L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mercredi 25 mai 1988 - Vol. 30 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières sur le projet de loi 31 - Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre


Journal des débats

 

(Dix heures cinq minutes)

Le Président (M. Charbonneau): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission parlementaire de l'économie et du travail reprend ses consultations particulières sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a quelques remplacements. M. Brassard (Lac-Saint-Jean) est remplacé par M. Dufour (Jonquière), M. Hétu (Labelle) est remplacé par M. Houde (Berthier) et M. Parent (Bertrand) est remplacé par M. Chevrette (Joliette).

Le Président (M. Charbonneau): Par ailleurs, à l'égard de l'ordre du jour, ce matin, nous allons entendre la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, la Fédération des travailleurs du Québec, section construction et, finalement, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. Cet après-midi, après la reprise, nous entendrons l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, suivie de l'Union des municipalités du Québec. Ce soir, nous finirons avec la Centrale des syndicats démocratiques et la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Est-ce que cela va? Il n'y a pas de...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et on poursuit demain.

Le Président (M. Charbonneau): Nous allons pourvuivre, semble-t-il, demain, à moins que le ministre ne change d'idée et ne décide de retirer son projet de loi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Trop populaire!

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que l'ordre du jour est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Charbonneau): Adopté. Très bien. Nous accueillons maintenant la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec. Je crois que le président, c'est M. Normand Bureau?

Une voix: Correction.

Le Président (M. Charbonneau): Correction? Alors, quel est le président?

M. Favre (Michel): Pardon, M. le Président.

Mon nom est Michel Favre. Je suis directeur général de la corporation des maîtres mécaniciens.

Le Président (M. Charbonneau): Bon, d'accord.

M. Favre: M'accompagnent le nouveau président de la corporation, M. François Lemay, assis à ma droite, M. Normand Bureau, qui est membre du comité exécutif de la corporation, et John White, qui est conseiller juridique.

Le Président (M. Charbonneau): D'accord. Qui va présenter le mémoire?

M. Favre: Ce sont MM. Lemay et Bureau.

Le Président (M. Charbonneau): Alors, que le premier commence. Vous avez une vingtaine de minutes pour faire la présentation de votre mémoire avec votre collègue. Par la suite, les membres de la commission ont le reste de l'heure qui vous est consacrée pour entamer des discussions avec vous.

Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec

M. Lemay (François): Merci beaucoup. La Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec regroupe près de 2300 entrepreneurs en mécanique du bâtiment. Cette corporation a été créée par la Loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie. Cette loi vise à assurer une plus grande compétence des membres de la corporation. Dans cet esprit, elle vise également à assurer une plus grande sécurité du public et le mieux-être de l'ensemble du public consommateur.

Dans le but de répondre aux objectifs fixés par sa loi constitutive, la corporation a établi différents services qui permettent d'aider les membres dans l'exercice de leur profession. Elle a également instauré un comité de discipline et de pratique professionnelle qui voit à faire respecter les règles d'éthique et les règlements de la corporation. Elle a également établi un service d'enquête qui lui permet, entre autres, de prendre connaissance des plaintes des consommateurs.

Les dispositions de la Loi sur les maîtres mécaniciens prévoient que seul l'entrepreneur dûment qualifié et membre de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie est habilité à entreprendre des travaux d'installation, de réparation, de modification ou de réfection des

installations de tuyauterie.

La corporation a toujours offert aux autorités sa collaboration pour tenter de résoudre les problèmes qui assaillent l'industrie de la construction. Nous sommes donc déçus de la façon avec laquelle ce projet de loi fut déposé. De plus, on semble encore une fois vouloir faire adopter une mesure législative importante à la vapeur, après avoir mis les intervenants devant un fait accompli ou presque.

À première vue, le projet de loi vise à exclure du champ l'application de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction tous les travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification que veut faire exécuter une personne physique à des fins personnelles. Autrement dit, les entrepreneurs pourront payer Ses salaires qu'ils voudront à leurs salariés, s'ils en trouvent, et n'auront plus l'obligation de faire des rapports, des retenues, etc.

Le projet de loi donne plus de pouvoirs à la Commission de la construction du Québec pour assumer le mandat qui lui est conféré par la loi.

La consultation rapide que nous avons pu mener auprès de nos membres nous permet de constater qu'ils s'interrogent et sont inquiets. Plusieurs entrepreneurs considèrent ainsi que le projet de loi ne règle en rien le problème du travail au noir. Ces interrogations, ces inquiétudes, ces problèmes trouvent leur source dans la réalité quotidienne du milieu.

Le milieu peut se décrire ainsi: premièrement, il y a l'artisan qui travaille seul ou parfois avec un employé et qui fait de la réparation ou de la construction. Il y a l'entreprise moyenne qui fait beaucoup de réparation et de la construction. Enfin, il y a l'entreprise plus grosse qui fait surtout de la construction et qui assure aussi un service de réparation.

Savez-vous que le plombier qui exécute du travail résidentiel est le même qui répare aussi chez le fleuriste, le garagiste et l'épicier du coin? C'est aussi lui qui entretient les appareils à gaz des restaurants et le chauffage de l'immeuble à logements. Donc, ce sont trois catégories d'entreprises qui ont chacune leurs particularités et qui fonctionnent de façon différente. Cependant, face à ce projet de loi, leurs interrogations se rejoignent car les trois catégories d'entreprises exécutent des travaux assujettis et non assujettis par rapport au projet de loi 31.

La première interrogation porte sur le champ d'application de l'exclusion créée par le projet de loi. Plusieurs questions peuvent se poser. Que signifie vraiment l'expression "aux fins personnelles autres qu'industrielles ou commerciales d'une personne physique"? Ainsi, par exemple, la réparation d'un équipement sanitaire devant être effectuée dans un logement situé dans un "bloc" de huit logements où le propriétaire en occupe un est-elle exclue du champ d'application de la loi? Le projet de loi ne nous permet pas d'établir facilement les distinctions nécessaires. On devra donc, pour les faire déterminer, recourir aux tribunaux. Durant ce temps, les employeurs et les salariés vivront dans l'incertitude. Si le ministre et le gouvernement entendent exclure certains travaux, qu'au moins cette exclusion soit claire et qu'elle ne laisse pas de place à l'interprétation.

Cette question fort importante sur le champ d'application de l'exclusion créée par le projet de loi 31 n'est pas la seule qui fut soulevée par les membres de la corporation.

M. Bureau (Normand): En effet, M. le Président, d'autres questions se posent, aussi, surtout à la suite des déclarations faites par le ministre. Le communiqué de presse émis par le bureau du ministre signale aussi que ce projet de loi permettra à des milliers de propriétaires et d'ouvriers d'effectuer au grand jour ce qu'ils étaient contraints de faire dans l'illégalité. On ne voit pas comment les gens étaient contraints d'agir dans l'illégalité. Le ministre veut-il dire qu'il ne sera plus nécessaire de détenir une licence émise par la Régie des entreprises de construction pour pouvoir entreprendre des travaux exclus de l'application de la loi sur les relations du travail? Le projet de loi ne modifie pourtant en rien la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction, ni celle des maîtres mécaniciens en tuyauterie.

Les propos ainsi tenus ont pu créer dans le public une fausse croyance, à savoir que, du moment qu'une carte de compétence est détenue, on peut effectuer des travaux en matière de plomberie ou de chauffage. Il est donc essentiel que le ministre indique de façon claire que le projet de loi n'a pas pour effet de permettre à n'importe qui de s'improviser entrepreneur dans l'industrie de la construction.

Le communiqué de presse indiquait également que le projet de loi aurait pour effet de donner aux consommateurs la possibilité d'exercer plus facilement des recours en cas de malfaçon ou de non-respect d'un contrat. Nous ne voyons pas comment le fait de donner à quiconque le désire la possibilité d'exécuter des travaux de rénovation, de modification, d'entretien et de réparation rendra plus facile aux consommateurs l'exercice de ces recours. En effet, le bonhomme aura sa carte de qualification hors décret, ses pantalons, sa brosse à dents sans aucune autre garantie ou obligation. On verra qui courra après lui.

En premier lieu, il faut s'assurer de l'excellence non seulement de la main-d'oeuvre, mais également et surtout des entrepreneurs de construction. Pour véritablement assurer aux consommateurs qu'ils pourront exercer des recours plus facilement et plus rapidement, il faudrait au minimum exiger la création de plans de garantie, comme le prévoit la Loi sur le bâtiment. C'est par de telles initiatives que les

consommateurs pourront être mieux protégés. (10 h 15)

Nous ne voulons pas que l'effet de ce projet de loi soit de permettre un accès plus facile à l'industrie pour des entrepreneurs ou des supposés entrepreneurs qui feront de !a rénovation résidentielle pendant six mois, un an ou deux ans et disparaîtront par la suite en laissant toute l'industrie de la construction dans une situation pire que celle que ce projet de loi visait à régler.

Pour que vraiment ce projet de loi puisse rendre les recours plus faciles, il devrait s'intégrer à un ensemble. Malheureusement, cela n'est pas le cas. Le ministre ne semble pas être prêt à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que la Loi sur le bâtiment vienne aussi apporter de vraies solutions aux problèmes. C'est un ensemble qu'il faut régler et non pas seulement tenter de les régler à la pièce. Il faut les envisager dans une perspective beaucoup plus générale, de façon concertée avec le milieu, et faire attention à ne pas se limiter à appliquer des cataplasmes sur une jambe de bois.

Le ministe indiquait aussi dans son communiqué de presse: Le projet de loi prévoit que le certificat de compétence sera toujours exigé pour les travailleurs qui exécuteront des travaux qui mettent en cause la sécurité du public. Or, le projet de loi ne prévoit rien. Nous sommes, cependant, conscients que, pour les travaux de tuyauterie, il existe présentement un règlement adopté en vertu de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre pour le métier de tuyauteur hors construction. Donc, nous comprenons que le ministre fait référence à ce règlement lorsqu'il indique que le projet de loi prévoit qu'un certificat de compétence sera toujours exigé. Toutefois, nous ne croyons pas que le consommateur vérifiera lui-même davantage si le travailleur détient son certificat de compétence.

Cela pose aussi un problème supplémentaire. En effet, comme nous l'avons déjà indiqué, les entreprises membres de la corporation peuvent se diviser en trois catégories. Pour le plus grand nombre d'entre elles, le temps est partagé entre des travaux qui seront maintenant exclus et d'autres qui seront inclus dans le champ d'application de la loi. S'il y a deux régimes de qualification, l'apprenti devra donc détenir deux carnets d'apprentissage. Qui va assurer ce contrôle: le ministère du Travail ou la Commission de la construction du Québec? Cela risque de créer des fouillis indescriptibles au sein même de l'entreprise. De plus, il pourrait s'avérer que la mobilité de la main-d'oeuvre à l'intérieur même de l'entreprise soit limitée.

Maintenir un régime hybride de qualification à la suite de l'adoption de cette loi ferait en sorte, au fil des ans, de limiter à certains entrepreneurs la possibilité de faire de la construction neuve. Nous sommes sûrs que cela n'est pas un des objectifs du ministre. Nous croyons donc essentiel pour le public en général, afin qu'il existe une véritable concurrence, qu'un régime unique de qualification existe pour tous les travaux, tant ceux qui sont inclus que ceux qui sont exclus. il faut également être conscients que, même si sont exclus du champ d'application de la loi de tels travaux, on ne pourra pas du jour au lendemain expliquer à un salarié qui gagne présentement environ 19 $ l'heure que, maintenant, il n'en vaut plus que 10 $ car son travail n'est plus assujetti à la loi. Ce problème se vivra partout et il est fort compréhensible que le travailleur de l'industrie se sente méprisé. Quel respect a-t-on du travailleur professionnel qui gagne sa vie de façon honnête en lui indiquant qu'il devra dorénavant gagner moins cher pour certains travaux et plus cher pour d'autres parce que l'on veut légaliser la situation de gens qui n'ont pas respecté la loi?

Cela risque également de provoquer une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée. Tous les salariés voudront probablement aller travailler à un salaire plus élevé dans les sphères régies ou, pour le même salaire, les employés vont choisir de travaiiler à leur propre compte.

Les salariés seront encore plus choqués de savoir que leurs régimes complémentaires d'avantages sociaux pourront prendre fin par règlement de la Commission de la construction du Québec. Quant à ces régimes, tenant compte de la structure de l'industrie et considérant, entre autres, qu'au fil des ans la part des travaux de rénovation sera sans cesse croissante, il faut trouver des mécanismes adéquats pour que de tels régimes existent pour les travaux non régis. Ainsi, on pourrait envisager soit que les personnes puissent continuer à contribuer aux régimes existant présentement ou encore que tous les entrepreneurs de construction puissent justifier d'une exemption s'ils démontrent qu'ils ont établi, soit eux-mêmes personnellement, soit par l'entremise de leur association, un régime respectant certaines normes. Il faut trouver immédiatement une solution à ce problème et faire en sorte que des gens ne se trouvent pas à pius ou moins long terme dans une mauvaise situation.

En conclusion, M. le Président, l'ensemble des remarques que nous venons de faire nous amène donc à la conclusion que, même si le projet de loi part d'intentions louables il risque de ne pas atteindre ses buts car il ne constitue qu'un morceau d'un casse-tête. De toute façon, il risque de créer pour l'ensemble de l'industrie pius de problèmes qu'il n'en réglera et nous ne croyons pas qu'il réduira de façon significative l'ampleur du travail au noir, ni le coût de la rénovation, de la modification, etc. Il aura pour effet de faire en sorte que les véritables entrepreneurs et travailleurs de la construction verront leurs travaux diminués. Cela est encore plus vrai si d'autres travaux sont exclus comme l'ont demandé, entre autres, les villes de Mont-

réal et de Québec lors de la présentation de projets de loi visant à modifier leur charte respective.

Je le répète, M. le Président, c'est beaucoup plus dans une perspective globale qu'il faut tenter de résoudre les problèmes, car c'est à ce niveau que l'on pourra voir toutes les situations pouvant créer d'éventuels conflits.

En conséquence, la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec ne peut accepter le projet de loi dans sa teneur actuelle et nous demandons donc que l'étude de ce projet soit reportée afin de permettre une consultation élargie non seulement sur le projet de loi, mais également sur l'ensemble des problèmes de l'industrie.

Nous remercions les membres de la commission, M. le Président et M. le ministre de leur attention. Nous les assurons aussi de notre collaboration pour participer à toute initiative qui pourrait vraiment contribuer au mieux-être de notre industrie.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, messieurs. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiendrais à remercier la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie, ainsi que les porte-parole qui la représentent aujourd'hui devant la commission parlementaire. Peu de temps nous est imparti. Attaquons, si vous le voulez bien, immédiatement le sujet qui nous préoccupe du point de vue gouvernemental, le travail au noir dans l'industrie de la construction. Et de façon que nous parlions tous le même langage lorsque nous parlons de travail au noir dans l'industrie de la construction, ma première question vise à vous demander si vous partagez toujours la définition de travail au noir qui est contenue dans le rapport Mireault et qui faisait l'objet d'un consensus patronal-syndical, à savoir que le travail au noir est tout travail qui échappe aux normes et aux règles qui gouvernent l'industrie de la construction.

M. Lemay: C'est exact.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est exact, c'est votre définition du travail au noir. Vous mentionnez - et il s'agit là d'une critique très sévère à l'égard du projet de loi - à la page 3 de votre mémoire, une conclusion qui nous inquiète comme gouvernement qui vise à réduire considérablement, sinon à éliminer, ie travail au noir dans l'industrie de la construction. Vous nous indiquez: "Plusieurs entrepreneurs considèrent aussi que le projet de loi ne règle en rien le problème du travail au noir." Et en conclusion, à la page 10, vous indiquez: "Nous ne croyons pas qu'il réduira de façon significative l'ampleur du travail au noir." Donc, le message à la commission parlementaire est celui-ci: bien que le gouvernement vise la réduction ou l'élimina- tion du travail au noir dans l'industrie de la construction, les dispositions contenues dans le projet de loi 31 n'auront pas les effets que vous pensez qu'ils auront. Est-ce qu'on peut s'entendre sur le fait qu'il existe du travail au noir dans l'industrie de la construction - si vous avez des proportions ou des éclairages, on vous saurait gré de les apporter à la commission - que ce travail au noir existe dans les grands chantiers de construction industriels et commerciaux, qu'il existe d'une façon plus marquée dans la construction domiciliaire et qu'il existe encore de façon plus marquée dans la rénovation domiciliaire? Est-ce que ce sont les observations que votre pratique quotidienne vous permet de vérifier sur le terrain?

M. Lemay: Exactement, M. le ministre. Par mon expérience en tant qu'entrepreneur, je crois que le travail au noir se situe principalement dans le secteur que vous mentionnez.

C'est difficile de donner un pourcentage parce que ces gens ne s'enregistrent pas quand ils font du travail au noir. Mais je sais, par exemple, que plusieurs consommateurs viennent se plaindre chez moi. J'ai souvent à refaire des travaux qui ont été farts au noir et qui n'ont respecté aucune espèce de code d'éthique, de code provincial de la tuyauterie en ce qui nous regarde. Souvent, ces travaux sont faits à la "botch" et laissent le consommateur avec ses problèmes. Le consommateur n'a aucun recours contre le gars qu'il a payé en argent, un an ou deux ans après. Il a traîné son problème souvent et il se décide à venir voir un entrepreneur compétent, qui a des responsabilités, qui a des comptes à rendre à une corporation, et il décide de faire refaire les travaux. Je crois que ce consommateur a été lésé. Souvent, cela lui coûte plus cher de faire refaire les travaux. Quand c'est au noir, c'est fait vite et pas nécessairement très bien fait.

Dans le commercial et l'industriel, il s'en fait beaucoup moins parce qu'il y a une incitation fiscale qui fait qu'en payant l'entrepreneur il y a une facture, c'est déductible d'impôt, etc. Je ne dis pas qu'il ne s'en fait pas, mais il s'en fait beaucoup moins, d'après mon expérience.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À partir du moment...

M. Lemay: Vous me posiez la question par rapport à la proportion. Je crois que réellement, dans le domaine résidentiel, rénovation et tout, il peut se faire jusqu'à 50 %, d'après moi, de travail au noir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous me mentionnez votre évaluation - et on le prend avec des réserves; quand on parle de travail au noir, par définition, je suis conscient que c'est très difficilement quantifiable - ...

M. Lemay: Exactement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...votre estimation personnelle de 50 %, vous parlez des travaux qui touchent votre domaine de spécialisation?

M. Lemay: Exactement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne parlez pas de l'ensemble. Parce qu'on a eu d'autres estimations et d'autres approximations sur le travail au noir dans l'ensemble des métiers.

M. Lemay: Je parle de mon secteur et de ma région, de ce que je vis.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que votre approximation - je ne suis pas en mesure de la contester - me paraît importante, compte tenu de la nature des travaux que vous effectuez. Je soupçonnais personnellement le travail au noir d'être très répandu dans les métiers de peintre, de charpentier, de menuisier, etc, mais autant que cela dans la plomberie...

M. Lemay: J'ai vécu des faits, par exemple, le consommateur nous fart venir chez lui pour faire des rénovations et, souvent, il veut baisser ses coûts et faire cela à sa façon. Notre code nous défend d'installer de la tuyauterie sans ventilation. On lui dit: II faut ouvrir des murs, pour la protection du public, les odeurs, etc. On essaie de lui faire comprendre qu'il faut le faire conformément à un code. Il s'entête et, finalement, le fart faire au noir. J'ai souvent vu perdre des contrats parce que cela avait été fart au noir. Je pense que ce n'est pas rendre service au public de permettre que le travail soit fait au noir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous parlez d'une approximation de 50 % qui seraient faits au noir. Est-ce que, dans cette proportion, cette évaluation de 50 %, il y a ce qu'on appelle le travail au noir effectué par des gens qui détiennent des cartes de compétence, mais qui ne facturent pas le tarif prévu au décret? Est-ce que c'est généralement une combinaison des deux, c'est-à-dire ni carte de compétence, ni facturation suivant le décret?

M. Lemay: Je crois qu'il y a un peu des deux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moitié-moitié, à peu près.

M. Lemay: Oui. Quelque chose qui peut ressembler à cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. On n'a pas traité des dispositions du projet de loi - vous n'en avez pas traité spécifiquement dans le mémoire, mais disons que la commission nous permet de le faire - qui resserrent les mesures de contrôle et les amendes en ce qui concerne la construction domiciliaire et les chantiers commerciaux et industriels. Est-ce que vous avez considéré ces modifications législatives? Si vous les avez considérées, quelle est votre opinion sur les modifications que nous apportons? (10 h 30)

M. Lemay: Je pense qu'on devrait resserrer la vérification, surtout à l'égard du marché noir. On voit souvent des inspecteurs faire la vérification auprès des entrepreneurs qui ont la compétence et des normes à suivre et on ne se soucie guère du charlatan qui travaille au noir. Il n'y a pas beaucoup d'énergie déployée pour faire vérifier cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tantôt, vous m'avez donné une approximation en ce qui concerne la rénovation dans les résidences des individus. Avez-vous une évaluation - encore une fois avec la même prudence sur les chiffres utilisés, avec la même crédibilité, parce qu'on parie encore de travail au noir - en ce qui concerne la construction domiciliaire et, si possible, les grands chantiers?

M. Lemay: Je crois que, dans la construction résidentielle, il y a beaucoup moins de travail au noir, parce que cela prend des permis, puis normalement cela dort être inspecté et occasionnellement on vérifie si les permis ont été sortis pour les maisons neuves.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans les grands chantiers, j'imagine que c'est encore plus difficile, le travail au noir. Est-ce que cela existe autant?

M. Lemay: D'après moi, il y en a encore beaucoup moins dans les grands chantiers.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va pour le moment.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le député d'Abrtibi-Ouest.

M. Gendron: Rapidement, je voudrais remercier la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec d'avoir, elle aussi, en peu de temps, exprimé son point de vue. On sent par votre mémoire que vous avez, quand même, pris le temps de vous exprimer sur les principales préoccupations du projet de loi 31 ou sur les absences de clarification, et elles sont nombreuses, concernant les doutes que soulève le projet de loi, mais encore davantage les communiqués de presse du ministre. J'étais heureux que vous repreniez à peu près la même théorie que tout le monde qui s'est exprimé jusqu'à

maintenant: faire voter une mesure législative à la vapeur à la dernière minute et surtout en émettant des communiqués de presse qui ont comme conséquence de présenter autrement le projet de loi que ce que vous en comprenez lorsque vous en faites l'étude article par article.

Je suis content également que vous portiez un jugement... C'était ma première question et le ministre l'a posée. La quintessence de ce projet de loi, s'il y en a une, c'est le travail au noir; c'est pour contrer le travail au noir. Quand un gouvernement se donne un objectif, normalement, il faut que les articles du projet de loi qu'il rédige contribuent à l'atteinte de cet objectif. Ma première question est la même sur le travail au noir, mais posée un peu différemment. Je ne veux pas interpréter, parce qu'on est ici pour interroger ceux qui présentent des mémoires et non pas pour émettre notre point de vue, mais, à la page 3, vous portez un jugement on ne peut plus clair. Et, en ce qui me concerne, vous avez raison, c'est le jugement que je porte: le projet de loi ne règle en rien le problème du travail au noir, même si le ministre vous a fait vous compromettre sur la définition du travail au noir en disant que c'est tout travail qui échappe aux normes et aux règles de l'industrie de la construction. Mais, dans ses communiqués, quand c'est le temps d'aller chercher faussement l'appui du public, ce n'est pas ce que cela veut dire, le travail au noir. Cela veut dire tout ce qui se fait illégalement, mais également tout ce qui n'est pas rapporté à l'État sur le pian de l'apport fiscal. C'est de cela que ses communiqués parlent. Dans le projet de loi, il n'y a absolument rien qui touche cet aspect-là et il me semble qu'à la page 3 vous aviez un jugement précis et clair.

La question que je vous pose: Pourquoi semblez-vous l'avoir atténué en conclusion à la page 10 lorsque vous dites: "Nous ne croyons pas qu'il réduira de façon significative l'ampleur du travail au noir"? Pour moi, il y a là une atténuation d'un jugement qui était clair à la page 3 et, comme je ne veux pas interpréter, est-ce que je dois conclure que c'est surtout le jugement de la page 3 sur le travail au noir que, comme membre de l'Opposition, je devrais retenir ou si c'est votre conclusion qui dit: Ce n'est pas diable pour contrer le travail au noir; on pense que cela va réduire, mais pas de façon significative, l'ampleur du travail au noir? La question précise: Ça n'y touche pas "pantoute" ou cela le réduit un peu? Qu'est-ce que vous dites?

M. Lemay: C'est difficile de répondre pour les autres corps de métiers. On a bâti le mémoire en pensant à notre métier, mais on ne pense pas régler quelque chose par ce projet de loi et, s'il y a de quoi, on pense que ça va augmenter le travail au noir.

M. Gendron: Donc, je retiens moins votre conclusion que ce qui est écrit à la page 3, soit que cela ne touche pas du tout au travail au noir. C'est que je ne veux pas interpréter. Je veux...

M. Bureau: C'est exact. M. Gendron: C'est exact?

M. Bureau: C'est qu'on n'a pas voulu être trop dur, non plus, en conclusion. On avait déjà dit ce qu'on pensait en page 3. Maintenant, M. le député, le travail au noir, c'est celui qui échappe aux normes, aux règles et aux rapports à l'Etat. Or, je comprends bien que les normes et les règles existantes sont pour le mieux-être du consommateur, pour la protection du consommateur. Alors, si on laisse tomber ces règles et qu'on ne conçoit pas quelque chose de valable pour protéger les consommateurs, que le ministre l'appelle comme il le voudra, je l'appelle encore du travail au noir. S'il ne se conforme pas à un minimum de normes pour la protection du consommateur, s'il n'y a pas de mécanismes adéquats pour s'assurer qu'il y aura des rapports à faire, quel que soit le nom qu'on puisse lui donner, nous l'interprétons comme étant du travail au noir.

Une voix: Avez-vous un problème?

M. Gendron: Non, non, je n'ai aucun problème. J'ai demandé une seconde au président. Excusez-moi, M. le Président.

Deuxième question. Vous avez, à raison en ce qui me concerne, touché le champ d'application de l'exclusion. Vous dites, comme tous les autres... Et c'est cela qui est un peu étonnant dans le bon sens du terme parce qu'on dirait que, même si c'est sûr que vous n'avez pas eu le temps de vous consulter, tous les mémoires disent la même chose, traitent des mêmes questions et soulèvent les mêmes interrogations, avec raison. Le ministre nous dit: Écoutez, je vais vous expliquer cela à un moment donné, mais on serait tous dans l'erreur de comprendre que l'expression "aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique" n'a pas cette étanchéité que vous souhaitez. À partir du moment où cette question n'est pas étanche, vous concluez: "La réparation d'un équipement sanitaire devant être effectuée dans un logement situé dans un "bloc" de huit logements où le propriétaire en occupe un est-elle exclue du champ d'application de la loi? D'après vous, si vous vous posez la question, c'est que vous croyez que le projet de loi, pas les communiqués de presse, permet que cela se fasse. Est-ce que c'est le jugement que vous portez?

M. Lemay: Non, si vous le permettez. C'est que ce n'est pas clair dans notre tête. Ce n'est vraiment pas clair et on aimerait avoir des explications. La modification, la réparation, la

rénovation et l'entretien, j'aimerais savoir qui est autorisé à entreprendre ce genre de travaux dans votre nouveau projet de loi.

M. Gendron: Le ministre aura quelques minutes et il pourra répondre, s'il le désire. Je vais continuer mon interrogation.

M. Lemay: C'est parce qu'il y a beaucoup d'interrogations et on ne le sait pas. Cela fait qu'on sous-entend. Pour le huit logements, c'est quoi? Est-ce que je pourrais avoir une réponse, à savoir qui?

M. Gendron: Vous avez également soulevé une autre question, que je trouve importante dans le débat que nous avons, sur la qualité des entrepreneurs, en affirmant que ce n'était pas clair et que le ministre devrait indiquer de façon claire que le projet de loi n'a pas pour effet de permettre à n'importe qui de s'improviser entrepreneur de construction. La question que je vous pose, c'est: À partir de quel article du projet de loi êtes-vous en mesure je vous interroger sur cette imprécision?

M. Lemay: C'est que ce n'est pas clairement défini et cela porte à confusion. Nous nous sommes réunis, plusieurs entrepreneurs, et nous ne nous entendons pas entre nous sur la définition. Cela fait que cela porte à confusion. Pour le grand public, je crois que cela va être encore plus confus.

M. White (John): M. le député, si vous me le permettez, sur ce point très précis à savoir quel article du projet de loi pourrait laisser entendre que ce n'est pas sûr que cela prend un entrepreneur, ce n'est pas vraiment dans le sens que le projet de loi prévoit quoi que ce soit, c'est beaucoup plus à la suite des déclarations que le ministre a pu faire et auxquelles on fait référence. Lorsque que le ministre, dans son communiqué de presse, parle des consommateurs et des travailleurs, à ce que je sache et d'après ce que nous avons conclu, nous - et c'est un peu ce qu'on explique dans le mémoire - la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction, elle, elle n'est pas modifiée et les travaux de construction sont définis dans la loi sur la qualification comme étant, entre autres: entretien, réparation, rénovation et modification de bâtiments. Puis, entrepreneur est défini comme quiconque exécute ou fait exécuter pour autrui des travaux de construction.

Alors, est-ce que ce que le ministre a dit va amener des modifications à la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction également qu'on n'a pas présentement? Quelle est la position qu'il faut prendre là-dessus? Parce que, selon la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie, pour pouvoir exécuter des travaux d'installation de tuyauterie, il faut être membre. C'est: quiconque exécute pour autrui, également. Alors, c'est une question importante pour nous et c'est dans ce sens-là, M. le député.

M. Gendron: Oui, je vous remercie. Effectivement, ce sont des précisions, en tout cas, que vous donnez, qui sont importantes pour bien comprendre le questionnement de votre mémoire sur ces aspects-là, en disant qu'il y a moins de précision qu'on n'aurait souhaité en avoir pour être en mesure de se faire une idée plus précise de la portée réelle qu'aura le projet de loi sur ces aspects-là.

Une autre question concernant les consommateurs. Je suis heureux que vous ayez touché cette question-là et, selon votre jugement, encore là, même si le ministre, autant dans ses communiqués qu'ailleurs, a prétendu qu'il s'agis-sait-là d'un... Là, je ne voudrais pas reprendre tout son texte, mais, c'était élogieux, ce qu'il disait, qu'il arriverait aux consommateurs avec le projet de loi 31. "Correspondre davantage à ses capacités de payer"; sur cela, il a peut-être raison; "Avoir la possibilité de confier les travaux de rénovation à la personne ou à l'entreprise de son choix"; je ne comprends pas cela, cela existait; "Sortir de la clandestinité et de l'illégalité; obtenir une meilleure garantie de travaux de qualité, parce que faits au grand jour et faciliter une meilleure protection en cas de mauvaise exécution parce que les recours seront désormais possible"; comme si cela n'était pas possible avant. Ce sont là les notes explicatives du ministre, lors de l'introduction du projet de loi.

La question que je pose concerne la protection du consommateur. Vous dites: Écoutez, on ne voit rien dans le projet de loi 31 qui permet une meilleure protection du consommateur et, pour qu'il y en ait une, nous, on pense qu'on devrait exiger "la création de plans de garantie, comme le prévoit la Loi sur le bâtiment". Pourriez-vous être plus explicites, préciser davantage?

M. Bureau: Je l'ai mentionné, tout à l'heure, entre parenthèses, M. le député, lorsque j'ai fait la comparaison avec le bonhomme qui part avec sa carte de compétence hors décret, ses pantalons et sa brosse à dents. Il ne faut pas se cacher devant quelque chose qui, à mon avis, est irréaliste. Légaliser quelqu'un qui n'est redevable envers personne, qui n'a aucune obligation, c'est courir après des problèmes.

Le bonhomme qui se promène avec sa carte de qualification hors décret, qui fait une réparation d'une journée dans une ville, puis qui n'a que sa brosse à dents et voyage dans d'autres villes ou change de place, que M. le ministre ou que moi, M. le député, on tente de le trouver, est-ce que cela va alléger le fardeau du consommateur pour avoir recours à quelqu'un? C'est notre inquiétude face aux consommateurs. Puis, il

ne s'agit pas de dire qu'ils ont le droit...

M. Gendron: Non. Mais, un instant. Votre inquiétude, je la partage. En tout cas, en ce qui me concerne, je suis aussi inquiet que vous. Je ne vois rien d'avantageux pour le consommateur, si ce n'est que cela va coûter moins cher. Tout le reste, ce sont des palabres, des phrases inutiles pour aller chercher une opinion publique favorable sur quelque chose qui n'aura pas d'incidence.

La question, ce n'était pas cela. Vous disiez: II faudrait exiger la création de plans de garantie. Alors, dans cette loi-là, un plan de garantie pour le consommateur, cela serait quoi? Dans la perspective où le ministre continue, lui, et où il veut l'appliquer, comment peut-on greffer un plan de garantie dans le projet de loi 31? (10 h 45)

M. Lemay: Je pense que ce qui serait important - c'est ce qu'on veut dire - c'est d'avoir un minimum de contrôle. Si ce n'est plus régi par la construction, il va absolument falloir que soit les associations, soit un organisme quelconque établissent une protection quelconque pour le consommateur afin qu'il y ait un contrôle dans la qualité des travaux qui vont être exécutés. C'est dans ce sens-là.

M. Gendron: D'accord. Cela va. Lorsque vous dites que, dorénavant, dans le projet de loi 31, il y a les inclus et les exclus, vous avez raison. Je pense que vous donnez exactement une conséquence du projet de loi. Vous avez ajouté, à la page 8: "S'il y a deux régimes de qualification, l'apprenti devra donc détenir deux carnets d'apprentissage. Qui va assurer ce contrôle? Le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ou la Commission de la construction du Québec?" Alors, je pense que vous posez des bonnes questions. La question que je vous pose, c'est: À partir de quoi précisément, dans le projet de Soi 31, déduisez-vous qu'on serait peut-être dans un régime où il y aurait l'obligation de détenir deux carnets d'apprentissage?

M. White: M. le député, sur cette question, il n'y a rien dans le projet de loi. Au sujet de la qualification, on n'a rien vu dans le projet de loi, sauf qu'il existe présentement un règlement hors construction pour le métier de tuyauteur, c'est-à-dire pour des apprentis qui pourraient faire de la réparation. Il y a un régime pour eux, vu qu'ils sont hors construction. S'ils font de la rénovation demain matin, ils vont être hors construction, ils vont avoir un carnet d'apprentissage hors construction. Mais dans l'entreprise, quand on va faire un appel de services chez un consommateur, mais également chez le fleuriste qui n'est pas un consommateur, d'accord, cela peut être le même gars, le même employé qui peut aller là. Or, à un moment donné, il va travailler 20 heures hors construction, puis il va travailler 20 heures construction. Il n'y a pas, en tout cas, on n'a pas pu retrouver au moment où l'on se parle de véritable disposition législative qui ferait en sorte qu'on ne devrait pas avoir deux carnets d'apprentissage. Je n'en ai pas trouvé. Si le ministre me dit que c'est le cas, que cela n'en prend pas, d'accord. Mais, selon nous, cela va prendre deux carnets d'apprentissage et, alors que le temps d'apprentissage est présentement de 8000 heures, tant hors construction que construction, bien, cela va prendre combien de temps avant que quelqu'un réussisse à avoir un certificat de compagnon? On va doubler ce temps pour obtenir les certificats de compétence. Alors, c'est pour cela qu'on dit un système, un seul système.

M. Gendron: Merci. Dernière question, à la page 11, votre conclusion sur l'ensemble du projet de loi, c'est que "l'étude de ce projet de loi soit reportée afin de permettre une consultation élargie non seulement sur le projet de loi, mais également sur l'ensemble des problèmes de l'Industrie". La question que je vous pose: Puisque vous souhaitez le report - je prétends que c'est la moindre des choses qu'il faut demander; moi, j'aimerais mieux balancer cela parce que c'est trop mal foutu, mais, au pire, si on le reporte - et que vous indiquez que cela serait pour vous permettre de faire une consultation élargie, est-ce que vous croyez que votre consultation élargie vous permettrait davantage d'arriver au retrait du projet de loi ou d'arriver à une meilleure compréhension du projet de loi et à dire: Bon, bien, il nous apparaît que nos membres souhaitent ce projet de loi là? Vers quelle orientation, selon vous une consultation élargie vous mènerait-elle?

M. Lemay: Si on se fie à ce qu'on a vécu dans le passé avec le projet de loi 119, normalement, on était consultés et on pouvait consulter nos membres pour arriver avec quelque chose de concret. Ce qu'on dit aujourd'hui ce n'est pas qu'on veut détruire tout ce qui a été fait, mais on voudrait se pencher là-dessus, aller chercher l'opinion de nos gens et arriver avec quelque chose de potable qui, peut-être, sera beaucoup mieux et qui donnera une meilleure orientation, une meilleure définition afin qu'on sache vers quoi aligner nos entrepreneurs.

ML Gendron: Donc, dans votre esprit, c'est un report sincère?

M. Lemay: Oui.

M. Gendron: C'est un report sincère. Merci.

M. Bureau: Si vous me le permettez, M. le député, comme on ie mentionne dans notre conclusion, cela nous permettrait aussi, de regarder le tout dans une perspective globale,

non morcelée, de ne pas parler seulement d'un morceau du casse-tête, mais je regarder le casse-tête globalement. C'est la raison pour laquelle on voudrait le retarder et être reconsultés, pour tenter de faire comprendre au ministre que ce n'est pas un "plaster" qu'il faut poser, il faut regarder l'opération en général pour régler le problème de l'industrie.

M. Gendron: Merci beaucoup.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je pense que, pour reprendre les dernières paroles de M. Bureau, il faut regarder le travail au noir, dans l'industrie, dans son ensemble et vous nous avez apporté là-dessus un éclairage important. Vous nous avez mentionné qu'il existe, bien qu'il soit beaucoup moins important, du travail au noir dans les chantiers commerciaux et industriels, les grands chantiers de construction, qu'il en existe un petit peu plus dans la construction domiciliaire et qu'il en existe dans un pourcentage, dans le métier qui vous concerne, un peu plus élevé que je ne le pensais même, dans la rénovation domiciliaire. Le projet de loi qu'on a devant cette commission aujourd'hui contient, en tout et pour tout, 19 articles. Il n'est pas d'une complexité incroyable. L'ensemble des articles touche le resserrement des contrôles sur les grands chantiers, ainsi que dans la construction domiciliaire. Là-dessus, je regrette que le critique de l'Opposition - c'est son droit, là - ne vous ait pas interrogés, pour reprendre cette question à laquelle je n'ai pas eu de réponse, à savoir, si les actions que nous prenons quant aux grands chantiers, quant à la construction domiciliaire, vont contribuer à réduire le travail au noir, sinon à l'éliminer. Je n'ai pas eu de réaction de votre organisme là-dessus. S'il n'y en a pas, cela va, mais j'aimerais peut-être le savoir s'il y en a une.

M. Bureau: Vous semblez insister, M. le ministre, pour appliquer plus de restrictions là où il n'y a pas de travail au noir ou à peu près pas. Dans la grande industrie, vous amplifiez les mécanismes de contrôle, les amendes et ainsi de suite, puis, là où le consommateur est le moins protégé, à mon avis, bien, vous légalisez, vous ouvrez les règlements.

M. Paradis (Brome-Missisquoi)-' Je respecte votre opinion, M. Bureau, mais je vous dirai que des gens qui ont témoigné devant cette commission - et il y en aura d'autres qui témoigneront - nous disent qu'il existe présentement du travail au noir dans les grands chantiers de construction, dans la construction qu'on appelle commerciale, et prétendent également, parce qu'ils ont une expérience sur le terrain, que c'est p/us important dans le secteur de la rénovation. Mais on n'en a pas eu encore, et vous êtes les premiers à nous le dire, qui nous ont dit qu'il n'existe pas de travail au noir dans les grands chantiers industriels au Québec, dans les chantiers commerciaux et dans la construction domiciliaire. C'est une révélation pour moi à ce stade-ci de la commission, je l'avoue.

M. Bureau: Je ne voudrais pas qu'on enregistre qu'on a dit qu'il n'en existait pas.

M. Gendron: Je n'ai pas entendu cela. M. Bureau: J'ai dit beaucoup moins.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Beaucoup moins, d'accord. Ce qu'on dit, au moment où l'on se parle - et je pense qu'on l'avait établi au début avec M. le président - c'est qu'il existe de façon graduée un peu de travail au noir dans les grands chantiers, un peu plus dans la construction domiciliaire, et beaucoup plus dans ce qu'on appelle la rénovation. Je pensais qu'il s'agissait là d'un consensus et je ne voulais pas qu'on brise ce consensus-là, à moins qu'il ne soit opportun et plus conforme à la vérité de le briser.

M. Lemay: M. le ministre, afin d'éclairer nos gens sur la question, je reviens à ma question de tout à l'heure: Modification, réparation, rénovation, entretien, qui va être autorisé, d'après votre loi, à entreprendre ce genre de travaux?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tout ce qui touche la question que vous posez se retrouve à l'article 4 du projet de loi 31 qui modifie l'article 19 de la loi actuelle et qui se lit comme suit: "par l'addition - c'est très technique - ...aux travaux suivants exécutés aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique." Les travaux, c'est "d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification". Ces termes-là ont été assez largement utilisés, depuis 20 ans, dans l'industrie de la construction pour qu'une jurisprudence ait pu les définir.

Maintenant, vous le soulevez par la voie d'une question. À la page 4 de votre mémoire, vous donnez l'exemple de "la réparation d'un équipement sanitaire dans un "bloc" de huit logements". Non, ce n'est pas à des fins personnelles dans le cas d'un "bloc" de huit logements. C'est rare que quelqu'un occupe un "bloc" de huit logements a des fins personnelles. C'est du jamais vu. Donc, l'exemple que vous soumettez - et vous l'avez posé d'une façon interroga-tive - serait soumis au décret.

Maintenant, vous demandez au paragraphe suivant de votre mémoire que les exclusions soient claires et qu'elles ne laissent pas de place à l'interprétation. Je pense que, sur le plan de la

clarté, vous avez raison d'insister pour que tous et chacun sachent le plus clairement possible quels sont les types de travaux qui sont exclus et qu'il n'y ait pas dans la tête ni du consommateur, ni du salarié, ni du travailleur autonome, ni de l'artisan, ni de l'entrepreneur quelque doute que ce soit. Maintenant, que cela ne laisse pas place à l'interprétation, cela relève un peu de la mission impossible et l'actuel gouvernement n'a pas l'Intention d'abolir les processus quasi judiciaires ou judiciaires, ni de priver d'emploi votre procureur, etc. Il y aura toujours des gens qui tenteront d'obtenir une interprétation de la part des tribunaux et il appartiendra toujours, dans notre société, aux tribunaux de donner cette interprétation. Mais le devoir du législateur - et là je rejoins votre demande - est d'être d'une limpidité et d'une clarté qui fassent en sorte que le champ d'action de vos procureurs soit le plus restreint possible.

M. Lemay: Donc, je comprends bien que cela va toujours relever de l'entrepreneur de faire ce genre de travaux et que le consommateur ne transigera pas directement avec...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Ce que l'on a dit, c'est que lorsque, comme dans l'exemple que vous apportez à la page 4 de votre mémoire, dans un "bloc" de huit logements le propriétaire, qui en occupe un seul, demande de faire réparer un équipement sanitaire, à ce moment-là, ce n'est pas à des fins personnelles et cela demeure soumis au décret de la construction.

Prenez le cas d'un locataire, dans un appartement, qui décide de faire repeindre son loyer pour des fins personnelles; il peut le faire faire soit par un artisan, soit par un travailleur autonome, soit par un salarié qui est à l'emploi d'un entrepreneur général ou d'un entrepreneur spécialisé, soit par un entrepreneur qui travaille seul.

M. Lemay: Mais si on prend, dans notre juridiction, la plomberie où on a une loi qui dit: II faut un entrepreneur pour faire des travaux de rénovation et tout cela, je comprends bien que cela existe toujours et que le propriétaire d'une maison unifamiliale, s'il veut faire faire des travaux, doit passer par un entrepreneur. La loi dit, d'après ce que je peux comprendre, que l'entrepreneur pourra payer le salarié au salaire qu'il veut finalement, mais cela reste toujours sous la juridiction d'un entrepreneur. Est-ce que c'est bien cela?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela demeure toujours, comme dans le cas de l'électricité, un travail qui a une composante sécurité et qui doit être effectué, même s'il est prévu que ce soit hors décret, par quelqu'un qui a la compétence reconnue pour l'effectuer.

M. Lemay: Mais la compétence et l'entrepreneur aussi. Le salarié qui a une carte de compétence n'aurait pas le droit d'entreprendre des travaux, d'après la loi présentement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour être entrepreneur au Québec, il faut se qualifier auprès de la Régie des entreprises de construction du Québec...

M. Lemay: C'est exact, parfait!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et aucune modification apportée dans le projet de loi 31 n'altère...

