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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 3 février 2005 - Vol. 38 N° 48

Consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec - Contexte, enjeux et questionnements


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente et une minutes)

Le Président (M. Jutras): Si vous permettez, étant donné que nous avons quorum, nous allons commencer nos travaux, et je déclare donc la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle le mandat de la commission. Alors, l'objet de cette séance est de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.

Alors, avant d'aller plus loin, est-ce que, Mme la secrétaire, vous avez des remplacements à annoncer?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Soucy (Portneuf) remplace Mme James (Nelligan).

Le Président (M. Jutras): Alors, je demanderais, autant à nos invités qu'aux membres de la commission et au personnel, là, tous ceux qui peuvent avoir des téléphones cellulaires en leur possession, de bien vouloir les fermer.

Alors, je donne lecture de l'ordre du jour. Alors, à 9 h 30, nous entendons l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, qui sont déjà prêts devant nous; à 10 h 30, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante; à 11 h 30, la Coalition pour le transport en commun. Nous suspendrons nos travaux à 12 h 30 pour reprendre à 14 heures, et, à 14 heures, nous entendrons l'Association de l'aluminium du Canada; à 15 heures, Alcoa Canada; à 16 heures, Bechtel Québec ltée; à 17 heures, Mme Margaret Kraenzel et M. Eric Chouinard; pour ajourner nos travaux à 18 heures.

Alors, je rappelle la façon de procéder. C'est une heure pour chacune des présentations. Alors, le groupe invité a 20 minutes pour faire sa présentation; par la suite, il y a 20 minutes pour les députés du groupe ministériel et, par la suite, 20 minutes pour les députés de l'opposition.

Auditions (suite)

Alors, les représentants de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable sont déjà installés, ils sont déjà prêts à procéder. Alors, je vous demanderais donc de vous identifier, là, le président ou celui qui va faire la présentation avec les personnes qui l'accompagnent.

Association québécoise de la production
d'énergie renouvelable (AQPER)

M. Cerceau (Jacky): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous accueillir aujourd'hui. Je suis Jacky Cerceau, président du conseil de notre association, et je désire tout d'abord présenter ceux qui m'accompagnent. Alors, à ma gauche, M. Richard Legault, qui est président d'Hélimax; ensuite, à ma droite, M. Claude Descôteaux, qui est le directeur général de notre association; et, plus loin, M. Claude Audet, qui est président de Boralex.

Des voix: Bonjour.

Le Président (M. Jutras): Alors, vous avez donc 20 minutes pour votre présentation. Vous avez entendu ce que j'ai dit quant à la façon de procéder, alors je vous invite à y aller maintenant.

M. Cerceau (Jacky): Merci. Notre association existe depuis 15 ans. Bien qu'elle soit relativement discrète, elle a toujours participé, depuis sa création, aux grands débats sur l'énergie. Elle peut le faire avec d'autant plus de confiance et de compétence qu'elle regroupe la plupart des entreprises indépendantes du Québec qui produisent de l'énergie, qui oeuvrent ici et ailleurs, hein, dans le champ des énergies renouvelables. Elles ont notamment développé une expertise concrète, autant dans l'hydroélectricité que dans l'éolien, en faisant preuve de productivité et en affichant des prix très concurrentiels. Ces entreprises assument seules et à leurs dépens la plupart des risques. Cela fait bien sûr partie de l'exercice de leur métier. Mais leur travail a cependant été et est encore l'objet de graves préjugés, qui sont souvent alimentés par des affirmations démagogiques ou encore par une méconnaissance des mécanismes de l'énergie et de l'économie. Nous espérons vivement que les travaux de cette commission permettront de replacer les choses dans leur juste perspective.

D'entrée de jeu, il convient d'ailleurs de dire quelques mots sur la symbiose qui existe nécessairement entre les deux mondes de l'énergie et de l'économie, hein, qui sont l'affaire de tous. Dans l'introduction de notre mémoire, nous avons tenu à rappeler quelques principes de base qui vont peut-être sans le dire mais qu'il vaut mieux réitérer dans ce forum où ils menacent d'être oubliés, voire carrément ignorés.

Premièrement, l'énergie, et particulièrement l'électricité, est un facteur incontournable du progrès économique et social de toute société moderne, à moins qu'on ne rejette la modernité elle-même.

Deuxièmement, les objectifs et les contraintes ne sont pas les mêmes partout. Par exemple, la Norvège, qui est riche en pétrole, dispose également de cours d'eau qui ressemblent à ceux du Québec. Par contre, la Belgique, qui a du charbon, ne dispose que de 1,5 % de l'hydraulicité de la Norvège. En d'autres mots, il y a une énorme différence entre les pays dotés de grandes ressources naturelles, surtout si elles sont renouvelables, et ceux qui n'en ont pas. Une grande différence aussi entre les pays qui peuvent exporter et ceux qui ne le peuvent pas, qui importent ou qui se tournent vers des formes d'énergie comme le nucléaire, le charbon ou le gaz naturel.

Troisièmement, il faut en conséquence se garder d'emprunter servilement des comportements qui proviennent de pays différents du nôtre et qui sont assujettis à des contraintes impératives de prix ou d'économie d'énergie.

Quatrièmement, la notion si populaire de développement durable implique clairement le désir de se développer et ne doit pas servir d'alibi à l'immobilisme.

Cinquièmement, le Québec a la chance inouïe de disposer d'un énorme potentiel d'énergie dont la mise en cause depuis un siècle explique largement le niveau de vie atteint par les Québécois. Qui plus est, il s'agit d'une énergie renouvelable, qu'on doit continuer d'exploiter intelligemment, dans le respect de conditions essentielles comme la préservation de la qualité de l'air et de l'eau ainsi que la transmission de ressources naturelles renouvelables aux générations futures.

M. le Président, les entreprises de chez nous ont démontré jusqu'à maintenant que la chose était faisable et qu'elle peut être poursuivie selon les règles propres à chacun des secteurs que nous allons maintenant examiner.

Tout d'abord, je m'exprimerai pour l'hydroélectricité. Tous les pays, développés comme en voie de développement, qui ont un grand privilège de disposer de ressources hydrauliques ont d'abord recours à cette forme d'énergie parce que la preuve a été abondamment faite qu'elle était fiable, économique, écologique, renouvelable et durable, avantageuse pour les communautés locales.

Le Québec dispose pour sa part d'un immense territoire doté d'une exceptionnelle quantité de rivières de très grande taille. Ce phénomène, doublé des extraordinaires réalisations à grand gabarit faites par Hydro-Québec, a en quelque sorte occulté la présence de milliers d'autres petits cours d'eau, lesquels font l'envie de tous les pays industrialisés, y compris les États-Unis d'Amérique. On en est même venu à laisser aller en désuétude des sites déjà aménagés disposant d'un potentiel substantiel.

Bien que modestes par rapport à Hydro-Québec, nos entreprises fournissent néanmoins de l'ordre de 300 MW d'énergie hydraulique au réseau d'Hydro-Québec. C'est loin d'être négligeable, à une époque où chaque mégawatt compte, soit pour satisfaire notre demande intérieure, soit pour permettre l'entretien de nos installations, soit pour bénéficier des revenus très élevés reliés à l'exportation. À cet égard, les petites centrales sont l'allié objectif d'Hydro-Québec parce que leur énergie est jugée verte par les Américains, ce qui n'est pas le cas pour les grandes centrales.

Il est aussi important de souligner que les petites centrales peuvent être réalisées deux fois plus vite que les grands projets d'Hydro-Québec. À cause de la flexibilité des entreprises, les petites centrales sont désormais construites à des coûts inférieurs à ceux des grands projets actuellement en développement et à des coûts substantiellement moindres que les petits projets entrepris par Hydro-Québec.

Le financement, l'exécution et la gestion des petites centrales ne sont pas à la charge d'Hydro-Québec, qui reçoit cependant l'énergie à un prix avantageux. Les petits projets apportent une diversification des sources d'approvisionnement au réseau d'Hydro-Québec. Ces projets également sont habituellement situés à proximité des populations locales et ils génèrent à leur avantage d'importantes retombées économiques et financières durant une très longue période.

n (9 h 40) n

L'arrivée des petites centrales est une contribution très concrète au développement tant désiré par toutes les régions du Québec. Les entreprises privées doivent réaliser ces projets en accord et même en association directe avec les institutions locales, comme les MRC. De très intéressantes formules ont d'ailleurs été mises au point.

Par ailleurs, il n'est pas exact, loin de là, de dire que les petites centrales détruisent l'environnement. Le plus grand soin, bien au contraire, est apporté à l'insertion harmonieuse des installations dans le milieu, et des efforts particuliers sont consentis pour rehausser l'utilisation récréotouristique des cours d'eau. Comme l'ont démontré les études d'Hydro-Québec, il y a une très grande et fructueuse synergie entre les sportifs et les grands réservoirs, comme Baskatong, le lac Taureau ou le barrage Gouin. C'est aussi le cas pour des petites installations.

Nous avons eu l'intuition que beaucoup de critiques provenaient d'une méconnaissance des réalités économiques, énergétiques et environnementales de petits groupes qui ne reflétaient pas l'opinion générale. C'est pourquoi nous avons demandé à Léger Marketing d'effectuer, du 12 au 16 février, un sondage sur ces questions. Je vais vous en lire les faits saillants.

Au Québec, seulement une personne sur cinq sait que les chutes Niagara, qui accueillent 10 millions de personnes par année, sont le lieu d'une production d'électricité deux fois plus grande que Manic-5; 60 % des Québécois ignorent que plusieurs petites centrales se sont mérité des prix et des félicitations pour leur aménagement récréotouristique; ayant été informés de la valeur économique de l'eau, 78 % des Québécois se sont déclarés favorables aux petites centrales hydroélectriques; il est d'ailleurs symptomatique que 72 % aient déclaré vouloir être mieux renseignés sur l'impact économique et environnemental des petites centrales; enfin, si on doit produire davantage d'électricité, 92 % des Québécois se déclarent favorables au développement simultané de l'hydraulique et de l'éolien.

En parlant de l'éolien, cela m'amène à passer la parole à mon collègue Richard Legault. Merci.

M. Legault (Richard): Merci, M. Cerceau. M. le Président, mesdames et messieurs, comme vous avez pu le constater à la lecture de notre mémoire, la filière éolienne se classe extrêmement bien par rapport à tous les enjeux soulevés dans le document de travail préparé par le MRNFP.

Un aspect de la filière éolienne requiert selon nous toutefois certaines clarifications: il s'agit du prix de revient de cette nouvelle filière au Québec. Au même titre qu'il est important d'entamer le débat sur le prix de revient d'électricité, il nous semble tout aussi important de bien connaître le coût de production des différentes alternatives qui s'offrent aux Québécois pour les années à venir. Or, plusieurs affirmations laissent entendre que l'électricité de source éolienne est coûteuse. Nous traiterons donc du coût de l'éolien en prenant en compte ses trois composantes de base, à savoir le coût de production du kilowattheure éolien, le service d'équilibrage et le coût de transport de l'énergie éolienne.

Comme première composante donc, notons le prix payé du kilowattheure dans le cadre des récents contrats signés avec Hydro-Québec Production, soit moins de 0,06 $ du kilowattheure. Quant au projet découlant du dernier appel d'offres mené par Hydro-Québec Distribution, le prix moyen est de 0,065 $ du kilowattheure mais en dollars de 2007. Cela représente, lorsque ramené en dollars de 2005, 0,0625 $ du kilowattheure. Soulignons que ce prix, très compétitif, permet en plus d'offrir à la région de la Gaspésie?Les Îles des retombées significatives découlant du contenu local, allant jusqu'à 60 %.

Au coût du kilowattheure, de l'ordre donc de 0,06 $, s'ajoute un supplément de 0,09 $ à titre de service d'équilibrage, afin d'offrir une plus grande fiabilité aux parcs éoliens en les couplant avec les gigantesques réservoirs d'Hydro-Québec. De l'avis de plusieurs incluant Hydro-Québec Production, ce montant de 0,09 $ du kilowattheure n'est encore qu'une base de discussion. Il est possible, voire probable que ce chiffre diminue de manière significative. En effet, l'expérience commerciale américaine commence à démontrer qu'un tel service d'équilibrage pour un si faible niveau de pénétration de l'éolien sur le réseau justifierait plutôt un coût de l'ordre de 0,02 $ à 0,05 $ le kilowattheure.

Dans un même ordre d'idées, l'éolien offre des avantages indéniables dus, entre autres, au fait que la grande majorité de la production éolienne au Québec survient durant les mois d'hiver, au moment même où la demande est à son maximum.

La troisième composante du coût de l'éolien concerne le renforcement nécessaire au réseau gaspésien de transport d'électricité. Selon les informations publiques disponibles, il faudrait injecter quelque 400 millions de dollars au réseau de transport gaspésien afin d'acheminer les futurs kilowattheures éoliens. Cet investissement représente un coût moyen de 0,013 $ par kilowattheure produit afin d'en amortir le coût. Ces coûts ne devraient toutefois pas être imputés à la filière éolienne, puisque le choix de la Gaspésie pour la réalisation des parcs éoliens découle d'une décision gouvernementale, louable en soi, visant en particulier le développement économique de la Gaspésie. En effet, 1 000 MW de capacité éolienne, bien répartis sur le réseau d'Hydro-Québec, ne nécessiteraient jamais un tel investissement. Au même titre et afin d'illustrer notre propos, il est évident que l'ajout de 1 000 MW de puissance en provenance de n'importe quelle source de production conventionnelle, lorsqu'installée à Gaspé, aurait aussi nécessité un renforcement significatif du réseau de transport d'Hydro-Québec.

Considérant ce qui précède, nous évaluons le coût typique de l'éolien sur le territoire québécois, lorsque stratégiquement localisé, de l'ordre de 0,06 $ à 0,07 $ le kilowattheure. Vous avez d'ailleurs un graphique qui démontre l'évolution du coût depuis une vingtaine d'années. De plus, il est important de prendre en considération les points suivants, lesquels ont un impact non négligeable sur le coût réel de la filière éolienne, soit: premièrement, la réduction anticipée du prix de revient de la filière éolienne au cours de la prochaine décennie; deuxièmement, la possibilité d'une aide fédérale dans le cadre du programme d'encouragement à la production d'énergie éolienne, laquelle, si disponible, peut réduire le prix de revient de l'éolien de l'ordre de 0,05 $ le kilowattheure; troisièmement, la création d'un actif potentiel en matière de crédits de gaz à effet de serre offre certes une valeur, par opposition à un passif potentiel dans le cas des filières polluantes; et, quatrièmement, dans le cas de l'éolien, aucun risque d'inflation découlant de l'augmentation des prix du combustible.

L'ensemble de ces facteurs démontrent selon nous la très grande compétitivité de la filière éolienne en plus de tous ses autres avantages déjà bien documentés, ce qui m'amène à vous remercier évidemment pour votre attention et à passer la parole à mon collègue Claude Audet pour vous parler de la biomasse.

M. Audet (Claude): Merci, Richard. M. le Président, mesdames, messieurs, bonjour. Très rapidement, là, on couvrira deux... peut-être deux volets de la production d'électricité à partir de la biomasse, là: c'est soit la biomasse forestière et également la biomasse urbaine.

Du côté de la biomasse forestière, on sait que les opérations forestières génèrent des quantités importantes de résidus de bois: des écorces, des branches, des souches, des troncs d'arbres, etc. Par contre, on doit admettre qu'on utilise principalement les écorces soit pour... de plus en plus convoitées pour le paillis ou encore pour la production d'énergie utilisée dans plusieurs papetières comme source de production de vapeur puis également comme source de production d'électricité lorsque prévu.

Le point que je voudrais faire sur ça, c'est que je crois qu'il y a tout un développement à faire au niveau de la récupération des branches, des souches, tout le bois qu'on laisse finalement en forêt, là, qu'on n'utilise pas, qui, si on se compare au Nord-Est américain, c'est déjà tout développé. Sur les terres privées, les gens font vraiment le nettoyage de leurs parterres de coupe, puis ça donne naissance à une industrie ou à un support supplémentaire, en termes de biomasse, pour les centrales thermiques. Donc, ici, au Québec, on a sûrement des entrepreneurs qui seraient intéressés.

Je regarde, on le fait dans le Nord-Est américain, on fournit des équipements, des remorques, on fournit des déchiqueteuses qui sont adaptées, et tout ça, pour faire en sorte qu'on puisse mettre sur le marché ces résidus-là qui autrement sont perdus. Ça fait que, dans la projection, là, de travailler sur les nouvelles autorisations sur les aires de coupe, tout ça, là, je pense que c'est une chose qui pourrait être intégrée. C'est certain que, si on laisse les branches un peu partout dans le bois, là, qu'il n'y a personne qui va être intéressé à ramasser ça, mais, si on intègre ça aux opérations, si on a des aires prévues pour l'accumulation des branches ou du bois qu'on ne peut pas utiliser autrement, bien il y a des entrepreneurs qui vont suivre, qui vont pouvoir produire suffisamment de copeaux avec ça pour que ce soit intéressant pour la production d'énergie. Donc, c'est de la matière qui existe, mais il s'agit simplement de développer une petite industrie autour de ça, là, pour faire en sorte qu'on puisse bien en profiter. C'est autant de pétrole qui est remplacé, c'est autant d'énergie qu'on peut produire avec ça.

n (9 h 50) n

Pour vous situer, au Québec, on a 10 sites de production d'énergie à base de biomasse, totalisant environ 200 MW de capacité. On produit également de la vapeur, parce que souvent on retrouve, associée à la production d'électricité, la production de vapeur, ce qu'on appelle une cogénération; c'est la situation qui est la plus avantageuse. Par contre, à certains endroits, on n'a seulement qu'une centrale thermique. Ça donne lieu à une production d'environ 1,7 million de mégawattheures par année. Sur le 160 $ du mégawatt ou à peu près, là, ça va vous donner, incluant le prix de la vapeur, là, 150 millions de revenus bruts par année. C'est quand même intéressant, là, en termes de valeur économique, puis ça permet d'utiliser quelque chose comme 3 millions de tonnes, actuellement, de résidus. Ce qu'on n'utilise pas, on le transfère du côté du nord-est américain; il y a quand même des surplus, il y a peut-être 1 à 2 millions de tonnes actuellement qu'on transfère, là, à tout moment du côté des États-Unis seulement pour et la production de d'énergie à partir de biomasse, et aussi le paillis, qui est un gros compétiteur pour nous autres. Donc, il y a là, je pense, une source d'énergie importante qu'on peut développer puis que facilement on peut, à notre avis, intégrer ça aux nouvelles règles de coupe forestière qu'on va bientôt, je pense, voir arriver.

Du côté de la biomasse urbaine, je pense qu'il y a là aussi un potentiel important. Déjà, des petits entrepreneurs récupèrent une certaine quantité, là, soit sur des sites d'enfouissement ou ailleurs. Enfin, à titre d'exemple, sur le site d'enfouissement de la ville de Montréal, ce qu'on appelle le complexe Saint-Michel, là, bien il y a 40 000 tonnes de bois qui se récupèrent là chaque année, puis on le déchiquette, puis, ce qu'on fait avec, c'est qu'on... pour le moment, on le transporte aux États-Unis pour faire de l'énergie, là, mais il n'y a rien qui empêche de développer, à travers les milieux urbains, ces collectes-là, de bois, soit du bois de construction ou du bois de démolition, qui va faire que c'est une source très importante de matières qu'on peut utiliser pour produire de l'énergie électrique ou de la vapeur. Ces résidus-là sont très secs; utiliser seulement que de ces résidus-là, ça pourrait être risqué, ça pourrait être dangereux pour les opérations. Par contre, si on le mélange avec de l'écorce du Nord ? deux minutes ? là, à ce moment-là on réussit quand même assez bien.

Disons qu'en terminant, moi, je pense que ce qu'on a besoin pour soutenir un peu tout ça, c'est un programme qui va permettre la collecte puis la production de copeaux de bois, aussi bien du côté de la forêt que du côté des villes, là, la forêt... ce qu'on appelle la biomasse urbaine. On est certainement prêts à contribuer au développement de ces programmes-là. Ça va prendre des contrats avec Hydro-Québec, aussi, qui tiennent compte de la particularité d'opérer une chaudière à bois, là. Ce n'est pas comme une chaudière à gaz, ça, là, ça varie constamment dans le temps, là. Puis, à tout moment, si on veut, là, puis, à la fin de la journée, on établit une moyenne, mais il faut que les contrats soient flexibles par rapport à ça. Disons que c'est en train de s'adapter, en passant.

Il faut aussi... en tout cas, si on prend l'exemple de nos voisins américains, là, c'est qu'ils sont arrivés avec des crédits d'impôt pour soutenir les producteurs d'électricité à partir de biomasse, parce que, vous le savez, ce n'est pas nécessairement... ça ne se fait pas nécessairement à bon marché, puis il faut constamment, je dirais, défier les lois du marché un petit peu pour essayer de trouver des conditions intéressantes. Mais ça, si on peut avoir des crédits d'impôt pour ça, vous allez voir des projets qui vont arriver puis qui vont permettre justement de récupérer le bois qui traîne dans la forêt.

Puis, moi, je pense qu'on aura toujours le défi de limiter les délais au niveau des études environnementales. Je vais vous donner un exemple. On met une chaudière à écorce, qu'elle soit de la grosseur que vous voulez ? puis on n'a pas vraiment d'étude plus compliquée qu'il faut, on va chercher les données qu'il nous faut, mais ce n'est rien de trop compliqué ? puis, à partir du moment où on y accroche la notion d'électricité, bien c'est tout un débat qui vient de s'ouvrir. Je pense qu'on va devoir s'occuper de ça. Ça fait que, écoutez, merci de votre attention. Puis je pense que ça termine nos présentations?

Le Président (M. Jutras): Oui.

M. Audet (Claude): On va être là pour vos questions. Merci beaucoup.

Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, merci. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Bienvenue à Québec, merci pour la présentation. Je vais commencer par l'hydraulique puis aller un petit peu peut-être, après, vers l'éolienne.

L'hydraulique, en fait, à la page 12 de votre présentation, vous faites une liste exhaustive, là, de l'avantage de minicentrales hydrauliques ? vous n'avez pas besoin d'y aller, c'est juste rapidement, là ? et donc vous dites qu'il y a plein d'avantages... en fait au point de vue impacts, ils sont réduits, il y a des retombées économiques, etc.

Comment vous répondez aux gens qui disent... les groupes environnementaux, les gens récréotouristiques qui disent: Bon, bien, une minicentrale ou une petite centrale, ça change le visage de la rivière, c'est du béton qu'on met sur la rivière, ça enlève... c'est un impact visuel important, il n'y a pas de retombées, c'est juste... une fois qu'on a fini le barrage, le monde s'en vont, il n'y a plus rien après. Quelle est la réponse donnée à ces gens-là? Quelles sont les réponses?

M. Cerceau (Jacky): D'abord, en ce qui concerne l'impact visuel, ce qui est peut-être le plus frappant, enfin l'argument qui est le plus souvent cité, je dirais d'abord qu'une petite centrale, par définition, c'est discret, c'est petit, ça n'inonde pas des territoires importants, et les promoteurs en général font des efforts maximums pour rendre ces constructions agréables, au moins, ou le moins nuisibles possible à l'aspect visuel.

Je pense qu'il y a quelques exemples. Bon, notamment à Québec, on le cite souvent, mais c'est les chutes Chaudière. Je pense que c'est quand même une réussite, puisque finalement le parc qui est situé autour de cette centrale a vu sa fréquentation augmenter après la mise en service de la centrale. Donc, déjà ça, c'est comme une preuve, une approbation en fait de ce type de projet, en tout cas pour l'aspect visuel. Il y a eu d'autres exemples, que je ne citerai pas, ça pourrait être un peu trop long. D'ailleurs, en Europe, il y a des milliers de petites centrales, et ça ne semble pas nuire non plus au tourisme, puisque c'est les pays les plus touristiques au monde. Donc ça, je pourrais... on pourrait donc mettre ça en balance.

