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(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! S'il vous plaît! La commission de l'économie et
du travail se réunit aujourd'hui pour procéder à des
consultations générales et à des auditions publiques sur
les modifications à apporter à la Loi sur les heures d'affaires
des établissements commerciaux. En premier lieu, ce matin, nous recevons
le Regroupement des grands centres de rénovation du Québec pour
l'équité entre les commerçants. J'inviterais donc...
Excusez. Auparavant, il y avait des remplacements aujourd'hui, M. le
secrétaire.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a des
remplacements. M. Audet (Beauce-Nord) est remplacé par M. Richard
(Nicolet-Yamaska).
Le Président (M. Bélanger): Bienvenue à M.
Richard qui connaît le dossier, semble-t-il. Ha, ha, ha! On en parle
beaucoup. J'invite donc les représentants de ce groupement à
s'asseoir à la table des témoins, à se présenter et
à nous présenter leur mémoire. Vous êtes le seul
porte-parole?
M. Guay (Michel): Effectivement.
Le Président (M. Bélanger): Les autres ne
s'assoient pas avec vous? Ils peuvent s'asseoir avec vous à l'avant, pas
de problème, et ils peuvent aussi, éventuellement,
répondre aux questions, si vous le désirez.
M. Guay: Pour les fins de la présentation, il avait
été convenu, et c'est peut-être simplement une
mésentente, que j'agissais comme porte-parole, et ces gens-là ont
bien daigné vouloir assister également à la
présentation du mémoire.
Le Président (M. Bélanger): Et vous allez
répondre aux questions?
M. Guay: Et je vais répondre aux questions.
Le Président (M. Bélanger): II n'y a pas de
problème.
M. Guay: Ça va?
Le Président (M. Bélanger): Oui. M. le
député de Nicolet.
M. Richard: M. le Président, peut-être pour des
fins, nous, de questionnement, ça serait plus facile qu'ils s'approchent
immédiatement, parce qu'on aura souvent des interrogations. Ce n'est pas
qu'on ne vous croira pas monsieur, mais...
M. Guay: Je n'ai aucune objection.
Le Président (M. Bélanger): On inviterait vos
collègues à s'asseoir à l'avant. Donc, vous
présenterez votre équipe et lorsque, dans les périodes
d'échanges, on vous posera des questions, s'il vous plaît, je vous
demanderais de bien vouloir vous identifier avant de répondre. Pas parce
qu'on ne vous reconnaîtra pas, mais tout simplement pour les fins de la
transcription. Les gens qui font la transcription sont dans une autre
pièce et, pour le Journal des débats, tout doit être
consigné. Alors, si on pouvait donner les noms chaque fois, ça
nous irait bien. Donc, si vous voulez vous identifier, tout le monde, et
procéder à la présentation de votre mémoire.
Regroupement des grands centres de rénovation
du Québec pour l'équité entre les
commerçants
M. Guay: Merci, M. le Président, Mme la
députée, MM. les parlementaires. Mon nom est Michel Guay. Je suis
porte-parole du Regroupement des grands centres de rénovation du
Québec pour l'équité entre les commerçants et je
suis également vice-président et secrétaire de groupe Val
Royal, un des membres de ce regroupement. J'aimerais souligner la
présence de M. Roy Sen-neville, de Foresbec; de M. Alain Chassé,
de Pascal, de M. Jean-Pierre Ravary, de Matériaux de construction Ravary
et de M. Denis Payette, également de Ravary.
Je remercie, en fait, les parlementaires, le gouvernement pour
l'invitation à présenter un mémoire. Il est convenu que la
convocation tient compte d'un malaise souligné par les
commerçants au cours des derniers mois, et je pense que c'est juste de
dire au cours des dernières années. Mais il faut se
réjouir et espérer qu'il s'agira de la dernière
consultation. Il faut être optimiste et apprendre des échecs
antérieurs en espérant qu'on ne s'assoira pas ici à
nouveau dans cinq ou dix ans pour refaire de nouvelles
présentations.
Dans ce contexte, il me fait plaisir de vous présenter, mais sans
prétention, le point de vue du Regroupement sur la question des heures
d'affaires. Permettez-moi, d'abord, de souligner le fait que le débat
qui, à l'origine, devait porter plus particulièrement sur
l'élargissement des heures d'affaires, des heures d'ouverture en semaine
pour l'ensemble des commerces et, le dimanche, pour les commerces
d'alimentation, a été élargi, à ce dernier
chapitre, à l'ensemble
des commerces de détail. À notre avis, cette ouverture
témoigne éloquemment de l'importance de doter le Québec
d'une loi sur les heures d'affaires équitable pour tous, une loi qui,
compte tenu de la diversité et du nombre important de commerces
touchés par une telle législation, réponde
véritablement aux besoins des consommateurs tout en plaçant ces
commerces, quel que soit leur secteur d'activité, sur un pied
d'égalité.
Le Regroupement des grands centres de rénovation du Québec
pour l'équité entre les commerçants est composé de
propriétaires de grands centres de rénovation, répartis
géographi-quement à travers le Québec, compte 64 points de
vente, 4415 employés et son chiffre d'affaires annuel est de l'ordre de
650 000 000 $ par année. Les membres de ce Regroupement sont
Matériaux Audet de Québec; Brico Centre de Montréal;
Castor Bricoleur de Québec également; Matériaux Coupai de
la région de Montréal, de Laval et de la rive sud; Foresbec de
Trois-Rivières et Gramby; Goineau & Bousquet de Laval; le Groupe BMR
dans toute la province de Québec; Matériaux Lumberland de
Montréal, de Laval et de l'Estrie; Pascal, Montréal,
Québec, Sherbrooke, Laval, Saint-Jean-Richelieu; Potvin & Bouchard,
Saguenay-Lac-Saint-Jean; Matériaux de construction Ravary de
Montréal et Val Royal de Montréal également, Sorel et
Tracy.
La loi actuelle sur les heures d'ouverture, d'autres intervenants l'ont
déjà souligné, prévoit un bon nombre d'exceptions
et diverses autorisations particulières, d'où le fait que, pour
un même secteur d'activité commerciale, différents
régimes sont applicables. À nos yeux, il est clair que
l'équité entre les établissements commerciaux,
équité qui devrait être à la base même du
système, n'existe pas actuellement. Cette inéquité, si
l'actuelle situation devait se maintenir, touchera particulièrement le
secteur de la rénovation et de la quincaillerie. Bon nombre de
commerces, en se prévalant des diverses exceptions contenues dans la loi
actuelle ou en profitant de l'application difficile de cette
législation, continueront d'avoir la possibilité de vendre, le
dimanche, des produits en tout point comparables à ceux offerts dans les
grands centres de rénovation du Québec.
Permettez-moi de m'arrêter pour vous donner quelques exemples qui
sont particulièrement frais, puisque j'ai demandé hier à
un membre de notre organisation d'aller faire le tour et de voir,
effectivement, ce qui se vend ailleurs, pour avoir le pouls le plus
récent, parce que vous savez comme moi que ça se développe
à une rapidité assez incroyable dans le domaine. Par exemple,
chez les vendeurs de piscines, on retrouve des produits, et je parie de
produits qui sont semblables à ceux qui sont vendus dans nos centres de
rénovation, soit des meubles de jardin, des barbecues, des boyaux
d'arrosage et des accessoires de barbecue aussi. Tous ces
éléments-là, qui se vendent également chez nous,
sont susceptibles d'être vendus également le dimanche dans ces
centres de piscines.
Au niveau des clubs d'achats, il n'y en a pas 25, mais on sait que, dans
ces endroits-là, on retrouve de plus en plus des produits qui sont
beaucoup plus des produits de consommation que des produits qui seraient
normalement utilisés par les PME, ce qui est apparemment l'approche
initiale. On retrouve des outils électriques, des outils manuels, des
perceuses, des meules, des tournevis, des scies sauteuses, des scies rondes,
des meubles de jardin également, des boyaux d'arrosage aussi, des
barbecues, un ensemble de choses dont le consommateur a besoin et qu'il peut se
procurer le dimanche.
Dans les marchés aux puces, je ne ferai pas la liste au complet,
mais là aussi on retrouve un certain nombre d'outils manuels,
électriques, des lampes, des accessoires électriques, et en plus
grand nombre au fur et à mesure que les mois et que les années
passent. Dans les pharmacies à escompte, on retrouve du papier
sablé - j'ai été moi-même surpris de la liste de
choses qu'on retrouverait là - du "masking tape", des pinceaux, de la
colle, des lampes de poche, des rallonges électriques, des balais, des
brosses, des produits d'entretien, des pinces, plusieurs modèles de
pinces, pas une seule, mais une variété, des marteaux, des
clés, des produits, des attaches, même des truelles pour le
plâtre, des ensembles de 50 morceaux pour faire du bricola ge, de la
corde, des pistolets à colle, des accessoires pour la réparation
de plomberie pour la maison, des thermomètres et j'en passe, des tapis,
des balais, des brosses à neige, des pelles, du lave-vitre, un ensemble
de choses qu'on retrouve dans les grands centres de rénovation.
M. Jolivet: Des costumes de bain, des brosses à dent.
M. Guay: Pardon? Aussi.
Le Président (M. Bélanger): Ils ont même de
l'aspirine.
Mme Marois: À l'occasion, ils vendent des aspirines
M, Guay: Parlons aussi - on peut le souligner en passant - qu'on
peut, le dimanche, louer une scie sauteuse, une scie ou des choses comme
ça pour, apparemment, faire du bricolage ou de la rénovation,
alors qu'on ne peut pas en acheter une. Alors, il y a tout un
développement de ce côté-là également qui est
dans un domaine similaire et des produits similaires à ceux qu'on peut
offrir à la clientèle.
Bien que l'actuelle situation, quand même, ne puisse être
qualifiée de catastrophique, c'est plutôt dans le sens du fait
que, si la tendance constatée des consommateurs a effectuer de plus
en plus d'achats le dimanche devait se maintenir, et il semble que ce
sera le cas puisque la gamme des produits qui leur est offerte ne cesse de se
diversifier, il est évident, selon nous, qu'à plus ou moins long
terme nous serons parmi les commerçants pénalisés par le
maintien de la loi et de ses exceptions telles que nous les connaissons
maintenant. À cet égard, nous croyons que le maintien de la loi
actuelle ou son élargissement par la création, par exemple, de
nouvelles exemptions, notamment en faveur des supermarchés
d'alimentation, confirmerait l'inéquité que nous
dénonçons. Il est clair, selon nous, qu'en permettant à
des groupes, des catégories particulières de commerçants
ou à des marchés de grande surface d'ouvrir le dimanche, ceux-ci
s'accapareront uno part encore plus grande du secteur de la rénovation
et de la quincaillerie. Stimulés par la demande des consommateurs, il
est évident que les commerçants qui sont ou qui seraient
autorisés à ouvrir leurs portes le dimanche ne s'arrêteront
pas en chemin; ils feront preuve de créativité, d'une
créativité toujours plus grande. Si, d'une certaine
manière, on peut louer l'imagination des commerçants
québécois désireux de s'accaparer, justement, une part
toujours plus grande du marché, on doit, en contre partie, et c'est dans
ce sens que va notre démarche, s'assurer qu'il puisse en être de
même pour tous les marchands qui, comme nous, sont, eux aussi, à
même de répondre aux besoins des consommateurs.
Si je peux me permettre de vous souligner le développement
extrêmement rapide de tous ces concepts qui sont apparus
récemment, comme les pharmacies à escompte qui, il y a quelques
années, prenaient une très faible part du marché, les
clubs d'achat qui, soulignons-le, ne font même pas partie du document
préparé par le ministère et dont tout le monde a
sûrement pris connaissance. À l'intérieur de ce
document-là qui, soit dit en passant, est extrêmement bien fait et
auquel on se réfère d'une façon générale
quant aux études, etc., mais qui, en même temps, présente
la situation des commerces de l'alimentation comme ayant perdu une part de
marché de X millions de dollars, on ne parle pas des clubs d'achat pour
lesquels on prévoit, pour l'année qui s'écoule, un chiffre
d'affaires au Québec de l'ordre de 400 000 000 $. Vous me direz que ce
ne sont pas 400 000 000 $ qui s'en vont directement aux consommateurs, mais il
y a une part importante de ce chiffre-là qui va aux consommateurs. Pour
montrer à quel point l'accélération du
phénomène est grande, dans quelle mesure, effectivement,
l'élargissement ou le non-élargissement, mais la
permissivité de la loi actuelle fait en sorte que les consommateurs se
procurent des biens le dimanche dans ces emplacements, on peut penser aux
marchés aux puces et aux marchés publics et, dans le même
contexte, on peut penser également à la télévision
interactive qui vient tout juste de commencer ses opérations avec
Vidéoway, je pense, et qui va permettre - je pense que c'est Nicole
Laliberté qui le soulignait hier - qui permet, finalement, le commerce
indirectement, par voie indirecte, le dimanche.
Face à la situation qui prévaut actuellement, le
Regroupement croit que le gouvernement doit choisir entre l'une ou l'autre des
trois possibilités suivantes: la fermeture complète de tous les
commerces, le statu quo assorti de nouvelles exemptions à la loi
existante ou la libéralisation complète.
Choisir la première équivaudrait, à notre avis,
à un retour en arrière dont nous croyons pouvoir affirmer qu'elle
serait mal accueillie des citoyens La permissivité telle que
préconisée par la loi actuelle permet aux citoyens d'effectuer
une partie de leurs achats le dimanche Ils peuvent aller au restaurant, au
cinéma, pratiquer leur sport favori et voyager, mais, également,
ils peuvent aller au dépanneur, à la pharmacie, au club d'achat
de même qu'au centre de jardinage et chez le vendeur de piscines, au
marché public et au marché aux puces, bref se livrer
déjà à des activités qui, autrement, leur seraient
inaccessibles.
Le profil de la société québécoise a
changé. C'est là un aspect important de la question sur les
heures d'affaires. Il a subi de profondes métamorphoses au cours des
années. Le nombre de ménages à double revenu a connu une
forte augmentation et il en va de même du nombre de familles
monoparentales. Ces changements ont eu pour conséquence de modifier les
habitudes de consommation. La permissivité, même relative, dont
nous jouissons, nous a permis d'identifier clairement les besoins toujours
grandissants en ce domaine et il nous apparaît évident que la
fermeture complète de tous les commerces le dimanche serait à la
fois injustifiable et inacceptable.
La seconde, c'est-à-dire le statu quo renforcé de
nouvelles exemptions, perpétuerait, selon nous, des
inéquités majeures. On peut se rappeler - et je n'y étais
pas, le Regroupement n'existait pas à l'époque; d'ailleurs, il
est de formation très récente - que la commission Richard et la
commission Biron ont discuté de ces mêmes problèmes en
tentant de trouver une façon intermédiaire, c'est-à-dire
en conservant les exemptions; elles n'ont pas, finalement, solutionné le
problème. Au contraire, le problème s'est amplifié. Selon
nous, le statu quo, même avec de nouvelles exemptions, ne
réglerait pas plus le problème et on serait assis ici à
nouveau dans quelques années pour rediscuter de la question des heures
d'affaires.
Compte tenu de la capacité toujours plus grande des
commerçants de développer de nouveaux concepts leur permettant de
tirer profit des exemptions de la loi actuelle et d'offrir de nouveaux services
répondant mieux aux besoins de la population, il est évident,
selon nous, que
le maintien de la loi actuelle, à laquelle pourraient
éventuellement se greffer de nouvelles exemptions, confirmerait deux
classes de commerçants. La première serait celle des
commerçants avantagés par la loi sur les heures d'ouverture telle
que nous la subissons actuellement et dont les marchés d'alimentation de
grande surface plus particulièrement se plaignent. La seconde classe
serait constituée de commerçants qui, à l'instar des
grands centres de rénovation, assisteraient impuissants à
l'effritement de leur part de marché au profit des marchands de la
première catégorie. C'est précisément cette
situation que nous dénonçons.
Il nous apparaît que pour mettre un terme à la
discrimination entre les commerçants, la libéralisation
complète des heures d'affaires est l'approche la plus équitable,
voire même inévitable. Selon nous, et c'est sans prétention
que nous disons ceci, une telle libéralisation ferait en sorte que les
droits et libertés individuelles primeraient sur la protection de
certains commerçants. La qualité de vie, selon nous, de toute une
société tiendrait à beaucoup plus que la seule
journée du dimanche. Les lois du marché dicteraient la ligne
à suivre de chacun des commerçants, de même que les heures
et les saisons durant lesquelles ils choisiraient de demeurer ouverts. Dans un
tel contexte de libéralisation, c'est le commerce de détail qui
s'adapterait aux besoins de la population et non l'inverse.
En pareil contexte et en considérant que, dans une certaine
mesure, la rénovation est une activité saisonnière, voire
même un loisir, on aurait tort de croire que notre démarche en
regard de la libéralisation des heures d'ouverture vise essentiellement
la protection des secteurs d'activité commerciale comme le nôtre
qui, à toutes fins utiles, sont dans l'impossibilité, à
moins d'enfreindre la loi existante, de tirer profit d'exceptions.
Bien que nous ne puissions nullement prétendre être experts
dans le domaine des besoins des consommateurs et que nous n'ayons pas
mené d'études exhaustives sur la question de la qualité de
vie, il nous semble que, justement, cette qualité de vie de l'ensemble
de la population est beaucoup plus importante que les considérations
monétaires rattachées à l'ouver ture ou non des commerces
le dimanche Cette qualité de vie. il convient de le souligner,
déborde largement le cadre étroit des heures d'ouverture le
dimanche. Elle fait appel à d'autres considérations.
Vu de façon globale, l'exercice de la liberté individuelle
joue, selon nous, un rôle fondamental dans l'accroissement du
mieux-être de l'ensemble des citoyens.
L'actuelle conjoncture de l'ensemble du marché de la vente au
détail, au delà de toute considération mercantile,
recèle une notion que l'on ne saurait passer sous silence. Il s'agit de
la notion de service à la clientèle considérée
aujourd'hui même comme tout aussi importante que le produit
lui-même Cette notion de service, parce qu'elle correspond à un
désir profond du consommateur, s'inscrit parfaitement dans le
présent débat
En d'autres termes, pour le consommateur, ce n'est pas tant le fait de
pouvoir acheter un quelconque produit qui est important qu'entre autres de
pouvoir le faire au moment où il le désire. Prenons l'exemple, et
qui n'a pas vécu cet exemple, d'une personne qui a besoin d'un produit
de quincaillerie le dimanche pour compléter un travail de
rénovation entrepris la veille. Faute de pouvoir se le procurer chez son
fournisseur habituel, cette personne ira se le procurer là où
elle est susceptible de le trouver. Si c'est à la pharmacie à
escompte, c'est là qu'elle va aller et si c'est au club d'achat, c'est
là qu'elle va aller le trouver.
Ce n'est donc pas tant le développement économique des
commerces qui est en cause que la satisfaction du besoin du consommateur au
moment où celui-ci se manifeste. À vrai dire, c'est, selon nous,
le respect de la liberté des individus qui devrait présider
à la decision que prendra le gouvernement sur les heures d'ouver-ture en
semaine et le dimanche plutôt que la protection de certains types de
commerces face à d'autres qui sont avantagés par la loi actuelle
ou qui le seraient dans une loi nouvelle ou amendée Le
développement économique est important, soit, mais en
dépit de ses incontestables mérites, il ne devrait pas être
placé au dessus de la qualité de vie et du respect de la
liberté des individus.
Par ailleurs, il n'est pas sûr que certains commerces, compte tenu
du leur emplacemenl géographique et des produits qu'ils offrent,
trouveraient leur compte en étant ouverts le dimanche. La
décision que prendra un marchand de demeurer ouvert ou non le dimanche
sera en partie dictée par le profit qu'il pourrait en tirer. Mais,
encore là, c'est le libre exercice de sa liberté qui
prévaudra.
Quant à nos employés, n'ayant pas fait de sondage interne
sur la question, nous serions tout de même portés à croire
que les employés de notre secteur réagiraient de la même
façon que les employés du secteur de l'alimentation en
préférant, dans le cas des employés à temps complet
qui comptent environ pour 30 % rie nos employés, no pas travailler le
dimanche et, dans le cas des employes à temps partiel qui comptent
environ pour la différence, 70 %, augmenter leur nombre d'heures
travaillées en travaillant justement le dimanche.
La libéralisation des heures d'ouverture nous semble
inévitable dans la mesure où l'équité veut que tous
les commerçants soient libres d'ouvrir leurs portes s'ils le
désirent sans avoir à encourir les rigueurs de la loi telle que
nous la connaissons actuellement
Bref, ce que nous aimerions, c'est que le
législateur prévoie l'érosion de notre
marché par des commerçants qui se prévaudraient
d'exemptions auxquelles nous n'avons pas droit parce que nous sommes des
magasins de grande surface ou parce que ces exemptions ouvrent la porte
à la créativité commerciale.
Au fond, nous ne voulons pas nous retrouver dans la même situation
que les supermarchés d'alimentation, situation qui s'est traduite,
depuis 1984, par une diminution sensible de leur part de marché au
profit de divers autres commerces bénéficiant d'exemptions et
d'exceptions qu'on a appelées structures parallèles.
Ce que nous craignons fortement, c'est que le maintien de la loi
actuelle de même que son élargissement par la création de
nouvelles exemptions en faveur des marchés d'alimentation de grande
surface ou de tout autre type de commerce ne fassent que maintenir
l'iniquité à notre égard.
En conclusion, nous souhaitons, étant d'avis que c'est la seule
solution équitable, que le gouvernement légifère dans le
sens de la libéralisation des heures d'ouverture pour répondre
aux nouvelles attitudes de consommation et favoriser une meilleure
qualité de vie par le respect de la liberté de chacun. En
agissant ainsi, il mettrait un terme aux iniquités qui, si elles
devaient être maintenues, auraient des effets néfastes sur le
développement des commerces que nous représentons. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
monsieur. M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Je vous remercie beaucoup, M. Guay. Pour
les fins de la discussion, je veux être bien certain. S'il y avait
l'élimination des exceptions - vous avez mentionné les piscines,
les clubs d'achat, les marchés aux puces, évidemment, et l'autre,
c'étaient les pharmacies d'escompte qui vendent de vos produits - est-ce
que vous auriez la même position d'ouvrir le dimanche?
M. Guay: Notre position est la conséquence d'une loi dont,
d'une certaine façon, II est extrêmement difficile de
contrôler l'application. Et nous croyons que, même si les
exceptions que vous mentionnez étaient effectivement retirées, la
créativité commerciale entraînerait quand même la
création de nouveaux concepts, de nouvelles méthodes d'achat et
nous serions quand même pénalisés.
M. Tremblay (Outremont): Ce que vous dites, c'est que la loi
serait peut-être applicable à court terme, mais elle ne serait pas
durable.
M. Guay: Effectivement, sur une base à long terme, nous
croyons que nous serions assis ici à nouveau dans quelques
années.
M. Tremblay (Outremont): C'est clair. Deuxième question,
deuxième principe: besoin des consommateurs. En quoi est-ce un besoin
réel des consommateurs d'aller acheter vos produits le dimanche?
M. Guay: II y a deux aspects à cette question-là.
Je vous dirais que, d'une certaine façon, les grands centres de
rénovation, les produits qu'on retrouve dans ces grands
centres-là, on pourrait même les qualifier, si on voulait rester
carrément à l'intérieur de la législation actuelle,
de besoins saisonniers, au même titre que les piscines ou les centres de
jardinage. Mais, d'une certaine façon, comme on le mentionne dans le
mémoire, on n'a pas fait d'analyse poussée sur les besoins des
consommateurs. On se réfère au document d'information
préparé par le ministère dans lequel on retrouve des
études qui, à notre avis, supportent le fait que les
consommateurs ont besoin, le dimanche, d'un certain nombre de choses.
L'augmentation des familles monoparentales, les ménages à double
revenu, la compression des heures disponibles pour le magasinage deux soirs par
semaine, jeudi et vendredi, et le samedi, selon nous, indiquent clairement que
les consommateurs ont besoin, entre autres, des produits que nous vendons et
à des périodes qui sont, entre autres, le dimanche et qu'il
serait préférable qu'ils s'approvisionnent chez nous, le
dimanche.
M. Tremblay (Outremont): Ma dernière question. Comment
va-t-on faire pour concilier votre point de vue avec Ro-Na et Canadian Tire qui
vont venir nous dire qu'ils sont défavorables? Est-ce parce qu'ils n'ont
pas la même conception - deux choses - de la qualité de vie que
vous? Deuxièmement, c'est que vous, vous avez une certaine vision de
l'avenir et vous dites qu'il va y avoir de la location, parce que, de la
location, en passant, ce n'est pas régi par la loi des heures
d'ouverture.
M. Guay: C'est exact.
M. Tremblay (Outremont): Ça veut dire que la location, les
gens peuvent louer le dimanche, ça crée une certaine forme de
concurrence, et vous avez mentionné la télévision
interactive. Alors, je vous donne l'opportunité, aujourd'hui, de nous
éclairer, de nous donner de l'information sur deux de vos concurrents
qui sont défavorables à l'ouverture le dimanche.
M. Guay: Je vous dirai en passant, même, qu'il faut
s'assurer d'une chose, encore là... Je n'ai pas pris connaissance de
tous ces mémoires, mais, chose certaine, le Regroupement qui est ici,
c'est un regroupement où on a retrouvé un consensus. Les
personnes que je vous ai mentionnées tantôt ont toutes
été appelées à donner leur point de vue. Souvent,
les mémoires présen-
tés par des groupes comme - je ne veux rien enlever à leur
mémoire - Ro-Na ont été l'objet d'un document
préparé au niveau du regroupement et centralisé, la
consultation n'est pas toujours complète. Je pense même... J'ai
entendu dire qu'il y a certains mémoires qui référaient
même à la présence ou à l'appui de Brico Centre ou
même de Pascal à l'intérieur de ces mémoires, ce qui
n'est pas le cas. (10 h 30)
Je vous dirais que, quant à eux, d'une part, je pense
qu'effectivement ils manquent de vision. Je pense qu'ils s'attardent au
passé et pas à l'avenir et qu'ils ne voient pas le
développement du commerce tel que nous, on le perçoit, en termes
de concurrence. D'une façon générale, on peut le
comprendre par le fait que la majorité des membres de ces regroupements
sont des plus petits centres qu'on retrouve en région et qui sentent
moins que nous, finalement, la pression concurrentielle. Et, dans ce
contexte-là, on croit que s'ils étaient mis au fait de cette
situation-là, ils en viendraient peut-être à la conclusion
que le marché doit être protégé aussi.
M. Tremblay (Outremont): J'ai une dernière... Je m'excuse,
j'en ai une autre, parce que je vais profiter de la présence de M.
Chassé, de Pascal.
M. Guay: Bien sûr, oui.
M. Tremblay (Outremont): Vous avez fait récemment de la
publicité dans les journaux à l'effet qu'on pouvait acheter des
meubles par la télématique, par Alex. Est-ce que - et
peut-être pouvez-vous revenir, M. Guay aussi - c'est une tendance que
vous allez faire?
M. Chassé (Alain): Je vous dirai là-dessus que si
on parle de meubles, il s'agit d'une compagnie différente de J. Pascal
inc., qui est celle que je représente.
M. Tremblay (Outremont): Est-ce que c'est associé?
M. Chassé: C'est associé, éventuellement. Ce
sont deux entités qui sont différentes.
M. Tremoiay (Outremont): Mais, M. Chassé, sur ce
point-là, parce que je pense que c'est très important, parce
qu'on va directement au principe de la loi qu'on essaie de faire, d'avoir une
loi durable, si les commerces de détail ne peuvent pas ouvrir le
dimanche - admettons qu'on arrive à cette conclusion-là à
la suite des représentations qui sont faites - est-ce que des
entités comme la vôtre, que ça soit Val Royal ou autre,
pourraient incorporer une compagnie à côté et vendre les
mêmes meubles que vous vendez au détail la semaine, par le
système Alex, les fins de semaine?
M. Chassé: Ça serait sûrement concevable.
M. Tremblay (Outremont): Est-ce que c'est ça que vous
êtes en train de faire?
M. Chassé: Non, définitivement pas. Je pense que
c'est tout simplement à titre expérimental pour l'instant, parce
que c'est une expérience qui est relativement nouvelle. On tente une
approche différente. Mais quant à la vision à long terme,
il va falloir suivre ce que cette expérience-là va nous
donner.
M. Tremblay (Outremont): Parfait! Je vais plus loin. Je vais
juste essayer plus loin...
M. Chassé: Et si je peux me permettre, je ne vois pas
pourquoi on devrait faire - et c'est là notre position - indirectement
ce qu'on ne pourrait pas faire directement et ce qu'on vous dit, c'est:
Donnez-nous une loi qui nous permet de le faire directement.
M. Tremblay (Outremont): Ce n'est pas ça... Oui, je
comprends ça. Je suis entièrement d'accord avec l'affirmation que
vous venez de faire, mais je veux juste aller plus loin, une seconde. S'il y
avait un achalandage important au niveau des achats par Alex et si vous
aviez... Je ne sais pas s'il y a des conventions collectives ou combien
d'employés vont travailler dans la compagnie affiliée.
Théoriquement, on pourrait arriver dans une situation où les gens
travailleraient le dimanche à remplir ces commandes-là et ils
pourraient livrer la semaine.
M. Chassé: Définitivement.
Définitivement.
M. Guay: Si je peux me permettre, à ma connaissance - et
je ne le jurerais pas, mais j'en suis pas mal convaincu - Canadian Tire qui
présente, de ce que je comprends, un mémoire également et
qui est contre l'ouverture le dimanche, est également inscrite sur Alex
avec son catalogue au complet qui permet l'achat, carrément, de tous
leurs produits le dimanche Je vous inviterais même à leur poser la
question lors de la présentation. Mais, pour moi, c'est une
évolution qui est pratiquement irréversible, cette façon
de faire, ce commerce.
M. Tremblay (Outremont): Je ne sais pas... Est-ce que j'ai
pris... Juste... Non? Vous êtes d'accord, Mme la députée de
Taillon?
Mme Marois: Oui, il n'y a pas de problème.
M. Tremblay (Outremont): Vous, vous êtes une personne des
ressources humaines. Je vois que vous êtes directeur des ressources
humaines.
M. Chassé: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Bon. Une des grosses discussions de
ça, c'est que, théoriquement, on pourrait en arriver là et
dépendamment de la demande, les gens, le consommateur, lui, ne saura pas
ce qui se passe. Nous, en tant que gouvernement, ça va être
difficle de contrôler les camions qui vont sortir. Vont-ils sortir le
samedi soir, pendant la nuit, ou le dimanche pour les livraisons? Toujours dans
le concept de la loi durable, quelqu'un va pitonner son Alex, la commande va
rentrer chez vous, disons le vendredi ou possiblement le samedi, parce que la
semaine, il va travailler et il n'aura pas le temps de regarder vos catalogues
ou votre publicité. Il pitonne le samedi. Et là, on essaie de...
Le législateur, il faut qu'il pense à tout. Il ne faut pas qu'on
se fasse ramasser, par exemple, avec des scénarios d'un club Price qui
ouvre ses portes à côté et après ça, on a des
problèmes. Est-ce que c'est possible qu'au lieu de travailler la
semaine, mettons le jeudi et le vendredi, par la télématique, les
gens travailleraient le samedi et le dimanche, que vous feriez la livraison le
lundi et le mardi et, dans ce cas-là, ce serait congé pour ces
personnes-là, le jeudi et le vendredi, mettons?
M. Chassé: Ce qu'il faut comprendre, c'est que, dans notre
domaine, il y a énormément d'emplois à temps partiel.
Disons que les besoins de la semaine sont généralement
assurés par du personnel à temps plein. Quand on parle du jeudi
soir, et vous me corrigerez si vous avez d'autres exemples, du vendredi soir et
du samedi, on a recours déjà à des gens qui ont des
emplois à temps partiel.
M. Tremblay (Outremont): Non, mais...
M. Chassé: Alors, si le dimanche devait, comme vous le
mentionnez, devenir une journée supplémentaire,
éventuellement, ceux qui sont déjà là, qui
travaillent les jeudi soir, vendredi soir et samedi, pourraient fort bien
travailler le dimanche.
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui.
M. Chassé: Et ils sont disposés à le faire,
d'ailleurs, parce que leur demande la plus forte, en ce qui nous concerne,
c'est d'avoir davantage d'heures...
M. Tremblay (Outremont): D'accord.
M. Chassé: ...de faire davantage de revenus.
M. Tremblay (Outremont): Parfait! Mais ce n'est pas dans
cette...
M. Guay: Je pense que la réponse à votre question,
c'est oui, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Je le sais, c'est oui, mais ce n'est pas
dans cette optique-là au niveau des employés
spécifiquement que je posais la question, c'est plus à savoir
pour des questions de rentabilité, des questions économiques.
Opérer un Pascal, un Ro-Na ou un Canadian Tire, ce sont des grands
locaux, des loyers, des taxes d'affaires...
Une voix: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Si on s'apercevait que, par la
télématique, c'est plus rentable, pour plusieurs raisons,
pourrait-on s'en aller vers ça? Vous pourriez penser à ça.
D'ailleurs, ce que vous me dites, c'est que Pascal et Canadian Tire y pensent
déjà.
M. Chassé: Définitivement.
M. Guay: Brico Centre y a pensé et même elle
continuera l'analyse et si, effectivement, après examen de la situation
dans six mois ou dans un an, on s'aperçoit que les besoins sont
là et qu'effectivement d'autres interviennent dans le marché, on
va intervenir dans le marché aussi.
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Taillon.
Mme Marois: Si on continuait dans ce scénario-là,
on pourrait imaginer aussi que quelqu'un peut tout à fait, pendant le
week-end ou a n'importe quel moment du jour ou de la nuit, entrer sur
ordinateur, par l'intermédiaire de ce système-là, sa
commande. Mais cela n'oblige absolument pas l'entreprise à avoir
nécessairement le samedi ou le dimanche ou le jeudi soir ou le vendredi
soir... mais à traiter la commande, du lundi au vendredi, aux heures
d'ouverture habituelles des bureaux, par exemple, en ne parlant pas des
commerces. Donc, bien sûr, ça donne accès à la
personne à tout moment à un catalogue, mais le traitement de la
demande comme tel peut se faire tout à fait à d'autres moments.
D'ailleurs, les guichets automatiques nous donnent le service, dans une caisse
populaire ou dans une banque, mais ça n'exige pas qu'il y ait du
personnel là. C'est au début de la semaine ou en dehors
des...
M. Tremblay (Outremont): Je suis d'accord, mais juste... Je pense
que c'est intéressant, c'est fondamental parce qu'on va avoir des
personnes...
Mme Marois: Oui.
M. Tremblay (Outremont): ...mais est-ce que ça ne pourrait
pas être un moyen éventuel - et
je ne vous prête pas d'intention surtout, je ne vous en
prête pas, ne prenez pas ça comme ça, mais ça va
être important - de faire... Pour des raisons, par exemple, de
main-d'oeuvre, pour des raisons syndicales, pour des raisons de
rémunération, on pourrait dire. On fait une compagnie à
côté par télématique et on pourrait peut-être
contourner - H faut penser à ça dans une vision d'avenir - des
conventions collectives pour dire: Voilà, maintenant, on a une nouvelle
entreprise, on va fermer notre Pascal traditionnel parce que ce n'est plus
rentable. Là, j'essaie de voir... Je vais poser la question tout
à l'heure à la FTQ: La position syndicale dans un tel contexte
quelle serait-elle?
Mme Marois: Oui, ça se pourrait dans un sens qu'H se
crée une autre unité à côté. D'ailleurs,
n'importe quelle entreprise le fait selon que ça convient ou non
à sa structure de propriété. Bon, elles pourraient le
faire et à ce moment-là, bien sûr, le poids incombe encore
une fois aux représentants des travailleurs et des travailleuses
d'essayer d'aller syndiquer à nouveau la nouvelle entité qui se
crée. On peut peut-être imaginer que les changements peuvent
être assez significatifs dans nos modes de fonctionnement pour dire: Bon,
bien, ça n'existera plus... Ça n'existera plus l'achat sur place,
mais ça va se faire uniquement par l'intermédiaire d'un outil qui
est le catalogue ou qui est l'écran sur lequel apparaît le
produit. Enfin, en France, les gens ont le système...
Une voix: Minitel.
Mme Marois: ...Minitel. Avec le Minitel, il y en a des
systèmes d'achat. Je ne sais pas si cela a vraiment fait baisser les
achalandages. En tout cas, moi je n'ai pas de données sur ça.
Ça serait peut-être intéressant d'aller en chercher mais...
J'ai un peu de difficulté... Quand tu veux t'ache-ter... J'imagine,
là, la vraie vie. Tu veux tacheter un set de salon. Tu vas le voir
quelque part. Peut-être bien que tu vas le commander par catalogue, mais
tu vas le voir, tu vas l'essayer, tu vas t'asseoir dedans...
M. Guay: Mais je pense qu'il faut souligner quand même que
c'est l'une des facettes qui démontrent la créativité des
commerçants. Ça n'est pas que l'avenir. On ne peut pas, je pense,
s'arrêter là-dessus et penser que ça va être
ça qu'il faut. Si ce n'est pas ça, ça va être autre
chose. Il y a quelques années, des clubs d'achat il n'y en avait pas.
Puis, il y aura autre chose qui se présentera dans les années qui
viennent si on continue d'avoir une loi qui ne répond pas aux besoins
des consommateurs. Ça ne sera peut-être même pas la
télévision interactive. Elle sera complètement
abandonnée peut-être dans quelque temps, mais il y aura autre
chose auquel on n'a pas pensé maintenant.
Mme Marois: Mais, moi, je vais revenir sur ce point de vue. Vous
disiez, bon, et le ministre a posé... ça a été sa
première question. Dans le fond, si on avait une loi que l'on pouvait
rendre étanche, est-ce que votre position serait la même? Vous,
vous dites: Oui. D'abord, premièrement, vous pensez que ce n'est pas
possible qu'il y ait une loi étanche à cause de l'imagination et
de la capacité que l'on a d'essayer de contourner, etc Ça, c'est
un point de vue. Et d'autre part, vous dites: De toute façon, la demande
est là et, est-ce que, d'avoir une vision, ce n'est pas s'assurer qu'on
réponde à la demande? La demande est là parce qu'il y a eu
offre de produits aussi, parce qu'il y a eu marketing, parce qu'il y a eu un
trou dans la loi et que s'est développée toute espèce de
forme d'outils pour aller chercher le consommateur et lui vendre des produits.
C'est la loi actuelle qui a permis que naissent des pharm-escomptes qui vendent
des scies rondes, des clous et des pinceaux. Alors, vous, votre point de vue
c'est de dire: Oui, il y a une demande. Elle est là et il faut y
répondre. Moi, je vous dis: Oui, mais on l'a suscitée, cette
demande-là. Et, je vais juste continuer et après ça je
vous entends.
Il y a un autre point de vue qui a été
développé. Si vous étiez là hier, vous l'avez
sûrement entendu, un certain nombre d'entre vous. Non, vous me dites?
Alors, on va le reprendre. Il y a un autre point de vue qui a été
apporté qui dit: Si on resserre la loi et qu'on ne permet que du
dépannage de type alimentaire et de type santé, pharmacie, il
pourrait y avoir là, on a dit... Maintenons quelques petites exceptions,
mais resserrons beaucoup la loi, ramenons-la à trois employés en
tout temps pour répondre aux besoins de dépannage et donnons-lui
des dents. Faisons en sorte qu'il y ait des amendes suffisamment
sérieuses, suffisamment importantes qui s'appliquent et qui ne soient
pas que théoriques, de telle sorte qu'on la fasse respecter, cette
loi-là, et qu'on fasse respecter le principe d'équité.
Vous avez tout à fait raison sur l'équité, tout le monde
en convient ici, de ce côté-ci ou de l'autre, ça n'a pas
d'allure; ça vous dessert actuellement comme ça dessert beaucoup
d'autres commerçants. Dans le domaine de l'alimentation, entre autres,
les grandes chaînes se sont vu prendre des parts de marché par des
boutiques spécialisées dans des grandes surfaces.
Une voix: Exact.
Mme Marois: Je reviens à cet autre point de vue qui dit:
Est-ce que l'avenir, ce ne serait pas aussi de se réserver, comme
collectivité, une journée dans notre vie active, sur une semaine,
où on tenterait de ralentir au maximum et le plus possible les
activités de production et les activités commerciales? Vous
semblez critiquer ce point do vue là en disant que c'est ça. la
qualité de la vie. Est-ce qu'il n'y a pas une autre façon
de traduire ça? Je vais aller plus loin là-dedans. Hier,
la Fédération des ACEF et d'autres associations de consommateurs
- il y a eu différents groupes, mais un certain nombre d'associations de
consommateurs - nous ont dit: Quand on fait une distinction, qu'on
établit un clivage entre qui veut magasiner le dimanche et qui ne veut
pas, on se rend compte que, si on s'adresse à des gens qui ont une haute
scolarité, qui sont relativement à l'aise quant à leurs
revenus, qui sont habituellement des gens seuls, des "yuppies" ou d'autres noms
nouveaux qu'on leur donne, c'est quoi...
Une voix: "DINK".
Mme Marois: "DINK*. C'est la nouvelle mode; on s'expliquera
ça plus tard.
M. Guay: Oui. C'est même dépassé un peu.
Mme Marois: Parce que eux ne seront pas amenés à
travailler le samedi ou le dimanche et parce qu'ils se disent: Bon, moi, j'ai
plein de temps; ce serait agréable aussi que je puisse aller faire mes
courses le dimanche et que je puisse répondre à mes besoins,
à ce moment-là, ils disent: Oui, nous, on veut que ça
ouvre. Quand on s'adresse à une autre catégorie de gens à
revenu moyen, des gens avec enfants, des travailleurs qui pourraient être
susceptibles de se retrouver à les offrir, ces services-là, comme
travailleurs, la réponse devient très différente.
D'accord? Alors on est placés, nous, dans ce dilemme et, mon point de
vue, c'est qu'on peut peut-être imaginer qu'il y a quelque chose dans le
fait qu'on mette un peu l'accent sur les relations entre les personnes, sur une
vie familiale, même si elle est plus réduite qu'elle était,
si on a deux petits plutôt que dix, on en a encore... enfin,
j'espère qu'on en aura encore. Mais qu'on mette un peu plus de temps sur
ce type de contacts entre personnes plutôt que sur l'activité
commerciale. Là, vous avez le portrait en plus de ce que je pense...
M. Guay: Oui, je le pense. (10 h 45)
Mme Marois: ...et vous le saviez déjà.
M. Guay: Très clairement.
Mme Marois: Mais j'aimerais que vous répondiez à
cette question...
M. Guay: Laquelle? Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Marois: ...sur la commercialisation. Il y en a beaucoup.
Allez-y.
M. Guay: Si je reprenais au début, je vous dirais - et
c'est un certain nombre de questions très intéressantes - qu'en
tant que commerçants, nous, ce qu'on peut vous dire, et dites le
contraire si vous n'êtes pas d'accord, c'est qu'on est à
l'écoute de la clientèle et qu'on répond à ses
besoins. Quand vous me dites qu'on a créé ces besoins-là
par le marketing et tout ça, je suis obligé de vous dire que ce
n'est pas le cas. Dans notre cas à nous, en tant que Regroupement ici,
si le besoin n'est pas là, on ne court pas après pour faire des
frais additionnels. Mais, si le besoin est là, par contre, on l'entend,
on a des réunions qu'on appelle des locus groups", et les clients nous
disent: On a de la misère; quand on va dans vos magasins le samedi,
ça n'a pas d'allure, il y a trop de monde. Le jeudi soir, le vendredi
soir, il y a trop de monde. Ce n'est pas possible. On est incapables de donner
le service à la clientèle. Tout le monde arrive chez nous le
jeudi soir, le vendredi soir à la course et le samedi, il y a une
congestion à l'intérieur de nos magasins pour donner du service
et on n'est pas capables de le donner. Ma réponse là-dessus,
c'est non, on ne le crée pas, il est là, ce besoin. Quand vous me
parlez des "DINKs" ou des autres...
Mme Marois: "Double income no kids".
M. Guay: ...qui ont peut-être plein de temps et tout
ça, ce n'est pas le cas. Ils n'ont pas de temps, justement. C'est
ça. Ils n'ont pas de temps. Ils courent continuellement et ils
concentrent toute leur activité commerciale dans ces trois sections du
jeudi soir, du vendredi soir et du samedi. Et on croit que la qualité de
vie serait l'élargissement, et justement, la possibilité
d'équilibrer finalement tout ça au choix du consommateur, pas
imposé par le commerçant, mais bien au choix du consommateur,
plutôt que de courir la semaine et tout ça, puis d'essayer de
finalement arriver... On est dimanche et, maintenant, c'est ça, la
qualité de vie, parce que c'est dimanche.
On a des employés même qui nous ont dit qu'ils aimaient
mieux jouer au golf la semaine, que ça ne les dérangeait pas de
travailler le samedi parce que, actuellement, on le vit déjà un
peu. Le samedi, c'est une journée également de fin de semaine. Il
y a des gens qui aiment mieux travailler le samedi pour être capables
d'avoir le mardi et le mercredi libres et de ne pas être dans la
congestion globale pour justement aller faire du ski ou autre chose.
Je reviens à votre question qui disait: Supposons qu'on
réussit à tout fermer ça et à empêcher...
Nous autres, on dit: On ne pense pas que ce serait effectivement
justifié. Je vous dirais qu'à choisir entre deux maux, à
choisir entre une situation telle qu'on va la vivre si on garde le statu quo,
avec des exemptions et tout ça, et une situation où tout le monde
serait obligé de fermer, on préférerait que tout le
monde soit obligé de fermer. Notre argument ici, devant vous
autres... On n'est pas des experts sur la qualité de la vie. On peut
donner notre opinion et on n'est pas plus nombreux qu'on est, c'est tout, et on
n'est pas des sociologues et tout ça. On donne notre opinion, notre
point de vue.
Ce qu'on peut vous dire, par contre, c'est que la question de
l'équité entre les commerçants, on la connaît parce
qu'on la vit quotidiennement et qu'on voit notre part de marché
s'effriter actuellement un peu, mais on imagine qu'elle va s'effriter beaucoup
plus dans le futur. C'est à cause de ça qu'on tient à ce
que ce soit protégé.
Le Président (M. Leclerc): Bien. M. le
député d'Orford.
M. Benoit: Je voudrais juste dire une chose à Mme la
députée, d'abord. Pour ce qui est de la vente par catalogue, en
ce moment, une des grandes cartes de crédit mondialement reconnues,
où 24 heures par jour vous pouvez appeler... C'est une ville
nord-américaine, non pas au Québec. On va vous répondre en
français, 24 heures par jour et il y a du personnel - ce n'est pas un
tape recorder" - qui va prendre votre appel. Vous allez leur dire... Et vous
pouvez acheter dans ce môme magazine qui est attaché à
votre carte de crédit à peu près n'importe quoi, à
partir d'un "computer", en passant par des meubles, des bicyclettes, des
volumes, des étagères. Ils vont vendre n'importe quoi et, 24
heures par jour, sept jours par semaine, il y a quelqu'un là qui va vous
parler en français et c'est une ville nord-américaine, non pas
québécoise.
Dans votre mémoire, aux pages 5 et 7, vous parlez des
libertés individuelles. Comme libéral, vous comprendrez que je ne
peux pas faire autrement qu'être sensible à ce discours. Comment
allez-vous pouvoir allier ce discours de liberté à celui de votre
personnel, l'individu qui ne voudra pas travailler le dimanche? Comment
allez-vous pouvoir marier tout ça?
M. Guay: C'est évident qu'on ne peut faire une omelette
sans casser des oeufs. On ne se contera pas d'histoires. On ne peut pas
commencer à vous dire que d'ouvrir le dimanche, il ne va y avoir que des
gens effectivement dont ça va être le bonheur de travailler le
dimanche. Ce n'est pas le cas. Ce ne sera pas facile. Il va falloir s'asseoir
avec nos employés, discuter, prévoir. Il y a déjà
des conventions collectives qui prévoient que, si jamais
l'élargissement est possible, le dimanche va faire partie de la semaine
de travail. Dans d'autres conventions collectives... Probablement qu'il y en a
qui n'ont pas de convention collective. Mais, d'une façon
générale, je pense qu'on va devoir s'asseoir avec nos
employés et discuter de la question et on a déjà
commencé à le faire. On a des réactions diverses. Puis, on
va trouver des façons de remplir, en môme temps, les besoins de la
clientèle et de s'assurer que nos employés sont heureux. On doit
fournir un service à la clientèle. C'est notre mission. Il va
devoir y avoir des gens dans ces magasins-là le dimanche. Ça va
être ceux préférablement qui n'auront pas d'objection
à travailler le dimanche. On est convaincus qu'avec la structure
actuelle, 30 % temps plein, 70 % temps partiel, désirant majoritairement
travailler le dimanche, on va retrouver à l'intérieur de
ça suffisamment de gens qui vont effectivement accepter de travailler le
dimanche pour répondre aux besoins, de la même façon qu'il
y a un paquet de monde qui travaille dans les restaurants, qui travaille un peu
partout et ne crie pas non plus à l'injustice du fait qu'ils travaillent
le dimanche. On pense qu'on va être en mesure de répondre à
ça.
M. Benoit: Est-ce qu'on créera de nouveaux emplois ou si
c'est du personnel que vous avez déjà qui va travailler un plus
grand nombre d'heures?
M. Guay: C'est difficile à répondre clairement
à cette question-là parce qu'on ne sait pas ce que le futur nous
réserve. On n'a pas de données précises là-dessus.
Dans notre cas à nous, en tant que grand centre de rénovation, on
soupçonne que durant certaines périodes de l'année, on
serait susceptible de créer de nouveaux emplois. Mais, je veux dire, je
ne pense pas que ce soit un élément fondamental dans notre
argumentation à l'effet qu'on va créer effectivement des emplois.
Mais, si on pense que notre période la plus active c'est avril, mai,
où vraiment le besoin se fait sentir de façon très
aiguë, comme dans le cas des piscines, des centres de jardinage,
peut-être que pendant cette période-là, le fait de
répondre plus adéquatement aux besoins de la clientèle va
amener la création de certains emplois à temps partiel,
entendons-nous, pas des emplois à temps plein, à ce
moment-là, mais quand même des emplois, quand même de la
rémunération. Et pendant d'autres périodes, il va y avoir
un équilibre qui va se faire.
M. Benoit: Sans connaître les stratégies de vos
entreprises, dans vos discussions, est-ce que les gens qui accepteraient de
travailler le dimanche exigeraient une rémunération
supplémentaire que celle qu'ils ont normalement les soirs ou sur
semaine?
M. Guay: On peut difficilement, encore là, répondre
à ça. Vous allez avoir la FTQ qui va venir devant vous. En fait,
dans notre cas à nous...
M. Benoit: J'espère que vous ne représentez
pas la FTQ.
M. Guay: Non, non, pas du tout, mais on a d'excellentes relations
avec la FTQ. Dans notre cas à nous, parce que je parle en mon nom
personnel en tant que Brico Centre. Pascal n'est pas syndiqué, d'autres
le sont avec d'autres syndicats. Mais, c'est possible, effectivement, que les
employés réclament une compensation monétaire et a priori,
je vous dirais qu'on devra s'asseoir et discuter. Ça fera
peut-être partie de la discussion, pourquoi pas?
Le Président (M. Leclerc): M. le député de
l'Acadie.
M. Bordeleau: Je ne sais pas si vous l'avez mentionné,
mais l'ensemble des commerces que vous représentez, ça correspond
à combien d'employés à temps plein?
M. Guay: Je vous dirais environ 1300. M. Bordeleau: 1300
à temps plein. M. Guay: Oui.
M. Bordeleau: Vous engagez à peu près combien de
temps partiel?
M. Guay: La différence, à peu près 3100.
M. Bordeleau: La différence entre 1300 et 3100. C'est
ça?
M. Guay: Non, non. Mais, 1300 à temps plein, et 3100
à temps partiel, 30 %-70 % à peu près.
M. Bordeleau: D'accord.
M. Guay: En tant que pourcentage.
M. Bordeleau: Bon, juste un commentaire peut-être. Je suis
un bricoleur et je vais vous faire juste une remarque, au départ. En
fait, on parle d'ouverture le dimanche. Moi, j'ai l'impression, comme
consommateur, que quand je vais dans les magasins de bricolage le samedi, j'ai
un moins bon service que si j'y vais durant la semaine parce que la fin de
semaine, j'ai l'impression que c'est du personnel d'appoint qui vient
compléter et que les gens sont moins qualifiés. Ce n'est pas
comme aller, je ne sais pas moi, prendre une boîte de conserve dans un
rayon.
M. Guay: Non.
M. Bordeleau: Bon. C'est une première question. Est-ce que
vous pensez qu'en élargissant les ouvertures au dimanche, ça ne
posera pas un problème de ce côté-là au niveau de la
qualité du service que vous allez donner à vos clients?
Je vais poser tout de suite ma deuxième question. Vous pourrez y
répondre en même temps. Est-ce que vous prévoyez qu'une
ouverture, par exemple, des commerces le dimanche, ferait en sorte qu'il y
aurait un accroissement du chiffre d'affaires ou qu'il y aurait un
étalement du même chiffre d'affaires actuel? J'ai l'impression, en
tout cas, que dans le genre de commerce que vous avez, il n'y a pas de perte,
contrairement, par exemple, à l'alimentation où il y a des
pertes, par exemple, et on nous dit: II y a une partie des coûts que
ça impliquerait d'ouvrir le dimanche qu'on absorbe déjà
à cause des pertes étant donné qu'on ferme le samedi et
qu'on rouvre le lundi, par exemple, dans le domaine des fruits et ces
choses-là.
Alors, vous, j'ai l'impression qu'on ne peut pas dire qu'il y aurait des
pertes de ce type-là. Et si, disons, il n'y a pas un surplus du chiffre
d'affaires et que vous devez avoir des coûts plus grands
d'opération par l'ouverture le dimanche, est-ce que ça va avoir
un effet sur une augmentation du prix des produits que vous vendez? Ce sont les
deux questions que je voulais vous poser.
M. Guay: D'abord, je répondrais à votre
première question en vous disant que c'est un problème constant
qu'on a, effectivement, de donner la qualité du service la fin de
semaine par rapport à la semaine, entre autres, en fonction du fait que,
la demande étant tellement forte le samedi, à un moment
donné, c'est impossible de répondre adéquatement à
la demande, tout le monde se présente en même temps. Mais d'un
autre côté, notre vocation de service à la clientèle
nous amène - et encore aujourd'hui, les problèmes ne sont pas
tous résolus - à augmenter la formation même des
employés à temps partiel, puisque ce sont eux, finalement, qui
donnent le service en bout de ligne à ces périodes-là et
le samedi... Et on le fera pour le dimanche. Ils viendront, ces
employés-là, finalement, à être capables de donner
le même service qu'une personne à temps plein. Je suis convaincu
que dans d'autres secteurs...
M. Chassé: On vit beaucoup le problème suivant. Le
fait de ne pouvoir offrir davantage d'heures aux employés à temps
partiel, il y a un taux de rotation qui est quand même assez
élevé. Effectivement, c'est définitif que, le samedi, il
ne faut pas s'attendre à recevoir le service qu'on a
généralement en semaine avec les employés à plein
temps. Cependant, ce n'est pas l'effet recherché par notre position.
