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Version finale

31e législature, 6e session
(5 novembre 1980 au 12 mars 1981)

Le vendredi 27 février 1981 - Vol. 23 N° 55

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Plan d'équipement et de développement d'Hydro-Québec pour la décennie 1981-1990


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Bonjour! La commission parlementaire de l'énergie et des ressources est à nouveau réunie aux fins d'entendre les personnes ou organismes qui veulent faire des représentations relativement au plan d'équipement et de développement 1981-1990 de la société Hydro-Québec.

Les membres de cette commission sont: M. Bérubé (Matane), M. Biron (Lotbinière), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Desbiens (Dubuc), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Fortier (Outremont), M. Grégoire (Frontenac), M. Perron (Duplessis) et M. Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont: M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Mercier (Berthier), M. Michaud (Laprairie), M. Rancourt (Saint-François) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Le rapporteur de cette commission est toujours M. Denis Perron, de Duplessis.

Les mémoires que nous entendrons aujourd'hui sont ceux de Trans-Québec et Maritimes, la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain pour dépôt seulement, de l'Office de protection du consommateur, du Conseil régional de l'environnement de l'Est du Québec, pour dépôt seulement, du Conseil régional de développement de l'Est du Québec et de la ville de Matagami. Aux gens qui sont ici présents, nous tenons à rappeler que les règles du jeu, c'est toujours dans l'enveloppe d'une heure, plus ou moins; les gens qui présentent des mémoires doivent utiliser environ 20 minutes au maximum et, de chaque côté de cette table, de la même façon, 20 minutes du côté du gouvernement et, 20 minutes du côté de l'Opposition.

En espérant que cette journée sera profitable, j'invite donc M. John K. Archambault, de Trans-Québec et Maritimes, à bien vouloir nous présenter d'abord les membres qui l'accompagnent et ensuite à faire lecture de son mémoire. M. Archambault.

Gazoduc Trans-Québec et Maritimes Inc. M. Archambault (John K.): Merci, M. le Président. Je vous présente à ma gauche, donc à votre droite, M. André Lizotte, directeur général des communications à Trans-Québec et Maritimes, et à côté de lui, M. Marc Fortier, vice-président aux affaires juridiques et réglementaires à Trans-Québec et Maritimes. À ma droite, vous avez M. Jean Richard, membre associé du groupe d'ingénierie Lalonde, Girouard et Letendre.

M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, plutôt que de lire le mémoire in extenso, je préfère lire un résumé des points saillants du mémoire. Je vais d'abord vous remercier de cette occasion de commenter le programme d'équipement et d'investissement d'Hydro-Québec.

Le Québec se trouve à l'aube des années quatre-vingt dépendant à 65% du marché du pétrole, mais sans pour autant être un prisonnier à vie de sa dépendance du marché international, mais plutôt, à notre point de vue, disposant d'options qui pourront sensiblement élargir sa marge d'autonomie et lui permettre d'atteindre un meilleur équilibre de son bilan énergétique.

Le but du mémoire que soumet la société Gazoduc Trans-Québec et Maritimes est justement de souligner le rôle du gaz naturel dans l'avenir québécois et de démontrer l'étroite compatibilité qui liera le gaz et l'électricité dans l'avenir.

Loin de gêner le développement des ressources hydrauliques du Québec, la venue du gaz naturel permet au contraire une planification plus rationnelle des investisssements énergétiques, plus de souplesse pour éviter une demande de pointe trop contraignante et un éventail de choix plus large et certainement plus avantageux pour les consommateurs dans les secteurs industriel, commercial et résidentiel.

En fait, non seulement le gaz et l'électricité sont des sources d'énergie qui se complètent, mais elles doivent être considérées comme faisant toutes deux partie intégrante d'un programme énergétique québécois. C'est dans ce contexte que j'aimerais d'abord discuter de TQ et M et du prolongement du gazoduc pancanadien au Québec.

Trans-Québec et Maritimes fut créée en avril 1980, le produit de la fusion des projets des sociétés TransCanada Pipelines et de Q et M Pipelines, filiale de Novan, qui toutes deux entendaient prolonger le gazoduc de l'Alberta au-delà de Montréal.

Depuis 1958, après le parachèvement du gazoduc canadien jusqu'à Montréal, la région métropolitaine était, à peu de choses près, la seule grande région du Québec à avoir accès au gaz naturel de l'Ouest canadien. (10 h 15)

II faut se rappeler qu'il n'était pas non plus immédiatement avantageux pour le Québec d'accroître son approvisionnement en gaz naturel à cette époque en raison de la faiblesse des prix du pétrole sur les marchés internationaux et sa grande abondance.

Toutefois, depuis le quadruplement des prix du pétrole en 1973-1974, les gouvernements fédéral et provincial ont décidé de réduire le plus possible la consommation du pétrole, plus particulièrement du pétrole importé, en lui substituant d'autres formes d'énergie. Le gaz naturel constitue un atout privilégié pour la réalisation de cet objectif puisque le Canada en dispose en abondance. D'ailleurs, dès 1978, dans son livre blanc sur l'énergie, le gouvernement du Québec avait parlé de doubler la pénétration du gaz naturel sur le marché québécois soit de la faire de 6% à 12%.

C'est dans ce contexte, M. le Président, que, l'an dernier, l'Office national de l'énergie autorisait la première étape du prolongement du gazoduc. Cette étape s'effectuera sur une distance de près de 1000 milles au Québec et rendra le gaz naturel accessible à un bon nombre de régions, soit la région située dans l'axe Montréal-Québec, les Cantons de l'Est, les Bois - Francs, la Beauce, Charlevoix et le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il s'agit d'un investissement de près de $500,000, excluant, bien sûr, des investissements semblables nécessaires à la construction des réseaux de distribution qui seront raccordés au nouveau gazoduc. Viendront s'ajouter les investissements pour la conversion d'équipement. On prévoit que le réseau transportera, en 1990, 136,5 milliards de pieds cubes additionnels de gaz naturel au Québec, en dehors des territoires déjà sous franchise, l'équivalent de près de $900,000,000 de pétrole importé au prix actuel. Ce projet est possible, d'abord, parce qu'il reflète une volonté politique claire d'accroître la pénétration du gaz au Québec et, par conséquent, de donner plus de flexibilité aux Québécois dans leur choix de consommation.

Le livre blanc sur l'énergie, comme je le disais plus tôt, visait un taux de pénétration de gaz naturel passant de 6% à 12%. Plus tard, en janvier 1980, devant l'Office national de l'énergie, le gouvernement du Québec déclarait que la pénétration du gaz devrait facilement atteindre entre 15% et 16% d'ici 1990. Un peu plus tard, toujours en 1980, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources disait, dans une entrevue qu'il avait accordée au Devoir, que la part du gaz naturel dans le bilan énergétique pourrait peut-être atteindre 25% en 1990.

Cette volonté politique exprimée à plusieurs reprises par le qouvernement provincial a été renforcée en octobre dernier par le programme énergétique national, lequel prévoit de nombreuses incitations à l'utilisation du gaz naturel. Entre autres, le prix du gaz naturel sera fixé à environ 67% du prix du pétrole sur le marché canadien et la zone tarifaire de l'Est inclura le Québec. Deuxièmement, le gouvernement fédéral subventionnera à 50% jusqu'à concurrence de $800 les coûts de conversion des appareils de chauffage.

Troisièmement, les distributeurs de gaz naturel auront accès à des subsides fédéraux supplémentaires pour combler le solde des frais de conversion ou pour rentabiliser des des projets additionnels. Finalement, la transformation des raffineries existantes pour réduire la production du mazout lourd favorisera la pénétration de gaz naturel.

Vient s'ajouter à ces objectifs de la politique énergétique du Québec et du gouvernement fédéral, le fait de l'abondance du gaz naturel canadien. Contrairement à ce que semble laisser entendre Hydro-Québec dans son document intitulé Une stratégie pour la décennie 80, je cite: "Le Québec ne dispose pas de réserves de pétrole et ne peut compter que sur des apports limités de gaz naturel canadien," le Canada, nous le prétendons, dispose, au contraire, d'énormes réserves de gaz naturel. En 1979, l'Office national de l'énergie concluait son rapport sur les besoins et approvisionnements de gaz naturel en affirmant qu'il existait au pays un surplus de gaz naturel canadien d'environ 2 milliards de pieds cubes ou 2000 milliards, c'est-à-dire autrefois TCF.

Depuis quelques années, l'Office national de l'énergie ne cesse de réviser à la hausse les réserves de gaz naturel canadien, ce qui lui a même permis de consentir des exportations additionnelles de gaz vers les États-Unis. Cette année, l'Office national de l'énergie poursuit son enquête sur les besoins et approvisionnements canadiens en énergie. Tous les intervenants sont de l'avis que les réserves de gaz naturel conventionnelles sont suffisantes pour satisfaire à la croissance de la demande intérieure - résultant incidemment du prolongement du gazoduc au Québec et dans les provinces de l'Atlantique, ainsi qu'à l'île de Vancouver - et aux exportations prévues. On anticipe les réserves additionnelles provenant de l'ÎIe-des-Sables et des îles de l'Arctique qui viendront encore gonfler ces prévisions.

Devant cette conjugaison d'une forte volonté politique et de l'abondance des réserves de gaz naturel canadien, le scénario de pénétration du gaz de 6 à 12% que

propose Hydro-Québec nous paraît trop faible. Ce scénario ne semble pas tenir compte des nouvelles incitations dont bénéficie le gaz et suppose un manque à pénétrer, à notre avis, qui est trop grand. De plus, il ne déplacerait qu'environ l'équivalent de 45,000 barils de pétrole par jour, ainsi que l'équivalent de 500 MWh d'électricité. D'autre part, toutes nos études nous rapprochent d'un seuil de pénétration de l'ordre de 16%, lequel déplacerait l'équivalent de 85,000 barils de pétrole par jour ou 40% du pétrole que le Québec achète présentement sur le marché international. De plus, TQM pourra remplacer environ 1000 MWh d'électricité, soit l'équivalent de LG 1 ou d'un projet de turbines à gaz décrit dans le programme d'équipement. C'est-à-dire, à toutes fins utiles, qu'il y a 1000 MWh qui, en 1990, n'auront pas besoin d'être produits.

J'ajouterai que si le gaz devient disponible dans des régions plus nombreuses, il pourra atteindre un taux de pénétration de 18% d'ici 1990 et même de 18% à 22% d'ici 1995. Il faut se rappeler que le taux de pénétration dans la région de l'agglomération montréalaise a déjà dépassé le seuil de 18%.

À 18% de seuil de pénétration, le gaz naturel permet de déplacer 115,000 barils de pétrole par jour en 1990, soit l'équivalent de 52,5% du pétrole qu'achète aujourd'hui le Québec sur les marchés internationaux. Le déplacement d'électricité correspond à environ 1200 MWh.

Avec ces taux de pénétration, nos études indiquent qu'en 1990, le secteur industriel représenterait 60% des ventes de gaz naturel. Le gaz représente un avantage certain pour plusieurs industries. Lorsqu'un procédé nécessite une flamme propre et non contaminante et que le contrôle de la température compte pour une part importante du procédé, il y a là un vaste champ d'application pour le gaz, d'autant plus que le coût du gaz est avantageux et qu'il offre des attraits évidents au niveau de la manutention du stockage. Qu'il suffise de rappeler qu'on connaît au gaz naturel plus de 26,000 usages industriels. Il est déjà connu que certaines industries attendent de connaître la disponibilité du gaz dans certaines régions avant d'arrêter leur décision de localisation.

Dans le secteur résidentiel, qui représenterait environ 20% des ventes de gaz, nous sommes convaincus que l'avantage que présente le gaz au niveau des coûts de chauffage et de la sécurité sera irrésistible pour de nombreux Québécois. Nous visons surtout le marché des conversions des domiciles, où nous estimons que le coût de capital de conversion du pétrole à l'électricité est presque le double du coût de conversion du pétrole au gaz naturel. La venue du gaz dans le secteur résidentiel offre des avantages importants à Hydro-

Québec.

D'ici 1995, un taux de pénétration de 18% à 22% implique un déplacement d'environ 140,000 barils de pétrole. Aux prix actuels, nous parlons donc, pour la balance des paiements, d'une économie de $1,9 milliards par année. Ceci correspond à 63,9% du pétrole que le Québec achète sur le marché international. Le déplacement de l'électricité serait alors d'environ 1700 MWh. Hydro-Québec, comme le témoigne son programme d'investissements, anticipe une très forte demande de pointe dans les années quatre-vingt. On prévoit même un projet de turbines au gaz pour aider à satisfaire à cette demande. Nos études sur le coût marginal du chauffage démontrent qu'à ce moment-ci le coût marginal de l'électricité pour le chauffage, tenant compte de l'efficacité thermique, serait, par milliard de BTU, plus de trois fois plus élevé que le prix du gaz naturel. Or, dans le secteur résidentiel, le gaz naturel pourrait prendre à sa charge, en 1990, une partie de la demande de pointe, soit 120 MWh et 16,000 barils de pétrole par jour, de mazout léger no 2.

En l'absence du gaz naturel, ces mêmes 16,000 barils seraient éventuellement, tôt ou tard, devenus de l'électricité de pointe. En conséquence, une des contributions significatives de la venue de TQM est la prise en charge d'environ 1000 MWh d'énergie de pointe. Cette contribution aiderait le Québec en général dans la mesure où un investissement prévu serait non nécessaire à la communauté et où les fonds seraient alors disponibles pour des fins d'industrialisation plus productive.

Pour le secteur commercial comme pour le secteur résidentiel, l'avantage "coût et sécurité" nous laisse croire qu'il représentera 20% des ventes de gaz.

En conclusion, je termine cet exposé sur une note évidemment plus optimiste quant à la pénétration du gaz naturel qu'Hydro-Québec prévoit dans son plan d'investissement et d'installation. Nos prévisions reposent sur des hypothèses déjà entérinées par l'Office national de l'énergie, sur l'abondance du gaz naturel canadien ainsi que sur les comparaisons des coûts du gaz et des autres sources d'énergie. Nous reconnaissons la volonté politique du Québec de rééquilibrer son bilan énergétique et sommes convaincus que le gaz peut y jouer un rôle appréciable. Dans l'immédiat, c'est-à-dire 1981-1990, un taux de pénétration de 15% à 16% nous semble beaucoup plus réaliste. Dans un avenir à plus long terme, 1990 à 1995, nous envisageons un créneau de 18% à 22%, ce qui englobe des réseaux de transport additionnels, soit par gazoduc, soit par navires méthaniers.

En plus de l'attrait du gaz naturel pour réduire la dépendance du Québec à l'égard

du pétrole, son apport sur le plan sectoriel technique est incontestable. Le gaz est sans doute un facteur d'industrialisation. De plus, en déplaçant une partie de la demande de pétrole et d'électricité, le gaz naturel évite la création d'un fardeau de pointes trop important pour Hydro-Québec. Le gaz et l'électricité deviendront donc, au cours de la prochaine décennie, beaucoup plus étroitement liés, tous deux agissant ensemble comme instruments de transformation de la situation énergétique du Québec. Une stratégie efficace de changement doit prévoir que le gaz naturel et l'électricité seront développés en tandem pour maximiser leur compatibilité, favoriser les consommateurs dans tous les secteurs et faire bénéficier les Québécois de la façon la plus optimale possible des options industrielles qui s'offrent à eux.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Oui.

M. Archambault: Merci, M. le Président. Avant de procéder aux questions, j'aimerais apporter certaines corrections au mémoire. Il n'y en a que cinq, mais certaines sont assez importantes. Si vous me donnez les trois ou quatre minutes nécessaires, j'aimerais le faire à ce moment-ci.

Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez y aller, M. Archambault. (10 h 30)

M. Archambault: Merci. À la page 3, dans la citation, la deuxième ligne avant la fin, il y a le chiffre "164 pétajoules" et cela devrait se lire "264". À la page 11, nous commençons à discuter du scénario de pénétration de 15%. Dans le deuxième paragraphe, on lit la phrase qui suit: "En se basant sur nos études de marché et des secteurs susceptibles de se convertir au gaz naturel, nous assumons dans le marché des conversions du secteur industriel un déplacement de 100% du mazout lourd no 6; dans le secteur commercial, 75% du mazout léger no 2 et 25% de déplacement de l'électricité; dans le secteur résidentiel, 12% de déplacement de l'électricité et 88% de déplacement du pétrole." Ici, effectivement, ce qu'on veut dire, c'est qu'on estime qu'on pourra capturer 100% du marché industriel potentiel existant. Pour ce qui est du commercial, on estime, lorsqu'on a développé les quantités de gaz naturel qui pourront pénétrer ce marché, que 75% de ces quantités sont présentement ou auraient, dans l'avenir, été au pétrole. De même, 25% sont présentement ou auraient été à l'électricité.

Pour le résidentiel, - et c'est là qu'on a peut-être un peu d'équivoque - nous prévoyons la même chose. On prévoit une certaine quantité de gaz naturel, 20% de la quantité totale, qui ira dans le marché résidentiel. Or, quant à nous, on prétend que de ce 20%, 88% de cette quantité de gaz naturel résidentiel est pris du pétrole soit actuel ou futur. Quant au 12% pour l'électricité, nous prétendons que c'est 12% qui aurait été à l'électricité, n'eut été de la présence du gaz naturel.

À la page 13, - permettez-moi de lire les premières lignes et vous apporter les corrections nécessaires - nous disons: Les études qu'a entreprises TQM permettent de conclure qu'en 1990, un taux de pénétration du gaz naturel aux environs de 16% déplacerait l'équivalent de 85,000 barils de pétrole par jour. On ajoute: En fait, à 16% de pénétration, si on convertit le gaz naturel en unités d'équivalence d'électricité, le projet TQM représente environ 1000 MWh. Or, ce n'est pas exprimé correctement.

La deuxième phrase devrait se lire: En plus, - plutôt qu'en fait - à 16% de pénétration, si on convertit le gaz naturel en unités d'équivalence d'électricité, le projet TQM - au lieu de "représente" - contribue à déplacer environ 1000 MWh d'électricité - il faudrait ajouter "d'électricité" - soit l'équivalent approximatif de... etc.

À la page 18, au troisième paragraphe, on y lit: II faut dire aussi qu'en plus de l'avantage coût, le gaz naturel offre des attraits au niveau de la manutention et du stockage (l'électricité, par exemple, ne peut être stockée) ce qui, par le fait même, permet une plus grande flexibilité dans la planification de la production.

Ici, on essaie de comparer le gaz naturel à l'électricité. Or, ce n'est pas le cas. C'est le gaz naturel comme l'électricité ne peut être stocké, mais c'est le pétrole qu'on doit stocker, mais en fait, le gaz et l'électricité sur ce plan ont le même avantage.

Finalement, un petit ajout, à la page 21. Dans le secteur commercial, vous avez un tableau: Source d'énergie, secteur commercial. Les chiffres que vous y voyez représentent des pourcentages et ce n'est pas noté.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Archambault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Permettez-moi de témoigner mon appréciation pour l'acceptation par la société TQM de venir soumettre un mémoire à cette commission parlementaire. Ce mémoire est d'autant plus important que la pénétration du gaz a fait l'objet de nos réflexions continues, soit par les distributeurs de gaz qui ont senti le besoin d'insister sur le fait qu'il ne fallait

pas encourager une pénétration trop rapide de l'électricité immédiatement, ce qui pourrait bloquer les marchés du gaz naturel lorsque celui-ci sera disponible dans trois ou quatre ans.

On a souligné également à quel point le gaz naturel pouvait représenter un potentiel extrêmement intéressant sur le plan énergétique et qui pourrait retarder par exemple la pénétration d'énergie plus dure, comme l'énergie nucléaire par exemple, donc extensionner notre parc hydroélectrique.

On a souligné également - et cela vient d'Hydro-Québec - l'impact de la construction du gazoduc, de tout le réseau de distribution, sur l'industrie de la construction au Québec, au cours des années qui viennent. J'aimerais essentiellement essayer de répondre avec vous à ces questions.

Prenons d'abord les réserves de gaz. Très fréquemment, des prévisions de réserves de gaz ont été pessimistes. En 1977, on a même parlé d'une pénurie de gaz naturel au Canada. Hydro-Québec nous parle de réserves d'une trentaine d'années, vingt à trente ans. Vous semblez beaucoup plus optimiste.

Un élément de problématique qui m'a toujours inquiété, c'est si nous décidons de favoriser l'utilisation de l'électricité dans des secteurs où l'électricité est particulièrement efficace, je pense à la mécanique et autres éléments que le chauffage, on se dit: C'est bien. Mais si, d'ici quinze ou vingt ans, tout le monde se chauffe au gaz et que, dans vingt ans, on n'a plus de gaz et qu'il faut revenir à l'électricité, nous ne serons guère mieux. Est-ce que ce n'est pas préférable, à ce moment-là, de se dépêcher de faire pénétrer l'électricité, et on verra bien dans quinze ou vingt ans?

Vous semblez beaucoup plus optimiste quant aux réserves de gaz. Tout récemment, je lisais une plaquette, "Energy Squeeze" où, au contraire, on a pris une attitude très pessimiste concernant le gaz. On donne trente ans, mais on dit: II n'y a pas vraiment de nouvelles découvertes de champs gaziers. Il y a des champs secondaires résultant de l'accroissement du prix qui nous permettent effectivement de mettre en valeur des réserves que nous connaissions mais qui n'étaient pas économiques. Mais on dit qu'il n'y a pas vraiment de nouvelles découvertes de gaz au Canada, sauf peut-être dans l'Arctique, dans le Nord. Mais là, on n'est pas trop certain des volumes en cause.

Et pourtant, elle est capitale, puisque si on nous parle d'abondance de gaz pour les 50 prochaines années, à ce moment-là, il n'y a aucun problème de miser sur le gaz, pour le Québec.

J'aimerais avoir, de votre part, votre impression, votre état de l'estimation des réserves que vous faites au Canada, non seulement des réserves actuelles, mais également de ce que vous prévoyez comme évolution des réserves ou de la vie des réserves, avec l'accroissement de la consommation. On sait, par exemple, qu'à chaque année de consommation, les réserves ne baissent pas nécessairement d'une année, puisqu'il y a de nouvelles découvertes et, par conséquent, on peut même avoir un accroissement des réserves si le taux de découverte est supérieur à la consommation.

J'aimerais voir comment vous évaluez présentement la vitesse à laquelle on développe de nouvelles réserves avec l'accroissement de la consommation et souhaiterais que vous essayiez de nous faire des projections sur les disponibilités de gaz naturel pour le Québec dans les années qui viennent.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: M. Bérubé, je vais vous répondre en vous donnant simplement des indices de tendance plutôt qu'une projection absolue et technique.

Relevant le dernier point que vous avez mentionné, c'est très clair, depuis quelques années, que le taux de découverte et de mise en valeur de gaz naturel dans l'Ouest canadien est supérieur au taux de production, c'est-à-dire qu'il y a des augmentations des réserves, et cela depuis deux ou trois ans.

Il y a un grand nombre de producteurs, dans l'Ouest canadien, et ils sont très variés. C'est-à-dire que vous avez d'immenses entreprises qui sont peut-être un peu plus conservatrices, vous avez des moyennes entreprises qui sont très agressives, il y a des producteurs qui s'intéressent à des formations géologiques particulières, alors que d'autre semblent moins s'y intéresser.

Où on voit l'optimisme de tout le monde, c'est vraiment un peu dans le tableau qui est en annexe de notre mémoire, l'appendice 2. Par exemple, vous y voyez des chiffres de réserves ultimes de l'ordre de 200, 214, 208, 190, et là ce sont des réserves conventionnelles. On ne voyait pas des chiffres de cet ordre, il y a quatre ou cinq ans; les personnes qui osaient avancer des chiffres de cet ordre étaient généralement perçues comme... enfin, leur crédibilité n'était pas à la hauteur de la masse. Alors que ce qu'on voit maintenant, ce sont des chiffres qui sont tous à peu près de l'ordre de 200 à 220. Et c'est énorme.

