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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 23 février 1993 - Vol. 32 N° 32

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres loi professionnelles


Journal des débats

 

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Gautrin): On constate qu'il y a quorum et nous allons commencer nos travaux. Je déclare donc la séance ouverte. Permettez-moi de rappeler d'abord le mandat de la commission. Le mandat de la commission pour cette séance, c'est de procéder à des auditions publiques sur l'avant-projet de loi, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements, s'il vous plaît?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Boucher-Bacon (Bourget) remplacée par M. Forget (Prévost); M. Gendron (Abitibi-Ouest) par M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue) et M. Gobé (Lafontaine) par M. Richard (Nicolet-Yamaska).

Le Président (M. Gautrin): Je vous remercie. Vous avez devant vous un projet d'ordre du jour qui est... J'imagine que vous ne voulez pas que j'en fasse lecture. A 10 heures, les remarques préliminaires, M. le député de Rimouski. À 11 heures, la Fédération nationale des associations de consommateurs; à 14 heures, le Conseil interprofessionnel du Québec; à 15 h 30, la Corporation professionnelle des médecins du Québec; à 16 h 30, l'Association des groupes d'intervention en défense de droits - Santé mentale du Québec et le Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec; à 17 h 30, la Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé; à 20 heures, l'Ordre des denturologistes du Québec; à 21 heures, la Corporation professionnelle des administrateurs agréés du Québec. Est-ce' que cet ordre du jour est agréé?

Des voix: Oui.

Déclarations d'ouverture

Le Président (M. Gautrin): Je le considère comme étant agréé. Alors, nous allons procéder aux remarques préliminaires. Suite à entente entre les leaders, le temps se partagera de la manière suivante: 20 minutes pour le ministre proposeur de la loi; 20 minutes pour le critique de l'Opposition officielle en la matière; 20 minutes pour un éventuel député indépendant et 30 minutes pour les autres députés qui auraient des remarques préliminaires à faire. M. le ministre, pour 20 minutes.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, nous débutons plusieurs semaines de travail. J'espère que le tout va se dérouler dans la plus grande harmonie et l'esprit le plus positif. Je voudrais saluer mes collègues de l'Assemblée nationale, Mme Caron également. Je voudrais également souhaiter la plus cordiale des bienvenues à ceux et à celles qui se sont présentés pour aujourd'hui et j'espère qu'ils vont maintenir une bonne présence pour assurer une bonne connaissance de l'avant-projet qui est devant nous pour étude. Je voudrais également souligner la présence de certains officiers de l'Office des professions, à ma gauche, M. Mulcair et, derrière moi, M. Roy, Me Beaumont, M. Sparer et mon attachée politique Edith Lorquet et de même que Me Lambert qui va nous assister tout au long de cette démarche.

Le texte en gros, M. le Président, que j'ai à vous présenter va chercher à présenter, en quelque sorte, notre position vis-à-vis l'avant-projet de loi. L'utilisation d'un avant-projet de loi est déjà chose peu commune. À ma connaissance et sauf erreur, ce mécanisme a été utilisé à peine six fois depuis treize ans. Si nous l'avons retenu, c'est que nous voulions atteindre certains objectifs. Tout d'abord, clairement et sans ambiguïté, nous voulons démontrer une volonté ferme de travailler ensemble avec l'ensemble des intervenants dans un esprit d'ouverture et de collaboration. Il faut, deuxièmement, dire et redire que nous sommes spécifiquement à la recherche de critiques constructives et - pour dire le fond de ma pensée - de vos suggestions qui, du moins, je l'espère, vont bénéficier à cet avant-projet. Mais, avant tout et surtout, l'objectif visé est une opération transparente et publique pour rajeunir, renforcer, améliorer les services et la protection que le public a le droit d'exiger et, effectivement, exige de chacun de nous.

Cet avant-projet est le premier rajeunissement envisagé au Code des professions. Il se situe dans un contexte de modification au système disciplinaire, d'allégement aux lourdes structures réglementaires et d'une volonté politique de voir le Conseil interprofessionnel jouer un rôle plus musclé, plus structurant et, finalement, de démocratiser - si vous m'en accordez l'usage - et de rendre davantage conformes à la réalité le fonctionnement et l'«interchange» des corporations et de l'Office.

Fait indiscutable, l'avant-projet fera l'objet de nombreuses discussions. Nous avons en effet reçu plus de 60 mémoires de valeur fort inégale,

mais dont chacun recherche le même but. L'Office travaille à ce projet depuis 1990. Il m'avise que les aménagements qui vous sont présentés ont fait l'objet de nombreuses consultations depuis 1990. Ce qui vous est présenté a subi une première consultation en mai 1990, lorsque l'Office a consulté le Conseil interprofessionnel du Québec et chacune des corporations professionnelles sur l'exigence de la citoyenneté canadienne. En septembre 1990, il consultait le Conseil interprofessionnel du Québec sur les hypothèses relatives au mécanisme disciplinaire. En novembre 1990, le Conseil interprofessionnel du Québec et chacune des corporations professionnelles ont été consultés sur la base de l'avis que l'Office me remettait sur la discipline. À la même époque, l'Office consultait, sur le même projet, le Protecteur du citoyen et certains groupes, telle la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. (10 h 10)

En mars 1991, l'Office a consulté, toujours sur le même sujet, les présidents des comités de discipline et le Tribunal des professions. Une consultation a également eu lieu auprès des secrétaires de comités de discipline des corporations des plus actives en discipline. En juillet 1991, l'Office consultait le Conseil interprofessionnel du Québec et chacune des corporations professionnelles sur l'assouplissement du processus réglementaire. En octobre 1991, l'Office consultait le Conseil interprofessionnel du Québec et chacune des corporations professionnelles sur la réglementation relative à l'assurance-responsabilité professionnelle. Par ailleurs, pour chaque loi professionnelle dont une modification est prévue par l'avant-projet, la corporation professionnelle concernée a été consultée.

Nous avons devant nous, donc, un projet qui a tiré profit des commentaires formulés par les milieux concernés. Les travaux de cette commission sont donc une consultation supplémentaire et élargie sur l'ensemble. En touchant à la discipline et à la réglementation, la législation que l'Office a préparée maintient l'objectif général de protection du public mais ne remet pas en cause ces deux caractéristiques du système professionnel que sont le jugement par les pairs et l'autogestion. De même que l'autonomie participe à la définition de ce que c'est l'activité professionnelle, l'autogestion des professions reste, avec cet avant-projet de loi, une des caractéristiques essentielles de notre système.

Pour bien cerner la finalité, la portée et les limites de ce qui nous est proposé, il faut se rappeler que, voilà 20 ans, l'Assemblée nationale innovait en créant un système voué tout entier à la protection du public et qui, en même temps, laissait aux corporations professionnelles le soin d'organiser elles-mêmes les aspects esssentiels de leur profession et de veiller à la déontologie et à la discipline en vue de la protection du public. Les professions constituées en corporations professionnelles héritaient donc du mandat clair de protéger le public et de pouvoirs étendus pour s'autogérer. Le législateur leur donnait des structures claires et homogènes pour surveiller et discipliner la pratique professionnelle.

Le système mis en place alors représentait un véritable pari pour le gouvernement. En invitant le monde professionnel à faire sien l'objectif de protection du public, le gouvernement laissait aux professionnels la gestion de leur profession et, par là même, le soin de faire la preuve que les corporations professionnelles sont un outil valable pour cette protection.

Vingt ans plus tard, peut-on dire que le pari a été tenu? que le système mis en place par le Code des professions est le cadre adapté à l'objectif de protection du public? que l'autogestion et le jugement par les pairs sont finalement compatibles avec cet objectif de protection? Bref, sommes-nous au rendez-vous que nous fixaient alors le gouvernement et le législateur?

C'est, en tout cas, ce que conclut l'Office des professions, puisque l'avant-projet qu'il a préparé et que je vous soumets n'est ni une abolition des structures ni un rapatriement des prérogatives de puissance publique déléguées au corporations professionnelles.

Constatant, dans l'ensemble, le succès de la formule et la maturité des structures, l'Office nous propose néanmoins une importante mise à jour: plus de 300 articles. Comme vous pouvez le constater, le système conserve sa structure largement décentralisée. Les corporations professionnelles conservent le contrôle de la compétence et du comportement professionnels. Elles continuent de régir bien d'autres aspects de la vie professionnelle et ce sont elles qui, en première ligne, gardent la responsabilité de protéger le public.

Toutefois, l'expérience nous a permis de constater l'efficacité et les lacunes de ce vaste réseau de règles et d'institutions. Le bilan est, dans l'ensemble, positif. Et la mise à jour qui nous est proposée vise à parfaire une formule gagnante. S'agissant du mécanisme disciplinaire, l'avant-projet de loi vise à apporter des solutions concrètes à des problèmes réels, c'est-à-dire à changer certaines règles là où leur application a produit des effets sans rapport avec l'objectif de la protection du public.

L'avant-projet de loi vise également à faciliter le traitement disciplinaire des actes dérogatoires commis hors du Québec. Dans le cas où une corporation professionnelle a connaissance d'un acte dérogatoire commis par l'un de ses membres hors du Québec, elle a déjà, en vertu du Code des professions, des moyens de faire enquête, de soumettre le membre à un examen médical, de faire une inspection professionnelle et, enfin, d'entreprendre une procédure disciplinaire de la même manière, d'ailleurs, que si

l'acte avait été commis au Québec.

Toutefois, dans le but de rendre l'intervention plus rapide, le projet de loi prévoit qu'il sera permis à une corporation professionelle d'utiliser, s'il en est, une décision disciplinaire d'un organisme similaire d'une province ou d'un autre pays pour refuser l'admission ou l'inscription au tableau ou encore comme preuve de culpabilité et de sanction pour fonder une plainte disciplinaire contre un de ses membres.

Comme on le voit, il s'agit d'une mise à jour importante qui aura pour effet de rendre le mécanisme disciplinaire plus performant, mais aussi, et surtout, qui lui donnera ou lui rendra la crédibilité qui est une condition de son efficacité.

L'avant-projet de loi comporte également un certain nombre d'autres dispositions touchant l'Office des professions. Il est prévu, par exemple, que, dans le but d'accroître la représentation du public dans le système professionnel, les cinq membres composant actuellement l'Office et qui sont tous professionnels, ainsi que le veut la loi, seront rejoints par deux non-professionnels, également nommés par le gouvernement.

L'Office prévoit explicitement, dans l'avant-projet, un pouvoir d'enquête de l'Office à l'égard des corporations professionnelles qui n'exercent pas leur fonction, ne s'acquittent pas de leur devoir et qui sont dans une situation financière ne leur permettant pas de remplir leurs obligations ou encore qui n'assurent pas une protection adéquate du public. L'expérience montre en effet que le devoir de surveillance que la loi confère à l'Office ne peut s'exercer valablement si ce dernier n'a pas de moyens efficaces de requérir les renseignements sur la situation qu'il doit surveiller ou de faire lui-même les constats nécessaires. Le processus d'adoption et d'approbation des 534 règlements que compte le système apparaît à tous comme lourd et lent. Pour des raisons de procédure et de cheminement qui comportent des étapes à l'extérieur même de l'Office, certaines améliorations peuvent encore être apportées. C'est pourquoi l'Office ~ propose, par l'avant-projet de loi qu'il m'a soumis, une simplification ou un allégement du processus d'approbation d'une bonne partie de la réglementation. Certains pouvoirs réglementaires dévolus au gouvernement le seront désormais à l'Office ou aux corporations professionnelles elles-mêmes, supprimant ainsi certaines étapes prévues par la Loi sur les règlements. De plus, certaines dispositions actuellement prises par règlement pourront à l'avenir l'être par simple résolution des corporations professionnelles. Ce sera le cas, par exemple, pour les règles de régie interne des corporations professionnelles. Il s'agit là d'une rationalisation dont personne ne se plaindra. Elle va également dans le sens d'une plus grande autonomie des corporations professionnelles et vise en fait à ne soumettre au gouvernement ou à l'Office que ce qui requiert l'attention du gouvernement ou de l'Office.

L'avant-projet que nous étudions ce matin comporte également plusieurs autres modifications visant à renforcer la protection du public dans certains domaines. Ainsi, il sera obligatoire pour chaque corporation professionnelle d'adopter un règlement sur l'assurance-responsabilité professionnelle souscrite par les membres individuellement. De même, les corporations professionnelles dont les membres sont appelés a détenir les sommes d'argent ou autres valeurs seront tenues de déterminer les modalités et les normes de réception, de garde et de disposition de ces sommes et valeurs.

L'avant-projet comporte également nombre de dispositions d'ordre technique visant la cohérence ou la concordance au sein de la législation professionnelle. Ainsi, afin d'étendre à tout le système des règles particulières à certaines corporations, des dispositions de certaines lois professionnelles seront rapatriées dans le Code des professions. Enfin, des dispositions de lois particulières faisant double emploi avec des articles du Code des professions seront abrogées.

Il va sans dire que le présent avant-projet ne contient pas non plus des dispositions sur le rôle accru du Conseil interprofessionnel. Ce rôle consultatif sera certainement l'objet de discussions lors de la présentation du mémoire par le Conseil interprofessionnel.

Et voilà! Des problèmes existent. Eh bien, nous saurons, j'en suis sûr, M. le Président, bien les résoudre. J'espère recevoir des propositions constructives. Je veux croire que ces débats nous montreront que les uns et les autres ont, au fil des ans, bien compris leur rôle au sein du système professionnel et qu'ainsi nous aurons tenu le pari que formulait le gouvernement de M. Bourassa voilà maintenant 20 ans.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le député d'Abitibi-Est et ministre délégué à la réforme au Code des professions.

M. Savoie: Ministre responsable.

Le Président (M. Gautrin): ...responsable. Mme la députée de Terrebonne et critique de l'Opposition en la matière.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Évidemment, M. le Président, je désire saluer les membres de cette commission parlementaire. Nous serons ensemble pour plusieurs jours et nous aurons à entendre les différentes personnes qui ont présenté des mémoires sur ce sujet qui est extrêmement important, la réforme du Code des professions. Sujet important puisque cette réforme doit toucher l'ensemble du public,

puisque le public reçoit des services des professionnels et touche évidemment les 220 000 professionnels du Québec. (10 h 20)

M. le président, je désire évidemment profiter de cette occasion pour vous présenter ma recherchiste qui est à ma droite, Me France Thériault, qui va m'assister tout au long de ces travaux. M. le Président, je désire évidemment souhaiter la bienvenue à toutes les corporations professionnelles, aux associations, associations de consommateurs ou autres associations, organismes et particuliers qui nous présenteront leur mémoire au cours des audiences publiques. M. le Président, j'en profiterai évidemment pour déplorer qu'on n'entende pas tous ceux et celles qui avaient pris le temps de préparer des mémoires puisque je considère que nous n'avons pas à juger de la valeur égale ou inégale des mémoires, mais bien à entendre le point de vue de chaque personne et de chaque groupe qui désire s'exprimer sur ce sujet qui touche, finalement, tout le monde.

J'aimerais préciser dès le début, M. le Président, qu'à titre de porte-parole de l'Opposition officielle pour les dossiers concernant la protection du consommateur et les dossiers sur les lois professionnelles je me préoccupe évidemment principalement de la protection du public, puisque c'est évidemment aussi le mandat des corporations professionnelles. Les audiences que nous allons tenir devront nous inciter à définir ce que représente exactement la notion de la protection du public. Ce terme est utilisé régulièrement dans le Code des professions mais jamais - comme nous l'ont bien souligné un des mémoires et une des personnes que nous entendrons en audience - jamais nous n'avons vraiment défini cette notion de protection du public. M. le Président, il m'apparaît souhaitable que les présents travaux puissent donc nous conduire à une définition beaucoup plus pointue et arrêtée du concept de la protection du public. Nous devons donc tendre à cet objectif ultime. De plus, cet exercice devra être effectué en gardant constamment à l'esprit l'importance d'une vision globale équilibrée du système professionnel. Il ne faudrait surtout pas - et c'est là ma crainte, M. le Président - que nos travaux nous conduisent à retenir une proposition qui ne protégerait le public qu'en apparence et le danger est là, M. le Président. Lorsqu'on ne touche qu'à des structures et lorsqu'on ne s'assure pas que ces nouvelles structures assurent véritablement une protection du public, on risque de ne toucher qu'à l'apparence, donc qu'à la crédibilité et ne pas assurer effectivement une meilleure protection du public.

Vous le savez, M. le Président, le 6 juillet 1973, le gouvernement de l'époque procédait à l'adoption du Code des professions et instituait l'Office des professions, dont le mandat consistait principalement à veiller à ce que chaque corporation professionnelle assure adéquatement la protection du public. Cette loi est entrée en vigueur le 2 février 1974, donc il y aura bientôt 20 ans que le système des corporations professionnelles a été institué et cela ne s'est fait qu'après un long processus de consultation. Il s'avère aussi important de prendre le temps pour apporter des modifications majeures à ce système.

Le système nécessite, sans contredit, après 20 ans, une réforme. Il faut savoir que, depuis l'adoption du Code des professions, aucun changement majeur n'a été entrepris. Cette révision complète est rendue essentielle afin que, notamment, l'application des lois professionnelles se fasse en harmonie avec l'évolution qu'a connue le système des corporations professionnelles.

Ce système requiert plus qu'un simple rajeunissement, contrairement aux propos tenus par le ministre responsable au printemps dernier et rapportés dans la presse. M. le Président, la réforme que tente, à mon avis, sans succès, d'instituer l'actuel avant-projet de loi est promise depuis 1991. À noter que, dès ce moment, le ministre se prononçait sur un point particulier auquel il tenait beaucoup et qu'on ne retrouve pas dans l'avant-projet, mais qu'on retrouve dans le projet de loi 67, c'est-à-dire de transférer aux corporations professionelles la responsabilité des coûts d'opération de l'Office. Cette intention était bien arrêtée et c'est pourquoi on ne la retrouve pas dans un avant-projet, mais bien dans un projet de loi.

L'intention du ministre était aussi d'alléger le système actuel, de le rendre plus cohérent, plus transparent et, enfin, moins coûteux. Également, le ministre entendait tenir compte de la libéralisation des marchés afin de ne pas défavoriser les membres de corporations professionelles québécoises au détriment des professionnels provenant de l'extérieur. L'avant-projet de loi, est-ce qu'il répond à ces critères? M. le Président, c'est la question que nous devrons poser à tous ceux et celles que nous entendrons au cours de ces audiences.

Le ministre nous avait également mentionné, et je cite: «Lorsqu'il y aura consensus, cette volonté sera traduite dans un projet de loi.» Est-ce que le retard de l'avant-projet de loi signifie qu'il y a eu consensus? Je crois que non, M. le Président, puisque nous nous trouvons encore devant un avant-projet de loi et non un projet de loi.

Le dépôt de cet avant-projet de loi aura eu l'avantage de permettre au ministre au moins de faire l'unanimité sur un aspect. En effet, les corporations professionnelles, soit par leur propre corporation ou par le Conseil interprofessionnel du Québec et les associations de consommateurs ainsi que les différents intervenants qui ont présenté des mémoires, considèrent l'avant-projet de loi comme insatisfaisant.

Je ne peux passer sous silence le fait, M. le Président, que la rédaction de ce projet de loi provient, évidemment, de l'Office des professions. Il m'apparait de plus en plus que c'est la responsabilité du gouvernement de légiférer dans les secteurs où il exerce le contrôle et octroie les budgets de fonctionnement. Cet état de fait conduit à certaines aberrations, M. le Président, et on se retrouve devant un avant-projet de loi où le président de l'Office des professions confère des pouvoirs, par cet avant-projet de loi, à l'Office des professions que même le ministre responsable de l'application des lois professionnelles ne peut exercer actuellement. Ce désengagement de l'État, s'il est réellement souhaité, à notre avis, est blâmable. De plus, il s'effectuera sur deux plans en même temps, soit au niveau de l'exercice des pouvoirs, puisque de nombreux pouvoirs appartenant au gouvernement sont transférés à l'Office des professions, ainsi qu'au niveau de l'injection des crédits pour assurer le fonctionnement de l'Office. Si je veux comparer l'Office des professions avec l'Office de la protection du consommateur, je dois dire que cette situation est un peu particulière. Lorsque le ministre de la Justice, responsable de la protection du consommateur, prépare un projet de loi, le projet de loi est préparé par le ministère de la Justice et l'Office de la protection du consommateur est consulté, mais l'Office de la protection du consommateur ne pilote pas du début à la fin les travaux d'un projet de loi.

Il faudrait aussi, M. le Président, parler du peu de temps qui a été consacré pour que les corporations professionnelles, les associations de consommateurs et les autres organismes qui souhaitaient se faire entendre en audience ont eu pour préparer leur mémoire. En effet, tous se sont sentis un peu bousculés pour produire leur mémoire qui coïncidait avec la période des fêtes. M. le Président, nous jugeons essentiel qu'une réflexion plus poussée, dans le cadre d'une discussion plus ouverte, ait lieu afin qu'une véritable réforme du système des corporations professionnelles vienne corriger les lacunes identifiées par tous les intervenants, ce que l'avant-projet de loi ne fait aucunement. En effet, l'avant-projet de loi n'aborde pas les principaux problèmes que vivent les petites corporations professionnelles de même que le problème spécifique que posent les corporations à titre réservé quant à la protection du public. En effet, ces corporations ne peuvent assurer complètement la protection du public puisque plusieurs actes professionnels se rapportant à eux peuvent être posés sans toutefois que le professionnel ou la professionnelle soit membre de la corporation. Donc, une étude plus approfondie est nécessaire pour couvrir ces problèmes de manque de protection du public.

Il est donc à souhaiter que le ministre acceptera, à la lumière des propos qui seront tenus devant cette commission, de retirer l'avant-projet de loi afin d'apporter les solutions les plus pertinentes à la protection du public et de poursuivre la discussion. Une réforme en profondeur doit également tenir compte de plusieurs aspects qui ne sont pas actuellement dans le projet de loi: le financement du système des corporations professionnelles, le financement de l'Office des professions, évidemment, puisque tout le projet est relié à ces nouveaux pouvoirs de l'Office des professions, et au nouveau financement qui est proposé par le projet de loi 67. Il est important, également, de prendre le temps d'examiner et de peut-être modifier le mandat confié à l'Office des professions, tel que proposé dans l'avant-projet de loi. Nous devons également étudier le mandat du Conseil interprofessionnel du Québec, le système disciplinaire, ainsi que la publicité, la libéralisation des marchés, les corporations à titre réservé et l'arrivée des nouvelles corporations. (10 h 30)

Pour le financement, nous croyons que le gouvernement doit le maintenir à partir de ses crédits budgétaires et non en confier la responsabilité aux corporations professionnelles qui, il faut le rappeler, actuellement assument 72 000 000 $ pour la protection du public et le gouvernement 3 500 000 $ pour le fonctionnement de l'Office des professions. Ce 3 500 000 $ est extrêmement important parce qu'il permet de préserver l'indépendance de l'Office et conserver son autonomie. Il s'agit d'un principe fondamental auquel le ministre ne peut toucher. Dans le contexte actuel de contrôle des dépenses publiques, l'Office doit être réformé d'abord de l'intérieur et nous devons procéder à l'examen de ses dépenses, à l'exercice de son mandat qui est principalement, il faut le rappeler, la surveillance et le processus réglementaire. Il serait sûrement possible, avec cet examen, de restreindre les dépenses de fonctionnement.

Il faut rappeler également que l'Office des professions, depuis plusieurs années, s'est vu ajouter un nouveau rôle, celui de donner des avis auprès de différents ministères du gouvernement. Il faut souligner que ce travail représente environ 33 % du travail effectué par l'Office. Est-ce bien là son rôle? Est-il nécessaire ou doit-on trouver une source de financement différente pour assumer ce rôle?

Le ministre ne peut permettre à l'Office de se créer, avec tous les nouveaux pouvoirs que lui confère l'avant-projet de loi, une superstructure et refiler la facture aux corporations professionnelles qui, sans nul doute, la refileront aussi rapidement aux consommateurs. Le gouvernement accepte déjà d'investir, il faut le rappeler, 14 000 000 $ pour voir à ce que la protection des consommateurs soit assurée par l'entremise du financement de l'Office de la protection du consommateur. Alors, pourquoi se refuserait-il à garantir cette même protection qui ne coûte que 3 500 000 $, comparativement à 14 000 000 $,

pour des services professionnels, en acceptant de continuer ses crédits essentiels?

M. le Président, compte tenu que le rôle de l'Office pourrait être modifié, qu'on pourrait alléger son fonctionnement, et donc réduire de beaucoup les dépenses, je pense que le montant qu'il resterait à assumer par le gouvernement est le montant essentiel pour qu'on s'assure que les services professionnels offrent la même protection que l'achat de biens pour les consommateurs.

Il est à craindre, M. le Président, que l'on assiste aussi à un phénomène de retrait des membres des corporations à titre réservé puisque leurs cotisations augmenteront et qu'il ne leur est pas nécessaire de faire partie d'une corporation pour pratiquer leur profession. De plus, les risques sont grands que les corporations les plus grandes exercent des pressions indues à l'égard de l'Office, afin qu'il favorise d'abord leurs intérêts particuliers et ce, à rencontre des corporations les plus petites, et évidemment, à rencontre d'une meilleure protection du public.

Donc, cette philosophie du transfert de l'État vers l'Office fait dévier l'équilibre à l'origine de l'institution du système et il ne faut pas croire que la protection du public en sera mieux circonscrite. Nous allons assister, entre autres, à une bureaucratisation des structures de l'Office, ce qui conduira, inévitablement à une augmentation des délais qui ne saurait que nuire considérablement au public. Le système bureaucratique déjà très lourd de l'Office doit être, au contraire, allégé. La lenteur administrative inacceptable des dernières années doit être corrigée. À cet égard, certaines propositions de l'avant-projet sont intéressantes, mais à notre avis il faut aller beaucoup plus loin. Le Conseil interprofessionnel du Québec, regroupant l'ensemble des corporations professionnelles, devrait constituer une tribune de consultation et d'information des plus appréciables, tant pour l'Office des professions que pour le ministre responsable.

Le système disciplinaire représente, évidemment, le sujet le plus difficile à traiter. Plusieurs corporations considèrent que le système actuel permet au public de faire valoir ses droits. Par contre, certaines corporations professionnelles estiment que celui-ci pourrait être assuré d'une manière beaucoup plus adéquate et, enfin, le public en général s'inquiète de la transparence et de l'impartialité du système.

Concernant la publicité, il faut rappeler qu'à l'occasion de l'étude du projet de loi 102 notre formation politique s'opposait à ce projet de loi, car nous considérions alors que le public était en droit de recevoir, à tout le moins, la même protection pour l'obtention de services que pour l'achat de biens à la consommation. En réalité, compte tenu de l'importance des services professionnels sur la vie des citoyennes et des citoyens, la protection devrait même être supé- rieure.

Il faut se rendre à l'évidence, M. le Président, et constater que cet avant-projet de loi n'opère d'aucune façon la réforme en profondeur du système des corporations professionnelles que nous étions en droit de nous attendre. D'ailleurs, le ministre lui-même en convient puisqu'il déclare au journal de la Chambre des notaires «Entracte» tout récemment, et je le cite: «Vous savez, on ne parle pas d'une réforme en profondeur puisqu'on a maintenu l'ensemble des infrastructures. L'Office des professions demeure en place de même que le Conseil interprofessionnel du Québec.» Fin de la citation. Il ne faudrait surtout pas confondre, M. le Président, changements majeurs et structures. On peut maintenir des structures, on peut maintenir l'Office des professions, maintenir le Conseil interprofessionnel du Québec, maintenir les corporations professionnelles et apporter des changements majeurs essentiels à partir des lacunes qui ont été identifiées.

Si le ministre souhaite sérieusement corriger le système actuel, nous devons considérer ces audiences comme une consultation qui devra se poursuivre dans les mois à venir, comme une première étape vers la préparation d'un système adéquat pour la protection du public. Le ministre devra évidemment refaire ses devoirs, mais avec l'aide, cette fois-ci, non seulement de l'Office des professions mais des associations de consommateurs, des corporations professionnelles, du Conseil interprofessionnel, des organismes et associations intéressés à cette réforme. Et je considère que nous ne pouvons travailler à partir uniquement de l'avant-projet de loi présenté par l'Office des professions que je considère comme juge et partie dans ce dossier.

Cet avant-projet de loi nous apparaît extrêmement incomplet puisqu'il ne touche que trois des points, c'est-à-dire: processus réglementaire avec des modifications qui sont intéressantes, mais modifications tout à fait insuffisantes; système disciplinaire qui présente des points intéressants, dont les actes dérogatoires hors Québec, mais qui doit être revu et modifié à nouveau; et surtout, surtout, et le ministre en a fait peu mention, ce projet de loi contient un transfert massif des pouvoirs du gouvernement et des corporations professionnelles vers l'Office des professions.

Cet avant-projet de loi compte évidemment plus de 300 articles, sauf qu'il faut préciser, M. le Président, que seulement les articles 1 à 103 touchent vraiment à des modifications du système professionnel puisque les autres articles ne touchent que des aspects techniques et de concordance.

M. le Président, nous aurons donc, au cours des prochains jours, la chance d'entendre les différents intervenants et je pense que, suite à la lecture des mémoires que nous avons eu l'occasion de faire jusqu'à ce jour, les proposi-

tions que nous allons entendre devraient sûrement éclairer le gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Il reste une période de 20 minutes pour un député indépendant, qui ne semble pas être présent. Je vais donc passer à l'enveloppe de temps qui est réservée aux autres députés pour des remarques préliminaires, chacun ayant une période de dix minutes pour intervenir.

Est-ce que vous avez, et je m'adresse aux députés ministériels, des remarques préliminaires? Les députés de l'Opposition, vous n'avez pas de remarques préliminaires?

Auditions

Alors, étant donné qu'on n'a pas de remarques préliminaires, je vais considérer que la période de temps allouée aux remarques préliminaires est terminée. On est, donc, en avance sur notre horaire, ce qui est rare dans une commission et on va donc passer tout de suite à l'audition de la Fédération nationale des associations de consommateurs et je leur demanderais de bien vouloir s'approcher, s'il vous plaît. Il s'agit de M. Beaudoin, de l'ACEF de Québec, si je comprends bien, de Mme Dupré, du groupe Auto-psy et de Mme Ouellette, du Comité santé et services professionnels. Mme Ouellette n'est pas là.

M. Beaudoin (Roger): Elle est absente, finalement.

Le Président (M. Gautrin): Très bien. Est-ce que c'est votre groupe qui a demandé de pouvoir utiliser un vidéo dans la présentation? Alors, je dois vous dire que ça a été agréé par la présidente de la commission. Je ne sais pas si vous voulez commencer à projeter votre vidéo, à quel moment vous voulez mettre votre vidéo? On vous a amené ici une télévision mais j'imagine qu'il faudra l'avancer à ce moment. Alors, "comment vous comptez procéder?

M. Beaudoin: Pour ce qui est du vidéo? Le Président (M. Gautrin): Oui.

M. Beaudoin: Alors, après une courte présentation, pendant à peu près trois minutes, on va vous parler un peu. Ensuite, le vidéo, ça va prendre trois minutes aussi et on va continuer après.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je voudrais quand même vous rappeler les règles de procédure dans...

M. Beaudoin: Oui.

(10 h 40)

Le Président (M. Gautrin): J'imagine que vous êtes familier. Vous avez une enveloppe de temps de 20 minutes pour présenter votre point de vue. Le parti ministériel a 20 minutes pour vous questionner et l'Opposition a 20 minutes aussi pour vous questionner.

Alors, vous avez la parole. Peut-être vous pouvez commencer aussi à présenter les personnes. J'ai commencé à vous présenter mais je ne sais pas la personne qui est là... C'est Mme Ouellette qui n'est pas là, c'est ça?

Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec (FNACQ)

M. Beaudoin: Finalement, M. le Président, Mmes et MM. de la commission, Mme Ouellette qui est une membre bénévole du Comité santé et services professionnels a dû s'absenter pour des motifs de travail. Elle devait pouvoir venir et elle ne l'a pas pu finalement. Ce qui fait que nous sommes représentés donc, à ma gauche, par Mme Lucie Dupré, qui est du groupe Auto-psy de Québec, qui est un des groupes membres de la Fédération nationale des associations de consommateurs, ainsi que par moi-même qui suis Roger Beaudoin, coordonnateur de l'ACEF de Québec, un autre groupe membre de la Fédération. Moi, je suis coordonnateur du Comité santé et services professionnels de notre Fédération.

Le Président (M. Gautrin): Merci.

M. Savoie: Juste une seconde, M. le Président. Étant donné qu'ils vont passer une cassette, est-ce qu'on peut savoir le contenu de la cassette si ça doit passer, avant que ça passe? Parce que normalement on n'est pas...

Le Président (M. Gautrin): Si j'ai compris la décision qui a été déjà accordée, dans leur témoignage, ils veulent faire un témoignage qui est une partie du témoignage, disons, purement verbale et une autre partie du témoignage qui a déjà été enregistrée sur cassette.

M. Savoie: Oui, j'ai compris ça.

Le Président (M. Gautrin): Donc, c'est une partie intégrante de leur témoignage et, si j'ai bien compris, c'est un vidéo d'environ quatre minutes qui est l'enregistrement d'un reportage aux informations nationales de Radio-Canada du 9 mars 1990 durant... Si j'ai compris ça peut être... quoique c'est un peu inusité. Oui, M. le député de Sauvé.

M. Parent: M. le Président, vous nous avez mentionné tout à l'heure qu'il y avait eu entente pour que nous entendions la cassette qui est amenée ici par nos invités. L'entente a eu lieu quand, où, entre quelles parties?

Le Président (M. Gautrin): Je crois que l'entente avait eu lieu entre la présidente et la vice-présidente de la commission et le secrétaire de la commission à cet effet. Moi, je préside les travaux, je ne suis pas le président de la commission, comme vous le savez.

M. Parent: Est-ce que le secrétaire peut nous informer si c'est le comité, ce qu'on appelle communément le comité de direction de la commission de l'éducation...

Le Président (M. Gautrin): M. le secrétaire.

M. Parent: ...qui a pris cette décision au nom des deux formations politiques?

Le Secrétaire: J'ai eu l'autorisation de la présidente de la commission. Il m'a été impossible de rejoindre la vice-présidente qui était absente...

M. Parent: Autrement dit, il n'y a pas eu de réunion du comité de direction pour décider si la commission se devait d'entendre ou de ne pas entendre la cassette présentée par nos invités. C'est bien ça?

Le Secrétaire: C'est la présidence qui organise les travaux et voit au bon ordre, au bon déroulement de la séance.

M. Parent: Non, ce n'est pas la présidence - M. le secrétaire, ce n'est pas exact - qui organise les travaux. C'est le comité de direction qui organise les travaux composé du président et de la présidente et du secrétaire. Est-ce qu'il y a eu une réunion formelle? C'est assez inusité que nous l'entendions.

Le Président (M. Gautrin): Si je comprends l'information que me souffle à l'oreille le secrétaire, il n'y a pas eu réunion formelle du comité directeur. En l'occurence on peut reprendre la décision ici.

M. Parent: Alors, je vous remercie, M. le Président. Mais par contre, si la porte-parole de l'Opposition officielle et si le ministre sont consentants, moi, je n'ai pas d'objection, je me rallie.

Le Président (M. Gautrin): C'est bien ce que je comprends qu'il y...

M. Savoie: C'est justement. Je présumais qu'on fonctionnait, étant donné qu'il n'y avait pas de structure complète, sur consentement. Maintenant, il n'y a pas de difficulté avec ce consentement. On est d'accord en principe pour autant qu'on...

Le Président (M. Gautrin): Qu'on respecte le laps de temps de 20 minutes.

M. Savoie: Oui. C'est-à-dire pour autant qu'on est au courant exactement du contenu du...

Le Président (M. Gautrin): Alors, je tiens à vous dire qu'il s'agit, dans la cassette, des informations nationales de Radio-Canada du 9 mars 1990. C'est bien ça. M. Beaudoin?

M. Beaudoin: Je peux ajouter, pour que ce soit plus complet, que c'est un reportage qui traite d'un cas, d'une consommatrice, Mme Patricia Bisson d'une ville de la Beauce qui, à l'époque, a fait beaucoup parler d'elle par rapport au cheminement d'une plainte qu'elle a faite dans le système disciplinaire de la Corporation professionnelle des médecins.

Le Président (M. Gautrin): Alors, formellement, est-ce qu'il y a accord de la commission pour entendre ce vidéo?

M. Savoie: Oui, oui.

Le Président (M. Gautrin): II y a accord de la commission. Alors, bien qu'il n'y ait pas eu réunion du comité directeur, la commission va entendre dans votre témoignage ces quatre minutes de présentation. Alors, M. Beaudoin, vous pouvez commencer, et vous avez 20 minutes. Dans vos 20 minutes de présentation, le vidéo sera inclus.

M. Beaudoin: Oui, merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mmes et MM. de la commission. Alors, très brièvement pour commencer, je voudrais vous présenter notre Fédération. Notre Fédération est née en 1978. C'est une Fédération qui a à coeur la défense des intérêts des consommateurs et des consommatrices du Québec, particulièrement les gens à faibles et modestes revenus quoique, dans nos membres, il y a aussi des gens qu'on peut dire à revenus moyens.

Dans notre association, il y a l'Association coopérative d'économie familiale de l'Estrie, l'ACEF de Granby, l'ACEF de Québec et l'ACEF Rive- Sud de Montréal, c'est-à-dire l'ACEF de Longueuil, ainsi que le groupe Auto-psy de Québec. On intervient dans différents domaines comme, par exemple, l'agro-alimentation, la téléphonie, l'électricité, l'endettement et le crédit, la fiscalité et les budgets gouvernementaux, la santé et les services professionnels et aussi d'autres dossiers qui touchent les pratiques commerciales.

Pour ce qui est du domaine de la santé et des services professionnels, depuis plusieurs années, on s'est impliqué dans ce dossier-là, entre autres sur la question du système disciplinaire des corporations professionnelles, bien sûr, mais aussi on a présenté, à différentes

reprises, des revendications, recommandations par rapport, par exemple, à la défense des droits des usagers et des usagères dans le cadre de la Loi sur les services de santé et les services sociaux ou encore par rapport à la confidentialité des renseignements personnels dans le cadre du système public de la santé et des services sociaux. On est intervenu aussi également sur la question de la protection des brevets pharmaceutiques au niveau fédéral, en 1987, et même dernièrement cet automne.

En ce qui a trait au domaine des actes professionnels, depuis plusieurs années, la FNACQ a fait des études, des revendications, aussi, des approches auprès de certaines corporations professionnelles, des consultations aussi pour essayer d'en arriver à un système qui soit davantage orienté vers la protection du public, c'est-à-dire, pour nous, la protection des consommateurs et consommatricas. Pour travailler là-dedans, bien sûr, il y a quelques personnes qui sont rémunérées, mais il y a des membres bénévoles du Comité santé et services professionnels qui, malheureusement, n'ont pu être ici aujourd'hui, ce qu'on aurait bien aimé, mais qui avaient des empêchements au niveau du travail.

Pour nous, ça fait déjà depuis 1985-1986 qu'on fait des interventions concernant le système disciplinaire particulièrement, mais aussi le rôle de l'Office des professions du Québec et, par contre, on peut dire qu'au niveau du grand public c'est un cas malheureux d'une consommatrice, Mme Patricia Bisson, qu'on va vous présenter brièvement tout à l'heure, qui a été rendu public de façon plus large, en mars 1990. Parce qu'auparavant on avait déjà parié de ça dans des conférences de presse mais ça avait eu un impact, on pourrait dire, plus régional ou local. Mais, en mars 1990, il y a eu une couverture panquébécoise de la question et c'a comme ému une grande partie de la population et on a l'impression que c'est un peu suite à ce cas-là que le ministre Savoie et le gouvernement ont décidé d'entreprendre une consultation, ~ quoiqu'il y avait déjà des éléments qui allaient dans le sens de remettre à jour, si on peut dire, le système disciplinaire et les autres aspects de la loi touchant les codes de professions.

Alors, on va vous parier, nous, brièvement, du cas de Mme Bisson, entre autres, avec le vidéo de trois ou quatre minutes. On va aussi se pencher sur l'avant-projet de loi, les parties qui nous intéressent plus particulièrement, mais de même on devra aussi, compte tenu du fait qu'il y a eu une proposition rendue publique par le Protecteur du citoyen concernant le système disciplinaire, vous dire ce qu'on pense de cette proposition-là parce que ça éclaire notre position par rapport à l'avant-projet de loi.

Alors, pour ce qui est de maintenant, je demanderais à ce qu'on actionne l'appareil vidéo pendant trois minutes, environ.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce qu'on peut l'avancer pour que les gens puissent le voir?

(Présentation audiovisuelle) (10 h 50 - 10 h 53)

M. Beaudoin: Alors, bien sûr, mesdames, messieurs, et M. le Président, dans notre mémoire, vous avez des précisions davantage sur le cas de Mme Patricia Bisson et, en annexe, vous avez une chronologie plus précise des événements.

Je vais conclure, brièvement, ajouter deux ou trois précisions par rapport à ce cas-là. D'abord, il faut bien dire que Mme Bisson, avant de passer devant le comité de discipline, avait demandé au comité de discipline de se désister de sa plainte parce qu'elle voyait les ennuis et les coûts venir et le comité de discipline a refusé de lui accorder ce désistement-là. Et on voit ça en page 8.

D'autre part, même si les deux plaintes n'avaient pas été portées au niveau du comité de discipline, quand même, le comité d'examen des plaintes qui existe à la Corporation professionnelle des médecins avait dit, avait indiqué qu'il n'était pas d'accord avec le fait que les médecins aient interdit l'accès à la clinique à Mme Bisson et que ceux-ci en étaient avisés.

D'autre part, depuis ce temps-là, Mme Bisson n'a pas pu aller plus loin, c'est-à-dire que ce n'était pas faisable d'aller en Cour supérieure compte tenu d'un avis juridique qu'on a eu à l'effet qu'il n'y avait pas eu légalement de problème au niveau juridique dans la décision du Tribunal des professions, même si beaucoup de gens considéraient qu'il y avait une erreur, mais qu'il n'y avait pas matière à aller plus loin. Et, donc, Mme Bisson a dû, finalement, même, faire faillite. Et depuis ce temps, elle l'avait dit aussi publiquement, elle voulait retourner à la vie ordinaire de M. et Mme Tout-le-Monde et elle ne voulait plus intervenir médiatiquement, elle ne voulait plus intervenir publiquement. Encore aujourd'hui, c'est toujours la même chose, Mme Bisson ne veut pas intervenir publiquement sur cette question-là parce qu'elle a été bouleversée profondément par toute cette histoire ainsi que sa famille.

En ce qui nous concerne, Mme Bisson n'est pas, contrairement à ce que dit M. Augustin Roy, une fauteuse de troubles, compte tenu qu'elle a utilisé des mécanismes qui existent pour tout le monde, compte tenu qu'elle a essayé de sortir de ce système-là mais qu'on le lui a interdit, compte tenu qu'on lui a dit qu'il fallait, on lui a même dit à la Corporation professionnelle des médecins, qu'il fallait qu'elle prenne un avocat, etc. Alors, cette personne-là a fait le tout, à notre avis, de bonne foi, mais elle s'est retrouvée dans une situation très difficile et, selon nous, on considère qu'elle a été victime du

système en tant que tel et, si elle n'a pas été victime du système, elle a été victime des failles du système ou des maladresses d'un certain nombre d'acteurs mais, pour nous, ça révèle qu'il y a une espèce de biais structurel en faveur des professionnels dans ce système-là, en tout cas au moins dans la Corporation professionnelle des médecins. On pourrait penser que le biais structurel a fait qu'il y ait jugement par les pairs; le fart que ce soit vraiment la Corporation professionnelle en tant que telle qui soit juge et partie, à toutes fins pratiques, a causé fondamentalement les problèmes de Mme Bisson et d'autres problèmes pour d'autres consommateurs.

Pour nous, il ne faut pas que la commission siège sans parler de ce cas-là. À notre avis, d'abord, j il faudrait que le gouvernement s'organise pour qu'il y ait des dispositions dans la loi, possiblement la Loi sur les services de santé et les services sociaux, pour que ce soit impossible pour une clinique privée de médecins d'interdire son accès à des gens, surtout dans une ville ou un village où il y a carrément un monopole. Et, bien sûr, ça dépasse la question du Code des professions, tout ça, mais il faudrait qu'il y ait des dispositions, que ce soit dans cette loi-ci ou ailleurs, parce qu'on pourrait imaginer d'autres situations où il se reproduirait la même chose parce qu'actuellement, dans le code de déontologie, ça peut être possible. Ça peut être contestable, mais ça peut être possible.

D'autre part, à notre avis, le gouvernement, que ce soit par l'entreprise de l'Office des professions du Québec ou d'une autre manière, devrait consentir une compensation financière extraordinaire à Mme Bisson pour les ennuis qu'elle a assumés et, d'autre part, nous espérerions des excuses ou une reconnaissance des problèmes vécus par Mme Bisson de la part de la Corporation professionnelle des médecins.

Et maintenant, je vais céder la parole à Mme Lucie Dupré sur l'avant-projet de loi sur les corporations professionnelles.

Mme Dupré (Lucie): Oui. Alors, nous nous sommes penchés sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. Ce que nous avons constaté c'est que l'avant-projet de loi propose peu de changements en ce qui concerne le système disciplinaire des corporations professionnelles. Le traitement des plaintes continue de s'effectuer par des pairs au sein des corporations professionnelles.

Tout d'abord, en ce qui concerne le syndic, on s'aperçoit que le syndic conserve son rôle de porte d'entrée de la Corporation pour toute personne qui désire déposer une plainte contre un professionnel. Le syndic demeure un membre de la Corporation nommé dans ses fonctions par le bureau de la Corporation et payé par la Corporation.

L'avant-projet de loi propose l'imposition d'un délai de 60 jours au syndic pour compléter l'étude de la plainte et pour rendre sa décision. Ce délai est intéressant puisqu'il pourrait éviter que des enquêtes traînent en longueur et que des plaignants restent sans nouvelle du cheminement de leur plainte. Par ailleurs, l'obligation pour le syndic de faire rapport à l'Office des professions de toute plainte dont l'examen n'aurait pas été complété dans les 60 jours, c'est un élément intéressant qui peut permettre d'encadrer le travail du syndic.

Toutefois, nous jugeons que les modifications qui sont proposées dans l'avant-projet de loi quant au rôle du syndic sont minimes et ne permettraient pas une amélioration suffisante du système disciplinaire. Selon nous, le syndic ne devrait pas être rattaché à la Corporation, mais plutôt à une structure externe, telle que l'Office des professions.

L'avant-projet de loi propose la création d'un comité d'examen des plaintes au sein de chaque corporation. Ce comité aurait pour fonction de conseiller le syndic en matière disciplinaire. Dans son avis, le comité d'examen des plaintes pourrait demander au syndic soit de compléter son enquête, de porter une plainte devant le comité de discipline ou de donner un avertissement au professionnel. Le comité d'examen des plaintes aurait donc certains pouvoirs. On pourrait ainsi espérer que des plaintes qui, actuellement, ne sont pas retenues par le syndic, pourraient, grâce aux recommandations de ce comité, se rendre jusqu'au comité de discipline. (11 heures)

Toutefois, la situation se gâche lorsqu'on regarde la composition du comité d'examen des plaintes. Chaque comité serait composé d'une majorité de membres de la corporation professionnelle. Il s'agirait donc d'une autre instance décisionnelle qui favoriserait le jugement par les pairs. On peut douter de l'impartialité des décisions d'un tel comité. La création d'une telle instance au sein de chaque corporation professionnelle, telle que proposée dans l'avant-projet de loi, ne constituerait pas une garantie pour les citoyens et les citoyennes que le système de traitement des plaintes des corporations professionnelles serait crédible et impartial. Il faudrait que le comité d'examen des plaintes soit composé d'une majorité de représentants du public, qu'il soit nommé à partir d'une liste de noms proposés par des associations de consommateurs ou des groupes d'usagers, qu'il soit décisionnel et rattaché, d'une façon organisée, à l'Office des professions.

Par ailleurs, il est extrêmement déplorable de constater que l'avant-projet de loi ne prévoit pas de représentant du public au sein du comité de discipline de la Corporation professionnelle. Pourtant, les recommandations initiales de l'Office des professions, sur lesquelles nous avons été consultés, comportaient l'ajout d'un membre extérieur à la Corporation à la composi-

tion actuelle du comité de discipline. Cette proposition n'a pas été retenue bien qu'elle répondait à une des principales revendications de la FNACQ.

Afin de garantir plus de crédibilité et de transparence dans le fonctionnement du comité de discipline, nous proposions, depuis plusieurs années, qu'il y ait un représentant du public nommé à partir d'une liste de noms proposés par les associations de consommateurs et des groupes d'usagers et que le comité de discipline soit composé d'au plus trois personnes, mais, selon l'avant-projet de loi, le comité de discipline serait composé d'un avocat et de deux professionnels. Toute plainte serait ainsi jugée par une majorité de pairs, ce qui signifie qu'il n'y aurait aucun changement par rapport à la situation actuelle. À ce chapitre, l'avant-projet de loi s'avère très décevant.

D'autres éléments sont à souligner dans l'avant-projet de loi. Parmi les sanctions que le comité de discipline pourrait imposer à un professionnel déclaré coupable d'une infraction se trouveraient l'obligation de communiquer un document ou tout renseignement qui y est contenu et l'obligation de compléter, de supprimer, de mettre à jour ou de rectifier un tel document ou renseignement. L'ajout de cet article pourrait s'avérer très utile, par exemple dans les cas de demandes pour faire rectifier ou supprimer un commentaire ou une note dans un dossier médical. Actuellement, lorsqu'une personne se sent lésée dans ses droits ou souffre de certains éléments qui sont inscrits dans son dossier médical, elle n'a que peu de recours à sa portée. Les professionnels de la santé invoquent, la plupart du temps, leur droit à leur opinion professionnelle pour justifier les notes qui sont consignées dans le dossier. À moins qu'il s'agisse de faits qui soient inexacts et facilement véri-fiables, il est pratiquement impossible, pour une personne, de voir des éléments de son dossier modifiés.

Par ailleurs, nous sommes heureux de constater que l'avant-projet de loi prévoir que le comité de discipline puisse exiger qu'une amende imposée à un professionnel soit versée à la personne qui a porté plainte. Cette amende versée au plaignant servira alors de compensation pour les pertes subies et les démarches encourues par la personne. Cette amende serait, dans plusieurs cas, davantage satisfaisante pour le plaignant que de savoir qu'une réprimande a été adressée au professionnel fautif et beaucoup plus significative également pour le professionnel.

L'autre élément intéressant apporté par l'avant-projet de loi concerne un plaignant qui décide de porter seul sa plainte devant le comité de discipline. Celui-ci ne pourrait se voir condamné au déboursé que si le professionnel a été acquitté sur chacun des chefs contenus dans la plainte et que la plainte a été faite de mauvaise coi. Il serait toutefois nécessaire d'évaluer ce qu'une plainte faite de mauvaise foi signifie exactement. Une définition précise aurait ainsi avantage à être apportée pour clarifier l'analyse de l'interprétation que les membres des comités de discipline pourraient en faire.

En ce qui concerne l'Office des professions, l'avant-projet de loi propose de lui confier davantage de pouvoirs, notamment le pouvoir d'enquête sur les corporations professionnelles. Cependant, des doutes subsistent quant à l'usage réel que l'Office pourrait faire de ces nouveaux pouvoirs face aux corporations professionnelles. En effet, lorsqu'on regarde la composition du conseil d'administration de l'Office des professions, on s'aperçoit que même l'ajout de deux membres extérieurs conserve cependant une majorité des sièges à des membres des corporations professionnelles. Même s'il s'agit d'un gain intéressant, nous croyons que pour que l'Office puisse s'acquitter efficacement et librement de ces nouveaux pouvoirs, il doit posséder une plus grande indépendance face aux corporations professionnelles.

Or, on peut mettre en doute les orientations et les décisions que les membres des corporations, siégeant a l'Office, pourraient prendre. Ils seraient liés, d'une part, aux corporations et, d'autre part, à l'Office. Sans remettre en question la place réservée à des membres des corporations au sein du conseil d'administration de l'Office, nous recommandons qu'une majorité des sièges soient occupés par des représentants du public, choisis à partir d'une liste de noms proposés par des associations de consommateurs et des groupes d'usagers.

En résumé, l'analyse de l'avant-projet de loi a permis de faire ressortir des propositions intéressantes afin d'améliorer le système de traitement des plaintes des corporations professionnelles. Toutefois, ces propositions ont pour effet de maintenir en place la structure actuelle, sans en changer profondément le fonctionnement et la composition. La FNACQ aurait souhaité une réforme en profondeur du système disciplinaire des corporations professionnelles qui garantirait une indépendance face aux corporations, un jugement impartial et une forte représentation du public.

