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Version finale

31e législature, 6e session
(5 novembre 1980 au 12 mars 1981)

Le vendredi 12 décembre 1980 - Vol. 23 N° 14

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 1 - Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'exploration minière


Journal des débats

 

(Quatorze heures quarante-sept minutes)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente de l'énergie et des ressources reprend donc ses travaux qui avaient été ajournés hier, aux fins d'étudier les projets de loi nos 1, 2, 6 et 9.

Pour aujourd'hui, les membres de la commission sont M. Bérubé (Matane), M. Biron (Lotbinière), M. Bordeleau (Abitibi-Est) remplacé par M. Lévesques (Kamouraska-Témiscouata), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Desbiens (Dubuc), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Fortier (Outremont), M. Grégoire (Frontenac), M. Perron (Duplessis), M. Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie), M. Rancourt (Saint-François), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Est-ce qu'il y aurait des substitutions? M. Rancourt pourrait remplacer...

M. Bérubé: Non, M. Grégoire va venir dès que l'autre commission va se terminer.

M. Samson: M. le Président...

M. Bérubé: M. Biron, par exemple.

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Samson: Sur un point de règlement, peut-être pour aider tout le monde. Est-ce qu'on ne pourrait pas s'entendre pour qu'au cours de la séance on puisse, à n'importe quel moment, faire la motion qu'on doit faire généralement en commençant pour faire des substitutions, compte tenu des gens qui siègent à différentes commissions.

Le Président (M. Bordeleau): Sur consentement des membres, il n'y a pas de problème, on peut substituer quelqu'un.

M. Samson: Si on était d'accord, des deux côtés, cela pourrait rendre service à tout le monde, peut-être.

M. Ciaccia: Est-ce qu'on peut s'entendre maintenant pour entendre les membres des différents partis politiques, même s'ils ne sont pas sur la liste d'intervenants ou de membres de la commission? On a quatre projets de loi, il y a différents sujets à traiter, alors, plutôt que de venir à chaque projet de loi et demander le consentement, si on s'entendait maintenant, cela rendrait la tâche beaucoup plus facile. Autrement, on va être obligé de faire une motion. Cela va éviter des procédures.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: II faudrait quand même que les membres de la commission soient identifiés au début de l'étude de chaque...

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Bérubé: C'est simplement pour des raisons de procédures. Si, évidemment, vous allez voter avec le gouvernement sur tous les sujets, il n'y a aucun problème, on peut s'entendre. Mais si jamais vous deviez voter contre le gouvernement et qu'on ne sait pas qui représente quoi...

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, je pense qu'il s'agirait simplement de s'entendre, d'avoir l'acceptation à l'unanimité des membres dès maintenant, pour que, éventuellement, dans le cours de nos travaux, on puisse substituer des gens qui viendront à la table à d'autres membres qui ne seront pas là.

M. Samson: On verra cela au moment où...

Le Président (M. Bordeleau): Sans motion. Si on a le consentement au départ, on pourra le faire à ce moment sans motion.

M. Samson: Sans motion. D'accord.

Le Président (M. Bordeleau): Dès maintenant, étant donné que le député de Saint-François est ici, on peut peut-être le mettre comme remplaçant..

M. Bérubé: De M. Biron peut-être.

Le Président (M. Bordeleau): M. Biron ne sera pas là?

Bérubé: Non, M. Biron, je pense, n'y sera pas. Par conséquent, M. Grégoire va se joindre à nous; donc, ce serait dangereux de remplacer M. Grégoire.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, à la place de M. Biron, M. Rancourt (Saint-François). De l'autre côté, il n'y a pas de problème?

M. Samson: De notre côté, c'est M. Giasson qui n'est pas là.

Le Président (M. Bordeleau): II est déjà intervenant, quand même.

M. Samson: C'est parce qu'on ne sait pas qui va venir nous aider à sa place.

M. Bérubé: M. le député de Mégantic-Compton n'était pas membre de la commission?

M. Samson: II n'était pas membre, il remplaçait M. Giasson hier.

Le Président (M. Bordeleau): Exact. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Est-ce qu'on peut s'entendre? M. le Président, excusez-moi. Je comprends la préoccupation du ministre, mais si...

M. Bérubé: Je n'ai pas de préoccupation.

M. Ciaccia: Cela paraît des fois dans vos projets de loi. Mais si on peut s'entendre pour dire que seulement les membres de la commission peuvent voter, que les intervenants ne peuvent pas voter, est-ce qu'on peut dire que tout membre de chaque formation politique peut intervenir?

M. Bérubé: Pour les interventions, oui. M. Ciaccia: Pour les interventions.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, cela règle tous les problèmes.

M. Samson: Cela règle les problèmes pour les interventions.

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Samson: Pour les votes, évidemment, si, à un moment donné, il y a quelqu'un...

M. Bérubé: Pour les votes, on n'a pas le choix; il faut définir qui fait partie de la commission.

Le Président (M. Bordeleau): C'est cela.

M. Samson: Mais ce que je demandais aujourd'hui en cas de vote, c'est que, si à un moment donné, il manque un membre au moment d'un vote, il puisse être remplacé par un autre.

Le Président (M. Bordeleau): Là-dessus, on a déjà eu le consentement quand même, je pense, des membres. On pourra lui substituer, à ce moment-là, quelqu'un d'autre. Alors, je pense que la commission est prête à entreprendre ses travaux. Il y aurait peut-être lieu quand même de nommer un nouveau rapporteur de la commission. Non, excusez-moi, c'est moi qui suis dans les patates; cela va, c'était le député de Duplessis qui était rapporteur de la commission. Alors, étant donné qu'on est toujours sur le même projet de loi, on peut continuer avec le même rapporteur.

M. Ciaccia: II n'est pas là.

Le Président (M. Bordeleau): Je pense que cela ne pose pas de problème; étant donné qu'il a déjà été nommé comme rapporteur, il est rapporteur de la commission.

M. Bérubé: Nous lui expliquerons ce qu'il doit rapporter.

M. Samson: Comme d'habitude.

M. Bérubé: De toute façon, il peut toujours éliminer vos interventions, ce qui fait que cela enlève 99%.

M. Samson: En éliminant mes interventions, cela n'aurait plus de sens, votre affaire.

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, messieurs! De toute façon, je vous rappelle que la rapporteur de la commission n'a pas d'honoraires additionnels. Cela ne change pas grand-chose.

M. Samson: Si vous l'aviez dit avant!

Projet de loi no 1 (suite)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ajournement de nos travaux d'hier, nous en étions à l'étude article par article du projet de loi no 1 qui est la Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'exploration minière. À moins que quelqu'un ne me dise le contraire, nous étions en train de discuter de l'article 22 de l'ancienne loi qui fait partie de l'article 4 du projet de loi no 1. On avait un amendement à ce moment et je demanderais immédiatement au ministre s'il y avait une espèce de consensus pour qu'on

laisse cela en suspens.

M. Samson: M. le Président, sur un point de règlement

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda, oui.

M. Samson: Pour les fins du règlement, pour qu'on se comprenne bien, c'est l'article 4 qui est en discussion présentement.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, mais je l'ai rattaché à l'article 4.

M. Samson: Même si on discutait de la partie 22 de l'article 4, l'article 4 n'étant pas encore adopté, il y a des points dans l'article 4...

Le Président (M. Bordeleau): C'est ce que je dis, M. le député de Rouyn-Noranda; on en est à l'article 4 qui n'est pas adopté.

M. Samson: ...qui pourraient être discutés, c'est cela.

Le Président (M. Bordeleau): On en était à l'intérieur de l'article 4, à l'ancien article 22 de l'ancienne loi de SOQUEM.

M. Samson: Cela n'empêche pas de parler de ce qui est inclus dans l'article 4, aussi longtemps que l'article 4 n'est pas adopté.

Le Président (M. Bordeleau):

Absolument pas. J'ai volontairement laissé l'ouverture aux nouveaux articles sans les délimiter par paragraphe ou par ancien article de l'ancienne loi.

M. Samson: Excellent.

Le Président (M. Bordeleau): Pour clarifier encore une fois, on était à l'article 22 de l'ancienne loi qui fait partie de l'article 4 du projet de loi no 1 qu'on étudie actuellement.

M. Bérubé: C'est cela, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Je demanderais, à ce moment-ci, au ministre s'il y a eu consensus ou s'il y a une position concernant l'amendement, vu qu'on a eu une discussion à savoir si on acceptait l'amendement comme tel ou si on revenait plutôt à l'ancien article 22. M. le ministre.

M. Bérubé: Je proposerais qu'on adopte la nouvelle rédaction pour l'article 22 qui se lisait ainsi: "Les livres et comptes de la société sont vérifiés chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement par le

Vérificateur général ou par un vérificateur désigné par le gouvernement. Le rapport du vérificateur doit accompagner le rapport annuel de la société."

J'ai eu, ce matin, une longue conversation avec le Vérificateur général pour être bien certain que nous interprétions bien clairement sa volonté. La position du vérificateur est qu'il est dans une situation un peu délicate, ayant à faire la vérification d'un certain nombre de sociétés d'État, mais ne le faisant pas non plus dans d'autres cas. Par conséquent, il n'aime pas se voir forcé de prendre une décision qu'il estime politique, à savoir si une société doit oui ou non être vérifiée par lui. Il préfère, si une décision de ce type est prise, que ce soit une décision politique et que le gouvernement assume ses responsabilités. Lui donnant raison, à ce moment-là, je reviendrais à la formulation que nous avions proposée en amendement et qui nous permettrait purement et simplement de dire que, d'une façon générale, les comptes sont vérifiés par le Vérificateur général. Toutefois, si le gouvernement en décide autrement et ne prend pas ses responsabilités, à ce moment-là, il peut confier la vérification à un autre vérificateur.

Je pense que ce qu'il serait intéressant de fouiller, dans le sens de certaines interventions qui ont été faites à cette commission, ce serait de regarder dans quelle mesure la Loi sur l'administration financière ne devrait pas être amendée, de manière que le vérificateur ait accès à la vérification de toutes les sociétés d'État, que ce soit en deuxième vérification, par exemple, de manière à garantir à l'Assemblée nationale un contrôle indépendant. Mais, comme ceci n'existe pas présentement dans la loi, je pense que je marquerai notre volonté initiale au gouvernement d'adopter l'article 22 tel qu'amendé, ce qui était d'ailleurs notre intention initiale.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, l'article 22 tel qu'amendé par le ministre ou dans sa forme originale nous pose certaines inquiétudes. Nous avons eu l'occasion de ce côté-ci de discuter plus amplement de la position que nous devrions prendre face aux responsabilités du Vérificateur général. Hier, il y a eu différentes opinions exprimées sur la question de l'efficacité; pour avoir les rapports annuels plus rapidement et les déposer à l'Assemblée nationale, il serait peut-être préférable de donner le droit au gouvernement de nommer un autre vérificateur. On a fait état que, dans l'entreprise privée, les sociétés avaient toute liberté de nommer leur propre vérificateur

et de changer de vérificateur dans l'intérêt de l'efficacité du fonctionnement de ces différentes sociétés.

Cependant, ce qui nous préoccupe présentement, c'est le fait que nous faisons face à une société d'État qui doit dépenser des deniers publics. Nous faisons face à la responsabilité du Vérificateur général, le chien de garde des contribuables, et on ne voudrait pas créer de précédent. Je sais que le ministre va nous dire, et même que cela a été porté à son attention par un des membres de l'Opposition officielle, qu'Hydro-Québec a un statut différent, qu'elle peut nommer son propre vérificateur général, mais je dirais qu'Hydro-Québec est dans une situation un peu particulière; le financement d'Hydro-Québec se fait sur le marché privé. Il y a une série de raisons qu'on pourrait invoquer pour justifier la nomination d'un vérificateur autre que le Vérificateur général.

L'autre exemple que le ministre nous a donné, c'est la Société nationale de l'amiante; je ne voudrais pas qu'on prenne cela comme précédent parce que, comme vous le savez, M. le Président, l'Opposition officielle n'a pas été d'accord avec cette loi et nous avons voté contre. Nous ne nous sentons pas liés par ce qui a été inclus dans cette loi comme créant un précédent parce que, pour nos raisons, nous avons voté contre la loi. Il me semble qu'il faudrait porter un peu plus d'attention à la question du Vérificateur général. C'est vrai qu'il y a une question de priorité. D'un côté on dit: II faut voir à l'efficacité de la société, mais, de l'autre côté, on doit se préoccuper des intérêts des contribuables. Alors, quelle priorité devons nous choisir? Celle de l'efficacité ou celle des intérêts des contribuables?

De notre côté, on croit qu'il y avait une raison pour laquelle le Vérificateur général a été... C'est une institution, il y a une raison spéciale pour qu'il soit nommé de cette façon et, comme l'a souligné un des membres de cette commission, le député de Rouyn-Noranda, le Vérificateur général doit obtenir l'approbation des deux tiers de l'Assemblée nationale. C'est pour maintenir son objectivité, c'est pour maintenir son caractère spécifique, c'est pour lui permettre de faire des commentaires au gouvernement sur le fonctionnement de ses différentes sociétés.

D'introduire dans un projet de loi comme celui de SOQUEM le principe qu'on peut écarter la responsabilité du Vérificateur général, je crois que c'est un précédent dangereux, parce que si on commence à donner cette responsabilité à une personne autre que le Vérificateur général, pour SOQUEM, on pourrait le faire pour toutes les autres sociétés et, éventuellement, on pourrait même enlever cette responsabilité vis-à-vis de certains ministères. On peut faire la même argumentation pour, par exemple, le ministère de l'Éducation ou le ministère des Affaires sociales, parce que ce sont des ministères où des milliards de dollars sont dépensés. On pourrait dire: Pour être plus efficace, pour avoir le rapport annuel plus vite, on va le donner à un autre vérificateur et je pense qu'on s'éloignerait complètement de l'esprit de la loi, de la responsabilité du Vérificateur général, de son rôle.

C'est pour ça que, hier, nous avons suggéré de suspendre les travaux afin que le ministre puisse réfléchir sur cet article particulier du projet de loi. Je voudrais apporter à l'attention du ministre que nous faisions ça dans un esprit de collaboration. On a voté en faveur du projet de loi et je pense que les suggestions que nous avons faites jusqu'à maintenant étaient pour essayer de bonifier le projet de loi. On a demandé certaines informations au ministre quant à l'application du projet, mais, généralement, je pense qu'on a apporté une approche assez positive. Mais on a tout de même une responsabilité comme Opposition; on ne pourrait pas, en toute conscience, accepter, sans aucune information, sans aucune autre intervention, sans aucune autre justification de la part du ministre, qu'on puisse écarter la responsabilité du Vérificateur général.

Je crois que, si le ministre était à notre place, il ferait exactement la même chose. Je pourrais lui souligner l'opposition du Parti québécois pendant qu'il était dans l'Opposition; elle à été encore plus grande que celle que nous apportons actuellement. Même, à un moment donné, le député de Saguenay avit dit: On n'approuvera pas de changement à SOQUEM avant que le gouvernement nous donne sa politique minière. Quelle est la politique du gouvernement quant au développement minier? On veut de la documentation, on veut un énoncé de principe.

C'est simplement pour vous montrer à quel point le Parti québécois, quand il était dans l'Opposition, s'est opposé au projet de loi sur SOQUEM. Je pense que, en effet, il avait voté contre les amendements que le Parti libéral du temps avait apporté quant aux modifications de la loi sur SOQUEM.

Mais nous n'allons pas jusque-là, nous ne prenons pas la position de dire: Nous n'approuvons pas le projet de loi sur SOQUEM à moins que vous ne nous donniez toute votre politique sur le développement minier. Il y a eu beaucoup de déclarations ou d'affirmations faites à l'Assemblée nationale. On pourrait les contester, on pourrait démontrer que, si on donnait suite à ces affirmations et qu'on les suivait, ce serait dans l'intérêt de toute la population québécoise.

Mais je crois que, sur une institution comme celle du Vérificateur général, c'est absolument essentiel d'obtenir plus d'information; c'est presque que comme abolir un poste de ministre. Que diriez-vous si on disait: Maintenant, on va abolir le poste de ministre de l'Énergie et des Ressources? Je ne vous demande pas cela personnellement parce que je crois bien que pour beaucoup de ce côté-ci de la Chambre c'est une question qu'ils pourraient voter vite sans trop de discussions. Mais en termes d'institution, en termes du rôle du ministre, c'est essentiel d'avoir ce rôle. On ne peut pas abolir le ministre de l'Énergie. Je considère que le rôle du Vérificateur général est presque aussi important. Lui-même, le ministre n'a pas besoin de l'approbation des deux tiers de l'Assemblée nationale. C'est un rôle que le gouvernement lui confère, mais la loi a donné certains droits, certaines responsabilités au Vérificateur général. Je crois que ce serait irresponsable de notre part de ne pas porter cela à l'attention du ministre, de ne pas demander plus d'explications de la part du ministre, de ne pas essayer de demander au ministre de justifier l'abolition, parce que c'est cela qu'il fait, il abolit le rôle du Vérificateur général pour SOQUEM, et, s'il crée ce précédent pour SOQUEM, il peut le faire pour les autres sociétés.