Donc, qu'on parle à Dome, à Gulf, à IPAC, à tous ces gens, on voit à peu près la même chose. Et la tendance est de beaucoup plus accrue que celle d'il y a trois ou quatre ans. Si on regarde les régions frontalières, il y a énormément d'exploration. Vous savez sans doute que l'actionnaire principal de Trans-Canada, qui est à 50% dans TQM, est Dome Petroleum. Dome Petroleum est très

active dans le nord et, effectivement, il y a eu des découvertes importantes. Cela coûte très cher. Il y a la question: À quel moment? Il faut quand même le sortir. Si on investit en 1980 des centaines de millions de dollars pour une production en l'an 2000, c'est peut-être moins intéressant que si on prévoit la production dans un horizon de dix ans. Alors, vous avez quand même un facteur comme cela qui joue. Mais, à très long terme... Moi, je suis personnellement absolument convaincu que 20 ans, 30 ans, c'est très clair. Or, mondialement, il n'y a aucune région qui peut vous offrir cela, nulle part, compte tenu de la consommation intérieure du Canada et des réserves qui sont très grandes.

En plus, si on veut être un peu futuriste, à défaut de réserves de méthane, c'est-à-dire de gaz à l'état naturel, c'est-à-dire la distillation de fossiles il y a des millions d'années, qu'arriverait-il si vraiment on en manquait ou qu'on voyait poindre le jour où il n'y en aurait plus? Nous avons des réserves de charbon immenses au Canada, et encore dans l'Ouest canadien. Or, le méthane peut être produit à même le charbon. Il y a des usines dans le monde qui produisent du méthane à partir du charbon. C'est la gazéification du charbon. Donc, vous avez une réserve qui n'est pas à l'état de méthane, en ce moment, mais qui est à l'état de carbone, que vous pouvez traiter pour obtenir du méthane, soit du gaz naturel, et vous servir des infrastructures. (10 h 45)

De plus, il y a toutes les énergies nouvelles, genre biomasse et tout; effectivement, au point de vue de l'énergie transportable, c'est soit du méthane ou de l'hydrogène. Encore une fois, on se sert des canalisations et de l'infrastructure existantes. Donc, compte tenu de la tendance des réserves dans le bassin sédimentaire conventionnel et de l'unanimité de ceux qui sont présents, compte tenu des réserves de l'Arctique, compte tenu de l'existence du charbon, compte tenu de l'existence de la biomasse, compte tenu du fait qu'on dit souvent que l'énergie de l'an 2000, de la deuxième moitié du siècle prochain, sera peut-être l'hydrogène, les infrastructures de canalisations sont nécessaires. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Bérubé: Si je prends votre appendice 2, si je suppose 200 exajoules de réserves ultimes et 2,67 exajoules de production, cela voudrait dire 75 ans. On joue donc dans cet horizon. J'ai calculé le chiffre rapidement; je sais que le député de Mont-Royal va certainement utiliser son calculateur, il est beaucoup plus précis que le mien, mais c'est à peu près cela.

M. Archambault: Vous parlez des réserves ultimes.

M. Bérubé: Je prends le 200 que vous m'avez indiqué tantôt dans votre exposé, je l'ai divisé par 2,67 et, à moins d'avoir fait une erreur de "pitonnage", comme on dit en termes vulgaires, c'est toujours le même chiffre: 75 ans de réserves conventionnelles.

M. Archambault: C'est cela.

M. Bérubé: Donc, on peut parler vraiment d'abondance de disponibilité de gaz naturel pour un horizon qui peut facilement faire 30 ou 40 ans.

M. Archambault: C'est cela. Au taux actuel de consommation.

M. Bérubé: Au taux actuel de consommation.

M. Archambault: M. Bérubé, ce que vous devez nécessairement prévoir, c'est que les producteurs, qui, évidemment, dépensent des millions de dollars et risquent de l'argent, vont vouloir avoir des marchés pour ce gaz naturel avant 75 ans. Je peux vous assurer de cela, mais c'est une autre histoire.

M. Bérubé: On laissera l'Office national de l'énergie trancher ce délicat débat. La deuxième question qui me vient à l'esprit porte sur l'interaction entre électricité et qaz, qui s'est trouvée au centre de nos préoccupations depuis trois jours. On a même eu des positions un peu contradictoires. Par exemple, Hydro-Québec, en réponse à une question portant sur les moyens d'éviter la construction de turbines à gaz pour répondre aux besoins de pointe - turbine à gaz voulant surtout dire turbine à kérosène, puisqu'en fait on m'a appris qu'elles ne fonctionnaient pas au gaz naturel - a suggéré soit la télécommande des chauffe-eau, mais a mis peut-être plus d'insistance encore sur l'installation de systèmes hybrides de chauffage au Québec, c'est-à-dire que les maisons pourraient être équipées de chauffage électrique avec un appoint au gaz naturel en période de pointe. C'était une façon élégante pour Hydro-Québec d'éliminer la pointe. J'aimerais avoir votre réaction là-dessus.

J'ai également un autre mémoire, celui de Gaz Métropolitain, qui nous a dit, par contre, que ce serait très dangereux de faire appel aux systèmes de chauffage hybrides pour différentes raisons: cela ralentirait la conversion des usagers du pétrole et provoquerait des hausses de coût considérables pour les distributeurs de gaz. On s'y est opposé. Dans votre exposé, à plusieurs reprises, vous avez souligné que la pénétration du gaz naturel pourrait permettre

à Hydro-Québec d'épargner plusieurs milliers de mégawatts, au moins 1000 mW en puissance de pointe. Comment conciliez-vous, pour l'instant, ces trois déclarations un peu contradictoires? D'une part, Hydro-Québec nous dit: Effectivement, aller au gaz, c'est peut-être une bonne façon de minimiser la pointe. Les distributeurs de gaz nous répondent: Attention, ce serait, au contraire, très nocif pour nous si on ne faisait que de la pointe. Vous soulignez quand même que la pénétration du gaz naturel va nous permettre d'épargner la puissance de pointe à HydroQuébec.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: M. Bérubé, on parle de points de vue très différents. Hydro-Québec - je n'ai pas le texte de sa réponse d'une façon générale, entrevoit son programme d'équipement comme étant une volonté de faire quelque chose. Elle se place du point de vue qu'effectivement cette électricité sera produite, qu'Hydro-Québec se doit de répondre aux besoins de chauffage, et qu'en conséquence, il y a un problème de pointe. Comment résoudre votre problème de pointe? C'est très simple. Faites la télécommande. Évidemment, cela s'est fait dans le passé. Je ne crois pas que ce soit à Montréal, mais j'ai lu qu'on l'avait fait à Toronto. Il y avait un tarif spécial, en fait, et il y avait un déclencheur des chauffe-eau entre 17 heures et 20 heures.

Donc, le point de vue d'Hydro-Québec est le suivant. Notre vocation est effectivement la production de toute l'électricité, de tout l'équipement qu'on prévoit. Ensuite, si cela crée des problèmes de pointe, on va réparer cela. Alors, on va mettre du gaz d'appoint ou on va mettre des télécommandes pour l'eau chaude.

Notre point de vue, c'est le contraire, dans le sens qu'on entrevoit nous-mêmes une vocation de prendre une part importante du bilan énergétique; on parle d'un créneau de 16% pour 1990 et d'un créneau plus élevé pour 1995. C'est là notre vocation. En voyant les effets de notre vocation, les effets bénéfiques sur l'industrialisation, sur le déplacement du pétrole, etc., on voit également un effet bénéfique sur HydroQuébec parce que, effectivement, en ayant des réseaux de distribution relativement bien équilibrés, on va aller chercher une demande de pointe qui, autrement, aurait été à Hydro-Québec. Dans un sens, on part du même point de vue et ils ne sont conciliables que dans le résultat.

M. Bérubé: Ce qui nous amène aux problèmes de tarification qui ont fait l'objet, certainement à notre première séance avec les titres spectaculaires... à votre opinion, quelle devrait être l'interaction entre gaz et électricité d'un point de vue, par exemple, tarifaire?

La position d'Hydro-Québec semble exprimer qu'il n'y a pas vraiment d'interaction entre les deux, que, de toute façon, Hydro-Québec envisage de détenir 45% du chauffage dans les années quatre-vingt-dix et que les projections de pénétration du gaz naturel, même en prenant des optimistes de 20%, 22% ou 23% pour la même période 1990-1995, font en sorte que l'on pourrait a priori supposer que les deux sont simplement en concurrence avec le pétrole, mais qu'ils n'interagissent pas l'un avec l'autre... C'est-à-dire qu'il y a suffisamment de remplacement de pétrole possible pour que vous puissiez chacun chercher à prendre votre part du marché, que vous ne vous nuirez pas l'un à l'autre parce que, de toute façon, vous avez une quantité infinie de pétrole à remplacer et que vous pouvez rentrer dans le marché allègrement sans vous préoccuper l'un de l'autre. Ce qui nous permettrait d'avoir une structure tarifaire tout à fait autonome pour l'électricité basée uniquement sur les coûts de production et une structure tarifaire pour le gaz naturel qui dépendrait essentiellement de la décision du tsar énergétique à Ottawa qui décidera quel prix il veut imposer aux provinces productrices.

Donc, la question que je vous pose est la suivante: Doit-on se préoccuper de tarifs concurrentiels entre le gaz et l'électricité si nous voulons atteindre les objectifs que vous visez, compte tenu qu'il semble que les deux vont pénétrer au détriment du pétrole et que la concurrence se fait avec le pétrole et non entre les deux autres sources?

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: Sûrement, du point de vue du consommateur, à moins qu'il ne soit contraint par règlement ou qu'il ne soit contraint par un procédé quelconque de prendre une source d'énergie comparée à l'autre, le prix qu'il va payer pour son énergie va être une chose très importante pour son choix. Le prix qu'on paie pour l'énergie, on appelle ça des tarifs, enfin, que ce soit industriel, que ce soit commercial ou résidentiel. Donc, ce n'est pas un sujet à ignorer. Par contre, où et comment doivent se faire les interventions, si elles doivent avoir lieu?

Pour le moment, d'après nos données et nos projections, il ne semble pas qu'il y ait lieu d'intervenir, c'est-à-dire de créer une chambre de compensation provinciale qui égaliserait tous les tarifs ou quelque chose comme ça. Ce n'est pas nécessaire pour le moment parce qu'il n'y a aucun doute que la consommation d'énergie électrique au Québec

va aller en s'accroissant, que la consommation de gaz va aussi aller en s'accroissant et, d'après les données que nous possédons, les prix restent concurrentiels.

Pour le moment, ce qu'on voit, ça va, le marché, comme vous dites, est très grand, il y a du déplacement de pétrole et, pour le moment, il n'y a pas lieu d'intervenir. Mais là où, dans notre mémoire, en fait, nous parlons de planifier l'électricité, nous entendions ça dans un sens très large et, effectivement, une commission comme celle-ci est un outil de planification, mais je crois que le moment n'est pas arrivé d'intervenir au niveau des tarifs, ce n'est pas nécessaire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Merci, M. le Président. M. Archambault, j'aimerais vous féliciter tout d'abord pour votre mémoire, si bien présenté, si bien étoffé. On voit que Trans-Québec et Maritimes est dotée d'une direction qui se veut dynamique, d'une façon nécessaire et loyale. On doit vous en féliciter pour plusieurs raisons. C'est d'abord que le Québec a besoin de gaz. Nous croyons que le gaz est une forme d'énergie qui est nécessaire, non seulement pour subvenir à nos besoins, pour déplacer le pétrole, mais également pour développer notre industrie. Il y a un sujet que j'aimerais discuter avec vous, c'est celui de la pénétration du gaz en particulier dans le domaine du chauffage résidentiel.

Nous avons discuté de ce sujet avec Hydro-Québec et avec certaines compagnies de gaz et on a fait, je crois, une certaine unanimité que la pénétration du gaz dans ce secteur, à long terme, dépend de la pénétration du gaz à court terme.

L'objectif qu'on atteindra dans une très grande mesure en 1996 ou en l'an 2000 dépend très fortement de la pénétration dans le domaine résidentiel et la pénétration du gaz dans les années qui viennent et d'ici sûrement 1986. Pourquoi? Je peux résumer bien sommairement les raisons. Bien sûr, il y aura des augmentations de pétrole qui ont été annoncées par le gouvernement fédéral et, d'ailleurs, ces augmentations sont moindres que les prix internationaux malgré le fait que le ministre Bérubé s'était prononcé dans le passé en faveur des prix internationaux. Mais il reste que ces prix annoncés nous ont dit des augmentations et on sait d'avance que ces prix seront des prix minimaux pour plusieurs raisons.

C'est que l'industrie elle-même n'est pas tellement satisfaite de ces augmentations de prix. On prétend que ces augmentations ne permettront pas à l'industrie justement de poursuivre ses efforts d'exploration et de développement des puits de gaz dans l'Ouest. Par ailleurs, on pourrait penser qu'à la suite des négociations entre le fédéral et l'Alberta, ces négociations nous amèneraient justement à satisfaire les demandes de l'Alberta et de l'industrie quant au prix. Pour toutes ces raisons et parce que ces augmentations se feront sentir d'une façon accélérée dans les années qui viennent, 1981, 1982, 1983, 1984 et 1985, tout ça va créer des facteurs psychologiques pour pousser les individus, les citoyens du Québec à faire une conversion, qui pourrait se faire soit vers l'électricité, soit vers le gaz, mais si le gaz n'est pas disponible, la conversion se fera nécessairement vers l'électricité.

Par ailleurs, il y a des facteurs psychologiques qui jouent vis-à-vis des individus et non pas vis-à-vis de l'industrie. Pour ce qui est de l'industrie, je pense bien que l'industrie va faire un choix rationnel; quant aux individus, ils vont faire des choix basés en partie sur des facteurs psychologiques, que ce soit le secteur de l'utilisation du gaz, que ce soient des déclarations un peu irresponsables du ministre indiquant que l'Alberta pourrait fermer les vannes et faire en sorte que le Québec ne soit pas approvisionné en pétrole. Justement, des gens qui m'en ont parlé hier on cru que cela pourrait signifier que si M. Lougheed peut fermer le robinet qui nous approvisionne en pétrole, cela pourrait psychologiquement créer chez les citoyens du Québec une psychose dans le sens de dire: Peut-être que M. Lougheed pourrait également fermer les vannes pour ce qui concerne le gaz. (11 heures)

Pour toutes ces raisons, compte tenu de ces facteurs, j'aimerais que vous me confirmiez ce consensus qui, je crois, s'est révélé, justement, en ce sens que la pénétration du gaz dans le secteur du chauffage domestique se fera d'ici 1986 ou ne se fera pas du tout, ou se fera en partie du moins, mais pas autant que vous pouvez l'escompter dans vos prévisions à long terme.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: Pour répondre à votre question, je peux dire que cela ne se fera pas en 1986. Qu'est-ce qui va se faire en 1986? C'est difficile pour moi de répondre à cette question précise. Ce qui est très clair, évidemment, c'est que, dans le domaine de la conversion du chauffage résidentiel, la personne qui fait un choix en 1981 fera le choix entre l'électricité et le gaz. Vous avez raison. Essentiellement, on ne retourne pas au charbon, quoique je peux vous dire que, dans certaines régions, on ira probablement au chauffage au bois. Cela a déjà commencé.

Par exemple, la décision étant prise en 1981, le type convertit son système de chauffage. Il ne le convertira pas deux ans après à l'autre source. C'est certain. Ce que

le gaz ne peut pas avoir en 1981 et qui part à l'électricité, c'est parti à l'électricité. Si un propriétaire d'une maison, en 1981, à cause du climat social, la panique, etc., dit: Je ne me chauffe plus à l'huile, je change, et que le gaz n'est pas disponible, il va aller à l'électricité et le gaz ne l'aura jamais. Peut-être que dans toutes nos statistiques, ce gars allait se convertir en 1986. On ne l'aura pas. Il n'y a pas de doute, vous avez raison là-dessus. La quantification, c'est difficile à préciser.

M. Fortier: Si on s'entend là-dessus, j'imagine qu'on peut justement penser qu'Hydro-Québec fait ce raisonnement-là. C'est normal. Je crois que c'est tout à fait normal. Ce que vous avez dit sur cette question de prévisions, c'est en partie une question d'opinion, mais c'est aussi une question de résultats. Il s'agit d'escompter des résultats. Hydro-Québec étant dans le domaine de l'électricité, elle a escompté des résultats à la lumière de ses prévisions. Du fait qu'elle soit dans le domaine de l'électricité, c'est normal qu'elle pense à des prévisions qui favorisent l'électricité. C'est normal que l'industrie du gaz fasse des prévisions qui favorisent le gaz. Je crois que, finalement, le gouvernement doit essayer de voir clair dans ce débat. Mais si on veut poursuivre ce débat sur la pénétration du gaz dans le domaine du chauffage résidentiel, sans vouloir porter de jugement, je vais laisser cela à mon collègue de Mont-Royal -il a bien raison d'ailleurs de le faire parce que je ne voudrais pas commencer un débat sur les raisons qui ont fait que le gazoduc n'est pas encore construit. Je sais qu'avec raison, le député de Mont-Royal a soulevé plusieurs questions là-dessus, mais ce n'est pas le sujet que je veux évoquer maintenant. Je tiens pour acquis que nous sommes en retard déjà d'un an, et je ne veux pas discuter des raisons qui font que nous sommes déjà en retard d'un an. J'essaie d'extrapoler dans l'avenir. Il semblerait -corrigez-moi si j'ai tort - que le gazoduc serait construit jusqu'à Boisbriand à la fin de 1981. Compte tenu du fait que le distributeur n'est pas encore choisi et que, s'il était choisi prochainement, on pourrait se rendre à Trois-Rivières, en 1982, et probablement à Québec, en 1983, si on ajoute à ces dates justement la période de temps requise pour faire en sorte que les canalisations soient posées dans ces villes et dans d'autres villes, et si on extrapole, à partir de ces années, 1981, 1982 et 1983, vers d'autres villes de la province, on s'en va vers un calendrier qui est un peu pessimiste, justement, à la lumière de la discussion qu'on vient d'avoir. Je me demandais si vous pouviez confirmer ou infirmer que l'analyse que je fais est pessimiste, optimiste ou réaliste.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: Vous me parlez de notre échéancier de construction, mais le fond de votre question, c'est sur le résidentiel.

M. Fortier: Oui.

M. Archambault: Sur le résidentiel, je répète ce que je vous ai dit plus tôt: Celui qu'on ne convertit pas cette année, il ne changera pas. S'il est parti avec l'électricité, on ne l'aura plus. Il y a un impact, c'est clair, alors que ce n'est pas le cas pour l'industriel...

M. Fortier: D'accord.

M. Archambault: ...parce que l'industriel est capable d'attendre. Il est peut-être plus informé et le gaz naturel, pour l'industriel, joue un rôle peut-être plus important que le choix entre les deux énergies pour une résidence.

M. Fortier: Mais n'est-il pas vrai, si l'on veut discuter de l'industriel pour une seconde, qu'il existe dans le moment des surplus de mazout lourd et que ces surplus, jusqu'à ce qu'une usine de transformation soit construite à Montréal, sont vendus à des prix extrêmement bas? De fait, il y a une guerre des prix qui prévaut dans le moment au Québec et les raffineries vendent ces surplus de mazout lourd à des prix bien en deçà du prix du gaz. Ne croyez-vous pas qu'encore là, durant les prochaines années -peut-être que, lorsque l'usine viendra, ce sera différent - il va y avoir une guerre des prix qui pourrait handicaper votre prévision de pénétration dans le domaine industriel?

M. Archambault: L'existence de produits du raffinage par voie de mazout lourd est une contrainte, mais ce n'est pas une contrainte insurmontable. Déjà, lors des auditions devant l'Office national de l'énergie, nous avions présenté une étude très approfondie sur l'impact de nos prévisions sur les raffineries dans l'Est du Canada et on en était arrivé à la conclusion qu'avec le marché qu'on allait capter, il n'y avait pas de contrainte majeure. Il fallait en tenir compte, mais il pouvait y avoir une coexistence entre le gaz naturel et les raffineries telles qu'elles existaient et compte tenu des plans d'équipement des raffineries parce que certaines avaient déjà annoncé l'intention de se transformer quelque peu afin de produire moins de mazout lourd.

Depuis, évidemment, avec le plan énergétique national, on compte faire une raffinerie indépendante qui va traiter 100,000 barils de mazout lourd en surplus. Cela

devrait sensiblement alléger la contrainte. Je ne dis pas qu'il ne faut pas en tenir compte. Il va toujours y en avoir un peu, mais cela semble ne pas être l'obstacle qu'on entrevoyait il y a deux ans.

M. Fortier: Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais faire une remarque et il pourrait peut-être formuler un commentaire sur la remarque que je vais faire.

Hydro-Québec a établi ses prévisions. Vous établissez vos prévisions quant à la pénétration du gaz et vous ne semblez pas avoir les mêmes prédictions qu'Hydro-Québec. Ne pensez-vous pas qu'il serait normal qu'il y ait des discussions ou des rencontres ou même qu'on institutionnalise une certaine forme de dialogue entre les différents intervenants dans le domaine énergétique? C'est ma première question.

Deuxièmement - je les pose toutes les deux ensemble parce qu'on n'a pas tellement de temps - vous prévoyez dans un certain scénario une pénétration de 18% à 22% en 1995. À supposer que vous ayez raison et à supposer qu'Hydro-Québec adopte un plan d'installation d'équipement accéléré, pour combien de temps pensez-vous qu'Hydro-Québec pourrait continuer à faire des exportations vers les États-Unis? On pourrait peut-être avoir des contrats d'exportation à moyen terme.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: D'après ma connaissance générale, Hydro-Québec, dans les dernières années, n'a pas eu de difficultés majeures à trouver des marchés pour l'électricité qu'elle avait en trop, soit d'une façon saisonnière ou à peut-être un peu plus long terme.

J'imagine, compte tenu du fait que la population de l'État de New-York est aussi grande que la population du Canada en général, cela ne devrait pas poser de problème à l'avenir. Je vois très bien une continuation de cette politique d'Hyro-Québec, plutôt que de garder l'eau derrière le barrage, on va la faire couler tout simplement; qu'on exporte les surplus saisonniers. Voilà la réponse à votre deuxième question.

Quant à la première question, vous savez, ce qui est extraordinaire, c'est que notre siège social est à Montréal, dans l'ancien magasin de Dupuis Frères, qui s'appelle Les Atriums. Nous sommes aux cinquième et sixième étages. La planification d'Hydro-Québec est au quatrième étage, comme par hasard.

Nous n'avons vraiment pas eu de rencontres importantes, formelles et continues avec Hydro-Québec, sauf qu'on se voit dans les ascenceurs. Vous avez raison, il en faut des rencontres comme cela. Institutionnaliser, cela me fait un peu peur. On le mentionne dans notre mémoire, il faut le faire en tandem, c'est un outil de planification énergétique québécois. Le rôle de cette commission, c'est cela. On l'a l'institution. Mais je vois difficilement des rencontres institutionnalisées à tous les mois, avec caméras de télévision, etc. Je ne suis pas sûr que ce serait aussi productif que des rencontres informelles. Je favorise par contre, aller devant la commission ou des forums publics, pour rendre compte de nos points de vue qui seront toujours marginalement au moins différents.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gouin.

