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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le jeudi 9 mai 1985 - Vol. 28 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Éducation


Journal des débats

 

(Dix heures vingt-quatre minutes)

Le Président (M. Paré): Je déclare la séance de la commission de l'éducation et de la main-d'oeuvre ouverte. Le mandat de la commission est d'entreprendre l'étude des crédits du ministère de l'Éducation pour l'année 1985-1986. Alors, je vous demanderais, Madame la secrétaire, d'annoncer les remplacements s'il vous plaît.

La Secrétaire: Mme Harel (Maisonneuve) est remplacée par M. Dupré (Saint-Hyacinthe).

Le Président (M. Paré): Merci. Alors, s'il n'y a pas d'objection et tel qu'entendu, nous allons procéder immédiatement à entendre les commentaires préliminaires du ministre de l'Éducation.

Remarques préliminaires M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, membres de cette commission, avant de présenter mes commentaires préliminaires, j'aimerais quand même présenter les gens qui m'accompagnent ici à la table, de même que tous ceux qui sont dans la salle de la commission. Alors, il y a M. Boudreau, sous-ministre en titre au ministère, M. Trempe, sous-ministre adjoint à l'administration, M. Gagnon, sous-ministre aux relations du travail et M. Rousseau, sous-ministre a la direction des réseaux, de même que M. Stein, sous-ministre associé de foi catholique et, également, les gens de mon cabinet: M. Lamarre, Mme Gionet, M. Ouellet de même que d'autres fonctionnaires du ministère. Alors, je leur souhaite la bienvenue, ils seront également ici pour nous aider à regarder ensemble les crédits du ministère.

L'étude des crédits du ministère de l'Éducation revêt cette année un caractère particulier. Nous sommes en effet parvenus à une étape décisive du processus de ce renouveau amorcé avec la publication, en 1977, du livre vert sur l'enseignement primaire et secondaire. Des orientations ont été proposées, largement discutées, puis adoptées; des politiques ont été élaborées; enfin, de nouvelles structures viennent tout juste d'être choisies. L'année 1985-1986 se présente comme une charnière importante entre une période principalement caractérisée par la réflexion et une autre déjà commencée, où les énergies seront davantage canalisées vers la mise en oeuvre de la consolidation.

Parmi les défis que doit relever le Québec, il importe de reconnaître ceux qui interpellent plus directement le système scolaire: le développement du potentiel humain, les jeunes et l'emploi, l'égalité des chances, le virage technologique. Les orientations et les plans arrêtés à travers toutes les recherches et les efforts de renouveau des dernières années visent à répondre à ces défis. Déterminés en particulier par la nouvelle Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public et par la nouvelle configuration du ministère de l'Éducation, distinct du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, les traits de ce temps de mise en oeuvre sont avant tout la responsabilisation des milieux, la concertation des partenaires, la recherche de la qualité et de l'efficience révélées à l'aide de l'évaluation.

Les défis adressés au système scolaire. Notre système scolaire a été l'instrument par excellence de notre accession au rang des États modernes. Cependant, au fur et à mesure de notre évolution récente, nous avons réussi à multiplier et à diversifier les leviers de notre développement collectif. L'école s'est délestée des fonctions supplétives qu'une conjoncture particulière l'obligeait d'assumer. Les pressions actuelles vont plutôt dans le sens d'un centrage sur sa mission essentielle et d'une contribution, parmi d'autres, à l'enrichissement du tissu social.

Au nombre des tâches dévolues au système scolaire, il y en a quatre qui, à l'heure actuelle, réapparaissent devoir retenir notre attention d'une façon spéciale.

Premièrement, le développement optimal du potentiel humain. Le système scolaire constitue toujours l'agent principal du développement de nos ressources humaines. Même si l'on doit reconnaître qu'une part de plus en plus grande des apprentissages s'effectuent a la faveur d'un réseau informel d'éducation, c'est encore le système formel qui détient la responsabilité du projet de la formation de base. Cette contribution unique, le nouveau ministère de l'Éducation entend l'assurer dans la perspective d'une éducation permanente.

Avec l'accroissement du volume des

connaissances et l'accélération du rythme des transformations, il devient impérieux de concevoir le temps de la scolarité obligatoire comme une simple étape de la formation, étalée sur toute une vie. C'est pourquoi l'organisation des enseignements généraux et professionnels doit viser moins à l'abondance des savoirs qu'à leur approfondissement et à leur transférabilité. Ce discours, vieux déjà d'une vingtaine d'années, est devenu chez nous une réalité bien vivante.

L'autre objectif, c'est d'accroître l'employabilité des jeunes. Aucune nation ne peut impunément gaspiller ses ressources humaines; aucune ne peut, sous peine d'en récolter les fruits amers, condamner sa jeunesse à l'oisiveté et au chômage chronique. Ce problème est une préoccupation prioritaire du gouvernement et des mesures ont été prises pour corriger la situation. Le ministère de l'Éducation apporte une contribution essentielle à la réalisation du plan gouvernemental pour favoriser l'insertion sociale et professionnelle des jeunes.

Le système scolaire ne crée pas les emplois. Il peut toutefois contribuer à accroître l'employabilité des jeunes. Les statistiques montrent que les diplômes sont encore le sésame qui ouvre la porte des emplois. Il faut donc faire en sorte que les élèves persévèrent dans leurs études jusqu'à l'obtention de ce diplôme et si, le cas échéant, ils abandonnent, il faut faciliter par tous les moyens le retour à l'école. Une meilleure information sur le marché du travail et sur les secteurs moins achalandés constitue un autre moyen d'augmenter les chances d'emploi. Enfin, la formation elle-même peut être un atout majeur de la recherche d'un emploi. Une meilleure identification des besoins du marché du travail favorise une plus grande adaptation de la formation et, par conséquent, accroît l'employabilité.

Réduire les inégalités persistantes. L'institution scolaire est, pour une large part, solidaire et tributaire de la société dont elle fait partie. Elle est aussi agent de changement social. C'est dans la dialectique de ses rôles antinomiques de conservation et de transformation qu'elle doit composer avec le phénomène des inégalités.

Longtemps on a cru que le système scolaire pouvait être l'instrument principal de la réduction des inégalités sociales. Aujourd'hui, nous savons que, malgré tous nos efforts de généralisation et de démocratisation de l'enseignement, des inégalités persistent parce que les règles du jeu social qui conditionnent les règles du jeu scolaire n'ont pas changé fondamentalement. Même si cela heurte nos convictions profondes, il faut nous rendre à l'évidence que le pronostic scolaire et social est à peine plus favorable qu'il y a vingt ans pour les jeunes issus de milieux économiquement faibles. Ce n'est pas tout d'ouvrir à tous les portes de l'école. Encore faut-il, à l'intérieur, offrir à chacun, selon ses avantages et ses handicaps, les conditions nécessaires à son réel épanouissement. Ce constat d'échec relatif n'a pas pour effet de nous décourager; il permet, au contraire, par une meilleure saisie du problème, de corriger la trajectoire et de planifier des interventions plus adéquates, en concertation avec nos partenaires sociaux.

L'avenir du Québec sera celui d'une société technologiquement avancée. Nous sommes déjà entrés de plain-pied dans cet avenir. L'industrie de pointe réclame déjà nos diplômés dans les secteurs hautement spécialisés. L'informatique transforme en profondeur les secteurs reliés à l'administration et aux communications. La recherche dans les domaines de la biologie, de l'environnement, de l'énergie ouvre la voie à de nouveaux champs d'application.

Le système scolaire est interpellé par ce fourmillement de mutations en aval. Il lui faut s'ajuster rapidement s'il veut contribuer activement à l'édification d'un Québec plus moderne. D'autre part, les exigences économiques et sociales correspondent ici à des impératifs d'épanouissement des personnes. Les jeunes aspirent à développer leur potentialité et leur motivation est plus grande si l'école leur en offre le loisir par des programmes adaptés à un monde qu'ils reconnaissent comme le leur et dont ils se sentent solidaires.

Les orientations et les différents plans qui sont en chantier. Voilà donc les principaux éléments de la problématique qui retiennent notre attention, orientent notre action et mobilisent nos ressources. Pour relever les défis qui lui sont adressés, le ministère de l'Éducation a mis en chantier des politiques et des plans.

Certaines politiques que l'on peut qualifier de majeures touchent à l'ossature du système et au projet éducatif national. D'autres constituent des mesures particulières de soutien à des catégories de personnes et représentent, dans la plupart des cas, des efforts à renouveler. Je n'ai pas l'intention d'en présenter ici un relevé exhaustif. On comprendra que je veuille plutôt mettre en évidence les dossiers auxquels il y a lieu d'attacher une importance spécifique.

C'est en 1985-1986 que se concrétiseront les démarches de réflexion et de consultation en vue de reconnaître le rôle déterminant de l'école et de ceux qui la font dans l'économie d'ensemble du système. La nouvelle Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public sera implantée et j'amorcerai bientôt la consultation sur les projets de règlement qui en découlent et qui sont nécessaires à son application définitive prévue pour juillet 1986.

Au niveau des politiques majeures, j'aimerais dire quelques mots de la formation générale. Avec la parution, en 1979, de "L'école québécoise" et de l'adoption, en 1981, du nouveau règlement sur le régime pédagogique, le ministère de l'Éducation entreprenait une vaste opération de révision et d'élaboration de tous les programmes du préscolaire, du primaire et du secondaire. L'échéancier prévu a été respecté dans la très grande majorité des cas.

L'application se déroule généralement, elle aussi, jusqu'à maintenant, selon le calendrier fixé au départ. Au primaire, les mathématiques, l'éducation physique et l'anglais, langue seconde, sont appliqués et le français suivra en septembre 1985. À la demande du comité mixte formé de représentants des fédérations des commissions scolaires, de la Centrale de l'enseignement du Québec et du ministère, un temps de consolidation dans l'implantation de ce premier bloc sera aménagé avec pour effet d'entraîner un sursis dans l'application obligatoire des autres programmes. Au secondaire où la programmation s'applique par degré, nous en sommes à la classe de quatrième, sauf pour les mathématiques et l'anglais. Un calendrier révisé d'implantation a aussi été adopté afin de tenir compte des difficultés particulières au secteur anglophone. Cette décision fait suite au mémoire présenté par le comité des responsables anglophones du curriculum.

Cette opération de mise à jour était nécessaire afin d'adapter le régime des études et les programmes aux réalités modernes. Nous avons toutefois conscience que, malgré leur contribution essentielle a la formation des jeunes, les programmes ne possèdent pas en eux-mêmes et à eux seuls les vertus magiques provoquant des apprentissages de qualité. Leur application doit entraîner des mutations profondes dans la relation maître-élève et dans l'approche pédagogique des enseignants. C'est pourquoi il convient de poursuivre les activités prévues de soutien, d'animation et de perfectionnement en continuant de consentir aux directions régionales et aux commissions scolaires le niveau actuel des ressources.

D'autre part, il n'est pas réaliste d'envisager la répétition périodique d'une opération de cette envergure. Il faudra même l'éviter à tout prix et je pense que cela nous est demandé par tous les intervenants. Pourtant, les programmes ont besoin d'être mis à jour et c'est donc à l'évaluation continue qu'il faudra recourir, dorénavant. Chaque année, nous devrons choisir un certain nombre de programmes à évaluer de manière que les principaux y passent à tous les cinq ans. Ce plan quinquennal a déjà été élaboré et des ressources y seront affectées.

Pour ce qui est du secteur de la formation professionnelle, celui-ci n'est plus le parent pauvre du système éducatif. On peut même dire que la distinction forcée entre le général et le professionnel, commode dans la vie scolaire de tous les jours, n'a plus, dans les faits, la réalité qu'elle avait auparavant. Le projet de formation réunit en symbiose les deux dimensions, chacune prenant appui l'une sur l'autre, pour réaliser l'émergence d'une génération de citoyens cultivés et compétents.

Pas plus qu'une formation générale complète ne saurait se concevoir sans une connaissance des réalités du travail, une formation professionnelle serait caduque si elle ne reposait sur une solide formation de base. Cette conviction, partagée par les responsables de l'entreprise et par ceux de l'éducation, a incité le ministère à reporter à la fin du secondaire l'enseignement professionnel proprement dit. Une telle décision comporte des conséquences dont je voudrais vous entretenir brièvement.

Le report de la formation professionnelle en secondaire V et au-delà entraîne ipso facto la disparition de ce qu'on appelait communément le professionnel court. Désormais, il n'y aura qu'un seul type de formation professionnelle au secondaire, donnant accès au statut d'ouvrier qualifié et sanctionné par une reconnaissance unique des compétences, soit le diplôme de formation professionnelle.

La première question qui se pose est la suivante: Qu'adviendra-t-il de la clientèle traditionnelle du professionnel court? Les commissions scolaires implanteront sur une base volontaire en 1985-1986 et sur une base obligatoire à compter de 1986-1987 les cheminements particuliers de formation de base. Il s'agit d'une pédagogie mieux adaptée, c'est-à-dire plus soucieuse des rythmes et des styles d'apprentissage de chacun des élèves. En outre, des expériences d'insertion sociale et professionnelle seront proposées aux élèves de 16 à 18 ans qui n'ont pas encore acquis le diplôme de fin d'études secondaires. Ces expériences pourraient se faire par la voie de l'alternance entre l'école et les milieux de travail. Une telle approche suppose un assouplissement des règles scolaires, la reconnaissance des acquis et la concertation avec l'entreprise. Cela ne signifie nullement une formation à rabais. Ce ne sont pas les objectifs qui seront adaptés, mais les modalités.

Cette restructuration affectera temporairement les maîtres de l'enseignement professionnel. La disparition progressive du professionnel court et le report de la formation professionnelle à la fin du cours secondaire entraîneront, pour une période transitoire, des mouvements de personnel qui se traduiront par des départs volontaires, des congés de perfectionnement

ou de recyclage, des mises en disponibilité, etc. Le ministère à prévu ces éventualités et mettra tout en oeuvre pour que l'économie du système coïncide avec la satisfaction des individus concernés. Déjà, j'ai eu l'occasion de rencontrer une délégation de la Commission scolaire régionale de la Mauricie qui m'a présenté des propositions visant à résorber les surplus de personnel dans l'enseignement professionnel. Les points de vue originaux qu'elle a fait valoir méritent attention et je m'engage à évaluer honnêtement et rigoureusement la viabilité de telles suggestions.

Qu'en est-il, maintenant, du contenu lui-même de cette formation professionnelle? Nous voulons offrir aux jeunes des formations polyvalentes, adaptées à la structure des emplois. Pour favoriser la mobilité à l'intérieur d'une famille de spécialités, l'école dispensera une formation professionnelle de base et laissera à l'entreprise ou à l'éducation des adultes le soin de compléter par une formation plus fine. En plus de favoriser la mobilité, une telle orientation permettra de ne pas allonger indûment le temps initial de formation.

Nous voulons aussi promouvoir la dimension régionale des apprentissages professionnels. Chaque commission scolaire disposera d'une marge de manoeuvre lui permettant de donner à ses programmes professionnels une coloration locale ou régionale. En électromécanique, par exemple, une commission scolaire fera des applications aux appareils de sécurité et de serrurerie, une autre à la machinerie servant aux mines, une autre aux machines à bois, une autre à la papeterie. Les régions du Québec sont suffisamment diversifiées pour justifier une telle marge d'application non seulement aux fins d'adaptation à l'entreprise régionale ou locale, mais aussi dans le but de favoriser chez les jeunes des apprentissages plus significatifs.

Tout comme pour la formation générale, l'entreprise de révision et d'élaboration des programmes professionnels mobilise de nombreuses ressources tant du monde du travail que du milieu scolaire. On peut en avoir une idée en songeant que l'on prévoit passer de 269 programmes à moins d'une centaine, d'ici à 1988-1989. Cela suppose beaucoup de consultations, beaucoup d'études, de cohérence et de pertinence et la traduction des besoins en objectifs pédagogiques, ce que nous ne pouvons remettre à plus tard.

Le projet d'éducation permanente. La mise en oeuvre du projet d'éducation permanente suppose d'abord une redéfinition de la formation initiale dispensée aux jeunes dans le cadre de la scolarité obligatoire. Les programmes scolaires doivent tenir compte des possibilités offertes aux adultes de compléter, quand bon leur semble, cette formation dite initiale. On a vu qu'à ce titre les actions découlant de l'énoncé de politique "L'école québécoise", en 1979, et des "Propositions de relance et de renouveau de la politique de formation professionnelle des jeunes", en 1982, réalisent dans les faits ce qui n'était jusqu'ici qu'un concept souvent considéré comme utopique.

Le second volet de ce dispositif global, l'éducation des adultes, a longtemps été considéré comme le tout. La preuve en est que l'on désignait dans les organismes les services d'éducation des adultes par "Éducation permanente". Nous avons éliminé ce quiproquo en donnant à chaque type de clientèle la place qui lui revient à l'intérieur du projet global. Nous venons de voir comment le ministère de l'Éducation a résolument transformé la formation dispensée aux jeunes pour la situer sur un continuum qui s'étend de la petite enfance au troisième âge. Nous allons maintenant donner un bref aperçu des mesures destinées aux adultes.

Ces mesures sont placées sous le signe de l'ouverture et de l'accessibilité. La loi 3 ouvre officiellement l'accès de l'école aux clientèles adultes. Les règles budgétaires confirment la volonté législative en prévoyant que les subventions versées aux commissions scolaires pour la formation de base, bien que s'adressant en priorité aux clientèles soumises è la scolarité obligatoire, peuvent également servir à l'éducation des adultes; les ressources didactiques leur seront également accessibles. La loi stipule de plus que le régime pédagogique peut être adapté aux situations particulières des étudiants adultes.

Des crédits supplémentaires sont alloués pour implanter différentes mesures visant à rendre les services éducatifs plus pertinents et plus accessibles. Accessibilité accrue à la formation de base par l'alphabétisation, aux formations qualifiantes par la reconnaissance des acquis expérientiels, à la formation professionnelle par les cours de recyclage et de perfectionnement aux travailleurs des métiers en perte de vitesse. Ouverture aussi par la diversification des offres de formation. Nous pensons ici, en particulier, aux organismes volontaires d'éducation populaire, communément appelés les OVEP, dont le nombre a presque doublé cette année.

Enfin, la mise en place du dispositif des services d'accueil et de référence régionalisée permettra à chaque adulte du territoire québécois de trouver à un même endroit dans sa région une personne capable de l'accueillir, de l'assister dans la définition de son projet de formation, de lui prodiguer les services d'information et d'orientation, d'évaluer ses acquis antérieurs et de le référer à la ressource éducative appropriée. L'établissement d'un tel dispositif a été

rendu possible grâce à la coopération des commissions scolaires, des cégeps, des commissions de formation professionnelle, des universités, des OVEP et, dans certains cas, des COFI et des groupements de femmes. 11 s'agit, en somme, d'une coopérative de services. L'année 1985-1986 sera très importante puisque l'infrastructure est installée et qu'on est rendu à l'étape du véritable démarrage.

La micro-informatique dans le système scolaire. L'évolution technologique et, en particulier, l'essor de la micro-informatique continuent d'affecter en profondeur et de façon irréversible les rouages économiques, la structure des emplois et la vie quotidienne des personnes. Le système éducatif ne pouvait rester en marge d'un tel phénomène et il devait faire en sorte que les jeunes et les adultes puissent s'approprier les nouvelles technologies et être en mesure de s'adapter rapidement aux changements qu'elles impliquent.

À cet effet, le ministère de l'Éducation a élaboré un plan quinquennal de développement de la micro-informatique dans le système scolaire. Ce plan en sera, en 1985-1986, à sa troisième année de réalisation. Pour ajouter à la compréhension du dossier, un document relatif au plan a été déposé auprès des membres de la commission parlementaire. Il fait état des réalisations des années 1983-1984 et 1984-1985, ainsi que des mesures prévues pour l'année 1985-1986. Qu'il me soit permis, sans entrer dans tous les détails, d'attirer votre attention sur la progression des principaux volets de cet important dossier. (10 h 45)

Tout d'abord, au chapitre des programmes d'études, nous poursuivrons l'implantation du programme d'introduction à la science de l'informatique au cours secondaire en passant de 315 écoles touchées à 450. Ajoutons que nous tenons également compte de l'évolution technologique dans ce domaine lorsque nous procédons à la révision des programmes en formation professionnelle.

Un tel développement entraîne par le fait même la nécessité d'intensifier le volet de formation et de perfectionnement des personnes.

On continuera de tenir des sessions ponctuelles de formation à l'intention des divers personnels et d'organiser des stages en industrie à l'intention du personnel de la formation professionnelle. On continuera d'encourager, par le biais des budgets de perfectionnement, les enseignants appelés à dispenser les cours d'introduction à la science de l'informatique à s'inscrire aux cours offerts par les universités dans le cadre des certificats. Enfin, on accélérera la production de la série télévisée Octo-Puce II.

On a l'intention d'accélérer le développement et l'achat de logiciels et de didacticiels. C'est là un rouage essentiel du plan quinquennal. Non seulement faudra-t-il continuer de soutenir les entreprises de production, mais aussi faudra-t-il susciter des projets de coproduction avec les réseaux d'enseignement et le personnel des établissements scolaires. En corollaire, il y aura lieu d'aider les commissions scolaires à se procurer les logiciels et les didacticiels sans lesquels les équipements perdraient toute utilité.

Nous prévoyons, en effet, acquérir en 1985-1986 les micro-ordinateurs correspondant à la dernière tranche du contrat passé au cours de l'année avec la firme Comterm. Comme on se souvient, ce contrat prévoyait l'achat de 9000 unités au cours des deux années.

Le succès d'un plan de développement aussi novateur repose en bonne partie sur un solide volet de recherche, d'expérimentation et d'innovation pédagogique. Au cours de la présente année scolaire, la création d'un centre de recherche en applications pédagogiques aura franchi des étapes décisives. Nul doute que les travaux du centre apporteront en 1985-1986, des éclairages essentiels dans le développement de logiciels exemplaires et dans l'expérimentation de modèles d'intégration pédagogique de l'ordinateur. D'autre part, le ministère de l'Éducation suscitera et soutiendra les projets émanant des milieux scolaires.

Enfin, le plan comporte aussi un volet d'évaluation continue et intégrée. Le mécanisme a déjà été mis en place et il continuera de fonctionner jusqu'à la fin du plan quinquennal. Ainsi, on pourra corriger au fur et à mesure les erreurs de trajectoire.

En plus des politiques majeures liées intrinsèquement à la trame du projet éducatif national, le ministère a identifié une série de cibles où il lui apparaît que des efforts particuliers doivent être soutenus et renouvelés. Une de ces premières cibles: les milieux économiquement faibles.

L'énoncé de politique "L'école québécoise" rappelait le droit de tous à une éducation de qualité et insistait sur le principe de l'égalité des chances, obligeant ainsi les milieux scolaires à reconnaître la présence à l'école de groupes minoritaires ayant des besoins spécifiques. Dès l'année suivante, en 1980, le ministère publiait une politique proposant un ensemble d'interventions éducatives pour les enfants des milieux économiquement faibles. Sans négliger tout à fait les ordres d'enseignement primaire et secondaire, la politique prévoyait des mesures destinées prioritairement aux très jeunes enfants et aux adultes. En 1984, un comité était créé afin de réaliser la politique existante et de formuler des recommandations précises visant à mettre à jour les orientations du ministère dans ce

domaine et à améliorer la qualité de l'enseignement dans les milieux économiquement faibles. Ce comité a maintenant terminé ses travaux et déposé son rapport.

Qu'est-ce que le comité propose? C'est un plan triennal qui commencera en 1986-1987. Il est prématuré d'identifier les mesures qui seront alors mises en oeuvre. Toutefois, on peut d'ores et déjà retenir que le plan d'action repose sur l'émergence de projets locaux nécessitant la coopération de tous les agents concernés. Le ministère accordera l'aide technique nécessaire et financera les projets sur la base d'une carte révisée des milieux économiquement faibles. Cette carte, qui permet de dégager pour chaque milieu un indice de "défavorisation", vient tout juste de recevoir les correctifs nécessaires. La nouvelle carte utilise le recensement de 1981 au lieu de celui de 1971 comme base de calcul. Elle permet aussi d'attribuer un indice à l'école et non plus seulement à la commission scolaire.

Ces modifications majeures introduisent une plus grande équité dans le processus d'allocation des ressources et tiennent davantage compte des réalités actuelles. On songe à l'utiliser dès 1985-1986 pour procéder à une réallocation des ressources. Cet instrument est disponible à des commissions scolaires qui, comme le Conseil scolaire de l'île de Montréal, consacrent une partie importante des taxes scolaires à l'établissement d'un système de péréquation visant à la réduction des écarts économiques entre les quartiers.

L'école et les communautés culturelles. Les enfants des différentes communautés culturelles constituent à l'intérieur de l'école des groupes minoritaires nécessitant une attention particulière. Soucieux de favoriser l'égalité des chances scolaires, le ministère a créé l'an dernier un comité chargé de faire une analyse de la situation et de proposer des mesures de correction des inégalités. Le comité vient tout juste de terminer ses travaux et de déposer un rapport comportant une soixantaine de recommandations.

Une première analyse de ces dernières laisse entrevoir la possibilité de donner suite dès cette année à une dizaine d'entre elles. L'an prochain, c'est-à-dire en 1985-1986, nous pourrons en réaliser une vingtaine d'autres. Il faudra par ailleurs procéder à une analyse plus poussée pour déterminer le rythme et les modalités d'application dans la dernière moitié des recommandations. Déjà, toutefois, la mise en oeuvre des premières introduira une dynamique nouvelle dans les milieux et encouragera les instances locales à susciter des initiatives qui modifieront positivement le contexte scolaire.

L'entreprise d'égalisation des chances, qui vise au développement optimal des aptitudes de tous les élèves par une attention aux besoins spécifiques de chacun, doit également se préoccuper d'une minorité trop longuement négligée: ceux qu'on appelle communément les élèves doués et plus talentueux ou la "douance". En effet, on ne peut parler d'excellence et du développement des compétences nécessaires à l'essor du Québec moderne si on ne favorise pas l'éclosion des talents.

Un document d'orientation sera bientôt prêt et des décisions seront prises afin que ces élèves reçoivent toute l'attention nécessaire. Déjà, cependant, le cadre se dessine et des actions concrètes peuvent être menées dès l'an prochain. Par exemple, au cours secondaire, il ne faudrait pas penser que la notion évoquée précédemment de "cheminements particuliers de formation de base" est réservée aux élèves qui se seraient trouvés au professionnel court. Les élèves doués et talentueux doivent aussi profiter de ce type de pédagogie individualisée. Il n'est pas dans notre intention de susciter la création d'écoles ou même de classes pour doués et talentueux, mais il faut plutôt encourager l'exploitation des ressources éducatives de l'école et de la communauté pour ces élèves. Le ministère soutiendra les innovations pédagogiques réalisées dans ce cadre et diffusera les rapports d'expériences en provenance des différents milieux. C'est le premier pas qu'il convient de franchir dès 1985-1986.

La condition féminine. Les filles à l'école ne constituent pas un groupe minoritaire. Cependant, leur orientation présente des anomalies qui les situent en position d'inégalité. Jusqu'au niveau du baccalauréat, la représentation féminine est égale à celle des garçons. Pourtant, lorsqu'on scrute attentivement la ventilation des effectifs et des diplômés par spécialisation ou par concentration, on réalise que les filles continuent de se diriger systématiquement vers les métiers traditionnellement féminins: santé, secrétariat, soins esthétiques, couture et habillement. Les relances effectuées par le ministère de l'Éducation auprès des sortants du système scolaire démontrent que les spécialités féminines présentent un taux de chômage plus élevé et un salaire inférieur.

Les orientations privilégiées par les filles préparent principalement à des emplois dans le secteur tertiaire, où l'on prévoit des surplus de main-d'oeuvre dus au développement de la micro-technologie et aux coupures budgétaires dans les services publics. Il suffit de constater l'absence quasi totale des étudiantes dans les options gagnantes reliées au virage technologique pour conclure que les filles seront les grandes perdantes, si on ne les incite pas à se tourner plus résolument vers les secteurs scientifiques et techniques traditionnellement masculins. La société québécoise y perd aussi

dans ce gaspillage du potentiel humain.

Pour remédier à cette intolérable situation, le ministère de l'Éducation, de concert avec ses partenaires sociaux, entend mener des actions vigoureuses et continues. C'est dans cette optique qu'il s'est associé au Conseil du statut de la femme, au ministère des Communications et au ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie pour produire un instrument didactique sur les carrières non traditionnelles d'avenir. La brochure "Explorons de nouveaux espaces" et la vidéo qui l'accompagne serviront de support aux activités d'incitation à l'orientation des filles vers les métiers plus prometteurs.

En outre, dans le cadre de la décennie des femmes, le ministère a adopté un plan triennal d'activités qui va dans le même sens. En 1985-1986, ce plan prévoit la recherche et la production de nouveaux instruments pédagogiques, la tenue de sessions de perfectionnement des personnels scolaires, l'identification de femmes oeuvrant déjà dans des secteurs de pointe et disponibles pour rencontrer des étudiantes, un dossier biographique d'une vingtaine de ces femmes, un guide de planification de conférences et d'ateliers de manipulation technique à l'usage des enseignants et des conseillers en orientation, ainsi qu'un didacticiel à l'intention des élèves du deuxième cycle du primaire. Enfin, l'influence des pairs étant souvent déterminante dans l'orientation des jeunes, on soutiendra également les initiatives des comités d'élèves.

L'insertion sociale et professionnelle des jeunes. Le volet éducation du plan gouvernemental d'insertion sociale et professionnelle des jeunes constitue toujours un dossier prioritaire du ministère et il mobilise les ressources de plusieurs unités administratives.

Les actions entreprises en 1984-1985 sous la responsabilité du ministère de l'Éducation portaient principalement sur l'amélioration des services d'orientation et d'information, la prévention de l'abandon scolaire, le retour à l'école des dé-crocheurs identifiés, le développement de l'enseignement professionnel et le perfectionnement des intervenants. Le ministère de l'Éducation collabore de plus activement avec deux autres ministères en assumant ses propres responsabilités dans la réalisation des mesures suivantes: Jeunes volontaires, avec le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche; travaux communautaires, stages en milieu de travail et rattrapage scolaire avec le MMOSR.

Les mesures d'orientation et d'information ont rejoint 43 000 élèves; celles de prévention de l'abandon scolaire, 38 000 élèves, et celles du retour à l'école, 21 000 élèves. Parmi ce dernier groupe, 9500 ont été référés au milieu scolaire par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu; 8500 étaient inscrits à l'enseignement régulier et 3000 à l'éducation des adultes. Il s'agit là d'une contribution supplémentaire du réseau de l'éducation et elle est d'autant plus significative qu'elle fait d'une mesure ponctuelle une prise en charge institutionnelle. La nouvelle politique de l'éducation des adultes, les règles budgétaires 1985-1986 et l'application de la loi 3 dès septembre 1986 donneront un caractère de permanence aux mesures visant à favoriser le retour aux études des jeunes décrocheurs qui n'ont pas obtenu leur diplôme d'études secondaires.

Pour leur part, les mesures de perfectionnement ont permis la réalisation de 50 projets et les travaux communautaires ont rejoint 2400 bénéficiaires de l'aide sociale.