Je pense que c'est absolument important de maintenir le rôle du Vérificateur général, de maintenir cette institution. À moins que le ministre nous donne plus de justifications - le fait qu'il veuille avoir le rapport annuel plus vite, on n'accepte pas cela comme justification -nous allons être obligés de voter contre l'adoption de cet article parce que, M. le Président, nous sommes très conscients de nos responsabilités et je ne pense pas que le contribuable nous pardonnerait si on laissait passer cet article tel qu'il est rédigé, même avec l'amendement. Ce serait comme dire au contribuable: On ne se préoccupe plus de vos intérêts. Ce n'est pas nécessaire d'avoir un Vérificateur général. Si la loi a cru juger bon de créer cette institution et de requérir l'approbation des deux tiers de l'Assemblée nationale, il y avait une raison spécifique. Il y avait une raison valable. À moins que le ministre nous démontre que cette raison n'existe plus, que les conditions ont changé, que ce n'est plus nécessaire que quelqu'un agisse pour le contribuable de façon impartiale et objective, M. le Président, nous disons au ministre maintenant que nous serons obligés de voter contre cet article du projet de loi. Je ne sais pas si mes collègues ont d'autres commentaires à ajouter à ces remarques. Pour le moment, c'est la position que nous prenons.

M. Fortier: J'aurais un commentaire...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: En plus de ce que vient de dire mon collègue de Mont-Royal, il me semble, même pour les compagnies du secteur privé, qu'il revient aux actionnaires de choisir le vérificateur. En y pensant bien, après avoir discuté de la chose entre nous, il nous semble qu'il ne serait pas juste de laisser une option au gouvernement ou au ministre de choisir soit le Vérificateur général, soit un vérificateur du secteur privé. Les véritables actionnaires de SOQUIP, comme de toute société d'État, c'est le peuple et le représentant du peuple, c'est l'Assemblée nationale. Nous croyons qu'il est préférable que soit inscrit dans la loi soit l'une ou l'autre des options et non pas laisser l'option au ministre ou au gouvernement dans son ensemble. Pour cette raison, je crois, M. le Président, que nous devrions revenir, pour les raisons explicitées par mon collègue, le député de Mont-Royal, au texte précédent ou peut-être retenir l'article 22, mais sans permettre justement au gouvernement d'avoir une option dans le choix du Vérificateur général ou d'un vérificateur du secteur privé.

Le Président (M. Bordeleau): Y a-t-il d'autres interventions sur cet artiple 22 de l'ancienne loi? M. le député de Rouyn-Noranda? Vous avez le choix. Personne ne m'a demandé la parole jusqu'à maintenant.

M. Samson: J'avais l'impression que le ministre voulait intervenir.

M. Bérubé: M. le Président, non...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Bérubé: Je ne peux malheureusement pas souscrire à la position de l'Opposition. D'ailleurs, cette attitude de l'Opposition est assez amusante parce que très fréquemment on verra, du côté du Parti libéral, l'attitude suivante à savoir que nos sociétés d'État doivent être rentables, que nos sociétés d'État doivent se comporter, face à la concurrence du secteur privé, avec les mêmes avantages et avec les mêmes inconvénients. On voudrait donc faire de nos sociétés d'État essentiellement des entreprises qui bénéficient des mêmes avantages que le secteur privé. Il ne fait aucun doute qu'il y a une énorme différence entre la vérification des comptes publics et la vérification des livres d'une société commerciale.

Le Vérificateur général est prévu comme étant le vérificateur des comptes du gouvernement dans le cadre de la Loi sur l'administration financière. Là, cela se

comprend, puisqu'il s'agit de vérifier les dépenses du gouvernement. Par conséquent, on ne voudrait pas avoir un gouvernement qui choisirait lui-même le vérificateur de ses dépenses.

Dans le cas présent, c'est autre chose. La société est autonome. Elle a ses distances par rapport au gouvernement, puisque la loi prévoit que le gouvernement a des pouvoirs pour ce qui a trait aux directives et aux orientations de la société, lesquelles d'ailleurs doivent faire l'objet d'un débat public, puisque le gouvernement doit déposer ses directives. Il y a donc une distance entre le gouvernement et la société d'État, le gouvernement étant simplement l'actionnaire, c'est-à-dire celui qui nomme les membres du conseil d'administration qui doivent agir là à titre personnel, exactement comme dans la Loi sur les compagnies. On est donc dans une situation où la société d'État bénéficie d'une autonomie face au gouvernement.

De plus, elle obéit à des règles de concurrence, ce qui est caractéristique du secteur privé. Je dirais même que je verrais d'un meilleur oeil la vérification par le Vérificateur général des comptes d'Hydro-Québec que la vérification des comptes d'une société commerciale. Dans la mesure où Hydro-Québec est un service public sans avoir à affronter la concurrence, il faut surtout s'assurer de l'équité dans la gestion des fonds que l'on peut qualifier de publics.

Dans le cas d'une société d'État, le problème d'équité existe comme dans n'importe quelle autre société, mais il reste qu'une société a des objectifs - nous en avons d'ailleurs discuté antérieurement - de rentabilité. Elle obéit donc à des critères autres que les critères gouvernementaux. Le gouvernement doit dépenser l'argent en s'assurant que les lois votées par cette Assemblée sont respectées intégralement. Le but de l'Opposition, c'est de s'assurer que le gouvernement respecte toutes les lois, les normes que l'Assemblée nationale a voulu imposer, que le gouvernement a voulu également imposer par le biais, par exemple, du Conseil du trésor et ses directives internes. C'est le rôle du Vérificateur général de s'assurer qu'il y a une cohérence interne parfaite entre les dépenses gouvernementales et les différentes politiques gouvernementales. C'est donc normal que le vérificateur soit une personne de l'extérieur qui ait comme mandat d'effectuer cette vérification, ce contrôle du gouvernement.

Dans le cas d'une société gouvernementale ou paragouvernementale, la situation est tout autre. Il s'agit là d'une société commerciale. Sa façon de dépenser les fonds publics n'est en rien contrôlée par des directives du Conseil du trésor, n'est en rien contrôlée par des lois gouvernementales autres que la loi constitutive de cette société-là et elle n'est soumise qu'à la Loi sur les compagnies, comme d'ailleurs toute autre société.

Par conséquent, le contrôle, la vérification de ses livres peut souvent faire appel à des critères qui ont beaucoup plus à voir avec les critères de la pratique commerciale traditionnelle qu'avec les critères proprement juridiques ou administratifs caractérisant l'administration des deniers publics.

On est donc dans une situation particulière. Cette espèce de volonté, présentée ici par le Parti libéral, d'ignorer tout d'un coup complètement l'aspect commercial, rentable, de la société d'État et de subitement vouloir en faire un pur instrument de l'État qui devrait respecter intégralement toutes les politiques comptables, toutes les politiques de gestion interne gouvernementale, cela me semble aller à l'encontre de l'esprit des lois créant nos sociétés d'État et cela me semble vouloir imposer une sorte de contrôle absolu sur l'action des sociétés d'État.

Nonobstant tout ce que je viens de dire, je pense que l'actionnaire de toute société doit pouvoir choisir son vérificateur. Et le présent projet de loi laisse à l'actionnaire, qui est le ministre des Finances et le gouvernement, le pouvoir, effectivement, de choisir le vérificateur qu'il veut bien. Le gouvernement aura à rendre compte, à partir de la performance de la société d'État, de son efficacité.

Mais on pourra, par exemple, parler de patronage, dans le cas de sociétés d'État. Ma réponse serait tout simplement: Cela ne me regarde pas, en vertu de la loi même. En d'autres termes, les critères de gestion de nos sociétés d'État ne sont pas les critères de gestion gouvernementaux. Au contraire. Elles sont en concurrence avec l'entreprise privée. Elles doivent donc bénéficier de la même marge de manoeuvre que le secteur privé, dans leurs pratiques commerciales. Sinon c'est, en partant, leur attacher les mains et les pieds et leur demander de savoir nager aussi bien que leurs concurrents. Je pense que cela n'est pas possible.

C'est pour cette raison qu'il faut toujours faire le partage, le départage entre un contrôle par l'État de la gestion des sociétés d'État, un contrôle rigoureux, et, en même temps, une décentralisation complète, de manière que, effectivement, nos sociétés d'État puissent jouir d'une marge de manoeuvre.

J'admets que c'est un équilibre délicat. Mais ce qui me frappe, dans la position libérale, c'est que, présentement, on s'en va entièrement du côté d'une centralisation de la gestion en fonction de critères proprement gouvernementaux. À mon avis, on nie la mission commerciale.

Or, comme dans le même projet de loi, on vient très clairement de dire qu'elle doit

poursuivre un objectif de rentabilité - et là-dessus, le député d'Outremont a souligné à quel point cet objectif était important - à partir du moment où on accepte ce principe, on se rend bien compte que ce n'est plus du tout le même critère. Le gouvernement du Québec n'a pas d'objectif de rentabilité, au contraire. L'Opposition va même prendre un malin plaisir, dans le cas du débat sur la Société d'habitation du Québec, à dire: Voyez-vous, vous avez nommé un mandataire. Il n'a pas géré suivant le processus d'appels d'offres, par exemple, qui est un mécanisme mis en place par les gouvernements, de manière à assurer que tous les citoyens sont traités sur un pied d'égalité. On va invoquer cela comme étant un exemple de mauvaise administration. Pourquoi? Parce que les critères de dépenses des fonds publics doivent être d'abord et avant tout des critères en vertu desquels tous les citoyens sont traités également, même si c'est inefficace. On ne -demande pas au gouvernement d'être efficace. On demande au gouvernement d'administrer les fonds suivant des lois qui sont écrites et prévues, des lois d'administration financière et toutes les règles édictées par le Conseil du trésor.

Il ne faut donc pas confondre. Le gouvernement n'a jamais eu comme objectif de faire des profits avec la gestion des fonds publics. Il a simplement comme objectif de gérer les fonds en fonction de règles strictes d'équité entre les citoyens. C'est bien évident qu'une société d'État à qui on confie en plus un mandat de rentabilité commerciale aux prises avec des contraintes qui sont les contraintes que lui imposent ses concurrents. Et c'est pour cela que ces pratiques commerciales, ces techniques commerciales peuvent parfois sembler déroger à certaines pratiques gouvernementales, mais, d'un autre côté, je pense que c'est essentiel d'établir l'équilibre.

Je dirais que, d'une façon générale, comme nous n'avons pas de raison de faire autrement, nous confions au Vérificateur général le soin de vérifier les livres et quand, pour des raisons particulières, nous estimons qu'effectivement ce serait peut-être une bonne idée que ce soit un autre vérificateur, il appartient au gouvernement d'accepter le fardeau politique de dire que ce ne sera pas le Vérificateur, ce sera telle société, pour faire la vérification. Et il aura à supporter.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je crois qu'on s'entend sur certains principes de base. Mais il y en a un sur lequel on ne s'entend pas. Je crois qu'on veut la même chose, dans le fond. Je voudrais corriger une notion qui est fausse, qui a été exprimée par le ministre.

C'est bien sûr que j'ai dit que j'acceptais ce qui est écrit dans la loi, où il est dit: Dans la réalisation de ses objets, la société doit avoir un objectif de rentabilité. Bien sûr, j'ai également dit que non seulement il fallait nous donner un plan quinquennal d'immobilisations ou d'investissements, mais qu'il faudrait aussi nous donner un plan quinquennal de développement et de projets, et, en plus de cela, nous donner des critères, comme la Société générale de financement l'a fait, pour qu'on puisse juger si réellement les objectifs de rentabilité ont été atteints. Lorsqu'on est dans certains secteurs de l'industrie privée, entre autres, dans une société comme Steinberg ou Provigo - je ne suis pas expert là-dedans - on me dit que la norme veut qu'on fasse à peu près 1,5% de profit après impôt. Pour les sociétés de génie-conseil, on sait que la norme, c'est de faire à peu près 7,5% de profit après impôt. Une société comme Montreal Engineering fait 7%; une société comme SNC fait 4%. Alors, on sait si on rencontre, oui ou non, la norme de l'industrie dans laquelle on travaille.

Mais là où je ne suis pas d'accord du tout, c'est sur le fait que le ministre puisse dire que le vérificateur, quel qu'il soit, qu'il soit le Vérificateur général ou un vérificateur du secteur privé, intervienne dans la gestion. Toute société a un président, toute société a un vice-président des finances et de l'administration, toute société a ses propres contrôles financiers. Les contrôles doivent se faire au niveau de la société. Le vérificateur ne fait pas partie de la gestion de la compagnie; il n'intervient pas dans la gestion de la compagnie. Tout ce qu'il fait, c'est qu'il vient vérifier les profits et pertes, les bilans qui ont été préparés par le président ou par l'organisme responsable de la mise en valeur d'un capital qui lui a été confié. C'est tellement vrai que, si vous lisez les rapports du Vérificateur général -j'ai celui de SOQUIP - on dit: J'ai vérifié le bilan de la société québécoise pétrolière. Alors, ce n'est pas lui qui prépare le bilan. Le bilan est préparé par d'autres et lui ne fait que l'inspecter et passer des commentaires à savoir si les règles de l'art ou si les règles normales qui président à la préparation des bilans de ce genre d'industrie ont été respectées et si, à sa connaissance, les contrôles financiers ont été respectés.

Alors, dire que le vérificateur - qu'il soit le Vérificateur général ou un vérificateur du secteur privé - intervient dans la gestion de la compagnie, c'est un peu farfelu. J'oserais penser que le président de SOQUIP ou le président de SOQUEM - on parle de SOQUEM dans le moment - ou le président de toute société, même s'il n'avait pas le rapport du Vérificateur général, pourrait quand même administrer sa société.

Ces gens-là ne sont pas du tout empêchés de fonctionner. Il n'y a aucune barrière qui les empêche de gérer la compagnie. Le rapport du vérificateur, qu'il soit du Vérificateur général ou d'un vérificateur du secteur privé, intervient justement pour donner un rapport aux actionnaires et pour faire en sorte que l'actionnaire puisse être informé. Donc, il ne s'agit nullement de créer un embarras. Le Vérificateur général ou un vérificateur du secteur privé n'intervient dans la gestion d'aucune société. Il ne fait que faire des commentaires sur les profits et pertes, sur le bilan de la société dont il fait la vérification.

C'est pourquoi, à ce moment, on se pose la question. Je suis complètement d'accord avec l'objectif qu'a exprimé le ministre. À l'avenir, à la condition, bien sûr, que les normes de rentabilité aient été définies - dans le cas de SOQUEM, elles ne sont pas définies - comme dans le cas de la Société générale de financement, toute personne qui juge la performance d'une de ces sociétés-là en regardant les critères, d'une part, qui auraient été homologués et approuvés par le ministre et en regardant le rapport financier, pourrait comparer les normes et les résultats financiers et dire: Oui, les normes ont été rencontrées; il y a eu amélioration ou il n'y a pas eu amélioration.

Tout cela pour dire qu'il n'y a rien qui empêche la société de fonctionner, comme dans le secteur privé, en fonction de normes préalablement définies. Mais le rapport du vérificateur est là pour satisfaire l'actionnaire. Dans le cas d'une société d'État, même si on veut lui laisser la liberté de fonctionner comme dans le secteur privé, il reste que l'actionnaire est un actionnaire public et non pas un actionnaire privé. Quoi qu'en dise le ministre, le vrai actionnaire, finalement, ce n'est pas le ministre des Finances; ce sont les contribuables québécois. Je suis complètement d'accord avec lui pour dire que l'actionnaire ne doit point intervenir dans la gestion de la compagnie. Il reste que l'actionnaire, à un moment donné, doit avoir un rapport d'un vérificateur en qui il a pleinement confiance.

Il est indéniable que le Vérificateur général doit fonctionner à l'intérieur d'une conjoncture politique qui existe, parce que l'actionnaire est le public et qu'il intervient par l'entremise du gouvernement qui est un organe politique. C'est la raison pour laquelle il nous est difficile d'imaginer une situation où les contribuables, représentés par l'Assemblée nationale, vont laisser à la décision du gouvernement, qui intervient dans le processus décisionnel, comme en font foi certains articles qui donnent maintenant le pouvoir au ministre de donner des directives a la société, de dire: Vous allez explorer telle ou telle région du Québec ou vous allez développer telle mine, vous allez développer les Îles-de-la-Madeleine, je crois que ce pouvoir de directive peut aller assez loin, parce que les critères de rentabilité n'ont pas été définis officiellement et, ce faisant, il faut que l'Assemblée nationale, représentant le peuple, décide elle-même qui va être le vérificateur de la société et, comme il s'agit d'une société publique, il faut que ce vérificateur soit le Vérificateur général.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, j'ai écouté le deuxième exposé du ministre, je l'ai écouté les deux fois, mais, dans son deuxième exposé, il a sûrement voulu employer une figure de style et, pour le bon entendement du journal des Débats, il me semble important qu'on reprenne ce qu'il a dit, lorsqu'il a mentionné: On ne demande pas au gouvernement d'être efficace. C'est sûrement une figure de style qu'il a voulu employer, parce que toute la population demande à tous les gouvernements d'être efficaces.

Maintenant, on parle de rentabilité et le ministre semble vouloir s'accrocher au fait que SOQUEM aura un objectif de rentabilité pour justifier le fait que le vérificateur pourra - j'ai même cru comprendre que ce serait peut-être privilégié comme formule -être quelqu'un d'autre que le Vérificateur général. Que nous ayons devant nous un projet de loi parlant d'objectif de rentabilité ou non, il me semble que ça ne change pas grand-chose quant aux bienfaits de la vérification par un vérificateur qui est nommé par les représentants dûment élus de la population et je pense que la formule de nomination du Vérificateur général a été une formule voulue dans ce sens, pour protéger au maximum la population.

