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Version finale

31e législature, 6e session
(5 novembre 1980 au 12 mars 1981)

Le jeudi 11 décembre 1980 - Vol. 23 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 1 - Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'exploration minière


Journal des débats

 

(Douze heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, messieurs.

La commission parlementaire de l'énergie et des ressources entreprend donc ses travaux aujourd'hui aux fins d'étudier article par article les projets de loi suivants, à moins qu'il n'y ait avis contraire: les numéros 1, 9, 6, 2. Projet de loi no 1, Loi modifiant la Loi de la Société québécoise d'exploration minière; projet de loi no 9, Loi sur l'économie de l'énergie dans le bâtiment; projet de loi no 6, Loi modifiant la Loi sur le crédit forestier et le projet de loi no 2, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'initiatives pétrolières.

Les membres de la commission pour la séance de ce matin sont M. Bérubé (Matane), M. Biron (Lotbinière), M. Bordeleau (Abitibi-Est) remplacé par M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Desbiens (Dubuc), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Fortier (Outremont), M. Grégoire (Frontenac), M. Perron (Duplessis), M. Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie), M. Rancourt (Saint-François), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Est-ce que vous avez des suggestions pour nommer un rapporteur de la commission? M. le député de Duplessis? Cela va? Le rapporteur sera donc M. Perron (Duplessis).

À cause de l'heure, est-ce que j'aurais une suggestion des membres? M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Si vous remarquez bien, les membres de l'Opposition sont présents à la commission parlementaire pour entreprendre l'étude article par article des projets de loi. Nous remarquons que le ministre n'est pas ici peut-être qu'il est retenu ailleurs. Nous pourrions faire la suggestion pour rendre service , parce que je pense bien qu'on ne pourrait pas valablement commencer à étudier ce projet de loi article par article sans la présence du ministre, de suspendre les travaux de cette commission jusqu'à 15 heures.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Effectivement, M. le ministre... D'abord, il faudrait mentionner que la commission a été lancée comme ça il y a quelques minutes, de sorte qu'il est possible que les gens n'aient pas pu se rendre. J'accepterais la suggestion.

M. Ciaccia: Je fais motion pour que les travaux soient suspendus jusqu'à 15 heures.

Le Président (M. Bordeleau): Les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 38)

(Reprise de la séance à 15 h 12)

Le Président (M. Bordeleau): La commission parlementaire de l'énergie et des ressources reprend ses travaux interrompus ce matin; à moins que j'aie des demandes de substitution, les membres seront les mêmes. Comme nous l'avions prévu ce matin, j'avais donné un ordre préférentiel des projets de loi à étudier, en commençant par le no 1. Cela tient toujours, M. le ministre, pas de problème?

M. Bérubé: Cela va très bien pour moi.

Discussion générale

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle donc le projet de loi no 1, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'exploration minière, et je demanderais au ministre s'il a des commentaires préliminaires avant d'entamer l'étude du projet de loi, article par article.

M. Bérubé: M. le Président, il s'agit, en fait, d'une refonte de la loi, mais qui ne modifie pas vraiment beaucoup de choses au sein de la société, si ce n'est de modifier un objet qui est maintenant de permettre l'exploitation d'un gisement seule, dans le cas où SOQUEM l'a découvert seule, et de moderniser la loi pour la rendre un peu conforme à celle des autres sociétés. Je pense qu'il n'y a pas vraiment de points à soulever. On pourra peut-être aborder, à un moment donné, quand on arrivera à l'article

en question, le montant du capital-actions autorisé pour la société, si on veut avoir des discussions là-dessus, mais, pour autant que je suis concerné, je n'ai vraiment rien d'autre à souligner.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que le ministre a des amendements à la loi...

M. Bérubé: Oui.

M. Ciaccia: ...et est-ce qu'il pourrait les déposer maintenant?

M. Bérubé: Certainement. Il s'agit d'amendements pour bien clarifier la pensée du gouvernement quant à deux articles qui ne sont pas très clairs, malheureusement, l'article 21, essentiellement, les points d) et e), et je pourrais peut-être...

Le Président (M. Bordeleau): Je peux en faire faire des photocopies.

M. Bérubé: Je peux peut-être en garder une.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre...

M. Bérubé: Je peux peut-être les lire.

Le Président (M. Bordeleau): À partir du moment où l'amendement sera déposé, chacun des membres pourra en prendre connaissance et on l'étudiera comme tel au moment de la discussion sur l'article 21.

M. Bérubé: Parfait.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on peut entreprendre, dès maintenant, l'étude de l'article 1? Article 1. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: À l'article 1, M. le Président, une des raisons pour lesquelles les objets de la société ont été modifiés, c'est pour légaliser, d'une façon, certaines activités de SOQUEM.

M. Bérubé: En particulier. (15 h 15)

M. Ciaccia: Le premier commentaire qu'on pourrait faire sur cet aspect, ce serait, premièrement, qu'on trouve que c'est une façon de procéder qui n'est pas tout à fait conforme à la loi de dire: qu'un projet de loi autorise une société d'agir d'une certaine façon. Si la société voulait entreprendre des projets qui vont à l'encontre de sa charte, de ses pouvoirs, je crois que ce serait l'obligation du gouvernement de venir devant l'Assemblée nationale et d'autoriser une telle opération avant qu'elle soit entreprise par la société. Ce que je comprends, d'après le rapport du Vérificateur général, c'est que l'opération est déjà en marche. C'est ex post facto actuellement.

M. Bérubé: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.

M. Bérubé: Je ne veux pas faire de politique, mais, effectivement, la seule mine que SOQUEM a exploitée illégalement, c'est la mine Louvem qui était sous votre juridiction puisque c'est vous qui avez autorisé SOQUEM à exploiter illégalement une mine seule. C'est ce que le vérificateur a souligné.

Dans le cas de la mine de sel aux Îles-de-la-Madeleine, la mine est en développement présentement. L'exploitation n'est pas commencée. Donc, on peut difficilement parler d'une illégalité pour l'instant. La société aurait agi dans l'illégalité au moment de la production, au moment de l'exploitation et de la vente commerciale de sel. Donc, la seule illégalité qui a été commise, c'est celle qui a été commise durant le mandat du Parti libéral de 1970 à 1976.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: ...seulement une précision. Louvem n'avait-elle pas débuté un peu avant 1970?

M. Bérubé: Oui, c'est possible. Alors, on pourrait dire que l'Union Nationale aussi l'a eue.

M. Samson: J'aimerais autant passer la balle à d'autres.

M. Ciaccia: On pourrait dire que vous avez attendu longtemps. Cela fait quatre ans que vous êtes là. Vous attendez assez longtemps pour faire la modification.

M. Bérubé: Vous avez raison. On a attendu malheureusement quatre ans et vous, vous avez trop attendu puisque vous avez été expulsés du gouvernement avant même de vous occuper de vos affaires. C'est peut-être la raison pour laquelle ils vont vous expulser d'ailleurs, mais enfin!

M. Ciaccia: Vous nous direz cela, vos commentaires si vous allez être aussi heureux, après les prochaines élections.

M. Samson: II y en a qui ont été accusés d'avoir agi trop peu trop tard. Vous serez peut-être accusé d'avoir agi trop vite, trop mal.

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! Est-ce que ça va pour l'article 1? M. le député de Mont-Royal?

M. Ciaccia: Non, un instant!

Le Président (M. Bordeleau): Non? M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Vous élargissez les pouvoirs de la société. Avez-vous des projets spécifiques en vue, à part ceux que vous avez mentionnés à l'Assemblée nationale? Vous donnez le droit d'exploitation, de transformation de substances minérales. Avez-vous d'autres projets pour SOQUEM?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Oui. Des projets, il y en a énormément, des projets au stade de la prise de décision à l'exception de la mine de sel aux Îles-de-la-Madeleine, l'expansion de production à Niobec, Silver Stack, la mise en valeur de ce gisement et éventuellement l'implantation d'une usine de traitement du minerai sur le site. Ce sont des projets imminents pour lesquels le conseil d'administration a pris des décisions. Il y aurait deux autres mines envisagées par la société, mais il faudrait que je vérifie avec quelqu'un de la société. Il y a Rouyn-Merger et Chimo. Je pourrais peut-être savoir si le conseil d'administration s'est prononcé quant à leur réalisation.

Une voix: Non, c'est en discussion.

M. Bérubé: C'est discussion. Donc, il s'agit là de projets imminents. D'ailleurs, je pense que le président de la société a indiqué que le conseil d'administration s'apprêterait a prendre une décision, mais ceux que je vous ai mentionnés sont, à ma connaissance, des projets concrets sur lesquels travaille la société. Quant à savoir si nous avons des projets, ah oui! il y en a des quantités innombrables, dans le domaine du carbonate en Gaspésie, dans le domaine des minerais de titane et de vanadium à Chibougamau ou dans la région de Mingan, des projets également dans le secteur de l'or, usine de traitement de l'or. Il y en a beaucoup, effectivement, mais il s'agit essentiellement - c'est difficile de parler plus que je ne le fais présentement - de projets.

M. Ciaccia: Est-ce que vous avez un rôle spécifique pour SOQUEM vis-à-vis de l'entreprise privée? Quel est l'objectif? On change les objets de la société pour leur donner tous les pouvoirs possibles dans ce domaine. Quelle est la politique du gouvernement? Comment voit-il le rôle de SOQUEM vis-à-vis de l'entreprise privée?

M. Bérubé: D'abord, je n'aime pas beaucoup l'idée vis-à-vis de l'entreprise privée, parce que pour moi c'est un concept abstrait qui peut bien faire dans un discours électoral, mais qui, à mon avis, doit être précisé.

Vis-à-vis des multinationales, la grande entreprise minière, c'est un rôle strict de concurrence, d'association quand c'est payant, quand c'est intéressant, de partage de risques. Ce sont des partenaires.

Vis-à-vis de la petite et la moyenne entreprise québécoise, nous avons demandé à SOQUEM - non pas dans le cadre d'une directive, parce que nous l'avions demandé avant que le pouvoir de directives nous soit alloué - d'essayer de s'associer avec des prospecteurs du Québec, de manière à donner une sorte de crédibilité aux programmes de prospection de ces prospecteurs et à faciliter éventuellement le financement de sociétés en commandite par le biais du marché boursier.

C'est effectivement ce que SOQUEM a fait en s'associant avec les frères Vézina pour créer cette société Aiguebelle et c'est également ce que fait la SDBJ en mettant sur le marché une émission d'actions de sociétés pour un montant de presque $12,000,000, si je ne m'abuse. Ce pourrait être le même cas pour ce qui concerne le gisement de Muscocho, à Montauban, où on pourrait avoir une association entre SOQUEM et une autre société en commandite qui, en ce moment, si je ne m'abuse, est déjà en train de mettre des actions sur le marché. C'est vendu.

C'est le deuxième exemple d'une action de SOQUEM à la suite d'une demande que j'avais faite au président de la société, mais je dois dire que je l'avais faite au président de la société avant que le pouvoir de directives existe. Ce ne serait peut-être pas mauvais que cela apparaisse éventuellement dans une directive publique.

M. Ciaccia: Je comprends la position concurrentielle vis-à-vis de certaines industries, certaines compagnies, mais vous voulez travailler en parallèle, inciter des entreprises de moindre envergure. Si c'est vraiment votre intention d'inciter, d'aider ou d'encourager l'investissement dans ce domaine, est-ce que vous avez songé à inciter par des moyens fiscaux ceux qui veulent investir? SOQUEM ne paie pas d'impôt. Pour elle, c'est un avantage qu'elle a par rapport aux autres investisseurs dans le domaine. On critique en disant qu'il n'y a

pas assez d'investissements privés au Québec dans ce domaine. C'est la suggestion qui a été faite par plusieurs, de donner des incitations fiscales, comme ils l'ont fait dans le domaine pétrolier. Ils ont voulu obtenir des investissements, la façon de les avoir, c'était de rendre cela beaucoup plus attrayant.

Est-ce que ce serait dans vos intentions de...

M. Bérubé: Oui. L'Assemblée nationale a d'ailleurs déjà voté des projets de loi à cet effet. Je vous rappellerais par exemple, dans le cas de l'exploration en chantier, que nous avons étendu les présents avantages fiscaux aux fins de la loi minière à l'exploration en chantier, alors qu'autrefois les avantages d'épuisement gagnés que consentait la Loi concernant les droits sur les mines ne s'appliquaient qu'à l'exploration hors chantier. C'est une première démarche pour encourager le développement de nouvelles réserves dans les mines existantes. Pour stimuler, également, le développement de nouvelles sociétés, nous avons introduit, l'année dernière, un projet de loi qui a été adopté par l'Assemblée nationale à l'unanimité, si je ne m'abuse, et qui offre au particulier qui investit dans une société en commandite l'équivalent d'un épuisement gagné, si on veut, c'est-à-dire une allocation de 166% de la valeur des dépenses d'exploration consenties dans une société en commandite aux fins du calcul d'impôt.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je voulais demander si cela a donné des effets déjà.

M. Bérubé: On me dit possiblement oui, parce qu'on s'aperçoit que, effectivement, l'émission, par exemple, d'actions de la SDBJ se fait avec beaucoup de facilité. Même les courtiers se plaignent de ce que c'est une maison de Toronto qui a obtenu l'émission plutôt qu'une maison du Québec, les maisons du Québec se rendant compte maintenant que cela aurait peut-être été bon pour elles, quand on leur a fait la proposition, au départ, de l'accepter et de la faire elles-mêmes au Québec. Mais, de leur plein gré, elles l'ont refusé. Maintenant, il est un peu tard pour revenir en arrière. De l'avis des courtiers que j'ai rencontrés tout récemment, on estime que les incitations fiscales pour susciter des investisseurs sont bonnes, tout à fait adéquates. On estime aussi que probablement il existe des prospecteurs, des géologues valables. Mais on a de la difficulté à se convaincre du côté des courtiers qu'elles peuvent courir le risque de conseiller leurs clients sur des émissions primaires dans le secteur minier. C'est peut-être, pour l'instant, l'obstacle qui reste.

Je pense qu'il va falloir peut-être un an ou deux de fonctionnement pour vraiment savoir si les mesures qu'on a adoptées ont l'impact nécessaire. Mais l'impression que j'ai, c'est que cela devrait en avoir.

M. Ciaccia: Je voudrais poser une autre question...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ...avant que vous donniez la parole à mes collègues. Est-ce qu'il y a une étude de rentabilité qui a été déposée, qui a été rendue publique pour le projet des Iles-de-la-Madeleine?

M. Bérubé: Nous ne déposons jamais en public des études de rentabilité.

M. Ciaccia: Est-ce que c'est possible, dans ce cas-ci, de la rendre publique?

M. Bérubé: Non.

M. Ciaccia: C'est refusé?

M. Bérubé: Oui.

M. Ciaccia: Alors...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je voudrais juste ajouter que, hier, lorsque nous avons rencontré la SGF, le ministre nous a offert, du moins en ce qui concerne les parlementaires de la commission, de rencontrer les dirigeants de la société pour avoir accès à de l'information qui ne serait pas publique. Est-ce qu'au moins le ministre pourrait considérer la possibilité de permettre aux parlementaires qui ont à juger d'un projet de loi comme celui-là d'avoir accès à une information privilégiée?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: C'est difficile de répondre à cette question, a priori, comme cela à brûle-pourpoint. D'une part, je ne vous cacherai pas que le président de SOQUEM, s'il accepte de me fournir cette information privilégiée, le fait toujours dans des conditions où il s'assure qu'elle ne coule pas, premièrement. En d'autres termes, même SOQUEM ne donne pas au gouvernement toute l'information que le gouvernement pourrait vouloir obtenir. Par exemple, c'est le cas du plan de développement. SOQUEM dépose un plan général de développement, mais il est évidemment très dangereux pour

une société qui est sur un marché hautement concurrentiel de commencer à dire: II y a une perspective de développement à tel endroit, nous avons le nez qui nous dit qu'il y aurait des propriétés intéressantes sur un territoire donné. Le moindre coulage aurait comme conséquence, le lendemain, que tout serait jalonné et que ce serait très difficile de signer des ententes. (15 h 30)

Donc, lorsqu'on arrive au niveau de l'information qui est essentielle à la corporation pour jouer son rôle de développement, c'est toujours un peu gênant de commencer à révéler cela sur la place publique. L'actionnaire, par exemple, a en main des données hautement confidentielles qui ne sont passées à personne d'autres, parce qu'il en a besoin pour jouer son rôle d'actionnaire, mais il est entendu qu'il y a une partie de l'information qu'on peut donner directement au ministre, il y a une partie de l'information qu'on peut étendre à certains fonctionnaires, il y a une partie qu'on peut étendre au gouvernement et il y a une partie de l'information qu'on peut étendre à l'Opposition. Le problème là-dedans, c'est que l'Opposition doit jouer son rôle et, si elle veut jouer son rôle, une fois qu'elle a eu accès à de l'information et qu'elle estime, que politiquement, elle doit l'utiliser, à ce moment-là, il devient très difficile de savoir quelle est la limite. Je pense bien que l'Opposition n'acceptera pas de prêter serment que cette information est confidentielle et qu'elle ne pourra l'utiliser en aucune façon, parce qu'à ce moment-là, elle ne pourra plus jouer son rôle d'Opposition. Cela devient difficile de savoir jusqu'où on peut aller et quelle est l'information disponible.

M. Ciaccia: Je peux comprendre le souci du ministre en ce qui concerne un plan de développement de SOQUEM, parce que, si vous rendez publics tous les endroits où SOQUEM veut aller, naturellement cela pourrait rendre la tâche de SOQUEM plus difficile. Ce n'est pas notre intention, en tant qu'Opposition responsable, de chercher ce genre d'information pour en faire de la politique. Je suis entièrement d'accord avec vous et je pense que nous avons même donné une preuve de cela. Si vous vous rappelez le projet de loi de SOQUIP, j'avais un document qui a été porté à mon attention et dans lequel il y avait des informations qui pouvaient être gênantes. Il n'était pas dans l'intérêt de tous les Québécois que ces informations soient divulguées maintenant. Je ne les ai pas divulguées. Je porte cela à votre attention pour vous laisser savoir que vous avez certaines responsabilités.

Dans le cas des Îles-de-la-Madeleine, ce n'est pas quelque chose qu'un concurrent peut dénoncer; on connaît les plans, on sait que cela va être développé. Je ne vois pas comment cet argument pourrait s'appliquer.

Deuxièmement, SOQUEM déclare dans son bilan que ça va coûter $65,000,000 pour développer ce site. Vous ne croyez pas qu'à ce moment-ci, SOQUEM devrait essayer de justifier ces investissements et, même si ce n'est pas public, de rendre disponible aux membres de l'Opposition son étude de rentabilité? Je pense que cela devrait être un devoir avant d'investir de telles sommes.