Mais un effet de cette proposition, ce serait très certainement, si on
pouvait offrir des heures additionnelles le dimanche, de pouvoir offrir, donc,
un meilleur salaire, dans l'ensemble d'un revenu sur une semaine, à nos
employés à temps
partit, de pouvoir les retenir et donc, de permettre
éventuellement à ces gens-là d'acquérir les
compétences nécessaires pour donner le service que l'on
recherche. C'est un effet indirect, si on veut.
M. Guay: Quant à votre deuxième question,
effectivement, on n'a pas de biens périssables; ce n'est pas notre point
de vue, on n'a pas de problème de ce côté-là. Sauf
que les coûts sont plus élevés et pas plus
élevés. Il y a une certaine partie des coûts qui sont
là de toute façon. On parte de grandes surfaces, on parle de
grands centres de rénovation. L'éclairage, le chauffage, c'est
là. Le loyer, c'est là aussi. La bâtisse est soit
payée, soit à loyer et, finalement, il n'y a pas de
différence entre les deux. Il y a un certain nombre de coûts fixes
qui sont déjà là et présents. Quant aux salaires,
on aurait probablement un meilleur équilibre, justement, entre les
diverses journées. Et dans l'ensemble, on ne voit pas qu'on aurait une
augmentation de coûts significative.
D'un autre côté, comme on le mentionnait dans le
mémoire, la clientèle recherche un meilleur service. Le prix est
un élément, mais ce n'est pas le seul élément. Et
elle serait probablement d'accord, nous le croyons, disposée à
payer peut-être un petit peu plus cher pour avoir le service au moment
où elle le veut. La preuve, quand elle va dans les pharmacies à
escompte, ce n'est pas le prix qui est l'élément
décisionnel, c'est le fait que c'est disponible à ce
moment-là et c'est là qu'elle va le chercher.
D'un autre côté, également, sur l'aspect de la
rentabilité, c'est possible que, durant certaines périodes,
effectivement, puisqu'on va répondre plus adéquatement aux
besoins de la clientèle, on va rentabiliser plus adéquatement
l'ouverture le dimanche. Mais de toute façon, et je pense que c'est
également le coeur de notre position, même si ça nous
coûtait un peu plus cher, on croit que c'est le prix à payer pour
conserver notre part de marché, d'ouvrir le dimanche.
M. Bordeleau: Parfait! Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Juste une chose sur laquelle je vais revenir. Vous
aviez mentionné la structure, c'est-à-dire la modification dans
la réalité des familles et des ménages. Hier, on nous
apportait la statistique suivante sur les chefs de famille monoparentale. Parce
qu'il faut toujours faire attention à certains arguments qui sont
à la limite de l'utilisable, dans certaines circonstances. On dit que
62,4 % des chefs de famille sont inactives - inactives au sens statistique du
terme - et donc n'ont pas besoin de temps supplémentaire pour magasiner.
Ça a été un argument qui nous est revenu souvent. Je vois
que vous faites référence à cette
réalité-là aussi dans votre mémoire. Donc, cela
veut dire qu'il y en a 38 %, 37 % qui sont actives ou actifs sur le
marché du travail, mais ça réduit un petit peu l'ampleur
de ce phénomène vu sous l'angle du commerce.
Je vais revenir sur une chose qui est la structure de
propriété. L'impression que j'ai, c'est que, quand Ro-Na et
d'autres viennent nous dire: Nous, nous ne souhaitons pas qu'il y ait
élargissement des heures d'ouverture mais plutôt resserrement,
plusieurs de ces entreprises-là sont la propriété
d'indépendants qui fonctionnent sous bannière, mais sont des
propriétaires uniques ou quelques-uns. Ceux-là sont bien
conscients qu'effectivement, si on élargit les heures d'ouverture, Hs se
disent "on n'a pas le choix", Hs font le même raisonnement que vous, ils
ont tout à fait raison. Si on veut garder notre part de marché,
si on veut être en affaires, il faut ouvrir nous aussi.
Eux disent, dune part, qu'ils sont plus en désaccord avec
ça parce qu'évidemment, ça les contraint, eux, dans leur
horaire du temps et eux font des choix, peut-être, différents, en
tout cas, qu'ils souhaiteraient différents et, dans ce sens-là,
à mon point de vue, selon le type de structure de
propriété auquel on fait face, les attitudes se modifient un peu.
J'ai peut-être tort et j'aimerais ça que vous me pariiez de vos
entreprises en particulier, parce que je ne connais pas nécessairement
bien chacun de vos cas: Est-ce que vos gens fonctionnent sous bannière?
Est-ce que ce sont des entreprises uniques avec du franchisage ou
autrement?
M. Chassé: Nos magasins sont corporatifs en ce qui
concerne Pascal.
M. Guay: Je pense que je peux répondre pour l'ensemble en
disant que ce sont, dans l'ensemble, des magasins corporatifs avec des
structures d'organisation, effectivement, qui sont plus importantes que ce
qu'on retrouverait habituellement à l'intérieur d'un commerce,
effectivement.
Mme Marois: Oui, c'est ça.
M. Guay: Mais j'ajouterais là-dessus que, curieusement -
je peux donner juste l'exemple chez nous - la structure corporative en
question, elle travaille souvent le dimanche.
Mme Marois: Hum, hum. Tout comme les personnes politiques.
M. Guay: Effectivement. Parce que, je veux dire, le commerce, ce
n'est pas juste cinq jours par semaine ou six jours par semaine, c'est une
journée également, H n'y a rien qui nous empêche de le
faire non plus...
Mme Marois: Non, non. Mais on sent quand même qu'il y en a
un clivage, voyez-vous, entre la structure de propriété.
M. Guay: Oui. Est-ce qu'on doit protéger ce
groupe-là dans le contexte plus large d'une société? C'est
la question qu'on pose.
Mme Marois: Est-ce que c'est protéger un groupe ou
s'assurer que l'intérêt est plus large à un autre point de
vue?
M. Guay: Privilégier quelques commerçants et, en
même temps dire: On va se fermer les yeux sur ce que les autres font et
leur laisser le soin de répondre aux besoins de la clientèle?
Mme Marois: Ça, je vous suis. Je vous suis
complètement. Moi, je pense qu'on ne peut pas... J'ai compris que
c'était le point de vue du ministre et du gouvernement. Maintenant,
comment résoudra-t-il le problème? Moi, j'en ai une solution que
je propose, notre parti en a une. Vous, vous ne la partagez pas, mais il faudra
en trouver une. Parce que là où vous avez raison, c'est qu'on
permet à d'autres de vendre des produits que vous vendez et, à
vous, on ne le permet pas. Ça, il y a inéquité là,
on ne reviendra pas là-dessus, je pense qu'on s'est bien entendus.
M. Guay: Et je vous relance la question: Est-ce que ça
doit être les consommateurs et leurs besoins? Présumons que vous
avez tort et que ce n'est pas, effectivement, une création des
commerçants, mais c'est plutôt un besoin réel - là,
vous avez des chiffres et, à un moment donné, je vous laisse le
soin de faire le ménage dans tous ces chiffres-là, parce que nous
autres, on n'a pas fait nous autres mêmes de sondage, mais est-ce que
c'est effectivement ça? À ce moment-là, de l'autre
côté, on va dire: Non, non, non, il faut penser à tel
nombre de petits commerçants qui vont effectivement être
obligés de déléguer le dimanche. Là, on peut aller
de l'autre côté et dire: Dans le fond, ces mêmes
commerçants-là, appelons-les Ro-Na ou les autres, etc., je ne
sais pas si on ne les retrouve pas sur les terrains de golf le mercredi et le
mardi, etc.
Mme Marois: C'est possible.
M. Guay: Comment est-ce que toute la chose a été
présentée? Je ne le sais pas ça non plus.
Mme Marois: C'est possible. Mais comme je respecte votre point de
vue dans le sens que je l'entends, je le comprends et je dis: Vous
représentez tel groupe, j'entends le leur et il est différent et
je le comprends aussi, je l'inscris dans un ensemble. Vous me suivez bien
aussi...
M. Guay: Oui, je vous suis, je vous suis.
Mme Marois: ...à cet égard-là. D'accord.
Oui, M. Chassé.
M. Chassé: Par analogie, ce que vous semblez faire valoir
comme point de vue, c'est que la structure de l'entreprise va...
Mme Marois: La structure de propriété de
l'entreprise.
M. Chassé: ...de propriété va guider la
position qui est prise à cette commission-ci par un groupe ou l'autre.
C'est ce que je comprends de votre point de vue.
Mme Marois: Ce que je dis, c'est qu'on sent... L'impression qui
semble se dégager - on le saura une fois qu'on aura fini le tour du
jardin, à partir des mémoires qu'on a - c'est selon qu'on est une
chaîne, des magasins corporatifs, avec un propriétaire unique ou
des actionnaires, peu importe là, publics et selon qu'on est un marchand
indépendant, il y a un clivage qui semble se dégager, les gens
souhaitant, les marchands indépendants souhaitant davantage de fermeture
et qu'on resserre la loi actuelle, alors que la structure corporative, elle,
proposerait davantage d'ouverture.
M. Chassé: Que dit l'alimentation là-dessus, qui
est en grande partie franchisée ou en voie de l'être?
Mme Marois: Comme je vous dis, on n'est pas allé encore au
bout. C'est ce qu'on est en train de faire. Mais ce qui semble
déjà se dégager à ce moment-ci, les
indépendants ou les... Parce que les franchisés, ce sont des
indépendants. Ils achètent une franchise.
M. Chassé: Provigo l'est. Steinberg est en voie de
l'être.
Mme Marois: Métro... M. Guay: C'est ça.
M. Chassé: Qu'est-ce qu'ils en disent eux?
Mme Marois: Les franchisés... Ce que j'ai compris, c'est
que la majorité des franchisés de certaines bannières nous
disaient non à l'ouverture le dimanche.
M. Guay: Pensons aux franchisés, effectivement, de la
bannière Jean Coutu. Ils vont venir vous dire sûrement...
Mme Marois: Ah, mais ça, on y reviendra.
M. Guay: C'est ça. Je voulais...
Mme Marois: Monsieur me parlait de l'alimentation et comme Jean
Coutu, c'est en train de devenir genre, je ne le sais pas...
M. Jolivet: Tout au complet.
Mme Marois: C'est ça. Le magasin
général.
M. Guay: C'est parce que vous parliez d'un clivage et il n'est
peut-être pas si important que ça, ce clivage-là.
Mme Marois: Non, on...
M. Guay: II y a peut-être des arguments des deux
côtés.
Mme Marois: Oui, oui. Non, non. Il y a des arguments de deux
côtés qui sont intéressants à entendre et pour
lesquels j'ai beaucoup de respect. Mais comme je le mentionnais à
quelqu'un hier, vous, vous avez un point de vue.
M. Guay: Oui.
Mme Marois: Je l'entends. Je le comprends. Mais moi aussi j'en ai
un.
M. Guay: Je l'accepte.
Mme Marois: Alors, dans ce sens-là, disons que c'est quand
même intéressant de continuer le débat que nous avons, et
la fin de la commission nous le dira au fur et à mesure. Mais c'est la
tendance qui semble actuellement se dégager, je le répète,
et je ne veux pas dire: Oui, tout le monde pense comme ça d'un bord et
autrement de l'autre côté.
On me dit que mon temps...
Le Président (M. Bélanger): II vous reste une
minute.
Mme Marois: II me reste une minute. À toutes fins
pratiques, c'est terminé. Je voulais aussi revenir sur cette notion de
liberté individuelle, de liberté de choix. Je pense que dans une
société où les techniques de marketing, de mise en
marché, où les techniques de persuasion sont
particulièrement bien développées - et je suis bien
placée pour le savoir parce que nous en faisons aussi dans les partis
politiques à cet égard-là, nous les utilisons aussi ces
techniques-là - elles sont suffisamment fines pour venir un petit peu
orienter le choix - d'ailleurs c'est l'objectif de ces techniques-là -
des personnes qui consomment, qui décident, qui choisissent. Alors la
liberté s'exerce dans un contexte et elle a certaines limites. Et,
d'autre part, la liberté à tout prix et complètement,
ça peut nous mener aussi à des aberrations. Je pense qu'on va en
convenir ensemble. Je vous remercie de cet échange franc que nous avons
eu. Je l'apprécie beaucoup même si je ne partage pas
nécessairement votre point de vue. Au moins nous avons la chance d'en
débattre. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le
ministre.
M. Tremblay (Outremont): M. Guay. M. Chassé, M. Ravary, M.
Senneville, ce que j'aimerais vous dire... Dans mes notes d'introduction, j'ai
mentionné que c'était essentiel d'avoir une ouverture d'esprit
dans la recherche d'une solution. Ça je l'ai dit. Et ce que
j'apprécie, c'est que vous l'avez. Parce qu'il faut avoir une
réflexion globale dans ce dossier. C'est évident que vous avez
une position mais ce que je trouve intéressant, c'est que vous
êtes prêts à en évaluer une autre, évidemment,
à certaines conditions, premièrement.
Et, deuxièmement, ce que j'ai toujours mentionné, c'est
qu'il faut qu'on ait une solution durable. Et, dans cette optique-là,
vous nous avez apporté une certaine vision. Vous avez dit: Qu'est-ce qui
va arriver - peut-être que ça arrive en ce moment - dans deux ans,
dans trois ans? Et, dans ce sens-là je trouve que c'est très
positif. Je pense qu'on a eu une excellente rencontre et je vous remercie
beaucoup d'être venus nous éclairer dans la décision qu'on
aura à prendre bientôt. Merci beaucoup.
M. Guay: Nous vous remercions.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie le Regroupement des grands centres de
rénovation du Québec pour l'équité entre les
commerçants. J'invite à la table la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante. Nous allons suspendre trois
minutes, le temps de permettre à M. le ministre de régler un
petit problème urgent.
(Suspension de la séance à 11 h 9)
(Reprise à 11 h 25)
Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, la
commission reprend ses travaux. Nous recevons présentement la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Si
vous vouiez bien vous présenter, donner vos noms. On s'excuse du
délai. M. le ministre a des fonctions, en dehors de la commission, qui
sont très importantes. On sait que c'est un homme très
occupé Comme il passe entre douze et quinze heures par jour avec cette
commission-là, je ne sais pas comment il
fait son autre travail, mais j'ai beaucoup de sympathie pour lui.
Alors, ça nous fait plaisir de vous recevoir. Si vous voulez vous
présenter, vous identifier et procéder à la
présentation de votre mémoire. Et lorsque nous aurons un
échange de propos avec les parlementaires, s'il vous plaît,
à chaque fois que vous intervenez, donnez votre nom au préalable,
cela pour les fins de transcription au Journal des débats. Si
vous voulez bien procéder, on vous écoute.
M. Décary (Michel): Nom nom est Michel Décary, je
suis vice-président Québec de la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante.
M. Marineau (Benoît): Benoît Marineau, je suis
adjoint aux communications pour la Fédération. Je remplace Me
Chantai Bouchard qui est absente pour des raisons personnelles.
M. Décary: Merci. Notre Fédération est
heureuse de participer aux travaux de votre commission qui est chargée
d'étudier les modifications à apporter à la Loi sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux. Le moins que l'on
puise dire, c'est que votre tâche n'est pas facile. Un bon nombre de
personnalités politiques fort respectées se sont
déjà penchées sur ce dossier depuis quelques années
sans qu'elles réussissent à mettre un terme à ce
débat qui semble interminable. On comprend le contexte difficile dans
lequel vous travaillez et c'est pourquoi notre Fédération a fait
un effort de synthèse. Vous avez pris connaissance de notre
mémoire qui se résume à dire que notre membership dans le
secteur de la vente au détail s'oppose à l'extension des
ouvertures de commerces le dimanche. Cette opposition vient du fait que nos
commerçants travaillent déjà six jours par semaine et du
fait qu'ils n'ont pas les moyens d'augmenter leur coût
d'opération, notamment pour la main-d'oeuvre supplémentaire qui
serait nécessaire pour ouvrir le dimanche.
Je pense que les données qu'on a annexées à notre
mémoire au sujet des revenus des commerçants sont très
révélatrices. La moyenne de ces revenus est très basse.
C'est un phénomène dont vous n'étiez peut-être pas
au courant, mais il explique en partie pourquoi nos gens ont l'attitude qu'ils
ont.
Je disais tantôt que notre organisme avait fait un effort de
synthèse. Cet effort ne s'est pas limité à préparer
un mémoire assez bref dans l'espoir que les députés aient
le temps et surtout la volonté de le lire, mais il incluait aussi des
démarches auprès d'autres intervenants pour trouver des compromis
ou terrains d'entente. À cet effet, on est heureux d'avoir
collaboré avec la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche
dont vous avez entendu les représentations hier. Nous appuyons, avec une
nuance seulement, la position en six points défendue par la Coalition.
La nuance qu'on apporte à cette position, c'est le fait que nous croyons
que les fruiteries opérant avec plus de trois employés doivent
être reconnues au chapitre des exemptions.
Pour différentes raisons, le gouvernement a toléré
pendant près de 20 ans que ces fruiteries soient ouvertes le dimanche,
peu importe le nombre de leurs employés. Ce type de commerces
n'existaient pas il y a 20 ans et lorsque les fruiteries ont fait leur
apparition, le gouvernement n'a pas pris le temps de statuer sur leur cadre
d'opération. Peut-être parce qu'elles n'étaient pas
nombreuses à l'époque, je n'en sais rien. Pourtant d'autres types
de nouveaux commerces ont fait leur apparition et le gouvernement s'est
penché rapidement sur la question et a annoncé ses couleurs.
L'exemple le plus frappant, c'est le cas des magains de vidéo où
le gouvernement a décidé que ces commerces ne seraient pas
assujettis à la loi parce qu'ils ne vendaient pas des produits mais ils
faisaient plutôt de la location. De toute façon, le
résultat est qu'aujourd'hui les fruiteries constituent à peu
près le seul groupe de commerces qui perdrait des acquis si la position
de la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche était
retenue par le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.
La FCEI vous recommande donc de retenir la position de la Coalition tout
en ajoutant la modification qui permettrait aux fruiteries opérant avec
plus de trois employés de continuer à ouvrir le dimanche. Je ne
crois pas qu'il est nécessaire de reprendre les six points de la
Coalition, vous les connaissez bien. J'aimerais cependant mettre l'accent sur
le dernier point, soit celui qui traite de la juridiction.
Notre Fédération considère qu'il est essentiel que
la responsabilité sur les heures d'affaires ne soit pas
transférée au niveau municipal ou régional. La loi doit
demeurer sous juridiction provinciale pour éviter qu'on soit victimes du
même chaos qui s'est instauré dans les provinces qui ont
tenté l'aventure de la décentralisation. D'ailleurs, il semble
assez clair que personne ne souhaite le transfert des responsabilités,
même pas les municipalités ou les MRC. On sait que la patate est
chaude, mais on vous suggère quand même de la garder entre vos
mains en essayant de ne pas trop vous brûler.
Je disais au début que je réalisais à quel point ce
dossier était complexe. Notre contribution se voulait constructive,
j'espère que vous la voyez ainsi. Merci de m'avoir entendu.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie. M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): M. Décary, là vous me
causez des problèmes et je vais vous dire pourquoi. Le premier principe
qu'on essaie
d'établir, c'est d'avoir une loi équitable. Donc, un des
reproches qu'on fait à cette présente loi. c'est qu'elle n'est
pas équitable à cause des exceptions. Vous, vous me
suggérez d'ajouter une exception. Une exception au niveau des
fruiteries. Pourquoi? Parce que vous dites que, à cause d'une certaine
tolérance, le gouvernement a créé - ce n'est pas
exactement ce que vous dites - des droits acquis. Donc, on devrait continuer
ça. Et c'est la seule exception que vous voulez ajouter. Je dois vous
dire en passant qu'au niveau des fruiteries, et je ne veux pas être
légaliste parce que c'est devant les tribunaux, ça a
été créé par un règlement qui est
présentement contesté. Par contre, au niveau des pharmacies, et
plus spécifiquement les pharmacies d'escompte, la loi 5.2 permet
à 219 pharmacies d'escompte d'être ouvertes en tout temps
indépendamment du nombre d'employés, trois employés et
moins. Vous ne mentionnez pas les pharmacies. Étiez-vous au courant de
ça?
M. Décary: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Donc, vous fermez les pharmacies.
Comment faites-vous, au nom de l'équité, pour dire à des
pharmacies qui avaient, de par la loi, la permission d'ouvrir, donc,
sûrement un droit acquis - si on peut appeler ça un droit acquis -
plus important que les fruiteries qui ne l'avaient pas par règlement qui
est contesté, comment fait-on pour avoir un poids, deux mesures alors
que l'un des reproches que l'on fart à la loi c'est qu'elle est
inéquitable?
M. Décary: Premièrement, mon objectif
n'était pas de vous compliquer la vie. Je pense qu'à
Québec, on réussit souvent à se compliquer la vie sans
l'aide des gens de l'extérieur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Décary: Je pense que le premier point, en parlant
d'équité, c'est de dire que le cas des fruiteries n'est pas le
même que celui des pharmacies, d'une part. On ne peut pas dire qu'un
acquis a plus de poids parce qu'il est reconnu dans une loi plutôt qu'un
autre véhicule. Légalement, oui, sans doute qu'il a plus de
poids, mais pas nécessairement au point de vue des droits. Le cas des
fruiteries date depuis plus longtemps; c'est une pratique de 20 ans et je pense
que ça donne un poids plus important que le cas des pharmacies.
Deuxièmement, les fruiteries sont un genre
d'établissements où les ventes se résument en grande
partie, très très majoritairement, à un type de produit.
Ce n'est pas le cas des pharmacies où des modifications ont
été faites durant une période où on essayait de
conquérir de nouveaux terrains, et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui,
comme plusieurs l'ont souligné devant cette commission, les pharmacies,
dans bien des cas, sont devenues des magasins généraux.
M. Tremblay (Outremont): Je comprends ce point de vue, mais
comment vais-je faire pour justifier ça en tant que législateur,
par exemple, les fruiteries? Vous savez que, dans les fruiteries, on vend
également de la charcuterie et des fromages, et on commence à
vendre autre chose Comment vais-je faire pour justifier qu'une fruiterie va
pouvoir concurrencer des supermarchés qui ne sont pas ouverts le
dimanche? Combien en avez-vous de fruiteries que vous représentez au nom
de la Fédération? Est-ce qu'il y en a?
M. Décary: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Bon. Est-ce que c'est parce qu'elles
vous ont fait beaucoup de pressions que vous avez une oreille attentive
à leurs demandes? Ça peut être correct. Je ne dis pas que
ce n'est pas correct. Je fais juste poser la question.
M. Décary: Non, c'est que 20 ans de reconnaissance
pratique, si on peut dire, mérite d'être considéré.
Ce n'est pas une question de pression, et, pour répondre à votre
question, je sais que c'est complexe. Tout le monde a fait des efforts pour
rationaliser et pour mettre de l'eau dans son vin. On l'a fait. On adopte en
très très grande partie la position de la Coalition. Il y a des
choses, dans cette position. Si vous me demandiez de justifier pourquoi on peut
acheter une piscine, mais non des caleçons, j'aurais bien de la
difficulté...
M. Tremblay (Outremont): Je comprends, M Décary, je
m'excuse, mais je n'ai pas beaucoup de temps. L'Opposition va en avoir aussi.
Expliquez-moi comment je vais pouvoir justifier ça?
L'équité, c'est le premier principe qu'on veut mettre de l'avant.
Et je comprends que ça fait 20 ans et qu'il y a eu une tolérance,
comme ça fait moins longtemps pour les marchés aux puces et qu'il
y a eu une tolérance, pour les pharmacies à escompte qui sont
ouvertes et qui ne sont pas dans la loi, pour lesquelles il y a eu une
tolérance, mais comment est-ce que je fais pour justifier
spécifiquement les fruiteries, indépendamment du nombre
d'employés, qui vendent plus que des fruits, qui vendent des
charcuteries et des fromages, face aux supermarchés? Comment vais-je
faire pour justifier ça politiquement?
M. Décary: Vous allez le faire avec grande
difficulté, surtout si vous partez du principe que, parce qu'une loi a
été passée par un gouvernement précédent,
ça mérite de continuer comme ça. Si vous partez de ce
principe, c'est vrai que ça va être difficile à
justifier.
Le Président (M. Bélanger): II vous reste quatre
minutes.
Mme Marois: Ah! D'accord. Allez-y.
M. Tremblay (Outremont): Je comprends votre position
également, M. Décary, mais ça vaut au-delà des
considérations politiques. Je pense qu'il y en a une loi. Elle est
là et tout le monde veut essayer de trouver une solution concrète
à cette loi. Ce que je me dis, c'est qu'il n'y a personne, à
date, qui nous a demandé d'ajouter des exceptions. Tout le monde nous
dit que le problème de la loi, et vous êtes le premier à le
dire, pourquoi les piscines? Parce que les piscines, ce que ça a
engendré... Au début, on vendait des accessoires de piscine, du
chlore. On disait: II faudrait trouver le chlore le dimanche. Maintenant, ils
vendent des barbecues, ils vendent des tables de patio. C'est cette permission
qui a engendré d'autres problèmes.
Ce que vous me dites, les fruiteries - et je comprends, on va le prendre
en considération - ça fait 20 ans qu'elles sont ouvertes. Mais
moi, le problème que j'ai, c'est que les supermarchés me disent.
On a perdu, depuis un certain nombre d'années, une part importante de
marché, entre autres, non pas uniquement à cause des fruiteries
mais c'est une raison, à cause des fruiteries. Permettez d'ouvrir aux
fruiteries, il n'y a pas de problème, elles sont d'accord. Mais, au
moins, permettez aux supermarchés d'ouvrir, parce qu'une fruiterie, ce
n'est pas juste des fruits.
M. Décary: En très grande partie. Je pense que si
on ouvre...
M. Tremblay (Outremorrt): Oui, oui. Mais elles vendent
aujourd'hui... Mais elles vendent des charcuteries, elles vendent du fromage et
demain, elles vont vendre d'autres choses.
M. Décary: Bien, si on ouvre un débat sur le type
de produits vendus par chaque établissement, ça risque
d'être très long. Je pense qu'un restaurant, ça vend aussi
des cigarettes. Je parlais tantôt des magasins de vidéo qui sont
exclus de cette loi parce qu'ils louent des produits au lieu de les vendre. Je
pense qu'il n'y a pas beaucoup de magasins de vidéo maintenant qui ne
vendent pas du pop-corn, de la liqueur et des vidéos. C'est un
très long débat que vous risquez d'ouvrir.
Ma réponse à votre question...
M. Tremblay (Outremont): C'est le but de la commission.
M. Décary: Oui. Ma réponse à votre question
serait de dire: En fait, au point de vue technique ou légal, c'est vrai
qu'on demande un ajout aux exemptions mais, en réalité, ce n'est
pas le cas. On demande simplement qu'une exception qui était
tolérée si non inscrite à la loi, que ça continue
à être le cas aujourd'hui et à l'avenir.
M. Tremblay (Outremont): Oui. Juste mon dernier... Combien
représentez-vous de fruiteries?
M. Décary: Environ une cinquantaine.
M. Tremblay (Outremont): Donc, c'est la très grande
majorité des fruiteries que vous représentez.
M. Décary: C'est un bon nombre, surtout des petites. Mais,
par contre, plutôt que de répondre à votre question de
pression, ce n'est pas, pour nous, une question de pression. J'ai 17 000
entreprises membres au Québec. Ce ne sont pas 50 qui vont...
M. Tremblay (Outremont): Non, non, mais je comprends. Mais je
sais que le lobbying des fruiteries, pour l'avoir vécu - et je pense que
c'est normal aussi, tout le monde défend son intérêt - est
assez important. Je suis convaincu que vous avez reçu
énormément de lettres. J'apprécie vos
représentations. Je comprends.
M. Décary: II faut dire aussi qu'on a des membres dans
à peu près tous les...
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui, tous les secteurs.
M. Décary: ...les secteurs. J'ai des Jean Coutu, j'ai des
supermarchés, des Provigo qui ont des franchises. J'ai à peu
près tous les secteurs représentés et...
M. Tremblay (Outremorrt): Est-ce que Jean Coutu, tiens, juste
pendant... Est-ce qu'ils vous ont demandé de faire des
représentations en leur nom? Non?
M. Décary: Non.
M. Tremblay (Outremont): Non.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Comment se ventile
à peu près votre membership, à savoir dans le domaine
alimentaire, dans le domaine de la vente de biens, de marchandises
sèches, de vêtements pour hommes, de vêtements pour dames?
Comment ça se répartit?
M. Décary: Comme je le disais tantôt, j'ai 17 000
entreprises membres au Québec...
Mme Marois: D'accord.
M. Décary: ...15 % dans le secteur manufacturier; j'ai 9 %
dans la construction; j'ai 29 % dans les services, incluant les bureaux de
notaires, les bureaux d'avocats, les bureaux de comptables; j'ai 38 % dans la
vente au détail et 5 % dans les grossistes. Dans la vente au
détail, j'ai environ peut-être 2000 commerces dans l'alimentation,
et le reste, c'est ventilé, c'est inimaginable la
variété.
Mme Marois: Oui, j'imagine, oui. Ça va, d'accord. Mais,
environ 2000.
M. Décary: Oui.
Mme Marois: Quand vous avez décidé cette
orientation que vous nous présentez, ce matin, comment avez-vous
procédé pour votre prise de décision? Ça s'est fait
à votre conseil d'administration de la Fédération?
M. Décary: Cela a été un long processus.
Comme vous l'avez sans doute remarqué, dans le passé, il y a eu
d'autres commissions parlementaires où on n'était pas
présents. La principale raison, c'est qu'on faisait nos sondages
auprès du membership en entier et le vote était assez, disons,
partagé, ce qui ne nous permettait pas de prendre une position claire
jusqu'au moment où on prenne la décision de sonder uniquement le
membership dans la vente au détail. Quand on a fait ça par voie
de sondage téléphonique, on a vu, après, entre 300 et 350
appels dans différentes régions du Québec; les
réponses étaient presque unanimes contre l'ouverture le
dimanche.
Après ça, pour les nuances, à savoir quelle
stratégie ou quel lien à faire avec d'autres groupes, cela a
été fait au niveau du conseil d'administration, mais la
prémisse de base était...
Mme Marois: Mais le fond de la décision vient de votre
membership concerné par une décision...
M. Décary: Oui.
Mme Marois: ...comme celle-là. D'accord. C'est important
parce que quand on vient présenter une position comme celle que vous
défendez, je me dis que c'est d'autant plus significatif quand ce sont
les membres concernés qui ont fait en sorte que vous arrivez à
celle-là. Parce que ça pourrait se passer autrement. Il y a des
délégations. Ça se fait parfois par les conseils
d'administration. Quand vous mentionnez, dans votre mémoire: "Le
Québec discute des heures d'affaires parce que quelques grandes
entreprises font des pressions pour obtenir l'extension des heures d'ouverture,
surtout le dimanche. Ces entreprises sont peu nombreuses, mais imposantes par
leur taille et leur part de marché. Je crois que vous étiez
là quand je questionnais les personnes qui sont venues avant vous, ce
matin. Et, le sentiment que j'avais, c'est qu'il y avait un clivage qui
s'établissait selon qu'on était justement des détaillants
indépendants ou de petites entreprises avec quelques commerces versus
les grandes chaînes et les firmes corporatives qui, elles, proposaient
davantage l'ouverture. (11 h 45)
De votre point de vue, est-ce que c'est ce que vous constatez aussi,
au-delà de la connaissance que vous avez du point de vue de vos membres?
Comme vous êtes quand même en lien, comme association de gens
d'affaires, avec d'autres types d'association, est-ce que vous avez aussi cette
même impression que j'ai sur cette question?
M. Décary: Je m'excuse auprès de ceux qui
s'occupent de la transcription, j'ai oublié de m1 identifier
chaque fois que je prenais la parole. C'est Michel Décary.
Mme Marois: On l'a oublié, nous aussi, M.
Décary.
M. Décary: En réponse à votre question, je
suis d'accord avec vous. Je pense que vous avez bien noté le clivage. Ce
matin, on a tenté de vous répondre en disant: Bien, ce n'est pas
tout à fait aussi clair, parce qu'il existe des franchisés qui ne
partagent pas ce point de vue-là. Je pense que vous avez raison. Les
exceptions seraient surtout au niveau de franchisés de grandes
chaînes qui, peut-être - je ne sais pas - par des pressions
internes ou la peur de perdre un chiffre d'affaires versus des gens qui
opèrent sous la même bannière... C'est peut-être
ça qui influence leur position. Mais, je pense que vous avez raison sur
le clivage, il existe.
Mme Marois: D'accord. Une des objections qui est faite, et elle
nous a été faite aussi ce matin et hier, c'est qu'une telle loi,
si elle devait exister, en resserrant les critères, donc avec une
fermeture plus étanche des commerces le dimanche, serait inapplicable.
Quel est votre point de vue à ce sujet-là?
M. Décary: Plus étanche?
Mme Marois: Une loi qui amènerait à retenir, par
exemple, ce que vous nous proposez, pour l'essentiel, c'est-à-dire
jamais plus de trois employés et tous les critères auxquels vous
adhérez, avec la Coalition, d'ailleurs.
M. Décary: Michel Décary. Si je comprends bien,
vous me demandez si ce serait pratiquable...
Mme Marois: Oui.
M. Décary: ...si le gouvernement adopte la position qu'on
lui recommande.
Mme Marois: C'est ça. C'est ça.
M. Décary: J'admets que ce serait difficile, entre autres,
quand on parle d'amendes. C'est sûr que, si on a le statu quo au niveau
de la bureaucratie qui est chargée d'administrer ça, ce n'est pas
avec le nombre actuel d'inspecteurs qu'on va réussir à faire
respecter la loi. Il y a cet aspect-là. C'est évident, et je
pense que je suis en bonne position pour le savoir, que les entrepreneurs font
preuve d'imagination. Ils vont sans doute analyser les textes et chercher des
options. Je pense que ça va être complexe, mais que ça ne
devrait pas nécessairement être l'élément qui fasse,
disons...
Mme Marois: Qui fasse qu'on ne devrait pas...
M. Décary: ...hésiter le gouvernement à
agir.
Mme Marois: Hésiter le législateur à adopter
une loi semblable. Ça va. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: Merci, M. le Président. Un peu dans la
foulée de ce que vous venez de mentionner, M. Décary, devant la
complexité de faire appliquer la loi, vous avez fait ressortir, dans
votre exposé du début, avec insistance, le point 6. Alors,
lorsqu'on regarde la mécanique, il y a l'Assemblée nationale qui
peut légiférer. On peut aller par un pouvoir
réglementaire. Je fais une hypothèse avec vous. Ça reste
de juridiction provinciale, mais, quand on arrive au niveau de l'application,
vous venez juste de dire que ça pourrait être un danger de faire
appliquer la loi au niveau du terrain. Alors, est-ce que vous auriez une
objection, à ce moment-là, à faire transférer ce
pouvoir de faire l'application au niveau des municipalités?
M. Décary: Ça revient...
M. Saint-Roch: Pas la législation, là.
M. Décary: ...au même. En pratique - comme les
Anglais disent, le "bottom line" - certaines municipalités pourraient
ouvrir, avoir des commerces ouverts et des municipalités voisines n'en
auraient pas. Si c'est ça le résultat, non, on est contre. Je le
disais tantôt que je réalise que c'est un problème complexe
et pas facile à régler. Mais, il ne faut pas que le gouvernement
prenne la solution facile qui est de transférer le problème
à un autre, comme on a fait dans certains cas en transférant les
pouvoirs aux juges sur des questions qui auraient pu rester le domaine du
législateur.
M. Saint-Roch: Vous craindriez, si on passait une loi qui
appliquerait exactement vos recommandations, si la loi disait ça, si on
déléguait le pouvoir de surveillance de l'application de la loi,
que les municipalités aient de la difficulté à le faire
faire.
M. Décary: Si c'est la surveillance...
M. Saint-Roch: Je parte juste de surveillance.
M. Décary: Ah! Je m'excuse, j'ai mal compris. La
surveillance, ça pourrait aider si on augmente le nombre d'inspecteurs,
mais je serais intéressé à regarder ça plus en
détail, comment ça pourrait fonctionner.
M. Saint-Roch: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député d'Acadie.
M. Bordeleau: Oui. J'aimerais revenir peut-être sur un
point dont vous venez de discuter, suite à une question de la
députée de Taillon. On pariait du clivage qui pouvait exister
entre les grands magasins corporatifs et les plus petits commerçants.
Moi, j'ai un peu de misère, disons, avec ce fait-là, qu'on
établisse toute la problématique autour d'un clivage qui se fait.
Ça ne me semble pas si évident que ça. D'abord, il faut se
rappeler - j'aimerais avoir vos commentaires, par la suite, là-dessus -
que les dépanneurs, qui ouvrent le dimanche, actuellement, sont des
petits commerces, en grand nombre. Ces gens-là ont opté pour
ça et souhaiteraient, disons suite aux représentations qu'on fait
actuellement, qu'on empêche d'autres d'aller sur leur marché. Ce
sont de petits commerçants qui, par choix - parce qu'ils avaient la
liberté d'aller dans ce commerce-là ou de ne pas y aller - ont
ouvert des commerces qui sont effectivement ouverts le dimanche, ce qui est
peut-être une de leurs caractéristiques principales. Alors, quand
on dit que ce sont les grandes corporations qui souhaitent l'ouverture le
dimanche, ça me semble, en tout cas, pas si évident que
ça.
Le deuxième point, ensuite, c'est qu'on fait
référence, souvent, à la commission - c'est normal un peu,
parce que chaque groupe qui vient représente, au fond, un certain nombre
d'intérêts -- à une opposition entre les commerçants
et les consommateurs. Et encore là, il me semble que, du
côté des consommateurs, il y a des besoins qui sont décrits
et qui sont, apparemment, assez évidents. On nous fait
référence souvent qu'il s'agit d'aller dans les marchés
publics, le dimanche, pour voir que les stationnements sont complets. Ça
doit répondre à
certains besoins des consommateurs aussi. Et la fin des commerces
étant de répondre aux besoins de ta clientèle, parce que,
s'il n'y avait pas de clients, il n'y aurait pas de commerces - ça,
c'est évident - jusqu'à quel point, à ce moment-là,
les commerces ne doivent-Us pas s'adapter à des besoins qui peuvent
changer, qui semblent évoluer, en tout cas, d'après ce qu'on nous
rapporte, suite à des données, à des sondages. Parfois, on
fait référence - c'est arrivé et, tout à l'heure,
la députée de Taillon faisait également
référence à ce point-là - au fait que les gens
exercent leur libre choix. On laisse sous-entendre que, de fait, Us n'exercent
pas leur libre choix parce qu'il y a des techniques de persuasion. Là,
j'ai l'impression qu'on charrie peut-être un peu.
La population est quand même capable, à mon avis en tout
cas, je fais assez confiance à la population pour croire qu'elle est
quand même capable d'exercer son jugement. Il y a des associations de
consommateurs, également, qui peuvent informer la population. De
là à dire que, si les gens se retrouvent dans les centres
commerciaux, c'est parce que les techniques de persuasion sont aujourd'hui
tellement fortes que les gens ne sont plus capables d'exercer leur libre choix,
bien, moi, je tiens pour acquis que les gens qui se retrouvent dans les centres
commerciaux, le dimanche, c'est parce qu'ils le veulent bien et que ça
répond à des besoins. Ça peut être des besoins
reliés à toutes sortes de contraintes dont on a parlé, des
contraintes de temps, ça peut être par choix ou par loisir qu'il y
a des gens qui vont là.
Alors, j'ai l'impression que l'histoire du clivage qu'on fait entre les
petits et les grands commerçants, ce n'est pas si évident que
ça. L'interprétation qu'on donne, disons, à la
présence des consommateurs, le dimanche, en tout cas, à partir de
certains indices qu'on a, c'est, je pense, que ce ne sont pas seulement des
techniques de publicité ou de persuasion qui font que des gens se
retrouvent là le dimanche. Alors, j'aimerais avoir vos commentaires,
peut-être à ce niveau-là.
M. Décary: D'accord. Michel Décary. Je ne veux pas
disons dramatiser la question de clivage; je dis que ça existe. Je pense
que Mme la députée de Taillon l'a bien reconnu. Sans dramatiser,
je pense que, plus les magasins sont grands, plus 8s ont tendance à
favoriser les ouvertures. Je pense qu'au niveau des pressions concrètes
qui ont été faites, soit sur l'opinion publique ou le
législateur, les grandes chaînes d'alimentation ont certainement
eu une présence importante de ce côté-là. Ce ne sont
peut-être pas les seuls, mais je dirais que ce sont les principaux.
Quant à la question des consommateurs, je suis d'accord avec vous
et heureux de constater que vous respectez l'intelligence du consommateur, du
public en général. Dans le mémoire, je fais allusion au
fait que les consommateurs n'ont pas exprimé très directement un
intérêt pour une extension des ouvertures le dimanche. Il y a eu,
évidemment, des sondages d'opinion publique. Je pense qu'ils comportent
des lacunes. Parce que c'est sûr, si on demande à quelqu'un qui
n'a aucun intérêt dans le dossier - la décision ne va pas
influencer ses revenus, ses heures de travail ou autres - on lui demande:
Seriez-vous d'accord à avoir un service dans tel secteur le dimanche?
que ça ne lui coûte rien de répondre oui. Mais je pense que
la plupart des gens auraient cette tendance à répondre oui, si on
pose la question de façon abstraite.
Que le gouvernement soit soucieux d'écouter l'opinion publique,
je trouve ça tout à fait légitime, mais je pense que,
à titre d'exemple, le gouvernement, s'il était vraiment
préoccupé par l'intérêt des consommateurs,
commencerait par lui-même, à offrir ses services le dimanche.
Pourquoi est-ce si difficile d'avoir vos formulaires, vos papiers de la
bureaucratie le dimanche? Ce n'est pas drôle pour les consommateurs
d'aujourd'hui d'être obligés de courir ou de prendre des
congés pour aller régler leurs problèmes avec vos
fonctionnaires qui, d'ailleurs, ne sont pas ouverts, non plus, le jeudi ou le
vendredi soir. Alors, si le gouvernement s'intéresse vraiment à
cette question-là, il pourrait donner l'exemple.
Dans le cas des centres d'achats, je ne pourrais pas vous donner des
chiffres pour expliquer le phénomène. Je peux vous parler,
peut-être sous forme d'anecdotes. Souvent, le dimanche, ma femme et moi
aimons aller au cinéma. Et, aujourd'hui, beaucoup de cinémas sont
situés dans des centres commerciaux comme Le Faubourg à
Montréal ou Les Cours Mont-Royal. C'est sûr qu'en sortant du
cinéma, on a tendance à regarder les vitrines et peut-être
à se laisser tenter par une pâtisserie, un Van Houtte ou quelque
chose du genre. Mais je ne sais pas ce qui explique la présence de tout
ce monde-là. Est-ce que ces gens ont un besoin particulier? Est-ce parce
qu'ils n'ont pas eu le temps de faire leurs achats sur semaine? Je ne le sais
pas. Ce serait assez difficile de faire la démonstration exacte.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas que
le député d'Acadie me prête des propos que je n'ai pas
tenus. Je ne doute pas de l'intelligence des gens. Je pense que ce serait
méprisant à l'égard de la population et je n'ai jamais eu
quelque attitude de cet ordre. Il va sûrement en convenir avec moi.
Cependant, je l'inviterais à lire le mémoire qui nous a
été déposé hier. Peut-être n'a-t-H pas eu le
temps de le faire? Je peux le comprendre aussi. C'est un mémoire qui est
assez long et
assez complexe - et on en a plusieurs, on n'a pas toujours le temps de
les lire tous - qui a été présenté par la
Fédération des ACEF du Québec, et on nous en a
présenté, hier, essentiellement le résumé, bien
sûr, mais qui apporte un long développement sur toute cette
question de marketing et même, on dit, d'apprentissage passif qui est une
nouvelle technique et qui fait référence d'ailleurs - c'est
intéressant - exactement au phénomène que vous soulevez,
à savoir l'existence du grand centre commercial où on attire par
un élément d'ordre culturel relié aux loisirs, mais
où la fin poursuivie n'est pas que les gens aillent au cinéma
nécessairement, mais que les gens viennent consommer des produits qui
sont dans le centre. Alors, la Fédération des ACEF a fait un
développement là-dessus, dans son document d'hier et même
dans le résumé, et je la cite: "Le magasinage le dimanche, avec
son flot de publicités, de rabais et autres techniques de marketing,
accentuerait le message incessant de notre société de
consommation que le bonheur vient de la consommation des objets. Il n'y aurait
pas de contrepartie pour nous rappeler que les personnes s'épanouissent
davantage dans ses relations avec les autres ou dans ses contacts avec la
nature, etc." C'est un mémoire qui a été apporté
hier. C'est bien sûr que les techniques utilisées - d'ailleurs
ça s'enseigne dans les universités, dans les facultés des
sciences de l'administration et de marketing - existent; elles essaient
d'être respectueuses, évidemment, des volontés et des
goûts des personnes, mais elles essaient aussi d'inciter les gens
à venir soit acheter un produit ou consommer un service.
Ce point étant fait, est-ce que vous avez eu l'occasion chez vos
entreprises membres de discuter avec ces personnes-là du point de vue
que leurs employés ont à ce sujet-là? Je sais que ce n'est
pas dans votre mémoire et je sais que, souvent, c'est de la petite et de
la moyenne entreprise, donc ce ne sont pas des nombres d'employés
nécessairement très élevés, vous le mentionnez dans
vos données à la fin de votre mémoire, mais est-ce que
vous avez eu l'occasion de soulever cette question auprès de vos
membres?
M. Décary: Michel Décary. Non, on n'a pas eu
l'occasion, je dirais plutôt, on n'a pas eu les moyens. On a des
entreprises éparpillées sur tout le territoire du Québec.
À titre d'exemple, on a une soixantaine de membres juste aux
Îles-de-la-Madeleine. C'est déjà très
compliqué de connaître l'opinion du ou des propriétaires de
l'entreprise. On ne peut pas faire des congrès à Québec ou
à Montréal pour attirer tous nos membres. Ce sont des gens qui
opèrent des commerces souvent avec une ou deux personnes, ils ne peuvent
pas se déplacer. On doit procéder soit par sondage
téléphonique rapide ou par bulletins de vote. Alors, c'est
compliqué juste d'avoir l'opinion du propriétaire. Je pense que
physiquement, ce serait un peu difficile...
Mme Marois: Un peu complexe.
M. Décary: ...d'aller chercher tous les employés.
Je dirais que c'est dommage parce que ce sont quand même des commerces
qui représentent un bon nombre d'employés que j'estimerais
à environ 25 000 juste dans nos commerces de détail au niveau de
l'alimentation seulement.
Mme Marois: D'accord. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Oui, j'aurais juste une petite question. Je sais
qu'on a parlé du membership pendant que j'étais absent,
j'étais allé faire une autre activité, et ça me
préoccupe toujours. On en a parlé un peu entre nous autres, quand
on commence à additionner le nombre de membres de chacune des
organisations, on s'aperçoit qu'au bout de la course, ça
dépasse énormément la population...
Mme Marois: On doit être nombreux. M. Leclerc: C'est
comme nos votes... M. Jolivet: Ça dépasse la
population.
M. Leclerc: ...tout le monde a voté pour nous autres et on
manque de votes.
Mme Marois: Ceux qu'on rencontre, tout le monde a voté
pour nous.
M. Jolivet: Ça dépasse la population du
Québec des fois, alors ça m'inquiète toujours. Parmi vos
membres, est-ce que se retrouveraient des gens qui sont parmi ceux qui sont
venus tout à l'heure et d'autres qui viendront au courant de la
journée? Est-ce que vous auriez des membres qui auraient répondu
lorsqu'on leur a posé une question par l'entremise du Regroupement des
grands centres de rénovation? Est-ce que qu'il y aurait des membres qui
seraient avec vous autres et, d'un autre côté, d'autres qui
viendront dire tout à l'heure qu'ils sont contre alors que d'autres
étaient pour l'ouverture le dimanche? J'ai vu dans votre texte que vous
parlez de petites... Vous dites: "Une entreprise doit être une
propriété canadienne, elle doit être indépendante de
toute société. Les propriétaires de l'entreprise doivent
être actifs dans l'opération de l'entreprise." Est-ce que
ça pourrait arriver qu'il y aurait des membres qui seraient dans des
organisations comme on a connues tout à l'heure et qu'on connaîtra
dans le courant de la jour-
née?
M. Décary: Michel Décary. Non seulement ça
pourrait arriver, mais ça va certainement arriver. Moi aussi, je suis
sceptique des fois quand je vois des chiffres, surtout au niveau des maladies
qu'on nous annonce aux nouvelles le soir, les nouvelles maladies de la semaine.
On dit: 300 000 Canadiens souffrent de ça et le lendemain, c'est 2 000
000. Mais il faut noter que plusieurs gens souffrent de différentes
maladies et...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Bien. Si vous voulez
bien remercier nos invités, Mme la députée.
Mme Marois: Je vous remercie de votre contribution à nos
travaux et de l'éclairage que vous nous avez apporté. Vous savez
que ma formation politique partage, pour l'essentiel, votre point de vue. Ce
que j'essaie de faire à l'intérieur des travaux de cette
commission, c'est aussi de creuser ce point de vue pour m'assurer qu'il
correspond aussi à une réalité et qu'il n'est pas
décroché de l'ensemble de notre vie collective. Votre
témoignage, je pense, ce matin, a permis d'aller un peu plus loin dans
ce sens. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
ministre.
M. Tremblay (Outremont): Alors, M. Décary, M. Marineau, je
vous remercie beaucoup. Je pense qu'on a eu une bonne discussion. Vous
comprenez plus maintenant, au niveau de l'équité, la
décision importante qu'on va avoir à prendre. Puis, juste pour
être certains qu'on s'est bien compris sur la question du
député de Laviolette. Si je comprends bien, c'est que vous
êtes représentants, vous représentez majoritairement les
membres consultés, mais c'est évident que ça ne fait pas
l'unanimité chez les personnes que vous avez consultées? C'est
ça?
M. Décary: Michel Décary. Ou exactement, je devrais
dire.
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie la Fédération canadienne
de l'entreprise indépendante et appelle à la table des
témoins la Jeune Chambre de commerce de Montréal. Alors, nous
allons suspendre les travaux pour cinq minutes. M. le ministre doit faire une
entrevue.
(Suspension de la séance à 12 h 7)
(Reprise à 12 h 16)
Jeune Chambre de commerce de Montréal
Le Président (M. Bélanger): Si vous le permettez,
je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place.
La commission va procéder à l'audition du mémoire
de la Jeune Chambre de commerce de Montréal. On excuse M. le ministre
qui a dû faire une intervention urgente et qui devrait être avec
nous dans quelques minutes. De toute façon, soyez rassurées, il a
lu votre mémoire parce que je vois qu'il y a même des commentaires
dans la marge, dans sa copie qui est là. On va donc commencer. Si vous
le voulez, par d'abord vous identifier et procéder à la
présentation de votre mémoire. Vous avez 20 minutes pour ce
faire.
Mme Béliveau (Josée): Parfait.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Béliveau: Josée Béliveau,
première vice-présidente de la Jeune Chambre.
Mme Rémillard (Lucie): Lucie Rémillard, directrice
générale.
Le Président (M. Bélanger): Bonjour. Si vous voulez
nous présenter votre mémoire, nous vous écoutons.
Mme Béliveau: D'accord. M. le Président, mesdames
et messieurs, bonjour. D'entrée de jeu, je voudrais vous prévenir
que nous ne sommes pas des commerçantes, mais que nous sommes des
professionnelles, comme 87 % de la population québécoise, nous ne
sommes pas régies par la Loi sur les heures d'affaires, donc nous sommes
appelées, si vous me permettez l'analogie, à travailler en dehors
des heures normales d'ouverture des commerces. Nous sommes également, en
tant que représentantes d'une association d'affaires, sensibles à
la notion du commerce dans tout ce débat sur les heures d'affaires.
Notre objectif aujourd'hui n'est pas de vous donner une vision noire de la
réalité présente et de ce qui s'en vient. Nous voulons
plutôt illustrer la réalité de façon objective telle
que, entre autres, les jeunes gens sur le marché du travail la
vivent.
La Jeune Chambre de commerce de Montréal a adhéré
à la Coalition pour l'équité et le libre accès aux
marchés d'alimentation le dimanche au printemps 1989, lors de sa
création, dans le but de défendre les besoins de ses membres et
des autres jeunes gens actifs sur le marché du travail
québécois. Dans cette présentation d'aujourd'hui, nous
aborderons trois grands thèmes: premièrement, la demande ou les
besoins des consommateurs; deuxièmement, l'inéquité
commerciale et, enfin, les effets d'une libéralisation des heures
d'affaires sur la qualité de vie.
Tout d'abord, j'aimerais vous présenter brièvement
l'organisme que nous représentons. La Jeune Chambre de commerce de
Montréal est un organisme à but non lucratif, fondé en
1931, qui regroupe près de 800 jeunes cadres, professionnels et
entrepreneurs du Montréal métropolitain. Le ratio de nos membres
est d'environ 60 % d'hommes et 40 % de femmes. Un des principaux objectifs de
l'organisme est d'être le porte-parole de la jeune communauté
d'affaires montréalaise et c'est à ce titre que nous sommes ici
aujourd'hui.
Avant de vous faire part de notre position, nous aimerions situer le
rôle du ministère de l'Industrie et du Commerce tel que nous le
percevons. En fait, pour la Jeune Chambre de commerce, le rôle du
ministère est de favoriser par tous les moyens l'épanouissement,
le développement et l'innovation de l'ensemble de l'activité
économique du Québec, et également de favoriser
l'équité et la justice entre les commerçants et les
entrepreneurs.
Nous sommes assurés que les travailleurs sont bien
protégés par le ministère du Travail. Les consommateurs,
eux, ont l'Office de la protection du consommateur pour voir à leurs
besoins et nous croyons que le débat social dont nous avons
été témoins depuis les trois dernières
journées devrait relever du ministère des Affaires sociales,
plutôt que du ministère qui doit s'occuper du commerce au
Québec.
Cela établi, étudions maintenant la nouvelle
réalité sociale telle que nous la percevons et nous la vivons. La
société québécoise a énormément
changé, on en a déjà beaucoup parlé, au cours des
dernières années et il est temps que ie gouvernement adapte la
Loi sur les heures d'affaires à ces nouvelles réalités. Il
est impérieux pour le gouvernement de répondre aux demandes
grandissantes des gens qui travaillent et en particulier, comme on l'a
déjà souligné, des familles où les deux conjoints
sont sur le marché du travail, des familles monoparentales et aussi d'un
autre groupe de travailleurs qu'on oublie particulièrement, les
personnes seules qui travaillent à temps plein.
Comme l'a déjà mentionné la Coalition pour
l'équité, la famille à deux revenus est devenue le
modèle de cellule familiale. Il est important de noter que ce
modèle sera de plus en plus vrai au cours des prochaines années.
En effet, les récentes statistiques indiquent - et je ne vous l'apprends
pas - que le taux d'activité des femmes atteint aujourd'hui 59 % avec 77
% de ces emplois occupés à temps plein.