Il faut toujours faire attention, dans n'importe quel dossier ou débat, d'apporter les nuances nécessaires entre l'action gouvernementale et l'action de l'Assemblée nationale, d'apporter les nuances nécessaires entre les pouvoirs de l'Exécutif et les pouvoirs de l'Assemblée. C'est une chose qui, je l'avoue, n'est parfois pas toujours facile et cela entraîne des situations délicates. On pourrait apporter, à l'appui de cette argumentation, un exemple de ce qui s'est passé en Chambre hier; je n'étais pas présent, mais on me l'a rapporté. Le député de Laval a mentionné un fait au président de l'Assemblée; en quelque sorte, il s'agit d'une brochure qui a été envoyée à toute la population concernant les questions constitutionnelles, je pense, et où il y a une adresse de retour qui mentionne nommément le président de l'Assemblée nationale. (15 h 30)

Évidemment, suivant ce qu'on m'a rapporté, le président de l'Assemblée a tenu, sur son honneur et sur son intégrité, a établir clairement que tel procédé avait été fait à son insu, qu'il ne l'avait pas autorisé, qu'il n'en avait pas pris connaissance, parce que c'est tellement délicat que dans la population, on pouvait, de cette façon, laisser l'impression à ceux qui reçoivent cette brochure qui est faite par le gouvernement et non par l'Assemblée nationale que c'est l'Assemblée nationale qui s'adressait à l'électeur, ce qui n'est absolument pas le cas. L'Assemblée nationale n'a pas le mandat comme tel, en tant que corps, de faire de la propagande politique à saveur partisane. Elle a évidemment des mandats de faire connaître l'institution, de faire connaître les droits et devoirs de l'institution, ces choses-là, mais pas d'entrer dans un débat politique à saveur partisane.

Ce que je vous apporte comme exemple, et qui m'a été rapporté - parce que, évidemment, je n'étais pas présent, j'étais avec vous au moment où cela s'est passé - c'est le genre de chose qui peut aller loin dans notre système parlementaire, en utilisant tous les recours et toute la procédure disponibles. On pourrait en discuter longtemps et amener certaines gens à la barre de l'Assemblée nationale qui, comme on le sait, a des pouvoirs très étendus. Elle peut se transformer en tribunal, pour la circonstance, dans certains cas.

Il y a des conséquences extraordinaires qui peuvent découler d'un geste comme celui-là qui, au départ, n'a peut-être pas été un geste prémédité d'aucune façon. Moi, je ne veux prêter d'intention à personne. Je veux mentionner ici qu'il est toujours très délicat de ne pas faire les nuances utiles et nécessaires entre les pouvoirs et les devoirs de l'Assemblée nationale et les pouvoirs et les devoirs de l'Exécutif.

Il s'agit ici essentiellement d'un principe de base. Je me rappelle quand le Vérificateur général actuel, M. Larose, a été nommé. Il a eu besoin d'un vote des deux tiers des membres de l'Assemblée, non pas des membres présents, mais des membres de l'ensemble de l'Assemblée, donc il fallait qu'il y en ait au moins les deux tiers présents qui votent pour sa nomination. Mais, également, avant d'en arriver à prendre ce vote pour la nomination du Vérificateur général, le premier ministre a poursuivi des consultations avec les chefs des différentes oppositions, un peu comme notre droit parlementaire, par ses us et coutumes, fait qu'on ne nomme pas un président de l'Assemblée - soit dit en passant, le président de l'Assemblée n'a pas besoin des deux tiers pour être nommé, il peut être nommé à la majorité simple - sans qu'il y ait consultation des différentes formations politiques. Les us et coutumes de l'Assemblée sont comme cela.

Il y a des raisons. Évidemment, notre droit parlementaire de style britannique est composé de notre règlement qui n'est pas tellement volumineux actuellement. Il a été réduit au cours de l'année 1972, si je me rappelle bien, 1973 pour être plus juste, mais il faut se rappeler que notre droit parlementaire a de longues coutumes. Nous avions ce qu'on appelle, nous, l'ancien règlement ici, qui est un règlement renfermant environ 850 articles avec des notes à chacun de ces articles, 20, 25, 30 notes pour différents articles, et, en plus de cela, c'est composé d'un droit qui n'est pas écrit. C'est pour cela qu'on arrive des fois à des questions de règlement que le président doit prendre en délibéré et revenir plusieurs jours plus tard pour justifier sa décision. Vous remarquerez que, quand il justifie sa décision, il fait référence à notre actuel règlement; il fait référence à notre ancien règlement et il fait référence à May, il fait référence à Beauchesne et, quand cela force, il va faire référence à des décisions prises à la Chambre des communes de Londres. C'est donc un système parlementaire qui est assis sur de nombreuses années, de nombreuses coutumes, de nombreux précédents, et chaque précédent peut, à un moment donné, être invoqué. C'est pas mal compliqué, mais c'est... Malgré qu'il soit pas mal compliqué, ce système peut paraître pas trop rapide, au sens que mon collègue d'Outemont aimerait le voir, parce que lui qui évoluait dans l'entreprise privée était habitué de prendre des décisions rapides. Le parlementarisme est un peu différent. Au risque d'admettre que parfois le système parlementaire n'est pas trop trop rapide, il reste que, comme le disait Winston Churchill, la démocratie c'est le pire des systèmes après tous les autres. Cela veut dire qu'on n'a pas encore trouvé mieux. C'est ce qui permet à la population de se faire entendre, de se sentir représentée et d'avoir ce pouvoir et ce droit de veto qu'est l'élection. Ce droit de veto qu'est l'élection, ce pouvoir est exercé en fonction de la connaissance qu'ont les contribuables de l'efficacité ou non des gouvernements, des gouvernements passés, des gouvernements à venir, en tout cas, il y a un tas de choses qui entrent en ligne de compte.

Tout ceci pour vous dire que ce n'est sûrement pas pour rien, ni encore pour plaire d'une façon particulière à une personne ou à un groupe de personnes plutôt qu'à un autre qu'on en est venu à nommer le Vérificateur général qui a fait, bien sûr, l'unanimité. Il a été nommé aux deux tiers de la Chambre et plus, après consultation. Donc, les parlementaires qui sont responsables... Je comprends que le ministre est responsable devant le Conseil des ministre, qu'il est responsable devant la Chambre, mais les

parlementaires qui ne sont pas nécessairement des ministres, des membres du Conseil exécutif, eux, sont responsables devant l'électorat. A ce moment-là, le sens qu'on donne au Vérificateur général est beaucoup plus important parce que le Vérificateur général, de par la façon dont il est nommé, donne beaucoup plus de garanties morales à l'électorat, en fonction toujours du fait que c'est de deniers publics que nous parlons.

Je veux bien admettre, comme le ministre l'a dit tantôt, que pour des fins d'efficacité, des fins de rentabilité, il y a Deut-être des nuances à apporter entre une société d'État et les ministères du gouvernement. Je veux bien l'admettre mais en voulant bien admettre cela, je veux également souligner que dans le cas qui nous occupe, comme dans un autre cas qui viendra dans une autre loi semblable, comme il est de coutume que ce soient les actionnaires qui nomment le vérificateur, c'est le ministre des Finances qui est l'actionnaire en titre, mais qu' il n'est en fait que le mandataire du contribuable, de la population. Il a un mandat, mais ce mandat lui vient de la population, il lui vient de l'Assemblée nationale aussi. Dans le cas présent, il me semble que c'est un faux principe que de se raccrocher à l'actionnaire parce que ce n'est qu'un actionnaire en titre, de la même façon que le ministre est un ministre en titre et que son mandat est limité par la durée de son gouvernement, ou encore par la durée que voudra bien lui conférer sa nomination par le premier ministre. Cela va autant pour le ministre des Finances que pour les autres ministres. Ce sont d'ailleurs les hauts fonctionnaires qui ont l'habitude de dire - en tout cas, s'ils ne le disent pas, ça se répète dans les corridors - que les ministres passent et que les hauts fonctionnaires demeurent. Il y a peut-être des nuances à apporter là-dessus, mais il reste une chose, c'est que l'institution qu'est l'Assemblée nationale, elle, est permanente; l'institution qu'est devenu, de par la volonté unanime de l'Assemblée nationale, le Vérificateur général . est aussi permanente.

Or, il m'apparaît important, autant pour les sociétés d'État que pour les ministères, que celui qui a le mandat de l'Assemblée nationale, avec la confiance de l'Assemblée nationale, par toutes les méthodes utilisées pour en arriver à sa nomination, donne toutes les garanties totales d'indépendance. Il n'y a pas un ministre qui puisse donner des ordres au Vérificateur général dans la façon de faire son travail. C'est important.

Je dis, M. le Président, que nous nous accrochons à ce principe parce que nous avons découvert avec les années que, d'une année à l'autre, le Vérificateur général, qui fait des vérifications, a toujours l'expertise des années précédentes et de l'historique. Il peut s'accrocher à ce qui a déjà été fait, à sa connaissance du secteur et de la façon dont ça se passe, de sorte que ça facilite son travail et ça lui permet en même temps de mettre le doigt sur des choses qui ne seraient peut-être pas vues autrement. Cela nous amène à être non seulement favorables, mais à tenir mordicus à ce que le Vérificateur général soit celui qui fasse la vérification.

On a également dit, du côté ministériel, que si on voulait amender par l'article 22 cet article, aux fins de permettre que le gouvernement décide de choisir lui-même un vérificateur, c'était pour des fins d'efficacité, pour que ce soit plus vite, etc.

Evidemment, je ne sais pas dans quelle proportion on veut aller plus vite. J'ai le rapport 1979-1980 de SOQUEM ici, la note du Vérificateur général, qui dit avoir vérifié le bilan consolidé de la société au 31 mars 1980; ce n'est pas il y a quinze ans, cela date du 31 mars 1980. Il a signé sa note en date du 3 juin 1980; donc, si je sais bien compter, mars, avril, mai, il y a eu un délai de trois mois. Est-ce que c'est ça que le ministre appelle un délai exagéré, trois mois?

Les délais exagérés sont peut-être pour ce qui concerne le dépôt du rapport devant l'Assemblée nationale parce que, là, ce n'est pas toujours la même chose. Là, ça prend parfois pas mal de temps avant que ça ne nous arrive à l'Assemblée nationale. Mais ce document nous dit clairement que cela a été vérifié jusqu'au 31 mars 1980 et c'est signé du Vérificateur général, M. Gérard Larose, le 3 juin 1980. (15 h 451

Aurons-nous pas mal mieux que ça avec un vérificateur nommé par le gouvernement même si c'était parmi les plus efficaces, à titre d'exemple, celui qui a été agent officiel du premier ministre - il semble très efficace celui-là - M. le Président? Est-ce le genre d'amendement qu'on veut introduire pour permettre qu'on aille chercher, par exemple, un vérificateur dans le style de celui qui a été nommé, souvent, depuis quelques jours à l'Assemblée nationale? Je ne le sais pas. Il reste une chose, c'est que si c'est le gouvernement qui nomme le vérificateur, là, le gouvernement prête le flan à la critique en provenance de l'Opposition et en provenance de la population. Tandis que si le Vérificateur général est nommé par les deux tiers de l'Assemblée nationale au moins, le gouvernement ne prête plus le flan à la critique parce que cela s'est fait dans les normes, avec toutes les chances possibles de notre côté pour que personne ne puisse dire que le vérificateur, c'est peut-être un petit ami à qui on a voulu confier un contrat, je ne sais pas. Je ne veux pas me faire

l'accusateur de qui que ce soit, mais j'ai entendu des choses, et j'ai cru comprendre que le gouvernement était très embarrassé par ces choses que j'ai entendues. Il se place dans une situation présentement pour, un jour, encore entendre de ces choses. D'autant plus qu'ils vont être dans l'Opposition très bientôt, dans deux mois, je ne sais pas, on est en décembre, on parle d' élections en février. Mettons, dans deux mois et demi. Quelques-uns de nos amis d'en face, malheureusement pas tous et peut-être pas beaucoup de ministres non plus, en tout cas, quelques-uns se retrouveront peut-être encore parmi nous. Ces quelques-uns seront les premiers à réclamer que ce soit le Vérificateur général qui fasse ce genre de vérification.

M. le Président, si j'en arrive à vous parler comme cela, c'est que j'ai eu l'insigne honneur de siéger pendant quelques années aux côtés de membres de l'actuel gouvernement qui hélas ne sont pas parmi nous aujourd'hui. On va parler des sept, si vous le voulez, et on va parler des six. Quand ils étaient six dans l'Opposition, les membres du Parti québécois qui, aujourd'hui, se retrouvent ministres, M. le Président, n'auraient jamais laissé passer ce genre de loi. Je vous le jure. Je les ai vus faire. Je ne les critiquais pas de faire leur travail de cette façon non plus parce qu'ils comprenaient que le rôle de l'Opposition, c'était cela. Moi aussi j'étais à leurs côtés, à ce moment, et je faisais la même chose. Ils comprenaient que le rôle de l'Opposition, c'était de s'opposer aux choses qui leur apparaissaient non conformes aux voeux de la population. C'était un rôle de chien de garde. Je vous jure moi que si on retrouvait ces six en face de nous aujourd'hui et voulant se baser sur des discours qu'ils ont déjà faits, on aurait tout simplement à leur demander de traverser de côté et ils feraient le même discours que moi.

Je les ai vus faire des discours comme cela et je m'en souviens. Des nuits de temps, M. le Président. L'autre nuit, on se faisait dire, de l'autre côté de la Chambre, qu'on voulait retarder les travaux,et ceci et cela. Vous auriez dû être là, M. le Président, vous qui êtes de la région du Nord-Ouest québécois, pour les entendre quand ils ont fait une motion sur la loi 50 de 1971, la Loi sur la Baie James qui vous intéresse énormément, vous qui êtes dans l'Abitibi-Est, vous auriez dû les entendre. Cela a duré une nuit de temps sur un amendement qui voulait qu'on change Société de développement de la Baie James pour Société de développement de la Baie de James, M. le Président. Imaginez-vous cette grande différence, l'énorme différence que cela pouvait faire.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda. Je ne voudrais pas vous interrompre et vous être désagréable non plus, sauf que je voudrais simplement vous rappeler que, selon mon horaire, vous parlez sur l'article 22, qui fait partie de l'article 4, depuis 30 minutes.

M. Samson: Je m'excuse, M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que je pourrais vous demander de conclure rapidement?

M. Bérubé: Je m'élève contre cette attitude qui voudrait bâillonner l'Opposition, M. le Président.

M. Samson: Je m'excuse, M. le Président, mais il me paraissait essentiel d'apporter cette contribution pour mieux faire comprendre aux membres de la commission pourquoi...

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît, messieurs. M. le ministre également, à l'ordre. Je n'ai pas enlevé le droit de parole au député de Rouyn-Noranda; j'ai simplement signifié que j'aimerais qu'il conclue rapidement.

M. Samson: Vous avez bien fait, M. le Président. D'ailleurs, je suis en train de protéger votre comté, là.

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président.

M. Samson: Je disais donc, M. le Président...

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président.

M. Samson: C'est quoi qu'il veut faire, lui, de l'autre bord?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, sur une question de règlement.

M. Bérubé: De toute évidence, M. le Président, il reste quand même que tous les députés ont un droit de parole inaliénable. Effectivement, je peux comprendre votre irritation à entendre ce moulin à paroles, mais, cependant, je pense que les règles de notre commission sont telles qu'il faut absolument faire perdre le temps d'absolument tout le monde quand on a décidé de le faire perdre, y compris de tous les gens qui devront dactylographier cela pendant des heures, des heures et des heures. Je pense, M. le Président, qu'il faut laisser le député de Rouyn-Noranda, aller au bout de sa présentation.

M. Samson: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, M. le ministre, je vous avoue que c'est ce que je suis en train de faire avec le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je remercie le ministre de son excellente collaboration, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Rouyn-Noranda, vous pouvez continuer.

M. Samson: Je découvre un ministre aujourd'hui agréablement, d'ailleurs, collaborateur. Ce que j'allais vous dire, c'est que, quand le Parti québécois était dans l'Opposition, il faisait des motions qu'il est convenu d'appeler dilatoires. Je vous en ai donné un exemple; vous savez, entre "la baie James" et "la baie de James", on a passé une nuit complète là-dessus et, rendu au matin, on n'était pas tellement avancé, c'est resté la baie James pareil. Cela ne vous a pas empêché, M. le Président, d'être présent quand ils ont coupé le ruban de la baie James et vous, comme péquiste, vous étiez là. Cela n'a pas empêché l'ex-ministre de l'Énergie - je ne parle pas de celui-là, mais de l'autre, le député de Mille-Îles - de nous amener à la baie James, les députés qui ont pu y aller, et de nous faire une belle petite présentation en nous disant que c'était le plus beau projet qui avait été réalisé et qu'il reconnaissait ça.

M. le Président, je vous ferais remarquer, justement, que l'histoire nous démontre que si, parfois, on a l'air de vouloir insister sur des choses, c'est qu'on voit loin d'avance, nous autres, contrairement au Parti québécois. Le Parti québécois a fait un "filibuster" - depuis la loi 101, ça s'appelle peut-être autrement, mais, en tout cas, dans ce temps-là, ça s'appelait comme ça - qui a duré une quinzaine de jours sur la loi de la baie James pour l'empêcher d'être adoptée et, une fois qu'il est au pouvoir, il vient nous avouer carrément que c'est le meilleur projet qui pouvait être réalisé, ceci dit par un ministre qui siégeait sur des banquettes à proximité de moi et qui a passé des nuits, comme nous autres, à faire des motions dilatoires.

Les péquistes étaient sept de 1970 à 1973 et six, de 1973 à 1976. Quand ils faisaient une motion dilatoire, ils avaient un discours écrit qui était fait par le chef du parti et les cinq autres ou les six autres, selon le cas, prenaient la même feuille et faisaient le même discours. Cela s'appelait des motions dilatoires, M. le Président. J'ai vu ça, moi.

M. Ciaccia: Ils n'apportaient pas les éclaircissements que vous apportez maintenant.

M. Samson: Ils n'apportaient pas d'argumentation valable comme j'en apporte aujourd'hui. Ils n'apportaient rien. Ils ne protégeaient pas, non plus, la population; ils protégeaient les petits intérêts partisans. Nous, on veut protéger la population...

Une voix: Et les gros intérêts.