M. Tremblay: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais faire une remarque rapide à l'intention des gens de Q et M. La loi des combines défend aux entreprises de se rencontrer pour comploter contre les consommateurs, de sorte que si vous rencontrez les dirigeants d'Hydro-Québec, faites-le dans les ascenceurs, mais ne le faites pas dans des endroits publics, vous pourriez être poursuivis.

Sur la question du gaz, j'aimerais poser quelques questions rapides, compte tenu de notre contrainte de temps, aux représentants de Q et M. Ils ont eux-mêmes confirmé ce qu'Hydro-Québec nous avait dit, savoir que le gaz représentait des avantages importants pour l'industrie au Québec. Je concours avec eux sur ce point. Il y a de nombreuses industries pour lesquelles le gaz naturel est une source d'énergie de première qualité et qui peut facilement remplacer le mazout, le pétrole et même l'électricité.

Par contre, ce qui intéresse de nombreux Québécois, c'est la question du gaz naturel pour le résidentiel et pour le chauffage. Dans votre mémoire, vous nous dites que la conversion des systèmes de chauffage au pétrole vers le gaz naturel coûte la moitié moins ou presque la moitié moins que la conversion à l'électricité. Il est logique que les citoyens se demandent pourquoi leurs taxes, soit au niveau du Québec, soit au niveau d'Ottawa, devraient être utilisées pour subventionner la conversion au gaz et non pas pour subventionner la conversion à l'électricité.

Autrement dit, cette subvention de $800 qui a été annoncée par le gouvernement fédéral en faveur de la conversion des systèmes de chauffage, le fédéral n'ayant pas exclu l'électricité, alors que le gouvernement du Québec laisse entendre qu'il faudrait

exclure l'électricité de cette subvention, d'après vous, est-ce qu'il y a une logique économique à faire cette distinction? Vous avez mentionné la balance des paiements, mais l'argument de la balance des paiements vaut pour l'électricité; quant à l'argument du pouvoir d'achat, l'électricité est davantage produite ici que le gaz. Donc, même si c'est à l'intérieur du Canada et qu'il n'y a pas de problème de balance des paiements, il y a quand même une sortie de pouvoir d'achat lorsque nous consommons du gaz naturel. (11 h 15)

Je vous pose la question: Vous, quelle est votre argumentation pour que les taxes des citoyens soient utilisées pour donner une subvention de $800 à ceux qui convertissent leur système de chauffage vers le gaz naturel, mais non pas vers l'électricité?

Deuxième question, concernant le prix du gaz naturel. Il y a eu une déclaration qui a été faite devant cette commission et qui intrigue. Elle a été faite par Hydro-Québec, elle relayait une information en provenance d'Hydro-Ontario, que, d'ici 1983 ou même en 1983 - je pense que c'était l'année retenue -Hydro-Ontario, qui produit 30% de son énergie électrique à partir du nucléaire, serait en mesure de concurrencer par le prix, compte tenu du haut taux d'efficacité de l'énergie électrique, le gaz naturel. Or, si Hydro-Ontario est capable de concurrencer, à partir de ses coûts de production, le gaz naturel en 1983, pourquoi ne serait-ce pas le cas pour Hydro-Québec, qui produit à partir de l'hydroélectrique?

Sur cette question de prix, comme l'a dit le député d'Outremont, jusqu'à un certain point, et comme vous le dites vous-même à la page 15 de votre rapport, vous n'osez pas prédire l'évolution du prix du gaz par rapport aux autres sources d'énergie au-delà des huit ou dix prochaines années. Il est évident qu'un consommateur qui songe à changer son système de chauffage ne regarde pas seulement cinq ou dix ans devant lui, mais il regarde 20 ans, et quand on est un constructeur, on construit une maison pour 30, 40 ou 50 ans.

Comme les politiciens au Canada sont très intimement liés au prix du gaz et du pétrole, comme les politiciens du Québec, notamment le gouvernement du Québec, favorisent ouvertement que le prix du pétrole canadien rejoigne le prix international très rapidement, comme, d'autre part, le prix du gaz naturel est arrimé, accroché au prix du pétrole, est-ce que les citoyens n'ont pas raison de craindre un peu que le gaz naturel va connaître des hausses de prix - peut-être pas au cours des cinq prochaines années, mais au-delà - qui vont être rapides? Là, je pose une question aussi qui est un peu dure. Est-ce que les citoyens n'auraient pas lieu de craindre que le gaz naturel soit une sorte de trappe que les politiciens, grâce à des subventions immédiates, font pénétrer dans la consommation, mais qui se révélerait coûteuse dans dix ou quinze ans? Je suis certain que c'est à l'esprit des gens, cette question et elle devrait être à l'esprit de notre commission.

Troisième question, concernant le gazoduc dans lequel Q et M est très impliquée évidemment, l'enjeu économique pour le Québec est très important, parce qu'en ce qui concerne le pétrole, il est évident que nous sommes au bout des pipelines; nous sommes au bout de celui de l'Ouest, donc les coûts de transport font que nous payons notre pétrole plus cher qu'ailleurs. Nous avons le pipeline de Portland, qui nous amène le pétrole des pays de l'OPEP; C'est une source d'approvisionnement importée, donc non fiable. Il est évident que le pipeline pour le gaz est très important, le gazoduc pour nous est très important.

Essayons de savoir si, pour le gaz du Grand-Nord, ce pipeline va rentrer par Gros Cacouna au Québec, faisant du Québec une localisation à la tête du gazoduc ou s'il va entrer par un port en Nouvelle-Écosse. Là, j'aimerais demander aux représentants de Q et M, qui sollicitent l'appui du gouvernement du Québec et celui de la population du Québec pour leur produit, si ils favorisent, eux, ou s'ils sont prêts à favoriser ouvertement le port méthanier de Gros Cacouna et en faire une recommandation au gouvernement fédéral et à l'Office de l'énergie afin que, pour une fois, concernant au moins le gaz, le Québec ne soit pas défavorisé, surtout pour que notre industrialisation, comme vous l'avez mentionné, puisse en profiter. Nous avons des industries de l'acier au Québec, nous avons des industries de pétrochimie au Québec qui vont avoir besoin de gaz naturel et d'un gaz naturel au meilleur marché.

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: M. Tremblay, pour commencer par votre dernière question, soyez assuré que je comprends et que je sympathise avec votre point de vue. Le terminal méthanier n'est qu'une partie d'un projet de grande envergure qui est celui de liquéfier du gaz dans les îles de l'Arctique, et le transporter par navires méthaniers, des navires cryogéniques dans l'Est du Canada, à Gros-Cacouna ou Canso, parce que ce sont essentiellement les deux ports qui sont considérés. L'ensemble du projet s'appelle Le projet pilote de l'Arctique. TQM a pris comme politique de ne pas favoriser l'un ou l'autre des sites. On nous informe que les deux sites sont valables, c'est-à-dire que si on était à l'école, ils passeraient tous les deux. Ils sont tous les deux valables. TQM,

par contre, peut dire qu'on sera prêt à raccorder - évidemment, on n'est pas pour avoir une usine qui va gazéfier et personne pour raccorder - le pipeline à l'un ou l'autre des sites. Je conviens avec vous qu'avoir un approvisionnement de plus ou une source d'approvisionnement de plus sur son territoire est un avantage pour les ressortissants de ce territoire, mais je suis sûr que les gens en Nouvelle-Écosse vont dire la même chose et ils auront raison.

M. Tremblay: Sur le plan économique ou sur le plan politique?

M. Archambault: La décision, quant au choix du site, sera prise par l'Office national de l'énergie. J'étais à Gros Cacouna il y a un mois peut-être, et le seul conseil que je pouvais donner aux personnes qui étaient là, c'était: Faites valoir vos points de vue à l'Office national de l'énergie, parce que c'est là que cela va se décider.

M. Tremblay: En termes économiques, M. Archambault, est-ce que vous avez fait des calculs pour montrer que compte tenu des coûts de transport, compte tenu de la proximité des marchés, il y aurait un avantage pour une des deux localisations au plan économique, pas au plan politique?

M. Archambault: Non, on n'a pas de calculs.

M. Tremblay: Avez-vous des indications, des opinions?

M. Archambault: M. Tremblay, TQM est une filiale relativement autonome de ses parents qui sont TransCanada PipeLines et Nova. Le propriétaire de l'usine de regazéification, c'est TransCanada PipeLines, ce n'est pas TQM. On n'a pas fait ces calculs économiques.

M. Tremblay: Etes-vous au courant s'il y en a eu des calculs?

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne voudrais pas qu'on... Vous avez posé des questions. Je pense qu'il y a d'autres membres à la commission qui ont des questions à poser.

M. Archambault: Rapidement, sur votre première question, la question des $800 à savoir si cela devrait s'appliquer à l'électricité et non pas au gaz naturel, ou au gaz naturel seulement et non pas à l'électricité, ce n'est pas nous qui faisons cette politique. Selon mon intérêt étroit sectoriel et personnel, je pourrais vous dire: Non, ne le mettez qu'au gaz, c'est parfait. Ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est qu'il en coûte plus cher pour se convertir à l'électricité qu'au gaz naturel. Il y aurait peut-être là un argument pour dire: Si on est pour subventionner, il vaut mieux subventionner là, cela va coûter moins cher. D'accord?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Fontaine: Question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Je n'ai pas voulu intervenir tout à l'heure pour ne pas déranger le député de Gouin, mais il a repris mes paroles pour dire que j'avais suggéré que des sociétés complotent ensemble contre les consommateurs. Ce n'est pas cela du tout que j'ai dit. J'ai tout simplement demandé qu'on fasse des échanges de données afin de mieux établir des prévisions sur différents points de vue afin d'établir des possibilités dans l'avenir. Je n'ai pas suggéré d'autre chose que cela.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Mont-Royal.

M. Archambault: M. le Président, si vous permettez, c'est de cette façon que je l'ai compris également.

M. Ciaccia: M. Archambault, je me réfère à l'appendice 3 de votre document. Vous faites différents scénarios de pénétration de gaz naturel au Québec. Vous avez un scénario de pénétration, par exemple, à 22% et, à l'aide d'un tableau, vous démontrez que les produits pétroliers représenteront 44%, le gaz naturel, 22% et que la part de l'électricité pour l'année 1995 sera de 28,6% du bilan énergétique global du Québec.

Les représentants d'Hydro-Québec sont venus devant cette commission et ils nous ont donné des chiffres sensiblement différents des vôtres. Pour l'année 1996 -c'est à peu près le même temps - ils nous disent que l'électricité devrait atteindre 45%. Sur la question pétrolière, les chiffres sont presque les mêmes, ceux d'Hydro-Québec et les vôtres. Pour le gaz naturel, leur scénario est de 12%. La différence entre la part de l'électricité pour 1995 est assez considérable. Vous nous dites, dans votre scénario, qu'il y aura 28,6% et Hydro-Québec nous dit 45%. Aujourd'hui, comme vous le savez bien et, en 1978, c'était approximativement 26%.

Comment expliquer cette différence considérable? Je crois que cela ne s'explique que partiellement par l'augmentation de la pénétration du gaz naturel; même cela représente seulement 12% du bilan énergétique. Si vos chiffres sont exacts,

quelle serait l'implication pour le Québec, pour le gouvernement sur les investissements nécessaires à Hydro-Québec? Je présume que cela voudrait dire que le programme d'Hydro-Québec devrait être réduit considérablement, car je réfère aussi à votre affirmation ou suggestion à la page 24 où vous dites "qu'une stratégie efficace de changement doit prévoir que le gaz naturel et l'électricité seront développés en tandem". Est-ce que cela veut dire que le programme de $89 milliards d'Hydro-Québec serait réduit considérablement parce qu'on n'augmente que de 2%? Alors, ce serait un accroissement très léger. Dans quelle proportion, parce que vous avez fait des études, cet investissement d'Hydro-Québec serait-il réduit, si votre scénario est exact?

Le Président (M. Jolivet): M.

Archambault.

M. Archambault: M. Ciaccia, d'une façon générale, notre mémoire indique non seulement, si vous voulez, la volonté de poursuivre les développements énergétiques en tandem, mais également il y a, sous nos chiffres, beaucoup de place pour HydroQuébec. Quant à nous, avec un programme qui laisserait le gaz pénétrer de la façon dont on le prévoit, il reste encore énormément d'électricité à développer. Si vous regardez le scénario de pénétration de 22%, à l'appendice 3 dont vous m'avez parlé, la différence majeure entre ce que vous voyez ici et les chiffres qui ont été produits par Hydro-Québec, c'est que, dans notre cas, on inclut le secteur du transport alors qu'Hydro-Québec l'exclut. Si on excluait le secteur du transport, la part d'Hydro-Québec en 1995 passerait à 36,8% et ceci est comparable aux 45% dont vous parlez. Évidemment, il y a une différence, mais cela s'explique. L'énormité de la différence, c'est la question que le transport est inclus dans notre cas alors qu'il est exclu dans le cas d'Hydro-Québec.

M. Ciaccia: Oui, parce qu'à première vue la différence est trop considérable. Maintenant, cela se comprend un peu mieux. La différence, c'est la pénétration du gaz naturel. Alors, les chiffres d'Hydro-Québec et les vôtres semblent se rejoindre. (11 h 30)

Une autre courte question. Est-ce que vous avez fait des études de la différence en termes de réduction d'investissements pour des projets hydroélectriques si la part du gaz naturel était de 22% et celle d'Hydro-Québec était réduite de 45% à 38%?

M. Archambault: C'est-à-dire, dans notre mémoire, une centrale équivalant à LG1, que ce soit celle-là ou une autre, parce que le coût précis des investissements d'Hydro-Québec nous ne l'avons pas. Tout ce qu'on sait, c'est qu'il y a de la puissance installée qui ne sera pas nécessaire. Or, la puissance installée non nécessaire avec la venue du gaz dans notre créneau de 16% en 1990...

M. Ciaccia: Excusez. Je veux simplement comprendre. Est-ce que vous nous dites que réduire la part d'Hydro-Québec de 45% à 38% et augmenter la vôtre à 22%, cela représente seulement la différence de LG1?

M. Archambault: Non.

M. Ciaccia: Combien de LG1 pour réduire la part d'Hydro-Québec de 7% à 8% environ?

M. Archambault: Sur le scénario de 1995, je ne saurais vous dire maintenant. Sur le scénario de 1990 avec ce qu'on a décrit comme étant notre hypothèse de 16%, c'est l'équivalent de LG1.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Au nom des membres de la commission, je vous remercie. Je dois vous dire que votre document qui n'a pas été lu, mais, qui a été résumé, est toujours disponible à la bibliothèque de la Législature ainsi qu'au secrétariat des commissions pour toute personne qui voudrait l'avoir.

J'inviterais l'Office de la protection du consommateur, représenté par M. Rafic Nammour, à venir ici à l'avant. Pendant ce temps, je dois dire, pour les besoins du journal des Débats, que la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métropolitain a soumis un mémoire pour dépôt seulement et lui aussi sera disponible à la bibliothèque de La législature ainsi qu'au secrétariat des commissions. Quand M. Nammour sera ici à l'avant, je lui demanderai de présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous pouvez y aller, M. Nammour.

Office de la protection du consommateur

M. Nammour (Rafic): Je vous présente, à ma droite, Mme Jacqueline Ramoisy de la direction de la recherche de l'Office de la protection du consommateur et, à ma gauche, Mme Monique Lachance de la direction de la recherche également.

M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir bien voulu inviter l'Office de la protection du consommateur à venir exposer son point de vue devant la commission parlementaire de l'énergie et des ressources.

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous approcher votre micro, s'il vous plaît, pour

qu'on puisse mieux entendre? Vous n'avez qu'à l'approcher, il est déjà branché.

M. Mammour: L'office s'est naturellement empressé de saisir l'occasion qui lui était offerte pour faire valoir les intérêts des consommateurs dans ce premier débat public sur les orientations et les projets d'Hydro-Québec.

Les sommes qu'Hydro-Québec s'apprête à investir au cours de la décennie quatre-vingt sont impressionnantes. Elles illustrent de façon éloquente le dynamisme du secteur de l'énergie hydraulique au Québec et le rôle grandissant d'Hydro-Québec en matière d'approvisionnement énergétique pour les Québécois.

Néanmoins, l'impact socio-économique des ambitieux projets d'Hydro-Québec et des sommes qui y seront consacrées, particulièrement la question de la répartition des coûts, ne saurait être passé sous silence. Le document d'Hydro-Québec mentionne que l'autofinancement de ses investissements devra osciller autour de 30% au cours des cinq prochaines années et que cette proportion constitue "un minimum raisonnable, si l'on tient compte des possibilités d'emprunts prévus". Cet objectif de 30% à même les fonds de l'entreprise signifie-t-il pour le consommateur québécois des hausses de tarifs supérieures au rythme actuel? Dans quelle mesure ces hausses seront-elles marquées par les effets combinés des coûts croissants de l'équipement hydraulique et de l'éloignement géographique progressif entre centres de production et centres de consommation? Le Québécois moyen, profane en matière d'hydroélectricité peut d'autant moins y répondre que le document d'Hydro-Québec demeure étrangement silencieux sur la question de la tarification et des prix.

Or, ce sont bien les consommateurs québécois qui, en définitive, devront payer la note. Mais ils ne disposent jusqu'à présent d'aucun véritable instrument d'intervention sur les activités d'Hydro-Québec si ce n'est par l'intermédiaire de leurs élus et d'une certaine participation au conseil d'administration d'Hydro-Québec. Ce n'est pas suffisant. L'office se permet donc d'intervenir sur cette question et sur d'autres pertinentes à la notion fondamentale de service. L'article 292 de la Loi sur la protection du consommateur accorde en effet à l'office le mandat de promouvoir les intérêts des consommateurs devant un organisme gouvernemental dont les activités affectent le consommateur.

Comme toute entreprise à caractère commercial, Hydro fournit un service dûment rémunéré, mais, qui plus est, avec les nécessités de la vie moderne, un service essentiel. Or, la stratégie élaborée par Hydro-Québec et qui engage, pour les dix ans à venir et même au-delà, l'avenir économique du Québec, semble vouloir éviter cette notion essentielle de service; elle ne dit rien sur les coûts qu'auront à supporter les Québécois; elle ne dit rien non plus sur les améliorations possibles à apporter au service à la clientèle. Pourtant, les consommateurs doivent pouvoir raisonnablement s'attendre que l'expansion du réseau d'Hydro-Québec aille de pair avec une hausse de la qualité des services offerts.

Enfin, les consommateurs, en particulier les plus démunis, sont en droit de s'attendre à ne pas être pénalisés indûment, lorsqu'ils sont dans l'impossibilité de faire face à leurs obligations. Ils sont en droit de revendiquer l'accès égal pour tous et sans discrimination à un service devenu essentiel.

Il ne s'agit pas ici de préjuger de l'attitude qu'adopteront les responsables d'Hydro-Québec sur ces questions, mais simplement de faire ressortir, pour le bénéfice des consommateurs, les lacunes de la stratégie, telle qu'elle nous est présentée et de proposer des améliorations et des moyens de contrôle à partir de la situation qui existe actuellement. Un fait est capital: on doit s'assurer que les intérêts des consommateurs sont pris en compte par Hydro-Québec, d'autant plus que cette gigantesque société détient un monopole d'État, qu'elle fournit un service essentiel et que le consommateur ne dispose évidemment d'aucune solution de rechange.

Les recommandations que l'Office de la protection du consommateur veut faire valoir auprès de la commission parlementaire portent sur cinq points. Les trois premiers touchent à des questions de principe, tandis que les deux autres concernent les pratiques du service à la clientèle.

La première recommandation vise ainsi à instituer un forum public permanent où les citoyens pourront se faire entendre sur les questions énergétiques et plus particulièrement sur les politiques d'Hydro-Québec.

La deuxième recommandation vise à interdire complètement les interruptions de service qu'on appelle plus communément coupures d'électricité.

La troisième recommandation découle en partie de la deuxième. Elle veut mettre fin à l'exigence d'un dépôt en argent pour la fourniture d'électricité.

La quatrième recommandation, quant à elle, est à l'effet d'obtenir pour les consommateurs une facturation sur une base régulière mensuelle, afin de prévenir les problèmes découlant de l'accumulation de comptes élevés.

Enfin, la cinquième recommandation de l'office vise à corriger certains aspects des services à la clientèle, notamment par l'amélioration de l'accueil aux consommateurs et du traitement de leurs réclamations.

La premiere préoccupation de l'office est donc la prise en considération des intérêts des consommateurs dans l'élaboration des politiques d'Hydro.

Afin que la population puisse exercer un droit de regard adéquat sur les activités d'Hydro-Québec et afin que toutes les catégories de consommateurs puissent, sur un pied d'égalité, faire valoir leur point de vue, principalement sur les questions reliées à la tarification et au service à la clientèle, l'Office de la protection du consommateur recommande la mise en place d'un mécanisme institutionnalisé de consultation systématique.

Le livre blanc sur l'énergie a déjà proposé la formation d'une régie de l'énergie. A titre de comparaison, l'Ontario a, depuis 1973, sa propre régie, l'Ontario Energy Board, auprès de laquelle le grand public a l'occasion d'exercer sa critique à l'endroit des décisions d'Hydro-Ontario et de proposer, s'il y a lieu, des changements, notamment au chapitre de la tarification. Aux États-Unis, tous les États, sauf le Nebraska, ont une commission des services d'utilité publique. Composées de gens élus ou nommés par le gouverneur de l'État, ces commissions ont pour tâche l'examen des modifications dans les tarifs et les prix des compagnies américaines d'électricité, de gaz, de téléphone et d'eau; celles-ci ne peuvent alors hausser leurs tarifs sans le consentement de la commission. Cette dernière procède au préalable à des auditions publiques où experts, représentants de l'industrie et groupes de consommateurs expriment leur point de vue. Les décisions de la commission sont alors exécutoires.

Même si Hydro-Québec est une entreprise publique, il ne nous paraît pas moins nécessaire que les citoyens aient la possibilité de s'exprimer directement sur ses politiques et ses activités en raison de la situation de monopole dont jouit la société d'État. L'impact socio-économique de ces politiques et de ces activités sur le niveau et la qualité de vie des Québécois est si considérable qu'il nous paraît indispensable que les citoyens concernés puissent avoir accès à un forum où ils seraient consultés régulièrement, surtout lorsqu'une hausse de tarifs est envisagée.

Il n'appartient pas à l'Office de la protection du consommateur de se prononcer sur la forme que devra prendre ce forum de consultation. Des experts ont déjà proposé des solutions à cet égard. L'essentiel, pour nous, c'est qu'il contribue à mieux assurer l'implication des consommateurs dans le processus décisionnel.

La deuxième recommandation de l'office est l'interdiction complète des coupures d'électricité. À l'époque où l'électricité était un luxe réservé à quelques privilégiés, il était concevable que l'approvisionnement soit interrompu chez quiconque négligeait de s'acquitter des frais encourus. Maintenant que l'électricité est devenue un service public accessible à tous et surtout un service essentiel, une telle pratique est inacceptable; d'autant plus que la libre concurrence dans ce domaine n'existe pas.

En conséquence, même si l'article 265 du Code civil sur l'exception d'inexécution autorise un commerçant à suspendre ses services à un client qui n'a pas payé la marchandise ou le service déjà obtenu, l'Office de la protection du consommateur considère que cette disposition ne devrait plus pouvoir s'appliquer à une entreprise telle qu'Hydro-Québec. C'est pourquoi l'office demande l'interdiction complète des coupures d'électricité par une modification des lois et règlements qui autorisent une interruption de service, et ce pour quelque motif que ce soit. Ainsi, les citoyens défavorisés, vivant grâce aux prestations d'aide sociale ou se trouvant momentanément dans une situation financière précaire, en particulier les vieillards et les familles monoparentales, ne risqueront plus d'être pénalisés s'ils sont dans l'incapacité de payer. Quant à ceux qui, par mauvaise foi ou négligence flagrante, ne s'acquittent pas de leurs obligations, Hydro-Québec pourra toujours les poursuivre en justice, comme peut le faire tout commerçant qui n'a pas obtenu le paiement de sa marchandise.