M. Lemay: Cette loi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...ces dispositions prévues quant à la Régie des entreprises de construction du Québec.

M. Lemay: D'accord. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, une dernière question. J'ai été étonné d'entendre quelque chose et je veux seulement vérifier. Il me semble qu'à une question du ministre, toujours concernant le travail au noir qui est censé être l'os de ce projet de loi, vous avez mentionné qu'il y avait environ la moitié, selon vous, du travail au noir qui était ce qu'on appelle une facturation inférieure au taux prescrit par le décret de la construction - oui, pour les tuyauteurs parce qu'on est en présence des tuyauteurs - et qu'environ la moitié du travail au noir se faisait par des personnes qui n'avaient pas de carte de compétence. J'ai été étonné parce que, selon ce que je connais, ce que j'entends et ce que je vis, c'est beaucoup plus un très fort pourcentage de gens qui ne détiennent pas la carte de compétence et qui, pour toutes sortes de raisons, prétendent qu'ils sont capables de faire l'installation de systèmes de tuyauterie et de plomberie faite par les plombiers. C'est entendu qu'à partir du moment où le gars n'a pas sa carte il ne facture pas le taux du décret, mais le cas le plus fréquent que je rencontre et dont j'ai entendu parler, c'est que c'est beaucoup plus des gens qui n'ont pas de carte et qui font le travail quand même. Là, il y a une entente bona fide sur combien ils demandent, que ce soit 15 $, 18 $ ou 20 $ l'heure. Je voudrais savoir sur la base de quoi vous avez lancé 50-50.

M. Lemay: C'est du travail au noir, n'est-ce pas? Ce n'est pas palpable. C'est une idée, un sentiment. À lire des journaux et à voir toutes sortes de statistiques, à un moment donné, on se fait une opinion. Mais je n'ai rien pour l'appuyer, si c'est cela que vous voulez savoir.

M. Gendron: D'accord, mais, en tout cas, vous êtes honnête, vous répondez exactement ce que je croyais: On n'a rien pour l'appuyer. Cependant, sur la même base de choses que j'ai lues et de certaines statistiques, toujours entre guillemets, j'ai l'impression qu'il y a plus de gens qui n'ont pas la carte - et, bien sûr, ils demandent une tarification - que la moitié de ceux qui sont qualifiés, et qui facturaient moins. Quand j'appelle des gens qui sont qualifiés et qui ont une carte de compétence, ils m'arrivent toujours avec le carnet dans leur poche arrière et ils me disent: Voici le taux. Ce sont bien plus les gens qui exigent le taux que les gens qui n'ont pas de carte qui font ce qu'on appelle du travail au noir, d'après moi. (11 heures)

M. Lemay: Je crois que ce qu'on voulait dire, c'est que c'est le travailleur compétent qui, le samedi, le dimanche ou le soir, exécute des travaux à son compte, sans détenir un permis de la régie. C'était plutôt dans ce sens qu'on disait qu'il y avait une bonne majorité de ces gens qui faisaient cela. Pour inciter le consommateur à faire affaire avec des entrepreneurs, s'il y avait un incitatif fiscal comme cela a déjà été proposé, il y aurait un avantage et là le travailleur paierait ses impôts, cela ne coûterait rien au gouvernement et le consommateur serait incité à faire travailler de vrais entrepreneurs et de vrais salariés.

Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse, nous allons mettre fin à votre présentation devant la commission parlementaire. Je vous remercie d'avoir participé à nos travaux. Nous allons maintenant inviter les représentants de la Fédération des travailleurs du Québec à prendre place.

À l'ordre! Nous recevons maintenant la Fédération des travailleurs du Québec. Alors, messieurs, bonjour à nouveau et bienvenue à la commission parlementaire de l'économie et du travail. Je crois que vous connaissez un peu nos règles du jeu. Nous avons un temps limité pour la présentation du mémoire et la discussion. D'abord, je pense que c'est M. Lavallée qui va présenter les personnes qui l'accompagnent, dont certaines sont illustres, puis qui fera sa présentation, et ce sera suivi d'une discussion avec les membres de la commission parlementaire. Sans plus tarder, allez-y!

FTQ-Construction

M. Lavallée (Jean): Je suis Jean Lavallée, président à la FTQ-Construction. Je suis accompagné, à ma gauche, de Yves Paré, directeur général de la FTQ-Construction et, comme vous le connaissez tous, à ma droite, de mon président, Louis Laberge de la FTQ.

M. le ministre, M. le Président, mesdames et messieurs, membres de cette commission, l'annonce, M. le ministre, de votre intention de déréglementer certains travaux de construction dans le secteur domiciliaire nous a causé une forte surprise. Mais que vous le fassiez sans avoir donné d'indications préalables à l'industrie, à la toute fin de la session parlementaire, et que vous nous donniez à peine trois semaines pour réagir à cette commission parlementaire laisse pratiquement penser que vos objectifs étaient de nous prendre par surprise et de passer ce projet de loi à la sauvette. Cela commence décidément à être une habitude lorsque l'industrie de la construction est concernée.

Depuis dix ans, toutes les modifications qu'a connues l'organisation de l'industrie ont été faites à la pièce, sans tenir compte de la cohérence de l'ensemble du régime ainsi obtenu. Les problèmes qu'on connaît aujourd'hui viennent principalement de cette façon de faire, de ces réformes parcellaires qui ont contribué, une à une, à bâtir un régime poreux, inadapté et inapplicable. De fait, il est de moins en moins appliqué.

Les objectifs de fond qui ont vu naître le régime actuel ont totalement disparu du décor. Aujourd'hui, ni les travailleurs, ni les entrepreneurs, ni les consommateurs, ni l'État n'y trouvent plus leur compte. Vous arrivez maintenant avec ce projet de loi qui ne vise encore une fois qu'un objectif limité, qui ne prend aucunement en compte les principaux problèmes de l'industrie.

M. le ministre, ajouter ainsi votre pierre au sommet d'un édifice branlant n'améliorera rien. Heureusement que, dans la construction, on ne bâtit pas ainsi. Autrement, l'escalier central du parlement aurait bien pu déboucher dans un placard!

Une voix: À la FTQ, c'est ça qui est arrivé.

M. Lavallée: C'est ça qui est arrivé. La FTQ-Construction considère que le projet de loi 31 est inadapté et même dangereux pour l'industrie, comme pour les consommateurs. Nous allons profiter de cette commission parlementaire pour expliquer à nouveau, le plus clairement possible, les vrais problèmes des travailleurs et de l'industrie.

À votre approche à la pièce, nous réagissons par une vue d'ensemble dans laquelle nous tenterons de vous faire comprendre l'effet réel de votre projet de loi. C'est pourtant un exercice que nous avons déjà fait à maintes occasions, mais qui n'a jamais trouvé écho auprès des gouvernements. Puisque c'est la première fois qu'il est fait devant vous, nous voulons bien le reprendre, en cherchant toutefois à bien mettre les points sur les "i".

Le contexte de l'industrie. Il faut d'abord rappeler pourquoi l'industrie de la construction est aujourd'hui si réglementée. Ce n'est pas pour le plaisir de la chose ou parce qu'à une autre époque cela aurait été davantage la mode. Depuis la commission Cliche, l'ensemble des parties de

l'industrie, comme le gouvernement, reconnaissent qu'un des problèmes centraux de l'Industrie est celui de l'insécurité et de l'instabilité d'emploi des vrais travailleurs de la construction. Ce problème a donc été, théoriquement du moins, celui qui a motivé toute la réforme des années soixante-dix. Les parties de l'industrie ne sont, par contre, jamais arrivées à de véritables consensus sur les moyens concrets de mettre en oeuvre l'objectif de sécuriser et de stabiliser l'emploi des travailleurs. Il y a certaines parties du mémoire que je ne iirai pas parce qu'on est limité à 20 minutes et qu'on veut respecter le délai fixé.

L'absence de cohérence dans les réformes successives depuis 1978 n'a cessé de créer des problèmes de plus en plus graves. L'artisan, vous le savez, est devenu une plaie pour toute l'industrie. Pas seulement pour les travailleurs, mais aussi pour les entrepreneurs. Au-delà de l'artisan lui-même, le problème c'est cette approche à la pièce, souvent contradictoire, que le législateur a adoptée depuis dix ans, craintif qu'en abordant les problèmes dans une démarche d'ensemble il n'ouvre ainsi une boîte de Pandore. C'est un beau mot, ça. Mon confrère Paré va vous expliquer ce qu'est une boîte de Pandore.

M. Paré (Yves): Continuez.

M. Lavallée: Non? D'accord. Aussi, avant que la situation ne devienne intenable, les parties dans l'industrie ont décidé de discuter de front ces problèmes. Aux dernières négociations, elles ont convenu de se parler très sérieusement et largement de la situation de l'industrie. Un comité formé d'un président et de deux assesseurs, des parties patronale et syndicale, a été mis sur pied pour entendre les mémoires des principales associations représentatives du secteur.

Et, fait très encourageant, les discussions devaient porter au-delà du simple contrôle de l'offre de la main-d'oeuvre, pour s'attaquer aux problèmes de l'instabilité de la demande des travaux de construction, de la répartition des heures de travail et même aux possibilités de développer une approche globale concernant la sécurité du revenu et d'emploi des travailleurs. C'est ce qu'on a appelé la commission Sexton. Nous pouvions compter pour ces discussions sur une situation plus calme, éloignée des négociations, du maraudage et des grandes réformes de l'industrie. Nous avions le temps, M. le ministre, de réfléchir et de discuter à fond en vue des prochaines négociations.

Voilà que vous nous arrivez, sans consultation, avec un projet de loi qu! modifie les règles du jeu, tout en attaquant un peu plus les bases du régime sur lequel nous nous appuyions pour mener nos discussions.

M. le ministre, votre projet de loi est mal venu dans sa démarche, dans sa formulation et dans le temps. Je peux vous dire que la commis- sion Sexton, on sait que ce n'est pas l'endroit pour le débattre, on a une commission expressément pour cela, mais c'est là qu'on va soulever les points qu'on veut amener pour clarifier ce qu'est une vraie sécurité d'emploi. Cela encadre le travail au noir et aussi les artisans. C'est accompagné d'une réduction des heures de travail, du contrôle du temps suplémentaire, d'une planification des investissements aussi, pour en arriver tout simplement à une sécurité du revenu. Dans notre mémoire, vous verrez qu'il y a des annexes qui font état de différents documents qu'on a présentés à la commission Sexton, en ce qui a trait à la répartition des heures régulières et à ia réduction de la durée hebdomadaire et normale de travail.

Un projet de loi qui ne règle rien. Compte tenu du contexte que nous vous exposions et vu ses effets, nous nous opposons à ce projet de loi et nous recommandons son retrait dans sa forme actuelle. Nous allons chercher à bien vous expliquer cette position, afin qu'il y ait le moins d'ambiguïté possible sur notre analyse.

Nous vous rappellerons pour débuter qu'en 1984 nous avions reconnu la difficulté d'application du décret dans le secteur résidentiel pour les travaux d'entretien et de réparation effectués aux fins personnelles et non lucratives d'une personne physique. C'était lors d'une commission parlementaire. À ce moment-là, les parties syndicales avaient été unanimes sur cette position. Nous avions alors cherché à expliquer le plus clairement possible au ministre du Travail de l'époque la situation dans l'industrie, afin que notre proposition prenne pour lui tout son sens. Nous lui proposions en effet de retirer l'artisan de l'industrie, moyennant quoi nous accepterions que ces travaux, et ces seuls travaux soient exclus du décret. Ils auraient à l'avenir très bien pu être réalisés par les artisans qui choisiraient de ne pas devenir salariés et de conserver leur statut actuel. Ils auraient eu une période de temps pour décider de demeurer artisans ou de devenir entrepreneurs. D'après des commentaires entendus, certains parlaient de trois mois, mais on avait alors parlé de six mois. Nous maintenons toujours cette position à laquelle votre projet de ioi n'a pas semblé bon de donner écho.

Le travail au noir. Vous présentez ce projet de ioi en insistant sur le travail au noir pour le justifier. Quelle est au juste la situation du travail au noir dans l'industrie? Nous avons déjà évalué son ampleur à 35 % des heures de travail effectivement réalisées dans l'industrie; cette évaluation a été faite dans le cadre des travaux du comité dont nous parlions un peu plus tôt. Nous vous recommandons de lire les textes que nous avons produits sur le sujet et que nous avons joints en annexe au présent mémoire.

Il nous faut faire ressortir ici deux réalités. D'abord, le travail au noir ne s'effectue plus uniquement dans les travaux domiciliaires, mais partout dans l'industrie. Et le plus dommageable

pour les travailleurs, ce n'est pas le travail au noir pour "la marche d'escalier", mais plutôt celui sur les chantiers commerciaux et industriels. Ensuite, le principal facteur qui a encouragé le travail au noir, c'est l'existence des concurrents directs des travailleurs, et aujourd'hui des entrepreneurs, que sont devenus les entrepreneurs artisans et les entrepreneurs associés.

Par leur possibilité d'effectuer les mêmes travaux que les travailleurs salariés, tout en n'étant pas assujettis aux mêmes obligations que ces derniers, les artisans ont complètement saboté les mécanismes des relations entre les salariés et les employeurs. Loin de déclarer leurs heures pour les travaux autres que pour des fins personnelles, les artisans travaillent de plus en plus en sous-traitance, à forfait, sur les grands chantiers. Les pratiques de travail à la pièce ou de travail à forfait, non déclaré, se sont développées à un rythme phénoménal, à tel point qu'elles ont même réussi à bousiller entre entrepreneurs le principe de l'accord du contrat au plus bas soumissionnaire. Nous reproduisons ici ce que nous affirmions à ce sujet dans un de nos mémoires au comité Sexton: "Chez les entrepreneurs, les problèmes commencent à devenir plus que sérieux. À tel point que le président de la Fédération de la construction du Québec, M. Linteau, signait dernièrement un texte où il lançait véritablement un cri d'alarme. Le processus du plus bas soumissionnaire, qui a permis aux "brokers" et aux petits entrepreneurs, comme aux entrepreneurs associés de se glisser dans le système et de couper les jambes aux travailleurs comme aux entrepreneurs mieux établis, est à son avis à remettre en question: "...je crois fermement que nous devons remettre en question notre système du plus bas soumissionnaire ou modifier la qualification au niveau des licences d'entrepreneurs en construction." La prolifération de petits entrepreneurs dont la régie ne contrôle pratiquement pas la qualification réelle déstabilise, selon lui, l'industrie et avantage le développement du travail au noir, encourage une tendance générale à la baisse dans l'évaluation de la valeur des projets et incite à réduire la qualité des constructions. (11 h 15) "De fait, selon le rapport annuel 1985-1986 de la Régie des entreprises en construction, 24 874 licences auraient été délivrées ou renouvelées durant l'exercice. Pendant ce temps, la CCQ indiquait que 14 309 entrepreneurs apparaissaient sur ses listes, soit un écart de 10 565 entrepreneurs. C'est dire que 42,5% des entrepreneurs détenant une licence n'apparaissaient pas à la CCQ. C'est phénoménal! Et la plus grande partie des écarts vient, bien sûr, des entrepreneurs artisans (2238 licences) et des entrepreneurs spécialisés (13 760 licences) qui soumissionnent à bas prix, qui n'engagent aucun travailleur ou qui les engagent au noir, et qui coupent souvent dans la qualité pour entrer dans leurs frais."

Vous n'êtes pas sans savoir, M. le ministre, ce que sont ies "brokers". Ce sont des promoteurs qui ont envahi l'industrie, qui n'engagent aucun travailleur, mais font simplement leur argent à fragmenter un contrat et à en faire faire toutes Ses parties par sous-contrat. Parce qu'ils ont accès à des artisans et à des entrepreneurs associés en quantité considérable, ils peuvent se permettre d'éviter des travailleurs couverts par le décret et de limiter à outrance les enveloppes de chacun des sous-contrats. Les sous-traitants doivent nécessairement faire appel au travail au noir et couper dans la qualité des matériaux, s'ils veulent entrer dans leurs frais.

M. le ministre, le problème du travail au noir dans l'industrie est aujourd'hui institutionnalisé et très bien organisé.

M. Paré (Yves): Que fait votre projet de loi par rapport au travail au noir?

Votre projet de loi passe donc à côté du problème le plus sérieux de l'industrie, tout en ne réglant pas, par contre, la situation dans le secteur domiciliaire. Que fait-il? Vous prenez trois types de mesures. Vous excluez du décret les travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification, exécutés aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique, en ajoutant les garages et les remises, et vous instituez un programme volontaire de formation pour les "déréglementés".

Vous réinscrivez plus nettement dans la loi le voeu pieux que l'artisan déclare ses heures en l'obligeant à fournir un rapport mensuel dans lequel ses heures normales et supplémentaires seraient distinguées, en plus de réaffirmer qu'il doit afficher son contrat sur les lieux du travail.

Vous augmentez légèrement les moyens d'enquête et les pouvoirs de la CCQ, tout en doublant, en moyenne, le niveau des amendes prévues pour ies infractions.

Nous ferons nos commentaires en y allant selon chacun de ces types de mesures.

De votre point de vue, cela devrait créer un incitatif à sortir du noir. De notre point de vue, cela n'aura pratiquement pas d'effet sur le travail au noir dans ces types de travaux, en plus de ne pas toucher au vrai travail au noir dans l'industrie. Votre analyse des causes du travail au noir dans la rénovation nous apparaît simpliste en regard de ce que nous connaissons. Sur ces causes, nous citons vos propres propos dans le mémoire que vous soumettiez au Conseil des ministres: "Les principales causes de ce phénomène sont leurs coûts excessifs pour le consommateur et le peu de polyvalence dans les métiers... la notion d'artisan n'a pas réussi à diminuer de beaucoup l'ampleur des travaux exécutés de façon illégale." Les salaires trop éievés et une réglementation trop lourde, voila,

selon vous, les causes du phénomène. Et, à l'appui de cette analyse, vous citez cet exemple, sans queue ni tête, de la hotte de poêle, qui demanderait sept métiers pour la poser. Nous observons, dans la pratique, une tout autre réalité.

Rappelons qu'il existait déjà, en 1979, une bonne proportion de travail au noir dans la rénovation et la réparation, mais qu'il y en avait encore peu dans le reste de l'industrie. S'appuyant sur le même genre d'analyse que vous, M. le ministre du Travail de l'époque a décidé de créer le statut d'artisan; il était présenté, à l'époque, comme un travailleur compétent, capable de répondre adéquatement à des besoins variés des consommateurs et était auréolé d'une histoire presque mythique, celle d'un travailleur faisant sa route seul, résistant encore à l'industrialisation de la construction et à la spécialisation des métiers. Cela devait être la réponse adaptée au travail au noir!

Est-ce que cela a réglé le problème? Ironie, vous donnez vous-même la réponse: "La notion d'artisan a probablement permis à des consommateurs de faire effectuer des travaux à des coûts plus abordables, mais il n'est pas sûr que ceux-ci aient été effectués en toute légalité dans le secteur résidentiel."

Jolie périphrase qui signifie que le travail au noir a augmenté, malgré la baisse des prix et l'absence de contraintes. Mais vous persistez à croire que ce ne fut tout simplement pas assez, et que de déréglementer totalement, cette fois, solutionnera le problème. C'est le genre de logique que nous avons de la difficulté à suivre.

Il est pourtant facilement compréhensible que le niveau des salaires n'est pas le problème principal, car, quel que soit le niveau de ceux-ci, il sera toujours plus profitable, encore, d'éviter le fisc. Le projet de loi rendra simplement plus de monde à l'aise pour effectuer des travaux de rénovation, tout en évitant de déclarer ces revenus au fisc. L'établissement d'un double standard salarial à l'intérieur du secteur domiciliaire, par contre, aura des effets d'entraînement importants dans la construction neuve, où nous sommes persuadés que le travail au noir va augmenter encore.

L'effet réel de la création du statut de l'artisan s'est plutôt fait sentir dans les autres secteurs de la construction, où ie travail au noir s'est propagé. Cette fois, les coûts salariaux ne peuvent certainement plus être invoqués puisque, selon une étude menée en 1984 par la firme d'actuaires Blondeau et compagnie, les salaires et avantages sociaux des travailleurs québécois de la construction étaient parmi les plus bas au Canada. Ce n'est pas non plus l'importance de la réglementation, mais l'affaiblissement de son intégrité, qui explique son apparition.

Le travail au noir, en effet, ne vient pas principalement de la demande, mais de la possibilité qu'il y ait une offre. Les consommateurs, pour un travail le moindrement important, ne font pas affaire séparément avec chacun des travailleurs, mais d'abord avec un entrepreneur qui, lui, engage au noir. Ce dernier effectuera d'autant plus de travail au noir que les opportunités seront grandes. C'est rendu, M. le Président, dans l'industrie de la construction, que les travailleurs qui côtoient les artisans sur les chantiers de construction se demandent pour quelle raison ils continuent à payer des impôts. Pourquoi? Je pense qu'il est beaucoup plus intéressant pour quiconque de travailler sans avoir à payer d'impôt. Qu'est-ce qui crée cela? Pourquoi est-il facile de le faire? C'est l'artisan. S'il n'y avait pas d'artisans, ce ne serait pas facile de le faire.

Nous voilà à la page 13, au point 2. Vous réaffirmez dans votre projet de loi l'obligation pour l'artisan de déclarer ses heures. Vous précisez simplement qu'il doit effectuer un rapport mensuel et qu'il doit déclarer ses heures normales et supplémentaires. La belle affaire!

Pourquoi, M. le ministre, pensez-vous que les artisans ne déclarent pas leurs heures? Parce qu'ils font partie de la chaîne de sous-traitance des "brokers" et que, s'ils déclarent leurs heures, ils n'auront pas de contrat de ces derniers, p>arce que c'est beaucoup plus payant pour eux de ne déclarer que le minimum d'heures pour être admissibles aux régimes complémentaires des avantages sociaux et d'en retirer le maximum. Parce que le travail à forfait se développe et que ce sont les artisans qui en profitent: déclarer leurs heures, ce serait être aux mêmes conditions salariales que les travailleurs, donc, perdre tout avantage pour obtenir des contrats des "brokers" et des entrepreneurs moins scrupuleux sur les conditions du décret.

M. le ministre, c'est tout un régime d'illégalité qui s'est mis en place dans l'industrie, qui tient essentiellement au fait que la réglementation est devenue poreuse et incohérente et parce que les contrôles ont été graduellement relâchés.

Le régime général dans l'industrie est truffé d'exceptions et d'exemptions. Le résultat est que l'industrie marche selon un double ou un triple standard sur un même chantier, ou selon les chantiers pour un même travailleur. Comment voulez-vous que certains ne profitent pas de ces disparités pour contourner le décret?

Que vous réaffirmiez ce qui existe déjà au sujet des artisans ne changera rien. Vous ne faites pas face à des individus qui omettent des heures, mais à tout un système qui s'est bâti autour d'eux, dans lequel les artisans travaillent à forfait ou ne travaillent pas.

La seule chose qui appuie l'obligation que vous leur faites de produire un rapport mensuel est un léger renforcement des pouvoirs de la CCQ vis-à-vis de ceux-ci. Mais pouvoirs et contrôles ne sont pas synonymes: la Commission de la construction ne pourra jamais contrôler chacun des 10 000 entrepreneurs qui sont actuellement enregistrés à la Régie des entre-

prises en construction, mais qui n'apparaissent pas sur les listes de la CCQ. Pour les artisans seuls, comment la CCQ pourra-t-elle contrôler ia véracité de leur rapport mensuel? Allez-vous mettre un inspecteur sur les talons de chacun des artisans au Québec?

Actuellement, M. le ministre, M. le Président, dans l'industrie de la construction, aux seules fins des entrepreneurs existants, les inspections de livres accusent un retard d'au-delà de 18 mois. Si on y rajoute encore un paquet d'artisans, je pense que cela va prendre beaucoup plus de temps à les vérifier.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce qu'il vous reste encore des explications?

M. Paré (Yves): II m'en reste encore pour quatre ou cinq minutes. Je pourrais aller aux conclusions, M. le ministre, si vous le voulez.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Quatre ou cinq minutes, cela va.

Le Président (M. Charbonneau): Quatre ou cinq minutes, cela va aller.

M. Paré (Yves): D'accord, nous passons à la page 16. Enfin, un point nous inquiète. Sur la liste des salariés, sur les heures effectuées, sur les cotisations syndicales, sur la disponibilité de la main-d'oeuvre, bref, sur toutes les questions relatives au fonctionnement de l'industrie et au respect du décret, les données que possèdent les associations syndicales nous viennent de la CCQ.

Pourquoi, alors, avoir ajouté à l'article 81.0.1 du décret les associations? Quel type de documents sont aux mains des associations dont la CCQ pourrait avoir besoin dans l'exercice de ses fonctions? Jusqu'où un document syndical peut-il être jugé nécessaire à cet exercice? N'est-ce pas là, M. le ministre, un premier pas pour couper court avec le placement syndical? Cette disposition nous apparaît plus que suspecte, et nous vous soupçonnons d'avoir voulu subtilement modifier le statu quo actuel sur toute la question du placement syndical.

Page 17, point 1. M. le ministre, il faut être bien loin de l'industrie de la construction pour penser que votre projet de loi sera applicable. Vous permettez à n'importe qui d'envahir le secteur domiciliaire, mais vous pensez que les travaux que vous ne voulez pas déréglementer dans le secteur seront protégés par miracle.

Comment empêcherez-vous des promoteurs d'acheter une vieille école, de la transformer en cinq condos, par exemple, chacun sous le nom propre d'un de ses promoteurs, et de les revendre un peu plus tard? Vous allez coller un inspecteur sur chacun des chantiers de restauration, de rénovation, de modification ou de transformation dans la province?

Pensez-vous qu'un entrepreneur avec ses quelques employés fera une différence lorsque son chapenîier-menuisier travaillera sur le coffrage du solage ou lorsqu'il travaillera sur la structure? Comment pensez-vous pouvoir différencier sur !es chantiers l'artisan - qui devra avoir sa carte de compétence quels que soient les travaux - des autres travailleurs qui pourront ne plus avoir de carte? Quei type de main-d'oeuvre sera désormais disponible, pensez-vous, pour les constructeurs de résidentiel neuf? Combien de temps pensez-vous qu'ils se priveront d'engager eux aussi des travailleurs formés volontairement? Allez-vous faire des inspections à chaque maison qui se construit?

M. le ministre, vous sous-estimez largement les capacités de l'industrie à contourner les règles lorsqu'elles sont mal adaptées et ne correspondent pas à la réalité. L'expérience nous montre plutôt que, lorsque vous créez des standards différents dans un même secteur, le régime générai et les limites imposées aux entrepreneurs prennent peu de temps à être contournés. Dans votre projet de loi, M. le ministre, vous parlez d'entretien, de réparation, de rénovation, de modification aux fins personnelles. Dans une déclaration publiée dans un journal, vous pariiez de 2 000 000 000 $. Si votre projet de loi n'a pour but que de protéger le propriétaire occupant pour ce genre de travaux, le montant de 2 000 000 000 $ n'est pas bon. Si le montant est exact, cela veut dire que la réparation, l'entretien, la rénovation et les modifications incluent plus de travaux que pour une personne physique ou un propriétaire occupant. C'est une question qu'on se pose et qui nous inquiète.

Passons à la page 21, le plus rapidement possible, pour qu'on puisse répondre à vos questions. En résumé, le projet de loi 31 aurait pour effet, à notre avis, d'augmenter l'incohérence et les disparités dans le régime général, sans pour autant avantager de façon significative le consommateur et sans s'attaquer sérieusement au problème du travail au noir. Nous signalons tout de même ia direction souhaitable que vous avez prise concernant les pouvoirs attribués à la Commission de la construction. Là-dessus, on voudrait faire un petit aparté, M. le Président, parce que, lors du dépôt du mémoire de la commission, il a été question un peu de l'augmentation des pouvoirs. Je pense qu'on devrait aller beaucoup plus loin que cela.

Aujourd'hui, en 1988, il y a encore des inspecteurs qui se font battre sur les chantiers. Je pense qu'il faut qu'on le dise. S'ils se font battre sur des chantiers lorsqu'ils vont faire de l'inspection, ce n'est sûrement pas par des personnes qui ont un droit légitimes d'y être. C'est parce que ce sont des gens qui ont quelque chose à cacher. Si on est obligé d'entrer avec la police sur les chantiers de construction, c'est parce qu'il y a un problème quelque part. Augmenter les pouvoirs, M. le ministre, en ce sens qu'on va augmenter un peu les amendes, je pense que ce n'est pas suffisant. C'est un bon

pas, on l'admet. Mais il va falloir aller beaucoup plus loin que cela.

Parce qu'il y a des chantiers complets qui travaillent au noir, on exige aussi d'avoir des pouvoirs, pour qu'on puisse les fermer. Cela fait longtemps qu'on le demande de même que de donner des pouvoirs aux agents, aux représentants syndicaux sur les chantiers de construction. Ce qui nous reste à faire aujourd'hui, c'est d'aller dire bonjour aux travailleurs et de s'en aller. Je pense que le rôle d'un représentant syndical est plus que cela.

M. le ministre, les parties de l'industrie devront à l'avenir être consultées au préalable, si vous voulez formuler des projets de loi qui soient réalistes et applicables. Mais, pour le moment, celui-ci est inacceptable.

En conséquence, nous réclamons que vous retiriez le projet de loi 31 tel que formulé; que la Loi sur les qualifications des entrepreneurs de la construction soit modifiée de façon à éliminer l'artisan de l'industrie et à le restreindre aux seuls travaux d'entretien et de réparation aux fins personnelles et non lucratives de personnes physiques. Nous demandons également que les artisans soient exclus des bénéfices et avantages sociaux des vrais travailleurs de !a construction. Si cela est fait, M. le ministre, nous serons tous disposés à venir vous exposer comment vous pourriez, de façon réaliste, régler le problème réel des travaux d'entretien et de réparation effectués pour les propriétaires occupants dans le secteur résidentiel. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, messieurs. M. le ministre. (11 h 30)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Dans un premier temps, vous me permettrez de remercier la FTQ-Construction, MM. Lavallée et Paré, et de souligner - je pense qu'elle a été remarquée - la présence parmi nous de M. Laberge. Je pense qu'il consacre l'importance, autant pour les travailleurs que pour l'ensemble des intervenants de l'industrie de la construction, du présent projet de loi qui est devant cette commission parlementaire. Si, chaque fois qu'on touche à l'industrie de la construction, M. Laberge revient un peu dans les parages, c'est peut-être à cause de son attachement pour cette industrie.

Pour résumer votre mémoire, je n'ai pas l'intention, parce que le temps ne me le permet pas, de répliquer a chacun des éléments que vous avez soulevés, mais j'ai peut-être l'intention de m'attaquer aux principaux éléments.

Dans l'industrie de la construction, on connaît le fléau du travail au noir. Tout le monde s'entend pour dire qu'il y a du travail au noir. Personne ne s'entend sur les proportions. Par définition, c'est difficile à évaluer, mais tout le monde s'entend pour dire que c'est important. Vous nous apportez un nouvel éclairage parce que, jusqu'à votre mémoire, la perception que j'avais comme ministre... Et je pense que le message qui a été livré aux membres de cette commission était que le travail au noir est présent dans la construction industrielle et commerciale, plus présent dans la construction domiciliaire et encore beaucoup plus présent dans la rénovation domiciliaire.

Vous nous indiquez à la page 7 de votre mémoire: "D'abord, le travail au noir ne s'effectue plus uniquement dans les travaux domiciliaires mais partout dans l'industrie." Vous confirmez donc ce que l'on soupçonnait. Vous dites: "Et le plus dommageable pour les travailleurs, ce n'est pas le travail au noir pour "la marche d'escalier", mais plutôt celui sur les chantiers commerciaux et industriels." Vous êtes donc d'avis que le travail au noir sur ces chantiers est important et ce, contrairement à d'autres intervenants qui sont venus devant cette commission.

Vous avez donc le problème pour vos travailleurs du travail au noir qui s'effectue sur ces grands chantiers de construction. Je vous dirai que le consommateur, lui, a un autre problème à l'autre bout, pour ses travaux de rénovation, de réparation, de modification et d'entretien. Il est de commune renommée que les tarifs imposés par le décret de la construction, la non-polyvalence de l'artisan, la disponibilité des artisans pour effectuer ces travaux-là, ainsi que d'autres critères font en sorte que le consommateur a tendance, de plus en plus, à recourir massivement au travail au noir pour faire exécuter ce type de travaux.

On assiste donc à ce qu'un éditorialiste de Montréal a qualifié dernièrement de vaste hypocrisie sociale. Je pense qu'on s'entend pour dire qu'elle existe dans la rénovation.

Vous nous mentionnez qu'il existe également une vaste hypocrisie sociale dans les grands chantiers de construction. Vous dites, en conclusion de votre mémoire: Réglez-nous l'aspect de l'hypocrisie sociale sur nos gros chantiers et on vous dira, M. le ministre, comment régler l'hypocrisie sociale dans la rénovation domiciliaire. Peut-être que ce n'est pas impossible, je vous le soumets bien respectueusement, de régler ces deux hypocrisies sociales en même temps, si on réussit à s'entendre. Je pense qu'on vise les mêmes objectifs: c'est de réduire au maximum, sinon d'éliminer, le travail au noir dans les grands chantiers et dans la construction par plus de contrôle et d'éliminer le travail au noir dans la rénovation en permettant d'effectuer ces travaux hors décret. Vous posez la véritable question: Est-ce que le gouvernement peut envoyer un inspecteur par logement? Est-ce que c'est praticable? Est-ce que c'est applicable? Je pense qu'après des années d'expérience la réponse est non.

Au centre de tout cela, et je sens que là vous n'y allez pas de main morte, vous attaquez ce qu'on appelle l'artisan. J'aimerais que vous nous expliquiez votre position concernant l'ar-

tisan. J'ai relu, et j'ai fraîche à la mémoire, votre déclaration de 1984 concernant l'artisan, dans laquelle vous souhaitiez à l'époque qu'il soit confiné aux travaux de rénovation et de réparation domiciliaire, etc. Au moment où nous parlons, vous souhaite2 sa disparition pure et simple. Comment conciliez-vous ces deux prises de position?

M. Lavallée: Écoutez, on a la même prise de position qu'en 1984. En 1984, on avait dit au gouvernement en commission parlementaire: on a des problèmes avec les artisans. Cela portait son nom, c'était pour faire du travail d'artiste, envoyez-les à la bonne place! Envoyez-les jouer - dans nos termes - dans le domiciliaire pour une personne physique sans but lucratif, sortez-les complètement de la construction neuve. On tient encore le même langage. On s'est aperçu qu'au fil des années ils ont pris de l'ampleur. Au début, on les voyait un peu moins sur les chantiers industriels. Aujourd'hui, on les voit partout, à travers les "brokers". Les "brokers" prennent un contrat, je l'ai vécu ici, on avait des témoins. Mon ami Pouliot, je ne sais pas s'il est dans la salle, mais il était avec moi. On se rappellera toujours l'histoire qu'on avait vue du Hilton. Le Hilton, ici, a fait la réparation à l'intérieur à l'entrée. On a changé le bar, le restaurant, etc. On est arrivés là un soir, en compagnie de Yves, qui est ici, et de Maurice. On s'est mis à faire notre enquête. On s'est aperçu que les gens qui travaillaient à refaire le plafond étaient des gars qui n'avaient pas de carte. Ils travaillaient de nuit. Ils se cachaient aussi, ils ne pouvaient peut-être pas, dans certains cas, le faire aussi facilement le jour, mais ils se cachaient pour le faire le soir. On a posé des questions à ces personnes. On a dit: Est-ce que vous avez des cartes, etc? Non, c'était un sous-contrat du sous-contrat du sous-contrat. Donc, il y avait un "broker" qui avait pris cela et il l'avait donné à sous-contrat et le sous-contrat avait été donné à cette personne qui, elle, faisait le travail, je suis à peu près sûr, à 99 % au noir.

On a vu cela de façon générale sur les chantiers. Lorsqu'on dit - c'est vrai, vous pouvez vérifier cela avec la commission - que, sur des chantiers de construction les inspecteurs de la commission sont obligés d'y aller avec la police provinciale, les inspecteurs ne sont plus respectés parce que, justement, ii y a des choses que les artisans, les promoteurs et les "brokers" veulent cacher, c'est rendu à ce point. Nous n'avons pas changé de position. On a dit: Les artisans, enlevez-les de la construction neuve et envoyez-les travailler pour une personne physique sans but lucratif dans l'entretien et dans la réparation dans le secteur domiciliaire. C'est la même position que celle de 1984. Peut-être qu'on se comprend mal sur les termes, mais c'est encore la même chose qu'on dit dans notre mémoire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais là, vous ne nous parlez plus uniquement dans votre mémoire de ce qu'on appelle ou de ce qu'on qualifie d'entrepreneurs artisans. Vous nous parlez également d'entrepreneurs associés et vous semblez les placer dans la même catégorie. Je voudrais qu'on soit clair là-dessus.

M. Lavallée: C'est la même chose. Je ne sais pas comment il se fait qu'on les a... C'est le terme, je pense que cela a été discuté aussi. Un entrepreneur associé, c'est un entrepreneur qui travaille seul et, en cours de route, il peut s'adjoindre deux ou trois entrepreneurs associés pour faire un travail. C'est très difficile pour un poseur de gyproc de prendre une feuille de douze ou de seize pieds et de la poser seul. Vous essaierez de prendre une feuille de seize pieds et de la tenir pour aller la poser. En tout cas, c'est une belle gymnastique à faire. Il va falloir que vous soyez une couple ensemble et peut-être plus.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, de façon pratique, il y a des gens aujourd'hui qui travaillent légalement dans l'Industrie de la construction qui s'appellent "entrepreneurs artisans" et qui s'appellent "entrepreneurs associés". Les chiffres qu'on m'a fournis, concernant ce nombre d'individus, varient autour de 9000. Pratiquement pariant, vous souhaitez quoi pour ces 9000 individus? Ils ne peuvent pas être rayés de la carte de...

M. Lavallée: Ils auront à choisir entre s'en aller comme artisans et travailler dans l'entretien et la réparation pour une personne physique sans but lucratif ou devenir entrepreneurs et travailler sur les chantiers de construction neuve.

M. Laberge (Louis): M. le ministre, si vous permettez, je vais essayer de vous expliquer cela très clairement. Ce n'est pas compliqué, pas une maudite miette. La réparation et l'entretien dans le secteur domiciliaire et résidentiel pour une personne physique sans but lucratif, on est prêt à accepter que cela sorte complètement des décrets. C'est un irritant pour le consommateur et cela le met en maudit. Pour vous, membres de l'Assemblée nationale, que ce soit de l'Opposition ou du gouvernement, c'est un irritant, vous avez un tas de monde dans vos comtés qui vous achalent là-dessus. Je vous dis: Parfait, sortons-le du décret. Mais, en retour, on va faire une affaire, et pour le gouvernement, et pour le consommateur, et pour les travailleurs de la construction. On va nettoyer les chantiers de construction pour qu'il y ait juste deux sortes de monde sur les chantiers. Tu es un employeur ou tu es un employé. Cela, ce serait clair, c'est facile à vérifier, beaucoup plus facile à vérifier. Tu es employeur ou tu es employé.

Que les artisans fassent la réparation, qu'ils

fassent l'entretien dans le résidentiel sans but lucratif, on est d'accord avec cela, mais nettoyons les chantiers de construction: employeurs-employés. D'abord, le gouvernement, c'est à son avantage. Plus de la moitié des heures sont cachées et ils ne paient pas d'impôts. Vous le savez fort bien, mon cher ministre, que, lorsqu'il y a tant de gens que cela qui ne paient pas d'impôts, nous autres on est obligés d'en payer plus. Ce n'est pas populaire, cela! C'est à notre avantage à tout le monde. Pour le consommateur, y a-t-il quelque chose de plus important que, lorsqu'il achète une maison, de s'assurer que, s'il y a quelque chose qui arrive, il va pouvoir la faire réparer, revenir sur l'entrepreneur en construction qui l'a faite? Un artisan ne peut pas faire cela. L'artisan est disparu dans la brume, il n'est pas solvable. Pour le consommateur, c'est d'une importance capitale. C'est l'achat le plus important de sa vie.

J'ai vu couler un solage et le solage ouvrir. C'est quelque chose à défaire et à recommencer à neuf. L'artisan qui avait fait cela, on ne peut pas le rejoindre, il est parti, lui. Un entrepreneur spécialisé dans la construction est obligé de payer, il a une licence, un bon. On peut revenir contre lui. Pour le consommateur, le gouvernement ou les travailleurs de la construction, vous avez une occasion en or de nettoyer cela. Les artisans: la réparation, l'entretien dans le domiciliaire sans but lucratif, parfait. Sortez-les des chantiers, que ce soit clair: employeurs-employés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour être clair, vous nous dites: pour les chantiers: employeurs-employés, en ce qui concerne les chantiers industriels, commerciaux et la construction domiciliaire...

M. Laberge: Toute la construction, que ce soit domiciliaire ou autre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous nous dites: L'artisan, retournez-le dans la rénovation, la réparation, la modification, etc., dans le domiciliaire, ce qui n'est pas de ia construction domiciliaire, de la construction dans les grands chantiers ou de la rénovation dans les grands chantiers.

M. Laberge: Dès que c'est de la construction: employeurs-employés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En le confinant là, souhaitez-vous l'exclusivité des travaux pour l'artisan dans le domaine de la réparation et de la rénovation ou si, à ce niveau, comme le prévoit le projet de loi, il sera en compétition avec toute autre personne qui peut faire des travaux?

M. Laberge: Ce ne serait pas régi par le décret, à ce moment-là, il est "number one".

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je voudrais rapidement remercier la FTQ-Construction d'être venue présenter son point de vue qui est toujours intéressant parce que vous êtes dans le domaine, comme centrale syndicale, depuis plusieurs années. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de projets de loi concernant !e domaine de la construction où vous n'avez pas tenu à exprimer votre point de vue. Vous l'avez encore rappelé, vous n'êtes souvent pas assez écoutés à votre goût et vous avez peut-être raison.

Pour ce qui est du projet de loi 31, c'est on ne peut plus clair. On ne peut pas chercher de midi à quatorze heures votre point de vue. C'est un projet de loi inadapté, dangereux pour l'industrie, tout autant pour les consommateurs, qui arrive à un mauvais moment, mais toujours de la même façon, à la dernière minute. Vous dites que c'est une habitude dans l'industrie de la construction. C'est plus une habitude du ministre d'arriver constamment à la dernière minute avec des projets de loi dont on n'a pas tellement entendu parler et qu'on veut faire adopter rapidement, toujours dans le même système parlementaire que nous sommes, dans ce qu'on appelle la fin de session.

Ce qui m'a intéressé dans votre mémoire, c'est qu'on sent que, même si le délai a été court, même si vous n'avez pas eu l'occasion de vous consulter, tous ceux qui sont venus nous parler du projet de loi 31 jusqu'à maintenant disent la même chose: Cela n'a pas de bon sens, ou: Reportez cela pour qu'on aille consulter nos gens afin qu'ils nous disent que cela n'a pas de bon sens davantage, parce qu'on n'a pas eu le temps de le faire. Donc, là-dessus, il y a unanimité des mémoires qu'on a entendus à ce jour. Il n'y a personne qui est venu nous dire que ce projet de loi réglerait le problème pour lequel on l'a rédigé. On a rédigé ce projet de loi, sup-posément, pour contrer le travail au noir. Il me semble que vous avez fait la preuve, on ne peut plus clairement, que tout ce que cela pourra avoir comme mérite, c'est d'amplifier le travail au noir plutôt que de régler quoi que ce soit. C'est un point de vue que je partage. Votre projet de loi est malvenu dans sa démarche, dans sa formulation et dans le temps.

J'ai quand même quelques questions à vous poser, moins sur le projet de loi que sur l'expertise que vous avez dans le domaine de la construction, pour regarder ensemble des solutions. Vous l'avez dit tout à l'heure, M. Laberge. C'est très clair que, pour ce qui est du secteur qu'on appelle communément l'entretien et la réparation pour de menus travaux, les contribuables du Québec... Et j'ai l'impression que pas beaucoup

de monde ne souhaite pas que ceia ne fasse plus partie du décret. C'est la logique consommée. Nous, on dit: Les petits travaux... Surtout quand le ministre avait la prétention de dire: la réparation d'une marche d'escalier, le remplacement de la hotte de poêle - pas avec sept corps de métier, j'aimerais cela qu'il revienne, il n'a jamais véritablement expliqué où il avait pris cela - je pense que vous comprenez que cela a du bon sens que ce soit exclu du décret. (11 h 45)

Cependant, quand on ajoute la rénovation et que des gens sont venus nous dire depuis le début des audiences que la rénovation moyenne des dernières années, par contrat - pas par unité de logement parce que c'est difficile, mais par contrat - est de l'ordre de 18 000 $, de 20 000 $ à 22 000 $, on n'est plus dans les menus travaux. Il me semble que vous avez raison de dire que, pour ce genre de travail, il n'y a personne, que je sache, qui souhaite que ce soit sorti du décret avec les conséquences que cela peut avoir sur la qualité des travaux, sur la garantie par rapport à des vices de formes que cela peut avoir et ainsi de suite.