M. Samson: Pardon? J'aimerais, M. le Président, que l'on répète ce qu'on vient de dire.

Le Président (M. Bordeleau): Personnellement, je n'ai rien entendu. De toute façon, le droit de parole est toujours à vous, M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: D'accord, M. le Président, si vous n'avez pas entendu...

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que je peux quand même vous demander de conclure?

M. Samson: ...je n'ai rien entendu non plus. Je continue. Je dis que nous tenons absolument à ce qu'on ne mette pas aujourd'hui un frein à cette habitude que le Vérificateur général soit celui qui fasse les vérifications.

Je dis, M. le Président, que déjà, dans la SNA, où on a laissé introduire malgré nous ce principe qui était un précédent, c'était trop. Il faut que cela s'arrête quelque part. M. le Président, nous nous devons -c'est notre devoir de le faire - de dire: C'est assez. On veut que le Vérificateur général, qui a été nommé par nous, M. le Président, autant que par ceux qui sont en face, même pas par ceux qui sont en face, ils n'étaient pas là, qui a été nommé par les deux tiers de l'Assemblée du temps, à qui on a fait confiance... S'il y a quelqu'un qui n'a pas confiance, qu'il le dise, mais qu'il ait le courage de le dire. Aussi longtemps que le Vérificateur général mérite la confiance - en tout cas, il mérite la nôtre - c'est à lui qu'on veut confier ce genre de choses.

C'est pourquoi, M. le Président, nous demandons au ministre de retirer son amendement, de reformuler l'article 22 aux fins d'y introduire très clairement le fait que c'est le Vérificateur général du Québec qui doit faire les vérifications et que ce rapport doit accompagner le rapport annuel de la société. C'est ce qu'on demande au ministre, M. le Président. On ne fera pas la formulation pour lui, on lui laisse le loisir de faire la formulation. On lui laisse le loisir de consulter ses conseillers juridiques pour que la formulation soit faite, mais l'essentiel de ce qu'on demande... On le demande d'une façon très claire et là-dessus on ne reculera pas, ce n'est pas notre intention; et ce ne sont pas deux ou trois membres de la

commission qui en ont décidé ainsi, M. le Président, c'est la position du parti qu'on a eu le temps de discuter depuis qu'on a ajourné les débats sur ce sujet-là. Nous avons le mandat de notre parti d'exiger cela. On verra maintenant ce que le ministre voudra faire. S'il ne veut pas acquiescer à notre demande, on verra si on a d'autres recours et on sera peut-être appelé à retourner devant notre caucus pour... En tout cas, on verra.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, le député de Rouyn-Noranda, dans sa brève intervention, a porté à votre attention beaucoup d'éléments pour justifier qu'on retienne le Vérificateur général comme celui qui va faire la vérification des activités de SOQUEM. Mais je voudrais relever certaines affirmations que le ministre a faites dans ses raisons pour justifier l'amendement à l'article 22 du projet de loi.

Le ministre semble dire que nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous voulons qu'une société d'État soit rentable et alors on doit donner tous les leviers à SOQUEM pour qu'elle puisse fonctionner au même niveau et avec les mêmes contraintes que l'entreprise privée. Mais, M. le Président, ce n'est pas le Vérificateur général qui enlève le caractère d'entreprise privée à une société d'État, ce n'est pas le fait qu'on insiste pour que ce soit le Vérificateur général, pour que cette intitution demeure qui fera que la société d'État aura des contraintes qui lui donneraient un désavatange vis-à-vis de l'entreprise privée. Je dirais même qu'il faudrait regarder les autres clauses dans la loi qui démontrent que cette société ne peut agir ou n'agira pas de la même façon que l'entreprise privée. Je me réfère, par exemple, aux clauses du contrôle que le ministre a sur la régie interne de la société. On ne voit ces clauses dans aucune société privée. Le ministre peut donner des orientations ou des directives sur les objets de la société. Déjà, il y a des contraintes dans SOQUEM qui peuvent être interprétées de façon à dire: Elle ne fonctionnera pas de la même façon qu'une société privée. (16 heures)

Mais il y a aussi l'autre aspect, c'est que ce sont des deniers publics que le gouvernement met à la disposition de SOQUEM. Si on maintient le Vérificateur général, cela n'enlève pas tous les autres aspects de la rentabilité, du fonctionnement de SOQUEM qui agirait comme une société privée. Je ne crois pas que, de ce point de vue, ce soit un argument. Si vraiment on voulait que SOQUEM ait les mêmes modalités qu'une société privée, on n'inclurait pas dans ce projet de loi beaucoup des conditions qui y sont incluses.

Je remarque aussi que le gouvernement lui-même avait reconnu la responsabilité du Vérificateur général. Je cite l'article 22, tel qu'originalement rédigé: "Les livres et comptes de la société sont vérifiés chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement, par le Vérificateur général. Ce dernier peut toutefois, à la demande de la société, désigner un autre vérificateur."

Il y avait une reconnaissance, de la part du gouvernement, qu'il y avait une responsabilité du Vérificateur général et il donnait au Vérificateur général l'obligation de désigner un autre vérificateur. Autrement dit, il y avait une implication, une responsabilité présente de la part du Vérificateur général. C'est vrai que la société pouvait demander de nommer un autre vérificateur, mais l'obligation de le nommer demeurait toujours avec le Vérificateur général.

De cette façon, on aurait pu dire que, même si c'était inadéquat, même si c'était incomplet, la responsabilité du Vérificateur général demeurait, et c'était reconnu par le gouvernement.

Hier, M. le Président, le ministre nous a apporté des explications pour justifier l'amendement qui est présentement devant nous; je vais le lire pour clairement démontrer la différence entre les deux clauses. Le gouvernement nous dit maintenant que les livres et comptes de la société sont vérifiés chaque année et chaque fois que le décrète le gouvernement, par le Vérificateur général ou par un vérificateur, à la demande de la société et désigné par le gouvernement.

Dans cet amendement, clairement, le Vérificateur général n'a pas de responsabilité. Si la société ou le gouvernement demande que ce soit un vérificateur autre que le Vérificateur général, lui, il s'en lave les mains et n'a rien à faire. Les explications que le ministre avait données étaient exactement cela, que, d'après les représentations ou les recommandations que le Vérificateur général lui avait faites, il ne voulait pas avoir cette responsabilité.

Je crois avoir compris que la position que le Vérificateur général prenait était celle-ci: Ou je vais prendre cette responsabilité d'office ou si la société ou le gouvernement veut en nommer un autre, qu'ils le fassent eux-mêmes. A ce moment-là, je n'aurai aucun lien, aucune responsabilité dans la nomination d'un autre vérificateur.

Je peux comprendre cette attitude du Vérificateur général. M. le Président, je suggérerais, pour éclairer la responsabilité du Vérificateur général, pour avoir son opinion pour savoir exactement comment il perçoit la portée de cet article sur ses fonctions, qu'on l'invite à cette commission. Comme

me le souligne mon collègue le député d'Outremont, il y a un autre projet de loi où on inclut la même clause, où on enlève la responsabilité du Vérificateur général. Je crois que c'est un article assez important pour qu'on puisse interroger le Vérificateur général, pour qu'il puisse donner à la commission parlementaire son opinion quant à la portée de cette clause et quant à sa responsabilité.

Motion réclamant la convocation du Vérificateur général

Pour ces raisons, M. le Président, je ferai la motion suivante: Que cette commission invite le Vérificateur général à se faire entendre devant cette commission pour expliquer les difficultés qui sont alléguées pour le contenu de l'article 23 du projet de loi et discuter avec lui des méthodes alternatives pour surmonter ces difficultés.

Le Président (M. Desbiens): Avez-vous une copie?

M. Ciaccia: C'est écrit sur ce papier. Peut-être que vous pourriez...

M. le Président, hier, le ministre avait allégué certaines difficultés quant à la rédaction de l'article en question pour ce qui est de la position du Vérificateur général et de l'amendement apporté par le ministre. Je voudrais souligner que...

M. Bérubé: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bérubé: ...je voudrais savoir s'il y a une proposition de déposée et si, présentement, le député de Mont-Royal parle sur la proposition.

M. Ciaccia: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Mais je n'ai pas encore décidé si la proposition était recevable.

M. Bérubé: Je voudrais parler sur la recevabilité de la proposition, M. le Président, avant que vous tranchiez, si vous me le permettez.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, sur la recevabilité de la motion.

M. Bérubé: M. le Président, nous devons, dans le mandat qui nous est imparti par l'Assemblée nationale, étudier article par article le présent projet de loi. Par conséquent, il appartient aux membres de cette commission de discuter de l'article comme tel, mais il n'est pas dans notre mandat de convoquer des personnes à témoigner à la barre de cette commission, car cela n'a pas été inclus dans notre mandat. Si nous avons effectivement rencontré, par exemple, des représentants de SOQUEM et de SOQUIP lors d'une autre séance de cette commission, c'était à la suite d'un mandat explicite nous venant directement de l'Assemblée nationale. Nous ne pouvons présentement outrepasser notre mandat; donc, il faut déclarer cette proposition irrecevable.

M. Ciaccia: Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, il fait partie de nos us et coutumes et des règlements de cette Assemblée qu'on a le droit de faire une motion pour inviter les parties intéressées, qui sont nommées ou qui peuvent apporter un éclaircissement sur le projet de loi que nous étudions. Je crois que c'est un précédent très clair. Ce que la commission ne peut faire, c'est ordonner ou donner commande à quelqu'un de se présenter. Mais il est clairement établi que la commission peut inviter les parties intéressées. Cela a été fait durant l'étude article par article de la loi 101. Cela a été fait même durant l'étude article par article de la Loi constituant la Société nationale de l'amiante. Nous avions invité, à ce moment, différentes parties pour nous donner leur opinion, faire une présentation, être questionnées et apporter des informations que les membres de la commission croyaient importantes pour nous éclairer, afin que nous puissions prendre une décision sur le sujet en question.

M. le Président, je crois que la motion est recevable. On peut ne pas être d'accord. La décision sera prise par la commission, savoir si elle doit le faire ou non. Cela, c'est un autre sujet. Mais en termes de recevabilité, je vous souligne très respectueusement qu'il y a des précédents et des articles dans le règlement qui le permettent clairement.

M. Samson: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda, sur la recevabilité de la motion.

M. Samson: Oui, sur la recevabilité, M. le Président.

Je voudrais attirer votre attention sur l'article 140 de notre règlement qui dit: "Une commission élue est convoquée par le secrétaire des commissions à la demande du

leader parlementaire du gouvernement. La demande et l'avis de convocation doivent indiquer l'heure, l'endroit et l'objet de la réunion et aucun autre sujet ne peut y être discuté."

C'est l'essence des sujets qui peuvent y être discutés qui est régie par notre règlement. Les membres de la commission ont le droit de parole, les intervenants ont le droit de parole, les remplaçants, tel qu'on peut le faire par motion non annoncée, ont le droit de parole et toute autre personne que la commission décide, parce que la commission est toujours maîtresse de ses travaux. Là où la commission ne peut dépasser, elle ne peut déborder du sujet qui nous y amène.

Or, on est convoqué par le leader parlementaire, par une motion de l'Assemblée nationale pour étudier le projet de loi article par article qui s'intitule: Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'exploration minière. On a non seulement le pouvoir et le droit, mais on a le devoir de discuter de cela et on a le devoir, pour être mieux éclairés aux fins de la discussion, de faire appel à des personnes-ressources.

La preuve qu'on peut faire appel à des personnes-ressources, c'est qu'à toutes les commissions parlementaires où on étudie des projets de loi article par article il y a toujours des personnes- ressources présentes. Depuis onze ans, je n'ai jamais vu une commission parlementaire du genre où il n'y avait pas de personne- ressource présente. Nous en avons de notre côté, il y en a de l'autre côté, mais il se trouve que parmi les personnes-ressources présentes il y a une personne manquante et, étant donné les sujets dont on a à discuter aujourd'hui pour bien faire notre travail consciencieusement et tout en représentant nos commettants, nous avons besoin de la présence de la personne-ressource indiquée dans la motion qui vous est soumise. Mais cela ne veut pas dire que la commission donne l'ordre au Vérificateur général d'être là au même sens qu'une commission parlementaire de l'Assemblée nationale, parce que là c'est la commission parlementaire de l'énergie et des ressources. Si c'était la commission parlementaire de l'Assemblée nationale qui siégeait, cette commission pourrait donner l'ordre à quiconque de venir comparaître, parce que la commission de l'Assemblée nationale, c'est la seule qui peut se transformer en tribunal ou en quasi-tribunal sur une simple motion, mais la commission de l'énergie et des ressources, au même titre que les autres commissions, comme celle de la fonction publique, n'a pas le pouvoir de se transformer de cette façon. Donc, on ne pourrait pas.

Je pense que je serais d'accord avec vous pour ne pas accepter la motion si notre motion disait: On ordonne au Vérificateur général de venir comparaître. À ce moment, je pense que la motion serait irrecevable, mais la motion du député de Mont-Royal est libellée d'une toute autre façon. On demande, évidemment, qu'il soit invité à venir nous renseigner, pas à comparaître au sens que la commission de l'Assemblée nationale pourrait le faire. Remarquez que la commission de l'Assemblée nationale, sur une motion de l'Assemblée, pourrait siéger aux fins d'interroger le Vérificateur général. Mais cela, c'est une toute autre chose, parce qu'à ce moment le Vérificateur général serait convoqué de façon formelle, ce serait un ordre, il devrait être là et répondre à toutes les questions dans tous les domaines. (16 h 15)

Ce n'est pas là notre point de vue; ce n'est pas ce qu'on recherche non plus; ce qu'on demande, c'est pour les fins de la bonne compréhension de l'article 22. C'est dans ce sens que la motion de l'honorable député de Mont-Royal a été faite. Evidemment, il y a d'autres articles de notre règlement qui viendront - je vois le député de Mont-Royal qui en a déjà un à la main -ajouter à notre argumentation en faveur de la recevabilité de cette motion.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je vous réfère à l'article 153 qui se lit comme suit: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents et que cette personne refuse de le faire, la commission fait rapport de ce refus au président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit satisfaite." Il y a clairement le pouvoir d'une commission élue de convoquer les intéressés pour se faire entendre; le pouvoir est inclus et on en fait spécifiquement référence à l'article 153: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne." Il faut que la commission élue, pour demander à une personne de se présenter, ait le pouvoir de le faire. C'est ce qu'on demande. On invite une personne à se présenter et si on n'a pas de moyen pour l'obliger à se présenter et si, à la suite de notre invitation, par exemple, le Vérificateur général refusait, ce qu'il aurait le droit de faire, le seul recours que nous aurions ce serait de faire rapport au président et à ce moment-là le président prendrait les dispositions qu'il jugerait nécessaires. Dans l'article 153, on parle clairement de ce pouvoir. Je suggérerais que vous regardiez les précédents des autres commissions; cela s'est fait à maintes et maintes reprises. On a invité des gens à venir faire des représentations. Je vous ai donné deux exemples, je n'en ai pas d'autres devant moi,

mais si on faisait quelques petites recherches dans quelques instants, si on en a le temps, on pourrait vous donner d'autres exemples. Je crois que c'est un pouvoir reconnu de la commission, c'est une motion recevable, mais cela dépend naturellement si la commission accepte cette motion ou ne l'accepte pas.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-François.

M. Rancourt: M. le Président, je n'ai pas le livre des règlements devant moi, mais je constate qu'il y a, depuis un certain temps, une manoeuvre très visible de l'Opposition de passer le temps comme le député de Rouyn-Noranda le fait. Tout amendement apporté est fait en fonction de prendre tout le temps disponible pour se rendre à six heures parce que l'ordre de la Chambre... Je m'excuse. Je vous ai écouté.

M. Samson: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il y a déjà une question de règlement?

M. Samson: Non, M. le Président. Une voix: ...sur la recevabilité.

M. Rancourt: On prendra le vote, s'il le faut.

M. Samson: Mon collègue parle sur la recevabilité, mais j'ai une question de règlement. Si on veut parler sur la recevabilité, qu'on s'en tienne à la recevabilité. Si on veut nous imputer des motifs, M. le Président, quand vous aurez rendu votre décision, il pourra reprendre son argumentation et cela va nous faire plaisir de l'écouter.

Le Président (M. Desbiens): D'accord, M. le député. M. le député de Saint-François, sur la recevabilité de la motion.

M. Rancourt: Pour moi, elle n'est pas recevable et je vous fais humblement part de ma réflexion à ce sujet. En considération de ce que j'ai dit, c'est cette raison pour laquelle je vous dis que ce n'est pas recevable.

Le Président (M. Desbiens): Vous allez me permettre, je pense... J'ai bien choisi mon temps pour venir m'asseoir ici, pour la première fois...

M. Samson: Est-ce qu'on pourrait, M. le Président, vous faire une suggestion.

Une voix: II veut suspendre. Donnez-lui le temps.

Le Président (M. Desbiens): Je vais suspendre pour cinq minutes, si vous permettez.

M. Samson: C'est ce qu'on allait vous suggérer.

M. Bérubé: Cela nous permet effectivement une perte de temps, mais en même temps...

(Suspension de la séance à 16 h 20) (Reprise de la séance à 16 h 27)

Le Président (M. Desbiens): Après délibération et en lisant la motion telle que libellée, je constate, évidemment, qu'il y a eu des précédents à une motion de ce genre, sauf que, habituellement, ça se faisait au début des travaux de la commission, dans l'organisation préliminaire des travaux et par consentement également. Mais ici, comme la motion indique bien qu'il s'agit d'une invitation et d'un voeu exprimé d'entendre un expert en la matière pour éclairer les membres de la commission sur une partie précise de l'article 22 et qu'il s'agit de la première fois que j'ai à prendre une décision comme président de commission, je suis plutôt porté à être libéral; je juge donc que la motion est recevable.

