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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le jeudi 12 juin 1975 - Vol. 16 N° 135

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 1 — Loi sur le cinéma


Journal des débats

 

Commission permanente de l'éducation,

des affaires culturelles et des communications

Projet de loi no 1 — Loi sur le cinéma

Séance du jeudi 12 juin 1975

(Onze heures vingt minutes)

M. Kennedy (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications reprend les travaux de l'étude du projet de loi no 1, Loi sur le cinéma, et le député de Saint-Jacques avait la parole, lors de l'ajournement d'hier.

Classification des films (suite)

M. Charron: M. le Président, nous étions à discuter hier un des amendements les plus importants que nous voulons voir introduire à ce projet de loi. La discussion, qui a entouré le dépôt de cet amendement, hier, à la fin de la séance, m'a amené à le modifier pour le rendre encore plus acceptable. J'ai senti, de la part du ministre —il l'a lui-même d'ailleurs affirmé à plusieurs reprises — que nous recherchions le même objectif. J'ai donc voulu inscrire, de façon très pertinente, cet objectif au projet de loi, celui qui vise à faire que tout film dont la version originale n'est pas en français, soit obligatoirement accompagné d'une version doublée ou sous-titrée, pour être admissible au processus de classification.

Vous vous rappelez qu'hier, dans la discussion, le ministre a soulevé les cas extrêmement difficiles, par exemple, de films à caractère scientifique, dont la clientèle est très limitée, par définition, et qui se verraient ainsi, si cette loi devait adopter ce principe général, presque interdits à être classifiés, ou encore de films qui sont faits dans une langue très limitée, par exemple, à un pays européen, et donc, à une minorité ethnique du grand Montréal, en particulier, et qui auraient droit d'être visionnés dans un cinéma en particulier, pour cette communauté. Ce sont toutes là des exceptions que, vous vous le rappellerez, M. le Président, j'ai admises d'emblée, mais j'ai dit, à ce moment, que les règlements, suivant l'adoption de mon amendement, pourraient tenir compte de ces cas très précis que je suis prêt à admettre.

Je me suis inspiré d'une autre partie de la loi, soit le deuxième paragraphe de l'article que nous sommes à discuter, qui tient lui-même compte et qui procède de la même façon que j'incite le ministre à procéder dans la première partie de l'article. Quand le ministre affirme, dans le deuxième paragraphe, que le doublage et le sous-titrage doivent être effectués entièrement au Québec — ce qui est un principe — il admet que, dans certains cas — et il aura lui-même à nous l'expliquer lorsque nous atteindrons ce deuxième para- graphe — il a lui-même prévu qu'il peut y avoir des exceptions prévues par règlement, et que ce principe est donc affirmé sous réserve des exceptions prévues au règlement.

Je m'inspire de cet exemple du deuxième paragraphe pour dire qu'au premier paragraphe, à la place de celui du ministre, qu'il a lui-même apporté comme amendement à la loi, nous puissions reprendre à peu près la même formulation. Celle que je propose ce matin, différente un peu de celle d'hier, mais qui devrait obtenir l'adhésion du ministre, est celle-ci: Tout film, dont la version originale n'est pas en français, doit obligatoirement être accompagné d'une version doublée ou sous-titrée en français pour être admissible au processus de classification, sous réserve des exceptions prévues par règlement. C'est le même genre de formulation que le deuxième paragraphe.

M. Hardy: M. le Président, peut-être pourrions-nous suspendre l'article 39, que nous l'examinions sur le plan juridique. Je dois dire tout de suite au député de Saint-Jacques qu'on ne peut pas comparer les deux cas.

Dans le deuxième alinéa de l'article 39, on prévoit très bien quel cas peut se produire. C'est le cas de la France. Actuellement, en France, la loi oblige que tout doublage et sous-titrage se fasssnt en France. Ce qui voudrait dire que, si on ne prévoyait pas le deuxième paragraphe, ceci impliquerait qu'un distributeur américain, qui fait doubler son film en France, et qui veut le distribuer au Québec, devrait de nouveau le faire doubler au Québec, ce qui est un peu absurde.

Au fond, le deuxième paragraphe, c'est pour nous donner le pouvoir d'établir un régime de réciprocité. Dans quelques jours, à l'occasion d'un voyage à Paris, je me propose de discuter de la chose avec le secrétaire d'Etat au ministère des Affaires culturelles. D'une part, quand un film serait doublé en France, nous l'accepterions, mais, d'autre part, la France accepterait également les films doublés au Québec.

M. Morin: C'est une excellente initiative, M. le Président. Je pense que ce serait de nature à résoudre pas mal de problèmes qui se posent dans ce domaine. Mais j'ai mal compris l'intervention du ministre. Veut-il dire que la proposition du député de Saint-Jacques entraînerait l'abandon du deuxième alinéa?

M. Hardy: Non, non, ce n'est pas ce que je veux dire. Je veux tout simplement dire que ce sont...

M. Morin: C'est une question tout à fait distincte.

M. Hardy:... des choses qui ne se comparent pas. C'est que le député de Saint-Jacques a dit: Voici, je m'inspire du deuxième paragraphe de l'article 39 pour proposer mon amendement. Or, je lui dis que le domaine est bien circonscrit en ce qui concerne le deuxième paragraphe. C'est tout

simplement le problème de la France et du Québec.

M. Charron: Quand je disais, M. le Président, que je m'inspirais du deuxième paragraphe, c'est quant à la formulation.

M. Hardy: Oui, oui, je sais.

M. Charron: Je ne dis pas que c'est le même cas.

M. Hardy: Non, non, j'ai compris. Mais précisément, le problème que j'ai évoqué hier, qui est toujours dans mon esprit malgré la nuit, c'est que, dans le premier cas, il est presque impossible de prévoir tous les cas. Même si on les prévoyait maintenant, il peut y avoir des modifications. Or, on ne peut pas amender la loi.

Le député de Saint-Jacques propose une formule qui, selon lui, pourrait nous permettre de prévoir tous ces cas par règlement. Au fond, ce que vous me dites, c'est que, dans votre article, vous affirmez d'une façon plus catégorique le principe du doublage que dans notre article. C'est cela?

M. Morin: Plus d'élégante aussi. M. Hardy: Plus élégante? M. Morin: Oui.

M. Hardy: Bien là, M. le Président, vous savez...

M. Morin: Parce que le principe est énoncé clairement.

M. Hardy: Je suis modeste sur les problèmes de style. Alors je n'ose me prononcer sur l'élégance du style de votre proposition.

M. Morin: Mais est-ce que je peux faire observer au ministre, sans insister, que la rédaction de l'article, telle qu'elle existe, le premier paragraphe de l'article 39, me rappelle beaucoup le droit statutaire anglais: Les règlements peuvent prévoir telle chose, prescrire telle chose? Pourquoi ne pas le faire à la française, affirmer le principe et, ensuite, faire suivre les exceptions?

M. Hardy: Vous reprenez une argumentation que j'avais soutenue l'an passé pendant l'étude du bill 22.

M. Morin: Oui, il l'a soutenu aussi...

M. Hardy: A un moment donné, vous aviez proposé un amendement qui s'inspirait du droit anglais...

M. Morin: Vraiment?

M. Hardy:... et je prétendais que notre propre version était plus française.

M. Morin: Je ne me souviens pas des événements, M. le Président. Nous soutenions, par exemple, qu'il était beaucoup plus français de dire à l'article premier, justement — le ministre s'en souviendra — que la langue française doit être la seule langue officielle au Québec. Nous procédions selon les mêmes principes de clarté cartésienne.

M. Hardy: Est-ce que vous acceptez...

M. Charron: M. le Président, soyez vigilant, le débat va dégénérerl

M. Hardy: M. le Président, est-ce que le député de Saint-Jacques et le député de Sauvé accepteraient que nous suspendions l'article 39...

M. Morin: Oui.

M. Charron: D'accord.

M. Hardy: ... pour que nous l'examinions plus en profondeur sur le plan juridique et que nous procédions à l'article 40?

Le Président (M. Kennedy): Article 39, suspendu.

Article 40.

M. Hardy: A l'article 40, il n'y a pas d'amendement

Cinémathèque nationale et dépôt légal

M. Charron: M. le Président, à l'article 40, une question. Aux yeux du ministre, la création de la cinémathèque nationale du Québec affecte-t-elle la vie d'autres cinémathèques publiques ou privées québécoises? Oblige-t-elle à un regroupement et affecte-t-elle la vie et la profession de certains citoyens québécois qui oeuvrent déjà dans la conservation et les archives cinématographiques?

M. Hardy: J'ai eu l'occasion de répondre à cette question à des représentants de la cinémathèque québécoise. En vertu du texte de loi, non. Il s'agit au fond de créer un mécanisme gouvernemental avec les conséquences qui en découlent quant aux dépôts, réquisitions, etc. Qu'est-ce qu'il adviendra des organismes privés qui existent présentement? Le tout devra se discuter entre les fonctionnaires de cette cinémathèque et les organismes privés. Toutes les hypothèses sont permises. Il pourra y avoir des accords de collaboration. Tout est possible. Je vous avoue bien honnêtement qu'à ce stade-ci, je peux vous donner peu de précisions. Je pense qu'on pourra vraiment établir un plan ou une politique lorsque les fonctionnaires seront dans ce secteur de la cinémathèque et que la direction générale du cinéma sera mise sur pied. C'est avec eux qu'on élaborera une politique et que l'on établira des ententes avec les cinémathèques existantes.

M. Charron: Est-ce qu'on ne devrait pas préci-

ser dans la loi que le conservateur a pour fonctions, si on prend les fonctions décrites à l'article suivant... Non pas comme fonctions, je pense que l'expression plus réaliste serait qu'il a autorité d'établir de ces ententes avec les cinémathèques existantes.

M. Hardy: Je ne pense pas que ce soit nécessaire.

M. Charron: De le prescrire dans la loi?

M. Hardy: De toute façon, à toutes fins pratiques, c'est le ministre, c'est l'administrateur de la loi, à partir des avis fournis par le conservateur de la cinémathèque. Je ne pense pas que ce soit nécessaire parce qu'un ministère a toujours la possibilité de conclure des ententes avec des organismes privés.

M. Charron: Mais dans le paragraphe b) de l'article 41 — si on peut encore une fois, M. le Président, les mener de front — quand on dit qu'il a pour fonctions "d'acquérir et conserver tous les documents qu'il lui est possible de réunir et qui sont utiles à la recherche en matière cinématographique, et audio-visuelle," Est-ce que cela permet au conservateur, sur sa seule initiative, d'aller dans une cinémathèque privée ou encore une cinémathèque existante et de dire: Telles pièces de votre cinémathèque, comme j'ai pour fonctions de les acquérir et de les conserver, je vous les achète?

M. Hardy: Cela pourrait être, ou la cinémathèque nationale pourrait donner mandat à la cinémathèque québécoise, l'actuelle cinémathèque, sur un territoire donné, d'exercer la fonction qu'elle a. Je pense que ce serait très imprudent d'établir un cadre trop rigide. Là-dessus, lors des discussions que j'ai eues avec les représentants de la cinémathèque, ils ont reconnu qu'il serait préférable de laisser beaucoup de latitude. Si, à un moment donné, on en arrive à la conclusion qu'il est préférable que la cinémathèque québécoise se fonde totalement pour éviter les doubles emplois, pour éviter les dispersions d'énergie, d'autre part, il pourrait arriver aussi qu'on s'aperçoive qu'il est préférable de laisser cela à des organismes privés, à cause du dynamisme que ces organismes peuvent avoir, à cause de l'intérêt que ces gens peuvent avoir. Au niveau de la loi, je préfère laisser le plus de marge de manoeuvre possible et voir ce qu'il sera possible de faire après des discussions avec tous ces gens évidemment. Il n'est pas question que nous agissions unilatéralement. Ce serait un peu stupide.

M. Charron: II n'y a donc pas de danger d'étatisation de certaines archives cinématographiques? Dans l'exemple que je vous donnais tantôt, c'est-à-dire d'un film réalisé en 1935 dont il n'existe plus qu'une seule copie, qui est aux mains d'un individu, est-ce que cela donne le pouvoir au conservateur de la cinémathèque de dire: Votre film, vous nous le vendez?

M. Hardy: Cela pourrait donner le pouvoir, entre autres, de conclure un contrat, dans l'hypothèse où on dit que la cinémathèque québécoise continue à exister. Mais cela pourrait impliquer qu'on conclut un contrat avec des gens, en vertu duquel ils s'engagent à ne céder ce qu'ils ont à personne. Eventuellement, un organisme fédéral pourrait arrriver auprès de la cinémathèque québécoise et dire: On vous offre tant pour vos biens, et la cinémathèque québécoise, légalement pourrait les vendre. Théoriquement.

M. Charron: Encore une fois, est-ce qu'on ne serait pas mieux de le préciser dans la loi même?

M. Hardy: C'est-à-dire qu'on le précise plus tard parce qu'on donne le pouvoir, dans la loi, au ministre, en s'inspirant de la Loi sur les biens culturels, de classer ou en tout cas d'intervenir de quelque façon pour empêcher des ventes semblables. Ce peut être les postes de radio. A un moment donné, il y a une oeuvre télévisuelle ou ra-diophonique qui peut avoir une grande valeur. Il ne s'agit pas de tout conserver. Il y a des radio-romans dont, je pense bien, on peut dire que ce serait du gaspillage de les conserver. Il y a d'autres choses, je pense entre autres à la série La famille Plouffe, qu'il aurait été heureux de conserver.

M. Charron: Certaines émissions de Point de mire?

M. Hardy: Point de mire? Oui, à l'époque ou M. Levesque était plus objectif qu'il ne l'est devenu. Oui,

M. Charron: Comme exemple de télévision intelligente et instructive pour la population, le ministre conviendra avec moi que...

M. Hardy: Ah oui! je regardais Point de mire. M. Charron: ... c'est dans les annales.

M. Hardy: Mais vous étiez assez vieux pour regarder cela, vous?

M. Charron: J'avais 13 ans.

M. Hardy: Vous avez toujours été précoce.

M. Charron: Absolument.

M. Hardy: Oui.

M. Charron: Que voulez-vous? Quand on est d'avant-garde...

M. Hardy: C'est cela. A ce moment-là, nous pourrions les classer et ces stations de télévision ou de radio ne pourraient plus les détruire. Surtout, elles ne pourraient plus les céder à d'autres instances, que nous ne reconnaissons pas comme des ennemis mais qui, encore une fois, ne sont pas l'expression politique de la collectivité québécoise.

M. Saint-Germain: ...propriété de Radio-Canada et du fédéral, est-ce que la loi...

M. Hardy: C'est-à-dire, il y a un problème qui se poserait, j'ai demandé une recherche constitutionnelle là-dessus. C'est la même chose pour la Loi des biens culturels, j'ai des avis contradictoires. Certains me disent que la Loi des biens culturels ne s'applique pas aux propriétés fédérales. Mais j'ai demandé une recherche exhaustive sur cette question.

M. Charron: Bien, M. le Président, article 40 adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 41.

M. Morin: Le ministre vient de faire une déclaration qui m'intéresse beaucoup. Est-ce qu'éventuellement nous serons mis au courant des résultats de cette recherche?

M. Hardy: Oui, la recherche sur le plan constitutionnel?

M. Morin: Sur le plan constitutionnel.

M. Hardy: Bien sûr. Il y aura peut-être bien un conflit d'intérêts si on vous demande de participer...

M. Morin: Je ne suis pas en train d'offrir mes services au ministre j'aimerais simplement en prendre connaissance, le plus tôt possible, lorsque vous l'aurez en main. Parce que je crois que c'est dans l'intérêt de tout le monde que nous en soyons saisis et qu'éventuellement nous puissions, si cette opinion est défavorable, aviser pour ce qu'il convient de faire. Peut-être que le ministre a décidé de passer au Parti québécois, à cette occasion, étant donné qu'il va se rendre compte de son impuissance devant les menées fédérales.

M. Hardy: Vous pensez que je peux me laisser impressionner par les vaciilements du député de Beauce-Sud?

M. Morin: Mais je faisais suffisamment confiance à l'intelligence du ministre pour croire qu'il n'était pas complètement englué dans les schèmes du passé, qu'il était capable d'évoluer devant les faits, devant les circonstances.

Le Président (M. Kennedy): A l'ordre, si vous voulez revenir à la loi. On est à l'article 41.

M. Hardy: M. le Président, le député de Sauvé a raison, je suis capable d'évoluer, mais j'évolue prudemment.

Le Président (M. Kennedy): Article 41. M. Charron: Article 41.

M. Hardy: L'article 41, tel que modifié. Ce sont de nouveaux articles que nous... Mais on a ajouté d).

M. Charron: Photothèque.

M. Hardy: Oui.

Nous avons ajouté d) qui prévoit une photothèque et nous avons ajouté également les oeuvres photographiques. Le conservateur pourra acquérir des oeuvres photographiques.

Photographiques, radiophoniques et audiovisuelles.

Oui. C'est cela ce dont je vous parlais tantôt, la radio et la télévision, ce qui n'était pas dans le premier projet.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 42.

M. Charron: Adopté également.

Le Président (M. Kennedy): Article 43.

M. Hardy: C'est le dépôt légal et on s'est inspiré du texte de la bibliothèque nationale, pour le dépôt légal.

M. Charron: D'accord.

M. Hardy: A l'article 44, nous ajoutons...

M. Charron: Article 43 adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 44.

M. Hardy: A l'article 44, on change ministre par conservateur. Remarquez qu'à certains points de vue ce serait l'équivalent.

M. Charron: A plusieurs points de vue. Le Président (M. Kennedy): Article 45. M. Hardy: Cela répond à la modification...

M. Charron: Je voudrais rappeler, avant qu'on enchaîne l'article 45, le ministre vient de me rappeler en faisant lui-même cette admission...

M. Hardy: Oui. Je ne cache jamais mes...

M. Charron: ...une conversation très intéressante sur le sens du conservatisme, que lui et moi avions eue sur le train, entre Montréal et Québec, avant qu'il soit ministre, lors de ces matins d'hiver où nous avions quatre à cinq heures de train à faire pour nous rendre ici. Est-ce que vous vous en souvenez, M. le ministre? A cette époque, vous parliez au bas peuple.

M. Hardy: Je n'ai jamais cessé. Vous viendrez me suivre dans ma circonscription une fin de semaine, vous allez voir que je parle à tout le monde. Et ma plus grande source d'inspiration ce sont justement les humbles citoyens. Ce sont eux qui m'entraînent de plus en plus à être conservateur.

M. Charron: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 45.

M. Hardy: L'article 45 répond à une des inquiétudes dont nous a fait part tantôt le député de Saint-Jacques relativement aux cinémathèques. Dans l'ancien texte, on parlait d'intégration et maintenant on parle de coordination.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Chapitre 4. L'Institut québécois du cinéma, article 46.

Institut québécois du cinéma

M. Hardy: L'article 46, c'est la même chose, sauf qu'on a changé le numéro. Je pense que ce n'est pas très contentieux à ce point-ci. Cela établit un institut québécois du cinéma.

M. Charron: L'institut québécois du cinéma. Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 47?

M. Hardy: L'article 47, c'est le mandat général.

M. Charron: Minute historique, M. le Président. L'Institut québécois vient d'être créé.

M. Hardy: II vient d'être sanctionné. Vous n'avez pas fait la même mention, hier après-midi, quand la censure a été abolie.

M. Charron: A un moment donné, oui. Article 47, adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 48, tel qu'amendé?

M. Morin: A l'article 48, je fais la proposition suivante, tout à fait nette et précise. A notre avis, cet article doit être biffé.

M. Hardy: Totalement?

M. Morin: Oui, tout simplement. Parce que le ministre se rappellera qu'hier nous avons déjà discuté la question du contrat intervenant entre l'institut et le ministre, contrat qui vient s'ajouter au mandat, réduire et même complètement supprimer l'autonomie dont devrait disposer cet institut dans un domaine comme celui du cinéma.

Je prenais connaissance récemment d'un ouvrage très bien fait d'André Gélinas sur les organismes administratifs autonomes, dans lequel il classe les diverses interventions de l'Etat selon la fonction que l'Etat entend exercer. Il y a la fonction consultative pour laquelle Me Gélinas suggère d'avoir recours à des conseils, la fonction judiciaire où l'on doit, selon lui, avoir recours à des tribunaux administratifs; la fonction de gestion économique, qui devrait faire appel à des sociétés d'Etat, la fonction de gestion non économique qui devrait prendre la forme d'un office et, enfin, la fonction de régulation économique ou technique.

Je crois que l'institut, que nous venons d'établir à l'article 46, répond fort bien à la description que Me Gélinas donnait de ces organismes remplissant des fonctions d'ordre technique. Il disait justement: "En raison des parties concernées, de leur organisation oligopolistique, ainsi que du volume de décisions, il n'est pas opportun que le ministre soit directement impliqué dans le processus de régulation. L'administration ministérielle n'offre pas les garanties explicites d'impartialité dans le cas de l'exercice de cette fonction technique."

Me Gélinas de suggérer que l'on ait recours à l'expression, au mot "régie" pour décrire le type d'organisme pouvant exercer cette fonction. Selon le mandat qui est donné à l'institut, soit de répartir, en veillant à la liberté de création et d'expression, ainsi qu'à la liberté de choix des consommateurs, les fonds que l'Etat destine au secteur privé pour mettre en oeuvre la politique cinématographique, je crois que ces fonctions sont vraiment celles d'une régie. On l'appelle "institut" pour des raisons que le ministre pourra peut-être nous expliquer tout à l'heure, mais il s'agit bien d'une régie distribuant des fonds de l'Etat et exerçant une fonction de régulation.

Si tel est le cas — à mon avis, c'est le cas il s'agit d'une régie — il s'agit néanmoins d'un organisme qui doit respecter la liberté de création et d'expression, comme le dit l'article 46. On doit donc avoir recours à une régie très autonome, sans doute même plus autonome que les diverses régies qui existent déjà au Québec. Le ministre sait qu'il existe, par exemple, la Régie des services publics, la Régie des loteries et courses, la Régie de l'électricité et du gaz, la Régie des eaux, la Régie des marchés agricoles/

A ces organismes s'ajoutent encore un certain nombre d'autres qui sont connus sous le nom de commissions, mais qui sont en réalité des régies. Par exemple, je pense à la Commission de contrôle des permis d'alcool, à la Commission des transports, à la Commission des valeurs mobilières, à la Commission du salaire minimum, si l'on veut. Cela intéressera le ministre de savoir que parmi les organismes de régulation économique et technique, Me Gélinas, l'auteur de cet ouvrage qui est considéré comme le meilleur dans ce domaine, classe le Bureau de surveillance du cinéma.