Dans la même optique, l'Office de la protection du consommateur demande que soit supprimée l'exigence d'un dépôt pour la fourniture d'électricité. Par l'article 9 de ses règlements, Hydro-Québec peut exiger ce dépôt en tout temps. Dans les faits, elle l'impose de manière discriminatoire puisqu'elle l'exige de personnes qui ont un mauvais crédit envers Hydro-Québec, c'est-à-dire en général de gens qui ont éprouvé des difficultés antérieures à acquitter leurs comptes et qui auront tout autant de difficultés à acquitter le dépôt. D'ordinaire, Hydro-Québec exige l'équivalent de deux mois de fourniture d'électricité.

Avec l'interdiction totale des coupures d'électricité, une telle pratique devrait automatiquement disparaître. Toutefois, l'Office de la protection du consommateur se devait de la dénoncer, car elle équivaut à nos yeux à accorder aux consommateurs un traitement inégal pour la prestation d'un service essentiel. Qui plus est, cette pratique est de nature à constituer un facteur d'endettement, vu que les réclamations peuvent représenter un fardeau pesant pour les citoyens les plus défavorisés.

Comme quatrième recommandation, l'office souhaite que la facturation se fasse sur une base régulière et à une périodicité rapprochée. Malgré des améliorations notables dans la fréquence des relevés de compteurs,

des consommateurs reçoivent encore des factures représentant leurs frais d'électricité accumulés sur plusieurs mois.

L'Office de la protection du consommateur propose donc que la facturation soit effectuée à intervalles réguliers - de préférence un mois - afin d'éviter les problèmes que connaissent certains consommateurs qui doivent faire face à des dépenses imprévues dans leur budget. C'est particulièrement le cas des retraités et des bénéficiaires d'aide sociale qui reçoivent leur chèque sur une base mensuelle; il serait donc pour eux souhaitable de recevoir aussi leur compte d'électricité sur une base mensuelle, ce qui leur permettrait de mieux planifier leurs dépenses.

Enfin, l'office veut mettre l'accent sur la nécessité d'améliorer le service à la clientèle de façon à le rendre accessible à tous les usagers. Des sommes fabuleuses seront engagées par Hydro-Québec au cours des prochaines années pour l'expansion et la modernisation du réseau. L'Hydro a-t-elle prévu également de se réserver certains montants d'argent pour l'amélioration de son service à la clientèle, en particulier l'accessibilité pour tous les citoyens à travers la province à son service de renseignements? C'est là une question que le consommateur se pose en toute légitimité lorsqu'il voit une entreprise de monopole public comme Hydro-Québec jongler avec les milliards.

L'Office de la protection du consommateur reçoit encore des plaintes à savoir qu'il est très difficile pour certains consommateurs de rejoindre l'Hydro en raison de la surcharge du réseau téléphonique. L'office réclame en conséquence une augmentation du nombre de lignes téléphoniques. Il demande également que soit généralisée l'utilisation de lignes de type INWATS ou l'abonnement au système Zénith de manière à éviter aux consommateurs des régions éloignées des grands centres des frais d'appels coûteux. (16 h 45)

Voilà donc l'essentiel des préoccupations de l'Office de la protection du consommateur en regard des politiques d'Hydro-Québec. Nous espérons que nos remarques et propositions, qui se veulent constructives, seront prises en considération. Nous espérons surtout que le dialogue qui s'amorce aujourd'hui s'intensifiera et deviendra une pratique consacrée dans le cadre d'une structure qui reste à définir.

Je vous remercie, M. le Président, M. le ministre et MM. les députés, de votre attention.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Nammour. M. le ministre.

M. Bérubé: Je remercie l'Office de la protection du consommateur d'avoir souligné ici un certain nombre de problèmes d'équité et je ne vous cache pas que c'est souvent ce genre de problèmes qui remontent jusque dans les cabinets de ministres. En fait, les problèmes qui sont soumis à notre attention sont, les trois quarts du temps, des problèmes de mauvais services à la clientèle, de téléphones qui ne répondent pas ou encore qui sont toujours occupés, ou encore de coupures l'hiver, comme le député de Nicolet-Yamaska nous l'a souligné. Évidemment, on essaie de régler cela sur une base un peu à l'amiable, mais ce n'est pas normal que des citoyens soient obligés d'appeler à un cabinet de ministre et veuillent parler au ministre parce qu'ils ont un problème avec Hydro-Québec. Il y a quelque chose qui ne marche pas dans ce temps-là. Les principaux appels que je reçois à propos d'Hydro-Québec, c'est presque toujours ce type de problème. Il y a certainement un malaise.

Il y a également - c'est l'impression que j'ai - une nette amélioration au niveau d'Hydro-Québec depuis quelques années pour faire en sorte que son service à la clientèle soit plus humain, que l'on réponde davantage, qu'on améliore les communications téléphoniques et qu'on arrive peut-être à avoir ne serait-ce qu'un peu plus d'amabilité de la part de ceux qui sont préposés au service. Ils ont peut-être reçu 25 appels au cours de la journée, mais ils sont payés pour cela, et ils finissent par oublier que le 26e, lui, ne le sait pas qu'il en a eu 25 avant lui. Par conséquent, se faire recevoir comme un chien dans un jeu de quilles n'est pas particulièrement intéressant, surtout quand vous avez des problèmes de service.

Je dois vous avouer que, quand je me suis occupé de problèmes semblables, cela a toujours été sur une base ponctuelle. Là, vous l'abordez dans le cadre d'une problématique plus globale et j'aimerais avoir un peu votre opinion. Par exemple, vous dites: Interdiction complète des coupures d'électricité. On m'a expliqué à Hydro-Québec que maintenant on ne coupe plus l'électricité l'hiver, puisque cela met le citoyen dans des conditions absolument épouvantables. On m'a soulevé un ou deux cas, je pense, qui doivent être grattés parce que, d'après moi, ces cas ne devraient pas se produire, puisque, à Hydro-Québec, on m'a dit que l'hiver on ne privait pas les citoyens d'électricité. Cela a souvent comme conséquence que le citoyen accumule un compte de plus en plus élevé que, de toute façon, il n'est pas capable de payer, ce qui fait qu'en pratique, cela revient, pour Hydro-Québec, à jouer un rôle d'aide sociale, c'est-à-dire à fournir l'électricité gratuitement.

On pourrait se poser la question: Dans quelle mesure Hydro-Québec doit-elle se

mettre à la place du service d'aide sociale et fournir un service gratuitement à une population qui est incapable de payer? C'est une question qui me vient à l'esprit. Si, a priori, on dit: II n'y a jamais de coupure, on peut toujours dire: Vous allez poursuivre. Mais le citoyen qui n'a pas payé son compte ne sera pas plus capable de le payer après, surtout s'il vit de l'aide sociale, par exemple, puisque la loi interdit la saisie des prestations de bien-être social.

Donc, cela revient à dire que tout assisté social qui ne voudrait pas payer son compte d'électricité pourrait se faire fournir gratuitement l'électricité et cela, sans qu'on ait aucun moyen pour empêcher cela. Vous aurez beau aller en cour, vous n'obtiendrez jamais gain de cause. Cela revient à dire: Le gouvernement va offrir à toute personne qui ne veut pas payer son compte une prestation sociale supplémentaire qui n'est pas prévue dans la loi.

Comment, dans votre réflexion sur la portection du consommateur, conciliez-vous cette problématique avec l'autre aspect qui m'apparaît aussi très important, soit que l'électricité est aujourd'hui un bien essentiel et qu'on ne peut pas priver les citoyens de biens essentiels?

Le Président (M. Jolivet): M. Nammour.

M. Nammour: Je suis parfaitement conscient du problème que vous soulevez et de ses implications pour Hydro-Québec. En fait, il ne devrait pas s'agir, pour Hydro-Québec, de fournir le service gratuitement à tous les assistés sociaux. Il faudrait trouver des mécanismes qui permettraient à ces assistés sociaux d'étaler leurs paiements. Je sais qu'il y a des arrangements qui sont actuellement pris par Hydro-Québec, qu'il y a eu des efforts faits dans ce sens, mais il y a toujours la menace d'une coupure qui pèse sur la tête des assistés sociaux. Je ne pense pas non plus que le fait de couper l'électricité va régler le problème, parce que si le consommateur ne peut payer, il ne pourra pas payer davantage si l'électricité est coupée et il va se retrouver avec un problème évident qui est celui de l'absence de prestations d'un service essentiel.

Je pense qu'il faudrait trouver des mécanismes souples d'ajustement peut-être par le réseau des affaires sociales - je dis cela juste à titre suggestif - qui permettraient aux personnes concernées, aux personnes pénalisées plutôt que d'être complètement coupées de service, d'avoir droit à une prestation minimale d'électricité pour leurs besoins et quitte, en fait, à étaler leurs paiements. Il y a peut-être des conseillers budgétaires qui pourraient les aider à mettre tant d'argent de côté pour payer leurs comptes. Je sais qu'il y a déjà eu des efforts qui ont été faits dans ce sens, ce sont des cas isolés, mais si on pouvait arriver à une politique généralisée et systématisée, je pense qu'on réglerait le problème une fois pour toutes.

M. Bérubé: Est-ce que l'office accepterait de réfléchir justement à ce problème, de manière à proposer des mécanismes? Puisque l'impression que j'ai, c'est que c'est faute d'avoir ces mécanismes. Je pense qu'on est tous d'accord sur le fond. C'est-à-dire qu'on ne doit pas priver un citoyen d'un bien essentiel sous prétexte qu'il est à court d'argent et de faire geler en plein hiver une famille avec des enfants. C'est totalement inhumain et inadmissible au sein de notre société.

Donc, vous avez parfaitement raison sur le fond. Le problème, c'est toujours le problème de la fraude. Comment doit-on se prémunir contre la fraude, sachant que lorsque l'on ne peut pas se prémunir contre la fraude, celle-ci a tendance à se généraliser? Puisqu'on comprend bien vite que le système est ainsi conçu, on ne pourra pas se prémunir contre la fraude, il n'y a rien de façon interne qui le permet.

J'aimerais cela si l'office pouvait réfléchir à cette question. Je pense que du côté gouvernemental, cela me paraît un point qu'il va falloir fouiller beaucoup plus en profondeur. Il va falloir en arriver à une mécanisme, peut-être dans le sens de celui que vous avez proposé. Est-ce que ce serait un prélèvement à la source qu'Hydro-Québec pourrait faire de concert avec le gouvernement? Je n'ai pas la moindre idée. Mais est-ce que c'est cette avenue que vous semblez favoriser présentement, qui pourrait effectivement peut-être nous permettre d'avoir une loi ou un règlement interdisant les coupures d'électricité, mais en même temps un mécanisme qui assure qu'Hydro-Québec n'est pas amenée à fournir un service social qui, normalement, doit être fourni par l'État.

M. Nammour: En fait, notre préoccupation essentielle, c'est qu'Hydro-Québec ne soit pas à la fois juge et partie. Je pense que cela devrait relever d'une autre instance de pouvoir trancher le litige et de pouvoir déterminer s'il y a eu fraude ou non. Au cas où il y aurait fraude, le consommateur serait lui-même pénalisé, et il devrait s'acquitter, quitte à être mis en faillite s'il le faut. Sauf que dans le cas où il ne peut pas payer, c'est autre chose, ce sont les mécanismes d'aide sociale qui interviendraient. Je pense qu'il ne faut pas laisser à Hydro-Québec seule le soin de déterminer si le consommateur est un bon ou un mauvais payeur, de bonne foi ou de mauvaise foi. Il faudra trouver des mécanismes qui permettraient d'arbitrer, si on peut dire, le conflit éventuel.

M. Bérubé: La preuve de mauvaise foi est toujours très difficile à faire. Par conséquent, l'impression que j'ai, c'est qu'Hydro-Québec fonctionne présentement sur une base très discrétionnaire, en essayant de faire preuve de bon jugement, essentiellement dans les cas, et on a des cas, effectivement, de mauvais jugement, puisque l'homme restant l'homme, parfois, il exerce son jugement correctement et parfois incorrectement.

Donc, on n'a pas vraiment de mécanisme. Mais ce serait intéressant si l'office pouvait réfléchir à une formule. Parce qu'il ne suffit pas de dire: Les coupures sont inadmissibles, il faut également proposer une formule en vertu de laquelle les coupures ne sont plus nécessaires. Je pense que c'est cela qui nous permettrait de nous sortir de la difficulté que vous soulignez. Mais je pense que votre point est fondamentalement correct. Il faut prendre les moyens pour qu'il n'y ait plus de coupures d'un service aussi essentiel que l'électricité, mais en même temps, il faut prendre les moyens pour qu'Hydro-Québec ne soit pas placée dans une position où elle se substitue à d'autres organismes gouvernementaux qui sont là pour aider les plus démunis de notre société.

L'interdiction du dépôt pour la fourniture d'électricité, j'ai toujours eu l'impression que ce dépôt ne s'appliquait qu'aux entreprises commerciales. Est-ce exact?

M. Nammour: II existe encore pour les particuliers, pour les usagers résidentiels.

M. Bérubé: Alors, c'est dans le cas des particuliers que vous voudriez...

M. Nammour: C'est cela.

M. Bérubé: ...voir ce dépôt retiré.

M. Nammour: C'est cela.

M. Bérubé: Est-ce qu'Hydro-Québec devrait exiger certaines garanties de service, en ce sens que, si je décide d'aller m'installer dans la forêt à 25 milles d'un point de service et que je demande à Hydro-Québec de me desservir - je caricature pour les fins de la cause - à ce moment, Hydro-Québec peut refuser de fournir le service ou le fournir contre une garantie. Vous suggérez ici qu'il n'y ait jamais de garantie demandée par Hydro-Québec?

M. Nammour: À titre de comparaison, je dirai que, lorsqu'on fait venir un plombier chez soi pour faire une réparation, bien souvent, il fait la réparation et il vous dit: On vous enverra le compte. Donc, il n'a aucune garantie en main, sinon qu'il y a une signature du client. Si on considère qu'Hydro-Québec passe un contrat avec ses clients, cela pourrait peut-être même prendre la forme d'un contrat écrit, le contrat vaudrait comme engagement de la part du client, comme n'importe quel autre contrat d'affaires.

M. Bérubé: C'est une formule effectivement envisagée. Je n'ai pas d'autre question pour l'instant.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je voudrais remercier également les représentants de l'Office de la protection du consommateur qui, ce matin, viennent nous faire part de leurs préoccupations. Je veux en même temps les assurer que ces préoccupations qui sont les leurs sont également les nôtres. À l'instar du ministre, j'ai aussi parfois des gens qui viennent me faire part de certains problèmes que nous retrouvons dans votre mémoire. Je note particulièrement votre préoccupation vis-à-vis des possibilités de coupure de service à la population, et notamment aux plus démunis, c'est-à-dire les assistés sociaux.

Vous faites certaines recommandations qui me semblent très valables. Cependant, il me semble... c'est peut-être dû au fait que vous n'avez pas tellement de possibilités avec l'actuelle Loi sur la protection du consommateur pour intervenir; si ma mémoire est fidèle, Hydro-Québec est soustraite à la loi et les compagnies distributrices de gaz naturel sont également soustraites à la loi, ce qui fait que, du point de vue d'un besoin de l'énergie, les relations entre le distributeur et le consommateur ne peuvent pas être facilement protégées par votre office, si je comprends bien.

II est bien sûr que, sur le plan pratique, il n'est pas facile de demander à Hydro-Québec aussi bien qu'à un autre organisme de distribution de services publics essentiels de le faire à titre gratuit. Il n'est pas facile non plus d'exiger d'eux de ne pas faire payer certaines classes en faisant payer une autre classe. Le problème est assez complexe. Vous l'avez cependant souligné et, je pense, à bon escient. Il me semble - vous me direz ce que vous en pensez - que la base, en partie, du problème que vous soulignez quant aux coupures, d'abord, s'il y a coupures, c'est qu'il n'y a pas paiement de facture.

Vous avez souligné à la quatrième recommandation de votre mémoire votre désir de voir une facturation plus régulière. Je pense que vous avez touché à un élément essentiel du problème. Comme vous, j'ai été témoin souvent du fait que des assistés sociaux se voyaient couper des services ou

encore se voyaient devant la possibilité d'une coupure de service en raison du fait qu'ils venaient de recevoir une facture d'électricité qui était à ce point élevée qu'il devenait impossible pour le consommateur à faible revenu de s'acquitter de cette facture. (12 heures)

Évidemment, en même temps, cela a un effet d'entraînement sur le dépôt. Puisqu'on ne sait pas si l'acheteur paiera bien dans l'avenir, la tendance est d'exiqer un dépôt pour s'assurer des prochains paiements. Malheureusement, quand on fait affaires avec des gens à faible revenu, des gens démunis, ce sont justement, comme vous le dites si bien d'ailleurs, ceux-là qui n'ont pas les moyens de donner un dépôt.

Mais ce problème, puisque, à cette commission, nous ne discutons pas que d'Hydro-Québec, mais du problème énergétique en général, je le retrouve quant aux coupures, pas quant à la facturation. La facturation, c'est surtout à Hydro-Québec que cela arrive et je pense que cela arrive dans certaines régions où il n'est pas facile d'avoir accès aux compteurs durant l'hiver. Il y a une facturation qui est basée sur je ne sais quel mécanisme, mais une facturation réduite et, tout à coup, quand il y a lecture des compteurs, il y a une explosion. La facture est trop élevée et on se retrouve devant une éventualité comme une coupure d'électricité. Cependant, comme le ministre le disait tantôt, il y a, évidemment, une question de jugement. Je dois, devant cette commission, dire que depuis quelques années il y a eu amélioration de ce côté-là à Hydro-Québec. Je me rappelle avoir eu des discussions sérieuses et avoir même dû intervenir pour lui faire savoir ce que je pensais. Depuis quelques années, il y a - je pense que cela dépend aussi des gens avec qui...

M. Bérubé: Changement de gouvernement.

M. Samson: Pardon?

M. Bérubé: Changement de gouvernement.

M. Samson: Non. Quand je dis quelques années, je suis là depuis onze ans. Cela fait plus longtemps que cela.

Des voix: Ah!

M. Samson: Le monde n'a pas été découvert en 1976, vous savez. Christophe Colomb est arrivé avant vous autres.

M. Ciaccia: Un bon Italien!

M. Samson: Je dois dire que selon les gens avec qui on fait affaires, il y a toujours moyen de s'arranger. Ce moyen de s'arranger, c'est, comme vous l'avez suggéré, un étalement sur un certain nombre de mois. Je n'irai pas jusqu'à demander que l'aide sociale intervienne pour devenir l'agent de l'assisté social parce que cela équivaudrait à placer l'assisté social dans une situation d'administration par le gouvernement. Je n'irai pas jusque là. C'est bien sûr que si l'assisté social est dans une situation telle qu'il ne peut pas facilement payer ses factures, il me semble que la principale raison, cela saute aux yeux de tout le monde, c'est le manque d'argent. Le manque d'argent, cela ne dépend pas nécessairement d'Hydro-Québec. Cela ne dépend pas nécessairement de la compagnie de gaz non plus. À titre d'exemple, si, dans une année donnée, les tarifs d'électricité augmentent de 17,5% et que, durant cette même année, le barème d'aide sociale est indexé à 8,7%, il y a sûrement quelque chose qui manque à l'assisté social pour payer quelque chose. Il a le choix entre retarder ses paiements d'électricité, retarder ses paiements de nourriture, retarder ses paiements de logement ou ne pas s'acheter de vêtements. C'est le problème qui se pose. Si je donne cet exemple, c'est que je pourrais fouiller dans mes livres et vous donner les années exactes où ce phénomène s'est produit. Il va se produire encore parce que l'indexation actuelle est de 9,9% et l'augmentation du prix de l'électricité sera plus élevée. C'est le problème des assistés sociaux que vous voulez défendre et qu'évidemment vous avez raison de vouloir défendre.

Maintenant, je voudrais savoir si l'office croit qu'il faudrait créer un mécanisme quelconque indépendant du gouvernement ou relié au gouvernement, qui aurait à arbitrer ce genre de choses, à décider des augmentations de tarifs, par exemple, ou encore à décider de la politique de services, à savoir si de tel mois à tel mois on n'a pas le droit ou on a le droit de couper les services tant dans le domaine de l'électricité que dans le domaine du gaz naturel, parce que là il faut aussi parler de gaz naturel. Étant donné la pénétration de gaz naturel qu'on va avoir de plus en plus, il va falloir en parler sur la même base dont on parle de l'électricité.

De ce côté, est-ce que vous croyez qu'un organisme comme celui-là, avec un mécanisme qui serait hors du fournisseur, pourrait mieux aider à aborder ce problème?

Le Président (M. Jolivet): M. Nammour.

M. Nammour: M. le député de Rouyn-Noranda, en fait, ce que vous venez de dire rejoint la préoccupation que j'ai exposée tantôt. Il faudrait idéalement qu'il y ait une instance qui soit indépendante d'Hydro-Québec pour agir à la fois comme arbitre et

comme, en fait, organisme régulateur par rapport aux pratiques d'Hydro-Québec vis-à-vis de ses clients. Je pense que c'est en cherchant un mécanisme de ce genre qu'on va peut-être pouvoir arriver à des solutions qui soient à la fois équitables et souples, et satisfaisantes aussi.

M. Samson: Est-ce que l'Office de la protection du consommateur a aussi été saisi de pratiques de coupures du côté du gaz naturel, un peu dans le même sens que ce que vous avez énoncé dans votre mémoire vis-à-vis d'Hydro-Québec? Est-ce que vous avez été saisi aussi de pratiques visant à pénaliser un client de 10% du montant de la facture après un délai de dix jours seulement, ce qu'Hydro-Québec pratiquait jadis, et qu'elle a changé, heureusement, pour en revenir à une méthode qui est celle du commerce en général, c'est-à-dire le taux d'intérêt après un premier mois?

Le Président (M. Jolivet): M. Nammour.

M. Nammour: En 1977, nous étions venus justement à la commission parlementaire de l'énergie et nous avions précisément dénoncé les pratiques qui étaient en cours aussi bien d'Hydro-Québec que de Gaz Métropolitain qui imposaient effectivement une pénalité de 10%. Ce qui est arrivé depuis 1977, c'est qu'Hydro-Québec a amélioré de beaucoup ses pratiques. La pénalité de 10% n'existe pas. En fait, actuellement, ce que les consommateurs ont comme pénalité, si on veut l'appeler comme ça, ce sont frais d'administration de 1 1/2%, donc, comme n'importe quel autre compte. Nous souhaitons que les mêmes mesures soient adoptées aussi bien pour les compagnies de gaz que pour Hydro-Québec, ainsi que pour tous les services de prestation d'électricité, municipaux et autres. Peut-être qu'à ce moment il faudrait parler non plus seulement d'un organisme de coordination ou de régulation juste pour Hydro-Québec, mais d'énergie en général, de toute fourniture, de toute prestation de services énergétiques, qu'il s'agisse de gaz, de pétrole ou d'électricité, parce que, surtout avec les éventuelles conversions de systèmes, le problème qui se pose aujourd'hui pour une personne dans le domaine de l'électricité va se poser peut-être avec le gaz et il faudrait que les solutions qui seront adaptées à l'un soient également adaptées ou prises en considération pour les autres.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous proposez concernant l'interdiction complète des coupures d'électricité. Je l'avais d'ailleurs mentionné dans mon allocution d'ouverture au début de cette commission parlementaire. Le député de Bellechasse a eu également l'occasion de souligner publiquement quelques cas. Je pense qu'il faut essayer de trouver une solution à ces problèmes. La solution, quelle qu'elle soit, je pense que cela revient au gouvernement à la trouver et peut-être qu'avec l'aide de votre organisme, on pourra le faire le plus rapidement possible.