C'est pourquoi la FNACQ considère qu'à moins de modifications majeures la proposition de l'avant-projet de loi soumise à la consultation n'est pas satisfaisante. À ce niveau, la proposition d'un mécanisme de traitement des plaintes indépendant et impartial par le Protecteur du citoyen nous intéresse davantage.

M. Beaudoin: M. le Président, combien de temps nous reste-t-il pour la présentation? Deux minutes?

Le Président (M. Richard): Une minute. Mais, ça, vous n'êtes pas obligé de le prendre.

M. Beaudoin: Non, non, ça va. Non, ça me situe. Ça me situe. Alors, il faut bien s'entendre au niveau...

Le Président (M. Richard): Toute farce à part!

M. Beaudoin: D'accord. Alors, au niveau de la dernière phrase, il faut bien comprendre qu'on parle de la proposition par le Protecteur du citoyen d'un mécanisme indépendant. Ce n'est pas nécessairement le Protecteur du citoyen qui assumerait ça. Alors, pour finir en une minute environ, effectivement, dans l'avant-dernière partie de notre mémoire, on trouve quelques commentaires sur la proposition du Protecteur du citoyen, rendue publique en mars 1992. Mais, en fait, le Protecteur du citoyen était déjà intervenu auparavant dans l'opinion publique sur certains critères qu'il souhaitait voir au niveau du système disciplinaire. Je n'entrerai pas dans les détails mais, fondamentalement, c'est une proposition qui remet en question le fait que le système disciplinaire appartient, à toutes fins pratiques, aux corporations professionnelles en tant que telles et qu'il vise à instituer un tribunal de la déontologie professionnelle.

Ceci dit, pour nous, que ce soit un tribunal, une commission ou que ce soit rattaché à l'Office des professions du Québec, ce n'est pas ça la question. L'important, c'est que ce soit indépendant des corporations professionnelles en tant que telles et qu'effectivement le jugement strictement par les pairs ne puisse pas s'appliquer et qu'il y ait nécessairement des représentants du public, que ce soit au niveau d'une commission, que ce soit au niveau d'un comité de discipline. Il faut qu'il y ait ça et que l'ensemble du système ne soit pas contrôlé par les corporations professionnelles, même si des membres des corporations professionnelles puissent être impliqués à différents niveaux.

Et, donc, voilà, grosso modo, nos recommandations. Il y a, par contre... Lucie va présenter quelques autres recommandations qui sont importantes pour nous, et je vais conclure rapidement. Alors, écoutez, de toute façon, on aura des questions, si vous le voulez, sur nos autres préoccupations. Et j'attire votre attention sur le fait que l'annexe 1 donne plus de précisions sur l'historique du dossier Patricia Bisson et, également, on avait prévu inclure des coupures de presse à notre mémoire. Elle ne sont pas incluses actuellement. J'ai fait une courte revue de presse ici et, si vous le désirez, je peux vous la distribuer ou la faire distribuer. Merci bien, M. le Président, mesdames et messieurs de la commission.

Le Président (M. Richard): Merci et vos copies de presse, si vous voulez les donner au secrétariat, s'il vous plaît, à madame, et on va en faire des copies pour l'ensemble des membres de la commission. Maintenant, M. le ministre, vous voulez débuter par la période de questions.

M. Savoie: Oui, M. le Président. Je voudrais, tout d'abord, remercier la Fédération nationale des associations de consommateurs d'avoir pris le temps de procéder à la rédaction d'un mémoire et à la présentation, ce matin. Je voudrais remercier tout particulièrement M. Beaudoin et Mme Dupré pour la présentation qu'ils en ont faite et, évidemment, si nous débutons nos travaux avec la Fédération, ce n'est pas l'effet du hasard. J'imagine que vous vous en doutiez.

Ce que nous voulons faire surtout et avant tout, c'est de constater avec vous, finalement, les points positifs et les points qui soulèvent encore une interrogation chez vous ou une critique qui tient compte des orientations dans votre organisation.

En gros, ce qu'on constate, c'est que, d'une façon générale, c'est un pas dans la bonne direction, quoique vous aimeriez avoir plus d'interventions dans certains secteurs, que vous vouliez avoir un petit peu plus de modifications au niveau de certains principes que nous avons jugé bon de ne pas toucher. Je pense qu'on peut s'entendre pour dire que vous avez une position très claire, très ferme à défendre, que nous, nous avons également une orientation à donner au dossier et qu'il est impossible, peut-être, d'en donner autant que vous en voulez. Mais je pense que, de façon générale, il y a une reconnaissance que c'est un pas dans la bonne direction. (11 h 10)

Je voudrais apporter quelques correctifs tout de suite pour les fins du dossier. Tout d'abord, c'est que nous entendons tout le monde qui a demandé d'être entendu, sans exception. La CSN s'est désistée proprio motu. Il y a trois mémoires qui n'ont, finalement, là... l'Association des usagers de la langue française, par exemple, dont le mémoire ne porte d'aucune façon sur les travaux de cette commission, et deux autres, évidemment, qui n'ont pas été retenus, sur consentement. Alors, on ne peut pas, on ne peut pas... Moi, je pense que, d'une façon générale, là, quiconque a demandé d'être entendu et qui avait un commentaire positif sera entendu. La porte est toujours ouverte.

Pour ce qui est de Mme Bisson, évidemment, il faut bien... Je voudrais mettre ça un peu en perspective, là. Il est sûr que c'a attiré l'attention de plusieurs sur le cas de Mme Bisson; il est sûr également que son cas a fait soulever des inégalités. Mais il faut aussi souligner que c'est un dossier dont la présentation sur la place publique, d'une façon générale, démontre plutôt un malaise, et ne s'attaque pas vraiment au problème de fond. La présentation, par exemple, que nous avons vue à la télévision, démontre un malaise. Les faits, les données, sont

en grande partie faux, hein? Lorsqu'on parle de 40 000 $, ça n'a coûté 40 000 $ à personne là-dedans, surtout pas à Mme Bisson. On sait qu'elle a eu des difficultés financières et on a voulu l'assister. Par contre, ce qu'elle a fait, c'est qu'effectivement, effectivement, elle a attiré, finalement, l'attention de plusieurs sur sa situation, et que, finalement, le public a toujours une sympathie naturelle vers ce genre de cas mais que, en bout de piste, en analyse serrée des faits, des détails, là, en profondeur au niveau du dossier, c'est qu'il y avait finalement des anomalies quant à la présentation publique des faits.

Il fallait faire un effort au niveau de la discipline, au niveau du fonctionnement. Vous l'avez constaté, vous avez eu l'occasion à plusieurs reprises de le souligner, et on vous en remercie. Vous soulignez à la page 25 de votre mémoire, en conclusion: «La protection du public commence à partir du moment où l'usager dépose une plainte». C'est-à-dire que, bien sûr, là, vous prévoyez des éléments curatifs - il n'y a personne qui met ça en doute, là - mais vous ne sentez pas que le projet de loi, ce qu'il vise effectivement, ce qu'il vise effectivement, c'est surtout du curatif, c'est-à-dire établir des mécanismes qui vont changer la perception, surtout au niveau des fautes légères, surtout au niveau des fautes légères, et qu'en conséquence il va y avoir moins de représentations suite à la réforme, à la proposition qui est contenue dans le projet de loi, et qu'en conséquence la perception du public va être améliorée, suite à ces modifications-là, et qu'en conséquence le fonctionnement sera mieux reconnu par le public?

M. Beaudoin: D'abord, M. le ministre... Non, je pense qu'officiellement il faut parler à M. le président, je pense?

M. Savoie: C'est ça, il faut s'adresser au président.

M. Beaudoin: Non, je ne sais pas, en tout cas. Alors, M. le Président, je voudrais'souligner quand même deux choses. D'abord, en ce qui a trait à la présentation des faits dans la présentation qu'on a eue tout à l'heure, ou de ce qui a été dit par mon entremise ou ce qu'il y a dans le document au niveau de la chronologie, en fait, M. le ministre a soulevé seulement un point où il y avait une anomalie, c'est-à-dire le montant de 40 000 $. Pour ce qui est du reste des faits, les plaintes déposées non retenues, la décision des médecins d'expulsion, à toutes fins pratiques, de la famille de Mme Bisson, etc., le fait que le comité de discipline ait donné raison en partie à Mme Bisson, le fait que le Tribunal des professions, finalement, ait donné raison plutôt aux médecins, etc., ce sont tous des faits qui font partie du dossier et qui ont été effectivement présentés tels quels et de façon complète et objective à l'ensemble de la population et des médias.

Pour ce qui est du chiffre de 40 000 $, le problème vient surtout du fait que Mme Bisson, quand elle parlait de 40 000 $, elle parlait de l'ensemble des coûts qu'elle avait assumés, et non pas seulement des coûts auxquels elle a été condamnée par le comité de discipline ou par le Tribunal des professions. Mme Bisson, dans les faits, a dû, s'est ramassée avec une facture, au niveau d'avocats, de l'ordre de 30 000 $, qui a été, par les avocats, diminuée de 10 000 $, après le mois de mars 1990, après la conférence de presse qu'il y a eu là; d'autre part, elle ne savait pas exactement, et nous non plus, exactement les montants qu'elle devait payer. C'était difficile à évaluer. Il y avait très peu de cas auparavant où ça avait été ça qui avait été déclaré. Finalement, elle a eu une dette vis-à-vis de la Corporation professionnelle des médecins de plus de 3000 $. Et, elle, quand elle parlait de 40 000 $ elle incluait aussi ses dépenses personnelles de déplacement quand elle est allée témoigner au comité de discipline par exemple, etc. Au total, dans les faits, on s'est ramassé finalement avec, pour ses dépenses à elle, 35 000 $. Le problème effectivement a été qu'il y a eu, soit de la part des médias, soit de notre part, soit de Mme Bisson, une surévaluation relative des coûts directs qui ne relève pas de ses coûts d'avocats, mais ce n'est pas nécessairement des gigantesques montants. Il y a une différence très importante. En fait, elle a eu à assumer, en gros, environ 35 000 $ de coûts facturés et elle n'était plus capable de les payer à la fin de tout ce processus-là.

D'autre part, pour ce qui est des améliorations qui ont été apportées au niveau de l'avant-projet de loi, vous avez raison, effectivement, nous, on considère qu'il y a quelques éléments positifs. On les a relevés. Mais à notre avis, par rapport même à ce qui avait été présenté par l'Office des professions du Québec, même l'Office des professions du Québec, au début, quand elle a proposé certaines choses en consultation, par exemple la possibilité qu'il y ait un membre, un représentant du public sur le comité de discipline, et ça, on ne retrouve pas ça dans l'avant-projet de loi... Je vais laisser peut-être Mme Dupré continuer.

Mme Dupré: Juste pour compléter. M. le ministre parlait que l'avant-projet de loi avec ses propositions pouvait changer la perception du public face au système de traitement des plaintes. Nous, on n'est pas du tout convaincus de ça quand on regarde l'ensemble de la structure, qui va rester la même. Effectivement, si l'on prend la structure actuelle, l'avant-projet de loi apporte des améliorations, sauf que tout le système de traitement des plaintes va demeurer au sein des corporations et être géré par les corporations. Donc, aux yeux du public, aux yeux de M. et Mme Tout-le-Monde, ça ne changera pas grand-

chose de savoir que les plaintes sont encore traitées par des pairs au sein des corporations professionnelles. Alors, nous, c'est pour ça qu'on dit qu'au niveau de la crédibilité, aux yeux du public et de l'impartialité du système l'avant-projet de loi n'apporte pas suffisamment d'améliorations. Il faudrait que ce soit un système qui soit complètement indépendant et, nous, on propose qu'il soit rattaché à l'Office des professions.

Le Président (M. Richard): M. le ministre.

M. Savoie: Tout simplement une dernière question avant de permettre à l'Opposition d'intervenir. Est-ce que vous connaissez un autre cas semblable au cas de Mme Bisson? Est-ce qu'il y a d'autres cas qui sont documentés là-dessus?

M. Beaudoin: D'abord, disons tout de suite que le cas de Mme Bisson est un cas très particulier. Il y a une chose importante, c'est que d'abord, même si c'est prévu dans la loi qu'on puisse aller comme individu, comme plaignant privé au comité de discipline... Alors, une fois que le syndic d'une corporation, disons, a refusé de porter une plainte au comité de discipline, une personne qui a vu cette plainte refusée, même s'il peut y avoir un avertissement qui a été indiqué ou une information qui a été communiquée au professionnel, la personne qui reçoit cette information-là, elle, elle considère que c'est un cas important et que ça doit aller au comité de discipline, et elle est prête, elle, comme plaignante privée, à y aller. Il faut dire que c'est rare, dès le départ. Alors, on n'a pas vraiment beaucoup d'exemples dans notre société québécoise depuis 10 ans, depuis 20 ans de cas de cet ordre-là. D'ailleurs, si je ne m'abuse, c'est à partir de 1986 que c'est devenu possible pour un plaignant privé d'y aller.

Deuxièmement, dans la revue Consommation de l'ACEF-Centre de Montréal, il est question en novembre ou en octobre dernier d'une personne qui est allée devant un comité de discipline parce qu'elle était insatisfaite de la plainte qu'elle avait déposée concernant un avocat. Cette personne-là, d'après elle, aurait été enfin, à toutes fins pratiques, escroquée, en tout cas, il y aurait eu un problème de cet ordre-là. Cette personne est allée devant le comité de discipline, a eu à payer des frais d'avocats principalement de l'ordre de 40 000 $. Elle s'est fait donner raison, au moins en partie par le comité de discipline. Par contre, ça n'a pas fait nécessairement les grandes manchettes. (11 h 20)

Nous, ce qu'on a de plus, c'est ce qu'on pourrait appeler des fautes légères ou des cas de fautes légères, soit des gens qui ont eu de la difficulté à avoir leur dossier médical dans une clinique privée, par exemple. Des fois ce n'est pas des fautes légères. Des fois, à notre avis, c'est des choses très sérieuses mais qui sont rejetées, à la première partie, par le syndic pour aller au comité de discipline, soit qu'il y a un avertissement plus ou moins qui a été donné au professionnel, soit que ce n'est pas clair exactement, ce qui s'est passé avec la plainte, mais ce qui est sûr, c'est qu'elle ne va pas devant le comité de discipline. Dans la plupart des cas, les consommateurs et les consommatrices sont insatisfaits de deux ou trois choses fondamentalement: du degré de communication et d'ouverture qu'ils ont perçu de la part du syndic, sauf exception, parce qu'il y a des exceptions, aussi du degré de communication, d'information sur le déroulement du dossier, ce qui est arrivé exactement avec le dossier, ce qui a été dit aux professionnels finalement si ce n'est pas allé au comité de discipline, et, troisièmement, de l'avis de plusieurs, du manque de sérieux avec lequel on a traité leur plainte parce que, des fois, c'est des affaires sérieuses quand même. Mais ces gens-là, la plupart du temps, ne veulent pas, eux, prendre la peine d'aller devant le comité de discipline seuls parce qu'ils savent que c'est compliqué et possiblement coûteux. Lucie.

Mme Dupré: Non, mais juste pour compléter aussi. C'est ce qu'on voit, je dirais, quotidiennement, que ce soit à l'ACEF ou à Auto-psy, les gens qui viennent nous voir parce qu'ils aimeraient porter plainte contre des professionnels, ce qu'ils nous disent, c'est qu'ils n'ont pas confiance dans le système. Ils disent: Bien, j'aimerais ça me plaindre, mais, dans le fond, je sais bien que ça ne donnera rien, ça ne réglera pas mon problème, on sait bien qu'ils se tiennent ensemble. Donc, les gens, à la base, ils n'ont pas confiance et je pense qu'à maintes reprises ça a été révélé, ça a même pu être prouvé. Les gens n'ont pas confiance actuellement dans le système disciplinaire et on ne pense pas qu'avec les améliorations qui sont proposées par l'avant-projet de loi ça va régler, à la base, ne serait-ce que la perception des gens qu'ils ont effectivement le droit de se plaindre et que ça peut donner quelque chose. Ça, par exemple, on le voit très souvent dans nos organismes.

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, j'aurais personnellement un questionnement. Vous avez sous-tendu tout à l'heure que c'était seulement depuis 1986 qu'on pouvait aller au comité de discipline. Est-ce que c'est le cas?

M. Beaudoin: Je peux me tromper, mais il me semble que j'ai lu ça dernièrement dans toute la montagne de papiers que j'ai consultés.

Le Président (M. Richard): Écoutez, je m'interroge, je ne connais pas la réponse, mais est-ce que c'est depuis 1986 ou si, auparavant, on avait quand même le droit d'aller au comité de discipline?

M. Savoie: Auparavant. Depuis 1973.

Le Président (M. Richard): Donc, c'est depuis le début.

M. Beaudoin: Alors, c'est une erreur de ma part.

Le Président (M. Richard): Écoutez, je ne voulais pas vous...

M. Beaudoin: Non. Ce qui est une erreur, c'est la date; ce qui n'est pas une erreur c'est de dire que c'est rare que des consommateurs ou des consommatrices vont aller devant le comité de discipline seuls.

Le Président (M. Richard): Faire une erreur n'est pas un problème, c'est faire deux fois la même qui est un problème.

M. Beaudoin: D'accord.

Le Président (M. Richard): Est-ce que vous avez une autre question, M. le ministre?

M. Savoie: On va revenir plus tard.

Le Président (M. Richard): Mme la députée de Terrebonne, vous avez la parole.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, merci, Mme Dupré, merci M. Beaudoin. Puisque je veux vraiment profiter de votre passage pour vous donner la chance de vous exprimer beaucoup, donc, je ne ferai pas beaucoup de commentaires.

Vous avez choisi de nous exprimer vos commentaires à partir d'un cas particulier qui démontre certaines lacunes du système disciplinaire. À votre avis, est-ce qu'il y a manque de connaissances et manque d'information pour le public en général, concernant le système professionnel en général et le système disciplinaire en particulier? Est-ce que, à votre connaissance, le public manque d'information sur ce système?

M. Beaudoin: Bien écoutez, je pense que c'est clair et net que la plupart des gens ne savent pas tellement que ça existe, c'est-à-dire que je pense que la plupart des gens savent que ça existe, une loi de la protection du consommateur, que ça existe, l'Office de la protection du consommateur, que la Cour des petites créances existe, par exemple, qu'ils ont des recours en matière de consommation dans le cadre qu'on pourrait dire des pratiques commerciales, marchandes ou courantes, mais il y a énormément de gens qui ne sont pas au courant de comment ça fonctionne, les corporations professionnelles, et aussi, effectivement, du système de traitement des plaintes ou du système disciplinaire, appelons-le, disons, système disci- plinaire. Il y a différentes raisons à ça. Je pense qu'il y a insuffisamment d'information publique sur le sujet et ce n'est pas nécessairement par l'entremise de deux ou trois cas spéciaux ou particulièrement extraordinaires à chaque année que ça va se faire connaître tellement bien pour M. et Mme Tout-le-Monde. Il faudrait effectivement, peu importe ce qui advient du système disciplinaire, peu importe la forme qu'il va prendre, il faudrait faire un effort d'information publique davantage.

Deuxièmement, il faut dire aussi qu'une partie du fait que les gens ne sont pas au courant, c'est peut-être parce que c'est moins courant que d'acheter certains produits régulièrement, bon, dans différents commerces que de se dire dans sa tête: Bien, il me semble que ça n'a pas tellement bien été, chez le dentiste. Je ne suis pas satisfait au niveau du médecin, ça ne va pas trop. Ou bien: L'arpenteur-géomètre... C'est parce qu'il faut dire aussi que, certains types d'actes professionnels, ce n'est pas tout le monde qui va avoir affaire à ça régulièrement. Exemple, arpenteur-géomètre. Des services d'arpenteur-géomètre, on n'a pas affaire à ça chaque semaine, bien sûr, et il y a même des gens qui, probablement, dans leur vie, à part de consulter pour un contrat éventuellement, ils n'en auront peut-être pas besoin. Il y en a pas mal de monde, mais pas tous les jours. Alors, il y a ça qui est important aussi.

Du côté des actes professionnels dans le domaine de la santé, il y a beaucoup de satisfaction, fondamentalement, par rapport à l'accès des soins, mais il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas toujours tellement satisfaites des soins mais elles ne savent pas exactement comment faire pour agir là-dedans et, dans certains cas qui peuvent même être graves, les gens ne savent pas quoi faire, d'une part, et, deuxièmement, ont peur de s'embarquer dans un processus un peu compliqué. Ce qui fait que, quelque part, avant même de penser a faire quelque chose, ils ne feront pas l'effort de s'informer non plus. Alors, vraiment, oui, il y a un problème, à la base, d'information et de connaissance du système.

Mme Caron: Je vous remercie, M. Beaudoin. Vous avez fait mention, et je pense que c'est intéressant, que le syndic devrait davantage faire part des conclusions de son enquête d'une façon claire et précise lorsqu'il répond à une plainte, puisque vous avez dénoté un problème du côté du degré de l'ouverture ou de l'information du syndic. Les gens sentent un manque de sérieux. Donc, lorsqu'ils reçoivent la décision du syndic, si on l'exprimait d'une façon claire et précise et si c'était vraiment détaillé, peut-être que ça viendrait corriger cet aspect-là.

Par contre, est-ce que vous ne croyez pas que par le délai de 60 jours, justement dans les cas où la plainte est sérieuse, on ne vient pas

nuire à l'enquête et qu'on ne risque pas que, justement, cette plainte soit traitée avec peu de sérieux, puisqu'on doit se dépêcher pour y donner réponse dans les 60 jours? Alors, ça favoriserait davantage les plaintes légères; bien sûr qu'il y aurait une réponse, mais la plainte sérieuse, elle, serait moins bien traitée.

Mme Dupré: Nous, on était un peu partagés face au délai de 60 jours imposé au syndic. On se disait que, d'une part, ça va être bien parce que, personnellement, moi, je connais des gens qui ont déposé des plaintes à des corporations professionnelles et qui attendent depuis déjà quatre mois, ne serait-ce qu'une réponse du syndic. Alors, le fait qu'il y a un délai de 60 jours, ça va venir clarifier ces situations où les plaintes traînent en longueur. D'une autre part, c'est vrai que, dans certains cas où les plaintes sont sérieuses, ça pourrait faire en sorte que l'enquête soit beaucoup plus rapide et ne couvre pas tous les éléments. Par contre, avec ce qui est proposé là, aussi, c'est que, si le syndic, en dedans de 60 jours, n'avait pas suffisamment de temps pour examiner tous les aspects de la plainte, il pourrait faire rapport à l'Office et peut-être obtenir un délai supplémentaire.

Il y avait aussi l'aspect que, si le syndic prend 60 jours et rejette la plainte, c'est envoyé au comité d'examen des plaintes qui, lui aussi, a 60 jours. Le plaignant qui, en bout de ligne, se ferait signifier un refus, au niveau de sa plainte, il a déjà attendu 120 jours; alors, à ce moment-là, c'est long. Ça peut être bien qu'il y ait des délais dans certains cas; dans d'autres cas, ça peut peut-être nuire.

Mme Caron: Je vous remercie. À plusieurs reprises, dans votre mémoire, vous rappelez l'importance d'une structure externe et vous spécifiez «une structure externe telle que l'Office des professions» et ça revient à plusieurs reprises dans votre mémoire. Compte tenu du fait que le gouvernement a déposé, en même temps, un projet de loi, le projet de loi 67, qui, à ce moment-là, transmet complètement le financement de l'Office des professions aux corporations professionnelles, est-ce que vous considérez toujours que l'Office des professions est, à ce moment-là, une structure externe complètement indépendante et autonome des corporations professionnelles? (11 h 30)

Mme Dupré: C'est sûr qu'au niveau du financement on a su qu'il y avait un projet de loi 67, qui n'était pas inclus dans l'avant-projet de loi, c'était une surprise parce qu'on pensait que c'était la même chose. Bon! Au niveau du financement, on n'a pas beaucoup approfondi la question parce qu'on trouvait que c'était compliqué et on n'avait peut-être pas d'idées très originales à ce niveau-là, sauf qu'on avait des craintes et on avait des questionnements. C'est sûr qu'avec la structure que, nous, on propose, enfin, on appuie la proposition du Protecteur du citoyen, c'est que, si ça devient une structure qui est complètement indépendante, rattachée à l'Office des professions, mais qu'en même temps l'Office des professions serait financé à même les corporations professionnelles, là, ça vient poser un problème au niveau de son indépendance parce qu'il serait lié sur le plan financier aux corporations professionnelles. C'est un problème. Mais le problème se pose aussi avec la structure qui est proposée dans l'avant-projet de loi, c'est-à-dire que, si l'Office des professions obtient plus de pouvoir de sévir auprès des corporations mais, d'un autre côté, il est financé à même . ces corporations, on peut douter s'il va vraiment pouvoir s'en servir et appliquer ces nouveaux pouvoirs. Donc, toute la question du financement, nous, on n'avait pas de réponse. On n'avait pas de solution, mais on avait des craintes. Et une autre crainte qu'on avait, c'était que les corporations, si elles doivent financer l'Office, les corporations vont, on peut penser, refiler ces montants à leurs membres qui eux, vont les refiler en bout de ligne aux citoyens, aux consommateurs. Et ça, ça serait un risque énorme à prendre. Donc, c'est un peu les craintes et les questionnements qu'on avait. Je ne sais pas si tu avais autre chose.

M. Beaudoin: Juste pour préciser. C'est que, si je ne m'abuse, les cotisations des membres des corporations professionnelles sont déductibles d'impôt. Si on augmente les cotisations, on augmente ce qu'on pourrait appeler des dépenses fiscales de l'ensemble des contribuables. Si les cotisations augmentent, d'un autre côté, sur le marché privé, dans le cas des services qui sont facturés directement aux consommateurs, bien, les professionnels, évidemment, vont augmenter légèrement leurs prix pour compenser, parce qu'il n'y a personne qui... Que ce soit un travailleur ou une travailleuse non syndiqué ou syndiqué ou que ce soit n'importe qui, on essaie toujours de garder, au moins, son niveau de vie, grosso modo. Ou encore, si on pense au niveau des médecins, par exemple, bon, bien, enfin, ça va être la même chose. Dans les négociations versus les ententes avec l'État, il va y avoir aussi une poussée légère, légère. Pas nécessairement... Ce ne sera pas un gros morceau, mais, quand même... Écoutez, bon. Il faudrait un peu plus, parce qu'il faut tenir compte du fait que maintenant on finance un peu plus le système des corporations ou de l'Office des professions qu'avant, un peu plus. Bon. Etc. Ça fait que rien ne se perd, rien ne se crée. Finalement, la manière de payer n'empêche pas que bien du monde va payer dans tout ça. Alors donc, encore effectivement, pas tout à fait de réponse, mais on essaie de ne pas être naïfs par rapport à ça.

Mme Caron: Je vous remercie. Il reste

encore du temps, M. le Président? Vous avez fait part aussi, en page 21, d'une possibilité que le Tribunal puisse condamner un professionnel à une amende et que cette amende puisse être versée au plaignant. J'aimerais que vous me fassiez la comparaison avec un système que vous connaissez bien, celui de l'Office de la protection du consommateur. Lorsqu'il y a plainte de la part d'un consommateur par rapport à une entreprise et qu'il y a amende à payer, est-ce que cette amende est versée au plaignant ou si l'amende est versée à un organisme?

M. Beaudoin: Écoutez, je m'excuse, j'ai perdu un petit peu ce que vous m'avez dit les 10 dernières secondes, mais en tout cas, bref, grosso modo... D'ailleurs, c'est dans l'avant-projet de loi aussi au niveau de ce qui est présenté par rapport au comité de discipline. Nous, que le système disciplinaire soit à l'intérieur des corporations professionnelles comme l'actuel avant-projet de loi veut le maintenir ou qu'il soit indépendant, on pense que c'est une bonne chose que les plaignants ou les plaignantes puissent avoir, possiblement, une compensation financière relative, compte tenu du temps qu'ils prennent, compte tenu des problèmes qu'ils ont eus, etc. Il faut bien s'entendre. C'est sûr qu'une personne qui dépose une plainte dans le cadre du système disciplinaire, ce n'est pas pour faire de l'argent avec ça, parce que c'est clair et net que ce n'est pas du tout, ça ne remplace pas du tout une éventuelle poursuite en dommages et intérêts, si nécessaire, dans les cas graves.

Ceci dit, d'avoir la possibilité d'un certain montant directement à la personne qui a eu, finalement, le problème directement, elle-même, bien, on trouve que c'est un point positif. Et cette personne, même si, pour elle, ce ne sont pas nécessairement des montants importants, ça fait partie de la reconnaissance de l'ensemble du système que, oui, cette personne a eu un problème et, même si ce n'est peut-être pas nécessairement suffisant, le montant qui lui est versé, il y a vraiment une reconnaissance de ce problème et le fait que ça vienne du professionnel, à toutes fins pratiques, l'amende, ça veut dire aussi: Bien coudon, ça veut dire qu'il y a un système qui a dit: Oui, il y avait un tort, il y avait un problème et la personne qui a déposé la plainte, finalement, en retire un bénéfice symbolique et légèrement monétaire, mais enfin. C'est une reconnaissance, en fait.

Mme Caron: Ma question était à l'effet: Au niveau des plaintes à l'Office de la protection du consommateur, lorsque, effectivement, on condamne une compagnie à verser une amende, est-ce que cette amende est donnée au consommateur?

M. Beaudoin: À ma connaissance, elle est donnée au consommateur. Mais je peux me tromper.

Mme Caron: Moi, je croyais que non, là. Alors, je voulais, c'est ce que je voulais vérifier. Vous avez également parlé de la possibilité de plaintes déposées par un tiers. J'aimerais vous entendre là-dessus. Vous en parlez en page 23. Vous démontrez un petit peu que les démarches sont peut-être difficiles pour plusieurs personnes, qu'elles n'osent pas déposer cette plainte-là. Est-ce que vous croyez que la mesure qui est proposée dans l'avant-projet de loi, à savoir que le secrétaire de la corporation devrait participer à aider le plaignant à formuler sa plainte, est-ce que vous pensez que c'est une façon, ou vous souhaitez vraiment que ce soit un tiers complètement indépendant?

Mme Dupré: Je pense que notre proposition se maintient; même s'il est mentionné que le secrétaire du comité de discipline pourrait aider le plaignant à formuler sa plainte, il demeure quand même que le secrétaire est encore lié, là, à la corporation. Souvent, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des gens qui, une fois qu'on les informe qu'ils pourraient porter plainte, ils ont besoin d'un certain support dans toute la démarche, ne serait-ce que pour rédiger la plainte, pour savoir que c'est une bonne démarche, que, bon, juste pour être rassurés et savoir que ce qu'ils font, c'est correct, et, ça, il y a déjà des organismes qui existent, que ce soit l'ACEF ou Auto-psy, qui peuvent jouer ce rôle-là, étant donné qu'on est près des gens et que, bon, on est complètement indépendants, donc, ils peuvent avoir confiance en nous, et ça peut devenir très important dans le cas de gens qui, autrement, ne porteraient pas plainte. Alors, c'est pour ça qu'on maintient quand même cette proposition-là, qui... c'est un ajout qu'on a fait, parce qu'on ne le retrouvait pas dans l'avant-projet de loi, mais c'est quelque chose auquel on tient beaucoup.

Mme Caron: Compte tenu que, justement, ce n'est pas toujours facile de porter plainte, on nous parle de la possibilité, dans l'avant-projet de loi, d'un formulaire unique préparé par l'Office. Pour permettre et faciliter, justement, les plaintes de la part du public, est-ce que ce ne serait pas mieux de maintenir plusieurs possibilités, c'est-à-dire que le public puisse, comme il le fait déjà, déposer une plainte selon les critères que, lui, juge intéressants, c'est-à-dire la déposer lui-même, à partir d'un texte qu'il écrit, comme ça se fait, qu'il puisse avoir le choix entre ce procédé et un formulaire, et, compte tenu du fait que les corporations professionnelles sont extrêmement différentes - il y en a 41 - et qu'elles ont donc des champs d'action tout à fait différents, qu'il puisse y avoir des formulaires différents?

Mme Dupré: Bon. On n'avait pas vraiment

pensé à la possibilité qu'il pourrait exister plusieurs formulaires; déjà, qu'il en existe un qui soit unique, par l'Office des professions, c'était déjà une amélioration en soi, parce qu'il y a des corporations qui n'en ont pas, et habituellement c'est toujours un peu la même procédure où la personne a à décrire les faits au sujet de sa plainte. Je pense aussi qu'il faudrait quand même qu'il y ait une certaine souplesse, si des gens veulent ne pas utiliser le formulaire mais procéder plus par lettre ou par document. Je pense qu'il y aurait une souplesse à y avoir, mais le fait qu'il y a un formulaire, déjà là, ça va être une amélioration, et ça peut même inciter des gens à porter plainte, plutôt que, s'ils appellent à la corporation et qu'on leur dit: Bien, écoutez, envoyez-nous une lettre, tout ça, déjà, écrire une lettre, ça peut être plus compliqué que remplir un formulaire; et l'Office, également, pourrait nommer une personne qui pourrait aider les gens à remplir le formulaire, avoir une espèce d'aide technique, ça pourrait bien être aussi les groupes d'aide et d'accompagnement au niveau de la défense des droits.

Mme Caron: Je vous remercie. J'aimerais vous entendre également concernant le traitement des plaintes, par rapport au système qui existe avec la réforme de la loi 120, c'est-à-dire le traitement des plaintes qui peut se faire directement dans les établissements, les régies régionales; comment vous concevez ce type de plaintes là par rapport au système disciplinaire du Code des professions. (11 h 40)

Mme Dupré: Bon. Nous, on est assez familiers avec le système de traitement des plaintes, que ce soit au niveau des établissements ou, bon, actuellement des CRSSS ou des régies régionales; sauf qu'à ce moment-là ça concerne plus, je dirais, la qualité des services ou, en tout cas, tout ce qui touche les établissements. Quand c'est des actes professionnels, à ce moment-là, c'est retourné aux corporations professionnelles, et on se dit que ça pourrait être intéressant que ça puisse également... que ces plaintes-là puissent également être déposées au niveau des établissements et de la régie régionale. Parce que tout ce qui est acte professionnel s'en va à la corporation, et si c'est le système actuel qui est en place, donc, le jugement se fait par les pairs au niveau des corporations professionnelles. On trouverait ça intéressant que ça puisse aussi passer par le biais, là, du nouveau système de traitement des plaintes, dans le réseau de la santé et des services sociaux. Je ne sais pas si tu as autre chose.

M. Beaudoin: Bien, en fait, je voudrais renchérir sur le fait qu'on a plusieurs fois abordé cette question-là, qu'on ne voulait pas que, aux niveaux local et régional, dans les établissements, au niveau des régies régionales, il y ait la continuation de ce qu'on a pu constater dans certains cas, et de ce qui a été, entre autres, constaté par Me Jean-Pierre Ménard, qui a déjà fait une étude sur la question, c'est-à-dire comment c'est traité, les plaintes, au niveau des régies régionales et au niveau des établissements, dans une publication aux Presses de l'Université de Montréal dont je ne me souviens pas du nom, malheureusement. Il y disait qu'effectivement, presque systématiquement, quand ça touchait un acte professionnel, c'était pratiquement toujours référé dans le système disciplinaire des corporations professionnelles. Dans certains cas, il y avait, au niveau des établissements, le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, qui en .était saisi, mais encore là, souvent, ça prenait plus la direction du système disciplinaire; alors que, nous, on pense quand même qu'il faut responsabiliser au niveau local, au niveau du système public aussi, pour la qualité des services, et il est possible que ce soit difficile de juger d'un acte professionnel dans certains cas, au niveau local, au niveau d'une administration, si on peut dire, mais on doit prendre acte du fait qu'il peut y avoir un problème avec certains types de comportements ou de professionnels, possiblement, et essayer d'agir. Ça se fait dans certains cas et, dans d'autres cas, il y a vraiment un laisser-aller, c'est-à-dire qu'on dit: Ça va être les corporations professionnelles.

D'autre part, Mme Caron, je voudrais dire que personnellement, tout à l'heure, sur les questions de la Cour des petites créances et des amendes, c'est que je voudrais vous dire qu'en termes de division du travail, moi, à l'ACEF de Québec, je ne m'occupe pas de la question des pratiques commerciales dans le sens de la Loi sur la protection du consommateur, ce qui explique mon flottement, si vous voulez, mais, en fait, je pense que vous avez raison. C'est que les amendes, en tant que telles, qui sont attribuées aux compagnies qui n'ont pas respecté la Loi sur la protection du consommateur ne vont pas aux individus victimes, vont plutôt au fonds consolidé de la province, ou quelque chose d'équivalent, et aussi je me rappelle qu'à un moment donné plusieurs associations de consommateurs ont demandé que ces amendes-là soient versées aux associations de consommateurs, pour les aider dans leur financement. Alors, voilà. Alors, je m'excuse de mon ignorance relative là-dessus.

Mme Caron: Pas du tout. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Richard): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Je cède maintenant la parole à M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: Merci, M. le Président. Peut-être une simple question concernant - et ça prolonge peut-être un petit peu les discussions ou les échanges que vous avez eus avec la députée de

Terrebonne - l'aide et l'accompagnement. Dans une de vos recommandations, vous dites qu'il serait important de reconnaître le droit pour toute personne d'être accompagnée par la personne de son choix dans toutes les démarches du système de traitement des plaintes, et vous faites référence, évidemment, au système, à la réforme qu'on est en train de mettre en place. Pourriez-vous élaborer davantage, et est-ce que vous avez d'autres suggestions, est-ce qu'il y aurait d'autres balises que celles-là?

Mme Dupré: Bon. C'est ça, c'est... j'en ai un peu parlé tantôt. Nous, on pense que ça serait important que ça soit reconnu, là, au niveau de tout le système de traitement de plaintes, au niveau des corporations professionnelles, parce que ça existe déjà actuellement dans le milieu de la santé mentale, où, par exemple, Auto-psy, où je travaille, est reconnu un organisme d'aide et d'accompagnement en matière de défense des droits. Donc, on informe les gens de leurs droits, on leur indique les recours qui sont possibles et on les accompagne dans leur démarche. Ce même système là va se mettre en place au niveau régional pour le système de la santé et des services sociaux. Donc, on pense que ça, c'est... il y a déjà des organismes qui sont là, qui sont en place. Malheureusement, c'est juste dans le secteur de la santé, mais on pense que ça pourrait être généralisé, et s'il n'y a pas d'org...

M. Hamel: II n'y en pas d'autre que celui-là, là, dans le fond, que vous avez...

Mme Dupré: À ma connaissance...

M. Hamel: ...que vous avez ou que vous souhaitez voir réaliser?

Mme Dupré: C'est-à-dire que, moi, je n'en connais pas d'autres dans d'autres secteurs, sauf que ça peut être toute personne qui est intéressée, que ce soit un proche parent ou urr ami qui veut accompagner la personne dans sa démarche, c'est tout à fait possible également, là.

M. Beaudoin: Peut-être une précision: C'est que... à certains endroits dans le mémoire - on en parle très peu, par contre, malheureusement; on en parlait davantage quand on a déposé un document à l'Office des professions en juin 1991 - deux choses: D'abord, nous, on pense que l'Office des professions du Québec aurait aussi le rôle, peut-être pas nécessairement de l'accompagnement, mais d'aider concrètement les gens à rédiger des plaintes, par exemple. Alors, ça, c'est une aide que l'Office pourrait concrètement apporter à des gens. D'autre part, on a déjà parlé par le passé, et on pourrait aussi l'indiquer encore aujourd'hui, qu'il serait possible que l'Office des professions du Québec attribue des montants d'argent à des associations de consommateurs, particulièrement dans les secteurs où il n'y a pas d'organisation structurée, c'est-à-dire qu'il peut y avoir des associations de consommateurs qui sont structurées, mais qui ne feront pas beaucoup d'aide aux gens dans le cadre du système disciplinaire des corporations professionnelles pour toutes sortes de raisons: parce que c'est compliqué, parce que ça prend beaucoup de temps, parce que ce n'est peut-être pas tout à fait, comment dirais-je, reconnu par l'Office de la protection du consommateur, cette aide-là. Alors, on avait déjà, par le passé, indiqué et on pourrait le faire actuellement, qu'il pourrait y avoir des montants prévus pour aider des associations de consommateurs ou d'usagers à aider les gens à faire de l'aide, de l'accompagnement, compte tenu que, dans les secteurs autres que la santé et les services sociaux, il n'y a pas nécessairement de structure prévue là-dessus.

M. Hamel: Merci, M. Beaudoin. C'était le sens de ma question.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Sherbrooke. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Oui. Tout simplement, M. le Président, pour remercier l'Association d'avoir pris le temps de venir présenter un mémoire. Je pense qu'il faut reconnaître qu'ils ont fait un travail fort louable, qu'ils ont cherché à défendre les intérêts des gens qu'ils doivent défendre et la position, évidemment, qu'ils véhiculent depuis fort longtemps. Je pense qu'on a pu constater que la FNACQ, de même que les ACEF sont présents sur la scène, voient à la protection et à la défense des citoyens et citoyennes du Québec et le sérieux du mémoire, M. le Président, nonobstant les lacunes ici et là, le sérieux du mémoire, je pense, mérite une attention toute particulière.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Terrebonne, vous avez des remerciements.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Évidemment, je vais remercier la FNACQ pour sa contribution, sa présentation, mais aussi la qualité des réponses. Je pense qu'on a pu aller beaucoup plus loin grâce à votre présence et je vous en remercie beaucoup.

Le Président (M. Richard): Mesdames, messieurs, à 14 heures, nous aurons le Conseil interprofessionnel du Québec, à 15 h 30, la Corporation professionnelle des médecins du Québec. Nous suspendons pour un retour à 14 heures. Merci, mesdames, messieurs et bon appétit.

(Suspension de la séance à 11 h 48)

(Reprise à 14 h 5)

Le Président (M. Richard): Mesdames et messieurs, je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Nous reprenons les travaux. Je vous rappelle, évidemment, le mandat de notre commission pour cette séance, qui est de procéder à des auditions publiques sur l'avant-projet de loi qui est la Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles au Québec. Mme Sylvie de Grandmont, qui êtes la présidente, je vous laisserai s'il vous plaît, madame, en vous ayant souhaité la bienvenue à vous et aux gens qui vous accompagnent, les présenter.

Maintenant, nous avons trois blocs. Vous avez un bloc de 30 minutes pour la présentation et deux autres de 30 minutes qui se répartissent à parts égales entre le parti ministériel et l'Opposition officielle. Madame, sans plus tarder, vous avez la parole et on vous souhaite la bienvenue.

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

Mme de Grandmont (Sylvie): Alors, M. le Président, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, Mmes et MM. membres de la commission, il me fait plaisir, à titre de présidente du Conseil interprofessionnel du Québec, de vous faire connaître le point de vue de nos 41 corporations membres sur l'avant-projet de loi qui fait l'objet de cette commission. À cette fin, je suis accompagnée de M. Claude Castonguay, associé-conseil du groupe Secor, de M. Paul Morin, syndic de l'une de nos corporations membres, de M. Errol Fréchette, directeur administratif du Conseil, et de Me Bernard Godbout.

Malgré les délais impartis, le Conseil interprofessionnel a effectué une vaste consultation auprès de l'ensemble de ses membres, qui regroupent, il convient de le rappeler, plus de 240 000 professionnels au Québec. Dès le dépôt de l'avant-projet de loi, différents groupes au sein du Conseil et des corporations se sont réunis à plusieurs reprises pour partager ensemble, mettre en commun leur expérience, faire l'analyse du processus réglementaire, du mécanisme disciplinaire, de tracer les forces, les faiblesses du système, tout cela en vue de proposer des solutions réalistes et efficaces pour l'actualisation de la législation. Je tiens à signaler la magnifique collaboration des corporations à la démarche entreprise par le Conseil. Nous tenons aussi à remercier les membres de la commission d'avoir accepté d'étendre les délais pour le dépôt des mémoires, en plus de reporter d'une semaine le début des audiences. Ces quelques jours additionnels ont été fort appréciés pour la préparation de cette intervention et celle de nos membres; une intervention, je tiens à le préciser, qui repose sur un consensus très clair qui s'est dégagé de notre ronde de consultations. Cette présentation reflète la position de l'ensemble de nos membres sur l'avant-projet de loi.

Comme la nature des activités et de l'exercice des professions varie énormément d'une corporation à l'autre, ceci explique que la plupart des corporations aient jugé nécessaire de présenter leurs points de vue particuliers sur l'avant-projet de loi. Ces mémoires viennent, en quelque sorte, compléter et renforcer le mémoire du Conseil.

Le Conseil et les corporations déplorent unanimement qu'ils n'aient pas été consultés dans la préparation de l'avant-projet de loi, et ce, malgré les offres et les invitations répétées de la part des. corporations et de leurs dirigeants. Le Conseil y voit une illustration du glissement inquiétant de la façon dont l'Office interprète son rôle et du manque de concertation évident entre tous les intervenants du système professionnel. Le Conseil tient à rappeler qu'il a contribué, à plusieurs reprises dans le passé, à la mise à jour et à l'amélioration du Code des professions et des lois professionnelles. Cette fois-ci, sa contribution n'a pas été jugée utile et nécessaire pour les auteurs de l'avant-projet de loi. Nous le déplorons. Malgré tout, le Conseil veut pleinement participer à cet exercice, et offre sa plus grande collaboration au ministre et aux membres de cette commission.

Avant de commenter l'avant-projet de loi, j'aimerais céder la parole à M. Claude Castonguay, qui fut, comme chacun se souvient, président de la Commission d'enquête sur la santé et le bien-être social, commission qui a eu comme mandat de préciser et d'examiner l'organisation professionnelle au Québec. C'est à cette expérience que nous avons voulu faire appel en sollicitant la collaboration de M. Castonguay lors de la préparation de cette intervention. Je crois qu'il est fort à propos de l'entendre avant d'exposer nos vues sur l'avant-projet de loi. Alors, M. Castonguay.

M. Castonguay (Claude): Merci. Alors, M. le Président, MM. et Mmes les membres de cette commission, je voudrais simplement faire un bref rappel de ce qui a conduit au système tel que nous le connaissons aujourd'hui. Avant 1970, ou avant 1966, le rôle des corporations portait à confusion. Certaines avaient la protection de leurs membres à l'esprit autant que la protection du public. Le gouvernement, de son côté, était inondé de demandes de groupes qui voulaient être reconnus comme corporations professionnelles, et il était démuni des éléments qui pouvaient lui permettre de juger du bien-fondé de ces demandes; et, au niveau de la population, des questions se posaient quant au rôle que jouaient les corporations professionnelles. (14 h 10)

Devant cette situation, le gouvernement confiait, en 1966, à la commission d'enquête que

j'ai présidée le mandat d'étudier toute cette question. La commission a procédé à une évaluation en profondeur, une étude très vaste de ce qui existait ici au Québec et également a procédé à une étude de ce qui existait dans bien d'autres juridictions. En 1970, la commission présente son rapport et recommande sans hésitation l'autogestion des corporations et, en d'autres termes, le contrôle par les pairs et rejette du même coup tout système de régie d'État ou d'assujettissement des professions à l'État. À l'automne de 1971, le projet de code des professions et les lois connexes était déposé et, en 1972, une large consultation avait lieu. enfin, à l'époque, c'était le projet de loi qui avait donné lieu au plus grand nombre de mémoires. et, à l'automne de 1972, un nouveau projet de loi fut déposé et, finalement, après une autre ronde de discussions, de consultations, adoption en juin 1973 et entrée en vigueur au début de 1974.

Si je mentionne ces étapes, c'est pour montrer la complexité des questions en cause, la nécessité d'établir un équilibre et de maintenir un équilibre qui s'est avéré, je crois, efficace, et aussi afin de tenir compte du fait que les corporations professionnelles se distinguent les unes des autres et ont des problèmes qui varient selon les cas.

Le Code des professions est donc fondé sur le principe de l'autogestion des professions. La mission des corporations professionnelles qui leur fut confiée à cette époque est très claire, c'est la protection du public. Et, en optant pour l'autogestion des professions, le gouvernement à l'époque voulait établir aussi une certaine distance entre l'État et les professionnels pour éviter l'ingérence de l'État dans des questions qui peuvent s'avérer fort délicates. Le gouvernement reconnaissait également que les professionnels, de façon générale, ont intérêt à ce que leurs membres fonctionnent de façon compétente, honnête et ont intérêt également, contrairement à ce que l'on pense dans la population, à ce que, si un membre de leur propre profession agit d'une façon inacceptable, la situation 'soit corrigée afin que la réputation de la profession ne soit pas entachée. Alors, c'est ce qui fait d'ailleurs que ce système d'autogestion, où les membres des professions ont intérêt à maintenir de hauts standards, a fait ses preuves ici comme ailleurs.

Pour s'assurer, en plus, que les corporations professionnelles assument leur rôle, le Code des professions créait l'Office des professions. Et le rôle de l'Office est clair, c'est de veiller à ce que les corporations assument leurs responsabilités et, évidemment, l'Office peut et doit agir comme conseiller auprès du gouvernement ou du ministre responsable de l'application de ces lois. Et, dans la conception du Code des professions, il n'appartient pas à l'Office d'assumer des fonctions analogues à celles des corporations ou de s'immiscer dans la gestion de leurs propres affaires.

Enfin, le Code des professions reconnaissait l'existence du Conseil qui avait été créé quelques années auparavant et le voyait comme étant un porte-parole des corporations, au besoin, un conseiller auprès du ministre, un organisme susceptible d'examiner les questions qui se posent avec l'évolution du système professionnel. C'est ce système qui est encore essentiellement en place aujourd'hui. Le Conseil croit qu'il continue de jouer efficacement son rôle mais, évidemment, après 20 ans, il est clair qu'une mise à jour de la législation est nécessaire, sans cependant que les fondements et l'équilibre du système ne soient modifiés.

Mme de Grandmont: Alors, merci beaucoup. J'aimerais préciser que, depuis la mise en place du système en 1973, les corporations professionnelles se sont dotées aussi de toute une gamme d'instrumentations nécessaires pour répondre à l'exercice de leurs responsabilités. Que l'on pense, par exemple, à la mise en place des codes de déontologie, comités de discipline, comités d'inspection professionnelle, programmes de formation continue. Pas moins de 534 règlements ont été adoptés, et vous l'avez mentionné ce matin. On peut aussi mesurer l'ampleur des moyens qui sont mobilisés et le sérieux avec lequel les corporations remplissent leur mission en signalant que le total des budgets d'exploitation s'élève à plus de 70 000 000 $ par année.

Le Conseil veut aussi rappeler que ce sont les membres des corporations qui assument ce financement. De plus, les professionnels consacrent bénévolement, chaque année, une somme considérable de travail pour assurer le fonctionnement efficace des corporations. Le Conseil affirme sans hésiter que l'organisation professionnelle mise en place pour assurer la protection du public continue, après 20 ans d'existence, de remplir efficacement sa mission. En réalité, les Québécois reçoivent, chaque année, un nombre difficile à évaluer de services de qualité de la part de professionnels compétents et responsables. On peut s'imaginer que ces 240 000 professionnels posent, au moins, un minimum de 200 000 000 d'actes par année au Québec. Évidemment la loi des grands nombres n'épargne pas le monde professionnel et l'on doit périodiquement déplorer certains accrocs de nature et de gravité variables. Et je pense qu'il serait extraordinaire et impensable qu'il en soit autrement. Mais faut-il pour autant remettre en cause le système professionnel? Doit-on faire table rase d'une structure qui a fait ses preuves et recommencer à zéro? Le Conseil croit que non. L'ensemble des corporations professionnelles partagent pleinement cette conclusion et pensent qu'il serait tout à fait néfaste, surtout en l'absence d'une évaluation adéquate, de modifier le rôle de l'Office et l'équilibre du système. C'est pourtant ce que l'on propose dans l'avant-

projet de loi.

Ceci dit, le Conseil reconnaît toutefois la nécessité d'une mise à jour et d'une actualisation de la législation professionnelle par une évaluation véritable de l'organisation professionnelle. Nous croyons également que certains amendements devraient être apportés en priorité pour régler des problèmes spécifiques et que l'on devrait accélérer et améliorer le processus disciplinaire. Mais cela ne peut pas se faire, selon nous, en modifiant et l'équilibre et les fondements du système. Et toute cette démarche d'envergure devrait être le fruit d'une évaluation véritable de l'organisation professionnelle.

