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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le vendredi 5 août 1977 - Vol. 19 N° 162

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 101 - Charte de la langue française


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 101

Charte de la langue française

(Onze heures quarante minutes)

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et messieurs!

Puis-je demander aux députés de regagner leurs chers fauteuils où ils siégeront pendant quelques heures?

Au début de cette séance, je voudrais, pour que nous nous comprenions tous et que nous nous entendions tous, faire une mise au point, sinon une mise en garde. Nous aurons une seule séance aujourd'hui. C'est rare que cela arrive. C'est arrivé lorsque nous avons siégé sur le projet de loi 1 et, par conséquent, les changements que l'on m'indiquera, au moment où je ferai l'appel des députés, sont valides pour tout le reste de la séance et, même si on ne demande pas le consentement unanime devant la directive, il n'y a pas de changement pendant une séance. D'ailleurs, cette directive a été rendue le 7 ou le 8 juin 1977 à cette même commission, alors que nous entreprenions les travaux sur le projet de loi 1.

Par conséquent, je vais faire l'appel. Je pense que j'ai fait tous les changements, sauf un; lequel? Je fais l'appel des membres. M. Alfred (Papineau) remplacé par M. Duhaime (Saint-Maurice); M. Bertrand (Vanier), M. Charbonneau (Verchères), M. Charron (Saint-Jacques)...

M. Charron: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Chevrette (Joliette-Montcalm) remplacé par M. Fallu (Terrebonne)...

M. Fallu: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes)...

M. de Bellefeuille: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Dussault (Châteauguay)...

M. Dussault: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Grenier (Mégantic-Compton)...

M. Grenier: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Guay (Taschereau)...

M. Guay: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)...

M. Lalonde: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... Laplante (Bourassa)...

M. Laplante: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Laurin (Bourget)...

M. Laurin: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... Mme Lavoie-Roux (L'Acadie)...

Mme Lavoie-Roux: Présente.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Le Moignan (Gaspé) remplacé par M. Biron (Lotbinière)...

M. Biron: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Morin (Sauvé)...

M. Morin (Sauvé): Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Roy

(Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M. Raynauld (Outremont)...

M. Raynauld: Présent.

Le Président (M. Cardinal): ... M. Samson (Rouyn-Noranda).

Sur ce, lors de l'ajournement — aujourd'hui, nous aurons peut-être deux suspensions — hier soir, nous en étions à débattre l'article 68. M. le député de Sauvé était intervenu et avait employé tout son temps. M. le député de Lotbinière est intervenu; il lui reste encore du temps. Mme le député de L'Acadie était intervenue; il lui reste encore du temps. Il y avait aussi M. le député de D'Arcy McGee qui est intervenu, mais il n'est pas, aujourd'hui, membre de cette commission et, par conséquent, c'est oublié; il faut le prendre dans le sens de la procédure et non pas dans ce qu'il a pu dire de profond.

Sur ce, je n'ai personne que je peux reconnaître, à qui la parole était accordée, puisque M. le député de D'Arcy McGee n'est pas là. Oui, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne sais pas si c'est une question de règlement avant de débuter; est-ce que...

Le Président (M. Cardinal): Approchez donc votre micro, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais vous demander, M. le Président, ou peut-être que je devrais plutôt demander cela au ministre d'Etat au déve-

loppement culturel... J'ai vu, dans le Devoir de ce matin, qu'il était dans les intentions du gouvernement d'imposer le bâillon le 15 août. Je voudrais savoir s'il y a un fondement à ceci et, si oui — évidemment, je crains fort qu'on le nie — je lui pose la question directement.

M. Laurin: Des rumeurs.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, je peux répondre à la question de Mme le député.

Le Président (M. Cardinal): En tant que leader parlementaire adjoint.

M. Charron: II n'y a rien de fondé dans les articles qui, d'ailleurs, vont se répéter jour après jour. Je signale seulement à madame que ce qui peut alimenter pareille rumeur est habituellement l'attitude de l'Opposition et, si elle ne veut pas se retrouver avec pareille rumeur chaque matin, elle en a en bonne partie la responsabilité. Mais puisque madame fait référence à des journaux de ce matin, peut-elle nous confirmer ce que la Gazette nous annonce ce matin, c'est-à-dire de la dissension profonde dont sa position serait victime dans son propre parti?

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît, à l'ordre!

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela me ferait tellement plaisir de lui répondre, mais j'en aurai l'occasion un peu plus tard.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Je l'ai déjà mentionné, pas de questions de privilège déguisées et pas de débat sur les fausses questions et surtout sur les rumeurs.

Je reconnais, dans l'ordre, M. le député de Lotbinière et ensuite M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Ils voudront bien m'indiquer ce sur quoi ils veulent parler.

M. Biron: M. le Président, c'est tout simplement une demande de directive.

Le Président (M. Cardinal): D'accord.

Chapitre VIII: La langue de l'enseignement (suite)

M. Biron: A quel moment précis pourrions-nous poser quelques questions très brèves au ministre de l'Education concernant le projet d'un nouveau règlement qu'il nous a déposé hier?

Le Président (M. Cardinal): C'est une question facile, mais la réponse est difficile.

Si je me souviens bien, le ministre d'Etat au développement culturel a distribué hier, en commission parlementaire, un projet de règlement qui découle de plusieurs articles, dont le prochain que nous allons étudier, l'article 69. On me corrigera si je commets la moindre erreur. Comme je l'ai déjà dit, on en demande beaucoup.

M. Morin (Sauvé): Non, M. le président, il découle de l'article 77.

M. Lalonde: A l'article 69, on ne prévoit pas de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Bon, alors, 77... D'accord. Je ne pense pas qu'au moment de l'étude de l'article 68, nous puissions discuter de ce règlement pour la raison suivante, c'est que le règlement n'a pas été déposé en commission parlementaire, il a été remis à des fins d'information. Mais, dès maintenant, je puis dire ceci: Lorsque nous serons rendus au premier article pertinent — on m'indique que ce sera 77 — dans la limite de ce que prévoit l'article 160, c'est-à-dire dans la limite du débat de 20 minutes par député, je permettrai certainement que l'on discute même d'un projet de règlement.

M. Morin (Sauvé): M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Sauvé, sur la même question de règlement?

M. Morin (Sauvé): Oui, précisément.

Le Président (M. Cardinal): Parce que j'avais reconnu auparavant M. le député de Marguerite-Bourgeoys. D'accord, allez!

M. Morin (Sauvé): Mon intervention n'est pas faite pour compliquer les choses, au contraire. En attendant que nous abordions l'article 77, ce qui devrait se produire dans le courant de la semaine prochaine, je suis disposé à donner toutes les explications que le chef de l'Union Nationale ou ses collègues du même parti voudront me poser dans le particulier. Je suis prêt également à répondre en Chambre à toutes les demandes qu'ils voudraient me faire officiellement sur le sens du nouveau règlement, sur sa portée etc.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sauvé, je reconnais votre connaissance — c'est un peu pléonastique — sur la façon dont les choses doivent se passer. Vous avez raison: II y a trois moments où ces questions peuvent être posées, soit au moment de la période des questions orales à l'Assemblée nationale, soit au moment où nous étudierons le premier article auquel ce projet de règlement se rattache, soit, évidemment, si on ne veut pas le faire publiquement, dans les corridors ou dans les bureaux de cette Assemblée nationale.

M. Biron: C'est tout simplement pour m'expliciter, M. le Président. Le projet me semble assez clair partout, sauf à quelques points précis. C'était beaucoup plus pour avoir des explications. Si ce n'est pas clair pour moi, ce ne l'est peut-être pas

pour beaucoup d'autres aussi. En posant la question publiquement à la commission parlementaire, on éclaire tous nos concitoyens québécois. C'est surtout sur ce point...

M. Lalonde: Si ce n'est pas clair pour lui, M. le Président, ce ne l'est sûrement pas pour personne.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de Lotbinière, je pense qu'on vous a indiqué la voie à suivre. Vous pourrez, soit mardi, à l'Assemblée nationale... A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! ... soit à l'Assemblée nationale, mardi, poser des questions...

Une Voix: Lundi...

Le Président (M. Cardinal): ... soit, lundi, oui, je m'excuse...

M. Lalonde: Soit, M. le Président, en abordant l'article 77.

Le Président (M. Cardinal): Soit lorsque nous serons rendus à l'article 77 en cette commission.

Est-ce que le député de Mégantic-Compton voulait intervenir sur la même question de règlement?

M. Grenier: Me permettez-vous simplement une seconde? ... c'était l'objet de ma question de tout à l'heure. Entre 69 et 77, on aura bien sûr des questions à poser. Cela va atténuer ou changer notre position sur plusieurs articles. Si on avait les informations... S'il y avait lieu de faire une pause à 69, on pourrait poser toutes les questions dont on a besoin afin de nous éclairer sur les articles. On aurait des amendements aux articles 69 et 77.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, j'ai déjà mentionné à cette commission qu'on pourrait évidemment s'entendre et avoir un dialogue à 21, soit le nombre de membres de cette commission, mais chaque décision que vous me demandez de rendre constitue un précédent: Je dois penser non seulement au moment présent, mais à l'avenir qui est ensuite engagé. C'est pourquoi, si on m'informe vraiment que ce n'est pas l'article 77 auquel le règlement peut vraiment se rattacher, je ne pourrai pas le permettre à l'article 69.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Si cela peut aider le député de Mégantic-Compton et le député de Lotbinière, quant à nous, s'il y a des questions accessoires ou rattachées aux problèmes que nous étudierons à l'article 69, si cela peut faciliter les travaux de cette commission, nous n'aurons aucune objection à ce que vous donniez autant de liberté que vous en avez donné au ministre de l'Education hier, lorsque, sur l'article 68, il a quand même engagé le débat sur toute la question de la langue de l'enseignement.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous êtes fort aimable et aussi fort renseigné. Vous avez trouvé la solution que la présidence pourrait employer pour aider les députés de Lotbinière et de Mégantic-Compton.

Si, au moment de l'article 69, j'obtenais un consentement unanime de la commission, je pourrais vous permettre ces questions.

M. Lalonde: L'Union Nationale pourra toujours compter sur l'Opposition officielle pour l'aider.

Le Président (M. Cardinal): Je n'en doute absolument pas.

M. Grenier: Cela commence bien la journée.

Le Président (M. Cardinal): Messieurs, reprenons-nous l'article 68? Qui demande la parole sur l'article...?

M. Laurin: Je l'avais demandée hier.

Le Président (M. Cardinal): Oui, d'accord. Je reprends cette tradition qui veut que, quand même, c'est un projet du parti ministériel...

Le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Grenier: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je n'ai pas entendu le président de l'Assemblée nationale ni vous non plus saluer la présence dans notre salle, ici, d'un député de l'Assemblée législative de Toronto qui est parmi nous. J'aurais aimé que M. Roy se lève pour qu'on puisse l'accueillir.

Le Président (M. Cardinal): Alors, c'est M. Roy, de l'Assemblée législative de l'Ontario. M. Roy, vous êtes bienvenu dans cette capitale du Québec. J'ai permis, exceptionnellement, qu'il y ait dans une commission parlementaire, une manifestation de sympathie. C'est interdit normalement par le règlement, mais c'est pour souligner votre présence.

Merci.

M. le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Laurin: M. le Président, à la suite de l'intervention du ministre de l'Education, hier soir, le député de L'Acadie a émis le souhait, peut-être le regret aussi, que le gouvernement fasse au plus tôt connaître les principes qui ont présidé à l'élaboration de sa politique en ce qui concerne l'enseignement et les objectifs qu'il poursuit.

Je pense qu'il convient de satisfaire cette curiosité.

Les objectifs du gouvernement comportent essentiellement trois éléments. Premièrement, que

l'enseignement en anglais soit réservé aux Anglo-Québécois actuels et à leurs descendants, Anglo-Québécois étant pris ici dans un sens culturel et linguistique, non en fonction de l'appartenance à une communauté anglo-saxonne, panca-nadienne, panaméricaine ou mondiale.

Deuxièmement, que les nouveaux immigrants et leurs descendants soient orientés vers l'école française.

Troisièmement, que les mesures de contrôle soient les plus simples possible et excluent tout recours à des tests linguistiques.

Pour concilier le premier élément avec le troisième, nous avons dû éliminer la référence aux critères de langue maternelle et de langue d'usage. Ces critères, en effet, ne se contrôlent pas objectivement. Il nous aurait fallu les appliquer de façon qu'on aurait pu qualifier d'arbitraire, et plus nous aurions voulu réduire la part d'arbitraire, plus il nous aurait fallu multiplier les enquêtes, les cueillettes de données, les vérifications multiples.

Quant au deuxième élément, il nous est apparu impossible de l'atteindre en établissant un régime de droit distinct pour les nouveaux immigrants. Outre le fait qu'il apparaîtrait odieux dans l'avenir d'avoir à établir la date d'arrivée, avant ou après 1977, de son premier ancêtre, pour déterminer les droits d'un individu à recevoir l'enseignement en anglais, une telle disposition aurait été sûrement contestée comme incompatible avec la Loi de la citoyenneté canadienne, qui interdit toute discrimination sur la base de la date d'obtention de cette citoyenneté.

M. Lalonde: Le ministre me permettrait-il de l'interrompre?

M. Laurin: Oui.

M. Lalonde: Croyez-moi, ce n'est pas pour être désagréable, mais je m'aperçois que le ministre s'exprime sur l'article 69. Je sais que l'invitation a été faite hier par le député de L'Acadie, mais si on permet à chacun des députés de discuter pendant 20 minutes sur l'article 68 en parlant de l'article 69 et qu'on fait la même chose à l'article 69, cela va retarder les travaux. Je n'aimerais pas que le gouvernement se rende coupable de filibuster.

M. Laurin: A ce moment, je peux proposer l'adoption de l'article 68.

M. Lalonde: II y en a peut-être qui ont quelque chose à dire sur l'article 68, c'est pour cela.

M. Laurin: Mais c'est en réponse à une question...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, je ne vous ai pas interrompu, M. le ministre.

M. Laurin: II y a aussi des discussions générales.

Le Président (M. Cardinal): Je ne vous ai pas interrompu, parce que je sens depuis hier soir ce désir que l'on parle de l'article 69, presque avant l'article 68.

M. Laurin: Qu'on les considère ensemble.

Le Président (M. Cardinal): Tant qu'il n'y a pas consentement unanime, je pense qu'il faut en revenir à l'article 68. Je demande, pour une deuxième fois, s'il y a quelqu'un qui veut s'exprimer strictement sur l'article 68? M. le député de Mont-Royal. Je m'excuse M. le ministre, mais...

M. Laurin: Cela va.

Le Président (M. Cardinal): Sans cela, tantôt, à l'occasion de l'article 69, on parlera peut-être de l'article 77. Alors, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je ne veux pas enlever la parole au ministre. Je n'ai pas demandé le droit de parole pour interrompre le ministre. Si vous voulez continuer, M. le ministre, je peux attendre.

M. Lalonde: ...de l'article 68.

M. Ciaccia: Si vous voulez continuer, je peux attendre.

Le Président (M. Cardinal): Je vais être obligé de poser la question autrement. Est-ce que l'article 68 est adopté?

M. Ciaccia: Non. Je veux parler sur l'article 68.

Le Président (M. Cardinal): S'il n'est pas adopté, nous allons parler sur l'article 68.

M. Ciaccia: Exactement, mais, par courtoisie, M. le Président, je veux donner le droit de parole au ministre. S'il veut parler sur l'article 68, oui.

Le Président (M. Cardinal): Alors, est-ce que M. le ministre a quelque chose à ajouter sur l'article 68?

M. Laurin: En fait, il m'apparaît assez difficile de distinguer les principes, d'une part, sur lesquels est fondée une politique, et les objectifs que nous entendons poursuivre et les moyens qui nous ont semblé les plus pertinents pour atteindre la réalisation de ces objectifs. Mais si, procéduralement parlant, il s'avère impossible, en l'absence d'assentiment, de procéder à un exposé qui couvre ces trois éléments, je suis bien prêt à attendre, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Remarquez que je puis prendre votre intervention comme une demande de directive. Il est possible, à la commission parlementaire, à l'occasion d'une étude article par article, de prendre ensemble deux ou trois articles. Cela s'est fait fréquemment. Si la

commission, non pas la présidence, ce n'est pas à moi à le décider, est d'accord pour qu'on étudie à la fois les articles 68 et 69, je vais le permettre, mais si j'ai un consentement.

M. Lalonde: M. le Président, pour faciliter les travaux, nous serions tentés de donner notre accord. J'aimerais qu'on revienne quand même aux sources.

Le Président (M. Cardinal): La tentation est forte, mais vous y résistez.

M. Lalonde: Oui, parce que l'article 68 établit le principe que l'école française est l'école de tout le monde. Je pense que cela mérite que quelqu'un s'exprime là-dessus, soit du gouvernement, et l'Opposition a l'intention aussi d'exprimer son point de vue là-dessus. L'article 69, c'est l'exception. On commence par l'exception, quand on arrive à l'article 69. Je sais que c'est là que les problèmes se trouvent en fait, qu'on retrouve les problèmes pratiques, la controverse et tout. Mais il reste que le principe que l'école française est l'école de tous les Québécois mérite qu'on s'y attache séparément. C'est pour cela que nous nous opposons.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, est-ce que c'est sur la question de règlement?

M. Laurin: Brièvement, M. le Président, quand on parle de l'exception à un principe ou de la dérogation à un principe, par le fait même, on se trouve à parler du principe également. On peut parler d'un principe de deux façons, soit à partir de l'exception, soit à partir de l'affirmation fondamentale initiale.

Le Président (M. Cardinal): Je suis bien d'accord, mais il y a malheureusement des questions de procédure qui me lient et je ne veux pas justement qu'il y ait un débat sur cette question. A mon humble avis, l'article 69 est une dérogation à l'article 68 et, à moins que le parti ministériel ne veuille s'exprimer sur l'article 68, je vais donner la parole à quelqu'un de l'Opposition officielle. Oui, M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, puis-je refaire la suggestion que je vous faisais hier soir? Pouvons-nous, de bonne grâce, considérer l'article 68 comme adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non.

M. Lalonde: Non, parce que nous avons des choses à dire. Cela me surprend que le gouvernement n'ait pas grand-chose à dire sur l'article 68. C'est le fondement de sa politique.

M. Charron: Pouvons-nous proposer, M. le Président, d'aborder les deux articles en même temps?

M. Lalonde: Le député de Saint-Jacques vient de nous rejoindre après une absence sûrement motivée, mais on vient justement de discuter de cela.

M. Charron: J'étais là.

M. Lalonde: Je viens d'exprimer les raisons pour lesquelles, même en étant tenté d'approuver cette suggestion, pour accélérer les débats, je pense qu'on ne peut pas le faire, parce que nous voulons nous exprimer sur l'article 68 librement et ensuite sur l'article 69, qui est une dérogation.

M. Bertrand: Faites-le.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Lalonde: Oui, mais on avait demandé le droit de parole et il a été donné aux autres.

Le Président (M. Cardinal): II demeure une seule et dernière solution, je me permets de la proposer, elle sera ou ne sera pas acceptée, c'est qu'on pourrait suspendre l'article 68 et étudier la dérogation de l'article 69 pour revenir à l'article 68.

M. Lalonde: Non, écoutez.

Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas d'accord. Par conséquent...

M. Charron: Allons-y, Alonzo.

Le Président (M. Cardinal): ... nous revenons à l'article 68. Je demande si quelqu'un du parti ministériel veut s'exprimer.

Alors, du côté de l'Opposition officielle, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: L'article 68, tel qu'il est rédigé, exprime un principe mais ne va pas assez loin. Il écarte certains... On va pouvoir faire beaucoup d'autres choses. L'Union Nationale oublie encore que c'est le gouvernement péquiste qui est au pouvoir et que c'est contre lui qu'elle devrait diriger son opposition. Bon! Elle recommence...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal, d'autres pourraient vous le dire, approchez votre micro.

M. le député de Mont-Royal, sur l'article 68, s'il vous plaît. Cela fait 20 minutes qu'on se demande si on va parler d'un article ou d'un autre. Alors, je vous prierais de parler de l'article 68.

M. Ciaccia: M. le Président, l'article 68, comme je le disais tantôt, exprime un principe mais ne va pas assez loin. Le député de Sauvé a parlé hier soir des minorités, il a parlé des tests. Il s'est référé à la charte que le gouvernement a introduite. Il a parlé aussi de la communauté anglophone ou de l'accès aux écoles de langue anglaise. Je voudrais, M. le Président, toucher à chacun de ces sujets, en relation avec l'article 68.

Premièrement, quant à la question des minorités, le gouvernement est mieux de comprendre que les minorités n'accepteront pas qu'on les force à être unilingues. C'est quelque chose que vous êtes mieux de vous rentrer dans la tête. Si vous voulez...

M. Morin (Sauvé): Qui vous a dit cela?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Votre projet de loi le dit, votre charte le dit.

M. Morin (Sauvé): Voyons donc.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le député de Sauvé, M. le ministre de l'Education. Ce ne sont pas des duos que je veux entendre ici. Les articles déjà mentionnés, 100 et 26, vous obligent tous à écouter le député qui parle du sujet qui est sur la table. Faudrait peut-être aussi, M. le député de Mont-Royal, et je ne veux en rien me prononcer sur le fond, être un peu indemne d'une certaine agressivité impérieuse qui, à coup sûr, rend les interlocuteurs éventuels de mauvaise compagnie.M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je vais essayer de reprendre mon calme face à la provocation dJ député de Sauvé.

The minorities of Quebec, the ethnic minorities, M. le Président, will not accept to be forced into an unilingual school system. Unless the government can accept this, we will not have a law that can be administered properly and accepted by the population.

Si nous essayons de faire des lois à rencontre des désirs, des voeux, des nécessités et de la réalité, cette loi, M. le Président, ne sera pas applicable.

Les minorités — je parle des minorités qui sont ici, je ne parle pas des émigrants futurs. Je vais aborder ce sujet après — les émigrants qui sont ici, M. le Président, sont venus sous certaines représentations. Ils n'ont pas les avantages des autres citoyens du Québec. Le seul espoir qu'ils ont, c'est de s'améliorer pour eux-mêmes et pour leurs enfants. C'est ce qu'ils cherchent, c'est ce qu'ils veulent et c'est ce qu'ils vont avoir, malgré quatre ou cinq lignes dans un projet de loi.

Et si le gouvernement ne peut pas réaliser cela et que, pour jouer à la galerie, il essaie de donner l'impression qu'il va forcer certaines choses contre la justice et l'équité des immigrants, M. le Président, la loi ne sera pas administrée d'une façon équitable. Je dirais une autre chose. Les immigrants, les minorités ethniques, malgré ce qui a été écrit dans la loi, vont le faire d'une façon légale, vont trouver le moyen de devenir bilingues, quoi que le gouvernement puisse inclure dans cette loi. Ils l'ont déjà fait dans le passé. On a déjà essayé de les empêcher de devenir bilingues. Ils vont faire des classes dans leurs sous-sols; ils vont créer des écoles privées, non pas parce qu'ils ne veulent pas être membres de la société québécoise, mais parce qu'ils veulent en être membres à part entière; ils ne veulent pas être des handicapés; il savent qu'ils sont au Québec dans l'Amérique du Nord, et c'est cela que le gouvernement est mieux d'accepter, s'il veut donner justice à ce groupe de citoyens.

M. Laurin: Pas de problème.

M. Ciaccia: Quant aux tests, M. le Président, je suis contre les tests; il n'est pas question de tests. Les critères d'admissibilité, d'après l'article 68 et les articles subséquents, ne sont pas fondés et ne devraient pas être fondés sur les tests. Qu'on n'essaie pas, par une erreur du passé, d'essayer de masquer les injustices de la présente loi. Parce qu'il y a eu une erreur dans les tests, on veut aller à une injustice plus grande; on veut créer des critères arbitraires. On aurait bien pu dire: Parce que les tests étaient odieux, ils n'ont pas été acceptés, nous allons prendre le critère des personnes qui ont les cheveux bleus ou les cheveux blonds pour être admis à certains... Certainement que c'est objectif. Cela peut être...

M. Laurin: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, un instant! C'est une question de règlement.

M. Laurin: On tombe dans l'article 69, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Bourget a raison. Je ne veux pas revenir sur ce que la commission a décidé et je dois vous rappeler à l'ordre.

M. Ciaccia: Très bien, M. le Président, je vais revenir. On s'est référé au livre blanc. Je crois, que j'ai dit tantôt que le député de Sauvé s'était référé à la charte, je voulais dire plutôt qu'il s'était référé au livre blanc. Si l'article 68 et l'application de l'article 68 étaient en conformité de l'esprit du livre blanc, je serais très préoccupé, parce que, quand nous disons que l'enseignement se donne en français dans les classes maternelles, etc., et que, dans le livre blanc, nous avons vu une définition du Québécois qui incluait seulement une certaine portion, un certain secteur de la population, c'est de la discrimination, c'est quelque chose que je ne peux accepter. On a maintenant fait l'amendement, mais on trahit toujours notre pensée par les paroles qu'on prononce. Même, si, dans les mots, nous avons corrigé "Québécois", supposément pour inclure tous les résidants du Québec quelles que soient leurs origines ethniques ou linguistiques, je me souviens que, la semaine dernière, le premier ministre, quand il a nommé le nouveau président de l'Hydro-Québec, M. Robert Boyd, a dit: C'est un Québécois.

Cela m'a encore inquiété, parce que dans son esprit, il voulait encore justifier qu'un Québécois,

c'est seulement quelqu'un qui a un nom d'origine française, que cela ne pourrait pas être quelqu'un d'origine anglaise, Boyd, et si — c'est de cela que les minorités s'inquiètent — on parle comme cela de quelqu'un du nom de Boyd ou de M. Smith, qu'allons-nous faire avec les noms de Montini, de Tadeo et de Ciaccfa? C'est cela qui m'inquiète et c'est cela l'esprit contre lequel je me prononce dans cet article 68 dans cette charte, dans le livre blanc.

M. Morin (Sauvé): On peut en faire des députés.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Une Voix: Comme les Fallu d'ailleurs.

M. Ciaccia: Ce n'est pas avec le livre blanc, ce n'est pas avec ce projet de loi qu'on va encourager et arriver à vos objectifs, M. le député de Sauvé.

Quand nous disons que l'enseignement se donne en français dans les classes maternelles, dans les écoles primaires et secondaires, etc., et encore, quand on relie ça, M. le Président, à l'esprit du livre blanc, on se dit: Ecoutez! Qu'allons-nous faire de la collectivité anglophone? Malheureusement, on essaie de créer une drôle d'atmosphère ici. Hier soir, je me suis référé à une sorte d'atmosphère d'intimidation. Je le répète, M. le Président. On veut créer une atmosphère où on ne devrait pas dire le mot "anglais"; on n'e devrait pas défendre cette collectivité, on ne devrait pas en parler. Mais je m'excuse, M. le Président. Ce sont des droits individuels, ce sont les droits d'une collectivité, et ça va au-delà de ça. Cela va dans l'atmosphère de notre société que nous allons créer, et c'est cette question que je me pose.

Savez-vous, M. le Président, quand on parle toujours d'une autre langue et qu'on semble vouloir effacer quelque chose dans l'esprit de l'article 68, peut-être, c'est pour cela que je me dis que peut-être que l'article 68 aurait besoin d'être amendé. Je ne ferai pas cet amendement, parce qu'on va encore nous accuser de vouloir faire de l'obstruction. Quand on veut prendre le droit de parole de ce côté-ci de la table, c'est toujours pour des questions dilatoires. On ne peut pas s'exprimer. Je ne ferai pas d'amendement à l'article 68, M. le Président, mais je vais exprimer mes doutes, poser mes questions et exposer lés préoccupations que j'ai quand même à l'article 68, dans le temps qui m'est alloué, quant à mon droit de parole.

M. le Président, quand on parle des droits de certains individus, des droits individuels, des droits d'une collectivité, si on veut admettre le principe du droit d'une collectivité, il y a une collectivité anglophone au Québec, et ce n'est pas une question de défendre — je veux encore souligner cela — le statu quo, les privilèges. Ce n'est pas ça que je veux faire, M. le Président, mais quand on veut enlever certains droits, quand on veut aller contre la justice et l'équité, où cela va-t-il nous mener? Comme minoritaire, ça me préoccupe, je suis inquiet de ça, je suis inquiet de l'esprit qui anime le projet de loi.

Je voudrais faire référence aux droits... Quand on dit que la collectivité a plus de droits ici que n'importe où ailleurs, ce n'est pas ça la question, M. le Président. C'est possible ou ce n'est pas possible. Ce n'est pas parce que des gens ont plus de droits qu'on doit leur en enlever; s'ils en avaient moins, ce ne serait pas une raison pour leur en donner plus. C'est la justice et l'équité, la réalité. Mais, à titre d'exemple, je peux citer la Tchécoslovaquie, ça peut paraître bizarre, pour défendre les droits culturels — parce que c'est de ça dont on parle — on parle des droits culturels, la majorité en a certainement, M. le Président, des droits culturels, et je serais le dernier à vouloir enlever ou entamer, ou même brimer, ou faire en aucune façon que ces droits culturels ne puissent pas s'épanouir de la façon la plus brillante ou de la meilleure façon possible. Ce n'est pas ça. Mais je regarde, par exemple, M. le Président, la constitution de la fédération d'un pays qui n'est pas démocratique, la Tchécoslovaquie, M. le Président. C'est à l'article 3. Il y a des minorités dans ce pays. C'est seulement pour donner l'exemple de la façon non pas dont on protège mais dont on respecte les minorités. Même un pays qui n'est pas démocratique dans sa constitution accorde, aux minorités des droits culturels entiers — j'y fais référence ici: des citoyens appartenant aux nationalités hongroise, allemande, polonaise, etc., — et ceci est important, M. le Président, elles jouissent du droit au plein développement culturel.

M. le Président...

M. Morin (Sauvé): C'est ça...

M. Laplante: Collectifs ou individuels?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: M. le Président, le principe de l'article 68, c'est bien que, dans le Québec, l'enseignement se donne en français. Ce n'est pas contre cela que je parle, mais cela ne va pas assez loin. Cela ne va pas du tout assez loin. Il n'y a pas de reconnaissance, premièrement, d'une autre collectivité et je ne veux pas faire, comme je l'ai dit, de la procédure...

Que le gouvernement le place à l'article 68 ou à un autre, mais qu'il accepte ce principe et je crois que, pour moi, il est important d'en parler ici parce qu'on a établi certains principes au début de la discussion sur la langue de l'enseignement.

Qu'est-ce que cela veut dire, le droit au plein développement culturel? Cela ne veut pas dire des restrictions, essayer d'effacer, essayer d'enlever, peur de dire le mot. Cela veut dire de traiter ces gens sur un pied d'égalité, de leur donner ce droit, non sans restriction, et on en reviendra à la question d'admissibilité, des restrictions aux écoles anglaises.

Il y a un autre point que l'article 68 n'établit pas. Il n'établit pas la nécessité de l'enseignement

de la langue seconde. Je n'en ferai pas un amendement, mais il est important d'en parler et, quand on cite le livre blanc, on a plus que l'impression... Le projet de loi nous dit qu'il y aura de l'unilinguisme, mais il y aura une élite. Quelques-uns pourront apprendre l'anglais. Je ne parle au nom d'aucune collectivité. Je parle au nom de la justice pour tous ceux qui habitent au Québec. Si vous pensez que c'est ainsi que vous allez créer votre société avec une classe d'élite qui aura le droit d'apprendre une langue et une autre classe qui n'aura pas ce droit, vous allez échouer. La population n'acceptera pas cela. C'est injuste. Il n'y a pas d'équité. C'est contre tous les principes de la justice et c'est cela que l'article 68 n'accepte pas, et il devrait au moins faire référence...

Même si vous voulez établir ce principe à l'article 68 — ce principe acceptable — vous n'avez pas le droit d'enlever à toute la population la chance, le droit d'apprendre une seconde langue.

Je soutiens que cela revient à faire, avec la protection d'une culture, d'une langue... Parce qu'on ne donne pas une sécurité en n'en tenant pas compte, en oubliant la réalité. Ce n'est pas ainsi qu'on rassure une population. Ce n'est pas en leur disant: Oubliez la réalité. La réalité est que le Québec est en Amérique du Nord. La réalité est que nous, les dirigeants du parti, sommes bilingues. Nous pouvons transiger avec toutes les autres provinces et les autres pays, mais vous, d'après ce projet de loi, vous n'aurez pas ce droit. Vous n'aurez pas l'occasion d'apprendre la langue seconde et...

M. Morin (Sauvé): ... pardon...

M. Ciaccia: M. le Président, j'invoque le règlement. J'ai le droit de parole.

Le Président (M. Cardinal): ... c'est déjà fait.

M. Ciaccia: Merci. Et vous n'allez jamais imposer cela aux minorités du Québec. Je vous le dis à l'avance.

M. Charron: Est-ce que cela se peut?

M. Ciaccia: Elles ne l'accepteront pas. Ces gens veulent être des citoyens à part égale. Ils ne veulent pas être des handicapés. Je crois que les principes que je viens de défendre sont des principes de justice et d'équité. Nous n'en avons pas du tout contre le principe d'une loi qui veut protéger ou promouvoir la langue française.

If I would have my choice, I would not have any language legislation at all because language legislation, by its very nature, must cause restrictions and it is almost like trying, attempting to legislate on religion, but, in the present context, it seems that the Parti Québécois is trying to use this legislation for its other political motives.

I think that we must not fall into their trap. We will discuss the legislation. Where the articles are accredible and just, we will accept them. Whether or not, we will make our recommendations and we will oppose them. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Merci, le temps était déjà écoulé. J'ai reconnu auparavant, selon la tradition, M. le député de Lotbinière, à qui il reste seize minutes.

M. Biron: M. le Président, je vais être bref. Je vais simplement résumer un peu ce que j'ai dit hier soir, d'autant plus que le ministre de l'Education avait semblé réceptif à certaines suggestions qu'a répétées tout à l'heure le député de Mont-Royal.

C'est sûr que, pour nous l'article 68 est très clair, il donne l'enseignement en français dans les classes maternelles, dans les écoles primaires et secondaires, sous réserve des exceptions prévues au précédent chapitre. C'est sûr que les exceptions, nous allons les discuter un peu plus loin, mais nous sommes totalement d'accord qu'on donne l'enseignement en français dans les écoles du Québec. Cela n'empêche pas, sous réserve des exceptions, de donner l'enseignement d'une autre langue, l'anglais, dans d'autres écoles.

Voici où je veux en venir, M. le Président. Hier, j'ai dit ce qui manquait au projet de loi. Il s'agit d'un article par lequel le ministre de l'Education s'engagerait à améliorer la qualité du français dans toutes les écoles du Québec — il m'a semblé réceptif à cette suggestion — de même qu'à assurer une bonne fréquence et une bonne qualité des cours de français dispensés dans les écoles anglaises. La même chose dans toutes les écoles françaises, une bonne fréquence et une bonne qualité des cours d'anglais. Ainsi, on assurera une connaissance suffisante de la langue française dans les écoles anglaises et une connaissance suffisante de la langue anglaise dans les écoles françaises.

J'ai constaté tout à l'heure qu'encore ce matin il était réceptif à une telle suggestion. Je sais que les députés de l'Opposition ne peuvent présenter de motions qui engagent des sommes d'argent ou des fonds de la part du gouvernement, mais j'ai l'impression que le ministre, étant réceptif à une telle suggestion, lui-même, un peu plus tard, devrait présenter un amendement ou un nouvel article dans son projet de loi qui garantirait à ceux et celles qui s'inquiètent justement de l'éducation, de la langue seconde dans nos écoles au Québec, une certaine sécurité.

Je reviens à ce que je disais hier, en parlant d'insécurité. C'est ce qui est le pire, vivre dans l'insécurité. Alors, si une partie de la population souffre d'insécurité, surtout si le ministre est réceptif à de telles suggestions qui peuvent donner un sentiment de sécurité à notre population québécoise, je crois qu'on devrait faire l'impossible pour donner un sentiment de sécurité à notre population, aux allophones, aux anglophones qui craignent que dans les écoles françaises nous n'enseignions pas la deuxième langue.

Le député de Mont-Royal, disait tout à l'heure qu'on n'enseignerait que le français dans les écoles françaises. Le ministre nous a dit non, qu'on allait enseigner une langue seconde. C'est un voeu pieux. Si c'était véritablement dans la loi, une grande partie de la population achèterait le projet

de loi 101 avec des améliorations, bien sûr, mais elle serait prête à l'accepter. Lorsqu'on ne donne pas ce sentiment de sécurité à ces gens, ils restent inquiets pour leur avenir, ils restent inquiets pour la qualité et la quantité de la langue seconde, la langue anglaise, enseignée dans les écoles françaises. C'est pour cela qu'ils hésitent à venir dans les écoles françaises, surtout les allophones. Si ces gens-là étaient sûrs que dans l'école française on enseigne une bonne qualité d'anglais, je sais, de par les nombreuses discussions que j'ai eues avec ces gens-là, qu'il n'y aurait pas de problème à les convaincre de venir chez nous. Mais à l'heure actuelle, ils souffrent d'insécurité, ils ne sont pas sûrs.

Le passé est garant de l'avenir; dans le passé dans les écoles françaises, malheureusement, on n'a pas enseigné l'anglais et personne ne pouvait parler la deuxième langue en sortant des écoles françaises. C'est là qu'il faut faire un effort additionnel. Je crois qu'avec un engagement, soit du ministre de l'Education ou du ministre d'Etat au développement culturel, pour qu'on ait dans ce projet de loi un nouvel article de loi... ou peut-être, M. le Président, qu'on pourrait greffer à l'article 61 une suggestion de l'Union Nationale qui est dans son livre bleu à la page 87, l'article 74.

Finalement on fera en sorte d'en former véritablement un projet collectif au Québec, parce que les gens n'auraient plus peur d'opter pour l'école française parce qu'ils sauraient qu'ils auraient un enseignement de l'anglais.