En ce qui concerne les retombées, bon, il est vrai que dans le passé il y avait relativement peu de retombées en dehors de la période de construction, puisque durant l'opération il est vrai qu'il y a relativement peu de personnes qui sont occupées. Cependant, je pense que les choses changent. Actuellement, on essaie d'impliquer les MRC dans les nouveaux projets, et ces MRC, en s'impliquant, vont récupérer des redevances et vont récupérer des revenus par le biais de leur participation financière. Donc ça, je pense que cet aspect-là va être réglé, si je puis dire, pour ce qui est de l'aspect retombées locales, et des retombées très substantielles. Je pense qu'on a donné un exemple qui est un peu la synthèse de différents projets qui illustre ce cas.

M. Hamad: Justement, j'aimerais ça, vous... C'était à la page 21 de votre mémoire, je pense, et vous donnez un exemple d'une minicentrale de 30 MW, quelles sont les retombées dans une MRC, là.

Rapidement, là, pour ne pas trop prendre de temps, un petit projet, mettons, une minicentrale ? on l'appelle mini, là, 30 MW, c'est quand même un petit peu plus gros que mini, c'est une petite, quand même ? donnez un exemple, là. Un 30 MW dans une région, dans une MRC, qu'est-ce que ça donne comme retombées économiques sur un échelon de 20 ans, comme votre exemple? Rapidement, les chiffres, là, qu'est-ce que ça peut donner?

M. Cerceau (Jacky): Vous parlez d'un projet de 30 MW?

M. Hamad: Votre exemple, à la page 21...

M. Cerceau (Jacky): Oui.

M. Hamad: ...juste le résumer davantage puis dire: Bon, bien, j'ai un projet de 30 MW dans une MRC au Québec.

M. Cerceau (Jacky): Bon. On fait l'hypothèse que la MRC est partenaire à 30 %, hein? Bon, ça peut être plus, ça peut être moins, ça dépend des moyens et des risques que veut prendre la MRC.

Par exemple, pour la MRC dans l'exemple que nous avons pris, la retombée locale serait, sur 25 ans, de l'ordre de 38 millions de dollars, qui représenteraient à peu près 43 % des revenus nets du projet, pour un investissement de 30 %.

Il y a également aussi des retombées substantielles pour le gouvernement, puisque, pour le gouvernement du Québec, il s'agirait de retombées de 36 millions de dollars. On peut rajouter en plus le fait qu'après la période d'exploitation le projet est entièrement transféré, pour 1 $ symbolique ou peut-être moins, au gouvernement. Donc, c'est aussi un revenu ou un capital très important dont bénéficie le gouvernement, où le gouvernement pourra, à ce moment-là, décider de le céder soit à la MRC soit à un autre groupe; enfin il pourra le gérer comme il l'entend. Donc, je pense que c'est assez substantiel.

M. Hamad: Cette semaine, nous avons eu le maire de Notre-Dame-de-Montauban, M. Paquin, et il y avait un projet de minicentrale dans sa région ? il est le préfet en même temps ? et, lui, il nous disait que, pour un projet de minicentrale chez lui... donnait une retombée pour la MRC de 1 million de dollars par année, et la ville ou la municipalité, c'est une petite municipalité qui a un revenu annuel de 900 000 $ par année, que lui, avec ce projet-là, recevrait 250 000 $. Alors, c'est à peu près 25 % du revenu de la municipalité, dans sa région. Et la MRC de Mékinac, c'est une des MRC les plus pauvres au Québec, donc un revenu additionnel comme ça, pour eux, c'était important.

Alors là, pour vous, là, l'argument qu'on voit souvent, c'est: Bon, une fois que vous avez mis le béton là, on est parti. Mais le 38 millions, c'est des revenus, pendant 25 ans, qui reviennent à la municipalité à... Bien, c'est divisé par 25 finalement, là?

M. Cerceau (Jacky): Bien, évidemment, c'est des dollars courants, donc c'est un revenu progressif, tout au long des 25 ans.

M. Hamad: O.K. Et ça, c'est avec une participation de la municipalité de 30 %.

M. Cerceau (Jacky): De 30 %.

M. Hamad: O.K.

M. Cerceau (Jacky): Plus, plus des redevances, basées sur le revenu brut, de l'ordre de 2,5 %, tel que l'exemple est cité dans notre mémoire.

n (10 heures) n

M. Hamad: Oui. O.K. Vous n'avez pas parlé... Il y a d'autres groupes qui sont venus nous demander, demander au gouvernement de... Évidemment, vous savez, actuellement, le développement de minicentrales ou de petites centrales, c'est 50 MW et moins, et il y en a plusieurs, groupes, qui demandent de rehausser le 50 à 100 MW, et je n'ai pas entendu parler de votre côté là-dessus.

M. Cerceau (Jacky): Bien, en fait, on le cite. C'est vrai que c'est discret dans notre mémoire, mais effectivement nous serions en accord avec ces autres propositions d'augmenter jusqu'à 100 MW.

M. Hamad: Éolienne, maintenant, l'énergie éolienne, Richard. La question fondamentale actuellement que la commission entend souvent, il y a plusieurs spécialistes qui parlent de la capacité actuellement qu'on vise comme objectif de combien de pourcentage de la capacité totale du Québec.

Actuellement, on produit, au Québec, 35 000 MW, et il y a plusieurs spécialistes qui nous parlent de 10 %; il y en a qui sont allés à 20 %, et évidemment, dans le sens que la capacité d'intégration dans le réseau, pour que le réseau d'Hydro-Québec soit capable d'absorber cette capacité-là... Bien sûr, la capacité de l'énergie éolienne, au Québec, est nettement supérieure que 20 %. D'ailleurs, vous êtes en train de faire une étude là-dessus, on a hâte de voir les résultats, mais il reste que: C'est quoi à peu près votre chiffre? Combien on devrait développer?

M. Legault (Richard): Ce que je peux vous donner, c'est une opinion, sans... sans... bon, enfin, le cas n'a pas été étudié chez nous, mais, basé sur l'expérience qu'on a d'autres provinces canadiennes ou des pays d'Europe, en général, 10 %... disons que notre position, 10 % de la puissance installée, dans le cas du Québec, 35 000, 40 000 MW représenteraient 4 000 MW d'éolien. 10 % ne nécessitent, je dirais... ne devraient générer aucun problème de stabilité de réseau, d'autant plus que le Québec a un solide réseau, bien distribué géographiquement, avec des réservoirs hydrauliques pour complémenter la filière éolienne.

Ce qu'on voit dans le monde va même jusqu'à 20 %, dans les réseaux beaucoup moins flexibles que celui du Québec. Donc, à mon avis, 20 %, si c'est réfléchi, ne devraient pas causer de problème. Là, on parle donc de 8 000 MW. Et je pense qu'on peut aller beaucoup plus loin que ça, si on y pense comme il faut, si on le planifie. Par exemple, si les parcs sont tous localisés ? je dis n'importe quoi ? sont tous à Laval, bien sûr que là on a un réseau qui est déstabilisé. Mais le Québec a la chance d'avoir une ressource éolienne qui est assez bien distribuée géographiquement sur son territoire. Donc, si les parcs sont répartis, ça vient d'autant plus faciliter l'intégration de ces parcs sur le réseau. Donc, à mon avis, jusqu'à 20 %, on n'a pas de problème, bien qu'il faille tout de même l'étudier et s'assurer que c'est fait de façon concertée ou réfléchie.

Au-delà du 20 %, je suis aussi convaincu qu'on peut aller... on peut aller aussi loin qu'on veut finalement. Quand on a décidé de faire la Baie-James, on a construit un réseau pour la Baie-James. Donc, si on décide d'en faire plus que 20 % puis qu'on se dit: Bien, là, il y a une conséquence sur le réseau, bien c'est une question de l'analyser puis de voir ce que ça coûte pour s'assurer que le réseau est solide et stable et en sécurité.

Ce qu'il faut mentionner aussi, c'est que la filière éolienne a beaucoup évolué, et la qualité de l'onde, et sans entrer dans les technicalités, la qualité de l'onde d'une éolienne moderne n'est plus un handicap pour un réseau mais bien souvent un actif, parce que les éoliennes aujourd'hui peuvent générer ce qu'on appelle des VARs, ce qui vient stabiliser les réseaux. Donc, là-dessus, je pense qu'on a une marge de manoeuvre très, très intéressante, au Québec.

M. Hamad: Ma dernière question, je vais laisser mes collègues après... Il y a plusieurs personnes qui sont venues nous parler... Évidemment, l'hydrogène, on se comprend, c'est un combustible d'avenir, et il y en a, dans les mémoires que nous avons reçus, des gens qui disent: Pourquoi on ne fait pas l'éolienne dans le Nord? Et on utilise cette énergie directement pour l'électrolyse, pour produire finalement l'hydrogène et le transporter vers le Sud, dans un futur rapproché, dans le sens qu'un jour on remplacera le pétrole ou l'essence par l'hydrogène.

Vous, comme expert dans le domaine éolien, évidemment l'énergie éolienne, on s'entend tous, ce n'est pas une énergie constante. Quand il y a du vent et à telle vitesse, évidemment, à telle fréquence, nous avons de l'énergie ou nous aurons de l'énergie. Comment vous voyez ça comme combinaison?

M. Legault (Richard): Bien, c'est sûr que l'hydrogène peut servir de batterie finalement, hein? Quand il vente, on produit de l'hydrogène ou on consomme l'électricité à ce moment-là. C'est un scénario que plusieurs provinces et pays regardent, qui est intéressant, mais l'hydrogène n'est pas encore rendu économiquement viable. Donc, la combinaison des deux ne peut pas plus l'être aujourd'hui, mais, en termes de vision, je pense que c'est un scénario qu'il faudrait analyser, qui offre... Parce qu'on a un potentiel exceptionnel dans le Nord québécois. Si, un jour, l'hydrogène devient compétitif, la façon de le produire, c'est avec du gaz naturel ou avec... bon, de l'énergie fossile, ce qui veut dire impact environnemental. Si on peut le produire avec de l'éolien, dans un territoire où il y a un potentiel énorme, on est encore là, le Québec, très bien positionné pour exploiter cette option-là.

M. Hamad: Si l'efficacité de l'énergie éolienne, 40 %, mettons ? on va aller au maximum actuellement ? qu'est-ce que vous faites dans les six jours ou le 60 % où vous n'avez pas de vent? L'usine, on fait quoi? On l'arrête-tu? On va aller chercher de l'énergie où?

M. Legault (Richard): O.K. Bien, tout d'abord, encore là, c'est un mythe, hein? Les gens se disent: Si ça marche 40 % du temps, ça ne marche pas 60 % du temps. Une éolienne tourne 80 % du temps, en Gaspésie, mais elle ne tourne pas à sa pleine puissance nominale, parce que le vent n'est pas constant. Donc, on a une quantité d'énergie qui est produite, constamment ou presque, mais qui fluctue, avec une éolienne.

Bien sûr, si j'ai une éolienne ici, sur la côte parlementaire, et que je n'en ai qu'une, bien ce que je viens de dire s'applique. Mais, si j'en ai une ici, j'en ai une à Montréal, j'en ai une à Gaspé, j'en ai une à Sept-Îles, j'en ai une autre à Chicoutimi, bien la distribution géographique fait en sorte que la fluctuation du productible va évidemment s'altérer, pour en arriver... mathématiquement ou statistiquement, à arriver à une production qui est beaucoup plus stable. Donc, en partant, je pense, là, on a une prémisse de dire qu'il y a des «swings», puis ce n'est pas tout à fait la réalité.

Alors, lorsque c'est bien planifié de façon géographique, je pense qu'avec l'éolien on peut aller chercher des taux de fiabilité extrêmement élevés. En le couplant avec nos barrages hydroélectriques, qui sont énormes, comme vous le savez, on a le potentiel, au Québec, pour aller plus loin que n'importe quelle entité géopolitique en Amérique du Nord.

Le Président (M. Jutras): Merci, M. Audet. M. le député d'Arthabaska.

M. Bachand: Écoutez, M. le Président, donc vous me permettrez de souligner le fait que je suis fort heureux que vous soyez de retour avec nous en tant que président, donc je vous souhaite la bienvenue. Donc, effectivement, comme dirait Mme la députée de Rosemont, je vais pouvoir enfin poser quelques questions.

Bienvenue, messieurs, à la commission. M. Cerceau, nous avons reçu des groupes, plusieurs groupes. Il y en a un, entre autres, qui sont venus... et deux groupes qui avaient des visions fort différentes du développement économique et du développement en particulier hydroélectrique. C'était intéressant, dans votre document, puisque vous faites allusion, dans le résumé de vos propositions, à une espèce de nouvelle suggestion de partenariat entre la CRE et la MRC, qui sont des partenaires privilégiés, qui prennent des initiatives de déclarer souhaitable l'attribution de tel ou tel développement hydroélectrique. Et vous dites, à l'intérieur de vos propositions... vous en avez quatre, en fait, propositions. En fait, vous dites que la MRC et la CRE devraient être les maîtres d'oeuvre dans le choix de sites à privilégier.

On a un foutu problème, hein, parce que, chaque fois qu'il y a des groupes qui se présentent ici, il y a toujours une vision... qui ne sont pas nécessairement concomitantes, hein, souvent des visions divergentes pour la même problématique. Et c'est toujours à peu près la même chose qu'on retrouve, des groupes qui veulent faire de la protection du patrimoine, puis, pour la même rivière, d'autres groupes qui veulent venir faire du développement hydroélectrique.

Dans vos propositions, j'aimerais avoir un peu plus de complément de réponse là-dedans, parce que j'y vois, là, de l'intervention de la part de la CRE, une certaine responsabilité qu'ils ont, mais il y a aussi les citoyens qui disent, eux: On a aussi notre mot à dire. À l'intérieur de chacune des étapes de développement, la première que vous citez, là, il me semble, la source du problème... Expliquez-moi un petit peu plus, là, dans votre processus, comment vous voyez ça, là.

M. Cerceau (Jacky): Je vais passer la parole à...

Le Président (M. Jutras): Alors, M. Descôteaux?

M. Descôteaux (Claude): C'est sûr qu'il s'agit de...

M. Cerceau (Jacky): Oui, à M. Descôteaux.

M. Descôteaux (Claude): Alors, M. le Président, c'est clair qu'il s'agit d'une question délicate parce que ça touche à des intérêts ou des aspirations ou des perceptions qui peuvent énormément varier d'un groupe à l'autre ou d'une personne à l'autre.

n (10 h 10) n

Notre philosophie de base, elle est assez générale mais s'appuie sur des principes de base. Le Québec, on l'a dit dans l'introduction, a la chance inouïe d'avoir un immense territoire, d'avoir 4 000 rivières, et il nous semble assez normal, si on recherche du développement qui soit durable, qu'on puisse utiliser ce qui à travers la planète est le premier potentiel exploité pour faire de l'énergie, c'est-à-dire la ressource hydroélectrique. Et, comme on a 4 000 rivières, il semble normal qu'on en utilise un certain nombre ? il ne s'agit pas d'en utiliser 4 000. Et, même pour celles qu'on utilise, comme le président l'a expliqué tout à l'heure, c'est une intervention qui se fait délicatement, et il ne s'agit pas, entre guillemets, comme certains l'ont véhiculé, de voler la rivière. Puis ce n'est pas parce qu'on fait de l'électricité au passage d'un cours d'eau qu'on fait disparaître le cours d'eau. Ça va presque jusque-là, la mythologie contre l'utilisation des cours d'eau pour produire de l'hydroélectricité. Il s'agit de faire une intervention en douceur, harmonieuse et qui est complémentaire à d'autres usages du même cours d'eau, soit pour l'installation de résidences ou l'exercice de sports récréotouristiques.

Ce n'est pas parce qu'on fait une centrale sur une rivière qui a 150 km de long qu'on va empêcher l'exercice du canot, du rafting, du camping, etc. Dans bien des cas, la démonstration a été faite qu'une telle installation hydroélectrique va faciliter l'accès à ces sites, va en faciliter l'accès sur les rives et va régulariser en quelque sorte l'utilisation des lieux.

On pense que très largement il y a une méconnaissance considérable de ce qu'est une petite centrale. J'inviterais tout le monde... Bien, ici, à Québec, vous le savez, mais, ceux qui sont contre, je les inviterais à visiter, par exemple, le site des Sept Chutes ici, tout près de Québec, qui est un magnifique succès hydroélectrique mais qui est en même temps un haut lieu touristique, qui est fréquenté très, très régulièrement pendant toute la saison touristique.

Donc, je pense qu'il faut ramener les pendules à l'heure. Et il ne faut pas non plus penser qu'on va transformer l'ensemble du Québec et ses 4 000 rivières en autant de 4 000 parcs régionaux ou nationaux ou municipaux. Et, même si on pense à la notion de parc, je dirais même que l'introduction d'une centrale hydroélectrique n'empêche pas qu'on puisse préserver même les caractéristiques d'un parc, et même au contraire, comme je l'ai dit. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député d'Arthabaska.

M. Bachand: Merci, M. le Président. Je comprends bien ça, hein, qu'on ne va pas là pour voler les rivières, on va faire ça de façon bien délicate. Mais force est de constater que les citoyens, eux, ce n'est pas ça qu'ils voient, ils n'ont pas cette impression-là. Il y a des suggestions qui sont venues à l'effet que l'Hydro pourrait, compte tenu de cette situation-là, compte tenu de l'expertise qu'ils ont, redonner ou donner à l'Hydro l'ensemble de tout le développement des barrages hydroélectriques, petits ou grands soient-ils, là, et que ça reviendrait à Hydro-Québec de faire ce développement-là dans les petites rivières. Qu'est-ce que vous pensez de cette idée-là?

M. Descôteaux (Claude): C'est un débat de société. Je pense, là, on change de type d'intervention, on ne parle plus de la même chose. À cet égard-là, l'Hydro a fait des études, dans les années quatre-vingt, si je me souviens bien, où elle reconnaît l'avantage de laisser les entreprises privées faire l'exploitation des plus petits sites parce que ces entreprises ont beaucoup plus de flexibilité et peuvent réaliser ces installations-là à des coûts inférieurs à ceux de l'Hydro. Ce qui fait que l'Hydro peut avoir l'électricité à meilleur marché, tout en la revendant au même prix qu'elle vend à ses clients, aux Québécois, l'énergie qui vient de sources plus coûteuses comme les plus grandes installations. Donc, c'est une solution qui est gagnante-gagnante pour tout le monde.

Le Président (M. Jutras): Monsieur... Non, le temps est épuisé, malheureusement, là. Alors, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Si je comprends bien, le sondage Léger & Léger dont vous nous avez parlé conclut qu'il y a un grand besoin d'information de la population. Est-ce que vous avez l'intention d'y donner suite?

M. Cerceau (Jacky): Disons, avec nos moyens, oui, c'est-à-dire, qui ne sont pas énormes, mais on va contribuer, c'est sûr, à essayer d'informer le mieux possible la population, oui.

Mme Dionne-Marsolais: Je regardais dans votre mémoire, vous avez pas mal d'information qui nécessiterait peut-être seulement une diffusion. Moi, je vous suggérerais de commencer à sensibiliser, parce que, comme l'a bien expliqué M. Descôteaux et comme vos chiffres de Léger & Léger l'ont indiqué, il y a une méconnaissance et de l'impact de ces petites centrales et de la valeur ajoutée que ça peut apporter. Et je pense que ce serait dans votre intérêt de faire connaître ça de manière simple pour qu'il n'y ait plus cette espèce de réticence. Parce qu'on a entendu des positions ici qui étaient vraiment très, très étonnantes, par rapport à quand même une région où, disons, il y avait visiblement deux positions, là, qui étaient très difficile à réconcilier.

C'est à peu près tout ce que je vais dire sur la question de la petite hydraulique, sauf que vous n'avez pas abordé le cadre réglementaire dans votre mémoire. Est-ce que vous avez une position sur ça? Ce que je veux dire par là: Est-ce qu'à votre avis le fait de ne pas assujettir Hydro-Québec Production biaise les règles du jeu pour le développement hydroélectrique et même le développement énergétique au Québec? Seriez-vous en faveur d'une modification de la loi n° 116 ou même de son abrogation? C'est ça, ma question.

M. Cerceau (Jacky): Je vais passer la parole à M. Descôteaux.

Le Président (M. Jutras): À M. Descôteaux.

M. Descôteaux (Claude): Bien, écoutez, je ne voudrais pas entrer... parce qu'on ne s'est pas... on n'a pas fait de discussion ou de débat à l'intérieur de l'association à savoir si on voudrait modifier la loi n° 116 ou pas, mais il est clair que ça prend un certain processus pour que le choix et l'exécution de centrales hydroélectriques dans les régions s'insèrent dans le cadre d'un processus qui soit clair, transparent et accepté par les intervenants, c'est-à-dire les municipalités, les MRC, Hydro-Québec et le gouvernement, et que bien sûr ce soit compatible aussi par rapport aux entreprises qui vont devoir s'exercer là-dedans, qu'ils puissent faire un travail intelligent et qu'ils ne s'en aillent pas les yeux bandés, dans le noir. Alors, je pense qu'il s'agit que les intervenants s'assoient ensemble, là, pour déterminer quel serait le processus adéquat.

Mme Dionne-Marsolais: C'est une belle réponse, mais, dans les faits, donc, si on veut de la transparence, il faudrait qu'on ait au moins un certain accès aux données d'Hydro-Québec Production, et actuellement vous savez très bien que la régie n'a pas accès à ça. Elle n'a accès qu'aux données qu'Hydro-Québec Distribution lui transmet en provenance d'Hydro-Québec Production, à cause de la loi n° 116.

M. Descôteaux (Claude): Je ne suis pas certain, M. le Président, que je comprenne bien, là, le rôle ou la question concernant Hydro-Québec Production comme telle.

Mme Dionne-Marsolais: Actuellement, Hydro-Québec Production, vous devriez le savoir, n'est pas assujettie à la réglementation de la régie, n'est-ce pas, à la juridiction de la régie, et donc, quand on regarde... quand on veut avoir une compréhension de la dynamique des coûts et de certains avantages et certains inconvénients ? vous parlez de transparence ? c'est important, si on veut faire des choix d'investissement intelligents, qu'on ait toutes les données. Or, il y a une donnée qui manque toujours dans cette dynamique-là, c'est la donnée d'Hydro-Québec Production. J'en veux d'ailleurs pour preuve le service d'équilibrage. Le taux pour le service d'équilibrage, dont on parle dans le cas de l'éolien ? et on va aborder la question tout à l'heure ? on ne sait pas comment il est déterminé. On ne sait pas ce qu'il y a là-dedans, on ne sait pas son importance.

Alors, ma question, c'est: Si on veut avoir une connaissance des coûts puis si on veut faire des choix d'investissement responsables, il faut qu'on ait toutes les données, et dans... il faut qu'il y ait une transparence, si vous voulez, au niveau des données, et actuellement cette transparence-là n'existe pas par la réglementation... par la loi n° 116. Vous comprenez?

M. Descôteaux (Claude): Alors, je comprends beaucoup mieux, et...

Mme Dionne-Marsolais: O.K.