J'ai également d'autres chiffres révélateurs au
niveau du travail. Les données de Statistique Canada, pour 1986,
indiquaient qu'il y avait 62 % des femmes mariées avec enfant de moins
de six ans qui travaillaient, je répète, 62 %, et 91,5 % des
femmes mariées sans enfant qui sont âgées entre 25 et 34
ans qui étaient, en 1986, et c'est sûrement plus aujourd'hui, sur
le marché du travail.
Il n'est pas nécessaire d'être expert en matière de
statistiques pour conclure, à la lumière de ces chiffres, que le
nombre de familles et de personnes ayant des contraintes de temps est de plus
en plus élevé. Je ne parle pas ici de sondage maison, de sondage
scientifique, je parle de statistiques. Je ne pense pas qu'on puisse nous - je
pourrais dire "accuser", c'est un mot un peu fort - dire qu'on biaise les
chiffres, qu'on interprète des sondages, parce que c'est vraiment la
réalité telle qu'elle est vécue aujourd'hui.
Dans un marché du travail de plus en plus compétitif,
plusieurs jeunes gens doivent mettre les bouchées doubles et travailler
de nombreuses heures, chaque semaine, pour pouvoir gagner leur place sur le
marché du travail. Cette situation est vécue avec autant de force
par les hommes que par les femmes.
Par conséquent, ces consommateurs qui ne peuvent s'approvisionner
pendant les heures normales d'ouverture des marchés doivent payer plus
cher pour leurs produits alimentaires car ils doivent faire leur
épicerie au dépanneur ou au marché public.
Sur le sujet des contraintes de temps. Le sujet des contraintes de temps
et de la présence accrue des femmes sur le marché du travail a
été largement couvert dans la présentation de la
Coalition, hier. C'est pour cette raison que nous ne nous y attarderons pas.
Tout ce que nous voulons vous rappeler aujourd'hui, c'est de vraiment prendre
en conséquence la réalité et, également, la
différence qui existe entre la situation aujourd'hui et la situation qui
existait au moment de l'application de la loi, il y a déjà 20
ans.
De tous les secteurs d'activité économique au
Québec, le commerce de détail est le seul secteur à
être régi par une loi relativement aux heures d'affaires. Au fil
des ans, on a vu le nombre des exceptions augmenter, ce qui crée une
non-équité commerciale décriée par tous. Je pense
que, à date, tous ceux que j'ai entendus, qui se sont
présentés ici, ont convenu que la loi présente
était inéquitable.
On se retrouve aujourd'hui avec certains commerces qui jouissent de
privilèges au détriment d'autres commerces. J'aimerais vous
rappeler peut-être certains faits, sans entrer dans tous les
détails. On parle des pharmacies qui ont outrepassé leurs
privilèges et qui, maintenant, vendent n'importe quoi; on parle des
marchés aux puces qui ne respectent plus la norme maximale des 20 $, du
produit à 20 $; les clubs Price qui ont contourné la loi par une
forme de membership et les boulangeries qui n'ont pas le droit d'ouvrir le
dimanche mais qui changent leur nom et s'appellent "pâtisserie" et
peuvent offrir les mêmes services le dimanche.
À cause de toutes ces exceptions, de celles-là et de
toutes les autres, on note aujourd'hui seulement 1123 marchés
d'alimentation qui n'ont pas le droit d'ouvrir le dimanche sur un total de
quelque 14 000 commerces en alimentation au Québec. C'est
situation est inéquitable avec la présence de tous les autres
commerces, dont les pharmacies, les marchés publics, commerces
situés dans les zones touristiques ou les commerces, même
présentement, qui opèrent illégalement et qui sont devenus
de véritables marchés d'alimentation déguisés.
Pour nous également, il est clair que la baisse de part de
marché des grandes surfaces dont on a déjà parlé
est principalement due au fait que les dépanneurs, les petites
épiceries et les magasins spécialisés ont le
privilège d'ouvrir le dimanche et non due au dynamisme de ces commerces,
comme on l'indique dans le document du ministère.
Dans une optique de stimulation de l'économie
québécoise, nous encourageons le gouvernement à mettre en
place un système de bonus à la performance et à la
création d'emplois plutôt que d'augmenter les amendes
imposées aux commerçants qui défient la loi.
La ville de Montréal a pris position dernièrement en
faveur des petits commerçants pour qui - et j'ouvre les guillemets -
"L'ouverture des commerces le dimanche signifierait, pour la plupart, la
disparition de la seule journée de congé dont les
propriétaires, les employés et leur famille disposent", et j'ai
cité M. Robert Per-reault qui est vice-président du comité
exécutif de la ville.
En prenant cette position, nous nous sommes demandé si la ville
avait vraiment réalisé que, entre autres, dans le domaine de
l'alimentation, ce sont présentement des petits commerces qui sont
ouverts le dimanche parce que, comme la loi l'indique, entre autres pour
certains commerces, ceux qui ont le droit d'ouvrir, ce sont des entreprises qui
comptent trois employés ou moins, en tout temps.
Comment se fait-il que tous ces petits commerçants se prononcent
en faveur du maintien de l'ouverture de leur type de commerce le dimanche?
Est-ce qu'ils sont si malheureux de la situation? Nous croyons, au contraire,
qu'ils profitent largement des privilèges auxquels ils ont droit et ils
sont loin de se plaindre. D'ailleurs, il y a un certain nombre de groupes qui
se refusent de partager ce privilège avec d'autres commerçants.
De plus, que nous sachions, il n'y a aucune loi dans le marché des
affaires qui protège les petites entreprises contre les grandes
entreprises. Que ce soit dans tous les secteurs de l'activité
économique, si on parle, par exemple, de droit, de communications ou
d'ingénierie, tous sont sur le même pied
d'égalité.
Et aussi, nous croyons que le débat a été
faussé par la ville de Montréal car, comme on l'a
déjà souligné si justement avec des experts et des
commerçants, les propriétaires de supermarchés sont
également de petits commerçants et sont à la tête de
PME. Je m'excuse.
En résumé, le régime actuel d'exemption de
décret et d'autorisation spéciale a créé chez nous
une situation de non-équité et d'injustice commerciale. Cette
non-équité commerciale dans le domaine de l'alimentation se fait
au détriment des consommateurs et des commerçants et, par le fait
même, des travailleurs. Dans un souci d'équité commerciale,
le gouvernement, selon nous, a deux choix: Ou bien on ferme tout le dimanche,
ou bien on décide de tout ouvrir, dans le secteur de l'alimentation.
Les opposants à la libéralisation des heures d'affaires
craignent pour la qualité de vie des travailleurs et de leur famille.
Pourtant, on estime - et ça, ce n'est pas nous qui avons sorti ces
chiffres-là, ça nous a été confirmé par les
grandes chaînes alimentaires qui, elles, ont les outils pour pouvoir
calculer ces statistiques-là - qu'il y aurait moins de 1 % de la
population active du Québec qui serait appelée à
travailler dans les supermarchés le dimanche. On a fait des petits
calculs et on nous indique qu'il y aurait environ de 15 000 à 20 000
personnes seulement au Québec, sur une population totale de 6 800 000
environ, qui seraient appelées à travailler, advenant le cas
où on ouvrirait les supermarchés le dimanche. Nous croyons qu'il
s'agirait probablement d'une majorité d'étudiants qui pourraient
ainsi obtenir un emploi à temps partiel, également des femmes ou
des hommes désirant profiter de la présence de leur conjoint
à la maison la fin de semaine pour apporter un revenu d'appoint. Quant
aux employés réguliers, les commerçants affirment qu'ils
seraient libres ou non de travailler.
La Jeune Chambre de commerce de Montréal se demande comment il se
fait que des syndicats représentant des travailleurs de l'alimentation,
qui sont employés majoritairement par les supermarchés, ne se
battent pas pour préserver l'emploi de leurs membres, quand on sait que
les supermarchés perdent des parts de marché au profit des
commerces spécialisés et, également, que ces commerces
spécialisés-là emploient des gens à temps partiel
et généralement sous-payés. Si la situation actuelle
continue, les pertes de parts de marché se traduiront sûrement par
la perte d'emplois dans les supermarchés. De plus, les étudiants,
dont il est beaucoup question ces jours-ci, seraient sûrement
intéressés à profiter de quelques heures de plus chaque
semaine pour augmenter leur revenu.
Afin de juger plus rationnellement des effets de l'ouverture des
commerces le dimanche, il serait profitable d'étudier
l'expérience américaine qui, bien souvent malgré nous, se
reflète chez nous quelques années plus tard. Par exemple, on a
déniché un article qui a paru dans le Toronto Star, en
juillet 1988, qui fait état de la situation à Boston, qui n'est
pas tellement loin de chez nous et qui se compare bien à
Montréal, où les heures d'affaires ont été
libéralisées en 1983. Un représentant de la Chambre de
commerce de Boston avait analysé la situation de la
façon suivante: - et je cite mon représentant de la
Chambre de commerce de Boston - Ils avaient perçu une création
directe de 6000 emplois avec l'ouverture des commerces. On avait noté
une augmentation du volume des salaires de 8 000 000 $, une augmentation de
perception de taxes de 112 000 000 $ la première année. On avait
également noté une récupération d'une partie des
ventes qui se faisaient dans les autres États où il y avait
déjà une libéralisation des heures d'affaires et,
également, on faisait état que les commerçants estimaient
à 70 % des ventes effectuées le dimanche qui
représentaient ce qu'on appelle du "new business".
Nous croyons que cette commission parlementaire et que le
ministère auraient avantage à étudier la situation
américaine plus en profondeur. Nous nous excusons, c'est la seule
étude que nous avons pu mettre sous le main, mais je pense qu'on aurait
vraiment avantage à voir ce qui se passe chez nos voisins.
De nombreux groupes favorisent l'ouverture des marchés
d'alimentation les soirs du début de semaine plutôt que le
dimanche. La Jeune Chambre de commerce est sensible à leur désir
de préserver le dimanche pour les activités familiales, mais elle
ne comprend pas leur entêtement et leur vision noire en cas d'ouverture
le dimanche. En effet, rien ne les empêcherait de profiter quand
même de cette journée de repos. De plus, nous nous demandons pour
quelle raison la journée familiale ne pourrait pas être le samedi.
Est-ce qu'il existe une règle écrite quelque part qui nous dit
qu'on doit absolument réserver nos activités familiales, sociales
ou culturelles au dimanche seulement? Pourquoi cette journée ne
pourrait-elle pas être transférée au samedi? (12 h 30)
De plus, l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche ne
signifierait pas automatiquement que tous les consommateurs devraient se
précipiter à leur marché cette journée-là.
Il s'agirait plutôt de leur donner la liberté d'organiser leur
horaire de magasinage et de loisirs en fonction de leur disponibilité.
Et nous croyons que c'est ce point-ci qui est à la base du débat
de société que nous vivons, ces derniers temps.
La Jeune Chambre de commerce n'est pas en faveur de l'ouverture les
soirs de début de semaine pour, entre autres, une raison
pratico-pratique qui peut peut-être sembler farfelue, au premier
égard, mais qui est très réaliste dans notre
société: la grande majorité des travailleurs
québécois - eh oui! - reçoivent leur chèque de paie
le jeudi. Rendu au mardi, mercredi soir, c'est vrai dans la plupart des cas, le
budget est plutôt à sec et ce n'est pas à ce
moment-là qu'on a encore de l'argent pour aller faire son
épicerie.
Certains groupes ont laissé entendre qu'ils demandaient
l'élimination de toutes les exceptions prévues à la loi
actuelle ou, en fait, certaines exceptions tels les marchés publics, les
pharmacies et les fruiteries. Est-ce qu'ils pensent aux consommateurs quand ils
prennent une position en ce sens? Est-ce qu'ils pensent aux gens qu'on a
recensés, présentement? On parle de 180 000 ménages qui
fréquentent les marchés publics et les fruiteries le dimanche,
sans compter les autres qui ne sont pas recensés, qui vont dans les
clubs Price, dans les pharmacies et dans les autres commerces. Ou bien, est-ce
qu'on a pensé aussi aux 54,7 % de la population qui se sont
prononcés en faveur?
Également, la tendance est à la hausse. Hier soir, je ne
sais pas si les gens ont pu prendre le bulletin de nouvelles de
Télé-Métropole-TVA, à 23 heures, où on
faisait mention d'un vox populi sur les heures d'ouverture qui avait
été pris à Télé-Métropole. On posait
la question aux gens: Aimeriez-vous que les magasins soient ouverts le
dimanche? Sur un total de 4000 appels, on note que 57 % des gens se sont
prononcés en faveur et que 43 % des gens s'y opposent. Donc, je crois
que la tendance est vraiment partie dans la population. Et ce sont les
consommateurs de tous les âges qui revendiquent le droit de faire leur
épicerie à l'endroit de leur choix, le dimanche.
La libéralisation constitue, pour nous, la meilleure solution
pour mettre fin aux exemptions, décrets et autorisations
spéciales, donc, à la non-équité qui sévit
présentement. La fermeture des commerces le dimanche est virtuellement
impossible et le statu quo est dénoncé par tout le monde comme
étant injuste et inéquitable. L'équité passe donc
par une libéralisation des heures d'affaires et l'ouverture des
commerces en alimentation le dimanche. Le libre choix des consommateurs, le
libre choix des marchands et le libre choix des travailleurs sont autant de
garanties pour améliorer et non maintenir la qualité de vie.
Notre société évolue rapidement.
La Jeune Chambre de commerce demande au gouvernement de
légiférer tout en tenant compte de la réalité
d'aujourd'hui et en prévoyant les besoins futurs afin que ce
débat n'ait pas à être répété dans les
prochaines années. Il est du devoir du ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie de favoriser le commerce, au Québec, par
tous les moyens légaux. La priorité du ministère est
d'aider le commerçant à oeuvrer quand il veut, comme il veut et
avec qui il veut. De l'autre côté, il est du devoir du
commerçant de répondre aux besoins de ses clients et d'être
à leur service au moment où ceux-ci sont disponibles.
La Jeune Chambre de commerce de Montréal demande également
au gouvernement, via le Code du travail, de protéger les travailleurs
afin qu'ils ne soient pas obligés de travailler tous les dimanches.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie,
madame. M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce que, au début, je
pensais que vous m'aviez enlevé la responsabilité des heures
d'affaires pour donner ça au ministère des Affaires sociales.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): Mais là, je vois, en conclusion,
que vous me l'avez redonnée encore. J'ai juste une petite question
d'information. Si on se fie à votre raisonnement initial - vous avez
mentionné les comptables - vous iriez peut-être, et je veux savoir
si c'est juste vous ou la Jeune Chambre de commerce de Montréal,
à la libéralisation totale, non pas uniquement pour
l'alimentation. Parce que, dans votre mémoire, vous parlez uniquement de
l'alimentation.
Mme Béllveau: Je vais laisser ma directrice
générale...
Mme Rémillard: Ça peut s'expliquer. Dans le
mémoire, on ne parie que de l'alimentation parce que c'était le
contentieux. Il y aurait des exceptions qui font en sorte qu'on sent qu'il
manque un accès. Si, par exemple, il n'y avait que les boutiques de
vêtements spécialisées qui étaient ouvertes, on
pourrait, là encore, dire: Mais pourquoi pas les grandes surfaces? C'est
ce qui explique peut-être que, dans le mémoire et à
l'origine, on s'est davantage penchés sur l'alimentation, puis aussi
parce qu'il s'agit vraiment d'un besoin essentiel. Il faut absolument, chaque
semaine, aller faire l'épicerie. Mais je pense qu'à partir de
là, on peut élargir. Là, je vous explique le contexte du
mémoire, tout ça, mais, effectivement, on est en faveur d'un
élargissement des heures d'ouverture pour tous les commerces à la
Jeune Chambre.
M. Tremblay (Outremont): Je vais terminer là-dessus. C'est
parce que vous avez mentionné, tout à l'heure: C'est le seul
secteur régi par une loi des heures d'ouverture.
Mme Béliveau: Le commerce de détail. M. Tremblay
(Outremont): C'est ça. Mme Rémillard: C'est
ça.
M. Tremblay (Outremont): Là, je veux être certain
que ce n'est pas juste une opinion personnelle des deux personnes
présentes, ou c'est la Jeune Chambre de commerce de Montréal, si
vous aviez à consulter... Vous avez dit que, dans le fond, on ne devrait
pas avoir de loi en ce qui concerne les heures d'ouverture des commerces. C'est
ça que vous dites?
Mme Béliveau: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Très bien.
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Richard: Merci, M. le Président. Mesdames, vous
mentionnez dans votre document que vous ne voyez pas l'avantage d'ouvrir les
commerces en alimentation les lundi, mardi et mercredi soir. Par contre, vous
dites: Toutefois, on ne s'oppose pas à ce qu'on soit ouvert
jusqu'à 9 heures le soir, jusqu'à 21 heures le soir. Par contre,
vous spécifiez: Moyennant que ce sera ouvert le dimanche. Là,
vous dites: Le dimanche, on voudrait - en alimentation toujours - que l'horaire
minimum sort de 10 heures à 17 heures. Donc, en alimentation,
basé probablement sur le principe que vous n'avez pas trop de temps
durant la semaine à cause du type de profession que vous avez, comment
se fait-il que vous ne mettez pas d'heures le samedi et que, le dimanche, vous
spécifiez jusqu'à 17 heures? Vous dites: On manque d'heures. Et
vous dites, en plus: Sur semaine, nous, en résumé, on n'a pas le
temps, on s'en fiche que vous en mettiez ou que vous n'en mettiez pas, des
heures. Mais vous dites que le dimanche, par contre, de 10 heures du matin
à 17 heures, ça va. Le samedi, ça ne vous touche pas. Je
ne pense pas que dans vos professions vous travaillez le samedi.
Mme Béliveau: En fait, ce qu'on veut dire, c'est que si on
n'a pas parié du samedi, c'est que ce qui est actuellement là,
présentement, peut satisfaire les besoins. Ce qu'on demande:
Premièrement, le samedi, on veut le garder.
M. Richard: Je m'excuse. Mme Béliveau: Oui.
M. Richard: Pourquoi voulez-vous garder le samedi? Pourquoi
voulez-vous garder après 17 heures le dimanche? C'est ça, mon
interrogation, vous avez exactement le sens de ma question.
Mme Béliveau: En fait, notre première
priorité, c'est d'avoir le dimanche en plus de ce qui est là
présentement. Garder le samedi, ça nous permet de partager sur
deux jours. C'est sûr que si on a le dimanche, ça fait juste
déplacer le problème, ça ne répond pas au
problème. Donc, nous, ce qu'on demande, c'est d'avoir l'ouverture le
dimanche en priorité. Si les commerces veulent ouvrir les soirs de
début de semaine, on n'est pas contre ça dans la mesure où
on a le dimanche. Pour beaucoup de gens et nous, les premières, ici, les
soirs de semaine, ça ne nous donne absolument rien que les commerces
soient ouverts; on n'a pas plus le temps daller faire l'épicerie le
lundi soir que le jeudi ou le vendredi soir. Donc, s'il y a un
certain besoin chez la population d'ouvrir ces soirs-là, on n'est
pas contre que ce soit ouvert, du tout. Ce qu'on demande, nous, notre besoin,
c'est d'ouvrir le dimanche. Ce dont on a besoin présentement, c'est le
dimanche.
M. Richard: Sans que vous pensiez que c'est une invitation,
qu'est-ce que vous faites le samedi?
Mme Béliveau: Ce que je fais le samedi, la course folle.
Je peux aussi laisser ma directrice générale, qui a deux enfants,
vous raconter son samedi. C'est la course folle, le samedi. Les courses, tout
ce qui n'a pas été fait la semaine, la course chez le nettoyeur,
le lavage, le ménage, le travail aussi ou, souvent, si on a des
activités culturelles, parce qu'on doit en avoir, le samedi soir, et
ça peut être... C'est une journée de repos aussi dont on a
besoin. Je ne pense pas qu'on soit obligé encore de se lever à 7
heures ou 8 heures, le samedi matin, pour courir les magasins et faire tout ce
qu'on a à faire; on a quand même droit aussi à prendre son
temps et commencer la journée... C'est une journée de
congé au même titre que pour les autres. Alors, je peux laisser
aussi...
M. Richard: Vous mentionnez que, dans votre cas, vous
transférez le dimanche au samedi, en fait. Parce que, dans un premier
temps, vous n'ajoutez pas d'heures le samedi, même si vous dites que vous
êtes "overloadée" dans toutes vos démarches d'achats que
vous avez à faire, mais vous réservez toujours une journée
de repos, le samedi.
Mme Rémillard: Je ne pense pas qu'on peut élargir
ça, je ne pense pas que c'est ce qui a été dit ici non
plus.
M. Richard: C'est parce que vous ne demandez pas d'heures le
samedi.
Mme Rémillard: On pan" d'un acquis, on part de ce qui
existe, on demande un élargissement, on dit: II n'y en a pas assez.
L'option que nous, on retient, en regardant notre réalité, c'est
qu'il faut ouvrir une autre journée. Alors, c'est ça, et on donne
des heures; on indique même que ce sont des heures minimums.
M. Richard: Pourquoi pas les majorer le samedi?
Mme Rémillard: Finir le samedi plus tard pour les
emplettes?
M. Richard: Bien oui. Vous dites qu'il vous manque quelques
heures. La plus belle preuve, c'est quelques heures, vous n'en demandez que
quelques heures le dimanche. Pourquoi vous ne majoreriez pas le samedi soir?
Pourquoi ne pas ouvrir les commerces jusqu'à 21 heures le samedi et vous
auriez une journée entière, le dimanche, plutôt que le
samedi?
Mme Rémillard: Mais pourquoi est-ce que vous voulez
décider à quel moment je pourrais me reposer?
M. Richard: Là, c'est correct. C'est parfait. Ça
répond à ma question. Merci.
Mme Rémillard: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: Mesdames, nous en sommes à notre
troisième journée d'audiences et dans votre mémoire, il y
a quelque chose qui m'ap-paraît à ce moment-ci. Lorsque je regarde
le grand secteur de l'alimentation, on peut dire aujourd'hui qu'il est
contrôlé par quatre grandes chaînes. Il y en a même
une, on nous dit que, dans quelque temps, à assez brève
échéance, on verra la disparition d'une de ces
chaînes-là. Deuxièmement, avec la libéralisation des
heures pour certaines catégories de commerce, on a vu ces quatre grandes
chaînes-là diversifier et aller dans un réseau de
dépanneurs, de sorte qu'aujourd'hui, de plus en plus, le contrôle
va être à peu près vers les mêmes gens. Et hier, on
s'est fait dire aussi, comme troisième paramètre, par les
coopératives qui opèrent dans le secteur de l'alimentation que
lorsqu'on garde une superficie d'un magasin normal, on draine peut-être
entre un à trois milles de rayonnement alentour de notre succursale. Par
contre, lorsqu'on voit quelque chose qui est hyper ou grande surface, on peut
parler de quelque chose comme 60 milles. En ayant pris conscience de ça,
ne craignez-vous pas dans le temps que, si on ouvre tout le commerce - vous
mentionnez qu'il y a seulement 1123 marchés d'alimentation qui sont
fermés le dimanche sur un potentiel de 14 000, on voit
déjà une concentration vers quatre grands groupes, et on se
dirige vers trois - à un moment donné la pression va être
de dire: Faisons une grande grande surface? Pourquoi avoir des
dépanneurs et pourquoi avoir des magasins satellites? On va avoir le
même chiffre d'affaires, centraliser et réduire nos
dépenses et, finalement, dans deux ans, trois ans, quatre ans ou cinq
ans d'ici ou dans le temps, on n'aura pas une perte d'emplois, une
érosion et, à ce moment-là une concentration aussi du
commerce dans quelques mains avec moins de concurrentiel, qui est exactement
à l'opposé de ce que la vive concurrence devrait faire, garder
des prix à la consommation très bas. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Rémillard: C'est une question assez technique. On n'a
évidemment pas, nous, les
moyens d'envisager les développements des entreprises. Il y a
quand même des constats qu'on peut faire. De plus en plus, les
marchés se segmentent et c'est vrai en alimentation comme dans tous les
secteurs. On constate aussi un développement important des petits
marchés spécialisés que les gens préfèrent
fréquenter aux grandes surfaces. Les gens vont fréquenter les
grandes surfaces pour un certain type de produit et vont aller dans les petites
épiceries fines ou dans les marchés spécialisés
pour autre chose. Dans ce sens-là, je pense que le consommateur est
gagnant. Il y aura une diversité de produits. Je ne pense pas qu'on va
arriver à un marché où il n'y aura pas de concurrence dans
l'alimentation. Mais, là, je ne suis pas équipée pour vous
donner la réponse avec tous les chiffres.
M. Saint-Roch: Merci.
Le Préskient (M. Bélanger): Bien. Il reste une
minute à la formation ministérielle.
Mme Dionne: J'avais une question. J'aurais aimé que, tout
à l'heure, madame complète sa réponse. Vous avez dit que
vous êtes mariée, avez deux enfants, les difficultés, et
c'est pour ça que vous demandez que les heures soient élargies.
Est-ce que vous pouvez compléter un peu votre réponse?
Mme Rémillard: La vie quotidienne d'une jeune
professionnelle, mère de deux enfants.
Mme Dionne: Oui.
Mme Rémillard: Mon époux travaille aussi à
plein temps. J'ai une fille à l'école. Je reviens assez tard.
J'ai des réunions en moyenne trois soirs par semaine. J'ai une
excellente gardienne, Dieu merci. Et il y a les devoirs, il y a les bains. J'ai
un bonhomme de deux ans et une bonne femme de huit ans. Ça vous explique
un peu la conjoncture. Donc, en soirée, prendre mes deux petits à
19 heures pour aller faire l'épicerie, parce que j'arrive chez moi
à peu près à ces heures-là, ce n'est vraiment pas
réaliste. Il me reste donc le samedi et le dimanche. Il fait un temps
magnifique samedi. Les enfants sont en forme, on est bien, on pourrait faire
une activité familiale. Mais moi j'ai l'épicerie à faire.
Là, on va changer de saison. Vous ne le savez peut-être pas,
messieurs, mais les vêtements d'été pour les enfants, c'est
maintenant qu'il faut les acheter. Et il faut amener les petits et...
Une voix: C'est sexiste, ça.
Mme Rémillard: Vous le savez? Tant mieux. Tant mieux. J'ai
dit: Peut-être pas, peut-être pas. Donc, il y a tous ces
achats-là. Il faut concentrer ça dans une journée en
disant: Demain, on pourra faire autre chose. Or, le lendemain, s'il pleut,
ça vient de casser nos plans, ou si un enfant est plus grognon, si un
ami appelle... On est obligés de tout concentrer. On planifie
déjà toutes nos semaines et on est rendus que les fins de
semaine, c'est vraiment très planifié: Tu prends les petits, tu
vas chez la coiffeuse, moi, je prends la plus grande et je vais l'habiller
pendant que tu fais l'épicerie. Et là, le samedi, on roule; on a
roulé toute la semaine et il ne nous reste que le dimanche.
Alors moi, je me dis, si vous pouviez nous donner un petit peu plus de
temps, nous laisser planifier sur deux jours des plages de repos, des plages
d'activités, afin d'éviter de partir le samedi matin avec les
deux enfants et de revenir à 17 h 30 le samedi soir. Il y a beaucoup
d'achats à concentrer dans une très courte période de
temps.
Le Président (M. Bélanger): Ce serait un plaidoyer
pour une huitième journée. Ha, ha, ha!
Mme Rémillard: Ah bien ça... Ha, ha, ha! On va
toujours tenter de le faire.
Le Président (M. Bélanger): Le temps de la
formation ministérielle étant écoulé, je
cède la parole à...
Mme Rémillard: Ça, ça irait peut-être
au ministère du Travail.
Le Président (M. Bélanger): ... Mme la
députée de Taillon. (12 h 45)
Mme Marois: Merci, M. le Président. En fait, j'ai lu votre
mémoire depuis quelques jours déjà, et il m'a
choquée, profondément choquée. Je le dis.
Mme Rémillard: Oui.
Mme Marois: Je le trouve même un peu presque sur le bord
d'être méprisant à l'égard de certaines
catégories de personnes. Ces gens n'ont plus d'argent le jeudi soir,
donc n'ouvrons pas. Ils n'en auront plus le lundi parce qu'ils sont
payés le jeudi, alors n'ouvrons pas le lundi, mardi, tu sais. Là,
j'exagère, je me défoule et je le dis D'accord?
Mme Rémillard: Oui.
Mme Marois: Et mieux vaut, je pense, être franc dans la vie
que de se faire croire des choses et, après ça, de...
Mme Rémillard: D'ailleurs, nous aussi on a
été francs.
Mme Marois: Alors, voilà. Cela dit, quand on me dit:
Ça ne devrait pas être au ministre de l'Industrie, du Commerce et
de la Technologie de
s'occuper de la qualité de vie, moi, je pense que ça
devrait être au premier ministre du Québec, au ministre de la
Science, au ministre de l'économie, des Finances et du Revenu. Ça
devrait être à tout le monde parce que la qualité de vie,
c'est peut-être l'essentiel qui fait que, quelque part, on a le
goût justement de vivre.
Je me dis: II faut un petit peu regarder d'une façon globale
l'ensemble de la société dans laquelle on s'inscrit. Alors, dans
ce sens-là, je pense que c'est justement ce qui va faire qu'on va avoir
une société qui va mieux répondre aux besoins des
gens...
Mme Béliveau: Aux besoins de qui?
Mme Marois: ...aux besoins de l'ensemble de la population...
Mme Rémillard: C'est ce qu'on dit, madame.
Mme Marois: ...si le ministre de l'Industrie, du Commerce et de
la Technologie et les autres...
Mme Béliveau: Je pense... Je m'excuse. Mme Marois:
...s'en préoccupent.
Mme Béliveau: Si je peux me permettre, quand on parte de
qualité de vie, nous, nous avons parlé de débat de
société. On n'a pas utilisé les mots "qualité de
vie" parce qu'on en parle, dans notre mémoire, de la qualité de
vie et on s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commerce pour cette
qualité de vie-là. Il faudrait peut-être faire attention
à la notion de qualité de vie dont on parlait.
Mme Marois: C'est dans vos propos, quand vous êtes
intervenues au début de votre présentation en disant,
évidemment sous l'angle de l'humour: Peut-être que ça
devrait s'en aller vers le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Je n'ai quand même pas rêvé ça; ce sont des propos
que vous avez tenus.
Mme Béliveau: Oui. On a parlé de débat de
société.
Mme Marois: D'accord.
Mme Béliveau: Je voulais juste remettre mes mots dans ma
bouche.
Mme Marois: D'accord. À partir de là, maintenant
que cela est dit, un vox populi à
TVA, je veux bien que vous le mentionniez ici, mais là, on
va...
Mme Béliveau: II n'est pas écrit dans le
mémoire non plus...
Mme Marois: Non.
Mme Béliveau: ...si vous remarquez.
Mme Marois: Mais on ne va pas mélanger les choux, les
carottes, les navets, les fraises, les framboises.
Mme Béliveau: Je ne vois pas pourquoi. Je m'excuse, Mme
Marois. Ce sont 4000 répondants de la région de Montréal.
Alors, on n'a pas écrit ces choses-là dans notre mémoire,
mais on se donne quand même la peine de mentionner, de porter à
votre attention ce qui se passe...
M. Jolivet: Je pourrais peut-être vous dire, madame...
Madame!
Mme Béliveau: ...je m'excuse.
M. Jolivet: Je pourrais vous dire que, le vendredi
précédant l'élection dans mon coin, la radio a fait la
même chose: 41 votes au candidat libéral, 22 au péquiste,
et je l'ai battu par 8000 voix, 66 % et deux tiers des voix. Donc, moi, ces
choses-là, j'y crois très rarement.
Mme Marois: Cela dit, on a eu un long débat ici, depuis le
début de la semaine. On a eu un long échange avec M. Nantel,
entre autres, des HEC et un certain nombre d'autres professionnels et chacun y
va de son sondage, chacun y va de ses variables, alors il faut être un
peu prudents là-dessus.
Dans votre mémoire - et j'y reviens assez
régulièrement - à la page - ah! il n'est pas
numéroté, oui - 1, vous dites: Nouvelle réalité
sociale... Il est impérieux pour le gouvernement de répondre aux
demandes grandissantes des gens qui travaillent et, en particulier, des
familles où les deux conjoints sont sur le marché du travail,
ainsi que des familles monoparentales et des personnes seules travaillant
à temps plein. Je vais prendre juste le bout "familles monoparentales et
personnes seules à temps plein". Je vous répète ce que
j'ai dit à d'autres avant vous: on dit que 62 % des chefs de famille
monoparentale sont inactifs au plan statistique du terme. D'autre part, les
personnes seules travaillant à temps plein, j'imagine que, si elles sont
seules, elles ne doivent pas travailler 150 heures-semaine. Imaginons qu'elle
en travaille 60 heures. Il doit quelque part leur en rester quelques-unes pour
aller faire leurs courses en dehors du dimanche?
Mme Béliveau: II leur en reste sûrement
quelques-unes. Moi, je vais vous répondre parce que je suis dans la
catégorie des personnes seules travaillant à temps plein. Et si
j'ai une activité le samedi pour mon travail ou autres, parce que
ça arrive qu'on ait des réunions le samedi, qu'on doive
travailler le samedi, il n'y a
personne chez moi pour aller faire l'épicerie à ma place.
Les personnes monoparentales, c'est la même chose. C'est sûr que,
si on travaille sur semaine, il reste le samedi pour aller faire les courses,
mais ce qu'on demande, c'est une qualité de vie supplémentaire,
de pouvoir répartir nos choses et de pouvoir dire: Non, aujourd'hui,
j'ai une autre priorité, j'ai d'autres choses, j'ai d'autres courses
à faire. Je vais les répartir sur deux jours ou je vais faire une
autre activité aujourd'hui. Comme Mme Rémillard le disait
tantôt: Aujourd'hui, il fait beau, j'ai envie d'être à
l'extérieur. Demain, je ferai mes courses. Je ne pense pas que ce soit
un caprice de gens de demander ça.
Mme Marois: Vous êtes bien conscientes que, dans le fond,
pour ce que vous voulez vous offrir, vous, vous demandez à d'autres de
se contraindre pour pouvoir faire en sorte que vous, là, vous en
profitiez? Je sais que vous avez fait la démonstration du nombre de
personnes.
Mme Béliveau: Oui.
Mme Marois: Bon. On pourrait en discuter longuement: Est-ce que
c'est 20 000, est-ce que c'est 30 000? Combien d'effets d'entraînement
cela aurait-il sur d'autres secteurs d'activité? Vous êtes 800
membres. Avez-vous demandé à vos 800 membres, qui ne sont pas des
commerçants, qui sont des professionnels...
Mme Béliveau: Oui.
Mme Marois: ...s'ils seraient d'accord, eux, pour ouvrir leurs
bureaux le samedi et le dimanche?
Mme Béliveau: Les gens ne les ouvrent pas les bureaux,
mais je peux vous dire que la grande majorité de nos membres vont,
à l'occasion, travailler le dimanche, et ce sont tous des gens qui ont
un profil de travail. Nous, on n'a pas pris l'angle des travailleurs,
contrairement à votre position, on a pris l'angle des gens qui ont
à vivre une réalité. Quand on parle de 15 000 à 20
000 personnes - on peut peut-être aller jusqu'à 50 000 si vous
voulez, mais on ne peut quand même extrapoler jusqu'à 100 000 -
c'est ce chiffre-là, versus quand même une population qui est
là. Quand on parte de 55 % des femmes qui travaillent à
l'extérieur dont 77 % à temps plein, ce n'est pas un sondage,
c'est Statistique Canada qui le donne. Donc, ça démontre quand
même une certaine réalité. Nous, on ne prend pas le parti
des travailleurs, parce que nous en sommes des travailleurs. Quand les gens
choisissent un emploi, un métier, ils voient les conséquences de
ce métier-là. Les gens en restauration le savent qu'ils ont
à travailler les soirs et le dimanche, comme vous et vos
collègues, quand vous vous êtes présentés comme
députés, vous saviez la charge de travail que ça
demandait. Donc, on ne veut pas prendre le parti des travailleurs, parce qu'on
a des contraintes de temps, nous aussi, de travail. Ce qu'on veut, c'est
prendre le parti du besoin de la population. Ce qu'on voulait vous
démontrer par ça, c'est le ratio de gens qui seraient
appelés à travailler - là, on est allés dans le
domaine de l'alimentation - le dimanche par rapport au reste de la population.
C'est là que c'est important.
Mme Rémillard: Mais...
Mme Marois: Si vous vouliez être logique jusqu'au bout...
Oui, je vais revenir, Mme Rémillard. Je m'excuse. Mais si vous vouliez
être logique jusqu'au bout, à ce moment-là vous devriez
demander aussi d'allonger les plages d'accès les lundi, mardi et
mercredi parce que... Il me semble que ce serait logique. Je comprends que
madame me dise: J'ai deux enfants. J'en ai quatre, moi aussi. Sûrement
que, si on se rencontrait plus longuement, on constaterait qu'on a les
mêmes maudits problèmes. D'accord? Mais, si on dit: Je prends le
point de vue de la population en général, à ce
moment-là, 91 % des 25-35 ans qui n'ont aucun enfant, les conjoints qui
sont tous les deux sur le marché du travail, peut-être qu'eux, ils
iraient, le mercredi soir, faire leur marché.
Mme Rémillard: Oui.
Mme Marois: II faut avoir une logique jusqu'au bout.
Mme Rémillard: C'est ça. Du point de vue où
on vous parie, et on vous parle au nom de nos membres évidemment, et on
les connaît bien, on sait que ces gens-là travaillent en
soirée, on sait que la journée ne se finit pas à 16 h 30,
à 17 heures ou à 18 heures dans nos milieux de travail. On sait
qu'on est souvent sollicités pour des réunions en soirée,
on sait tout ça. Alors la solution ne nous apparaît pas la
solution universelle à tous nos problèmes, ces quelques heures
qu'on ajouterait en soirée parce que, déjà, c'est
impossible.
Je voudrais ajouter peut-être à votre question de
tantôt concernant le caprice qu'on se paierait sur le dos des autres
travailleurs, je pense qu'ils ne travailleront pas sept jours par semaine, ces
gens-là; je pense qu'ils vont répartir leur temps d'une
façon différente et leurs heures d'une façon
différente, et qu'ils auront, comme les autres consommateurs, au moment
de leurs deux journées de congé - je l'espère pour eux -
ou en tout cas de leurs heures de congé, accès à tous les
marchés pour faire, eux aussi, leurs emplettes. Tout bêtement,
c'est juste ça, le problème.
Mme Marois: Non, j'avais compris ce que
vous m'exprimez. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je passe la
parole au député de Drummond.
M. Saint-Roch: En vous écoutant, une des réflexions
avec laquelle on devrait peut-être faire un débat de
société, c'est d'augmenter aussi les horaires flexibles.
Ça réglerait peut-être une partie des...
Mme Rémillard: Je peux peut-être dire
qu'effectivement, on parle des besoins des jeunes sur le marché du
travail et on parle des besoins des jeunes familles. Ça touche à
tout. On demande de meilleurs services de garde avec plus de
flexibilité, on demande un réaménagement des heures de
travail ou de la flexibilité là-dedans. On demande aussi que les
commerces, là où on agit à titre de consommateurs,
tiennent compte de ces besoins-là. C'est exactement dans le même
créneau de demandes et c'est ça, le projet de
société, la qualité de vie. On n'est pas à
côté de ça. Ce projet-là, on le porte dans tous les
autres domaines. Pourquoi, en tant que consommateurs, tout à coup,
toutes les portes se fermeraient?
Mme Béliveau: Peut-être aussi, au niveau de
l'horaire flexible, je ne pense pas que ceux de nos membres qui sont
entrepreneurs ou professionnels aussi, beaucoup... L'horaire flexible, quand tu
travailles 60 heures par semaine, je ne sais plus où c'est. Est-ce que
c'est quatre jours de 20 heures ou quatre jours de 15 heures, l'horaire
flexible? C'est une autre chose. Ce serait idéal. J'adorerais ça,
travailler quatre jours, mais je pense que je travaillerais 20 heures par jour
pour pouvoir faire mon autre travail dans ces jours-là. Je pense qu'on
ne vit pas ça, l'horaire flexible. La majorité de nos membres ne
le vivent pas parce que, comme on l'a dit, on doit travailler, c'est une lutte
de tous les instants sur le marché du travail. Il n'y a personne qui
nous fait de fleurs ou de faveurs. Alors, il faut vivre avec ce qu'on a, avec
les heures qu'on a et s'adapter le mieux possible.
M. Saint-Roch: Oui. Une dernière question. Cela fait
quelques fois que je la pose d'ailleurs. Votre mémoire aussi est clair,
vous ne voulez pas que le pouvoir décisionnel soit
transféré au niveau local.
Mme Béliveau: Oui.
M. Saint-Roch: Admettons qu'on a besoin d'avoir une loi, on garde
le pouvoir de légiférer, ici à Québec...
Mme Béliveau: Oui.
M. Saint-Roch: ...le pouvoir de réglementer. Mais, au
niveau de l'application de cette loi, est- ce que vous auriez des objections
à ce qu'elle soit transférée au niveau local, à ce
moment-là?
Mme Rémillard: Que chaque localité décide
des heures d'ouverture?
M. Saint-Roch: Non. Mme Rémillard: Non?
M. Saint-Roch: Ici, l'Assemblée nationale et M. le
ministre, avec le pouvoir réglementaire que lui confère la loi,
après décret, ou ces choses-là, que ça demeure
à Québec... Après qu'on a un texte de loi, ça prend
quelqu'un pour surveiller l'application de cette loi. Si on dit, par exemple,
que les commerces sont tous fermés le dimanche, que l'Assemblée
nationale décrète cette loi. Mais, pour la faire respecter,
est-ce que vous seriez, à ce moment-là, d'accord qu'il y ait un
pouvoir de surveillance et que l'application de la loi soit faite au niveau des
municipalités?
Mme Béliveau: Je n'ai pas analysé la question, mais
je serais tentée de vous dire non, parce qu'on voit au niveau des
commerçants qu'il y a toujours des commerçants qui vont trouver
une façon de contourner la loi. Je ne veux pas accuser les
municipalités du tout, ce n'est pas mon propos du tout, mais il y a
peut-être des secteurs où les gens vont trouver profitable que
certains commerces soient ouverts et qu'on applique peut-être la loi de
façon moins rigoureuse. En tout cas, c'est ma première
impression, c'est ma première réponse. Si vous voulez, on
pourrait y réfléchir plus longuement et peut-être,
éventuellement, revenir. Un premier "feeling", ce serait vraiment
ça... Je ne sais pas si...
Mme Rémillard: Je peux peut-être ajouter une chose
là-dessus. C'est qu'on introduirait à une concurrence dans un
milieu donné une possibilité d'avoir recours à une police
locale. Il me semble que c'est un "bias", c'est introduire quelque chose d'un
peu bizarre dans le marché, si on parle d'application, parce qu'on
restreindrait les heures. Par ailleurs, il a déjà
été mentionné qu'on pourrait laisser aux forces locales le
choix, si elles veulent ouvrir ou ne pas fermer, par municipalité, mais
ce n'est pas ce que vous évoquiez, vous.
M. Saint-Roch: Non. J'évoque l'exemple de la loi 127 sur
la sécurité routière. C'est une loi qui est de juridiction
provinciale. La loi a été votée par l'Assemblée
nationale, mais le corps policier, par exemple, en fait l'application, au
niveau de la municipalité, de la loi-cadre.
Mme Rémillard: II faudrait créer une police parce
que, sinon, ça va être de la délation. Je ne pense pas que
ce soit très sain.
M. Saint-Roch: Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Orford.
M. Benoit: D'abord, pour ce qui est du sondage, je pense que 4000
personnes à 23 heures, le soir, c'est probant pour moi. Je comprends
qu'en période électorale, nos équipes appellent et
essaient de donner une influence à ces sondages. Mais à 23
heures, te soir, au canal 10, j'ai tout lieu de croire que le sondage aurait
une certaine forme de vérité.
Mme Béliveau: En tout cas, ça confirme aussi les
tendances qu'on a démontrées avec la Coalition.
M. Benoit: Je suis heureux de vous entendre dire, et après
l'exposé de madame avec ses deux enfants... Un certain nombre d'entre
nous avons de jeunes enfants, et nos épouses et nous-mêmes vivons
ce problème du couraHIage du samedi. Et je suis heureux de vous entendre
dire effectivement que la qualité de vie ne commence pas le samedi soir,
à 18 heures, parce que le législateur a décidé que
c'était le samedi soir, à 18 heures, que la qualité de vie
commençait. La qualité de vie, c'est quelque chose qui est toute
la semaine. Et, tout ce qui va faire qu'on peut donner de la
flexibflité. je pense que la flexibilité va faire que la
qualité de vie va être proportionnelle. Chacun, à partir de
ses cours à l'université, de son ouvrage, de ses
préoccupations, de sa famille, de ses amis...
Mme Béliveau: De son implication.
M. Benoit: ...de ses voisins, de la température, va
décider finalement c'est quoi, sa qualité de vie. C'est
drôle que la mienne, ma qualité de vie n'a peut-être rien de
similaire à la vôtre, mais plus on mettra de flexibilité
dans le système, plus la qualité de vie... Chacun va s'ajuster.
J'étais heureux que vous le disiez, finalement, et vous finissez dans
votre mémoire en disant: Les commerçants ouvriront s'ils le
veulent. On ne les obligera pas. Les travailleurs travailleront s'ils le
veulent et les consommateurs magasineront s'ils le veulent. Extraordinaire!
Mme Béliveau: En fait, ce qu'on demande, le message,
finalement, de tout ça, c'est: Laissez-nous... Aux heures où on
est disponibles, on aimerait que les commerces soient là et qu'on puisse
profiter de ça. Donc, vraiment, le message c'est: Entre 9 heures et 17
heures, le lundi, il y a beaucoup de gens qui ne sont pas disponibles, mais le
dimanche on est disponibles. Donc, c'est vraiment ça le message qu'on
veut passer.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée.
Mme Marois: Je reviens au vox populi. Si on vous posait la
question: Êtes-vous contre les taxes? Tout le monde va dire: Bien
sûr qu'on est contre les taxes. Il y avait quelqu'un, d'ailleurs, et il
l'a dit ce matin, je pense que c'est un député ministériel
qui disait: Si on pose la question: Voulez-vous plus de services? Il y a, comme
spontanément, une réponse qui va venir: Bien sûr, on en
veut plus de services. Si on pose la question: Voulez-vous travailler le
dimanche? Peut-être qu'on aurait eu d'autres réponses. Si on pose
la question: Est-ce que vous voulez que les commerces soient ouverts le
dimanche, ou les lundi, mardi, mercredi? Ou, une autre alternative: le dimanche
ou le mercredi? Ça donnerait probablement un autre résultat.
D'accord? C'est ça, la nuance que je voulais apporter tout à
l'heure, uniquement ça.
Est-ce que, dans votre demande, vous n'avez pas une crainte à
l'effet que, permettant l'ouverture des commerces d'alimentation, on mette le
pied dans la porte et qu'on en arrive à ce que des pressions
s'établissent pour que l'ensemble des commerces de détail, dans
tous les secteurs, soient ouverts aussi sept jours-semaine?
Mme Béliveau: On s'est prononcés, tantôt, en
faveur de l'élargissement.
Mme Marois: Et donc, dans ce sens-là... Mme
Béliveau: Oui.
Mme Marois: ...vous, vous dites: Oui, c'est un pas dans la porte.
Ce que je veux vous entendre dire, c'est: Oui, c'est un pas dans la porte et
notre prochaine demande, ça va être celle-là.
Mme Rémillard: Oui, c'est régler un problème
actuel qui est dû beaucoup à lïnéquité. C'est
beaucoup ça qui est en cause aussi présentement...
Mme Marois: Oui.
Mme Rémillard: ...le fait que l'alimentation soit un
besoin essentiel. Alors, si on peut régler ce problème-là,
on sera très heureux. On verra.
Mme Marois: Pour le reste, on verra. Mme Rémillard:
Bon.
Mme Marois: D'accord. J'avais un certain nombre d'autres
commentaires, mais je pense que, de toute façon, le temps
général de la commission est à peu près
terminé.
Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous voulez
remercier nos invités, Mme la députée.
Mme Marois: Je vous remercie de votre présentation. Je ne
partage absolument pas votre point de vue. Je pense que je vous l'ai dit
très clairement et très honnêtement.
Mme Rémillard: C'est votre droit.
Mme Marois: Je préfère ce type d'échanges
très francs. Ça permet de travailler, après ça, sur
des bases correctes. Merci de votre contribution.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): C'est bien, parce que la
députée de Taillon a des idées, des fois, bien
arrêtées, mais c'est bon. Ça fait une bonne discussion
mais, moi, je dois vous dire que je ne suis pas nécessairement contre
les taxes pour autant..l
Une voix: Qu'elles paient ton salaire. M. Tremblay
(Outremont): Non. Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Au moins...
M. Tremblay (Outremont): Ça dépend de ce qu'on fait
avec.
Une voix: Ah bon! Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): Tu sais, ça dépend de ce
qu'on fait avec l'argent, et j'ose espérer que je suis utile dans ce que
j'essaie de faire aussi. Ce que je veux vous dire en terminant, c'est que c'est
vrai que c'est un débat de société très important.
Moi, j'ai beaucoup apprécié vos commentaires et vos remarques
parce que j'ai mentionné au début de cette commission, je l'ai
dit et je le cite encore, j'ai dit: La solution retenue devra donc permettre
aux consommateurs, aux commerçants et aux travailleurs d'être
gagnants. J'ai dit: C'est ainsi que nous pourrons favoriser
l'épanouissement économique et social du Québec. C'est
ça maintenant. Alors, dans ce sens-là, merci beaucoup, et vous
pouvez partir avec un beau sourire dans le sens qu'au moins on a
écouté ce que vous avez dit...
Mme Rémillard: Merci.
M. Tremblay (Outremont): ...et on va le prendre en
considération dans la décision qu'on aura à prendre.
Alors, merci beaucoup.
Mme Rémillard: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie les représentants de la Jeune
Chambre de commerce de Montréal et suspend ses travaux jusqu'à 14
h 30. À 14 h 30, si on pouvait débuter à l'heure, s'il
vous plaît.
(Suspension de la séance à 13 h 4)
(Reprisée 14 h 34)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission de l'économie et du travail va reprendre ses
travaux pour continuer ses auditions publiques sur le dossier des heures
d'ouverture des commerces. Nous recevons, cet après-midi, la Chambre de
commerce du Québec. C'est bien ça, oui?
Une voix: Oui, c'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Excusez! C'est parce
qu'on devient mêlés dans nos horaires. C'est bien la Chambre de
commerce du Québec. Je demanderais donc à ses
représentants de se présenter. Avant de passer à la
présentation de votre mémoire, losqu'on aura une partie
d'échanges avec les parlementaires, je vous prierais de vous identifier
chaque fois, non pas qu'on n'a pas de mémoire et qu'on ne vous
reconnaîtra pas, c'est pour les gens qui travaillent à la
transcription, au Journal des débats. Ils ont besoin de votre
nom. Alors, si vous ne le dites pas chaque fois, ils ont un problème et
c'est bien fastidieux pour eux. Juste pour leur rendre la tâche plus
facile, je vous demanderais de vous identifier chaque fois. Donc, si vous
voulez identifier votre porte-parole, présenter l'équipe et
présenter votre mémoire, on vous écoute.
Chambre de commerce du Québec
M. Lambert (Jean): M. le Président, mon nom est Jean
Lambert, je suis président de la Chambre de commerce du Québec.
J'aimerais vous présenter mes collègues qui sont avec moi: M.
André Grondines, qui est le président du comité sur les
heures d'ouverture; M. Jean-Claude Riendeau, qui est le directeur
général de la Chambre; M. François Barron, qui est le
directeur de la recherche, et nous avons une collègue effacée qui
est Mme Cléroux, la directrice des communications.
Le Président (M. Bélanger): Que j'ai le plaisir de
bien connaître.
M. Lambert: M. le Président, nous tenons, en premier lieu,
à souligner la qualité exceptionnelle du document d'information
qui nous a été remis par le ministère de l'Industrie, du
Corn-
merce et de la Technologie. La justesse et la profondeur des analyses
présentées ont constitué une base solide et stimulante
nous permettant de mieux cerner le cadre d'analyse de la problématique
et d'étayer notre démarche et nos recommandations.
Qui sommes-nous, la Chambre de commerce du Québec? Nous sommes un
porte-parole de premier plan de la communauté des affaires et sur une
base horizontale. Fondée il y a 80 ans, la Chambre de commerce du
Québec regroupe quelque 230 chambres locales et au-delà de 7517
sociétés membres. Je viens d'avoir la statistique exacte, il y a
quelques minutes.
Le Président (M. Bélanger): II y en a plus. M.
Lambert: 7517. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lambert: On est en croissance. Elle représente, pour
les intervenants québécois, un point de convergence, un lieu de
rassemblement où les idées novatrices trouvent leur tremplin.
C'est en leur nom que nous présentons aujourd'hui ce mémoire.
Ainsi qu'elle le définit dans son concept d'affaires, la Chambre
se veut le catalyseur du développement économique du
Québec. Par le biais du réseau des chambres locales, la Chambre
apporte son soutien aux activités et aux interventions de chacune des
instances dans sa région respective. Par ailleurs, elle relie tous les
maillons de cette chaîne pour demeurer le lien entre les paliers locaux
et l'interlocuteur gouvernemental, et elle fait office de pont entre les
entreprises québécoises et les administrateurs publics.
En tant qu'intervenant majeur au sein de la communauté des gens
d'affaires et de la société tout entière, la Chambre de
commerce du Québec suit de près le dossier sur les heures
d'ouverture des établissements commerciaux depuis plusieurs
années. C'est donc pleinement consciente des répercussions
sociales et de la controverse qu'il suscite en matière de concurrence
qu'elle entend vous livrer ici le point de vue de ses membres.
Je vais me permettre, M. le Président, de vous donner un
résumé succinct et je permettrai à mon président de
vous faire part de la méthodologie et de la façon dont nous avons
opéré.
Dans le cadre de la présente commission parlementaire, la Chambre
a orienté son intervention sur trois points qui préoccupent plus
directement ses membres et sur lesquels elle est en mesure d'exposer un point
de vue pertinent, soit la révision des exceptions prévues par la
loi actuelle; deuxièmement, le réaménagement des heures
d'ouverture en semaine pour tous les types d'établissements commerciaux;
et, troisièmement, l'ouverture le dimanche des établissements
commerciaux du secteur de l'alimentation.
Lors d'un sondage maison mené en janvier dernier et portant sur
les deux derniers points précités, les membres de la Chambre se
sont prononcés dans une proportion de 69 % en faveur de chacune des deux
propositions. Ces résultats confirment, notamment, l'évolution
des mentalités en faveur d'une libéralisation des heures et des
jours d'ouverture. Ils soulignent, en outre, le besoin d'une
amélioration des services aux consommateurs dont l'évolution des
besoins et des habitudes de vie appelle un assouplissement des heures
d'ouverture des commerces
Deux préoccupations majeures justifient notre position en faveur
de la libéralisation des heures d'ouverture des établissements
commerciaux: en premier lieu, le besoin de laisser jouer les lois du
marché afin de favoriser un nouvel équilibre économique
et, en deuxième lieu, le rétablissement d'un régime plus
équitable pour toutes les entreprises visées. Essentiellement, la
Chambre soutient que c'est aux commerçants de s'adapter aux besoins des
consommateurs et non l'inverse.
