Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre,
messieurs!
La commission parlementaire de l'énergie et des ressources se
réunit ce matin pour entendre les représentants des
différentes sociétés d'État, soit MM. Antoine
Ayoub, président du conseil d'administration de SOQUIP, Fernand Girard,
président par intérim de SOQUIP, et Paul Bourassa,
président de SOQUEM.
Les membres de la commission pour la séance de ce matin sont: M.
Bérubé (Matane), M. Biron (Lotbinière), M. Ciaccia
(Mont-Royal), M. Desbiens (Dubuc), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Fortier
(Outremont), M. Grégoire (Frontenac), M. Perron (Duplessis) et M.
Tremblay (Gouin). Les intervenants sont: M. Brochu (Richmond), M. Dussault
(Châteauguay), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie),
M. Rancourt (Saint-François) et M. Samson (Rouyn-Noranda). D'abord, y
aurait-il des substitutions à faire? Oui, M. le
député.
M. Scowen: Pourriez-vous remplacer M. Giasson par M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce)?
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. Giasson
remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce). Cela va, tout le
monde?
Il y aurait lieu, à ce moment-ci, de nommer un rapporteur de la
commission. Avez-vous une suggestion? Le député de Duplessis se
porte volontaire. Le rapporteur de la commission sera M. Perron
(Duplessis).
Je voudrais rappeler simplement aux membres de la commission, avant de
procéder à l'écoute de nos différents
invités, que le mandat de la commission, si j'ai bien compris,
était d'entendre les trois personnes que j'ai mentionnées plus
tât, de 10 h à 12 h 30 ou 13 heures. On a trois personnes. Je me
demande s'il n'y aurait pas des suggestions de la part des membres de la
commission pour statuer sur un certain temps à allouer à chacune
de ces personnes ou si vous préférez y aller dans un certain
ordre. En tout cas, j'attends vos suggestions.
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ...lorsque l'on dit qu'il y a trois
personnes, je constate qu'effectivement il y a peut-être trois personnes
en Dieu, mais en fait il y a deux sociétés et on devrait
peut-être consacrer la moitié du temps à chacune, à
moins que vous n'ayez une façon différente de départager
le temps. Je n'ai aucune idée préconçue, mais pourrait-on
départager le temps également entre les deux
sociétés?
M. Ciaccia: On pourrait peut-être commencer avec la
société SOQUEM et, au fur et à mesure qu'on verra comment
les travaux se dérouleront, on pourrait peut-être décider
à ce moment-là... On pourrait avoir comme objectif de partager le
temps en deux...
Une voix: En principe, comme question de principe.
M. Ciaccia: ...en principe, mais tout en étant
flexibles.
M. Bérubé: Oui, d'accord, absolument. D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous rappelerai au moment
où on sera rendu à peu près à la moitié du
temps.
M. Ciaccia: Oui, et on décidera à ce moment.
Le Président (M. Bordeleau): C'est cela; on
l'évaluera. Est-ce qu'il y a une déclaration préliminaire
ou des informations additionnelles?
M. le ministre
Remarques préliminaires
M. Bérubé: Voici la seule déclaration
préliminaire. Je voudrais souhaiter la bienvenue au nouveau critique en
matière énergétique du Parti libéral qui nous
honore de sa présence, M. Fortier, ainsi qu'au nouveau critique des
mines, le député de Rouyn-Noranda qui, également, nous
honore de sa présence. Cela me fait énormément plaisir de
les accueillir à cette commission parlementaire.
II est important de souligner que nous allons débattre deux
projets de loi importants pour l'orientation de nos sociétés,
puisque, dans les deux cas, il s'agit de modifier les conseils d'administration
et de modifier des règles de relations entre l'État et ses
sociétés d'État. Il s'agit souvent d'accroître le
capital-actions et il s'agit également de définir de nouveaux
mandats pour ces deux sociétés. C'est donc un changement
législatif majeur quant à ces sociétés. Il ne fait
aucun doute que l'occasion qui nous est donnée de rencontrer les
dirigeants de ces deux sociétés pour répondre à nos
questions peut certainement nous aider à mieux saisir l'importance de
ces projets de loi et, surtout - à cet égard, je suis fort
heureux - nous permettre de saisir l'importance de l'action des
sociétés d'État dans le domaine où elles oeuvrent.
Cette commission va certainement être pour nous un appui majeur dans
notre travail législatif.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Nous avions
demandé de rencontrer les dirigeants de SOQUEM et de SOQUIP, à la
suite du dépôt du projet de loi et à l'annonce des travaux
parlementaires par le ministre. Nous aurions aimé, par ailleurs, avoir
plus de temps pour examiner le rapport annuel avec SOQUEM et pour examiner
certains projets, parce que nous trouvons, premièrement, qu'il y a des
changements majeurs dans le projet de loi. Il y a des changements dans les
objectifs de la société. Il y a des changements dans les
structures de la société. Nous aurions voulu avoir plus de temps
aussi pour examiner certains projets auxquels se réfère le
rapport annuel, parce qu'on met en question le rôle des
sociétés d'État et les relations entre ces
dernières et l'administration du gouvernement qui semble changer encore
plus avec le présent projet de loi.
Avant de commencer, je voudrais poser une question. Je voudrais demander
si mes collègues auraient d'autres remarques préliminaires et,
à la suite de cela, nous pourrions peut-être poser des questions
aux représentants de SOQUEM, à moins qu'ils n'aient une
déclaration à faire au début.
M. Bérubé: Nous pourrions demander sans doute aux
représentants de SOQUEM de s'identifier de manière que ce soit
porté au procès- verbal, d'une part. Si le président de
SOQUEM veut faire une déclaration préliminaire, on va l'y
inviter.
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa est
déjà en place. Alors, M. le Président, si vous avez une
introduction à faire ou une présentation... Je vous ferai
remarquer que vous pouvez très bien demeurer assis. À cause du
son, ce. serait préférable.
Audition des administrateurs de SOQUEM
M. Bourassa (Paul): Merci. Je croyais que ma voix portait assez.
Je suis Paul Bourassa, président-directeur général de
SOQUEM. J'ai avec moi, ce matin, à ma gauche, M. Fernand Dubuc,
directeur de l'exploration, M. Claude Genest, vice-président et
directeur de l'exploitation; à ma droite, M. Henri Lanctôt, chef
du contentieux; dans la deuxième rangée, à ma gauche, M.
Lucien Fontaine des relations publiques, M. Gilbert Marquis, directeur des
services financiers, M. Josaphat Gilbert, administrateur externe, M. Hector
Monette, administrateur externe et M. Pierre Garceau, administrateur
externe.
D'après le télégramme que j'ai reçu, votre
commission désire entendre nos représentations concernant notre
projet de loi. J'ose espérer que je serai excusé de faire un
discours à l'emporte-pièce et nous aimerions mieux
répondre aux questions spécifiques que la commission pourrait
avoir.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Bourassa. On peut
peut-être, s'il n'y a pas d'autres commentaires généraux,
commencer par des questions.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Premièrement, avez-vous été
consultés par rapport au contenu de ce projet de loi? Il y a des
changements majeurs qui sont demandés par le gouvernement. Je pense, par
exemple, à la question de la capitalisation, à la question de la
structure interne. Est-ce que le gouvernement vous a consultés?
M. Bourassa: Depuis très à bonne heure en 1979,
jusqu'à mai 1980, nous avons été intimement
consultés et nous avons participé à la rédaction
d'un projet de loi.
M. Ciaccia: Est-ce à la rédaction du même
projet de loi que vous voyez ici aujourd'hui que vous avez participé ou
s'il y a des changements?
M. Bourassa: L'objet principal du changement dans le temps
était de nous enlever de l'illégalité étant
donné, d'après le vérificateur de la province, que nous
étions illégaux en faisant partie d'un groupe d'exploitation. Ce
changement est demeuré. Il y a eu d'autres changements qui ont
été apportés depuis le mois de juin et qui n'ont pas
été discutés à fond avec la direction de
SOQUEM.
M. Ciaccia: II y a des changements qui sont faits au conseil
d'administration; quelles seront les conséquences de ces changements
pour votre administration?
M. Bourassa: Est-ce que j'ai bien entendu? Vous dites "au conseil
d'administration"?
M. Ciaccia: Oui, au conseil d'administration, par exemple, et
aussi sur le contrôle, la régie interne par le gouvernement. Il y
a certains actes que vous ne pouvez pas poser sans le consentement du
gouvernement. Quelles en seront les conséquences?
M. Bourassa: Si vous me le permettez, M. le Président, je
vais répondre à la première question.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre demande la
parole.
M. Bérubé: Question de règlement. Les
questions sont vagues. Serait-il possible, par exemple, de préciser un
article et, à partir d'un article, de demander les implications
concrètes? Quelles sont les conséquences de ce projet de loi sur
la société, cela va peut-être nécessiter de la part
de M. Bourassa un long discours et il va brûler tous mes arguments pour
mon discours de deuxième lecture cet après-midi en Chambre. Je ne
le lui pardonnerais pas.
M. Ciaccia: Non, je ne pense pas avoir demandé...
M. Samson: Je vais vous en écrire un autre.
M. Ciaccia: ... les conséquences du projet de loi.
M. Bérubé: Qui? Vous allez l'écrire?
M. Samson: Oui, je vais vous en écrire un autre.
M. Bérubé: Je m'en méfierais comme du beau
diable!
M. Samson: Ce serait peut-être votre meilleur.
Le Président (M. Bordeleau): On pourrait peut-être
laisser M. Bourassa répondre à la question posée.
M. Bérubé: Je dois être
généralement très mauvais.
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Si vous me le permettez, M. le Président, je
vais répondre à ce que je crois être la première
question: Quelles seront les conséquences du remaniement du conseil
d'administration sur la société? Dans l'ancienne loi, le conseil
d'administration était formé de sept membres, dont trois
internes, les membres de la direction, et quatre externes, ce qui,
d'après nous, formait un groupe de travail plutôt que seulement un
groupe de prise de décision ou de ratification. En allant à neuf
membres ou à onze membres, le système va évidemment
être beaucoup plus lourd et, au niveau du conseil d'administration, je
suis autorisé de dire à cette commission que neuf membres
seraient un conseil qui se manierait très bien, qui pourrait participer
comme un groupe de travail comme nous l'avons toujours fait dans nos
décisions, mais onze membres, ce serait peut-être un peu lourd. On
croit que ce serait quelque chose qui se manierait. Toutefois, une des choses
que le conseil d'administration a jugé bon d'apporter, c'est qu'il y ait
deux types de membres au conseil d'administration: le président et
directeur général, c'est à l'article 14a, et, ensuite de
cela, il y a les administrateurs. (10 h 30)
Une des choses qui pourraient nous arriver avec l'article 15, qui
prévoit la nomination d'un président et d'un
vice-président du conseil parmi les six ou dix autres membres
mentionnés à l'article 14b, on croit que cela va être
quelque chose d'excessivement lourd avec lequel travailler. Le présent
conseil d'administration m'a demandé de vous recommander, s'il y avait
moyen, de scinder a) et b) de l'article 14 pour que ce soient les membres du
conseil d'administration qui élisent le président à
même tout le groupe plutôt que d'enlever le président de la
société et en faire un membre à part.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: J'ai une question supplémentaire, M. Bourassa.
Enfin, pour quelqu'un qui a été dans votre position comme
président, j'ai beaucoup de sympathie pour vous parce que je me rends
compte qu'avec l'augmentation du nombre des membres du conseil
d'administration, moi, je me demanderais à qui se rapporte le
président. Est-ce que le président se rapporte au
président du conseil? Est-ce qu'il se rapporte au ministre? Est-ce qu'il
doit parler au ministre par l'entremise du président du conseil
d'administration? En même temps, on lui impose de rentabiliser sa
compagnie et il va recevoir des instructions de différents domaines. Par
ailleurs, il s'agit de sujets hautement techniques dans ce genre d'affaires
à haute technologie, comme les mines, les décisions d'investir ou
de ne pas investir, les décisions doivent se prendre de mois en mois. Il
est donc évident qu'il faut avoir autour de la table des gens qui, non
seulement savent ce dont ils parlent, mais qui aient suivi également les
dossiers de très près. Avec l'agrandissement du conseil
d'administration, il y a un danger qu'on doive éventuellement former un
comité exécutif, ce qui va encore augmenter la lourdeur
administrative. Je me demande, M. Bourassa, si, avec tous ces
changements-là, vous vous sentez confortable et si, finalement, dans
votre relation avec le ministère, qui devrait être assez suivie,
du moins sur les objectifs à long terme et sur les discussions qui
pourraient impliquer le gouvernement, vous allez être assez
embarrassé pour respecter la norme de rentabilité telle que
fixée au début.
M. Bérubé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: II m'apparatt assez évident que
l'Opposition essaie d'utiliser le président de SOQUEM
présentement de manière à pouvoir l'opposer au
gouvernement. Je pense que c'est contraire à toute tradition
parlementaire, puisque cette société relève directement du
ministre de tutelle. Si vous avez des questions concernant le contenu, le sens
à donner à la loi, il est bien évident que c'est au
gouvernement qu'il faut s'adresser, au Conseil des ministres, qui a pris cette
décision-là et non pas à la société. Vous
pouvez demander les conséquences pratiques pour le conseil
d'administration, mais je m'opposerai formellement, M. le Président,
à ce qu'on essaie, de quelque façon que ce soit, d'amener le
conseil d'administration de SOQUEM, qui est présent ici pour
répondre aux questions factuelles d'information, à faire des
interventions à caractère politique, de manière à
pouvoir, éventuellement, faire la première page des journaux.
Je tiens à le souligner; je ne voulais pas faire de
procédure avec cette commission parlementaire, mais je pourrai en faire
facilement.
M. Fortier: M. le Président, je vais poser ma question au
ministre. Compte tenu de tous ces changements-là et, évidemment,
de la lourdeur qui va s'ensuivre, qui est le chef de l'exécutif et de
qui relève-t-il?
M. Bérubé: Ah! mais là, c'est très
clair. La loi...
M. Fortier: Ce n'est pas très clair.
M. Bérubé: ... est précise. Un conseil
d'administration administre les affaires de la société. C'est
très clair! Il est composé du président de la
société nommé par le gouvernement après
consultation des autres membres du conseil d'administration pour une
période d'au plus cinq ans et de six à dix autres membres
nommés par le gouvernement pour une période d'au plus deux ans.
En d'autres termes, le conseil d'administration administre les affaires de la
société-
gnies.
M. Fortier: À qui parle le président de la
compagnie? Parle-t-il au ministre ou au président du conseil
d'administration?
M. Bérubé: II parle au conseil d'administration. Je
pense que vous devez connaître le fonctionnement des lois en vigueur au
Québec. Le conseil d'administration administre la société,
d'une part. Le ministre responsable de la société répond
devant le Parlement des actions de la société. Il est donc la
courroie de transmission de l'information de la société au
Parlement, c'est la seule et unique fonction. Vous avez également le
ministre des Finances qui a un rôle spécifique en tant
qu'actionnaire de la société, qui peut, lors de
l'assemblée des actionnaires, poser toutes les questions et voir
à ce que ses intérêts soient bien défendus par le
conseil d'administration; vous avez dans le présent projet de loi, par
le biais de pouvoirs de directives concernant les orientations et les objectifs
de la société, la possibilité pour le gouvernement de
donner des orientations spécifiques. De telles orientations,
évidemment, doivent être déposées à
l'Assemblée nationale de manière qu'elles soient publiques.
Le pouvoir d'intervention politique dans une société
d'État est balisé d'une façon très précise
et il est très spécifiquement inscrit dans la loi. On ne vous
demande pas ce que vous imaginez, on vous demande de lire la loi.
M. Fortier: Je n'ai pas besoin de recevoir un cours de droit, je
sais fort bien qu'on se rapporte à un conseil d'administration.
Cependant, la question...
M. Béïubé: Parfait. Cela ne paraissait pasr
dans vos questions.
M. Fortier: J'ai déjà été
président de compagnie, je sais de quoi je parle.
M. Bérubé: Ah! je sais que vous êtes un
président de compagnie remarquable.
M. Fortier: De toute façon, la question est celle-ci:
Peut-être que c'est mon ignorance, je m'en excuse, mais y avait-il...
M. Bérubé: Sans doute.
M. Fortier: ... à venir jusqu'à maintenant, un
président du conseil d'administration? S'il n'y en avait pas, le
président jouait-il le rôle de président du conseil
d'administration? S'agit-il d'une personne additionnelle entre le ministre et
le président de la compagnie?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: Antérieurement, le
président du conseil d'administration était en même temps
le président de la société. Dans toutes les lois
constitutives de nos sociétés d'État, nous avons introduit
l'élection d'un membre du conseil d'administration au poste de
président du conseil d'administration, de manière à
faciliter les échanges entre les membres du conseil d'administration et
la direction. En d'autres termes, vous vous retrouvez avec quelqu'un qui
arbitre les réunions du conseil d'administration et nous avons, à
la lumière d'un certain nombre d'expériences, conclu que
c'était généralement là meilleure façon de
gérer nos sociétés d'État.
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais revenir sur la
question de règlement. On ne veut pas faire de procédure non
plus, mais je pense que ce que le député d'Outremont voulait
savoir des dirigeants, des représentants de SOQUEM, c'est quelles seront
les conséquences pour eux des changements au projet de loi. Il n'est pas
question de mettre une société en contradiction avec le
gouvernement; ces gens veulent savoir, face à ces changements
proposés par le gouvernement, quelles en seront les conséquences
pour l'administration actuelle.