M. Descôteaux (Claude): ...si on prend l'exemple, M. le Président, de l'équilibrage pour l'éolien, la régie a elle-même dit clairement que, cette notion-là étant intrinsèque au prix, au coût de l'énergie éolienne, ce facteur qui affecte le prix de l'énergie éolienne devrait être assujetti à l'examen de la Régie de l'énergie, et on n'aurait certainement pas d'opposition, je crois, comme association, à moins que le président en décide autrement, à ce que la régie examine aussi les conditions dans lesquelles s'exerce le travail des petites centrales face à Hydro-Québec selon une formule à être déterminée.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Ensuite, maintenant, j'aimerais qu'on aborde la question de l'éolien. Vous avez mentionné tout à l'heure, et avec justesse, je crois, que les investissements au niveau du réseau de transport qui ont été... qui sont prévus par Hydro-Québec dans la région de la Gaspésie ne devraient pas être considérés... intégrés aux coûts nets finalement de la production éolienne, et je partage votre avis là-dessus.

n (10 h 20) n

J'ai par contre une question sur le service d'équilibrage. On a eu ici des présentations qui ont été faites, notamment, je crois, hier, par les Manufacturiers et exportateurs du Québec, qui avaient fait une étude... enfin une recherche, pas une étude mais une recherche documentée des coûts des services d'équilibrage à travers... en Amérique, je pense bien, et puis le coût d'Hydro, de 0,009 $, je crois, si ma mémoire est bonne, était bien au-dessus de l'intervalle du coût des services d'équilibrage ailleurs en Amérique. Et...

Qu'est-ce que vous pensez de... est-ce que vous avez été impliqués, est-ce que vous avez... Je sais, M. Legault notamment, que vous êtes dans ce domaine-là depuis très longtemps. L'intégration de la production éolienne à un réseau comme celui d'Hydro-Québec, à votre avis, êtes-vous en mesure d'évaluer, de juger la crédibilité de ce coût-là?

Le Président (M. Jutras): Alors, M. Legault.

M. Legault (Richard): Oui. Alors, comme je l'ai indiqué dans mon allocution, puis, bon, vous m'ouvrez la porte, là, je peux peut-être entrer un peu plus dans le détail, ce qu'on constate, surtout aux États-Unis, il se fait actuellement beaucoup de travaux aux États-Unis pour évaluer comment bien intégrer l'éolien sur les réseaux, surtout sur des réseaux hydroélectriques comme ceux du Québec. On pense à l'Ouest américain, par exemple, Bonneville Power est un exemple sur lequel, je crois, Hydro-Québec s'est calquée un peu dans le contexte, là, du débat devant la Régie de l'énergie, l'été dernier. Donc, ce qu'on constate aux États-Unis, c'est que, plus on intègre de l'éolien sur un réseau en termes relatifs, plus il est difficile de l'intégrer et plus l'équilibrage ou le coût de l'équilibrage peut être élevé, d'une part.

D'autre part, les chiffres les plus élevés qu'on connaît ou que je connais, du moins aux États-Unis, sont effectivement de 0,09 $ le kilowattheure, ce qui est suggéré ici, au Québec, dans le cas du 1 000 MW de la Gaspésie. Donc, il semble que le tarif proposé ici soit vraiment à la limite supérieure de la fourchette. Ce qu'on voit, là, selon les différents services publics aux États-Unis, c'est que ça joue entre 0,01 $ et 0,09 $ le kilowattheure canadien, d'autre part.

Donc, quand on constate qu'au Québec 1 000 MW, sur un réseau de 35 000 MW qui est déjà fortement hydraulique, donc très... très apte à absorber ou à équilibrer l'éolien, on peut se... on peut émettre l'opinion que, 0,09 $, c'est très élevé, de là la fourchette de 0,02 $ à 0,05 $ suggérée un peu plus tôt dans mon allocution.

Donc, c'est une opinion préliminaire qui nécessite d'être étudiée plus à fond, mais tout ce concept-là est très nouveau. Et ce qu'il faut voir aussi, c'est que ce service d'équilibrage là, c'est un service selon lequel Hydro-Québec Production remet à Hydro-Québec Distribution sur une base hebdomadaire la quantité d'énergie éolienne produite la semaine avant. Ce n'est donc pas une valeur... excusez l'anglicisme, mais un «back-up» immédiat de l'éolien à chaque instant, mais plutôt étalé sur une semaine.

Donc, si, par exemple, une semaine, il y a 0 kW de produit... 0 kWh produit par l'éolien, la semaine suivante, Hydro-Québec Production retourne à Hydro-Québec Distribution 0 kWh d'énergie éolienne. Donc, ça vient écrêter la fluctuation de l'éolien, mais ça ne vient pas l'appuyer totalement. Donc, je pense qu'il y a là-dessus un exercice assez poussé ? parce que c'est très technique ? à faire, et à mon avis on pourra constater que le service d'équilibrage peut être rendu à un coût inférieur à 0,09 $.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. Legault. Et, plus vous parlez, plus je me rends compte que les conclusions des manufacturiers sont excellentes. Et d'ailleurs le forum... le président d'Hydro-Québec Production, devant le Forum des politiques publiques, à Ottawa, il n'y a pas tout à fait un mois, a dit, et je le cite: «We won't be investing in wind power ourselves. Balancing services ? donc le service d'équilibrage ? for wind power generation in Québec is the commercial opportunity we're currently focussing on». Alors, si je comprends bien, c'est une très bonne opportunité d'affaires, c'est très payant. Cela étant dit, je pense que ça mérite une réflexion, au niveau des parlementaires, quant à cette... à toute cette notion, là, de la place d'Hydro dans l'éolien.

Ma dernière question, c'est en termes de biomasse. Vous savez que le décret, on avait passé un décret, le gouvernement précédent, pour un potentiel que l'on avait évalué à l'époque à 100 MW de biomasse, et la réponse à des appels d'offres qui ont été faits a été plutôt modeste, d'une trentaine, 39, je pense. Et, dans son mémoire devant la Régie...

Une voix: Non, ici.

Mme Dionne-Marsolais: ... ? excusez, c'est vrai, c'est le mémoire qu'ils ont présenté ici ? le 11 janvier, Hydro-Québec a indiqué qu'il était très improbable que d'autres projets d'importance voient le jour, à court et moyen terme, en biomasse. Pouvez-vous nous expliquer comment ça se fait qu'il n'y a pas eu plus d'intérêt pour la biomasse? Si on se fie à ce que vous avez dit, il semblerait qu'il y a un potentiel là.

Le Président (M. Jutras): Oui, M. Audet.

M. Audet (Claude): Merci. La question est très pertinente. Même nous, Boralex, on s'est retirés à la dernière minute, avec un projet qui totalisait...

Mme Dionne-Marsolais: Oui!

M. Audet (Claude): ...presque ça, 39 MW, là, ça fait que... puis pas vraiment avec beaucoup de plaisir, là. C'est que, quand on a finalisé nos inventaires des sources disponibles de bois, on s'est bien rendu compte, là, que ça ne pouvait pas supporter le projet.

Il faut réaliser qu'un projet comme ça, si on veut aller chercher du financement, là, sur une période de 15 ou 20 ans, bien il faut arriver avec des valeurs assez sûres à présenter aux institutions financières. Puis, si on leur présente non seulement un doute sur le prix éventuel de la biomasse, mais qu'en plus on rajoute à ça les quantités qui ne seront peut-être pas toujours là...

Puis, pour parler un petit peu pour notre domaine à nous autres, on est dans l'hydraulique, mais on est aussi dans la biomasse, à la hauteur de sept centrales actuellement, dont cinq aux États-Unis puis deux au Québec, ça devient un défi, là, presque de tous les jours de soutenir l'approvisionnement. Il a été un temps, au Québec, où on avait de l'écorce partout, on ne savait pas quoi en faire. Vous allez faire un tour dans plusieurs régions, vous allez voir les empilements incroyables, quoiqu'on commence à les récupérer, puis je pense qu'il y a une chose intéressante là.

Mais c'est tout simplement une question de garanties. Vous savez, il n'y a pas de bourse, du côté de la biomasse, qu'on va retrouver du gaz naturel, donc on ne peut pas garantir les prix, puis là on avait un problème au niveau des quantités. C'est pour ça qu'on vous suggère... aujourd'hui, on amène le point de dire: Bien, le potentiel est là; seulement dans l'Outaouais, on peut récupérer facilement ? en tout cas, nous, avec les petites études qu'on a faites, là ? 1 million de tonnes par année. Bien, 1 million de tonnes par année, ça soutient, ça, ça soutient un 50 MW, 60 MW facilement; le double de ça, là, je dirais, 1 million, on va aller autour de 70 MW de capacité.

Donc, on serait facilement au-delà de l'appel d'offres que vous avez mentionné tantôt, mais le potentiel n'est pas développé. La matière est là, je pense qu'on pourrait éventuellement l'utiliser, mais il faut pour ça être capables de mettre en marche tout un système, comme on a sur les terres privées des États-Unis. Puis ça ne sort pas bon marché, mais ça... à partir du moment où le système est rodé, qu'est en place une participation de chacun, moi, je pense qu'on est capables d'être quand même compétitifs. Mais c'est vraiment là.

Puis, du côté déchets urbains, je pense qu'on est au début vraiment de la récupération concernant le bois de démolition, le bois de construction. Le ministre de l'Environnement va arriver avec des nouveaux règlements, il y a des tests qui s'en viennent sur la mise en décharge de ces matériaux-là. Donc, tout ça, à mon sens, ça devrait favoriser la collecte puis la production de copeaux, qui servent bien sûr à l'alimentation. C'est l'enjeu principal.

Mme Dionne-Marsolais: O.K.

Le Président (M. Jutras): Merci, M. Audet. M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs, merci pour votre mémoire. Alors, peut-être dans la même foulée que le collègue d'Arthabaska, plusieurs mémoires ont été déposés, puis il y a plusieurs visions au niveau du développement des minicentrales. Alors, il y en a qui sont pour les petites centrales, il y en a qui sont contre, bien entendu, les petites centrales, il y en a qui sont pour, mais gérées complètement par Hydro-Québec. Et, dans votre document, vous parlez, en page 8, que la preuve a été faite abondamment, par rapport aux petites centrales, que c'est fiable, économique, écologique, renouvelable et durable, avantageux pour les petites communautés; et, en page 19, vous parlez des propositions de partenariat, et vous parlez des CRE et des MRC.

On a reçu un groupe, hier, qui est le Conseil de bande de Betsiamites, dont le chef, M. Picard. Je lui demandais c'était quoi, sa vision, lui, comme communauté autochtone, de partenariat. Alors, lui, comme communauté autochtone sur la Côte-Nord, il désire être un partenaire par rapport au développement de petites centrales, exemple, comme Betsiamites. Alors, je n'ai pas retrouvé dans votre mémoire une partie de partenariat avec les autochtones, alors j'aimerais vous entendre là-dessus.

Et je vais en profiter, parce que j'ai deux autres questions en même temps. Je n'ai rien, vu dans votre document non plus, sur l'octroi de bloc patrimonial à la grande entreprise.

Et ma dernière question, c'est: Est-ce qu'on se sert, au niveau de l'hydroélectricité, avant exportation, par rapport à l'économie du Québec?

Le Président (M. Jutras): Alors, M. Cerceau.

M. Cerceau (Jacky): Oui. Je vais essayer de répondre à toutes ces questions, je vais essayer de me souvenir de toutes.

M. Dufour: Je pourrai les répéter.

n (10 h 30) n

M. Cerceau (Jacky): Bon, d'accord. La première question, c'était, je crois, au sujet de l'éventuelle participation d'autochtones à des partenariats. Bon, évidemment, on a cité les MRC parce que, bon, il y a différents projets actuellement en gestation où des MRC sont impliquées, mais rien ne s'oppose effectivement à ce qu'il y ait des partenariats avec des communautés autochtones. Je pense que ce serait légitime aussi dans certains territoires, bon. Il n'y a rien qui s'oppose à ça, on est tout à fait en faveur évidemment, hein! Je pense que ça, ça doit être clair. C'est vrai qu'on n'a pas... on n'a pas cité ce cas particulier, mais c'est équivalent à la participation des MRC, oui.

Alors, les autres...

M. Dufour: Le bloc patrimonial.

M. Cerceau (Jacky): Bloc patrimonial.

Le Président (M. Jutras): Qui... M. Descôteaux? Qui continue, là?

M. Cerceau (Jacky): Oui, M. Descôteaux, peut-être.

Le Président (M. Jutras): M. Descôteaux.

M. Descôteaux (Claude): Oui. Alors, votre question, si je me souviens bien, c'était: Est-ce qu'on devait affecter une partie du bloc patrimonial au développement local ou...

M. Dufour: Au niveau des blocs patrimoniaux, c'est le tarif L, c'est l'octroi de blocs patrimoniaux à la grande industrie.

M. Descôteaux (Claude): Oui. Bien, je crois que, nous, on n'a pas analysé à fond cette décision, mais il me semble qu'il y a une position d'Hydro-Québec et du gouvernement qui est assez claire à l'effet qu'il n'y ait plus de tarif avantageux qui soit consenti pour la grande entreprise. Enfin, c'est ce que j'en ai compris du débat public, et nous ne sommes pas intervenus, dans nos débats, sur cette question-là.

Sur la troisième question: Est-ce qu'on doit exporter ou utiliser localement ? c'est une question qui me touche beaucoup compte tenu de mes antécédents ? je pense que c'est un débat un peu, comment dirais-je?, proche du sexe des anges, parce que ça me rappelle le très vieux débat, il y a 40 ans: Est-ce qu'on devait avoir des investissements étrangers ou se prendre en main et faire un développement économique par nous-mêmes?

La réponse, elle me semble bien évidente, c'est que l'un n'empêche pas l'autre. Et, au moment où on exporte, parce que c'est immensément payant ? mais on sait maintenant qu'on exporte à très court terme ? on peut très vite rapatrier ces ressources-là pour les besoins locaux si on en a besoin. Alors, on peut être gagnants sur les deux tableaux: faire de l'argent en exportant et puis en profiter pour nos entreprises si elles en ont besoin, qui, évidemment, doivent avoir la priorité. Ça, ça va de soi.

Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier.

M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour. Bonjour à vous, merci d'être là. En complément d'information concernant les petites centrales, on parle souvent de pourcentages. Lorsqu'on parle, exemple, de filière éolienne, on parle de, bon, 10 %, 20 % de la production qu'on pourrait avoir ici, au Québec.

Concernant les petites centrales, est-ce qu'on peut chiffrer un pourcentage de développement? Est-ce qu'on peut comparer, aussi, le Québec avec d'autres pays? Est-ce que, peut-être, on a un retard là-dessus? Alors, j'aimerais vous entendre concernant peut-être le pourcentage que le Québec pourrait avoir de petites centrales, parce qu'on a un potentiel absolument incroyable, avec le nombre de rivières qu'on a, et puis tout ça; il me semble qu'on a un certain retard là-dessus. Alors, peut-être m'informer sur le pourcentage que vous voyez éventuellement, dans les prochaines années.

M. Cerceau (Jacky): Bon. Effectivement, actuellement, on a moins de 1 % en production en petites centrales, bon, je dirais de production indépendante. Hydro-Québec, aussi, génère de l'énergie à partir de centrales de petite taille.

M. Légaré: Oui, oui.

M. Cerceau (Jacky): Si on prend l'exemple d'autres pays, évidemment les pays européens ont beaucoup plus d'avance, si je peux dire, dans ce domaine-là, parce qu'ils ont très vite épuisé les grandes ressources hydrauliques. Donc, ils ont recouru très rapidement par la suite à des petites centrales; il n'y en a plus beaucoup à développer.

Au Québec, il y a encore un potentiel théorique de 5 000 MW, qui avait été évalué dans les années quatre-vingt, je crois, par Hydro-Québec, et évidemment il ne s'agirait pas de développer l'ensemble de ces 5 000, parce que, d'abord, ils ne sont pas tous rentables, à l'heure actuelle, au prix du marché, et ce ne serait peut-être pas souhaitable par toutes les communautés. Probablement que 1 000 MW serait un chiffre qu'on pourrait imaginer dans les prochaines années, quoi, sans avoir été plus à fond dans l'étude précise de ce cas-là, mais je dirais que c'est à peu près ce qu'on pourrait évaluer faisable, au prix du marché aujourd'hui.

M. Légaré: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Alors, le temps est maintenant épuisé. Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et je demanderais à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, là, les représentants, de s'approcher.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Jutras): Nous allons procéder...

Nous entendrons maintenant les représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Vous me faites signe quand vous êtes prêts.

Une voix: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Alors, messieurs, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle les règles du jeu: vous avez 20 minutes pour votre présentation; par la suite, c'est 20 minutes pour les députés du côté ministériel; par la suite, 20 minutes pour les députés de l'opposition. Alors, je vous demanderais de commencer sans plus tarder, en vous présentant d'abord et la personne qui vous accompagne.

Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)

M. Fahey (Richard): Bonjour. Je suis Richard Fahey, vice-président, Québec, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Je suis accompagné de mon collègue Pierre Emmanuel Paradis, qui est économiste principal chez nous.

M. le Président, l'importance de l'énergie pour le bien-être de la population et le développement du Québec n'est plus à démontrer. Or, à la fois ce bien-être et ce développement sont à risque du fait de l'état de nos finances publiques et du fait du vieillissement de la population accéléré que va connaître le Québec.

Les PME du Québec souhaitent depuis des années que le gouvernement s'attaque au fardeau de la dette, qui est hors contrôle. La FCEI vous propose une nouvelle façon de gérer l'énergie au Québec: un effort de toute la population pour utiliser de façon optimale l'énergie et ainsi se servir de ce levier pour rembourser 10 % de notre dette sur un horizon de 10 ans. Faisons des comparaisons: au cours de la dernière décennie, on a remboursé 500 millions sur notre dette, soit moins d'un demi de 1 %, donc ça vous donne une idée de la proposition.

n (10 h 40) n

En clair, M. le Président, le Québec doit réaliser que nous ne sommes plus en 1980, les surplus d'électricité n'existent plus. À l'époque, les importants surplus d'énergie électrique avaient incité le gouvernement à adopter et à maintenir des tarifs bas d'électricité, à promouvoir le chauffage à l'électricité et à accorder à de grandes industries énergivores des contrats d'approvisionnement à des prix dérisoires. La conjonction de ces trois choix stratégiques fait en sorte qu'aujourd'hui ces surplus se sont envolés, que la tarification inefficace biaise de façon importante le comportement des utilisateurs et incite au gaspillage. En effet, les prix payés pour l'électricité au Québec sont entre 25 % et 70 % moins chers que les juridictions avoisinantes, et les Québécois sont les plus grands consommateurs d'électricité, non pas au Canada ni en Amérique du Nord, mais dans le monde. Tout ça fait en sorte que notre société d'État ne contribue pas de façon optimale aux finances publiques du gouvernement du Québec.

Nous devons corriger les distorsions des tarifs d'électricité afin de tendre vers la vérité des prix et favoriser l'adoption de la bonne énergie au bon endroit. Conjuguée à la correction de l'interfinancement partiel et cet interfinancement qui grève le développement des PME, cette approche cohérente et intégrée nous permettra de rehausser notre richesse collective tout en s'attaquant au remboursement de la dette, qui est colossale. Le gouvernement doit adopter une vision à long terme et avoir le courage politique de s'attaquer à ces défis pour le bénéfice de nos enfants et des générations futures.

La proposition de la FCEI n'est pas un menu duquel on peut prendre un élément ou un autre, chaque maillon est essentiel au défi que nous vous proposons. Des hausses tarifaires raisonnables, prévisibles, de même que la correction de l'interfinancement enverront un juste signal de prix aux consommateurs, favorisant l'adoption de comportements énergétiques optimaux. De plus, cela incitera à l'efficacité énergétique, libérant alors des capacités qui aujourd'hui sont engagées à servir les besoins des Québécois, capacités qui pourraient être vendues sur les marchés lucratifs d'exportation, ce qui contribuera aussi au remboursement de la dette. Ce remboursement sera d'autant plus important si Hydro-Québec gère efficacement ses dépenses d'exploitation. Et, ici, il y a une responsabilité de l'actionnaire pour l'inciter à mieux gérer son entreprise. Mais il faut être clair, cet appel à la solidarité n'a qu'un seul but: que le fruit de nos efforts collectifs bénéficie exclusivement au remboursement de la dette.

Nos analyses et calculs sont non seulement conservateurs, mais aussi fondés sur des documents publics déposés devant la Régie de l'énergie, car la FCEI est la seule association qui défend sur une base régulière les intérêts des entreprises à la régie. Nous profitons aussi des précieux renseignements qui émanent d'un sondage réalisé auprès de 1 600 dirigeants de PME, qui ont permis d'orienter nos recommandations. Notre proposition est donc ancrée dans la réalité de l'énergie au Québec et dans la vision des PME; elle ne repose pas sur des voeux pieux.

Mais notre propos ne se limite pas seulement à l'électricité. Le développement du gaz naturel s'est accéléré au cours des années quatre-vingt avec la construction des gazoducs, jusqu'à Québec actuellement. Les récentes initiatives du principal distributeur gazier qu'est Gaz Métro ont permis de redonner un certain blason à une énergie évitée et encore méconnue par les Québécois, alors qu'elle constitue par ailleurs la norme dans le chauffage au Canada mais aussi ailleurs dans le monde. Toutefois, le Québec doit explorer les possibilités de diversifier ses approvisionnements en gaz naturel. Cette diversification serait d'autant nécessaire si Hydro-Québec cessait de subventionner les développements domiciliaires tout électrique. En effet, le chauffage électrique domestique constitue le principal facteur affectant la pointe hivernale du distributeur.

En l'absence de programme de gestion de la demande interruptible ? parce qu'Hydro n'en a pas ? combien de centrales alimentées par des combustibles fossiles, comme le Suroît, faudra-t-il construire avant de réaliser qu'il serait préférable d'imiter les autres juridictions et de chauffer au mazout ou au gaz naturel? L'électricité serait alors réservée à l'éclairage et à la force motrice, ce qu'on appelle les usages nobles de l'électricité.

Bien sûr, on ne changera pas le parc électrique du Québec, mais il faudrait au moins commencer à agir pour le futur et arrêter de... et de mettre fin ? pardon ? à une pratique archaïque où l'on force en quelque sorte Hydro-Québec à connecter des nouvelles maisons tout électriques et à livrer de l'électricité à perte à ses clients résidentiels. Cette capacité pourrait être libérée et être vendue aux juridictions avoisinantes à un prix moyen de 0,088 $ du kilowatt.

Par ailleurs, le Québec est fortement dépendant du pétrole, surtout dans le domaine des transports. Il reste un bien petit joueur par ailleurs pour influencer la donne mondiale. Ce secteur, le pétrole, est contraint par oligopoles, tant au niveau des pays producteurs que des entreprises de raffinage, alors que la demande ne cesse de pousser et que les prix atteignent de nouveaux sommets.

En vue de contrer la hausse des prix de l'essence, les deux solutions privilégiées par les PME seraient de réduire les taxes sur la carburant et accroître la concurrence dans cette industrie. Toutefois, toute modification des taxes devrait être bien calibrée et contrôlée afin d'éviter qu'elles ne servent pas à engraisser les coffres des pétrolières. On pourrait notamment envisager un pouvoir de surveillance étendu de la Régie de l'énergie. De plus, une intégration verticale des grandes pétrolières cause de sérieuses difficultés aux détaillants indépendants et aux transporteurs, au niveau des approvisionnements. Le message, ici, est clair, des PME: Si l'industrie n'est pas en mesure de s'autoréguler, quelqu'un devra le faire pour elle.

La facture moyenne des PME du Québec approche les 15 % des coûts totaux de production et a connu une hausse significative, au cours des dernières années. Cela préoccupe les dirigeants de PME, puisque depuis trois ans ces augmentations ont causé des hausses de prix: donc, impact sur l'inflation, une diminution importante de la marge de profit et, dans 12 % des cas, des pertes d'emplois.