M. Bérubé: Pour vous montrer les implications - vous en êtes aussi conscient que moi et le député d'Outremont aussi - le seul avantage dont bénéficie SOQUEM pour la vente de son sel, c'est la politique d'achat du Québec qui lui donne un avantage de 10%, au moment des soumissions, si elle devait soumissionner plus haut qu'un concurrent. Il devient assez évident qu'un concurrent qui mettrait la main sur les études de rentabilité de SOQUEM, qui connaîtrait la marge de profit de SOQUEM, pourrait utiliser ces informations pour se placer sur le marché, de manière à enlever à SOQUEM certains contrats que SOQUEM pourrait vouloir aller chercher. C'est donc de l'information que vous ne voudriez certainement pas passer à un concurrent. En tout cas, si j'étais actionnaire d'une entreprise, je ne voudrais surtout pas que la stratégie corporative, les marges de profit de mon entreprise soient investies chez mon concurrent parce qu'à ce moment-là, je sais que c'est le rendement de mes actions qui en serait affecté. L'intérêt public, il me semble, à ce moment-là, exige qu'on défende le secret professionnel de l'entreprise.

Le Président( M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je voudrais revenir là-dessus. Le rôle qu'on essaie de jouer, c'est qu'on parle de l'actionnaire ici... Finalement, l'actionnaire ce sont les contribuables...

M. Bérubé: C'est le ministre des Finances.

M. Fortier: Oui. Il faut justifier cela devant les contribuables et le rôle de l'Opposition est d'en arriver à une information qui lui permette d'arrêter la politicaillerie et de s'asseoir d'une façon convenable pour discuter d'une information valable. Je suis un peu en désaccord. Le député de Mont-Royal n'a pas assisté hier à la réunion qu'on a eue avec la SGF. C'était tout de même assez intéressant. Peut-être est-ce dû au fait de l'expérience que j'ai eue et qu'il n'a pas eue, je ne le sais pas, mais ce que j'entends par un plan de développement, ce n'est pas un plan opérationnel de cinq ans qui va dire: L'an

prochain, on va acheter telle mine, dans deux ans, on va acheter telle mine et, dans trois ans, on va acheter telle mine. C'est entendu que ce genre de plan opérationnel, dans l'avenir prévisible, c'est peut-être un document caché.

Ce que j'entends par plan de développement, c'est plutôt un document qui est le résultat d'une réflexion à l'intérieur de l'organisation et en collaboration avec le ministre qui fait l'évaluation des performances passées, qui détermine où la société se trouve dans le moment et qui définit des plans stratégiques pour l'avenir en disant: Voici, il y a beaucoup de choses qu'on pourrait faire selon la loi, mais on accepte ou on recommande qu'on aille dans telle direction. Il s'agit plutôt de direction stratégique et non pas de plan opérationnel comme tel.

Le plan que la SGF a déposé hier a permis justement une discussion intelligente autour de la table. Guy Coulombe, qui connaît très bien le gouvernement, savait ce qu'il avait à faire pour susciter l'intérêt et pour qu'il y ait une discussion intelligente. Si l'État veut intervenir par des sociétés de la couronne dans l'avenir, il faudrait bien s'arranger pour que l'Opposition puisse jouer un rôle assez intelligent et pour qu'en l'absence d'une information réelle elle ne soit pas portée a faire des "filibusters" comme on en a déjà fait. C'est pour cela que je reviens à la charge. Je pense qu'on se rejoint en disant des choses différentes.

Ce dont on a besoin, c'est une information intelligente qui va permettre à l'Opposition de jouer son rôle véritable. Cela présume que dans un premier temps le président de SOQUEM, pour prendre cette société d'État en particulier, va comprendre l'importance d'un plan stratégique, l'importance ou la nécessité qu'il y a d'informer l'Opposition lorsqu'on en vient à faire approuver des montants comme $36,000,000 ici, $120,000,000 chez SOQUIP, et combien chez SGF? Encore $100,000,000 ou $200,000,000.

En ce qui concerne les projets particuliers, même s'il est hors de question peut-être de donner une information qui, comme vous le dites, pourrait être traitée de confidentielle, j'oserais penser que les parlementaires qui siègent à cette table-ci pourraient avoir accès, avant la commission parlementaire, à une certaine information privilégiée. Je sais que dans le cas de la SGF; hier, le ministre a accepté qu'à l'avenir, dans une certaine mesure, ceci pourrait être fait. J'ose espérer qu'avec Hydro-Québec on pourra faire la même chose parce qu'il s'agit de documents tellement substantiels qu'à moins d'avoir accès à une certaine information avant la commission parlementaire, cela n'aurait aucun sens d'étudier des piles de documents avant qu'on se présente. C'est la raison pour laquelle je suggère bien humblement que, dans le cas de SOQUEM et de SOQUIP, on en arrive à une formule qui permette à l'Opposition de discuter d'une façon intelligente, non pas en nous demandant, à trois jours du dépôt d'un projet à l'Assemblée nationale, d'approuver des $36,000,000 ou des $100,000,000. On essaie de jouer notre rôle d'une façon intelligente. Je suggère au ministre qu'on devrait essayer de définir le genre d'information que l'Opposition devrait avoir avant qu'on se mette à débattre des projets de loi de cette envergure. Je ne sais pas si cela rejoint le point de vue du député.

M. Ciaccia: C'est exactement cela. Quand on arrive à ce moment-ci, ce n'est pas le temps... Ce n'est pas de la petite politique qu'on veut faire avec certains projets; si un projet est rentable et réalise certains objectifs, je ne pense pas que ce soit dans notre intérêt d'essayer de faire de la petite politique à son sujet, mais vous ouvrez la porte à toutes sortes de critiques parce que l'information n'est pas disponible. Je ne parle pas d'information privilégiée, mais d'une certaine information de base.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Le problème là-dedans est la formalisation de telles rencontres. Qu'on le fasse sur une base informelle - cela s'est vu dans le cas de certains projets de loi où, effectivement, on s'est réuni autour d'une table de façon tout à fait détendue et on l'a examiné sans que ce soit consigné au procès-verbal de la réunion et sans journalistes autour en train de surveiller nos moindres gestes - cela me paraîtrait une bonne pratique. La seule difficulté que je vois est que dans la formalisation, il faudrait éviter de laisser voir que certains députés sont privilégiés, ont accès à de l'information qui leur permet de jouer un rôle qui les met en lumière, alors que d'autres députés, eux, seraient mis de côté, n'auraient pas l'information et, par conséquent, devraient écouter les grands députés échanger. L'inquiétude que j'ai, c'est que nos lois parlementaires sont ainsi faites qu'elles mettent tous les députés, qu'ils soient ministériels ou de l'Opposition, sur un pied d'égalité. Il m'apparaîtrait intéressant, en tout cas, qu'un critique officiel d'un parti d'Opposition soit délégué, lors d'une rencontre informelle avec le ministre ou son adjoint parlementaire, à une séance de discussion générale. Oui, je pense que ce serait facile, parce qu'on reconnaît là plutôt un élément de stratégie. C'est un peu comme les réunions des leaders, je pense qu'ils se réunissent fréquemment à notre insu et prennent beaucoup de décisions que nous

sommes bien obligés d'avaler après, que nous soyons d'accord ou non, parce que nos leaders ont décidé entre eux que c'était ainsi que les procédures se dérouleraient. L'impression que j'ai, c'est que, dans beaucoup de cas comme ça, effectivement sur une base tout à fait amiable, en dehors des feux de la rampe, oui, c'est le genre de chose qui serait acceptable d'autant plus que, dans des projets de loi de cette nature, normalement, il ne devrait y avoir rien à cacher. Il faudrait voir vraiment les implications. Je n'ai pas d'objection à ça.

Dans le cas de SOQUEM plus particulièrement, il y a une difficulté qui vient de ce que le plan triennal de développement de la société n'a même pas été étudié encore par le gouvernement. Il est devant le comité ministériel de développement économique. C'était le premier plan qui nous était soumis et on a eu beaucoup de difficulté, au départ, à l'accepter parce que le rodage n'était pas fait. On n'avait pas encore une idée très claire de ce que nous voulions avoir dans les plans, pas plus que la société n'avait une idée très claire de ce que nous attendions. Par conséquent, ce n'est peut-être pas le plan le plus satisfaisant que l'on puisse imaginer et il n'a pas encore été soumis au gouvernement. Donc, je suis un peu gêné d'arriver et de dire: Ecoutez, je vais m'asseoir avec l'Opposition, on va aller examiner ça ensemble et ensuite je soumettrai cela au Conseil des ministres.

M. Fortier: "Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément".

M. Bérubé: Ah, Boileau!

M. Fortier: C'est pour ça qu'on a de la difficulté à approuver $120,000,000 et $36,000,000.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Lotbinière.

M. Bérubé: Non, pas dans le cas des $36,000,000.

M. Biron: M. le Président, j'étais intéressé à entendre le député d'Outremont, tout à l'heure, parce que, pour son information, c'est une discussion qu'on a eue il y a déjà plusieurs années ici. Même, il y a environ un an et demi, j'avais proposé moi-même une motion pour former une sous-commission pour justement étudier tout le problème des sociétés d'État et demander les informations que les députés devaient ou pouvaient avoir concernant ces sociétés d'État. On n'en est pas venu encore, même si la sous-commission a siégé à plusieurs reprises, à prendre des décisions finales, parce qu'on se demande: Est-ce que la sous-commission va siéger à huis clos ou si ça va être public, quel genre d'informations on va donner à la sous-commission, quel genre d'informations les députés peuvent avoir, quel genre d'informations les ministres peuvent donner ou pas?

Alors, c'est toute une série de problèmes techniques qui a fait en sorte que même si, sur le principe, tous les députés de l'Assemblée nationale, il y a un an et demi, étaient d'accord pour qu'on essaie de voir une formule nouvelle vis-à-vis des sociétés d'État - je suis bien d'accord avec vous parce que c'est moi qui avais proposé cette motion à l'époque - on n'en est pas venu à trouver des réponses aux différentes questions que, de part et d'autre de la salle, on se posait vis-à-vis des informations qu'on devait recevoir.

Je trouve que votre suggestion est encore très valable; puisqu'elle était valable il y a un an et demi, elle l'est encore aujourd'hui. Un jour ou l'autre, il faudra qu'au Québec, à cause du nombre de sociétés d'Etat que l'on a, on se penche d'une façon très sérieuse sur ce problème et que, entre les partis politiques, on en vienne à une espèce de consensus ou de modus vivendi. Mais si le gouvernement donne de l'information à l'Opposition et si l'Opposition ne peut pas s'en servir, finalement l'Opposition ne peut pas jouer son rôle, etc. C'est ça qui a été discuté longtemps entre les différents leaders parlementaires et les représentants des différents partis politiques à cette sous-commission. On n'a pas encore trouvé de réponses précises, mais, si vous avez des suggestions à ce sujet, je suis certain que le leader parlementaire du gouvernement serait intéressé à ce qu'on trouve une réponse finale le plus tôt possible.

M. Fortier: Juste un mot, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): C'est que M. le député de Rouyn-Noranda m'avait demandé la parole sur le même sujet, mais si c'est pour une réponse au député de Lotbinière, d'accord.

M. Fortier: C'est juste une réponse. Ce que je voulais dire, c'est que je sais - j'ai lu les procès-verbaux - et qu'il y a une motion qui a été faite. Je suis ingénieur et, M. Bérubé va être d'accord avec moi, nous, les ingénieurs, on aime régler les problèmes sans adopter des motions. Simplement, ce que je dis, c'est que le ministre peut décider, sans attendre une recommandation de l'Assemblée nationale, de permettre à des parlementaires d'avoir accès à une certaine information. Il n'est a pas besoin pour ça d'avoir un débat en Chambre, parce que j'ai l'impression que,

si on attend un débat en Chambre, on va attendre encore pendant cinq ans. Le ministre a tout à fait la liberté de faire quelque chose pour que les événements qui se sont produits pendant les derniers jours ne se reproduisent pas, parce que si on veut que nos sociétés d'État réussissent, il va falloir prendre les moyens pour réussir. Comme on a un ingénieur comme ministre de l'Énergie et des Ressources, qu'il applique le grand principe: les ingénieurs règlent les problèmes sans attendre que les législateurs les règlent pour eux. (15 h 45)

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez quelque chose à répondre à ça?

M. Bérubé: J'ai un point. J'avais eu une longue discussion parce que, effectivement, je ne vous cache pas que, au sein du gouvernement, nous avons eu un long débat à la suite de la proposition de l'Union Nationale; il y en avait qui étaient favorables, d'autres qui ne l'étaient pas. La difficulté du système parlementaire est la suivante: le gouvernement répond devant l'Assemblée nationale de son administration. Jamais un fonctionnaire n'est appelé à témoigner, c'est le ministre qui répond, c'est le ministre qui est responsable. À intervalles réguliers, la société décide si les réponses ont été satisfaisantes ou non, c'est l'élection.

La tentation est forte, chaque fois que l'on est dans l'Opposition, de vouloir un peu se substituer au gouvernement, c'est-à-dire d'essayer d'avoir accès à toute l'information interne du gouvernement de manière à pouvoir, si on veut, jouer son rôle d'Opposition, mais, en même temps, à pouvoir jouer un peu le râle de l'exécutif, à se mettre à la place du gouvernement. Mais, hélas, les résultats de l'élection ont voulu que le gouvernement soit assis d'un côté de la Chambre et l'Opposition soit assise de l'autre côté. Le Conseil des ministres a effectivement de l'information privilégiée sur la base de laquelle il élabore sa stratégie et sur laquelle, finalement, l'électorat tranche.

Tout le débat de fond que nous avons eu a été de dire: Oui, on peut demander à un ministre de comparaître, de venir répondre aux questions, mais c'est le ministre, qui répond. Dans la loi même, c'est lui qui est le ministre de tutelle. C'est lui qui répond devant l'Assemblée nationale de l'administration de la société, ce n'est pas la société. En d'autres termes, c'est à moi de répondre pour toutes les questions politiques, économiques concernant les sociétés d'État et à personne d'autre. Je peux accepter qu'une société d'État vienne témoigner et répondre aux questions, mais c'est uniquement parce que je l'accepte, parce que c'est moi qui parle au nom de la société.

C'est le fonctionnement de notre système qui est ainsi conçu. Il est peut-être mal conçu, mais c'est la mécanique du parlementarisme britannique. Je reconnais qu'il y a un problème réel au niveau de la connaissance par l'ensemble des députés du fonctionnement interne et des sociétés d'État et des ministères, qui leur permettrait à ce moment de jouer véritablement leur rôle de parlementaires. Mais la difficulté vient de ce que, dans le système britannique, la notion d'exécutif et de législatif est un peu confondue, puiqu'on tire les membres de l'exécutif des membres élus au législatif. On a tendance à confondre les deux. Il reste, quand même, que, dans le système parlementaire britannique, il y a une distinction très nette: le gouvernement gouverne et les députés sont censés faire des lois et, évidemment, critiquer le gouvernement dans ses orientations, dans ses politiques. Mais le député d'Opposition doit critiquer les politiques dans leurs fruits, il n'est pas là pour travailler à l'élaboration des politiques internes du gouvernement. En effet, à ce moment, si c'est l'Opposition qui a élaboré la politique de SOQUIP ou de SOQUEM, je regrette, mais si jamais ça ne marche pas, on pourra toujours dire: Écoutez, c'est l'Opposition qui l'a faite et l'Opposition dira: Écoutez, c'est vous qui étiez en charge, vous n'aviez qu'à prendre vos responsabilités et à ne pas accepter nos propositions. Alors, une façon plus élégante de le faire consiste à dire: Vous, de l'Opposition, faites votre travail d'Opposition; nous, on va faire notre travail et l'électorat jugera quand viendra le temps d'une élection. Il est là, le problème.

Alors, il faut éviter que le Parlement ne cherche à se substituer... à moins qu'on ne change de système. Dans le système actuel, je pense qu'il faut distinguer clairement que l'exécutif a un rôle et que le législatif en a un autre; notre rôle, à nous, c'est de faire des lois.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ...dans d'autres juridictions...

M. Bérubé: II est un peu là, le problème.

M. Ciaccia: M. le ministre, je pense que, dans d'autres juridictions, même dans le système britannique, à Ottawa, par exemple, une fois par année, les administrateurs dans la fonction publique viennent devant une commission parlementaire et ils sont questionnés sur leur administration par la commission permanente sur le ministère en question. Je comprends que c'est votre responsabilité, c'est à vous de décider des

orientations. Écoutez, j'étais sous-ministre à Ottawa et, une fois par année, je comparaissais devant la commission et je me faisais poser toutes les questions sur toute l'administration de mon ministère. C'est moi qui répondais et ce n'était pas au nom du ministre. C'est bizarre, mais c'est comme cela. 3e peux vous assurer que c'est comme cela que cela se fait.

M. Bérubé: Je dis que c'est notre procédure qui est bizarre.

M. Ciaccia: Exactement, ici un fonctionnaire répond. Je pense que la procédure a évolué. C'est possible d'avoir des structures pour vraiment questionner, parce que là on pose des questions aux sociétés d'État. Comme c'est là, à la dernière minute, on a une heure pour poser une question à SOQUEM, afin de nous préparer pour un projet de loi votant $36,000,000 additionnels pour toutes sortes de projets. Franchement, vous allez admettre que c'est un peu inadéquat. Vous vous enlevez la responsabilité sans exiger que SOQUEM nous donne tous ses plans de développement. Il y a moyen d'obtenir plus d'information, de pouvoir questionner ces gens afin qu'on puisse vraiment accomplir notre rôle d'Opposition officielle. Vous avez les structures en main. Maintenant, si vous vouliez les mettre en exécution.

M. Bérubé: Je pense que le ministre d'État au Développement économique voulait suivre la suggestion de l'Union Nationale et avait élaboré une petite formule qui allait un peu dans ce sens, en essayant de balancer les inconvénients et les avantages. Un des problèmes que nous avons - je pense que vous le reconnaîtrez avec nous - c'est que le temps de la Chambre est extraordinairement précieux. Essayer de faire accepter par le leader que la Chambre puisse prendre du temps pour étudier une question aussi importante que le plan d'équipement d'Hydro-Québec, c'est déjà un problème parce que vous avez 23 ministères avec un paquet incroyable de lois, en plus des grèves où les gens demandent à être entendus, et tout nous apparaît important. Le drame c'est, pratiquement parlant, le temps limité disponible à la Chambre; par exemple, nos règles de quorum sont telles qu'il faut maintenir, même quand notre commission siège, un minimum de députés en haut, et on sait très bien qu'il n'appartient pas à l'Opposition de maintenir le quorum, c'est donc au gouvernement de le maintenir.