Voici la première question que j'aimerais vous poser, parce que c'est surtout cela qu'on doit faire, compte tenu de l'expertise que vous avez dans le domaine, pour essayer d'éclairer davantage la lanterne du ministre et du gouvernement. Si jamais il veut poursuivre dans son projet de loi, au moins que ie projet de loi vise à régler un peu plus les vrais problèmes. À la page 6 de votre mémoire vous avez indiqué dans une petite phrase subtile: "dans sa formulation actuelle, il serait inefficace en regard de ses objectifs mêmes - parce que le ministre a défini les objectifs dans ses notes explicatives du projet de loi - (du moins dans ses objectifs officiels)". La question que je vous pose: Est-ce que vous croyez qu'effectivement le projet de loi 31 n'a pas comme objectifs officieux de sortir graduellement l'ensemble du domiciliaire du secteur de la construction et que ce sera un premier pas? Est-ce comme cela que vous comprenez le projet de loi 31?

M. Laberge: J'espère que ce n'est pas ça parce que, si c'était cela, ce serait malhonnête. On est prêt à venir rencontrer le gouvernement, à discuter carrément et franchement des problèmes. Il y a un problème sur la réparation et l'entretien dans le résidentiel? Réglons le problème. Mais retarder indéfiniment ne réglera pas la situation non plus. On souhaite que cela se fasse. Vous avez une situation claire devant vous. Vous pourriez faire quelque chose et l'Opposition pourrait aider le gouvernement là-dedans: faire quelque chose dans l'intérêt de tout le monde: des consommateurs, du gouvernement et des travailleurs. Vraiment une situation claire, pas la rénovation. Vous le savez, vous avez vu cela à Montréal, M. Gendron. Ils prennent des bâtisses, des anciens collèges ou des choses semblables. Ils n'en gardent que les murs puis les planchers. Ils refont tout l'intérieur et l'extérieur. Ce n'est pas de la réparation et de l'entretien. On dit: La réparation et l'entretien dans le résidentiel, sans but lucratif: artisans. Chantiers de construction: employeurs-employés. C'est clair. Faites cela et vous allez voir que ça va encore bien aller pour une secousse. Le reste, il y a la commission Sexton; elle fera son rapport en temps et lieu. Pour le moment, faites donc ce coup-là.

M. Gendron: Deuxième question...

M. Laberge: Cela vous aiderait de faire un bon coup une fois de temps en temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paré (Yves): On dit: "officiels", parce que c'est la question que l'on posait tout à l'heure: Est-ce que l'intention du ministre est strictement pour une personne physique à but non lucratif, propriétaire occupant ou si cela laisse vaguement l'impression que... Je peux vous dire que les entrepreneurs, les "brokers", les artisans - on le dit dans notre mémoire - sont assez rapides pour contourner les lois, puis on n'a pas un inspecteur sur le talon de chacun. Donc, qu'est-ce que la loi 31 veut dire par rénovation, entretien, réparation et modification? C'est le danger.

M. Gendron: Deuxième question: Vous avez longuement décrit comment se pratique le travail au noir dans la construction. Le ministre a indiqué à quelques groupes pas nécessairement les statistiques parce que c'est une mauvaise expression de parler des statistiques concernant le noir, si c'est vraiment le travail au noir, mais les informations qu'on a ou ce dont nous disposons pour porter un jugement analytique. Dans la gradation du travail au noir, le ministre dit: Là où se fait le plus de travail au noir, c'est dans les travaux de rénovation; deuxièmement, dans le domiciliaire; troisièmement, dans le commercial. Il a vérifié cette interprétation avec quelques groupes qui l'ont confirmé. La question que je vous pose, puisque si on lit bien votre mémoire, vous ne semblez pas dire ça: Dans votre mémoire, il vous apparaît que le gros du travail au noir, le vrai noir pesant et lourd, est d'abord dans les chantiers commerciaux.

M. Paré (Yves): II est partout. On ne peut plus se le cacher, en 1979, quand la loi a été adoptée pour créer l'artisan, on disait: De toute façon, la réparation et l'entretien, c'est tout fait au noir. Donc, on va légaliser cela. Huit ou neuf ans après, on dit: C'est un peu plus grand; on va légaliser cela encore. Le travail au noir n'est pas strictement dans la réparation et l'entretien, il est partout.

M. Gendron: M. Paré, on s'entend là-dessus. Je pense qu'il y en a partout, mais pour moi ce n'était pas cela: quand on parle de gradation, c'est qu'on porte un jugement qualitatif en termes d'importance.

M. Laberge: II y en a plus dans la réparation, l'entretien et la rénovation que sur les chantiers industriels et commerciaux, c'est sûr.

M. Lavallée: Sauf que, dans l'industriel et le commercial, quand on parle de travail au noir, cela ne s'attache pas uniquement à dire que c'est du travail fait sous la couverte. Il y a toutes les banques d'heures qui s'attachent à cela. Il y a une série de circonstances qui font en sorte que, même sur les gros chantiers industriels, il y a une forme de travail au noir qui est différente de celle pratiquée en entretien, en réparation et en rénovation.

M. Gendron: Je pense que votre mémoire a bien exprimé ce que vous entendiez par toute la pratique du travail au noir.

M. Laberge: La pollution s'étend.

M. Paré (Yves): Cela va même plus loin que cela. Dans les gros chantiers industriels aujourd'hui, les surveillants de travaux mettent dans les contrats que les entrepreneurs n'auront pas le droit d'avoir des banques d'heures. Ce n'est pas rendu au gars qui répare une marche d'escalier, là, mais dans des chantiers industriels de plusieurs centaines de millions.

M. Gendron: La troisième question, c'est concernant l'illégalité qui est devenue presque une vertu dans le secteur de la construction. Vous dites à la page 9 de votre mémoire: "Et votre gouvernement - vous parlez du gouvernement, vous pariez au ministre - comme la CCQ ont laissé aller le développement de l'illégalité comme principe d'organisation de l'industrie." Je voudrais que vous étayiez davantage ce jugement qui est quand même d'une sévérité probablement réelle, mais...

Une voix: ...avec l'ancien gouvernement.

M. Gendron: Également, mais étayez donc cela un peu plus.

M. Lavallée: Ce n'est pas la première fois qu'on en discute. On a discuté avec ce gouvernement-ci et on a discuté avec l'ancien gouvernement pour leur dire que cela n'a pas de bon sens. C'est rendu que tout le monde sait qu'il y a du travail au noir qui se fait, qu'il y a un paquet d'argent qui est camouflé et que les impôts ne sont pas payés.

On a dit au gouvernement et on a déjà dit au ministre des Finances: Pourquoi ne serrez-vous pas la vis? On a dit au gouvernement actuel: Pourquoi ne prenez-vous pas les gens que vous avez appelés les boubous macoutes, pourquoi ne les engagez-vous pas pour suivre les employeurs de la construction? Je vous dis que, si on prenait ces inspecteurs-là pour les envoyer vérifier les livres de l'artisan qui déclare 800 heures par année, 1000 heures par année, qui a une maison de 250 000 $, qui passe l'hiver en Floride parce que l'hiver, cela coûte plus cher de construire les bungalows, comme on les appelle, et qu'on se mettait à le suivre un peu, vous verriez que ce serait pas mal différent.

Les pressions sur les gouvernements, que ce soit celui-ci ou les gouvernements antérieurs, ont été faites, mais il n'y a rien qui suinte, il n'y a rien qui bouge. On dirait qu'on ne veut pas aller serrer la vis dans le champ pour faire en sorte que cesse ce travail au noir légalisé sur lequel tout le monde s'entend pour dire que oui, c'est vrai, il y a des centaines de millions d'impôt que le gouvernement ne récupère pas et on laisse aller cela.

M. Laberge: Pour le ministre, il a bien plus d'argent à récupérer là-dedans que cehz: les bénéficiaires de l'aide sociale! Il y en a là-dedans.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: J'ai une autre question pour M. Paré, M. Laberge ou M. Lavallée. Il est sûr que, si le ministre décidait d'appliquer le projet de loi 31, cela aurait une conséquence quand même assez importante sur les différents niveaux de la main-d'oeuvre, de même que sur les avantages sociaux. J'aimerais que vous me donniez l'analyse que vous avez faite des conséquences dans la perspective où, effectivement, on soustrait de l'application du décret toute la rénovation et tout cela. C'est quoi, concrètement, en chiffres, l'impact que cela peut avoir sur votre main-d'oeuvre, comme centrale syndicale, et également sur la perte d'avantages sociaux que perdrait indubitablement un certain nombre de travailleurs? Est-ce que vous avez fait une évaluation? Sans aller dans les détails à n'en plus finir, grosso modo, c'est quoi, l'évaluation en chiffres par rapport à vos effectifs et à la perte d'avantages sociaux?

M. Laberge: Me permettriez-vous, toutefois, de faire une précision? Nous, on parle d'entretien et de réparation. Si on s'en va dans tous les mots que le ministre emploie dans le projet de loi 31, c'est énorme, l'impact est énorme. Si on parle d'entretien et de réparation, c'est encore beaucoup, mais c'est beaucoup moins. Nous, on essaie... C'est d'une importance capitale. On a parlé tantôt de la rénovation, de la façon dont cela se fait maintenant. La rénovation, c'est de la construction, dans le fond. Ils ne prennent que les murs et ils refont tout à neuf. Mais, en ce qui concerne l'entretien et la réparation,

l'impact est beaucoup moindre, c'est bien sûr, mais c'est quand même beaucoup.

Quant aux chiffres précis, le ministre ne nous a pas donné le temps de fouiller cela très longtemps. Il déposait le projet de loi alors qu'on était au congrès du CTC à Vancouver. On est revenu et on a fait cela vite un peu. Peut-être qu'il y a même des erreurs là-dedans, mais c'est la faute du ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paré (Yves): Peut-être un complément. C'est pour cela qu'on met en doute soit le projet de loi du ministre ou sa déclaration en ce qui a trait aux 2 000 000 000 $.

On dit: Si vous parlez de 2 000 000 000 $ strictement pour des personnes physiques, ce n'est pas 2 000 000 000 $, c'est beaucoup moins, peut-être 500 000 000 $. Mais, si le chiffre de 2 000 000 000 $ est exact, ce n'est plus pour une personne physique, c'est pour toute la rénovation de condos qui va se faire dans le centre-ville de Montréal, un peu partout, dans le cas d'écoles achetées et converties en condominiums. Dans ce cas-là, on pourrait dire que le montant de la rénovation pourrait être de 2 000 000 000 $, mais ce n'est plus pour une personne physique. Alors, la vraie estimation, on ne l'a pas.

M. Gendron: D'accord. Autre question. Qu'est-ce que vous penseriez d'envisager, pour régler le problème - parce que tout le monde constate qu'il y en a un, cela ne fait aucun doute - d'oublier toutes les écritures du projet de loi 31 et les communiqués de presse qui disaient à peu près le contraire du projet de loi 31 du ministre, d'oublier tout cela et d'envisager une seule mesure qui, à ma connaissance, n'a jamais été assez fouillée et qui serait à peu près celle-ci: Exclusivement pour le domaine résidentiel, on dirait: Tous travaux - sans les qualifier - dans le domaine résidentiel, de 2500 $ et moins - c'est un exemple, je ne veux pas fixer le montant cet après-midi - sont exclus du décret? Tout le reste... Parce que je prétends, moi - je veux finir ma phrase - je prétends que des montants comme cela, de 2000 $ à 2500 $, couramment, selon ce que je connais, c'est vraiment de la réparation et de l'entretien. Tu ne refais pas une structure, tu ne refais pas un solage, tu ne refais pas un garage, tu ne refais pas une annexe comme il est proposé, puisqu'à un moment donné l'annexe devienne plus importante que la bâtisse principale. C'est cela qui est proposé dans le projet de loi 31. Tout cela serait exclu et il me semble que c'est facile à gérer, cela. On dirait: Tous travaux de tel montant sont exclus; toujours dans le domaine résidentiel, le reste, je ne m'occupe pas de cela. Je voudrais savoir quel est votre point de vue sur une affaire comme cela.

Une voix: D'accord.

M. Laberge: C'est le contrôle qui est difficile.

M. Lavallée: D'accord. Bien...

M. Laberge: Le contrôle est très difficile.

M. Lavaflée: Le contrôle est très difficile. Je peux vous dire qu'on a déjà vécu cela dans le secteur industriel. Cela a été le bordel.

M. Laberge: C'était 5000 $.

M. Lavaliée: Cela a été le bordel. C'était 5 000 000 $ et moins, dans le secteur industriel. On s'arrangeait pour toujours donner des contrats de moins de 5 000 000 $.

Vous parlez de 2500 $ dans l'entretien et la réparation.

M. Gendron: À titre d'exemple.

M. Lavallée: Tu fais faire un petit ajout d'un balcon, en arrière, c'est cela, 2000 $, 2500 $. Cela veut dire: Comment feriez-vous pour faire ce suivi-là? En tout cas, cela nous prendrait des inspecteurs pour faire ces vérifications-là et il y aurait ce jeu-là, encore une fois, qui pourrait arriver, de "spliter" les contrats. En tout cas, à première vue, moi, je trouve cela...

M. Gendron: Bien, regardez. C'est parce que j'avais en tête - ce ne sera pas long, on va mettre cela ensemble - une deuxième question qui est liée à cela. Moi, je prétends que, oui, cela a du bon sens de l'envisager si effectivement celui ou ceux qui proposeraient cela ont la capacité d'avoir un mécanisme de contrôle. Mon autre question sur le mécanisme de contrôle, c'est: Puisque, à moins que je ne me trompe, la plupart des municipalités du Québec exigent que, même pour une petite réparation ou une rénovation, nous détenions un permis - celui qui le fait faire - de la municipalité, construction ou rénovation...

M. Laberge: Construction, oui; pas rénovation.

M. Gendron: Ah oui! M. Laberge: Pas réparation. M. Gendron: Non. M. Laberge: Entretien.

M. Gendron: Pas réparation, vous avez raison. Mais rénovation, oui, rénovation, des travaux mineurs, si on définissait ce que c'est. Mais, puisque la plupart des municipalités exigent un permis, est-ce que ce ne serait pas une formule envisageable que de dire dans un projet

de loi quelconque: Toutes les municipalités du Québec doivent faire obligatoirement rapport à la Commission de la construction du Québec de rémission des permis de rénovation et de construction?

Une voix: II y a une façon de vérifier cela.

M. Gendron: Par le biais de l'ensemble des municipalités du Québec, il me semble que là, on aurait l'heure juste et qu'on serait en mesure de contrer beaucoup mieux le travail au noir.

M. Lavallée: Sauf que, si cela fonctionnait, on n'a pas réglé notre problème des artisans dans la construction neuve.

M. Gendron: Non, les artisans, je vais y revenir. En tout cas, j'ai une dernière question là-dessus. Mais pensez-vous que c'est quelque chose qui...

M. Paré (Yves): Bien, toute formule de contrôle est acceptable, mais...

M. Laberge: Cela pourrait aider.

M. Paré (Yves): ...je veux dire, ce n'est pas la seule qui serait acceptable.

M. Laberge: Cela pourrait aider.

M. Gendron: Non, non, mais je pense que... Je pense que cela pourrait aider. Je veux avoir votre opinion là-dessus.

M. Laberge: Aucun doute.

M. Gendron: Votre opinion, c'est que cela pourrait aider.

M. Laberge: Cela pourrait aider. (12 heures)

M. Gendron: Dernière question, en ce qui me concerne, dans le temps qui m'est imparti. Sur les artisans, je pense que - moi, je ne change pas d'avis - l'objectif qui avait été prévu est un objectif valable, dans la perspective où les artisans étaient confinés davantage au résidentiel qu'au commercial. La pratique a voulu qu'il se développe toutes sortes de situations. Et, aujourd'hui, si j'avais un tableau devant moi, je serais obligé de constater que ce n'est pas cela, le portrait. Je serais obiigé de constater que ce n'est pas cela, le portrait factuel. En conséquence, je pense que, dans votre mémoire, vous l'indiquez très clairement: Même si le projet de loi 31 a le mérite, selon le ministre, d'avoir ajouté de belles phrases concernant l'enregistrement des heures et tout le contrôle plus sévère - dans le jugement que vous portez, vous le dites - cela ne changera rien parce qu'il y a trop de pratiques déloyales qui se sont développées, que ce n'est pas en disant: Dorénavant, une fois par mois, vous allez faire votre petit rapport, qu'on va pouvoir mieux contrôler le travail des artisans. Votre suggestion, c'est de les sortir carrément du décret de la construction et de les confiner exclusivement au domaine résidentiel. C'est bien ça?

M. Laberge: Ils auront le droit d'aller travailler sur les chantiers, mais, à ce moment-là, ils choisiront leur statut. Ils seront employés ou employeurs. Ils ne seront pas entre deux chaises; voilà. Un employé n'a pas le choix, il est obligé de déclarer ses heures. C'est l'employeur qui les déclare pour lui. Puis un employeur, c'est pareil parce que, en tout cas, c'est plus facile à vérifier. Allons-y carrément.

M. Gendron: Donc, ce n'est pas sortir les individus, c'est sortir le statut.

M. Paré (Yves): Voilà. Parce qu'il n'y a pas de travailleur résidentiel, commercial ou industriel comme il n'y a pas d'artisan résidentiel, commercial ou industriel. Il y a des travailleurs de la construction et des artisans de la construction. Si on continue à reconnaître l'artisan, il y a une compétition déloyale dans l'industrie de la construction.

Un charpentier menuisier lors de la grève de 1986 déclarait à la radio: Je ne suis pais un charpentier menuisier résidentiel, je suis un charpentier menuisier de la construction. Quand je n'ai plus d'ouvrage dans la maison, je m'en vais dans l'édifice. Je suis un travailleur de la construction. L'artisan, c'est la même mosus d'affaire. Il n'est pas confiné à dire: Bon, moi, je fais rien que de la maison. Ne m'appelle pas et ne me sollicite pas à 50 $ l'heure pour aller travailler dans le commercial, je n'y vais pas. Non, le statut, c'est artisan dans la construction puis travailleur dans la construction. Et c'est là que c'est déloyal.

M. Gendron: D'accord. Je veux remercier les gens de la FTQ parce que, dans le temps qui m'est imparti, j'ai terminé. Alors, merci.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, j'ai quelques questions additionnelles concernant les inspections comme telles et le resserrement des mesures. Je note qu'à la page 21 du mémoire, dans l'ensemble des bons mots que vous avez eus à l'égard du projet de loi, vous dites: "Nous signalons tout de même la direction souhaitable que vous avez prise concernant les pouvoirs attribués à la CCQ, sans toutefois aller suffisamment loins", pour finir la phrase.

Je pense qu'il y a resserrement en ce qui concerne les grands chantiers et, sur le plan de l'applicabilité, je pense que, si on clarifie les choses et que l'on donne les moyens, il y a une

applicabilité qui peut être raisonnable et nous assurer une diminution considérable, sinon l'élimination, du travail au noir dans les grands chantiers industriels et commerciaux. Sur le plan pratique, également, de l'applicabilité dans la construction domiciliaire qui demeure soumise, avec le projet de loi 31, au décret de la construction, il y a une phrase qui m'inquiète dans votre mémoire et j'aimerais que vous l'expliquiez un peu. Au bas de la page 17, vous demandez, et vous le faites sous forme interrogath/e: "Allez-vous faire des inspections à chaque maison qui se construit?" Et là, on dit bien "construit". Si on conserve la construction domiciliaire dans le décret de la construction, j'imagine que c'est parce qu'on a l'intention d'appliquer la réglementation dans la construction domiciliaire.

M. Laberge: C'est une des erreurs dont vous êtes responsables.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laberge: Mais ça va plus loin que cela, monsieur. Ça va beaucoup plus loin que cela et cette phrase-là n'est pas nécessairement... Ce qu'on veut dire là-dedans, c'est qu'aujourd'hui, au moment où l'on se parle, les entrepreneurs doivent rapporter les heures des artisans, faire des déclarations, tout le kit au complet. Et, M. le ministre, on ne les prend pas sur les chantiers de construction. Il y a du travail au noir qui continue même si l'artisan travaille pour un entrepreneur. Là, on nous dit: Bon, maintenant, il va être obligé de rapporter les heures qu'il va faire pour une personne physique, il me semble que je vois le type, le 31 de chaque mois, dire: Bon, là, cette semaine-là, il a mouillé deux jours, je vais déclarer rien que huit heures. C'est lui qui fait son propre rapport pour une personne physique. Il ne faudrait quand même pas dire que la Commission de la construction... Et un autre élément sur lequel on a dit que vous n'allez peut-être pas assez loin, et un confrère vous l'a mentionné hier, on manque d'inspecteurs à la CCQ, cela fait six mois qu'on a des demandes. Bon, je ne reviendrai pas là-dessus. La Commission de la construction, quand on dit qu'on est dix-huit mois en retard dans la vérification des livres, qu'on ne vienne pas me faire accroire qu'on vérifie chantier par chantier puis qu'on est capable de dire: II y a tant d'artisans sur tel chantier puis il y a tant de travailleurs au noir. La plus belle preuve, c'est que personne ne peut donner les chiffres parce qu'ils ne le savent pas et nous autres non plus, M. le ministre. Puis on est obligés de se fier à des fausses données pour essayer de trouver la vérité là-dedans. Alors, c'est cela le problème.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Disons qu'on réussit une clarification de statut, sur laquelle on peut s'entendre, admettons qu'on peut s'entendre également sur le fait, sur les chantiers commerciaux et industriels, on peut contrôler l'application d'un décret, les choses étant plus claires, admettons également qu'on peut, avec efforts, réussir à appliquer le décret et à le contrôler dans la construction domiciliaire, on va avoir dépensé pas mal d'énergie et on va avoir consacré pas mal d'efforts pour enrayer le travail au noir dans ces deux secteurs où le décret s'applique.

Revenons à ce nous nous appelons "entretien, réparation", ce à qui le projet de loi ajoute "rénovation, modification". Vous me donnez l'exemple de l'école transformée; ce n'est pas ce que le projet de loi vise. Il vise l'habitation de l'individu, de la personne physique à des buts non lucratifs et il vise, comme le projet de loi l'indique "l'entretien, la réparation, la rénovation et la modification". Prenons le cas des travaux qui sont effectués dans la cuisine d'un consommateur. Travaux d'entretien, l'exemple: travail de peinture; travaux de réparation: réparer une armoire qui est brisée; travaux de rénovation: les armoires de cuisine qui sont en bois sont transformées en mélamine. Prenons l'exemple de modification: le consommateur agrandit sa cuisine par l'addition d'armoires, il modifie cela. Est-ce qu'on peut sérieusement penser que, sur le plan de l'applicabilité de la vérification, on peut aller vérifier les questions de rénovation et de modification si on ne retient qu'entretien et réparation?

M. Laberge: La rénovation, des affaires comme cela, je vous dis que ce n'est pas cela qui inquiète les gens, pour être bien franc. C'est parce que c'est de la rénovation, la nouvelle mode depuis plusieurs années, enfin, six ou sept ans au Québec, de la rénovation, il s'en fait partout. On prend de vieilles maisons, on les transforme, on en fait des logements fort agréables et, en tout cas moi, je trouve qu'il se fait une "maudite belle job" là-dessus. C'est sensationnel.

Mais cela, ce n'est plus ce qu'on veut couvrir. Vous savez que, quand ils prennent, par exemple, une ancienne école et qu'ils font des condos, ils sont six là-dedans et ils se font chacun un condo pour eux, sauf qu'ils ne restent pas dedans. Il y a un gars qui leur tord le bras et ils les vendent avant de pouvoir emménager. C'est cela qui se passe.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tente de préciser les définitions parce que, tantôt, il va falloir arrêter, baliser des définitions qui auront une application pratique et les conséquences dans le vécu quotidien de tous les intervenants de ce dossier-là; quand vous me parlez de l'école transformée, je pense, peut-être à tort, qu'on a les moyens, les outils et la volonté de contrôler ce type de rénovation, de modification. Là on revient à la question fondamentale: Est-ce qu'on

a les outils, la volonté, est-ce que c'est possible d'aller contrôler des travaux de modification et de rénovation à l'intérieur de la résidence de tous les individus? Est-ce qu'on a les moyens ou est-ce qu'on ne rêve pas en couleur lorsqu'on tient ce langage-là?

M. Laberge: Mais on ne rêve même pas en couleur. Ce n'est pas cela qui nous inquiète. Ce qui nous inquiète, c'est que la pollution de l'artisan est rendue sur les chantiers industriels et commerciaux. C'est cela qui nous inquiète. Il faut arrêter la pollution, elle est rendue partout.

Commençons par nettoyer les chantiers industriels et commerciaux. La construction dans le résidentiel, c'est plus facilement vérifiable que la réparation, l'entretien ou la rénovation. C'est bien sûr. La construction, cela prend un permis de la municipalité, il n'y a aucun doute là-dessus. Cela, c'est plus facilement contrôlable. Commençons par cela et on sera bien heureux de cela, et vous aussi, je pense.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur ces bons mots, c'est...

Le Président (M. Charbonneau): Alors, je voudrais vous remercier, messieurs, d'avoir participé aux travaux de la commission et je n'ai aucun doute qu'un jour ou l'autre nous vous retrouverons à cette même commission pour un autre sujet. Alors...

M. Laberge: Si vous êtes là assez longtemps, on va se revoir.

Le Président (M. Charbonneau): Cela, vous savez...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le cas du député de Verchères, la question se pose.

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît!

À l'ordre, s'il vous plaît! Ceux qui veulent faire des caucus ou des réunions, je vous prierais de les faire à l'extérieur de la salle de la commission.

Nous recevons maintenant l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. Je crois que le président est M. Conrad Gosselin. M. Gosselin, bienvenue! Vous avez une vingtaine de minutes pour présenter le mémoire à la commission. Par la suite, le reste du temps sera réparti entre les membres de la commission pour la discussion.

APCHQ

M. Rousseau (Orner): M. le Président, M. le ministre, de même que les membres de cette commission, mon nom est Orner Rousseau. Je suis vice-président à la direction de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du

Québec. Je ne ferai pas partie de la présentation, mais peut-être des réponses. Je vais laisser le président, M. Conrad Gosselin, de Hénault & Gosselin inc, de Rivière-du-Loup, faire la présentation. Il sera suivi par M. Serge Croche-tière, notre avocat, pour la partie un peu plus technique et juridique, assisté de M. Gilles Doyon, avocat, et de l'économiste Hugues Moisan.

Ceci dit, M. Gosselin pourrait faire la présentation de l'organisation de même que l'introduction quant à notre position.

Le Président (M. Charbonneau): Auparavant, je vous demanderais, M. Gosselin, de présenter les personnes qui vous accompagnent, pour les fins du Journal des Débats.

M. Gosselin (Conrad): M. le Président, à mon extrême droite, il s'agit de M. Gilles Doyon, directeur du contentieux de l'APCHQ; à ma droite, M. Serge Crochetière, avocat-conseil de l'APCHQ; à mon extrême gauche, M. Hugues Moisan, économiste de l'association, et, bien sûr, à ma gauche, M. Orner Beaudoin-Rousseau, vice-président, et moi-même, président pour 19813 de l'association.

Avant de vous soumettre nos commentaires et recommandations concernant l'adoption de mesures de déréglementation des relations du travail dans le marché de l'habitation, il conviendrait, croyons-nous, de vous entretenir brièvement de notre association et de sa représentativité du secteur résidentiel de l'industrie de la construction au Québec.

Organisme sans but lucratif et d'appartenance volontaire, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ) transige avec au delà de 8000 entreprises actives dans l'industrie de la construction et de la rénovation résidentielle. De ce nombre, quelque 5000 se regroupent dans treize associations régionales, les autres se retrouvent au sein d'associations affiliées à l'APCHQ, soit la Fédération provinciale du bâtiment et de l'habitation du Québec, la Société québécoise des manufacturiers d'habitations et l'Association des puisatiers du Québec. Représentatifs de leur milieu, les membres de l'APCHQ réalisent plus de 90 % des travaux d'habitation au Québec.

Peu importe le type de structure ou le mode de tenure, ces membres oeuvrent dans tous les secteurs de l'industrie de la construction résidentielle, qu'ils soient entrepreneurs, constructeurs, promoteurs, manufacturiers, prêteurs, assureurs ou professionnels spécialisés en ce domaine. (12 h 15)

Par ailleurs, depuis sa création en 1962, l'APCHQ a su reconnaître et jouer pleinement son rôle en s'avérant à la fois une association professionnelle, une association de services ainsi qu'un organisme voué à la protection du consommateur grâce à ses programmes de garantie.

Instaurée depuis 1976, la Garantie des maisons neuves (GMN), offre une protection complète tant au chapitre du remboursement des acomptes versés, du parachèvement des unités résidentielles que des vices de construction. Plus de 1400 entreprises sont volontairement accréditées auprès de la Garantie des maisons neuves de l'APCHQ. Depuis douze ans, la Garantie des maisons neuves protège près de 150 000 unités d'habitation. D'ailleurs, l'APCHQ est fière de souligner que 95 % des unités construites dans le cadre de Corvée-habitation sont protégées par la garantie de l'APCHQ. Créée en 1985, la Garantie rénovation de l'APCHQ offre une protection analogue dans le domaine de la rénovation et de la restauration d'immeubles. Après trois ans d'opération, quelque 400 entreprises sont maintenant accréditées auprès de ce programme. De fait, la Garantie des maisons neuves et la Garantie rénovation sont le symbole du professionnalisme de l'industrie de la construction résidentielle et constituent la meilleure des protections pour le consommateur.

Quant à la formation des entrepreneurs, l'APCHQ dispose, depuis 1984, d'un service de formation dont le principal mandat est d'appuyer les membres entrepreneurs dans leur démarche de formation et/ou de perfectionnement. Depuis la création du service, l'APCHQ a permis à au-delà de 3500 entreprises de participer à un ou plusieurs cours de ses 30 séminaires de formation en construction et en rénovation résidentielles. C'est donc comme porte-parole de l'habitation et à titre d'intervenant le plus concerné par le projet de loi 31 que l'APCHQ s'adresse à la commission parlementaire aujourd'hui.

Il y a quelques semaines seulement, l'APCHQ présentait, concurremment au ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de \a Sécurité du revenu, et au ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation un mémoire intitulé "L'APCHQ et les relations de travail dans l'industrie de la construction et de la rénovation résidentielles", que vous retrouvez en annexe I du présent document. Ce document était présenté en réaction aux projets de loi 230 et 250 concernant respectivement les villes de Montréal et de Québec. Il faut se rappeler, en effet, que chacune de ces villes, par le biais du projet de loi mentionné ci-dessus, demandait que sa charte soit modifiée afin d'exclure les travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification exécutés par ses employés salariés permanents du champ d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Dans son mémoire et au regard de la demande de ces villes, l'APCHQ situait dans sa juste perspective le sujet des relations du travail dans l'industrie de la construction et de la rénovation résidentielles et s'exprimait ainsi: "...l'APCHQ réitère au gouvernement sa recommandation à l'effet que le secteur de la construction et de la rénovation résidentielle devrait avoir un statut particulier. Toutefois, l'APCHQ s'oppose à ce que les municipalités soient soustraites de l'application du décret pour les travaux résidentiels et encore moins qu'elles agissent à titre de promoteur ou maître d'oeuvre. "Nonobstant ce qui précède, notre association est d'accord à ce que les travaux de rénovation soient soustraits de l'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, en autant que cette mesure s'inscrive dans un processus de déréglementation de l'ensemble du secteur de la construction résidentielle. "L'adoption de mesures de déréglementation des relations du travail dans le marché de l'habitation aurait l'avantage de répondre au besoin exprimé par les villes de Montréal, de Québec et le monde municipal en général, d'obtenir des services d'entretien et de réparation à meilleurs coûts. "Enfin, dans l'optique qu'une telle déréglementation ne doit pas se faire au détriment de la protection du consommateur et des entrepreneurs dûment quafifiés, cette recommandation est conditionnelle à l'exigence que les entrepreneurs exécutant les travaux puissent fournir, à la demande des clients, une garantie adéquate" annexe II.

D'une part, la recommandation contenue au mémoire de l'APCHQ s'inscrivait dans le cadre d'une position de principe conséquente défendue par notre association depuis plusieurs années, à savoir l'adoption de conditions de travail particulières au secteur de la construction et de la rénovation résidentielles ou, à défaut, l'exclusion pure et simple de ce secteur du champ d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et, par le fait même, du décret.

D'autre part, ces recommandations avaient le mérite de prévoir et de tenir compte du vacuum qui pourrait être créé au niveau de la protection du consommateur en préconisant un régime d'autodiscipline de l'industrie au moyen de programmes de garantie privée.

Pour la suite, M. le Président, je vais passer la parole à M. Serge Crochetière, avocat-conseil.

M. Crochetière (Serge): Mme la Présidente et M. le ministre, je vais tâcher de résumer et non pas de faire lecture de notre opposition. Cependant, pour certains passages, je vais me référer directement au texte.

Dans un premier temps, lorsqu'on a reçu copie du projet de loi, c'était accompagné d'un communiqué. Le communiqué disait que, désormais, les consommateurs au Québec n'auraient plus à subir les contraintes de l'application de la loi et du décret telles qu'on les connaît. À ce titre-là, l'association était heureuse de cette démarche, principalement parce que cela s'inscrit dans toutes les représentations traditionnelles de

notre association où, constamment - on vous a peut-être même fatigués - on vient vous dire régulièrement, une ou deux fois par année, qu'on n'est pas comme les autres, qu'il faut qu'on ait un traitement spécial. Alors, cela s'inscrivait au moins dans la reconnaissance de ce fait-là, une reconnaissance très parcellaire, mais qui existait. Cependant, malgré cela, quand on a pris connaissance du projet lui-même, on a été malheureux - là, je vais me référer au texte directement. Malheureusement, ce qui paraît être l'amorce d'une démarche logique et rationnelle sert aussi de paravent à d'autres modifications à la loi qui auront comme conséquence de satisfaire les demandes maintes fois répétées de la part de la partie syndicale de ne laisser effectuer les travaux de construction que par des employeurs et des salariés. On enlève la notion d'entrepreneur. Cet objectif syndical n'a, d'autre part, jamais été contesté par l'AECQ qui ne se reconnaît ni le mandat ni le devoir de défendre les intérêts des entrepreneurs ne se qualifiant pas comme des entrepreneurs professionnels dans l'industrie de la construction. Elle a d'ailleurs quand même maintes fois répété que les gens de l'APCHQ, elle les qualifiait, à l'occasion, de "brokers", c'est-à-dire de gens qui n'ont pas de salariés et qui ne sont pas des employeurs professionnels, mais des entrepreneurs. Nous parlons aussi pour ces gens, ces entrepreneurs, parce qu'il y aura une conséquence pour eux dans la loi sur les relations du travail. Or, comme nous le verrons plus loin, ces modifications à la loi nient une fois de plus la réalité de la construction et de la rénovation résidentielles au Québec en s'attaquant à toute la structure de notre industrie.

Le texte que je viens de citer quant à notre réaction première face au projet de loi est en page 5 du mémoire. Maintenant, quant à la technique législative utilisée, pour nous, le principal élément se retrouve à l'article 4 du projet de loi qui modifie l'article 19 de la loi sur les relations du travail. Il y a deux aspects touchés. Premièrement, la question de l'exclusion de la rénovation, de l'entretien et des modification à des fins personnelles autres que commerciales d'une personne physique et, ensuite, il y a les modifications au statut de l'artisan. Quant à l'exclusion des travaux que je viens de vous énumérer pour nous, la principale erreur - qui est maintenant dans le texte à la page 6 - qui a été créée, c'est qu'on a repris textuellement l'ancienne exclusion qui ne s'appliquait qu'aux artisans sans penser que cela créerait des problèmes parce que les artisans, par définition, sont des personnes seules qui travaillaient avec leurs outils, alors que là on les appliquerait à n'importe quel type d'entreprise. Je vais vous le dire tantôt et je vais revenir particulièrement sur cet aspect. En reprenant textuellement la nomenclature ou la description du paragraphe, on s'est dit que, si cela a marché pour les artisans, cela va marcher pour tout le monde parce que cela s'appliquerait aujourd'hui non plus au statut de l'artisan, non plus au statut de celui qui va être le maître d'oeuvre des travaux, mais a une entreprise, quelle qu'elle soit, si cela entre dans le contexte de travaux faits par une personne physique autres qu'à des fins commerciales et industrielles. D'accord? Il n'est donc plus question d'artisan. Cela veut donc dire qu'on peut ajouter 300 000 $ à une résidence près d'un cours d'eau où il y a souvent des résidences somptueuses. Ce sera une entreprise qui le fera. À partir de là, ce ne sera plus un entrepreneur artisan. Tout entrepreneur peut le faire à partir du moment où il a une licence d'entrepreneur.

La question qui se pose à nous... Quant à cela, on serait contents, on serait d'accord, mais on n'a pas défini la notion de commercialité. Est-ce que la notion de commercialité s'applique au donneur d'ouvrage, à la structure, à l'utilisateur ou à l'utilisation? Je m'explique. Est-ce que le fait d'avoir un triplex que j'habite et, parce que je loue deux logements, cela en fait une fin commerciale pour les deux tiers de la maison, puisque c'est dans le but d'obtenir un revenu, ou si ce n'est commercial que si je demande des modifications pour me permettre d'exploiter un dépanneur? Si on lit la loi, on n'a pas de réponse. Nous n'en avons pas, en tout cas. Les fins commerciales peuvent être interprétées autant dans un sens que dans l'autre.

Si on parle d'utilisateur, on va faire une distinction quant à la personne qui habite ou occupe le logement par rapport à son possesseur. Est-ce à dire alors que le propriétaire d'un triplex qui ne l'habiterait pas ne pourrait pas donner un contrat de travail qui bénéficierait de l'exclusion de la loi, mais que chacun de ses trois locataires pourraient le faire? Parce que ce serait à leurs fins personnelles, comme personnes physiques, pour un usage autre que commercial et industriel. Est-ce qu'on parle de copropriété divise? Est-ce que le copropriétaire d'une unité divise va pouvoir faire des travaux? Si oui, si cela affectait les espaces communs de l'ensemble immobilier, est-ce qu'il ne pourrait plus le faire, eu égard notamment aux modifications du Code civil qui font que, très bientôt, les copropriétés vont avoir un statut de personne morale, c'est-à-dire qu'elles vont être des syndicats? Comment peut-on démêler tout cela, M. le ministre? Qui est un utilisateur à des fins personnelles? Si on dit que c'est à des fins personnelles en excluant le revenu ou le rendement, est-ce qu'on a mesuré l'impact que cela aurait sur toutes les corporations propriétaires de grandes conciergeries? Est-ce qu'on a aussi mesuré l'impact, à cause de la Régie du logement et la méthode de fixation des tarifs, sur les locataires qui habiteraient des immeubles détenus par des corporations par rapport aux locataires qui habiteraient des immeubles détenus par des personnes physiques? Jusqu'ici, personne ne nous a donné de réponse à cela. Les coopératives et les OSBL sont exclus. Ce sont des personnes morales.

Ce sont les interrogations qu'on se pose face au projet de loi. Il y en a une série ici. Je vous donne un autre exemple. Si on dit qu'il faut que ce soient des propriétaires occupants, s'il y a trois personnes qui achètent un triplex, pourront-elles le faire? Elles pourraient aller y habiter ou alors en habiter chacune des portions? Elles pourraient le faire? S'ils "roulent" subsé-quemment, entre le moment où ils signent le contrat et le moment où les travaux commencent, la propriété dans ' une corporation pour une raison x, le contrat est déjà signé, l'entrepreneur sera responsable de quoi, lui? Du contrat qu'il a déjà signé, de le respecter ou de la loi sur les relations du travail quand il va envoyer ses hommes sur le chantier? À quel moment va-t-on apprécier l'application de la loi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au moment où les travaux s'effectuent.

M. Crochetière: Pardon? Je m'excuse, je n'ai pas entendu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au moment où les travaux s'effectuent.

M. Crochetière: Alors, si c'était, comme vous le dites, au moment où les travaux s'effectuent, comment l'entrepreneur peut-il prévoir que les propriétaires vont "rouler" la maison dans une compagnie? C'est lui qui va subir les amendes. C'est lui qui va être responsable de cela et qui sera poursuivi en justice parce qu'il ne pourra pas respecter son contrat s'il veut respecter la loi. Que fait-il? (12 h 30)

On me dit que le temps file. Sur cet aspect, pour nous, c'est inapplicable, notamment parce que ce n'est pas assez clair et que c'est l'entrepreneur qui va payer les frais de tout cela. C'est lui qui va payer les amendes quand il va s'être trompé. Il n'y a pas de contrôle, il ne peut pas savoir qui est le propriétaire, qui est l'utilisateur, quel est le statut de son donneur d'ouvrage. Il ne peut même pas savoir quelle est l'intention de son donneur d'ouvrage.

L'autre aspect, celui qui, pour nous, est encore plus important là-dedans, ce sont les modifications qu'on fait au statut de l'artisan. On réduit l'artisan à un statut de salarié, sauf quant au précompte et à l'appartenance syndicale. Jusque-là, cela peut aller. Le problème - et ce n'est pas une cachette, on l'a dit souvent - c'est qu'à cause de la conjoncture particulière nos entrepreneurs transigent souvent avec des entrepreneurs spécialisés. Quand ces entrepreneurs spécialisés n'ont pas assez de travail, ils travaillent seuls sur leur chantier. Est-ce que vous allez réduire ces gens-là au statut d'artisan? Allez-vous appliquer textuellement la notion d'artisan comme étant une personne seule qui travaille sur ses chantiers, sans l'aide d'un salarié? Si oui, vous venez de toucher à toute notre structure de l'industrie, à la seule façon légale qu'ont les entrepreneurs de construction résidentielle de pouvoir continuer à produire, avec les contraintes d'une loi et d'un décret qui ne sont absolument pas taillés pour eux. On ne s'est jamais cachés que notre seule façon légale d'agir, c'était celle-là. Si le législateur croit qu'il peut infléchir toute une industrie en ramenant ces gens-là au statut d'artisan, nous croyons qu'il va y avoir des problèmes. C'est un peu paradoxal qu'en voulant régler le problème du travail au noir, on risque d'en créer un qui soit, à tout le moins, aussi important et qui affecte la structure et le coeur même de nos entreprises, de nos industries, et la façon dont on fonctionne économiquement.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Crochetière, je pense que votre temps est écoulé, si...

M. Crochetière: Puis-je prendre deux minutes très rapidement, Mme la Présidente? Je n'abuserai pas.

La Présidente (Mme Bélanger): Allez-y, M. Crochetière.

M. Crochetière: D'accord. Quant aux droits acquis de l'entrepreneur - je reviens sur le projet de loi 119, M. le ministre - on nous avait promis que les entrepreneurs auraient le droit, sur simple demande, d'avoir leur carte de compétence. On a dit qu'on craignait dans l'avenir l'application et l'interprétation de cela, et, vous, vous étiez fait fort de nous garantir que non, que cela ne se pouvait pas, qu'on avait des droits acquis. Les gens de la Commission de la construction du Québec vous font mentir, ils ne renouvellent pas parce qu'ils disent aux entrepreneurs: Vous n'avez pas déclaré d'heures. C'est sûr, les entrepreneurs n'en déclarent pas; ils appliquent textuellement la réglementation. Le problème commence à surgir. On vous demande de clarifier cela dans la loi pour s'assurer que ces gens-là auront le droit de travailler.

La question de la formation maintenant. Nous sommes heureux que dans le projet de loi vous vous soyez gardé la possibilité de définir de nouvelles tâches, de nouvelles fonctions, de nouveaux devis d'apprentissage qui soient propres à la construction résidentielle; cela aussi c'est une reconnaissance. Cependant, lorsque vous parlez de la protection du consommateur, nous ne croyons pas que cela doive se faire par des certificats, mais par des garanties que les entreprises doivent donner. On demanderait que les garanties soient fournies par les entreprises de construction. Ce sont les principaux points de notre mémoire. Les conclusions sont illustrées à la page 14.

M. Gosselin: J'aimerais, si Mme la Présidente le permet, donner les quatre points principaux de notre conclusion.

La Présidente (Mme Bélanger): Allez-y, M. Gosselin.

M. Gosselin: Bien que les mesures de déréglementation des travaux de rénovation proposées par le gouvernement s'inscrivent dans le cadre des recommandations maintes fois répétées par l'APCHQ, cette dernière ne peut souscrire au projet de loi 31 dans sa forme actuelle. Nous tenons compte, d'une part, du caractère limitatif et ambigu de l'article 4 et, d'autre part, des modifications substantielles qui seront apportées au statut de l'entrepreneur spécialisé et de l'artisan.