M. Bérubé: Aucune objection à ce que la
société réponde à ces questions, dans la mesure
où elles ne sont pas conçues de manière à amener la
société à prendre position concernant les avis du
gouvernement.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, sur la question de
règlement, je pense que nous avons demandé et d'ailleurs nous
avons accepté que tous les députés, les membres de
l'Opposition et du parti ministériel puissent poser des questions aux
représentants de la société SOQUEM et de la
société SOQUIP. M. le Président, je trouve un peu
osée la façon dont le ministre aborde cette commission ce matin,
en ce sens qu'il semble vouloir avertir par-dessus la barre les
représentants des deux sociétés que nous avons devant nous
de ne pas répondre à certaines questions ou, encore, de le faire
dans le sens que le ministre aimerait vouloir le faire. M. le Président,
je vous souligne respectueusement qu'en tant que président de cette
commission - car c'est vous qui êtes le président et non le
ministre - sur la question de règlement suivante, c'est à vous
d'arbitrer, et que pour autant que nos interventions soient conformes à
notre règlement, c'est-à-dire qu'elles respectent l'esprit et la
lettre de notre règlement, nous n'avons pas à faire censurer
à l'avance nos questions par le ministre.
D'autre part, M. le Président, ces gens sont ici sur l'ordre de
la Chambre et non pas sur l'ordre du ministre. Chaque député peut
poser les questions qu'il veut, quitte aux représentants qui sont devant
nous d'y répondre ou de ne pas y répondre. On verra, à ce
moment-là, quelle sorte d'autres moyens nous pourrons utiliser. Je
voudrais avertir immédiatement le ministre que le genre d'attitude qu'il
vient de prendre est un genre d'attitude qui va absolument à l'encontre
de toutes les habitudes prises dans le passé. On n'avertit pas à
l'avance les gens qui sont de l'autre côté de la barre en disant:
II ne faudrait pas que ce soit à l'encontre des désirs du
gouvernement. Je regrette, M. le Président, mais on est là pour
étudier un projet de loi. On nous demande et on va demander à la
Chambre de se prononcer là-dessus. On ne va pas demander au ministre de
décider tout seul. S'il avait le pouvoir de décider seul, il
n'aurait probablement pas amené le projet de loi devant la Chambre.
C'est
parce qu'il faut que la Chambre se prononce qu'on a demandé que
les membres de la commission parlementaire puissent poser des questions. On
peut poser les questions qu'on veut - je le porte à votre attention, M.
le Président -et, autant que possible, ces questions seront objectives
et positives. Évidemment, autant que possible, on aimerait aussi
recevoir des réponses. S'il n'y a pas de réponses à nos
questions, c'est une chose, mais que le ministre dise à l'avance
à ces gens de ne pas répondre ou encore que le ministre leur
fasse signe par-dessus la barre qu'il n'acceptera pas leur point de vue ou bien
qu'ils feraient peut-être mieux de ne pas le donner, c'est, M. le
Président, de l'intimidation à quelqu'un qu'on fait venir
à la barre d'une commission parlementaire. Cela ne s'est jamais vu dans
notre droit parlementaire dans le passé.
Je le porte à votre attention, M. le Président et je vous
demande de nous donner une directive là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): II y a toujours quand
même une question de règlement, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce?
M. Scowen: Oui. Je veux simplement ajouter une très
brève question de règlement parce que je ne veux pas faire perdre
le temps de la commission dans cette affaire plus qu'il n'est
nécessaire.
Depuis deux ans, j'ai eu le plaisir de faire partie des commissions
parlementaires avec pas moins de six ou sept sociétés
d'État qui relevaient du ministre de l'Industrie et du Commerce, du
ministre des Finances ou du ministre des Affaires municipales. Je puis vous
dire, M. le Président, que ce matin, c'est la première fois,
selon mon expérience, que j'entends un ministre oser dire devant la
commission parlementaire ce qu'il permettra aux intervenants de dire et ce
qu'il les empêchera de dire. Je pense que ce que mon collègue vous
a dit tantôt est juste. Je suis entièrement d'accord avec lui et
j'espère que vous allez prendre la responsabilité de
décider si l'un ou l'autre des intervenants viole le règlement.
Mais, pour moi, cela ne relève pas du ministre de faire de telles
déclarations ici. M. Duplessis est mort.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Je voudrais
simplement rappeler aux membres de la commission, à la suite de cette
question de règlement, que je pense effectivement que les questions
peuvent être posées par n'importe quel membre de la commission ou
représentants des sociétés d'État. Étant
donné le mandat de la commission, je demanderais que ces questions
relèvent ou aient un rapport, au moins quelconque, avec les projets de
loi 1 et 2, étant donné que c'est le but de cette commission. Je
pense également que c'est à n'importe quel membre de la
commission de s'adresser aux personnes qui se présentent devant nous.
C'est le droit du ministre de faire les réflexions qu'il veut. Par
contre, cela n'empêche pas les gens des sociétés qui sont
devant nous de répondre aux questions des autres membres de la
commission.
M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, compte tenu de votre
décision, puis-je demander au président de la compagnie SOQUEM de
répondre à la question que je posais tout à l'heure,
à savoir dans quelle mesure les changements importants au niveau du
conseil d'administration, y inclus le fait que le conseil va être
élargi et le fait qu'à partir de maintenant, les permanents ne
feraient pas partie du conseil, du moins pas automatiquement, et compte tenu
des objectifs de rentabilité, dans quelle mesure ces changements
vont-ils affecter son administration ou la façon de faire les choses au
niveau de sa compagnie?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Les seules mesures sont l'introduction d'un conseil
de onze membres plutôt que sept, ou d'un président de conseil
d'administration externe. Cela n'empêchera pas SOQUÈM de
fonctionner, cela amène seulement des lourdeurs dans le processus de
décisions. Obligatoirement, je crois qu'on va être obligé
de former un comité exécutif. Le conseil, présentement,
d'après sa charte, est tenu d'avoir une assemblée par mois. Donc,
le conseil exécutif devrait en avoir au moins une à part celle du
conseil. Cela va seulement allonger les discussions.
En tant que président - vous me posiez la question tout à
l'heure - moi, je me rapporte et je continue à me rapporter au conseil
d'administration. (10 h 45)
M. Fortier: M. le Président, j'aurais une question
additionnelle. Jusqu'à maintenant, si je comprends bien - vous
m'excuserez, je n'ai pas suivi tout le dossier de SOQUEM depuis dix ans
-d'après l'information que j'ai, c'est une société qui
avait un conseil d'administration, qui fonctionnait bien, et les relations,
d'après ce que vous avez dit tout à l'heure, étaient assez
intimes. Le processus de décisions se faisait comme il doit se faire et
dans le meilleur intérêt des actionnaires.
La question additionnelle que je poserais au ministre, c'est: Pour
quelle raison faire ces modifications, alors que nous avons une
société d'État qui, d'après la déclaration
du président, semble bien fonctionner? Normalement, on fait les
modifications lorsqu'il est nécessaire d'en faire. Est-ce qu'il y a des
raisons importantes pour faire ces modifications? Est-ce que c'est juste par
désir d'uniformisation ou s'il y a des raisons sérieuses pour
faire des modifications qui pourraient empêcher la société
d'atteindre son objectif de rentabilité?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: II n'y a pas de problème,
puisqu'il s'agit effectivement de l'esprit de la loi, et je pense qu'on peut
répondre à cette question sans difficulté. D'une part,
étant donné que la loi de SOQUEM n'avait pas été
remaniée depuis longtemps, à la demande même de la
société il nous a été proposé qu'on effectue
une refonte de la loi de SOQUEM, ce que nous avons accepté.
De plus, nous avons dû constater au gouvernement que nos lois de
sociétés d'État étaient très diverses. En
d'autres termes, elles ont été rédigées un peu
suivant les vues du ministre de l'époque et nous n'avons pas un seul
conseil d'administration souvent formé de la même
façon.
Les lois elles-mêmes sont très différentes. Quand
cela arrive au Conseil des ministres, on ne sait jamais trop comment expliquer
qu'une société fonctionne d'une façon, alors qu'une autre
fonctionne d'une autre. Il a donc été entendu que nous ferions un
moule uniforme pour nos sociétés d'État en calquant, quant
a leur fonctionnement, la Loi des compagnies et les mécanismes de
fonctionnement du secteur privé.
C'est pour cette raison que nous avons décidé d'introduire
un certain nombre de changements, comme la présidence du conseil
d'administration, qui soit différente de la direction. Une des raisons -
elle est relativement facile à comprendre - c'est qu'il peut arriver,
à un moment ou l'autre, qu'un conseil d'administration ne partage pas
nécessairement les vues du PDG. Cela ne s'est pas vu à SOQUEM,
mais cela s'est vu dans d'autres sociétés. Le cas
échéant, le conseil d'administration n'a plus aucune voix pour
communiquer au gouvernement sa réflexion concernant la
société, à moins de tenir une séance du conseil
d'administration un peu illégale, dans la mesure où le
président ne la convoque pas, de faire le point sur la situation de la
société et, éventuellement, de tenter d'avoir accès
au ministre de tutelle pour le mettre au courant directement en travaillant
à l'insu du président de la société. De telles
situations se sont produites à plusieurs reprises dans le passé.
L'ancienne administration libérale l'avait vécu d'ailleurs, nous
l'avons vécu également. Ce qui nous a amenés à
prendre la décision que, désormais, dans nos
sociétés d'État, il y aurait d'une façon
générale, un président du conseil distinct du PDG, de
telle sorte qu'on puisse toujours maintenir au moins deux canaux. Nous avons
commencé cette première transformation lorsque nous avons
amendé la Loi sur l'Hydro-Québec en particulier où nous
avons introduit la notion de président du conseil d'administration. Elle
s'est généralisée, subséquemment, à à
peu près toutes les sociétés. La Société
nationale de l'amiante fonctionne selon ce principe. Au fur et à mesure
que nous reprenons les lois de nos sociétés, nous ramenons le
principe de fonctionnement de ces dernières sur la base de ce qui est
connu dans la Loi des compagnies. C'est une des raisons pour lesquelles le
gouvernement a voulu agir.
La deuxième raison plus spécifique à SOQUEM est
liée au fait que SOQUEM grandit rapidement. SOQUEM va gérer des
actifs beaucoup plus importants et on peut continuer à maintenir une
gestion que je pourrais qualifier de familiale, mais on pourrait aussi vouloir
gérer, éventuellement, SOQUEM comme sont gérées la
plupart des entreprises dans le secteur privé. Dans une loi d'une des
sociétés d'État, la Société de cartographie,
où récemment nous devions apporter des amendements, nous avons
décidé de ne pas modifier la structure du conseil
d'administration, parce qu'il s'agit d'une petite société et
qu'il y a là également avantage à maintenir un petit
conseil d'administration de cinq membres qui gère l'entreprise - je ne
dirais pas à la bonne franquette - sur une base assez familiale, assez
intime. Mais lorsqu'une société grossit rapidement - on peut
envisager le jour où SOQUEM aura peut-être un ordre de
$500,000,000 d'actifs entre les mains - il est normal que l'actionnaire qui
représente la collectivité québécoise, soit
assuré que le contrôle sur le fonctionnement quotidien de la
société soit peut-être un peu plus serré et, par
conséquent, qu'on adopte les règles que la tradition a voulu
instaurer en général dans le secteur privé, dans toutes
les entreprises d'une taille le moindrement importante.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je trouve que l'argument de l'uniformisation est
malheureux; dans le secteur privé, bien sûr, on essaie d'adapter
chaque conseil d'administration aux besoins de chaque société. La
question que je voulais poser au ministre est celle-ci. Il désire, dans
une certaine mesure, que cette société, comme toutes les autres
sociétés d'État, fonctionne sur un objectif de
rentabilité. On reviendra tout à l'heure sur les critères
de rentabilité.
Lorsqu'on passe à l'article 21, justement à cause de la
lourdeur qu'on veut ajouter au niveau du conseil d'administration, je me
demande dans quelle mesure il désire réellement que la
société puisse être rentable. On lit: "La
Société ne peut sans l'autorisation préalable du
gouvernement: - il y a différentes choses ici - d) acquérir ou
détenir des actions ou des biens d'une entreprise dans une proportion
suffisante pour lui en assurer le contrôle." Là, on peut se
demander ce qu'est le contrôle. On sait qu'on peut prendre le
contrôle avec moins de 51%. Mais surtout au paragraphe e), on dit:
"adopter des règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et sa
régie interne." Voilà maintenant que le gouvernement va approuver
des règlements de régie interne; cela me semble aller loin dans
l'intervention gouvernementale alors qu'on désire que le
président puisse diriger sa compagnie avec un objectif de
rentabilité. J'aimerais poser la question au ministre: Est-ce qu'il y
voit une contradiction? Moi, j'en vois une. À ce moment-là,
pourquoi intervenir au niveau de la régie interne?
M. Bérubé: D'une part, concernant plus de
contrôle, effectivement, notre intention est de déinir clairement
- mais là, évidemment, nous ne sommes pas en commission
parlementaire pour l'étude article par article - que ce soit un
contrôle à plus de 50%; en d'autres termes, il s'agit d'un
contrôle effectif majoritaire de la société, comme
amendement.
L'intention du gouvernement, au paragraphe e), est de faire en sorte que
le règlement de régie interne de la société, qui
définit les partages de juridiction, par exemple, entre le
président du conseil et le président de la société,
et qui est aussi fondamental, fasse l'objet, évidemment, de
l'approbation du gouvernement. Toutefois, tous les règlements qu'une
société peut adopter ou les procédures de régie
interne devraient être purement du ressort de la société.
Donc, notre intention est d'apporter également un amendement à
cet article de manière à bien spécifier qu'il s'agit du
règlement de régie interne.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais poser une question sur un projet
spécifique. C'est malheureux - je
suis d'accord avec mes collègues - que le ministre ait
essayé d'intimider les représentants; j'espère que ce
n'était pas son intention.
M. Bérubé: J'ai essayé d'intimider
l'Opposition.
M. Samson: Même le règlement ne vous permet pas
cela.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre,
messieurs!
M. Ciaccia: J'espère que les représentants de
SOQUEM vont se sentir tout à fait à l'aise de répondre aux
questions qui leur seront posées par les membres de l'Opposition. Je
crois que c'est vraiment la seule façon d'essayer d'avoir des
informations et de maintenir un certain contrôle du public sur ces
sociétés d'État. Si le ministre n'est pas d'accord avec ce
que disent les représentants, il nous le dira.
Je voudrais poser une autre question. Dans le rapport annuel, vous
parlez du projet Dauphin et des mines Seleine. Avez-vous fait une étude
de rentabilité? Est-ce que, d'après vos études, ce
projet... Quels critères avez-vous utilisés? Est-ce un projet
rentable? Pouvez-vous nous donner des informations sur la rentabilité de
ce projet?
M. Bourassa: Effectivement, au mois de mai 1979, nous terminions
l'étude de rentabilité du projet Dauphin pour les mines Seleine.
La rentabilité du projet a été prouvée surtout sur
la base que les réserves de sel étaient prouvées pour 26
ans et indiquées pour plus de 60 ans. Une fois les installations
payées, on avait à notre portée du sel, du chlorure de
sodium pour aller dans l'industrie chimique, dans le sel de
déglaçage. Notre étude de rentabilité prouvait que
le projet rencontrait nos normes de rentabilité.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que cette étude de rentabilité
était basée sur un contrat, impliquant, mettons, un monopole avec
le gouvernement ou est-ce que c'est une étude de rentabilité
basée sur le libre marché au Québec et au Canada?
M. Bourassa: L'étude de rentabilité était
basée sur le libre marché au Québec et dans la partie est
du Canada. La partie ouest du Canada, étant donné que c'est
beaucoup plus loin, nous n'étions pas capables de la
pénétrer.
M. Ciaccia: Alors, il n'est pas question d'avoir un contrat avec
le gouvernement où tous les approvisionnements du gouvernement vont
provenir de cette mine?
M. Bourassa: Présentement, nous n'en avons pas.
M. Ciaccia: Combien d'emplois seront créés par ce
projet?
M. Bourassa: Aux Iles-de-la-Madeleine mêmes, il va y avoir
125 emplois.
M. Ciaccia: Et le coût total du projet serait?
M. Bourassa: $65,400,000.
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ... je me permettrais uniquement un
commentaire a cet égard. Il est parfaitement exact que SOQUEM ne
détient pas un contrat d'exclusivité, d'une part, avec les
municipalités, puisque la loi ne le permet pas, et, d'autre part, non
plus avec le ministère des Transports concernant la vente de sel.
Cependant, je pense qu'il faut le souligner, il est bien évident que la
politique d'achat du Québec s'applique dans le cas de SOQUEM, ce qui,
évidemment, donne à Seleine un avantage par rapport à ses
concurrents puisque la politique d'achat consiste, dans le cas d'un contenu
proprement québécois, à accorder une marge à
l'avantage de la société d'environ 10% dans ses soumissions de
prix. C'est l'avantage dont bénéficie la société,
mais soulignons, cependant, que c'est également un avantage dont
bénéficient toutes les entreprises québécoises et
non pas SOQUEM en particulier.
Le Président (M. Bordeleau): Je reconnaîtrai le
député de Lotbinière et, après, M. le
député d'Outremont.
M. Biron: Sur le même sujet, lorsque vous avez fait votre
étude de rentabilité sur la mine Seleine, on devait obtenir de la
part du ministère de l'Expansion économique régionale
d'Ottawa une subvention. On sait que, depuis ce temps, pour des raisons
politiques, la subvention a été ou annulée par le nouveau
ministre du MEER. Est-ce que cela change quelque chose dans l'étude de
rentabilité maintenant qu'on n'obtient plus de subvention du MEER?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa. M. Bourassa:
D'accord.
M. Bérubé: C'est un peu politique.
J'appliquerais pratiquement le même argument à mon
distingué collègue que celui que j'appliquais à
l'Opposition tantôt.