Plusieurs autres aspects, aussi, de la fourniture de services énergétiques méritent l'attention. Premièrement, les PME estiment que le prix de l'énergie devrait refléter le vrai coût, le coût réel de la prestation de services, et évoluer à terme de façon à transférer la hausse des coûts aux utilisateurs responsables de la croissance de la demande. Ils aimeraient aussi voir le processus d'approbation environnementale des projets énergétiques accéléré, notamment dans le cadre des efforts d'harmonisation fédéral-provincial. Finalement, ils sont insatisfaits des efforts déployés en efficacité énergétique par le fournisseur.

Le message des PME sur l'efficacité énergétique nous interpelle tous. Le potentiel énergétique du Québec ne réside pas simplement dans la construction de nouveaux équipements, mais aussi dans la libération des capacités aujourd'hui existantes. Ainsi, l'économie d'énergie au sens large est d'autant plus porteuse que les investissements sont déjà faits et que, dans le cadre d'une planification intégrée des ressources énergétiques, les opportunités de réduire la demande seraient analysées de façon parallèle aux investissements en nouvelles capacités. En clair, ici, la FCEI propose l'application systématique d'un critère rationnel sur le plan économique, à savoir: à coût égal ou moindre, on choisit l'économie d'énergie.

L'Agence de l'efficacité énergétique doit voir son mandat renforcé en devenant indépendante des fournisseurs d'énergie. De plus, son financement doit être significativement augmenté par l'entremise d'une redevance qui serait perçue sur chaque gigajoule d'énergie vendu, peu importe le fournisseur d'énergie, afin qu'elle puisse, avec ce financement et cette indépendance, bâtir de véritables programmes intégrés d'économie d'énergie et réaliser son plein potentiel.

n (10 h 50) n

Finalement, et vous avez les niveaux de satisfaction à l'écran, M. le Président, les PME ont un niveau de satisfaction plus grand au niveau du secteur du mazout, principalement auprès d'indépendants. Donc, leur principal fournisseur énergétique constitue les entreprises de mazout, et c'est là que la satisfaction est plus grande. Et, comme on vous le disait dans mes propos liminaires, les prix et l'efficacité énergétique constituent les principales préoccupations des dirigeants de PME.

Maintenant, mon collègue Pierre Emmanuel Paradis, qui est économiste, va vous présenter en quelque sorte le fonctionnement de ce fonds énergétique, l'équivalent de ce qu'on appelle, en Alberta, le Heritage Fund, là, pour rembourser notre dette, et comment la contribution de chacune des classes de tarifs d'électricité pourrait contribuer à ce financement.

Le Président (M. Jutras): Alors, M. Paradis, il vous reste environ sept minutes.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Merci. Tout d'abord, j'ai trois remarques, en introduction à la présentation du fonds. Premièrement, la rationalité du fonds énergétique du Québec repose sur l'optimisation de la valeur des activités de production, transport et distribution d'énergie au Québec.

Deuxièmement, le fonds énergétique du Québec suppose un tout nouveau cadre réglementaire et légal qui optimise justement la valeur collective de ces activités. Le détail de nos propositions se trouve dans notre mémoire et concerne essentiellement l'interfinancement et la Régie de l'énergie. C'est, entre autres, justement cette nouvelle optique de cadre légal et réglementaire qui explique les différences, qui peuvent sembler marquées, par rapport à notre position d'aujourd'hui comparativement à celle défendue à ce jour à la Régie de l'énergie.

Troisièmement, le fonds énergétique du Québec est une solution intégrée que la FCEI propose dans la mesure où toutes les composantes sont réunies.

Donc, il y a deux volets au fonctionnement de ce fonds: il y a un volet qui est domestique et il y a un volet exportation. Tout d'abord, du côté domestique, la demande d'électricité, au Québec, évolue d'une année à l'autre selon trois grands types de facteurs. Principalement, cette demande-là est influencée par sa croissance naturelle, qui est issue de la démographie, du développement économique, de la température, etc. Ça, c'est un élément sur lequel il n'y a personne qui a du contrôle.

Maintenant, il y a deux autres éléments sur lesquels il y a moyen d'avoir un certain contrôle. Premièrement, les changements dans les prix: si les prix augmentent, la demande diminue, et inversement. Et, deuxièmement, aussi, quelles sont les opportunités qui sont offertes par les fournisseurs d'énergie de réaliser des économies d'énergie?

Donc, en influençant les deux derniers éléments, les prix et l'économie d'énergie, on influe directement sur la quantité d'énergie consommée au Québec. Donc, cette quantité d'énergie consommée a un prix: quantité fois le prix égale les revenus totaux. Cette quantité a également un coût: quantité fois le coût unitaire nous donne les coûts totaux. Et puis c'est avec ces activités-là qu'Hydro-Québec génère un bénéfice sur ses ventes d'électricité domestique au Québec.

Maintenant, on est tout à fait conscients que et le gouvernement et Hydro-Québec ont besoin de cet argent-là; ce n'est pas du tout remis en question. Alors, l'idée, ici, du fonds est de fixer le bénéfice qui est prévu pour 2005 et de prendre ce montant-là et de l'indexer de 2 %, 3 % par année, par exemple, pour toutes les années à venir. Le reste ? tous les fonds qui seraient générés en excédent de ce surplus-là ? serait directement versé au fonds énergétique du Québec.

Deuxième volet, du côté droit du diagramme, donc du côté de l'exportation: qui dit hausse de prix, économie d'énergie, dit marge de manoeuvre qui est libérée du côté de la production. Cette marge de manoeuvre là, on ne parle pas d'une marge de manoeuvre spéculative sur des activités de «trading», mais bien une marge de manoeuvre qui est structurelle, qui est donc dans le système, prévisible, disponible année après année, et cette marge de manoeuvre là peut donc être exportée, et les revenus nets de cette activité-là sont donc versés au fonds énergétique du Québec.

Alors, c'est une idée qui ne date pas d'hier. Il y en a plusieurs qui l'ont présentée, mais on s'est dit: Tiens, nous, on va s'asseoir puis on va le calculer. Alors, on a testé différents scénarios, d'abord de hausses de prix, de corrections d'interfinancement et d'économie d'énergie, sur une période de 10 ans, donc de 2005 à 2014. Le résultat du scénario optimal, de ce côté-là, serait de 8 milliards de dollars du côté domestique, 3,5 milliards du côté de l'exportation, sur la base d'hypothèses qui sont extrêmement conservatrices; et pour un total donc de 11,5 milliards de dollars qui pourraient être générés directement pour le remboursement de la dette publique du Québec. 11,5 milliards de dollars, ça veut dire 1/10 de la dette du Québec. Et peut-être un des volets les plus intéressants, sur cette simulation qui est très conservatrice du côté de l'exportation, il y a un 30 % qui est remboursé par l'étranger, donc l'Ontario, les États-Unis, etc.

Maintenant, on se dit: C'est un effort collectif qui est énorme, 11,5 milliards de dollars, mais je dois vous dire que ça représente seulement un tiers de la rente économique totale qui est associée au fait que nos tarifs d'électricité au Québec sont extrêmement faibles. Si vous regardez sur la colonne de droite du tableau, on voit le scénario maximum, c'est une simulation des hausses de prix qu'il faudrait réaliser sur 10 ans pour corriger complètement l'interfinancement et mettre le Québec à niveau de toutes les juridictions voisines.

Donc, on a fait l'exercice sur une dizaine d'années, et ça donne 33 milliards de dollars; c'est l'importance de cette rente économique là. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est: On ne ramène pas le prix de l'électricité complètement au niveau des voisins, mais on fait un tiers du chemin, c'est un effort collectif qui est réalisé donc à la fois par les entreprises, par les consommateurs.

Maintenant, pour ce qui est de l'impact sur la clientèle, vous allez dire: Bon, quelles sont les hausses de prix, puis, sur les factures d'électricité, qu'est-ce que ça donne? C'est la troisième colonne qui est la plus importante. Donc, l'impact sur les factures varie entre 2,3 % et 3,5 % du montant de la facture annuelle.

Donc, les hausses de prix qui sont prévues, qui varient, bon, autour de 3 %, selon les catégories d'entreprises ? ici, c'est regroupé pour le mettre plus simple visuellement ? mais donc ça varie entre 3 % et 5,2 %, en termes des hausses de prix, sont atténuées par les opportunités d'économie d'énergie. Et ces opportunités d'économie d'énergie là, on ne les a pas sorties d'un chapeau, on a pris les élasticité-prix qui sont observés sur la demande d'électricité au Québec, selon les différentes catégories d'utilisateurs. On a regardé quelle est l'économie d'énergie qui est réalisable, selon Hydro-Québec et selon une optimisation des différents programmes qui sont existants. Donc, l'impact net sur les factures, c'est un impact qui serait tout à fait raisonnable, à notre sens.

La dernière diapo, maintenant, présente simplement le détail des scénarios, à partir du scénario de référence jusqu'au scénario qui est le plus extrême, donc pour les hausses de prix, l'interfinancement et l'économie d'énergie. Donc, merci beaucoup, et puis on est prêts à recevoir vos questions.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Paradis. Merci, M. Fahey. M. le ministre.

M. Hamad: Alors, bienvenue, M. Fahey. Bienvenue, vous aussi, économiste en chef. Première question. Hier, on a eu l'association des Manufacturiers et exportateurs, et l'industrie n'arrête pas de le dire: Aïe! n'augmentez pas mes coûts de production. N'augmentez pas mes coûts de production; le dollar, déjà, nous nuit énormément pour notre production. Et, même vous, dans votre présentation, vous avez fait un acétate qui dit: Voici l'impact de la hausse du coût d'énergie, ça a fait en sorte que les coûts de production ont augmenté de 56 %, les profits ont baissé de 56 %, puis il y a 12 % de pertes d'emplois. Puis, en même temps, vous arrivez et dites: Vous voyez, tout ça, une fois que... ceci étant dit, on veut augmenter.

Dans votre sondage, quand vous avez posé la question... Tout dépend des questions de sondage, hein? Vous savez, les sondages, on peut préparer la réponse en fonction de la question. Est-ce que vous avez... êtes-vous conscients, de votre scénario, que... est-ce que les entreprises sont d'accord de dire: J'augmente mes prix... mes coûts, c'est-à-dire, puis je diminue mes profits? Avec vos données à vous, là, vous avez dit 56 % de diminution de profits, et ils sont d'accord avec ça?

n (11 heures) n

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Je vais peut être commencer puis je laisserai Richard compléter. D'abord, la beauté justement du fonds énergétique, c'est que chaque sou qui est généré et puis qui est versé au fonds va directement à la dette. Donc, à terme, on parle d'une diminution d'impôts, parce qu'au fur et à mesure que la dette peut se payer, on abaisse le capital et donc on abaisse les intérêts à verser sur la dette. Donc, il y a un avantage, de ce côté-là, qui est important, parce que le fardeau fiscal et la dette sont les deux principales priorités de la PME, devant toutes les autres. Donc, on s'est interrogés, à savoir de quelle façon... C'est certain qu'il y a un effort à faire. Il n'y a pas moyen de tout simplement dire: O.K., on va réussir à payer la dette sans faire aucune espèce d'effort. Alors, voici l'effort qu'on propose, de notre côté. Donc... Et puis... Vas-y, Richard.

M. Fahey (Richard): Oui. M. le Président, en fait, la présentation n'est pas une présentation traditionnelle. Vous comprendrez qu'à chaque fois qu'on est à la Régie de l'énergie, dans le cadre actuel, on se bat pour chaque point de pourcentage au niveau des hausses de tarifs.

Ce qu'on vous propose ici, c'est enfin de s'attaquer à cette montagne qui s'appelle la dette, qu'on n'a pas trouvé les façons encore de faire, et de gérer différemment l'énergie au Québec. Bien sûr, on peut rester dans notre situation actuelle puis dire: Ah! je vais me battre, à chaque année, sur le 2 %. Mais on croit puis nos entreprises croient qu'il y a là un potentiel d'effort collectif. Là, là, je pense que le mot, là, important, c'est un «effort collectif», tout le monde va faire sa part.

Tu sais, par exemple, si on prend l'interfinancement, actuellement les PME sont désavantagées entre 15 % et 30 %. Logiquement, j'aurais pu me présenter devant vous ce matin, dire: Corrigez l'interfinancement, l'article 52.1 de la loi sur la régie, qui a été introduit par la loi n° 116, c'est une nullité absolue. Les entreprises ne veulent plus rien savoir de ça, baissez mes tarifs. J'aurais pu vous dire ça.

On a pensé être innovateurs, créatifs, et de dire: Qu'est-ce qui est raisonnable en termes de hausse de tarifs? On pense qu'une hausse tarifs moyenne, pour toutes les classes, de 2,8 % par année pendant 10 ans va générer une baisse de 10 % de notre dette, puis là je pense que le gouvernement va avoir une plus grande marge de manoeuvre pour baisser ses impôts, et donc, en définitive, ça va générer de l'activité économique.

C'est sûr que, si actuellement on fait juste se chicaner sur le 2 % puis on perpétue ça dans le temps, bien on laisse sur la table la rente économique de 33 milliards qu'on a présentée puis on ne change pas nos façons de faire. Nous, on pense que, si tout le monde fait son effort, si toutes les entreprises savent que la hausse de tarifs maximale va être de 3 %, puis qu'en intégrant des efforts d'efficacité énergétique cette hausse de tarifs moyenne pour toutes les classes de consommateurs va être de 2,8 %, puis que les consommateurs savent, et ça, c'est certainement le point le plus important, la ligne qui apparaît sur leur facture d'électricité: Contribution au Fonds énergétique du Québec, que cet argent-là s'en va à la dette, ça, là-dessus, M. le Président, je peux vous assurer que, si on adopte cette proposition-là, on va prendre... on va s'assurer qu'annuellement... la FCEI va s'assurer qu'annuellement ces argents-là soient versés au gouvernement et versés à la dette.

Le Président (M. Jutras): Peut-être, M. Fahey, raccourcir vos réponses, si on veut faciliter, là, le nombre de questions.

M. Fahey (Richard): Oui, pas de problème. Mais...

Le Président (M. Jutras): Oui, je comprends que vous êtes convaincu, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Hamad: M. Fahey, malgré votre bonne réponse, vous n'avez pas répondu exactement à ma question. Je vais poser une autre question. Vous parlez de 3,5 milliards de revenus d'exportation; ils sont basés sur combien de ventes de mégawatts ou de... plutôt, térawattheures, qui sont faits sur quelques années? Juste une réponse rapide, je reviens avec ma question après.

M. Fahey (Richard): C'est sur la base de 7 TWh, 7,6 TWh, qui est une marge de manoeuvre structurelle, qui est dégagée sur la base des économies d'énergie et des augmentations de prix.

M. Hamad: Selon vos calculs, ça nous ramène 3,5 milliards?

M. Fahey (Richard): À un prix moyen, un prix moyen de 0,088 $ du kilowattheure. On a pris le prix 2003 ou 2002?

M. Paradis (Pierre Emmanuel): 2003 seulement.

M. Fahey (Richard): 2003. On n'a pas augmenté ce prix-là. Le marché est en hausse actuellement. On ne l'a pas augmenté, on l'a laissé «flat» à 0,088 $. Donc, c'est pour ça qu'on dit, de façon conservatrice, 3,5 milliards sur 10 ans.

M. Hamad: Sur 0,08 $, avez-vous enlevé les coûts de production?

M. Fahey (Richard): Oui, oui, c'est net.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Oui, oui, tout à fait. C'est une valeur... On parle d'une valeur nette.

M. Hamad: C'est veut dire on va le vendre à combien, le térawattheure... le kilowattheure?

M. Paradis (Pierre Emmanuel): À 0,088 $ le kilowattheure.

M. Hamad: Ça, c'est profit net?

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Moins... moins le coût justement de production et de distribution.

M. Hamad: De combien, le coût?

M. Fahey (Richard): Bien, en fait, c'est des coûts d'Hydro-Québec, là.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): C'est les coûts d'Hydro-Québec.

M. Fahey (Richard): On prend leurs coûts à eux, puis, si on fait la somme des exportations et les activités de «trading» associées à ça...

M. Hamad: Parce que, 0,08 $, là, 0,08 $, on enlève à peu près, mettons, entre 0,04 $ et 0,06 $, là, il en reste 0,02 $ à peu près, 0,02 $... mettons 0,03 $ ou 0,04 $. Exagérons, mettons 0,04 $. 0,04 $, sur un térawattheure, ça amènerait peut-être... c'est 400 millions, là. Je ne vois pas pourquoi... En tout cas, je ne veux pas rentrer dans les chiffres, on va se perdre, là.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Oui, multiplié par... fois 10 ans.

M. Fahey (Richard): Fois 10 ans.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Fois 10 ans. Voilà d'où ça vient.

M. Hamad: Oui, oui. Mais est-ce que vous... en tout cas, le calculez net-net, là, O.K., mais c'est correct.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): C'est ça.

M. Fahey (Richard): 300 millions par année fois 10 ans.

M. Hamad: La question que je vous pose: Est-ce qu'actuellement vous avez les chiffres, la capacité d'Hydro-Québec d'exporter... Parce que ça, c'est une exportation nette à la fin de l'année d'Hydro-Québec, et on sait pertinemment que la situation actuellement... l'exportation nette de cette année, par exemple, est presque even, là. On n'est pas à 7 TWh cette année, puis on est peut-être à 1... si on est chanceux, autour de 1 TWh. Et là vous êtes à sept fois plus, et là on calcule sur 10 ans. Mais, pour ça, notre gouvernement veut développer, parce qu'on veut exporter plus tard, une fois qu'on a répondu...

Et là je prends une petite parenthèse pour expliquer encore une fois à mon collègue de l'autre côté, c'est qu'on a Hydro-Québec Distribution. Son mandat, c'est réponse à la demande de tout le monde au Québec. Ça veut dire.... la demande à tout le monde, ça veut dire faire le développement en même temps. Puis, à Hydro-Québec Production, ils ont une obligation de 165 TWh à fournir à Hydro-Québec Distribution, et la différence, leur marge de manoeuvre ou cette différence-là permet de faire l'exportation.

Notre objectif aujourd'hui, c'est augmenter la production au Québec pour sécuriser les Québécois en premier lieu et permettre d'avoir une marge de manoeuvre; cette marge de manoeuvre permet d'avoir une exportation.

Aujourd'hui, si on regarde les chiffres d'aujourd'hui, on n'est pas à 7 TWh d'exportation, on est loin. Et ça va prendre du temps pour arriver à notre 7 TWh, ça ne prend pas deux ans, trois ans. Parce qu'on projet hydroélectrique, ça prend 14 ans à peu près, la vie de... à partir des études jusqu'à la mise en service. Un projet éolien, on a vu, ça prend un peu moins de temps, mais on n'aura pas toute cette capacité-là dans 10 ans. Et la capacité, lorsqu'on regarde les chiffres, si tous les projets vont bien, si on n'a pas de problème sur les chantiers, si on n'a pas des bris sur les chantiers, si les échéanciers sont respectés, si les projets démontrent qu'ils sont... qu'ils respectent l'environnement, et si dame Nature est de notre bord aussi, nous donne une hydraulicité moyenne, on va réussir, en 2012, 2010, 2012, de commencer à dégager notre...

Alors là, vous, vous êtes rendus, dans votre calcul, 2014; nous, on dit: En 2012, on va commencer à avoir cette marge de manoeuvre là. Donc, le 7 TWh fois 10, c'est 70 TWh, c'est la moitié, presque, de la production actuelle du Québec. Et...

M. Fahey (Richard): M. le ministre, pour répondre à ça, votre prémisse, c'est de dire: Aujourd'hui, on augmente la production pour pouvoir éventuellement exporter, parce qu'on est vraiment serrés, là, au niveau de... Puis, si ça n'avait été des importants apports d'eau qu'on a eus cet été, on aurait été vraiment, là, tu sais, même négatifs; on a été un importateur cette année. Mais ça, c'est l'hypothèse de base qu'on n'accepte pas.

Ce qu'on propose ici, c'est une façon de revoir l'énergie. Ce n'est pas juste d'augmenter la production, c'est aussi de hausser les tarifs, c'est aussi de faire de façon intensive de l'efficacité énergétique. Et ce 7 TWh, qui est une moyenne sur 10 ans, c'est sûr qu'aujourd'hui on n'en a pas, mais, si on change nos façons de faire, on va se dégager des marges de manoeuvre. Puis là Pierre Emmanuel peut vous donner les chiffres, là, la tendance.

M. Hamad: ...augmenter les tarifs, là...

M. Fahey (Richard): Bien...

n (11 h 10) n

M. Hamad: ... ça n'augmente pas l'énergie, là, c'est l'efficacité énergétique qui va aller chercher une marge. Actuellement, on a mis un objectif de 3 TWh sur un espace de 10 ans, là, parce que, demain matin, la machine ne vire pas sur un trente sous, là, ça prend du temps, là, il faut... L'efficacité énergétique, on en veut, là, tout le monde en veut, et il faut vraiment qu'on travaille pour aller chercher ça. Et le 3 TWh, de l'objectif du gouvernement du Québec, c'est un minimum, je comprends, mais, demain matin, on ne sera pas à 15 TWh dans l'efficacité énergétique. Et donc, notre marge de manoeuvre, et les 3 TWh, avec tous les projets actuellement qui sont en marche, avec ce qu'on veut ajouter... Et je pense, en tout cas, je pense ? rapidement ? qu'en 10 ans, avec la situation actuelle puis avec l'augmentation de la consommation, il faut tenir compte de 2 TWh par année, parce qu'il faut qu'on continue à répondre à la marge. Je pense, je pense ? très rapidement ? que 3,5 milliards de revenus sur l'exportation d'ici 2014, c'est un petit peu...

Je ramène maintenant... je vais ouvrir l'autre question. Évidemment, vous, votre philosophie, dire: On fait payer tout le monde. Malgré que je ne suis pas sûr que les PME sont d'accord à payer, tu sais, elles sont d'accord à baisser la dette, mais je ne suis pas sûr, avec le chiffre que, vous-mêmes, vous avez donné, qu'elles sont prêtes, en plus, à baisser leurs profits, augmenter leurs coûts de production pour contribuer à la dette.

Si le gouvernement développe au maximum son potentiel, dans le respect évidemment des communautés et dans le respect de l'environnement bien sûr, et on crée un développement énergétique important au Québec qui... Évidemment, à chaque fois qu'on fait un développement énergétique, il y a des retombées majeures sur l'économie, il y a des revenus supplémentaires au gouvernement, bien sûr, et ces revenus-là permettent de donner une marge de manoeuvre au gouvernement, qui permet aussi d'attribuer cet argent-là à l'augmentation de... En fait, à la limite évidemment notre priorité, nous, c'est baisser les impôts, et, une fois qu'on a stabilisé les situations des finances publiques et on a baissé les impôts, évidemment l'attaque... attaquer la dette est une bonne chose.

Et donc, là, il y a deux philosophies. Vous, vous dites: On fait payer tout le monde maintenant, puis payer jusqu'à 10 ans, tout le monde en fait, et prendre cet argent-là, baisser la dette. Il y a aussi l'autre philosophie, celle d'augmenter mon développement économique au maximum, et puis cet argent-là m'aide à baisser mon fardeau fiscal, baisser...