En 1985-1986, troisième année du plan, les activités se poursuivent en fonction des résultats de l'évaluation en cours. Cette dernière, dont une grande partie tient compte de la satisfaction des bénéficiaires du plan, laisse déjà entrevoir la contrepartie des nombreux témoignages positifs exprimés. On pourrait les résumer ainsi: "Pourquoi l'école régulière ne m'a-t-elle pas enseigné des choses aussi intéressantes et utiles? Je n'aurais jamais décroché!" De tels témoignages interpellent vivement le système scolaire et nous indiquent le bien-fondé des efforts entrepris pour réviser le régime pédagogique et les programmes. Ils nous indiquent aussi qu'il faudra évaluer l'impact des changements apportés et rester constamment sur le qui-vive.

Un autre secteur important, c'est la formation et le perfectionnement des maîtres. Tous les chantiers évoqués jusqu'ici comportent des exigences considérables de formation et de perfectionnement des maîtres. Le ministère en est tout à fait conscient et déjà, en juin 1983, il soumettait à la consultation un document d'orientation intitulé "Vers des aménagements". En raison d'une année scolaire 1983-1984 fort chargée - restructuration scolaire, formation professionnelle des jeunes, micro-informatique, etc. - les partenaires ont reporté leur participation à la consultation en 1984.

À ce jour, les résultats de la consultation sont compilés et un comité réunissant les représentants du MEQ et du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie s'apprête à en tirer les conclusions ainsi qu'à proposer les aménagements à retenir et à mettre en place. On devrait donc pouvoir annoncer, dans le courant de la prochaine année, les mesures spécifiques qui seront arrêtées.

L'année 1984-1985 a été celle de l'adoption de la loi 3, Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public. Pour qu'elle

puisse entrer en vigueur de façon définitive et dans sa totalité le 1er juillet 1986, il faut dès maintenant mettre en oeuvre le dispositif de transition et adopter les procédures, les règlements et les règles budgétaires qui la rendront opérationnelle. La plupart des étapes de ce processus sont décrites au chapitre VI de la loi. Parmi les règlements qui découlent de cette loi, il y en a trois qui feront l'objet d'une consultation vers juin 1985. (11 heures)

Je veux déposer aussi à cette commission, pas à ce moment-ci, mais è la fin, les projets de règlement sur le régime pédagogique, sur la gestion des ressources matérielles et financières des commissions scolaires et sur la consultation des parents préalable à une demande de reconnaissance ou de retrait de reconnaissance comme école catholique ou comme école protestante.

Le premier projet porte sur l'article 447 de la loi 3 qui fixe le cadre à prévoir pour l'organisation des services éducatifs et qui détermine les sujets auxquels s'applique le règlement. Le nouveau régime s'apparente à l'ancien sur la plupart des sujets. Les principales modifications portent sur le temps prescrit pour les services éducatifs, sur les matières obligatoires et à option, ainsi que sur le calendrier d'application progressive des articles du régime. Dans l'ensemble, le nouveau régime colle aux articles de la loi et, de ce fait, s'appuie sur des balises qui facilitent sa compréhension. D'autre part, il respecte l'esprit de la loi qui octroie aux instances locales une meilleure marge de manoeuvre.

Le projet de règlement sur la gestion des ressources matérielles et financières porte essentiellement sur l'aliénation des immeubles, sur les contrats de construction des immeubles, de même que sur les services professionnels reliés à la construction. Sans entrer dans les détails, il ressort des projets de règlement que l'accent est mis sur la simplification du système, la responsabilisation des commissions scolaires, la transparence des décisions, l'utilisation rationnelle des ressources matérielles et, enfin, l'harmonisation de toutes ces procédures.

Le projet sur la consultation des parents préalable à une demande de reconnaissance ou de retrait de reconnaissance comme école catholique ou comme école protestante fixe les modalités par lesquelles une commission scolaire met en oeuvre le processus conduisant à l'octroi ou au retrait du statut confessionnel d'une école. Le règlement fait obligation à la commission scolaire de tenir une consultation, à la suite d'une demande d'un conseil d'école, et de veiller à ce que son déroulement s'effectue dans le plus grand respect des règles du jeu démocratique.

La loi 3 constitue l'aboutissement d'un long cheminement qui, du livre vert en 1977 jusqu'à ce jour, a donné lieu à de nombreuses consultations et à des commissions parlementaires. Adopter une loi pour le système scolaire est un processus qui exige du temps et des efforts concertés, lorsque les citoyens sont assez aguerris au jeu politique pour exprimer leur point de vue et le gouvernement assez respectueux des droits civiques pour chercher la voie étroite des compromis socialement acceptables. Nous avons là un exemple de la démocratie en action.

La nouvelle loi sur l'enseignement primaire et secondaire ainsi que la nouvelle configuration du ministère de l'Éducation déterminent un certain nombre de traits de cette période de mise en oeuvre.

La responsabilisation des milieux. La première moitié de la présente décennie a été marquée par une volonté de décentralisation des responsabilités vers ceux qui font l'école et, donc, par une démarche progressive de prise en charge de l'école par la communauté. La loi 3 vient accentuer ce mouvement en créant des conditions qui permettent de passer des intentions à la réalisation des objectifs de responsabilisation des milieux.

La loi favorise une décentralisation administrative réelle vers l'école en la plaçant nettement sous la responsabilité d'un directeur et d'un conseil. La composition et les fonctions des conseils d'école permettent de reconnaître le rôle prééminent des communautés locales dans la gestion des écoles. Les enseignants se voient confirmés dans leurs responsabilités relatives à l'enrichissement des programmes d'études et à l'adaptation des contenus indicatifs, au choix des modalités d'intervention pédagogique, du matériel didactique et des instruments d'évaluation.

Au niveau de la commission scolaire, le principe de l'élection démocratique au suffrage universel pour la majorité des commissaires a été préservé de manière à réaffirmer le maintien de la responsabilité de chaque communauté locale à l'égard des services publics d'éducation. Afin que la voix des écoles se fasse entendre au centre de décision de la commission scolaire, des parents désignés par l'ensemble des membres des conseils d'école représentent ces derniers au sein du conseil des commissaires.

Lors de l'étude des crédits de 1984-1985, mon prédécesseur, M. Bérubé, annonçait l'intention du ministre de se délester de certaines fonctions et pouvoirs et de se centrer sur sa mission essentielle. Les dispositions de la loi 3 ont concrétisé cette intention en réduisant les pouvoirs et les contrôles gouvernementaux sur la vie pédagogique et la gestion des commissions scolaires. À titre d'exemple, les commissions

scolaires n'ont plus à faire autoriser les programmes locaux par le ministère. Elles ont maintenant le pouvoir d'exempter un élève de l'application d'une disposition du régime pédagogique et elles peuvent délivrer les équivalences d'études. De même, le ministère abandonne les contrôles a priori dans au moins trois domaines: la disposition des biens, l'élaboration des plans et devis et les budgets annuels. Le nouvel encadrement réglementaire permet de décentraliser les pouvoirs et la prise de décision.

Il revient donc au milieu de prendre acte de ces nouveaux pouvoirs et responsabilités afin de faire de l'école un lieu qui réponde davantage aux aspirations de la communauté environnante. Le ministère tend à s'appuyer davantage sur la motivation et sur la capacité des agents éducatifs locaux à se donner les outils pédagogiques adaptés à leurs besoins, à s'engager dans des entreprises nouvelles, à prendre en main les destinées de leur école.

Bien sûr, une plus grande décentralisation, aboutissant obligatoirement à une responsabilisation accrue des milieux, place au premier plan la nécessaire concertation entre tous les partenaires impliqués de près ou de loin dans l'éducation.

Les règles du jeu nées de la loi 3 imposent de nouvelles formes de concertation au sein même du réseau scolaire. En précisant les rôles spécifiques des différents partenaires, cette loi a fait de l'école un lieu de concertation dont l'aboutissement majeur sera la réalisation du projet éducatif. Le nouveau conseil d'école, formé de représentants de toutes les composantes de l'école, constitue le coeur de la coopération de tous ces partenaires. Il est assisté dans ses fonctions par trois comités regroupant les parents, les élèves, les enseignants et les professionnels. Cette concertation interne à l'école peut même s'étendre au-delà des personnes directement impliquées. C'est ainsi que l'assemblée des parents peut décider de désigner un représentant de la communauté pour occuper le siège d'un parent au conseil d'école. Entre l'école et la commission scolaire, de nouveaux rapports doivent s'établir pour tenir compte de la redéfinition des responsabilités et d'une participation plus grande des parents au conseil des commissaires.

La concertation déborde même le réseau de l'éducation. Les politiques en action, dont j'ai parlé précédemment, faisaient déjà apparaître la nécessité d'une concertation accrue entre l'école et les partenaires sociaux. Les services régionalisés d'accueil et de référence, qui impliquent la concertation de plusieurs organismes d'une même région, constituent un bon exemple de ce phénomène. De même, certaines orientations en formation professionnelle entraînent l'établissement de relations très étroites entre le monde de l'éducation et celui du travail. Si on retient, par exemple, la voie de l'alternance comme cheminement particulier pour certains élèves, le réseau de l'éducation devra être en lien direct avec les entreprises.

La recherche de la qualité et de l'efficacité à l'aide de l'évaluation. Cette période que nous vivons, identifiée comme celle du second souffle de la réforme scolaire, est marquée par la recherche de la qualité. Les grandes opérations menées depuis la parution de "L'École québécoise" visaient, notamment, à doter le système éducatif québécois d'instruments susceptibles d'en accroître la qualité. Les quelques exemples suivants suffiront à illustrer ma pensée.

Le ministère a rendu publiques, au cours des dernières années, diverses politiques sectorielles qui sont venues préciser les orientations générales de notre système. Tous les programmes d'enseignement ont été renouvelés et leur implantation a été facilitée par un important programme de soutien pédagogique: des guides pédagogiques, le perfectionnement des enseignants et l'amélioration du matériel didactique. Des régimes pédagogiques plus ouverts à la responsabilité locale ont été promulgués. Cette recherche de la qualité offre à l'évaluation un fondement solide. Ce n'est pas tout de se donner des instruments pour accroître la qualité, il importe aussi de se donner les moyens de juger de cette qualité. On assiste depuis quelques années, chez les agents de l'éducation, à une attention et à un intérêt renouvelés pour le champ de l'évaluation.

À la recherche de la qualité s'ajoute la recherche de l'efficacité du système. De plus en plus, les pressions de l'opinion publique incitent les établissements à rendre compte de leurs activités éducatives. Les moindres données, qui traduisent même partiellement la performance de notre système, font la une des quotidiens québécois. La population est avide de ces jugements portés sur notre système. En plus, devant les impératifs de rationalisation liés, d'une part, au déclin de la population scolaire et, d'autre part, aux coûts de l'éducation dans une économie en crise, on redécouvre les nécessités et les vertus de l'évaluation.

En réalité, la volonté d'évaluer n'est pas un phénomène nouveau et des gestes importants ont déjà été posés, notamment, la politique générale d'évaluation pédagogique et le cadre général de l'évaluation dans l'ensemble du système éducatif. Actuellement, des travaux sont en cours afin de dégager de l'ensemble des données que nous possédons celles qui sont les plus significatives pour porter un jugement sur la qualité, la performance et les tendances générales de notre système d'éducation. Nous serons bientôt en mesure de fournir aux

gestionnaires des écoles un profil pédagogique de leur école axé sur le cheminement scolaire. Il sera possible de situer l'école par rapport à elle-même, par rapport a des écoles ayant les mêmes caractéristiques et même par rapport aux tendances générales du sytème scolaire. L'analyse de ces données permettra aussi de mieux mesurer la pertinence et l'efficacité des grands programmes d'action du ministère.

L'Assemblée nationale sera appelée à adopter bientôt, à ma demande, des crédits de 4 591 000 000 $ pour assurer l'enseignement préscolaire, primaire et secondaire. Ces crédits représentent une hausse de 3,5 % sur ceux de l'an dernier; en regard des dépenses probables, l'augmentation passe à 4,8 %.

L'ensemble du budget est constitué de deux éléments majeurs: l'administration (2,2 %) et l'enseignement (97,8 %). Par rapport à l'année 1984-1985, le budget de l'administration a diminué de 4 %, alors que celui de l'enseignement a augmenté de 11,3 %. Cette hausse est attribuable en grande partie au paiement par anticipation effectué en 1983-1984, qui a eu pour effet de diminuer les crédits de 1984-1985 et de gonfler artificiellement de 7,7 % ceux de 1985-1986. C'est pourquoi nous avons une augmentation réelle de 3,5 %.

La majeure partie de ces crédits de 4 591 000 000 $ est destinée aux commissions scolaires et sert surtout à assurer la rémunération du personnel enseignant, qui constitue la principale ressource mise à la disposition des élèves.

Malgré le fait qu'on assistera à une diminution d'environ 5000 élèves dans nos écoles, le montant des subventions gouvernementales pour l'enseignement aux jeunes augmentera de quelque 20 000 000 $ en 1985-1986. De plus, le gouvernement engagera un montant de 30 000 000 $ pour les programmes de construction d'écoles et d'amélioration des écoles déjà existantes. J'ai demandé, à cet égard, qu'on me présente les projets plus tôt que par les années passées afin que je puisse les autoriser rapidement.

Par ailleurs, la poursuite de la réalisation du plan quinquennal de développement de la micro-informatique à des fins pédagogiques permettra aux commissions scolaires d'acheter des équipements pour quelque 22 000 000 $ en 1985-1986.

Les crédits accordés à mon ministère assureront également le maintien d'interventions éducatives particulières reliées à l'accessibilité de l'éducation et à l'organisation de services supplémentaires pour des clientèles spéciales, dont les élèves en difficulté et les élèves provenant de milieux économiquement faibles. Une mesure nouvelle a aussi été conçue pour faciliter l'hébergement des jeunes handicapés qui doivent loger hors du foyer familial pour recevoir des services éducatifs appropriés. Les parents de chaque enfant admissible pourront ainsi bénéficier d'une allocation maximale de 1500 $ par année.

Enfin, j'aimerais rappeler que le budget dont il est question constitue, à toutes fins utiles, celui du réseau puisque c'est dans les écoles que vont se réaliser les mesures mises en lumière tantôt.

L'étude des crédits est l'une des rares occasions, sinon la seule véritable, de faire connaître aux membres de la commission parlementaire et surtout à la population en général l'état du développement des grands dossiers éducatifs. C'est aussi le moment de rendre des comptes puisque les crédits à engager le sont toujours par rapport à l'année qui précède, aux actions qu'il faut interrompre, continuer ou modifier, et à celles qu'il convient d'inventer parce que des besoins nouveaux se sont manifestés.

Loin de me soustraire à cette obligation annuelle, j'ai voulu profiter pleinement de l'occasion qui m'est offerte et je n'ai pas hésité à prendre le parti d'expliquer en détail certaines orientations majeures ainsi que les mesures concrètes par lesquelles nous allons passer du projet à l'action. (11 h 15)

Maintenant, M. le Président, j'avais indiqué à l'Opposition que je présenterais également les grandes lignes qui ont été les nôtres au cours de l'année 1984-1985 de même que les projections de 1985-1986 concernant deux autres organismes qui sont de ma responsabilité, à savoir la Commission de la fonction publique et l'Office des ressources humaines. Mais je trouve qu'il serait peut-être préférable d'aller tout de suite aux commentaires de l'Opposition officielle, ayant convenu entre nous que s'il y avait des questions sur ces deux points nous le ferions demain avant-midi. C'est bien cela? Alors, demain avant-midi, pendant la dernière heure, je pourrais, en présence des gens de la commission et de l'Office des ressources humaines, présenter pendant dix à quinze minutes les grandes lignes, les grandes orientations de ces deux organismes gouvernementaux. Par la suite, nous aurions les commentaires ou les réactions de l'Opposition.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le ministre. La parole est maintenant à M. le député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de participer de nouveau à ce débat annuel sur les crédits du ministère de l'Éducation. Comme le ministre l'a fait tantôt, je vais d'abord esquisser un tour d'horizon des événements qui se sont produits au cours de

la dernière année, et plus largement, peut-être, au moins sur certains aspects, au cours du deuxième mandat du gouvernement actuel. Dans une deuxième partie, j'aborderai plutôt brièvement un certain nombre de sujets dont je proposerai ensuite qu'ils fassent l'objet d'échanges plus approfondis pendant la période de temps qu'il nous restera pour l'étude des crédits du ministère.

Je suis tout à fait d'accord avec le ministre pour qu'on aborde à la fin du travail de la commission consacrée aux crédits de son ministère les deux organismes auxquels il a fait allusion à la fin de son intervention. On prévoira volontiers, à ce moment-là, tout le temps voulu pour les explications que le ministre aurait pu donner maintenant, mais qu'il a jugé, opportunément à mon point de vue, devoir reporter à ce moment-là de nos travaux.

M. le Président, l'accession du Parti québécois au pouvoir en novembre 1976 avait suscité de grands espoirs dans les milieux de l'éducation et dans la population en général quant à l'action qu'allait entreprendre le nouveau gouvernement dans le secteur vital de l'éducation. Au cours du second mandat du gouvernement Lévesque, ces espoirs ont cependant été brisés par le cheminement erratique, imprévisible et trop souvent autoritaire du gouvernement. Ce gouvernement devrait être le promoteur par excellence de l'éducation; il en est devenu, dans trop de dossiers, le fossoyeur.

Au début de son premier mandat, le gouvernement avait semblé mieux comprendre le rôle irremplaçable de l'éducation. Il avait continué, comme le gouvernement précédent, d'accorder à l'éducation une place de choix dans ses priorités. Par la voix de son ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, il avait tenu à l'endroit du monde de l'éducation un discours ouvert, compréhensif et empreint de volonté de collaboration. Ce discours s'était traduit dans plusieurs dossiers par des politiques et des décisions empreintes d'une volonté réelle de progrès.

Au cours du second mandat du gouvernement, la situation s'est toutefois rapidement gâchée. Hanté par les conséquences de sa propre imprévoyance financière et économique, le gouvernement, à compter de 1981, a en effet entrepris de sabrer vigoureusement dans plusieurs secteurs qu'il avait donné jusque là l'impression de respecter. Prenant un virage radical dans le sens d'un retour à une orthodoxie économique et politique qu'il avait trop longtemps tournée en dérision, le gouvernement a commis l'erreur que l'on observe souvent chez les convertis de fraîche date. Il a poussé le zèle réformateur jusqu'à brûler ce qu'il adorait naguère, jusqu'à noircir ceux qui furent longtemps ses meilleurs appuis, jusqu'à s'en prendre avec une brutalité inattendue à des institutions qui n'avaient le plus souvent qu'accompli consciencieusement leur devoir.

Après avoir été sous tous les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis 1960 l'objet d'une attention et d'un respect transcendant généralement les lignes de parti, l'éducation est soudainement devenue, à compter de 1981, un sujet de remontrances et de jérémiades de la part du gouvernement, une cible par excellence pour les coupures budgétaires et maintes autres interventions arbitraires de la part du gouvernement.

Je signale, entre parenthèses, M. le Président, que le nouveau ministre de l'Éducation a adopté, depuis quelques semaines, depuis qu'il est entré en fonction -les premiers temps, il parlait moins mais, depuis, il a commencé à parler - un langage qui nous rapproche beaucoup plus de ce climat que j'ai évoqué à propos des années du premier mandat du Parti québécois, et des années précédentes également, des gouvernements libéraux et de l'Union Nationale qui se sont succédé depuis 1960. Je trace un tableau d'ensemble et je pense qu'on conviendra facilement de la vérité de ce que j'ai dit.

L'année 1984-1985 n'a pas été différente, à cet égard, des trois années précédentes. Elle a vu se confirmer et s'accentuer trois tendances lourdes qui suscitent de graves inquiétudes quant à l'avenir de l'éducation au Québec.

La première tendance est confirmée par les résultats du dernier exercice et accentuée par les documents budgétaires déposés par le gouvernement pour l'exercice 1985-1986. L'éducation a continué et continuera, au cours de la prochaine année, à perdre du terrain dans la hiérarchie des priorités gouvernementales. Elle fut longtemps la priorité majeure des gouvernements qui ont exercé le pouvoir depuis 1960. Tous comprirent en effet que, sans un système d'enseignement qui soit à la fine pointe du progrès et des connaissances, il serait illusoire d'envisager un avenir prometteur pour le Québec. Tous acceptèrent de proposer que les Québécois s'imposent ensemble les sacrifices nécessaires à la poursuite de cette fin. Malheureusement, cette tendance qui s'était maintenue jusqu'à 1980 a été renversée au cours des quatre dernières années.

Les dépenses du ministère de l'Éducation représentaient, en 1980-1981, 20 % de toutes les dépenses du gouvernement. Évidemment, je soustrais ce qui a été transféré au ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie. Il en sera question plus loin dans mon exposé, évidemment, et de manière plus approfondie la semaine prochaine, à l'occasion de l'étude des crédits de ce ministère. Si on réaligne les dépenses en fonction du partage des responsabilités qui a

été fait, les dépenses du ministère représentaient, en 1980-1981, 20 % de toutes les dépenses du gouvernement et 5 % de la valeur totale du produit intérieur brut québécois. En 1985-1986, le ministère de l'Éducation ne se verra plus attribuer que 16,8 % des dépenses gouvernementales et ses dépenses ne représenteront plus que 4,4 % de la valeur totale du PIB.

Dans les explications qu'il a préparées à l'intention de la commission parlementaire, le ministre de l'Éducation attribue sentencieusement ce changement "aux efforts particuliers du ministère de l'Éducation dans la rationalisation des dépenses gouvernementales." Il va jusqu'à souligner, comme s'il y avait lieu de s'en vanter - et je cite de nouveau - que "le taux de croissance des dépenses du ministère de l'Éducation, au cours de la période 1980-1981 à 1985-1986 a été inférieur à celui de l'économie du Québec."

Ce que le ministre omet de signaler, c'est que si cette réduction de taille a été conçue et appliquée à partir d'en haut, sous le signe du resserrement et de la rationalisation, elle s'est traduite sur le terrain, c'est-à-dire là où se trouvent les élèves, les enseignants et les institutions d'enseignement, par une diminution inquiétante et trop souvent arbitraire de la qualité des services éducatifs.

À l'appui des réductions budgétaires imposées dans le secteur de l'éducation, le ministre invoque à juste titre la diminution des clientèles aux niveaux préscolaire, primaire et secondaire. Il suffit toutefois de constater les chiffres contenus dans le cahier explicatif des crédits de son ministère pour l'année 1985-1986 pour se rendre compte que l'évolution des effectifs, depuis 1982-1983, a été très mineure. La diminution a été très minime et ce n'est sûrement pas l'argument qu'on peut invoquer pour justifier les coupures qu'on a imposées au cours de ces années. Les prévisions que l'on nous présente pour les prochaines années vont dans le même sens.

À cet égard, il est une donnée de base que le gouvernement ne saurait réfuter. Si l'on s'en tient strictement aux subventions par étudiant en dollars constants, on constate que dans tous les secteurs du système d'enseignement il y a eu, depuis 1981, un recul inquiétant dans les contributions gouvernementales à l'oeuvre de l'éducation.

Selon des calculs établis tout récemment par M. Gaétan Lévesque, économiste au service de la Fédération des associations de professeurs d'universités du Québec, les subventions par étudiant sont passées, entre 1980-1981 et 1984-1985: pour le secteur primaire et secondaire public: de 2975 $ à 2673 $; pour le secteur collégial public: de 1566 $ à 4282 $, subventions per capita, en dollars constants; pour le secteur universitaire: de 6616 $ à 4961 $; pour les institutions privées de 2379 $ à 1966 $.

Non seulement observe-t-on une diminution substantielle des subventions per capita dans chaque secteur, mais cette tendance à la baisse, loin de se résorber, est encore présente dans les prévisions budgétaires de 1985-1986.

Le ministre nous a indiqué tantôt que, pour son ministère, l'augmentation réelle des crédits par rapport aux dépenses effectuées l'an dernier est de 4,8 %. C'est à peine supérieur au taux de l'inflation pour la dernière année, lequel a été autour de 4,2 %, 4,3 %. C'est au moins mieux que ce que présentaient les estimations budgétaires du gouvernement quand il nous faisait voir dans les titres une augmentation de 12,7 % au chapitre de l'enseignement primaire et secondaire et de 11,9 % pour l'ensemble du ministère. On donnait des explications par la suite, mais l'impression qu'on créait beaucoup de journalistes ont malheureusement été victimes de ce piège - c'est qu'on augmentait de 12,7 % les ressources mises à la disposition du ministère au cours de la prochaine année, alors que tout le monde sait que c'est l'effet d'un mirage créé par les paiements anticipés de 280 000 000 $ à même la dette accumulée des commissions scolaires. De toute manière, je pense que les chiffres ont été présentés comme ils doivent être vus.

Une seconde tendance s'est affirmée avec un sans-gêne désolant dans les actions du gouvernement au cours des deux dernières années. Elle consiste à vouloir faire passer l'aspect utilitaire de l'éducation avant l'aspect gratuit et libéral qui est sa première et principale raison d'être. Le gouvernement veut, avec raison, que la formation de la jeunesse soit faite dans un souci constant d'adaptation aux besoins du marché du travail et aux exigences du changement dans les domaines culturel, social, économique et technologique. Sur ce point, nous sommes parfaitement d'accord. À l'exemple de maints autres gouvernements, le gouvernement québécois pousse toutefois cette préoccupation si loin qu'il a été amené, ces dernières années, à introduire dans notre système d'enseignement des changements majeurs qui mettent en péril l'unité essentielle du système d'enseignement et le respect des finalités premières de l'éducation.

Ce n'est que grâce au travail de la commission parlementaire de l'éducation que l'on a pu éviter, il y a un an et demi, l'imposition d'un règlement des études collégiales qui s'inspirait nettement et explicitement de cette philosophie utilitariste et à courte vue, qui nous aurait amenés à créer un diplôme intermédiaire entre le certificat d'études que nous avons actuellement et le diplôme d'études

collégiales. Grâce au travail de la commission parlementaire et aux interventions d'à peu près tout ce qui avait une valeur représentative dans le milieu, il fut possible d'apporter à temps des changements importants à ce projet de règlement qu'avait conçu le ministère de l'Education.

Un autre exemple éloquent de ce glissement vient de l'orientation retenue par le gouvernement dans le secteur de l'éducation des adultes. Sous prétexte d'établir une nette distinction entre la formation professionnelle et la formation générale dans ce secteur, on a imposé, sans aucun débat public préalable, une politique bicéphale, voire tricéphale, qui est radicalement contraire à la proposition majeure qui avait émané de la commission Jean.

L'éducation des adultes relève désormais non plus d'une autorité unifiée, comme l'avait vivement souhaité la commission Jean, mais de deux, que dis-je, de trois ministères différents.

On isole la formation générale de la formation professionnelle. On soustrait la formation professionnelle à l'autorité normale du ministre de l'Éducation. On prétend faire ainsi oeuvre plus utile et plus fonctionnelle. On prétend pouvoir mieux adapter l'éducation des adultes aux besoins du marché du travail. Je crains fort qu'on ne réussisse, au contraire, qu'à diminuer la portée véritable de l'éducation des adultes. Le but majeur de l'éducation à tous les niveaux, c'est la formation d'hommes et de femmes capables de se débrouiller honorablement sur le marché du travail, mais surtout d'hommes et de femmes aptes à vivre en plénitude leur vie d'hommes et de femmes dans toutes ses dimensions.

On me permettra de citer à ce sujet des extraits d'une étude que publiait en 1983 un universitaire américain distingué, M. William Rivera, professeur à l'Université du Maryland et observateur attentif de l'évolution de l'éducation des adultes sur la scène américaine et internationale. Après avoir noté la priorité que les gouvernements sont de plus en plus enclins à accorder à la dimension économique de l'éducation, M. Rivera formule l'observation suivante: "Cette approche et ce souci sont compréhensibles, mais ils minimisent la pleine portée et la signification de l'éducation. En un sens, ils condamnent l'éducation à l'échec, vu qu'au jugement de plusieurs critiques, il n'existe pas de corrélation nécessaire entre éducation et développement économique, entre production et emploi, entre planification et formation." (11 h 30)

Rivera poursuit ainsi: "Le développement national est un sujet d'importance majeure. Mais la préoccupation économique n'est pas la seule dont doivent tenir compte les personnes responsables des décisions dans ce domaine. D'autres facteurs, de nature culturelle, revêtent une grande importance dans le développement. L'éducation doit leur accorder une place aussi importante, sinon plus grande, qu'à la seule préoccupation économique."

L'orientation qu'a retenue le gouvernement en matière d'éducation des adultes inspire à cet égard de profondes inquiétudes. On le déplore d'autant plus qu'après avoir attendu deux ans avant de faire connaître ses orientations, le gouvernement s'empressa ensuite de les imposer dans les faits, refusant systématiquement le débat en commission parlementaire que réclamaient d'une voix unanime les intervenants du secteur de l'éducation des adultes et se contentant d'une consultation pro forma qui était tellement générale et tellement large qu'elle eut beaucoup plus l'air d'une série de monologues que d'une véritable consultation comme on était en droit de s'attendre de la part d'un gouvernement démocratique.

Lorsqu'on ne perçoit plus l'éducation qu'à travers certaines dimensions coupées les unes des autres, on ne perçoit plus l'importance d'en assurer l'unité, ni dans les orientations qu'on lui imprime, ni dans les structures d'organisation dont on entend la doter. L'érosion observée au niveau des finalités n'a pas tardé, en conséquence, à se refléter au niveau des structures de direction du système d'enseignement.

Le Québec s'était doté, en 1964, d'un ministère de l'Éducation chargé de promouvoir l'accès à l'éducation sous toutes ses formes et d'assurer le développement harmonieux et ordonné d'un système d'enseignement moderne dans toutes ses composantes. Une raison majeure qu'invoquait la commission Parent pour recommander la création d'un ministère de l'Éducation, c'était précisément le besoin de doter le Québec d'un instrument politique capable d'assurer l'unité et l'ordre là où l'organisme d'enquête avait trop souvent déploré des phénomènes de dispersion, d'anarchie et de désordre.

Depuis deux ans, sans qu'il y ait jamais eu de débat public à ce sujet, procédant chaque fois de manière furtive et soudaine, le gouvernement semble s'être ingénié à diminuer et à rapetisser le ministère de l'Éducation. Celui-ci avait naguère la charge de tout le système d'enseignement au Québec. Ainsi que le dit sa loi constitutive, encore en vigueur jusqu'à nouvel ordre, le ministre de l'Éducation - et je cite le texte de la loi "a la responsabilité de promouvoir l'éducation, d'assister la jeunesse dans la préparation et l'orientation de son avenir, d'assurer le développement des institutions d'enseignement". Le ministre de l'Éducation a

donc la responsabilité de l'éducation sous toutes ses formes, à tous les niveaux. Il est doté par la loi, à cette fin, des pouvoirs nécessaires. Ces pouvoirs s'appliquent, suivant des formes et des degrés qui varient selon les niveaux et les types d'institution, à tous les niveaux d'enseignement, à toutes les institutions. Le but de ces dispositions législatives, ce n'était pas d'instituer une dictature. C'était plutôt d'assurer la nécessaire unité de direction et d'orientation, et le développement ordonné et intégré de tout le système à l'intérieur d'orientations communes.

Après le départ de la formation professionnelle des adultes pour le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du rs-venu et le départ de l'enseignement collégial et universitaire pour le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, le ministère de l'Éducation ne sera plus qu'une direction générale de l'enseignement primaire et secondaire, coiffée d'un chapeau politique. Il aura cessé d'être un ministère de l'Éducation au plein sens du terme. Non seulement se sera-t-il vu amputer de dimensions essentielles du rôle qu'avait voulu lui conférer naguère l'Assemblée nationale, mais il n'existera plus nulle part - sauf au niveau d'un cabinet dont on connaît, hélas, les déchirements, les tensions et les changements continus d'orientation sur les questions souvent les plus vitales pour l'avenir de notre peuple -de direction politique unifiée pour l'ensemble du système d'enseignement québécois. Sous des formes qui se veulent modernes et enveloppées dans le langage technocratique d'aujourd'hui, c'est le retour au morcellement et à la dispersion des énergies et des ressources qu'avait vivement déploré en son temps la commission Parent.