M. Ciaccia: M. le Président, normalement on ne fait pas de commentaires sur les décisions, mais je crois que c'est une décision très sage qui va nous permettre peut-être d'apporter un peu d'éclaircissements sur un aspect très difficile de ce projet de loi. Je voudrais donner quelques raisons à l'appui de ma motion. La raison pour laquelle nous voulons inviter le Vérificateur général, c'est d'abord, à la suite des propos du ministre lui-même qui a admis certaines difficultés dans la rédaction de cet article, difficultés qui ont été soulevées par le Vérificateur général lui-même. Le gouvernement voulait originalement, si on lit le projet de loi, garder la responsabilité du Vérificateur général; on voit que c'était l'intention par la lecture même. Ce qui est arrivé, c'est que le Vérificateur général a soulevé certaines difficultés. Alors, l'alternative qui a été suggérée par le gouvernement a été d'enlever totalement cette responsabilité. (16 h 30)

Je crois que le Vérificateur qénéral pourrait nous suggérer d'autres façons d'aborder le sujet pour trouver une solution à ce problème particulier. Il ne faut pas oublier, M. le Président, que, dans ce projet de loi, par exemple, on présente un amendement à SOQUEM, ce qui fait qu'un membre du conseil d'administration autre que le président peut avoir un conflit d'intérêts. Le

ministre a justifié cet article en disant qu'il voulait nommer des experts, des gens du milieu au conseil d'administration. On peut donner des arguments pour ou contre. Même si cet argument est valable, c'est une raison de plus de retenir la responsabilité du Vérificateur général, parce qu'on crée un certain précédent. C'est vrai, on élargit le champ d'opération du conseil d'administration et cela devient encore plus important d'avoir le représentant des contribuables pour vérifier les activités de SOQUEM ou de toute autre société qui aurait, au sein du conseil d'administration, des gens qui peuvent avoir un certain conflit d'intérêts.

Je pense que la loi elle-même et la responsabilité exigent que le contribuable soit protégé. On n'a pas contesté. On a soulevé en deuxième lecture la question du conflit d'intérêts, mais on n'a pas fait trop, on n'a pas apporté trop de discussion, trop de contestation à l'étude article par article à la suite de l'explication du ministre. On peut lui donner le bénéfice du doute à ce sujet, pourvu qu'on maintienne la responsabilité du Vérificateur général; lui qui est objectif va pouvoir regarder les activités de cette société et faire les commentaires qu'il juge nécessaires.

Une autre raison pour laquelle, je crois, il est important de maintenir la responsabilité du Vérificateur général, c'est les activités, par exemple, de SOQUEM et le manque d'information que nous avons. Je donne un projet en particulier, le projet Dauphin des Îles-de-la-Madeleine. On a demandé hier si on pouvait avoir l'étude de rentabilité. Le ministre a jugé que ce n'était pas dans l'intérêt public de dévoiler cette étude. À la suggestion du député d'Outremont, même si le ministre ne dévoilera pas publiquement l'étude de rentabilité, au moins qu'il la fasse parvenir ou qu'il donne connaissance de cette étude aux membres de la commission et aux porte-parole des partis de l'Opposition. Le ministre a jugé qu'il n'avait pas l'intention de le faire.

On a une situation où ce projet de loi autorise l'augmentation du capital-actions à $36,000,000. On porte à notre attention qu'on va développer un projet de $65,000,000. On ne nous donne pas d'étude de rentabilité. Je crois que cela devient absolument essentiel de maintenir la responsabilité du Vérificateur général et je vais donner un exemple très clair. Pour SOQUIP, le Vérificateur général a porté à l'attention du gouvernement et à l'attention de la population certaines actions, certaines façons de capitaliser de la société et il a suggéré que le ministre des Finances réévalue la méthode de financer SOQUIP, parce qu'il croyait, c'était son opinion, que les sommes qui étaient versées dans SOQUIP et dans les activités de SOQUIP ne seraient pas récupérées par la société.

Je ne crois pas que ce soit le genre de commentaire qu'un vérificateur ferait si c'était un vérificateur dans l'entreprise privée, mais c'est le genre de commentaires que le Vérificateur général, par son rôle, a le devoir de faire et je crois que c'est très important. Pourquoi enlever cette responsabilité, pourquoi enlever cette protection pour le contribuable? Je pense que c'était important pour nous de savoir que, dans le cas de SOQUIP, il y avait peut-être des suggestions quant à la méthode de financer la société. À la lumière du peu de renseignements que nous avons, par exemple, sur le projet des Îles-de-la-Madeleine, moi, je ne voudrais pas enlever la responsabilité et le rôle du Vérificateur général. C'est vrai que les membres de l'autre côté de la Chambre peuvent nous critiquer et dire qu'on ne veut pas du projet des Îles-de-la-Madeleine. On va faire de la démagogie là-dessus, on va parler des hommes et des femmes du Québec et de l'intérêt national, tout le restant. Mais, comme Opposition officielle, on a le droit de soulever certaines questions, c'est notre rôle, de soulever des questions dans l'intérêt des hommes et des femmes du Québec, M. le Président. On a seulement soulevé la question à savoir si c'était rentable. On n'a pas dit que la société ne devrait pas s'impliquer dans ce projet, loin de là, mais je pense qu'on ne peut laisser passer tous les projets de $65,000,000, - même si c'était moins que ça, mais c'est une somme assez énorme, - sans poser de questions. Est-ce que c'est vraiment dans l'intérêt de toute la population de s'embarquer là-dedans? Je pense que la population nous en voudrait.

C'est une autre raison pour laquelle je crois que le rôle du Vérificateur général est important, parce que, quand il va examiner les livres de SOQUEM, peut-être va-t-il faire le même commentaire que sur SOQUIP, il va dire: Écoutez, j'ai examiné et vous avez un objectif de rentabilité. Je trouve que tel ou tel projet n'est pas rentable, je trouve que les sommes ont été dépensées d'une façon qui n'était pas autorisée. Le Vérificateur général a même porté à l'attention du gouvernement, qu'il fallait amender la charte de SOQUEM parce que ses activités n'étaient pas conformes aux pouvoirs de SOQUEM; Louvem, par exemple, était impliquée directement dans l'exploitation tandis que sa charte ne donnait pas le droit à SOQUEM ou à ses filiales de s'occuper directement de l'exploitation. Alors, le gouvernement a réagi, tard un peu peut-être, mais il a fait les changements nécessaires suite aux représentations du Vérificateur général, qui a suggéré qu'il fallait, pour légaliser la situation, amender la charte quant aux pouvoirs et aux objets de la société, ce que le gouvernement a fait, ce que nous avons approuvé, en deuxième lecture, sujet à

certaines questions que nous aurions le droit de soulever.

C'est encore une autre raison pour exiger que le Vérificateur général vienne ici, explique un peu le rôle et les responsabilités qu'il a vis-à-vis d'un projet comme celui des Îles-de-la-Madeleine ou les autres projets de SOQUEM.

Un autre aspect que je voudrais soulever, sur lequel je voudrais avoir l'opinion du Vérificateur général, c'est la question du mandat du SOQUEM qui est élargi. Je crois qu'on donne à SOQUEM beaucoup de pouvoirs, assez complets et ça devient une autre raison importante pour garder la responsabilité du Vérificateur général. On pourrait dire au gouvernement et au Vérificateur général, plutôt que de procéder de cette façon: Écoutez, nous avons un problème d'efficacité, on veut le rapport annuel plus tôt, on ne veut pas attendre les délais normaux, dans les travaux du Vérificateur général, quoique le député de Rouyn-Noranda a souligné qu'il n'y a pas beaucoup de délais; c'est une question de trois mois, et, même dans l'entreprise privée, il y a beaucoup de cas où ça prend plus de trois mois pour recevoir le rapport annuel d'une compagnie.

Je voudrais, M. le Président, explorer, avec le Vérificateur général, d'autres choix, suite aux difficultés soulevées par le ministre; par exemple, est-ce qu'on devrait amender la Loi sur l'administration financière pour que le Vérificateur général puisse d'office, nommer un autre vérificateur, sous son contrôle, sa direction, sa responsabilité? Je crois qu'il n'a pas ce pouvoir actuellement. Ou c'est le Vérificateur général ou ce ne l'est pas. Au lieu de dire: Si vous avez trop de travail, on va nommer un autre vérificateur, peut-être que le gouvernement pourrait donner le droit au Vérificateur général de nommer un autre vérificateur sous sa responsabilité, qui aurait les mêmes devoirs que le Vérificateur général et les mêmes responsabilités. Cela permettrait, pour des cas spécifiques d'efficacité, de nommer des gens particuliers. C'est une solution.

Je voudrais en explorer une autre. On laisse entendre que le Vérificateur général a peut-être trop de travail. C'est la seule conclusion à laquelle on peut en venir. Quand le ministre dit: Pour des questions d'efficacité, je vais nommer un autre vérificateur, cela doit être parce que le Vérificateur général a trop de travail. Y a-t-il une autre solution? Il devrait peut-être engager d'autre personnel. Le fait de dire: On élargit la bureaucratie, ce n'est pas un argument, parce qu'il y a beaucoup d'autres endroits où on pourrait faire des coupures, qui ne sont pas des éléments essentiels. Quand quelque chose est important, essentiel, ne pas élargir la bureaucratie, je pense que c'est de la fausse économie. Je ne pense pas que le contribuable apprécierait cela. Il dirait plutôt: Dans d'autres endroits, soyez plus efficaces, mais quand on en vient à protéger les intérêts du contribuable, ne commencez pas à faire des coupures. C'est une autre solution qu'on pourrait explorer. Comme c'est là, on n'a pas la réponse; on a seulement une opinion du ministre ou une façon de procéder du ministre qui a jugé parce qu'il voulait agir de façon à éliminer la possibilité d'avoir le Vérificateur général.

Ce sont des éléments, je crois, qu'on pourrait examiner d'une façon plus claire si on avait la personne directement impliquée ici. Franchement, quand on introduit un article comme l'article 22, qui peut avoir des conséquences assez considérables, je pense qu'il est tout à fait normal de faire venir la personne qui sera principalement affectée, le Vérificateur général, et de lui poser certaines questions pour avoir son opinion. Le ministre n'a pas eu d'objection à faire venir le président de SOQUEM, lundi matin. C'était un peu à la dernière minute, mais au moins on a pu obtenir certaine information de lui. Pourquoi? Parce qu'on allait discuter un projet de loi devant affecter l'avenir de SOQUEM; il était tout à fait normal d'avoir les représentants de SOQUEM ici. Comment pouvons-nous dans l'Opposition essayer de protéger les intérêts des contribuables ou bien faire des représentations sur certaines conditions du projet de loi si on ne questionne pas directement les personnes impliquées directement par le projet de loi? Le principe, je crois, est accepté par le ministre.

C'est vrai qu'on arrive ici en fin de session. Ici, on parle d'une question de procédure, on ne parle pas d'une question de responsabilité. Je crois bien que le principe de la responsabilité, le principe d'inviter les gens directement impliqués, le gouvernement l'a accepté. Autrement, s'il ne l'avait pas accepté, il n'aurait pas fait venir le président de SOQUEM, le vice-président et le président de SOQUIP. Le principe d'avoir ces personnes directement impliquées ici en commission parlementaire, je pense que cela a été accepté par le ministre.

C'est vrai, on est une semaine avant Noël et le gouvernement commence être à court de temps. Il aurait dû y penser au mois de juin, au mois de juillet. Cela fait longtemps que le gouvernement sait qu'il faut qu'il amende la charte de SOQUEM. Le fait que le gouvernement nous arrive à la dernière minute, avec le rouleau-compresseur, une semaine avant les Fêtes, avant l'ajournement de la Chambre, ce n'est pas une raison pour nous de ne pas prendre nos responsabilités, je regrette. Je ne vois pas l'urgence aujourd'hui d'adopter cette charte de SOQUEM tout de suite avant Noël.

SOQUEM va continuer de fonctionner. (16 h 45)

Nous sommes d'accord sur le projet de loi. On ne va pas le bloquer. On a voté pour en deuxième lecture. Ce n'est pas notre intention d'y mettre des obstacles. Je m'oppose toutefois aux remarques du député de Saint-François qui dit que nous faisons de l'obstruction systématique. Vous n'avez pas vu ce que c'est que de l'obstruction systématique. Je peux vous en montrer et vous en donner des exemples. Je peux vous donner un exemple du Parti québécois sur le "bill" 22. On n'a jamais laissé l'article 1 en trois mois. Nous sommes restés sur l'article 1. Pourquoi? Parce qu'au lieu de dire "la langue officielle sera le français", on voulait dire "la seule langue officielle". Trois mois sur cet article! Ici, après trois heures, nous sommes rendus à la fin du projet de loi. Cela n'est pas de l'obstruction. Si on avait voulu faire de l'obstruction, je peux vous garantir que je serais encore sur l'article 1. On aurait pu le faire. On a l'expérience pour le faire, on l'a appris de vous autres. On aurait pu le faire.

Mais arrive un moment où on prend ses responsabilités. Arrive un moment où une question de principe, une question de contenu nous paraît assez importante pour qu'on prenne une position. Cela aurait été très facile pour le ministre, pour éviter le soi-disant obstacle, d'accepter de maintenir la responsabilité du Vérificateur général. Il aurait pu l'accepter hier soir à 18 heures, il aurait pu l'accepter aujourd'hui à 15 heures. Il est 16 h 40. Ce n'est pas la fin du monde. Ce n'est pas une question d'obstruction, mais on ne peut pas accepter, parce que vous voulez adopter le projet de loi avant Noël, de ne rien faire, de laisser passer des clauses que nous considérons très importantes. Cela serait manquer à notre devoir. Comme je l'ai déjà souligné, il n'y a aucune urgence pour adopter ce projet de loi cette semaine. SOQUEM va continuer à fonctionner. Personne ne va lui créer des obstacles. Et si vous le faites la semaine prochaine ou dans deux mois, je crois que les activités de SOQUEM ne seront pas affectées. Le ministre va continuer à donner ses directives et SOQUEM va continuer à faire le travail qu'elle doit faire, tel que décrit dans son rapport annuel.

M. le Président, ce sont les raisons que j'invoque à l'appui de la motion que j'ai faite, pour inviter le Vérificateur général, parce que cela a des implications beaucoup plus profondes que simplement ce projet de loi. C'est facile de mettre une petite clause dans un projet de loi, mais il faut voir les conséquences de cette clause, il faut voir jusqu'où cela va aller, quelle sorte de précédent cela va créer et ce que cela va apporter au fonctionnement de l'administration publique. On ne peut pas accepter... Le ministre ne peut pas avoir les deux côtés de la médaille et dire: Je veux un certain contrôle sur SOQUEM. Le contrôle absolu, il l'a. Le conseil d'administration est nommé par le gouvernement, le président est nommé par le gouvernement, les directives sont données par le ministre, la régie interne est contrôlée par le gouvernement. Il ne peut pas séparer l'administration de son ministère aussi clairement de l'administration de SOQUEM, en termes d'administration publique. Ce sont des deniers publics et les mêmes règles de révision par le Vérificateur général, pour voir à ce que ces fonds soient utilisés dans le meilleur intérêt de la population, s'appliquent.

Ce sont les raisons que j'apporte à l'appui de ma motion. Je crois que cela apporterait de l'information additionnelle et peut-être que le Vérificateur, général va nous convaincre que l'amendement du ministre devrait être accepté. Je n'ai pas de préjugés, mais avant que j'en entende les conséquences de la bouche même du Vérificateur général, je ne peux pas accepter cet amendement.

Ce sont les raisons que j'apporte à l'appui de ma motion et j'espère que le ministre va agir d'une façon responsable. Il parle d'agir d'une façon responsable, dans le meilleur intérêt de tout le Québec. Qu'il prenne ses responsabilités, qu'il démontre qu'il est vraiment de bonne foi dans ce qu'il dit, dans ses propos. Et je lui suggère de voter pour notre motion et d'inviter le Vérificateur général.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Mont-Royal?

M. Ciaccia: Pour le moment, oui.

M. Samson: On va attendre pour voir ce que le ministre va dire.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre s'il vous plaîtl

Le ministre avait levé la main, ainsi que le député de Mont-Royal.

M. Bérubé: Je suis convaincu que nous aurons besoin d'un peu plus d'éclairage. Peut-être que le député d'Outremont pourrait prendre la parole.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Outremont, la parole est à vous.

M. Fortier: M. le Président, il y a trois ou quatre raisons pour lesquelles, je crois, nous aurions besoin de l'avis du Vérificateur général.

M. Bérubé: ...sans farce!

M. Fortier: Je sais que le ministre ne

semble pas intéressé, mais, pour nous, c'est un sujet bien important. Compte tenu du fait que le ministre a dit qu'il s'agissait d'une décision, semble-t-il, du cabinet de standardiser toutes les lois, il nous semble à nous que le temps est venu d'étudier cet article en particulier, et de faire la lumière sur les implications que des modifications apportées pourraient avoir sur l'administration globale du gouvernement, reliée à l'administration des sociétés d'État.

Une raison pour laquelle je crois que nous devrions consulter le Vérificateur général, c'est le fait que le ministre, à deux reprises, a dit qu'il avait lui-même consulté le Vérificateur général. Personnellement, j'ai pleine confiance en la parole du ministre, mais il nous semble que, compte tenu des divergences d'opinions que nous avons exprimées, il est normal que si une personne en consulte une autre, elle nous rapporte la consultation sous un éclairage qui peut être favorable au point de vue que l'on défend.

Donc, il me semble à moi que si nous avions l'occasion, dans cette commission, de discuter avec lui, en présence du ministre, des motifs que le ministre a mis de l'avant, des raisons et des opinions que nous avons exprimées, nous pourrions avoir une discussion beaucoup plus intelligente.