Et un autre élément aussi qui est sur le plan financier: lorsque je fais marcher mon économie au maximum, mon PIB, produit intérieur brut, augmente, on est à 240 milliards actuellement, autour. Et, quand je prends la dette, je pense, si ma mémoire est bonne, on est à une proportion de 40 %, 42 %... de pourcentage de la dette, divisée sur le PIB. Si mon économie augmente puis est prospère, mettons, mon PIB augmente, le pourcentage de la dette diminue. Il reste que la dette est là pour payer pareil, j'ai une dette pareil, mais, en pourcentage, permet une marge de manoeuvre plus intéressante.

Alors, comment... qu'est-ce que vous...

M. Fahey (Richard): M. le ministre, ce que vous exposez, c'est la façon qu'on a développé l'énergie au Québec depuis 40 ans, puis strictement vous avez raison. Strictement, vous avez raison, le développement économique va amener des capacités d'exportation, on va pouvoir aller... on va pouvoir envoyer de l'électricité, on va faire de l'argent sur l'électricité, et ainsi de suite.

Il y a un fait qui demeure: on va continuer à être les plus grands consommateurs d'électricité au monde. On va continuer à la gaspiller ? parce qu'il faut le dire, on la gaspille, on n'a pas la vraie valeur de notre énergie ? et on va perpétuer en quelque sorte le régime actuel. On va aussi, dans un scénario comme ça, augmenter notre dette, puis notre PIB, notre croissance économique va devoir rouler sur un temps riche pour pouvoir maintenir ce ratio dette-PIB. Ça, ça serait notre défi.

Maintenant, rentrez là-dedans une petite variable qui s'appelle le vieillissement de la population puis demandez au ministère des Finances ce que devient sa dette-PIB dans 10 ans, et c'est là le défi. Il nous reste six, sept ans pour changer nos façons de faire, dégager des marges de manoeuvre. On l'a vu, au cours des 10 dernières années, le gouvernement du Québec n'a pas été capable de générer de façon interne, à même ses opérations, à même ses ventes, à même ses achats, et ainsi de suite, de remboursement sur la dette. Si on continue à perpétuer ce qu'on fait actuellement, dans 10 ans je vais revenir ici pour vous dire que la première priorité des PME, d'un point de vue fiscal, c'est la réduction de la dette; la deuxième, c'est la réduction des impôts. On pense qu'on a là un levier qu'on peut utiliser collectivement, tout le monde fait un effort.

Puis, à votre question: Est-ce que les PME accepteraient de mettre 3 % de hausse d'énergie? Écoutez, au cours des trois dernières années, on a eu une hausse moyenne des prix d'énergie de 12,3 %. C'est 4 % par année. Est-ce que c'est beaucoup? La réponse, c'est oui. 3 %, si on sait qu'on a un cap, qu'on a un plafond à 3 % et que c'est prévisible ? l'élément de prévisibilité est important ? les PME vont l'intégrer dans leur modèle d'affaires. Ils vont planifier en conséquence, sachant ? puis, encore une fois, ça, c'est l'élément important ? que cet argent-là ne servira pas à des dépenses, il va servir à baisser la dette, qui est hors contrôle.

Le Président (M. Jutras): Alors, il reste 2 min 30 s. M. le député d'Arthabaska.

M. Bachand: Merci, M. le Président. M. Fahey, ça me fait plaisir de vous voir ici. C'est toujours intéressant de vous voir. C'est sûr qu'il y a toujours une consonance très économique dans vos orientations.

Moi, je vais aller dans un terrain totalement différent. Vous parlez, dans votre début de mémoire, que l'énergie des PME approche 15 % des coûts, d'accord? Suivez-moi rapidement dans mon raisonnement, j'ai besoin de quelques réponses très rapides. Gestion de nos ressources: Est-ce que, pour vous, ça implique aussi gestion des rejets de ces ressources-là? Oui ou non, d'après vous, très... très...

M. Fahey (Richard): Les ressources?

M. Bachand: Si la gestion des ressources... Quand on fait la gestion des ressources naturelles...

M. Fahey (Richard): Oui. Oui.

M. Bachand: ...est-ce qu'on doit gérer aussi les rejets? Exemple, une usine thermique, on a besoin de...

M. Fahey (Richard): Ah oui! Tout à fait, tout à fait.

M. Bachand: Hein, vous êtes d'accord avec ça?

M. Fahey (Richard): Au point de vue développement durable, oui, oui.

M. Bachand: Vous êtes d'accord avec ça. Vous avez dit, dans votre plaidoyer, là, fort intéressant, qu'on a voulu être «innovatifs et créatifs» et là je vous cite. Et, moi, je vais vous demander de faire appel à ces qualités-là que vous avez en vous. Dites-moi donc, ça prend de l'énergie pour produire des biens de consommation; vous êtes d'accord avec ça, hein? Absolument. C'est beaucoup de biens de consommation. Vous représentez, en fait regroupez 105 000 à peu près PME au Canada, 24 000 au Québec. Dites-moi donc, pensez-vous que les 24 000 PME que vous regroupez ont une responsabilité sur la récupération et le recyclage des biens que vous mettez en service?

M. Fahey (Richard): Écoutez, je vous dirais que, puis je n'ai pas le chiffre exact, les PME sont en faveur du développement durable, elles adhèrent au développement durable, cette vision tricéphale en quelque sorte du développement économique, environnemental et sociétal. Donc, la réponse, c'est: Oui, elles acceptent le développement durable, le principe de développement durable.

M. Bachand: Merci, M. Fahey. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Alors, ça va? Il reste 30 secondes, M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Oui. Merci, M. le Président, de m'accorder ce 30 secondes. J'ai beaucoup apprécié votre présentation, messieurs. Au niveau économique, ça se tient. Le seul... Tantôt, vous avez dit que vous aviez intégré l'ensemble de la problématique.

Moi, j'avais une question sur les gaz à effet de serre. Vous n'avez pas du tout parlé... Quand vous avez fait allusion au partage de l'énergie, entre l'électricité et puis le gaz naturel, dans votre discours, vous ne parlez pas du tout des gaz à effet de serre. Alors, ma question, c'était là-dessus, là.

M. Fahey (Richard): Bien, écoutez, la gestion des gaz à effet de serre, c'est un défi pour tout le Canada, et il y a beaucoup de flou, à savoir comment on va s'attaquer à ça. Heureusement, au Québec, on a une situation qui est privilégiée par rapport à ça compte tenu du développement hydroélectrique, qui a été, ma foi, une fort bonne décision, puis on a une société, un fleuron qui s'appelle Hydro-Québec, là-dessus.

Ce qu'on recherche dans notre mémoire, c'est l'utilisation de la bonne énergie à la bonne place. Si on est pour construire un Suroît pour chauffer des maisons, c'est zéro, je ne retiens rien. Il faut prendre le gaz naturel ou le mazout pour chauffer nos maisons et se servir de nos développements hydroélectriques pour alimenter en électricité, en force motrice, les besoins des entreprises et des consommateurs. Et ça, c'est de l'optimisation énergétique globale.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Fahey. Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, je comprends bien le sens de votre mémoire, bien que je ne partage pas tout à fait l'approche que vous présentez, pas parce qu'elle n'est pas bonne, là, mais parce que, dans le contexte de la sécurité et de l'avenir énergétiques du Québec, j'aimerais mieux me concentrer là-dessus. Et je voudrais revenir sur deux notions.

n (11 h 20) n

Bon, je comprends qu'on revoie la loi n° 116 parce qu'il y a une transparence, là, dont vous faites état, qu'il faut réaliser. Vous parlez de prévisibilité. Quand on parle d'un développement agressif de l'hydraulique sur 10 ans, il faut aussi tenir compte qu'on n'est pas tout seuls dans le marché. Je pense que vous êtes bien conscients de ça, on est dans un marché nord-américain.

Hier, les Manufacturiers et exportateurs du Québec nous ont présenté un petit tableau, juste pour votre gouverne, là ? vous l'avez peut-être vu: les capacités additionnelles de production prévues aux États-Unis pour les 12 prochains mois. Vous avez à peu près pour 1 000, 1 200 MW, là, de capacité qui s'en revient strictement dans le Nord-Est. Alors, c'est clair que, si on commence à avoir une stratégie qui ne vise qu'un développement agressif, le ministre l'a mentionné tantôt, là, il y a des délais dans le développement de l'hydraulique, on se retrouve dans une dynamique qui va être très différente de celle de l'année passée. Alors, sur cette question-là, moi, je ferai preuve de beaucoup de réserves.

Je suis favorable à l'exportation d'énergie, mais je pense qu'on doit tenir compte de la dynamique d'un marché qui est en mouvance également, et je voudrais vous demander ce que vous pensez de la constatation de ce même groupe qui nous disait hier que les ventes de produits manufacturés québécois, par kilowattheure, rapportaient 0,69 $ du kilowattheure au Québec, alors que les ventes, dans un marché où le dollar canadien était nettement défavorisé, donc les 10 dernières années, rapportaient à peu près 0,09 $ du kilowattheure. Donc... et, quand je dis «défavorisé», c'est parce que le dollar était bas, donc les exportations généralement vont bien dans ce temps-là. Qu'est-ce que vous pensez de cette évaluation-là?

M. Fahey (Richard): En fait, je...

Mme Dionne-Marsolais: Pensez-vous sérieusement qu'avec une donnée comme ça on peut dire qu'on doit exporter de préférence à investir, quel que soit le degré de transformation?

M. Fahey (Richard): Il y a peut-être deux éléments, là. Je vais parler du développement agressif, et Pierre Emmanuel va vous parler de l'industrie manufacturière.

Mme Dionne-Marsolais: O.K.

M. Fahey (Richard): La FCEI ne propose pas un développement agressif. C'est sûr que, si on change le chauffage pour l'huile... le mazout ou le gaz naturel, ça va ralentir notre développement hydroélectrique. C'est sûr que, si on fait plus d'efficacité énergétique, ça va ralentir le développement hydroélectrique. Si on fait... S'il y a des hausses de tarifs et compte tenu des élasticités-prix, ça aussi, ça va ralentir la croissance de la demande. Donc ça, pour nous, l'exportation n'est pas une fin en soi. Pour nous, le développement d'une marge de manoeuvre optimisée, où on va chercher le plus grand rendement, c'est vraiment ça, le but de notre mémoire. Pour ce qui est du manufacturier, Pierre Emmanuel.

M. Paradis (Pierre Emmanuel): Oui. Dans le secteur manufacturier, on a souvent l'impression que le manufacturier, c'est comme autre chose, ce n'est pas un secteur économique comme les autres, et puis que chaque emploi dans le manufacturier est plus important, que c'est un secteur moteur. Depuis des décennies, la part de l'emploi manufacturier, dans l'emploi total, diminue. Sa production continue à augmenter, puis on parle d'une industrie qui va vers des produits à plus haute valeur ajoutée. Donc, oui, c'est un secteur qui est en changement, qui est en transformation, mais il y en a d'autres, et puis, nous, on s'est concentrés sur le développement économique dans son ensemble.

On a une richesse qui est l'électricité. On a un contexte qui est exceptionnel, au Québec, pour la production, la vente et les opportunités d'exportation. Parce que vous noterez bien qu'on n'a pas du tout modélisé en fonction d'activités de «trading», où on a une marge de manoeuvre qui est à toutes fins pratiques inexistante puis sur laquelle on peut quand même faire de l'argent. On a uniquement regardé la valeur potentielle du structurel additionnel qui serait généré. Donc, on préfère regarder ça dans son ensemble plutôt que de dire que le secteur manufacturier est exceptionnel, ce qu'il n'est pas.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Enfin, ce n'était pas le point. Le point, c'était que 1 $ investi dans l'industrie manufacturière avait plus de retombées, par rapport à l'utilisation de l'énergie à la bonne place, que 1 $ investi pour fins d'exportation. Ce qui n'empêche pas, ce qui n'empêche pas l'exploitation du réseau et l'optimisation pour maximiser le marché d'exportation.

La question que j'ai... j'ai un autre commentaire aussi sur votre mémoire. Vous dites que la facture moyenne d'énergie d'une PME ? il doit y avoir des manufacturières quand même là-dedans, là ? approche les 15 % de ses coûts totaux et a connu une hausse significative au cours des dernières années.

Quand je vais dans votre sondage, en arrière, sur 1 547 PME, avec une marge d'erreur de plus ou moins 2,5 %, 19 fois sur 20, vous avez 80 % de vos entreprises où la part des coûts de l'énergie est inférieure à 10 %. Ce n'est pas une grosse part, là. La part des coûts d'énergie dans les coûts totaux de l'entreprise ? je pense que c'est la question 10, là, qui est ici, ou 1,0, je ne sais pas ? vous avez 80 %... 76 %, là, pour être précis, des entreprises qui ont... dont le coût de l'énergie représente moins de 10 %.

Et vous pensez, vous, que ces entreprises-là, si vous leur annoncez une augmentation de tarifs pour financer la dette au Québec, ne vont pas se présenter au ministre pour dire: Ça n'a pas d'allure? Honnêtement, là, moi, j'ai de la misère à vous suivre, d'autant, d'autant que vous dites de la même voix, vous dites que vous êtes insatisfaits des efforts en efficacité énergétique, et vous savez très bien que la PME est la plus difficile à convaincre au niveau des efforts d'efficacité énergétique, parce que les périodes de recouvrement de son investissement supérieures à 12 mois, ça ne l'intéresse pas, c'est trop coûteux.

Alors, ma question, prenons l'efficacité énergétique: Est-ce que vous pensez qu'il y aurait un intérêt à consolider les efforts de l'Agence de l'efficacité énergétique et peut-être d'en faire une entité autonome, adéquatement financée, qui pourrait trouver avec vos PME des solutions? Parce que, dans les cinq prochaines années, les PME vont patiner, hein, avec l'augmentation pas rien que des coûts d'énergie, là, avec l'augmentation de la valeur du dollar canadien.

M. Fahey (Richard): Écoutez, beaucoup de commentaires, là, dans votre intervention. Premièrement: Oui, le dollar investi au Québec peut profiter au Québec, devrait profiter au Québec, sauf que... Il y a des experts qui sont venus vous présenter des données sur les investissements dans la grande entreprise et les tarifs d'électricité bénéfiques qu'ils ont reçus et le retour sur l'investissement que le Québec a gagné là-dessus: pas très reluisant! Je suis convaincu que nos PME, à 200 000 $ l'emploi, seraient certainement très intéressées à être financées comme nos grandes entreprises le sont. Ça, c'est le premier élément. Donc, oui à l'investissement au Québec. Oui à l'investissement au Québec, dans la mesure où ça procure une valeur ajoutée ici, au Québec, qu'il y a de la transformation, qu'il y a des produits à valeur ajoutée qu'on peut exporter, ainsi de suite. Malheureusement, dans bien des cas, on fait simplement exporter des lingots et il n'y a pas nécessairement beaucoup de valeur ajoutée au Québec.

Pour ce qui est des hausses, la part d'énergie des coûts totaux, les PME ? vous le savez, hein, 75 % des entreprises au Québec ont moins de cinq employés, 98 en ont moins de 50 ? la moyenne du 15 %, c'est la moyenne de toutes les entreprises au Québec, et il faut réaliser que notre économie est en train de devenir une économie de services beaucoup plus que traditionnelle, là, de «brick and mortar».

Pour ce qui est de l'efficacité énergétique, oui à une agence autonome ? on l'a dit, c'est dans le mémoire ? financée par une redevance sur chaque gigajoule vendu.

Pour ce qui est des PME qui sont difficiles à convaincre, Mme la députée, je vais vous dire personnellement... excusez, M. le Président, je vais vous dire qu'un des éléments pour lequel il y a si peu d'efficacité énergétique dans le secteur de la PME, ce n'est pas juste parce qu'ils sont difficiles à convaincre, c'est parce que c'est... traditionnellement, dans les structures tarifaires de Gaz Métro, d'Hydro-Québec, de Gazifère, des pétrolières, c'est le pain puis le beurre d'un distributeur énergétique. C'est là qu'on fait le plus d'argent pour le service donné.

Donc, la raison pour laquelle on veut faire une agence indépendante, c'est d'éviter ce dilemme d'intérêts que le fournisseur a de: Pourquoi est-ce que j'investirais dans l'efficacité énergétique dans mon secteur, dans mon domaine ou... qui est le plus payant pour moi qui est le secteur de la PME?

Mme Dionne-Marsolais: Alors, je vous remercie...

n (11 h 30) n

M. Fahey (Richard): Finalement, peut-être un dernier élément pour la hausse de tarifs de 3 %. Je vais faire une analogie, un parallèle avec la hausse de tarifs que les PME ont subie en assurances.

Mme Dionne-Marsolais: ...je vous interromps parce que j'ai des collègues qui veulent poser des questions, puis je pense que votre point est fait. Je ne le partage pas et je voudrais que vous soyez un peu plus respectueux pour les grandes entreprises, parce que les centres de recherche que nous avons au Québec, sans les grandes entreprises, on pourrait les chercher longtemps. Ce n'est pas une question, c'est un commentaire.

Le Président (M. Jutras): Alors, Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Je vous salue, messieurs. Et, moi, justement je vais continuer dans la même ligne que ma collègue et prendre votre tableau à la page 25, parce que justement, hier, l'Association des manufacturiers exportateurs du Québec sont venus nous faire une excellente présentation et ils sont venus... Je vous invite à lire leur mémoire, à l'étudier à fond, surtout les deux pages qui concernent des tableaux où on voit que dans le fond les tarifs préférentiels pour la grande industrie qu'on a au Québec, bien il y en a en Europe, il y en a aux États-Unis. Et, moi, je ne comprends pas, parce que c'est vraiment... vous faites une rupture avec votre ligne de pensée habituelle. Moi, je n'ai pas eu d'appels, dans mon bureau de comté, d'entreprises, de PME qui sont venues me dire: Mme la députée de Matapédia, on voudrait avoir des hausses de nos tarifs d'électricité. J'en ai plutôt, quand il y en a, des hausses de tarifs d'électricité. Puis j'en ai des résidentiels aussi.

C'est toute une chaîne; on a une économie intégrée, au Québec. Et, moi, la grande entreprise, ce sont des donneurs d'ouvrage, ce sont souvent des sous-traitants. Les petites et moyennes entreprises, dans des régions comme la nôtre, mon collègue de Roberval, mes collègues, que ce soit en ville, dans un milieu urbain ou dans des régions forestières et d'agriculture comme les nôtres, ce sont des donneurs d'ouvrage, la grande entreprise. Puis là vous dites... Et, quand je consulte votre tableau, là, puis je lis les articles sur ce que vous... vous proposez à la grande entreprise des hausses de 5,6 % après sept ans, le tarif domestique ou le résidentiel, le citoyen et citoyenne, M., Mme Tout-le-monde, papa, maman, petits enfants, 10,1 %, et général, institutionnel, puis on a vu... ils sont venus nous dire que... Bien, en tout cas, si je n'ai pas... Mais je n'ai pas terminé. Bon. Et là vous proposez d'augmenter plus rapidement pour le résidentiel que pour les entreprises. Mais là, avec tout ce qu'on a comme mesures d'économies, comme efficacité énergétique... Puis là je pense que le ministre, je ne suis pas toujours d'accord avec lui, mais là c'est vrai, ce qu'il a dit, qu'en 2012, 2014, on va avoir au Québec plus d'énergie, on va pouvoir faire probablement plus d'exportation puis on va en avoir plus.

Actuellement, on a 1,9 milliard de retour d'Hydro-Québec puis 2 milliards presque cette année, et ça va continuer avec presque la moitié, 45 % d'augmentation. Et là vous voulez en mettre davantage dans la cour des citoyens parce que, là... Moi, je trouve que vous êtes audacieux, M. Fahey. D'habitude, je ne vous trouve pas très audacieux. C'est ça, Fahey, hein? Je ne vous trouve pas très audacieux, plutôt... et là... En tout cas, mettez ce que vous voulez là-dedans. Mais là vous dites: On va creuser ensemble notre tombe, les citoyens et citoyennes du Québec, PME et grandes entreprises. Moi, là, je ne vous comprends plus. J'aime ça vous comprendre, puis là, là, je ne vous comprends plus.

M. Fahey (Richard): Je vais vous aider à me comprendre. Le scénario 7 auquel vous faites référence, le 10 % pour le citoyen, c'est ce que j'appelle le scénario de sport extrême. Ça, c'est la valeur de la rente économique des tarifs bas d'électricité au Québec. Si on se mettait à niveau avec l'Ontario puis les États-Unis, si on corrigeait l'interfinancement complet, si on faisait ça, c'est ça, le chèque tarifaire qu'on aurait année après année pendant 10 ans. Donc, on s'entend-u que la FCI, raisonnable comme elle est, n'a pas favorisé le scénario 7, a plutôt favorisé le scénario 6 où on corrige partiellement l'interfinancement, où on rattrape ce déficit de prix d'énergie par rapport aux juridictions environnantes seulement de 10 %, et qu'en définitive on va chercher de l'argent pour le fonds énergétique?

Permettez-moi, M. le Président, de répondre au manque de respect par rapport aux grandes entreprises. Écoutez, j'ai tout le respect pour les grandes entreprises, parce que les grandes entreprises sont des donneurs d'ouvrage, comme vous le dites, des PME, qui en bénéficient. Mais il y a une donnée qu'on oublie souvent: Où se crée l'emploi au Québec? Année après année, pendant les 20 années, 80 % des nouveaux emplois se sont créés dans la PME. Donc, avant de parler des tarifs préférentiels que les grandes entreprises ont pu avoir, moi aussi, j'en voudrais. Mais ce qu'on propose aujourd'hui, c'est un effort collectif pour voir différemment l'énergie. Je sais que c'est difficile, mais on pense que c'est raisonnable et prévisible.

Le Président (M. Bachand): C'est bien, M. Fahey, on a bien compris le sens de votre intervention. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Une dernière: Est-ce que, M. Fahey, vous ne trouvez pas que c'est plus un sport extrême de supputer des baisses d'impôts autant pour les citoyens ordinaires? Parce que là on a vu que c'est plus souvent des hausses de tarifs de toutes sortes, hein, que le sport extrême, ce ne serait pas supputer ça, ou supposer, ou escompter ça que plutôt des baisses d'impôts? Qu'est-ce que vous pensez qu'il nous arrive, tout le monde, habituellement, des hausses de tarifs ou des baisses d'impôts, d'une année à l'autre?

M. Fahey (Richard): Mme la députée, vous avez tout à fait raison, il n'y a personne qui aime ça de voir une augmentation de tarifs, ou de taxes, ou d'impôts, c'est clair. Sauf qu'il y a-tu quelqu'un qui s'occupe de la dette en ce moment? La réponse là-dessus, c'est non. Le gouvernement du Québec n'a pas été capable, au cours des 10 dernières années, de s'attaquer à la dette. On vous propose une façon de le faire compte tenu du défi du vieillissement de la population. Vous n'avez pas à être d'accord avec ça. Ce qu'on vous propose, c'est un effort collectif pour faire face à la musique, parce que ce ne sera pas dans 10 ans, quand tout le monde va vouloir prendre sa retraite puis qu'il n'y aura pas suffisamment de monde pour payer notre système de santé, qu'il faudra se poser la question: Comment on aurait dû le faire?

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Fahey. M. le député de...

Mme Doyer: Oui, mais juste... et je termine là-dessus.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, Mme la députée de...

Mme Doyer: Cet argent-là, M. Fahey, ils ne l'auront pas pour investir. Les PME et la grande entreprise ne l'auront pas pour investir dans nos différents milieux s'ils paient... Puis là je termine là-dessus, puis je veux laisser la... C'est vous qui commandez...

M. Fahey (Richard): C'est en supposant...

Mme Doyer: ...mais, si je veux que mon collègue ait le temps de poser une question...

Le Président (M. Bachand): Regardez, là...

M. Fahey (Richard): ...c'est juste en supposant...

Le Président (M. Bachand): M. Fahey! M. Fahey!