Mais, encore une fois aussi, c'est une recommandation que je fais au ministre de l'Education, car je crois, je ne peux pas présenter d'amendements qui vont causer des dépenses au Québec. J'aimerais que, dans cet article, il y ait un engagement du ministre de l'Education d'enseigner un meilleur français, d'améliorer les cours de français dans nos écoles françaises et d'améliorer nos cours de français dans les écoles anglaises. Cela aussi manque au projet de loi.

Je comprends que le ministre de l'Education va certainement accepter une telle suggestion, c'est important, si on veut véritablement aller au fond des choses, c'est peut-être avec l'article 61 qu'on pourrait l'améliorer en conséquence. C'est une ouverture que je fais ce matin, M. le Président, au gouvernement d'accepter une telle suggestion et, finalement, on sera sûr d'avoir du français partout et on sera sûr aussi d'avoir une bonne connaissance de l'anglais comme langue seconde dans toutes nos écoles françaises.

Est-ce que je peux me permettre de distribuer une copie de ce que je me proposais de faire, mais je ne suis pas sûr que ma motion soit recevable, parce que cela comporte des déboursés de fonds possibles. Alors, comme information...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous avez une motion à présenter, je vous suggère de la présenter tout simplement, verbalement, pour commencer, et par écrit, par la suite, au Président, qui verra à décider de sa recevabilité. Si elle est recevable, à ce moment, on pourra la distribuer.

M. Biron: Je ne voudrais pas présenter une motion pour discuter longtemps et faire perdre du temps, si vous jugez...

M. Lalonde: Cela ne vaut pas la peine qu'on en parle?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, selon les usages, vous présentez une motion ou vous n'en présentez pas. Si vous en présentez une, le président décidera de sa recevabilité et après, si elle est déclarée recevable, elle sera distribuée.

M. Biron: Alors, je présente ma motion, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur l'article 68?

M. Biron: Sur des mots à ajouter à 68.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pourriez-vous au préalable lire votre motion et m'en remettre une copie, s'il vous plaît?

M. Biron: "Le ministre de l'Education doit prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que la fréquence et la qualité des cours de français aux élèves qui reçoivent l'enseignement en langue anglaise soient de nature à donner à ceux-ci une connaissance suffisante de la langue française. Le ministre de l'Education doit également prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que la fréquence et la qualité des cours d'anglais dispensés aux élèves qui reçoivent l'enseignement en langue française soient de nature à donner à ceux-ci une connaissance suffisante de la langue anglaise".

M. Laplante: Ce n'est pas le bon article.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Lotbinière, est-ce que je pourrais vous demander, dans le cadre de l'article 68, où se situerait l'inclusion de ces deux paragraphes, parce que nous avons déjà deux alinéas dans l'article 68, et il serait de mon intérêt et de l'intérêt de tous de savoir où se situeraient ces articles, avant de décider de la recevabilité évidemment?

M. Biron: A l'article 68, on discute de l'enseignement... l'enseignement se donne en français dans les classes maternelles, je voudrais être sûr de le compléter. Mais, même si vous jugez que ma motion n'est pas recevable, M. le Président, je la laisse comme suggestion et j'y reviendrai peut-être à un article, un peu plus tard, si vous croyez...

M. Lalonde: Vous plaidez en faveur de l'irrecevabilité de votre motion, monsieur.

M. Biron: C'est recevable, mais c'est difficile de trouver la place exactement où...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Lotbinière, vous me placez dans une

drôle de situation parce que vous me présentez une motion, mais, d'autre part, vous me dites que si elle est irrecevable, ce sera une suggestion. Je dois vous dire en toute neutralité qu'à moins que vous ne m'indiquiez de façon précise — parce qu'une motion doit avoir le fond et doit avoir une forme — où est située cette motion dans l'article 68, je devrai, simplement pour défaut de forme, la déclarer irrecevable.

M. Biron: M. le Président, entre le premier et le deuxième paragraphe de l'article 68, j'insérerais ma motion.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II est proposé par le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale que les articles dont il vient de faire mention et qu'il vient de lire soient inclus et deviennent respectivement les alinéas 2 et 3 de l'article 68, l'alinéa 2 devenant l'alinéa 4.

M. le député de Saint-Jacques, sur la recevabilité évidemment.

Mme Lavoie-Roux: Peut-on en avoir copie?

M. Charron: M. le Président, me servant des arguments mêmes du chef de l'Union Nationale dans la présentation de sa motion, je vois qu'il a fait une partie de ses armes et il est parfaitement conscient que pareil amendement qui engage des fonds publics est irrecevable lorsque présenté par l'Opposition.

On peut toujours rappeler qu'il existe à l'article 44 de la loi 22, d'où s'inspire sans doute le chef de l'Union Nationale, une mesure similaire, mais je rappelerai — il n'a pas vécu cette époque — que cet amendement, qui n'était pas au texte original de la loi 22, avait été introduit par le parti ministériel de l'époque, l'eussions-nous voulu, le gouvernement nous en aurait empêchés. Peut-être, dans les circonstances, le chef de l'Union Nationale préférera-t-il s'abstenir sur sa propre motion.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce qu'il y a d'autres députés qui voudraient intervenir sur la recevabilité? M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'inviterais la présidence à une attitude large et non restrictive là-dessus, si le député de Lotbinière me permet de plaider en faveur de la recevabilité de sa motion. Tout d'abord, parce que le libellé de l'amendement est de facture assez générale pour vous permettre, M. le Président de ne pas en venir à la conclusion qu'il s'agit d'une motion d'amendement qui amènerait nécessairement une dépense d'argent.

On dit que le ministre de l'Education doit prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que la fréquence et la qualité des cours de français dispensés aux élèves qui reçoivent l'enseignement en langue anglaise soient de nature à donner à ceux-ci une connaissance suffisante de la langue française et vice versa pour l'autre paragraphe. C'est une motion visant à l'amélioration de la langue seconde.

Quant à moi, j'aurais préféré que... Enfin, on présentera des motions pour, tout d'abord, commencer à améliorer la qualité du français et, ensuite, la qualité de la langue seconde, mais l'Union Nationale a choisi de procéder de cette façon. Je pense que la motion est recevable, parce qu'elle ne demande pas directement au gouvernement de prendre des mesures qui vont coûter de l'argent. On dit: Cela peut être des mesures de réforme, de politique, de directives, toutes sortes de mesures qui n'engagent pas des fonds directement. Je vous invite, M. le Président, à la lire assez attentivement — je sais que vous l'auriez fait sans mon invitation — parce que, réellement, le chef de l'Union Nationale n'engage pas de dépenses d'argent, ce qui ne peut être fait que par un ministre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, je reviens à la charge un instant. Ce n'est pas pour être déplaisant, mais il y a un règlement qui a prévu cela, c'est l'article 64 de notre règlement. Je renvoie les députés de la commission au libellé de cet article. L'on dit qu'une motion ne peut être présentée que par un représentant du gouvernement et même on spécifie, après recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil. C'est une contrainte qui s'impose aux membres du gouvernement eux-mêmes, parce qu'elle a pour objet direct—j'en viens aux 2 et 3, M. le Président—l'allocation de subventions et l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables.

Si nous acceptions — je ne dis pas qu'on le refuse en esprit — dans le libellé la motion d'amendement présentée par le chef de l'Union Nationale, il est évident que l'allocation des subventions aux différentes commissions scolaires du Québec s'en trouverait forcément modifiée. Il se trouverait dès lors une imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics, autrement dit la liberté de manoeuvre du gouvernement se trouverait ainsi diminuée du fait que, forcément, par la loi, il se verrait obligé de prendre une partie du budget total de l'Etat et de la convertir aux fins que vient de signaler le chef de l'Union Nationale.

Si cet aspect existe dans notre règlement, M. le Président, qui vient même d'un précédent règlement, il a toujours été jugé essentiel pour que la législation présentée et étudiée, soit à l'Assemblée, soit en commission lorsque l'Assemblée la délègue en commission, ait tout le caractère de responsabilité. J'invoque donc l'article 64, 2e et 3e à nouveau pour l'irrecevabilité de la motion.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je crois qu'à sa face même, la motion est recevable parce qu'il n'y a rien, à la lecture de cette motion, qui oblige qu'on dépense de l'argent ou que ça tombe dans le libellé de l'article 64. A la face même, on peut

s'assurer de l'enseignement de la langue seconde sans, nécessairement, dépenser des sommes additionnelles. On pourra le faire de toutes sortes de façons, question d'allocation des cours, prendre les professeurs qui sont en chômage et au lieu de les laisser en chômage, les laisser enseigner la langue seconde. Alors, à la face même, ça n'oblige pas, ça n'implique pas qu'on dépense des fonds, et je pense que la motion est recevable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je partage l'avis de mes collègues, à savoir qu'à sa face même, cette motion est recevable. J'aurais préféré, par exemple — je le regrette — compte tenu du principe énoncé à l'article 68, qu'il inspire un amendement qui soit davantage pour améliorer la qualité du français, puisque c'est ça qui est le principe du projet de loi. C'est l'école française. Cela m'aurait semblé préférable. Mais je pense que des mesures nécessaires ne veulent pas nécessairement dire des mesures financières. D'ailleurs, je pense que cela a été un des plaidoyers du ministre de l'Education, à qui on a demandé plusieurs fois: Est-ce qu'on ne trouve pas de sommes supplémentaires au budget? Il nous a assurés que ce n'était pas nécessaire, que l'amélioration et même la reconnaissance d'un principe tel que l'amélioration de la langue seconde n'impliquait pas nécessairement des mesures budgétaires supplémentaires. Tout le monde se rappellera, de fait — nous étions en commission parlementaire pour l'étude des crédits sur l'éducation et, également, je pense, à l'Assemblée nationale — ...

Une Voix: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Alors, moi, je pense que ce que le député de Lotbinière veut faire accepter, c'est un principe: préciser des intentions et que, continuellement, le gouvernement ne se dérobe pas vis-à-vis de cette obligation qu'il a d'assurer aux étudiants une bonne connaissance de la langue seconde. Dans ce sens-là, je pense qu'elle est acceptable et que l'argument, en tout cas — peut-être en aura-t-il un meilleur plus tard — que le député de Saint-Jacques invoque présentement ne me semble pas rendre cette motion irrecevable, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... M. le député de Sauvé, à qui j'avais donné la parole préalablement.

M. Lalonde: Ah bon!

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais tout d'abord féliciter le chef de l'Union Nationale pour les préoccupations qu'il a exprimées. L'amélioration du français et des langues secondes doit être, pour tous les Québécois et pour le gouver- nement en particulier, une préoccupation de premier plan. A telle enseigne que le gouvernement, dans son discours inaugural, a fait savoir que deux de ses priorités portent là-dessus.

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président. Est-ce qu'on parle de la recevabilité de la motion ou sur le fond de la motion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On parle de la recevabilité.

M. Morin (Sauvé): Bon! J'ai l'intention...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je permets une dernière intervention aux députés de Sauvé et de Marguerite-Bourgeoys. Par la suite, j'aurai une décision à rendre.

M. Morin (Sauvé): Bien! M. le Président, le gouvernement a annoncé des priorités à cet effet — je pense que le chef de l'Union Nationale s'en souviendra — et nous avons même dit que nous allions consacrer à ces priorités plusieurs millions de dollars cette année, l'an prochain et au cours des années à venir, puisque cette politique va se développer dans l'avenir. De même va-t-il être question de l'enseignement des langues secondes dans le livre vert, qui doit paraître incessamment.

M. Lalonde: M. le Président, je déteste...

M. Morin (Sauvé): De sorte que, M. le Président...

M. Lalonde:... interrompre le...

M. Morin (Sauvé): ... je veux en venir à mes conclusions.

M. Lalonde: C'est un long préambule.

M. Morin (Sauvé): Le chef de l'Union Nationale est fort conscient du fait qu'on ne saurait inclure dans un projet de loi, de la part de l'Opposition, en tout cas des dispositions entraînant des dépenses pouvant se chiffrer à plusieurs millions de dollars. De sorte que tout en félicitant le chef de l'Union Nationale pour ses préoccupations qui rejoignent les nôtres — je tiens à le rassurer pleinement sur ce point — je suis contraint, d'autre part, de reconnaître que le député de Saint-Jacques, leader du gouvernement à la commission, a raison de souligner le fait que cette proposition entraîne des dépenses.

Non seulement sont-elles considérables, mais l'article proposé par le chef de l'Opposition est d'une telle générosité que le coût en demeure indéterminé; mais, tout indéterminée qu'elle soit, elle n'en sera pas moins considérable.

Quand on se réfère à la fréquence, à la qualité des cours de français et de langues secondes, cela entraîne des dépenses et nous allons les faire. Seulement, du point de vue de la procédure

parlementaire, il n'appartient malheureusement pas au chef de l'Union Nationale, membre de l'Opposition, de proposer cela à la commission.

M. Ciaccia: Pourquoi n'avez-vous pas...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Sur la recevabilité, une dernière intervention.

M. Lalonde: J'ai seulement mentionné l'article 64 et il m'apparaît important que, si vous décidiez de déclarer la motion irrecevable, cela ne soit pas en vertu de l'article 64 parce que la motion est libellée de telle façon qu'elle n'entraînerait pas directement ou nécessairement des dépenses de l'Etat. Il reste l'article 70. Je pense qu'il est de mon devoir, étant donné que j'ai plaidé en faveur de la recevabilité, de me poser une question, toutefois, à savoir si c'est bien à l'article 68 que cet amendement devait être apporté, étant donné... A-t-il pour but d'écarter la question principale?

M. Morin (Sauvé): Voilà.

M. Lalonde: C'est la seule question, mais il importe que cela ne soit pas en vertu de l'article 64. J'ai intérêt à ce que cela ne soit pas en vertu de l'article 64 parce que j'ai une motion d'amendement semblable à l'article 80 qui...

M. Morin (Sauvé): Tiens, tiens. M. Lalonde: Je vous déclare...

Mme Lavoie-Roux: Vous aimez cela le savoir à l'avance.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je dois vous informer que votre intervention est extrêmement pertinente et qu'elle correspond au jugement que le président avait l'intention de rendre.

Tout d'abord, je ne pense pas que le président soit en mesure, à ce stade-ci — s'il vous plaît — d'alléguer l'article 64 puisque la présidence est dans l'ignorance la plus complète, à savoir si un tel amendement amène oui ou non des dépenses supplémentaires.

Si la présidence était convaincue de ce fait, la présidence n'hésiterait pas à alléguer l'article 64. D'autre part, à bon droit, le député de Marguerite-Bourgeoys s'est servi de l'article 70 et, sans déclarer cette motion recevable ou irrecevable, je dis qu'elle est prématurée et qu'il y a certainement d'autres articles que nous étudierons au cours de certaines journées qui permettront à n'importe quel député de cette commission de présenter un tel amendement et le président, alors, aura une décision à rendre.

Alors, sans la déclarer recevable ou irrecevable, je dis qu'à ce stade-ci, elle ne me paraît pas recevable parce que vous aurez l'occasion de la représenter, probablement, un peu plus tard.

D'accord?

M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 68.

M. Lalonde: M. le Président, vous m'aviez reconnu après le député de Lotbinière pour l'article 68.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ma liste est vierge puisque j'ai remplacé l'autre président. Je vous accorde la parole, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je regrette de changer la virginité de votre liste.

M. Charron: La violer!

M. Lalonde: Mais si vous consentez...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est l'autre président qui a dit qu'on pouvait tout violer, sauf le règlement. Je dis que ma liste est vierge.

M. Lalonde: II me semble que, si vous m'accordez le droit de parole à ce stade-ci, il importe que la commission examine de façon expresse le principe émis à l'article 68 et je suis un peu surpris de ne pas avoir entendu les députés ministériels réellement affirmer le bien-fondé de ce principe.

On a parlé tout de suite du problème qui en est un — on le sait — extrêmement complexe des exceptions à ce principe, mais il importe — et je vais le faire assez brièvement— de rappeler que, si le législateur, actuellement, à l'article 68, premier paragraphe, reprend, avec une certaine analogie, non p'as verbatim, le libellé de l'article 40 de la Loi sur la langue officielle actuellement en vigueur, ce n'est pas sans raison.

Malheureusement, en effet, il était devenu nécessaire d'affirmer que l'école française doit avoir l'attrait naturel qu'une école de la grande majorité de la population devrait avoir, sans même l'affirmation de la loi.

On sait l'évolution que nous avons connu après les années cinquante au niveau de la fréquentation scolaire, surtout de la part des nouveaux arrivants. Je ne reviendrai pas là-dessus, mais il reste toutefois, M. le Président, que, quant à moi, je suis d'accord — et c'était l'affirmation que nous faisions à l'article 40 de la loi sur la langue officielle qui est actuellement en vigueur — que le principe de base est que l'école française, c'est l'école de tout le monde, c'est l'école naturelle de tout le monde.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les remarques du député de Mont-Royal. M. le Président, je pense qu'il faut toutefois, en affirmant ce principe, en affirmant par réalisme, il faut continuer cet exercice de réalisme et tenter de comprendre la réalité québécoise qui n'est pas homogène, qui est pluraliste au point de vue linguistique, au point de vue de l'origine ethnique et au point de vue culturel. En votant en faveur de

cet article 68 qui affirme ce principe sur lequel nous sommes d'accord, nous avons quand même, M. le Président, beaucoup de réserve sur les modalités d'application de ce principe qui seront proposées par le gouvernement dans les articles suivants. Je ne verserai pas dans l'impertinence, ou plutôt dans la non-pertinence du débat, c'est-à-dire que je ne discuterai pas maintenant des articles 69 et suivants.

Lorsque le député de Mont-Royal a affirmé avec une conviction qui ne faisait pas de doute que les minorités ethniques avaient une perception de la réalité québécoise, de la réalité canadienne et de la réalité nord-américaine, extrêmement sensible, je pense que le gouvernement devrait tendre une oreille accueillante à ces propos. Ce n'est pas par contestation que le député de Mont-Royal faisait ces remarques. Il veut, comme nous, faire une loi qui va correspondre à la réalité, qui va correspondre aux désirs des gens. Lorsqu'il mentionnait son désir, il le faisait peut-être dans ses propos, plus particulièrement en rapport avec les minorités ethniques... Je me permettrai d'élargir ces propos à l'égard de la majorité francophone, à savoir le désir des gens de connaître la langue seconde, de pouvoir...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je m'excuse. Je vais être obligé de suspendre les travaux pour que vous puissiez accomplir votre devoir de député, à moins que ce ne soit pour une question de quorum.

M. Lalonde: Comment savoir, M. le Président? Comment sait-on si c'est un quorum?

Le Président (M. Cardinal): Justement, si vous le permettez, je vais m'informer immédiatement, mais je ne voudrais pas... Continuez, je vais faire vérifier tout de suite. A l'ordre, s'il vous plaît. Je vais faire vérifier tout de suite, mais je voulais quand même informer les députés que la cloche sonnait. Allez, M. le député.

M. Lalonde: Non, ce n'est pas la passion que je veux soulever, M. le député de Sauvé, c'est à la raison que je tente de m'adresser. Je ne suis pas sûr d'avoir beaucoup de succès, parce que si on en juge par...

M. Morin (Sauvé): ...passionnant.

M. Lalonde: ...l'inspiration romantique de ce projet de loi, peu souvent avons-nous l'occasion d'y rencontrer la rationalité et le réalisme. Alors, M. le Président, c'est au nom de la majorité francophone aussi que, tout en affirmant le principe de l'école française pour tous, nous faisons appel au gouvernement pour, en même temps, donner la chance à tous les francophones, non pas simplement à une petite minorité privilégiée, comme cela s'est vu dans le passé, mais à tous les francophones, d'avoir l'apprentissage de la langue seconde, de façon suffisante, de façon qu'on ait une connaissance d'usage...

Le Président (M. Cardinal): Je viens de poser la question, il n'y a pas de vote. C'est simplement que les gens sont trop attirés par la commission et qu'il n'y a pas assez de députés à l'Assemblée.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que vous suggérez qu'on transporte nos travaux à l'Assemblée nationale?

Le Président (M. Cardinal): Non, je suggère que vous continuiez.

M. Proulx: Je pense qu'il n'y a pas de problème de quorum. Il y a suffisamment de gens à l'Assemblée.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jean, vous n'avez pas le droit de parole, en vertu d'une motion adoptée à cette commission.

M. Lalonde: Je pense que nous aurons l'occasion, dans l'examen des autres articles, de proposer au gouvernement des dispositions qui, tout en conservant avec le caractère le plus solennel, le plus sacré possible, le principe du français, de la langue française c'est-à-dire de l'école française pour tous, permettront à tous nos Québécois, qu'ils soient partie de minorités ethniques ou de la majorité francophone, d'avoir une connaissance suffisante de la langue seconde pour que leurs enfants soient traités équitablement dans une société qui, quand même, M. le Président, est entourée et immergée par plus de 200 millions d'anglophones en Amérique du Nord.

Ce désir des parents francophones est légitime et il est malheureusement exprimé souvent par une nécessité actuelle, dans ce qu'on a appelé la liberté de choix, qui à mon sens, est un faux problème. Pourquoi les parents francophones, lorsqu'on fait les sondages, à 70% ou 80% ou enfin c'est dans cette proportion, choississent-ils ou préfèrent-ils la liberté de choix? C'est parce qu'ils veulent que leurs enfants aient la chance d'apprendre la langue seconde d'une façon correcte, que leurs enfants ne soient pas handicapés lorsqu'ils arriveront sur le marché du travail. C'est la seule raison.

Si on leur assurait à l'école française, un enseignement de la langue anglaise qui permette à leurs enfants d'apprendre l'anglais, d'une façon correcte, non pas d'être parfaitement bilingues, je ne pense pas qu'aucun système d'enseignenent permette, comme langue seconde, d'avoir une maîtrise suffisante de cette langue seconde pour qu'on puisse parler de l'élève qui sortirait de cette école comme d'un parfait bilingue, mais permette quand même d'avoir un apprentissage raisonnable de la langue anglaise. Ce n'est pas attaquer les droits de la majorité que de dire cela, M. le Président, c'est le désir légitime de chaque parent francophone, et, ce serait de la fausse pudeur que de le cacher.

Je reviendrai là-dessus, M. le Président, lorsque nous présenterons un amendement à l'article 80, ce qui nous porte à nous inquiéter et à ne

pas accepter les assurances que le ministre de l'Education nous a données, encore maintenant, de façon solennelle, c'est que vous avez, nous avons comme Québécois, dans la Loi sur la langue officielle actuelle, une assurance législative à l'article 44, qui se lit comme suit: "Le ministre de l'Education doit également prendre les mesures nécessaires pour assurer l'enseignement de la langue anglaise, langue seconde, aux élèves qui reçoivent l'enseignement en langue française". Disons tout de suite, M. le Président, que, seulement trois ans après l'adoption de cette loi, on ne peut pas dire que, dans les faits, ce désir du législateur ait reçu ou ait produit des résultats satisfaisants. Non.

M. Morin (Sauvé): Mésestimez-vous mes prédécesseurs?

M. Lalonde: Une longue évolution naturellement, une réforme avait été engagée, je ne reviendrai pas là-dessus, mais il reste que...

M. Morin (Sauvé): Je vous comprends.

M. Lalonde: ... que le gouvernement actuel, non seulement est muet, dans sa loi, dans son projet de loi 101, mais il se trouve à enlever de la loi qui est en vigueur une disposition que tous les parents désirent avoir, francophones et autres, allophones, pas les anglophones, puisqu'ils l'ont, la langue anglaise, mais, à ce moment-là, le fait que le gouvernement ait choisi de l'enlever est une source d'inquiétude sérieuse pour tous les parents québécois.

C'est en affirmant ce principe de la langue française, de l'école française comme école pour tous les Québécois, que je fais ces réserves, M. le Président et que j'annonce un peu de quelle façon nous allons engager le débat sur ce chapitre VIII.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voulais faire mes excuses au député, je crois qu'il a parfaitement raison, mes prédécesseurs ont été fort négligents sur ce chef.

Le Président (M. Cardinal): Je pense qu'il n'y a pas une question de règlement. A l'ordre, s'il vous plaît! Vous avez épuisé les trente minutes de votre temps...

Mme Lavoie-Roux: II me reste du temps de parole.

M. Morin (Sauvé): En dépit des dispositions législatives.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le député. M. le ministre de l'Education, s'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président, je pense que... Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Lalonde: Je pense que, M. le Président, quand même l'article 96 m'oblige de l'invoquer.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas impératif, l'article 96.

M. Lalonde: Oui, M. le Président, j'ai quand même...

Le Président (M. Cardinal): C'est permissible.

M. Lalonde: Mais, dans l'économie de notre droit parlementaire, M. le Président, il me fait une invitation que je ne peux pas refuser.

Le Président (M. Cardinal): D'accord.

M. Lalonde: ...Parce que je n'ai pas dit que les prédécesseurs du ministre avaient manqué à leur devoir, et il m'invite à le dire, tout à fait en dehors du débat, et c'est pour cela que je ne l'ai pas dit. Un programme de l'enseignement des langues a été mis sur pied, avec des investissements importants, par l'ancien gouvernement, il commence à donner des résultats, mais, il n'en donnera pas avant, quand même, enfin, il va en donner, j'espère, le plus rapidement possible, pourvu que la volonté politique soit là. Elle n'est pas là dans le projet de loi 101.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le député de Mégantic-Compton, sur une question de règlement.

M. Grenier: Non, non, est-ce qu'on pourrait demander le vote sur l'article 68 avant de sortir?

Le Président (M. Cardinal): D'accord, est-ce que l'article...

Mme Lavoie-Roux: II est déjà une heure moins cinq.

Le Président (M. Cardinal): Non, il n'y a pas consentement. Si vous permettez, avant que nous ne suspendions, quand même, je voudrais rétablir un fait moi aussi, non pas en vertu de 9b, parce que je ne fais pas de discours, quoi qu'il en paraisse. Tout à l'heure, on n'a pas eu l'invitation au quorum, M. le whip, qui n'a pas droit de parole, avait quand même raison de le souligner, ni à un vote. C'est une fausse alerte et ceux qui voudront des explications plus particulières, je les leur donnerai. Nous pouvons suspendre, je pense, selon l'ordre de la Chambre, à cet après-midi, quinze heures.

M. Charron: Peut-être que madame n'en a que pour une minute et nous pourrions procéder au vote.

Mme Lavoie-Roux: Je suis bien prête à ce qu'on adopte le 68, je voulais juste vous dire un mot.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Oui, non...

Mme Lavoie-Roux: Non, non, je pense que c'est normal qu'on le fasse. Non, ce que je voulais

simplement souligner, suite aux réactions du député de Sauvé et ministre de l'Education, tant et aussi longtemps qu'on traitera un peu à la légère la question de l'enseignement de la langue seconde, à savoir que nos prédécesseurs ont été bons ou n'ont pas été bons, on sait que le problème est très complexe, il y a la volonté politique à affirmer, il y a aussi d'autres attitudes qui doivent être modifiées. C'est dans ce sens, je pense, qu'il faut considérer ce problème d'enseignement de la langue seconde, d'une façon sérieuse et non pas en se disculpant — ce n'était peut-être pas l'intention du ministre — ou en le discutant d'une façon légère pour dire: Cela viendra la seule remarque que je voulais faire, pour ma part, en ce qui touche la langue seconde, c'est que je préférerais qu'il vienne à l'article 80, compte tenu de l'esprit de l'article 1, sur lequel hier, j'ai exprimé très clairement mon point de vue. Je suis donc bien prête à ce que nous adoptions l'article 68, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Dans les trente secondes qui restent, est-ce que l'article 68 est adopté?

M. Charron: Appel nominal, s'il vous plaît!

Le Président (M. Cardinal): M. Alfred (Papineau)?

M. Charron: C'est M. Duhaime qui le remplace, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Non, pardon, M. Duhaime, de Saint-Maurice, cela revient au même.

M. Charron: En haut.

Le Président (M. Cardinal): M. Bertrand (Vanier)?

M. Bertrand: D'accord.

Le Président (M. Cardinal): M. Charbonneau (Verchères)?

Une Voix: II est en Chambre.

Le Président (M. Cardinal): M. Charron (Saint-Jacques)?

M. Charron: En faveur, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): M. Fallu (Terrebonne)?

M. Fallu: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Ciaccia (Mont-Royal)? M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes)?

M. de Bellefeuille: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Dussault (Châteauguay)?

M. Dussault: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. Grenier (Mégantic-Compton)?

M. Grenier: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Guay (Taschereau)?

M. Guay: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Laurin (Bourget)?

M. Laurin: Pour.

Le Président (M. Cardinal): Mme Lavoie-Roux

(L'Acadie)?

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. Biron (Lotbinière)?

M. Biron: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. Morin (Sauvé)?

M. Morin: En faveur.

Le Président (M. Cardinal): M. Roy (Beauce-Sud)? M. Saint-Germain (Jacques-Cartier)?

M. Lalonde: C'est Raynauld.

Le Président (M. Cardinal): Pardon, M. Raynauld (Outremont)? Je m'excuse, c'est parce que je ne vois pas ces personnes. M. Samson (Rouyn-Noranda)?

L'article 68 est adopté.

M. Lalonde: Combien sont en faveur? Et combien y en a-t-il pour?

Le Président (M. Cardinal): Sauf les absences, c'est un vote unanime.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

Reprise de la séance à 15 h 7

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

Comme il fut mentionné ce matin, nous continuons la même séance de la commission de l'Education, des Affaires culturelles et des Communications qui a mandat de l'Assemblée nationale d'étudier, article par article, le projet de loi 101 après sa deuxième lecture. L'article 68 a été adopté avant la suspension. Nous en sommes à l'article 69 et, comme il se doit — à moins que ce soit une question de règlement, madame — je donne la parole au ministre d'Etat au développement culturel.

L'enseignement en anglais: Explication des principes

M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, je reprends l'explication des principes qui ont présidé à l'élaboration de notre politique, des objectifs que nous poursuivons. Les objectifs du gouvernement comportent essentiellement trois éléments. Premièrement, que l'enseignement en anglais soit réservé aux Anglo-Québécois actuels et à leurs descendants, Anglo-Québécois étant pris ici dans un sens culturel et linguistique, et non en fonction de l'appartenance à une communauté anglo-saxonne panca-nadienne, panaméricaine ou mondiale. Deuxième élément, que les nouveaux immigrants et leurs descendants soient orientés vers l'école française. Troisième élément, que les mesures de contrôle soient les plus simples possibles et excluent tout recours à des tests linguistiques.

Pour concilier le premier élément avec le troisième, nous avons dû éliminer la référence au critère de langue maternelle et de langue d'usage. En effet, ces critères ne se contrôlent pas objectivement. Il nous aurait fallu les appliquer de façon qu'on aurait pu qualifier d'arbitraire, et plus nous aurions voulu réduire la part d'arbitraire, plus il nous aurait fallu multiplier les enquêtes, les cueillettes de données, les vérifications multiples.

Quant au deuxième élément, il nous est apparu impossible de l'atteindre en établissant un régime de droit distinct pour les nouveaux immigrants. Outre le fait qu'il apparaîtrait odieux dans l'avenir à établir la date d'arrivée, par exemple avant ou après 1977, de son premier ancêtre pour déterminer les droits d'un individu de recevoir l'enseignement en anglais, une telle disposition aurait été sûrement contestée comme incompatible avec la loi de la citoyenneté canadienne qui interdit toute discrimination sur la base de la date de l'obtention de cette citoyenneté.

Le critère de la scolarité de niveau élémentaire des parents rencontre sinon la lettre, en tout cas certainement l'esprit des objectifs que nous avions. Premièrement, ce critère se réfère directement à la langue et à la culture.

L'école élémentaire, en effet, est celle des apprentissages fondamentaux. Elle joue un rôle beaucoup plus apparenté à celui de la famille et des parents que celle des autres niveaux. La langue qu'on y enseigne est souvent la langue maternelle, mais certainement, pour la très grande majorité des enfants, une des premières langues apprises et, probablement, la première des langues dont on conservera l'usage.

L'école élémentaire est le premier milieu institutionnel d'intégration à une culture. On retrouve donc normalement à l'école élémentaire anglaise les descendants de Britanniques qui sont demeurés culturellement anglophones, à l'exception bien sûr des Burns, O'Neill, McKay, McAndrew et autres qui sont devenus francophones.

M. Bertrand: McAndrew c'est français.

M. Laurin: On y retrouve aussi certains descendants de Français qui sont devenus culturellement anglophones — on dit qu'il y en a 75 000, actuellement — et les descendants d'autres groupes ethniques, Scandinaves, Néerlandais, Juifs, Indopakistanais et le reste, qui s'intègrent le plus souvent à la communauté anglophone. Mais on y retrouve aussi d'autres enfants dont les parents ne sont pas anglophones, mais ont choisi l'anglais pour leurs enfants dans le cadre d'une loi linguistique permissive comme celle de la loi 63. Avec le critère tel que proposé, nous ne revenons pas en arrière pour corriger une situation historique dont certains éléments peuvent déplaire, mais nous fermons la valve pour tenter d'empêcher de nouveaux transferts vers l'école anglaise.

Deuxièmement, l'application de ce critère nous permet d'acheminer tous les nouveaux arrivants vers l'école française, sans avoir à les traiter comme un cas particulier. Ce ne sont pas les immigrants qui sont ici un cas particulier, ce sont les héritiers du réseau d'enseignement en anglais du Québec, lesquels, d'ailleurs, ne se voient nullement privés de leur droit à l'école française. Les immigrants ne sont pas nommés dans la loi et ils n'ont pas à l'être, puisqu'ils entrent dans la règle générale.

Troisièmement, nous éliminons totalement le recours à des tests linguistiques, comme également toute mesure de la qualité linguistique des individus, élèves ou parents. Ce qui est en considération, ce n'est pas le caractère des individus d'être ou de ne pas être d'origine britannique, d'être ou de ne pas être de langue maternelle anglaise, c'est le fait d'avoir ou non fait ses études en anglais dans le réseau scolaire québécois.

On considère ici une action posée par l'individu concerné et pour laquelle il peut y avoir une attestation officielle, mais non la concordance de cet individu avec une définition théorique.

Les avantages de la formule sont particulièrement évidents. Il faut bien voir que l'un ou l'autre de ces avantages pourrait être perdu si on y introduit certains amendements. Nous avons dit que le maintien du réseau d'enseignement en anglais doit être vu comme une mesure exceptionnelle au sein d'un système d'éducation en principe français. Ajoutons que ce n'est pas en vertu d'une philosophie générale de promotion des langues maternelles que nous maintenons ce réseau.

D'une part, la langue maternelle appartient au milieu familial. Il ne peut pas être question pour nous de limiter le droit des parents, de transmettre à leurs enfants la langue de leur choix. Mais la conservation et le développement de la langue maternelle est avant tout une responsabilité de la famille. L'école publique a normalement pour fonction d'assurer la connaissance par tous et le développement de la langue nationale, de la langue commune, de la langue officielle, de la langue qui assure le maintien de la cohésion sociale.

D'autre part, aucun Etat moderne, pas plus le Québec que les autres, n'a les moyens d'assurer par l'école publique l'apprentissage de toutes les langues maternelles existant dans la population. Ce n'est pas non plus en vertu d'une quelconque garantie constitutionnelle.

Ce n'est pas non plus en vertu d'un droit fondamental assimilable aux droits reconnus dans les diverses chartes ou déclarations des droits de l'homme. Ce n'est pas non plus en vertu du principe des droits acquis, un tel principe, s'il est invoqué d'une manière générale à propos des législations, étant le meilleur moyen de paralyser tous les législateurs et les empêcher de modifier les situations de droit créées par les législations antérieures. Nous maintenons le réseau d'enseignement en anglais parce que ce réseau existe et qu'il nous paraît juste d'accorder aux Anglo-Québécois de naissance et d'adoption le droit d'y faire instruire leurs enfants s'ils le trouvent opportun. Le critère proposé permet de maintenir le réseau d'enseignement en anglais à une taille à peu près équivalente à celle qu'il a présentement, mais il en limite l'accès de façon précise, évitant ainsi à la fois la disparition de ce réseau et les dangers, aux plans social, culturel et politique, d'une expansion de ce réseau au détriment du réseau francophone.

Il est évident, par ailleurs, que le fait de ne considérer la scolarité que d'un seul parent simplifie considérablement l'opération administrative. La vérification des attestations est deux fois moins longue en principe; mais il y a aussi que si des archives ont été perdues, concernant la scolarité d'un des parents, on peut se rattraper avec les attestations de l'autre parent. On facilite donc aux familles, dont les deux parents sont anglophones, la détermination ou l'établissement du droit des enfants à l'école anglaise. On diminue d'autant le nombre de ces problèmes. Les pertes d'archives auraient donc statistiquement beaucoup moins de chance, toutes proportions gardées, de toucher les familles anglophones homogènes.

A long terme, ce critère peut augmenter le nombre des inscriptions à l'école anglaise selon la façon dont s'effectueront les mariages mixtes et selon l'attitude adoptée par les couples mixtes. En effet, les enfants d'un francophone et d'une anglophone pourraient fréquenter l'école anglaise et, plus tard, même mariés de nouveau à des francophones, ils pourraient continuer à envoyer leurs enfants à l'école anglaise, et ainsi de suite pour toutes les générations à venir, de sorte que si tous les anglophones et autres ayants droit, disons 18% de la population actuelle, mariaient des francophones et si nous oublions, pour un moment, l'impact de l'immigration aussi bien que de l'émigration, théoriquement, 36% des enfants de la génération suivante auraient droit à l'école anglaise. Si, au niveau de cette deuxième génération, tous les ayants droit usent de ce droit, théoriquement, 72% des enfants de la troisième génération auraient droit à l'école anglaise, alors que théoriquement tous ces enfants pourraient bien être des francophones.