M. Samson: Laissez-le faire! Le gouvernement est rendu qu'il ne
laisse même pas ses membres libres.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Rouyn-Noranda, je vous ferais simplement remarquer que tous les membres de la
commission, y compris le ministre, sont libres de poser les questions qu'ils
veulent et de faire les affirmations qu'ils veulent.
M. Samson: Vous n'avez pas compris que le ministre est en train
de mettre en boîte son propre collègue.
M. Biron: Bien non. C'est de l'argent qui devait nous revenir de
la part du fédéral et qui ne nous est pas revenu. De l'argent qui
s'en va ailleurs dans les autres provinces.
M. Samson: Voyons.
M. Ciaccia: On veut que nos sociétés soient
rentables.
Le Président (M. Bordeleau): Messieurs, à ma
connaissance, j'avais accordé la parole à M. le
député de Lotbinière et je pense que M. Bourassa veut
répondre.
M. Bourassa: M. le Président, pour répondre
à la question, évidemment, l'automne dernier, après que le
ministère de l'Expansion économique régionale eut fait
lui-même, avec le ministère de l'Industrie et du Commerce du
Québec, l'évaluation des infrastructures qui seraient aptes
à être payées, l'évaluation qu'ils avaient faite
était de $17,000,000. Notre évaluation était un peu
moindre dans notre étude de rentabilité. À la suite de la
déclaration de M. de Bané aux Îles-de-la-Madeleine, le 8
juin dernier, il a fallu resserrer nos cordons et nous avons entrepris,
à partir du mois de juillet, des études des méthodes pour
couper tous les coûts possibles et imaginables pour encore être
capables de rencontrer notre rentabilité avec une subvention beaucoup
moindre qui est présentement de $10,000,000. (11 heures)
M. Fortier: J'aurais une question...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ... supplémentaire sur ce point de
rentabilité. Si je comprends bien les opérations de la compagnie,
on y retrouve l'exploration, bien sûr, ensuite la mise en valeur de
l'exploitation. Si on laisse de côté l'exploration, et dans la
réalisation de ses objectifs, la société dit qu'ici, la
loi doit avoir un objectif de rentabilité. Ma première question
est celle-ci: Est-ce que, pour la mise en valeur de l'exploitation, vous devez,
au niveau de la régie interne, avoir un objectif? Si cet objectif - je
ne sais pas avant impôt, quoique vous ne payiez pas d'impôt - mais
avant impôt, il pourrait être certainement en haut de 15%,
s'agit-il justement d'un objectif de rentabilité qui serait
agréé avec le gouvernement de telle façon que, lorsque
vous jugez d'un projet, comme le fait l'entreprise privée, si vous
êtes soumis aux mêmes normes, si un projet ne devient pas rentable
ou s'il ne répond pas à cet objectif, à ce
moment-là, votre compagnie serait-elle libre d'accepter ou de ne pas
accepter le projet?
Il y a une sous-question à cette première question. Si on
revient au projet de sel, bien sûr, un projet comme celui-là peut
être rentable si de tierces personnes paient les infrastructures, mais si
la compagnie SOQUEM est appelée à payer les infrastructures,
j'imagine que la rentabilité va diminuer considérablement, et,
à ce moment-là, est-ce que ce projet va répondre aux
normes de régie interne que vous aviez adoptées ou qui ont
été agréées avec le gouvernement?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Premièrement, dans notre plan de
développement, nous prévoyons une rentabilité et un
chiffre a été mis là, il a été soumis au
gouvernement. Notre plan de développement a été
accepté par le gouvernement. Je ne crois pas qu'il serait dans
l'intérêt public de dévoiler ce chiffres.
Au niveau de la mine de sel, il est évident que nous avons pris
la même attitude que toute entreprise privée qui s'installerait
à Cacouna ou à Montréal et qui dispose de toutes les
infrastructures disponibles. C'est pour ça que le ministère de
l'Expansion économique régionale a été
créé, c'est pour mettre ces infrastructures à des endroits
défavorisés.
Autant que nous sommes concernés, nous ne prévoyons pas
présentement être obligés de mettre plus d'argent de
SOQUEM, étant donné que nous avons eu du gouvernement
l'autorisation d'une subvention de $10,000,000, mais nous espérions
avoir $17,000,000. Il est bien évident qu'il va falloir faire des
coupures ailleurs, ce que l'on a commencé au mois de juillet de cette
année et, jusqu'à maintenant, on a certainement sauvé 50%
de cet excédent.
M. Fortier: Si je comprends bien votre réponse...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ... compte tenu de la non-contribution du
gouvernement fédéral, le projet ne satisfait pas à la
norme de rentabilité que vous vous êtes fixée.
M. Bourassa: Je ne croyais pas avoir répondu ça, M.
Fortier.
M. Fortier: Non?
M. Samson: J'avais compris la même chose.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: M. le Président, je voudrais poser une question
à M. Bourassa. Dans le projet de loi que nous allons étudier, on
retrouve des amendements qui vous permettront directement à l'avenir de
faire de l'exploitation et de faire de la transformation de substances
minérales, ce qui est évidemment différent de l'ancienne
loi, en ce sens que, dans l'ancienne loi, il vous était permis de faire
de l'exploration, de participer à la mise en valeur des
découvertes, y compris celles faites par d'autres, avec
possibilité d'acheter et de vendre des propriétés à
divers stades de développement et s'associer à d'autres pour ces
fins, ainsi que de participer à la mise en exploitation des gisements,
soit en les vendant, soit en prenant une participation contre des valeurs, des
propriétés transmises.
Ma question est la suivante: Évidemment c'est nouveau, mais
ça me semble être une orientation passablement élargie du
mandat que vous aviez dans le passé. Quelles sont, au point de vue du
conseil d'administration de SOQUEM, les raisons principales qui vous
amènent à demander ces élargissements à la loi
actuelle?
M. Bourassa: Premièrement, nous avions deux cas avec la
compagnie Louvem à Val-d'Or, dont SOQUEM détient 100% des
actions, à la suite d'une entente avec le groupe minier
Brossard. Dans l'ancienne loi, nous n'avions pas le droit d'être
des exploitants. Il fallait s'associer Vous vous souviendrez, M. Samson, en
1970-1971, des débats avec le groupe minier Brossard. Cela s'est
finalement conclu par un règlement hors cour. C'était une place
où nous étions dans l'illégalité
d'après> la loi. L'autre place, c'était avec les
mines de sel. Dans le dépôt où nous travaillons, on avait
indiqué au-delà de soixante ans de réserve. Si on
était allé s'associer avec quelqu'un d'autre, la
rentabilité n'aurait pas été là, parce
qu'automatiquement toute l'entreprise serait devenue imposable.
M. Samson: Évidemment, par cette loi, on demande
d'augmenter le capital-actions de $36,000,000. Dois-je comprendre que vous
auriez, en plus des deux mines que vous venez de mentionner, d'autres projets
où il y aurait à faire de l'exploitation et peut-être
même des projets de transformation? Il me semble que vous ne vous
êtes pas approchés trop de la transformation jusqu'à
maintenant.
M. Bourassa: Non, on ne s'en est pas approché pour des
raisons bien spécifiques, c'est parce que les usines de transformation
existaient ici au Québec. Dans certains cas, certaines usines de
transformation n'existent pas au Québec ni au Canada, par exemple dans
le niobium. On sort à Niobec, à Saint-Honoré, 6,000,000 de
livres de concentré de niobium. On aurait présentement un
marché de 2,000,000 de ces 6,000,000 de livres qui pourraient aller, si
on pouvait transformer notre concentré en oxyde pur. Cela ne se fait pas
au Canada. La seule place où cela se fait au monde, c'est au
Brésil. D'après l'ancienne loi, on ne pourrait pas faire cela.
Avec des études qu'on fait depuis deux ans avec le Centre de recherche
minérale et une firme de l'Ontario, nous venons de trouver un
procédé pour aller à l'oxyde pur. Évidemment,
n'ayant pas d'usine de transformation en Amérique du Nord, on croit que
ce serait aussi rentable que ce soit nous qui le fassions que de vendre cette
technologie qu'on a prise à d'autres.
M. Samson: Est-il vrai que SOQUEM envisage la possibilité
d'aller aussi dans la transformation du minerai d'or?
M. Bourassa: On envisage la possibilité d'aller dans la
transformation de l'or...
M. Samson: De l'or.
M. Bourassa: ... pas du minerai. On fait présentement la
récupération. On peut aller jusqu'à une finesse de 800
dans nos usines à cyanure. Mais pour aller à une finesse
commerciale de 99,99, il faut envoyer cela soit à Toronto ou à
Ottawa. Avant que nous ayons une production de 200,000 onces, ce ne serait pas
économique de le faire ici, mais, pour une production d'au-delà
de 200,000 onces par année, ce serait plus économique que nous le
fassions ici plutôt que de l'envoyer à l'extérieur.
M. Samson: Dois-je conclure que le présent projet de loi
pourrait, advenant que la société envisage cette forme de
transformation, vous faciliter la tâche pour en arriver à
cela?
Autrement dit, est-ce que cela pourrait aller jusqu'à une usine
de transformation qui serait une affinerie d'or à 99,99% dans la
région de l'Abitibi-Témiscamingue?
M. Bourassa: Cela pourrait y aller, M. Samson, mais cela me
surprendrait beaucoup, parce que, pour tout ce qui touche l'or
présentement, nous croyons que nous sommes mieux d'emprunter cet argent
à 100% plutôt que d'aller emprunter pour du cuivre ou du zinc dont
le marché fluctue. Chaque mois l'or semble monter. La rentabilité
de l'or est un peu exceptionnelle. On serait mieux d'emprunter tout le montant
et le garder pour de l'exploration ou de la mise en exploitation des gisements
de sulfure, des métaux usuels.
M. Samson: Autrement dit, votre déclaration récente
dans le sens qu'il y aurait une possibilité d'ouverture d'une affinerie
d'or dans la région du Nord-Ouest, vers les années quatre-vingt,
c'est bien...
M. Bourassa: Dans les années quatre-vingt.
M. Samson: C'est-à-dire dans les années
quatre-vingt. C'est bien cela. Etait-ce une déclaration à titre
exploratoire ou s'il y a quelque chose de...
M. Bourassa: C'est une déclaration... M. Samson:
...fondé à la société?
M. Bourassa: ...bien fondée qui a été
discutée avec le conseil d'administration de SOQUEM.
M. Samson: Vous avez l'intention, effectivement, de construire
une raffinerie d'or...
M. Bourassa: C'est ça.
M. Samson: ...dans cette région?
M. Bourassa: Oui.
M. Samson: Vous avez aussi l'intention, si je comprends bien,
d'aller davantage dans l'exploitation, en ce sens que vous envisageriez un
nouveau projet à Montauban, un projet à Rouyn-Merger qui est
l'ancienne McWaters et à Chimo à 20 milles à l'est de
Louvem. C'est bien ça?
M. Bourassa: C'est ça.
M. Samson: Ce projet de loi, en élargissant votre mandat,
en vous permettant de faire de l'exploration et de la transformation,
permettrait ces choses-là qui sont déjà annoncées.
Si je comprends bien, les annonces qui ont été faites sont
valides?
M. Bourassa: Les annonces...
M. Samson: Cela n'a pas été mal rapporté par
la presse?
M. Bourassa: Je ne voudrais pas dire ça parce que les
journalistes m'en voudraient, mais vous avez...
M. Samson: Non, non. On comprendrait, vous savez, parce que
ça nous arrive aussi de ne pas toujours être bien
rapportés.
M. Bourassa: ...dans le dépliant qu'on vous a remis, un
texte de ce que j'ai dit à Val-d'Or.
M. Samson: Malheureusement, on vient de l'avoir.
M. Bourassa: Oui, d'accord. Ce n'était pas notre intention
de vous envahir de papiers, mais, dans mon texte, il est mentionné que,
dans les années quatre-vingt, nous croyons fermement que le
marché sera assez bon pour que nous puissions ouvrir six mines d'or.
M. Samson: En plus de l'affinerie?
M. Bourassa: C'est après. L'affinerie, il faut que ce soit
après.
M. Samson: L'affinerie viendrait après. Ce sont les six
mines d'or...
M. Bourassa: II faut de l'or pour l'affiner. M. Samson:
...qui justifient votre affinerie. M. Bourassa: C'est ça.
M. Samson: Quels seraient les autres coins? On en a trois de
mentionnés.
M. Bourassa: Je ne crois pas que ce serait dans
l'intérêt public de les dévoiler.
M. Samson: C'est le genre de réponse qu'un ministre nous
donne généralement.
M. Bérubé: C'est entendu! M. Samson: Je
n'insiste pas. M. Fontaine: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui. Est-ce vraiment sur le
même sujet, M. le député de Nicolet-Yamaska?
M. Fontaine: Oui, sur le même sujet. On parle de la
rentabilité des mines d'or éventuellement. Dans votre discours,
vous mentionnez effectivement que vous aviez l'intention de développer
au moins six mines d'or dans les années quatre-vingt. Je voudrais
également vous citer un autre passage de votre discours. Vous disiez:
"Je m'aventurerai donc, en compagnie de mes collègues de la direction
à SOQUEM et de nombreux analystes, à croire à
l'irrésistible montée du cours du métal jaune dans les
mois et les années à venir, croyant qu'au début de
l'année 1981, l'or devrait atteindre $1000 l'once." Je pense que c'est
important pour la question de la rentabilité. Actuellement, l'or semble
plutôt se stabiliser aux environs de $630 américains. Pouvez-yous
nous dire sur quoi vous vous basez pour dire que vous prévoyez que l'or
va continuer à augmenter dans les mois et années à venir,
pour rentabiliser votre affaire, votre développement des mines d'or?
M. Bourassa: Sur quoi je me suis basé?
Premièrement, $630 américains, cela veut dire $750 canadiens et
les $1000 que j'ai mentionnés sont $1000 canadiens parce que nous
travaillons tous en dollars canadiens - on paie en dollars canadiens et on est
payé en dollars canadiens -ce qui nous donne un prix de $830
américains. On croit qu'avec les nouveaux prix du pétrole qui
s'en viennent de plus en plus élevés au cours du commencement,
dans le premier quartier de 1981, le prix de l'or va aller à $1000,
mais, dans mon discours, je n'ai aucunement dit que notre rentabilité
était basée sur $1000 l'once. Je ne crois pas que ce soit ce qui
est mentionné la.
M. Fontaine: Non, mais je croyais que vos prévisions
allaient dans le sens de dire: Si on veut devenir rentable à ce niveau,
il faut prévoir que le prix de l'or montera à $1000. Ce n'est pas
ça du tout?
M. Bourassa: Non, ce n'est pas ça. Oh, non, pas du
tout!
Maintenant, M. le Président, si vous me le permettez...
Le Président (M. Bortteleau): Oui, M. Bourassa. (11 h
15)
M. Bourassa: ...j'ai oublié une partie de la question de
M. Samson. Vous mentionnez Montauban. Nous sommes en coparticipation avec
l'entreprise privée, 50-50.
M. Samson: Je mentionnais Montauban, parce que cela faisait
référence à votre déclaration à Val-d'Or et
c'était rapporté par le journal. Il disait ceci: "Par ailleurs,
la société SOQUEM entend mettre en opération deux
nouvelles mines d'or: une première en 1981 et une deuxième en
1982. Actuellement, SOQUEM étudie trois projets, soit Montauban,
à proximité de Québec, Rouyn-Merger et Chimo, à
vingt milles à l'est de Louvem. C'était pour vérifier avec
vous si on avait bien rapporté vos paroles.
M. Bourassa: Oui, d'accord. Mais je voulais souligner que, dans
un de ces trois-là, Montauban, nous sommes avec...
M. Samson: Vous êtes déjà là.
M. Bourassa: Oui, on est associé avec une compagnie qui
nous a demandé de gérer.
M. Samson: Le projet que vous étudiez pour l'avenir,
à Montauban, c'est dans le cadre de l'actuel projet.
M. Bourassa: Oui, c'est cela.
M. Samson: C'est ce que vous faites actuellement, mais
élargi.
M. Bourassa: Sauf que dans le projet actuel, présentement,
selon la loi, on n'aurait même pas le droit d'être les
gérants ou les exploitants de la mine, surtout dans le troisième
objet: c'est s'associer avec d'autres, soit en vendant ou en gardant un
intérêt dedans. Mais cela ne prévoit aucunement la
gérance ou l'exploitation elle-
même.
M. Samson: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Avant de donner la parole
à qui que ce soit - il y a eu plusieurs demandes - je voudrais
simplement rappeler aux membres de la commission que, sans avoir d'objections
à ce que vous posiez les questions que vous voulez, le temps file et il
va falloir que la commission ajourne ses travaux. Je voudrais, autant que
possible, que vos questions se rapportent aux projets de loi no 1 et no 2.
M. Scowen a demandé la parole. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, est-ce que cela tient toujours?
M. Scowen: Oui, j'ai une question mais avec deux conditions. La
première, c'est que vous continuiez sur SOQUEM, et deuxièmement,
que les deux intervenants principaux de notre côté n'aient pas
d'autres questions à poser.
M. Fortier: J'en ai plusieurs.
M. Scowen: Alors, je pense que je vais laisser la parole à
mon collègue et s'il reste du temps après, je vais poser ma
question.
Le Président (M. Bordeleau): À moins que M. le
ministre me demande la parole aussi.