M. Hardy: Comme une régie?

M. Morin: Oui, enfin, il considérait que ce bureau devrait avoir les fonctions d'une régie et être autonome. Mais c'est une parenthèse, parce que ce qui nous intéresse ce matin, c'est de savoir si l'institut que nous allons créer est une régie ou pas.

A mon avis, étant donné le mandat qui lui est confié, il s'agit bien d'une régie gouvernementale, mais d'une régie d'un type tout à fait spécial-parce qu'elle va réglementer un domaine qui touche à la création artistique, qui touche à la liberté d'expression, comme le dit l'article 47.

C'est pourquoi nous pensons qu'on ne doit pas permettre au ministre d'ajouter au mandat de

redéfinir annuellement ou tous les deux ans ou tous les trois ans le mandat qui est confié en vertu de l'article 47. Si, en effet, s'ajoute au mandat de droit public, confié par l'article 47 à l'institut, un mandat d'ordre privé, parce que ce contrat relèvera — j'imagine que le ministre en conviendra — du droit civil, puisqu'il s'agit d'une entente soumise aux règles du droit privé entre le gouvernement et l'institut, si, donc, un contrat d'ordre privé vient s'ajouter à un mandat d'ordre public, nous pensons qu'il s'agit d'un double contrôle trop étroit pour que soient respectées la liberté de création et d'expression ainsi que la liberté de choix des consommateurs.

J'ai déjà, d'ailleurs, fait valoir des arguments hier, je ne voudrais pas les répéter au complet. Il nous paraît que ce contrat va permettre au ministère d'exercer un contrôle trop étroit des politiques de l'institut, des choix qu'il sera appelé à faire dans l'exercice de son mandat. C'est pourquoi, compte tenu du fait que cette régie doit avoir une autonomie plus grande encore que les autres régies, étant donné qu'elle touche à des choses très délicates — le ministre en conviendra — étant donné que sa fonction réglementaire risque, si on n'y prend garde, de toucher à la liberté d'expression, risque, d'ailleurs, de provoquer des controverses à n'en plus finir si les bénéficiaires de l'institut ont le sentiment que le ministre tente de piloter l'institut, de lui dicter des choix, cela peut devenir un véritable nid de guêpes. Compte tenu de cela, je propose de biffer l'article 48 qui constitue une sorte de second mandat à la discrétion du ministre.

Voilà les arguments que j'avais à faire valoir et, selon la réaction du ministre, je me réserve de revenir sur la question plus en détail.

M. Hardy: M. le Président, devant une proposition comme celle que vient de formuler le député de Sauvé, je suis tenté — et je sais que vous allez être restrictif — d'engager un très long débat sur nos institutions politiques, sur le contrôle des fonds publics, sur les luttes historiques et héroïques que nous avons dû mener pour que les fonds publics soient sous le contrôle des représentants élus, enfin toute la théorie de notre régime démocratique.

Je serais également tenté, et j'espère un jour en avoir le loisir, de faire une étude sur le comportement actuel de certains partis politiques, de certains analystes...

M. Morin: Cela fera partie de vos mémoires, cela aussi?

M. Hardy: Non, non. C'est avant mes mémoires, cela.

M. Morin: Ah bon!

M. Hardy: Mes mémoires, c'est...

M. Morin: Vous avez beaucoup de pain sur la planche.

M. Hardy: Je vous l'ai dit; mes mémoires, c'est à l'âge de 90 ans. Donc, il me reste 50 ans pour écrire mes mémoires.

C'est pour démontrer comment, dans certains milieux — même si cela ne paraît pas à première vue mais on le voit quand on creuse un peu — on manque de confiance envers l'Etat, comment on est pessimiste quant au rôle de l'Etat. C'est d'autant plus paradoxal, dans la bouche du député de Sauvé, quand on lit le programme de son parti où, presque à chaque page, on voit l'intervention de l'Etat: L'Etat qui intervient ici, l'Etat qui intervient là, réglementation ici et réglementation là. Puis tout à coup, d'un autre côté, lorsque l'Etat agit par un autre parti que le sien, là, ce n'est plus bon.

Si un jour ce parti est au pouvoir, l'Etat devra intervenir, l'Etat devra être omniprésent. Mais tant et aussi longtemps que ce n'est pas ce parti omniscient, omnivertueux qui est au pouvoir, il faut éloigner l'Etat le plus possible de l'élaboration, de la mise en place des politiques.

Moi, M. le Président, je regrette. Quels que soient les partis politiques au pouvoir, mes principes fondamentaux face à la démocratie sont les mêmes. Je peux ne pas être d'accord, à un moment donné, sur la façon dont un parti politique exerce le pouvoir mais cela ne change pas chez moi ma conception fondamentale de la démocratie et du rôle de l'Etat.

Sans vouloir reprendre l'argumentation que j'ai faite hier, je vous dis que dans notre régime, que ce soit en matière culturelle, en matière économique, en matière sociale, il appartient à l'expression politique de la collectivité, à ceux qui assument le pouvoir au sein de l'Etat, de donner les grandes orientations. Il n'appartient pas au pouvoir politique de décider ce que les écrivains doivent écrire, quelle sorte de films les producteurs de films doivent faire. Mais il appartient à l'Etat de décider si, à un moment donné, on doit mettre l'accent sur la production de films ou sur la distribution de films, si on doit mettre l'accent sur le cinéma pour les jeunes plutôt que sur une autre forme de cinéma. C'est toute la différence entre le rôle de l'Etat qui établit le grand cadre de la politique et le respect de la liberté des créateurs.

C'est ce à quoi nous arrivons avec ce contrat. Avec le contrat et la loi, nous établissons les grandes orientations de ce que sera la politique cinématographique. Cela appartient à la collectivité de le dire par la voix de son gouvernement. Quand il s'agira d'appliquer concrètement, individuellement, ces grandes orientations, quand il s'agira de décider si on accorde une subvention à tel producteur plutôt qu'à tel autre, à tel réalisateur plutôt qu'à tel autre, à tel scénariste plutôt qu'à tel autre, là le gouvernement et le ministre des Affaires culturelles n'auront pas un mot à dire. C'est cela le respect de la liberté de la création.

Deuxièmement, M. le Président, confier totalement à l'institut, les grandes orientations de la politique culturelle, ceci voudrait dire qu'on les confie à un groupe bien déterminé et qui, de par la nature des choses, a des intérêts. Les producteurs, les propriétaires de salles, les réalisateurs,

les artisans, les distributeurs ont un intérêt financier et professionnel immédiat dans le domaine cinématographique. Qu'est-ce que l'on fait de la collectivité? Qu'est-ce que l'on fait du bien commun? Qu'est-ce que l'on fait du bien culturel de l'ensemble de la collectivité? Qui va le défendre? Je répète que la seule instance habilitée à défendre cet aspect, c'est le gouvernement et plus particulièrement le ministère des Affaires culturelles.

De plus, M. le Président, je souligne au député de Sauvé que dans leurs mémoires, les producteurs, l'Union des artistes, les exploitants de salles, les distributeurs, n'ont pas mis en cause le principe du contrat. Tout ce qu'ils nous ont demandé, c'est d'atténuer certains aspects et nous avons retenu leurs recommandations dans la nouvelle rédaction du projet de loi. De plus, M. le Président, je rappelle qu'à cause des changements presque annuels qui peuvent se produire dans le domaine cinématographique, il est extrêmement important que les mesures adoptées, que les programmes collent le plus possible à la réalité.

Pour ce faire, il faut que la politique de l'institut cinématographique évolue, colle à la réalité. Pour ce faire, je répète qu'il faut et l'appréciation du milieu cinématographique bien sûr, parce que c'est le milieu professionel, mais il faut également l'appréciation de ceux qui sont les mandataires de la collectivité.

Je répète que ce n'est pas le gouvernement qui va dicter le contrat. Un contrat — je ne répéterai pas cela au député de Sauvé, il le sait très bien — c'est le produit du consentement de deux parties.

M. Morin: Oui, mais qui paie?

M. Hardy: Le député d'Anjou sait cela.

M. Morin: Oui, il sait cela, j'espère.

M. Tardif: Ce n'est pas cela que vous m'avez enseigné.

M. Morin: Ce n'est pas la matière...

M. Hardy: Heureusement. Donc, ce sont les deux parties, le milieu professionnel et la collectivité, qui vont annuellement ou à tous les deux ans, selon les besoins, examiner la situation et qui, ensemble, vont décider ce qui est bon comme grande orientation: Est-ce que l'on va consacrer, au cours des deux ou trois prochaines années, telle proportion du budget à tel secteur ou à tel autre? Cela ne touche en rien la liberté de création. A l'intérieur du secteur donné, les créateurs garderont toute leur liberté, mais la grande orientation... C'est cela, l'orientation d'une politique, c'est par un budget. C'est de cette façon qu'on fait, d'abord et avant tout, une politique, c'est par des choix budgétaires.

Quand le gouvernement décide, par exemple, de consacrer tel pourcentage de l'ensemble de son budget aux Affaires sociales plutôt que de le consacrer aux Affaires culturelles, c'est parce qu'il fait des choix politiques. Cette année, quand le gouvernement a décidé d'accorder une augmentation de 32% au budget du ministère des Affaires culturelles, il a fait un choix politique, il a décidé de concrétiser, d'articuler, d'incarner dans la réalité le principe de la souveraineté culturelle. C'est un choix politique. Ce sera la même chose dans le domaine du cinéma.

Je rappelle, encore une fois, qu'en Suède, un pays dont les gens du Parti québécois — à moins qu'ils aient discontinué, depuis quelques mois — en particulier le chef du Parti québécois, s'inspiraient largement, entre autres à l'époque de Point de mire...

M. Morin: Avec discernement.

M. Hardy: Ah! vous commencez à discerner, vous commencez à trouver que la Suède est trop à gauche?

M. Morin: Non, pas assez.

M. Hardy: Pas assez à gauche? Le député de Sauvé dit que la Suède n'est pas assez à gauche?

M. Morin: Sur certains points non, sur certains points oui.

M. Hardy: Je serais presque tenté de dire que ce que vous dites là ressemble à du patinage de député.

M. Morin: Vous êtes un spécialiste, vous devriez le savoir.

M. Hardy: La Suède, qui est un pays très évolué sur le plan économico-social, est un pays qui a une très grande expérience dans le domaine cinématographique, vous en conviendrez.

M. Charron: Allez-vous en Suède bientôt? M. Hardy: Pardon?

M. Charron: Allez-vous en Suède bientôt? Vous aurez l'air d'un gars qui prépare les tapis rouges.

M. Hardy: Non, je ne vais pas en Suède. Je rappellerai au député de Saint-Jacques qu'il y a un an et demi que je suis ministre et que le seul voyage que j'ai effectué à l'extérieur du pays c'est pour aller au congrès des Franco-Américains l'automne dernier. Mon premier voyage en Europe sera dans quelques jours parce que, comme ministre, je refuse systématiquement de faire du tourisme. Quand je voyage, quand je vais en Europe comme touriste, j'y vais à mes propres frais. C'est parce que j'ai des questions bien importantes à discuter, entre autres dans le domaine cinématographique, que je me rends à Paris au cours des prochains mois.

Mais je suis très bien informé, par exemple. Il n'est pas nécessaire d'aller en Suède pour être très bien informé sur ce qui se passe en Suède.

J'ai des fonctionnaires qui y sont allés, en particulier celui qui est à ma droite; il a eu des rencontres avec tous les milieux cinématographiques de Suède et il m'a fait des rapports exhaustifs, complets, rigoureux sur ce qui se passe. Nous avons encore reçu, tout dernièrement, une lettre...

M. Morin: Par cris ou par chuchotements?

M. Hardy: Par écrit. Nous avons encore reçu, tout dernièrement, une lettre du directeur de l'Institut cinématographique de Suède qui a examiné notre loi et qui nous a fait ses commentaires. Ses commentaires, je dois le dire, sont très positifs.

Donc, la formule du contrat, c'est vraiment la Suède qui nous l'a inspirée parce que cette formule de contrat nous a paru celle qui concilie le plus parfaitement, dans un milieu en perpétuelle mouvance, dans un secteur qui évolue beaucoup, nous avons conclu que la formule du contrat était celle qui pouvait assurer le maximum d'autonomie à l'institut et assurer également au gouvernement l'exercice de ses responsabilités dans l'élaboration d'une politique cinématographique.

Je termine en vous disant que la formule du contrat n'est pas exclusive au domaine du cinéma. De plus en plus, c'est une formule que nous adoptons dans l'ensemble de nos interventions dans le domaine culturel et c'est une formule qui a de grands avantages. Elle a pour conséquence de ne pas mettre les organismes subventionnés dans un état de dépendance, dans un état de quêteur de fonds publics.

Par cette formule de contrat qui intervient de plus en plus avec les organismes, ceux-ci s'engagent — au fond, que ce soit une troupe de théâtre ou un orchestre, ces gens en quelque sorte sont, quand le gouvernement les subventionne, des aides, pour le gouvernement, pour diffuser la culture — ces organismes s'engagent à faires des choses, nous leur donnons une totale liberté. Quand le TNM vient nous voir, nous ne disons rien sur le contenu de sa programmation, nous n'intervenons pas sur le contenu de sa programmation, nous intervenons sur les budgets.

M. Charron: La Nouvelle compagnie théâtrale.

M. Hardy: Nous intervenons via le budget, mais pas sur le contenu. Ce n'est pas sur la matière elle-même. A un moment donné, nous disons à la Nouvelle compagnie théâtrale: Ecoutez, telle production, nous ne sommes pas capables de la subventionner, compte tenu de nos ressources financières cette année. Si vous êtes capables de compléter ce que nous pouvons vous donner d'une autre façon, allez-y. Mais c'est via les subventions, ce n'est pas via le contenu que nous intervenons. Vous le savez très bien, le député de Saint-Jacques le sait très bien qu'il y a des pièces actuellement dont la philosophie va totalement à rencontre de la philosophie du ministère et ces organismes reçoivent des subventions.

M. Charron: Celle de Molière, par exemple.

M. Hardy: L'AQJT. Je vous donne l'exemple de l'AQJT. Est-ce que vous prétendez que les pièces de l'AQJT sont conformes à la philosophie du gouvernement actuel?

M. Charron: Non.

M. Hardy: Et l'AQJT reçoit des subventions substantielles.

Donc, je dis et je conclus par ceci, que le contrat concilie d'une façon la plus parfaite possible l'autonomie, la liberté des créateurs et la responsabilité du gouvernement dans cette matière.

M. Morin: M. le Président, je ne suis pas d'accord. La meilleure façon de concilier l'intervention du gouvernement, l'intervention nécessaire du gouvernement et la liberté des créateurs, c'est de reconnaître l'autonomie véritable de cet institut. C'est-à-dire de lui laisser vraiment la liberté de choix entre les diverses priorités qui peuvent se présenter dans le domaine cinématographique.

Le ministre faisait allusion au fait que le programme du parti que je représente est interventionniste, et c'est vrai. Mais il l'est surtout dans le domaine de la gestion économique et de la gestion technique. L'on doit faire des distinctions, à moins de vouloir mettre ses gros pieds dans la porcelaine comme, il me semble, l'on s'apprête à le faire avec le contrat qui s'ajoute au mandat donné à l'institut.

M. Hardy: Où est la porcelaine et où sont les pieds?

M. Morin: Les pieds, ce sont les vôtres. La porcelaine, c'est la création artistique.

M. Hardy: Ce n'est pas gentil. Le député de Saint-Jacques a été très gentil, hier, pourquoi venez-vous gâter l'atmosphère?

M. Morin: M. le Président, ce sont des choses sérieuses et si le ministre acceptait nos suggestions et voulait se rendre à l'évidence, je pense que l'atmosphère serait beaucoup plus détendue.

M. Hardy: Si j'acceptais vos suggestions, à ce moment vous diriez que j'ai des petits pieds.

M. Morin: De toute façon, qu'on ait des petits ou des gros pieds, si on les met dans la porcelaine, cela risque de créer des dégâts, d'avoir des conséquences désastreuses. C'est là-dessus que je veux attirer l'attention du ministre.

M. Hardy: De toute façon, je n'ai pas les moyens financiers d'avoir de la porcelaine.

M. Morin: M. le Président, le domaine auquel nous touchons, c'est de la porcelaine. C'est un domaine délicat, c'est celui de la création artistique, c'est celui de la liberté d'expression. C'est pourquoi nous faisons une distinction fondamentale entre l'intervention de l'Etat dans la fonction

de gestion économique ou encore dans la fonction technique et la fonction de régulation comme celle qu'exercera l'institut que la loi va créer.

M. le Président, on ne peut pas comparer la gestion économique ou la gestion technique avec le genre de régulation de la vie artistique, de la spontanéité artistique. Ici, il s'agit d'une intervention fort délicate qui pourrait même être dangereuse si, par le truchement du contrat, le gouvernement se mettait dans la tête d'orienter, dans une direction qui fasse son affaire, la création artistique dans le domaine cinématographique. Je relisais l'article 48 et je me rends compte à quel point cela va loin, l'influence que pourrait avoir le gouvernement par le truchement de ce contrat. Cela porte sur les orientations que doit suivre l'institut, comme si ce n'était pas l'institut lui-même qui doit les déterminer.

M. Hardy: La collectivité.

M. Morin: La collectivité intervient par le mandat qu'elle confie à l'institut et elle peut contrôler ce mandat, vous le savez fort bien et elle peut même modifier le mandat.

M. Hardy: Comment?

M. Morin: En modifiant la loi, tout simplement. Bien sûr, j'imagine que le ministre sera d'accord pour reconnaître que, s'il nomme des membres de l'institut, comme il prétend le faire, c'est-à-dire démocratiquement, en tenant compte des suggestions du milieu, c'est encore l'institut qui va être le plus représentatif du milieu et de la collectivité.

M. Hardy: Du milieu cinématographique, pas de la collectivité.

M. Morin: Et aussi de la collectivité. M. Hardy: Voyons donc!

M. Morin: Mais plus que le ministre, en tout cas.

M. Hardy: Bien, voyons donc! Moi, je rends des comptes à tout le monde.

M. Morin: Le ministre veut-il me laisser terminer?

M. Hardy: Oui, d'accord. Mais c'est épouvantable, ce que vous dites.

M. Morin: Non, non. Le ministre sait très bien ce qu'il est en train de faire avec son contrat. Non seulement, il va régir les prinpales orientations de l'institut, mais...

M. Hardy: II me provoque.

M. Morin: Lisez votre article 48. Le contrat établit les orientations que doit suivre l'institut. Il détermine ses champs d'activité. Vous ne croyez pas que cela va un peu loi, M. le ministre? Non seulement cela, il détermine la limite des engagements financiers que l'institut peut prendre; il détermine les modalités d'exécution de ses fonctions. M. le Président, qu'est-ce qu'il reste comme autonomie à l'institut? Et tout cela peut être revu à la discrétion du ministre d'année en année. Le ministre nous dit: "Un contrat, cela se négocie d'égal à égal". Ce qu'il oublie de dire, c'est qu'entre le fort et le faible, entre celui qui a les fonds publics à sa disposition — ce sera le ministre — et l'institut qui va venir quémander chaque année ses fonds, il sait très bien qu'il n'y aura pas de véritable économie, de véritable liberté pour l'institut. Non, M. le Président, on a beau faire des sophismes et parler de démocratie, je pense que le ministre va devoir étudier longtemps avant de rédiger son opus magnum sur la démocratie. Il s'agit d'une régie qui doit jouir...

M. Hardy: Vous m'inspirez beaucoup.

M. Morin: J'ai hâte de vous lire pour connaître un peu les fondements de votre conception de la démocratie. En tout cas, je la trouve drôlement triturée dans les arguments que vous venez de nous livrer. Il s'agit d'une régie qui doit jouir d'une très grande autonomie. Il doit y avoir intervention de l'Etat, mais une intervention subtile, une intervention qui n'a pas pour effet de brimer la créativité, d'orienter la créativité. C'est pourquoi nous pensons que cet institut doit avoir une très large part d'autonomie. Sans cette autonomie, si le ministre peut, chaque année faire comparaître l'institut pour lui dire: Vos orientations l'année dernière, ne me convenaient pas, vos modalités de fonctionnement, vos modalités d'exécution du mandat que la loi vous a confié ne me convenaient pas, le ministre sait très bien que c'est lui qui aura le gros bout du bâton, parce que c'est lui qui aura les fonds. L'institut sera obligé de se plier à ces exigences et l'institut pourra de la sorte abandonner ce qu'il considère peut-être comme une meilleure politique, politique qui devrait être déterminée en pleine autonomie dans un champ d'activité aussi délicat que celui-là. Je ne suis pas le seul à le dire. Si j'étais le seul à élaborer des théories de la démocratie, peut-être pourrais-je me sentir isolé et peut-être pourrais-je me dire que le ministre a des fondements plus sûrs que les miens, mais ce n'est pas le cas. Je fais allusion au mémoire de l'Institut canadien de l'éducation des adultes qui me paraît un organisme extrêmement scrupuleux.

M. Hardy: Je vous en ai cité quatre, moi.

M. Morin: Dans ce mémoire, je crois qu'on a très bien résumé la situation. On y dit: "S'il est normal de reconnaître au ministre le droit d'élaborer et de proposer un projet de loi pour être voté par l'Assemblée nationale ainsi que d'en surveiller, au nom de celle-ci, l'application, il nous apparaît, par ailleurs, indispensable de confier à une régie autonome la mise en oeuvre des objectifs, l'application de la loi et la coordination de l'exécution de celle-ci. L'Institut canadien d'éducation des adultes propose — et je continue de citer le

texte — pour contrer les deux facteurs d'ingérence politique que sont la centralisation et les pouvoirs discrétionnaires, la création d'un office qui jouirait donc d'une très grande autonomie et qui serait entouré d'un conseil consultatif."

M. le Président, si l'on voulait vraiment un organisme pleinement autonome qui, en même temps, refléterait parfaitement les besoins et les ententes du milieu, on créerait un organisme qui ne dépendrait pas du ministère par le truchement de ce contrat, et on l'entourerait d'un conseil consultatif, d'un conseil...

M. Hardy: C'est possible.

M. Morin: Je sais que cela est possible; mais pourquoi ne le prévoyez-vous pas dans la loi? Pourquoi ne le créez-vous pas dans la loi?

M. Hardy: Parce qu'on laisse l'autonomie à l'institut de décider s'il aura besoin ou non d'un conseil consultatif; on ne le décide pas.

M. Morin: C'est au législateur de décider de cela, ce n'est pas à l'institut.

M. Hardy: L'institut aura...

M. Morin: L'institut peut très bien décider de s'enfermer derrière des portes closes, tandis qu'un conseil consultatif...