La France et la Grande-Bretagne, deux sociétés auxquelles le Québec est profondément apparenté en matière d'éducation, ont toutes deux réalisé la nécessité d'adapter leur système d'enseignement aux exigences d'un monde de plus en plus imprégné de science et de technologie. Ni la France, ni la Grande-Bretagne n'ont cependant cédé à la tentation de morceler l'autorité politique dans un domaine aussi essentiel que l'éducation. Chacun de ces deux pays a au contraire mis au point des structures de direction politique qui préservent l'unité de direction jugée essentielle pour l'ensemble du système d'enseignement, tout en veillant à ce que des personnes se voient doter de responsabilités précises dans le champ de l'enseignement supérieur, de la science et de la technologie. On aurait aimé qu'au lieu d'emprunter l'exemple trop récent et trop limité pour être vraiment significatif de certaines provinces de l'Ouest canadien, le gouvernement du Québec puise plutôt son inspiration, en une matière aussi lourde de conséquences, à cette source plus sûre, plus substantielle et plus stable que constituent les deux grands pays auxquels le Québec et le Canada doivent leur identité culturelle et politique.

Ce qui s'est passé dans le secteur de l'éducation est le reflet fidèle de ce qui s'est passé au sein du gouvernement actuel depuis quatre ans. Sous l'empire d'une crise économique aiguë dont nul ne nie les ravages, le gouvernement a senti avec raison le besoin de procéder à des ajustements. Ces ajustements s'imposaient d'autant plus dans maints domaines, en particulier celui de l'économie, que le gouvernement s'était obstiné pendant plusieurs années à nier, à ignorer ou à ridiculiser des réalités pourtant évidentes que l'Opposition n'avait cessé de lui rappeler, comme celle, par exemple, de rechercher une capacité concurrentielle plus forte pour le Québec et de faire à cette fin une confiance plus franche et plus forte au secteur privé de l'économie. Mais la crise économique, à certains moments, est devenue prétexte à des virages qui allaient bien au-delà des besoins qui en découlaient. Dans le domaine de l'éducation en particulier, on a profondément ressenti les effets de maintes secousses créées par les virages trop brusques et irréfléchis d'un gouvernement visiblement pris de panique.

Les flottements qu'a connus le gouvernement autour de ses orientations fondamentales ont engendré eux aussi des répercussions coûteuses dans le secteur de l'éducation. En moins d'un an, pas moins de trois ministres, véhiculant chacun des conceptions souvent très différentes de l'action à conduire, se sont succédé à la tête du ministère de l'Education.

Je veux rendre hommage au personnel professionnel du ministère de l'Éducation qui a su faire montre, à travers ces changements trop nombreux, d'un sens remarquable de la continuité et de l'attachement au devoir. Grâce à la maîtrise que certains fonctionnaires possèdent des grands dossiers, il a été possible de prévenir certains écueils et de garder le navire à flots. Mais, si la stabilité et l'unité des orientations n'avaient dépendu depuis un an que de la direction proprement politique du ministère, le Québec aurait sombré dans la confusion et l'improvisation. Cette carence du pouvoir politique engendre en contrepartie un phénomène dangereux. Lorsque le pouvoir politique pèche par absence ou instabilité, les fonctionnaires sont entraînés malgré eux à prendre aussi en charge des orientations de nature politique. C'est là une tendance qui ne peut qu'être néfaste à la longue au bien véritable de l'éducation et au respect que l'on doit conserver pour la fonction publique.

Les tendances que je viens d'évoquer vont inévitablement engendrer des

conséquences coûteuses pour le bon fonctionnement de notre système d'enseignement, et pour une longue période, si elles ne sont pas corrigées. À l'aide d'un certain nombre de cas concrets qui ont revêtu au cours de leur dernière année une acuité plus grande, je voudrais illustrer, dans une deuxième partie de cet exposé, certaines de ces conséquences.

Les sujets dont je traiterai successivement sont les suivants: la condition enseignante, le régime pédagogique et les nouveaux programmes, la formation professionnelle, l'éducation des adultes, les règles budgétaires, la restructuration scolaire, les micro-ordinateurs, l'enseignement privé, la présence anglophone au ministère de l'Éducation et les enseignants ex-religieux.

Je ne pense pas, M. le Président, que j'aurai le temps de donner lecture du texte entier des observations que j'ai préparées sur chacun de ces sujets mais, si le ministre veut consentir à ce que ces sujets, dont la plupart ont été abordés par lui-même dans son exposé d'ailleurs, servent d'inspiration pour la division du temps, je pense que nous aurons la possibilité de faire un travail constructif au cours de la discussion qui commencera à compter de cet après-midi.

Sur la condition enseignante, il serait trop long de reprendre toutes les observations que faisait en septembre dernier le Conseil supérieur de l'éducation sur l'état pitoyable dans lequel se trouvait la profession enseignante un an après l'entrée en vigueur des trop célèbres décrets qui tiendront lieu de convention collective, à moins de développements contraires, jusqu'à la fin de 1985 pour les enseignants du secteur primaire et secondaire public.

Au terme d'une enquête dont il avait presque dû arracher de force le mandat au ministre de l'Éducation du temps, le Conseil supérieur de l'éducation signalait, entre autres, l'existence d'une atmosphère généralisée de défaitisme et d'insatisfaction dans de nombreuses écoles; l'essoufflement et la fatigue des enseignants devant la lourdeur de la tàche éducative inspirée par les décrets; le vieillissement des effectifs enseignants dans tout le Québec; les difficultés de communication avec les élèves découlant des décrets, surtout au niveau secondaire.

Devant la gravité des observations formulées par le Conseil supérieur de l'éducation, le ministre de l'Éducation, après avoir d'abord nié l'existence des problèmes -que de fois on nous a répété, en Chambre, que tout allait bien, qu'il n'y avait pas de problème; c'était avant le ministre actuel de l'Éducation - dut se rendre à l'évidence: il accepta de geler la tâche éducative pour 1984-1985.

Tout cela ne saurait cependant faire oublier que les décrets et les coupures arbitraires de salaire de 1982-1983, de même que la campagne de dénigrement absurde menée par le gouvernement contre les enseignants, ont laissé chez ceux-ci des blessures profondes et un sentiment de gêne qui alourdit leur activité professionnelle. Entre le gouvernement et les enseignants, il s'est produit une rupture de confiance dont les effets perdurent, au prix de graves conséquences pour le climat et la qualité du travail éducatif.

À la faveur des contacts rendus possibles par l'existence d'un comité mixte représentant la partie patronale et la partie syndicale, le ministre actuel de l'Éducation -et je l'en félicite - avait accordé son aval à des conversations qui débouchèrent, il y a quelques temps, sur une hypothèse de règlement susceptible d'améliorer les conditions de travail des enseignants et de procurer la paix dans le secteur de l'éducation pour les trois prochaines années. Le ministre avait autorisé la tenue de ces pourparlers dans un esprit dont nul ne saurait mettre en doute l'ouverture et la sincérité. Il avait même assumé personnellement la responsabilité d'endosser auprès de ses collègues du gouvernement les recommandations découlant des négociations officieuses des dernières semaines.

Malheureusement, le ministre n'a point trouvé auprès de ses collègues du cabinet l'audience qu'il avait souhaitée. Le cabinet, ayant rejeté certaines recommandations contenues dans l'hypothèse de règlement, le ministre a dû se contenter de constater publiquement son échec.

On ne saurait trop souligner combien il importe de reprendre les pourparlers au point où les a laissés le refus du gouvernement. Toute solution négociée que les deux parties pourront mettre au point sera infiniment préférable à la méthode décrétale devenue chère au gouvernement.

Le régime pédagogique et les nouveaux programmes. La préparation des nouveaux programmes et la mise au point des régimes pédagogiques aux plans primaire et secondaire ont constitué une opération de grande envergure qui doit se poursuivre au cours des prochaines années. Les programmes ne seront jamais, ni définitifs, ni parfaits. Dans l'ensemble, cependant, on s'accorde à reconnaître l'excellente qualité de la très grande majorité des nouveaux programmes mis au point sous l'autorité du ministère de l'Éducation.

Si l'on est d'accord sur la qualité objective des nouveaux programmes, il n'en va pas ainsi, toutefois, de la manière dont on a procédé à leur implantation. Voici, à ce sujet, les principales constatations recueillies par le Conseil supérieur de l'éducation dans son enquête de 1984 sur la condition enseignante.

En premier lieu, on déplore l'arrivée

trop massive des nouveaux programmes dans un laps de temps trop court, notamment au primaire où les généralistes doivent assumer l'application simultanée d'un nombre de programmes nouveaux qui grandit d'une année à l'autre.

Deuxièmement, on dénonce les retards fréquents dans la publication des guides pédagogiques pour le maître; souvent, ces guides n'étaient pas disponibles durant la phase de préparation des enseignants ou, encore, ils paraissaient à la dernière minute ou après le début de l'application du programme. (11 h 45)

Troisièmement, la publication des nouveaux manuels scolaires, lorsqu'elle se produit, a lieu deux ou trois ans après le lancement des programmes. Il en va de même pour le nouveau matériel didactique et parfois pour les instruments d'évaluation. On doit donc utiliser des instruments anciens, peu adaptés aux exigences des nouveaux programmes ou, encore, fabriquer sur place du matériel maison pour les élèves.

Le peu de préparation formelle des enseignants en vue de l'application des nouveaux programmes est apparu dans trop de milieux comme un grief majeur. Des moyens ont certes été pris pour rejoindre les enseignants dans des sessions d'information ou des journées pédagogiques, mais, en moyenne, le Conseil supérieur de l'éducation - que je cite presqu'au texte dans cette partie - estime que le temps consacré à cette partie de l'opération a été beaucoup trop limité.

On demande, enfin, un meilleur soutien de la part de conseillers pédagogiques capables d'aider les enseignants vraiment dans leur champ respectif d'enseignement. Ce problème semble devoir s'aggraver, vu que le nombre de conseillers pédagogiques disponibles a diminué ces dernières années.

Dans les milieux anglophones, la mise au point des nouveaux programmes et des guides pédagogiques qui doivent les accompagner soulève des problèmes beaucoup plus aigus. On y constate des retards nombreux dans à peu près tous les champs d'enseignement.

Dans le cahier explicatif des crédits, le ministre reconnaît lui-même des lacunes très graves dans ce secteur, lacunes que nous avons soulignées, d'ailleurs, l'an dernier et l'année précédente. Les remèdes sont beaucoup plus lents à venir que les assurances de bonne volonté qu'on nous prodigue à chaque fois.

En relation avec l'implantation des nouveaux programmes, je voudrais attirer l'attention du ministre sur un certain nombre de carences qui n'ont pas donné lieu à des solutions satisfaisantes à ce jour. J'aurai l'occasion de le faire de manière plus détaillée quand nous discuterons de ce poste plus tard durant les travaux de cette commission, mais je voudrais souligner dès maintenant que le refus du ministère de l'Éducation de fournir aux commissions scolaires les sommes dont elles ont besoin pour faire l'acquisition des manuels requis pour l'enseignement des nouveaux programmes entraîne, dans trop d'endroits, des situations où les élèves se voient privés d'instruments de travail dont ils ont absolument besoin et auxquels ils ont droit.

Le ministre a fait allusion tantôt au nouveau projet de règlement qui est en voie de préparation en conséquence de la mise en oeuvre de la loi 3 sur la restructuration scolaire. J'ai constaté qu'un nouveau projet de règlement touchant le régime pédagogique qui est en préparation... Le ministre a eu la courtoisie de remettre à l'Opposition une copie de ce document en vue de l'étude des crédits du ministère pour l'exercice 1985-1986. Ce projet de règlement apporte des modifications substantielles au régime pédagogique, particulièrement en ce qui a trait à la répartition du temps consacré aux diverses matières, à la grille des matières au niveau secondaire, aux programmes optionnels qui peuvent être définis localement et aux modalités de promotion des élèves. Il serait essentiel que les changements proposés dans ce projet de règlement soient étudiés en commission parlementaire et que l'on puisse entendre, à cette occasion, les organismes et les personnes qui voudront apporter une contribution à l'étude que fera la commission parlementaire.

De tous les secteurs de l'enseignement public, celui de la formation professionnelle dispensée au niveau secondaire est peut-être celui qui a le plus souffert des difficultés des dernières années. Dans son enquête sur la condition enseignante, le Conseil supérieur de l'éducation a constaté l'existence de très nombreux et très sérieux problèmes dans ce secteur.

Il y a plusieurs années que le gouvernement parle de réformer l'enseignement professionnel. Les premières propositions gouvernementales sur ce sujet remontent à 1980, alors que le ministère de l'Éducation publiait un premier livre beige sur le sujet. Il y a eu par la suite la parution du livre blanc en 1982. Deux rondes de consultation, l'une en 1983 et l'autre en 1984, vinrent s'ajouter aux discussions entretenues par le ministère de l'Éducation.

Je souligne tout de suite que ces rondes de consultation furent faites avec des personnes en provenance des milieux directement intéressés. Il n'y eut pas de débat public sur un plan plus large à ce sujet. Il n'y en a jamais eu au niveau de la commission parlementaire de l'éducation, ni de l'Assemblée nationale.

Le document intitulé "La formation professionnelle dans le système scolaire -

Orientations et voies d'action retenues" publié en février 1985, représente, avec les propos que nous avons entendus ce matin sur les lèvres du ministre, l'expression la plus récente de l'orientation du gouvernement. Nous sommes cependant encore loin d'une véritable déclaration officielle de politique. Je souligne encore une fois qu'aucun des documents publiés depuis près de cinq ans n'a été soumis à l'examen d'une commission parlementaire.

Le ministre a déclaré, ce matin, que le ministère de l'Éducation semble avoir renoncé pour de bon à son projet de reporter la formation professionnelle après la cinquième année du secondaire. Si j'ai bien compris ce qu'il a dit tantôt, la formation professionnelle commencera à la cinquième année du secondaire et se continuera après. Ce n'est pas ce qu'avait recommandé le Conseil supérieur de l'éducation dans un examen approfondi qu'il avait fait du problème. Comme vous le savez, le conseil supérieur avait plutôt proposé de retenir un modèle commun de formation intégrée qui commencerait dès la quatrième année du secondaire pour être complété avec une sixième année supplémentaire exclusivement consacrée à la formation professionnelle. Cela aurait permis de répondre à la fois aux exigences du régime pédagogique et d'éviter qu'un trop grand nombre d'élèves ne se désintéressent de l'école à cause d'une formation professionnelle trop tardive.

Cette solution avait l'avantage d'une grande simplicité. Nous aurons l'occasion de demander au ministre, lors de l'étude des crédits sur cette partie précise, les motifs de la décision qui nous a été communiquée ce matin et qui me semble être encore porteuse d'une somme élevée d'ambigul'tés.

La révision des programmes dans ce secteur laisse beaucoup à désirer. La politique de formation professionnelle qui avait été esquissée dans les documents dont j'ai parlé prévoit une refonte complète des programmes. Cette refonte est encore au stade embryonnaire, du moins à la connaissance de l'Opposition. Elle est prévue sur un échéancier de cinq ans devant s'étaler de 1984 à 1989. Je crois comprendre qu'une première mise è jour a été réalisée pour environ 60 programmes. Je rappelle qu'il existe plus de 250 programmes de formation professionnelle et que seulement un nombre très limité d'entre eux ont fait l'objet, jusqu'à maintenant, d'une révision en profondeur.

Cette révision se situe dans le cadre de l'établissement d'une carte nationale des options professionnelles intégrant les niveaux secondaire et collégial. La carte sera établie après que des tables nationales sectorielles -composées aux deux tiers de représentants du monde du travail - et des tables régionales auront émis des avis sur les besoins en main- d'oeuvre et en formation et après que les intervenants en éducation auront pu prendre conseil auprès de ces tables pour ajuster les programmes en conséquence.

Des inquiétudes de deux ordres surgissent à ce sujet. Premièrement, il serait prématuré de rendre obligatoires des changements de cheminement de formation alors qu'une infime partie des programmes sont jusqu'à aujourd'hui révisés en profondeur.

Deuxièmement, en raison du rôle des tables sectorielles régionales, on risque d'assujettir les programmes de formation professionnelle aux seuls besoins immédiatement prévisibles du marché du travail.

À ce sujet, il est clair que le ministère vise à réviser ses programmes de façon qu'ils puissent s'adresser à la fois aux étudiants adultes et réguliers. Si l'on ajoute à cela les restrictions budgétaires importantes que nous connaissons, nous risquons de voir un bon nombre d'options professionnelles subir des modifications radicales ou disparaître sans que l'accessibilité et l'égalité des chances aient été prises en considération.

En 1983-1984 et 1984-1985, le ministère de l'Éducation accordait un total de 54 000 000 $ pour le financement des équipements dont tout le monde connaît et déplore l'état de désuétude et d'inadaptation dans un très grand nombre d'institutions. Ces sommes ont été allouées sans qu'aucune étude systématique des besoins n'ait été réalisée au préalable. Un bilan devrait être complété d'ici à juin 1985. Ce n'est qu'à ce moment que nous pourrons savoir de façon précise l'aide qu'il convient d'apporter par la suite.

Sur l'éducation des adultes, j'ai déjà formulé tantôt des observations qui me permettront d'être plus bref à ce stade-ci, mais je voudrais signaler certains problèmes d'application plus immédiate qui ressortent des développements de la dernière année et de la documentation dont nous disposons.

Au cours de la dernière année, on a assisté à un véritable démantèlement de l'ancienne Direction générale de l'éducation des adultes au ministère de l'Éducation sans que cela ait jamais fait l'objet d'une déclaration claire et explicite de la part du ministre. L'ancienne DGEA avait compétence sur l'ensemble de l'éducation des adultes. Elle comptait environ 160 employés. Elle exerçait une autorité directe sur les activités des commissions scolaires dans l'éducation des adultes. La nouvelle direction de l'éducation des adultes se situe plutôt à l'intérieur du réseau préscolaire, primaire et secondaire. On n'y retrouve qu'une trentaine d'employés. Tous les autres employés de l'ancienne direction générale ont été dispersés soit au ministère de la Main-d'Oeu-vre et de la Sécurité du revenu, soit au

ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, soit dans d'autres secteurs du ministère de l'Éducation.

Jusqu'à l'implantation de la nouvelle politique, la coordination de l'activité des commissions scolaires et des collèges dans l'éducation des adultes était assurée par des représentants régionaux de la DGEA oeuvrant au sein de la Direction générale du ministère de l'Éducation. Désormais, les collèges transigent directement avec Québec. Le minimum de coordination régionale qui avait été entrevu comme une dimension importante de la politique de l'éducation des adultes apparatt ainsi compromis.

Dans les régions, le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi que les commissions de formation professionnelle exercent une autorité sans cesse croissante sur les problèmes reliés à la formation professionnelle. Cette autorité irait, selon nos renseignements, jusqu'à comporter un véritable droit de décision sur les achats d'équipements des commissions scolaires dans le secteur de la formation professionnelle des adultes. "Dans le passé, écrivait récemment l'Institut canadien d'éducation des adultes, les programmes de formation professionnelle des adultes étaient sous le contrôle du ministère de l'Éducation. Les critères à partir desquels on les préparait étaient souvent trop académiques. Maintenant, on confie la gestion de ces programmes au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui risque cette fois de passer des commandes de formation trop axée sur les besoins à court terme des entreprises -et du marché du travail. Il importe au plus haut point que l'on cesse - c'est toujours l'Institut canadien d'éducation des adultes qui parle - de passer ainsi d'un extrême à l'autre et que, sur la base d'objectifs de formation clairs, on définisse les rôles respectifs des deux ministères. Cette définition devra respecter le droit absolu des adultes à l'éducation et le caractère public du service éducatif."

La reconnaissance de la spécificité de l'éducation des adultes et de la nécessité de structures propres pour en assurer le développement est très généralement reconnue comme un élément nécessaire de toute politique d'éducation des adultes digne de ce nom. Or, par le jeu combiné de la restructuration scolaire et des règles budgétaires, de nombreuses commissions scolaires sont tentées d'ores et déjà de rapatrier l'éducation des adultes dans les structures régulières d'organisation scolaire. Au nom de la transférabilité accrue des budgets, certaines commissions scolaires se montrent déjà enclines à vouloir rapatrier pour leurs fins générales une partie des budgets qui devraient être réservés à l'éducation des adultes. Le ministère de l'É- ducation se lave les mains de cette opération. N'a-t-il pas comme politique de promouvoir la responsabilisation des commissions scolaires? Nous rappelons au ministère de l'Éducation, comme nous l'avons fait lors de l'étude du projet de loi 3 en commission, qu'il ne saurait éluder le rôle de leadership qui lui incombe en matière de promotion de l'éducation des adultes. Ce n'est pas avec des responsabilités évasives comme celles que définit la loi 3 à l'endroit des commissions scolaires dans le domaine de l'éducation des adultes que le ministère de l'Éducation pourra assurer la promotion de cette dernière.

Je rappelle enfin au ministre que je lui ai déjà dit en Chambre que le projet de règles budgétaires soumis aux commissions scolaires en janvier dernier faisait à l'éducation des adultes une place fort peut encourageante. D'un côté, on dit vouloir élargir l'accès à la formation de base pour toute la population et on autorise à cette fin des enveloppes budgétaires ouvertes. D'autre part, les règles budgétaires sont assaisonnées de dispositions qui risquent de rendre vaines ces orientations théoriques.

Je n'ai pas eu le temps, au moment où j'ai rédigé ces notes, de prendre connaissance de la version définitive des règles budgétaires pour 1985-1986 dont le texte m'a été transmis par le ministère hier. J'attendrai à ce sujet les explications du ministre avant de porter un jugement. Si toutefois des modifications importantes n'ont pas été apportées aux règles budgétaires sur ce sujet de l'éducation des adultes, il y aura lieu de critiquer sévèrement le gouvernement.

Dans le secteur de l'éducation populaire, je constate avec plaisir l'augmentation des sommes qui ont été inscrites au budget pour l'année 1985-1986. Je voudrais connaître les explications du jugement avant de me faire une opinion à ce sujet, parce que les données explicatives que nous apporte le cahier mis à notre disposition par le ministère ne sont pas parfaitement claires à ce sujet. S'il s'agit vraiment d'une injection de fonds nouveaux, nous nous en réjouirons du côté de l'Opposition, sans arrière-pensée. (12 heures)

Nous accueillons également avec satisfaction la décision qu'a apparemment prise le ministère de reporter d'un an le projet d'implantation d'une régionalisation des subventions versées au titre de l'éducation populaire. Le projet de régionalisation, dans sa conception originelle, comportait des vices sérieux, méconnaissant, en particulier, le rôle essentiel des directions provinciales ou nationales au sein des organismes bénévoles, qui ne peut pas être oublié au profit d'un transfert pur et simple de toutes les discussions, de toutes les transactions des

organismes régionaux. Avant d'implanter une telle régionalisation, le ministère devra s'assurer que l'on est vraiment en possession de toutes les données relatives à ce phénomène très important.

Je vais continuer pour un quart d'heure, si vous me permettez.

M. Gendron: D'accord, pas de problème.

M. Ryan: J'ai abrégé parce que c'était un peu plus long que cela, mais vous aurez le texte intégral d'une minute à l'autre.

M. Gendron: Le président vous le permet et je vous le permets, M. le député.

M. Ryan: Vous êtes bien gentil.

Les règles budgétaires. Au cours des dernières années, les règles budgétaires ont été, entre les mains du gouvernement, un instrument puissant pour imposer ses priorités aux commissions scolaires. Ces règles prévoient, avec un luxe inouï de détails, la manière dont les commissions scolaires doivent établir leurs dépenses en vue d'avoir accès aux subventions gouvernementales qui leur rapportent environ 95 % de leurs revenus.

Depuis quelques années, les règles budgétaires ont été le moyen principal dont s'est servi le gouvernement pour imposer aux commissions scolaires tantôt le fardeau financier d'engagements pris par lui-même à l'occasion de la négociation de conventions collectives, tantôt des réductions de services auxquels les intéressés ne souscrivaient pas, tantôt des pénalités à peine déguisées pour les commissions scolaires qui avaient commis l'impardonnable erreur, aux yeux du gouvernement, de terminer leur exercice financier avec un surplus.

Année après année, les commissions scolaires se sont vu imposer, depuis cinq ans, des contraintes sans cesse multipliées. De l'avis de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, il en est résulté une détérioration dangereuse de la qualité des services éducatifs. Dans une étude dont elle publiait les résultats en mars 1984, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec avait abondamment établi le caractère réel des conséquences découlant de ces contraintes imposées par le gouvernement. Je n'y reviens pas, parce que c'est déjà inscrit dans un document à caractère public, auquel on peut facilement avoir accès.

Le projet de règles budgétaires soumis aux commissions scolaires pour la présente année budgétaire n'a point fait exception à cette pratique bien implantée depuis plusieurs années. On s'attendait, cette année, è des soulagements appréciables, mais l'étude du document soumis aux commissions scolaires a vite ravivé les inquiétudes des administrateurs scolaires. "Le contexte budgétaire 1985-1986, signalait récemment la Fédération des commissions scolaires catholiques, se situe à nouveau - je cite au texte - dans la perspective particulière des décrets et du programme de compressions budgétaires du gouvernement. Les compressions combinées à la sous-indexation des dépenses contribuent à diminuer les ressources financières dont les commissions scolaires ont besoin pour offrir la qualité et la quantité des services nécessaires pour chacune. Les commissions scolaires sont conscientes que leur marge de manoeuvre est réduite à sa plus simple expression. "Il est vrai, poursuit la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, que les écoles fonctionnent, mais nous pouvons dire que les moyens pour atteindre les objectifs dans l'éducation des futurs citoyens diminuent toujours de plus en plus."

Au nom des commissions scolaires, la fédération a formulé, en mars, une liste importante de recommandations visant à l'amélioration des règles budgétaires pour l'exercice 1985-1986. Je souhaite que le ministre apporte, à ce sujet, au cours de nos travaux, des précisions qui permettront de dissiper les craintes exprimées alors. Suivant les informations que j'ai pu recueillir au cours de la journée d'hier, après avoir reçu le texte définitif des règles budgétaires, les améliorations apportées au projet de règles budgétaires seraient cependant plutôt mineures. Si tel était le cas, il en découlerait une nouvelle dégradation de la qualité des services éducatifs dont le gouvernement serait évidemment le grand responsable.

La restructuration scolaire: La manière dont le gouvernement a procédé pour imposer l'adoption de la loi sur la restructuration scolaire restera gravée dans les mémoires comme un épisode peu reluisant de notre histoire parlementaire.

En février 1984, le gouvernement, après cinq semaines d'audiences publiques qui avaient fonctionné de manière digne et efficace, mettait abruptement fin aux témoignages des organismes qui avaient demandé à être entendus en commission parlementaire de l'éducation. Sans autre justification que l'explication du ministre de l'Éducation affirmant qu'il jugeait avoir été suffisamment éclairé, le gouvernement, appuyé par une majorité ministérielle docile, renvoyait brutalement chez eux de nombreux organismes qui avaient été invités à se faire entendre et qui s'étaient consciencieusement préparés en conséquence.

Ensuite, après avoir déposé vers la mi-novembre de 1984 une version nouvelle du projet de loi sur la restructuration scolaire, le gouvernement faisait adopter ce projet à la vapeur, en décembre, imposant la

guillotine après à peine quatre jours d'étude du projet de loi en commission parlementaire. Nous avons ainsi - comme l'a signalé tantôt le ministre - une nouvelle loi-cadre de l'instruction publique au Québec. Mais cette loi fondamentale comprenant plus de 600 articles a été adoptée par l'Assemblée nationale sans même que les parlementaires aient eu la chance de l'examiner sérieusement. Elle a été adoptée sous l'effet d'un coup de force du gouvernement, dans des conditions absolument antidémocratiques.

La loi soulève dans le cas de Montréal et de Québec des difficultés d'ordre constitutionnel relatives aux garanties constitutionnelles que définit l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. L'Opposition avait fortement insisté pour que le gouvernement fasse dirimer ces difficultés par les tribunaux avant de procéder à l'implantation de la loi 3 sur les territoires de Montréal et de Québec. Le gouvernement décida - comme c'était son droit et comme c'est, hélas, souvent son habitude - de passer outre à ces recommandations. Aussi fait-il face aujourd'hui à des contestations judiciaires dont l'issue pourrait entraîner des conséquences coûteuses pour tout le projet de restructuration.

Dans l'immédiat, le principal souci du ministre a été, ces dernières semaines, la délimitation des nouveaux territoires scolaires qui regrouperont les commissions scolaires suivant une base linguistique plutôt que confessionnelle.

Dans le cas de Montréal, le gouvernement a déjà procédé à une délimitation créant cinq commissions scolaires francophones et deux commissions scolaires anglophones. Même si elle ne traduit aucune vision cohérente, cette délimitation est généralement acceptable en pratique. On ne pourra cependant avoir de certitude quant à son application éventuelle tant que les tribunaux ne se seront pas prononcés sur les procédures en cours.

Dans le reste du Québec, la formation des commissions scolaires francophones va bon train. Ici encore, on serait en peine de trouver une véritable cohérence dans les décisions gouvernementales. On aura à travers le Québec des commissions scolaires dont la taille variera considérablement. Tout ce travail a été entrepris sans que le gouvernement consente au débat public que réclamait l'Opposition sur les critères devant guider ces décisions. Le ministre de l'Éducation et ses collaborateurs ont voulu tenir compte dans toute la mesure du possible des volontés locales et régionales dans les recommandations qu'ils ont faites au gouvernement; ils ont été attentifs même à plusieurs recommandations particulières de l'Opposition et je leur en sais gré. On avance néanmoins dans ce domaine sans qu'une politique claire ait été publiquement énoncée par le gouvernement et discutée par les parlementaires. On court ainsi le risque de retenir dans certains cas des solutions agréables aux milieux immédiatement concernés, mais non pas nécessairement conformes au bien objectif de l'éducation.

Je rencontrais, hier soir, une personne qui oeuvre depuis de nombreuses années à la Commission scolaire de Chambly et qui n'est pas le président de la Fédération des commissions scolaires du Québec, ni le président de cette régionale. Elle me disait qu'on est en train de faire une opération de charcuterie majeure dans cette région. Quelle sera la conséquence de cela au point de vue des coûts? Quelle sera la conséquence de cela au point de vue de la qualité des services offerts? Là, on est perdu dans des chicanes à savoir si telle portion de territoire va se rattacher à telle commission scolaire ou à telle autre. Nous essayons chacun de notre mieux de mettre notre grain de sel pour que l'arbitrage baigne dans l'huile le plus possible, mais cela ne dispose pas du problème fondamental qui est posé par l'absence d'une politique claire, cohérente et connue de ce côté-là.

La formation de commissions scolaires anglophones en dehors des territoires de Montréal et de Québec est également engagée. Selon nos renseignements, les quelque dix commissions scolaires anglophones que s'apprête à créer le gouvernement répondent de manière générale à la volonté des milieux intéressés. La décision qu'a prise le gouvernement de tenir partout des élections dans les secteurs anglophones en dehors de Montréal et de Québec d'ici à la fin de la présente année répond également à une nécessité. L'obligation où seront désormais catholiques, protestants et membres d'autres familles spirituelles anglophones de travailler ensemble dans les structures scolaires créait la nécessité de procéder à une élection démocratique des commissaires avant la mise en marche des nouvelles structures linguistiques en matière scolaire.