Cela a pour conséquence pratique -d'ailleurs, l'Opposition se charge bien de nous le rappeler chaque fois qu'il n'y a pas quorum - que le gouvernement est obligé de maintenir le quorum en Chambre. Cela peut être relativement facile parce que nous avons un avantage numérique, mais si on en arrive à un moment donné à deux partis, par exemple, assez également représentés à l'Assemblée nationale, on se rendra compte tout de suite, en essayant de tenir plusieurs commissions de front alors que seul le gouvernement est obligé de tenir le quorum, qu'il est pratiquement impossible de tenir ce quorum. Donc, on est obligé de réduire le nombre de commissions parlementaires et c'est le temps qui manque. C'est tout.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, le ministre tantôt a eu des paroles que je considère comme très intéressantes, à un certain point de vue, lorsqu'il a parlé de notre système parlementaire. Les leaders parlementaires des différents partis ont des réunions qui, en quelque sorte, sont informelles où ils discutent des travaux parlementaires, de la façon de les introduire, en tout cas, et il a dit là-dessus: On est bien obligé d'accepter le genre d'entente auquel ils en viennent. J'en déduis de cela que le ministre pense, peut-être comme moi, que dans une certaine proportion il faut faire confiance si on veut qu'un Parlement fonctionne. Il faut faire confiance à des gens à qui on confère des responsabilités, à l'exemple de ce qu'on fait pour les leaders parlementaires.

Ce qui a été souligné par mes collègues, c'est qu'il apparaît difficile aux parlementaires de l'Opposition - parfois, je dis parfois, ce n'est pas toujours le cas, parfois - de pouvoir présenter une critique bien fondée, en toute connaissance de cause, et qui pourrait peut-être dans certains cas éviter de longs débats, parce qu'on est pris, dans une certaine proportion, avec les renseignements qui sont publics ou publiables, alors que, dans certains cas... C'est le cas de sociétés d'État qui ont des stratégies et qui, lorsqu'il y a concurrence, n'ont sûrement pas avantage à publier ces stratégies. Dans ces cas, cela apparaît comme un fait qui amène l'Opposition à débattre le projet de loi d'une telle façon, mais, autrement, il serait débattu d'une autre façon, si on avait certains renseignements.

Je me demande - là-dessus, je vous assure que je ne prétends pas avoir les réponses plus qu'un autre - si on ne pourrait pas utiliser l'exemple de la confiance faite aux leaders parlementaires qui se rencontrent entre eux et qui viennent nous apporter les suggestions faites à la suite de ces rencontres, pour permettre, en quelque sorte, de faciliter le travail de la Chambre.

Je me demande dans quelle proportion, en ce qui concerne les sociétés d'État, il ne pourrait pas y avoir de l'information, avec le consentement du ministre, transmise aux représentants de l'Opposition, que

l'Opposition pourrait choisir pour la circonstance, parce que, pour avoir vécu presque onze ans de parlementarisme, je sais d'abord que ce ne serait pas facile et, deuxièmement, ce ne serait peut-être pas une bonne chose que d'amener tous les membres d'une commission parlementaire à assister à ce qenre de réunions, qui pourraient être privilégiées.

J'essaie de me rappeler l'année, mais il y a eu, à un moment donné, une expérience; c'est le président d'Hydro-Québec qui avait, de façon très informelle, sans qu'il y ait eu de convocation officielle, manifesté le désir de rencontrer les chefs des partis d'Opposition. C'était à la demande du premier ministre, parce qu'il avait quelque chose à présenter et je pense que, pour les fins de la bonne marche d'Hydro-Québec, il n'était pas d'intérêt public que certains faits soient mis sur la table. À la demande du premier ministre, je me rappelle, pour avoir été un des chefs de l'Opposition à ce moment-là, avoir assisté à une réunion très informelle, mais où on nous avait demandé d'assurer la confidentialité. Un des collègues du ministre, qui siège aujourd'hui au Conseil des ministres, était présent et tout le monde avait respecté ça. Pour cette situation en particulier, cela avait permis d'en arriver... D'abord, il n'y a personne qui pouvait ne pas être d'accord avec ce qui était présenté, mais on aurait pu ne pas l'être si on n'avait pas eu le genre d'information que nous avions.

Cela avait facilité le travail de l'Opposition et du gouvernement, sans que cela soit une règle générale. Il me semble qu'il y avait là une occasion qui le justifiait et ça pourrait se retrouver, dans le cas de sociétés d'État; quand on parle de sociétés minières, avec d'autant plus de rigueur, parce que, dans ce domaine, c'est important que certains renseignements ne soient pas mis sur la place publique, sachant les conséquences que cela peut amener. Là-dessus, je ne voudrais pas blâmer le ministre de ne pas offrir sur la place publique certaines informations comme ça. Je ne voudrais pas le blâmer, parce que je sais que cela pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la société. (16 heures)

Peut-être qu'il y aurait moyen de trouver une formule selon laquelle, avec un représentant de chaque parti autorisé, avec la garantie de confidentialité, pace que c'est important dans des cas semblables, on pourrait en arriver, d'abord, à permettre un débat plus modéré dans certaines circonstances et, comme le disait mon collègue d'Outremont, plus intelligent aussi, un débat où on pourrait peut-être éviter la partisanerie. Évidemment, on est des hommes politiques, tout le monde est parfois tenté, quand il est dans l'Opposition ou au pouvoir, de tirer sa part de profit politique; c'est normal et c'est le jeu de la démocratie, mais il y a des choses qui, je pense, méritent que l'on puisse aller vers des discussions privilégiées. À titre d'exemple, si notre représentant en titre à la commission avait eu certaines informations et avait dit à ses collègues: Sur telle chose, je ne peux pas vous donner les raisons, mais on n'y va pas, on lui aurait fait confiance à ce moment-là. C'est peut-être là une avenue qu'on peut explorer pour l'avenir. Sur ce sujet, M. le Président, je n'ai pas d'autre chose à ajouter. Il y a, évidemment, quelques questions que je voudrais poser au ministre à l'article 1, mais je vais attendre que mes collègues aient terminé.

Le Président (M. Bordeleau): On est déjà à l'article 1, à moins que vous n'ayez d'autres questions.

M. Samson: Peut-être que le ministre voudrait...

M. Bérubé: Je dirais que, présentement, nous sommes en dehors du sujet.

M. Samson: Eh bien.

Le Président (M. Bordeleau): Je suis tout à fait d'accord avec vous, M. le ministre, que j'ai été pas mal large sur l'interprétation de notre commission.

M. Samson: Généralement, à l'article 1, on fait...

Une voix: On peut clore le débat.

Le Président (M. Bordeleau): C'est-à-dire qu'on a mis le préambule dans l'article 1.

M. Samson: J'aimerais peut-être avoir le point de vue du ministre...

Le Président (M. Bordeleau): Sur l'article 1?

M. Samson: ...sur ce que je viens de dire.

Le Président (M. Bordeleau): J'avais l'impression que M. le ministre s'était déjà exprimé auparavant sur un point de vue semblable. S'il veut répondre, c'est à lui de le faire.

M. Bérubé: M. le Président, je pense que cela dépend...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Samson: M. le Président, peut-être

que je m'exprime mal.

M. Bérubé: ...essentiellement du climat, des relations, je pense, amicales. Parfois, les électeurs sont surpris de voir le genre de relations qui existent entre nous en dehors des feux de la rampe quand nous ne sommes pas obligés de répondre du tac au tac dans un débat public. Les électeurs sont souvent surpris de voir un peu le caractère de bonne amitié qui existe entre beaucoup de membres de cette Assemblée de partis politiques opposés. Il va de soi que parfois un parti choisit de mener un débat politique sur une question. J'ai connu la Loi constituant la Société nationale de l'amiante en compagnie du député de Mont-Royal. On s'est bien amusé pendant des mois et des mois, mais je pense qu'à ce moment-là j'ai constaté une chose: plus on donne de l'information à l'Opposition, plus elle l'utilise pour alimenter le feu, puisque, justement, son objectif est de maintenir le feu le plus longtemps possible. J'ai découvert à ce moment-là que cela n'aidait pas. Au contraire, cela nuisait. Cela est malheureux. Cela fait partie de la politique. Selon le climat que l'on perçoit entre nous lorsqu'on se rencontre...

M. Ciaccia: Cela ne veut pas dire que la politique de base n'était pas bonne.

M. Bérubé: ...à un café et qu'on sent que quelqu'un nous dit: Ton projet de loi, on est d'accord, ' il y a peut-être des choses qu'on aimerait savoir, il s'établit un certain climat d'amitié. On finit par identifier les projets de loi sur lesquels on sent qu'il y a l'accord d'à peu près tout le monde. À ce moment-là, on dit: Que veux-tu savoir? Et,là, on organise une rencontre comme celle dont on parle. Je pense que c'est assez facile à faire et cela m'apparaît de bon aloi. L'impression que j'ai, c'est que, dans le cas de la SGF, il y avait également une espèce d'harmonie entre les vues de l'Opposition et celles du gouvernement. C'était assez facile à organiser.

Lorsqu'on arrive, cependant, dans des cas litigieux, on voit assez facilement que le ministre responsable veuille ouvrir le moins possible parce qu'il y a des dossiers - il faut quand même le reconnaître - où nous sommes plus forts et des dossiers où nous sommes plus faibles. Si l'Opposition a décidé d'identifier un dossier plus faible pour frapper sur le gouvernement à tour de bras, il est bien évident que le ministre responsable ne voudra pas donner à l'Opposition l'information qu'il a parce que, évidemment, la première chose qu'elle va dire, c'est: Vous voyez la faiblesse de l'argumentation du ministre et elle va l'utiliser simplement pour le massacrer. Dans ces conditions, on se rend compte qu'il y a une évaluation que le ministre devra faire pour savoir quand cela vaut la peine de partager son information, quand cela cela ne vaut pas la peine. Et cela, il va le faire essentiellement sur la base du climat d'amitié qui va s'établir, non pas d'amitié personnelle, mais j'entends de bonnes relations qui vont s'établir. C'est cela qui permet, à un moment donné, de sentir qu'effectivement l'Opposition est d'accord, ne veut pas faire de guerre sur un projet de loi, mais aimerait avoir réponse à certaines questions. À ce moment-là, on n'a rien à cacher. On sort l'information, mais c'est sur une base amicale et non pas sur une base institutionnalisée.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce toujours du point de vue général?

M. Samson: Sur le même sujet.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord.

M. Samson: Les comparaisons sont parfois difficiles. Le ministre vient d'utiliser un exemple en parlant de la question de l'amiante. Dans des cas comme cela, il y avait des philosophies qui s'affrontaient.

Dans le cas que j'ai cité en exemple, sans vous dire de quel sujet il s'agissait, parce que je n'ai pas à le dire, il ne s'agissait pas de philosophies qui s'affrontaient quant à savoir le bien-fondé de l'existence de la société d'État. Il s'agissait d'un projet de la société d'État qui avait beaucoup de sens d'ailleurs, qui était présenté de façon privilégiée aux différents chefs des partis d'Opposition parce qu'il était d'intérêt public qu'on ne le mette pas sur la table au moment où on devait parler de ces choses-là. C'est devenu public une fois que les choses ont été conclues.

Mais si on n'avait pas procédé de cette façon et si le premier ministre n'avait pas suggéré que cela se fasse de cette façon, à ce moment-là, je pense, connaissant le système parlementaire - on était quatre partis d'opposition officiellement reconnus à ce moment-là - qu'il y aurait eu un débat qui aurait duré pas mal longtemps et qu'on a évité. Je pense qu'on a bien fait de l'éviter, c'était pour le bien public.

C'est dans ce sens-là que je dis qu'un jour, dans certaines circonstances, il serait peut-être valable que le ministre puisse le faire.

Je n'ai pas autre chose à dire sur ce sujet. J'aurais peut-être quelques questions à poser. Mais, comme je le dis, si mes collègues n'ont pas terminé...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais poser une question sur le pouvoir d'exploration. Est-ce

que la situation actuelle donne des droits prioritaires, d'une façon ou d'une autre, à SOQUEM, dans le domaine de l'exploration?

M. Bérubé: Non. Sauf que n'oublions pas la loi 27, adoptée en 1977, si je ne m'abuse, en vertu de laquelle le gouvernement peut réserver pour la couronne des territoires sur lesquels il effectue des travaux intensifs d'exploration.

Évidemment, une fois ces travaux terminés, on peut se retrouver avec une propriété mise en valeur de façon assez exceptionnelle. Et là, il y a un jugement politique. À qui le gouvernement veut-il donner cette propriété? Il peut la donner par soumission publique. Il peut demander des propositions de prospection. Ou il peut carrément choisir de la donner à sa société d'État s'il estime que c'est nécessaire. Un bel exemple, c'est le travail du ministère en cours présentement sur un ensemble d'anomalies qui avaient été complètement négligées par tous les gens en exploration au Québec, c'est une propriété de molybdène que le ministère - je ne dirai pas a mise en valeur - est peut-être en train de mettre en valeur à un point tel qu'on aurait peut-être une mine, effectivement. On se retrouverait dans la situation un peu bizarre où c'est le ministère qui a trouvé une mine. On n'est pas pour pleurer. Et si, effectivement, il y avait une mine, je ne suis pas absolument convaincu que je doive la mettre à ... mais peut-être que je la passerais directement à SOQUEM. Il y a un choix politique à ce moment-là. Mais c'est le seul cas où une société d'État pourrait être privilégiée.

M. Ciaccia: D'après la loi 27, cela donne ce privilège. Est-ce que cela peut résulter en un décroissement d'argent du secteur privé qui irait dans l'exploration?

M. Bérubé: ... de la loi 27. Cela n'a rien à voir avec la loi 1.

M. Ciaccia: Mais vous l'avez mentionné.

M. Bérubé: Oui. Vous m'avez demandé s'il pouvait y avoir... Je vous ai donné le cas où cela pouvait se produire.

M. Ciaccia: Exactement, l'exploration. Mais cela résulte. On parle des opérations de SOQUEM. Même si vous avez ce droit, cela dépend de la façon que vous l'exercez. Est-ce que cela a résulté en un décroissement d'exploration, la politique que vous avez eue ?

M. Bérubé: Écoutez. Si j'étais ministre d'un gouvernement créditiste, je pourrais la donner également à un entrepreneur créditiste qui voudrait développer cette mine. En d'autres termes, le gouvernement est libre de choisir à qui il veut accorder des droits miniers et cela peut être aussi bien à SOQUEM qu'à n'importe quelle autre entreprise. Un mordu de l'entreprise multinationale étrangère pourrait prendre comme principe que lui, quand il a développé une mine, il la donne toujours à des étrangers. Cela pourrait être effectivement une attitude. C'est pour SOQUEM en particulier.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? D'autres questions, M. le député de Rouyn-Noranda?

M. Samson: Oui, M. le Président. En 1977, le ministre annonçait pour la région du Nord-Ouest des déboursés à investir dans un plan quinquennal, si je me rappelle bien, pour un montant d'environ $65,000,000 consacrés à l'exploration minière, en association avec la Noranda qui devait dépenser autour de $20,000,000 aux mêmes fins. Est-ce que le ministre peut nous faire part de sa satisfaction ou de son insatisfaction, de son expérience concernant ce projet, de quelle façon il l'a vu et comment cela se présente maintenant, depuis 1977?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Je ne voudrais pas, M. le Président, qu'un député participant aux travaux de cette commission m'accuse de ne pas avoir été pertinent. Par conséquent, c'est une question qui est complètement en dehors du sujet.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez raison. En fait, je ne vois pas tellement le rapport avec le projet de loi no 1.

M. Samson: Je m'excuse, M. le Président, mais si je pose cette question-là peut-être qu'on va comprendre pourquoi je la pose. On est appelé à voter une loi où on parle de modifications à une compagnie d'État, dans ses objectifs, où il serait permis de s'associer ou de conclure des accords avec toute autre personne ou société. C'est le genre de chose qui s'est faite ou qui peut se faire. C'est la raison pour laquelle je pose la question.

Quand on parle d'association, l'expérience vécue jusqu'à maintenant ou celle qui s'en vient, de quelle façon se présente-t-elle? Il me semble que ce n'est pas en dehors du sujet. Autrement, qu'on enlève le mot "associé" du projet de loi qu'on discute. On dira: II n'y a pas d'association possible. Mais il y en a qui sont possibles, puisqu'il y en a eu.

Le Président (M. Bordeleau): M. le

ministre.

M. Bérubé: Le député de Rouyn-Noranda aura réponse à sa question concernant les programmes de recherche de SOQUEM dans le rapport annuel 1979-1980, où tous les associés de SOQUEM, projet par projet, y sont indiqués.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, cela peut être une réponse pour quelqu'un qui pourra prendre le temps d'aller fouiller dans le rapport, mais on est ici devant une commission parlementaire publique. On pose des questions au ministre dont les réponses sont publiques, susceptibles d'être comprises et entendues par d'autres que nous. Ce n'est pas tout le monde qui a le rapport de SOQUEM en main. Si je demande au ministre son expérience des associations, peut-être ne veut-il pas parler de celle-là. Cela, c'est autre chose. Peut-être qu'il pourrait nous parler d'autres formules d'association. Est-ce que les formules d'association de SOQUEM avec d'autres sociétés sont des choses qui permettent à la société de mieux évoluer ou si ce sont des choses qu'on prend comme un moindre mal qu'on est obligé d'accepter absolument?

Ce que je veux savoir, c'est si cela vous semble à vous - c'est au ministre que je m'adresse; je ne m'adresse pas à SOQUEM, parce que le ministre a bien dit que c'est lui qui est responsable de SOQUEM - être des formules qui peuvent aider au développement et de SOQUEM et de l'industrie minière?

M. Bérubé: Oui.

M. Samson: Ce sont des formules qui peuvent aider. Donc, si ce sont des formules qui peuvent aider, comme celles que M. le ministre a annoncées lui-même - parce que cela n'a pas été annoncé par d'autres - en 1977, comme le rapportait le Devoir du 20 avril 1977: $65,000,000 investis, $20,000,000 investis par la société Noranda dans le cadre d'une couverture d'exploration généralisée dans la région du Nord-Ouest québécois, j'imagine qu'il y a une question qui peut se poser. Votre plan quinquennal de $65,000,000, les investissements de $20,000,000 de Noranda, est-ce que ces investissements se font au rythme prévu? (16 h 15)

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, je ne répondrai pas à cette question étant donné que cela n'a rien à voir avec le projet de loi no 1, mais que cela pourrait être discuté au moment du discours du budget.

M. Samson: M. le Président, je regrette. Je suis obligé de soulever une question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous plaît! M. le député de Rouyn-Noranda comme tout le monde, je voudrais simplement rappeler à tous les membres, et au député de Rouyn-Noranda et au ministre, que le but de la convocation de la commission est d'étudier article par article le projet de loi no 1. Je veux bien comme président être assez large avec les membres de la commission pour permettre un échange sur des points qui pourraient donner un éclairage sur l'étude du projet de loi, mais j'aimerais que les membres s'en tiennent autant que possible à l'étude du projet de loi article par article comme nous avons le mandat de le faire. D'autre part, le ministre est aussi responsable de ses réponses. Il peut décider de ne pas répondre ou de répondre.