Je voudrais soulever un autre point, parce que vous dites dans votre mémoire qu'Hydro-Québec est devenue un service accessible à tout le public, bien sûr, et surtout un service essentiel. Il y a quelque temps, on a eu à vivre dans le Québec des grèves dans le secteur d'Hydro-Québec. Personnellement, j'en ai vécu une de façon tangible. Je suis allé passer une journée avec des gens qui étaient privés des services d'Hydro-Québec depuis sept jours et cela un peu avant la période des fêtes, l'an passé. Pourriez-vous me donner votre opinion à savoir s'il serait opportun d'interdire le droit de grève dans ce secteur qui est jugé comme un service essentiel aujourd'hui dans la province de Québec?

Le Président (M. Jolivet): M.

Nammour.

M. Nammour: M. le député de Nicolet-Yamaska, votre question est assez complexe, parce que, à l'intérieur d'un organisme comme Hydro-Québec, il faudrait voir d'abord quelles sont les activités qui pourraient menacer la prestation du service essentiel et quelles sont celles qui ne le sont pas. Il est évident que des emplois comme ceux d'administration ou de bureau n'ont peut-être pas une implication en matière de services essentiels et qu'une interruption de travail dans ces secteurs n'affectera pas la fourniture du service, mais il y a peut-être d'autres emplois où cela risque de compromettre de façon radicale la fourniture de services. À ce moment-là, je pense que ce problème devrait être traité de la même façon que tout autre service essentiel, aussi bien les services hospitaliers ou d'autres services qu'on considère comme essentiels à la population et que le traitement qui sera appliqué à l'un de ces services soit aussi, pour être équitable, appliqués à Hydro-Québec, si tel était le cas.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je note que l'Office de la protection du consommateur a fait plusieurs recommandations dont une est la création d'un mécanisme, tel qu'une régie de l'énergie pour des auditions publiques, pour entendre les représentations des différents groupes,

quant aux augmentations possibles des tarifs d'Hydro-Québec. Je voudrais seulement porter à votre attention qu'en 1978, durant une commission parlementaire telle que celle-ci, j'ai moi-même fait une motion formelle à cet égard. À ce moment-là, je parlais de la régie de l'énergie, mais cela aurait pu être aussi un autre mécanisme. Le gouvernement avait inclus dans son livre blanc la création de la régie de l'énergie. À ce moment-là, ce n'était pas le ministre actuel, c'était M. Joron. Il était d'accord en général avec le principe d'un mécanisme devant lequel les individus, les citoyens et les autres institutions québécoises pourraient se présenter, mais, malheureusement, le gouvernement n'a pas agi dans ce domaine. C'est malheureux, parce que nous croyons que c'est important d'avoir un tel mécanisme pour justement avoir toutes les informations nécessaires quant aux prises de décision, que ce soit les prises de décision du gouvernement vis-à-vis d'une politique énergétique ou les tarifs d'Hydro ou les recommandations d'Hydro-Québec. (12 h 15)

Je voudrais porter une autre chose à votre attention aussi et vous poser une question. Le gouvernement a annoncé un programme de conservation de l'énergie. Dans son discours inaugural, le premier ministre a déclaré qu'il y aurait un programme de $1 milliard qui comprendrait des déboursés de $100,000,000 par année échelonnés sur les dix prochaines années. J'ai demandé le dépôt du document, de l'étude sur laquelle était basé ce programme et je me suis aperçu que, les conclusions de l'étude étaient à que non seulement il y avait différents scénarios, - il y avait notamment le scénario de la dépense de $1 milliard - mais que si le gouvernement avait dépensé $1,900,000,000, l'économie d'énergie serait beaucoup plus élevée. Au lieu d'être de 21,8%, elle aurait pu monter à 38% et, même si Hydro avait voulu aller au-delà de dix ans avec un déboursé de $2,500,000,000, elle aurait pu effectuer des économies d'énergie de 41,8% dans le domaine résidentiel, qui affecte les gens que vous représentez et pour lesquels vous venez faire des représentations aujourd'hui. La question que je voudrais vous poser est donc la suivante: Face aux recommandations, aux conclusions de ce document, seriez-vous d'opinion de demander au gouvernement d'accepter les conclusions de ce document à savoir qu'on devrait dépenser plus d'arqent pour effectuer de plus hautes économies d'énergie plutôt que de se limiter à seulement une partie des recommandations, naturellement avec une économie d'énergie beaucoup moindre?

Le Président (M. Jolivet): M. Nammour.

M. Nammour: M. le député de Mont-Royal, nous n'avons malheureusement pas eu connaissance de ce document et nous serions, bien sûr, très intéressés à l'étudier parce que je pense que l'objectif d'économiser le maximum d'énergie, ne serait-ce d'abord qu'à cause de la rareté de cette ressource, mais aussi pour les implications économiques que cela a pour le portefeuille des citoyens, cela nous intéresse au plus haut chef. Je pense que nous ne sommes pas les seuls à l'intérieur de l'administration publique à souhaiter qu'on en arrive à un résultat satisfaisant.

M. Ciaccia: Vous pourriez peut-être en prendre connaissance et, par l'entremise de votre bureau, faire les représentations qui s'imposent. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Nammour et vos représentants.

J'invite donc le Conseil régional de développement de l'Est du Québec, représenté par M. Pierre Jobin, à bien vouloir venir présenter son mémoire. Pendant ce temps, - ce qui permettra aux gens de venir s'installer - je tiens à faire part aux membres de cette commission que le Conseil régional de l'environnement de l'Est du Québec a demandé que l'on dépose son mémoire et, comme prévu, il sera à la bibliothèque de la Législature ainsi qu'au secrétariat des commissions.

La parole est à M. Pierre Jobin, du Conseil régional de développement de l'Est du Québec, mémoire no 23. Allez, M. Jobin!

Conseil régional de développement de l'Est du Québec

M. Jobin (Pierre): Merci, M. le Président.

D'abord, en guise d'introduction, on tient à remercier la commission de recevoir le Conseil régional de développement de l'Est du Québec. Nous croyons qu'il est de notre devoir de faire valoir le point de vue de notre région par rapport à l'avenir du Québec au niveau de l'électricité et nous espérons que nos considérations vous seront utiles.

Notre exposé consiste d'abord en une présentation rapide de ce qu'est notre CRD et des caractéristiques majeures de notre région; par la suite, on sera en mesure de mieux expliquer l'intérêt qu'on a dans le dossier.

Cela fait, on va analyser les documents préparés par Hydro-Québec, d'abord d'une façon générale. Notre évaluation portera ensuite sur les éléments régionaux du programme. Finalement, on va tenter d'envisager la pertinence des propositions en regard de notre bilan énergétique régional et on va présenter nos conclusions. Toutefois,

pour éviter toute ambiguïté, on tient à vous signaler que nous ne sommes pas des experts des questions énergétiques, d'une part, et que, d'autre part, les délais impartis par la commission sont très courts pour des organismes comme le nôtre qui doivent réunir un conseil exécutif, un conseil d'administration, etc., surtout compte tenu de la...

Le Président (M. Jolivet): On a de la difficulté à vous entendre.

M. Jobin: Excusez-moi... surtout compte tenu de la complexité des questions en cause.

Le portrait d'ensemble de l'Est du Québec. Très rapidement, l'Est du Québec est un pays qui est grand comme la Suisse -16,000 milles carrés - où sont éparpillées plus de 200 municipalités pour une population totale de l'ordre de 315,000 habitants. C'est une région que l'on désigne comme périphérique, marginale, ou ressource, selon les auteurs. Le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine font depuis longtemps l'objet d'expériences de planification dont la plus célèbre, le Bureau d'aménagement de l'Est du Québec, le BAEQ, a constitué une première au Québec.

Tous les problèmes ne sont pas réglés, loin de là, comme nous le révèle un coup d'oeil rapide sur ce qu'on est convenu d'appeler les macro-variables: le revenu disponible par ménage dans notre région ne représente que 80% de la moyenne du Québec. C'est de l'ordre de 65%, si on le considère per capita; le taux de chômage est parmi les plus élevés au Québec et dépasse régulièrement 20% malgré un taux d'activité inférieur de 10% à la moyenne et un travail extra-régional très important qui est de l'ordre de 4% à 5%; la population diminue et vieillit à cause d'un bilan migratoire négatif, qui dépasse parfois les 5000 personnes et frappe surtout les strates jeunes.

C'est dans ce contexte que la population de l'Est du Québec se débat. C'est par des expériences originales de développement, à caractère populaire et communautaire, que les gens de l'Est ont décidé de prendre en charge leur avenir. Partout sur le territoire, des coopératives de pêcheurs aux îles et en Gaspésie aux clubs alimentaires du Témiscouata, de la cartonnerie de Cabano à la papeterie de Matane - cela a été écrit pour le 6 février -des radios communautaires à l'aménagement intégré des ressources dans le JAL, partout, dans tous les domaines jaillissent les initiatives, à telle enseigne que le mouvement coopératif connaît chez nous un chiffre d'affaires 2,5 fois plus élevé per capita que la moyenne provinciale.

Quant à notre CRD, c'est un orqanisme qui est né en 1967 de la fusion entre le Conseil d'orientation économique du Bas Saint-Laurent et le Conseil régional d'expansion économique de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, compagnie sans but lucratif régie par la troisième partie de la Loi sur les compagnies.

Reconnu comme interlocuteur privilégié en matière de développement régional, il vise des objectifs de consultation et de concertation en regroupant les intervenants préoccupés par le développement de notre région. Ces derniers participent aux activités du CRD et élisent, chaque année, lors de l'assemblée générale, les membres du conseil d'administration parmi lesquels seront choisis ceux du conseil exécutif.

Le CRD regroupe aussi bien des centrales syndicales que des corporations municipales; des coopératives que des associations patronales ou des groupes communautaires; des entreprises mais également des individus et divers conseils régionaux sectoriels. Ces intervenants se retrouvent au CRD pour échanger des points de vue sur le développement régional et se concerter sur des questions d'intérêt régional.

La structure d'organisation et de participation du CRD est conçue en fonction d'une approche à la fois sectorielle économique, sociale, culturelle et civique -et territoriale - KRT, Métis, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine. C'est à partir de cette organisation que le CRD émet des avis à ses divers interlocuteurs régionaux et extra-régionaux, volontaires ou gouvernementaux. On retrouve d'ailleurs un graphique qui illustre le mécanisme d'organisation du CRD.

Notre intérêt dans ce dossier. Ce n'est pas d'hier que le CRD de l'Est du Québec s'intéresse de près aux questions énergétiques. Nous avons même eu l'occasion, dès novembre 1977, de soumettre un mémoire à la commission parlementaire sur l'énergie où on faisait un portrait rapide de la situation de notre région qui, en pratique, doit importer la presque totalité de son énergie.

Nous avons eu également à nous prononcer à quelques reprises sur les tracés de ligne proposés par Hydro-Québec à l'intérieur de notre région. De la même façon, nous avons fait des représentations auprès de l'Office national de l'énergie du Canada sur la prolongation du gazoduc dans notre région l'an dernier et nous comptons également faire connaître notre point de vue sur le terminal méthanier à toutes les instances autorisées. C'est fait depuis la date du dépôt de ce rapport. Nous sommes intervenus devant le Bureau des audiences publiques à Cacouna, à Rivière-du-Loup.

Finalement, il faut souligner les actions que nous avons menées en ce qui concerne le prix de l'essence. Nous avons identifié qu'en

1978, il en coûtait au moins $9 millions de plus à notre région que dans les régions centrales pour une même quantité d'essence. Nous avions alors organisé une pétition qui a recueilli plus de 20,000 appuis et adressé au ministre d'État à l'énergie un mémoire exposant diverses solutions à cette situation d'iniquité pour notre région.

Ces présentations faites, on peut parler un peu plus directement de l'avenir électrique. Hydro-Québec nous a fait parvenir, il y a quelque temps, un certain nombre de documents pertinents aux questions qui sont soumises à la commission. Après avoir établi quelques principes, on va analyser ces documents de façon générale et en fonction de notre région.

Quelques principes de base. On pense que c'est utile de présenter d'abord les considérations d'ensemble qui guident notre intervention. En tout premier lieu, nous tenons à établir clairement que l'étalon auquel nous mesurons la situation et les propositions qui sont mises de l'avant, c'est le développement de l'Est du Québec et le mieux-être de ses habitants. Notre point de vue est donc résolument régionaliste.

L'épuisement des ressources de la planète constitue un phénomène dont la prise de conscience commence à se manifester; cela a même amené des chercheurs à proposer que la société de consommation dans laquelle nous vivons fasse place à une société de conservation. Dans le domaine de l'énergie, l'insécurité des approvisionnements pétroliers, accompagnée de la flambée des prix ont conduit à des mesures d'économie: cylindrée des automobiles, réduction de la vitesse, isolation des maisons, etc.

Il nous apparaît qu'on doit développer une attitude semblable vis-à-vis de l'électricité que trop souvent on tient pour acquise au Québec, sans doute à cause des réalisations exceptionnelles d'Hydro-Québec dans ce domaine: Manic, la Baie James, les lignes des 735 kV etc., qui sont, d'ailleurs, devenues des symboles du génie national des Québécois.

Cela peut être important de se mettre à économiser, tant d'un point de vue écologique que d'un point de vue économique. L'électricité, surtout l'hydroélectricité, constitue, de l'avis général, une source d'énergie relativement respectueuse de l'environnement. En effet, elle ne produit pas, par sa consommation, de déchets polluants; renouvelable, elle -n'exige pas non plus, pour sa production, l'utilisation de ressources finies. Mais elle présente quand même certains inconvénients.

La construction de barrages, même si les petits sont à cet égard moins offensants que les gros, vient quand même perturber considérablement l'écologie des cours d'eau qu'on canalise et des bassins hydrographiques qui sont touchés. Quant aux lignes de transmission, elles présentent divers désagréments. En premier lieu, on ne peut nier qu'elles constituent un important facteur de pollution visuelle. Dans une région qui présente un intérêt touristique, cela peut être un problème. De plus, même si là-dessus le dernier mot n'a pas été dit, il se pourrait qu'elles affectent les humains et les bêtes dans les alentours immédiats, surtout dans les cas de hauts voltages. On connaît également les nombreux désagréments qu'elles causent à l'agriculture. Finalement, en favorisant l'accès à la forêt dans certaines zones, elles constituent un facteur d'augmentation du braconnage.

D'un point de vue économique, l'électricité au Québec est offerte à un coût qui s'avère très concurrentiel avec celui des autres sources d'énergie. Il n'y a pas de raison qui permette de prévoir que cette situation soit appelée à changer. Toutefois, cela ne signifie pas qu'il faut arrêter là l'analyse des aspects économiques du développement électrique.

Le Québec peut, à partir de ses propres ressources en personnel, en équipement et en matières premières, fournir à peu près tout ce qu'il faut pour produire et distribuer l'hydroélectricité et ce secteur représente un élément important dans l'économie. Le pari hydroélectrique, s'il réussit, peut nous faire oublier l'absence presque complète du Québec dans la technologie nucléaire.

Mais, de toute façon, hydraulique ou nucléaire, l'électricité exige des investissements colossaux tant du côté des équipements de production que de celui de la distribution. À telle enseigne que les vastes projets d'Hydro-Québec, qui se chiffrent par des dizaines de milliards de dollars, pèsent très lourd sur les marchés financiers, conditionnent le crédit du Québec dans son ensemble et influencent la balance des paiements, voire la valeur du dollar.

Comme on peut le constater, il y a, tant du point de vue écologique que du point de vue économique, des bonnes raisons pour appliquer à l'électricité, comme aux autres sources d'énergie, un programme de conservation détaillé et efficace.

L'électricité comme outil de développement - parce que c'est également un outil de développement important - sa disponibilité en abondance et à des prix avantageux constitue certainement un atout important pour la promotion économique du Québec.

La question de l'exportation. Quand nous exportons de l'électricité à l'état brut plutôt qu'en produits transformés, c'est comme quand nous exportons nos richesses naturelles à l'état brut plutôt qu'en produits transformés: nous exportons des emplois. Ceci ne veut pas dire de ne pas vendre à l'extérieur, surtout que nous devons disposer de nos surplus et que les périodes de pointe

de nos clients correspondent à nos périodes de creux. Mais on croit qu'il faut dépasser les simples considérations financières immédiates et plutôt considérer les perspectives économiques d'ensemble du développement industriel du Québec pour évaluer correctement les termes de l'échange.

La question des tarifs préférentiels. Il y a quelques années, la question des tarifs préférentiels avait été soulevée par rapport à l'implantation hypothétique, qui ne s'est pas réalisée finalement, d'une usine de ferrosilicone à Rimouski. Le gouvernement devait déclarer qu'il a choisi le recours aux subventions directes, claires et nettes plutôt qu'à des incitations plus cachées dont on connaît moins bien les coûts à l'avance, comme les tarifs préférentiels d'électricité. Mais qu'en serait-il d'une réduction s'appliquant à toute une région pour lui permettre de payer la même facture que les autres régions pour sa consommation énergétique totale?

Le programme d'Hydro-Québec.

D'entrée, en tout cas, quand on se place d'un point de vue régionaliste, il y a une constatation qui s'impose, clairement à la lecture des documents que nous a présentés Hydro-Québec: on n'y retrouve aucune perspective régionale. Que ce soit dans le document Prévision de la demande d'électricité, 1981 à 1986; plan des installations, 1981 à 1990, ou dossier préparé en réponse aux questions du gouvernement du Québec, aucune des études fournies ne nous permet de conclure quoi que ce soit sur notre région. Il n'y a pas là de données qui nous permettent cette vision des choses. (12 h 30)

Prévision de la demande d'électricité: C'est à la base de tout le programme, la prévision de la demande pour ajuster l'offre. Là-dessus, nous comprenons qu'Hydro-Québec dispose d'équipes multidisciplinaires qualifiées face auxquelles on peut difficilement soulever des objections. Cependant, compte tenu de la position de monopole d'Hydro-Québec et de sa large autonomie de gestion, ses prévisions peuvent facilement devenir des "self-fulfilling prophecies" et il vaut la peine de les regarder de plus près.

En pratique, la demande devrait doubler d'ici 1990, selon les prévisions; conséquemment, le programme d'équipement requis pour répondre à cette croissance de la consommation va nécessiter des investissements substantiels.

Cependant, Hydro-Québec prévoit un budget de seulement $50 millions au cours de la décennie pour le développement du solaire thermique, des thermopompes et des économies dans les édifices et le matériel roulant. Si la somme paraît respectable à première vue et peut certainement contribuer à restreindre la croissance de la consommation d'électricité, la valeur de l'effort en question est resituée dans une perspective nouvelle quand on la compare à un programme d'investissements de $40 milliards d'ici 1990 pour les seuls équipements de production.

Sur un autre plan, la croissance énergétique des autres pays permet de mieux évaluer l'évolution de la demande québécoise. Même si, dans l'ensemble, le Québec se compare favorablement au reste du monde occidental, on doit noter d'abord un pourcentage annuel moyen d'augmentation une fois et demi plus élevé que celui du Canada pour la période 1978-1990 et un ratio énergie consommée/produit intérieur brut une fois et demi plus élevé que celui de l'Europe en 1990. Ces données indiquent bien qu'il reste place à amélioration du côté de la restriction de la demande.

Le plan des installations nous permettra de revenir une fois de plus sur la constatation que nous faisions en début de chapitre, à savoir que les documents d'Hydro-Québec ne contiennent pas de données régionalisées. Il est alors assez difficile d'exposer un point de vue régional et cela risque de laisser occuper le champ des débats de la commission par les seuls groupes et individus qui ont un point de vue panquébécois à exposer et à défendre. Nous ne saurions faire autrement que souhaiter que l'ensemble des commissions parlementaires soient conçues de façon à faciliter l'expression des collectivités régionales, tant par la documentation de soutien que, pourquoi pas, par des audiences régionales.

Cela dit, comment évaluer le plan des installations par rapport à l'Est? Nous avons tenté de contacter divers employés d'Hydro-Québec dans notre région et ce que nous en avons retenu, c'est qu'on ne compte pas faire des investissements importants dans les équipements de production dans l'Est du Québec. Par ailleurs, la modernisation du réseau de transport de l'électricité dans l'Est du Québec tout comme notre programme spécial d'isolation et de conversion à l'huile pour les Îles-de-la-Madeleine sont déjà en cours. Somme toute, l'Est du Québec continuera d'être un importateur net d'électricité.

Notre situation énergétique dans l'Est: En ce qui concerne la production d'énergie du côté des carburants fossiles, nous n'en produisons pas à l'heure actuelle, ni le charbon, ni le pétrole, ni le gaz naturel. Toutefois, on entretient toujours l'espoir de découvrir du pétrole et ou du gaz naturel en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine. La présence de dôme de sel est, semble-t-il, très souvent accompagnée de la découverte de puits de qualité commerciale.

Par ailleurs, à propos du gaz naturel, l'installation d'un terminal méthanier à Gros

Cacouna amènerait dans notre région d'immenses quantités de gaz naturel en provenance de l'Arctique canadien. De plus, on explore avec beaucoup d'intérêt la possibilité d'entreposer ce gaz dans les immenses cavernes que la géologie de notre région a situées à Parke, tout près de Gros Cacouna justement. La rareté des ports méthaniers additionnée à ces capacités d'entreposage exceptionnelles créent une situation aussi avantageuse ou presque que la présence d'un puits - somme toute, on a un puits artificiel - mais à la condition de pouvoir compter sur le gazoduc dans notre région.

Finalement, même si on a, quelque temps, fondé des espoirs sur la tourbe dont notre région est la plus grande productrice au Québec, il semble que la qualité du produit régional le destine plutôt au marché de la tourbe horticole, qui est plus payant de toute façon.

Les énergies redécouvertes. Sauf quelques sections de notre territoire comme certains coins de la baie des Chaleurs, la région de l'Est ne connaît pas une insolation suffisante pour justifier un recours important à l'énergie solaire, du moins d'après ce que les experts nous disent.

Du côté de l'énergie éolienne, les Îles-de-la-Madeleine offrent un potentiel intéressant; on sait qu'Hydro-Québec y expérimente un équipement qui se situe à la fine pointe de la technologie.

Quant aux résidus du bois, déjà quelques-unes des usines de transformation des produits de la forêt de notre région sont équipées pour utiliser ces déchets à des fins énergétiques. Par ailleurs, le syndicat des producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent mène actuellement des recherches appliquées sur la technologie de récupération de la biomasse lors de la récolte forestière. Finalement, on peut encore entretenir quelques espoirs de voir s'installer une usine de production de méthanol.

La production d'électricité dans notre région, c'est très faible. C'est réparti entre plusieurs petites unités. Des centrales thermiques comme Cap-aux-Meules, Chandler, Murdochville, ou des centrales hydroélectriques comme Métis et Rivière-du-Loup produisent environ 50,000 kW, ce qui ne peut, évidemment, répondre à la consommation régionale. D'ailleurs, la plupart sont collées à des usines.

Le coût comparatif de l'énergie chez nous. Si la production d'énergie ne constitue pas encore une vocation régionale, éventuellement, avec des découvertes de gaz naturel, on pourrait faire un peu de rattrapage, mais il ne semble pas que ce soit notre grande vocation. Il faut évaluer les effets de cette situation de rareté, jointe aux coûts de transport et à la relative dispersion de la population en regard des prix exigés des divers utilisateurs et ce, selon les diverses formes d'énergie disponible.