M. Bérubé: C'est simplemement pour expliquer
clairement que, dans l'ancienne loi, SOQUEM pouvait faire de l'exploration
seule. Mais telle que rédigée, il était ainsi
inévitable que dès qu'il y avait découverte, SOQUEM ne
pouvait que participer à l'exploitation, donc devait se trouver un
partenaire. Lorsque vous êtes forcés de vendre, c'est
évidemment beaucoup plus difficile que lorsque vous avez une marge de
manoeuvre. En d'autres termes, à partir du moment où SOQUEM se
voyait contrainte par la loi de céder une partie de sa
propriété, on s'attirait des conditions de marchandage qui
étaient malheureusement peu intéressantes. Il n'en reste pas
moins que dans la plupart des projets de SOQUEM, SOQUEM est associée.
Mais SOQUEM est associée dès le départ au niveau de
l'exploration ou au niveau de la mise en valeur et il m'apparaît assez
évident qu'à partir du moment où vous avez fait une
découverte, c'est à ce moment que ça devient
véritablement rentable et que vous vous repayiez la majeure partie de
vos dépenses d'exploration, non pas pour ce projet, mais pour tous les
autres projets d'exploration qui ont conduit à des échecs; c'est
à ce moment qu'il devient intéressant, évidemment, de
retirer tout l'usufruit. C'est pour cette raison que nous amendons la loi de
manière à donner une marge de manoeuvre à SOQUEM.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, il y a trois sujets qu'il
faudrait bien discuter avant de clore le débat là-dessus.
Première des choses, il y a tous les besoins financiers de la compagnie;
la deuxième des choses, le plan à long terme de la compagnie et,
en relation avec cela, la participation du secteur privé dans
l'exploration minière.
Pour attaquer le sujet sur les besoins financiers, on nous demande'
d'approuver maintenant... Le capital-actions passe de $89,000,000 à
$125,000,000. D'après l'information que j'ai, il y a $62,500,000 qui ont
été souscrits. Il y en a $45,000,000 de payés.
La première question que j'aurais pour M. Bourassa est celle-ci:
Est-ce que c'est SOQUEM qui a demandé que le capital-actions soit
augmenté? Est-ce qu'elle a besoin de cet argent? Dans le secteur
privé, bien sûr, ce qu'on fait normalement, c'est qu'on
présente aux actionnaires un plan d'action à long terme. Ensuite,
on justifie l'augmentation du capital-actions. Ici, on ne nous a donné
à peu près aucune information. On nous demande d'augmenter le
capital-actions de $36,000,000. J'aimerais bien savoir, de la part de SOQUEM,
si, réellement, elle a besoin de ces $36,000,000 additionnels. Est-ce
qu'elle peut se financer ailleurs? Est-ce qu'elle peut faire des emprunts
à la banque? Sinon, quel est le but de cette augmentation
théorique, étant donné qu'on n'a pas étudié
tout le capital-actions qui est possible?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Le capital-actions possible dans la loi se termine
ce mois-ci, le 31 décembre 1980. Il va tout être versé. Il
nous reste environ $7,000,000 - $7,200,000 ou $8,200,000 - à recevoir de
l'actionnaire dans le mois de décembre.
M. Fortier: Des $89,000,000?
M. Bourassa: Des $89,000,000, oui. Si vous regardez notre rapport
trimestriel au 30 septembre.
M. Fortier: Je vous fais confiance là-dessus.
M. Bourassa: Notre rapport trimestriel au 31 décembre va
montrer que les $89,000,000 sont entièrement versés.
M. Fortier: Ma question porte surtout sur l'augmentation.
Avez-vous fait des profits? Ne pouvez-vous pas financer vos opérations
à même les profits que vous faites dans le moment?
M. Bourassa: Présentement... M. Fortier: Non?
M. Bourassa: ...avec les projets que nous avons en cours, nous
prévoyons être capables de financer la majorité de nos
travaux d'exploration à $6,000,000 par année, de mise en valeur
à $3,000,000 par année et de mise en exploitation seuls ou avec
des partenaires. Mais ce qu'on essayait de prévoir, c'était un
cas ou deux cas de gisements que nous avons présentement. On en a un
dans le vanadium et on en a un autre dans le niobium et le tantale où
l'investissement sera de beaucoup supérieur à celui d'une mine
d'or ou d'une mine de métaux usuels. Nous essayons de prévoir
qu'il faudrait, si la rentabilité n'est pas de 40% ou 50% comme dans une
mine d'or, prouver aux financiers que nous mettons de l'équité
dedans, soit 50-50 dette-équité ou 60-40 dette
équité, plutôt que d'aller tout emprunter
auprès des financiers.
M. Fortier: Si je comprends bien votre réponse,
l'augmentation de capital vient d'une demande de votre conseil
d'administration. L'autre question que j'avais et que j'ai posée
était celle-ci. Comme je le disais, dans le secteur privé, on
justifie aux actionnaires l'augmentation de capital dont on a besoin. Ici, je
n'ai pas encore vu de documents de stratégie à long terme qui
auraient défini justement la stratégie que vous allez suivre, y
inclus la stratégie que vous allez suivre vis-à-vis du secteur
privé. Est-ce qu'un tel document a été soumis au ministre?
Est-ce qu'il va être rendu public? Quel est-il? Quelles sont les grandes
lignes de ce plan-là?
M. Bérubé: À nouveau, je vais intervenir
puisqu'il s'agit carrément d'une question politique...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: ...liant directement la
société d'État et le gouvernement. Effectivement, nous
avons un plan de développement déposé par SOQUEM,
même si la société n'était pas, comme telle, tenue
par loi de nous en déposer un, à ma connaissance, mais elle le
sera avec les amendements tels qu'ils sont déposés ici. Nous
avons un plan de développement de SOQUEM. SOQUEM est d'ailleurs la
première société gouvernementale à déposer
des plans de développement. Une des difficultés que nous avons
avec ces plans de développement, c'est que, d'une part, s'ils sont trop
précis, ils pourraient donner à des concurrents éventuels
l'information nécessaire fort utile soit pour contrer l'action de
SOQUEM, soit profiter de certaines informations privilégiées qu'a
la société. Donc, trop détaillés, s'ils
étaient publiés, cela pourrait être dangereux. Par contre,
s'ils étaient trop généraux, évidemment, on
pourrait se plaindre qu'on n'a pas vraiment l'information.
Alors, on va essayer de jouer entre les deux, c'est-à-dire qu'on
va essayer de donner assez d'information en rendant public le plan de
développement de SOQUEM de manière qu'on ait quand même une
idée de l'objectif de la société sans peut-être
s'engager dans une description trop détaillée des projets
spécifiques.
M. Fortier: Mon intervention, M. le ministre, là-dessus,
était celle-ci. Je pense que les contribuables - enfin, les
députés sont les élus du peuple, on représente les
contribuables - les compagnies et les individus qui financent ces
investissements ont le droit de connaître l'objectif, à long
terme, de SOQUEM et ont le droit de connaître ce qui est
réservé au secteur privé. M. Bourassa, dans une
conférence qu'il a présentée à l'Association des
prospecteurs du Québec le 20 novembre dernier, a justement
déclaré - c'était une déclaration d'intention
-vouloir associer le secteur privé et jouer un rôle de catalyseur
dans certains domaines. Il me semble que ce genre de principes qui sont des
principes de base font partie ... On peut parler d'un plan à long terme
et on peut aussi parler d'un plan stratégique à long terme, d'un
plan qui définisse les orientations stratégiques. À ce
moment, je crois que ces choses sont trop impor- tantes pour être
laissées simplement à des déclarations d'intention. C'est
la raison pour laquelle je crois que ces stratégies qui permettent au
secteur privé de s'orienter devraient être homologuées et
être reconnues comme telles. Elles devraient devenir des directives
envers la compagnie de la Couronne. Comme vous le savez, il y a eu une
conférence de M. Langlois et les gens, maintenant, s'inquiètent
du fait que SOQUEM prend tout l'espace dans le domaine de l'exploration et le
secteur privé n'a plus affaire de ce côté; il y a des gens
qui sont peu satisfaits de cela. Il me semblerait qu'au niveau des
stratégies à long terme et des objectifs vis-à-vis du
secteur privé, ils devraient être très bien connus et que
la compagnie de la couronne devrait être tenue de s'en tenir à cet
objectif de principe. J'aimerais demander à M. le ministre s'il a des
commentaires à faire là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: Effectivement, dans le plan de
développement, il va y avoir des orientations, des secteurs à
l'intérieur desquels la société va s'engager. Je pense que
l'or en est un qui est maintenant connu publiquement d'après les
déclarations...
M. Fortier: L'uranium.
M. Bérubé: L'uranium, pas nécessairement.
Vous en avez besoin pour vos petites centrales dans les parcs d'Outremont?
M. Fortier: Dans Outremont, oui. Est-ce que je vous ai
distribué le feuillet antinucléaire?
M. Bérubé: Lorsqu'on examine les cartes
-malheureusement, elles ne sont pas à la disposition de la commission,
mais nous avons une carte du Québec ici - les territoires en noir sont
les endroits où SOQUEM travaille; les territoires en vert sont les
endroits où la SDBJ travaille. Nous avons donc un ensemble de
territoires couverts par l'exploration. On se rend bien compte que l'espace
couvert par SOQUEM n'est pas encore important. Quand un terrain est
quadrillé en noir, il ne s'agit pas non plus de couvrir tout le
territoire, il s'agit souvent de zones jalonnées par SOQUEM qui ne
couvrent pas l'ensemble du territoire.
En d'autres termes, il y a encore énormément d'espace pour
batifoler au Québec dans le domaine de l'exploration minière. Il
faut essayer de voir quelle est la place du secteur privé et celle du
secteur public. Ce qu'il faut se dire, c'est qu'il s'est fait au Québec
- c'est difficile à dire - l'année dernière, $45,000,000
d'exploration et environ $6,000,000 par SOQUEM. Cela veut donc dire qu'il y a
encore largement place pour le secteur privé; on ne peut donc pas parler
encore de l'omniprésence de SOQUEM.
Mais vous avez parfaitement raison de dire qu'il faut au moins avoir des
plans de développement sur trois ans qui nous disent approximativement
dans quel secteur la société va s'orienter. Soulignons cependant
que, dans le domaine de l'exploration, il y a un certain problème. La
société répond très souvent à des
propositions qui lui sont faites, des options qui lui sont offertes
sur des propriétés qui, après analyse,
s'avèrent intéressantes. Aussi, on peut difficilement baliser a
priori quelles seront les options qui seront proposées à SOQUEM;
on doit donc se contenter surtout de définir les secteurs. On pourrait,
par exemple, décider qu'on ne fera pas d'exploration en vue de
découvrir de l'uranium. Cela pourrait être une orientation.
M. Fortier: Le ministre dit cela en riant, elle en a fait quand
même.
M. Bérubé: Elle en fait de moins en moins.
M. Fortier: De plus en plus.
M. Bérubé: Cela pourrait être l'orientation
prise par la société...
M. Fortier: Ce n'est pas ce que dit M. Bourassa.
M. Bérubé: ...qui pourrait être
définie dans le plan de développement. Par exemple, le
gouvernement pourrait décider qu'après tout l'exploration en vue
de trouver de l'or est une exploration à caractère purement
spéculatif et que, pour des raisons économiques, on voudrait voir
SOQUEM s'orienter dans le secteur des métaux de base. Bon, il pourrait y
avoir des orientations définies à l'intérieur du plan de
développement. Ce qui me paraît difficile, c'est de baliser
très précisément le niveau des actions communes avec le
secteur privé. Je pense que c'est assez difficile à faire, mais
dans le plan de développement nous aurons effectivement un premier... Il
faut dire que ces plans de développement vont se roder avec les
années. C'est la première fois avec SOQUEM et le qouvernement est
en train d'examiner le premier plan de développement de SOQUEM. Nous
avons mis presque un an d'échanqes avec la société,
simplement pour essayer de voir le mode de présentation, le contenu.
Nous en sommes à notre deuxième plan de développement avec
la Société générale de financement,
présentement, et je dois dire que les concepts se précisent; je
pense qu'on arrivera éventuellement à un instrument qui va
répondre justement à votre attente, qui va permettre aux citoyens
de savoir quelle est l'intention de la société au cours des trois
prochaines années sans, évidemment, dévoiler comme telle
la stratégie corporative directement sur le terrain.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais demander à M. Bourassa comment il
voit son mandat. Voyez-vous votre mandat comme une façon d'inciter
l'entreprise privée ou si vous le voyez comme étant
principalement l'exploration directe en concurrence avec l'entreprise
privée?
Deuxièmement, est-ce que dans le secteur de l'exploration vous
êtes au même niveau que l'entreprise privée? Est-ce qu'elle
a les mêmes droits que vous ou si vous avez un certain droit de
priorité? (11 h 30)
M. Bourassa: Oui, M. le Président. On n'a aucun droit de
priorité. On n'a aucune information privilégiée, que ce
soit du gouvernement ou du ministère des Richesses naturelles ou de
quelque organisme du gouvernement. On travaille sur les mêmes piliers et
sur le même palier que l'industrie privée. Autant que possible,
quand un prospecteur vient nous voir concernant une propriété ou
une compagnie, que ce soit "junior" ou "sénior", on s'efforce de faire
une entente soit pour une compagnie, soit pour une unité en
coparticipation, un "joint venture". La majorité des fois, ce sont des
prospecteurs ou des compagnies "juniors" qui, quand on leur propose une
association à 40% ou à 45%, disent: Si vous trouvez quelque
chose, on n'aura pas l'argent pour suivre, on aimerait autant avoir une
redevance. On a présentement 22% de notre exploration qui se fait avec
des compagnies dont la majorité sont "séniors". Les "juniors",
d'habitude, aiment mieux consentir une option sur leurs terrains en se gardant
une "royauté".
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: J'ai une question additionnelle là-dessus.
Quand vous dites que vous êtes sur le même pied que le secteur
privé, je pense bien que vous voulez parler au point de vue droit minier
ou droit à la recherche.
M. Bourassa: C'est cela.
M. Fortier: Parce que quand on arrive aux risques, bien
sûr, le fait que vous soyez une compagnie de la couronne vous donne une
assurance que le secteur privé ne peut avoir. Ce que je voudrais
soulever ici, cela ne regarde pas SOQUEM directement - peut-être que je
devrais adresser ma question au ministre - c'est que si vous lisez cette
conférence qui a été donnée en février 1980
par M. Gonzague Langlois, qui traite justement des problèmes qu'ils ont
vis-à-vis de la fiscalité et de la Commission des valeurs
mobilières, ils se sentent très nettement
défavorisés vis-à-vis de l'exploration, ce qui favorise
SOQUEM en très grande partie. Je me demande si le ministre aurait un mot
à dire là-dessus maintenant. Est-ce qu'il se penche sur ce
problème? Est-ce que tôt ou tard il envisage de faciliter ou de
s'entendre avec la Commission des valeurs mobilières pour que le secteur
privé puisse réellement concurrencer SOQUEM s'il le peut, mais
faire en sorte que le secteur privé ait le droit lui aussi à
l'exploration minière sur une base qui lui soit rentable ou qu'il puisse
se financer dans le public?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: C'est tout le sens de l'action du
gouvernement depuis quatre ans, en fait. À notre arrivée, il y
avait eu un certain nombre de scandales dans les années 1970, 1971,
1972, et même dans les années antérieures, qui avaient
amené d'abord un bon nombre de maisons de courtage
québécoises à se désintéresser du
financement minier, d'une part. On peut dire que nos prospecteurs avaient perdu
le mécanisme normal de financement. Notre première action a
consisté à demander à la Commission des valeurs
mobilières d'assouplir les règles concernant, par exemple, la
détention par le promoteur d'un
certain pourcentage des actions; également, l'importance non pas
du fonds de roulement, mais du capital-actions détenu par l'entreprise.
Les projets que la Bourse acceptait de financer étaient souvent trop
importants en valeur monétaire pour que ce soit facile pour un
prospecteur d'aller chercher tant d'argent et de s'engager dans un programme
d'exploration de ce type. Donc, c'est le sens en gros des assouplissements.
La deuxième démarche a consisté à favoriser
la création de sociétés en commandite en amendant le Code
civil et, deuxièmement, en introduisant des bénéfices, des
avantages fiscaux aux particuliers de manière que ceux-ci soient
amenés à investir dans nos sociétés en commandite.
Cela a été le sens de l'action gouvernementale. En même
temps, nous demandions à nos deux sociétés d'État,
la SDBJ et la SOQUEM, de chercher à établir de telles
sociétés en commandite, de concert avec des prospecteurs
québécois, dans un but précis.
Nous avons constaté que les avantages fiscaux au niveau des
droits miniers, par exemple, consentis au secteur privé existant avaient
comme conséquence de favoriser essentiellement les entreprises en place,
c'est-à-dire que, lorsque vous donnez des stimulants fiscaux pour
favoriser l'exploration en chantier, ce sont évidemment les entreprises
en place qui en profitent. Or, comme il n'y a pas d'entreprise
québécoise exploitant des gisements miniers au Québec ou
à peu près pas, ou de mini-entreprises, par conséquent, on
ne faisait qu'encourager le contrôle étranger de notre industrie
minérale par des mesures fiscales de ce type. Nous l'avons fait
néanmoins dans un objectif d'augmenter les réserves de minerai de
manière à garantir une certaine sécurité, une
certaine survie aux "smelters" de Noranda.
Cependant, le dernier point qui reste vraiment à
débloquer, c'est de trouver le moyen de favoriser le financement
boursier de nos prospecteurs. Nos maisons de courtage hésitent à
s'y engager puisqu'elles n'ont aucune compétence comme telles et, comme
elles doivent conseiller leurs clients, elles ne savent pas si la
propriété qu'on leur dépose sur la table est
véritablement une bonne propriété. Elles n'ont aucun moyen
d'analyser la compétence du géologue, pas plus qu'elles n'ont de
moyen d'analyser la qualité de la propriété. Elles se
retrouvent donc dans l'obligation de faire une recommandation à leur
client et elles ne veulent pas le faire purement et simplement.