M. Fahey (Richard): Excusez, M. le Président.

Le Président (M. Bachand): On connaît votre enthousiasme et vos convictions, puis soyez assuré qu'on est très attentifs là-dessus. Donc, permettez-moi de vous donner la parole après la question du député de René-Lévesque. M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Une question avec un exemple bien concret. Vous dites que vous avez 24 000 PME au Québec. Moi, je pense que dans mon comté, dans la MRC de Manicouagan, j'ai plusieurs PME dont l'ouvrage est donné par la grande entreprise. O.K.?

Une voix: Alcoa.

M. Dufour: Alcoa, Abitibi-Consolidated, Kruger, tu sais, puis il y a Hydro-Québec, il y a du monde sur la patinoire. O.K.? Ce qui a accroché dans un dossier en particulier, puis je vous donne l'exemple de la modernisation d'Alcoa, c'est justement le tarif d'électricité. Vous parlez de hausses de tarifs d'électricité par rapport aux tarifs préférentiels. Mais, si la grosse industrie, par rapport à une non-prévisibilité des tarifs d'électricité, ne sont plus présents au Québec, savez-vous qu'il y a plusieurs PME qui disparaissent? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bachand): M. Fahey, en une minute.

M. Fahey (Richard): 71 % des PME ont été créées et vivent de la sous-traitance. Ça, c'est la réalité au Québec. O.K.? Notre propos, ce n'est pas de dire: On met un x sur la grande entreprise. O.K.? Ce n'est pas ça. Notre propos ? puis je vais le dire, puis je vais le dire autant comme autant ? notre propos, c'est de trouver un levier pour s'attaquer à la dette, c'est juste ça. Et on se dit, on pourrait très bien dire: Faites payer la grande entreprise, parce que, moi, je défends des PME, puis donnez un break aux PME. J'aurais pu venir dire ça. Plutôt, j'appelle à la solidarité de tous les contribuables, de tous les consommateurs d'énergie, de dire: Faisons un effort collectif, sachant ? et c'est là-dessus, Mme la députée, la question de Mme la députée ? sachant que l'effort collectif qui est fait est dédié à la dette. S'il est dédié aux dépenses gouvernementales, oubliez-nous, on n'est pas là. Et la prévisibilité, bien là on connaît nos hausses de tarifs, tout le monde les connaît, tout le monde va savoir à quoi s'en tenir.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Fahey. Donc, vous avez pu remarquer que votre enthousiasme était communicatif. Il me reste, au nom de mes collègues ? M. le député de Portneuf, juste un instant ? donc il me reste, au nom de mes collègues, de vous souhaiter donc bon retour. Merci infiniment de vous être présentés à la commission.

n (11 h 40) n

Et je vais demander tout de suite à la Coalition pour le transport en commun de venir se présenter, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Jutras): Nous recommençons donc nos travaux, et je souhaite la bienvenue à la Coalition pour le transport en commun. Alors, M. Robert Perreault, entre autres, un de nos anciens collègues de l'Assemblée nationale. Alors, M. Perreault, bienvenue, et je vous demanderais de présenter la personne qui vous accompagne.

Coalition pour le transport en commun

M. Perreault (Robert): Oui. Merci, M. le Président. Alors, c'est André Porlier, qui travaille avec moi au Conseil régional de l'environnement de Montréal. Nous sommes les porte-parole de la coalition pour la commission.

Le Président (M. Jutras): Alors donc, bienvenue à cette commission. Vous connaissez les règles, je vous les rappelle quand même: 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, il y a 20 minutes pour les députés du côté ministériel, 20 minutes du côté des députés de l'opposition. Alors, vous pouvez commencer.

M. Perreault (Robert): Merci. On va essayer de raccourcir la présentation. Je pense que tout le monde a déjà reçu le mémoire. Le propos est relativement simple, puisque, dans le cadre de cette commission, je pense, les enjeux seront plus complexes. Je veux saluer, M. le Président, le ministre et puis également mes ex-collègues de l'Assemblée nationale et les députés présents ici aujourd'hui.

Écoutez, nous autres, on va sans doute un peu amener la commission à réfléchir sur des matières un peu différentes de ce sur quoi elle a réfléchi jusqu'à maintenant, du moins d'après ce que nous vu à travers les médias. Nous allons, à toutes fins pratiques, ne pas parler d'électricité et parler plutôt d'hydrocarbures et de pétrole. Une des constatations que nous avons faites en lisant le document, c'est à quel point ce qui quand même constitue, à toutes fins pratiques, presque 40 % de notre consommation énergétique annuelle, c'est-à-dire la consommation des hydrocarbures, particulièrement du pétrole, particulièrement dans le secteur du transport ? c'est l'enjeu qui est le nôtre ? est à peine évoqué dans le document sur les enjeux d'une politique énergétique pour le Québec, à peine esquissé. Le document, au départ, établit très clairement que de fait le secteur des hydrocarbures est aussi important que le secteur de l'électricité dans la consommation d'énergie globale, à 38 virgule quelques chacun, égal en termes de leur place dans la consommation de l'énergie, et il nous semble un peu paradoxal, après ça, qu'on se concentre strictement sur les problèmes d'Hydro-Québec, aussi importants soient-ils et ce qu'ils entraînent pour le Québec.

Autrement dit, ce qu'on dit, par analogie, je vous dirais: Écoutez, tout le monde est au courant qu'actuellement il y a une guerre en Irak. Tout le monde sait à peu près pourquoi il y a une guerre en Irak, c'est la volonté des Américains de garantir leur sécurité énergétique notamment du côté de l'approvisionnement en pétrole. Et c'est comme si nous abordons, comme État du Québec, la question de la sécurité énergétique du Québec et que nous oublions 50 % de l'enjeu. Et c'est la compréhension que nous avons dans le document. Bien sûr, on esquisse dans le document des possibilités un peu théoriques d'exploration pétrolière, mais il n'y a aucune lecture à notre avis serrée des enjeux qui découlent de cette situation.

C'est le secteur des transports ? et le document également l'établit, et les études l'établissent ? c'est le secteur des transports qui est le grand consommateur, au Québec, des hydrocarbures. À lui tout seul, sur l'ensemble de notre consommation énergétique, le secteur des transports représente plus de 25 %, il représente les deux tiers de notre consommation d'hydrocarbures. Donc, c'est un secteur extrêmement important. Et, à notre avis, toute politique à long terme du Québec en matière de sécurité énergétique, d'approvisionnement, d'économie, d'efficacité, surtout dans une perspective de développement durable ? et c'est dans cet esprit-là que le gouvernement a lancé son document ? doit absolument intégrer une politique des transports beaucoup plus agressive que celle à laquelle nous nous sommes habitués depuis quelque temps.

Il faut rappeler qu'à lui seul le secteur des transports génère 40 % des gaz à effet de serre du Québec. On parle souvent du bilan relativement positif du Québec en matière de gaz à effet de serre parce qu'historiquement on a misé sur l'hydroélectricité, c'est un fait. Certains se réfugient derrière ça pour dire que nous n'aurions plus rien à faire comme société, puisqu'à l'échelle de la Chine, ou de l'Inde, ou de d'autres notre bilan là-dessus est plutôt positif. Mais, si on regarde là où le bât blesse chez nous, là où nous aurions des efforts significatifs à faire, c'est, encore une fois, dans le secteur des transports, avec 40 % des émissions.

Il faut savoir que, par exemple, y compris du point de vue... Quand on réfléchit à une question d'une politique énergétique, on soulève bien sûr des questions environnementales, des questions de production et de consommation, mais on est au coeur aussi ? et on l'a vu par les intervenants avant moi ? on est au coeur des enjeux économiques, de l'organisation économique d'une société, de ses défis. Et c'est quand même important de se rappeler que nous avons dépensé... les Québécois ont dépensé, en 2002, 47 milliards de dollars pour faire circuler leurs véhicules. Ils ne produisent ni voiture ni pétrole, et 45 % de cette somme est allée directement à l'étranger, puisque, dans le secteur des transports, pour chaque dollar dépensé, il y a 45 % de ces dépenses qui s'en vont à l'extérieur. Dans les grandes sociétés occidentales motorisées comme les nôtres, avec des taux de possession de véhicules à plus parfois de 2,3 par ménage, nous sommes une des rares sociétés occidentales, avec notre niveau de vie, notre niveau de consommation, qui nous retrouvons sans industrie pétrolière, sans industrie automobile et qui continuons de développer la possession d'automobiles et la consommation d'hydrocarbures comme si tout ça allait de soi: 350 000 véhicules de plus entre 1997 et 2002, 70 000 véhicules qui s'ajoutent chaque année au parc automobile.

Et, du point de vue de l'économie du Québec, une des questions qui se posent: Qu'est-ce qui va arriver quand le prix du baril du pétrole va passer à 60 $, 70 $, 80 $? C'est quoi, les conséquences quand toute notre organisation sociale, notre organisation des transports, tant du point de vue de la mobilité des personnes que du point de vue du transport des marchandises, a été totalement abandonnée au seul secteur du transport routier et des hydrocarbures?

Donc, nous pensons que toute stratégie adéquate en matière de sécurité énergétique doit intégrer des préoccupations à l'égard du développement d'alternatives à la fois durables et en même temps économiquement viables à l'utilisation stricte, dans le domaine des transports, des hydrocarbures, notamment par le développement des transports publics, dans le cas de la mobilité des personnes. Les transports interurbains publics n'existent presque plus. Faire l'autoroute Montréal-Québec en train, je veux dire, il faut se lever de bonne heure. Dans les grands centres urbains, à Montréal, Québec, le transport en commun peine à se maintenir, et pourtant plein, plein de chiffres disent qu'on devrait faire des efforts différemment.

n (11 h 50) n

Je vous donne quelques exemples. Ce que les ménages montréalais ont de plus dans leurs poches pour acheter des biens et services, pour vivre, remplir leurs obligations familiales, du fait de l'utilisation des transports en commun, c'est 570 millions de dollars par année. C'est ce que ça représente dans les poches des Montréalais qui utilisent les transports en commun, globalement, d'argent de plus, ça. Il faut se rappeler que cet argent retourne quand même... Un investissement dans le transport public de la part des gouvernements... Dans le cas du gouvernement du Québec, chaque dollar investi retourne complètement au gouvernement du Québec. Et, si on ajoute le prélèvement à travers les taxes et les impôts du gouvernement fédéral, c'est 1,45 $ pour chaque dollar investi qui retourne au gouvernement. Dans le secteur de l'automobile, on est bien loin de ça. Il faut savoir que dans le fond le déplacement par les transports privés coûte de deux à trois fois plus cher que par les transports publics. Il faut savoir que le transport en commun bouffe cinq fois moins d'énergie.

Bon, ce sont tous des chiffres qui démontrent à notre avis le fait qu'on devrait, au Québec, commencer un petit peu à réfléchir. Et on constate que malheureusement le gouvernement du Québec, je dirais presque tous partis confondus, a un petit peu abandonné... ? sauf certains efforts qui ont été faits du côté de la création de l'AMT, et je pense qu'il faut les saluer ? mais, depuis quelque temps, on a un peu abandonné toute réflexion à l'égard du développement du transport public. Et, à notre avis, on devrait étendre cette réflexion également pour ce qui est du transport routier, du transport des marchandises. Et ça nous semble problématique à long terme, d'où nos interventions dans ce sens-là.

J'ajouterais peut-être en terminant ? puis, après ça, on pourra y aller avec les questions ? il est un petit peu paradoxal de se retrouver, quand on est particulièrement Montréalais, de se retrouver devant une situation où, par exemple, une commission comme celle-ci tient des audiences, un gouvernement veut bâtir une politique, et en même temps on laisse entendre des projets comme, par exemple, le prolongement de l'autoroute 25. C'est l'ajout de 150 000 mouvements de véhicules par jour. Pour donner une idée, on se rappelle du débat entourant le Suroît, c'est quatre fois plus polluant que le Suroît en termes de pollution locale. Je ne parle pas en termes de gaz à effet de serre, mais, en termes de pollution locale, c'est quatre fois plus polluant que le Suroît. Et sans parler de tous les autres impacts, et j'ai parlé tantôt des aspects économiques pour les ménages et pour l'État de tout ça.

Dans le fond, ce qu'on veut essayer de faire valoir à cette commission et au gouvernement, c'est l'importance, un petit peu, de renforcer le volet de sa politique qui concerne les hydrocarbures. Je pense que le Québec n'a pas à se dire que parce qu'il ne produit pas de pétrole c'est une question qu'il n'a pas à aborder dans sa réflexion sur sa stratégie de sécurité énergétique ni sur ses stratégies économiques. Il y a des économies non seulement d'électricité à faire, il y a des économies de carburant à faire, et ça doit, ces économies-là, faire partie de toute politique. C'est un peu le message que nous voulions vous transmettre. Et évidemment on propose des solutions concrètes pour y arriver, et, un petit peu comme les gens qui nous ont précédés, nous, on est prêts à ne pas hésiter à dire que, dans certains cas, nos sociétés doivent accepter de payer le prix de choix difficiles, mais qu'on ne pourra pas toujours, au Québec, éviter les choix sous prétexte qu'ils sont exigeants. Voilà.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Perreault. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Bienvenue. Une question de curiosité sur la 25. Ce n'est pas mon champ d'activité, mais parce que vous m'avez rendu curieux quand vous dites: Le pont 25 va engendrer 125 000 véhicules encore.

M. Perreault (Robert): 150 000.

M. Hamad: O.K. Mais, ces véhicules-là, ils n'étaient pas arrêtés avant, là, ils étaient quelque part, puis on les amène là.

M. Perreault (Robert): Oui.

M. Hamad: Autrement dit, on n'a pas ajouté. Tout ce qu'on a fait, on a... Ce n'est pas 150 000 voitures qui étaient arrêtées qui attendent le pont pour partir.

M. Perreault (Robert): Oui. La première année, vous avez sûrement raison. On aura l'occasion, devant les audiences du BAPE, d'en débattre. Mais je vous dirais qu'on serait sans doute les seuls dans le monde ? puis, de ce point de vue là, on pourra peut-être charger un prix d'entrée ? qui construirions une autoroute vers un centre-ville pour réduire la pollution, la congestion et le nombre de voitures sur la route. Toutes les expériences dans le monde démontrent le contraire. Si vous regardez l'expérience de la création de la 13, qui voulait libérer la 15, bien jamais la 15 n'a connu, dans toutes les années, même après l'ouverture de la 13, la moindre réduction d'achalandage. Elle a connu une forme de stabilisation, et, au bout de sept, huit ans, les deux étaient à 150 000 mouvements de véhicules à...

M. Hamad: Mais, demain matin, on n'aura pas 150 000 voitures de plus.

M. Perreault (Robert): Non, pas demain matin, je le reconnais bien volontiers, mais, sur l'espace de quatre, cinq ans, oui. Et, au rythme où se fait actuellement la motorisation, oui.

M. Hamad: En tout cas, on ne vendra pas 150 000 voitures de plus. Les concessionnaires d'autos vont être heureux de vendre ça, 150 000 voitures de plus à Montréal.

M. Perreault (Robert): Non, mais ce que vous induisez... Vous avez raison, M. le ministre, mais ce que vous induisez... M. le Président, M. le ministre a raison, mais ce qui est induit par une telle offre de places supplémentaires, c'est toutes sortes de choix: une personne qui habitait Montréal et qui décide, ce faisant, d'aller habiter plus loin; quelqu'un qui laissait sa voiture à la maison parce que c'était congestionné et qui, pendant un certain temps, se rend compte que la route est plus libre, la prend; et, au bout de la ligne, l'expérience le démontre partout.

M. Hamad: Oui. Revenons à l'énergie, l'avenir du Québec. À la page 10 de votre mémoire, vous mentionnez que, grâce aux nouvelles technologies, le péage effectue un retour au Canada. Peut-être parler un petit peu de... Parlez-vous des technologies de... les caméras qui prennent les numéros, etc., ces cartes-là? C'est ça, hein?

M. Perreault (Robert): Oui, c'est ça. C'est parce que souvent, quand on veut un peu faire peur aux gens sur le dossier des péages, bien il y a d'abord le coût du péage. C'est effectivement exigeant de rétablir les péages. Ça a été une erreur historique, je pense. Et puis, quand on regarde ce qui se passe dans la plupart des grands pays, la capacité de financer les réseaux routiers, pas juste d'ailleurs le transport public... Et le transport public passe par ce genre de formule de plus en plus, soit des taxes sur l'essence soit des péages. Ce n'est pas une vision d'écolos, ça se fait à New York, ça se fait à Portland, ça se fait à Londres, qui ne sont pas nécessairement des endroits où les écologistes sont toujours les plus dominants. Oui, ce qu'on parle, c'est qu'on dit tout simplement qu'il ne faut pas faire peur aux gens avec les barrières puis les arrêts; il y a des technologies maintenant qui font qu'à toutes fins pratiques ça ne ralentit pas la circulation.

M. Hamad: Vous êtes en faveur pour le péage, comme j'ai vu dans votre mémoire.

M. Perreault (Robert): Nous, on met de l'avant... ce qu'on dit, c'est qu'une politique énergétique digne de ce nom doit prendre en compte le problème des hydrocarbures. On parle de la mobilité des personnes. Pour ça, il faut aussi avoir une politique à l'égard des transports publics. Et il va falloir les financer, et on met de l'avant trois formules possibles: la taxe sur l'essence, qui a l'avantage d'envoyer un signal clair; il y en a d'autres, la taxe sur les stationnements, qui est à la fois un moyen de financement mais en même temps qui permet d'envoyer un message à l'utilisateur; et l'autre, c'est le péage sur les ponts.

M. Hamad: Dernière question, laisser mes collègues après. Qu'est-ce que vous en pensez? En fait, vous savez, une bonne partie de consommation de produits pétroliers au Québec, c'est le transport, c'est numéro un, là, au Québec, 60 %, si ma mémoire est bonne. 60 %... 60 %?

Une voix: ...

M. Hamad: 60 %. Maintenant, qu'est-ce que vous en pensez? Évidemment, là, le transport au Québec, c'est le premier émetteur de gaz à effet de serre, au Québec, aussi; ce n'est pas la production d'énergie, au Québec, qui... C'est de loin, en plus. Et évidemment, là, dans un esprit de réduction de gaz à effet de serre, le transport sera un élément intéressant à prendre en premier, parce que c'est l'émetteur de gaz à effet de serre premier au Québec. Comment vous voyez ça? Comment vous voyez ça...

M. Perreault (Robert): Bien, nous, ce qu'on soulève, c'est le fait que la politique devrait faire le lien justement avec la question des transports. Et ce n'est pas parce qu'on ne produit pas de pétrole comme société qu'on ne doit pas intégrer cette dimension à notre réflexion. On est des grands consommateurs, par tête de pipe, de pétrole, et c'est le secteur des transports qui l'est. Puis, si en plus on fait le lien avec la question des gaz à effet de serre, c'est le secteur le plus important au Québec pour l'émission des gaz à effet de serre. On ne prétend pas que tout passe par le transport public, mais, en matière de mobilité des personnes, ce qu'on dit, c'est que dans les grands centres urbains on doit avoir des politiques. Et ce qui nous préoccupe depuis quelques années, c'est que le gouvernement du Québec se désintéresse de ces questions.

Dans le document rendu public par le ministre des Transports, ce qui est clairement affirmé: que c'est une responsabilité municipale. Ça nous préoccupe, parce qu'on se dit: Les municipalités ont un certain nombre de raisons de vouloir privilégier le transport public, mais elles n'ont pas toutes les raisons de le faire. L'État du Québec a des raisons qui tiennent à ce qu'on disait tantôt. C'est-à-dire, il n'y a pas d'économie occidentale qui se paie 2,3 voitures par ménage et qui en envoie 50 % à l'étranger sans trouver le moyen de développer une industrie automobile, par exemple. Bien, on n'en a plus, de ça, au Québec. Donc, ça doit nous interpeller. Et quand on dit: Qu'est-ce qui arrive, en termes d'impact pour les citoyens et pour l'État, si le prix du baril monte? C'est qu'on a tout misé que sur le transport routier et sans avoir développé de politique de transport public, nulle part. Et on parle quand même dans certains cas de... Je veux dire, c'est quand même 1 million de passagers par jour, le système de transport public, là, au Québec, un peu plus, 1,2 million, c'est beaucoup de monde.

n (12 heures) n

Alors, nous, on dit qu'on ne doit pas... le gouvernement devrait, dans le cadre de sa réflexion là-dessus, intégrer ces questions-là, et on a plutôt l'impression d'un abandon de la part du gouvernement du dossier du transport public. On a un peu abandonné nos voies ferrées du côté du transport routier des marchandises, alors que partout ailleurs ça revient. Pour vous donner un exemple, le pays par excellence de l'automobile qu'est les États-Unis, le gouvernement américain, le gouvernement central investit, à toutes fins pratiques, quoi, 24 % dans le transport public. Je pense que le Québec est à 16 %. Bon, je veux dire, notre sentiment, c'est qu'il y a une prise de conscience qui n'a pas été faite ici, en cette Assemblée nationale sise à Québec. Il y a une prise de conscience qui n'a pas été faite d'un bout de la problématique qui s'appelle effectivement les transports publics, puis on est en train de le laisser tomber. Et on considère qu'une commission sur l'énergie dont le document de base affirme au départ que 38 %, c'est l'électricité, puis que 38 %, c'est les hydrocarbures, bien, ne devrait pas passer tout son temps que sur l'électricité.

M. Hamad: En fait, juste pour ouvrir une parenthèse ? vous m'avez encouragé à le faire ? mon collègue Yvon Marcoux puis ma collègue Julie Boulet, ils ont annoncé que leur budget de transport, cette année, dépasse 1 milliard. C'est la deuxième fois, je pense, dans l'histoire du Québec où le budget du ministère des Transports est en haut de 1 milliard. Alors, je pense que mes collègues sont très conscients de l'importance aussi du transport en commun et de l'importance du transport au Québec.

Si vous avez une recommandation à nous faire... Vous avez ici trois, là... Les trois, c'est: augmentation de taxes, péage, augmentation de taxes sur le stationnement. Mais, si vous avez une recommandation ou deux pour la stratégie énergétique du Québec, quelles seront...

M. Perreault (Robert): Avant de vous suggérer des moyens, je vous dirais: Est-ce que le gouvernement du Québec est prêt à se fixer des objectifs de réduction de la place de l'automobile dans notre économie et dans notre mode de déplacement, de quantifier sa prédiction et de se donner une stratégie pour l'atteindre? Puis, après ça, quand on arrive au niveau des moyens... Et, en même temps, écoutez, on n'est pas des imbéciles, quelqu'un qui habite à 20 km de Rimouski n'a pas d'autre choix pour se déplacer que le transport privé. Ce n'est pas de ça dont on parle, on ne veut pas qu'il se mette à se déplacer en train entre la campagne de Rimouski et Rimouski. On parle de l'essentiel des urbains qui vivent au Québec, dans les centres urbains, qui se déplacent matin et soir pour motif de travail ou des études, et on dit: Il faudrait qu'il y ait des objectifs là-dessus.

Puis vous avez parlé de votre collègue, du ministre des Transports. Vous avez raison, j'ai lu avec beaucoup d'attention son discours à La Malbaie, dans tout ce qu'il a annoncé, 1 350 000 000 $ garantis pour les trois prochaines années, il n'y a, à toutes fins pratiques, pas un mot pour le transport en commun. Et il nous annonce des décisions gouvernementales... Notamment, sur la 25, il a l'air de la présenter comme une garantie. Les audiences du BAPE n'ont pas encore eu lieu sur les impacts environnementaux, et il nous l'annonce comme une décision presque décidée, il garantit au contracteur le contrat. Nous, on pense que ça vaudrait la peine que, vous, comme ministre responsable... que le ministre responsable de tout ce qui s'appelle les politiques énergétiques interpelle le gouvernement sur l'importance de faire les liens dans ces dossiers-là. Encore une fois, on parle du transport en milieu urbain.