Ma seconde raison - comme je viens de le dire - c'est que nous avons exprimé des opinions différentes sur le rôle d'un vérificateur en général et du rôle du Vérificateur général, en particulier. Le ministre exprimait l'opinion que le vérificateur semblait, à son avis, faire partie de l'administration ou de la gestion financière de la société. Pour ma part, j'ai exprimé l'opinion que le Vérificateur général est à l'extrême de la société et qu'il n'est pas impliqué dans la gestion interne de cette société. À mon avis, il s'agit ici de deux points de vue diamétralement opposés. Il me semble qu'un expert comme le Vérificateur général pourrait nous donner un peu de lumière sur ce sujet.

Troisièmement, je crois qu'il y a une autre raison. Encore là, le Vérificateur général pourrait nous renseigner. On nous a dit, quoique les critères de rentabilité n'aient pas encore été définis, que, dans certains cas, il se pourrait que les critères qui pourraient être agréés avec la direction de SOQUEM incluent des critères incluant des facteurs socio-économiques.

Avec raison, la députée des Îles-de-la-Madeleine a soulevé cette question l'autre jour à l'Assemblée nationale pour faire valoir que, très certainement, dans le cas du développement du projet de la mine de sel des Îles-de-la-Madeleine, en plus des critères normaux utilisés par le secteur privé, il fallait peut-être utiliser en plus des facteurs socio-économiques qui seraient à l'avantage d'une région donnée.

M. Ciaccia: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal, sur une question de règlement.

M. Ciaccia: Je ne veux pas interrompre mon collègue, le député d'Outremont, mais je crois que mon collègue essaie de donner des raisons au ministre pour lesquelles nous devrions inviter le Vérificateur général. Je m'aperçois que le ministre est en caucus dans le coin, avec ses conseillers. Nous, nous admettons que le ministre puisse consulter ses conseillers. Mais peut-être pourrait-on suspendre jusqu'à ce qu'il ait complété cette consultation. Après cela, il pourrait écouter le député d'Outremont lui donner les raisons pour lesquelles il est en faveur d'inviter le Vérificateur général.

M. Bérubé: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, sur la question de règlement.

M. Bérubé: Je voudrais dire que le député d'Outremont ne nous dérange absolument pas et qu'on n'a aucune objection à ce qu'il continue.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Outremont a la parole, il a le droit de s'exprimer et d'avoir devant lui des membres attentifs.

M. Samson: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je pense qu'on n'a pas compris notre point de vue. En commission parlementaire, M. le Président, surtout quand on discute un projet de loi, article par article, c'est évidemment le ministre qui doit, après avoir entendu l'argumentation, au nom du gouvernement, décider s'il accepte oui ou non les propositions qu'on fait. Il se trouve que, présentement, il est en discussion avec ses conseillers, On trouve que c'est normal, on n'a rien à dire contre cela, mais, d'autre part, pendant qu'il est en discussion, il ne peut sûrement pas écouter le député d'Outremont. Je me demande, M. le Président, si, pour donner une chance au ministre de terminer son caucus, on ne devrait pas suspendre les travaux quelques minutes.

M. Rancourt: On écoute. On écoute.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! MM. les membres de la

commission, à l'ordre, s'il vous plaît, afin que nous puissions poursuivre nos travaux. Merci.

M. Bérubé: Pas de problème, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Outremont, je pense que tous les membres de la commission sont prêts...

M. Fortier: Merci. Je comprends bien que le ministre peut toujours lire mon intervention plus tard, mais je crois...

M. Samson: Je m'excuse auprès de mon collègue; j'ai une autre question de règlement à soulever, M. le Président. Je m'excuse même auprès du ministre. Je ne voudrais pas être désagréable envers lui, mais dès que la question de règlement a été soulevée, dès que vous avez semblé vouloir suspendre les travaux pour nous donner raison, il est venu à son siège et dès que le député d'Outremont a repris la parole le ministre est reparti. Je ne sais pas à quel jeu on veut jouer, M. le Président, mais le député d'Outremont, a été dûment élu, qui représente une population qui a le droit d'être, à travers son député, respectée. C'est un manque de respect envers un député, ce que l'on voit là. Je vous réitère encore une fois ma demande de suspendre la séance jusqu'à ce que le caucus du ministre soit terminé et qu'il soit disponible à cette commission.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-François, sur la question de règlement.

M. Rancourt: Je vous fais humblement savoir que le député de Saint-François écoute l'intervention du député d'Outremont. Donc, indépendamment, il y a quelqu'un qui écoute.

Le Président (M. Desbiens): Je dois comprendre quand même que le ministre ne crée pas de désordre à la commission. Il n'est pas requis d'être à son siège nécessairement. Je pense que dans l'état de calme où se trouve la séance, M. le député d'Outremont peut poursuivre.

M. Fortier: C'est bien malheureux parce que je crois que ce que j'ai à dire pourrait ajouter un peu de lumière à son entendement de la situation. De toute façon, ce que je voulais dire, c'est que parmi les facteurs de rentabilité de SOQUEM, il se pourrait fort bien qu'il y ait des facteurs socio-économiques qui puissent être ajoutés aux autres facteurs ou critères économiques qui sont normalement retenus par le secteur privé. À ce sujet, je voudrais demander au Vérificateur général, d'après son opinion, parce qu'il a une expérience que peu de personnes ont dans le secteur privé, s'il croit qu'un vérificateur du secteur privé qui n'a pas l'expérience du milieu politique où travaille le Vérificateur général, pourrait jouer le même rôle que le Vérificateur général pourrait jouer. Il est évident que le Vérificateur général, compte tenu des lois qui ont été adoptées, la Loi sur l'administration financière entre autres, qu'il est en mesure, à mon avis, davantage qu'un vérificateur du secteur privé de pouvoir juger d'une situation comme celle-là.

Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président, il me semble que, si le Vérificateur général était appelé devant cette commission, nous pourrions discuter avec lui des opinions diverses qui ont été exprimées à cette commission, nous pourrions discuter du rôle d'un vérificateur, dans le cas de SOQUEM ou de toute société d'État et nous pourrions nous rendre à l'évidence qu'il nous faut retenir les services du Vérificateur général. Il s'agit ici d'un problème qui est trop fondamental pour qu'on puisse prendre la parole du ministre qui, lui, nous a dit qu'il avait consulté le Vérificateur général.

Comme cet article à l'ordre du jour, qui est l'article 22, se retrouve d'ailleurs intégralement dans la loi de SOQUIP et à cause du fait que le ministre nous a indiqué que ce même article serait utilisé dans d'autres lois, il me semble que nous devrions avoir l'avantage d'en discuter en toute connaissance de cause afin de prendre une décision finale qui sera à l'avantage de l'Assemblée nationale et des contribuables qui sont les vrais actionnaires des sociétés d'État. Pour cette raison, je désire voter en faveur de la motion. C'est la raison pour laquelle j'ai exprimé mes motifs devant cette commission et j'ose espérer que la motion sera adoptée.

Je vous remercie, M. le Président. (17 heures)

Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autres intervenants sur la motion, je ferai...

M. Biron: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Alors, je reviens au début de la séance où il y avait...

M. Samson: Est-ce que le député prend la parole sur la motion?

Le Président (M. Desbiens): Sur la motion. Alors, il faut le consentement. On avait exprimé le consentement au début.

M. le député de Lotbinière remplacera le député de Kamouraska-Témiscouata qui remplaçait M. Bordeleau (Abitibi-Est).

M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, je ne veux pas parler longtemps, mais je suis un peu surpris dans le fond de l'attitude de nos amis de l'Opposition officielle. Je les ai entendus, au cours de la séance de cette commission, prendre la défense de l'entreprise privée et se vanter de vouloir véritablement aider l'entreprise privée à se développer au Québec.

On sait que, de ce côté-ci de la Chambre, le gouvernement fait des efforts énormes, depuis quatre ans, pour aider la petite et la moyenne entreprise privée au Québec. On sait, en particulier, quels efforts ont été faits avec le programme OSE, on sait que, même sur les professions, le gouvernement du Québec croit dans les capacités des producteurs, des administrateurs, des gestionnaires, des inventeurs québécois. Donc, c'est une profession de foi pour la petite et la moyenne entreprise privée québécoise. Des bureaux de vérification, en fait, ont 10, 15, 20, 25 ou 50 personnes; à mon point de vue, c'est encore une petite ou une moyenne entreprise.

On discute, à l'heure actuelle, pour savoir si le gouvernement va continuer à faire confiance à l'entreprise privée, oui ou non, dans certaines circonstances. J'ai de la difficulté à suivre le cheminement de nos amis de l'Opposition officielle qui, une journée, sont pour l'entreprise privée et, le lendemain, sont contre l'entreprise privée; une journée, ils sont pour l'entreprise étatisée et, le lendemain, ils sont contre. J'ai un peu de difficulté à suivre tout ce scénario.

C'est simplement sur ce point que je voulais me prononcer pour qu'on sache, une fois pour toutes, de l'autre côté, où on va se brancher et de quelle façon on va se brancher. Ce ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, je pense que c'est clair. On a depuis longtemps fait une profession de foi pour la petite et la moyenne entreprise privée québécoise. Dans ce sens, le gouvernement du Québec veut faire confiance au Vérificateur général, mais il ne veut pas se lier les deux pieds dans le ciment et il veut, à quelques reprises, bien sûr, continuer sa philosophie et aider, encourager l'entreprise privée compétente au Québec, chez nous.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Bérubé: M. le Président, je donnerai un bref point de vue qui est essentiellement le suivant. D'une part, je pense que cette commission et le gouvernement ne doivent pas accepter de faire venir le Vérificateur général ici. Je trouve que cela serait une pratique extrêmement mauvaise.

D'une part, comme l'a souligné le député de Rouyn-Noranda dans son discours fleuve - je lui ferai remarquer que je les écoute d'une demi-oreille, comme j'avais l'habitude de le faire en commission parlementaire sur l'amiante, jamais plus qu'une demi-oreille, parce que les trois quarts de ce qui est dit est généralement inutile - il a bien souligné à quel point le Vérificateur général élu par l'Assemblée nationale aux deux tiers est un homme qui se situe au-dessus des partis politiques et qui se voit confier le mandat très clair de l'administration des lois.

Or, convoquer le Vérificateur général pour lui demander de se prononcer sur une position qui est essentiellement politique, à savoir si le Vérificateur général doit, oui ou non, vérifier les comptes d'une société d'État, dans le cadre de la loi constitutive de cette société, c'est là une question essentiellement politique et, par conséquent, nous n'avons pas à demander à un Vérificateur général de se prononcer sur une telle question. Le vérificateur exécute les ordres que l'Assemblée nationale lui donne et il n'a pas à dire à l'Assemblée nationale de quel côté elle devrait s'orienter. Aussi, cela me paraît complètement farfelu, bizarre, contraire à toutes nos règles parlementaires, une violation même de l'esprit qui a mené à la création du poste de Vérificateur général. On ne peut, à ce moment-là, qu'en tirer comme seule et unique conclusion qu'il s'agit là d'une motion dilatoire dont l'objectif est de tenter de retarder l'analyse du projet de loi.

J'ignore en vertu de quelle stratégie politique le Parti libéral a décidé de procéder à une telle discussion. Il ne fait aucun doute que plusieurs points de vue sont possibles sur la question, on pourrait avoir le point vue que seul le Vérificateur général doit vérifier les livres des sociétés. C'est la position que le Parti libéral choisit de prendre. On pourrait, au contraire, opter pour une position beaucoup plus libérale et décider que l'actionnaire, tel que la Loi sur les compagnies le stipule, choisit le vérificateur et, à ce moment, laisser le gouvernement libre de choisir le vérificateur qu'il entend. On pourrait également choisir une formule mixte, qui est essentiellement la formule que nous proposons ici et qui consiste à dire que, d'une façon générale, nous mettons l'accent sur la vérification par le Vérificateur général, mais nous laissons une marge de manoeuvre au gouvernement qui, à ce moment, est responsable politiquement, devant l'Assemblée nationale, des décisions qu'il prend; nous laissons le gouvernement répondre de ses actes, de ses décisions.

Donc, je reconnais qu'on peut tenir plusieurs points de vue sur la question. Je reconnais surtout qu'une telle question ne devrait pas faire l'objet d'un débat aussi poussé que celui dont elle fait l'objet

présentement, reconnaissant que l'Opposition libérale a accepté tout récemment la création de la Société d'assainissement des eaux et qu'elle a voté effectivement en faveur d'une disposition identique à celle que j'ai proposée en amendement. Il y a là une contradiction interne totale entre la position que le Parti libéral a défendue il y a quelques mois et celle qu'il défend maintenant.

S'il faut attribuer ça à l'absence totale d'idées, au sein du Parti libéral, qui les amène, une journée, à penser d'une façon et, le lendemain, à penser autre chose, là, je laisserai l'opinion publique en juger. Mais il apparaît assez clair que la position tenue par le Parti libéral, dans un débat tout récent sur la Société d'assainissement des eaux, est l'antithèse de la position qui est présentement défendue par l'Opposition libérale, ce qui montre qu'il n'y a absolument aucune continuité dans la pensée et que l'on suit purement et simplement les aléas, les vagues, les mouvements, les courants d'air, tout ce qu'il y a de plus aléatoire qui pousse ce parti tantôt dans une direction, tantôt dans une autre. C'est ainsi qu'on se déclare, à un moment donné, contre le rapatriement unilatéral et que, le lendemain matin, on ne veut pas voter contre le rapatriement unilatéral. En fait, on ne peut pas amener le Parti libéral à avoir la moindre opinion consistante sur un point en particulier et ça devient tellement difficile de les suivre que les électeurs ont, depuis longtemps, cessé de les suivre. Les quelques rares électeurs qui les suivent les suivent surtout à cause d'un certain état de désintéressement vis-à-vis de la politique et, à ce moment, évidemment, il peut devenir plus ou moins intéressant de voter pour un parti politique qui tantôt se dit qu'il a l'avantage d'être aussi bien une journée à gauche que le lendemain à droite, que le surlendemain au centre, que le "sur-surlendemain" à l'extrême gauche. On se promène d'une position à l'autre, de manière à ne jamais choquer les électeurs en aucune façon. En d'autres termes, on hume l'air une journée donnée et on décide de quel côté on va pencher.

Alors, je pense qu'il n'y a pas d'autre solution, dans un cas comme celui-là, que de faire preuve d'une grande patience, de laisser le député de Rouyn-Noranda, qui se prépare une intervention qui va durer, je prévois, 50 minutes, puisqu'il reste 50 minutes avant l'ajournement et, si ce n'est pas lui qui prend les 50 minutes, je suis convaincu que le député d'Outremont pourra... Non pas d'Outremont, parce qu'il n'est pas encore suffisamment habitué, mais que le député de Mont-Royal pourra prendre le reste du temps et on pourra certainement laisser au député d'Outremont le soin de parler quelques minutes. Graduellement, à force de l'entraîner comme ça, il sera, dans très peu de temps, capable de parler pendant des heures et des heures et des heures à ne rien dire, ce qui est un peu dommage, parce que, dans les quelques rares interventions qu'il a faites jusqu'à maintenant, il a montré certainement un souci d'apporter une contribution personnelle et originale au débat. Mais, comme je le lui soulignais tantôt, les problèmes de partisanerie politique l'amèneraient très rapidement à modifier sa position et que, très bientôt, il s'engagerait dans un processus de décadence rapide qui l'amènera à- ne rien dire pendant des heures, comme tout le reste de ses collègues, mais, de ça, je l'excuse à l'avance. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autre intervenant, je vais...

M. Ciaccia: ... très pertinent à la motion.

Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je voudrais offrir mes...

M. Bérubé: Moi, je pourrais offrir un chronomètre au député de Rouyn-Noranda.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Samson: ... meilleurs voeux au ministre pour le week-end qui s'en vient, j'espère qu'il passera un bon week-end. Mais il m'a semblé, dans toute l'argumentation qu'il vient de nous servir et qui évidemment était pas mal loin du sujet, mais, de toute façon, ça ne nous dérange pas, ce n'est pas nous qui allons l'empêcher de parler, M. le Président. Nous considérons, nous, que le droit de parole est un droit sacré, et même si dans le cas du ministre cela devient un droit sacrant, on va le laisser faire pareil. Son problème, M. le Président, me semble être le suivant. Il me semble que le ministre ne sait même compter jusqu'à onze parce que dans tout ce qu'il a dit, il a tenté de nous faire peur, comme le Bonhomme Sept Heures de nos jeunes années. Il a tenté de nous faire peur en nous disant: Ils ne vous suivront pas, vous allez perdre ci, vous allez perdre ça. M. le Président, s'il y a quelqu'un qui n'est pas suivi par l'électorat, ce n'est pas nous autres. Ce sont les gens d'en face. Onze à zéro, M. le Président. Imaginez-vous, onze à zéro, c'est même plus fort qu'un score de hockey, c'est un score de football. Ce gouvernement a dépassé le mandat ordinaire, qui est un mandat de quatre ans. On peut, pour la petite histoire, pour les fins de l'histoire, dire que les deux

gouvernements précédents avaient été en deçà de quatre ans: L'un a duré trois ans et demi et l'autre a duré trois ans. Or, depuis 1970, il n'y avait pas eu d'élections après quatre ans, c'était toujours avant.

Depuis la dernière guerre mondiale, jamais il n'y avait eu un dépassement de plus de deux mois, je pense, M. le Président. Ce gouvernement est rendu...

M. Bérubé: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources sur une question de règlement.

M. Bérubé: M. le Président, je crois que le règlement permet à un député de poser une question à celui qui a la parole s'il l'autorise. Je voudrais demander au député de Rouyn-Noranda s'il me permet une question.

M. Samson: Avec plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, M. le député de Rouyn-Noranda vous permet de poser une question.