Je demanderais à M. André Grondines, notre
président, de livrer le côté pointu de notre
mémoire.
M. Grondines (André): Merci, M. le président. M te
Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, parmi
les six thèmes soumis à l'étude de la commission, nous
avons choisi de privilégier, comme il a été
mentionné il y a quelques instants, trois questions qui nous
apparaissent fondamentales, et je les répète: la révision
des exceptions prévues par la loi actuelle, le
réaménagement des heures d'ouverture en semaine pour tous les
types d'établisse ments commerciaux et, troisièmement,
l'ouverture le dimanche des établissements commerciaux du secteur de
l'alimentation. Sans négliger les autres aspects de nature plus
administrative, nous avons cru bon d'orienter notre intervention sur les trois
points les plus névralgiques qui touchent plus directement les membres
de la Chambre et qui serviront de base aux réaménagements
à apporter à la loi.
Dans le contexte de l'intensification de la concurrence à
l'échelle québécoise et, dans un cadre plus large,
à l'échelle internationale, il est plus que jamais
nécessaire de laisser jouer les lois du marché afin de
préserver et d améliorer la rentabilité de nos
entreprises. Cela suppose, notamment, pour tous les commerçants,
d'articuler leur politique commerciale autour des besoins des consommateurs et
non l'inverse.
À cette fin, il leur faut s'adapter à des besoins qui
n'ont cessé d'évoluer depuis quelques années au rythme de
la transformation du contexte social et des habitudes de vie, principalement en
milieu urbain où les obligations professionnelles et familiales ont
sensiblement rétréci le temps disponible pour faire les
achats
Le juste équilibre des forces vives du
marché, équilibre essentiel à la croissance
économique, passe obligatoirement par la satisfaction des besoins
actuels et potentiels des consommateurs. C'est dans cette optique que la
Chambre de commerce du Québec, au nom de ses membres de la
communauté des affaires, réclame un réaménagement
de la loi leur assurant un encadrement législatif souple et efficace
pour mieux faire face aux nouveaux besoins de la société.
Selon les derniers renseignements que nous avons reçus de nos
membres sur le sujet, c'est par une faible majorité que ceux-ci se
déclarent favorables à l'élargissement des heures
d'ouverture des établissements commerciaux le dimanche. Dans ces
circonstances, nous nous appuyons sur les principes de base qui gouvernent
notre organisme, lesquels favorisent, d'une façon
générale, la libéralisation des heures d'ouverture.
En conséquence, nous recommandons que, pour les
établissements autres que ceux de l'alimentation, la révision de
la loi ne contribue pas à restreindre, à limiter ou à
retirer des heures d'ouverture qui sont déjà acceptées ou
acceptables en vertu des lois et règlements actuels. Nous recommandons,
de plus, que l'information sur ce qui est permis et ne l'est pas soit mieux
diffusée au sein des commerçants et du public, et qu'elle soit
rédigée dans un libellé qui soit le plus clair et le plus
simple possible.
En 1988, nous nous sommes prononcés pour une politique favorable
au consommateur qui réclame des heures d'ouverture mieux adaptées
à ses besoins. À titre indicatif, soulignons que nous avons
mené un premier sondage dont la formulation différait quelque peu
de celui que nous avons effectué en janvier 1990 selon les termes plus
précis du ministère, termes que j'ai mentionnés il y a
quelques instants. À cette époque, l'opinion de nos membres
paraissait partagée entre les tenants et les opposants de la
prolongation des heures de commerce, qui représentaient respectivement
36 % pour les tenants et 43 % pour les opposants, de même qu'entre ceux
qui se déclaraient pour ou contre l'ouverture des commerces de
détail le dimanche, soit respectivement 48 % pour et 43 % contre.
Deux années plus tard, soit en janvier 1990, nous avons de
nouveau abordé le sujet dans le cadre d'un deuxième sondage
maison élaboré par la Chambre. Nous leur demandions alors s'ils
étaient d'accord pour que le gouvernement permette, premièrement,
à tous les types d'établissements commerciaux qui le
désiraient d'ouvrir tous les soirs sur semaine et, deuxièmement,
à tous les établissements commerciaux du secteur de
l'alimentation qui le désiraient d'ouvrir le dimanche. (14 h 45)
Les résultats, compilés et analysés par la maison
SORECOM, ont révélé que la proportion de membres de la
Chambre favorables à chacune des propositions atteignait 69 % dans les
deux cas. Il semble donc que l'opinion des membres en la matière ait
évolué parallèlement aux exigences de la clientèle
et de ses habitudes de consommation.
Basés sur un échantillonnage de 728 membres
répartis entre divers secteurs d'activité, soit le secteur du
commerce dans une proportion de 26 %, le secteur de la construction dans une
proportion de 20 %, le secteur de la finance, 7 %, le secteur manufacturier, 24
% et, finalement, le secteur des communications dans une proportion de 14 %,
cette enquête a, en outre, permis de mettre en lumière les
aspirations particulières de certaines catégories de
répondants. La proportion des membres en faveur de la prolongation des
heures d'ouverture, selon les secteurs d'activité, premièrement,
les soirs de semaine, varie de 44 % à 83 %, soit 44 % pour les
commerces, 68 % pour le secteur de la construction, 82 % pour le secteur de la
finance, 83 % pour le secteur manufacturier et, finalement, 80 % pour le
secteur des communications.
En ce qui a trait à la prolongation des heures d'ouverture le
dimanche, les proportions ou les pourcentages sont similaires, soit 52 % au
niveau des commerces, 72 % au niveau de la construction, 78 % au niveau de la
finance, 77 % au niveau du secteur manufacturier et 76 % au niveau du secteur
des communications.
De plus, dans tous les secteurs d'activité, le taux des
répondants en faveur de la libéralisation augmente
proportionnellement avec le nombre d'employés que compte l'entreprise.
Au sein des entreprises de moins de 20 employés, il se situe à 59
%, alors qu'il atteint 81 % dans le cas des entreprises de 200 employés
et plus.
Les résultats de ce dernier sondage viennent renforcer la
position adoptée par la Chambre de commerce du Québec en 1988 et
dénotent, de la part de la communauté des affaires, une
perception plus à jour et plus complète de la situation. Ils
soulignent, en outre, le besoin de libéraliser les heures d'ouverture
des établissements commerciaux.
En conclusion, la loi doit tendre vers une plus grande
libéralisation des heures d'ouverture, répondant ainsi aux
aspirations des gens d'affaires et aux besoins des consommateurs.
Entravée par les nombreuses exceptions qui alourdissent l'application et
ajoutent à la confusion et au mécontentement, il est clair que,
dans sa forme actuelle, elle freine le libre exercice des forces du
marché et accentue les inégalités entre les entreprises
d'un même secteur d'activité.
Par conséquent, les gens d'affaires du Québec, par
l'entremise de la Chambre, se déclarent en faveur du
réaménagement des heures d'ouverture en semaine pour tous les
types d'établissements commerciaux et, le dimanche, pour les commerces
du secteur de l'alimentation. Pour ce qui est des heures d'ouverture des autres
établissements commerciaux le dimanche,
nous demandons que les heures d'ouverture déjà permises
soient tout au moins maintenues. Cette recommandation s'appuie sur la politique
d'action de ta Chambre, à savoir que c'est aux commerçants de
s'adapter aux besoins des consommateurs et non l'inverse.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie.
M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Merci, M. Gron-dines et M. Lambert. J'ai
deux questions. Si je suis bien votre raisonnement, vous dites que la loi
actuelle est inéquitable. Vous ne le dites pas exactement comme
ça, mais vous dites: À cause des exceptions, ça
crée des problèmes. La suggestion que vous venez de faire, c'est
de créer une nouvelle exception. Donc, on pourrait discuter de la
catégorie de produits parce qu'on sait qu'avec l'imagination des
commerçants, si on permettait, par exemple, à l'alimentation
d'ouvrir, Ils vendraient des fois, le dimanche, autre chose que de
l'alimentation et là, ça deviendrait inéquitable et ce
serait très difficile à contrôler. Est-ce que vous avez
vérifié avec vos membres la possibilité de dire: On
libéralise les heures d'ouverture pour tous les commerces? C'est ma
première question. Répondez à celle-là et je vais
revenir parce que l'autre est totalement différente.
M. Lambert: M. le ministre, notre sondage n'a pas
été fait de la façon dont vous venez d'énoncer
votre question, sauf que nous aimerions vous mentionner que ce n'est pas par
exception que nous voudrions fonctionner et, tel que vous avez
énoncé votre fin de question, nous sommes favorables à la
libéralisation des heures d'ouverture pour tous les commerces.
M. Tremblay (Outremorrt): Pourquoi ne le dites-vous pas?
M. Lambert: La seule raison pour laquelle nous ne l'avons pas dit
de façon aussi claire, c'est uniquement parce que notre sondage portait
sur deux questions précises et nous ne sommes pas allés dans une
troisième question ou dans des sous-questions.
M. Tremblay (Outremont): Là, c'est difficile. Ça va
être une impression, mais, en tout cas, je vais vous poser la question.
Si vous aviez posé cette question-là pour la
libéralisation totale, pensez-vous que vous auriez eu les mêmes 69
%?
M. Lambert: À toutes fins utiles, oui.
M. Tremblay (Outremont): Juste pour votre information, le fait de
créer des catégories de produits comme l'alimentation, des
piscines, la preuve démontre que c'est difficilement gérable. En
tout cas, c'est le point que je voulais faire.
Le deuxième point. Nulle part dans votre mémoire, vous ne
faites allusion aux travailleurs et aux travailleuses. Est-ce que vous voyez
des aménagements pour protéger les travailleurs ou les
travailleuses qui seraient peut-être appelés à travailler
le dimanche?
M. Grondines: Concernant les travailleurs et les travailleuses,
le point n'a pas été abordé, comme vous le mentionnez,
dans notre document. Par contre, nous croyons que les besoins de personnel
additionnel qui pourrait être requis... Ce qui m'amène à
parier en ces termes, c'est qu'on peut entrevoir un étalement - c'est un
scénario possible - des ventes sur un plus grand nombre de jours, ce qui
pourrait mener à une réorganisation ou à une planification
différente des horaires de travail des employés. Par contre,
considérant qu'il pourra aussi y avoir une augmentation des ventes dans
des commerces, c'est exact que l'on peut prévoir une augmentation de
personnel.
Maintenant, nous pouvons nous appuyer sur des cas vécus aux
États-Unis. Il y a des études, entre autres, qui étaient
relatées dans le document du ministère de l'Industrie et du
Commerce, qui révélaient qu'effectivement la considération
de travailleurs additionnels ne causait pas un problème
véritablement pour les entreprises parce que, de façon
générale, ce ne sont pas des employés très
spécialisés, je dirais, qui sont requis pour ce type de commerce
là. Alors, que l'on regarde strictement le niveau de chômeurs que
l'on a, que l'on regarde la possibilité au niveau des étudiants
qui, avec les hausses des frais de scolarité dont il est question, les
coûts du système scolaire, ne demanderaient pas mieux que
d'occuper ces postes-là, par exemple, le dimanche. Enfin, il est
plausible que ça serait de la main-d'oeuvre à temps partiel qui
serait utilisée pour les heures d'ouverture additionnelles et on ne
croit pas que ça cause véritablement de problème. C'est ma
perception.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M. le
député d'Orford.
M. Benoit: Oui, une seule question. À la page 5 de votre
mémoire, c'est intéressant, c'est la première fois qu'on
voit cette donnée ici, en commission parlementaire: dépendant du
nombre d'employés dans une entreprise, ça passe de 65 % à
81 % d'approbation à la prolongation des heures. À quoi
attribuez-vous ça? J'aurais pensé que, peu importe que vous
travailliez dans une grosse entreprise ou dans un petite entreprise, vous
êtes pour ou vous êtes contre, finalement. À quoi est-on
capable d'attribuer ce différentiel de 16 points entre le fait que vous
travaillez dans une entreprise de 200 employés ou dans une entreprise de
19 employés?
M. Grondines: Écoutez, c'est une réponse
plutôt personnelle que je vais faire, une interprétation
personnelle parce que, en fait, on pourrait y prêter différentes
interprétations. Un des éléments qu'on peut sûrement
invoquer est probablement la moins grande flexibilité qu'on peut
peut-être retrouver au sein des entreprises de très grande
envergure comparativement aux petites entreprises où les structures sont
peut-être moins lourdes, où il est peut-être plus facile de
s'accommoder, à un moment donné, au niveau d'achats qui peuvent
être faits ou de ce qui pourrait être requis pour eux. C'est
peut-être une façon d'interpréter les résultats qui
sont présentés ici.
M. Benoit: Mais ce questionnaire-là de
SORECOM, il était envoyé à l'employeur, non pas
à l'employé. Est-ce que j'ai raison de dire ça? C'est
l'employeur qui répondait.
M. Lambert: C'est exact. M. Grondines: Exactement.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Kamouraska-Témiscouata.
Mme Dionne: Oui, M. le Président. Ma question fait
référence à des discussions qu'on a eues hier avec
plusieurs groupes. Plusieurs nous ont parlé de la qualité de vie.
Tout le monde avait sa théorie, si on peut dire, et j'aimerais vous
demander la vôtre, celle des propriétaires de tous ces commerces,
de toutes ces entreprises. Est-ce qu'on en a parlé, est-ce qu'on a
analysé ce point-là?
M. Lambert: Madame, nous y répondons dans notre
mémoire, à la qualité de vie, en disant que le
consommateur, sa qualité de vie, c'est d'être capable de se
procurer des biens dans le temps où il lui est loisible ou possible de
le faire. Alors, c'est pour ça que nous répondons que le
commerçant doit maintenant agir en fonction du consommateur, et non pas
l'inverse.
Mme Dionne: D'accord. Mais...
M. Lambert: Alors, notre position n'est pas une question de
qualité de vie pour le commerçant, mais pour le consommateur.
Mme Dionne: Bon. C'est clair. Ça va.
Le Président (M. Bélanger): Ça va. C'est Mme
la députée de Taillon. Excusez, c'est parce qu'on m'apprend un
problème technique ici.
Mme Marois: Bonjour, bienvenue. Je vois ça, ils sont
occupés à régler autre chose. On va travailler ensemble.
Non, mais ça arrive à l'occasion. Je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): Vos collègues de
Laval, semble-t-il, ont une difficulté à se présenter cet
après-midi. Alors, on est à regarder ce qu'on fait avec
l'horaire.
Mme Marois: Si on pouvait ramener tout le monde un peu plus
tôt, ce serait bien.
Le Président (M. Bélanger): C'est ce qu'on essaie
de faire là.
Mme Marois: Ça nous permettrait de finir plus tôt
parce que la qualité de notre vie est un peu perturbée de ce
temps-ci par la tenue de la commission. Bon. Cela étant dit, j'aimerais
ça que vous m'expliquiez un petit peu la technique de votre sondage,
celui de SORECOM. J'ai compris que vous faites référence à
SORECOM, à un moment donné. J'ai rêvé ça?
Bon.
Une voix: C'est juste l'analyse.
Mme Marois: Ah, O.K. Oui, allez-y donc.
M. Lambert: Bon, alors, madame, voici. C'est un sondage
maison...
Mme Marois: D'accord.
M. Lambert: ...et nous avons fait analyser par SORECOM les
réponses.
M. Grondines: C'est ça.
Mme Marois: Voilà, OK. Ça va. C'est ça.
À la page 4, dans le premier paragraphe en haut, vous dites: "Deux
années plus tard, soit en janvier 1990, nous avons de nouveau
abordé le sujet. Nous leur demandions alors s'ils étaient
d'accord pour que le gouvernement permette, premièrement, à tous
les types d'établissements qui le désiraient d'ouvrir tous les
soirs sur semaine et, deuxièmement, à tous les
établissements commerciaux du secteur de l'alimentation qui le
désiraient d'ouvrir le dimanche." Vous avez posé la question
à votre échantillon qui était là et qui
représente, pour le commerce, la construction, les finances, là,
les pourcentages que vous nous avez donnés. C'est bien cela?
M. Lambert: Oui.
Mme Marois: D'accord. Est-ce que le questionnement qui se faisait
offrait des hypothèses ou si c'était plutôt
carrément la question: Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on
libéralise l'ouverture des commerces le dimanche dans le domaine de
l'alimentation, point? Est-ce que c'était comme ça?
M. Riendeau (Jean-Claude): C'est une réponse tout à
fait dichotomique que le...
Mme Marois: O.K.
M. Riendeau: ...membre devait donner; c'était un oui ou un
non pour le secteur alimentaire le dimanche.
Mme Marois: D'accord. Parce que, si vous suivez un petit peu les
travaux de la commission, il y a eu tout un débat au début de la
semaine sur: est-ce qu'on a offert l'alternative ou pas? C'était
vraiment très, comme vous dites, dichotomique; le terme est bien
choisi.
M. Riendeau: C'est ça. Une opinion dichotomique. (15
heures)
Mme Marois: Ça va. Moi, ce qui me fascine un peu quand on
regarde les chiffres de la page 4: les gens les plus concernés qui sont,
j'imagine, le commerce de détail... Enfin, on parle de commerce et, sous
commerce, j'imagine que ce sont surtout vos membres dans le commerce de
détail qui sont là. Il reste que c'est chez eux qu'on trouve la
plus faible proportion de gens en faveur de la prolongation des heures
d'ouverture et ce sont, pourtant, les gens les plus concernés parce que
la construction... D'ailleurs, ça va m'amener une autre question.
J'aimerais ça que vous me commentiez ça.
D'autre part, quand vous dites: construction, finance, manufacturier,
j'aimerais que vous me disiez de quel type d'entreprises il s'agit. Est-ce que
ce sont des entrepreneurs de construction, des entrepreneurs
généraux ou des entreprises spécialisées comme de
la plomberie? Et, de la même façon, finance, est-ce que ce sont
des institutions financières? De quel type d'institutions
financières il s'agit? Est-ce que ce sont des fiducies, des caisses
populaires, des banques, juste pour avoir une idée de ce dont on
parle?
M. Lambert: Madame, pour vous donner peut-être un
échantillonnage, en termes d'employés, de notre membership, sur
7517 sociétés membres, nous en avons 6076 qui ont 50
employés et moins.
Mme Marois: Donc, c'est de la petite.
M. Lambert: Alors, c'est de la petite. Ce qui me fait
répondre par définition que, lorsqu'on se retrouve de l'autre
côté de la page, à la page 5, là, vous voyez le
même phénomène que ce que vous avez soulevé
vis-à-vis du commerce. Voyez-vous?
Mme Marois: Oui.
M. Lambert: Dans le 1 à 19, vous avez les pourcentages les
moins élevés...
Mme Marois: De gens.
M. Lambert: ...comparativement à... Mme Marois:
C'est ça. M. Lambert: ...tout ce qui augmente. Mme Marois:
Tout étant relatif, c'est ça.
M. Lambert: La réponse que donnait M. Grondines à
votre collègue, il y a quelques minutes, va dans le sens que les petites
entreprises n'ont pas la facilité et la versatilité de
réaménager des heures à cause du petit nombre
d'employés qu'elles ont. C'est la raison pour laquelle on le voit
très bien se transporter ici. Et plus le commerce va grossir, plus vous
allez avoir cette grande facilité-là.
Mme Marois: Je vais revenir avec une sous-question. Mais
ça va un petit peu dans le sens de ce que je disais à des
représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, ce matin. Je pense que vous étiez là, M.
Qrondines, et un de vos collègues aussi, peut-être. Ce matin,
j'utilisais le terme "clivage". Le terme est peut-être un peu fort, mais
on sent, quand même, une démarcation selon qu'on est des
entreprises indépendantes ou des marchands dont la dimension de
l'entreprise est un peu moins grande, soit en termes de nombre ou en termes de
chiffre d'affaires. On sent donc une différence de points de vue selon
qu'on se situe là ou qu'on se situe à l'autre bout du spectre
où il s'agit de la grande entreprise. Et ça se reconnaît
encore chez vous. Il y a vraiment une tendance qui se marque dans ce
sens-là.
Maintenant, je vais revenir à ma question. Revenons toujours
à notre petit tableau de la page 4, commerce. Là, vous m'avez
répondu sur la taille, je pense que ça, c'est intéressant.
Mais comment expliquer que, pour le secteur concerné par rapport aux
autres secteurs, ce soit chez eux que la proportion pour ouvrir davantage soit
la plus basse?
M. Lambert: Écoutez, la réponse que je vais vous
donner m'est personnelle..
Mme Marois: D'accord. Un peu comme M. Grondines l'a fait tout
à l'heure sur un autre point, mais c'est correct, c'est aussi
intéressant, c'est votre expérience dont on se sert aussi.
M. Lambert: C'est mon expérience. C'est que vous n'avez
pas autant de facilité, en termes de recrutement de personnel.
Là, je vais essayer de vous donner l'exemple suivant: la petite boutique
dans un centre d'achats, qui recherche du personnel, nu pas une personne
spécialisée pour faire du recrutement. Pour elle, ça
devient un peu plus lourd, ce phénomène-là. Donc
Mme Marois: C'est intéressant, ça
M. Lambert: ...vous vous retrouvez avec une opération
alourdie au niveau de cette personne-là et ça la met dans un
état de crainte, un peu, d'opérer. Maintenant, plus vous allez
grandir ou grossir votre opération, plus vous allez avoir du support,
plus c'est facile, évidemment.
Mme Marois: Ah oui! Mais c'est intéressant, ce que vous
dites. Je trouve que c'est un élément qui ne nous a pas encore
été apporté, ce point de vue là, sous cet
angle-là, et c'est intéressant de le soulever. Une autre des
réalités auxquelles on fait face au Québec - ce n'est pas
à vous que je vais l'apprendre, d'ailleurs, et vous mentionniez que le
document du ministère était particulièrement bien fait, il
le mentionne - c'est que notre infrastructure non seulement de
propriété industrielle, mais de propriété
d'entreprise, si on prend le secteur de l'alimentation, entre autres, est
différente, par exemple, de ce qu'on connaît dans les provinces
voisines, particulièrement en Ontario, où ce sont de grandes
chaînes possédées par un groupe de propriétaires,
que ce soit une entreprise publique au sens d'avoir des actionnaires, ou un
gros propriétaire en termes de valeurs financières versus la
propriété au Québec, où on retrouve plus de la
petite et de la moyenne entreprise à propriétaire unique ou
à quelques propriétaires dans le domaine de l'alimentation.
Ça se répercute aussi, évidemment, dans les autres
domaines.
Dans ce sens-là, on a eu des représentants de gens
d'affaires qui, eux, nous disent: Bon, on craint un peu pour nos entreprises si
on devait être amenés à ouvrir, à cause du fait,
justement, que vous soulevez que c'est peut-être plus difficile... Ils ne
disent pas de recruter, eux, mais ils disent: On est propriétaires
indépendants; ça va nous amener, nous, à mettre encore
plus de temps dans notre entreprise et ça nous pose des contraintes.
Alors, comme on sait qu'il y a une iniquité, on
préférerait que vous resserriez les critères pour qu'il y
ait moins d'ouverture la fin de semaine, de telle sorte qu'on ne soit pas
pénalisé aussi à un autre point de vue. J'aimerais
ça que vous réagissiez à cet autre point de vue qui nous
est apporté par des gens aussi qui sont, évidemment, dans les
commerces.
M. Lambert: Je vais vous faire deux ou trois commentaires. Le
premier commentaire que je vous faisais, tout à l'heure, dans le temps,
il n'était pas expérimenté par ce genre de commerce dont
je vous ai parlé...
Mme Marois: Oui.
M. Lambert: ...quand je vous parlais de la petite boutique.
Laissez-moi, maintenant, vous ramener au domaine de l'alimentation parce que le
même phénomène, à peu près, en fonction d'une
question que vous posez, s'est vécu dans le passé, où les
petites entreprises dans le domaine alimentaire ont vu d'un mauvais oeil -
elles voyaient ça de façon très négative - toute la
question de la vente de la bière.
Mme Marois: Ah, je le sais, la bière!
M. Lambert: Et vous savez très bien qu'aujourd'hui
l'expérience démontre que non seulement elles n'ont pas
fermé, mais que leur chiffre d'affaires a augmenté et s'est
multiplié. Premier élément.
Le deuxième élément, donc, si je le ramène
vis-à-vis de la petite boutique, c'est la méconnaissance et la
réfraction aux changements qui l'amènent souventefois à
réagir de cette façon-là. Et le jour où il aura la
possibilité d'avoir, disons, des heures d'ouverture le dimanche, je vous
dirai qu'il aura moins de personnel le lundi dans sa boutique et que le monde
travaillera le dimanche. Parce qu'il est connu présentement que le
lundi, c'est une journée qui est à peu près nulle en
termes de commerce.
Mme Marois: On me dit à l'oreille que c'est
terminé. Je reviendrai. Mais merci, c'est intéressant, ce que
vous soulevez. Non, non, mais je vais revenir. On a encore un petit peu de
temps.
Le Président (M. Bélanger): II y aura dix minutes
encore, tout à l'heure.
Mme Marois: C'est ça.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: Quand je regarde vos recommandations, c'est pour
"une plus grande libéralisation des heures d'ouverture, répondant
ainsi aux aspirations des gens d'affaires et aux besoins des consommateurs. Qui
dit libéralisme, habituellement, veut dire plus grand commerce, plus
grande concurrence; donc, ça sous-entend aussi de meilleurs prix pour le
consommateur.
Je vais prendre comme exemple le secteur de l'alimentation. On a vu, au
courant des années, à partir des grossistes et des grandes
chaînes, une concentration. Et, finalement, aujourd'hui, on peut dire
qu'il y a quatre grands géants qui contrôlent ce vaste
secteur-là. Il y avait une ouverture qui était les fins de
semaine et ces quatre grandes chaînes-là sont allées, par
des ententes ou des franchises, contrôler une partie du secteur du
dépannage. On nous dit aussi que bientôt on verra peut-être
disparaître une de ces grandes chaînes-là et qu'on sera
à trois et, dans le temps, qu'on en viendra jusqu'à deux.
Ne croyez-vous pas que, si on libéralise davantage le commerce de
l'alimentation le dimanche - on nous a dit aussi en commission qu'une surface
moyenne a un rayonnement moyen
d'entre un et trois milles et, lorsqu'on met quelque chose qui est
hyper, c'est 60 milles - ces grandes chaînes-là, qui sont
propriétaires du côté du commerce et aussi
impliquées fortement dans le dépannage, ne verront pas
l'avantage, à ce moment-là, de créer de ces
hypersurfaces-là ouvertes sept jours par semaine, ce qui ferait en sorte
qu'à un moment donné, les profits étant à la
baisse, on fermerait le dépannage versus les grandes surfaces? Et,
finalement, en bout de piste, on aurait moins d'emplois dans le secteur de
l'alimentation et, deuxièmement, aussi, ceci amenant davantage de
concentration, moins de concurrence et l'accroissement des prix chez le
consommateur.
M. Lambert: Je vais donner une réponse, encore une fois,
personnelle, par l'expérience personnelle. Nous vivons
présentement les clubs Price. Ils sont ouverts le dimanche. Ils vendent
de l'alimentation et, à ce que je sache, présentement, ils ont
des prix qui sont sensiblement inférieurs à ce que vous retrouvez
dans des boutiques spécialisées d'alimentation et je peux vous
dire que les boutiques spécialisées d'alimentation, leur chiffre
d'affaires ne diminue pas. Ça, je le sais par expérience, je suis
propriétaire.
Le deuxième élément que je veux vous mentionner,
c'est que je ne crois pas que le fait que certains établissements
ouvrent le dimanche puisse être tellement négatif quand je
considère déjà que, le samedi, ils sont ouverts et que ces
entreprises-là, que nous avons déjà dans le moment, c'est
une de leurs meilleures journées d'affaires le samedi et le vendredi
soir.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que ça
pourrait, par extension, si je suis votre raisonnement, amener - je fais une
hypothèse complètement farfelue, pour ma culture personnelle -
les établissements à fermer le lundi, par exemple?
M. Lambert: C'est ce qu'on désirerait. N'oubliez pas que
je vous parle comme propriétaire. Ha, ha, ha!
Mme Marois: Non, mais c'est intéressant parce que
c'était ça, moi aussi. Quand le président m'a dit tout
à l'heure: Vous n'avez plus de temps, dans le fond, quelque part, on se
dit: II faudra bien fermer. Quand tu as une petite entreprise, tu peux bien
avoir du remplacement, mais il y a des fois où c'est
spécialisé ou des trucs comme ça. On dit: Les
consommateurs ne viennent pas vraiment le lundi; donc, on fermera cette
journée-là. Ce n'était pas mon tour, hein?
Le Président (M. Bélanger): Oui, oui, allez-y,
allez-y, c'est à vous.
Mme Marois: Le propos qui est défendu par un autre point
de vue... C'est-à-dire qu'il y a des gens qui, d'un autre point de vue,
défendent autre chose, ils disent: Est-ce qu'il ne serait pas
souhaitable que, comme société, on décide qu'il y ait une
journée où on ralentit un tant soit peu les activités de
production, les activités commerciales pour que, tout le monde ensemble,
on se donne un moment où les activités plus de loisir,
d'échanges, de communication, de famille etc., vont nous permettre de
nous retrouver un petit peu ensemble? Dans le fond, là, vous dites: De
toute façon, ça prend un temps où on peut arrêter
l'entreprise et ce n'est pas inutile de le faire, on le fera le lundi.
Évidemment, on profitera à ce moment-là de l'achalandage
qu'il y aura le dimanche, mais est-ce que ce n'est pas, justement, au
détriment de cette possibilité qu'on aurait comme
société d'avoir un moment où à peu près tout
le monde a un temps d'arrêt, sauf, évidemment, quelques personnes
qui sont prises pour assurer les fonctions essentielles, de même que des
activités de loisir et culturelles jusqu'à un certain point, mais
où les activités reliées plus à l'échange
commercial ou à la production sont au ralenti?
M. Lambert: Mme Marois, j'ai souventefois de mauvais exemples,
mais je vais essayer de vous en donner un.
Mme Marois: Un bon ou un mauvais? Ha, ha, ha!
M. Lambert: Vous savez, la société fait
qu'aujourd'hui il y a des entreprises qui ont des gens qui travaillent sur des
quarts qu'on appelle
Mme Marois: Oui
M. Lambert: Et ces gens là peuvent avoir des
journées de congé qui peuvent être le lundi, le mardi,
dépendant Et ils travaillent de nuit alors que tout le monde normalement
dort. Finalement, la société est rendue à un point, en
termes d'évolution, où les besoins sont très
différents de ce que nous avions il y a dix ans seulement en
arrière.
Deuxième point que je peux mentionner, c'est que vous retrouvez
ces gens là, en termes de besoins, avec des vacances annuelles, mais ces
gens-là souventefois, lorsqu'ils travaillent, parce qu'on retrouve
maintenant des familles où les deux conjoints sont sur le marché
du travail, n'ont pas nécessairement des vacances ensemble. Donc,
aujourd'hui, on se retrouve plus à essayer de remplir un besoin
qu'à essayer de changer la façon dont la roue tourne. Ma
perception des choses, c'est qu'on s'en va de plus en plus... Et c'est le
consommateur lui-même qui le demande, ce
phénomène-là. Il ne demande pas d'avoir plus de temps en
famille; il demande d'avoir plus d'heures pour être capable d'aller
chercher ce dont il a besoin. (15 h 15)
M. Benoit: Le consommateur... Je pense qu'on vit et qu'on va
vivre le phénomène des vacances d'été tous
ensemble, c'est-à-dire qu'on a deux semaines où tout le monde
essaie de prendre ses vacances ensemble. Ça crée souvent un
préjudice à l'entreprise, de un. De deux, les couples qui
travaillent tous les deux essaient d'agencer leurs vacances pour être
ensemble; c'est une autre préoccupation. Et, troisièmement, les
prix sont normalement à la hausse pour ces deux semaines-là parce
que tout le monde est en vacances en môme temps. Ce dont j'aurais peur
avec le dimanche, c'est qu'on voie le môme phénomène: tout
le monde en même temps à la même place et il y a une
surévaluation des prix.
Mme Marois: Si vous me permettez, parce que vous m'avez
regardée, dans le domaine alimentaire, il semble que le marché ne
serait pas en progression. Donc, à ce moment-là, si on ouvre,
ça va être pour qu'il y ait une répartition.
M. Benoit: J'aurais dû ajouter au niveau du loisir.
Mme Marois: Ah, d'accord.
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: À la lecture de votre mémoire, ici,
vous mentionnez que vous êtes pour une plus grande libéralisation,
un réaménagement des heures d'ouverture en semaine pour tous les
types d'établissements et pour l'alimentation le dimanche. Où
est-ce que vous situez les marchés aux puces? J'aimerais entendre votre
opinion concernant l'ouverture ou la survie ou le devenir de ces
marchés.
M. Lambert: Écoutez, je ne suis pas en mesure de
répondre à cette question-là. Je ne sais pas s'ils sont
membres chez nous. Je suis désolé de vous répondre de
cette façon-là. Je n'ai vraiment pas de réponse. Je ne
suis pas en mesure de vous... Peut-être que mes confrères
pourraient vous la donner.
M. Saint-Roch: Les marchés aux puces ne sont pas une
source de concurrence pour les commerces que vous représentez.
M. Lambert: Que je sache, moi, il n'y a personne qui m'a soumis,
depuis que je suis à la Chambre de commerce, et ça
représente plus de dix ans, des commentaires à cet
effet-là.
M. Saint-Roch: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Bien, moi, je n'ai pas réagi tout à
l'heure à ce que vous avez dit. Je pense que vous connaissez mon point
de vue et le point de vue de ma formation politique à cet
égard-là. Et, évidemment, il y a une question de
philosophie, il y a une question d'analyse sociologique, aussi. On va en
convenir, on peut avoir des analyses différentes. Depuis le début
qu'on siège en commission, on constate bien qu'on est une
société hétérogène et c'est ce qui fait la
richesse, d'ailleurs, de notre société. C'est absolument
passionnant d'y vivre probablement, entre autres, pour cette raison-là.
Bon!
Cela étant dit, je vous donnerai un autre exemple. Vous me
donniez un exemple, je vais vous en donner un autre. Il y a 20 ans, on avait,
comme je le mentionnais au début, à l'ouverture de cette
commission, quelques hurluberlus qui s'occupaient d'écologie. Ils
avaient habituellement un drôle d'air et on les trouvait un peu bizarres
parce qu'ils faisaient des discours un peu alarmistes sur le fait que notre
terre s'en allait vers le désastre si on ne faisait pas un virage pour
mieux protéger notre environnement. On les trouvait un peu fous. On
disait: Ce sont quelques illuminés, alors, écoutons leurs
discours, mais ça ne nous préoccupait pas plus que cela.
Maintenant, c'est devenu la préoccupation majeure, à raison
d'ailleurs, à cause de tous les effets négatifs que l'on constate
quant à une mauvaise protection de notre environnement. Donc, je
m'arrête là en ce qui a trait à l'environnement. On n'est
pas ici pour parier de ça nécessairement, mais le
parallèle que je veux faire est le suivant: Alors qu'à un moment
dans le temps on a accordé peu de valeur à cette
réalité-là, la réflexion, la connaissance a fait en
sorte que 20 ans plus tard on pense que c'est une priorité d'intervenir
en matière environnementale et on a des preuves scientifiques pour nous
le dire.
Actuellement, il y a un débat. Il est autour des heures
d'affaires et il concerne la qualité de la vie. Ça permet d'en
discuter parce qu'on parie des heures d'affaires, on s'entend, mais le
débat qu'il y a, c'est: est-ce qu'on ne peut pas penser comme
société qu'il est important qu'on ne réagisse pas
seulement à un besoin qui est celui de consommer, qui existe, qui est
réel, mais qu'on voie aussi les autres besoins qu'on a dans une
société? Et je reviens à ceux que je vous
énumérais tout à l'heure qui sont les besoins
d'échanges, de communication, de contacts entre les personnes. Et,
est-ce que cette course effrénée à l'avoir plutôt
qu'à la réflexion autour de l'être, de ce que l'on est
profondément, ne devrait pas nous questionner sur nos modes
d'organisation et nos modes de vie, et nous amener peut-être non pas
à être réactionnaires et à faire des retours en
arrière qui nous ramèneraient à des attitudes
complètement dépassées, mais, au contraire, est-ce qu'on
ne peut pas imaginer que le modernisme, que les valeurs de l'an 2000, c'est
aussi de prendre le
temps de se reposer et d'arrêter les activités qui
créent du stress et qui soulèvent toute une série
d'exigences, et de le faire carrément comme société? Dans
un pays comme les États-Unis qui, pourtant, est le lieu par excellence
du libre commerce, si on veut, il y a des États où,
carrément, on procède à la fermeture des commerces le
dimanche. Il y en a où c'est l'inverse, où c'est libre
complètement, mais il y a des États aussi où on
réglemente, et dune façon assez serrée, l'ouverture des
commerces.
Vous pouvez ne pas commenter aussi, hein! Ha, ha. ha!
M. Lambert: Je serais porté à faire simplement
certains commentaires qui sont les suivants. Nous vivons dans l'ère du
libre-échange et je crois que le législateur est amené
à se positionner lorsque la base lui demande certains changements. Ce
que nous sentons chez nous, c'est que la base dit: On est prêt à
certains changements. Je ne voudrais pas aller plus loin dans mes commentaires.
Je pourrais peut-être demander à mes...
Mme Marois: M. Grondines veut ajouter quelque chose.
M. Grondines: Oui, Mme Marois, je respecte votre point de vue.
Maintenant, en termes de qualité de vie, il ne faudrait pas relier la
qualité de vie seulement au dimanche.
Mme Marois: Ah! Je suis d'accord avec vous.
M. Grondines: La qualité de vie, pour moi, s'étale
tout au long de la semaine. Vous avez parié d'organisation et je pense
que c'est en termes d'organisation qu'on doit faire en sorte que, finalement,
on ait une qualité de vie à tous les jours et ce n'est pas
seulement dans le domaine des achats, dans le domaine du commerce et dans le
domaine du travail. Le terme "qualité de vie", on en parie de plus en
plus dans les milieux de travail proprement dits. Cela exclut tout l'aspect des
achats.
L'autre point aussi, en termes de qualité de vie - et ça
rejoint l'idée de notre président - c'est à quel moment,
par exemple, on préfère intégrer des activités de
loisir, des activités en famille. Alors, c'est un choix personnel et
ça n'exclut pas que ça puisse être fait le vendredi si ton
horaire de travail te le permet, le samedi ou toute autre journée que le
dimanche. Donc, ça n'exclut pas, finalement, la possibilité que
le dimanche soit utilisé ou que la libéralisation des heures
d'ouverture en vienne jusqu'au dimanche, toujours en termes d'organisation et
toujours en termes de choix personnel. Parce que, finalement, lorsque les gens
s'expriment ou que les membres se sont exprimés dans d'autres sondages
qui ont eu lieu, c'est un choix.
C'est sûr que c'est une proposition qu'on leur fait, mais c'est un
choix qu'ils font.
On n'a qu'à regarder actuellement l'achalandage dans les
commerces qui sont exemptés, mais qui sont ouverts actuellement. Et,
s'ils y vont, ils y vont par choix parce que, même dans
l'hypothèse où la loi serait modifiée pour
libéraliser les heures d'ouverture, les commerçants auront le
droit d'ouvrir et les consommateurs auront le droit de s'y rendre, mais ils ne
seront pas forcés de s'y rendre. Encore là, le respect des droits
et libertés individuels sera là, dans le sens que, si moi, le
dimanche, je ne veux pas m'y rendre, c'est un choix personnel et je peux
continuer à faire mon épicerie ou mon épouse peut
continuer à faire son épicerie le vendredi soir. C'est dans ce
sens-là que la qualité de vie, je la ramène toujours
à une question de choix personnel au moment où ça
convient.
Mme Marois: Avec la limite que, si votre épouse travaille
dans un service qui ouvre le dimanche et qu'elle n'est pas là,
même si vous, votre congé, c'est le dimanche et qu'elle n'a pas le
congé, disons que ça limite un peu, quand même, votre choix
à ce moment-là.
M. Grondines: Je ne veux pas entrer dans un débat
personnel, mais c'est la situation qui se présente.
Mme Marois: Ha, ha, ha!
M. Grondines: Et ça ne cause pas de problème. On
s'organise
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M.
Grondines.
Mme Marois: Mais vous admettrez qu'il faut toujours être
prudent quant à l'extension de sa situation personnelle à la...
Vous êtes d'accord? O.K. Ça va. Parfait. Ha, ha, ha!
M. Grondines: J'ai fait une mise en garde. Le Président
(M. Bélanger): D'accord.
M. Grondines: Écoutez, je n'aime pas faire état
d'une situation personnelle, mais...
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre! Je
vous remercie, M. Grondines Alors, si Mme la députée veut
remercier le groupe de nos invités.
Mme Marois: Oui, je vous remercie de cet échange que l'on
a eu. Ça nous a permis de pousser un petit peu plus loin sûrement
et d'aller chercher un certain nombre d'informations nouvelles. C'est toujours
intéressant, je pense, qu'on puisse ainsi avoir des gens qui
contribuent
à l'avancement de nos travaux de la façon dont vous l'avez
fait. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
ministre.
M. Tremblay (Outremont): J'aimerais vous dire en terminant qu'au
début de cette commission j'ai dit que le Québec d'aujourd'hui
n'est plus celui d'hier et que celui de demain risque lui-même
d'être différent de celui d'aujourd'hui. Dans cette
optique-là, j'aimerais vous remercier beaucoup, M. Lambert, M.
Grondines, MM. Rien-deau et Barron, ainsi que Mme Cléroux, et vous dire
que nous allons prendre en considération vos commentaires, vos remarques
lors de l'élaboration de notre solution. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie la Chambre de commerce du
Québec pour sa participation à nos travaux et pour son
éclairage. J'invite à la table la Fédération des
travailleurs du Québec, la FTQ. On suspend les travaux deux minutes pour
faire le changement de groupe.
(Suspension de la séance à 15 h 27)
(Reprise à 15 h 30)
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à
chacun de bien vouloir reprendre sa place. S'il vous plaît. Je
demanderais à chacun de reprendre sa place pour que nous puissions
continuer nos travaux. Nous recevons présentement, à la table des
témoins, la Fédération des travailleurs du Québec,
la FTQ. Alors, je pense qu'il est inutile de vous préciser nos
procédures. Vous y êtes familiers. Simplement vous rappeler qu'on
a 20 minutes pour la présentation du mémoire ou moins,
dépendant. Je connais votre esprit de concision. Et, s'il vous
plaît, chaque fois que vous avez à intervenir, bien que vous soyez
très connus, nos gens qui font la retranscription dans une autre
pièce ne vous voient pas, donc je vous demanderais de bien vouloir vous
identifier à chacune de vos interventions. Ça leur facilite
grandement le travail. Je sais que c'est une chose que vous comprenez. Alors,
si vous voulez vous identifier et procéder, ça me fait
plaisir.
FTQ
M. Daoust (Fernand): Je voudrais vous présenter la
délégation de la FTQ, M. le Président. Louis Laberge, le
président de la FTQ; Marcel Tremblay, vice-président de la FTQ et
aussi président d'une section locale des Travailleurs unis de
l'alimentation et du commerce; Michel Morasse, le représentant de la FTQ
pour la région de Québec; et mon nom est Fernand Oaoust,
secrétaire général de la FTQ.
M. le Président, Mmes les députées, MM. les
députés, je vais vous faire la lecture de ce mémoire. Je
pense bien que je ne dépasserai pas les 20 minutes. La FTQ se
présente devant cette commission au nom de ses 450 000 membres provenant
de tous les secteurs économiques et qui sont aussi des consommateurs et
consommatrices directement affectés par la Loi sur les heures d'affaires
des établissements commerciaux. La FTQ participe en plus à ce
débat pour apporter son appui à l'un de ses syndicats
affiliés, les TUAC, qui représentent les employés qui,
à un titre ou à un autre, travaillent dans des marchés
d'alimentation et dans d'autres magasins. Enfin, la FTQ vient soutenir les
revendications de la Coalition contre l'ouverture le dimanche, Coalition dont
elle fait partie.
Dans ce mémoire, la FTQ s'oppose à l'ouverture le dimanche
des commerces du secteur de l'alimentation et plaide en faveur d'une
société où la qualité de la vie n'est pas
sacrifiée aux intérêts mercantiles des entreprises
commerciales. Nous examinerons d'abord pourquoi le gouvernement veut modifier
la loi. Puis, nous verrons comment l'ouverture le dimanche va à
rencontre de la qualité de vie pour l'ensemble de la population et pour
les personnes qui travaillent dans ce secteur de l'alimentation. Nous nous
attarderons ensuite aux besoins des consommateurs et consommatrices, pour
envisager finalement les problèmes d'équité
associés à la loi actuelle. Nous conclurons par une position
claire sur les thèmes qui sont soumis au débat public.
Pourquoi modifier la loi? Deux raisons principales expliquent que le
gouvernement veuille modifier la loi. Premièrement, les nombreuses
infractions à la loi actuelle et les plaintes des supermarchés de
l'alimentation qui estiment que les marchés publics, les fruiteries et
les pharmacies qui sont exemptés de la loi leur font une concurrence
déloyale. Deuxièmement, les sondages sur les besoins des
consommateurs et des consommatrices qui souhaiteraient pouvoir faire leurs
emplettes en soirée et le dimanche. Parmi les solutions qui sont
envisagées par le gouvernement, la libéralisation des heures
d'ouverture des commerces et, en particulier, l'ouverture des commerces de
l'alimentation le dimanche sont mises de l'avant.
La FTQ s'oppose fermement à cette hypothèse. En effet,
cette soi-disant solution va à rencontre du principe le plus important
retenu par le gouvernement pour orienter les changements à la loi, soit
le maintien de la qualité de vie. De plus, elle ne répond que
partiellement aux deux autres principes qui sont le rétablissement de
l'équité de traitement entre les divers types de commerce et la
réponse aux besoins réels des consommateurs. La FTQ estime qu'il
est inacceptable de sacrifier le principe du maintien de la qualité et
qu'il y a d'autres moyens de faire respecter les trois principes
simultanément.
Qualité de vie. La qualité de vie est le premier principe
qui doit guider toute action gouvernementale. Malheureusement, nous vivons
actuellement dans une société hautement compétitive
où les valeurs économiques ont une place
prépondérante. Le bien-être, la justice et la compassion
sont bien souvent sacrifiés au profit de la productivité et de la
compétitivité. Les valeurs de convivialité de notre
société sont menacées. L'État participe à
cette tendance. Il ne se veut plus providence et abandonne à leur sort
les plus démunis de notre société. Le mouvement syndical
veut mettre un frein à la désintégration de notre
société en poursuivant inlassablement ses revendications pour que
l'État continue d'assumer ses responsabilités de créer une
société plus juste et plus humaine.
L'État doit fixer les règles de fonctionnement des
entreprises afin d'assurer la protection du public. Le contrôle des
heures d'affaires des commerces fait partie des législations à
caractère économique qui civilisent la concurrence et posent des
limites aux abus de toutes sortes. Cette législation a aussi une
incidence sur le respect des valeurs de notre société.
Jusqu'à présent, nous avons réussi à
préserver la journée du dimanche de l'invasion de
l'activité industrielle et commerciale. C'est un élément
fondamental de la qualité de notre vie collective. Quelles seront les
conséquences du magasinage le dimanche et du travail le dimanche?
Magasiner le dimanche. Le dimanche est la seule journée de la
semaine où la grande majorité de la population est disponible
pour s'adonner à des activités sportives, sociales, culturelles,
dans le cadre de la famille ou entre amis. C'est le moment
privilégié pour organiser des rencontres, pour prendre des
moments de repos ensemble, pour renforcer nos liens avec les personnes que l'on
aime. Les autres journées sont consacrées au travail, aux
tâches domestiques, aux emplettes et aux loisirs organisés. Les
journées de semaine sont remplies d'obligations de tous ordres. Seul le
dimanche est une journée qui peut facilement être consacrée
à des activités libres. Le dimanche est une pause dans notre vie
surmenée.
La possibilité de magasiner le dimanche pour faire son
épicerie vient banaliser la journée de repos pour en faire un
jour ordinaire, c'est-à-dire un jour de labeur. Cela vient renforcer
l'idée que la consommation est une valeur sociale tellement importante
qu'on ne peut s'en passer, ne serait-ce qu'un seul jour. Notre
société de consommation a besoin d'une journée où
nos valeurs sociales et familiales passent au premier plan.
L'interdiction d'ouvrir les commerces le dimanche pose des limites aux
propriétaires avides et permet au plus grand nombre de jouir d'au moins
une journée de congé à vivre avec sa famille et ses amis.
Cela pose une limite au temps consacré au travail et démontre
clairement que le repos est nécessaire et fait partie de nos valeurs
sociales.
Travailler le dimanche. Il y a des motifs qui justifient socialement que
des personnes travaillent le dimanche: protection de la santé et de la
sécurité du public: services d'incendie et de police, services de
santé et services sociaux, services de pharmacie, services d'entretien
de la voirie, services d'entretien d'urgence du gaz et de
l'électricité; le transport des personnes et les communications:
services d'autobus, de taxi, de train, d'avion, ainsi que services
téléphoniques; les loisirs: salles de spectacles,
bibliothèques publiques, centres sportifs, services d'hébergement
et de restauration.
Cependant, ce n'est pas seulement dans ces secteurs que des personnes
sont obligées de travailler le dimanche. Dans l'industrie, de nombreuses
usines opèrent en continu et exigent de leur main-d'oeuvre qu'elle
travaille de soir, de nuit et de fin de semaine. Les syndicats ont
essayé par tous les moyens de réduire l'incidence et les
conséquences du travail en continu en aménageant des horaires qui
permettent aux travailleurs et travailleuses de bénéficier du
plus grand nombre possible de congés le samedi et le dimanche. On sait
les conséquences des horaires en continu sur la qualité de vie
des travailleurs: difficultés familiales, incidence plus forte des
problèmes d'alcool, problèmes de santé liés au
manque de sommeil, et le reste. Comme nous nous sommes battus pour
empêcher le travail en continu, nous sommes prêts à nous
battre contre le travail du dimanche pour les travailleurs et travailleuses du
commerce.
L'ouverture le dimanche des magasins d'alimentation est le premier pas
vers la libéralisation totale des heures de travail dans tous les
secteurs de l'économie. Pourquoi alors ne pas ouvrir les autres
commerces le dimanche? Et ensuite, qu'est-ce qui nous empêchera d'ouvrir
les banques le dimanche pour nous permettre de retirer de l'argent
nécessaire à nos achats, d'ouvrir également les
entrepôts qui fournissent les magasins, les bureaux qui gèrent les
flux commerciaux et le reste? Qu'est-ce qui justifierait que tout cela soit
fermé et que les commerces soient ouverts?
La fermeture des commerces le dimanche est une protection contre
l'envahissement du mercantilisme et du travail dans l'ensemble de la vie. Ceux
et celles qui doivent travailler le dimanche pour des motifs supérieurs
et pour assurer la qualité de la vie de la population en tout temps
méritent notre reconnaissance et des conditions de travail qui
compensent un tant soit peu les sacrifices qu'ils font en travaillant le
dimanche. Nous ne croyons pas que le commerce soit un motif supérieur
qui rende l'ouverture le dimanche indispensable.
Les besoins des consommateurs et des consommatrices. C'est sous
prétexte de répondre aux besoins réels des consommateurs
et consom-
matrices que l'ouverture le dimanche est envisagée. Les
changements dans les modes de vie justifieraient que l'on revoie la Loi sur les
heures d'affaires. Pourtant, les sondages évoqués dans le
document d'information semblent démontrer une relative satisfaction face
aux heures d'ouverture des commerces. Il faut reconnaître que les heures
d'ouverture actuelles sont relativement longues: si on considère qu'une
journée compte trois périodes, l'avant-midi, l'après-midi
et la soirée, les commerces sont actuellement ouverts durant quatorze
périodes par semaine sur un total possible de 21 périodes. Quels
que soient les horaires de travail et les complexités de la vie
familiale, n'importe qui peut trouver un moment pour faire ses emplettes.
Si l'on estime vraiment que les consommateurs et consommatrices sont
lésés par la présente loi, nous croyons que l'ouverture
des commerces le dimanche n'est pas une solution socialement désirable.
Puisqu'il s'agirait d'ajouter deux périodes par semaine aux heures
d'ouverture actuelles, nous préférons plutôt une extension
des heures d'ouverture en semaine plutôt que le dimanche, tel que cela se
pratique dans d'autres provinces.
L'équité. Le rétablissement de
l'équité entre les commerces du secteur de l'alimentation est
l'autre motif qui pousse le gouvernement à modifier la loi. Les
propriétaires de supermarchés estiment que les marchés
publics, les fruiteries et les grandes pharmacies qui sont exemptés de
la loi leur font une concurrence déloyale. Ils attribuent leur baisse de
la part du marché à la loi qui ne leur permet pas d'ouvrir leurs
portes le dimanche et en soirée. Dans ce secteur hautement
compétitif dont l'expansion est limitée, le puissant lobby des
propriétaires de supermarchés souhaite que les heures d'affaires
soient libéralisées de façon à ce qu'ils puissent
récupérer la part du marché qu'ils ont perdue au profit
des petits commerces.
La FTQ estime qu'il y a deux façons d'atteindre
l'équité: en libéralisant la loi ou en la faisant
respecter. Parce que le gouvernement n'a pas su ou n'a pas pu faire respecter
la loi actuelle et que des plaintes ont été
déposées, il s'interroge sur la pertinence de la loi. Les
nombreuses exemptions à la loi et les décrets spéciaux
ont, en effet, rendu la loi inéquitable. La FTQ juge qu'il faut
restreindre les exemptions à la loi et établir un critère
simple et applicable à tous qui devrait faciliter les exemptions
légitimes, comme dans le cas des dépanneurs, et éliminer
la concurrence déloyale. C'est dans ce sens que la loi doit être
modifiée. De même, les sanctions en cas de non-respect de la loi
doivent être plus dissuasives.
Dans le même esprit, la FTQ s'oppose vigoureusement à la
possibilité de transférer au niveau local le pouvoir
décisionnel concernant l'ouverture le dimanche du secteur de
l'alimentation. La concurrence entre les municipalités voisines fera en
sorte qu'elles seront nombreuses à autoriser les commerces à
ouvrir le dimanche de peur de perdre la clientèle. C'est une
manière hypocrite de favoriser l'ouverture le dimanche. Dans le cas
où des municipalités adopteraient des politiques
différentes, le transfert est une garantie d'inéquité.
C'est au gouvernement à assumer la responsabilité de
légiférer sur les heures d'ouverture des établissements
commerciaux.
Le repos du dimanche est actuellement l'otage du puissant lobby des
supermarchés qui veulent maintenir et augmenter leurs profits. Ce n'est
pas aux consommateurs et consommatrices ni aux travailleurs et travailleuses
à faire les frais de ces tractations.
Conclusion. En remettant en question la Loi actuelle sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux, le gouvernement veut nous
faire croire qu'elle n'est plus adaptée aux besoins des consommateurs et
des consommatrices et qu'elle est source d'inéquités. Si les
exemptions abusives de la loi actuelle étaient retranchées et si
la loi était appliquée avec des sanctions suffisantes, il ne
serait sans doute pas nécessaire de la modifier.