On me dira que c'est là une hypothèse farfelue, et j'en conviens. Je ne l'ai présentée que pour faire ressortir la différence qu'il y a, à long terme, à ne faire porter le critère de la scolarité en anglais que sur un seul des deux parents. Si le critère portait sur les deux parents, il y aurait tendance à une réduction du réseau anglophone d'autant plus rapide qu'il y a de nombreux mariages mixtes.

A l'inverse, étant donné qu'il ne porte que sur un seul des deux parents, il y a tendance à une expansion du réseau anglophone d'autant plus rapide que les mariages mixtes seront nombreux.

L'impact des flux migratoires modifiera nécessairement tous ces chiffres. Je ne présente cette comparaison que comme un modèle théorique pour illustrer que le choix de ce critère n'a pas que des effets à court terme. Ce choix simplifie de même d'une façon notable l'administration du critère et c'est là un avantage très important.

Faut-il réserver l'accès de l'école anglaise aux enfants dont les parents ont fait leurs études élémentaires en anglais au Québec ou faut-il l'ouvrir également aux enfants dont les parents ont fait leurs études élémentaires en anglais au Canada? Disons, d'abord, que ceci compliquerait de beaucoup l'administration du critère si le critère était étendu à l'ensemble du Canada. Mais regardons au préalable une autre application de ce critère en ce qui concerne son administration. Nous avons l'impression qu'une fois établi, le système fonctionnera tout seul. Un fichier central sera établi, ce fichier central s'enrichira à mesure des données sur la scolarité élémentaire des élèves actuels et futurs. Pour les futures générations, le système pourra continuer à fonctionner sans problème, sans test linguistique.

Revenons maintenant à l'alternative Québec-Canada. S'il faut.considérer la scolarité faite un peu partout au Canada, on complique énormément l'administration du critère, dès le départ, mais surtout, on le maintient compliqué pour toujours. On aura beau établir un fichier central, une partie des données pertinentes au fonctionnement du système échapperont toujours à ce fichier central. Il va de soi que, si nous défendons l'autonomie du Québec en matière d'éducation — je ne me situe même pas ici comme indépendantiste; je raisonne tout simplement comme aurait pu le faire M. Duplessis ou M. Lesage — nous ne pouvons pas donner de directives aux ministères de l'Education des autres provinces et encore moins aux commissions scolaires et aux écoles de ces provinces sur la façon de tenir leurs archives.

Nous ne pouvons pas leur demander de

conserver des renseignements qui nous intéressent pour le fonctionnement de notre système scolaire. Nous ne pouvons pas leur donner de directives sur la façon de donner leurs attestations d'études. Parmi les neuf autres provinces, il s'en trouvera sûrement dont les archives sont moins bien tenues. Peut-être s'en trouvera-t-il qui ne voudront pas collaborer de bonne foi et nous n'y pourrons pas grand-chose.

En ne considérant que la scolarité faite au Québec, on peut envisager, après une période de rodage, de libérer les parents du fardeau de la preuve. Quand le ministère disposera directement des données pertinentes, il établira les droits de chacun sans avoir à les envoyer à la chasse aux certificats d'études. Si l'on considère la scolarité faite partout au Canada, il faudra nécessairement laisser aux parents le fardeau de la preuve à moins que par des accords de réciprocité, les autres provinces ne s'engagent à mettre leurs services à la disposition de leurs ressortissants à qui le Québec ouvrirait l'accès à l'école anglaise en échange d'avantages similaires consentis aux Québécois dans ces mêmes provinces.

Si on veut donc mettre l'accent sur la simplification des mesures de contrôle tout en conservant au Québec toute l'initiative de l'administration et du fonctionnement de notre système scolaire, nous devons refuser l'extension au Canada tout entier du critère des parents. Mais il n'y a pas que la complexité administrative en cause, il y a aussi les deux premiers objectifs dont je parlais au début, qui se recoupent d'ailleurs et que j'ai déjà énoncés.

Si nous acceptons, pour le présent et l'avenir, de considérer la scolarité élémentaire faite en anglais n'importe où au Canada, premièrement, nous ne réservons pas l'enseignement en anglais aux seuls descendants des Anglo-Québécois actuels; deuxièmement, nous ne le réservons même pas aux seuls descendants des Anglo-Canadiens actuels.

En effet, nous n'avons aucun contrôle, ni sur la politique d'immigration du gouvernement canadien qui pourrait nous inonder, un jour, selon des critères qu'il serait à même d'établir, ni sur les migrations interprovinciales. C'est donc dire qu'un immigrant qui arrivera à Toronto, à Vancouver ou à Halifax, en 1980, en 1990 ou plus tard, n'aura qu'à demeurer dans une autre province le temps où ses enfants font leur scolarité de niveau élémentaire et à venir ensuite s'établir définitivement au Québec. Il aurait alors acquis le droit à l'école anglaise pour tous ses descendants.

Je ne prétends pas pour le moment que le gouvernement fédéral conseillera systématiquement aux immigrants de faire d'abord un stage en Ontario avant de s'établir au Québec, je dis seulement que, s'il voulait le faire, nous n'aurions aucun moyen de l'empêcher. Présentement — ceci dure depuis des années — plus de la moitié des immigrants qui entrent au Canada s'installent d'abord en Ontario et environ un cinquième viennent d'abord au Québec.

Nous ne savons pas grand-chose des dépla- cements ultérieurs de ces migrants, une fois qu'ils sont devenus citoyens; ce que nous savons, cependant, c'est que c'est avec l'Ontario que le Québec échange le plus en termes de population et que c'est justement dans cette province que les immigrants arrivent surtout.

Pouvons-nous nous permettre de laisser la réalisation de nos objectifs politiques à la merci des humeurs politiques d'un autre gouvernement? Il ne s'agit pas de prétendre que le gouvernement fédéral osera influencer les immigrants dans le sens décrit plus haut, malgré que l'on pourrait se poser des questions très pertinentes a ce sujet, mais je dis simplement qu'il pourrait éventuellement arriver qu'un gouvernement fédéral, moins bien disposé à notre égard et moins systématiquement dévoué à la réalisation de nos objectifs que le gouvernement Trudeau, décide de le faire. Je prétends que nous ne devrions pas nous livrer ainsi à sa merci.

M. Trudeau n'est-il pas déjà lui-même intervenu récemment pour défendre le droit des immigrants en anglicisation?

Pourquoi serait-il farfelu de penser qu'un de ses successeurs puisse passer des paroles aux actes et mettre les services de l'Immigration au service de sa politique "civilisatrice"? Je me garde bien de prétendre qu'actuellement les services canadiens de l'Immigration puissent intervenir de quelque façon sur l'orientation linguistique des immigrants ou sur le choix de leur lieu d'entrée au pays. Mais il manque présentement au Québec des instruments importants pour agir efficacement sur tous les aspects de son développement économique, social, culturel et politique. Il nous manque notamment le contrôle de notre immigration. Cependant, il est un domaine où nous sommes constitutionnellement souverains, c'est celui de l'éducation. Il serait, pour le moins, paradoxal qu'une équipe gouvernementale qui se propose de récupérer les autres instruments qui lui paraissent essentiels hésite à se servir de façon souveraine d'un instrument dont il dispose déjà.

Par ailleurs, il faut éviter tout ce qui pourrait apparaître comme de la discrimination entre les diverses catégories d'immigrants. Or, si nous acceptons de reconnaître, aux fins d'établir le droit à l'école anglaise, la scolarité faite n'importe où au Canada, nous faisons de la discrimination entre immigrants.

Deux Italiens, par exemple, partent en même temps de l'Italie. L'un s'établit directement à Montréal; l'autre fait un stage de dix ans à Toronto avant de s'établir définitivement au Québec. Les descendants du premier vont obligatoirement à l'école française. Les descendants de l'autre ont droit à l'école anglaise. Si c'est au nom de la civilisation qu'on justifie cette discrimination, il n'y a plus rien à comprendre.

Par ailleurs, encore aujourd'hui, quand un Anglais vit en France, il est soumis au droit civil au même titre que les Ecossais de naissance. De la même manière, un Ontarien qui vit au Québec est soumis au droit civil québécois, aussi longtemps qu'il reste au Québec. Même s'il ne réside pas au

Québec, s'il transige au Québec, il est soumis aux lois du Québec pour ses transactions. Il ne faudrait pas non plus accuser à la légère les Suisses de ne pas être civilisés, et pourtant, quand un Suisse change de canton, il accepte normalement les lois de son canton d'adoption, y compris le régime linguistique de l'école du nouveau canton, et pourtant, tous les Suisses appartiennent à la même confédération suisse.

Je ne rejette pas totalement toute notion de droits acquis. C'est pour respecter, de façon civilisée, ce qui peut être raisonnablement considéré comme une situation acquise que le projet de loi propose de laisser à l'école anglaise tous ceux qui y sont déjà et d'y admettre aussi leurs frères et soeurs cadets. Parmi ceux qui seront ainsi admis à l'école anglaise, on retrouvera une bonne part des enfants actuels des Canadiens actuellement au Québec. Je ne vois pas très bien pourquoi nous devrions considérer que les Canadiens qui viendront demain s'établir au Québec ou que les familles n'ayant pas encore un enfant à l'école y auraient des droits acquis. La théorie des droits acquis, si on l'appliquait à la manière dont certains la comprennent, aboutirait à immobiliser totalement le législateur, car toute nouvelle loi modifie, d'une certaine façon, le régime de droits antérieurs.

Si on permet, par ailleurs, aux Canadiens déjà installés au Québec de profiter du droit à l'école anglaise, il n'est pas nécessaire, pour autant, de reconnaître ce droit à tous les Canadiens à venir et à tous les immigrants qui auront, à l'avenir, la brillante idée de passer par l'Ontario avant de s'établir définitivement au Québec.

Par ailleurs, à l'appui de notre position, nous avons fait effectuer plusieurs études démographiques statistiques qui ont été déposées à l'Assemblée nationale. Nous en avons d'autres que nous déposerons incessamment. Je pense bien que ces statistiques montrent que c'est simplement avec ce critère que l'école française au Québec pourra maintenir ses effectifs et même les augmenter et que, par ailleurs, l'application du critère n'entraînera en rien l'élimination ou la disparition du réseau scolaire anglais, ni celle de la minorité anglophone. Pour toutes ces raisons, je demande l'adoption de l'article 69.

M. Bertrand: Adopté.

Le Président (M. Cardinal): J'ai reconnu Mme le député de L'Acadie, ce qui me laisse présumer que l'article n'est point adopté.

Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'on le soupçonnait.

Le Président (M. Cardinal): Pas la présidence!

Mme Lavoie-Roux: Vous, vous ne soupçonnez jamais rien.

Merci, M. le Président. J'avais déjà dit hier soir que nous avions l'intention de présenter une mo- tion à cet article 69; mais vous me permettrez, au préalable, de faire un préambule.

Le Président (M. Cardinal): Tant qu'il n'y a pas de motion, vous pouvez parler sur l'article.

Mme Lavoie-Roux: Hier soir, certaines opinions furent émises par le ministre de l'Education. J'avais dit que je ne les relèverais pas, parce que je ne les trouvais pas pertinentes, du moins à l'article 68.

Je voudrais quand même apporter certaines précisions. J'ai eu l'impression, devant l'attaque pour le moins surprenante du député de Sauvé, de quelqu'un qui, ne voulant pas être obligé de parler d'un problème qui le confrontait, se lançait à l'attaque pour éviter d'avoir à parler de ce qui était le vrai problème.

D'ailleurs, c'est une chose que j'ai apprise depuis que je suis à l'Assemblée nationale et peut-être que mon meilleur maître à cet égard a été le député de Sauvé. Quand ce dernier est dans l'embarras — il n'est pas le seul à le faire, mais je dois dire qu'il a beaucoup de talent de ce côté — très rapidement, il se lance à l'attaque.

Cela m'a même permis, un jour, de soulever une question de privilège à l'Assemblée nationale. D'abord, tout le monde se rappellera qu'hier soir il a fait nombre d'accusations contre les tests, les caricaturant et même, avec une certaine allure de psychodrame, disant que ces tests étaient horribles, et ainsi de suite. Je voudrais tout de suite établir au départ que je ne suis pas d'accord avec les tests et que si certains journaux ont rapporté cela, je pense que je n'ai pas à critiquer les journalistes. Pour une fois où j'aurais aimé qu'on m'eût interprétée plus fidèlement, il y a peut-être vingt fois où l'on m'interprète fidèlement. Je pense que c'est là le hasard du journalisme, et je l'accepte au point de départ. Je pourrais dire la même chose du reportage qui fut fait dans la Presse, auquel le ministre de l'Education a également fait allusion en disant que nous étions pour le libre choix. Je pense que c'est là aussi une interprétation, à mon point de vue — je tiens à le préciser ici — très généreuse de la position que nous avions exposée le midi. Mais enfin, encore une fois, je l'accepte, cela fait partie des règles du jeu.

Ce qui m'a beaucoup amusée, c'est la caricature dramatique des tests du ministre de l'Education. Je vais juste relater un petit incident dont tout le monde se souviendra. Non pas pour justifier l'utilisation des tests, mais pour se poser des questions sur —j e ne sais pas si on peut appeler cela ainsi — la rigueur intellectuelle du ministre de l'Education. Tout le monde se souviendra qu'au mois de décembre, le ministre de l'Education, avec beaucoup de solennité, ce qu'il fait toujours d'ailleurs, avait fait une déclaration ministérielle dans laquelle il avait dit, après avoir rappelé tout le monde à l'ordre, à l'obéissance à la loi, ce qui est fort bien d'ailleurs: "En premier lieu, quant aux groupes d'enfants, au nombre d'environ 250, qui, pour diverses raisons, n'ont pas encore passé les tests, mon ministère et les commissions scolaires

concernées sont invités, dans les jours qui viennent, à prendre les mesures nécessaires pour qu'ils puissent les passer comme la majorité l'a déjà fait, et que l'application des tests se déroule dans les meilleures conditions pédagogiques possibles". Pour la dernière partie, j'étais tout à fait d'accord. Mais on se souviendra qu'en réponse à cette déclaration ministérielle, j'avais soulevé des doutes très sérieux quant à la décision que le ministre de l'Education prenait à ce moment, surtout que la loi ne l'obligeait pas à ce que les enfants subissent des tests et que, dans le passé, tous les enfants n'avaient pas été soumis à des tests parce qu'on avait tenu compte d'autres critères d'identification pour éviter à certains enfants d'être soumis aux tests. Mais enfin! Telle était la position, à ce moment-là, du ministre de l'Education qui, sans hésitation, recommandait pour tous les enfants que l'on passe des tests. Mais, ce qui est le plus surprenant, après cette décision très comme il faut, je suppose, aux yeux du ministre de l'Education, je lui ai posé, le 15 juillet dernier, la question suivante, à savoir s'il pouvait me dire si les enfants qui, au mois de décembre, avaient été soumis aux tests certains avaient échoué et s'ils avaient interjeté appel auprès du ministre, c'est la réponse du ministre: "Je puis cependant dire à Mme le député qu'il n'y a pas eu d'appel et tout s'est déroulé dans l'ordre le plus complet." Alors, dire que tous les tests causaient des situations dramatiques, comme ce qu'il a voulu décrire hier soir, je pense que ceci est un peu en contradiction avec le scénario qu'il a voulu créer autou. des tests.

D'ailleurs, tout le monde connaît l'éloquence du ministre de l'Education. On l'a vu, hier soir, aller rapidement, mêlant entrevues, tests et faisant des affirmations qui étaient pour le moins surprenantes.

Je voudrais également dire qu'hier soir le ministre de l'Education nous a dit qu'il avait discuté pendant des jours des critères appropriés, quel serait le meilleur critère à retenir pour déterminer l'accès à l'école anglaise. Ce qui est le plus étonnant, c'est que sans doute sa décision était prise avant même le début des commissions parlementaires, puisqu'il n'y est jamais venu, sauf une ou deux fois, alors qu'il est venu discuter d'aspects constitutionnels du projet de loi. On peut se demander quel est l'objectif qu'on poursuit quand on a ces commissions parlementaires.

J'ai également entendu hier soir le ministre de l'Education — et c'était fort amusant — tendre des perches au député de D'Arcy McGee, ceci, encore une fois, c'est que le ministre de l'Education préférerait qu'on discute d'un projet hypothétique de l'Opposition officielle qui n'est pas au pouvoir — je le regrette, mais elle n'y est pas, ce sont les faits— alors que ce qui fait l'objet de l'étude, c'est le projet de loi du gouvernement. Je pense qu'au point de départ, il faudrait se le rappeler.

Ceci dit, enfin, il y aurait peut-être d'autres mises au point, mais je ne veux pas prendre vingt minutes pour faire ces mises au point, je pense que c'est suffisant.

Le Président (M. Cardinal): Oui, parce que vous ne pourriez rien dire après.

Mme Lavoie-Roux: Je ne pourrais pas faire ma motion.

J'en arrive au critère qui est présenté par le gouvernement. Au départ, je suis prête à admettre — et je l'admets bien volontiers — qu'il y a eu de la part du gouvernement une recherche certainement aussi approfondie que celle qui a été décrite hier par le ministre de l'Education pour trouver un critère qui, justement, soit le plus simple possible. Malheureusement, il en est découlé une décision quant au choix d'un critère automatique pour utiliser les mots du ministre de l'Education lui-même, hier soir. Je pense que ce critère automatique est un critère de facilité qui, à mon point de vue, met très sérieusement en doute l'équité de ce critère.

D'autres l'ont qualifié de critère mécanique, je l'ai qualifié de critère d'accommodement dans le sens qu'il permet — je ne parle pas de toute la machine administrative qu'il faut mettre en marche pour le vérifier — d'éviter les tests, il n'y a aucun doute là-dessus. Ce critère a plusieurs inconvénients. D'abord, il donne à l'interprétation de la communauté anglophone un prolongement assez surprenant; je l'ai déjà cité en commission parlementaire, mais je pense qu'il convient de le rappeler ici: Les dispositions de la charte seront donc rédigées de façon à atteindre un double objectif, permettre l'accès à l'école anglaise de tous ceux qui se trouvent actuellement au Québec et dont les parents, par l'éducation reçue, font partie de la communauté anglophone ainsi qu'à leurs descendants.

Je trouve — et je le redis — extrêmement surprenant que tous les parents qui ont reçu leur enseignement primaire à l'école anglaise soient tout à coup devenus des anglophones. Là-dessus, les trois ministres qui sont devant nous le savent fort bien. Il y a eu, depuis longtemps, un pourcentage qui se situait, et je pense — il a dû diminuer depuis la loi 22 — à environ 2 1/2% de la population francophone qui s'est trouvée dans les écoles anglaises non pas pour s'angliciser, mais — peut-être, dans certains cas, pour la majorité des cas faire l'apprentissage de l'anglais, langue seconde. Tout à coup, ce gouvernement sanctionne l'anglicisa-tion de milliers de francophones québécois. Il en va de même pour les allophones et pour un grand nombre d'entre eux.

Tout le monde sait, et particulièrement dans le cas de la minorité italienne qui est quand même une minorité très considérable au Québec, qu'une grande partie d'entre elle est allée à l'école anglaise mais vit en français et conserve à la maison la langue italienne. Je pense que là, également, ainsi que pour d'autres groupes, le critère retenu par le gouvernement ne permet pas de rejoindre l'objectif que devrait rejoindre l'école anglaise, c'est-à-dire d'en permettre l'accès à ceux qui sont membres de la communauté anglophone, qu'ils soient nés anglophones ou qu'ils le soient deve-

nus par les circonstances de la vie ou du cheminement personnel qu'ils ont vécu.

Pour parler d'une façon plus précise... J'entendais, tout à l'heure, le ministre d'Etat au développement culturel qui disait: On va créer de la discrimination entre deux Italiens, celui qui est passé par Toronto et celui qui est arrivé à Montréal directement—je pense que cette discrimination s'exerce déjà à l'égard des familles qui sont ici. Je ne pourrai pas prendre vingt minutes pour citer des cas particuliers, mais pensez simplement à une famille dont certains enfants sont allés à l'école anglaise, d'autres sont allés à l'école française et, dans les générations qui suivent, vous aurez des enfants qui auront le choix d'envoyer leurs enfants à l'école française et d'autres à l'école anglaise.

Vous avez même, à l'intérieur de familles anglophones — et ce ne sont pas des cas hypothétiques, ce sont des cas que je connais— qui, a partir des années 1960, étaient de véritables familles anglophones — personne ne pourrait mettre en doute cette spécificité — qui ont fait le choix d'envoyer leurs enfants ou quelques-uns de leurs enfants à l'école française. Maintenant devenus adultes, certains enfants de ces familles, quelques-uns, conservent le droit d'envoyer leurs descendants à l'école anglaise alors que d'autres l'ont perdu. Ce sont des cas précis que je pourrais apporter au ministre.

Pour ce qui est des immigrants à venir, la même discrimination pourra s'exercer, M. le Président. On sait fort bien que beaucoup de membres de la communauté portugaise, italienne et grecque — je parle de celles-là parce que peut-être je les connais mieux — vont régulièrement en vacances dans leur pays d'origine, y envoient leurs enfants. Encore une fois, il ne s'agit pas de cas hypothétiques. Le ministre d'Etat au développement culturel ne trouve-t-il pas discriminatoire, par exemple, qu'une Portugaise qui est ici, qui va marier un Portugais qui est au Portugal, qui revient ici, les descendants de ce groupe peuvent aller à l'école anglaise. Non seulement ceci mais de plus ces familles vont vivre en portugais chez eux parce que ces communautés gardent leur langue d'origine. On va voir, et ce sera assez amusant — amusant est peut-être une mauvaise expression — des enfants qui vont arriver à l'école anglaise en ne parlant pas du tout l'anglais.

Mais il y a une inquiétude de moins, l'Etat n'aura pas à encourir de dépenses supplémentaires, parce que les écoles anglaises les accueilleront sans même demander de classes d'accueil. Ce qui ne veut pas dire ici que je porte un jugement contre les classes d'accueil, je pense qu'elles sont nécessaires, mais on sait qu'historiquement les secteurs anglais, pour des raisons qu'on connaît fort bien, n'ont jamais exigé de classes d'accueil et ont massivement intégré des enfants qui n'étaient pas de langue anglaise.

Je voudrais — parce que vous m'avez avertie qu'il ne me resterait peut-être plus de temps — finir en disant que ce critère — et c'est ceci qui m'apparaît le plus grave — qui est retenu par le gouvernement est un critère qui dévalorise l'école française. Il le dévalorise dans le sens que le fait que vous ayez fréquenté l'école anglaise devient une partie de votre héritage, de votre legs, de votre dot et il devient un critère qui donne, dans un sens, une plus-value, si on veut, aux yeux d'un grand nombre, à l'école anglaise. C'est cela le drame du Québec. Toutes les mesures que nous avons prises — et je dois l'admettre même dans le cas de la loi 22— ont créé cette situation de dévalorisation pour l'école française et de revalorisation ou de survalorisation — je pense que le terme serait peut-être mieux choisi — pour l'école anglaise.

Je m'arrête ici, je ne ferai pas ma motion immédiatement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): De toute façon, madame, il vous restait encore près de quatre minutes.

Mme Lavoie-Roux: Je peux continuer?

Le Président (M. Cardinal): Non, pas nécessairement.

M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Merci, M. le Président, je veux remercier le député de l'Acadie de me permettre de faire des remarques générales sur cet important article de ce projet de loi. En fait, si les membres de la commission ont décidé d'étudier ce chapitre, comme on l'a dit hier, c'est que ce chapitre cause de l'inquiétude dans la population et il est grand temps que tout le monde sache exactement où nous voulons aller sur ce chapitre sur la langue de l'enseignement. Alors, je veux remercier le député de L'Acadie et je lui repasserai la parole tout à l'heure pour lui permettre de présenter les amendements qu'elle veut présenter.

Cet article 69 du projet de loi, à mon point de vue, est un progrès sensible sur le projet de loi 22, et spécialement sur certains aspects, c'est beaucoup plus humain. C'est sûr que nous avons énormément critiqué les tests linguistiques, mais cela me plaît qu'on ait trouvé une autre formule par laquelle on va finalement sélectionner les enfants, ceux qui ont le droit d'aller dans les écoles anglaises.

La formule choisie par le gouvernement — j'emploie les mots du ministre lui-même — c'est la moins "mauvaise" des formules, mais, au moins, c'est celle qui m'apparaît la plus humaine à l'heure actuelle.

Il n'est pas question de revenir à des tests. Toutes sortes de tests sur les enfants m'apparaissent complètement inhumains. Je suis heureux de voir qu'on a trouvé une formule, peut-être un peu plus bureaucratique, c'est vrai, mais il n'y a jamais d'avancement, il n'y a jamais de progrès sans avoir quelques petits désavantages. La formule trouvée, quant à moi, me plaît. Je trouve qu'on va donner justice avec une formule qui est peut-être un peu moins arbitraire même que le critère de langue maternelle, parce qu'encore une fois la langue ma-

ternelle, c'est quoi? Cela va être difficile, il va falloir la revérifier de toutes sortes de façons. Cette formule qui donne le fardeau de la preuve aux parents me plaît quand même, parce que le père ou la mère qui veut envoyer ses enfants à l'école anglaise, à mon point de vue, c'est par exception au Québec, parce que la grande majorité du Québec, on a dit: C'est l'école française pour tout le monde.

Si on veut quand même reconnaître certaines écoles anglaises ou si le père ou la mère, un des deux parents ou les parents veulent envoyer leurs enfants à l'école anglaise par exception, c'est à eux d'avoir le fardeau de la preuve et c'est à eux de faire la preuve qu'ils peuvent envoyer leurs enfants dans de telles écoles.

Dans le programme de l'Union Nationale d'octobre 1976, c'était clairement dit que nous reconnaissions la prééminence du français dans le respect des autres cultures. Le fait d'avoir des écoles anglaises, c'est le respect de la culture anglophone. Il est également dit dans notre programme, compte tenu de la situation sociale qui prévaut au Québec, qu'il faut prévoir l'intégration à la communauté francophone de tous les immigrants non anglophones à venir. Là-dessus, je pense bien que tous les partis politiques sont unanimes.

Le 16 avril dernier, notre parti, dans une volonté de clarifier et d'expliciter davantage ce que nous entendions par la prééminence de la langue française, a convenu de surseoir à l'application du principe du libre choix de la angue d'enseignement. Cela veut dire que, finalement, aujourd'hui, pour le francophone, nous sommes d'accord avec le gouvernement qu'il n'y aura plus la liberté de faire inscrire les enfants dans une école de langue anglaise; ils devront aller à l'école de langue française. Mais on a finalement aussi voulu, à même nos amendements, donner une certaine garantie que dans cette école de langue française ils auront l'occasion d'apprendre la langue anglaise comme langue seconde. Pour l'anglophone, qu'il soit déjà au Québec ou qu'il soit un immigrant, nous voulions qu'il conserve le libre choix de se faire instruire dans sa langue ou dans la langue de la majorité du Québec, soit la langue française, parce que nous reconnaissons, au Québec, deux grandes communautés, deux grandes collectivités, la française, d'abord, et aussi une communauté anglophone au Québec. Le fait de reconnaître une telle communauté nous oblige à dire que tous ceux qui déjà appartiennent à la communauté anglophone, peu importe qu'ils soient de Montréal, de Toronto ou de Londres en Angleterre, parce que déjà ils appartiennent à cette communauté anglophone, ils peuvent, à notre point de vue, continuer de s'intégrer à la communauté anglophone qui existe déjà au Québec.

Or, nous nous sommes également entendus pour que les allophones vivant au Québec, s'ils avaient opté pour l'école anglaise, ceux qui déjà étaient là, pouvaient soit y demeurer, y compris leurs frères et soeurs cadets, soit opter pour l'école française.

Cependant les immigrants non anglophones à venir devaient s'intégrer à la communauté franco- phone. Pour eux, il n'est pas question de liberté de choix. Le fait d'avoir une garantie, de par cette loi, du ministre de l'Education d'avoir une excellente qualité d'anglais langue seconde dans les écoles françaises va encourager beaucoup d'allophones à s'enregistrer de bon gré et volontairement à l'école française, même si quelques-uns d'eux avaient la permission ou le droit d'aller, en vertu de cet article de notre projet de loi, à l'école anglaise.

Je suis assuré que beaucoup vont s'intégrer à la communauté francophone.

Enfin, nous nous sommes déjà engagés, au chapitre sur la langue d'enseignement, à réclamer et à obtenir, en plus d'une meilleure qualité de l'enseignement de la langue française, des garanties précises pour un enseignement accru, une meilleure qualité de la langue seconde partout.

Les commentaires spécifiques. Les tests sont terminés. Bien sûr, comme le disait d'ailleurs il y a quelques mois le député de L'Acadie, c'est peut-être un passeport pour l'école anglaise pour quelques francophones qui, normalement, devraient rester à l'école française, mais il y a une date où il faut tout couper et où il faut dire:

A partir d'aujourd'hui, on commence ça; même si le passé était correct ou pas correct, je pense bien qu'il y a une date à laquelle il faut dire: A partir d'aujourd'hui, c'est comme cela que ça va aller. Même si je regrette, pour ma part, personnellement, qu'on donne un passeport à plusieurs francophones pour aller à l'école anglaise, c'est très difficile de décider de cas particuliers d'un bout à l'autre de notre province.

Finalement, même si ce passeport existe, j'accepte la formule préconisée par le gouvernement là-dessus. Il faut prévoir, quand même, au premier paragraphe de ce projet de loi, lorsqu'on donne la permission aux enfants dont le père ou la mère a reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais, d'être un peu plus large. Il faut prévoir le cas de parents qui sont arrivés ici, au Québec, à l'âge de l'école secondaire, qui sont allés à l'école secondaire anglaise et qui sont intégrés à la communauté anglophone, qui font véritablement, aujourd'hui, partie de la communauté anglophone. Il faudrait élargir un peu et prévoir ces cas de parents qui ont étudié ou d'enfants qui ont étudié et ont fait leur secondaire dans les écoles anglaises au Québec.

De même, il faudrait prévoir aussi le cas de petites municipalités du Québec, dans Mégantic ou dans Gaspé, ou à quelques endroits où il reste encore des îlots d'anglophones, mais pas assez nombreux pour envoyer leurs enfants à l'école anglaise. Habituellement, ces gens envoient leurs enfants à l'école française, pour le primaire, et les envoient à l'école anglaise pour le secondaire. Il faudrait prévoir ces cas-là en particulier parce que, si on n'ouvre pas nos écoles anglaises à ceux qui ont reçu l'enseignement soit primaire ou secondaire en anglais, on crée des injustices à ces gens.

En plus de ça, ce qui va arriver, c'est qu'immédiatement après l'adoption de la loi, il y aura peut-être un échange d'étudiants entre l'école

française et l'école anglaise, les parents qui ont le droit d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise au primaire vont peut-être les prendre d'une école française pour les envoyer à une école anglaise. Alors, il faudrait prévoir que, dans ce cas-là en particulier, on va peut-être perturber la vie de jeunes étudiants. Cela ne comporte peut-être pas des milliers d'étudiants — peut-être quelques centaines, peut-être quelques milliers — mais pas tellement d'étudiants au Québec. Il faudrait être un peu plus large dans le premier paragraphe de ce projet de loi.

Quant au deuxième, je me pose encore la question, à savoir où est la générosité promise par le premier ministre dans son discours inaugural et surtout en considérant qu'il y a un consensus au Québec dans toutes les écoles de pensée à ouvrir un peu plus large l'option Québec, et la plupart nous disent: L'option Canada. Nous, à cause de notre philosophie, parce que nous reconnaissons, ici, au Québec, l'existence d'une communauté anglophone bien articulée, nous disons: Tous ceux qui, déjà, font partie de la communauté anglophone peuvent y aller, mais, si on garde cet article tel quel, on verra de véritables anglophones, qui viennent de Toronto ou qui viennent de Londres en Angleterre, devoir aller à l'école française, alors que des gens qui ne sont pas de véritables anglophones, qui sont ici depuis peut-être quinze ans, mais qui ne sont pas de véritables anglophones, eux, vont avoir le passeport pour aller à l'école anglaise.

Il s'agit de reconnaître ou de ne pas reconnaître une communauté, une collectivité anglophone au Québec et, si nous reconnaissons cette collectivité, je pense bien qu'il faudrait ouvrir nos écoles pour les membres de cette collectivité.

Il y aura aussi des fonctionnaires fédéraux qui voyagent d'un bout à l'autre du pays, qui sont appelés à travailler ou à vivre dans des immeubles fédéraux à Hull et, autrement, on va peut-être forcer ces gens à demeurer du côté d'Ottawa, au lieu de venir demeurer au Québec. C'est peut-être important de prévoir, d'autant plus que, dans les écoles anglaises, il y aura la qualité de français pour permettre à ces gens, finalement, de devenir parfaitement bilingues dans les écoles anglaises et de s'intégrer, avec le temps, à la communauté francophone, à la culture et à la langue de la majorité au Québec.

L'option Québec du Parti québécois, c'est un manque de confiance, à mon point de vue, dans l'effet d'entraînement de l'ensemble des autres articles du projet de loi qui visent, on ne peut plus, la prééminence du fait français au Québec.

Hier, j'étais heureux d'entendre le ministre délégué au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports nous dire que, quant à lui, il aurait commencé par l'article concernant le travail ou la langue des affaires, parce que c'est là, véritablement, que nos Québécois vont pouvoir continuer de vivre en français et, lorsqu'ils peuvent travailler en français, ils étudient le français pour pouvoir travailler dans cette langue. Cet argument du ministre délégué au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, je pense que c'est important, très important dans la philosophie du gouvernement, parce que, si cet argument est valable, cela veut dire que la langue de l'enseignement, c'est peut-être secondaire. Les enfants vont se faire instruire dans la langue dans laquelle ils vont pouvoir gagner leur vie honorablement.

Je ne vois pas des gens au Québec se faire instruire complètement en chinois. Ce n'est pas possible. Il faut qu'ils se fassent instruire en français si la langue du travail est le français, si la langue des affaires est la langue française.

J'ai confiance dans toutes les autres mesures apportées — avec certaines corrections — par le gouvernement à l'heure actuelle à même ce projet de loi pour créer un effet d'entraînement pour tous ceux qui vont vouloir vivre au Québec, un effet d'entraînement à tel point que ce sera normal de choisir l'école française et que ce sera par accident qu'on choisira l'école anglaise. J'ai confiance dans ces mesures.

J'ai peut-être plus confiance dans les mesures que le gouvernement préconise que le gouvernement lui-même dans ses propres mesures. Je rejoins là-dessus le député de Saint-Jacques. J'ai été heureux de l'entendre dire hier qu'il aurait commencé par la langue du travail et la langue des affaires.

On ose ici nous parler des dangers d'assimilation que représenterait l'accès à l'école anglaise d'éventuels Canadiens ou anglophones venant d'autres pays. On ignore ou on feint d'ignorer que le gouvernement du Québec peut, à l'intérieur même du système actuel, avec la même détermination qu'il met à défendre sa position sur le dossier linguistique, agir dans le domaine de l'immigration et, notamment, dans la sélection des immigrants. Là-dessus, l'Union Nationale a prouvé sa bonne foi; elle a collaboré avec le gouvernement sur une motion spécifique à l'occasion de l'étude des crédits. Le choix de ses immigrants relève du gouvernement du Québec qui a la possibilité de faire quelque chose et de choisir le genre d'immigrants, la qualité d'immigrants qu'on veut avoir chez nous.

Par ailleurs, le gouvernement se montre complexé sur ce sujet en dressant une barrière symbolique dans une attitude séparatiste plus qu'autre chose, ne tenant pas compte de la réalité canadienne et on frappe, rétroactivement, les futurs Québécois venant ici enrichir la mosaïque culturelle du Québec.

Je qualifie cette partie de l'article 62 de mesquine, restrictive, et je me demande si, véritablement, le premier ministre, lorsqu'il plaidait sur toutes les tribunes, que son gouvernement veut faire preuve de générosité à l'endroit de la minorité anglophone, était sincère lorsqu'il disait cela et qu'il plaidait la civilité à l'endroit des autres provinces canadiennes ou des autres pays du monde.

Il me paraît injuste de faire porter l'odieux de manques, surtout à l'avant-dernier paragraphe, lorsqu'on dit: "...recevaient légalement au Québec..." Là aussi, j'aurai certainement des suggestions à faire dans ce domaine pour des amélio-

rations, parce qu'il ne faudrait pas faire porter l'odieux d'un manque de politique gouvernementale passée, qui ne dépend pas du gouvernement d'aujourd'hui et qui peut-être inconsciemment ne dépendait pas du gouvernement passé non plus — de telles choses ont existé et sont arrivées — sur le dos des enfants complètement étrangers à des jugements que d'autres, à tort ou à raison, ont pris à leur place.

Je crois qu'au nom de l'équilibre affectif de ces enfants, il faut amender l'article qui dit: "... recevaient légalement au Québec..." Là-dessus, on a fait quelque chose dernièrement, il y a quelques mois, en abolissant les amendes dues et devant être payées en vertu du bill 23 et du bill 253 parce qu'on a dit: C'est le passé, on veut oublier cela et on veut créer au Québec un bon climat social, un climat social sain.

On a déjà fait quelque chose dans le passé. C'est ce même gouvernement qui a pris une décision dans ce sens pour créer un climat social sain en disant: C'est le temps. C'est arrivé dans le passé, mais c'est fini. On regarde l'avenir avec foi.

Dans ce cas en particulier, vis-à-vis de l'article 69c, il faudrait regarder l'avenir, avoir foi dans l'avenir et dire: C'est malheureux. C'est arrivé dans le passé, et faire la même chose qu'on a faite pour le bill 23 et le bill 253, en disant: A partir d'aujourd'hui, on commence véritablement à marcher dans la bonne direction et on a foi dans l'avenir du Québec et dans l'avenir francophone du Québec.

M. le Président, nous demandons instamment au gouvernement de faire preuve de plus de flexibilité dans cet article 69. Nous proposerons des amendements en conséquence un peu plus tard.