M. Samson: M. le Président, je soulève une question de règlement pour dire que je suis bien d'accord avec vous quand vous dites que le ministre a le droit de ne pas répondre. Il est certain que si le ministre me dit: Je ne réponds pas, je ne veux pas répondre, c'est une chose et on l'interprétera comme on voudra, mais de là à accepter de me faire dire que ce projet de loi ne me permet pas de poser le genre de question que je pose, je vous soumets très respectueusement, M. le Président, que ce projet de loi me permet de poser ce genre de question parce que ce projet de loi nous demande de l'argent au même titre que le budget supplémentaire discuté en haut présentement. Ce sont des crédits qu'on nous demande, M. le Président, et, quand on nous demande des crédits, il est non seulement normal, mais aussi du devoir d'un député que cela intéresse de poser des questions afin de savoir ce qu'on fera avec l'argent qu'on nous demande. Pour être capable d'établir un lien raisonnable, pour voir si ce qu'on nous demande sera bien dépensé, je pense qu'il est normal de savoir que ce qui a été dépensé dans le passé a été aussi bien dépensé. C'est une question de tenter de faire la liaison par rapport à l'expérience du passé. Si on ne peut pas se baser sur l'expérience du passé comment voulez-vous qu'on puisse faire confiance dans l'avenir? Il me semble que c'est là une question de caractère qu'on pose. Elle se pose dans le cadre de notre règlement. Évidemment, si le ministre me dit: Je ne réponds pas, je ne veux pas répondre à cela, c'est une autre affaire. S'il ne veut pas répondre à cela, M. le Président, à ce moment-là, je vous avoue franchement que je ne considère pas cela comme une question très difficile, c'est une question qui

est assez simple, ce n'est pas un secret d'État, je pars d'articles de journaux, donc cela a été publié, ce sont des questions publiques. Je pose des questions à partir de choses qui sont connues pour savoir qu'elle a été l'expérience. Si je ne peux pas avoir de réponse à cela, comment voulez-vous que je fasse confiance au reste? C'est pour cela que je pose la question.

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, M. le député de...

M. Grégoire: M. le Président, sur la question de règlement et sur la décision que vous avez rendue. Il y a à chaque année une occasion pour tous les députés de se renseigner sur l'état des finances, sur les expériences de toutes les sociétés et du ministère, c'est lors de l'étude des crédits du ministère. S'il fallait qu'à chaque loi déposée on puisse soulever toutes les questions qui peuvent se soulever lors de l'étude des crédits d'un ministère ou d'une société d'État, à ce moment-là les projets de loi tourneraient ni plus ni moins en étude des crédits ou en réunion du comité des comptes publics. Je pense qu'aujourd'hui c'est le projet de loi. Le ministre ne refuse pas de répondre parce qu'il craint la réponse, mais parce qu'il croit que ce n'est pas une question qui est dans l'ordre selon notre règlement.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Sans aller dans les détails de l'étude des crédits des sociétés d'État, ce n'est certainement pas quand on étudie les crédits du ministère parce que les crédits des sociétés d'État n'entrent pas dans les crédits des ministères. Je pense que le député de Rouyn-Noranda discute du projet de loi; regardez l'article 1 qui se réfère à l'article 3b du projet de loi; est-ce assez précis pour vous? On dit: "À ces fins, la société peut, conformément à la loi, s'associer ou conclure des accords avec toute personne ou société". Je crois que, dans la discussion des termes du projet de loi et en plus dans l'article 1, nous avons aussi le capital-actions qu'on nous demande d'augmenter. Je crois que c'est tout à fait normal de poser des questions sur ces sujets; je crois que c'est tout à fait pertinent. Maintenant, si le ministre ne veut pas répondre, c'est une autre chose, mais je ne pense pas qu'on puisse me répondre que je vais à l'encontre du règlement en soulevant ces questions. Autrement, ce ne seraient que des mots prononcés ici; qu'est-ce qu'on ferait ici, à l'étude de ce projet de loi, si on ne peut pas poser ce genre de question? C'est votre projet de loi et nous devons avoir des réponses.

Le Président (M. Bordeleau): Toujours sur la question de règlement ou sur une autre?

M. Samson: Je peux y aller sur la question de règlement.

M. Bérubé: II n'y a aucun doute là-dessus, il peut y aller sur n'importe quoi!

M. Samson: Oui, je peux y aller sur la question de règlement.

M. Bérubé: Entre le projet de loi et ce qu'il dit, c'est absolument "irrelevant".

M. Samson: M. le Président, on parle de SOQUEM?

Le Président (M. Bordeleau): C'est cela. M. Bérubé: Juste.

M. Samson: Dans l'annonce que vous avez faite dans le journal Le Devoir du 20 avril 1977, vous avez parlé, dans cette grande annonce, des travaux intensifs d'exploration menés en collaboration avec des compagnies minières publiques. SOQUEM recevra $3,000,000 dès cette année. Il me semble que c'est relié à SOQUEM, non? Suis-je trop loin de SOQUEM? C'est pas mal proche, non?

Le Président (M. Bordeleau): II y a un lien avec SOQUEM. Je peux vous l'accorder, c'est écrit là.

M. Samson: Bon. Là, on dit que l'entente avec Noranda s'inscrit dans ce cadre. C'est relié à SOQUEM, M. le Président. Il me semble que soulever une question de règlement pour tenter de me dire que ce n'est pas pertinent de poser ce genre de question, c'est abuser un peu du parlementarisme, c'est abuser un peu de la situation, c'est vouloir cacher des choses et je ne pense pas que le ministre ait quelque chose à cacher là-dessus. Au contraire, s'il en a fait une annonce publique comme celle qu'il a faite le 20 avril 1977, c'est qu'il voulait que cela se sache. Si le ministre voulait que cela se sache, c'est qu'il était fier de ce qu'il annonçait.

Je lui demande aujourd'hui, au moment où on parle de donner des crédits nouveaux à SOQUEM dans un projet de loi, de nous fournir une expertise, l'expérience qu'il a eue à cette occasion en association. C'est là que le lien se fait. On nous parle, dans le projet de loi, d'une association. On dit: À ces fins, la société peut, conformément à la loi, s'associer ou conclure des accords avec toute personne ou société. C'est exactement ce dont je viens de parler. Il faut savoir, pour avoir confiance en l'avenir, comment cela

s'est passé dans les trois dernières années. C'est aussi simple que cela. C'est pour cela que je pose la question. Si le ministre voit là-dedans quelque formule de piège que ce soit pour tenter de l'embarrasser et pour retarder les travaux, je voudrais m'en excuser auprès de lui immédiatement, ce n'est pas là mon intention et je le fais en toute bonne foi. Il me semble qu'une réponse à cela aiderait nos travaux.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, sur votre question de règlement. Je pense qu'il est toujours très difficile de voir la pertinence ou l'impertinence des questions posées au ministre sur un projet de loi, d'autant plus que c'est un projet de loi qui modifie une loi existante. On peut finalement toujours rattacher une question à un article ou à un mot d'un article précis du projet de loi qu'on étudie. Je suis pratiquement obligé de vous permettre de poser votre question; de toute façon, je pense que cela n'aiderait pas de vous empêcher de la poser. Sauf que le ministre peut toujours décider lui-même de la pertinence de la question à son projet de loi et décider, de ce fait, de répondre directement ou de s'abstenir de répondre.

M. Samson: Merci, M. le Président, vous êtes bien aimable. Je voudrais, en toute objectivité, reformuler ma question. Si le ministre pense qu'elle n'est pas bien formulée et qu'elle devrait l'être autrement, qu'il ne se gêne pas pour me dire quelle partie de la question est embarrassante et ne devrait pas faire l'objet d'une réponse publique. J'imagine qu'à travers tout ce qu'il a annoncé, il y a sûrement des choses dont il devrait normalement être fier.

M. Bérubé: Oui.

M. Samson: Oui, quoi?

M. Bérubé: À votre question.

M. Samson: Vous êtes satisfait de l'association que vous avez eue... M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: ... si dans sa longue réponse je l'interprète bien?

M. Bérubé: J'aime autant que ce soit lui qui gaspille sa salive que moi.

M. Samson: On pourrait éviter ce genre de petite remarque, M. le Président. Je ne vois pas l'utilité, cela n'avance pas le débat. Je suis disposé à discuter de façon objective ce projet de loi parce que, si vous parlez de dépense de salive, je vous dirai que j'aimerais autant que ce soit lui qui dépense les deniers publics que moi car, dans certains cas, je considère qu'ils ne sont pas toujours très bien dépensés. En tout cas, je suis prêt à retirer mes paroles là-dessus. Ce n'est pas cela que je veux faire aujourd'hui.

Le oui du ministre qui est une réponse très élaborée, M. le Président, est-ce que je dois comprendre par ce oui que la formule d'exploration en association - là j'ai parlé de Noranda, mais évidemment c'est une figure de style, si on veut, cela peut vouloir dire en association avec d'autres - à SOQUEM a donné satisfaction au ministre, au gouvernement? Est-ce qu'elle a pu apporter des découvertes - sans qu'on les nomme, je ne veux pas entrer dans les secrets d'État -qui pourraient mettre en exploitation possiblement de nouvelles mines? Compte tenu des formules d'association dans l'exploration, est-ce que le ministre retient, ou est-ce que SOQUEM, dans des cas comme cela, si la découverte est faite en association, retient comme privilégiée la possibilité que l'exploitation se fasse en association avec les mêmes sociétés?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: La question commence à se préciser tranquillement. C'est encore vague. Êtes-vous satisfait ou insatisfait? C'est très difficile à dire. On voit une liste de projets dans le rapport annuel où SOQUEM est associée avec l'entreprise privée, d'une part. D'autre part, on voit d'ailleurs, à la page 9 du même rapport, qu'une telle association dans le cas de Muscocho va donner naissance à un gîte minéral. Donc, il y a lieu de souligner cette réalité.

Le député de Rouyn-Noranda trouvera aussi à la page 11 des programmes de mise en valeur de découvertes qui nous amènent à des évaluations de projets mis en commun. On constate qu'on s'est rendu jusqu'à la décision de mise en exploitation, travaux de "mise en exploitation et exploitation minière au moins dans le cas d'une mine, la mine Doyon, où il y a une association à 50-50 avec SOQUEM; c'est donc un beau succès parce que c'est très rentable. Mais je n'arrive pas à voir vraiment ce qu'on veut savoir. Il faudrait être plus précis dans la question et je suis convaincu que le député de Rouyn-Noranda peut certainement prendre encore dix minutes pour expliquer ce qu'il veut dire par sa question.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: ... il faudrait peut-être que

le ministre ait encore une heure à prendre pour répondre. Le début de ma question, M. le Président, c'est ceci. À grands renforts de publicité, en 1977, le ministre avait annoncé cela lui-même et cela s'inscrivait dans le cadre d'une entente en ce qui concerne SOQUEM, parce que les $65,000,000 qui sont annoncés étaient annoncés par le ministre, par le ministère, c'est-à-dire pour le compte du ministère. À l'intérieur de cela, pour 1977, il y avait $3,000,000 et il disait: Cela s'inscrit dans l'entente avec Noranda. Le même jour, on a un autre article de journal où il est dit que Noranda s'était associée, en fait, à ce programme d'exploration et que Noranda devait dépenser quelque chose comme $20,000,000. Le résultat de cette association, particulièrement - évidemment, je présume que le ministre avait fait ces démarches pour tenter de venir en aide au développement de l'industrie minière dans la région immédiate du Nord-Ouest québécois -a donné quoi? Est-ce que les associations, les travaux qui se sont déroulés ont été faits dans un esprit de collaboration ou est-ce qu'il y a eu des accrochages? Il est important de le savoir. (16 h 30)

M. Bérubé: M. le Président, de par la nature de la longue dissertation du député de Rouyn-Noranda, il est assez difficile de savoir exactement quelle est la question. Si on me dit: Est-ce que cela s'est fait dans un esprit de collaboration? M. le Président, il va falloir que je dise oui, cela s'est fait dans un esprit de collaboration. Etes-vous satisfait, M. le ministre? Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, oui, je suis satisfait. Je n'arrive pas à... Je pense que le député d'Outremont doit avoir la même réaction, je le lis un peu dans ses yeux. Lui-même qui est ingénieur dit: "Keep it simple". J'ai l'impression qu'il pourrait s'attaquer un peu à la pensée du député de Rouyn et la restructurer d'une façon un peu plus percutante pour que j'aie une idée précise de la question qu'on veut me poser et je pourrais essayer de répondre, au meilleur de ma connaissance. Je n'ai pas d'objection à essayer de répondre, mais à des questions vagues comme ça, je ne suis pas capable de donner de réponses.

M. Fortier: Est-ce que cette conjoncture a donné d'aussi bons résultats que d'autres "joint ventures" qui ont été faits au même moment et dans d'autres régions?

M. Bérubé: De quel "joint venture"? Parce qu'on ne sait pas trop de quoi on parle?

M. Fortier: Celui qui est annoncé dans le journal.

M. Bérubé: Ce qui est annoncé dans le journal, c'est un plan quinquennal de travaux géoscientifiques effectués par mon ministère pour mettre en valeur le territoire et attirer des prospecteurs et des entreprises minières sur le territoire du Québec; par conséquent, cela n'a rien à avoir avec l'activité de SOQUEM. Au tout début, toutefois, pour attirer SOQUEM, le gouvernement lui a consenti une subvention de $3,000,000 pour l'amener dans le Nord-Ouest. Si vous regardez les plans d'expropriation de la société, vous allez constater qu'aujourd'hui la société fait presque l'essentiel de ses travaux dans le Nord-Ouest, ce qui était l'objectif que le gouvernement avait demandé à SOQUEM à l'époque, si c'est ça que vous voulez savoir. Je peux vous dire ce qu'on a fait, mais...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je sais qu'à l'époque le ministre - je ne veux pas lui imputer de mauvais motifs, au contraire - s'inquiétait de la situation minière et qu'il avait annoncé que cela s'inscrivait dans le cadre où il fallait venir en aide pour empêcher peut-être une fermeture éventuelle de la fonderie de Noranda. Comme Noranda Mines annonçait hier un investissement de $35,000,000 pour améliorer le procédé métallurgique à sa fonderie, par une usine d'oxygène, il me semble qu'il y a une différence entre cette époque de 1977, où le ministre tentait de trouver des possibilités de venir en aide pour empêcher que ça ferme, et cette annonce qui a été faite hier par la Noranda de $35,000,000, pour une usine d'oxygène devant améliorer son système et le rendre plus compétitif.

C'est pourquoi je posais la question. Étant donné les deux situations qui ont complètement changé depuis ce temps, cela me permettait de demander au ministre s'il était satisfait du programme qu'il avait lancé à ce moment, dont les objectifs avoués étaient de venir en aide à l'industrie minière et en particulier à la fonderie de Noranda. C'est pour ça que je posais la question, M. le Président. J'imagine que le ministre doit être satisfait du résultat d'au moins une partie de ces travaux.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: II s'agit ici de discuter essentiellement d'un projet gouvernemental qui n'a rien à voir avec l'activité de SOQUEM, qui est un programme d'incitation à l'exploration au Québec par l'ensemble de l'industrie tant privée que publique. Comme ce n'est pas l'objet du présent projet de loi, je m'en tiendrai à des analyses sur SOQUEM,

à des analyses par rapport au texte de loi, mais non par rapport à la qualité des géologues du ministère ou aux forces et faiblesses de nos programmes gouvernementaux. Une telle discussion doit avoir lieu au moment de l'étude des crédits.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: ...on parle d'association entre SOQUEM et d'autres sociétés. Il a été mentionné récemment, quand on a entendu le président de SOQUEM, compte tenu maintenant du marché de l'or qui connaît, on le sait, une situation quelque peu privilégiée par les temps qui courent, qu'à la suite de la mise en oeuvre d'environ six mines, SOQUEM envisaqeait la possibilité d'une usine d'affinage de l'or dans la région du Nord-Ouest québécois. Le ministre peut-il nous dire à ce moment-ci s'il ne peut pas parce qu'il y a des discussions en cours, je le comprendrai, si SOQUEM, compte tenu des objectifs qu'on lui donne dans le présent projet de loi, entend, pour la construction de cette éventuelle usine d'affinage, privilégier la formule d'association avec d'autres sociétés ou y aller seule?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Dans le cas particulier de l'usinage d'affinage d'or dont on parle, on nous dit qu'il faut, pour la justifier, un volume d'or de l'ordre de 200,000 onces annuellement et que la mine Doyon va produire à elle seule environ 100,000 onces. Donc, on n'en est pas exactement à un niveau de production en or suffisant pour justifier une telle usine. Toutefois, compte tenu justement de l'existence d'autres mines et de la possibilité d'association et compte tenu du développement de certaines mines d'or envisagé par SOQUEM elle-même, il est donc peut-être tout à fait possible d'en arriver à un seuil de production suffisant pour rentabiliser ces activités, mais j'ignore entièrement les intentions de la société, d'autant plus que je crois que la société elle-même ne doit pas avoir d'intentions très précises à cet égard en ce moment. C'est exactement ce qu'on me confirme. La société n'a pas encore d'intentions très précises à cet égard.

M. Samson: Peut-on me dire si, au niveau des intentions précises dans l'éventualité d'une production possible de 200,000 onces - parce que je pense que cela va devenir possible - la construction de cette usine éventuelle devrait se faire dans la région immédiate ou dans un endroit stratégique pour desservir les mines concernées? Je crois comprendre que nous parlons de la mine Doyon présentement. Nous parlons de l'éventualité de Rouyn-Merger.

M. Bérubé: On me dit que c'est pour la région de Rouyn, mais si le député de Rouyn-Noranda continue, je vous garantis que je l'amène en Abitibi-Est!

M. Samson: M. le Président, je ne me sens pas impressionné par ce genre de choses.

M. Bérubé: Cela va être la seule directive que je vais donner à la société.

M. Samson: J'ai l'impression que ce ne sera pas lui qui donnera la directive en ce qui concerne cette usine. De toute façon, M. le Président, je ne veux pas être désagréable envers le ministre, mais on va parler de Rouyn-Merger s'il le veut bien. J'aimerais savoir si on doit, en ce qui concerne Rouyn-Merger, faire connaître une décision bientôt, compte tenu du fait que l'ouverture probable ou non de Rouyn-Merger impose des difficultés puisque la mise en fonction probable de Rouyn-Merger impose actuellement des difficultés au ministère des Transports qui, comme vous le savez, a décidé de construire un pont sur la rivière Kinojévis. La propriété de Rouyn-Merger se trouve à la sortie du pont qui devra être construit. Cela pose des problèmes énormes au ministère des Transports et cela retarde les travaux de construction du pont sur la rivière Kinojévis qui sont urgents.

J'en profite, puisqu'on parle de SOQUEM, pour demander au ministre à quel moment ou vers quelle période on pourra être fixés là-dessus, afin de pouvoir procéder avec l'autre ministère dans les autres travaux.

