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Commission permanente de l'éducation,
des affaires culturelles et des communications
Etude des crédits du ministère des
Affaires culturelles
Séance du vendredi 2 mai 1975
(Onze heures cinq minutes)
M. Pilote (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A
l'ordre, messieurs! M. Houde (Limoilou) remplace M. Houde (Fabre). Hier, nous
étions rendus au programme 2, élément 2: Conservation des
sites et des lieux historiques et archéologiques. Le chef de
l'Opposition avait des questions.
M. Morin: Oui, M. le Président.
Sites historiques et archéologiques Vieux
Sillery
Le Président (M. Pilote): Je lui cède la parole
immédiatement.
M. Morin: J'ai déjà laissé entendre à
M. Ju-nius, du ministère, hier, que j'avais l'intention d'interroger le
ministre ce matin sur ce qui s'est passé depuis deux ou trois ans
à l'intérieur du périmètre de l'arrondissement
historique du Vieux Sillery. Le ministère des Affaires culturelles n'est
pas le seul qui soit concerné d'ailleurs, puisque d'autres
ministères, dont celui des Affaires municipales ont été
mêlés à cette affaire qui ressemble fort à un cas de
spéculation foncière, assez éhonté, à
l'intérieur de l'arrondissement culturel protégé par la
loi.
Je ne sais si le ministre a eu l'occasion de rendre visite au Vieux
Sillery depuis quelque temps. Lorsqu'on passe sur le boulevard Champlain, on
peut distinguer de quoi il s'agit, mais on ne peut le voir avec
précision. La vieille maison des Jésuites qui date du
début du 18e siècle est littéralement
écrasée par un énorme talus de terre de 25 à 30
pieds de hauteur, lequel a été entassé par un entrepreneur
qui, ne sachant que faire de la terre extraite de la Place Laurier, l'a
entreposée en quelque sorte c'est du moins ce qu'il disait au
début sur les terrains adjacents à la vieille maison des
Jésuites. Je ne sais si le ministre l'a vu, mais pour le cas où
il ne l'aurait pas vu, je lui montre ce que cela donne par rapport à la
maison des Jésuites. Je pense que tout le monde peut voir cette
photo.
M. Hardy: Le ministre a vu.
M. Morin: Bien. Ce tas de terre artificiel ce remblai,
c'est ce dont il s'agit a été accumulé
illégalement à l'intérieur d'un arrondissement historique
qui a été créé par arrêté en conseil
en 1964.
Je voudrais donner quelques précisions au ministre, à
moins qu'il ne connaisse déjà à fond le dossier.
M. Hardy: Je le connais assez bien.
M. Morin: Assez bien? Je veux lui rappeler la chronologie des
événements et des rapports qui ont été
établis entre les victimes de ce remblai et le ministère.
M. Hardy: La seule chose, j'essaie de considérer si votre
chronologie correspond à la mienne.
M. Morin: Eh bien! c'est ce que nous allons avoir l'occasion de
faire avant que je pose des questions au ministre. C'est donc le 5
février 1964, par l'arrêté en conseil par le
décret, en bon français numéro 219 que
l'arrondissement historique du Vieux Sillery a été
créé, au sens de la Loi des monuments historiques du 10 juillet
1963, laquelle a été remplacée par la suite par la Loi sur
les biens culturels, entrée en vigueur le 8 juillet 1972.
Au centre de cet arrondissement historique dont je ne décrirai
pas les limites puisque le ministre les connaît sûrement
elles se trouvent d'ailleurs publiées dans les règlements du
Québec, je n'ai pas à les mentionner, j'imagine au centre
de cet arrondissement historique se trouve la pointe appelée autrefois
Saint-Joseph, aujourd'hui complètement noyée dans le boulevard
Champlain, qui a défiguré les lieux.
M. Hardy: Le député de Sauvé revit son
enfance en décrivant ces lieux?
M. Morin: En effet, M. le ministre, en partie. C'étaient,
à ce moment, les bords du Saint-Laurent où nous allions sauter de
galet en galet.
M. Hardy: Avant que l'on massacre les rives du Saint-Laurent par
ce boulevard Champlain.
M. Morin: Oui, il y a bien longtemps. Mais ce n'est pas par
nostalgie je voudrais que le ministre me comprenne que
j'évoque le problème que nous allons discuter ce matin, l'un des
problèmes dont nous allons discuter ce matin. C'est vraiment parce que
même si je n'avais jamais mis les pieds à cet endroit
lorsque j'ai rendu visite aux lieux, cela m'a porté un coup, non
seulement au coeur, mais à l'esprit. Je crois qu'il s'agit d'un abus
éhonté et j'espère que le ministère sera en mesure
de faire quelque chose.
Je rappelle très brièvement les faits. Cette pointe
Saint-Joseph a vu s'établir l'une des toutes premières missions
algonquines et montagnaises, à compter de 1637. Il y a eu sur les lieux
la première chapelle de pierre jamais construite au pays, dont il ne
reste aujourd'hui, à la suite des fouilles accomplies avec des fonds du
gouvernement fédéral, que les fondations. Je ne sais si le
ministre est intéressé à voir cette photo; on y distingue
très bien les fondations de la première église. Tout cela
se trouve dans le périmètre qui entoure immédia-
tement la maison des Jésuites, laquelle est
légèrement postérieure à la mission. La maison des
Jésuites actuelle a été construite vers 1700,
c'est-à-dire qu'elle est relativement peu ancienne par rapport au site
archéologique et au site historique.
On a retrouvé, lors des mêmes fouilles, des restes du mur
de circonvallation, le périmètre de défense avec les
tours; tout se trouve là sous le sol ou encore à l'oeil nu comme
dans le cas pour la chapelle. Ces fouilles archéologiques ont
été effectuées entre 1964 et 1966. On a même mis
à jour des éléments qui, pour l'étude du
patrimoine, ne sont pas sans importance, comme, par exemple, l'un des rares
aqueducs en bois qui nous restent de cette époque.
Sur la pointe, en haut, au milieu du terrain acheté par le
promoteur Paul Racine, qui est bien connu dans certains milieux
gouvernementaux, se trouve une tour de garde qui remonte également au
tout début de l'époque de la colonisation française et on
a trouvé, sur les mêmes lieux, des restes d'occupation
préhistorique. Je crois même que le site a été
classé. Dans votre service d'archéologie se trouve un dossier
numéro DO-75 qui comporte un plan et cette photo; c'est un dossier qui a
été établi en 1970, je crois.
Il s'agit donc, M. le Président, d'un ensemble tout à fait
exceptionnel, l'un des plus importants sur les plans historique et
archéologique pour notre patrimoine. Or, en 1969, cette
propriété formait une sorte de cuvette qui, du niveau de la
maison des Jésuites, montait en pente légère vers le haut
de la butte dominée par la tour de garde dont je parlais tout à
l'heure. Ce terrain a été acheté par le
dénommé Paul Racine ou par une société, l'une des
multiples sociétés dont il se sert pour ses affaires. Je crois
que c'était, en l'occurrence, la société Delrano, mais il
y en aura plusieurs autres par la suite qui vont se passer le terrain de l'une
à l'autre dans un chassé-croisé qui rend évidemment
le déblayage de cette affaire bien compliqué. Les lots 281-NS,
288 et partie de 289, faisant partie de la succession Henri Aubin, ancien
propriétaire, ont été achetés par ce M. Racine qui
était déjà propriétaire de la pointe et de la tour
qui est située au sommet.
Le nouveau propriétaire a fait déverser de la terre et
quantité de pierres provenant de la Place Laurier qu'il était
à construire. Les Jésuites qui, à la suite d'une longue
histoire sur laquelle je n'ai sans doute pas à revenir puisqu'elle est
également connue, sûrement, du ministère, avaient repris
leur vieille maison et qui tentaient d'en faire un musée, d'en faire un
site historique pouvant recevoir des visiteurs, se sont inquiétés
immédiatement de cette accumulation de terre qui est énorme, qui
est devenue gigantesque et bloque maintenant tout l'horizon. Au début,
on leur a dit: "C'est temporaire; cela va servir à faire les
terrassements du boulevard Champlain par la suite. Ne vous inquiétez
pas, père Pouliot, cela n'aura pas de suites. Nous nous servons tout
simplement du terrain en attendant de trouver un autre endroit où mettre
tous ces rebuts.
Le père Pouliot, constatant cependant, l'année suivante,
plus précisément en février 1970, que le tas de terre
prenait des proportions gigantesques, a écrit au ministère des
Affaires culturelles c'était au prédécesseur du
ministre actuel, M. Jean-Noël Tremblay lui demandant
d'intervenir.
M. Hardy: Pas le prédécesseur immédiat.
M. Morin: Non, sans doute, mais c'était l'un de vos
prédécesseurs.
M. Hardy: L'un de mes nombreux prédécesseurs.
M. Morin: Oui. Et le 11 février, le ministre Tremblay
répond au père Pouliot qu'il a demandé à l'un de
ses adjoints, M. P.H. Roy, de lui faire rapport. Je ne sais pas si ce rapport a
été fait. C'est l'une des questions que je pourrai vous poser par
la suite. En tout cas, le père Pouliot, lui, n'a pas entendu parler de
ce rapport.
Le dénommé Racine ayant été averti dans I
intervalle de l'importance archéologique et historique du site, dont il
pouvait d'ailleurs se douter, puisqu'il savait qu'il y avait là un
arrondissement historique, a été prévenu par le
père Pouliot de façon spécifique. Il était donc au
courant au moment où ont commencé les déversements,
lesquels je dois le dire, ont été faits sans autorisation. Aucune
autorisation n'a été demandée ni à la ville de
Sillery, d'après ce que nous avons pu voir, ni au ministère des
Affaires municipales, ni au ministère des Affaires culturelles, ni
à la Commission des monuments historiques.
Comme le tas de terre semblait devoir demeurer, même après
la construction du boulevard Champlain, le père Pouliot a eu de nombreux
contacts avec tous les intéressés et en particulier avec la
société Delrano pour découvrir, après quelques
mois, que le tas de terre, dans l'esprit de ceux qui l'y avaient
accumulé, était destiné à être permanent et
même que la société Delrano avait demandé au
ministère des Affaires culturelles le lotissement de la plate-forme, du
remblai ainsi créé, lotissement considérable que le
ministre a peut-être eu sous les yeux et qui est inscrit au cadastre sous
le no 09.0640, avec la mention 2,666, plan dressé le 30 septembre 1971
par M. Jean Guérard et approuvé par le sous-ministre des Terres
et Forêts sous la minute 2567.
Est-ce que le ministre a vu ce plan d'aménagement du remblai?
M. Hardy: Nous l'avons dans le dossier.
M. Morin: Vous l'avez. Bien.
Il s'agit donc, dans l'intention de ceux qui ont accumulé ce
remblai à l'intérieur d'un arrondissement historique, d'une
tentative de créer un espace pour construire des habitations du style
qu'on connaît, des habitations dont on voit déjà le vieux
Sillery se parsemer.
La ville de Sillery a approuvé le lotissement du plateau et a
demandé au ministère des Affaires culturelles d'y ouvrir une rue,
le 30 septembre 1971. Le 19 octobre 1972 je précise cela pourque
la chro-
nologie soit bien claire l'original du plan est
déposé au ministère des Terres et Forêts pour faire
partie du cadastre officiel du Québec.
Maintenant, j'en viens rapidement à la chronologie en ce qui
concerne plus particulièrement le ministère des Affaires
culturelles et sa participation à cette affaire. Le 17 juillet 19... Si
le ministre n'aime pas le mot "participation", je le retire. Je veux dire la
façon dont il a été mêlé à cette
affaire, peut-être malgré lui.
M. Hardy: De toute façon, je rétablirai les faits
tantôt.
M. Morin: Bien. Le 17...
M. Hardy: Qui ne sont pas nécessairement à la
gloire du ministère, je l'avoue tout de suite.
M. Morin: Ce qui m'intéresse, M. le ministre, ce n'est pas
si le passé est à la gloire ou non du ministère,
c'est...
M. Hardy: Ce qu'on va faire.
M. Morin: ...ce que vous allez faire dans l'avenir. C'est pour
cela que je soulève ce problème...
M. Hardy: D'accord.
M. Morin: ...autrement, je perdrais mon temps...
M. Hardy: Très bien.
M. Morin: ...et je vous ferais perdre le vôtre.
Le 17 juillet 1972, il y a eu, de la part des monuments historiques, un
refus d'approuver un mur de soutènement. Cela, c'est le premier geste,
je pense, vraiment positif du ministère et ce sera malheureusement l'un
des seuls. Du moins avez-vous refusé qu'on construise un mur de
soutènement qui aurait eu de 20 à 30 pieds de hauteur et qui...