Nous reconnaissons que le Québec doit être français; que la collectivité au Québec doit vivre essentiellement en français. Nous reconnaissons aussi qu'au Québec, nous avons une communauté anglophone bien articulée. Il faut reconnaître cette collectivité, cette communauté, spécialement avec l'article 69.

Un peu plus tard, nous aurons des amendements, mais tel qu'entendu avec le député de L'Acadie, je voudrais lui laisser présenter ses propres amendements.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, nous aurions souhaité présenter un amendement à l'article 69 qui aurait remplacé le texte complet de l'article. Mais après consultation avec le président, il semble qu'il soit plus sage que nous procédions alinéa par alinéa, ou, étape par étape.

Une Voix: C'est plus sage.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... sans préjugé, évidemment.

Motion d'amendement Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Si nous avions eu le loisir de le faire globalement, nous aurions proposé la motion suivante: "Peuvent recevoir l'enseignement en anglais, à la demande de leur père, de leur mère ou de leur tuteur, les enfants appartenant à la communauté anglophone. Les enfants qui sont déjà inscrits à l'école anglaise peuvent y demeurer s'ils le désirent, les frères et soeurs des enfants qui ont fréquenté l'école anglaise au Québec peuvent s'inscrire à l'école anglaise s'ils le désirent." Eventuellement, sans vouloir produire un livre bleu azuré comme l'Union Nationale — quoique je devrais être plus gentille maintenant que le chef de l'Union Nationale a accordé un appui à la déclaration de principe du Parti libéral, qui a eu lieu à Drummondville il y a déjà quelques mois. Le gouvernement aime aussi savoir vers quoi on se dirige. Ultérieurement donc, nous avons l'intention de présenter un amendement pour des mesures transitoires touchant les allophones de 0 à 5 ans. Si nous n'avons pas de chance avec nos amendements, nous avons l'intention de présenter un amendement qui permettra aux enfants de la communauté anglophone, qui requièrent des mesures pédagogiques particulières, d'avoir accès à l'école anglaise, strictement comme mesure pédagogique.

Ceci dit, l'amendement que nous voulons présenter est le suivant: Que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en remplaçant dans les première et deuxième lignes les mots "dont le père ou la mère a reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais", par les mots "appartenant à la communauté anglophone". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "a) les enfants appartenant à la communauté anglophone,".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour le bénéfice des membres de la commission, et pour que les débats soient mieux compris, comme la motion d'amendement qui a été présentée se rattache à l'article 69a, je suggère donc, parce qu'il pourrait y avoir des amendements à d'autres paragraphes si cette motion est déclarée recevable, que la discussion se fasse sur cet amendement et par la suite, sur un autre amendement, s'il y en a d'autres, et ainsi de suite, de paragraphe en paragraphe, à l'article 69. Car il serait illusoire de penser pouvoir discuter de quatre ou cinq amendements ou motions d'amendements en même temps ou simultanément.

M. Lalonde: C'est pour cela, M. le Président, que nous avons présenté un amendement seulement au sous-paragraphe a), pour la bonne marche des travaux.

M. Biron: M. le Président, je voudrais poser une question au député de L'Acadie. Est-ce que cela veut dire critère de langue maternelle ou langue de fréquentation scolaire, "la communauté anglophone"?

Mme Lavoie-Roux: Je le...

M. Lalonde: Je pense qu'on devrait d'abord laisser déclarer l'amendement recevable et, ensuite, cela nous fera plaisir...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je déclare immédiatement cette motion recevable et...

M. Charron: M. le Président, je m'interroge avant qu'on ne procède au débat que veut entamer le chef de l'Union Nationale. Je m'interroge, à savoir si l'amendement est complet tel que présenté par Mme le député de L'Acadie. J'aimerais qu'on me précise ce qu'est la communauté anglophone. Les enfants appartenant à la communauté anglophone, on n'a rien réglé en disant cela. La question qu'on se pose, c'est: Qu'est-ce que la communauté anglophone? Ceux qui sont de langue maternelle anglaise, ceux qui sont assimilés aux Anglais, ceux qui désirent par une entrevue se déclarer appartenant à la communauté anglophone... Il faudrait peut-être le savoir pour qu'ensuite tous les membres de l'assemblée puissent se prononcer en connaissance de cause. Mais la communauté anglophone, qu'est-ce que c'est?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait, l'amendement tel que rédigé est conforme à notre règlement et est recevable. Il pourra être adopté ou battu, mais à ce stade-ci, il serait peut-être bon que Mme le député de L'Acadie explique le sens de son amendement.

M. Morin (Sauvé): Qu'elle prenne tout le temps qu'il faut, cela va être difficile.

M. Charron: Je soutiens, sur un point de règlement, M. le Président, que...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Charron: ... madame a déjà épuisé son temps de parole sur la motion même. C'est peut-être un de ses collègues, si elle leur fait confiance, qui pourrait nous présenter ce qu'elle veut dire par son amendement. Elle ne peut pas elle-même intervenir sur l'amendement qu'elle présente à la toute fin d'une motion principale.

M. Lalonde: Sur la question de règlement. Je pense que le député de L'Acadie a exprimé son opinion sur l'article 69. Lorsqu'elle a présenté une motion d'amendement, elle a maintenant le droit, en vertu de l'article 160, d'exprimer son opinion sur l'amendement aussi longtemps que le règlement le lui permet, c'est-à-dire vingt minutes. Si elle avait choisi autrement, c'est-à-dire de ne pas discuter de l'article 69 mais de commencer par une motion d'amendement, il est possible que son temps aurait été...

M. Charron: M. le Président, le député a suffisamment d'expérience pour savoir qu'elle aurait pu débuter par son amendement ou alors prendre les vingt minutes pour nous préparer à expliquer son amendement. Mais un député qui intervient sur une motion principale et proposeur d'un amendement n'a plus vingt minutes à nouveau pour parler de son amendement. Madame a choisi de parler sur l'article 69 sans nous prévenir ou nous prévenant de façon peut-être imprécise.

M. Lalonde: Je ne suis pas d'accord sur cela. M. Charron: Le député sait très bien tout cela.

M. Lalonde: La motion d'amendement est un débat différent. Je ne vois pas quel règlement l'empêcherait maintenant de parler, étant donné que c'est un nouveau débat, que c'est une motion différente. La motion sur laquelle le député de L'Acadie s'est exprimée pendant je ne sais pas combien de minutes, c'était la motion peut-être du député de Saint-Jacques ou d'un autre député qui a dit que l'article 69 soit adopté. A ce moment, c'est une motion, elle s'est exprimée pendant quelques minutes, sûrement, et elle a conclu par un amendement qui est tout à fait différent de l'article 69. Alors elle a donc le droit de s'exprimer, d'exprimer son opinion, de tenter de nous convaincre pendant soixante minutes, c'est une motion différente.

M. Charron: Etes-vous prêt à trancher, M. le Président, ou si je dois vous donner d'autres exemples qui affluent dans notre tradition parlementaire?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je considère, M. le député de Saint-Jacques, que la question que vous avez soulevée est extrêmement pertinente et difficile. Si vous pouvez m'éclairer davantage, vous pouvez le faire.

M. Charron: M. le Président, je prends l'exemple — il y en a à la tonne dans la tradition parlementaire — d'un chef de l'Opposition qui intervient...

M. Raynauld: En vertu de quel article du règlement?

M. Charron: 69. Le chef de l'Opposition qui intervient sur une motion peut proposer un amendement à une motion non annoncée, par exemple. Mais avez-vous vu, dans notre tradition parlementaire, par habitude ou par règlement, que le chef qui termine un long discours de deux heures sur le discours inaugural par une motion de blâme, comme c'est la tradition chez nous, a ensuite une heure pour venir nous expliquer, à la fin de ses deux heures, pourquoi il a conclu par une motion de blâme?

Le député de Verdun qui a proposé, en deuxième lecture sur le projet de loi no 101, de retarder à trois mois l'adoption de cette loi, l'a fait en intervenant sur la motion principale, mais n'a pas recouvré par le fait même un droit de réintervenir. Au contraire, lorsque les motions de réintervenir paraissent, elles sont appelées au chapitre des motions de réplique. Mais les droits de réplique n'existent pas en commission parlementaire. Donc, il est évident, il me semble, qu'un député

qui décide de garder le contenu, le libellé de sa motion à la toute fin de son temps de parole de vingt minutes doit — c'est une question de confiance entre membres d'un même parti, j'en conviens — laisser reposer l'argumentation de son amendement sur un ou l'autre collègue en qui il a le plus confiance.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Je vais être très bref. C'est seulement pour vous dire que quand on a un amendement à proposer, c'est qu'on veut être en mesure de discuter, à un moment donné, d'un article amendé qui sera considéré comme article final. En d'autres mots, quand on veut améliorer un article, on propose des amendements.

Si on propose des amendements, c'est qu'on va aboutir, après avoir discuté de ces amendements, avec un article qui ne sera plus amendé parce que plus personne n'aura d'amendement à apporter et c'est sur cet article final que les gens ont à se prononcer, en définitive.

Donc, si le député de L'Acadie propose un amendement pour améliorer cet article 69, si c'est son point de vue, c'est son devoir de le faire dès qu'elle prend la parole pour qu'à la toute fin, quand ces amendements auront été acceptés ou battus, nous nous retrouvions avec un article sur lequel elle puisse se prononcer et peut-être même prendre la parole. Mais elle a un amendement à proposer et elle a pris 20 minutes, avant, pour discuter de l'article dans sa globalité.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une dernière intervention, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Mon collègue en aurait une, avant.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Entendez-vous ensemble.

M. Lalonde: Oui, mais j'ai découvert, dans l'article 160, la source du bien-fondé de la suggestion que je vous fais et je vais le lire. "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi — je passe sur les crédits — un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne parler plus de 20 minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion". Je laisse le reste de l'article.

Lorsqu'on a appelé l'article 69, la motion était à l'effet d'adopter l'article 69. Mme le député de L'Acadie a exprimé son point de vue; donc, il y avait deux motions. Je disais que l'article 160 prévoit un droit de parole de 20 minutes, globalement, pour chaque motion et la première motion sur laquelle le député de L'Acadie s'est exprimée, c'est sur la motion d'adoption de l'article 69.

Là, nous avons une motion différente, une motion d'amendement à l'article 69 qu'elle vient de proposer et l'article 160 lui permet d'exprimer son point de vue pour un maximum de 20 minutes, mais le temps nécessaire. Je propose, M. le Président, que le député de L'Acadie ait encore 20 minutes en vertu de l'article 160.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une dernière intervention, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le député de Saint-Jacques s'est référé à l'article 69, mais l'article 69 commence par les mots "sauf les exceptions prévues au règlement". Une des exceptions nous renvoie à l'article 160. Si le député de L'Acadie n'a pas le droit de parole, vous lui enlevez un droit qu'elle aurait selon le règlement parce que le député de L'Acadie a le droit de parler 20 minutes sur la motion d'adoption de l'article 69. Si c'avait été un autre député qui avait fait une motion d'amendement, le député de L'Acadie aurait encore droit à 20 minutes sur l'amendement à l'article 69. Le fait que ce soit elle qui ait fait l'amendement ne devrait pas lui enlever son droit de parole. Sa première intervention se référait à la motion de l'adoption de l'article 69 et son droit de parole maintenant se réfère à la motion d'amendement; ce sont deux sujets différents.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Depuis deux jours et demi ou trois jours, c'est certainement la question de règlement la plus difficile et la plus importante également, importante puisqu'elle va peut-être régler, en fait, un problème pour le reste de nos travaux.

Il est bien évident que l'article 160 est de mise relativement à cette question de règlement, il faudrait peut-être le lire ensemble. "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi ou des crédits, un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne parler plus de vingt minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion ou une même question d'ordre ou de règlement." Il est bien évident qu'un article de loi peut avoir plusieurs paragraphes et qu'à l'occasion de l'étude de cet article et des paragraphes, plusieurs questions de règlement peuvent être soulevées. Ainsi, théoriquement parlant, un même député pourrait intervenir, sur un même article, si celui-ci a plusieurs Daragraphes et si les paragraphes sont étudiés un à un et s'il y a plusieurs ques-tionsde règlementqui sont soulevées, à chaque fois et avoir 20 minutes sur chaque question de règlement, et ainsi de suite.

L'intervention du député de Bourget et ministre d'Etat au développement culturel s'est terminée par la phrase suivante; M. le Président, je propose donc l'adoption, je fais donc motion pour que l'article 69 soit adopté.

En ce qui me concerne, j'estime que le député de L'Acadie a parlé 16 minutes sur la motion du député de Bourget demandant l'adoption de l'article 69 du projet de loi 101. Ceci, à mon avis, ne l'empêche absolument pas de présenter à la fin de son intervention une nouvelle motion d'amende-

ment. Selon l'interprétation de l'article 160, puisque la motion a été déclarée recevable, j'estime qu'à partir de ce moment, tous les députés membres de cette commission, y compris le député de Bourget et ministre d'Etat au développement culturel, ont le droit d'intervenir, et ce pendant 20 minutes chacun sur cette nouvelle motion qui est une motion d'amendement à celle du député de Bourget.

En conséquence, et compte tenu de l'article 160, j'estime que le député de L'Acadie a employé 16 minutes pour parler sur la motion présentée par le député de Bourget; j'estime qu'elle n'était pas obligée de présenter immédiatement sa motion d'amendement à l'article 69, qu'elle avait le droit d'utiliser 20 minutes sur cette motion et qu'elle avait également le droit, au bout de deux minutes, au bout de dix minutes, au bout de dix-neuf minutes, de présenter la motion d'amendement qu'elle a présentée. En conséquence, je pense être logique avec l'article 160 en estimant que le député de L'Acadie a le droit de présenter cette motion, qu'elle a le droit d'intervenir sur cette motion au même titre que tous les autres députés et qu'une autre période de 20 minutes supplémentaires, pour chaque député, y compris le député de L'Acadie, commence à partir du moment où la motion qu'elle a présentée a été déclarée recevable. C'est dans ce sens que je vois l'article 160.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.

Une Voix: C'est contraire à la pratique qu'on a toujours suivie jusqu'ici.

M. Lalonde: C'est une mauvaise pratique.

M. Charron: Vous savez très bien que ce n'est pas une mauvaise pratique!

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Charron: M. le Président, je voudrais vous demander une directive sur une question de règlement. Si, plutôt que de parler 20 minutes, j'ai envie de parler 40 minutes, je n'ai qu'à proposer un amendement entre la 19ème et la 20ème?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si, par exemple, vous jugez à propos, M. le député de Saint-Jacques, de proposer un sous-amendement...

M. Charron: Non, pas un sous-amendement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...non, mais supposons-le, parce que les sous-amendements sont prévus dans le règlement. En supposant que vous vouliez présenter un sous-amendement à l'amendement proposé par le député de L'Acadie, j'estime que vous pourriez parler 20 minutes sur la motion du député de L'Acadie et, à la fin de votre intervention, présenter un sous-amendement. A partir de ce moment, vous avez 20 minutes pour parler de votre sous-amendement.

M. Charron: Donc, vous me donnez une directive positive, à savoir que si un député veut transgresser habilement le règlement qui le limite, selon l'article 160, à 20 minutes...

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai jamais eu l'intention de faire cela.

M. Charron: Mais non, madame, parce que vous saviez fort bien que c'était irrégulier.

M. Lalonde: Voyons donc, jamais, ces accusations sont fausses.

M. Charron: Donc, il y a un nouveau précédent que vous venez de créer à cette commission, M. le Président, c'est que si un député...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne sais pas si j'ai...

M. Charron: Moi, je vous assure que je n'ai jamais eu pareille directive...

M. Lalonde: M. le Président, votre décision est-elle rendue?

M. Charron: C'est une directive que je demande. Je ne conteste pas la décision du Président, j'essaye avec lui d'en mesurer toutes les conséquences pour chacun des membres de la commission, pour que cette fois cette question dont semble se réjouir le député de Marguerite-Bourgeoys soit claire aux yeux de tous. Donc, un député peut étirer son droit de parole par une motion non annoncée, au milieu ou à la fin de son intervention et se regagner un nouveau droit de parole.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si on lit l'article 160, en résumé, un député pourrait théoriquement, comme je l'ai dit, intervenir huit fois s'il y a trois paragraphes étudiés séparément et s'il y a cinq questions de règlement, et si à chaque motion d'amendement il y a des motions de sous-amendement, le droit de parole de chaque député recommence à 20 minutes, si l'on lit à la lettre l'article 160, qui dit qu'un député peut parler 20 minutes sur un même paragraphe — un paragraphe cela présuppose que des paragraphes peuvent être étudiés séparément — une même motion, ce qui veut dire que s'il y a des motions différentes. Le droit de parler 20 minutes recommence à chaque motion différente, et lorsqu'on parle de motion, on peut parler de sous-amendements, ce qui veut dire que théoriquement, s'il y avait cinq amendements et dix motions de sous-amendement, chaque député pourrait avoir le droit, non seulement pourrait mais aurait le droit de parler 20 minutes, et c'est... Ce n'est pas la première fois que j'ai l'occasion de lire l'article 160, même si c'est la première fois que j'ai à trancher un cas semblable. J'estime, avec vous, M. le député de Saint-Jacques, qu'un député qui veut se servir, de façon dilatoire et de façon très habile et

très subtile, de l'article 160, pourrait, à toutes fins pratiques, avec des amendements et des sous-amendements dilatoires — évidemment je ne qualifie pas actuellement les amendements qui sont ici — avoir un droit de parole de beaucoup supérieur à 20 minutes parce que les 20 minutes sont toujours sur une même motion, un même article ou un même paragraphe, comme le dit l'article 160. De cette façon, s'il y a plusieurs paragraphes, vous avez plusieurs 20 minutes.

S'il y a plusieurs motions, vous avez plusieurs vingt minutes, et s'il y a plusieurs sous-amendements, vous avez d'autant plus de vingt minutes. C'est l'interprétation de l'article 160. M. le député de Saint-Jacques, je n'ai pas tous les précédents de l'Assemblée nationale en ma possession. Je maintiens cette décision, et j'en prends toute la responsabilité tout en vous avouant que ce n'est pas la première fois que j'ai des problèmes d'interprétation avec l'article 160. M. le député de Mont-Royal a déjà eu une de mes décisions venant à l'encontre de ses opinions sur l'article 160, mais je dois dire que la décision que j'ai rendue à ce moment-là était conforme et en toute logique avec celle que je viens de rendre aujourd'hui sur l'interprétation de l'article 160. C'est dans ce sens que je déclare que le député de L'Acadie a présenté une motion d'amendement et que, comme l'article 160 parle d'une même motion et puisqu'il s'agit d'une motion différente, de nouvelles périodes de vingt minutes viennent de naître pour le député de L'Acadie et pour chaque député.

M. Ciaccia: D'ailleurs, M. le Président, seulement pour confirmer ce que vous venez de dire, c'est que c'est seulement avec cette interprétation de l'article 160 que le Parti québécois a pu rester deux semaines sur l'article 1 en 1974.

M. Morin (Sauvé): Non jamais, au contraire, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Votre remarque est déplacée, M. le député de Mont-Royal.

M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas le cas, si nous avions pu utiliser une décision comme celle que vous venez de rendre, M. le Président, en 1974, je pense que ce n'est pas une semaine que nous aurions tenu, c'est un mois.

M. Lalonde: M. le Président, l'article 43, sur les questions d'ordre et de règlement, vous permet de mettre fin au débat, avant les vingt minutes.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, je pense que, compte tenu de l'importance de la question, il est important... Je ne demande pas évidemment à tout le monde d'accepter cette décision, mais je sais que tout le monde la respecte. Elle est faite en toute objectivité et selon la compréhension personnelle de l'article 160 sur lequel j'ai déjà eu à rendre des décisions et, en conséquence, évidemment, ce que j'ai dit s'applique à tous les députés de cette commission. Je cède la parole au député de L'Acadie.

M. Lalonde: Si le député de L'Acadie me permet avant, simplement pour réagir aux propos du député de Saint-Jacques, nous n'avons pas l'intention d'utiliser votre décision pour allonger les débats, au contraire, sauf qu'il m'apparaît tout à fait dans l'ordre que celui ou celle qui présente une motion ait le loisir de l'expliquer et de la défendre.

Mme La voie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord, au préalable, rassurer le député de Saint-Jacques. Je pense également que cela permettra de clarifier certaines autres hypothèses qui ont été soulevées au cours des derniers jours. Hier soir, j'entendais le député de Saint-Jacques qui s'inquiétait à savoir comment j'allais réconcilier ce qui avait été ma position à titre de présidente de la CECM avec la position linguistique de mon parti.

Je voudrais rappeler ici — je le citerai — alors que je présidais cet organisme. J'ai eu l'occasion d'en parler hier ou ce matin et, à ce moment-là, je présentais en commission parlementaire un rapport que je cite: "De l'avis de la commission, il est essentiel et urgent que l'Etat accorde un statut prioritaire au français dans le domaine de l'enseignement". "A notre avis, accorder priorité au français, c'est adopter des mesures appuyant concrètement le principe selon lequel la langue d'enseignement est le français". Je pense que, ce matin, l'article 68 soulignait ce que nous avons fait. On ajoutait: "Ce principe doit toutefois souffrir un tempérament important à l'égard des anglophones qui ont droit à leur culture et à leurs écoles. Par anglophones, la commission entend des personnes issues de familles d'expression anglaise ou des personnes de quelque nationalité ou provenance qu'elles soient ayant acquis la culture anglaise."

Ceci, sans aucun droute, demeure ma position et je pense qu'elle demeure au niveau des principes la position de l'Opposition officielle.

On m'a demandé tout à l'heure — je pense que c'est tout à fait légitime — ce que nous entendions par "enfants qui appartenaient à la communauté anglophone". Pour nous, les enfants qui appartiennent à la communauté anglophone sont d'abord des enfants dont la langue maternelle et la culture des parents sont anglaises et qui, partant, parlent l'anglais et sont anglophones, et également les enfants des familles qui ne sont pas nécessairement de langue maternelle et de culture anglaises mais qui, au fil des années, par des circonstances — qu'on les appelle des circonstances de travail, sociales ou autres — se sont intégrés à cette communauté anglophone et dont les enfants parlent également l'anglais et sont intégrés à cette communauté anglophone.

Je pense que, pour nous — je l'ai dit il y a déjà très longtemps — certains soulèvent des difficultés quant à cette question d'appartenance à la communauté anglophone. C'est strictement pour pouvoir y intégrer non seulement, comme je viens de le dire, ceux qui sont de langue maternelle et de culture anglaises par la naissance, mais également ceux qui s'y sont intégrés. Je pense qu'évidemment, si on veut faire des obstacles, créer des

difficultés, on dit: Est-ce que j'appartiens à la communauté anglophone oui ou non? Je pense qu'avec toutes les statistiques qu'on nous a servies pour nous démontrer qui était la minorité anglophone et qui ne l'était pas, ce n'est quand même pas un argument, je pense, qui résiste très longtemps à l'analyse.

Une autre raison pour supporter cette notion de respect de la communauté anglophone réside, d'abord, au plan historique, sur le fait — ceci a été signalé à d'autres reprises — que la communauté anglophone est partie du Québec depuis au-delà de 200 ans et qu'elle y a contribué au plan social, au plan culturel et dans toutes les autres sphères d'activités et qu'elle peut se réclamer, à ce titre — et je pense que même le gouvernement, dans ce sens, l'a reconnu, au moins dans le livre blanc — elle peut se réclamer de droits historiques dont je pense, d'autres communautés ou d'autres minorités ne peuvent se réclamer au même titre. D'ailleurs, c'est un peu la même chose dans le reste du Canada parce que je pense que si, à Toronto, vous prenez les statistiques touchant les Italiens, même si les Italiens sont probablement plus nombreux non seulement à Toronto, mais dans l'ensemble de l'Ontario que les francophones, on n'a pas d'écoles pour les Italiens. On a, par contre, des écoles pour les francophones parce que, historiquement, les deux communautés font partie de l'héritage canadien et font partie de l'héritage du Québec.

Depuis longtemps, j'ai dû interpréter, et probablement bien avant plusieurs de ceux qui sont assis autour de cette table, que ce désir du Québec d'être français et de protéger son équilibre démographique nous semblait prioritaire. Il nous semblait également important d'assurer à la communauté anglophone, à cause de ces droits historiques qu'elle avait acquis, que nous ferions tous les efforts pour qu'on la respecte et aussi toutes ses institutions qui viennent soutenir cette culture. Je pense que ce qui est prévu à l'article 69, aux fins de restreindre, par exemple, au Québec, cet accès à l'école anglophone, d'une part, pour nous, ne respecte pas cette page de l'histoire ou cette partie de l'histoire et va créer, je pense, de la discrimination entre des citoyens qui partagent la même langue et la même culture.

J'aimerais ici citer le Conseil supérieur de l'éducation qui disait que, du fait que, d'abord, "le groupe anglais était un élément fondateur important du Québec, il était naturel que, dès lors, un anglophone, d'où qu'il vienne, se joigne au groupe culturel qu'il trouve ici et avec lequel il se reconnaît.

D'autre part, si l'existence de la communauté anglophone est admise, elle doit pouvoir maintenir des rapports normaux de perméabilité et d'échange avec l'extérieur et accueillir les nouveaux venus qui sont de sa culture.

En dépit de tous les chiffres dont nous a fait part le ministre d'Etat au développement culturel, chiffres qui, nous le savons, ont soulevé de nombreux conflits, nous ne croyons pas — et d'autres auront l'occasion de s'exprimer sur le sujet — que de protéger et de permettre l'accès à l'école anglaise à tous les membres de cette communauté anglophone constitue un danger au déséquilibre démographique. Il faut dire que, lorsque ce débat a commencé, le problème qui a été soulevé était l'intégration massive des allophones à l'école anglaise, particulièrement depuis la deuxième guerre, et d'un certain nombre de francophones. L'autre jour, en discours de deuxième lecture, avec chiffres à l'appui, j'ai prouvé que les allophones qui arrivent au Québec s'intègrent maintenant, par le truchement des classes d'accueil, en quasi-totalité aux classes françaises ou aux écoles françaises.

J'ai même indiqué que, déjà, même si le délai a été court — à peu près deux ans — on le ressentait dans la distribution linguistique des deux secteurs de la CECM. J'ai mentionné la Commission des écoles catholiques de Montréal. Tout le monde sait que c'est là que le problème s'est fait sentir de la façon la plus aiguë, mais il y a un autre facteur qui m'apparaît extrêmement important. Jusqu'ici, que l'on permette à des enfants de langue maternelle et de culture anglaises, qu'ils le soient par la naissance ou qu'ils aient acquis la langue anglaise par la suite, de profiter d'un régime pédagogique qui est celui de leur langue maternelle, quand ce régime pédagogique existe ou quand ce système scolaire existe...

Je pense qu'on n'a pas besoin de démontrer à qui que ce soit qu'il est toujours difficile pour quelqu'un de faire des apprentissages dans d'autres langues. Pour les immigrants on sait fort bien les retards pédagogiques que cela cause. Pour les immigrants allophones, je pense que le problème ne se pose pas de la même façon puisqu'ils auront de toute façon à faire le choix, ils auront de toute façon à faire des apprentissages, soit en français, soit en anglais. Ils auront à subir ces inconvénients. Mais de refuser à des enfants qui sont déjà de langue et de culture anglaises, si tel est le désir des parents, de pouvoir fréquenter l'école anglaise, cela me semble tout à fait injustifié sur le plan pédagogique. On sait fort bien que pour certains enfants, il est inutile de multiplier ces difficultés pédagogiques, surtout si le système scolaire leur permet d'aller à l'école anglaise.

Un autre point que je voudrais soulever... Des articles ont paru, à savoir que même en l'an 2000, si on permettait le libre choix — je ne veux pas par là laisser entendre qu'on devrait revenir au libre choix, je l'ai exprimé au début— la communauté anglophone ou la population des écoles anglophones se maintiendrait à peine, même dans une option de libre choix.

Dans l'amendement que nous proposons, il n'est pas question de libre choix. Il est clair que ceci restreint le choix et, en aucune façon, ne risque de déséquilibrer la distribution démographique de la population scolaire. J'ai trouvé tout à fait intéressant — d'ailleurs, je le soupçonnais depuis longtemps — l'aveu du ministre d'Etat au développement culturel. Je le comprends et je sais que c'est là une de ses difficultés. Selon le critère qu'on a retenu, si on devait ouvrir au Canada et à l'ensemble des autres pays où l'anglais est la lan-

gue d'usage, la langue officielle, je comprends fort bien qu'il y aurait des difficultés très sérieuses à obtenir les preuves d'études primaires en anglais à l'élémentaire... Non seulement cela, mais on risquerait aussi d'ouvrir une digue extrêmement considérable, parce que le critère en lui-même est assez large et moins contrôlable.

Pour toutes ces raisons, à ce moment-ci, je veux quand même me garder quelques minutes. Non, je ne veux pas tout à fait terminer ici. On me dira: Mais de quelle façon déterminerez-vous les critères d'appartenance, etc.? Je pense que ce sont là des questions qui doivent être examinées et qui présentent des difficultés. Plusieurs ont déjà été suggérées à partir du recensement, de fiches d'inscription appropriées, le critère retenu par le gouvernement serait aussi un indice intéressant qui pourrait être ajouté à d'autres indices. Je pense, également, à certains moyens que le Conseil supérieur de l'éducation menait de l'avant quant aux données du registre de la population au ministère des Affaires sociales qui, depuis 1974, enregistre la langue maternelle des enfants. On me dira: Oui, mais quelle sera la véracité de ce que les gens déclareront? Je leur soulève le même problème. Comment allez-vous vérifier la véracité des attestations qui seront apportées par les parents de pays extérieurs au Québec présentement, de commissions scolaires où les archives sont disparues, d'écoles qui sont passées au feu? Je pense que l'exemple le plus frappant est l'école St. Patrick, qui est une vieille école de Montréal qui a dû accueillir nombre d'enfants anglophones. Je ne suis pas certaine que vous n'aurez pas beaucoup plus de diplômés de l'école St. Patrick que le nombre d'enfants qui y sont vraiment passés.

Ce sont des difficultés d'ordre pratique et vous apportez, comme réponse finale, que le fonctionnaire ou le directeur général ou quelqu'un décidera en dernier lieu de l'attestation que le parent soumettra. Je pense que ces difficultés demeurent aussi considérables, sinon plus, sans parler des difficultés que vont apporter la tenue des registres qui vont assurer à la descendance des parents ayant fréquenté l'école élémentaire en anglais le droit à l'école anglaise pour que ceci soit maintenu d'une génération à l'autre. Je voudrais juste, en terminant, montrer encore la faiblesse du critère retenu par le gouvernement. Sera-t-il possible, pour un francophone, de retenir pendant plusieurs générations, même s'il ne s'en prévaut pas, ce droit à l'école anglaise? Ceci démontre bien la fragilité de ce critère.

Si ce critère d'appartenance à la communauté anglophone était uniquement celui du Parti libéral, on pourrait dire que c'est une lubie qu'il a. Mais je pense que c'est un critère admis par nombre d'autres organismes qui sont venus ici, devant la commission parlementaire. Je mentionnerai le Conseil supérieur de l'éducation, la Fédération des principaux du Québec, qui ne lui donnaient pas l'extension à l'extérieur du Québec — je l'admettrai — ils la lui donnaient à l'intérieur du Canada, mais qui voyaient ce critère comme étant un critère beaucoup plus juste, beaucoup plus équitable, pouvant répondre aux besoins pédagogi- ques des enfants d'une façon beaucoup plus adéquate que celui qui est présentement mis de l'avant par le gouvernement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, Mme le député de L'Acadie.

M. Biron: M. le Président, je vais laisser la parole au député d'Outremont qui a...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, la motion a été déclarée recevable.

M. Biron: ... qui doit quitter plus tôt pour Montréal. Alors que je suis disponible toute la soirée et j'interviendrai après. Mais avant, je voudrais tout simplement savoir, et finalement je vais mieux me préparer à vous répondre: l'appartenance à la communauté anglophone, comment déterminez-vous cela? Et qui détermine que j'appartiens ou pas à la communauté anglophone?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Madame...

Mme Lavoie-Roux: Appartenez-vous à la communauté anglophone ou si vous appartenez à la communauté francophone, M...?

M. Biron: Comment déterminez-vous cela? C'est ce que je veux savoir.

M. Lalonde: ... de la déclaration.

M. Morin (Sauvé): C'est le libre choix.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Vous ne faites pas confiance aux gens.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le député de L'Acadie, si vous voulez répondre à la question sur votre temps, il vous reste deux minutes sur votre motion.

Mme Lavoie-Roux: Non, je ne réponds pas.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Lotbinière, vous cédez votre droit de parole au député d'Outremont?

Mme Lavoie-Roux: Je veux garder mes quatre minutes, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: Merci, M. le Président, merci, M. le député et chef de l'Union Nationale.

Une Voix: Cela prend du temps à s'ajuster. M. Lalonde: On peut être gentil, mais...

M. Biron: ... à contribution.

M. Raynauld: Je veux simplement reconnaître que le chef de l'Union Nationale me donne l'occasion de parler avant lui et je l'apprécie.

J'ai tenu à intervenir sur ce sujet, parce que le problème est très important, il est fondamental, il est, en grande partie, fonction d'une perception qu'on peut avoir sur l'évolution de la communauté francophone, sur l'évolution de cette communauté anglophone au Québec et tout particulièrement à Montréal. Il me semble que cette perception devrait être fortement orientée et influencée par les faits, par les statistiques que nous avons sur l'évolution respective des communautés en cause.

Auparavant, je voudrais mentionner que, si je suis favorable à ce critère qui est proposé de reconnaître l'accès à l'école anglaise à la communauté anglophone, c'est qu'il me semble, à mes yeux, au départ, qu'il s'agit d'une question de justice. Non pas d'une justice absolue, mais d'une justice comme celle que nous avons cru avoir, nous les Canadiens français au Canada, depuis 200 ans. Nous nous sommes, en effet, battus pour avoir l'accès à des écoles françaises, nous avons maintenu des institutions au Canada, souvent contre l'avis des gouvernements que nous avions. C'est cette même justice que je réclame pour les anglophones. Encore une fois, pas cette justice absolue, parce que cela n'existe pas, malheureusement, mais la même justice que celle dont nous nous sommes réclamés nous-mêmes pour obtenir cet accès à l'école française.

Je dirai aussi que je suis favorable à cet amendement qui est proposé par réalisme et par intérêt pour la communauté francophone dans son ensemble. Je pense que la communauté anglophone exerce un certain rôle dans notre société. Ce rôle ne doit pas être contraint suivant des règles que le gouvernement du Québec établit car il est extrêmement positif. J'ai essayé de montrer cela dans le discours de deuxième lecture sur le projet de loi no 101.

Ceci dit, je voudrais examiner très brièvement avec vous les facteurs qui sont susceptibles d'influencer notre perception des choses quant au danger qu'il y aurait ou danger qui n'existe pas d'une certaine assimilation qu'on traduit en chiffres statistiques d'habitude par une proportion de francophones qui baisserait dans la population totale au Québec. On associe en effet cette proportion, qui est une proportion statistique, souvent à un danger d'assimilation et non sans raison. Si la capacité d'une langue à absorber et à intégrer des gens est déterminée par un grand nombre de facteurs, le premier c'est encore la densité de cette population. Donc, il est important de conserver cette densité de la population francophone au Québec, si cette communauté doit grandir et s'épanouir.

Quels sont ces facteurs qui déterminent cette proportion de francophones et ce danger d'assimilation des francophones au Québec? Il y a trois facteurs qui sont reconnus par tout le monde, la fécondité, c'est-à-dire l'accroissement naturel de la population...

M. Fallu: Une question de règlement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: J'aimerais bien qu'on nous parle de la fécondité, ce serait d'ailleurs un très bel après-midi pour en parler puisqu'il pleut. Mais il s'agit de parler sur l'amendement.

J'aimerais bien qu'on me parle de l'appartenance, du sentiment d'appartenance, de la définition d'une communauté, la définition d'une communauté anglophone et la justification de l'appartenance à la communauté anglophone comme étant un amendement à l'article 69.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait...

M. Raynauld: Est-ce que je peux parler sur une question...

M. Lalonde: Question de règlement. Sur la question de règlement, la motion d'amendement a pour effet de permettre à un enfant qui appartient à la communauté anglophone l'accès à l'école anglaise. De là, l'argumentation du député d'Outremont voulant que ce n'est pas un danger d'assimilation. Tous ses arguments, fort intéressants — je l'écoutais avec beaucoup d'intérêt — je pense, sont tout à fait pertinents pour éclairer les membres de cette commission.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce que je dirai, en résumé, c'est que nous avons une motion d'amendement proposée par le député de L'Acadie. Il faudrait que tous les députés fassent des efforts pour parler de l'amendement et non pas de l'article 69 en général. On doit parler de l'amendement proposé à l'article 69a qui se lit ainsi: "les enfants appartenant à la communauté anglophone".

M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Pour le bénéfice de mon collègue d'en face, puisqu'il n'a pas compris, je vais lui expliquer dès maintenant le sens et la portée des données que je veux présenter sur la fécondité, l'immigration et les transferts. Je veux essayer de lui démontrer et de démontrer à tout le monde que si on acceptait cet amendement, si on donnait accès à l'école anglaise à la communauté anglophone, on ne mettrait pas en péril la survie de la communauté francophone au Québec. Je pense que c'est tout à fait pertinent à l'amendement.

Ceci dit, parmi ces trois facteurs qui déterminent l'accroissement des communautés, la fécondité, l'immigration et les transferts linguistiques, je ne dirai qu'un mot sur la fécondité. Comme on le sait, du côté francophone, les taux de naissance ont diminué de façon brutale depuis le début des années soixante; pour moi, c'est l'une des raisons fondamentales pour lesquelles on a commencé à craindre, en général, au Québec, pour la survie de la communauté francophone. Ces taux de fécondité sont à peu près équivalents aujourd'hui chez

une communauté anglophone, allophone ou francophone au Québec, de sorte que ce facteur n'est pas un facteur déterminant très important.