M. Fortier: Dans le pétrole, c'est le même
problème?
M. Bérubé: Oui, c'est un peu le même
problème dans le pétrole. Ce qu'il faut, c'est donner une
certaine crédibilité. Une des façons pour assurer cette
crédibilité, c'est d'associer SOQUEM, qui a quand même
maintenant une réputation bien établie dans le monde minier au
Québec, à ces projets d'exploration, ce qui rend le financement
beaucoup plus facile à ce moment-là.
Il y a, par exemple, en ce moment - et c'est un secret de polichinelle -
un projet de financement de presque $12,000,000 impliquant la SDBJ, qui va
justement permettre aux Québécois de commencer à
s'intéresser au financement de la prospection minière. De la
même façon, SOQUEM, en association avec les frères
Vézina, a mis sur pied une nouvelle société, Aiguebelle,
qui va pouvoir éventuellement se financer de la même façon.
Donc, SOQUEM cherche, en s'associant à des prospecteurs, à donner
une certaine crédibilité auprès des maisons de courtage
qui amènerait éventuellement ces maisons de courtage à
commencer à s'engager dans le financement boursier.
Nous avons des réticences énormes à vaincre du
côté des maisons de courtage, mais je dois dire que, depuis
quelques mois, on commence à sentir l'iceberg fondre et on a
l'impression qu'il y a de plus en plus de maisons québécoises qui
s'intéressent au financement boursier de la prospection à ce
moment-là, en mettant tout ensemble les bénéfices.
L'opinion unanime des courtiers maintenant, c'est qu'il existe effectivement un
investisseur potentiel à cause des avantages fiscaux que le gouvernement
lui a consentis. Il y a indéniablement des prospecteurs
québécois très compétents et ce qui manque
maintenant, c'est l'étincelle, la bougie d'allumage. Un des moyens d'y
arriver, c'est l'association des sociétés d'État avec des
prospecteurs pour faciliter ce financement. Oui, c'est un des rôles que
la société a joués et qu'on lui a demandé de
jouer.
M. Fortier: Pourquoi voyez-vous que la situation soit tellement
différente de celle du pétrole? Dans le pétrole, on a
exactement le même problème, quoiqu'il peut y avoir des majeurs
qui donnent de la crédibilité à certains investissements,
mais il y a aussi des mineurs qui le font.
M. Bérubé: Est-ce que les financements primaires se
font sur la Bourse de Montréal?
M. Fortier: Non.
M. Bérubé: Alors, le problème est là.
Nos prospecteurs peuvent se financer à Calgary et à Vancouver
indéniablement, mais le problème n'est pas là. Le
problème, c'est qu'on voudrait qu'ils se financent au Québec.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais revenir pour un instant à la
question que j'avais posée à M. Bourassa. Peut-être
pourrait-il s'expliquer un peu plus. L'objectif principal du projet de loi
actuel qu'on veut amender semblait être que vous deviez participer
à différentes opérations. Cela avait comme implication que
votre rôle dans l'industrie était plutôt de promouvoir
l'industrie privée et que vous participiez avec d'autres. On change ce
projet de loi aujourd'hui et on vous donne des pouvoirs beaucoup plus
étendus. Une des raisons, c'est pour légaliser une certaine
situation. Mais vous, à titre de président de cette entreprise,
comment voyez-vous votre mandat? Est-ce que vous vous voyez, selon votre
mandat, comme étant encore la société, l'instrument qui va
aider l'entreprise privée ou est-ce que vous voyez vraiment que votre
mandat maintenant est de vous impliquer complètement, à temps
plein dans toutes les phases de l'industrie et de concurrencer
vraiment l'industrie privée?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Personnellement et professionnellement, M. le
Président, je vois que mon mandat n'est pas d'aider l'industrie
privée. On est une société d'État, on n'est pas un
ministère. C'est pour essayer de susciter le plus d'exploration possible
dans la province de Québec pour trouver le plus de gisements possible.
Nous essayons, à coeur de mois et à coeur d'année, de nous
associer à des compagnies. Des fois, nous réussissons, d'autres
fois non. Une fois qu'on a fait une découverte, évidemment, le
prix d'entrée n'est pas tout à fait le même que quand on
commence l'exploration. Quand vous avez dépensé $1,000,000 en
exploration dans une propriété et que vous trouvez un gisement
qui en vaut $100,000,000, on n'est pas pour dire au gars: Investis $500,000 ou
50% de notre premier million et tu auras 50% de $100,000,000. Cela appartient
à tout le monde, cela appartient à tous les
Québécois. Présentement, 22% de nos projets d'exploration
sont conjoints avec des sociétés.
M. Fortier: J'aurais seulement deux ou trois petites questions
rapides à poser.
Le Président (M. Bordeleau): Un seconde! II reste à
peu près trois quarts d'heure, si on veut étudier SOQUIP.
M. Fortier: Ce sera très court.
Le Président (M. Bordeleau): C'est à votre
goût.
M. Fortier: Elles s'adressent au ministre. Pour ce qui concerne
le plan de développement de la compagnie, on ne mentionne pas le plan de
développement des filiales. Pourrait-on préciser dans la loi
qu'il ne s'agit pas uniquement du plan de développement de la compagnie
comme telle, mais de celui des filiales également? Il n'y a rien qui est
dit qu'on doit rendre public au moins un objectif. Je me demandais si on
devrait préciser cela.
M. Bérubé: Nous ne voulons pas effectivement
inclure le plan de développement des filiales pour une raison à
laquelle nous nous sommes finalement ralliés, parce que je dois avouer
qu'il y a eu beaucoup de discussions là-dessus, c'est que cela
paraît gênant de parler de "partnership" entre, par exemple, SOQUEM
et une entreprise minière quelconque et que ce partenaire sache que le
plan de développement de l'entreprise qu'il va fonder avec SOQUEM, c'est
le gouvernement qui doit l'approuver. On pense que nous allons approuver le
plan de développement de SOQUEM et les intentions de SOQUEM concernant
ses filiales, mais il nous apparaissait délicat d'introduire le plan de
développement de la filiale comme telle dans la loi. C'est la raison
pour laquelle nous ne l'avons pas mis.
M. Fortier: Pour ce qui concerne le Vérificateur
général qui peut, à la demande de la
société, désigner un autre vérificateur, quel est
le sens de cet article?
M. Bérubé: Un des problèmes que nous avons
avec le Vérificateur général... D'accord, je vais
répondre effectivement. J'entends le député de Mont-Royal
et je pense qu'il a raison, on peut reprendre en fait la discussion article par
article. Je réponds immédiatement. Nous voulons, en principe, que
ce soit le Vérificateur général qui fasse la
vérification, mais, pour des raisons d'expédition plus rapide des
dossiers, nous voulons permettre au vérificateur de dire: J'accepte la
suggestion de la compagnie et on va nommer telle entreprise de
vérification de manière que le rapport annuel sorte rapidement et
que l'on puisse déposer les rapports annuels non pas comme cela se
faisait traditionnellement à l'Assemblée nationale toujours un
an, un an et demi en retard après la fin de l'année
financière, mais quelques mois après, de manière qu'on ait
un contrôle sur nos sociétés d'État. C'est tout.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Très brièvement, ma dernière
question porte sur un aspect bien spécifique. Dans l'état
consolidé des revenus et dépenses et du déficit de
l'exercice terminé le 31 mars 1980, on parle dans les dépenses de
projets miniers abandonnés. En 1979, c'était $146,240 seulement
et, en 1980, cela atteint $5,094,949. Je ne peux pas vous donner le montant
pour 1978, parce que dans le rapport, je pense que ce n'était pas
mentionné, mais pouvez-vous nous dire quelles sont les raisons de cette
très grande différence?
M. Bourassa: Au 31 mars 1979, nous avions comme politique
comptable ou convention comptable de dépenser toute notre exploration.
Chaque année, notre déficit montait. Pour essayer de stimuler nos
cadres, nous avons changé la politique comptable ou la convention
comptable, parce qu'on se dit: Quand on dépense de l'argent de
l'exploration, c'est un placement. Sur 100 propriétés qu'on
visite, il y en a peut-être seulement une ou deux qui deviennent
intéressantes. Si on dit à un gars: Tu t'en vas et tu t'en vas
pour dépenser de l'argent, c'est négatif, tandis que,
présentement, ce qu'on lui dit, c'est: Tu t'en vas, tu t'en vas faire un
placement dans cette propriété. On a au moins un espoir de
trouver.
En changeant cette convention comptable, on est obligé, tous les
trois mois, tous les trimestres, d'examiner entre les services financiers et
les services de l'exploration et de la mise en valeur les
propriétés qui sont encore valables et celles qu'on devrait
laisser tomber, tandis qu'avant, étant donné que tout allait aux
dépenses, même si ces propriétés étaient
toutes identifiés, on ne suivrait pas la même convention. C'est la
raison pour laquelle les $146,000 n'ont pas été traités de
la même façon que les $5,000,000.
M. Fontaine: Ah bon! (11 h 45)
M. Bourassa: C'est vraiment une dépense, parce que ce sont
des projets abandonnés. Toutes les autres sont des dépenses
déférées ou capitalisées comme un placement.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va?
M. Biron: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Une dernière question,
toujours sur SOQUEM?
M. Biron: ...j'aurais deux petits commentaires...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: ...très brefs. D'abord, depuis quelques
années, j'ai demandé que les sociétés d'État
publient des rapports financiers à tous les trimestres comme ça
se fait dans l'entreprise privée. Depuis quelque temps, on voit que
ça se fait. Je suis très heureux de constater que, très
rapidement, on peut voir comment nos sociétés d'Etat sont
administrées. Je pense que c'est le signe de la volonté du
gouvernement d'avoir une saine gestion dans nos sociétés
d'État. On a parlé souvent de la crédibilité des
sociétés d'État au point de vue de la
profitabilité. Je suis très heureux aussi de voir qu'après
les six premiers mois d'exercice de l'année financière, SOQUEM a
déjà $11,000,000 de bénéfices nets
d'accumulés. Cela aussi, c'est encourageant. Cela peut permettre
à nos autres sociétés d'État d'acquérir
aussi une grande crédibilité. C'est un peu ce que disait le
ministre tout à l'heure: Si on veut aider les entreprises privées
de quelque façon, surtout celles qui font de la recherche
minière, à se faire coter à la Bourse de Montréal,
je pense qu'elles vont avoir besoin d'un associé qui ait de la
crédibilité et, dans ce sens-là, je suis heureux de voir
les bénéfices nets accumulés de SOQUEM au cours de cet
exercice financier.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que ça va pour
les questions à l'endroit de M. Bourassa?
M. le dépué de Notre-Dame-de-Grâce, aviez-vous
quelque chose?
M. Scowen: J'avais une grande question et une petite question. Je
pense qu'avec le temps qui reste je vais simplement poser la petite question.
À la page 10 de votre rapport annuel de 1979-1980, vous faites mention
d'une déclaration d'intention avec une compagnie américaine
touchant l'achat d'une partie importante de la production de Seleine. Dans
cette déclaration d'intention, faisait-on mention du prix et
était-ce basé sur le prix du marché courant ou y avait-il
une autre formule développée pour le prix?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bourassa.
M. Bourassa: Je m'excuse, M. le Président, mais je n'ai
pas bien compris la question. La déclaration d'intention...
M. Scowen: Oui. Il semble que...
M. Bourassa: Oh! Avec Diamond Crystal.
M. Scowen: Oui, c'est ça.
M. Bourassa: Oh, excusez.
M. Scowen: Ah, je n'avais pas nommé la compagnie. Diamond
Crystal Salt Company, de St.Clair, Michigan. C'était quoi, l'accord sur
le prix qui a été inscrit dans cette déclaration
d'intention? Le prix sera-t-il basé sur le prix du marché
courant?
M. Bourassa: Non, c'est un prix qu'on a négocié
avec eux. Il est basé sur les prix du marché annuellement.
M. Scowen: Et c'est à un pourcentage inférieur au
prix du marché? C'est le but?
M. Bourassa: Non, il est compétitif.
M. Scowen: C'est, en effet, le prix du marché. Votre prix
sera effectivement égal au prix du marché.
M. Bourassa: Avec le marché sur la Côte Est des
Etats-Unis.
M. Scowen: Existe-t-il déjà dans le programme de
vente de ce sel au gouvernement du Québec une entente écrite ou
verbale en ce qui concerne le prix de vente de sel des Iles-de-la-Madeleine aux
organismes gouvernementaux?
M. Bourassa: Non. Cela fait deux ans que nous sommes en
négociations et il n'y a aucune entente présentement.
M. Scowen: Le gouvernement vous a-t-il fait part de son intention
en ce qui concerne le prix? D'après vous, est-il probable que le
gouvernement insiste pour que ce prix soit inférieur au prix du
marché? C'est une question qui va toucher, j'imagine, des
municipalités du Québec et plusieurs autres organismes publics et
parapublics. Où en êtes-vous jusqu'à maintenant avec ces
discussions?
M. Bourassa: Nous sommes encore en train de négocier. Au
bout de deux ans, nous n'avons pas pu nous entendre. C'est ce qui nous permet
de vous dire que nous n'avons pas d'entente avec le gouvernement du
Québec.
Avec les municipalités, nous allons faire comme toutes les
compagnies, marchands de sel. Nous allons soumissionner publiquement à
leurs appels d'offres.
M. Scowen: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M.
Bourassa, ainsi que les gens qui vous accompagnent de vous être
présentés devant les membres de notre commission.
Audition des administrateurs de SOQUIP
J'appellerais maintenant M. Antoine Ayoub, président du conseil
d'administration de SOQUIP, ainsi que M. Fernand Girard, président par
intérim de SOQUIP.
Comme il ne reste qu'un peu plus d'une demi-heure pour compléter
nos travaux, je vous demanderai immédiatement de procéder,
à moins que M. Ayoub ne veuille présenter... Non. Les gens qui
l'accompagnent veulent-ils faire un commentaire général?
M. Girard: J'avais pensé, peut-être, pour
l'intérêt du comité, étant donné que
SOQUIP,
contrairement aux sociétés minières à
l'intérieur du Québec, était dans un domaine où la
rentabilité et les résultats sont beaucoup moins apparents, parce
que la période était d'abord à un inventaire du potentiel
pétrolier du Québec, de résumer en quelques mots ce qui a
été fait à SOQUIP, si cela vous intéresse, sans
vous retarder.
Le Président (M. Bordeleau): Certainement, allez-y.
M. Girard: Lorsque SOQUIP a été
créée, il y a dix ans, il avait été d'abord
prévu une loi qui ressemble beaucoup au projet de loi que vous avez
devant vous aujourd'hui, mais finalement, pour des raisons d'époque,
parce qu'on était la première société d'État
qui évoluait dans le monde du pétrole, on a limité
l'action de SOQUIP assez modestement à faire l'inventaire du potentiel
pétrolier du Québec.
Les questions qu'on pourrait se poser: Est-ce que cela valait la peine?
Est-ce que cela valait les $40,000,000 que SOQUIP a mis dans cela depuis dix
ans? Je pense que la réponse est la suivante: On avait, depuis 100 ans
et même 200 ans, des suintements de pétrole. On avait des gens,
dans le bout du lac Saint-Pierre, des cultivateurs qui s'installaient des
prises de gaz. On avait du gaz en surface. On avait du pétrole en
surface en Gaspésie. On connaissait géologiquement le potentiel
du golfe qui semblait considérable. Alors, c'était sûr
qu'il fallait faire un effort de recherche et le gouvernement nous avait dit:
On prévoit qu'on aura besoin de pétrole de plus en plus. S'il y
en a au Québec, trouvons-le et, s'il n'y en a pas là, il faudrait
peut-être en trouver ailleurs. Mais on verra plus tard, et plus tard,
pour nous, c'est aujourd'hui.
Cependant, on doit dire que, pendant que SOQUIP a dépensé
$45,000,000 en recherches pétrolières, à faire
l'inventaire des trois grandes régions qui sont les Basses-Terres, qui
sont la région de la Gaspésie et du golfe, pour la partie marine,
les sociétés pétrolières, elles, qui ne jettent pas
leur argent par les fenêtres, ont dépensé $115,000,000.
C'est donc dire que SOQUIP, dans son rôle de société
d'accueil, d'être un moteur, un stimulant pour encourager les
sociétés à venir faire de l'exploration au Québec,
a d'abord réussi, si vous considérez le montant important investi
par les compagnies pétrolières. Toutes nos activités se
sont faites en association. Nous avons rarement fonctionné seuls, pour
deux raisons: la première, c'est que, d'abord, c'est là pratique
pétrolière dans le monde. Vous savez qu'excepté au
Moyen-Orient, on dit qu'il faut forer dix puits secs pour faire un puits
chanceux. Alors, quand vous en êtes rendus au neuvième puits,
à $1,000,000 chacun et que vous n'avez rien trouvé, vous dites:
Si on avait mis tous nos oeufs dans le même panier, on serait
peut-être en faillite plusieurs fois par année, surtout si on
tenait compte de la dotation qu'on avait.
Donc, on avait un intérêt à faire comme les
compagnies, à ne pas mettre nos oeufs dans le même panier et
à investir dans les champs d'activité et dans différents
projets. Nous avons fait l'inventaire du potentiel après que des
compagnies majeures, que je ne nommerai pas, ont dépensé
au-delà de $27,000,000 dans la région des Basses-Terres. Dans le
même territoire, nous avons fini par découvrir du gaz à
Saint-Flavien, lequel gaz est maintenant commercialisé, que nous vendons
à Brique Citadelle. Le potentiel n'étant pas énorme
à cause de problèmes particuliers à cette région,
les Basses-Terres, ce qui fait qu'on a là une géologie
très compliquée, fracturée, la technologie aura
maintenant, selon notre appréciation et les recherches qu'on a faites,
à nous donner des moyens différents qu'on espère avant
bien des années, avant de pouvoir réinvestir beaucoup plus
d'argent dans la région des Basses-Terres.