Je saute par-dessus la section qui traite de la micro-informatique, mais je tiens à signaler qu'elle est là et qu'on n'a pas oublié ce dossier, évidemment. Je vais passer également par-dessus la section concernant l'enseignement privé, parce que nous aurons l'occasion d'y revenir plus tard au cours de nos discussions. Je voudrais dire un mot sur deux sujets que j'ai inscrits à la fin de mon exposé et cela va se terminer dans quelques minutes, M. le Président.

La présence anglophone au sein du ministère de l'Éducation était, il y a deux ans, suivant des renseignements qu'on nous avait fournis à notre demande, d'à peu près vingt unités dont un cadre au niveau supérieur, quelques professionnels et le reste

des employés de niveau intermédiaire. Nous avons demandé de nouveau cette année des informations à ce sujet et quelle n'a pas été ma déception de constater qu'il y a encore vingt fonctionnaires anglophones, c'est-à-dire une représentation qui équivaut à peine à 1 % de l'ensemble des fonctionnaires dans le ministère de l'Éducation. Si mon collègue de D'Arcy McGee était présent avec nous comme il l'était tantôt, je pense qu'il insisterait pour qu'on envisage un programme "formative action", un programme de redressement explicite de ce côté-là. Je pense qu'il y a un problème majeur. Comment voulez-vous mettre sérieusement en marche des réformes et des orientations dans le secteur anglophone, qui représente quand même 15 % de la population au bas mot, s'il n'est pas représenté dans les centres de décision, dans les centres où l'on conçoit les orientations?

Je voudrais rappeler enfin qu'à plusieurs reprises, au cours de la dernière année, nous avons attiré l'attention du gouvernement sur le problème des quelque 2800 membres de la profession enseignante qui doivent, depuis 1965, se satisfaire de conditions de retraite injustement inférieures à celles de leurs collègues pour la simple raison qu'ils furent un jour membres d'un institut religieux et qu'ils décidèrent de se séculariser après 1965.

Après avoir d'abord refusé d'y faire face, le gouvernement, par l'entremise de l'actuel président du Conseil du trésor, a reconnu l'existence du problème au cours de la dernière année. Il a même accepté d'ouvrir des négociations avec les intéressés afin de chercher en leur compagnie une solution au problème.

Malheureusement, les négociations ont achoppé sur des obstacles apparemment insurmontables. Elles se sont heurtées à l'intransigeance des porte-parole du gouvernement qui, après avoir déposé une offre de règlement jugée insatisfaisante par les intéressés, ont carrément refusé de bouger davantage.

Les calculs établis sur la base de données fournies par les enseignants exreligieux permettent de constater qu'à la suite des négociations des derniers mois, la marge qui séparait les deux parties a diminué de manière sensible. C'est là un progrès notable, que l'on ne saurait trop souligner. L'écart qui sépare les parties demeure non négligeable, même s'il est impossible pour l'instant de l'établir avec une précision qui serait acceptable aux deux parties. Cet écart est cependant très inférieur aux projections cataclysmiques qu'établissaient il n'y a pas si longtemps les prophètes de malheur prétendant parler au nom du gouvernement.

Les enseignants ex-religieux ont droit, M. le Président - je suis convaincu que le ministre actuel de l'Éducation partage mon avis sur cette question - à des conditions de retraite dignes et honorables, à des conditions de retraite comparables à celles dont jouissent leurs collègues qui ont été laïques pendant toute leur vie. Le règlement de leur problème doit être recherché avec diligence dans la voie de la négociation. (12 h 15)

En terminant, je voudrais rappeler que nous devons nous rendre compte qu'au Québec, comme dans beaucoup d'autres sociétés, l'enseignement public, primaire et secondaire, est l'objet d'inquiétudes très profondes et, souvent, d'un scepticisme inquiétant dans divers secteurs de la population.

Nous avons consenti des sacrifices énormes pour l'amélioration de notre système d'enseignement au cours des deux dernières décennies. Certains considèrent que nous sommes allés peut-être trop loin dans cette direction et que nous n'avons pas obtenu, au chapitre de la performance, les résultats qui auraient dû normalement découler d'un effort aussi considérable.

Je ne souscris point à ce jugement. Je pense que les sacrifices que nous avons faits étaient nécessaires et que nous devrons en faire d'autres au cours des années à venir, si nous voulons simplement maintenir notre place, à plus forte raison, l'améliorer, dans le peloton des sociétés qui regardent en avant et non pas en arrière ou de côté.

Si on regarde aux États-Unis, j'ai étudié au cours de la dernière année tous les rapports des commissions d'enquête nombreuses qui se sont penchées sur l'éducation, tant au nom du président de la république qu'au nom des gouverneurs des États, qu'au nom des entreprises privées, qu'au nom des administrateurs scolaires et toutes ces enquêtes, sans exception, concluent que la société américaine devra, au cours des prochaines années, consacrer à l'éducation des sommes encore plus élevées que celles qu'elle lui a consacrées au cours des dernières années.

Dans certains domaines, nous avions, malheureusement et peut-être à mauvais escient, pris une avance sur la société américaine. Je pense qu'on peut donner un exemple bien simple, celui de la rémunération des enseignements. Les États-Unis ont pris un retard terrible en matière de rémunération des enseignants. Je pense qu'ils ont un rattrapage à faire et qui a été fait par anticipation ici. Ici, maintenant, je pense qu'il y a une vitesse de croisière qui va convenir pour un grand nombre d'années à venir. Aux États-Unis, on a énormément fait de ce côté. Mais il y a d'autres secteurs dans lesquels ils ont progressé plus que nous et sur lesquels nous avons énormément de travail à faire.

Je voudrais affirmer, en terminant, ma

conviction profonde que nous devons renforcer dans notre système d'enseignement tout ce qui touche l'enseignement des matières de base. L'enseignement du français à la maternelle laisse énormément à désirer. L'enseignement de l'anglais, langue seconde, est un paysage assez désolant. L'enseignement des sciences et des mathématiques ne progresse pas au rythme qu'on serait en droit de le souhaiter, à la lumière des besoins qui découlent des changements sociaux et technologiques.

Je pense que nous sommes tous d'accord pour signaler que les valeurs de discipline et de responsabilité devront être accentuées davantage par le système d'éducation. Je pense que si, au cours des prochaines années, la société québécoise pouvait s'entendre pour que les discussions entre les gouvernants et la population et entre les différents intervenants du monde de l'éducation, portent sur ces sujets essentiels et non plus sur des sujets périphériques, souvent secondaires, malgré leur importance relative, nous pourrions entreprendre ensemble une marche en avant nouvelle qui serait vraiment dans le sens du progrès.

Je voudrais indiquer, comme toute dernière remarque, que je me réjouis de constater que, dans l'hypothèse de règlements dont nous aurons l'occasion de parler, il était beaucoup plus question des contenus de l'éducation que dans des discussions auxquelles on a assisté entre parties syndicales et parties patronales depuis de nombreuses années. J'espère que cet embryon d'orientation nouvelle se confirmera au cours des mois à venir.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député d'Argenteuil. Si d'autres membres de la commission n'ont pas de remarques préliminaires, je vais permettre au ministre de faire ses commentaires à la suite de cette présentation. Cela nous amènerait à commencer cet après-midi plus spécifiquement les sujets qui ont été privilégiés par les membres de la commission. M. le ministre.

M. Gendron: Au préalable, M. le Président, je voudrais savoir si c'est à 12 h 30 qu'on termine ou à 13 heures.

Le Président (M. Charbonneau): 12 h 30.

M. François Gendron (réplique)

M. Gendron: D'accord, cela va être assez rapide, puisque je n'ai que dix minutes de réaction. Je voudrais, dans un premier temps, remercier le député d'Argenteuil d'avoir effectivement pris l'occasion de nous fournir une réflexion passablement fouillée et détaillée et, également, de nous indiquer les points sur lesquels, comme il l'avait fait ce matin, d'une façon un petit peu plus privée, il préférait échanger davantage au cours de l'après-midi, de même que demain.

Mon premier commentaire sera le suivant, M. le Président et MM. les membres de cette commission: Si on résumait, je pense que le titre de la présentation du député d'Argenteuil évoque assez sensiblement l'ensemble de son appréciation par rapport à la conduite des choses de l'éducation depuis 1981. D'après son jugement, nous aurions été un gouvernement immensément préoccupé dans le premier mandat par les questions éducatives, allant jusqu'à nous souligner que nous avions effectivement une très bonne compréhension, nous dit-il, du rôle qu'un ministère ou qu'un ministre de l'Éducation doit avoir d'une responsabilité aussi fondamentale pour la collectivité québécoise.

Il prétend que nous avons accordé à l'éducation une place de choix dans nos priorités et que tout était comme dans le merveilleux monde de Walt Disney. Le problème s'est posé à partir du second mandat où, dit-il, nous aurions effectué des virages désastreux dans tous les secteurs pour arriver à un constat général, toujours selon le député d'Argenteuil, que nous aurions en éducation un second mandat passablement désastreux.

Pas besoin de vous dire, M. le Président et MM. les membres de cette commission, que ce n'est pas l'avis que je partage; je voudrais reprendre très rapidement quelques points. Je pense que, depuis 1976, le gouvernement du Parti québécois est exactement le même dans ses priorités fondamentales. Il est composé essentiellement de la même équipe, du même chef, avec les mêmes préoccupations d'accorder à des secteurs vitaux du développement du Québec toute la considération qu'on doit y accorder. Je pense qu'il faut quand même regarder les choses à la lumière de l'évolution d'une société et à la lumière de certaines tendances qui se sont manifestées. Dans un premier temps, quand on nous indique que le gouvernement a dû, compte tenu du contexte économique, rationaliser sa gestion, je pense qu'il faudrait être complètement déplacé ou malhonnête pour ne pas affirmer que ce commentaire-là est tout à fait exact et pertinent. C'est nous qui l'avons fait.

Dans la présentation que j'ai eu l'occasion de faire ce matin, oui, j'ai indiqué que nous avons dû, en 1981 et les années subséquentes, rajuster certaines priorités. On a dû faire des choix budgétaires de l'ensemble des activités d'un gouvernement, y compris les activités éducatives. Cela nous a obligés à déplacer certains ordres de priorités, mais pas au point où on aurait négligé celles qui sont toujours importantes

dans une société en évolution en matière d'éducation.

Si je donne un exemple bien précis, en prenant notre produit intérieur brut, quand on laisse voir que le Québec investirait moins qu'en 1976, je tiens à rappeler aux membres de cette commission qu'en 1983-1984 le Québec investissait 4,35 % du produit intérieur brut à l'éducation alors que l'Ontario, pour la même année, en 1983-1984, investissait 3,94 % de son produit intérieur brut en éducation. Je veux bien qu'on cite toutes sortes de chiffres, mais sans prendre ce que l'on appelle nos niveaux traditionnels de comparaison. Depuis plusieurs années, le gouvernement du Québec a toujours essayé de regarder un peu ce qui se faisait ailleurs et, dans ce sens-là, je pense que le gouvernement du Québec avait à ce point le souci de l'éducation, tout en étant moins riche collectivement que la province voisine, pour accorder des points supérieurs au produit intérieur brut à l'éducation au Québec, par rapport à l'Ontario. Donc, cela signifiait qu'on voulait continuer à marquer l'importance du secteur éducatif. En 1984- 1985, et c'est la même chose pour 1985- 1986, nous sommes exactement dans la même tendance, parce qu'il n'y a pas eu de compression significative dans le secteur de l'éducation pour ces deux années additionnelles, puisque nous fonctionnons à peu près, toutes proportions gardées, sur les mêmes bases.

Quand le député d'Argenteuil nous indique aussi dans ses commentaires préliminaires, avant de parler des points spécifiques, que nous serions passés à une éducation dite plutôt utilitaire qu'à une éducation plus gratuite, démocratique et ainsi de suite, il me semble que cela manifeste encore là une nécessité d'ajuster certaines préoccupations éducatives à des besoins d'une société en évolution. On a voulu que notre système participe de plain-pied au virage technologique et, dans ce sens-là, je pense que l'on ne peut d'aucune façon accepter un reproche comme celui-là puisqu'il manifeste, ou est signe d'une plus grande adaptabilité à la réalité technologique d'une société en évolution, en développement.

Dans ce sens, que nous ayons des programmes éducatifs, que nous ayons un système d'éducation peut-être davantage collé à ce que j'appellerais des utilités concrètes, des utilités qui se manifestent à la suite d'une technologie qui a changé, d'une technologie qui doit changer, collé à un contexte aujourd'hui où les métiers traditionnels sont en voie de disparition, où on doit être plus préoccupé par l'évolution de techniques nouvelles, que ce soit la bureautique, que ce soit l'informatique, c'est normal. Il est normal, je pense, en ce qui me concerne et en ce qui concerne le gouvernement du Québec, que nous ayons une préoccupation plus utile, plus adaptée à certaines réalités utilitaires plutôt que strictement garder le grand concept théorique, toujours valable, d'une très grande démocratisation, d'une très grande accessibilité, par des mesures accrues, ce que nous avons fait.

M. le député d'Argenteuil, également -on aura l'occasion d'y revenir - traitait de la condition enseignante dans son commentaire en disant qu'on a été - il a eu des mots très sévères en parlant du second mandat - un gouvernement de jugement qui a essayé de déprécier ou de décrier les premiers agents de l'éducation qui sont toujours les éducateurs et les éducatrices. Je tiens à dire que la réalité est tout autre. On a été sensible au rapport du Conseil supérieur de l'éducation. Le Conseil supérieur de l'éducation a fait un travail honnête, objectif, d'analyse de ce qui se passait à la suite de l'application des décrets. J'en conviens, tout comme le député d'Argenteuil, j'aurais aimé mieux ne pas passer par là, c'est évident. C'est une étape que j'aurais aimé mieux ne pas vivre, comme tout autre élu en politique. Je pense que personne n'a voulu cette crise. Il n'y a personne, contrairement à ce que vous affirmez pour le moins gratuitement, qui soit hanté par notre propre imprévoyance financière.

Si on a été imprévoyant sur le plan financier et économique, il y en a une "mosus de gang" qui l'a été également parce que je connais un paquet d'entreprises qui ont eu des difficultés sans précédent lors de la fameuse crise de 1982-1983. Je connais un paquet d'institutions qui ont eu à vivre des difficultés absolument sans précédent. On a même dit qu'on n'avait jamais vécu cela depuis les années trente, depuis la vraie, la plus dure crise que le Québec n'ait jamais connue. À partir du moment où on n'est pas des extraterrestres, on s'inscrit dans le même profil que n'importe quel citoyen. Il y a beaucoup de choses qui nous sont arrivées, particulièrement au Québec, et on ne pouvait pas contrôler l'ensemble de ces situations, en particulier quand on fait référence au fait que le gros des difficultés vécues dans la société québécoise était dû à des taux d'intérêt sans précédent, à cause d'une politique inflationniste volontairement pratiquée, par d'autres ou pas. Je ne veux même pas juger, mais je veux juste dire qu'on n'avait sûrement pas tous les outils de contrôle pour contrer ces difficultés qui ont conditionné certaines décisions difficiles, je le reconnais, qui ont eu des conséquences dans l'éducation comme ailleurs, parce qu'elles ont eu des conséquences dans toute la société québécoise.

À la suite de ce climat plus difficile, ce climat concret dans les écoles, parce que, M. le député d'Argenteuil, je pense que j'ai eu l'occasion de le dire, depuis que j'ai ces

responsabilités, oui, j'ai constaté qu'il y avait des problèmes réels, dans nos écoles au Québec, de démotivation, de dépersonnalisation, d'absentéisme, etc. Toutes ces difficultés ont été soulignées dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation et on a dit: En 1984 il est urgent d'accorder un moratoire, ce que nous avons fait, pour se donner le temps d'analyser et de regarder cela d'une façon plus spécifique. Il y a un secteur - c'est le seul - en éducation où on a prévu des mécanismes pour faciliter l'analyse de solutions qui amélioreraient le vécu dans les écoles, parce que c'est fondamental, c'est important, cela a été la création des comités mixtes. Le comité mixte en éducation a donné des résultats palpables, concrets qui ont permis d'améliorer la condition enseignante.

Je vais juste rappeler, en conclusion là-dessus parce que j'aurai l'occasion d'y revenir - on me fait signe qu'il sera bientôt 12 h 30 - qu'au niveau du gel de la tâche, quand on a eu à le faire, même en gelant la tâche, je tiens à rappeler au député d'Argenteuil, et je suis convaincu qu'il le sait, on reste quand même au Québec avec une tâche qui est passablement inférieure à celle qui existe en Ontario, dans d'autres provinces canadiennes et dans d'autres États. Je veux bien qu'on dise que le système scolaire n'est pas le même, je le reconnais, je connais le milieu, j'ai enseigné moi-même pendant douze ans. Je pense que des efforts pour adoucir l'effet négatif des décrets au niveau particulier de la tâche comme telle ont été posés par notre gouvernement en 1984, à la suite des accords du 11 mai, et tout récemment avec la décision que j'ai eue l'occasion d'annoncer publiquement qu'il n'y aurait pas, contrairement à ce qui avait été prévu d'augmentation de la tâche pour l'année 1985-1986 commençant le 1er septembre. Ce sont des commentaires très rapides. J'aurai l'occasion, à la reprise, de revenir sur quelques autres avant de faire une discussion plus exhaustive sur chacun des points qui ont été soulevés par le député d'Argenteuil, dans certains cas avec pertinence, dans d'autre cas avec la nécessité d'énormément de clarification a tout le moins. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. La commission va ajourner ses travaux sine die. Vraisemblablement nous reviendrons cet après-midi avec un avis du leader. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

(Reprise à 15 h 40)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission parlementaire de l'éducation et de la main-d'oeuvre reprend ses travaux avec l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. Je vais immédiatement céder la parole au député d'Argenteuil et vice-président de la commission.

Une voix: Ah, il n'avait pas fini!

Le Président (M. Charbonneau): À moins que le ministre n'ait des choses à ajouter...

M. Gendron: Si M. le député d'Argenteuil n'a pas d'objection, ainsi que les membres de la commission, effectivement, j'avais indiqué que, sur ce que j'appellerais les considérations générales que le député d'Argenteuil avait données sur quelques points, j'aurais aimé faire un court retour sur trois points: la politique gouvernementale à l'éducation permanente, je n'ai pas eu le temps...

Une voix: ...

M. Gendron: ...- je veux juste finir ma phrase là-dessus - non pas l'enseignement professionnel mais la formation professionnelle et, également, les régimes pédagogiques. J'aurais aimé avoir l'occasion de faire un commentaire sur ces trois points.

M. Ryan: Je n'ai pas d'objection, mais il me semble que ce serait plus pratique si vous faisiez ces commentaires au début de chacun des sujets qu'on va étudier, parce que cesdits sujets viennent tout de suite à l'ordre du jour. En tout cas, je n'ai pas d'objection. Je crois que, effectivement, cela va être court, donc, je ne formule pas d'objection, une suggestion au plus.

M. Gendron: Juste une seconde, M. le député d'Argenteuil. Dans les points que vous aviez indiqués, à moins que je n'aie mal lu, pour la formation professionnelle, cela va, vous avez raison; l'éducation des adultes, cela allait aussi; il y a juste sur les régimes pédagogiques qu'on ne revenait pas, dans les points que vous aviez...

M. Ryan: Oui, oui, cela revient, c'est le deuxième, cet après-midi.

M. Gendron: Oui, vous avez tout à fait raison, c'est le deuxième. Alors, je n'ai pas d'objection. On pourrait y aller tout de suite avec la condition enseignante. On va les traiter...

M. Ryan: Parce que vous allez avoir plus d'impact quand on va être sur le sujet.

M. Gendron: Cela devrait!

Le Président (M. Charbonneau): Sur ce consensus, M. le député d'Argenteuil.

La condition enseignante

M. Ryan: Nous avons inscrit la condition enseignante en première place dans la liste des sujets que nous voulions discuter, pour une raison qui va être facile à comprendre, c'est que nous trouvons que c'est la pierre de base autour de laquelle gravite toute la qualité de l'oeuvre éducative. On peut avoir toutes les réformes qu'on voudra en ce qui concerne les structures, le financement et même les programmes, si on n'a pas une profession enseignante compétente, appliquée et raisonnablement heureuse dans son travail, je pense que tout le reste va être gravement compromis.

Comme c'est le point qui a été le plus en souffrance ces dernières années et que le ministre semble considérer que c'est une priorité à laquelle il doit continuer de s'attaquer comme il l'a fait depuis son entrée en fonction, je voudrais peut-être lui adresser quelques questions découlant de ce que nous avons discuté.

La première serait la suivante. Le Conseil des ministres a refusé, autour de deux points, l'hypothèse de règlement qui avait été arrêtée entre le ministère et la Commission des enseignants des commissions scolaires et qui avait été acceptée par une faible majorité chez les enseignants.

Est-ce que le ministre pourrait déposer devant la commission le texte de cette hypothèse de règlement, qui comprenait quatorze sujets différents et nous indiquer les estimations de coûts qui avaient été établies pour chacune des mesures concrètes devant découler des quatorze points en question? Le ministre pourrait-il, également, nous indiquer le coût du gel de la tâche des enseignants pour l'année scolaire 1985-1986 et ses répercussions sur les mises en disponibilité?

Hypothèse de règlement

M. Gendron: D'accord. Je pense que, effectivement, la façon la plus claire de répondre à vos questions, M. le député d'Argenteuil, ce serait de déposer ce document d'information à la commission. Vous auriez là, essentiellement, les réponses sur chacun des points, puisque dans les discussions que j'ai eues avec le Conseil des ministres, nous avions évalué les coûts financiers de chacun des points de l'éventuel règlement.

Cependant, il ne faut pas oublier que, dans le contexte, c'était toujours une hypothèse de règlement, je m'étais engagé, comme ministre de l'Éducation, tout comme M. Bisaillon s'était engagé à la soumettre à ses instances, à la soumettre au Conseil des ministres. Il est exact que le Conseil des ministres était d'accord pour ratifier, toujours sur une base de trois ans, douze points sur quatorze, les deux points pour lesquels celui-ci avait des objections majeures étant toujours la question de l'injection de 200 postes annuels sur une base récurrente et le fameux point, plus majeur, qui était la négociation locale avec droit de grève sur quatre points précis. Ce sont ces deux points qui ont été rejetés.

Quand vous posez une question précise sur le coût du gel de la tâche, c'est 25 000 000 $ en termes de coût budgétaire. L'injection de 200 postes qui a été refusée représente à peu près 8 000 000 $ pour la première année, parce qu'après cela il fallait évaluer, effectivement, la relation très étroite qui existe entre l'injection de postes additionnels et les mises en disponibilité.

Quant aux autres coûts concernant les douze points autres que les deux que je viens d'évoquer, il y avait, au total... Je pense que ce ne serait pas le moment de passer point par point. Dans certains cas, il n'y avait pas de coût. Dans d'autres cas, nous ne sommes pas en mesure de l'évaluer avec énormément de précision tout de suite parce qu'il aurait fallu voir à l'exercice, mais je peux vous indiquer, M. le député d'Argenteuil, que cela représentait à peu près, sur une base annuelle, 5 000 000 $ pour l'ensemble des autres points.

M. Ryan: 5 000 000 $?

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: Pour tous les autres points?

M. Gendron: Oui, si j'exclus la monnayabilité des congés de maladie. Pourquoi je l'exclus? C'est que nous avions déjà, comme ministère, une autorisation du Conseil du trésor pour revenir à l'ancien système de la monnayabilité, dans une progression plus lente, dans le sens que le mandat du Conseil du trésor était 50 % au lieu des 100 % de monnayabilité. Donc, si on avait à chiffrer le coût de l'entente ou de l'hypothèse de règlement, c'est bien sûr que je fais seulement la différence entre le mandat du Trésor à 50 % et ce que j'ai déposé, 100 % de monnayabilité, dès la prochaine année scolaire.

M. Ryan: Sur les congés de maladie -entre parenthèses - est-ce que votre ministère a une estimation de ce que cela a coûté aux commissions scolaires pour la dernière année, le remboursement monnayé des congés de maladie découlant du fameux compromis Désillets? Est-ce que le ministère a fait quelque chose pour compenser les commissions scolaires là-dessus ou si elles

ont été obligées de payer toutes ces dépenses à même les ressources qui leur étaient allouées normalement, sous l'empire des règles budgétaires? Je vous pose la question, M. le ministre, parce que j'ai déjà écrit à votre prédécesseur pour avoir des précisions là-dessus à la suite de représentations qui avaient été faites auprès de moi par des commissions scolaires et je n'ai jamais obtenu de réponse.

M. Gendron: Je peux vous l'indiquer parce que votre question est précise et que je ne vois pas pourquoi on ne vous communiquerait pas ces informations. Dans une minute ou deux, je les aurai et je vous les communiquerai. Si vous avez une autre question, toujours sur le même sujet général. Je vous donnerai l'information dans quelques minutes.

M. Ryan: Dans l'hypothèse de règlement, il y avait des gros sujets comme l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Il y avait l'éducation des adultes, des mesures assez importantes là-dessus également. Quand on dit: On va mettre fin au double emploi, par exemple, c'est énorme parce que, sur à peu près 12 000 ou 13 000 personnes qui enseignent à l'éducation des adultes, il y en a au moins 10 000 ou 11 000 qui sont des enseignants à temps partiel, dont plusieurs sont des enseignants à temps complet dans l'enseignement régulier. Je ne sais pas. Je continue: Les milieux pluriethniques, les milieux économiquement faibles, si on veut faire quelque chose... Les classes à divisions multiples, on va en supprimer un bon nombre. Il y en a plusieurs qui ont plus de deux niveaux actuellement. Le nombre d'élèves de groupes: on va donner une rémunération supplémentaire lorsque le nombre des élèves, dans un groupe, dépasse la norme. Tout cela pour 5 000 000 $, c'est cela que vos collaborateurs avaient estimé?

M. Gendron: M. le député d'Argenteuil, je veux bien; ces points sont importants en termes de condition de vie des enseignants et des enseignantes. Si on les regarde un par un, très rapidement: Pour l'éducation des adultes, tout ce qu'on avait mis sur la table, c'est un accord pour une déclaration de principe dans le but de réduire le double emploi, de façon à permettre l'emploi d'un plus grand nombre de personnes, tant que c'était une demande où les syndicats étaient d'accord pour qu'eux aussi puissent agir sur leurs propres professeurs pour les inviter à ne pas faire double emploi, mais pour nous, ce sont exactement les mêmes coûts. Il n'y a aucune différence de coût, que ce soit un professeur à temps régulier qui offre les cours à l'éducation des adultes... Je parle pour le ministère, pour les commissions scolaires. Pour nous, c'est le même coût. Alors, c'est une demande qu'on trouvait logique dans le contexte de permettre à plus de gens d'avoir une occasion d'emploi. Mais il n'y a pas de coûts additionnels pour le ministère. Même chose sur les milieux pluriethniques et les milieux économiquement faibles. Les mesures, c'était la mise sur pied d'une table nationale pour analyser plus à fond ces problèmes. Les parties s'engagent sur réception du rapport de la table à rouvrir la convention pour inclure les dispositions jugées appropriées. Vous allez convenir avec moi qu'il était très difficile d'en faire une évaluation chiffrée puisqu'on convenait que ce n'est que sur le rapport de la table unique qui était souhaitée par les gens concernés.

Les classes à divisions multiples, maximum de deux degrés, sauf dans les écoles de moins de 100 élèves ou sauf si le syndicat y consent; compensation monétaire au-delà de la moyenne et non au-delà du maximum. C'était beaucoup plus, encore là, une mesure d'organisation scolaire pour les commissions scolaires qu'une injection de ressources financières. Là où il y avait peut-être un peu de coûts, c'est le nombre d'élèves par groupe, augmentation de la compensation selon le nombre d'élèves excédentaires. Alors, premier élève, c'était 1 $ selon le ratio, 1,25 $ pour le deuxième élève...

M. Ryan: Est-ce que...

M. Gendron: Juste une seconde; c'est que je veux juste vous indiquer que, pour ce qui est du nombre d'élèves par groupe de même que des classes à divisions multiples, il y avait déjà des coûts de prévus. Entre autres, l'élément 9 dans le papier que vous avez et qui est le même que j'ai, je pense, pour ce qui est du nombre d'élèves par groupe, ce n'était qu'une bonification, M. le député d'Argenteuil. Donc, quand je parlais des 5 000 000 $ environ sur une base d'une année budgétaire, cela incluait uniquement les coûts excédentaires, de plus que ce qui existait et non pas l'ensemble de l'enveloppe requise pour couvrir ces éléments. Parce que là, vous avez raison, il y a beaucoup plus d'argent que cela dans ces éléments. Quand j'ai répondu 5 000 000 $, ce n'était que pour la partie excédentaire.

M. Ryan: Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir un texte écrit résumant l'estimation que vous avez faite des coûts excédentaires pour ces différents postes? Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir une note écrite là-dessus?

M. Gendron: En ce qui me concerne, oui, parce que, de toute façon, j'ai eu l'occasion d'en discuter assez longuement au

Conseil du trésor et au Conseil des ministres. Effectivement, c'est d'intérêt public, c'est du domaine public de vous donner l'information chiffrée qu'on avait évaluée. Vous connaissez nos instances de vérification. Entre le MEQ et le Conseil du trésor, il n'y avait pas d'incompatibilité sur les évaluations de chiffres.

M. Ryan: Est-ce qu'une évaluation avait été faite avec la partie syndicale également? Est-ce qu'il y avait un accord qui s'était établi entre la partie patronale et la partie syndicale quant aux implications financières de cette entente?

M. Gendron: Oui, je comprends. Pas au début, mais à la fin de ce qu'on appelle l'exploration qu'on a conduite pour dire: Bon, c'est sur ces bases qu'on entend de part et d'autre soumettre à nos instances l'hypothèse d'un règlement. Je pense que oui. Les deux parties convenaient que les évaluations de chiffres étaient conformes. Bien, écoutez...

M. Ryan: On va le vérifier.

M. Gendron: Vous vérifierez sauf que ce que je vous indique, M. le député d'Argenteuil, très clairement, c'est que c'est toujours le ministère avec le Conseil du trésor qui a les outils nécessaires pour faire l'évaluation. Ce que j'ajoute pour répondre correctement à votre question, c'est qu'on n'a pas eu d'information de la partie syndicale disant qu'elle n'était pas d'accord avec l'évaluation chiffrée qu'on faisait de cette hypothèse de règlement. Alors, c'est par voie de déduction que je conclus qu'on devait s'entendre sur les chiffres parce qu'habituellement, quand ils n'étaient pas d'accord, ils nous le laissaient savoir, ce qui n'a pas été le cas là-dessus.

M. Ryan: Très bien. Maintenant, j'aimerais vous demander pourquoi le gouvernement a refusé les deux points qui ont achoppé, c'est-à-dire les 200 postes additionnels au secondaire et, deuxièmement, la négociation locale d'un certain nombre de sujets avec le droit de grève qui accompagne normalement le droit de négociation.