Conséquemment, l'APCHQ recommande: d'élargir le champ d'application du projet de loi 31 à tout le secteur de la rénovation résidentielle; deuxièmement, de modifier le projet de loi 31 pour qu'on y distingue clairement le statut d'entrepreneur spécialisé de celui de l'artisan; troisièmement, d'amender le projet de loi afin de prévoir précisément le droit acquis pour les entrepreneurs de construction à l'obtention d'un certificat de compétence compagnon et, quatrièmement, d'obliger l'entrepreneur désirant obtenir une licence à la RECQ à fournir une preuve de sa capacité d'offrir une garantie pour l'ensemble de ces travaux de rénovation. L'APCHQ réitère enfin son accord pour que tous les travaux de rénovation soient soustraits de l'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction pour autant que cela s'inscrive dans un processus de déréglementation de l'ensemble du secteur de la construction résidentielle. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Gosselin. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, je tiens à remercier l'APCHQ pour la qualité de sa présentation, ainsi que la qualité du mémoire. Je remercie les porte-parole de s'être déplacés pour nous faire part de leur expertise. Je considère leur témoignage, devant cette commission comme extrêmement important. Nous avons eu et nous aurons encore l'occasion d'entendre des gens qui oeuvrent plus généralement dans des chantiers industriels et commerciaux. Nous entendrons beaucoup parler de toute la question de la rénovation domiciliaire, etc. La question de la construction domiciliaire est un sujet dont on a, au moment où l'on se parle, peu parlé et je crains que l'on n'en parle pas beaucoup d'ici à la fin de nos travaux. Je ne voudrais pas que tout ce secteur d'activité économique extrêmement important au Québec se sente laissé-pour-compte de la rénovation qui est déréglementée et des gros chantiers où la réglementation est resserrée. C'est un peu là où se situent les discussions que j'aimerais avoir avec vous.

Je suis conscient qu'en déréglementant tout l'aspect de l'entretien et de la réparation, nous répondons en partie, comme vous l'indiquez, à des demandes que vous avez adressées au gouvernement à maintes reprises. Je ne citerai pas des extraits de tous les mémoires que vous avez fait parvenir au gouvernement où vous parlez de la capacité de payer du consommateur. J'ai surtout l'intention de vous posez plus spécifiquement des questions quant à la construction domiciliaire. Il a été établi, par voie de déduction, d'estimation et d'appréciation, que le travail au noir, en ce qui concerne la rénovation, était très important dans l'industrie de la construction et qu'il était relativement important dans les grands chantiers. En ce qui concerne la construction domiciliaire - sans penser que vous êtes à la confesse; de toute façon, on ne peut pas donner l'absolution - quelle est l'estimation que vous faites du travail au noir dans ce qu'on appelle la construction domiciliaire, présentement, au Québec?

M. Rousseau: En ce qui a trait à la rénovation domiciliaire?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement la construction.

M. Rousseau: Dans un mémoire qu'on avait remis, je crois, en mai 1985 ou 1986, on disait que le marché noir variait selon qu'on était en région ou en ville, y compris tout le phénomène de l'autoconstruction, parce qu'à toutes fins utiles c'est du pareil au même, et pouvait représenter de 30 % à 70 %, selon que c'était en ville ou dans le domaine rural.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je veux bien qu'on se comprenne: Pour la construction ou est-ce que vous incluez également la rénovation?

M. Rousseau: Tout compris.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tout ce qui est domiciliaire, autrement dit. Le travail au noir dans le domiciliaire.

M. Rousseau: Dans le domiciliaire, sauf que dans le domaine de la rénovation, évidemment, la proportion est beaucoup plus importante. D'ailleurs, on a toujours prétendu que la rénovation se faisait au noir en grande partie, c'était clair. On ne parle pas des travaux de rénovation que l'on appelle, nous, de transformation, c'est-à-dire pour des écoles, par exemple. À ce moment-là, c'est fait par des entrepreneurs, comme si c'était des entrepreneurs dans le domaine commercial.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tantôt, vous avez sûrement entendu les représentants de la FTQ-Construction témoigner que, sur les chantiers commerciaux, industriels, ainsi que dans la construction domiciliaire, on ne devrait retrouver que deux types d'individu avec des statuts très

clairs, soit un statut de salarié ou un statut d'entrepreneur, si on oeuvre dans ces secteurs d'activité. De quelle façon réagissez-vous à cette prise de position?

M. Crochetière: Si je peux me permettre, ce qu'ils ont dit plutôt, c'est qu'il ne devrait y avoir que des statuts de salarié et d'employeur.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'employeur, excusez.

M. Crochetière: Et non d'entrepreneur. C'est que justement on nie la notion d'entrepreneur. On veut introduire dans un régime de relations du travail une notion juridique distincte qui est celle de la liberté de l'individu quant aux moyens qu'il met en oeuvre, ce qui fait de lui un loueur de services ou un loueur d'ouvrage plutôt qu'un salarié. C'est cela qui est l'artisan ou l'entrepreneur spécialisé. Dans notre mémoire tantôt, on a dit que, justement, on craignait que d'une façon ou d'une autre on veuille réduire l'entrepreneur spécialisé au statut de salarié. On réagit, c'est clairement indiqué là, on le dit depuis toujours, les entrepreneurs, avec ou sans salariés, ne sont pas toujours des employeurs. Il se peut... Des finisseurs de ciment, des gars qui posent du crépi ne sont pas obligés d'avoir douze employés avec eux quand ils finissent le travail. Je donne un exemple facile, j'en conviens, mais il reste que ce sont des entrepreneurs. Ce ne sont pas nécessairement des salariés. Pour nous, il est primordial que jamais on n'oblige les entrepreneurs à être à la fois des employeurs lorsqu'ils veulent exécuter des travaux sur des chantiers.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va pour le moment. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Très rapidement, je voudrais moi aussi vous remercier, comme association provinciale dans le secteur de la construction, d'avoir produit un mémoire qui, sans l'ombre d'un doute, quand on aura l'occasion d'en prendre davantage connaissance... Ce n'est pas votre faute si vous n'avez pas pu le produire avant, compte tenu des courts délais dans lesquels on vous a placés pour donner votre avis. C'est sûrement une réflexion qui nous aidera. Mais, à moins que je ne comprenne mal, c'est une réflexion qui nous aiderait davantage dans l'objectif de revoir tout un mécanisme, non pas de relations du travail, mais de système dans le domaine résidentiel que, clairement, vous voulez voir exclus des dispositions qui nous régissent actuellement. Vous avez toujours prétendu être des apôtres de la déréglementation, mais une déréglementation totale, avec un régime spécifique, puisque vous avez dit à plusieurs reprises:

Nous sommes différents, la construction résidentielle ce n'est pas la même chose que le reste de la construction, voulant sans doute distinguer par rapport à la construction commerciale.

Dans le rapport Scowen, il y avait également une recommandation qui allait dans le sens des annexes que vous avez produites - je n'ai pas eu le temps de les voir complètement - où Ion proposait une déréglementation totale de la construction par étapes, en commençant par le secteur résidentiel au complet, pas uniquement amélioration, réparation, rénovation et modification.

La première question que je voudrais vous poser... Sur le projet de loi 31, je ne peux pas vous poser beaucoup de questions, vous dites la même chose que les autres pour sa forme, en particulier par rapport à l'article 4 qui, à moins que je ne me trompe, est la quintessence du projet de loi. Il y a tellement de questions que vous avez posées aux pages 6, 7 et 8 de votre mémoire... Pour plusieurs, j'avouerai bien humblement que, même si je n'en comprends pas totalement l'application concrète - ce n'est pas important à ce moment-ci - cela me permet à tout le moins de conclure que vous avez de très sérieuses réserves quant à un éventuel projet de loi 31 qui serait adopté dans la forme que vous connaissez. Vous dites, vous autres aussi, que cela créerait plus de problèmes que cela en éliminerait.

M. Rousseau: Ce n'est pas la même chose, par exemple.

M. Gendron: Non, non, je sais. Mais à partir du moment où vous préconisez le retrait complet du domaine résidentiel du champ de juridiction du décret, il faudrait parler, d'après moi, d'un autre projet de loi, il faudrait voir toutes les conséquences. C'est à ce sujet que j'avais une première question qui est la suivante: À partir du moment où il y aurait un régime particulier pour le résidentiel, il me semble qu'il faudrait élaborer une série de modalités qui concerneraient les travailleurs qui oeuvreraient spécifiquement dans le résidentiel.

M. Rousseau: Je suis entièrement d'accord avec vous, on l'a toujours dit. Pour régler le problème du marché au noir, il faut savoir quelles en sont les causes. C'est clair, on l'a toujours dit, c'est une question de coût. C'est aussi la question que l'exercice des métiers de la construction n'était pas approprié au secteur de la construction résidentielle. Je pense que cela fait des années qu'on le dit et il n'y a personne qui nous a dit le contraire là-dessus.

C'est tout le système des relations du travail qui n'est pas approprié au secteur résidentiel. Si on n'avait pas cela, c'est très évident que le marché au noir, on n'en parlerait pas, le travail se ferait dans un autre cadre - juridique peut-être. C'est la raison pour laquelle on avait

déjà répondu au rapport Scowen en disant: On est d'accord, faute de ne pas avoir d'intervenants capables de négocier des conditions particulières pour le secteur résidentiel. Même si on se tue à le leur dire, ils ne comprennent pas. (12 h 45)

Donc, on est d'accord. C'est ce qu'on a dit et, d'ailleurs, on redit la même chose ici: La rénovation... Pas simplement soustraire les menus travaux, c'est-à-dire les histoires de peinture, d'escaliers et de menus travaux, on dit tout simplement: Tout le secteur de la rénovation, sortez-le. C'est une première étape, puis, dans une deuxième étape, on ira vers le neuf, parce qu'évidemment II faut être capable de vendre un produit qui réponde à la capacité de payer du consommateur. C'est clair.

M. Gendron: Je pense avoir saisi très clairement que c'est ça. Vous dites: On l'a dit, cela fait plusieurs années qu'on le dit. Vous venez d'ajouter: Ceux à qui on offre cette solution ne nous comprennent pas. Cependant, je vous demande comme deuxième question: Est-ce que vous pensez que cela les aiderait à vous comprendre si, au lieu de ne parler que de la nécessité d'avoir un régime particulier, vous commenciez à définir, à préciser quel serait ce régime-là et plus particulièrement concernant toute la question des normes de travail à ces travailleurs qui oeuvrent dans le résidentiel: les heures de travail, les vacances annuelles, les congés fériés, toutes les questions relatives à la mise sur pied, au licenciement et tout l'aspect également de la syndicalisation? Dans le rapport Scowen, c'est sûr que, si on prend uniquement la volonté de déréglementer le résidentiel et qu'on n'indique pas quel sera le vécu concret de ce nouveau régime, il n'y a pas preneur, parce qu'il y a des inquiétudes et qu'on ne sait pas exactement comment on fonctionnera. Il me semble que ce que vous dites clairement aujourd'hui au ministre du Travail, c'est: Fais-nous un autre régime, un régime à part qui exclura complètement le résidentiel, avec des conditions spécifiques au domaine résidentiel. C'est bien cela?

M. Gosselin: Mme la Présidente, j'aimerais répondre pour ce qui est de la définition, mais d'abord j'ai un court préambule à faire dans le sens suivant: Non seulement on est d'accord, mais on applaudit à l'initiative du ministre d'arriver avec un projet de loi qui a pour but de déréglementer la rénovation. C'est un premier pas. Pour ça, j'ai besoin de m'expliquer: Je suis entrepreneur en rénovation. Mon entreprise emploie environ 50 travailleurs. On opère un peu partout au Québec dans différents bureaux depuis 20 ans. Je crois être en mesure de savoir de quoi je parle. Ce qui différencie spécialement l'habitation des autres secteurs, c'est que le produit de l'habitation est similaire et ressemble beaucoup à l'alimentation ou à la restauration. C'est un produit destiné et vendu directement au consommateur et qui n'est pas tellement complexe à fabriquer. Le consommateur peut le faire lui-même ce produit-là. C'est donc dire que le consommateur n'a jamais accepté de se laisser prendre en otage par des revendications inapplicables à ce que lui voulait payer. C'est le fond du problème. Le fait que l'habitation soit sous la tutelle de la même loi que les autres secteurs de la construction: génie civil et autre, à mon avis, c'est aussi invraisemblable que si on voulait prendre l'industrie de la restauration au Québec et la fusionner avec l'industrie des pâtes et papiers, puis exiger qu'il y ait une seule convention collective. On aurait de grosses chances de se retrouver avec des salaires de restauration similaires aux pâtes et papiers, ce que le consommateur refuserait. Là, on verrait toute une structure au noir se créer parce que des hamburgers à 15 $ l'heure ce n'est pas possible que cela se fasse, cela n'a pas de sens, ce n'est pas logique, parce que le Québec ne peut pas être différent des autres provinces et de la balance de l'Amérique du Nord. C'est ce qui est vraiment fondamental comme position.

Alors, quand vous nous demandez de le définir, on a travaillé pour le définir dans le passé. J'ai moi-même été administrateur à l'AECQ. J'ai voulu définir un statut particulier pour l'habitation. Le problème, c'est que le différend existait à l'intérieur de la boîte comme telle: l'habitation était prise et gardée en otage à l'intérieur de cette association pour des intérêts qui sont autres que les intérêts de l'habitation. Alors, la définition qu'on a pu en faire n'a servi à rien puisqu'on n'a même pais eu droit au chapitre lors des négociations.

M. Gendron: Deux autres choses. Quand même, je pense que vous avez très bien précisé ce à quoi vous applaudissez, mais vos applaudissements se changent, à la page 7, en de sérieuses inquiétudes, quand vous parlez du projet de loi 31. Vous dites: Ce projet de loi "revêt un caractère d'injustice et d'iniquité tant pour les donneurs d'ouvrage et les utilisateurs que pour les entrepreneurs de construction." Je pense que, pour ce qu'on a à discuter aujourd'hui, soit le projet de loi 31, sauf pour le principe de commencer à déréglementer en partie - ce n'est pas ce que vous souhaitez parce que c'est l'ensemble du secteur domiciliaire, et je n'ai pas vu que, dans le projet de loi 31 il y avait une volonté gouvernementale de déréglementer la totalité du secteur résidentiel - je suis obligé de dire que, pour ce que je lis du projet de loi 31 dans votre mémoire, il ne me semble pas que vous lui donnez un appui, tel qu'il est libellé.

M. Crochetière: Écoutez, moi, ce que je peux vous en dire, c'est qu'on est d'accord avec la démarche. On est content que quelqu'un se rende enfin compte qu'il y a des contraintes et des contingences spéciales. On pourrait même

vivre avec un étapisme plus lent. Mais la façon dont il est rédigé, cela pose tellement de difficultés d'interprétation et d'application, principalement pour les entrepreneurs dans le champ qui, en plus, vont être obligés de payer l'amende, que face à cela on est obligé de dire non. Mais, bien clairement, on est d'accord avec le principe. Tout ce qui constitue un statut particulier pour le résidentiel, tout ce qui constitue une progression pour un champ d'application spécial, on applaudit à cela. Là où on émet des réserves, c'est sur la façon dont il a été rédigé et là on rejoint, si vous voulez, la critique du projet de loi qui nous est soumis, pas quant au principe, mais quant au libellé lui-même. On dit: Le libellé n'est pas vivable.

M. Gendron: Oui, d'accord, sauf que, moi, je suis membre de l'Opposition, vous le savez, et j'aurai, à un moment donné, à parler sur le principe en deuxième lecture, et je ne veux pas mal vous interpréter. Quand je lis, à la page 8: "Conséquemment, le projet de loi 31, dans sa forme actuelle, ne peut être endossé par l'APCHQ", bien moi, je ne veux pas faire d'erreurs et je veux être capable de dire, dans ma liste, que jusqu'à ce jour je n'ai vu personne qui soit en faveur du projet de loi 31 du ministre, et je veux vous inclure. Alors, je ne veux...

M. Crochetière: Au lieu de prendre...

M. Gendron: ...pas le faire sans votre consentement. Alors, est-ce que c'est exact que vous êtes en désaccord avec le projet de loi 31?

M. Crochetière: Non.

M. Gendron: Sur le principe? Parce que, moi, même si on me fait discourir en Chambre, en deuxième lecture, sur le principe... Sur un principe en soi, presque tout le monde peut être d'accord. C'est quand on vérifie les modalités d'application de ce principe et qu'on se rend compte qu'on n'arrive même pas à atteindre l'objectif ou le principe du projet de loi... Dans le projet de loi 31, dans la forme qui nous est présentée, n'oubliez pas que l'objectif principal était de contrer le travail au noir - cela est censé être la quintessence, l'os du projet de loi - et c'est ma dernière question, en ce qui me concerne: Est-ce que vous trouvez que le projet de loi 31, au delà des questions pertinentes que vous avez soulevées aux pages 5, 6, 7 et 8, aura comme conséquence d'éliminer le travail au noir?

M. Rousseau: En fait, l'objectif du projet de loi, c'est de déréglementer, de commencer; c'est un début de déréglementation pour le secteur résidentiel. Ce que nous on dit: On est d'accord avec la démarche entreprise par le gouvernement, sauf qu'elle ne va pas assez loin à l'heure actueUe.

M. Gendron: Oui, oui.

M. Rousseau: Le premier pas qui devrait être fait, ce serait normalement d'enlever toute la rénovation et pas simplement une partie. Donc, on dit: Voulez-vous refaire vos devoirs? Refaites votre définition de façon à introduire toute la question de la rénovation, de façon à ne pas avoir tantôt de problème particulier dans le secteur de la rénovation par rapport au secteur du neuf. Si vous le faites, on n'aura pas de problème. Cela, c'est une première étape pour, après, passer au secteur du neuf. C'est pour cela que je dis simplement: Ne lisez pas simplement: "Conséquemment, le projet de loi 31..."

M. Gendron: Non, non...

M. Rousseau: II faudrait revoir ce sur quoi on faisait des remarques. Là, je pense que cela s'avérerait juste.

M. Gendron: Alors, je vais tout relire, en particulier votre conclusion, à la page 14. Je l'avais lue votre conclusion à la page 14: "L'APCHQ réitère enfin son accord à ce que tous les travaux de rénovation..." Une question pratique: Est-ce que vous pensez qu'à ce moment-ci - on arrive au 1er juin - c'est possible, c'est réaliste de refaire un nouveau 31 qui retirerait tout le champ de la construction résidentielle et de la rénovation, surtout avec cette volonté d'arriver à définir un nouveau régime pour les travailleurs concernés, d'ici à la fin de juin?

M. Rousseau: II n'y a pas de problème là-dessus, on l'a déjà fait dans d'autres provinces.

M. Gendron: Ah!

M. Rousseau: D'ailleurs, le secteur résidentiel, partout en Amérique du Nord de même que dans les autres provinces, il n'est pas réglementé. Alors, qu'est-ce qu'il y a d'impossible ici? D'ailleurs, si on a été capable d'écrire un projet de loi qui donne cela aujourd'hui, on est capable d'en écrire un autre qui va donner autre chose demain matin.

M. Gendron: Oui, puis si le projet de loi reste tel quel, parce que...

M. Rousseau: On n'est pas d'accord.

M. Gendron: ...le ministre n'a pas donné d'indication...

M. Crochetière: On est en désaccord avec le libellé du projet de loi tel quel.

M. Gendron: Vous êtes en désaccord avec le projet de loi 31. Merci.

M. Rousseau: En fait, c'est comme pour tout projet de loi...

M. Gendron: Oui, oui.

M. Rousseau: ...qui est soumis en commission parlementaire. Il y a des remarques qui sont faites et, après cela, on bonifie le projet de loi. On est ici pour donner un coup de main.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais reprendre les dernières paroles prononcées, je pense, par M. Rousseau. Je ne regardais pas, mais je les ai entendues. J'ai entendu: On est ici pour donner un coup de main. Sur le plan du libellé de l'article, vous vous posez de nombreuses questions, comme d'autres intervenants, mais peut-être pas dans le même sens que d'autres intervenants quî ont comparu devant cette commission parlementaire. Plusieurs se sont posé des questions afin de savoir s'il était suffisant d'inclure les travaux d'entretien et de réparation et de ne pas inclure des travaux de rénovation et de modification. C'est une question qui a été posée par d'autres intervenants, parce que les intervenants craignaient que la déréglementation n'en embrasse trop. Si je saisis bien le sens de vos revendications, vous craignez que la terminologie utilisée, que le libellé que vous retrouvez présentement à l'article 4 du projet de loi 31 en embrasse trop peu. Je tiens à en embrasser de façon équilibrée. La terminologie qu'on m'indique que je peux utiliser est une terminologie dont on me dit qu'elle a connu une dizaine d'années d'interprétation par les gens qui ont à prendre ces décisions dans le milieu et même par les tribunaux. À ce moment-là, je n'ai pas d'objection à ce qu'elle soit clarifiée. On a tous intérêt, que ce soit pour réduire ou pour augmenter, que ce soit le plus clair possible. Vous avez peut-être raison de souligner que, si ce n'est pas clair, on sait qui paiera. Maintenant, sur le plan de cette jurisprudence, sur le plan de cette terminologie, est-ce que vous avez, étant donné que vous êtes là pour aider, des propositions concrètes sur le plan de la terminologie?

M. Crochetière: Écoutez, seulement pour bien situer le débat sur ce plan aussi, on dit que c'est une application qui est faite depuis une dizaine d'années. Tantôt, on a bien précisé que c'était dans un autre contexte. C'est justement cela qu'on critiquait. On a pris une définition qui ne posait pas de problème. Quand on parlait des artisans, c'étaient des travaux de finition de beaucoup moins grande importance. Ici, en nombre, un artisan doit travailler seul, alors que là c'est une entreprise.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, en pratique...

M. Crochetière: Vous pouvez avoir un ajout de 200 000 $ avec 20 corps de métiers qui vont passer sur la maison. Là, la question va. se poser et ces interprétations n'ont jamais été soumises à aucun tribunal, ni au conseil d'arbitrage, ni aux commissaires. Alors, nous, ce que l'on...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À titre d'exemple...

M. Crochetière: Ce que nous... Oui?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À titre d'exemple, on a eu une suggestion hier. Je pense que c'était le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction qui nous suggérait d'ajouter une distinction entre but lucratif et sans but lucratif.

M. Crochetière: Le but lucratif ou commercial. Mais comment, encore une fois, allez-vous définir la notion de commercialité? Est-ce que vous pouvez me dire si, dans votre esprit, c'est l'utilisateur ou le propriétaire qui doit être l'objet de la définition, comme je vous le disais tantôt? Si c'est un propriétaire, cela lui appartient en propre. Si j'ai un bungalow et que je le fais transformer pour le louer à un dépanneur, que M. X loue, moi je suis une personne physique et c'est à mes fins personnelles, autres que commerciales, si on ne définit pas la location comme étant à caractère commercial. Le seul aspect qui pourrait déroger à cela serait l'utilisation que mon locataire en ferait. En contrepartie, est-ce que vous pouvez nous dire aujourd'hui que, chaque fois qu'il y a un locataire, cela ne s'applique pas?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je peux vous dire, c'est que si je...

La Présidente (Mme Bélanger): Je m'excuse, M. le ministre. Est-ce que je pourrais demander la permission aux membres de la commission pour poursuivre, étant donné l'heure? Il reste à peu près quinze minutes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'en ai pour cinq minutes peut-être. Je ne pense pas qu'on réussisse en quinze minutes...

M. Crochetière: Non, non, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...à régler chacun étymologiquement, juridiquement, et à faire jurisprudence sur les échanges de propos qu'on peut avoir.

M. Crochetière: Ce n'est pas une question...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais je

pense qu'il est clair dans l'esprit du...

M. Crochetière: Ce n'est pas une question de jurisprudence.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, a-t-on le consentement?

M. Crochetière: C'est une question de déterminer son application et, pour nous, ce n'est pas clair. Comme je vous le disais tantôt...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, si quelqu'un fait transformer une partie de sa résidence pour y installer, louer, etc., un dépanneur, si c'est à des fins personnelles, il va faire faillite. Par définition, ce n'est pas à des fins personnelles.

M. Crochetière: Si c'est un propriétaire de duplex avec un locataire au-dessus, est-ce que cela s'applique?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, pas pour le propriétaire, mais cela s'applique pour l'usager, l'exclusion du décret.

M. Crochetière: Ça, c'est une autre question: Est-ce qu'il va avoir besoin de deux contrats? S'il y a des éléments de mécanique qui s'appliquent aux deux logements, comment va-t-il faire pour le ventiler, M. le ministre? Un chauffage central.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question a été posée ce matin, dans le cas d'un immeuble de huit unités de logement, par les tuyauteurs, je pense, le premier groupe qui a comparu. Nous avons apporté la même réponse que nous vous apportons. Étant donné que cela sert à plusieurs unités de logement, on imagine que ce n'est pas à des fins personnelles; à ce moment-là, le décret s'applique.

M. Rousseau: II y a aussi une question, je pense, M. le ministre, de logique dans tout cela, puis de bonne application. Si quelqu'un est propriétaire d'un duplex et fait faire des travaux pour 8000 $ ou 10 000 $, il va être assujetti au décret de la construction et l'autre qui a à faire une belle allonge à sa propriété qui coûte 40 000 $ ou 50 000 $, plus une verrière de 25 000 $ à 30 000 $, va pouvoir les faire faire en vertu du projet de loi 31. C'est une question d'équité. Je pense qu'il faut regarder aussi cet aspect-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La grande question que vous avez posée et qui a été soulevée, entre autres, par le groupe qui vous a précédés et que vous soulevez de nouveau est une question d'applicabilité. Quelles sont les possibilités d'application? Je pense que tous les intervenants s'entendent pour dire qu'avec le régime actuel le gouvernement et la Commission de la construction du Québec ne sont pas capables de s'assurer d'une application saine du décret de la construction dans le domaine de la rénovation domiciliaire. Je pense que c'est un constat devant cette commission parlementaire et je pense qu'on a établi avec d'autres intervenants qu'il y a moyen, en resserrant les dispositifs, de s'assurer d'une saine application du décret de la construction dans les grands travaux de construction. J'ai expressément posé la question tantôt à la FTQ-Construction: Est-ce que vous pensez, lorsque vous inscrivez dans votre mémoire - et on m'a dit que c'est par erreur que cela avait été inscrit - que cela va prendre un surveillant par construction neuve au Québec, qu'on a une possibilité de l'appliquer? C'est là-dessus qu'on cherche des réponses parce qu'on est intéressé à appliquer ce qui est applicable et, si nous adoptons une réglementation, comme gouvernement, nous avons la responsabilité de l'appliquer.

M. Rousseau: Mais l'intervention de la FTQ ne devait pas vous fatiguer trop ià-dessus, parce qu'elle ne savait pas, dans le fond, si elle se contredisait oui ou non. Alors, ce n'était pas trop un problème.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela demeure un problème d'application. Je pense qu'en soustrayant les travaux de rénovation, de réparation, de modification et d'entretien, quitte à apporter des précisions, sur le plan du travail au noir, par définition, cela sera aboli puisque légalisé. En ce qui concerne la construction domiciliaire, il faudra déployer, si nous voulons que le décret s'y applique, beaucoup d'efforts, beaucoup d'énergie pour s'assurer que c'est appliqué. En ce qui concerne les grands chantiers de construction, avec un déploiement d'efforts et d'énergie raisonnables, c'est très applicable.

M. Rousseau: En fait, M. le ministre, ce qu'on pourrait faire, c'est s'asseoir avec les gens de votre ministère pour regarder, se dire tous les problèmes que cela cause actuellement de façon à arriver à une définition qui soit claire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Puis ces gens-là sont à la disposition de votre association, comme à la disposition de l'ensemble des intervenants, pour que, une fois les objectifs partagés, on s'assure que sur le plan de la rédaction du texte de loi on les atteigne au maximum.

M. Rousseau: Par contre, on aurait aussi aimé que le ministre se prononce sur un des éléments qu'on a soulevés tout à l'heure, à savoir le droit acquis pour les entrepreneurs. En fait, Serge pourrait reprendre la remarque, mais j'aimerais cela, dans le fond, entendre le ministre sur ce point-là.

M. Crochetière: Si vous voulez que je résume, c'est qu'à l'occasion de l'étude du projet de loi 119, l'article 32 précisait que sur demande les entrepreneurs pouvaient demander une carte de compétence compagnon. Ils l'ont fait, mais on avait dit qu'on craignait la réglementation quant au renouvellement, mais on nous avait assurés que c'était un droit acquis. Actuellement, quand ils se présentent pour la demander, on dit: Non, parce que tu n'as pas rempli d'heures l'année passée. Et cela devient impossible parce que les entrepreneurs n'en rentrent pas...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que la loi 119 reçoit une application qui, si on la compare à la situation antérieure, est très améliorée. Maintenant, je n'ai pas la prétention de dire qu'au moment où nous nous parlons, en ce qui concerne, entre autres, l'émission de cartes, il n'y a pas de problèmes à la Commission de la construction du Québec. Comme les autres députés, je fais du bureau de comté une fois par semaine et j'ai à détecter quelques cas. Je vous dirai cependant que c'est beaucoup moins important que ce l'était précédemment, et, quant à la question que vous me soumettez, je vais la vérifier.

M. Rousseau: Oui, parce que même, à un moment donné, les entrepreneurs avaient reçu la directive que, s'ils voulaient avoir un renouvellement de carte ou une émission de carte, il fallait qu'ils se présentent à l'OCQ avec un papier... C'est comme si demain matin on disait: Tu t'en viens en prison, tu as besoin de ton papier pour t'identifier, etc. Cela n'a pas de maudite allure.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais vous comprendrez qu'avant de vous apporter une réponse...

M. Rousseau: D'accord.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...j'effectue les vérifications appropriées de façon à vous répondre le plus précisément possible.

La Présidente (Mme Bélanger): Cela va? Alors, les membres de la commission remercient l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec de leur participation, leur souhaitent un bon retour et la commission suspend ses travaux jusqu'à 16 h 30.

(Suspension de la séance à 13 h 5)

(Reprise à 16 h 36)

Le Président (M. Charbonneau): La commission de l'économie et du travail reprend sa consultation particulière sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Nous accueillons maintenant l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Le président est M. Roméo Julien. M. Julien, si vous voulez bien présenter les personnes qui vous accompagnent et engager immédiatement la lecture de votre mémoire. Vous avez une vingtaine de minutes et, par la suite, les membres de la commission utiliseront le reste du temps pour discuter avec vous et vos collègues.

Association des entrepreneurs en construction du Québec

M. Julien (Roméo): Merci. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, on vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de venir discuter du projet de loi 31, une chose qu'on aime bien. On est souvent venu en commission parlementaire, on pense que c'est de bon augure de venir rencontrer les gens de temps à autre. Je ne sais pas si vous avez vu notre mémoire, qui est un peu long. On va peut-être changer notre façon de procéder et permettre à Me Dion, notre directeur général, de le lire en diagonale pour pouvoir passer à travers et qu'il reste du temps pour les questions, sinon cela prendrait tout le temps juste pour le lire. Je passe la parole à Me Dion.

Le Président (M. Charbonneau): D'accord.

M. Dion (Michel): M. le Président, M. le ministre, d'abord on voudrait vous sensibiliser sur ce qu'est notre industrie vue du côté de l'AECQ. Je vais quand même suivre un peu le mémoire, mais je vais nécessairement sauter des pages.

Il est intéressant de faire savoir à la commission que l'AECQ regroupe actuellement ce qu'on appelle des employeurs et des inscrits, c'est-à-dire que l'on a 18 000 inscrits sur nos listes et, de ces 18 000 inscrits, on a 15 000 employeurs. Quelle est la différence entre les deux? C'est qu'on reçoit de l'Office de la construction du Québec une information, à savoir que telle ou telle entreprise s'est enregistrée à l'Office de la construction, mais on s'aperçoit à la fin de l'année que l'entreprise n'a jamais déclaré d'heures, n'a jamais payé de cotisation et n'a jamais engagé de salariés dans l'industrie de la construction. Tout cela pour vous dire que l'association regroupe en réalité 15 000 employeurs de l'industrie de la construction qui sont des quatre secteurs de l'industrie de la construction, répartis autant dans le résidentiel, l'industriel, le commercial que le général.

Je ne sais pas si c'est un hasard, mais il faut quand même vous souligner que le président de l'association à l'heure actuelle est un entrepreneur du secteur résidentiel, peut-être pas le

moindre. Il semble, selon certaines statistiques préparées dans le passé par une organisation, qu'il y aurait environ 3 % des gens du résidentiel qui font plus de 100 maisons par année. Or, le président de l'AECQ est un entrepreneur du résidentiel qui fait environ 500 maisons par année. C'est peut-être important de souligner que M. Julien est un entrepreneur qui connaît le secteur. Il est également important de souligner qu'à notre conseil d'administration il y a plusieurs personnes du secteur résidentiel, donc elles sont au courant des problèmes du résidentiel.

La présentation à notre conseil d'administration du projet de loi 31 a donné les résultats suivants. On n'a pas de réaction négative devant les objectifs théoriques du projet de loi 31, c'est-à-dire que l'exclusion de certains travaux pourrait être envisagée, en principe, à certaines conditions. Le combat du travail au noir c'est une chose dont on parle depuis plusieurs années, donc on est sûrement favorable. Ce sont deux objectifs qui apparaissent dans le projet de loi 31 pour lequel on peut facilement être d'accord. Ce sur quoi on a de la difficulté, avec le projet de loi 31, ce sont les moyens utilisés pour régler ces problèmes-là.

Dans le premier cas, on nous propose une déréglementation d'une partie du secteur résidentiel, la réparation, l'entretien, la rénovation et la modification. Pour notre part, nous sommes en total désaccord avec la question de la rénovation, dans un sens extensif, et la modification, parce que pour nous ces choses-là peuvent facilement être assimilées et assimilables à de la construction. La réparation et l'entretien, pour nous, cela apparaît être un champ bien différent, dans le sens: que l'industrie de la construction se divise en deux éléments. C'est qu'on peut vendre, dans l'industrie de la construction, un produit. Je peux, avec un donneur d'ouvrage, prendre l'engagement de lui fournir un édifice, ou de lui fournir un ouvrage. Je lui vends à ce moment-là un produit, un produit fini. Mais quand je parle de réparation et d'entretien j'ai l'impression qu'on vend du service, et non pas un produit.

C'est peut-être une comparaison que vous allez dire boiteuse, mais cela m'apparaît être quelque chose comme, par exemple, la compagnie GM, qui fabrique des automobiles, qui vend un produit, l'automobile, et lorsque je vais au garage faire réparer l'auto, a ce moment-là, j'achète un service de réparation ou d'entretien de mon véhicule. Dans ce sens-là, réparation et entretien, pour nous, c'est une question de service, c'est une question qui est proche du consommateur, à laquelle nous sommes très sensibles et pour laquelle on est prêts à jeter un coup d'oeil favorable à l'intérieur du projet de loi 31.

Ce qui ne nous convient pas clairement dans le projet de loi 31, c'est que d'un même souffle, on veuille sortir réparation et entretien un peu plus, mais en même temps on conserve l'artisan dans la couverture du décret de la construction, il nous semble important de peut-être faire une parenthèse sur l'artisan dans l'industrie de la construction. D'abord pour vous dire que le statut d'artisan, à notre connaissance, a été introduit à peu près vers l'année 1979, surtout pour couvrir ces genres de travaux qu'on veut sortir actuellement. Surtout aussi pour régler des problèmes face à un consommateur. Et ce qui est encore plus important c'est de regarder ce qu'est un artisan dans la construction, dans la loi.

L'artisan, dans la loi, et je ne veux pas en faire ma propre définition, mais je pense qu'il faut comprendre que c'est une personne qui, seule, sans l'aide de salariés, est censée faire des travaux de construction. Or cette définition-là n'est pas du tout celle qu'on retrouve sur les chantiers de construction. Si on est capable de nous démontrer à l'heure actuelle qu'un artisan peut poser du gyproc de 4X8 ou de 4 X 12 dans une maison, seul, je pense qu'il y aurait peut-être un point. Mais, jusqu'à aujourd'hui, ce qu'on retrouve, ce ne sont pas des artisans seuls, cela n'existe presque pas. Je n'ai pas dit: Cela n'existe pas, mais cela n'existe pratiquement pas. On va retrouver un artisan, c'est-à-dire celui qui a une pépine, excusez le mot, mais une petite machinerie; ii conduit sa machine et il fait son travail. Alors, il va contracter et faire son travail. C'est une sorte d'artisan. Je pense que celui-là, ce n'est peut-être pas celui qu'on vise exactement.

Mais les autres artisans, ce sont des gens qui, individuellement, vont s'engager pour faire ensemble un travail sur un chantier de construction, et cela c'est une compétition totalement déloyale avec l'entreprise de construction normale. Ce n'est pas la forme d'artisanat, je pense, à laquelle on serait en droit de s'attendre dans le statut que la loi a voulu lui accorder. On a éliminé, en vertu de l'amendement qui a été fait, les sociétés d'artisans, mais par contre, par la pratique, on permet presque que ces sociétés d'artisans existent par des contrats individuels. Cinq ou six gars se présentent, prennent chacun une pièce et ils font la maison. Finalement, c'est quoi? C'est un groupe de gars qui remplacent une entreprise de construction qui font les travaux de construction. (16 h 45)

Ceci étant dit, pour nous autres, des artisans sur les chantiers de construction, c'est à peu près impensable. C'est sûrement impensable en ce qui concerne les hommes qui n'ont pas de métier. Je vois assez mal un artisan manoeuvre. J'essaie d'imaginer ce que cela peut faire sur un chantier parce que, en pratique - je ne dis pas en principe - mais en pratique un manoeuvre c'est quelqu'un qui travaille avec des hommes de métier autour de lui ou à peu près, en général. Il faut donc qu'il soit avec quelqu'un. Il ne peut pas être tout seul. Il ne peut pas, non plus,

être un artisan apprenti. Un apprenti, c'est un gars qui travaille sous la surveillance d'un compagnon. Donc, il ne travaille pas tout seul. Il travaille avec un autre. Or, en théorie, un artisan c'est un gars qui devrait être tout seul. Et sur les chantiers de construction ce n'est absolument pas cela qui se passe. On se sert de cette notion-là pour s'inscrire dans l'industrie de la construction et pour passer à côté des règles de l'industrie de la construction. Parce qu'il va sans dire que c'est un secteur qui n'est absolument pas surveillé et je dirais presque si peu surveillable.

Or, c'est clair que, quant à nous, si l'idée du gouvernement est de sortir des travaux de réparation et d'entretien du résidentiel à des fins personnelles et avec certaines précisions, on pense, à ce moment-là, qu'il devra au moins sortir les artisans des chantiers de construction.

Par contre, on n'est pas nécessairement alignés vers cette solution-là. Nous, depuis plusieurs années, on croit qu'à l'intérieur du régime des relations du travail il y a moyen de régler les problèmes du résidentiel. C'est peut-être parce que les efforts n'ont pas été faits pour régler les problèmes ou c'est peut-être parce que les efforts qui ont été faits n'ont pas été appuyés. C'est sûr que cela pourrait peut-être nous amuser - on le fait, de toute façon, dans notre mémoire - de soulever à la commission qu'on s'est fait imposer des décrets à des conditions absolument inabordables, et qu'il n'y a pas beaucoup de monde, du côté du gouvernement, qui s'est soucié des conditions du consommateur. On s'est fait imposer aussi toutes sortes de réglementations. Le statut de l'artisan en est une, entre autres, une réglementation, une loi. Aujourd'hui, qu'on veuille soulager le consommateur, on est d'accord, mais on pense que cela pourrait, avec le concours peut-être d'une toi, être fait à l'intérieur du décret. On est venu très proche, avec certaines parties syndicales, de négocier une entente où l'on tentait, où l'on réglait des problèmes du résidentiel. On avait, à ce moment-là, établi toute une série de soulagements, entre parenthèses, qu'on pouvait apporter au résidentiel. C'est évident que, dans le résidentiel, il faut que je tienne compte du client. Donc, il faudrait peut-être penser à des conditions favorables au client, des conditions salariales favorables au client.

Il faudrait aussi penser que ce n'est peut-être pas une place où l'on peut appliquer des règles aussi rigides que sur les gros chantiers de construction, avec des horaires de travail, du temps supplémentaire puis des bornes quant au métier, etc. Alors, on avait établi toute une série de moyens pour faire en sorte que le résidentiel puisse vivre à l'intérieur du décret de la construction. Cela m'a fait rire, ce matin, quand j'ai entendu certains individus dire qu'il n'y avait jamais eu personne qui avait essayé de faire quoi que ce soit pour le résidentiel. On regrette infiniment. On a fait des batailles et je pense qu'il y a des gens qui ont tenté de faire des choses pour le résidentiel. Je me rappelle qu'on s'est retrouvé aussi en grève, dans l'industrie de la construction, pour défendre cette position et régler les problèmes du résidentiel. Les premiers qui ne suivaient pas la grève, c'étaient ceux qu'on essayait de défendre. Ils continuaient à travailler, eux autres, puis, nous autres, on se battait pour essayer de leur trouver des conditions. Effectivement, on pense que, dans le décret de la construction, il y aurait possibilité d'établir des choses, pour le résidentiel, au moins pour la construction résidentielle, et on devrait, je pense que c'est la seule façon de pouvoir régler les problèmes, avoir des jalons dans la loi pour pouvoir établir des choses pour le résidentiel. Peut-être qu'à partir de là, si on établit: un statut pour envoyer l'artisan dans la réparation et l'entretien - et là, je fais une parenthèse - qu'on le garde à l'intérieur du décret ou qu'on le sorte, nous, on pourra envoyer l'artisan à l'intérieur de ces travaux-là.

Ce que l'on craint de la loi 31, à l'heure actuelle, c'est ceci. C'est qu'il se fait des travaux clairs en dessous de la table à l'heure actuelle. Le consommateur n'a pas les moyens de payer. Il paie un taux - établissons-le pour les fins de la discussion - de 10 $ l'heure, à l'heure actuelle. Si ce que le gouvernement désire à l'heure actuelle se réalise, que ces gens-là se légalisent par la déréglementation, cela veut peut-être dire des rapports d'impôt, cela veut peut-être dire la CSST, la régie, etc. On est obligé de vous dire qu'il est possible qu'ils ne puissent plus exiger 10 $ l'heure. Il est possible qu'ils en exigent 12 $. Le consommateur n'aura pas eu une diminution. Je ne peux pas évaluer votre projet de loi en disant qu'en déréglementant il va payer moins que le décret. Non, il va payer la même chose ou moins que ce qu'il payait avant, parce qu'il payait en dessous de la table. Donc, ce n'est pas un écart avec le décret qu'il faut que je calcule, c'est un écart avec la situation actuelle. C'est un premier point. Le deuxième point, c'est que cela nous surprend que, dans une partie de votre projet, vous prévoyez une certaine formation. Autrement dit, vous êtes obligés de remettre en place une certaine réglementation parce que vous avez des inquiétudes vis-à-vis du consommateur qui va se retrouver avec de la main-d'oeuvre non qualifiée et non compétente. Vous attachez, par exemple, beaucoup d'attention - je pense au communiqué de presse - à l'électricité, la plomberie et la structure ou la charpente. C'est signe que vous reconnaissez qu'il y a un maudit danger - excusez-moi - qu'il y a un danger que le consommateur se retrouve avec des incompétents pour faire ces travaux. Nous croyons que le danger est énorme. Il est énorme parce que tout le monde va pouvoir aller faire ces travaux-là n'importe comment.

Alors, il y a peut-être différentes façons d'arriver à régler cela. Il y a celle dont je vous

parlais tantôt: de garder cela mais d'établir des taux de services ou des taux de charges dans notre décret. L'autre façon, c'est celle dont on a parlé. C'est peut-être de jouer le jeu qu'on a déjà proposé il y a quelques années au gouvernement, l'allégement fiscal. Cela donnerait quoi dans le fond? Le problème de... La commission du travail n'est peut-être pas la place pour en parler, mais on pense qu'il y a une relation intime avec le projet de loi. C'est que si, demain matin, vous accordez au consommateur qui fait faire des travaux par une entreprise reconnue et licenciée, avec des gens qui ont la compétence pour faire les travaux ou qui ont les cartes de compétence, si vous accordez que cette personne qui a fait faire les travaux puisse produire des factures sur son rapport d'impôt et qu'elle obtienne une déduction d'impôt, il y a là un incitatif pour le consommateur à utiliser des gens qui sont dans le cadre d'une compétence. D'autre part, celui qui va donner la facture va être incité à se rapporter parce que forcément il a donné des factures et l'impôt va les avoir. Donc, il va avoir le choix de se mettre à la lumière. De cette façon, le consommateur va avoir une réduction, une certaine possibilité, à son choix, d'aller chercher des travaux compétents et avoir une déduction d'impôt. Celui qui travaille en dessous de la table va peut-être au moins avoir un incitatif pour se légaliser, se faire voir au grand jour et déclarer ses revenus. C'est une façon, quant à nous, d'avoir un cheminement pour permettre au consommateur de sauvegarder au moins une certaine compétence dans ces travaux.