Remarquez que le mur de soutènement aurait peut-être
été plus joli que le remblai, en définitive, mais je crois
que vous avez eu raison de le refuser parce que cela aurait été
permanent tandis que les constructions n'ayant pas encore débuté
sur le remblai, il existe encore une possibilité d'action.
Seulement, le temps passe. Tout cela est arrivé il y a deux ou
trois ans, le remblai est toujours là et il défigure toujours le
site et l'arrondissement. Le 17 juillet 1973... Je vais donner la chronologie
des échanges de lettres dans l'ordre, M. le ministre, pour que vous
puissiez vérifier si toutes les pièces sont au dossier. J'ai
copie de toutes ces pièces.
Le 17 juillet 1973, lettre de M. Pouliot à M. Ju-nius, lui
demandant son intervention. Le 25 juillet, lettre de M. Junius au père
Pouliot accusant réception. Le 14 septembre, lettre de Me Aline Mercier
qui, je crois, est des nôtres ce matin, au père Pouliot,
l'invitant à une réunion le 20 septembre 1973. Effectivement, je
crois que cette réunion a lieu le 20 septembre, puisqu'il y a un
procès-verbal au dossier. Mais le procès-verbal est très
bref et se contente de constater l'absence, non motivée, de M. Paul
Racine qui, pourtant, avait été invité, d'après le
dossier, d'après la correspondance, et l'absence également du
maire de Sillery, M. Beau-lieu.
Je dois dire que la ville de Sillery avait donné le consentement
au lotissement sur motion de Mme Albanie Morin, qui n'est pas de ma famille,
mais qui appartient à une autre famille bien connue.
M. Hardy: C'est un peu insidieux. M. Morin: Non. Le
ministre... M. Hardy: Jusqu'ici...
M. Morin: Comme le ministre l'a dit, il aura tout le loisir de
rétablir les faits et de nous rassurer pleinement, je n'en doute
pas.
M. Hardy: Jusqu'ici, le député de Sauvé
s'était tenu dans une relative objectivité mais là, il a
erré un peu.
M. Morin: M. le Président, je voudrais simplement
décrire tous les faits et chacun tirera ses conclusions. Je ne les ai
pas encore tirées pour ma part. J'espère que le ministre me
donnera l'occasion de tirer des conclusions optimistes de tous ces faits.
M. Hardy: ...que je vais faire même des admissions
judiciaires.
M. Morin: Bien. A condition que cela conduise à l'action.
C'est cela qui nous importe.
Le 2 octobre 1973, lettre du père Pouliot, le père
jésuite qui est président, je crois, du musée et qui y
consacre le plus clair de son temps, à M. Junius, demandant que cette
fameuse réunion se tienne. Entre-temps, le 9 août 1973, le maire
de Sillery déclare à la radio au sujet du terrain, je cite: "II
est là et puis il n'y a aucun règlement, à aucune place,
qui empêche un citoyen de remplir son terrain".
M. Hardy: Qui a dit cela?
M. Morin: Le maire de Sillery. Le maire de Sillery qui, au
début, s'était montré très hésitant, puis
qui, le 9 août 1973, nous dit les choses telles qu'elles sont.
Je répète: "II est là et il n'y a aucun
règlement à aucune place qui empêche le citoyen de remplir
son terrain". Je pense que le maire de Sillery n'avait pas pris connaissance
des lois sur la protection des biens culturels. Peut-être y a-t-il
d'autres explications, mais, là encore, je laisserai le ministre me
rassurer tout à l'heure.
Le 11 octobre 1973, lettre de Me Mercier au père Pouliot,
annonçant une nouvelle réunion. J'ai l'impression que cette
nouvelle réunion n'a jamais eu lieu, n'est-ce pas? Ce sera une des
choses que vous pourrez nous dire tout à l'heure. En effet, on
voit au dossier une lettre du 21 novembre 1973, la dernière en ce
qui nous concerne, qui est une lettre de M. Junius au père Pouliot, dans
laquelle il lui dit combien il comprend son impatience. Depuis ce temps, il n'y
a plus de correspondance, à notre connaissance, dans le dossier; du
moins, les jésuites ne m'en ont pas remis d'autre.
Les questions que soulève cette série de faits sont les
suivantes: Est-ce que, dans les circonstances, la ville de Sillery et son
maire, M. Beaulieu, ne se sont pas carrément moqués de la loi?
Est-ce que M. Paul Racine et la société Delrano ne se sont pas
moqués carrément de la loi et du ministère?
Ce qui m'inquiète le plus, c'est que chaque semaine qui passe
nous rapproche du moment où les constructions pourront commencer sur le
remblai. C'est pourquoi, je demande au ministre, bien que je connaisse en
partie la réponse, de quels pouvoirs dispose-t-il pour mettre de l'ordre
dans cette situation, pour ramener à l'ordre ceux qui ont enfreint la
loi et qui se sont moqués du ministère.
Le ministre compte-t-il utiliser ces pouvoirs et, en somme, qu'entend-il
faire?
M. Hardy: M. le Président, le problème
soulevé par le député de Sauvé est à la fois
un cas intéressant, et pas dans le sens heureux du mot, un peu comme
lorsque...
M. Morin: Comme un beau cas de cancer.
M. Hardy: Exactement, oui. C'est, donc, un cas intéressant
et un cas qui se soulève dans d'autres secteurs. C'est d'abord celui
je suis bien conscient des mots que je vais prononcer du manque
total de bonne foi ou de respect de certains principes, de certaines lois de
l'environnement, de l'écologie, du patrimoine que manifestent des
promoteurs dans le domaine domiciliaire.
M. le Président, j'ai déjà eu l'occasion de le dire
et je le répète: Je suis un partisan de l'entreprise libre, de
l'entreprise privée. Je crois aux vertus de ce système, mais je
crois également que, dans ce système, les gens n'ont pas le droit
de violer d'une façon aussi sauvage le bien commun. Quand il s'agit de
la qualité de l'environnement, que ce soit sur le plan strictement de
l'écologie, quand il s'agit du plan historique, je pense que c'est un
aspect extrêmement important du bien commun.
Or, M. le Président, on ne saurait trop dénoncer ces gens,
quels qu'ils soient. Que ce soient des libéraux, des conservateurs, des
créditistes, des péquistes, quelle que soit leur appartenance
politique ou idéologique, je condamne avec la plus grande vigueur
l'attitude de cette sorte de personnes qui prétendent que, pour faire de
l'argent, on peut prendre n'importe quel moyen, on peut violer les lois de son
pays, non seulement les lois juridiques, mais même je dirais les lois
morales et même certaines lois naturelles. Je prétends que le
respect de l'environnement, le respect de la qualité de la vie,
au-delà des textes juridiques qui peuvent s'appliquer, c'est en quelque
sorte du droit naturel.
Donc, M. le Président, là-dessus, je m'entends totalement
avec le député de Sauvé pour dénoncer non seulement
ceux qui sont impliqués dans le cas qu'il a soulevé ce matin,
mais tous les entrepreneurs, à l'échelle du territoire du
Québec, qui ne prennent pas en considération le respect de la
qualité de l'environnement lorsqu'ils décident d'entreprendre un
développement domiciliaire, industriel ou autre.
L'autre chose que je dois déplorer et qui explique en partie le
problème devant lequel nous sommes placés, c'est l'insuffisance
des moyens du ministère des Affaires culturelles elle est moindre
au moment où on se parle qu'elle ne l'était au moment où
ces choses se sont produites tant au niveau du nombre de personnes
oeuvrant à la Direction générale du patrimoine ou dans les
secteurs qui s'occupent de ce domaine qu'au niveau du contentieux.
Lorsque j'ai été nommé ministre, à la fin de
l'année 1973, Me Mercier était seule au contentieux.
L'administration, entre autres, de la Loi sur les biens culturels amène
un volume de travail, sur le plan juridique, très considérable.
Nous avons réussi à obtenir deux autres personnes au contentieux.
Il y a maintenant trois personnes qui travaillent à ce service, mais je
constate que c'est encore insuffisant pour la somme de travail à
accomplir.
Donc, je ne veux pas présenter cela comme une excuse à
l'inertie ou à l'immobilisme, mais c'est une forme d'explication. Or,
à cause de ces deux faits que je viens de mentionner: mauvaise foi ou
manque de collaboration des personnes en cause, des propriétaires des
immeubles en cause, et absence ou faiblesse des moyens dont nous disposions au
ministère des Affaires culturelles, il est exact qu'au printemps 1971,
la loi a été directement violée.
Ce n'était pas la loi actuelle, ce n'était pas la loi 2,
la Loi sur les biens culturels, mais l'ancienne loi aurait exigé que les
propriétaires de ce terrain obtiennent du ministère des Affaires
culturelles la permission d'exécuter ces travaux qui ont amené
cet amoncellement de terre. Donc, ces gens ont violé la loi en
n'obtenant pas de permission. Le ministère, n'ayant pas, encore une
fois, le personnel suffisant, n'a pas pu, de sa propre initiative, intervenir,
parce qu'il a aussi le droit de le faire.
C'est pourquoi je vous parlais tantôt de faiblesse de moyens. Au
moment où l'on se parle et même au moment où vraiment nous
avons été alertés par le père Pouliot ou les
personnes en cause, il n'était plus possible d'intenter de poursuites
pénales, parce qu'il y avait prescription.
Toutefois, en vertu de la loi actuelle sur les biens culturels du
chapitre 19 des Lois de 1972, nous avons encore la possibilité d'un
recours par voie d'injonction pour obliger les propriétaires actuels
à remettre les lieux dans l'état où ils étaient
avant qu'ils entreprennent des travaux. Or, cette hypothèse d'intenter
de telles procédures judiciaires est présentement à
l'étude. Je dois même vous dire qu'il y a, ce matin même,
rencontre entre des fonctionnaires de notre ministère, des
fonctionnaires du ministère des Affaires municipales et des Terres et
Forêts, pour étudier la possibilité d'inten-
ter des procédures afin que les lieux soient remis dans
l'état où ils étaient avant que l'on effectue ces
travaux.
M. Morin: Je remercie le ministre de sa réponse. J'aurais
quelques autres petites questions à lui poser pour que nous ayons bien
fait le tour du dossier. La première question qui me vient à
l'esprit découle de ce qu'il vient de nous dire. Est-ce que cette
procédure d'injonction pourrait avoir lieu assez rapidement, au cours
des semaines qui viennent?
M. Hardy: On me dit que nous serions prêts, quant à
nous, à remettre le dossier au ministère de la Justice dans une
quinzaine de jours.
M. Morin: Bien. Nous surveillions le tertre, le remblai, et ce
que je craignais, c'est que les travaux de construction commencent. J'ai
attendu les crédits plutôt que d'interroger le ministre en
Chambre, à ce sujet, parce que je sais bien qu'aux crédits nous
avons beaucoup plus le loisir d'étudier le dossier en profondeur.
M. Hardy: D'abord, je dois souligner qu'au niveau de
l'autorité municipale, il y a présentement, en particulier de la
part du nouveau maire de Sillery, un esprit de franche collaboration avec le
ministère des Affaires culturelles. Le climat a quand même
changé, entre 1971 et 1975, et je ne crois pas que les
intéressés risqueraient de commencer des travaux de construction,
sans obtenir un permis du ministère des Affaires culturelles. De toute
façon, nous sommes suffisamment alertés sur ce dossier que,
même s'ils devaient prendre ce risque de commencer les travaux sans
obtenir de permis, nous interviendrions automatiquement.
M. Morin: Ai-je bien compris le ministre, lorsqu'il dit que la
moindre construction sur ce remblai exigerait l'obtention d'un permis?
M. Hardy: C'est-à-dire, la moindre construction dans tout
l'arrondissement, pas seulement de ce remblai. Toute construction dans tout
l'arrondissement historique de Sillery est soumise à une demande de
permis. Nous avons un autre problème dans ce secteur, actuellement, avec
le domaine Cataracoui où nous avons refusé, jusqu'à ce
jour, toute permission de lotissement, de construction et de démolition
de la principale maison Cataracoui.
M. Morin: M. le Président, je voudrais vous poser une ou
deux questions sur d'autres aspects du dossier. Pour ce qui est du site
archéologique situé au sommet de la colline, la tour de garde et
les restes aborigènes qui sont situés autour, vous avez un
dossier, je crois, à votre ministère, sur ce sujet. J'ai cru
comprendre que ce terrain, je n'en suis pas sûr, je pose la question,
mais j'ai cru comprendre que ce terrain faisait partie des terrains mis en
vente et qu'il y aurait peut-être construction sur le site même de
la tour et du site archéologique.