Si on regarde les attentes des différents intervenants vis-à-vis cette actualisation de la législation professionnelle, on sait que le gouvernement souhaite que le système professionnel soit plus transparent, plus souple, plus accessible et moins coûteux. D'emblée, nous tenons à affirmer que nous sommes pleinement d'accord avec les objectifs poursuivis par le ministre. Tous les intervenants y trouveraient leur compte. En effet, un système plus transparent ferait connaître la fonction essentielle remplie par les syndics. Une organisation plus souple et plus accessible avantagerait le public. Quant au système moins coûteux, il serait évidemment selon nous le bienvenu, sachant qui assume les coûts de l'organisation professionnelle au Québec.

Les corporations ont aussi des attentes. Elles ont besoin de mécanismes efficaces de protection du public et elles désirent que soit assoupli leur rapport avec l'Office des professions. Le public, quant à lui, a besoin d'avoir accès à des services professionnels de haute qualité. Est-ce que l'avant-projet de loi répond à ces attentes? A cette question, il nous faut répondre non. Le Conseil et ses membres s'opposent unanimement à l'avant-projet de loi. Nous voyons dans cet avant-projet un ensemble hétéroclite de dispositions visant à résoudre des problèmes ponctuels. On ne semble pas s'être soucié de l'équilibre du système. On ne semble pas s'être préoccupé non plus des implications financières et juridiques graves qui pourraient découler de certaines propositions contenues dans l'avant-projet de loi. Par exemple, la création d'un comité d'examen des plaintes dans chacune des corporations comporterait des incidences lourdes de conséquences. L'avant-projet reste malheureusement muet sur cette question.

Le Conseil perçoit même des contradictions dans l'avant-projet. Ainsi, l'article 12 maintient intégralement le rôle de surveillance de l'Office bien que, plus loin, l'Office se voit confier des rôles d'intervention directe. L'avant-projet de loi semble ignorer qu'il n'est pas possible d'être à la fois juge et partie. Les corporations jugent l'avant-projet de loi comme une illustration de l'absence de concertation entre les différents intervenants du système. Elles désapprouvent le climat de confrontation créé par l'Office. Elles voient dans cet avant-projet de loi une tentative de l'Office de se donner une nouvelle mission qui irait au-delà de son rôle de surveillance et cela, malgré la contradiction inhérente d'une telle démarche. (14 h 20)

Dans la perspective d'une révision plus en profondeur de la législation professionnelle, le Conseil a cru utile de présenter de nouvelles voies de solution. Ces propositions - nous en sommes convaincus - respectent les objectifs du ministre que nous avons mentionnés plus haut. Dans cette démarche, il faut tenir compte de deux facteurs. En premier lieu, l'organisation professionnelle a atteint un stade de maturité. L'étape de mise en place de la réglementation est terminée et le fardeau de travail de l'Office devrait être considérablement réduit. En second lieu, nous devons tenir compte de la crise des finances publiques que vit le Québec. À ce sujet, les corporations répondent que l'office devrait d'abord apprendre à mieux contrôler les dépenses inhérentes à sa fonction de surveillance et qu'il ne faut pas perdre de vue que la fonction de surveillance relève en priorité du gouvernement. C'est pour cette raison que les corporations s'opposent si vigoureusement au projet voulant qu'elles financent dorénavant, sans aucune forme de contrôle, l'ensemble des activités de l'Office des professions. Par ailleurs, nous croyons que les clients qui s'adressent à l'Office pour lui confier certaines tâches devraient en assumer les coûts. Il s'agit d'une tendance normale vers la tarification des usagers.

Avec ces facteurs à l'esprit et sous cet éclairage, voici maintenant nos commentaires sur l'organisation professionnelle, la protection du public et le pouvoir réglementaire. Sur le plan de l'organisation professionnelle, nous sommes d'avis que l'Office devrait revoir la façon d'assumer sa fonction de surveillance. Au lieu de considérer son rôle de surveillance comme se limitant à des contrôles sur la réglementation adoptée par les corporations, l'Office devrait développer des façons plus diversifiées et plus efficaces d'assumer ce rôle fondamental. Les corporations s'opposent unanimement à l'avant-projet de loi, parce qu'il ne respecte pas la philosophie à l'origine de l'organisation professionnelle. Le législateur avait de bonnes raisons de ne pas octroyer d'autres pouvoirs à l'Office que celui de veiller à ce que chaque corporation assure la protection du public. Or, l'avant-projet de loi accorde à l'Office des pouvoirs d'approbation, de tutelle, d'exécution. Il lui accorde également des pouvoirs d'enquête de son propre chef et le pouvoir d'imposer aux corporations des règlements dont l'adoption doit clairement relever des corporations. Dans tous les cas, il s'agit de pouvoirs qui appartiennent actuellement, sort au gouvernement, soit aux corporations. L'avant-projet de loi compromet ainsi la neutralité de l'Office en lui accordant des fonctions d'inter-

vention directe. Il y a là menace d'exagérer le rôle de l'Office en allant à l'encontre des principes de base de l'autogestion.

Voici maintenant les incidences de l'avant-projet de loi sur les structures. D'abord, il y a une volonté très claire d'uniformisation. L'avant-projet de loi tente clairement d'uniformiser les pratiques du milieu professionnel et il s'agit là d'une attaque non justifiée aux principes de l'autogestion. L'avant-projet de loi vise l'abolition de plusieurs distinctions découlant des lois particulières et l'Office se refuse à reconnaître que les corporations professionnelles sont différentes les unes des autres. Pour le Conseil interprofessionnel, l'uniformité n'est ni une qualité, ni une fin en soi. Dans un deuxième temps, l'avant-projet de loi vise à conférer à l'Office de nouveaux et larges pouvoirs d'enquête. Selon nous, le pouvoir d'enquête devrait être exercé exclusivement par le gouvernement et à l'initiative de ce dernier. En troisième lieu, l'avant-projet de loi élargit considérablement les possibilités de mise sous tutelle. Le Conseil reconnaît l'opportunité d'une telle disposition exceptionnelle en autant qu'elle soit assortie d'un mécanisme d'intervention préalable de la corporation auprès du gouvernement et seulement dans la mesure où l'enquête est exigée par celui-ci.

En ce qui concerne la protection du public, ce sont les corporations qui doivent assurer ce rôle. À cette fin, elles ont mis en place et gèrent maintenant toute une série de mécanismes et de mesures qui permettent de s'assurer que les professionnels sont compétents et responsables de leurs actes vis-à-vis du public. Vous connaissez ces mécanismes et ces mesures. Qu'on ne pense qu'à la formation continue, à l'inspection professionnelle, au professionnalisme et au contrôle par le milieu, à la présence du public au sein des corporations professionnelles, à la présence d'avocats nommés présidents de comités de discipline. Alors, toutes ces mesures et ces mécanismes sont déjà mis en place pour la protection du public. C'est sûr que dans ses rapports avec les professionnels le public fait face à des problèmes de différentes natures et de gravité variable. Ces problèmes portent-ils atteinte ou non au public? Sont-ils réels ou sont-ils le fait d'une mauvaise perception ou d'une incompréhension? À l'évidence, ces problèmes ne méritent pas tous d'être traités de la même façon par les mêmes mécanismes ou les mêmes procédures.

Le Conseil croit toutefois qu'il y a place à amélioration. Il préconise le développement d'un mécanisme d'intervention capable de répondre encore plus efficacement aux attentes du public. Nous insistons cependant sur le fait que la nature fort différente des activités professionnelles d'une corporation à l'autre exige vraisemblablement des solutions adaptées à chaque situation.

Enfin, le Conseil est d'avis que le système professionnel québécois a tout avantage à mettre sur pied des mécanismes de résolution de conflit flexibles et moins coûteux. Autrement, nous risquons d'introduire une plus grande judiciarisa-tion des conflits à des coûts financiers et sociaux élevés que ni la population ni le gouvernement ne sont prêts à payer. Le Conseil affirme que la tendance à la judiciarisation des conflits serait amplifiée de façon majeure et fort coûteuse par les propositions de l'avant-projet de loi.

Voici ce que nous suggérons en plus des mécanismes existants. Deux mécanismes dont les objectifs visent à alléger le système. Alléger le système pour ce qui est de la diminution des coûts, diminution des délais, en plus de le rendre plus transparent. Nous proposons, premièrement, qu'on examine la mise en place d'un mécanisme de règlement des différends. Il s'agit d'un mécanisme de médiation inédit au Québec, mais qui existe ailleurs et qui semble connaître un certain succès. L'expérience menée par le Collège des médecins et chirurgiens de l'Ontario démontre que ce mécanisme a permis de régler au-delà de 90 % des cas traités. Un second mécanisme que nous proposons consiste en un comité consultatif auprès du syndic. Ce comité remplacerait le comité d'examen des plaintes proposé dans l'avant-projet de loi. Il aurait l'avantage d'être plus souple et moins coûteux.

Puisque je viens d'évoquer les comités d'examen des plaintes, il faut rappeler que l'avant-projet de loi en propose la création dans chacune des corporations. Selon nous, il s'agit d'une voie à caractère exclusivement disciplinaire pour traiter l'ensemble des problèmes. Nous nous opposons à cette proposition en raison du risque de judiciarisation accrue qu'elle comporte. Or, qui dit judiciarisation dit plus de coûts, plus de délais, plus de tactiques dilatoires. Dans le même ordre d'idées, nous nous opposons à la proposition qui introduit un principe indésirable dans le système. Il s'agit de l'obligation qui serait faite au syndic d'informer l'Office des professions, par un rapport détaillé, du progrès d'une enquête non terminée après 60 jours. Cette obligation porte gravement atteinte à l'autonomie du syndic. Il s'agit, selon nous, d'une immixtion injustifiée. De plus, ce délai est irréaliste d'application dans la plupart des cas complexes. À ces propositions de nature corrective axées sur la non-confiance, la méfiance, la mise en place de structures voulant davantage encadrer et bureaucratiser la fonction du syndic, nous nous opposons fermement. Le Conseil privilégie plutôt des avenues de prévention. Les syndics ont besoin d'outils efficaces. Ils ont besoin d'améliorer leur efficacité et nous allons donner...nous avons l'intention d'offrir éventuellement, dès cet été, aux membres des comités de discipline, aux syndics des sessions d'actualisation. Et c'est une avenue qui doit être explorée. Les syndics ont besoin d'améliorer...de pouvoir être de plus en

plus performants. Et je pense que c'est une avenue beaucoup plus positive que de les encadrer dans un mécanisme très bureaucratique.

Concernant les modifications ayant trait à la réglementation, c'est sans doute l'aspect le plus positif de l'avant-projet de loi. Le Conseil croit que l'avant-projet de loi constitue, en y apportant certaines modifications, une réponse positive aux corporations qui réclament des correctifs nécessaires au bon fonctionnement du processus réglementaire. En effet, l'avant-projet de loi confirme le rôle essentiel des corporations et suggère certaines solutions pour assouplir le processus réglementaire. Toutefois, l'avant-projet réserve encore une fois à l'Office trop de latitude dans l'application de ses pouvoirs d'examen d'avis. L'efficacité des propositions de l'avant-projet de loi pourrait en être grandement compromise. (14 h 30)

Essentiellement, l'avant-projet de loi propose trois modes d'adoption des règlements. Un mode général d'adoption identique à celui actuellement en vigueur. Le Conseil est d'accord pour que l'on conserve un processus général d'adoption des règlements. Cependant, l'intervention de l'Office dans ce processus réglementaire devrait être limitée à la seule question de la conformité du règlement à la loi habilitante. L'Office devrait aussi être contraint de motiver par écrit son avis et d'en faire part tant au gouvernement qu'à la corporation concernée et ce, dans un délai spécifié.

Deuxième mode d'adoption proposé où l'approbation de l'Office est substituée à celle du gouvernement. Le Conseil s'oppose vigoureusement à ce mode d'approbation. Le Conseil est d'avis qu'il ne revient aucunement à l'Office, compte tenu du rôle qui lui est conféré par le législateur, d'approuver les règlements des corporations professionnelles et de se substituer ainsi au gouvernement.

Enfin, un mode d'adoption ne prévoyant pas d'approbation ni par le gouvernement, ni par l'Office, mais où l'avis de ce dernier demeure nécessaire. Ce nouveau processus d'adoption concerne essentiellement les questions d'ordre administratif des corporations professionnelles. Il pourrait réduire les délais encourus, ce qui est une chose souhaitable. Par contre, si l'office ne s'est pas réservé, avec ce troisième mode d'adoption, le pouvoir d'approuver la réglementation, il se réserve le pouvoir de formuler un avis contraire. Un tel pouvoir est nettement excessif; nous l'assimilons à un véritable droit de veto.

En résumé, au niveau de l'organisation professionnelle, nous nous opposons à l'élargissement du rôle et des pouvoirs de l'Office. En ce qui concerne la réglementation, le Conseil reconnaît que cet avant-projet de loi propose certains éléments de solution à des problèmes majeurs vécus par l'ensemble des corporations professionnelles. Ces éléments pourraient faire l'objet d'un projet de loi si on leur apportait les modifications suggérées précédemment. Toutefois, nous tenons à le rappeler, l'avant-projet de loi confère, selon nous, à l'Office trop de latitude dans l'application de ses pouvoirs d'examen et d'avis. De plus, nous sommes d'accord pour améliorer le processus disciplinaire en trouvant des mécanismes plus souples et plus flexibles.

J'aimerais conclure cette intervention en ouvrant la discussion sur l'avenir. Dans l'exercice de consultation et de concertation que le Conseil a tenu en janvier 1993, il est clairement ressorti un besoin évident, une volonté déterminée de poursuivre la réflexion et la discussion afin de favoriser l'atteinte des objectifs d'une véritable actualisation de la législation professionnelle dans le respect des objectifs du ministre. Compte tenu de l'évolution de l'activité professionnelle dans plusieurs domaines, une réflexion plus poussée et une discussion plus ouverte, dans un climat de confiance et de franchise s'imposent si on veut profiter pleinement des efforts déployés au cours des dernières semaines. Devraient, selon nous, être intégrés à cette réflexion des sujets qui, depuis plusieurs années, commandent un examen attentif.

Commençons par un besoin qui nous concerne plus particulièrement, c'est-à-dire le rôle du Conseil interprofessionnel. Avec la maturation du sytème et le nouveau contexte de financement, le Conseil interprofessionnel pourrait et entend jouer un rôle plus dynamique sur un ensemble de questions plus vaste, portant notamment sur un élargissement de sa fonction de conseil auprès du gouvernement. Une meilleure concertation et coopération entre corporations professionnelles. La réalisation d'études et de recherches sur l'évolution du système d'autogestion ou sur toute autre question d'intérêt commun aux professionnels, à la demande de ses membres. Et aussi une contribution [...] sur l'amélioration qu'on devrait apporter à l'information du public.

Nous croyons que le Code des professions doit refléter davantage ce rôle d'avenir et cette nouvelle réalité.

Un second élément important concerne les difficultés rencontrées par les corporations professionnelles à titre réservé. À ce sujet, nous devons noter que la modification proposée au Code des professions ne solutionne pas les problèmes que vivent ces corporations. Que l'on pense notamment à l'utilisation fréquente ou à la substitution du titre réservé dans l'utilisation des différentes conventions collectives. Cette question mérite réflexion si l'on veut que ces 20 corporations puissent remplir efficacement leur mandat et bien servir le public.

Un troisième élément important dont nous voulons toucher un mot est l'information du public. Selon nous, plusieurs des problèmes que vit le monde professionnel sont dus à une méconnaissance du système et de ses limites. Par

exemple, on confond souvent les notions de poursuite disciplinaire et de poursuite pour dommages et intérêts. L'ambiguïté doit être dissipée. Il nous revient, de concert avec l'Office, avec les associations de consommateurs, sans doute, de réfléchir à des instruments efficaces d'information du public. D'autres sujets d'intérêt pour l'avenir du monde professionnel méritent aussi d'être étudiés. En voici, à titre d'information, une liste non exhaustive; on devrait se pencher sur la prolifération des groupes qui désirent accéder à un statut professionnel, l'évolution des notions d'éthique et de déontologie, le phénomène de multidisciplinarité, la libéralisation des échanges commerciaux et l'impact de la mobilité interprovinciale et internationale.

En résumé, afin que la mise à jour de la législation professionnelle soit vraiment adéquate, toutes ces nouvelles données exigent, de la part de tous les intervenants, une réflexion en profondeur et l'assurance de consultations véritables de la part du gouvernement. À cet égard, le Conseil réitère sa complète disponibilité afin de participer à cette réflexion. Nous sommes prêts à offrir notre entière collaboration, collaboration pour aider le gouvernement à cerner les amendements à la loi à être adoptés en priorité, collaboration à la réflexion plus large qui s'impose. Merci de votre attention.

Le Président (M. Richard): Merci, madame. Et merci d'avoir respecté sensiblement votre temps. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Alors, vous me permettrez tout d'abord, certainement, de saluer d'abord la présidente du Conseil interprofessionnel, Mme de Grandmont, avec qui nous travaillons sur l'ensemble des dossiers que : nous devons traiter avec beaucoup d'assiduité depuis plusieurs années. Mme de Grandmont est certainement très active au niveau de l'ensemble des dossiers. Je voulais souligner également la présence de M. Fréchette, de M. Morirïf de Me Godbout et tout particulièrement de M. Caston-guay, dont la présence ici, cet après-midi, est tout à fait remarquable. On est heureux de le voir avec nous. On constate qu'il a été, finalement, à la source de cette structure au Québec, qui a fait ses jaloux dans les autres provinces et ailleurs. Et, évidemment, ses recommandations et ses considérations seront certainement retenues par les membres de la commission.

Je vais, si vous me le permettez, faire quelques commentaires d'ordre général avant d'aborder quelques questions, avant de céder la parole à la députée de l'Opposition.

Vous avez tout d'abord parlé d'un manque de consultation et, si je comprends bien ce que vous nous dites, c'est que, oui, il y a eu consultation sur chacun des éléments, mais qu'au niveau de l'ensemble, lorsque le projet de loi était terminé, avant de le déposer comme avant-projet de loi, il n'y a pas eu consultation.

Il faut comprendre que j'ai ici les rapports de la consultation sur la révision du système disciplinaire, M. le Président, en trois volumes. Il ne s'agit pas de l'étude, il s'agit des consultations sur la révision. Trois volumes, consultation du 9 octobre 1991 sur l'assurance-responsabilité professionnelle, consultation du 24 mai 1990 sur les propositions de modification législatives concernant la citoyenneté et, une année plus tard, la consultation du 30 juillet sur l'assouplissement du processus réglementaire. C'est-à-dire qu'il y a eu consultation sur chacun des éléments qu'on vous présente et finalement, ce qu'on nous dit, c'est que sur le tout, il n'y a pas eu consultation. Ce qu'on voudrait souligner, M. le Président, c'est: lorsqu'on procède par avant-projet, c'est que là on a un document et là on veut consulter. Et c'est un peu cet exercice. Je ne voudrais pas que les gens qui peuvent consulter les documents de cette commission puissent penser qu'on n'a pas consulté. Je pense qu'il faudrait que ce soit bien clair. L'avant-projet a pour but de consulter et on en viendra un petit peu plus tard, on y reviendra d'une façon un petit peu plus précise un peu plus tard. Loin de moi l'idée de déposer un projet de loi, et vous le savez fort bien, même signer un règlement sans consultation. (14 h 40)

Donc, l'avant-projet de loi... Malgré un différend, je pense qu'on s'entend qu'il y a consultation et que la consultation va continuer jusqu'au dépôt, évidemment, du projet de loi, et même après. La porte est toujours ouverte. On est toujours ouverts au changement. Je pense que tous ceux et celles qui ont vu des projets de loi passer dernièrement, au niveau de l'Office, ont certainement - en tout cas, pour la durée de mon mandat - pu constater l'étendue des consultations et le souci qu'on apporte lorsque c'est présenté.

Document déposé

Au niveau de la discipline, M. le Président, pour les fins de la commission, je voudrais déposer - on pourra peut-être en faire des copies - il s'agit d'un document concernant les matières sur lesquelles il y a des pouvoirs d'enquête qui sont accordés au Québec dans les différentes lois. On parle finalement d'une vingtaine de lois où le gouvernement accorde pouvoir d'enquête à un organisme, que ce soit la CSST, ou que ce soit les producteurs agricoles, l'organisation policière, les maîtres électriciens, l'ensemble des projets de loi sur lesquels, évidemment, il y a un pouvoir d'enquête, assez étendu dans certains cas, moins dans d'autres.

Certainement que ça pourra, je pense, apporter certains éclaircissements quant aux membres de la commission sur le pouvoir d'en-

quête que se propose l'Office.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. On va faire la distribution aux membres de la commission, si vous permettez.

M. Savoie: Au niveau du comité des plaintes, votre suggestion - au lieu d'avoir un comité des plaintes, vous avez parlé d'un comité consultatif à l'intérieur - ça aussi nous allons l'examiner. Vous comprendrez toutefois - et je pense que tout le monde est d'accord pour reconnaître qu'au niveau des fautes lourdes il y a eu et il va y avoir des modifications d'assouplissement, de meilleurs traitements pour l'ensemble du public parce que ce qu'on cherche à faire spécifiquement, ici, c'est s'occuper des fautes légères, et on trouvait que le comité des plaintes présentait des avantages.

Vous avez souligné un cas, qui est l'argent. Vous dites que c'est coûteux. On a déjà eu l'occasion d'échanger là-dessus. L'Office m'avise que, non, tout se fait à un prix très peu coûteux, très abordable pour l'ensemble des corporations professionnelles. Je ne pense pas qu'on veut discuter de ça ici en commission. Ce que je peux vous dire, toutefois, c'est qu'au niveau des coûts, après cette commission, on va s'asseoir et ensemble, l'Office, le Conseil, nous-mêmes, pour déterminer effectivement exactement combien ça va coûter le fonctionnement pour s'assurer qu'effectivement on ne décharge pas sur les corporations des coûts qui seraient trop difficiles à gérer.

Vous avez touché à plusieurs points au niveau des comités disciplinaires. Je ne pense pas que je voudrais commenter chacun. Je ne pense pas que c'est le but qu'on vise ici. Tout ce que je peux vous dire, par exemple, c'est que, pour chaque élément que vous avez soulevé, nous allons ouvrir une page dans un grand livre. Et chacune de vos recommandations sera traitée. Chacun va faire l'objet de commentaires et d'analyses et chacun, évidemment, fera l'objet d'une discussion entre vous et moi, le Conseil et l'Office et mon personnel, et que ça vous sera remis bien d'avance pour que les discussions soient les plus claires possible.

Donc, le travail que vous avez fait, parce que vous avez fait du travail là-dedans, ce qu'on voit c'est un survol, finalement, de la présentation. Le mémoire et la recherche que l'Office a faite dans le temps que vous avez eu, je pense, a quand même été bien réussi. Au niveau de la réglementation, un questionnement au niveau d'un transfert du pouvoir du gouvernement vers l'Office, que ça pourrait créer des problèmes. Ça aussi ça va être regardé. Ça ne tombe pas dans les oreilles d'un sourd. Ça sera analysé et je suis certain, je suis confiant que le résultat final, après avoir entendu l'ensemble des mémoires, nous sera satisfaisant.

Les autres éléments, je pense, d'une façon globale, sont assez bien reçus, ici et là quelques épines, mais d'une façon générale, pour les autres éléments, je pense qu'on peut constater que c'est du moins intéressant, sinon acceptable, et que donc l'orientation est assez valable. Les questions, évidemment, il faut comprendre le positionnement du public. Est-ce que vous ne sentez pas que dans l'ensemble de vos recommandations, lorsque vous parlez de maturité, lorsque vous parlez d'une évolution positive, vous ne sentez pas qu'effectivement, au niveau du public, il y a une certaine volonté qui existe pour, justement, voir renforcer les mécanismes disciplinaires, donner un petit peu plus de transparence, une présence accrue des citoyens? Je pense par exemple que tous les intervenants non professionnels qui vont se présenter ici vont tous plaider en faveur, soit de l'abolition du jugement par les pairs, soit en faveur de structures composées de non-professionnels. Ici, tout ce que nous avons fait, c'est que nous avons introduit des professionnels dans le mécanisme, dans le but, justement, de respecter ce qui fonctionnait bien; nous croyons l'améliorer, le rajeunir un peu, le rendre plus effectif, mais on n'a pas, finalement, mis en question le fonctionnement du jugement par les pairs, la gestion des corporations professionnelles, l'intégrité générale du fonctionnement des corporations professionnelles. Tout ce que nous avons dit, c'est qu'il faudrait démocratiser davantage, et on pense qu'il y a là une volonté, et, si on regarde ce qui se fait un peu ailleurs, c'est ce qui semble être l'orientation générale. Alors, vous nous arrivez et vous dites: Pas d'accord. Je me demande comment vous faites pour, finalement, concilier ça avec l'opinion générale qui existe dans la population, comme de quoi qu'il doit y avoir ces assouplissements-là.

Mme de Graudmont: Je crois que la façon d'envisager le problème, les demandes d'intervention du public sont de différents ordres. La nature et les problèmes à traiter sont de gravité différente. Actuellement, la seule façon de traiter les interventions du public, c'est par la voie directe du processus disciplinaire. C'est un processus qui est long, qui est coûteux, et souvent les délais, à cause de toutes les tactiques dilatoires, font que et la corporation et le plaignant ont de la difficulté avec ce fonctionnement-là. Je pense que, pour améliorer la perception du public, pour améliorer l'efficacité du système, on doit penser à un mécanisme intermédiaire, donner des outils au syndic pour lui permettre, d'une part, de pouvoir se référer à un comité aviseur consultatif pour prendre conseil; parce que, souvent, le syndic se retrouve seul et a besoin de confronter ses décisions avec un comité de cette nature.

Deuxièmement, les plaignants ont souvent l'impression qu'ils n'ont pas satisfaction au niveau du traitement de leurs plaintes, parce que

le système disciplinaire est mal connu, c'est un système qui est punitif, qui vise à empêcher le professionnel à exercer, a reproduire une faute dans le futur. Souvent, ce que le plaignant aimerait avoir, c'est une compensation des dommages ou une compensation monétaire. Je pense que, dans l'avant-projet de loi, on parie d'un règlement de conciliation des différends. Bon, dans les deux pages de notes explicatives de l'avant-projet de loi, on n'a pas eu, là, la définition de ce que pouvait être ce comité-là, mais on pense que c'est un comité qui veut concilier les différends au niveau des produits, et je pense que c'est une avenue qui doit être explorée et mûrie. Par contre, au niveau de la médiation des différends - et c'est là que notre piste est à exploiter - c'est que, contrairement à la conciliation, c'est un mécanisme de médiation qui pourrait permettre - et, ça, je vous dis, c'est une piste à explorer - d'envisager que la corporation, le plaignant et le professionnel puissent faire appel à un médiateur neutre qui amène les parties à une solution. Si la solution n'est pas retenue, le processus s'enclenche au niveau de la voie disciplinaire. C'est peut-être un mécanisme qui pourrait être utilisé par certaines corporations.

Je pense qu'on doit voir le traitement des plaintes d'une façon souple, c'est-à-dire qu'on doit envisager plusieurs mécanismes, et permettre aux corporations de juger quels sont les mécanismes qui leur sont les plus utiles pour traiter le contrôle de la compétence de leurs membres avec les moyens les plus appropriés. Je ne pense pas que c'est en remettant en cause la confiance du jugement du syndic à un comité d'examen des plaintes qui finalement va refaire la procédure du syndic en réexaminant la plainte, en réécoutant le plaignant, le professionnel, que l'on va arriver à une solution dynamique dans ce dossier. Je pense que c'est en permettant au syndic d'avoir des outils flexibles, c'est-à-dire beaucoup d'interventions concernent la conciliation et l'arbitrage des comptes. On pourrait avoir une avenue où on pourrait traiter de la conciliation et de l'arbitrage des différends en matière de produits. On pourrait avoir un comité aviseur pour aider le syndic. On pourrait avoir un mécanisme, à définir, de médiation. Et ça devrait être rendu possible aux corporations selon les besoins de chacune. Et je pense qu'à ce moment-là le public aurait l'impression, en n'étant pas nécessairement juste dirigé vers l'entonnoir de la discipline, qui est souvent un processus qui est long, qui est compliqué... probablement qu'on pourrait répondre davantage aux attentes de ces gens-là. (14 h 50)

Le Président (M. Richard): Vous avez quelque chose à ajouter, M. Castonguay?

M. Castonguay: J'aimerais faire quelques observations pour répondre aussi au point fait par le ministre. Le comité de discipline est présidé par un avocat; c'est un membre externe, un avocat nommé par le gouvernement, approuvé par le Barreau et, donc, il y a déjà une présence externe à ce niveau-là. Le comité aviseur dont il est question dans le mémoire qui aiderait et conseillerait le syndic dans son travail pourrait, sans hésitation, comporter un membre externe, de telle sorte qu'il puisse voir comment le syndic effectue son travail. J'ajoute aussi que, s'il y a des doutes quant au fonctionnement d'un comité de discipline, il me semble qu'il appartiendrait à l'Office d'aller voir sur place comment les comités de discipline fonctionnent et au besoin, s'il constate qu'un comité ne fonctionne pas bien, faire rapport. Il y a enfin, et vous avez raison, un besoin d'information auprès du public. Le public, à cause des délais, pour différentes raisons, le fait que les mécanismes ne sont pas tout à fait appropriés au traitement de tous les cas, croit bien souvent qu'il n'obtient pas toujours justice ou satisfaction. Et je pense que l'exercice que nous traversons tous démontre qu'il y a un besoin d'information du public, comme le signalait Mme de Grandmont dans son intervention au début.

M. Savoie: C'est ça, c'est que, finalement, au niveau de l'introduction de citoyens non professionnels, qui est l'élément essentiel au niveau de la perception du public, vous n'avez pas d'objection sur le fond.

Mme de Grandmont: Le comité aviseur propose d'avoir en son sein un membre du public.

M. Savoie: Un membre du public.

Mme de Grandmont: Oui, ou... C'est des choses qu'on pourra discuter par la suite, mais je veux dire, le principe d'avoir un membre du public au sein des comités aviseurs, c'est quelque chose qui ne semble pas créer d'objection chez nos membres.

M. Savoie: Je pense que c'est ça. Je pense que finalement l'introduction de non-professionnels - parce que c'est ça souvent la plainte -c'est ce que nous entendons avec une certaine récurrence. Il me semble, tout au moins, que vous êtes d'accord avec le principe de ce qu'on appelle, entre guillemets, une espèce de démocratisation, c'est-à-dire l'introduction de deux membres au niveau du Conseil, non professionnels, transparence, une approche, un pas dans cette direction-là qui semble acceptable. Au niveau du comité des plaintes, bien là vous dites: si on pouvait en faire un comité...

Mme de Grandmont: Aviseur.

M. Savoie: ...aviseur. Est-ce qu'on pourrait dire édenté? Il pourrait à ce moment-là avoir

également un citoyen ou deux, mais finalement le principe est là, ce n'est que le mécanisme qui sera certainement étudié. Les syndics, de quelle façon voient-ils ça, le comité des plaintes?

Mme de Grandmont: Le comité des plaintes pour les syndics, je pourrais peut-être laisser M. Morin y répondre. Il m'a tellement entretenue sur le sujet qu'il va le faire de façon, je pense, très efficace.

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. Morin.

M. Morin (Paul): Le comité d'analyse des plaintes devient une instance additionnelle. Je pense que le syndic fait déjà en grande partie ce travaH-là. Le comité, tel qu'il est suggéré, sa seule fonction, c'est de vraiment déterminer si le syndic devrait aller en discipline. Il n'a pas d'autre fonction qu'une mission strictement disciplinaire, c'est-à-dire qu'il suggère, par exemple, au syndic ou d'aller en discipline ou de continuer son enquête parce que, supposément, elle ne serait pas complète ou enfin de donner un avis aux professionnels. Alors, il n'y a pas d'autre avenue, pour ce comité-là, que de faire de la discipline ou que de viser la discipline. C'est-à-dire que ce comité-là remplace le syndic. À ce moment-là, il y a peut-être moins besoin d'avoir un syndic qui est déjà chargé de faire ce travail-là. Le comité aviseur, en autant qu'on le définisse comme il faut, pourrait non seulement analyser des situations mais faire des recommandations, intervenir de façon un petit peu plus positive dans des situations précises. C'est pour ça, j'imagine, que le public pourrait être intéressé à participer aux activités d'un comité comme ça dans certaines situations où on rencontre... On ne cherche pas la confrontation mais on peut chercher à régler des situations en dehors de la discipline.

M. Savoie: Ha, ha, ha! Non.

M. Morin (Paul): Non. Vous n'avez pas assez...

M. Savoie: Bien non puis oui, là.

Mme de Grandmont: Je pense que la présence du public est importante mais il ne faudrait pas nécessairement axer le débat seulement sur ce point de vue là. Je pense qu'on doit donner au syndic des avenues, des possibilités de conciliation de différends qui peuvent être adaptées à chacune des corporations. Alors, je pense que le comité aviseur est un comité que l'on voit souple et flexible, qui peut être utilisé ou non par les corporations professionnelles. Comme le comité de conciliation des différends, certaines corporations ont à concilier des produits. Et, souvent, le plaignant ne veut pas de remboursement d'honoraires mais veut avoir un produit satisfaisant. Alors, ça c'est une autre avenue qui est énoncée dans l'avant-projet de loi. C'est une avenue positive mais ça doit être utilisé, exploré par les corporations qui en sentent le besoin.

Pour d'autres corporations, au niveau de la qualité des services, au niveau du comportement, de la compétence, l'avenue de la médiation peut être une avenue intéressante. C'est une expérience nouvelle en Ontario. Le Collège des médecins, actuellement, en fait l'expérience. On peut vous dire que, sur 70 cas qui ont été identifiés pour fins de médiation, 64 ont accepté et seulement quatre cas n'ont pas été conclus à la satisfaction des parties. Et ça, je pense que si on y réfléchit et si on explore cette avenue-là... Et c'est une avenue qui devra être approfondie... pas nécessairement utile à toutes les corporations mais c'est un autre mécanisme. Le message, c'est: Développons des outils de nature différente pour répondre à des problèmes de nature différente et des outils qui doivent s'adapter à la particularité de chacune des corporations. Et là je pense que, déjà, on aura fait un pas en avant dans la perception qu'a le public que ses plaintes ou ses problèmes ne sont pas bien traités.

Pensons aussi prévention. Alors, je pense que les syndics nous l'ont démontré, ils ont une énergie, une volonté de se regrouper et de partager leur expertise. Et je pense que ces gens-là, qui sont compétents, ont besoin aussi de support pour améliorer, d'année en année, leur performance, qu'on leur donne des cours sur l'actualisation des lois, sur les techniques d'entrevue, techniques d'enquête. Et, ça, c'est quelque chose de positif, c'est quelque chose qui n'est pas coûteux, qui est flexible et, éventuellement, qui ne va que faire progresser le système disciplinaire au Québec.

Le Président (M. Richard): M. Castonguay. (15 heures)

M. Castonguay: Sur le comité d'examen des plaintes, M. le ministre, présentement, un des problèmes ou une des raisons pour lesquelles il y a des gens qui ont plus ou moins confiance dans le fonctionnement du système, c'est qu'on a introduit toutes sortes de tactiques dilatoires pour reporter ou faire traîner en longueur le travail des comités de discipline. Il faut évidemment essayer de resserrer ça pour que les comités puissent fonctionner et ne soient pas toujours paralysés dans leur travail.

Si on ajoute un comité d'examen des plaintes, tel que proposé dans i'avant-projet de loi, une des craintes que nous avons, comme ce comité-là va devoir faire un certain travail d'enquête, peut convoquer des témoins, on va reprendre encore les mêmes tactiques, et c'est là où on voit un danger de rendre le système encore plus lourd, plus long, plus complexe, et ne pas atteindre l'objectif visé vraiment, qui est

de le rendre plus efficace, plus rapide et plus ouvert; ça, on n'a pas d'objection à ce qu'il soit plus visible, pour que les gens puissent voir vraiment ce qui se passe. il y a un danger réel là.

Le Président (M. Richard): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, Mme de Grandmont, M. Castonguay, M. Fréchet-te, M. Morin, M. Godbout, je vous remercie pour votre présentation et, évidemment, pour le mémoire, qui est extrêmement étoffé, qui touche à l'ensemble des sujets, qui présente une vision globale, et qui ouvre aussi sur des pistes de solution nouvelles, intéressantes.

J'aimerais clarifier peut-être un petit point avant de poursuivre mes questions. Vous nous avez mentionné dans votre avant-propos que vous n'aviez pas été consultés pour la préparation de l'avant-projet de loi. Le ministre nous a fait une démonstration concernant les consultations qui ont précédé l'avant-projet de loi. J'aimerais vous entendre, parce que vous n'avez pas eu la chance de donner votre point de vue là-dessus. Pourquoi ne vous êtes-vous pas sentis consultés, même s'il y avait eu consultation avant l'avant-projet de loi?

Mme de Grandmont: C'est sûr qu'il y a eu un effort certain de consultation de la part de l'Office sur les différents volets qui ont été traités. Ce que l'on déplore, ce n'est pas la consultation qui a eu lieu depuis les deux dernières années. Il y a un point où il n'y a pas eu de consultation, c'est sur le rôle de l'Office, les pouvoirs qu'il se donne et sa façon qu'il interprète sa nouvelle mission ou sa mission de surveillance. Ça, je pense qu'on peut dire qu'il n'y a pas eu de consultation là-dessus. Il y a eu de la consultation sur le processus d'assouplissement réglementaire, sur l'amélioration de la discipline, mais, sur le rôle que l'Office se donne dans l'avant-projet de loi, il n'y a pas eu de consultation; et ce glissement du rôle que l'Office se donne dans l'avant-projet de loi teinte toute la nature de l'avant-projet de loi. On y voit une façon de concevoir son rôle qui revient dans tous les articles ou dans la majorité des amendements proposés, que ce soit au niveau du syndic qui doit rendre compte à l'Office, de la façon que l'Office envisage la surveillance de la réglementation, et c'est là-dessus que les corporations n'ont pas été consultées et ne se retrouvent pas.

Deuxièmement, les corporations ont demandé beaucoup de changements, et elles auront l'occasion de vous en faire part, qui ne se retrouvent pas dans l'avant-projet de loi, ou ont demandé des changements qui se sont transformés et qui ne reflètent pas ce qu'elles demandaient. Les gens ne se retrouvent pas dans ce projet de loi là. Il y a eu aussi des modifications aux lois particulières, et les corporations - en tout cas, ce que j'ai entendu lors de notre consultation de janvier, c'est qu'elles ne s'y retrouvent pas non plus. Je pense qu'il y a eu une volonté, c'est clair, de l'Office, de vouloir se saisir de la réalité des corporations. Il y a quand même eu un moment clé qui a manqué dans cette étape-là, et c'est cette concertation qu'on aurait dû faire entre tous les intervenants, et non pas voir l'Office, en vase clos, cueillir toute l'information et la retransmettre et la retranscrire dans sa façon à elle de voir les choses. Je suis contente que le ministre nous permette de faire cette consultation et ces audiences, mais je pense qu'on aurait pu être encore plus performants aujourd'hui si, déjà, on avait eu la chance de s'approprier certaines notions, de les améliorer, et, aujourd'hui, d'aller de l'avant vers des... et non pas être en réaction, mais aller de l'avant vers des suggestions et des propositions beaucoup plus constructives.

Le Président (M. Richard): Madame.

Mme Caron: Je vous remercie de ces clarifications. Je pense que, lorsqu'on prend connaissance de l'avant-projet de loi, effectivement, pour avoir, moi aussi, consulté la presque totalité des corporations professionnelles au cours de la dernière année, je vous avoue que c'est un élément qu'on n'attendait pas dans l'avant-projet de loi, de retrouver ces pouvoirs, que j'oserais parfois qualifier d'abusifs de l'Office des professions, et ce n'est pas un élément qui faisait partie, je pense, effectivement, des consultations.

Vous nous avez parlé, M. Castonguay, très brièvement - et j'ai trouvé cet élément-là intéressant - de l'intérêt des corporations à assurer la protection du public. Une corporation qui sévit contre des membres qui posent des actes non professionnels, finalement, se protège davantage à ce moment-là. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi ce principe, qui est pourtant fondamental, n'est pas perçu par la population et n'arrive pas à passer?

M. Castonguay: J'aimerais avoir la réponse à cette question. Il y a évidemment un manque d'information. C'est un sujet complexe qui est devant nous et ce n'est pas facile de retenir l'attention des gens et de leur faire comprendre que les corporations professionnelles ont un code de déontologie, ont un comité d'inspection professionnelle, ont des programmes de formation, obligent leurs membres à reprendre, à mettre à jour leurs connaissances par la formation continue, qu'ils doivent détenir de l'as-surance-responsabilité professionnelle. Les gens oublient ça un peu. Et ce qui ressort, malheureusement, c'est que s'il y a un cas, une personne qui a subi un préjudice, mais il a de fortes

chances de trouver son chemin dans les médias et d'être mis en évidence. C'est ça le grand problème: Comment faire en sorte que les deux côtés de cette histoire-là soient connus? Ce n'est pas facile, évidemment. Moi je dirais que c'est là le problème. La tendance des gens, c'est de dire: Les professionnels se protègent entre eux. Bon! C'est ce qu'on entend. Mais ils oublient que les professionnels ont aussi intérêt à ce que leur réputation soit maintenue, que la très grande majorité des professionnels, je dirais à part quelques exceptions, sont des gens honnêtes, sont des gens compétents, des gens consciencieux et qui acceptent mal qu'un de leurs membres ne respecte pas ces standards. Lorsqu'ils en identifient un, moi je suis, en tous les cas, convaincu qu'ils posent les gestes, de façon générale, pour corriger la situation. Je n'ai pas de doute, moi, sur ce plan-là. Évidemment, le message passe difficilement.

Mme Caron: En fait, ce que vous nous dites, c'est que ce n'est vraiment pas à l'avantage d'une corporation de ne pas s'assurer de la protection du public. C'est contre sa propre réputation.

Est-ce que vous avez des informations concernant les causes qui se retrouvent au Tribunal des professions? Vu qu'on parle du jugement des pairs, est-ce que, au niveau du Tribunal des professions, les sanctions sont plus sévères lorsqu'une cause se rend au Tribunal des professions ou si les sanctions sont sensiblement les mêmes?

Mme de Grandmont: Ce que j'ai entendu, moi, des syndics et des gens des corporations professionnelles, c'est souvent que les corporations professionnelles déplorent que les jugements qui sont donnés par le Tribunal des professions sont beaucoup moins sévères que le jugement qui est donné par les pairs au niveau des comités de discipline. C'est quand même surprenant et, semble-t-il que c'est de façon assez systématique.

Mme Caron: Vous nous avez parlé, Mme de Grandmont, d'un besoin d'une évaluation adéquate, finalement, du système actuel pour pouvoir pousser la réflexion davantage vers d'autres pistes de solution. Vous la voyez comment cette évaluation? (15 h 10)

Mme de Grandmont: Je vous ai fait remarquer que l'ensemble de l'avant-projet de loi ne traitait que de certains volets ou aspects pour répondre, probablement, à des problèmes ponctuels. Je crois que nous devons, et ce qui est un peu, en tout cas, ce sur quoi il faut attirer votre attention, c'est qu'on a cet avant-projet de loi, on a un projet de loi 72 qui a été déposé, on a un projet de loi 67 qui est en attente, on a un projet de loi sur la société par actions qui s'en vient, et ça touche l'ensemble de l'organisation professionnelle. On a les problèmes des titres réservés qui ne sont pas réglés.

On a tout l'impact du libre-échange et de la libre circulation, de la mondialisation des marchés qui amènent une évaluation au niveau de notre seuil d'accueil, de nos normes d'admission. On a l'actualisation des codes de déontologie, des codes d'éthique, toutes les fautes à caractère sexuel - c'est un problème, en tout cas, assez d'actualité - on n'en traite pas. En tout cas, il y a une série d'ensembles qui devraient être traités en même temps que les problèmes au niveau de la discipline. Les mécanismes que l'on propose ne pourront pas être adoptés demain. Ça demande quand même que tous les intervenants se concertent. Ce que l'on propose, c'est que, dans un court laps de temps, le Conseil, avec l'Office, avec le gouvernement, s'asseoient pour trouver les amendements qu'on peut régler de façon prioritaire pour permettre, l'adéquation de certaines... et de trouver des solutions à certains problèmes. On propose, dans un deuxième temps, un «task force», un groupe-conseil au ministre sur lequel siégeraient les gens du Conseil, les corporations, du gouvernement, de l'Office, des groupes de pression, des groupes d'associations de consommateurs et qu'on fasse une table ronde et que là, d'ici la fin janvier 1993, il y ait une véritable... ou 1994, ça prendra le temps, M. Castonguay l'a dit, à un moment donné, si on veut vraiment actualiser et donner un souffle nouveau au Code pour les 20 prochaines années, une concertation véritable, une réflexion en profondeur sur l'ensemble de ces sujets qui ne sont soit qu'abordés partiellement ou complètement évacués par l'avant-projet de loi pour arriver à une actualisation confortable, fonctionnelle du système professionnel.

Mme Caron: J'avoue, Mme de Grandmont, que notre formation politique partage vos inquiétudes sur des projets de loi qui arriveraient à la pièce et qui n'amèneraient pas une vision globale, nouvelle, par rapport au Code des professions et les différents éléments qui ne sont pas touchés par l'avant-projet de loi sont évidemment des éléments qu'il nous apparaît important de traiter en faisant cette réforme. Et vous avez fait mention, autant dans votre mémoire que dans vos présentations, de l'importance de distinguer les corporations les unes des autres et, pour les avoir rencontrées, je partage aussi cet avis. On ne peut pas traiter toutes les corporations professionnelles de la même façon, elles ont des réalités vraiment très différentes. Près de la moitié des corporations soient à titre réservé. C'est un problème qui n'est pas abordé au niveau de l'avant-projet et je pense qu'il va falloir qu'on puisse pousser la réflexion sur ce problème particulier.

Ce matin, la Fédération nationale des associations de consommateurs nous avait relevé

trois points importants, trois problèmes majeurs. Le premier, nous en avons parlé, la crédibilité par rapport aux pairs et les deux autres points touchaient davantage les syndics. C'est qu'on nous disait qu'il semblait y avoir un manque d'ouverture, un manque d'information de la part des syndics et on allait jusqu'à dire: même un manque de sérieux. Vous avez évidemment présenté certaines pistes de solution. Bon! La session d'actualisation pour la formation du côté des syndics, mais j'aimerais peut-être entendre un des syndics nous dire: Est-ce que vous voyez des pistes de solution pour que, justement, la personne qui porte plainte sente qu'on s'occupe d'elle, qu'elle ait une communication peut-être plus rapide, parce que, les délais, on dénote souvent que les délais sont beaucoup trop longs, et qu'elle sente vraiment qu'on est prêt à l'informer?

M. Morin (Paul): Je pense que la volonté est là. Je pense que les syndics, en général, sont assez rapides dans la réception des plaintes. Je pense que les situations qui nous sont soumises, quand elles sont sérieuses, généralement, on ne tire pas des conclusions a priori. On fait toujours enquête. La minute qu'on nous signale une situation, il y a une enquête qui est faite. Les gens ont tendance à oublier qu'ils nous confient une information, qu'ils nous confient une mission de faire une vérification. Il s'agit de déterminer si notre travail est un travail au niveau de la protection du public. Est-ce qu'on doit assurer une permanence ou si on doit toujours intervenir dans une situation ponctuelle? Nous, on considère que les informations ou les plaintes qui nous sont soumises doivent être interprétées en fonction de la protection à long terme. Je pense que, la plupart des gens qui font appel à nous, qui nous signalent des situations, on les informe assez bien. Je pense que le défaut de l'information au niveau du public, c'est de croire que, la discipline, c'est notre seule avenue. La discipline, c'est le bras judiciaire de notre activité. La minute qu'on embarque en discipline,'~ il faut s'attendre à ce que ça soit judiciaire. C'est une structure qui ne nous appartient plus. Le syndic dépose devant un comité de discipline qui est formé de gens sérieux, sous la surveillance de la Cour supérieure, une plainte, après une enquête qu'il a faite. Rendu là, rendu en discipline, il doit suivre le processus. On ne peut pas nier aux gens qui sont accusés le droit de se défendre. Alors, rendu là, c'est ça. Il ne faut pas faire croire aux gens ou les encourager à ce que la Corporation fasse de la discipline. Il s'agit de les encourager peut-être à nous signaler des situations. On disait, ce matin, les gens nous disent: Ça ne vaut pas la peine de signaler la situation, ils ne feront rien pour régler mon cas. Alors, on ne fera peut-être rien pour régler son cas, mais on peut faire quelque chose pour régler une situation. Alors, on l'interprète comme ça, nous. Les gens ont tendance à penser que c'est simple, qu'on va prendre le téléphone ou qu'on va régler ça vite. Les enquêtes, c'est complexe. Les gens nous signalent une situation où, souvent, ils ne se rendent pas compte jusqu'à quel point ça peut impliquer, au niveau du comportement du professionnel, sa compétence. Alors, ils doivent quand même nous faire confiance. Et puis, si on nous donne la discipline ou les moyens qu'on demande, ce n'est pas juste pour les syndics, c'est pour la Corporation, le moyen de régler les situations en dehors de la discipline. La discipline, ça ne nous appartient pas.

Mme Caron: Dans le mémoire de la FNACQ, M. Morin, on précisait qu'il faudrait que le syndic fasse part au plaignant des conclusions de son enquête de façon claire et précise, en réponse aux éléments d'une plainte. Il semblerait que, du côté du public, on considère que les conclusions d'enquête sont souvent trop brèves, pas suffisamment explicites et que, finalement, c'est ce qui fait que le citoyen ne se sent pas satisfait devant les décisions.

M. Morin (Paul): Est-ce qu'il peut être satisfait d'une décision... de nous faire confiance de régler une situation qu'il nous a signalée? Est-ce qu'il doit être satisfait seulement parce qu'on va en discipline? N'oubliez pas que les gens qui nous signalent des situations qui finissent en discipline sont obligés de continuer, aussi, à nous aider.

Mme Caron: Mais, lorsque vous refusez, par exemple, d'accepter une plainte, est-ce que les conclusions de votre enquête sont suffisamment claires, précises, détaillées?

M. Morin (Paul): Je pense que oui. , On essaie autant que possible de bien expliquer aux gens pourquoi on ne va pas en discipline. Parce que notre seule décision est là: aller en discipline ou ne pas y aller. Alors, on doit expliquer aux gens. On essaie, je pense que la plupart des syndics essaient d'aider les gens, souvent, à régler des situations. Les gens nous rappellent quand ils ne sont pas satisfaits. Alors, je pense que les syndics ne se cachent pas. Ils vivent avec leur décision puis ils n'ont pas à en avoir honte. Sauf qu'il y a souvent des critères qui échappent aux gens du public, les gens qui voudraient... Ce n'est pas que les gens cherchent vengeance, mais ils voudraient qu'on règle leur dossier ou leurs problèmes, ce qui leur est arrivé. Souvent, on ne peut pas. Il n'y a pas de situation... On ne peut pas intervenir directement. Sauf que je pense que, dans l'ensemble de nos opérations ou nos activités, on s'occupe de tout ça.

Mme de Grandmont: J'aimerais peut-être

réagir. Le mécanisme... Justement, les avenues de solution, les mécanismes intermédiaires plus souples, plus flexibles de médiation, de conciliation des différends vont probablement régler ce problème de perception, ce problème de doute ou de... dans l'efficacité du syndic. Je pense que le syndic met tout en oeuvre pour régler la plainte, mais qu'actuellement la voie disciplinaire est tellement lourde et complexe, c'est ce qui donne l'impression au plaignant que sa plainte n'a pas bien cheminé. Et je pense qu'il y a un effort à faire, effectivement, pour bien informer le plaignant du déroulement de l'enquête. Mais cette information doit être dirigée beaucoup plus au plaignant qu'à l'Office des professions qui, après avoir eu l'information, va faire quoi avec ça?

Mme Caron: C'est que, finalement, il faut avoir d'autres voies que cette seule voie disciplinaire. (15 h 20)

Mme de Grandmont: Je pense qu'il faut voir des voies différentes, flexibles, souples pour régler les plaintes qui sont de nature différente, de gravité différente, et qui ne sont pas de même nature, dépendamment des types d'exercices, des types de professions.

Mme Caron: Au niveau de la médiation, c'est un petit peu le même principe, du côté de la médiation familiale, qui amène concrètement une déjudiciarisation et un plus grand taux de satisfaction par rapport au système de justice.

Mme de Grandmont: C'est des avenues à explorer. Je pense qu'on est ouvert à en discuter avec...

Mme Caron: La protection du public est souvent perçue comme un seul élément, c'est-à-dire le système disciplinaire. Je pense que vous nous avez fait part, autant Mme de Grandmont que M. Castonguay, que finalement, votre vision de la protection du public est beaucoup plus large. Elle touche également la formation, le Code de déontologie et la formation continue.