Parce que la qualité de la vie doit prendre le dessus sur les
intérêts économiques, la FTQ prend les positions suivantes
sur les thèmes soumis à la discussion en fonction des objectifs
mis de l'avant par le gouvernement. Pour la qualité de la vie, la FTQ
s'oppose à l'ouverture le dimanche des établissements commerciaux
du secteur de l'alimentation. Pour les besoins des consommateurs, la FTQ est
réceptive à un réaménagement des heures d'ouverture
en semaine pour tous les types d'établissements commerciaux. Et, pour
l'équité, la FTQ estime qu'il faut réduire le nombre
d'exceptions prévues par la loi actuelle; la FTQ s'oppose à
l'augmentation du nombre maximum d'employés présents en tout
temps dans le secteur de l'alimentation pour ouvrir hors des heures
régulières; la FTQ souhaite que l'on renforce les
mécanismes et les modalités d'application de la loi et que l'on
augmente les amendes pour les contrevenants; enfin, la FTQ s'oppose à la
possibilité de transférer au niveau local le pouvoir
décisionnel de l'ouverture le dimanche du secteur de l'alimentation.
Voilà.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
ministre. (15 h 45)
M. Tremblay (Outremont): Merci, M. Daoust, pour votre
présentation. On révise la loi - je veux bien qu'on se comprenne
là-dessus - parce que c'est un chef-d'oeuvre d'incohérences - je
pense que l'Opposition est d'accord avec ça - ce n'est pas parce qu'il y
a un lobby. Moi, je vous dis honnêtement: Je n'ai jamais eu le lobby des
gros, il y a même des petits qui sont venus me voir, plus de petits qui
sont venus me voir que
de gros. Alors, je veux bien vous rassurer là-dessus, et ce n'est
pas uniquement en fonction des besoins réels de la population. Moi, je
suis en fonction depuis quatre mois. Mon téléphone n'a pas
arrêté de sonner. J'ai décidé de faire une
commission publique pour essayer, une fois pour toutes, de régler ce
problème-là. Deuxièmement, au début de la
commission, j'ai mentionné - et ça, c'est très important
que vous l'ayez à l'esprit - que, si on fait une consultation publique,
c'est qu'on veut que ça soit un forum, un forum privilégié
pour une réflexion globale. Et j'ai clairement mentionné qu'il va
falloir aller au-delà de l'intérêt personnel et
immédiat de chacun. Et, si on n'a pas une ouverture d'esprit dans la
recherche d'une solution, on va se ramasser avec un dilemme important et,
à ce moment-là, ça sera difficile, puisque je me suis
engagé à déposer un projet de loi.
Il n'y a pas juste un principe. Dans votre document, vous dites: La
qualité de vie est le premier principe - le premier - qui doit guider
toute action gouvernementale. Je pense que c'est très important la
qualité de vie. Par contre, il n'y en a pas juste un principe. Il y en a
trois qui sont peut-être aussi importants les uns que les autres.
L'équité. Un gouvernement se doit d'être équitable.
On doit avoir une loi équitable. Deuxièmement, on doit être
à l'écoute des consommateurs, des travailleurs, des
travailleuses, des commerçants et de la population en
général. Donc, il y a les besoins réels et la
qualité de vie. Et où c'est difficile avec la qualité de
vie, c'est que ce qui peut être, par exemple, une qualité de vie
pour quelqu'un ou une condition sine qua non de qualité de vie - le
point de vue que vous défendez - on s'aperçoit, après les
nombreuses représentations qu'on a, que c'est une diminution de la
qualité de vie pour d'autres.
J'en arrive à mes questions. J'en ai plusieurs. La
première. Expliquez-moi. Vous avez signé des conventions
collectives. Vous avez une lettre d'entente avec Steinberg qui dit: Si la loi
ou un jugement d'une cour autorise l'ouverture des supermarchés le
dimanche ou d'autres heures d'affaires... Et vous allez même
jusqu'à dire que, si c'est pas la loi, si c'est pour des raisons de
compétition, on s'assoit et, en dedans d'une semaine, si on ne s'entend
pas, c'est un arbitre qui le décide. Et vous avez d'autres conventions
collectives. Vous en avez au moins 147 de signées avec Provigo qui
disent clairement que, si les heures changent ça va; sans
négociation, sans arbitre, vous pouvez ouvrir le dimanche. Et cela a
été signé, dans un cas, en 1986 et, dans un autre cas, le
20 octobre 1988. Est-ce que c'est parce que vous êtes visionnaire et que
vous pensez que ça va arriver ou que ça s'en vient? C'est la
première question.
M. Laberge (Louis): M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): M. Laberge.
M. Laberge: Louis Laberge. FTQ. M. le Président, pour
essayer de répondre aux questions du ministre, vous nous voyez un peu
confus. Moi, je suis d'accord que le gouvernement écoute la population.
C'est pour ça que le gouvernement avait mis sur pied le comité
Richard qui est allé partout rencontrer tous les groupes, toutes les
associations, tout le monde et qui est arrivé avec un rapport que le
gouvernement a pris et qu'il a maudit au panier. Alors ça, je... Eh ouil
Et le ministre du temps, qui est parti depuis - je ne dirai pas qu'y est parti
par rapport à ça mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Le ministre du temps est arrivé et a remis le
débat en question. Combien de fois va-t-H falloir faire le débat?
Là, vous allez admettre que ça devient un petit peu
agaçant. Moi, je pense que le comité Richard avait fait du maudit
bon boulot et il n'y a personne qui n'a pas pu se faire entendre par le
comité. Ils sont allés partout à travers le
Québec.
Les consommateurs... Vous avez vu Mme Laliberté, hier, je pense,
qui est venue. Je ne sais pas quand a eu lieu la dernière
assemblée qu'elle a eue avec des consommateurs, mais j'aurais
aimé ça pouvoir lui demander combien elle en a rencontrés
à l'assemblée. Je pense que Mme Marois a réussi à
lui faire dire qu'elle était financée par Provigo...
M. Tremblay (Outremont): M. Laberge...
M. Laberge: J'en viens à répondre à votre
question.
M. Tremblay (Outremont): Non, mais ce n'est pas pour ça.
Je vais vous dire que, moi, je n'ai pas d'objection à avoir une
très bonne discussion avec vous. On en a déjà eu beaucoup
dans le passé. Mais étant donné que le temps est
limité, si on me dit: On est d'accord, on peut discuter longtemps, je
n'ai aucune objection à ce qu'on parte. Mais si, après ça,
on arrive et qu'on me coupe mes dix minutes et qu'on coupe... Parce que j'ai
des questions intéressantes pour accélérer et essayer de
trouver des solutions pour régler le débat. Je ne sais pas mais
j'ai...
M. Laberge: Je vais essayer de répondre à vos
questions.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me permettez,
avant, M. Laberge, si j'ai le consentement des deux partis, comme le groupe
d'après s'est désisté, on pourrait prolonger quelques
minutes...
M. Laberge: Je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Bélanger): ...puisque l'autre va
arriver plus tôt. Alors...
M. Tremblay (Outremont): Parfait. Très bien.
Le Président (M. Bélanger): ...on pourra avoir un
peu de temps. Je vous en prie.
M. Laberge: Pour répondre à votre question,
à savoir pourquoi on a ça dans nos conventions collectives, il
est bien évident que les patrons avec qui on signe des conventions
collectives ont fait beaucoup de pression et ont dit: Écoutez, est-ce
que vous allez laisser les autres, qui emploient toutes sortes de gens non
syndiqués, ouvrir alors que, nous autres, de par nos conventions
collectives, on serait empêchés de pouvoir faire la même
chose? Évidemment, de guerre lasse, le syndicat a dit: Écoutez,
on va faire une ouverture. Si ça arrive, on va s'asseoir et on va
régler le problème. Comme vous dites, il y a même certaines
clauses dans la convention qui ont été peut-être un peu
trop loin et qui vont même plus loin que ça. Alors ça,
c'est si ça arrivait. Mais on souhaite ardemment que ça n'arrive
pas.
M. Tremblay (Outremont): Je comprends, M. Laberge.
M. Laberge: Et j'y reviendrai tantôt.
M. Tremblay (Outremorrt): O.K. Mais vous auriez pu prendre la
position de dire: Nous autres, on n'est pas d'accord, pour la qualité de
vie de nos travailleurs, selon l'argumentation de M. Oaoust tout à
l'heure, donc on n'ouvre pas le dimanche.
M. Laberge: On n'est pas d'accord avec l'opération
continue dans les usines non plus, sauf que, si on a le choix entre garder
l'usine ouverte ou...
M. Tremblay (Outremont): Excellent.
M. Laberge: ...autrement, perdre nos emplois, bien on sacrifie un
peu la qualité de vie. Je pense que crever de faim, ça ne fait
pas une grosse qualité de vie non plus.
M. Tremblay (Outremont): Non.
M. Laberge: Mais quand je regarde dans la salle ici, le fait que
les commerces d'alimentation ne soient ouverts que six jours par semaine ne
semble pas nous avoir privés, personne.
M. Tremblay (Outremont): Non, non. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Tremblay (Outremont): Excellent. Excellent, M. Laberge, vous
introduisez ma deuxième question. Dans votre mémoire, M. Daoust a
dit tout à l'heure, justement: II faut travailler, il faut gagner sa
vie; pour avoir une qualité de vie, ça prend des sous. Et,
ensuite, qu'est-ce qui nous empêcherait d'ouvrir les banques le dimanche?
Mais elles sont ouvertes les banques le dimanche.
M. Laberge: Les comptoirs automatiques.
M. Tremblay (Outremont): On les a remplacées pas des
guichets automatiques.
M. Laberge: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Non, mais tu sais...
M. Laberge: Créateurs d'emplois.
M. Tremblay (Outremont): C'est ça, oui. Mais ça,
c'est un exemple. Mais le point que je veux faire, c'est que, ce matin, on a eu
une bonne rencontre avec des gens qui ont essayé de nous expliquer une
certaine vision, c'étaient les gens au niveau du Regroupement des grands
centres de rénovation du Québec. On nous a - et j'aimerais
ça vous entendre là-dessus - parlé, par exemple, de
Pascal, de Canadian Tire et d'une tendance, si on veut juste avoir une certaine
vision, de ce qui pourrait arriver dans un an ou dans deux ans, parce que ce
qu'on veut faire - et là-dessus, je suis entièrement d'accord
avec vous - c'est qu'on ne veut pas faire une loi et se revoir encore dans un
ou deux ans pour dire qu'on s'est trompés. De plus en plus, vous lisez
dans le journal de la publicité où vous pouvez, par Alex, acheter
des meubles. C'est une compagnie affiliée à Pascal. Dans un
entrepôt, vous passez votre commande et ils vont vous livrer ça le
samedi ou le dimanche. Il se pourrait, dans un certain avenir - j'ai
posé spécifiquement cette question-là - que, pour
plusieurs raisons, pour des raisons de service, pour des raisons de besoins
à la clientèle, pour des raisons syndicales, que Pascal
décide de fermer ses grands magasins ou Canadian Tire pour dire: Nous
autres, on se fait notre petite compagnie et commandez donc par Alex. Comment
voyez-vous ça? Est-ce que ce n'est pas quelque chose de possible avec la
créativité des commerçants?
M. Laberge: Qui peut dire que c'est quelque chose qui n'est pas
envisageable, quelque chose d'impossible? On ne le sait pas, évidemment.
On ne le sait pas. Mais ce qu'on sait, c'est que, plus on va encourager
l'ouverture le dimanche, plus il va y avoir de monde qui ne pourra pas en
profiter le dimanche.
M. Tremblay (Outremont): Mais comment
puis-je arrêter ça? Comment puis-je arrêter... C'est
ça.
M. Laberge: Ah! Ça, on aurait une couple de suggestions
à vous faire. L'équité, le gouvernement se doit d'adopter
une loi qui est équitable, on est entièrement d'accord avec
ça. Mais il faut que ce soit clair pour tout le monde. Bon, les
pharmacies, est-ce qu'on va revenir à l'ancien temps où il y
avait des rideaux en broche dans des magasins et H y avait certaines heures
où on était obligés de fermer les rideaux? Moi, je dis
non. Moi, je dis que les pharmacies, on a besoin que ça ouvre la fin de
semaine, le samedi et le dimanche. Alors qu'elles décident: Est-ce
qu'elles veulent être un magasin d'alimentation ou une pharmacie? Si les
pharmacies recommençaient à vendre des pilules et des
médicaments et laissaient les magasins en alimentation vendre de
l'alimentation, on n'aurait peut-être pas ce problème-là.
Nous autres, on est, mais véritablement, diamétralement
opposés à l'ouverture le dimanche. C'est la seule journée
qui reste pour avoir les gens en famille. Vous le savez. Vous êtes un peu
poignes là-dedans, vous en rencontrez vous-mêmes
énormément de monde. On a de plus en plus de misère. Le
samedi, on n'est quasiment plus capables de tenir des assemblées, si on
est pour donner une chance équitable à tout le monde d'y
assister, parce que tous nos gens qui sont dans le commerce et un peu partout
travaillent déjà le samedi. Si on rajoute le dimanche...
M. Tremblay (Outremont): Essayez de m'aider dans la
réflexion. Moi, j'y pense. J'ai l'avantage d'avoir une ouverture desprit
et d'écouter, parce qu'on n'a pas pris de décision encore, donc
c'est important. Mais comment vais-je faire? Prenons un exemple plus
précis. Price Club. Steinberg opère... et là il a ouvert
des Price Club, des grossistes. Évidemment, on voit les
conséquences et l'effet que ça a. Quand même on trouverait
un moyen d'après la loi de dire... Qu'est-ce qui va arriver pour les
autres? La créativité, aujourd'hui, est rendue à un point
tellement élevé chez les commerçants qu'ils vont trouver
les moyens de vendre des produits soit par les ventes par correspondance, soit
par l'informatique, la télématique. Comment va-t-on faire?
Ça va nuire aux travailleurs, ça. Pourquoi? Ce sont juste des
questions que je pose. Pourquoi s'acharner et dire: Non, jamais le dimanche et
souvent... Si on regarde la tendance, on le voit dans les supermarchés,
où c'est votre clientèle syndiquée. Ça s'en va, le
chiffre d'affaires baisse comme ça, inévitablement, et les petits
grossissent. Mais les petits ne sont pas syndiqués. Même vous,
vous devriez, pour des raisons économiques syndicales, dire: II faut que
je protège mes travailleurs qui sont là. Mais le chiffre
d'affaires a baissé de huit points des grandes surfaces que vous
protégez.
M. Laberge: Alors, pourquoi le chiffre d'affaires a-t-il
baissé dans les supermarchés? Parce que eux ont
décidé de respecter la loi alors que le gouvernement n'a pas eu
le courage politique de la faire respecter par les autres. C'est aussi simple
que ça. Si vous aviez eu le courage politique de faire respecter la loi
par Jean Coutu et sa gang, les supermarchés et les autres, on ne serait
pas où on en est là. Et, M. le ministre, c'est très
important, ça. En même temps, c'est une bonne chose que ce soit
arrivé, parce que ça nous a réveillés. Nous autres
aussi, on a été un peu lâches, dans le bon sens du terme.
On n'a pas été aussi rigoureux qu'on aurait dû
l'être. Non pas lâches dans le mauvais sens du terme, dans le bons
sens du terme. On aurait dû être plus rigoureux.
Quand on a vu les exceptions se multiplier, quand on a vu les gens
affronter carrément la loi, on aurait dû vous donner un coup de
pouce. On aurait dû aller les fermer nous autres mêmes, ce qu'on se
jure bien de faire, une fois ces discussions-là terminées.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): M. Laberge...
M. Laberge: Je suis très sérieux. Ce ne sont pas
des paroles en l'air, moi, je vous le jure.
M. Tremblay (Outremont): Bon. M. Laberge, je m'excuse. Vous
pariez des pharmacies d'escompte. Vous savez pourquoi les pharmacies d'escompte
entre autres, pour avoir parié à des intervenants... Moi, je ne
veux pas parier de Jean Coutu, je parie des pharmacies d'escompte. Les
supermarchés ont commencé à vendre des produits
hygiéniques et des aspirines puis le Bromo Seltzer. Alors, c'est
là que les pharmacies d'escompte se sont dit: Pour attirer une
clientèle, nous autres aussi, on va commencer à vendre une
certaine catégorie de produits alimentaires. C'est en légitime
défense. Alors, comment puis-je empêcher, en tant que gouvernement
- je pose la question - un supermarché de vendre des aspirines, des
pilules et des choses comme ça?
M. Laberge: Comme vous faites avec la Société des
alcools, en vous assurant que tous les revenus des vins et des spiritueux
reviennent au gouvernement au lieu d'être divisés dans... C'est
facile quand on veut. La Société des alcools, c'est clair.
Personne n'a le droit de vendre de spiritueux à moins qu'il n'ait un
permis. C'est aussi facile dans l'alimentation. Il s'agit - et ça,
là-dessus, on est parfaitement d'accord - que ce soit clair. Il y en a
qui ont parié de surfaces de plancher. On ne peut pas demander à
des gens de se promener avec une mesure et commencer à prendre des
mesures.
Mais c'est facile à calculer combien il y a de vendeurs.
Quelqu'un posait tantôt une question à une des
représentantes de la Chambre de commerce sur les marchés aux
puces. Bon! Les marchés aux puces, c'est supposé vendre des
affaires de seconde main. Si vous pouvez me trouver un marché aux puces
aujourd'hui qui vend quelque chose de seconde main, vous me le direz parce que
ma femme dit qu'elle aime ça, aller au marché aux puces pour
acheter des choses de seconde main, puis elle arrive toujours avec des affaires
neuves, parce qu'ils ne vendent plus rien de seconde main dans les
marchés aux puces.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): Juste un dernier point. Vous avez
mentionné tout à l'heure que le chiffre d'affaires des
supermarchés a baissé. Peut-être parce que le gouvernement
n'a pas été assez vigilant, vous n'avez pas été
assez vigilants. Mais un fait demeure, c'est que le chiffre d'affaires des
dépanneurs a augmenté, lui.
M. Laberge: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Bon.
M. Laberge: Et ça, tous ensemble, on a reconnu qu'il
devrait y avoir des dépanneurs. Et n'oubliez pas, il y a je ne sais pas
combien de dépanneurs au Québec. Est-ce que quelqu'un a un
chiffre? En tout cas plusieurs centaines, même quelques milliers.
M. Tremblay (Outremont): 4500. (16 heures)
M. Laberge: 4500. Alors, tout le monde a été
d'accord pour qu'il y ait des dépanneurs justement par rapport à
la vie moderne des couples où les deux travaillent, etc., pour leur
donner l'occasion, quand il leur manque quelque chose, de se dépanner.
On a ouvert des dépanneurs.
N'oubliez pas que, parmi les 4500 dépanneurs, il y a un tas de
gens qui ont englouti toutes leurs économies là-dedans, qui ont
fait des sacrifices et qui travaillent sept jours par semaine. Les
dépanneurs, normalement, c'est l'époux et l'épouse et un
enfant ou deux, et une fois, très rarement, ils vont engager un
employé, mais très rarement. C'est surtout la famille. Si vous
permettez aux supermarchés d'alimentation d'ouvrir le dimanche, ces
dépanneurs-là viennent tous de "péter au fret". Ce sont
des gens qui ont englouti toute une vie d'efforts et leurs économies
parce qu'on leur avait permis de faire ça; ça répondait
à un besoin. On a une responsabilité vis-à-vis de ces
gens-là aussi.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
M. Tremblay (Marcel): J'aurais un petit commentaire à
ajouter.
Le Président (M. Bélanger): Oui, M. Tremblay.
M. Tremblay (Marcel): Quand vous parlez de la baisse qu'il y a eu
dans les supermarchés, il ne faut pas oublier que des statistiques ont
révélé dernièrement qu'au niveau de la restauration
on est parti, dans les dix dernières années, d'un volume de
chiffre d'affaires qui était à peu près, au niveau du
Québec, de 2 300 000 000 $ et qu'aujourd'hui, en 1990, on retrouve dans
la restauration des chiffres d'affaires d'environ 3 000 000 000 $. Quand on
parle, à un moment donné, du changement de style des
consommateurs et de tout ça, c'en est un, changement...
M. Laberge: Oui.
M. Tremblay (Marcel): ...dont personne ne parle ici. C'est
sûr que la vitesse de la société, le rythme dans lequel on
est embarqué et tout ça... Bien souvent, il y a un paquet de gens
qui vont dire: On va acheter un peu moins. Le dimanche, on va aller au
restaurant. Ce sont tous des facteurs aussi qui font qu'à un moment
donné on voit, probablement parce que c'est dû à un
changement de mentalité...
M. Tremblay (Outremont): Non, c'est parce que...
M. Tremblay (Marcel): ...que les chiffres d'affaires baissent
dans les supermarchés.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce que les restaurants... En
fait, l'hypothèse que je fais et, encore là, c'est juste une
hypothèse, c'est que les restaurants se sont adaptés et ouvrent
sept jours par semaine, et quand ils décident de ne pas ouvrir sept
jours par semaine, s'ils n'ouvrent pas le lundi, c'est parce qu'il n'y a
personne.
M. Laberge: Mais le point que faisait M. Tremblay, si vous le
permettez, M. le ministre...
M. Tremblay (Outremont): Oui.
M. Laberge: ...c'est qu'il y a eu une augmentation assez
fantastique du chiffre d'affaires dans la restauration. Ça veut dire
qu'il y a une diminution d'achat dans les marchés d'alimentation, c'est
évident. Mais il est bien évident que les pharmacies et les
supermarchés ont établi une concurrence.
M. Tremblay (Outremont): Est-ce que les
gens qui travaillent le dimanche, et il y en a beaucoup - j'ai
essayé d'avoir le chiffre, mais on me dit que, statistiquement, c'est
très difficile dans la restauration et dans tous les commerces, il y a
beaucoup de commerces: les sports et toute la liste que M. Daoust a
mentionnée tout à l'heure - ce ne sont pas des travailleurs et
des travailleuses qui ont besoin d'une qualité de vie?
M. Tremblay (Marcel): Ce sont des travailleurs qui ont besoin
d'une qualité de vie et à qui on ne donne pas de choix. Vous
savez, on est quand même dans une société... Quand on parle
de 10 % de chômeurs et de tout ça, ce n'est pas vrai, quand on me
parle de libre choix, que demain matin un individu décide exactement
où il va aller travailler. Bien souvent, on travaille où on peut
travailler et non pas où on veut travailler.
M. Tremblay (Outremont): Non, mais théoriquement, si on
prenait votre logique, M. Tremblay, il faudrait tout fermer le dimanche et
rester assis dans notre salon, surtout ne pas regarder la
télévision; parce qu'il y en a qui font les journaux, les
médias, il ne faudrait pas les lire. Il ne faudrait pas faire de sport.
Il ne faudrait pas tomber malade.
C'est parce que ceux qui travaillent le dimanche, je pense qu'ils
doivent aimer ça un petit peu aussi. Ils nous reçoivent avec un
sourire; ils ne doivent pas être si malheureux que ça.
M. La berge: Idéologiquement, vous avez raison. Mais,
évidemment, on ne peut pas retourner aussi loin que ça en
arrière. Si vous ne savez pas quoi faire avec vos dimanches, je pourrais
vous faire une suggestion ou deux.
M. Tremblay (Outremont): Ah! Je le sais. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Mais ça va plus loin que ça. J'ai
rencontré, l'autre jour encore, notre ami Alain Bilodeau, de Steinberg.
Il m'a dit: Vous êtes toujours opposés? J'ai dit: Oui, nous
autres, contrairement à toi, on ne change pas d'idée aussi
souvent qu'on change de chemise. Alain Bilodeau était contre les
ouvertures le dimanche tant qu'il n'a pas eu de nouveaux patrons qui lui ont
tordu les bras. Mais il était contre et il était très
convaincant. D'ailleurs, quand il a rencontré le comité Richard,
M. Richard m'a dit qu'il avait été convaincu par Alain Bilodeau
que ce n'était pas bon d'ouvrir le dimanche.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Aujourd'hui, il est pour. Il a le droit de changer
d'idée. Il a le droit de changer d'idée. Mais il dit: On va
laisser les gens libres.
Marcel Tremblay vient de toucher le point important. Avec 10 %, 11 % de
chômage, les gens ne sont pas vraiment libres. Quelqu'un appelle et dit:
Toi, est-ce que, librement, tu voudrais travailler le dimanche? Le gars ou la
fille savent fort bien que, s'ils disent non, ils ne travailleront pas non plus
le jeudi, ni le vendredi, ni le mercredi. C'est ça, l'affaire. Ils ne
sont pas vraiment libres. Ah! S'il manquait de travailleurs et de
travailleuses, on aurait peut-être une opinion différente
là-dessus. Là, ils auraient vraiment le choix. Tu refuses de
travailler le dimanche là, tu t'en vas ailleurs et tu as un autre
emploi. Ce n'est pas le cas. Alors, le libre choix des travailleurs et
travailleuses là-dedans, on va se faire grâce de ça.
M. Daoust: M. le ministre, si vous me le permettez, c'est
peut-être là qu'est le danger dans ce que vous avez
soulevé. Vous dites: D'une part, il y a déjà des gens dans
notre société qui travaillent le dimanche. Ils sont heureux. Ils
nous accueillent avec le sourire. Comment se fait-il que vous ne vous
préoccupiez pas de la qualité de vie de ces gens-là alors
que vous vous opposez à l'ouverture des commerces le dimanche? C'est
ça qui est le danger et c'est pernicieux comme raisonnement. C'est de
banaliser le dimanche, de faire en sorte que, de plus en plus, dans les
mentalités, on accepte que le dimanche soit une journée tout
à fait ordinaire, et c'est ce qu'on dit, dans notre document. Ces
services-là qu'on a identifiés - et j'espère que vous vous
en rendez compte - le service de police, des incendies, les grands moyens de
communication téléphonique et je n'en nomme pas d'autres, on
parle des transports en commun, on les a identifiés, les grandes usines
à production continue, les raffineries, dans la sidérurgie, dans
la métallurgie, il en coûterait des millions, sinon des centaines
de millions s'il fallait qu'à tout moment et à toute occasion, le
vendredi, on décide de mettre un terme à la production et qu'on
recommence le lundi. Il n'y a pas un traître chat qui viendrait
s'installer au Québec. Ce sont des pratiques universelles et vous le
savez fort bien et on est tous au courant de ça. On ne peut y
échapper. Le service de police, tout de même, qu'est-ce que vous
voulez, les ambulances, les hôpitaux, sauf que la
société... Et là où il y a des syndicats, on s'est
défendus et on s'est prémunis contre ça. Bon, il y a
toutes sortes de conditions qu'on a négociées. Il ne s'agit pas
de les reprendre Vous les connaissez. Ce n'est pas de gaieté de coeur
que les gens vont travailler le dimanche alors que l'ensemble de la population
n'est pas au travail. Il y en a qui voudraient le banaliser.
Je prends une de vos expressions quand vous avez parlé de la
créativité des entreprises. Moi, je salue la
créativité des entreprises, mais la profitabilité et
l'appât du gain sont tels qu'à
un moment donné, si on va dans le sens d'un raisonnement comme
celui-là, on va se réveiller - on l'a dit dans le mémoire,
je ne fais qu'expliciter ce qu'on dit - mais tout va être ouvert le
dimanche, mais tout va fonctionner le dimanche. Là, c'est un discours
contradictoire dans notre société alors qu'ailleurs, dans
d'autres lieux, on parle de la dislocation familiale, la
désagrégation de nos sociétés, des problèmes
d'alcoolisme, de délinquance, de toxicomanie alors qu'on essaie de
provoquer des moments où, collectivement, la société... Et
ça se fait... Écoutez, au Québec, on n'a pas
inventé grand-chose, de ce côté-là. Regardez ce qui
se passe dans bien des pays en Europe. Pourquoi faut-il toujours que le
modèle soit le modèle le plus mercantiliste au monde? Et ce n'est
pas toujours à la fine pointe de toutes les sociétés, ce
qui se passe à certains endroits, que ce soit au Canada anglais ou aux
États-Unis. Alors, c'est pour ça qu'on y tient. Ce n'est pas pour
être une société plus distincte, ce qui n'est pas mauvais,
soit dit en passant, qu'on se distingue de ce côté-là,
mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Daoust: ...c'est de faire en sorte que les gens puissent se
retrouver. Écoutez, la coalition, on n'est pas tout seul dans la
coalition. Il y a des groupes de toute nature. Je ne veux pas les nommer, mais
on en vient tous à peu près aux mêmes conditions. C'est
fort, Steinberg, Provigo, Métro. Et quand vous nous dites - et
là, je ne vous fais pas de procès d'intention, M. le ministre,
loin de là - que vous ne subissez pas les lobbies, mais attention, les
lobbies, ils sont là et ils sont tout-puissants et ils s'expriment. Les
petits qui viennent de temps à autre, on sait fort bien qu'ils se font
pousser dans le dos, si ce n'est pas ailleurs, ou bien ils se font prendre par
la main de temps à autre pour protéger des intérêts
que vous savez. On n'a pas l'impression d'avoir la vérité la plus
complète, la plus absolue, mais le danger, encore une fois, si on
commence comme ça le dimanche, demain, ça va être les
banques. Vous avez parlé des guichets automatiques. Bon, les guichets
automatiques, ce ne sont pas les banques. Quand on va vouloir négocier
nos hypothèques, contracter des emprunts, faire toutes les transactions
traditionnelles des banques, là, les banques vont être ouvertes.
Si on commence comme ça, éventuellement, il n'y a pas grand-chose
qui va être fermé le dimanche.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si vous
le permettez, je vais céder la parole à Mme la
députée de Taillon, histoire de faire un petit peu
d'alternance.
Mme Marois: C'est ça, mais je suis prête à
céder un peu de mon temps parce que j'aime bien entendre les propos qui
sont tenus. Le ministre ne s'en étonnera pas, mes collègues d'en
face non plus parce que, évidemment, je partage plutôt le point de
vue que vous défendez. Je vais juste faire un commentaire au ministre
sur la question des pilules et des médicaments. Quand l'Ordre des
pharmaciens est venu devant nous, vous soulevez un problème réel,
mais quand l'Ordre des pharmaciens est venu, ce qu'ils nous ont dit, et vous
étiez là, vous avez été là depuis le
début, c'est: II y a une possibilité de faire en sorte qu'on
réduise encore les produits pharmaceutiques vendus dans les grandes
surfaces parce qu'il y en a qui ne sont pas si banals qu'on veut bien le
laisser entendre et qui présentent des risques.
Si je me souviens bien, les représentants de l'Ordre nous ont
dit: II est possible par une série d'annexés à faire
à notre loi d'encadrement, en ce qui concerne la loi d'encadrement des
pharmacies, qu'on aille un petit peu plus loin dans la précision des
produits pharmaceutiques, de telle sorte que le problème que vous
souleviez et qui a amené peut-être ce que l'on connaît dans
des surfaces de pharmacie à vendre des produits d'alimentation pourrait
être encore réduit. D'autre part, si on posait la question:
Ça a été quoi, la proportion du chiffre d'affaires fait
sur la base des produits pharmaceutiques dans les grandes surfaces? je pense
bien qu'on serait bien conscients que c'est une infime proportion en ce qui
concerne le chiffre d'affaires.
M. Tremblay (Outremont): Comme la nourriture dans les pharmacies
d'escompte.
Mme Marois: Là, on pourra demander la question aux gens
qui vont venir. Ils vont venir un petit peu plus tard. Si la marge
bénéficiaire est basse... elle est basse, de toute façon,
dans les supermarchés aussi, on sait que la marge
bénéficiaire sur les produits d'alimentation est très
très basse. Mais dans les pharmacies, à partir du moment
où elle prend tant d'espace, c'est qu'ils doivent quelque part faire un
chiffre d'affaires à cause de ça. En tout cas, on pourra leur
poser la question.
Dans... Oui, c'est vrai. On parlait de "loss leader". J'avais entendu
ça alors c'est pour ça que j'ai dit: Oui, c'est vrai. C'est donc
un élément d'attrait pour la clientèle pour d'autres
produits d'achalandage, bien sûr. Dans un document que nous a
présenté la Coalition pour l'équité et le libre
accès, on nous dit: C'est pour défendre les droits des
consommateurs qui sont dispersés à travers la province et sans
réel levier et pour contrer le lobby syndical qui préfère
le statu quo aux besoins réels des consommateurs que la Coalition a
été fondée, en 1989. Et la Coalition pour l'ouverture nous
a dit qu'elle avait un peu de difficulté à comprendre les
syndicats qui souhaitaient la fermeture parce que ça allait faire perdre
des emplois alors qu'on
avait un taux de chômage du pourcentage que l'on connaît.
Alors, que répondez-vous à leur affirmation ici?
M. Laberge: Bon. La FTQ qui représente bien au-delà
de 450 000 membres, avec leurs familles, ça fait pas mal de
consommateurs aussi. Mais la différence, c'est que nous sommes
structurés pour rencontrer nos gens. Ce n'est pas une critique
vis-à-vis des autres. Mais ce sont des consommateurs. Bon. Est-ce que
ça va créer des emplois? Bien sûr. Ça va
créer encore d'autres emplois à temps partiel, des emplois dits
précaires, au salaire minimum. Et ça va diminuer sans aucun doute
les conditions de travail et les salaires des employés qui sont
permanents aujourd'hui. Vous voyez, la famille, enfin, aujourd'hui, M. le
ministre, c'est un secret de polichinelle, c'est assez rare où le
couple, les deux ne travaillent pas. C'est quasiment devenu une exception.
Alors, un va travailler du mardi au dimanche et l'autre va travailler
quoi? Du lundi au vendredi. Comment on va faire? Les enfants sont
supposés être à la maison le samedi et le dimanche. Comment
peut-on réconcilier tout ça? C'est déjà très
compliqué comme c'est là. Les consommateurs, s'ils sont inquiets
pour les emplois perdus, je pense qu'ils devraient regarder aussi l'effet que
ça va avoir sur les conditions de travail existantes, sur les salaires
existants et, ne l'oubliez pas, sur le prix de l'alimentation. Ce n'est pas
vrai que tout ça va se traduire par une diminution des aliments. Au
contraire. Ça va coûter plus cher aux magasins d'alimentation;
conséquemment, ça va coûter plus cher aux consommateurs. Il
n'y a aucun doute là-dessus. (16 h 15)
Mme Marois: D'accord. J'aimerais ça que vous me parliez un
petit peu du droit de refus. Vous avez des expériences syndicales. C'est
aussi un argument des gens qui nous disent: Bon, bien, ce n'est pas grave, les
gens pourront refuser de travailler. Vous l'avez abordé un petit peu, M.
Laberge, tout à l'heure, cette question-là, mais j'aimerais que
vous alliez un peu plus loin dans le sens d'expériences que vous avez
vécues, de contrats que vous avez négociés où vous
avez introduit des droits de refus. Peut-être M. Tremblay peut-il nous en
parler. Vous en avez introduit dans vos conventions. Comment ça s'est-il
appliqué? Parce que là aussi il y a une espèce de discours
un peu fallacieux où on nous dit: Ce n'est pas parce qu'on va permettre
l'ouverture qu'on va être obligés de... Et là on dit: Ce
n'est pas parce qu'on va permettre l'ouverture que les gens vont être
obligés d'aller magasiner, ils peuvent décider de ne pas y aller.
Ce n'est pas parce qu'on va permettre l'ouverture et qu'on va offrir à
des travailleurs de venir travailler qu'ils vont être obligés de
venir. Ce n'est pas parce qu'on va permettre l'ouverture qu'un
commerçant va être obligé d'ouvrir si d'autres ouvrent; il
pourra décider de ne pas ouvrir. Alors, le droit de refus.
M. Tremblay (Marcel): Marcel Tremblay. Mme la
députée, moi, je peux vous dire que, dans la majorité des
conventions qui existent actuellement, le droit de refus existe, par exemple,
au niveau de l'ensemble des salariés à temps partiel. Quand on
dit que les salariés à temps partiel, par exemple, donnent leur
programmation par ancienneté et selon leur disponibilité... Pour
les salariés, il y a des droits qui sont inclus actuellement dans les
conventions collectives comme quoi ils ont le droit de refuser, à un
moment donné, ou de se rendre non disponibles. Et rien que le fait
qu'ils se rendent non disponibles, on cherche, à un moment donné,
à leur faire des horaires de travail où ils ne sont plus capables
d entrer, on les pénalise de quelque manière que ce soit. Le
droit de refus, je l'ai dit cette semaine, quand il y a un lien de
"subordinateur" à subordonné, je regrette, mais ça
n'existe pas. Une fois, un salarié va dire non, ça va passer une
fois. Deux fois, trois fois, il commence à se faire regarder de travers
et, à un moment donné, on cherche toutes sortes de moyens pour
pénaliser indirectement et subtilement le salarié. Le droit de
refus, ça n'existera pas, jamais. Et moi, j'aimerais aussi attirer
l'attention du comité...
M. Tremblay (Outremont): Très bien. Très important,
ce point-la. Si on faisait une loi...
M. Tremblay (Marcel): Oui.
M. Tremblay (Outremont): et on le mettrait clairement dans la
loi...
M. Laberge: Qui dirait quoi?
M. Tremblay (Outremont): Qui dirait: Pour répondre
à l'attente. Je ne sais pas comment je le phraserais... et tout
ça pour répondre...
M. Tremblay (Marcel): La loi des parties, M. le ministre, dans
les conventions collectives, il y a quand même des arbitres - ça
l'est, la loi des parties - il y a des arbitres qui rendent des
décisions là-dessus. Moi..
M. Tremblay (Outremont): Non, mais c'est parce que tout à
l'heure...
M. Tremblay (Marcel): ...je sais qu'il y a une loi du salaire
minimum qui existe, qui s'appelle la loi 126, où il y a des obligations
pour les employeurs de payer tant de congés par année aux
salariés. Il y a des salariés qui se sont déjà
prévalus de ces lois-là et, le fait qu'ils s'en soient
prévalus... On les a payés, on leur a donné leurs
journées, sauf que, deux, trois semaines après, on a
trouvé toutes sortes de
prétextes pour les congédier. Ce ne sont pas les lois qui
vont faire, M. le ministre, que les employeurs vont respecter... Il y en a, des
lois, actuellement, sur les heures d'ouverture et on ouvre les magasins quand
même illégalement le dimanche.
M. Tremblay (Outremont): Je suis bien content d'entendre
ça, M. Tremblay, parce que c'est contraire au discours que vous teniez
tout à l'heure, pas vous parce que ce n'est pas vous qui avez
parlé. Vous me disiez: Faites appliquer la loi pour l'ouverture des
commerces.
M. Tremblay (Marcel): Effectivement.
M. Tremblay (Outremont): C'est ça que vous me disiez.
M. Tremblay (Marcel): On vous dit la même chose.
M. Tremblay (Outremont): Mais là je yous dis: II y en a
une loi pour les normes du travail.
M. Tremblay (Marcel): Oui.
M. Tremblay (Outremont): Et, même si vous essayez de la
faire appliquer, c'est très difficile pour des raisons...
M. Tremblay (Marcel): Non, elle est appliquée, M. le
ministre. Non, ce que je vous dis, M. le ministre, je regrette...
M. Tremblay (Outremont): Elle est appliquée, mais...
M. Tremblay (Marcel): Elle est appliquée... M. Tremblay
(Outremont): ...l'employeur...
M. Tremblay (Marcel): ...sauf que vous n'avez aucun
contrôle sur les sanctions qui sont prises contre les salariés qui
font que la loi est respectée. La loi est respectée, M. le
ministre...
M. Tremblay (Outremont): Non.
M. Tremblay (Marcel): ...intégralement.
M. Tremblay (Outremont): Comme, par exemple, M. Laberge a fait
allusion à ça tout à l'heure, on dit: Le petit
dépanneur, trois employés et moins. Il dit: Ce n'est pas grave,
ils travaillent sept jours par semaine et, habituellement, ils sont
occupés sept jours. Mais comment on va faire pour contrôler,
mettons qu'on va à trois, le fait que - parce que c'est trois en tout
temps dans l'établissement - sa femme... Parce que habituellement il
fait travailler sa femme, il fait travailler ses enfants et ils ne sont pas
comptés, des fois, les trois. Des intervenants nous disent ça:
Très difficile à contrôler, les trois. Après
ça, on dirait que, quand vous voulez, vous regardez le gouvernement:
Faites appliquer la loi! Mais c'est difficile. Ce n'est pas toujours
facile.
M. Tremblay (Marcel): Oui. C'est-à-dire... c'est vrai que
ce n'est pas toujours facile. Même pour les syndicats, ce n'est pas
toujours facile de faire appliquer les conventions collectives. Mais moi, ce
que je peux vous dire, M. le ministre, je pense que le député de
Drummond ici, en tout cas, qui a l'air à avoir une idée assez
précise... c'est comment, peut-être, on pourrait les faire
respecter, ces lois-là. O.K.? Soit, par exemple, en faisant ça
sur une espèce de législation provinciale et peut-être
donner le pouvoir, à un moment donné, de vérifier si les
lois sont appliquées ou non, si elles vont être appliquées
par les municipalités. C'est peut-être une possibilité de
faire que... Ça faciliterait peut-être davantage le respect de la
loi.
M. Laberge: M. le ministre, je vais vous faire une
démonstration très simple. Actuellement, il y a six jours de
couverts. Supposons que vous dites: Parfait, sept jours! Le propriétaire
d'un magasin d'alimentation va aller voir son employé et il va lui dire:
Écoute, les autres ouvrent alentour, alors il faut bien que j'ouvre. Qui
va prendre ça, le dimanche? J'en ai besoin de deux pour couvrir mon
espace ou j'en ai besoin de trois. Qui va prendre ça? S'ils disent non,
tout le monde, il va faire quoi? Il va en engager trois à temps
partiel.
M. Tremblay (Outremont): C'est ça.
M. Laberge: Attendez un peu. Est-ce qu'il va continuer à
payer tous ses autres employés à cinq jours par semaine? Bien
non! Parce que, vous le savez fort bien, mon cher ministre, qu'on n'a rien
qu'une paie et qu'on n'a rien qu'un budget, en alimentation. Si tu le
dépenses le dimanche, tu n'en auras pas pour les lundi, mardi et
mercredi. D'ailleurs, vous le savez, dans les épiceries, le lundi, la
clientèle est rare parce qu'il y a mardi, mercredi, jeudi, vendredi et
samedi. Vous ajoutez le dimanche; est-ce que ça va être les lundi,
mardi? Alors, vous dites: On va s'assurer, dans la loi, que c'est libre. Moi,
je dis: Non, moi, je ne veux pas travailler le dimanche, la loi me
protège, c'est libre. Bien, on va me dire: Bien, tu resteras aussi chez
vous mardi, parce que, vu qu'on ouvre le dimanche, on n'aura pas assez de monde
le mardi pour t'oc-cuper. Je viens de perdre une journée de travail. A
ce moment-là, je ne suis plus libre. Je vais accepter, si j'ai besoin de
ma paie de cinq jours, de travailler la cinquième journée.
M. Tremblay (Outremont): Mais ce qu'il faudrait que la loi dise
également, c'est qu'en ce
moment, ce travailleur-là, il travaille, mettons, ses 40 heures
ou 43 heures, 44 heures, 38 heures, peut-être 37,5, en tout cas, mettons
qu'il travaille 40 heures, il est donc assuré de ses 40 heures. C'est un
employé, il a son statut. S'il ne veut pas travailler le dimanche, il
faut toujours qu'il ait ses 40 heures. S'il décide de travailler le
dimanche, ça fait un occasionnel de moins qui sera engagé
peut-être le lundi, quand il prendra sa journée de congé.
C'est ça que la loi, il faudrait qu'elle dise; il ne faudrait pas
qu'elle dise juste: Tu ne travailles pas le dimanche.
M. Laberge: Non, non, mais même là, même si la
loi était parfaite - on n'en a jamais vu - mais même si elle
l'était...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): C'est vrai.
M. Laberge: Non, non, mais ça n'adonne pas, ça.
Mais même si elle était parfaite, on ne peut pas couvrir
ça. Encore une fois, disons 40 heures par semaine - c'est plus facile
à regarder - moi, j'ai 40 heures et il me dit: Je suis obligé
d'ouvrir le dimanche, les autres ouvrent, pour garder ma clientèle, donc
ça m'en prend pour le dimanche; est-ce que vous voulez y aller? Non.
Parfait, tu as le droit, sauf que tu vas comprendre que, moi, je n'ouvrirai
plus et je n'aurai pas besoin de mes 18 employés, le lundi et le mardi,
parce qu'ils vont venir le jeudi, le vendredi, le samedi et le dimanche. Il n'y
a pas à y échapper et la loi ne peut pas couvrir ça,
autrement, on va leur faire faire banqueroute, ces magasins-là - c'est
ça, le problème - ou il y aura une augmentation assez fantastique
dans l'alimentation, qui est déjà assez chère et la
concurrence étant ce qu'elle est...
M. Tremblay (Outremont): Vous ne trouvez pas...
M. Tremblay (Marcel): M. le ministre, permettez-moi un petit
commentaire.
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui, M. Tremblay, allez-y.
Mme Marois: D'ailleurs, c'est sur mon temps qu'il intervient,
alors je vous permets un commentaire!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Marois: Mais on fait ça...
Une voix: Vous reprendrez ça dimanche.
Mme Marois: J'accepte ça.
M. Tremblay (Outremont): Mais, quand il y en a qui sont pour, je
lui laisse du temps. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): Ça s'équilibre, ça
s'équilibre.
M. Jolivet: Mais le président n'est pas sûr.
M. Tremblay (Outremont): Je connais assez la
députée de Taillon pour savoir que, si je prends trop de temps,
elle va me le reprendre quelque part, mais on est d'accord.
Le Président (M. Bélanger): Alors, disons que le
temps est imputé au ministre, mais que c'était une
parenthèse...
Mme Marois: Non, ça va, ça va, on s'est
compris.
M. Tremblay (Outremont): Ce n'est pas grave, là.
Le Président (M. Bélanger): ...qui devient
grande.
Mme Marois: On s'est entendu sur ça.
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui, c'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on laisse...
Mme Marois: Mais j'aimerais ça entendre M. Tremblay.
Le Président (M. Bélanger): Oui!
M. Tremblay (Marcel): Marcel Tremblay. C'est que, tout à
l'heure, on parlait qu'il y avait un paquet de travailleurs qui travaillaient
le dimanche. Il y a un institut au Québec qui s'appelle TIRAT, qui,
à un moment donné, a fait une espèce de recherche sur le
taux d'absentéisme chez les entreprises qui étaient ouvertes le
dimanche, les différents services qui étaient ouverts le
dimanche. La conclusion du rapport de TIRAT, c'est que le plus grand taux
d'absentéisme qu'on retrouve dans les entreprises, soit de services,
soit dans les industries, c'est le dimanche qu'on le retrouve.
C'est pour ça que, quand on dit, finalement, qu'on parle
réellement au nom des consommateurs, au nom des travailleurs, je veux
dire, c'est que, s'il y a un taux d'absentéisme si élevé
le dimanche, ce n'est pas un hasard, c'est que les gens n'aiment pas ça,
travailler le dimanche. Ça, je pense que c'est clair au niveau des 450
000 travailleurs qui sont représentés au niveau de la FTQ. Je
pense que c'est très clair. Les études scientifiques ont
démontré qu'effectivement on est dans une société
où on a quand
même tout un patrimoine, toute une culture d'attachée
à ça, où, finalement, le dimanche, on n'aime pas ça
travailler. Je crois que c'est le rôle du gouvernement de faire en sorte
que, s'il y a une masse énorme de population qui demande de ne pas
travailler le dimanche, on limite au minimum les possibilités aux
consommateurs et aux gons de travailler le dimanche, parce que tous ces
gens-là sont quand même des consommateurs.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce qu'il y a un autre
intervenant qui est venu ce matin avec les vacances de la construction.
M. Tremblay (Marcel): Oui.
M. Tremblay (Outremont): II y a deux semaines de vacances de la
construction. Ça crée un phénomène d'engorgement
important au niveau, par exemple, des centres touristiques qui fait que, quand
vous regardez entre le 15 juillet et le 31 juillet, c'est toujours le plein
prix et, quand vous regardez, par exemple, au début du mois
d'août, le prix baisse, à cause, entre autres, des vacances de la
construction. Et là, ce qu'on dit, c'est qu'on ferme les grandes
surfaces - admettons que les prix ne baissent pas, M. Laberge, mais, au moins,
ils restent les mêmes ou à peu près - et on crée une
structure parallèle de dépanneurs à côté.
Tous les intervenants viennent nous dire: On force le consommateur à
aller chez un dépanneur le dimanche et ça lui coûte 15 %
plus cher. Comment fait-on pour justifier ça? Quelle est la logique de
ça?
M. Laberge: Ils ont le samedi, ou le vendredi soir, ou le jeudi
soir comme nous autres.
M. Tremblay (Outremont): Donc, très bien. Pour avoir une
loi équitable, une qualité de vie, on pourrait
théoriquement dire: Dimanche, on ferme tout.
M. Laberge: Bien, on est d'accord!
M. Tremblay (Outremont): Les dépanneurs?
M. Laberge: Si vous avez le courage politique d'aller
jusque-là, on est d'accord. On est d'accord, nous autres.
M. Tremblay (Outremont): Parce que, dans le fond, si on veut le
regarder - et encore ce sont toutes des hypothèses -
théoriquement, ce qu'il faut dire, c'est qu'on ferme tout le dimanche,
sauf quelques exceptions.
M. Laberge: Enfin, les choses essentielles. O.K.
M. Tremblay (Outremont): Oui, sauf les choses essentielles.
M. Laberge: Essentielles.
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui. Ou on libéralise. Parce
que le jour où on fait des exceptions, à cause de la
créativité, on se ramasse dans un an ou dans deux ans avec des
problèmes.
M. Tremblay (Marcel): Sauf, M. le ministre...
M. Tremblay (Outremont): Attendez, M. Laberge...
M. Laberge: Et c'est en plein ça.
M. Tremblay (Outremont): Vous êtes d'accord avec ça,
M. Laberge?
M. Laberge: Moi, je suis d'accord avec ça et c'est
là que je me fais des reproches, c'est qu'on vous a laissé -
quand je dis vous...
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui.
M. Laberge: ...c'est le gouvernement - multiplier les exemptions
et c'est là qu'on aurait dû y voir tout de suite.
M. Tremblay (Outremont): O.K. Donc...
M. Laberge: Et c'est ça qui nous amène à ce
que les gens disent, avec raison...
M. Tremblay (Outremont): Très bien. M. Laberge:
...qu'il y a une inéquité.
M. Tremblay (Outremont): Bon, très bien. Est-ce que - et
j'aimerais ça vous entendre sur ce point-là; M. Tremblay, vous
allez pouvoir... en tout cas, parce que je pense que c'est important et je veux
en profiter...
Mme Marois: C'est parce que là j'ai une question à
vous poser moi aussi.
M. Tremblay (Outremont): ...publiquement. C'est ça que je
veux faire, parce que j'aurais pu rencontrer des intervenants avant, mais je
n'ai pas voulu. Je veux en profiter publiquement. C'est important ce dont on
discute là. C'est le fond. Est-ce que c'est équitable -
l'équité qui est un des principes importants - d'aller dire
à des gens... Parce que vous l'avez mentionné tout à
l'heure, vous avez dit: Le petit dépanneur - je veux être certain
qu'on est conséquent - a investi des sous. Il a bâti toute sa vie
et il a voulu travailler fort. Là, ce qu'on va leur dire, c'est:
Écoutez, là, pour l'équité, on va dire à
tout le monde: On ferme le dimanche.
M. Laberge: On a déjà consenti à ce que
les dépanneurs soient ouverts. Là, vous voulez retourner
en arrière. Si vous voulez retourner en arrière, O.K., mais,
à ce moment-là, on va compenser ces gens-là, parce qu'eux
autres ont investi là-dedans parce qu'on a dit qu'il y avait un besoin
qui existait et qu'on leur a permis d'ouvrir. Je ne parle pas de ça.
Cela a été fait ouvertement, après consultation et tout
ça. Je parle des centaines et des centaines et des milliers d'exemptions
qui ont été données à la douce sans que personne ne
le sache. Je parle de celles-là.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce que vous venez de qualifier
ce que vous avez dit tout à l'heure. Et c'est correct. C'est correct. Je
comprends. C'est parce que l'impression que j'avais, c'est qu'on aurait pu
dire: Même les dépanneurs, on les ferme.
M. Laberge: On aurait pu le dire. Mais, maintenant qu'on le leur
a permis... C'est comme le...
M. Tremblay (Outremont): O.K. parfait.
M. Laberge: Comment pourrais jo bien dlro? Quand on a
donné les règles du jeu...
M. Tremblay (Outremont): Très bien.
M. Laberge: ...une fois que la partie est commencée, on
n'a pas le droit de les changer.
M. Tremblay (Outremont): Très bien. En 1984... C'est bien,
c'est exactement ça. En 1984, dans la loi, à l'article 5.2, on a
dit à 219 pharmacies d'escompte: Vous avez le droit d'ouvrir. On l'a
dit. Est-ce que...
M. Laberge: 1984?
M. Tremblay (Outremont): Oui
M. Laberge: II faut que je regarde où est-ce que
j'étais. Quelle date?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): En tout cas, moi je n'étais pas
là, mais c'est M. Biron qui a permis ça dans la loi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Bien, ce n'est pas correct.
M. Tremblay (Outremont): Le point que je veux faire sur
l'équité...
M. Laberge: On a dormi sur la "switch" en mautadit.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Tremblay (Outremont): Le point que je veux faire sur
l'équité c'est... Mettez-vous à la place d'un gouvernement
qui doit voir ça dans son ensemble, avoir une vision globale. Comment
va-t-on faire pour retourner en arrière et dire aux dépanneurs:
Vous autres, vous avez le droit, mais ceux qui, de bonne foi, ont ouvert en
fonction de l'article 5.2, maintenant vous n'avez plus le droit? Une croix
dessus.
M.Jolivet: ...
M. Tremblay (Outremont): Oui, mais c'est dans la loi.
M. Jolivet: Non, ils n'ont pas ouvert. Ils étaient
ouverts.
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui.
M. Jolivet: C'est la différence, c'est important.
Mme Marois: Bien oui.
M. Tremblay (Outremont): C'est ça....
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Tremblay (Outremont): ...pour l'équité, quand on
parle d'équité. Parce que là j'ai donné cet
exemple-là.
M. Laberge: Les pharmacies sont ouvertes pour vendre
supposément des médicaments. Qu'elles vendent des maudits
médicaments! (16 h 30)
M. Tremblay (Outremont): Oui, mais ce n'est pas ce que la loi
disait, à l'article 5.2; ce que la loi a dit, justement pour
régler ce problème-là définitivement, c'est: Parce
que vous êtes une pharmacie qui vend autre chose, les grandes pharmacies,
et que vous êtes plus que trois employés, on va vous permettre de
continuer à ouvrir II y en a 219. Voilà, on l'a mis dans la
loi.
M. Laberge: Alors, ça a été une grave
erreur. Est-ce que vous feriez la même chose, M. le ministre, avec
quelqu'un qui a une licence pour bière et vin? Si vous le surprenez
à vendre du fort, qu'est-ce qui arrive? Il peut perdre son permis,
hein?
M. Tremblay (Outremont): Mais comment je vais dire à ces
gens-là... Mettons qu'on admette...