M. Hardy: Là, vous n'avez plus confiance en l'institut.

M. Morin: ... serait une excellente façon de régler le problème.

M. Hardy: Est-ce que le député de Sauvé se relit parfois? Dans deux minutes vous vous contredisez d'une façon effroyable.

M. Morin: Le ministre veut-il me laisser terminer? J'achevais.

M. Hardy: Oui, très bien, mais je vous dis que c'est difficile de vous écouter parce que...

M. Morin: Ensuite il pourra montrer les prétendues contradictions qu'il y a dans ce que je dis. Je voudrais que cet organisme soit à la fois pleinement autonome, et non pas qu'il soit dans la main du ministre chaque année. Il va revenir dans les mains du ministre chaque année. Il aura à se soumettre aux politiques générales du ministère. Ce n'est pas ce que j'appelle un organisme autonome. C'est le ministre, et non pas l'institut, qui va déterminer les orientations que doit suivre l'institut, ses champs d'activité, les limites de ses engagements financiers, les modalités d'exécution de ses fonctions. Alors, que reste-t-il à l'institut comme liberté de choix et d'intervention dans ce domaine?

M. le Président, je prétends que le gouvernement et le ministre se comportent comme un éléphant dans un magasin de porcelaine...

M. Hardy: Cela est exagéré un peu.

M. Morin: On verra, au cours des années qui viennent, que vous serez aux prises avec les difficultés de cet institut, et que la responsabilité vous en retombera sur le dos, car on dira: L'institut est une créature du ministre, donc c'est le ministre qu'il faut aller voir, c'est le ministre qu'il faut influencer, c'est le ministre dont il faut faire la bouche, dont il faut essayer de circonvenir les préventions. Vous aurez, dans les milieux cinématographiques, des difficultés à n'en plus finir. On saura bien que, derrière l'institut, il y a la main subtile et gantée, mais la main puissante du gouvernement.

M. le Président, plus j'examine cet article 48 plus je me convaincs qu'on doit le biffer complètement. Autrement, c'est purement du décor que de nous parler d'un institut autonome. Cet institut sera, de fait, entre les mains du gouvernement.

M. Hardy: M. le Président, voyez-vous les contradictions? Dans l'espace de deux minutes, le député de Sauvé m'a dit que nous agissions comme un éléphant et, deux minutes plus tard, il parle de main gantée; seulement dans les images, il y a une contradiction flagrante.

M. Morin: Un éléphant ganté.

M. Hardy: C'est très subtil. M. le Président, les contradictions du député de Sauvé sont d'une telle énormité. S'il fallait qu'un ministre du gouvernement professe en si peu de temps les mêmes contradictions que le député de Sauvé, ce serait la manchette dans les journaux. Vous êtes chanceux d'avoir la sympathie des journaux. Au fond, je vous envie. S'il fallait que l'un de nous, de ce côté-ci de la table, professe le dixième des contradictions que vous professez dans la même période, ce serait un scandale public.

M. Morin: .... au fond de la question.

M. Hardy: Je vous donne un exemple: Dans deux phrases qui se sont suivies, le député de Sauvé a dit: II faut que l'institut ait une autonomie pleine, entière, totale, complète, etc.," et, deux secondes plus tard, il me dit: "Ce n'est pas à l'institut de se donner un conseil consultatif, c'est au gouvernement". Donc, vous refusez à l'institut de se donner les mécanismes dont il jugera avoir besoin.

M. Morin: Voyons donc!

M. Hardy: Vous n'avez pas confiance en l'institut. Deux contradictions.

M. Morin: Comme sophisme, là...

M. Hardy: M. le Président, le député de Sauvé nous dit aussi: Oui, bien sûr, dans le domaine économique, nous sommes un parti interventionniste, mais pas dans le domaine culturel. Mais comment le député de Sauvé peut-il faire cette démarcation absolue entre la vie économique et la

vie culturelle? Le député de Sauvé devrait très bien savoir que, si l'on intervient massivement dans le domaine économique, on intervient, par voie de conséquence, dans la vie des individus, et que si l'on intervient dans la vie des individus, on intervient par le fait même sur leur comportement culturel. Tout cela se tient. On ne peut pas couper cela avec un couteau, la vie culturelle, la vie économique et la vie sociale. C'est un tout, et si vous intervenez massivement dans la vie économique d'une collectivité, vous intervenez dans la vie quotidienne des individus et, par voie de conséquence, vous intervenez dans leur comportement culturel.

M. Morin: Oui, mais tout est dans la manière.

M. Hardy: Je n'ai pas terminé, bien sûr, et j'écouterai avec grand plaisir l'intervention du député de l'Assomption qui, dans cette matière comme dans toutes les autres, est très valable.

M. Le Président, c'est évident que l'on oriente...

M. Charron: Même le député de l'Assomption rit de ce que vous venez de dire.

M. Hardy: II ne rit pas parce que le député de l'Assomption sait très bien qu'au cours des récentes semaines, j'ai tenu largement compte des observations qu'il m'a formulées car, en plus d'être un représentant d'une collectivité, le député de l'Assomption est également un cinéphile. Vous ne saviez pas cela?

M. Charron: Le ministre, lui, est cinéphage.

M. Hardy: M. le Président, le député de Saint-Jacques veut, volontairement, malicieusement, m'empêcher de répondre au député de Sauvé. Le fait de déterminer dans un contrat que 40% du budget de l'institut sera consacré à la production, je répète que ce n'est pas une façon d'intervenir dans la liberté de création, parce qu'à l'intérieur de cette enveloppe de 40% l'institut aura la totale liberté de répartir cer argent. Il pourra accorder cet argent à qui il voudra. Mais encore une fois je pense que la collectivité a le droit de donner des priorités. Je regrette, l'institut ne sera pas le mandataire de la collectivité. L'institut sera le mandataire des gens des secteurs qui sont déterminés dans la loi. L'institut sera le mandataire des producteurs, des réalisateurs, des distributeurs, des artisans de cinéma...

M. Morin: De la collectivité aussi.

M. Hardy: Comment pouvez-vous m'expliquer que...

M. Morin: C'est l'Assemblée qui lui donne le mandat, et l'Assemblée parle au nom de la collectivité. C'est ce que m'expliquait tout à l'heure le ministre.

M. Hardy: C'est justement ce que le député de

Sauvé ne comprend pas ou ne veut systématiquement pas comprendre. Les orientations que la collectivité va donner à la politique cinématographique sont à la fois contenues dans la loi et contenues dans un contrat, parce qu'une loi, ce n'est pas une chose qu'on modifie annuellement.

Or, la situation, dans le domaine du cinéma, évolue constamment et elle peut évoluer beaucoup d'une année à l'autre. Les dernières années le démontrent. Si on attend, pour modifier la loi, la politique cinématographique, que les orientations collent à la réalité, on risque que les orientations soient en retard de deux, trois ou quatre ans sur la réalité. C'est ce que nous ne voulons pas. Nous voulons que l'action de l'institut colle le plus possible à la réalité. On y arrivera à la fois par le grand cadre très général déterminé par la loi et par ce contrat qui, encore une fois, sera le produit non pas du gouvernement seul, mais du mandataire de la collectivité qu'est le gouvernement, et le produit des professionnels du milieu cinématographique.

Je regrette, mais le député de Sauvé fait une grave erreur en prétendant que l'institut est le mandataire de la collectivité. L'institut, dans son comportement quotidien, est le mandataire du milieu cinématographique, et nous faisons confiance à ce milieu cinématographique...

M. Morin: C'est l'assemblée qui lui donne le mandat.

M. Hardy: Nous lui accordons, à l'intérieur d'une répartition très générale, le mandat d'appliquer la politique cinématographique. C'est l'institut, c'est le milieu du cinéma qui, encore une fois, va déterminer dans quelle production, dans quel genre de production, à quel film les fonds publics seront consacrés. Quelle serait la réponse du député de Sauvé si, à un moment donné, on n'avait pas ce contrat pour déterminer les grandes orientations. L'institut, encore une fois, est l'émanation du milieu cinématographique uniquement ou presque uniquement. Le ministre pourra nommer deux personnes. Encore faudra-t-il que ces personnes soient approuvées par le milieu cinématographique. Qu'est-ce que le député de Sauvé, le ministre des Affaires culturelles, le premier ministre ou un membre du gouvernement répondrait à la population si, à un moment donné, celle-ci disait au gouvernement: "Nous ne sommes pas d'accord sur la façon d'agir de l'institut, nous croyons que l'institut accorde trop...

M. Morin: Je vous ai dit, il y a un instant, ce qu'il convenait de faire.

M. Hardy: Amender la loi?

M. Morin: Créez dès maintenant le conseil consultatif et arrangez-vous pour qu'il soit vraiment représentatif du milieu.

M. Hardy: Un conseil consultatif n'a pas de pouvoir de décision.

M. Morin: Vous donnez à l'institut le pouvoir

de créer son propre conseil consultatif, croyez-vous que vous allez vraiment de la sorte avoir l'opinion publique? Allons donc!

M. Hardy: D'abord, l'institut a le pouvoir de se donner un conseil consultatif et même si...

M. Morin: C'est vous qui devriez déterminer les membres de ce conseil consultatif.

M. Hardy:... il y avait un conseil consultatif de nommé exclusivement par le ministre, l'institut ne serait pas oubligé de se soumettre à l'opinion du conseil consultatif. Le député de Sauvé sait très bien qu'un conseil consultatif ne peut faire que des recommandations. L'institut est un organisme privé, une corporation autonome au sens du code civil. De quelle façon l'institut serait-il obligé de se soumettre aux avis d'un conseil consultatif?

M. Charron: Mais il va être obligé de se soumettre aux avis du gouvernement. C'est cela que vous voulez dire?

M. Morin: Là, on y est.

M. Charron: II ne serait pas obligé de se soumettre aux avis du conseil consultatif, mais, par votre loi, il va être obligé de se soumettre aux avis du gouvernement.

M. Hardy: J'en viens à ceci. Dans sa grande thèse, le député de Sauvé nous dit...

M. Morin: Ah!

M. Hardy: ... un contrat! Mais il y aura inégalité des parties parce qu'une des parties fournit l'argent et l'autre partie, évidemment, est un peu...

Si vous réfléchissez deux minutes, au fond, ce que vous nous demandez de faire et ce que nous refusons de faire, c'est d'être hypocrites.

M. Morin: C'est de créer un organisme autonome, vraiment autonome.

M. Hardy: M. le Président, je n'ai pas interrompu le député de Sauvé ou, du moins, je me suis efforcé de ne pas l'interrompre.

M. Morin: D'accord.

M. Hardy: Qu'il y ait contrat ou non, ce sera toujours le gouvernement qui va subventionner l'institut. Or, nous voulons agir d'une façon claire et précise devant l'opinion publique. S'il n'y a pas de contrat, qu'est-ce qui va arriver? Le pouvoir de marchandage du gouvernement reste le même. Il n'y a pas de contrat, nous nous rangeons à votre opinion, nous biffons l'article. Or, annuellement, le gouvernement est appelé à remettre des subventions à l'institut, qu'est-ce qui arrive à ce moment? Il peut y avoir du "grenouillage". J'espère que ce n'est pas ce que vous voulez.

M. Morin: Au sein du gouvernement?

M. Hardy: Laissez-moi terminer. S'il n'y a pas de contrat, le ministre peut faire venir l'institut et lui dire: Ecoutez, messieurs, vous allez avoir $3 millions, $4 millions cette année, mais à la condition que vous fassiez telle chose, telle chose et telle chose. Tout cela ne paraît nulle part, ce n'est pas vérifiable par l'opinion publique. Les gens de l'institut repartent en disant: Bien, si on veut avoir notre argent, mieux vaut se soumettre au diktat du ministre. Cela ne sera pas vérifiable par l'opinion publique.

Or, nous vous suggérons de procéder au grand jour, devant le grand public, au lieu de donner des instructions à l'institut in camera. Nous voulons que ce soit consigné, couché dans un contrat qui sera déposé à l'Assemblée nationale, qui pourra être critiqué par les représentants de l'opinion publique. Quand je déposerai le contrat intervenu entre le ministre et l'institut, vous pourrez dire, vous, député de Sauvé, comme tous les autres membres de l'Assemblée nationale: Nous sommes en désaccord sur les orientations contenues dans ce contrat. Vous avez déterminé que 40% iraient à la production, nous ne sommes pas d'accord sur ça. C'est 50% qui auraient dû aller à la production et 30% à la distribution.

La chose sera faite au grand jour, tandis que si nous biffons l'idée du contrat, les choses se feront in camera, en catimini, derrière les rideaux, parce que ce sera toujours le gouvernement qui donnera la subvention.

M. Charron: Ce n'est pas vrai, parce que...

M. Hardy: C'est toujours le gouvernement qui va donner la subvention.

M. Charron: Oui, mais vous avez l'exemple, très voisin, de la SDICC; statutairement, le montant que reçoit la SDICC est dans la loi qui l'a créée. Donc, il n'y a pas de "bargaining" dans cette affaire. C'est tant de millions de dollars par année qui vont à la SDICC et on pourrait très bien dire, ici: Le budget de l'institut sera de $6 millions provenant du fonds consolidé. Moi, j'aurai l'occasion de vous suggérer plus tard qu'on permette à l'institut de se trouver des fonds augmentant son pouvoir d'action à partir d'une taxe spéciale qui serait prise sur la projection de films étrangers dans nos salles...

M. Hardy: Eventuellement...

M. Charron: ...comme cela se fait dans d'autres pays que vous connaissez.

M. Harvey: ... nous pourrions arriver à cela. Mais, pour le moment, ce serait imprudent de déterminer le montant dans le projet de loi, parce qu'il faut quand même voir de quelle façon le tout va s'administrer.

Je le répète: Nous manquons de beaucoup de renseignements, renseignements que la loi nous autorise à obtenir. Mais fixer maintenant un montant, ce pourrait être péjoratif pour le milieu cinématographique, parce qu'encore une fois une loi,

cela ne s'amende pas d'une semaine à l'autre. Vous le savez très bien. Cela a pris douze ans pour cette loi-ci. Je ne dis pas que cela prendra douze ans pour l'amender. Mais on sait très bien qu'on n'amende pas une loi du jour au lendemain.

Or, ce serait imprudent, maintenant, de fixer le montant dans le projet de loi. Encore une fois, après une expérience de trois, quatre ou cinq ans, quand on saura un peu de quelle façon s'oriente l'institut, on pourra peut-être, à ce moment-là, fixer un montant annuel.

M. Charron: L'augmenter ou l'étouffer.

M. Hardy: Mais, pour le moment, nous considérons que le montant doit être fixé annuellement ou à tous les deux ans. Je répète que le contrat est une façon, pour l'opinion publique, de savoir exactement ce que son gouvernement veut, les orientations que le gouvernement veut donner à la politique cinématographique. Si les orientations que le ministre donne dans un contrat ne sont pas conformes à ce que veut l'opinion publique, bien il y a des mécanismes de contrôle, des mécanismes démocratiques, soit par l'Assemblée nationale ou par d'autres moyens.

M. le Président, je répète que le moyen du contrat, d'une part, respecte totalement la liberté de création et surtout empêche que les choses ne se fassent derrière les rideaux. Nous voulons que les choses se fassent au grand jour, ouvertement, devant l'opinion publique. Le ministre aura à répondre de son action devant l'opinion publique.

M. Morin: La négociation n'aura pas lieu au grand jour. C'est après.

M. Hardy: Non, mais le contrat.

M. Morin: Vous allez nous mettre devant des faits accomplis, après. Ce n'est pas la même chose.

M. Hardy: La négociation pourra se faire au grand jour. L'institut pourrait très bien, pendant les négociations, lui qui sera parfaitement autonome, aller dire à l'opinion publique: Voici, le ministre exige telle chose et nous ne sommes pas d'accord. Les négociations pourront se faire au grand jour. Il pourra y avoir des rapports faits à l'opinion publique. Le ministre pourra répliquer et dire: C'est vrai que l'institut exige telle chose, mais nous, pour telles raisons, nous en exigeons d'autres. C'est ça, la démocratie.

Le Président (M. Kennedy): Le député de L'Assomption.

M. Perreault: M. le Président, je souscris aux propos du ministre et je suis prêt à concéder au député de Sauvé que l'institut s'assimile à une régie.

Cependant, je ne peux souscrire à la philosophie du Parti québécois et à ce que l'on a vu depuis quelques années, au dépouillement du droit de regard des élus du peuple en confiant de larges secteurs aux régies d'Etat. Je dis ceci depuis plusieurs années. Il est malheureux que les élus du peuple n'aient pas un droit de regard sur les régies d'Etat. Quand une régie d'Etat fait un bon coup, c'est en sa faveur. Quand elle fait une bévue ou un mauvais coup, c'est le gouvernement qui écope.

Le député de Sauvé disait tout à l'heure: Quand les problèmes retomberont sur le dos du ministre, il verra qu'il aurait dû créer un institut autonome. Depuis cinq ans que je suis ici, combien de fois aie-je vu l'Opposition tomber à bras raccourcis sur le gouvernement pour des problèmes issus de régies autonomes? Et on a blâmé, chaque fois, le gouvernement, quand c'étaient des bévues commises par ces régies autonomes.

Alors, je considère que les élus du peuple doivent conserver un droit de regard sur les régies et les organismes issus de l'Etat et qu'on arrête de dépouiller les élus du peuple de leurs pouvoirs.

Le Président (M. Kennedy): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, le ministre, dans son intervention, a voulu souligner des contradictions dans les propos du chef de l'Opposition en disant que tantôt le chef de l'Opposition avait demandé de l'autonomie et, tantôt, il réclamait le contraire, puisqu'il refusait que ce soit de l'institut que relève la création d'un comité consultatif.

Il n'y a pas de contradiction là-dedans; il y a une façon de procéder. Quelles sont les responsabilités du gouvernement? Les responsabilités du gouvernement, on s'en acquitte aujourd'hui. Ensuite, cela devient la responsabilité de l'institut.

A mon avis, on équipe, on bâtit l'institut et on lui laisse son autonomie par la suite. On ne fait pas l'oeuvre à moitié. On ne le crée pas à moitié autonome et à moitié dépendant; le laisser vivre à moitié autonome et à moitié indépendant; le soumettre, d'année en année, à un quémandage qui annihile son indépendance et par la suite, lorsque les mauvaises décisions seront prises par cet institut, à lui refoulerson autonomie, en disant — c'est le contraire des propos que vient de tenir le député de l'Assomption — ce n'est pas ma faute, c'est l'institut, puisqu'il est autonome.

Ne faisons pas les choses à moitié et surtout n'obligeons pas cet institut à fonctionner à moitié. Que le gouvernement s'acquitte aujourd hui de ce qu'il estime être sa responsabilitél

Sa responsabilité aujourd'hui, c'est de créer l'institut. De dire dans la loi de combien l'institut disposera d'argent. De lui fixer un mandat, comme les articles 49, 50 et 51 lui donnent et de leur préciser davantage, s'il estime que cela doit être fait. De dire, s'il estime, comme le dit le ministre, que l'institut sera représentatif du milieu cinématographique et non seulement du public. De s'arranger pour que le public soit aussi partie prenant des décisions de l'institut. De créer cet organisme suggéré à partir de l'ICEA, et de le poser comme adjoint permanent de l'institut dans les décisions qu'ils doivent prendre. Mais après c'est fini. Après, c'est l'autonomie de l'institut.

M. Hardy: Me permettriez-vous une question? M. Charron: Oui.

M. Hardy: Est-ce que vous considérez que ce comité consultatif dont vous parlez, même en s'ef-forçant de faire les choix les plus judicieux, est aussi représentatif de l'opinion publique de la collectivité que le Parlement et le gouvernement qui en sont l'émanation?

M. Charron: Je me demande pourquoi vous me posez cette question.

M. Hardy: Pour avoir une réponse.

M. Charron: Des comités consultatifs dans d'autres matières, votre gouvernement dont vous êtes membre, vous avez endossé la création de ces comités à plusieurs reprises, à tour de bras.

M. Hardy: Oui, mais on se réserve le droit d'accepter ou de refuser.

M. Charron: Bien sûr.

M. Hardy: Mais là, vous voulez créer un comité consultatif et vous voulez nous enlever notre droit de regard dans le contrat. S'il n'y a plus de contrat, il n'y a plus de droit de regard. S'il n'y a pas de contrat, l'institut peut faire ce qu'il veut. C'est l'institut qui va orienter les grandes politiques.

M. Charron: M. le Président, je suis membre de cette commission qui étudie, à l'occasion, la situation de Radio-Québec.

M. Hardy: Oui.

M. Charron: L'Office de radio et de télévision québécois est autonome. Ce que le ministre des Communications a pris comme responsabilités, et c'étaient les siennes, c'est le budget de l'Office de radio et de télévision québécois.

Il est responsable du mandat, parce que c'est lui qui a parrainé la loi, qui l'a présentée ici. Il a procédé, avec le lieutenant-gouverneur en conseil, à la nomination des membres du conseil d'administration de l'Office de radio et de télévision québécois.

Il a l'occasion, en Chambre, d'intervenir. On l'a vu dans le cas de l'embauche de M. Laurent Laplante à Radio-Québec.

M. Hardy: II a le droit de se plaindre. M. Charron: Et de le faire. M. Hardy: II a le droit...

M. Charron: Mais l'Office de radio et de télévision québécois...

M. Hardy: II a le droit d'avouer son impuissance.

M. Charron: L'Office de radio et de télévision québécois ne fonctionne pas par contrat annuel avec le ministère des Communications.

M. Hardy:... si cela fonctionnait par contrat.

M. Charron: Voilà.

M. Morin: Voilà.

M. Hardy: Oui je le dis.

M. Charron: Vous avez peur de l'autonomie de cet institut... Votre contrat, c'est le moyen de contrôler cetta autonomie.

M. Hardy: C'est le moyen d'établir les grandes orientations, oui.

M. Morin: Et de mettre M. Laplante dehors. C'est bien cela?

M. Hardy: Non. Non, pas tout à fait cela. M. Morin: C'est cela que vous vouliez dire?

M. Hardy: Non, dans le contrat... M. Laplante, je ne vous dis pas que si j'étais directeur de Radio-Québec, je ne le mettrais pas dehors pour incompétence, mais ce n'est pas cela que je veux du tout.

M. Charron: Pourquoi l'Office de radio et de télévision du Québec ne fonctionne-t-il pas par contrat annuel avec le ministère des Affaires culturelles?

Votre collègue des Communications, lorsque nous avons fait l'étude des crédits annuels de Radio-Québec, a tenu ferme à ce que jamais l'Office de radio et télévision québécois ne soit soumis à une négociation, pour ne pas se trouver dans la même situation que celle de l'ORTF, par exemple.