Mme de Grandmont: Effectivement, si on regarde 240 000 professionnels, c'est des gens qui sont compétents, qui ont des diplômes qui sont approuvés par le gouvernement. Tous les mécanismes de formation continue qui sont mis en oeuvre dans les corporations, les mécanismes d'inspection professionnelle, où on va vérifier, où on fait de la prévention, où on informe le professionnel sur ses forces, sur ses faiblesses, ce sont des éléments qui sont méconnus du public. Tous les stages d'actualisation qui sont exigés. Alors, il y a beaucoup d'autres mécanismes que la discipline, qui permettent, justement, aux professionnels de demeurer compétents, et c'est ce qui sûrement justifie le peu de plaintes. Alors souvent, on a tendance à penser que, parce qu'il y a beaucoup de professionnels et qu'il y a des millions d'actes qui sont posés à tous les jours, c'est qu'il y a un problème, compte tenu qu'il n'y a pas suffisamment de plaintes. Mais je pense qu'il y a beaucoup d'autres mécanismes qui sont des mécanismes qui vont permettre d'encadrer la pratique, la compétence des professionnels, et faire en sorte qu'on ait le moins de plaintes, d'erreurs de parcours. Il y en aura toujours, mais je pense que le système professionnel a quand même des mécanismes qui sont très diversifiés et qui auraient avantage à être mieux connus du public.

Mme Caron: Justement, puisque malgré que le Code .des professions existe depuis bientôt 20 ans, malgré que de nombreux moyens pour assurer la protection du public soient mis en place, que l'information ne se rend toujours pas, est-ce que le Conseil interprofessionnel a l'intention de mettre en place des moyens d'information ou si les corporations professionnelles elles-mêmes comptent faire davantage d'information parce que ça fait quand même 20 ans que le système est là?

Mme de Grandmont: Je pense qu'il y aura un travail de discussion à faire entre nous et je pense aussi qu'on aura à demander la collaboration des associations de protection du consommateur, parce que, moi aussi, quand je lis ce qu'ils écrivent, des fois, je pense qu'on aurait avantage à se parier, à mieux s'informer. Donc, je pense qu'il y a un effort des deux côtés, et de la part des associations de consommateurs, et je pense qu'on aurait avantage à s'asseoir et à discuter.

Mme Caron: M. Castonguay, j'aimerais connaître, puisque vous étiez là à ce moment-là, la structure qui existait pour l'adoption de la législation qui touchait les corporations professionnelles avant l'existence de l'Office des professions.

M. Castonguay: D'abord, il n'y avait pas de Code des professions, il n'y avait pas d'Office et il y avait un certain nombre de lois. La loi du Collège des médecins, à l'époque, l'Ordre des dentistes, des architectes, des avocats. Et, si ma mémoire est bonne, de façon générale, ce qui était santé, on s'adressait au ministre de la Santé, on s'adressait au ministre de la Justice pour la loi touchant le Barreau, on s'adressait au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Science pour les architectes, les ingénieurs et, j'imagine, le ministre de l'Industrie et du Commerce pour les comptables. Alors, c'était réparti un peu comme ça, ce qui faisait que les projets étaient modifiés sans qu'il y ait une vue d'ensemble et sans même qu'on voie clairement quel devait être le rôle des corporations professionnelles.

alors, elles jouaient un rôle utile, mais il n'y avait pas d'uniformité ou plutôt il n'y avait pas de vue d'ensemble de ce que devait être leur rôle et leur façon de fonctionner.

Mme Caron: Est-ce que vous croyez - ma question s'adresse à tous les membres qui sont là - qu'au niveau de la législation il serait plus normal que la législation parte du ministre responsable de l'application des lois professionnelles, comme cela se fait dans la plupart des ministères, plutôt que d'un office en particulier, au niveau de la législation comme telle?

M. Castonguay: Si vous me permettez, Mme la Présidente, je pense que la législation doit toujours demeurer sous le contrôle du gouvernement, du Conseil des ministres, du ministre responsable. L'Office, normalement, devrait jouer un rôle de conseiller auprès du ministre, de même que le Conseil. Je ne sais pas si je réponds a votre question, mais il m'apparaît, que c'est assez clair comment les choses devraient se dérouler à ce niveau-là.

Mme Caron: Oui, c'est suffisamment clair. Je peux peut-être un petit peu préciser ma pensée. C'est que, pour avoir eu à travailler sur certaines lois touchant l'application des lois professionnelles au cours des derniers mois, je me suis rendu compte que, finalement, il semblait extrêmement difficile, lorsqu'on voulait l'adoption d'un projet de loi, si la volonté du ministre par exemple était autre que celle de l'Office des professions, eh bien, il fallait accepter un projet de loi qui ne correspondait pas nécessairement à la volonté et le modifier en commission parlementaire. Ça m'apparaissait une façon de légiférer très différente de ce qu'on retrouve au niveau des différents ministères et j'avoue que j'avais et j'ai toujours un peu de difficulté avec ce procédé. On se retrouve devant le même phénomène pour l'avant-projet de loi qui a été préparé par l'Office des professions et le président de l'Office agit aussi à titre de 'conseiller du ministre au niveau des audiences et ça m'apparaît un petit peu difficile, c'est un petit peu être juge et partie en même temps. C'est pour ça que je vous questionnais sur cet élément précis.

Vous nous avez donc suggéré différentes pistes, je pense. Vous nous proposez de poursuivre la réflexion à partir d'une évaluation adéquate de la situation qui existe actuellement. Parmi les pistes de solutions nouvelles, il y a évidemment, je retiens, la médiation qui m'apparaît un élément intéressant. On parle aussi dans l'avant-projet de conciliation au niveau des produits, ce qui peut être un élément aussi très positif, on a parlé d'arbitrage des comptes, sessions d'actualisation du côté des syndics et la possibilité d'un comité aviseur avec des membres du public qui pourraient faire partie de ce comité aviseur. Est-ce que vous souhaitez que cet élément de présence du public se reflète vraiment dans les structures? Présentement, la présence du public, on la retrouve au niveau du bureau des corporations et est-ce que vous avez des exemples de corporations professionnelles qui ont un comité aviseur qui est en opération et où il y a déjà des membres du public et est-ce que c'est positif?

Mme de Grandmont: La présence du public, je pense que cette notion-là est acquise au sein des corporations professionnelles et on n'a aucun problème avec ça. Alors, je crois que, dans les discussions qui auront lieu dans les semaines à venir, les avenues de solutions qu'on vous propose sont des pistes. Vous allez avoir l'occasion aussi d'entendre nos membres pendant les prochains jours. Je sais que ces gens-là ont aussi des pistes qui vont compléter les orientations du Conseil et je suis certaine que vous allez voir dans les interventions de nos membres beaucoup d'ouverture et une volonté de servir adéquatement la population et de bien protéger le public.

Mme Caron: Puisque mon temps est écoulé, je vous remercie beaucoup de votre participation.

Le Président (M. Gautrin): M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: Merci, M. le Président. Au chapitre 5, intitulé «La prochaine étape», vous dites: «Le Conseil interprofessionnel entend jouer un rôle dynamique auprès des intervenants du monde professionnel», et vous énumérez un certain nombre d'éléments fort intéressants mais que je qualifierais d'un peu généraux. Qu'est-ce que vous proposez plus concrètement puisque vous dites que le Code des professions doit refléter davantage ce rôle d'avenir et cette nouvelle réalité?

Mme de Grandmont: C'est sûr que les membres du Conseil se penchent et discutent régulièrement du rôle que le Conseil devrait jouer. Je crois que l'avant-projet de loi qui est déposé va être discuté au cours des prochaines journées. Je crois qu'on ne devrait pas entrer dans le... Les corporations, lors de notre consultation de janvier, ont émis le souhait que le Conseil soit plus présent sur la place publique, les représente adéquatement. Je pense qu'il est prudent d'écouter nos membres, dans un premier temps, lors de cette commission et d'engager le Conseil dans un «task force» après, pour rapidement cerner... suite aux enjeux, à la mission qu'on voudra donner à l'Office des professions, au Conseil, et faire participer les différents intervenants qui sont nos membres, l'Office, le gouvernement, à cette discussion-là.

Alors, je pense que le Conseil veut élargir son rôle de conseiller auprès du ministre, veut

améliorer encore ses actions de concertation, d'aide au niveau des corporations pour les aider à mieux accomplir leur rôle de protection du public. On pense que, à la demande de nos corporations, on devrait être à même d'effectuer et d'être plus proactifs au niveau de la recherche, de la prospective, pour trouver des solutions aux problèmes de l'organisation professionnelle. À leur demande, je pense qu'on a un travail à faire pour améliorer l'information publique mais je pense qu'avant tout on devrait écouter l'ensemble des intervenants qui vont s'exprimer à cette commission et par la suite, rapidement, regrouper les intervenants et ensemble définir ce que devrait être la mission actualisée de l'Office, ce que devrait être la mission du Conseil et comment les corporations auront des outils adéquats pour assumer la protection du public.

M. Hamel: Merci, madame.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre et député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Alors, je crois effectivement que nous avons épuisé le temps qui nous était alloué. Tout simplement pour vous dire qu'il y a eu une invitation de votre part pour des consultations spécifiques au niveau du projet de loi. Ça se fera avant de déposer le projet de loi à l'Assemblée nationale. Nous aurons l'occasion de nous rencontrer à plusieurs reprises, j'en suis sûr, pour justement faire valoir les points que vous avez soulevés dans votre mémoire. Et nous en ferons autant, de notre côté, sur certains éléments que nous voulons protéger.

Vos commentaires, comme je vous l'ai dit, ont été finalement très bien reçus. On constate que vous avez mis du temps, de l'effort, que vous avez cherché à maintenir un équilibre du côté des professions que vous avez le rôle, le mandat, justement, de devancer mais également avec un souci du public. Il y avait une ouverture, quand même, au niveau d'interventions de citoyens. Il y avait aussi une reconnaissance, je pense, de façon générale, qu'effectivement des changements peuvent se faire dans une certaine harmonie. Et on est prêt à regarder certaines des positions qui suscitent plus d'intérêt que d'autres.

Troisièmement, c'est que vous savez fort bien que je ne peux pas faire un ramassis de tout et tout mettre dans un projet de loi. On ne peut pas mettre tous nos oeufs dans le même panier. Vous savez qu'il y a... C'est très difficile, évidemment, de donner une suite à cette orientation-là mais on va chercher, à l'avenir, une fois que les deux trois principaux dossiers qui sont sur la table actuellement seront réglés, à aller dans le sens de votre proposition.

Je vous remercie tous et chacun pour avoir pris le temps de venir présenter votre mémoire.

La qualité des interventions a été fort appréciée. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gautrin): Mme de Grand-mont, M. Fréchette, M. Godbout, M. Castonguay, M. Morin, la commission vous remercie et je suspends les travaux pour cinq minutes en attendant la Corporation professionnelle des médecins du Québec.

(Suspension de la séance à 15 h 30)

(Reprise à 15 h 39)

Le Président (M. Gautrin): La commission reprend ses travaux. J'inviterais la Corporation professionnelle des médecins du Québec à se présenter. Dr Augustin Roy, vous pouvez présenter les personnes qui vous accompagnent.

Corporation professionnelle des médecins du Québec (CPMQ)

M. Roy (Augustin): Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, mesdames, messieurs, je vais vous présenter d'abord les gens qui m'accompagnent. À l'extrême droite, le Dr Jacques Brière, secrétaire général adjoint de la Corporation; Dr André Lapierre, également secrétaire adjoint à la Corporation; Dr Rémi Lair, syndic de la Corporation; Me Jacques Prévost, conseiller juridique de la Corporation.

Le Président (M. Gautrin): Alors, vous connaissez parfaitement les règles des commissions parlementaires. J'imagine que ce n'est pas à vous qu'il faut les exposer. Mais, pour les fins, je vous les rappellerai. Nous avons une heure qui se partage en trois fractions de temps de 20 minutes: 20 minutes pour vous, votre exposé, 20 minutes pour les ministériels et 20 minutes pour l'Opposition.

M. Roy: La Corporation professionnelle des médecins du Québec remercie la Commission de l'éducation et M. le ministre responsable de l'application du Code des professions et des lois professionnelles de lui donner l'opportunité de présenter un mémoire sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. (15 h 40)

Avant de continuer plus loin, M. le Président, je voudrais attirer votre attention sur le fait que ce matin un groupe a passé la moitié de son temps à parler d'un cas spécifique à la Corporation des médecins. Je ne veux pas perdre mon temps, qui est très limité, pour discuter de ce cas. Mais je voudrais, comme question de privilège, parce que la Corporation est directement attaquée et moi-même, avoir l'occasion d'avoir au moins 10 minutes pour, au moins,

rectifier certains faits et, ensuite, vous proposer à ceux qui sont intéressés, de venir nous rencontrer et discuter de ce dossier...

Le Président (M. Gautrin): Monsieur...

M. Roy: ...de façon à comprendre ce qui se passe. Le dossier qui a été mis sur la place publique incorrectement...

Le Président (M. Gautrin): M. Roy, si je comprends bien la demande que vous faites à la commission, c'est qu'on étende votre temps de parole de 10 minutes de manière à ce que 10 minutes vous soient accordées pour pouvoir répondre au cas de Mme Bisson. C'est bien cela?

M. Roy: D'accord.

Le Président (M. Gautrin): Pour cela, je crois que c'est une modification à l'ordre du jour et ça demanderait le consentement des deux partis. Est-ce que j'ai le consentement des deux partis? Est-ce que j'ai le consentement des partis sur cette question?

M. Savoie: M. le Président, nous avons eu l'occasion lors de la présentation du mémoire de la Fédération de commenter certains des faits qui ont été présentés. Si on ouvre la porte, je pense qu'on risque de voir plusieurs autres présentations de mémoires de la part de certaines corporations qui vont corriger ce qui a été dit auparavant. Et on s'embarque dans un glissement de temps que nous ne possédons pas. Je pense que tout le monde est bien au courant de l'intégrité du Collège, du travail assidu que font ses défenseurs. Je ne pense pas qu'il est nécessaire de donner 10 minutes additionnelles, malgré que je suis toujours intéressé d'entendre le Collège sur le cas. Mais je pense que je dois refuser.

Le Président (M. Gautrin): Vous ne donnez pas votre consentement. Je m'excusef à ce moment-là, l'Opposition n'a pas à... Un consentement devrait être unanime. Dans ces conditions-là, vous êtes obligé de vous limiter à la période de 20 minutes tel qu'il avait été décidé.

M. Roy: On sera malheureusement obligé de trouver une autre tribune. Je m'excuse mais je pensais que c'était la maison du peuple ici.

Le Président (M. Gautrin): Cher ami, je suis sûr que vous auriez trouvé des...

Vos 20 minutes commencent à partir de maintenant.

M. Roy: La Corporation reconnaît le mérite et l'avant-propos de plusieurs modifications proposées par ce projet de loi et n'hésite pas à les appuyer en souhaitant que l'Assemblée nationale les sanctionne. Pour ne pas allonger inutilement le texte de ce mémoire, il ne sera pas question dans celui-ci de ces modifications considérées comme appropriées. Et c'est vrai, je pense, qu'au niveau de la rédaction de certains articles du projet de loi il y a des améliorations de la concordance de plusieurs articles, il y a amélioration sur la loi actuelle.

La Corporation s'efforcera plutôt d'attirer l'attention de la commission et de la mettre en garde contre un certain nombre de modifications proposées par cet avant-projet de loi, qui, si elles étaient sanctionnées, accorderaient de façon injustifiée des pouvoirs excessifs à l'Office des professions, augmenteraient considérablement les coûts d'administration du système professionnel, en alourdiraient le fonctionnement, et pourraient aller jusqu'à le paralyser. Les commentaires de la Corporation porteront sur les fonctions et les pouvoirs de l'Office des professions, la réglementation professionnelle, l'inspection professionnelle, le syndic et le comité d'examen des plaintes - entre parenthèses, la Corporation professionnelle des médecins a un comité d'examen des plaintes depuis très longtemps; en fait, depuis 1962, nous avons un comité de conciliation qui est devenu un comité d'examen des plaintes en 1971, avec des membres du public, avant que le Code des professions soit institué et avant qu'on puisse avoir des membres du public à notre corporation professionnelle - le comité de discipline, la procédure de destitution et d'immunité rattachée à certaines fonctions.

Oui. Alors, premier chapitre, les fonctions et les pouvoirs de l'Office des professions. En 1974, le Code des professions instituait l'Office des professions, lui donnant pour fonction de veiller à ce que chaque corporation professionnelle assure la protection du public. Les pouvoirs de l'Office comportaient celui de faire des recommandations au gouvernement concernant la réglementation professionnelle adoptée par les corporations, et celui de faire enquête sur l'administration financière d'une corporation présentant une situation financière déficitaire, ou dont les revenus semblaient insuffisants pour remplir ses obligations, et d'en faire rapport au gouvernement qui pouvait alors placer cette corporation sous le contrôle de l'Office. Le Code donnait également à l'Office un pouvoir supplétif concernant certains règlements, en général ceux qui avaient une importance plus immédiate pour le public. Les corporations professionnelles passaient donc d'un régime d'autogestion qu'elles connaissaient avant 1974 à un régime d'autogestion tempérée par ces pouvoirs de surveillance et de suppléance partielle de l'Office des professions.

Nul n'avait prévu, en 1974, que l'Office des professions exercerait ses fonctions de façon très normative et autoritaire, tentant d'imposer un modèle réglementaire uniforme à toutes les corporations professionnelles, pourtant fort dit-

férentes les unes par rapport aux autres, étudiant avec une extrême minutie, et allant même jusqu'à provoquer des commentaires et susciter des réactions non demandées sur tout projet de règlement en provenance des corporations professionnelles, effectuant de nombreuses études et recherches à tendance souvent idéologique, par exemple dans le domaine de l'immatriculation et des conditions supplémentaires aux diplômes donnant ouverture à un permis. C'est malheureux, mais pour la vérité, je dois le dire, l'Office a mal joué son rôle, et maintenant l'Office veut plus de pouvoirs. Sauf pour les deux premières années de fonctionnement de l'Office, et sauf pour le début des mandats de chacun des deux présidents ultérieurs, l'Office a institué un système professionnel basé sur la confrontation, sur l'affrontement, un système, en anglais, qu'on dit «adversarial», au lieu de miser sur la concertation et la collaboration entre l'Office et les corporations; et c'est ça, le problème fondamental qu'on a aujourd'hui entre l'Office et les corporations professionnelles.

Cette façon de concevoir son rôle a entraîné, de la part de l'Office, une dépense de ressources humaines et matérielles considérable qui se reflète sur son budget et, de la part du personnel des corporations, une semblable dépense d'énergie et de temps pour faire face aux exigences, études et consultations de l'Office. Là encore, il y a répercussion sur les budgets des corporations. Quelques exemples: avant 1974, un règlement important comme le Code de déontologie des médecins avait été approuvé par le gouvernement, en 1952, un mois après son adoption par le Bureau provincial de médecine. En 1971, un nouveau Code de déontologie fut adopté par le Bureau provincial de médecine, le 19 mai, et approuvé par le gouvernement le 6 octobre de la même année. Très bien. Depuis 1974, il faut calculer les délais en années. Par exemple, le Règlement sur les conditions et modalités de délivrance des permis a été adopté par le Bureau de la Corporation professionnelle des médecins du Québec en 1975 et approuvé 12 ans plus tard par le gouvernement, soit en 1987. Pendant toutes ces années, la Corporation professionnelle des médecins du Québec n'avait aucun règlement sur les conditions et modalités de délivrance des permis et devait fonctionner sur la foi d'habitudes acquises du passé.

La Loi médicale fut modifiée en 1977 pour prévoir - c'est un autre exemple - la réglementation permettant l'exercice de l'acupuncture par des personnes autres que des médecins. La Corporation professionnelle des médecins du Québec a adopté un règlement en 1979, qui avait été précédé d'un prérèglement approuvé par l'Office, mais il fallait des consultations mais, finalement, elle avait adopté, en 1979, un règlement qui ne fut approuvé qu'en 1985, six ans plus tard. Et c'a été la cause de nombreux problèmes qui sont dus à ce délai dans l'approba- tion du règlement. Le nouveau Code de déontologie fut adopté par le Bureau de la Corporation professionnelle des médecins du Québec le 24 mars 1976 mais ne fut approuvé par le gouvernement que le 20 mars 1980, soit quatre ans plus tard. Et on a de nombreux autres exemples.

La moindre modification réglementaire, qui ne fait l'objet d'aucune contestation, peut prendre un an avant d'être approuvée par le gouvernement. Par exemple, l'addition de quelques nouveaux vaccins au règlement de délégation d'actes approuvée par le Bureau de la Corporation en mars 1989 ne fut approuvée par le gouvernement et n'entrait en vigueur qu'en février 1990. Une telle lenteur administrative n'est certainement pas à l'avantage du public. La Corporation professionnelle des médecins du Québec, qui a connu les deux régimes, souhaiterait certainement revenir à l'époque antérieure à 1974 et ne croit pas essentielle la structure de l'Office des professions. Je vais passer les commentaires que j'avais mis de côté.

Le Collège des médecins et chirurgiens existe dans la province de Québec depuis 1847. Il a très bien fonctionné depuis ce temps jusqu'en 1974, sans surveillance d'un organisme intermédiaire comme l'Office des professions. Il avait même obtenu des pouvoirs d'enquête suffisants pour commencer ses visites d'inspection professionnelle vers le milieu de la décennie 1960, bien avant l'adoption du Code, et créer un comité d'examen des plaintes en 1971, comme je vous l'ai dit, avec des membres du public, plusieurs années avant l'adoption du Code des professions et avant qu'if y ait des représentants du public sur le Bureau des corporations. (15 h 50)

Voici que l'avant-projet de loi dont nous discutons aujourd'hui veut accroître, de façon exorbitante, les fonctions et les pouvoirs de l'Office. Par exemple, à la suite d'un rapport de l'Office, non seulement sur une situation financière déficitaire mais sur tout autre objet, le gouvernement peut mettre sous le contrôle de l'Office toute corporation. Et l'Office peut alors se substituer, non seulement au bureau et au comité administratif, mais aussi au comité d'inspection professionnelle et au syndic. Où l'Office prendra-t-il le personnel ayant l'expertise pour se substituer au comité d'inspection professionnelle et au syndic de 41 corporations professionnelles fort différentes? Faudra-t-il décupler le budget de l'Office pour recruter le personnel apte à accomplir toutes ces tâches? Avec toutes les fonctions et tous les pouvoirs demandés, l'Office ne demeure plus un organisme de surveillance, il devient une supercorporation. Il ne s'agit plus d'autogestion tempérée mais plutôt de 41 corporations fantoches sous la férule de l'Office. La Corporation des médecins croit que, si c'est là l'intention du gouvernement, il devrait avoir le courage de faire dispa-

raître les corporations et de laisser à l'Office le soin de faire le travail de toutes les corporations. Le principe du jugement par les pairs aura été alors sérieusement erroné, parce que le problème, c'est que le rôle de l'Office est un rôle de surveillance des activités des corporations pour s'assurer qu'elles rendent bien service au public. Or, depuis 18 ans, c'est ça que l'Office n'a pas joué comme rôle. Jamais l'Office n'est venu nous voir pour nous demander comment on fonctionnait, vérifier comment fonctionnait le système des plaintes, le système disciplinaire, l'inscription des permis, le système d'inspection professionnelle, comment on fonctionnait au niveau des poursuites de pratique illégale de la médecine. Nos livres sont ouverts. Ils sont ouverts aux autorités compétentes pour vérifier si ce qu'on fait est bien et on n'a pas peur de les ouvrir, les livres, confidentiellement, à ceux qui ont l'autorité pour les observer. Mais quand on ne vient pas nous le demander, à ce moment-là, on n'accepte pas les blâmes.

Pourquoi risquer de détruire un système professionnel cité en exemple en Amérique du Nord et envié par certains pays européens? La Corporation professionnelle des médecins croit que, pour améliorer l'efficacité du système professionnel et en réduire les coûts, les fonctions et pouvoirs de l'Office devraient plutôt être restreints. Le pouvoir supplétif de l'Office en matière réglementaire ne devrait exister que dans le cas d'une Corporation professionnelle mise par le gouvernement sous la tutelle ou sous le contrôle du ministre ou d'une personne qu'il désigne lorsqu'elle est en situation financière déficitaire ou qu'elle ne peut remplir ses fonctions. Il ne semble pas normal qu'une corporation, à la suite d'une enquête ou d'un rapport de l'Office, soit placée par le gouvernement sous le contrôle de l'Office, organisme qui a fait l'enquête et rédigé le rapport. Le Code des professions devrait plutôt prévoir, comme pour les établissements de santé en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, comme pour les institutions d'éducation également et au niveau des municipalités, que l'administration provisoire d'une corporation puisse être assumée par le ministre responsable ou une personne qu'il désigne. De plus, cet article devrait prévoir la nécessité d'aviser, dans un cas semblable, la corporation intéressée du rapport fait par l'Office et la possibilité pour cette corporation de faire des représentations au gouvernement. Les pouvoirs accordés à l'Office par l'article 15 actuel ne sont pas suffisants compte tenu des fonctions de l'Office qui ne doit pas se transformer... sont suffisants, excusez, compte tenu des fonctions de l'Office qui ne doit pas se transformer en supercorporation.

Les modifications que la Corporation professionnelle des médecins vient de suggérer, jointes à celles qui seront suggérées au chapitre suivant et appuyées par une intervention du ministre responsable auprès de l'Office pour l'inciter à exercer ses fonctions avec sobriété, devraient conduire à une réduction appréciable du budget consacré par le gouvernement, l'Office des professions et les corporations à l'administration du système professionnel tout en le rendant plus efficace et plus expéditif. Dr Brière.

M. Brière (Jacques): La Corporation des médecins est souvent envieuse du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada. Nous procédons avec cet organisme aux visites d'agrément des milieux de formation et également à l'agrément des programmes de formation en spécialité et nous administrons dans certaines spécialités des examens conjoints écrits avec le Collège royal. Or, le Collège royal peut modifier, de sa propre autorité et à sa guise, ses méthodes d'examen selon l'évolution de la docimologie. Le Collège royal peut également créer des spécialités, à sa guise, de sa propre autorité, sans requérir l'approbation de personne et selon l'évolution de la science médicale. Nous avons tenté, nous, de modifier notre règlement sur les spécialités pour modifier précisément les techniques d'examen pour tenir compte de l'évolution de la docimologie. Le règlement a été adopté par la Corporation et envoyé à l'Office en novembre 1990 et j'ai appris récemment, donc, en février 1993, que l'Office s'apprête à envoyer son avis au ministre. De la même façon, nous avons tenté de créer une nouvelle spécialité, en oncologie médicale, Le règlement de modification pour créer cette spécialité a été adopté par le Bureau en novembre 1991 et, là encore, on me dit que l'Office s'apprête à envoyer son avis au ministre. Alors, vous voyez que nous n'avons pas tout à fait la même latitude et la même rapidité d'évolution que le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada. Et pourtant, les certificats de spécialistes et les titres d'associés émis par le Collège royal sont reconnus mondialement et, donc, ont beaucoup de prestige, malgré que cet organisme n'a pas d'autorité au-dessus de lui. En somme, pour accélérer le processus réglementaire, vous allez voir que notre mémoire fait une suggestion de conserver le processus actuel pour les règlements les plus importants, qui ont un impact direct sur le public ou sur des personnes qui ne sont pas membres de la Corporation, en espérant toutefois que le processus soit accéléré. Pour les autres règlements qui visent surtout la régie interne d'une corporation ou encore les normes plus particulières à une profession et qui sont donc plus difficiles à apprécier pour des gens qui ne sont pas membres de cette profession, nous croyons que les règlements ne devraient pas requérir d'approbation gouvernementale. Ils devraient entrer en vigueur sur simple adoption par le Bureau après qu'un avis a été envoyé à l'Office, donnant à l'Office un certain temps pour y répondre. Et cette réponse de l'Office, comme le suggérait le Conseil inter-

professionnel dans son mémoire, devrait se borner à dire si le règlement est conforme ou non à la loi habilitante. De cette façon, je pense que l'on pourrait ainsi épargner beaucoup de travail et à l'Office des professions et au Bureau des règlements, ce qui éviterait parfois au Bureau des règlements de trouver toujours de la sous-délégation.

Un mot de l'inspection professionnelle. Le projet de loi fait apparaître une nouvelle catégorie de personnes qui peuvent assister le comité d'inspection professionnelle dans ses fonctions. Ce sont les inspecteurs. Sur le plan purement théorique, il est peut-être possible de départager les fonctions de l'inspecteur de celles de l'enquêteur. Mais, sur le plan pratique, ça me semble beaucoup plus difficile. En effet, l'inspecteur, évidemment, peut procéder à l'inspection systématique des registres, dossiers et livres d'un professionnel, mais, évidemment, ceci peut l'amener à conclure qu'il y a un problème d'incompétence sur ce professionnel. L'inspecteur devrait-il alors se retirer et demander l'enquêteur pour poursuivre l'enquête? Ça me semble un peu superflu. Par ailleurs, l'enquêteur, dans sa procédure d'enquête, va nécessairement examiner les livres, registres et dossiers d'un professionnel parce que là se trouvent souvent les éléments qui vont permettre de conclure à une incompétence. Et, de toute façon, les deux fonctions possèdent les mêmes pouvoirs d'enquête et les deux assistent le comité dans ses fonctions. Alors, c'est une distinction qui nous parait plus factice que réelle.

Enfin, nous voudrions aussi insister sur un point de l'avant-projet de loi qui semble faire obligation au comité d'inspection professionnelle d'aviser le syndic chaque fois que son enquête révèle une infraction à une disposition quelconque des lois et des règlements. Ceci nous semble excessif. En effet, si le comité d'inspection professionnelle note que le professionnel a oublié d'afficher le permis sur son mur ou, encore, ne tient pas ses dossiers de façon tout à fait correcte, il peut très bien lui faire des recommandations et procéder à une visite de contrôle. Il ne sert à rien d'aviser le syndic, de faire faire une nouvelle enquête et d'aller en discipline pour une chose aussi banale. Nous pensons que le comité d'inspection professionnelle devrait pouvoir utiliser son discernement pour référer au syndic les cas d'infraction grave ou, encore, d'incompétence manifeste ou, encore, de refus d'obtempérer aux recommandations du comité d'inspection. C'est d'ailleurs ce qui se fait en pratique actuellement à la Corporation des médecins. C'est à peu près tout ce que j'avais à dire.

M. Roy: Le Dr Lair va vous parler du comité des plaintes et du syndic.

M. Lair (Rémi H.): M. le Président et M mes et MM. de la commission, je parlerai rapidement du comité d'examen des plaintes, du rôle du syndic et des syndics adjoints et aussi du comité de discipline. Quand on regarde l'avant-projet de loi, on constate que cet avant-projet de loi transforme ou propose la formation d'un comité d'examen des plaintes qui aurait en fait des pouvoirs quasi judiciaires en ce sens qu'on entendait, devant ce comité d'examen des plaintes, le syndic ou les syndics adjoints et, en plus, le professionnel qui est intimé, qui est visé par une plainte ainsi que la personne qui a demandé l'enquête et aussi tout autre témoin. Je soumets que ce genre de comité risque de fonctionner en parallèle avec le comité de discipline... et n'aura comme conséquence que d'alourdir le processus actuel qui, je vous le soumets, est déjà très lourd et qui permet toutes sortes de requêtes dilatoires de nature à retarder la procédure et non pas à protéger le public. (16 heures)

Mon expérience avec un comité d'examen des plaintes qui existe à la Corporation des médecins depuis déjà plus de 20 ans est la suivante: Nous soumettons que, si on est pour proposer aux corporations un comité examen des plaintes, il soit facultatif et qu'il regroupe un nombre suffisant de personnes pour émettre une opinion dépendant des questions qui sont abordées, et à la Corporation des médecins on n'a aucune objection à ce que des membres du public soient présents sur ce comité et, d'ailleurs, depuis toujours, on a deux personnes qui sont membres du comité. Chez nous, il y a huit médecins, et deux personnes du public, et ces deux personnes ne sont pas nécessairement des professionnels.

Et notre expérience est que ce comité d'examen des plaintes a souvent aidé à régler des problèmes beaucoup plus rapidement et de façon beaucoup plus juste que le processus disciplinaire. Il faut comprendre que la discipline, c'est un procès, c'est lourd, et mon opinion, c'est qu'on doit garder pour le processus disciplinaire, tel qu'il existe actuellement, les cas lourds. Il y a beaucoup de cas légers ou de fautes légères qu'on peut régler autrement que par le processus disciplinaire.

Si on regarde l'avant-projet, on constate également qu'on propose que l'Office établisse un formulaire de demande d'enquête. Nous, on croit que ce formulaire risque de causer plus de problèmes que de bienfaits. On pense que c'est un geste plutôt bureaucratique. Ça peut être compliqué pour une personne de remplir un formulaire. Ça peut également amener cette personne à laisser de côté les informations valables. Nous, on pense que ça serait beaucoup plus simple que la personne décrive, dans ses mots, dans ses termes, le problème qu'elle a pu vivre avec un médecin.

De toute façon, je suis convaincu qu'avec un tel formulaire la personne devra à nouveau

écrire d'autres données. Ça va juste retarder, à notre avis, la formulation de sa plainte. Quant au fait que l'Office des professions pourrait aussi établir un formulaire de plaintes à être adressé au comité de discipline, je pense qu'il faut faire confiance aux avocats qui travaillent pour les syndics au niveau des diverses corporations. Ces avocats ont réellement assez de connaissances et de compétence pour rédiger correctement une plainte disciplinaire.

Je pourrais, à la rigueur, comprendre que ce genre de formulaire pourrait aider les plaintes privées. Les plaintes privées, il n'y en a pas tant que ça, et notre expérience à la Corporation est la suivante: Les comités de discipline ont toujours aidé les plaignants privés à formuler correctement leurs plaintes. On constate également...

Le Président (M. Gautrin): M. Lair, je suis obligé de vous demander peut-être d'envisager de conclure parce que le temps qui vous était imparti arrive à terme; je ne veux pas être trop restrictif, mais je voudrais simplement vous le rappeler. Non? Alors, écoutez, par consentement, ce qui vous avait été refusé au début vous est accordé maintenant.

M. Lair: Me donnez-vous cinq minutes? Le Président (M. Gautrin): Bien sûr.

M. Lair: Alors, j'ai perdu un peu le fil. Je m'excuse.

Le Président (M. Gautrin): Prenez votre temps. Ce n'est pas...

M. Lair: On constate également que dans l'avant-projet... Si on est pour mettre sur pied un comité d'examen des plaintes dans les corporations, on suggère que les conclusions ou les avis transmis au syndic soient communiqués à la personne qui a porté la plainte ou qui a demandé qu'une enquête soit tenue. Il faut comprendre que dans ce genre de conclusion on peut trouver beaucoup de choses telles que des commentaires ou des recommandations qui soient faites à un médecin dans un but préventif et éducatif. Nous, on ne pense pas que ça servirait réellement la cause de la protection du public de rendre toutes ces recommandations-là et tous ces commentaires à la connaissance des parties impliquées. Il faut comprendre également que souvent ces décisions, ces conclusions sont prises sans que le médecin ait lui-même l'occasion de présenter une défense pleine et entière, de contre-interroger lui-même la personne qui présente des faits. Ici, il y a un problème et, pour cette raison-là, la Corporation n'est pas d'accord à communiquer aux plaignants ce genre de recommandation.

Il faut comprendre également qu'il y a des choses qui surprennent dans l'avant-projet. Qu'on demande au syndic de produire un rapport circonstancié 60 jours après le début de l'enquête, je trouve ça inutile pour la simple raison que, ou bien c'est un cas simple et ça ne prendra pas 60 jours, ou c'est un cas complexe et ça va prendre beaucoup plus que 60 jours, compte tenu qu'il faut obtenir des informations, il faut souvent obtenir des expertises et ces informations-là sont parfois difficiles à recueillir.

Je pense que cette demande ou cette proposition constitue une espèce de procédure bureaucratique inutile. On demande également au syndic ou on semble vouloir lui imposer de porter des plaintes et sans lui laisser à lui la discrétion de décider si ces plaintes sont justifiées. À ce moment-là, vous allez avoir un syndic qui ne sera qu'un simple enquêteur et qui ne pourra pas réellement signer les plaintes de la façon qu'il les signe actuellement. Si vous exigez qu'un syndic dépose une plainte à laquelle lui ne croit pas - il peut avoir des motifs sérieux pour ne pas y croire - à ce moment-là, ça ne donne absolument rien, il faut trouver une autre procédure. On a souvent dit également qu'un syndic ne peut être objectif parce qu'il est un employé d'une corporation. Il faut comprendre qu'actuellement les corporations qui ont beaucoup de plaintes ont des syndics et des syndics adjoints qui sont permanents et ces personnes-là ne peuvent être destituées qu'après un vote des deux tiers des membres du Bureau. Et je pense que cette garantie-là est une garantie d'indépendance, d'objectivité et d'impartialité.

Il faut également regarder certains autres points de l'avant-projet. On mentionne, entre autres, que les dossiers du comité de discipline devraient être accessibles. Je pense qu'il faut faire attention. Si on regarde les dossiers de discipline à notre Corporation, on retrouve là-dedans des informations de nature confidentielle, des dossiers médicaux, des profils de consommation de médicaments, des profils de facturation à la RAMQ, des rapports d'expertise et il y a beaucoup de ces éléments-là, si on prend par exemple le dossier médical, qui concernent des renseignements nominatifs et ils ne seront peut-être pas tous utilisés ou révélés au comité. Cependant, ils sont dans les dossiers. Et il faut faire attention avant de rendre tous ces documents-là accessibles. Il y a également une question qui est de remplacer l'enregistrement des dépositions par un sténographe, de remplacer ça par un enregistrement mécanique. Ici, je pense qu'on va faire face à des problèmes. C'est beaucoup plus facile de contester un enregistrement mécanique qu'un enregistrement par sténographe officiel. Et, comme beaucoup de nos causes, de plus en plus, se ramassent devant des instances de paix, le Tribunal des professions, la Cour supérieure et la Cour d'appel, on va avoir des problèmes à ce niveau-là, je pense, si on laisse de côté les dépositions par sténographe officiel.

On a également mis deux conditions pour condamner le plaignant privé aux déboursés. Il y en a une qu'on est prêts à accepter. C'est celle où effectivement tous les chefs seraient retenus, où le médecin serait trouvé non coupable sur tous les chefs. Mais l'autre condition qu'on met et qui est celle de la mauvaise foi, ça, je ne comprends pas, la mauvaise foi, c'est difficile à présumer, à démontrer. On présume plutôt la bonne foi et, ici, je pense que cette histoire de bonne ou de mauvaise foi, ça ne devrait pas figurer comme condition. Et il y a une chose sur laquelle je veux insister finalement, c'est qu'il m'est arrivé à plusieurs reprises comme syndic de faire face à des situations où un professionnel, un médecin avait eu un comportement tout à fait inacceptable, non professionnel, mais il n'y avait absolument rien dans la loi qui me permettait de conclure que ce professionnel avait commis une infraction. Il peut y avoir effectivement des situations où le comportement d'un professionnel peut s'avérer dérogatoire, mais il n'y a aucune infraction qui a été commise. Et, nous, à la Corporation, on recommande de revenir à ce qu'on appelle une clause omnibus où, et je lis: «En l'absence d'une disposition de la présente loi ou d'un règlement applicable aux cas particuliers, le comité de discipline décide, privativement à tout tribunal en première instance, si l'acte reproché est dérogatoire à l'honneur et la dignité de la profession.» Il faut comprendre que cette clause existe actuellement pour une seule corporation, qui est celle du Barreau, et ça peut rendre service dans certains cas. Et on l'a déjà eue à la Corporation, au Collège des médecins, avant 1973, et c'est une clause qui nous a permis de régler un certain nombre de problèmes.

Finalement, je voudrais également terminer par ceci. C'est qu'on veut donner au comité de discipline le pouvoir, d'une part, de rectifier sa décision - la Corporation est tout à fait d'accord avec ça parce qu'il peut y avoir des erreurs, effectivement - mais, où la Corporatioin n'est pas d'accord, c'est de donner au comité de discipline un pouvoir de rétractation lorsqu'on pourrait, à ce moment-là, évoquer, le procureur de l'intimé ou l'intimé lui-même pourrait évoquer un fait nouveau qui n'a pas été révélé pour x raison lors de l'audition en discipline et, à ce moment-là, on pourrait également invoquer un vice de fond et de procédure pour demander une réouverture d'enquête. Ce qui veut dire que, si on accepte ça, on amène encore de nouveaux délais, on va recommencer, on peut recommencer ad infinitum des causes devant le comité de discipline. Et, pour cette raison-là, on n'est pas d'accord avec ce pouvoir. Je vous remercie.

Le Président (M. Gautrin): En conclusion, monsieur...

M. Roy: Plusieurs modifications... (16 h 10)

Le Président (M. Gautrin): Brièvement, parce qu'on dépasse le temps, vous savez.

M. Roy: C'est important, ce projet-là, j'espère...

Le Président (M. Gautrin): Je comprends.

M. Roy: Plusieurs modifications au Code des professions proposées par l'avant-projet de loi sont de nature à préciser et à améliorer le fonctionnement du système professionnel au Québec. La Corporation professionnelle des médecins du Québec s'objecte toutefois à l'augmentation considérable des fonctions et des pouvoirs _. de l'Office proposée par cet avant-projet de loi. La preuve de la nécessité d'un tel accroissement des fonctions et pouvoirs de l'Office n'est pas faite. De telles modifications conduiraient à transformer l'Office en supercorporation, les corporations professionnelles devenant des organismes fantoches. Le budget de l'Office connaîtrait une augmentation considérable, entre parenthèses, les professionnels ne seront pas prêts à le financer, alors que le résultat serait une confusion des rôles, un alourdissement et un ralentissement du système professionnel pouvant aller jusqu'à la paralysie, surtout si l'on maintient le rôle et le fonctionnement du comité d'examen des plaintes tels que conçus dans l'avant-projet de loi.

La Corporation propose au contraire, à défaut de l'abolition de l'Office - ce qui serait peut-être un traitement chirurgical idéal dans le cas d'un cancer, on abolit la tumeur - de rendre l'Office des professions plus sobre dans l'exercice de ses fonctions et propose un assouplissement des mécanismes de réglementation professionnelle pour rendre le système professionnel plus efficace, plus adapté à l'évolution de la société, moins lourd et moins coûteux. La Corporation ne croit pas non plus que la transparence du système disciplinaire doive aller jusqu'à donner accès à toute personne aux documents produits devant le comité de discipline. Dans le cas de la Corporation des médecins, il s'agit habituellement de dossiers médicaux qui, par définition, contiennent des renseignements nominatifs et confidentiels. Le fait que les audiences soient publiques devrait suffire à l'exigence de transparence. Le système professionnel actuel comporte de nombreuses dispositions garantissant l'impartialité et la transparence de son fonctionnement, et je cite: Un organisme de surveillance de l'Office des professions, l'approbation de la réglementation par l'Office des professions au gouvernement, des administrateurs externes nommés par l'Office des professions siégeant au Bureau, au comité administratif sur les comités y compris le comité d'examen des plaintes, la présidence des comités de discipline assumée par un avocat nommé par le gouvernement, la possibilité pour une personne de porter plainte directement

devant le comité de discipline, l'appel devant une division de la Cour du Québec et le Tribunal des professions composé de trois juges, les audiences publiques du comité de discipline et du Tribunal des professions, la publication d'avis des décisions du comité de discipline et du Tribunal des professions. Jusqu'où doit-on aller dans l'ouverture au public sans risquer de détruire un système professionnel souvent cité en exemple dans les autres provinces ou à l'étranger? Comme on est les premiers à passer, M. le Président, et il se dit trop d'inexactitudes, de grossières erreurs, de fausses interprétations et de con-neries, j'aimerais avoir l'occasion de revenir devant vous à la fin de vos audiences.

Le Président (M. Gautrin): Attendez, ça, la liste des gens, ça viendra... Je prends note de votre demande et elle sera traitée par le comité directeur de la commission, j'imagine. Maintenant, il nous reste combien de temps? Vous avez pris combien de temps? Vous avez pris 30 minutes. Si je partageais le temps qui reste en 15-15, ça serait correct pour vous et pour vous?

M. Savoie: Ça va, ça.

Le Président (M. Gautrin): Ce serait correct... Non, non, le temps, il est minuté à la seconde. Alors, 15 minutes...

M. Savoie: Oui, d'accord. Je vous remercie-Le Président (M. Gautrin): ...et 15 minutes. M. le ministre.

M. Savoie: Je vous remercie, M. te Président. Alors, tout simplement, saluer évidemment le Dr Roy, M. Brière, M. Lair et M. Lapierre de même que Me Prévost, conseiller de... On a bien apprécié votre laïus sur 1847 et le Collège des médecins. On sait que vous n'étiez pas président à ce moment-là, malgré la rumeur a l'effet contraire.

Des voix: Ha, Ha, Ha!

M. Savoie: On apprécie également la présentation de votre mémoire très coloré, Dr Roy - il faut qu'il soit fidèle à lui-même - mais, malgré évidemment quelques commentaires désobligeants, je pense que l'ensemble du mémoire va certainement être regardé de près, surtout au niveau des recommandations du syndic. Je pense que tout le monde reconnaît qu'il y a des recommandations qui sont fort valables et des approches qui sont très intéressantes. Je voudrais tout simplement souligner un élément. Au niveau de la plainte, il y a une ambiguïté. Le comité des plaintes, vous dites: Bon, oui, ça devrait être finalement facultatif; si on veut le créer, on peut le créer; si on ne veut pas le créer, évidemment on ne devrait pas être tenu de le faire.

Puis, il me semblait qu'on a en vue également dans le document qu'on ne devrait pas l'avoir.

M. Lair: Non, si vous permettez, j'ai été un peu poussé par le temps. Voici ce que, nous, on recommande. C'est que les corporations qui veulent en faire un et qui ont le besoin d'en avoir un s'en créent un.

M. Savoie: Un comité des plaintes.

M. Lair: Des plaintes. Et c'est un comité qui devrait aviser le syndic sur la justification de citer un médecin en discipline ou non. Par ailleurs, si on regarde ce qui se fait chez nous actuellement, c'est un comité qui a également des pouvoirs de recommander et de servir des commentaires et, jusque dans un certain sens, même des réprimandes.

M. Savoie: Oui. Je comprends ça. C'est parce que ça ne suit pas exactement l'orientation que tenait le Conseil tout à l'heure dans le sens qu'on ne devrait pas avoir de comité des plaintes mais un comité de surveillance. Ça se ressemble un peu, vous allez dire...

M. Lair: II faut dire que le Conseil a voulu reprendre l'ensemble des propositions qui viennent des corporations.

M. Savoie: D'accord, oui, c'est ça. Alors, c'est un peu à part.

M. Roy: M. le ministre, c'est aussi un comité qui peut recevoir des intimés, des médecins à l'occasion pour leur faire des recommandations sur place.

M. Savoie: D'accord. Dites-moi donc, au niveau des plaintes pour fautes légères, on me dit que vous en réglez plusieurs assez rapidement aussi. Oui?

M. Lair: Oui. Effectivement... Vous savez, moi, quand j'ai une plainte, ce que je regarde, c'est quelle est la meilleure façon pour moi de protéger le public. Et ce n'est pas nécessairement en déposant une plainte, même si la plainte est fondée. Ce n'est pas nécessairement en déposant cette plainte-là devant le comité de discipline. Si c'est une faute légère, je perds mon temps devant le comité de discipline. Ça risque de durer un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans.

M. Savoie: Oui. D'accord.

M. Lair: Et j'aime mieux rencontrer le médecin, le faire venir au comité des plaintes, s'il le faut, et lui dire c'est où son problème et trouver d'autres mécanismes pour régler ce problème. On réfère un certain nombre de

cas - environ 40 à 50 par année - à l'inspection professionnelle. On en réfère également à l'éducation médicale continue. On a aussi des médecins qui ont des problèmes de santé. On les réfère en thérapie. On réfère aussi certains médecins au niveau du comité administratif. Il y a d'autres solutions que de la discipline pour régler des problèmes de médecins.

M. Savoie: Vous comprendrez qu'on cherche des réponses plus courtes parce que vous mangez mon temps d'une façon additionnelle. Ça rentre dans mon temps, vos réponses.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Attendez! C'est moi qui gère le temps.

Des voix: Ha, ha, ha! M. Savoie: Oui, Dr Roy.

M. Roy: M. le ministre, il y a une très grande méconnaissance du public et de bien des personnes sur le rôle d'un comité de discipline. Un comité de discipline, ce n'est pas un tribunal civil, ça ne donne pas des indemnités et ce n'est pas un tribunal qui fait des réparations, qui fait de l'indemnisation. C'est un tribunal qui fait de la prévention, de l'éducation pour empêcher la récidive, pour empêcher que des actes semblables soient posés par un professionnel. Ce n'est pas du tout le but poursuivi par un tribunal civil et les gens confondent ça. Souvent, les gens veulent avoir réparation, veulent avoir un montant d'argent pour parer à des erreurs qui ont été commises. Ce n'est pas la bonne place, un tribunal de discipline.

M. Savoie: Mme la députée...

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne.

M. Savoie: Vous, il vous en reste 15.

Le Président (M. Gautrin): Vous avez 15 minutes.

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. Savoie: C'est ça?

Le Président (M. Gautrin): Oui et établir... Que vous pourrez prendre par tranches de 10.

Mme Caron: Alors, M. Roy, M. Brière, M. Lapierre, M. Lair, M. Prévost, bienvenue à notre commission. J'ai lu attentivement votre mémoire et j'aurais évidemment quelques questions à vous poser. Parmi les éléments intéressants, nouveaux, positifs, peut-être, que je voudrais soulever, qui touchent plus particulièrement la protection du public, je pense qu'il y a peut-être lieu de souligner la clause omnibus à laquelle vous faisiez référence à la fin de votre intervention et qui permettrait peut-être de vous permettre d'intervenir lorsqu'il y a effectivement une faute mais qui n'est pas incluse dans votre Code de déontologie.

Vous avez aussi fait part de la difficulté à démontrer la mauvaise foi d'une personne. En fait, lorsque quelqu'un dépose une plainte, on devrait peut-être normalement prendre pour acquis qu'elle le fait de bonne foi. Et vous avez également, dans votre mémoire, en page 20, précisé votre accord au niveau de l'article 155 du Code des professions, proposé par l'article 69 de l'avant-projet, où la Corporation voudrait aller plus loin. C'est-à-dire que la Corporation croit que les paragraphes premier et deuxième du premier alinéa du nouvel article 155 devraient être modifiés pour en faire disparaître les mots «sauf s'il a purgé sa sentence ou qu'il a obtenu le pardon». Et je pense que j'aimerais peut-être vous entendre un petit peu plus sur ce point particulier.

M. Lair: On peut bien en parler. Vous savez, quand on fait face à ce genre de situation, ce sont des cas qui sont publics, qui ont fait la manchette des médias et c'est évident que le comportement d'un médecin dans une telle situation est une atteinte grave à l'honneur et à la dignité de la profession. Et ça met aussi en danger la relation de confiance qui doit exister entre un professionnel et son client. Comment voulez-vous qu'un client fasse confiance à quelqu'un qui a fait l'objet d'une condamnation de cette nature-là? On a actuellement un article 155 qui ne prévoit pas ces exceptions et ça fonctionne relativement bien. Il a pu y avoir, je concède, quelques cas où on a amené un médecin en discipline puis peut-être que ce n'était pas absolument nécessaire. Mais la loi l'imposait. Moi, je pense que si on met cette exception-là on risque d'avoir, dans nos corporations, des gens qui ne méritent pas la confiance du public. C'est juste ça.

Mme Caron: Donc, vous souhaitez aller plus loin. (16 h 20)

M. Lair: Je souhaite garder ce qu'on a actuellement. On a un article qui nous permet, qui nous oblige même à déposer automatiquement une plainte contre tout professionnel trouvé coupable par un tribunal canadien d'un acte criminel par voie de mise en accusation, et c'est ce que je souhaite garder, et non pas mettre des exceptions qui vont faire qu'il suffirait qu'il ait purgé sa sentence de quelques mois - parce qu'il peut être condamné à deux ans et purger deux, trois mois. Si, nous, on apprend après deux, trois mois qu'il a fait cette chose-là, on ne peut rien

faire? Ça n'a pas de sens.