Je dirai cependant, en ce qui concerne les francophones, qu'il y a beaucoup de démographes qui croient que ce taux de fécondité va se relever dans les années à venir, pour toutes sortes de raisons sur lesquelles je ne m'étendrai pas.

M. Morin (Sauvé): Vous ne vous étendrez pas là-dessus?

M. Raynauld: Non. C'est déjà assez long, ce que j'ai à dire, M. le ministre. Décidément, la fécondité énerve les gens. Il n'y a pas beaucoup de gens féconds; on dirait qu'ils se sentent attaqués!

En tout cas, le taux d'accroissement naturel de la communauté francophone au Québec a des chances d'augmenter plus rapidement; ce taux d'accroissement a des chances d'être plus élevé à l'avenir qu'il ne l'est à l'heure actuelle. Ceci serait un facteur positif.

Venons-en maintenant aux deux autres facteurs qui ont été les plus discutés récemment, celui de l'immigration, entre autres. Là où cette question d'immigration est pertinente, c'est évidemment que s'il y avait un afflux considérable de gens de langue anglaise ou de gens qui adopteraient l'anglais à l'avenir, ils pourraient, par leur nombre, en arriver à supplanter les francophones au Québec. Il est important de savoir si ces migrations se soldent finalement par des entrées ou des sorties, par un afflux de gens de langue non française ou si, au contraire, il s'agit de sorties.

Statistique Canada a récemment publié des statistiques qui se rapportent à la période de 1961 à 1976, donc quinze ans. Ceci répond à l'une des objections qui avaient été faites auparavant suivant lesquelles on avait des séries trop courtes. Sur une base de quinze ans, ce que nous savons de façon certaine, dans la mesure où on peut être certain, c'est qu'au total on a eu une immigration nette d'origine internationale de 151 000 personnes pendant ces quinze ans; on a eu des sorties nettes interprovinciales de 220 000 personnes, ce qui a laissé un solde négatif de 68 789 personnes qui, sur une base nette, ont quitté la province de Québec en seize ans. Donc, il n'est pas question d'afflux. C'est vrai qu'il y a des gens qui entrent, mais il y en a plus qui sortent. Par conséquent, on ne peut pas invoquer cet argument pour dire que c'est l'immigration qui va être la cause d'un rétrécissement relatif de la communauté francophone au profit des anglophones ou des gens parlant d'autres langues au Québec.

Si on essaie de répartir, maintenant, les migrations que nous avons connues suivant la langue — parce que cela aussi est important — suivant la langue française, anglaise ou autre, on voit que, si l'on fait l'hypothèse que 1966 à 1971 est une période représentative pour l'ensemble des quinze ans, on voit là encore que les sorties nettes de 68 000 se répartissent comme suit. Il y a eu, en fait, de 1961-1962 à 1975-1976, 180 000 anglophones qui sont sortis; il y a eu à peu près autant de francophones entrés que de sortis; donc, un bilan égal à zéro et, enfin, il y a eu une sortie de 40 969 gens d'autres langues. Donc, on voit que ce ne sont pas les francophones surtout qui quittent la province de Québec, ce sont des anglophones ou des gens d'autres langues.

Là encore, on ne peut pas invoquer cet argument pour craindre ou pour susciter des craintes selon lesquelles le Québec s'angliciserait.

En ce qui concerne maintenant les transferts linguistiques je l'ai mentionné dans ce discours et je veux simplement dire un mot là-dessus puisque je l'ai déjà dit suivant le recensement de 1971, il y a eu des gains du français de 52 000 personnes; il y a eu des pertes, des francophones qui ont adopté l'anglais comme langue d'usage, de 46 000 et il y a eu des pertes en faveur de l'anglais de 76 000 provenant des allophones qui ont adopté l'anglais comme langue d'usage. Ce que je veux faire ici comme raisonnement, c'est simplement que, si le problème des gens dont la langue maternelle n'est ni le français ni l'anglais est réglé en faveur du français comme ce l'est en vertu de la loi actuelle et comme ce le serait en vertu du projet de loi 101, il n'y aurait aucun danger, les transferts linguistiques, en fait, seraient en faveur du français et non pas de l'anglais.

Venons-en enfin à la clientèle scolaire. Là aussi, on a essayé d'établir des soldes d'entrées et de sorties d'enfants, soit sur le plan international ou interprovincial, pour essayer de démontrer que la clientèle des écoles anglaises, à Montréal en particulier, augmenterait, donc que la proportion des élèves du Québec augmenterait dans les écoles anglaises. Ici encore, j'ai des statistiques qui sont très révélatrices. Si on prend la clientèle scolaire, le bilan migratoire interprovincial de la clientèle scolaire pour les quinze dernières années, on voit que les enfants anglophones ne sont pas entrés dans des écoles anglaises dans la province de Québec, sur une base nette, mais sont sortis. Il en est sorti 2603 sur une base annuelle; les francophones, entrées 219, et il serait sorti 410 enfants d'autres langues. Là encore, sur le plan de la clientèle scolaire, des enfants d'âge scolaire, il y a eu plus de sorties que d'entrées; par conséquent, il est impossible d'imaginer que cette clientèle scolaire serait à l'avenir plus favorable aux écoles anglaises qu'aux écoles françaises, si on s'en tient à ces tendances passées.

Si on remarque, cela est un bilan migratoire interprovincial. Il faudrait aussi examiner combien d'enfants viennent de l'étranger. Des enfants d'âge scolaire de langue anglaise qui viennent de l'étranger dans une année au Québec, je ne sais pas si vous savez quel est ce chiffre. J'ai été Jrès surpris quand je l'ai appris; c'est 1470 par année. Il y a 1470 enfants d'âge scolaire qui entrent par année et qui sont de langue maternelle anglaise. Cela est la moyenne pour la période de 1971 à 1976.

Pense-t-on que c'est avec des chiffres comme ceux-là qu'on va mettre en danger la survie de la communauté francophone lorsqu'on sait qu'en 1975, il y avait 1 459 500 enfants au Québec qui

étaient inscrits à l'école, 1 500 000, et il en vient 1470 de l'étranger et j'ai dit que, sur le plan des migrations interprovinciales, le bilan était négatif, il en sortait plus qu'il n'en entrait. Donc, il ne peut pas y avoir d'afflux massif d'enfants d'âge scolaire dans les écoles anglaises de la province de Québec.

Je terminerai avec un seul autre petit chiffre. Si on oublie que des enfants sortent du Québec et qu'on prend juste les entrées en provenance des autres provinces — seulement les entrées des enfants des autres provinces pour la période de 1971-1976, il en est entré 5229 de langue maternelle anglaise — peut-on savoir ce que cela représente comme proportion de l'ensemble des élèves inscrits dans les écoles du Québec?

Sur 1,459 million, cela veut dire 36 sur 10 000; cela veut dire 3,6 sur 1000 et cela veut dire 0,3, soit le tiers de 1% des enfants qui sont dans les écoles, qui proviennent chaque année de l'extérieur du Québec et qui parlent anglais.

Je pense que ces chiffres sont absolument dérisoires, M. le Président et qu'il n'y a aucune espèce de raison pour laquelle on devrait manquer à des considérations qu'on pourrait avoir, par ailleurs, de justice ou de réalisme et qui pourraient nous faire refuser d'élargir la portée de la clause actuelle du bill 101, suivant l'article 69, et d'adopter l'amendement proposé par l'Opposition libérale. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député d'Outremont. Avant de céder la parole au député de Lotbinière, pour compléter un peu la décision que j'ai rendue tout à l'heure, j'aimerais vous lire un passage où des directives ont été données aux présidents de commission relativement à l'interprétation de l'article 160.

L'auteur, Erskine May, 19e édition, aux pages 720 et 721, explique, pour l'exercice financier 1975/76 à Londres, que l'estimation des dépenses pouvait faire l'objet de 166 votes à l'intérieur de 17 départements. C'est donc dire que le droit de parole pouvait échoir aux parlementaires en 166 occasions. Ces 166 votes correspondent en somme aux 173 programmes qui contient le budget des dépenses du Québec pour l'année 1977/78. Nous sommes déjà très généreux au Québec en étendant ces occasions de parler pendant vingt minutes à chaque député, à chacun des trois, quatre, cinq ou six éléments que contient chacun des 173 programmes de notre cahier. Je fais référence à l'article 160 où on parle d'une commission qui étudie un projet de loi ou des crédits.

Par assimilation... à la commission parlementaire qui étudie des crédits, on peut parler pendant vingt minutes sur chacun des éléments qui composent un programme. Un député pourrait donc intervenir quatre fois vingt minutes sur un programme qui contient quatre éléments et si les 173 contiennent chaque élément... Il pourrait, en vertu de l'article 160 et en vertu des directives qu'on nous a données, parler vingt minutes aux 173 programmes et à chaque élément.

M. Charron: M. le Président, si vous me le permettez, j'ai à nouveau deux questions de règlement. Puisque vous l'avez fait vous-même, l'explication que vous venez de donner n'est absolument pas contestée et, à mon avis, ne fait pas l'objet du litige que vous avez été appelé à trancher tout à l'heure. La question n'était pas que nous discutions qu'on puisse avoir vingt minutes par article, par paragraphe ou par élément de crédit, c'était une question de principe, à savoir si un proposeur d'un amendement pouvait, à la suite, revenir pour argumenter lui-même, sur son amendement. A cet effet, je vous rappellerai l'existence de l'article 163 qui dit que les règles relatives aux débats à l'Assemblée nationale s'appliquent mutatis mutandis. Je soutiens, avec les quelques années d'expérience que j'ai et que le député de Marguerite-Bourgeoys peut avoir également, pas aussi nombreuses que les miennes, mais sûrement bien utilisées aussi, que jamais à l'Assemblée nationale un proposeur d'amendement ne récupère... Je ne l'ai pas vu récupérer un droit de parole d'intervention à la défense de son propre amendement. C'est ce point qui est en litige.

L'article 4 de notre règlement, qui nous rappelle que les traditions à l'Assemblée ou les usages à l'Assemblée ont valeur constitutionnelle, si vous voulez, est aussi important dans ce cas. Je n'ai jamais assisté à pareille décision.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je dois vous dire, M. le député de Saint-Jacques, qu'effectivement je n'ai pas rendu la décision dans ce sens. Je pense qu'on se comprend sur l'interprétation de l'article 160. Je n'ai absolument pas saisi si c'était le sens de votre intervention et je n'ai pas statué sur la question de règlement que vous venez de soulever.

Ce que j'ai décidé tout à l'heure, c'était tout simplement l'interprétation de l'article 160, à savoir que chaque député pouvait intervenir vingt minutes sur chaque motion, sur chaque question de règlement et sur chaque article ou chaque paragraphe, mais en aucun moment, je ne veux que cette décision ne soit interprétée dans ce sens que Mme le député de L'Acadie pouvait immédiatement, après cette motion d'amendement, prendre la parole.

En aucun moment je n'ai eu à réfléchir et à statuer là-dessus. Si le sens de votre question de règlement, c'était cela, je m'en excuse, mais le sens de mon jugement, c'était d'interpréter l'article 160 de la façon dont je l'ai fait.

Mais, en aucun moment je n'ai interprété ou je n'ai pensé avoir à rendre une décision sur l'opportunité pour Mme le député de L'Acadie de prendre la parole en premier, en deuxième ou en troisième lieu.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'explique le sens de la décision qui a été rendue.

M. Lalonde: ... puisque le député de Saint-Jacques a gentiment fait référence à ma courte expérience à l'Assemblée nationale, je voudrais

d'abord dire que, pour ma part, je ne fais pas référence à mon expérience pour tenter d'interpréter l'article 163 ou 160, simplement au règlement. L'article 163 dit: A moins de dispositions contraires, les règles relatives à l'Assemblée s'appliquent aux commissions. L'article 160 fait référence aux commissions particulièrement... Les usages de l'Assemblée nationale sont sûrement applicables, mais pas dans le cas de l'article 160.

M. Charron: Est-ce que le député convient que l'usage à l'Assemblée nationale est qu'un proposeur d'amendement ne récupère pas un droit d'intervention...

M. Lalonde: Je ne voudrais pas donner d'opinion juridique. Je crois que oui, mais l'article 160 dit: Lorsqu'une commission — je ne parle pas de l'Assemblée nationale — c'est exceptionnel à l'article 163.

M. Charron: L'article 163 se situe dans le chapitre qui vise les travaux de la commission. Il n'a pas été placé là inutilement.

M. Lalonde: Oui, mais à moins de dispositions contraires. C'est tout à fait clair, M. le Président. Vous avez certainement raison.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De toute façon, ce que j'avais dit, c'est que j'avais interprété l'article 160...

M. Lalonde: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... et, en aucun moment... Et si la question m'était posée lors de travaux supplémentaires, cette question, qui vient d'être soulevée, à savoir, en fait...

M. Lalonde: Cela, c'est autre chose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... qui doit parler le premier, à ce moment-là j'aurai à rendre une décision, mais dans mon esprit à moi — j'aimerais être bien compris — en aucun moment je n'ai statué là-dessus.

M. Charron: Bien!

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Lotbinière, sur la motion d'amendement.

M. Biron:... rapidement la motion... Sur la motion d'amendement du député de L'Acadie. Si nous adoptions cet amendement, cette motion telle que rédigée, cela voudrait dire que les alinéas b), c) et d) de l'article 69 n'auraient plus leur raison d'être. Or, je voudrais expliquer ici clairement que je rejoins le souci du député de L'Acadie, exprimé dans sa motion d'amendement, c'est-à-dire reconnaître en fait — pour les écoles — qu'ici, au Québec, nous avons une communauté anglophone et reconnaître des droits à cette communauté anglophone. C'est une question de principe. Je crois que le député de L'Acadie a voulu nous faire accepter... Or, la communauté anglophone, si elle existe véritablement au Québec, a le droit à ses propres institutions et, spécialement au niveau de l'enseignement, cette communauté anglophone a le droit d'avoir ses écoles.

Mais la question qu'il faut se poser en fonction de l'article 69, c'est: Comment va-t-on déterminer l'appartenance d'une personne à la communauté anglophone? C'est ça qu'est la question. Sur la question de principe, bien sûr, je suis d'accord avec le député de L'Acadie, mais il y a plusieurs façons de déterminer l'appartenance à une communauté. Il y a peut-être les tests qu'on a connus dans le passé ou d'autres sortes de tests, mais que les gens refusent maintenant, parce qu'on dit: C'est inhumain, des tests. Il y a la langue maternelle, mais comment va-t-on faire pour déterminer la langue maternelle? Quels sont les critères? Encore une fois, il va y avoir des tests. Il y a la fréquentation scolaire qui, à mon point de vue, est le moins mauvais des critères.

Chaque personne va-t-elle dire: J'appartiens à la communauté anglophone? Est-ce que moi, demain matin, si je décide de déménager dans Pointe-Claire et vais-je dire, parce que je vis dans une ville anglophone: Maintenant, je vis dans la communauté anglophone, donc, j'appartiens à la communauté anglophone?

C'est pour ça, dans le fond, que par deux fois j'ai posé des questions au député de L'Acadie, pour savoir comment on fait pour déterminer qui appartient à la communauté anglophone. Qui décide ça si, quelque part, au bout de la ligne, il y a divergence d'opinion là-dessus? C'est ça que je voudrais savoir. Comment fait-on pour déterminer, dans l'amendement du député de L'Acadie, les enfants qui appartiennent à la communauté anglophone? Que fait-on pour déterminer cela?

Nous, en tout cas, nous avons choisi la fréquentation scolaire, parce que cela a été suggéré par le gouvernement et, à notre point de vue, ça apparaît plus pertinent, plus simple, plus facile à réaliser. On préfère, sur ce point-là, comme disait hier soir le député de Saint-Jacques, affronter directement le gouvernement, mettre ça sur la table, sur son terrain, quand même, mais dans la propre structure de formulation, dans sa technique de législation et dire:

A travers cela, si c'est véritablement clair que c'est la fréquentation scolaire, on va essayer d'ouvrir les écoles anglophones à tous ceux qui sont véritablement membres de la communauté anglophone.

Je rejoins véritablement l'amendement du député de L'Acadie, mais au point de vue technique, je trouve que cet amendement n'est pas complet. Le moment venu, tout de suite après que nous aurons disposé de cet amendement, si la commission ne l'adopte pas, nous présenterons des amendements pour clarifier ce que nous voulons et, pour nous mettre sur le même terrain que le gouvernement dans sa structure de formulation, comment nous voulons ouvrir les écoles anglaises aux véritables membres de la communauté anglophone.

Encore une fois, j'aurais aimé que le député

de L'Acadie réponde clairement aux deux questions que j'ai posées sur les critères d'appartenance à la communauté anglophone. Cela nous aurait certainement aidés à prendre une décision.

Si on décide des principes, on va décider des principes; mais je crois qu'à l'article 69, il n'est pas question de décider de principes. Il est question de décider de l'application de la loi, comment on fera pour appliquer la loi. Il est sûr qu'il y a les tests, la langue maternelle, fréquentation scolaire. On peut peut-être en prendre un ou deux ensemble et même les trois. Comme j'ai dit tout à l'heure, si je décide de déménager à Pointe-Claire si je décide demain matin que j'appartiens à la communauté anglophone, cela se résume au libre choix total.

Ce n'est pas cela qu'on veut. Avec l'amendement tel que rédigé par le député de L'Acadie, je pense qu'on ne fait pas assez ressortir la prééminence du fait français pour le Québec. Il n'y a rien là-dedans qui nous dit que les écoles françaises seront obligatoires pour les francophones qui vont se dire, un bon jour, membres de la communauté anglophone. Je voudrais quelque chose de clair qui fasse ressortir clairement la volonté d'une prééminence du français et, en même temps, rendre justice à tous ceux qui sont véritablement membres de la communauté anglophone.

Ce n'est pas tout de dire qu'on va ouvrir les écoles aux enfants appartenant à la communauté anglophone. Il faut décider en même temps des critères. Si on laisse cela tel que la motion est formulée présentement, on ouvre la porte à l'incertitude, à la confusion totale et à l'arbitraire, un jour ou l'autre. Il faut absolument que la loi détermine clairement l'appartenance à la communauté anglophone et comment on va déterminer cela. Il nous manque énormément d'informations de la part du député de L'Acadie, les mécanismes par lesquels le député de L'Acadie entend appliquer ce critère d'appartenance à la communauté anglophone.

Il est sûr que si, un peu plus tard, le député de L'Acadie ou d'autres députés du Parti libéral nous expliquent comment ils feront pour établir les mécanismes d'appartenance à la communauté anglophone, et si cela répond véritablement à l'objectif de l'Union Nationale, c'est-à-dire assurer la prééminence du fait français au Québec d'un côté, et de l'autre côté, rendre justice à la communauté anglophone, on serait prêt à voter sur un tel amendement. Mais à l'heure actuelle, parce qu'il manque trop d'informations sur l'application même de cette motion d'amendement, s'il fallait que la commission l'accepte, nous, du moins, devrons voter contre cette motion. Encore une fois, si les membres du Parti libéral nous expliquent clairement les mécanismes par lesquels ils entendent donner la prééminence au français et donner justice à la communauté anglophone et comment ils feront pour déterminer cela, je serais prêt à reconsidérer ma façon de décider. Mais à l'heure actuelle, je trouve que cette motion, telle que rédigée, n'est pas assez claire dans l'application même du projet de loi.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sauvé et ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais d'abord qu'il soit très clair que le gouvernement, par ce projet de loi, entend reconnaître les droits moraux et historiques de la minorité anglophone du Québec.

Depuis toujours, et même à une époque où nous n'avions pas encore d'université francophone, cette collectivité avait les siennes; elle avait ses écoles, ses collèges, ses établissements d'enseignement supérieur. Il n'est pas question de s'en prendre le moindrement à tout cela, au contraire. Je pense que le gouvernement a démontré sa ferme intention de traiter tous les Québécois, anglophones et francophones, sur le même pied, compte tenu, bien sûr, du nombre, de part et d'autre.

Ce projet de loi reconnaît donc, et entend expressément reconnaître les droits de la minorité anglophone. Encore faut-il s'assurer qu'il s'agit bien de la minorité anglophone et non de personnes qui voudraient s'y joindre, venues de l'extérieur du Québec ou de l'étranger. Il y a un droit moral de la collectivité anglophone du Québec à ses écoles. Ce droit, enraciné dans l'histoire du Québec, le gouvernement entend le reconnaître pleinement.

Toute la question est évidemment de savoir qui fait partie de cette minorité, qui a le droit de se prévaloir de ces droits historiques, dont le fondement moral est indubitable. Après avoir fait le tour de tous les critères possibles et imaginables, après nous être, à bien des reprises, arraché les cheveux au sujet de cette question, nous avons choisi, comme le chef de l'Union Nationale le rappelait il y a un instant, le critère qui nous paraissait le plus humain et soulevait le moins de difficultés. Ce n'est pas le meilleur; à compter du moment où l'on veut départager les droits de deux collectivités coexistantes, il n'y a pas de "meilleur" critère, il n'y en a que de "moins mauvais".

Or, le député de L'Acadie nous propose un critère des plus vagues, probablement le plus vague qui se puisse concevoir. Qui est moins strict même — j'attire votre attention là-dessus, M. le Président — que celui de la loi 22: "les enfants appartenant à la communauté anglophone", nous dit-elle. Elle nous aurait proposé un autre amendement, comme "anything goes", cela serait revenu à peu près au même.

M. le Président, il y a deux interprétations possibles de ce critère, l'un émanant de Mme le député de L'Acadie, l'autre nous venant il y a un instant d'une courte intervention, mais non suffisamment remarquée, du député de Marguerite-Bourgeoys. La première interprétation est celle qui fait de cette appartenance un fait vérifiable; la seconde veut que, ce fait étant trop difficile à vérifier, on se contente d'une simple déclaration, comme le suggérait le député de Marguerite-Bourgeoys.

Si, comme le veut Mme le député de L'Acadie, c'est un fait vérifiable, nous sommes amenés inévitablement à ce qu'elle appelle, euphémistique-

ment et pudiquement, "de simples entrevues", c'est-à-dire que les enfants ou les parents — ou tous — sont amenés devant un examinateur qui vérifie si, oui ou non, ces enfants, ces parents, cette cellule familiale appartenant à la communauté anglophone. Je vous laisse imaginer les scènes qui peuvent se produire à cette occasion. Je vous laisse imaginer, surtout, les risques d'arbitraires que cela comporte, lesquels ont d'ailleurs amené une condamnation sans appel de la loi 22. Ce n'est pas moi qui condamne ce critère que nous propose Mme le député de L'Acadie. Ce n'est même pas le chef de l'Union Nationale qui, pourtant, vient d'exprimer son désaccord. C'est la presse anglophone elle-même qui n'en veut pas et qui dénonçait hier, ce matin encore, tous les risques que comporte un tel critère. Je voyais dans la Gazette, ce matin: "Children would be subjected to a short and simple interview. It does not need much imagination to predict that there could be many situations where decisions would appear arbitrary". Même si elles n'étaient pas arbitraires, elles pourraient paraître, arbitraires et cela suffirait à défaire tout le bien que la loi veut à la communauté anglophone ainsi que l'ordre et la paix que ce projet de loi veut ramener entre les collectivités qui forment le Québec.

M. le Président, si l'on en fait un fait vérifiable, comme Mme le député de L'Acadie le suggère, nous sommes conduits inévitablement aux tests — qu'elle appelle cela comme elle voudra: "de simples entrevues"— nous sommes de retour à la vérification, et cela nous paraît odieux.

C'est la raison pour laquelle, avec le chef de l'Union Nationale, nous l'avons écarté.

L'autre façon d'appliquer un tel critère, c'est de n'exiger qu'une simple déclaration. N'importe qui se présente et dit: "Je suis anglophone". C'est ce que nous suggérait, il y a un instant, le député de Marguerite-Bourgeoys qui, je le signale, n'est pas d'accord sur ce point avec Mme le député de L'Acadie. Il semble qu'il y ait deux écoles de pensée su sein du Parti libéral. J'aimerais bien savoir laquelle est la bonne.

M. Charron: Deux!

M. Morin (Sauvé): Au moins deux!

M. Ciaccia: II y en a beaucoup plus de votre côté.

M. Lalonde: En avez-vous une au moins? Vous n'en avez pas de pensée là-dedans. C'est de la mécanique.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Morin (Sauvé): Notre critère est énoncé dans la loi.

M. Lalonde: C'est de la mécanique.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Sans insister, ce matin, à votre égard, M. le député de Mont-Royal, j'ai eu une phrase pour diminuer votre agressivité. Cet après-midi, je ne parlerai pas d'agressivité, je vais simplement vous rappeler pour la Xième fois — si cela peut s'écrire au journal des Débats — qu'il y a des articles qui nous régissent et que, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, l'on cherche à s'interrompre.

J'aimerais qu'on laisse M. le député de Sauvé terminer son exposé avant de lui répondre.

M. le député de Sauvé et ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): J'achevais, M. le Président. Le député de L'Acadie nous propose le retour aux tests; le député de Marguerite-Bourgeoys nous propose le retour au libre choix, en somme. Appelons donc un chat un chat. Je m'excuse, ce n'est pas une allusion au député de Pointe-Claire.

M. le Président, le Parti libéral, sur cette question, se montre bicéphale. Il va falloir que vous vous décidiez entre vous, avant toute chose, ce que vous avez à nous proposer. Mais j'aime autant vous dire qu'en ce qui nous concerne, qu'il s'agisse de tests ou de libre choix, nous n'en avons que faire. C'est pourquoi, M. le Président, nous voterons contre cet amendement.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Premièrement, je voudrais assurer le député de Sauvé que nous n'avons pas la division, la dissenssion et le nombre d'opinions sur ce sujet qu'il suggère.

M. le Président, le député de Sauvé, le ministre de l'Education, ainsi que le ministre d'Etat au développement culturel ne cessent de nous assurer, d'assurer cette commission et la population qu'ils veulent protéger les droits de la communauté anglophone. Et immédiatement après l'avoir dit, ils procèdent à les leur enlever et les restreindre par des mesures qui sont contenues dans le projet de loi no 101. Les propos du chef de l'Opposition me laissent un peu perplexe et me rappellent les paroles du député de Saint-Jacques. Il semble que le programme de l'Union Nationale est: Une langue officielle, two official languages. Parce que lui aussi veut protéger et veut reconnaître la communauté anglophone, mais lui aussi commence à faire ces distinctions à savoir qui aura le droit, qui appartient à une collectivité, qui n'y appartient pas...

Premièrement, je voudrais dire au ministre d'Etat au développement culturel et au ministre de l'Education de cesser de venir nous dire: Convainquez-nous avec vos arguments. Je crois que le fardeau de la preuve, maintenant, pour prouver leurs paroles, à savoir qu'ils veulent vraiment protéger ou reconnaître la collectivité anglophone, est sur eux. C'est sur eux que repose le fardeau de la preuve de démontrer qu'ils ne veulent pas restreindre la communauté anglophone, les individus lui appartenant; qu'ils ne veulent pas l'amoindrir, qu'ils veulent que cette collectivité, que cette culture puisse s'épanouir au Québec.

On parle de tests. Je suis content les tests, c'est clair? Je suis contre les interviews...

M. Charron: Parfait.

M. Ciaccia:... les entrevues...

Une Voix: La troisième école.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Pas de dialogue ni, surtout, de trio. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: II y a un écho à ma gauche.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Si je rappelle les autres à l'ordre, je vous prie de ne pas tomber dans le même panneau.

M. Ciaccia: Les raisons qu'on invoque sont vraiment bizarres. On a eu de la difficulté avec les tests en 1974; puisqu'on a eu de la difficulté, on va abolir la communauté anglophone! Bien oui, c'est ce qu'on dit. On n'aura plus de critères pour la communauté anglophone, on va décider, nous, qu'il n'y en aura plus parce que les tests sont inapplicables. Je trouve cette façon de penser absolument inacceptable et aberrante.

C'est pareil à ceci: on ne peut pas définir d'une façon exacte le concept de la justice, mais on veut la justice. Mais parce qu'on ne peut pas la définir d'une façon exacte, va-t-on dire que nous sommes pour l'injustice? Ce sont les arguments de l'autre côté de la table.

On se réfère à la collectivité francophone. Je veux que mes propos soient clairement compris. Ce n'est pas nécessaire, pour protéger cette collectivité — les statistiques et les arguments du député d'Outremont nous ont éclairés sur ce fait — d'enlever les droits d'une autre. Chaque communauté, chaque collectivité a le droit non seulement de se faire reconnaître, mais elle a le droit aussi de s'épanouir. C'est un droit inhérent à la reconnaissance d'une communauté. Le projet de loi 101 n'accorde pas ce droit.

La communauté anglophone, à la suite des mémoires qui nous ont été présentés, nous dit qu'elle accepte qu'on doive parler le français au Québec. Je ne pense pas que ce soit cela, on fausse le débat. On essaie d'identifier l'existence d'une communauté avec le fait que la langue française doit être parlée au Québec; cela, c'est faux. Dans les écoles anglophones, on nous l'a démontré à maintes reprises; il y a des cours d'immersion, il y a les cours de français et ces gens ne s'opposent pas à apprendre le français, mais ils veulent survivre comme communauté culturelle. Est-ce tellement difficile à comprendre? On dit: C'est quoi, la communauté anglophone? Comme on ne peut pas définir spécifiquement la communauté anglophone, on ne doit pas la reconnaître, on doit la faire disparaître. C'est faux. On n'est pas pour commencer à mettre des numéros sur leurs bras pour qu'ils aient le droit d'avoir leurs écoles. Est-ce cela que vous préconisez?

On peut vous citer des lois d'autres pays où ils reconnaissent les minorités, les collectivités qui font partie de ces pays. Elles disent que chaque citoyen décide librement. Premièrement, elles reconnaissent le droit au plein développement culturel de cette communauté. Je ne parle pas d'en assimiler d'autres, je ne parle pas des futurs immigrants non anglophones, je parle de l'existence d'une communauté. Dans d'autres pays, on reconnaît leur droit à un plein développement culturel, on reconnaît leur droit à l'instruction dans leur langue. Pour ceux qui s'inquiètent de la définition, laissez-moi vous lire un article d'une constitution d'un pays dictatorial.

Je ne vous ai pas cité l'article 4, M. le ministre, et je ne veux pas me faire interrompre. Savez-vous, non seulement cela, mais pour plaire au côté gauche de votre parti...

M. Morin (Sauvé): Faites attention!

M. Ciaccia:... c'est un pays socialiste. O.K.?

M. Morin (Sauvé): Faites attention à ce que vous allez citer parce que je l'ai, moi aussi, le texte.

M. Ciaccia: L'article 4, je le cite. J'espère que vous avez la même édition, une édition plus récente que celle que j'ai.

M. Dussault: Quel pays?

M. Ciaccia: C'est la Tchécoslovaquie, encore.

Une Voix: C'est un Etat fédéral.

M. Ciaccia: C'est un Etat fédéral, exactement.

M. Dussault: Une nouvelle constitution en janvier 1974, en 1969.

M. Ciaccia: M. le Président, c'est seulement pour donner un exemple. Vous pouvez citer toutes sortes de choses, mais c'est seulement pour donner l'exemple d'un certain esprit qu'on veut abolir ici; vous voulez un précédent, je vous en donne un.

Chaque citoyen décide librement, d'après sa propre conviction, de son appartenance à une des nationalités, et ils reconnaissent quatre ou cinq nationalités.

M. le Président, c'est un faux débat, la question: Allons-nous définir la communauté anglophone oui ou non? Vous savez que vous pouvez la reconnaître, cette communauté existe et si, parce que vous ne le pouvez pas au dernier degré, au nième degré, il peut y avoir une personne qui, peut-être, n'appartient pas à la communauté anglophone et qui va trouver une place dans la communauté anglophone, quelle tragédie! Pour éviter cette petite tragédie, on va l'anéantir et refuser de la reconnaître. C'est le principe, M. le Président, it's the principle...

M. Charbonneau: Le principe de libre choix.

M. Ciaccia: Non, ce n'est pas le principe de libre choix, monsieur. On parle de l'amendement, de la reconnaissance de la communauté anglophone, 69a.

M. Charbonneau: C'est quoi, la communauté anglophone? La réponse est claire.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le député de Mont-Royal. A l'ordre! M. le député de Verchères.

M. Ciaccia: II me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal, vous avez commencé à 17 h 20 et vous connaissez le texte de l'article 160 par coeur, je pense, il a été si souvent invoqué.

M. Ciaccia: Je ne savais pas à quelle heure j'avais commencé. Les interruptions... On fait exprès.

Le Président (M. Cardinal): Cette question est revenue souvent de votre part, M. le député de Mont-Royal. Il est du jeu parlementaire qu'il y ait des interruptions, même si elles ne sont pas conformes au règlement. Je ne suis pas pour prendre un chronomètre pour savoir si vous avez été interrompu à bon droit, à mauvais droit, pendant 30 secondes ou autrement. Ce que j'ai fait jusqu'à présent, c'est que j'ai normalement déduit le temps que la présidence prenait de l'intervention du député et, deuxièmement, j'ai toujours manifesté une générosité particulièrement libérale qu'on a même soulignée dans les journaux.

M. Ciaccia: M. le Président, je ne demande pas plus de temps parce que j'ai été interrompu. Je sais que c'est de coutume parlementaire d'interrompre et c'est aussi de coutume parlementaire de se plaindre d'être interrompu.

M. Charbonneau: Vous êtes parfait.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Verchères, s'il vous plaît. Je sais que c'est chacun son tour. Si vous pouviez, cependant, à cause de l'importance du sujet dont nous discutons, avoir une certaine retenue.

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: La reconnaissance telle que préconisée par notre amendement à l'article 69 non seulement répond à un droit juste et équitable et à la réalité de la communauté anglophone, mais répond également aux questions de la langue de travail, aux représentations qui nous ont été faites par la communauté des affaires tant anglophone que francophone. C'est pour cela que nous aurions préféré discuter de la langue de travail avant d'aborder la question de la langue d'enseignement parce qu'il y aurait eu beaucoup de précisions et nous aurions vu que, si nous avions pu discuter de la question de la langue de travail, on ne perdrait pas notre temps aujourd'hui à décider si une communauté anglophone existe. On aurait vu ce que c'était et pour quelles raisons la communauté anglophone existe et doit continuer d'exister et doit continuer d'avoir des droits.

Mr Chairman, even the representatives of the English-speaking community, most of whom, by the way, Mr Chairman, when they came to the parliamentary committee, presented their briefs to the government in a French language. They have pleaded and asked and they have recognized that there is such a thing as anglophone parents. They have said that just because, merely because it was odious to have introduced the question of tests, that it is not a reason to refuse the recognition of this community which is part of Quebec.

This community has been part of Quebec, has made its contribution in all fields and will continue and wants to remain part of Quebec society. One of the problems of language legislation, of this particular language legislation, is the fact that it may be used by the government, I am of the opinion that it is being used by the government for political motives, it is being used by the government to advance its objectives of separatism and every time someone tries to identify, to recognize either individual rights or rights of the English-speaking community, we are immediately labelled as working against the interests of the majority and that is false, it is based on a false premise and it is divisive of the goodwill that exists between these communities which are being eroded away by the constant introduction of language legislation such as bill 101.

M. le Président, on se réfère toujours aussi à d'autres endroits, d'autres provinces et à ce qui a existé dans le passé. Il y a eu des injustices dans le passé, c'est vrai, mais ce n'est pas une raison pour nous aujourd'hui d'essayer d'imiter ces injustices. Qu'on essaie de faire justice à notre société, de ne pas créer de divisions. Ce n'est pas une raison parce qu'en 1890, au Manitoba, il y a eu une loi que personne ne peut accepter, qui est discriminatoire et qui n'aurait jamais dû être introduite et acceptée, pour aujourd'hui imiter ce genre de loi. On devrait avoir un esprit un peu plus large, si vraiment le but du gouvernement est de légiférer dans les intérêts de tous les Québécois.

Le gouvernement se plaît toujours à dire que, malgré notre origine ethnique, linguistique, nous sommes tous des Québécois, mais je veux vous rappeler, M. le Président, que c'est lui qui introduit les distinctions.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, le député me permettrait-il une question?

Le Président (M. Cardinal): S'il vous le permet.

M. Ciaccia: Après mon intervention.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas après, c'est pendant ou ce n'est rien.

M. Ciaccia: S'il me reste du temps, après que j'aurai terminé, je lui permettrai une...

Le Président (M. Cardinal): Après, c'est la permission du président. D'accord. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, on cite toujours la loi 22; on nous accuse; on accuse le gouvernement. Hier soir, le député de Saint-Jacques m'a dit que j'avais voté contre la langue officielle, le français langue officielle; je lui ai rappelé que non, que j'avais voté contre la loi 22, de la même façon que lui-même avait voté contre la loi 22.

Le fait qu'il ait voté contre la loi 22, est-ce parce qu'il a voté contre la langue officielle, le français langue officielle? Non, nous avions chacun nos raisons.

Oui, c'est excellent, merci, M. le député de Sauvé. M. le Président, je pense que M. le député d'Outremont, mon collègue d'Outremont nous a prouvé que le bill 101 n'est pas nécessaire. Pour ma part, si nous n'étions pas dans le contexte politique actuel, je voterais contre toute législation linguistique, c'est simple, mais je n'oublie pas les objectifs du gouvernement et je ne veux pas jouer son jeu en m'opposant à un projet de loi sur la langue.

Les articles qu'on peut appuyer, je vais les appuyer, mais il y a certains principes fondamentaux, quant à moi, auxquels je vais m'opposer.

Pour terminer, M. le Président, pour montrer que la loi 22 ne nous préoccupe pas tellement, on réalise certaines failles et certaines difficultés, et je pourrais vous dire ceci:

Le député d'Outremont a prouvé que le bill 101 n'est pas nécessaire et que c'est une loi politique pour des buts politiques. Je pourrais dire que la loi 22, de la façon dont elle a été rédigée — elle a été faite de la même façon — c'était un projet de loi politique. Ce projet de loi a pendu le premier ministre qui l'a présenté. Je vais vous dire, M. le Président, que le projet de loi no 101 va avoir le même effet sur le Parti québécois.