M. Gendron: Oui, je pense que ce n'est pas sûr que cela soit opportun à cette commission-ci, en tout cas, quelle que soit la commission, que des débats internes au Conseil des ministres soient exposés sur la place publique. Les indications additionnelles que je peux vous donner, M. le député d'Argenteuil, c'est que vous saviez très bien que, pour un des points dits majeurs, il y avait en même temps au Conseil des ministres la discussion de fond sur un nouveau cadre de négociation proposé à l'ensemble des partenaires et également à l'ensemble des secteurs concernés par la négociation, que ce soit le réseau des affaires sociales, la fonction publique et l'éducation. Chez certains collègues, il apparaissait difficile d'avoir deux modèles, sans donner tous les détails, d'avoir un modèle plus général pour l'ensemble de la fonction publique et parapublique et d'avoir une particularité ou une exception pour une durée de trois ans avec le secteur des enseignants. Ce sont les considérations, je pense, dont je peux vous faire part sans aller dans les détails sur le bloc le plus important.

Sur la question des 200 postes, on a laissé voir, et cela a été du domaine public pendant un certain temps, que les travaux qui ont eu lieu lors de l'évolution des discussions au comité mixte avaient quand même permis de dégager des possibilités d'arriver aux mêmes résultats autrement que par l'injection récurrente de 200 postes sur une base annuelle dans le réseau avec, toujours, l'image difficile que cela pouvait avoir chez certains, d'une part de geler la tâche et, tout en posant le gel, non seulement geler, mais injecter des ressources additionnelles. Il y a une espèce d'image antinomique, en tout cas, chez certains. Certains voient que c'était difficile à comprendre, cela.

La raison principale, M. le député, était beaucoup plus parce qu'il y a un bon nombre de gens, chez nous, qui avaient la prétention qu'on peut atteindre l'objectif que les professeurs ne soient pas appelés à rencontrer plus de six groupes dans leur charge de travail hebdomadaire par des moyens autres. Ces moyens autres ont effectivement été fouillés lors des échanges au comité mixte et c'est surtout pour ces raisons qu'on ne croyait pas donner suite à cette demande.

M. Ryan: Est-ce que je dois comprendre que le ministre de l'Éducation avait recommandé l'hypothèse de règlement au cabinet?

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: Elle n'a pas été seulement transmise. Elle a été recommandée.

M. Gendron: Oui, oui. De toute façon, je pense que je l'avais indiqué publiquement. Je trouve que c'est un peu normal quand on a des responsabilités sectorielles de s'impliquer complètement. Dans ce dossier, je me suis impliqué complètement sans aucun regret. Je crois toujours que c'était une hypothèse de règlement et j'ai indiqué que je m'engageais à la soumettre et à la défendre.

M. Ryan: Vous savez comme moi que ce qu'il y a d'exceptionnel dans cette histoire, c'est la manière quelque peu

différente dont vous avez procédé comme ministre. D'ordinaire, dans une négociation comme celles que j'ai pu voir dans le passé, le ministre, avant de s'impliquer moralement - je ne dis pas légalement - vérifiait avec ses collègues du cabinet et il allait dire à ses gens: Là, on ne peut pas aller plus loin que tel point, j'ai vérifié. Il y a eu un malentendu qui s'est créé de l'autre côté, j'ai l'impression, qui peut rendre la situation plus difficile - on va en parler tout de suite tantôt - du fait que vous étiez impliqué sans l'être, finalement, parce que vous vous impliquez d'un côté et, après cela, vous pouvez venir et dire: J'ai belle jambe, j'avais recommandé cela, mais il y a des gens qui n'ont pas voulu comprendre, je regrette infiniment, je vous fais rapport et, après cela, on passe à autre chose. C'est un petit peu l'impression que cela a donnée dans le public.

M. Gendron: Non. Les commentaires que j'ai à vous dire, M. le député d'Argenteuil, c'est que de temps en temps il faut rompre avec la forme traditionnelle des négociations, de la façon dont cela a été mené. Vous êtes tout aussi au courant que moi que le résultat a toujours été - en tout cas, dans les 20 dernières années particulièrement difficile. Cela, c'est mon premier commentaire. Le deuxième, cela avait été très clair. Je ne vois pas pourquoi cela ne le serait pas pour vous également. Il s'agissait d'une exploration de part et d'autre qui pouvait nous conduire, effectivement, à ce qu'on pouvait appeler une hypothèse qui méritait d'être soumise à nos instances. On avait privilégié cette formule dans le contexte des suites à être données au comité mixte parce que la prétention syndicale était le comité mixte. Oui, on reconnaît qu'il y a eu du bon travail de fait, mais il faudrait aller un peu plus loin et voir la possibilité de traduire cela plus concrètement en clause de convention collective, sans pour autant entamer une négociation au sens traditionnel des mécanismes qui les conditionnent. Vous connaissez les mécanismes qui les conditionnent.

Dans ce sens, j'étais d'accord de faire ce qu'on appelle une exploration. Heureusement, l'exploration nous a conduits à ce que vous savez, c'est-à-dire une hypothèse de règlement que, de part et d'autre, nous convenions de soumettre à nos instances. Je ne vois pas le drame en ce sens que je m'engageais, effectivement, à la soumettre et à la défendre. Je peux vous dire que j'ai eu plus de succès que mon collègue, M. Bisaillon, parce que la plupart de mes gens ont voté sur cela et non pas 13 % seulement et je suis sorti de là et j'ai échappé deux points, mais j'en ai douze dans ma poche. Je trouve que l'exercice - sans jeu de mots -était nécessaire, utile et en aucune façon je ne regrette la démarche qu'on a conduite, sauf qu'il n'y avait pas de confusion. J'avais été on ne peut plus clair avec mes mandataires en leur disant: On fouille cela le plus possible et si on arrive à une hypothèse de règlement je m'engage à la soumettre et, lui aussi, il s'engage à la soumettre et c'est ce qui est arrivé. Je fais juste une conclusion sur cela. Ce n'était pas une négociation dans le cadre des règles traditionnelles qui nous régissent parce que nos dépôts ne sont pas faits et on n'a pas commencé la nouvelle négociation avec le secteur public et parapublic. (16 heures)

M. Ryan: Maintenant, si on regarde l'avenir, je crois que vous avez déclaré d'un côté: On serait prêt à prendre les douze points qui restent et à signer une entente pour les trois prochaines années. La Commission des enseignants des commissions scolaires vous a répondu: Nous serions prêts à signer une entente autour de ces douze points pour les douze prochains mois.

M. Gendron: Exactement.

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait connaître votre position sur cela?

M. Gendron: Là, avec l'avertissement que vous m'avez servi tantôt, je vais être plus prudent. Vous en convenez. Mon avis sur cela, c'est que je crois que, lorsqu'on réussit, comme c'est le cas, à continuer à se parler, c'est déjà un gain additionnel. Oui, il est exact que j'ai indiqué à la CECS que j'étais toujours disposé à une signature avant-hier, aujourd'hui ou demain matin, sur la base de trois ans avec ce qu'il me reste des douze points. La CECS m'a répondu: Nous serions d'accord de les prendre, mais sur la base d'une année. Cela s'appelle bonifier le gel. Alors, non seulement ces gens ont le gel mais là ils voudraient bonifier le gel de douze points. Il y a encore des discussions qui sont en cours, je n'ai pas du tout d'objection à creuser cela davantage pour effectivement voir les possibilités de part et d'autre et pour voir si on pourrait sortir de nos positions qui semblent actuellement un peu éloignées l'une par rapport à l'autre. C'est pourquoi encore hier il y avait des rencontres et nous allons continuer d'en avoir pour vérifier si un ajout de quelques éléments pourrait permettre d'envisager sur ces questions une hypothèse de trois ans. C'est une possibilité.

Il y a l'autre solution, effectivement, de se rabattre sur la proposition de la CECS et de signer uniquement pour un an sur la base des douze points retenus de l'accord. Cette partie, je ne dis pas que je ne la regarde pas encore, sauf que, soyez assurés que si jamais je traduisais cette demande, en ce qui me concerne, par un dépôt officiel, à

ce moment les instances concernées auraient été consultées au préalable pour assurer le ministre de l'Éducation qu'il peut faire un tel dépôt.

Rapport du CSE

M. Ryan: C'est très bien pour cela. Il y a un autre point que je voudrais soulever qui se rattache directement à celui-ci. Dans son rapport sur la condition enseignante le Conseil supérieur de l'éducation avait abordé bien des sujets qui n'ont pas été soulevés, évidemment, au comité mixte. Le comité mixte a pris un certain nombre des problèmes qui avaient été recueillis par le Conseil supérieur de l'éducation. Il y en a d'autres qui ont été portés à l'attention du public et du ministre de l'Éducation et du gouvernement par le Conseil supérieur de l'éducation. Je voudrais savoir s'il y a d'autres actions qui ont été entreprises pour donner suite au rapport du Conseil supérieur de l'éducation et s'il y a d'autres actions qui sont envisagées et s'il y a eu une réponse qui a été adressée au Conseil supérieur de l'éducation sur ces autres points ou si le gouvernement, le ministre en particulier, voudrait laisser entendre qu'on a trouvé le canal du comité mixte et qu'il n'y a pas autre chose qui se fait et que tout est réglé là.

M. Gendron: Non. Je pense que le ministre n'a pas laissé entendre cela et il n'a pas l'intention de laisser entendre que le canal du comité mixte, c'est la seule voie, l'unique voie pour progresser dans d'éventuelles considérations qui aboutiraient à des solutions pour améliorer effectivement certains éléments qui nous ont été soulignés dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation. Je veux juste rappeler au député d'Argenteuil que j'ai rappelé à l'ensemble des partenaires interpellés par le rapport du Conseil supérieur de l'éducation qu'il était important de se concerter pour donner des suites à certaines des choses très concrètes qui ont été signifiées dans le rapport. En termes clairs, M. le député d'Argenteuil, vous allez en convenir avec moi - je suis convaincu que vous avez pris connaissance d'une façon très exhaustive du rapport du Conseil supérieur de l'éducation - il y a des éléments sur lesquels il y avait des problèmes réels de déceler, mais pour lesquels les concernés étaient davantage, tantôt une direction scolaire, tantôt une commission scolaire, tantôt le ministère. Mon travail, comme ministre de l'Éducation, c'était de dire en ce qui nous concerne: Nous, on va essayer de mettre un mécanisme en place qui nous permettra de progresser sur ce que j'appellerais les problèmes soulignés qui sont davantage de notre responsabilité - comme j'étais en train de vous le dire lorsque vous conversiez avec votre voisin - qu'il y avait lieu de se concerter, tous les agents éducatifs, sur les suites à donner au rapport du Conseil supérieur de l'éducation. Cette proposition fut laissée de côté pendant la démarche d'exploration, parce que je ne peux pas blâmer la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec et d'autres intervenants qui disaient: Écoutez! On va vous regarder aller là-dessus, on verra la conclusion et ensuite on va prendre le bout des responsabilités qui nous concernent pour essayer d'améliorer les problèmes réels. Dans certains cas, ce sont des mésententes entre des directions scolaires versus les enseignants mais qui, en aucune façon, ne peuvent se régler par des voies autres que celles qu'on a prévues au comité mixte.

Même chose quant au rappel de la loi 3 qui a institué le cadre et les objets des consultations que le ministre a dorénavant l'obligation de faire en regard de ces divers règlements. Parce que dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation, il y avait également des analyses qui étaient faites de temps en temps sur un rythme de changements trop rapides, un rythme de modifications de règles et de directives qui était "agressant", entre guillemets. Dans ce sens-là, les nouvelles dispositions de la loi 3 vont faire en sorte que les mécanismes de consultation, dorénavant, me font obligation de prépublier, de publier et de faire une démarche de plus en plus "implicative" de tous les intervenants, ce qui fait que normalement il devrait y avoir moins de bousculade, moins d'éléments qui arrivent comme ça dans le réseau scolaire pour lesquels les intervenants éducatifs se sentent plus ou moins prêts à y donner suite. Je pense que vous aviez insisté d'ailleurs dans la partie de votre rapport dont j'ai pris connaissance, vos commentaires à la suite des miens, pour atténuer un peu ces effets-là. Si on procédait un peu moins rapidement mais avec plus d'implications dans certains cas, on risque que le climat soit plus serein et meilleur. Je donne raison à un genre d'argumentation.

M. Ryan: Est-ce que ce serait possible de demander - ce n'est pas une chose pressée pour demain matin - que le ministère publie un rapport peut-être d'ici à quelques semaines sur les suites données ou qu'on entend donner aux recommandations du Conseil supérieur de l'Éducation, celles qui regardent plus spécifiquement le ministère de l'Éducation?

M. Gendron: Je ne suis pas friand de ce genre de rapport. C'est vraiment le ministre de l'Éducation qui va s'engager dans ce qu'il va dire. Je préférerais plutôt qu'on fasse peut-être une note de service disant:

Pour telle section, on prétend que cela relève de notre responsabilité d'essayer de voir des solutions, que cela soit via le comité mixte ou par des mécanismes d'exploration comme on en a exploré certains et que, sur d'autres parties, on prétend que c'est la mise en vigueur de l'application de la loi 3 le plus rapidement possible qui va contrer certains inconvénients soulevés dans le système. Il y a déjà des efforts de faits réels au niveau du gel de la tâche puisqu'on nous avait indiqué l'an passé que ce qui serait le plus dramatique, ce serait d'augmenter une tâche, parce que cela empêcherait de nous donner le temps de faire les travaux nécessaires et les échanges de vues avec tous les agents pour mieux identifier les correctifs qui auraient lieu d'être apportés pour améliorer véritablement la condition enseignante, mais pas nécessairement toujours par voie de matière ajoutée dans les conventions collectives. Alors, sous la forme d'une note de service, je n'ai pas d'objection à vous formuler cela.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Saint-Laurent.

Charge des enseignants

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, nous sommes tous évidemment concernés par la qualité de l'enseignement. À la suite du rapport du Conseil supérieur de l'éducation, est-ce que vous êtes d'accord pour reconnaître que la charge des enseignants est trop lourde? Est-ce que vous considérez que cela pourrait être une raison pour affecter la qualité de l'enseignement?

M. Gendron: C'est très difficile de répondre à votre question prise en soi. Par définition, quand j'enseignais - je répète; je l'ai fait pendant douze ans - je me rappelle certains jours où j'avais l'impression que ma charge était vraiment trop lourde. C'est évident, pour toutes sortes de raisons et de conjonctures. Ce n'est pas facile, aujourd'hui, d'être un pédagoque "up to date", si vous me permettez l'expression, avec les changements de toute nature, que ce soit dans les valeurs sociales, les valeurs éducatives, les valeurs familiales, la télévision, les heures de coucher qui ont bien changé. Là, je ne vous ferai pas un cours d'éducation familiale.

Mais, ce n'est pas de même, je pense, qu'il faut apprécier, M. le député de Saint-Laurent, si oui ou non, objectivement, la charge de travail des enseignants et des enseignantes du Québec serait trop élevée, serait injustifiée par rapport à d'autres secteurs ou par rapport à d'autres milieux. Je pense qu'il y a une vieille phrase qui est toujours d'actualité: Des fois, à se regarder on se désole, mais à se comparer, on se console.

Quand on se compare à ailleurs, avec des indices dits assez reconnus... J'ai devant moi - cela va être très court - des organismes scolaires de Boston, de New York, de la région de Hartford. Dans l'ensemble canadien, je ne les ai pas ici. Toronto, c'est cela.

Par rapport à ces indices, sur à peu près n'importe quoi, qu'on prenne n'importe quoi, les jours de travail, les jours de classe, la charge de travail, y incluant tous ses éléments, correction, surveillance et tout cela, en règle générale, je n'ai pas envie de faire le tour, on arrive avec un indice... parce que si l'indice global, quand on compare... prenons l'exemple de Boston par rapport au Québec, c'est 18 % de plus à Boston, pas au Québec. Concord - je ne sais pas dans quelle région, aux États-Unis - dans la région de Concord au New Hampshire, encore là, 18 % de plus.

La région de Hartford, Connecticut, 1,20 %, c'est-à-dire 0,20 % de plus; 0,29 % dans la région de Newark; dans la région de New York, 0,27 % et ainsi de suite. À chaque fois, on les a fait ces exercies.

Mais, en ce qui me concerne, comme ministre de l'Éducation, je dis: Cela ne prouve rien, je ne trouve pas que cela prouve beaucoup de choses, parce que, fondamentalement, il s'agit de regarder la tâche des enseignants par rapport à ce qu'on exige au Québec, par rapport à l'évolution de certaines charges de travail dans d'autres secteurs. On doit se dire: Est-ce qu'il y a lieu de réviser nos paramètres pour l'augmenter ou la réduire, compte tenu de ce qui s'est fait ailleurs, plutôt qu'avoir toujours le modèle traditionnel que par définition, quelle que soit l'évolution, une charge de travail, il faut toujours que cela s'en aille en descendant, en termes de réduction? Je n'aime pas ce genre d'approche.

Pour ne pas être très long, parce qu'on veut échanger nos opinions, de part et d'autre, je pense que là-dessus, à votre question précise: Est-ce que vous considérez, M. le ministre de l'Éducation, que vous en exigez trop en termes de charge de travail de vos enseignants et enseignantes? La réponse, par comparaison avec d'autres milieux, que ce soit le Canada, les États-Unis, est évidemment non. On en exige beaucoup moins qu'ailleurs. C'est toujours à peu près de l'ordre de zéro à 20 % ou 25 %. Mais, c'est ailleurs; c'est différent. Il faudrait regarder d'autres composantes. Il y a toutes sortes d'autres composantes à évaluer.

Mais, je pense qu'on a une tâche raisonnable; ma conclusion, c'est surtout cela. Je vais vous dire que j'ai été un de ceux qui croyaient qu'elle devait être gelée l'an dernier et c'est ce qui est arrivé. Je dois vous dire que j'étais un de ceux qui, cette année, croyaient qu'elle ne devait pas

augmenter le 1er septembre 1985. C'est ce que j'ai recommandé comme ministre de l'Éducation.

Mais, à partir de ces deux niveaux de "réduction" - entre guillemets - il m'apparaît que nous avons une tâche, actuellement, qui non seulement est comparable, mais faisable. (16 h 15)

Évaluation et perfectionnement des enseignants

M. Leduc (Saint-Laurent): Je voudrais savoir s'il existe une formation, un genre de formation continue des professeurs et, également, s'il se fait une évaluation du travail ou de l'enseignement des professeurs.

M. Gendron: La réponse est oui. Toutes les commissions scolaires ont la responsabilité d'avoir ce qu'on appelle la préoccupation de l'évaluation pédagogique de leurs effectifs. Il y a également à l'intérieur de chacune des commissions scolaires un comité de perfectionnement avec des enveloppes affectées aux commissions scolaires pour faciliter le perfectionnement continu des professeurs en exercice, mais il est certain que ce perfectionnement-là se fait toujours sur une base volontaire. Une commission scolaire, dans notre système d'éducation, ne peut pas forcer des enseignants à prendre un perfectionnement additionnel au-delà de la nécessité de temps en temps d'organiser ce que l'on appelle des stages, d'organiser des sessions un peu plus particulières de formation, mais de courte durée. Lorsqu'on parle de la véritable formation continue, reliée à l'évaluation pédagogique, à votre question, les deux réponses sont oui. Nous avons un service d'évaluation au ministère. Nous avons également l'obligation, étant préoccupés par ces questions, de transmettre à chacune des commissions scolaires la nécessité pour elles d'être vigilantes quant au mécanisme d'évaluation de son personnel, plus particulièrement en ce qui concerne le personnel enseignant. Je ne dis pas que ce n'est pas nécessaire pour l'autre personnel, mais il me semble que toutes les commissions scolaires ont la responsabilité de suivre le perfectionnement et l'évaluation de leur personnel. Je ne voulais pas, mais je peux bien le faire, entrer dans la mécanique, il y a des montants précis qui sont décentralisés par enseignant. Par exemple, si on parle d'un montant d'environ 9 000 000 $, ce qui représente un montant de 141 $ par enseignant, c'est l'enveloppe décentralisée, puis il y a un montant centralisé de 230 000 $ pour les régions éloignées. Ce que je vous cite ici, ce sont des chiffres sur l'exercice 1984-1985, mais ce sont des montants prévus aux ententes de travail des enseignants. C'est pour un secteur. Il y avait également pour le secteur de la micro-informatique sur lequel on voulait donner une emphase spécifique. Pour ce qui est de la formation des enseignants grâce à l'implantation du système informatique - l'ISI - il y avait 450 000 $ et il y avait également 700 000 $ pour la formation des agents multiplicateurs, pour un montant de 1 150 000 $ qui s'ajoutent à ce que je viens de mentionner: les 9 000 000 $ pour les enseignants, plus les 230 000 $, le montant décentralisé.

Si on ajoute d'autres types de formation: insertion sociale et professionnelle des jeunes, on a également une somme de 700 000 $ là-dessus et ainsi de suite, mais votre question étant: Est-ce que dans les commissions scolaires on s'occupe d'évaluation du personnel? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a des montants prévus au perfectionnement? Oui. Est-ce qu'il y en a assez? Bien non, il n'y en a jamais assez parce que, par définition, les besoins sont toujours plus grands que les sommes affectées dans n'importe quel secteur.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ces deux sommes que vous mentionnez ont-elles effectivement été dépensées?

M. Gendron: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Le Conseil supérieur de l'éducation a également identifié comme un des problèmes le vieillissement des professeurs. Quelle est votre solution à ce problème-là et est-ce que la loi 15 y est pour quelque chose?

M. Gendron: La dernière, la loi 15, y est-elle pour quelque chose? Non. Elle n'y est pas pour quelque chose de significatif. A votre question précise: Est-ce que nous posons des gestes pour essayer d'améliorer cette situation? La réponse est oui; on a quatorze ou quinze mesures de résorption des personnels enseignants qui tiennent compte du problème fondamental que vous évoquez du vieillissement du milieu enseignant. Alors, je ne veux pas toutes les faire, mais il y a des retraites anticipées, des congés sabbatiques, des incitations à sortir complètement du milieu de l'éducation.

Je me souviens que récemment M. Biron pouvait signifier qu'au ministère de l'Industrie et du Commerce, pour les directions régionales qui avaient été recrutées dans la banque qu'on appelle communément les MED - mis en disponibilité - il y a un certain nombre de profs qui ont accepté de relever le défi d'une nouvelle carrière dans un autre ministère. On pourra peut-être y revenir. D'ailleurs, on vous a envoyé toutes les mesures de résorption, elles sont très précises: leur succès, le nombre d'effectifs. Votre question était

plutôt d'ordre général. Oui, le problème du vieillissement nous préoccupe, c'est la raison pour laquelle on a voulu avoir ces mesures de résorption; c'est la raison pour laquelle on continue à réfléchir très sérieusement sur d'autres mesures qui pourraient s'ajouter pour permettre que le système éducatif puisse permettre l'entrée de plus de nouveaux jeunes spécialisés en psychopédagogie ou avec les diplômes requis pour faire face au défi actuel. Je pense que dans ce sens, c'est une responsabilité et c'est un intérêt continu qu'un ministre de l'Éducation ne peut pas ne pas avoir. Je pense qu'on va continuer à avoir cette préoccupation.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que vous avez des chiffres ou un pourcentage de renouvellement de professeurs?

M. Gendron: Pouvez-vous être plus spécifique? Voulez-vous dire du taux de roulement ou du... Une année il en arrive tant, et il en part tant?

M. Leduc (Saint-Laurent): Un pourcentage d'addition de nouveaux professeurs chaque année.

M. Gendron: Oui, on a toujours cela. On n'a pas cela ici, même si on est bardé d'information. On peut prendre cela en note et vous envoyer cette information parce qu'on a sûrement ce détail dans la machine indiquant, sur une base annuelle, qu'il en est entré... Une seconde! On me dit que bon an, mal an, dans les dernières années, il entrerait à peu près 300 nouveaux professeurs par année sur 60 000 ou 62 000.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites 300.

M. Gendron: Cela ne fait pas un gros pourcentage.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pas très fort.

M. Gendron: II y a un autre problème, j'espère que vous mettez toujours en parallèle de dire: II n'entre pas beaucoup d'enfants de plus non plus, on n'est pas vraiment en croissance. Si on me garantissait une dizaine de mille "flos" par année de plus, je n'aurais pas de problème d'engager de nouveaux professeurs.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Oui, M. le député d'Argenteuil, sur le point 2 ou sur...

M. Gendron: Peut-être un dernier commentaire là-dessus. Il faut quand même convenir que le problème du vieillissement dans un champ donné est un problème de société, comme ailleurs. Dans le sens qu'une société doit avoir la préoccupation d'apporter des correctifs au problème du vieillissement. Je tiendrais à signaler, à ce moment-ci, que je n'ai jamais porté de jugement sur la qualité tout aussi significative de certains professeurs qui ont une très vaste expérience, mais souvent on le dit ailleurs, je ne verrais pas pourquoi on ne dirait pas en éducation que la question du vieillissement, en théorie, c'est beaucoup plus une question d'attitude, de coeur et d'esprit que d'âge chez beaucoup de gens. C'est aussi vrai pour l'enseignement.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Tout à l'heure, M. le ministre a parlé d'un coût estimatif de 25 000 000 $ pour le gel de la tâche. Dans une note de travail que nous a remise le ministère, en préparation de notre débat sur les crédits, on disait que le coût net varierait entre 7 000 000 $ et 18 000 000 $.

M. Gendron: Le ministère avait raison, entre 7 000 000 $ et ce que vous venez de dire. D'après les derniers chiffres vraiment plus serrés du Conseil du trésor, il semblerait que le coût net va se fermer à 13 000 000 $. Il y a une logique là-dedans compte tenu des effets de résorption. À partir du moment où on gèle la tâche, il y a moins de MED. Parce qu'on garde le niveau qu'elle avait, je n'ai pas cela ici, mais pas plus tard que mardi, au Conseil du trésor, M. le député d'Argenteuil, le chiffre que le Conseil du trésor plaçait quelque part dans ses équilibres à la suite du premier rapport mensuel, il prétend que c'était bien 25 000 000 $ sauf que cela va finir par un coût net, sur une base annuelle, qui devrait être de 13 000 000 $.

M. Ryan: Devrait coûter... M. Gendron: 13 000 000 $.

M. Ryan: 13 000 000 $, je comprenais 30 000 000 $ j'étais pour dire...

M. Gendron: Non, 13 000 000 $.

M. Ryan: Cela va. Je pense que cela vous montre la difficulté qu'il y a de jouer avec les chiffres dans des débats de cette nature. Tantôt on parlait de 25 000 000 $ et présentement c'est 13 000 000 $.

M. Gendron: II n'y a pas de difficulté. Quand on m'a demandé cela, M. le député, j'ai répondu très honnêtement que... On a toujours parlé comme cela. C'est vraiment, pour moi, 25 000 000 $.

M. Ryan: Je vous dis cela parce qu'avec certains de vos prédécesseurs, ils mettaient un zéro de plus ou de moins et cela ne les dérangeait pas du tout.

M. Gendron: Présentement, fonctionnez avec celui que vous avez.

M. Ryan: Mais on a coupé de moitié, c'est déjà pas mal.

M. Gendron: Fonctionnez avec ce que vous avez, et vous dites vous-même que vous n'aurez pas de problème.

M. Ryan: Maintenant, il y a une chose que je voudrais vous demander. Cela fait deux années de suite qu'on gèle la tâche éducative. Est-ce que vous avez fait une comparaison entre ce que demandaient les représentants syndicaux des enseignants au début de la négociation en 1983 et ce qu'on a aujourd'hui? On a fait toute une guerre au nom de cette nécessité qu'il y avait pour le Québec de les mettre un peu sur le même pied que les autres au point de vue du travail. Là, je crois qu'on est rendu à un stade, en gelant la tâche deux années de suite, où on est à peu près dans le même ordre de grandeur que ce que la CEQ avait proposé dans ses dépôts d'offres, de demandes à la partie patronale à ce moment. Est-ce qu'on n'aurait pas été embarqué dans une immense aventure pour se réveiller, aujourd'hui, avec des résultats qui sont beaucoup plus proches de ce qu'on aurait obtenu si au lieu de choisir la voie décrétale, on avait choisi la voie de la négociation?

M. Gendron: C'est toujours plus facile -juste pour s'amuser un peu, M. Ryan, vous aimez cela de temps en temps - d'être gérant d'estrade après les événements, mais il y avait beaucoup plus d'autres éléments que ceux qu'on évoque dans la demande syndicale en 1983, d'une part. D'autre part, le contexte 1983 relié par rapport à toute la demande syndicale y incluant les autres éléments et y incluant aussi, M. Ryan, les autres secteurs négociés... Il ne faut pas oublier qu'en 1983, parce que c'est plus en 1982 qu'il s'est passé des affaires, vers la fin de 1982, il faut remettre cela dans tout le contexte.

Je prétends que par rapport à l'effort que nous demandions aux autres secteurs par rapport aux coupures budgétaires du secteur du réseau des affaires sociales, la fonction publique, prise dans un tout, prise dans des paramètres d'une politique de rémunération qui avait été largement diffusée, largement connue, on avait fait notre lit et notre nid de ce qui était disponible et possible. À ce moment, cela nécessitait, toujoucs selon l'analyse du moment - pas l'analyse de 1985 - de demander un effort additionnel aux enseignants en termes d'augmentation de la tâche. C'est exact, c'est cela qu'on avait demandé.

Il y a eu quand même une augmentation pour l'année 1983, parce qu'à ce que je sache, les accords du 11 mai 1984 ont permis de geler la tâche en 1984-1985, mais il y a eu une augmentation de tâche pour la PI, la première année de la convention ou du décret. J'ai l'information qu'il y avait un écart entre ce que vous parlez, aujourd'hui, de leurs demandes et de ce qu'on parle - il y a toujours un écart de 2000 postes - si nous avions donné suite à la demande syndicale totale quand on nous la faisait.

Donc, ce n'est pas exact qu'on a laissé aller complètement, pas juste le contenu, mais également les éléments du débat qui avait lieu en 1982 et 1983, tout ceci pour une somme de 80 000 000 $ qu'on trouvait toujours utile dans le temps d'être capable de disposer ailleurs.

M. Ryan: On va faire des vérifications là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'on est prêt à prendre le deuxième programme: Le régime pédagogique et les nouveaux programmes? C'est cela?

M. Ryan: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Argenteuil.

Je crois qu'il y a eu entente pour qu'on adopte l'ensemble une fois que le temps sera écoulé.

M. Gendron: Sur les crédits? Oui, oui, parce que cela, c'est une formalité par habitude. Ce serait important si on voulait cela autrement, mais habituellement on le fait comme cela.

Si vous n'avez pas d'objection, M. le député d'Argenteuil, j'irais de mon petit commentaire d'entrée.

M. Ryan: Très bien.

Le Président (M. Gagnon): Allez M. le ministre.

Régime pédagogique

M. Gendron: Concernant le régime pédagogique, d'abord, je tiens à vous remercier très sincèrement, M. le député d'Argenteuil, parce que dans votre document, à deux ou trois reprises, vous avez mentionné que dans l'ensemble on s'accorde à reconnaître l'excellente qualité de la très grande majorité des nouveaux programmes mis au point sous l'autorité du ministre de

l'Éducation. Alors, cela m'a plu. (16 h 30)

Un peu plus loin, vous ajoutez: On est d'accord, également, sur la qualité objective des nouveaux programmes.

Quant au règlement concernant le régime pédagogique, je voudrais peut-être -ce ne sera pas long - seulement resituer cela dans son contexte. Vous êtes sans doute au courant que la loi 3 statue sur un certain nombre d'éléments qui sont présentement définis dans l'ancien régime pédagogique. La définition des services éducatifs, la précision des mandats relatifs à l'enfance en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, de même qu'une volonté de décentralisation et une recherche évidente d'une plus grande cohérence dans le partage des responsabilités confiées aux intervenants de chaque niveau réduisent de façon importante et simplifient à tout le moins le contenu du nouveau régime pédagogique.