M. Hardy: Je répète qu'il ne peut y avoir, en vertu
de la loi, aucune construction sans notre autorisation. Et, bien sûr,
nous n'avons pas l'intention de donner des autorisations qui auraient pour
conséquence de détériorer ou de mettre en cause la valeur
de ce site.
M. Morin: Si j'ai bien compris, l'objectif du ministère,
donc c'est de faire remettre les lieux en état.
M. Hardy: Dans la mesure où légalement nous le
pourrons. C'est la raison de la réunion de ce matin, c'est la raison qui
nous incite à mettre à jour notre dossier sur cette question. Si
nous avons des possibilités, sur le plan juridique, d'intervenir,
évidemment c'est le ministère de la Justice qui prendra la
décision finale, mais quant à nous, nous travaillons, avec
beaucoup d'opiniâtreté, à mettre à jour le dossier
avec, comme objectif, que le ministère de la Justice intente
éventuellement des procédures judiciaires.
M. Morin: J'imagine, M. le Président, que vous vous fondez
sur l'article 48 de la Loi sur les biens culturels qui dit que nonobstant toute
loi générale ou spéciale, nulle construction,
réparation, transformation ou démolition d'immeubles ne peut
être faites dans un arrondissement historique ou naturel sans
l'autorisation du ministre qui prend avis de la commission. C'est bien
cela?
M. Hardy: Oui.
M. Morin: Et je me réfère aussi au troisième
paragraphe; dans le cas de construction, réparation, transformation ou
démolition faite pour des fins agricoles sur des terres en culture,
l'autorisation n'est pas requise. Bien non, cela ne s'applique pas. Cela ne
s'applique pas, je pensais...
M. Hardy: L'article 57...
M. Morin: ...à l'article 57, pour le cas où il y a
violation de la loi. Vous êtes habilité, par cet article, à
obtenir la remise en état. C'est bien cet article que vous allez
invoquer.
M. Hardy: Exactement. M. Morin: Bien.
M. Hardy: Je ne sais pas si le député de
Sauvé ou son parti a été mis au courant de l'autre cas qui
est sensiblement de même nature, sauf qu'il n'y a que l'autorité
publique qui est en cause, au niveau municipal, non pas un secteur
privé. Nous sommes placés exactement devant une situation
identique à Saint-François de l'île d'Orléans
où une municipalité, sans autorisation, sans permission a
décidé de construire un mur. Là, dans ce cas, des
procédures sont déjà en cours
M. Morin: Oui, j'avais entendu parler de ce cas, mais j'ai
tellement d'autres cas dont je voudrais entretenir le ministre, ce matin, que
j'avais
laissé celui-là de côté, parce que j'ai cru
savoir aussi que le ministère avait agi, avait tenté de faire
quelque chose dans ce domaine.
M. Hardy: II n'est pas mauvais, pour compenser un peu, de montrer
qu'il y a eu peut-être une certaine "négligence". C'est
précisément parce que notre personnel est plus
considérable, maintenant, que nous pouvons agir avec plus de
rapidité. L'exemple est Saint-François de l'île
d'Orléans.
M. Morin: Je voudrais rassurer le ministre. Je pense que la
façon dont nous étudions le dossier montre que, ni d'un
côté ni de l'autre, nous n'avons l'intention de politiser ce
domaine-là.
M. Hardy: Très volontiers.
M. Morin: Personne n'y gagnerait. Je crois qu'au contraire
beaucoup pourraient y perdre, et d'abord la collectivité. Mais le seul
but que je poursuis, et je suis heureux de voir que le ministre le prend sur ce
ton, c'est vraiment d'arriver à ce que les lieux soient remis en
état, parce que c'est révoltant. D'ailleurs, le ministre l'a dit,
je n'insiste pas.
Une chose me préoccupe. Comment peut-il se faire que le
ministère des Terres et Forêts approuve un plan de lotissement et
l'inscrive au cadastre, après avoir obtenu la permission du
ministère des Affaires municipales pour l'ouverture d'une rue, en plein
milieu de ce remblai, puisque, comme vous le savez peut-être, M. le
ministre, on ne peut ouvrir une rue qui dépasse telle largeur ou qui a
moins de 66 pieds, je crois, sans le consentement des Affaires municipales.
Est-ce qu'il n'y a pas là, soit un manque de communications
évident, soit encore une négligence très
considérable de la part des Affaires municipales, parce que je pense que
c'était à elle à s'informer auprès de vous?
M. Hardy: Voici ce qui est arrivé, M. le Président.
Avant l'adoption de la loi 2, et même dans la première
période de l'application de la loi 2, il n'existait pas de
communications entre les différents ministères qui peuvent
être impliqués. Vous soulevez le cas des Terres et Forêts,
il y avait les Affaires municipales, il y avait le ministère des
Transports, avec ce résultat que l'on a été placé
devant un cas un peu aberrant qui a été soulevé, je pense,
il y a quelques mois, à l'Assemblée nationale. Le
ministère des Transports avait décidé de construire une
route dans l'arrondissement historique de Percé, sans demander
d'autorisation. Nous avons dû, le ministère des Affaires
culturelles, avec beaucoup de vigilance, intervenir sur le plan judiciaire, par
voie d'injonction, pour empêcher l'entrepreneur qui s'était
déjà amené avec sa machinerie pour exécuter les
travaux.
Depuis ce temps, il y a, je pense, on peut l'admettre, une excellente
collaboration qui s'est amorcée et qui se développe de plus en
plus entre tous les ministères concernés. Il y a même entre
différents ministères des comités institutionnali-
sés. C'est le cas avec le ministère des Transports. Et
maintenant, jamais le ministère des Transports, lorsque la loi 2 peut
être en cause, ne prend de décision, sans soumettre les projets
à ces comités.
Donc, ce qui s'est produit en 1971, qui a un caractère un peu
aberrant, je le reconnais, ne risque plus, sauf accident, de se reproduire
maintenant, à cause de l'excellente collaboration que le directeur
général du patrimoine, M. Julius, a su engager avec les autres
ministères concernés, et même avec des
municipalités. Nous avons réussi à mettre sur pied, avec
la ville de Montréal un comité conjoint. Nous sommes à
tenter d'en mettre un avec la ville de Trois-Rivières, à cause de
l'arrondissement historique de Trois-Rivières.
Au sein même du gouvernement, entre différents
ministères, encore une fois, il peut se produire un accident, mais nous
avons pris toutes les dispositions pour que des cas semblables ne se
répètent pas.
M. Morin: Bien. Dans les procédures que vous vous
apprêtez à entreprendre ou qui sont à l'étude, dans
votre ministère, M. le ministre, j'imagine que, dans la mesure où
la loi vous le permet, vous allez demander que les lieux soient remis
intégralement en état. Ai-je bien compris?
M. Hardy: C'est l'objectif que nous poursuivons, encore une fois,
sous réserve des moyens juridiques dont nous disposons dans les
circonstances. Comme je vous le rappelais, tantôt, sur le plan
pénal, par exemple, il est inutile d'y songer, toutes les poursuites
possibles sont prescrites. Sur le plan civil...
M. Morin: Oui, est-ce que vous pouvez m'expliquer la chronologie
de la prescription, en l'occurrence?
M. Hardy: Les poursuites pénales que l'on peut intenter en
vertu de la loi 2, c'est en vertu de la Loi sur les poursuites sommaires, alors
c'est la prescription générale de toute poursuite en vertu de la
Loi des poursuites sommaires; deux ans.
M. Morin: C'était deux ans, en l'occurrence. Et alors,
vous avez calculé ces deux ans à compter de quel moment?
M. Hardy: Au moment où nous avons vraiment pris
conscience... où nous avons constaté que la prescription
était accomplie, acquise. A quel moment? C'est au printemps 1973 que le
contentieux du ministère des Affaires culturelles a
réalisé l'acquisition de la prescription.
M. Morin: Mais, M. le ministre, je voudrais bien comprendre. Le
remblai il est toujours là. Donc l'infraction est là en
permanence.
M. Hardy: Oui. Je ne pense pas que cela puisse, sur le plan
civil, oui, mais pas sur le plan...
M. Morin: ... votre droit.
M. Hardy: Toute infraction, en vertu de la Loi des poursuites
sommaires, dure toujours. Si vous
commettez une infraction aujourd'hui, dans deux ans, dans trois ans ou
dans cinq ans, la conséquence de l'infraction sera toujours là.
Mais la Loi des poursuites sommaires dit que la couronne n'a que deux ans pour
intenter des poursuites.
Je ne sais pas si c'est la Loi des poursuites sommaires qui s'applique
également dans le domaine de la chasse et de la pêche . Je sais
que ce n'est pas votre cas mais dans l'hypothèse où vous
appartiendriez à cette famille de gens qui ont un goût particulier
pour le braconnage, supposons que vous alliez braconner aujourd'hui. Vous
pourriez tuer un orignal, un chevreuil, que vous apportez chez vous, vous le
placez dans un congélateur. Dans trois ans, vous serez toujours en
possession de votre viande, c'est-à-dire que le résultat de votre
infraction, le fruit de votre infraction sera toujours là. Mais le
ministère de la Chasse et de la Pêche, s'il n'a pas pris les
poursuites en dedans des deux ans, ne peut plus vous poursuivre.
M. Morin: Seulement pour que la question soit close une fois pour
toutes, pourriez-vous me dire à quel moment vous situez l'infraction, et
à quel moment la prescription a été acquise?
M. Hardy: Dans mon dossier, l'infraction aurait été
commise au printemps 1971. Selon les faits que nous possédons, et je
pense que cela correspond à la chronologie du député de
Sauvé, l'infraction, c'est-à-dire cet amoncellement de terre,
s'est produit, au printemps 1971, et le contentieux du ministère des
Affaires culturelles a été saisi de ce dossier au mois de juillet
ou août 1973. Donc, à ce moment, la prescription était
acquise. Le contentieux du ministère des Affaires culturelles ne pouvait
recommander des poursuites sur le plan pénal.
M. Morin: Si l'on démontrait, à la satisfaction de
votre contentieux, que de la terre a continué à être
apportée par la suite, bien après le printemps 1971, est-ce que
votre ministère réexaminerait les faits?
M. Hardy: Nous pouvons faire l'enquête et, si nous sommes
en mesure d'avoir une preuve que des travaux de quelque nature que ce soit ont
été faits depuis moins de deux ans, il est bien sûr que
notre ministère recommanderait au ministère de la Justice
d'intenter des poursuites sur le plan pénal.
M. Morin: Sans délai pour que la prescription n'agisse
pas.
M. Hardy: Je répète, M. le Président
là-dessus, j'ai donné des instructions très
précises que, lorsqu'il y a infraction à la loi, surtout
lorsqu'il y a mauvaise foi, la loi doit être appliquée et les
recours que l'on peut intenter en vertu de la loi doivent être pris sans
aucun ménagement, parce que c'est de cette façon seulement que
cette loi pourra finalement être respectée. S'il se répand
cette impression que la Loi sur les biens culturels est une loi un peu
particulière, qu'on peut la violer sans avoir à craindre les
foudres de la justice, cette loi continuera à être violée.
Il existe des cas difficiles, pénibles. C'est le cas de certains
individus, de certains particuliers qui, bien sûr, malgré le
principe que nul ne doit ignorer la loi, parfois ne le savent pas. Dans la
révision que l'on est en train de préparer de la Loi sur les
biens culturels, j'ai demandé qu'il y ait des mécanismes
semblables. Il peut arriver que des gens achètent une
propriété dans un arrondissement historique et ne sachent pas
qu'il s'agit d'un arrondissement historique. Ces gens peuvent se mettre
à faire des constructions et, tout à coup, on arriverait et on
leur dirait: Monsieur, vous avez violé la loi alors que ces gens
étaient tout à fait de bonne foi et ne le savaient pas. Donc, il
faut peut-être, à ce moment, user d'une certaine humanité.
Mais c'est notre intention, d'une part, de faire appliquer rigoureusement la
loi et, d'autre part, pour prévoir des cas comme celui que je viens de
mentionner, de prévoir des mécanismes pour que la bonne foi de
quiconque ne soit pas prise en défaut.
M. Morin: M. le Président je voudrais poser au ministre
une dernière question. Est-ce qu'il estime que les pouvoirs de son
ministère, tels que définis notamment a l'article 57, mais aussi
aux autres articles de la section VI de la Loi sur les biens culturels, sont
suffisants ou est-ce qu'il ne jugerait pas que le moment est venu de renforcer
les pouvoirs dont dispose son ministère pour faire respecter la loi?