En ce qui concerne l'électricité, d'abord, il faut reconnaître et affirmer haut et clair que la nationalisation de l'électricité et la politique de tarifs d'Hydro-Québec ont valu à notre région, d'une part, de payer le même prix qu'ailleurs pour l'électricité et, d'autre part, d'obtenir enfin un service convenable. Sans Hydro-Québec et à travers elle, une certaine péréquation entre tous les Québécois, nous en serions encore, dans l'Est du Québec, à payer plus cher pour moins d'électricité. Il nous semble que ces choses-là méritent d'être dites et répétées, mais il n'en va pas de même par rapport aux autres sources majeures d'énergie.

Le gaz naturel est disponible en abondance au Canada et les approvisionnements sont sûrs. Il ne pollue pas l'environnement et son prix est indexé en fonction de maintenir une marge incitative par rapport au pétrole.

Mais voilà, le gazoduc n'est pas encore rendu dans notre région. Bien plus, la demande de permis que vient de déposer devant l'Office national de l'énergie du Canada le promoteur Gazoduc Trans-Québec et Maritimes, qui est intervenu tout à l'heure, ne prévoit rien pour l'Est du Québec, du moins à court terme. Pourtant, lors des audiences de l'hiver 1980 de l'Office national de l'énergie du Canada, le ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec avait officiellement appuyé nos demandes de prolongation du gazoduc, jusqu'à Matane, à tout le moins.

Même si on prévoit une tarification incitative, voire des subventions pour la conversion des systèmes au gaz naturel, ces mesures ne serviront à rien dans l'Est du Québec tant que le gazoduc ne couvrira pas notre région. En attendant, nous continuons à payer plus cher pour notre chauffage et le combustible de nos machines industrielles.

Sur les produits pétroliers, comme l'huile à chauffage et l'essence pour automobile, on n'a pas d'expertise récente sur la question. D'ailleurs, la flambée des prix des produits pétroliers rend très rapidement caduques les meilleures données sur la question.

Une enquête-maison qu'on avait faite en 1978 indiquait qu'on payait $9,000,000 et on peut même dire $10,000,000 de plus dans notre région que dans les régions centrales pour une même quantité d'essence. $9,000,000, c'était le chiffre très prudent pour ne pas se faire critiquer par personne. Mais les fonctionnaires du ministère de l'Énergie et des Ressources nous avaient déclaré que $10,000,000, c'était encore une approximation généreuse.

À l'échelle des dizaines de milliards que prévoit investir Hydro-Québec, $10,000,000 peuvent sembler bien modestes.

Toutefois, si on les compare à d'autres réalités qu'on vit dans l'Est du Québec, cela prend son véritable sens. $10,000,000, c'est plus que l'ensemble des revenus agricoles des comtés de Bonaventure, Gaspé-Est, Gaspé-Ouest et des Îles-de-la-Madeleine réunis. Nous sommes la région la plus rurale du Québec. $10,000,000, c'est plus que les salaires manufacturiers de la plupart des comtés de l'Est du Québec pris un par un. $10,000,000, c'est trois fois les budgets du fonds de développement régional dans notre région. $10,000,000, c'est plus que les investissements privés dans le secteur manufacturier pour l'ensemble de la région au cours d'une année moyenne. $10,000,000, c'est plus que $30 par habitant et $50 par personne en âge de conduire. Finalement, $10,000,000, c'est, en gros, la masse salariale d'Hydro-Québec, région Matapédia.

Comme nous n'avons pas eu l'occasion de mener une recherche similaire sur les prix de l'huile a chauffage, nous n'osons pas avancer de chiffres, mais tout indique que la situation est sensiblement la même, ce qui viendrait encore accroître le déficit de notre bilan énergétique.

En conclusion, on présente des recommandations qui, selon nous, ont des aspects panquébécois et d'autres qui sont plus régionales. La première, c'est qu'Hydro-Québec devrait consacrer une plus forte proportion de son budget à la recherche et à la promotion de l'utilisation plus efficace de l'électricité et de l'énergie en général. La deuxième, c'est qu'Hydro-Québec devrait étudier la possibilité d'organiser une tarification variable selon les heures de la journée ou les saisons de façon à écrêter les pointes de consommation par des réductions à d'autres périodes. Cette mesure nous semble plus respectueuse des abonnés qu'un système de télécommande d'interruption centralisé, un peu comme dans le roman d'Orwell, "1984", où c'est Big Brother qui décidait tout ce qui se passait. La troisième, c'est qu'une des priorités de la recherche d'Hydro-Québec devrait être le stockage d'électricité, soit sous forme d'accumulateurs, d'air comprimé, d'uranium enrichi, d'hydrogène liquide, de production de méthanol, etc., de façon à conserver l'énergie produite par les barrages la nuit, où l'utilisation est plus faible. Si on réussissait à l'accumuler toute, on doublerait ou presque la capacité des équipements existants, ce qui entraînerait de sérieuses économies dans les programmes d'investissements prévus.

Les aspects plus régionaux. Si les mesures décrites plus haut permettent effectivement d'épargner des quantités suffisantes d'électricité pour éviter ou retarder des investissements dans les équipements de production, on pourrait avantageusement se servir des intérêts ainsi épargnés à des fins de développement régional. En tout cas, c'est ce que nous pensons. Et il ne s'agit pas de menue monnaie. Si on épargne 5% du programme d'investissements de production ($40 milliards), cela représente, à 10% d'intérêt, ce qui est un intérêt relativement faible par les temps qui courent, une somme annuelle de l'ordre de $200,000,000. Voilà qui dépasse amplement le budget du fonds de développement régional.

Hydro-Québec devrait, selon nous, étudier la possibilité d'établir des tarifs différentiels selon les régions de façon à équilibrer les coûts différentiels des autres sources d'énergie, spécialement les produits pétroliers. Tant qu'on n'aura pas mis au point une voiture électrique de série, cela permettrait au moins de compenser pour les coûts supérieurs de l'essence dans notre région, si ce n'était que cela.

Également, on pense qu'Hydro-Québec devrait étudier la possibilité de déconcentrer vers les régions des activités des divisions, services, départements, etc., dont la télématique rend la présence physique au siège social beaucoup moins nécessaire. On suivrait en cela l'exemple encore timide des gouvernements, fédéral et provincial, et on pourrait éventuellement épargner sur les $330,000,000 prévus pour le nouveau siège social au cours de la décennie.

En conclusion finale, nous voulons revenir sur l'utilité d'un meilleur souci des intervenants régionaux, tant par la ventilation des projets et budgets contenus dans les documents de soutien que par des rencontres régionales d'information et remercier à nouveau la commission de nous avoir entendus.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Avant de donner la parole à M. le ministre, j'aime bien m'entendre avec les gens autour de cette table au niveau des deux mémoires qui nous restent. Est-ce que nous continuons après 13 heures de façon à terminer à peu près à 14 heures, 14 h 15 ou si nous allons dîner? Consentement de chaque côté? M. le ministre, la parole est à vous.

M. Bérubé: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, M. le ministre. Je pense qu'il y a objection.

M. Samson: Si on fait ça, on va bousculer l'autre.

Le Président (M. Jolivet): Non, je pense...

M. Fortier: Quand revient-on?

Le Président (M. Jolivet): II n'est aucunement question de bousculer qui que ce

soit. Il reste la ville de Matagami. Il s'agit de continuer et d'arrêter quand on aura terminé. On prévoit que cela pourrait aller jusqu'à 14 heures, 14 h 30, à peu près. C'est le temps normal prévu pour chacun des mémoires.

Une voix: Sans bousculer personne.

Le Président (M. Jolivet): II n'est aucunement question de bousculer quiconque.

M. Bérubé: Simplement que ça bouscule notre lunch. J'ai l'impression que le député de Rouyn-Noranda a faim.

M. Samson: M. le Président, si on veut jouer à cela, de toute façon on a un règlement c'est 13 heures.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je n'ai pas d'objection. Si c'est 13 heures, nous arrêterons à 13 heures. Cela dépendra de vous.

M. Samson: On reprendra à 15 heures.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, la parole est à vous.

M. Bérubé: Je n'ai aucune objection pour autant que je suis concerné. Merci, M. le Président. En fait, vous avez un certain nombre d'éléments qui sont introduits ici et qui sont intéressants, d'abord parce que comme mémoire régional, vous n'avez pas comme tel d'intérêt à défendre sur le plan hydroélectrique. Nous avons eu des interventions régionales ici, mais en général il s'agissait de porter à l'attention de la commission des travaux potentiels dans le secteur hydroélectrique que l'on aimerait voir devancer chez soi, alors que vous avez abordé la question sous un autre angle. Il y a au moins deux points dans les aspects régionaux que vous soulevez: premièrement la notion de tarification et, deuxièmement, la notion de déconcentration. Comme, effectivement, le gouvernement a fait pression sur Hydro-Québec indéniablement pour l'amener à réfléchir au problème du siège social et d'en arriver à une proposition éventuellement et que votre position est essentiellement contraire, en ce sens que, plutôt que de voir un siège social bien centralisé à Montréal, vous aimeriez le voir déconcentré, j'aimerais peut-être que vous développiez un peu cette idée de déconcentration, que vous nous disiez quel genre de services pourraient être offerts en région plutôt que de nous venir du centre. Je pense au niveau peut-être de la facturation. J'aimerais voir un peu la réflexion que vous avez poursuivie de ce côté-là. (12 h 45)

M. Jobin: Sans que ma réflexion ait été poussée très loin, essentiellement, il s'agit de services comme la facturation. On n'a pas besoin d'être à un endroit précis pour envoyer une facture. Cela peut se faire de n'importe où. Les équipements de télécommunication et même de télétraitement des données, je pense, permettent maintenant une relative indépendance de localisation pour ce genre de fonctions. L'exemple qui nous guide, c'est celui du fédéral à Matane, que vous devez bien connaître, où on a un système de vérification des chèques qui ont été encaissés. Ce sont tous les chèques du gouvernement du Canada qui transitent par le bureau de Matane. Il me semble que la vérification des paiements de factures et l'envoi de la facturation pourraient également se faire, soit de Matane, soit de Rimouski, soit de quelque part dans notre région. On n'a pas évalué avec précision quels services pourraient effectivement être déconcentrés. C'est plus pour amener l'idée, mais si jamais la commission manifestait quelque intérêt de ce côté-là, je suis sûr qu'il pourrait y avoir des recherches supplémentaires à faire par le CRD qui a déjà, d'ailleurs, accumulé des données sur l'ensemble des fonctions qui pourraient être déconcentrées dans l'administration publique québécoise.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Bérubé: Vous suggéreriez, en fait, que le gouvernement, dans ses discussions avez Hydro-Québec peut-être, demande qu'Hydro-Québec nous fournisse une analyse des types de services qu'elle offre à la clientèle aussi bien que des services internes nécessaires à son bon fonctionnement comme tel et qu'à la suite de cette analyse elle étudie en même temps les possibilités de décentralisation de tels services, de telle sorte qu'on ait peut-être un peu plus d'information qui nous permettrait de trancher dans le sens peut-être que vous suggérez.

M. Jobin: II nous semble, en tout cas, que cela devrait être surtout les services internes et les services à la clientèle qui doivent être près de la clientèle. Malheureusement, il y en a moins dans notre région qu'il peut y en avoir à Montréal, mais des services internes - je ne parle pas de la gestion du personnel - comme la facturation, des choses comme cela, peuvent, de nos jours, être faits par des systèmes de télématique avec écrans cathodiques et, des relais micro-ondes. Il n'y a pas d'impossibilité là-dedans; c'est même sur le plan physique très facile à organiser. Si le gouvernement décidait de la faire pour sa propre administration - Hydro-Québec est

quand même une masse aussi à déplacer -avec le réseau des constituantes de l'Université du Québec et tout cela, il pourrait peut-être même se développer au Québec une industrie de la télématique qui pourrait compter sur un marché quand même assez intéressant, dès le départ, avec ces transferts de fonctionnaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Bérubé: Le deuxième point, c'est celui des tarifs. C'est un point intéressant que vous soulevez, mais, en même temps, c'est une voix discordante que l'on entend. En effet, nous avons eu de la part d'Hydro-Québec une position en faveur d'un accroissement des tarifs qui suivrait l'inflation ou même irait plus vite que l'inflation pour permettre à Hydro-Québec peut-être de réduire les emprunts et de faire en sorte qu'on n'hypothèque pas l'avenir trop fortement. C'est une position. Vous avez eu de la part des producteurs de gaz des réflexions à savoir que les progressions prévues de la tarification d'Hydro-Québec semblent correctes et ne nuisent pas à leurs capacités concurrentielles, donc, s'en tenir en gros à la stratégie de tarification antérieure.

Un distributeur de gaz, lui, a au contraire suggéré une croissance plus rapide des tarifs d'électricité sous peine de voir le gaz pénétrer moins facilement au Québec particulièrement dans les années qui viennent.

Vous êtes le premier à suggérer une réduction de tarifs d'électricité et en même temps de suggérer qu'on cherche à économiser l'énergie et même qu'on essaie de mettre moins d'argent dans les investissements lourds d'Hydro-Québec, mais davantage d'argent dans les économies d'énergie. Là, je me pose immédiatement une question. En général, on économise sur les choses qui ont de la valeur et quelque chose qui est trop bon marché, qui n'augmente même pas avec le prix de l'inflation, par exemple, pourrait avoir comme conséquence d'inciter les gens à ne pas s'en préoccuper. Cela ne sert absolument à rien d'investir dans l'isolation d'une maison si cela vous coûte plus cher en matériaux isolants et en coûts de main-d'oeuvre que ce que vous économisez en énergie. Donc, il y a un lien entre l'incitation à l'économie d'énergie et les prix. Or, vous nous présentez, en fait, une proposition de réduction régionale de tarifs qui aurait comme objectif - si j'ai compris clairement - de faire en sorte que les tarifs moyens d'énergie, si on tient compte du pétrole, soient finalement comparables dans l'Est avec ce qui se passe dans l'ensemble du Québec. Cela voudrait donc dire une réduction très importante des tarifs d'électricité puisque cela peut représenter 25% ou 27% de l'énergie. Si on veut, avec 27% d'énergie, baisser suffisamment les tarifs pour que, finalement, le coût moyen, ce qui implique le coût moyen sur l'autre 65% ou 70% de l'électricité, cela veut dire une baisse substantielle des tarifs d'électricité. N'y a-t-il pas un danger de surconsommation?

M. Jobin: Je dois vous avouer qu'on n'a pas calculé avec précision exactement les montants que cela représenterait. On ne pense pas que ce soit la seule solution non plus pour équilibrer notre balance énergétique. On avait déjà présenté à M. Joron une série de mesures et d'hypothèses par lesquelles il y avait moyen aussi de réduire le coût des produits pétroliers dans notre région. Cette réduction de tarifs de l'électricité ne nous semble pas être le seul moyen. Aujourd'hui, on préconise celui-là parce qu'on parle surtout du programme d'Hydro-Québec, mais il nous semble que pour ramener notre balance énergétique à un niveau comparable à celui du Québec, c'est un ensemble de mesures qu'il faudrait prendre dont, entre autres, les réductions du prix des produits pétroliers éventuellement en jouant sur la fiscalité des produits pétroliers qui, elle, est contrôlée par le gouvernement du Québec, si je me rappelle bien. Il y a même une loi qui lui permet de fixer un prix maximum pour les produits pétroliers dans tout le Québec ou dans certaines régions. Donc, il y a, là aussi, un lieu où il peut y avoir des interventions qui permettent l'équilibrage de notre balance des paiements sur le plan énergétique, mais on ne pense pas qu'on doive pour autant négliger l'hypothèse électrique dans un cadre général à ce propos.

M. Bérubé: D'accord. Vous verriez, comme autre facteur, la subvention au pétrole ou que cela se fasse directement par une subvention au distributeur...

M. Jobin: Une réduction de la taxe de vente.

M. Bérubé: Ou par une réduction de la taxation. Cela revient exactement au même point, de manière à peut-être trouver un équilibre, plutôt que d'essayer de réduire de façon significative le coût d'électricité qui est déjà bas.

M. Jobin: C'est exact. Et il nous semble qu'il est très difficile d'y parvenir autrement, en termes économiques, à cause de la dispersion des utilisateurs dans notre région. Les coûts de livraison de l'énergie vont toujours être plus grands. Ce n'est pas en accroissant l'efficacité des fournisseurs d'énergie, parce qu'il n'y a pas moyen d'aller plus loin qu'un certain seuil. C'est un vice

de l'occupation de l'espace qui fait que l'énergie nous coûte plus cher qu'ailleurs.

M. Bérubé: Concernant la pénétration du gaz naturel, vous avez souligné que dans les projections de TransCanada PipeLines, on ne prévoyait pas desservir l'Est du Québec essentiellement. On fait même un petit virage vers les Maritimes, très rapide, avant même de se rendre à Rivière-du-Loup, et on évite allègrement le territoire.

Compte tenu que le gouvernement fédéral a annoncé un programme massif de subventions pour la construction du gazoduc jusque dans les Maritimes, puisque la pénétration de ce gazoduc est non rentable et qu'il faut donc le subventionner massivement d'une part et que d'autre part, par une politique de tarification uniforme, on force le producteur de gaz à supporter finalement les coûts additionnels reliés au transport, n'avez-vous pas l'impression qu'à ce moment-là, il y a une discrimination vis-à-vis de l'Est du Québec, à subventionner un gazoduc et une distribution non rentable dans les Maritimes mais en même temps à ne pas le faire pour l'Est du Québec?

M. Jobin: Je dois dire que cet aspect de la question n'a pas été discuté comme tel par les membres de notre conseil d'administration et les opinions que je pourrais avancer là-dessus me sont plus personnelles, sans essayer de faire exprès pour dire le contraire de ce qu'on peut penser que nos administrateurs auraient dit. Mais je pense qu'effectivement, il y a, chez beaucoup de gens dans notre région, un sentiment du type de celui que vous venez d'exposer, de discrimination, surtout que le gazoduc tourne juste lorsqu'il arrive à la frontière. Cela fait quasiment exprès. Il ne vient même pas faire un petit tour.

Cela aussi est relié, dans l'esprit de la plupart des gens, à la question du terminal méthanier à Gros Cacouna, où le sentiment régionaliste est assez fort pour toutes les régions et tous les organismes qu'il y a dans la région sont pour Gros Cacouna qui, de toute façon, attend depuis des décennies qu'il se passe quelque chose. Donc, si on avait le terminal méthanier, ils seraient obligés au moins de rendre le gazoduc jusqu'à Gros Cacouna au minimum, ce serait déjà cela de pris.

D'ailleurs, d'après les calculs qui ont été faits par le secrétariat de l'Office national de l'énergie du Canada, l'an dernier, lors des audiences - je ne me rappelle pas le chiffre exact - la prolongation du gazoduc jusqu'à Matane, étant donné la grosseur des conduites qui seraient requises, ne présentait pas une somme considérable. C'était de l'ordre de $30,000,000 ou quelque chose d'approchant. Je ne parle pas de $30,000,000 de subventions; $30,000,000 de coût de construction, donc ce n'est pas les qros chars encore.

M. Bérubé: La société Trans-Québec et Maritimes, nous a d'ailleurs présenté une carte ce matin. Effectivement, vous avez parfaitement raison, on voit le gazoduc qui, juste avant d'entrer dans l'Est du Québec, fait un joli petit virage sur la droite pour éviter la Gaspésie et ensuite, avec une bretelle, vient longer la frontière de l'Est du Québec pour aller desservir le nord du Nouveau-Brunswick, Bathurst, Dalhousie, mais évite allègrement d'aller desservir la Gaspésie.

Effectivement, on voit très clairement que le gazoduc évite carrément l'Est du Québec, pour aller desservir le nord du Nouveau-Brunswick entièrement, mais sans desservir des régions comme Rimouski, Matane, l'Est du Québec qui, comme vous le savez, avec les annonces qui viennent d'être faites, vont connaître un essor industriel assez spectaculaire puisqu'on prévoit pratiquement 1100 emplois, 1028 emplois directs dans le secteur manufacturier, au cours des deux ou trois prochaines années. Il faut s'attendre, effectivement, à un essor industriel très important, sans compter d'ailleurs tout le développement minéral que je me ferai fort d'expliquer dans quelques semaines à toute la région. Je pense qu'il faut s'attendre à une expansion économique spectaculaire. Il faudrait absolument qu'on ait le gazoduc de manière à desservir nos industries.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Merci, M. le Président. Je voudrais juste vous faire préciser votre pensée sur toute la question du développement régional. Nous avons eu beaucoup de mémoires qui ont traité de développement régional: la Caisse d'entraide économique de Portneuf, cet après-midi, on va entendre Matagami, Sept-Îles, votre région. On sent justement que les régions qui bénéficient d'un investissement massif sont bien heureuses parce qu'elles cherchent à avoir des retombées. Celles qui ne bénéficient pas de ces investissements massifs cherchent à connaître quel sera l'impact d'un investissement de $55 milliards, plus toute la recherche qui n'est pas incluse dans ce chiffre sur notre région. C'est la question que vous posez dans votre mémoire, qui m'intéresse hautement. Comme vous le savez, ce n'est pas la mission première d'Hydro-Québec de faire du développement régional. Il y a un Office de planification et de développement du Québec. D'ailleurs, votre mouvement, j'en suis sûr, a des relations suivies avec cet office. La question que j'aimerais vous poser est celle-ci: si je

comprends bien, votre désir aurait été qu'avec la publication des documents d'Hydro-Québec une étude soit faite justement pour permettre aux différentes régions du Québec de connaître quel impact ces investissements auraient sur elles. Hier, la Chambre de commerce de Montréal justement a parlé des retombées économiques qu'un tel investissement pourrait avoir. On parlait peut-être un peu moins de développement régional. Je crois que votre intervention vient dans le même sens, dans le sens de favoriser un développement économique. Vous parlez des économies nouvelles, en particulier. Il semble difficile, parce que les documents n'ont pas été fournis par le gouvernement, même si le gouvernement avait en main les documents d'Hydro-Québec depuis un an, de mesurer quelle serait la part des choses dans les régions qui ne bénéficient pas d'investissements comme tels. Est-ce que c'était bien là le sens de votre question?

M. Jobin: Oui. De fait c'est une intervention qui peut porter sur deux ou trois objets. Le premier, c'est qu'il n'y a pas de présentation régionale. Dans les documents qu'on a eus, c'est très difficile de trouver des données régionales. On parle un peu des Îles-de-la-Madeleine, parce qu'il s'y passe des expériences particulières. En dehors de cela, on parle de grands barrages, de petits barrages, mais on ne sait jamais lesquels ce sont et où ils sont. Donc, il n'y a pas de données régionales. Même sur le programme, on ne sait pas ce que cela donne dans quelque région du Québec que ce soit, à moins de bien connaître le réseau électrique du Québec. (13 heures)

Deuxièmement, il n'y a pas non plus, comme vous le mentionnez, d'étude sur les retombées économiques régionales de ces programmes d'investissement gui, quand même, totalisent $55 milliards si on prend l'ensemble du programme et au moins $40 milliards dans les équipements de production seulement. Il n'y a pas de présentation des retombées économiques régionales de cela. On sait que notre région, en termes du nombre de travailleurs qui sont à la Baie James, après Montréal et Québec et avant l'Abitibi qui, pourtant, est à la porte de la Baie James, est le troisième fournisseur de main-d'oeuvre à la Baie James, ce qui est quand même très loin de chez nous, en termes de distance. Donc, concernant les programmes d'investissements massifs dans la construction de barrages dans les régions nordiques, on peut prévoir que, compte tenu de l'expérience accumulée par nos travailleurs, il y aurait des retombées intéressantes pour eux. C'est une situation qui favorise encore le travail extra-régional avec tous les problèmes sociaux et familiaux que cela pose et qui n'entraîne pas comme tel, à part des effets de revenus finalement assez faibles, de développement économique régional.