Je peux vous dire qu'il y a des inquiétudes énormes du côté des gens qui ont été en contact avec le projet de loi 31, de la façon suivante: Je suis un entrepreneur d'habitation. Je finis une maison; je livre la maison à mon client; j'ai une garantie et, chanceux ou pas chanceux, j'ai la garantie des maisons neuves. Je fais faire des travaux dans mon sous-sol par un "botcheur", un Jos. Bleau, dans la rue, qui décide que ce serait plus beau de mettre le mur là et de tasser la colonne qui est en bas. Là, il s'en va comme cela, il me fait mon sous-sol et il me "botche" cela. C'est beau. Il y a plus ou moins une garantie. Sa garantie, c'est son coffre d'outils. Six mois après, les planchers commencent à grouiller et la maison commence à tordre. Qui va avoir les problèmes? Est-ce que c'est le Jos. Bleau qui est venu faire le sous-sol ou si c'est le gars qui a construit ma maison, qui peut, théoriquement, se retrouver avec les problèmes après? À cela, vous allez dire: C'est peut-être des choses à l'extrême. Il est excessivement dangereux de penser que vous allez laisser le consommateur dans les mains d'une série de personnes incompétentes qui peuvent aller faire des travaux. Il suffit qu'elles enlèvent une cloison portante quelque part et c'est là qu'il va apprendre qu'elle est portante. Il sera peut-être trop tard quand il va l'apprendre. Quant à nous, à ce moment-là, il nous apparaît essentiel que si on fait ce "move" ou si le gouvernement décide quand même de le faire, même si on pense que ce n'est pas la solution, il faudra au moins assurer au consommateur un allégement sur ses coûts et une certaine compétence dans les travaux qu'il va aller chercher.

Nous avons aussi étudié le projet de loi 31 en fonction des conséquences qu'il peut y avoir face à la santé et à la sécurité. Je peux vous dire qu'on est excessivement inquiets parce qu'on ne sait pas exactement le résultat que cela peut donner au bout. Actuellement, que je parle d'artisans, que je parle d'"illégaux" ou que je parle de ces gens-là, il est comique, et là c'est un peu la parenthèse que je voulais faire au début, de voir chez nous des pseudo-entrepreneurs qui rapportent 80 ou 70 heures travaillées dans l'année. Je ne sais pas qui vit avec seulement 80 heures travaillées par année? En tous cas...

Il y en a une grande partie - environ 4000 chez nous - qui ont moins de 1000 heures déclarées. C'est la moitié d'un homme par année. Il va arriver ceci: c'est qu'actuellement les gens ne font apparaître leurs heures que lorsqu'ils ont un problème et qu'il faut qu'ils aient de l'argent de quelque part. C'est la nature humaine; on ne peut pas se battre contre cela, semble-t-il. C'est ce qui arrive. Le gars tente de se faire couvrir. Il se fait mettre sur un "payroll" pour aller chercher sa CSST ou essayer de se couvrir. Qui va couvrir le travailleur qui va aller faire des sous-sols? Qui va déclarer la masse salariale de ce gars-là? Qu'est-ce qu'il va payer à la CSST? Qu'est-ce qu'il va recevoir de la CSST? Sur quelle base va-t-il recevoir des choses de la CSST? En vertu d'une déclaration qu'il va se pondre lui-même, ou d'un salaire fictif ou d'un T4 qu'il va déclarer? On ne sait pas trop ce qui va arriver, mais il y a une chose qu'on sait. C'est qu'actuellement, dans l'industrie de la construction, entre autres, la CSST nous coûte des prix de fous, des prix énormes, des prix qu'on a de la misère à absorber.

Or, si on prend, dans l'industrie de la construction, une "bunch" de bonshommes sur lesquels on n'a aucun contrôle et qu'on les fait assumer par l'industrie de la construction, il est clair qu'on va crier très fort, M. le ministre. Si on les met en dehors, est-ce que cela sera un groupe crédible? Est-ce que ce groupe pourra se suffire à lui-même? Qui va les absorber? Le fonds général ou s'ils vont s'absorber entre eux autres au niveau de la CSST? Dieu sait que cela peut être un groupe assez important. On présume, à l'heure actuelle - certains nous disent qu'il y en a 2000, 3000, 4000 de ces gars-là - qu'il peut y en avoir largement plus que cela. C'est une inquiétude, je pense, la CSST, dont on devrait tenir compte dans un projet de loi semblable.

Cette déréglementation nous a amenés à poser la question: Est-ce un pas de déréglemen-

tation ou un pas de valse? C'est-à-dire qu'on fait semblant de déréglementer et, après, on va se retrouver une place pour recommencer à réglementer. Il y a quand même une petite indication. Il y aura de la formation professionnelle. Il va aussi y avoir la tentation de certaines gens - qui n'est pas tellement cachée à l'heure actuelle - d'essayer de ramasser ce monde-là, de les regrouper et de leur bâtir un beau petit décret ou une belle petite convention collective. Et là ils vont probablement avoir atteint ce qu'ils veulent atteindre, c'est-à-dire aller chercher la "gang" qui est dans l'AECQ et les amener chez eux. Si ce n'est que cela, le projet de loi, qu'on nous le dise. Ce n'est pas plus difficile que cela.

Non, je ne charrie pas, M. le ministre. Ce sont des éventualités qui sont possibles. Si c'est un décret dans ie décret qu'on veut faire, on est capables de s'asseoir et d'essayer de trouver des solutions. Si c'est déréglementer totalement pour libérer les gens, cela peut peut-être être pensé de cette façon. On a de maudites craintes que cela puisse tout simplement être un déplacement des responsabilités et des contraintes.

Le projet de loi, entre autres, on ne fera pas beaucoup de commentaires sur les questions d'amendes. Il nous paraît que les questions d'amende sont une étape prématurée, quant à nous. Il faudrait commencer par régler les problèmes, régler notre champ d'application. On vient en commission parlementaire régulièrement pour demander de régler nos problèmes de champ d'application. Aujourd'hui, on se retrouve en commission parlementaire pour essayer de le sauver. Cela nous apparaît énorme. On est venus dire à Hydro-Québec de ne pas nous enlever, de ne pas venir tailler avec de la sous-traitance. On est venus le dire en 1984 d'arrêter, avec des salariés permanents ou pseudo-permanents de l'entreprise, de faire les travaux de construction. Arrêtez avec les commissions scolaires, avec les municipalités. Arrêtez tout le monde de gruger l'industrie de la construction. Ou bien posons-nous la question. Enlevons toute la législation de la construction et laissons le monde aller.

Le Président (M. Charbonneau): M. Julien, sur ces arrêts que vous nous invitez à faire, je vais vous arrêter parce que le temps...

M. Dion: Ce n'est pas Julien mon nom, c'est Dion.

Le Président (M. Charbonneau): C'est une erreur d'organisation devant moi. Si vous le permettez, on va plutôt laisser la parole aux membres de la commission qui vont réagir à vos positions et à vos recommandations. M. le ministre.

M. Dion: D'accord, M. le Président. Je pense que j'avais à peu près tout couvert. Le restant, je vais le passer ailleurs, ne soyez pas inquiet.

Le Président (M. Charbonneau): Je n'en doute point, à vous regarder aller... Il n'y a pas de problème. Je n'ai pas d'inquiétude pour vous. (17 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me permettrez de souhaiter la bienvenue à l'Association des entrepreneurs en construction et à ses porte-parole. Sauf erreur, il s'agit de la première présence de M. Julien à la commission de l'économie et du travail. Ce n'est pas ie cas de M. Dion, qui est un habitué des commissions parlementaires. J'en profite, M. le président, pour vous souhaiter une bienvenue toute spéciale, en souhaitant que la bonne marche de nos travaux vous impressionne positivement plutôt que négativement.

Le projet de loi 31 vise à diminuer considérablement sinon à éliminer le travail au noir dans l'industrie de la construction. Si nous voulons en discuter de façon ordonnée, il faut s'entendre sur la définition du travail au noir. Il y a plusieurs définitions de travail au noir dans la société québécoise qui peuvent toucher d'autres activités économiques face au ministère du Revenu, mais il y a une définition du travail au noir dans la construction qui a fait l'objet d'un consensus patronal-syndical à la table Mireault, dans le rapport Mireault. C'est toute action dans la construction qui contrevient au décret ou aux lois qui régissent le domaine de la construction. Si on s'entend sur cet élément-là, on peut continuer en disant: Est-ce qu'il y a du travail au noir partout dans l'industrie de la construction?

L'ensemble des intervenants que nous avons entendus avant vous sont plutôt d'avis qu'il en existe un peu dans l'industriel et le commercial, un peu plus dans la construction domiciliaire et beaucoup plus dans tout l'aspect rénovation, réparation, entretien, modification domiciliaire. D'autres associations nous ont affirmé que c'était quasiment inexistant dans les grands chantiers de construction. Quelle est la position de l'AECQ? Est-ce qu'il y en a? Est-ce qu'il y en a partout et est-ce qu'on le grade bien? Est-ce que la perception de la commission est bonne en disant que c'est plus important dans l'ordre que je viens de donner?

La question est soit à M. Julien, soit à M. Dion.

M. Julien: Je dois vous dire, M. le ministre, qu'il y en a partout. C'est peut-être plus évident dans le domaine du résidentiel, de la rénovation ou de l'entretien, mais il y en a dans tout ce qui s'appelle construction. Il y a toutes sortes de façons de le faire. C'est plus évident quand on regarde le résidentiel parce qu'on le voit tous les jours tandis que, sur les grands travaux, dans des places spécifiques où il y a des contrats de 8 000 000 $, 10 000 000 $, 15 000 000 $, 20 000 000 $, 30 000 000 $, 50 000 000 $, on ne

le voit pas tout à fait autant, mais il y en a dans tout; par contre, il y en a plus dans le résidentiel.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Aujourd'hui, i'AECQ se prononce sur le projet de loi 31 dans le mémoire qu'elle nous soumet et dans les représentations verbales que vous énoncez, mais I'AECQ a eu l'occasion de se prononcer à plusieurs reprises sur cet aspect du travail au noir, sur le rôle de l'artisan, etc. Je peux faire référence, brièvement, à vos mémoires du mois d'août 1984, peut-être que M. Dion va se le rappeler plus spécifiquement, votre mémoire sur la déréglementation de mars 1987, vous êtes intervenus à plusieurs reprises.

En 1984, vous disiez ce qui suit. Pendant longtemps les chefs syndicaux, les gouvernements et, il faut bien l'admettre, certains de nos membres ont cru que les coûts de main-d'œuvre dans la construction importaient peu puisque, par le jeu du décret, les entreprises concurrentes faisaient face aux mêmes coûts. Il s'agissait, bien sûr, d'une erreur. Les entrepreneurs en construction du secteur résidentiel ont été les premiers à s'en rendre compte. Faisant plus directement affaire avec le consommateur, ils ont dû vite s'ajuster à la capacité de payer de leurs clients. Plus loin, vous ajoutez: Comment peut-on demander aux consommateurs d'accepter de payer 21,47 $ - on est en 1984 - l'heure en coût de main-d'oeuvre pour la construction de leur maison lorsqu'ils ne gagnent pas la moitié de cette somme par heure de travail? Et vous continuez. Puis, un peu plus loin: Toutes les lois, tous les règlements et tous les inspecteurs du monde n'empêcheront pas le jeu de l'offre et de la demande, lequel demeure le fondement de notre système économique.

Aujourd'hui, le gouvernement se rend compte que vous aviez peut-être en partie raison...

M. Dion: On a toujours raison. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être en partie raison, que tous les inspecteurs du monde ne suffisent pas, sur le plan de la rénovation résidentielle, à assurer l'application du décret de la construction. Je pense qu'on se rend à l'évidence en faisant une telle affirmation. On se rend également compte que les lois et les règlements ne sont pas appliqués d'une façon raisonnable ou satisfaisante pour les parties qui les suivent dans la grande construction ainsi que dans la construction domiciliaire. Il nous semble que, si on resserrait la réglementation dans le domaine des grands chantiers et dans le domaine de la construction domiciliaire, on pourrait éliminer en grande partie ce qu'on appelle le travail au noir en le contrôlant davantage au niveau des grands chantiers - c'est encore un peu pius facile - et au niveau de la construction domiciliaire, avec beaucoup d'efforts, on pourrait arriver à le diminuer considérablement. Et, en légalisant la situation des travaux de rénovation et d'entretien par définition, il ne s'agirait plus de travail au noir. C'est l'approche que nous avons privilégiée.

Mais, dans tout ce domaine de la construction, il existe différents intervenants. Vous étiez présents ce matin lors du témoignage d'une des centrales syndicales, la FTQ-Construction. Vous avez entendu M. Laberge parler de l'élimination de l'artisan, ce qui incluait, dans le mémoire soumis par la FTQ-Construction et même par le conseil provincial, l'élimination également de l'entrepreneur spécialisé, celui qui oeuvre tout seul, de façon que, sur les grands chantiers, on trouve deux catégories d'individus: l'employeur et le salarié. J'aimerais vous entendre sur cette élimination de l'artisan et de l'entrepreneur spécialisé des grands chantiers de construction et de la construction domiciliaire.

M. Dion: M. le ministre, d'abord je veux qu'on s'entende sur ies termes. On parle de relations du travail, de décret de la construction et de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. À moins d'erreur de notre part, on pense qu'on doit parler d'employeur, de salarié et, entre guillemets, d'une notion qui a été introduite dans la loi et qui est celle de l'artisan. Pour nous, il est impensable d'amener une notion d'entrepreneur spécialisé. Une notion d'entrepreneur n'a pas d'affaire là-dedans. Une notion d'entrepreneur, c'est une notion de contrat, une notion de relation avec un donneur d'ouvrage; c'est une notion d'exécution, ce n'est pas une notion de relations du travail. Alors, immédiatement, on va vous dire qu'on refuse totalement de reconnaître la question des entrepreneurs spécialisés. C'est de la foutaise qui a été créée de toutes pièces pour régler des problèmes. On avait une grosse corvée de problèmes à régler et on les a réglés de cette façon. Cela n'existe pas des entrepreneurs spécialisés en relations du travail. Le terme "entrepreneur spécialisé" dans mon temps, c'était des sous-traitants. Ils étaient spécialisés dans la plomberie et ils étaient spécialisés dans l'électricité. Cela a été galvaudé et c'est devenu une notion, mais pas dans les relations du travail. Cela ne sera jamais, à mon goût, une relation du travail.

Concernant l'artisan, notre position est très claire. On demande nous aussi dans notre document que... Si, par exemple, on décidait de sortir les travaux d'électricité du décret, on trouverait logique de vous dire: Sortez les électriciens, et, si on sortait la plomberie du décret, on vous dirait: Sortez les plombiers. Mais là, comme vous sortez la réparation et l'entretien domiciliaire on vous répond, comme les autres centrales vous ont dit ce matin: Sortez l'artisan. Laissez la construction aux professionnels de la

construction, aux employeurs et aux employés de la construction. Ce sont eux les professionnels de la construction. En 1979, quand on nous a vendu en poussant un peu fort le statut d'artisan - je pense que c'est écrit dans notre mémoire - on nous a fait croire que cela était bon pour les consommateurs, et a peu près ça pour les travaux de réparation et d'entretien. Mais, si vous sortez le principal, sortez l'accessoire. C'est notre position.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais il faut s'entendre. Lorsqu'on parlait de sortir, on ne sortait pas des gens, on sortait des notions.

M. Dion: Oui...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La proposition...

M. Dion: On est d'accord là-dessus. Excusez-moi, M. le ministre. On est prêt à donner un choix à ces gens pour qu'ils se placent. Je pense qu'il reste quand même que outre la définition ou le statut comme tel, il y a des individus, des êtres humains là-dedans, des êtres humains qui peuvent être d'excellentes personnes au point de vue de la compétence pour faire des travaux. Qu'on leur donne un délai X pour faire un choix: Ils peuvent devenir des vrais travailleurs de la construction qui vont travailler pour des employeurs, ou devenir des employeurs s'ils le veulent et ils engageront des salariés pour travailler pour eux, ou choisir de sortir du décret et d'aller faire les travaux que vous auriez choisi à ce moment-là de sortir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Je vous suis. C'est très clair. La prochaine question s'adresse à M. Julien.

M. Dion: Est-ce que mes réponses sont trop longues?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, cela va. M. Dion: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est à cause possiblement de la région d'où il provient, soit la même région que le député d'Abitibi-Ouest, qui, dans certaines circonstances, peut également s'apparenter avec la région que je représente sur le plan des petites municipalités, sur le pian des services dont la population a besoin dans ces petites municipalités.

Si on suit le raisonnement que vous venez de donner, l'artisan ainsi que l'entrepreneur spécialisé auraient un délai X pour faire un choix: ils pourraient devenir soit des salariés, soit des employeurs. Sur les gros chantiers, cela ne pose pas tellement de problèmes d'application pratique. Vous devez avoir dans votre région comme j'ai dans ma région des gens qui sont surtout dans le domaine de l'électricité et de la plomberie, des entrepreneurs spécialisés qui oeuvrent seuls et qui donnent le service à la population. Qu'est-ce que vous faites de ces gens-là?

M. Julien: Je dois vous dire, M. le ministre, que dans ma région ceux avec qui je travaille, en tout cas, ont des licences de la régie, ce sont des électriciens avec des employés. Je n'ai jamais travaillé avec un électricien qui travaillait tout seul.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nos régions se ressemblent un peu moins que je pensais. Dans la région, chez nous, j'ai plusieurs électriciens qui travaillent tout seuls. Ils ont une petite camionnette, etc.

M. Dion: Oui, M. le ministre, mais vous avez une personne dans le service. C'est vrai, il part avec son camion, il s'appelle Le fil magique ou La plomberie en or et if s'en va réparer votre tuyauterie, il s'en va changer votre fil électrique, il est tout seul. Mais quand il travaille dans des maisons d'habitation - je ne dirais pas à 100 % - Ils sont souvent deux: il y en a un qui tire sur le fil et un autre qui pose des boîtes.

M. Julien: Dans mon domaine, chez nous, les électriciens qui travaillent pour moi sont des entrepreneurs avec des licences et des employés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela va.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, rapidement. Je voudrais d'abord remercier l'Association des entrepreneurs en construction du Québec d'avoir eu le temps, même si c'était court comme période - et ce sont des conditions imposées par le ministre - de réagir au projet de loi 31. Je voudrais saluer - et je ne pense pas que les membres de la commission m'en voudront - d'une façon spéciale le président de cette association, M. Julien, qui est de cette belle et grande région de l'Abitibi-Témiscamingue et qu'on a temporairement prêté à une association nationale, selon notre jargon. Je suis content que cette association soit ici présente pour s'exprimer sur le projet de loi 31. À tout le moins, c'est une association qui a développé au fil des ans - la présence de M. Dion à plusieurs commissions parlementaires le prouve - une très longue expertise dans le domaine de la construction domiciliaire. Il est certain que votre expertise est intéressante ici et on doit en profiter pour vérifier ce que j'appelle les deux ou trois principes qu'il y a dans le projet de loi 31.

Un des premiers objectifs du ministre - et

il faut questionner sur cela tous les intervenants compte tenu de leur expérience - c'est de tenter de réduire le travail au noir. Ce n'est pas pour rien qu'il a presque toujours commencé par cette première question: Est-ce que vous comprenez le sens de la définition du travail au noir? Le ministre a toujours voulu s'en tenir à une définition qui retient strictement ceci: ce qui se fait autrement que par les lois prescrites dans la construction. Je prétends que c'est un bras du noir. Il y a aussi l'autre bras du noir: c'est tout ce qui ne figure pas comme entrée de fonds au gouvernement du Québec. C'est un bras tout aussi important; même si le travail peut être conforme au taux prescrit, si cela se fait en dessous de la table et qu'il n'y a pas de retour de revenus au gouvernement du Québec, il me semble qu'on devrait tous avoir, comme citoyens, la préoccupation de contrer cela.

Ceci étant dit sur le travail au noir, à moins que je ne sache pas lire - ce dont je doute après douze ans de pratique dans ce domaine - votre prétention est on ne peut plus claire; vous prétendez même que le projet de loi 31 va l'amplifier. J'ai lu à la page 21 de votre mémoire: "...il reviendra sous peu avec un autre projet - c'est dans la perspective où il procéderait avec le projet de loi 31 tel quel - pour de nouveau déréglementer, car le travail au noir aura pris de l'ampleur et les assoiffés de la déréglementation" voudront réglementer à nouveau sur une autre partie. Vous prétendez que tout cela se fait à la pièce et que ce n'est pas en procédant à la pièce qu'on va en arriver à quelque chose qui va correspondre au véritable problème.

La question que je vous pose, puisque vous semblez être on ne peut plus clair, c'est: Pour ce qui est de votre association, dans le domaine résidentiel, est-ce que vous êtes en mesure de confirmer ou d'infirmer la gradation que le ministre et d'autres groupes ont voulu donner, à savoir que c'est probablement le secteur dans lequel il se fait le plus de travail au noir? Est-ce que vous partagez cette appréhension? (17 h 15)

M. Dion: Absolument.

M. Gendron: Dans le secteur de la construction domiciliaire, incluant la rénovation, bien sûr?

M. Dion: Bien, disons que par gradation, c'est clair que c'est plus grave pour réparation et entretien. Un peu plus haut, si vous voulez, la construction résidentielle et, en réduisant tranquillement dans les autres secteurs, il y en a aussi.

Est-ce que vous voulez que je vous explique pourquoi on dit que le travail au noir va continuer?

M. Gendron: Oui, si ce n'est pas trop long.

M. Dion: Rapidement, ceci. Si le projet de loi garde l'artisan, l'artisan il faut qu'il gagne sa vie, à ce moment-là, il ne pourra plus aller où il était habitué, en général, d'aller, soit réparation et entretien, parce que là il va être en compétition avec un marché totalement libre, du salaire minimum en montant. Il va s'en aller où, ce gars-là? Il y a une bonne chance qu'il s'en aille faire réparation et entretien, mais dans les autres secteurs. Et là il va faire la même chose qu'il fait à l'heure actuelle, parce que, sans malice, il est quand même celui qui est en partie responsable de ce travail. Nous, le travail au noir, on appelle cela du travail fait en dehors de la législation, du travail peut-être fait en partie dans la législation, mais pas tout déclaré dans la législation et peut-être fait aussi, n'importe comment. Donc, il va se retrouver dans un autre secteur, c'est-à-dire pour réparation et entretien, où il va venir en compétition. En créant cette compétition-là, dans l'autre secteur, il va provoquer, encore une fois, la naissance d'un nouveau travail au noir. Dans le fond, c'est le jeu. C'est ce qu'on a peut-être essayé de dire dans une page, je ne suis pas capable de l'identifier. C'est comme les deux gars qui se chicanent sur un terrain où il y a une clôture: l'un veut tasser la clôture de six pouces et l'autre, de six pouces. Et là, tout d'un coup, ils prennent la clôture et ils la tassent de trois pieds, puis ils se chicanent encore sur la clôture, six pouces d'un bord, six pouces de l'autre. Il ont seulement déplacé l'endroit où ils se chicanent, où la limite est obscure. C'est cela qu'on est en train de faire par le projet de loi 31. On déréglemente ce qui a l'air d'être obscur, on déplace la borne. Cela va devenir obscur ailleurs. C'est cela qu'on craint. On ne vous dit pas que le projet de loi en lui-même n'est pas un principe intéressant. On ne vous dit pas que d'éliminer le travail au noir ce n'est pas souhaitable, mais les moyens sont discutables.

M. Gendron: Oui, cela je l'ai bien compris. Votre mémoire est très clair là-dessus, surtout dans les premières pages qu'on n'a pas eu l'occasion d'entendre, mais dont certains auraient avantage à reprendre connaissance. Il y avait une forme caricaturale intéressante dans les deux ou trois premières pages. J'inviterais du monde à relire cela, et il faut lire entre les lignes pour comprendre ce que cela signifie.

L'autre question que je veux vous poser, c'est sur ce que vous identifiez comme étant un des problèmes majeurs, ou une des causes majeures du noir, qui est la question des artisans. Vous l'avez traitée assez longuement, et là je ne veux pas contredire mon bon ami, le président de l'association, M. Julien, parce qu'il a raison, M. le ministre du Travail, en Abitibi-Témiscamingue, règle générale et en grande majorité, on n'a pas d'électriciens qui ne sont pas membres de la Corporation des maîtres électriciens, et ils travaillent en équipe. Il y a

quelques cas isolés. Dans tout l'Abitibi-Témiscamingue, il y en a peut-être cinq ou six qui sont seuls. Entre autres, j'en connais un de La Sarre qui s'appelle Adrien Chrétien; il a toujours travaillé tout seul, tout le temps. Jos. Lapointe, de Palmarolle, a toujours travaillé tout seul. Alors, cela existe, mais c'est très limité. C'est très limité, et probablement que chez vous, si cela arrive plus qu'ailleurs, c'est parce que cela ne fait pas longtemps que vous avez l'électricité, je pense, dans votre région... C'est peut-être pour cela qu'il y en a plus.

Ceci étant dit, sur le statut d'artisan, je pense que vous aviez raison, M. Dion, de dire... Ce n'est pas parce qu'on a essayé de le vendre, mais dans sa présentation, au moment où cela a été introduit dans la législation, l'artisan devait, autant que possible, travailler seul, travailler davantage dans le secteur de la réparation et l'entretien, et toucher un peu la rénovation. Vous avez raison, c'était à tout le moins non seulement l'esprit mais la volonté du législateur d'alors. Sauf que dans les faits, aujourd'hui, on est en 1988 et on doit reconnaître que ce n'est pas comme cela que cela se passe. Par conséquent, il y a des décisions à prendre pour revérifier toute la gestion de la notion de l'artisan dans la construction et, moi, je ne vous ai pas trouvé assez clair, même si vous en avez parlé dans votre mémoire. Est-ce que vous souhaiteriez - et c'est là ma deuxième question - qu'effectivement l'artisan ait l'obligation, dans un délai X, de se donner un statut différent, pour revenir un peu à la problématique de la FTQ? Elle disait: Dans le fond, dans la construction, ça irait bien mieux s'il y avait deux types de monde: il y aurait des salariés et - non pas ce que le ministre a dit, des entrepreneurs - des employeurs, parce que je suis sûr que le président de la FTQ a parlé d'employeurs et non pas d'entrepreneurs. Si on avait dans la construction des employeurs et des salariés ou des employés, est-ce que vous pensez que, si on s'orientait comme cela, il faudrait absolument régler le problème des artisans en les obligeant par législation à faire un choix?

M. Dion: Vous avez raison. Notre position est très claire. On pense que le statut d'artisan écrit dans la loi doit disparaître et l'individu devrait avoir un délai pour pouvoir choisir d'aller soit comme employeur soit comme employé. Je voudrais peut-être aussi ouvrir une parenthèse dont il serait important que vous preniez connaissance: contrairement à ce que les gens pensent, un artisan n'est pas nécessairement un artisan 365 jours par année. C'est important de retenir cela parce que, selon ce qu'il ramasse comme contrat, il s'engage des gars. Si c'est un peu plus gros ce qu'il a à faire, il va engager deux ou trois gars et il devient employeur parce qu'il a des salariés à son emploi. Cela fonctionne pendant un ou deux mois, puis cela "jam"; il y a un peu moins d'ouvrage, houp! il redevient artisan. Il passe d'artisan à employeur, selon le besoin.

On a ce problème-là et c'est ce que j'ai voulu vous souligner en parlant de 18 000 et 15 000 membres chez nous. C'est impensable qu'un gars ne fasse que 200 heures par année, c'est impossible. Donc, c'est un bonhomme qui, un bout, se déclare artisan et il fourre le système comme il peut; il est imaginatif. Je ne veux pas que vous preniez mes paroles comme étant malicieuses. C'est ma façon de m'exprimer. Effectivement, il est imaginatif et il s'en va dans le système. Tout d'un coup, il a un peu plus d'ouvrage; il engage deux gars et il se met à faire de l'ouvrage. Tout d'un coup cela ne marche pas; il fait le sous-sol à Jeannette et à Françoise. Le lendemain matin, il frappe une belle "job", il a toute une cour à finir; il s'en va le faire avec deux ou trois gars. Essayez de me faire croire qu'un artisan est capable de poser de la brique tout seul. Il n'ira pas brasser son ciment, charrier sa brique, la mettre sur le mur et retourner brasser son ciment. Ce n'est pas vrai, ça n'existe pas un artisan briqueteur-maçon. Cela n'existe pas un poseur de gyproc artisan, ce n'est pas vrai, ce sont deux ou trois gars ensemble. C'est cela le problème. On dit: C'est un gars compétent, il est important. Peut-être qu'on peut l'avoir dans l'industrie de la construction comme employeur ou comme employé, mais, comme il a joué sur son statut à tout bout de champ, qu'on lui donne le choix: qu'il choisisse d'aller chez Albert ou chez Joseph, mais qu'il arrête de jouer entre les deux.

M. Gendron: C'est très clair. Je suis sérieux, c'est très clair.

À la page 15, M. Dion ou M. Julien, vous avez indiqué que dans votre esprit ce n'est que déplacer la ligne que de dire: Dorénavant, on exclura la rénovation et la modification. On revient au même problème d'exclure cela du champ de juridiction. Est-ce que cela signifie également que même si on s'attablait avec une série de spécialistes pour rédiger quelque chose de serré... Ce qui ne semble pas être le cas, parce que tout le monde qui est venu ici a fait toutes sortes d'interprétations, probablement correctes. Il y a juste le ministre qui dit qu'on est dans les patates. Il dit toujours: Cela ne veut pas dire cela. Mais c'est drôle, tous les intervenants pensaient que cela pourrait effectivement conduire à tel abus, tel abus, mais, non, on lit mal! Ce n'est pas grave. La question que je vous pose c'est: Si on réussissait à être certain que soit écrit dans le projet de loi que rénovation et modification ne veulent rien dire d'autre que des menus travaux, est-ce que vous maintiendriez quand même votre proposition, à savoir que pour vous c'est une erreur de soustraire à l'application du décret de la construction la rénovation et les modifications?

M. Dion: Je vais être honnête au maximum

en vous disant que le mot "rénovation" nous fait carrément moins peur que le mot "modification", parce que la rénovation, pour nous, touche quelque chose qui existe qu'on modifie, qu'on répare, qu'on entretient, dans le fond. On pense que rénovation, entretien et réparation, c'est presque tout à la même sauce, dans le fond. Pour nous, cela ressemble un peu à cela - je ne fais pas du légalisme avec cela - tandis que modification c'est nettement différent. On a été vulgaire en disant qu'on peut partir d'un élément... Et j'ai entendu les gens parler de postes de pompiers et d'écoles qui sont transformés, il ne faut pas se conter de peurs. Cela peut être n'importe quoi. On a vu des postes de pompiers... Ils ont décidé de faire des grosses casernes et d'abandonner les petites. Cela peut être n'importe quoi de cela. Par une modification, on peut changer une destination. Cela nous apparaît, la modification, très dangereux parce qu'on va embarquer dans des structures. On va embarquer beaucoup trop loin. On embarque dans de la construction. Effectivement, nous, on va s'opposer.

Je voudrais, M. Gendron, ajouter que j'ai aimé le début de ce que vous avez présenté parce qu'on l'offre dans notre document. Nous ne sommes pas des experts. Nous sommes des gens qui vivent là-dedans. Ce qu'on demande à la fin, c'est de retarder le projet à l'automne pour nous donner le temps de vous dire ce qu'on pense et comment cela pourrait être fait. Après cela, vous ferez comme en 1979, en 1982, en 1983 et en 1984.

M. Gendron: Ce ne sera pas "vous" ferez, mais "ils" feront. Donc, M. Dion, vous nous dites à peu près ce que tous les autres sont venus nous dire, à savoir qu'il n'y a qu'une seule façon de régler ce problème - le problème initiai étant de contrer le noir - c'est de soustraire à l'application du décret de la construction l'entretien et la réparation. Vous seriez plus dans cette lignée.

J'arrive à l'autre volet qui est à votre page 17. À la page 17, il y a une première confusion que je voudrais régler. Une première confusion dans mon esprit, peut-être. Vous mentionnez que le sondage, chez vos gens du résidentiel, rejetait les conclusions de la solution facile du rapport Scowen, qui étaient une déréglementation par morceaux, ailant graduellement vers une déréglementation totale.

Vous avez dit que les gens du résidentiel rejetaient cette conclusion. Or, à ce que je sache, l'APCHQ, qui était la seule à ma connaissance à retenir cette solution, est membre de votre...

M. Dion: MM. les membres de la commission, l'AECQ regroupe des employeurs. Elle ne regroupe pas des associations, au grand déplaisir de certains. On ne regroupe que des employeurs. Les membres de l'APCHQ qui sont des employeurs sont membres chez nous.

M. Gendron: lis sont membres. C'est cela.

M. Dion: Les employeurs de l'APCHQ sont membres chez nous, seulement les employeurs, pas les autres.

M. Gendron: Oui, seulement les employeurs. Reconnaissez-vous qu'il peut y avoir...

M. Dion: II y a une grande nuance. Je ne veux pas être agaçant, mais, chez nous, ce ne sont que des employeurs, pas des gens qui ont des terrains et qui vendent des projets. Ce ne sont pas des "brokers". Ce ne sont pas des entrepreneurs qui n'ont pas de salariés à leur emploi. Nous, on n'a que des employeurs de la construction chez nous.

M. Gendron: Oui, mais est-ce que vous acceptez qu'il y ait des employeurs chez vous qui soient membres également de l'APCHQ?

M. Dion: Oui, certainement. Tout ce qui est employeur, membre de n'importe quelle des autres associations, est membre chez nous. Mais tout ce qui est membre ailleurs n'est pas nécessairement membre chez nous. Sans aucune malice, l'Association de la construction de Montréal et du Québec, qui est une grosse association, a des membres qui ne sont pas membres chez nous. Parce que cela se peut que ce soit un entrepreneur n'ayant aucun salarié ou un fournisseur ou un manufacturier. On n'a que des employeurs de l'industrie de la construction.

Par contre, c'est important de retenir ceci, notre conseil d'administration regroupe des gens des quatre secteurs. À notre conseil, on avait au moins quatre entreprises de construction du secteur de l'habitation, des gens qui sont actifs dans ce secteur, qui ont participé aux discussions. Ils ont des réactions qui sont parfois légèrement différentes de celles qu'on entend ailleurs. Mais il faut aussi voir la nuance. Je pense que c'est le voeu de certains de vouloir sortir toute la construction résidentielle pour la mettre ailleurs. Notre position à l'AECQ et celle qu'on a eue à la suite de notre sondage, les gens ont dit: Cela sera peut-être une solution, mais cela ne réglera pas les problèmes. Ils disent: Faisons les choses à l'intérieur du décret. On pense qu'on peut le faire à l'intérieur du décret.

M. Gendron: À la même page 17, vous dites: "Les employeurs du résidentiel ne veulent pas que leur secteur soit soumis à un régime de relations du travail différent de celui des autres secteurs."

M. Dion: C'est cela.

M. Gendron: Est-ce que vous partagez cela ou si vous êtes contre cela?

M. Dion: C'est ce qu'on dit. C'est notre mémoire.

M. Gendron: Voilà. C'est ce que je lisais. On arrive à la page 18 et regardez ce que vous dites: On voudrait, dans le fond, qu'il y ait un régime... À moins qu'encore là je comprenne mal...

M. Dion: Mais c'est à l'intérieur du décret, M. Gendron, ce dont on parle. (17 h 30)

M. Gendron: Non, je le sais, mais un régime...

M. Dion: On dit: Garder le...

M. Gendron: ...particulier pour le résidentiel...

M. Dion: Oui, mais...

M. Gendron: ...où il y aurait des horaires appropriés, des vacances libres.

M. Dion: Mais, M. Gendron, à l'intérieur du décret de la construction, de l'unité totale de la construction, on a des conditions particulières pour l'industriel. On a une clause 23.15 qui a manqué de faire sauter toute la province.

M. Gendron: Oui.

M. Dion: On a des conditions particulières pour le génie et les travaux de voirie. On a des conditions particulières pour les travaux du gouvernement quand on fait des travaux à la Baie James. On en a comme cela. Pourquoi ne pas avoir des conditions particulières pour le résidentiel? On se bat pour cela. On pense que c'est essentiel. C'est ceia qui va arrêter ces recherches de déréglementation et ces recherches de "splitage" de l'industrie de la construction et on va faire tort à l'industrie de la construction en faisant cela.

M. Gendron: M. Dion, ce que vous me dites...

M. Dion: J'étais bien parti pourtant. M. Gendron: Oui, je vois cela. M. Dion: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Ce que vous me dites, c'est que vous voulez, à l'intérieur de la grande famille...

M. Dion: Oui.

M. Gendron: ...avoir un régime prescrit de relations du travail ou de dispositions spécifiques au résidentiel, mais à l'intérieur de l'ensemble du secteur de la construction couvert par le décret de la construction.

M. Dion: À l'intérieur du décret, on voudrait que soient établies des conditions propres au secteur résidentiel.

M. Gendron: Résidentiel.

M. Dion: On vous demande peut-être, à ce moment-là, de l'aide. C'est peut-être cela qu'on demande dans ces pages. On demande au gouvernement de nous tracer, dans la loi, des jalons qui vont nous permettre de passer au travers des obstacles qu'on a à l'heure actuelle.

M. Gendron: En conclusion, sur le 31 vous demandez son report.

M. Dion: On demande des ratios un pour un.

M. Gendron: Non, mais...

M. Dion: Ce serait essentiel dans le résidentiel.

M. Gendron: Globalement, sur le 31, votre conclusion, c'est que vous demandez le report de ce projet de loi.

M. Dion: C'est-à-dire qu'on demande de régler les problèmes du travail au noir et on demande de régler les problèmes du résidentiel, mais on pense qu'on devrait nous donner du temps...

M. Gendron: Oui, mais comment cela finit-il?

M. Dion: ...pour y réfléchir...

M. Gendron: C'est cela.

M. Dion:... et reporter à l'automne.

M. Gendron: Cela finit par un report.

M. Dion: On comprend qu'une commission parlementaire comme la vôtre, en réfléchissant au problème, va sûrement nous accorder cela, aux parties, parce que vous voulez régler les problèmes.

M. Gendron: C'est réglé pour le report. Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Julien. M. le ministre.

M. Dion: On n'a pas pu remercier la

commission. Si notre temps...

La Présidente (Mme Bélanger): II reste encore du temps.

M. Dion: Ah! Attaboy!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le ministre va vous questionner.

M. Paradis (Brome-Missisquoi)-' Disons que c'est un peu comme dans les associations. Il y a plus d'une association d'employeurs également d'un côté comme de l'autre de la table. On n'est pas en maraudage.

Deux points que j'aimerais toucher avec vous. Je vous suis reconnaissant d'avoir inclus aux travaux de réparation et d'entretien les travaux de rénovation parce que vous rejoignez là ce que vous nous aviez mis par écrit en mars 1987. Je pense que cela fait preuve d'une certaine continuité dans ce sens.

Je vais revenir où on s'est quitté. Je veux revenir avec Le fil magique, si vous voulez, cet individu qui n'existe pas, sauf que vous avez reconnu son existence et possiblement son utilité. Si ce n'est pas le cas, indiquez-le. L'expression que vous avez utilisée: celui qui a sa pépine... Il existe. Demain matin, qu'arrive-t-il avec cet individu? Est-ce qu'on l'abolit? Il y a celui qui a sa pépine, et la Régie des entreprises en construction au Québec m'indique qu'à travers la province de Québec j'aurais 605 individus qui travailleraient un peu comme les gens que le député d'Abitibi-Ouest vous a nommés et ceux auxquels j'ai fait référence dans mon comté. Est-ce qu'ils ont une place dans le petit résidentiel et dans le petit commercial, ces 605, ou si eux aussi font un choix?

M. Dion: Les pépines?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les pépines et mes 605 en électricité pour donner un exemple.

M. Dion: Je pense qu'il faut les traiter séparément. Il a déjà existé dans l'industrie de la construction ce qu'on appelait l'entrepreneur artisan en industrie lourde ou en machinerie lourde, quelque chose comme cela. Je ne sais pas si vous vous rappelez. Effectivement, on reconnaissait justement ces propriétaires de pépines qui pouvaient fonctionner. Je pense que si vous nous accordez ce qu'on vous demande, de reporter le projet de loi à l'automne, on pourra régler ces problèmes. Je pense qu'il faut que celui-là soit réglé. C'est quelque chose qui existe. Aux 600 personnes qui, sensément, pourraient à l'occasion travailler seules, je pense qu'il y a moyen de trouver une solution dans l'industrie de la construction. Peut-être en écrivant, je ne veux pas lancer quelque chose, autrement le mot "employeur". Car, est-ce que c'est essentiel qu'à chaque jour d'une année l'employeur ait un salarié à son emploi? Vos 600, à l'occasion, ils ont des salariés à leur emploi.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Dion: À moins que je me trompe.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Possiblement...

M. Dion: Est-ce que vous avez saisi ce que je veux dire?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, vos employeurs, certains jours de l'année...

M. Dion: Oui, c'est parce que...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...ils n'ont aucun employé...

M. Dion: Bon! c'est cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...sur le "payroll".

M. Dion: Est-ce que, par principe, on ne pourrait tout simplement pas définir les deux catégories, employeurs et salariés, puis retrouver ces 600 personnes-là dans la catégorie des employeurs, des employeurs que je dirais, entre guillements, en puissance? Parce que, éventuellement, ils pourraient avoir des salariés à leur emploi. Il y a peut-être une solution, qu'on pourrait regarder.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais là est-ce qu'on ne retombe pas dans le vice qui a été dénoncé comme étant un vice...

M. Dion: Donnons-nous le temps de trouver la solution. Je pense qu'il y a une solution possible.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.

Lorsque vous parlez d'avoir des règles particulières d'application du décret dans le résidentiel...

M. Dion: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...c'est que vous visez à maintenir pour le secteur de l'entretien et de la réparation sous décret. Donc, un secteur qui continuera à être réglementé.

M. Dion: II y a deux options dans notre document...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De quelle façon peut-on s'assurer - parce qu'une fois que le gouvernement a pris la décision de réglemen-

ter, le gouvernement et les intervenants sont intéressés à s'assurer que la réglementation est appliquée, donc qu'elle est, par définition, applicable -- de quelle façon, dis-je, peut-on s'assurer qu'une réglementation qui vise les travaux, je vais toucher îe plus simple, d'entretien, dans le domaine de la construction, soit appliquée dans l'ensemble des unités de logement de la province de Québec? De combien d'inspecteurs, pensez-vous, on aurait besoin?

M. Dion: II est peut-être malheureux, M. le ministre, qu'on soit arrivé à la toute dernière minute avec le texte de notre mémoire. C'est possible que vous n'ayez pas eu tous le temps de le regarder ou, en tout cas, de l'analyser à fond. Je pense qu'on présente deux options. Si on lit attentivement le document, on n'a pas déjà accepté que la réparation et l'entretien puissent théoriquement en sortir, mais on donne une option qui prévoirait la réparation et l'entretien sortis, avec le reste du résidentiel bien encadré avec ses propres conditions. C'est l'option qu'on privilégie dans notre document.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on nous a signalé, devant cette commission, à ce jour, c'est que l'amélioration des contrôles, des pénalités, etc., pour les chantiers dits commerciaux et industriels, peuvent recevoir une application dite raisonnable. On nous indique qu'en ce qui concerne la construction résidentielle neuve, si on tient à appliquer le décret, cela va prendre des efforts particuliers, des efforts déployés énergiquement, si on veut faire en sorte d'avoir ces chantiers de construction de résidences neuves sous contrôle. Vous voulez ajouter encore le contrôle en ce qui concerne la modification dans le résidentiel?

M. Dion: Non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous pensez que c'est applicable et réaliste?

M. Dion: Non. D'abord, cela ne peut pas être pire que c'est actuellement. Au moins, on peut se dire cela. Les solutions qu'on propose pour régler les problèmes du résidentiel, M. le ministre, ce sont des solutions qui font que les choses vont se faire dans la légalité, à l'intérieur du décret, à un prix que le consommateur peut absorber, mais surtout par des gens compétents. Mais on va, en même temps, garder ce bassin-là à l'intérieur de l'industrie de la construction pour que l'industrie de la construction puisse continuer à faire les échanges de mains-d'oeuvre entre bassins, selon les mouvements de mains-d'oeuvre. Autrement dit, la surveillance de cela peut se faire et va continuer de se faire comme elle se fait actuellement. Mais, écoutez, M. le ministre, vous ne nous proposez pas, dans le projet de loi 31, de régler le problème de la construction neuve! Vous ne proposez que de régler la réparation et l'entretien. Donc, ce que je vous propose...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. On s'excuse...

M. Dion: ...est aussi bon que ce que vous me proposez.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse, là, je ne sais pas si... C'est peut-être parce que vous étiez serrés dans les délais. Mais dans les propositions qui sont contenues dans le projet de loi 31, qui comprend 19 articles, il n'y a qu'un seul des 19 articles qui s'applique à ce qu'on appelle la réparation, la rénovation, la modification et l'entretien.

M. Dion: C'est cela.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les autres articles, en général, sauf les articles de concordance et de mise en application, s'appliquent à la construction domiciliaire et s'appliquent également à la construction...

M. Dion: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...dans le domaine commercial et industriel où l'on s'attaque aussi au travail au noir par une réglementation plus poussée, par des amendes où les plafonds actuels deviennent des minimums, etc.

M. Dion: Oui, mais, M. le ministre, dans notre document, on ne vous dit pas qu'on est contre les amendes. On vous dit qu'à ce moment-ci...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Mais vous ne pouvez pas...

M. Dion: ...ce n'est pas le temps. Ce n'est pas de même qu'on règle le problème. On ne dit pas qu'on est contre les contrôles administratifs,...