M. Laberge: Ah! mon Dieu! si vous êtes trop
gêné...
M. Tremblay (Outremont): Non, non. M. Laberge: ...j'irai
le dire à votre place. Des voix: Ha, ha, ha! M. Tremblay
(Outremont): Non, non. M. Laberge: Je ferais ça avec
plaisir.
M. Tremblay (Outremont): Non, non, mais, M. Laberge, en tant que
gouvernement, quand on parle de rétroactivité, même vous,
vous êtes le premier à dire des fois
"rétroactivité", parce que là j'ai donné l'exemple
des pharmacies d'escompte, mais il y a également les fruiteries. Il y a
des fruiteries qui, par règlement - et j'admets que c'est
contesté, c'est devant les tribunaux - ont ouvert de bonne foi en
fonction d'une catégorie de produits énumérés par
règlement. Ça, c'est un autre exemple. Il y en a, des exemples
comme ça, dans la loi.
M. Laberge: Mais il y a des fruiteries qui sont rendues aussi
boulangeries, qui sont...
M. Tremblay (Outremont): Oui, oui, c'est certain, oui, oui.
M. Laberge: ...rendues toutes sortes d'affaires.
M. Tremblay (Outremont): C'est la créativité.
M. Laberge: Oui, mais, M. le ministre, par exemple, moi, je
trouve que la loi réglementant la vitesse sur nos routes est ridicule.
On a des petites routes tortueuses où tu rencontres et tu as droit
à 90 kilomètres à l'heure; sur la 20 et sur la 40, tu as
droit à 100 kilomètres à l'heure. C'est tellement "slow"
qu'on s'endort. Moi, je suis d'accord pour faire sauter ça, pas de
limite de vitesse, comme ça existe dans certains pays. Vous n'allez pas
me le permettre, hein?
M. Tremblay (Outremont): Non.
M. Laberge: Parce que, pour la majorité des citoyens, il
faut que ce soit réglementé. C'est la même chose pour ceux
qui aimeraient ça, magasiner le dimanche. Ils magasineront aux heures
d'ouverture.
Rappelez-vous ce qui est arrivé avec les automobiles; pourtant,
c'est un achat bien plus important quand on est obligé de s'acheter une
voiture. À un moment donné, il n'y avait plus... On s'est dit:
Mais qu'est-ce qu'on va faire pour acheter une voiture? C'est fermé le
samedi. Pourtant, tout le monde continue à s'acheter des voitures, ils
ont trouvé le moyen de le faire; on a trouvé le moyen de le
faire, hein? Tout le monde. C'est la même chose en alimentation.
Le Président (M. Bélanger): Je cède la
parole à Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Je veux juste...
M. Jolivet: Sur le temps du ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Marois: Sur le temps du ministre? Non, sur mon temps. Je
voudrais juste rappeler au ministre quand même une certaine chose. Nous
avons adopté la loi, c'était en 1984. Il y a un article qui
permet au ministre - qui permet, je dis bien, pas oblige - d'autoriser des
exceptions. C'est l'article 5.2. Sauf que c'est quand même le ministre
Daniel Johnson qui a signé... Oui, c'est parce qu'il faut le dire. Il
dit: Oui, oui, je le sais, mais il y a peut-être d'autre monde qui ne le
sait pas. C'est le ministre Daniel Johnson qui a signé - pas à la
fin de 1985, pas au début de 1986, il a signé au mois de juin
1986 - c'est lui qui les a acceptées, les exemptions.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce qu'il y a eu un changement
de gouvernement.
Mme Marois: Alors, il y a eu un changement de gouvernement et le
gouvernement qui a suivi...
Des voix: Ah!
Mme Marois: ...a dit: Ce n'est pas tellement un cafouillis, on
est assez d'accord...
M. Laberge: II me semblait.
Mme Marois: ...avec la loi, à ce point qu'on va accepter
les exemptions. Alors, il a accepté les exemptions. Je me dis, je veux
bien prendre ma tartine et boire ma tasse, mais on va la partager.
M. Laberge: La loi de 1984, si je comprends bien, ne permettait
pas aux pharmacies d'escompte d'ouvrir le dimanche.
Mme Marois: Non. Ce n'était pas automatique.
M. Tremblay (Outremont): Elle permettait de fermer le
dimanche.
M. Laberge: Non, mais ça me surprenait qu'on n'ait pas vu
ça.
Mme Marois: D'accord, ce n'était pas automatique.
M. Tremblay (Outremont): Non. Elle permettait de fermer.
Mme Marois: Attendez un peu. Je vais finir maintenant mon
intervention et, après ça, vous pourrez reprendre, M. le
ministre. Le ministre nous dit que nos gens d'affaires on beaucoup
d'imagination. C'est vrai, de façon générale, je pense que
les Québécois et les Québécoises ont beaucoup
d'imagination. SI les gens d'affaires ont de l'imagination pour trouver des
trous pour passer à travers une loi, j'imagine que les
législateurs doivent avoir aussi assez d'imagination, au fur et à
mesure que ça apparaît, si on a une certaine vigilance... Il faut
être capable de trouver les moyens de contrer ça, hein?
M. Jolivet: Calfeutrer.
Mme Marois: À partir du moment, par exemple - et là
il faut être clairs ensemble - où on s'entend sur la règle,
sur ce qu'on veut, sur là où on veut aller et sur l'objectif,
après ça, le reste, c'est de l'ordre des moyens. Je pense que
tout le débat qu'on a ensemble avec les représentants de la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et
votre formation politique, c'est de se dire qu'il y a eu des exceptions qui ont
été permises. Les gens ont pris un peu plus, ont grappillé
d'un endroit à l'autre, de telle sorte qu'on se retrouve aujourd'hui
effectivement avec un cafouillis, mais parce qu'on n'est pas intervenus. Le
président de la FTQ lui-même le reconnaît. Il dit: Si on
avait été plus vigilants de part et d'autre, peut-être bien
qu'on ne serait pas à se poser la question maintenant et aux prises avec
des gens qui sont à la marge, qui sont presque dans
l'illégalité, avec des injonctions, etc. Donc, dans ce
sens-là, c'est vrai qu'il y a de l'imagination chez nos gens, et c'est
tant mieux et c'est heureux. Mais je pense aussi qu'on a ta capacité
d'en avoir, de l'imagination, et d'intervenir s'il y a lieu pour contrer des
excroissances qui iraient à rencontre de la loi.
Une autre question: Est-ce que vous avez souvent des primes dans vos
conventions collectives, lorsqu'il y a obligation, dans les secteurs qu'on
mentionnait tout à l'heure? Je pense aux sidérurgies, je pense
à certaines entreprises qui sont en temps continu. Est-ce qu'il y a des
primes qui sont prévues à ce moment-là?
M. Laberge: Évidemment. Mme Marois: D'accord.
M. Laberge: C'est bien évident et ça coûte
très cher. Par exemple, dans l'industrie des pâtes et papiers ils
ont obtenu la production continue, mais elle a coûté très
cher. Ça a coûté tellement cher que, si le dollar canadien
continue d'être surévalué comme il est là, nous
sommes très anxieux...
Mme Marois: Inquiets.
M. Laberge: ...pour l'avenir de nos emplois dans l'industrie des
pâtes et papiers au Québec et c'est beaucoup, beaucoup d'emplois
parce que, justement, l'opération continue, ça a permis aux
compagnies une certaine économie Mais, par contre, les conditions qui
ont été exigées pour perdre la fin de semaine, ça a
été très onéreux et ça a fait augmenter le
coût du papier. Moi, je vous le dis, je vous le certifie, l'ouverture des
commerces d'alimentation le dimanche va faire augmenter le prix des
denrées, il n'y a aucun doute là-dessus.
Mme Marois: Oui, M. Tremblay.
M. Tremblay (Marcel): J'aurais un petit commentaire concernant
les denrées. C'est qu'il y a une prémisse ici cette semaine qui a
été amenée, je pense, qui est totalement fausse. Quand on
dit que, si demain, vous passez une loi, puis vous ne permettez point que les
magasins d'alimentation soient ouverts le dimanche, vous allez amener un
certain groupe de consommateurs à payer 10 % ou 15 % de plus leur
commande d'épicerie, ça, M. le ministre, cest totalement faux.
Faites des recherches, faites des analyses, on les a faites, etc Des gens qui
font leur marché le dimanche, il n'y en a pas. Il n'y a pas de gens qui
font leur marché le dimanche. Il y a des gens qui vont aller acheter un
morceau dans telle boutique spécialisée, mais des gens qui font
leur marché le dimanche, ça n'existe pas.
Mme Marois: Une dernière question et vous pourrez poser un
certain nombre d'autres questions, M. le ministre. On a aussi abordé ici
la question des zones touristiques en disant que c'était rentré
dans les., que c'était une des exemptions, puis bon. Est-ce qu'on
devrait les maintenir? Qu'est-ce qu'on devrait faire avec ça? Est-ce que
vous avez réfléchi à ça? Évidemment, je ne
pose peut-être pas la question aux bonnes personnes là, alors!
Dans les zones touristiques?
M. Laberge: Bon, dans les zones touristiques, comme d'autres,
moins souvent que M. Daoust, moi, je me promène plutôt au
Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Alors, que M. Daoust se
le tienne pour dit!
M. Laberge: Mais quand je vais en touriste en quelque part,
probablement comme vous tous, quand on va en touriste en quelque part,
qu'est-ce qu'on fait? D'abord, on reste dans un hôtel et on mange dans
des restaurants. Ce n'est pas vrai qu'on va faire notre marché
d'alimentation
quand on est dans une zone touristique, à part les endroits
où il y a des chalets, par exemple, durant la saison estivale. Et
là, les gens vont partir en courant, le vendredi soir, de leur emploi
pour s'en aller à leur chalet et il y a le samedi, il y a le dimanche.
Moi, la chose la plus simple, même dans les zones touristiques, je n'en
connais pas assez, les marchés d'alimentation... Ce n'est pas vrai,
Marcel vient de le dire, ce n'est pas vrai que les gens font leur marché
le dimanche, même dans les zones touristiques. Maintenant, si le
gouvernement croit qu'il devrait absolument y avoir une exception, il faudrait
qu'elle soit très limitée.
M. Tremblay (Outremont): Elle est là, elle existe. Mais je
dois vous dire pour votre information, M. Laberge, que dans les zones
touristiques, si on prend pas loin, Saint-Sauveur, par exemple, il s'est
construit... Il y a 20 ans, parce que M. Daoust parlait de ça, il y a 20
ans, moi, je me rappelle, je partais avec mes parents, ils ouvraient la valise
et on mettait toute notre commande pour la fin de semaine dans la valise de
l'auto et on se rendait à la campagne. Maintenant, aujourd'hui, on part
et on s'en va, par exemple, à la campagne, mais on n'achète pas
à Montréal, on arrête dans la zone touristique. Alors, il y
a une demande importante. La preuve, c'est qu'à Saint-Sauveur il y a un
Provigo, il y a un Métro et il y a de grandes chaînes
d'alimentation et il y a également beaucoup de boutiques. Alors, le
touriste dont on parle, qu'on voit, en tout cas, si on se fie aux zones
touristiques, il semblerait qu'il y ait un besoin.
M. Laberge: On n'est pas complètement fermés
à tout ça, là.
M. Tremblay (Outremorrt): Non, non, mais le
problème...
M. Laberge: Mais, encore une fois, il faudrait que ce soit
très très régi.
M. Tremblay (Outremont): Oui, je comprends, et on en a
discuté avec d'autres intervenants. Mais ce que ça crée,
je vais vous donner un exemple de ce que ça pourrait créer en
tant que législateur. La zone touristique permet d'ouvrir sept jours par
semaine, 24 heures par jour, indépendamment du nombre d'employés.
C'est important, ça. Tous les commerces. C'est ce que ça permet
dans des planches données, non pas douze mois par année.
Ça voudrait dire que - et je pousse à l'extrême - un Price
Club pourrait dire: Je n'ai plus le droit d'ouvrir à Laval; je vais
aller m'établir à Saint-Sauveur. Avec la mobilité des
commerçants, théoriquement, le commerçant pourrait se
rendre à Saint-Sauveur et faire les mêmes achats, parce que
ça a l'air que ce sont des gros achats qui se font là. Juste pour
vous montrer la dynamique avec laquelle le gouvernement va devoir composer pour
arriver avec un projet de loi qui va être équitable, qui va
répondre aux besoins réels et qui va également
répondre, c'est important, je l'ai mentionné, à la
qualité de vie des travailleurs et des travailleuses.
M. Laberge: Quelle que soit la situation, il y a toujours
quelqu'un qui va essayer d'imaginer des façons de la contourner. Bon. Il
faut se rendre à l'évidence. Mais je pense qu'on ne peut pas
demander l'impossible a un gouvernement, non plus. Le gouvernement se doit de
légiférer dans l'intérêt de la majorité et
d'essayer, au moins de faire des efforts pour faire respecter ces
législations par la majorité. Qu'il y ait des exceptions...
Encore là, il y a des choses qui pourraient être faites. On
pourrait faire appel aux citoyens et aux citoyennes pour nous aider à
faire respecter pas mal de législations. Mais, de toute façon,
les zones touristiques, on a regardé ça, nous autres aussi, on
n'est pas complètement fermés.
M. Tremblay (Outremont): Juste...
M. Laberge: Évidemment, le plus facile, c'est que tout le
monde soit fermé, mais on est prêts à regarder
ça.
M. Tremblay (Outremont): J'ai une dernière question.
Mme Marois: Oui, allez y.
M. Tremblay (Outremont): Vous avez 450 000 membres, sans compter
les membres des familles. Donc, on parle de beaucoup de monde. Ce n'est pas
unanime.
M. Laberge: Ce n'est pas?
M. Tremblay (Outremont): Unanime.
M. Laberge: Bien, ce n'est pas unanime. On a eu un conseil
général où tous nos syndicats sont
représentés et on a eu un congrès avec au-delà de
1100 délégués, et personne ne s'est enregistré
contre, personne.
M. Tremblay (Outremont): Oui, mais vous savez pourquoi, M.
Laberge.
M. Laberge: Non, je ne sais pas pourquoi. Vous?
M. Tremblay (Outremont): Non, je faisais une farce.
M. Laberge: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): J'ai...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laberge: Non, non, je ne sais pas pourquoi. Ha, ha, ha! Mon
cher ministre, vous savez fort bien qu'il y a un peu plus de quatre ans, on a
tenu un congrès spécial. Comme je m'étais servi de mon
vote prépondérant pour faire une recommandation de prendre
position lors des élections au Québec, les
délégués au congrès spécial ont battu notre
recommandation.
M. Tremblay (Outremont): Non, non, mais c'était pour
détendre, M. Laberge.
M. Laberge: Pardon?
M. Tremblay (Outremont): C'était pour détendre la
conversation.
Une voix: C'était pour nous détendre.
M. Tremblay (Outremont): C'était pour détendre.
Une voix: C'est parce que tu l'as tendu.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Aïe, on l'a manqué.
M. Tremblay (Outremont): Ha, ha, ha! Mais une chose est certaine,
si vos groupes, peut-être que les 1100 personnes... Mais je peux vous
dire...
M. Laberge: Non, non, il y a certainement des gens chez nous
qui... Bien sûr.
M. Tremblay (Outremont): Si vous êtes ici en train de
défendre cette position-là, vous êtes sûrement
majoritaires.
M. Laberge: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Ça c'est certain. Mais, dans tous
les groupes, quels qu'ils soient, même les groupes qui prônent, par
exemple, l'ouverture, je pose toujours la question et c'est évident que
ce n'est pas unanime non plus Eux aussi, ils sont majoritaires. Ça peut
être 52 48, 61-39. C'est juste le point que je voulais faire, c'est que
ce n'est pas unanime chez vous, non plus.
M. Laberge: Oui. Bien, en fait, ce n'est pas unanime, mais
n'essayez pas de faire croire qu'il pourrait y avoir une vive opposition. Ce
n'est pas le cas.
M. Tremblay (Outremont): Non, non.
M. Laberge: Moi je vais vous dire que, chez nous, l'opinion est
vastement majoritaire D'ailleurs, encore une fois, le comité Richard,
quand 11 y a eu un sondage de fait la dernière fois, la majorité
des citoyens, malgré la façon dont la question était
posée, ont dit qu'ils n'avaient pas besoin de ça, le
dimanche.
Bien sûr, quand on parle de, je ne le sais pas, 40 % ou 43 %,
c'est beaucoup de gens qui disent: Oui, nous autres, on est
intéressés le dimanche. Oui. Comme moi, je suis
intéressé à faire augmenter la limite de la vitesse sur
les autoroutes; pas des affaires de fou, mais des affaires qui seraient un peu
plus compatibles avec nos besoins et nos communications rapides. Mais, encore
une fois, si on ne réglemente pas, vous savez ce qui arrive. Quand on
commence à permettre des exceptions, on arrive à un point
où ça devient inéquitable. (16 h 45)
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Taschereau, vous avez une question.
M. Leclerc: À moins que madame.. Bien, je voudrais dire
que je suis bien content qu'on ait un petit peu plus de temps parce que,
effectivement, vous êtes des intervenants privilégiés quant
à la qualité de vie des travailleurs. Il y a des associations de
consommateurs qui, elles, sont un peu plus expertes pour nous parler de la
qualité de vie et des besoins des consommateurs. Je ne peux pas
m'empêcher, à cause de la dernière question du ministre, de
revenir un petit peu sur les 450 000 personnes que vous représentez
C'est le député de Laviolette qui disait: À force de tout
additionner les gens qui sonl représentés ici, on est rendus
à peu près à 12 000 000 de population.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leclerc: Ha, ha, ha! Ce que je veux dire là-dessus,
c'est que statistiquement, plus le nombre de gens que vous représentez
est grand, plus il aura tendance à se conformer à la moyenne.
Hein? Vous représentez tellement de gens, 450 000, plus les gens de
leurs familles, sur 6 000 000, forcément, il y a une grande similitude
entre l'opinion de vos membres et l'opinion de la population en
général
M. Laberge: C'est un reflet fidèle de ce qu'est la
société québécoise.
M. Leclerc: Voilà!
M. Laberge: II n'y a aucun doute.
M. Leclerc: Et toutes les statistiques, tous les sondages nous
montrent que les Québécois sont relativement divisés sur
la question. J'ai dit "relativement". Certains sondages, dépendant quand
on pose la question et quelle question on pose, donnent une majorité aux
"pour" ou une
majorité aux "contre", mais de façon
générale les Québécois sont relativement
divisés. Je dirais que, lorsqu'on pose la question à des gens qui
ne sont pas partie prenante dans le débat, ce sont des gens qui ont une
appréciation relativement molle. Ils sont un peu pour, un peu contre
dépendant de l'argumentation qu'on développe. Or, je pense que le
ministre, dans sa question, avait un petit peu raison de dire que dans les 450
000 il y a toute la diversité des opinions qu'on retrouve au
Québec parce que, justement, vous avez un échantillon tellement
gros. C'était juste un petit point que je voulais faire.
Une question sur la qualité de vie des travailleurs. Tout le
monde convient qu'il n'y a personne qui saute en l'air de travailler le
dimanche. Moi, j'ai parlé à mon dentiste, ce matin, et, lui, il
n'est pas question qu'il ouvre sa clinique le dimanche, mais il aimerait
ça aller magasiner le dimanche. Mais, lui, ne lui parlez pas de
travailler le dimanche. Le point que je veux faire, c'est par rapport à
la position du Parti québécois que vous semblez partager, et
c'est une position qui est aussi partagée par bien d'autres gens. Quand
on parle de qualité de vie et qu'on dit que, pour la qualité de
vie des travailleurs, il ne faudrait pas ouvrir le dimanche, bien. Mais, si on
ouvre le lundi soir plus tard, le mardi soir plus tard, le mercredi soir
jusqu'à 21 heures, vous ne pensez pas que la somme de ces trois
soirs-là, une heure ou une heure et demie de plus le lundi, une heure ou
une heure et demie de plus le mardi, et trois heures et demie de plus le
mercredi, ça ne risque pas d'être "aussi pire", sinon pire que les
maux qu'on veut éviter du dimanche?
M. Laberge: Non.
M. Leclerc: Je vais juste finir, là. Parce que le
dimanche, les hypothèses étaient de midi à quatre, de onze
à trois, de onze à quatre. Est-ce que vous êtes
sûr... Je prends l'hypothèse d'une famille monoparentale ou
biparentale où la mère, par exemple, arriverait, le
supermarché fermant à 18 h 30 ou 19 heures, mettez une demi-heure
ou trois quarts d'heure de voyagement comme à Montréal, elle va
arriver chez elle à 20 heures le lundi soir et peut-être que ses
enfants vont être couchés. Bon. Alors, moi je me pose la question,
quand on parle de qualité de vie et j'en suis, et vous êtes des
intervenants privilégiés là-dessus, êtes-vous
certains que ce que vous proposez, les trois soirs: le lundi un peu plus tard,
le mardi un peu plus tard et le mercredi jusqu'à 21 heures, 21 h 30 et
même il y en a qui disent 22 heures, ce n'est pas "aussi pire" que de
onze à trois ou de onze à quatre, le dimanche pour la
qualité de vie des familles?
M. Laberge: D'abord, on n'a jamais jamais jamais
suggéré que les magasins soient ouverts à tous les soirs.
On n'a jamais...
M. Leclerc: Non, mais vous parlez d'un
réaménagement des heures.
M. Laberge: ...proposé... Non, non, on n'a jamais
proposé une telle affaire.
M. Leclerc: Ah?
M. Laberge: On a dit que, pour répondre à des
besoins, on est ouverts et on est prêts. D'ailleurs, c'est la position
qu'on avait prise quand on avait adopté...
M. Leclerc: O.K. Si vous permettez...
M. Laberge: ...le rapport Richard. C'est ce qu'on dit: On est
ouverts.
M. Leclerc: Parfait! Si vous me permettez, pouvez-vous me
commenter alors la position du Parti québécois qui, eux, ont
proposé lundi plus tard, mardi plus tard et mercredi...
M. Jolivet: Non, non, vous avez mal compris.
M. Leclerc: Bien, écoutez, là...
M. Laberge: Non, mais le Parti québécois, ça
peut être leur position.
M. Jolivet: Ce n'est pas ça.
M. Laberge: Nous autres, on a dit...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leclerc: Ce n'est pas ça?
M. Jolivet: II ne comprend rien.
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! On écoute M.
Laberge.
M. Leclerc: On réaménage où, là?
Mme Marois: On a.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
s'il vous plaît, on écoute...
Mme Marois: ...proposé effectivement un certain
allongement de la plage...
M. Leclerc: Bien oui, mais quand? Dites-moi quand.
Le Président (M. Bélanger): Non, non, non...
Mme Marois: ...c'est-à-dire qu'on est prêts à
envisager...
Le Président (M. Bélanger): ...non, non, non. Ta,
ta, ta, ta. Non, non, non, non.
M. Leclerc: J'espère que ce n'est pas le jeudi et le
vendredi.
Mme Marois: Demandez donc la question à nos
invités, là.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Taschereau, Mme la députée de Taillon,
s'il vous plaît...
M. Leclerc: Non, O.K.
Le Président (M. Bélanger): la parole appartenait
à notre invité, M. Laberge. On écoute sa réponse
sans la commenter...
M. Jolivet: C'est parce qu'ils n'ont pas compris.
Mme Marois: C'est ça.
Le Président (M. Bélanger): ...et, s'il vous
plaît, les interactions entre nous, on aura des séances de travail
pour les faire.
M. Laberge: Bravo! Bravo!
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On écoute.
M. Laberge: Vos séances de travail, vous ne faites pas
ça le dimanche. Enfin, je ne connais pas les positions de tout le monde.
Sauf que, encore une fois, le comité Richard, après avoir
rencontré bien des gens, a dit: II y a un besoin pour les consommateurs
et la question qu'on nous a posée: Est-ce que vous êtes ouverts
à ça? on a dit: Oui, nous sommes ouverts à ça. Nous
sommes ouverts à ça et, même si ça pourrait faire
plus d'heures, on souhaite ardemment que quelqu'un ne nous suggérera pas
d'ouvrir à tous les soirs. On souhaite ça ardemment, ardemment.
Mais, même si on est obligés de sacrifier des heures le soir,
c'est plus facile de demander à un employé, ou à une
employée permanente de commencer un peu plus tard le matin pour finir un
peu plus tard le soir, que de lui demander de sauter une journée de
paie. Bon. Mais, le dimanche, c'est pire. Et vous le savez, que c'est pire.
Puis, moi, je l'ai toujours dit, j'ai tellement d'admiration pour nos
employés d'hôpitaux, de centres d'accueil et tout ça, qui
sont obligés de travailler les journées de fête. Moi, je
figure un peu comme un ministre, on a des jobs un peu difficiles, mais au moins
on a l'occasion de temps en temps de bénéficier de nos fins de
semaine et des journées de fête et d'être avec nos familles,
et pour moi, ça, c'est de l'or en barre.
M. Leclerc: Bon, alors je m'excuse. Je voudrais juste finir.
J'avais donc mal interprété le moment..
M. Laberge: Oui, tu l'as eu l'occasion .
Des voix:...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Leclerc: Excusez-moi, M Tremblay, je ne voudrais pas vous
empêcher de parler. O.K. Cela dit, messieurs...
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! À l'ordre! M. le député de
Taschereau.
M. Leclerc: M. Tremblay, vous pourrez intervenir sur le temps de
Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Ah bon.
M. Leclerc: Non, je fais des blagues. Donc, j'avais mal
interprété lorsque vous avez dit: Pour les besoins des
consommateurs, la FTQ est réceptive à un
réaménagement des heures d'ouverture en semaine pour tous les
types d'établissements commerciaux. Moi je pensais, je vous le dis
honnêtement, que ça voulait dire que vous étiez prêts
à rallonger le lundi soir, pas jusqu'à 22 heures là,
à rallonger un petit peu le lundi, à rallonger un petit peu le
mardi et à permettre, comme certains nous l'ont proposé, le
mercredi soir à la même heure que le jeudi soir et le vendredi
soir. Ce n'est pas ça, donc
M. Laberge: Non.
M. Leclerc: Ce serait quoi, le réaménagement?
M. Laberge: Écoutez, nous autres, on n'a pas
changé. C'est juste votre lecture qui doit changer. Notre mémoire
n'est pas long, mais il est précis.
M. Leclerc: Oui, oui.
M. Laberge: Notre mémoire dit: On est ouverts à la
discussion là-dessus.
M. Tremblay (Outremont): Parfait! C'est sur que c'est clair.
M. Laberge: C'est ça qu'on dit
M. Tremblay (Outremont): Très bien, M Laberge, on
arrête là.
Le Président (M. Bélanger): Comme
député de Laval-des-Rapides, si vous me permettez une question.
Si je comprends bien, vous dites, dans
le fond, si je lis entre les lignes de votre mémoire, vous dites
que c'est une question d'organisation de vie. Si on ouvre le dimanche, les gens
vont y aller le dimanche. Mais, si ce n'est pas ouvert, ils vont s'organiser
pour y aller aux heures où c'est ouvert. Vous donniez l'exemple de
l'achat d'une automobile ou d'autres biens. Alors, plus on étend, plus
on en prend, mais, si on répartit la même masse sur plus de jours,
on augmente les coûts.
M. La berge: Je ne connais pas de Québécois qui
sont morts de faim parce que les magasins d'alimentation n'étaient pas
ouverts le dimanche.
Le Président (M. Bélanger): Je n'en connais pas
beaucoup non plus. Alors, Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Je vous remercie de votre contribution.
Effectivement, je partage aussi ce point de vue, à savoir qu'il est
essentiel que comme société on puisse se réserver un
moment où il est souhaitable que le plus de gens possible cessent les
activités commerciales et de production. Que nous soyons obligés
de conserver certains services, ça va de soi. Il y a des services de
santé; c'est bien évident que ça en prend. Il y a certains
services culturels, de loisirs; ça en prend. Mais même dans les
activités de production, si on n'avait pas les contraintes que vous
mentionniez, il serait souhaitable que, là aussi, on puisse resserrer de
telle sorte qu'on se garde au moins une journée qui est un temps
d'arrêt dans notre vie collective et qui nous permet de nous occuper
d'autres choses que des activités de consommation.
Et on peut trouver, effectivement, des façons de faire en sorte
qu'en allongeant certaines plages et en regardant certains
réaménagements dans la semaine les consommateurs et
consommatrices y trouvent leur compte, puissent avoir accès aussi
à plus de services. Mais qu'on ne remette pas en question cette
journée qui est déjà passablement amochée, qu'on le
veuille ou non, malheureusement. Je vous remercie de votre contribution aux
travaux de la commission.
M. Laberge: M. le Président, je voudrais remercier les
membres du comité de nous avoir permis de leur présenter nos
vues. Encore une fois, M. le ministre, nous sommes entièrement d'accord
avec le gouvernement, avec l'Opposition, avec tous les membres du comité
qu'il faut mettre de l'équité là-dedans. On est
entièrement d'accord. Il faut que ce soit équitable. Pour que ce
soit équitable, ça va prendre des amendements pour que la loi
soit plus claire, plus simple d'application. Nous sommes vraiment, mais
vraiment opposés à l'ouverture le dimanche parce que la
qualité de vie... On vous a donné nos arguments. S'il y a un
besoin pour les consommateurs d'avoir des heures d'ouverture plus longues dans
les commerces d'alimentation, nous sommes prêts à le regarder.
Nous souhaiterions qu'il n'y ait pas plus d'heures d'ouverture, mais, s'il y a
un besoin et que vous nous montrez le besoin, on va le regarder et on va
collaborer avec vous. Ce n'est pas une tâche facile que vous avez et on
vous souhaite de penser très sincèrement à la
qualité de vie. Regardez ce qui se passe aux États-Unis - il y en
a plusieurs qui en parient, la Chambre de commerce et d'autres - où les
commerces sont ouverts quasiment 24 heures par jour. Je ne pense pas qu'il y en
ait beaucoup parmi nous, assis ici, qui voudraient élever une famille
aux États-Unis si on a la chance de pouvoir l'élever au
Québec.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Maintenant, j'ai fait une petite erreur tout à l'heure. Le
député de Drummond m'avait demandé la parole et je ne l'ai
pas reconnu. Est-ce qu'on accepte... Et je vous donnerai un droit de
réplique par la suite, évidemment. M. le député de
Drummond, si les gens de la commission le permettent.
M. Saint-Roch: Merci, M. le Président. C'est seulement
deux questions. Je vais essayer d'être bref. À la lecture de votre
mémoire, messieurs de la FTQ, vous affirmez: La FTQ estime qu'il faut
réduire le nombre d'exceptions prévues par la loi actuelle.
Est-ce que les bases des conclusions du rapport Richard où on met la
réduction des exemptions... Est-ce que vous êtes en accord avec ce
rapport-là?
M. Laberge: Le rapport Richard qui parie de diminuer les
exemptions?
M. Saint-Roch: De diminuer les exceptions et qui les
énumère très bien.
M. Laberge: Sans aucune restriction. La seule question qu'on se
posait sur le rapport Richard, c'était la question des 3000 pieds. On a
trouvé ça un peu difficile d'application. Pour le reste, on est
d'accord avec le rapport Richard; on l'a endossé.
M. Saint-Roch: Ça va.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Taillon.
Mme Marois: Ça va.
Le Président (M. Bélanger): Ça va? Bien. M.
le ministre.
M. Tremblay (Outremont): M. Laberge, M. Daoust, M. Tremblay, on
vous revoit? Vous allez revenir encore? Oui?
Une voix: Eh oui!
M. Tremblay (Outremont): Ah oui? C'est bien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Marcel): Malheureusement, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): C'est bien. M. Morin, moi, je veux vous
remercier. C'est évident que ce n'est pas facile. L'engagement que j'ai
pris, c'est de consulter. Je pense que, si je me suis fait un peu l'avocat du
diable, c'est pour essayer d'apporter des éclaircissements dans la
décision qu'on aura à prendre. C'est une situation excessivement
complexe. Je pense qu'en tant que gouvernement, ce qu'on recherche, c'est
d'avoir une loi qui va répondre aux trois principes dont on a
discuté tout à l'heure et surtout une loi qui va être
durable pour qu'on puisse concentrer nos efforts sur le développement
économique et social du Québec. Alors, dans ce sens-là, je
vous remercie beaucoup, M. Laberge et les membres de votre équipe, pour
votre ouverture d'esprit. Je suis pas mal convaincu qu'on aura l'occasion d'en
reparler également après la commission. Alors, merci beaucoup
d'être venus.
M. Laberge: Merci bien.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie la Fédération des
travailleurs et des travailleuses du Québec pour sa participation
qualitative et...
M. Laberge: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): ...plus
important...
M. Laberge: Vous avez été d'un doigté
exceptionnel et d'une efficacité remarquable.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Ha, ha, ha! Alors, on
va suspendre nos travaux quelques minutes pour permettre aux gens de l'autre
groupe d'arriver. Déjà, quelques-uns sont arrivés Alors,
s'il vous plaît, vous tenir pas loin pour qu'on puisse se rapailler et
recommencer vite. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 59)
(Reprise à 17 h 48)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place pour
que nous reprenions nos auditions. Nous recevons, aujourd'hui, Les marchands
associés Canadian Tire du Québec inc.
Alors, messieurs, d'abord, bienvenue à la commission. Je vais
vous expliquer un petit peu nos règles de procédure. Vous avez 20
minutes, maximum, pour présenter votre mémoire; ce sont 20
minutes ferme qu'on ne peut pas dépasser et, par la suite, il y a une
période d'échanges avec les parlementaires. Alors, je vous
prierais, donc, de vous identifier et de procéder à la
présentation de votre mémoire. Cependant, auparavant, chaque fois
que vous devez prendre la parole, pour les fins de la transcription au
Journal des débats, je vous demanderais de bien vouloir vous
identifier. Comme elles ne vous connaissent pas, qu'elles ne vous voient pas,
c'est bien important pour le Journal des débats. Donc, si vous
voulez procéder, nous sommes tout ouïe.
Les marchands associés Canadian Tire du
Québec inc.
M. Boulianne (Michel): II me semble que vous êtes loin. La
dernière fois, on était plus près que ça. Je ne
sais pas si avec les heures d'affaires, avec les commissions qui
siègent, de plus en plus on s'éloigne de nous, mais, en tout
cas!
Le Président (M. Bélanger): C'était pourtant
une façon de se rapprocher.
M. Boulianne: Si vous me le permettez, mon nom est Michel
Boulianne, je suis le secrétaire adjoint de l'association; à ma
droite, j'ai M.
Jean-Paul Guillemette, qui est le président de l'association.
M. Guillemette (Jean-Paul): Bonjour
M. Boulianne: À ma gauche, M. Denis Cantin; à ma
droite, vous avez M. Gilles Séguin, qui est un des directeurs; deux ex
présidents: M Fernand Lucier, de Longueuil, et M. Robert Blanchard,
d'Iberville. Alors, notre léger retard est dû aux vents contraires
pour les avions.
Le Président (M. Bélanger): Ah. ça, c'est un
langage que je connais bien.
M. Boulianne: C'est ce qui fait qu'on peut aller à
Montréal en une heure et dix et revenir en vingt minutes.
Si vous le permettez, nous allons le lire parce que je ne pense pas que
ça prenne plus de 20 minutes. C'est un peu le même mémoire
que nous avions déjà présenté; la position n'a pas
changé, nous y avons ajouté quelques épines parce qu'il y
a des irritants qui existent pour nous, aujourd'hui, et qui existaient il y a
deux
ans, comme ils existaient dans le temps de la commission Biron, ils sont
toujours là.
À peu de chose près, notre association reprend
aujourd'hui, deux ans après la commission Richard et sept ans
après les auditions tenues dans le cadre de la commission Biron sur les
amendements prévus à la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux, les représentations sérieuses
qu'elle faisait à l'époque. Aujourd'hui, le monde industriel et
commercial se retrouve à nouveau devant des modifications
éventuelles à cette loi, alors que les exceptions qu'on a voulu y
apporter au cours des dernières années non seulement n'ont pas
réglé le problème, mais l'ont amplifié.
De nombreux arguments vous ont sans doute déjà
été présentés et vous le seront dans le cadre de
cette commission d'étude, portant sur l'intérêt même
des travailleurs, l'amélioration de la qualité de vie, la
non-nécessité pour le consommateur d'extensionner les heures de
travail, etc. En ce qui nous concerne, nous vous présenterons, tout
d'abord, un bref exposé sur notre association pour, ensuite, vous donner
notre argumentation militant en faveur de la non-extension des heures
d'affaires et vous démontrer que la tendance, du moins au Canada, est
plutôt favorable au maintien des heures d'affaires actuelles et du
respect du dimanche. On peut souligner que certaines provinces qui l'ont fait
ont commencé, du moins, à raccourcir l'assiette des heures
d'affaires, principalement à Calgary où on a ramené
ça à quelques heures le dimanche. Je pense qu'on s'est
aperçu que ça a été un fiasco dans certains centres
d'achats.
Il faudrait éviter, comme résultante de la présente
commission et de l'étude des nombreux mémoires, de nous retrouver
dans une position de compromis trop évidente qui aurait pour effet
d'essayer de satisfaire tout le monde, principalement, semble-t-il, le
consommateur, pour satisfaire aux sacro-saintes exigences du commerce. Nous
reprendrons, tout à l'heure, pour vous dire que le consommateur - tout
dépend toujours de la question qu'on lui pose - est en faveur de tout,
mais ne veut pas payer.
Notre association représente 88 propriétaires de magasins
affiliés à la chaîne Canadian Tire. Ce sont des
entrepreneurs, des présidents de PME couvrant la province de
Québec. Nous avons créé de nombreux emplois depuis une
trentaine d'années et continuons, de jour en jour, à ajouter
notre contribution à l'essor économique de la province. Au
Québec, donc, nos magasins regroupent près de 8000
employés qui, avec leur cellule familiale, représentent environ
35 000 personnes. La masse salariale pour ces employés se situe
au-delà de 45 000 000 $. Il va sans dire que nos membres sont
très fortement impliqués et touchés par le domaine des
relations de travail et par les travaux de cette commission d'étude.
Notre association réunit donc des entrepre- neurs dont les
commerces sont à la fois soumis à la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux et également à
l'application de divers comités paritaires, principalement ceux du
décret de l'automobile, et ce, à travers la province.
Nous reprenons les arguments que nous avions soulevés
déjà, en avril 1983, à l'effet que l'ouverture des
commerces le dimanche ne peut constituer une service additionnel aux
consommateurs dans l'acception générale du mot "service"; que
cette ouverture ne peut devenir un palliatif à la non-rentabilité
des commerces et ne créerait pas nécessairement de nouveaux
emplois.
En 1986, la Cour suprême du Canada a eu à se prononcer dans
Edwards Books. Il s'agissait de quatre détaillants ontariens et vous
êtes sans doute déjà au courant, d'autres ont dû
élaborer. Des arguments constitutionnels et relatifs à la charte
avaient été présentés dans ce dossier puisqu'il
s'agissait à la fois du respect du dimanche et d'infractions commises
par un magasin d'alimentation casher appartenant à des hommes d'affaires
juifs.
Les questions constitutionnelles soulevées devant la Cour
suprême étaient les suivantes: la loi sur les jours
fériés dans les commerces de détail relève-t-elle
de la compétence législative de la province? Deuxièmement,
y a-t-il eu violation de l'un ou l'autre des articles 2, 7 et 15 de la charte
sur les libertés? Et dans quelle mesure une atteinte à ces droits
peut-elle être justifiée par l'article 1 de la charte?
Le plus haut tribunal du pays a maintenu et confirmé la
validité de la loi ontarienne sur les jours fériés dans
les commerces de détail. Il est bon de se rappeler que cette loi, bien
que dans des mots ou termes différents de notre loi sur les heures
d'affaires, interdit en son article 2 que le dirigeant d'un commerce donne
accès à son établissement à la clientèle
lors de jours fériés. Et, dans la description des jours
fériés, le législateur ontarien a inclus le dimanche en
prévoyant certaines exclusions, tout comme dans notre loi.
La loi québécoise actuelle considère donc, dans la
même ligne de pensée, le dimanche comme un jour
férié et une telle application est dans les cadres des pouvoirs
appartenant aux provinces, à moins que la Cour suprême, comme
récemment, ne vienne nous dire que ce n'est pas le cas mais,
jusqu'à présent, elle ne nous l'a pas dit.
Je tourne à la page 5. Le but de notre loi, à
caractère provincial, est de statuer sur les droits civils des
employés de bénéficier d'un jour commun de repos et de
loisir. Le législateur souhaitait et souhaite prévoir des
congés pour certaines personnes qui travaillent dans certains commerces
de détail. Le fait que le dimanche et certains autres jours ayant une
importance sur le plan religieux soient inclus dans la définition de
jour férié est accessoire à l'objet principal de la
loi. La présente loi réglementant les jours fériés
vise à accorder aux salariés de ces secteurs des congés
qui soient les mêmes que ceux dont jouissent les autres membres de la
collectivité. Il y a quelques années, le rapport sur la
législation du respect du dimanche en Ontario faisait
référence à des facteurs qui avaient amené la
Commission à préconiser des jours de congé uniformes.
Entre autres facteurs, on y citait: les problèmes de coordination des
congés au sein de la famille et avec les amis dans le cas d'un
système d'étalement des congés; la difficulté
d'organiser des manifestations collectives sous un autre régime; la
préférence manifestée par la plupart des gens pour les
congés en famille, avec des amis ou encore en groupe. Lorsque la
moitié de la famille travaillera le dimanche en plus de travailler la
semaine, les rencontres autour de la dinde dominicale vont être
rares.
La Commission de réforme du droit de l'Ontario, dans le rapport
dont fait mention l'honorable juge en chef dans la cause de Edwards Books, cite
ceci - je ppnse que c'est important - pour souligner l'importance d'une pause
au sein de la société: "Ainsi, alors que notre capacité de
production et notre niveau de vie sur le plan économique continuent de
s'accroître en Ontario, nos chances, collectivement, de jouir de ces
avantages moins tangibles qui sont la participation à des loisirs avec
sa famille, ses amis et d'autres personnes dans la société
continuent de décroître. C'est compte tenu de cette érosion
continuelle des jours fériés légaux ainsi que des
soirées que nous considérons qu'il est absolument essentiel que
le gouvernement tente maintenant de préserver au moins un jour uniforme
de repos hebdomadaire avant qu'il ne soit trop tard." On voit, après
ça, les commentaires de l'honorable juge en chef que je vous laisse le
soin de lire.
En bas de la page 7. Tout cela fait ressortir un souci constant du
législateur de protéger le travailleur et le consommateur. En
effet, dans l'éventualité où les commerces pourraient
être ouverts le dimanche, les salariés auraient-ils vraiment la
liberté de choisir de travailler ou non et ne feraient-ils pas l'objet
de pressions économiques subtiles les forçant au travail,
principalement dans les grands établissements où la
résistance des salariés à la décision
d'exten-sionner les heures prise par la direction serait contournée par
le simple remplacement des opposants? La liberté demeure donc
entière et le législateur peut prévoir des exemptions
comme il le fait dans la présente loi. Il lui est loisible de limiter
l'application législative dans les secteurs où il semble y avoir
des préoccupations particulièrement urgentes ou à des
catégories où cela semble particulièrement
nécessaire. De même, le législateur peut-il créer
des catégories de commerces de détail qui soient exemptées
de l'application de la loi. La preuve est encore à faire, nous le
soumettons, qu'il existe un besoin social pour le consommateur à
l'ouverture des commerces le dimanche d'une manière
générale. Il est faux de procéder par déduction
pour justifier une telle ouverture en mettant de l'avant le fait que les
consommateurs seraient en faveur de pouvoir effectuer leurs emplettes le
dimanche. La question posée aux consommateurs lors d'enquêtes
à cet effet ne met jamais en comparaison les coûts administratifs
et sociaux de telle ouverture, mais, plutôt, fait état d'un
souhait.
Nous constatons ce qui se passe lors de ces enquêtes. Je suis
convaincu que, si vous demandiez au consommateur s'il veut avoir le loisir de
faire son épicerie 24 heures sur 24, il va dire oui, c'est
évident. Moi, je trouverais ça bien agréable, lorsque je
reviens d'une réunion à 2 heures du matin, de dire: Bien, mon
Dieu, j'ai oublié d'acheter quelque chose et tant qu'à acheter un
peu de lait je ne vois pas pourquoi je ne ferais pas les achats de demain et je
dormirai jusqu'à midi. Techniquement, on peut faire ça. Alors, le
loisir ou le besoin du consommateur, il est toujours là. Si vous pouviez
lui donner un huitième jour durant la semaine, je suis convaincu qu'il
serait en faveur, il le prendrait.
Cette législation sur le commerce de détail est tout
à fait particulière. Il est évident, et c'est notre avis,
que ce sont plutôt les pressions de la concurrence qui forcent chaque
exploitant à prolonger ses heures d'affaires, en grande partie contre sa
volonté. On a beau dire que c'est un choix: si on veut ouvrir, on
ouvrira ou on n'ouvrira pas, c'est faux. Nous, on n'en a aucun de nos magasins
qui ouvre le dimanche et, si on ouvre le dimanche, ce ne sera pas une question
de choix. Il va falloir qu'on ouvre si la concurrence le fait. Ces pressions ne
se font cependant pas sentir au niveau des services. En effet, si l'on suivait
ce principe, l'argument fallacieux de cette réquisition d'un nombre
d'heures additionnelles par le consommateur, on en arriverait aux
déductions suivantes Les débits de boissons alcooliques, vu qu'il
y a une demande à cet effet, devraient-ils être ouverts 24 heures
sur 24? Ça ne l'est déjà pas et on voit que c'est
très strict. La Régie des permis d'alcool est très stricte
à cet effet. Les services gouvernementaux - ceci vous touche - de
façon à permettre à la population d'y avoir recours plus
facilement, ne devraient-ils pas être ouverts le dimanche? Pourquoi pas?
Les services de santé, autres que ceux d'urgence où, très
souvent, la présence de l'un ou l'autre des parents, sinon des deux, est
requise, ne seraient-ils pas plus facilement satisfaits s'ils pouvaient y avoir
accès le dimanche?
On pourrait citer à l'infini de nombreux autres exemples du
genre. C'est pourquoi nous vous rappelons cet argument que les pressions en
faveur de l'ouverture d'un septième jour durant la semaine viennent
beaucoup plus de l'intérieur que de l'oxtérieur, c'est-à
dire dos commerçants
au détail eux-mêmes. Vous aurez l'occasion de le voir, les
plus fervents partisans seront beaucoup plus des commerçants que des
associations de consommateurs. Vous pourrez facilement constater que ceux qui
sont le plus en faveur de cette libéralisation sont ceux pour lesquels
il en coûtera le moins aussi en termes de main-d'oeuvre, de surveillance,
de frais fixes. (18 heures)
Pour ne vous citer qu'un exemple, soit celui des épiceries
à grande surface, comme on les retrouve dans le sud des
États-Unis, l'ouverture sur une base de 24 heures et de sept
jours/semaine leur coûte très peu puisqu'ils n'ont qu'à
placer une seule caissière, à fermer certains départements
comme celui de la boucherie, et le tour est joué.
L'électricité n'augmente pas, la surveillance demeure la
même et, en Floride, c'est climatisé 24 heures sur 24, ça
ne change pas grand-chose et le tour est joué. Il n'en va pas de
même pour les commerces de détail où vous avez besoin de
personnel sur le plancher et de transport. Il est également à
retenir qu'en raison du climat nord-américain les coûts
d'opération seraient beaucoup plus élevés si on doit
envisager une opération sept jours sur sept, augmentation qui s'abattra
sur le consommateur en bout de ligne.
Pour vous trouver un exemple tout à fait terre à terre,
nous n'avons pas l'impression, chez Canadian Tire, que nous vendrons une
tondeuse de plus si nous ouvrons 52 jours de plus par année. Par contre,
si vous prenez les cinq mois d'hiver, il est évident que nous nous
retrouvons avec des coûts additionnels pour cette journée
additionnelle durant la semaine, vu qu'à 5 heures du soir, on baisse
l'électricité, on baisse le chauffage, on ne déblaie pas
dans la nuit du samedi au dimanche, on fait tout ça le lundi matin. S'il
faut ouvrir quatre heures le dimanche, ce sont des coûts additionnels qui
viennent se greffer et qui vont coûter cher; un jour ou l'autre, c'est le
consommateur qui va voir arriver la facture, peut-être tranquillement. Et
trouver du personnel qualifié le dimanche également, on estime
que ça ne peut pas simplement être quelqu'un qui est
présent; on ne peut pas simplement avoir une caissière, il faut
qu'il y ait quelqu'un pour répondre sur le plancher. Et cette
personne-là, ça ne peut pas être un temporaire qui
travaille un jour sur sept, qui, durant la semaine, va aux études et qui
vient répondre aux questions le dimanche.
C'est là, à notre avis, que le rôle du
législateur a toute son importance, car il lui appartient de distinguer
l'essentiel du superflu et de faire en sorte que la liberté des uns ne
soit pas brimée par la liberté des autres. Au cours des
années, la loi sur les heures d'affaires a connu de nombreuses
extensions et exceptions comme les jours précédant Noël et
Pâques et certaines autres dispositions contenues à la loi, de
même que l'addition de commerces exemptés de la fermeture du
dimanche. Les pressions sont définitivement faites dans un seul but,
c'est de nous amener vers une ouverture des commerces sur une base hebdomadaire
et, qui plus est, sur une base éventuelle d'ouverture de 24 heures. La
formation de la main-d'oeuvre dans certains établissements commerciaux
est déjà extrêmement difficile et, s'il fallait envisager
de former de la main-d'oeuvre additionnelle pour les opérations du
dimanche, il est fort probable que les coûts administratifs
entraînés se répercuteraient sur le client ou encore que la
qualité du service diminuerait.
Comme nous l'avons souligné en 1983, il serait beaucoup plus
important d'assurer le respect de la loi actuelle par des amendes
significatives que de voir les transgressions à cette loi
encouragées par de trop faibles sanctions. La force d'une loi
réside dans son application et ceux qui la respectent et s'y conforment
se sentent moins liés à la longue lorsque le nombre des
transgresseurs augmente proportionnellement par rapport à ceux qui la
respectent.
Je fais un aparté pour vous souligner que l'exemble des clubs
Price est l'exemple parfait, à l'heure actuelle, des transgressions
à la chaîne qui s'en viennent. La veille de Noël, le 24
décembre, ils ont vendu dans quatre magasins, sous prétexte
qu'ils vendent en gros, pour près de 2 000 000 $ dans une seule
journée. On sait que le 24 décembre est une grosse journée
de vente. Or, nous, nous étions tous fermés. Price était
ouvert, sous prétexte qu'ils vendent en gros. Or, c'est un secret de
Polichinelle et une vérité de La Palice que d'essayer de dire
qu'ils vendent en gros; ils vendent au détail, strictement et
purement.
Il y aura toujours des consommateurs qui fréquenteront les
dépanneurs 24 heures sur 24 puisque ces consommateurs sont conscients
que la disponibilité existe. En ce qui concerne le commerce de
détail, si des commerces continuent d'être ouverts dans
l'illégalité, il y aura toujours des consommateurs qui
fréquenteront ces commerces. Le législateur serait malvenu de
considérer cette fréquentation comme un argument en faveur de
l'ouverture. Il s'agit là d'un cercle vicieux dont on ne pourrait jamais
se sortir. On n'augmentera pas les limites de vitesse sur nos routes en
prétendant qu'il y a beaucoup de gens qui les transgressent.
Lors et après les auditions de la commission Richard, il semble
s'être établi une sorte de consensus en ce qui concerne les
magasins d'alimentation, à savoir qu'on ne pourrait empêcher
l'ouverture d'un établissement le dimanche s'il vendait de
l'épicerie et s'il avait trois employés ou moins. Cet argument
semblait reposer sur le fait que, dès qu'un commerce vend des aliments,
il peut être considéré comme une épicerie. Nous
avions alors suggéré au ministre de l'époque d'appliquer
une réglementation qui existe déjà dans une régie
gouvernementale, soit
la Régie des permis d'alcool du Québec, laquelle
prévoit que, pour obtenir le droit de vendre des boissons alcooliques,
soit bière ou vin, il faut être une épicerie au sens de la
loi. Cette obligation force donc le commerçant, suivant un
règlement de la Régie, à avoir, en denrées
alimentaires, 51 % en inventaire et en vente. Lorsqu'il rencontre ces normes,
le commerçant, à condition qu'il satisfasse à toutes les
autres exigences, se voit automatiquement accorder un permis de vente. Pourquoi
n'en serait-il pas de même pour certains commerces d'épicerie qui
ont le droit d'ouvrir le dimanche? On éviterait que certains commerces,
et je me réfère à Jean Coutu, puissent contourner la
philosophie de la loi existante et faire indirectement ce qu'il n'est pas
permis de faire directement. On m'avait répondu à
l'époque, sur consultation, que, dès qu'ils vendent de
l'épicerie, ils ont le droit d'ouvrir le dimanche. Obligez Jean Coutu
à avoir 51 % en inventaire et je vous jure qu'il ne l'aura pas en
inventaire d'épicerie.
Également, parmi ces transgresseurs, il est définitif
qu'il existe, à l'heure actuelle, un cas bien précis que nous
avons à l'esprit, soit celui des marchés aux puces. En effet,
ceux-ci, loin d'être ce qu'ils étaient au début, soit des
marchés en plein air, sont devenus maintenant des commerces
structurés. Je ne m'étends pas plus sur ce sujet-là, vous
les connaissez.
La loi devrait également être plus précise pour
établir, si l'interdiction de vendre le dimanche est maintenue, que les
établissements de vente en gros soient également fermés
afin d'éviter, comme cela se fait actuellement, que des commerces
d'envergure nationale aillent carrément à rencontre de la loi en
prétendant avoir le droit d'ouvrir le dimanche sous prétexte
qu'ils ne vendent pas au détail, mais en gros, alors que des
enquêtes approfondies effectuées tant par le ministère de
l'Industrie et du Commerce que par des organismes particuliers
démontrent d'une façon évidente qu'il s'agit là de
vente au détail déguisée, créant par là un
malaise certain et évident et privant ceux qui respectent la loi de
revenus légitimes.
Ceci étant dit, quelle est la solution idéale à
apporter? Y a-t-il une solution miracle? Le gouvernement doit-il continuer de
toujours essayer de sauver la chèvre et le chou? Nous avions
déjà, en 1983, fait état d'un moyen terme qui aurait
visé la possibilité d'extensionner certaines heures d'ouverture
à l'intérieur de la semaine ou encore de les
réaménager. On n'est pas convaincus que, si vous ouvriez les
magasins à 8 heures du matin, vous n'auriez pas des gens qui iraient
avant d'aller au travail. Alors, il y a soit un réaménagement,
soit une extension. Il est évident que, certains soirs de la semaine, on
pourrait peut-être extensionner; quelqu'un qui finit à 5 heures
n'ira pas magasiner beaucoup entre 5 heures et 5 h 30, c'est
évident.
Alors, on avait suggéré, nous, dans le temps, comme
possibilité, une période, non jusqu'à 9 heures, mais le
mardi et le mercredi, peut-être, une période de magasinage
additionnelle. Ceci aurait eu pour effet de permettre aux gens d'effectuer plus
à l'aise leurs emplettes après avoir quitté le bureau.