M. Roy: II semble qu'on ne peut jamais être gagnants. Si on suit la loi et que, après que quelqu'un a purgé sa peine, il est réintégré, à ce moment-là, on se fait critiquer. Si, par ailleurs, ça prend du temps, ou, apparemment, quelqu'un est trouvé innocent, on se fait encore critiquer. Alors, un moment donné, il faut savoir sur quel pied danser. Il ne peut pas y avoir trois, quatre sortes de régimes de justice au Canada. Encore aujourd'hui, on parle vraiment de médecins qui ont déjà été condamnés, et là on voudrait que les médecins qui ont déjà été condamnés, qui ont subi leur peine soient obligés d'avoir une affiche dans leur dos en disant: J'ai déjà été suspendu pour deux ans, ou trois ans, ou quatre ans, ou cinq ans par ma profession. Est-ce qu'on fait ça dans le système ordinaire de la société? Est-ce que les chartes des droits s'appliquent aux professionnels comme aux citoyens ordinaires? Où est-ce qu'est la réhabilitation? Il faut, un moment donné, que les gens sachent qu'il y a des lois, qu'on bonifie les lois pour protéger le public, protéger les citoyens partout, partout, dans tous les domaines. Mais, un moment donné, qu'on ne chiale pas lorsque les lois sont appliquées, et qu'on n'est pas satisfait, par ailleurs, des lois.

Mme Caron: M. Roy, vous avez parlé, et j'avoue que vous m'avez particulièrement surprise lorsque vous nous avez dit que jamais l'Office, en 18 ans, n'avait fait de surveillance ou ne vous avait... n'avait demandé de comptes à la Corporation des médecins concernant le système disciplinaire.

M. Roy: Les seuls moments où on a rencontré l'Office - c'a été très rare qu'on a rencontré l'Office dans son ensemble - c'a été généralement pour discuter de projets de règlement, de projets de règlement, mais pas pour analyser, par exemple, le rapport annuel, la structure; c'est ça qu'on pense qui devrait être le rôle de l'Office: s'asseoir - pas, évidemment, tous les ans avec toutes les corporations: peut-être que ça serait trop fastidieux, trop long -mais une fois de temps en temps, faire ce qu'on appelle une inspection professionnelle, un agrément, comme nous on fait dans les hôpitaux et dans les cabinets de médecins, et dire: Écoutez, on prend la journée, ou on peut prendre deux jours, et on regarde comment ça se passe. On a les rapports annuels, on a les statistiques. Mais au lieu de faire ça, l'Office a pondu récemment une espèce de patente administrative qui n'a ni queue ni tête qui s'appelle les indices de performance, pour mesurer les façons des corporations d'accomplir leur tâche en les comparant les unes aux autres. C'est du vrai charabia, incompréhensible. Je comprends que ça puisse coûter cher, faire fonctionner l'Office, si on passe des mois et des mois à préparer des documents semblables.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Caron: M. Roy, dans le mémoire de la Fédération nationale des associations de consommateurs, ce matin, on faisait référence, en page 13, à votre corporation professionnelle; alors, je voudrais vérifier avec vous si, selon vous, ces chiffres sont exacts, et comment, peut-être, on peut les expliquer.

Alors, «si on prend - et je les cite -l'exemple de la Corporation professionnelle des médecins où un comité d'examen des plaintes existe depuis 1970, il y a quand même 96 % des plaintes qui ne se rendent pas au comité de discipline. L'efficacité et le rendement de ce comité au niveau du traitement des plaintes est plutôt faible. La création d'une telle instance au sein de chaque corporation professionnelle, telle que proposée dans l'avant-projet de loi, ne constituerait pas une garantie pour les citoyens et citoyennes que le système de traitement des plaintes des corporations professionnelles serait crédible et impartial.» Est-ce que, selon vous, ces données sont justes, que 96 % des plaintes ne se rendent pas au comité de discipline dans votre Corporation?

M. Lair: C'est vrai, mais ce qu'est... C'est vrai, effectivement, grosso modo, parce qu'il faut comprendre qu'il faut faire une distinction entre une plainte formelle, assermentée devant un comité de discipline, et une plainte qui vient d'un patient. On peut regrouper plusieurs plaintes d'un patient et en faire une seule plainte. Ceci étant dit, les statistiques dont vous mentionnez sont à peu près vraies, sauf que, même si ça ne se rend pas au comité de discipline, ça ne veut pas dire que, comme on a dit ce matin, que la plainte est rejetée. Elle n'est pas nécessairement rejetée. On retient à peu près, grosso modo, 45 % à 50 % des plaintes. Le fait de retenir une plainte, ça ne veut pas dire qu'il faut aller en discipline; ça veut dire qu'il faut faire quelque chose, et là on peut prendre des mesures préventives, on peut mettre en place des mécanismes, des rencontres, ou encore des inspections ou des séances d'éducation pour régler un problème. Alors, quand on dit que 96 % des plaintes sont rejetées, ce n'est pas la vérité.

M. Roy: En fait...

M. Lair: On les retient et on regarde ce qu'il faut faire. Est-ce qu'il faut aller en discipline? Quand il faut y aller pour les fautes lourdes, on y va. Mais on ne s'amuse pas à aller en discipline pour des fautes légères, ce qui ne règle absolument rien. Il faut regarder c'est quoi, le meilleur mécanisme pour protéger le public, et c'est ce qu'on fait, mais c'est mal compris.

M. Roy: Mme la députée de Terrebonne, en fait, je le dis souvent, c'est comme les gens qui se plaignent à un poste de police. Durant la journée, la police peut recevoir 100 plaintes. Combien de ces plaintes-là vont aller, effectivement, devant le tribunal pénal ou criminel? Très, très, très peu. Il peut n'y en avoir aucune. En fait, quand on analyse les plaintes qui sont portées ici, le traitement qui y est fait, on compare ça avec le rapport du Protecteur du citoyen. J'ai apporté, effectivement, pour laisser à la commission, des réponses au rapport du Protecteur du citoyen. Quand on regarde le rapport du Protecteur de 1990-1991, le Protecteur a refusé 11 136 des 20 178 plaintes, demandes d'intervention, soit 54 % de ces demandes qui ont été refusées d'emblée. De plus, 935 demandes ont été retirées par les demandeurs, soit 4,5 %. En fait, à la fin, il y a seulement eu 2468 demandes qui ont été acceptées, mais en traitement. Qu'est-ce que vous voulez? Les plaintes, ça veut dire que n'importe qui peut se plaindre de n'importe quoi, mais il y a toutes sortes de gravité à l'intérieur d'une plainte. Quand on parle de 4 %, c'est 4 % qui vont devant le comité de discipline. Comme le dit le syndic, le Dr Lair, il y a 50 % des autres plaintes et plus qui sont étudiées par les syndics, par le comité d'examen des plaintes et pour qui il y a des recommandations qui sont faites.

Mme Caron: Merci, M. Roy. Comme ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière voulait poser une petite question...

Le Président (M. Gautrin): J'ai bien compris, là. Par règle d'alternance, je vais demander aux ministériels s'ils ont une question. Il vous reste encore 10 minutes. Après, je reviendrai à la députée des Chutes-de-la-Chaudière et, éventuellement, au ministre, par règle d'alternance.

Mme Caron: Merci.

M. Savoie: II ne leur reste plus de temps, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): non, non, ce n'est pas vrai. il reste du temps à la députée des chutes-de-la-chaudière pour pouvoir poser sa question.

M. Savoie: Je vais lui permettre de poser sa question, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Alors, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez la parole.

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. Dans votre mémoire, vous déplorez les lenteurs administratives. Vous en avez d'ailleurs fait allusion dans votre exposé de départ. À la page 4, j'ai été surprise moi aussi de voir qu'il pouvait y avoir des délais de quatre ans ou six ans pour adopter des règlements. Par ailleurs, et sans vouloir être méchante, je pense que vous allez comprendre mon franc-parier, je sais que, parfois, il peut arriver qu'il y ait des lenteurs aussi du côté des corporations. Je voulais faire référence un petit peu au dossier des sages-femmes où le gouvernement a légiféré depuis trois ans, voyez-vous, et où il y a mésentente. Le dossier est bloqué et on n'a pas de projet de réalisé.

De toute façon, ceci étant dit, ce que je voulais savoir en clair, vous avez parlé un petit peu, tout à l'heure, des charabias administratifs qui se passent à l'Office. J'imagine que c'est en partie à ça que vous attribuez ces lenteurs-là. À quoi attribuez-vous ces lenteurs-ià? Parce que je trouve que c'est beaucoup aussi. Ce serait quoi, pour vous autres, un délai acceptable? Comment on peut corriger cette situation-là?

Le Président (M. Gautrin): M. Brière.

M. Brière: Je pense que la réponse réside beaucoup plus au niveau de l'Office et probablement du Bureau des règlements qu'à notre niveau à nous. Je pense que l'Office peut mieux que nous répondre à cette question-là parce que c'est lui qui étudie nos règlements avec minutie, dans les détails, qui nous rencontre, qui en discute encore, qui fait des recommandations. Il y a des moments, par exemple, où il y a eu un blocage systématique, et c'est dans le cas particulièrement du règlement sur les conditions d'émission du permis, parce que même si les élus du peuple avaient décidé, en 1974, que les corporations pouvaient imposer des examens et des stages, quelques années après l'entrée en vigueur du Code des professions, l'Office contestait l'immatriculation et les conditions supplémentaires. Je me souviens même des auditions publiques qui ont été tenues sur les conditions supplémentaires et, pendant tout ce temps-là, notre règlement a été bloqué jusqu'à ce qu'on finisse par admettre que, oui, les conditions supplémentaires pouvaient exister. Ça a pris 12 ans. Il y a des choses comme ça.

M. Roy: C'est ce qu'on voulait dire quand on parlait d'idéologie dans notre mémoire. Pour des motifs idéologiques, l'Office, à un moment donné, a bloqué des règlements. Qu'est-ce que vous voulez? Ça pourrait être beaucoup plus rapide, beaucoup plus efficace. Évidemment, je ne peux pas laisser passer l'allusion que vous avez faite au sujet des sages-femmes parce que vous allez en entendre parler dans les jours qui viennent. Il va y avoir des communiqués de presse.

Mme Carrier-Perreault: Même chose dans votre cas.

M. Roy: Faites la différence entre les corporations professionnelles et les syndicats professionnels, les associations professionnelles, une très grande différence. J'aimerais ça avoir plus de temps pour vous donner... Je ne parle pas de vous instruire. J'avais envie de dire de vous instruire, mais de vous donner plus d'information sur ce qui se passe en réalité. Vous manquez vous autres aussi d'information. Si je vous en donnais, vous seriez peut-être éclairée et vous penseriez différemment. Le dossier des sages-femmes est un dossier pourri. Ça va éclater dans les jours qui viennent. Ça ne marchera pas. Je sais qu'il y a un projet-pilote dans votre coin, je le sais très, très bien. Je connais ça, les Chutes-de-la-Chaudière, mais écoutez...

Mme Carrier-Perreault: II y en a plusieurs au Québec.

M. Roy: ...je sais qu'il y a des problèmes parce que ça se fait en opposition avec les médecins.

Le Président (M. Gautrin): Veuillez vous adresser à la présidence dans la commission qui, elle, transmet les remarques aux membres.

Mme Carrier-Perreault: II y en a plusieurs projets-pilotes.

Le Président (M. Gautrin): C'est le décorum, vous le savez bien. Mme la députée.

Mme Carrier-Perreault: Disons que j'irai rencontrer le Dr Roy après la rencontre ici. (16 h 30)

Le Président (M. Gautrin): Merci. Vous avez terminé? M. le ministre et député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Est-ce qu'ils ont terminé leur temps, M. le Président?

Le Président (M. Gautrin): Vous avez terminé votre temps, vos questions? Merci. Alors, M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Ah, il ne leur reste plus de temps?

Le Président (M. Gautrin): Non.

M. Savoie: Non, c'est fini pour eux autres?

Le Président (M. Gautrin): C'est ça, oui.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Alors, pour revenir finalement à la liste, est-ce qu'on serait capables d'avoir une liste rien que pour nous donner une idée de l'ordre de grandeur?

Une voix: Liste de?

M. Savoie: Une liste sur les plaintes que vous traitez d'une façon sommaire et les fautes vénielles que vous traitez finalement à l'interne?

M. Lair: Ah, une liste de grandeur. M. Savoie: Oui.

M. Lair: Je dirais peut-être quelque chose comme 40 %. Vous savez, il faut comprendre aussi que les plaintes ne sont pas toutes des plaintes de patients. Nous, dans nos statistiques qu'on appelle plaintes, on a des problèmes qui nous sont soumis sous forme de demande d'intervention sans que ce soit réellement des plaintes. Et les statistiques, on peut leur faire dire n'importe quoi. Alors, c'est pour ça que je suis un petit peu prudent quand je vous soumets des chiffres en pourcentage.

M. Savoie: On serait capables d'examiner ça, cette liste-là, oui?

M. Lair: Oui, on pourrait sûrement vous donner le nombre de cas où on a soumis des recommandations et les commentaires où on a fait des interventions autres que la discipline pour des cas qu'on considère, nous, comme pas graves.

M. Savoie: D'accord.

M. Roy: M. le ministre, juste pour ajouter là...

M. Savoie: Non. Je voudrais passer à d'autre chose, si vous me permettez. C'est rien que pour avoir une idée de la .liste. C'est parce que vous allez manger tout mon temps encore, là, Dr Roy!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Roy: Mais sur le même sujet, M. le ministre, je veux le dire quand même. Sur plus que 10 000 plaintes - on en a fait la compilation depuis les 18 dernières années - on en a entendu parler d'une couple, le cas Bisson, le cas anchet-tin dans les journaux, les affaires évidemment à sensation. Et vous m'avez empêché de parler du cas Bisson qui est un cas que je connais parce que, moi aussi, j'ai des parents à Saint-Joseph-de-Beauce, moi aussi je savais ce que cette femme-là faisait. Moi aussi je sais ce qu'elle a eu comme condamnation ailleurs. Alors, qu'est-ce que vous voulez? Le seul endroit où elle a eu de la sympathie, c'est au comité de discipline de la Corporation des médecins. Et quand elle a été trouvée... que le médecin a été trouvé non coupable, c'est au Tribunal des professions formé de juges et non pas de médecins.

Le Président (M. Gautrin): M. Roy, je vous remercie.

M. Roy: II y a plein d'inexactitudes.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors, M. le ministre, sur une autre question.

M. Savoie: On devrait lui poser une «switch», M. le Président. Ça irait... Je pense que...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Je vous demande de respecter nos invités dans leurs interventions.

M. Savoie: Alors, quelques commentaires très rapides au niveau de votre mémoire, au niveau de la corporation fantôme. Je pense qu'il voudrait que ce soit... On ne peut pas laisser ça sous aucune ambiguïté. On ne peut laisser personne faire une intervention dans ce sens-là, en laissant croire, même de la part du Dr Roy, pour aucune considération, qu'on veut créer, qu'on veut réduire l'indépendance des corporations professionnelles, qu'on veut, par exemple, créer des corporations fantômes.

On comprend le sens de votre intervention. À votre façon, vous nous dites: Si vous continuez comme ça, on n'a plus cette indépendance et on va être des corporations fantômes. Mais ce que je peux vous dire, c'est que le résultat ne vise d'aucune façon et le résultat ne sera pas là... Ce qu'on veut, c'est des corporations professionnelles en pleine santé, capables de critiquer, comme vous le faites, le travail du gouvernement, le travail de l'Office. C'est peut-être un petit peu moins dur, un petit peu plus équilibré...

M. Roy: Oui, parce que...

M. Savoie: Mais c'est ce qu'on recherche, et le système a été conçu comme ça, et c'est ça qu'on veut, on ne veut, d'aucune façon, créer une supercorporation. L'Office a un rôle à jouer et bien identifié. Il veut être en mesure de le jouer; les corporations doivent le faire aussi, et le Collège des médecins, malgré beaucoup de difficultés, fait un effort de façon constante, dans un milieu particulièrement difficile, de voir au développement de mécanismes de protection assurée.

Je pense que l'ouverture que vous avez faite au niveau des plaintes est louable. Je pense que ça, c'est très intéressant. On l'apprécie et, évidemment, d'autres interventions que vous faites au niveau des mécanismes, des suggestions que vous avez faites, c'est également louable. Ce qu'on constate, par exemple, c'est qu'il y a des efforts additionnels à faire. Le public n'est pas content et vous le savez fort bien, il n'est pas content du Collège des médecins. Je pense qu'à ce niveau-là l'image est très claire. Je pense qu'on a eu des incidents dernièrement et ça nous demande des interventions.

Maintenant, je ne dis pas que vous êtes à blâmer et je ne lance pas la pierre. On est tous dans le même bateau. On fait tous face à la même réalité et on doit tous réagir. Tout ce que je peux faire, à ce moment-ci, c'est finalement de dire qu'au moins, dans votre mémoire, il y a un réalisme, il y a une approche. Les interventions du Dr Lair ont été excellentes. L'approche est très viable et je suis certain que, Dr Roy, vous allez reconnaître qu'il faut maintenir nos efforts de ce côté-là. Ça fait partie de notre travail et ça fait partie du vôtre de collaborer dans cette orientation pour le bien de la protection du public.

M. Roy: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Gautrin): Dr Roy.

M. Roy: On ne veut pas vous forcer à nous aimer. On veut simplement que vous appréciiez ce qu'on fait et nous traiter justement. Ce qu'on n'apprécie pas, c'est quand l'Office des professions se substitue à son pouvoir et vient critiquer injustement le travail de certaines corporations, dont la nôtre. Ça, on ne peut pas l'accepter. On accepte que l'Office contrôle ce qu'on fait, il est le bienvenu chez nous mais on n'accepte pas qu'il prenne des positions publiques irresponsables, illégales sur des sujets qu'il ne connaît pas du tout. Ça, on ne peut pas l'accepter. Et, s'il y a des mauvaises perceptions dans le public, c'est dû à ces choses-là. C'est bien sûr, on juge une corporation sur deux ou trois petites affaires et on ne nous laisse même pas la chance de l'expliquer et quand on l'explique, évidemment, c'est tout rapporté faussement et de façon partielle, parcellaire par les médias qui ne cherchent que la sensation. Je dois vous dire moi que la Corporation fait très bien son travail et je vous défie de prouver le contraire. Je vous invite à venir la voir, j'invite l'Opposition également à venir nous visiter. On vous ouvre les portes. Je l'ai dit à des journalistes souvent, mais ils ne viennent jamais. Ils critiquent des fois mais ils ne viennent jamais. Alors, je vous invite, venez voir ce qu'on fait et je peux vous assurer qu'on fait le travail que vous nous avez demande-Le Président (M. Gautrin): Merci.

M. Roy: ...dans le Code des professions et notre loi professionnelle.

Le Président (M. Gautrin): il reste deux minutes aux députés de l'Opposition.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, évidemment nous allons prendre ce temps pour vous remercier de votre collaboration. Vous nous

avez donné des éléments nouveaux, des éléments intéressants. Je pense qu'il apparaît très clairement que la Corporation professionnelle des médecins est une des corporations que le public connaît le mieux. Donc, c'est sûr qu'au niveau du système disciplinaire nous avions davantage de questions à vous poser puisque les cas particuliers qui ont été soulevés relevaient de la Corporation professionnelle des médecins. Moi, M. Roy, j'aimerais que vous puissiez déposer le document dont vous nous avez parlé concernant le Protecteur du citoyen et je vous remercie de votre participation.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. le ministre. Les ministériels ont encore quatre minutes, est-ce que vous les prenez?

M. Savoie: Oui, merci, M. le Président, alors compte tenu du retard que nous avons, je pense qu'il est entendu que nous allons nous revoir sur ce dossier. Alors, au fur et à mesure qu'on avance au niveau du projet de loi, suite à ces consultations, vous pouvez être certain qu'on va communiquer avec les représentants du Collège. Je vous remercie beaucoup pour votre mémoire.

Le Président (M. Gautrin): Dr Brière, Dr Lapierre, Dr Roy, Dr Lair, Dr Prévost, la commission vous remercie pour votre présentation. Je suspends les travaux pour trois minutes de manière à permettre à l'Association des groupes d'intervention en défense de droit - Santé mentale du Québec et au Regroupement des ressources alternatives en santé mentale de venir se présenter.

(Suspension de la séance à 16 h 38)

(Reprise à 16 h 42)

Le Président (M. Gautrin): La commission de l'éducation va reprendre ses travaux. Avant de vous donner la parole, Mme Ménard et M. Bousquet, je crois comprendre que j'ai une demande de dépôt de document.

Alors, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. J'aimerais que soit déposé le document du Dr Augustin Roy concernant le Protecteur du citoyen.

Document déposé

Le Président (M. Gautrin): Je crois que le document est pertinent. Le document est déposé à la commission.

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Mme Ménard et

M. Bousquet, vous connaissez les règles habituelles dans nos commissions. Vous avez une période de temps d'une heure qui est partagée en trois périodes de 20 minutes: 20 minutes pour vous permettre de présenter votre mémoire, 20 minutes au parti ministériel pour vous poser des questions - il peut être fractionné en partie - et 20 minutes à l'Opposition pour aussi faire le même travail. Alors, vous avez la parole.

Association des groupes d'intervention

en défense de droits - Santé mentale

du Québec et Regroupement des ressources

alternatives en santé mentale du Québec

(AGIDD-SMQ et RRASMQ)

Mme Ménard (Fernande): Oui. Alors, si vous voulez bien, je vais commencer. Étant donné que nous ne sommes sûrement pas des vedettes ici aujourd'hui - on en a vu avant nous - si vous voulez bien, on va...

Le Président (M. Gautrin): Les gens les plus humbles sont souvent des vedettes.

Mme Ménard: ...nous allons présenter nos associations, parce qu'on pense que c'est important que vous sachiez qui nous sommes.

Alors, le Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec - je représente ce groupe aujourd'hui - est né dans les débuts des années 1980. Le Regroupement est à la fois regroupement et mouvement. Il constitue un lieu de parole et d'action pour des personnes qui, en raison de problèmes de santé mentale, sont considérées et traitées comme des exclues au sein de notre société. Il existe très peu de lieux démocratiques qui permettent une telle expression dans nos structures actuelles. Le Regroupement est composé de 90 groupes membres répartis dans toutes les régions administratives du Québec. Ces groupes sont variés quant à leurs objectifs et à leurs activités: entraide, hébergement, défense de droits, insertion au travail, milieu de jour, écoute, intervention de crise, et j'en passe. Usagers et usagères, intervenants et intervenantes partagent la même volonté d'offrir aux personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale le droit à l'alternative, c'est-à-dire à une façon autre que celle préconisée par le réseau public de psychiatrie ou par le secteur privé, de faire face à la souffrance émotionnelle.

Un des objectifs du Regroupement est de faire en sorte que la personne aux prises avec des problèmes de santé mentale redevienne partie prenante de son histoire et partie prenante de la société. Le Regroupement favorise donc l'association entre psychiatrisés, l'implication des psy-chiatrisés dans toutes les étapes et les structures de fonctionnement des ressources, c'est-à-dire c.a., planification des activités, représentation à l'extérieur, travail thérapeutique d'accompagné-

ment de pairs, etc. Cela s'avère impossible dans le réseau public. Les services, même très personnalisés, très humains, très corrects maintiennent l'individu dans une relation de dépendance où il n'est que consommateur de services. Le Regroupement vise à briser ce modèle et à proposer une façon différente de concevoir la personne au centre du système.

Nous savons que l'appellation «psychiatrisé» en choque plusieurs, à commencer par les psychiatres. Elle dérange aussi ceux et celles qui disent que ce mot entretient les préjugés dans la population. Or, ce terme, que nombre de psychia-trisés eux-mêmes ont choisi de se donner et de projeter sur la place publique, ne fait que renvoyer à la société elle-même cette évidence qu'il existe bel et bien chez nous un pouvoir psychiatrique qui opprime et que la première forme de préjugé consiste à ne pas le reconnaître.

Historiquement, le Regroupement a été le premier organisme au Québec à se préoccuper activement de la défense des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. Ce faisant, il renouait avec le fameux «Les fous crient au secours» de Jean-Charles Pagé, un psychiatrisé interné à Saint-Jean-de-Dieu et dont le livre, plus que les recours juridiques existants à l'époque, allait lever le voile sur les conditions de vie dégradantes des personnes internées et sur la violation systématique de plusieurs de leurs droits fondamentaux. Il est significatif, en effet, que, parmi les groupes à l'origine du Regroupement, les ressources axées résolument sur la défense de droits aient pris une importance capitale. Les premières sorties publiques du Regroupement ont remis en cause le système asilaire, le pouvoir psychiatrique et les préjugés de la société face a tous ceux et celles qu'on appelle les «fous». À travers ses préoccupations, le regroupement a questionné la curatelle, remis en cause également la Loi sur la protection du malade mental, contesté l'inefficacité des recours pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. On s'est aussi prononcé à maintes reprises pour réclamer un système efficace de défense des droits des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale; 90 groupes membres, ça veut dire que c'est des milliers et des milliers de personnes dont la plupart ont été victimes de la psychiatrie et qui ont très peur du système et qui jamais ne porteraient plainte parce qu'ils auraient peur. C'est au nom de ces personnes-là qu'on vient parler aujourd'hui.

M. Bousquet (Mario): L'Association des groupes d'intervention en défense de droits-Santé mentale du Québec, l'AGIDD-SMQ, que je représente aujourd'hui, a été fondée lors de son assemblée générale le 7 décembre 1990. Il s'agit en fait d'une transformation du groupe Auto-psy provincial (Autonomie-Psychiatrisés). Des groupes de promotion et de défense de droits en santé mentale se sont alors joints aux cinq Auto-psy pour former cette association. Auto-psy a été créé en 1980 et s'est donné comme mandat la promotion et la défense des droits des personnes ayant ou ayant eu des problèmes de santé mentale. En plus d'avoir développé une expertise dans la défense de droits individuels et collectifs, Auto-psy s'est impliqué dans plusieurs dossiers politiques, présentation des mémoires à la commission de la culture, étude de la loi d'accès aux documents; commission des affaires sociales, étude du projet de la politique de santé mentale.

Auto-psy provincial a également produit des vidéos relatant notamment les conditions de vie des personnes ayant un vécu psychiatrique, dont «De la matrice à l'asile» en 1982, «La psychiatrie va mourir» en 1982, «Salaire de rien» en 1984, «Les gens qui doutent» en 1984. Comme autre document de vulgarisation, Auto-psy a produit un guide des droits ainsi qu'un guide des médicaments du système nerveux central.

En 1989, la politique de santé mentale vient mettre sur pied des groupes de promotion et de défense des droits. Auto-psy sent alors le besoin de se rallier à ces groupes au sein d'une nouvelle association, AGIDD-SMQ, dans un but de soutenir à un niveau provincial le développement de la promotion et la défense des droits par un regroupement d'usagers et usagères. Plus de 37 groupes sont membres de l'AGIDD-SMQ. Ils se sub... Ils se sub... En tout cas, ils se divisent en trois catégories.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gautrin): Ce n'est pas grave.

M. Bousquet: Les groupes d'entraide et d'accompagnement - faisant exclusivement la défense de droits - des groupes de promotion-vigilance - avec volet droits - et les comités de bénéficiaires des institutions psychiatriques.

Pourquoi nous présenter devant la commission parlementaire chargée d'étudier l'avant-projet de loi concernant le Code des professions? En tant qu'organismes provinciaux regroupant des usagers et usagères des services de santé et des services sociaux et plus particulièrement dans le champ de la santé mentale, nous nous réjouissons de voir au menu législatif la réforme des corporations. La société québécoise est en droit de s'attendre à un véritable débat sur le fonctionnement et le rôle que l'on confie à ces corporations, principalement au niveau des syndics et des comités de discipline.

Notre expérience au niveau des corporations se situe davantage au niveau des psychologues, des médecins, des psychiatres, des travailleurs sociaux. Notre position en tant que regroupements provinciaux nous amène très souvent et

malheureusement à faire face à un constat d'impuissance et d'indignation en ce qui a trait aux droits de l'usager et l'usagère d'en appeler d'une corporation.

Un système qui a perdu toute sa crédibilité. Afin de mieux illustrer l'inefficacité des corporations en matière disciplinaire, point n'est besoin de citer de noms, quelques chiffres suffisent. Ainsi, pour un total de 80 625 182 actes médicaux dont 3 698 402 en psychiatrie, 467 demandes d'enquête ont été retenues par le syndic, dont seulement 15 furent transmises au comité de discipline. Cette même corporation, rappelons-le, regroupe plus de 16 557 membres. Le nombre d'enquêtes totalise à peine 005 % des actes et ne touche que 2,2 % des membres. (16 h 50)

Que faut-il en conclure? Que notre système de santé est excellent? Que les professionnels sont vraiment au-dessus de tout soupçon? Comment peut-on prétendre avoir un système de défense des intérêts du public crédible avec de tels chiffres? Aucune unité de production n'a la prétention d'une telle perfection. Pour leur part, l'ensemble de nos membres ont fait le deuil de leurs attentes face à ces supposés mécanismes de recours. D'ailleurs, l'Office lui-même admet n'avoir reçu, en 1989-1990, que 31 plaintes relatives au système disciplinaire. En 1988-1989, le rapport annuel ne mentionnait que 40 plaintes concernant les mécanismes disciplinaires, et ce, face à 12 corporations différentes. Si l'on considère le peu de crédibilité dont jouissent les syndics, si l'on considère également que le recours à l'Office lui-même est peu connu du public, le nombre de plaintes peut être considéré comme énorme. Il est surtout significatif de l'ampleur du problème. Il nous faut donc revoir ces mécanismes de toute urgence.

Mme Ménard: Les principes généraux en contradiction avec les rôles dévolus aux corporations. La Charte canadienne des droits et libertés et la Charte des droits et libertés de la personne du Québec ont pour effet de renforcer Tes droits des citoyens et citoyennes en reconnaissant plusieurs droits fondamentaux. Ces chartes imposent l'obligation d'agir et de prendre des décisions avec objectivité, impartialité, sans intérêt personnel, préjugé ou parti pris et sans tenir compte des pressions extérieures. Les tribunaux administratifs sont généralement régis par ces grands principes. D'ailleurs, l'article 4 de la Loi sur la fonction publique reconnaît le principe qu'un tribunal administratif doit jouir d'un haut degré d'indépendance afin d'offrir les meilleures garanties d'impartialité. Or, comment parler d'impartialité, d'objectivité, lorsque la loi confie aux corporations deux mandats, soit la protection du public et la protection de leurs membres? Ceci constitue pour nous ce que nous appelons un conflit de rôles. Les intérêts des deux clientèles visées par les mécanismes de plaintes ne sont pas nécessairement compatibles ni convergents. Il s'agit là d'une position insoutenable pour les uns et les autres et qui se doit de disparaître. Malheureusement, rien dans la réforme ne nous permet d'envisager une évolution en ce sens.

Un autre principe nous anime visant un meilleur équilibre entre le citoyen-citoyenne et le ou la professionnelle: la transparence absolue dont doivent faire preuve les comités de discipline. Ces principes et ces constats nous amènent donc à proposer au législateur la mise en place d'une structure indépendante dont la seule mission serait la prise en compte des intérêts du public. Avec le Protecteur du citoyen, nous réaffirmons: II faut éviter de donner au citoyen l'impression que ces organismes ne sont que des bureaucraties comme les autres. Les tribunaux administratifs autonomes doivent être et apparaître indépendants et impartiaux. Il en va de la confiance du citoyen. Malheureusement pour nous, déjà, la notion de confiance en ces structures est perdue et ça, depuis bien longtemps. Il nous faudra donc redonner à la personne un véritable lieu où elle pourra faire valoir ses droits sans que ce lieu serve en même temps à protéger les intérêts du professionnel. Ce lieu devra garantir un maximum d'objectivité et d'impartialité.

Or, l'objectivité ne peut exister lorsque nous considérons les trois niveaux de structure actuels et le rôle des syndics et des corporations, soit l'enquêteur, le dénonciateur et finalement le procureur. Nous pourrions parler de conflit d'intérêts, mais ce terme ne situe pas véritablement le rôle que la corporation est appelée à jouer. Comment peut-on juger des faits qui constituent la preuve sur laquelle repose la plainte lorsqu'on est soi-même appelé à recueillir les éléments de cette preuve? Les corporations peuvent très bien assumer le mandat de protéger leurs membres, et ce, tout en surveillant la qualité de l'acte, mais non sous le couvert de la protection du public. En effet, les corporations professionnelles ont tout intérêt à maintenir un haut niveau de qualité de pratique chez leurs membres. Une telle intervention est d'ailleurs pratique courante et c'est dans ce sens que le système disciplinaire s'applique, c'est-à-dire à l'intérieur des professions elles-mêmes, en tant que mécanisme d'autorégulation pour la corporation. Ceci ne saurait constituer d'aucune façon un mécanisme de recours pour le citoyen et la citoyenne.

Il nous faut une structure qui n'aura pas à vivre avec l'ambivalence et parfois l'antagonisme de la défense et de la couronne. En effet, notre système judiciaire a bien clarifié ces deux champs d'intervention. Une même personne ne peut être à la fois couronne et défense. Or, la réforme proposée s'entête à tenter d'améliorer le système disciplinaire existant à l'intérieur même des corporations, sans en remettre en cause les

fondements. En proposant de nommer un avocat comme président et deux autres pairs, elle ne règle en rien le conflit de rôles. De plus, il nous faut tenir compte du pouvoir discrétionnaire du syndic, et ce, dans la majorité des cas. En effet, ce dernier a à déclarer s'il réclame une enquête ou s'il en appelle du comité de discipline. La réforme ne modifie en rien ce rôle de syndic. Le syndic demeure tout à fait libre du choix de la procédure utilisée et, qui plus est, il peut traiter l'information à sa discrétion, et ce, sans obligation de tenir la personne concernée au courant des suites sauf, bien entendu, si cette dernière demande enquête. Le syndic aura alors à justifier sa décision de ne pas porter plainte.

Là où nous retrouvons une modification importante réside dans ce que le Protecteur du citoyen qualifie de «pouvoir lié». Dorénavant, l'article 155 rendrait impossible la répétition d'une situation qui a prévalu dernièrement face à un psychiatre ayant à son compte des accusations criminelles dans une autre province et qui pratiquait au Québec. Nous avons là un exemple frappant de la non-partialité des corporations. Nous ne pouvons en effet passer sous silence la réaction de M. Augustin Roy de la Corporation des médecins déclarant qu'il n'avait pas à juger l'homme deux fois. Le rôle de M. Roy se situait-il au niveau de la protection du public ou de celle de ses membres? C'était probablement un cas léger comme on en parlait tantôt, n'est-ce pas!

Quant à nous, une évidence s'impose. Si on veut réellement se doter d'un système garant de la protection des droits du public, il nous faudra sortir du giron des corporations. Me Jean-Pierre Ménard, éminent avocat en matière de droit de la santé, déclarait justement: Le syndic ne se présente devant le comité de discipline qu'avec des preuves absolument écrasantes. Par ailleurs, si un individu décide, malgré le syndic, d'en appeler de la décision de ce dernier, il s'agira alors d'une plainte privée. Cette personne sera donc placée dans la situation d'avoir à se défendre non seulement contre le professionnel mais également contre la Corporation. Ce système devient donc inaccesible tant humainement que financièrement pour l'ensemble des citoyens et citoyennes, doublement évidemment pour les psy-chiatrisés et psychiatrisées. Il s'agit concrètement pour la personne de faire le travail du syndic, soit protéger le public. De plus, un plaignant privé risque également d'engloutir une fortune financière et toute sa crédibilité. Rappelons-nous simplement de l'affaire Patricia Bis-son de la Beauce - on en a parlé tantôt - pour constater l'immense dégât qu'une telle démarche risque de provoquer.

M. Bousquet: Si nous voulons un système de justice douce, il nous faut sortir des corporations. La Corporation des médecins vit présentement une situation que l'on pourrait qualifier ironiquement de névrose de la poursuite. Lorsqu'un syndic décide de ne pas porter plainte au comité de discipline, la personne concernée reçoit comme unique réponse la formule suivante: Après enquête, le syndic a décidé de ne pas porter votre plainte devant le comité de discipline. Toutefois, des recommandations ont été faites au médecin. Le syndic Rémi H. Lair déclarait: On hésite à donner trop d'informations. On ne veut pas que les lettres envoyées aux plaignants soient utilisées contre les médecins devant les cours civiles. Or, cette phobie des poursuites face aux tribunaux civils et ce mutisme du syndic poussent les consommateurs devant un choix unique. Des poursuites en matière civile. En effet, ne pouvant compter sur les syndics et les comités disciplinaires des corporations, l'individu pour qui il y a eu préjudice n'a d'autre choix que de se retourner vers le recours au civil.

Pour une structure garantissant un meilleur respect des droits. Nous proposons donc que soit retiré aux corporations le mandat de la protection du public et que soit mise sur pied une nouvelle structure; que l'Office des professions engage un commissaire spécifique à la déontologie, ce dernier relevant également adminis-trativement de l'Office. Tout comme le Protecteur du citoyen, nous jugeons important qu'il y ait un commissaire à la déontologie professionnelle par profession. Ce dernier devrait être choisi par un comité de sélection formé d'un représentant de la corporation visée et d'un représentant de l'Office et également d'un représentant du public non membre d'une corporation professionnelle. Ce commissaire à la déontologie devrait également ne pas être membre de la corporation qu'il représente. Les commissaires seraient appelés à jouer le rôle du syndic, soit recevoir la plainte, évaluer sa pertinence, rejeter ou porter plainte devant le tribunal de la déontologie professionnelle et ce, sous le chapeau de la poursuite. Il faudra donc donner aux commissaires des pouvoirs d'immunité et des pouvoirs d'enquête et ce, en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête. Ces mêmes commissaires devraient, dans un délai de 60 jours, informer les personnes concernées de leur décision et de leur motivation.

Un droit d'appel. Toute personne non satisfaite de la décision du commissaire pourrait en appeler directement via le président du tribunal. Ce processus d'appel devrait permettre la révision du dossier de même que l'ajout de preuves nouvelles, la poursuite de l'enquête. L'obtention d'une réponse à la personne devrait également se faire dans un délai de 60 jours. Une telle structure demande également qu'il y ait autant de divisions qu'il existe de corporations. Le tribunal serait formé de trois membres: le président serait membre du Barreau, un membre recommandé par la corporation professionnelle visée et un membre choisi après consultation

auprès des groupes de base et des associations de consommateurs visés particulièrement par la pratique.

Ce tribunal s'assurerait de garder un caractère public qui ajoute une garantie supplémentaire à l'impartialité. Une personne ou tout groupe pourrait en appeler de ce tribunal. Nous revendiquons également le droit pour une personne qui le désire d'être accompagnée par une personne de son choix lors de toutes ses démarches concernant une plainte contre un professionnel. Nous précisons que ce droit s'appliquerait également lors d'expertises ou de contre-expertises médicales. Nous connaissons bien les enjeux importants pour les personnes lorsqu'elles doivent déposer une plainte contre un professionnel. Cela implique souvent plusieurs étapes à franchir et parfois, pour certaines personnes, ces étapes sont les lieux qui permettent à des gens de faire de l'intimidation ou d'acheter tout simplement le silence.

L'article 11 de la loi 120, loi sur la santé et les services sociaux, reconnaît ce droit. Cependant, l'interprétation de l'article 11 ne permet pas, pour l'instant, à une personne d'être accompagnée lors d'un examen médical ce qui, à notre sens, s'il ne s'y retrouve pas spécifiquement nommé pour cette démarche, ne pourrait être appliqué. Et, finalement, nous demandons également qu'une plainte faite par un tiers soit jugée comme recevable. L'article 70 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec donne le pouvoir à un organisme voué à la défense des droits et libertés de la personne de porter plainte au nom de cette dernière en autant que celle-ci y ait consenti par écrit. Nous réclamons que le tribunal puisse également entendre ces groupes.

Au niveau du conseil d'administration de l'Office, il faut également garantir que le conseil d'administration de l'Office puisse être porteur des principes généraux qui sont l'impartialité et la garantie de l'objectivité dans le respect des droits fondamentaux. Ceci ne peut se faire en vase clos où l'on ne retrouverait que des pairs. Aussi, la composition du conseil d'administration devrait être la suivante: un tiers, membres du public non-membre des corporations professionnelles, un tiers, membres des corporations et un tiers, membres des groupes de défense des droits des consommateurs. (17 heures)

Mme Ménard: L'équité hommes-femmes. Nous aimerions porter à votre attention un principe qui, selon nous, devrait également être inclus, soit l'équité dans la représentation hommes-femmes. En effet, il nous faudrait mettre l'accent sur la présence équitable des femmes dans les nouvelles structures. La réalité démontre que ce sont les femmes qui consultent le plus et qui utilisent davantage les services de santé et les services sociaux et ce, d'une façon beaucoup plus marquée que les hommes. Il est donc primordial pour nous de retrouver une place égalitaire pour la représentation sur le conseil d'administration de l'Office.

Garantir au public un examen crédible des plaintes par un mécanisme externe et indépendant des différentes corporations qui relèverait de l'Office des professions est, à notre avis, un pas de plus vers une plus grande impartialité et une meilleure justice sociale. En plus d'offrir un mécanisme crédible et transparent, il faut également le rendre accessible et à la portée de main de toute la population. À notre avis, un système comme celui proposé par le Protecteur du citoyen, avec nos recommandations, devient le lieu d'un véritable recours pour le citoyen. De plus, il en va de l'intérêt même des professionnels que la société québécoise soit dotée d'un mécanisme indépendant garantissant impartialité, objectivité et transparence.

En terminant... Oh! Excuse-moi. O.K. Excusez-moi. Merci.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Alors, M. le ministre et député d'Abitibi-Est, vous avez la parole.

M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Alors je voudrais souhaiter la bienvenue à cette commission à l'Association des groupes d'intervention en défense de droits - Santé mentale. Vous avez soulevé à juste titre le fait qu'il y a effectivement 3 698 402 actes en santé mentale, en psychiatrie. Il y a là-dessus 467 demandes d'enquête. Ce n'est pas beaucoup. Est-ce que vous pensez que la majorité des infractions passent inaperçues ou est-ce que vous pensez que le chiffre est à peu près exact, là?

M. Bousquet: II faut comprendre, au niveau de la psychiatrie, que les usagers et usagères qui sont dans les réseaux, qui sont dans les institutions, sont très fragiles et très vulnérables et que la confiance avec le professionnel qui lui donne des services est comme primordiale pour lui; il n'ira pas porter plainte facilement. Donc, il a à surmonter cette difficulté supplémentaire qu'un citoyen qui possède toutes ses facultés ou qui possède tous ses éléments n'a pas pour porter plainte. Alors le chiffre, effectivement, est très bas.

Mme Ménard: Moi, je voudrais ajouter un autre élément. Moi, ma connaissance du milieu - alternatif, en tout cas - nous démontre que les personnes qui ont été psychiatrisées sont très, très, très médicamentées, donc, rendues très passives. Pour eux autres c'est beaucoup plus difficile. Vous savez, quand on prend jusqu'à 17 médicaments par jour, je pense que c'est difficile de très bien organiser sa pensée pour pouvoir porter plainte.

M. Bousquet: C'est d'ailleurs pour ça que la

politique de santé mentale visait à mettre sur pied des organisations de défense de droits pour ces personnes-là, pour aider à acheminer les différents recours. Pas juste au niveau des corporations, mais à bien d'autres niveaux. Mais le constat, au niveau des corporations professionnelles, de par mon expertise et de par l'expérience que j'ai vécue dernièrement en Montérégie, me laisse croire que quelqu'un qui fait plainte contre son médecin, il se fart vite rabrouer parce qu'il est très dépendant de son médecin et on lui fait des menaces voilées déjà de par son éducation. On lui dit: Écoute, si tu portes plainte contre moi, moi je ne suis plus ton professionnel. Je m'en vais et trouve-toi-zen un autre. Donc, c'est trop pour quelqu'un qui a des problèmes de santé mentale.

Mme Ménard: Et peut-être qu'un dernier élément qu'on peut ajouter à ça, c'est que ce sont des gens qui ont une estime de soi à zéro. Ce sont des gens qui se pensent responsables de leur maladie. C'est des gens qui se sentent coupables. Alors, à ce moment-là, il y a aussi un esprit critique qui est très fort par rapport à eux-mêmes, mais qui est peut-être beaucoup moins fort par rapport aux services qu'ils reçoivent.

M. Savoie: Bon, alors, finalement, c'est 467, c'est très bas...

Mme Ménard: C'est bien possible.

M. Savoie: On ne parle pas de 900 là. On parle de quoi, 700, 600 dans votre évaluation, 200,300 de plus?

M. Bousquet: Mais le 467 est un chiffre statistique. C'est le chiffre qui est public actuellement. C'est le chiffre que la Corporation nous a transmis. Alors, c'est 467 demandes d'enquête, dont seulement 15 ont été retenues devant le syndic.

M. Savoie: Oui, c'est ça. On va arriver aux 15 tantôt. Là vous dites que c'est beaucoup plus élevé, le 467. J'essaie d'avoir un ordre de grandeur. Pensez-vous que c'est 1467 ou 900?

M. Bousquet: C'est-à-dire que ce n'est pas plus élevé, le nombre de plaintes officielles. Ce que je voulais dire tantôt, c'est qu'il y a probablement plus de gens qui pourraient porter plainte, mais compte tenu de la situation, il n'y en a que 467 qui ont fait des demandes.

M. Savoie: Alors, vous pensez, combien de gens pourraient...

Mme Ménard: C'est très difficile à évaluer, vous savez. Ça fait très peu de temps que les associations de défense de droits ont été mises sur pied avec mandat. Donc, on n'a pas vraiment... je pense que ces associations-là n'ont pas vraiment eu le temps de bâtir des statistiques à partir des plaintes qu'elles reçoivent pour dire que nous autres on puisse donner un chiffre crédible.

M. Savoie: Oui, je sais. Votre sentiment, votre impression, votre «feeling», est-ce qu'on parle d'une fraction ou est-ce qu'on parle de...

Mme Ménard: moi je dirais qu'on parlait d'un pourcentage. lequel? ah mon dieu! je pense que ce ne serait pas sérieux de notre part si on en donnait.

M. Savoie: Vous n'avez pas d'idée. D'accord. Alors, finalement, 467 c'est un chiffre officiel. Vous dites que c'est probablement beaucoup plus élevé. Mais on ne sait pas ce que beaucoup plus élevé veut dire.

M. Bousquet: C'est un peu comme les plaintes légères pas définies.

M. Savoie: D'accord.

M. Bousquet: On ne peut pas...

M. Savoie: Non, mais c'est parce que c'est important dans notre évaluation. Les 15, évidemment, c'est un élément, mais quand même sur 3 700 000 plaintes, finalement. Actes, plutôt.

M. Bousquet: Actes.

M. Savoie: II y a 467 plaintes. C'est quand même indicatif. Vous avez, bon, présenté l'option du commissaire, ce qui est intéressant, et il y a une autre chose, c'est que vous proposez que les deux tiers du conseil d'administration de l'Office... Plusieurs de vos recommandations, finalement, rejoignent un peu le Protecteur du citoyen. Vous dites: Que les deux tiers du conseil d'administration de l'Office soient composés de personnes... Là on a mis ce qu'on a pensé valable, c'est d'introduire deux membres. Et pour maintenir quand même, on parle quand même d'une structure qui régit les corporations professionnelles, donc, ça demande une connaissance assez intime du fonctionnement et des structures. Vous ne trouvez pas que c'est trop?

M. Bousquet: Non, et si on veut vraiment tenir l'objectif de défendre l'intérêt du public, à mon avis il faut donner la place au public et dans toutes les instances. Sinon, on ne cautionne pas le jugement entre pairs. Donc, on dit: L'objectif c'est que ça vise la protection du public. Alors, à notre avis, il faut donc laisser le plus de place possible aux gens du public. Alors, on dit un tiers des membres de la population et un tiers des organisations qui s'occupent de la

défense des droits des consommateurs.

Alors on dit: Eux, ils ont l'expertise. Et ils vont avoir le souci de protéger véritablement le public. Or, c'est pour ça qu'on donne davantage actuellement, même si on ajoutait deux autres membres venant du public sur la proposition qui est faite sur la table, à notre avis, il y a toujours une majorité de professionnels et on ne va pas vers une réelle volonté de vouloir défendre les intérêts du public. (17 h 10)

M. Savoie: D'accord.

Mme Ménard: Est-ce que je peux rajouter juste une toute petite chose sur ça?

M. Savoie: Certainement, oui.

Mme Ménard: Je pense que, quand on travaille dans les milieux communautaires, on se bute très souvent...

M. Savoie: Ça, ça a été accordé ça.

Mme Ménard: ...justement à cette espèce d'expertise où on dit que c'est difficile que les citoyens ordinaires participent. Mais, moi, je trouve qu'on se bute aussi à un problème où, dans les professions, on s'acharne sur un langage qui est très hermétique et qui ne permet pas à d'autres personnes... Alors, il y aurait peut-être un ajustement à faire au niveau du langage aussi pour permettre aux personnes qui n'ont pas nécessairement une formation, mais beaucoup de jugement, de participer à ces décisions-là.

M. Savoie: merci. au niveau de l'article 155, est-ce que ça rencontre finalement l'orientation que vous voulez donner au niveau des abus?

M. Bousquet: Oui. Je pense que... Si je le retrouve dans le mémoire.

M. Savoie: Vous en avez fait mention, de l'article 155, dans votre présentation. Vous avez dit: Bien, ça couvre déjà une bonne partie de la distance, mais... Alors, si je comprends bien, c'est que, finalement, vous êtes les premiers préoccupés par l'article 155, surtout avec ce qui s'est passé dans l'affaire Warnes, il n'y a pas tellement longtemps. 155, ça vous va?

M. Bousquet: Oui. Je pense que dans le texte... Je vais juste le retrouver dans le texte, pour bien resituer...

M. Savoie: D'accord. C'est vers la fin. Ça, ça ne compte pas sur mon temps, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): Non, non, non, non.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Ménard: Non, non. Ça compte sur le nôtre.

M. Bousquet: C'est nous.

Le Président (M. Gautrin): Non, non. Ce n'est pas sur le vôtre non plus, chère madame.

M. Savoie: Non, non. Vous n'en avez plus de temps. Vous êtes sur mon temps.

Le Président (M. Gautrin): Est-ce que vous voulez que je suspende pendant une minute pendant le temps que vous cherchez?

M. Savoie: S'il vous plaît, M. le Président. M. Bousquet: Oui, une minute. Oui.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je suspends pendant une minute les travaux de cette commission. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

(Reprise à 17 h 14)

Le Président (M. Gautrin): Alors, est-ce que vous êtes prêt à répondre?

M. Bousquet: Oui, oui.

Le Président (M. Gautrin): La commission est prête à reprendre ses travaux et M. Bousquet, vous êtes prêt à répondre à la question de M. le ministre.

M. Bousquet: Oui. D'ailleurs, au niveau du pouvoir lié, effectivement, l'article 155 viendrait empêcher la répétition de ce qui venait de se produire dernièrement au niveau du psychiatre qui avait eu des accusations d'agression sexuelle et qui voulait pratiquer ici. Donc, l'article 155 répond bien, empêcherait, en fait, des gestes comme celui-là et on est d'accord avec.

M. Savoie: D'accord. Une dernière intervention pour le moment. Une notion qui demande qu'un organisme puisse, au nom d'une personne, porter plainte, oui, ça, je peux vous dire que ça attire beaucoup mon attention et je trouve ça intéressant, surtout dans les cas de santé mentale.

M. Bousquet: Oui.

M. Savoie: Oui. On vous remercie beaucoup pour la recommandation. Peut-être que Mme la députée de...

Le Président (M. Gautrin): Attendez un instant. Vous avez terminé votre intervention?

M. Savoie: Oui, oui.

Le Président (M. Gautrin): Bon! Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gautrin): De Terrebonne, c'est ça, oui.

Mme Caron: II va falloir l'apprendre, hein! Ça fait déjà plus d'un an là!

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne!

Mme Caron: Alors, Mme Ménard, M. Bousquet, je tiens à vous remercier parce que je pense que vous représentez un groupe particulier et je pense que vous avez bien défini à quel point ces personnes sont vulnérables et à quel point le manque de confiance, à quel point aussi, parfois, l'utilisation de médicaments peut rendre l'accès à une plainte extrêmement difficile. À ce chapitre-là, il semble extrêmement important, comme le donnait en dernier le ministre, qu'on puisse utiliser dans ces cas-là une personne ou un groupe qui pourrait aider la personne à déposer une plainte et à formuler une demande. Parce que je pense que, comme vous nous l'avez présenté, peu importe le système, aussi bon le système sort-il, le système sera le plus impartial, le plus transparent, le plus efficace, cela n'enlèvera pas le problème pour la personne qui a vécu des difficultés en santé mentale de déposer une plainte. Je pense qu'à cet égard-là c'est sûrement une de vos priorités.