Nous avons fait le même travail Gaspésie. On connaissait en
Gaspésie des suintements de pétrole en surface. Il fallait aller
voir s'il y avait en profondeur des réserves et nous avons
également là, toujours en "joint venture" avec d'autres
sociétés pétrolières... Vous verrez, à la
fin du rapport annuel qu'on a peut-être distribué ou qu'on va
distribuer, la liste des sociétés avec lesquelles nous avons
travaillé. Vous verrez que nous avons travaillé avec à peu
près toutes les grandes sociétés au Canada qui font de la
recherche pétrolière.
Dans le golfe également, nous aurons à continuer à
faire un effort qui pourra être important. Quand on songe qu'un puits de
forage sur terre coûte environ $1,000,000, lorsque nous sommes dans le
golfe et que nous faisons des forages dans la partie marine où le
potentiel est encore le plus prometteur du point de vue théorique, si
vous voulez, puisqu'on n'a pas encore cherché considérablement,
les puits vont coûter entre $20,000,000 et $25,000,000 chacun. On croit
que s'il y avait un potentiel valable important dans l'estuaire - vous voyez
les découvertes importantes qui se font, pas très loin à
l'est de Terre-Neuve - qui redonnerait de la valeur au territoire que le
Québec possède dans l'estuaire du Saint-Laurent, il faudrait
penser à peut-être 50, 60 ou 100 puits. Estimez-les à
$20,000,000 chacun et il est bien sûr qu'on ne peut pas penser que la
province de Québec aurait, toute seule, les reins financiers
suffisamment solides pour faire ce travail. C'est pourquoi, là aussi,
dans la mesure où nous pouvons travailler, nous travailons en "joint
venture" avec des associations pour pouvoir réduire les coûts. Un
exemple, c'est le fameux puits Hekja que nous sommes en train de forer à
l'est de Terre-Neuve avec une série d'associés, dont
Pétro-Canada pour une partie et plusieurs autres compagnies. Le
coût pour ce seul puits sera d'environ $45,000,000. C'est sûr que
SOQUIP n'aurait pas pensé pouvoir avoir accès aux réserves
de pétrole qu'il y a dans l'Est du Canada.
En proportion, vous pouvez dire qu'on a investi dans l'Ouest. Vous allez
peut-être vous poser une question: Est-ce que SOQUIP a une équipe
compétente, puisqu'elle n'a rien trouvé d'important au
Québec? Je pense que ce sont toujours les étrangers qui sont les
meilleurs. On est toujours meilleur juge ailleurs. Je dois vous dire que les
compagnies pétrolières mondiales -c'est un club assez
fermé, que l'exploration pétrolière - reconnaissent, sans
s'en cacher, que SOQUIP possède la meilleure équipe de recherche
pour les sédiments et la géologie de l'Est du Canada,
excepté la sous-marine.
Deuxièmement, nos expériences très petites - nous
avons investi environ $8,000,000 dans
l'Ouest - ont été très réussies. C'est la
valeur des réserves de gaz qui appartiennent à SOQUIP dans
l'Ouest. La raison pour laquelle nous sommes allés là, c'est
qu'à un moment donné des développements de SIDBEC
exigeaient que la part du gaz acheté à Montréal soit plus
considérable. Il y avait eu, à ce moment-là, des batailles
avec TransCanada PipeLines afin qu'elle puisse en céder au Québec
une plus grande partie.
Les démarches qui avaient été faites entre le
Québec, SIDBEC, le gouvernement et l'Alberta étaient que, si on
investissait dans l'Ouest un montant quelconque d'exploration, était-il
possible qu'on nous consente un pourcentage de gaz plus élevé?
L'autre argument était le suivant. On disait: Comme le grand pourcentage
du gaz va surtout à l'Ontario, pour pouvoir faire pression sur
TransCanada PipeLines afin que le gaz vienne au Québec, si on
transportait notre gaz, on aurait un bien meilleur argument. Alors, nous avons
dit: Plutôt que SIDBEC prête l'argent, pour se qualifier, pour
avoir un surplus de gaz, en exploration à des compagnies de l'Alberta,
pourquoi ne pas le prêter à SOQUIP qui, elle, va l'investir et va
assumer cette responsabilité d'essayer de trouver du gaz? C'est ce que
nous avons fait. Les réserves sont intéressantes.
C'est assez rare, en tout cas, on se félicite, à SOQUIP,
d'avoir été la première société
d'État à qui des sociétés privées confient
leur argent en lui demandant de l'investir à leur place. En effet, il y
a quelques mois, la compagnie Alcan, le Royal Trust et des compagnies
d'assurances nous ont demandé de constituer un "drilling fund". Elles
nous ont confié $13,000,000 avec lesquels nous avons fait des forages en
Alberta, au nombre de neuf. Je dois vous dire qu'à ce jour la moyenne de
réussite, en Alberta, dans les territoires où nous avons
effectué ce travail pour des investisseurs - généralement,
vous avez un puits chanceux sur huit puits forés - a été
de huit puits chanceux sur neuf puits forés. Ces compagnies à
capital nous demandent maintenant de créer d'autres fonds de "drillinq"
et d'opération. La raison pour laquelle nous étions
intéressés, c'est que cela nous donne de l'argent pour
l'exploration. Comme ces investisseurs ne sont pas intéressés au
pétrole ou au gaz, cela nous donnait, en tant que, je dirais,
gérant du projet, l'option pour obtenir le gaz et le pétrole.
Alors, c'est un peu le résumé des activités de SOQUIP.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je remarque, dans le projet de loi, que le
capital-actions est augmenté... Excusez-moi.
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre. (12
heures)
M. Bérubé: ...j'étais distrait au tout
début et je n'ai pas réalisé qu'on n'a pas
présenté les intervenants. Je constate qu'on a
présenté M. Girard comme étant M. Ayoub; il faudrait
maintenant présenter M. Ayoub comme étant M. Girard ou faire la
correction tout de suite.
Le Président (M. Bordeleau): Le meilleur moyen est
peut-être que les gens se présentent eux-mêmes.
M. Ayoub: M. le Président, sans entrer dans le fond de ce
qu'a dit mon collègue M. Girard, qui est le directeur
général de SOQUIP - je suis Antoine Ayoub, président du
conseil d'administration - pour le bénéfice du débat de
cette commission, il serait peut-être intéressant de scinder les
questions concernant le bilan que M. Girard vient de brosser devant vous et,
dans un deuxième temps, concernant les modifications de la loi sur
lesquelles j'essaierai de répondre à vos questions surtout
concernant l'orientation de SOQUIP pour l'avenir.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Ayoub.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. Girard et M. Ayoub. J'aimerais remercier
les différents intervenants à la suite de la présentation
qu'a faite le président. Je remarque que dans le projet de loi il y a
une augmentation du capital-actions; je pense que cela va de $100,000,000
à $220,000,000. Est-ce que vous pouvez expliquer la
nécessité de cette augmentation? Est-ce qu'elle fait suite
à des représentations que SOQUIP a faites pour ses besoins?
Est-ce que ce sont des sommes qui sont nécessaires, qui sont
demandées par SOQUIP et qui font partie des projets de SOQUIP à
court terme? Sans nécessairement dévoiler tous les projets - je
sais que vous allez dire que ce n'est d'intérêt public -
pourriez-vous expliciter un peu cette augmentation du capital-actions? Le
dernier rapport annuel que j'ai est de 1978-1979; peut-être que
quelques-uns de mes chiffres seront un peu dépassés.
En ce qui concerne le présent capital-actions, je ne pense pas
que vous ayez tout... Le montant qui vous a été versé,
d'après le bilan que j'ai devant moi, jusqu'à présent
était de $59,500,000. Ce qui est autorisé maintenant n'a pas
été entièrement versé et vous demandez encore
$120,000,000.
Le Président (M. Bordeleau): M. Girard. M. Girard:
En fait, il reste...
Le Président (M. Bordeleau): M. Girard, je m'excuse, M. le
ministre aurait peut-être quelque chose à ajouter.
M. Bérubé: Oui, sur la question du
député de Mont-Royal. Le député de Mont-Royal
indique que la société a demandé de l'argent au
gouvernement.
M. Ciaccia: Non, j'ai demandé si c'est à la suite
de demandes de la société que le capital-actions a
été augmenté.
M. Bérubé: Essentiellement, c'est une
décision gouvernementale de modifier le mandat de la
société. Ceci a été travaillé conjointement
avec M. Cloutier et c'est une décision gouvernementale.
M. Ciaccia: Excusez-moi, mais est-ce que...
M. Bérubé: Ce n'est pas une demande de SOQUIP.
M. Ciaccia: Un instant, un instant. Il faut bien se comprendre.
Je voulais poser des questions aux représentants de SOQUIP; s'ils n'ont
pas les réponses, peut-être que le ministre pourra ajouter quelque
chose, mais je préférerais que ce soient les représentants
de SOQUIP qui précisent les réponses aux questions que je vais
poser.
M. Bérubé: Oui, mais c'est l'actionnaire qui
décide de la quantité d'argent qu'il veut investir et qui soumet
à l'Assemblée nationale un projet de loi à cet effet.
M. Ciaccia: Ce n'est pas ce que je veux savoir. Je sais que le
ministre est prêt à investir $220,000,000, même à
rencontre des représentations et des recommandations du
Vérificateur général. Je sais que le ministre est
prêt à faire cela, le ministre des Finances, je suppose, avec
l'appui du ministre de l'Énergie, mais ce n'est pas ma question. Ma
question, je la pose à ces représentants-là: Est-ce que
cette augmentation a été faite à la suite des
représentations que SOQUIP a faites?
M. Bérubé: Ah!
Le Président (M. Bordeleau): Bon. M. Girard.
M. Girard: Assurément. Pour les raisons que je donnais
tout à l'heure, à cause des coûts inhérents à
ce type de recherche, si vous considérez les coûts
inhérents au type de recherche et ce que nous avions comme dotation
précédemment, c'est sûr que nos activités, en tant
que société, ont été modestes et ne pouvaient pas
être autrement que très modestes. En plus, on doit ajouter que,
comme nous avons préparé avec le ministère les
éléments du nouveau mandat élargi qui fera partie de la
loi bien sûr, nous avons également discuté avec lui des
fonds nécessaires pour pouvoir le réaliser.
M. Ciaccia: Alors, vous avez des projets en vue pour utiliser ce
capital-actions que vous demandez. Maintenant, dans le rapport annuel que j'ai,
on remarque que vous avez dépensé - vous avez mentionné
$8,000,000 en Alberta $6,000,000 et il y a $34,000,000 pour l'exploration au
Québec. Quelles sont vos intentions pour l'avenir? Est-ce que c'est de
continuer à dépenser, davantage au Québec ou d'augmenter
vos travaux dans l'Ouest canadien? Je remarque, d'après ce rapport-ci,
que les $6,000,000 que vous avez dépensés en Alberta ont
été beaucoup plus fructueux que les $34,000,000 que vous
dépensez au Québec. Quels sont vos projets et vos intentions?
M. Girard: Je pense que c'est à triple volet et cela tient
compte, évidemment, du mandat qui sera décidé par le
Parlement. En ce qui concerne la partie dont on parlait tout à l'heure
qui consiste à continuer l'inventaire du Québec, il est
évident que nous aurons à continuer et à terminer cette
recherche du potentiel pétrolier particulièrement dans l'estuaire
du Saint-Laurent. Cela reste notre programme principal de recherche
pétrolière au Québec qui peut être
considérable selon les fonds auxquels nous aurons accès. Mais, en
plus des fonds qui nous sont donnés, vous savez qu'en vertu d'une
modification récente à la loi les compagnies peuvent utiliser en
recherche pétrolière de l'argent qu'elles versaient autrefois au
titre de la Loi sur l'éducation de telle sorte que maintenant cela nous
donne accès à des fonds que des compagnies maintenant
désirent investir avec nous en recherche, ce qui nous permettra
d'accentuer nos recherches au Québec.
Dans la mesure également du mandat qui est
déterminé dans la nouvelle loi de pouvoir obtenir de
l'approvisionnement pour sécuriser les problèmes de
réserve au Québec, eh bien, nous aurons proportionnellement
à investir en dehors du Québec pour pouvoir nous assurer de cet
approvisionnement.
M. Ciaccia: Est-ce que dans le passé...
Le Président (M. Bordeleau): Excusez-moi, M. le
député de Mont-Royal, il y a un complément de
réponse apporté par M. Ayoub.
M. Ayoub.
M. Ayoub: M. le Président, il y a un principe fondamental
qui est à la base de cette modification ou même de cette
augmentation de capital qui est le suivant et qu'il ne faut pas perdre de vue.
C'est le problème de la sécurité des approvisionnements au
Québec. Si on tient compte qu'il faudrait, d'une manière ou d'une
autre, assurer les approvisionnements en hydrocarbures pour les années
prochaines, dans un contexte international très difficile, tout le monde
en convient, il faudrait donc essayer de mettre en application cette
constatation que font tous les observateurs de la scène
pétrolière internationale et même nationale. Alors, si on
tient compte de ce principe, il reste à dire que les placements ou les
investissements, l'exploration se feraient là ou dans d'autres parties
du Canada ou même ailleurs qu'au Canada suivant la possibilité de
réaliser cet objectif primordial qui est celui d'assurer la
sécurité des approvisionnements du Québec durant les
années prochaines.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Une dernière question sur le sujet que M.
Ayoub vient de soulever. Vous mentionnez que c'est le mandat d'assurer - un des
objectifs - la sécurité des approvisionnements. Est-ce que vous
voyez, dans ce mandat, vos affaires sur la scène internationale ou si
vous prétendez, oour arriver à cet objectif, coordonner vos
travaux avec, mettons, Pétro-Canada, une société
fédérale, parce que je suppose qu'en termes de "bargaining power"
avec les autres pays, c'est plus facile de se présenter au nom du Canada
qu'au nom d'une province? Voilà la première question.
Deuxième question: Est-ce qu'à votre connaissance, dans le
passé peut-être que M. Ayoub ou M. Girard pourrait me
répondre -SOQUIP, avec d'autres sociétés, a essayé
de négocier des contrats d'approvisionnement de pétrole sur le
marché international ou de participer à des négociations
pour de tels achats?
M. Bérubé: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Bérubé: J'invoque le règlement à
nouveau. Sur la deuxième partie de la question, je n'ai aucun
problème puisque c'est une question de fait. Quant à la
première question, il s'agit de demander à la
société d'État ce que pense l'actionnaire de son mandat.
Je pense que la question n'est pas dirigée à la bonne partie.
M. Ciaccia: Je ne l'adresse pas au ministre pour une raison
très simple, c'est que je ne voulais pas la poser au ministre. Ils ont
un mandat, comment le voient-ils?
M. Bérubé: Ils n'ont pas de mandat.
M. Ciaccia: II y a un objectif, c'est une société
d'État, ce n'est pas vous le président.
M. Bérubé: Ils n'ont pas de mandat, il est dans la
loi.
M. Ciaccia: Écoutez, ce n'est pas le ministre qui est
président de SOQUIP. SOQUIP a un objectif. Vous venez de dire, M. Ayoub,
la sécurité d'approvisionnement. Bon, comment allez-vous faire
pour nous assurer cet approvisionnement au Québec? Qu'allez-vous
faire?
Le Président (M. Bordeleau): M. Ayoub.
M. Ayoub: M. le Président, pour répondre
précisément et directement à la question qui a
été posée, nous allons faire comme fait toute
société qui doit avoir comme objectif de s'assurer de la
sécurité des approvisionnements d'une région ou d'un pays.
C'est peut-être un tort de ma part quand je dis assurer la
sécurité d'approvisionnement; ça peut vouloir dire assurer
seuls, mais il n'est pas dit que c'est assurer seuls, c'est coopérer
à la sécurité d'approvisionnement du Québec. Cette
coopération, bien entendu, n'exclut pas en principe et d'avance de
travailler sur un projet ou sur un autre avec Pétro-Canada. D'ailleurs,
dans le bilan qu'a brossé mon collègue, M. Girard, il a
mentionné qu'à deux reprises il y a, par exemple, des accords
avec Pétro-Canada pour explorer ici ou là dans le pays. Donc, le
seul critère c'est effectivement la sécurité
d'approvisionnement. Si ce critère est mieux servi par une
coopération avec Pétro-Canada, eh bien, en principe, rien
n'empêche de le faire.
M. Ciaccia: La deuxième partie de la question...
M. Bérubé: Sauf, M. le Président, si le
gouvernement et l'Assemblée nationale devaient décider de
définir un mandat différent, par exemple, par le pouvoir de
directive, ce dont nous discutons, et je pense qu'il y a une question de
règlement fondamentale...
M. Ciaccia: Je comprends ça. Vous pouvez changer. Le
gouvernement peut donner des directives et même vous vous donnez dans le
projet de loi le droit de donner des directives et des orientations. Vous allez
un peu loin. On va discuter de ça en deuxième lecture...
Une voix: Quelles sont ces interruptions-là?
M. Ciaccia: ... et en commission parlementaire. Ce n'est plus
SOQUIP qui va décider de son plan d'action. Vous vous donnez une
ingérence politique pas mal élargie dans les pouvoirs du
ministre. Mais on discutera de ça en deuxième lecture.
M. Bérubé: Question de règlement, M. le
Président.