M. Hardy: Est-ce qu'il est interdit à un gouvernement d'innover, de progresser?

M. Charron: Vous êtes en train de reculer. M. Hardy: Selon vous.

M. Charron: Ce n'est pas interdit à un gouvernement de reculer. Je vous prie de me croire, cela fait cinq ans que j'assiste au spectacle.

M. Hardy: Selon d'éminents juristes en droit administratif, on nous a dit que notre formule était une très heureuse innovation sur le plan juridique.

M. Charron: Sur le plan juridique, lorsqu'il s'agit d'un organisme carrément administratif et qui n'a qu'à faire l'administration d'un certain nombre de responsabilités qui lui sont fixées, il se peut que ce que le ministre appelle son innovation, mais qui est puisé dans ce qu'il y a de plus vieux dans le code civil, je ne vois pas très bien ce

qu'il y a d'innovation là-dedans, mais, lorsque nous parlons de l'institut du cinéma, lorsque nous intervenons dans le champ culturel de l'activité québécoise, c'est une innovation qui constitue un recul. Je pense que ce que ce même gouvernement a pris comme initiative dans le domaine de la câblodiffusion, dans le domaine de la câblodistri-bution, dans le domaine de la radio-télévision québécoise, devrait être un acquis pour les Québécois et non pas un recul comme nous le faisons. De toute façon, l'amendement présenté par le chef de l'Opposition doit être soumis aux voix...

M. Hardy: Oui.

M. Charron: ...mais il rn'apparaît essentiel, et c'est peut-être pour cela que la discussion a duré, que la création de l'institut soit évaluée dans sa juste réalité. Tant que figurera, en appendice à la création de l'institut, l'article 48 que le chef de l'Opposition nous invite à biffer, il faudra toujours prendre avec un grain de sel ce que le ministre nous en dira.

M. Hardy: M. le Président, avant qu'on passe au vote, et je reprends l'argumentation du député de L'Assomption, fondamentalement, même si vous essayez d'envelopper cela dans la littérature, c'est un manque de confiance que vous avez à l'endroit de la démocratie, à l'endroit de la population qui élit ce gouvernement. C'est cela que vous dites. Au fond, vous dites à la population: Mesdames, messieurs, les Québécois, vous vous êtes trompés, vous vous êtes donné un gouvernement. Ce gouvernement, il faut l'empêcher le plus possible d'agir parce que c'est un mauvais gouvernement.

M. Morin: Méfiez-vous-en.

M. Hardy: Vous dites à 55% des Québécois: Messieurs les Québécois, vous n'êtes pas assez évolués, vous vous êtes donné un gouvernement qui agit mal. Même si un jour les Québécois élisaient majoritairement le Parti québécois, je respecterais la décision des Québécois parce que j'ai assez de respect pour la démocratie, mais vous n'avez pas de respect pour la démocratie.

M. Morin: Vous ne critiqueriez pas un gouvernement péquiste?

M. Hardy: Vous respectez... Je pourrais critiquer des décisions comme telles, mais jamais, même s'il y avait un gouvernement péquiste, je ne poserais des gestes pour rogner, pour faire abdiquer à ce gouvernement son rôle, sa responsabilité comme mandataire de la population. C'est cela que vous voulez faire par des voies détournées, par des phrases, sous des thèmes, la démocratie, l'autonomie. Au fond, avec votre autonomie à des groupes particuliers, vous niez la plus grande représentativité qui existe dans une collectivité, c'est-à-dire la souveraineté populaire qui s'exprime par l'élection de députés dans un Parlement, lesquels choisissent un exécutif. C'est cela, au fond, votre thèse.

M. Morin: Que le ministre...

M. Hardy: Je vous le dis, il faudra un jour... Nous avons de la difficulté à expliquer cette attitude de votre parti qui, je le répète, est une attitude antidémocratique parce que les media vous sont extrêmement sympathiques et les media font tout pour voiler cet aspect de votre pensée. Fondamentalement, vous êtes antidémocratiques. Vous voulez enlever des pouvoirs au Parlement souverain pour les confier à des organismes privés. C'est cela que vous faites. Peut-être que, pendant un certain temps, les media vont réussir a cacher cet aspect de votre pensée politique. Un jour, nous finirons bien par réussir à démontrer à la population vos véritables motifs, votre véritable inspiration et que vos véritables motifs, le véritable fondement de votre pensée qui se dévoile à l'occasion d'un débat comme celui-ci et qu'on peut voir à l'occasion de beaucoup d'autres débats, votre véritable motivation, c'est d'enlever des pouvoirs au Parlement souverain; donc, c'est d'enlever à la collectivité, à l'ensemble de la population, des pouvoirs d'intervention en matière politique.

M. Morin: M. le Président, puisque nous parlons de fondement de la pensée et des attitudes, que le ministre nous le dise donc carrément, qu'il se méfie des milieux créateurs québécois, qu'il se méfie des gens de cinéma et qu'il veut être bien sûr...

M. Hardy: On va leur donner $4 millions à administrer.

M. Morin: C'est à mon tour de parler... Qu'il se méfie de ces gens et qu'il veut pouvoir, chaque année, contrôler les orientations que doit suivre l'institut, les champs d'activité de l'institut, les limites des engagements financiers, les modalités d'exécution des fonctions et du mandat de l'institut. Que le ministre nous dise donc que ces milieux, le gouvernement s'en méfie, qu'il les craint.

M. Hardy: C'est faux.

M. Morin: Mais vous n'agiriez pas comme vous agissez si vous aviez confiance en ces milieux, si vous aviez vraiment confiance...

M. Hardy: Vous, vous vous méfiez du peuple.

M. Morin: Non, je me méfie du gouvernement actuel, ce qui n'est pas la même chose.

M. Hardy: Vous vous méfiez du peuple, parce qu'à maintes reprises, le peuple a dit qu'il n'avait pas confiance en vous.

M. Morin: Je me méfie... M. Hardy: Pas de problème.

M. Morin: ... du gouvernement actuel, ce qui n'est pas la même chose, parce qu'il ne reflète pas les besoins du peuple.

M. Hardy: Qui a élu le gouvernement? M. Morin: 55% de la population... M. Hardy: Ah ah!

M. Morin: ... mais il y a 45% de la population que le ministre oublie et qui a le droit de poser des questions. Nous ne contestons pas la nécessité de l'intervention de l'Etat dans ce domaine, mais nous disons que lorsqu'on touche à la créativité, lorsqu'on touche au domaine artistique, lorsqu'on touche à des domaines qui sont fondés par excellence sur la liberté d'expression, l'Etat doit se faire subtil. Ce n'est pas parce que vous avez été élu par 55% de la population que vous avez le droit de contrôler tout ce que va faire cet institut. Cest ça que nous vous disons.

Et j'invite le ministre à faire preuve d'un peu plus de subtilité. J'invite le ministre à revenir aux propos que je tenais tout à l'heure, au début de ce débat et à comprendre que l'intervention de l'Etat ne peut pas être la même, ni avoir les mêmes modalités, selon la fonction consultative, judiciaire, technique, gestionnaire et selon le domaine d'activité auquel elle s'adresse. C'est pourquoi il nous paraissait que les solutions que nous avons mises de l'avant étaient plus subtiles et plus adaptées à la liberté dont doivent jouir ces milieux. Si le gouvernement ne s'en méfiait pas tant, comme il se méfie d'ailleurs de la presse, on voyait dans les propos du ministre tout à l'heure...

M. Hardy: Je ne me méfie pas, c'est la réalité.

M. Morin:... cette jalousie à l'égard de l'Opposition...

M. Hardy: Une certaine envie, bien sûr.

M. Morin: ... cette envie qu'il manifeste à l'égard de l'Opposition

M. Hardy: C'est évident. Je serais heureux si on avait seulement 50% de la sympathie que vous avez de la presse. Je ne vous demande pas 100%.

M. Charron: Vous avez eu la première page de la Presse hier.

M. Morin: M. le Président, peut-être que nous arrivons au point où il faut dire: Trêve de débats...

M. Hardy: Probablement que les gens de la presse, quand ils ont lu le discours du député de Sauvé, de la veille, ont dit: Franchement, pour le lui faire comprendre, il faut lui écrire ça en grosses lettres.

M. Morin: M. le Président, je crois que maintenant, on doit dire: Trêve de débats, que le gouvernement, que le ministre prenne ses responsabilités. Mais, nous en reparlerons, on verra les conséquences de ça par la suite.

M. Hardy: Je termine en disant que lorsque vous parlez de subtilités, c'est sûr, c'est vrai que c'est très subtil votre histoire, c'est d'une très grande subtilité, encore une fois, pour enlever au peuple souverain son pouvoir.

M. Morin: Allons donc! M. Hardy: Votre...

Le Président (M. Kennedy): Le député de Jacques-Cartier a demandé la parole.

M. Saint-Germain: J'aimerais ajouter, M. le Président, que je suis un peu surpris qu'on veuille biffer cet article, je crois qu'en le biffant, le gouvernement se départirait de responsabilités qui lui appartiennent en propre et ces responsabilités, c'est la politique cinématographique du Québec. Il y a plus qu'une question d'argent ou de justice ou d'administration, c'est une question de priorité, de politique qui, en propre, appartient aux hommes élus par le peuple.

En plus,c et institut sera formé de gens qui oeuvrent dans le milieu du cinéma, ce sont des distributeurs, des réalisateurs, des propriétaires de salles, ce ne sont pas des missionnaires et ce ne sont pas des gars qui travaillent pour la culture, d'une façon absolument pas désintéressée. On sait tout de même que ceux qui oeuvrent habituellement au niveau du cinéma le font parce que, premièrement, c'est un ouvrage qu'ils préfèrent et, deuxièmement, ils ont des motivations pécuniaires.

L'industrie du cinéma, qui est naissante au Québec, n'a tout de même pas encore fait ses preuves, et si !e gouvernement se soustrayait aux responsabilités qui lui sont propres, ce serait une lacune inconcevable. Je crois qu'on doit laisser aux hommes publics leur responsabilité, qui est de déterminer les priorités et les normes politiques qui doivent s'établir au Québec. Je voterai contre l'amendement du chef de l'Opposition.

M. Hardy: Rejeté sur division?

Le Président (M. Kennedy): L'amendement du chef de l'Opposition est rejeté sur division.

M. Morin: Sur division.

Le Président (M. Kennedy): Article 49.

M. Hardy: Avant d'aller à l'article 49, on pourrait peut-être revenir à l'article 39.

Le Président (M. Kennedy): Article 48, adopté?

M. Charron: Oui.

Le Président (M. Kennedy): On pourrait peut-être revenir à...

M. Charron: Article 48, sur division.

Le Président (M. Kennedy): Sur division? Adopté sur division.

M. Hardy: A l'article 39, M. le Président, après avoir, comme je l'avais promis hier soir, dormi et réfléchi sur le premier amendement du député de Saint-Jacques, après avoir revu ce matin, avec mes conseillers l'amendement, qui se voulait amélioré, du député de Saint-Jacques, j'en arrive toujours à la conclusion que nous ne pouvons pas l'accepter. En fait, je ne veux pas répéter ce que j'ai dit hier, c'est substantiellement pour les mêmes raisons. Nous voulons autant que le député de Saint-Jacques que le cinéma au Québec se fasse en français. Mais il s'agit d'un domaine complexe, que l'on ne peut pas transformer du jour au lendemain. D'autre part, je ne veux pas adopter des lois qu'on ne respecte pas. Donc, nous affirmons le principe que les films devront être doublés ou sous-titrés. C'est le principe, c'est l'objectif de la loi, c'est l'intention du législateur, et les règlements devront tenir compte de la réalité...

M. Charron: Non. ...

M. Hardy:... de ces complexités, mais toujours avec comme inspiration que le cinéma au Québec doit se faire, doit être en français.

M. Perreault: D'autant plus que les règlements...

M. Hardy: Les règlements seront soumis à la commission parlementaire.

M. Charron: Je ne veux pas trop rajouter non plus, M. le Président, à un débat qui a occupé plusieurs minutes de la séance d'hier, mais je tiens à m'inscrire en faux contre une des affirmations que vient de faire le ministre des Affaires culturelles. C'est faux! Si le ministre rejette mon amendement, et demande à la commission de le rejeter, il n'est pas du tout exact que le principe de la version obligatoire française est désormais accepté par cette assemblée. Lisez l'article 39, M. le Président, tel qu'il est libellé. Si mon amendement est rejeté, il n'y a pas d'affirmation de principe. Le seul principe affirmé dans l'article 39, c'est que les règlements peuvent prescrire que les films appartenant aux catégories soient obligatoirement accompagnés d'une version doublée. Rien ne nous en assure, le principe n'est pas affirmé. Rien ne nous dit comment les règlements pourront le prescrire? S'approcheront-ils de ce principe? S'en tiendront-ils éloignés?

M. Hardy: On les étudiera...

M. Charron: On peut en venir à plusieurs conclusions...

M. Hardy:... en commission.

M. Charron: Ce que je demandais au ministre, c'est de prendre une position claire et nette en faveur d'une version obligatoire française. Il refuse de le faire. Mettez mon amendement aux voix, M. le Président.

M. Morin: C'est comme le bill 22.

Le Président (M. Kennedy): Ceux qui sont en faveur de l'amendement du député de Saint-Jacques?

M. Charron: Voulez-vous appeler les votes, M. le Président, sur cet amendement, car il est d'une grande importance?

Le Président (M. Kennedy): M. Bérard?

M. Bérard: Contre.

Le Président (M. Kennedy): M. Perreault?

M. Perreault: Contre.

Le Président (M. Kennedy): M. Charron?

M. Charron: Pour.

Le Président (M. Kennedy): M. Hardy?

M. Hardy: Contre.

Le Président (M. Kennedy): M. Côté, Matane?

M. Côté: Contre.

Le Président (M. Kennedy): M. Lapointe, Laurentides-Labelle?

M. Lapointe: Contre.

Le Président (M. Kennedy): M. Morin?

M. Morin: En faveur.

Le Président (M. Kennedy): M. Parent, Prévost? M. Saint-Germain, Jacques-Cartier?

M. Saint-Germain: Contre.

Le Président (M. Kennedy ): M. Tardif?

M. Tardif: Contre.

Le Président (M. Kennedy): Pour,2; contre, 7. L'amendement est rejeté.

M. Hardy: M. le Président, avec le consentement de la commission, je demanderais également de revenir à l'article 12, et je proposerais de biffer les mots, après"le ministre peut", "avec l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil". C'est par erreur que cette phrase y a été mise. C'est un mécanisme beaucoup trop complexe, il faudrait un arrêté en conseil chaque fois qu'on émet un permis.

M. Charron: D'accord. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): L'article 12 tel qu'amendé et adopté est à nouveau amendé et adopté.

M. Charron: On enlève "avec l'approbation du lieutenant gouverneur en conseil".

M. Perreault: Seulement cela?

M. Hardy: "...avec l'approbation du lieutenant gouverneur en conseil et", ce qui devient: "Le ministre peut, sur la recommandation..."

M. Charron: D'accord. M. Hardy: L'on revient à... M. Charron: ...l'article 49. M. Hardy: ...l'article 49.

M. Charron: M. le Président, à l'article 49, il s'agit du mandat de l'institut contractuel, l'institut à l'emploi du ministre. Je pense que, avant de prendre les paragraphes a), b), c), d) et e), qui sont les mandats du ministre...

M. Hardy: Les mandats que le Parlement va donner à l'institut.

M. Charron: Je pense que l'amendement que j'aurais à vous présenter serait plus de mise à l'article 50 qu'à l'article 49.

M. Hardy: Article 49, adopté.

M. Charron: Non, à l'article 49, j'ai des questions à vous poser. A l'article 49, je me demande pourquoi la précision du paragraphe a) qui dit: "en tenant compte de la rentabilité de ces investissements." Il me semble évident que l'institut, même s'il est à l'emploi du ministre, va prendre des décisions qui... C'est un minimum de confiance à faire à l'institut, quand il va donner de l'argent à un producteur qui va venir en demander, comme on le fait pour la SDICC, qu'il va tenir compte de la rentabilité des investissements, il me semble, si on y a le sens de la responsabilité. Pourquoi mettre cela dans la loi? Toutes ces affaires, c'est comme si on voulait tout le temps mettre l'institut en tutelle, le plus possible, lui interdire toute liberté d'action. Le ministre fonctionne avec un contrat. Il embauche...

M. Hardy: Le milieu ne s'oppose pas à cela. M. Charron: Moi, je m'oppose à cela.

M. Hardy: Voulez-vous que je vous dise une chose? Ce qui est assez curieux, vous prétendez et beaucoup de journalistes ont prétendu que nous voulions restreindre la liberté de l'institut. Savez-vous une chose? Les producteurs, appuyés par les distributeurs et les propriétaires, insistaient pour que ce soit le ministre qui nomme le directeur général de l'institut. C'est inscrit dans leur mémoire. Jusqu'à un certain point, je me suis battu avec eux et je leur ai dit: Non, le directeur général de l'institut, vous allez le nommer. L'institut est une corporation autonome. Vous devez vous gérer. Une des choses importantes, c'est de nommer directeur général le principal fonctionnaire de votre groupement.

M. Charron: Je suis d'accord avec vous là-dessus.

M. Hardy: Sur le mandat, ils n'ont pas dit un mot, ils trouvent cela tout à fait normal, ce mandat. C'est le milieu.

M. Charron: Peut-être. C'est un autre endroit où nous représentons le public, n'est-ce pas?

M. Hardy: Oui.

M. Charron: Nous pouvons être en désaccord avec le milieu, n'est-ce pas?

M. Hardy: Nous représentons 55% du public.

M. Charron: N'avez-vous pas soutenu toute cette thèse, il y a à peine cinq minutes, n'est-ce pas?

M. Hardy: Oui.

M. Charron: Je vous dis que, au nom du public et pour l'autonomie de l'institut, on pourrait dire: Promouvoir et soutenir financièrement la création, la production, la distribution, la division, l'exploitation des films québécois de qualité.

M. Hardy: Je réponds à ceci: C'est vrai. Tout ce que vous venez de dire, c'est au nom de 30% du milieu. Je vous dis que, au nom de 55% de la collectivité, plus tout le milieu cinématographique qui a voulu collaborer à l'amélioration de cette loi, les deux, 55% de la collectivité, plus une...

M. Morin: Un peu moins, d'après les sondages.

M. Hardy: Les bulletins de vote mis dans les boîtes, c'est plus fort qu'un sondage. Je vous dis, si vous voulez arguer dans ce sens, que 55% de la collectivité, plus une très grande proportion du milieu, c'est-à-dire le milieu cinématographique qui a voulu vraiment collaborer à la rédaction de cette loi, tous ces gens sont contents du mandat. Va-ton changer le mandat pour faire plaisir à 30% de la collectivité? Je crois encore à la démocratie; 55%, plus la majorité du milieu, c'est encore plus fort que 30% plus quelques-uns de vos amis qui ont voulu rejeter la loi totalement, globalement, pour des raisons politiques.

M. Charron: Les sophismes se suivent et se ressemblent depuis un certain nombre d'interventions du ministre des Affaires culturelles. Oubliez les 30%, 35%, 45%...

M. Hardy: Est-ce un sophisme, 55%?

M. Charron: Non, oubliez les 30%, 35%, 45% et 50%.

M. Hardy: C'est dans les caucus 50%?

M. Charron: Non. Oubliez cela. Vous êtes membre d'un gouvernement qui a fait adopter par l'Assemblée, à plusieurs reprises, des lois où un organisme autonome, dans certains cas, par exemple la Société de développement industriel ou un organisme, à l'emploi du ministre comme l'institut, ici, a des responsabilités d'administration financière. On remet à un certain nombre de personnes, à des fins diverses, la permission d'utiliser des fonds publics à certaines fins déjà prescrites dans un mandat.

Quand vous remettez annuellement de l'argent, par exemple, à l'Orchestre symphonique de Montréal, l'obligez-vous, y a-t-il une loi quelque part qui vous dit que l'orchestre pourra utiliser cet argent en tenant compte de la rentabilité financière de ses investissements? Il n'y en a pas.

M. Hardy: Ce n'est pas tout à fait la même chose.

M. Charron: Bien non. Même dans le texte de la Société de développement industriel...

M. Hardy: Je n'ai pas le texte de la loi devant moi. Elle a le devoir, mais elle ne peut pas...

M. Charron: Elle a le devoir.

M. Hardy: ...prêter des choses, elle ne peut pas faire des prêts si ce n'est pas sérieux.

M. Charron: C'est évident. C'est pour cela que ça n'a pas été mis dans la loi. C'est comme si on avait cette méfiance de l'institut, en plus de le tenir par la gorge, d'année en année, par le budget et par le contrôle de l'article 48. C'est comme si on disait: Ces gars sont assez caves qu'à un certain moment il va venir un film, un scénariste ou des artistes regroupés qui vont proposer un film "Ben Hur descendant la Manicouagan" et qui va coûter $50 millions seulement en investissement, en costumes et tout ça. Ces gars vont être assez caves, eux qui sont issus des milieux producteurs, eux qui sont issus des milieux artistiques, eux qui sont des milieux de distribution, ils seront assez caves pour remettre, sur une somme très limitée, un investissement massif, parce qu'ils ne sont pas assez "smarts", si on ne leur dit pas dans la loi, pour y penser d'eux-mêmes, pour tenir compte de la rentabilité des investissements.

M. Hardy: De deux choses l'une: Ils vont être assez fins pour le faire. Donc, cela ne change rien dans la loi et cela peut rassurer certaines parties de l'opinion publique qui — c'est vrai, il faut l'admettre, je ne vous dis pas que c'est ma conception — sont méfiantes. Beaucoup de gens m'ont rencontré et m'ont dit: Ecoutez. Vous exagérez un peu. Confier des millions comme ça à un orga- nisme dans le cinéma, des gens qui ne sont pas connus pour leur...

M. Charron: Et vous les avez crus? M. Hardy: Je ne les ai pas crus.

M. Charron: Vous les avez crus parce que c'est là.

M. Hardy: Je ne les ai pas crus...

M. Charron: C'est là.

M. Hardy:... mais c'est mon devoir...

M. Charron: C'est à l'article 49 et à l'article 50.

M. Hardy: Je ne vous dis pas que je les ai crus...

M. Charron: Voyons donc!

M. Hardy:... mais je pense que c'est important de rassurer cette partie — c'est même valable — de l'opinion publique qui peut avoir des inquiétudes. Il faut tenir compte de l'opinion publique. Si vous en teniez compte davantage, vous ne seriez pas six en Chambre.

M. Morin: Nous serions 33.

Le Président (M. Kennedy ): Article 49. Adopté?