À la section IV, une définition plus large du temps prescrit pour les services éducatifs devrait permettre une plus grande souplesse dans la réponse à des besoins spécifiques d'organisation scolaire. Cette définition tient compte également des programmes à durée variable en formation professionnelle.

À la section V - toujours du nouveau régime pédagogique - la même approche est envisagée quant à l'enseignement de la langue seconde au primaire. C'est une question qui vous intéressait, M. le député d'Argenteuil. Le français, langue seconde, est obligatoire au premier et au deuxième cycle du primaire, alors que l'anglais, langue seconde, ne le devient qu'à compter du deuxième cycle. Je suis en mesure, cependant, aujourd'hui, en profitant de la discussion que nous avons sur les crédits, d'annoncer que le ministère de l'Éducation et le ministre, pour ce qui est de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, au premier cycle, nous serons d'accord, en 1986, pour tester quelques expériences d'immersion et vraiment avoir ce que j'appellerais un projet d'innovation pédagogique dans ce secteur. C'est, effectivement, quelque chose qui n'existait pas mais, à partir de 1986, il pourra être possible de faire des expériences pilotes de classes d'immersion au premier cycle, pour ce qui est de l'enseignement de la langue seconde.

Dans la même section, une place a été faite aux sciences physiques en deuxième secondaire, permettant ainsi l'atteinte d'une continuité souhaitée dans l'enseignement des sciences au secondaire. La marge de manoeuvre du premier cycle du secondaire s'en trouve limitée d'autant, mais l'étalement possible de quelques matières obligatoires sur plus d'une année satisfera sans doute les commissions scolaires qui voudront répondre à des besoins pédagogiques particuliers ou à des contraintes d'ordre organisationnel.

Les dispositions diverses présentées à la section IX ne comportent plus de calendrier pour l'application de certains articles. Le pouvoir d'appliquer progressivement certaines dispositions est confié au ministre qui pourra, par le biais de l'instruction sur les activités éducatives, faire connaître l'échéancier à respecter. En ce qui concerne la formation professionnelle, les décisions prises relativement à l'application de la politique se reflètent dans l'ensemble du document concernant le nouveau régime pédagogique.

Dans un autre ordre d'idée, notons que l'interprétation de ce règlement devrait être facilitée parce qu'il colle aux articles de la loi et, de ce fait, offre des arguments fondamentaux qui aident à sa compréhension. C'est d'ailleurs ce qui explique, en partie du moins, le fait que peu de commentaires s'y sont ajoutés. Précisons, enfin, que des dispositions de ce règlement s'appliqueront à la clientèle adulte et que d'autres, particulières, constitueront les articles à y intégrer dans une autre version.

Ce sont les éléments que je voulais faire valoir à ce moment-ci.

M. Ryan: Voulez-vous répéter la dernière phrase, s'il vous plaît, M. le ministre, concernant les adultes?

M. Gendron: Vous me demandez de préciser quoi?

M. Ryan: De répéter la dernière phrase.

M. Gendron: La dernière phrase: Précisons, enfin, que des dispositions de ce règlement s'appliqueront à la clientèle adulte et que d'autres, particulières, constitueront des articles à y intégrer dans une autre version.

Le Président (M. Gagnon): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Cela va. Peut-être qu'on pourrait prendre ce projet de règlement tantôt. Il y a d'autres sujets que je voudrais aborder avant, les sujets qui regardent le régime pédagogique actuel et les programmes qu'on est en train d'instaurer ou qui devraient l'être. Je pense que ce serait bon qu'on fasse le point pour savoir où on en est. On n'a pas eu l'occasion de le faire, les années précédentes. Si vous n'aviez pas d'objection à ce sujet, on pourrait peut-être partir des observations que nous avons faites dans les remarques d'introduction que j'ai présentées ce matin pour voir si c'est vrai et si le ministère a des précisions à nous apporter à ce sujet.

Au niveau primaire, nous constatons que les programmes concernant l'enseignement

religieux catholique, qui seront obligatoires à compter de juillet 1986, ne sont pas encore disponibles, non plus que les guides et manuels correspondants. Je voudrais poser une question là-dessus parce qu'il y a un petit point qui me manque pour mon orientation. Je sais que l'Épiscopat du Québec a publié l'an dernier des documents qui orientent nettement vers de nouveaux programmes de formation religieuse. Quelle est la réaction du gouvernement vis-à-vis de ces propositions de l'Assemblée des évêques du Québec? Et où en sommes-nous à propos des programmes concernant l'enseignement religieux catholique au niveau primaire qui doivent entrer en vigueur, normalement, et devenir obligatoires à compter de juillet 1986?

M. Gendron: Ce qu'on a comme information, c'est que les programmes concernant l'enseignement religieux au primaire sont actuellement disponibles pour implantation, avec la liberté de les implanter dans les commissions scolaires qui le désirent, en vous indiquant que les représentations qui nous ont été faites par les évêques sur la partie que vous indiquiez tantôt ont été intégrées effectivement à ces nouveaux programmes qui sont disponibles pour implantation à partir de 1986.

M. Ryan: Est-il vrai que les guides et manuels ne sont pas encore disponibles?

M. Gendron: Les guides pédagogiques pour le premier cycle sont prêts pour septembre.

M. Ryan: Sont prêts pour septembre. M. Gendron: C'est-à-dire, ils sont...

M. Ryan: C'est présent et futur, un nouveau mode.

M. Gendron: Oui, cela va plus vite. Ils sont prêts, M. le député, mais on va les utiliser en septembre.

M. Ryan: D'accord. Très bien.

Deuxièmement, les programmes d'enseignement moral qui doivent remplacer les programmes de formation morale pour les élèves exemptés de l'enseignement religieux ne sont pas disponibles non plus que les guides et manuels correspondants - je suis toujours au primaire - et on ne connaît pas davantage la date à laquelle ces programmes doivent être mis en application.

M. Gendron: Quant aux manuels, on m'informe qu'effectivement les programmes de formation morale, pour ceux qui ne font pas le choix de l'enseignement religieux, ne sont pas prêts et ne seront pas prêts avant une couple d'années. Sauf que, d'après l'analyse qui a été faite au ministère, nous sommes toujours convaincus qu'on peut continuer à offrir un enseignement moral de qualité, pour ceux qui font ce choix, sur la base des anciens manuels qui sont toujours disponibles de même que les guides pédagogiques.

M. Ryan: Est-ce qu'il serait possible de savoir pourquoi cela ne pourra être prêt avant une couple d'années? Cela semble lointain.

M. Gendron: C'est sûrement possible de vous dire cela. Je pense qu'il faut convenir, M. le député, que c'est un secteur qui est passablement neuf, celui de l'enseignement moral, et les équipes de travail pour la rédaction de ces manuels et guides pédagogiques sont au travail très intensivement. D'après les informations qu'elles nous donnent, elles ne peuvent pas progresser plus rapidement et nous croyons qu'il faut laisser faire ce travail par les mêmes équipes qui ont travaillé aux anciens programmes. Dans ce sens-là, c'est juste une question de capacité horaire.

M. Ryan: En tout cas, je trouve que c'est trop long, étant donné toutes les discussions qu'il y a eu là-dessus et les questions de droit qui sont soulevées par certains secteurs de la population. Je pense que, si le gouvernement pouvait faire diligence et accélérer un peu l'échéancier, cela serait...

M. Gendron: Je vais en prendre note. Si on peut effectivement accélérer, on va essayer de le faire.

Enseignement des sciences

M. Ryan: Autre sujet. Les programmes de sciences humaines, d'arts, d'activités manuelles, de formation personnelle et sociale, de sciences de la nature - cela fait un gros voyage - devront être reportés, suivant une conclusion du comité mixte, vu qu'on n'est pas prêt à les appliquer. Est-ce que je pourrais savoir de quelle sorte de report il s'agit? C'est assez massif, cela en comprend un grand nombre.

J'entendais, l'autre jour, le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie dire: Au point de vue de la formation scientifique, cela va bien. Les choses sont bien engagées et on est en train de sortir de l'ornière, etc. Là, on s'aperçoit qu'au niveau élémentaire on a un point majeur dans le renouveau pédagogique qu'on veut faire, c'est l'enseignement des sciences de la nature. On nous dit: On va être encore obligé de retarder cela d'un an parce qu'on n'est pas prêt. J'aimerais avoir des

explications sur les raisons qui motivent tous ces reports et sur les mesures qui vont être prises pour accélérer l'entrée en vigueur de tous ces programmes. Est-ce un report uniquement d'un an? Quand on dit qu'on n'est pas prêt à les appliquer, qu'est-ce que cela veut dire? Quelles raisons a-t-on fait valoir au comité mixte qui ont pu influencer le gouvernement au point de modifier son échéancier?

M. Gendron: II faut faire attention, M. Ryan. D'abord, je vais parler un peu en général avant de reparler strictement des sciences naturelles. Souvent, quand on dit qu'on n'est pas prêt, ce n'est pas exact. Il arrive souvent que nous soyons prêts sauf que, rappelez-vous, dans le même rapport qu'on discutait tantôt sur la condition enseignante, le rapport du Conseil supérieur de l'éducation, il y a pas mal d'enseignants qui nous disaient: Les bouchées sont trop grosses et le niveau d'entrée est un peu trop rapide. Alors, si on prend un exemple concret, pour ce qui est des sciences naturelles, on est prêt; au premier cycle, on serait prêt à enseigner les sciences naturelles.

M. Ryan: Les professeurs ne sont pas prêts.

M. Gendron: C'est cela.

M. Ryan: Cela fait partie de votre responsabilité de les préparer.

M. Gendron: Oui, je suis complètement d'accord avec vous, mais je veux quand même indiquer que, même si cela fait partie de notre responsabilité, à partir du moment où le premier agent concerné, même si je lui disais: "Prêt ou pas prêt, on part et tu vas recevoir la formation que je t'offre... Il y a des contraintes qui nous sont imposées par un certain rythme de changement et de préparation des nouveaux programmes, en particulier, au niveau de l'élémentaire parce qu'on a effectivement plusieurs nouveaux programmes prévus qui se doivent d'être appliqués.

L'autre commentaire que j'ajoute c'est que, souvent, quand on parle des délais pour être prêts à appliquer un nouveau programme pédagogique, c'est le délai obligatoire. Cela ne signifie pas du tout qu'entre temps il n'y a pas de commissions scolaires ou d'enseignants qui sont en mesure d'offrir ces nouveaux programmes, mais c'est sur une base non coercitive dans le sens qu'ils devancent le délai d'obligation. Quand on discute de cela officiellement avec le ministère les réponses que je vous donne sont toujours dans la perspective de l'obligation. Exemple: le 1er septembre 1987, cela va être obligatoire d'enseigner les sciences naturelles au premier cycle. En 1988, cela va être obligatoire au deuxième cycle. C'est la même chose pour l'enseignement religieux qui va être obligatoire au premier cycle en 1986 et obligatoire au deuxième cycle en 1987 et, là, je pourrais tous les faire un par un: les sciences humaines, les sciences naturelles, la formation personnelle et sociale.

Or, entre-temps, notre responsabilité c'est d'essayer d'aller le plus vite possible tout autant pour ce qui est du matériel didactique que des guides pédagogiques, des nouveaux programmes dans la perspective que, lorsque l'obligation deviendra "formalisée", là, on n'aura plus de retard nulle part, nos professeurs seront formés, nos professeurs seront capables de faire face aux demandes du ministère. C'est dans ce contexte qu'il faut discuter de ce qu'on discute.

M. Ryan: Un autre point: toujours au niveau primaire, vous avez parlé tantôt de l'enseignement de l'anglais, langue seconde. Vous avez dit: Cela va commencer au deuxième cycle et on va commencer des expériences en classe d'immersion en 1987, si j'ai bien compris.

M. Gendron: Là, j'en profiterai, M. le député d'Argenteuil - et vous faites bien d'y revenir... D'abord, ce n'est pas le deuxième, c'est le premier. Au deuxième, cela existe, d'accord? Bien oui, au deuxième cycle de l'élémentaire, on enseigne une langue seconde.

M. Ryan: Actuellement, est-ce que c'est à la quatrième ou à la cinquième année que cela commence?

M. Gendron: À la quatrième année. M. Ryan: Quatrième?

M. Gendron: La première année du second cycle de l'élémentaire.

M. Ryan: J'aimerais avoir la confirmation. Est-ce que c'est cela qui est établi partout? C'est drôle, je marchais avec l'idée que c'était à la cinquième année dans bien des endroits.

M. Gendron: Juste une minute, M. le député d'Argenteuil. C'est ce qui est prévu dans le programme pédagogique et c'est ce qui est prévu dans les directives du MEQ, mais il n'y a pas d'obligation...

M. Ryan: Alors, sur cela, c'est le statu quo.

M. Gendron: Oui. Ce que j'ai ajouté tantôt...

M. Ryan: Alors, il n'y avait rien de nouveau; quand vous avez dit cela, au deuxième cycle, c'est la même chose. C'est cela que je voulais savoir.

M. Gendron: Non, il y avait quelque chose de nouveau. Si vous me donnez l'occasion de le dire, il y aura quelque chose de nouveau.

M. Ryan: Très bien.

Enseignement de l'anglais

M. Gendron: Ce qu'il y a de nouveau, c'est qu'à partir de septembre 1986 on va permettre non pas des classes d'immersion -là, j'ai fait une erreur, je la corrige - au premier cycle, mais des expériences d'enseignement de l'anglais au premier cycle. C'est cela qu'il y a de nouveau. Cela n'existait pas et, à partir du 1er septembre 1986, nous allons permettre des expériences d'enseignement d'une langue seconde, donc de l'anglais, au premier cycle de l'élémentaire. (16 h h 5)

M. Ryan: Regardez, M. le ministre... Est-ce que vous avez terminé là-dessus?

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: J'aurais une couple de commentaires à faire, si vous me le permettez. D'abord, vous me permettrez de vous dire que vous me faites sourire quand vous dites qu'on va permettre des expériences d'enseignement de l'anglais, langue seconde, au premier cycle du primaire. Cela me fait penser qu'il y a à peu près 15, 20 ans la Commission des écoles catholiques de Montréal avait fait cela, elle avait commencé des expériences pour qu'on puisse dégager des éléments nouveaux de pédagogie. Je dois vous dire qu'on n'a jamais vu les résultats nulle part. Il y en a sans doute eu, mais on ne les a jamais vus nulle part. Cela fait 15, 20 ans et on n'est pas plus avancé aujourd'hui pour ces trois années qu'on ne devrait l'être après tout ce qui a été vécu comme expérience depuis vingt ans.

Je voudrais vous poser une question. Il y a une commission scolaire - je pense que c'est la Commission scolaire de Châteauguay, si mes souvenirs sont exacts - qui avait commencé une expérience de ce côté-là, à partir d'instruments pédagogiques qui avaient été empruntés, je crois, à la Commission des écoles catholiques de Montréal. Le ministère a poursuivi, a poursuivi, a pourchassé devant les tribunaux. Ils voulaient donner une chance à des enfants de faire une expérience. Ils ne prétendaient pas généraliser tout de suite. Je voudrais savoir où en sont ces poursuites-là et si le ministère se serait ravisé, parce que je n'en ai plus entendu parler depuis une couple d'années. J'aimerais savoir où on en est avec cela, si on marche toujours avec la méthode des poursuites, les gros méchants qui avaient le malheur de dire: II faudrait quelques mots d'anglais au premier cycle du primaire. Est-ce que ces poursuites-là sont toujours en cours?

M. Gendron: Oui. M. Ryan: Pardon?

M. Gendron: Ces poursuites-là sont toujours en cours.

M. Ryan: Est-ce qu'on peut savoir où elles en sont rendues? Est-ce que cela fait partie du...

M. Gendron: Cela fait partie de la poursuite un peu globale dans la région de Montréal concernant les régimes pédagogiques. Il y a d'autres commissions scolaires, effectivement, qui avaient inscrit une poursuite. C'est-à-dire que c'est nous, je pense, qui l'avions inscrite, parce que c'était illégal de le faire. Je voudrais juste compléter et peut-être que, là, il serait plus facile pour vous de voir pourquoi il est toujours légitime, pour ce qui nous concerne, de continuer cette poursuite.

Quand je vous disais tantôt que nous allions autoriser, c'est qu'il est de la responsabilité du ministre et du ministère de l'Éducation d'autoriser de tels types d'expérience. L'article 20 - je vous disais tantôt qu'au 1er septembre 1986 on permettra l'expérience - dit ceci, et là je vous cite un article d'un projet de règlement: "Au premier cycle du primaire, l'enseignement de l'anglais, langue seconde, peut être autorisé par le ministre dans le cadre d'un projet d'innovation pédagogique". Si on me dit que je peux l'autoriser, cela suppose que j'aie une demande, cela suppose que la commission scolaire fasse une demande au ministre de l'Éducation qui l'autorise en vertu d'une disposition connue parce qu'effectivement on veut dégager un certain nombre d'expérimentations à la suite du vécu de cette expérience. Mais, pour ce qui est de la commission scolaire que vous avez mentionnée tantôt, il ne semble pas que cela soit le cas. On n'a pas attendu qu'il y ait une disposition dans l'article 20, on a décidé de tester cette expérience-là.

Sans être un spécialiste de ces questions, je vous ferais remarquer qu'après vingt ans on sait qu'il y en a qui en ont essayé, mais on est toujours devant deux écoles de pensée, M. Ryan, on est toujours devant deux écoles de pensée. Disons que le départage n'est pas clair, à savoir que certains prétendent qu'il n'est pas tellement avantageux, qu'on n'a pas tellement d'argumentation convaincante pour soutenir la

thèse qu'avant de maîtriser un peu mieux sa langue maternelle on doit avoir des dispositions facilitantes pour entreprendre l'apprentissage d'une langue seconde. Là, je ne ferai pas les écoles de pensée. L'autre école de pensée dit: II faut d'abord - elle dit le contraire, évidemment - maîtriser un peu plus sa langue maternelle avant d'envisager de commencer l'apprentissage d'une seconde langue qui pose toujours des problèmes de déséquilibre, de ci et de ça. On avait pensé qu'on ne retrouvait pas les éléments contradictoires des deux thèses en présence si nous démarrions l'enseignement de la langue seconde au second cycle du primaire.

M. Ryan: Au premier cycle. Les pouvoirs dont vous parlez du ministre d'autoriser l'enseignement de l'anglais au premier cycle, avez-vous parlé de cela en fonction du projet de règlements nouveaux qui est en marche ou bien...

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: ...du régime actuel?

M. Gendron: Non, j'ai parlé de cela dans la perspective du...

M. Ryan: Parce que vous avez déjà ce pouvoir, M. le ministre. Dans le régime actuel, il y est; il n'y a rien de neuf là-dedans, mais il n'a jamais été utilisé. Les problèmes qu'on a soumis à l'attention de vos prédécesseurs, ils n'ont jamais voulu les considérer à la lumière de cet article-ci.

M. Gendron: Vous avez raison, M. Ryan, de dire que cette disposition n'ajoute rien. L'annonce que j'ai faite, c'est que le ministre de l'Éducation qui vous parle, lui, a l'intention de se prévaloir de la disposition de l'article 20 pour autoriser des expériences pour des projets d'innovation pédagogique. C'est ce que je vous dis.

M. Ryan: Maintenant, une dernière question à propos du primaire et cela va déboucher sur le secondaire. Deux problèmes fondamentaux que nous avons dans le système d'enseignement sont celui de la qualité de la langue maternelle, d'abord, et, deuxièmement, la qualité de l'anglais, langue seconde. Je pense que c'est une source majeure d'inquiétude pour tous les citoyens qui se préoccupent de l'avenir de notre culture.

Je sais que c'est un problème large qui dépasse les frontières de la société québécoise. Aux États-Unis, on a d'immenses problèmes avec la langue écrite. En France, on a d'immenses problèmes, malgré les apparences; en Angleterre également. Par conséquent, je ne veux pas généraliser et dire qu'il y aurait une plaie ici qui nous est unique, parce que nous sommes du Québec et qu'il y a un gouvernement péquiste, etc., pas du tout: Mais je voudrais savoir si vous avez des plans d'action précis pour renforcer l'action du système d'enseignement sur ces deux points.

Parmi les études qui ont été faites aux États-Unis sur la réforme du système d'enseignement, je pense que l'une des meilleures - et vos collaborateurs me confirmeront là-dessus - c'est celle qui a été faite par le professeur Boyer sur la réforme de l'enseignement secondaire. C'est une étude tout à fait remarquable. Dans cette étude, le professeur Boyer conclut, en parlant des États-Unis - pas du Québec - que la pièce essentielle de toute l'expérience éducative dans les écoles publiques, ce doit être l'exercice qui vise à donner à l'élève la maîtrise de sa langue. Lui apprendre à bien s'exprimer, cela va l'aider à étudier des sciences; cela va l'aider à progresser dans toutes les disciplines, à s'affirmer comme citoyen, etc.

De ce côté, nous avons des carences énormes qui ont été confirmées par des études récentes qu'on a portées à votre attention. Est-ce que le gouvernement a des programmes spéciaux à l'esprit? Est-ce qu'il y a des choses qui vont être faites pour revigorer l'enseignement de ce côté? Est-ce qu'on peut s'attendre à une déclaration de politique dans un avenir prochain? Je ne pense pas qu'il y ait de recette qu'on puisse appliquer demain et je n'en demande point, mais je pense qu'il y a eu bien du verbiage là-dessus, beaucoup de discours et que l'action n'a pas progressé beaucoup.

Au point de vue de l'anglais, langue seconde, c'est généralement lamentable. Il faut circuler dans le système d'enseignement. On rencontre des enseignants qui nous disent: Moi, l'année passée, j'enseignais l'histoire et, là, cette année, j'enseigne la religion et, l'année prochaine, je vais peut-être enseigner l'anglais, langue seconde. Je me dis: Je ne pense pas qu'on puisse avancer bien gros avec des affaires comme cela.

J'en rencontrais un l'autre jour à Lachute qui m'a dit - là, il est rendu organisateur d'expositions de plein air - qu'il était dégoûté de tout ce "bumping", un très bon éducateur. Il a dit: Je vais essayer de me trouver un rôle dans le secteur privé; je ne suis plus capable de vivre là-dedans. Ce n'est pas comme cela, je pense, qu'on va renforcer la qualité de la langue maternelle et, également, la qualité de l'anglais, langue seconde, parce que nos jeunes ont besoin des deux langues. Leurs parents l'exigent, d'ailleurs, dans une proportion énorme. Toutes les enquêtes qui ont été faites là-dessus disent que les parents veulent cela dans une proportion de 90 % à 95 %.

Je suis content qu'on puisse aborder ce problème dans un climat plus détendu, parce

qu'il m'apparaît tout à fait crucial.

Enseignement du français

M. Gendron: Sur le premier point, M. le député d'Argenteuil, je pense que n'importe quelle personne intéressée par ces questions est obligée d'avoir, d'abord, une sensibilité et, également, être assez imaginative pour dire: II va falloir véritablement déborder les sentiers traditionnels qu'on a utilisés jusqu'à maintenant, puisque le constat qui est fait, si je prends le premier sur la qualité de la langue française, en particulier, la façon de l'écrire, oui, il y a un problème réel.

Votre question est: Est-ce que vous avez des mesures, est-ce que le ministère de l'Éducation a envisagé des choses concrètes pour améliorer cela? La réponse est oui, mais avec des réserves.

Qu'est-ce qu'on a envisagé pour améliorer cela? C'est la rédaction de nouveaux programmes pédagogiques, en particulier, pour ce qui est du français écrit, qui devraient faciliter une meilleure compréhension grammaticale, la meilleure possibilité de faire des phrases, ainsi de suite. Mais je dois vous signaler, comme cela l'a été d'ailleurs par tous ceux qui se sont penchés là-dessus, qu'au Québec la mauvaise qualité du français écrit, c'est d'abord et avant tout un problème de société.

Si, comme ministre de l'Éducation, j'essayais de la resserrer davantage pour qu'elle demeure uniquement dans le réseau de l'éducation, je pense que je ferais erreur. Cela ne veut pas dire de ne pas faire des choses chez nous. Au ministère de l'Éducation, il y a des gestes importants à être faits.

J'avais l'occasion d'ailleurs, samedi dernier, à la conférence que je donnais à la Fédération québécoise des directeurs d'école, de leur indiquer quelques mesures ponctuelles sur lesquelles je voudrais qu'il y ait une insistance réelle marquée à partir de 1986, qui aurait comme conséquence de renforcer la position du Québec et, surtout, des jeunes du Québec pour une meilleure qualité du français.

Il faut être conscient qu'il faut absolument que cela déborde le programme pédagogique du français. On aurait le meilleur programme possible, si cela ne devient pas une préoccupation collective, d'abord, de tous les autres enseignants dans une école... Cela devrait être une préoccupation autant pour le professeur de biologie, que pour le professeur d'histoire d'amener les jeunes à être attentifs sur la façon dont ils écrivent leur français. Cela devient aussi une préoccupation de famille. Avec l'arrivée de la télévision qui prend beaucoup de place dans nos foyers, nos jeunes, malheureusement, lisent moins.

J'ai toujours appris et je pense que je ne fais pas d'erreur en disant que la meilleure façon de construire une phrase comme du monde, avec un verbe, un sujet et un complément et de temps en temps la ponctuation qu'il y faut, c'est à force d'en voir, c'est à force de visualiser du français bien écrit. La lecture est sûrement un complément capital nécessaire pour renforcer une meilleure qualité du français écrit.

Est-ce qu'on va devoir, au cours de l'année qui s'en vient, faire plus? Ma réponse est oui, puisqu'on vient de recevoir le rapport de Mme Ouellet, je pense, du ministère de l'Éducation, qui nous a donné l'heure juste sur l'analyse qui a été faite dans tout le réseau de la qualité du français. Il y a des recommandations dans son rapport, qu'on va regarder, et on verra quelles sont ces recommandations qu'on peut mettre le plus rapidement possible en application.

Je n'aurais pas exactement les mêmes commentaires sur les gestes à faire pour ce qui est de l'autre dimension, c'est-à-dire l'amélioration de la qualité de l'enseignement de la langue seconde. Le problème est tout aussi réel, mais les moyens préconisés pour le corriger ne sont pas du même ordre. Dans ce sens, je pense qu'il y aura lieu également, cependant, de voir à ce que ce soient davantage des professeurs d'anglais qui enseignent l'anglais aux niveaux primaire et secondaire dans nos écoles que des professeurs d'une espèce de champ 38 qui se libèrent, ce qui fait que ces gens sont affectés à l'enseignement d'une matière ou d'une discipline pour laquelle ils n'ont véritablement pas la compétence.

Cela, c'est un problème d'affectation du personnel, M. le député. C'est un problème de gestion des enveloppes de personnel à l'intérieur d'une commission scolaire. Il faut qu'une commission scolaire essaie le plus possible, à l'intérieur de la gestion de son enveloppe et de la répartition des effectifs, que ces problèmes se présentent le moins souvent possible.

M. Ryan: II y a une suggestion que j'aimerais vous faire là-dessus, M. le ministre. Là, je vous dévoile un secret parce que j'aurais bien voulu que ce soit mon parti qui prenne l'initiative de cette suggestion, mais on pense au bien de l'éducation. On va avoir un réseau de commissions scolaires françaises...

M. Gendron: Vous êtes mieux de la faire parce que cela peut prendre du temps. Vous êtes mieux de me la faire.

M. Ryan: On va avoir un réseau de commissions scolaires françaises... Je n'ai pas compris.

M. Gendron: Non, c'est mieux! Restons-en aux crédits!

M. Ryan: Vous voulez dire que l'élection n'aura pas lieu avant la fin de mars.

M. Gendron: Vous pouvez le prendre de même. J'avais pris cela à l'inverse, mais...

Une voix: Ils vont changer la constitution.

M. Gendron: J'étais déjà confiant pour les prochaines. C'est dans ce sens que je l'ai pris, je m'excuse. (17 heures)

M. Ryan: On va avoir un réseau de commissions scolaires de langue française et un réseau de commissions scolaires de langue anglaise. Il y a un danger, avec ce système, que la séparation des deux communautés s'accentue au lieu de s'atténuer. Il y a des réserves, un bassin de ressources énormes pour l'enseignement des langues chez nous qu'on n'exploite pas du tout. On a des professeurs de langue maternelle anglaise. On me dira ce qu'on voudra, mais je pense qu'un professeur dont l'anglais est la langue maternelle est bien plus qualifié pour l'enseigner que celui qui l'a appris de force, comme on est obligé de le faire quand ce n'est pas la langue maternelle, et vice versa d'ailleurs.

Je ne sais pas s'il ne faudrait pas que le ministère envisage ce que j'appellerais des exercices de - je vais employer l'expression française d'abord - fécondation réciproque, "cross-fertilization", entre les deux réseaux de manière que les jeunes apprennent à se connaître un peu plus dès cet âge, qu'on bénéficie davantage des ressources qui sont disponibles de chaque côté. Je ne le sais pas. Ce n'est pas facile à mettre en oeuvre. Je connais les contraintes découlant des conventions collectives et celles qui vont découler du nouveau mode d'organisation, mais le souvenir que je conserve de ces expériences c'est que, quand l'anglais était enseigné par un professeur dont c'était la culture, qui en même temps s'était familiarisé avec la culture française, les résultats étaient bien meilleurs que quand c'était enseigné laborieusement par quelqu'un qui le faisait parce qu'il était obligé, mais qui n'avait pas toutes les qualifications de ce côté-là. J'ai déjà tenu des propos comme cela et cela avait scandalisé des gens. Cela ne me dérangeait pas trop, mais je vous fais la suggestion dans un esprit le plus constructif possible. Je ne sais pas si cela ne pourrait pas être étudié de manière systématique.

M. Gendron: Cela pourrait être...

M. Ryan: Les parents des deux côtés, autant ceux de langue française que ceux de langue anglaise, il y a une chose qu'ils veulent pour leurs enfants. Ils savent que quel que soit le régime qu'on aura à Québec, le gouvernement au pouvoir ou le parti qui gouvernera, leurs enfants vont vivre en Amérique du Nord et ils vont avoir besoin d'une bonne connaissance de leur langue maternelle et d'une bonne connaissance de la langue seconde, autant ceux de langue française que ceux de langue anglaise. C'est une suggestion que je vous fais. Je n'ai pas l'intention de développer cela davantage à ce moment-ci.

M. Gendron: Au moment où je la note, cela pourrait, après analyse, être un bon élément de plate-forme électorale pour le ministre de l'Éducation qui vous parle.

M. Ryan: Pardon?

M. Gendron: C'est un bon "deal" cela.

M. Ryan: Pardon?

M. Gendron: Cela pourrait être éventuellement, après analyse, un bon élément de plate-forme électorale pour le ministre de l'Éducation qui vous parle.

M. Ryan: Maintenant que vous avez purgé votre parti, peut-être.

Je continue. Au niveau secondaire, il y a bien des points qui sont soulignés dans le rapport que j'ai déposé ce matin. Je pense qu'on ne pourra pas les voir en détail. On en a illustré assez, cependant, pour montrer qu'il y a encore énormément de travail à faire dans l'implantation des programmes. Ce que nous voulions laisser comme impression très ferme, c'est qu'il n'y a pas matière à complaisance parce qu'il y en a beaucoup qui vont à travers le Québec disant: On a de bons programmes, cela marche, il n'y a pas d'inquiétude. Nous avons dit ce que nous pensons de la qualité objective des programmes, mais sur les problèmes d'implantation il y a énormément de problèmes qui se posent. Je pense qu'il est important que... J'aimerais, sur les points que nous avons soulignés, si vous pouviez m'adresser vos commentaires, M. le ministre, au cours des prochaines semaines. Je n'exige pas que ce soit aujourd'hui ou demain. Parce que seulement là-dessus on pourrait rester jusqu'à 22 heures, ce soir.