M. Bérubé: M. le Président, c'est que le député de Rouyn-Noranda en ce moment s'étonne que le gouvernement actuel prolonge son mandat de quatre ans à quatre ans et deux mois. Je suis convaincu qu'il connaît ses talents de mage qui lui permettent de prédire l'avenir et il doit certainement être heureux de voir que ses prévisions sont présentement en voie d'être réalisées, en voie de se concrétiser puisque je me souviens de l'avoir entendu dire qu'advenant l'élection du Parti québécois, celui-ci décréterait l'abolition de toute élection et qu'il resterait au pouvoir au moins dix ans. J'ai l'impression que cela va dans le sens de ses dires et je ne vois pas pourquoi il s'offusquerait.

M. Samson: M. le Président, le député de Matane ne m'a pas posé une question. Il a fait une affirmation qui - je vais vous le dire franchement - ne me surprend pas trop. C'est dans le style du député de Matane. Je n'avais pas été jusqu'à vouloir dire qu'actuellement ils veulent aller jusqu'à dix ans, mais s'il le dit lui-même, M. le Président, qu'il prenne à son compte ses propres paroles. Je voulais vous dire à vous, M. le Président, qui semblez très intéressé par cette commission, beaucoup plus que le ministre, que l'actuel gouvernement ayant dépassé son mandat...

M. Bérubé: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre.

M. Samson: Pardon, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda, vous avez la parole.

M. Samson: Je vous félicite, M. le Président. Ce gouvernement qui a dépassé son mandat, je disais tantôt qu'il devrait savoir compter jusqu'à onze. On est rendu onze à zéro dans les élections partielles. Ce gouvernement qui a dépassé son mandat et qui ne semble pas vouloir déclencher d'élections générales pour ne pas donner la chance à la population de manifester son désaccord qui est évident, M. le Président, tout le monde le reconnaît, tout le monde le voit, les journalistes sont rendus qu'ils l'écrivent, ce gouvernement s'accroche au pouvoir et ne veut pas lâcher. Ce que je pourrais lui donner comme suggestion, qu'il pourrait peut-être transmettre - comment est-ce qu'on appelle cela - par câble, en tout cas, comme il voudra, à Paris à son premier ministre, c'est que pendant que le premier ministre est à Paris, il pourrait peut-être songer à cela, 68 à 34; on est rendu 68 députés du PQ et 34 députés libéraux. On a gagné 11 élections partielles. S'ils ne veulent pas déclencher d'élections générales, c'est parce qu'ils ont peur et que c'est trop d'ouvrage. Peut-être, M. le Président, qu'ils pourraient déclencher 18 élections partielles, on va gagner les 18 et on va être au pouvoir par des élections partielles. C'est peut-être une bonne recette, parce qu'ils ont peur des élections générales. (17 h 15)

En attendant, M. le Président, puisqu'ils se sont accrochés au pouvoir, il est de notre responsabilité à nous de ne pas leur laisser faire n'importe quoi, surtout en dehors d'un mandat comme ça. Je ne sais pas si le ministre le réalise mais toutes les décisions prises par ce gouvernement depuis le 15 novembre 1980, date limite d'un mandat ordinaire et normal, sont des décisions qui engagent le prochain gouvernement. Il me semble que le moins qu'on pourrait demander, la moindre décence qu'on pourrait demander à ce gouvernement, ce serait de laisser le prochain gouvernement s'engager lui-même, parce qu'il est évident que l'actuel gouvernement, dès qu'il aura le courage d'inviter la population à aller aux urnes, sera défait.

Nous avons la responsabilité, sachant que c'est nous qui allons former le prochain gouvernement, de ne pas laisser passer n'importe quoi, parce que c'est nous qui allons avoir à répondre devant la population des deniers publics engagés par l'actuel gouvernement. C'est tellement vrai qu'on peut prendre comme exemple d'autres secteurs où on voit que le gouvernement, depuis qu'il tente de se refaire une nouvelle

image, une nouvelle beauté, pour ne pas dire une nouvelle virginité, annonce des millions et des millions de dollars en investissements. Dans la plupart des cas, les annonces sont faites maintenant pour des dépenses qu'ils n'ont pas les moyens de faire maintenant, donc, des dépenses à faire plus tard.

M. le Président, cela s'appelle hypothéquer l'avenir, cela s'appelle engager l'avenir, cela s'appelle endetter la population actuelle, mais également endetter les générations futures. On sait que la population actuelle a, par son droit de vote normal, voté pour ce gouvernement en 1976, mais quand elle aura une autre chance elle va voter pour un autre gouvernement. La population actuelle aura un jour, j'imagine, le pouvoir de voter encore une fois. Même les générations futures, celles qui ne sont pas nées, qu'on est en train d'endetter, il me semble qu'on devrait attendre qu'elles soient nées, pour demander leur permission avant de les endetter. Le gouvernement n'a même pas cette décence ici.

Ce sont des annonces pour cinq ans à l'avance, six ans à l'avance, imaginez-vous, M. le Président, ils annoncent des ponts, des si, des ça, ils se promènent de ce temps-là, parce que vous avez dû remarquer, que l'Opposition est obligée de rester en Chambre. On est obligé d'être là, parce qu'on nous a fait siéger cette semaine jusqu'à 2 h 30 du matin, avec ce ministre qu'on aime bien, et jusqu'à tout près de 5 heures, un autre matin.

M. Bérubé: Je vous rends d'ailleurs cet amour, totalement.

M. Samson: Bien sûr, c'est le grand amour, n'est-ce-pas?

Mais, un autre matin, jusqu'à 5 heures, ça dépasse l'amour, par exemple!

M. Bérubé: En général, c'est l'amour.

M. Samson: Si ce n'est pas l'amour fou, à cette heure-là, c'est l'amour fatiguant. Mais on est obligé de rester ici. Pendant ce temps-là, M. le Président, les ministres de ce gouvernement - vous remarquerez que le matin, il en manque pas mal, à 10 heures, quand on vient à la période des questions -se promènent dant tout le Québec, parce qu'ils sont assez nombreux pour garder le quorum. Il faut en garder pour encourager le ministre qui doit être découragé, et je le comprends, et ils en ont assez pour en envoyer se promener dans la province et faire de la propagande.

M. le Président, je n'ai rien contre le fait que le Parti québécois fasse de la propagande, c'est son droit, on ne lui enlèvera pas ce droit, sauf que là on est en période de session intensive, on est vers la fin d'une session où on nous oblige à siéger du matin jusqu'au soir, tard, M. le Président; on passe le rouleau à vapeur que le Parti québécois a tellement dénoncé quand il était dans l'Opposition. Mais pendant ce temps-là, ces messieurs, qui nous obligent à passer presque des nuits blanches, se promènent en faisant de la propagande. Il y en a un qui est parti pour la Belgique, il doit aller à Paris, il y en a un autre qui est parti après-midi. Ils sont toujours partis en vacances eux autres, mais nous, il faut rester là. Cela s'appelle de l'irresponsabilité gouvernementale. C'est dans un tel contexte qu'on voudrait nous passer toutes sortes de sapins, pour ne pas dire des épinettes. Je pense qu'on ne peut pas accepter ce genre de choses-là.

Je me rappelle avoir entendu une réflexion, sur la rue, je pense que c'est mercredi matin, si je me rappelle bien, alors que je revenais à l'Assemblée. On avait ajourné vers cinq heures du matin et les postes de radio parlaient de ça M. Tout-le-Monde, quelqu'un s'est adressé à moi pour me dire: Quelles sortes de folies est-ce qu'ils font au Parlement, de ce temps-là? En pleine nuit...

M. Bérubé: Vous n'aviez qu'à...

M. Samson: ... durant le mois de septembre, ils n'ont pas siégé...

M. Bérubé: Les gens n'avaient qu'à les écouter, ils ont été les seuls à parler.

M. Samson: ... durant le mois d'octobre ils n'ont pas siégé, ils n'ont pas siégé durant le mois d'octobre, ils n'ont pas siégé au mois d'août, ils n'ont pas siégé au mois de juillet, ils n'ont pas siégé au mois de janvier l'an dernier et tout à coup, à la veille des Fêtes, voilà que le PQ se découvre un amour parlementaire extraordinaire, ils siègent toute la nuit.

Même les journalistes n'ont pas le temps de fournir, de ce temps-là; l'autre nuit il n'y avait pas de journalistes à la galerie de la presse, vous savez ça? Ils sont allés se coucher et je ne les blâme pas à part ça. Mais là, ils reprennent le journal des Débats, ils reprennent ce qui, techniquement, leur est disponible, ils vont informer la population. Mais il se trouve que l'expérience de ce genre de choses-là que nous avons vécue fait que c'est vers le 15 ou le 20 janvier que la population va savoir que mardi soir dernier on a siégé jusqu'à cinq heures du matin sur un projet de loi selon lequel le gouvernement réclame $120,000,000 on ne sait pas trop pourquoi encore. Pourtant, ces gens-là qui ne seront informés que vers la fin de janvier paient des taxes tout le temps, même en période des Fêtes, et de ce temps-là ils paient pas mal de taxe de vente parce qu'il se vend pas mal de choses pour les Fêtes.

Or, c'est le contexte qui ne se prête pas à ce genre de choses-là. Pourquoi n'a-ton pas amené ça plus tôt, premièrement? Il me semble que ce n'est pas le temps qui manquait. Si ce gouvernement-là avait des idées, il me semble qu'il pourrait prévoir trois mois à l'avance. Il nous parle de planification pour des années d'avance quand c'est le temps de faire des promesses, mais quand c'est le temps de passer à des projets concrets, il n'est même pas capable de voir trois mois d'avance, M. le Président. Pourquoi n'a-t-on pas pensé à apporter ce projet de loi-là au mois d'octobre? Pourquoi n'a-t-on pas pensé à faire siéger la Chambre, comme convenu, au mois d'octobre? Mais non, ça arrive juste avant les Fêtes et là ça presse. On vient de découvrir que ça presse. Par-dessus le marché, j'en viens au point qui nous a fait présenter la motion, au moment où il veut absolument nous faire adopter ça rapidement et où ça presse, il est en train de changer totalement la philosophie de la vérification des comptes.

Dans la loi existante, parce qu'au moment où l'on se parle, aussi longtemps que cette loi que nous étudions ne sera pas adoptée en troisième lecture, dûment votée avec les amendements, promulguée, sanctionnée, on est encore sous l'ancienne loi, sous la loi que j'appelle la loi actuelle. Or, la loi actuelle dit que les comptes de la société sont vérifiés par le Vérificateur général une fois l'an et, en outre, chaque fois que le décrète le gouvernement.

Ce n'est pas le Parti libéral aujourd'hui qui invente ça, c'est dans la loi. Mais le gouvernement veut profiter de la circonstance, du fait qu'on est bousculé vers la fin de la session, du fait que les gens ont l'esprit un peu ailleurs. On sait que la fête de Noël viendra bientôt; les gens ne suivent pas tellement les débats. Il y a d'autres sujets dans l'air qui retiennent l'attention aussi, de sorte que cela passe un peu inaperçu dans l'opinion publique. Pourquoi le gouvernement profite-t-il de cette période pour présenter cette loi et, en plus, modifier fondamentalement la philosophie de base de la vérification, c'est-à-dire de la surveillance de la dépense des deniers publics que l'on demande à cette Assemblée nationale?

Si le ministre veut dépenser son argent à lui, on ne dira pas un mot. On va lui laisser pleine et entière liberté de le dépenser et on va lui laisser pleine et entière liberté de faire vérifier ses comptes personnels par qui il voudra. Cela ne nous regarde pas. Il pourra faire tout ce qu'il voudra là-dedans.

Mais cela s'adonne que la Société québécoise d'exploration minière, SOQUEM, n'appartient pas au ministre. Cette société, étant une société d'État, appartient à la population et ce sont des deniers publics fournis par la population qui vont être dépensés. Je ne veux pas dire qu'ils seront mal dépensés, M. le Président. On ne veut pas imputer de motifs à la société. Mais, toute saine gestion des deniers publics doit passer par une saine vérification. Je sais que dans l'entreprise privée ils sont capables de faire de la saine vérification aussi. Je ne veux pas prétendre que la vérification qui pourrait être faite par d'autres bureaux pourrait être saine ou malsaine. Je ne peux pas prétendre cela, au contraire. Il reste que celui qui est concerné, celui qui a le mandat de vérifier en notre nom, au nom de l'Assemblée nationale et au nom de la population, c'est le Vérificateur général. À celui-là, nous avons donné, par une loi, le maximum possible de liberté et d'indépendance. L'Assemblée nationale a pris des précautions comme on doit en prendre quand il s'agit de garantir l'indépendance de la magistrature. C'est aussi sérieux que cela, M. le Président. On sait que la magistrature se doit d'évoluer en toute indépendance. C'est pour cela qu'à l'Assemblée nationale, quand il nous est venu, à quelques reprises, des projets de loi où il fallait discuter des émoluments des juges, des plans de retraite et des choses comme cela. Chaque fois, M. le Président, nous, du Parti libéral, nous avons traité de ces choses d'une façon sérieuse, objective, en tout respect pour la magistrature. Mais je me rappelle - et c'est pour cela que je n'accepte pas les petites insinuations qui viennent de mes bons amis d'en face - les avoir entendus faire ce qu'on appelle de l'obstruction systématique, même sur des questions aussi sérieuses que les émoluments et les salaires des magistrats. C'était directement aller à l'encontre de l'indépendance de la magistrature. Et cela a duré des jours dans un cas que je me rappelle très bien, M. le Président. Ce sont nos amis d'en face, qui tentent de nous faire la leçon aujourd'hui, qui ont fait ces choses-là. (17 h 30)

Je dis que ce n'est pas pour rien que l'Assemblée nationale a nommé un Vérificateur général. Si ce gouvernement est pour remettre en cause les fonctions du Vérificateur général en lui enlevant des mandats, cela dénote - parce que, quand on enlève un mandat à quelqu'un, M. le Président, il faut bien se le rappeler - un manque de confiance, surtout quand la personne concernée s'en est toujours, à notre point de vue, très bien acquittée. Cela dénote, de la part de l'actuel gouvernement, un manque de confiance.

Quand le premier ministre a enlevé des mandats à un ou deux ministres, M. le Président, cela n'a été perçu par personne comme un abus de confiance du premier ministre envers ses ministres, quand il les a retournés sur les banquettes arrière. Tout le monde a dit - et avec raison - il y a un

manque de confiance. C'est la même chose ici, M. le Président, quand il s'agit du Vérificateur général, c'est exactement la même chose.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda. Je regrette, votre temps est écoulé. Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Samson: M. le Président, en vertu de l'article 94, je crois, l'un de nous a un droit de parole qui peut aller jusqu'à une heure sur une motion de fond. C'est une motion de fond qu'on fait là. Mes collègues n'ont pas parlé plus que les 20 minutes régulières, de sorte que je pense que j'ai un droit de parole d'une heure. C'est la raison pour laquelle je continuais.

Vous allez reconnaître comme moi, M. le Président, que c'est un changement de philosophie...

Le Président (M. Desbiens): Je comprends donc que vous parlez au nom du parti...

M. Samson: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): ...sur la motion.

M. Samson: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): D'accord, vous avez la parole.

M. Samson: Vous êtes bien aimable.

M. Bérubé: Veuillez noter qu'il parle sur la motion, n'est-ce pas?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, si je le fais avec autant de pertinence, c'est que je regarde presque toujours mon honorable ami d'en face, le ministre de l'Énergie et des Ressources!

Je disais donc que nous faisons face à un changement radical de philosophie de la part du gouvernement et c'est un signe de son manque de confiance envers des personnes qui, en quelque sorte, personnifient une institution. Le Vérificateur général, c'est une institution. C'est comme le Protecteur du citoyen; c'est une institution. C'est comme le président de l'Assemblée nationale; c'est presque un Dieu en trois personnes, M. le Président. C'est le président et les deux vice-présidents qui forment, en fait, la présidence; c'est une institution.

Quand un gouvernement n'a plus confiance en la personne qui représente l'institution, il se doit d'avoir le courage de le dire clairement. Alors, je ne voudrais pas interpréter le geste que pose actuellement le gouvernement comme étant une motion de blâme à l'endroit de l'institution, celle du Vérificateur général. Mais, même si moi, je ne veux pas le faire, si le gouvernement continue à se comporter de telle façon, il va semer un doute sérieux. Je pense qu'un gouvernement ne doit pas se livrer à de telles choses. Nous croyons honnêtement et sincèrement que l'article 24 de l'actuelle loi doit demeurer telle qu'il est. C'est la raison pour laquelle, à moins qu'on ne nous fasse la démonstration, sans équivoque, d'un besoin de modification à cet article, on n'est pas disposé à voter pour le changement qui nous est proposé.

Mais qu'est-ce que nous avons comme parlementaires, en tant qu'outils, lorsqu'il y a un doute qui est semé? Nous avons l'outil généralement reconnu, acceptable et accepté de demander à la personne représentant l'institution concernée de venir nous éclairer davantage.

Le point de vue du ministre - je veux bien prendre sa parole; d'ailleurs, le règlement m'y oblige - demeure - je ne veux pas lui imputer de motifs indignes, au contraire - quand même un point de vue qui pourrait être entaché de partisanerie parce que c'est un homme politique qui représente un parti, donc, qui est partisan. Son point de vue découle du point de vue du Conseil des ministres qui, lui, est issu d'un parti qui, comme vous le savez, tient de temps en temps un conseil national où des motions de blâme ou des choses qui ressemblent à ça... Je ne dirais peut-être pas des motions de blâme officielles, mais officieuses dont on entend parler souvent. Il reste que le gouvernement est partisan. On ne peut pas dire qu'on n'est pas partisan nous non plus, le Parti libéral a le droit de l'être également.