M. Charron: Non. Je propose qu'au paragraphe a), par simple décence... Tu peux partir, cela ne dérangera absolument rien.

M. Hardy: Non. Il continue de donner un spectacle.

Une Voix: Continue à faire ton spectacle.

M. Hardy: II y a un député dans un des sept discours en Chambre — ce n'est pas le cas du député d'Anjou — a été... Le député de Saint-Jacques devrait savoir qu'il y a un député qui a fait deux interventions à l'Assemblée nationale pendant son passage. Une fois, il est allé fermer la Chambre...

M. Charron: C'est ce que vient de faire le député d'Anjou.

M. Hardy: ... et l'autre fois, il avait parlé des... et ce député a siégé pendant 35 ans à l'Assemblée nationale. C'est l'ancien député de Yamaska.

M. Charron: J'espère qu'on ne sera pas "poi-gné" 35 ans avec celui qui vient de fermer la fenêtre.

M. Hardy: II fait d'excellents discours. Alors, lui ce sera 50 ans.

M. Charron: Je propose qu'au paragraphe a), on supprime les mots "... en tenant compte de la rentabilité de ses investissements..."

M. Hardy: Rejeté sur division?

Le Président (M. Kennedy): Rejeté sur division. Adopté.

M. Charron: On passera au paragraphe b) lorsque nous reprendrons les travaux.

Le Président (M. Kennedy): La commission suspend ses travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 13 h)

Reprise de la séance à 15 hl5

M. Kennedy (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications continue l'étude du projet de loi no I, Loi sur le cinéma.

A l'ajournement, nous en étions à l'article 49 et le député de Saint-Jacques avait la parole.

M. Charron: M. le Président, au paragraphe b) du mandat de l'institut. Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. M. Charron: Paragraphe c), adopté. M. Hardy: Où est-ce qu'on est rendu?

Le Président (M. Kennedy): Au paragraphe c) de l'article 49.

M. Charron: J'ai dû les prendre par paragraphes, à cause de l'importance de l'article 49.

M. Hardy: Très bien.

M. Charron: Adopté, dans l'ensemble, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 49, adopté. Article 50.

M. Charron: A l'article 50, M. le Président, j'ai un amendement qui vise à ne rien soustraire au texte original, mais à le compléter. Je prie la commission de m'excuser, mais il est identifié article 49, alors que, comme je l'ai dit ce matin, c'est plutôt l'article 50, qu'on devrait y voir.

M. Perreault: L'amendement de votre feuille, à l'article 38?

M. Charron: Non, c'est passé.

M. Hardy: Ce sera l'article 50 a).

M. Charron: J'en ai quelques autres copies.

Le Président (M. Kennedy): Cela deviendrait l'article 50 a)?

M. Charron: Cela deviendrait l'article 50 a). Peut-être que le ministre aura l'intention de contester la légalité de mon amendement, puisqu'il s'agit d'une dépense de fonds publics, mais j'ai choisi de le présenter quand même pour que nous puissions examiner...

M. Hardy: Pour ne pas brimer le député de Saint-Jacques, et pour ne pas créer de précédent, disons que vous parlez. Vous ne présentez pas votre amendement. Vous parlez sur le fond. Si vous réussissez à me convaincre, je le propose et, si

vous ne me convainquez pas, je ne peux pas le proposer. C'est tout simplement une question de précédent.

M. Charron: D'accord.

M. Harvey: Au fond, vous allez défendre votre idée quand même, mais, si je vous laissais actuellement, et même, si le président vous laissait proposer cela, on poserait un précédent qui pourrait être invoqué à l'avenir. Discutez du fond. Si vous nous convainquez, vous proposerez votre amendement et, si vous ne nous convainquez pas...

M. Charron: D'accord. M. le Président, puis-je d'abord lire cet amendement pour les membres de la commission? Il s'agirait...

M. Hardy: Ce qui n'est pas un amendement actuellement, ce sont les idées du député de Saint-Jacques.

M. Charron: Voilà. Il s'agirait d'introduire, à la fin de l'article 50, où on parle des moyens d'action de l'institut du cinéma, de la façon, pour lui, de dispenser les fonds qui lui sont remis à partir même des fonds publics, une source de revenus additionnelle qui lui permettrait, à mon avis, encore mieux, avec encore plus d'excellence et de possibilités d'action, de remplir le mandat que nous lui avons confié à l'article 49. Parce que, M. le Président, si vous regardez l'article 50, on dit que l'institut exécute son mandat par les moyens suivants: des placements, des prêts, des garanties aux prêteurs, des primes à la qualité et des subventions, des prix d'excellence, des réinvestissements.

Or, la commission n'a pas encore établi — ce n'est pas l'intention du ministre de l'établir dans la loi, nous a-t-il dit — la somme dont disposera l'institut pour faire accomplir le mandat de l'article 49 par les moyens prévus à l'article 50. Il n'est pas faux de penser à un certain nombre de millions qui ont varié dans les différentes entrevues qu'a accordées le ministre, entre $3 millions et $6 millions, dont pourrait disposer l'Institut du cinéma pour faire cela. Je voudrais proposer une source additionnelle de revenus à l'institut du cinéma qui lui permettrait d'agir encore plus et encore mieux dans l'exécution de son mandat. C'est pour cela que je propose cet article 50 a), comme vous l'avez appelé, M. le Président, qui dirait ceci: "Aux fins de l'exécution des paragraphes a) et b) de l'article 49 et de l'article 50, l'institut pourra disposer de sommes d'argent qui lui seront remises par le ministre des Finances à même le fonds consolidé du revenu, provenant des revenus d'une taxe spéciale sur les profits faits au Québec par la présentation de films non québécois. b) Le pourcentage de cette taxe spéciale qui ne peut dépasser 10% ainsi que son mode de perception sont établis par le lieutenant-gouverneur en conseil. Les sommes d'argent provenant des revenus de cette taxe spéciale sont versées en plus des sommes déjà prévues à l'article 37 et ne font pas l'objet de négociations prévues aux articles 2 et 48.

M. Le Président, c'est simple, devant l'envahissement, d'une part, normal puisqu'un pays doit toujours être ouvert aux productions cinématographiques étrangères, et, d'autre part, anormal à cause du volume sans précédent de productions étrangères, en particulier américaines, qui envahissent les écrans québécois, nous croyons que cette situation ne doit pas se présenter, non seulement au détriment du cinéma québécois, mais doit être pour lui une source d'appoint et une source d'expansion. Autrement dit, comme le disaient certains opinants en deuxième lecture, ne pas fermer la porte à l'étranger, bien sûr, mais ne ne pas permettre non plus à l'étranger d'occuper un champ que les Québécois n'occupent pas dans la proportion qu'ils devraient occuper.

Or, nous inspirant du modèle qui est déjà connu dans certains pays, dont les Etats-Unis d'Amérique, nous aimerions voir le ministre accepter cette proposition qui viserait à faire que, sur les revenus nets émanant d'une présentation d'un film étranger en salle québécoise, un pourcentage de ces revenus soit affecté à l'institut. D'après les calculs que nous avons pu faire quant aux statistiques que nous détenons du visionnement de films étrangers au cours des dernières années, en particulier sur les films étrangers, cela aurait voulu dire une perception d'environ $6 millions, lesquels $6 millions seraient ainsi ajoutés à ce que le ministre des Affaires culturelles, par contrat, puisque nous devons l'accepter maintenant, octroiera à l'institut du cinéma annuellement.

M. Hardy: Seulement une question.

M. Charron: Si vous me permettez, j'ai deux autres phrases...

M. Hardy: Non, c'est seulement pour suivre votre... Vous dites que cela fait $6 millions? 10%? Parce que le revenu total, selon les statistiques que nous avons, a été $48 millions.

M. Charron: Je ne voulais pas le faire sans avoir le papier dans les mains, vous m'obligez à y retourner.

M. Hardy: Nous, les statistiques que nous avons, c'est qu'il y a eu un revenu de guichet de $48 millions, l'an passé, au Québec.

M. Charron: Attendez un peu.

M. Hardy: De revenu brut. Pour les films étrangers, c'est moins que cela. $48 millions, c'est tout, films québécois et films étrangers.

M. Charron: Les films québécois, il y en avait 27...

M. Hardy: Oui.

M. Charron: ... sur 188. On ne peut pas dire que...

M. Hardy: Même si vous prenez le chiffre de $48 millions, on arrive à $4.8 millions à 10%.

M. Charron: C'est bien le chiffre que j'ai, moi, ici, M. le Président.

M. Hardy: Celui de $48 millions? M. Charron: Non, $6 millions.

M. Hardy: Les $48 millions, c'est du Bureau de la statistique?

Une Voix: Oui, du Québec.

M. Hardy: De toute façon, cela ne change pas pour votre principe. Il reste le même.

M. Charron: Le principe reste le même. C'est que quel que soit le montant, selon les revenus annuels, cela constituerait une augmentation du budget dont dispose l'Institut du cinéma pour accomplir son mandat.

J'imagine que le ministre a envisagé cette possibilité, à un moment ou à un autre...

M. Hardy: Longuement.

M. Charron:... dans les études qui ont préparé cette loi. J'aimerais entendre, maintenant, son opinion sur cette suggestion, M. le Président.

M. Hardy: M. le Président, encore là, cela peut peut-être paraître bizarre, cette unanimité au niveau des principes, mais je suis parfaitement d'accord avec le député de Saint-Jacques pour dire qu'il est anormal que les étrangers viennent chercher les sommes d'argent, qu'ils viennent chercher annuellement, par la distribution de films étrangers. Je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques dans bien des cas, et en particulier, dans l'intervention qu'il faisait en Chambre, dans le cas des films américains, par exemple. Quand ils viennent ici, c'est un surplus. Cela augmente leurs profits. C'est nous, les Québécois qui, au fond, de cette façon, contribuons à enrichir les compagnies de distribution étrangères. Il serait non seulement éminemment souhaitable, mais juste et raisonnable que — sans, bien sûr, réduire leurs profits à néant, parce qu'ils ne viendront plus si on réduit leurs profits à néant — mais la collectivité québécoise retire sa juste part de ces bénéfices plantureux que font les étrangers en exploitant la clientèle québécoise sur le plan cinématographique.

Comme vous l'avez dit tantôt, quand nous avons préparé notre loi, nous avons songé à des mécanismes, pas nécessairement tels que formulés ici, mais à des mécanismes qui nous permettraient d'aller chercher une part de ces profits, lesquels profits nous réinvestirions par l'intermédiaire de l'institut.

Mais, après discusssion avec des spécialistes, et, je dois le dire, après discussion au niveau du conseil des ministres, nous en sommes arrivés à la conclusion que la façon la plus rationnelle et la plus efficace serait d'agir non pas au niveau de la Loi sur le cinéma, mais des lois fiscales régulières. Et pour agir d'une façon aussi précise que possible, je vais vous donner un exemple: Vous arrivez à $6 millions, nous arrivons à $4.8 millions, encore une fois, avec les renseignements très précis que nous pourrons obtenir, en vertu de la loi actuelle, à partir de ces renseignements, c'est mon intention d'intervenir de nouveau auprès de mon collègue, le ministre du Revenu et de l'ensemble du conseil des ministres, pour qu'il y ait des amendements aux lois fiscales pour aller chercher ce que vous nous proposez d'aller chercher. Je ne sais pas dans quelle proportion, je ne sais pas si c'est 10% ou plus, l'idée est retenue, mais ce serait plutôt par le truchement des lois fiscales ordinaires, les lois du ministère du Revenu, que nous le ferions, et à partir des renseignements bien précis que nous pourrons avoir après une année d'activité avec la loi actuelle.

Donc, votre idée est retenue. Encore une fois, dans un premier texte, au niveau du ministère, cette idée d'incorporer cela à la loi actuelle avait été retenue, mais, à la réflexion, nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il était préférable d'agir au niveau des lois ordinaires du ministère du Revenu, et surtout après avoir obtenu des renseignements très précis pour savoir combien exactement les distributeurs étrangers, les "major" viennent chercher de profits sur l'ensemble des films distribués au Québec, sur chacun en particulier, en fait, et que nous ayons un portrait très précis de la situation dans ce domaine.

M. Charron: Le jour où vous aurez et le plus rapidement possible le profil de cette situation, est-ce votre intention de modifier la loi sur le revenu?

M. Hardy: Je dis que c'est l'intention du ministre des Affaires culturelles d'exercer toutes les pressions possibles. Je n'ai pas de raison de croire que mes collègues refuseront de m'écouter, parce que c'est tellement logique, c'est tellement dans l'ordre des choses, que cela devrait se faire, mais, encore une fois, je pense qu'il est sage de faire des choses semblables par les mécanismes les plus réguliers, les plus valables et surtout en ayant un portrait aussi précis que possible de la situation.

Le ministre des Affaires culturelles ne serait pas équipé, entre autres — même si vous mettiez cela dans la Loi sur le cinéma — pour appliquer cet article, parce que cela revient au ministère du Revenu.

M. Charron: M. le Président, je reviendrai certainement à la charge sur cette question parce qu'il me semble y avoir là une source de revenu pour le cinéma québécois qui, non seulement lui permettrait de continuer à croître, mais surtout qui rétablirait un certain degré de justice par rapport à l'envahissement étranger dans ce domaine. Je souscris entièrement aux propos qu'a tenus le ministre des Affaires culturelles. C'était le but de la présentation de cette idée-amendement parce que

les profits, s'ils doivent continuer à croître, normalement, c'est prévisible...

M. Hardy: Sauf si le cinéma québécois se développe à ce point qu'il devienne un concurrent très fort du cinéma américain.

M. Charron: Pour que le cinéma québécois devienne un concurrent très fort, il faudrait de l'argent à l'institut pour le compte.

M. Hardy: D'accord.

M. Charron: Bien, M. le Président.

M. Hardy: Juste une chose. On me fait remarquer qu'en Italie on avait ce processus que vous proposez et on est revenu aux lois fiscales ordinaires, au fonds consolidé, et on me dit qu'en Suède on a ce processus et on songe à y revenir à cause des complications d'application de cette méthode.

Le Président (M. Kennedy): Article 50 adopté?

M. Bérard: Est-ce que je pourrais ajouter un commentaire? M. le ministre, est-ce que vous ne craindriez pas que le fait de percevoir ces 10% sur les profits n'amènerait pas une hausse au guichet? A toutes fins pratiques, qui est-ce qui paierait encore la note? Ce seraient encore les consommateurs.

M. Hardy: Possiblement, mais il y a quand même la loi de l'offre et de la demande qui existe. Si on augmente trop le billet, la clientèle va diminuer. Théoriquement, oui, mais si on appliquait votre principe d'une façon trop vigoureuse, il ne faudrait pas qu'il y ait de taxe.

M. Bérard: Oui, d'accord.

M. Hardy: Parce qu'on dirait: Si on augmente les taxes... Cela joue sûrement, mais on abolirait le système de taxation du gouvernement et je ne sais pas comment on agirait. Le député de Rouyn-Noranda n'est pas ici, mais sûrement qu'il nous parlerait de la machine à piastres.

M. Bérard: Parce qu'il est bien sûr que si les profits de ces compagnies sont diminués, elles vont chercher un moyen pour...

M. Hardy: C'est-à-dire que ces compagnies peuvent voir leurs profits diminuer tout en continuant à considérer que c'est extrêmement payant de distribuer des films au Québec.

M. Charron: Je suis convaincu de cela également, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 50 adopté.

M. Saint-Germain: M. le Président, les pays étrangers, comme la France, n'en viendraient-ils pas à faire la même chose relativement à nos films?

M. Hardy: Si un jour l'industrie cinématographique québécoise est devenue à ce point rentable qu'elle fait de grands profits dans les pays étrangers, ce serait normal qu'on applique la même chose.

Mais, le jour où les pays étrangers pourront venir chercher une taxe sur la production cinématographique québécoise, cela voudra dire que l'industrie cinématographique québécoise est en pleine santé et très florissante et tout le monde ne pourra que s'en réjouir.

Le Président (M. Kennedy): Le député de L'Assomption.

M. Perreault: J'aimerais ajouter un mot suite aux remarques du député d'en face, c'est que lorsque la télévision est arrivée, l'industrie du film a quasiment foutu le camp à terre, parce qu'il n'y avait plus personne dans les salles de cinéma. Alors, si le prix aux guichets augmente trop subitement, il y a un grand danger qui existe de voir le marasme... et ça ne renforcira pas le film québécois. Le film québécois, même s'il existe en grande quantité, on ne peut pas forcer le cinéphile à aller voir des films québécois qu'il ne veut pas voir. Il ne faut pas oublier ça. Tant que vous n'aurez pas des films québécois de qualité pour concurrencer le film étranger, c'est un leurre de penser qu'on va déplacer des sommes d'argent vers le film québécois.

Il y a un dosage à faire, lorsque vous ferez une taxe spéciale, je pense bien qu'il y a une étude à faire pour ne pas faire en sorte qu'on amène l'industrie dans le marasme.

Le Président (M. Kennedy): Le député de Saint-Jacques a un amendement à l'article 50.

M. Charron: Oui, M. le Président. Il s'agirait d'ajouter à l'article 50, un paragraphe i) dont le texte est le suivant: "L'institut exécute son mandat par l'acquisition et l'exploitation, selon les modalités précisées par le lieutenant-gouverneur en conseil, de salles de cinéma." L'objectif de cet amendement est de permettre à l'institut de promouvoir le cinéma québécois en s'assurant que dans différentes régions du Québec, par sa propriété et par son exploitation de certaines salles de cinéma, un certain nombre de films de qualité, puisque,je vous rappelle que le paragraphe a) de l'article 49 mentionnait que le tout premier mandat de l'institut est de diffuser et d'exploiter des films québécois de qualité, donc de nous assurer qu'à quelques endroits, selon les centres, il existe une salle. Ce n'est pas une obligation que je voudrais voir donner à l'institut d'aller acquérir une salle de cinéma dans chaque ville avec 25,000 habitants ou plus. Je voudrais que la loi — le jour où l'institut le jugera bon, selon son développement, selon ses propres critères — l'autorise à le faire.

C'est clair, il y a des petites villes du Québec

qui sont littéralement prisonnières d'un cinéma et l'exploitant de la salle n'offre à la population de cette petite ville, que ce qu'il veut bien leur montrer; les navets américains qui sont envoyés en restants, les films de fesses français, pour autant qu'ils en font et, de temps à autre, un film absolument commercial qui lui apportera du revenu.

C'est le choix, c'est la libre entreprise des salles de cinéma et personne ne peut prévoir que, même après l'adoption de cette loi, cette pratique changera.

Ce qu'il serait important de faire, là où l'institut le jugera essentiel pour sa promotion du film québécois de qualité et aussi du film étranger de qualité, c'est d'assurer que le public de ces petites villes n'est pas prisonnier de la décision et de l'orientation d'une entreprise d'un seul homme et, à l'occasion, se rendre propriétaire et exploiter des salles de cinéma, selon ses intentions.

Encore une fois, ce n'est pas une obligation, c'est la permission que je voudrais voir donner à l'institut de remplir ce mandat.

M. Hardy: M. le Présider-t, encore là, je ne ferai pas de grands discours, je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques. Les juristes m'affirment et mes faibles connaissances en droit confirment...

M. Charron: Ce n'est pas toujours ce que vous dites.

M. Hardy: ...que ce pouvoir est déjà contenu au paragraphe a) de l'article 49. Promouvoir et soutenir financièrement, en tenant compte de la rentabilité de ses investissements, la création, la production, la distribution, la diffusion et l'exploitation de films québécois.

Cela veut dire que l'institut peut...

M. Charron: Par le mot "diffusion".

M. Hardy: ...louer des salles existantes. Par exemple, l'institut pourrait, dans la ville aller voir le propriétaire et dire: On loue votre salle pour tant de temps. Ou l'institut peut se constituer une filiale, une corporation sans but lucratif, qui achèterait des salles et qui les exploiterait.

M. Charron: D'accord, M. le Président; mais, encore une fois, l'accomplisssment de ce mandat est directement lié au budget...

M. Hardy: La Cinémathèque nationale peut faire cela aussi.

M. Charron: D'accord. Mais l'accomplissement de ce mandat est directement lié au budget que pourra faire...

M. Hardy: Même avec votre amendement, il faut se lier au budget aussi.

M. Charron: Oui.

M. Hardy: Mais le pouvoir que vous voulez donner par votre amendement, il est déjà à l'article 49.

M. Charron: Je retire mon amendement, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Le député de l'Assomption.

M. Perreault: Là-dessus, je verrais une filiale ou une société de la couronne exploiter des salles de cinéma plutôt que l'institut. Déjà, vous mettez, parmi les gens qui sont membres de l'institut, des propriétaires de salles. Je pense que c'est créer une mauvaise concurrence en mettant l'institut propriétaire de salles de cinéma.

M. Hardy: Je m'excuse. Ce que j'ai dit au député de Saint-Jacques, c'est qu'en vertu de l'article 49 a), l'institut a le pouvoir de constituer une filiale sans but lucratif. Il ne s'agit pas d'aller faire concurrence aux salles commerciales.

Mais on pourrait constituer un organisme sans but lucratif.

M. Perreault: Mais cela ne devrait pas être un organisme de l'institut. Cela devrait être une société de la couronne.

M. Hardy: Une société de la couronne, cela revient...

M. Perreault: Cela ne devrait pas être l'institut. Vous avez déjà des propriétaires de salles commerciales qui sont dans l'institut. Vous créez un affrontement à l'intérieur.

M. Hardy: Je ne sais pas ce que l'institut fera, mais elle a le pouvoir de le faire. Ce n'est pas bon, avec l'institut? Mais qu'est-ce que vous faites? C'est quand même exact, ce que le député de Saint-Jacques a dit tantôt.

M. Perreault: Oui, vous pouvez créer une société de la couronne pour exploiter des salles.

M. Hardy: Pourquoi? Une autre société de la couronne?

M. Perreault: Absolument, commercialement.

M. Hardy: A ce moment, vous allez créer une société de la couronne qui va... Si le Parlement décide d'en créer une, je serais assez réticent, parce que, à ce moment, vous allez faire de la concurrence.

M. Perreault: C'est un secteur témoin.

M. Hardy: Je suis réticent un peu au secteur témoin, parce que vous savez que, parmi les propriétaires de salles de cinéma, avec la distinction que j'ai faite hier, bien sûr, il y a les propriétaires qui sont les grandes firmes de distribution. Financièrement, ils sont en bonne condition. Les propriétaires indépendants ne sont pas dans une si-

tuation financière extraordinaire. Il ne faudrait pas aller leur faire une concurrence.