Nous croyons que cette mesure apporterait une satisfaction suffisante, mais il
est bien évident que cela se répercuterait sur la journée
de travail qui deviendrait de neuf heures ou de neuf heures trente, selon le
cas, et viendrait affecter toutes les lois connexes avec les
conséquences que cela comporte, comme le minimum d'heures de travail
dans une semaine, le temps supplémentaire, etc. Le consommateur y
gagnera-t-il? Nous sommes loin d'en être convaincus et ce n'est pas
nécessairement ce que nous recommandons. Au pis-aller, nous croyons que
c'est peut-être une possibilité.
Conclusions. Notre association ne s'oppose pas à un
réexamen de la loi et à son adaptation aux besoins modernes.
Toutefois, nous ne croyons pas à l'ouverture des commerces de
détail 365 jours par année ou presque Que le législateur
reconnaisse et contrôle certains cas d'exception, soit, que le
législateur s'assure, par des amendes appropriées, du respect de
la loi, soit, mais qu'il cède à des groupes de pression visant
à la libéralisation du dimanche, à des fins strictement
personnelles, en invoquant l'intérêt suprême de la
population, nous nous inscrivons en désaccord total avec une telle
position.
À toutes fins pratiques, la libéralisation des heures
d'affaires le dimanche équivaut à la mort certaine, à plus
ou moins brève échéance, de tous les petits
commerçants qui ne pourront pas, à coûts égaux,
suivre les magasins à grande surface. Si vous prenez le cas du secteur
alimentaire, l'extension des heures d'affaires acculera tôt ou tard
à la faillite les épiceries de petite surface, type
dépanneur, qui jouissent déjà d'une exception en vertu de
la loi.
Vous me permettrez trente secondes pour vous dire l'historique des
dépanneurs parce que j'ai, à l'époque, fait le
débat sur les permis d'alcool. Au début, vous vous le
rappellerez, avant 1980, les grandes surfaces, les chaînes de cinq
magasins et plus n'avaient pas le droit de vendre de boissons alcooliques,
bière et vin. Ils ont fait des pressions, ils l'ont plaidé devant
la Régie; c'est allé devant la Cour supérieure. Ils ont
dit: Écoutez, on va prendre la bière: les dépanneurs, vous
avez encore le vin, et les fins de semaine et le soir. Quelques années
après, il s'est avéré que le vin était très
intéressant; les grandes surfaces alimentaires l'ont demandé.
Alors, vous avez vu, à ce moment-là, qu'il restait au
dépanneur le soir et les fins de semaine. Moi, je vous prédis
que, si, dans l'alimentaire, les grandes surfaces ouvrent le dimanche, d'ici un
an ou deux, 75 % des dépanneurs vont disparaître. C'est
déjà plus cher chez le dépanneur et je vous jure que la
tentation est forte, chez
certains de nos membres, de dire: S'ils ouvrent le dimanche, pourquoi...
Eaton l'a déjà suggéré. Eaton a déjà
un très beau secteur de fruits confits, etc., et, dans certains endroits
à Montréal, ça représente plus de trois ou quatre
allées, des îlots. Ils disent: Pourquoi est-ce qu'on n'aurait pas
une épicerie, nous aussi, chez Eaton? Et pourquoi, chez Canadian Tire,
on n'aurait pas deux îlots d'épicerie? La question est
lancée. Si on fait ça, quand tout le monde ouvrira le dimanche,
on aura monté d'un cran, on aura un nouveau problème de
main-d'oeuvre qualifiée, etc., et on se retrouvera devant la même
situation.
Nous sommes d'avis qu'il faut, une fois pour toutes, cesser de s'adapter
aux exigences des commerçants et poser la vraie question au
consommateur, c'est-à-dire: Est-il prêt à la
libéralisation ouverte des heures d'affaires? S'il répond oui
à la première question, est-il prêt à en assumer le
coût? Poser la question, c'est y répondre. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, Me Boulianne. S'il y en
a d'autres qui veulent répondre aux questions, vous êtes...
Vous avez parlé tout à l'heure du
réaménagement des heures. Si une des hypothèses dans le
réaménagement, c'est de dire: Au lieu d'ouvrir, par exemple,
à 8 h 30 le matin, on pourrait ouvrir à 9 h 30 et, au lieu de
fermer à 6 heures, on pourrait fermer à 7 heures, on entend deux
arguments.
M. Boulianne: Lorsqu'il en a été question au
regroupement...
M. Tremblay (Outremont): Non... M. Boulianne: Ah! O.K.
M. Tremblay (Outremont): Ce n'est pas ça. J'aimerais vous
entendre après, mais je vais vous donner les arguments qu'on entend,
pour accélérer le débat. Il y a deux arguments qu'on
entend. Le premier, c'est si on ouvre à 9 h 30 au lieu de 8 h 30,
ça peut causer des problèmes au niveau des livraisons parce que
ceux qui livrent ont toujours été habitués tôt le
matin. C'est ce qu'on entend. Deuxièmement, si on fermait, et je parle
juste des lundi, mardi, mercredi, à 7 heures le soir, ce qu'on entend,
c'est qu'il y en a beaucoup à qui, de 6 heures à 7 heures,
ça pourrait causer certains problèmes. Comment voyez-vous
ça, le réaménagement en semaine? Vous l'avez
déjà suggéré.
M. Boulianne: M. le ministre, quand je parlais de
réaménagement, je ne parlais pas nécessairement d'ouvrir
à... Lors de la coalition qui regroupait à Montréal
plusieurs milieux - il y avait de l'alimentaire là-dedans, il y avait de
la marchandise sèche, de la quincaillerie comme nous et des garages, des
réparations d'automobiles - les gens disaient: Pourquoi ce sont des
heures mortes? Alors, on disait: Si vous ouvrez à 9 h 30 le matin... On
a des fois des pressions des gens qui disent: Pourquoi est-ce que ça
n'ouvre pas avant ça? C'était une hypothèse qui avait
été faite. Dans l'alimentaire, il y en a qui avaient dit:
Pourquoi est-ce qu'on n'ouvrirait pas les épiceries à 8 h 30 le
matin ou à 8 heures? Le dépanneur ouvre déjà, lui,
dès 7 heures parce qu'il veut prendre les gens avant le travail. Alors,
on se demandait pourquoi on n'ouvrirait pas plus tôt.
M. Tremblay (Outremont): Mais si on veut avoir, admettons, une
loi uniforme, parce qu'on regarde...
M. Boulianne: Ah oui!
M. Tremblay (Outremont): Essayez de penser globalement. Je sais
que ce n'est pas facile, mais oubliez que vous êtes des marchands dans
votre secteur. Si on veut avoir une loi uniforme, la loi dit, en ce moment: 8 h
30 à 6 heures. Il semblerait qu'il y ait une catégorie
d'intervenants, des consommateurs, je suis d'accord avec vous, qui nous disent:
Écoutez, nous autres, on travaille jusqu'à 5 heures en milieu
urbain; il faut retourner chez nous. On prend le métro et on arrive
à la maison à 5 h 55 et on doit aller vite faire des courses. Si
on avait jusqu'à 7 heures, peut-être que ça pourrait
être intéressant. Ça ne veut pas dire que vous... Le
plancher serait, admettons, que vous pouvez ouvrir de 9 h 30 à 7 heures.
Vous, vous pourriez décider d'ouvrir, mettons, de 9 h 30 à 6
heures et fermer si la clientèle n'est pas là. Je veux juste
savoir comment vous voyez le réaménagement.
M. Boulianne: Le réaménagement peut se voir de deux
façons, mais qui dit réaménagement dit pas d'extension. On
prend les blocs d'heures et on les déplace. On ouvre à 5 heures
du matin...
M. Tremblay (Outremont): Oui.
M. Boulianne: ...et on ferme à 3 heures de
l'après-midi.
M. Tremblay (Outremont): Oui, c'est ça, c'est
ça.
M. Boulianne: II y en a deux sortes. Nous, on n'est pas pour
ouvrir plus tard et fermer à 7 heures. S'il y en a un qui se faisait,
tout au plus, s'il y a du magasinage qui peut se faire à 8 h 30, on n'a
pas d'objection. Ça touchait surtout l'alimentaire. Au sein de la
coalition, on leur a laissé entendre que nous, c'est pas plus
tard que ça, à moins qu'il n'y ait un désir ou que
le législateur le décide, un soir. C'était notre position
il y a déjà deux ans. M. Richard s'en souviendra. On avait dit:
À la rigueur, le mercredi soir, on ouvrirait jusqu'à 21 heures,
ou peut-être qu'on penserait à jouer d'une demi-heure de
réaménagement certaines journées. Lundi, mardi, il est
évident que, quand on ferme à 5 h 30, sous réserve...
M. Tremblay (Outremont): Très bien.
M. Boulianne: ...et les gens qui sont ici avec moi pourront vous
le dire, ce n'est pas nécessairement une demi-heure de plus qui
changerait quelque chose. Ça permettrait de faire des ventes
additionnelles.
M. Tremblay (Outremont): Excellent. Ma deuxième question.
Je vais essayer de profiter du fait que vous êtes un avocat. Vous avez
fait allusion à quelques reprises, tout à l'heure, aux amendes.
Vous représentez des clients aussi. Qu'est-ce qui serait dissuasif?
D'après vous, quel montant d'amende devrait-on avoir pour s'assurer que
les gens respectent la loi?
M. Boulianne: La dernière fois, pour ceux qu'on avait
représentés, ça touchait dans les milliers de dollars.
Vous savez, ce n'est pas le montant; c'est bien plus si c'est mis en
application. Une amende de 100 $ - je vous donne un exemple - quand ça
fait dix fois que vous la payez et que vous avez une gradation qui fait que
vous perdez votre permis après, c'est aussi dissuasif et même plus
qu'une amende de 10 000 $ que le gars va contester jusqu'à la Cour
suprême et qui va se décider cinq ans plus tard.
M. Tremblay (Outremont): En fait, vous dites deux choses, parce
que, si je prenais l'exemple, tout à l'heure, de vos quatre magasins que
vous avez mentionnés, vendre pour 2 000 000 $ et payer une amende, je ne
sais pas, de 100 $, ce n'est sûrement pas significatif, ce n'est pas
assez. Mais où vous seriez même prêt à aller, c'est
à la perte éventuelle du permis au-delà d'un certain
nombre d'infractions. (18 h 15)
M. Boulianne: Oui, et puis avoir des gradations, comme nous
l'avions déjà recommandé dans d'autres domaines, pour ne
pas qu'on se retrouve avec la même amende et que le gars la conteste. Je
vous parlais de Price, tout à l'heure. C'est public, il y a une
poursuite de prise et, mon Dieu, ils sont déjà rendus, je pense,
à deux tables comme ça de documents. On est rendu au premier
niveau; je pense que la Cour suprême va le décider en 1998,
probablement. À ce moment-là, ça aura peut-être
complètement changé. Mais ce qui est important surtout, quel que
soit...
Je vous laisse le choix d'apprécier, vous allez en avoir
sûrement qui vont venir vous parler d'amendes sérieuses. Ces
amendes-là, s'il y avait un moyen... Il y a toujours une dissuasion
possible, les gens le savent, à l'heure actuelle. Mon Dieu, je serais
curieux, M. le ministre, de vous demander combien de personnes peuvent
être sur la route - je comprends qu'il y a une question de budget - pour
aller mettre en application cette loi-là. Les gens, lorsque vous leur
parlez de ça, vont dire: Bof! Il vient une fois de temps en temps, le
gars.
M. Tremblay (Outremont): Je vais en profiter pour répondre
à ça parce que c'est vrai qu'on n'a sûrement pas le nombre
de personnes, s'il fallait le faire nous-mêmes. La meilleure police,
c'est la concurrence. On opère principalement à la suite de
plaintes qui nous sont faites. Parce qu'il ne faut pas vous leurrer, vous avez
des commerçants avec vous, ils font le tour, ils vont voir ce qui se
passe, puis ils nous appellent. Alors, l'année dernière, il y a
eu 1 400 poursuites. Je pense que, de ce côté-là, on fait
tous les efforts nécessaires pour appliquer la loi et je ne pense pas
que ce serait le fait qu'on ait 200 personnes qui réglerait le
problème. Je pense qu'il y a un malaise fondamental dans la loi.
Juste pour revenir, par exemple on m'a informé tout à
l'heure qu'il y a une injonction contre Price, qui va être...
M. Boulianne: Qui a été signifiée, pour
votre information, M. le ministre... On avait essayé de l'avoir au
niveau du provisoire le 24 décembre, ce qui était aberrant, et je
peux vous dire que 8 des 15 affidavits viennent de gens qui sont ici, qui ont
signé...
M. Tremblay (Outremont): Très bien.
M. Boulianne: ...puis qui ont été faire
enquête, dont deux ou trois des personnes qui sont ici.
M. Tremblay (Outremont): C'est une injonction qui devrait
être, je pense, entendue la semaine prochaine.
M. Boulianne: Oui, mais j'ai bien l'impression qu'il va y avoir
une demande d'interrogatoire, comme d'habitude.
M. Tremblay (Outremont): O.K. Je pousse plus loin; mettons qu'il
y a toutes les mesures dilatoires que vous mentionnez. Si l'injonction
n'était pas accordée, légalement ça veut dire
qu'après ça ça pourrait prendre cinq ans, six ans avant
d'aller devant la Cour suprême un jour?
M. Boulianne: C'est parce que je sais déjà qu'il y
a eu des poursuites de prises par votre ministère. Il est évident
qu'ils contestent la juridiction, la constitutionnalité, ce qui est
leur
droit; je n'enlève pas aux gens le droit de contester. Alors,
avant que les arguments soient épuisés, le juge n'a pas encore
entendu l'once d'une preuve et il y en a déjà...
M. Tremblay (Outremont): Me Boulianne, je comprends ça.
D'ailleurs c'est votre métier, c'est le métier des avocats. Non,
ce n'est pas négatif, ce que je dis...
M. Boulianne: Non, non.
M. Tremblay (Outremont): ...au contraire, ils défendent
leurs clients. C'est le meilleur moyen possible. Le point que j'essaie de
faire, c'est de dire qu'on ne peut pas tout prévoir dans une loi. On ne
peut pas prévoir la créativité des gens d'affaires qui
vont trouver une autre formule. Price en a trouvé une. Si l'injonction
n'est pas acceptée et qu'au bout de cinq ans la Cour suprême
statue, qu'est-ce qu'on fait? Est-ce que vous avez une suggestion à nous
faire? Je pense que c'est important.
M. Boulianne: S'il y en a une, suggestion, je prétends
que, si j'étais capable d'être petit oiseau et de nous ramener
cinq ans ou dix ans en arrière, il n'y en aurait jamais eu, de
début de libéralisation.
M. Tremblay (Outremont): Non, mais ce n'est même pas
ça. Parce qu'il n'est même pas soumis à la loi, lui. Lui,
il s'est trouvé une formule de grossiste.
M. Boulianne: II est évident que, si c'est un grossiste,
c'est vrai qu'il n'est pas soumis à la loi. C'est pour ça que je
vous dis, dans notre mémoire, qu'il faudrait prévoir les
grossistes aussi.
M. Tremblay (Outremont): Ah!
M. Boulianne: Si c'est vrai, il y a deux aspects dans le cas de
Price. Si c'est un grossiste - il semble que c'est vrai - il y a une faille, il
ne serait pas soumis à la loi. Mais le grossiste, si vous le forcez
à vendre seulement aux grossistes, il va fermer le dimanche. Il est
évident que, quand moi-même j'y vais comme avocat et que j'utilise
ma raison sociale, parce que j'ai le droit d'en avoir une, parce que j'ai une
déclaration de raison sociale, et que j'achète trois pneus, ce
n'est sûrement pas pour les revendre au détail. Je vends des
services.
M. Tremblay (Outremont): O.K. Bon. La dernière question
que j'ai - je pense qu'il me reste une minute - c'est la location. On a
mentionné, ce matin - il y a des gens qui sont venus nous faire des
représentations - la location d'outils ou d'objets que vous vendez dans
vos commerces. Est-ce que ça vous cause un problème,
ça?
M. Guillemette: On ne fait pas de location.
M. Tremblay (Outremont): Je sais que vous ne faites pas de
location, mais est-ce que vous considérez ça comme de la
concurrence? Est-ce que ces gens-là pourraient éventuellement,
sous le biais de la location, vendre certains produits?
M. Guillemette: Oui, parce que ceux qui font de la location,
normalement, ils vendent des produits en même temps. Ils font les
deux.
M. Tremblay (Outremont): Alors, c'est ça. Parce que la
location, ce n'est pas soumis à la loi. C'est ça que je vous dis.
Vous avez de l'imagination; au début de votre mémoire, vous
dites: "De nous retrouver dans une position de compromis trop évidente
qui aurait pour effet de satisfaire... principalement... le consommateur, pour
satisfaire aux sacro-saintes exigences du commerce." Moi, j'essaie de vous
donner des exemples et je veux que vous réagissiez à ça.
On a parlé des grossistes et là, est-ce qu'on devrait faire
quelque chose au niveau de la location?
M. Guillemette: S'ils vendent des marchandises,
définitivement.
M. Tremblay (Outremorrt): Est-ce qu'ils en vendent,
d'après vous?
M. Guillemette: Oui. Ceux qui font de la location de tondeuses ou
de n'importe quel accessoire électrique, ils en vendent en même
temps.
M. Cantin (Denis): Ils vendent des pièces de rechange.
M. Guillemette: Ils vendent des pièces rechange et ils
vendent du matériel neuf aussi.
M. Tremblay (Outremont): Oui. Pour les pièces de rechange,
ils ont le droit. Mais vous dites qu'ils vendent du matériel neuf?
M. Guillemette: Neuf, oui.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
M. Tremblay (Outremorrt): Ils n'ont pas le droit, mais ils ont le
droit...
Mme Marois: Ils n'ont pas le droit de vendre du matériel
neuf, de vendre l'appareil lui-même.
M. Cantin: Ce qu'ils font, Mme Marois, c'est qu'ils louent,
disons, une tondeuse et, par contre, ils mettent à la
disponibilité des gens des
roues et des silencieux pour la même tondeuse, puis une corde pour
la faire démarrer.
Mme Marois: D'accord. Je vous comprends.
M. Cantin: AJors, ils le font d'une façon
déguisée en disant: On fait de la location. Mais le type veut
avoir, disons, une roue en surplus, alors il achète une roue neuve.
M. Tremblay (Outremont): Oui, mais, si je veux être
créatif - et je pense que c'est important - je vais m'ouvrir un commerce
de location avec option d'achat.
M. Cantin: C'est ça. Mme Marois: Bien
voilà!
M. Tremblay (Outremont): Alors, je vais louer pendant un an en
donnant une option d'achat et, au bout d'un an, il va venir me payer.
M. Cantin: Puis même, on va faire plus, M. Tremblay. On va
louer la tondeuse et, après, on va vous donner des pièces de
rechange neuves et on va vous dire: Tu viendras payer lorsque tu rapporteras la
tondeuse. Je n'ai pas fait de vente, mais je vais en faire le lundi ou je vais
en faire durant la journée.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je pense que le
ministre pose des questions qui sont effectivement des cas réels, devant
lesquels on est quand on a à administrer une loi. Moi, je dirais:
Lorsqu'on voit apparaître un phénomène comme
celui-là, est-ce qu'on ne peut pas imaginer que, si la loi ne le
prévoit pas, on vienne rapidement colmater, boucher le trou qui se
présente? Ça s'est déjà fait dans d'autres
secteurs. Mais, enfin, je laisse la question.
Je vous remercie, M. le président. Ça m'a beaucoup
intéressée de suivre votre mémoire. Évidemment, on
n'a pas toujours le temps de lire tous nos mémoires avant de venir en
commission. Je vous avoue que je n'avais pas eu le temps de lire le
vôtre, mais, à beaucoup de moments, je reconnais des propos que je
tenais au début de la commission, presque les mêmes types
d'exemples. Ça m'a fait sourire et c'est pour ça que je souriais
en vous entendant, tout à l'heure, parce que je partage le point de vue
que vous défendez ici.
Cela étant dit, je vais vous poser quelques questions pour nous
permettre d'éclaircir votre position. Evidemment, ce matin, dans votre
même secteur d'activité - même si je sais que vos
activités vont aussi vers le secteur automo bile et les services aux
automobilistes - il y a eu le Regroupement des grands centres de
rénovation du Québec pour l'équité entre les
commerçants Et eux, ils ont défendu une position
différente de la vôtre, à savoir qu'à leur point de
vue le mouvement est tellement engagé vers l'ouverture le dimanche qu'on
devrait aller dans ce sens-là parce que les grandes tendances vont vers
là. À cet égard, enfin, selon ce que j'ai compris de leur
point de vue et je ne pense pas les mésinterpréter, ils disent:
Comme on ne finira pas par être capables de contrôler, on est mieux
de permettre l'ouverture. J'aimerais entendre votre point de vue puisque vous
êtes dans les mêmes secteurs d'activité. Eux, ils
défendent une approche un peu différente.
Deuxième question. Les associations qui défendent et qui
sont d'accord avec l'ouverture des commerces le dimanche nous disent:
Écoutez, on n'obligera personne: un commerçant qui ne voudra pas
ouvrir le dimanche n'a qu'à décider de ne pas ouvrir; un
consommateur qui ne veut pas consommer n'a qu'à décider de ne pas
consommer et un travailleur qui ne veut pas travailler n'a qu'à
décider de ne pas travailler. Alors, ça, c'est leur argumentation
pour dire: Pourquoi contraindre tout le monde à être dans le
même moule, en fermant tous les commerces, alors que, finalement, en
permettant l'ouverture, c'est le magnifique libre choix qu'on laissera à
tout le monde? Ceux qui décideront d'ouvrir le feront et ceux qui
veulent fermer le feront, etc.
On aimerait que vous approchiez de la table et que vous vous
identifiiez. Ils peuvent le faire, M. le Président?
Le Président (M. Bélanger): Oui Vous n'avez
qu'à vous approcher de la table des témoins.
Mme Marois: C'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Alors, à la
première place, pourvu qu'il y ait un micro. Alors, vous vous
identifiez.
M. Blanchard (Robert): Alors, je m'identifie: Robert Blanchard.
Je suis propriétaire du magasin Canadian Tire à
Saint-Jean-sur-Richelieu. Mon point de vue là dessus, Mme Marois et les
membres de la commission, c'est que, d'abord, il y aurait peut-être une
façon relativement simple de régler tout ce
problème-là concernant la pseudo-liberté totale. Il
s'agirait peut-être justement de l'accorder, c'est-à-dire que tous
les magasins, partout, pour tout le monde, tous les services gouvernementaux ou
autres puissent être ouverts sept jours, sept nuits, 365 jours par
année. On pourrait aussi conclure, par exemple, que, pour les
journées fériées, tout en respectant les
prérogatives des employés, on pourrait dire: Moi, la
journée de Dollard, ça ne veut rien dire pour moi, j'ouvre; la
journée de la Saint-Jean-Baptiste, ça ne veut rien dire pour moi,
j'ouvre,
et ainsi de suite. Ça, c'est un point de vue.
L'autre côté aussi, c'est qu'on a mentionné dans
notre mémoire une pause dans notre société. Moi,
personnellement, et je sais que mes confrères pensent comme moi, j'aime
beaucoup cette identification. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas être
différents des autres? Si nous sommes dans une société,
entre guillemets, distincte, est-ce que ce n'est pas une façon
très catégorique de dire: Bien oui, on n'est pas comme les autres
sur ce côté-là et oui on préconise une pause dans la
société, et cette pause-là, ça s'adonne que c'est
le dimanche?
Mais il est évident que ce débat-là des heures
commerciales, ça déborde beaucoup des heures de travail. C'est
devenu un débat de société qui engage les familles, qui
engage les gens qui ne sont pas impliqués dans le milieu et,
évidemment, les gens du milieu. Alors, je pense qu'il y a un signe qui
nous indique pourquoi c'est... Je ne sais pas si vous avez entendu la voix des
employés. Ce serait intéressant de voir leur point de vue. C'est
beaucoup plus que de ne pas travailler le dimanche ou d'avoir des commerces
ouverts le dimanche.
Mme Marois: Parlez-m'en de la voix de vos employés?
M. Blanchard: II est très évident que les
employés sont catégoriquement contre l'ouverture le dimanche pour
les mêmes raisons, lorsqu'on parle de qualité de vie. Je pense
qu'on peut directement associer ce fait-là avec la qualité de
vie. C'est très clair et très net que, si vous approchez
l'attitude des employés au niveau des commerces de détail, on
vous indiquera très rapidement que les employés sont
carrément contre, pour toutes les raisons qui ont été
énoncées. Moi, je sais que je parle avec les autres
là-dessus. Si nous nous démarquons des autres concernant la
fermeture le dimanche dans notre société, bien, tant mieux, je
pense que la société n'en sera que meilleure. Autrement, qu'on
libère partout tout le monde, 24 heures par jour, 365 jours par
année et là, on verra ce que ça donne; ce sera le chaos
total.
Mme Marois: J'aimerais ça revenir... Me Boulianne parlait
de l'expérience de Calgary. On l'a déjà traitée ici
à l'occasion des audiences qui sont déjà engagées
depuis quelques jours et, bon, on nous disait que ce qui est arrivé
à Calgary et à Edmonton, c'est qu'on a permis l'ouverture;
ça ne s'est pas passé ailleurs dans la province, sauf à
Calgary et à Edmonton où on a ouvert. Et là, ça
avait l'air d'être le bonheur total. C'était ce qu'on
défendait hier, mais c'est un son de cloche différent que
j'entends aujourd'hui et je voudrais que vous m'en parliez.
M. Boulianne: Je peux vous dire que, dans certains centres
d'achats où je suis allé, pas pour représenter mes
clients, mais pour aller voir comment ça se passait là-bas - et
j'y étais, c'était il y a environ six mois - j'ai constaté
tout à coup... Il y avait, tout près de mon hôtel, un
centre d'achats et j'en ai parlé à un ami, à moi, qui est
avocat là-bas - et il n'y avait que la moitié du centre d'achats
qui était ouvert. À un moment donné, j'ai posé la
question à un marchand et il a dit: Ah bien! C'est dommage, c'est
embêtant. Lui trouvait ça dommage que les autres avaient
décidé de ne pas ouvrir parce que ce n'était pas rentable,
parce que ça attirait moins de monde. Le phénomène
d'attraction fait en sorte qu'un centre d'achats à moitié ouvert,
ça ne vaut rien, parce que le gars qui va dans le centre d'achats
s'attend à tout trouver. Tout à coup, il s'aperçoit - il
aurait voulu aller acheter ses jeans - qu'il ne peut pas y aller parce que
c'est fermé. Au début, ils voulaient l'ouvrir
complètement. Ils ont commencé et, à certains endroits,
ça été réduit à trois heures
l'après-midi, parce qu'ils ont dit: Le dimanche matin, les gens dorment
et ils ne veulent pas venir. Alors, il y a eu un problème d'emploi pour
faire entrer les gens pour trois ou quatre heures. Ils ne pouvaient pas faire
ça jusqu'à 9 heures; alors, ils ouvraient trois heures
l'après-midi. Ça crée un problème de trouver du
personnel qui va rentrer pour trois heures. Ceux qui fonctionnaient bien, qui
étaient dans la nourriture ou quoi que ce soit, disaient: Nous autres,
ce n'est pas grave, on va les payer six heures. C'était encore rentable
pour eux autres. Alors, en termes de commerce, je ne suis pas convaincu... Je
n'ai pas fait tous les magasins, mais je peux vous dire que l'application n'est
pas à outrance, comme on voulait le faire au début.
Et, encore là, il y a des commerces pour lesquels c'est plus
facile d'ouvrir le dimanche. Mais, en dépit du choix qu'on vous
manifeste en disant: Non, on ne voudrait pas que ce soit ouvert, il y en a.
Vous savez, c'est un peu paradoxal de vouloir prétendre que ceux qui
veulent ouvrir ouvrent. C'est faux et ce n'est pas comme ça que
ça fonctionne, en termes de commerce. Même si ça nous
coûte quelque chose, parce que nos concurrents ouvrent le dimanche, on
n'aura pas le choix, on va ouvrir. On n'a pas le choix. Des fois, il peut
arriver que le jeudi soir, ça ne soit pas rentable. Les gens sont
habitués à ce que le commerce soit ouvert. Si le gars veut
magasiner pour faire des achats pour 300 $, on va peut-être
réduire le personnel quelque part, mais il faut que le client vienne,
qu'il sache qu'on est ouvert. C'est dans ce sens-la que ce principe-là,
je le trouve un peu poussé à l'extrême.
Mme Marois: D'accord.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon, je vous inviterais à remercier nos
invités.
Mme Marois: On finit, malheureusement, à 18 h 30. Le
problème, c'est qu'il est prévu qu'on finisse à 18 h 30 et
qu'on a des engagements. Je pense bien que le ministre a aussi des
engagements.
M. Boulianne: Un instant, peut-être, juste un autre
Mme Marois: Oui, j'aimerais ça si d'autres...
M. Cantin: M. Cantin, propriétaire de Charlesbourg. Moi,
je trouve quand même que la décision revient à la masse. Et
la masse, c'est la population. Et j'aimerais que les gens réalisent,
comme M. Boulianne l'a démontré, que si, définitivement,
nous ouvrons le dimanche ou nous rallongeons les heures d'ouverture, il y aura
un coût qui devra être supporté par la population. Dans les
volumes, dans les marges où nous opérons actuellement, c'est
impossible, pour nous, de rallonger les heures d'ouverture ou d'ouvrir le
dimanche. Si la population accepte une majoration de coûts pour se porter
acquéreur du produit qu'on a actuellement, accepte d'avoir un service
moindre et accepte que les heures soient rajustées, peut-être
même coupées le matin et rallongées un petit peu le soir,
que ce ne soit pas les heures qu'eux recherchent, moi, je dis: On devrait le
regarder. Mais, au départ, nous sommes contre l'ouverture le
dimanche.
M. Boulianne: Je demanderais à M. le président de
finir.
M. Guillemette: Jean-Paul Guillemette, du boulevard Masson,
à Québec. Moi, à mon sens, si vous permettez l'ouverture
le dimanche, "free for ail", c'est le petit qui va manger la grosse claque
là-dedans. Que ce soit dans n'importe quel commerce, que ce soit dans la
petite quincaillerie ou que ce soit dans les accessoires d'automobiles, le
petit commerçant qui est tout seul dans son commerce, qui "runne"
ça avec sa femme, impossible qu'il puisse travailler sept jours par
semaine et sept soirs par semaine.
Ceci est mon commentaire. Les magasins à grande surface, eux
autres, ils vont mettre moins d'employés Ils vont ouvrir et c'est eux
autres qui vont empocher le paquet Merci beaucoup de m'avoir
écouté.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, si vous
voulez remercier nos invités.
Mme Marois: Deux minutes pour vous remercier. Je
répète que je partage votre point de vue, que même
certaines expressions que vous utilisez, je les avais retenues. Je vous
remercie de votre témoignage et j'ajouterais...
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Mme Marois: J'ajouterais peut-être une chose: II commence
à se dégager aussi un autre constat à la commission. Parce
que vous êtes sous bannière, mais chacun possède son
entreprise. On constate que soit les indépendants ou les personnes qui
possèdent quelque magasin, qui connaissent bien leur clientèle,
qui connaissent bien leurs travailleurs et leurs travailleuses aussi ont
plutôt tendance à proposer ce que vous défendez aujo rd'hui
et que c'est plutôt du côté, oui, de la très grande
chaîne qu'on propose des avenues un peu différentes. Je vous
remercie de votre contribution.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre
M. Tremblay (Outremont): Au lieu de vous dire merci, je vais
aller vous le dire après. Il y a un article de la loi, l'article 3.1,
qui dit que, les 14 jours précédant le 24 décembre, vous
pouvez être ouverts jusqu'à 21 heures, sauf, évidemment, le
dimanche. Comment vous vivez ça? Est-ce que c'est une contrainte?
Ça, ça va? Ça va parce que c'est le temps des fêtes
et ça vous permet de...
M. Boulianne: Sauf pour le 24 décembre de cette
année.
M. Tremblay (Outremont): Est-ce qu'il y a d'autres
périodes de l'année qui sont des périodes intenses comme
les fêtes qui pourraient...
M. Cantin: La période précédant Noël
facilite un meilleur service à notre clientèle.
M. Tremblay (Outremont): Est-ce que 14 jours, c'est assez?
M. Guillemette: Oui, on n'en veut pas plus, on n'en veut pas
moins.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce que là, de l'autre
côté de la frontière, pour tous ceux qui longent, par
exemple, l'Ontario, de plus en plus, en Ontario, ça ne commence pas dans
les 14 jours précédant le 24 décembre C'est pour ça
que jo vous pose cette question là Vous êtes d'accord. Il y a un
autre article dans la loi qui donne un pouvoir discrétionnaire au
ministre, pour les zones limitrophes, de permettre l'ouverture pour plus que
cette période-là. Mettons, en d'autres mots, si l'Ontario
décidait d'ouvrir le 1er décembre, ce qui est le cas, alors
là, ce n'est plus 14 à Hull, Aylmer. Si la municipalité me
demandait la permission, pour une zone limitrophe, je peux donner la
permission.
M. Boulianne: Ça fait une zone tampon, pour les
limitrophes.
M. Tremblay (Outremont): O.K. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie Les marchands associés Canadian
Tire du Québec inc. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 20
heures.
(Suspension de la séance à 18 h 35)
(Reprise à 20 h 12)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place.
À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! S'il vous
plaît! M. le député de Nicolet et M. le
député de Saint-Maurice, s'il vous plaît!
Une voix: C'est M. le député de...
M. Jolivet: De Verdun. M. le député de Verdun, s'il
vous plaît!
Le Président (M. Bélanger): Non, il ne parle pas.
Quand il parle... Bon, cela dit, la commission reprend ses travaux pour
procéder à la consultation générale et à des
auditions publiques sur les modifications à apporter à la Loi sur
les heures d'affaires des établissements commerciaux.
Ce soir, nous recevons, comme premier groupe, le Groupe Ro-Na Dismat
inc. qui sera représenté... Écoutez, je vous laisse vous
présenter, vous êtes de grands garçons, et identifier votre
porte-parole. Vous avez vingt minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire...
Une voix: Non, dix minutes. On est aux demi-heures.
Groupe Ro-Na Dismat inc.
Le Président (M. Bélanger): Oh! Excusez-moi. Je
suis mêlé. On a dix minutes pour la présentation de votre
mémoire et vingt minutes d'échanges de propos avec les
parlementaires. Chaque fois que vous aurez à prendre la parole, s'il
vous plaît, bien vouloir vous identifier avant, ceci pour les fins de
transcription au Journal des débats. Ça nous aide
beaucoup. Alors, sans plus tarder, allons-y.
M. Drouin (Henri): Merci, M. le Président, M. le ministre,
MM. les députés du pouvoir, MM. les membres de l'Opposition. Mon
nom est Henri Drouin, je suis président du conseil du Groupe Ro-Na
Dismat. M'accompagnent, à l'extrême gauche, M. Georges Lanouette,
quincaillier à Montréal; M. Pierre Piotte, quincaillier de la
quincaillerie Ro-Na de...
Une voix: Ville Mont-Royal.
M. Drouin: ...Ville Mont-Royal et le fils de Napoléon.
À mon extrême droite, M. Roland Durand, quincaillier de
Québec, Rénovateur Ro-Na de Québec, et M. Gérard
Mercier, quincaillier de Longueuil.
Le Président (M. Bélanger): Bien.
M. Drouin: Je pense que vous avez déjà... On
représente, vous savez, 850 détaillants, 650 regroupés
sous sept différentes bannières et environ 200 détaillants
non identifiés à une bannière en particulier. Je pense
qu'on ne lira pas nécessairement le mémoire qu'on a
déposé. On va peut-être juste le résumer
brièvement plutôt pour laisser un peu plus de temps à la
période de questions, pour discuter avec vous.
On est conscients qu'on a très peu, dans notre industrie ou dans
notre secteur d'activité au détail, de contrevenants à la
loi actuelle. Par contre, on est un peu inquiets parce qu'on est conscients
que, si la situation actuelle perdure, c'est-à-dire une situation qui
exempte beaucoup de commerces de la loi et qui permet à des gens de
s'accaparer d'une part de marché aux dépens de gens qui doivent
rester fermés, cette situation créerait des pressions à
long terme pour une ouverture naturellement sept jours par semaine.
Définitivement, le Groupe Ro-Na Dismat, notre position, c'est que nous
sommes contre l'ouverture des commerces le dimanche. En bref, nous sommes aussi
en faveur d'une loi provinciale. Nous sommes contre le fait de passer aux
municipalités le droit de légiférer dans ce sens. Je pense
qu'on ne créerait qu'un plus grand chaos si une telle possibilité
était envisagée. Les principales raisons, naturellement, pour
lesquelles nous sommes contre... nous opérons dans un secteur du
commerce où le service personnalisé est une priorité.
Alors, je pense que notre devoir, en tant que détaillants, c'est de
donner un bon service, avec un personnel qualifié et à des prix
raisonnables. On pense qu'on ne pourrait pas atteindre ces objectifs si les
commerces devaient être ouverts le dimanche.
La plupart de nos entreprises, de nos entrepreneurs sont des
détaillants, de petites entreprises familiales où le
propriétaire et plusieurs de leurs employés travaillent
déjà six jours par semaine. On pense que l'obligation,
naturellement, de travailler sept jours par semaine serait une
démotivation non seulement pour plusieurs de nos employés parce
que, déjà, on perd des employés parce qu'ils ne veulent
plus travailler les fins de semaine, on pense que ce serait une
démotivation pour de nombreux propriétaires de petites
entreprises. On s'inquiète même au niveau de la relève
à l'intérieur de nos commerces comme répercussion.
Évidemment, on a consulté le document d'information qui a
été publié. Je trouve qu'il est très, très
riche en frais de renseignements. Un
de points qui m'a frappé dans ce document, ce sont les
études qui démontrent que là où les commerces
peuvent être ouverts le dimanche, on assiste à un plus grand
nombre de grandes surfaces par rapport aux petites surfaces ou un accroissement
des commerces de grande surface et une diminution des commerces de petite
surface, un peu le contraire de ce qui s'est produit au Québec, à
cause de la loi actuelle, où on a vu une prolifération de
commerces de petite surface, comme des dépanneurs. Ce qui nous frappe
comme conséquence, définitivement, c'est que si tous les
commerces devaient être ouverts le dimanche, il y aurait une augmentation
des commerces de grande surface au détriment des commerces de petite
surface. Nos genres d'opération sont généralement de
petite surface qui verraient une partie de leur chiffre d'affaires
disparaître au profit des plus grandes. Donc, on verrait une fermeture
d'un certain nombre de nos détaillants.
Nous disons qu'il y aurait une augmentation de nos coûts
d'opération parce que, dans nos commerces, de 60 % à 66 % des
dépenses sont des dépenses de salaire. Alors, en
répartissant sur sept jours les horaires de travail, les surfaces de nos
commerces ne sont pas assez importantes pour qu'on puisse
réaménager les horaires de travail sans augmenter le nombre
d'heures travaillées et sans augmenter les coûts.
Évidemment, l'ouverture le dimanche impliquerait plus d'employés
à temps partiel, non qualifiés, manque de service et le vol
à l'étalage est une des conséquences qu'on aurait à
souffrir.
Parmi les commerces, naturellement, qu'on pense qu'ils devraient
être limités, ou limiter les exemptions dans le rapport qu'on
soumet, le mémoire qu'on soumet aujourd'hui par rapport à celui
qu'on avait soumis l'an dernier, un facteur qu'on ajoute, qui n'avait
peut-être pas l'impor tance qu'il a actuellement, ce sont les clubs
d'achat style Price Club qui se servent de cartes supposément
commerciales pour permettre à des individus d'aller magasiner le
dimanche. On dit que c'est un genre d'exemption qui, veux veux pas, camoufle du
commerce au détail et permet à des organisations de vendre
à des consommateurs alors que leurs compétiteurs, eux, doivent
rester fermés.
Alors, définitivement, si on en revient peut-être à
certaines des questions sur lesquelles la commission voulait se pencher, oui,
nous pensons qu'il est important de réviser les exemptions
prévues par la loi actuelle, incluant celle de commerces qui, sous
l'étiquette "commerce de gros", peuvent commercialiser des produits au
détail, style Price Club. Nous sommes pour le statu quo au niveau des
heures d'ouverture, définitivement contre l'ouverture le dimanche des
établissements commerciaux du secteur de l'alimentation parce qu'on dit
que ces gens-là ne sont pas plus fous que les pharmaciens. S'ils ont le
droit d'ouvrir le dimanche, on va voir une augmentation des grandes surfaces
d'alimentation et, naturellement, ces gens-là, pour rentabiliser leurs
opérations, vont commercialiser des lignes de produits autres que celle
d'alimentation, comme les pharmacies le font actuellement.
Le transfert au niveau local du pouvoir décisionnel, nous sommes
contre ça, c'est évident. Dès qu'une municipalité
aurait adopté une loi permettant l'ouverture le dimanche, on voit mal
comment la municipalité voisine ne pourrait pas faire autrement, elle
aussi. Nous sommes pour le maintien du nombre d'employés présents
en tout temps dans le secteur de l'alimentation pour ouvrir hors des heures
régulières et, naturellement, les modalités d'application
de la loi, telles que l'augmentation des amendes, nous en avions
déjà parlé dans notre premier mémoire, nous sommes
en faveur de ça. Alors, en résumé, c'est la position du
Groupe Ro-Na Dismat. Si vous avez des questions à poser.
Le Président (M. Bélanger): Bien, je cède la
parole, d'entrée de jeu, à M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): M. Drouin. merci beaucoup pour votre
présentation. J'ai deux questions. Botanix, qu'est-ce que ça
fait, ça?
M. Orouin: Centre de jardin.
M. Tremblay (Outremont): Qu'est-ce que vous vendez?
M. Drouin: Produits d'horticulture, produits vivants, menus
articles de jardinage.
M. Tremblay (Outremont): Des pelles, des râteaux.
M. Drouin: Oui.
M. Tremblay (Outremont): Bon À l'article 5.12, la loi dit
que vous avez le droit de vendre des fleurs et des produits d'horticulture le
dimanche. Dans votre mémoire, vous recommandez au gouvernement une
restriction des produits vendus par les commerces exemptés Est-ce qu'on
pourrait en conclure que, parce que vous vendez des pelles, des ràleaux,
vous concurrencez des quincailleries qui sont fermées le dimanche et
qu'on devrait vous fermer pour les fleurs et l'horticulture, pour avoir une loi
équitable?
M. Drouin: Où tracer la ligne?
M. Tremblay (Outremont): Oui, mais c'est ça. Pensez
à ça, nous, on doit la uacer. C'est exactement ce qu'on nous
reproche en tant que gouvernement parce qu'on a donné des exceptions -
et vous le mentionnez clairement dans votre mémoire - et les gens se
disent: Bien oui, les fleurs. Là, on va commencer à vendre des
accessoires, des pelles et des râteaux et ça
apporte, je ne dis pas dans ce cas-là spécifiquement...
Bon. Ça, c'est le premier point que je voulais faire et vous allez y
revenir, peut-être qu'on pourra en reparler.
Deuxièmement, les zones touristiques. Vous avez Podium et
certaines quincailleries dans des zones touristiques. Est-ce que vous les
ouvrez le dimanche?
M. Drouin: Je connais une zone touristique qui est la zone des
Laurentides où nous avons un
Podium qui ouvre dans cette zone-là. C'est le seul parmi 75
détaillants Podium.
M. Tremblay (Outremont): Oui. Est-ce que vous êtes
malheureux d'ouvrir le dimanche pour votre Podium dans cette zone-là? Ou
comment voyez-vous ça, les zones touristiques? C'est une critique qui
est faite, des fois, les zones touristiques. On dit que ça permet une
concurrence illégale d'autres...
M. Drouin: Je pense que l'ouverture dans ces zones-là
correspond plus à un consensus entre l'ensemble des détaillants
d'une telle région. Et, à ma connaissance, dans la région
des Laurentides, notre détaillant qui est là ne nous a pas
mentionné que c'était un problème pour lui.
M. Tremblay (Outremont): Oui, parfait. Très bien.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Richard: Merci, M. le Président. Vous faites allusion
aux marchés aux puces qui ne devraient pas être exemptés
par la loi. Je comprends que vous dites qu'ils ne devraient pas être
exemptés par la loi parce qu'ils vendent des marteaux, des scies et
beaucoup d'articles qui dépassent la réglementation de la loi
actuelle qui est 20 $ et moins d'articles neufs. Est-ce que, par contre, vous
seriez favorable à ce que le marché aux puces - faisons le
scénario - redevienne ce qu'il était vraiment autrefois, partant
de la vente de garage à tout ce qui est, indépendamment du prix,
des articles ou menus articles usagés? Est-ce que vous seriez favorable
à ça? Là, en fait, vous dites: Pas question de leur
permettre de fonctionner le dimanche. Vous dites qu'ils devraient
disparaître des exemptions parce qu'ils font partie des exemptions,
actuellement. Là où on sait que ça fait problème,
c'est comment on va contrôler les 20 $ et moins de la loi actuelle. Il se
vend des réfrigérateurs, des poêles... On sait que
ça dépasse royalement les 20 $, effectivement. Mais est-ce que
vous seriez favorables à ce que ça fasse quand même partie,
dans l'éventualité où on n'élargirait pas,
où on ne libéraliserait pas?
M. Drouin: Dans le cas où ce ne serait que des objets
usagés, je ne vois pas comment on pourrait s'opposer à ce genre
de type de vente de garage qui est un peu plus structurée? C'est mon
opinion personnelle. Je ne sais pas...
Une voix: Parfaitement d'accord.
M. Drouin: Le problème, c'est peut-être comment vous
pouvez le contrôler.
M. Richard: J'aurais une deuxième question, M. le
Président...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, je
vous en prie.
M. Richard: ...si vous permettez. Au niveau municipal, vous vous
cadrez en disant directement: Nous, on ne serait pas d'accord à ce que
vous transfériez la patate aux municipalités. L'expression n'est
peut-être pas bonne, mais c'est quand même alimentaire. Par contre,
est-ce que vous pourriez regarder la possibilité, non pas que le monde
municipal puisse décréter si, dans cette
municipalité-là ou dans cette MRC ou dans cette
région-là, on peut ouvrir le dimanche ou pas, mais qu'ils aient
la responsabilité de l'application? C'est-à-dire la loi-cadre
viendrait du gouvernement du Québec, les balises viendraient du
gouvernement du Québec au niveau des heures et de la brochette d'heures,
sauf que l'application sur le terrain, la surveillance serait...
Une voix: La police.
M. Richard: ...faite par la police municipale ou par la SQ -
extrapolons - au niveau de l'application. Une des faiblesses de la loi
actuelle, c'est effectivement qu'elle est non applicable. On a une
problématique dans l'application.
M. Drouin: Je pense que ça ferait beaucoup plus...
M. Richard: Les deux, je pense.
M. Drouin: ...de monde pour voir à l'application de la
loi. Notre première réaction à cette
proposition-là, c'est celle-là. Pourquoi pas?
M. Piotte (Pierre): Je vois ça difficilement, parce que je
me demande... Je suis à la ville de Mont-Royal, à
côté, c'est Outremont; si la ville de Mont-Royal décide de
l'appliquer et qu'Ou-tremont ne décide pas de l'appliquer, qu'est-ce que
ça donne?
M. Richard: Ah, non! Là, on parlerait du fait...
M. Piotte: On irait par région.
M. Richard: Non, non, pas du tout. On parlerait du fait que la
loi viendrait du gouvernement du Québec...
M. Piotte: D'accord.
M. Richard: ...de nous, ici, d'une façon provinciale, sauf
que la surveillance, en fait, le vrai mot, c'est la surveillance et
l'application de la loi seraient faites par le monde municipal.
M. Piotte: Oui, mais est-ce que le monde municipal ferait le
même effort de l'appliquer, à chaque place?
Une voix: La loi serait la même pour tout le monde.
M. Piotte: D'accord, je comprends, mais s'ils ne l'appliquent
pas. Je veux dire qu'il y a des lois, actuellement, et elles ne sont pas
surveillées... les heures d'ouverture... Si, encore une fois, on a deux
municipalités, et que l'une dit: Moi, je vais faire la surveillance, et
que l'autre à côté dit: Je ne la fais pas...
M. Richard: Ah bon! Alors, à ce moment-là, vous
dites qu'il y aurait une faiblesse à ce niveau-là.
M. Piotte: Bien, j'ai l'impression, moi. M. Richard:
L'idée est excellente.
M. Tremblay (Outremont): Juste pour clarifier, donc. Je pense
qu'ils surveilleraient Parce que si on augmente les amendes pour les
fêtes importantes...
Une voix: D'accord.
M. Tremblay (Outremont): et qu'on partage les amendes, je pense
qu'ils vont être intéressés à aller cogner à
la porte.
M. Piotte: Pleinement d'accord. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): II faut avoir un incitatif
financier...
M. Piotte: Un incitatif oui.
M. Durand (Roland): Pour compléter, je pense que sur le
plan de l'efficacité et de l'action rapide, ça pourrait aider en
autant que vous leur donniez instruction de faire leur travail de cette
façon-là. Sur le plan de l'efficacité, c'est beaucoup plus
rapide que par le biais de la Sûreté du Québec ou que par
les plaintes qui vont au ministère. Alors peut-être qu'à ce
niveau-là, ça pourra aller en autant que tout le monde ait des
instructions très, très sévères du
ministère.
M. Richard: Mais en ayant le côté alléchant
que sont des amendes qui pourraient passer de 3 000 $ à 5 000 $,
hypothétiquement, ça pourrait peut-être devenir
intéressant pour la rentabilité même du service de
sécurité de l'endroit.
M. Drouin: Je trouve intéressante la promotion de plans de
participation aux profits.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): C'était M
Drouin. M. le député de Drummond
M. Saint-Roch: Pour compléter, peut-être. On a fait
ça avec la loi 127 qui est toute la loi de la sécurité
routière où les municipalités peuvent garder l'argent des
billets d'infraction qu'elles émettent en vertu de cette loi-là.
On est dans un monde qui est changeant, qui évolue de plus en plus. Je
ne pense pas que vous fassiez de vente, à l'heure actuelle, parmi tous
les intervenants de votre groupe au niveau du catalogue. Vous ne vendez pas par
catalogue à l'heure actuelle? Aucune de vos succursales.
Mais si on projette un peu dans le temps, avec toute la
télématique qui s'en vient, on est tous bien occupés.
Est-ce qu'il est de l'intention de votre groupe, à un moment
donné, d'aller explorer ces avenues-là au niveau d'un nouveau
programme de mise en marché?
M. Drouin: C'est quelque chose qu'on regarde. On s'interroge sur
les répercussions de ce type de commercialisation-là qui demeure
tout de même extrêmement limitée au moment où on se
parle, qui est à ses débuts aux États-Unis actuellement.
Mais, c'est assurément un genre de concurrence à laquelle on
devra faire face
M. Saint-Roch: Parce que, comme M le ministre l'a si bien
expliqué à plusieurs occasions, on cherche toujours à
faire une loi qui va avoir une certaine durabilité dans le temps.
À l'heure actuelle, rien n'empêcherait quelqu'un, à un
moment donné, d'avoir un service 24 heures par jour, sept jours par
semaine, et même si on avait une loi qui serait bien fermée, de
livrer, un exemple, un paquet de produits de quincaillerie, de faire la
distribution à pamr d'un système comme ça, le
samedi soir ou le dimanche dans la journée. Seriez-vous favorables, dans
l'éventualité où on regarderait un certain resserrement de
la loi Ne seriez-vous pas d'accord que cette partie-là des ventes
devrait avoir quand même une restriction? Je ne sais pas moi, que les
commandes pourraient être prises sept jours par semaine, 24 heures par
jour, mais que la livraison de chacun des articles pourrait être faite
suivant les heures d'ouverture de
chacun des commerce.
M. Drouin: Extrêmement intéressant comme suggestion.
(20 h 30)
M. Saint-Roch: Vous seriez d'accord avec...
M. Drouin: Oui, parce que, de toute façon, lorsque... Ce
sont des ordinateurs qui prennent ces commandes-là de façon
informatique et par télématique. On ne peut pas contrôler
le moment où la commande est placée ou lorsqu'elle est
reçue, sauf que, comme vous dites, on peut peut-être
contrôler la livraison de ces objets-là.
M. Saint-Roch: M. le Président, est-ce que je peux...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Saint-Roch: Dans un autre domaine, vous mentionnez que la
plupart de vos travailleurs ne sont pas d'accord à travailler - c'est
difficile de les faire travailler le samedi - les fins de semaine à
cause des nombreuses heures. Est-ce que la majorité de vos
détaillants... Est-ce que les employés sont syndiqués ou
si...?
M. Drouin: Non syndiqués.
M. Saint-Roch: Non syndiqués. Mais vous remarquez
déjà une résistance à travailler même le
samedi et le dimanche, ce serait pratiquement impossible.
M. Drouin: Nous perdons actuellement des employés
qualifiés au bénéfice d'autres types d'emplois parce que
l'épouse ou l'époux ne travaille pas le samedi, par exemple, ou
pour une plus grande vie en famille. On perd des employés qui ne veulent
pas travailler dans le commerce de détail à cause de
ça.
Le Président (M. Bélanger): M. Lanouette avait un
complément de réponse.
M. Lanouette (Georges): Oui, Georges
Lanouette, de Montréal. Pour répondre à votre
question, Monsieur, j'ai 16 employés; on a émis 32 T4, ça
répond ça?
Le Président (M. Bélanger): M. Durand.
M. Durand: Moi, j'ai aussi deux magasins. J'ai 35 employés
permanents; c'est syndiqué chez nous. 35 employés permanents, 20
temporaires, à temps partiel et j'ai fait le tour du personnel avant de
venir, en leur disant que j'allais... Et ils m'ont demandé: S'il vous
plaît, aidez-nous à respecter au moins... Parce que j'ai le
problème du samedi où... Alors, ils m'ont donné
congé, en disant: S'il vous plaît, fais un effort, fais quelque
chose, parce qu'ils ne veulent pas travailler le dimanche. Mais si je devais
suivre la loi, parce que si on l'applique, même si je dis non, ma
compétition étant autour, je vais être obligé de le
faire, comme le disait M. Drouin, je vais être pris avec une
rentabilité à regarder et je vais être pris à
regarder aussi le personnel qui va probablement, lors d'une prochaine
convention, me dire que je n'ai pas fait mon ouvrage aujourd'hui. C'est le
problème; ils ne veulent pas travailler le dimanche; c'est bien
sûr. On en a même discuté. J'ai réussi à
signer la dernière convention avec un samedi par mois et je dois faire
une rotation pour garder mon personnel compétent, sinon je suis
obligé d'avoir des étudiants, ce qui fait la distinction entre la
qualité de service qu'on donne chez Ro-Na Dismat et la qualité de
service de ma compétition qui, des fois, a seulement un commis les fins
de semaine qui ne connaît pas la différence entre un
poinçon et un tournevis. C'est là la différence. Alors,
c'est pour ça.
M. Saint-Roch: Est-ce que vous me permettez...
Le Président (M. Bélanger): Alors, malheureusement
le temps est écoulé. Je cède la parole à Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Vous avez une autre question dans ce sens? Allez-y,
M. le député.
M. Saint-Roch: Merci, Mme la députée de
Taillon.