L'autre aspect sur lequel, en termes de développement régional, on pense qu'Hydro-Québec pourrait jouer un rôle, c'est la question de la tarification différentielle. Là-dessus, on ne pense pas que ce soit le seul intervenant en ce qui concerne le bilan énergétique de nos régions, mais que cela peut en être un très important.

M. Fortier: Mais croyez bien qu'on déplore...

Le Président (M. Jolivet): M. le député. M. Fortier: ...ce manque d'analyse...

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Fortier: ...par rapport au plan d'investissements et que cela aurait permis un débat peut-être plus éclairé.

M. le Président, je voudrais soulever un point de rèqlement. Il est 13 heures. Je crois qu'on a discuté, il y a quelques minutes, à savoir si on pourrait continuer. Vous avez demandé le consentement. Après discussion avec mes collègues, on est arrivé à certaines recommandations. D'une part, plusieurs d'entre nous ont oeuvré ici toute la semaine et, bien sûr, une des options, c'est de faire en sorte que l'on puisse retourner chacun dans nos domiciles le plus tôt possible. D'autre part, il faudrait rendre justice à ceux qui ont voulu présenter des mémoires et ne pas les bousculer. Nous avons encore à entendre, en plus de terminer l'audition du Conseil réqional de développement de l'Est du Québec, le Conseil régional de l'environnement de l'Est du Québec et la ville de Matagami.

J'aimerais faire une proposition. Au lieu de revenir à 15 heures, M. le Président, que l'on revienne plutôt vers 14 h 30, s'il n'y avait pas d'objection. Alors, cela nous permettrait de terminer plus tôt, comme plusieurs d'entre nous le voudraient, mais, d'autre part, faisons en sorte que l'on rende justice à ceux qui voudraient bien se présenter et avoir le bénéfice d'autant de questions que ceux qui ont présenté des mémoires plus tôt dans la journée.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je vais, cependant, faire mention d'une chose. Il nous reste seulement, en plus de l'intervenant qui est devant nous, la ville de Matagami. Quant à l'autre organisme, c'est un dépôt qui a été fait. Donc, il ne reste qu'un seul mémoire.

M.. Fortier: Mais quand même la ville de Matagami est située dans le Nord-Ouest

du Québec et c'est un secteur très important pour nous. À 14 h 30, cela nous irait.

Une voix: Est-ce que, M. le Président...

M. Bérubé: J'ai une activité à 14 h 45 malheureusement, de 14 h 45 à 15 heures. C'est un peu compliqué. À moins que vous me permettiez de m'absenter pendant quinze minutes.

M. Samson: Ce n'est pas nous qui avons décidé de siéger aujourd'hui, c'est vous.

Une voix: On peut le permettre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je pense que...

M. Desbiens: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Dubuc.

M. Bérubé: On peut suspendre à 13 heures et revenir à 15 heures, comme on l'a souligné tantôt. Je n'ai pas d'objection, d'une façon ou d'une autre. J'ai accepté la proposition qui nous venait de l'Opposition hier.

M. Desbiens: Est-ce que par sa proposition, le député d'Outremont veut dire qu'on termine quand même l'audition du mémoire actuel ou si on arrête immédiatement?

M. Fortier: Je ne crois pas. Ce qu'on aimerait, c'est de...

M. Desbiens: Terminer immédiatement.

M. Fortier: ...de suspendre maintenant et de revenir à 14 h 30.

Une voix: Ce n'est pas 14 h 30, c'est 15 heures.

M. Fortier: Enfin, 14 h 30 est une proposition, sinon c'est le règlement qui s'appliquera. Mais si c'était 14 h 30, cela nous permettrait de finir plus tôt. Je pense que certains d'entre nous voudraient bien terminer un peu plus tôt parce qu'on a eu une semaine très chargée.

M. Bérubé: Je n'ai pas d'objection à m'absenter à 14 h 45, mais malheureusement, ce ne sera pas très gentil pour la personne qui va témoigner. C'est juste cela.

Le Président (M. Jolivet): 15 heures? Donc, retour à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 04)

(Reprise de la séance à 15 h 7)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît;

La commission permanente de l'énergie et des ressources est à nouveau réunie pour l'étude des mémoires sur le plan d'équipement et de développement d'Hydro-Québec 1981-1990.

Au moment où nous nous sommes quittés, la parole était au député d'Outremont qui posait ses questions au représentant du Conseil régional de développement de l'Est du Québec, M. Pierre Jobin. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. Jobin, merci pour votre réponse. Lorsqu'on s'est quitté, on discutait du développement régional et de la nécessité d'évaluer ses programmes non pas uniquement en fonction de l'énergie, de la consommation d'énergie ou de la production d'énergie, mais en fonction également des retombées économiques et non pas uniquement dans les régions où les investissements se font, mais également de la nécessité de chercher à voir si ces investissements ne pourraient pas créer des emplois, des retombées économiques dans les parties de la province où les investissements ne se font pas d'une façon directe.

J'ai remarqué, par ailleurs, que vous traitez dans votre document de différentes formes d'énergie. Justement, vous faites la remarque qu'il n'y a peut-être pas assez d'investissements dans les énergies nouvelles. Entre autres, vous faites allusion à la biomasse. J'imagine que, dans votre région, c'est un facteur important. Nous avons fait des représentations dans ce sens-là. Il semble bien qu'il y ait un travail qui peut être fait, davantage d'investissements qui pourraient être faits d'autant plus que si on s'appuyait en plus sur les deniers disponibles au Québec, sur les fonds qui peuvent être obtenus d'Ottawa, on pourrait développer des programmes très importants de ce côté-là.

Peut-être pourriez-vous nous dire si votre comité a considéré certaines de ces énergies nouvelles et lesquelles auraient le plus de chance de se développer? La remarque que vous avez faite était-elle générale ou si vous avez des intérêts bien particuliers dans ce dossier?

M. Jobin: Celle à laquelle on pense le plus, indépendamment des éoliennes aux Iles-de-la-Madeleine, qui sont vraiment un cas particulier, c'est évidemment la question du méthanol à partir des sous-produits du bois ou, éventuellement aussi, si le terminal méthanier se réalisait à Gros Cacouna, à partir du gaz naturel qui, lui aussi, peut être transformé en méthanol, ce qui rend son utilisation plus intéressante à cause des facilités de transport et de la polyvalence

plus grande que cela permet, que de ne l'avoir qu'à l'état gazeux. Donc, la production de méthanol pourrait être envisageable selon ces deux formules dans notre région, spécialement, si on tient compte - là-dedans, je vous avoue que je ne suis pas un expert - que le CRD s'est intéressé rapidement à cette question de la possibilité de cultiver des essences comme les aulnes, par exemple, à croissance très rapide qui, semble-t-il, donnent un rendement méthanier intéressant. Il y a des chercheurs à l'Université Laval qui font du travail là-dessus tant à Manic qu'à la baie James sur la croissance des aulnes et il semble que les conditions géoclimatiques de notre région se prêteraient assez bien à une culture de ces espèces. Cela donne des rendements de quelque chose comme cinq tonnes anhydres à l'heure avec une rotation de quatre ans. Donc, il y a vraiment moyen d'avoir une production forestière suffisante pour alimenter des usines.

Le problème, c'est que, sur le plan technologique, il semble que l'on n'ait pas encore mis au point tout à fait des formules qui permettent de traiter le bois pour en faire du méthanol sans qu'il y ait des problèmes de chauffage, de poussière, etc. Il faut absolument éliminer toutes les particules, si on veut s'en servir dans des moteurs. Mais cela ne doit pas être d'une complexité telle que cela ne puisse être réalisé si on consacre à la recherche sur ces questions les montants nécessaires. Dans la mesure où cela utiliserait une production régionale renouvelable, cela pourrait être assez intéressant dans notre région.

M. Fortier: Je voulais juste conclure. Somme toute, à part des investissements qui sont faits par Hydro-Québec dans le développement des éoliennes aux Îles-de-la-Madeleine, il y a peu de retombées économiques pour votre région.

M. Jobin: II y a ça et, éventuellement, dans les grands chantiers, là où on emploie de la main-d'oeuvre régionale, c'est une retombée économique intéressante, mais cela amène des problèmes sociaux, familiaux, etc., et les seuls effets économiques sont finalement des effets de revenu et c'est assez mince.

M. Fortier: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. M. Jobin, je remarque que, dans votre mémoire, vous êtes très sensibilisé à la question de conservation de l'énergie. Vous en parlez. Vous faites référence aux conditions de notre société qui nous porteraient à faire attention à ce secteur du développement énergétique du Québec. Vous faites aussi référence à l'aspect écologique. Je suis heureux de voir que, dans votre mémoire, vous portez une attention particulière au domaine de la conservation de l'énergie. Ce qui arrive, c'est que, des fois, beaucoup de gens en parlent, le gouvernement en parle, on fait des suggestions, on en parle, on en discute, mais on ne passe pas à l'action concrète. Pensez-vous qu'on doive conserver le maximum d'énergie possible avant d'investir dans des projets de production d'énergie? Pensez-vous qu'on devrait faire le plus grand effort possible dans ce domaine et que, si on le faisait, cela réduirait nos investissements dans la production de projets énergétiques, soit hydroélectriques, soit gaziers, soit autres, pour baisser la facture du contribuable? Est-ce la position que vous prenez?

M. Jobin: Oui, c'est, d'une part, pour baisser la facture du contribuable dans la mesure du possible et, d'autre part, parce que les ressources, qu'on les prenne au Québec, au Canada ou sur des marchés extérieurs du Canada, sont des ressources assez considérables. Quand on parle d'un programme de $55 milliards sur dix ans, c'est très important. Ces ressources ne sont donc plus disponibles pour d'autres fins qui pourraient contribuer, elles aussi, et peut-être plus au développement économique du Québec dans son ensemble et peut-être des régions qui en ont le plus besoin en particulier. En ce sens-là, si on parvient à économiser l'énergie ou à en faire le stockage par des procédés qu'il reste à mettre au point, à diminuer la nécessité d'emprunt ou d'autofinancement d'Hydro-Québec et, finalement, la facture énergétigue globale dans le domaine de l'électricité, on pourrait affecter ces ressources à des fins qui pourraient être plus productives. (15 h 15)

M. Ciaccia: Je suis heureux de voir votre approche. Je voudrais porter à votre attention une étude qui a été faite sur le potentiel d'économie d'énergie dans le secteur résidentiel au Québec et sur laquelle le gouvernement s'est basé pour faire l'annonce d'un programme de conservation d'énergie. Je voudrais avoir vos commentaires sur les conclusions et sur les recommandations ou sur les décisions du gouvernement. Il y a eu une étude qui a été faite par une compagnie qui s'appelle Scanada Consultants Ltd et, à la suite de cette étude, le gouvernement a annoncé dans le discours inaugural du premier ministre l'automne dernier qu'il y aurait un programme d'économie d'énergie et il a estimé cela à un montant de $1 milliard. L'étude avait démontré que, si on dépensait plus que le gouvernement a annoncé, on

pourrait effectuer plus d'économies. Autrement dit, ce que le gouvernement a annoncé pourrait nous apporter des économies d'environ 21%, mais l'étude a démontré comment on pourrait effectuer 41% d'économie en dépensant $900,000,000 ou $1 milliard de plus. Cela veut dire, en effet, 41% de moins sur la facture du contribuable dans le secteur résidentiel.

Il y a d'autres conséquences d'un programme de conservation de l'énergie. On ne baisse pas seulement la facture du contribuable. On crée des emplois. Vous parliez du développement régional, de la création d'emplois sectoriels. Vous avez dit que dans votre région beaucoup de travailleurs vont à la Baie James et vous auriez aimé suggérer des moyens pour créer des emplois dans votre région. Justement, dans cette étude, on parle de l'efficacité des fournaises à l'huile et on démontre comment, en dépensant un certain montant d'argent, on peut fournir des équipements non seulement pour économiser de l'énergie, mais créer des emplois. On dit ici: Si le marché de la rénovation des fournaises se confirmait, le Québec pourrait aisément adopter les mesures nécessaires pour les faire même manufacturer par l'industrie québécoise. Non seulement il y a de la conservation d'énergie, mais des retombées économiques telles que la création d'emplois, la création d'autres industries au Québec.

Je voudrais avoir vos commentaires sur la décision du gouvernement qui, plutôt que de prendre toutes les recommandations et d'annoncer ce programme au complet, a décidé de le couper en deux et de mettre en vigueur seulement la moitié du programme. Croyez-vous, comme contribuable représentant d'une des régions où on pourrait bénéficier de ces économies d'énergie, où on pourrait bénéficier de la création d'emplois, que le gouvernement devrait pousser au maximum la conservation d'énergie et non seulement annoncer la moitié du programme qui a été recommandé, mais l'adopter dans son ensemble pour créer plus d'économie d'énergie et créer plus d'emplois dans les différents secteurs qui seront affectés?

M. Jobin: Un peu comme j'ai répondu à M. Bérubé ce matin sur une autre question, je dois souligner que les membres de notre conseil d'administration n'ont pas été saisis de cette dimension et que cette étude ne nous était pas connue au moment où on a élaboré notre mémoire.

Donc, ma réponse, comme celle que j'ai fournie à M. Bérubé ce matin, risque d'être plus personnelle que collective, même si je peux essayer de tâter la température.

Notre mémoire dit que toutes les économies d'énergie, que ce soit par une diminution de la consommation, l'amélioration technique de l'appareil de chauffage, par exemple, ou éventuellement par le stockage d'électricité, nous semblent des mesures qu'on doit mettre de l'avant de façon prioritaire pour conserver le plus possible les ressources financières qu'on dépenserait - pas qu'on gaspillerait, mais qu'on dépenserait - à construire des barrages, les utiliser à d'autres fins, pas forcément dans le domaine énergétique, et éventuellement pour équilibrer peut-être aussi la facture énergétique interrégionale.

Donc, en ce sens-là, sans être des experts et sans pouvoir me prononcer pour le CRD sur l'étude à laquelle vous faites allusion, l'esprit général de notre mémoire est le suivant: Économisons d'abord l'énergie de façon à dépenser le moins possible sur des immobilisations.

M. Ciaccia: Merci. Si on vous faisait parvenir une copie de cette étude, peut-être que vous pourriez la soumettre à votre groupe de travail et faire les représentations qui s'imposent auprès du gouvernement?

M. Jobin: Oui, et je pense que le CRD serait intéressé effectivement à avoir copie de ce document.

M. Ciaccia: Et, si c'est possible, on aimerait avoir vos commentaires.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Jobin. Au nom des membres de cette commission, je tiens à vous remercier de la présentation de votre dossier.

J'inviterais le dernier groupe de la journée à intervenir au niveau des mémoires, la ville de Matagami, représentée par M. Réjean Choquet, gérant-greffier.

M. Choquet, vous pouvez commencer.

Ville de Matagami

M. Choquet (Réjean): Merci, M. le Président.

M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, le Conseil de ville de Matagami tient à vous remercier de lui donner l'occasion de faire certaines représentations à la présente commission. Comme vous le savez, notre ville est directement touchée par le projet NBR qui fait partie de La stratégie de la décennie 80 d'Hydro-Québec et on voudrait profiter de l'occasion qui nous est offerte pour vous faire connaître nos préoccupations pour l'avenir.

Parmi les personnes présentes qui n'ont pas la chance de connaître Matagami, je peux vous dire que Matagami est une ville minière située au sud du projet de la Baie James et qui compte actuellement une population de 4000 habitants.

Dans le passé, Matagami fut touchée par le projet Baie James, lors de l'ouverture

de la route donnant accès directement aux chantiers et, aujourd'hui, nous bénéficions en partie de quelques retombées par l'implantation de services et sociétés se rapportant audit projet.

Matagami possède déjà des structures et services en place, mais nous voulons nous préparer pour ne pas nous retrouver dans la même situation qu'en 1972, alors que Matagami s'est vue envahie par des entrepreneurs, commerçants et gens venant de tous les milieux et ce, sans en avoir été avisée dans un délai raisonnable.

À ce jour, le conseil de ville a rencontré des représentants de la Société d'énergie de la Baie James pour discuter du projet NBR. À la suite de discussions, un comité a été formé des membres du conseil de ville, de la Commission d'urbanisme, de la chambre de commerce locale et des représentants de la Société d'énergie de la Baie James et, déjà, des informations sont échangées et nous croyons que c'est indispensable pour un bon fonctionnement. La ville espère que, dans l'avenir, cela se poursuivra, et encore plus intensément une fois le projet accepté.

Même avec la création de ce comité, nous croyons opportun de vous sensibiliser à nos préoccupations et revendications pour vous permettre de mieux analyser notre situation face à la réalisation de tels projet et ce, quels que soient les délais de réalisation dudit projet.

Voici donc les points sur lesquels nous tenons à vous sensibiliser.

Premièrement, le rehaussement de la rivière Bell dans le secteur urbanisé. Cette rivière, qui longe en très grande partie le secteur urbanisé du territoire, est touchée par la création du réservoir Soscumica-Matagami, qui provoquera un effet de rehaussement des eaux d'environ trois mètres et, par conséquent, causera le déplacement de bâtiments résidentiels, commerciaux et industriels, en plus des usines de traitement des eaux potables et usées de la ville et de l'usine de pompage de la mine Noranda Ltée.

Le déplacement. Ce rehaussement de la rivière affecte plus ou moins soixante résidences qui sont construites, dans la majeure partie des cas, depuis la création de la ville. Bien entendu, en étant déplacées, elles perdront leur emplacement le long de la rivière Bell et ainsi perdront leur vue sur la rivière.

Actuellement, les contribuables de ce secteur se rendent à pied au centre-ville pour faire leurs commissions de tous les jours, mais dans l'avenir le trajet sera plus long et leur occasionnera l'utilisation probable d'un véhicule.

En ce qui concerne les commerces, ils pourront être déplacés à l'entrée de la ville. Actuellement, il n'y a pratiquement aucun service d'aménagé.

Pour ce qui est des industries, elles devront être déplacées à l'extérieur de la ville où il n'y a pas de rues, donc pas d'aqueduc ni d'égout. Jusqu'à aujourd'hui, elles ont toujours bénéficié des services de base, soit l'aqueduc, les égouts, rues asphaltées, etc.

Au niveau des infrastructures municipales, les usines de traitement des eaux et le garage municipal, incluant la caserne des incendies, elles devront être déplacées dans d'autres secteurs.

En ce qui concerne les réseaux d'aqueduc et d'égout dans le secteur remblayé, ils devront être reconstruits dans certains cas et dans d'autres, non, et des rues devront être réaménagées à l'autre extrémité de la ville.

Plusieurs autres terrains et bâtiments sur le territoire sont affectés et devront eux aussi être pris en considération lors des déplacements.

Tous ces déplacements affectent très sérieusement le centre-ville commercial, de telle façon qu'il ne sera plus situé au centre-ville, mais à une extrémité du secteur urbanisé et que cela occasionnera l'ouverture ou le déplacement de commerces dans des secteurs non prévus initialement.

Les annonces dans les journaux, les séances d'information, la commission parlementaire, les ouï-dire, beaucoup d'information est véhiculée. Les gens savent que les projets sont en marche et qu'ils sont sujets à déménager et ils se posent beaucoup de questions. Quand cela va se faire? Est-ce que je suis appelé à être relogé? Qui va être affecté? Combien vais-je recevoir pour mon relogement? Est-ce que c'est négociable? Est-ce que c'est sérieux, ce projet?

Cette situation, vous comprendrez comme moi, crée un climat d'insécurité dans la population. Il y a lieu, dès que les décisions seront prises en ce sens, que les gens intéressés soient contactés pour les rassurer. Vous savez, déménager des castors, c'est une chose, déménager des gens, c'est autre chose.

Environnement dans le secteur urbanisé. Bien entendu, par le déménagement des bâtiments, il est prévu de réaménager les berges de la rivière, mais une attention toute spéciale devra être apportée pour garder un cachet local et garantir au maximum la sécurité des contribuables qui ne seront pas déménagés, mais qui sont touchés par le rehaussement de la rivière. De ce côté, nous comptons sur la bonne collaboration du gouvernement pour encourager fortement l'aménagement des berges et des secteurs affectés pour leur redonner un environnement naturel.

Le zonage. Comme il en est fait mention précédemment, beaucoup de bâtiments seront déplacés et, bien entendu, des axes routiers seront affectés en

conséquence et Matagami, qui est en construction depuis 1962, verra changer son plan d'urbanisme en profondeur. Au cours de 1979, une commission d'urbanisme a effectivement été mise sur pied pour repenser la réglementation et les plans d'urbanisme pour tout le territoire, mais vu La stratégie de la décennie 80, les travaux de la commission d'urbanisme, ainsi que de l'urbaniste-conseil se voient donc tous remis en question, à tel point que le plan est adopté en fonction de la situation actuelle et que nous devrons reprendre le tout lorsque nous aurons en main le plan définitif approuvé pour le remblayaqe dans le secteur inondé et que nous aurons connu tout l'impact du projet. Entre-temps, la ville a prévu une zone de campement temporaire pour recevoir les entrepreneurs de passage. Déjà là, vous pouvez remarquer la bonne volonté de la ville de recevoir les gens sur son territoire et non à l'extérieur.

Développement économique et social. Comme on peut le remarquer dans La stratégie de la décennie 80, le projet de développement de cette région s'étend sur plusieurs années et aura un impact certain dans toute la province. Nous voulons nous attarder surtout sur le développement régional et local. Nous pensons que notre développement sera considérablement affecté par ce projet et que nous bénéficierons, dans une bonne mesure, des retombées. Cela s'explique par notre situation géographique, par la similitude de nos ressources naturelles, de la disponibilité des services offerts et du potentiel des ressources humaines.

Il existe présentement des industries se rapportant aux travaux qui sont appelés à être réalisés sur le territoire de la Baie James et nous vous demandons d'encourager fortement ces industries et compagnies à participer activement au développement de notre localité. C'est pourquoi nous vous suggérons d'inventorier nos industries et entreprises locales.

Les compagnies existantes sont disposées à faire parvenir à qui de droit les services qu'elles sont en mesure d'offrir. (15 h 30)

De plus, tout devrait être mis en marche pour favoriser la formation et le perfectionnement des travailleurs de la région de l'Abitibi et nous comptons sur les programmes de notre gouvernement pour ce faire.

Services à Matagami. Nous savons que, pour réaliser un projet de cette envergure, la Société d'énergie de la Baie James devra se doter de plusieurs personnes et qu'il devra y avoir des déplacements fréquents pour assurer une bonne coordination et surveillance des travaux.

Matagami possède déjà les services de base d'une ville bien organisée et est prête à recevoir des gens et des infrastructures pour assurer un bon fonctionnement et un bon suivi lors de la réalisation des travaux. Nous croyons qu'il serait souhaitable que des permanents du projet prennent racine à Matagami. Matagami a la seule route d'accès pour le projet de la Baie James, un aéroport déjà aménagé, des services essentiels, de l'espace d'aménagement, etc. La porte est ouverte.

L'implantation des chantiers de travail. Lors de la réalisation des travaux, il devra nécessairement y avoir des chantiers d'aménagés pour héberger les travailleurs de la construction et nous voulons que, dans le mesure du possible, ce genre de chantier n'existe pas aux abords des limites de la ville, mais dans la ville même toujours dans la mesure où la chose est possible. La ville de Matagami est disposée à négocier et espère que cette demande sera prise en considération.