M. Bérubé: On me dit qu'en pratique la partie exploration, mise en valeur, définition du gisement est terminée. Cependant, il y a des essais métallurgiques requis pour connaître exactement la récupération de l'or par les procédés conventionnels. Il s'agit de quelque chose qui pourrait prendre de six à douze mois, avant qu'on soit en mesure de faire véritablement une étude de rentabilité et demander un bail.

M. Samson: Six à douze mois. D'accord, M. le Président, je remercie le ministre pour sa collaboration, pour sa grande collaboration.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le ministre, j'ai quatre sujets que j'aimerais soulever. Je vais les

prendre un par un. Le premier touche l'objet de la société. On a voté pour le projet en deuxième lecture. Donc, on est d'accord sur le principe. Comme nous en avons discuté pour ce qui concerne la Société générale de financement hier, je pense que le parti que je représente aimerait voir davantage de balises imposées aux sociétés d'État pour plusieurs raisons. Entre autres, il y a d'autres sociétés d'État et il y a aussi des sociétés privées, bien sûr. Et à moins qu'on n'impose certaines balises aux sociétés d'État, elles peuvent croire que leur mandat est universel et qu'elles peuvent faire à peu près tout.

Dans cette optique, lorsqu'on arrive à l'article 1 touchant l'article 3 de la loi: La société a pour objets, on a changé bien sûr l'article 3 qui existait où on disait: ...de participer à la mise en valeur ou de participer à la mise en exploitation. J'interprète cela, comme c'était comme pouvant signifier qu'il s'agissait d'une participation minoritaire, de laisser le leadership à d'autres.

Si je comprends bien le changement qu'on veut faire par la présente loi, c'est de permettre à SOQUEM de prendre le leadership, de faire des choses. Mais, comme nous l'a dit le ministre et comme nous l'a dit le président de SOQUEM dans cette conférence qu'il a présentée dernièrement, où il disait: Nous sommes bien conscients que ce ne serait pas dans l'intérêt du Québec de voir SOQUEM occuper en entier ou presque seule tout le champ d'exploration, etc.

Dans cet ordre d'idées, je me demande si le ministre verrait une objection fondamentale à modifier le texte où on dit: À ces fins, la société peut, conformément à la loi, s'associer ou conclure des accords, tout simplement par: À ces fins, la société doit, conformément à la loi, s'associer ou conclure des accords.

C'est sur l'objet proprement dit. Peut-être qu'on peut répondre à cela. Je reviendrai avec les autres questions par la suite.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bérubé: J'y serais personnellement opposé d'une façon virulente. En effet, pour le gouvernement, il ne saurait être question de forcer la société à s'associer avec qui que ce soit. Nous croyons désirable, dans certains cas, que la société mène seule des projets. Il sera toujours possible au gouvernement, par le biais de son pouvoir de directive, de donner une directive visant à restreindre cette possibilité d'association ou, au contraire, à la rendre obligatoire. Je pense que le pouvoir de directive est là pour cette fin. Mais je m'opposerais à ce que ce soit dans une loi, pour la simple raison qu'une loi est difficilement maniable et elle ne peut pas tenir compte des circonstances particulières.

Dans ces conditions, à titre d'exemple, lorsque SOQUEM a développé la mine de sel aux Îles-de-la-Madeleine, elle a cherché à trouver des partenaires et elle n'a pas réussi à en trouver. Avec un article tel que rédigé, il faudrait l'interpréter d'une façon rigoureuse et à ce moment-là, à cette fin, la société doit s'associer et comme elle ne peut pas s'associer, par conséquent, elle ne doit pas développer de gisement. Comme l'a souligné le député de Charlevoix, ceci causerait un tort irréparable au Québec, puisque lui-même a souligné les problèmes du cartel du sel qu'il avait vécus à l'époque et l'importance pour SOQUEM de mettre en valeur cette mine. On se rend donc compte que cela pourrait être dangereux de vouloir figer dans la loi un texte trop rigide qui ne donne pas la flexibilité nécessaire. (16 h 45)

M. Fortier: Quand on lit les débats qui ont eu lieu lors de la création de SOQUEM, bien sûr, on s'aperçoit que les raisons qui ont motivé d'écrire la loi telle qu'elle est écrite dans le moment, c'était justement parce qu'on voulait que SOQUEM joue un rôle de catalyseur avec le secteur privé. Je suis bien d'accord, d'ailleurs. Quand on lit l'intervention de M. Lévesque à ce moment, il s'agissait de s'associer avec le secteur privé québécois pour ne pas laisser le champ libre totalement aux multinationales.

Si on ouvre la porte considérablement à SOQUEM, c'est sûr que les directives... D'ailleurs, le ministre a avoué qu'il n'y en avait pas dans le moment. Si on laissait la loi telle quelle, il faudrait, au minimum, que les directives viennent préciser le rôle que le gouvernement voudrait lui voir jouer. Cela serait un moindre mal à ce moment. Je reviendrai sur les directives dans un moment, si vous le voulez.

En ce qui concerne l'article 4 où on autorise le capital jusqu'à $125,000,000, une augmentation, si je me souviens bien, de $36,000,000, est-ce que le ministre peut nous dire - je ne me souviens pas s'il nous l'a dit quelle est la proportion de cette augmentation de capital qui est déjà engagée pour des projets biens spécifiques et lesquels? Est-ce qu'il peut nous donner des chiffres plus précis à ce sujet? Quel montant est réservé pour une autorisation à venir du gouvernement?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Essentiellement, tout doit être autorisé dans l'avenir, parce qu'il n'y a aucun projet de déposé par SOQUEM actuellement exigeant de tels fonds. En effet, la raison pour laquelle, souvent, on

prévoit des enveloppes avec une certaine marge de manoeuvre au moment où on amende une loi vient de ce qu'il est pratiquement impossible de bouger assez rapidement au niveau de l'Assemblée nationale pour pouvoir faire face à toutes les demandes qu'une société peut connaître dans l'exercice de son mandat au cours d'une année, par exemple. Et même être obligé de rouvrir une loi annuellement surchargerait les travaux de cette Assemblée à un point tel qu'on aurait de la difficulté à le faire. On est donc obligé, à partir de pas grand-chose souvent, d'essayer d'imaginer quels pourraient bien être les besoins en capital-actions de la société.

Or, présentement, en ce qui a trait au développement du gisement de sel des îles, au développement de Niobec et au développement de Silver Stack, les besoins en capital de la société sont essentiellement satisfaits par la loi existante. Cependant, il y a deux gisements qu'on peut voir poindre à l'horizon. Un des gisements, c'est le gisement de Crevier à Girardville qui est un gisement de Nb2°5 et tentale pour lequel on peut imaginer, compte tenu des réserves que l'on a identifiées, un investissement qui atteindrait peut-être l'ordre de $27,000,000. Il y a également dans le comté de Charlevoix un gisement de silice que la société envisage de mettre en production et pour lequel il pourrait y avoir à nouveau des investissements peut-être de $3,000,000, $4,000,000 ou $5,000,000. C'est donc très vague, puisque le bail minier n'a pas encore été émis. L'étude de faisabilité n'a pas été faite et, par conséquent, on est vraiment dans le vague le plus complet.

M. Fortier: À Crevier, quel genre de minerai?

M. Bérubé: De niobium, le même type que celui de Saint-Honoré. Soulignons aussi qu'il y a environ $6,000,000 que nous avons mis de côté pour deux objectifs potentiels. Advenant le cas où le prix de l'or ne se maintiendrait pas au niveau où il est, SOQUEM pourrait avoir de la difficulté à autofinancer l'actuel programme d'exploration qui représente entre $6,000,000 et $7,000,000 par année. Si cela devait se produire, nous voulons avoir une petite caisse qui nous permettrait de ne pas réduire l'effort d'exploration de SOQUEM. Donc, c'est une petite caisse potentielle pour l'exploration.

Également, il est possible - mais le gouvernement n'a pas pris la décision -d'amener SOQUEM à effectuer plus d'exploration que pour $6,000,000 ou $7,000,000; donc, on veut porter ce montant à $9,000,000 au cours des quelques années qui viennent et, à ce moment-là, cela pourrait se faire soit par le maintien du prix de l'or actuel ou par une amélioration même du prix de l'or; si ça ne devait pas se faire de cette façon, on pourrait vouloir disposer d'un petit montant; il y aurait $6,000,000 qui ont été prévus à cette fin. Les $36,000,000 sont beaucoup plus là comme une espèce d'enveloppe à partir de projets qu'on voit poindre à l'horizon, mais pour lesquels on est incapable de formuler un besoin financier précis.

M. Fortier: ...procédé de... On dit: "Ce paiement peut être fait en un ou plusieurs versements, chacun d'eux doit faire l'objet de l'approbation prévue au premier alinéa." J'imagine que c'est par arrêté en conseil que c'est fait. Qu'est-ce que le premier alinéa? J'essayais de savoir ce qu'on voulait dire par cela. Le premier alinéa de quoi?

M. Bérubé: "Le ministre des Finances est de plus autorisé à payer à la Société sur le fonds consolidé du revenu, avec l'approbation préalable du gouvernement et aux conditions qu'il détermine..." Cela veut dire qu'une demande de SOQUEM est généralement faite au ministre responsable de l'application de la loi, qui est moi, et elle fait l'objet d'un mémoire au Conseil des ministres, lequel mémoire est d'abord analysé au Conseil du trésor pour évaluer les disponibilités financières du gouvernement à ce moment-là; c'est généralement pris à même l'extrabudgétaire. À partir de cette analyse qui est effectuée au ministère des Finances et souvent au Conseil du trésor également, une recommandation est envoyée au Conseil des ministres. C'est le Conseil des ministres qui donne l'approbation finale pour verser ce montant.

M. Fortier: Quand est-ce que l'Opposition est informée de cela? En même temps que le public? Quand l'arrêté en conseil devient public, cela devient public, donc c'est disponible. Il n'y a aucun mécanisme d'information de l'assemblée comme telle.

M. Bérubé: Exactement. Dans le cas de la Loi constituant la Société nationale de l'amiante, nous déposons l'arrêté en conseil, mais...

M. Fortier: M. le ministre, je vous demanderais, ici si vous pouvez considérer qu'à titre d'information, compte tenu qu'il s'agit d'une enveloppe, lorsque l'arrêté en conseil sera approuvé, de le déposer en Chambre.

M. Bérubé: C'est l'article 13 qu'on vient de dénicher. C'est cela. Cela m'étonnait parce que j'avais introduit cela dans la Loi constituant la Société nationale de l'amiante et il me semblait qu'on l'étendait aux autres lois. Effectivement,

c'est une introduction que j'ai fait faire dans les lois du Québec pour augmenter le niveau d'information à l'Assemblée nationale.

M. Fortier: On ne dit pas quand, mais j'imagine que cela...

M. Bérubé: Le plus rapidement possible. En général, je les dépose dès qu'ils sont approuvés.

M. Fortier: Une information additionnelle. Mon prochain commentaire est sur le conseil d'administration. Je conçois bien que l'idée est d'avoir... On a parlé en deuxième lecture des avantages d'élargir le conseil d'administration.

M. Bérubé: La procédure parlementaire n'est peut-être pas respectée à la perfection, mais souvent on se met d'accord pour dire qu'on a une discussion générale au début. M. le Président, moi, je n'ai pas d'objection.

M. Fortier: ...

Le Président (M. Desbiens): C'est parce que c'est l'étude article par article.

M. Bérubé: La procédure parlementaire exige qu'on l'étudie article par article. On n'a pas d'objection, nous, en tout cas, à faire une discussion générale au début et après cela...

M. Fortier: Oui. Cela revient au même. Il s'agit que les membres de la commission s'entendent.

M. Bérubé: Oui. Exactement.

M. Fortier: Sur le conseil d'administration. Il y a un avantage à élargir votre conseil. On a fait état des désavantages et des avantages; c'est que, lorsqu'il y a beaucoup de monde autour du conseil, on sait qu'on est obligé de former un comité exécutif. Est-ce que la loi prévoit la possibilité de former un comité exécutif dans le moment?

M. Bérubé: La loi ne le prévoit pas. Elle le laisse au jugement du conseil d'administration qui doit décider du bon fonctionnement de ses travaux et de la façon de fonctionner.

M. Fortier: Est-ce qu'il y a quand même une possibilité pour le conseil de déléguer des pouvoirs exécutifs?

M. Bérubé: Dans le règlement de régie interne que nous discuterons ultérieurement, le conseil d'administration peut choisir de créer un conseil exécutif et de lui déléguer certains pouvoirs.

M. Fortier: Dans cet ordre d'idées, mon expérience a été, quand j'ai siégé à des conseils d'administration, qu'il est bon, avant que la personne soit désignée au comité exécutif, qu'elle siège pendant un an ou un an et demi au conseil et soit ensuite nommée au comité exécutif.

Je vois que, dans 14b, on dit: "De six à dix autres membres nommés par le gouvernement pour une période d'au plus deux ans." Cela me semble aller justement à l'encontre de cette nécessité d'avoir quelqu'un qui serait très au courant afin de pouvoir faire une contribution directe. Je me demande pourquoi on ne met pas cela à quatre ans plutôt que deux ans? Cela me semble un peu minime de nommer quelqu'un pour deux ans seulement.

M. Bérubé: Pour plusieurs raisons. D'abord, pour une raison politique. Le seul pouvoir qu'un gouvernement détient sur une société d'État est le pouvoir de directive que nous avons introduit dans nos lois sur les objectifs et les orientations et également son pouvoir de nomination au conseil d'administration.

Il me paraît important qu'on n'engage pas le gouvernement pour des périodes trop longues. Il pourrait y avoir effectivement un changement de gouvernement qui amène le nouveau gouvernement à vouloir orienter la société sur une base différente et nommer des gens qui correspondent davantage à ses orientations politiques. Dans les nominations que j'ai faites, j'ai toujours cherché non pas à examiner l'allégeance politique des candidats, mais à ouvrir d'abord l'éventail régional, à avoir la représentation de toutes les régions du Québec. Je voulais également m'assurer que les milieux financiers et de génie-conseil y sont; enfin, essayer d'ouvrir les conseils d'administration de nos sociétés d'État sur la société québécoise.

Mais j'imagine qu'un autre gouvernement pourrait, lui, vouloir nommer, par exemple, essentiellement des gens qui lui sont proches de manière à pouvoir exercer un meilleur contrôle s'il s'en méfie; c'est tout à fait possible, et cela devient quasi impossible lorsque les nominations sont faites pour des durées trop longues. Cela pourrait même être très tentant pour un gouvernement de s'organiser juste à la veille d'une élection et, là, bloquer tous les postes aux conseils d'administration et faire en sorte que le nouveau gouvernement se voit les mains complètement liées et n'ait plus aucun moyen d'agir sur la société.

Donc, cela me paraît mauvais, d'autant plus que la Loi sur les compagnies est également sage à cet égard, elle dit bien que c'est une nomination d'un an, si je ne m'abuse, ou de deux ans. Donc, la Loi sur les compagnies, dans sa sagesse, a prévu ces cas. La suggestion que vous faites, qui me

paraît une suggestion tout à fait valable, n'est pas inapplicable pour autant. Ce que cela veut dire, c'est que, dans un conseil d'administration, vous avez forcément des gens qui sont là depuis deux, trois, quatre, cinq, six, sept ou huit ans et on aura tendance à nommer au comité exécutif des gens qui sont là depuis un certain nombre d'années, mais sans pour autant préjuger qu'ils sont là ad vitam aeternam puisque je pense que c'est vraiment là un des privilèges du pouvoir politique de nommer les gens qu'il veut bien nommer.

M. Fortier: En ce qui concerne un changement majeur ici, si je ne m'abuse, c'est le fait que vous avez enlevé la nécessité de nommer des officiers, excepté le président. Dans une société comme celle-là, où les personnes sont impliquées dans l'exploitation, quel est votre sentiment là-dessus? Vous semblez préférer faire en sorte que ces gens ne soient pas désignés, du moins en principe, dès le départ. Ils pourraient ne pas être nommés. En fait, la seule personne désignée par la loi est le président de la compagnie. Ne croyez-vous pas que certains des officiers pourraient avoir une contribution même s'ils sont en minorité? Je suis tout à fait d'accord pour dire que les officiers de la société doivent être en minorité dans un conseil d'administration parce qu'il s'agit de juger de leur performance à eux.

Il reste quand même que dans un domaine aussi technique ils devraient pouvoir exprimer leur opinion et dire les avantages qu'il y a d'investir ou de ne pas investir dans un projet ou dans l'autre.

M. Bérubé: Ce serait là justement un privilège de l'actionnaire. Si, comme vous le dites effectivement, c'est une excellente pratique sur le plan de la gestion, l'actionnaire décidera effectivement de nommer des gens de l'intérieur. Personnellement, je pense qu'il est sage que le vice-président exécutif soit toujours au conseil d'administration de manière qu'on ait toujours quelqu'un en "stand by", si on peut utiliser l'expression, prêt à prendre les rennes de l'entreprise puisqu'aucun homme ou aucune femme n'est éternel, la mort est toujours possible, une démission est toujours possible de même qu'un départ. Je pense qu'il est important que dans un conseil d'administration il y ait au moins un autre membre de la direction qui siège.

À savoir s'il devrait y en avoir deux, trois, quatre ou cinq, je pense que c'est une question de jugement de la part de l'actionnaire et je préférerais le laisser le plus libre possible de telle sorte qu'advenant un échec de la société le gouvernement puisse assumer l'entière responsabilité. L'expérience personnelle que j'ai maintenant, après quatre ans, est qu'il faut éviter, dans nos lois, de vouloir mettre trop de restrictions parce qu'on ne peut pas à la fois exiger de nos sociétés d'État des performances comparables à celles du secteur privé et en même temps abuser de réglementations, de contraintes de toutes sortes, de façon que finalement on mette la société d'Etat dans une position où elle ne peut pas concurrencer et en même temps on lui dit de concurrencer.

Donc, je préfère lui laisser la marge de maneuvre que l'on retrouve en général dans le secteur privé, de manière qu'elle soit véritablement en concurrence et, à ce moment, c'est au gouvernement à prendre ses responsabilités lorsque la société ne réussit pas. J'ai dû constater, dans certains cas, qu'il y a eu des abus réels dans nos lois, alors que des gens étaient nommés pour dix ans, par exemple, non pas que le résultat ait été malheureux, je pense qu'un bel exemple c'est la nomination de M. Côme Carbonneau à la direction de SOQUEM. C'était un excellent choix et le président de la société a vraiment bâti une entreprise assez remarquable. Mais on peut toujours poser l'hypothèse que ça n'a pas fonctionné aussi bien qu'on aurait voulu et se demander qu'est-ce que le gouvernement en place aurait fait. Il aurait toujours pu expliquer à la population que la loi ne permettait pas plus, mais les citoyens ne comprennent pas, parce qu'eux ont l'impression que des lois ça se change. Malheureusement, ça ne se change pas si facilement que ça.