M. Hamad: Je répète encore, pour nous, le transport en commun, il est important, c'est clair, et on met l'effort nécessaire. L'annonce à La Malbaie, j'étais là. Parce que, là, 1 350 000 000 $, ça prendra des jours pour en parler, des détails sur le 1 350 000 000 $. Mais, en tout cas, vous ne m'avez pas dit votre recommandation. Une recommandation, c'est de ça que j'ai besoin pour ma stratégie.

M. Perreault (Robert): Non. Nous, on a suggéré trois méthodes, puis chacune rapporte des sommes différentes. Dans le cas du potentiel sur les péages sur les ponts, dépendamment du montant que vous fixez, mais, à 1 $, par exemple, par aller-retour, ça peut rapporter jusqu'à 250 millions de dollars par année de revenus. Le prix est beaucoup plus élevé à Londres, il est au moins aussi élevé à New York. Bon, si vous établissez des taxes sur le stationnement, là encore ça dépend par quel montant vous l'établissez. Mais l'avantage des taxes sur l'essence, chaque sou sur le litre d'essence, dans la Communauté métropolitaine de Montréal, rapporte 35 millions de dollars... 40?

Une voix: 42.

M. Perreault (Robert): 42. Il a ça précis, 42 millions de dollars. Donc, ce sont toutes des formules, dépendamment de l'analyse des besoins et des projets de développement.

Le Président (M. Jutras): M. le député d'Arthabaska.

M. Bachand: Merci, M. le Président. M. Perreault, c'est fort intéressant. J'ai lu votre mémoire, vous donnez trois effectivement recommandations, mais ces recommandations-là font toujours état de recommandations qui concernent la responsabilité d'autres organismes, d'autres individus. Puis je vous avouerais qu'effectivement, vous le savez fort bien, ce n'est pas facile quand on parle de péage, ça ne fait pas l'unanimité sur les moyens, hein? On ne pense que simplement... l'augmentation des émanations, lorsqu'on arrête et on repart, un élément que, moi, je n'avais honnêtement pas vu, mais il y en a beaucoup d'autres aussi, qui ne sont pas évidents, sur la réduction d'émission des GES. Donc, ce qui nous paraît évident à l'essence, lorsqu'on a plus d'information, nous paraît moins évident, en tout cas plus nuancé.

Taxe sur le stationnement: Intéressant aussi, mais vous faites appel aussi à des municipalités, à plusieurs intervenants, puis ce n'est pas facile, vous en conviendrez aussi.

Moi, j'aimerais avoir votre opinion sur l'utilisation du biodiesel. Donc, je vous poserais des questions bien directes: Êtes-vous en accord avec l'utilisation du biodiesel dans le transport en commun? Et puis quels sont les moyens que vous entendez utiliser pour promouvoir ça?

M. Perreault (Robert): On ne parle pas de l'éthanol, là, on parle du biodiesel?

M. Bachand: Oui.

M. Perreault (Robert): O.K. Excusez-moi, quels sont les... Excusez-moi. Je veux juste préciser, vous avez bien posé la question sur le biodiesel?

M. Bachand: Oui.

M. Perreault (Robert): J'ai répondu oui. Ce n'est pas l'éthanol.

M. Bachand: O.K. Et puis, bon, donc ma deuxième question, c'est: Quels seraient, par exemple, les moyens que vous aimeriez utiliser ou souhaiteriez utiliser qui permettraient l'atteinte de cet objectif-là, par exemple?

M. Perreault (Robert): Bien, si les informations que j'ai de la Société de transport de Montréal sont justes, je pense que la Société de transport de Montréal souhaiterait que le gouvernement du Québec fasse comme le gouvernement ontarien et la libère de l'obligation de payer les taxes sur ce carburant. Ce serait déjà un bon pas.

M. Bachand: Et vous, comme association, vous êtes tout à fait pour l'utilisation de ça puis mettre en place les moyens qui seraient aidants pour permettre l'utilisation de biodiesel dans le transport en commun? Vous êtes à l'aise avec ça?

M. Perreault (Robert): Oui.

M. Bachand: Deuxième question: Êtes-vous en accord avec la position de la Fédération des chambres de commerce, qui prône l'abolition de l'augmentation de la tarification des véhicules, les 4 litres et plus, pour les commerçants et industriels?

M. Perreault (Robert): Oui. Ce sont toutes des formules pour les commerçants et industriels?

M. Bachand: Oui.

M. Perreault (Robert): Répétez-moi, excusez.

M. Bachand: En gros, là, je vous répète ça, là, dans mes termes. C'est que la Fédération des chambres de commerce a demandé à l'ensemble de ses membres puis a demandé aussi... est venue nous faire la présentation ici, à la commission parlementaire, et souhaitait que, pour les véhicules de 4 litres et plus, tous les commerçants et les industriels soient exemptés de l'augmentation de l'immatriculation pour ces véhicules-là. Êtes-vous en accord ou en désaccord avec ça?

M. Perreault (Robert): Bien, écoutez, c'est un aspect très, très pointu qu'on n'a pas regardé. Je vous dirais, de façon générale, le travail, par exemple, qu'on fait actuellement avec la ville de Montréal, il y a 80 partenaires autour de la table, un certain nombre de grandes entreprises, Bombardier est là, Bell, Gaz Métro, la ville de Montréal, les gens du milieu environnemental, on va plutôt dans le sens de voir comment à terme on pourrait modifier les flottes de véhicules par des flottes de cylindrées moins élevées, moins consommatrices d'énergie. Bon, il n'est pas facile parfois de faire un changement de véhicules pour des véhicules hybrides ou des véhicules électriques, parce que la disponibilité de ces véhicules-là n'est pas toujours là au Québec, mais, à tout le moins, on peut réduire les cylindrées, le volume du camion ou des choses semblables, dans bien, bien des cas, et on va plutôt dans ce sens-là. Est-ce qu'il y a une raison particulière dans la question que vous soulevez?

M. Bachand: En fait, la seule raison particulière, c'est d'en connaître la réponse, mais je vous dirais... C'est parce que vous avez fait aussi une distinction entre la mobilité des personnes et la mobilité des biens. On sait bien que l'industriel et le commercial va transporter bien sûr des personnes, mais beaucoup de biens, beaucoup de services, et je me pose tout le temps la question: Quelle en est la responsabilité, de ces commerçants et de ces industriels-là, à mettre les biens en service? Lorsqu'ils les font, ils utilisent de l'énergie, lorsqu'ils les transportent, ils utilisent de l'énergie. Est-ce qu'on doit faire une distinction entre les commerçants et les industriels, qui doivent payer... En fait, c'est un peu une redevance sur la pollution qui est engendrée par les quatre cylindres et plus que les propriétaires...

M. Perreault (Robert): Oui, mais vous savez... Je comprends votre question, il y a comme... Écoutez, on peut toujours sectorialiser le débat. Comme je vous dis, on n'a pas regardé ça, mais première chose qu'il faudrait peut-être faire, c'est arrêter de transformer les voies ferrées en pistes cyclables ou en pistes à skidoos et sauver ce qui nous reste de notre industrie ferroviaire, du point de vue du transport des marchandises. Il me semble, ça, ça devrait faire partie de la réflexion de cette commission. Ça, c'est sur le transport des marchandises.

Deuxième chose, le mouvement qu'on doit essayer de développer, c'est que, chaque fois qu'il y a un choix réel pour une entreprise, c'est de prendre une cylindrée qui est moins consommatrice d'énergie. Et le gouvernement, par ses politiques fiscales, devrait encourager ça plutôt que de le... donc l'encourager. Quand vous me soulevez la proposition de la Chambre de commerce, ça me semble plutôt aller dans le sens contraire. Je ne sais pas s'il y avait une raison précise, ça me semble plutôt aller dans le sens contraire. Donc, le gouvernement devrait l'encourager.

n (12 h 10) n

De la même façon que, si on multiplie les exemples, bien, je veux dire, c'est aberrant que... Quand je vous ai parlé, tantôt, de 350 000 véhicules de plus, 70 000 de plus par année, c'est sans les VUS, parce qu'ils ne sont pas considérés comme des véhicules. On leur donne des privilèges de camion. Alors, peut-être qu'il y aurait des choses à revoir là-dessus aussi, à l'achat, et tout. Mais, encore une fois, quand on est dans tout ça, on est dans le domaine... dans ces dernières affaires là, à mon avis plus dans des signaux. Mais les gros enjeux, ils sont plus dans l'organisation des transports urbains, en termes d'économie d'énergie et... Bien, je veux dire, il y a le transport routier. On l'a moins abordé, mais économie d'énergie et...

M. Bachand: Vous nous parliez tout à l'heure des incitatifs qui permettent donc au gouvernement d'intervenir, c'en était un. Donc, sur une échelle, vous me diriez que vous êtes peu, moyennement ou beaucoup en désaccord avec la Fédération des chambres de commerce?

M. Perreault (Robert): Bien, ce que j'en comprends, là... Écoutez, je n'ai pas lu leur papier, c'est difficile. Encore une fois, tout ce que je peux répéter, c'est: Toute mesure qui envoie le signal clair qu'on doit économiser l'énergie, qu'on doit réduire l'impact de l'utilisation de l'énergie, en termes de pollution atmosphérique et de gaz à effet de serre, c'est des mesures dans le sens duquel on devrait aller.

M. Bachand: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Merci. Alors, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci. Alors, messieurs, bienvenue, bonjour. Moi, je suis très heureuse que vous soyez là, parce que, depuis le début de ces auditions-là ? de ces auditions, oui ? on n'a pas entendu parler du transport, et effectivement c'est le secteur qui représente le pourcentage le plus élevé de consommation d'une forme d'énergie d'ailleurs qui n'est pas... ? vous l'avez bien expliqué, puis il est bien... bien, enfin, il est bien présenté dans votre mémoire ? et qui en plus contribue le plus à la détérioration de notre environnement. D'ailleurs, aujourd'hui devrait être une bonne journée. Je pense qu'à Québec on a une journée de smog importante, hein?

Une voix: ...

Mme Dionne-Marsolais: Alors, oui, pour ceux qui ne le savaient pas, je vous l'apprends, c'est une très mauvaise journée à Québec aujourd'hui. Alors, ça devrait nous faire réfléchir.

Cela étant dit, la question que je pose est la suivante, puis ce n'est pas une colle, là: Pour le bénéfice de tout le monde, est-ce que le fait d'avoir le métro qui se rendra à Laval peut être considéré suffisant pour éviter la construction du pont sur l'autoroute 25? Je comprends que les distances ne sont peut-être pas les mêmes, mais j'aimerais ça que vous me l'expliquiez. Je suis certaine que vous l'avez regardé.

M. Perreault (Robert): Alors, la réponse est non. Il faut faire beaucoup plus que ça, mais il ne faut pas faire de pont sur la 25. Le prolongement du métro à Laval va générer, d'après certains chiffres, autour de...

Une voix: 30 000...

M. Perreault (Robert): ...30 000 déplacements supplémentaires dans l'axe de la station de métro, mais il y a d'autres projets importants, notamment les projets que l'AMT, l'Agence métropolitaine de transport, a dans ses cartons, qui ne sont pas énormément dispendieux: le prolongement du train de banlieue vers Repentigny, le prolongement d'une autre ligne de train vers Mascouche, le développement d'un axe de transport par autobus est-ouest à Laval. Toutes ces mesures sont de nature, d'après les chiffres qu'on a vus, à réduire de plusieurs dizaines de milliers le nombre... la pression des véhicules chaque jour, aux heures de pointe, entre la Rive-Nord et l'île de Montréal. Donc, plusieurs dizaines de milliers.

Et nous, dans le fond, ce qu'on se dit... Écoutez, on a toujours le mauvais rôle, on est contre un pont. Un pont, c'est utile, ça permet de traverser une rivière. Bon. Alors, pourquoi qu'on est contre un pont? Il y aura peut-être un pont un jour. Nous, ce qu'on dit, c'est que l'état des besoins actuellement ne le justifie pas. Il y a moins de, je pense ? c'est quoi? ? 1 % de la population qui travaille dans l'est de Montréal qui vient de l'est de Laval; il y a moins de 5 % de la population qui travaille dans l'est de Montréal qui vient du nord; il n'y a à toutes fins pratiques aucun mouvement de camionnage entre l'est de Laval et l'est de Montréal.

On dit: On veut réduire la congestion sur la Métropolitaine, 80 % des camions qui utilisent la Métropolitaine ont affaire sur la Métropolitaine parce qu'ils prennent de la marchandise puis ils la livrent sur l'île. Il en reste 20 %, mais c'est la 30 qui est considérée comme l'axe au sud pour libérer entre l'est du pays et l'Ontario. Dans le fond, le seul enjeu réel, c'est le projet de parc industriel que le maire de Laval a développé. Tout le zonage est déjà changé. Bon. On sait qui sont les propriétaires des terrains, et tout ça. Bref, tout ça pour dire qu'il y a un enjeu de développement et non pas un enjeu de répondre à des besoins, et que, par des mesures dans le transport public, on pourrait, à moindres coûts, gagner des années. Peut-être qu'un jour...

Mme Dionne-Marsolais: Dans une politique énergétique comme la nôtre, il y aurait donc intérêt d'avoir un axe transport ? et surtout transport en commun ? important.

Vous avez parlé du transport ferroviaire. Le contrôle du Québec est très, très, très modeste sur le transport ferroviaire, il faut le reconnaître. Alors, qu'est-ce que... Bien, vous allez me dire qu'il faudrait être souverains pour avoir le contrôle du transport ferroviaire. Peut-être, mais, si on n'est pas souverains, en attendant, qu'est-ce qu'on peut faire, à part manger nos bas, là?

M. Perreault (Robert): Oui. Non, non, il y a des questions complexes, je le reconnais. Notre mémoire s'est moins attaché aux questions du transport des marchandises. On dit: Au moins, essayons d'éviter d'empirer la situation quand on le peut, mais il faut qu'on commence à y réfléchir. Et, nous, on n'a peut-être pas, dans le cas de notre mémoire, toute l'expertise et l'analyse qu'il faut, mais, comme commission, sûrement c'est un enjeu réel. Je donne des exemples simples, à la limite qui peuvent faire l'objet de réflexion. Le transport, comment expliquer qu'on a encore des vans de 40 pieds pour livrer du Coke dans les dépanneurs du centre-ville de Montréal? Tu sais, il me semble qu'il y a d'autres façons d'organiser des transports puis la livraison des marchandises dans les centres urbains, mais c'est comme ça que ça se passe, ça.

Mme Dionne-Marsolais: Donc, ce que vous nous dites, là, au niveau des transports, si je vous comprends bien, on devrait se donner une priorité de revoir les transports dans les centres urbains pour commencer.

M. Perreault (Robert): Bien, sûrement au niveau des transports des personnes, tous les chiffres, du point de vue... Écoutez, du point de vue de la balance des paiements du Québec, c'est un fardeau considérable, le niveau de motorisation qui est le nôtre et l'absence totale d'industrie de transformation, de fabrication de véhicules ou de production d'essence. C'est un problème économique réel. Nous pendent au bout du nez des possibles augmentations de prix. Il faut voir comment le monde réagissent dès que le prix à l'essence frise le 0,85 $. Et, si on n'est pas capables de mettre... Un citoyen peut toujours décider de s'acheter une auto de plus, un citoyen ne peut pas décider de se faire construire un métro, une ligne de train. C'est l'État qui doit prendre des décisions structurantes à cet égard. Et c'est l'État du Québec, ce n'est pas des municipalités qui peuvent prendre des décisions de même. Alors, nous sommes un peu inquiets devant l'absence d'intégration de cette dimension dans l'analyse.

Mme Dionne-Marsolais: Bon, une autre question. En matière d'axes de recherche et de développement... Bon, là, vous nous avez donné des mesures, là, assez court terme, là, qu'on pourrait prendre rapidement. En matière de recherche et de développement, avez-vous, dans le cadre de la coalition, réfléchi à cela? Pour substituer le pétrole ou les hydrocarbures dans l'industrie du transport, il faudra autre chose un jour. Est-ce que vous avez des orientations à partager avec nous quant aux axes de recherche et de développement qu'on devrait privilégier en matière d'énergie?

M. Perreault (Robert): Oui. Bien, il y a plein d'expériences ailleurs. Ça pourrait faire partie aussi des réflexions de cette commission. Il y a des villes en Europe dont le parc des véhicules urbains municipaux, et pas juste, là, les voitures, les aubergines pour donner les tickets, là, mais les camions, et tout, sont totalement à l'électricité. On a parlé tantôt du biodiesel, il y a quand même une usine de... il y a eu toutes sortes d'expériences de faites au Québec. Bon, elles pourraient être encouragées plutôt que découragées. Il y a donc... ça fait partie des éléments de recherche.

Il y a certains organismes, je ne sais pas s'ils viendront devant votre commission, mais qui, au Québec, s'intéressent particulièrement à l'utilisation des technologies nouvelles, et notamment des énergies non polluantes, en matière de transport. Bon, il y a en termes de fiscalité. Il y a une mesure qui, à un moment donné, avait été évoquée. C'était le gouvernement précédent, mais elle pourrait être reprise en termes de... Par exemple, c'est des signaux clairs, au niveau de la fiscalité, de donner des réductions pour ceux qui utilisent les transports publics, par exemple l'achat des... Il y a des mesures qui peuvent être faites, on l'a dit tantôt, au niveau de la fiscalité, d'achat des véhicules. Il y a les véhicules hybrides. Enfin, il y a beaucoup de dimensions possibles.

Est-ce que ça doit être nécessairement la recherche? On a chez nous Bombardier, c'est un grand producteur de matériel roulant public. Dans le développement des métros, dans certaines villes du monde, il s'en tire assez bien; il y aurait, à Montréal, des choses à faire là-dessus aussi. Alors, il existe donc une technologie québécoise qui pourrait être utilisée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Jutras): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, j'aimerais que la commission...

Le Président (M. Jutras): Je m'excuse...

M. Tremblay: Oui, c'est vrai, ça prend le consentement pour...

Le Président (M. Jutras): Oui, il faudrait le consentement étant donné qu'il n'est pas membre de la commission. Et je suggérerais que, le consentement, on le donne pour la journée, pour qu'on n'ait pas à revenir à chaque fois. Ça va?

M. Tremblay: Merci.

Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, il y a consentement.

n(12 h 20)n

M. Tremblay: Bien, pour le bien de la commission ? et peut-être que nos invités pourront le commenter ? à ma connaissance, l'Université de Sherbrooke, dans les dernières années, a obligé ses étudiants à avoir une petite taxe de plus sur les frais de scolarité, mais faisant en sorte que ça leur donne le droit d'utiliser le transport en commun. Et je pense que ça a été une mesure très positive, puisque l'achalandage du transport en commun a augmenté. Même les étudiants qui avaient une voiture devaient payer cette carte-là. Donc, je me demande si, par exemple, dans les universités de Montréal ou Québec, il pourrait y avoir une mesure comme ça. Vous pourrez commenter là-dessus.

Mais l'autre question que je voulais poser... Bon, moi, je suis de ceux qui roulent en voiture hybride. J'ai proposé au ministre justement qu'il élimine la TVQ sur l'achat de ce genre de véhicule. Vous comprendrez que, vivant en région, nous n'avons pas un grand accès au transport en commun. Donc, ce genre d'écofiscalité est une mesure positive. Mais est-ce que, considérant que vous êtes de Montréal et que je ne le suis pas, considérant que le smog est une affaire urbaine ? Montréal, Québec principalement; en tout cas, sûrement plus à Montréal qu'ailleurs au Québec ? que les Montréalais seraient prêts justement à ce qu'il y ait une fiscalité beaucoup plus lourde pour ceux qui utilisent les voitures, dans le secteur de Montréal? Donc, de s'acheter une voiture ou payer des frais d'immatriculation, à Montréal, serait beaucoup plus cher que, par exemple, au Lac-Saint-Jean.

Donc, il y aurait vraiment une inéquité, mais qui à mon sens... Par le fait qu'il y a une trop grande concentration, on dit: On met une taxe sur l'immatriculation supérieure là où, en plus, vous avez une alternative, vous avez le transport en commun. Donc, ça, est-ce que ça pourrait être une mesure, ou bien donc c'est tout simplement une somme de mesures globales qui peuvent faire une différence?

M. Perreault (Robert): Bien, je pense qu'il peut y avoir effectivement des mesures différenciées; pas obligé d'avoir un seul modèle à travers le Québec. Évidemment, chaque fois qu'on impose des taxes à certains citoyens, il y a des sensibilités, il y a des problèmes politiques, ça fait partie de la problématique à intégrer, là. Ce qui est certain, c'est que quand on interroge les gens de la région de Montréal... Et je ne parle pas juste des Montréalais. Les Montréalais, historiquement, ont une voiture par deux ménages. Les gens de Laval ont 2,7 voitures par ménage. Alors, c'est évident que, quand on interroge ce qu'on appelle les Montréalais, bien, selon que vous n'avez pas d'auto ou selon vous en avez trois dans votre cour, votre réaction peut être différente. Mais ce qui est une constante dans la région de Montréal, y compris chez les automobilistes, c'est que tous considèrent, à peu près, qu'il n'y a pas de solution aux problèmes de la mobilité et de la congestion sur les ponts le matin et le soir sans passer, entre autres, par le transport public.

Ça ne veut pas dire que tout le monde est d'accord pour que ça ne passe que par là, ça ne veut pas dire que, demain matin, tout le monde est prêt à laisser sa voiture à la maison, mais déjà, dans l'esprit du public, il y a une conscience qu'en milieu urbanisé c'est difficile de régler ça autrement, que ça crée des problèmes environnementaux importants et qu'il doit donc y avoir des solutions. Après ça, évidemment, les contribuables ne sont jamais contents de payer, et c'est là que ça pose... La raison d'être des gens comme vous, c'est de choisir les moyens, les moyens les plus acceptables. On en a proposé un certain nombre, il y a des contradictions, c'est évident, là.

Le Président (M. Jutras): Oui.

M. Tremblay: Dans les questions du transport en commun, est-ce que les choix qui motivent les utilisateurs sont sur le fait... bon, l'accessibilité financière, bon, le fait que ce soit environnementalement plus sain? Mais est-ce qu'il y aurait, entre autres, aussi un travail d'éducation auprès de la jeunesse? Si, par exemple, dans les secteurs urbains, dès le secondaire, par exemple, vous éduquez votre jeunesse ? et ce sera bon pour le reste de leur vie ? aux avantages sociaux du transport en commun? Ou bien donc ce sera, comme la plupart du temps, l'individualisme et le cocooning... et fait en sorte que, bien, moi, je prends mon char parce que je suis tout seul dans ma voiture le matin pour aller travailler, puis je suis dans ma bulle, puis je suis content comme ça, puis c'est ce que je veux préserver?

M. Porlier (André): Bien, je pense que la sensibilisation, c'est toujours intéressant, mais ça a un peu ses limites. Tout ce qu'on dit depuis tout à l'heure, c'est un peu le principe de la carotte et du bâton. Si vraiment on veut arriver avec des changements de comportement... C'est un peu ce que vous mentionniez tantôt à propos de l'Université de Sherbrooke, on a pris le bâton, on a imposé une taxe, mais on a offert aussi une carotte qui était le service de transport en commun gratuit. C'est un peu ce que le maire de Londres a fait aussi, il a imposé une lourde taxe au centre-ville, mais, en échange, il a amélioré grandement le service de transport en commun. Donc, ça semble être une approche qui est assez gagnante, celle d'effectivement contraindre peut-être les automobilistes à changer leur comportement ou à payer un peu plus cher pour utiliser leur auto, mais en même temps il faut offrir des alternatives, parce qu'évidemment, s'il n'y a pas d'alternatives, ça ne donne rien de seulement taxer pour taxer.