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. Julien.

M. Dion: ...on dit que ce n'est pas tout à fait cela. Pardon?

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, s'il vous plaît! M. Julien.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, M. Dion.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dion.

M. Dion: On ne vous dit pas qu'on est contre ces choses-là. On vous dit qu'il y a des choses, là-dedans, qui sont bonnes, mais elles

sont prématurées. Commençons par trouver la vraie solution.

La journée où je donnerai des conditions valables au résidentiel, il n'y aura peut-être plus personne qui va essayer de passer à côté puis de jouer à côté. Cela sera peut-être plus facile de surveiller.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. Je tiens à remercier l'Association des entrepreneurs en construction pour sa présence devant cette commission parlementaire et, dans les circonstances, laisser le député d'Abitibi-Ouest souhaiter un bon retour peut-être à M. Julien dans sa...

M. Gendron: Vous êtes bien gentil. Je veux remercier les gens qui sont venus, et en particulier M. Julien, mais, je suis convaincu que M. Julien a une petite note pour vous, M. le ministre, en conclusion.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, j'ai vu que vous étiez allé lui porter une petite note tantôt.

M. Julien: J'ai l'impression, M. le ministre, que je vais vous la faire parvenir personnellement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes bien gentil, M. Julien. J'apprécie.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, les membres de la commission remercient l'Association des entrepreneurs en construction du Québec pour leur participation et leur souhaitent un bon retour.

M. Dion: Merci, madame. Merci, messieurs de la commission.

La Présidente (Mme Bélanger): J'inviterais maintenant l'Union des municipalités du Québec à prendre place à la table.

À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à ces messieurs qui ont des caucus à tenir de bien vouloir les tenir dans le corridor afin que ia commission puisse poursuivre ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît!

Alors, les membres de la commission vous souhaitent la bienvenue, monsieur, et je vous demanderais de vous présenter, s'il vous plaît!

Union des municipalités du Québec

M. Desrosiers (Jean-Louis): Mme la Présidente, nous vous remercions de nous recevoir, l'Union des municipalités du Québec. Je vous présente les gens qui m'accompagnent à la table. En commençant ici, à ma gauche, par Mme Lynne Charest, chargée de mission aux affaires inter- gouvernementales et qui représente la ville de Montréal - d'ailleurs, je pense que vous avez dû recevoir un télégramme de la ville de Montréal, de M. le maire Jean Doré et de M. Michael Fainstat disant qu'ils s'excusaient de ne pas être présents; Mme Charesî va remplacer les gens de Montréal. Vous avez Ici M. Raymond L'Italien, qui est directeur général de l'Union des municipalités du Québec; votre humble serviteur, Jean-Louis Desrosiers, maire de la ville de Mont-Joli et vice-président de l'Union des municipalités du Québec. Mon voisin de droite, je pense que tout le monde le connaît bien. Là encore, le maire de Québec s'excuse de ne pouvoir être présent. Il a envoyé son vice-président, M. Jean-Paul Morency. Nous avons aussi M. Hervé Brosseau, directeur général adjoint de la ville de Québec. D'autres nous accompagnent: M. Marc Laperrière, derrière moi, de l'Union des municipalités du Québec, qui est conseiller juridique et directeur du service de la recherche, et M. François Jutras, directeur des ressources humaines à la ville de Québec.

Nous avons un mémoire à vous présenter. Je sais qu'on n'a pas grand temps.

La Présidente (Mme Bélanger): J'aimerais vous faire remarquer que vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, une discussion de 20 minutes avec M. le ministre et les députés ministériels, et 20 minutes avec les députés de l'Opposition.

M. Desrosiers: Je vous remercie bien, Mme la Présidente. Les 20 minutes ne me créent aucun problème. C'est pour votre audition que vous aurez certains problèmes à me suivre, parce qu'on va se dépêcher pour garder le maximum de temps pour les questions.

Alors, voici le mémoire qu'on vous présente. La ville de Québec en avait un aussi. La ville de Montréal a incorporé le sien à celui de l'Union des municipalités du Québec. (17 h 45)

Dans l'ensemble, je fais un premier constat. Le mémoire que nous vous présentons représente vraiment l'opinion de l'Union des municipalités du Québec. Cela regroupe 250 municipalités et 80 % de la population du Québec. Cela regroupe des municipalités de 100 à 1 000 000 de personnes et l'Union des municipalités n'en est pas à ses premières armes quant à la présentation de mémoires devant cette commission ou d'autres commissions du même genre.

L'avant-projet de loi qui gouverne notre attention présentement vise essentiellement à soustraire du champ d'application de la loi sur les relations de travail les travaux de rénovation résidentielle exécutés par des consommateurs. Nous tenons, et je pense qu'il est important de le faire, à bien situer la nature de nos représentations. Nous sommes bien conscients que l'objet du projet de loi est de réduire l'ampleur du travail au noir, etc. Nous réalisons fort bien que les municipalités ne sont pas au premier chef

visées par ce projet de loi. Cependant, si l'objet de la loi n'est pas de nature municipale, il apporte toutefois une modification importante au champ d'application de la loi. Par cette modification, le gouvernement reconnaît que ce champ peut, pour des raisons d'intérêt public, être réduit. Nous désirons saisir cette occasion pour réitérer notre position visant justement à exclure les municipalités du champ d'application de la loi. Notre démarche a pour but d'apporter l'éclairage voulu auprès des membres de cette commission pour les amener, nous l'espérons, à reconnaître le bien-fondé de nos représentations. Nous entendons, dans les pages qui suivent, rappeler l'historique des représentations de l'UMQ, situer le cadre juridique qui assujettit les municipalités au décret de la construction ainsi que souligner aux membres de cette commission les motifs qui militent en faveur de cette demande d'exclusion.

Quant à l'historique, rapidement, l'union demande depuis de nombreuses années - en fait, depuis 1968, depuis que la loi a été promulguée une première fois - de soustraire les municipalités et les organismes en découlant du champ d'application de la loi pour les travaux exécutés par leurs propres salariés. Nous nous sommes manifestés à plusieurs reprises depuis l'adoption de la loi initiale. Le but de cette loi est de protéger les travailleurs de l'industrie de la construction soumis à des cycles économiques et saisonniers. Je pense que ça, c'est peut-être l'élément clé de la loi qui nous gouverne et du problème sur lequel on veut attirer votre attention, Mme la Présidente. Le but de cette loi est de protéger les travailleurs de l'industrie de la construction soumis à des cycles économiques et saisonniers. À moins que nous ne nous leurrions, qu'on ne se trompe royalement, c'était vraiment ça et je ne pense pas qu'on ait changé d'opinion depuis le début. Vu l'application de la loi en milieu municipal, lorsque les fonctionnaires municipaux exécutent des travaux de construction, de rénovation ou de modification, la municipalité encourt des coûts supplémentaires.

Maintenant qu'on sait ce que la loi devait faire, voyons comment elle s'applique et pourquoi nous sommes ici devant vous. Parce qu'elle occasionne des coûts supplémentaires, on doit accorder des conditions et des avantages prévus au décret de la construction tout en étant déjà conventionnés par une première règle de travail. Les municipalités peuvent également décider de confier le travail à l'entreprise privée, ce qui est une possibilité, invariablement, les coûts additionnels ainsi occasionnés sont assumés par les contribuables municipaux comme s'il n'y avait pas eu de pacte en 1979 quant à la fiscalité municipale. Le gouvernement du Québec et l'Union des municipalités du Québec, s'étaient entendues à cet effet qu'il n'y ait pas de redistribution de richesses par les taxes municipales. Ce n'est pas dans notre texte, malheureusement - j'ai la mauvaise habitude de déborder du texte. Dans ce temps-là, on avait vraiment conclu un pacte qui avait pour but d'avoir une taxation adéquate pour le bénéfice reçu. Il n'était pas question de profiter d'une surcharge pour transférer des frais à d'autres catégories, ce qu'on fait en appliquant la loi qui nous gouverne.

Reconnaissant la spécifité du monde municipal et la validité de nos recommandations dans le sens de l'intérêt des citoyens, en 1970, il y eut une première exclusion partielle des travaux de construction, de canalisation, d'eau, d'égout, de pavage, de trottoirs, etc. Alors, je passe rapidement. C'est une première exclusion qu'on a faite à la loi de 1968 pour permettre au monde municipal de faire des travaux sans être assujetti aux normes du décret. En 1979, le gouvernement du Québec a fait de même pour les réseaux des affaires sociales et de l'éducation. Notons au passage que nous sommes aussi des élus, qu'on représente 80 % de la population, qu'on représente 250 municipalités au Québec. Je pense que ce sont des éléments qui militent en faveur du fait qu'on puisse dire que, même si nous sommes un niveau de gouvernement qui émane du vôtre, Mme la Présidente, nous sommes aussi un gouvernement qui ressemble étrangement à celui du Québec. Il n'y a aucune raison qui justifie que les contribuables municipaux aient à consacrer une partie de leurs taxes en salaires et autres avantages prévus par les conventions collectives en vigueur majorées par le décret de la construction. C'est toujours la fameuse addition qu'il faut faire. Nous réitérons notre demande afin qu'à l'occasion de la présente réouverture de la loi il soit donné suite à nos représentations et qu'une exclusion soit prévue pour les municipalités. À la suite du jugement de la Cour suprême ayant mis fin à toute interprétation possible, il est urgent... Et c'est pourquoi nous sommes devant vous, parce qu'il y avait une loi en I968, parce qu'il y a eu des exclusions en cours de route, parce que l'application de cette loi-là crée des situations aberrantes et que le jugement de la Cour suprême vient de confirmer de façon irrémédiable qu'il faut que la loi soit respectée et traitée comme telle. Donc, il n'y a pas de porte de sortie.

Quel est le cadre juridique? Le chapitre de la loi traitant de son champ d'application prévoit une série d'exclusions auxquelles viendra se greffer une nouvelle. La nature des exclusions prévues soustrait partiellement ou totalement du champ d'application les exploitations agricoles, les entreprises minières, les entreprises forestières, Hydro-Québec, l'industrie du verre plat, les réseaux de l'éducation et des affaires sociales, les artisans, et les travaux d'entretien et de réparation exécutés par certaines personnes maintenant.

Tel que nous le mentionnons, on a également reconnu la spécificité du monde municipal en excluant certains travaux exécutés par les salariés de ce secteur: l'aqueduc, les égouts, le pavage, les trottoirs et autres travaux du même genre. Donc, les différents secteurs ne sont pas

tous traités de la même façon, certains faisant l'objet d'une exclusion partielle, d'autres d'une plus large. Dans le passé, plusieurs débats longs et coûteux ont opposé l'actuelle Commission de la construction du Québec et les municipalités, la commission réclamant de celles-ci qu'elles versent les avantages prévus au décret à leurs salariés. Un arrêt décisif fut rendu par le plus haut tribunal du pays, ce dont on a parlé tantôt. En effet, la Cour suprême, dans une cause opposant la Commission de la construction du Québec, alors connue vous savez sous quel nom et la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, a tranché en octobre 1986 au désavantage et au désarroi du monde municipal, sauf que c'était dans la ligne de pensée d'une application très légaliste d'une loi. Dans les faits, la commission de transport de la CUM avait, par l'entremise des salariés à son emploi couverts par une convention collective, fait exécuter des travaux de transformation à son siège social et à deux de ses garages: réfection de cloisons, divisions, plafonds, pose de fenêtres, peinture, installation de système électrique. Il s'agissait donc tout simplement d'adapter ses bâtisses à ses nouveaux besoins. La ville de Montréal aura l'occasion de s'exprimer sur cet aspect-là tout à l'heure et je pense que c'est aussi un des points qu'on devra essayer de clarifier, à savoir qu'est-ce que les mots veulent dire quand on parle de rénovation, quand on parle de réparation, quand on parle d'entretien et quand on parle de construction au sens large.

Bien que la STCUM ait agi à l'égard de ses propres immeubles en employant ses salariés et que la rémunération globale par ces derniers fut supérieure à l'ensemble des avantages prévus au décret, la cour fut d'opinion que l'employeur n'avait pas d'autre choix et devait accorder aux salariés les montants prévus au décret, pour chaque condition y déterminée au titre des salaires, vacances et avantages sociaux. Cette décision est donc lourde de conséquences pour le monde municipal, procurant aux salariés de ce secteur des avantages additionnels à ce qu'ils ont volontairement et librement négocié à leur convention collective. Cela nous achale, et on tient à attirer votre attention sur ce point-là, que des travailleurs, qui travaillent pour nous dans le monde municipal, qui ont négocié une convention en bonne et due forme, qui ont des salaires négociés, des conditions de travail négociées et qui ont une sécurité dans leur travail, puissent avoir accès à une autre loi, qui s'appelle le décret sur la construction, qui, lui, a été fait initialement pour parer au fait que ce n'est pas du continu, mais du discontinu, de l'occasionnel. On applique deux choses qui ont des finalités différentes à la même catégorie de personnes, et on pense que le moment est venu de trancher ce débat.

Les fondements d'une demande d'exclusion. Il ne nous semble pas logique que la collectivité... Voudrais-tu en lire un bout, s'il vous plaît?

M. L'Italien (Raymond): II ne nous semble pas logique que la collectivité, soit tous les contribuables municipaux, doivent supporter un fardeau financier plus élevé lorsque les municipalités confient à leurs salariés des travaux de construction, de rénovation ou de modification de leurs immeubles plutôt que lorsque celles-ci leur assignent un autre travail qui, celui-là, n'est pas assujetti à la loi. De la même manière, on doit se questionner sur la situation engendrée pouvant conduire les municipalités à accorder des contrats à l'entreprise privée plutôt qu'à les faire exécuter par ses propres salariés, vu la majoration des avantages et salaires qui doivent leur être accordés. On se prive ainsi d'une main-d'oeuvre compétente, ayant l'expertise voulue, et dont les coûts seraient moindres en l'absence de ce régime imposé par le décret de la construction, régime qui ne nous paraît pas justifié chez l'employeur municipal.

La municipalité, M, Desrosiers vous l'a dit il y a un moment, est un palier de gouvernement. Le gouvernement du Québec s'est lui-même soustrait à l'application de la loi pour les réseaux de l'éducation et des affaires sociales. Les gouvernements locaux ne bénéficient pas du même traitement, sauf pour certains travaux bien spécifiques. Chacun de ces paliers de gouvernement rend des services de nature publique et non privée. Ni l'un ni l'autre ne sont des employeurs professionnels et ni l'un ni l'autre n'ont pour vocation première d'exercer une activité reliée au monde de la construction. Ces activités ne sont qu'accessoires et marginales. Elles sont exercées à des fins non lucratives. Il n'y a aucun motif pour lequel les municipalités qui offrent des services publics aient à assumer un fardeau plus onéreux que les institutions des réseaux de l'éducation et des affaires sociales. Il ne nous apparaît pas justifié qu'un contribuable paie plus cher des travaux effectués à des immeubles appartenant à une corporation municipale plutôt qu'à une commission scolaire.

Les relations du travail en milieu municipal. De tous les secteurs du Québec, celui de l'administration municipale en est un où la présence syndicale est la plus forte. Sur une population totale de 66 500 emplois, 41 800 sont régis par une accréditation syndicale, soit un taux de syndicalisation de 62 %. À titre de comparaison, rappelons que ce même taux pour l'ensemble du Québec est de 44 %. L'ensemble des travailleurs du monde municipal représente 3 % de celui des travailleurs du Québec et 5 % de celui des travailleurs syndiqués. Le monde municipal compte 672 conventions collectives dont la majorité concerne des employés cols bleus. Parmi les cols bleus, plusieurs sont des électriciens, peintres, menuisiers, etc. Leurs conventions collectives leur assurent des conditions de travail avantageuses, une gamme d'avantages sociaux et une sécurité d'emploi. Les travailleurs

de la construction, quant à eux, ne jouissent pas d'une telle stabilité d'emploi malgré leurs salaires élevés. Plusieurs de ces conventions collectives contiennent des clauses prohibant ou restreignant la sous-traitance ou encore créant des planchers d'emploi, vu les craintes des salariés de voir leurs emplois menacés par le recours à des entrepreneurs indépendants. L'application de la loi aux municipalités a donc des incidences financières avantageuses pour ces salariés, leur permettant de retirer les avantages prévus au décret, alors qu'ils effectuent des travaux de construction ou de rénovation, en plus de continuer à jouir des avantages de leur propre convention collective dont la stabilité d'emploi lorsqu'ils sont assignés à d'autres tâches.

Alors que les parties ont librement et volontairement convenu de s'entendre sur les clauses du contrat de travail, le législateur vient accorder un boni pour certaines tâches exécutées. Un tel traitement privilégié crée des tensions entre les salariés d'un même groupe qui désirent tous être affectés à des tâches leur procurant de tels avantages additionnels. On risque donc de créer des conflits additionnels, d'amener des revendications afin d'accorder les mêmes avantages à tous les cols bleus qui veulent conserver les acquis en s'assurant, en plus, des avantages du décret.

Les municipalités sont en face d'un imbroglio administratif considérable en devant administrer deux régimes de façon parallèle. À titre d'exemple, le décret de la construction prévoit un pourcentage du salaire au chapitre des vacances, alors que la convention collective prévoit habituellement une période liée à l'ancienneté. On assiste inévitablement au cumul de vacances. Il en est de même pour le pourcentage prévu au chapitre des avantages sociaux, alors que les fonctionnaires bénéficient déjà de tels avantages de par leur convention. Par ailleurs, pour les employeurs municipaux qui en ont la possibilité, on risque d'assister à des mises à pied afin de confier des travaux à des tiers.

Je passe rapidement, Mme la Présidente. Voyons les impacts sur la gestion. En plus des problèmes liés aux relations du travail, les municipalités font face à de nombreux obstacles dont ceux de la difficulté de faire appliquer les garanties données par les entrepreneurs, ceux-ci rejetant la faute sur les fonctionnaires, et vice versa. Il est également difficile de tracer la ligne entre travaux de construction, d'une part, et d'entretien d'autre part, amenant les gestionnaires à devoir évaluer la nature de chaque travail avec circonspection afin de ne pas se placer en situation d'illégalité et décider dans chacun des cas du type de main-d'oeuvre à utiliser.

À la ville de Montréal, les résultats concrets du régime bicéphale créent de nombreux problèmes. À Montréal, il a été évalué, selon une étude réalisée en 1987, que les déboursés supplémentaires requis par l'application du décret coûtent aux Montréalais et aux Montréalaises 3 700 000 $ par année. D'autre part, si Montréal choisit de confier les mêmes travaux à des entrepreneurs privés, c'est plutôt 19 400 000 $ supplémentaires qu'il lui en coûtera, sans compter l'impact qui découle d'une mauvaise utilisation de ses ressources humaines. (18 heures)

C'est là une situation injustifiable aux yeux des contribuables. Une administration publique, quelle que soit sa taille, ne peut au nom de la complaisance, accepter que le législateur laisse perdurer une telle situation. La preuve en est que le gouvernement du Québec a lui-même choisi d'exempter de ce régime les commissions scolaires, les collèges, les institutions de santé et de services sociaux. Pour une ville dont les employés sont syndiqués, est-il logique que l'on offre à une catégorie d'entre eux des privilèges qui, à l'origine, étaient destinés à protéger des travailleurs d'une industrie saisonnière? La loi, par ses effets pervers, décourage l'embauche permanente d'ouvriers spécialisés et c'est là une situation que nous estimons extrêmement regrettable. À long terme, la situation actuelle nuira à tous les contribuables, aux administrations municipales et aux ouvriers spécialisés eux-mêmes qui se verront dans l'impossibilité d'obtenir des emplois spécialisés. À la situation vécue par Montréal, il faut ajouter celle vécue par les 1510 autres municipalités du Québec, mettant ainsi en lumière la véritable ampleur de la situation.

Mais qu'est-ce que les municipalités recherchaient en fait? L'UMQ a pris connaissance du mémoire de l'APCHQ: L'APCHQ et les relations du travail dans l'industrie de la construction et de la rénovation résidentielle. C'était le titre de son mémoire. Cet organisme a été entendu devant vous aujourd'hui. Le mémoire de l'APCHQ peut, à prime abord, faire en sorte que l'on situe mal les représentations du monde municipal. Nous désirons souligner que nos représentations visent en premier lieu à permettre aux municipalités d'entretenir les immeubles dont elles sont propriétaires, de les transformer et de les rénover selon l'évolution de leurs besoins, qu'il s'agisse d'une bibliothèque, d'une aréna, d'un garage, d'un hôtel de ville ou d'un centre administratif. Cette demande nous paraît des plus raisonnables, surtout lorsque l'on sait que plusieurs bâtiments municipaux sont des immeubles historiques nécessitant eux-mêmes de nombreux travaux.

Nous ne pouvons que plaider en faveur des contribuables municipaux qui sont les réelles victimes de la situation inéquitable créée par la loi. Si le législateur désire vraiment atteindre les buts fixés, il est souhaitable qu'il agisse dès maintenant pour corriger l'injustice à l'égard des contribuables municipaux créée par l'augmentation inutile des coûts des travaux municipaux qui se répercute inévitablement sur leurs comptes de taxes. Alors que le présent projet de loi vise à diminuer le fardeau des consommateurs qui font

rénover leur résidence, on maintient une situation déplorée depuis plus de 20 ans par le monde municipal et qui augmente la facture de ces mêmes consommateurs visés par le projet de loi, soit, bien sûr, les contribuables municipaux.

Mme la Présidente, la recommandation de l'Union des municipalités du Québec est que les corporations municipales, communautés urbaines et régionales, organismes municipaux et paramu-nicipaux soient exclus du champ d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. L'Italien. M. le ministre.

M. Desrosiers: Est-ce qu'il serait possible, Mme la Présidente, avant que le ministre prenne la parole, que je demande aux représentants de la ville de Québec de faire une petite présentation très courte?

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez dit que vous vouliez avoir du temps pour la discussion avec les parlementaires. Votre temps est écoulé, mais si vous voulez le prendre pour...

M. Desrosiers: Oui. La première partie est écoulée?

La Présidente (Mme Bélanger): Oui. Les 20 minutes sont écoulées. Mais c'est votre choix, si vous voulez faire un petit exposé.

M. Morency (Jean-Paul): Mme la Présidente, ce seïa très court. Je veux simplement dire que la ville de Québec appuie, est d'accord avec le document que l'Union des municipalités du Québec vient de présenter. Nous avons préparé un court mémoire; j'en ai des copies que l'on pourra distribuer à tous les membres de la commission. Je voulais simplement ajouter que la ville de Québec compte environ 90 employés spécialisés qui sont couverts par la loi sur la formation professionnelle et que l'application de la loi, strictement, telle qu'elle est présentée, nous obligerait certainement à abolir environ 50 de ces postes, si nous sommes tenus, bien sûr, de nous conformer à cette nouvelle loi. Les équipements municipaux, vous le savez, ont constamment besoin de restauration ou de rénovation, surtout à Québec où nous en avons passablement, un peu comme à Montréal. Nous ne sommes pas intéressés, et je tiens à le spécifier, à faire de la construction. Ce n'est pas notre domaine et nous ne voulons pas faire de construction. Ce que nous voulons, c'est entretenir tous les équipements municipaux, parce que c'est notre responsabilité vis-à-vis de nos contribuables comme élus municipaux de bien les entretenir afin d'économiser aux contribuables une perte qui pourrait être assez substantielle si nous ne les entretenions pas, ce que nous permettent la rénovation et la restauration.

Enfin, je retiens ce qui a déjà été spécifié par M. Desrosiers. Comme le gouvernement lui-même dans le domaine des affaires sociales et de l'éducation s'est permis de se soustraire à l'application de cette loi, je pense qu'il ne serait que juste et raisonnable que les municipalités puissent jouir, pour toutes les raisons qui ont été énumérées tout à l'heure, de ce même privilège. Ce serait, je pense, une application équitable pour les municipalités. C'est tout, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Morency. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mme la Présidente, dans un premier temps, je tiens à remercier les représentants de l'Union des municipalités du Québec ainsi que les représentants de la ville de Québec et de la ville de Montréal pour des mémoires qui sont clairs, quasiment aussi clairs que la position dans laquelle elles sont placées depuis octobre 1986, depuis le jugement de la Cour suprême.

Votre mémoire soulève quand même certaines questions. Vous mentionnez les économies qui ont pu être faites dans le cadre de certains travaux. Est-ce que vous avez une évaluation pour l'ensemble des travaux dans l'ensemble des municipalités du Québec? En termes de travaux, combien représente l'exclusion que vous souhaiteriez?

M. Desrosiers: La réponse est très courte, M. le Président et M. le ministre. Cette demande nous a été transmise la semaine dernière, à savoir si nous pouvions, en prévision de notre comparution, répondre à cette question. Nous ne sommes pas en mesure d'y répondre présentement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai là-dessus que, lorsque vous obtiendrez ces données, la commission parlementaire de l'économie et du travail sera intéressée à les connaître et naturellement celui qui vous parle aussi.

Vous touchez à la question du coût pour les contribuables, pour la municipalité, de travaux qui sont effectués lorsqu'ils sont soumis au décret de la construction. Mais, sauf erreur, je ne vous ai pas entendu ni lu sur la question de la compétence, de la qualification des travailleurs dé la construction. Lorsque vous demandez une exclusion, vous visez des économies pour vos contribuables, mais qu'en est-il sur le plan de la compétence des travailleurs?

M. Morency: Pour autant que la ville de

Québec est concernée, je vous spécifiais, M. le ministre, tout à l'heure que nous avons 90 employés spécialisés qui sont couverts par la loi sur la formation professionnelle. Alors, la compétence de ces gens est tout à fait évidente, je pense.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter de discerner cela comme il faut. On a ce qu'on appelle dans la qualification nos R-4 et nos R-3, soit nos travailleurs hors construction mais qualifiés par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, et on a nos gens qui sont qualifiés pour travailler dans le domaine de la construction. Certaines municipalités ont des conventions collectives dans lesquelles elles exigent la qualification du secteur de la construction.

M. Desrosiers: C'est notre cas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'autres ont une exigence qui est celle de la qualification du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. En ce qui concerne la ville de Québec...

M. Desrosiers: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...à titre d'information, laquelle avez-vous?

M. Morency: On exige ces cartes de compétence pour nos employés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, le travailleur qui travaille chez vous détient une carte de compétence. S'il quittait son emploi à la ville de Québec, il pourrait travailler sur un chantier de construction.

M. Morency: Exactement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va pour le moment.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. M. le critique, s'il vous plaît!

M. Gendron: Moi aussi je vais en profiter pour remercier M. Desrosiers et son équipe, les gens de la ville de Québec et les représentants de la ville de Montréal de nous avoir rappelé à nous parlementaires la position traditionnelle de l'Union des municipalités du Québec en disant qu'on souhaiterait être exclus du champ d'application du décret pour des raisons de double régime, à plusieurs égards, et également pour des raisons faisant suite au jugement que la Cour suprême a rendu et qui a comme conséquence de faire hausser les coûts pour les contribuables du Québec. En ce sens, c'est une position qui s'explique très bien.

Ma première question était celle qu'a posés le ministre, à savoir si vous aviez fait une évaluation globale dans la perspective où on vous exclurait. Qu'est-ce que cela représenterait comme valeur? Vous avez dit que vous n'aviez pas cette information. Donc, je ne la pose pas.

La deuxième question que j'aurais aimé poser, c'est: Est-ce que vous avez l'information concernant la masse salariale pour la ville de Montréal? Vous parlez du bicéphalisme du régime qui, à Montréal, en 1987, a fait en sorte que des déboursés supplémentaires ont été requis à cause de l'application du décret. Cela aurait coûté aux Montréalais 3 700 000 $ de plus par année.

M. Desrosiers: II faut le demander à Mme Charest, s'il vous plaît.

M. Gendron: Oui, la question que je pose, c'est: ces 3 7000 000 $. Sur quelle masse salariale sont-ils applicables, pour qu'on se fasse un meilleur jugement de l'impact?

Mme Charest (Lynne): Écoutez, je n'ai pas la masse salariale comprise, puisque cette évaluation-là ne comprend que le coût encouru pour le service des travaux publics de la ville de Montréal. C'est donc dire que, s'il y a des employés de même statut ou visés par ces dispositions qui sont dans d'autres services que le service des travaux publics de la ville de Montréal, ils n'ont pas été comptabilisés dans cette appréciation. On a fait une appréciation spécifique à la suite du jugement de la Cour suprême du service où il y avait la plus grande, pas la presque totalité, mais la majorité des frais qu'on était capable de calculer rapidement.

Maintenant, je n'ai pas le montant de la masse salariale totale de la ville de Montréal. Je pourrais faire un appel, cela me prendrait deux minutes, mais je ne peux pas vous répondre comme cela.

M. Gendron: Oui. Si c'était possible, j'aimerais l'avoir, mais je ne veux pas...

Mme Charest: Oui, cela ne pose pas de problème, à moins que vous n'ayez d'autres questions à me poser immédiatement.

M. Gendron: Bien, la deuxième...

Mme Charest: Posez-les toutes, je vais aller faire l'appel.

M. Gendron: Non, la question additionnelle, je l'aurais posée au représentant de la ville de Québec.

Vous avez mentionné que vous aviez 90 employés à la ville de Québec. Est-ce que vous seriez en mesure de nous indiquer le salaire moyen que ces gens-là touchent actuellement à la ville de Québec?

M. Morency: Je vais demander à M. Bros-seau, si vous me permettez, M. le député.

M. Brosseau (Hervé): À l'heure actuelle, si on inclut les avantages sociaux, M. le Président, c'est environ 40 000 $, entre 39 000 $ et 40 000 $. Nos hommes de métiers touchent environ 30 000 $, plus les avantages sociaux,

caisse de retraite, assurance collective.

M. Gendron: Est-ce à dire toujours pour les employés de la ville de Québec, qu'à partir du moment où ils sont qualifiés selon le régime du secteur de la construction, vous l'avez mentionné tantôt, ces gens-là ont un double fonds de retraite? Un fonds de retraite à la ville de Québec et un fond de retraite à la Commission de ia construction du Québec?

M. Brosseau: Avant le jugement de 1986, on avait conclu une entente bona fide avec la Commission de la construction dans laquelle on ne suivait pas nécessairement la loi. On versait l'excédent entre le salaire versé à la ville et le salaire du décret de l'industrie de la construction. On payait aussi certains avantages sociaux supérieurs, comme les vacances, et les employés de la ville recevaient, deux fois par année, un chèque de la commission pour les travaux qualifiés de construction qu'ils avaient faits.

M. Gendron: En plus de leurs vacances prévues à votre convention collective?

M. Brosseau: En plus des vacances. Les employés recevaient, disons, deux paies. Ils recevaient une paie de vacances de la commission et une paie de vacances de la ville de Québec.

M. Gendron: Alors, c'est la même chose pour le fonds de retraite, c'est la même chose pour la paie de vacances. Quelle est l'ampleur?

M. Brosseau: Oui. Les employés étaient obligés... Nous, nous calculions selon le régime spécifique qui n'était pas nécessairement légal, c'était une entente que nous avions eue, parce qu'on était assis entre deux chaises. Nous calculions que cela nous coûtait à peu près 25 % de plus que la rémunération horaire de nos employés spécialisés.

M. Gendron: J'ai également une question qui s'adresse à M. Desrosiers ou à quelqu'un d'autre. Moi, je prétends, depuis le début de cette commission sur le projet de loi 31, qu'en règle générale la plupart des municipalités exigent des intéressés, lorsqu'ils font des travaux de construction ou de rénovation, un permis. Est-ce que cette pratique est généralement étendue à toutes les municipalités du Québec en ce qui a trait aux travaux de rénovation? Est-ce que, d'après vous, la plupart des municipalités du Québec exigent que les intéressés viennent quérir auprès la municipalité un permis de rénovation avant de rénover?

M. Desrosiers: La réponse, c'est oui. De façon automatique et systématique.

M. Gendron: Oui. Quelles sont les statis- tiques que vous avez sur ceux que j'appellerais les délinquants? D'après vos statistiques. Vous avez sûrement des statistiques? C'est quoi? 15 %, 30 %, 50 % de délinquants qui ne vont pas se chercher un permis et qui font de la rénovation?

M. Desrosiers: Deux réponses. Dans une petite ville comme ia mienne, c'est difficile d'être délinquant. Tout le monde se connaît et tout le monde connaît ses voisins. Alors, tout le monde se rapporte. Il y a une espèce de... Tout le monde travaille ensemble. Dans une grande ville, je ne sais pas. On va demander à la ville de Québec de répondre.

M. Morency: Dans une ville comme Québec, c'est sûr qu'il y a des délinquants, M. le député. Si on connaissait tous les délinquants, on pourrait vous donner un pourcentage, mais c'est justement pourquoi ils sont délinquants, on ne les connaît pas. Alors, c'est assez difficile de répondre à cette question-là. (18 h 15)

M. Gendron: Oui, je suis d'accord. Mais c'est toujours la même chose. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas de statistiques précises sur quelque chose, quand des gens sont habitués d'oeuvrer dans un domaine, qu'il n'y a pas ce qu'on appelle des éléments d'analyse qui nous permettent d'estimer présomptueusement des chiffres qui, règle générale, sont quand même... À l'aide sociale, mais là je ne veux pas porter de jugement, toutes les statistiques ont confirmé qu'il y a toujours à peu près une fourchette de 6 %, 7 % ou 10 % de fraudeurs. C'est prouvé.

M. Morency: Personnellement, je n'ai pas d'éléments; M. le ministre, pour risquer un chiffre.

M. Desrosiers: Moi, mon directeur général qui était derrière moi est venu m'en donner un et je vous le donne officiellement. Alors, on peut affirmer qu'il y en a 25 %, et la preuve, on peut vous la fournir au moment de la revision du rôte d'évaluation, elle apparaît là.

M. Gendron: C'est cela. Donc, question additionnelle: Est-ce que vous pensez que cela serait intéressant de mettre dans une loi quelconque que toute personne qui veut faire des travaux de rénovation ou de construction ait l'obligation, c'est-à-dire qu'on oblige les municipalités à transmettre cette information à la Commission de la construction du Québec? Est-ce que cela serait un bon moyen pour vous de faire contrôler, d'une certaine façon, ce travail-là pour éviter que le travail au noir ne se propage et aille grandissant?

M. Desrosiers: J'ai envie de vous répondre comme je le sens dans mon coeur: C'est une nouvelle mission que les municipalités auraient?

M. Gendron: Oui.

M. Desrosiers: C'est la première fois que j'en entends parler. J'aimerais consulter l'ensemble des municipalités pour vous dire si elles seraient d'accord ou non. Je ne vous répondrai pas sur cela aujourd'hui.

M. Morency: On ajouterait que c'est une chose qui est déjà publique, M. le député. C'est déjà public parce que les permis de construction, c'est public, particulièrement à la ville de Québec. Tous les permis passent à la Commission d'urbanisme. Seule la ville de Québec a une commission d'urbanisme, mais, chez nous, c'est cela.

M. Gendron: Que je sache, il n'y a pas de disposition qui vous oblige comme ville de Québec à faire connaître les informations dont vous disposez sur les permis de rénovation.

M. Morency: Non, mais c'est déjà public par le fait même.

M. Gendron: Oui.

Une voix: Un mois après.

M. Desrosiers: Cela veut dire qu'au lieu de nous demander de les produire, ceux qui voudraient connaître la nature de ces informations pourraient venir à l'hôtel de ville et s'en enquérir. Ils auraient la liste, parce que la liste est produite à chaque séance du conseil, des nouvelles constructions, des nouvelles réparations, des nouvelles additions, parce que, pour nous, notre source de financement, c'est le rôle d'évaluation.

M. Morency: À Québec, c'est même toutes les semaines, M. le député, parce que la Commission d'urbanisme siège tous les mardis après-midi. C'est automatique, il y a des procès-verbaux et tout cela. Ce sont des chiffres qui sont disponibles, c'est public. Tout le monde peut avoir cela.

M. Gendron: Une dernière question de fond. Quand on lit votre mémoire, vous dites que dans le fond c'est le contribuable qui serait gagnant dans la perspective où vous seriez soustraits de l'application du décret, parce qu'il y aurait des coûts moindres. Cela permettrait aux municipalités de ne pas être à cheval sur deux régimes dans bien des cas, en particulier à la ville de Montréal. Voici la question que je me pose. J'essaie d'analyser pourquoi les centrales syndicales - je vais m'exprimer comme cela - ou les intéressés, dans le secteur de la construction, que ce soit la CSN, la CSD, la FTQ, que ce soient l'association des entrepreneurs et l'autre groupe syndiqué de M. Pouliot dont j'oublie le nom, le Conseil provincial des métiers de la construction, et tous les autres... J'essaie de voir. Est-ce que les municipalités, officiellement, comme union, auraient fait des représentations assez systématiques auprès de ces organismes-là pour qu'elles-mêmes en viennent à convenir de la logique et du bien-fondé de votre demande, si, effectivement, le contribuable est gagnant et qu'il n'y a pas véritablement d'impact pour leur clientèle, puisque vous m'avez dit que c'est dans le monde municipal, et je pense que vous avez raison statistiquement parlant, que le niveau de syndicalisation est le plus élevé pour les employés qui font ce type de travail par rapport à l'industrie de la construction? Je veux savoir quelles sortes de représentations vous avez faites auprès de ce monde-là.

M. Desrosiers: II y en a eu plusieurs, il y en aura toujours et je ne pense pas qu'on doive en dresser la liste. Ce qui me parait important dans la réponse qu'on doit vous donner, c'est que, même si nos propres travailleurs, à l'unité... Un travailleur qui a bénéficié du double régime n'a pas porté plainte nulle part, ni ici, ni devant nous. Vous comprenez bien que tout ce beau monde a certaine satisfaction à se voir agir puis à se voir faire. C'est quand le bât blesse que, là, on prétend qu'on devrait faire des correctifs. Ce qu'on veut bien affirmer, et je voudrais que ce soit très clair, c'est qu'en 1968 on a adopté une loi comme gouvernement pour des raisons très précises et on ne dénie pas cela, on trouve que c'est bien, mais en cours de route on s'est rendu compte qu'il fallait faire des exclusions: une première en 1970 pour nous, une deuxième en 1979 pour vous, le gouvernement, et vous vous apprêtez à en faire une troisième et on en demande une quatrième. On poursuit deux finalités différentes. Je ne sais pas qui pourra nous expliquer et expliquer à la population du Québec qu'on peut, en même temps, marier la carpe et le lapin, être l'opposition et le pouvoir. Je ne pense pas qu'on puisse faire ces deux choses en même temps. On assujettit des travailleurs à une double méthode d'opération. Cela nous crée un régime difficile à contrôler. Cela crée des insatisfactions chez tout ce beau monde. Seul celui qui ne se plaint pas en retire les avantages. Tous les autres voudraient qu'au moins la situation soit claire. C'est cela qu'on demande, de clarifier les termes et de clarifier l'application, uniquement cela.

M. Gendron: D'accord. Sur le projet de loi 31, parce que cela ne fait pas partie de votre mémoire, vous n'avez pas émis d'opinion. Quelle est votre opinion sur le projet de loi 31 ?

M. Desrosiers: C'est sûr que, quand on vient en commission parlementaire, il faut s'attendre à se faire poser des questions comme cela. Cela donne le goût un jour, au lieu d'être assis ici, d'être assis là-bas pour poser les mêmes questions et voir quelles réponses on

donnerait. Vous comprenez bien, vu le temps que j'ai - j'espère que mon temps est pas mal écoulé... Le président va m'ôter la parole et vous n'aurez jamais la réponse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Quand même, M. Desrosiers, vous me permettrez de vous dire ceci en conclusion: Ce n'est pas parce que j'avais le goût de vous poser cette question, c'est parce que c'est le sujet pour lequel on est convoqué comme parlementaires. Que je sache, la commission de l'économie et du travail est censée étudier le projet de loi 31. Je respecte beaucoup votre point de vue de profiter du projet de loi 31 pour nous dire: Nous autres, dans le fond le projet de loi 31, c'est de vos affaires, on ne veut pas s'occuper de cela. Mais, profitez-en donc, parce que le projet de loi 31 touche à un domaine où on pourrait régler notre problème, pour exclure complément les municipalités du Québec de ce champ.

Vous ne m'en voudrez sûrement pas de dire comme parlementaire que je n'aurais pas détesté avoir l'avis de l'Union des municipalités du Québec sur le projet lui-même, au delà de la problématique que vous avez soulevée, avec raison d'ailleurs. Vous avez bien fait de vous situer par rapport au projet de loi 31, en égard à votre demande traditionnelle. Mais, cela ne me dit pas ce que l'Union des municipalités du Québec pense du projet de loi 31.

M. Morency: Pour la ville de Québec, je vais vous référer pour notre avant-propos pour obtenir réponse à cette question.

M. Gendron: Dans votre mémoire à vous, de la ville de Québec.

M. Morency: Oui.

M. Gendron: Je vais le lire. Ce n'est pas parce que cela ne vous affecte pas directement que vous ne pouvez pas avoir un avis sur quelque chose.

M. Cannon: J'aurais une petite question.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de La Peltrie.

M. Cannon: Oui, merci, M. le Président. Pour suivre un peu la même veine que le critique de l'Opposition, ma question s'adresse à M. Morency. Vous nous avez référés à votre position dans l'avant-propos; malheureusement, le temps ne nous a pas permis de lire votre mémoire. Ma première question est de savoir si, pour l'essentiel, votre mémoire regroupe des recommandations qui sont contenues dans le mémoire que M. Desrosiers nous a lu. Est-ce à peu près la même chose pour l'essentiel ou est-ce qu'il y a des nuances ou des différences?

M. Morency: C'est à peu près la même chose, comme je l'ai indiqué tout à l'heure à Mme la présidente, puisqu'on appuie le mémoire de l'Union des municipalités. On fait état de notre demande de 1986 et de notre seconde demande. On nous avait dit à ce moment-là que c'était à l'étude au ministère. Pour la deuxième demande, le ministre des Affaires municipales nous a informé que cela faisait l'objet d'une étude. Dans le mémoire, on fait état de la régie et que par la loi... Ce sont les mêmes employés qui travaillent à des travaux d'entretien et de réparation et à des travaux de construction. Ce sont les mêmes employés qui travaillent. Lorsqu'ils travaillent dans un champ d'action, ils ne seraient pas assujettis et, lorsqu'ils travaillent dans un autre champ d'action, ils le seraient, ce qui dénote une certaine ambiguïté, vous en conviendrez. Ensuite, on note aussi qu'il est fait abstraction des réseaux de l'éducation et des affaires sociales. Une chose importante aussi, une municipalité ne peut pas et ne doit pas être considérée comme un employeur professionnel au sens de la loi. C'est aussi expliqué.

Le mémoire est très court. Nous l'avons fait très court parce que nous avions pris connaissance du mémoire de l'Union des municipalités auparavant et que nous ne voulions tout simplement pas répéter inutilement des choses qui avaient déjà été dites. L'essentiel est dans le mémoire.

M. Cannon: Au moment de l'échange que vous avez eu avec le ministre plus tôt, vous avez indiqué qu'à la ville de Québec il y avait 90 employés...

M. Morency: Spécialisés.

M. Cannon: ...spécialisés et qu'il y avait risque d'abolition de 50 postes.

M. Morency: 50 %.

M. Cannon: Voulez-vous me précisez cette proposition?

M. Morency: Bien, si nous devons donner tous ces travaux de restauration et de rénovation par contrats, nécessairement, le nombre de postes, que nous avons actuellement va diminuer. Comme on ne peut pas licencier, on devra probablement recycler ces employés, mais on ne renouvellera pas les postes au fur et à mesure que ces postes, soit par décès ou par prise de retraite, seront libres. Les postes seront abolis, tout simplement. Cela prendra je ne sais combien de temps, mais on en viendra là.

M. Cannon: Bon. De là la question que je vous pose sur votre état d'âme, à vous qui venez de la ville de Québec et qui êtes membre de

l'exécutif: Qu'est-ce que vous pensez du projet de loi 31?

M. Morency: Je n'ai pas d'opinion à vous donner sur le projet de loi 31 lui-même. D'abord, parce que je n'en ai pas pris connaissance au complet, première raison. Je serais pas mal irresponsable de donner une opinion sur un projet de loi que je n'ai pas lu. Le seul jet du projet de loi lui-même qui nous intéresse, c'est qu'on en profite aujourd'hui pour dire: Vous avez un projet de loi - c'est pour cela que je vous référais à l'avant-propos - et on trouve que l'occasion est excellente pour revenir à la charge une troisième fois avec des choses qu'on a déjà demandées et très bien expliquées, et qui ont été encore plus approfondies dans le mémoire qui a été présenté aujourd'hui par l'Union des municipalités du Québec.

M. Cannon: J'écoute le critique de l'Opposition qui dit que le projet de loi ne vaut pas cinq cennes. Mais je crois, avec les économies d'échelle qui pourront être réalisées, qu'entre les mains des consommateurs cela va valoir probablement plus que cinq cennes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Je voyais le député de La Peltrie qui s'inquiétait. De savoir si j'avais salué les gens de l'Union des municipalités du Québec. Je l'ai informé que je l'avais fait avant le début de la commission parlementaire. Je pourrais leur réitérer des mots de bienvenue et leur dire que j'ai plaisir à les rencontrer. Souvent, en les entendant répondre aux questions, je me suis senti l'obligation de répondre à leur place. Il n'y a pas tellement longtemps, on faisait partie du même monde.