Je préfère une loi qui fait appel à la sagesse populaire et je pense que la Loi sur les compagnies fait vraiment appel à la sagesse populaire. Ça fait assez longtemps que les citoyens doivent s'organiser en corporations. Ils ont développé des règles et c'est pour cette raison que, d'une façon générale, j'ai tenté, depuis que je suis là, de modifier les lois des sociétés d'État pour les amener dans une sorte de coquille qui soit assez identique à la Loi sur les compagnies, en tenant compte cependant qu'une société d'État étant généralement mandataire de la couronne, il faut évidemment qu'il y ait certains contrôles différents qui nous obligent à maintenir des distinctions dans nos lois.

C'est un peu la philosophie qui a sous-tendu mon action dans beaucoup de cas et je suis content de voir, après quatre ans, qu'on est en train de se doter tranquillement d'une coquille pour nos lois de sociétés d'Etat. Je pense que c'est une amélioration très nette par rapport à ce qui existait antérieurement.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le ministre, quand vous dites que vous leur donnez une marge de flexibilité pour fonctionner, vous incluez un

article comme l'article 21e selon lequel elles ne peuvent pas adopter de règlements concernant l'exercice de pouvoirs sur la régie interne sans votre consentement. D'une façon, vous venez de dire que vous voulez élargir leur marge de manoeuvre et là vous voulez tout contrôler, même la régie interne.

M. Bérubé: II y a deux objectifs pratiquement contradictoires. D'une part, vous voulez que votre société d'Etat ait une marge d'autonomie, qu'elle puisse prendre des décisions. D'autre part, comme elle est mandataire de la couronne, elle doit, dans ses gestes quotidiens, exprimer la volonté du gouvernement. C'est pour cette raison qu'un certain nombre de décisions fondamentales sont soumises à l'approbation du gouvernement, alors que, pour d'autres décisions, on s'assure qu'elle jouit d'une plus grande autonomie ou d'une plus grande marge de manoeuvre.

Mais on reviendra au problème de la régie interne, j'ai déposé un amendement à cet égard, je pense que ce sera plus facile d'en discuter à ce moment-là.

M. Fortier: Les commentaires les plus importants que j'aie après ça sont aux articles 21 et 23. Pour en rester au conseil d'administration, vous parliez de la marge de manoeuvre à donner à la société, et la marge de manoeuvre en ce qui concerne la formation du conseil d'administration vous vous la donnez à vous-même, ce n'est pas à la société, c'est à vous-même.

Vous avez dit, en réponse à la question que je posais sur la raison pour laquelle il n'y avait pas de gens de l'intérieur, que vous préfériez donner une marge de manoeuvre. La marge de manoeuvre, dans ce cas, c'est à vous-même que vous la donnez.

M. Bérubé: Je l'ai donnée au gouvernement, oui.

M. Fortier: Je reviendrai plus tard aux articles 21 et 23.

Le Président (M. Bordeleau): J'avais reconnu M. le député de Duplessis.

M. Perron: Oui, M. le Président, je voudrais dire ceci au ministre, premièrement que l'article 4, qui change l'article 14b de l'ancienne loi, sur le principe de porter le nombre de membres du conseil d'administration de six à dix, je suis parfaitement d'accord, mais, cependant, j'ai une certaine réserve en rapport avec qui devrait être nommé là.

Je vais vous dire pourquoi, c'est que le mandat de SOQUEM étant élargi de beaucoup, je me demande s'il n'y aurait pas lieu de regarder attentivement ce qu'on a à l'intérieur de SOQUEM actuellement pour amener des compétences qui connaissent le milieu depuis un certain nombre d'années, par exemple, dans l'administration actuelle, je ne parle pas du conseil d'administration, mais dans la direction actuelle, parce que quatre nouveaux membres dans un nouveau conseil d'administration cela pourrait créer des problèmes d'adaptation, surtout quand il y a des réunions qui sont convoquées une fois par mois, si ma mémoire est bonne, par le président, soit dans les cas, M. Paul Bourassa; est-ce que le ministre a l'intention de travailler en coordination avec le président pour la nomination de ces membres, de très près avec lui?

M. Bérubé: Ce qu'il est important dans ça de souligner, c'est que le conseil d'administration est composé du président et de six à dix... Il y a une marge.

M. Perron: Ils ne passent pas de six à dix.

M. Bérubé: II est composé de six à dix, ce qui veut dire que nous pourrions n'en nommer que six, plus le président, sept, c'est la situation actuelle, ou nous pourrions le monter jusqu'à onze...

M. Perron: Incluant le président actuel.

M. Bérubé: II y a donc, tel que c'est rédigé, une possibilité de maintenir le conseil d'administration dans sa forme présente ou encore de choisir d'y ajouter de nouveaux représentants. Je ne vous cacherai pas que, par exemple, j'ai l'intention de nommer quelqu'un, de demander au Conseil des ministres de nommer quelqu'un venant du Nord-Ouest qui est une région où la société oeuvre de façon très importante... Vous savez, comme il va y avoir l'usine d'affinage d'or, on ne peut pas tout avoir.

Une Voix: On ne voulait pas vous le dire tout de suite.

Le Président (M. Bordeleau): On est très intéressé, M. le ministre.

M. Bérubé: J'aurai fait une mauvaise blague, mais mon adjoint parlementaire me dirait que j'ai toujours tendance à faire des mauvaises blagues, ce qui a le don de susciter des discussions. C'est mon intention en tout cas de recommander au Conseil des ministres l'ajout d'un représentant venant du Nord-Ouest. Donc, les régions où la société travaille, il me semble qu'on devrait s'assurer qu'elles soient représentées, qu'elles sont présentes.

M. Grégoire: Comme cela se fait d'ailleurs dans le domaine de l'amiante où

deux membres du conseil d'administration de la Société nationale de l'amiante viennent de la région de l'amiante.

M. Bérubé: Dans la mise sur pied d'un conseil d'administration, il faut tenir compte de passablement de facteurs. Il est important que chaque membre du conseil apporte véritablement quelque chose d'original au conseil d'administration, soit une connaissance du milieu de travail, des relations de travail, soit une connaissance du milieu financier ou du génie ou de l'exploration; enfin, il y a un éventail de connaissances qui sont requises pour qu'un président puisse prendre une décision. C'est très important qu'un conseil d'administration soit bien étoffé à ce chapitre. C'est d'ailleurs pour cela - et là, ce n'est pas une mauvaise blague, mais je pense qu'il faut le souligner - peut-être que dans le passé les gouvernements ont eu tendance à vouloir nommer aux conseils d'administration des gens en qui ils avaient confiance, et très fréquemment c'étaient des nominations de type politique. C'est-à-dire qu'on prend un ex-député libéral, je n'irai pas dire de Rouyn-Noranda, et on le nomme.

Il y a des fois où c'est tout à fait justifié. Certains députés, certains ministres ont une très grande connaissance du domaine; ce peut être un excellent choix de les nommer à de tels postes, mais je pense qu'il est dangereux de nommer systématiquement des gens pour des raisons de politique partisane parce que le président du conseil, généralement, est nommé d'une façon assez rigoureuse puisque les gouvernements sont conscients qu'un mauvais président pourrait coûter cher à la société. On fait donc un effort particulier pour nommer un président valable. Au niveau des conseils d'administration, je pense qu'il faut insister sur l'importance de doter les conseils d'administration de compétences assez ouvertes couvrant l'éventail des préoccupations de la société, de manière, justement, que le président soit bien appuyé. Je pense que c'est une des difficultés que nous avons eues dans le passé avec les conseils d'administration des sociétés d'État de ne pas y trouver des compétences dans tous les domaines qui auraient été utiles pour le président. Cela m'apparaît important.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: D'après l'article 15, ce n'est pas le ministre qui est président du conseil. Ce sont les membres du conseil qui choisissent un président.

M. Bérubé: Pour le président du conseil. M. Fortier: Est-ce que vous auriez objection à dire que les membres du conseil d'administration peuvent l'élire parmi les membres? Vous insistez pour qu'il y ait un président du conseil d'administration ou si c'est simplement une option?

M. Bérubé: Personnellement, je n'ai pas d'objection à dire "peuvent" élire, effectivement...

M. Fortier: Cela semble indiquer qu'automatiquement la personne va être une personne différente tandis que selon la Loi des compagnies, il arrive que dans certaines sociétés le président puisse être à la fois le président du conseil.

M. Bérubé: Je n'aurais pas d'objection, au nom d'un principe qui est: donnons le plus de flexibilité possible. On est toujours content d'avoir la flexibilité quand, à un moment donné, un problème se pose et qu'on s'aperçoit que la loi est un carcan qui nous empêche effectivement de prendre des actions qui devraient être prises.

M. Ciaccia: Quelle est votre intention, est-ce que c'est d'avoir un président?

M. Bérubé: Mon intention à moi est de toujours avoir un président du conseil. Les expériences que j'ai eues m'ont enseigné qu'il n'est pas mauvais que le PDG soit distinct du président du conseil, de telle sorte que le conseil puisse prendre une certaine distance. C'est d'autant plus important que le gouvernement nomme le président de la société. Donc, le président a un mandat du gouvernement, il parle parce qu'il détient la confiance du gouvernement. Si, d'autre part, le conseil d'administration a été nommé par le gouvernement, que ce passe-t-il lorsque les deux, conseil et président, sont en désaccord sur un point? Cela pose un problème très délicat. La présidence du conseil étant entre les mains du PDG de la société, il devient très difficile aux membres du conseil d'exprimer cette opposition.

Personnellement, je pense que toutes nos sociétés devraient avoir un président du conseil distinct de la direction comme telle. C'est ma perception personnelle. Mais je ne vous cache pas que, dans certaines lois que j'ai pilotées ici à l'Assemblée nationale, pour des raisons de flexibilité, j'avais gardé la possibilité que ce soit un peu au sens où le dit le député d'Outremont. Toutefois, depuis, de longues discussions ont eu lieu entre le ministère des Finances et les différents autres ministères, et au niveau du Conseil exécutif, on tend à nous ramener à cette formule en disant: cela nous apparaît à ce point désirable qu'on devrait s'en tenir à ce qu'il y ait toujours un président du conseil

distinct du PDG. Comme c'est une position gouvernementale, je la respecterai.

Le Président (M. Bordeleau): Le député d'Outremont.

M. Fortier: Je suis d'accord, je ne devrais pas dire ça, mais je suis d'accord sur le concept d'un président du conseil et d'un PDG, quitte à ce que dans certains cas, il n'y ait pas de président du conseil, mais dans la plupart des cas, ça pourrait être une bonne chose. Cependant, il me semble que le concept pourrait être comme ceci - c'est un peu comme ça que les compagnies de la couronne à Ottawa fonctionnent - le président du conseil est nommé par le gouvernement et, de fait, agit comme l'interlocuteur politique.

Le président devient alors le chef de l'exécutif de la compagnie, il est nommé par le conseil d'administration, avec ressentiment du ministre. On voit alors que le président a un rôle moins politique, mais plutôt un rôle de gestionnaire qui doit gérer la compagnie à l'intérieur des politiques qui ont été définies. Le rôle du président du conseil étant nettement défini, je crois qu'en mettant l'interlocuteur valable du ministre, cela fait en sorte, au jour le jour, que le ministre, ou un représentant sans rôle exécutif, a un rôle politique à l'intérieur de la société.

Ici, ce n'est pas ça, c'est le ministre qui nomme le président, et le président du conseil est nommé par les autres membres du conseil d'administration. C'est pour ça que je trouve que la formule est un peu ambiguë, quant à moi.

M. Bérubé: Vous avez raison, en ce sens que si vous regardez la loi sur la Société nationale de l'amiante, elle suit exactement le patron que vous venez de décrire. Pour des nominations inférieures à deux ans, le gouvernement maintenait son pouvoir traditionnel de nomination, mais pour des nominations supérieures à deux ans - on pense, par exemple, au président de la société - la loi était ainsi structurée que le conseil d'administration avait un rôle très grand à jouer.

Nous avons eu des difficultés de fonctionnement avec la loi sur la SNA et, après mûre réflexion, on a décidé de ne pas complètement bouleverser la mécanique actuelle, en vertu de laquelle, présentement, c'est le gouvernement qui nomme le PDG. La seule chose que nous y avons ajoutée, c'est que c'est après consultation des autres membres du conseil d'administration. En d'autres termes, nous avons forcé, dans la loi, le gouvernement à consulter le conseil d'administration, mais nous avons voulu maintenir au gouvernement le droit, le pouvoir de nomination du PDG.

Donc, l'exécutif de la société est véritablement sous contrôle gouvernemental, puisque c'est lui qui choisit le directeur général de l'entreprise. Dans ces conditions, puisque c'est l'approche à privilégier, il fallait donner au conseil d'administration peut-être une marge d'autonomie face au PDG, d'où la décision de laisser le président du conseil d'administration se faire élire par les membres du conseil d'administration, donc donner un peu plus d'autonomie au conseil, face à la direction. (17 h 15)

M. Fortier: Le problème que ça va créer, c'est que si c'est le cas et si le président du conseil est un interlocuteur politique vis-à-vis du président, le ministre va être obligé de faire des manigances à l'intérieur du conseil d'administration pour s'assurer que son poulain va être élu président du conseil. Vous faussez la façon dont vous voulez que le conseil d'administration joue. Tant qu'à faire des manoeuvres comme celle-là, ce serait aussi bien de le dire dans la loi, mais je vois bien que vous êtes en minorité au sein de votre caucus ou de votre cabinet.

M. Bérubé: Non, pas du tout. C'est parce qu'il n'y a pas là vraiment une question politique. C'est une question de point de vue et de sentiments. Votre point de vue se défend très bien.

M. Fortier: Je l'ai vécu par en dessous et l'expérience que j'ai vécue m'amènerait à poser un geste différent.

M. Bérubé: Oui. Notre expérience, à nous, nous a amenés à poser celui-ci. C'est là qu'est le problème. Je pense que c'est essentiellement matière de point de vue. Nous n'avons pas voulu complètement bouleverser nos habitudes. Effectivement, dans le cas d'Hydro-Québec, par exemple, le président du conseil est l'interlocuteur privilégié du gouvernement. Cela a été voulu ainsi Le gouvernement nomme directement le président du conseil et c'est volontaire. Donc, j'ai l'impression que tous les points de vue sont possibles à cet égard, mais, dans ce cas-ci, nous restons dans la tradition plus classique où le gouvernement nomme le PDG, mais, à ce moment-là, on a voulu quand même donner plus d'autonomie au conseil d'administration. Effectivement, si le ministre veut absolument louvoyer pour avoir son homme à la présidence du conseil d'administration, il louvoiera.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je me demande dans quelle proportion on ne ferait pas mieux de le dire carrément si c'est ce qu'on veut faire. Le

ministre dit qu'il aime mieux cette formulation, mais on semble comprendre que, de toute façon, cela va être dans la pratique voulu par le gouvernement que le président du conseil d'administration soit celui que le gouvernement veut avoir. C'est aussi bien de le nommer. De même, il n'y aura pas d'accusation pour rien et ce ne sera pas anormal non plus. Ce ne serait pas anormal que ce soit le gouvernement qui le nomme. On serait peut-être aussi bien de l'inscrire directement.

M. Bérubé: Non, je préférerais que ce soit tel quel. C'est toujours une espèce d'équilibre à établir et, dans le cas présent, nous aurions très bien pu décider que les présidents-directeurs généraux de nos sociétés d'État sont nommés par le conseil d'administration, donner toute l'autonomie au conseil d'administration et qu'il n'y aurait pas d'intervention politique, sauf que c'est aller très loin parce que là, si la société fonctionne mal...

Une voix: C'est lui qui est responsable.

M. Bérubé: ...le gouvernement, qu'est-ce qu'il répond? C'est difficile. Donc, effectivement, on n'a pas choisi cette approche. On a choisi l'approche suivante: Le gouvernement nomme le PDG et il ramassera le plat si cela va mal. Dans ces conditions, pour pouvoir donner une autonomie au conseil d'administration pour pouvoir prendre ses distances face au PDG, on a donc dit: Gardons à notre conseil d'administration le pouvoir de nommer son président de manière qu'il puisse prendre ses distances et donner une opinion parallèle, indépendante au ministre si besoin est. C'est pour cette raison qu'on laisse le conseil d'administration élire son président, suivant la Loi sur les compagnies, d'ailleurs.

M. Fortier: Le seul commentaire, c'est si je me place dans la peau des candidats à la présidence de ces sociétés. On veut de plus en plus des gestionnaires compétents. Si vous allez chercher quelqu'un qui, justement, n'a jamais fait de politique, si c'est ce que vous voulez dans une certaine mesure comme président d'une société d'État...

M. Bérubé: On est quasiment mieux dans ce temps-là avec un bon bonhomme de même.

M. Fortier: C'est cela. Je me place dans la peau du candidat et je me dis: À ce moment-là, si je ne veux pas être identifié à un parti politique, étant le candidat X, j'aimerais bien mieux être nommé par le conseil d'administration, sachant que cette nomination a été approuvée par le ministre, mais en second lieu. Je crois que de la façon dont la loi a été formulée on a pensé au ministre, mais on n'a pas pensé au candidat. Mais comme il sera peut-être plus difficile dans l'avenir d'aller chercher des candidats pour devenir chefs de l'exécutif de ces sociétés, surtout d'aller chercher des gens très compétents, on aurait peut-être pu y penser. En tout cas, c'est leur choix. Je pense que le ministre a répondu qu'il s'agit d'une enveloppe en ce qui concerne les $36,000,000 additionnels.

M. Bérubé: Je n'ai pas de détails à donner. Je n'en ai pas.

M. Ciaccia: Mais comment êtes-vous arrivé à $36,000,000? Pourquoi pas $25,000,000 ou $40,000,000?

M. Bérubé: Oui. Cela aurait pu être $25,000,000.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas pris le chiffre dans un chapeau.

M. Bérubé: Out of blue sky ou à peu près. $6,000,000 pour l'exploration, nous le savions, parce que nous savions en gros ce que nous voulions et, après cela, on a pris un beau chiffre rond de $30,000,000. Cela aurait pu être $25,000,000, cela aurait pu être $35,000,000.

M. Ciaccia: II n'y a pas de plan de développement?

M. Bérubé: Le plan de développement, il s'autofinance avec les dotations en capital actuellement et avec les revenus de la société. Mais comme il s'agit de deux propriétés supplémentaires que la société voit poindre à l'horizon, celle de Crevier et celle de La Galette, à ce moment-là, on a essayé de voir quelle pourrait être la taille de ces mines. Ayant une idée approximative du montant qui serait requis, cela donne à peu près $30,000,000. C'est vraiment du préengineering.