M. Ciaccia: On n'a pas beaucoup de temps, on voudrait avoir
quelques réponses des représentants de SOQUIP. Si nous avons des
disputes, vous et moi, ensuite, on pourra s'en occuper à
l'Assemblée nationale et en commission parlementaire.
M. Bérubé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: L'Opposition et tous les
députés ici présents ont évidemment tous les droits
de poser des questions sur ce qui se passe à la société,
sur des détails concernant les projets. Toutefois, je ne peux pas
accepter, comme membre d'un gouvernement, que l'on pose des questions à
une société portant sur une volonté gouvernementale, parce
qu'à ce moment-là on demande à la société
d'interpréter quel doit être le mandat que le confie lui le
gouvernement. C'est le seul point sur lequel je peux être en
désaccord. Tant et aussi longtemps qu'on pose des questions concernant
l'action de la société dans le cadre du mandat qui lui est
défini présentement, il n'y a aucun problème. Mais,
présentement, il s'agit évidemment d'un nouveau mandat que le
gouvernement va définir à SOQUIP et ce n'est pas à la
société de le définir.
C'est dans ce sens-là que je dis qu'il faudrait s'en tenir aux
questions. Si on veut m'interroger concernant le mandat de la
société, il me fera certainement plaisir d'y répondre au
moment de la commission parlementaire, au moment du débat, sans aucun
doute, mais je pense qu'il faut entendre la société sur ce
qu'elle fait dans le cadre du mandat, comment elle interprète le
présent mandat, mais non pas sur le mandat que le gouvernement ou
l'Assemblée nationale va lui fixer. C'est simplement cette
question-là qui, depuis le début, semble poser des
problèmes.
M. Ciaccia: Avant de céder mon droit de parole...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: ... à mon collègue, pourriez-vous
répondre à la deuxième partie de ma question, à
savoir si, dans le passé, vous avez été impliqués
ou avez participé à l'achat ou si vous avez essayé de
faire des contrats d'approvisionnement sur le marché international pour
SOQUIP?
Le Président (M. Bordeleau): M. Ayoub.
M. Ayoub: À ma connaissance, d'une manière
ponctuelle, directe et effective, non, mais je suis...
M. Ciaccia: Je ne demande pas si vous avez réussi, mais si
vous avez essayé.
M. Ayoub: J'y réponds. Je dis qu'à ma connaissance
je ne le crois pas. Maintenant, ceci n'exclut pas que le dossier de
l'approvisionnement a été effectivement traité sur le
plan, si vous voulez, de l'information à l'intérieur de SOQUIP
pour suivre le marché, voir quelle est l'orientation du marché.
(12 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): Je reconnaîtrai d'abord
le député d'Outremont, ensuite le député de
Duplessis et le député de...
M. Fortier: Merci. J'aurais quelques questions.
Le Président (M. Bordeleau): ... Notre-Dame-de-Grâce
également, à la suite. M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Sur la lancée du débat qu'on vient de
faire, vous reconnaîtrez, M. Ayoub, que ce sont les mêmes
contribuables au Québec qui paient, d'une part, les investissements dans
Pétro-Canada et, d'autre part, les investissements dans SOQUIP. Dans cet
ordre d'idées, pour le contribuable qui a de la difficulté
à comprendre l'enchevêtrement des contributions - c'est une
question sur les faits pour respecter la nature des questions que le ministre
voudrait bien qu'on pose à SOQUIP - avez-vous des rencontres
régulières avec Pétro-Canada? Je sais que, dans le secteur
privé, il arrive que, même lorsqu'on est compétiteur, on se
rencontre pour connaître ce qui se fait et les objectifs. Comme on peut
le faire peut-être entre compétiteurs, mais étant des
compagnies de la couronne, avez-vous des rencontres régulières
avec Pétro-Canada justement pour essayer de définir vos mandats
respectifs et faire en sorte que la contribution de chacune de ces compagnies
de la couronne soit dans le meilleur intérêt du contribuable
québécois?
Le Président (M. Bordeleau): M. Ayoub.
M. Ayoub: Je voudrais donner la parole à M. Girard.
Le Président (M. Bordeleau): M. Girard.
M. Girard: Je dois dire que nos rencontres avec
Pétro-Canada n'ont été que dans le cadre du mandat que
nous avons, c'est-à-dire que jusqu'ici, à moins que la loi ne
soit modifiée, nos démarches avec Pétro-Canada
étaient à l'intérieur du mandat dont la majeure partie des
activités, pour ne pas dire toutes, étaient dans l'exploration.
De fait, non seulement nos rencontres ont été amicales, mais nous
avons même eu des projets d'association avec elle. Comme je vous le
disais, il y a même un forage que nous faisons conjointement avec elle et
d'autres compagnies présentement.
M. Fortier: Ma question portait sur l'assurance
d'approvisionnement. Comme M. Ayoub disait que c'était là un
objectif, je me posais la question à ce moment-là: S'assurait-on
que les contribuables ne paient pas deux fois pour les mêmes travaux ou
qu'il n'y ait pas une duplication inutile? C'est pour cela que je posais ma
question, dans le sens d'une meilleure collaboration entre deux compagnies de
la couronne.
M. Girard: Comme je vous le dis, parce que nous n'avions pas le
mandat dans le domaine de l'approvisionnement, nous n'avons pas fait de
démarches pour tenter d'obtenir de l'approvisionnement. Puisque nous
n'avions pas le mandat, cela aurait été illégal. Nous
avons cependant fait des approches avec certains raffineurs. Vous savez qu'on
reconnaît que 35% et peut-être plus -certains économistes
prétendent 50% - du pétrole qu'autrefois les raffineurs et les
multinationales pouvaient aller chercher eux-mêmes sur le marché
seront maintenant négociés d'État à État, ce
qui veut dire que, si les raffineries de Montréal, par exemple, veulent
continuer d'avoir la même quantité de brut à raffiner elles
vont avoir à utiliser les services d'une société
d'État pour négocier.
En tant que société du Québec qui a
été fondée cinq ans avant Pétro-Canada, qui a de
bonnes relations, au besoin, avec Pétro-Canada, SOQUIP pense qu'elle a
une monnaie à offrir pour la sécurité d'approvisionnement
que d'autres compagnies ou que même Pétro-Canada n'auraient pas.
Je cite, par exemple, le fait que beaucoup de pays africains où nous
avons l'intention de faire des démarches pour tenter d'obtenir de
l'approvisionnement ne nous demandent pas de l'argent sur le marché. Ils
pourraient tout aussi bien confier à Pétro-Canada le soin de
l'approvisionnement en brut s'il s'agissait simplement d'entrer du brut au
Canada. Mais ces pays veulent échanger des services techniques. C'est
une monnaie qu'au Québec on peut offrir d'une façon un peu
spéciale. Parce qu'un grand nombre de ces pays ne travaillent qu'en
français, c'est une monnaie particulière que nous avons de
pouvoir offrir, en français, des services techniques, que ce soit
d'Hydro, que ce soit autre chose.
M. Fortier: Ils n'ont pas besoin de SOQUIP pour cela.
M. Girard: C'est un type de monnaie qu'on pense qu'ils pourraient
utiliser. Je crois que les approches discrètes qu'on a eues autour de
Pétro-Canada, si vous voulez une réponse complète à
votre question, démontrent qu'elle n'avait pas d'objection du tout. En
effet, quand il y aura une crise du pétrole, ce que chacun pourra
accrocher quelque part, tout le monde sera bien content de pouvoir en trouver
quelque part.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Fortier: Si vous me le permettez, j'aurais une deuxième
question portant sur l'objectif de rentabilité. On a posé la
question à SOQUEM tout à l'heure. Vous avez entendu la
réponse. On nous a répondu: Oui, il y a un objectif de
rentabilité. Cela a été discuté avec le ministre.
J'ai de la misère à voir comment il pourrait y avoir un objectif
de rentabilité ici. Je me demande si on a mis cela dans le projet de
loi comme décor seulement. De fait, y a-t-il un objectif de
rentabilité? De quelle façon pouvons-nous le définir?
M. Girard: Je dois dire que nous demandons depuis près de
dix ans un objectif de rentabilité à l'intérieur de
SOQUIP.
M. Fortier: Est-ce possible de définir ce que vous avez
proposé? C'était ma première question.
M. Girard: C'est très possible. Vous savez que, dans les
différentes actions que l'on peut exercer dans le monde du
pétrole - par exemple, dans l'exploration, c'est plus difficile - c'est
bien sûr que, si nous n'avions pas eu - et je fais une réserve -
comme mandat premier de faire l'inventaire du potentiel pétrolier du
Québec, si c'avait été mon argent personnel, je vous jure
honnêtement que je l'aurais probablement investi au Moyen-Orient, au
départ. Donc, si je n'avais eu qu'un mandat de rentabilité au
départ, on n'aurait pas investi au Québec; on aurait investi
ailleurs. Ceci ne s'applique pas par contre à toutes les autres
activités touchant le pétrole. Je pense à la distribution
et au domaine du raffinage; il y a plusieurs activités du pétrole
où c'est éminemment rentable et on le sait à voir le bilan
des compagnies de pétrole. À partir de là, nous pourrions
avoir un autofinancement qui nous éviterait, en tant que
société d'exploration, de toujours aller demander de l'aide au
fonds consolidé pour nos projets d'exploration.
M. Fortier: J'ai une dernière question.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: Dans le dernier état financier, -on n'a pas le
tout dernier, mais celui de l'an dernier - il y avait eu des commentaires du
Vérificateur général sur le fait qu'il faudrait changer le
mode de financement retenu jusqu'à présent avant même de
faire une capitalisation additionnelle. Le Vérificateur
général faisait des commentaires justement sur le fait qu'on
investissait en capitalisation des dépenses qui sont des dépenses
courantes dans des sociétés pétrolières. M. Girard,
puis-je vous poser une question? Si le mode de comptabilisation a
été modifié, pour quelle raison vient-on ici - si
ça n'a pas été fait - présenter une demande
d'investissements additionnels sans que cela ait été fait?
M. Girard: La pratique pétrolière pour les
compagnies, vous savez que ce que nous avons comme actif de compagnie
pétrolière, ce sont les permis. C'est la seule valeur de ces
permis, si on peut dire, qui constitue un bien, c'est-à-dire que si on
voulait liquider demain matin, par exemple les Basses-Terres ou ailleurs, on le
vendrait combien? La seule valeur qu'on a, c'est l'habillage technique qu'on
lui fait, c'est-à-dire les sommes d'argent qu'on dépense en
recherche, en exploration pour habiller des permis. Je vais vous donner un
exemple, celui d'un permis que nous avons pris pour un forage. Quand nous
demandons à un associé de venir, pour 50% de droits dans le
permis, dépenser $3,000,000 ou $4,000,000 - ce qui veut dire qu'on
divise par le nombre d'acres qu'il y a dans ce permis - cela veut dire, pour
simplifier, qu'on lui perçoit $12 l'acre pour se qualifier pour venir
faire des travaux avec nous, ce qui veut dire que la valeur que l'on donne
à notre domaine minier pour ce projet est maintenant $12 l'acre. S'il y
a 50,000, 100,000 ou 200,000 acres dans un projet, là, on peut dire: II
vaut autant de fois $12, c'est-à-dire qu'en recherche
pétrolière la valeur des terrains en exploration est basée
sur ce que sont prêts à investir nos associés dans ces
projets. Ce qui veut dire qu'au bilan de toutes les sociétés
pétrolières on capitalise les travaux de recherche qui, partout
ailleurs, pourraient passer pour des dépenses jusqu'à ce que, au
bout de notre programme de recherche, on ait déterminé qu'on a
suffisamment dépensé d'argent et qu'on remet le permis au
gouvernement parce qu'on ne veut plus faire de travaux là-dessus.
À ce moment-là, on dit à notre vérificateur:
Veux-tu rayer de notre actif le montant de... c'est-à-dire ce montant
qui avait été des dépenses, qu'on avait investi dans un
projet et que maintenant on sent n'être plus un actif parce qu'on
considère que ça n'a plus de valeur.
C'était peut-être difficile à percevoir ici pour les
vérificateurs. On a donc demandé à rencontrer des
"auditeurs" d'expérience internationale qui l'avaient fait pour toutes
les grandes compagnies pétrolières et on a maintenant
trouvé avec le vérificateur un accommodement qui, je crois, va
satisfaire ces exigences.
M. Fortier: Dans le prochain projet financier, le
Vérificateur général va-t-il encore faire des commentaires
défavorables là-dessus?
M. Girard: Non, le problème va être
résolu.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
remercier M. Girard pour son exposé de la situation. Je pense qu'il a
fait pas mal le tour du dossier en rapport avec le travail que fait SOQUIP.
Vous avez fait un exposé de la situation qui se rapportait surtout au
golfe, disons aux Basses-Terres, et à l'Ouest du Canada, soit l'Alberta,
si ma mémoire est bonne. Je voudrais savoir ce que SOQUIP est
allée faire dans les Maritimes et dans l'Est du Canada en y effectuant
des travaux d'exploration de plus de $12,000,000. Dans quelle province cela
a-t-il été fait?
M. Girard: Nous sommes allés en Nouvelle-Écosse,
à l'Île-du-Prince-Édouard et nous sommes allés
surtout travailler à ce fameux projet Hekja qui n'est pas
terminé, qui est dans cette région actuellement, que tout le
monde dit miracle des grandes découvertes, en association avec plusieurs
compagnies. Sur les $12,000,000 investis dans l'Est et les Maritimes, il y a
près de $7,500,000 investis dans le seul puits de Hekja, sur lequel je
ne puis pas donner de renseignements parce que les travaux ne sont pas
terminés.
Cependant, les autres forages que nous avons faits dans les Maritimes
l'ont été pour une raison toute simple, c'est que la
géologie, comme on la connaît dans le golfe, s'apparente
énormément à la géologie sur terre qu'il y a
dans les provinces maritimes. C'est-à-dire que, pour aller voir ce qui
se passe en dessous, on pouvait, en forant sur terre, dans les Maritimes, au
coût de $1,000,000, faire un puits, alors que, si on avait fait le
même puits dans la partie maritime, cela nous aurait coûté
$20,000,000. Alors, pour aller chercher les renseignements qui nous sont
indispensables pour être capables de continuer le développement de
l'exploration de l'estuaire, il fallait aller dans ces coins.
Deuxièmement, il y avait eu antérieurement, par beaucoup
de compagnies de pétrole, de la recherche faite dans les Maritimes et
qui a prouvé jusqu'à maintenant des réserves de gaz qui ne
sont peut-être pas encore assez rentables pour les mettre sur le
marché, mais qui sont intéressantes et qui légitimaient la
démarche qu'on a faite.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Merci. Maintenant, sachant très bien que
SOQUIP, d'après votre exposé, fait affaires avec d'autres
provinces du Canada et donc d'autres compagnies qui existent dans ces
provinces, ce que je voudrais savoir, c'est si, sur une base plus
élargie, SOQUIP fait actuellement affaires avec d'autres pays que les
provinces du Canada et le Canada lui-même. Si oui, quels sont les pays
où SOQUIP entend le plus faire affaires dans l'avenir? Est-ce qu'il
serait possible de savoir ça, M. Girard?
M. Girard: Dans un double volet. Dans le premier volet, nous
agissons sur demande. Un certain pays d'Afrique nous demandait l'aide technique
qu'il n'avait pas. Nous avons envoyé des équipes volantes qui
sont allées très ponctuellement pour de petits travaux de
recherche rémunérés, comme on l'est partout ailleurs,
lorsqu'on fournit de l'aide technique pour rendre des services à la
demande de certains pays, mais cela a été assez réduit.
Cependant, comme vous le savez, M. Ayoub, qui dirige une activité
annuelle mondiale à l'Université Laval qui réunit des
pétroliers du monde entier qui viennent ici étudier les questions
pétrolières, nous a valu cette année une rencontre avec
une dizaine de pays africains qui sont venus nous voir, qui ont dit: Votre
gouvernement vous donne le pouvoir de faire de l'exploration en dehors du
Québec, exploration qui sera rattachée à de
l'approvisionnement. On a tel problème. Seriez-vous prêt à
nous aider? Alors, nous avons commencé une première
démarche exploratoire avec des pays - je vais vous en
énumérer quelques-uns - en vue de déterminer si vraiment
les services qu'on pourrait leur rendre du point de vue technique sont
possibles, quel est vraiment le besoin, par l'inventaire du
développement de la recherche pétrolière dans ces pays.
J'en nomme quelques-uns: le Cap-Vert, le Gabon, le Congo, la
Guinée-Bissau, le Togo, l'Angola, la Guinée équatoriale et
certains autres pays cibles dont nous étudions actuellement le potentiel
pétrolier, afin de déterminer si vraiment cela vaudrait la peine
pour nous de faire des démarches en échange de services
techniques, ce qui pourrait nous garantir un approvisionnement de
pétrole.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis, je veux seulement vous rappeler qu'il est midi et demi. Normalement,
le mandat de la commission se terminerait, à moins que je n'aie le
consentement des membres, parce que l'Assemblée nationale siège
à 14 heures. Il reste quelques intervenants. Si nous avions le
consentement, nous pourrions continuer pendant quelques minutes, en vous
demandant d'être le plus concis possible.
M. le député de Duplessis.
M. Perron: Seulement une dernière question sur la loi no 2
qui a été déposée à l'Assemblée
nationale, par rapport à la loi qui existe actuellement. Le projet de
loi no 2 n'ayant pas encore été sanctionné, est-ce que
SOQUIP a le droit, au moment où nous nous parlons, de signer des
contrats avec d'autres compagnies , des compagnies qui pourraient exister au
Canada ou encore à l'extérieur du Canada?