Pour conclure, la ville de Matagami est pour le développement de la province et pour le mieux-être des Québécois. Mais nous vous demandons de prendre en considération nos revendications et commentaires afin que tous les Québécois puissent bénéficier de ce projet. Nous vous remercions, M. le Président et messieurs les membres de la commission, de nous avoir consacré le temps nécessaire pour faire connaître la position de Matagamiens.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. Choquet. La parole est à M. le ministre.

M. Bérubé: En fait, nous avons là un beau cas, peut-être un peu semblable à celui que nous avons eu hier dans le cas de Portneuf, d'une municipalité qui va vivre aux abords d'un vaste projet hydroélectrique au cours des dix prochaines années et qui cherche à s'ajuster. Dans le cas de Portneuf, il a semblé que les relations entre Hydro-Québec et la municipalité étaient heureuses et qu'on a réussi finalement à trouver des terrains d'entente sur la façon de faire les aménagements de manière à avoir un minimum d'impact environnemental résultant du projet. Dans le cas plus particulier de Matagami, j'aimerais savoir quel est l'état des échanges, des relations, la fréquence des contacts que vous avez. Avez-vous lieu d'être satisfaits de ces échanges?

M. Choquet: Oui, jusqu'à maintenant, comme j'en ai fait mention, il y a un comité de formé, à Matagami, on l'appelle le comité NBR, composé de représentants de Matagami, de représentants de la Société d'énergie de la Baie James. À l'heure actuelle, il se fait des échanges pour voir l'implication au niveau de l'inondation surtout parce que cela nous donne 25% du secteur urbanisé inondé. Cela se discute, mais la SEBJ est la gérante du projet, si on comprend bien la structure.

Pour la ville, cela implique des déboursés. À l'heure actuelle on peut dire qu'on est satisfait des relations qui existent, mais cela va impliquer des déboursés assez considérables au niveau de la ville. D'accord, la Société d'énerqie de la Baie James a des spécialistes pour préparer des relevés techniques sur notre territoire et tout ça, mais il peut y avoir des retombées à long terme et on n'a pas le personnel nécessaire pour faire ces études. C'est la même chose au niveau du zonage et de tout ça. Tant et aussi longtemps que des budgets ne seront pas adoptés, cela implique toujours des déboursés pour la ville, pour les Matagamiens. Cela nous restreint peut-être dans nos démarches à ce moment-ci.

On serait peut-être intéressés à approfondir certains points, mais cela implique des déboursés assez sérieux. Jusqu'à maintenant, on peut dire que c'est acceptable comme relations, cela va bien.

M. Bérubé: On me dit qu'il y a une firme St-Amant, Vézina, Vinet et Brassard, je crois, une firme de Val-d'Or, qui a fait des études un peu plus détaillées sur l'impact de la hausse du niveau de l'eau dans le lac Matagami sur la ville comme telle. D'abord, vous avez obtenu copie de ces études. Deuxièmement, est-ce que vous avez été en mesure d'évaluer l'impact, vu que vous semblez, dans votre mémoire, indiquer que les gens nagent dans l'inconnu le plus total? Ils n'ont pas d'idée de ce que seront les cotes de hauteur d'eau, des travaux correcteurs qui devront être accomplis et, par conséquent, tous les gens se demandent s'ils vont être expropriés ou s'ils ne le seront pas. Avez-vous présentement assez d'information permettant de répondre à ces questions que les citoyens vous posent?

M. Choquet: Justement, la firme Saint-Amant et Vézina a déposé un rapport technique pour les implications. Il y a quatre options possibles de proposées. La SEBJ propose l'option B; nous autres, nous ne le savons pas encore. C'est justement le point que j'ai soulevé tantôt. Pour être en mesure de connaître l'impact direct pour Matagami ils font des recommandations, mais si on veut faire une analyse plus technique avec des ingénieurs, cela va impliquer des déboursés. À cette étape-ci, si on se fie aux ingénieurs Saint-Amant, Vézina et Brassard et sur la SEBJ, ils favorisent un coin en particulier; on a délimité les maisons qui devaient être relocalisées et tout cela. De notre côté, ce n'est pas qu'on n'a pas confiance à la Société d'énergie ou à Saint-Amant et Vézina, mais on voudrait avoir la possibilité de faire des études de ce côté-là, nous aussi.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Bérubé: Cela implique en gros combien de maisons délogées par le projet, du moins dans l'étude de Saint-Amant?

M. Choquet: Initialement, on parlait de 80 maisons, incluant les maisons mobiles, mais, depuis le temps, il y a eu 16 ou 18 maisons mobiles qui ont été déménagées. Cela inclut aujourd'hui une soixantaine de maisons.

M. Bérubé: Et combien sont des maisons mobiles?

M. Choquet: II en reste peut-être 4 ou 5, pas plus que cela.

M. Bérubé: Pas plus que cela.

M. Choquet: Les autres, ce sont des résidences construites là depuis une dizaine d'années au minimum. Dans la majeure partie des cas, les maisons appartiennent à la mine Noranda Ltée, mais encore là il y a des particuliers qui ont des propriétés dans ces secteurs. C'est en plus de tout le secteur de la rue Nottaway où il y a des industries et des commerces, des entreprises de la Société de développement de la Baie James, des bureaux de la Société d'énergie et de la municipalité de la Baie James et des entrepreneurs locaux, le garage municipal, en fin de compte, un paquet de choses, les usines de traitement des eaux. On relocalise le secteur urbanisé dans une autre partie de la ville complètement. On est obligé de refaire un plan de zonage pour déplacer les axes routiers. On va avoir un remblai. Comment sera-t-il aménagé? C'est pour cela qu'on a demandé d'avoir la collaboration du ministère de l'Environnement de ce côté-là. Là, actuellement, il n'y a pas de problème d'aménagement de berges, c'est naturel. On n'a pas de problème avec les niveaux d'eau, mais avec l'implantation du projet, on relocalise des réseaux d'aqueduc et d'égout. Les stations de pompes devront être installées et tout cela. C'est très technique, la relocalisation et on n'a pas le potentiel nécessaire à ce moment-ci.

M. Bérubé: Avez-vous des engagements de la SEBJ disant qu'elle va défrayer le coût de ces modifications?

M. Choquet: Oui. On a même commencé à en discuter dans le comité NBR, entre autres. Des idées sont lancées. Il y aura peut-être la formation d'une corporation incluant la SEBJ et le conseil de ville. Il n'y a pas d'idée arrêtée de ce côté-là. C'est notre première expérience. Mais il y a des échanges de faits de ce côté-là.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je remercie d'abord M. Choquet d'être venu nous rencontrer au nom de la ville de Matagami et de nous avoir fait part des préoccupations de cette ville relativement au projet NBR. Évidemment, suivant le tableau que nous ont brossé Hydro-Québec et la SEBJ au début de cette commission parlementaire mardi dernier, ce sont là des travaux qui débuteront vers 1992. C'est une phase de travaux qui n'est pas encore totalement acceptée, si j'ai bien compris. Jusqu'en 1985, ce sont des travaux acceptés, mais, de 1985 à plus loin, ce sont des projections qui pourraient peut-être faire l'objet de révision d'ici quelques années On ne nous l'a pas certifié, si j'ai bien compris. Je vois le président d'Hydro-Québec qui me fait signe que c'est bien cela.

Ceci dit, M. Choquet, tenons pour acquis qu'Hydro-Québec irait de l'avant avec ce projet. Vous auriez alors des problèmes qui seraient soulevés à la ville de Matagami. J'essaie de synthétiser. La consultation devrait devenir extrêmement utile et nécessaire pour une bonne harmonisation des relations. Évidemment, vous suggérez que les eaux de la rivière Bell pourraient être élevées d'environ trois mètres, soit une dizaine de pieds. C'est considérable, surtout au bord d'une ville semblable et cela pourrait vous obliger à relocaliser des résidences, des commerces et des industries, à remettre en question les infrastructures municipales, à faire le réaménagement de rues, le déplacement du centre-ville, ce qui n'est pas peu dire. Dans le cas d'une ville, déplacer son centre-ville, c'est un problème assez important.

Vous nous parlez de l'incertitude de la population à la suite de certaines déclarations publiques, j'imagine, de ce qui se dit à cette commission et de ce qui s'est dit avant. Compte tenu de ce qui vient d'être dit - parce que je ne savais pas que vous aviez déjà en main des études d'ingénieurs qui offraient un choix de quatre options - ne sachant pas, au moment où on se parle, quelle serait la meilleure des options à retenir et comme cela doit se faire en collaboration avec la SEBJ, j'imagine, avez-vous déjà, à la ville de Matagami, pris des dispositions pour que le développement futur, à partir de maintenant, se fasse dans un territoire donné qui ne serait pas celui assujetti à une future inondation? Dans un premier temps, avez-vous pris ce genre de mesures ou vous apprêtez-vous à les prendre?

Le Président (M. Jolivet): M. Choquet. M. Choquet: C'est au chapitre sur le zonage. Je crois que c'est le chapitre 4 dans le document. Actuellement, nous avons refait le plan et le règlement d'urbanisme au complet. Il est justement en période d'approbation; cela va être lundi et mardi prochain. C'est un nouveau plan d'urbanisme pour tout le territoire de Matagami. Ce qui a été fait en réalité, c'est qu'on a - le mot est peut-être... - gelé le territoire tant et aussi longtemps que l'option finale ne sera pas retenue, de remblayage, ou l'option A, B, C ou D.

Donc, la première idée du conseil de ville là-dessus, c'était qu'en 1980, le mandat qui avait été donné à l'urbaniste-conseil et à la commission d'urbanisme était de repenser tout le plan d'urbanisme pour tout le territoire. Mais, au cours de l'année 1980, on a eu des rencontres, on a eu de l'information avec des gens de la SEBJ surtout et ils nous ont dit: II y a le projet NBR, il y a des possibilités d'inondation, et tout cela. (15 h 45)

Ce qui est arrivé, c'est que le conseil de ville et la commission d'urbanisme ont dit: On va zoner, on va refaire notre plan de zonage pour redéfinir nos zones actuelles et l'essentiel à court terme. Et, une fois que cela sera défini pour l'option retenue, à ce moment-là, on fera une étude complète de notre plan d'urbanisme pour l'ensemble du territoire. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Samson: Oui. Comme vous êtes obligés de refaire ce travail, sur une base au moins temporaire, ne sachant pas exactement quelle sera l'option retenue, c'est sûr que cela vous a apporté des coûts?

M. Choquet: Oui, exactement.

M. Samson: Et cela va vous en apporter encore. Comme il y a de forts risques que le projet NBR aboutisse un jour, même s'il ne nous a pas été présenté de façon définitive. Dans vos relations avec la SEBJ, est-ce que vous avez su en arriver à des ententes de compensation pour les dépenses faites pour vos plans d'urbanisme à court terme, tenant compte de l'éventualité de ces inondations et tenant compte aussi du fait que vous ne devez pas aller dans une certaine zone? Donc, cela dérange votre plan. Est-ce qu'il y a eu des possibilités d'entente avec la SEBJ à ce sujet?

M. Choquet: Oui, effectivement. Au niveau du comité du projet NBR, cela a été discuté avec la Société d'énergie de la Baie James. On lui a expliqué la situation, entre autres du plan de zonage, qui devait nécessairement être refait au complet, ajoutant que cela occasionnerait des frais assez considérables à la ville, le fait qu'on serait obligé de reprendre tout cela.

Les représentants de la Société d'énergie de la Baie James nous ont dit qu'ils étaient ouverts à cela. On n'a avancé de chiffres ni d'un côté ni de l'autre, parce qu'on ne sait pas dans quoi on s'embarquera exactement. C'est tout à refaire. Ce sera à renégocier à ce moment-là. Mais la Société d'énergie de la Baie James nous a dit que son portefeuille était ouvert, pas pour qu'on y fouille quand on veut, mais il est ouvert.

M. Samson: II est peut-être ouvert d'une certaine heure à une certaine heure, mais pas longtemps dans le jour.

De toute façon, je suis heureux de voir que vous entretenez de bonnes relations et que ce point-là a été reconnu par les deux parties comme étant un point compensable.

Dans votre mémoire, en relation avec l'éventualité de la mise en chantier du projet NBR, vous demandez que soit retenue la possibilité d'un développement local et régional. Vous demandez que soient encouragées les industries, les entreprises locales, qu'on fasse un inventaire de ce qui existe pour savoir dans quoi la SEBJ pourrait puiser pour aller s'alimenter selon ses besoins. Est-ce que vous avez, de ce côté-là, à la suite des discussions que vous avez soutenues, une approche qui vous semble intéressante, à ce moment-ci?

M. Choquet: II en a été discuté, mais on n'a pas tous les mécanismes qu'il faut pour faire les pressions où il faut. Je ne sais pas si c'est l'endroit ici.

M. Samson: Profitez-en, c'est le temps.

M. Choquet: En fin de compte, ce qu'on veut, c'est de favoriser notre développement local et régional aussi. D'ailleurs, la CRDAT a fait des représentations à cet effet. Mais, du côté local, c'est qu'il y a des industries et des commerces qui ont été créés depuis 1972, lors de l'ouverture de la route donnant accès à la Baie James. Entre autres, actuellement, dans le transport, ils sont dans une période morte, si on peut dire. Il serait assez intéressant que, lors de l'octroi des contrats, les gens qui sont déjà sur place, qui ont des compagnies de transport - il y a d'autres compagnies, mais là je pense au transport -soient favorisés dans la mesure du possible.

Étant donné que ces gens se sont implantés et qu'ils ont investi à la porte de la Baie James, il y aurait lieu que des mesures soient prises au niveau des cahiers de charges de la Société d'énergie de la Baie James. Ces gens ont investi et il y a d'autres commerces aussi qui existent. Nous, nous pensons que ce sont les premiers intéressés. Il y a la région, bien entendu, qui doit être encouragée aussi. Ce dont j'ai fait mention, c'est aussi au niveau des ressources humaines, au niveau de l'Abitibi.

Au niveau du programme d'Hydro-Québec, on fait mention de 25,000 travailleurs, à un moment donné, vers 1990. On suggère au gouvernement de créer des programmes de formation pour ces travailleurs au Québec. On n'est pas contre les gens venant de pays étrangers, mais si on peut trouver la clientèle nécessaire dans la province, entre autres en Abitibi, ce serait une bonne chose. On n'a pas tous les outils en main, nous, pour que cela se fasse, mais on est ici pour que les choses se fassent dans ce sens.

M. Samson: Au niveau de la main-d'oeuvre, vous êtes sans doute au courant que la région - on va parler de l'ensemble de la région, si vous le voulez - a un bassin de main-d'oeuvre disponible.

En réponse à mes questions, la SEBJ m'a dit l'autre jour qu'ils employaient environ 1500 personnes en provenance de la région cette année, parce qu'il n'y en avait pas plus de disponibles. Après avoir compris tout ce qu'ils avaient à dire, nous avons compris qu'il n'y en avait pas plus de disponibles possédant la fameuse carte de classification en vertu du règlement de placement de l'OCQ, ce qui fait que si l'on tient compte du bassin de main-d'oeuvre disponible avec carte de compétence, mais ne possédant pas le fameux privilège de cette carte de l'OCQ, cela réduit le bassin et cela a amené la société d'énergie à ne pas pouvoir employer plus de 1500 personnes.

Si on prend comme point de comparaison l'année 1976 alors que nous avions au-delà de 18% de la main-d'oeuvre de la Baie James en provenance de la région et qu'en 1980 c'est tombé de moitié, c'est sûr que nous en arrivons à conclure que ce règlement de placement de l'OCQ devrait être revu si l'on veut que la main-d'oeuvre existante et capable de remplir ces fonctions puisse avoir accès aux chantiers. En même temps, de 1976 à 1980, la main-d'oeuvre en provenance de la région a tombé d'environ 18% à 9%, c'est-à-dire de moitié; en même temps, les chômeurs de la région sont passés de 7000, en 1976, à 8000 en 1980. Donc, il y a un bassin, il y a un réservoir de disponible.

Vous suggérez qu'on aille en chercher le maximum possible. Il y a un problème présentement au niveau de la réglementation. Évidemment, le plus vite ce problème sera réglé, le plus vite la SEBJ pourra prendre plus de travailleurs dans la région. Ce n'est pas nécessairement un problème de formation de main-d'oeuvre. Il y a beaucoup de main-d'oeuvre formée, prête à travailler, des gens qui sont obligés - vous le savez probablement, parce que vous êtes de la région, comme moi - présentement d'aller travailler en Ontario et dans le Nord du Québec, à Cornwallis Island, parce qu'en

Ontario et là-bas ils n'ont pas besoin de la fameuse carte de classification. La main-d'oeuvre qu'on nous dit ne pas pouvoir venir chercher parce qu'elle n'est pas disponible, elle est disponible, mais elle est au travail ailleurs, parce que ailleurs on n'exige pas le petit papier qui donne le droit de vivre. On exige cela présentement en fonction des actuels règlements. J'espère que cela va changer au plus vite pour qu'on puisse donner suite à vos revendications.

J'aimerais savoir, puisque vous avez fait mention de certaines recommandations du CRDAT, si la ville de Matagami est d'accord sur des recommandations du CRDAT, comme par exemple, la politique d'achat de la SEBJ, que les fournisseurs soient appelés à livrer FOB Matagami, première question. La deuxième, je la passe, parce qu'on vient d'en parler. L'autre, c'est qu'une certaine priorité d'embauche soit donnée à la région dans laquelle le projet a lieu, c'est-à-dire dans la région du Nord-Ouest. La troisième, j'imagine que vous êtes d'accord avec: que la ville de Matagami soit utilisée comme centre névralgique du complexe NBR. Il me semble que cela saute aux yeux. L'autre, que les transporteurs aériens régionaux soient utilisés au maximum - c'est une recommandation du CRDAT aussi et que les décisions relativement au développement du territoire soient prises en fonction de leur impact sur le développement socio-économique de l'Abitibi-Témiscamingue. Je pense que vous en avez parlé. J'aimerais avoir votre opinion sur les autres questions.

Le Président (M. Jolivet): M. Choquet.

M. Choquet: Cela va être assez court. Je pense que c'est oui sur toute la ligne. On est de la même région, on a les mêmes priorités et on veut développer notre région d'abord, c'est normal. On n'est pas loin du territoire de la Baie James, on est même dans le territoire de la Baie James, parce qu'on est des villes enclaves, en l'occurrence Matagami. Il est normal et naturel que les premiers encouragés soient les premiers le long du projet, parce que, normalement, cela devrait coûter moins cher aux compagnies intéressées à faire le transport ou à fabriquer des pièces nécessaires pour le projet. Ce seraient les premiers à encourager.

De quelle façon? Tantôt, la question m'a été posée, on ne connaît pas le mécanisme de tout cela, mais c'est sûr qu'on veut que cela soit pris en considération et, dans la mesure du possible, qu'il y ait des pourcentages d'inclus même dans les cahiers de charges, si c'est possible d'encourager la région de l'Abitibi comme telle.

M. Samson: J'aurais juste une dernière petite question. Vous mentionnez dans votre mémoire, à un moment donné, que vous aimeriez que les travailleurs de la construction, pour le projet NBR, soient logés, dans la mesure du possible, aux abords de la ville de Matagami. La question que je pose est la suivante: Est-ce que vous y voyez des avantages importants et est-ce qu'il y a, d'autre part, des inconvénients? Évidemment, un chantier, c'est un chantier. Est-ce que les deux, le pour et le contre, ont été bien pesés? Est-ce que la ville peut loger à ses portes un nombre de travailleurs aussi important que celui qui serait nécessité par le projet sans que cela lui crée des problèmes particuliers? Est-ce que cela a été étudié par vous autres?

Le Président (M. Jolivet): M. Choquet.

M. Choquet: Oui, cela a effectivement été étudié en commission d'urbanisme et au conseil de ville. Les résultats, il en est fait mention dans le rapport. Il y a un campement temporaire de chantier de travail de prévu. C'est le même site ou à peu près qui a été utilisé en 1972 pour l'implantation des compagnies de passage, les entrepreneurs de passage.

De plus, au niveau des chantiers de travail comme tels, la SEBJ nous a informés qu'il devrait y en avoir un non loin de Matagami, à 70 kilomètres de Matagami où il y aurait 1800 hommes. C'est prévu pour 1986, pour une durée de cinq ans.

On se demande si c'est possible, si c'est néqociable. Si ce n'est pas possible de tous les avoir, qu'on ait au moins une partie de ces gens-là dans la ville de Matagami. À 70 kilomètres, ils n'auront probablement pas la possibilité de sortir du chantier de travail, tandis qu'à Matagami, on offre des services de base. On a déjà une aréna, un club de curling, un centre civique et un terrain de golf. On a déjà tous les services de base. Si on regarde le projet de la Baie James comme Radisson, ce sont tous des services gu'ont est obligé d'implanter et ce, pour une courte période. Donc, il y a une possibilité d'économie de coûts par l'État, par la Société d'énergie de la Baie James. On a déjà sur place ces services et la ville de Matagami est prête à les offrir.

Quant à l'ouverture des rues, s'ils sont obligés d'en ouvrir dans d'autres secteurs, à 60 ou 70 kilomètres de Matagami, c'est entendu que la ville est ouverte à des négociations. Cela pourra nous rester par la suite et cela peut être négocié. En compensation, nous autres, on donne des services de base d'une ville.

M. Samson: Merci beaucoup, M. Choquet.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je remarque, M. Choquet, que votre mémoire démontre un haut degré de volonté de collaboration avec les autorités sur des questions qui peuvent causer certains problèmes à la ville de Matagami, aux résidents de Matagami, en ce qui a trait au développement des projets d'Hydro-Québec. (16 heures)

Je présume que, dans votre mémoire, quand vous dites: "Vous savez, déménaqer des castors, c'est une chose; déménager des gens, c'est autre chose", sans doute vous référez à l'entente de la Baie James où il y a eu effectivement un engagement par le gouvernement de déménager les castors pour le bénéfice des autochtones. Je me rappelle, M. le Président, qu'à cette époque, avant de conclure cette entente, j'ai demandé de rencontrer les autorités municipales de Matagami afin de les consulter en ce qui concernait certains effets ou certaines conséquences qu'aurait pu entraîner cette entente pour les résidents de Matagami. Le principe de collaboration, de coopération, c'est un principe en vertu duquel je crois fermement qu'un gouvernement ne devrait pas prendre de décisions qui vont affecter un secteur de la population, dans ce cas-ci la municipalité et les résidents de Matagami, sans avoir consulté les autorités et collaboré avec ces autorités parce que, dans l'entente de la baie James, il y avait des choses qui pouvaient affecter indirectement et même directement la ville de Matagami. Il y avait la question des droits de pêche qu'on donnait aux autochtones. Cela pouvait affecter les droits des résidents de Matagami. Il y avait la construction de certaines routes et tous les droits des pourvoyeurs. Avant de conclure cette entente nous avons consulté et nous avons eu la collaboration entière des autorités et de la population de Matagami.

Je voulais prendre cette occasion pour le souligner et j'espère que ce degré de collaboration qui existait à cette époque continue et continuera en ce qui concerne les projets qui affectent votre ville et vos résidents. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le député. M. Choquet, au nom des membres de cette commission, je vous remercie d'être venu nous rencontrer.

Pour les besoins des membres de cette commission, je dois leur donner l'ordre du jour du lundi 2 mars. C'est déjà celui que vous avez reçu et qui concerne le Regroupement pour la surveillance nucléaire; la Caisse d'entraide économique de Portneuf; l'Association des mines de métaux du Québec; la Ligue des droits et libertés; M. Jean Gagnon, M. Pierre Marissal et l'Association du Québec-Labrador. Je crois comprendre que la convocation est pour 15 heures. Ajournement à 15 heures, le lundi 2 mars.

(Fin de la séance à 16 h 3)

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