M. Fortier: C'est comme cela qu'on marche dans le secteur privé. Je ne sais pas si politiquement, c'est acceptable.

M. Ciaccia: Vous aviez mentionné deux ou trois projets. C'est dans cet...

M. Bérubé: C'est du pifomètre. Mais il n'est peut-être pas si faux que cela, de toute façon.

Etude article par article

Le Président (M. Bordeleau): Avant d'aller plus loin, j'aimerais quand même qu'on adopte un certain nombre d'articles au

début, ceux qui ne semblent pas poser de problème. Je pense que cela va être préférable, avant d'arriver à l'amendement qu'on a déposé.

Est-ce que l'article 1 sera adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Est-ce que l'article 2 sera adopté?

M. Ciaccia: Oui, adopté.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 2 est adopté. Article 3. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: À l'article 3, je voudrais demander au ministre pourquoi il a employé l'article 12 de la présente loi plutôt que de la modifier. J'avais une certaine restriction, c'était...

M. Bérubé: On me l'a expliqué et effectivement je le comprenais clairement à ce moment-là, mais c'est lié à la façon de rédiger l'article 3.

M. Bérubé: Jean Brisset Denos, au service juridique du ministère.

Le Président (M. Bordeleau): Mais c'est toujours au nom du ministre.

M. Bérubé: Mais ce qui apparaît dans le procès-verbal, c'est toujours le ministre. Vous avez remarqué que j'ai une connaissance en droit remarquable, une connaissance en génie minier époustouflante et, dans tous les domaines où vous poserez des questions, je suis toujours aussi brillant.

M. Fortier: Vous allez avoir une bonne position dans le secteur privé dans quelques mois, M. le ministre.

M. Samson: J'aurais aimé mieux que cela ait été dit par un autre.

M. Bérubé: L'article 12 doit être lu en relation avec le dernier article du projet de loi, soit l'entrée en vigueur des articles du projet de loi, qui peut entrer en vigueur en tout ou en partie.

L'article 12 mentionne l'emploi des sommes qui se terminent au 30 décembre de cette année. Les sommes mentionnées à l'article 10 non modifié, à l'article 11 de la loi actuelle...

L'article 12 se lit comme suit: La société doit employer les sommes qui lui sont versées en vertu des articles 10 et 11 pour l'accomplissement des objets visés aux paragraphes b) et c) de l'article 3. Comme on modifie l'article 3 et comme les sommes des articles 10 et 11 vont être employées avant la fin de l'année civile 1980, effectivement, quand la loi va être adoptée, cet article n'aura plus aucune conséquence.

M. Fortier: C'était une restriction.

M. Ciaccia: Vous n'auriez pas pu la modifier pour tenir compte de l'utilisation des fonds avant la fin de décembre, mais en tenant compte aussi des objets élargis de l'article 3.

M. Bérubé: C'est parce que les paragraphes b) et c) ont sauté et qu'en plus, lors d'une rencontre, cela peut poser des problèmes, s'il y a modification, de faire suivre...

M. Fortier: II n'y a pas d'utilité, à ce moment-là. Autrement dit, il n'y a aucune restriction. C'était une restriction sur l'utilisation des fonds. Il n'y a plus de restriction.

M. Bérubé: Les fonds ayant été versés, cela ne sert à rien de garder dans la loi une restriction sur les fonds ayant été versés puisque...

M. Ciaccia: Mais vous parlez d'un autre montant de $36,000,000 qui n'est pas encore versé.

M. Bérubé: Non. L'article 12 qui est abrogé ne se réfère pas au montant de $36,000,000.

M. Ciaccia: II se réfère seulement aux fonds qui sont versés.

M. Bérubé: C'est cela, aux sommes déjà votées dans la loi.

M. Fortier: C'est-à-dire que les fonds mis à la disposition de la société doivent être utilisés selon le mandat de la société. Mais cela ne vaut pas la peine de le dire.

M. Ciaccia: C'est compris dans la loi qu'ils doivent l'utiliser.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 3 sera adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 4, sur lequel on a un amendement.

M. Ciaccia: Attendez.

Le Président (M. Bordeleau): Dans l'article 4, justement, il y a l'ancien article 21.

M. Fortier: Alors l'article 13, cela va,

l'article 14, le conseil d'administration... Si c'est le voeu du ministre, moi, j'aurais voulu certaines modifications. Là, c'est un choix de l'exécutif. Articles 15, 16, 17, 18, 19, 20. Moi, j'irais jusqu'à l'article 21.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: II y a un point qui est intéressant à l'article 18, que je voudrais simplement souligner aux fins de renseigner cette commission. Nous avons introduit maintenant dans presque tous nos contrats avec nos présidents de société des clauses de rémunération basée sur la performance. C'est un élément nouveau. Cela n'existait pas antérieurement. Maintenant, nos présidents de société reçoivent un salaire de base, mais également, à partir d'un ensemble de critères de performance quantifiable , ils ont droit à une rémunération additionnelle, ce qui rend les contrats d'engagement de nos présidents plus complexes que par le passé, mais cela pourrait certainement aider à améliorer la performance de nos sociétés d'État dans l'avenir.

M. Fortier: À ce sujet, la SGF a donné hier encore un bon exemple, parce qu'elle a déposé son plan qui définit les critères de rentabilité. J'oserais espérer que, dans un avenir prévisible, la société développe des critères, soit un retour sur l'investissement... Parce que, maintenant, c'est assez facile. Prenons le cas de M. Coulombe, président de la SGF; il a mis sur la table un plan de développement qui inclut des critères de rentabilité que tout le monde peut juger. Dans le cas du président de la SGF, on peut dans un, deux, trois ans évaluer nous-mêmes - ou le public peut le faire - et il me semblerait que ce serait normal que certains critères de rentabilité de la société puissent être connus du public.

M. Bérubé: La rémunération basée...

M. Fortier: La rémunération du chef de l'exécutif jugé d'après ces critères.

M. Bérubé: Ah oui. C'est une excellente approche, parce que de cette façon, on commence à introduire des moyens internes de contrôle dans le fonctionnement de nos sociétés. Je suis absolument d'accord. Je tenais à le souligner, parce que c'est véritablement un changement de mentalité ou d'attitude face à nos sociétés d'État depuis quatre ans.

M. Samson: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Avant l'article 21, M. le député de Rouyn-Noranda?

M. Samson: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, à l'article 17, il y a un changement qui est évidemment majeur. "Au moins les deux tiers des membres du conseil d'administration, dont le président du conseil et le président de la société, doivent être domiciliés au Québec".

Anciennement, ils devaient tous être domiciliés au Québec. Est-ce que le ministre peut me donner - il l'a dit - un exemple...

M. Bérubé: Bon...

M. Samson: ...d'un besoin d'aller chercher quelqu'un à l'extérieur?

Deuxièmement, est-ce que quelqu'un qui fait partie du conseil d'administration, non domicilié au Québec, pourrait être domicilié à l'extérieur du pays, à l'extérieur du Canada, par exemple?

M. Bérubé: La raison est très simple. Dans la loi de la SNA, je ne vous cache pas que j'avais aboli carrément cette exigence, parce que je trouve complètement farfelu d'aller dire à un gouvernement: Vous devez nommer tous vos administrateurs à partir des citoyens résidant aux Québec. Si un gouvernement qui est responsable devant la Chambre et l'électorat de la performance des sociétés faisait la gaffe inimaginable d'aller nommer tous des étrangers, il ferait rire de lui à tel point que ce genre d'erreur, il ne la répéterait pas souvent.

Donc, cela me fait penser même à une espèce de besoin de refermer le Québec sur lui-même. Cette espèce de clause à l'effet qu'on ne peut pas nommer quelqu'un de l'extérieur du Québec à un conseil d'administration, cela m'est toujours apparu, moi, un peu mesquin. Je voulais donc la faire disparaître. On m'a souligné, à ce moment-là, et l'Opposition libérale était là de même que l'Union Nationale, qu'on allait trop loin, indéniablement, et qu'on pourrait peut-être au moins avoir un minimum. Effectivement, on a eu un compromis proposé par l'Union Nationale à l'époque, qui était qu'au moins les deux tiers soient du Québec et, moi, je souscris à cela. Je pense bien que n'importe quel gouvernement qui voudrait nommer plus que le tiers d'administrateurs de l'extérieur se couvrirait de ridicule. Je pense à un bon compromis entre une espèce de volonté de garantir que ce sont bien des Québécois qui siègent au conseil d'administration et, en même temps, cette ouverture-là. Cela m'avait permis des discours absolument homériques lors du débat sur la loi sur l'amiante pour montrer à quel point le Parti québécois était ouvert alors que les libéraux étaient fermés. On ne

recommencera pas parce que nous en avons fait pendant trois mois. (17 h 30)

M. Fortier: Dans la Loi des compagnies on prévoit toujours au Canada de dire au moins que la majorité des membres du conseil doivent être canadiens. Ici vous pourriez nommer un tiers de Français et cela répondrait à l'objectif de la loi. Il me semble qu'on devrait préciser que ceux qui sont de l'extérieur du Québec devraient être au moins canadiens, étant donné que nous faisons toujours partie du Canada.

M. Bérubé: C'est une précision...

M. Ciaccia: Même si vous alliez le faire, vous ne l'incluriez jamais dans un projet de loi.

M. Bérubé: C'est une précision, comme on en est tous conscients, qui pourrait nous amener à devoir, dans quatre ou cinq ans, réviser toutes nos lois sous prétexte que le Québec serait totalement indépendant. Étant donné qu'on voudrait éviter à nos législateurs, peut-être dans trois ou quatre ans, l'obligation de reprendre toutes les lois du Québec, aussi bien ne pas préciser.

M. Ciaccia: Cette loi est prête pour un Québec indépendant!

Une voix: Toutes les lois sont prêtes.

M. Samson: Si je comprends bien, M. le Président, cette loi s'inscrit dans le cadre de la démarche vers l'indépendance. Est-ce qu'on peut faire répéter le ministre? Comme toutes les autres d'ailleurs.

M. Bérubé: C'est une ouverture sur l'avenir.

M. Samson: Est-ce que vous pouvez répéter cela une autre fois sans rire?

M. Fortier: M. le député de Rouyn-Noranda, vous voyez bien que le ministre prend cela en riant; il a abdiqué ses ambitions.

M. Samson: C'est pour cela que je lui demandais s'il était capable de le dire sans rire.

M. Bérubé: On rejoint la position de l'Union Nationale. On rejoint les exigences de la loi fédérale des compagnies qui exige un pourcentage de la majorité. En même temps, on garde une ouverture sur le monde. Là-dessus, on avait vite fait l'unanimité.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'on en arrive à l'ancien article 21? M. le ministre, est-ce que vous auriez l'obligeance de nous donner l'amendement, de présenter l'amendement?

M. Bérubé: Oui.

M. Fortier: Est-ce qu'on peut les prendre un par un?

Le Président (M. Desbiens): L'amendement gouvernemental porterait sur les deux paragraphes d) et e) qui ont d'ailleurs été discutés rapidement lors de la commission parlementaire au cours de laquelle nous avons entendu les dirigeants des sociétés d'État. Dans le cas de d), pour être bien certain qu'il a une expression claire dans la loi, il s'agirait d'acquérir ou de détenir des actions ou des biens d'une entreprise, et je spécifie, "dans une proportion supérieure à 50%", plutôt que "suffisante pour lui en assurer le contrôle." De façon que ce soit très clair. C'est un peu d'ailleurs ce qui existe maintenant dans les lois fédérales. On dit que les créatures sous contrôle de la société d'État devraient au moins faire l'objet d'une approbation gouvernementale, parce qu'on s'est retrouvé à Ottawa avec une multiplication phénoménale de filiales à l'insu totalement du gouvernement. La société pouvait en arriver à faire indirectement ce que la loi lui défend de faire directement parce que la loi s'applique à SOQUEM, M. le Président, mais elle ne s'applique pas aux filiales de SOQUEM.

M. Fortier: Comme vous le savez, cela s'applique dans les lois ici, mais dans le secteur privé, si vous possédez 51% de la compagnie, vous devez prendre les pertes à 100% et non pas à 51%. On est bien d'accord sur cela.

M. Bérubé: Cela est clair. Le paragraphe e)...

Le Président (M. Desbiens): Ah oui, d'accord. Vous présenterez l'amendement...

M. Bérubé: Je présenterai l'amendement global. À moins qu'on y aille alinéa par alinéa. On ne suit vraiment pas la procédure, mais je ne suis pas un expert en procédure.

Le Président (M. Desbiens): Cela va. On va s'entendre sur cela.

M. Fortier: C'est l'influence de deux ingénieurs autour de la table.

M. Bérubé: II ne faudrait pas trop les gâter parce qu'ils sont en train d'apprendre à travailler.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, l'amendement au paragraphe e).

M. Bérubé: Le texte de la loi disait: "Adopter des règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et le règlement de sa régie interne."

M. Ciaccia: C'est quoi cet article?

M. Bérubé: C'est le règlement qui, par exemple, définit les pouvoirs du comité exécutif, s'il devait y en avoir un, et le règlement général de régie interne. C'est tellement fondamental qu'un tel règlement doit être approuvé par le gouvernement. Cela peut, par exemple, amener le conseil d'administration à départager les pouvoirs entre un président du conseil et un PDG. Je pense qu'une telle décision doit faire l'objet d'une approbation du gouvernement.

M. Fortier: Une telle clause peut-elle affecter les nominations, l'embauche d'employés, le personnel? Vous avez mentionné tantôt que vous vouliez autant que possible éviter le genre de nominations qui s'étaient produites dans le passé. Est-ce que cela ne vous permet pas une ingérence complète dans toute l'exploitation de la société avec une telle clause?

M. Bérubé: II est indéniable que cela définit l'équilibre des pouvoirs, les politiques de rémunération du conseil d'administration. Il est indéniable que cela définit...

M. Ciaccia: Je peux comprendre votre préoccupation avec le conseil d'administration, mais quand vous parlez de la régie interne de la société, non seulement...

M. Bérubé: C'est le règlement... M. Ciaccia: ...non seulement...

M. Bérubé: C'est le règlement concernant sa régie interne.

M. Ciaccia: Exact. Alors, cela affecte plus que le conseil d'administration.

M. Fortier: Je pense qu'on ne comprend pas ce que vous voulez dire. Si je me fie à mon expérience personnelle, il y avait beaucoup de règlements ou de procédures de régie interne par exemple, comment les projets vont être administrés, des choses comme celle-là. Ce dont vous parlez, je pense bien que c'est le règlement qui concerne la distribution des fonctions les plus hautes. Il me semble que celle-ci est beaucoup plus large que ce que vous voulez dire. Si vous voulez dire que l'organigramme des cadres supérieurs devrait être approuvé par le ministre, nous sommes d'accord, mais si vous laissez cela tellement vague que ce dernier pourrait approuver des détails, il me semble qu'on devrait laisser plus de latitude au président.

M. Ciaccia: Cela semble donner un contrôle absolu au ministre.

M. Bérubé: Si on compare la nouvelle version avec l'ancienne, elle est évidemment beaucoup plus précise maintenant qu'elle ne l'était antérieurement, alors que c'était d'adopter des règlements. Cela aurait pu s'appliquer à tous les règlements adoptés par le conseil d'administration. Cela comprenait la politique d'embauche, tous les règlements internes de la société qui auraient dû être approuvés par le Conseil des ministres. C'était carrément trop lourd. Par contre, le règlement de régie interne, lui, doit être approuvé absolument.

M. Fortier: Est-ce que vous seriez d'accord, M. le ministre, si on ajoutait: Concernant la formation du comité exécutif ainsi que l'organigramme des cadres supérieurs de l'organisation. C'est ce que vous voulez, dans le fond?

M. Bérubé: Cela nous aurait amenés à être très précis dans la définition de ce pouvoir. Il m'apparaît plus sage de laisser "le règlement de sa régie interne"; à ce moment-là, la société a une beaucoup plus grande autonomie et peut adopter des règlements continuellement. Notez bien qu'il s'agit ici de définir les, relations entre la société et l'État. Si l'État trouve que la société adopte quantité de règlements qui modifient l'équilibre des pouvoirs ou le fonctionnement interne de la société d'une façon majeure, à ce moment-là, le gouvernement pourra toujours dire: Cela devrait faire partie de votre règlement de régie interne, ces règlements multiples, mais il faudra qu'il y ait quand même une discussion entre le gouvernement et la société pour dire précisément ce qui va constituer le règlement de régie interne, si on veut aller là. Si on disait "des règlements de régie interne", cela deviendrait tellement vaste qu'on pourrait obliqer la société à toujours proposer. Tel que rédigé, cela a l'avantage de laisser un certain flou indéniablement, mais un flou qui m'apparaît sage, parce que quand une loi est trop précise on finit par avoir des problèmes.

M. Ciaccia: En mettant "le règlement de sa régie interne", je ne sais pas si vous...

M. Bérubé: "Le règlement général de sa...

M. Ciaccia: Non. "Et les règlements

généraux."

Une voix: Ce qu'on appelle les règlements généraux, mais non pas les règlements comme le fonctionnement...

M. Ciaccia: Oui. Parce que même avec votre nouvelle rédaction, "le règlement de sa régie interne", cela peut aller dans tous les détails. Pourvu qu'il n'existe qu'un règlement. Je pense que vous n'avez pas résolu le problème. Le problème qu'on essaie de résoudre, c'est que vous ne voulez pas aller dans tous les détails. Je pense que la suggestion que votre conseiller vient de faire, c'est que si vous le référez aux règlements généraux...

M. Fortier: Légalement parlant, je pense qu'on s'entend. Ce serait "adopter des règlements généraux".

M. Bérubé: Ce serait "adopter des règlements concernant l'exercice de ces pouvoirs et les règlements généraux de régie interne". Une formulation comme cela...

M. Fortier: Non. Je pense que...

M. Bérubé: Je vois le conseiller juridique de SOQUEM qui, lui, doit peut-être envisager des difficultés.

M. Fortier: M. le ministre, ce qu'on essaie de faire, c'est de vous protéger.

M. Ciaccia: On essaie de vous protéger contre vous-même. C'est cela qu'on essaie de faire.

M. Fortier: ... des heures de travail... M. Bérubé: ...

M. Fortier: Je sais bien que ce n'est pas ça, mais c'est ce que ça veut dire. On ne devrait pas parler de régie interne, seulement des règlements généraux.

M. Bérubé: La difficulté est de trouver une formulation juridique qui exprime fidèlement et complètement ce que nous voulons. Or, on n'arrive jamais à trouver cette formulation, si bien que, lorsqu'on prend l'article tel que rédigé actuellement "adopter des règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et le règlement de sa régie interne", présentement ça existe tel quel dans la Loi sur Hydro-Québec, ça existe tel quel dans la Loi sur REXFOR, ça ne pose absolument aucun problème.

M. Fortier: Notre intervention se veut dans le sens que, si on veut que ces compagnies soient rentables, le chef de l'exécutif ait une certaine latitude vis-à-vis de la régie interne en ce qui concerne les heures de travail, une certaine délégation aux plus bas niveaux, etc. Cela semble ouvrir la porte à l'intervention du ministre dans des domaines où il ne devrait pas s'ingérer.