M. Hardy: A la lumière de l'expérience vécue
depuis la proclamation de cette loi, expérience vécue à la
fois par la Direction générale du patrimoine et par la Commission
des biens culturels, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il y
avait lieu de revoir cette loi et d'y apporter des amendements. D'ailleurs,
vous vous rappellerez que le discours inaugural annonce des amendements
possibles à la Loi sur les biens culturels. Alors que j'étais
invité par la Commission des biens culturels à participer
à l'une de ses réunions, qui se tenait à Percé, au
mois de juin dernier, je l'avais expressément invitée à se
pencher sur cette question et à formuler des propositions d'amendement
à la Loi sur les biens culturels. Je pense qu'ils sont relativement
avancés dans ce travail...
M. Morin: Bien.
M. Hardy: ...de telle sorte que je prévois pouvoir
déposer un projet de loi amendant la Loi sur les biens culturels
à la reprise de la présente session, à l'automne.
Moulin de Deschambault
M. Morin: Bien, je remercie le ministre de ses renseignements au
sujet du Vieux Sillery et du remblai qui défigurait le site historique.
Je considère qu'il a pleinement répondu à nos questions.
Il ne reste plus maintenant qu'à surveiller et nous n'y
manquerons pas le déroulement des opérations. Je referme
ce dossier pour en ouvrir rapidement un ou deux autres qui, ceux-là,
n'ont
peut-être pas l'importance de celui que nous venons de
refermer.
Il s'agit de deux cas particuliers qui vont peut-être, d'ailleurs,
nous permettre d'évoquer des problèmes plus vastes; deux cas
particuliers dont le premier est très concret.
Il s'agit du moulin de Deschambault qui est dans un état de
dégradation qui s'accélère très rapidement. Je
connais ce moulin depuis des années, depuis ma jeunesse. Je ne l'ai
jamais vu en fonctionnement, puisqu'il y a très longtemps, maintenant,
qu'il ne fonctionne plus, mais depuis qu'il n'est plus surveillé et
qu'il a été laissé à l'abandon par ses
propriétaires, ce moulin est en train de tomber en ruines et c'est l'un
des rares qu'il nous reste depuis, en particulier, que le moulin du Crochet a
été rasé. J'imagine que le ministre connaît ce
célèbre moulin de Deschambault. Je lui montre une photo, s'il ne
le connaît pas. La couverture est en train de... C'est moi-même,
non, c'est mon fils qui a pris cette photo parce qu'il est passionné de
vieilles maisons québécoises. La toiture est maintenant
crevée de toutes parts, les fenêtres et les portes sont ouvertes
à tout vent, la neige s'est accumulée à l'intérieur
cet hiver pour la première fois, il y a tout un côté du
toit qui est en train de crever, la charpente elle-même a
cédé en deux endroits et je ne serais pas surpris que d'ici un an
ou un an et demi le tout s'effondre. C'est à ses risques et
périls qu'on y pénètre déjà, en ce
moment.
Le ministre veut peut-être voir la photo, cela l'aidera à
l'identifier, et pour l'intérêt des autres membres de la
commission aussi. Je voudrais poser brièvement quelques questions.
Est-ce que ce moulin est classé, d'abord?
M. Hardy: Non, M. le Président, il s'agit d'un moulin qui
n'est pas classé, mais je dois dire que c'est un dossier qui est
actuellement à l'étude à la Direction
générale du patrimoine.
M. Morin: Est-ce que le propriétaire est connu de la
direction générale?
M. Hardy: Cela dépend du degré d'avancement de
l'étude de ce dossier. C'est bien sûr que dans l'étude d'un
dossier semblable; un des aspects importants est de connaître le
propriétaire, c'est-à-dire que l'on fait sûrement
l'étude des titres, mais les responsables de ce secteur n'ont pas
à la mémoire à quel degré, encore une fois,
à quel degré d'avancement ce dossier se trouve. A partir de ce
problème, soulevé par le cas de Deschambault, on pourrait
généraliser...
M. Morin: C'est ce que je pensais.
M. Hardy:... la situation. J'ai visité moi-même,
l'an passé, à Berthier-sur-Mer, un ancien manoir, qui a dû
être très beau à l'époque de sa vie glorieuse et qui
est dans un état de ruine sûrement aussi avancé, sinon
plus, que ce moulin de Deschambault. Toute la question et c'est le
drame, jusqu'à un certain point, devant lequel le ministère des
Affaires culturelles et la Direction du patri- moine sont placés
pendant un très grand nombre d'années, d'une part, on ne s'est
pas préoccupé de ces monuments historiques et, d'autre part,
l'inventaire, parce que c'est là la base de tout, aussi bien des
immeubles que des objets d'art, des objets mobiliers, n'a pas été
fait.
Si nous possédions, en ce moment, un inventaire exhaustif des
biens meubles et des biens immeubles qui méritent d'être
classés, nous pourrions procéder à ce classement avec
beaucoup de rapidité. Vous comprendrez que ne possédant pas cet
inventaire... Il y a encore cette année une augmentation des
crédits considérable pour le domaine de l'inventaire parce que
c'est le noeud, c'est la base de tout le problème. Dès que nous
aurons l'inventaire nous pourrons, par la suite, procéder à des
classements avec beaucoup plus de rapidité et, par voie de
conséquences, à des interventions sur le plan financier. Mais,
encore une fois, ce n'est pas une excuse pour ne pas agir, c'est tout
simplement une constatation, ce qui explique un cas semblable, un drame
semblable.
C'est une des raisons pour lesquelles, dès mon arrivée au
ministère, j'ai demandé que la priorité première,
et c'est bien le cas actuellement cela peut paraître, aux yeux de
certains, un peu curieux la grande priorité, la principale
priorité, cela se traduit en termes budgétaires, au
ministère des Affaires culturelles, à l'heure présente,
c'est le patrimoine. Cette priorité ne devrait pas être
interprétée comme un jugement de valeur quant à d'autres
secteurs de la vie culturelle. C'est tout simplement que, dans ce secteur, si
nous n'intervenons pas avec autant de rapidité que possible, dans deux
ans, dans cinq ans, dans dix ans il sera trop tard.
Quand vous parliez, hier, qu'une journée, à certains
moments, cela peut être très grave, c'est un fait. Chaque jour qui
passe est dramatique pour la conservation du patrimoine. Dans deux ans, dans
cinq ans, dans dix ans, on pourra toujours faire de l'opéra, on pourra
toujours faire du théâtre parce que rien ne sera détruit.
Mais dans le domaine du patrimoine, si nous n'agissons pas aujourd'hui, demain,
quand bien même nous pourrions disposer des ressources financières
possibles, il sera peut-être trop tard.
Revenant au cas particulier de Deschambault, je vous
répète que c'est un dossier qui est actuellement à
l'étude et, dès que ce dossier sera complété, il
sera soumis à la Commission des biens culturels pour obtenir son avis,
selon la loi. Si l'avis est positif, il y aura sûrement classement et,
à ce moment-là, avec la collaboration du propriétaire, ou
si c'est impossible, nous pourrons songer à acquérir ce monument
et à le restaurer. Je dois ajouter que, dans le domaine des moulins,
nous en avons malgré tout, avec l'accélération de
l'inventaire que nous avons connue au cours des derniers mois,
inventorié 140 et sur ce nombre, actuellement, il y a 80 dossiers
d'ouverts, c'est-à-dire que 80 sont à l'étude. Ce sont des
moulins à eau.
M. Morin: C'est un moulin à eau, effectivement.
M. Hardy: Dans le cas des moulins à eau, au
Québec, nous prévoyons en terminer l'étude
complète cet automne, à l'automne 1975.
M. Morin: Ce qui m'inquiète, dans le cas particulier dont
nous parlons, c'est que le propriétaire, que je n'identifierai pas, a
acheté ce moulin en très bon état, il y a quelques
années à peine, et l'a laissé se dégrader de
façon tout à fait éhontée. Il ne s'en est pas
occupé.
M. Hardy: Comportement un peu bizarre.
M. Morin: Je n'arrive pas à le comprendre, je n'ai pas eu
l'occasion de m'en entretenir avec lui. J'espère que nous pourrons nous
rencontrer l'un de ces jours pour que je puisse lui parler, comme on dit en
Gaspésie,"dans le front". Il semble que ce soit tout simplement à
des fins de spéculation qu'il l'ait acheté. Je ne sais pas s'il
visite son moulin fréquemment, mais de spéculation il n'y en aura
pas, parce que si cela continue, il n'y aura plus de moulin.
M. Hardy: Peut-être qu'il n'a pas une bonne notion de la
spéculation à l'heure actuelle, parce qu'il devrait savoir,
qu'étant donné l'intérêt de plus en plus grand que
les Québécois manifestent pour la conservation des monuments, il
a peut-être fait un mauvais placement en laissant
détériorer son bien.
M. Morin: Oui, c'est mon impression.
M. Hardy: Parce que je connais des gens qui sont prêts
à débourser des sommes assez considérables pour faire
l'acquisition d'immeubles semblables.
M. Morin: Bon. La situation est donc la suivante. Avant qu'un
immeuble, de portée ou d'intérêt historique ou
archéologique ne soit classé, vous n'avez aucun moyen de
contraindre le propriétaire à faire quoi que ce soit.
M. Hardy: C'est-à-dire que le seul moyen dont nous
disposons et cela aussi fait partie de l'examen ou de notre
réflexion en regard de la révision de la loi. Nous pouvons
envoyer ce que l'on appelle l'avis de 60 jours, un avis d'intention, et pendant
60 jours on ne peut pas toucher au bien.
M. Morin: Le bien est gelé. M. Hardy: II est
gelé.
M. Morin: Je puis vous assurer que le moulin était
gelé cet hiver.
M. Hardy: S'ajoute à ceci le dernier amendement
apporté à la Loi des cités et villes et au code municipal
qui permet maintenant aux municipalités de suspendre l'émission
d'un permis de démolition pendant un an, ce qui nous permet de faire
l'étude d'un dossier.
M. Morin: Je referme également ce dossier dans l'espoir
que le moulin sera classé sous peu et je procède une étape
plus loin.
M. Hardy: Le député de Sauvé est
peut-être un peu imprudent, il se prononce avant que la Commission des
biens culturels se soit prononcée.
M. Morin: J'ai dit dans l'espoir.
M. Hardy: II faudrait bien respecter totalement
l'indépendance de la Commission des biens culturels.
M. Morin: Oui, j'imagine que le ministre sait que je suis encore
moins bien placé que lui pour influencer la commission. J'ai dit: Dans
l'espoir que le classement ait lieu.
Maison Lamontagne
M. le Président, j'aimerais procéder un pas plus avant et
traiter maintenant d'une maison qui a été classée, du
moins d'après ce que nous en savons. C'est la maison Lamontagne, une
maison de colombages pierrotés, l'une des rares qui soit demeurée
depuis le début des établissements français dans ce pays.
Dans ce cas, il s'agit d'une maison qui est inhabitée depuis de
nombreuses années, qui servait de remise pour la machinerie agricole
jusqu'à ce qu'elle soit identifiée comme étant une maison
de colombages pierrotés, par, je crois, M. Michel Lessard, qui est un
spécialiste de l'architecture québécoise et dont tout le
monde connaît les ouvrages, qui contribuent beaucoup à relancer
l'intérêt des Québécois pour leur patrimoine, comme
le signalait le ministre, il y a un instant, cet intérêt qui se
fait de plus en plus vif, mais qui, semble-t-il, n'est pas suffisant pour
arriver à sauver de la ruine des monuments aussi importants, sur le plan
architectural, que la maison Lamontagne, à Rimouski-Est.
J'aimerais demander au ministre, d'abord, si la maison est
classée.
M. Hardy: La maison est classée.
M. Morin: Bien. Nous avons franchi un pas depuis tout à
l'heure. Dans le cas du moulin de Deschambault, il n'était pas
classé. La maison Lamontagne, elle, est classée. Qu'est-ce que le
ministre compte faire pour protéger cette maison de la ruine et de quel
pouvoir dispose-t-il dans ce cas?
M. Hardy: La maison est classée, c'est clair, mais il y a
un petit problème juridique qui se pose dans ce cas. C'est que le
propriétaire du fonds, le propriétaire du terrain n'est pas le
même que le propriétaire de la maison elle-même. Je ne
connais pas l'historique. Je ne sais pas comment il se fait qu'il y ait deux
propriétaires, mais c'est la réalité. C'est la raison pour
laquelle, devant l'importance, sur le plan historique, sur le plan
architectural, sur le plan du patrimoine de cette maison, parmi les projets
d'acquisition que nous
avons, cette année, au ministère, la maison La-montagne
figure sur notre liste.