M. Perreault: C'est parce qu'à l'intérieur de l'institut, vous auriez des membres, des propriétaires de salles commerciales et vous auriez l'institut qui serait lui-même propriétaire de salles. C'est un peu une anomalie.

M. Hardy: Je ne vois pas ce que cela ferait de différence si c'était une société de la couronne.

M. Perreault: Elle serait au même titre que les autres sociétés commerciales, comme vous avez le secteur témoin dans d'autres domaines, comme, dans l'industrie minière vous avez SO-QUEM, qui est en concurrence avec d'autres industries.

M. Hardy: A ce stade-ci...

M. Perreault: Je crois que c'est foncièrement mauvais.

M. Hardy: Vous voulez enlever le pouvoir à l'institut?

M. Perreault: Non, je ne veux pas lui enlever le pouvoir, mais...

M. Charron: M. le Président, je ne veux pas défendre la loi du ministre, mais toute l'action de l'institut, employée par le ministre... tous ses employés ont comme mandat, dans l'article 49, d'entrer en concurrence. Si l'institut n'entre pas en concurrence avec les forces actuelles qui contrôlent le cinéma québécois, les compagnies américaines qui contrôlent le réseau, les compagnies de production qui sont essentiellement étrangères également au Québec, la répartition des revenus entre les propriétaire de salles à aller jusqu'aux artistes, c'est-à-dire qu'on crée pour rien l'institut s'il ne dérange pas personne.

M. Perreault: II faut distinguer entre l'exploitation d'une salle de cinéma et les fonctions de l'institut. C'est bien différent. Chez moi, si l'institut vient créer une salle en concurrence avec un propriétaire de salles commerciales et fait crever l'autre, je ne suis pas d'accord.

Le Président (M. Kennedy): L'amendement est retiré et l'article 50, tel que présenté, est adopté.

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 51?

M. Charron: Qu'est-ce que c'est ce mode de collaboration que veut établir le ministre entre l'institut...

M. Hardy: En particulier, avant d'édicter des règlements, le ministre peut consulter l'institut. Si l'institut décide de se donner le comité consultatif dont vous parliez ce matin, le ministre rédigera un projet de règlements qu'il soumettra à l'institut, que l'institut pourra soumettre à son comité consultatif avant de revenir devant la commission parlementaire pour l'étudier.

M. Charron: En fin de compte, l'institut...

M. Hardy: L'institut a le pouvoir de conseiller le ministre en matière cinématographique.

M. Charron: Oui. Est-ce que je dois entendre l'article 51 comme faisant peser, sur vous ou sur l'institut, l'obligation d'entamer le processus de collaboration, quand on dit: L'institut doit collaborer avec le ministre...

M. Hardy: Cela veut dire...

M. Charron: ... dans les tâches qui vous ont été réservées suivant la présente loi?

M. Hardy: ... quand le ministre demande un avis à l'institut, l'institut ne peut pas dire: On ne veut pas vous en donner.

M. Charron: Mais cela ne vous oblige pas à solliciter d'avis de l'institut, notamment en matière de classification, de promotion, de titrage, de doublage, de contrôle?

M. Hardy: Non, parce que, toujours, en vertu du grand principe, je suis d'abord responsable devant vous, le Parlement...

M. Charron: Vous en avez sorti de grands principes, depuis le début de l'étude de cette loi. Vous les inventez à mesure vos principes.

M. Hardy: Suis-je rendu assez fort dans les principes pour que, éventuellement, je puisse être admis dans votre parti?

M. Charron: Non.

Le Président (M. Kennedy): Article 51, adopté.

M. Charron: Parce que les principes que vous défendez sont contraires aux miens.

M. Hardy: Pas toujours. M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 52, tel qu'amendé?

M. Charron: Cet article m'apparaît... M. Hardy: Article 52?

M. Charron: Oui, l'article 52. Cet article m'apparaît vague, M. le Président. L'institut reconnaît comme films québécois, les oeuvres qu'il indique dans la mesure qu'il détermine. Cela ne me dit pas ce que va être un film québécois.

M. Hardy: Justement.

M. Charron: II les reconnaît suivant des normes qu'il établit — l'institut — par règlements, en consultation avec le ministre conformément au paragraphe e) de l'article 68.

M. Hardy: Deux raisons pour le vague de cet article. Si vous vous rappelez, dans le premier projet, on était beaucoup plus précis, on déterminait ce qu'était un film québécois. Or, le milieu cinématographique les producteurs surtout, ce sont eux qui nous ont fait valoir que c'était très imprudent de déterminer dans la loi ce que serait un film québécois.

Il pourrait arriver, à un moment donné, dans un cas non prévu par la loi et vraiment cela pourrait être un film québécois et puis on serait gelé. Donc, danger d'être trop rigide dans la loi et deuxièmement — je pense encore là que vous devriez applaudir — vous nous avez dit ce matin en particulier votre collègue, le chef, combien on manquait de confiance envers le milieu, combien on ne faisait pas confiance au milieu. Or, on lui fait tellement confiance qu'on dit: C'est vous, institut, vous, représentant du milieu cinématographique qui allez décider ce qu'est un film québécois. Ce n'est pas le ministre qui va dire: Non, c'est un film qui est trop péquiste, ce n'est pas québécois. C'est l'institut qui va décider ce qu'est un film québécois.

M. Charron: Cela me fait penser à quelque chose. Avez-vous vraiment écrit à Michel Brault à la suite de son succès à Cannes?

M. Hardy: Oui, c'est mon conseiller, M. Gourd, qui a rédigé la lettre.

M. Charron: Je vous signale, pour votre information personnelle, que M. Brault n'a jamais reçu...

M. Hardy: II ne l'a pas encore reçue?

M. Charron: ... de lettre, ni de félicitations du gouvernement québécois.

M. Hardy: Vous savez comme moi que la poste royale est lente.

M. Charron: C'est vous qui la soutenez, ce n'est pas moi.

M. Hardy: M. Brault est à ce point anxieux de me lire?

M. Charron: Non, mais il voudrait voir jusqu'à quel degré vous allez patiner pour...

M. Hardy: Je n'ai pas patiné, je l'ai félicité pour son immense talent, comme d'ailleurs j'avais... Voulez-vous que je vous redise à peu près la lettre que j'avais envoyée à Mme Pauline Julien?

M. Charron: Non, chantez-la-moi plutôt.

M. Hardy: Mme Pauline Julien a fait une tournée à un moment donné en Europe grâce en partie, à une subvention du ministère des Affaires culturelles. A son retour, Mme Pauline Julien m'a fait parvenir, soit elle-même, soit par son imprésario, des coupures de presse à ce sujet. Je me suis empressé d'écrire à Mme Pauline Julien pour lui dire substantiellement ceci: Madame, les coupures de presse que vous me faites parvenir ne font que confirmer ce que j'appréhendais déjà quant au succès de votre tournée.

M. Charron: Vous appréhendiez?

M. Hardy: Appréhendez ou... Laissez-moi vous dire que j'admire votre immense talent, même si vos idées économico-sociales sont tout à fait à l'opposé des miennes, et que je considère que sur le plan culturel, vous représentez très bien le Québec. Ce n'était pas patiner, cela?

M. Charron: Non.

M. Hardy: Le style de la lettre à M. Brault est dans le même sens.

M. Charron: Des hommages de circonstance. Quand on s'aperçoit que l'adversaire est plus fort, on se soumet.

M. Hardy: Vous n'êtes pas gentil.

Le Président (M. Kennedy): Article 52, adopté?

M. Charron: Oui.

M. Hardy: M. le Président, c'est bien sûr que je reconnais que, dans le domaine de la chanson, Mme Pauline Julien est beaucoup plus forte que moi.

M. Charron: Oui.

M. Hardy: Mais sur le plan des idées politiques, par exemple!

Le Président (M. Kennedy): Article 53?

M. Charron: Pourquoi le ministre a-t-il choisi de diminuer le nombre de membres de l'institut par rapport au projet antérieur?

M. Hardy: Encore une fois, ceci provient directement des mémoires qui nous ont été présentés par les producteurs, c'est-à-dire l'essence du mémoire; ce sont les producteurs qui nous ont présenté cela. Dans le même mémoire, je vous ai fait remarquer ce matin qu'on allait encore plus loin.

M. Charron: C'était dix avant?

M. Hardy: C'était dix avant. Au sujet de ces dix secteurs, on nous a fait remarquer que tels que constitués, c'était irréaliste que cela ne corres-

pondait pas vraiment à la réalité du cinéma. On nous a représenté que ce qui correspondait vraiment à la réalité, c'était la production, la réalisation, les artisans de la distribution et l'exploitation, donc cinq secteurs. Ces gens nous ont dit: C'est cela qui est vraiment le milieu cinématographique. Chacun de ces cinq secteurs nomme quelqu'un. Le ministre en nomme deux autres dont un qui représentera le consommateur, et les deux que le ministre nomme devront être acceptés par les cinq. Dans le même mémoire, les producteurs auraient voulu que le ministre nomme le directeur général. Le ministre a dit: Non, j'ai trop de respect pour l'autonomie, la liberté, l'indépendance de l'institut pour me mêler de nommer le directeur général. C'est vous qui le nommerez, le directeur général. Bien sûr, j'imagine que l'éclatement de la fédération a servi d'inspiration aux gens, aux producteurs qui ont fait cette recommandation. Ce serait bien beau de faire un institut, mais si l'institut ne fonctionne pas! Encore une fois, beaucoup de journalistes ont parlé de la mise en tutelle de l'institut. On dit: Ah! le ministre, au fond, crée un institut, mais il se réserve le droit d'aller le repêcher.

Notre but, notre intention, c'est de tout faire pour que l'institut fonctionne, précisément, pour que jamais le ministre n'ait à appliquer l'article 69. Nous prenons tous les moyens réalistes pour que l'institut fonctionne par lui-même, pour que le ministre ne soit pas obligé d'intervenir.

M. Charron: Article 53 adopté, M. le Président. Le Président (M. Kennedy): Article 54.

M. Charron: A l'article 54, c'est plus juteux. D'abord, on dit: Le ministre reconnaît, aux conditions qu'il détermine, lui, l'association la plus représentative dans chacun des cinq secteurs cinématographiques suivants.

M. le Président, nous parlerons, si vous le voulez bien, des cinq secteurs dans une deuxième étape de la discussion sur cet article. Je veux simplement m'en tenir à ce qu'on veut dire par "aux conditions qu'il détermine", et le mot "représentative".

Qu'est-ce que c'est, pour le ministre, une association représentative? Quand il dit qu'il va reconnaître l'association la plus représentative aux conditions qu'il détermine, quelles seront les conditions qu'il va déterminer pour reconnaître qu'une association est la plus représentative de son secteur?

M. Hardy: Ecoutez! Il faut que quelqu'un reconnaisse l'association représentative. Dans le cas actuel, cela ne pose pas de problème. Eventuellement, peut-être que cela pourrait en poser, mais dans le cas actuel, il n'y a pas de problème.

M. Charron: Non? Quelles sont les associations?

M. Hardy: II y a une seule association qui représente les producteurs.

M. Charron: Oui.

M. Hardy: II y a une seule association qui représente...

M. Charron: Les réalisateurs. M. Hardy:... les réalisateurs. M. Charron: D'accord!

M. Hardy: Les artisans sont représentés à la fois par les syndicats et l'Union des artistes. Dans le cas des artisans, le ministre va consulter les syndicats et l'Union des artistes, qui devront s'entendre ensemble pour nommer leurs représentants.

Au fond, aux conditions qu'ils jugent...

M. Charron: Continuez donc. La distribution...

M. Hardy: Les distributeurs, c'est l'ensemble des distributeurs, c'est-à-dire les distributeurs indépendants plus les autres. Ils devront s'entendre ensemble pour nommer quelqu'un, une personne.

M. Charron: Ah bon! Attendez un peu! Vous les obligez à s'entendre entre eux...

M. Hardy: Oui.

M. Charron: ... pour vous soumettre trois noms...

M. Hardy: Quand je parle de représenta-tive, c'est que, s'il y a trois associations dans le même secteur, il faudra que les trois associations s'entendent pour recommander un nom.

M. Charron: Trois noms. M. Hardy: Trois noms, oui.

M. Charron: Trois noms. Là, autrement dit, ce n'est pas vous... Moi, je comprenais la loi, et je pense que bien des gens avaient compris la loi comme si, entre les différentes associations de distributeurs, par exemple, vous choisissiez, vous, la plus représentative, et, à celle-là, vous demandiez trois noms.

M. Hardy: Cela revient à ceci: Quand on dit "la plus représentative", le ministre dit aux distributeurs: Ecoutez, messieurs, ou bien tous les distributeurs ou tous les exploitants, vous vous réunissez en un seul groupe et vous recommandez trois noms. Si vous refusez systématiquement de vous réunir autour d'une table pour choisir trois noms, je vais vous consulter individuellement.

Non, je m'excuse, je donne une fausse interprétation.

M. Charron: C'est...

M. Hardy: Le ministre oblige les gens d'un

secteur, pour être représentatifs... S'il y a une seule association, pas de problème...

M. Charron: Oui.

M. Hardy: Je prends encore les producteurs. Il n'y a pas de problème, il n'y a qu'une seule association. Si, demain matin, les producteurs se subdivisaient en deux ou trois associations — ou, comme cela existe pour les artisans — il y a l'Union des artistes, il y a les...

M. Charron: Syndicats de techniciens.

M. Hardy:... syndicats de techniciens; ils sont plusieurs — je leur dis; Messieurs du secteur des artisans, réunissez-vous ensemble, et, ensemble, proposez-moi trois noms.

Au fond, quand je parle de représentativité, c'est que je trouve le moyen que tout le monde d'un secteur se retrouve ensemble. S'ils sont déjà unis dans une même association, s'ils forment plusieurs associations, qu'ils se réunissent pour ces fins spécifiques, qu'ils se réunissent autour d'une table et qu'ils recommandent trois noms. "La plus représentative", cela veut dire que tout le monde d'un secteur doit être là pour recommander les trois noms. On ne peut pas laisser cela seulement à une partie du secteur.

M. Charron: Le secteur le plus flou, le plus vague...

M. Hardy: Ce sont les artisans.

M. Charron: ... ce sont les artisans, parce que cela regroupe, tel que vous me l'avez décrit, des gens à intérêts, je ne dis pas divergents, mais...

M. Hardy: Les artistes, les comédiens...

M. Charron: L'Union des artistes et le Syndicat national du cinéma ou les caméramen, les chefs de plateau, les techniciens, les teneurs de micro, les gars qui prennent le son, tous ces gens, n'ont pas nécessairement les mêmes...

Alors, ce qui va arriver, c'est que l'Union des artistes va probablement vous recommander trois noms et les autres aussi vont vous recommander trois noms et il faudra que vous choisissiez...

M. Hardy: Non. Il leur faudra s'entendre. Il leur faudra faire l'unanimité sur les trois noms.

M. Charron: Ce n'est pas ce que dit votre loi. Elle dit que vous allez reconnaître l'association que, selon les conditions que vous déterminez, vous reconnaissez comme la plus représentative, et c'est à elle que vous demanderez trois noms.

M. Hardy: Oui, mais les conditions...

M. Charron: Comment allez-vous faire? Chez les artisans, par exemple, laquelle est la plus représentative? L'Union des artistes ou le Syndicat national du cinéma?

M. Hardy: Non. Ce n'est pas comme cela. Dans un secteur donné, que ce soient des artisans ou autre chose, on va faire l'inventaire de ce que regroupent les artisans. On va les identifier, s'il y a plus qu'un groupe, dans un règlement bien précis, et on va demander à ces gens qui seront identifiés, dans un texte bien précis, de se réunir et de suggérer trois noms. C'est dans ce sens qu'on parle de représentativité, que le ministre juge de la représentativité. Bien sûr, il faudra que quelqu'un identifie qui est dans cette histoire.

M. Charron: L'explication que vous me donnez, c'est ce qu'il faut lire dans "...aux conditions qu'il détermine".

M. Hardy: C'est bien cela. C'est le ministre qui déterminera combien il y a de groupes dans un secteur donné. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui décide cela à un certain moment.

M. Charron: Les conditions que vous allez poser, c'est qu'ensemble, ils décident...

M. Hardy:... qu'ils fassent l'unanimité sur trois noms, qu'ils se consultent, qu'ils recommandent trois noms; c'est accepté, du moins, par ceux qui nous ont parlé, avant qu'ils décident de ne plus me parler — certains groupes — parce qu'à un certain moment tout le monde me pariait. Cela allait bien. Il y a eu deux réunions, tout le monde était là, tout ce qui est dans le cinéma, la gauche, la droite, le centre, l'extrême-gauche, l'extrême-droite, ils étaient tous là. Ce qui est bien amusant, c'est ce qu'ils ont dit à cette réunion, parce que tout a été enregistré et cela ne l'a pas été illégalement — c'était au vu et au su de tous.

Quand ils se sont tous réunis, tous étaient d'accord sur'le principe — je ne dis pas les secteurs, parce que cela a varié. — Treize groupes étaient représentés et douze avaient fait l'unanimité. Le seul groupe opposé à cette formule, c'étaient ceux que vous n'aimez pas, les "major".

M. Charron: Ouais.

M. Hardy: Les "major" étaient minoritaires et très fortement minoritaires. Ils étaient seuls. Et je n'ose pas citer M. Brault, parce que je crains que, demain matin, il dise que je le cite mal, mais j'ai quand même des témoins ici. A un certain moment, on a demandé à M. Brault: Comment voyez-vous cela? M. Brault nous a répondu — je ne pense pas trahir sa pensée — C'est vous le gouvernement, prenez donc vos responsabilités et nommez donc les gens. Encore une fois, je le cite sous réserve, parce qu'il peut aussi bien me dire demain matin que je l'ai mal cité, mais j'ai quand même des témoins.

Le Président (M. Kennedy): Article 54. Adopté?

M. Charron: Non, parce que je considère toujours que l'interprétation que vient de donner le

ministre et ce que dit le texte de la loi, ce n'est pas...

M. Hardy:... conforme...

M. Charron: Cela ne va pas l'un avec l'autre.

M. Hardy: Vous ne vous fiez pas aux éminents juristes qui m'entourent?

M. Charron: Vous ne serez pas toujours là.

M. Hardy: Ah! mais je vais y être longtemps. Prenez-en votre parti. Vous allez avoir à m'endurer longtemps aux Affaires culturelles.

M. Charron: Si c'était seulement moi qui vous endurais, cela ne serait pas bien grave. Je trouve qu'il y a pas mal de gens qjji vont devoir vous endurer.

M. Hardy: Vous et ceux qui n'aiment pas ma face, il va falloir que vous vous habituiez à m'endurer.

M. Charron: Quand vous dites, dans le deuxième paragraphe de l'article 54, que vous demandez par écrit à chacune des associations reconnues, ce n'est pas à l'Union des artistes ou au Syndicat national du cinéma? C'est quand vous les avez convaincus de se mettre ensemble pour vous en soumettre trois.

M. Hardy: Exactement. C'est cela. C'est dans ce sens qu'ils deviennent représentatifs.

M. Charron: II y a combien d'associations de distributeurs?

M. Hardy: Pardon?

M. Charron: II y a l'association des distributeurs indépendants.

M. Hardy: Oui, et il y a le Montreal Film Board.

M. Charron: C'est le Montreal Film Board, Famous Players. Laquelle est la plus représentative?

M. Hardy: C'est ensemble qu'ils vont l'être.

M. Charron: Je ne suis pas d'accord. Je trouve que vous devriez avoir un article qui dit clairement que le ministre procède à un regroupement des différentes associations dans chacun de ces secteurs.

M. Hardy: Cela revient à cela.

M. Charron: Quand vous dites l'association...

M. Hardy: On ne peut pas mettre cela dans une loi.

M. Charron: L'association, il faut que ce soit vous qui la créiez, autrement dit, là où il y en a plusieurs.

M. Hardy: Vous voulez me faire créer des associations.

M. Charron: Non, mais c'est ce que vous me dites. C'est ce que lui vient de me dire. Il me dit: Je vais les mener à la même table et je vais leur demander trois noms. Ce n'est pas ce que dit la loi parce que l'Union des artistes, c'est une association; le Syndicat national du cinéma, c'est une autre association; et la loi dit qu'elle va reconnaître la plus représentative. Elle ne dit pas qu'elle va les mettre ensemble et va demander trois noms; cela dit que le ministre va choisir laquelle des deux est la plus représentative. Quand on dit la plus, c'est parce qu'il y en a une qui est moindre.

M. Hardy: Oui, mais c'est une association ad hoc pour une fin bien précise, soit recommander trois noms.

M. Charron: Ah! C'est cela qu'il faut dire. Cela va être fait ad hoc. Des associations de distributeurs, il en existe déjà. La loi vous obligera à choisir laquelle des deux vous trouvez la plus représentative.

M. Hardy: Je ne peux pas me donner ce pouvoir dans la loi. Vraiment, vous voulez me donner des pouvoirs.

M. Charron: Changez le libellé de la loi parce que comme elle est là, vous devrez prendre une association existante.

M. Hardy: Si je me donnais ce pouvoir dans la loi, je me ferais tomber sur la tête par votre ami M. Tadros, demain matin.

M. Charron: Vous ne créez pas l'association, vous la reconnaissez.

M. Hardy: C'est cela.

M. Charron: Elle est donc existante.

M. Hardy: Pour une fin bien précise, la recommandation de trois noms, je demande à tous les groupes qui forment un secteur donné de se réunir, donc de former un groupe ad hoc très temporaire, très limité dans le temps et dans l'espace.

M. Charron: Ce n'est pas dit dans la loi. M. Hardy: Oui, c'est impliqué. M. Charron: Ce n'est pas impliqué dans la loi. M. Perreault: C'est indiqué au point...

M. Charron: Ce n'est pas impliqué dans la loi. Supposons que vous ameniez l'Union des artistes

et le Syndicat national du cinéma... j'aime autant prendre un autre exemple un peu plus juteux pour le ministre. Supposons l'Association des distributeurs indépendants, d'un bord de la table...

M. Hardy: C'est plus juteux pour vous ou pour moi?

M. Charron: Pour vous. M. Hardy: Pourquoi?

M. Charron: Parce que j'aimerais vous voir dans ce jus. Vous amenez l'Association des distributeurs indépendants d'un côté de la table et les Américains de Famous Players de l'autre bord. Supposons qu'ensemble...

M. Hardy: Ils ne s'entendront pas?

M. Charron: ...ils ne s'entendent pas pour vous soumettre trois noms sur lesquels ils sont d'accord, la loi va vous obliger de reconnaître l'association la plus représentative.