M. Bérubé: La volonté, c'était le règlement...

M. Fortier: Ce que vous voulez, dans le fond, c'est l'organigramme supérieur ou le comité exécutif. Moi j'ai toujours...

M. Bérubé: Oui, mais ça ne se dit pas dans un projet de loi.

On pourrait peut-être demander de suspendre.

M. Fortier: Vous connaissez notre intention, pourquoi ne pas travailler dessus et revenir peut-être avec une meilleure phraséologie? Je pense qu'on s'entend.

M. Bérubé: Le e), c'est une proposition qui nous vient directement de chez vous, moi, je suis prêt à l'adopter tel quel; si on me dit e), je l'adopte tel quel, parce que c'est la proposition qui nous vient de SOQUEM et on se débrouillera bien avec, on vivra avec. Et, ici, on a changé d'idée.

Je proposerais e): "Adopter les règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et le règlement de sa régie interne", je le laisserais comme ça, sinon je reviendrai à la formulation générale que nous avons dans les autres lois, et par concordance. Je ne sais pas laquelle vous préférez. (17 h 45)

M. Ciaccia: Le e) m'apparaît plus limitatif.

M. Bérubé: Lequel e)? Une voix: Le nouveau e).

Le Président (M. Bordeleau): Cela veut dire que les amendements à l'article 21, paragraphes d) et e), seraient adoptés. On pourrait peut-être adopter tout l'article 4.

Une voix: C'est cela, l'article 4 est adopté.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 21 est adopté tel qu'amendé. Finalement, l'article 4 est adopté.

M. Fortier: On arrive à l'article 23.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, on va continuer. On reviendra pour l'article 4 au complet tel qu'amendé. Alors, 22, 23?

M. Fortier: N'y a-t-il pas un amendement a l'article 22?

Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez présenter votre amendement.

M. Bérubé: Oui. Sur le plan de la procédure, je pense qu'il faudrait essentiellement remplacer l'alinéa 22 par l'alinéa*. "Les livres et comptes de la société sont vérifiés chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement par le Vérificateur général ou par un vérificateur désigné par le gouvernement. Le rapport du vérificateur doit accompagner le rapport annuel de la société" visé dans l'article 37.

M. Ciaccia: Le Vérificateur général, si la compagnie en désigne un autre, n'aura rien à faire avec les rapports sur...

M. Bérubé: Non, si le gouvernement. M. Ciaccia: Si le gouvernement, oui. M. Bérubé: C'est exact. M. Ciaccia: Le danger là...

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que c'est possible, M. le ministre, d'avoir une copie de votre amendement?

M. Bérubé: Oui, c'est tout à fait possible. "Le rapport du vérificateur doit accompagner le rapport annuel de la société". Parfait.

Le Président (M. Bordeleau): C'est l'article au complet, l'article 22 refait. On va en faire faire une photocopie et on va faire le papillon. Est-ce que vous l'avez compris? De toute façon, on va le relire.

M. Ciaccia: On va le relire et, après, on fera des commentaires précis.

M. Bérubé: On va le relire au complet pour avoir un texte précis.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. L'article 22 tel qu'amendé se lirait comme suit: Les livres et comptes de la société sont vérifiés chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement par le Vérificateur général ou par un vérificateur désigné par le gouvernement. Le rapport du vérificateur doit accompagner le rapport annuel de la société.

M. Ciaccia: J'ai compris l'explication que vous aviez donnée.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Vous aviez donné la raison pour avoir un vérificateur soit nommé par le gouvernement ou, comme vous l'aviez dans votre projet, de loi à la demande de la société. C'était afin d'avoir un rapport plus vite. Mais qu'arrive-t-il du rôle du Vérificateur général? Le but du Vérificateur général et son importance pour le contribuable, ce n'est pas nécessairement d'avoir un rapport plus vite; c'était d'avoir un rapport complet dans lequel est inclus le genre de commentaires que le Vérificateur général fait. Le Vérificateur général a un rôle à jouer. Si vous l'enlevez, je crois qu'on enlève une grande responsabilité et on diminue la protection du contribuable. C'est une société d'État. Je comprends que, si c'était dans le domaine privé, il n'y aurait pas de problème. On veut le rapport rapidement, on le veut le plus vite possible. Mais, pour moi, l'importance dans ce cas-ci, c'est le rôle du Vérificateur général.

M. Bérubé: M. le Président, il n'est pas du tout exclu que le Vérificateur général fasse la vérification.

M. Ciaccia: À ce moment-là, pourriez-vous inclure les deux?

M. Bérubé: Ceci a été examiné en détail et rejeté unanimement.

M. Ciaccia: Oui.

M. Bérubé: À ce moment-là, c'est opposer le travail d'un vérificateur à celui d'un autre vérificateur. Il faut donc choisir. Je pense que, d'une façon générale, le Vérificateur général du Québec devrait faire la vérification des livres des sociétés d'État, mais que, lorsque, pour des raisons pratiques, il ne peut pas répondre aux besoins, dans ces conditions-là, il faut se garder une porte de sortie.

M. Ciaccia: Quand vous dites, qu'il ne peut pas répondre aux besoins, vous savez, il y a un Vérificateur général pour des gouvernements qui ont un budget plus élevé que celui du Québec et le Vérificateur général répond aux besoins, il engage plus de personnel.

M. Bérubé: C'est indéniable, il y a toujours possibilité d'engager plus de personnel.

M. Ciaccia: C'est le rôle du Vérificateur général.

M. Bérubé: Oui, mais la difficulté vient justement souvent qu'il peut se produire des cas. C'est arrivé dans le passé que le Vérificateur général, effectivement, n'avait pas, pour des raisons pratiques, étant donné les enquêtes qu'on lui demandait, étant donné les mandats particuliers qu'il avait reçus, se trouvait dans une position un peu particulière

et ne pouvait pas effectuer la vérification dans des délais qui seraient raisonnables, à notre avis, pour dépôt à l'Assemblée nationale. À ce moment-là, privé de ce moyen de nommer un autre vérificateur que le Vérificateur général, on se prive également d'un instrument de contrôle de la société et là, il y a matière à jugement.

M. Ciaccia: Le Vérificateur général ne veut pas accepter la responsabilité...

M. Fortier: Nous préférerions l'article 22 tel qu'il était.

M. Ciaccia: ... de nommer lui-même un autre vérificateur.

M. Bérubé: Ah oui! c'est l'article que nous avions effectivement concocté, mais le vérificateur ne l'aime pas du tout. Je ne vous le cache pas.

M. Ciaccia: Non, parce que sa responsabilité est un peu engagée, je crois.

Si c'est lui qui désigne un autre vérificateur, je suppose qu'il...

M. Bérubé: De l'avis du Vérificateur général, c'est le rôle de l'actionnaire de nommer des vérificateurs. Il n'a pas tort, d'une part. Il prévoit également des sources de conflits potentiels entre le Vérificateur général et la société s'il devait refuser d'accéder à la demande.

Il pourrait, par exemple, se retrouver dans une situation délicate et avoir à justifier la nomination d'un autre vérificateur. La réponse à cela serait qu'il n'a qu'à accroître son personnel. C'est exactement la position que le député de Mont-Royal vient de prendre il y a quelques instants. C'est généralement par des positions comme celle-là qu'on voit la bureaucratie gouvernementale grossir, grossir, grossir, parce qu'on s'est encarcané dans un mécanisme dont on ne sait plus sortir. Il faut donner une certaine flexibilité, une certaine marge de manoeuvre. J'imagine que l'Opposition est là pour jouer son rôle et, si l'Opposition devait constater, par exemple, qu'un rapport de vérification sort et qu'il n'est pas fait par le Vérificateur général, l'Opposition pourrait alors taper sur la table et dire: Compte tenu de ce qui se passe présentement, nous exigeons que le gouvernement prenne le Vérificateur général, respecte son mandat, et fasse un tapage du tonnerre, ce qui amènerait un gouvernement à y penser deux fois avant d'en nommer un autre. Je pense que c'est un peu cela qui...

M. Ciaccia: Ce ne serait pas vraiment satisfaisant, parce que vous auriez déjà nommé le Vérificateur qénéral et le rapport serait déjà déposé à l'Assemblée nationale. Il serait trop tard. Je crois que vous avez raison, il y a une question de priorité. Quelle est la priorité pour nous? Est-ce d'avoir le rapport dans les plus brefs délais ou est-ce d'avoir la responsabilité du Vérificateur général pour veiller aux intérêts du contribuable? Mon opinion, c'est que c'est beaucoup plus important, dans le cas d'une société d'État, d'avoir le Vérificateur général, même si cela prend plus de temps, pour veiller aux intérêts des contribuables, parce qu'il fait des commentaires dans ses rapports, qu'il porte à l'attention du gouvernement les recommandations qu'il fait et je crois que ce n'est pas un bon précédent à établir.

M. Fortier: II existe déjà un précédent, M. le Président, Hydro-Québec, justement, vérifie. Il y a deux vérificateurs extérieurs et, à ma connaissance, cela nous permet de porter des jugements salutaires. Je ne sais pas, je suis assez indécis là-dessus. Je vois l'avantage qu'il y a d'aller vers le secteur privé. Il y a des avantages d'avoir un vérificateur du secteur public. Je me demandais si on pourrait se donner un moment de réflexion.

M. Bérubé: N'eût été a de la position du Vérificateur général du Québec, je m'en serais tenu à l'article 22 qui m'apparaissait un heureux compromis en ce sens qu'on disait: C'est le vérificateur qui vérifie les livres, mais si le vérificateur accepte la nomination d'un autre vérificateur, à ce moment-là, c'est peut-être un heureux compromis. Le vérificateur souligne cependant qu'on invente une nouvelle façon de nommer le vérificateur et qu'il existe déjà d'autres lois, soit que le vérificateur est désigné dans la loi, soit qu'il est désigné par décret gouvernemental, ou encore par les dispositions de la Loi sur les compagnies ou encore, ce qui est proposé, c'est le Vérificateur général ou un autre vérificateur désigné par le gouvernement. Il nous souligne d'éviter d'en inventer encore un autre et de choisir parmi une des quatre. Si je devais choisir parmi l'une des quatre, je choisirais la quatrième, à cause de la marge de manoeuvre qu'elle assigne au gouvernement.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Si ma mémoire m'est fidèle, M. le Président, le Vérificateur général doit être nommé par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale. Il n'y a pas beaucoup de postes qui font l'objet de l'obligation d'un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale; il y a le Vérificateur général, le président des élections, le Protecteur du citoyen, le directeur général du financement des partis politiques, peut-

être d'autres qui m'échappent. C'est assez retreint, pour des raisons, j'imagine, qui ont été évaluées à leur juste valeur avant d'en arriver à décréter que les personnes nommées à ces postes doivent l'être par un vote des deux tiers de l'Assemblée. Un vote des deux tiers de l'Assemblée, M. le Président, ce n'est pas un vote régulier, c'est un vote extraordinaire et non seulement des deux tiers des membres de l'Assemblée au moment où on prend le vote, mais des deux tiers de la députation, ce qui confère évidemment au Vérificateur général ainsi qu'aux autres personnes qui sont nommées de la même façon une pleine et totale indépendance. Le gouvernement quel qu'il soit - il n'est pas question de partisanerie, parce qu'on ne légifère pas seulement pour aujourd'hui - ne peut pas facilement émettre de directives officielles ou officieuses à des gens comme cela. Ils ont pleine et entière liberté d'action et ils peuvent ainsi, si le besoin s'en fait sentir, à la suite de leur action, comme le cas du Vérificateur général, émettre des opinions. Ils peuvent même critiquer. C'est ce qui permet en fait au public d'être le mieux protégé possible. Cela ne veut pas dire que tout est parfait, mais cela permet au public d'être protégé le mieux possible.

Ici dans cet article - je ne pense pas que c'est pour cela que cela a été prévu, je ne veux imputer des motifs à personne -volontairement ou non, mais je pense que c'est plutôt involontairement, on se trouve à déroger de ce principe auquel je tiens beaucoup qu'un vérificateur ne soit pas une créature d'un gouvernement ou d'un ministère, mais que le Vérificateur général soit reconnu comme ayant toute la latitude donnée par l'Assemblée nationale. Il est donc responsable à l'Assemblée nationale et non au ministre. C'est très différent.

Évidemment, on dit dans l'article que son rapport devrait être déposé en même temps que le rapport de la société si c'était quelqu'un d'autre que lui, mais cela ne me donne pas satisfaction, parce qu'il y aurait trop de risques. Je pense que, dans nos statuts, le Vérificateur général, s'il a besoin, pour fournir, et là on peut avoir besoin d'un rapport plus rapidement, pour des fins d'efficacité... Je pense qu'il vaudrait mieux exiger que ce soit le Vérificateur qénéral, mais, à ce moment-là, qu'on prenne des dispositions pour qu'il ait plus de personnel s'il en a besoin. (18 heures)

Vous connaissez, comme presque tout le monde autour de la table, ma préférence pour l'entreprise privée. C'est sûr que j'aime mieux voir évoluer l'entreprise privée qu'une entreprise d'État, quand c'est possible. Mais, dans ce cas-là, ce n'est pas une question d'entreprise privée. C'est une question de vérifier pour protéger le public, pour protéger ses deniers, pour lui dire de quelle façon ses deniers sont dépensés, etc.

Si on doit ouvrir une porte pour déroger à ce grand principe que le Vérificateur général est libre d'agir parce qu'il est nommé par les deux tiers de l'Assemblée, responsable à l'Assemblée plutôt qu'au gouvernement, si on ouvre une porte à cela, il y a le danger qu'à un moment donné on va dire: II y a trop d'ouvrage, cette société d'État pourra être vérifiée par un autre. Une autre société pourra être vérifiée par un autre et plus tard, pourquoi pas, aller au bout du raisonnement et dire que tel ministère sera vérifié par tel organisme, tel ministère par tel autre organisme. C'est cela qu'on a voulu arrêter, à un moment donné, quand on a nommé un Vérificateur général.

Il me semble que son rôle est tellement important qu'on ne doit pas déroger à ce grand principe. À moins qu'on ne m'apporte de l'argumentation très développée et tenant compte de ce que je viens de dire, je ne serais pas disposé à voter pour l'article 22, ni tel qu'il est, ni tel qu'il serait.

Je pense qu'il vaudrait mieux laisser les choses telles qu'elles sont. Je me demande si, en droit...

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, M. le député de Rouyn-Noranda, étant donné que cela peut se prolonger encore, je demanderais le consentement pour continuer après 18 heures.

M. Samson: J'en ai pour 30 secondes, si on veut.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que j'ai le consentement?

Des voix: D'accord.

M. Samson: Je me demande même si, en droit, on est capable d'enlever au Vérificateur général ses fonctions par une loi, sans passer par l'Assemblée nationale qui l'a nommé aux deux tiers. Celui qui nomme doit être celui qui décide aussi si on lui enlève des responsabilités.

M. Bérubé: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le nistre.

M. Bérubé: Je pense que ce qu'il faut là-dedans, c'est regarder un peu la jurisprudence et voir ce que le Parlement a choisi de faire dans le passé. Or, le Parlement a effectivement, dans le cas d'Hydro-Québec, confié à des vérificateurs extérieurs et non pas au Vérificateur général c'est pire puisqu'il s'agit d'une régie carrément autonome et en même temps d'un service public - le soin de faire la

vérification.

On voit donc que le législateur a senti que dans certains cas, il fallait, pour des raisons d'efficacité essentiellement, choisir un vérificateur autre que le Vérificateur général. Or, il n'y a rien, a priori, qui oblige le Vérificateur général à être le vérificateur des sociétés d'État. La Loi sur l'administration financière, à ma connaissance, prévoit qu'il est le vérificateur pour tous les fonds gérés dans le cadre du budget voté par le Parlement ainsi que les fonds de l'extra-budgétaire dont dispose le ministre des Finances, indéniablement.

Toutefois, il faut que ce soit la volonté expresse du législateur pour que lui soient confiés des travaux de vérification autres. C'est le cas qui nous occupe présentement. Je souscris personnellement à l'idée qu'il faut, d'une façon générale, faire vérifier les livres de nos sociétés d'État par le Vérificateur général.

D'autre part, je souscris à l'idée qu'il faut maintenir la formule la plus flexible possible, de telle sorte que l'on puisse faire face aux situations. Dans le cas de la Société nationale de l'amiante, le gouvernement nomme le vérificateur, purement et simplement, en tant qu'actionnaire. Je crois que nous sommes peut-être allés trop loin dans cette voie. C'est un recul par rapport à ce que nous avions dans la loi de la SNA et ce que nous proposions c'est qu'effectivement, à l'origine, c'est normalement vérifié par le vérificateur, mais le gouvernement peut nommer un autre vérificateur, ce qui force le gouvernement à justifier sa position face à l'Opposition. Par conséquent, cela peut amener un certain contrôle.

Donc, au nom du gouvernement, après les discussions fort utiles que nous venons d'avoir, je m'en tiendrais présentement à la proposition du vérificateur lui-même, M. Larose, proposition qui, finalement, est conforme à la pratique dans plusieurs autres sociétés d'État.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je pense que nous avons dépassé le temps qui est normalement alloué à la commission. Est-ce que je pourrais suggérer qu'on suspende cet article et peut-être que vous pourriez y réfléchir encore une fois. Je sais que c'est votre opinion, mais à moins que vous ne puissiez nous donner d'autres exemples que celui d'Hydro-Québec -parce qu'il peut y avoir des raisons spécifiques pour Hydro-Québec et la société nationale - je pense que la position que nous allons être obligés de prendre, c'est de nous opposer au changement de...

M. Bérubé: On peut prendre un vote.

M. Ciaccia: On pourrait y penser jusqu'à demain et on reprendra...

M. Bérubé: ...jusqu'à ce soir, 20 heures.

M. Ciaccia: Non, cela va à demain, parce qu'il y a deux commissions ce soir.

Le Président (M. Bordeleau): Le mandat de la commission est spécifique: jusqu'à 18 heures.

Une voix: Est-ce qu'on peut continuer demain matin?

Le Président (M. Bordeleau): Pour demain, je n'ai aucune idée.

M. Samson: Demain, cela va être après la période des questions...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, c'est cela. On n'a pas le mandat pour siéger demain. On suspend l'étude du projet de loi no 1 à l'article...

M. Bérubé: Est-ce qu'on peut accepter ce consentement des autres articles ou bien...

M. Fortier: Cela pourrait aller rapidement, si vous voulez. Tu préfères suspendre ou...

M. Ciaccia: Je préférerais...

M. Fortier: On est mieux de suspendre.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, on fonctionne selon le consentement des membres, à moins que quelqu'un ne s'y oppose.

La commission de l'énergie et des ressources ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 8)

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