Evidemment, une fois que nous aurons acquis, si la chose se fait, cette
maison, nous allons la restaurer. Il y a différentes vocations
possibles, avec le concours de la municipalité, en faire un centre
culturel ou autre chose. Mais c'est un cas auquel nous nous intéressons
très vivement. Nous espérons trouver une solution dans les
prochaines semaines.
M. Morin: Combien y a-t-il de maisons de colombages
pierrotés classées à l'inventaire?
M. Hardy: II n'y en a qu'une au Québec... M. Morin:
Oui.
M. Hardy: ... que nous connaissons et il y en aurait trois ou
quatre en Amérique du Nord.
M. Morin: II y en a peut-être d'autres au Québec, M.
le ministre. J'en connais d'autres.
M. Hardy: Cela est toujours relié à la poursuite de
nos inventaires. Il est fort possible que, lorsque nous aurons... On me signale
qu'il y a la maison Pichette, à l'île d'Orléans.
M. Morin: II y en a également d'autres qui sont entre des
mains privées et qui sont bien entretenues. Il y en a sans doute
d'autres que nous n'avons pas encore découvertes, parce qu'il faut
gratter pour savoir s'il s'agit d'une maison de pierre ou de colombages
pierrotés.
Enfin, il n'y en a qu'une qui soit classée et, si j'ai bien
compris, c'est la maison Lamontagne?
M. Hardy: C'est exact.
M. Morin: Parmi vos projets figure donc l'achat éventuel,
le plus rapidement possible, j'imagine, de cette propriété. C'est
une réponse satisfaisante. J'espère que cela pourra se faire
cette année, parce que, là encore, le vent commence à
circuler librement dans cette maison.
M. le Président, une dernière question. Dans le cas
où le monument est classé, possédez-vous des pouvoirs qui
puissent vous permettre d'intervenir auprès du propriétaire pour
le forcer à protéger d'abord, le bien culturel dont il est
propriétaire et à le remettre en état s'il le
dénature.
M. Hardy: En vertu de la Loi des biens culturels, dès
qu'un monument est classé, le propriétaire ne peut rien y faire,
ajouter, retirer, ne peut rien faire sans avoir obtenu un permis. Il ne peut
pas planter un clou sans avoir obtenu un permis du service des monuments.
De plus, la loi oblige le propriétaire à prendre toutes
les mesures raisonnables, normales, pour maintenir en bon état l'objet
classé. En retour de ces obligations, le ministère accorde une
subvention équivalant à 40% du coût des réparations
et de la restauration.
Donc, si vous êtes propriétaire d'un bien classé,
vous êtes obligé de bien l'entretenir. Quand vous faites des
réparations, vous pouvez recevoir 40%, sur la présentation de la
facture et sur l'approbation des plans, etc.
Encore là, il y a un problème qui se pose. Dans certains
cas, cette subvention de 40% est amplement suffisante. Si vous êtes
propriétaire d'une maison d'habitation normale, qui sert à vos
besoins réguliers, cela peut être avantageux d'avoir une maison
classée et de recevoir ces 40%. Dans d'autres cas, lorsqu'il s'agit
d'une maison qui a des proportions un peu plus considérables qu'une
maison d'habitation normale, qu'une maison qui est nécessaire pour les
besoins d'une famille normale ou, dans le cas de certaines fabriques, le cas
s'est posé à L'Acadie, dans le comté du
député de Saint-Jean...
M. Veilleux: ...L'Acadie.
M. Hardy: Le député de Saint-Jean, à
plusieurs reprises, m'a parlé. Bien avant là aussi, je ne
veux pas faire cela dans un esprit partisan mais, bien avant que le
journal Le Jour nous donne des photographies de ce cas, le député
de Saint-Jean m'avait parlé, avec beaucoup d'insistance, du cas de
l'église de L'Acadie. Or, voici que à L'Acadie, la fabrique,
même malgré notre intervention, est dans une situation
financière qui ne lui permet pas de faire les travaux qu'elle devrait
faire. Donc, c'est un autre aspect, celui-là, non pas sur le plan
législatif, mais sur le plan administratif, que nous étudions
pour tâcher peut-être d'adapter davantage à chaque cas la
possibilité d'intervention du gouvernement. Il ne faudrait pas, d'une
part, que nos normes administratives permettent à des gens de s'enrichir
sans cause et, d'autre part, il ne faudrait pas que des propriétaires,
de quelque nature qu'ils soient cela peut être des
municipalités soient inacapables de faire de la restauration. Ce
serait peut-être le cas du moulin de Deschambeault. Peut-être que,
dans l'état où il est actuellement, le propriétaire du
moulin de Deschambeault, même si on lui accordait 40% pour le restaurer
ne pourrait pas financièrement, lui-même, débourser les
autres 60%.
Donc, il s'agit pour nous d'étudier de nouvelles normes qui nous
permettraient, d'une façon juste, équitable pour tout le monde,
et qui permettraient aux propriétaires de biens immeubles
classés, d'intervenir. Parce qu'il faut écarter, à mon
sens, l'hypothèse que le gouvernement acquière une multitude de
biens immobiliers. Je ne pense pas que ce soit souhaitable que le
propriétaire... Mais il y a certains cas, c'est le cas de la maison
Lamontagne, à cause des dispositions législatives et
administratives avec lesquels nous travaillons présentement, où
nous devons acheter.
M. Veilleux: M. le Président...
M. Morin: M. le ministre, je m'excuse, j'ai encore deux
questions. Est-ce que le député de Saint-Jean me
permettrait...
M. Veilleux: C'est parce qu'il parlait de L'Acadie.
C'était pour savoir...
M. Morin: C'est parce que je dois courir ailleurs et j'ai encore
une ou deux questions à poser. Ensuite...
M. Veilleux: Moi aussi, je cours. M. Hardy: Vous allez nous
quitter.
M. Morin: Oui, je vais devoir vous quitter, M. le ministre, bien
à regret. Je suis sûr qu'on aurait pu faire le tour du patrimoine
tranquillement, comme cela, pendant plusieurs jours. Lorsque le
ministère donne une subvention de l'ordre de 40%, est-ce que les plans
de restauration doivent être approuvés par le
ministère?
M. Hardy: Oui, intégralement. M. Morin: Dernière
question.
M. Hardy: Même s'il n'y avait pas de 40%, encore une fois,
dès que c'est classé, on ne peut pas toucher à l'immeuble
sans une approbation.
Neuville
M. Morin: Très bien. Une dernière question, vous
m'en permettrez une d'intérêt personnel pour terminer. Neuville
a-t-il fait l'objet d'une étude particulière, en vue d'être
classée NeuviHe, près de Québec, l'ancienne
Pointe-aux-Trembles de Québec, comme on l'appelait est-ce qu'elle
fait l'objet d'études pour classement comme arrondissement historique,
étant donné la densité du patrimoine dans ce coin?
Deuxièmement, les deux maisons les plus importantes de Neuville,
sur le plan architectural, c'est-à-dire la maison Athanase Denis et la
maison Soulard qui figurent certainement parmi les toutes premières qui
nous restent, en tout cas, est-ce que ces maisons sont classées?
Songe-t-on à les classer?
M. Hardy: C'est-à-dire que nous avons fait une
étude dans le cas de Neuville. Nous n'avons pas fait seulement une
étude de certains immeubles, mais nous avons fait une étude
régionale, une étude globale de tout Neuville.
M. Morin: Oui.
M. Hardy: ...et on me dit que cette étude devrait
être publiée dans quelques jours. C'est fait, c'est fini.
M. Morin: Très bien. Je vois que...
M. Hardy: Je dois souligner, ici, et on ne le dit peut-être
pas suffisamment. Bien sûr, encore une fois, les journaux et les media ne
sont pas là pour faire la propagande du gouvernement. D'autre part, je
pense que la vérité exige que, malgré tous les cas
habituellement, les journaux et les media parlent des cas tristes, ceux
où on démolit il s'est fait, depuis deux ans, en
particulier au cours de la dernière année, un travail absolument
fantastique à la direction générale du patrimoine. Les
personnes qui sont à ce service ont vraiment... Je pense que le
directeur général du patrimoine, M. Junius, constitue, dans ce
sens, une inspiration. Il s'est fait un travail fantastique, surtout en regard
des moyens dont il dispose, moyens sur le plan humain. Le personnel n'est pas
suffisamment considérable en regard du travail à accomplir et les
ressources financières non plus.
Encore une fois, j'ai réussi à convaincre peut-être
pas autant que je l'aurais voulu, mais j'ai réussi à convaincre
le Conseil du trésor d'accorder une attention toute particulière
à ce secteur. C'est ce qui explique l'augmentation relativement
considérable du budget pour ce secteur.
M. Morin: L'étude que vous me signalez et qui va
être rendue publique incessamment, a-t-ell pour but, tend-elle
à la déclaration d'un arrondissement historique à
Neuville?
M. Hardy: Selon les résultats et aussi selon l'avis de la
commission, il y a plusieurs possibilités. On peut le déclarer
arrondissement ou on peut tout simplement classer individuellement les biens
immobiliers qui méritent de l'être.
M. Morin: Est-ce que les maisons Denis et Soulard ont fait
l'objet d'études particulières?
M. Hardy: II y a cinq ou six maisons, dans cette région,
qui ont fait l'objet d'une étude particulière, dont les deux
soulignées par le député de Sauvé.
M. Morin: II y a aussi Marcotte et il y en a quelques autres;
mais ces deux-là en particulier sont vraiment importantes, je crois, sur
le plan architectural. Est-ce que les études particulières sur
chacune des maisons vont également être rendues publiques, en
même temps que l'étude générale?
M. Hardy: C'est une étude générale qui
mentionne l'existence de cinq ou six où on donne des critères,
où on donne des points. C'est-à-dire que c'est au sein de
l'étude générale où on s'est arrêté,
d'une façon particulière, à certains aspects. Mais, il n'y
a pas d'étude individuelle actuellement. C'est l'étude globale.
Le cas de ces immeubles mentionnés par le député de
Sauvé est intégré à l'étude globale, mais,
cette étude globale s'est arrêtée, d'une façon
particulière, à certains aspects.
M. Morin: Dernière question: Lorsque la direction du
patrimoine fait une étude particulière sur un monument en
particulier, une étude qui n'est pas publiée, est-ce que cette
étude est accessible au public? Je pense à tous ceux qui aiment
se documenter sur le patrimoine.
M. Hardy: Par le biais du centre de la docu-
mentation, le député de Sauvé comprendra que nos
budgets ne nous permettent pas de publier, pour le grand public, tous ces
documents; mais, un peu comme aux archives, ceux qui veulent en prendre
connaissance peuvent le faire par notre centre de documentation.
M. Morin: Je n'ai plus de question, M. le Président. Je
vous remercie.
Le Président (M. Pilote): Peut-on considérer que
l'élément 2...
M. Veilleux: M. le Président...
Le Président (M. Pilote): Pardon. Le député
de Saint-Jean.
M. Veilleux: Je suis patient.
Le Président (M. Pilote): Je vous avais oublié.
M. Veilleux: Vous comprenez. Vous êtes du Lac-Saint-Jean,
M. le Président, mais n'oubliez pas que le député de
Saint-Jean...
M. Hardy: Malheureusement, c'est ce qui arrive trop souvent
à nos présidents. Ils oublient trop souvent la partie... C'est
peut-être, parce que le député de Saint-Jean, physiquement,
est à votre gauche, ce matin.
M. Veilleux: Je remercie le ministre...
L'Acadie
M. Hardy: Cela aurait dû vous inciter à le
reconnaître parce qu'habituellement nos présidents de commission
ont une tendance, comme la tradition parlementaire le veut, à
protéger davantage leur gauche.
M. Veilleux: M. le Président, je voudrais revenir au cas
qu'a mentionné tout à l'heure le ministre, le cas de L'Acadie,
parce que, pour reprendre les termes du chef de l'Opposition officielle, c'est
quand même un cas dramatique, car le monument, je pourrais dire, les
monuments historiques de la paroisse de L'Acadie sont constitués de
trois bâtiments, l'église, le presbytère et une
école.
A l'heure actuelle, l'église et le presbytère ont
été rénovés avec la participation du
ministère à 40%, mais arrive le troisième bâtiment,
qui est celui de l'école. A l'heure actuelle, la fabrique n'a
réellement pas les moyens de reconstituer ou de rénover
complètement l'école.