M. Ayoub: Si vous parlez de la question de l'approvisionnement de
pétrole, non, nous n'avons pas le mandat. Tant que la loi ne nous l'aura
pas donné, nous ne pouvons pas avoir d'activité précise
dans ce domaine.
M. Perron: D'accord. Donc, c'est aussi une demande par SOQUIP de
faire en sorte qu'elle puisse signer de tels contrats d'approvisionnement en
hydrocarbures ou quoi que ce soit.
M. Ayoub: C'est-à-dire que, si les raffineries, demain
matin - vous savez qu'actuellement il y a un petit surplus qui pourrait durer
peut-être encore un an - avaient de gros problèmes
d'approvisionnement, elles seraient obligées de demander de l'aide de
sociétés d'État. Si les raffineries nous demandaient,
demain matin, de commencer à faire des démarches, dans ce
cas-là, nous serions tout simplement un "broker". Nous n'avons pas
investi, à SOQUIP, dans le domaine de l'approvisionnement ou de la
sécurité. Nous serons un "broker" qui ira acheter, en tant que
société d'État pour les raffineurs qui nous donneront
leurs commandes et leurs besoins. Si nous avions, demain matin, un tel type de
commande, on ne pourrait pas répondre oui parce qu'on n'a pas encore le
mandat. (12 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Girard.
M. Fontaine: On parle depuis tantôt d'assurer une
sécurité d'approvisionnement dans le domaine du pétrole et
c'est d'ailleurs pour cela que votre société demande une
augmentation de capital. On nous dit également qu'il y a une autre
société canadienne qui s'appelle Pétro-Canada qui
travaille dans cela. Ma question est de savoir quel est le pourcentage du
pétrole que vous devrez aller négocier à
l'extérieur du Canada ou même à l'intérieur du
Canada pour assurer une sécurité d'approvisionnement, pour
apaiser les craintes qu'on a soulevées tantôt, parce qu'on a
aussi, il faut bien y penser, d'autres énergies qu'on est en train de
développer au Québec, surtout
l'hydroélectricité.
Normalement, les demandes en pétrole devraient au moins se
stabiliser, si elles ne diminuent pas. Quel est le pourcentage, en tenant
compte de ce
que Pétro-Canada fait, de l'approvisionnement que SOQUIP va
être obligée d'aller chercher?
M. Girard: M. le Président, pour répondre à
cette question de manière rapide, il y a plusieurs facteurs qui entrent
en ligne de compte. Le premier facteur, c'est effectivement l'effet de
substitution. Ce que M. le député a cité est tout à
fait exact, dans le sens que plus on va vers une source autochtone
d'énergie, mieux c'est. Cela assure la sécurité des
approvisionnements. Cela a été visible dans le livre blanc du
gouvernement.
Maintenant, dans la limite de ce qui reste à approvisionner en
pétrole, il est généralement admis qu'actuellement le
chiffre que je présente, ce n'est pas 35%, mais 50% qui passent par des
contrats d'État à État. Les compagnies
pétrolières multinationales elles-mêmes font des
représentations auprès des différentes
sociétés d'État qui existent partout dans le monde
maintenant chez les pays consommateurs. Peut-être pas aux
États-Unis - si on exclut les États-Unis - mais partout ailleurs,
elles font des représentations par l'intermédiaire des
sociétés d'État pour aller chercher du pétrole des
autres sociétés d'État des pays producteurs. Quel serait
le pourcentage? Il est difficile de le dire, sauf que plus le pourcentage qui
passe par le canal ou le marché des sociétés d'État
augmenterait, plus l'implication éventuelle, si la modification est
adoptée, serait grande, à la satisfaction des mêmes
sociétés plurinationales qui ne peuvent plus aller
s'approvisionner directement du pétrole international des pays
producteurs. Voilà donc la situation sur le plan de l'approvisionnement
futur.
M. Fontaine: Une brève question additionnelle. Est-ce que
SOQUIP, que nous considérons comme une société
d'État québécoise, sera considérée comme une
société d'État au niveau international? Quand on parle de
négociations d'État à État, habituellement, c'est
de pays à pays. Est-ce que SOQUIP va avoir ce statut, sera connue
internationalement comme une véritable société
d'État, comparativement à Pétro-Canada?
M. Ayoub: Pour répondre à cette question, ce n'est
pas d'État à État; c'est de société
d'État à société d'État. Les
négociations se font de société d'État à
société d'État. Maintenant, il arrive - par exemple,
l'Allemagne fédérale est là pour nous renseigner - qu'il y
ait des sociétés d'État qui sont des
sociétés de province. Par exemple, la Bavière a conclu un
accord avec l'Arabie Saoudite, il y a un an de cela, pour s'approvisionner -
c'est une société parapublique de la région de la
Bavière, de l'État de Bavière -de 50,000 barils par jour.
Cela fait l'affaire de tout le monde, c'est-à-dire de l'Allemagne
fédérale, en général, et des compagnies
pétrolières qui diminuent au fur et à mesure leur
capacité d'approvisionner directement le marché.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le
député?
M. Fontaine: Seulement une dernière question.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Rapidement, s'il
vous plaît.
M. Fontaine: Avez-vous déjà des démarches
entreprises, par exemple, auprès du Mexique? Est-ce qu'il y aurait des
ententes, à la suite de l'adoption de cette loi, qui pourraient
être imminentes, en vue d'un certain approvisionnement?
M. Ayoub: Encore une fois, sur cette question, tant et aussi
longtemps que la modification de la loi n'est pas adoptée par
l'Assemblée nationale, il serait présomptueux et illégal,
de la part de SOQUIP, d'aller vraiment négocier en bonne et due forme ou
bien des contrats d'approvisionnement pour les sociétés, encore
une fois pour les raffineurs de Montréal, ou des contrats d'exploration.
Ceci pourrait, éventuellement, se faire une fois que la loi aura
été adoptée. Si la loi est adoptée - c'est la
seconde partie de la réponse - il faut voir, à travers les
possibilités qui existent au Mexique ou ailleurs, au Venezuela ou dans
l'Afrique noire francophone ou même ailleurs, quelles sont les
possibilités, tout en sachant très bien que le contexte
international ne permet pas de se prendre pour d'autres. Il faut aller miser
là où les résultats peuvent être les plus probants
et là où il n'y a pas une queue énorme à faire pour
arriver à avoir des barils de pétrole. Les compagnies des pays
africains, les présidents-directeurs généraux de ces
presque 17 pays africains qui étaient réunis ici au mois
d'août dernier, pendant quinze jours, pour avoir une certaine formation
ou reformation dans le domaine pétrolier, à l'Université
Laval, sont tous unanimes et désireux de pouvoir diversifier leurs
relations avec les pays consommateurs habituels ou avec les compagnies
pétrolières internationales pour aller ailleurs et,
effectivement, comme le disait M. Girard, négocier ou échanger
non pas des dollars contre des barils de pétrole seulement, ce que tout
le monde peut faire, mais négocier des ventes de technologie dans une
langue qui leur est accessible, c'est comme cela, et qu'ils
préfèrent - si on a deux préférences, ils
préfèrent cela - que de faire uniquement des actions ponctuelles,
de pouvoir enlever une quantité de barils de pétrole ce que toute
société peut faire.
M. Girard: Juste une petite remarque qui pourrait peut-être
compléter le sens de votre question. C'est que nous avons fait une
démarche auprès des raffineurs parce que, dans le domaine de
l'approvisionnement, SOQUIP n'entend pas se substituer aux autres compagnies
privées. Nous entendons jouer le rôle qui se joue maintenant par
des sociétés d'État à la demande des
sociétés privées. C'est donc une première
démarche qu'on a faite auprès de quelques raffineurs en leur
demandant: Si on avait le mandat pour aller négocier, seriez-vous
intéressés à utiliser nos services? Ceux qu'on a vus
étaient unanimes à dire: C'est bien sûr qu'à partir
du moment où cela prend une société d'État pour
nous aider à maintenir notre approvisionnement on sera heureux de vous
confier cela. C'est pour cela qu'on demande un rôle de "broker"; on ne
demande pas un rôle d'acheteur pour maintenir des réserves.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Lotbinière, en vous rappelant qu'on a eu le consentement.
M. Biron: Je vais être très bref, mais je tiens
à noter, M, le Président, que le seul puits de gaz naturel en
exploitation commerciale à l'heure actuelle au Québec est dans
Lotbinière, et c'est autour de cela que je veux poser ma question
à M. Girard. Vous avez dit tout à l'heure que l'inventaire des
Basses-Terres était terminé. On en voit faire à l'heure
actuelle, pourtant. Vous commencez une préparation pour faire des
inventaires comme on en faisait autrefois à Saint-Flavien, en
particulier, et dans la région de Saint-Louis-de-Blandford, à
Villeroy aussi. Est-ce qu'on continue l'inventaire - je vais vous poser mes
trois questions; vous pourrez peut-être me répondre - dans cette
région? Est-ce que c'est tout simplement de l'inventaire ou si on va se
décider à faire des forages, encore une fois? On a d'autres puits
où on a trouvé du gaz naturel, en particulier, pas tellement loin
du puits qui est en exploitation à Saint-Flavien. On en a d'autres
à Villeroy, on en a dans d'autres régions de Lotbinière.
Est-ce qu'on peut mettre en exploitation d'autres puits et offrir à peu
près le même service qu'on offre à d'autres entreprises,
comme les services qu'on offre présentement à Brique Citadelle de
Beauport qui peut s'approvisionner avec des camions-citernes en gaz naturel de
Saint-Flavien pour son usine de Beauport?
M. Girard: Nous avions un programme de plusieurs puits pour
tenter de déterminer le potentiel. Les résultats n'étant
pas ce qu'on espérait, il faut toujours maintenir nos décisions
en tenant compte du montant de dollars investi pour les chances de
récupération qu'on a. Jusqu'à maintenant, on a atteint ce
niveau de décision du fait qu'on va continuer au ralenti notre
exploration dans les Basses-Terres jusqu'à ce que les techniques nous
permettent de pouvoir explorer ces fameuses régions fracturées
d'une façon plus efficace. Donc, nous avons un programme de
continuité. Nous avons trouvé du gaz à Villeroy, comme
vous le savez. La quantité rentable d'un puits de gaz dans cette section
dépend de deux facteurs. De la proximité d'un marché,
d'abord. Il n'y a pas encore de marché pour le gaz au Québec. On
trouverait du gaz et on ne saurait pas à qui le vendre. Il faudrait
commencer par construire des canalisations pour trouver des clients. Quand le
gazoduc sera construit, s'il est construit sur la rive sud, qu'il passe
près des puits qu'on a et qu'on puisse les y rattacher, ce sera
peut-être rentable de sortir le pétrole. En d'autres termes, c'est
la vieille loi de la recherche. Il peut y avoir pour $10,000,000 de gaz dans
chacun des puits ou $100,000,000, mais si cela coûte $110,000,000 pour le
mettre sur le marché, on le laisse là. Tout dépend du
développement des politiques de l'énergie qui nous permettront de
le mettre sur le marché et du prix du gaz.
M. Biron: Voici ma dernière question. Est-ce qu'on peut
offrir à d'autres entreprises les mêmes services qu'on offre
présentement à Brique Citadelle où on transporte le gaz
par camion? Parce qu'il y a beaucoup d'entreprises de la région, dans un
rayon de 40 à 50 milles qui seraient prêtes à avoir le
même service qu'on offre à Brique Citadelle
présentement.
M. Girard: On l'envisage. On a fait des démarches
auprès d'autres types d'entreprises. Il s'agit de déterminer une
rentabilité; et là, comme vous savez, par exemple, on a
joué assez serré sur la rentabilité, si on doit subir une
taxe sur le gaz, cela remet en question tous nos calculs, mais l'étude
se continue vis-à-vis du client particulier, mais très
localement.
Le Président (M. Bordeleau): Une question?
M. Fortier: Une seule question. Je voudrais remercier M. Ayoub et
M. Girard. Ce dernier a très bien répondu techniquement à
toutes nos questions.
La question que j'ai pour le ministre, c'est celle-ci. Je sais que le
ministre ou le conseil d'administration, je ne sais pas, a engagé un
consultant en administration pour aller à l'extérieur. Pourquoi
ne pas faire la promotion de l'intérieur de SOQUIP au lieu d'aller
à l'extérieur?
M. Bérubé: Ce n'est pas du tout exclu, au
contraire, dans la mesure où le consultant qui a été
engagé... D'ailleurs, c'est assez nouveau, contrairement à
l'habitude traditionnelle qu'on a connue dans les sociétés
d'État, de faire appel à un consultant pour essayer de recruter
ce qui nous apparaîtrait le meilleur candidat. Les candidats de
l'intérieur, évidemment, ne sont pas éliminés,
puisque cela fait partie du mandat spécifique du consultant. Ce dernier
considère aussi bien les candidats de l'intérieur que ceux de
l'extérieur.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie Messieurs.
Vous avez une autre question M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce?
M. Scowen: Oui, s'il reste deux minutes.
Le Président (M. Bordeleau): On a obtenu le consentement.
Si vous voulez avoir le temps de déjeuner, cela ne me dérange
pas. On recommence à 14 heures. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, une petite dernière.
M. Bérubé: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je vous ferai remarquer que le critique en
matière énergétique vient de vous donner deux minutes.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: J'ai été très
intéressé par vos commentaires en ce qui concerne la
sécurité d'approvisionnement et les liens avec le gouvernement
fédéral. Mon collègue d'Outremont a soulevé la
question très importante des chevauchements possibles mais moi, j'ai
pensé qu'il y a un autre aspect qui sera même plus
intéressant pour la population, c'est la question de la
responsabilité.
Je pense que dans le régime fédéral, au moins pour
cette question d'approvisionnement du pétrole qui sera peut-être
quelque chose de très sérieux dans les années à
venir, les gens ont le droit de savoir qui est responsable, le gouvernement
fédéral ou le gouvernement provincial. Parce qu'il peut arriver
à un moment donné, que l'on manque de pétrole et on doit
pouvoir dire:
C'est la faute du fédéral ou c'est la faute du
gouvernement du Québec. J'ai écouté attentivement M.
Girard et vous aussi, M. Ayoub. Vous avez parlé de votre rôle,
mais dans mon esprit ce n'était pas clair. À un moment
donné, M. Girard semblait dire: Nous avons la responsabilité de
l'approvisionnement du pétrole francophone, en effet, parce que nous
avons des liens serrés avec les pays africains.
M. Bérubé: Est-ce qu'il chauffe mieux que
l'autre?
M. Scowen: Je pose une question assez sérieuse, s'il vous
plaît, je pense. Pendant le référendum, quelqu'un disait
que le pétrole latin est plus facile pour le Québec à
attraper et toute ces histoires. Je pense qu'au fond les gens vont exiger du
gouvernement qu'on soit approvisionné avec du pétrole
francophone, anglophone, latin, n'importe quel.
La question que je veux vous poser est la suivante: Est-ce que dans
votre esprit nos responsabilités dans l'approvisionnement, c'est surtout
de soutenir ou combler les trous des initiatives fédérales? J'ai
l'impression que le fédéral a l'intention de prendre la
responsabilité de l'approvisionnement du pétrole au Canada, selon
le gros livre qu'on connaît tous. Est-ce que vous avez l'idée de
jouer un rôle très spécifique à l'intérieur
de cette affaire ou si vous allez laisser la responsabilité globale au
gouvernement fédéral pour vous permettre de dire n'importe quand,
si on manque de pétrole: C'est la faute du fédéral? Ou
est-ce que vous allez commencer d'agir en parallèle, dans un sens qui
peut donner lieu à une certaine confusion parmi la population et
même parmi les compagnies sur la responsabilité finale, globale de
cet approvisionnement? Je n'ai peut-être pas posé la question
comme il le faut, mais je pense que vous en comprenez certainement le sens. (12
h 45)
M. Girard: Je pense qu'en tant que société
d'État on est disponible, au service du gouvernement du Québec,
pour assumer à l'intérieur des politiques d'énergie qui
vont le déterminer le rôle qu'il va nous confier. Est-ce que ce
rôle maintenant est un rôle qui peut entrer en conflit avec un
autre? Nous, on dit qu'à la façon dont on a marché
jusqu'à maintenant on a pu fonctionner en accord avec les gens
présents parce qu'il y a moyen d'avoir des consensus
d'intérêt lorsqu'il s'agit de crises qui ont la gravité de
la rareté du pétrole dans le monde, premièrement;
deuxièmement, dans la mesure où notre actionnaire nous donne un
mandat avec comme, je le disais, une monnaie spéciale qui peut
probablement aider Pétro-Canada qui, bien sûr, va avoir le mandat
général d'approvisionnement. Je pourrais, tout à
l'inverse, dire: Est-ce qu'on ne devrait pas suggérer à notre
actionnaire, parce qu'il y a une société d'État maintenant
fédérale qui s'occupe de ce domaine, de dire: Donnez-lui aussi
Hydro, donnez-lui toutes les formes d'énergie? Ce ne serait pas notre
décision à nous, parce que ce serait une décision
politique. La seule chose que je peux dire, c'est que, dans tous les domaines
où il y a des juridictions parallèles comme vous dites, qu'on
prenne le commerce ou autres, cela n'empêche pas toutes les provinces du
Canada d'avoir des maisons du commerce à Paris, en Angleterre, partout
dans les autres pays pour défendre, à l'intérieur du grand
mandat du fédéral quant au commerce international, les
intérêts particuliers des provinces. Nous, on est un outil, et on
fera ce qui nous est demandé.
Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais remercier M.
Ayoub et M. Girard de s'être prêtés à nos questions
et demander - M. le ministre, si vous voulez me donner deux minutes, je n'ai
pas fini - au rapporteur de la commission de faire rapport à
l'Assemblée nationale. La commission de l'énergie et des
ressources ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 47)