M. Bérubé: Nous n'oserions certainement pas accuser l'Opposition libérale de... Non, absolument pas.

M. Samson: Mais le Vérificateur général...

M. Bérubé: L'amour que nous portons à cette Opposition est telle que, surtout à quatre heures du matin, jamais...

M. Samson: ... n'est pas partisan. Il est au-dessus de tout ça. C'est là la grande différence.

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Energie et des Ressources, sur

une question de règlement.

M. Bérubé: Le député d'Outremont ne suit pas son collègue et je pense qu'il devrait... Je pense que le député de Rouyn-Noranda fait une intervention capitale et je constate que le député d'Outremont est totalement distrait. Il lit un rapport, ce qui me semble d'ailleurs beaucoup plus intéressant que ce que dit le député de Rouyn-Noranda, mais, enfin, il faudrait quand même qu'il manifeste à l'égard de son collègue un respect minimal et qu'il le supporte encore quelque temps.

M. Fortier: Question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Outremont, sur une question de règlement.

M. Fortier: Je voudrais dire ceci: Le député de Matane n'a aucune raison de critiquer ma conduite, pour plusieurs raisons. La première c'est que j'écoute d'une oreille. D'un autre côté, nous avons discuté tous les arguments mis de l'avant par mes collègues pendant plusieurs demi-heures et je sais pertinemment les arguments qui sont avancés par mon collègue de gauche. Pour cette raison, je me permets, pour gagner du temps et ne pas faire d'obstruction systématique, d'étudier des documents qui vont être ceux que nous allons discuter lors du prochain projet de loi. C'est pour gagner du temps que je me permets d'étudier les documents que le ministre nous a donnés la semaine dernière.

M. Bérubé: Question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, sur une question de règlement.

M. Ciaccia: ... d'autres interventions à faire, M. le ministre?

M. Bérubé: Je pense qu'il est indéniable que le député d'Outremont manifeste un désir de faire progresser la législation qui est tout à son honneur. Il faut l'en louanger. Cependant, je pense qu'il faudrait lui faire prendre conscience qu'on ne pourra peut-être jamais se rendre au projet de loi qu'il est en train d'étudier, au rythme où on avance.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rouyn-Noranda.

M. le député de Lotbinière, sur une question de règlement.

M. Biron: J'ai entendu avec beaucoup de plaisir le député d'Outremont nous dire cette semaine combien il était efficace dans les décisions, combien les ingénieurs prenaient des décisions rapidement et que ça fonctionnait. Puis-je lui suggérer de suggérer au député de Rouyn-Noranda une façon de prendre une décision rapidement et de fonctionner pour qu'on en arrive finalement à une solution?

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: J'aimerais répondre à la question...

M. Bérubé:...

M. Fortier: Question de règlement sûrement. Il est malheureux que la langue française ne contienne qu'une description pour le mot "efficacité". Ceux qui ont l'habitude de la langue anglaise savent qu'il y a deux mots en anglais, soit "efficiency" et "effectiveness". Quand j'ai parlé d'efficacité, je parlais plutôt en termes d'"effectiveness" que d'efficacité au sens mathématique du terme.

M. Rancourt: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-François, sur une question de règlement je suppose?

M. Rancourt: Imaginez s'il fallait perdre du temps avec des mots supplémentaires...

Le Président (M. Desbiens): Messieurs... M. Bérubé: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Energie et des Ressources, il ne faudrait pas abuser des questions de règlement. Vous avez la parole.

M. Bérubé: Abuser des questions de règlement, vous avez raison. Deuxièmement, le député d'Outremont et moi-même, de même que nos collègues, devrions effectivement retourner à des travaux plus sérieux, c'est-à-dire à nos lectures, et j'apprécierais que vous repassiez la parole au député de Rouyn-Noranda.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de ...

M. Ciaccia: M. le Président, j'espère...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mont-Royal. Chacun va avoir eu sa question de règlement.

M. Ciaccia: ... que le temps qui a été pris pour les questions de règlement ne sera

pas déduit sur le temps que mon collègue...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rouyn-Noranda vous avez la parole.

M. Samson: II n'y a rien de mieux qu'un ami pour venir nous aider. M. le Président, pour donner satisfaction au ministre, je voudrais, à l'instar de mes collègues, lui suggérer d'adopter cette motion qui a été présentée, de sorte que nous allons pouvoir, par la suite, faire notre travail de façon normale comme parlementaires et aussi défendre au point de vue du public les positions qu'on aura à prendre, parce qu'on les aura prises en toute connaissance de cause. Cela va aider le ministre, M. le Président. C'est de cette façon qu'on veut l'aider.

Il arrive parfois qu'il faille protéger quelqu'un contre lui-même. Généralement ce ne sont pas des ministres qu'on protège contre eux-mêmes, mais dans le cas présent ça va être un ministre. Que voulez-vous, les personnes qu'on protège contre elles-mêmes parfois peuvent avoir été ministres un jour.

Je continue donc en disant que nous tenons à cette rencontre avec le Vérificateur général pour les motifs qu'il n'est pas...

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, sur une question de règlement.

M. Bérubé: Pour la première fois le député de Rouyn-Noranda est pertinent. Pourriez-vous le rappeler à l'ordre, s'il vous plaît?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je me retiendrai parce que j'avais presque envie de vous dire: Regardez-lui pas les pieds pour le soigner, ça ne m'a pas l'air d'être là qu'il a mal! De toute façon, on dit que c'est un changement de philosophie majeur. Un changement de philosophie majeur on ne fait pas ça sans avoir des raisons valables et des raisons qu'on est capable de défendre. Ce gouvernement n'est pas capable de défendre son point de vue présentement. Il est tellement incapable de défendre son point de vue que les députés qui sont devant moi n'ont pris la parole sur cet amendement que pour la forme. Ils n'ont pas d'argument pour défendre leur point de vue; c'est pour ça qu'ils n'ont soulevé que de petites questions de règlement comme ça, pour tenter d'embêter l'Opposition, pour tenter de nous enlever notre droit de parole, pour tenter d'empêcher qu'on n'éclaire l'opinion publique. Ils n'ont pas d'argumentation, M. le Président.

Je dis que ce changement de philosophie, dans la question de la vérification des livres de la société d'État, alors que dans le passé c'était strictement le Vérificateur général, coïncide drôlement avec le changement d'orientation de la société que l'on retrouve, si je ne m'abuse, à l'article 1 qui modifie l'article 3 où il est dit que maintenant la société a pour objet "l'exploration minière par toutes méthodes; la recherche, la mise en valeur, l'exploitation et la transformation de substances minérales. À ces fins, la société peut, conformément à la loi, s'associer ou conclure des accords avec toute personne ou société. Dans la réalisation de ses objets, la société doit avoir un objectif de rentabilité." Cela change, ça, ce n'est pas ce qu'il y avait dans l'autre loi. C'est un changement d'orientation. Ce que je trouve drôle et difficile à expliquer à la population, c'est qu'en même temps qu'on voit ce changement d'orientation, on a un changement de philosophie quant à la vérification des comptes. Pourquoi? Est-ce qu'on peut répondre, de l'autre côté de la table, à cette question? Est-ce qu'on peut nous donner une vraie bonne réponse à ça? Pourquoi? Qu'est-ce qui se cache en dessous de ça? Nous ne le savons pas. J'espère qu'eux le savent, mais en tout cas nous, on ne peut pas le savoir, on n'est pas dans le secret des dieux. (17 h 45)

Ce changement de la philosophie de la vérification des comptes, comme par hasard, arrive en même temps qu'on nous demande $36,000,000. Je trouve ça curieux. Le jour où on nous demande de l'argent, qu'on dise: Celui que la loi obligeait à vérifier les comptes, celui qui est nommé par l'Assemblée nationale, aux deux tiers, celui qui a la confiance de l'Assemblée nationale, celui qui est le protecteur du public, à partir du jour où on vous demande de l'argent, je trouve cela curieux qu'on ne veuille pas que ce soit toujours lui qui vérifie après. M. le Président, qu'on réponde à cette question. On n'a pas répondu à cette question. Curieuse coïncidence encore, M. le Président, le jour où on nous demande de changer de philosophie, le jour où le gouvernement voudrait se donner le pouvoir, par un amendement qu'il a lui-même proposé - ça sera dit pour la forme, pour ne pas trop faire peur à personne - à l'article 22, le Vérificateur général pourra continuer, mais le gouvernement pourra... M. le Président, ce n'est pas à la demande du Vérificateur général, comme c'était dans le premier article qui nous était présenté, c'est encore pire que ça, c'est maintenant le gouvernement qui pourra choisir un autre vérificateur.

M. le Président, cela ne se fait pas, parce que les crédits qui sont demandés à l'Assemblée nationale, c'est par l'Assemblée nationale qu'ils sont votés. Le fonds consolidé où on va prendre $36,000,000, c'est devant l'Assemblée Nationale que ça revient une fois par année, quand on étudie les crédits. Donc, si c'est l'Assemblée nationale qui est souveraine en ces matières de crédits pourquoi veut-on passer par-dessus l'Assemblée nationale quand il s'agit de savoir qui va vérifier de quelle façon on dépense cet agent. Tel que rédigé, il n'y a rien qui nous garantisse, de ce côté - quand je dis de ce côté, pour les fins du journal des Débats, c'est quand je regarde le ministre - dans la loi actuelle telle que proposée et dans les amendements tels que proposés par le ministre, que le ministre n'aura pas de ces envies de changer de vérificateur une fois par année. Si un ne fait pas l'affaire, à un moment donné, vous savez, on donne au ministre tellement de pouvoirs dans cette loi-là; pouvoir de directives, pouvoir de décision, pouvoir de faire ci, pouvoir de faire ça et on empêche la société de faire telle chose sans l'accord du ministre et sans l'accord du gouvernement. Je me demande - parce qu'il n'y a rien qui me garantit le contraire - si ce n'est pas parce qu'on tente, du côté gouvernemental, de jouer avec ça. Il ne s'agit peut-être pas d'aller jusqu'à l'intimidation, je ne dirais pas ça, je ne voudrais pas imputer ce genre de motif, M. le Président, mais ce serait quand même assez intimidant pour une firme de vérificateurs de se voir retirer le mandat au bout d'un an et de le voir confier à un autre. Sans vouloir imputer de motifs, ça pourrait arriver, parce que la loi ne l'empêche pas.

Je trouve ça curieux, M. le Président, qu'au moment où on nous demande de donner un "chèque en blanc" au gouvernement pour la vérification des dépenses des deniers publics cela coïncide avec le fait que dorénavant, en vertu de l'actuelle loi - c'est-à-dire en vertu de la future loi, parce qu'elle n'est pas encore adoptée, M. le Président, pas tout à fait - il y aura la notion - imaginez-vous - de conflit d'intérêts introduite dans cette loi, notion de conflit d'intérêts. Ce gouvernement donne des directives à ses ministres pour ne pas qu'ils soient en conflit d'intérêts, ce gouvernement donne des directives à à peu près tout le monde autour de lui, dans la fonction publique, par exemple, pour ne pas qu'ils soient en conflit d'intérêts. Il y a même une directive qui est sortie il y a deux semaines, qui n'est peut-être pas encore adoptée, mais c'est un projet de directive qui a été publié dans le journal Le Soleil, à savoir que ce gouvernement considère comme conflit d'intérêts le fait qu'un fonctionnaire qui travaille pour le gouvernement puisse avoir un autre emploi ailleurs, le soir. Il considère ça comme un conflit, parce que selon la philosophie de ce gouvernement, d'après le projet de directive que j'ai vu dans le journal Le Soleil, le deuxième emploi pourrait venir en conflit avec le premier emploi sur le plan de la productivité.

Vous voyez, M. le Président, comment ce gouvernement est chatouilleux quand il s'agit de conflits d'intérêts pour les travailleurs, pour ses employés, pour ses fonctionnaires, même jusqu'au bas de l'échelle, celui qui gagne le moins cher. Et pourtant, quand on arrive avec une loi comme ça où on nous demande $36,000,000 d'un coup sec, là, on introduit la notion de conflit d'intérêts parce qu'il paraît que c'est bon. Il paraît que si on n'a pas de conflit d'intérêts on ne pourra pas administrer ça comme il faut parce qu'on n'aura pas de gens assez expérimentés.

Je répondrai au ministre, dans des circonstances comme ça, que pour avoir un bon ministre, il faudrait qu'il soit en conflit d'intérêts tout le temps. Pourquoi pas? Si c'est bon pour la société d'État, c'est bon pour le gouvernement. Si on prétend que le fait de ne pas admettre de conflit d'intérêts ça ne permet pas de compétence, je dirai que, comme ce gouvernement-là n'accepte pas les conflits d'intérêts chez les ministres, donc, ça veut dire que le ministre est incompétent. C'est l'un ou c'est l'autre, mais qu'on se fasse une idée.

C'est curieux quand même que cela arrive en même temps qu'on veut empêcher le Vérificateur général de se mettre le nez dans les comptes. Si on soulève des questions de principe maintenant, c'est parce qu'il y a une autre loi qu'on aura peut-être un jour l'occasion de discuter, si le ministre veut bien comprendre. S'il ne comprend pas, ça va prendre plus de temps, ça ne nous fait rien, on n'est pas pressé. Mais s'il veut comprendre, on discutera peut-être un jour l'autre loi. On sait que dans une autre loi il y a un article qui ressemble à celui-là. C'est pourquoi c'est maintenant qu'il faut mettre les freins, comme dirait le ministre des Transports. Dans le cas du ministre on pourrait lui dire: Attachez votre ceinture parce que c'est dangereux pour vous.

Une voix: En amiante.

M. Samson: En amiante, oui, des freins d'amiante.

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président...

M. Samson: D'amiante non nationalisé, de préférence, il est meilleur que l'autre.

Le Président (M. Desbiens): M. le

ministre de l'Énergie et des Ressources, sur une question de règlement.

M. Bérubé: La dissipation éhontée des députés de l'Opposition libérale est telle que nous sommes absolument incapables, de notre côté, de pouvoir suivre les propos du député de Rouyn-Noranda. Je veux bien reconnaître qu'ils sont décousus, incompréhensibles, mais, néanmoins, nous faisons un effort, puisque nous avons à travailler à ce projet de loi, et je pense que c'est extrêmement important que l'Opposition du Parti libéral écoute au moins son collègue. D'ailleurs j'en profite pour souhaiter la bienvenue au député de Montmagny-L'Islet qui, sur la fin de l'après-midi, j'imagine, après avoir vaqué à ses diverses occupations, nous honore de sa présence.

M. Samson: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Je remercie le ministre, je reconnais en lui la gentilhommerie qui a fait sa renommée, M. le Président. Je disais donc que je trouve absolument curieux que tout cela arrive au moment où, par exemple, à l'article 21 du projet de loi, le gouvernement se donne toutes sortes de pouvoirs. Imaginez-vous! Ils viennent de nous dire tantôt qu'il fallait qu'on puisse permettre un vérificateur autre - j'ai entendu le député de Lotbinière parler de l'entreprise privée - parce que cette société d'État avait une autonomie extraordinaire. C'est ça qu'on nous a dit tantôt. Regardons l'autonomie extraordinaire de la société d'État, à l'article 21 : "La société ne peut, sans l'autorisation préalable du gouvernement: a) conclure un contrat de participation relativement à la réalisation des objets visés à l'article 3 si ce contrat l'engage pour plus de cinq ans."

Autonomie exagérée. Elle est tellement autonome qu'elle ne peut, sans l'autorisation préalable du gouvernement, vendre des gîtes minéraux. Elle est tellement autonome qu'elle ne peut pas vendre de propriété minière ou des intérêts dans des biens autrement que par la vente à l'enchère ou par soumissions publiques. Elle est autonome cette société-là, le ministre l'a dit, mais elle est tellement autonome qu'elle ne peut pas contracter, sans avoir l'autorisation préalable du gouvernement, un emprunt qui porte à plus de $500,000 le total des sommes empruntées par elle et non encore remboursées. Elle est autonome cette société et c'est par rapport à cette autonomie que le ministre veut que le Vérificateur général cesse de se mettre le nez dedans. Il veut que c'en soit d'autres, parce que c'est maintenant une compagnie autonome. Comme le dirait le député de Lotbinière, c'est l'encouragement de l'entreprise privée à l'extrême. Cette compagnie est tellement autonome qu'elle ne peut, sans l'autorisation préalable - remarquez bien "préalable" -"acquérir ou détenir des actions ou des biens d'une entreprise dans une proportion suffisante pour lui en assurer le contrôle". C'est une autonomie extraordinaire! Je n'en reviens pas. On continue; plus loin, on dit que cette société est tellement autonome qu'elle ne peut, sans l'autorisation préalable du gouvernement, "adopter des règlements concernant l'exercice de ses pouvoirs et sa régie interne". Il y a là une autonomie qui nous dépasse.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Samson: C'est en vertu de cette autonomie que le ministre nous a dit qu'il fallait absolument que le Vérificateur général du Québec, celui qui est nommé par les deux tiers de l'Assemblée nationale, soit en dehors de cela le plus souvent possible.

M. Bérubé: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Â l'ordre! M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, sur une question de règlement.

M. Samson: C'est donc pourquoi, M. le Président, je vous dis...

M. Bérubé: Oui, M. le Président, mon chronomètre très précis m'indique qu'il est 18 heures, zéro minute et zéro seconde et que, effectivement, le temps alloué à cette commission et au discours du député de Rouyn-Noranda a essentiellement atteint sa fin. D'ailleurs, cela peut être confirmé par votre montre qui est sans doute une montre d'ingénieur très précise, aussi précise que la mienne. Par conséquent, M. le Président, je pense qu'il y aurait lieu de demander l'ajournement du débat.

Le Président (M. Desbiens): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 57)

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