M. Bousquet: Oui, effectivement, on a ce problème-là. D'ailleurs, nos organisations s'occupent, en fait, de défense de droits en général et on s'aperçoit que, lorsqu'on aide et qu'on accompagne ces personnes-là dans l'exercice de leurs recours, on voit que, de plus en plus, un, ça permet à la personne de prendre du pouvoir sur lui et d'avoir une certaine confiance et, de deux, de vraiment exercer son droit. Je pense qu'intégrer, surtout au niveau des plaintes, au niveau de la corporation, ce qu'on vit actuellement, c'est très lourd au niveau des personnes, elles doivent affronter ça seules... Alors, si on pouvait légaliser cet article-là, toujours en s'inspirant de l'article 70 de la Charte québécoise, je pense que ce serait un outil drôlement intéressant pour ces personnes. Je pense qu'on pourrait donner un support important et permettre à ces gens-là de vraiment recourir à leurs droits.

Mme Caron: Lorsqu'on parle de protection du public, on parle, évidemment, du système disciplinaire. Mais les corporations professionnelles nous ont fait valoir que la protection du public avait une base beaucoup plus large et on faisait principalement mention de l'importance de la formation de base des professionnels, de la formation continue, des modalités de délivrance de permis, du Code de déontologie comme tel, de l'inspection professionnelle qui amenait une certaine prévention, de l'assurance-responsabilité et du fonds d'indemnisation. Est-ce que, pour vous, ces mesures-là sont aussi des mesures de protection du public et doivent être maintenues de la part de corporations professionnelles?

M. .Bousquet: Je pense que les corporations professionnelles doivent avoir un rôle administratif et un peu ce rôle de prévention, donner la formation. On ne peut pas être contre, on ne peut pas être contre ça. Là où le bât blesse, c'est vraiment au niveau du traitement des plaintes. Ça, ça devrait être carrément retiré. Tant qu'aux autres aspects qui, en fait, sont une certaine protection, si vous voulez, ou une prévention des abus ou des situations qui peuvent arriver, je pense, effectivement, qu'on ne peut pas être contre ça, la prévention, mais je pense que tout le traitement de plaintes, la structure même devrait être indépendante et transparente.

Mme Ménard: Je voudrais peut-être ajouter juste une petite chose. On pourrait... Je ne sais pas, je suis peut-être hors d'ordre, mais ça va être 30 petites secondes. Je pense qu'il faudrait aussi quand même, dans tout le processus d'éducation, mettre un peu plus l'accent aussi sur l'éducation du public. Je pense que notre clientèle a besoin de formation beaucoup et les moyens qu'on a, évidemment, sont très, très, très restreints, et je pense que c'est un ensemble. Il y a besoin d'information des deux côtés.

Mme Caron: Je pense, Mme Ménard, que vous n'êtes absolument pas hors d'ordre. De toute façon, lorsqu'on fait des audiences publiques sur un sujet, tous les éléments sont importants et ce n'est absolument pas d'être hors d'ordre. Et ce côté d'information, je pense que... Évidemment, au niveau des gens que vous représentez, c'est doublement important, mais il ne faudrait pas croire que l'information sur le système professionnel est une information que possède très bien la population.

Mme Ménard: Non.

Mme Caron: Je pense que...

Mme Ménard: Je pense que non.

Mme Caron: ...vous êtes loin de faire... Vos membres sont loin de faire exception. Je pense que c'est une des caractéristiques, un des

problèmes aussi auxquels on doit faire face. Moi, je vous avoue bien humblement qu'avant de prendre ce dossier sous ma responsabilité, j'aurais été très embêtée de vous parier de notre système professionnel.

Vous nous avez parlé d'un élément et vous êtes les seuls, je pense, à avoir touché cet élément-là. Vous nous avez parlé de l'équité au niveau de la représentation.

Mme Ménard: Oui.

Mme Caron: Et j'aimerais peut-être un petit peu vous entendre davantage. Vous semblez relier cette équité-là au fait que, finalement, beaucoup plus de femmes sont touchées par... (17 h 20)

Mme Ménard: Oui. Je pense que ça, si vous... On va dans, par exemple, la politique santé et bien-être. Je pense que c'est bien démontré, entre autres en santé mentale, que... Il y a des chiffres à l'appui - je ne les ai pas, malheureusement - qui démontrent que oui, au niveau de la psychiatrie, au niveau des services en santé mentale, les femmes sont de grandes consommatrices. Elles sont consommatrices de services, elles sont consommatrices de médicaments. Mais, moi, je rajouterais quand même qu'elles sont aussi 53 % de la population. Donc, en soi, ça pourrait aussi justifier... J'ai été un peu frappée par la brochette qui était avant nous et qui était décidément très 100 % mâle. Et ça, moi, je trouve ça un peu inquiétant. Il me semble qu'il y aurait encore des efforts à faire à ce niveau-là, oui.

Mme Caron: Là-dessus, Mme Ménard, je vais sûrement partager votre avis, évidemment.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Caron: Si vous regardez l'Assemblée nationale, avec 23 femmes sur 125, évidemment la brochette est extrêmement forte. On ne peut pas parler non plus d'équité et on maintient les chiffres de 53 %...

M. Bousquet: Exact.

Mme Caron: ...de la population, et je pense que là-dessus vous avez parfaitement raison.

Mme Ménard, vous êtes revenue à quelques reprises sur l'importance de la participation du public. Moi, j'aimerais un petit peu faire la distinction. Lorsque vous nous parlez du tiers de membres public, non-membres de corporations professionnelles, et le tiers de groupes de défense des droits des consommateurs, pourquoi faire cette distinction?

Mme Ménard: Si vous voulez, je vais laisser M. Bousquet quand même répondre à cette question-là. Il s'y connaît plus que moi.

M. Bousquet: Je pense que... Je vais donner l'exemple des associations... bon, des ACEF, qui sont quand même très près des diverses situations qui arrivent, et je pense... Au niveau de la santé et des services sociaux aussi, elles s'impliquent beaucoup. Je pense que ces groupes-là ont une expertise et je pense qu'ils seraient habilités davantage à être membres de l'Office et défendraient davantage le côté plus défense de droits et de consommateurs. Les questions viendraient plus facilement parce qu'ils font de l'accompagnement déjà, ils font déjà de la défense de droits. Ils représentent aussi des consommateurs de services. Donc, à notre avis, ils ont une expertise qui est intéressante. C'est pour ça qu'on fait une distinction entre les membres public en général et les membres d'associations de protection des consommateurs. C'est vraiment parce qu'ils ont une expertise et ils sont habitués aussi à traiter ce genre de dossier là. Donc, ce ne serait pas nouveau et je pense qu'ils prendraient davantage partie pour le public à ce moment-là, mais aussi avec quand même une objectivité au niveau des faits, je pense, compte tenu qu'eux-mêmes ils traitent déjà des cas et des plaintes actuellement.

Mme Caron: Alors, M. le Président, ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière souhaiterait poser une question.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, bien sûr.

Mme Carrier-Perreault: Une toute petite question effectivement. Je partage, moi aussi, les commentaires de ma collègue concernant le manque d'équité par rapport aux représentations féminines-masculines.

Moi, cependant, je voulais vous demander, toujours par rapport à la possibilité de nommer un conseil d'administration, d'aller chercher un tiers de membres du public, non-membres des corporations, un tiers des membres des corporations et un tiers des groupes de défense des droits des consommateurs, je veux savoir: Est-ce que vous voyez un processus différent quant à l'accession de ces membres-là au conseil d'administration, parce que, présentement, ces membres-là proviennent d'une liste... En fait, il y a deux membres, le vice-président et le président, qui sont nommés par le gouvernement; il y a une liste qui est fournie par le comité interprofessionnel. Comment est-ce que vous voyez l'accession, si on veut, à ce comité, au conseil d'administration?

M. Bousquet: Je pense que, un peu comme nos modèles, on peut prendre le modèle des assesseurs dans les tribunaux administratifs où les syndicats nomment des personnes qui peuvent aller siéger sur les tribunaux administratifs, un peu comme les patrons au niveau du Conseil du

patronat qui nomment des personnes. Ce serait un peu peut-être inspiré... On n'a pas réfléchi en profondeur sur cette question-là, mais on pourrait s'inspirer de ce modèle-là. Il y a des associations, il y a des fédérations, des groupes qui pourraient soumettre une liste au comité de sélection qui, eux, pourraient faire à ce moment-là le choix parmi une liste qui a été proposée par les fédérations.

Mme Carrier-Perreault: Autrement dit, vous conserveriez le même groupe pour faire la liste, comité interprofessionnel mais, par ailleurs, il serait obligé de tenir compte de certains éléments dont vous venez de...

M. Bousquet: Oui. Moi, à mon avis, oui.

Mme Carrier-Perreault: D'accord. Je vous remercie.

M. Bousquet: On n'a pas réfléchi plus en profondeur sur cette question-là, bien honnêtement.

Mme Ménard: On peut penser entre autres à un groupe actuellement. Il y a une coalition de 25 fédérations au Québec qui se réunit très, très régulièrement et qui pourrait, je pense, assez facilement se concerter. Cette coalition est très connue du ministère de la Santé et des Services sociaux et pourrait être consultée à ce niveau-là très rapidement.

Mme Carrier-Perreault: Merci.

Le Président (M. Gautrin): Merci. En faisant la règle d'alternance, est-ce qu'un député ministériel voudrait poser une question?

M. Savoie: II nous reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Gautrin): 10 minutes pour les ministériels, 9 pour l'Opposition.

M. Savoie: Oui. On mène 10 à 9, hein? C'est ça que vous alliez dire. On mène plus que 10 à 9 à part de ça. C'est une «game» qui se prend au sérieux. Écoutez, je vais être très bref parce que, finalement, les éléments que vous soulevez, par exemple, au niveau de commissaires, les éléments que vous avez soulevés également au niveau de la représentation des deux tiers, évidemment, la représentation des femmes, ça va de soi, je pense qu'il y a une volonté constante pour prendre ce chemin-là. Ce sont des choses qui ont été examinées: commissaires, deux tiers des citoyens et des choses comme ça. Évidemment, il est difficile, pour nous, de prendre ce chemin à ce moment-ci de l'évolution, je pense, des corporations professionnelles au Québec mais, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, il y a certainement des recommandations dans votre mémoire, particulièrement le droit d'intenter pour et au nom de, ça m'intéresse. Au niveau de la santé mentale, je pense que c'est un élément qui est intéressant. C'est une route qui promet une certaine richesse et dont je suis certain que la majorité des citoyens et citoyennes du Québec vont voir d'un oeil favorable.

Ce qui est intéressant, c'est les chiffres, quand on a des chiffres, et je vous ai souligné ça. Je pense que si je pouvais vous faire une recommandation, si vous voulez vraiment nous aider dans notre démarche, la Corporation, le Collège des médecins, l'Office des professions, c'est de _ développer des chiffres, parce que vous n'avez pas répondu à ma question. Je pense que vous avez développé un petit peu plus de crédibilité, mais vous n'avez pas osé vous embarquer à savoir si c'est 467 ou 1000. Je pense que c'est de valeur, mais on serait intéressés à cerner ça davantage, parce que s'il y a bobo, là, ça va se traduire par des chiffres.

Actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'effectivement, comme vous, on partage votre inquiétude au niveau du 467, du 15, du 2,2 %. Ce sont des éléments qui sont des plus valables, mais...

Mme Ménard: Si je vous disais, monsieur, que dans la ressource, parce que je suis présidente du Regrouprement, mais, évidemment, je suis directrice de ressources où on reçoit chaque année une centaine de femmes qui ont des problèmes sérieux de santé mentale. L'organisme a 10 ans. Donc, ça fait à peu près 1000 femmes. Si je vous disais que chaque année, bon an mal an - moi, je fais toutes les entrevues d'évaluation, chez nous - il y a au moins quatre ou cinq femmes qui pourraient porter plainte...

M. Savoie: Qui ne l'ont pas fait.

Mme Ménard: ...et qui ne le font jamais.

M. Savoie: C'est ça.

Mme Ménard: Ça, c'est bon an mal an. C'est à peu près ça. C'est un petit chiffre d'une petite ressource et ça vaut ce que ça vaut.

M. Bousquet: Peut-être pour renchérir, je veux juste donner un peu de l'expérience que j'ai vécue. En Montérégie, j'étais conseiller pour le collectif de défense des droits de la Montérégie jusqu'en janvier 1993 et, au nombre de plaintes qu'on recevait à tous les niveaux, toutes proportions gardées, à tous les niveaux, sur 100 plaintes, il y avait facilement entre 25 et 30 plaintes qui étaient toujours au niveau de la relation avec le médecin, soit la baisse de médicaments, la relation de confiance. On voulait changer de médecin; il n'était pas d'accord. Le

médecin n'était pas courtois avec le client. Il voulait qu'on négocie ses conditions de vie. Alors, c'était environ 30 %. Je ne dis pas que c'est des plaintes qui auraient toutes été à la Corporation, mais c'est des plaintes qui impliquent les psychiatres versus le client. Donc, là-dessus, on aurait pu faire des plaintes si les gens avaient voulu faire des plaintes, évidemment, au niveau de la Corporation. Ce sera probablement qualifié comme des plaintes peut-être légères, sauf qu'il y a aussi des cas ou des situations qui pourraient être plus graves, dont on a peut-être eu connaissance, mais les gens ne voulaient pas, spontanément, entraver leur relation de confiance entre les professionnels et eux. Mais au niveau des statistiques locales en Montérégie, je dis la région de Longueuil, qui est quand même une très, très grande région, sur 100 plaintes qu'on recevait, c'est environ 25 à 30 plaintes qui reliaient l'établissement, c'est à-dire le professionnel et le client, l'usager.

M. Savoie: C'est ça. Est-ce que vous avez consulté le Protecteur du citoyen pour la préparation de votre mémoire? Est-ce qu'il y a eu des échanges?

M. Bousquet: Non, on n'a pas eu d'échanges avec le Protecteur du citoyen. On a eu le document. On leur a demandé de nous fournir le document. On avait aussi la position de l'ACEF-Centre de Montréal, seulement une communication pour nous envoyer le document, compte tenu qu'au niveau santé et services sociaux le Protecteur du citoyen ne peut pas intervenir. Actuellement, la loi ne le permet pas.

M. Savoie: D'accord. Et vos relations avec l'Office des professions?

M. Bousquet: On n'en a presque pas. On aimerait aussi rencontrer l'Office des professions. On est toujours très disposés, provincialement parlant, de les rencontrer. C'est pour ça qu'un début c'était au moins de déposer un mémoire pour nous dire qu'il faut absolument qu'il y ait de la transparence puis de mettre fin à ce qu'on appelle cet «inceste» entre pairs, qu'un professionnel puisse juger nos professionnels. Je pense que si on se reporte au niveau des électriciens, si un électricien fait un geste, il n'est pas protégé par sa corporation.

Alors, moi, qu'un professionnel puisse juger un professionnel à cause de la formation et du degré de formation, à mon avis, ça ne tient pas, compte tenu qu'un juge peut toujours demander une expertise ou éclairer le dossier s'il y a des éléments qu'il ne peut pas juger. D'ailleurs, ça se fait couramment au niveau de toutes les cours, au niveau du- droit commun où, tout le monde le sait, aussitôt que le juge veut se faire éclairer, il peut très bien demander un avis à un tiers. (17 h 30)

Le Président (M. Gautrin): Merci. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous devez sûrement faire face à un autre problème lorsque... Je vous écoutais répondre au ministre tantôt. Le fait qu'il y a une personne psychiatri-sée, non seulement il y a le problème de confiance en elle et puis de volonté de déposer une plainte, mais la personne doit également faire face à un problème de crédibilité.

M. Bousquet: Oui, évidemment. Mme Ménard: Elle est folle.

M. Bousquet: Elle est folle ou bien quel âge mental a ton client? C'est souvent ce problème de crédibilité qui fait qu'elles ne sont pas écoutées ou pratiquement pas. Donc, tantôt, j'écoutais le Dr Roy nous dire qu'on était contre le fameux formulaire pour porter plainte, que les gens peuvent simplement écrire une lettre. À notre avis, le formulaire est essentiel. C'est un premier outil pour dire: On va partir une plainte à partir de ça, et, si on laisse un usager écrire une plainte, je vous garantis que ça n'ira pas loin. On sait très bien que les personnes psy-chiatrisées, c'est souvent des personnes les plus démunies de la société. On les retrouve souvent sur l'aide sociale et, de plus, le taux d'analphabétisme est très élevé.

Donc, si on a un formulaire, au moins, il peut contacter une personne, et il peut dire: Je voudrais me faire aider à remplir le formulaire, ne pas le laisser sans adresse, rien, pour qu'il porte plainte. Je pense que c'est aller un peu fort; tantôt, la remarque, je la trouvais un peu...

Mme Caron: Ça m'amène à vous poser une autre question. Comme il y a ce problème au niveau de la crédibilité, est-ce que c'est facile ou possible pour un membre du public... Moi, je me pose la question personnellement. Si j'avais à juger, n'ayant pas de connaissances au niveau de la psychiatrie, au niveau de la médecine, au niveau de la santé mentale, par rapport à une plainte, est-ce que ça ne pose pas un problème non plus?

Mme Ménard: Mais c'est aussi peut-être pour ça qu'on demande que les personnes puissent être accompagnées, n'est-ce pas?

Mme Caron: Non, mais pour ceux qui ont à juger...

Mme Ménard: Bien, ça, c'est une éducation à faire. Vous savez, on dit: Fou des fois puis pas fou tout le temps. Et je pense qu'il faut apprendre à se convaincre de ça, qu'il y a des personnes qui peuvent avoir des problèmes de santé mentale, mais qui peuvent avoir leur tête aussi

quand ils parient, puis quand ils parient d'eux. Et je pense que ça, c'est vrai que c'est une difficulté. Mais, si on s'arrête à cette difficulté-là, on n'avancera jamais socialement. Il faut apprendre à dépasser ce préjugé. C'est un préjugé. Et je pense que nos groupes, en tout cas, on travaille énormément à ce niveau-là. Et, moi, je pense que, si, par exemple, on accompagne, dans les premières démarches, à un moment donné, la personne, on l'aide à articuler son affaire... Je vous prie de croire qu'il y a des gens qui, il y a 10 ans, n'étaient pas capables de s'exprimer et, aujourd'hui, on les voit à la télévision qui disent: Je suis schizophrène, avez-vous peur de moi? Bien, vous savez, à un moment donné, ils prennent aussi conscience puis ils deviennent plus articulés par rapport à leurs problèmes.

M. Bousquet: II ne faut pas non plus... Il ne faut pas...

Mme Caron: C'était plus - je vais vous préciser ma pensée - plus dans le sens si, par exemple, vous nous dites: Une personne considère que son médecin lui donne trop de médicaments. Moi, comme personne du public, je me vois mal essayer de juger si effectivement le médecin lui donne trop de médicaments ou pas.

M. Bousquet: Mais il s'agit... Moi, je pense qu'il y a beaucoup plus d'objectivité si c'est un membre du public qu'un médecin, parce que, moi, je me fais répondre souvent, lorsque j'accompagne des gens avec le médecin: M. Bousquet, ne croyez pas tout ce que le patient vous dit, vous êtes donc bien naïf, le médicament est bon pour lui, qu'il le prenne, je suis le professionnel. Et ce pouvoir-là, il faut qu'il cesse également. Je pense qu'une personne du public peut au moins permettre à cette personne de s'exprimer; qu'est-ce que les médicaments? Souvent, on a des problèmes au niveau de l'information. Les médecins ne donnent pas toujours toute l'information concernant le médicament et tout ça. Au moins, la préoccupation de dire: Mais on va au moins l'écouter. On va dire: Pourquoi il ne veut pas les médicaments? Il ne faut pas oublier que tu as une règle de consentement aux soins, également, au niveau des articles 19.1, 19.2, 19.3 et 19.4 du Code civil qui peuvent permettre un consentement. Des fois, même le consentement n'a pas été demandé et on médica-mente. Je pense que le public aurait peut-être plus des questions à poser, des informations, et de dire, de protéger, au moins de permettre à la personne de s'exprimer, tandis qu'au niveau du médecin psychiatre qui peut être la personne qui dit qu'il peut avoir la compétence de juger s'il doit avoir ou pas des médicaments - et ça je lui accorde - il peut aussi bien dire: II se plaint pour rien, il est malade, c'est pour ça qu'on le soigne, d'ailleurs. Et on se fait répondre souvent ça par le médecin, sauf que, des fois, ils veulent seulement avoir une question d'information sur le médicament, sur les effets secondaires, sur: Est-ce que je vais en prendre toute ma vie, c'est quoi mon plan de traitement, mon plan de soin, etc?

Mme Ménard: Vous savez, il y en a de l'information alternative sur la médication et ça serait probablement très intéressant que des personnes du public puissent poser des questions pour qu'on puisse, nous, diffuser cette information-là qu'on a. Je pense que ça pourrait être des décisions plus éclairées, à ce moment-là.

Mme Caron: Une dernière question, Mme Ménard et M. Bousquet. En page 13, vous nous dites que le syndic, lorsqu'il décide de ne pas porter plainte au comité de discipline, la personne concernée reçoit comme unique réponse la formule suivante: «Après enquête, le syndic a décidé de ne pas porter votre plainte devant le comité de discipline. Toutefois, des recommandations ont été faites au médecin.» Nous avons parié à certains syndics cet avant-midi et il semble que, normalement, la réponse est beaucoup plus explicite. Est-ce que vous avez des données là-dessus? Est-ce que vous avez plusieurs personnes qui ont porté plainte et qui ont reçu ce type de réponse?

M. Bousquet: Ça c'est la réponse type. Je ne sais pas qui a nié ça, la réponse type. D'ailleurs, le syndic Rémi H. Lair l'avait déclaré, il avait même confirmé ça, il avait dit: II ne faut pas trop donner d'information sur les raisons; on a peur aux recours judiciaires, aux recours civils. Alors, oui, effectivement, c'est toujours très vague la réponse et on a reproduit exactement ce que comportaient la majorité des réponses quand la plainte n'était pas retenue. Alors, des recommandations, c'est lesquelles? On aimerait ça savoir quelles recommandations on a portées au médecin et pourquoi, sauf qu'on n'a pas le droit de voir ça, ces informations-là, c'est confidentiel et puis, bon, la plainte n'a pas été retenue, les recommandations ont été faites, mais on ne sait pas pourquoi. On ne pourra jamais réévaluer, à moins de porter une plainte plus tard, je veux dire. Et même, est-ce qu'il y a des récidives? Est-ce d'autres personnes se plaignent du même problème, par exemple? Est-ce qu'il y a déjà eu des recommandations de faites à ce professionnel-là? Ça, on ne peut pas avoir accès à ça.

Mme Caron: À votre connaissance, est-ce que ça serait seulement du côté de la Corporation des médecins ou si ça serait une règle générale?

M. Bousquet: Je ne peux pas parier des autres, parce que je n'ai pas d'expertise à ce niveau-là. Au niveau des médecins et des psy-

chiatres, plus précisément, c'est souvent cette réponse qui a été fournie. Il ne faut pas oublier que toute la proposition qu'on fait pour l'impartialité et tout, je pense que ce qui est important de comprendre, c'est que c'est beaucoup plus pour le médecin; avoir un tribunal neutre, objectif est beaucoup plus sain pour les corporations, à notre avis. Il en va de la crédibilité du public. Le public va juger plus facilement et plus correctement si c'a été un tribunal neutre qui a jugé ou acquitté un médecin, tandis que, quand il est acquitté par ses pairs, le public réagit très négativement en disant: Ah bien! Ils se sont couverts entre eux. Donc, je pense qu'ils ont tout à gagner dans un tribunal neutre et objectif, et indépendant surtout.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup et bon retour.

Le Président (M. Gautrin): Merci, Mme la députée de Terrebonne. M. le ministre, député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Merci beaucoup, également. On a grandement apprécié la présentation de votre mémoire.

Le Président (M. Gautrin): Mme Ménard et M. Bousquet, je vous remercie, au nom de la commission, de votre présentation.

Je vais demander à la Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé de bien vouloir se présenter.

Je suspends les travaux pour trois minutes de manière qu'il puisse y avoir les circulations d'usage.

(Suspension de la séance à 17 h 40)

(Reprise à 17 h 41)

Le Président (M. Gautrin): La commission reprend ses travaux et a le plaisir d'accueillir la Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé. J'imagine que c'est Mme Leroux qui est leur porte-parole, c'est bien ça?

Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé (CPS)

Mme Leroux (Marie Josée): Qui va débuter, oui, la présentation.

Le Président (M. Gautrin): Bon, alors, Mme Leroux, c'est à vous de... Si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent.

Mme Leroux: Oui. M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la commission, c'est avec plaisir que la Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé vous soumet aujourd'hui le mémoire qu'elle a formulé dans le cadre de la consultation portant sur l'avant-projet de loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. Pour ce faire, elle a désigné Mme Dominique Ver-reault, technologue en radiologie et secrétaire adjointe à la Centrale, Me Denis Bradet, procureur, et moi-même Marie Josée Leroux, physio-thérapeute et vice-présidente de la Centrale.

Permettez-moi d'abord de vous rappeler que la Centrale des professionnelles et des professionnels de la santé, que nous appellerons la CPS pour le reste de la présentation, est composée de sept syndicats dont les 7000 membres au total sont exclusivement des professionnels salariés d'établissements du réseau public de santé du Québec. Nous voudrions souligner ici que ces personnes salariées travaillent dans un milieu où l'encadrement législatif est très important - on n'a qu'à penser à la Loi sur les services de santé et les services sociaux avec, entre autres, son propre processus de plaintes, à la Loi médicale et à toutes les autres lois ou réglementations régissant les nombreuses professions et les relations employeurs-salariés. Ces personnes ne sont pas touchées par les réglementations professionnelles touchant la vente de services, par exemple la publicité et l'arbitrage de comptes.

Ces professionnels, et le terme «professionnel» étant utilisé ici dans son sens générique, sont de formation universitaire ou collégiale et se répartissent en trois catégories en regard du Code des professions. La première catégorie: membres d'une corporation reconnue à exercice exclusif, et, au sein de la Centrale, on compte les technologues en radiologie dans cette catégorie. La deuxième: membres, s'ils adhèrent volontairement, de corporations dont la profession est dite à titre réservé; par exemple, les physiothé-rapeutes, ergothérapeutes, travailleuses sociales, psychologues, audiologistes, orthophonistes, hygiénistes dentaires. La troisième catégorie: des titres d'emplois n'ayant pas de statut professionnel reconnu en regard du Code; par exemple, les techniciennes en diététique, les thérapeutes en réadaptation physique, les archivistes médicales, les génagogues, les psychoéducateurs, éducateurs spécialisés, etc.

Nous aurions pu, bien sûr, de par le fait que nos membres sont des observateurs privilégiés du système de santé, nous prononcer sur l'état du système professionnel au Québec; par exemple, sur le fait qu'il leur semble souvent que les corporations professionnelles se comportent comme des leviers de défense d'intérêts professionnels plutôt que d'être des instruments de protection du public; par exemple - et ça a été remarqué par des intervenants aujourd'hui - tant la population que nos membres, doutent parfois de l'objectivité de pairs jugeant l'un des leurs.

Compte tenu du peu de temps dont nous disposions, nous avons plutôt choisi d'élaborer

sur quelques amendements de l'avant-projet de loi à la lumière d'expériences vécues par nos membres et en étudiant l'impact des modifications proposées sur les professionnels que nous représentons qui sont aussi membres de corporations professionnelles. C'est donc dans cette perspective, vous comprendrez, fort différente de celle des corporations professionnelles, que nous vous présentons ce mémoire portant sur cinq points principaux: la notion de maître de stage, les déboursés imposés aux professionnels, l'élection de domicile, l'avis aux professionnels en matière de plaintes, le délai pour rendre une décision. Je vais laisser le soin à Me Bradet de présenter succinctement le contenu du mémoire qui, vous l'avez sûrement constaté, ne porte pas sur des éléments majeurs de l'avant-projet de loi mais sur des éléments qu'il nous paraissait utile de porter à votre attention.

Le Président (M. Gautrin): Merci, Mme Leroux. Alors, Me Bradet.

M. Bradet (Denis): M. le Président. Rapidement, d'abord nos représentations sur la notion de maître de stage. Nous avons constaté qu'auparavant la loi ne permettait qu'à la personne qui effectuait un stage en vue de devenir un professionnel d'effectuer et d'exercer certaines fonctions normalement réservées à ce professionnel. Il nous semble que le projet de loi va beaucoup plus loin que ça, particulièrement en permettant au maître de stage d'exercer certaines fonctions qui sont normalement exercées par le professionnel.

Lorsqu'on regarde la réglementation, entre autres, l'article 94g), nous avons nettement l'impression que les corporations professionnelles n'ont pas le pouvoir, à l'inverse, d'encadrer le maître de stage jusqu'au point où elles pourraient exiger que ce maître de stage soit lui-même un professionnel, donc pouvant exercer toutes les fonctions. Donc, dans le secteur particulier où oeuvre la Centrale des professionnels de la santé, dans le secteur de la santé et des services sociaux, notre crainte est à l'effet que l'organisation du travail, une organisation particulière, pourrait conduire à retrouver des situations où les maîtres de stage, dans plusieurs cas - nous pensons à certaines corporations professionnelles - ne seraient pas des membres, eux-mêmes, de la corporation à titre réservé ou à exercice exclusif.

Nous nous demandons si c'est une modification souhaitable et si c'est vraiment assurer la protection du public que de permettre que des maîtres de stage soient des personnes qui ne sont pas elles-mêmes membres de la corporation en regard du stage qu'elles supervisent. Ça nous semble difficilement justifiable.

En regard des déboursés imposés aux professionnels, qui est le deuxième point, l'article 49 du Code des professions serait modifié pour imposer aux professionnels au moins la moitié des frais relatifs à l'examen médical qu'une corporation peut exiger dans certains cas, examen médical qui est fait par trois médecins. Cet examen médical est imposé dans certaines circonstances particulières et le fait qu'il soit fait par trois médecins implique, vous le comprenez bien, des frais qui peuvent être assez importants. Il faut comprendre que l'une des circonstances où un professionnel peut être appelé à subir un examen médical est celle où il a certaines difficultés avec son travail, c'est le moins qu'on puisse dire, et où il peut être suspendu de son travail ou même congédié, donc, une situation où le professionnel est déjà en situation . financière difficile. Il nous semble difficile d'envisager qu'on puisse lui imposer la moitié des frais de l'expertise médicale ou de l'examen médical qui est ordonné par la corporation, par ailleurs, unilatéralement.

Dans le même sens, nous avons noté que l'article 151 du Code des professions pourrait être modifié pour que les déboursés changent de forme selon le fait qu'il y ait une condamnation ou non.

L'article prévoit qu'en cas de condamnation les frais de déplacement et de séjour du comité de discipline pourraient être à la charge du professionnel qui est condamné. D'une part, ça nous semble aller à l'encontre d'une notion qui est bien connue dans ces matières disciplinaires, c'est-à-dire la notion de double sanction. Un comité de discipline peut déjà, en vertu du Code des professions, imposer une amende de 500 $ et plus.

Ce que l'avant-projet de loi semble dire, c'est qu'en plus le comité de discipline peut imposer des frais de déplacement et de séjour des membres. Un comité de discipline, on le sait, ça peut être formé de membres d'une corporation qui viennent de n'importe où au Québec. Une situation que nous avons vécue, comité de discipline qui siège à Montréal et qui est formé de membres qui ne proviennent que de la région du Saguenay. Je vous donne cet exemple-là parce que c'était bien celui-là. Bien sûr, ils sont allés en avion et, bien sûr, ils ont des frais de séjour. Il nous semble pour le moins excessif de dire à la personne qui sera condamnée, en plus de payer l'amende, tu devras payer les frais de déplacement de ces gens.

À notre avis, c'est comme dire au citoyen de Gaspé qui est jugé par un juge de la Cour supérieure, toujours de Québec, c'est ça notre système, si toi, tu es condamné pour une infraction, ça te coûte l'avion et le voyage du juge alors que le citoyen de Québec qui est jugé par le même juge, mais qui a la chance d'être jugé à Québec, n'a pas ces frais à payer. (17 h 50)

II me semble que ça risque donc de créer une situation disproportionnée et d'imposer aux professionnels, fussent-ils condamnés, un fardeau

financier qui viole la règle de la double pénalité et qui ne rend pas, je pense, justice à l'ensemble des professionnels, en regard de la situation que nous avons mentionnée.

Encore une fois, je répète que, lorsqu'un professionnel passe devant un comité de discipline, il subit aussi vis-à-vis de son employeur une perte d'emploi ou une suspension sans solde, d'où une situation financière aussi plus difficile. Nous avons suggéré et nous suggérons que les déboursés qu'on peut imposer aux professionnels, ce qui n'est pas contraire aux règles que nous connaissons, en cas de condamnation... il n'est pas anormal que certains déboursés soient imposés aux professionnels, nous suggérons que ces déboursés-là soient identifiés et que le montant qu'on peut imposer aux professionnels, à titre de déboursés, comporte un maximum ou soit bien identifié. Comme devant tout tribunal, ce sont les règles normales d'un tribunal que d'identifier les déboursés et de les fixer à un montant qui ne varie pas en fonction de la composition de ceux qui rendent justice ou de leur provenance.

Troisième point, l'élection de domicile. Peut-être une situation particulière aux salariés du secteur de la santé, mais certainement à d'autres. Pour le professionnel de la santé qui est dans une situation de statut précaire, qui est occasionnel - on vit fréquemment, j'en ai vu moi récemment, la situation où le technicien ou le professionnel, je pense à un technicien en radiologie qui, dans une région éloignée, travaille dans quatre établissements différents, et cela au gré de la disponibilité du travail et qui peut être appelé à travailler dans d'autres établissements, encore une fois au gré de la disponibilité du travail - il me semble curieux qu'on lui impose, à chaque fois, de par le manque de travail et la disponibilité du travail, d'aviser sa corporation, par écrit, qu'il travaille maintenant à temps partiel dans un établissement plutôt que dans un autre. Nous croyons qu'il suffirait, dans ces cas-là et probablement de façon plus générale, de maintenir la loi telle qu'elle existait, c'est-à-dire l'identification du lieu où le professionnel exerce principalement son occupation. Ce qui, en tout cas pour les personnes qui ont un statut précaire, correspondrait à une obligation plus raisonnable.

Au niveau de l'avis au professionnel en matière de plainte - c'est notre quatrième sujet - nous devons noter que le Code des professions ne comporte pas d'obligation pour la corporation professionnelle d'aviser le professionnel qu'il fait l'objet d'une plainte ou qu'il fait l'objet d'une enquête. Bien sûr qu'à une certaine étape cet avis ou l'obligation d'aviser le professionnel existe, nous croyons que c'est une question de justice naturelle, question fondamentale, tout simplement de justice, qu'une personne qui fait l'objet d'une enquête ou qui fait l'objet d'une plainte le sache pour qu'elle prépare son dossier ou qu'elle agisse en conséquence.

Et dernier élément, les délais pour rendre une décision, encore une fois dans le contexte des salariés que nous représentons, nous vivons fréquemment les situations où les salariés sont suspendus ou même congédiés parce qu'ils font l'objet d'une plainte à leur corporation professionnelle. Or, un délai... Il n'y avait pas de délai auparavant. Alors, le délai de 90 jours, nous avouons que c'est mieux que rien, mais, dans le contexte de la catégorie de professionnels dont je viens de vous mentionner, 90 jours, ça nous apparaît un délai trop long. C'est pourquoi nous proposons un délai de 45 jours pour rendre décision dans les cas qui sont devant un comité de discipline. J'ajouterais que l'une des modifications au Code des professions dont nous n'avons pas discuté nous apparaît, dans la même foulée, tout à fait appropriée, c'est-à-dire la modification qui obligerait le syndic à aviser l'Office des professions lorsqu'il ne peut compléter son enquête dans les 60 jours. C'est une roue qui tourne, c'est un délai parmi d'autres et il nous semble essentiel que des délais soient imposés au syndic, au comité de discipline pour éviter que les professionnels qui font l'objet d'une plainte ou d'une enquête ne subissent un préjudice qui lui aussi pourrait être théoriquement disproportionné. Je vous remercie.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Bradet, Mme Leroux, Mme Verreault. Vous avez terminé? Alors, M. le ministre et député d'Abiti-bi-Est.

M. Savoie: Merci. Il me fait plaisir de recevoir Mme Bradet, Mme Verreault, de même que Me Leroux.

Le Président (M. Gautrin): Me Bradet. M. Savoie: Excusez-moi, Me Bradet. Le Président (M. Gautrin):...

M. Savoie: Oui, c'est ça. La journée que j'ai dans le corps probablement.

M. Bradet (Denis): C'est Mme Leroux qui a présenté.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Me Bradet... Le Président (M. Gautrin): C'est ça.

M. Savoie: ...vous êtes conseiller pour la Centrale...

Le Président (M. Gautrin): La Centrale.

M. Savoie: ...des professionnels?

M. Bradet (Denis): Je représente depuis

plusieurs années la Centrale des professionnels de la santé.

M. Savoie: O.K. C'est curieux. Oui, c'est correct. Ça crée un peu que, finalement... Finalement, on a constaté plusieurs recommandations. Bon, le comité de discipline devrait rendre une décision dans les 45 jours. On avait proposé 90. Vous savez qu'il y a... On a évalué 45; on ne l'a pas retenu. On pensait que c'était comprimé d'une façon considérable, compte tenu aussi qu'il peut y avoir souvent des maladies, des déplacements qui sont impliqués de la part du comité, des membres du comité. 45 jours, ça nous semblait un peu serré. On a maintenu les 90 jours. On prend quand même en note votre recommandation.

Au niveau de l'enregistrement - vous en avez parlé assez longuement - vous préconisez que l'enregistrement se fasse d'une façon générale et non pas par institution. Je crois comprendre que c'est ce qui est visé et on pense que c'est tout simplement peut-être soit revoir de nouveau la lecture de notre texte pour éliminer tout doute. On ne vise pas, évidemment, à ce que, par exemple, une infirmière auxiliaire doit s'enregistrer lorsqu'elle travaille auprès de deux ou trois centres hospitaliers ou deux ou trois régions. Je ne pense pas que c'est ça qui est visé.

Finalement, vous avez soulevé également que le Code devrait fixer le montant maximum des déboursés qu'un professionnel peut être condamné à payer. Vous comprendrez qu'on ne peut pas retenir ça non plus parce que ça... Comment est-ce qu'on fait pour l'évaluer? Ça représente des grandes difficultés.

Mais je serais intéressé d'entendre, je serais très intéressé d'entendre Mme Leroux ou Mme Verreault sur les points majeurs du mémoire, c'est-à-dire comment est-ce que vous voyez ça, vous, les modifications qu'on est en train d'apporter au Code des professions? Comment ça peut vous affecter, vous, le fait qu'il y ait un comité des plaintes maintenant? Comment ça peut vous affecter que l'Office se propose de se doter d'un pouvoir d'enquête auprès d'une corporation professionnelle avec des retombées, finalement, importantes sur l'orientation qu'on connaît au niveau de ce dossier-là? C'est quoi votre évaluation de ça vraiment, mais les points majeurs de la réforme?

Mme Leroux: Peut-être un tout premier commentaire. C'est que, bon, Mme Verreault et moi venons effectivement de milieux syndiqués du secteur public, comme tous nos membres. On réalise aujourd'hui à quel point l'avant-projet de loi est, en fait, une manifestation complexe d'intérêts complexes et de pouvoirs complexes entre les différents organismes; peut-être, dans nos établissements, nous, les professionnels membres de corporations ou non-membres, on ne réa- lise pas jusqu'à quel point ces interrelations-là sont grandes et compliquées, je le répète. (18 heures)

Ce qu'on en a saisi. D'abord... Évidemment, ça a été mentionné ce matin que, de la part des professionnels qu'on représente, le fait d'assumer le financement de - dorénavant, en tout cas, ce qui est présenté dans le projet de loi - l'Office des professions semble être le point de débat majeur parmi nos membres, en tout cas ce qu'ils en connaissent. En général, on trouve que les frais qui sont... Bon. C'est sûr qu'ils sont adoptés par les corporations et charges aux membres adhérant à ces corporations-là ou adhérant volontairement ou nécessairement selon le type de corporation. En général, on trouve ces montants-là assez élevés, peut-être parce que les gens connaissent mal le rôle des corporations en général, connaissent mal leur fonctionnement, connaissent mal leurs obligations. Bon, ça, c'est un premier commentaire et c'est peut-être pour ça qu'on a axé sur la question des frais dans le mémoire aussi. C'est que, de façon générale, nos membres trouvent que déjà le fardeau de support des corporations au niveau financier est assez élevé.

M. Savoie: On vous parle de quel montant ça pourrait coûter à un professionnel? Vous, vous avez dans votre association... Vous avez dans votre association, dans votre Centrale, par exemple, les ergothérapeutes, le syndicat des physiothérapeutes?

Mme Leroux: Vous parlez de ma corporation professionnelle?

M. Savoie: C'est laquelle?

Mme Leroux: La mienne impose, je pense, 350 $ ou 360 $ annuellement, maintenant.

M. Savoie: Oui, on parle de quelle corporation?

Mme Leroux: Les physiothérapeutes. M. Savoie: Les physiothérapeutes. Mme Leroux: Oui.

M. Savoie: Et vous pensez que ça va vous coûter combien, l'autofinancement?

Mme Leroux: On peut estimer jusqu'à un maximum, comme il est mentionné dans le projet de loi, je pense que c'était 25 $ par membre; c'est évident que les corporations, actuellement, n'ont pas de fonds de financement qui est créé pour l'Office, donc, ça va être automatiquement reporté à la charge des membres...

M. Savoie: Les physiothérapeutes, je pense...

Mme Leroux: ...qui cotisent.

M. Savoie: Oui, c'est ça. Ça, c'est un maximum...

Mme Leroux: Oui, mais étant donné... M. Savoie: ...avant impôt.

Mme Leroux: C'est sûr que sur certains aspects on était partagés par rapport aux pouvoirs de l'Office, la question que vous me posiez tantôt, à savoir si on devait applaudir à ça, au fait que l'Office aurait des pouvoirs de plus en plus élevés par rapport à la surveillance des corporations. Sur certains aspects, il nous arrive, effectivement, d'espérer que l'Office puisse avoir plus de pouvoirs. Par contre, c'est un fait que, de la façon dont c'est libellé dans l'avant-projet de loi, ça laisse la porte ouverte à l'Office pour que, dans le fond, les corporations n'aient pas droit de regard sur les activités de l'Office et la façon de faire ces activités-là, donc, ouvre la porte aussi à toute la question de la cotisation maximum de chacune des corporations à l'Office qui va être potentielle à tous les ans, dans le fond. Je pense que l'Office doit faire un rapport et, s'il n'a pas de financement suffisant avec la première cotisation qui est versée par les corporations, il a le droit d'aller chercher une cotisation supplémentaire. Donc, c'est évident que les gens s'attendent, tant mieux si c'est moins, à cotiser 25 $ par personne pour le financement des corporations, de l'Office des professions, pardon.

Le Président (M. Gautrin): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, Mme Leroux, Me Bradet, Mme Verreault, je vous remercie de votre participation. Je pense que vous nous faites prendre conscience du rôle de professionnels qui vivent une autre situation, c'est-à-dire de professionnels qui, soit sont membres d'une corporation à exercice exclusif, soit membres d'une corporation à titre réservé ou n'ont pas de statut de corporation professionnelle, mais sont tous des professionnels qui travaillent dans le secteur public. C'est évident qu'au niveau de la réforme et, principalement, au niveau du financement, ça pose un problème particulier parce que, ce matin, on disait que, évidemment, la facture de la nouvelle charge, au niveau du financement de l'Office des professions, qui va être assumée par les professionnels, pourra, dans le cas de ceux qui travaillent au secteur privé, être transférée aux consommateurs. Mais, au niveau des professionnels qui travaillent au secteur public, il n'y a pas de possibilité, c'est directement les membres qui vont devoir assumer cette augmentation.

Probablement que vous n'avez pas non plus tout à fait les mêmes services au niveau des corporations professionnelles que ceux et celles qui travaillent au niveau du secteur privé. Le fait d'avoir trois groupes à statuts différents, ça doit poser un certain problème par rapport aux corporations professionnelles?

Mme Leroux: Le fait d'avoir trois groupes différents...

Mme Caron: Oui.

Mme Leroux: ...nous cause des problèmes?

Mme Caron: Puisque vous en avez qui, effectivement, ont un statut de membres de corporations professionnelles à exercice exclusif; vous en avez qui sont à titre réservé, donc ce n'est pas du tout la même situation, et vous en avez aussi qui n'ont pas de statut reconnu comme corporations professionnelles. Donc, ceux-là n'auront pas à assumer les frais de l'Office des professions puisqu'ils ne sont pas membres de corporations professionnelles alors que les deux autres catégories professionnelles auront à assumer cette facture et ne pourront pas la transmettre aux consommateurs puisque vous ne travaillez pas au niveau du privé.

Mme Leroux: Effectivement. Je pense cependant que le fait d'avoir des statuts différents en regard de la reconnaissance ou non par le Code des professions de certaines de nos professions, bon, je pense que le premier principe c'est que tous nos membres sont défendus de la même façon, qu'ils soient membres ou non d'une corporation professionnelle. Ce n'est pas...

Mme Caron: Mais ils n'obtiennent pas les mêmes services, là.

Mme Leroux: Je veux dire... Individuellement, je pense que oui.

Mme Caron: C'est ça.

Mme Leroux: À nos membres, ça va poser des problèmes. À nous, bon, on est plus ou moins touchés, à part de circonstances exceptionnelles, du fait que nos membres ne soient pas tous membres de corporations.

Mme Caron: Vous avez...

Mme Verreault (Dominique): Peut-être pour rajouter un petit peu, je pense que...

Le Président (M. Gautrin): Mme Verreault.

Mme Verreault: Oui, Mme Verreault, c'est ça. Pour rajouter, bon, je vois des situations, une situation qui me vient à l'idée quand on parle de ces trois groupes distincts là, c'est

peut-être dans l'exercice de certains actes qui, dans le cas de corporations à titre réservé, fait en sorte que certaines corporations essaient parfois de s'approprier des actes et de les encadrer, ce qui fait que d'autres professionnels ne peuvent à ce moment-là ou sont obligés, finalement, de lutter pour être capables de poser ces actes-là qui ne sont pas finalement réservés de par la loi des corporations à titre exclusif. On voit un problème là.

Peut-être pour en rajouter un petit peu au niveau des corporations à titre exclusif, je pense que dans le cas de ces corporations-là qui sont, pour nos groupes à nous, des petits nombres versus la corporation des médecins ou des infirmières, ces corporations-là sont quand même tenues, de par la loi, d'avoir certains comités qui sont mis en place. On voit qu'avec l'avant-projet de loi on augmente encore, en termes de comités, la charge des corporations et on comprend qu'en bout de ligne ça va vouloir dire pour nos membres des coûts supplémentaires. Est-ce que ça fera en sorte que le public sera mieux protégé? C'est peut-être l'interrogation qu'on a. Puis, est-ce que ça fera aussi en sorte que nos membres pourront poser des actes de qualité ou de meilleure qualité dans l'application de cet avant-projet de loi là s'il était mis en force? C'est des interrogations qu'on a et qui ne sont pas claires pour nous.

Mme Caron: Je comprends très bien, Mme Verreault, d'autant plus que c'est évident qu'une corporation à titre réservé, vous l'avez dit vous-même, il y a peu de membres souvent et elle devra assumer le même système disciplinaire et la même complexité de système, ce qui pose effectivement problème pour les petites corporations.

Votre mémoire est vraiment très clair. Vous posez vos commentaires sur cinq points particuliers, bien précis. Le premier concernant les maîtres de stage. Est-ce que, à votre connaissance, il y a beaucoup de maîtres de stage dans des corporations précises qui ne sont pas membres de corporations professionnelles ou si c'est exceptionnel?

Mme Verreault: Bon, pour vous parler de la corporation de mon groupe, présentement il n'y a pas cette problématique-la parce que les maîtres de stage doivent être des membres de la corporation professionnelle pour pouvoir poser les actes qui nous sont exclusifs. Alors, on ne retrouve pas ce problème présentement. (18 h 10)

L'ouverture que l'avant-projet de loi fait, c'est qu'il permettrait aux maîtres de stage de ne pas être membres de notre corporation pour pouvoir poser des gestes qui nous sont réservés. Alors, pour prendre un exemple, des étudiants, des stagiaires en techniques radiologiques qui ont à travailler dans le milieu clinique pendant 48 semaines, ces étudiants-là pourraient être, à la rigueur, supervisés par quelqu'un qui n'est pas un technicien en radiologie, donc qui n'a peut-être pas toutes les compétences et toutes les connaissances pour, dans un premier temps, protéger le public qui serait en contact avec les stagiaires et, dans un deuxième temps, montrer aussi aux étudiants, aux futurs techniciens et techniciennes la façon de travailler. On comprend aussi que, dans notre cas, on travaille sous rayonnement, ce qui amène une problématique supérieure encore dans tout ce contexte-là.

L'avant-projet de loi, ce qu'il dit, c'est qu'il permettrait au maître de stage de ne pas être membre de la Corporation. Alors, à la rigueur, on pourrait retrouver quelqu'un d'autre qu'un technicien en radiologie qui serait en contact avec les stagiaires dans le milieu clinique. Pour nous, c'est quelque chose qui est très important. Moi, ma perception, c'est que pour les corporations du domaine de la santé et des services sociaux, qui sont des corporations à titre exclusif, je vois le même problème pour toutes ces corporations. Je n'ai pas entendu de commentaires à ce sujet-là dans le cours de la journée, mais, pour moi, cette problématique-là, elle existe pour toutes les corporations à titre exclusif.

Mme Caron: Le deuxième point concerne les déboursés imposés aux professionnels. Vous avez parlé, dans le premier point concernant l'article 49, que, dans certains cas, on peut avoir à demander un examen, des frais d'expertise de trois médecins.

Mme Verreault: Oui, c'est ce que prévoit l'avant-projet de loi. Pour devenir membre d'une corporation ou, en cours de route, si la corporation juge qu'il est nécessaire d'avoir l'expertise médicale, on devra avoir un comité médical formé de trois médecins: un dont les déboursés sont à la charge de la corporation, un qui est à la charge de la personne qui devra être expertisée et le troisième qui est à moitié-moitié en termes de frais à couvrir. L'avant-projet de loi est assez large à l'effet que ça peut être même quelqu'un qui demande à devenir membre de la corporation qui pourrait avoir à subir cette expertise médicale. Alors, on trouve que c'est quand même très large comme possibilité pour la corporation professionnelle.

Mme Caron: Au niveau des coûts, ça peut s'évaluer à combien?

Mme Verreault: En tant qu'organisation syndicale ayant eu à défrayer des coûts de ce type-là dans certaines causes, on sait qu'une expertise médicale, pour une journée d'audition, peut aller de 5000 $, 6000 $ à 8000 $, ce qui peut être quand même très important, dépendant des médecins experts qui sont appelés à venir se prononcer face à la personne ou à la pertinence

pour cette personne-là d'être admise ou de pouvoir continuer à travailler dans son champ d'action.

Mme Caron: Donc, on se parle de coûts qui peuvent être très élevés, là.

Mme Verreault: Oui. Effectivement, c'est des coûts qu'on considère, en tout cas, qu'on évalue, nous, comme quelque chose qui pourrait être élevé pour une personne qui est soit sans emploi et veut devenir membre d'une corporation ou peut-être même suspendue dans le cas où on doute de ses capacités de poursuivre son travail.

Mme Caron: Au niveau de l'article 151, je pense que vous avez bien relevé que, finalement, on crée deux catégories de frais, c'est-à-dire ceux qui ont la chance d'avoir un comité qui n'a pas de frais de déplacement et de séjour et ceux qui n'ont pas cette chance. Donc, dépendamment de la provenance des régions, je pense que c'est un élément important que vous soulevez là-dessus. Là aussi on doit se parler de frais quand même très élevés.

Mme Verreault: Oui. On pense aux régions éloignées. Je pense que ça défavorise les membres de corporations qui vivent en région éloignée et qui travaillent en région éloignée dans ce cas-là.

Mme Caron: J'aimerais peut-être aborder, comme dernier point, les délais, les délais pour rendre une décision. Est-ce que vous n'avez pas de crainte, dans les cas où la plainte touche une faute grave, que le fait de limiter le délai ça puisse nuire à la personne si le syndic n'a pas le temps de faire une véritable enquête complète et qu'il décide, finalement, peut-être d'un peu bâcler l'enquête? Ça pourrait nuire à la personne.

Mme Verreault: Vas-y, Denis.