Il y a un point que je voudrais souligner, sans vous demander votre appréciation du projet de loi 31 comme tel. Il y a un endroit, à la page 11, où vous dites: "Nous désirons souligner que nos représentations visent, en premier lieu, à permettre aux municipalités d'entretenir les immeubles dont elles sont propriétaires, de les transformer et les rénover selon l'évolution de leurs besoins, qu'il s'agisse d'une bibliothèque, d'un aréna, garage, hôtel de ville ou d'un centre administratif." Il y a des bâtisses qui sont assez grosses là-dedans pour justifier des travaux assez importants. Je me souviens, et je ne le vois pas dans votre mémoire, que les municipalités, les petites surtout, disaient: Pourquoi n'aurait-on pas le droit de faire de la petite construction, par exemple, bâtir un centre de loisirs en bas de 100 000 $, quand il y a des subventions gouvernementales? Vous n'y faites pas allusion du tout. Je me souviens que les municipalités disaient dans le temps: Pourquoi ne nous permet-on pas de le faire nous-mêmes? Nous n'avons pas les moyens. Si c'est 100 000 $ pour le bâtir, nous ne le ferons pas, mais si nous pouvions le faire nous-mêmes, nous paierions un prix normal, plus que le prix ordinaire, et nous pourrions le faire. Mais nous ne sommes pas capables de rencontrer les critères de la construction. Vous autres, vous n'y faites pas allusion dans le mémoire, mais je suis conscient qu'il y a des travaux que vous pouvez faire qui sont beaucoup plus élevés que 100 000 $.

M. Desrosiers: Si M. le président le permet, je ne répondrai pas à la question. Vous nous demandez si la possibilité de réaliser des travaux de construction de petite ampleur nous intéresserait. Je pense que ce serait une erreur que de répondre a la question. Je vais vous répondre autrement. Ce qu'on veut faire corriger, c'est quelque chose qui n'est pas intelligent. Je m'excuse, mais ce n'est pas intelligent. Ce n'est pas possible qu'on ait adopté une loi en 1968 et qu'on se rende compte 20 ans plus tard que le bât blesse à plusieurs endroits, à tel point qu'on a fait des exclusions pour respecter, selon le jugement de la Cour suprême, nos lois de telle façon qu'on puisse en avoir au meilleur coût possible, à la plus grande rentabilité, que cela coûte le moins cher possible aux contribuables, qu'on respecte nos conventions collectives, à condition qu'une fois pour toutes on dise c'est quoi de la rénovation, c'est quoi de la réparation, c'est quoi de l'entretien et c'est quoi de la construction. On sait que tout cela entre dans le grand chapitre de la construction. Alors, vous me demandez si l'union serait intéressée à faire de la construction, si petite soit-elle. Le péché véniel est péché pareil. Ce n'est pas cela qu'on demande. On demande d'avoir la conscience en paix, de pouvoir, dans nos bâtisses, dans nos immeubles, et seulement là, faire l'entretien, ce pourquoi les gens nous ont élus et ce pourquoi on a accepté le pacte de la fiscalité, a savoir qu'on ira chercher dans leurs poches seulement l'argent qu'il faudra pour payer les services qu'ils nous demandent. C'est dans cet esprit que le mémoire a été présenté. C'est aussi dans cet esprit qu'on demande à notre ministre de bien tenir compte de la représentation qu'on fait et non pas d'obtenir un laissez-passer pour de petites constructions, si bien fondées soient-elles quant à la possibilité d'économie, etc. Antérieurement à des demandes de ce genre que nous ne faisons pas, nous disons: Corrigeons une situation qui mérite d'être corrigée pour plaire à tout le monde. C'est dans ce sens que notre intervention est faite.

M. Dufour: Vous aurez remarqué que l'intervenant précédent disait: Ce qui nous fait peur, c'est le mot rénovation. On peut admettre un peu de réparation et d'entretien. L'intervenant précédent, le groupe qui est venu nous rencontrer avant, disait que dans la rénovation on peut inclure un paquet d'affaires. Je ne sais

pas si on est capable de l'écrire très bien dans la loi. C'est peut-être compliqué. C'est fini, notre temps?

Le Président (M. Théorêt): Finissez votre question.

M. Dufour: Je me demandais si, par rapport à cela, dans le mot rénovation, on ne pourrait pas dire qu'on agrandit une bâtisse. Si la bâtisse appartient à la municipalité, elle pourrait l'agrandir sans considérer que c'est une construction.

M. Desrosiers: M. le Président, je ne veux pas faire une boutade. Ce n'est pas parce qu'on n'est pas fort en français qu'on n'a pas besoin d'un bon dictionnaire pour définir la rénovation et qu'on doit laisser une loi qui ne donne pas satisfaction aux gens. Je pense qu'on devrait profiter de l'occasion pour la corriger. S'il faut faire de la sémantique, vous la ferez. On vous fait confiance.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député de Jonquière. J'aurais seulement une courte question à poser aux représentants de la ville de Québec. Je n'ai pas bien saisi comment vous pouvez arriver à dire qu'il y aura une possibilité de 50 pertes d'emploi chez vous. Vous avez actuellement 90 employés...

M. Brosseau: Spécialisés.

Le Président (M. Théorêt): ...spécialisés dans l'entretien, la rénovation et la réparation. Je ne vois rien, à moins que je ne me trompe, dans le projet de loi 31 qui change le statut de ces 90 employés. Vous dites, par ailleurs, si le projet de loi 31 était adopté, qu'il y aurait une possibilité de perdre 50 emplois. Comment pouvez-vous expliquer cela?

M. Morency: Ce n'est pas le projet de loi lui-même, M. le Président, c'est l'application de la loi par la suite. Comme je l'expliquais tantôt au député, M. Cannon, l'application va nous obliger par la suite à donner plus de contrats à l'extérieur. Les postes ne seront pas renouvelés. On ne peut congédier personne à la ville de Québec. Je pense que M. Brosseau, qui est un ancien directeur du service du personnel, peut vous donner l'explication dans des termes plus techniques.

M. Brosseau: M. le Président, depuis 1986, depuis la décision de la Cour suprême, si on appliquait la loi strictement, nous prétendons que 50 % de nos employés spécialisés devraient cesser de faire ce travail.

La semaine dernière, nous avons reçu un avis de contravention du ministère de la Justice, parce que deux de nos employés sont allés mettre du goudron sur une toiture. Un inspecteur est passé et leur a dit: Vous n'avez pas le droit de faire cela, vous êtes assujettis au décret de la construction. Il y avait un genre de moratoire jusqu'à l'an dernier, étant donné que le débat était devant les tribunaux et est monté jusqu'à la Cour suprême. À l'heure actuelle, si on change une serrure de porte où il y avait un baril d'un pouce et demi, si un de nos employés le change par un baril de deux pouces, c'est de la construction, à ce moment-là parce qu'on modifie une porte. Si nos employés ne peuvent plus faire cela, il faudra soit les payer selon le décret de l'industrie de la construction ou faire appel à un entrepreneur de l'extérieur.

Le Président (M. Théorêt): Donc, si je saisis bien, le projet de loi 31 n'a rien à voir avec le fait que, déjà, vous avez des problèmes à cause du jugement de la Cour suprême.

M. Brosseau: Nous avons des problèmes à l'heure actuelle.

Le Président (M. Théorêt): Ce n'est pas le projet de loi 31.

M. Brosseau: Cela ne modifie rien à la situation actuelle.

M. Morency: C'est ce qu'on demande de corriger.

Le Président (M. Théorêt): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour moi, cela va. Les explications, sous réserve des chiffres que vous allez nous fournir et peut-être sous réserve de la réponse que vous avez...

M. Gendron: Est-ce que vous l'avez?

Mme Charest: Oui, je peux vous la donner immédiatement. La masse salariale de 1987 pour 12 218 employés était de 569 800 000 $. Pour les cols bleus, elle était de 126 000 000 $ à Montréal.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Théorêt): Mesdames, messieurs, nous vous remercions de votre présence devant les membres de la commission. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 36)

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Théorêt): S'il vous plaît, à l'ordre!

La commission de l'économie et du travail

reprend ses travaux pour procéder aux consultations particulières sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Nous recevons maintenant les représentants de la Centrale des syndicats démocratiques avec à sa tête, bien sûr, M. Jean-Paul Hétu. M. Hétu, nous vous souhaitons la plus cordiale des bienvenues et vous demandons dans un premier temps de nous présenter les gens qui vous accompagnent.

CSD-Construction

M. Hétu (Jean-Paul): Avec plaisir, M. ie Président. Tout d'abord, à commencer par ma gauche, il y a M. Ernest Lévesque, qui est le secrétaire du syndicat provincial CSD-Construction, M. Raymond Lortie, qui est le président de ce syndicat, M. Pierre Yvon Ouellet qui est conseiller technique, M. Aimas Tremblay, qui est premier vice-président et qui réside à Jonquière et ensuite, à l'arrière, il y a d'autres membres du comité exécutif, dont M. Pierre Beauregard, qui est deuxième vice-président, M. Gérard Néron, troisième vice-président, M. Réal Deschênes, quatrième vice-président, et M. Alain Pépin, qui est le trésorier. Il faut toujours emmener la finance avec soi. Il y a aussi une vingtaine d'autres représentants du syndicat et si nécessaire, en temps et lieu, M. le ministre, on pourra grossir la délégation, si jamais vous ne donnez pas suite à nos revendications.

Le Président (M. Théorêt): Alors, M. le président, nous vous remercions. Étant donné que vous êtes un habitué de ces commissions parlementaires, je tiens pour acquis que vous savez le temps qui vous est imparti pour la présentation et pour les formations politiques. Je vous cède donc immédiatement la parole.

M. Hétu (Jean-Paul): Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, vous avez tous copie de notre mémoire que nous avons fait circuler à compter de ce matin.

Tout d'abord, en premier lieu, j'aimerais exposer de façon claire et non équivoque la position de la CSD et du syndicat de la construction affilié à la CSD. Tel que formulé, tel que présenté, votre projet de loi, M. ie ministre, est inacceptable. Nous ne pouvons pas l'accepter tel que libellé. Pour qu'on vous accorde un appui, il faudrait qu'il y ait des changements substantiels, dans son essence même. Les changements importants que nous aimerions voir, on pourra les expliquer plus en détail, mais, si on se réfère de façon spécifique à ce que l'objet de la loi recherche, c'est d'exclure un certain nombre d'activités de la loi sur les relations du travail dans la construction. Notre position est la suivante dans son essence, clairement expliquée, tout au moins on l'espère: que la rénovation, l'entretien, la réparation et la modification soient exécutés dans l'unité de logement du propriétaire occupant. Bien sûr, avec les autres éléments de l'article 4, à ce moment-là, nous serions d'accord sur ce point de base.

Mais, deuxièmement, on ajoute, quant aux personnes, à la main-d'oeuvre qui serait chargée d'assumer des responsabilités - là-dessus je vais être très clair aussi - :que les artisans, tels que reconnus et définis dans une des lois des relations du travail, soient exclus du champ de juridiction de l'industrie de la construction, de telle sorte que ces artisans assument les responsabilités inhérentes aux travaux à faire, commandés par le propriétaire occupant.

Maintenant, après avoir exposé l'essence même de notre proposition, j'aimerais aborder point par point les différents éléments que contient notre position. Je tiens à vous dire, M. le ministre, M. le Président, MM. les députés, que ce document que vous avez a été préparé par les représentants attitrés, officiels du syndicat, qui sont de la construction. Par conséquent, ils connaissent très bien de quoi il s'agit dans la proposition gouvernementale.

Dans un premier temps, M. le ministre, on a un reproche à vous faire et vous allez très bien le comprendre. Ce reproche tient au fait que, depuis six mois, c'est la cinquième fois que des changements sont apportés à la loi ou au décret. Je n'ai pas besoin de vous rappeler les différents éléments de modification. Cependant, ce que nous en dégageons, c'est que nous nous apercevons, M. le ministre, que ou bien vous allez à la pièce, ce qui est évident, ou bien vous improvisez. Mais, dans le fond, on veut vous mettre en garde, parce que vous êtes en train - et vos motifs sont sans aucun doute louables - de vous embarquer dans un rouage, une sorte de cercle vicieux en vertu duquel vous allez travailler à répondre à un certain nombre de problèmes soulevés à la fois par votre parti ou le gouvernement ou par les parties. Mais ce qu'on trouve plus grave encore, c'est que, par définition, vous prenez partie pour les représentants des unions d'origine américaine. Le gouvernement du Québec est en train - dans le débat de la langue, peut-être que cela nous surprend moins - de reconnaître la culture, les pratiques qui ont été inventées aux États-Unis et répétées ici. Nous nous référons en particulier, même si on s'en défend, à la FTQ et à TINTER. Parfois, à TINTER, on prétend qu'ils sont peut-être trop près du Parti libéral. C'est pourquoi, peut-être, ils vous appuient trop. Enfin, ce sera à vous de l'expliciter.

Responsabilité de la CCQ dans la préparation des règlements. Sur ce point, sur le fond, on reconnaît votre objectif. Quant à la forme de réalisation, on prétend que, ce faisant, vous maintenez et accentuez une discrimination à notre égard. On est absent du conseil d'admi-

nistration de la CCQ. On ne peut pas intervenir à ce conseil par le biais des deux membres recommandés par le ministre, à cause de l'implication partisane de personnes qui occupent actuellement ces sièges. Il y a même un de ces représentants, pour ne pas le nommer, le représentant de la CSN, qui aurait dit en cette Chambre que vous ne lui donnez pas tellement de mandats. Par conséquent, il occupe tout le siège de la CSN et son objet, bien sûr, est de nous écarter, de nous empêcher d'apporter une contribution qu'on estime très importante au sein de ce conseil. Bien sûr, vous allez dire que ce n'est pas partisan de notre part. Cela ne l'est pas. On prétend que vous nous avez enlevé un droit qu'on nous a de tout temps, en particulier, reconnu parce que nous sommes suffisamment représentatifs même si vous continuez toujours à maintenir la proportionnalité, comme si la minorité n'avait pas le droit de parole et n'avait pas le droit de prendre des décisions et des responsabilités. C'est pour cela que nous ne pouvons pas accepter cette vision. Cela nous surprend de votre part.

Autre point, les pouvoirs que vous consentez à la CCQ. On appuie ces modifications. Par ailleurs, j'y reviendrai pour parler au nom du syndicat et de la CSD des questions relatives à la tâche de l'inspecteur, à la jurisprudence et aux amendes.

On arrive au coeur, sans aucun doute, du projet de loi. En premier lieu, nous voulons vous mettre en garde, nous assurer de certains termes utilisés. Ainsi, on parie de travaux exécutés aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique. Dans le cas d'un individu propriétaire de plusieurs unités de logements, nous demandons que l'exclusion s'applique uniquement à l'unité de logement occupée par ledit propriétaire. Ensuite, dans le cas de la construction résidentielle, nos représentants ont soulevé un problème à partir de leur expérience et de la pratique. Il faut prévoir qu'il y a un risque que la loi soit contournée de la façon suivante: lors d'une première phase de travaux, on construira les structures minimales et on laissera s'écouler un certain temps ou encore le promoteur vendra au propriétaire une maison "semi-finie". Ensuite, on terminera les travaux - par exemple, divisions intérieures et finition - en dehors du champ d'application en prétextant qu'il s'agit de modification, d'entretien ou de rénovation. Il faudrait que l'on approfondisse cette question et que l'on trouve un correctif. Peut-être ce correctif se trouve-t-il relativement à l'âge de la maison? On pourra y revenir.

Comme seconde question, nous demandons au législateur de profiter du projet de loi pour clarifier l'interprétation donnée aux exclusions actuelles, en particulier au terme de salarié permanent, tel qu'on le définit aux paragraphes 2° et 8° de l'article 19 de la loi. Nous estimons que cela donne lieu à des interprétations qui violent véritablement l'esprit de la loi. Dans plusieurs cas, notamment dans ces deux articles, on qualifie le salarié de permanent par le fait qu'il est un individu à embaucher. Les deux articles se réfèrent à ce concept-là. Il y a là un problème majeur. Comment cela? Parce que les travailleurs de la construction prétendent qu'ils se font voler leur job par des travailleurs embauchés par des compagnies qui font, par exemple, des extensions à leurs établissements. Elles embauchent des travailleurs qui sont nouveaux et, là, on dit que, parce qu'on les embauche sur le champ, les travaux sont faits de façon habituelle. Cela peut susciter des rixes, des bagarres et des grèves sauvages. On en a connu il n'y a pas longtemps et, si on ne fait pas attention, si on ne corrige pas cette définition-là, on peut en avoir dans l'avenir et vous serez appelé encore, M. le ministre, à intervenir pour résoudre ces problèmes pour avoir la paix sociale.

Alors, ce que nous proposons, c'est qu'il y ait une définition plus précise de salarié permanent. À la CSD-Construction, on prétend qu'un salarié permanent est un individu qui a acquis un droit d'ancienneté, par exemple, en vertu d'une convention collective. S'il est vraiment à l'emploi de la compagnie qui l'embauche, on n'a qu'à vérifier s'il a un droit d'acquis ou s'il a un droit d'acquis en vertu du préavis selon l'article 82 de la loi sur les normes.

Comme troisième point, la CSD-Construction considère que l'exclusion proposée soulève le problème de base des travailleurs de la construction. Il s'agit de l'insécurité des travailleurs de la construction: insécurité à l'égard de l'emploi, insécurité vis-à-vis du revenu. Évidemment, il y a la proposition que nous vous avons faite pour corriger celle de l'exclusion. On vous a dit que ce serait acceptable si vous le faisiez dans le sens dont on a parlé dans l'introduction et que l'on explique clairement dans notre document. Mais tout le monde sait, ou il faut le rappeler, ou il faut le comprendre, que les travailleurs de l'industrie vivent un problème majeur d'insécurité d'ouvrage et de salaire. Les conséquences de cette insécurité sont nombreuses: la main-d'oeuvre, il va de soi, est instable et le travail clandestin se développe à cause de cette insécurité. Il peut y avoir une des sources dans l'exclusion que vous voulez faire, mais le fondement du travail clandestin c'est l'insécurité: je travaille un peu, je n'ai pas d'ouvrage, je travaille un peu plus, etc. Ce n'est pas tellement, à l'origine, l'appât du gain comme la nécessité de maintenir, c'est bien légitime, un niveau de vie normal.

Dans le fond, on pense, M. le ministre, que vous vous attaquez aux conséquences: on légalise certaines formes de travail au noir; par ailleurs, on se donne de nouveaux moyens pour mieux combattre d'autres formes de travail au noir. On pourrait vous donner des exemples de cela: manque d'heures, bons d'achat. Il faut qu'on

trouve des solutions concrètes à ces formes, aussi, qui sont néfastes et nuisibles pour les travailleurs.

La CSD-Construction croit que cette approche est incomplète et est en ce sens que nous souhaitons une réforme plus en profondeur. Voici les principaux éléments de cette réforme.

Pour combattre l'instabilité cyclique de l'industrie et des travailleurs, l'État doit cesser d'utiliser la construction comme moteur économique. L'État doit plutôt s'impliquer dans la stabilisation économique de l'industrie elle-même, en mettant de l'avant la planification des travaux. L'État possède un tel pouvoir, attendu que son rôle de donneur d'ouvrage est d'environ 40 % des investissements. L'insécurité vient aussi des risques élevés en matière d'accidents de travail. On n'a pas besoin d'insister là-dessus, c'est tellement évident et grave. L'insécurité vient aussi de certaines pratiques du milieu. L'État doit, notamment, favoriser la mise en application du droit d'ancienneté. On a fait une proposition relative, par exemple, à la loi sur les normes. L'insécurité provient, en outre, de la mobilité professionnelle insuffisante, à cause d'un manque de formation et de perfectionnement des travailleurs. Sur ce point, le ministre du Travail a agi, en décembre 1986, par l'adoption du projet de loi 119. Actuellement, on sait que le dossier est fortement compromis. Il faut le relancer en s'occupant notamment de l'accès au nouveau régime pour les travailleurs en place.

Statut et obligations de l'artisan. Je pense qu'encore là on a été très clairs. Alors, je n'y reviendrai pas. Nous demandons que le statut de l'artisan soit banni de l'industrie et que les artisans soient ceux qui agissent dans le cadre des objectifs que nous proposons en amendement à votre projet de loi.

Le projet de loi suggère un accroissement significatif des amendes en cas de violation de la loi ou du décret. La CSD-Construction appuie ces modifications, mais croit qu'il faut les encadrer par les trois mesures suivantes.

En premier lieu, il faut s'arrêter au travail des inspecteurs. Avec le projet de loi, ceux-ci - pour nous, c'est évident - deviendront des policiers de la construction; la situation actuelle l'exige. Mais, en matière de gestion des ressources humaines, il serait essentiel que la CCQ - on est heureux de savoir qu'il y a des représentants de la CCQ ici - prépare, à l'intention des inspecteurs, un pian d'action visant à améliorer et à adapter les méthodes de travail ainsi qu'à développer l'éthique professionnelle. Nous insistons, entre autres, sur ce dernier point, parce qu'on sait qu'il existe, hélas! - et il faut corriger cela - des pots-de-vin qui sont consentis. Bref, le projet de loi repose sur la qualité du travail des inspecteurs et la commission a la responsabilité de donner aux inspecteurs la formation, le perfectionnement et les outils nécessaires pour accomplir leur travail.

Deuxièmement, il y a un problème de jurisprudence. Actuellement, les juges ont tendance à donner raison à l'accusé, non pas parce que l'infraction n'est pas fondée, mais parce qu'ils estiment que l'accusé a été victime d'excès de zèle ou de harcèlement de la part des inspecteurs. On trouve qu'il devrait y avoir là une modification quant aux attitudes de ces honorables juges.

Enfin, en plus du système d'amendes, la CSD-Construction demande que les inspecteurs aient le pouvoir de suspendre des travaux et d'apposer des scellés dans le même esprit que ce pouvoir est accordé actuellement aux inspecteurs de la CSST.

Transférabilité des régimes complémentaires d'avantages sociaux. L'article 12 du projet fait un ajout à l'article 92 de la loi afin de permettre la transférabilité des régimes complémentaires d'avantages sociaux. En apparence, il s'agit d'une modification technique, mais il y a anguille sous roche. Cette modification démontre qu'on est en train de développer, dans l'industrie, une série de régimes complémentaires qui s'ajoutent aux régimes supplémentaires. La CSD-Construction ne s'oppose pas - et cela, c'est bien important - au principe de la possibilité technique de transférer les régimes complémentaires, mais tient à vous alerter, M. le ministre, au sujet de la multiplication de ces régimes. (20 h 30)

Les régimes supplémentaires s'appliquent de manière universelle, cela, on le sait, sans distinction pour le métier ou l'occupation. Mais, par contre, les régimes complémentaires sont négociés métier par métier. Ils créent, quant à nous, de la discrimination systématique entre les travailleurs et freinent leur mobilité professionnelle. Cette situation est attribuable à plusieurs facteurs. En particulier, on sait que les associations syndicales majoritaires sont actuellement structurées par métiers. L'essentiel du pouvoir financier et politique appartient au local d'une union, chacun des locaux étant identifié à un métier. On n'a pas besoin de les énumérer, ils sont nombreux. Ces structures syndicales sont propres aux organisations d'origine américaine, telles que la FTQ et TINTER. Ces structures sont bien sûr décentralisées, ce qui cause de fortes luttes internes de pouvoir. D'ailleurs, l'analyse des causes qui défilent devant le conseil arbitral en témoigne en ce qui concerne les conflits de juridiction. On retrouve aussi des tensions sur les chantiers par les représentants des locaux, dans le dossier de la formation professionnelle où on veut tout confier aux sous-comités de métier, dans les instances telles que le comité mixte, etc.

Dieu sait s'il y a une évolution technologique réelle dans l'industrie de la construction! La position de fond de la CSD, c'est: qu'on restructure la formation professionnelle sur la base des familles de métiers. Aussi, qu'on raisonne dans l'ensemble du décret en tenant compte de cette réalité impérative. Dieu sait si

l'évolution technologique doit continuer à s'accentuer dans la construction! Mais, si on prend toujours des positions pour favoriser ces unions de métiers ou, par ricochet, des réalités qui ne correspondent plus à la réalité moderne de l'industrie de la construction, on va avoir des problèmes très sérieux.

Le Président (M. Théorêt): M. Hétu. M. Hétu (Jean-Paul): Oui.

Le Président (M. Théorêt): Je dois vous rappeler que votre temps pour la présentation de votre mémoire est déjà écoulé, malheureusement. Je vous demande si vous préférez continuer, quitte à prendre ce temps à même les formations politiques.

M. Hétu (Jean-Paul): J'étais pratiquement rendu à la conclusion.

Le Président (M. Théorêt): Allez-y!

M. Hétu (Jean-Paul): Mais, avant de la tirer, il y a un petit point qui concerne la formation. Aujourd'hui, par le projet de loi, on va transférer de la main-d'oeuvre qui va s'occuper des travaux dont on veut qu'elle s'occupe. Il y a des gens qualifiés, mais, dans cinq ans ou dans dix ans, que va-t-il se passer? On va avoir un problème de qualité. Les consommateurs vont être mal servis. Alors, il est vraiment important qu'on puisse agir non pas tellement sur une base volontaire, mais pour assurer la formation des gens.

En conclusion, notre position est globale. On ne peut pas prendre un élément et dire: Voici ce que la CSD et le syndicat de la construction dit. Elle est globale, elle fait partie d'un tout.

Maintenant, je suis prêt à vous écouter et je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Théorêt): M. le Président, on vous remercie et je cède immédiatement la parole au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. M. le Président, je tiens à remercier la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD-Construction particulièrement, à saluer son président, M. Lortie, et à souligner que la présence de M. Hétu indique bien également l'importance du projet de loi et l'importance qu'il accorde, comme président de la centrale, au dossier de la construction. La qualité du mémoire présenté nous indique également que vous avez réussi à résumer en quelques pages votre vécu quotidien et à faire part au gouvernement des appréhensions qui sont les appréhensions, comme vous l'avez indiqué, de vos membres. Vous n'avez pas été tendres à l'endroit du ministre du Travail, l'accusant d'être trop proche, dans un premier temps, du Conseil provincial des métiers de la construction (International), dans un deuxième temps, de la FTQ-Construction et, dans un troisième temps, de la CSN-Construction. J'ose espérer que les prochains qui comparaîtront ne m'accuseront pas d'être trop proche de la CSD-Construction.

M. Hétu (Jean-Paul): On peut témoigner que ce n'est pas le cas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Hétu (Jean-Paul): Excusez-moi, M. le Président.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Essentiellement, les gens qui vous ont précédés sont tombés d'accord avec l'ensemble des parlementaires membres de la commission pour dire que le travail au noir constitue un fléau, que ce travail au noir dans la construction est présent dans la construction industrielle et commerciale, que ce travail au noir est présent dans une proportion encore plus importante dans la construction domiciliaire et que ce travail au noir est présent d'une façon encore beaucoup plus importante dans tout le secteur de l'entretien, de la réparation, de la rénovation, de la modification.

Ma première question: Est-ce que la CSD-Construction partage cette opinion généralement exprimée par les autres intervenants qui vous ont précédés?

M. Hétu (Jean-Paul): Ne les ayant pas entendus, je ne veux pas prendre en bloc la responsabilité de ce qu'ils ont dit, mais je ne mets pas en doute votre parole. Sans doute avaient-ils des contextes dans lesquels ils ont agi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais...

M. Hétu (Jean-Paul): Je vais répondre de manière claire, je vais être explicite. Disons qu'on croit que votre projet de loi va accroître le travail au noir. C'est ce qu'on croit. Il va accroître le travail au noir, pas par la mesure que vous prenez de le légaliser en l'excluant de la loi. Ce qui était illicite, disons du bras gauche, va devenir licite, mais, devant le ministre du Revenu, on prétend que vous ne réglez rien par cela. Les travailleurs de la construction, chez nous, sont unanimes là-dessus.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne prétends pas, comme ministre du Travail, présenter un projet de loi qui s'attaque à l'aspect fiscal. Certains experts nous disent que, le travail étant légalisé, les individus faisant une activité qui n'est plus clandestine sont raisonnablement plus enclins à produire un rapport d'impôt, mais nous n'avons, comme vous le soulignez, aucune garantie à cet effet-là. Lors-

qu'on parle de travail au noir dans l'industrie de la construction - j'aurais dû vous prévenir - nous nous référons à la définition qu'en a donnée le consensus patronal-syndical dans le rapport Mireault, c'est-à-dire le travail qui est effectué en violation des lois et des règlements qui régissent l'industrie de la construction. On ne fait pas référence au travail au noir au sens de la fiscalité, qui peut inclure le domaine de la construction, mais qui peut également inclure beaucoup d'autres domaines de l'activité économique dans la société québécoise, vous en conviendrez.

Si on limite cela au travail au noir de l'industrie de la construction, j'aimerais avoir l'appréciation que vous avez de votre expérience. Quelle est cette importance du travail au noir dans les chantiers industriels commerciaux? Quelle est cette importance du travail au noir dans la construction domiciliaire? Quelle est cette importance du travail au noir dans le secteur de la rénovation et de la réparation résidentielles?

M. Hétu (Jean-Paul): Disons que vous ne voulez pas modifier l'ensemble de la loi, mais que vous voulez vous limiter à ce dont on parle. Vous voulez limiter et exclure des débats sur le travail au noir: autre que la partie commerciale et industrielle, alors, on va se limiter à la portion que vous voulez couvrir. Son importance actuellement est réelle. C'est quelque chose qui existe. C'est quelque chose qu'à peu près tout le monde, sauf quelques gens vertueux qui ne l'ont pas pratiqué - j'exclus tous les députés et les ministres, c'est certain, - a pratiqué dans la construction d'une remise, par exemple... Je ne sais pas pourquoi vous souriez, je n'en ai aucune idée. Cela s'est pratiqué sur une grande échelle. Mais le syndicat de la construction a évolué depuis la position qu'il avait été donnée et à laquelle vous vous référez. Il a évolué, justement, parce qu'il doit prendre l'homme, le travailleur dans sa totalité. Celui-ci n'est pas seulement quelqu'un qui travaille, c'est aussi quelqu'un qui fait partie d'une société et le syndicat a des obligations à son égard. C'est pourquoi on ne peut absolument pas exclure ce volet qui est propre à l'impôt.

On trouve que la modification, dans le cadre des propositions que nous faisons, si elle était soutenue par cet autre élément, serait, elle, importante. Mais aussi, ce qu'on trouve déplorable, c'est que, par le projet de loi que vous soumettez, vous excluez des catégories de travaux qui vont être exécutés par des personnes. Cependant, vous laissez, et les consommateurs et les travailleurs aux lois du marché, tout simplement. Il reste deux cadres possibles de référence, par exemple, au consommateur ou au travailleur: d'une part, la Loi sur la protection du consommateur, d'autre part, la Loi sur les normes du travail. Encore là, au sujet de la loi sur les normes, on pourrait soulever différents problèmes dans son application car, lorsqu'elle a été conçue, on ne pensait pas à cette catégorie de travailleurs. Il est certain qu'on a défini en termes larges la notion d'employeur. On a défini aussi en termes larges la notion du salarié, parce qu'il y a deux types de catégories. Mais on aurait aimé avoir plus de temps pour y réfléchir, pour tenter de voir comment cela va se vivre de façon concrète. Combien de travailleurs pourront-ils l'utiliser? Ceux qui vont travailler à contrat pour fins de rénovation, de modification, ou je ne sais pas trop encore, d'entretien, etc., est-ce que ce leur sera possible d'y recourir? Pour ce qui est des consommateurs, il y a là toute une problématique qu'il faudrait fouiller. C'est pourquoi on se dit qu'il faudrait peut-être qu'il y ait un cadre, même minimum, un cadre juridique qui régirait cet ensemble. L'un des défauts du projet de loi - je ne parle pas de son intention, de sa formulation - est qu'il ne parle qu'en termes d'exclusion et oublie le cadre, pas un cadre pour réglementer au maximum, parce qu'on a bien lu dans un de vos objectifs que vous voulez déréglementer. La déréglementation ne doit cependant pas brimer des droits, ne doit pas développer par un problème qu'on veut résoudre un autre type de problème d'exploitation qui serait plus grand que celui qu'on veut résoudre, par exemple. C'est notre conception de manière générale par rapport à votre question.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Hétu, je ne rejette pas l'approche sur le plan fiscal. Vous n'êtes pas le premier, non plus, qui la mentionnez devant la commission, mais je pense que d'aucuns ont convenu qu'il est difficile pour le ministre des Finances d'aborder, avec une approche fiscale, une activité qui est illégale. L'activité étant légalisée, cela permet de compléter par d'autres mesures. Il faut commencer par le commencement.

Allons directement au coeur du projet de loi. Une partie du projet de loi avec laquelle vous semblez manifester un certain accord se retrouve dans ce qu'on appelle l'augmentation des pouvoirs et des amendes de la Commission de la construction du Québec, relativement aux contrôles qu'elle effectuera dans les grands chantiers de construction industrielle, commerciale ainsi que dans la construction domiciliaire. Vous semblez avoir des réserves, que d'autres ont émises également, mais que vous reprenez avec une précision qui est nouvelle quant à l'exclusion, quant à cette partie que nous voulons exclure. Vous mentionnez à la page 6 de votre mémoire: "Nous voulons nous assurer des termes utilisés. Ainsi, on parle de travaux exécutés aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles d'une personne physique. Dans le cas d'un individu propriétaire de plusieurs unités de logement, nous demandons que l'exclusion s'applique uniquement à l'unité de logement occupé par ledit propriétaire. Ensuite, dans le

cas de la construction résidentielle, il faut prévoir qu'il y a un risque que la loi soit contournée de la façon suivante: lors d'une première phase de travaux, on construira les structures minimales..."

On sait ce qu'on veut dire: deux problèmes. Pour ne pas que cela arrive, vous suggérez la notion du propriétaire occupant et vous nous mettez en garde contre la construction par étapes.

Je vais vous lancer une invitation. Avez-vous ou vous serait-il possible de nous soumettre un libellé - je sais que vous avez quand même certaines ressources à la CSD - qui pourrait vous garantir que l'intention du gouvernement - qui n'est pas d'en arriver là finalement - se retrouve dans le libellé du texte de loi et qu'il n'y a pas de dérapage possible dans l'application quotidienne, quitte à passer pour un ami de la CSD?

M. Hétu (Jean-Paul): Certainement. On pourra le faire, et avec plaisir à part de cela.

Une voix: II veut vous faire faire son ouvrage.

M. Hétu (Jean-Paul): Pardon?

Une voix: II veut vous faire faire son ouvrage.

M. Hétu (Jean-Paul): Non. Je pense qu'on est capable de le formuler. On l'a déjà fait dans d'autres projets de loi et on s'aperçoit aujourd'hui que les résultats abondent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense qu'on a eu une collaboration du bout des lèvres dans le cadre de la loi 119, laquelle s'est transformée par la suite, parce qu'on partageait les mêmes objectifs. Si nous partageons les mêmes objectifs et que le gouvernement ne vise pas que ces travaux se fassent par étapes, non plus que l'immeuble à logements soit exclu, je pense qu'il y a moyen de trouver une formulation qui sécurise les travailleurs de la construction, tout en permettant au propriétaire occupant d'effectuer ses travaux de rénovation, de réparation, etc., sans être soumis au décret de la construction.

Je vais toucher à un autre point très sensible - le temps me presse - toute la question de l'artisan. C'est un point que vous soulevez et sur lequel vous êtes très fermes. Je n'ai pas la page exacte. Oui, je l'ai. "Nous demandons que le statut d'artisan soit banni de l'industrie de la construction." (20 h 45)

Je pense que c'est assez clair comme demande. Cette demande nous est également adressée par d'autres intervenants. Il y aussi toute la question qui est liée à celle du statut de l'artisan, sort celle de l'entrepreneur spécialisé.

Est-ce que votre revendication vise également la notion d'entrepreneur spécialisé?

Une voix: Le président du syndicat de la construction, M. Lortie, va répondre à cette question.

M. Lortie (Raymond): Pour nous dans la construction, c'est bien clair: il devrait y avoir des employeurs, et des salariés. Que les autres se branchent: employeurs ou salariés. Je sais qu'une des associations qui a parlé a 3000 membres dont 1300 travaillent seuls. Quant à moi, ce sont 1300 artisans. Ils sont membres de cette association. Pour nous, il est bien clair que les travaux devraient être faits par des vrais travailleurs, et par des vrais employeurs. Je pense qu'à ce moment-là on enlèverait beaucoup de travail au noir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur ce qu'on appelle les gros chantiers de construction industrielle, commerciale, on peut voir une application assez raisonnable de ce que vous demandez. Pour ce qui est de la construction domiciliaire, on sent une certaine résistance de la part de certaines parties. En ce qui concerne l'entrepreneur spécialisé dans le domaine de l'électricité, pour prendre un exemple, qui oeuvre en régions et qui fait des réparations, non seulement dans le secteur résidentiel, parce que là le problème ne se posera pas, mais pour les petits commerces, etc., qu'est-ce qu'on fait de cet individu, une fois la loi adoptée? Il n'a pas d'employé. Il est entrepreneur spécialisé, avec tous ses permis, tout va bien, il fait de la réparation dans les petits commerces.

M. Lortie: C'est la distinction que je fais, M. le ministre, entre entrepreneur et employeur. Dans la construction, il doit y avoir des employeurs et des salariés. S'il décide d'être entrepreneur-employeur, il embauchera des salariés. Il pourra être spécialisé quand même en électricité, mais il sera un employeur.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Prenons l'exemple - on en a donné cet après-midi - de l'opérateur de pépine, pour utiliser une expression bien connue. Lui, il n'aura pas d'employé, il possède sa pièce de machinerie, il effectue des travaux. On fait quoi?

M. Lortie: En avez beaucoup d'opérateurs de pépine dans le résidentiel, dans la rénovation?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau de l'excavation, j'imagine qu'il y en a quelques-uns.

M. Lortie: Oui, mais là on est rendu dans la construction neuve. D'accord? Selon moi, s'il y a des travaux d'aqueduc dans une construction neuve, le gars sera entrepreneur, et il pourra être employeur.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je saisis très bien la distinction entre l'entrepreneur et l'employeur. C'est pourquoi je vous ai demandé si vous assimiliez au bannissement de l'artisan, le bannissement également de l'entrepreneur spécialisé.

M. Lortie: Lorsqu'on est rendu dans les travaux d'excavation, là, on n'est pas, quand même, dans les travaux de construction de résidences et tout cela. Moi, je parle de construction de maisons, soit construction commerciale, industrielle ou résidentielle.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va, M. Lortie. Je reviendrai peut-être. L'Opposition?

Le Président (M. Théoret): Merci, M. le député de... Lequel commence en premier, M. le député de Duplessis? M. le député de Du-plessis.

M. Perron: M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais remercier M. Hétu et son groupe pour la présentation du mémoire. Il y a une chose que je tiens à souligner. Au sujet des représentations faites par la CSD, je trouve remarquable l'évolution énorme qu'il y a eu par rapport aux débuts de votre syndicat, car aujourd'hui, sur l'ensemble des dossiers que vous pilotez et quand vous venez en commission parlementaire, ce n'est pas seulement pour faire la critique, mais aussi pour apporter des solutions possibles dans différents domaines d'activité.

Ce que je crois par rapport au projet de loi 31, c'est qu'encore une fois, vous l'avez d'ailleurs souligné tout à l'heure, en l'espace de six mois, le gouvernement a légrféré ou est intervenu à cinq reprises pour corriger certaines situations. Et nous, dans le jargon parlementaire, on appelle cela de la législation à la pièce. Lorsque arrive un certain problème ou une certaine demande, par exemple de la part du patronat pour modifier les lois du travail, le gouvernement réagit alors de façon positive, mais à la pièce seulement, au lieu de faire cela d'une façon globale. Quant à moi, j'ai pu remarquer que, dans le cas que nous avons devant nous, face à cette loi 31, on se trouve à enlever certains acquis qu'ont actuellement les syndicats de la construction, et donc, par ricochet, les travailleurs de la construction. En ce qui concerne les droits acquis, il y a un risque énorme que, de plus en plus, dans tous les domaines de la construction, les syndicats et les travailleurs de la construction aient à faire face à un système où éventuellement il n'y aura pratiquement plus de protection directe pour tous les travailleurs de la construction. Je pense que ce qui est en train de se passer dans le domaine de la construction, c'est que le gouvernement est en train d'essayer par la bande - je vais le dire comme je le pense - de déboussoler complètement les actions syndicales et intersyndicales dans différents domaines. C'est surtout pour favoriser les employeurs. C'est dans ce sens que cela va directement. D'ailleurs, on l'a réalisé au cours des deux dernières années.

Quant au projet de loi lui-même, sur le fond, je pense que tout le monde convient que c'est surtout l'article 4 du projet de loi 31 qui apporte des modifications substantielles à ce qui existe actuellement dans le décret. Je suis bien d'accord qu'aujourd'hui nous sommes devant une commission parlementaire et que vous présentez un mémoire. À ce que je sache, sur les modifications qui sont actuellement apportées par la loi dans l'industrie de la construction, il n'y a pas eu beaucoup de discussions entre le gouvernement et les syndicats avant d'arriver au projet de loi que nous avons en face de nous. Par le fait même, le ministre a préparé, au nom du gouvernement, ces modifications à la pièce et probablement aussi, à la pige, à la suite des demandes présentées par certains intervenants. On remarque que l'article 4 exclut effectivement - à moins que je ne me trompe et vous me corrigerez là-dessus - la rénovation, l'amélioration, l'entretien et la réparation du champ d'application du décret actuel. Quant à moi et à l'Opposition, il est faux, contrairement à ce que dit le ministre du Travail au nom du gouvernement, de dire que cette loi va permettre sur le fond d'éliminer le travail au noir. Il est faux de prétendre cela.

Vous l'avez soulevé tout à l'heure, M. Hétu, et vous avez même affirmée - cela va dans le sens de ce que je crois et de ce que d'autres croient aussi - que cela va plutôt accentuer le problème qui est actuellement vécu. Cela va l'accentuer, l'accroître, parce que les entrepreneurs vont jouer le jeu de la situation. Il y a des gens de la construction qui vont jouer le jeu aussi.

Je voudrais maintenant toucher à la question des responsabilités. Si vous le permettez, M. le Président, je vais donner mon exemple. Si tout le monde faisait son travail, si toutes les personnes qui font faire des travaux de construction faisaient leur travail, pour justement empêcher toutes sortes d'intervenants qui veulent travailler au noir et qui passent par les entrepreneurs... Je vais vous donner un exemple concret. Il y a deux ans, j'ai fait ajouter une salle à manger pour agrandir ma résidence de Sept-îles. À chaque fois qu'un travailleur de la construction se présentait - quand je n'étais pas là, c'était mon épouse qui s'en occupait - il devait montrer sa carte, son permis, avant d'entrer dans ma résidence ou sur mon terrain. À un moment donné, un certain vendredi soir, je revenais de Québec et j'arrive à la maison. Un gars arrive, frappe à la porte et il demande quelle sorte de travail il y avait à faire. Il s'en venait effectuer des travaux de plâtrage et de peinture. J'ai demandé: Est-ce que tu as ta carte? Est-ce que tu as un permis d'enregistrement dans la construction? Il répond: Non, j'ai fait ma demande.

J'ai dit: Si tu n'as pas ton permis encore, j'aime autant te dire tout de suite que je vais appeler l'entrepreneur qui fait les travaux à ma résidence et je vais lui dire que tu ne viens pas ici, c'est clair et qu'il m'envoie un gars qui a son permis.

Quand je parle de responsabilités, c'est à cela que je pense. Chaque individu, chaque personne, le ministre, le gouvernement, tous les députés, les travailleurs de la construction, les employeurs doivent faire leur job là-dessus et aussi, bien sûr, la CCQ.

Vous avez parlé de formation professionnelle et, là-dessus, je pense que votre mémoire est extrêmement intéressant. J'ai eu l'occasion de le lire dans son ensemble, incluant l'annexe que vous y avez placée. Dans l'annexe, il y a des choses extrêmement intéressantes qu'on pourrait inclure dans la loi. C'est pour cela que je dis que je suis parfaitement d'accord avec vous, lorsque vous mentionnez qu'on devrait apporter des modifications en profondeur à l'ensemble du dossier de la construction, au lieu d'arriver et de légiférer à la pièce, comme cela se fait actuellement. Je peux bien comprendre qu'il y a des comités qui existent ici et là; le ministre va en bénéficier sûrement, éventuellement, pour précisément régler, apporter quelque chose de concret dans ce domaine.

Quant à moi, on aurait dû attendre pour modifier des lois que certains comités fassent état des situations, fassent des représentations et que ce soit fait tout d'un bloc plutôt que par petits bouts, ce qui cause des problèmes à tout le monde. Je comprends que cela peut faire plaisir au ministre et à certains de ses amis de la construction, incluant Maurice Pouliot, mais cela ne veut pas dire qu'il a le devoir d'agir en ce sens; il a plutôt le devoir de faire les choses correctement.