M. Hardy: C'est cela.

M. Charron: Votre association ad hoc, que nulle part dans la loi vous êtes obligé de faire, n'existe pas, n'est pas légale. Dans le cas de mésentente, vous devez revenir au texte original de la loi et là vous devrez choisir entre l'Association des distributeurs indépendants et les Américains de Famous Players. C'est ce que je ne veux pas voir dans la loi. Je n'ai pas envie qu'il y ait un seul Américain à l'Institut du cinéma québécois.

M. Hardy: Je répète encore. Je commence d'abord par leur demander de se réunir.

M. Charron: Ce n'est pas dit dans la loi.

M. Hardy: Ils ne veulent pas se réunir. Ils ne veulent rien savoir. A ce moment, je prends l'association qui est la plus nombreuse. Dans le cas des distributeurs, ceux que vous appelez les plus juteux, c'est évident que ce sont les distributeurs indépendants qui sont les plus nombreux, donc ce sont les distributeurs indépendants qui recommandent les trois noms.

M. Charron: Les exploitants de salles?

M. Hardy: II y a une seule association. S'il y avait deux associations et s'ils refusaient de s'entendre, on prendrait l'association qui représente le plus de monde, la plus représentative. Tout cela est impliqué dans la loi.

M. Charron: Vous en impliquez pas mal, je trouve.

M. Hardy: Comme disait votre chef ce matin, le député de Sauvé, nous légiférons à la française. C'est-à-dire que tous les grands principes sont contenus dans la loi. La grande distinction entre légiférer à l'anglaise et à la française, c'est qu'à l'anglaise, il y a toujours une série d'énumérations; à la française, le modèle par excellence est le code civil. Nous avons de grands principes qui contiennent tout ce que nous pouvons faire.

M. Charron: Tout ce que je retrouve de français dans votre loi, c'est que vous parlez beaucoup pour ne rien dire. Ce que j'aimerais que vous disiez très clairement, ce sont vos intentions en arrière de cela.

M. Hardy: Ce que je vous ai dit n'est pas assez clair? Au contraire, si on mettait toutes les indications que vous dites, on mettrait beaucoup de mots inutiles, donc on parlerait pour ne rien dire. Mais c'est une phrase concise, un paragraphe concis, clair, précis où tout est contenu. Donc, cartésien, donc français.

M. Charron: Article 54, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 55.

M. Charron: Je me demande toujours, le secteur le plus vague, celui des artisans...

M. Hardy: Les artisans, oui.

M. Charron: ...je me demande toujours...

M. Hardy: C'est probablement le secteur qui va poser le plus de difficultés, je suis d'accord. D'autre part, ils ont des...

M. Charron: Est-ce que vous seriez d'accord... M. Hardy: Je vais vous poser une question...

M. Charron: Moi aussi, j'allais vous en poser une.

M. Hardy: Je vous donne la préférence.

M. Charron: Supposons que les techniciens et les artistes, regroupés sous l'étiquette...

M. Hardy: Je pense que j'aurais dû vous poser ma question avant.

M. Charron: Oui, allez-y.

M. Hardy: Je vais vous poser une question bien précise. Est-ce qu'un secteur du milieu cinématographique vous a fait une recommandation précise quant au mode de nomination?

M. Charron: Je ne crois pas.

M. Hardy: Vous n'en avez pas eu, nous en avons eu, c'est le mémoire des producteurs, appuyé par les propriétaires de salles et les distributeurs. Ce sont eux qui nous ont proposé ce mode

de nomination. Alors, vous êtes un peu devant du vague, vous n'avez pas de proposition précise du milieu cinématographique, moi, j'ai une proposition très précise du milieu cinématographique que j'accepte et que j'incorpore à la loi.

M. Charron: Je regrette, mais la proposition que vous avez reçue du milieu cinématographique ne venait...

M. Hardy: D'une partie.

M. Charron:... que des patrons.

M. Hardy: Oui, oui.

M. Charron: Ne venait que des patrons.

M. Hardy: Des producteurs. Les producteurs sont des patrons.

M. Charron: Mais oui.

M. Hardy: Mais oui et qu'est-ce...

M. Charron: On parle du groupe...

M. Hardy: Qu'est-ce que vous voulez, les autres...

M. Charron: Groupes d'employés.

M. Hardy: Bien oui, mais les artisans et les réalisateurs, c'est-à-dire que j'ai eu un membre de l'exécutif des réalisateurs qui m'a rencontré. Il est allé vous voir et il est venu me voir aussi. Il vous a dit la même chose qu'à moi, parce que vous avez le même mémoire.

Les autres qui vous ont parlé n'ont pas fait de proposition précise, que voulez-vous que je vous dise?

M. Charron: Ecoutez, ce n'est pas surprenant que les patrons de l'industrie du cinéma, ceux qui font le plus d'argent dans l'industrie du cinéma...

M. Hardy: Les producteurs québécois font beaucoup d'argent?

M. Charron: Les producteurs, dans une entreprise cinématographique font plus d'argent que les artistes...

M. Hardy: Je parle des producteurs québécois, ce sont les producteurs québécois, ce ne sont pas les producteurs des Etats-Unis, ce sont les producteurs québécois.

M. Charron: Les producteurs québécois font plus d'argent que les artistes québécois, et que les techniciens québécois.

M. Hardy: Hummmm, faites attention!

M. Charron: Bien voyons donc! Quand on partage le profit d'un film... Bingo, j'ai donné l'image des profits de Bingo, je vais les ressortir, si vous voulez.

Voyons donc!

Dans le film Bingo, il y a $1,300,000 qu'on a faits avec le film au guichet, d'accord? Après que les propriétaires de salle eurent pris leurs profits, c'est $0.65 par piastre. Après que le distributeur, qui a charrié le film dans toutes les villes du Québec — parce que Bingo a quand même eu une assez large diffusion, c'est d'ailleurs le même producteur — ait pris le sien, il restait $265,000 sur $1,300,000, pour le producteur. Le producteur a pris son profit dessus et il restait $0.05 par piastre. Moi, j'avais payé $3 pour aller voir ce film. Sur mes $3, il y avait $0.15 qui allaient aux artistes qui ont fait le film, pour payer les techniciens, pour payer les gars qui prennent le son, pour payer les gars qui font le montage du film, etc.

Dans un film, à moins qu'un artiste soit extrêmement populaire ou extrêmement sérieux quant aux affaires, par exemple, Dominique Michel, quand elle a joué dans 'Tiens-toi bien après les oreilles à papa", avait été assez intelligente — parce qu'elle est loin d'être folle — pour inclure dans le contrat un pourcentage à même les recettes aux guichets. Sans cela, elle ne donnait pas son nom, parce que c'était elle, avec Yvon Deschamps, la vedette du film.

Mais, ce ne sont pas tous les artistes qui ont ce "bargaining power". Même, la plupart se quêtent des emplois.

Un film mettant en vedette Luce Guilbault, par exemple, est à l'affiche pendant cinq semaines au cinéma, des files sur le trottoir, du matin jusqu'au soir, cela rapporte très peu à Luce Guilbault elle-même dans le fond. Mais, c'est elle qui fait le corps du film par son talent. C'est environ de $0.05 à $0.07 par dollar qui reviennent aux artistes et aux techniciens.

Le ministre est disparu, mais je dois me rendre à l'argument. Je considère toujours impossible de mettre, pour ceux qui sont les employés de l'industrie du cinéma, c'est-à-dire les techniciens et les artistes, un seul représentant à l'institut.

Ce que je voudrais suggérer, c'est que si la personne choisie comme le représentant des artisans est un individu, une personnalité provenant du monde artistique, admettons, tel que recommandé par l'Union des artistes, dans les deux membres qui restent...

M. Hardy: C'est prévu, d'ailleurs. Le ministre leur a dit d'en laisser un qui n'est pas assigné et qui peut servir...

M. Charron: Ça y est. Je viens de gagner mon point. Il faudrait le mettre dans la loi. Je ne me fie pas à vous autres.

A quel article parle-t-on des deux représentants qu'il reste à fournir? A l'article 56. "Il y en a un qui doit représenter la clientèle cinématographique québécoise" ce que j'endosse. Est-ce qu'on peut spécifier que l'autre viendra du monde artisan? Puisque le monde artisan est le plus...

M. Hardy: Non. Cela se peut que ce soit...

M. Charron: Vous ne voulez pas le mettre, hein?

M. Hardy: Je dois attendre le ministre.

M. Charron: On va attendre le ministre. Je viens de faire une proposition extrêmement intéressante.

M. Hardy: Je l'écoute avec toute attention... Quelle est votre proposition?

M. Charron: Si je m'en tiens au projet actuel — si vous le trouvez difficile, j'ai une sous-proposition à faire — vous admettez avec moi que le représentant des artisans va être difficile à trouver, probablement, à cause de l'association ad hoc qui va réunir les intérêts, encore une fois non pas opposés, mais très différents à l'occasion. Très différents: sécurité d'emploi, etc., dans l'industrie.

M. Hardy: Mais, pour l'institut, ces gens-là ne doivent pas penser à leur sécurité d'emploi, à ces choses-là.

M. Charron: Non, mais je veux dire que ce sont des gens qui vont aborder les...

M. Hardy: Une fois nommés à l'institut, il ne sont plus les représentants des...

M. Charron: Non. Je parle de la sécurité d'emploi des techniciens dans la... Vous avez eu le mémoire du syndicat du cinéma...

M. Hardy: Oui, qui voulait qu'on amende les lois du travail avec la Loi sur le cinéma.

M. Charron: Non, s'ils faisaient cela, s'ils ont suggéré cela, c'est parce qu'un bon nombre d'entre eux ont des emplois qui végètent beaucoup. En tout cas, ce n'est pas de cela que je veux parler.

Je veux dire que la catégorie des artisans — on a convenu de cela, je pense depuis le début de notre discussion — est la catégorie qui regroupe des intérêts plus différents que d'autres catégories.

M. Hardy: C'est-à-dire où il y a le plus d'associations dans tout cela.

M. Charron: Voilà. Est-ce qu'on peut s'entendre pour que, les deux autres membres qu'il vous restera à nommer, dont un doit représenter la clientèle cinématographique québécoise, l'autre provienne du milieu qui n'aura pas été celui que représentent les artisans, autrement dit.

Que si vous vous entendez pour choisir, parmi les trois noms que les artisans vous suggéreront, quelqu'un qui provient du milieu des artistes...

M. Hardy: Un secteur important.

M. Charron: Oui.

M. Hardy: C'est-à-dire qu'on a retenu cette idée-là, mais pas simplement pour les artisans. Justement, les deux que le lieutenant-gouverneur en conseil peut nommer, mais toujours sur approbation, cela pourra varier avec les années.

Il y a la clientèle, il y a les consommateurs. Il faudrait qu'il y ait quelqu'un des consommateurs, mais, l'autre, le deuxième, l'idée que nous avions, quand nous avons rédigé cet article, toujours, encore une fois, à la suggestion des producteurs, c'est que, bien sûr, il y aura toujours des milieux qui ne seront pas aussi représentés. Il n'y a pas seulement les artisans. Il y a les critiques. Il y a les professeurs du domaine cinématographique. Il y a des secteurs. L'idée de la présence de cette septième personne, c'est qu'elle pourra éventuellement provenir de ces milieux. A un moment donné, pour un mandat, cela pourra être un critique, un journaliste qui se spécialise dans le domaine cinématographique. A une autre occasion, à la fin du mandat de cette personne, cela pourra être un des secteurs des artisans qui n'était pas là. Ce pourrait être un professeur du domaine cinématographique. L'idée des deux, c'est que les consommateurs et les secteurs du cinéma plus difficilement identifiables, obtiennent d'être représentés. Dans ce sens, nous considérons que l'article 54 nous donne ce pouvoir.

M. Charron: Merci.

M. Hardy: Si on veut que tout le monde y soit, on se retrouve avec un institut de quinze ou vingt membres et on nous a fait nettement voir qu'à ce moment l'institut ne pourrait pas fonctionner. C'est le milieu qui nous l'a dit très clairement.

Le Président (M. Kennedy): Le député de L'Assomption.

M. Perreault: M. le ministre, je suis en désaccord avec vous là-dessus de regrouper dans le secteur des artisans, les artistes et tous les professionnels de l'acoustique, les professionnels du son, les professionnels de la photographie, les professionnels de la cinéphotographie. Je pense que c'est là mettre ensemble des choses dissemblables. Les artistes qui sont dans un film varient de l'un à l'autre. Ce ne sont pas des gens qui vivent complètement de ce métier. Je pense que les techniciens du son, les techniciens du film, tous ces gens qui ont des métiers dans le cinéma devraient être regroupés. On parlait hier de la qualité du son. L'institut devrait avoir un oeil là-dessus. Je pense que ce groupe devrait avoir son représentant. Je pense que c'est de passer à côté que de regrouper dans les artisans les techniciens de ces métiers, de ces groupes et les artistes.

M. Hardy: Ce n'est pas un problème facile. On a essayé partout.

M. Perreault: C'est de regrouper des choses complètement dissemblables.

M. Hardy: Quelle est la solution? De nous en écarter? D'écarter des gens?

M. Perreault: Ce n'est pas de les écarter; qu'il y ait un représentant, que votre sixième qui flotte soit un représentant de ces gens.

M. Hardy: C'est cela. Vous dites ce que je viens de dire.

M. Perreault: Oui, qui devrait l'être. M. Hardy: Oui.

M. Perreault: Au lieu qu'il y en ait deux, que ce soit un secteur reconnu.

M. Hardy: On ne peut pas le reconnaître d'une façon précise, parce que, comme je vous dis, il y en a beaucoup. Il faudra varier, pour permettre à tout le monde d'avoir un jour ou l'autre la chance de siéger à l'institut. Cela varie.

M. Perreault: Oui, mais vous avez admis des professeurs et des critiques. Je ne parle pas de ceux-là. Je parle des gens qui vivent dans les métiers...

M. Hardy: Un critique cinématographique est assez intimement lié au domaine... Les producteurs de scénarios...

M. Perreault: Je parle des métiers de construction du cinéma, les caméramen, le technicien en acoustique, l'ingénieur du son, c'est de ceux-là que je parle. C'est ce que j'appelle les métiers professionnels du cinéma. Qu'ils ne soient pas représentés, c'est une grave déficience, d'après moi.

M. Hardy: Ils vont être représentés au niveau de leur syndicat. Tous ces gens vont être consultés par le syndicat dans le secteur des artisans.

M. Perreault: C'est parce que vous regroupez dans le même secteur artisan... Parmi les trois représentants demandés, vous en nommez un. Il n'est pas sûr que les gens de ce secteur des métiers du cinéma vont être représentés.

M. Hardy: Ils en recommandent trois.

M. Perreault: Ils peuvent en recommander trois, mais on ne sait pas qui sera choisi. Le même ne peut pas représenter les artistes et les métiers du cinéma. Ce sont deux chapeaux différents et deux personnes dissemblables. C'est là la déficience. Je ne vois pas un artiste, que ce soit Luce Guilbault ou un autre, représenter les gens du métier du cinéma. Cela ne marche pas.

Le Président (M. Brisson): Article 55, adopté? M. Hardy: Quant à moi, je suis prêt.

Le Président (M. Brisson): Est-ce qu'on était à l'article 54 ou 55?

M. Charron: Article 55, adopté.

Le Président (M. Brisson): Adopté. Article 56, adopté?

M. Charron: Non, M. le Président, je pense que je suis partagé entre une obligation que je sens que je devrais avoir pour être plus conforme aux objectifs que j'ai défendus et une espèce de latitude que je voudrais laisser, mais je crois que... A la fin du paragraphe 56, où on dit: "... dont un représente la clientèle cinématographique québécoise...", j'ajouterais: "Et l'autre provenant du milieu des artisans." Je suis parfaitement d'accord avec le député de L'Assomption là-dessus. J'invite le ministre à y penser très sérieusement parce que...

M. Hardy: Laissez-moi y penser jusqu'à la troisième lecture.

M. Charron: Jusqu'à la troisième lecture?

M. Hardy: Oui, adoptons l'article tel quel et on y pensera jusqu'à la troisième lecture. On peut toujours faire des amendements.

Le Président (M. Brisson): Adopté, sous réserve.

M. Hardy: Non, pas sous réserve, on va l'adopter. Si, en réfléchissant, on propose...

M. Charron: Suspendons-le.

M. Hardy: Non, parce que je vous dis tout de suite que, d'ici 23 heures ce soir, je ne serai pas en mesure d'avoir pris une décision. Vous m'avez promis qu'on finissait à 23 heures.

M. Charron: Je ne vous ai pas promis qu'on finissait à 23 heures.

M. Hardy: Ah!

M. Charron: Surtout si vous faites comme cela.

M. Perreault: J'appui le député de Saint-Jacques là-dessus pour que vous y pensiez sérieusement.

M. Hardy: Cela me fait peur.

M. Perreault: On ne s'appuie pas souvent, mais c'est ma formation d'ingénieur qui me pousse...

M. Charron: Au fond, j'aurais dû vous amener.

M. Hardy: De toute façon, cela devient tellement complexe que le député de L'Assomption et le député de Saint-Jacques soient sur la même longueur d'onde que j'ai besoin de plusieurs heures pour réfléchir à leur proposition.

M. Charron: C'est la voix du public. 55% et 30%, cela fait 85% contre le ministre.

M. Hardy: Le député de L'Assomption n'a pas eu une grosse majorité dans son comté.

M. Charron: il ne l'a même plus, d'ailleurs, à l'heure actuelle.

Le Président (M. Brisson): Adopté?

M. Hardy: Article 56, Adopté.

M. Charron: M. le Président je vote contre.

M. Hardy: Adopté, sur division.

Le Président (M. Brisson): Adopté sur division.

M. Hardy: Sur la division du député de Saint-Jacques et du député de L'Assomption.

M. Perreault: Oui.

Le Président (M. Brisson): Article 57, adopté?

M. Charron: Qu'est-ce que cela veut dire, l'article 57? Comment allez-vous vérifier cela, le caractère représentatif des associations?

M. Hardy: Je vous ai donné un exemple tantôt. Actuellement, il n'existe qu'une seule association des propriétaires de salles. Dans deux ou trois ans, il peut y en avoir deux, trois, quatre ou cinq. Alors, on ira vérifier laquelle, s'ils ne réussissent pas à s'entendre, des trois, quatre ou cinq, regroupe le plus de membres. Celle qui aura le plus de membres sera la plus représentative.

M. Charron: Supposons qu'il arrive...

M. Hardy: Ne me proposez pas le cas où il y aurait trois associations qui ont exactement le même nombre de membres.

M. Charron: Ce n'est pas cela que je veux dire. On est en train de mettre un institut en tutelle, vous devriez rester.

M. Cournoyer:...

M. Charron: L'autre question dont je voudrais parler... Il y a des phénomènes qu'on appelle des associations moribondes, c'est-à-dire qu'à cause du peu de vigueur, etc., les gens, membres pourtant, qui pourraient être membres, ne sont pas intéressés à y aller parce qu'ils considèrent que leurs porte-parole sont complètement soumis au ministre.

M. Hardy: C'est le cas de l'association du Parti québécois dans Terrebonne actuellement.

M. Charron: Quoi?

M. Hardy: C'est le cas de l'association du Parti québécois dans Terrebonne.

M. Perreault: Moribonde? M. Charron: Moribonde?

M. Hardy: Moribonde. 25 personnes sont venues entendre le député de Lafontaine l'autre jour. Je referme la parenthèse.

M. Charron: Oui?

Le Président (M. Brisson): Article 57, adopté?

M. Hardy: Je referme la parenthèse. On devrait admettre que je n'ai pas dit cela parce que je vois le journaliste de la Presse qui ne trouve vraiment pas sérieux de faire des allusions semblables. Je referme la parenthèse, j'oublie, j'efface. On revient au fond de la question.

M. Charron: Alors?

Le Président (M. Brisson): Article 57, adopté?

M. Charron: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): Article 58?

M. Hardy: Article 58, vous n'y êtes pas opposé?

M. Charron: Non. A l'article 59, pourquoi cette distinction, M. le Président?

M. Hardy: C'est le système de rotation. Oui, d'abord, c'est pour assurer la continuité et le renouvellement.

M. Charron: D'accord!

M. Hardy: On ne peut pas changer tout le monde en même temps.

Le Président (M. Brisson): Articles 58 et 59 adoptés? Article 60, adopté?

M. Charron: Article 60...

M. Hardy: C'est ce qui arrive dans toutes ces organisations. Tout à coup, il y a un certain retard pour le renouvellement, les CEGEP...

M. Charron: D'accord! Adopté.

Le Président (M. Brisson): Article 61, adopté?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Brisson): Article 62, adopté?

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): Article 63, adopté?

M. Hardy: C'est pour être conforme à la pratique générale des sièges sociaux...

M. Charron: D'accord! Adopté.

M. Hardy: ...il y a le problème de Québec et la ville administrative, Montréal...

Le Président (M. Brisson): Article 64, adopté?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Brisson): Article 65, adopté?

M. Charron: Oui.

Le Président (M. Brisson): Article 66, adopté?

M. Charron: Article 67, adopté.

Le Président (M. Brisson): Article 67, adopté.

M. Charron: A l'article 68, il y a une faute de français. Article 67, adopté, oui.

M. Hardy: A l'article 68, il y a une faute de français.

M. Charron: Oui, paragraphe b): "...rendre à ces jurys applicables les articles 73..." Je pense que ce serait mieux de dire: "...rendre applicables à ces jurys..."

M. Hardy: Oui.

M. Charron: Ce ne sont pas les jurys qui deviennent applicables. Ce sont les règles.

M. Hardy: Vous avez raison.

M. Charron: Est-ce que mon amendement est adopté?

M. Hardy: Oui. M. Charron: Merci!

M. Hardy: C'est le troisième ou le quatrième amendement qu'on accepte? Au paragraphe b), au lieu de dire "...rendre à ces jurys applicables..." on dit "...rendre applicables à ces jurys les articles 73 à 77".

Le Président (M. Brisson): L'article 68 est adopté donc. Article 69?

M. Hardy: II y a des modifications à l'article 68. On ajoute "les articles 73 à 77 de la présente loi".

M. Charron: Oui.

M. Hardy: Cela va? C'est un amendement technique, au fond, et on ajoute à l'article 68 le paragraphe e): "...établir, en consultation avec le ministre, les normes visées à l'article 52".

Le Président (M. Brisson): Article 68 adopté. Article 69?

M. Charron: Aussi.

Le Président (M. Brisson): Adopté. Article 70?

M. Charron: Aussi.

Le Président (M. Brisson): Adopté. Article 71?

M. Charron: Aussi.

Le Président (M. Brisson): Adopté. Article 72?

M. Hardy: II y a un amendement à l'article 71. Pardon! Je propose un amendement à l'article 71. Il ne faudrait pas que l'esprit de coopération du député de Saint-Jacques me fasse oublier mes amendements.