M. Hardy: C'est gros, cette paroisse?
M. Veilleux: Non. Parlons de l'école. Lundi passé,
j'ai eu affaire à Napierville et, par exprès, je suis
passé près de cette école. Je dis au ministre que, si le
ministère n'est pas capable, d'ici deux ou trois mois, d'augmenter le
pourcentage de sa subvention pour la reconstitution, la rénovation de
l'école sera inutile, car, le printemps prochain, il n'y aura plus
d'école, tout sera tombé. La fabrique a besoin de plus pour
soutenir les murs, et d'abord le toit de l'école; cela n'existe
pratiquement plus. Je ne parle pas en termes architecturaux ou comme
ingénieur, comment on peut appeler cela, mais il y a quand même
des bois ou des piquets qui ont été plantés pour tenir les
murs. Je vous dis que si on attend plus que trois ou quatre mois avant de
prendre la décision d'augmenter le pourcentage de la subvention, c'est
bien dommage, mais on perdra un monument historique dans le comté de
Saint-Jean.
De la façon que c'est situé, cet ensemble historique, dans
le centre du village et près de la rivière L'Acadie, constitue un
tout. Si, d'ici cinq ou six mois, on perd l'école, on se trouve à
briser cet ensemble historique. Je voudrais sensibiliser le ministre. Si la
fabrique n'a pas le moyen et c'est vrai qu'elle n'a pas le moyen
de refaire cette école, je dis qu'il va vous falloir envisager, d'ici un
mois ou deux peut-être, de l'acheter.
M. Hardy: M. le Président, d'une part, nous allons
sûrement nous pencher sur ce problème. Je connais ce village de
L'Acadie, qui a une valeur historique et architecturale très grande.
Nous allons tâcher, avec les outils dont nous disposons actuellement,
d'empêcher la disparition de l'école. D'autre part, j'en profite
pour dire que, parmi les solutions auxquelles j'ai fait allusion tantôt,
nous envisageons, pour améliorer l'intervention gouvernementale dans ce
secteur, à l'étude des crédits de cette année, un
montant de $30,000 pour l'étude d'un projet de caisse de prêts.
Nous pourrions prêter à des taux d'intérêt
réduits à des propriétaires ou à des corps publics
des montants pour les aider à restaurer les biens immobiliers. Il y a
une autre hypothèse également, une autre hypothèse de
solution que nous envisageons, c'est que, dans le cas des corps publics, il y
ait une intervention accrue, sur le plan des subventions.
Cela fait partie de l'ensemble des moyens que nous étudions
présentement, parce que nous constatons que, dans bien des cas,
l'intervention actuelle de 40% ne suffit pas. Je retiens le cas de
l'école qui fait partie de cet ensemble architectural. Si
déjà l'église et le presbytère ont
été sauvés, il serait vraiment malheureux que nous
laissions tomber la troisième partie de cette triologie culturelle et
historique.
M. Veilleux: Oui, parce que la demande de la fabrique pour
l'église comme telle, c'était surtout pour refaire
l'électricité et ces choses. La fabrique aura probablement les
moyens, avec la subvention de 40%, de refaire ce filage dans l'église et
le presbytère, mais n'a pas les moyens d'absorber en plus les travaux
à faire à l'école. Le problème majeur à
L'Acadie, c'est l'école. Je vous dis que si vous attendez encore une
saison froide, il n'y en aura plus l'an prochain.
Le deuxième cas que je voudrais soulever au ministre, c'est que,
lorsqu'on déclare un monument historique dans le secteur rural, il peut
y avoir des propriétaires autour du monument historique en question qui
peuvent rencontrer certaines difficultés.
J'ai le cas en tête, je n'ai pas le nom du monument, mais dans la
paroisse de Saint-Blaise dans mon comté, l'an passé, il y a un an
et demi, le ministère a déclaré une maison comme
étant monument historique. Je tiens à vous dire que ceux qui
demeurent dans la maison, la conservent dans un état de
délabrement extraordinaire, malpropre autour de leur
propriété, gardant sur le gazon si on peut appeler cela le
gazon, d'abord le foin est à plusieurs pieds de hauteur toutes
sortes de babioles en avant. On se trouve, à ce moment à geler
les 500 pieds autour. Cela fait que comme résultat, vous avez des
agriculteurs qui ont des granges ou qui se trouvent dans le
périmètre de 500 pieds, on se trouve à pénaliser
d'une certaine façon ces gens parce qu'à ce moment, ces gens
subissent préjudice, s'ils veulent améliorer le rendement
agricole.
M. Hardy: Non, voici, c'est peut-être encore un peu notre
faute. C'est la raison pour laquelle nous prévoyons améliorer
notre service d'information en injectant des sommes additionnelles cette
année. Nous constatons bien souvent, et même les journalistes, je
l'ai constaté fréquemment que les journalistes ne comprenent pas
du tout ou très peu, je l'ai constaté en particulier dans le cas
de la maison des Soeurs Grises à Montréal, les journalistes ne
comprenent pas du tout le sens... en tout cas, beaucoup de journalistes, je ne
veux pas généraliser de façon exagérée, mais
la plupart des journalistes qui s'intéressent à ce secteur ne
comprennent pas le sens exact de la Loi des biens culturels, entre autres, de
l'effet de l'aire de protection.
Encore une fois, ce n'est pas un reproche, je constate. Ce sont
peut-être nos moyens de communication, quoique les joumalistes soient
toujours invités à venir nous consulter, à consulter notre
contentieux ou à consulter la direction du patrimoine pour savoir
exactement ce que cela veut dire le classement d'un bien, ce que ce que veut
dire l'aire de protection. Or, vos cultivateurs qui sont dans l'aire de
protection du bien classé, je ne vois pas de quelle façon ils
peuvent être pénalisés, parce que l'aire de protection,
cela ne veut pas dire qu'à partir du moment où vous êtes
dans une aire de protection, vous ne pouvez plus rien faire. Cela veut dire que
si vous voulez faire quelque chose, si vous voulez construire un nouvel
immeuble, vous devez soumettre vos plans à la direction du patrimoine,
de sorte que et c'est cela le but de l'aire de protection les
nouvelles constructions que vous pourrez ériger dans le voisinage
immédiat d'un bien classé, ne viennent pas détruire la
valeur du bien classé.
Si, par exemple, vous avez un bien classé à tel endroit et
à quelques centaines de pieds, vous construisez... qui ne va pas du tout
dans l'environnement du bien classé, vous détruisez le bien que
vous venez de classer. C'est cela le but de l'aire de protection. Ce n'est pas
d'empêcher les gens d'utiliser leur immeuble, leur terrain et surtout
s'il s'agit de cultivateurs qui continuent à cultiver, ils peuvent
continuer à cultiver...
M. Veilleux: Cela, M. le ministre...
M. Hardy: ... ils peuvent agrandir leur grange, ils peuvent
agrandir leur bâtiment. Tout ce qu'on leur demande, c'est de soumettre
leur plan au Service des monuments.
M. Veilleux: J'ai soulevé ce point pour la raison
suivante. J'ai tout expliqué cela, parce que, quand le cas est
arrivé à mon bureau, j'ai communiqué avec le
ministère. On m'a donné tous ces renseignements. Je les ai
recommuniqués.
M.Hardy: Je reconnais là l'excellent député
que vous êtes.
M. Veilleux: Là où est le problème pour ces
agriculteurs propriétaires dans l'aire de protection, c'est qu'ils
disent: On nous empêche, on est chez nous, on est propriétaire,
d'agir en conséquence, et en même temps, le propriétaire du
monument en question qui est une maison, qui demeure là, garde cela dans
un état de délabrement extraordinaire cela devient ni plus
ni moins qu'un taudis et on nous empêche d'améliorer notre
propriété. Il faut toujours recourir au ministère, il faut
toujours... C'est là qu'est le problème dans le milieu agricole.
Je tiens à vous le dire. Vous l'avez chez nous, vous l'aurez
probablement ailleurs. Je n'ai rien contre le fait, au contraire, qu'on
déclare une maison monument historique si c'est un monument historique,
mais je m'imagine qu'il devrait aussi y avoir des obligations, parce que, vous
savez, il y a bien des gens, et je sais que dans ce cas, le propriétaire
a tout fait pour que cela soit déclaré monument historique, parce
qu'au moment où c'est déclaré monument historique, cela
vaut un petit peu plus cher qu'avant.
A présent qu'il a son monument historique, il continue à
demeurer dedans, il ne fait absolument rien pour l'améliorer. Vous
devriez forcer ces gens.
M. Hardy: M. le Président, je comprends très bien
les sentiments qu'éprouvent les électeurs du député
de Saint-Jean qui sont concernés par ce problème. D'abord, il
faut bien admettre que, pour certains, même sur le plan strictement
idéologique ou émotif, le fait de classer leur
propriété ou que la propriété soit incluse dans une
aire de protection, ils sont un peu révoltés, les tenants du
droit de propriété absolu, total. On retrouve cela dans d'autres
secteurs, dans la Loi du cinéma, les gens à qui on veut imposer
le contingentement, le propriétaire de salle à qui on veut
imposer de projeter des films, un certain genre de films pendant une certaine
période, se révoltent au nom de la liberté et disent: On
est propriétaire de nos salles, on ne veut pas entendre parler de cela.
C'est la même chose dans le domaine des...
La seule chose qu'il faut faire, c'est de faire comprendre à ces
personnes que, bien sûr, le droit de propriété existe, que
cela continue d'exister dans notre société, mais que ce droit de
propriété n'est pas absolu et que, pour le bien
commun, elles doivent être prêtes à accepter
certaines contraintes. C'est bien sûr qu'il s'agit d'une servitude. Quand
on classe un bien immeuble ou quand un bien immeuble est dans une aire de
protection, c'est une servitude. Cela, on peut leur expliquer. Elles vont
accepter ou non...
M. Veilleux: Elles comprennent.
M. Hardy: Là où elles sont totalement
justifiées, c'est de se dire: Nous, on nous impose des contraintes et,
tout à côté, le bien classé est dans un état
de délabrement. Cela aussi fait partie de nos préoccupations.
Dans la mesure où nous pourrons augmenter notre personnel, nous pourrons
faire des enquêtes sur ces cas semblables, parce qu'encore une fois la
loi oblige le propriétaire à maintenir dans un bon état le
bien qui a été classé. La seule raison pour laquelle des
choses semblables existent et je ne doute pas qu'il en existe dans tout
territoire c'est que nous n'avons pas encore suffisamment de personnel
pour faire les enquêtes nécessaires et introduire le processus
régulier, processus qui nous est permis par la loi pour obliger ces
propriétaires à respecter la loi.
Le Président (M. Pilote): Alors,
l'élément... Le député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, le chef de l'Opposition, qui
m'a plus qu'adéquatement remplacé pendant mon absence, a
terminé en soulevant des questions personnelles, disait-il,
d'intérêt personnel...
M. Hardy: Cela m'a mis un peu de doute dans l'esprit. Je ne
voudrais pas que, pour la protection de la réputation du
député de Sauvé, ce soit interprété, quand
il a parlé d'intérêt personnel, qu'on pense qu'il a des
propriétés dans ce secteur...
M. Charron: C'était simplement son coin natal.
M. Hardy: ... ou qu'il s'apprête à en
acquérir.
M. Charron: C'est simplement son coin natal. En ce sens, c'est
toujours la même chose.
M. Hardy: C'est un intérêt, et il faudrait bien
préciser, à ce moment, que l'intérêt du
député de Sauvé est sur le plan sentimental et non pas
économique.
M. Charron: Son intérêt, désormais, est
totalement dévoué aux électeurs de Sauvé. Il faut
le dire, il n'a plus aucun...
M. Hardy: Est-ce qu'il a fait voeu de pauvreté, de
chasteté et d'obéissance?
M. Charron: Comme vous, parce qu'il reçoit exactement le
même salaire que vous. J'entamerai aussi la discussion en essayant d'y
donner une suite...
M. Hardy: Dans mon cas, pauvreté, oui, mais pas les deux
autres.
Eglise Saint-Jacques
M. Charron: M. le Président, j'ai aussi, comme
Montréalais, l'intention d'ouvrir ce débat, et comme
député de Saint-Jacques, en particulier, de faire une
parenthèse sur une blessure qui n'est pas encore complètement
cicatrisée chez nous, c'est la disparition de l'église
Saint-Jacques. J'ai souligné à un autre moment de notre
discussion avec le ministre que cette disparition, qui a blessé le
centre-sud de Montréal, de façon évidente pour ceux qui
connaissent ce coin de la ville... C'est sur ma route quotidienne entre ma
maison et mon bureau à Montréal, c'est au beau milieu du
comté de Saint-Jacques.