Quant à la formation professionnelle, il y a toute une éducation à faire, je crois, pour amener certains secteurs d'activité, comme le ministère de l'Éducation, le ministère du Travail du Québec, les syndicats et le patronat, en particulier, à faire en sorte qu'il y ait une liaison entre tous les intervenants, pour empêcher, dans le domaine de la formation professionnelle ou un autre, qu'on continue à former des travailleurs de la construction, par exemple, en plomberie ou en menuiserie, si on n'en a pas besoin dans les marchés régionaux, afin de s'aligner plutôt dans l'éducation, dans la formation professionnelle, vers d'autres éléments où les travailleurs de la construction auront des possibilités d'aller de l'avant. Vous parlez du bassin. Vous avez d'ailleurs parlé, dans votre mémoire, des questions de revenu, de sécurité d'emploi, etc. Je trouve cela intéressant de voir de quelle façon vous avez procédé.

Donc, une éducation à faire pour en venir là et il faudrait que les gens se parlent; II faudrait qu'il y ait quelque chose de concret de fait dans ce secteur pour empêcher, je le répète, qu'on forme des gens dont on n'a pas besoin sur le marché du travail. On continue à le faire. Que ce soit à Sept-îles, à Rouyn-Noranda ou à Gaspé, on continue à former des gens qui n'auront pas d'emploi, demain matin, quand ils vont sortir avec leur certificat d'études, peu importe le diplôme qu'ils auront en main.

J'ai certaines questions à vous poser, M. Hétu, ou encore à un membre de votre groupe, se rapportant à votre mémoire. À la page 4, vous mentionnez ceci: "Dans les circonstances actuelles, la CSD-Construction s'oppose à toute forme de renforcement du pouvoir de la commission au détriment du ministre."

Une voix: Page 4?

M. Perron: Oui, à la page 4, troisième paragraphe. Est-ce que vous pourriez, pour le bénéfice des membres de cette commission, élaborer davantage en donnant des exemples, des cas précis, où ce que vous mentionnez dans votre mémoire arriverait?

M. Hétu (Jean-Paul): Actuellement, le ministre a nommé, en vertu des pouvoirs conférés par la loi, deux représentants: un premier, qui représente la partie syndicale... Pour nous - c'était là son intention, bien sûr - le ministre avait un point de vue juridique. Il est quasiment allé par la règle de la proportion. Il y en avait deux: l'un représentait la FTQ, l'autre TINTER et, par la suite, il a dit: Je vais faire un cadeau, je vais nommer un représentant de la CSN. Dans ce cadre, c'est partisan jusqu'à un certain point de vue, parce que la personne qui est là n'est plus ce canal ouvert en vertu duquel, par exemple, les minorités syndicales, par le biais des représentants ministériels, peuvent se faire entendre. L'intention de la loi, avoir deux personnes qui représentaient, entre autres, le ministre, était bonne mais, dans ce cas, il nous a bloqué la porte de ce côté, à cause des luttes intersyndicales, tout comme il y a des luttes politiques. Que voulez-vous? Là-dessus, on subit un préjudice. C'est dans ce cadre qu'on profite de l'occasion, du chapitre sur l'accroissement des responsabilités de la CCQ, pour faire part de ce problème. (21 heures)

M. Perron: Toujours dans la même veine, M. Hétu: Si la CSD était présente au conseil d'administration de la CCQ, seriez-vous alors d'accord avec les modifications touchant le renforcement du pouvoir de la commission au détriment du ministre?

M. Hétu (Jean-Paul): Sans aucun doute, oui. C'est clair cela?

M. Perron: Dépendamment du libellé?

M. Hétu (Jean-Paul): Oui. On pourrait en discuter dans les détails, mais sur le fond, c'est certain. C'est clair. On ne se cache pas.

M. Perron: Combien avez-vous de membres actuellement dans l'ensemble de la CSD, et combien font partie du secteur de la construction?

M. Hétu (Jean-Paul): Dans la construction.

M. Lortie: 11 786, selon le dernier rapport de la CCQ.

M. Perron: Dans la construction? M. Lortie: Dans la construction.

M. Perron: Et dans l'ensemble du syndicat de la CSD, combien?

M. Hétu (Jean-Paul): 56.

M. Perron: 56 000?

M. Hétu (Jean-Paul): Mais 11 000 membres dans la construction, cela donne quand même une possibilité d'expression, de participation à la définition de la prise de responsabilités. C'est ce que l'on revendique, dans le fond. Quand on parle de responsabilités, on veut y être associé. C'est cela, le fond de la proposition. On n'a pas d'objection à ce qu'il accroisse la responsabilité de la CCQ dans les domaines que l'on mentionne, mais on se dit: Ma foi, encore là, on est discriminé. On nous a donné une part au chapitre de la formation. C'est intéressant, mais il nous reste le coeur même, le dynamisme de l'ensemble de l'application, de l'ensemble des prises de responsabilités. Dans le milieu de la construction, on est exclu. On a une sorte d'intermédiaire, alors qu'on représente du monde. Ma foi, on dit: Là c'est assez. C'est ça, le fondement de notre vision.

M. Perron: D'accord. Compte tenu des affirmations que vous faites dans votre mémoire, est-il exact, à moins que je n'aie une interprétation différente, que vous auriez aimé que ce projet de loi ne soit pas là, donc, que vous croyez qu'il est prématuré par rapport à votre voeu de réforme globale?

M. Hétu (Jean-Paul): II est évident que c'est le fondement de notre intervention. Ce sont les motifs pour lesquels, dans un premier temps, on a réagi et fait connaître au ministre notre position. Cependant, on est aussi pratique et concret. On s'est dit: On va étudier ce projet de loi. Il y a une commission parlementaire qui en discute. On s'est dit: On n'est pas pour s'exclure dans une position vide. On va faire valoir la réalité, le vécu que nous représentons. On a alors bâti ce dossier avec nos représentants, dans ce contexte, mais notre volonté est clairement Indiquée. C'est pourquoi vous avez un mémoire qu'on a soumis à un comité d'étude qui indique notre vision plus générale; on aimerait qu'on agisse sur cet ensemble.

Évidemment, un ministre est obligé d'agir à un moment donné et de résoudre parfois les problèmes selon certaines circonstances qui se présentent, comme c'est arrivé. On aimerait bien qu'il y ait du recul; on aimerait bien que le législateur qui est responsable de la société, et chargé de résoudre les problèmes, ne le fasse pas uniquement de manière ponctuelle, mais qu'à un moment donné on ouvre la vapeur, qu'on tente de résoudre de façon plus générale l'ensemble des questions propres aux travailleurs de l'industrie. C'est pourquoi le mémoire se réfère toujours à cet ensemble que l'on aimerait voir modifié.

Bien sûr, le mémoire qu'on vous soumet... Il y a déjà un débat en cours dans le cadre d'un comité d'étude. C'est certain. Mais on se dit: Le législateur ne verra pas ces choses, ne verra pas cela, à cause des limites fixées au comité d'étude.

M. Perron: Dans le cadre de l'exclusion au champ d'application, à moins que je ne me trompe, vous semblez d'accord avec certaines exclusions. À la page 6 de votre mémoire, vous mentionnez: "Nous demandons que l'exclusion s'applique uniquement à l'unité de logement occupée par ledit propriétaire." Plus loin, vous mentionnez un exemple assez concret de ce qui pourrait arriver, si jamais l'article de loi n'est pas clarifié, si certaines définitions plus importantes sont données à certains mots, à certains aspects de la loi, à certains articles. Est-ce que cela provient d'un avis juridique que vous avez obtenu, ou du travail que vous avez effectué entre vous, comme syndiqués de la construction?

M. Hétu (Jean-Paul): Cela provient d'une réflexion faite par des personnes qui vivent tous les jours dans l'industrie.

Au niveau juridique, on n'a pas eu tellement le temps de le faire. C'est pourquoi, au fond, on a accepté de travailler sur le libellé. Ensuite, vous réagissez ainsi. On est d'accord pour faire cette réflexion, dans cette veine. Notre réflexion s'est faite à partir des propos concrets des hommes qui vivent l'industrie, qui connaissent la loi aussi. Ils ont dit: D'accord, on veut exclure cela. Qu'est-ce que cela veut dire de façon concrète, pratique, etc? Comment peut-on le formuler, dans une proposition générale, mais qui ne soit pas forcément de nature juridique? On est prêt à amorcer la réflexion là-dessus, mais on ne voudrait pas non plus que la proposition du ministre soit un piège. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a une question de délai. Quant à savoir quand vous voulez cela, on n'en a pas parlé. C'est dans ce sens que je parle de piège. Ce n'est pas un piège au sens où vous allez me donner une poussée, vous êtes plus gentil que cela. On n'a pas parié de délai, mais je sais qu'on en parlera dans quelques instants.

M. Perron: Non, je pense que...

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Duplessis, vous avez droit à une dernière question; votre temps est écoulé. Une dernière question, s'il vous plaît.

M. Perron: Bien, disons, juste un commentaire puis, après cela, une autre question.

Le Président (M. Théorêt): Non, non, une dernière...

M. Perron: Je pense que, dans ce cas, vous pouvez être assurés...

Le Président (M. Théorêt): ...question.

M. Perron: ...que Maurice Pouliot va prendre note de ce que vous allez proposer puis, là, le ministre va sûrement prendre notre de ce que M. Pouliot va lui dire.

Le Président (M. Théorêt): Alors, merci, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Cela a fonctionné comme cela depuis plusieurs années. Je sais que le président n'aime pas trop trop cette allusion, M. Hétu, mais en tout cas, je l'ai faite.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Perron: Est-ce que, dans le cadre du projet de loi 31, il y a eu des discussions entre les spécialistes du ministère du Travail, le bureau du ministre et votre syndicat pour en arriver à ce projet de loi 31 et à son contenu?

M. Hétu (Jean-Paul): Non, on a entendu le ministre à la télévision qui a annoncé qu'il déposerait un projet de loi pour légaliser, pour valoriser le travail au noir, non, légaliser seulement. Excusez-moi.

Le Président (M. Théorêt): Alors, merci de cette réponse et de cette dernière question. Je passe maintenant la parole au député de La Peltrie.

M. Cannon: Merci, M. le Président. Une voix: Ah bon!

Le Président (M. Théorêt): C'est que le temps alloué...

Une voix: D'accord. C'est maintenant au tour des députés.

Le Président (M. Théorêt): Vous ne voulez pas partir?

Une voix: Non, non, non. Et surtout...

M. Cannon: Je veux vous donner un petit répit parce que ma question va...

Une voix: Quatre minutes. Une voix: Avec plaisir.

M. Cannon: J'adresse ma question à M. Ouellet.

Une voix: Très bien.

M. Cannon: M. Ouellet, à la page 8, dans ce qui est écrit en petits caractères, il y a un premier paragraphe qui se lit comme suit: "Pour combattre l'instabilité cyclique de l'industrie, l'État doit cesser d'utiliser la construction comme moteur économique."

J'aimerais que vous m'expliquiez d'une part, ce que vous entendez par cette notion, et, d'autre part, ce qui s'enchaîne. C'est-à-dire que, s'il s'agit d'une activité économique, comment incorporer ou comment y intégrer la planification des travaux? Quand vous avez fait cette recommandation, quelle était votre vision derrière cette recommandation?

M. Ouellet (Pierre-Yvon): D'abord, pour avoir le détail de la recommandation, je vous référerais à la première partie de l'annexe qui comprend toute la partie touchant la planification des travaux et qui a été présentée au comité d'étude.

C'est une vieille recommandation qui n'a jamais abouti politiquement, qui n'a jamais abouti au niveau décisionnel. On a toujours dit: Quand le bâtiment va, tou va, incluant les élections. Cela a fait en sorte qu'au niveau économique on a utilisé la construction comme un moteur économique de relance. Quand on voulait relancer l'ensemble de l'activité économique, on disait: Utilisons la construction. Dans les années soixante-dix, ce que cela a démontré, c'est que le fait d'utiliser la construction en dehors de l'équilibre même du secteur a eu un peu l'effet contraire. Les donneurs d'ouvrage, en particulier les gouvernements, que ce soit pour les travaux hydroélectriques, les infrastructures, etc., ont poussé le cycle économique, c'est-à-dire qu'on a accru les poignes, puis on a creusé les déficits économiques, élargi le creux économique. L'effet que cela a, c'est qu'à force de vouloir utiliser l'industrie de la construction comme stabilisateur économique on déstabilise continuellement l'industrie elle-même. L'avantage qu'on essaie de retrouver, premièrement, on ne réussit pas toujours à l'atteindre, et, deuxièmement, cela crée des inconvénients à l'intérieur de l'industrie même qui deviennent pratiquement aussi importants que les avantages qu'on avait voulu créer. Ce n'est plus vrai comme avant que, quand le bâtiment va, tout va. Ce n'est plus vrai comme avant à cause de l'évolution économique, l'évolution des secteurs économiques. On n'est plus

dans une économie d'industries manufacturières, on n'est plus dans une économique d'industries secondaires, donc, ce n'est plus vrai. L'implication que cela a c'est que cela accroît l'instabilité cyclique de l'industrie. Notre recommandation vise à mettre en oeuvre la planification des travaux pour stabiliser le cycle dans la construction. L'État, là-dessus, comme donneur d'ouvrage, a un rôle majeur à jouer comme leader. Prenez les travaux de la Baie James. Posons-nous la question: Est-ce qu'on peut étaler les travaux de la Baie James de manière à stabiliser l'industrie de la construction, pas l'économie du Québec, l'industrie de la construction?

Le Président (M. Théorêt): Merci. A l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Cannon: Je m'excuse, ma question s'adressait à M. Ouellet qui est économiste de formation, donc, il doit savoir de quoi il parle, pas nécessairement à des gens de l'Opposition. Merci.

Le Président (M. Théorêt): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, il nous reste à peine 30 secondes. Pour le bénéfice, davantage sans doute des membres de l'Opposition que de la CSD-Cons-truction qui est beaucoup plus proche du terrain, j'aimerais terminer en remerciant la CSD et en citant un extrait d'un édttorial de Jean Fran-coeur paru dans Le Devoir du 11 mai dernier. M. Francoeur s'exprimait comme suit: "En adoptant ce projet de loi, l'Assemblée nationale mettra fin à une immense hypocrisie sociale. Il est de commune renommée que le secteur des travaux à domicile est le terrain de prédilection du travail au noir. Dans son état actuel, la loi est absolument inapplicable. Il faudrait lâcher sur tout le territoire des divisions entières d'inspecteurs qui iraient frapper à toutes les portes. En outre, pourquoi appréhender de braves travailleurs pour les traduire devant des Juges qui, la veille, ont fait repeindre leur appartement à un coût bien inférieur à celui du décret (31,27 $)!"

Je comprends que vous vouliez que ce soit balisé pour sécuriser vos membres. Je comprends, également, que vous vouliez que, sur le plan des travaux de construction domiciliaire et de construction dans le domaine industriel et commercial, la loi soit appliquée avec beaucoup plus de sévérité. C'est ce que le projet de loi que nous présentons vise. Pour votre collaboration, pour le mémoire que vous nous avez présenté, je tiens au nom de la commission à vous remercier.

Le Président (M. Théorêt): Merci.

M. Perron: M. le Président, j'aimerais aussi, tout comme le ministre, remercier les représen- tants de la CSD pour leur mémoire et vous pouvez être assurés que je vais en prendre connaissance dans son entier parce que je pense qu'il est extrêmement important que, pour les lois à venir, on puisse regarder très attentivement les propositions que vous faites à l'intérieur de votre mémoire et surtout, en particulier, en annexe. Je voudrais terminer en vous disant ceci: en ce qui a trait au domaine de la construction, au domaine de la législation sur la construction, je préfère de loin et de très loin parler avec des gens comme vous que de parler avec un éditorialiste de quelque journal que ce soit.

Le Président (M. Théorêt): Merci. Alors, messieurs, nous vous remercions. Nous vous souhaitons un bon voyage de retour.

Des voix: Ha, ha, ha!

(21 h 15)

Le Président (M. Théorêt): J'invite maintenant les représentants de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec à prendre place, s'il vous plaît.

À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames et messieurs à l'arrière, à l'ordre s'il vous plaît! Merci de votre collaboration.

Nous avons maintenant les représentants de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec - s'il vous plaît! - et M. Gabriel Légaré, son président. Nous vous demandons, dans un premier temps, M. Légaré, de nous présenter les personnes qui vous accompagnent, en vous rappelant que vous avez vingt minutes, bien sûr, pour la présentation de votre mémoire et que le reste du temps sera partagé entre les deux formations.

Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec

M. Légaré (Gabriel): Merci. M. le Président, messieurs, je remercie les membres de la commission de l'économie et du travail d'avoir invité la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec à vous faire part de ses représentations sur le projet de loi 31. Permettez-moi, en premier lieu, de vous présenter les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, M. Fernand Paradis, directeur général de la fédération; à ma droite immédiate, M. François Houde, conseiller juridique à la fédération; immédiatement à la droite de M. Houde, M. Clermont Provencher, conseiller en relations du travail à la fédération.

Depuis un certain temps déjà, plusieurs commissions scolaires nous ont fait part de certaines difficultés auxquelles elles avaient à faire face en lien avec l'application de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. En particulier, le mot "permanents", du paragraphe 8° du premier

alinéa de l'article 19 de cette loi occasionne, en effet, les difficultés dont je vais vous faire part. Mais, d'abord, j'aimerais vous fournir quelques indications qui, je l'espère, éclaireront la commission.

La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec est un organisme créé par une loi privée et qui regroupe, sur une base volontaire, les commissions scolaires catholiques: 181 commissions scolaires sur une possibilité de 184 sont donc membres de la fédération. Les orientations et les positions de la fédération sont déterminées par ses membres.

Les commissions scolaires sont des corporations publiques soumises à l'autorité d'un conseil des commissaires. Les commissaires sont élus au suffrage universel pour chacun de leurs territoires.

Les commissions scolaires ont près de 90 000 personnes à leur emploi. Ces employés sont presque tous syndiqués et affiliés, pour la plupart, à l'une ou l'autre des grandes centrales syndicales. Ces employés sont tous soumis à une convention collective négociée et agréée à l'échelle nationale ou à l'échelle locale ou régionale. Parmi ces 90 000 employés, nous retrouvons plusieurs corps d'emploi, dont le personnel de soutien manuel. C'est ce corps d'emploi qui est particulièrement concerné par les dispositions de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Selon notre évaluation, environ 1200 employés sont directement concernés par cette loi.

Cela étant dit, examinons, si vous me le permettez, le genre de difficultés auxquelles ont à faire face les commissions scolaires dans l'application de la loi actuellement en vigueur. Un des menuisiers à l'emploi de la commission scolaire est absent pour une durée indéterminée. Naturellement, la commission scolaire doit embaucher une personne qui aura un statut d'employé temporaire, au sens des conventions collectives. Cet employé temporaire n'est pas un salarié permanent de la commission scolaire au sens du paragraphe s de l'article 1 de la loi, car ses fonctions ne comportent pas exclusivement des travaux d'entretien. De ce fait, la commission scolaire devrait lui accorder les conditions de travail prévues au décret de la construction, incluant la période de vacances obligatoire de juillet et la rémunération qui est rattachée à la tâche. De plus, elle devra appliquer la convention collective la liant à ses employés réguliers. Elle devrait, entre autres, effectuer les retenues syndicales. Enfin, les échelles de traitement ne correspondant pas, l'employé temporaire pourrait bénéficier d'un salaire supérieur à celui de la personne qu'il remplace.

Examinons maintenant un autre problème. C'est durant la période estivale, en particulier durant les vacances des élèves, que les commissions scolaires peuvent effectuer la plupart des travaux de réparation, de rénovation et d'entretien des écoles. Le personnel régulier ne suffit pas à la tâche. Bien souvent, les commissions scolaires désirent engager du personnel temporaire durant cette période afin d'effectuer des travaux de réparation, de rénovation et d'entretien. Ces employés temporaires ne sont pas des salariés permanents, tel que je l'ai mentionné précédemment, puisqu'ils n'effectuent pas uniquement des travaux d'entretien. La commission scolaire devrait donc appliquer le décret de la construction avec ce que cela implique.

De plus, certains travaux ne peuvent être effectués que durant cette période estivale, soit du 1er juillet au 25 août environ. Si, en plus, les travaux doivent cesser durant deux semaines pour les vacances prévues au décret de la construction, il ne reste donc qu'environ un mois de travail effectif.

Je me permets de signaler que le personnel ouvrier à l'emploi des commissions scolaires doit détenir les certificats de qualification valides et appropriés à la fonction qu'il occupe. Il n'y a donc pas de risque que les commissions scolaires embauchent du personnel non qualifié. Cette dernière exigence est prévue au plan de classification établi par la partie patronale.

Afin d'éviter ces problèmes, la fédération et les commissions scolaires qu'elle représente proposent de retrancher du paragraphe 8° du premier alinéa de l'article 19 de la loi le mot "permanents". Cette solution permettrait aux commissions scolaires de respecter les conventions collectives et les obligations légales qui leur sont faites relativement aux qualifications requises pour accomplir leur tâche.

Vous trouverez, en annexe du mémoire que nous vous déposons, la liste des 63 commissions scolaires ayant adopté une résolution demandant d'être exemptées de l'application de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le Président. M. le ministre?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je remercie la fédération des commissions scolaires et ses représentants. Votre demande est très claire, elle est très explicite; elle se résume à un mot très précis que l'on retrouve, comme vous l'avez indiqué, au huitième paragraphe de l'article 19. Si le législateur donnait suite à votre revendication, l'article se lirait comme suit: "aux travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification exécutés par des salariés embauchés directement par les commissions scolaires et collèges visés..."

Quelle est la garantie que ces salariés permanents soient des gens qui possèdent les qualifications requises pour effectuer des travaux de construction?

M. Légaré: J'inviterais M. Provencher à vous fournir une réponse, M. le Président, si vous le permettez.

M. Provencher (Clermont): M. Paradis, les employés de soutien manuels dans les commissions scolaires sont régis par des conventions collectives qui sont négociées avec la CEQ, la CSN, la FTQ et les autres. Nous avons un plan de classification qui s'applique avec cette convention collective dans lequel nous retrouvons, entre autres, des peintres, des électriciens qui doivent détenir, pour nos employés réguliers permanents, les certificats de validation qui sont requis par la loi. Pour travailler dans une commission scolaire comme peintre, on doit détenir les certificats de compétence.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): S'agit-il des certificats qu'on appelle les R-3 ou les R-4? Pour être plus spécifique, s'agit-il des certificats construction ou hors construction? Pour être un peu plus pratique, un travailleur qui quitte chez vous peut-il, avec le certificat qu'il possède, oeuvrer sur un chantier de construction le lendemain?

M. Provencher: Oui, c'est possible.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous avez une obligation légale d'inclure ce que vous mentionnez dans vos conventions collectives ou est-ce que c'est là à la suite d'une libre négociation entre les parties?

M. Provencher: Non, c'est une obligation légale.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va pour le moment.

Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le député de Duplessis. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Je remplacerais mon collègue de Duplessis. J'aimerais savoir de vous - tout en vous félicitant, parce que le mémoire est rapide, il est clair; on peut en prendre connaissance dans son entier aussi - comment vous avez fonctionné jusqu'à maintenant, au cours des travaux que vous avez effectués durant l'été. Avez-vous eu des problèmes avec la construction? Quels sont les problèmes que vous avez vécus?

M. Légaré: De fait, il y a eu des gens employés par les commissions scolaires et, dans certaines situations, cela a créé des problèmes. Il y a eu des décisions rendues par les commissaires de la construction qui ont fait que les commissions scolaires ont dû dédommager les employés qu'elles avaient engagés au cours d'un été pour la différence entre ce que fixe le décret et ce que fixent nos propres conventions collectives. Comme je vous l'indiquais tantôt, cela fait deux poids, deux mesures pour nous. C'est une situation qui n'est pas souhaitable. Nous avons dû respecter les règlements et compenser pour la différence qui existait alors dans ces cas-là.

M. Dufour: Cela va pour la façon dont vous l'avez vécu, mais est-ce que, durant les vacances de la construction, les commissions scolaires n'accomplissaient plus de travaux d'entretien, de rénovation, de restauration, etc?

M. Légaré: Je demanderais à Me François Houde de répondre, si vous le permettez, M. le Président.

M. Houde (François): Pour les employés permanents de commissions scolaires, c'est-à-dire ceux qui sont déjà à leur emploi depuis qu'ils ont acquis leur permanence, les travaux qui correspondent à des travaux de rénovation et d'entretien sont effectués, quand même. Les travaux qui sont effectués par du personnel non permanent; généralement, sont arrêtés.

M. Dufour: Vous arrêtez les travaux durant les vacances de la construction?

M. Houde (François): En effet. C'est cette partie qui nous occasionne des problèmes parce qu'il n'y a que durant à peu près un mois que le travail peut s'effectuer. Si c'est du personnel soumis au décret, les commissions scolaires, sauf les cas du 14 juillet 1987, c'est assez exceptionnel, où il y avait des situations d'urgence... Ce ne sont jamais des situations d'urgence qui nécessitent l'entrée au travail de personnel conformément au décret de la construction.

M. Dufour: Est-ce que, par vos recherches ou par vos constatations, vous vous êtes rendu compte qu'il y avait des travaux que vous n'avez pas pu faire durant l'été? Je comprends que, pour les écoles, il faut que les travaux se fassent quelque part dans le temps, et l'été est la meilleure période; puisqu'il n'y a pas d'élèves, il n'y a pas de professeurs en général à l'intérieur des bâtiments, c'est plus facile. Est-ce que les contraintes que vous avez vécues jusqu'à maintenant ont empêché les commissions scolaires ou les commissaires d'écoles de bien remplir leurs obligations?

M. Houde (François): II n'y a pas eu de situation où les commissions scolaires n'ont pas été en mesure de faire les travaux. Ce qui arrive plutôt, c'est qu'elles planifient leurs travaux en fonction des dispositions légales qu'elles ont à respecter. Dans certains cas, cela peut amener des retards dans l'ouverture prévue d'une école. J'ai le cas d'une commission scolaire, que j'ai vérifié aujourd'hui, dans la banlieue sud de Montréal; elle considère que cela lui prendrait

une école de réserve sur son territoire pour pouvoir rénover son parc immobilier régulièrement. Ce sont des écoles, des bâtisses qui ont un minimum de trente ans; elles ont donc très souvent besoin de rafraîchissement. Ce ne sont pas des travaux de construction, mais simplement de rafraîchissement. Donc, pour pouvoir déplacer les élèves et effectuer les travaux uniquement durant l'été, cela lui prendrait une école sur son territoire, qui ne serait pas utilisée régulièrement, pour loger ses élèves. Mais elles planifient leurs travaux en conséquence. (21 h 30)

M. Dufour: Est-ce que vous pourriez me donner une estimation des montants qui sont payés à des gens que vous employez par rapport à ceux qui sont dans le domaine de la construction, en incluant les avantages sociaux?

Une voix: M. Provencher.

M. Provencher: Vous voulez dire la différence horaire?

M. Dufour: Dans l'ensemble. On sait qu'un employé de la construction peut aller chercher plusieurs dizaines de dollars à cause des conventions et à cause aussi des avantages sociaux, les vacances, etc.

M. Provencher: Je vais vous donner le salaire horaire d'un peintre dans une commission scolaire. En 1987, un peintre gagnait 12,33 $ et je crois que, dans le décret, le salaire est de 16,66 $. Entre autres, je vous donne cet exemple. Je peux vous le donner pour un électricien: il gagnait 13,92 $ par rapport à 18,88 $.

M. Dufour: D'accord. Dans cela, vous n'incluez pas, bien sûr, les avantages sociaux.

M. Provencher: Non.

M. Dufour: Comme c'est temporaire, ils ne sont pas touchés par tous les avantages sociaux.

M. Provencher: Non, c'est inclus pour eux. C'est cela.

M. Dufour: D'accord. Il y a peut-être une question que je voudrais poser et je suis certain que mon collègue, M. Gendron, le député d'Abi-tibi-Ouest, qui est responsable du dossier, m'en voudrait de ne pas la poser. D'ailleurs, il l'a posée à l'Union des municipalités du Québec cet après-midi. Est-ce que vous avez une idée précise de la loi 37? Qu'en pensez-vous?

Une voix: La loi 31.

M. Dufour: La loi 31. La loi 37, c'est un autre morceau pour notre ministre. Il prend des gâteaux très épais. Alors, on verra. Est-ce que vous avez une idée précise concernant la loi 31?

M. Légaré: Je dois vous dire qu'à proprement parler la loi 31 n'est pas de première importance pour la gouverne des commissions scolaires. Il nous est apparu, par ailleurs, concernant l'article 4 du projet de loi 31, en particulier, qui vient modifier !a loi actuelle, à la demande des commissions scolaires, qu'ii devenait important de vous faire savoir leur point de vue. Nous en avons eu 63. Peut-être y en a-t-il plus qui auraient souhaité aussi nous indiquer leur insatisfaction vis-à-vis de cet article 4. Notre démarche aujourd'hui n'est pas de faire le tour de la loi 31. Ce n'est pas que nous ne voulons pas nous en soucier, mais ce n'est pas notre principale préoccupation, sauf pour cet article 4 qui touche nos membres au plus haut point dans des travaux, dans des activités qu'ils ont à effectuer à un moment où c'est relativement urgent et à peu près exclusif.

M. Dufour: II y a peut-être une dernière question: en supposant que le ministre reste insensible à votre présentation, de quelle façon cela pourrait-il affecter le vécu scolaire monétairement? Est-ce que la facture est transférée directement aux contribuables locaux ou si elle est transférée, par le biais des subventions au gouvernement du Québec?

M. Légaré: Vous m'ouvrez une excellente porte...

M. Dufour: Bien oui.

M. Légaré: ...pour vous indiquer que, dans des situations telles que celles-là, si jamais cela se produit, c'est malheureusement la taxe locale qui doit supporter l'écart qui sera généré par une telle mesure. Ce qui avait été prévu par le législateur au moment où il a établi la taxe locale - il l'a fixée à 0,25 $ les 100 $ ou à 6 % du taux d'évaluation - c'était de lui donner une couleur locale. Mais, dans ce cas, lorsqu'on se substitue à une organisation que je pourrais qualifier de déficiente entre deux dimensions, c'est-à-dire notre convention collective et la loi qui régit le travail dans le domaine de la construction, il n'appartiendrait pas normalement à la taxe scolaire, qui n'a pas cet objectif, de défrayer cela. Mais nous sommes tenus, de par les circonstances, de l'assumer à l'aide de cette taxe.

M. Dufour: En partant de ce que vous me dites, pourriez-vous m'indiquer de quelle façon le gouvernement, par son projet de loi et par d'autres projets de loi, vous a soustrait à l'application déjà de l'Office de la construction ou de la loi de la construction du Québec? Vous n'y êtes pas soumis au même titre que les municipalités. J'espère que vous êtes conscients de cela. Il y a un certain nombre... Est-ce que c'est en fonction de ce que vous me dites ou s'il y avait directement la partie de subventions qui

était concernée? Est-ce que vous aviez une idée par rapport à cela?

M. Légaré: Personnellement, je ne pourrais vous dire quelles étaient les intentions du législateur au moment où il a fait de nous des exceptions. C'était possiblement à la demande de mes prédécesseurs ou à la suite des volontés exprimées par les commissions scolaires, à l'époque. Actuellement, i! nous apparaît qu'il serait souhaitable que le mot "permanents" soit retiré, de façon à nous permettre de travailler dans une juste mesure sur cette question et de ne pas être pris à assumer des coûts différents dans le cas des employés que nous engageons par rapport à ceux que nous devons engager en surnuméraire.

M. Dufour: Ah, bon!

M. Légaré: M. le Président, si vous le permettez, M. le directeur général voudrait ajouter quelque chose.

Le Président (M. Théorêt): Oui, avec plaisir.

M. Paradis (Fernand): Si vous le permettez, j'ajouterai une réflexion. Si on regarde l'évolution du réseau scolaire, particulièrement depuis une dizaine d'années, on constate, en particulier depuis 1979, qu'il y a eu un plafonnement dans la taxe scolaire locale, limitée à 6 % des dépenses nettes ou à 0,25 $ les 100 $ d'évaluation. Au début, bon nombre de commissions scolaires n'avaient pas atteint ce seuil limitatif; bon nombre de commissions scolaires ne l'avaient pas atteint. Avec le temps, les exigences étant de plus en plus lourdes, les commissions scolaires se sont rapprochées de ce seuil; si elles voulaient le dépasser, elles devaient procéder par voie de référendum. Aller en référendum produisait des dépenses qui, parfois, équivalaient à 0,01 $, 0,02 $ ou 0,03 $ de taxation, d'une part.

D'autre part, je pense que les difficultés économiques qu'on a connues ont eu comme effet de limiter les dépenses dans le secteur des affaires sociales et du côté de l'éducation. L'une des clés pour fermer ce robinet, c'était la restriction des dépenses dans ce qu'on a appelé longtemps l'enveloppe 3, c'est-à-dire des montants destinés aux commissions scolaires pour des coûts autres que les salaires des enseignants et des autres personnels. C'étaient des frais variés où on retrouvait, par exemple, l'huile à chauffage, l'électricité et aussi l'entretien et les réparations.

La conséquence de cela, c'est que les réparations dans les commissions scolaires se sont accumulées; bon nombre de réparations n'ont pas été faites et, actuellement, un très grand nombre de commissions scolaires se plaignent que le parc immobilier se détériore et qu'on aurait besoin de crédits pour tenter de redresser cette situation.

Alors, il y a toutes sortes de contraintes qui jouent, actuellement, qu'à notre avis il faut considérer dans ce contexte que l'on a vécu depuis une dizaine d'années.

M. Dufour: Je veux vous remercier. Cela confirme un peu que, directement ou indirectement, le gouvernement est touché; il y a des chances que le ministre ouvre toutes grandes ses oreilles pour vous écouter comme il faut. Et je le souhaite qu'il vous écoute dans ce sens-là.

Vous me dites que le parc immobilier et les écoles se détériorent. Je suis d'accord avec vous. Il y a sûrement des économies qui se sont faites, je ne pourrais pas dire aux bons endroits, mais là où elles faisaient le moins mal aux élèves. C'est ce que les commissions scolaires ont choisi, je pense qu'elles agissaient correctement quand elles l'ont fait. Mais, aux législateurs, vous donnez un bon message: En année d'abondance, il faut que te gouvernement investisse où ii doit investir. Je vous remercie.

Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, cela va aller.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. Permettez-moi, d'abord, de saluer d'une façon spéciale mes ex-collègues de la fédération, M. Légaré, ou les cadres de la fédération, M. Paradis et les autres.

À la page 4, vous avez souligné un problème particulier qui se situe durant la période des vacances. On convient qu'à l'école le ministre de l'Éducation ne tolérerait pas de grosses réparations, à part les réparations urgentes, dans le cours de l'année. Antérieurement, on sait que les commissions scolaires avaient l'habitude de profiter de la saison estivale pour effectuer les travaux d'entretien, de rénovation et de réparation de fenêtres, de toits, etc. Dans bien des commissions scolaires, on y allait de deux façons; d'abord par ses propres employés pendant la période estivale. Mais, comme elles devaient aussi donner des vacances à leurs employés, cela créait un vide de personnel un peu compétent, si on peut utiliser ce terme. Certaines commissions scolaires y allaient par de petits entrepreneurs. Dans bien des commissions scolaires, admettons que vous devez changer 50 ou 100 fenêtres, on y allait par le biais d'entrepreneurs plutôt que par des hommes d'entretien.

Il faudrait préciser, dans le cas d'une bâtisse d'une commission scolaire, qu'il y a deux sortes de réparations: la réparation d'entretien usuel et la réparation majeure, comme les toits qui coulent et la plomberie qu'il faut changer à un moment donné après vingt ans. Dans le

décret actuel, on sait, par exemple, que pendant la période estivale, à cause du temps que vous avez qui est de deux mois, vous ne pouvez pas vous permettre de perdre quinze jours parce que vous allez arriver au mois de septembre les écoles pas prêtes. Dans le décret actuel, on a déjà des exclusions, par exemple, concernant les grands travaux routiers pour lesquels il n'y a pas de vacances. Cette exclusion-là pourrait-elle être une chose abordable pour vous?

M. Légaré: Si vous me permettez de répondre, M. le Président, ce serait tout à fait souhaitable. Si la chose est possible, nous ne demanderions pas mieux que cette possibilité nous soit offerte de faire des travaux à l'occasion d'une période qui normalement est décrétée de vacances pour l'ensemble des activités de la construction. Pour les écoles, compte tenu de cette période très restreinte, si vous accordiez une règle d'exclusion pour ces situations, ce serait bienvenu. Nous souhaitons ardemment que ce soit fait, si jamais c'est votre intention d'y procéder.

M. Maltais: D'accord. Dans les problèmes que les commissions scolaires ont rencontrés versus l'Office de la construction au cours des huit ou neuf dernières années, est-ce qu'il y a une jurisprudence qui a été donnée par des juges? Peut-être que Me Houde pourrait me donner une réponse là-dessus. Je n'ai pas de souvenance.

Une voix: Me Houde.

M. Houde (François): À ma connaissance, il n'y a pas de jurisprudence de tribunaux supérieurs, j'entends Cour supérieure par bref d'évocation ou des choses comme celle-là. Les décisions que l'on a viennent du commissaire de la construction, dans bien des cas. Il y a aussi des décisions à la suite d'une inspection de l'Office de la construction à l'époque; la commission scolaire a décidé de respecter les conclusions de l'inspecteur pour éviter des honoraires d'avocat. Je pense, entre autres, à une commission scolaire sur la rive sud de Montréal qui a convenu d'un règlement avec l'office, justement, pour éviter d'avoir à assumer certains frais d'avocat et de faire une jurisprudence qui plus tard aurait servi aux commissions scolaires, mais la situation ne s'est pas présentée. Mais les principales décisions sont des décisions du commissaire de la construction dans certains cas.

M. Maltais: Me Houde, j'aimerais que, dans un temps ultérieur, vous nous fassiez parvenir cette jurisprudence pour les besoins de la commission, parce que c'est, quand même, important pour nous.

Dans un deuxième temps, êtes-vous au courant, peut-être M. Légaré ou M. Paradis, s'il y a des commissions scolaires qui font affaire avec des entrepreneurs artisans?

M. Légaré: Je ne le sais pas et M. Paradis, non plus. Nous ne sommes pas au courant, M. le député.

M. Maltais: D'accord.

M. Légaré: Si vous le permettez, M. Paradis voulait ajouter à mes propos de tout à l'heure et je l'inviterais à le faire.

M. Paradis (Fernand): Sur la question que vous avez posée, M. Maltais, on observe dans le réseau scolaire que l'année scolaire avait l'habitude de se terminer aux alentours du 24 juin et les classes reprenaient à la fête du Travail, ce qui donnait, grosso modo, deux mois et demi pour faire les réparations. Les conventions collectives ont fait en sorte que les écoles soient utilisées pour des fins de perfectionnement jusqu'au 30 juin. Socialement, on a assisté à une demande de plus en plus forte pour que la rentrée se fasse autour du 25 août, ce qui fait qu'on a rétréci la période où on peut faire les travaux par les deux bouts. On a introduit, durant la période estivale, deux semaines de vacances pour la construction. On observe un autre phénomène qui s'ajoute à celui-là: une semaine avant les vacances, là où nous avons des entrepreneurs, on ne livre pas beaucoup de matériaux de peur qu'en les laissant sur les chantiers au cours de la période des vacances ils ne disparaissent. Cela fait que les deux mois et demi ont rétréci de plus en plus pour faire une période d'environ cinq semaines et que l'on assiste à une course contre la montre pour faire les travaux dans une période devenue de plus en plus courte.

M. Maltais: Vous n'êtes pas obligé de me répondre, mais je sais que plusieurs commissions scolaires, entre autres, au Québec - et je trouve cela très bien - pendant la période estivale, engagent de temps en temps des étudiants pour effectuer des petits travaux; je ne parle pas de charpentiers, de plombiers, de menuisiers, mais de menus travaux de nettoyage, de rafistolage, etc. Est-ce que du fait que vous ayez fait cela - je trouve cela très bien, parce que cela occupe bien des jeunes et cela leur donne un revenu d'appoint - vous avez eu des problèmes avec l'OCQ là-dessus? (21 h 45)

M. Légaré: M. Houde serait au courant de certaines difficultés et je l'inviterais à vous en faire part.

M. Maltais: Allez-y parce que le président de la CCQ est derrière vous. C'est le temps.

Des voix: Ha! ha! ha!

M. Houde (François): Oui, effectivement,

pour certains...

M. Maltais: Ce n'est pas catholique, cela, faire prendre des enfants.

M. Houde (François): Ce n'était pas les décisions auxquelles je faisais référence tantôt...

M. Maltais: Non, non, non.

M. Houde (François): Ce n'étaient pas les mêmes. Mais, effectivement, pour avoir engagé des étudiants pour effectuer certains travaux - ces étudiants-là étaient payés au taux de la convention collective régissant la même catégorie d'emploi dans la commission scolaire - des commissions scolaires ont dû défrayer des sommes supplémentaires. Dans un cas: 18 000 $.

M. Mariais: Merci. Je pense que le message est passé à la CCQ.

Il y a peut-être un petit commentaire, avant de laisser la parole au ministre. Tout à l'heure, mon collègue de Jonquière a souligné que le parc immobilier était drôlement amoché et qu'il fallait économiser. Je comprends, mais vous avez, quand même, eu une cure d'amaigrissement de 10 ans. Mais, pour vous consoler, il n'y a pas juste vous autres, il y a le service routier, II y a le service hospitalier, il y a le service de l'éducation, parce que mon ami Francis avait oublié de les énumérer. C'est bien sûr que le Québec a un retard immense à rattraper dans ces services essentiels, on va y aller au compte-gouttes et, bien sûr, selon nos disponibilités budgétaires. Même si ia masse est forte, la demande est forte aussi dans tous les secteurs et c'est pour cela que le ministre de l'Éducation y va à la même vitesse de croisière que le ministre des Transports et le ministre de la Santé. Merci.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député du Saguenay, de permettre au ministre d'intervenir maintenant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mes propos seront des propos de conclusion. Vous avez un mémoire qui est bref, qui est précis. Les échanges ont porté sur un terme qui est "permanents" et également sur une période de plus en plus restreinte. Je pense que vous avez sensibilisé les membres de la commission aux problèmes qui vous sont causés par la rédaction de l'article 19.8°, tel qu'on le connaît actuellement.

Le projet de loi que nous avons devant la commission ne propose pas, au moment où nous nous parlons, de modification pour donner suite à vos revendications. Je vous indiquerai, cependant, que nous en sommes à un stade pré-deuxième lecture, que, sur le plan des principes, le projet de loi n'a pas encore traversé cette étape et qu'il sera suivi d'une analyse article par article, en commission parlementaire. Vous m'avez personnellement sensibilisé à des problèmes dont je discuterai avec les principaux partenaires de l'industrie de la construction et je souhaite également que vous ayez rejoint plusieurs des parlementaires membres de cette commission pour que nous tentions, en ne brimant les droits de personne, d'ajuster la loi à la réalité, au vécu quotidien des commissions scolaires. Si nous pouvons convaincre l'ensemble des partenaires de la justesse de vos propos, nous aurons la possibilité de proposer, lors de l'étude, article par article, des amendements que je sais que vous suivrez attentivement.

D'ici là, nous comptons sur votre collaboration pour recevoir la jurisprudence à laquelle on a fait référence au cours des échanges. Si vous aviez des informations additionnelles et plus précises à nous donner quant au montant des travaux que vos commissions scolaires effectuent chaque année dans le domaine de la rénovation, de la réparation, de la modification et de l'entretien et si vous pouviez également nous indiquer quel est le pourcentage, présentement, des travaux que vous effectuez en régie interne, si vous me permettez l'expression, comparativement aux travaux que vous donnez à contrat, ce sont des éléments qui me permettront d'aller un peu plus loin dans la discussion avec les partenaires majeurs de l'industrie de la construction.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Au nom de ma formation, je veux vous remercier de la clarté et, de la limpidité de votre mémoire. Mon collègue de Saguenay dit: II y en a plusieurs qui ont suivi la cure d'amaigrissement. C'est vrai, mais je pense qu'il faut se poser la question. Jusqu'à quel point peut-on continuer à faire subir cette cure d'amaigrissement à l'ensemble de nos organismes ou de nos citoyens? Parce qu'encore là cela peut devenir facilement de la dilapidation des biens publics; aussi, si, pendant trop longtemps on serre la vis.

Le Président (M. Théorêt): C'était bien le mot de remerciement.

Une voix: Ha! ha! ha!

M. Dufour: C'est important de maintenir ces gens-là en santé et l'une des bonnes façons de le faire, c'est de les écouter, de prendre en considération ce qu'ils nous disent. Ce sont des gens d'expérience. Je vous remercie.

Le Président (M. Théorêt): Alors, merci. Cela dit, les travaux de la commission sont ajournés à demain, 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 21 h 51)

Document(s) associé(s) à la séance