Est-ce qu'il reste encore du temps dans la période qu'on avait prévue pour ce sujet-ci, M. le Président?

Le Président (M. Charbonneau): Je pense qu'on a pris 45 minutes pour le premier sujet...

M. Ryan: II me reste...

Le Président (M. Charbonneau): ...on en

est rendu à environ 35 minutes pour le second sujet. Combien en avons-nous? Huit ou neuf.

M. Ryan: Oui. J'ai encore une couple de questions sur le deuxième sujet que je ne voudrais pas laisser passer...

Le Président (M. Charbonneau): Écoutez, je pense que c'est à la convenance... Dans la mesure où il n'y a pas de limite, vous pouvez prendre deux heures sur un sujet. La réalité, c'est qu'on a huit heures pour les crédits, il nous reste une heure aujourd'hui. J'ai l'impression que, demain, on va avoir quatre heures. On a perdu une heure aujourd'hui. Donc, il va falloir peut-être récupérer une heure demain.

M. Ryan: Par rapport à notre échéancier, nous, cela va bien. Il n'y a aucun problème, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va.

M. Ryan: De notre côté, parce que les sujets ne demandent pas tous une heure, non plus. C'est un "core subject", comme on dit. C'est un sujet absolument central.

Le Président (M. Charbonneau): Dans ce cas, je vais vous laisser dans le sujet central.

M. Ryan: C'est pour cela qu'on va prendre au moins l'heure complète.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va.

Manuels scolaires

M. Ryan: Au sujet des manuels, est-ce que le ministre pourrait nous dire si le gouvernement envisage des améliorations à la politique que j'appellerais malthusienne qu'il a pratiquée depuis quelques années avec les commissions scolaires? Deuxièmement, est-ce qu'il envisage des améliorations dans le système par lequel doivent passer les maisons d'édition pour faire approuver des manuels? Je pense qu'il y a deux problèmes, là. Le gouvernement ne donne pas de budget aux commissions scolaires pour acheter les manuels qu'il faut pour bien faire fonctionner les nouveaux programmes. D'autre part, pour un très grand nombre de matières, il n'y a pas de manuels disponibles et ce, me disent des éditeurs sérieux, en grosse partie parce que les exigences du ministère sont trop compliquées encore une fois, trop bureaucratiques, trop écrasantes. Il n'y a pas moyen de prendre le départ. Je ne sais pas si, sur ces deux points, on pourrait avoir des explications et des assurances d'amélioration parce que c'est une des grosses pierres d'achoppement.

Je remarque, sur le même sujet - cela va être un troisième volet - que, dans le nouveau projet de règlement, le nouveau projet de régime pédagogique que vous avez porté à notre connaissance, M. le ministre, il y a un article qui était dans le régime actuel. Dans le régime actuel, il y a un article très simple - M. Rousseau va pouvoir me dire le numéro. L'article qui dit qu'un manuel est nécessaire pour une matière, M. Rousseau, quel est le numéro dans le régime pédagogique actuel?

M. Rousseau (André): Cela fait plusieurs versions que nous avons.

M. Ryan: Vous savez laquelle je veux dire, vous. Ici, c'est cela, je l'avais noté... Cela va prendre seulement une seconde. Je pense que c'est important qu'on ait cela. On va prendre l'article 19. C'est pour le niveau primaire et il y a sans doute des choses semblables pour le niveau secondaire. Pardon?

M. Rousseau: C'est quatre, au secondaire.

M. Ryan: C'est quatre au secondaire. Prenons l'article 19, au niveau primaire. On va le lire. C'est écrit: Lorsque la liste du matériel didactique autorisé indique, pour un programme donné, un ou plusieurs manuels, l'élève doit disposer personnellement d'un ou des manuels requis pour couvrir le programme. Je crois comprendre que dans le nouveau texte que vous avez déposé - je l'ai lu à la dérobée, en diagonale, parce que je n'ai pas eu le temps de faire toutes les comparaisons avec le texte actuel - cet article ne serait plus là.

M. Rousseau: Dans la loi.

M. Ryan: Alors, je pose la question. Il y a trois volets dans ma question, par conséquent. Je vais attendre les réponses.

M. Rousseau: À l'égard du dernier volet, en ce qui concerne la gratuité des manuels scolaires, dans le premier chapitre de la Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public introduisant les droits aux services éducatifs que l'on retrouvait dans le régime pédagogique, on retrouve donc: "L'élève a droit à la gratuité des manuels et des autres instruments pédagogiques requis pour l'enseignement des programmes d'études et à la gratuité du matériel didactique utilisé dans les classes ou ateliers. "Ce droit à la gratuité ne s'étend pas aux documents dans lesquels l'élève écrit ou dessine."

Cela veut dire que l'article 8 -s3i vous

vous souvenez bien, cette question avait été traitée en commission - est venu même améliorer la situation qui était prévue à l'intérieur du régime pédagogique et dans les droits et obligations de la commission scolaire. On retrouve à l'article 309: "La commission scolaire met gratuitement à la disposition de l'élève les manuels et les autres instruments pédagogiques requis pour l'enseignement des programmes d'études et le matériel didactique utilisé dans les classes ou ateliers." Cela veut dire que non seulement le droit apparaît au premier chapitre, mais, au chapitre traitant des pouvoirs et obligations de la commission scolaire, on retrouve l'obligation.

M. Ryan: Je pense qu'on ne se comprend pas très bien. Voyez-vous, c'est très bien...

M. Rousseau: C'est le troisième volet de la question.

M. Ryan: Oui, restons sur le troisième. On va le régler tout de suite. Les deux points qui sont dans la loi, nous les favorisons; vous vous en souvenez, d'ailleurs. Nous avons insisté pour que la gratuité soit encore plus explicite et assurée. S'il n'y a pas de manuels, cela ne donne rien qu'ils soient gratuits, vous allez en convenir comme moi. Deuxièmement, si le manuel n'est pas requis, la commission scolaire ne sera pas obligée de le fournir. Elle va dire: Ce ne sont pas des choses qui sont exigées par le régime pédagogique. Ce que je vous dis, c'est que vous faites disparaître, dans le régime pédagogique, le droit qu'il y avait pour l'élève d'avoir un manuel et l'obligation de lui garantir cet instrument. Est-ce qu'on aura cela dans le nouveau règlement?

M. Rousseau: C'est-à-dire que l'article 19 disait: "Lorsque la liste du matériel didactique autorisé indique, pour un programme donné, un manuel..." Cela ne garantissait pas un manuel par programme. Prenons l'exemple de l'éducation physique: il y a plusieurs... Voyez-vous? C'était dans ce sens. C'était le sens qui était donné.

Par rapport au premier volet de la question, sur l'achat, par les commissions scolaires, de manuels scolaires, nous pouvons maintenant nous rendre compte que de nombreuses collections de manuels scolaires sont disponibles. Je pense qu'il ne faut pas blâmer les commissions scolaires de ne pas avoir nécessairement fait des choix prématurés sans qu'elles puissent véritablement avoir un certain nombre de collections dans chacune de ces matières. Mais, maintenant, quand vous regardez les catalogues des maisons d'édition, vous vous rendez compte que, pour les matières de base, vous pouvez retrouver des choix de collection de la première jusqu'à la sixième année, au primaire. Ce qui veut dire que les commissions scolaires seront maintenant beaucoup plus en mesure de faire ces choix, même après avoir expérimenté un certain nombre de manuels.

En termes budgétaires, on peut prendre différentes hypothèses. Par rapport aux états financiers concernant l'achat du matériel didactique et des manuels scolaires, nous n'avons pas fait le contrôle de l'achat des manuels scolaires. Maintenant, nous contrôlons par grande enveloppe l'ensemble des états financiers, c'est-à-dire l'ensemble de l'enveloppe "autres coûts" et, à l'intérieur de cela, le matériel didactique, les livres de bibliothèque ou les manuels scolaires, mais pris comme un tout. Si 50 % de ces achats ont servi à des manuels scolaires, nous pouvons prétendre que la majorité des commissions scolaires avaient, à l'intérieur de cette enveloppe, les capacités financières de les acheter. Si cela représente 70 % de ce coût, c'est-à-dire que, si l'on part de l'hypothèse qu'elles achètent beaucoup moins de matériel didactique et de livres de bibliothèque, mais surtout des manuels scolaires, là, il y a certains ajustements qui devraient se faire au sein de cet article. D'ailleurs, c'est dans cet esprit que, cette année, il n'y a pas eu de compression à l'article 3. Au contraire, même si le projet de règles ne prévoyait aucune augmentation, il y a eu cette augmentation de 2 %, qui ne correspond pas à l'augmentation des coûts, nous en convenons; excepté que, par rapport au projet de règles qui a été envoyé, il y a eu cette augmentation de 2 %.

Maintenant, sur le deuxième volet, à savoir la qualité des services rendus par le ministère auprès des maisons d'édition. Il faut dire que, au point de départ, les maisons d'édition ont réclamé, durant plusieurs années, des règles du jeu claires du ministère de l'Éducation. C'est pour cela que c'est avec les maisons d'édition que le ministère de l'Éducation a bâti un modèle de devis, de préparation de manuels scolaires. C'est un devis qui indique l'ensemble des règles pour fins d'approbation. Alors, il y a certaines règles élémentaires: cela doit couvrir tout le programme, cela doit permettre l'évaluation et, évidemment, cela doit être de qualité en ce qui concerne la langue, le matériel, le papier utilisé et autres.

Toutes ces règles du jeu ont fait l'objet de vastes consultations avec les maisons d'édition avant qu'on entreprenne le premier projet avec le français. Il y a beaucoup de plaintes de maisons d'édition sur des cahiers d'exercice. Le ministère avait pris comme option que le manuel scolaire devait inclure les dimensions permettant l'évaluation sans que les jeunes aient à acheter des cahiers d'exercice, ce qui ne veut pas dire que le

ministère est contre les cahiers d'exercice, mais nous tenions à tout prix à ce que le manuel scolaire puisse inclure cette dimension d'évaluation, de manière que ce ne soit pas toujours nécessaire d'être accompagné d'un cahier d'exercice.

Sur ces questions, il y a des divergences. Il faut dire que, depuis dix ou quinze ans, dans plusieurs matières, on ne retrouve que des cahiers d'exercice. Même dans les matières fondamentales, il y a des collections en français et en mathématiques qui n'utilisent comme matériel que des cahiers d'exercice, avec un petit paragraphe résumant le chapitre au point de départ, pas un véritable manuel scolaire qui puisse permettre de faire toute la démarche nécessaire pour réaliser un objectif vis-à-vis de tel ou tel programme.

Alors, ce n'est pas étonnant qu'il y ait des divergences. Mais, sur le devis, nous avons encore la conviction que toutes les maisons d'édition sont traitées sur le même pied, qu'elles connaissent à l'avance les conditions pour être, à toutes fins utiles, approuvées automatiquement, si le devis est respecté. Nous avons donc cette conviction qu'on favorise le développement de l'édition scolaire par cette mesure.

(17 h 15)

M. Ryan: À cela, je voudrais simplement répondre ceci. Tout d'abord, il y a un fait brutal: la production de manuels traîne énormément par rapport à la production des programmes des guides pédagogiques. Il y a un décalage qui risque de nuire énormément à la bonne implantation des programmes. Je pense que c'est documenté autant qu'on peut le faire. On a au moins une couple de douzaines d'exemples seulement dans les cas que j'ai mentionnés aujourd'hui.

Deuxièmement, je vous signale que du côté des éditeurs, on m'a signalé que la manière dont le ministère présente ses exigences est de nature à les décourager bien souvent.

Troisièmement, les commissions scolaires vous ont dit autant comme autant que la manière dont vous budgétisez ce poste-là en particulier entraîne des situations où les élèves sont privés de manuels. On peut bien faire les proportions ou les calculs que vous avez faits, mais ce sont les représentations que nous entendons. Je pense qu'il faut apporter des remèdes à cela, à moins que ce soit tous une bande de menteurs.

M. Gendron: M. le député d'Argenteuil, je pense qu'on pourrait conclure là-dessus en disant que, sur les représentations que les éditeurs vous ont faites, j'aimerais qu'ils entrent en communication avec mon ministère. Je m'engage à regarder très sérieusement leurs revendications pour essayer d'améliorer l'affaire et je suis pas mal sûr qu'on va trouver des accommodements.

Sur la deuxième partie de votre commentaire, la façon dont on comptabilise à l'intérieur des enveloppes disponibles les sommes requises pour se pourvoir en manuels, je pense que ce ne sera une cachette pour personne si je vous dis que, oui, il y aurait lieu d'avoir une enveloppe additionnelle octroyée aux commissions scolaires pour reprendre un peu plus rapidement les années de retard. Je le concède et je vous dis même que cette année j'étais en demande de crédits supplémentaires au comité des priorités pour cette disposition. Pour des raisons d'autres priorités, on n'a pas pu donner suite à la demande telle qu'elle a été présentée, mais je tiens à vous signaler que je n'oublie pas cette demande que je trouve pertinente et légitime, d'essayer de trouver une façon d'augmenter les crédits affectés au renouvellement et à l'achat des manuels scolaires dans certaines disciplines, parce que c'est un peu fondamental d'avoir au moins dans certains nouveaux programmes un manuel de base auquel les élèves puissent se référer.

M. Ryan: Une dernière question, M. le Président.

M. Gendron: Et, aux crédits de l'an prochain, je serai en mesure de vous dire tout le progrès qu'on aura fait là-dessus.

M. Ryan: Une dernière question en ce qui me concerne, pas parce qu'il n'y en a pas d'autres, mais parce que le temps nous presse. Le projet de nouveau régime pédagogique que vous avez porté à notre connaissance, seriez-vous prêt, M. le ministre, à prendre l'engagement de le soumettre à l'examen de la commission parlementaire un peu plus tard dans le processus, quand vous aurez obtenu des réactions et tout? Je me souviens que la dernière fois que tout cela est entré en vigueur, les parlementaires étaient complètement en dehors du coup.

Je crois qu'on est entré dans une démarche plus exigeante au cours des dernières années. Si on pouvait obtenir l'engagement que ce règlement qui est fondamental, car c'est ce règlement qui va définir le nouveau régime pédagogique, sera examiné par la commission parlementaire de l'éducation et de la main-d'oeuvre avant d'être décrété par le gouvernement, ce serait une très bonne chose. Je voudrais vous demander la même chose à propos du règlement qui va régir les enquêtes, les consultations sur le caractère confessionnel des écoles. On nous a distribué également une esquisse. Je vous pose cette question.

M. Gendron: Je vais être franc en vous disant que cela ne me répugne pas de prendre bonne note de ce que vous évoquez, mais, à ta lumière du retour de la très large consultation que l'on mène tout autant sur l'un que sur l'autre et à la lumière de l'éclairage que je ferai là-dessus, je serai mieux équipé pour être capable de soutenir modestement, à la folie ou passionnément votre demande.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, je voudrais revenir sur l'enseignement de l'anglais, langue seconde. Qu'on le veuille ou non, on est bien obligé de reconnaître que nos finissants au secondaire ne maîtrisent pas, n'ont pas une connaissance suffisante de l'anglais. Or, récemment, un rapport du Conseil supérieur de l'éducation nous faisait part du résultat d'une enquête qu'il avait menée. Il constatait que sur le temps consacré à l'enseignement de l'anglais au secondaire - je pense que c'est 120 minutes par semaine - les commissions scolaires n'en dispensaient que de 74 % à 84 %. Comment expliquez-vous cette situation? Est-ce que vous trouvez que c'est logique? On se préoccupe beaucoup de la connaissance, de l'enseignement de l'anglais, langue seconde. On est même rendu à vouloir en donner et à faire des expériences au premier cycle du primaire. Ne pensez-vous pas qu'on devrait se préoccuper d'abord de cette situation? On ne donne même pas les 120 minutes au niveau secondaire.

M. Gendron: La réponse, je l'ai donnée un peu. Ma première priorité, ce ne serait pas correct de vous dire qu'elle ne se situe pas là, mais cela ne veut pas dire que ce n'est pas important ce que vous signalez. Je prétends que dans une société francophone comme la nôtre il est d'abord capital, primordial, de faire des efforts comme ce n'est pas possible pour s'assurer que notre système d'enseignement préscolaire, primaire et secondaire public puisse offrir de meilleurs résultats appréciés et appréciables au niveau d'abord de la qualité du français.

Cela dit, c'est clair qu'on ne peut pas se fermer les yeux sur d'autres difficultés que certaines matières ou disciplines éprouvent à l'intérieur de nos régimes pédagogiques. Je pense que l'enseignement de l'anglais comme langue seconde est aussi important. Je voudrais apporter deux correctifs à ce que vous avez mentionné. Le temps enseigné, quand on dit que c'est deux périodes, 120 minutes, il faut que vous sachiez que c'est une décision d'une commission scolaire et non du ministère de l'Éducation. La commission scolaire a une grande latitude, au primaire en particulier, pour fixer les temps alloués à chacune des matières. Il y a la grille "matières" et il y a la grille "horaires". La grille "matières" vient de nous et la grille "horaires" vient des commissions scolaires. Si des commissions scolaires sont capables à l'intérieur des exigences de la grille "matières" de trouver du temps d'enseignement plus important, plus significatif pour renforcer non seulement la qualité, mais le temps d'enseignement, moi, comme ministre de l'Éducation, je n'ai aucune espèce d'objection à ce que cela se passe de même, après avoir donné les grandes orientations. La première: la qualité du français; la deuxième - bien sûr, s'il y a lieu de faire un effort additionnel sur le temps d'enseignement au niveau primaire ou au niveau secondaire de la langue seconde -je n'ai pas d'objection à l'intérieur de la grille "horaires" pour laquelle la commission scolaire a une marge de manoeuvre que je n'ai pas... Nous avons une marge de manoeuvre sur la grille "matières".

M. Leduc (Saint-Laurent): Là, je parle de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, au niveau secondaire.

M. Gendron: Oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): II est prévu que l'enseignement doit se donner sur deux périodes, sur 120 minutes. Est-ce une obligation? Est-ce que la commission scolaire peut déroger à ces 120 minutes?

M. Gendron: En moins, non; en plus, oui.

M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, comment expliquez-vous que le rapport du Conseil supérieur de l'éducation note que les commissions scolaires ne dispensent que de 74 % à 84 % des 120 minutes?

M. Gendron: Tout simplement pour les raisons que je viens d'expliquer. Les commissions scolaires ont décidé, à l'intérieur de leur grille "horaires", de ne pas affecter autant de temps qu'elles le pourraient à l'enseignement de la langue seconde au secondaire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, elles ne respectent pas les exigences, elles ne se conforment pas aux exigences. Vous dites qu'elles ne peuvent pas donner moins de 120 minutes, mais qu'elles peuvent en donner plus. Là, on constate, d'après l'enquête du Conseil supérieur de l'éducation, qu'elles ne donnent pas 120 minutes. Est-ce que vous avez posé des gestes?

M. Gendron: Non, et justement je crois que j'ai répondu correctement. Le programme

de l'enseignement de l'anglais au secondaire n'est pas un programme obligatoire.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous avez dit tantôt que c'était obligatoire. Vous avez dit qu'on pouvait en donner plus, mais pas moins.

M. Gendron: C'est cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que là elles pouvaient en donner moins?

M. Gendron: M. Rousseau.

M. Rousseau: Les commissions scolaires peuvent offrir le nombre de cours d'anglais, langue seconde, qui correspond aux exigences qu'elles prétendent nécessaires pour réaliser les objectifs d'un programme. Là, nous sommes encore avec nos anciens programmes d'études. Les nouveaux programmes obligatoires ne s'implanteront pas demain matin en anglais - je n'ai pas le tableau ici - mais ils vont s'implanter dans quelques années. Le nombre de crédits qui apparaît dans le régime pédagogique, c'est le nombre de crédits qui est lié au nouveau programme d'études; mais pour les anciens programmes, puisque le régime pédagogique date de 1971, il n'y avait même pas d'obligation en cinquième année du secondaire, ce qui veut dire qu'il y a des commissions scolaires qui ne l'offraient pas, il n'y avait pas d'obligation. Les nouvelles obligations commencent à entrer, elles sont rendues en secondaire III. Le nouveau programme, lui, tant qu'il n'est pas obligatoire, on ne réalise pas tous les objectifs que le régime pédagogique de 1981 impose.

M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, ils n'étaient pas obligés de donner les 120 000 $.

M. Rousseau: En secondaire V, ils peuvent même ne rien donner actuellement avec le régime de 1971 qui s'applique.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord. Maintenant en ce qui concerne l'enseignement des sciences, on a eu des rapports du Conseil des sciences du Canada et également un avis du Conseil supérieur de l'Éducation qui ont critiqué très sévèrement l'enseignement des sciences au secondaire. Je pense également, si je ne me trompe, que la direction de la recherche est actuellement en train de réaliser une série d'études sur l'enseignement des sciences. Je voudrais savoir ce qui se fait au niveau du ministère de l'Éducation pour améliorer cette situation qui a été décriée concernant l'enseignement des sciences au secondaire.

M. Gendron: Je l'ai mentionné tantôt, je pensais que cela avait été assez clair. Pour ce qui est de l'enseignement des sciences, une place a été faite aux sciences physiques en deuxième secondaire permettant ainsi l'atteinte d'une continuité souhaitée dans l'enseignement des sciences au secondaire. La marge de manoeuvre du premier cycle du secondaire s'en trouve limitée d'autant, mais l'étalement possible de quelques matières obligatoires sur plus d'une année satisfera sans doute les commissions scolaires qui voudront répondre à des besoins pédagogiques particuliers dans le sens d'offrir plus d'enseignement des sciences s'il l'étale sur quelques années. Le nouveau régime pédagogique permettra cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce qu'à ce jour, il y a des gestes concrets qui sont posés?

M. Gendron: Le geste concret posé est d'offrir le plus rapidement possible un nouveau régime pédagogique qui va permettre que l'enseignement des sciences ait une plus grande place à l'intérieur du tronc commun enseigné.

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va commencer quand?

M. Gendron: Je l'ai indiqué tantôt, l'enseignement des sciences naturelles au premier cycle commencera en 1987. Ce sont toujours les dates obligatoires, il y en a qui vont commencer avant parce qu'on va être prêt avant. Pour ce qui est du deuxième cycle, cela va être en 1988.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ne croyez-vous pas qu'à la suite de ces critiques très sévères, il n'y aurait pas lieu d'en faire une priorité?

M. Gendron: On en a fait une priorité dans le sens qu'en 1985...

M. Leduc (Saint-Laurent): Pas avant 1988.

M. Gendron: ...non, en 1985 on avait quatre crédits - vous êtes probablement familier avec cette notion - pour l'enseignement des sciences, mais ce n'était pas obligatoire, alors qu'en secondaire II, en 1986, nous aurons quatre crédits mais cette fois-là obligatoires.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ensuite, vous dites que cela va aller en 1988?

M. Gendron: En 1988, je ne pense pas que je parlais de cela, je parlais des sciences naturelles pour le deuxième cycle. D'accord?

M. Leduc (Saint-Laurent): Ça va.

Le Préaident (M. Charbonneau): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: C'est relié à la question d'entrée en matière plutôt du député de Saint-Laurent concernant la qualité... Évidemment, il a parlé uniquement du secondaire... Est-ce que des statistiques nous permettraient d'apprécier le degré de bilinguisme des jeunes Québécois à leur arrivée sur le marché du travail? Êtes-vous en mesure de répondre à une question comme celle-là? C'est difficile?

M. Gendron: Oui, on a des statistiques, ce sont les résultats d'examen de fin d'année, mais on n'a pas cela sous la main. On en prend note et on vous en reparlera. (17 h 30)

M. Desbiens: Je pense que cela permettrait d'apprécier dans quelle mesure... Je pense que c'est à l'arrivée sur le marché du travail et là où le besoin s'en fait sentir dans leur vie quotidienne qu'on peut apprécier aussi le degré ou la qualité de connaissance de la langue secondaire des Québécois et des Québécoises.

Deuxième intervention. Vous mentionnez très bien qu'un des objectifs que vous poursuivez, c'est l'amélioration de la qualité de la langue maternelle d'abord. C'est une des lectures que j'ai déjà faites. Est-ce que cette politique ou cet objectif est déterminé en fonction du fait que la qualité de la langue seconde ou la facilité d'acquérir la langue seconde est d'autant meilleure que le sujet possède déjà mieux sa langue maternelle?

M. Gendron: Oui, là, on revient sur ce que j'exposais tantôt sur les écoles de pensée. J'ai dit qu'il y en avait deux, mais il y en a beaucoup plus que deux. Effectivement, oui, on a des documents qui ont la prétention qu'il est plus facile de maîtriser davantage un apprentissage d'une langue seconde après que tu as une plus grande maîtrise de la langue maternelle. Il y a des gens qui prétendent cela, on a de la documentation à cet effet, comme il y en d'autres qui prétendent que cet handicap s'atténue dès qu'un jeune progresse dans l'échelle de ses connaissances. À un niveau plus élevé, il peut avoir une capacité d'apprentissage plus grande pour des raisons d'adaptabilité, pour des raisons d'un meilleur développement de sa croissance, pour des raisons d'intérêts plus larges qu'il est capable de prendre.

Mais, c'est un peu ce que je disais tantôt, il y a une demi-heure, quand M. Ryan disait: Écoutez, on a fait toutes sortes de choses, on est rendu en 1985 et on avait essayé cela il y a vingt ans et on n'est pas plus avancé. Je ne suis pas prêt à dire qu'on n'est pas plus avancé. On a plus d'éléments sur lesquels on peut s'appuyer pour dire: II y a sûrement une chose, c'est que tout n'est pas blanc et tout n'est pas noir, donc, cela signifie qu'il faut y aller avec parcimonie. Il faut y aller avec délicatesse, sur le bout des pieds.

C'est pourquoi j'annonçais que, dès septembre 1986, je suis prêt à me prévaloir d'une disposition de l'article 20 pour autoriser la tenue de quelques expériences d'enseignement de langue seconde au premier cycle de l'élémentaire. On va voir ce que cela va donner et on va faire des analyses avec ce que j'appelle des cartons frais. On est en 1985 et en 1986, alors, on ne fera pas ces années sur la base de ce qu'on observait en 1962 et en 1968, si on en a fait en 1962 et 1968, ce qui devrait nous amener à dégager des éléments de politique et de problématique pour arriver peut-être à conclure et dire: Écoutez, nos prétentions qu'on avait se sont avérées plus ou moins erronées ou plus ou moins exactes.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: On passe au sujet suivant. M. Gendron: Oui.

Formation professionnelle

M. Ryan: La formation professionnelle. Dans son intervention liminaire de ce matin, le ministre écrivait, entre autres, à la page 11, que le secteur de la formation professionnelle n'est plus le parent pauvre du système éducatif québécois. On peut même dire que la distinction forcée entre le général et le professionnel comme mode dans la vie scolaire de tous les jours n'est plus dans les faits la réalité qu'elle avait auparavant.

J'aimerais pouvoir partager l'optimisme que traduisent ses propos, mais j'ai beaucoup de mal à le faire. Je voudrais demander au ministre, pour commencer, de nous indiquer s'il est vrai qu'en plus de la chute considérable de clientèle, qui s'est produite dans le secteur professionnel au cours des dernières années, cette tendance semble devoir se continuer au cours de l'année 1985-1986. Le ministre pourrait-il nous indiquer quelle répercussion cette nouvelle baisse que l'on doit entrevoir pour 1985-1986 aura sur le nombre des professeurs susceptibles d'être mis en disponibilité?

D'après des données que nous possédons, le secteur de la formation professionnelle représentait en 1979-1980, 18 % de la clientèle totale du secondaire. En 1984-1985, ce pourcentage n'était plus que de 14 %. Alors, je demande au ministre: Est-il vrai que cette tendance à la baisse va continuer en 1985-1986, selon les indications les plus

récentes? Quel effet cette baisse aura-t-elle sur le nombre des enseignants mis en disponibilité? Est-il vrai, pour être encore plus précis, que le nombre des enseignants susceptibles d'être mis en disponibilité pourrait très bien passer de 400 à plus de 1000? Qu'est-ce que le ministère entend faire pour réagir à cette tendance, à ces prévisions qui nous préoccupent beaucoup?

M. Gendron: Pardon?

M. Ryan: Qui nous préoccupent beaucoup.

M. Gendron: Oui et nous également, parce que vos données sont passablement conformes à celles dont nous disposons. Il y a plusieurs questions. Est-il exact que le secteur professionnel subit depuis quelques années une chute de clientèle? La réponse est oui. La tendance indique-t-elle que cela se continue? La réponse est oui. Est-ce que cela crée une répercussion sur le nombre de profs mis en disponibilité. C'est évident que cela a une répercussion sur les profs mis en disponibilité. Votre dernière question: Est-ce que cela pourrait finir pour l'année en cours à un chiffre de 1200? La réponse est que c'est exact, mais après avoir soustrait les 430 qu'on traînait - il n'y a pas de jeu de mots - qui étaient déjà dans la banque de disponibilité, mais qui provenaient du secteur. Donc, les nouvelles mises en disponibilité prévues pour l'année en cours, c'est environ 825 et non pas 1200. Les 1200, c'est l'accumulation de la banque de MED provenant du secteur professionnel, plus ceux de cette année.

J'ai un commentaire à faire. Nous sommes conscients qu'à partir du moment où c'est un programme qu'il faut réviser, toute la question de la formation professionnelle, pour une année ou deux de transition, oui, il va y avoir les inconvénients que je viens de signaler. Cependant, on a également l'information que c'est beaucoup plus à la suite d'une directive qui n'a pas été trop comprise par le réseau scolaire à l'effet qu'on avait bien mentionné que nous reportions d'un an l'application de la nouvelle politique concernant la formation professionnelle. Devant cela, il y a des commissions scolaires qui ont eu le geste peut-être trop libertin d'ouvrir les valves de la mise en disponibilité dans ce secteur. Ce qui devrait très tôt, en septembre, se corriger parce qu'il va continuer quand même à y avoir des élèves au secteur professionnel court. Je n'ai pas les chiffres, à ce moment-ci, qu'on envisage récupérer, mais il y a un bon nombre de ces gens-là qui vont être réintégrés au réseau scolaire. Donc, ils ne resteront pas dans l'enveloppe de ce qu'on appelle les mises en disponibilité au tout début de l'année scolaire. Ce sont les commentaires que je peux faire.

M. Ryan: Avez-vous des données sur les causes?

M. Gendron: Juste une seconde, parce que je trouve que c'est très pertinent ce que l'on me donne comme information. On a les indications déjà sur le fait que ce serait sûrement très passager, parce qu'il y a des commissions scolaires qui ont commencé à vivre un peu plus avec les orientations du nouveau programme professionnel suggéré. Pour celles qui l'ont fait, on a frappé un vacuum, mais pour les années à venir il y a une remontée assez significative, entre autres, pour ce qui est du professionnel intensif. Je n'en dirais pas autant pour le professionnel long ni pour le professionnel court, sauf que cela ne pose pas de problème dans le sens que c'est ce que l'on veut. Avec le nouveau programme pédagogique proposé aux professionnels, il n'existera plus de professionnel court.

M. Ryan: C'est correct.

M. Gendron: Les causes, parce que j'ai entendu la question...

M. Ryan: Oui.

M. Gendron: Alors les causes. Selon une première analyse faite par les responsables de la formation professionnelle des diverses directions régionales, il nous faut tenir compte des dimensions suivantes pour comprendre ce phénomène de démographie scolaire.