Alors, on ajoute, à l'article 71... Ah oui! A l'article 71, on enlève les mots "le ministre reçoit tous les avis de convocation..."

M. Perreault: Est remplacé par le suivant.

M. Hardy: Ah bon!

M. Perreault: Vous remplacez l'article.

M. Hardy: Ce qu'on enlève, techniquement c'est que le ministre n'assiste plus aux réunions et ne délègue plus de représentant. C'est à cause du numérotage des articles.

M. Charron: Adopté, M. le Président.

M. Perreault: Pourquoi avez-vous enlevé cela?

M. Hardy: Pourquoi le ministre n'assiste plus aux réunions?

M. Perreault: Ni son représentant?

M. Hardy: Parce que le ministre veut respecter, le plus totalement possible, l'indépendance de l'institut et son autonomie.

M. Perreault: Très bien!

Le Président (M. Brisson): L'article 72 est-il adopté?

M. Charron: Oui.

Le Président (M. Brisson): Article 73, adopté?

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): Article 74, adopté?

M. Charron: A l'article 74, il y a un amendement?

M. Hardy: On ajoute "représentants et employés".

Le Président (M. Brisson): Adopté? M. Charron: Oui, M. le Président.

M. Hardy: Ce sont des gens qui seront réputés avoir des conflits d'intérêts.

Le Président (M. Brisson): Article 75, adopté?

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): Article 76, adopté?

M. Charron: Est-ce que cela va être public, M. le Président, la disposition de l'article 76?

M. Hardy: Ah oui! Dans le texte actuel de l'article 76...

M. Perreault: II y a un amendement, à l'article 76, deuxième alinéa...

M. Hardy: De toute façon, pour les fins de la... Il y a quelques petits imbroglios dans le texte des amendements que l'on m'a remis. Pour les fins de la discussion, le texte de 76 est le nouveau texte et je le lis pour que cela soit bien clair. Le texte de l'article 76 que nous adoptons...

De toute façon, le nouvel article 76 est l'ancien article 64 qui devient maintenant l'article 76 et se lit comme suit: "Les administrateurs et dirigeants de l'institut doivent, au moment de leur entrée en fonction, et peuvent par la suite, faire une déclaration générale de leurs intérêts dans les entreprises qui pourraient être appelées à bénéficier de l'aide financière de l'institut." Alors, c'est l'ancien article 64 qui devient l'article 76 et le texte...

M. Perreault: Vous supprimez le deuxième alinéa.

M. Hardy: C'est cela. Exactement. Le deuxième alinéa de l'article 64 est supprimé...

M. Perreault: C'est cela.

M. Hardy: ...et l'article 64 porte maintenant le numéro 76.

Le Président (M. Brisson): Article 76. Adopté.

M. Charron: Je veux seulement poser une question. Si cette déclaration de conflits d'intérêts possibles est publique... A qui le disent-ils?

M. Hardy: A l'institut. Ils remettent leur déclaration à l'institut.

M. Charron: Et est-ce que l'institut va rendre public...

M. Hardy: C'est une personne juridique. L'institut pourra décider, par règlement interne, de rendre cela public. Mais c'est une corporation privée. Faites-vous confiance ou non à l'institut?

M. Charron: Ce n'est pas cela qui est la question.

M. Hardy: Bien oui.

M. Charron: C'est justement pour qu'il jouisse du plus grand respect dans l'opinion publique. C'est qu'il mette ses cartes sur la table et qu'on sache très bien que les gens qui le composent, au départ, sont voués à l'intérêt du développement du cinéma québécois. Je trouve que c'est pour le plus grand bien de la réputation...

M. Hardy: Je suis d'accord avec vous. Il s'agit de voir comment, techniquement, on peut le...

M. Charron: J'ai un amendement ici. Regardez le texte pour voir si cela vous sourit.

M. Hardy: Article 76? M. Charron: Oui.

M. Hardy: Ces déclarations générales écrites doivent être remises au ministre qui, lui, doit les rendre publiques.

M. Charron: Par exemple, si le représentant du secteur de l'exploitation est effectivement un propriétaire...

M. Hardy: Vous visez toujours les mêmes. M. Charron: Non.

M. Hardy: Dans votre esprit, ce sont toujours les mêmes qui sont "peccamineux".

M. Charron: Non, mais c'est parce que c'est le cas le plus évident. Je vous donnais un exemple dans le milieu des employés du cinéma. Par définition, dès que vous représentez le monde de l'exploitation, c'est un exploitant de salle. Cela serait bon, quand il arrive, qu'il nous dise de quelles salles il est propriétaire parce que l'institut, par l'article a) de son mandat, qui s'assure de la diffusion du cinéma... A un certain moment, tu peux peut-être t'apercevoir que, lorsqu'il s'occupe de diffusion, c'est pour amener des films toujours dans le même cinéma.

M. Hardy: Je vous avoue que je suis très partagé parce que, quant au fond, je suis très sympathique. Je voudrais que tout se fasse le plus clairement possible...

M. Charron: Cela serait clair.

M. Hardy: ...mais j'ai des hésitations sur le plan juridique. C'est un amendement à 76?

M. Charron: Oui. J'ai peur qu'il y ait des critiques à un certain moment sur les décisions de l'institut et qu'on dise: Ah! Ils ont pris cela et sais-tu pourquoi? C'est parce qu'un des gars qui est membre de l'institut est propriétaire de ci et de cela et je comprends: II pense à sa vache.

M. Hardy: Pourquoi ne faites-vous pas confiance à l'institut? S'il y a de telles critiques, cela sera à l'institut de se défendre.

M. Charron: Bien non! Cela serait tellement plus simple... On demande à ces gens de déclarer leurs intérêts quand ils y vont, exactement comme on le demande aux fonctionnaires ici. J'ai voté cette semaine, pendant que je faisais la queue de veau entre la Chambre et une commission parlementaire, au moment où on faisait la deuxième lecture, j'ai voté une loi des Affaires sociales où tous les membres de conseils d'administration des hôpitaux...

M. Hardy: ...doivent rendre ça public?

M. Charron: ...des centres hospitaliers doivent désormais le faire. C'est pour le plus grand bien... Ce n'est pas une tâche énorme.

M. Hardy: Les fonctionnaires font une déclaration à la Commission de la fonction publique ou au président... Les hôpitaux sont des corporations privées.

Je vous le dis tout de suite. Il y a toujours la crainte de légiférer sur le bout de la table, suivant la vieille expression. Je suis très sympathique à ça.

Si vous voulez, on va le vérifier et si, techniquement, légalement, cela se fait, je m'engage à le faire.

M. Charron: La Loi des affaires sociales, dont je vous parlais, avant qu'on abandonne ce sujet, prévoit même des sanctions dans le cas où un membre du conseil d'administration est en conflit d'intérêts. Je ne vous demande même pas cela. Je ne vous demande pas de punir un membre de l'institut qui, par exemple, aurait favorisé la chaîne de cinémas dont il est le représentant. Je vous demande juste qu'il mette ses cartes sur la table quand il arrive, pour que l'institut parte avec carte blanche. On sait quel gars c'est...

M. Hardy: Déjà, le fait de le mettre devant tous les autres membres du conseil d'administration de l'institut, c'est déjà... Si les réalisateurs s'aperçoivent qu'un tel a un conflit, ils vont le dire.

M. Charron: Si les ministres du cabinet, par exemple, ne se contentaient que de déposer entre eux, cette affaire-là, cela voudrait dire qu'à un moment donné où il se prend une décision...

M. Hardy: Non. Vous ne pouvez pas dire la même chose, parce que les membres d'un conseil de ministres sont soumis au secret. Il y a une grande homogénéité dans un conseil de ministres, vous le savez.

M. Charron: Oui.

M. Hardy: Tandis qu'à l'institut, vous allez avoir les réalisateurs, les propriétaires de salles. Cette homogénéité ne sera pas aussi grande.

M. Charron: Justement...

M. Hardy: Ils vont se surveiller les uns les autres. En tout cas, est-ce que vous acceptez... Je retiens votre idée et nous allons l'examiner d'ici le moment de la troisième lecture. Peut-être ce soir.

M. Charron: D'ici ce soir, écoutez, ce n'est pas...

M. Hardy: Est-ce que vous voulez suspendre?

M. Charron: D'accord.

M. Hardy: C'est le fait qui est suspendu.

Le Président (M. Kennedy): Jusqu'à maintenant, oui. Article 77?

M. Hardy: Je suis bien d'accord avec vous. Moins il y a de cachette, moins il y a possibilité que les journalistes fassent toutes sortes de suppositions, d'interrogations, de suspicions, etc.

M. Charron: Vous savez comment ils sont.

M. Hardy: Oui. Ils sont épouvantables, même quand ils sont de commerce agréable.

M. Charron: Article 77 adopté. Le Président (Kennedy): Adopté.

M. Hardy: Evidemment, quand on dit: Article 77 adopté, c'est toujours en considérant le changement de numéro.

M. Charron: Je travaille à...

Le Président (M. Kennedy): On travaille à cela. Section 4, dispositions financières, article 78.

M. Charron: Adopté. Le Président (M. Kennedy): Article 79? M. Charron: II manque un "tre" à "minus". M. Hardy: Où? A quel endroit?

M. Charron: Cela finit: "qu'il n'est approuvé par le "minus". Il faudrait mettre le "ministre."

M. Hardy: Le minis. Dans mon texte, j'ai par le "minis". On pourrait penser que c'est le député de Saguenay qui a rédigé...

M. Charron: Article 79 adopté, M. le Président.

M. Hardy: M. le Président, à l'article 80, je propose de remplacer l'article 80 par un nouvel article et je dis tout de suite que cela m'est pratiquement imposé. C'est pour se conformer à la Loi de l'administration financière.

M. Charron: Qui se lirait comment?

M. Hardy: Le nouvel article 80 se lirait ainsi: Je vais demander à celui qui l'a rédigé de le lire. "Les livres et comptes de l'institut sont véri-

fiés chaque année par le Vérificateur général et, en outre, aussi souvent que le détermine le lieutenant-gouverneur en conseil." C'est la Loi de l'administration financière qui oblige à...

M. Charron: D'accord, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 80 tel qu'amendé; adopté.

M. Hardy: M. Archambault, vous allez l'avoir dans le texte.

Le Président (M. Kennedy): Section 5, administration provisoire, article 81.

M. Hardy: Immédiatement, je vous fais remarquer que nous avons largement diminué les cas. Nous avons enlevé des cas où la tutelle ou l'administration provisoire pouvait intervenir.

Me permetteriez-vous que je m'absente trois minutes?

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): La commission suspend ses travaux à la demande du ministre pour trois minutes.

(Suspension de la séance: 16 h 39)

Reprise de la séance à 16 h 42

M. Kennedy (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission continue ses travaux. Nouvel article 81.

M. Charron: J'ai un amendement à l'article 81, M. le Président.

M. Hardy: Vous avez un amendement à l'article 81?

Nous acceptons. Au lieu que ce soit un seul membre qui demande... "le lieutenant-gouverneur en conseil, de sa propre initiative ou à la demande de l'un des membres de l'institut, peut nommer une ou plusieurs personnes." Alors, ce sera à la demande d'au moins deux...

M. Charron: Au moins deux membres. M. Hardy: D'au moins deux membres.

Le Président (M. Kennedy): L'amendement est adopté. Article 81, tel qu'amendé, adopté.

M. Hardy: C'est l'article 81, tel qu'amendé, le nouvel article 81.

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 82.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 83.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 84.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 85

M. Hardy: Articles 47 à 50...

M. Perreault: Au lieu de l'article 71.

M. Hardy: A l'article 85, on ajoute trois numéros d'article. Au premier alinéa, on dit à l'article 83 et au paragraphe d), aux articles 47 à 50.

M. Charron: D'accord, ça va.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Chapitre 5: Réglementation. Article 86.

Réglementation

M. Charron: Je voudrais demander au ministre, puisqu'on aborde le chapitre de la réglementation, quels sont les pouvoirs de réglementation qui existaient déjà?

M. Hardy: Dans l'ancienne loi? M. Charron: Oui.

M. Hardy: C'étaient des pouvoirs de réglementation pour les ciné-parcs et pour le Bureau de surveillance.

M. Charron: Par exemple, le paragraphe a) de l'article 86: "Etablir des normes d'aménagement, d'exploitation, d'admission de tout endroit utilisé pour la projection publique".

Est-ce que vous n'aviez pas déjà ce pouvoir de réglementation?

M. Hardy: Pour les ciné-parcs, mais pas pour les salles de cinéma. On l'avait pour les ciné-parcs. Pas pour les salles de cinéma conventionnelles. Les salles de cinéma conventionnelles étaient soumises aux règlements du ministère du Travail, vu l'hygiène et la sécurité.

A l'avenir, salles de cinéma et ciné-parcs devront se conformer à des nonnes d'aménagement et d'exploitation.

M.Charron: C'est quoi des normes d'aménagement et d'exploitation?

M. Hardy: Comme le disait avec beaucoup d'éloquence et de brio mon collègue député de l'Assomption — quand il n'est pas d'accord avec

vous, habituellement, il est brillant — il nous faisait part des problèmes d'acoustique. Ce sont toutes ces questions qui devront être bien réglementées, toujours dans le but de faire en sorte que l'oeuvre cinématographique puisse avoir toute sa valeur, toute sa splendeur.

Dans la loi no I, tel que déposé en première lecture, cela avait été oublié. C'est pour cela que vous le retrouvez ici, à titre d'amendement.

M. Charron: A l'article b) de l'article 86...

M. Hardy: Au fond, avec les modifications disant qu'on ne rejette plus de films, on reprend substantiellement les règlements actuels du Bureau de surveillance, la façon de procéder, mais adaptés avec la loi, parce que, maintenant, il y a des délais. Le service de la classification devra classer un film dans un délai imparti...

M. Charron: D'accord, adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 86, tel qu'amendé, adopté. Article 87.

M. Charron: II est adopté tel qu'amendé; c'est ce que vous avez dit, M. le Président.

M. Hardy: L'article 87, évidemment, avec tous les amendements inclus dans le nouveau texte.

M. Charron: C'est de concordance, adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté tel qu'amendé. Chapitre VI: Dispositions finales. Article 88.

M. Charron: Adopté.

Dispositions finales

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Nouvel article 89.

M. Hardy: C'est le fameux article 89 dont on a parlé au début. On avait discuté longuement. C'est un pouvoir qui est donné au ministre de faire annuler la licence si un exploitant pose des gestes qui vont à rencontre du bien culturel, des intérêts culturels de la collectivité.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 90?

M. Charron: Adopté aussi.

Le Président (M. Kennedy): II y a un amendement. C'est changé d'article.

M. Charron: C'était quoi?

M.Hardy: Oui, à l'article 36. C'est une concordance. C'est une simple concordance.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 91?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 92?

M. Charron: Adopté. J'aurais suggéré le député de Rosemont, mais je prendrais bien le ministre des Affaires culturelles, par exemple. Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 93?

M. Hardy: On ajoute, dans le nouveau texte de l'article 93, les documents photographiques.

M. Charron: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 93, tel que modifié,,adopté. Article 94?

M.Hardy: Mes conseillers considèrent que nous allons trop rapidement.

M. Charron: Vous avez sauté quoi?

Le Président (M. Kennedy): Je n'ai rien sauté. On suit cela.

M. Hardy: Comme on travaille sur le nouveau texte, on implique que ce sont toujours des amendements. C'est impliqué dès le début. On ne propose pas, d'une façon technique...

Au fond, on considère quasiment une réimpression du projet de loi pour les fins des travaux de la commission.

M. Charron: C'est cela. La présente loi remplace la Loi sur le cinéma. Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 95?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 96?

M. Charron: Quels sont les articles qui se trouvent à être abrogés par cette disposition?

M. Hardy: L'Office du film, entre autres, d'après la loi du ministère. Ce sont les deux articles de la loi du ministère qui me donnent la responsabilité de l'OFQ et du bureau de surveillance.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 97?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 98?

M. Charron: Adopté.

M. Hardy: C'est le pouvoir de classer des oeuvres cinématographiques.

Le Président (M. Kennedy): Article 99, tel qu'amendé?

M. Charron: Avec une protection de 500 pieds ou environ.

M. Hardy: L'aire de protection... M. Charron: L'aire de protection. M. Hardy:... mutatis mutandis.

Le Président (M. Kennedy): Article 99, tel qu'amendé? Adopté.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Article 100?

M. Charron: Bien sûr, cela va.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 101?

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Le nouvel article 102?

M. Charron: D'accord, M. le Président. Le Président (M. Kennedy): Article 103? M. Charron: Cela va.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 104?

M. Charron: L'article 104 dit que la loi sera proclamée en vigueur à une date qui sera fixée. Quand?

M. Hardy: Vous savez comme moi qu'il y a des articles qui impliquent la mise sur pied d'organismes. A mesure que nous serons prêts, physiquement, les articles seront proclamés.

M. Charron: Par exemple?

M. Hardy: Par exemple, pour tout ce qui concerne l'institut, il va falloir attendre...

M. Charron: Combien de temps croyez-vous avoir à mettre?

M. Hardy: Je vous donne le cas du Bureau de surveillance.

M. Charron: Sur les deux cas que j'avais...

M. Hardy: II faut continuer à mettre les films par catégorie. Tant et aussi longtemps que la direction générale du cinéma et que le service de l'information de la classification ne seront pas mis sur pied, c'est évident que ce sera le Bureau de surveillance qui continuera à fonctionner.

M. Charron: Je pose la question à l'administrateur des Affaires culturelles du Québec. Combien de temps croyez-vous que, au sein du ministère, on mettra avant d'établir ce service?

M. Hardy: Comme lié évidemment à tout le processus de la fonction publique, les mutations, pour être prudent, je dirais à l'automne, le Bureau de surveillance en particulier.

M. Charron: Est-ce que la censure existe encore jusqu'à l'automne?

M. Hardy: C'est-à-dire que la censure, en principe, va exister aussi longtemps que les articles qui abolissent la censure ne seront pas proclamés.

M. Charron: C'est jusqu'à l'automne.

M. Hardy: Cela vous pose des problèmes?

M. Charron: Non, parce qu'il paraît que...

M. Hardy: Le député de Saint-Jacques ne peut pas se retenir jusqu'à l'automne pour voir certains films. Le député de Saint-Jacques est un grand voyageur. Il ira en Suède, cet été.

M. Charron: Certainement.

M. Perreault: II va être obligé d'aller voir des films pour tous.

M. Charron: Je vais aller au Danemark voir la vie amoureuse de Jésus-Christ. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): II reste l'article 76.

M. Hardy: II reste l'article 76, M. le Président. Evidemment, nous n'avons pas eu le temps, au rythme où nous avons travaillé, depuis que nous nous sommes arrêtés à l'article 76... Je propose que nous l'adoptions. S'il y a lieu d'accepter l'amendement du député de Saint-Jacques, ce sera au moment du retour en Chambre.

M. Charron: M. le Président, je pense que mon amendement, dans la discussion que j'ai eue avec les conseillers du ministre, je suis même disposé à l'amoindrir dans le sens que vous soyez détenteur de la déclaration...

M. Hardy: Un joli cadeau de Grec! Si je décide de ne pas les rendre publics, c'est moi qui en est le dieu.

M. Charron: C'est cela.

M. Hardy: Les bons coups, c'est l'institut qui va les faire et, les mauvais coups, ce sera le ministre.

M. Charron: Ce sont vos employés.

M. Hardy: Les gens de l'institut! Au contraire, les gars...

M. Charron: Ils vont signer un contrat chaque année.

M. Hardy: M. le Président, je regrette infiniment. Je ne voudrais pas ouvrir un grand débat, mais les membres, les employés ne sont pas membres de la fonction publique, ne sont pas les employés du ministère. Ils sont les employés d'une corporation autonome, privée, au sens du code civil.

M. Charron: Pire que cela, ce sont des contractuels.

M. Hardy: II faut que ce soit bien clair. M. Charron: Ce sont des occasionnels.

M. Hardy: C'est-à-dire que l'institut sera très libre de signer une convention collective avec les employés pour trois ans, quatre ans ou cinq ans.

M. Charron: M. le Président, je soumets mon amendement au vote à l'article 76?

Une Voix: Quel amendement?

M. Hardy: Vous me placez devant une situation bien difficile, vous me placez devant l'obligation de le refuser maintenant et de peut-être l'accepter plus tard.

M. Charron: D'accord, au moment du rapport de la commission à l'Assemblée...

M. Hardy: Suspendez donc; on votera à ce moment-là.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Alors, la commission...

M. Hardy: Si vous me faites voter contre ici, je serais assez mal placé pour le présenter.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): La commission...

M. Hardy: Article 76 est adopté.

M. Perreault: ...notre problème de représentation du milieu des artisans.

M. Hardy: Oui.

M. Perreault: Vous réfléchissez.

M. Hardy: Ne vous organisez pas pour que j'aie des cauchemars cette nuit.

Le Président (M. Kennedy): La commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications a terminé l'étude du projet de loi no I, Loi sur le cinéma.

M. Hardy: Avant que nous n'ajournions, vous me permettrez de remercier le député de Saint-Jacques de son excellente collaboration dans l'étude de ce projet de loi. Nous avons parfois différé d'opinion sur les moyens. Je pense que, sur les objectifs, l'unanimité a été totale. Sur les moyens, nous avons pu différer d'opinion. Je pense que nous avons fait un travail très efficace ensemble. Les propos du député de Saint-Jacques m'inspireront sûrement dans l'administration de cette loi.

M. Charron: M. le Président, je suis content également. Je dois admettre qu'entre la version originale sur laquelle nous avons dû travailler et qui a été à l'origine de notre première prise de position sur ce projet de loi et les amendements, dont plusieurs substantiels, qui ont été amenés — au point que je disais au ministre qu'il aurait même pu, il était d'accord avec moi, réimprimer sa loi, des chapitres complets ont été réaménagés — il y a eu progrès. Je pense que le progrès vient très certainement de l'ouverture d'esprit qu'a voulu manifester le ministre devant ce qu'on lui signalait, mais également du dynamisme du milieu lui-même qui, on en conviendra, a mis le doigt à certains moments sur certaines solutions qui n'ont peut-être pas été retenues entièrement par le ministre, mais il conviendra avec moi qu'elles ont été à l'origine de certaines modifications. Il a rendu raison à certains milieux. Je crois donc que nous pourrons accepter le projet de loi lorsque l'Assemblée le proposera en troisième lecture.

M. Hardy: Et de certaines observations très judicieuses de nos amis, les journalistes.

M. Charron: Cela va. Merci, M. le Président.

(Fin de la séance à 16 h 58)

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