Merci!

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement, excusez.

M. Morin: M. le Président, est-ce qu'il reste...

Le Président (M. Cardinal): Un instant!

M. Morin (Sauvé): ...un instant pour poser ma question?

Le Président (M. Cardinal): Oui, mais auparavant, si vous permettez, M. le député de Marguerite-Bourgeoys invoque le règlement. Je répondrai ensuite à M. le député de Sauvé.

M. Lalonde: M. le Président, c'est...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ...une suggestion que j'ai à faire qui concerne la marche de nos travaux. Après consultation avec le leader adjoint du gouvernement et le député de Mégantic-Compton et mes collègues, je suggérerais que pour continuer la bonne marche des travaux et éviter quand même de terminer à une heure trop tardive et permettre à ceux qui ont à quitter Québec de retourner chez eux ce soir, que nous continuions après 18 heures la tenue de cette séance jusqu'à 20 heures, et qu'après, la séance soit ajournée, tel qre le leader du gouvernement l'a exprimé dans son avis ce matin.

Le Président (M. Cardinal): Sur cette question, s'il y a consentement, je serais disposé à accepter... Oui, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Ce n'est qu'une discussion; ce n'est pas une motion, bien sûr, on s'entend bien?

M. Lalonde: C'est ça, oui.

Le Président (M. Cardinal): Je l'ai considérée comme suggestion, non pas comme motion, parce que s'il faut repartir sur l'article 160, il sera onze heures quand on aura décidé qu'il faut ajourner à 20 heures.

M. Lalonde: Si on en fait une motion, M. le Président, ça va prendre 30 secondes.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: ...on aura discuté en dehors de la table, bien sûr, c'est un moindre mal, puisqu'on a voté contre le fait de siéger cet après-midi, nous, depuis 13 heures cet après-midi jusqu'à lundi matin, à 10 heures. C'est un accommodement qui nous va, même si je trouve pénible d'être obligé de siéger le vendredi soir. On va quand même accepter de se rendre jusqu'à 20 heures, s'il y a lieu, et de terminer là jusqu'à lundi.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Mégantic-Compton.

M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement?

M. Charron: M. le Président, nous sommes tout à fait d'accord avec cet accommodement proposé. Il rejoint l'objectif de faire avancer les travaux sur cette importante loi, en même temps que de respecter un calendrier normal à la fin de cette semaine pour les députés, membres de la commission.

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez quand même, je vais ajouter un commentaire qui concerne le règlement et nos façons de procéder.

Je suis prêt, à titre d'accommodement, à recevoir cette suggestion, qui reçoit un consentement unanime. Je ne voudrais cependant pas en faire un précédent. J'ai souvent rappelé à cette commission que, suivant nos règlements, et là, on

pourrait s'interroger longuement sur le vendredi — c'est pourquoi je ne veux pas en faire un précédent — nous sommes dans une situation particulière. Je ne voudrais pas qu'à l'avenir on puisse invoquer un consentement unanime pour qu'à 18 heures le président ne quitte pas d'office son fauteuil et ajourne à 20 heures. Je veux que ceci soit bien clair. Disons que j'accepte ce que vous proposez à titre d'accommodement provisoire pour un certain vendredi soir, celui, si je ne me trompe pas, du 5 août 1977.

M. le député de Sauvé et ministre de l'Education.

M. Morin (Sauvé): Oui, M. le Président, je désirais poser une question au député de Mont-Royal...

Le Président (M. Cardinal): ...à ce sujet, M. le député de Sauvé, il vous reste encore pas mal de temps, et il reste même aussi un peu de temps au député de Mont-Royal. Ce que je voudrais éviter, c'est que le député de Sauvé ou le député de Mont-Royal, dans un échange très courtois et très savant, ne dépasse chacun, ou l'un d'eux, leur temps. Alors, M. le député de Sauvé, d'accord, mais pourvu que M. le député de Mont-Royal, suite à votre question, ne vienne pas ajouter à son discours, contrairement aux dispositions de l'article 160.

M. Morin (Sauvé): Je serai très bref. Le député de Mont-Royal a fait allusion $ la législation répressive et injuste du Manitoba en 1885 et 1890. N'imitons pas ce mauvais exemple, nous dit-il! Je suis tout à fait d'accord mais ce n'est pas ce que fait le présent projet de loi. Je me demande ce que le député a voulu dire exactement. La législation de 1885 au Manitoba abolissait, à toutes fins pratiques, l'école française. La législation de 1890 abolissait l'usage officiel de la langue française.

Or, la Charte de la langue française ne fait rien de tel. Elle maintient les écoles anglaises l'usage de la langue anglaise. La preuve est que le député s'exprimait tout à l'heure en anglais et continuera de le faire. J'espère, du moins, qu'il continuera si, cela lui chante. Autrement dit, le Québec est bien trop civilisé pour imiter le Manitoba.

Alors, voulez-vous nous expliquer en quoi consistait ce curieux parallèle?

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, M. le député de Mont-Royal, parce qu'il faut éviter lors d'un amendemtent, des sous-débats ou des mini-débats, nous ne sommes pas à l'Assemblée nationale, vous avez deux minutes au maximum pour répondre.

M. Ciaccia: C'est regrettable que je n'aie que deux minutes parce que pour répondre à une telle question, je pourrais prendre plus que cela, mais je serai bref.

Le député de Sauvé a raison quand il dit que le Québec est trop civilisé pour accepter l'attitude du Manitoba et c'est pour cela que le Québec n'acceptera pas votre projet de loi no 101, et quand vous dites que le projet de loi n'abolit pas l'anglais comme langue officielle, vous ai-je bien compris?

M. Morin (Sauvé): Aurez-vous le droit, oui ou non, de vous exprimer en anglais à l'Assemblée nationale?

M. Ciaccia: Oui, je vais l'avoir, et je n'ai pas dit que ce projet de loi allait aussi loin, mais c'est l'esprit, et vous savez ce que je voulais dire, c'est l'esprit et... Les mots plus que l'esprit, certaines restrictions dans le projet de loi. L'article 69, c'est une question de degrés. Vous commencez aujourd'hui avec cela et, plus tard, où allez-vous aller? Si les institutions ne peuvent pas survivre, si elles ne peuvent pas continuer, si les droits individuels n'y sont pas, vous savez, M. le député de Sauvé, ce que vous faites avec le projet de loi 101. Il n'est pas nécessaire qu'il soit un duplicata de la législation de 1890, mais nous sommes en 1977. Il faut être un peu plus subtil, tel que vous l'êtes, tel que votre gouvernement l'est. Vous êtes plus subtil avec votre projet de loi 101, mais vous ne changez pas les concepts de la législation de 1890 ou de ce projet de loi.

M. Morin (Sauvé): J'accepte le compliment du député, mais je souhaiterais qu'il en extirpe le venin. Cela serait plus juste à l'endroit du projet de loi.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes rendus dans les problèmes de réaction de formations politiques.

M. Ciaccia: Vous avez essayé de me provoquer et vous avez réussi.

A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Ces deux députés devraient se rappeler ce que j'ai mentionné ce matin sur l'agressivité-.

M. Charron: Y a-t-il d'autres intervenants sur la motion?

Le Président (M. Cardinal): Oui, il y a d'autres intervenants, M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: Voulez-vous appeler les prochains intervenants, s'il vous plaît!

Le Président (M. Cardinal): Oui. M. le député de Bourget et ministre d'Etat au développement culturel.

M. Laurin: Je ne comprends pas qu'un parti qui a assumé, à plusieurs reprises dans l'histoire l'exercice du pouvoir présente un amendement aussi vague, aussi flou, administrativement invérifiable, aussi mou et aussi spongieux, car l'appartenance à la communauté anglophone me semble absolument impossible à définir.

Je n'en nie pas la réalité, mais il est extrêmement difficile de cerner cette réalité, ne serait-ce

qu'en raison du pouvoir intégrateur, pour ne pas dire assimilateur, de la minorité anglophone ici au Québec, à l'endroit de tous les nouveaux arrivants, à l'endroit en tout cas, de la grande majorité des nouveaux arrivants.

Quel que soit le critère que l'on choisisse, que ce soit le critère de l'origine ethnique, que ce soit le critère de la langue maternelle, que ce soit le critère de la langue d'usage, que ce soit le critère de ceux qui savent parler français en même temps qu'anglais, le critère de bilinguisme, on en arrive à des chiffres éminemment variables et différents, et je pense que c'est absolument impossible, à ce moment, d'introduire un pareil amendement dans une loi qui se respecte et qu'il faut faire respecter.

D'ailleurs, Mme le député de L'Acadie en est tellement consciente qu'elle-même a dit qu'elle ne pouvait pas ajouter un critère à son amendement. Elle a avoué qu'il serait difficile de le faire. Elle a mentionné, au hasard, le recensement, les fiches d'inscription. Mais nous savons bien, nous qui avons eu à préparer le projet de loi, que nous avons examiné chacune de ces hypothèses. Le ministre de l'Education disait 17, 18, 19. Nous avons peiné durant des mois pour essayer de vérifier le caractère administrable de chacun de ces critères et cela a été absolument impossible. Je pourrais vous faire un long discours pour vous montrer en quoi chacun des critères mentionnés par le député de L'Acadie est impossible à administrer.

Présenter un pareil amendement sans critère qui en rend l'administration possible me semble naïf, me semble infantile à certains égards et, en tout cas, me semble absolument irresponsable. En ce sens, il nous apparaît absolument impossible de l'accepter.

Evidemment, dans son exposé de présentation, le député de L'Acadie a dit qu'elle était obligée, finalement, de penser à ce qu'avaient dit le Conseil supérieur de l'éducation et d'autres organismes, c'est-à-dire au critère de la langue maternelle anglaise. Nous savons très bien, pour l'avoir étudié, que ce critère de la langue maternelle anglaise ne constitue en rien la méthode simple, complète, objective, fiable, identique et juste pour tous que le législateur doit introduire dans une loi pour que son administration en soit possible. Donc, il n'est pas possible de le retenir. Par ailleurs, si nous voulons véritablement le retenir, avec toutes les conséquences qu'il comporte, c'est-à-dire qu'il nous ramènerait infailliblement à des mesures de contrôle qui seraient, comme je l'ai dit dans mon discours de deuxième lecture, tout aussi tracassières, tatillonnes et odieuses que les tests linguistiques, à ce moment, nous retombons de Charybde en Scylla. On ne peut pas retenir un critère, celui de la langue maternelle anglaise, qui, même s'il ne nous ramène pas à des tests, nous oblige, pour son administration, à quelque chose qui lui ressemble.

Je sais que le député de Mont-Royal n'est pas d'accord avec les entrevues. Il nous l'a dit. Le député de D'Arcy McGee, hier, nous a dit qu'il fallait plutôt tester les parents. Probablement que ce n'est pas l'opinion du député de L'Acadie. Peut-être qu'il y a quatre ou cinq autres opinions dans le Parti libéral, ce qui montre qu'il est absolument impossible, avec la base de départ qu'ils ont choisie, d'arriver à faire une législation qui se respecte.

Il faut donc arriver à des mesures de contrôle. De quel nom les baptisera-t-on? On voudra éviter, évidemment, le mot "test", mais il faudra revenir à la réalité du test. J'ai essayé de voir dans le dictionnaire d'où pouvait venir ce mot "test". Je ne l'ai pas trouvé dans le Larousse, incidemment, mais je l'ai trouvé dans le Webster Nov. Collegiate Dictionary. A la page 1205, j'ai vu une définition du "test" que j'accepte; d'ailleurs, c'est un mot d'origine anglaise, c'est pour cela que je l'ai trouvé là. Le mot "test" se définit dans le Webster: "a critical examination, observation, or evaluation". Ce sont souvent des mots qu'on entend autour de la table depuis le commencement de la discussion. Cela veut dire que, quel que soit le mot que vous employez: examen, observation, entrevue, déclaration, évaluation, c'est toujours, au fond, de la même farine. Cela participe à la même famille qui est définie par le mot "test" dans le Webster New Collegiate Dictionary, c'est-à-dire aux mêmes mesures de contrôle, qui sont subjectives, qui donnent lieu à tout l'arbitraire imaginable, à tous les contrôles possibles et impossibles. Nous arrivons donc aux mêmes conclusions, aux mêmes méthodes que rejette la communauté anglophone, tel qu'il en appert des articles que nous avons vus depuis quelques jours dans la Gazette et dans le Star, qui représentent bien, en ce moment, l'opinion de la majorité anglophone.

On nous dit, par ailleurs — c'est le député d'Outremont qui l'a dit — que cette loi n'est pas nécessaire; donc, que le critère que nous choisissons n'est pas nécessaire. Je profite de l'occasion pour dire qu'à mon avis le député d'Outremont est à peu près le seul dans ce débat, du côté libéral, qui a présenté des vues objectives, sérieuses, étoffées et qu'il convient donc de respecter à leur pleine valeur. Il reste, cependant, que je ne suis pas d'accord avec les diverses objections qu'il a fait valoir, aussi bien en ce qui concerne le taux de fécondité que le taux d'immigration anglophone, que le taux de transferts linguistiques et que l'évaluation qu'il fait de la clientèle scolaire.

Nous avions présenté à cet égard, depuis plusieurs semaines, nos propres scénarios, nos propres perspectives. Je sais qu'elles ont été contestées. Elles ont été contestées par certains démographes, MM. Henripin et Lachapelle, dans deux articles dans le Devoir. Elles ont été contestées par l'Université McGill. Elles ont été contestées par certains membres du comité protestant du Conseil supérieur de l'éducation et M. Slingerland a fait paraître, à cet effet, un article dans le Devoir. Elles ont été contestées par la Chambre de commerce, lorsqu'elle s'est présentée à la commission parlementaire.

Nous avons lu avec la plus grande attention, M. le Président, ces diverses critiques qui ont été faites à nos prévisions démographiques. Nous les avons étudiées dans ce qu'elles pouvaient présen-

ter de scientifique, sans en retenir le côté inutilement polémique, car j'ai très mal réagi, je dois vous l'avouer, à certaines des remarques qui ont été faites par l'un ou l'autre de ces critiques à l'endroit des démographes, à l'endroit des statisticiens ou à l'endroit des professionnels du gouvernement qui nous ont aidés à préparer ces statistiques.

On a voulu dire que le gouvernement leur avait donné des ordres, qu'ils avaient travaillé dans un esprit partisan, qu'ils avaient été mobilisés pour la défense d'une cause. Je m'inscris en faux contre ces affirmations, car jamais le gouvernement n'a donné d'ordres ou d'hypothèses de travail aux démographes du gouvernement. Jamais il n'a tenté d'incliner dans quelque sens que ce soit leur travail. Ce travail a été fait selon les critères les plus rigoureux de la recherche scientifique. Je pense qu'il serait très malsain de la part de certains députés, comme le député de Saint-Laurent, ou d'autres personnes à l'extérieur de cette Chambre de prétendre que les professionnels, qui travaillent au service du gouvernement, travaillent au service, en fait, d'un parti politique.

Mais, quoi qu'il en soit, M. le Président, cette mise au point étant faite, nous avons étudié d'une façon scientifique, rigoureuse toutes les représentations, toutes les critiques qui ont été faites à l'endroit des premières prévisions que nous avons établies. Je peux remettre maintenant aux membres de la commission le résultat de l'étude critique, des travaux critiques qui ont été faits à l'endroit de nos propres prévisions. Nous en avons même préparé un tableau synthèse, que nous avons intitulé "La langue et l'école", où nous reprenons, à la suite des représentations qui nous ont été faites et des informations additionnelles que nous avons pu recueillir, tous les scénarios que nous avions présentés il y a un mois, c'est-à-dire un nouveau tableau de l'évolution de la clientèle scolaire, suivant la langue d'enseignement, de 1971 à 1986.

Nous nous sommes permis aussi de faire une réflexion sur la méthodologie employée par ceux qui ont critiqué nos propres prévisions. Nous avons tenté de mettre en rapport les informations anciennes et additionnelles que nous possédions avec l'évolution des clientèles scolaires au Québec. Nous avons réétudié d'une façon plus attentive la situation particulière de la région de l'Outaouais. Ce sont ces documents maintenant que j'aimerais remettre pour éclairer la discussion aux membres de la commission, quitte à ce que, en môme temps, ils puissent consulter d'autres documents que j'aimerais déposer, que j'aimerais remettre aux membres de la commission, pour aller plus au fond des critiques qui ont été faites par ceux qui sont intervenus dans ce débat. On peut les distribuer pour le moment.

Il nous semble, par ailleurs, que la position de l'Opposition officielle à cet égard, si on la retenait, s'avérerait discriminatoire à l'égard des allopho-nes, en ce sens qu'elle tendrait à prétendre qu'il n'y a que deux seules communautés ici au Québec, alors que nous savons — nous l'avons re- connu dans le livre blanc — qu'il existe plusieurs communautés au Québec. Même si la communauté anglaise est la plus importante, il importe de ne pas oublier les autres, leurs caractéristiques, les motivations qu'ils ont à maintenir leur propre langue maternelle et leur propre culture, souhait qu'ils m'ont souvent exprimé et qu'ils ont sûrement souvent exprimé également au gouvernement précédent.

Par ailleurs, nous continuons à refuser d'ouvrir les écoles du Québec à la communauté anglaise du monde. Nous voulons préserver les droits de la communauté anglophone du Québec et je pense que les dispositions de la présente loi sont respectueuses, justes et généreuses à cet égard. Je pense même que, lorsqu'on les comprendra et qu'on les évaluera justement, on verra que le gouvernement a fait montre, en l'occurrence, de la plus grande justice et de la plus grande équité.

Pour revenir durant quelques minutes également sur le critère que nous avons adopté, il est vrai, comme l'a dit le ministre de l'Education, que ce critère n'est pas parfait. Dans certains cas, il pourra s'avérer difficile de l'administrer en raison des inconvénients qu'a signalés le député de L'Acadie. Il y a quelques écoles qui ne les possèdent pas, il y a eu des écoles qui ont été brûlées. Il y a des archives qui sont perdues.

Mais avant d'en arriver à notre décision, je veux vous assurer que nous avons fait toutes les enquêtes nécessaires afin de savoir si les dossiers dont nous pourrions avoir besoin étaient suffisamment nombreux et suffisamment adéquats pour nous permettre justement d'appliquer ce critère dans un esprit de justice et d'équité. Les résultats de l'enquête que nous avons faite prouvent, de toute évidence, que ces dossiers ont été préservés, qu'ils sont disponibles et qu'ils nous permettront d'appliquer d'une façon responsable le critère objectif, fiable et juste que nous avons choisi.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Sur l'amendement, j'accepte le principe voulant que l'école anglaise soit une institution destinée à donner des services d'enseignement aux anglophones; en conséquence, l'école anglaise doit être accessible à tous les anglophones. Je pense que ceci est conforme à notre philosophie linguistique au Parti libéral, exprimée d'abord à l'article 68: l'école française pour tous et l'école anglaise pour les anglophones. De là l'amendement et je l'appuierai.

On s'est attaché, surtout du côté ministériel, à rechercher les difficultés d'application que ce principe pourrait avoir dans les faits. Je me souviens de l'allusion que le député de Sauvé a faite à un mot que j'ai dit tantôt. Tout à coup, j'ai mis la main sur des formulaires apparemment préparés, me dit-on, par le gouvernement pour l'application de ce principe tel que contenu dans le projet de loi no 101 et j'ai vu, parmi les trois formulaires sou-

mis, l'un, qu'on appelle, je pense, le formulaire C, qui, justement, contient la signature du parent. Donc, on admet, même pour l'application de ce principe, qu'on doive recourir à une déclaration des parents, à une déclaration des gens.

M. Morin (Sauvé): Oui, la demande d'admission en anglais.

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Sauvé.

M. Lalonde: L'application du principe n'est jamais très facile. Le ministre d'Etat au développement culturel vient, d'ailleurs, lui-même d'admettre que l'application du principe contenu à l'article que nous tentons d'amender rencontrera des difficultés souvent pénibles. Mais je pense qu'il s'agit d'une question d'attitude. Tout d'abord, l'application du principe devrait, au départ, et pour la très grande majorité des gens, être aussi facile qu'il est facile, pour le recensement, de conclure qu'il y a X milliers d'anglophones au Québec ou Y milliers de francophones en Ontario.

Si cette formule de vérification des populations est assez précise et sûre pour qu'on puisse s'y appuyer dans les études démographiques utilisées tant par le gouvernement que par d'autres organismes, elle devrait, au départ, suffire pour l'application d'un tel critère. Autant le gouvernement fait confiance aux gens pour le processus de recensement, autant nous devrions changer d'attitude à l'égard de l'application de tels critères et éliminer à tout jamais l'approche coercitive de vérification absolument stricte que, par exemple, les tests représentaient. Pourquoi recourir à des mesures coercitives quand on sait qu'on peut faire confiance à la très grande majorité des gens, à la très grande majorité des Québécois?

La disparition des tests est essentielle et la disparition de tout système de tests organisés, de tests systématisés ou de toute chose qui ressemblerait à des tests, mais organisée pour tous les gens doit aussi disparaître. Autant on prend la parole ou la signature du citoyen lors du recensement, autant on peut lui faire confiance dans ce secteur. Le ministère de l'Education devra se fier à la déclaration des gens quant à la fréquentation scolaire dans bien des cas.

Le ministre d'Etat au développement culturel vient justement de mentionner quelques-unes des difficultés que représentent, par exemple, la disparition d'écoles, la disparition d'archives, le fait que certaines écoles aient été incendiées, etc. A ce moment là, il faudra que le gouvernement fasse confiance aux gens. De simples fiches d'inscription contiendront la preuve amplement suffisante de l'appartenance à la communauté anglophone, ce qui, dans la très grande majorité des cas, ne posera aucun problème. Les abus, s'il y en a, comme dans toute application de loi, seront apparents de façon inévitable.

Le député de Sauvé a fait l'analogie de cette attitude ouverte, de cette attitude de confiance avec le libre choix. Il dit qu'on retourne au libre choix. Rien de plus faux, M. le Président. Faire confiance aux gens, prendre leur parole équivaut, pour le ministre de l'Education, à la présomption d'infraction. On dirait que, pour le Parti québécois, on est présumé coupable. On est présumé toujours vouloir faire une infraction à la loi. Le Parti québécois ne fait pas confiance aux francophones alors qu'à l'époque de la grande liberté de choix, à peine 2,5% des francophones se servaient de cette liberté de choix. L'on sait, depuis la loi 22, même hors l'application des tests, que la population francophone s'est imposé elle-même une autodiscipline à l'égard de l'exercice de cette liberté de choix assortie d'une restriction. Quant aux allophones, M. le Président, la preuve de leur non-appartenance à la communauté anglophone est l'enfance de l'art.

M. le Président, le critère du Parti québécois est artificiel. On ferait subir aux Québécois plus de contraintes et d'injustices qu'un critère positif, fondé sur un principe comme celui que nous proposons.

J'aimerais vous mentionner — je ne suis pas un expert dans cette question, je fais confiance naturellement aux recherches que le député de L'Acadie a faites et aux exemples qui sont assez impressionnants de résultats de l'application du test artificiel, commode, qu'on nous propose — un article de Mme Lysiane Gagnon, journaliste qui a suivi le débat sur la langue, sur la question linguistique depuis fort longtemps et qui écrivait dans la Presse, je crois, le 16 avril 1977: "En retenant ce critère de l'école du père ou de la mère, le gouvernement péquiste mise sur le fait que l'école primaire est généralement le prolongement culturel de la famille et que la plupart des adultes qui ont fréquenté une école élémentaire anglaise sont des anglophones soit par naissance soit par assimilation. Mais la réalité est souvent plus complexe et mouvante que ce critère mécanique, sans compter les nombreux cas d'assimilation entre francophones et anglophones (en Gaspésie, dans l'Estrie, etc). Le simple fait que la loi interdise l'école anglaise à certains "vrais" anglophones et permette le libre choix à des gens pour qui l'anglais n'est pas la langue d'usage, est déjà une faille en soi."

Je continue la citation, un peu plus loin dans l'article, M. le Président: "Deuxième faille dans la loi projetée; un élève peut avoir ou non le libre choix de la langue d'enseignement selon des facteurs qui tiennent partiellement au hasard de la vie. Selon qu'il est membre d'une famille nombreuse ou enfant unique. Selon son rang au sein de la famille, selon l'âge de l'aîné des enfants au moment de la promulgation de la loi, selon cet autre hasard qui a amené les parents à envoyer l'un de leurs ainés à l'école anglaise, etc."

Voilà deux failles qui, dans un premier temps, vont avoir pour résultat de refuser l'accès à l'école anglaise à des anglophones, des "vrais" anglophones, pour citer Mme Lysiane Gagnon, et, dans un autre temps, donner un passeport à vie à de nombreux francophones qui, parce que leurs parents auront fréquenté l'école anglaise pourront

envoyer leurs enfants ad vitam aeternam à l'école anglaise, alors que le principe du maintien d'un système de l'école anglaise au Québec repose sur la nécessité de pourvoir et de continuer de pourvoir à la communauté anglophone des services d'enseignement en anglais.

M. le Président, pour nous, c'est une question de justice, ce n'est pas une question de commodité, et les trois critères ou principes plutôt que le ministre d'Etat au développement culturel a mentionnés au début de son intervention, lors de la présentation de l'article 69, sont assez symptomatiques, surtout dans l'utilisation qu'il en a faite et que le gouvernement aussi en a faite, c'est-à-dire que le troisième critère ou le troisième principe était la facilité ou la possibilité d'appliquer les deux premiers principes.

Naturellement, il faut s'attacher à la facilité où à la possibilité d'appliquer une loi lorsqu'on fait nos choix, mais, en s'inspirant de ce troisième principe, en le rejoignant avec le premier qu'il a mentionné — je n'ose pas les répéter, parce que je ne les ai pas verbatim — on s'est inspiré, je crois, on s'est laissé influencer de façon trop importante par la question de l'application pour aboutir à un critère qui ne repose sur aucun principe, qui repose sur des accidents dans beaucoup de cas, qui repose sur quelque chose d'artificiel, qui va créer de la discrimination, non pas de la discrimination dans le sens de la Charte des droits et libertés de la personne. Je sais que la Commission des droits et libertés de la personne a donné un avis à cet égard et je suis tout à fait d'accord avec ses conclusions, mais dans les faits, on va traiter différemment, sans aucune raison valable, à propos ou sur la base d'aucune rationalité, la possibilité pour des gens d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise, d'une part parce qu'ils ne pourront pas le faire même en étant anglophones, et, d'autre part, en donnant un droit, un privilège à des francophones d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise alors que l'on sait que ce n'est pas le but de ce projet de loi, que ce n'est pas le but de toute la politique linguistique et de la loi 22 et de ce projet de loi.

M. le Président, à cet article que l'on veut amender, "les enfants dont le père ou la mère a reçu au Québec, l'enseignement primaire en anglais," notre amendement a pour but de faire tomber cet article. Je crois qu'il est pertinent de faire référence à ce critère, particulièrement, c'est-à-dire la clause Québec, dans le plaidoyer que l'on fait en faveur de notre amendement. Je dis donc que ce choix politique, cette restriction, cette contrainte sont inutiles, d'autant plus inutiles que, lorsqu'on a vu les données démographiques que le député d'Outremont nous a décrites et remises tantôt, que le but en est de traiter la minorité anglophone d'une façon restrictive, inutilement restrictive et coercitive.

Il s'agit d'une minorité, d'une minorité nombreuse, d'une minorité que nous, du Parti libéral, conformément à une philosophie de liberté et de démocratie, voulons reconnaître par la loi. Le sous-paragraphe a) que l'on veut amender le fait d'une façon pusillanime, le fait d'une façon inuti- lement restrictive et, ne serait-ce que pour cette raison, on devrait accepter l'amendement du député de L'Acadie.

Le degré de civilisation d'une société démocratique est fonction du respect que cette société a à l'égard de ses minorités. Or, traiter cette minorité considérable de la façon dont le sous-paragraphe a) veut le faire, M. le Président, va se refléter négativement sur toute la société québécoise et ce n'est sûrement pas le désir des francophones. Les francophones ne sont pas assez peureux, ne sont pas assez timorés, M. le Président, pour vouloir traiter les anglophones de façon aussi restrictive et aussi inutile — les données démographiques sont quand même évidentes à ce propos — que le fait le sous-pagraphe a) de l'article 69, M. le Président.

Quant à moi, je me sens mal à l'aise, comme Québécois francophone, de devoir recourir à ce genre d'attitude, à ce genre de mesure pour, supposément et prétendument assurer la survie, le maintien et le développement de ma culture et de ma langue.

M. le Président, l'amendement du député de L'Acadie repose sur un principe sûr. Il appartient à un système de valeurs démocratiques modernes; il veut que l'on reconnaisse dans la loi des faits, une situation de fait, et il m'apparaît inspiré d'une philosophie libérale tout à fait conforme aux grandes orientations de notre parti; c'est pourquoi je l'appuierai, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le député de Saint-Jacques, il vous reste deux minutes.

M. Charron: II me reste deux minutes?

Le Président (M. Laplante): Non, vous commencez, vous.

M. Charron: M. le Président, je m'étais inscrit, il me semble, il y a déjà longtemps, c'était pendant que mon excellent ami le député de Mont-Royal nous formulait une fois de plus toutes ses appréhensions et ses angoisses. Entre-temps, le ministre d'Etat au développement culturel a, une fois de plus, tenté d'expliquer le bien-fondé de la position qui nous amène à rejeter l'amendement de Mme le député de L'Acadie.

Mais, puisque mon sujet initial était les propos du député de Mont-Royal, aussi bien y revenir.

Il se dit victime de plusieurs interruptions depuis qu'il travaille avec nous à cette commission. C'est un fait statistique, je crois, qu'il cite mais j'estime que le député de Mont-Royal devrait se rendre compte qu'il les provoque, qu'il les sollicite, parce qu'il est difficile d'être Québécois de langue française, et, se croyant honnête et se croyant juste, de voir l'assiduité avec laquelle, au point même, je pense, d'en gêner ses propres collègues de son parti — j'ai presque envie de dire la mauvaise foi, mais le règlement me l'interdit — le député de Mont-Royal aime répéter — combien de citations pourrais-je relever depuis le début des

travaux d'hier — que ce que le gouvernement recherche, c'est la mort, l'extinction, l'assassinat de la minorité anglophone du Québec? Combien de fois il nous a dit...

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.

Une Voix: C'est vrai!

M. Ciaccia: Je n'ai pas utilisé le mot "assassinat", les mots qu'il dit. Il m'impute des motifs; il m'attribue des paroles que je n'ai pas dites.

M. Charron: Très bien...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le député de Mont-Royal.

M. Charron: On va se parler comme il faut et on ne fera pas de point de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Votre question de règlement est acceptée. Vous avez rétabli les faits. M. le député de Sauvé. Pas de Sauvé, pardon, de Saint-Jacques, veuillez continuer.

M. Charron: C'est difficile, comme Québécois francophone, d'endurer ça. Et c'est peut-être pour ça que, spontanément, de ce côté-ci, parce que nous, nos couleurs et notre programme sont sur la table, je soutiens encore que vos propres collègues, dans votre propre parti, ne doivent pas toujours trouver très drôle de vous entendre dire, chaque fois que les Québécois — ils peuvent s'y prendre de différentes façons, on peut discuter sur les modalités — essaient d'assurer à la communauté anglophone, pour reprendre le mot de l'amendement de madame, selon des modalités différentes, que nous sommes d'ailleurs en train de discuter, chaque fois, dis-je, que nous voulons assurer spécifiquement à la communauté anglophone ses écoles et les instruments culturels pour son développement.

Nous voulons spécifier ces gestes, comme le gouvernement libéral, dont s'était dissocié à l'époque, le député, dont le chef qu'il vient de renier à nouveau avait pourtant osé présenter comme une voie d'avancement pour la collectivité française; je vous assure que c'est difficile, comme Québécois, de rester impassible à ce genre de geste.

Si j'avais le moindre doute, le moindre doute — je ne dis pas l'assurance — le moindre doute que, même à long terme, le projet de loi tel quel, sans l'amendement de Mme le député, conduit à la moitié du début de l'extinction de la minorité québécoise anglophone, je serais de votre côté, opposé au projet de loi. Mais me faire dire, chaque fois que j'interviens honnêtement en faveur de cela, que je discute avec d'autres sur des motions, que, de toute façon, je suis persona non grata, que parce que j'appartiens à un parti indépendantiste québécois, je n'ai qu'un but en tête, la disparition des Anglais, je n'aime pas me faire accuser de pareil geste.

Je suis en train de travailler honnêtement à trouver une loi qui va assurer, justement, à la communauté anglophone tout ce à quoi elle a droit. Je suis convaincu que je suis en train d'offrir déjà à la communauté anglophone du Québec beaucoup plus qu'aucune communauté francophone, dans le pays que vous défendez, n'a jamais reçu ailleurs.

M. Ciaccia: J'accepte cela.

M. Charron: Et en ce sens-là, que le député ne se soulève pas du fait que, de temps à autre, ses insinuations, pour ne pas dire ses affirmations — parce que je l'ai entendu clairement — provoquent un haut-le-coeur. Je me dis, quand je l'écoute, qu'il s'adresse probablement bien au-delà des cerveaux qui sont à l'entour de cette table. Il sait qu'à chaque fois qu'il ouvre la trappe il a au moins deux importants organes d'information qui s'adressent à la minorité anglophone qui lui réservent les pleines pages, comme s'il était le porte-parole officiel et tenace, et comme si, à chaque fois, il était le seul défenseur, et qu'ici tous les francophones de cette assemblée, de quelque parti que ce soit, n'avaient en tête qu'une idée, éteindre, torturer et chasser la minorité anglaise du Québec. Il est bien servi par les media d'information, le député. Il le sait et il en profite abondamment, je pense, dans ses interventions depuis le début.

Je me dis encore plus, quand nous ne sommes pas témoins, quand il n'est même pas sous la surveillance des media d'information, mais quand, comme homme responsable de l'Assemblée nationale, il rencontre les citoyens anglophones, peut-être inquiets, j'en conviens, lorsqu'il s'agit d'aborder des questions aussi importantes que celles que nous débattons, j'aime autant ne pas entendre ce qu'il doit leur dire. J'aime autant ne pas entendre et, en ce sens, je me demande si le député demeure tout aussi honorable que son titre le maintient. Je ne m'avance pas, je ne l'ai pas entendu, mais j'ai le droit d'exprimer les craintes que j'ai en moi. L'amendement de Mme le député...

M. Ciaccia: M. le Président, il n'y a pas de question de privilège. Je n'en soulève pas, mais c'est une question de règlement...

Le Président (M. Cardinal): Ecoutez. Je ne voudrais pas prendre la place des députés. S'il y a une question de privilège, vous savez que vous devrez donner un avis avant lundi après-midi, 14 heures.

M. Ciaccia: ...mon intention, mais le député de Saint-Jacques m'impute des motifs que je n'ai pas... Il m'a imputé des paroles que je n'ai pas dites.

M. Charron: Mes propos n'ont rien d'irrégulier. Le député intervient abondamment.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je reconnais vos droits, M. le député, mais je ne veux pas intervenir...

M. Ciaccia: Quand on défend les minorités, on se fait accuser d'être contre la majorité. Je regrette, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Il y a une façon de le faire. Je viens de l'indiquer et je ne veux pas qu'il y ait un débat sur les affirmations d'un député en commission parlementaire.

M. Charron: Tout ce que j'ai affirmé est que je n'aime autant pas assister — j'ai le droit de dire que je n'aime autant pas assister — aux rencontres que le député de Mont-Royal peut avoir avec des citoyens de langue anglaise du Québec par le temps qui court, non pas parce que je suis indépendantiste, mais parce que je suis démocrate.

M. Raynauld: ...imputer des motifs.

M. Ciaccia: Oui, cela s'appelle imputer des motifs.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charron: Je n'impute pas de motifs à ces propos. Vous pouvez m'en imputer, si vous le voulez.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Tous ceux qui auront des questions de privilège donneront un avis avant 14 heures, lundi.

M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, l'amendement de Mme le député de L'Acadie a tous les caractères que lui a donnés tout à l'heure le ministre d'Etat au développement culturel, et est même beaucoup plus généreux dans un sens. Le texte de l'article 69 du projet de loi 101, tel quel, a peut-être beaucoup plus d'effet que l'amendement et couvre peut-être beaucoup plus de gens que l'amendement de Mme le député. Je pense que si nous devions adopter le critère de la Communauté anglophone du Québec, non seulement devrions-nous recourir à quelques "tests", le mot ne peut pas être mieux choisi, à quelques critères objectifs.

Prenons le cas qui occupe les journaux de ce temps-ci, le cas d'un pays privé de son chef d'Etat soudainement, qui abrite, comme on le sait, deux communautés sans doute beaucoup plus en guerre que ne peuvent être les communautés du Québec. Si je vous demandais, demain matin — et la question a sans doute déjà été posée dans ce pays — d'identifier à Chypre la communauté turque et la communauté grecque, comment le feriez-vous? Sur la base de la langue maternelle, très probablement, tellement ces deux langues ont des différences. Comment vérifieriez-vous la langue maternelle de chacun? Sur une simple déclaration? Par un test? Par une entrevue?

Nous avons dit: La communauté anglophone du Québec est celle qui est de langue maternelle anglaise, donc qui a probablement été à l'école anglaise. Et, en ajoutant le critère que les parents aient été à l'école anglaise, nous incluons même, madame, des gens qui ne seraient pas inclus dans votre critère basé sur la langue maternelle pour définir la communauté anglophone, parce qu'il y a eu des francophones qui sont allés à l'école anglaise primaire, 75 000 francophones, qui, en vertu de cette loi, et je le dis à regret — obtiennent le droit inaliénable d'inscrire leurs enfants à l'école anglaise.