M. Bradet (Denis): Ce qu'on estime - on en a quand même discuté pas mal - c'est que, effectivement, dans les cas comme ceux dont vous parlez, les corporations doivent prendre les moyens pour rendre une justice expéditive. Je comprends très bien qu'il y a des contraintes administratives, mais, à l'inverse, de laisser le syndic procéder à son enquête avec le temps qu'il désire, ça a créé, dans le passé, pour les groupes qui sont ici, de longs délais, de très longs délais.

Mme Caron: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'établir des délais différents selon les fautes légères et les fautes plus graves? Je pense, par exemple, lorsqu'une personne décide de déposer une plainte sept ans après l'acte répréhensible commis, c'est évident que, au niveau de la recherche de preuves, ce n'est pas évident que ça peut se faire dans un délai très court.

M. Bradet (Denis): II est certain qu'il y a des différences qu'on peut faire entre les situations. Il faut toujours tenir compte de la réalité du salarié qui est sous enquête; plus la plainte dont il fait l'objet est grave, plus il est susceptible d'être un salarié suspendu sans solde ou congédié. Donc, il n'a pas un sou. Je comprends que le syndic, lui aussi, il faut qu'il ait le temps de travailler, mais, le salarié, il faut qu'il retrouve son travail si la plainte dont il fait l'objet n'est pas bien fondée. Alors, c'est dans ce sens que nous croyons qu'il faut imposer des délais au syndic pour qu'il agisse rapidement.

Mme Verreault: Peut-être pour rajouter... Si je lis dans l'avant-projet de loi ce qu'on nous dit, c'est qu'on parte de 90 jours pour le délibéré. Alors, moi, ce que je comprends dans ça, c'est que l'enquête est déjà faite et c'est le temps où le comité de plainte ou le comité en question se rencontre pour, finalement, discuter du cas et mettre sur papier les décisions qu'ils ont à rendre. Alors, je pense qu'à ce niveau-là on peut essayer de diminuer le temps et ce, sans que ça ait d'impact sur un cas tel que celui que vous nous présentez où je pense que l'idée, nous, ce n'est pas justement de presser l'enquête et de faire en sorte que l'enquête serait faite de façon non conforme ou en tout cas non complète, mais dans ce qui s'appelle donner la décision, de rendre la décision de la part du comité, je pense qu'on apprécierait que le délai soit le plus court possible, comme Me Bradet le disait, pour faire en sorte que notre salarié puisse le plus rapidement possible retrouver un emploi dans le cas où il a été suspendu ou congédié.

Mme Caron: Alors, je vous remercie beaucoup de votre participation. Je pense que c'était important aussi qu'on puisse entendre des professionnels salariés au niveau du secteur public parce que vous vivez une situation fort différente des professionnels qu'on a entendus jusqu'à maintenant. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gautrin): Sur le temps des ministériels, je vais poser une question. J'ai du mal à comprendre votre règlement sur la question des maîtrises de stage. Si je comprends bien, vous faites référence à l'avant-projet de loi à la page 10, l'article 12, qui vient introduire le nouvel article 34 qui modifie l'article 32. Votre problème est avec le 3e, si je comprends bien, le 3° qui vient élargir la portée de l'article 34, qui, jusqu'à maintenant, était strictement limité aux étudiants, va l'étendre aux personnes qui sont des enseignants. Et les maîtrises de stage, bon, je comprends que ça peut exister, néanmoins je ne comprends pas le problème que vous soulevez

alors que l'article 34. 3° limite cette possibilité dans les cas où - et je lis l'article 34. 3°: «l'enseignant ou le maître de stage de poser, suivant les conditions déterminées par règlement pris en application du paragraphe g de l'article 94...» Alors, l'article g de l'article 94 permet au bureau de la corporation de «fixer des normes permettant de reconnaître, aux fins de la délivrance d'un permis et d'un certificat de spécialiste, l'équivalence de la formation d'une personne qui ne détient pas un diplôme autrement requis à cette fin». Ma compréhension de l'article 34. 3°, c'est que le bureau de la corporation a la possibilité d'accorder à certaines personnes qu'elle considère comme étant par-faitements aptes, parce qu'elles sont déjà des enseignants, de pouvoir, dans le cadre de la formation, poser un acte professionnel. Je ne comprends pas, alors qu'il y a, donc, ces balises dont je viens de vous rappeler, quel est le problème que vous avez.

Mme Verreault: Ce qu'on en comprend, nous, c'est qu'à l'article 94g cette disposition-là fait en sorte de permettre à la corporation professionnelle de déterminer les conditions suivant lesquelles le maître de stage pourra poser des actes et ne permettrait pas, d'autre part, d'aller à rencontre de l'article 34 de l'avant-projet de loi. Alors, pour nous, il n'est pas clair qu'une corporation professionnelle, de par ses règlements, pourrait limiter l'application de l'article 34 de l'avant-projet de loi. (18 h 20)

Le Président (M. Gautrin): Écoutez, peut-être que c'est une question de rédaction, on pourrait consulter, mais je crois l'esprit n'est pas du tout d'aller dans la direction que vous dites là parce que si je relis l'article 34. 3°, c'est: «L'article 32 n'empêche pas l'enseignant ou le maître de stage de poser, suivant les conditions...» et les conditions sont déterminées par la corporation, l'application de l'article 94g. Enfin, c'est bon que vous nous souleviez ici les craintes, mais je dois vous dire que les rédacteurs de cette loi-là avaient les mêmes préoccupations et pensaient - on pourra vérifier du côté des juristes - que, par ce biais-là, la corporation avait les pleins pouvoirs, le cas échéant, d'accorder un droit de pratique ou une possibilité à certains enseignants ou maîtres de stage.

Mme Verreault: Alors, si c'est le cas, vous nous rassurez.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Est-ce que, règle d'alternance, parce que j'ai pris du temps sur les ministériels... Non? Est-ce que d'autres ministériels ont des... Alors, peut-être en conclusion. Est-ce que vous avez d'autres questions?

Mme Caron: M. le Président, moi, j'ai fait mes remerciements, alors je vous remercie à nouveau pour votre participation.

Le Président (M. Gautrin): M. le ministre, en conclusion.

M. Savoie: Oui, effectivement, il y a des éléments là qui méritent d'être regardés de plus près. Comme je vous l'ai dit, il y en a sur lesquels vous tranchiez franchement, il faudrait y voir finalement une réflexion, il y a toujours un élément d'arbitraire dans une décision, même si, des fois, on a tendance à habiller ça autrement. C'est toujours difficile. On fait ce qu'on peut le mieux.

Au . niveau de l'autre projet de loi, au niveau du financement, évidemment, on aura l'occasion de s'en reparler.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Gautrin): Alors, je vous remercie de votre participation. Je suspends les travaux de cette commission jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 22)

(Reprise à 20 h 3)

Le Président (M. Tremblay, Rimouski): Mesdames, messieurs de la commission, nous allons repartir cette commission et entendre dans un premier temps l'Ordre des denturologistes du Québec, représenté ici par M. Denis Provencher, président, Mme Monique Bouchard, directrice générale, MM. Arsenault et Dubé. Alors, M. le président, je vous demanderais s'il vous plaît de nous présenter votre mémoire dans un premier temps, vous avez 20 minutes pour le faire, et après nous entendrons la partie ministérielle et la partie de l'Opposition. Alors, M. le président.

Ordre des denturologistes du Québec (ODQ)

M. Provencher (Denis M.): Merci, M. le Président, membres de la commission, je voudrais en premier lieu mentionner que l'Ordre des denturologistes du Québec a participé activement aux consultations tenues par le Conseil interprofessionnel du Québec et a approuvé, à l'instar des autres corporations professionnelles, le mémoire du CIQ. Nous avons été fort surpris de constater que cet avant-projet de loi modifiait sensiblement l'équilibre des pouvoirs entre les divers intervenants, sans qu'aucune consultation préalable ne soit effectuée et sans qu'aucune étude sérieuse ne soit déposée par l'Office des professions prouvant la nécessité de telles mesures.

Le ministre avait bien raison de mentionner, lors de sa rencontre avec les responsables des corporations professionnelles, que les cheveux allaient peut-être nous dresser sur la tête. Il y

en a certains que ça a dressé... À preuve, nous sommes ici réunis pour examiner un avant-projet de loi dont les changements sont apportés unilatéralement par l'Office, sans motifs pour étayer sa position, et pour notre corporation c'est la deuxième fois que nous vivons ce type d'expérience en commission parlementaire. Cette remise en cause de notre système professionnel, ainsi que certaines mesures qui sont apportées dans cet avant-projet de loi vont à contre-courant de ce qui est véhiculé aujourd'hui dans l'industrie et dans d'autres domaines. De façon générale, les termes couramment employés pour qualifier cette philosophie s'énoncent comme suit: le principe de la qualité totale. Ce principe ne consiste pas à ajouter du personnel supplémentaire pour multiplier les mesures de contrôle, il fait surtout appel à la responsabilisation des individus composant tout le système. Cette responsabilisation s'obtient en définissant clairement le rôle de chacun à l'intérieur de son champ d'activité, en établissant qu'il est le seul responsable et qu'il ne peut pas se décharger de cette responsabilité sur un autre. Pour ce faire, on se doit de lui donner toute la latitude nécessaire à l'exécution de son mandat et être très, très sensible aux suggestions qu'il émet pour améliorer l'efficacité de sa responsabilité. Cette responsabilisation rend superflus les doubles et triples contrôles. Elle décentralise les pouvoirs décisionnels et rentabilise au maximum chaque fonction. Elle évite aussi les pertes de temps, d'énergie et de productivité. Il n'est pas étonnant que le système professionnel actuel soit cité en exemple un peu partout dans le monde, car il est basé sur ces principes d'avant-garde que l'industrie commence tout juste à appliquer et à en recevoir les bienfaits. Le système professionnel est basé sur la responsabilisation de chacun des professionnels concernés. Il est aussi basé sur la responsabilisation de chaque corporation professionnelle en ce qui concerne la protection du public.

Quelles sont les raisons sérieuses qui motivent ce changement de cap? Nous fignorons. Il y a des lacunes à notre système, c'est évident et toute les parties le reconnaissent. Mais est-ce en déresponsabilisant les corporations professionnelles et en les jetant pieds et poings liés à la merci de l'Office des professions que nous obtiendrons des résultats? Nous en doutons. Si le passé est garant de l'avenir, et notre corporation est très bien placée pour vous en faire part, nous assisterons bientôt à un office totalitaire qui rendra inutile les bureaux d'administration des corporations professionnelles. Souvenons-nous de l'adoption de la loi 17 et de ses interdictions. Et je prends à témoin la quasi-totalité des membres actuels de cette commission qui avaient participé, à l'époque, à cette étude.

C'est exactement ce qui arrive lorsqu'on devient à la fois juge et partie. Je ne voudrais cependant pas qu'on interprète mes propos comme désirant l'abolition de l'Office et l'abolition de son mandat de surveillance. Je crois plutôt qu'on devrait le renforcer si le besoin était démontré, ce qui n'a pas été fait jusqu'ici. Il faut toujours garder en tête que notre fonction, et la vôtre, en tant que législateur, est le bien du public. Il est peut-être facile de vouloir multiplier les contrôles et les enquêtes, mais, avant de les installer, il faut toujours se demander la nécessité et, aussi, qui paie la note. En bout de ligne, que ce soit le gouvernement qui paierait pour l'Office ou les corporations professionnelles, comme c'est le cas pour le projet de loi sur le financement de l'Office, c'est toujours le consommateur qui, en bout de ligne, en paiera la note. C'est pourquoi nous nous opposons à tout pouvoir supplémentaire accordé à l'Office, autres que ceux qui renforceraient son mandat actuel de surveillance si le besoin était démontré.

L'Ordre des denturologistes a toujours eu à coeur son mandat, et je crois qu'il a été bien rempli. À titre d'exemple, depuis près de 20 ans, nous avons mis en place une procédure de conciliation des différends qui, de 30 % d'efficacité qu'elle était dans les premières années, atteint maintenant près de 80 %, le tout sur une base strictement volontaire puisque la réglementation n'existait pas dans le Code des professions. C'est pourquoi nous voyons d'un très bon oeil son introduction légale dans le Code. Les plaintes du public à notre corporation, étant donné la nature des services rendus, sont en grande partie reliées à une notion de différend entre le professionnel et le consommateur. Vous trouverez d'ailleurs, en page 26 de notre mémoire, des statistiques que nous avons recueillies à votre intention afin de démontrer le bien-fondé de ce règlement sur les différends. (20 h 10)

J'inviterais M. Arsenault, notre syndic, à vous expliquer un peu plus en détail ce tableau.

Le Président (M. Gautrin): M. Arsenault.

M. Arsenault (Richard): Oui, bonsoir. Nous avons tous entendu, cet après-midi, quelques-uns de mes confrères syndics venir expliquer ici la façon dont ils géraient les plaintes reçues du public. Certains nous disaient que 96 % de ces plaintes-là ne se rendaient pas en comité de discipline, mais elles n'étaient pas pour autant mises carrément à la poubelle. Ces plaintes-là étaient gérées d'une autre façon. Ils employaient des façons plus souples d'arriver à leurs fins. Alors, nous avons pensé ici vous démontrer clairement, chiffres à l'appui, ce qui arrive de ces plaintes. Alors, le tableau, à la page 26, nous indique que, sur approximativement 275 000 prothèses dentaires fabriquées annuellement par les denturologistes, le syndic a enregistré 125 plaintes officielles. De ces 125 plaintes, quatre seulement se sont rendues, durant la dernière

année, en comité de discipline. Qu'est-ce qui est arrivé des autres? Alors, le tableau de la page 26 vous l'indique. Le syndic, comme l'expliquait M. Provencher, depuis longtemps, se sert d'une médiation volontaire pour régler les problèmes. Alors, sur les 125 plaintes, 70,4 % de ces plaintes ont reçu un remboursement, autrement dit, ont été gérées, ont été terminées de la façon que le client qui se plaignait ait satisfaction, parce que ça reposait finalement sur un différend, une insatisfaction des prothèses, des travaux réalisés. Alors, 70 % de ces plaintes ont reçu satisfaction. Le client était content, il est reparti satisfait des travaux du syndic.

Parmi les plaintes qui ont été, celles-là, vraiment rejetées, 11,2 % ont été vraiment rejetées pour différentes raisons qu'on vous a détaillées. Plaintes trop tardives, après analyse des prothèses dentaires, après examen, après expertise, rien n'avait été trouvé de dérogatoire. Donc, nous avons rejeté la plainte. D'autres plaintes ont été rejetées pour d'autres motifs aussi. Il y avait des plaintes non fondées. Il y avait des plaintes qui ont été retirées par le patient en cours d'analyse.

Alors, seulement 11 % des plaintes ont dû vraiment être rejetées par le syndic. Il y a le dernier pourcentage. Celui-là ici est intéressant, surtout dans la demande qu'on va vous faire. On s'aperçoit que 10,4 % des plaintes, finalement, le syndic, par médiation volontaire, n'est pas arrivé à quelque chose de satisfaisant pour les deux parties, et nous avons dû aussi diriger, à cause d'une médiation qui n'a pas pu aboutir, vers les tribunaux, 8 %. Donc, un total de 18,4 % de ces plaintes-là que le syndic n'a pu régler par médiation volontaire ou n'a pas réglé à l'intérieur de la Corporation, à la satisfaction des clients. Alors, ceci nous amène à dire que si on pouvait... Si la Corporation avait l'outil qui s'appelle un comité d'arbitrage des comptes et des différends, si on avait cet outil-là pour régler les dossiers à l'intérieur de la Corporation, on pourrait, chiffres à l'appui, régler 18,4 % de plus de plaintes.

Vous savez, après une négociation qui n'a pas réussi, c'est très frustrant pour le syndic de dire au plaignant: Madame ou monsieur, je ne peux pas régler votre cas, je n'ai pas le pouvoir de le régler. Vous devrez vous référer à un tribunal ordinaire. Alors, c'est là qu'on se fait dire: Écoutez, vous autres, qu'est-ce que vous êtes de bon? À quoi vous servez? Vous n'êtes même pas capables de régler, de régimenter vos membres ici. Alors, ça, ça nous donne une très mauvaise image. D'accord? Et, lorsqu'on parle de prothèses dentaires, imaginez-vous une personne qui a des prothèses dentaires en bouche et qui se voit référée à une Cour des petites créances dont les délais sont de trois, quatre, six mois, tout dépendant des régions, avec des prothèses dentaires en bouche qui ne sont pas satisfaisantes, qui sont douloureuses, alors, ce n'est vraiment pas un bon service à leur rendre. Ça engorge les tribunaux ordinaires. Alors, si on pouvait, nous, à l'intérieur de notre corporation, régler ces cas-là, on aurait un taux de satisfaction de 20 % supérieur.

Quant au comité d'examen des plaintes, nous nous opposons à son introduction car il ne viendrait qu'alourdir le système et que son efficacité n'en serait que mitigée. De plus, n'oublions pas que cela viendrait restreindre l'autonomie et l'indépendance nécessaires à un syndic dans l'exercice de ses fonctions. Par contre, nous ne verrions pas d'objection à ce que le comité soit transformé en un comité aviseur pour le syndic, tel que décrit dans le mémoire du Conseil interprofessionnel. Bien que ce comité aviseur serait très peu utile à notre corporation, étant donné la nature des plaintes chez nous et les moyens dont dispose actuellement le syndic avant de rendre sa décision, le législateur pourrait cependant étudier la possibilité de demander au comité aviseur de réexaminer un dossier, à la demande expresse d'un consommateur, mais non pas d'une façon systématique. Ceci aurait pour effet de créer un moyen d'appel pour le consommateur avant qu'il décide d'aller plus loin dans sa démarche. Mais, comme M. Provencher l'a dit précédemment, ce type de cas serait, à notre expérience, très rare chez les denturologistes, étant donné les litiges en cause.

Merci.

M. Provencher: Les modifications proposées au processus réglementaire dans l'avant-projet de loi sont, dans l'ensemble, très positives. Par contre, nous sommes en désaccord avec les modifications concernant l'intervention de l'Office dans tous les règlements, même ceux dits à caractère administratif. En cela, nous sommes d'accord avec le Conseil interprofessionnel qui craint que l'Office perçoive son rôle d'une façon trop rigide ou autoritaire, ou retarde, pour des motifs incompréhensibles ou philosophiques, l'adoption des règlements. Nous ne comprenons pas, d'ailleurs, pourquoi l'Office tient tant à obtenir ce pouvoir supplétif. Quelles en sont les raisons? Nous pensons que c'est un pouvoir d'ingérence, encore une fois, et de non-confiance aux corporations professionnelles.

J'aimerais aussi vous sensibiliser sur un aspect de la protection du public qui a été omis dans cet avant-projet de loi et qui demanderait à être examiné, soit la pratique illégale de la profession. En effet, nous pensons qu'en modifiant la juridiction du Tribunal des professions, afin que celui-ci devienne un tribunal en première instance en matière de pratique illégale, vous rendriez service à la population et aux corporations. Il ne fait pas de doute qu'un tribunal spécialisé en droit professionnel serait beaucoup plus qualifié et que les corporations professionnelles n'auraient pas à expliquer constamment comment interpréter les dispositions qui définis-

sent l'exercice d'une profession.

L'Ordre des denturologistes est conscient de la volonté du législateur et des problèmes auxquels ce dernier fait face. Nous souscrivons pleinement aux objectifs du ministre de rendre le système plus transparent, plus souple, plus accessible et moins coûteux. De tels objectifs sont constamment recherchés par notre corporation professionnelle et c'est pourquoi, dans le plus grand respect de chacun, nous déplorons le manque de consultation de la part de l'Office dans cette préparation de l'avant-projet de loi. Nous considérons que, pour qu'un système soit efficace, chacun doit l'être aussi. Et, lorsqu'on désire modifier le rôle de ceux-ci, on se doit de les impliquer dans le changement souhaité. C'est la première règle à suivre pour atteindre la responsabilisation des individus ou des groupes dont nous parlions en introduction.

D'autre part, nous croyons aussi que la transparence, souvent souhaitée, passe par l'éducation. Nous constatons que les rôles de l'Office et des corporations professionnelles sont peu ou mal compris par le commun des mortels. On associe, par exemple, trop souvent une corporation professionnelle à un syndicat, dont le syndic est le digne représentant. Nous suggérons au législateur ainsi qu'à l'Office, en collaboration avec les corporations professionnelles, d'intensifier l'information du public et ce, avant, pendant et après les discussions sur d'éventuelles modifications. Les préjugés envers les corporations sont déclenchés, parfois, par quelques cas d'exception, mais qui circulent, persistent et s'amplifient à cause du peu de compréhension du public du rôle des corporations professionnelles. N'oublions pas qu'une hirondelle ne fait pas le printemps. Il y a lieu que le public connaisse davantage le système professionnel, dont particulièrement le rôle premier de son protecteur, c'est-à-dire le syndic, ce qui effacerait peut-être cette croyance populaire que les professionnels se protègent tous entre eux. (20 h 20)

Bien que certains éléments de l'avant-projet de loi soient valables, nous sommes en désaccord avec le principe profond de cet avant-projet de loi. C'est pourquoi l'Ordre des denturologistes a recommandé dans son mémoire que ce projet soit rejeté dans sa forme actuelle, mais que le législateur procède à une réforme complète, en profondeur, du Code des professions après les consultations de tous et chacun dans le système. L'Ordre des denturologistes tient à assurer le législateur et l'Office de son entière collaboration dans d'éventuelles consultations visant à faire en sorte que notre système soit l'un des meilleurs et l'un des plus avant-gardistes. Je vous remercie.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Provencher. Alors, pour la période de questions, je donnerai maintenant la parole à M. le ministre responsable et député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Effectivement, il y a, dans la présentation que fait l'Ordre des denturologistes du Québec, des éléments qui méritent d'être retenus. On est heureux de voir qu'effectivement vous avez pris le temps de préparer un mémoire et également d'examiner certains éléments qu'on n'a pas encore vu présenter devant nous, mais on sait qu'ils vont venir, et on constate qu'il se développe un certain consensus. Je parle, par exemple, de l'utilisation du tribunal pour des cas de pratique illégale. On trouve qu'il y a là une avenue et on vous remercie pour la recommandation. On va certainement regarder ça de très près et échanger sur ça avec la justice. Il y a là un pas, je pense, une recommandation positive pour bonifier le projet de loi.

Il y a, à travers l'ensemble de votre mémoire, une inquiétude de la création d'un déséquilibre en faveur de l'Office où on parle effectivement des mesures... On souligne que les mesures de tutelle, par exemple, les mesures d'enquête qui sont proposées... On parie également de mesures coercitives d'une façon générale au niveau du projet, du mémoire, plutôt, et on a de la difficulté à concilier ça, finalement, avec les grandes orientations du projet de loi. On se demande si, effectivement, on ne cherche pas à rempirer l'orientation qui est donnée dans le projet de loi en disant: Un pouvoir de tutelle, nécessairement, ça vient du gouvernement et, nécessairement, un pouvoir d'enquête va devoir être contrôlé. Il ne pourra pas être libre d'intervention. On se demande, dans un contexte comme ça, pourquoi, finalement, demander le retrait du projet de loi en ce qui concerne, justement, ces pouvoirs de tutelle et d'enquête parce qu'on a déposé ce matin un ensemble de documents concernant une trentaine de lois qui accordaient un pouvoir d'enguête à différentes instances gouvernementales et* ça ne semblait pas créer de difficultés majeures à ce moment-ci. On se demandait, étant donné le rôle de l'Office, étant donné les possibilités d'intervention de l'Office lorsque c'était nécessaire, pourquoi cette crainte de déséquilibre constant, là?

M. Provencher: Cette crainte vient un peu du passé ou des façons de procéder. On a relevé aujourd'hui, tant au niveau du Conseil interprofessionnel que des médecins, un état assez souvent de confrontation qu'il y a eu entre l'Office et les corporations professionnelles. J'en ai discuté avec plusieurs de mes collègues et ça semble être très largement un état de fait. Chez nous, particulièrement chez les denturologistes, on a vécu des expériences, il y a environ deux ans, qui nous font avoir crainte que, quand tu es à la fois juge et partie, tu ne puisses pas te défendre adéquatement ou de ne pas avoir le temps de le faire, parce que, sur simple soupçon,

l'Office pourrait à ce moment-là, de son propre chef, engager des procédures, et il y a une crainte à ce niveau-là. On se dit que, s'il y a effectivement des soupçons qui sont vérifiés, le législateur pourrait en prendre connaissance et les corporations professionnelles pourraient, à ce moment-là, avoir droit au chapitre et faire entendre leur version des faits avant de décider ou de décréter des enquêtes sur les corporations ou une tutelle quelconque.

M. Savoie: c'est ça. vous ne voyez pas dans le pouvoir d'enquête, par exemple, une force positive qui permettrait justement à contrôler certaines corporations professionnelles qui pourraient outrepasser leur mandat.

M. Provencher: Comme je l'ai mentionné dans le début du mémoire, si on avait des preuves de ça, s'il y avait des courbes où on dit: Avoir eu ça, ces mandats-là, j'aurais pu éviter tel ou tel problème... Ça n'a pas été discuté avant. C'est ce qui a fait aussi que les corporations professionnelles, quand on dit le manque de consultation de l'Office, à ce niveau-là, on n'a pas pu prendre connaissance, dire, on a eu tel problème et il devrait être réglé par telle solution. Je ne crois pas qu'il y en ait eu réellement de problème. C'est à cause de ça qu'on dit: Pourquoi on change un système, on change la façon de fonctionner, alors qu'il n'y a pas de base d'établie, de problème évident? Pourquoi changer ce qui fonctionne bien?

M. Savoie: Oui, mais, le sondage, je pense qu'on a pu constater que ça ne fonctionne pas si bien que ça. Il y a un problème là.

M. Provencher: Effectivement, un problème au niveau du règlement de la population. Comment les servir mieux? On a fait mention, tout à l'heure, au niveau de la discipline, au niveau de la connaissance du public, qu'il y a un problème là. Quand un public dépose une plainte, il s'attend lui à avoir satisfaction, et la discipline ne lui donne pas, jamais, satisfaction. Parce que même si elle passe à travers tout le processus, elle qui voulait peut-être un remboursement ou un ajustement, se ramasse à la fin du processus, elle n'a pas eu ce qu'elle est venue chercher. Le professionnel a probablement été condamné, mais la personne en elle-même sort un peu frustrée, surtout dans le problème de judiciarisation qui existe. Quand deux bons avocats se confrontent dans un comité de discipline, le patient, des fois, se demande ce qu'il fait là.

M. Savoie: ...combien ça va coûter.

M. Provencher: Ça c'est quand il est avec la corporation.

M. Savoie: Oui.

M. Provencher: Veux, veux pas...

M. Savoie: À la page 26, vous soulignez qu'il y a eu - et vous faites une démonstration au niveau des 125 plaintes qui ont été déposées sur les 275 actes, finalement, que vous avez posés. Ça c'est au cours de l'année 1992, je présume?

M. Provencher: La dernière année financière qui est dans le rapport annuel de la corporation.

M. Savoie: D'accord, 1991-1992. M. Provencher: Exact, 1991-1992.

M. Savoie: Si on donnait suite à la recommandation de l'utilisation d'un formulaire, le citoyen pourrait, par exemple, prendre, développer un accès à un formulaire par le biais, disons, de l'institution bancaire ou une caisse populaire de quelque sorte; pensez-vous que ça va augmenter sensiblement le nombre de plaintes que vous allez recevoir?

M. Arsenautt: Dois-je répondre? Écoutez, le formulaire par lui-même n'augmenterait peut-être pas le nombre de plaintes. Par contre, l'éducation, si ce formulaire-là est envoyé avec une formule explicative du rôle du syndic, du rôle des corporations professionnelles, alors là je croirais peut-être que ça pourrait effectivement augmenter le nombre de plaintes parce que moi, tous les jours, je reçois des coups de téléphone de gens qui ne connaissaient même pas mon existence, qui sont référées souvent par l'Office de la protection du consommateur. Ils se sont adressés là. Et l'Office me les réfère chez moi.

Ils ne connaissaient même pas mon existence. Ça me prend, bien souvent, 10 minutes de discussion avec eux autres pour seulement les mettre en confiance parce que leur première attitude c'est de croire que moi je suis là pour défendre le denturologiste. Alors, un formulaire en plus des explications expliquant clairement ce que c'est que notre rôle, peut-être que ça pourrait aider, ça serait bienvenu. Un formulaire, là vous parlez pour la rédaction d'une plainte, c'est ça? Je pense qu'on devrait aussi autoriser n'importe qui à écrire comme bon lui semble sur une simple feuille. Ça peut être bien dans un cas, mauvais dans l'autre, alors, qu'on laisse une latitude assez large aux gens de s'exprimer comme ils le veulent. (20 h 30)

M. Savoie: Ah oui, un n'exclut pas l'autre, là.

M. Arsenautt: Ah, non, absolument.

M. Savoie: Tout simplement que le formulaire devrait faciliter la tâche. Alors, vous pensez de rester là, à 125 plaintes, grosso modo,

par année? Vous ne pensez pas, là, que...

M. Provencher: Si on regarde les différents rapports annuels, vous allez constater qu'il y a une diminution de plaintes à travers les années. Il y a moins de plaintes, si on regarde voilà dix ans, comparativement à aujourd'hui.

M. Savoie: C'est ça.

M. Provencher: La tendance est à la baisse au lieu d'être à la hausse.

M. Savoie: Oui, et vous attribuez ça, finalement, à la formation continue, des éléments comme ça?

M. Provencher: On attribue ça aussi à ce que j'appellerais la responsabilisation des professionnels. C'est clair que, quand ils font face au syndic, qu'ils font face à une évaluation de leur travail, j'ai comme l'impression que maintenant, ceux qui ont passé à travers le processus font beaucoup plus attention et évitent de leur propre chef ce genre de démarche-là, parce qu'il n'est jamais agréable pour un professionnel de dire: Ici le syndic de l'Ordre, j'ai un problème. Tout le monde, là, les épaules leur dressent un peu, là. Ils sont inquiets.

M. Savoie: D'accord. Et finalement, si je comprends bien, là, c'est que vous êtes d'accord avec la réforme proposée pour plusieurs éléments, mais par contre, sur certains éléments, là, vous demandez tout simplement le retrait de certains mécanismes en ce ', qui concerne la tutelle et l'enquête. Par exemple, l'examen des plaintes, vous demandez un registre de ça. Mais vous voulez quand même que le processus - c'est à la page 34 de votre mémoire, hein - vous affirmez toujours que bon, effectivement, c'est la bonne orientation, qu'il faut réformer en profondeur...

M. Provencher: C'est ça, il y a certains éléments dont on trouve qu'ils sont inadéquats, mais il y en a d'autres qui sont très importants.

M. Savoie: D'accord. Et le comité des plaintes, évidemment, vous prenez la même position que le Conseil interprofessionnel, vous voulez un comité...

M. Provencher: ...aviseur.

M. Savoie: ...consultatif, sur une base volontaire, ou obligatoire?

M. Provencher: Parce que, chez nous, un comité des plaintes, de la façon que ça peut se travailler, c'est que, quelle utilité il va avoir, puisque le syndic règle déjà les problèmes, mais il ne les amène pas en discipline dans 90 % des cas. Si on considère que chacun de ces cas-là est une plainte, étant donné qu'ils n'ont pas été en discipline, le comité devrait se repencher sur ce que le syndic a fait. On trouve que c'est un dédoublement, c'est de l'argent qui, veux, veux pas, est gaspillé, et un processus qui est alourdi pour rien. Mais par contre, si une personne est insatisfaite du syndic, si on donnait une piste, peut-être que ce comité-là, à la demande du consommateur, pourrait servir; ou encore, dans des cas compliqués, le syndic pourrait l'utiliser pour avoir un avis. Dans les deux cas, ça pourrait rendre certains services. On disait que chez nous il y a moins d'efficacité, ou... parce que le syndic a déjà tous les moyens à sa disposition pour avoir des avis. C'est clair que, quand il a des problèmes, il va aller chercher des experts ou des personnes pour s'entourer; quand je dis «experts», on ne se limite pas strictement à des denturologistes, ça peut être des gens en marketing, si on parle de publicité; il va s'entourer des personnes pour être capable de donner une réponse éclairée.

M. Savoie: D'accord. Ça fait que, finalement, au niveau du comité, ce serait finalement sur une base volontaire.

M. Provencher: Volontaire.

M. Savoie: Alors, vous, finalement, vous direz: Non, nos structures sont suffisantes pour répondre à nos attentes au niveau...

M. Provencher: C'est ça, parce que les besoins des consommateurs vont être remplis, à ce moment-là...

M. Savoie: Oui, c'est ça.

M. Provencher: ...sans ça.

Le Président (M. Gautrin): M. Arsenault.

M. Arsenault: Vous allez juste comprendre que, d'après la nature des services qu'on offre, des prothèses dentaires, il est absolument essentiel que, moi, je me doive d'offrir un service rapide de négociation et de règlement des conflits.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Arsenault. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, M. Provencher, Mme Bouchard, M. Arsenault et M. Dubé, bienvenue. Votre mémoire est intéressant à plusieurs égards. Lorsque vous expliquez la situation économique difficile, et que vous répétez, finalement, que la confiance des citoyens envers les institutions en général est fortement ébranlée, je pense que c'est une réalité. Ça ne s'applique pas uniquement aux professions, ça s'applique aux gouvernements, ça

s'applique aux commissions scolaires, aux autorités religieuses, aux municipalités, et on aurait pu faire la liste encore plus longue, et la réaction, évidemment, est toujours d'ajouter au système. Donc, plus le système est complexe, plus le système est bureaucratique, moins les gens sont satisfaits et moins le système est efficace. On a eu un exemple avec le problème des taxes des cigarettes et l'ajout d'une police verte qui n'a pas nécessairement solutionne le problème. Mais on ajoutait un autre palier et c'était beaucoup plus difficile.

Le Président (M. Gautrin): Restons dans les denturdogistes.

Mme Caron: Oui, oui, c'est à la page 6, la situation économique difficile. C'est en plein dans le sujet, M. le Président. Donc, vous nous dites que, finalement, l'important c'est d'avoir un système qui soit simple, efficace et qui donne satisfaction. À la page 26, à cet égard-là, votre tableau est très révélateur et je pense que vous démontrez que dépendamment des sercices qui sont offerts par les professionnels, les solutions peuvent en fait être très différentes. C'est évident que, dans le cas d'un denturologiste ou d'un dentiste qui offre des services dentaires, la personne, ce qu'elle souhaite, c'est sa satisfaction. Même si le professionnel a une sanction, ça ne lui donne pas satisfaction si on ne règle pas son problème. Je pense que, dans des corporations comme les optométristes ou les opticiens, on peut retrouver sensiblement le même type de problème.

J'aurais une question sur votre tableau. Lorsque vous nous dites: parmi les 18,4 %, pour 13, aucune conciliation, est-ce que qu'on peut nous donner des exemples, des raisons? Vous nous disiez tantôt: Bon, si la personne a un problème avec ses prothèses dentaires et qu'elle doit attendre aux petites créances, est-ce qu'on a des raisons pour que la conciliation ait échoué?

Le Président (M. Gautrin): M. Arsenault.

M. Arsenault: Oui. Les raisons peuvent être diverses, mais c'est qu'habituellement le denturologiste se refuse de reconnaître, j'allais dire le jugement, mais enfin l'examen, l'expertise qui a été pratiquée sur ses prothèses, se refuse de se soumettre à notre recommandation. Alors, c'est ça. Si on a fait une distinction vis-à-vis les dix plaintes qui étaient dirigées vers les tribunaux, c'est parce qu'on sait que celles-là ont été effectivement dirigées, la personne a poursuivi et nous lui avons donné assistance, nous avons envoyé la personne qui avait fait l'examen des prothèses pour expliquer au juge c'était quoi le problème. On offre ça, mais ça n'empêche pas que le délai est extrêmement long. Souvent, parmi ces gens-là qui refusent une conciliation, ils connaissent très bien le système, ils se disent que s'ils laissent courir vers les petites créances, eh bien alors là ils vont retarder le paiement final de trois mois, quatre mois, six mois. Alors, souvent on s'aperçoit que c'est ça, c'est juste pour retarder l'échéance.

Le Président (M. Gautrin): Merci. M. Provencher: Si je peux compléter. Le Président (M. Gautrin): Bien sûr.

M. Provencher: II y a aussi l'autre aspect où c'est le consommateur auquel on dit qu'il peut avoir un. règlement qui n'est pas tout à fait complet et qui veut plus que ce qui lui est offert ou le genre de conciliation qui est amenée. À partir de ce moment-là, c'est le consommateur lui-même qui refuse. C'est pour ça qu'on a aussi séparé entre deux parties, parce que... aucune conciliation, c'est autant le consommateur ou le professionnel qui peuvent refuser. Diriger vers les tribunaux, c'est un petit peu ce que M. Arsenault vous a dit, c'est qu'à ce moment-là ça s'est effectivement dirigé vers les tribunaux et on a fourni assistance au patient.

Mme Caron: Est-ce que vous avez une idée des résultats sur les plaintes qui sont dirigées vers les tribunaux?

M. Arsenault: Sur une bonne partie, oui, effectivement, le patient souvent nous rappelle et nous dit: Merci beaucoup de votre assistance. Je viens de recevoir mon jugement quelques semaines après et c'était positif. Parce qu'il faut dire que, lorsqu'on envoie soit un expert ou soit un autre denturologiste qui a procédé à un examen, ça met du poids dans la balance, effectivement. Mais, malheureusement, c'est trois mois après.

Mme Caron: Dans votre mémoire, page 32, vous nous parlez brièvement des règles de conservation des dossiers disciplinaires et des autres dossiers détenus par la Corporation. On sait qu'actuellement il y a des audiences concernant le projet de loi 68 sur la protection de la vie privée. Est-ce que vous croyez que le Code des professions devra s'ajuster avec ce projet de loi qui va également toucher les professionnels?

Le Président (M. Gautrin): Bien sûr. M. Arsenault.

Mme Caron: Bien sûr. M. Dubé... M. Arsenault: Ah, non, ça va être... Le Président (M. Gautrin): M. Dubé.

M. Arsenault: M. Dubé. (20 h 40)

Le Président (M. Gautrin): M. Dubé, c'est vous-même qui êtes concerné.

M. Dubé (Jean-Claude): Ça va. Alors, définitivement, il va y avoir des ajustements à faire dans ce sens-là. Il faut bien comprendre qu'il y a une certaine réalité qui existe au niveau professionnel dans la nature des renseignements qu'on peut détenir - je parle particulièrement en milieu médical - sur la nature des renseignements qui sont nécessaires au professionnel, à l'exercice de ses actes. Je vous donne comme exemple, on a eu un cas comme ça, là, pas nécessairement l'Ordre des denturologistes, mais qui a été exposé dans une séance, dans une plénière, on parie, entre autres, de renseignements sur des gens, de nature médicale, entre autres, des gens qui sont sidatiques. Or, on a eu la question qui a été posée: Est-ce que le professionnel qui reçoit, exemple, le coup de téléphone de l'épouse de l'individu, est tenu, effectivement, de dévoiler des renseignements sur la nature de la maladie de son mari? Parce qu'elle voit bien qu'il a une maladie, et elle pense que c'est ça. Alors, il y a un paquet, une foule d'exemples qu'on peut donner comme ça, qui vont faire en soi que, nécessairement, les dossiers médicaux doivent avoir un caractère confidentiel, et qu'on ne peut pas révéler, et je pense que le projet de loi 68 va avoir un effet là-dessus.

Mme Caron: Vous nous avez parié, M. Provencher, de l'importance de l'information, et je pense que c'est un des points majeurs concernant cette réforme, puisque après 20 ans le public en général nia pas endossé le système professionnel comme tel et le trouve non transparent. Du côté de l'information, est-ce que vous voyez des pistes de solution?

M. Provencher: Du côté de l'information, il faudrait qu'il y ait un consensus de toutes les parties. C'est clair que l'Ordre des denturologistes a sa part à faire, qu'il n'a peut-être pas faite aussi adéquatement qu'il devrait le faire. Les autres corporations aussi devraient mettre la main à la pâte et le faire, aussi. S'il y avait un consensus de toutes les corporations, ajoutez à ça le poids de l'Office et la caution du gouvernement, il est certain qu'on peut rejoindre beaucoup de consommateurs et, tranquillement, faire changer une mentalité. Ça ne se fera pas du jour au lendemain, mais, si on demande à strictement un intervenant de tout faire, ça peut prendre du temps. On l'a vu, ça fait 20 ans, et chacun a attendu que le voisin règle le problème, et il ne s'est pas réglé.

Mme Caron: Le ministre soulevait tantôt qu'il semblait trouver dans votre mémoire une certaine méfiance pour le rôle de l'Office des professions. Pour avoir participé aux travaux du projet de loi 17, j'avoue que je me souviens très bien de ce projet de loi 17 - j'en pariais justement au souper avec mon collègue de Laviolette qui était présent à ce moment-là, notre députée collègue des Chutes-de-la-Chaudière, qui, elle, n'était pas présente, et à ce moment-là je n'étais pas porte-parole, je faisais partie des membres de la commission, moi, et c'était la députée de Chicoutimi qui était porte-parole - et je me souviens très bien qu'à une question très précise concernant une possibilité de règlement de compte, finalement, parfois, de l'Office par rapport à une corporation professionnelle, je pense que le président nous avait candidement avoué qu'effectivement, oui, il avait décidé, par le projet de loi 17, de mettre une corporation au pas et que c'était ce qu'il avait décidé de faire. Est-ce que cet élément-là, qui, bon, finalement, avec un processus réglementaire, peut toujours jouer contre ou pour une corporation professionnelle, compte tenu de tout ce processus réglementaire qui demeure dans les mains de l'Office, et avec l'avant-projet de loi qui augmente les pouvoirs de l'Office, est-ce que c'est cette méfiance, c'est cette inquiétude qu'on sent du côté des corporations professionnelles?

M. Provencher: C'est effectivement une inquiétude que l'on a. Il est clair que dans le passé, il y a eu des gestes posés par l'Office, et je fais référence à... pas juste le président actuel et l'Office actuel. Même dans le passé, on a eu des problèmes de cet ordre-là, où il y avait des niveaux de philosophie qui accrochaient d'un bord et de l'autre, et le pouvoir de l'Office, à ce moment-là, était de mettre des règlements sur la... sur la table d'attente. C'est clair qu'au niveau de la loi 17 on a eu une lutte épique, qui s'est déroulée à ce niveau-là. Mais je me rappelle aussi de la publicité chez les professionnels où l'Office avait décidé qu'il imposerait, veux veux pas, et qu'il y avait même des communiqués de presse qui étaient prêts avant même que les décisions sortent. C'est un ensemble de passé et de présent qui fait en sorte qu'il y a des réticences pour l'avenir. C'est clair que ça s'appuie, c'est diffus, on ne sait pas... Pour moi, l'Office des professions devrait avoir le même degré de collaboration que nous on l'a avec nos membres. C'est clair que tu sévis si un membre ne fait pas correctement, mais, pour tous les autres, tu cherches à lui aider. S'il y a de quoi qui ne fonctionne pas, tu vas lui donner l'aide, le support qu'il lui faut pour qu'il accomplisse bien son travail. Mais on essaie autant que possible d'éviter la confrontation entre nos membres. Il devrait exister, selon moi, le même genre de complicité entre les corporations professionnelles et l'Office des professions, ce qu'on n'a pas vécu jusqu'à date.

Mme Caron: Écoutez, si j'ai abordé le point, je pense que, pour avoir rencontré la très grande

majorité des corporations professionnelles, j'ai toujours senti ce malaise, cette espèce de pouvoir discrétionnaire, dans le fond, au niveau du processus réglementaire qui, humainement parlant, joue toujours évidemment et peut avoir un poids par rapport aux corporations professionnelles. Je pense que c'est important qu'on se le dise aussi parce que ça fait partie des problèmes qui sont vécus au niveau du système professionnel. Je vous remercie.

Le Président (M. Gautrin): merci. est-ce qu'il y a un autre député ministériel qui a des questions? non. est-ce que m. le député d'abiti-bi-est et ministre responsable...

M. Savoie: Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, on a abordé plusieurs des points qu'ils ont soulevés dans leur mémoire. Je pense que l'élément fondamental, c'est effectivement leur réticence vis-à-vis du comité des plaintes, tutelle, pouvoir d'enquête, mais que, pour l'ensemble finalement, il n'y a pas de problème majeur, dans le sens qu'il y a des points qui doivent se discuter. Ils nous demandent des consultations sur tel élément une fois qu'une décision sera prise.

Et ça nous ramène au coeur finalement du projet, c'est-à-dire, justement, ce rôle que l'Office doit jouer des fois. Vous dites finalement, à la page 15 de votre mémoire, que l'Office doit exercer un pouvoir de surveillance qui devrait s'exercer non pas sous forme de, finalement, régence, mais bien dans un rapport de collaboration. On a constaté que, des fois, cette collaboration-là était assez difficile. On a vu, avec certaines corporations professionnelles, par exemple, un refus d'appliquer telle partie de leur code de déontologie ou d'appliquer tel aspect de la loi, prendre des positions assez militantes. C'est assez difficile à ce moment-là pour l'Office de voir au grain si elle n'a pas un «bat» de baseball.

M. Provencher: Je pense que, sans avoir ça, il serait assez facile, et chez nous comme ailleurs ça a été discuté, de venir et de voir. Je ne sais pas combien de fois on a invité les procureurs de l'Office à venir assister à un comité de discipline. On leur expliquait la difficulté qu'on avait, qu'on rencontrait et jamais ils ne se sont déplacés pour ça. Quand on parle de pouvoir de surveillance, je verrais le rôle autrement de ce qu'il est aujourd'hui. J'irais réellement dans la corporation voir ce qui se passe et en discuter en profondeur. Mais, ça, c'est des philosophies qui... ça ne s'est pas passé à travers les années.

M. Savoie: Mais vous avez vu les groupes de consommateurs nous dire: Ah! ça ne va pas assez loin, il n'y a pas assez de ci, il n'y a pas assez de ça, ça prend... Enlevez, par exemple, le jugement par les pairs et bon... Alors, finalement, on se demande... Vous comprendrez qu'on est à la recherche d'un équilibre. Bien sûr, les corporations professionnelles ont notre confiance. Bien sûr, on veut que les corporations professionnelles se développent, jouent un rôle actif, mais on n'est pas au paradis, ça ne fonctionne pas toujours. Des fois, évidemment, il y en a un qui part de travers suite à une élection... Ha, ha, ha! Et, à ce moment-là, il faut le ramener et souvent les paroles, non. Le bon sens n'a pas toujours son rôle et c'est pour ça que finalement on est d'accord pour le baliser. Je pense qu'il ne faudrait pas jouer sur le concept d'abus. Je pense que tout simplement il y a un problème, il se présente, par exemple, au gouvernement, au ministre, et on dit: Bon bien, effectivement, on demande un pouvoir d'enquête parce qu'il y a une transgression, ou bien, carrément, on recommande au gouvernement une tutelle. À ce moment-là, il y a un «bat» de baseball et souvent les choses ont... Pensez-vous qu'il va y avoir un abus de la part du gouvernement avec un pouvoir d'enquête, un pouvoir de tutelle? (20 h 50)

Le Président (M. Gautrin): C'est M. Dubé ou M. Provencher?

M. Dubé: Vous permettez.

Le Président (M. Gautrin): M. Dubé.

M. Dubé: Si vous me permettez, M. le ministre, simplement de souligner la chose suivante. Il y a une différence entre un pouvoir de surveillance et être un gardien des choses lorsqu'on travaille avec une épée de Damoclès parce que, finalement, on a accordé des pouvoirs à un organisme qui a ce pouvoir de surveiller des choses. Ce qu'on dit dans le mémoire, c'est qu'il a un pouvoir de surveiller, nous en sommes tout à fait conscients et nous voulons que ce pouvoir-là s'exerce par l'Office dans un système de collaboration.

Là où est la problématique matérielle et l'expérience du passé, c'est qu'il s'est avéré que ce n'est que par la suite, au moment où nous sommes arrivés à faire face à des situations de fait, qu'ils ont été opposés à l'Ordre des dentu-rologistes en disant: Voici la situation. Et tout ça s'est fait en catimini, sur des croyances, sur des adages, peut-être pour d'autres convictions, d'autres personnes, alors que nous on n'en était pas au courant de ces situations-là. Alors, comment faire pour avoir cette confiance en notre organisme de surveillance, de savoir qu'il agit, dans certaines façons, en catimini, et d'arriver devant cet organisme qui a eu la possibilité d'être partie, d'instituer lui-même son enquête, qui peut être à notre insu, d'en tirer des conclusions, de faire une recommandation auprès du gouvernement? Tout ça, on va être pris dans un état de fait et on n'aura pas à se

faire valoir.

M. Savoie: Oui. C'est sûr que...

M. Dubé: Et c'est ce qu'on veut enlever de cette portion...

M. Savoie: Oui.

M. Dubé: ...dans le cadre des modifications qui sont apportées dans le sens que l'Office procède à son pouvoir de surveillance, définitivement; qu'il y ait des moyens, oui, mais pas avec les mécanismes qui sont prévus à l'avant-projet de loi.

M. Savoie: C'est ça.

M. Dubé: C'est ça qu'est le problème.

M. Savoie: Évidemment, la règle fondamentale de droit, audi alteram partem, des choses comme ça, ça va être respecté. Ce n'est pas mis en jeu et, évidemment, on ne vise pas les denturologistes parce qu'on pense bien que depuis plusieurs années, quelques années tout au moins, les choses ont pris du pic et on sent qu'on a un partenaire actif et dynamique au sein du monde professionnel. La bonne volonté des denturologistes n'est aucunement mise en jeu. Finalement, la question, si je comprends bien, ça vient d'une évaluation qui vous fait croire que, si on leur donne un «bat» de baseball, ils vont nous taper dessus. C'est un peu ça.

M. Dubé: On voudrait bien savoir quand est-ce qu'on va être frappés, en tout cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dubé: Disons que l'audi alteram partem n'est pas si évident aux modifications du projet de loi.

M. Savoie: Oui, c'est ça.

M. Dubé: C'est ça peut-être le problème.

M. Savoie: Mais enfin...

Le Président (M. Gautrin): II vous reste une minute pour conclure.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Enfin, on constate qu'il y a là, finalement, une volonté de maintenir et de développer un équilibre malgré tout. On comprend, finalement, votre position au niveau du comité des plaintes: 125, les éléments comme ça. On comprend également vos craintes vis-à-vis... à cause de toutes sortes d'éléments au niveau des pouvoirs de tutelle et d'enquête qui sont proposés dans le projet de loi, que vous nous dites: Écoutez, pensez-y deux fois et si vous devez y aller, bien, balisez-les comme il faut si ça devait être retenu. Vous savez fort bien aussi que si on revient avec un projet de loi il n'y aura pas de commission parlementaire, mais certainement que les corporations vont être consultées sur le texte final avant que ce soit déposé pour vos commentaires.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Mme la députée de Terrebonne, vous avez quelques minutes encore pour poser quelques questions.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous nous en avez parlé brièvement, et j'aimerais vous entendre un peu plus longtemps sur le problème de la pratique illégale de la profession. Alors, je ne sais pas lequel ou laquelle veut nous répondre là-dessus.

M. Provencher: Notre procureur va vous donner...

Le Président (M. Gautrin): M. Dubé, encore.

M. Provencher: II les vit à chaque jour, on va le laisser répondre.

Le Président (M. Gautrin): Ah! M. Dubé, vous devenez un professionnel de la réponse.

M. Dubé: Ce qui était remarquable, c'est cette absence de modifications apportées au Code et qui pourraient permettre des mécanismes beaucoup plus tangibles, flexibles pour la corporation parce que vous savez qu'au niveau de la pratique illégale, s'il y a bien quelque chose qui met en péril la sécurité du public, c'est bien une des premières choses auxquelles une corporation fait face et doit avoir pour la protection de son public.

Maintenant, on est pris dans un système dans lequel le dépôt de ces plaintes-là se fait devant les tribunaux de droit commun. On est pris dans un système qui est lourd administra-tivement, qui est long dans le temps, qui est mal perçu, mal compris aussi par les tribunaux de droit commun. Je vous dirais, par expérience - ça fait plus de 10 ans que je suis procureur à l'Ordre des denturologistes, qui sont mes clients et que je «fais» de la pratique illégale devant les tribunaux de droit commun - de me faire dire par des juges: Écoutez, 500 $ pour un chef de pratique illégale, vous n'y allez pas de main morte. Mais oui, c'est le minimum. Et c'est à rebrousse-poil que le juge prononce la sentence de 500 $ pour un chef. Alors, je vous dis qu'on fait face à un paquet de problématiques dans ce milieu de la pratique illégale, pour lesquelles on dit: L'avant-projet devrait prévoir quelque chose, au moins du côté de la pratique illégale. En tout cas, je regarde au niveau de la denturdogie, c'est quelque chose qui est crucial, qui est important pour la protection du public. On a vu

des cas extraordinaires là-dedans, de gens qui ne sont pas habilités à pratiquer et qui ont causé à des gens des dommages importants à leur santé buccale.