Je ne sais pas ce que donnera l'ensemble architectural, une fois que
l'UQUAM aura érigé son béton autour du clocher et de ce
qui reste du fronton de l'église, mais, pour le moment, en tout cas,
c'est une scène absolument horrible au coeur de Montréal.
J'ai souligné, en y faisant allusion à un autre moment,
que cela avait quand même eu un effet positif, c'est-à-dire qu'en
chaque mauvaise chose, il faut toujours se rabattre et essayer de trouver une
chose meilleure. Cela a soulevé l'intérêt de mes
concitoyens, quant à la protection de leur environnement, d'une
façon tellement vive que j'ai été le premier à
applaudir.
On parle maintenant de la démolition de l'église de St.
Brigide qui est en face de Radio-Canada. Je me permets de faire remarquer une
chose. Quand Radio-Canada a annoncé pompeusement, il y a quelques
années, qu'il s'en allait dans l'est, chez le peuple, qu'il quittait les
Anglais de l'ouest, pour venir s'installer auprès de leur
clientèle, tout le monde a bien, en principe, applaudi à ce genre
d'initiative, sauf que cela a voulu dire la mort d'un quartier. Radio-Canada
n'est pas venu s'installer dans un quartier; il s'est emparé du
quartier, il a démoli le quartier, il a planté ses tours et son
béton dans le quartier.
A ce moment-là, je peux dire qu'on n'en avait pas tellement
besoin. Tout ce qui s'appelait tout le monde s'en souviendra le
faubourg-à-la-mélasse de Montréal, c'est-à-dire ce
qui est immédiatement à la gauche, au sud, lorsqu'on aborde
Montréal par le pont Jacques-Cartier, la brasserie Molson,
Télé-Métropole et autres institutions
québécoises notoires, tout cela est maintenant isolé
autour de Radio-Canada.
Je fais cette allusion parce que c'est dans les projets d'expansion de
Radio-Canada, son besoin de se doter de salles supplémentaires dont on
parle maintenant, d'aller chercher ou bien l'église
Saint-Pierre-Apôtre, ou bien l'église St. Brigide.
La seule rumeur de cela a fait que des citoyens, dans chacune de ces
deux paroisses, ont voulu protéger cet environnement culturel. En temps
et lieu, j'aurai l'intention, lorsque tout cela se concrétisera
l'intention de l'autre côté, il faudra vérifier
mais, par la suite, si les citoyens demeurent aussi vivants sur cette question
qu'ils
semblent l'être, avec beaucoup d'insistance je me ferai plus que
jamais leur représentant ici, à la commission, et auprès
du ministère, sur ces questions.
Montréal a aussi, évidemment, des gens vivant dans
d'autres quartiers. Les députés représentant ces autres
quartiers pourraient aussi bien parler de l'évolution de
Montréal, au cours des dernières années, et du
bouleversement qui se produit.
Je suis convaincu que la direction générale du patrimoine
a dû, d'ailleurs, accorder beaucoup d'intérêt à
Montréal, parce que c'est là si je prends l'allusion du
ministre selon laquelle chaque jour est important où chaque jour
apporte effectivement du changement.
En peu de temps, les transactions financières, la base de
l'édification d'un nouvel immeuble, se font très rapidement et
les travaux également et personne n'a à peu près pas le
temps de réagir.
Le cas du carré Saint-Louis, que j'ai évoqué
quelque fois à l'Assemblée nationale, en est un autre. C'est le
premier cas précis que j'ai l'intention de soulever parce que, pour moi,
Saint-Jacques, c'est fini.
L'arrivée de l'école d'hôtellerie, projet du
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, du
côté est de la rue Saint-Denis, a certainement projeté,
c'est le cas de le dire, une ombre sur le carré Saint-Louis, en
face.
Le seul espoir que nous puissions avoir... Je dis "nous" parce que le
député de Saint-Louis lui-même a souvent soulevé
cette question à l'Assemblée et, comme cette partie du territoire
devrait revenir dans Saint-Jacques, selon le projet de la nouvelle carte
électorale, je peux dire "nous" avec encore plus de raisons.
Nous avons assisté à l'édification et à la
transformation de l'environnement du carré Saint-Louis. Il nous reste
maintenant à protéger le reste, à s'assurer que l'ensemble
architectural très particulier d'une époque de la vie de
Montréal, et en ce sens-là, c'est aussi du Vieux
Montréal...
Au Vieux Montréal, cela n'a pas besoin d'être ce qui a
été édifié au début de la colonie ou
jusqu'en 1867, c'est aussi là que Montréal est devenu centre
urbain, aux mains des francophones. L'architecture que les francophones se sont
donnée en s'établissant en ville, en arrivant en ville, au
début de ce 20ième siècle, demeure tout aussi importante,
à mes yeux, que ce qui a marqué le début de la
colonie.
L'architecture qui entoure le carré Saint-Louis a
déjà fait l'objet de considérations par des
spécialistes qui ont jugé ce bien essentiel à
protéger et je me permets la question: Est-ce que c'est l'intention du
ministre de faire que l'arrondissement du carré Saint-Louis, soit
déclaré d'intérêt historique, donc, ainsi
protégé selon la Loi des biens culturels?
Carré Saint-Louis
M. Hardy: D'abord, M. le Président, je dois dire et je
tiens à préciser qu'il ne faudrait pas voir là aucune
allusion à une évolution quelconque, chez moi, sur le plan
idéologique.
Je dois reconnaître que, de même que ce matin,
j'étais totalement d'accord avec le député de Sauvé
lorsqu'il dénonçait il n'a pas même
été aussi loin que cela, mais moi, je n'hésite pas
à employer le mot la barbarie de certains promoteurs dans le
domaine domicilaire, à l'endroit de la qualité de
l'environnement.
J'étais totalement d'accord avec les principes qu'il
énonçait à ce sujet-là, en relation avec le dossier
de la Maison des Jésuites. Je dois dire que je suis autant d'accord avec
le député de Saint-Jacques pour dire qu'il faut respecter le
visage d'un quartier, c'est-à-dire ce qui constitue son visage humain,
même s'il s'agit de maisons qui ne sont pas nécessairement
extraordinaires en elles-mêmes.
Je trouve cela important et je ne trouve rien de plus bête, de
plus stupide, que cette notion du progrès ou cette notion du
développement qui veut que l'on doive tout raser pour construire des
routes, pour construire des nouvelles habitations qui, la plupart du temps,
sont, sur le plan de l'architecture, sur le plan esthétique, encore dix
fois plus laides que les taudis qu'on voulait remplacer.
Là-dessus, je constate une heureuse évolution dans les
nouveaux plans de restauration des bâtiments. Plutôt que de raser
bêtement des logis, des maisons d'habitation, on s'emploie plutôt
à les restaurer, à les réaménager. Sur le plan
économique, je ne suis pas en mesure de me prononcer, pour savoir si
c'est valable, mais sur...
M. Charron: C'est même moins coûteux.
M. Hardy: Tant mieux. Mais sur le plan humain, sur le plan de la
conservation d'une tradition, faire en sorte que les gens ne se sentent pas
dépaysés. C'est ce qui est arrivé, par exemple, il y a
quelques années, avec la construction du plan Dozois.
Je me rappelle qu'il y avait des personnes qui levaient le nez sur ces
gens-là. Ils disaient: Sont-ils assez stupides! On veut leur construire
de beaux logements, ils vivent dans des nids à poux, dans des taudis, on
veut leur construire de beaux logements et ils n'aiment pas cela.
Je regrette, mais je les comprenais ces gens-là. Quand on est
habitué à vivre dans un milieu, même si ce milieu n'est pas
tout ce qu'il devrait être sur le plan de l'hygiène, c'est
important qu'il n'y ait pas de coupure radicale, de coupure brutale, entre ce
qui était et ce qui est ou ce qui sera, de garder une certaine
continuité.
Le respect du visage d'un quartier, que ce soit le quartier
Saint-Jacques ou le carré Saint-Louis, le respect du visage d'un
quartier, c'est extrêmement important. Bien sûr, il y a
sûrement un aspect émotif, sentimental. Qu'un homme de 50 ans
puisse revoir le quartier tel qu'il l'a connu dans son enfance, c'est
peut-être sentimental, mais c'est important pour la qualité de la
vie. Qu'il n'y ait pas des brisures de cette sorte, je trouve cela
extrêmement important.
Le cas qui se pose. Encore là, c'est une nouvelle
mentalité qui, peu à peu, heureusement, se développe, mais
ce que je dis, actuellement, j'au-
rais risqué probablement de passer pour un parfait huluberlu si
j'avais dit des choses semblables il y a cinq ou dix ans.
M. Charron: C'est ce qu'on disait de ces gens-là, il y a
cinq ou dix ans.
M. Hardy: Je pense qu'il y a cinq ou dix ans, un ministre qui
aurait dit ce que je dis présentement, on se serait posé des
questions sur l'état de sa santé mentale.
Je pense qu'aujourd'hui, en tout cas, un bon secteur de la population
est prêt à accepter une telle perception de la
réalité. Actuellement, le problème qui se pose aux
Affaires culturelles, à la direction générale du
patrimoine, c'est cette espèce de chevauchement qui doit exister entre
une loi comme la Loi des biens culturels et des lois de zonage ou
d'aménagement du territoire.
L'esprit actuel de la Loi des biens culturels, à mon sens
je pense bien que c'est la conception de la direction du patrimoine ne
peut pas aller au-delà d'une certaine limite. Au-delà d'une
certaine limite, on arrive à faire de l'aménagement du
territoire, du zonage.
Je n'ai pas d'objection à ce qu'un jour, tout le problème
de l'aménagement du territoire revienne au ministère des Affaires
culturelles. Ce serait peut-être normal, si on envisage, encore une fois,
la culture, dans une conception très globale, où la
qualité de la vie est le centre principal des préoccupations
culturelles, donc, l'aménagement du territoire deviendrait..-
Pour le moment, c'est la responsabilité du ministère des
Affaires municipales et je n'ai pas l'intention, dans l'immédiat
j'ai assez de problèmes concrets à résoudre
d'entreprendre une bataille pour rapatrier l'aménagement du territoire,
sauf qu'il peut y avoir des relations très étroites entre les
deux ministères.
Donc, il y a certains immeubles que, en vertu de la Loi sur les biens
culturels, nous ne pouvons pas classer, mais ceci ne m'empêche pas de
reconnaître qu'il serait souhaitable que l'on trouve le plus rapidement
possible, des mécanismes pour les sauvegarder. Encore une fois, la
nouvelle conception de l'aménagement ou le réaménagement
des maisons d'habitation, je la trouve très heureuse dans ce
sens-là. Plutôt que de faucher, plutôt que de
démolir, on accepte de remodeler, de restaurer, de réparer des
logis existants.
Je reviens au cas plus particulier de l'église Saint-Jacques.
Là aussi, je dois reconnaître que les réactions des
citoyens de cet environnement, réactions traduites par le
député de Saint-Jacques ce matin, à la commission, je les
ai éprouvées dès ma nomination comme adjoint
parlementaire.
Quand j'ai été nommé adjoint parlementaire aux
Affaires culturelles, le titulaire de l'époque m'avait confié un
certain nombre de secteurs, en particulier, le domaine du patrimoine. Je me
rappelle d'une réunion que nous avions eue avec les représentants
de l'Université du Québec à Montréal et je vous
avoue que j'avais été, personnellement, extrêmement
critique quant à leur projet de démolir l'église
Saint-Jacques et ne conserver que le clocher et le transept aussi.
Je continue à penser que, s'il avait été possible,
à l'origine, quand on a conçu le développement de
l'Université du Québec à Montréal, quand on a
commencé à prévoir les plans, s'il avait été
possible d'intégrer l'église Saint-Jacques dans sa
totalité, cela aurait été infiniment souhaitable.
Le problème devant lequel j'ai été placé,
tant comme adjoint parlementaire et, par la suite, comme ministre, c'est que
les plans étaient tellement avancés, il y avait tellement de
dépenses d'argent de faites, la collectivité avait tellement
investi dans une certaine conception du projet, que cela aurait
été extrêmement coûteux, financièrement, de
faire machine arrière, de rebrousser chemin.
D'autant plus que, je dois le reconnaître, on s'est
efforcé... Comme le député de Saint-Jacques, je demeure
encore un peu sceptique. On verra vraiment quand on pourra voir visuellement ce
que cela donne.