C'est dur, parce que je ne comprends pas comment un francophone peut mettre ses enfants à l'école anglaise. Il y en a qui l'ont fait. Par respect pour ces gens, parce qu'on les estime désormais par un choix que leurs parents ont fait ou qu'ils ont fait eux-mêmes, peu importe, il ne s'agit pas d'écorcher les gens, nous les estimons membres de la communauté anglophone maintenant, assimilés très probablement, parce que nous nous disons: Un jeune francophone qui est entré à l'école anglaise à six ans, qui a fait tout son primaire, tout son secondaire et éventuellement son université en anglais, doit sans doute encore parler français, le milieu l'y aide, mais il est sans doute d'esprit membre de la communauté anglophone.

Si nous adoptions votre amendement, madame, ce membre d'esprit de la communauté anglophone n'aurait pas le droit d'y aller. Or, nous lui accordons ce droit d'y aller. Nous respectons plus la communauté anglophone du fait que nous disons même à un immigrant qui n'aurait pas été à l'école anglaise, ici ou ailleurs, mais qui aurait déjà un seul enfant à l'école anglaise, le droit d'y inscrire tous les autres qu'il aura. Nous les reconnaissons déjà membres de la communauté anglophone.

Si nous nous basons sur le seul critère de la langue maternelle, cet immigrant n'aurait pas, madame, le droit d'y aller. Voilà donc que, dans un effort rationnel pour le rendre administrable et par respect pour la communauté anglophone du Québec, citoyen à part entière du Québec, nous nous sommes dit que le meilleur critère pour respecter le plus de gens possible membres de cette communauté, était de se dire que quelqu'un qui a passé six ans à l'intérieur de l'école primaire a déjà exprimé un choix d'appartenir à cette communauté, nous le respectons. Nous ne lui demandons même plus de parler l'anglais aujourd'hui. Le député s'en rend-il compte?

Certains francophones, dans des provinces, vont à l'école française et perdent leur français par la suite. Ils sont pourtant de langue maternelle française. Imaginons, aujourd'hui, qu'ici un anglophone de Montréal aurait été à l'école primaire anglaise et, par la suite, se serait marié à une francophone, aurait vécu dans un milieu francophone, et en serait venu à perdre son anglais, comme il arrive si tragiquement à certains d'entre nous dans d'autres minorités. L'hypothèse est presque fantaisiste au Québec, pour une minorité en voie d'extinction, c'est assez curieux. Mais disons que cette hypothèse se réaliserait, qu'un anglophone en vienne à perdre son anglais au Québec, qu'il

deviendrait de langue courante française, il conserverait le droit d'inscrire son enfant à l'école anglaise demain matin, ce que les francophones n'ont plus.

Quand on dit qu'on abolit le libre choix, c'est le contraire, nous réservons à la communauté anglophone du Québec le libre choix. C'est aux francophones que nous le retirons. Mais il n'est aucunement interdit à un Anglais du Québec d'inscrire ses enfants ou à l'école française ou à l'école anglaise, le lendemain de ce projet de loi. Que l'on ne me dise pas qu'on est en train de réduire les droits de la communauté anglophone, nous lui en laissons plus que la majorité de ce pays ne s'en garde.

Voilà donc ce que c'est que de travailler à l'extinction, à la mort lente et à la disparition d'une minorité anglaise, quand on inscrit dans une loi de Charte de la langue française autant de dérogations possibles pour être certains, dans les paragraphes a), b), c), d), de rejoindre tous ceux que le passé et le présent ont fait, et même le futur, puisque ces droits deviendront inaliénables et qu'il suffira d'avoir passé six ans à l'école anglaise pour obtenir l'autorisation d'y inscrire ses enfants en 1990, et ceux de 1990, de les y inscrire en 2020.

Cela ne présuppose en rien la disparition des media d'information qui alimentent le réseau de télévision qui alimentent le Québec abondamment. Il y a plus de postes de langue anglaise dans la deuxième ville française au monde qu'il n'y en a en français. Cette loi n'éteint aucun de ces postes de radio. Elle vous permettra de retourner à CFCF pour combattre cette loi de la façon dont vous l'aviez fait au sujet de la loi 22. Rien n'est interdit là-dedans. La communauté anglophone... Ce pourquoi je m'oppose à l'amendement de Mme le député, c'est qu'il est restrictif à l'égard de la communauté, en la restreignant à la base de la langue maternelle.

Nous disons par cet amendement qu'il suffit presque d'avoir flirté à un moment avec la culture anglaise et à Montréal il est difficile d'y échapper. Il suffit même d'avoir exprimé soit par une inscription scolaire, soit par une préférence dans un mariage... Il suffit à peine d'avoir été approché par la communauté anglaise pour obtenir tous ces droits. Que l'on viennede la Grèce, de l'Italie, du Pakistan ou de l'Ontario, il est écrit, en vertu de cette loi, que cette communauté a non seulement ses droits conservés, mais le pouvoir de les agrandir et de continuer à vivre avec les autres Québécois.

Je vous dis seulement, et j'espère que le député suit attentivement les réponses que le premier ministre attend de ses autres collègues, que si les minorités françaises des autres provinces avaient eu, comme le disait le chef de l'Etat, la moitié du début du commencement d'un pareil traitement, ils ne se plaindraient pas actuellement. On ne serait pas obligé d'être en train de négocier un minimum de respect à leur égard, comparativement à ce qu'on est capable d'offrir.

Je donne donc mon opinion et la raison pour laquelle je m'opposerai à l'amendement de Mme le député, en rappelant, pour la dernière fois, j'es- père, mais je sais qu'il interviendra abondamment encore dans les "tributaires" du député. Qu'il ne se surprenne pas d'être interrompu, quand il s'adresse à nous de cette façon, quand il veut comme attiseur — je ne dis pas fanatique, mais les fanatiques se nourrissent souvent à des sources honorables — de la hargne que l'on essaie de développer actuellement, non pas uniquement à l'égard d'une loi, mais à l'égard d'un choix démocratique d'une population qui date à peine de huit mois, cette espèce de volonté de présenter le gouvernement élu par la majorité des Québécois comme un gouvernement illégitime presque. C'est l'oeuvre à laquelle travaille actuellement un bon nombre d'artisans de la minorité anglophone dont est loin de se dissocier le député de Mont-Royal. Qu'il ne se surprenne pas que, comme francophone — il doit j'espère, à l'occasion le sentir jusqu'au coeur du Parti libéral, s'il y a encore place pour de la dignité et de la fierté dans ce parti... Mais il doit savoir que, comme francophone, je le dis, quelle que soit l'appartenance politique autour de la table, ses propos sont souvent durs à digérer.

M. Ciaccia: J'invoque l'article 96.

Le Président (M. Cardinal): Le député de Mont-Royal, sur une question de règlement.

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président. J'espère que vous me permettrez ces quelques courtes paroles. Je vais m'en tenir aux termes de l'article 96.

Je n'irai pas plus loin, quoique plusieurs des propos du député de Saint-Jacques demanderaient que je lui réponde un peu plus sur ce qu'il a dit. Il m'a accusé d'avoir utilisé des mots comme "assassinat". C'est au sujet du discours que j'ai prononcé. Quant à la question du mot "assassinat", je donne des explications d'après l'article 96. Vu l'importance de ce dont on vient de traiter, M. le Président, j'espère que vous m'accorderez le droit de parole selon l'article 96. Il a dit que j'ai renié...

M. Charron: M. le Président, je retire le mot "assassinat". Le député ne l'a pas employé; il a employé le mot "extinction". Vous en jugerez par vous-même.

M. Ciaccia: Vous avez dit que j'avais renié mon chef, ce que je n'ai jamais fait.

M. Charron: Le coq va chanter.

M. Ciaccia: Non, j'ai dit... Si vous relisez...

M. Charron: Le coq va chanter!

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Un instant! J'ai dit que cette loi avait causé ce qui lui est arrivé et que cela va cau-

ser la même chose à votre parti. Je n'ai pas renié mon chef. J'aurais pu laisser le Parti libéral et je ne l'ai pas fait.

Vous m'avez accusé d'avoir participé à des émissions de CFCF; je n'y ai jamais participé. Je me suis prononcé contre cela. Ce n'est pas tout à fait honnête, M. le député.

M. Charron: C'est votre autre collègue, je m'excuse.

M. Ciaccia: Oui. Quand vous dites que vous aimeriez assister à des rencontres que j'ai, j'aimerais que vous y assistiez. J'aimerais aussi que vous soyez là quand je vais dans d'autres provinces du Canada pour entendre ce que je leur dis, de quelle façon je défends le Québec. Cela me fait mal au coeur; vous ne me connaissez pas.

M. Charron: J'ai lu votre discours à Niagara Falls et je vous assure que c'était loin d'être...

M. Ciaccia: Non, vous ne l'avez pas lu.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Non, vous ne l'avez pas lu, mais je vais vous en envoyer une copie. Vous avez lu quelques extraits de journalistes qui favorisent le Parti québécois et qui ont pris quatre mots de ce discours. Je vais vous l'envoyer, M. le député. Cela me fait mal au coeur quand n'importe quelle minorité, qu'elle soit francophone, anglophone, italienne ou d'une autre ethnie, se fait traiter de cette façon. C'est pour cela que je me prononce. Je défends les francophones, malgré ce que vous dites. Je voudrais que vous assistiez aux discours et aux rencontres que j'ai dans mon propre comté. Je voudrais que vous relisiez mes propos sur le bill 22, en 1974, et vous allez voir. C'est regrettable que vous ayez pris de cette façon mon intervention sur certains principes fondamentaux.

M. le Président, je vais arrêter à ce moment-ci.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, vous vous êtes tenu dans les limites de l'article 96. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Bien brièvement, afin qu'on puisse procéder au vote immédiatement après, s'il y a lieu. Ensuite, c'est l'amendement proposé par l'Union Nationale qui viendra. La proposition faite par le Parti libéral, il est sûr que je ne l'affublerai pas, comme l'a fait le ministre d'Etat au développement culturel, de toutes les épithètes dont il s'est servi tout à l'heure et qui sont, à mon sens, assez justifiées puisque l'amendement est large et difficile à comprendre, encore plus difficile à résumer.

Je comprends la position du Parti libéral actuellement. Après avoir entendu la position du gouvernement, qui s'est exprimée par la loi 101, et la position de l'Union Nationale, exprimée dans notre livre bleu, tenant compte également du bill 22, les corridors se rétrécissent, bien sûr, et, pour en arriver à des amendements, il faut les faire plus larges et sortir un peu des amendements trop précis pour pouvoir couvrir toutes les positions.

Je trouve que cette motion couvrirait chacun des articles a), b), c) et d). Il me semble qu'on devrait procéder un par un, en y apportant ensuite les amendements. Ce sera le cas pour l'Union Nationale dans au moins trois des quatre. On pourrait présenter un amendement, le discuter et l'ajuster ensuite à chacun des articles que nous avons là. Il est difficile, je pense, de déterminer — cela semble difficile puisque le député de Sauvé a posé la question au représentant du Parti libéral tout à l'heure; M. Biron l'a lui-même posée à deux reprises — l'appartenance à la communauté anglophone. Je ne sais pas encore, on n'a pas eu de détermination là-dessus. J'aurais aimé que le Parti libéral, avec son amendement, dépose en même temps un document qui nous aurait démontré sur quoi il voulait se baser, comment il définissait la communauté anglophone et cette appartenance à la communauté anglophone.

On aurait pu s'attendre à une proposition de ce genre et à un document qui aurait pu nous l'expliciter. Si on l'avait eu cela aurait peut-être eu tendance à nous rendre plus compréhensifs envers cette proposition. Mais, dans le contexte actuel, je vois mal qu'on puisse appuyer une proposition de ce genre, qui est à mon sens plus large encore que tout ce dont on a parlé avant, de tests, d'entrevues. D'autres ont la position de pas de test et pas d'entrevue. On a même le libre choix dans tout cela.

Si on accepte une motion aussi large que cela, je me demande comment on va réussir à trouver l'appartenance à cette communauté anglophone.

Quant à l'Union Nationale, notre livre bleu s'est basé sur le projet de loi qui était déposé. Quand on n'est pas le gouvernement, on ne s'attend pas de gagner sur tous les points, non plus que sur 50% des points, on s'attend d'en gagner quelques-uns. En tenant compte de cela, notre livre bleu s'est basé sur cet article de loi. On a proposé des amendements, comme l'a dit tout à l'heure le chef de l'Union Nationale, cela semble un critère assez équilibré et qui peut susciter, je pense bien, pas mal moins de problèmes que les tests qu'on avait avec la loi 22. Cela ne résolvera pas tous les problèmes, c'est sûr, et il y aura quand même des anomalies et des cas qui vont sortir de cette loi qui seront obligés d'être traités un à un. Mais je pense que cette proposition, cette formule nous plaît avec les amendements qu'on y apportera. On les déposera sur cette table et personnellement l'amendement qui sera déposé pour nous au paragraphe a), je m'en ferai un virulent défenseur. On verra si le gouvernement peut céder des choses même si cela n'apparaît pas dans les règlements qui nous ont été déposés hier.

Mais, logiquement, comme Opposition constructive, si on se base sur cet article 69, sans vouloir trouver des choses originales et un amendement qui est aussi large que celui-là seulement

pour le plaisir de trouver un amendement qui sort de l'ordinaire, je pense qu'on peut régler pas mal de problèmes. Si cela ne nous convient pas après que nos amendements auront été bien défendus, encore une fois, ce n'est pas nous comme parti d'Opposition qui en porterons l'odieux, ce sera le gouvernement. C'est notre façon de travailler et c'est comme cela qu'on va procéder immédiatement après, si c'est la fin de cette étude de motion d'amendement. C'est comme cela qu'on va procéder en expliquant brièvement, avec tous les commentaires que cela justifie, chacun de ces articles et ensuite on passera au vote. Je pense que c'est une façon de travailler avec le gouvernement et de démontrer notre appui.

M. le Président, l'esprit est là et on reconnaît que ce qui est apporté par le Parti libéral n'est pas farfelu, loin de là, excepté que cela manque de précision. Je pense qu'on serait plus mal "poigné" avec un amendement de ce genre que de revenir à ce qui existait avant. C'est comme cela qu'on devra procéder, article par article, tout à l'heure avec les a) b) c) et d) et en proposant les amendements sur chacun de ceux-là. En attendant, un peu malgré nous, on devra quand même voter contre cet amendement présenté par la députation libérale.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Mégantic-Compton.

On me permettra très brièvement tout de suite d'indiquer la marche du débat. Lorsque cet amendement aura été soit accepté, soit défait, nous reprendrons l'alinéa a) de l'article 69 et ce sera au tour de l'Union Nationale. Sur ce, je dois indiquer qu'il y a encore devant moi, au moins, la demande de deux opinants, et je donne la parole à M. le député de Taschereau.

M. Guay: M. le Président, après des jours, des semaines, des mois d'hésitation, de tergiversation, de contradiction dont les journaux nous ont fait abondamment part, voici donc que le Parti libéral nous énonce sa nouvelle politique dans le domaine de la langue d'enseignement.

Cette synthèse que veut être l'amendement de Mme le député de L'Acadie est tout naturellement un chef-d'oeuvre d'imprécision, et comment en serait-il autrement du reste, quand il s'agit de concilier l'inconciliable, de réunir en une même position les idées du député de L'Acadie et en même temps du député de Westmount, du député de Montmagny et du député de Mont-Royal, du député de Charlevoix et du député de Jacques-Cartier? Bref, comment aurait-on pu, effectivement, en arriver à une position qui rassemblerait les 26 positions individuelles de ce conglomérat d'intérêts particuliers qu'est ce qu'il reste du Parti libéral du Québec?

Aussi bien, M. le Président, cet amendement ne veut-il absolument rien dire, puisqu'en effet, ce qu'on nous propose, c'est essentiellement, malgré les négations à cet effet, le fameux libre choix scolaire. Bien sûr, dans la meilleure tradition du Parti libéral, depuis six à huit ans, on l'a maquillé; on l'a poudré, on l'a coiffé autrement, si bien que l'on appelle cela maintenant la communauté anglo- phone. Mais, à vrai dire, il est évident qu'il s'agit là du libre choix et, pour paraphraser un slogan publicitaire, il s'agit même du libre choix à l'ancienne servi à la moderne.

Le député de Marguerite-Bourgeoys essaie de nous faire dire et de nous faire croire que cette position est toute naturelle, qu'il s'agit de faire confiance à la population, qu'en fait, le libre choix, cela n'a rien de malicieux, que c'est dans la nature des choses. Si tel était le cas, M. le Président, on doit se demander sérieusement comment il se fait qu'alors qu'il était membre du gouvernement précédent, ce même gouvernement a décidé d'intervenir dans le domaine de la langue et notamment de la langue d'enseignement pour mettre fin, précisément, au libre choix que consacrait la loi 63. Si la loi 63 et si le libre choix étaient si peu dangereux pour la majorité francophone du Québec, on doit se demander, en effet, pourquoi lui et le gouvernement dont il faisait partie sont intervenus à ce sujet.

Il est évident que la position actuelle du Parti libéral constitue un net recul par rapport à sa position déjà fort timide du passé. Afin de justifier la position de son parti, l'inénarrable verbo-moteur qu'est le député de Mont-Royal nous cite abondamment ce qui semble être devenu désormais son livre de chevet, peut-être par insomnie, la constitution de la République socialiste de Tchécoslovaquie, pour nous montrer qu'en Tchécoslovaquie les droits culturels sont abondamment garantis par la constitution. Il faudrait d'abord qu'il y ait un peu plus de cohérence.

Hier, au moment où nous étudiions les articles 2 à 6, si ma mémoire est bonne, on nous a accusés, à tort, de vouloir, par ces articles, amorcer le début de la constitution de la république du Québec, ce qui était évidemment faux, mais, d'une part, on nous dit que des articles de la Charte de la langue française se veulent un début de constitution et, d'autre part, on voudrait voir inscrire dans une loi qui n'est pas une constitution des garanties qui sont d'ordre constitutionnel, comme le texte fondamental de la République tchécoslovaque le démontre.

Un bel exemple, en vérité que celui de Tchécoslovaquie. Après l'exemple que nous a donné le député de Laval, en Chambre, l'autre soir, en invoquant ce merveilleux pays qu'est la Rhodésie, voici qu'on nous donne la Tchécoslovaquie en exemple. Il serait peut-être de bon aloi qu'au-delà de la constitution de la Tchécoslovaquie, on se penche un peu sur la triste réalité qui prévaut dans ce pays depuis le retour à l'orthodoxie en 1968 et que l'on regarde un peu ce que les intellectuels qui ont écrit la charte de 1977 pensent de l'épanouissement culturel en Tchécoslovaquie.

Un certain nombre d'entre eux risquent fort d'y être emprisonnés prochainement pour avoir voulu profiter des dispositions de la constitution tchécoslovaque, et c'est cette constitution qu'on nous cite maintenant abondamment pour soutenir les arguments du Parti libéral en la matière.

En vérité, M. le Président, la position du Parti libéral apparaît être, elle aussi, un retour à l'orthodoxie, à l'orthodoxie libérale fédérale, à I'ortho-

doxie du "Liberal Party of Canada", dirigé par M. Pierre Trudeau. En comparaison, pour utiliser un langage que le député de Mont-Royal comprendra sans doute, puisqu'il évoque la Tchécoslovaquie, la loi 22 était du révisionnisme, du déviationnisme, à la rigueur. Mais voilà qu'enfin le Parti libéral du Québec, pour ce qu'il en reste, revient à une saine orthodoxie libérale fédérale et ce faisant, M. le Président, il nous démontre ce que le député de Saint-Jacques annonçait fort éloquemment hier soir dans son remarquable discours, lorsqu'il disait que le débat sur la langue de l'enseignement nous démontrerait quels sont les intérêts qui sous-tendent le Parti libéral, quels sont les intérêts que défend cette formation politique. Eh bien! nous le savons avec cet amendement. Ce sont les intérêts de la majorité économique du Québec, qui est en même temps la majorité "Canadian" dans ce vaste pays qu'il veut maintenir, coûte que coûte.

Ce faisant, le Parti libéral du Québec nous démontre qu'en fait il n'existe plus comme tel depuis le 15 novembre et qu'il est devenu, tout simplement, une succursale du Parti libéral du Canada et de l'orthodoxie fédéraliste de M. Trudeau.

Dans ces circonstances, M. le Président, compte tenu de l'aspect à tout le moins vague, imprécis de l'amendement de Mme le député de L'Acadie, qui ouvre la porte à un arbitraire pire que celui de la loi 22, qui ouvre la porte aux pouvoirs assimilateurs du libre choix qu'on a connus de 1969 à 1974, compte tenu de ce recul en arrière honteux, de la part d'un parti qui siège à l'Assemblée nationale du Québec, compte tenu de cette rupture avec la constante historique, la marche en avant du peuple québécois vers son destin, pour toutes ces raisons, M. le Président, j'ai l'intention de voter contre cet amendement.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie. Mais je vous ai déjà indiqué, confidentiellement, qu'il vous restait deux minutes.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.

Je n'ai jamais entendu autant de sophismes autour d'une table. Tout à coup, chacun d'entre nous ne sait pas s'il appartient à la communauté francophone ou anglophone. C'est assez étonnant. Ce que le gouvernement a choisi de faire, c'est de prendre le critère le plus facile, mais non équitable et qui ne respecte pas la réalité sociologique et historique de cette province. Cela le regarde. Mais, quand on essaie de laisser entendre qu'il s'agit d'un libre choix, vous savez fort bien, M. le député de Taschereau, que, quand on parle de quelqu'un qui appartient à la communauté anglophone et qu'on le définit, d'abord et avant tout, comme quelqu'un de langue maternelle anglaise et de culture anglaise et de ceux qui se sont associés à cette culture et qui, par conséquent, participent à cette même langue dans sa totalité, il ne s'agit pas d'un libre choix, et je tiens à le dire.

Maintenant, c'est de bonne guerre pour le gouvernement de brandir, d'un côté, les tests, alors qu'il n'en a jamais été question. On sait que cette perception chez les anglophones ou, enfin, la communauté anglophone, crée de l'anxiété. De l'autre côté, on brandit le libre choix, alors qu'également on sait que, comme collectivité ou majorité, les francophones ne veulent pas du libre choix, quoique, individuellement, si on le leur demandait, ce serait peut-être une autre chose. Alors il ne s'agit ni de l'un, ni de l'autre. Ce que le gouvernement refuse de faire, c'est ce que des organismes, comme le Conseil supérieur de l'éducation, comme le Conseil scolaire de l'île de Montréal, comme le Conseil des évêques, comme la CEQ, même, ont dit, l'école anglaise doit être aux véritables anglophones et non pas l'ouvrir comme pour, tout à coup, masquer la réalité et montrer la générosité du gouvernement, qu'elle soit ouverte aux Grecs, aux Ukrainiens et aux gens qui arriveront à l'école anglaise sans même parler l'anglais, et c'est ça, la réalité. C'est ça qu'on refuse de faire, et c'est pour ça que de ce critère, on n'en parle pas et qu'on attaque la position du Parti libéral qui, au niveau des principes, est inattaquable, alors que celle du gouvernement est pleine de trous et de failles et un avenir prochain vous le prouvera!

Le Président (M. Bertrand): Merci, Mme le député de L'Acadie.

M. Morin (Sauvé): On verra bien. Vote sur la motion

Le Président (M. Cardinal): Remarquez que ceci n'est pas une réplique. Il n'y en a pas en commission parlementaire, mais cependant, il est d'usage de permettre au parrain de la motion de terminer. Je considère que je puis mettre aux voix cette motion.

Est-ce que je fais l'appel nominal? D'accord.

Alors, la motion que nous étudions, si les gens s'en rappellent, est une motion d'amendement à l'article 69, alinéa a). Je pense que je n'ai pas besoin de relire. Il s'agissait tout simplement d'ajouter: ... que les enfants appartenant à la communauté anglophone seraient compris dans les dispositions de l'article.

Alors, on m'indiquera si on est pour ou contre la motion.

M. le député de Saint-Maurice n'est pas ici. M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Taschereau.

M. Guay: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Bourassa. Il n'est pas présent. M. le député de Bourget.

M. Laurin: Contre.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sauvé.

M. Morin (Sauvé): Contre.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Beauce-Sud n'est pas présent. M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Pour.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Rouyn-Noranda n'est pas présent.

La motion d'amendement est rejetée. Oui, M. le député de Sauvé.

M. Morin (Sauvé): Je demande la parole, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): A quel sujet?

M. Morin (Sauvé): ... si vous voulez bien me la donner.

Le Président (M. Cardinal): Sûrement.

M. Morin (Sauvé): Puisque maintenant que Mme le député a soumis un amendement, lequel a été défait, je voudrais vous demander la permission de déposer un amendement également qui est plus un amendement qu'autre chose.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le député de Sauvé. Je ne sais pas si vous m'avez entendu tantôt. Vous avez eu la motion principale déposée par M. le député de Bourget, la motion d'amendement déposée par Mme le député de L'Acadie et, selon une tradition immémoriale, je m'en remets aux mains de l'Union Nationale.

M. Morin (Sauvé): Je me range à votre décision.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Peut être avons-nous le même amendement, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas préjuger, mais... Allez-y. Allez-y.

Motion d'amendement M. Rodrigue Biron

M. Biron: Je voudrais proposer une motion d'amendement qui se lirait comme suit: "Que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en ajoutant, dans la deuxième ligne, après le mot "... primaire..." les mots suivants: "... ou secondaire."

Le Président (M. Cardinal): Un instant, si vous permettez, M. le député de Lotbinière. Vous avez eu l'amabilité de me donner tout de suite le texte de votre amendement. Il n'y aura pas de problème sur votre droit de parole, mais pour les membres de la commission, on va attendre que le texte soit distribué. Je vais le relire, non pas parce que vous n'avez pas une belle voix et qu'on ne vous a pas bien entendu, mais tout simplement pour que la présidence prenne connaissance de l'amendement.

C'est un amendement à l'article 69. "Que le paragraphe a) soit modifié en ajoutant, à la deuxième ligne, après le mot "... primaire ..." les mots suivants: "... ou secondaire "

Je dois d'abord décider de la recevabilité de la motion, je ne me ferai pas informer. Je la déclare immédiatement recevable, en vertu de l'article 70, et je vous cède la parole, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, par cet amendement, nous voulons reconnaître le paragraphe ou

l'alinéa tel que présenté par le gouvernement à l'accession à l'école anglaise pour les enfants dont le père et la mère ont reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais.

Mais, ici, avec l'amendement, nous voulons couvrir certains cas bien spécifiques de gens qui, par exception, n'ont pas reçu l'enseignement primaire en anglais au Québec mais qui font réellement partie de la communauté anglophone. Il y a des enfants qui sont arrivés au Québec à l'âge scolaire, mais qui, au secondaire, étaient intégrés, naturellement, à l'époque, à l'école anglaise et qui, aujourd'hui, font véritablement partie de la communauté anglophone. Ils ont pu arriver ici vers l'âge...

Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce que c'est?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Ne faites pas comme ces gentilshommes.

M. Biron: Je vais vous expliquer, Mme le député de L'Acadie, comment faire maintenant pour définir ceux à qui nous voulons permettre d'aller à l'école anglaise? Ces enfants ont véritablement, à notre point de vue, droit d'aller à l'école anglaise. Il y a aussi le deuxième cas, il y a deux cas bien particuliers, le deuxième cas qui arrive surtout dans nos petites paroisses, dans les Cantons de l'Est, ou en Gaspésie, en particulier, où on a très peu d'enfants anglophones d'âge scolaire. Les parents ont dû les envoyer à l'école française au primaire et, lorsqu'ils arrivent au secondaire, déjà les écoles sont un peu plus loin, mais ils peuvent bénéficier d'écoles secondaires anglaises, dans la région de Sherbrooke, en particulier, ou dans la région de Gaspé. A notre avis, ces gens aussi devraient avoir le droit d'aller à l'école anglaise.

Si on accepte cette motion d'amendement telle quelle, j'ai l'impression qu'on va même empêcher certains transferts qui se feront peut-être en septembre de l'école française à l'école anglaise, pour parents qui vont vouloir assurer à leurs enfants le droit, pour eux et pour les descendants de leurs enfants, d'aller à l'école anglaise éventuellement. En plus, on va encourager peut-être les parents anglophones à envoyer leurs enfants à l'école primaire française, quitte à les en sortir par après pour les envoyer à l'école anglaise secondaire. Ces anglophones deviendront véritablement des gens qui vont vivre en français beaucoup plus facilement s'ils peuvent envoyer leurs enfants à l'école primaire française.

Cela ne touche peut-être pas beaucoup de Québécois, quelques centaines, peut-être quelques milliers, mais ce sont des cas bien spécifiques que nous voulons couvrir par cette motion d'amendement, des cas spécifiques qui ont été oubliés certainement, mais pas par mauvaise vo- lonté de la part du gouvernement, des cas spécifiques qui nous ont été référés, à nous personnellement, par nos députés. J'ai avec moi le député de Mégantic-Compton, qui nous a parlé de cas bien spécifiques dans son comté. Le député de Gaspé m'a parlé de quelques cas bien spécifiques dans son comté.

M. le Président, j'ai voulu brièvement présenter ma motion. J'ai l'impression qu'elle sera acceptée avec l'ajournement de ce soir, mais je voudrais que le gouvernement nous dise véritablement ce qu'il pense de ces deux cas spécifiques. C'est dans cette ferme intention que j'ai présenté cette motion.

En terminant, je suis convaincu que les véritables anglophones qui ont étudié à l'école secondaire anglaise au Québec devraient avoir le droit, pour eux et leurs descendants, au libre choix de l'école anglaise ou de choisir, s'ils le veulent aussi, l'école française.

Le Président (M. Bertrand): M. le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Laurin: M. le Président, malgré tout le regret que j'en éprouve, nous voterons contre cet amendement. Nous avions étudié cette possibilité, lors de l'étude qui a précédé l'adoption de ce critère, comme vient de le dire le chef de l'Union Nationale. Il reste que ceci s'applique à un très petit nombre d'individus et ce à quoi le critère à la recherche duquel nous étions était quand même un critère général. Comme nous l'avons dit, c'est le moins mauvais que nous avons choisi, sans avoir la prétention de croire que c'était un critère parfait. Il est difficile d'édifier un critère à partir des exceptions. Lorsque nous cherchons un critère, nous cherchons celui qui s'applique au plus grand nombre de cas, de façon qu'il soit le plus juste possible. Ceci, pour expliquer la méthodologie que nous avons suivie.

Par ailleurs, il est peut-être vrai qu'il est certains enfants anglophones qui n'ont pu aller à l'école primaire anglaise, parce que le système scolaire québécois ne leur offrait pas la possibilité de ces classes anglaises. Nous avons fait une enquête à ce sujet, et il semble que le cas soit extrêmement rare, parce que, même dans les régions où le nombre d'élèves de langue anglaise est très limité, dans la plupart de ces régions, pour ne pas dire toutes — et le ministre de l'Education me confirmera ou m'infirmera cela — le gouvernement du Québec met à la disposition de ces élèves de langue anglaise, sinon des écoles anglaises, du moins des classes anglaises qui, bien sûr, peuvent parfois être situées à l'intérieur de l'école française. Mais ces élèves de langue anglaise peuvent suivre un enseignement en anglais à l'intérieur de classes anglaises, bénéficier du transport scolaire, bénéficier également d'enseignants dans leur langue et bénéficier de tous les autres avantages que procure l'enseignement en langue anglaise tel que défini par le ministère.

Notre raison fondamentale est plus profonde que celle-là. Malgré ce qui a été dit autour de cette

table, nous avons la certitude que le critère que nous avons choisi est quand même celui qui se rapproche le plus possible du critère d'appartenance à la communauté anglophone ou à celui du critère de langue maternelle anglaise. Cette appartenance ne se définit pas in abstracto, elle se définit par des gestes que posent les gens.

Il nous semble que le premier geste que pose quelqu'un qui veut appartenir à la communauté culturelle anglaise, c'est bien d'envoyer son enfant à l'école primaire. C'est la raison pour laquelle nous retrouvons à l'école primaire les enfants de ceux qui sont des anglophones d'origine, qui appartiennent aux groupes ethniques communément considérés comme anglophones, soit les Ecossais, les Irlandais, les Anglais d'Angleterre ou de la communauté anglophone mondiale ou américaine. Nous retrouvons aussi dans les écoles anglaises les gens qui, dans l'histoire du Québec, pour toutes sortes de raisons occupationnelles, économiques ou autres ont opté pour la communauté culturelle anglaise. Ceux-ci, évidemment, envoient leurs enfants à l'école anglaise, quelle que soit l'origine ethnique à laquelle ils appartiennent.

Il est donc évident que dans l'école anglaise se retrouvent ceux qui appartiennent d'une façon immémoriale à la communauté anglaise et ceux aussi qui, au Québec, ont choisi cette communauté et qui l'ont prouvé, justement, par le geste le plus naturel, le plus normal, le geste premier qui consiste à envoyer son enfant à l'école anglaise. Donc, si nous avons mis le mot "primaire" dans le premier paragraphe a), c'est précisément parce que ce mot "primaire" suffisait pour montrer l'appartenance d'un enfant ou de sa famille à une communauté bien distincte.

Si par ailleurs nous ajoutions "secondaire", nous élargirions, d'une façon qui nous semble excessive, le critère. Parce que nous savons très bien que, dans bien des cas, particulièrement au Québec, en raison de facteurs historiques, il arrive très souvent que, sans aucun égard à l'appartenance francophone, italophone ou anglophone d'une famille, on décide, pour des raisons de commodité ou d'acquisition d'une autre langue, soit le français, soit l'anglais, selon le cas, on décide d'envoyer son enfant, ou l'enfant décide lui-même d'y aller, dans une école différente de celle où il a fait ses études primaires. C'est le cas pour un très grand nombre de francophones en particulier. Les statistiques que nous avons consultées montrent que le nombre d'élèves francophones, par exemple, aux écoles secondaires est proportionnellement plus élevé que celui qui se rend aux écoles primaires. La proportion est encore plus grande lorsqu'il s'agit des collèges, et encore plus grande, lorsqu'il s'agit des universités.

Par exemple, nous savons que, l'an dernier, il y avait 34% d'élèves francophones à l'Université McGill. Quand on s'éloigne du primaire, on s'éloigne de l'esprit qui a présidé au choix de ce critère et on se retrouve dans une situation qui peut être expliquée par des facteurs historiques. Donc le critère, à ce moment, deviendrait beaucoup moins strict, beaucoup moins rigoureux, beaucoup moins fondé, aussi, par rapport aux principes qui ont présidé à l'élaboration de notre politique.

C'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que nous avons, après y avoir pensé, éliminé l'épi-thète "secondaire" dans le paragraphe a) qui est actuellement à l'étude.

Le Président (M. Bertrand): Merci, M. le ministre. S'il y a un représentant de l'Opposition officielle qui désire prendre la parole avant que je cède, au député de Mégantic-Compton, son droit, tel qu'il l'a demandé, c'est votre droit.

Mme Lavoie-Roux: Je vais lui laisser la parole, je parlerai après.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Très brièvement encore, puisque l'exposé a été fait par le chef de l'Union Nationale. Je vois que le ministre a pris connaissance de l'amendement qu'on se proposait d'apporter, qui était compris dans notre livre bleu. Je vois qu'il s'est penché sur le problème assez longuement pour nous fournir des explications qui répondent passablement aux questions qu'on se posait.

Je dois vous dire que ce qu'on couvre actuellement ce sont des cas très isolés, je le sais. Il faut dire qu'il y a des enfants du primaire qui, pour être dans le nombre de ceux qui sont incorporés dans la communauté canadienne anglaise — il y a un transport d'organisé dans la région des Cantons de l'Est — font plus de 80 milles par jour d'autobus actuellement pour pouvoir rejoindre une école primaire. Bien sûr, ceux-là se qualifient, mais, comme il y a des limites, il arrive, dans des régions un peu plus éloignées, que des jeunes du primaire ne peuvent pas compter sur un transport. Je vois la difficulté avec laquelle le ministre nous répond.

Il y a des régions, actuellement, qui ne sont pas pourvues de classes anglaises et qui sont vraiment trop loin; question transport, il n'y a plus moyen de rejoindre ces régions. Ce ne sont pas des enfants qui seront incorporés à la communauté canadienne anglaise. Je pense que ce n'est plus possible, rendu au niveau du secondaire, parce qu'on se rend compte que ces parents, dont les enfants fréquentent l'école primaire dans des régions aussi éloignées — peut-être pas éloignées tant que cela parce que c'est une région développée comme ailleurs — mais à cause des communautés anglophones qui disparaissent des petits villages, comme dans les Cantons de l'Est, et qui se centralisent davantage à Lennoxville et à Sherbrooke, il arrive que ces jeunes, de famille anglophone, deviennent des francophones. Cela n'a peut-être pas été dit souvent, mais cela devient des familles francophones.

Je n'ai peut-être rien contre cela, excepté que je dois vous dire que cela est parfois un cauchemar dans des familles et ce sont des cas pénibles, quand il y en a. C'est comme cela qu'on a soumis l'amendement aux partis de joindre le mot "se-

condaire". Si cela ne devait pas répondre... Je sais qu'il est vrai que beaucoup d'élèves, beaucoup de familles francophones, si on joignait le mot "secondaire", profiteraient de cela ensuite pour être reconnus anglophones. Vous connaissez l'esprit, actuellement, des gens qui envoient leurs enfants à l'école secondaire anglaise. Ce n'est pas pour en faire des Anglais, c'est pour leur faire apprendre l'anglais. Parce que l'anglais est tellement mal enseigné aux francophones, c'est pour leur faire apprendre un peu d'anglais. On n'en fait pas des anglophones, on tâche d'en faire des gens un peu plus bilingues. Je ne vous cache pas qu'avec l'argumentation que vous m'avez donnée cela demeure un cas isolé. Je ne sais pas ce que vous pourriez me répondre pour aider à l'ajuster, je vois que vous discutez chaudement avec le ministre de l'Education. Je me demande ce qui pourrait ajuster ces familles isolées dans le Québec. On sait combien la langue maternelle prend aux tripes les familles. Je me demande comment on pourrait réagir pour aider ces gens, si ce n'est pas en ajoutant le mot "secondaire".