Premièrement, la lenteur de la réforme en formation professionnelle.

Deuxièmement, l'information véhiculée par les orienteurs et les responsables de l'information scolaire et une plus grande attraction des cours de formation professionnelle de niveau collégial, donc un déplacement du niveau de la formation professionnelle qui, de plus en plus, passerait du secondaire au collégial.

Il y a également toujours - je l'ai vécu et je pourrais vous raconter quelques petites anecdotes où on ne contribuait pas tellement à ce qu'on va dire - une perception négative des cours de formation professionnelle offerts au niveau secondaire. Il y a toutes sortes d'attitudes dans certaines écoles qui font que le comportement de professeurs ou d'autres personnes n'avait pas nécessairement comme conséquence d'inciter des jeunes à choisir des cours de formation professionnelle, même si certains avaient la conviction que c'est cela qu'ils auraient dû prendre.

De plus, l'abandon progressif du professionnel court et des cours complémentaires et également le soutien économique à la mobilité des élèves du

secondaire plus faible que celui du collégial.

D'après nos analyses, ce sont là les causes. Cette situation éventuelle confirme la pertinence de la priorité que s'est donnée le comité national d'implantation des mesures de résorption de présenter des mesures, d'identifier une stratégie d'information et de privilégier un mode de gestion qui tienne davantage compte des difficultés de résorption de cette clientèle.

Ainsi, il sera peut-être nécessaire, dès le mois de septembre, d'accorder une attention toute spéciale à l'évaluation de l'efficience de ces mesures et à l'étude de la possibilité, s'il y a lieu, de mettre en place des mesures d'appoint afin d'atténuer les conséquences de ce problème de gestion des ressources humaines.

M. le député d'Argenteuil, ce ne sera pas très long. Quand je vous disais que j'aurais aimé, lors de cet élément, revenir sur vos commentaires globaux, j'ai deux commentaires. Cela va être très court. Vous laissiez voir, dans vos commentaires généraux, avant d'apprécier ce qu'on fait présentement d'une façon plus détaillée, qu'on n'aurait pas de politique de formation professionnelle. Je ne peux pas acheter cela, parce qu'il existe une réforme de la formation professionnelle qui a été élaborée en étroite collaboration avec les gens du milieu: en février 1980, le livre vert intitulé "La formation professionnelle des jeunes", le livre blanc de 1982, les colloques régionaux en 1983 et 1984 plus une publication du document "La formation professionnelle dans le système scolaire".

L'ensemble de ces documents et surtout le dernier constituent la politique du gouvernement en matière de formation professionnelle. On ne peut pas passer notre temps à écrire des choses sans en tenir compte. Même si elles n'ont pas été soumises - c'était une de vos remarques également - à une commission parlementaire, ces orientations ont été préparées avec la collaboration étroite et constante de l'ensemble des partenaires du ministère et d'autres.

La volonté du gouvernement est donc claire sur ce point crucial. Dans un monde de technologie nouvelle en perpétuelle évolution, il nous apparaît essentiel que tous les étudiants du Québec puissent recevoir une formation de base large leur permettant de faire face aux défis de l'avenir. Cette formation intégrera pour tous des éléments de connaissances technologiques. Elle devrait permettre à tous d'acquérir un secondaire V qui constitue le seuil visé pour une formation de base commune à tous. C'est pourquoi la formation professionnelle sera reportée en 6e année du secondaire, après l'obtention du DES.

Cependant, de façon à permettre une certaine souplesse, la formation pro- fessionnelle pourra, dans certains cas, commencer - là-dessus, je pense que vous aviez une question ce matin, je ne vous ai pas compris quand vous avez dit: Vous n'avez pas été clair, en parlant de moi - dès la 5e année du secondaire, les étudiants pouvant utiliser jusqu'à douze crédits optionnels pour entreprendre une formation professionnelle.

De façon à permettre encore plus de souplesse et à limiter le nombre de décrocheurs éventuels, certains cours de formation professionnelle pourront être offerts dès le secondaire IV, mais jusqu'à un minimum de huit crédits. Il s'agit d'un régime à caractère exceptionnel. Le régime général est fixé par le gouvernement afin de permettre au plus grand nombre possible de compléter leur formation générale.

Je ne sais pas si vous avez bien compris l'escalier. C'est qu'on permettrait, en secondaire IV, d'aller chercher jusqu'à huit crédits de formation professionnelle. En secondaire V, on permettrait d'aller en chercher douze parce que dans le nouveau programme, ce n'est qu'à la 6e année secondaire, véritablement, qu'on aurait le nouveau cours de formation professionnelle. (17 h 45)

M. Ryan: Très bien. Je continue. De tous les documents que vous avez cités, ils étaient mentionnés dans notre intervention de ce matin, par conséquence, cela ne nous apprend rien. On sait qu'il y a eu tous ces documents de publiés. Il n'y a pas de problème là-dessus. Je voudrais vous poser une question. Le dernier en date de ces documents, c'est celui qui est intitulé "La formation professionnelle dans le système scolaire, orientations et voies d'action retenues, février 1985." Là, est venu s'en ajouter un autre, ce matin, c'est la partie de votre exposé qui traitait de la formation professionnelle. Je voudrais vous demander ceci: entre ce qui a été donné dans votre exposé et ce qui était dans le document de février, est-ce qu'il y a des modifications et lesquelles? C'est simplement un résumé du document de février que vous nous avez donné.

M. Gendron: À ma connaissance, il n'y a pas de modification.

M. Ryan: II n'y a pas de modification. M. Gendron: Non.

M. Ryan: Maintenant, il y a une chose. Par rapport à ce dont vous venez de parler, le cheminement que doit suivre l'élève qui se destine à la formation professionnelle, le débat avait porté en très grande partie sur la question de savoir si la formation professionnelle commencerait en quatrième secondaire, en cinquième secondaire ou après. Je crois comprendre que l'option de base qui

est faite par le ministère, c'est pour une formation professionnelle après que le secondaire ait été complété, après la cinquième année secondaire.

M. Gendron: C'est exact.

M. Ryan: Cela veut-il dire qu'il va y avoir deux années après cela, la sixième et la septième année?

M. Gendron: C'est exact qu'il y a des programmes mais on ne peut pas... Votre question est claire, mais elle est générale. Tout ce qu'on sait, c'est que, oui, il y a des programmes qui vont exiger plus d'une année, même si c'est la sixième secondaire, pour avoir ce qu'on appelle une formation professionnelle finie, complète, terminale, dans la perspective où ces gens ne vont pas au collégial. Là, il faudra regarder par corps de métier.

M. Ryan: C'est évident. En principe, on va avoir, pour plusieurs disciplines, une sixième et une septième année secondaire?

M. Gendron: Oui. Pour la formation d'ouvriers spécialisés de niveau secondaire.

M. Ryan: Si mes souvenirs sont exacts, c'est radicalement contraire à ce que le Conseil supérieur de l'éducation avait proposé au gouvernement. Après avoir étudié les documents publiés par le ministère de l'Éducation, le Conseil supérieur de l'éducation vous avait mis fortement en garde contre cette orientation. Je pense que dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation, vous vous souvenez très bien des avertissements qu'on vous donnait à ('encontre de cette orientation. Le danger, d'après moi - je pense que le conseil l'avait souligné - c'est qu'on ait deux types de formation de même durée ou très proches que l'une soit considérée comme une formation de qualité supérieure et que l'autre soit considérée comme une formation de qualité inférieure. Je cite un extrait du document du Conseil supérieur de l'éducation: Parmi les problèmes que recense le document ministériel - c'est-à-dire celui du ministère de l'Éducation, là c'est le Conseil supérieur de l'éducation qui écrit - celui du passage possible du secondaire au collégial pour les finissants du cours professionnel constitue un exemple de traitement dans l'abstrait. Le document aborde le problème en affirmant que le fait d'être passé de 7 %, en 1975-1976, à 11 %, en 1979-1980, illustre la possibilité d'en arriver à un véritable débloquage. Mais le véritable enjeu sous-jacent au problème ne réside pas dans l'accessibilité, mais dans les possibilités réelles, dans l'intérêt, dans les motivations qui pousseront les jeunes à se prévaloir de l'accès au collégial. Une telle argumentation en faveur d'une croissance du taux de passage du secondaire professionnel aux études collégiales frise encore l'irréalisme en raison de l'orientation que propose le document ministériel de n'accorder le diplôme d'études professionnelles aux jeunes qu'après l'obtention de leur diplôme d'études secondaires. Ce qui vient d'être confirmé par le ministre dans les propos qu'il a ajoutés à ceux beaucoup plus vagues qu'il avait tenus ce matin. Qu'est-ce qui motivera alors un jeune qui a déjà prolongé d'au moins deux ans sa scolarité au niveau secondaire de se prévaloir de la possibilité d'aller au collège avant d'accéder au marché du travail?

Je crois que le Conseil supérieur de l'éducation - je n'ai pas relu tout son document ces jours-ci mais j'en avais fait une lecture attentive à l'époque, c'est un document qui remonte au mois de mars 1983, cela fait déjà deux ans et quelques mois -avait dit: Il y a des élèves, on peut bien concevoir un schème théorique en vertu duquel on va les initier seulement à partir de la cinquième ou de la sixème année, à qui cela serait infiniment plus profitable d'être initiés plus vite, d'acquérir un métier et d'aller sur le marché du travail. Mais, il semble que les orientations que vous avez prises soient en opposition directe avec celles que le Conseil supérieur de l'éducation avait recommandées. Est-ce que je pourrais vous demander pourquoi vous avez décidé d'agir ainsi?

M. Gendron: On est convaincu qu'il n'y a pas d'opposition entre ce que le Conseil supérieur de l'éducation nous indique et ce que nous faisons. Je vais y aller pour une partie et M. Rousseau vous donnera une explication additionnelle. Ce qu'on croit comprendre dans ce que le Conseil supérieur de l'éducation nous a dit, c'est ceci: Est-ce qu'il n'y a pas possibilité d'initier ou de commencer la formation professionnelle avant, même si on reconnaissait un profil ou un programme qui l'autorise à partir du secondaire VI? Alors, nous avons dit: Oui, on va avoir une mesure qui va permettre à l'étudiant ou à l'étudiante qui aura fait ce choix de faire une sixième professionnelle, dans la perspective où il - ou elle - ne va pas au cégep, de commencer avant sa formation professionnelle par une quatrième année du secondaire, pour huit crédits, et une cinquième pour douze crédits. Alors, il n'y a pas d'incompatibilité entre ce que nous disait le conseil supérieur et ce qu'on s'apprête à faire.

L'autre partie où il y aurait peut-être une incompatibilité, c'est dans le cas où l'étudiant envisage d'aller au collégial. M. Rousseau, quel était le commentaire que vous faisiez là-dessus?

M. Rousseau: Pour l'élève qui entreprend sa formation professionnelle après un diplôme d'enseignement secondaire, il fait donc un choix entre l'enseignement collégial qui offre une scolarité dans le domaine de la formation professionnelle de trois ans, incluant des obligations en philosophie, en langue maternelle, en langue seconde, en formation générale et professionnelle, une formation qui mène à un diplôme de technicien ou de technologue, et une formation d'ouvrier spécialisé qui, au secondaire évidemment, sera moins exigeante en ce qui a trait à la formation de base, puisqu'il a déjà son diplôme d'enseignement secondaire. Ce qui doit être réalisé, c'est que lorsqu'un jeune ou un adulte entreprend cette scolarité d'ouvrier spécialisé, si jamais il opte par la suite pour entreprendre un programme au niveau collégial, il faudrait qu'on puisse reconnaître ses acquis, qu'on puisse établir les équivalences là où il y en a. Mais c'est pour deux fonctions de travail qui sont totalement différentes, même dans une même spécialité.

M. Ryan: Maintenant, je reviens à la position que le Conseil supérieur de l'éducation défendait à l'époque. Quoiqu'il soit opposé à l'idée d'une septième année secondaire, il disait: II faudrait essayer de faire la formation. Je vais citer son texte, cela va être encore mieux: "Le conseil pressent plus d'avantages que d'inconvénients à ce que la formation professionnelle de niveau secondaire se situe au cours des onzième et douzième années d'études," c'est-à-dire la cinquième secondaire actuelle, plus une sixième année. Il y a deux ans de différence avec le collégial, on comprend. Il y en a un qui va être un ouvrier spécialisé et l'autre qui va être un technicien. Il y a une différence de deux ans. Là, vous allez ramener cela à un an et cela va faire un embouteillage et une confusion, finalement. Je crains cela beaucoup.

M. Gendron: M. Ryan, je prends votre première phrase. Vous avez dit: Le Conseil supérieur de l'éducation ne voulait pas envisager une formation spécialisée sur une septième année. Je prends votre phrase intégrale.

M. Ryan: Oui.

M. Gendron: On va ajouter, disons, une septième secondaire. D'accord? C'est cela que vous dites. Rassurez-vous car, nous non plus, on ne veut pas cela. Cela n'arrivera pas ainsi parce que... Cela peut être un ou deux cas exceptionnels qu'après une sixième année secondaire pour la formation professionnelle certains profils de cours exigent un peu plus de contenu spécialisé. On suit. Ils vont le prendre dans ces cas par le bas et non par le haut, parce que cela va être connu. Moi, comme étudiant, si je sais, par exemple, que je veux être ouvrier de métallurgie, je ne sais pas quelles sont les conséquences, mais si cela requiert une formation qui demande l'équivalent de deux ans, toujours au secondaire, on n'est pas au collégial, on va vous dire: Connaissant cela, je prendrais probablement huit crédits en quatre, douze en cinq, pour être certain de fermer avec ma sixième - ce dont on parle, la sixième année professionnelle - pour ne pas faire, comme vous dites, une septième professionnelle. C'est cela que le Conseil supérieur de l'éducation disait de ne pas faire et on est d'accord là-dessus, complètement d'accord.

M. Ryan: Maintenant, vous me dites que la septième année serait une affaire très exceptionnelle.

M. Gendron: Très exceptionnelle, c'est cela.

M. Ryan: Cela fait plus l'affaire, c'est plus clair.

M. Gendron: Oui, oui.

M. Ryan: Si l'orientation s'en va dans ce sens-là, je pense que cela se rapproche de ce qu'avait recommandé le Conseil supérieur de l'éducation.

M. Gendron: Oui, on l'a. Vous n'avez qu'à poser les questions, je vais donner les réponses, cela va se clarifier.

M. Ryan: Très bien. Je vais continuer, si vous me permettez.

M. Gendron: Bien sûr.

M. Ryan: C'est parce que je voudrais faire une suggestion au président et je ne sais pas comment le ministre réagira. Si on allait jusque vers 18 h 15 pour la formation professionnelle, on pourrait peut-être terminer cette partie ce soir. Cela nous permettrait d'aborder un autre sujet dès le début de la séance, demain matin.

M. Gendron: Oui, j'achète cela.

M. Ryan: Est-ce que cela va, M. le Président? M. le ministre achète cela.

M. Gendron: Cela va?

M. Ryan: On va faire diligence, je pense que d'ici à 18 h 15, on peut...

M. Gendron: Oui, 18 h 15.

M. Ryan: Encore une fois, ce n'est pas

parce que le sujet ne demanderait pas davantage, mais je pense qu'on va couvrir le plus de terrain possible, de la manière la plus constructive possible de cette façon.

Une voix: Allez, mon père.

M. Ryan: Autre question, la révision des programmes, deux choses là-dessus. J'ai cru constater que, sur l'ensemble des programmes, il y en a à peine une soixantaine qui ont été l'objet d'une révision jusqu'à présent. Il y a, actuellement, à peu près 250 titres différents. Le ministre a dit, dans son discours, que ces programmes seraient ramenés de 269 - je m'excuse, ce n'est pas 250, c'est 269 - à moins d'une centaine d'ici 1988-1989.

Est-ce qu'on pourrait savoir où on en est, actuellement, dans la révision des programmes? Quel est l'échéancier qu'on s'est tracé pour en venir à bout?

M. Gendron: D'accord. Je pense que vous faites bien, encore là, de revenir là-dessus. Là, je vais vous citer. Le député d'Argenteuil a fait valoir que seulement 60 programmes ont connu une révision sur les 250 qui existent présentement. Là, je vous cite...

M. Ryan: Oui.

M. Gendron: II faut, cependant, faire attention.

M. Ryan: Je n'ai pas peur.

M. Gendron: On pourrait donner ainsi l'impression d'un immense retard, ce qui n'est pas le cas. Alors, on va régler la question du retard. Non, on n'est pas si en retard que cela, parce que la révision qu'on a commencée, depuis fort longtemps, consiste à diminuer le nombre de ces quelque 250 programmes et de les ramener à une centaine - vous avez également dit cela -permettant d'assurer des qualifications plus fondamentales et plus facilement transférables à l'intérieur d'une même famille de métiers. Donc, si on fait la conversion, on vise une centaine, on en a déjà une soixantaine où la révision a eu lieu; l'écart, c'est une quarantaine pour lesquels la révision n'a pas eu lieu.

Avez-vous compris? Je résume. Vous dites qu'on est prêt pour 60, qu'on en a révisé 60, et il y en a 250, vous avez raison. En les révisant, on en "scrape" un certain nombre pour arriver à peu près à une centaine. D'accord? Dans la centaine de programmes requis, nous en avons 60 de connus, de révisés, pour lesquels on sait exactement quoi offrir. Donc, il n'en reste que 40, sur la centaine, pour lesquels notre travail n'est pas terminé. Est-ce qu'on se comprend là-dessus?

Sur cette base, M. le député d'Argenteuil, j'ajoute: Le drame est moindre qu'on le laissait voir, parce que, pour plus de 50 % des programmes, cela a fonctionné puisque la révision a eu lieu, qu'on a ce qu'il faut. Pour les 40 autres, en attendant que la révision se fasse, on peut toujours appliquer la politique avec les anciens programmes et il n'y a pas de drame. C'est cela qu'on va faire, tout en marquant l'importance de procéder, d'accélérer, parce que si on a réussi à faire la révision de 60 programmes, je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas la révision des 40 qui manquent le plus rapidement possible, pour être en mesure, pour tout le bassin de la formation professionnelle, de procéder avec de nouveaux programmes révisés. (18 heures)

M. Ryan: Maintenant, je voudrais comprendre le raccordement avec les tables nationales sectorielles, les tables régionales de concertation. Tout cela est censé se faire en harmonie avec ces tables de concertation qui sont prévues dans les documents d'orientation du gouvernement. Combien de ces tables sectorielles nationales existent actuellement? Combien de tables régionales? Est-ce qu'on veut dire que tous les programmes révisés dont vous avez parlé ont été soumis à l'examen de ces tables de concertation? Où en est-on dans l'établissement d'une carte nationale des options professionnelles? Il y a une chose que je voudrais ajouter à la question. Nous savons tous qu'il y a eu une réduction considérable du nombre d'options offertes par les commissions scolaires en formation professionnelle, depuis deux ou trois ans en particulier, à la suite des compressions budgétaires. Je voudrais savoir où on en est sur tout cela?

M. Gendron: D'accord, sur la table de concertation au niveau régional?

M. Ryan: Oui. Ensuite sur les tables régionales en même temps, et leur participation à la révision des programmes. Et le stade où on est rendu dans la mise au point d'une carte des options professionnelles nationales, évidemment pour chaque région aussi.

M. Gendron: On va vous démêler cela.

M. Ryan: Oui, il y a beaucoup de choses.

M. Gendron: Commençons d'abord, M. Ryan, par la table de concertation au niveau régional. Dans les onze régions du Québec, les commissions scolaires, les cégeps et les commissions de formation professionnelle -ce qu'on appelle les CFP et autres - on

formait des tables de concertation qui se sont donné les priorités suivantes: l'amélioration des services regroupés d'accueil et de référence pour la population adulte, la planification d'un projet de carte régionale de développement des enseignements professionnels. Récemment une tournée sous-ministérielle a permis aux membres du comité tripartite: le MEC, le MMSR, ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, et nos nouveaux collègues du MESST, ministère de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie...

M. Ryan: La Trinité, trois personnes.

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: Un seul Dieu.

M. Gendron: Oui.

M. Ryan: On le cherche!

M. Gendron: Vous cherchez le Dieu ou les trois personnes?

M. Ryan: Non, je cherche le Dieu justement.

M. Gendron: ...de la prise en charge locale de la mise en oeuvre de la politique. Je voulais juste vous donner ces considérations pour dire que, dans ce cas, c'est de même qu'on évolue à peu près sur la base de toutes les régions. Sauf, qu'il est clair - pour être plus précis - qu'il y a des régions, dans la délimitation par exemple de ce qu'on appelle la carte régionale des options professionnelles, qui sont plus avancées que d'autres. Il y en a qui sont quasiment en train de terminer l'opération.

Pour ce qui est de la carte nationale -vous avez posé aussi cette question - la direction régionale déposera en juin 1985 les orientations et procédures pour établir la carte nationale. Cette carte nationale devrait se réaliser en 1985-1986.

M. Ryan: Est-ce qu'on pourra obtenir une liste de tous ces programmes qui ont été mis à jour, avec en même temps les contenus évidemment pour chacun, et peut-être - je ne veux pas demander un travail spécial - les indications quant aux programmes qu'ils regroupent? Si on en a 60, à partir d'un nombre beaucoup plus élevé, j'aimerais savoir comment cela est regroupé, etc.? Comment cela a-t-il été approuvé? Quelle sorte de comités ont travaillé sur cela? Est-ce qu'on pourrait nous renseigner un peu sur la mécanique par laquelle on est arrivé à cela?

M. Gendron: Oui. Au lieu de le faire ici, parce qu'il y a plusieurs éléments, on va prendre cela en note et on va vous donner les informations.

M. Ryan: J'aimerais avoir l'information générale quant à la manière dont est arrivé à mettre à jour 60 programmes jusqu'à maintenant sur un objectif de 100 programmes?

M. Gendron: On est en mesure de vous répondre tout de suite sur cela. M. Rousseau.

M. Ryan: Oui, j'imagine et j'en suis sûr.

M. Rousseau: Les concepteurs viennent des commissions scolaires ou des collèges. Il existe des tables de consultation regroupant des compétences pédagogiques et des compétences professionnelles incluant à certains égards, l'entreprise ou encore des corporations professionnelles lorsqu'elles existent. Ce sont des tables de consultation à partir d'un produit qui est conçu par des pédagogues et des spécialistes dans le domaine du secteur de développement. Le regroupement qui est fait est inspiré par une division en vingt grands secteurs. Dans chaque programme, on retrouve la dynamique qui a servi à son élaboration.

M. Ryan: Vous allez nous envoyer une documentation sur cela pour compléter notre information. Quand vous préparez les programmes... Vous avez dit qu'environ une soixantaine étaient prêts. Est-ce qu'ils sont en circulation actuellement, est-ce qu'ils sont communiqués aux commissions scolaires ou s'ils sont juste en stock pour le moment?

M. Gendron: Oui, on dit qu'il y en en circulation; il y en a qui sont à d'autres niveaux de direction. Mais, ils sont en circulation.

M. Ryan: Est-ce qu'il y a une planification qui a été faite des équipements que va requérir la mise en oeuvre de ces programmes? Est-ce qu'il y a des mesures qui ont été prises pour cela? Est-ce qu'on voit à ce qu'il y ait une équivalence? Je vais vous raconter un fait. Vous allez me dire que cela regarde le collégial, mais cela relevait de votre autorité jusqu'à si récemment que vous avez sûrement une grosse responsabilité là-dedans.

J'étais dans un cégep l'autre jour, et il y a des nouveaux programmes qui ont été élaborés par le ministère de l'Éducation -l'autre ministre n'existait pas encore à ce moment - disons, en électronique, en instruments et contrôle et en une couple d'autres disciplines. On a des programmes qui sont très bien faits. Mais, j'ai regardé les

équipements qu'ils ont pour appliquer ces programmes et cela ne tient pas debout; il y a un décalage terrible entre les deux.

Il y a un programme d'électronique qui est bien bon et les instruments dont on dispose pour enseigner cette matière remontent à voilà vingt ans. Ils n'ont pas eu de budget de renouvellement d'équipements depuis sept ou huit ans. Je pourrais vous donner le nom du cégep. Je ne veux pas le nommer ici pour ne pas lui faire de tort, justement.

Je suis allé à instruments et contrôle. Vous avez vos experts dans ces questions qui connaissent ces choses mieux que moi; aujourd'hui, les usines marchent toutes a base de gros panneaux d'instruments de contrôle, à base électronique, ce sont tous des ordinateurs. Eux enseignent encore cela avec des instruments à base pneumatique; c'est la génération précédente. Dans le Québec d'aujourd'hui! Un gros cégep à Montréal! J'ai mis mon nez et mes doigts dessus, pour être bien sûr.

Je vous pose la question: Est-ce que vous avez une politique? Est-ce que vous avez bien prévu qu'on va avoir l'instrumentation en matière d'équipements, en matière de manuels. Les professeurs m'ont dit, M. le ministre, qu'il y en a un qui s'est vu confier une nouvelle discipline. Il n'a pas un cent de budget pour acheter des livres. La bibliothèque n'a pas les livres qu'il lui faut. Il faut qu'il dépense 450 $ de volumes, d'ici le mois de septembre, pour commencer l'enseignement de son affaire. C'est la réalité pratique.

J'aimerais avoir des précisions de votre part, si on a un peu plus les pieds à terre en ce qui regarde la formation professionnelle au secondaire. Ce que j'ai vu, cela ne fait pas plus d'une dizaine de jours.

M. Gendron: Pour le dernier bout, c'est évident, parce qu'on est situé à l'étage inférieur.

M. Ryan; Oui?

M. Gendron: C'est cela, on est situé à une étage inférieur à celui du ministère de la Science et de la Technologie.

M. Ryan: Mais vous savez que les professeurs se plaignaient énormément de la pauvreté des équipements. C'est dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation et cela m'a été dit à maintes reprises. Mais, je m'excuse de vous avoir interrompu.

M. Gendron: M. le député - très sérieusement, parce que la question est pertinente - nous, on pense qu'il faut absolument que les devis d'implantation de ces programmes incluent toujours les équipements requis pour faire la relation. De plus, nous avions, en 1983-1984, un budget de 10 000 000 $. Même chose en 1984-1985, pour l'amélioration des équipements. En 1985-1986, il y aura également une évolution des équipements dans les commissions scolaires pour être en mesure de faire une évaluation de la qualité de ces équipements, parce qu'on est toujours conscient qu'il est important que la relation étroite entre le devis d'implantation et l'équipement requis n'ait absolument pas d'écart.

Par voie d'évaluation serrée, nous, on est en mesure d'affirmer que c'est quelque chose qui se fait. Et on pourrait vous lancer quelques cartons d'invitation, M. le député d'Argenteuil, pour vous montrer que dans les secteurs de pointe où effectivement on a obtenu des crédits supplémentaires pour offrir une meilleure qualité d'équipement nécessaire, nous croyons, sans prétention -parce qu'il faut toujours faire attention à cela - que nous sommes passablement à jour dans les secteurs de pointe.

M. Ryan: Je remarque, d'après les chiffres que nous ont donnés vos collaborateurs... Est-ce que vous avez dit, pour la dernière année, pour l'année précédente, 10 000 000 $? Vous avez donné des chiffres tantôt et j'ai été distrait un petit moment. Pourrez-vous me répéter ces chiffres?

M. Gendron: Non, non. On a eu deux années d'affilée de 10 000 000 $: 1983-1984, 10 000 000 $...

M. Ryan: C'est cela.

M. Gendron: ...1984-1985, 10 000 000 $.

M. Ryan: Oui. Et 1985-1986, 10 000 000 $.

M. Gendron: Non, 1985-1986, je n'ai pas dit 10 000 000 $...

M. Ryan: C'est cela que j'ai. M. Gendron: Non, non.

M. Ryan: On fait exception de la micro-informatique, dont on va parler demain.

M. Gendron: Oui. Mais en 1985-1986... M, Ryan: Pour le reste...

M. Gendron: ...dans ce que je vous ai dit, M. le député, je n'avais pas mentionné de chiffre.

M. Ryan: Mais je l'ai ici, sur une feuille qui m'a été donnée par votre

ministère.

M. Gendron: Qu'est-ce qu'on écrit?

M. Ryan: 10 000 000 $.

M. Gendron: M. Cadieux.

M. Ryan: Source: Michel Hawey.

M. Gendron: On l'a, M. Ryan.

Une voix: Vous avez un bon ministre aussi.

M. Gendron: C'est qu'on pense, même si c'était peut-être plus intéressant d'avoir votre feuille que la nôtre... Non, non, je pense que l'information est davantage ici, d'après les papiers. C'est vraiment 10 000 000 $ en 1983-1984; c'est 10 000 000 $ en 1984-1985; et il n'y a pas un cent d'écrit pour 1985-1986, parce qu'on est en train de faire l'évaluation sur la base de ces équipements pour deux années de 10 000 000 $ avant de consacrer une somme budgétaire. C'est cela que j'ai comme information. Il ne faudrait pas présumer, aujourd'hui, que nous avons 10 000 000 $ pour 1985-1986.

M. Ryan: Alors, vous mentionnez une leçon qui m'invite à me méfier de la documentation qui nous est remise par votre ministère avant l'étude des crédits, parce que c'était écrit en bonne et due forme. Je voudrais bien...

M. Gendron: À peine... M. Ryan: Pardon?

M. Gendron: Je ne veux pas dire que ce n'était pas écrit, mais c'est possible qu'on écrive un peu plus.

M. Ryan: Très bien. Maintenant, je voudrais... Vous allez avoir cela bientôt, dites-vous?

M. Gendron: Oui. Demain, d'ailleurs, je serai probablement en mesure de vous dire pour 1985-1986...

M. Ryan: Pas demain. Regardez, c'est parce que je vais vous dire, d'après ce que je crois comprendre, moi-même, je croyais que c'était un montant approximatif. Il était inscrit ici avec assez d'assurance... mais il y avait une phrase qui était écrite: "Le bilan des mesures qu'on a prises pour améliorer les équipements au cours des deux dernières années est en cours et on compte le terminer en juin 1985". Sur la base de ce bilan, j'imagine que là vous allez établir les appropriations nécessaires pour l'exercice courant. Mais il y a une chose que je voudrais remarquer - là-dessus, si je suis injuste, corrigez-moi - je crois comprendre qu'on a procédé à des dépenses considérables en 1983-1984 et 1984-1985 sans avoir procédé à un inventaire vraiment rigoureux des ressources qui étaient disponibles. Cette fois-ci, on procède à un inventaire beaucoup plus sérieux en vue d'avoir...

M. Gendron: M. Ryan, vous m'avez dit que si on vous croyait injuste, de vous reprendre. Je crois que vous êtes injuste puisque quand on l'a fait - on vous donne raison pour 1983-1984 et 1984-1985 - nous n'avions pas tous les inventaires. Mais nous l'avons fait uniquement dans les secteurs de pointe, où on était sûr qu'il était urgent de substituer ces équipements, uniquement dans les secteurs de pointe très définis. C'est pour cela que je pense que les 10 000 000 $ deux années d'affilée ont été véritablement bien affectés sur des équipements complètement vétustes.

M. Ryan: En tout cas, j'espère que cela a été mieux fait dans les autres secteurs que dans celui des micro-ordinateurs dont nous parlerons demain.

Le Président (M. Charbonneau): Cela dit...

M. Ryan: Cela dit, je pense que l'heure est atteinte.

Le Président (M. Charbonneau): ...la commission ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 14)

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