Alors, il y a des mécanismes qui doivent être envisagés de ce côté-là, qui faciliteraient... On vous a lancé l'exemple comme terrain à exploiter. Est-ce que le Tribunal des professions ne serait pas déjà une première instance qu'il serait beaucoup plus facile, en fin de compte, de voir à cette compréhension qu'est l'exercice d'une profession et de ceux qui n'y ont pas le droit? Alors, je pense qu'il faut voir ce côté-là et ça, c'est une partie drôlement importante et, pourtant, on n'en a presque pas entendu parler, tout au moins aujourd'hui. C'est une phase où il y a tout à voir et tout à gagner lorsqu'on prend le mandat qu'on a, de protection du public.

Mme Caron: Oui, je pense que vous avez parfaitement raison, M. Dubé. C'est, évidemment, un des points importants si on veut vraiment assurer la protection du public, d'autant plus lorsqu'on touche, finalement, à la santé des citoyens et des citoyennes. Je pense que, ça, vous l'avez clairement démontré.

M. Dubé: Et des pertes financières que les gens ont...

Mme Caron: Oui.

M. Dubé: ...parce qu'ils ont payé quand même de gros prix pour avoir des prothèses qui sont tout à fait inadéquates et qu'ils ont des problèmes de santé après.

Mme Caron: Eh bien, il me reste à vous remercier, principalement pour nous avoir présenté un modèle précis. Je pense que c'était une excellente idée de nous ajouter votre tableau, parce qu'on a parlé, au cours de la journée, de conciliation et on n'avait pas de chiffres, on n'avait pas d'exemples précis. Je pense que c'est très concluant, je vous en remercie beaucoup.

Le Président (M. Gautrin): Je tiens à vous remercier, M. Dubé, M. Provencher, M. Arse-neault, Mme Bouchard, pour votre contribution ici, à la commission.

Je vais demander, maintenant, à la Corporation professionnelle des administrateurs agréés du Québec, de bien vouloir s'avancer. Je vais suspendre les travaux pour trois minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 59)

(Reprise à 21 hi)

Le Président (M. Gautrin): La commission va reprendre ses travaux. Alors, M. Gagnon et M.

Plante, on vous souhaite la bienvenue ici à notre commission. Vous connaissez les règles puisque vous y avez assisté depuis un bout de temps. On a une heure pour nos échanges qui va se partager de la manière suivante: 20 minutes pour votre présentation, 20 minutes pour les questions des députés ministériels et 20 minutes pour les questions des députés de l'Opposition. Alors, je ne sais si c'est M. Gagnon ou M. Plante? M. Gagnon.

Corporation professionnelle des administrateurs agréés du Québec (CPAAQ)

M. Gagnon (Richard): M. le Président, M. le ministre, M mes et MM. les députés, mon nom est Richard Gagnon. Je suis le directeur général de la Corporation professionnelle des administrateurs agréés. Je suis accompagné de M. Fernand Plante, qui est membre du bureau de direction et membre du comité administratif de notre corporation professionnelle.

Alors, le système professionnel québécois aura bientôt 20 ans. C'est beaucoup et c'est peu à la fois. C'est beaucoup si l'on considère les progrès marqués que cette réforme a permis d'accomplir, particulièrement pour ce qui touche la protection du public et le développement des compétences professionnelles. C'est peu lorsqu'on tient compte de l'envergure de la mission confiée aux corporations professionnelles et aux instances mises en place et du temps qu'il a fallu pour en quelque sorte roder la machine.

La Corporation professionnelle des administrateurs agréés a participé activement à cette réforme. De notre point de vue, le système professionnel québécois fonctionne bien et globalement il atteint les objectifs visés au départ. La principale raison de ce succès tient à l'équilibre entre les divers intervenants au sein du système. C'est pourquoi nous nous inquiétons de voir cet équilibre remis en cause par l'avant-projet de loi soumis pour l'étude à cette commission.

Plus précisément, nous sommes en désaccord avec les dispositions de l'avant-projet de loi qui s'éloignent de la philosophie de base qui a présidé à l'adoption du Code des professions, notamment l'autogestion des corporations professionnelles. Tout en reconnaissant qu'il y a place pour des améliorations en vue d'accroître l'efficacité du sytème, particulièrement pour ce qui est de la réglementation, nous considérons que l'ampleur de la démarche proposée est injustifiée. C'est le message que je viens livrer aujourd'hui à cette commission. De façon générale, le mémoire que vous a présenté le Conseil interprofessionnel du Québec cet après-midi reflète bien notre position. Malgré cela, nous avons jugé bon, compte tenu de l'importance des enjeux, de nous adresser directement à la commission pour faire état de nos principales réflexions sur ce plan à la lumière de l'expérience qui nous est propre.

La Corporation des administrateurs agréés compte environ 4000 membres qui oeuvrent à titre de gestionnaires dans les entreprises québécoises ou qui exercent dans des domaines spécialisés tels: le conseil en management, la gestion immobilière ou la planification financière. Les administrateurs agréés sont présents tant dans le secteur public et parapublic que dans le secteur privé au sein d'organismes de toutes tailles.

Au cours des dernières années, notre corporation a consacré des efforts importants à la modernisation des normes professionnelles proposées à ses membres ainsi qu'au maintien et au développement de leurs compétences professionnelles. Elle a également porté une grande attention au bon fonctionnement des mécanismes de contrôle établis par le Code des professions. Pendant cette période, nous avons doublé le nombre de nos membres. Des alliances stratégiques nous ont permis d'accueillir dans nos rangs les administrateurs immobiliers et, plus récemment, les conseillers en management et les planificateurs financiers.

C'est donc forte d'une expertise et d'un membership élargis que notre corporation professionnelle vous soumet ses commentaires sur cet avant-projet de loi. Notre position à ce sujet est claire. Nous appuyons les changements qui permettront d'améliorer l'efficacité du système actuel, mais nous sommes en désaccord avec toute remise en question des principes de base sur lesquels repose le système.

Lors de la réforme des professions au début des années soixante-dix, c'est aux corporations professionnelles que la loi a confié la responsabilité de protéger le public dans ses rapports avec leurs membres. Ce faisant, le législateur a confirmé que les membres d'une profession sont les mieux placés pour assurer entre pairs le contrôle de la qualité des actes professionnels posés. De même, il a reconnu qu'ils sont les premiers intéressés à voir leur profession se gagner la confiance du public et se tailler une solide réputation grâce à la mise en place de standards élevés. C'est encore vrai aujourd'hui et les corporations professionnelles ont largement démontré, quant à nous, leur capacité à s'auto-contrôler et à s'autodiscipliner. Pour assurer le bon fonctionnement de ce système, le législateur a créé, dans la même foulée, l'Office des professions du Québec et le Conseil interprofessionnel du Québec, deux organismes appelés à intervenir auprès des corporations ou en leur nom selon le cas.

Les corporations professionnelles constituent donc la pierre angulaire du système et nous sommes en mesure de témoigner qu'elles atteignent les objectifs qui leur ont été fixés. Tout en reconnaissant la pertinence de mettre à jour la législation professionnelle pour rendre le système plus transparent, plus souple, plus accessible, moins coûteux, comme le souhaite le ministre, nous estimons inopportun de procéder à une nouvelle réforme en profondeur du système en lui apportant des changements aussi substantiels que ceux que propose l'avant-projet de loi. Comme le souligne le Conseil interprofessionnel dans le mémoire qu'il présente au nom des corporations, il importe, au moment de considérer des changements à l'organisation professionnelle, de reconnaître que celle-ci a atteint un stade de maturité. L'époque où l'Office des professions était appelé à fournir un soutien important à la mise en place des structures et à l'élaboration de règlements dans les corporations professionnelles est plutôt révolue.

Dans ce contexte, nous tenons à exprimer notre désaccord avec les dispositions de l'avant-projet de loi qui accorderaient à l'Office des professions des pouvoirs d'intervention directe ainsi que des pouvoirs d'enquête à sa propre initiative et le pouvoir d'imposer aux corporations des règlements dont l'adoption leur revient. Nous considérons aussi que le rôle des corporations professionnelles devrait être préservé, ce qui permettra de maintenir un équilibre dont les résultats sont largement probants. Cet équilibre repose sur un partage de responsabilités entre quatre grands intervenants. D'une part, l'État, qui adopte les lois en vue de donner accès à des services professionnels de qualité et qui voit à leur application, d'autre part, les corporations qui assurent la protection du public grâce au contrôle de l'admission dans leurs rangs, l'évaluation des compétences de leurs membres, la surveillance de la pratique des professions et l'offre de recours aux usagers qui auraient à se plaindre de services professionnels. Cette autogestion constitue la base même du système. De son côté, l'Office des professions veille à ce que chaque corporation assure la protection du public. Il est appelé à suggérer, au besoin, la création, la fusion, la dissolution de corporations et des modifications aux lois qui les régissent. Enfin, le CIQ assure un ensemble de mandats touchant les liens entre les corporations et leur représentation ainsi que l'étude de leurs problèmes communs.

L'avant-projet de loi vient, à notre avis, bouleverser cet équilibre entre les intervenants en renforçant la présence de l'Office des professions et en l'autorisant à intervenir trop directement dans les corporations professionnelles, à l'encontre des principes fondamentaux d'autogestion. Notre corporation s'objecte donc à l'élargissement du rôle et des pouvoirs de l'Office, notamment à ce que lui soit conférés des pouvoirs d'imposition, d'approbation, d'exécution d'enquête et de tutelle qui appartiennent actuellement soit au gouvernement, soit aux corporations elles-mêmes. Selon nous, l'ajout de ces pouvoirs entre en contradiction avec la mission fondamentale de l'Office qui est d'abord de veiller à ce que chaque corporation assure la protection du public. Nous sommes aussi préoc-

cupés par les dispositions qui visent à conférer à l'Office de nouveaux pouvoirs d'enquête, beaucoup plus étendus et permanents. À notre avis, ces pouvoirs doivent continuer à être réservés au gouvernement lui-même et n'être délégués que dans des situations où il s'en réserve l'évaluation. Dans la même logique, nous récusons le bien-fondé de la reconnaissance d'un pouvoir de tutelle à l'Office des professions. Là aussi, selon nous, c'est au gouvernement qu'il revient de fixer les conditions précises d'intervention et l'Office ne devrait intervenir qu'à sa demande.

En résumé, nous croyons que le rôle de l'Office doit être limité aux fonctions qui lui sont présentement dévolues dans le Code des professions. Lui conférer de nouveaux pouvoirs qui lui permettraient de se substituer au gouvernement ou aux corporations menacerait les fondements du système et l'alourdirait considérablement. À notre avis, les modifications proposées au système professionnel vont trop loin et débordent les besoins exprimés par les principaux intéressés au bon fonctionnement du système, soit le public, le gouvernement et les professionnels. Quels sont ces besoins pour le public? Avoir accès à des services professionnels de haute qualité et être protégé sur ce plan. Malheureusement, la méconnaissance du système professionnel par le public pose un problème particulier à ce niveau et le débat quant au partage des responsabilités en cette matière, à l'intérieur du système professionnel, n'a jamais véritablement eu lieu, malgré qu'il soit de première importance. (21 h 10)

Le ministre responsable de l'application des lois professionnelles a pour sa part exprimé clairement les besoins du gouvernement que le système soit plus transparent, plus souple, plus accessible et moins coûteux. La protection du public, ne l'oublions pas, est la raison d'être et l'objectif prioritaire du système professionnel québécois. Cette préoccupation qui a orienté la réforme des professions au début des années soixante-dix doit, selon nous, continuer à être le critère fondamental de toute décision d'apporter des modifications à l'organisation professionnelle. Sur ce plan, les corporations professionnelles, quant à nous, ont fait leurs preuves. Pour la plupart, elles vont même au-delà des exigences minimales prescrites par la loi et les règlements. Loin de se limiter à des mesures disciplinaires, les mécanismes qu'elles ont mis en place au fil des ans pour assurer la protection du public englobent toute une série d'interventions résolument proactives notamment en ce qui concerne la formation, l'information ou même la déontologie.

En fait, nous constatons que non seulement le système professionnel fonctionne bien, mais que les moyens qu'il a mis en place pour assurer la protection du public vont souvent au-delà des objectifs qui lui étaient fixés sur ce plan. Nous sommes convaincus que ces mécanismes assurent au public le haut niveau de qualité des services recherché. Les professionnels ont toujours été les premiers à exiger des standards de qualité élevés et ils ont démontré qu'ils sont les mieux placés pour les mettre en oeuvre efficacement selon des principes d'autogestion. Ce constat doit être pris en considération lors de l'étude des changements proposés à la législation en vigueur.

Dans cette optique, nous sommes en désaccord avec la mise en place du comité d'examen des plaintes proposé dans l'avant-projet de loi et nous cautionnons plutôt la proposition du Conseil interprofessionnel de créer un comité aviseur auprès du syndic. Ce comité aviseur aurait l'avantage d'alléger le système et de réduire les coûts reliés à ce type d'intervention. Nous considérons par ailleurs que l'obligation, pour le syndic d'une corporation, d'informer l'Office des professions d'une enquête non terminée après 60 jours est quelque peu irréaliste.

La Corporation professionnelle des administrateurs agréés reconnaît par contre le caractère positif de plusieurs dispositions de l'avant-projet de loi en matière de réglementation. Nous considérons qu'il s'agit là globalement d'une réponse satisfaisante aux demandes des corporations en vue d'obtenir les correctifs nécessaires au bon fonctionnement du processus réglementaire.

Pour ce qui est de l'adoption des règlements des corporations professionnelles, nous sommes d'accord pour que le processus général soit conservé en ce qui concerne les règlements qui gouvernent et encadrent l'exercice d'une profession, pour autant que l'intervention de l'Office soit limitée à la conformité à la loi habilitante et qu'elle fasse l'objet d'un avis écrit transmis dans des délais précisés. Dans cette logique, nous nous objectons au mode d'approbation des règlements des corporations défini à l'article 95.1 qui permettrait, selon nous, à l'Office, de se substituer au gouvernement pour l'approbation des règlements sur les comités d'inspection professionnelle, les stages ou les cours de perfectionnement. Par contre, pour les questions d'ordre administratif, le processus d'adoption de règlements décrit à l'article 95.2 nous apparaît intéressant sous réserve, encore là, du pouvoir de formuler un avis contraire conféré à l'Office des professions.

Notre corporation professionnelle est d'accord avec les modifications proposées par l'avant-projet de loi à certains règlements spécifiques, notamment le règlement sur l'assu-rance-responsabilité professionnelle, le règlement sur le fonds d'indemnisation et le règlement délimitant le territoire du Québec en région. Dans ce dernier cas, d'ailleurs, nous nous réjouissons de constater que l'Office et le ministre ont accueilli favorablement nos demandes en vue de permettre à des représentants de secteurs professionnels d'être élus au bureau de direction d'une corporation aux côtés des repré-

sentants des régions.

Nous approuvons par ailleurs le principe énoncé dans l'avant-projet de loi à l'effet de rendre obligatoire l'adoption de règlements sur la tenue de dossiers des professionnels et sur la tenue des cabinets de consultation. Pour ce qui est du devoir de fixer par règlement des règles de conservation des dossiers disciplinaires et autres dossiers détenus par une corporation, nous croyons qu'il serait pertinent d'analyser cette disposition en regard du projet de loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

De façon générale, l'avant-projet de loi nous semble donc constituer un effort valable en vue d'augmenter l'efficacité du processus réglementaire et d'en réduire les délais. Toutefois, le pouvoir supplétif de l'Office des professions en matière d'adoption de règlements ne devrait être exercé que lorsqu'une corporation professionnelle persiste vraiment à vouloir adopter un règlement non conforme à la loi habilitante et qu'elle refuse de donner suite à un avis de l'Office des professions en ce sens.

En terminant, la Corporation des administrateurs agréés insiste auprès des membres de la commission pour que la réflexion en cours soit poussée plus avant et inclue certains éléments qui seront déterminants pour l'avenir du système professionnel québécois. Notre Corporation se sent particulièrement concernée par les difficultés que vivent les corporations à titre réservé dans leurs efforts pour protéger le public. Bien que leurs obligations soient les mêmes que celles des corporations qui encadrent des champs d'exercice exclusif, leur autorité ne s'étend pas à l'ensemble des actes posés dans le domaine de l'exercice de leur profession, mais seulement aux activités de leurs propres membres et, encore là, elles ne disposent pas de la même influence pour remplir leur mandat. D'autre part, l'expérience que vit notre corporation confirme le défi lié à l'impact de la libéralisation des échanges et de la mobilité interprovinciale. Ces nouvelles réalités nous imposent une adaptation, notamment pour accueillir les professionnels venus de l'étranger, faire reconnaître nos titres professionnels à l'échelle internationale et nous assurer que nos standards professionnels répondent aux exigences de ce nouvel environnement. Notre corporation professionnelle a déjà commencé à se positionner sur ce plan. Les administrateurs agréés en planification financière sont ainsi reconnus à l'échelle nationale et soumis à des normes établies à ce niveau. Il en est de même pour les conseillers en management. Il apparaît important, donc, que la réflexion se poursuive à ce sujet au niveau de l'ensemble du système professionnel.

Les défis qui attendent notre système professionnel sont majeurs. Plutôt que de changer les principes de base qui ont fait leurs preuves, nous souhaitons que la démarche en cours nous permette d'être encore plus efficaces et de nous préparer à relever ces nouveaux défis. Je vous remercie.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Gagnon, et je vais passer la parole à M. le ministre responsable et député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Alors, permettez-moi tout d'abord de saluer les gens de la Corporation des administrateurs agréés. Évidemment ils ont présenté un mémoire - je ne veux pas dire le mot «substantiel» - puisque effectivement, ce qu'ils font, c'est qu'ils donnent un survol des orientations. Ils disent bon, peut-être, à ce moment-ci c'est injustifié, il faudrait peut-être attendre un peu plus tard pour aller à des modifications plus importantes. Il faut savoir aussi qu'ils se sont prononcés en grande partie en faveur de certaines orientations déjà données par le Conseil interprofessionnel, et, évidemment, il faut tenir compte de leur évaluation de la situation. Les administrateurs agréés sont avec nous depuis fort longtemps, et tout dernièrement on a constaté qu'il y a une volonté de s'immiscer davantage. Par exemple, on a constaté que depuis 1978, au niveau des décisions disciplinaires, tout dernièrement là, on a fait des interventions à ce niveau-là pour justement atteindre un plus haut niveau de compétence pour les membres et une surveillance plus accrue, particulièrement pour les comptes, les comptes en comptabilité publique qui doivent se faire pour la protection du public.

Quelques questions, et évidemment je ne partage pas leurs vues quant à la justification, à ce moment-ci, ils vont comprendre pourquoi et leur sourire en dit long, mais...

Le Président (M. Gautrin): Ils s'en doutaient.

M. Savoie: Ils s'en doutaient, oui. Et tout en respectant l'opinion contraire, M. le Président, au niveau de l'article 155, vous ne l'avez pas abordé mais j'ai toujours pensé que ça pouvait avoir un impact chez vous, c'est-à-dire l'article 169 du projet de loi, là, qui touche à l'article 155 où on dit bon... ce n'est pas seulement un cas réservé à une corporation professionnelle comme par exemple, les médecins où on a eu un cas tout dernièrement qui a fait les manchettes; on parle spécifiquement là, par exemple de quelqu'un qui est membre de votre corporation, corporation dont les membres sont très mobiles, qui finalement ont des rayons d'action bien à l'extérieur de la province de Québec, un type, par exemple qui exerce, en participant ou non a une corporation professionnelle mais qui se fait accuser, par exemple, de détournement de fonds ou bien justement de harcèlement sexuel et qui est également membre de votre corporation. J'imagine que ça a dû faire l'objet d'une réflexion chez vous, l'article 155, c'est-à-dire l'article 169 qui modifie l'article 155?

M. Gagnon: En fait, M. le ministre, on ne s'objecte absolument pas à cette disposition qui facilite effectivement, pour les corporations professionnelles, l'importation ou l'application de jugements réalisés à l'extérieur et les commentaires que nous avons exprimés dans le mémoire qu'on vous présente ne s'objectent aucunement à cette disposition-là.

M. Savoie: Non. Est-ce que vous voyez ça comme un pas dans la bonne direction?

M. Gagnon: Oui, tout à fait, absolument. On pense qu'il faut, notamment, travailler à «désa-lourdir» le système. Pourquoi on serait obligé, au Québec, de reprendre une procédure qui a déjà été appliquée à l'extérieur et qui, par contre là, colle relativement bien aux dispositions qui sont celles du Québec? (21 h 20)

M. Savoie: D'accord.

M. Gagnon: Je ne suis pas sûr qu'une importation, ou que l'application automatique d'un jugement serait aussi simple que ça. Par contre, qu'on puisse s'en inspirer ou que les corporations aient la possibilité de le faire, je pense que c'est effectivement un pas dans la bonne direction.

M. Savoie: J'imagine, par exemple, que les trois décisions disciplinaires, sans connaître là... j'imagine que ça portait sur de la comptabilité en fidéicommis pour plusieurs?

M. Gagnon: Pas vraiment, M. le ministre. Ça portait notamment, le dernier tout au moins, sur le fait que les services livrés, la façon de livrer ces services dans un contexte de conseils en management, de conseils en administration, n'ont pas été livrés selon les règles de l'art, les services n'ont pas été livrés selon les règles de l'art, et les informations non plus. Alors, c'est surtout à cet égard-là. C'était des dérogations au code de déontologie.

M. Savoie: C'est surtout au niveau de la qualité des conseils.

M. Gagnon: Tout à fait, la qualité du service rendu par le professionnel et la façon dont ça a été fait.

M. Savoie: D'accord. Mais, s'il y avait un cas, par exemple un membre des administrateurs agréés ici, qui a également des activités à l'extérieur...

M. Gagnon: Tout à fait, on en a de plus en plus...

M. Savoie: Oui, de plus en plus, j'imagine. Mais si, à ce moment-là, il y avait des accusa- tions portées contre lui, pas au criminel, mais je parle, par exemple, d'une autre structure là, au criminel ça serait trop facile, j'imagine que l'orientation de 155 ne présente aucune difficulté là.

M. Gagnon: Ah! Pour nous elle est même souhaitable.

M. Savoie: Même souhaitable.

M. Gagnon: Ah! oui, oui. Tout à fait.

M. Savoie: Justifiable.

M. Gagnon: Oui, tout au moins.

M. Savoie: Ha, ha, ha! merci, c'est ce que je pensais. Au niveau du comité des plaintes justement, l'utilisation d'un comité des plaintes, le mécanisme c'est pour les fautes légères, ça vous concerne beaucoup moins parce que vous n'avez pas beaucoup de plaintes pour fautes légères?

M. Gagnon: Vous avez tout à fait raison. Notre Corporation professionnelle n'est pas une corporation là - je ne veux pas dire de la santé, parce qu'on sait que c'est plus facile, il y a plus de plaintes dans ce type de corporations -nous ne sommes pas une corporation qui génère beaucoup de plaintes. Celles que nous avons, il va sans dire qu'on fait tout ce qu'il faut pour les traiter correctement, et c'est une raison supplémentaire, M. le ministre, qui fait en sorte que le comité d'examen des plaintes, tel que proposé, ne serait pas vraiment pertinent pour nous. Ce dont notre syndic pourrait beaucoup plus avoir besoin, dans le contexte où il a à examiner une plainte et à prendre des décisions, c'est plus de recourir à des ressources qui pourraient bien le conseiller et qui pourraient l'orienter sur... ou lui faciliter la prise de décision. Mais de lui imposer un comité de plaintes qui, de toute façon, deviendrait une instance presque automatique, parce que le plaignant y référerait automatiquement si le syndic ne porte pas plainte, viendrait tout simplement alourdir la démarche parce que là il y aurait un deuxième processus d'enquête, et au-delà d'alourdir la démarche, honnêtement, il me semble, viendrait démotiver de façon importante le syndic. Parce que, là, le comité des plaintes, en plus, a le pouvoir de... presque un pouvoir de tutelle au syndic en lui disant bien, tu vas maintenant prendre telle ou telle décision. Pour nous c'est vraiment exagéré ou abusif comme mécanisme.

M. Savoie: S'il y avait un comité des plaintes sur désignation, c'est-à-dire que le gouvernement pourrait demander à telle corporation de développer un comité des plaintes qui,

effectivement, devrait normalement vous exclure, parce que, comme vous l'avez souligné, la Commission des valeurs mobilières ne dépose pas des plaintes pour péchés véniels chez vous souvent là, mais effectivement, s'il devait, sur recommandation pour certaines corporations là où il y a du volume, il y a des «interchanges» constants avec un grand public, à ce moment-là ça modifierait votre opposition au niveau du comité des plaintes?

M. Gagnon: Pas vraiment parce que, d'une part, on ne serait pas concernés par le comité des plaintes mais, malgré cela, moi je vous dirais que je ne vois pas comment le public serait nécessairement mieux protégé de se resoumettre à un deuxième processus d'analyse de la plainte en question. Déjà le processus est lourd, alors il vient s'alourdir encore et il n'y a rien qui garantit qu'une décision du comité des plaintes viendrait changer la décision du syndic ou quoi que ce soit. Puis d'autant plus que, dans une corporation professionnelle qui a un volume de plaintes important, ce mécanisme de comité des plaintes deviendrait presque un automatisme et ferait en sorte que cette pauvre corporation professionnelle, entre nous, se ramasserait avec un système de gestion des plaintes extrêmement compliqué. En tout cas, c'est ce qui m'apparaît, là. Maintenant, pourquoi ne pas proposer au syndic de ces corporations un mécanisme notamment comme le comité aviseur qui est beaucoup plus léger et qui permettrait au public, tout au moins, d'avoir des garanties supplémentaires que la décision du syndic est éclairée par des apports externes, des conseillers externes, des aviseurs externes? On l'appelle comité aviseur dans ce sens-là, d'ailleurs.

Le Président (M. Gautrin): Merci. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Page 1 de votre mémoire, vous nous dites que, bon, malgré que de façon générale vous endossez les recommandations du mémoire du Conseil interprofessionnel, compte tenu des enjeux, vous avez jugé bon de vous adresser directement. Je pense que vous avez bien fait puisque la réforme du Code des professions va non seulement toucher l'ensemble des professionnels - et on se parle de quelque 240 000 - mais aussi l'ensemble des citoyens et des citoyennes qui bénéficient de ces services de professionnels dans les différents domaines. Vous faites la constatation, autant en page 2 qu'en page 7, et là je vous cite: «Nous sommes en mesure de témoigner que les mécanismes et les outils qu'elles ont mis en place pour assumer leur mission atteignent les objectifs», c'est en page 2, et en page 7: «Les corporations professionnelles ont fait leurs preuves», mais malgré tout ça le public ne partage pas cet avis, et, parmi les principales remarques de la Fédéra- tion nationale des consommateurs, on nous parle beaucoup du rôle du syndic, du manque d'information, et on nous a parlé également du... lorsqu'il y a une plainte qui est rejetée, que, finalement, la personne qui a déposé... le plaignant n'a pas de raisons, on lui dit tout simplement que sa plainte a été rejetée tout simplement. Est-ce que c'est la même chose chez vous? Le syndic, lorsqu'il rejette une plainte, est-ce qu'on explique au plaignant les raisons qui motivent ce rejet?

M. Gagnon: Certainement. D'abord, quand on signale, Mme la députée, que nous avons l'impression que le système professionnel remplit bien son mandat, on s'appuie de façon assez simple sur le nombre de plaintes, par exemple, générées par le système professionnel et, si on le met en perspective avec le nombre d'actes professionnels posés au Québec à chaque année, les plaintes sont vraiment une portion très, très minime. Maintenant ce n'est pas une justification pour dire que ces plaintes-là ne doivent pas être bien traitées, il va sans dire. Chez nous il est clair que, d'autant plus que nous ne recevons pas beaucoup de plaintes, quand on en reçoit, il y a un échange, une discussion avec le plaignant qui est très intense et avant d'arriver - d'ailleurs le syndic, dans le type de corporations comme nous, va aussi déborder son rôle, va faire du travail de conciliation, va essayer de... - même si on a le sentiment que la plainte n'est peut-être pas justifiée, si le syndic arrive à cette conclusion, il va quand même s'assurer que le client ou le plaignant comprend bien la situation et le syndic va être satisfait dans la mesure où le plaignant a bien compris que la plainte est rejetée pour tel ou tel motif. Souvent aussi, la plainte va être rejetée parce que le plaignant lui-même, en cours de route, va cesser le processus ou il va avoir des discussions qui vont faire en sorte qu'il va cesser son processus de plainte ou on va lui demander de creuser un peu dans le processus de l'enquête les motifs justifiant la plainte, et le processus s'arrête assez rapidement. Donc, il faut bien démêler les plaintes sérieuses qui entrent dans le système, qui sont traitées et qui, soit aboutissent au comité de discipline, les plaintes qui, compte tenu de l'opinion du syndic, n'y aboutissent pas mais font l'objet de bonnes discussions entre le syndic et le plaignant et où on s'assure que le plaignant a satisfaction, au moins dans les réponses qu'il reçoit, et il y a les plaintes qui, au bout du compte, ne franchissent pas tout le processus parce que le plaignant lui-même cesse.

Mme Caron: Deux brèves questions au niveau des plaintes. Vous avez fait allusion évidemment au fait que vous n'aviez pas beaucoup de plaintes, est-ce qu'on peut avoir une idée du nombre de plaintes dans une année? Lorsque vous nous dites qu'il y a discussion, que

vous rejetez et que le syndic explique bien au plaignant, est-ce que cette décision et ces explications, vous les faites par écrit ou vous évitez de les faire par écrit pour que le plaignant ne l'utilise pas au niveau d'un recours civil? (21 h 30)

M. Gagnon: Non. Souvent les correspondances entre le syndic et le plaignant sont écrites, et là-dessus on est plutôt libéral. Pourquoi on n'a pas plus de plaintes que ça, madame?

Mme Caron: Vous en avez combien?

M. Gagnon: Ah! C'est moins de 10 par année, pour être honnête. Pourquoi on en n'a pas plus que ça? On a bien l'impression que c'est une question d'information. Vous savez, on en fait un petit peu allusion dans notre mémoire, on pense qu'il y a vraiment un problème d'information de la part du système en général, sur ce qu'est le système professionnel et pourquoi un citoyen devrait faire affaire avec un professionnel plus qu'avec un non-professionnel. Il faut commencer à expliquer les choses au public. On discute là, et on va en discuter pendant une dizaine de jours, d'un système professionnel qu'au fond bien peu de gens connaissent, qui a généré chez le public des attentes qui ne sont pas toujours les bonnes et, au bout du compte, on entend des groupes de consommateurs déçus de la performance du système professionnel mais souvent un peu injustement, à l'égard du système comme tel. Parce que, comme on l'a dit dans notre mémoire, nous on pense que le système fait bien son travail. Il y a des ajustements à y apporter mais des ajustements qui doivent être intelligents, qui doivent tenir compte du fait que le système se comporte assez bien. Maintenant, quand je dis: le contribuable n'est pas assez informé des raisons d'être et de la mission du système professionnel, bien c'est un peu de notre faute à tout le monde. Un des éléments c'est qu'il faudra, notamment, en en discutant, l'Office, le Conseil interprofessionnel, les corporations, le ministère, déterminer qui a le principal mandat de faire valoir c'est quoi le système professionnel et qu'est-ce qu'on promet au public par le système professionnel et s'assurer que les attentes qu'on génère sont des attentes réalistes et auxquelles on est capable d'apporter des réponses. Et une grande partie des problèmes qu'on vit et qu'on entend des groupes de consommateurs découlent de cet état de fait, du manque d'information sur ce qu'est le système.

Mme Caron: Est-ce que vous n'avez pas l'impression, toujours dans le même sens, qu'effectivement, pour le public en général, il y a très peu de corporations de professionnels? Ils seraient très étonnés de savoir qu'il y en a 41; pour la plupart, le nombre se limite à cinq ou six corporations plus connues soit par le nombre de membres, soit par leur rôle.

M. Gagnon: Vous avez absolument raison. La notion de profession au Québec n'est même pas protégée en soi. On a, au Québec, un système professionnel qui est un des plus avant-gardistes au monde alors que l'appellation «profession» n'est même pas protégée. Alors, dans l'esprit du public, tout le monde qui gagne sa croûte à faire quelque chose de précis occupe une profession mais en même temps, historiquement, il y a cinq ou six vraies professions au Québec qu'on connaît tous et qu'on n'a pas besoin d'identifier ce soir. Alors ça vient ajouter encore, Mme Caron, à la problématique d'informer le public correctement.

Mme Caron: À deux reprises, page 6 et page 9, vous soulignez un peu le désengagement du gouvernement, et là je vous cite: «II nous apparaît que ces pouvoirs - au niveau de l'enquête - doivent être réservés au gouvernement lui-même et n'être délégués, le cas échéant, que dans des situations dont il se réserve l'évaluation» et, en page 9, au niveau du processus réglementaire, vous faites à nouveau allusion à l'importance du gouvernement finalement, à prendre son rôle. Est-ce que ce désengagement, qui revient à deux reprises au niveau du processus réglementaire, peut se lier aussi au désengagement que la loi 67, au niveau du financement, viendrait confirmer?

M. Gagnon: En fait, quand on parle de désengagement, nous, on va toujours privilégier des mécanismes qui vont permettre aux corporations professionnelles de plus se responsabiliser entre elles, de mieux s'autocontrôler entre elles, et même entre elles comme corporations professionnelles. Et on a le sentiment que plus le système professionnel mature, plus il mûrit, comme on a l'impression, nous, que c'est ce qui se passe, malgré certaines difficultés de parcours, plus on pense que les corporations professionnelles devraient être responsabilisées dans le système, beaucoup plus que l'effet inverse d'ajouter des pouvoirs ou des responsabilités à l'Office des professions. L'Office a un rôle, quant à nous, de collaboration avec les corporations professionnelles beaucoup plus que de discipline, contrôle, et de lui donner des pouvoirs supplémentaires, quant à nous, va totalement à l'inverse de la logique du système qui fait que plus le système se développe et se consolide, plus l'Office doit s'alléger, alors que ce qu'on préconise, dans l'avant-projet de loi, c'est exactement l'inverse.

Mme Caron: Oui, finalement, en page 3, vous souhaitez une réduction au niveau des dépenses, au niveau de l'Office, donc une réduction peut-être au niveau de certaines tâches aussi et vous souhaitez un élargissement du rôle

du Conseil interprofessionnel comme porte-parole des corpos et aussi comme conseiller du gouvernement.

M. Gagnon: Oui, bien en fait, au plan des dépenses, il est clair que si l'Office des professions, dans ses responsabilités, s'allège, parce que le système professionnel mature, mûrit, et parce qu'on pense honnêtement que c'est en se responsabilisant comme corporation professionnelle et en s'auto-contrôlant entre nous de plus en plus que le système va continuer de se développer efficacement, ça a des incidences sur le financement, bien entendu, de l'Office des professions. D'autre part, le projet de loi 67, là, j'imagine, on aura l'occasion d'en discuter à d'autres moments, mais, avant, quant à nous...

Mme Caron: Ne prenez pas de chances! Ha, ha!

M. Gagnon: ...de se lancer dans un autofinancement tel que proposé dans le projet de loi 67, on pense que l'exercice en cours sur les responsabilités de l'Office et de l'ensemble du système doit d'abord se compléter. Disons qu'on a d'autres devoirs à faire, il nous semble, avant. Maintenant, il est clair que nos membres sont des gestionnaires et moi je vous assure que les administrateurs agréés vont avoir comme premier réflexe, que, si on a à assumer les dépenses d'une organisation, il faut s'assurer qu'on a un certain contrôle dessus, sinon ça ne marche pas. En tout cas, ça va aller à rencontre de notre logique de gestionnaires.

Mme Caron: Et, donc, ça va aller à rencontre des propositions au niveau des associations de consommateurs qui voient l'Office comme une instance externe, vu qu'elle n'est pas financée par les corporations professionnelles.

M. Gagnon: Oui.

Mme Caron: Peu de...

M. Gagnon: Excusez-moi. Oui, Fernand...

Le Président (M. Gautrin): Oui monsieur, allez-y.

M. Plante (Fernand R.): Je voudrais rajouter un point. C'est que, actuellement, on a, dans notre mémoire, présenté disons des points où on dit que le ministre a ses besoins, on dit: que le système professionnel soit plus transparent, plus souple, plus accessible et moins coûteux. Je pense que, du point de vue stratégique, on devrait plutôt commencer par la base, aller voir les besoins de la base. Si on veut réformer l'Office, si on veut changer des choses au niveau de l'Office, il faudrait commencer par aller voir les besoins en bas et monter en haut plutôt que de partir du haut et descendre en bas. Et, pour répondre à votre question plus exactement, c'est que je pense que les corporations professionnelles n'ont pas besoin d'une compagnie mère, entre guillemets, et des filiales en dessous.

Mme Caron: Ça répond bien. Vous nous avez parlé, et peu de corporations ont parlé de ce problème - mais je pense que nous allons avoir à le vivre de plus en plus - concernant l'impact de la libéralisation des échanges et de la mobilité évidemment, et dans votre cas c'est important. Est-ce que vous pensez que le gouvernement ou l'Office devra intervenir et qu'est-ce que vous prévoyez, qu'est-ce que vous souhaitez comme mécanisme à ce niveau-là?

Le Président (M. Gautrin): M. Plante.

M. Plante: Bien, au niveau de la mobilité des personnes, nous pensons que, avec aussi les lois qui s'en viennent au niveau de la corporation, c'est qu'il faudrait être extrêmement prudent et, étant donné que vous allez avoir des professionnels qui vont exercer à l'intérieur d'entreprises qui pourraient être autres que des... tenant compte du pourcentage requis à l'intérieur d'une compagnie de services professionnels, si nous voulons permettre aux Québécois, premièrement, d'exercer leur profession au Québec, il faudrait être prudent puis laisser la place aux gens du Québec de pouvoir pratiquer leur profession librement avant que des gens de l'extérieur viennent le faire pour nous, à notre place, je veux dire, au Québec. Je ne sais pas si je suis clair. C'est que, à l'intérieur des compagnies de services professionnels, on va retrouver des gens de l'extérieur qui vont détenir les actions, sans être majoritaires, ils vont aller chercher le profit dans l'entreprise et, nous, nous allons laisser aller cet argent-là à l'extérieur.

Mme Caron: Au niveau de la pratique, je sais que pour certaines corporations professionnelles ça pose aussi un problème dans le sens que certains professionnels ont le droit d'exercer, à partir de certaines conditions, à l'extérieur et ont donc le droit d'exercer, avec ces mêmes conditions, ici, alors que les nôtres ne peuvent pas exercer pour les mêmes conditions. (21 h 40)

M. Plante: Et vous allez avoir des gens qui vont s'installer dans une province voisine et qui vont pouvoir exercer leur profession de l'extérieur et pratiquer alors que les professionnels du Québec ne pourront pas exercer leur droit de pratique au Québec.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gautrin): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Alors, brièvement maintenant, M. le ministre, il vous reste bien du

temps mais santé et sobriété...

M. Savoie: Non, mais il faut comprendre qu'on n'a pas l'occasion de... on n'a pas autant l'occasion qu'on voudrait pour échanger avec les administrateurs agréés sur un projet de loi. Finalement, lorsqu'ils nous arrivent avec des réponses assez claires, je pense, assez brèves, assez concises qui démontrent, finalement, une certaine vision du monde professionnel au Québec, qu'on a de la misère à accepter puisqu'il y a apparence là de... Une façon franche, directe de dire une grande vérité, là. Souvent, ça camoufle une autre réalité qui bouge en dessous là et qui est très importante comme le fait que de passer d'en haut et de descendre vers le bas.

Alors, je pense que, pour nous autres, il est très, très clair qu'on part au niveau de l'évaluation du public québécois qui nous dit que ça ne marche pas. Ils ne sont pas contents et ils veulent que ça monte et que les gens en haut écoutent et que ça change là. C'est un peu ça l'orientation qui est donnée quand on parie, par exemple, au niveau... Et je suis d'accord que ça concerne peu ou pas votre corporation professionnelle, là, mais c'est dans le sens où, ultime-ment, ça vous concerne. Ultimement, vous avez un rôle à jouer au sein du Conseil, auprès des autres corporations et c'est dans ce sens-là que je me dis: Bon, bien, effectivement, il y a un malaise. Je pense que, celui ou celle qui ne reconnaît pas qu'il y a un malaise là, on va avoir de la misère à se parler là. Le malaise est tangible, les sondages le démontrent de façon constante, il y a, au niveau de la population là, une difficulté de perception du fonctionnement de notre système disciplinaire, traitement par les pairs; je pense que les seules, les seules qui défendent l'utilisation de systèmes disciplinaires par les pairs, c'est les corporations professionnelles. La minute que tu sors de ce milieu-là, c'est fini, ça n'existe plus ce discours-là, tu ne le trouveras nulle part. Ce qu'on dit, c'est le contraire, et ailleurs, souvent, on n'utilise pas ce mécanisme-là. Si on regarde ailleurs, on a tendance à éloigner des situations conflictuelles, c'est-à-dire qu'on dit que, bon...

Alors c'est un peu ça. Il y a actuellement au Québec 41 corporations professionnelles et il y a une demande pour à peu près 6 autres en attente. Certains sont très avancés, d'autres débutent là, mais il y en a d'autres qui s'en viennent, qui cognent à la porte là, qui veulent rentrer et on a rentré, par exemple, les traducteurs et traductrices, il n'y a pas tellement longtemps. Évidemment il y a une volonté, il y a une poussée, alors j'ai de la misère, finalement, à concevoir une vision qu'on pourrait appeler arrêtée du monde professionnel au Québec, classique. J'admire beaucoup les choses classiques, mais quand même, là, choisissez votre adjectif là. Ha, ha, ha!

M. Gagnon: Tout, M. le ministre, tout part de la perception qu'on en a du système professionnel et de son efficacité ou sa non-efficacité. Puis, c'est vrai qu'il y a des corporations professionnelles qui ont peut-être plus de difficultés que d'autres. De là à dire que l'ensemble du système professionnel, aux yeux du public, ne fonctionne pas ou est inefficace, moi, je ne suis pas aussi convaincu que... même les sondages peuvent le refléter. Au fond, c'est souvent parce que le citoyen s'attend à autre chose du système professionnel que ce que le système est en mesure de lui offrir. Et, souvent, l'insatisfaction des contribuables, des citoyens, vient du fait qu'ils n'attendent pas les bons services ..du système professionnel. D'autre part, même si c'est vrai qu'il y a des problèmes dans le système, parce que Dieu sait qu'il n'est pas parfait et on ne prétend pas du tout qu'il est parfait non plus, maintenant, il reste à voir qui est le garant, ou qui doit être le garant de l'efficacité et de la qualité du système professionnel. Est-ce que c'est l'Office des professions ou est-ce que ce sont les corporations professionnelles elles-mêmes, ou est-ce que c'est le ministre responsable de l'application des lois professionnelles? Ultimement là, c'est le ministre mais dans l'opération du système... Et ça vient mettre en cause la vision qu'on doit avoir d'une réforme ou d'une réorganisation du système professionnel. Si on convient que c'est l'Office des professions, moi je comprends très bien les gens de l'Office qui veulent bien faire leur travail, se donner le plus de poignées possible, le plus d'instruments, le plus d'outils possible pour pouvoir intervenir et faire leur travail correctement, parce qu'ils ont le sentiment que c'est l'Office des professions qui doit être garant de l'efficacité du système.

Nous, on prétend que ce sont les corporations professionnelles elles-mêmes, et on croit que les solutions pour améliorer l'efficacité du système et même la perception du système par rapport aux citoyens doivent venir beaucoup plus des corporations professionnelles et les correctifs doivent venir beaucoup plus de mécanismes qui vont aider les corporations à se responsabiliser entre elles et par rapport à elles-mêmes comme corporations individuelles. On est plus tenants de cette vision-là du système professionnel, et on n'est pas convaincus que d'ajouter des pouvoirs à l'Office des professions - et Dieu sait qu'on n'a rien contre l'Office des professions, au contraire, c'est pour nous un partenaire précieux, l'Office -on n'est pas convaincus que d'y ajouter des pouvoirs d'intervention, des pouvoirs d'action sur les corporations, ça va vraiment régler le problème. Ça risque, au début, peut-être de faire plaisir à des groupes de consommateurs qui vont avoir l'impression que le système est plus impartial ou... mais ça ne changera rien à la façon de faire du syndic chez nous qui fait bien son travail, de toute façon, mais, quand il arrive

à la conclusion qu'une plainte ne doit pas être portée, qu'est-ce que le contribuable tire comme conclusion? C'est bien clair, c'est entre pairs, alors résultat: le système fonctionne mal. Je pense qu'il faut aller un peu au-delà de ça.

Prenons l'exemple du système judiciaire au Québec. On a plusieurs concitoyens et concitoyennes qui considèrent que le système judiciaire est tout croche, qu'il n'y a pas justice et que, souvent, il n'y a même pas apparence de justice. Quand le juge Untel rend tel jugement, on crie à l'injustice mais le juge Untel s'est appuyé sur des règles de droit et sur des procédures de droit. Le système professionnel, il juge les plaintes, M. le ministre, de la même manière. Alors, on n'est pas convaincus qu'en ajoutant des pouvoirs à l'Office, d'intervention, d'enquête, de mise en tutelle, ça va vraiment permettre de régler ces problèmes de fond là, puis on pense plus que demander aux corporations professionnelles de se grouiller les puces peut-être un peu plus, pour retravailler certaines de leurs façons de faire, certaines manières de se projeter dans le public, ça serait peut-être plus efficace.

M. Savoie: D'accord. Alors je pense que vos explications ont certainement clarifié, pour moi en tout cas, la nature de votre position et ça ne vous avance pas beaucoup, Ha, ha, ha!

M. Gagnon: On ne vous a pas fait changer d'idée, non?

M. Savoie: Même, je vous vois exactement où certains étaient l'an passé là. Il est clair qu'il y a un problème de perception au niveau du public, surtout au niveau des péchés véniels là, les fautes légères, ça, là-dessus, et je pense que ça demande un mouvement... Maintenant vous nous dites: Laissez ça aux corporations professionnelles. Bien, mon Dieu, c'est ce qu'on a fait pendant 20 ans et ça n'a pas réglé le dossier. On pense que l'ajout d'un mécanisme léger, pour justement traiter ces cas-là où il y a... Moi, je pense que vous avez raison: sur le fond, il n'y a pas de problème, mais on a toujours tenu ce discours-là; au niveau du fond, l'administration de la justice, de la discipline au niveau des corporations, il n'y a jamais eu de difficultés. C'est que l'apparence n'est pas là, c'est ça le problème et c'est là qu'on cherche à intervenir pour que le citoyen - se faire dire non par un syndic et au lieu de s'embarquer, par exemple, dans des structures beaucoup plus lourdes au niveau, par exemple, comité de discipline ou se taper sur un mur là - pourrait se retourner vers un comité des plaintes, s'adresser à eux, et là il y a deux citoyens, pas deux administrateurs agréés mais deux citoyens avec un administrateur agréé qui vont lui dire: Ton affaire là, ça ne marche pas. Je pense qu'il va sentir qu'effectivement il va avoir de la misère à se lever contre cette orientation-là en disant: Bon, bien, effectivement, des citoyens étant présents... l'apparence de justice y est pour quelque chose, il y a un appel d'une décision qu'il ne comprend pas. On ne cherche pas à lui donner raison, au citoyen qui se trompe, ce qu'on cherche à faire, par exemple, c'est lui démontrer qu'on s'est plié en quatre pour lui faire comprendre le refus de la part du syndic et pourquoi, finalement, son orientation est peut-être mal fondée. On pourrait en discuter longtemps, je pense, et je suis certain qu'au bout de quelques heures vous comprendriez rapidement l'orientation qu'on a prise et vous l'appuyerez à 100 % à ce moment-là, mais... Ha, ha, ha!

M. Gagnon: Si je pouvais me permettre, j'ajouterais un commentaire... (21 h 50)

Le Président (M. Gautrin): Brièvement, parce que le temps des ministériels a été écoulé et que vous prenez sur le temps des ministériels. Alors, très brièvement...

M. Gagnon: Je vais y aller brièvement pour vous dire que j'ajoute à ce que je vous disais précédemment sur l'ajout des pouvoirs de l'Office, que déjà le rôle de l'Office des professions est assez compliqué comme il l'est. D'y ajouter encore risquerait de compliquer encore plus son mandat envers les corporations professionnelles et, quand on parle d'équilibre, il faut qu'il y ait un équilibre dans les pouvoirs et dans les autorités. Si cet équilibre-là est remis en cause, les relations risquent de devenir encore beaucoup plus difficiles que ce qu'elles sont actuellement.

Le Président (M. Gautrin): Merci, M. Gagnon. Alors pour le reste du temps qui est imparti à l'Opposition, Mme la députée de Terrebonne ou Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière? Mme la députée de Terrebonne, brièvement.

Mme Caron: J'aurais peut-être une dernière question concernant les corporations à titre réservé qui, effectivement, éprouvent plus de difficultés puisque, effectivement, elles doivent assurer une protection du public et que les gens ne sont pas obligés d'être membres de votre corporation. Est-ce que vous avez des pistes de solution pour ce problème?

M. Gagnon: Bien, la première piste de solution c'est de contribuer, encore une fois, à expliquer aux contribuables, à M. et Mme Tout-le-Monde, quel avantage elle a de faire affaire avec un administrateur quelconque qui n'est aucunement encadré par une corporation professionnelle et un administrateur agréé qui, lui, a pris la peine de s'intégrer au système professionnel et de se soumettre à des mécanismes de contrôle, des mécanismes de discipline. Donc, premier élément pour aider les corporations à

titre réservé: bien informer le public sur l'avantage de faire affaire avec un professionnel qui a pris la peine, même s'il n'y était pas obligé pour gagner sa croûte, de s'intégrer à système professionnel qui va l'encadrer, qui va le vérifier et qui va même le soumettre à des mécanismes de discipline. Deuxième élément: Pourquoi l'État, Mme Caron, ne prêcherait-il pas par l'exemple...

Le Président (M. Gautrin): Vous parlez au président, monsieur.

M. Gagnon: M. le Président, je m'excuse. Le Président (M. Gautrin): Merci.

Mme Caron: Oui, je pense qu'il y a effectivement un problème au niveau de l'engagement de l'État, parfois, de professionnels qui ne sont pas nécessairement membres de corporations.

M. Gagnon: Tout à fait.

Mme Caron: L'autre question, toujours sur le même sujet: Oui, il faut convaincre les gens qu'ils ont avantage à faire appel à un professionnel mais est-ce que vous ne croyez pas que, si on met en place le système de l'avant-projet tel que suggéré et qu'on y ajoute la loi 67 sur le financement, justement, les professionnels qui font partie des corporations à titre réservé vont tout simplement se retirer de leur corporation?

M. Gagnon: Bien, vous savez, il y a un risque énorme, effectivement. Et on a beau dire que les professionnels, déjà, font partie des bien nantis de la société et sont capables d'assumer un peu plus leur part pour faire fonctionner le système - d'ailleurs notre corporation, il y a quelques semaines, était présente devant une autre commission parlementaire pour faire valoir qu'effectivement le gouvernement devait resserrer ses dépenses, faire attention dans sa façon de gérer les finances publiques - sauf que les professionnels contribuent déjà, qu'on le veuille ou non - et il faut éviter de tomber dans la démagogie - de façon très importante au financement de la société par leurs impôts, par leurs contributions à la corporation professionnelle -nos cotisations augmentent de plus en plus, on a des responsabilités qu'on veut assumer correctement, alors il faut que le professionnel assume des cotisations de plus en plus importantes et souvent, bon, il y a deux ans on a ajouté la TPS, l'an passé on a ajouté la TVQ et l'an prochain on va ajouter une autre portion...

Le Président (M. Gautrin): C'est ce que le budget vous réserve...

M. Gagnon: Bon. Alors, résultat, effectivement, l'assurance-responsabilité qu'on exige de nos membres également, tout ça, celui qui décide, lui, de demeurer exclu du système professionnel est totalement à l'abri de ces dépenses supplémentaires. ça risque de faire réfléchir beaucoup de personnes.

M. Plante: Et ça devient de la pratique illégale et qui dit pratique illégale demande d'autres coûts aux corporations professionnelles pour protéger leurs droits, surtout au niveau des corporations à titre réservé.

Le Président (M. Gautrin): En conclusion, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Je vous remercie beaucoup pour vos précisions.

Le Président (M. Gautrin): Alors, M. Gagnon, M. Plante, la commission vous remercie de votre témoignage et la commission ajourne à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 55)

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