Mais je pense qu'avec la collaboration de l'Université du
Québec, la direction générale du patrimoine, le service
des monuments, on a fait des efforts considérables pour tâcher de
conserver le maximum sur le plan architectural, sur le plan esthétique,
de concilier les besoins, les projets de l'Université du Québec
et ce qui restera de l'église Saint-Jacques.
Mais encore là, nous étions placés en face, au
fond, de choix extrêmement importants, d'une part, les besoins d'une
université, les besoins, donc, de l'éducation et l'autre valeur,
la conservation d'un environnement et la conservation, en particulier d'un
monument qui n'était pas extraordinaire dans son ensemble.
Il y avait des parties de l'église Saint-Jacques, sur le plan
strictement architectural, qui étaient bien ordinaires. Mais il reste
quand même, j'y suis passé encore il y a quelques jours, surtout
dans l'état actuel des choses, que c'est désolant. Vous voyez ce
magnifique clocher qui n'a pas de support, qui est seul, perdu. Ce n'est pas la
main de l'homme qui est intervenue, c'est le destin ou la Providence selon les
croyances auxquelles on adhère, mais ça me fait penser un peu
à la façade de la cathédrale de Saint-Boniface. On a
réussi à conserver la façade de la cathédrale
à la suite d'incendie et à l'arrière de cette
façade, on a érigé une nouvelle cathédrale qui se
concilie peu.
On a un autre cas à l'Ile d'Orléans, monstrueux, à
mon avis, je ne sais pas à quoi ont pensé le curé et les
marguillers de cette fabrique de Saint-Pierre, quand ils ont
décidé de construire à côté de cette
magnifique église qu'est l'ancienne église Saint-Pierre, ce
monstre architectural qu'est la nouvelle église, mais enfin!
Encore une fois, l'excuse qu'on a, c'est que ça s'est fait
à une époque où la préoccupation de l'opinion
publique était beaucoup moins grande pour la conservation du patrimoine
que c'est le cas présentement.
Pour résumer, je dis que j'épouse totalement les
réticences, les réserves, les préoccupations du
député de Saint-Jacques et je dis que, compte tenu des
contraintes devant lesquelles nous sommes placées, nous tentons de faire
le maximum pour sauver ce qui peut être encore sauvé.
M. Charron: Avant que vous n'abordiez la question du carré
Saint-Louis, comme je vous l'ai suggéré, puisqu'on parle,
peut-être pour la dernière fois, de l'église Saint-Jacques,
est-ce que la direction générale du patrimoine a
évalué les dangers que pouvait courir ce qu'on a
décidé de laisser subsister de l'église pendant les
travaux de construction des édifices de l'UQUAM, et avant que ne
débute, comme le dit le ministre, pendant que le clocher est tout seul
et livré aux intempéries, sans la protection ordinaire de
l'établissement qu'il y avait à l'arrière.
M. Hardy: Toutes les pièces qui avaient une valeur
intrinsèque, toutes les oeuvres d'art dans l'église Saint-Jacques
ont été récupérées et remises à
l'évêché.
M. Charron: Non, ça, je le savais. Ce que je me demande,
actuellement, vous avez décrit que le clocher est debout, seul, comme le
chef de l'Union Nationale en Chambre. C'est à se demander si ça
ne s'effondrera pas...
M. Hardy: M. Bellemare n'est pas complètement seul, il est
seul comme député, mais il a un entourage d'accompagnement qui
est très agréable.
M. Charron: Est-ce qu'il n'y a pas danger que, pendant les
travaux de construction, il y ait en-dommagement de ce qui reste?
M. Hardy: On nous assure que, sur le plan technique, les
ingénieurs prennent toutes les précautions pour empêcher
qu'il y ait désintégration de ce qui existe. Compte tenu des
faits, nous avons une excellente collaboration de l'Université du
Québec. Pour ce qui est de l'ensemble, le député de
Saint-Jacques a fait mention, en plus de l'église Saint-Jacques, d'une
autre église; je dois lui dire que, cette année, nous avons un
programme pour faire un inventaire complet de toutes les églises, non
seulement de l'île de Montréal, mais du diocèse; il y aura
un inventaire complet, tant sur le plan immobilier que sur le plan des objets
d'art qui peuvent y être contenus. Nous allons faire cet inventaire
complet cette année.
M. Charron: C'est une bonne idée. Cela devrait
conduire...
M. Hardy: Cela devrait être terminé avec
l'année financière actuelle. Au moment où nous nous
rencontrerons pour l'étude des crédits l'an prochain,
j'espère que le député de Saint-Jacques sera toujours le
critique de son parti en cette matière, nous aurons un inventaire
complet des églises.
Quant au carré Saint-Louis, et à cet autre sec- teur
important de Montréal qu'on appelle communément le Square Mile,
nous faisons un préinventaire actuellement de ces deux secteurs qui
pourraient éventuellement conduire, je ne veux pas m'engager car tout
dépendra des conclusions de l'étude, mais ça pourrait
conduire à un classement de ces secteurs comme arrondissement
historique.
M. Charron: Qu'est-ce que c'est un préinventaire?
M. Hardy: C'est une étude globale moins
détaillée que l'inventaire, c'est-à-dire que l'inventaire,
c'est du raffinement, on voit, on analyse le tamis.
M. Charron: Plus général, quoi.
Le Président (M. Pilote): Je vous inviterais à
parler dans le micro.
M. Charron: Vous pouvez le laisser parler, si vous voulez, c'est
en votre nom.
M. Hardy: Je vais répéter pour les besoins du
journal des Débats. C'est que le préinventaire donne une analyse
plus globale du site, de l'arrondissement, quand on passe au deuxième
stade, celui de l'inventaire, on prend chaque point plus en détail. Le
préinventaire, au fond, est un peu, comme dans le domaine juridique,
l'enquête préliminaire, c'est pour savoir si ça vaut la
peine de continuer l'étude.
Maison des soeurs Grises
M. Charron: D'accord. Maintenant, si vous me permettez la
question de la maison mère des soeurs Grises, qui a aussi fait couler
beaucoup d'encre chez ceux qui sont intéressés à cette
chose qu'est la sauvegarde, la mise en valeur des biens culturels, ma question
sera générale, elle permettra au ministre de faire rapidement le
tour de la question parce que je sais qu'on l'a déjà
abordée en Chambre. Mais la question est générale et
très précise en même temps. Pourquoi est-ce que le ministre
refuse de suivre la recommandation de la Commission des biens culturels, qui
était de classer tout l'ensemble comme bien culturel?
M. Hardy: Je ne sais pas si j'ai le temps, on pourrait
peut-être dépasser d'une heure.
M. Charron: Je n'ai pas d'objection.
M. Hardy: On pourrait dépasser d'une heure pour que je
fasse le résumé de ce problème. D'abord, je voudrais bien
que mes paroles ne soient pas interprétées comme une critique. Je
pense que le dossier des soeurs Grises a dépassé le
problème comme tel, c'est devenu un peu le symbole. Je pense que toute
la conservation du patrimoine montréalais s'est symbolisée dans
le cas des soeurs Grises.
C'est peut-être normal parce que c'est vraiment une partie
importante...
M. Charron: Pour ce quartier de Montréal.
M. Hardy: Pour ce quartier et même pour Montréal en
entier.
M. Charron: ...pour l'ensemble.
M. Hardy: Dans un premier temps, la Commission des biens
culturels avait recommandé le classement intégral de l'immeuble
des soeurs Grises. Mais je pense que ce n'est pas trahir la
vérité que de dire qu'au moment où la Commission des biens
culturels a fait ce classement, son jugement ne reposait pas sur des dossiers
très articulés. C'était plutôt global, sentimental,
et je dirais presque instinctif, quand cette recommandation a été
faite. On comprendra quand même, quand on voit les conséquences
d'un classement par la loi, qu'il faut se méfier de prendre des
décisions uniquement sur le plan émotif, sentimental et
instinctif.
Mais, reconnaissant les dangers immédiats que courait cette
propriété, nous avons utilisé tous les outils que la loi
mettait à la disposition du ministre, en envoyant des avis d'intention;
en tout cas, nous avons constamment suivi le dossier de très près
et surtout, nous nous sommes assurés que rien d'irréparable ne
pouvait se produire. A la suite d'études, d'expertises du Service des
monuments de la direction du patrimoine au sujet de la chapelle, expertises qui
ne laissaient planer aucun doute, nous avons décidé de classer la
chapelle. A partir du moment où la chapelle était classée,
à cause de l'aire de protection, toute la propriété des
soeurs Grises devenait assujettie aux mêmes conséquences que le
classement. En d'autres termes, à cause de l'aire de protection, rien ne
pouvait être fait à une parcelle de la propriété des
soeurs Grises sans notre autorisation.
Donc, c'est ce que je me suis évertué à expliquer
à l'opinion publique et, encore une fois, ce que certains journalistes
et même certaines personnes et associations intéressées
dans ce domaine, je pense, entre autres à l'architecte Michael Fish, ont
semblé vouloir ne pas comprendre, en énervant constamment les
gens. Car s'il faut, d'une part, sensibiliser l'opinion publique dans ce
domaine, il ne faut pas non plus énerver les gens, susciter des
épouvantails, faire la chasse aux sorcières. Donc, depuis le
début, à cause des avis d'intention, à cause du classement
de la chapelle et à cause de l'enregistrement de l'aire de protection,
depuis qu'il est question que cette maison soit vendue à des promoteurs,
cet immeuble a été constamment sous notre juridiction, en ce sens
que rien ne pouvait être fait sans notre autorisation.
Une fois que la direction générale du patrimoine a
complété son dossier sur la chapelle, ils ont continué
à étudier les autres parties de cette propriété des
soeurs Grises. Cette étude était une étude importante,
sérieuse et ç'a pris un certain temps. Il y a quelques semaines,
trois ou quatre semaines déjà, on m'a remis le rapport sur cette
autre partie où il y a des conclusions.
Je reconnais publiquement que je n'ai pas encore eu le temps... Je pense
qu'on comprendra pourquoi, le cinéma et d'autres problèmes ont
retenu mon attention présentement, non pas parce que ce n'est pas
important les Soeurs Grises, mais parce qu'il n'y a pas de péril en la
demeure, tout est gelé. Je n'ai pas encore eu le temps d'en prendre
connaissance personnellement, j'ai seulement feuilleté ce
deuxième rapport. Je peux dire dès maintenant que les
décisions que je serai appelé à prendre, bien sûr,
seront prises à partir de ce deuxième rapport que la direction du
patrimoine m'a remis.
J'espère qu'aussitôt que les dossiers les plus chauds
auxquels je dois faire face actuellement seront refroidis, c'est-à-dire
qu'ils auront reçu des solutions, je me pencherai sur le problème
de la maison des soeurs Grises.
Le Président (M. Pilote): II est 1 heure, messieurs, et la
commission ajourne ses travaux à mardi matin, 10 h 15.
M. Hardy: M. le Président, je voudrais bien qu'il soit
compris... Je ne sais pas si ce sont les mêmes membres de la commission,
il y a plusieurs absents, vous parlez de 10 h 15. Je suis bien prêt
à être ici à l'heure à laquelle nous ajournons.
C'est peut-être le même cas pour le député de
Saint-Jacques. Personnellement, comme tous les lundis, je serai à mon
bureau de comté lundi soir jusqu'à minuit, peut-être 1
heure, je suis bien prêt à être ici à l'heure
à laquelle la séance de la commission est fixée. Je me
lèverai à l'heure nécessaire le matin, mais j'aimerais
bien qu'on puisse commencer c'est la même chose pour les
fonctionnaires qui devront se déplacer à l'heure
indiquée.
Si on prévoit que les gens ne seront pas ici à 10 h 15,
j'aimerais mieux qu'on dise 10 h 30 et que tout le monde soit ici à 10 h
30.
M. Charron: M. le Président, je vais renchérir sur
ce que disait le ministre, parce que je n'aurai pas de difficulté
à être ici à 10 h 15, mardi, puisque je serai à
Québec lundi pour rencontrer le milieu cinématographique au
complexe G, à l'amphithéâtre du complexe G, puisque le
salon rouge nous a été refusé.
Le Président (M. Pilote): Les commanditaires ne sont pas
permis à la commission.
M. Hardy: M. le Président, je pourrais peut-être
ajouter que je devrai, moi aussi, rencontrer des gens du domaine du
cinéma au cours de la semaine prochaine, mais après
l'étude des crédits.
Le Président (M. Pilote): Moi, je vous rencontrerai mardi,
à 10 h 15.
(Fin de la séance à 13 h 3)