Encore là, en parlant de secondaire pour les cas isolés, ce n'est pas avec ceux-là qu'on anglicise le Québec. Comme je vous l'ai dit, ce sont de rares cas. On n'en fait pas des anglophones, on en fait des gens qui voudraient tout simplement être capables de communiquer dans leur langue maternelle.

Le Président (M. Bertrand): Merci, M. le député de Mégantic-Compton. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, si vous me permettez...

M. Grenier: Je m'excuse, si vous me permettez, j'ai oublié une question bien technique. Est-ce que le ministre, qui a fait des recherches, pourrait nous produire des documents sur les chiffres qu'il a pris? Je serais peut-être surpris d'apprendre que c'est encore plus rare que je pense, mais je sais que vous avez chez vous des équipes. En tout cas, vous avez plus de possibilités, du côté des équipes de recherche, qu'on peut en avoir dans un parti d'Opposition. Si vous pouviez déposer les documents qui nous disent exactement combien il y a de cas de ce genre, nous l'apprécierions.

M. Morin (Sauvé): Pour compléter la pensée du député: vous voulez parler du cas de parents qui, étant allés à l'école secondaire, seraient habilités à envoyer leurs enfants à l'école anglaise...

M. Grenier: C'est cela.

M. Morin (Sauvé): ... par rapport au nombre de ceux que nous reconnaîtrions si nous ne retenions que le critère de la scolarisation primaire des parents. Est-ce bien cela? Vous ai-je bien suivi?

M. Grenier: Oui. Si vous permettez, je vous donne une explication qui va peut-être rejoindre la vôtre.

Si la loi est adoptée telle quelle, l'élève qui ne pourra pas fréquenter le primaire à cause des difficultés qu'on a énumérées, c'est à la deuxième génération que cela se pose. Il est fils d'Anglais. J'aimerais connaître pour cette deuxième génération combien il y en a qui seront privés de s'incorporer à la communauté canadienne-anglaise.

M. Morin (Sauvé): Je peux essayer de trouver la réponse, mais je ne suis pas sûr qu'on puisse la trouver à moins de procéder à une sorte de recensement général des commissions scolaires; cela pourrait prendre pas mal de temps. Mais, si le député y tient, je puis demander que la recherche soit effectuée, mais combien de semaines faudra-t-il? Je n'en sais rien.

M. le Président, je pourrais m'entretenir de cela dans le particulier avec le député Au fond, c'est une question assez intéressante; on pourrait peut-être au moins s'assurer des chiffres.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Si vous me le permettez, je voudrais parler sur l'amendement proposé par le député de Lotbinière, en citant, pour donner mes vues sur l'importance ou sur la nature de cet amendement, quelques propos auxquels s'est référé le député de Saint-Jacques d'un discours que j'ai donné à Niagara Falls. Je crois que les paroles que j'ai prononcées à Niagara Falls s'appliqueraient pour donner certaines vues quant à la portée de cet article. Cela nous permettrait de voir si cet article devrait être accepté de telle façon ou s'il devrait être accepté tel que rédigé dans le projet de loi 101. Pour comprendre la portée de l'article, question de langue d'enseignement pour ceux qui doivent être admis à l'école anglaise par dérogation à l'article 68, il faut — et je cite mon discours — comprendre ce qui se passe au Canada. On parle d'éducation ici au Québec et on parle de l'option Québec. "Pour comprendre ce qui se passe au Canada, il faut d'abord comprendre de quel pays il s'agit. Il est également important de connaître et de comprendre l'histoire et la nature du peuple canadien-français. Parce que je ne suis pas né dans ce pays et que, depuis mon enfance, j'ai participé à la vie des deux peuples fondateurs, j'ai pu observer les relations entre anglophones et francophones tant de l'intérieur que de l'extérieur. J'ai eu la chance qu'ont malheureusement trop peu de Canadiens de voyager beaucoup dans tout le pays". Entre parenthèses, M. le Président, c'est une traduction d'un discours que j'ai prononcé en anglais à un auditoire anglophone qui venait de tout le Canada.

M. Charron: J'invoque le règlement.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Saint-Jacques, sur une question de règlement.

M. Charron: J'invoque le règlement. Je déplore que cela s'adresse au député de Mont-Royal, mais, cette fois, ce n'est pas sur la teneur de ses propos, mais plutôt sur la régularité quant à notre règlement de ses propos. Je n'ai pas d'objection à ce qu'il revienne à ce fameux discours de Niagara Falls, mais je doute qu'il ait été en train de parler, à ce moment, de l'amendement proposé par le député de Lotbinière sur la pertinence de joindre les mots "ou secondaire" dans le projet de loi qui n'était même pas déposé, si je me rappelle bien, à l'époque, pas plus que l'amendement du député, d'ailleurs.

Si par hasard le député traitait de ce sujet, je n'ai aucune objection, mais nous sommes à une heure avancée de nos travaux et le règlement nous oblige à nous en tenir à la pertinence d'ajouter les mots "ou secondaire" dans le projet de loi.

Le Président (M. Bertrand): J'accepterai une intervention du côté de l'Opposition.officielle pour justifier l'intervention du député de Mont-Royal.

M. Lalonde: M. le Président, cela semble bien simple, deux mots "ou secondaire". Il reste, surtout si on a suivi les propos des intervenants jusqu'à maintenant, que, dans la réalité, cela change des choses. Pour le député de Mont-Royal, afin d'expliquer quel sera son vote ou son attitude à l'égard de cette motion d'amendement, il est tout à fait pertinent, tout à fait indiqué d'exprimer quelle est sa conception de la société québécoise, à savoir est-ce qu'on devrait élargir, par exemple, le critère boiteux qu'on a actuellement?

M. Charron: N'exagérons rien.

M. Lalonde: Je pense que c'est tout à fait dans l'ordre des choses que le député se fonde sur une conception qu'il a de la société canadienne et de la société québécoise en particulier, des différents peuples et que, par référence à un discours qu'il a fait, il en informe la commission.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Saint-Jacques et M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je veux simplement dire que, dans le contexte de cet article 69, sur chacun des articles, il peut arriver effectivement qu'on ait à recourir à des exposés qui, très souvent, peuvent déborder le cadre limité de la motion d'amendement. Le député de Mont-Royal m'ayant assuré, avant de commencer sa citation, qu'elle se situait dans le cadre de la discussion sur la motion d'amendement formulée par le député de Lotbinière, j'attends d'avoir entendu l'extrait de ce discours à Niagara Falls pour, évidemment, juger de la pertinence ou pas de cet exposé dans le cadre du débat.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je serai très bref, je ne prononcerai pas tout le discours, seulement un certain extrait, merci.

M. de Bellefeuille: Vous n'aurez pas assez de vingt minutes.

M. Ciaccia: Je continue. J'ai eu la chance, qu'ont malheureusement trop peu de Canadiens, de voyager beaucoup dans tout le pays. J'ai vu plusieurs aspects et plusieurs régions et j'ai fait l'expérience du contraste entre les luxueux fauteuils tournants de conseils d'administration et les caisses d'oranges qui servent souvent de sièges dans les conseils.d'Indiens. Je connais la situation pour l'avoir étudiée, si je puis dire, à l'école de la vie. Permettez-moi donc de vous faire part de quelques-unes de mes impressions de la réalité canadienne, et je crois que cela s'applique à la question que nous discutons ici.

M. de Bellefeuille: Quels sont les saints du jour?

M. Ciaccia: A l'époque de la confédération, les Canadiens français hors du Québec formaient un assez fort pourcentage de la population.

M. Charron: J'invoque le règlement.

M. Ciaccia: Je ne le citerai pas, s'il vous plaît.

M. Charron: Je sais que le député de Mont-Royal meurt d'envie...

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Mont-Royal, indépendamment de l'argumentation, je dois donner la parole au député de Saint-Jacques qui veut intervenir sur une question de règlement.

M. Charron: Je crois qu'on peut forcer l'interprétation du règlement. Même le député de Marguerite-Bourgeoys a eu du mal à se retenir de rire en le faisant.

M. Lalonde: C'est à l'encontre du règlement, M. le Président. M. le Président, l'article 96.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, nous sommes sur un des articles les plus importants du projet de loi. L'amendement n'est peut-être pas majeur, mais il peut être significatif dans l'application du projet de loi. S'il peut y avoir une certaine attitude quant à la conception de la société canadienne ou québécoise lorsqu'on aborde un article, j'en conviens, avec une certaine limite, mais lorsqu'on est sur un amendement aussi précis, que l'on ne me dise pas que l'on peut ici donner sa conception de l'humanité quand il s'agit de savoir si nous incluons les enfants dont les parents auraient reçu l'enseignement secondaire en anglais au Québec.

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Mont-Royal sur la question de règlement seulement.

M. Ciaccia: Vous avez rendu, je crois, la décision que je pouvais citer certains extraits de mon discours. Je crois que c'est très pertinent de savoir si le père ou la mère a reçu, au Québec, l'enseignement primaire ou secondaire en anglais. On parle de Québec, est-ce que ce devrait être Québec ou le reste du Canada? Je crois que j'ai le droit de faire une intervention.

M. Charbonneau: C'est justement cela.

M. de Bellefeuille: Non, ce n'est pas cela dont il s'agit...

M. Ciaccia: Sur la question de règlement, l'article que nous discutons dit: "Par dérogation à l'article 68, peuvent recevoir l'enseignement en anglais, à la demande de leur père et de leur mère, a) les enfants dont le père ou la mère a reçu au Québec..."

J'ai le droit de toucher à cette question.

Le Président (M. Bertrand): Sur la question de règlement, M. le député de Mont-Royal, je pense avoir été d'une certaine souplesse dans la première interprétation que j'ai donnée tantôt à la question de règlement invoquée par le député de Saint-Jacques. Je vous ai laissé lire un extrait de votre discours et je dois noter qu'après la lecture de ce premier extrait, parce qu'il semblait y en avoir d'autres, vous n'aviez certainement pas touché à la motion d'amendement —je veux bien spécifier la motion d'amendement — qui demande d'ajouter le mot "secondaire".

Je voudrais aussi que vous notiez, M. le député de Mont-Royal, que ce genre d'intervention que vous faites — je réitère ce que j'ai dit tantôt — peut fort bien se situer dans le cadre de la discussion que nous avons sur l'article 69.

Je ne vous donne pas de directive sur ce que vous pourriez faire.

Je vous demanderais de réfléchir sur l'opportunité qu'il y aurait pour vous de retenir certains extraits de ce discours, par exemple, pour la discussion de l'alinéa b) où, je pense, il est plus fortement question de rapports qui pourraient exister entre le Québec et le Canada.

Alors, M. le député de Mont-Royal, je vous demande de vous en limiter, s'il vous plaît, à la discussion de la motion d'amendement formulée par le député de Lotbinière et qui demande d'ajouter les mots "ou secondaire"

M. Ciaccia: Très bien, M. le Président, puisque je vais prendre les paroles que vous avez prononcées, je ne continuerai pas maintenant de citer le discours. J'y reviendrai quand nous discuterons l'article 69a, mais je voulais seulement attirer l'attention du député de Saint-Jacques sur certains propos que j'avais tenus. J'y reviendrai quand nous discuterons d'autres articles.

Merci.

M. de Bellefeuille: Quelle joie!

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de l'amendement...

M. Ciaccia: Je ne sais pas si vous savez pourquoi je le fais...

M. Lalonde: Avant de commencer, je voudrais rappeler au député de Saint-Jacques que, si je conserve ma bonne humeur, généralement, durant ces débats, il ne doit pas en conclure un manque de sincérité dans mes propos.

M. le Président, on voit, à cet amendement, et à l'attitude un peu tiraillée du gouvernement devant cette motion, jusqu'à quel point le critère apparaissant au paragraphe a) est boiteux, artificiel, jusqu'à quel point il crée des problèmes. C'est très difficile, presque aussi difficile pour un député de l'Opposition que pour le ministre d'Etat au développement culturel de discuter d'un tel amendement dans le cadre de ce critère, étant donné que ce qu'on donne d'une main, on l'enlève de l'autre, ou, quand on veut donner un pouce, on en donne un pied à d'autres. Les conséquences de chaque élargissement sont souvent difficiles à mesurer. Le ministre de l'Education a même parlé d'une enquête qui durait plusieurs semaines seulement pour savoir combien d'anglophones qui auraient dû fréquenter une école francophone par manque de service d'enseignement en anglais, dans leur région, se retrouveraient à être... J'ai peut-être mal compris. Cela avait l'air un peu mêlé, pas vos propos, mais, enfin, l'échange. D'ailleurs, le ministre de l'Education a hésité à saisir, d'ailleurs, quel genre d'enquête le député de Mégantic-Compton lui demandait.

Enfin, quant à moi, compte tenu de la faiblesse, de la complexité, en pratique, des injustices qui sont créées par ce critère dans le paragraphe a), je pense qu'on doit s'attacher à deux critères, à deux éléments pour décider si on appuie ou non cet élargissement.

D'un côté, le critère, tel qu'il est là, crée — on l'a expliqué auparavant — une injustice à l'égard des "vrais" anglophones, comme Mme Lysiane Gagnon le disait, qui auraient envoyé leurs enfants dans le secteur français, soit par nécessité, comme le député de Mégantic-Compton l'a bien décrit, soit par choix. Plusieurs anglophones l'ont fait en reconnaissant le caractère de plus en plus français du Québec et ont fait fréquenter à leurs enfants l'école primaire française. Ils se trouvent ainsi privés et à priver leurs enfants, lorsqu'ils deviendront des parents, du droit de faire fréquenter l'école anglaise à leurs enfants, étant donné qu'ils sont demeurés des anglophones.

Le danger d'ouvrir le critère a été mentionné par le ministre d'Etat au développement culturel, à savoir qu'un plus grand nombre de francophones fréquenteraient l'école anglaise au secondaire qu'au primaire, si j'ai bien compris. Le ministre n'a pas donné de chiffres, mais il a affirmé — je le crois — que le nombre est plus élevé.

Toutefois, en tenant compte de toute l'économie de la loi linguistique en vigueur actuellement et de celle qui, si elle ne fait pas l'échec que je crains étant donné son aspect coercitif, en ce qui concerne la francisation des entreprises, la promotion de la langue française dans toutes les activités du Québec... Je choisirais de réparer les

injustices créées justement par l'aspect artificiel de ce critère, tout en faisant confiance qu'en élargissant à la faveur des francophones, le droit de fréquenter l'école anglaise, on ne créerait quand même pas un danger pour l'épanouissement, la survie et le maintien de la culture française et ce "danger" d'ouvrir la possibilité à plus de francophones de faire fréquenter l'école anglaise à leurs enfants ne se réaliserait pas.

Vous voyez le tortueux chemin que j'ai dû suivre pour tenter de vous démontrer pour quelles raisons je vais voter pour cet amendement. S'il est tortueux, c'est que l'inspiration de cet article m'impose ce cheminement très complexe et je crains qu'on ne doive d'ici à la fin de ce chapitre s'imposer cette torture.

Le Président (M. Bertrand): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je vais être extrêmement brève parce que le député de Marguerite-Bourgeoys a fait valoir les arguments que je me proposais d'invoquer. Ce n'est pas grave. Mais je ne pensais pas que si tôt, il nous serait donné l'occasion de faire une démonstration aussi concrète du critère boiteux que le gouvernement a adopté pour déterminer sa politique dans le secteur de la langue de l'enseignement. Ce ne sont là que quelques exemples et on n'est même pas sortie de la salle.

Je sais fort bien, j'ai cru entendre le ministre d'Etat au développement culturel parce que j'ai eu quelques moments d'inattention... Il est vrai que dans les polyvalentes anglaises à l'extérieur de Montréal, il y a, je pense, à Galt, Sherbrooke... — Gaspé, je suis moins familière — un assez grand nombre d'élèves francophones, peut-être plus finalement que dans les écoles polyvalentes de la région de Montréal. Je pense que le député de Mégantic-Compton l'a expliqué, très souvent, ces enfants y sont allés parce que c'était le seul moyen pour eux de faire un apprentissage de la langue seconde, un peu valable, surtout, que dans les régions rurales on sait fort bien que les services d'enseignement en langue seconde sont souvent encore plus déficients qu'ils ne le sont dans les villes. Mais je partage à ce point de vue, l'idée du député de Marguerite-Bourgeoys, que ces enfants ne sont quand même pas allés à l'école anglaise pour s'angliciser, mais pour vraiment acquérir un deuxième outil, quoiqu'avec le critère du gouvernement, on va les consacrer anglophones. C'est assez inouï.

Compte tenu des intentions très louables du député de Lobtinière qui a présenté la motion, qui veut vraiment essayer de corriger quelques injustices qui, déjà, se glissent à l'égard des anglophones, je vais lui faire une taquinerie qui ne se veut pas méchante... Je voudrais seulement lui demander comment il a pu décider que ceux-là appartenaient à la communauté anglophone et étaient des anglophones.

Ceci dit, je voterai pour la motion du député de Lotbinière.

Le Président (M. Bertrand): Merci, Mme le député de L'Acadie.

M. Charron: Mettez la motion aux voix.

M. Biron: Une remarque en terminant, très brève, encore une fois.

Le Président (M. Bertrand): II vous reste seize minutes, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Je ne prendrai pas mes seize minutes. Si on n'accepte pas une telle motion d'amendement, on aura peut-être dans une région deux voisins dont un aura un passeport pour l'école anglaise parce que son frère ou sa soeur aura été à l'école primaire anglaise il y a quinze ans, et le passeport est pour toute la famille. L'autre, le véritable anglophone, qui est arrivé il y a quelques années, parce qu'il est arrivé à quatorze ou à quinze ans et qu'il est allé à l'école secondaire anglaise, ses enfants n'auront pas le droit d'aller à l'école anglaise.

Je demande au ministre de l'Education de réfléchir sérieusement sur ces cas bien spécifiques. Ce sont des cas sérieux. Ces gens qui sont arrivés ici, ce n'est pas leur faute s'ils ne sont pas allés à l'école primaire anglaise; c'est parce qu'ils n'étaient pas au Québec et qu'ils y sont arrivés à l'âge du secondaire. Ce sont des cas bien spécifiques. Il y a le deuxième cas que j'ai cité tout à l'heure, sur lequel le député de Mégantic-Compton a élaboré aussi, des paroisses éloignées des grands centres. Il reste un fait établi: dans des endroits comme Montréal en particulier, en donnera des passeports pour l'école anglaise à un certain groupe de gens, parce que le frère ou la soeur sont allés à l'école anglaise, à cause du système qui existait dans le temps, et qu'on est obligé d'administrer aujourd'hui, alors que l'autre véritable anglophone n'aura pas le droit d'envoyer ses descendants à l'école anglaise.

Je demanderais au ministre de l'Education de prendre quelques minutes pour nous dire quelle est l'intention du gouvernement sur ces deux cas bien spécifiques. Je pense qu'il faudra prendre une décision un jour ou l'autre. Si on ne la prend pas aujourd'hui, on va s'apercevoir dans un an qu'il faudra prendre une décision, parce que cela va causer des embêtements aux rouages administratifs de l'enseignement au Québec.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Sauvé.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, quel que soit le critère retenu lorsqu'il s'agit de départager de façon aussi délicate une collectivité minoritaire d'une majorité, il y aura des cas limites qui, bien sûr, nous amèneront à des résultats qu'on pourrait considérer comme peu souhaitables; quel que soit le critère. Nous avons retenu celui qui nous paraissait justement entraîner le moins de cas de ce genre.

Dans l'exemple que vous avez donné, cependant, je dois vous dire que, si vous avez lu attenti-

vement l'article 69c, la personne qui a fait des études primaires en anglais et qui a de jeunes frères ou de jeunes soeurs de quinze ans plus jeunes n'habilite pas ses cadets de plusieurs années. Si vous avez bien lu l'article 69, paragraphe c) et d) ce sont les frères et soeurs cadets des enfants visés au paragraphe c). Or, au paragraphe c), il s'agit des enfants qui, lors de leur dernière année de scolarité, avant l'entrée en vigueur de la loi, recevaient légalement au Québec l'enseignement en anglais dans une classe maternelle publique etc.

Donc, s'il y a un intervalle de quinze ans, nous n'avons pas le sentiment, à ce moment, de briser la cellule familiale en dirigeant les cadets vers l'école française. L'exemple que vous avez donné ne s'appliquait pas tout à fait. Il faudrait lire attentivement les paragraphes c) et d), car ils doivent être lus ensemble.

M. Charron: Le plus simple serait de les aborder le plus rapidement possible.

Motion rejetée sur division

Le Président (M. Bertrand): La motion d'amendement du député de Lotbinière à l'effet d'ajouter, à la seconde ligne du paragraphe a), après le mot "primaire", les mots suivants "ou secondaire", est-elle adoptée?

M. Lalonde: Non.

Le Président (M. Bertrand): Appel nominal?

M. Lalonde: Je n'y tiens pas.

M. Charron: Rejetée sur division, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): La motion d'amendement du député de Lotbinière est rejetée sur division.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je maintenant solliciter votre permission pour soumettre un amendement à l'article 69? C'est, comme je l'ai indiqué il y a un instant, un amendement de forme plus que de fond quoiqu'il puisse avoir certaines conséquences.

Je demanderais qu'on distribue le document intitulé "Motion d'amendement à l'article 69 du projet de loi no 101", et seulement cette motion.

Mme Lavoie-Roux: On pourrait peut-être aller plus rapidement.

M. Lalonde: Les déposer toutes.

Mme Lavoie-Roux: Et peut-être imiter le beau geste de l'Union Nationale qui les a toutes déposées.

M. Lalonde: En présentant un livre rouge! Le Président (M. Bertrand): A l'ordre! M. le député de Sauvé, si vous voulez bien lire cet amendement, s'il vous plaît!

M. Morin (Sauvé): Oui. Il est rédigé de la façon suivante: Que l'article 69 soit modifié en ajoutant au paragraphe c), après le mot "scolarité" les mots "au Québec".

M. Lalonde: M. le Président, excusez-moi. Une question de règlement.

Je n'aime pas interrompre un orateur aussi éloquent que le ministre de l'Education qui était lancé dans la lecture de son amendement, mais immédiatement, je dois vous dire que j'ai un amendement à présenter au paragraphe a) de l'article 69. Il me semble que la procédure m'empêcherait de le présenter si j'acceptais qu'on discute du paragraphe c), quoique j'ai bien hâte de connaître cet amendement.

M. Morin (Sauvé): Nous allons le distribuer, de toute façon, parce que ce n'est...

M. Charron: Le meilleur moyen de vous satisfaire, c'est qu'on va disposer très rapidement de votre amendement au paragraphe a).

Le Président (M. Bertrand): Madame, messieurs les membres de la commission, de toute façon, dès la réception de cette motion d'amendement, en lisant la lettre c), j'allais demander au député de Sauvé si c'était une erreur typographique ou bien s'il s'agissait vraiment d'une motion d'amendement au paragraphe c). Je pense qu'il est dans l'ordre des choses qu'on procède d'abord aux amendements qui pourraient concerner le paragraphe a), ensuite le paragraphe b).

M. Morin (Sauvé): C'est dans l'ordre, M. le Président. Je ne savais pas que mes collègues libéraux avaient un autre amendement au paragraphe a).

Le Président (M. Bertrand): A ce stade-ci, je serai en mesure de donner la parole à un intervenant sur le paragraphe a), avec motion d'amendement ou sans motion d'amendement.

Motion d'amendement M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, quelques mots avant de présenter ma motion d'amendement, non pas pour étendre mon droit de parole. Je serai aussi bref que possible à cette heure. Le paragraphe a) se lit comme suit, les motions d'amendement successives ayant été battues: "Les enfants dont le père ou la mère a reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais".

M. le Président, nous avons eu l'occasion d'exprimer notre désaccord sur le critère exprimé par le paragraphe a). Etant donné qu'il demeure, toutefois, qu'on a rejeté celui que nous avions proposé, je dois souligner le fait que la restriction

au Québec de la fréquentation scolaire, que l'on conserve comme critère au paragraphe a), me paraît tout à fait inacceptable. Je vais simplement tenter de démontrer, en me limitant au secteur de l'économie, au secteur des sièges sociaux plus particulièrement, et plus particulièrement à Montréal...

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. A l'ordre, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. A moins que vous ne parliez sur la motion principale en vue d'arriver à un amendement, je suis bien d'accord avec vous. Je voudrais que ce soit clair pour tout le monde.

D'accord.

M. Lalonde: ...jusqu'à quel point il me paraît inacceptable pour le développement économique, et plus particulièrement dans le secteur des sièges sociaux, des bureaux divisionnaires, des bureaux régionaux, des grandes entreprises qui constituent plutôt un élément extrêmement important, essentiel de l'économie du Québec, et qui sont concentrés, il faut le dire, surtout dans la région de Montréal. Le critère restrictif que l'on voit au paragraphe a) est de nature à créer des problèmes extrêmement graves. La restriction de la fréquentation de l'école anglaise aux seuls enfants dont les parents ont fréquenté au Québec l'école anglaise, l'annonce de ce critère a déjà commencé, selon tous les témoignages, que ce soit la Chambre de commerce du Québec, que ce soit les entreprises, en particulier, à créer des problèmes extrêmement difficiles, extrêmement sérieux au niveau de la mobilité du personnel et plus particulièrement du personnel de cadre des grandes entreprises.

On ne pourra mesurer les effets négatifs qu'après un certain temps d'application d'un tel critère.

Déjà, tous les témoignages sont unanimes pour indiquer ceci. Des entreprises ont déjà connu des difficultés à transférer, à amener ici, au Québec, des gens de l'extérieur du Québec, plus particulièrement du Canada, mais aussi des Etats-Unis et de l'Europe. Ce sera pire parce qu'ils savent maintenant, si ce projet de loi est adopté tel quel, qu'ils ne pourront pas envoyer leurs enfants à l'école anglaise. Il s'agit, naturellement, dans les exemples auxquels je me réfère, d'anglophones visant à l'extérieur du Québec, dans les autres provinces du Canada, vivant aussi, naturellement, aux Etats-Unis et qui ont des enfants qui ont déjà commencé, dans beaucoup de cas, leur fréquentation scolaire dans des écoles anglaises, nécessairement, et qui se verraient obligés d'interrompre cet enseignement à leurs enfants pour les envoyer ici, au Québec, à l'école française.

Je propose que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en ajoutant, à la première ligne, après le mot "Québec", les mots "ou ailleurs". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "Les enfants dont le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs, l'enseignement primaire en anglais".

Le Président (M. Cardinal): M. le député de

Marguerite-Bourgeoys, afin que nous procédions avec ordre, surtout à cette heure, alors que nous avons convenu de terminer à 20 heures, je mentionne que vous avez parlé sur la motion principale en terminant par un amendement. Il n'a pas épuisé son droit de parole puisqu'il a 20 minutes sur la motion principale. Par conséquent il pourra, pour cette raison et cette seule raison, parler sur l'amendement.

Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "a) les enfants dont le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs, l'enseignement primaire en anglais".

Dans le fond, il s'agit d'ajouter, à la première ligne, après le mot "Québec", les mots "ou ailleurs". Est-ce exact?

M. Lalonde: Exact.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, désirez-vous continuer?

M. Lalonde: Oui, M. le Président, si vous le permettez.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On pourrait, à plusieurs titres, souhaiter élargir le critère qu'on a appelé la clause Québec dans ce paragraphe; on pourrait le souhaiter pour reconnaître l'appartenance du Québec au Canada. On pourrait le souhaiter pour éviter d'injecter dans ce projet de loi une restriction, une contrainte d'inspiration séparatiste.

On pourrait ainsi, M. le Président, continuer à souhaiter et à invoquer des arguments forts valables pour souhaiter élargir ces critères. Je ne m'en tiendrai qu'aux inquiétudes qui sont formulées quotidiennement au niveau des entreprises, comme je l'ai dit tantôt, et je laisserai à d'autres opinants le soin d'élargir les arguments. Mais je tiens à insister sur le caractère extrêmement sérieux, pour l'avenir de Montréal en particulier, comme capitale économique, comme capitale des sièges sociaux d'entreprises canadiennes et d'entreprises internationales, l'amendement que je propose, M. le Président.

Si vous voulez avoir des témoignages, M. le Président, vous n'avez qu'à vous promener un peu dans certains milieux d'affaires et vous recevriez quotidiennement des témoignages qu'une telle clause est de nature à fermer littéralement la source indispensable pour ces entreprises de cadres venant de l'extérieur du Québec pour participer aux activités économiques, à l'administration de ces grandes entreprises qui sont si nécessaires, si indispensables, surtout actuellement, dans le climat économique négatif que nous connaissons, dans une économie extrêmement difficile. Avec tous les problèmes que l'arrivée au pouvoir du Parti québécois représente pour ce secteur, il est inutile d'en ajouter un autre, c'est-à-dire de fermer le robinet, de fermer les frontières à ceux dont nous avons besoins dans nos entreprises pour continuer de participer avec nous et aussi avec de

plus en plus de francophones au développement économique, au développement du Québec.

Naturellement, vous me direz que ce n'est pas qu'à l'extérieur du Québec qu'une telle entreprise ayant des activités à l'extérieur du Québec peut aller chercher ces cadres. C'est exact. Mais il est un fait qu'il faut reconnaître, toute entreprise qui a des activités non seulement au Québec et non seulement au Canada mais aussi dans d'autres pays, a besoin de faire venir au Québec, à son siège social, de jeunes cadres, des cadres intermédiaires pour leur faire subir une période d'apprentissage au siège social, souvent pour éventuellement aller prendre la responsabilité d'une unité de production ou d'un bureau d'administration à l'extérieur, mais ils ont quand même besoin de cette mobilité du personnel et pas seulement la grande entreprise anglophone, je parle de l'entreprise qui est peut-être maintenant aujourd'hui une petite ou une moyenne entreprise mais qui va se développer, espérons-le.

Cette entreprise peut être aussi bien francophone; elle a ou aura des activités et des bureaux administratifs à l'extérieur du Québec, des marchés et des unités de production à l'extérieur du Québec et elle devra faire appel, dans ses unités de production, dans ses marchés, à des gens qui demeurent à l'extérieur du Québec et qui, dans une grande majorité, naturellement, sont des anglophones.

Que la compagnie soit soi-disant francophone, moyenne ou autrement actuellement, elle devra subir les mêmes contraintes linguistiques que les grandes entreprises actuelles qui, on le sait, doivent faire une place assez importante à la langue anglaise dans les activités de leur siège social. On le sait, cela a été répété tellement souvent; la démonstration n'est plus à faire. Je pense que l'expérience que la Régie de la langue française, depuis deux ans, a connue dans sa tentative, sa démarche de franciser les entreprises, la connaissance que la Régie de la langue française a obtenue est tout à fait évidente. Je pense en particulier que le ministre d'Etat au développement culturel, qui a la responsabilité administrative de cette régie, a accès à cette connaissance.

Je ne veux pas être trop long. Je voudrais quand même que l'on constate le caractère sérieux de ce problème. Ce n'est pas un problème qui va m'affecter personnellement, qui va peut-être nous affecter, nous, autour de cette table, mais c'est un problème qui est de nature à affecter le développement de l'économie au Québec, donc, le développement de 100% de ses citoyens qui comprennent, il ne faut pas l'oublier, 80% de francophones.

Ce sont autant les francophones que les anglophones qui peuvent subir les dommages, les inconvénients d'une politique restrictive, fermée, comme celle qu'on voit au paragraphe a).

M. le Président, pour toutes ces raisons je pense que l'amendement que je propose est bien fondé et j'invite tous les membres de cette commission à l'appuyer.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de

Verchères. Non, je m'excuse, je vais répéter. Lorsque je suis...

M. Charbonneau: M. le Président, je suis disposé à laisser mon droit de parole...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, s'il y a consentement, mais, normalement, après une motion qui vient d'un parti de l'Opposition, je permets au parti ministériel de continuer et ensuite je reviens aux autres partis, mais si vous voulez vous entendre entre vous, c'est une autre affaire.

M. Charbonneau: M. le Président, je croyais personnellement qu'en donnant mon nom tantôt, cela ne privait pas le ministre d'Etat au développement culturel d'avoir le premier le droit de réplique pour le gouvernement.

Le Président (M. Cardinal): Vous soulevez un autre point. Je vais tout de suite demander si M. le ministre d'Etat veut intervenir. Non. M. le député de Verchères, voulez-vous le faire?

M. Charbonneau: Je peux laisser mon droit de parole, pour le moment, au député de Lotbinière et j'interviendrai après.

Le Président (M. Cardinal): II n'est pas obligé de le prendre.

M. Charbonneau: S'il ne veut pas le prendre. M. Biron: Je vais le prendre, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Bon! Alors, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, d'abord, cette motion d'amendement est à peu près semblable à celle que nous avions préparée pour l'alinéa b) de l'article 69. Or, c'est sûr que nous voterons pour une telle motion d'amendement, mais, quand même, peut-être pour différentes raisons que celles du député de Marguerite-Bourgeoys. Le député de Marguerite-Bourgeoys nous a parlé des cadres des grandes entreprises multinationales. C'est sûr qu'il faut protéger les entreprises multinationales jusqu'à un certain point, mais je ne suis pas encore sûr que, véritablement, les cadres de ces grandes entreprises n'ont pas le moyen, en fait, de se payer des écoles privées. Mais il y a plus que ça. C'est plus profond que ça. A notre point de vue, en reconnaissant la communauté anglophone au Québec, on veut que les membres de cette communauté anglophone, tous ceux qui parlent l'anglais à travers le Québec, qui ont étudié en anglais dans leurs cours primaires, puissent participer véritablement à cette vie que nous avons au Québec.

Il est question aussi de la réalité canadienne, M. le Président. C'est qu'il y a des fonctionnaires du gouvernement canadien — j'en ai parlé aujourd'hui et je le redis — qui sont appelés à travailler dans la région de l'Outaouais au Québec, à Hull en particulier. Avec une telle clause, ils vont peut-

être choisir de demeurer à Ottawa ou sur la frontière de l'Ontario, alors qu'ils pourraient facilement venir s'installer au Québec, vivre au Québec, apprendre le français au Québec et participer véritablement à la vie du Québec.

Il faut avoir confiance dans les effets d'entraînement des autres mesures et ouvrir un petit peu plus, je crois, nos écoles anglaises aux membres réels de la communauté anglophone.

Quant aux suggestions de M. Trudeau, je ne suis pas tout à fait d'accord avec lui lorsqu'il commence à vouloir dire au Québec quoi faire dans le domaine de l'éducation. Je pense que M. Trudeau a énormément de travaux à faire au niveau du gouvernement fédéral, qui regardent le gouvernement fédéral. Il ne devrait pas se mêler du tout de ce qui regarde les juridictions des provinces elles-mêmes. Je pense que les provinces sont assez adultes pour décider ensemble, sans qu'on ait à entendre les suggestions du premier ministre du Canada là-dessus.

Or, c'est sûr que la réalité canadienne, ça existe, mais les provinces sont assez adultes pour s'apercevoir que ça existe, la réalité canadienne. Les provinces sont assez adultes aussi pour décider, dans leur propre domaine de juridictions et en particulier dans le domaine de l'enseignement, ce qu'elles ont à faire.

C'est ici, autour de cette table de la commission parlementaire, que les représentants du peuple québécois doivent décider de ce qui est bon pour nous dans le domaine de l'enseignement. M. le Président, on propose, à même ce projet de loi, d'autres grandes mesures qui auront des effets d'entraînement immenses sur la vie future du français au Québec.

Alors, nous avons confiance dans ces effets d'entraînement, nous avons confiance dans ces mesures qui sont proposées à même le projet de loi no 101 et nous sommes sûrs qu'ils serviront d'effets d'entraînement.

Nous voudrions voir de la part du gouvernement un peu moins de complexes, de peur des anglophones, plus de possibilités que les francophones s'affirment au Québec, si on leur aide où il faut les aider.

Il faut montrer un peu plus de générosité vis-à-vis de ceux qui sont appelés à venir au Québec, vivre avec vous, enrichir cette province de Québec.

Il faut ouvrir nos bras, ouvrir notre coeur, ouvrir notre esprit et recevoir ceux qui véritablement font partie de la communauté anglophone. Le critère désigné par le gouvernement du Québec, soit avoir étudié en anglais pour l'école primaire, on y va jusque-là parce que c'est un critère clair. C'est un critère précis alors qu'un grand mot comme communauté anglophone, on ne sait vraiment pas; mais là, on sait qu'il y a un critère clair. Si les parents apportent le certificat d'étude, on sait que c'est clair. C'est quelque chose qui se mesure. J'ai été habitué à mesurer quelque chose et je n'aime pas trop trop les voeux pieux. J'aime cela quand on mesure quelque chose.

Alors, dans ce sens en particulier, nous faisons appel au gouvernement pour accepter une telle motion d'amendement qui nous semble réaliste, qui nous semble pleine de bon sens, à cause des autres mesures que nous proposons à même le projet de loi no 101.

Alors, nous allons voter pour une telle motion d'amendement.

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez madame, messieurs, je veux d'abord, à vous...

M. Laurin: J'ai demandé la parole.

Le Président (M. Cardinal): Vous pouvez demander la parole tout de suite pour la conserver. D'accord, M. le ministre d'Etat au développement culturel.

Mme Lavoie-Roux:...

Le Président (M. Cardinal): Silence! que je puisse souhaiter à tous bon appétit, bonne fin de semaine parce que nous sommes le vendredi. Si nous étions un samedi, je vous souhaiterais un bon week-end. La commission ajourne ses travaux...

Une Voix: Le contraire.

Le Président (M. Cardinal): Alors, le contraire. La commission ajourne ses travaux à lundi matin, dix heures.

(Fin de la séance à 19 h 58)

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