Le Président (M. Bélanger): Alors, si on a le
consentement.
Mme Marois: Quand j'aurai besoin du temps...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Drummond.
M. Saint-Roch: Comme on a toujours fait, madame.
Mme Marois: D'accord.
M. Saint-Roch: Alors, ce sera une question, M. le
Président, qui est un peu hypothétique. Alors, vous me le
permettrez même si nos coutumes veulent qu'on s'en abstienne. À
supposer qu'on libéraliserait les heures tous azimuts, que tout le monde
serait ouvert, avec l'expérience - je remarque qu'il y a beaucoup
d'expérience alentour de votre table - qu'est-ce que vous pourriez
prévoir en termes de nombre de commerçants chez vous, sous votre
bannière, qui pourraient disparaître?
M. Lanouette: Georges Lanouette. J'opère un
commerce qui est probablement l'un des plus vieux au Québec, qui
a été fondé par mon grand-père en 1889 et qui va
avoir 102 ans dans un mois. La quatrième génération est en
place pour nous remplacer. Ce sera, je pense, la fin du commerce de
détail comme on le connaît dans le moment. Comme M. Drouin a dit
tout à l'heure, les grandes surfaces prendraient place. Je suis certain
que nos enfants avec le stress - si vous me permettez ce mot anglais - qui
existe dans le moment, nous, de ma génération, on a
travaillé très fort, mais on n'avait pas cette pression qui
existe aujourd'hui... On deviendra comme des dépanneurs. Je pense que
c'est quatre ans, quatre ans et demi la vie d'un dépanneur et,
après ça, ils sont soit morts, parce qu'ils claquent une crise et
ils ont le luxe de pouvoir essayer de vendre peut-être. Ce sera la fin,
je pense, du commerce de détail comme on le connaît, pour
être entrepris, si vous me permettez de dire ça dans cette
pièce, par des groupes peut-être ontariens qui rapporteraient des
profits là-bas.
M. Drouin: Henri Drouin. Je voudrais juste souligner quelque
chose qui est dans notre rapport et je pense que ça répond
à votre question. Le tissu du détail au Québec est
très différent dans le reste du Canada; 68 % des commerces au
détail sont contrôlés par les indépendants au
Québec alors que ce pourcentage-là est de 40 % dans le reste du
Canada, et c'est à cause d'organisations comme Ro-Na Dismat,
Métro-Richelieu, Provigo, des détaillants qui se sont
regroupés sous une bannière pour rester en vie face à la
compétition des chaînes et des très très grandes
surfaces. C'est un facteur, c'est unique au Québec. Vous venez dire: On
met ça "at large", l'extension des heures d'ouverture? On va commencer
à ressembler davantage au reste du Canada.
M. Saint-Roch: J'ai bien dit que c'était une question
purement hypothétique.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Effectivement, mais c'était une question,
entre autres, que je voulais poser. Je vous remercie. Ça me fait plaisir
aussi de vous rencontrer. Je vais d'abord faire une remarque. Le sentiment que
j'ai, c'est qu'il y a justement ce clivage dont vous venez de parler. Quand on
est une entreprise indépendante ou ayant quelques commerces... Votre
exemple est un bon exemple, nous avions cet après-midi les
représentants de Canadian Tire qui sont aussi des marchands
regroupés sous une bannière, mais qui sont propriétaires
de leur entreprise. Plus les gens sont propriétaires de l'entreprise,
plus les gens connaissent leurs travailleurs et leurs travailleuses, plus les
gens connaissent leur milieu, plus ils sont en accord avec la fermeture plus
serrée le dimanche de l'ensemble des commerces d'ailleurs en disant:
Oui, gardons du dépannage, gardons les urgences, etc. Plus on va vers
les propriétaires de grandes chaînes, de grandes surfaces, qui
sont un peu moins personnalisées, plus on devient soit neutres ou:
D'accord, ouvrons le dimanche. Je ne sais pas qui me disait ça il y a
quelques heures ou un jour ou deux: II me semble que ce clivage-là
n'existe pas; plus on avance dans les travaux de la commission, plus ce clivage
est en train d'apparaître Ce qui est intéressant dans ce que vous
avez apporté aussi, c'est le fait que vous ayez consulté vos
travailleurs et vos travailleuses, pour un certain nombre d'entre vous.
On a eu cet après-midi la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec qui est, évidemment, une
grande centrale syndicale Alors, les gens disent: Ils ont un parti pris et ils
sont un petit peu traditionnels dans leur approche; donc, c'est pour ça
qu'ils sont contre la fermeture le dimanche. Mais, dans le fond, dans vos
entreprises, ce ne sont pas nécessairement des travailleurs et des
travailleuses syndiqués avec des grandes centrales. Pour la plupart,
d'ailleurs, ce n'est pas le cas. Et eux aussi sont en accord avec la fermeture
non seulement le dimanche, mais, comme vous le dites, vous avez même des
difficultés à recruter du personnel le samedi, finalement. Tout
ça, je le mentionne pour essayer de voir ce qui finit par se
dégager comme consensus et chez qui. C'est important de savoir qui sont
nos interlocuteurs, qui sont les porte-parole, qui ils représentent et,
quand ils font valoir un point de vue, sur quoi ils s'appuient comme
réalité. Cela dit, dans votre mémoire, il y a un endroit
où vous mentionnez, à la page 5, au point 4: "L'augmentation des
heures d'ouverture en semaine et/ou le dimanche entraînerait une
augmentation des coûts d'opération de 10 % à 15 % et
obligatoirement une hausse des prix." C'est probablement la première
fois dans les mémoires qu'on chiffre le type d'augmentation
qu'engendrerait une ouverture en sus des heures où on ouvre
déjà. Comment arrivez-vous à ce chiffre-là? Vous
parlez ensuite des dépenses reliées aux salaires. Comment
arrivez-vous au chiffre, d'une part, et, d'autre part, ce que vous nous dites,
c'est que vous ne croyez pas que les ventes sans augmentation de prix vous
permettraient de couvrir, autrement dit, les coûts afférents
à l'ouverture? Je veux que vous me parliez un peu de ça
M. Drouin: Ce qu'on dit, c'est que nous ne pouvons pas
déplacer des horaires d'employés à temps partiel, en
enlever certaines journées pour en ajouter le dimanche, compte tenu du
service personnalisé et du personnel qualifié qu'on doit avoir.
Ce qu'on dit, c'est que le nombre d'heures rémunérées dans
une semaine va augmenter en
proportion du nombre d'heures ouvertes. On ouvre déjà
entre 60 et 65 heures par semaine; ajoutez huit ou dix heures d'ouverture le
dimanche et vous avez votre pourcentage qui s'ajoute. L'autre partie de votre
question était sur...
Mme Marois: Ce que je disais, c'est que vous n'êtes pas
capables d'aller récupérer, dans le fond, l'investissement que
ça vous demande en termes d'achalandage et, donc, vous êtes
obligés de répercuter dans les prix, à ce
moment-là, le coût supplémentaire.
M. Drouin: Parce qu'on ne croit pas que le volume des ventes va
être augmenté...
Mme Marois: Bon, c'est ça. Voilà!
M. Drouin: ...et le montant à dépenser va rester le
même et, au niveau d'un commerce, nous n'augmenterons pas les ventes au
détail. Ce qu'on peut prévoir, c'est qu'il pourrait y avoir un
déplacement du commerce de petite surface vers des plus grandes surfaces
et, donc, la fermeture d'un certain nombre d'établissements.
Mme Marois: De petits détaillants. M. Drouin:
Oui
Mme Marois: D'accord. Ça va, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Ça va. Est-ce
qu'il y a d'autres questions? M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Je veux juste revenir sur une chose
importante que j'ai mentionnée, l'équité. C'est important,
vous le dites et vous en faites spécifiquement mention dans votre
mémoire. Vous dites: 85 % des personnes interrogées, de votre
groupe, sont d'accord qu'on doit restreindre le genre de produits vendus le
dimanche, puis, vous dites: Par les centres de piscines, les marchés
publics, les centres de jardin. Je reviens à Botanix - Bo-tanix, je ne
dis pas que c'est le cas, mais il y en a d'autres semblables à Botanix -
j'ai mentionné tout à l'heure que vous vendez des râteaux,
vous vendez des pelles, vous vendez des brouettes. Il y en a qui vont commencer
à vendre des tondeuses. Puis, il y en a qui vendent du pavé uni.
Quand on regarde ça, est-ce que vous seriez prêts, pour ne pas
ouvrir le dimanche, à ce que le gouvernement limite cette exemption pour
s'assurer que tout ce qui peut être vendu, ce sont des fleurs ou des
produits d'horticulture?
M. Drouin: Je pense que oui. C'est pour ça qu'on a inclus
les centres de jardin dans la liste.
M. Tremblay (Outremont): Vous êtes au courant que la
Fédération des horticulteurs va venir nous faire une
présentation et va venir nous dire exactement le contraire. Vous
êtes conscients de ça. Mais vous, dans votre cas, ça
voudrait théoriquement dire que tout ce que vous pourriez vendre, ce
sont des fleurs, des produits d'horticulture. Donc, vous allez peut-être
arriver à la conclusion, pour des raisons économiques, que
ça ne donne pas grand-chose d'ouvrir le dimanche Non? Je ne sais pas. Je
pose la question. Je veux juste...
M. Piotte: Pierre Piotte. On n'est pas représentés
ici par aucun de nos Botanix, c'est difficile de vous répondre
directement, sauf que, connaissant un peu leur marché, la partie que
vous mentionnez, pelles, si vous allez chez un Botanix le dimanche, c'est quand
même une partie assez marginale de son commerce. Puis, moi, connaissant
certains Botanix personnellement - un membre du conseil, Yvon Cléroux
ici - je suis à peu près certain que si vous dites que vous
enlevez les pelles et les râteaux, il va continuer à ouvrir le
dimanche et à avoir une police pour faire le trafic à la porte
comme il le fait actuellement. J'en suis à peu près certain.
M. Tremblay (Outremont): C'est parce que, où ça
devient difficile et il y a beaucoup d'intervenants, c'est le
contrôle.
M. Piotte: D'accord. Je suis d'accord.
M. Tremblay (Outremont): Parfait. Je voulais juste avoir votre
point de vue là-dessus.
M. Piotte: C'est mon opinion personnelle, je ne suis pas un
propriétaire de Botanix, mais je suis à peu près certain
que les Botanix accepteraient de ne pas vendre de pelles parce que ce n'est pas
la partie importante de leur commerce le dimanche.
Excusez, M. le ministre, vous avez mentionné une affaire tout
à l'heure. Vous avez parlé des parties touristiques.
M. Tremblay (Outremont): Des zones touristiques, oui.
M. Piotte: Oui. Je vous donne mon opinion personnelle. Je
n'aurais pas d'objection qu'à Sainte-Agathe vous ouvriez un Podium ou,
je ne sais pas, n'importe quoi, même une quincaillerie, en zone
touristique. Mais s'il vient s'implanter à Laval et qu'il fait du
commerce dans Montréal, à ce moment, c'est le problème qui
se pose. Je pense que la zone touristique s'est éloignée des
grands centres. Je ne vois pas de danger aussi extraordinaire que... Plus elle
va être près du grand centre, plus le danger est réel. Si
vous dites le Vieux-Montréal, par exemple, zone touristique, je pense
qu'on en a parlé dans certains mémoires précédents,
à ce moment-là, il
n'y a pas d'erreur qu'il puisse se construire un magasin à
l'intérieur et venir concurrencer sur la balance.
M. Benoit: Mais, encore là, prenons la région de
Magog qui est une zone non seulement touristique, mais de villégiature,
parce que les Ro-Na vendent plus aux villégiateurs qu'aux touristes. Le
gars qui demeure dans une des 1700 chambres d'hôtel, à Magog, ne
va pas acheter des râteaux, mais le gars qui est villégiateur.
L'opposition va venir des autres Ro-Na de Sherbrooke, de Rock-Forest, qui, eux,
disent: Ce marché-là, on est pénalisés. (20 h
45)
M. Piotte: Je pense que ce qui nous fait craindre dans ces
ouvertures, c'est bien plus, comme on vient de le voir à Québec
récemment, qui voulait ouvrir le dimanche avec des choses de jeu et des
choses comme ça. Je ne pense pas qu'à Magog, demain matin, un
Eaton aille s'installer ou un magasin à départements important
qui va nous faire compétition. J'ai l'impression que notre quincaillier
de Magog ne sera pas déçu que ce soit une zone touristique parce
que ça va lui donner la permission, s'il veut, lui, d'ouvrir ou pas,
mais il n'y aura pas de grosses surfaces qui vont venir le
compétitionner comme on aurait dans les zones urbaines. En tout cas,
moi, c'est mon opinion.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée, si vous voulez remercier nos invités.
Mme Marois: Je vous remercie de votre présentation. Comme
vous savez déjà que je partage votre point de vue, je
n'élaborerai pas davantage là-dessus. Je voudrais en profiter,
peut-être, pour faire une remarque sur le téléachat. C'est
une nouvelle façon, effectivement, de commercer. Mais je pense qu'il ne
faut pas prendre prétexte d'un nouveau mode comme celui-là qui
pourrait, effectivement, fonctionner 24 heures par jour pour la commande, mais
pour la livraison et le traitement de la commande, ça pourrait
fonctionner pendant les mêmes heures d'ouverture que les commerces. Et
j'imagine que les commerces comme ceux qui sont devant nous et d'autres
pourraient avoir aussi assez d'imagination pour inventer leur propre petit
système.
Cela dit, je vous remercie de votre présentation.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre. M.
Piotte: Merci de votre accueil.
M. Tremblay (Outremont): Je vous remercie d'être venus nous
éclairer sur vos commerces. On va prendre en considération vos
remarques dans la décision qu'on aura à prendre. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie le Groupe Ro-Na Dismat pour sa
présentation et invite à la table des témoins le groupe
suivant qui est l'Association des détaillants de matériaux de
construction du Québec.
Bien. Alors, si vous permettez, nous recevons l'Association des
détaillants de matériaux de construction du Québec.
Messieurs, vous avez vu nos règles de fonctionnement. Vous avez un
maximum de dix minutes très fermes pour présenter votre
mémoire et, par la suite, une partie d'échange avec les
parlementaires. À cet égard-là, au moment de
l'échange de vues, je vous rappellerais une petite règle de
procédure qui aide beaucoup nos gens qui font la transcription des
débats, celle de vous nommer à chaque intervention, même si
c'est fastidieux. Ça aide beaucoup ces gens-là qui doivent
décoder tout ça par la suite.
Alors, si vous voulez bien vous présenter et présenter
votre mémoire, nous vous écoutons
Association des détaillants de matériaux
de construction du Québec
M. Le Gac (Hervé): Bonjour. Je m'appelle Hervé Le
Gac, je suis président de l'Association des marchands de
matériaux de construction du Québec. Nous sommes venus
défendre notre position, ce soir, en compagnie de Rosaire
Désaulniers, qui exploite un commerce à Shawi-nigan. J'exploite
moi-même deux commerces à Saint-Hyacinthe. Rosaire
Désaulniers est le premier vice-président de notre Association et
Maurice Rhéaume est directeur général de notre
Association. Alors, nous vous remercions de nous donner l'opportunité,
ce soir, de nous exprimer devant vous. Il est évident que, passant en
arrière des gens du Groupe Ro-Na Dismat que nous avons
écoutés avec attention, il y a certainement beaucoup de choses
qui se sont dites, mais il en reste vraisemblablement beaucoup plus qu'on ne
pourrait en loger dans la demi-heure qui nous est impartie.
L'Association représente 720 centres de rénovation au
Québec. Je parte de 720 centres parce que ce ne sont vraiment que des
centres de rénovation, l'Association ne représentant pas
forcément des bannières autres que celles qui oeuvrent dans le
domaine de la quincaillerie et des matériaux de construction. Et le
souhait de l'ADMACQ, ce serait de voir raffermir davantage la loi et les
règlements sur les heures d'ouverture des commerces. Nous appuyons donc
les démarches de la Coalition contre l'ouverture des commerces le
dimanche, avec une réserve, toutefois: nos membres ne souhaitent pas un
réaménagement des horaires de la semaine. Les centres de
rénovation et de matériaux de construction peuvent
déjà être ouverts, on l'a vu, entre 60 et 65 heures par
semaine et c'est, croyons-nous, amplement répondre aux besoins des
consommateurs, aux aspirations des détail-
lants et aux valeurs sociales des employés.
D'ailleurs, le document d'information publié par le gouvernement
du Québec en novembre 1989, au sujet de la Loi sur les heures
d'affaires, démontre clairement que la question se pose surtout dans le
secteur de l'alimentation. Ce que nous souhaitons, M. le Président,
c'est davantage une loi-cadre plus rigoureuse et sans zone grise. Nous
recommandons que la loi ne glisse pas entre les mains des autres paliers comme
les municipalités régionales de comté.
Nous recommandons une application plus vigoureuse de la loi quant aux
amendes. Nous recommandons aussi que le gouvernement apporte des modifications
aux exemptions des marchés aux puces. On pourra peut-être
développer un petit peu. Il y a eu des suggestions qui ont
été faites tantôt et qui ne manquent pas
d'intérêt, c'est évident. On peut ajouter à
ça également le club Price qui est certainement un
phénomène. C'est récent, mais c'est non
négligeable. Nous souhaitons, M. le Président, que la commission
de l'économie et du travail saura répondre avec satisfaction aux
recommandations soumises par notre organisme.
C'était donc un petit résumé du mémoire qui
vous a été présenté. Les arguments que l'on
souhaite utiliser, c'est évidemment la qualité du service que
nous sommes à même d'apporter. Nous pensons certainement que le
fait d'avoir à faire appel... Le problème est très grave
au niveau de la qualité du personnel que l'on emploie dans nos
commerces. Nous sommes, à l'heure actuelle, à travailler sur un
programme de formation des vendeurs dans nos magasins, mais ce programme de
formation touchera autant à la qualité technique de l'information
qu'ils sont en mesure de donner qu'à leur compétence ou
qu'à leur façon de se comporter devant un client. Il est
évident que ces gens-là, à partir du moment où ils
ont une certaine qualité, auront également le souci d'aller
chercher dans leur vie une certaine qualité. Et on perdra souvent du
personnel parce qu'on lui impose des horaires qui ne sont pas des horaires
faciles, c'est-à-dire le jeudi soir, le vendredi soir et le samedi. Moi
aussi, je perds du personnel parce que je suis ouvert le samedi ou parce que je
suis ouvert le jeudi et le vendredi. On mettra donc l'emphase sur la formation
de ce personnel, mais il est évident qu'il sera limité à
40 heures. On a énormément de mal à trouver du personnel
et on a énormément de difficulté à le former. On
est en train de se créer des heures additionnelles et des
problèmes additionnels à ce niveau-là.
Mais je ne pense pas que le consommateur soit gagnant dans ce
débat-là parce que, si la seule façon de venir remplir le
nombre d'heures d'ouverture des magasins, ça va être d'embaucher
du partiel ou d'embaucher des étudiants... Le consommateur est devenu
excessivement exigeant. Il est très renseigné et il sait ce qu'il
veut. Il accepte de payer un certain prix, mais il veut de la qualité au
niveau du service. Je pense que le consommateur va perdre cette qualité
au niveau du service parce qu'il n'aura plus en face de lui du personnel
suffisamment compétent pour répondre à ses exigences.
Nous sommes convaincus, d'autre part, qu'en augmentant le nombre
d'heures d'ouverture des magasins on n'augmentera pas la capacité
d'acheter du particulier. Il déplacera son achat peut-être sur le
dimanche, mais il arrêtera d'acheter le lundi. Mais le lundi, on sera
quand même ouverts dix heures ou douze heures et il faudra être
là malgré tout. Mais on n'aura pas donné plus de
capacité d'acheter parce qu'on aura donné plus d'heures
d'ouverture.
Et le tissu social, parlons-en, le tissu familial, ça en prend un
sacre coup. On est tous propriétaires de nos affaires. Parce qu'on
travaille toujours avec du personnel un petit peu réduit, on se doit
d'être présents pratiquement de l'ouverture le lundi matin
à la fermeture le samedi soir. Alors, si on ajoute à ça le
dimanche, je pense que nos femmes et nos enfants vont arrêter de nous
reconnaître quand on va se rencontrer. On ne voudrait pas en arriver
à ce point-là. C'est un petit peu le condensé de ce qui
nous amène aujourd'hui à nous opposer à une modification
quelle qu'elle soit des heures d'ouverture des magasins.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
M. Le Gac: Merci de votre attention.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Non, j'ai cédé la parole
au député de Nicolet-Yamaska.
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Richard: Bon, alors, vous êtes radical. Vous dites:
Nous, il n'est pas question d'ajouter... Remarquez que je n'ai rien contre la
"radicalité". Vous dites: On n'ajoute rien, nous, sur semaine. Vous ne
seriez pas conciliants pour dire: II faudrait peut-être ajouter certaines
heures en semaine, par exemple? Vous êtes catégoriques pour le
dimanche et il n'est pas question du dimanche, là, mais, sur semaine,
vous ne pensez pas qu'il pourrait y avoir une adaptation au niveau du nombre
d'heures, du taux d'heures?
M. Le Gac: Non. Hervé Le Gac.
M. Richard: Alors, vous êtes intraitables, à ce
niveau-là, vous dites: C'est...
M. Le Gac: Non, on n'est pas intraitables, mais on n'a pas, si
vous voulez, je ne le pense pas, de pouvoir de décision. On vient
essayer
peut-être d'apporter notre point de vue dans la solution d'un
problème, mais on ne pense pas que ça changerait quelque chose,
ni au bien-être du consommateur, ni... Ça n'arrangerait
certainement rien pour le bien-être du personnel travaillant dans les
commerces, mais je ne pense pas que ça apporterait grand-chose. Nous ne
pensons pas que ça apporterait grand-chose au bien-être du
consommateur, parce que, chacun d'entre nous ou chaque personne habitant au
Québec travaille, en moyenne, 40 heures par semaine et les magasins sont
ouverts 62 heures. Donc, si je raisonne un petit peu clairement, on a 22 heures
d'"over" pour aller chercher, pour aller faire ses commissions dans son centre
de rénovation, ou dans son épicerie, ou chez son marchand de
vêtements. Et 22 heures de magasinage, au-delà des 40 heures de
travail, je trouve que c'est largement suffisant.
M. Richard: Vous n'avez pas de marchandise périssable dans
votre domaine...
M. Le Gac: Non.
M. Richard: ...peut-être fort heureusement. Mais si vous
vendiez des choses périssables, par exemple dans le domaine alimentaire,
est-ce que votre raisonnement serait le même, vous pensez? Selon votre
propre utilisation personnelle, est-ce que vous pensez qu'au niveau de
l'alimentation, où il y a des denrées périssables, il y
aurait lieu, à ce moment-là, de faire un correctif? Prenons pour
hypothèse que vous gardez la même vision pour le dimanche, on ne
parle pas du dimanche, mais, en semaine, est-ce que vous diriez: Là, en
alimentation, c'est peut-être différent, ou bien: Non, non?
M. Le Gac: C'est difficile de répondre, on ne
connaît pas les conditions d'approvisionnement de ces gens-là.
Est-ce qu'il rentre de la marchandise une fois par semaine, le jeudi ou est-ce
qu'ils peuvent la faire rentrer tous les jours? Quels sont...
M. Richard: Alors, je vous simplifie ça. M. Le Gac:
Oui.
M. Richard: Pour vous, selon votre utilisation à vous,
puisque vous avez sûrement un milieu famillial..
M. Le Gac: En tant qu'acheteur, en tant que client.
M. Richard: Oui, oui, c'est ça.
M. Le Gac: Moi, ils me donnent suffisamment d'heures d'ouverture,
à l'heure actuelle, ah oui!
M. Richard: Alors, vous êtes..
M. Le Gac: Non, je ne suis pas borné, si vous voulez, ou
je ne suis pas arrêté forcément, et je parle au nom des
autres, nous ne sommes pas arrêtés forcément sur des
principes, mais je considère qu'on a. pour autant qu'on soit un petit
peu débrouillards. du temps, largement assez de temps pour aller acheter
un vêtement, etc.
M. Richard: Maintenant, deuxième question, seulement au
niveau des marchés aux puces. Au niveau des marché aux puces,
vous avez l'air d'être fragiles, là-dessus, fragiles dans le sens
que ça vous tracasse. C'est quoi, votre réaction, en fonction des
marchés aux puces. Qu'est-ce que nous devrions faire avec les
marchés aux puces?
M. Le Gac: Bon! Vous avez parlé, tout à l'heure, de
l'application plus sévère de la loi actuelle qui consiste
à dire: il ne faut pas que les produits dépassent 20 $ et il faut
qu'ils soient usagés.
M. Richard: Exact.
M. Le Gac: Bon! Si l'application de ce règlement ne fait
aucun doute, c'est quelque chose qui est tout à fait acceptable. Ce qui
est beaucoup plus difficile à digérer, c'est d'avoir, à
côté de chez soi, quelqu'un qui va ouvrir le dimanche et qui va
vous vendre des blousons de cuir à 350 $, des outils Makita à 400
$ ou 500 $, alors qu'on en a dans notre magasin, et que ces gens-là,
grand bien leur fasse, arrivent à acheter, la plupart du temps, beaucoup
mieux que nous puisqu'ils arrivent à vendre quasiment à notre
coûtant à nous Ça, c'est déjà beaucoup moins
acceptable, c'est une concurrence quasiment déloyale.
M. Richard: La loi devrait être quoi.
M. Le Gac: Une application sévère de la
réglementation existante.
M. Richard: Mais vous laisseriez: 20 $ et moins pour du neuf.
M. Le Gac: Non, pour de l'usagé Le principe du
marché aux puces, c'est de vendre de l'usagé
M. Richard: Alors, c'est qu actuellement vous avez droit de
vendre de l'usagé, sauf qu'on permet, dans la loi actuelle, 20 $ et
moins pour des menus articles neufs.
M. Le Gac: Neufs. On accepterait cette chose-là.
M. Richard: Que ça reste comme ça.
M. Le Gac: Oui. Mais, par contre, qu'on applique la
réglementation actuelle avec beaucoup plus de
sévérité.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Drummond, il vous reste deux minutes.
M. Saint-Roch: Alors, je vais être bref, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Brièvement.
M. Saint-Roch: Vous avez entendu, tout à l'heure, mon
collègue de Nicolet poser la même question que j'ai eu le plaisir
de poser à plusieurs groupes. Vous mentionnez, dans votre
mémoire, que vous ne voulez pas que ce soit transféré
à d'autres paliers de gouvernement, que ce soit les MRC ou les
municipalités.
On garde le pouvoir à Québec, on dit: On est d'accord avec
vous, on fait une loi. Mais quand on en arrive à la surveillance et
à l'application, avec un système qui pourrait être
regardé aussi, bien entendu, avec les municipalités, est-ce que
vous seriez enclins à accepter, c'est-à-dire qu'on puisse
déléguer l'application au niveau municipal? (21 heures)
M. Le Gac: Je pense qu'on est tout à fait d'accord
là-dessus. D'ailleurs, vous avez fait allusion, tout à l'heure,
à un problème qui nous touche de très près depuis
deux ans, soit la réglementation sur le transport routier, sur la
sécurité et le transport routier. Je peux vous assurer que dans
une ville comme Saint-Hyacinthe, les polices arrêtent de regarder les
stops américains et surveillent votre camion. Ça rapporte pas mal
plus. Ça vaut 600 $ le plus petit coup. On ne parle pas de 20 $.
M. Saint-Roch: Je me réjouis qu'on ait fait une bonne loi
avec la loi 127.
M. Le Gac: Oui, oui, ne soyez pas inquiets. Ils savent où
aller chercher leur argent. Ils vont à la productivité.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon, la parole est à vous.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je crois que vous avez
entendu aussi mon point de vue tout à l'heure. Je ne vous le
répéterai pas. Je vais vous poser une question en ce qui a trait
à une présentation que nous avons eue ce matin. Le premier
mémoire ce matin, c'était le Regroupement des grands centres de
rénovation du Québec pour l'équité entre les
commerçants qui, lui, nous disait qu'il était pour
l'équité entre les commerçants et, pour lui, ça
voulait dire: Ouvrez. Je vous le dis. C'étaient Audet, Brico
Centre, Castor Bricoleur, Coupai, Foresbec, Lumberland, Pascal, Ravary,
Val Royal, j'en oublie à peine deux ou trois. Ces gens disaient
même: "La libéralisation complète des heures d'affaires est
l'approche la plus équitable voire même inévitable." Vous
êtes dans les mêmes secteurs d'activité et vous
différez de point de vue. Comment expliquer que vous différiiez
de point de vue?
M. Le Gac: II y a une raison très particulière et
qui me vient à l'esprit tout de suite, c'est que tous les gens dont vous
avez fait mention sont des gens qui opèrent des surfaces de 50 000 pieds
carrés, à peu près, plus ou moins, peut-être 5000,
entre 30 000 et 60 000, vraisemblablement, et je ne pense pas que les
propriétaires de ces groupes-là passent 65 heures sur le plancher
et je ne pense pas non plus que, s'ils ouvrent le dimanche, ils passeront les
huit heures ou les dix heures d'ouverture du dimanche sur le plancher de leurs
magasins.
Tout à l'heure, on a fait mention, et je pense que dans toute
notre démarche on fait mention de la qualité du tissu social qui
existe à l'intérieur d'un magasin. On a des rapports avec notre
personnel qui sont peut-être beaucoup plus serrés,
personnalisés, chaleureux. Il est évident que dirigeant 150
personnes et au bord de ma piscine un dimanche du mois de juillet, mon magasin
peut être ouvert et ça ne me dérange pas du tout. Ce sont
eux qui travaillent et je vais mettre des gérants pour surveiller le
travail qu'ils font. Mais si j'agis en tant que propriétaire d'un
magasin employant une vingtaine de personnes, j'aurais quasiment mauvaise
conscience à les faire travailler le dimanche pendant que je me
prélasse. Je pense que je ne pourrais pas faire autrement que
d'être avec eux, peut-être, d'abord, pour aider les jeunes qui
seront certainement moins performants que les autres. Parce que les
matériaux de construction, d'abord ça ne s'apprend pas en cinq
minutes et, si vous employez du personnel temporaire, on se rend compte
très vite que l'étudiant qui va venir travailler avec nous le
samedi n'est pas du tout au courant de ce qui s'est passé pendant la
semaine, de ce qu'on a rentré comme nouveaux produits, de ce qui a
été vendu, etc. Donc, il y a une espèce de remise en cause
permanente. Donc, déjà l'emploi du personnel temporaire est
excessivement difficile. Il n'a pas de spécialisation. Alors, c'est
ça la réponse finalement: Les gros centres, évidemment,
demanderont d'ouvrir parce que, finalement, ils ne mettent pas la main à
la pâte et ça ne les dérange pas, mais les petits centres
sont dérangés par cette démarche-là.
Mme Marois: D'ailleurs, j'ai vu... Je suis contente parce que je
voulais qu'on pousse un peu plus loin cette aspect-là et,
vous-même, j'ai l'impression que chez vos marchands qui sont très
gros, il y a une petite démarcation à savoir
que c'est peut-être chez ceux-là qu'on en retrouve
quelques-uns qui seraient d'une opinion un peu différente. N'est-ce pas?
Oui.
M. Rhéaume (Maurice): D'ailleurs le plus grand centre de
rénovation au Québec qui est Goineau & Bousquet - mon nom est
Maurice Rhéaume - n'est pas en faveur d'ouvrir le dimanche. Il a deux
grands centres à Laval de 100 000 pieds et plus, mais ça en est
un qui n'est pas intéressé à ouvrir le dimanche et qui
n'est pas inclus dans votre liste.
Mme Marois: D'accord. Vous nous citez dans votre texte un
monsieur qui fait partie des Centres de rénovation DOIT et qui nous
parle de l'Ouest. On dit: "...en Alberta et en Colombie-Britannique,
l'ouverture le dimanche est permise depuis quelques années. Or,
malgré le prolongement des heures d'ouverture, nos commerçants
dans ces deux provinces ne font pas plus d'affaires que ceux du reste du pays.
En fait, nos commerçants là-bas sont épuisés et
aimeraient bien revenir en arrière." J'imagine que vous avez des
contacts avec quelques-uns de ces marchands qui vivent ces
expériences-là. Est-ce que vous pouvez nous en parler?
M. Rhéaume: Personnellement, nous n'avons pas de contact
avec ces gens-là. M. Brouillette, notre source...
Mme Marois: Dont vous vous inspirez oui.
M. Rhéaume: ...est membre, est un directeur
général de D. H Howden qui appartient main tenant à
Sodisco et qui a des succursales à travers le Canada. Ils
dépendent plutôt du bureau de Toronto ces gens-là.
Mme Marois: D'accord, ça va. Et lui, de
l'expérience...
M. Rhéaume: Oui.
Mme Marois: ...qu'il a eue...
M. Rhéaume: De ces gens-là.
Mme Marois: ...qu'il vous a traduit ce point de vue
là.
M. Rhéaume: Oui.
Mme Marois: Ça va, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Madame. M. le ministre,
avez-vous un commentaire?
M. Tremblay (Outremont): Dans votre Association, vous dites que
vous avez 720 centres. Ce n'est pas unanime sur la position Quelle est la
représentativité9 Avez-vous con- sulté? J'ai
toute une liste de personnes qui sont membres.
M. Rhéaume: 85 %.
M. Tremblay (Outremont): 85 %?
M. Rhéaume: Oui
Mme Marois: Bien, je pense que oui. C'est 85 % des
propriétaires, hein...
M. Rhéaume: Oui.
Mme Marois: ...qui sont fermement opposés.
M. Rhéaume: Dans le fond, tous ceux qui font partie de la
liste - il y a des gens qui sont passés ce matin - ont plusieurs
succursales.
Mme Marois: Ceux dont je vous mentionnais la liste tout à
l'heure.
M. Rhéaume: Les Lumberland, les. .
Mme Marois: Ce sont des entreprises à propriétaire
unique ou ce sont des entreprises de type public.
M. Rhéaume: Vous avez Val Royal, Brico Centre.
Le Président (M. Richard): Mme Marois,
députée de Taillon, vous avez le mot de la fin
Mme Marois: Merci. Je vous remercie de votre contribution aux
travaux de notre commission. Je partage le point de vue que vous
défendez et j'espère que l'on saura être sensible à
ce point de vue là et que ça se traduira par une loi. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Richard): M. le ministre, vous avez un
commentaire?
M. Tremblay (Outremont): Oui. Je voudrais vous remercier. On va
déposer un projet de loi au printemps.
Le Président (M. Richard): Merci beaucoup, messieurs,
d'avoir présenté un mémoire à la commission. Bon
retour.
Maintenant, on demanderait à l'Association canadienne des
détaillants en quincaillerie de se présenter, s'il vous
plaît.
Bonsoir, messieurs. Ça nous fait plaisir de vous revoir.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): Nous aimerions que, pour les
fins de transcription, vous présentiez vos collègues.
Association canadienne des détaillants en
quincaillerie
M. Lanouette: Certainement. À ma gauche, M. Pierre Piotte
et M. Roland Durand. Georges Lanouette représente l'Association
canadienne appelée vitement l'ACDQ.
Nous sommes une organisation qui regroupe près de 2000 membres
à travers le Canada dont près de 500 au Québec. Nous
comprenons des quincailleries, des Dismat et Ferbec, Quincailleries Pro,
Centres Doit, Home Hardware, Ferplus, Bâti Tout, Novico, Ro-Na, Unitotal,
Montex, Pascal, Brico Centre, Marchands-Unis et BMR.
Nos membres s'opposent massivement à l'ouverture des magasins le
dimanche. Au Québec, le membre type de l'ACDQ est un propriétaire
exploitant franchisé qui travaille six jours par semaine pour un total
de 57 heures, soit chaque minute d'ouverture.
Je pense que je me répète un peu sur ce qu'on a dit tout
à l'heure, je ne pense pas de tout lire.
Nous avons des contacts aussi avec des personnes de l'extérieur
comme l'Alberta dont un ami et je peux vous en parler, parce qu'on posait une
question tout à l'heure; il souffre de ce phénomène. Ce
n'est pas facile pour la vie familiale, mais ça ne leur rapporte pas
plus que ça ne leur rapportait avant parce que le commerce est seulement
distancé sur sept jours au lieu de six. Leur chiffre d'affaires est
à peu près pareil, excepté que leurs dépenses ont
augmenté.
Je pense que, dans les arguments qu'on a eus, qui nous surprennent un
peu parce que, dans les questionnaires à la radio, on entend souvent des
gens a qui on demande s'ils aimeraient faire des achats le dimanche, on oublie
une question primordiale: Est-ce qu'ils seraient prêts à payer
plus? On a donné l'argument, tout à l'heure, que ça
coûterait de 10 % à 15 % de plus d'opération pour aller
chercher notre coût du dimanche.
Une voix: Cela a-t-il fait un...
M. Lanouette: Ah ça? Non, à peu près pas. On
a déjà des problèmes énormes à se trouver du
personnel. Je pense qu'on a à peu près tout dit tout à
l'heure sur les grandes entreprises, que les grandes surfaces prendraient la
place des petites surfaces. Il y a aussi un facteur assez important C'est que
s'il y avait du travail sept jours par semaine, je crois que - dans notre
rapport, ici, on le mentionne - des services des gouvernements seraient
obligés d'être ajoutés comme les garderies qui seraient
obligées d'être ouvertes sept jours par semaine, le transport en
commun qui serait à temps plein sept jours par semaine. Il y aurait
certainement des phénomènes comme des maladies additionnelles
parce que ça ferait un stress additionnel, ce serait des dépenses
additionnelles même pour le gouvernement.
On demande au gouvernement de bien penser à ça pour garder
les entreprises, dans le moment, avec une période de repos,
préférablement le dimanche.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Saint-Maurice.
M. Lemire: J'aurais quasiment envie de vous poser cette question.
Tantôt on a parlé du personnel qualifié. Dans le domaine de
l'alimentation et dans votre domaine à vous autres, vu que vous avez
beaucoup d'expérience, le personnel des deux catégories, est-ce
que vous pensez que, dans votre domaine, soit dans les quincailleries ou dans
les matériaux, ça prend un personnel qui est plus qualifié
que dans le domaine de l'épicerie, par exemple?
M. Piotte: Mon nom est Pierre Piotte. Je peux vous
répondre. Vous venez de passer une loi, l'an passé, seulement au
niveau des insecticides qu'on vend beaucoup. Je suis dans un milieu, moi,
à ville Mont-Royal où on vend beaucoup d'insecticides et vous
allez demander de suivre des cours une semaine, peut-être un mois,
prochainement pour ça. Je pense que ça répond
partiellement. Si vous êtes allés dans une quincaillerie et que
vous avez acheté de la peinture... D'ailleurs, chez nous, tout ce qu'on
donne, ce sont des conseils. On est des médecins de travaux.
Je ne le sais pas, je ne fais pas l'épicerie, c'est mon
épouse qui la fait plus que moi. Je n'ai pas le temps, je suis toujours
dans mon magasin. Mais quand elle va chercher une boîte de fèves
elle est souvent plus au courant que le commis qui va la servir, tandis que le
client qui vient chez nous ne connaît pas la marchandise. Il a besoin
d'explications et c'est important qu'on ait des gens qualifiés.
M. Lemire: Moi, je regarde, vous avez un magasin qui est quasi
centenaire. Et vous avez vu l'évolution depuis des années dans
tous les commerces...
M. Lanouette: Pas centenaire, moi, là. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Lemire: Mais c'est ça. J'y ai bien pensé. C'est
votre commerce qui existe depuis 1800. Vous avez vu l'évolution de tout
ça. Moi, en tout cas, je constate moi-même parce que j'ai
déjà été emballeur... Je travaillais pour Steinberg
quand j'étais étudiant, à l'âge de 16 ans, 17 ans ou
18 ans. J'ai constaté, c'est drôle - je ne sais pas si vous avez
la même opinion que moi - qu'à cette époque-là les
gens avaient toujours des gros paniers de provision. J'ai déjà vu
des dames arriver à la caisse avec deux ou trois paniers parce qu'elles
faisaient des épiceries d'une
semaine, les familles étaient plus grosses, il y avait plus de
monde dans la même famille. Vous, vous avez vécu tout ça.
Est-ce que vous constatez aujourd'hui, que les paniers de pro-,don ont
diminué et que les gens font des plus petites épiceries? Vous ne
faites plus l'épicerie pour une semaine, aujourd'hui. Est-ce que vous
avez constaté ça?
M. Lanouette: Si vous me permettez, certainement qu'aujourd'hui
il y a beaucoup plus de monde qui appelle Saint-Hubert Barbecue et la pizzeria
du coin. Anciennement, ce que je connais de chez nous, tout se faisait dans la
maison; à partir de la farine on faisait un pain. Dans ce
domaine-là, oui, certainement que le monde étend peut-être,
pour des questions monétaires aussi, ses achats à deux
reprises.
Vous parliez de la compétence de nos employés. Je pense
que c'est ça qui fait la différence d'avoir de la
compétence chez nos employés. On opère un commerce, nous,
qui est spécialisé en quincaillerie industrielle. Ça
demande pour nous à peu près un an de formation pour mettre un
commis dont on est assurés. Vous savez, dans le domaine industriel, si
un bonhomme donne un mauvais item, vous avez une poursuite qui peut être
importante. (21 h 15)
M. Lemire: Ça veut dire que le problème, c'est que
la loi a été charriée pendant des années; on
s'aperçoit que tout le monde essaie de passer outre à la loi.
Vous avez vu toutes sortes d'ouvertures, des commerces qui ont des grandes
surfaces et qui vendent de tout. Ça veut dire que, dans le domaine de
vos spécialités, le grand malaise ne se retrouve pas chez vous
dans le moment, il se retrouve plutôt dans l'alimentation.
Une voix: Oui.
M. Lemire: Ça veut dire que si, ensemble, on a vécu
une période d'évolution dans la société, je ne sais
pas si vous avez remarqué la même chose que moi, mais il y a eu
une période où les dépanneurs sont arrivés en
grande et se sont spécialisés davantage et ont pris une part du
marché, peut-être des surfaces qui étaient dans le milieu.
Là, dans le moment, on s'aperçoit que les gens ont une habitude,
qu'ils sont habitués d'aller chercher leurs spécialisations,
c'est-à-dire leur charcuterie, les pâtes alimentaires, beaucoup de
choses le dimanche. Trouvez-vous que, dans le moment, avec la commission
parlementaire et en écoutant les gens, on devrait donner plus de chance
aux clients, c'est-à-dire aux consommateurs du Québec, d'avoir un
peu plus d'heures dans le domaine de l'alimentation et être plus
sévères dans votre domaine?
M. Lanouette: Disons que quand on parie d'alimentation, on ne
parle plus d'alimentation...
Vous savez, je pense que le gros problème débute à
la pharmacie. Une pharmacie, ce n'est plus une pharmacie. Si je pouvais
disséquer leurs ventes, je pense que ça ne tiendrait pas à
plus de 20 % en produits pharmaceutiques, le reste, les 80 % sont une des
compétitions de votre domaine de l'alimentation. Je ne doute pas qu'ils
aient des problèmes sévères. Il y a eu la phase des
dépanneurs qui, dans le moment, sont très populaires, qui ouvrent
24 sur 24, ceux qui veulent et ceux qui peuvent, mais..
M. Lemire: Je ne veux pas étirer plus le temps, je veux
juste, en conclusion, vous dire que j'ai l'impression que, dans le moment, on
assiste à une guerre des marchés.
M. Lanouette: Ah bien oui! Ah oui! Définitivement.
M. Lemire: ...et ça se joue sur la tête des
consommateurs.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): J'ai lu que vous disiez dans votre
mémoire, - et c'est bien, - que c'est la Loi sur l'ouverture des
magasins le dimanche la mieux pensée au Canada, alors que nous, on est
d'accord avec. C'est-à-dire que l'Opposition est d'accord avec nous que
c'est un chef-d'oeuvre d'incohérence. Mais c'est juste une petite
remarque.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): C'est juste une petite remarque.
M. Lanouette: Si elle est appliquée Des voix:
Ah!
M. Tremblay (Outremont): 2000 membres au Canada, 500 au
Québec. On a reçu des groupes ce matin comme Pascal, BMR et Brico
Centre qui sont de vos membres et qui sont venus nous dire qu'ils sont en
faveur de l'ouverture le dimanche Quel est le pourcentage? Vous dites dans
votre rapport que, massivement, vous favorisez la fermeture le dimanche. C'est
quoi, massivement? Là, j'en vois au moins trois qui sont pour.
Le Président (M. Bélanger): M Durand
M. Durand: Oui. Si je peux me permettre de vous répondre,
M. le ministre, actuellement, les Brico Centres sont membres de l'Association
canadienne aussi. Il y a en a deux au Québec. Alors, ils sont deux sur
les 200 dont on vous parle.
M. Tremblay (Outremont): Ils nous ont dit
qu'ils étaient huit dans le Montréal-métro. Une
voix: ...un projet de... M. Tremblay (Outremont): On a huit... M.
Durand: Avec les Val Royal et les... M. Tremblay (Outremont): Non. Une
voix: Oui. M. Durand: Brico, centre Brico?
M. Tremblay (Outremont): Non, Val Royal. En fait...
M. Durand: Dans la région de Montréal, c'est
possible qu'ils soient huit. Mais il faut faire la distinction entre ce qu'on
appelle Val Royal et Brico Centre. Par exemple, Val Royal est une chaîne
qui pourrait se comparer, si vous voulez, à des Métro-Richelieu,
des Provigo ou des grandes surfaces, IGA, par exemple, des grandes surfaces.
C'est une corporation. Tandis que Brico Centre, cela pourrait se comparer
à nos Centres Chantiers, par exemple, chez Ro-Na Dismat, qui sont des
genres de magasins entrepôts, une copie, si vous voulez, de ce que HOME
DEPOT est aux États-Unis. Alors, c'est un entrepôt sans services,
enfin, passons sur l'explication qu'on trouve chez un quincaillier où on
dit: II y a trois serrures; je voudrais savoir la différence entre.
Tandis que, chez Chantiers ou chez Brico Centre, vous faites votre choix et, si
vous faites une erreur, vous en subissez les conséquences. Tandis que
Val Royal, c'est un magasin à grandes surfaces et leur peur, quand vous
dites qu'ils sont un peu en contradiction avec nous, c'est qu'ils aimeraient
mieux ouvrir le dimanche si l'alimentation ouvre le dimanche parce qu'ils vont
se dépêcher à ouvrir un département
d'épicerie de la même façon que les grandes surfaces vont
se dépêcher à ouvrir un département de quincaillerie
et ça va devenir un "free for ail". C'est ce qu'on voudrait
éviter. Je suis convaincu que si vous disiez à Val Royal,
même s'ils sont venus ici et qu'ils vous ont dit qu'ils étaient en
faveur. Il n'y aura pas d'ouverture des épiciers le dimanche, je suis
convaincu que ces gens vont endosser notre position. C'est leur
problème.
M. Tremblay (Outremont): Vous n'avez pas tout à fait
répondu. Je veux juste savoir la représentativité 500,
j'aurais les 8 Brico Centres, il y a 19 Pascal, il y a 5 Val Royal, ça
fait 24, ça fait 32. 32 sur 500. Vous dites dans votre mémoire
que massivement vos membres vous appuient pour dire qu'on devrait fermer le
dimanche. Ce que je voudrais savoir, c'est ce que ça veut dire
ça, massivement, pour vous?
M. Lanouette: 80 %.
M. Tremblay (Outremont): Au Québec.
M. Lanouette: Au Québec. Oui, la requête a
été faite seulement au Québec. La demande a
été faite seulement au Québec.
M. Tremblay (Outremont): Sur les 500. M. Lanouette: Sur
les 500.
Le Président (M. Bélanger): M. Piotte, vous aviez
un complément de réponse?
M. Piotte: Au niveau de Brico Centres, il ne faut pas se leurrer.
Ce sont des magasins à plusieurs magasins. Le propriétaire n'est
pas dans son magasin, il n'est pas impliqué comme nous le sommes. Ce
sont des magasins qui ne donnent pas de service. C'est pour ça qu'ils
veulent avoir l'ouverture.
D'ailleurs, chez nous, nos chantiers chez le Groupe Ro-Na Dismat sont un
peu divisés parce qu'il y en a qui ont trois ou quatre chantiers et ils
vont ouvrir si Brico rentre; ils vont ouvrir pour ne pas avoir la
compétition, mais je pense qu'il ne sont pas - d'ailleurs, ils nous
l'ont laissé savoir - en majorité intéressés
à ouvrir, sauf qu'ils vont suivre le courant s'il y a lieu pour ne pas
perdre de compétition.
Une autre chose aussi, je pense, qui est importante au niveau
économique, et là, on va revenir un peu... Une partie de
l'Association fait partie quand même de ça, les quincailliers au
Québec, le Groupe Ro-Na Dismat qui fait un gros travail au
Québec. Ce sont tous en majorité des propriétaires uniques
avec un petit ou un moyen magasin avec des chiffres d'affaires d'à peu
près 1 000 000 $ par marchand dans la quincaillerie. La prise de
décision au niveau de l'achat pour ces 600 000 000 $ qui se sont vendus
au Québec au niveau du gros est faite à Montréal ici. Elle
est faite au Québec. Si, à cause de certaines lois, nous allons
perdre des éléments, nous allons perdre un pouvoir d'achat et,
dans la quincaillerie, vous regarderez autour, des organisations de la grosseur
de la nôtre, il y en a très peu dont la prise de décision
est faite au Québec qui viennent encourager nos manufacturiers
québécois. Je pense que c'est une partie importante, quand vous
allez penser à votre loi, d'essayer de protéger nos petits
magasins pour que cette prise de décision demeure au Québec pour
faire travailler nos industries du Québec.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, je
cède ta parole à Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Comme on s'est
déjà causé d'un certain nombre de choses, je vais revenir
sur un élément de votre document.
Vous faites référence à l'expérience
onta-rienne un peu plus. Vous dites à la page 7: En Ontario,
l'Association des détaillants, etc., ainsi qu'un bon nombre de
détaillants, d'unions, de municipalités et les membres d'un
groupe pour la qualité de la vie font présentement coalition afin
de renverser la loi adoptée par le gouvernement, soit: L'option
municipale. De plus, au-delà de 3 000 000 de résidents de
l'Ontario représentés par des associations majeures sont aussi
engagés dans la même cause afin de remédier à la
situation chaotique existant actuellement en ce qui regarde les heures
d'ouverture des magasins le dimanche. Vous en parlez d'ailleurs
précédemment en disant: II y a un fonds qui s'est
créé pour essayer de remettre en question cette loi.
Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu plus, de cette
expérience qui se vit en Ontario?
M. Lanouette: Dans le moment, c'est une guerre. Il n'y a pas de
gagnant encore. L'ACDQ a dépensé près de 100 000 $
à contribuer aux organisations qui s'appellent CAOSS, c'était un
chaos.
Mme Marois: Oui. Ah! Ah!
M. Lanouette: À date, c'est dans les mains du gouvernement
un peu comme dans le moment ici, je pense, il n'y a pas eu de décision
de prise encore. On ne le sait pas. Ils vivent un autre
phénomène, eux. Ils ouvrent le soir, hein?
Mme Marois: Oui.
M. Lanouette: J'ai des amis en Ontario qui travaillent de 9
à 21 heures tous les jours de la semaine. Ça fait que s'il y a le
dimanche, c'est soit le suicide ou le divorce pour eux.
Mme Marois: Ou la fin des affaires.
M. Lanouette: II y a cela aussi qui pourrait venir après,
pour nous autres. Quand l'ouverture du dimanche va arriver, le lundi, le mardi,
le mercredi vont y passer. Puis, après, le samedi va y passer.
Mme Marois: Oui, c'est ça. Je vais me permettre une
remarque, un commentaire. Si vous avez le goût de réagir à
ça, vous le faites. Sinon, on se reprendra à un autre moment.
Un sentiment que j'ai depuis le début de nos travaux, - ça
fait peu de jours, mais déjà il se dégage un certain
nombre de choses - c'est que même des gens d'affaires qui ont de grandes
surfaces dans l'alimentation ou dans votre domaine, la quincaillerie, les
matériaux de construction ou quoi que ce soit, même ces
gens-là qui nous disent: On est d'accord avec l'ouverture le dimanche,
quand on leur pose privément la question, ils nous disent. Dans le fond,
on aimerait mieux ne pas ouvrir, mais comme on croit qu'on ne réussira
pas ou qu'on n'arrivera pas à adopter une loi qui a des dents, qui va
s'appliquer et qu'on craint que ça continue dans le sens où c'est
engagé actuellement, bon, il y a les Jean Coutu qui font de la
quincaillerie, qui font de la vente de toute espèce de produits, qui
vont continuer à le faire, alors on se dit: On va continuer à se
faire prendre des parts de marché. Donc, on n'a pas le choix. Demandons
au gouvernement d'ouvrir, comme ça, ça nous mettra au moins sur
le même pied qu'eux et puis on jouera la concurrence de façon un
petit peu plus loyale.
Mais, dans le fond, quand on pose la question, privément, - et je
le répète, je le sais là, c'est volontaire, - ils
aimeraient mieux ne pas ouvrir Est-ce que je me trompe dans mon
évaluation? Et si je me trompe, dites le moi, ça ne va pas me
choquer
Le Président (M. Bélanger): M Durand
M. Durand: Moi, je me permettrais de vous dire, Mme Marois, que
cette attitude pâte molle des commerçants vient de la
non-application de la loi. C'est assez clair parce que les gens ont peur qu'en
ouvrant... Moi, j'ai une surface où je peux me permettre peut-être
d'ajouter un département d'épicerie, si je viens à en
être obligé. Et je peux faire toutes sortes d'actions.. Dans le
fond, comme vous me voyez ici, comme vous me voyez en privé, je ne veux
rien changer à mon opération parce que je vais me lancer dans un
domaine que je ne connais pas et je vais faire ça parce que la
compétition m'y force Le contraire va arriver. L'épicerie ouvre
le dimanche et moi je n'ouvre pas. Si on le lui permet et que l'application de
la loi n'est pas sévère, le gars va ouvrir un département
de quincaillerie, va dépanner tout le monde et il va me laisser, moi,
avec les résidus ou les choses qu'il n'est pas capable de régler
pour le début de la semaine
Alors, c'est pour ça qu'il faut que ce soit très
très strict et que l'application soit très sévère,
que vous ayez des normes, quon les suive. Et si tu n'es pas dans le train, tu
es pénalisé. Il va falloir que ce soit de cette
façon-là, je pense.
Mme Marois: D'accord. Je vous remercie. Ça va, M. le
Président, en ce qui me concerne.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous voulez
remercier notre groupe?
Mme Marois: Je vous remercie de la contribution que vous apportez
à nos travaux. Il est toujours intéressant de parler à des
gens d'expérience. J'espère que votre expérience aura
inspiré le gouvernement. Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, M. Lanouette. M. Durand,
M. Piotte, pour toute l'information que vous nous avez donnée et je peux
vous assurer qu'on va la prendre en considération dans notre
réflexion. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie l'Association canadienne des
détaillants en quincaillerie, vous souhaite un bon retour et ajourne ses
travaux au mardi 6 mars, à 10 heures. Je répète, le mardi
6 mars, à 10 heures. Merci.
(Fin de la séance à 21 h 29)