M. Tremblay: Est-ce que l'idée de... Pour les voitures, les voitures à faible consommation, imaginons, par exemple, que, si vous avez une voiture qui fait moins... ou environ 5 litres aux 100 km, ça vous donne droit, par exemple, à une plaque d'immatriculation verte, hein? Donc, ça veut dire que vous vous affichez. Et je pense que, dans l'identité des gens, il y a des gens qui s'achètent des Hummer pour parfaire leur identité de ce genre. Je n'en suis pas. Mais, si on créerait une identité verte et donc que ces gens-là qui font le choix de ces véhicules-là ont comme un... oui, c'est ça, on les associe justement à une plaque d'immatriculation verte, ou des avantages comme, par exemple, le stationnement moins cher, ou des choses comme ça, est-ce que ça, ça peut être une mesure intéressante encore pour un secteur comme Montréal, ou bien donc vous dites: Bien oui, c'est bien beau, les véhicules à faible consommation, mais c'est quand même le transport en commun vers lequel il faut se concentrer?

M. Perreault (Robert): Non, on ne dit pas qu'il n'y a que le transport public comme solution. Je pense qu'on a clairement établi le fait qu'il y a aussi bien sûr une façon de réduire la pression de la consommation d'essence en diminuant le volume des cylindrées. Et il y a toutes sortes de mesures incitatives qu'un gouvernement peut établir en ce sens-là, et ça contribue avec le temps effectivement à changer les mentalités, les approches. Il faut quand même se rappeler que l'industrie automobile, qui représente, comme on vient de dire, 45 milliards de dollars par année au Québec, a des moyens de promotion, de publicité et de conditionnement des mentalités assez forts. Alors, pour contrer ça, je ne dis pas que la sensibilisation à l'école n'est pas utile, mais il faut aussi...

Je vous donne un exemple. Le gouvernement va nous arriver avec une piste cyclable, là, probablement à côté du pont de la 25 ou une voie réservée pour autobus puis six voies pour les voitures. Alors, vous avez beau dire... Autrement dit, il y a une disproportion absolue dans les moyens. Et ce sur quoi qu'on veut insister auprès de cette commission, c'est que le transport public est un des éléments de la solution, la réflexion autour du transport des marchandises en est un autre, et effectivement la diminution de la consommation d'essence par les Québécois en général, par toutes sortes de mesures, en est une autre voie.

Et le message qu'on voulait laisser, c'est: On comprend que cette commission est née beaucoup des débats entourant Hydro-Québec, la production, la consommation, le prix, la vente, mais une politique énergétique du Québec ne peut pas oublier 50 % de la problématique.

Le Président (M. Jutras): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Non. Alors, merci, M. Perreault. Merci, M. Porlier. Et les travaux sont suspendus jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

 

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Jutras): La Commission de l'économie et du travail reprend donc ses travaux. Nous continuons notre consultation sur le document Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements.

Cet après-midi... Nous avons déjà donné l'ordre du jour, là, au tout début de la matinée, à savoir: à 14 heures, nous entendons l'Association de l'aluminium du Québec; à 15 heures, Alcoa Canada; à 16 heures, Bechtel Québec ltée; à 17 heures, Mme Margaret Kraenzel et M. Eric Chouinard.

Alors, déjà sont en place les représentants de l'Association de l'aluminium du Canada. Alors, messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Je vous demanderais de vous identifier, là, et de présenter la personne qui vous accompagne. Vous connaissez les règles, vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, les députés ministériels ont 20 minutes pour un échange avec vous, et par la suite les députés de l'opposition. Alors, bienvenue. Si vous voulez vous présenter, dans un premier temps.

Association de l'aluminium
du Canada (AAC)

M. Van Houtte (Christian L.): M. le Président, mon nom est Christian Van Houtte. Je suis président de l'Association de l'aluminium du Canada. Et je suis accompagné cet après-midi par M. Robert Gagné, qui est professeur titulaire à l'Institut d'économie appliquée de l'École des hautes études commerciales. M. Gagné est un expert en matière d'énergie. Il participe activement aux travaux du groupe CIRANO, entre autres. Il a siégé comme expert, il a témoigné comme expert à la Régie de l'énergie. Donc, il a une très bonne connaissance des problèmes de l'industrie et il m'aidera à compléter une partie de ma présentation un peu plus loin cet après-midi.

Je voudrais d'abord vous remercier de nous recevoir aujourd'hui et de nous donner l'occasion de vous présenter les vues de l'industrie de l'aluminium sur ce que pourrait être éventuellement une politique énergétique. Permettez-moi, avant de commencer, de vous présenter... ou de souligner la présence dans la salle des présidents et des trois membres de l'association, des trois compagnies qui sont membres de l'association: M. Joe Lombard, qui est président et chef de la direction de l'Aluminerie Alouette, à Sept-Îles; M. Jean Simon, qui est président Saguenay?Lac-Saint-Jean d'Alcan inc.; M. Jean-Pierre Gilardeau, qui est président et chef de la direction d'Alcoa Canada Première Fusion.

Plus tard aujourd'hui, Alcoa vous présentera ses vues sur le développement de son entreprise au Québec, et, dans quelques jours, Alcan vous fera connaître ses positions. Mes commentaires cet après-midi seront donc d'ordre général, plus globaux, et ne toucheront pas spécifiquement une entreprise ou une autre, mais l'ensemble de l'industrie.

Au cours des derniers mois, l'industrie de l'aluminium s'est retrouvée au centre de nombreux débats. La fermeture des cuves Söderberg à l'usine Arvida d'Alcan, l'annulation du projet de modernisation de l'usine de Baie-Comeau d'Alcoa, l'octroi d'un bloc de 500 MW à l'Aluminerie Alouette pour son agrandissement, les études toujours négatives de quelques spécialistes, l'utilisation massive de l'électricité et les prix payés, la hausse des tarifs d'Hydro-Québec et surtout le traitement donné à ces sujets ont eu pour effet de jeter une confusion totale sur l'un des sujets les plus importants pour le Québec, l'avenir des alumineries chez nous.

D'entrée de jeu, je voudrais vous dire aujourd'hui, vous réitérer l'engagement de l'industrie et de ses entreprises à continuer à faire du Québec un centre d'excellence reconnu mondialement dans notre domaine. Les débats, souvent très émotifs, n'ont pas toujours été très constructifs. Je crois qu'il est temps pour le gouvernement, la société civile, l'industrie et ses grands partenaires d'adopter une position d'ouverture et de respect mutuel. C'est dans cet esprit que nous vous soumettons respectueusement notre mémoire. Les enjeux sont trop importants et nous avons tous trop à perdre pour nous laisser aller dans des batailles inutiles. Si notre présence, cet après-midi, peut servir à aplanir des écueils, nous aurons tous contribué au développement du Québec. Un débat éclairé devrait permettre de trouver ensemble des solutions profitables à tous. Si les débats se poursuivent dans le but de trouver ensemble une solution, nous demeurons optimistes quant au futur de notre industrie au Québec.

Ces remarques préliminaires étant faites, je voudrais maintenant vous faire part de la position de l'industrie de l'aluminium au Québec.

«Matériau porteur d'avenir, l'aluminium est un moteur économique dans plusieurs régions du Québec. Source de milliers d'emplois, la production et la transformation de l'aluminium représentent l'un des piliers importants de l'économie québécoise.» Cette déclaration n'est pas de nous mais plutôt du ministère du Développement économique et régional et de la Recherche du gouvernement du Québec et tirée du programme de TransAl 2005, qui tiendra son congrès à Trois-Rivières en juin prochain. Cette affirmation du gouvernement du Québec, partagée par l'opposition officielle, reconnaît la contribution de notre secteur au développement économique du Québec. Nous vous remercions de cette confiance.

Au Québec, l'industrie de l'aluminium de première fusion compte parmi les trois plus importants secteurs industriels, tant par la valeur de sa production que par son volume de ventes à l'étranger. De la première usine d'aluminium, en 1901, sur les bords de la rivière Saint-Maurice, à Shawinigan, aux 2,5 millions de tonnes qui aujourd'hui représentent la production de l'industrie au Québec, l'industrie de l'aluminium s'est développée de façon constante. En 2003, les dépenses totales attribuables aux 10 alumineries au Québec s'élevaient à 3,2 milliards de dollars, dont 1,1 milliard en achats de biens et services, 1,1 milliard pour la rémunération des 15 000 emplois directs et indirects dont plus de 8 500 emplois directs dans les régions. Le mémoire dont vous avez copie de même que la brochure portant sur l'aluminium et l'économie démontrent clairement l'apport substantiel de notre industrie à l'économie du Québec. Avec des investissements massifs et la formation d'une formidable grappe industrielle, avec des centres de recherche et de développement, avec la présence ici des plus grandes entreprises au monde dans le secteur, le Québec est devenu une référence mondiale tant par la modernité de ses usines que par ses résultats techniques et environnementaux.

Aujourd'hui, certains voudraient freiner la croissance de l'industrie et même favoriseraient sa décroissance. Les conséquences seraient selon nous désastreuses pour le Québec et surtout pour ses régions. D'autres voudraient voir nos investissements directement reliés à la transformation de l'aluminium.

Le secteur de l'aluminium représente un apport considérable au Saguenay?Lac-Saint-Jean, sur la Côte-Nord et dans la Mauricie?Centre-du-Québec. Un emploi en région, vous le savez, équivaut en termes de retombées à plusieurs emplois dans les grands centres. Près de 20 % de tout l'aluminium produit au Québec y est transformé. La première transformation de l'aluminium, trop souvent passée sous silence, procure des emplois à près de 4 800 personnes dans les usines situées dans les régions.

n(14 h 10)n

Dans la deuxième et la troisième transformation, une étude de Sous-traitance industrielle Québec révèle que plus de 1 300 établissements manufacturiers utilisent ici, à des degrés divers, l'aluminium dans la fabrication de leurs produits. Les équipementiers établis ici prennent chaque année une place de plus en plus grande dans la réalisation des projets d'alumineries à travers le monde. Ce sont là des réalisations, M. le Président, qui font honneur aux entreprises de chez nous. Plus récemment, l'industrie de l'aluminium s'est engagée à créer plus de 1 000 emplois dans le secteur de la transformation au cours des 10 prochaines années.

L'industrie de l'aluminium souhaite poursuivre sa croissance, et, pour ce faire, deux conditions se posent: d'abord, l'assurance d'obtenir de grands volumes d'électricité pendant de longues périodes et, deuxièmement, un tarif concurrentiel et prévisible. Pour nous, l'électricité est, avec l'alumine, l'élément essentiel du procédé d'électrolyse. En fait, l'électricité représente 35 % des coûts de production d'une aluminerie moderne. L'électricité est une matière première que nous transformons au profit des régions du Québec. Depuis toujours, l'industrie de l'aluminium s'est établie dans les parties du monde où l'électricité est disponible et où les tarifs sont avantageux, et, encore aujourd'hui, un nombre croissant de pays sont désireux d'attirer chez eux de grandes alumineries.

Les alumineries québécoises sont relativement récentes, et les contrats en vigueur pour la fourniture d'électricité viendront à échéance entre 2010 et 2020. La présente discussion concerne donc l'avenir. En termes clairs, il faut d'abord assurer le maintien des installations existantes et prévoir dès maintenant si le développement des alumineries sera possible et, si oui, dans quelle mesure et dans quelles conditions?

Le prix de l'aluminium, vous le savez, est fixé sur la scène mondiale par la Bourse des métaux de Londres sans que les entreprises productrices ne soient impliquées. L'aluminium est une commodité. Personne ne peut vendre son produit plus cher parce qu'il paierait son électricité plus cher ici, au Québec, ou ailleurs. Cette réalité est implacable et aucune entreprise n'y échappe. Compte tenu de l'importance des coûts de l'électricité dans les coûts totaux d'opération d'une aluminerie, il s'agit d'un enjeu incontournable.

Une société maximise son développement en utilisant de la façon la plus efficace les ressources à sa disponibilité. Or, l'électricité, et particulièrement l'hydroélectricité, compte parmi les atouts que souhaiteraient détenir toutes les nations du monde pour appuyer leur développement. Nous avons la chance d'en avoir ici en abondance et nous pouvons continuer à développer ce potentiel pour aider les Québécois à améliorer leur niveau de vie, particulièrement dans les régions. Encore faut-il utiliser cette ressource de façon optimale et non vendre au plus offrant la prospérité des Québécois. Il s'agit de l'application du principe de développement durable.

Nous désirons être optimistes quant au développement futur de notre industrie au Québec. Nous espérons même que, d'ici une ou deux décennies, le Québec disposera de surplus énergétiques qui permettraient éventuellement l'implantation de nouvelles usines. Lancés sur l'élan des 100 dernières années, nous n'avons sûrement pas l'intention d'appliquer les freins. Malheureusement, nos projets pourraient être remis en cause, voire carrément abandonnés parce qu'il serait apparemment, selon certains, plus avantageux de vendre notre électricité sur les marchés extérieurs plutôt que de l'utiliser au Québec. Nous sommes d'avis que certains experts, dont quelques-uns ont comparu devant votre commission, font fausse route. Le Pr Robert Gagné, qui est avec moi cet après-midi, vous donnera dans un instant les arguments qui remettent en question les théories avancées.

Le Président (M. Jutras): M. Gagné.

M. Gagné (Robert): M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs, la question, qui n'est peut-être pas sur toutes les lèvres mais, disons, sur presque toutes les lèvres ces temps-ci, c'est: Pourquoi vendre notre électricité moins cher ici quand on peut la vendre plus cher ailleurs en exportant?

J'avance, si on veut, deux groupes de réponses pour répondre à cette question. D'abord, parce que ce n'est pas aussi payant qu'il n'y paraît à prime abord; et, deuxièmement, parce qu'il ne faut pas mettre tous nos oeufs dans le même panier, ce serait là une grave erreur.

Parlons d'abord du fait que ce soit payant ou pas d'exporter. Les activités d'exportation, ce sont des activités risquées. L'électricité vendue ici donc et celle exportée, ce n'est pas le même produit. Les risques sont différents. D'où viennent ces risques? Bien, d'abord, quand on exporte, on exporte sur les marchés qui sont plutôt déréglementés, donc ce sont des marchés où la loi de l'offre et de la demande règne. Ce sont des marchés où les prix fluctuent d'heure en heure, de jour en jour, de semaine en semaine.

Par ailleurs, ce qu'on a vu, ce que vous avez vu, plutôt, ici récemment, ce sont des calculs, des données basées sur une année, 2003, qui est assez exceptionnelle en termes d'exportations, parce que le Québec n'a pratiquement pas exporté en 2003. Donc, on utilise les prix moyens d'exportation de 2003 et on fait des projections sur 10, 15 ans avec ce prix-là, alors qu'on n'a pas exporté. Alors, tout le monde ou à peu près sait que, quand on veut vendre plus, il faut vendre à un prix moindre. Ça semble évident pour plusieurs sauf pour certains experts, semble-t-il.

Par ailleurs, on ne contrôle pas le comportement des acheteurs. Alors, eux, ils peuvent aussi modifier leur comportement, ils peuvent décider de devenir plus autosuffisants en matière énergétique. Ce qui fait qu'on ne peut peut-être pas vendre au prix qu'on pense pouvoir vendre.

Finalement, il y a d'autres risques, dont le risque de change. On a vu depuis un an le dollar canadien s'apprécier d'environ, quoi? 20 %. Bien, c'est une baisse des revenus d'exportation d'à peu près l'équivalent de 20 %. Alors, tout ça, ce n'est pas dans le débat actuel, ce n'est pas dans le paysage, c'est ailleurs. Mais il faut... C'est important de le mettre sur la table.

Comme les risques sont différents, on ne peut donc pas tout simplement comparer les prix et en déduire une subvention implicite aux industries locales, comme certains le font. On ne compare pas la même chose. Donc, 0,08 $, 0,09 $, 0,10 $ d'exportation, 0,04 $ ou 0,05 $ ici, ce n'est pas le même produit. Donc, on ne peut pas faire la différence entre les deux, 0,10 $ moins 0,04 $, et en déduire 0,06 $ de subvention à l'industrie, et donc multiplié par les térawattheures, ça fait des millions et des milliards de subventions.

Pour comparer correctement, il faut ajuster pour les risques inhérents aux activités d'exportation. Comme l'exportation est plus risquée, il est normal que les prix d'exportation soient plus élevés. C'est un peu comme un investisseur à la Bourse qui exige un rendement plus élevé de la part des titres plus risqués. Le même principe s'applique ici. Ça ne veut pas dire que c'est plus payant, c'est juste différent.

Dans ce contexte, il est important que les prix à l'exportation soient ajustés pour les risques afin que les prix signalent non seulement les coûts de production ? ce qu'ils font actuellement, les prix, les prix qu'on a en vigueur actuellement signalent très bien les coûts de production; la preuve: Hydro-Québec fait des profits quand même assez importants ? mais également le niveau de risque associé à cette activité. Négliger cet aspect primordial constitue une erreur méthodologique importante.

Deuxième, si on veut, famille d'arguments: la diversification ou, je dirais, la souhaitable diversification. L'utilisation de l'électricité doit être diversifiée. On a bien sûr des besoins domestiques pour les secteurs résidentiel, commercial, les industries locales et éventuellement les exportations. Il faut donc éviter de mettre tous ses oeufs dans le même panier en tombant dans le piège de l'exportation à outrance. Il faut se garder un portefeuille d'usages diversifiés de manière à diminuer nos risques.

Autre argument lié à la diversification, le développement de l'infrastructure de production hydroélectrique au Québec a été possible notamment parce qu'on pouvait compter sur des revenus stables via des contrats d'approvisionnement au tarif L. Si on veut, demain matin, investir des centaines de millions et des milliards pour des nouveaux projets de développement, bien il va falloir offrir des garanties de revenus plutôt stables. Et on ne trouvera pas ces garanties de revenus stables là du côté des marchés spot d'exportation. Très certainement pas.

La non-diversification comporte une part significative de risques économiques, et certaines régions du Québec actuellement en paient le prix. On peut penser à la région de Huntingdon, qui est une région mono-industrielle, plutôt mono-industrielle, orientée très fortement sur le textile. Le textile n'est plus à la mode ou enfin se déplace ailleurs, qu'est-ce qu'on fait? On n'a pas une économie diversifiée, donc on est un peu pris avec cette situation malheureuse. À mon sens, le Québec doit profiter d'une base industrielle diversifiée, et l'énergie peut contribuer de manière importante à cette diversification.

En ce sens, ce dont on parle ici aujourd'hui, c'est davantage de politique industrielle que de politique énergétique. Et, encore là, à mon sens, il ne revient pas à Hydro-Québec, ou à la Régie de l'énergie, ou au BAPE, ou à quelque autre organisme de définir la politique industrielle du Québec. Je pense que c'est la responsabilité des parlementaires et du gouvernement de définir la politique énergétique du Québec. La politique industrielle est d'avoir donc une politique énergétique cohérente avec cette politique industrielle là.

n(14 h 20)n

On peut aussi regarder ce qui s'est fait ailleurs dans ce domaine-là, hein? Il y a des gens qui ont essayé ça ailleurs, ils ont été tentés par le diable de l'exportation, si on veut, là. Alors, dans les États du Nord-Ouest américain, de l'Oregon et de Washington, ils ont là-bas fermé des... Les alumineries disposaient de gros contrats d'électricité, donc ils ont fermé des alumineries pour vendre à la Californie, dans les années quatre-vingt-dix, parce que les prix... la Californie, vous le savez probablement tous, connaissait des difficultés importantes, et ils se sont dit: Bien, voilà le pactole, on va faire beaucoup d'argent en vendant à la Californie. Entre-temps, qu'est-ce qui s'est passé? Bien, la Californie s'est un peu retournée de bord, a augmenté sa capacité de production, les prix ont chuté de manière assez importante, et aujourd'hui les alumineries dans ces coins-là sont encore fermées, et il n'y a pas plus de belles possibilités d'exportation à des prix faramineux comme c'était le cas.

En conclusion, parce que je veux être bref pour permettre beaucoup de questions, je pense qu'il ne faut pas faire avec l'électricité ce que plusieurs ont longtemps reproché à l'industrie de l'aluminium, c'est-à-dire exporter sans transformer. De manière plus poétique peut-être, on pourrait dire: Ne laissons pas la proie pour l'ombre. Merci.

M. Van Houtte (Christian L.): M. le Président, la démonstration que vient de faire le Pr Gagné justifie pleinement selon nous une politique énergétique qui prendrait en compte la croissance de l'industrie de l'aluminium. Pendant que le gouvernement et des sociétés d'État parcourent le monde à la recherche d'investissements créateurs d'emplois de qualité, de préférence dans les régions, nous affirmons que les entreprises établies ici répondent à tous ces critères et à bien d'autres. La politique énergétique que vous recommanderez au gouvernement est indissociable de la stratégie de développement économique du Québec.

Au cours des prochaines semaines, des intervenants se présenteront devant vous et tenteront, dans leurs mots et selon leurs sphères d'intérêt, de vous démontrer le dynamisme de notre secteur et sa contribution à l'économie de la société. D'autres, avec des arguments réducteurs et des raisonnements souvent superficiels, feront porter à l'industrie de l'aluminium un lourd fardeau, on l'a vu ce matin. Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Vous aurez à arbitrer et choisir entre deux approches et à recommander une solution mitoyenne qui permette à l'industrie d'assurer d'abord la pérennité de ses installations et des emplois qui y sont rattachés et d'autre part de poursuivre sa croissance dans un cadre déterminé.

Si l'industrie peut obtenir l'accès à de l'électricité à des tarifs concurrentiels et prévisibles et prévoir le renouvellement des contrats qui se termineront dans quelques années, soyez assurés que nous serons au rendez-vous. L'aluminium est un métal encore jeune, plein de possibilités. S'ouvrir à l'aluminium, c'est s'ouvrir à notre avenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. M. Van Houtte, Christian, Pr Gagné, bienvenue à Québec. Très belle présentation puis un bon document. Puis j'ai pris la peine aussi de lire l'autre document que vous avez préparé: L'aluminium, l'énergie et l'électricité.

Premier point. En fait, je regarde le résumé de votre mémoire, là, il y a trois points. Ce que vous dites aujourd'hui, c'est: fournir aux Québécois l'électricité dont ils ont besoin; deuxième, c'est favoriser le développement économique régional; et le troisième point, en fait, c'est la démonstration du Pr Gagné, c'est en exporter une partie pour générer des fonds pour l'actionnaire, mais il y a un point où vous dites: C'est le risque de l'exportation.

Alors, je vais me permettre, pour entrer en matière, d'expliquer un petit peu l'exportation puis les besoins au Québec, parce que c'est important, parce que le monde pense souvent... pas vous nécessairement, les gens pensent, M. Tout-le-monde pense qu'on va prendre l'énergie du Québec, qui va répondre aux Québécois, pour l'exporter. Et la structure à Hydro-Québec, elle est faite par... il y a trois compagnies indépendantes, avec un mur entre chaque compagnie, c'est-à-dire qu'il y a une compagnie qui s'appelle Hydro-Québec Distribution, il y en a une qui s'appelle Transport, et la troisième, Production.

Hydro-Québec Distribution a un mandat ferme et clair, c'est de répondre à toutes les demandes des Québécois, incluant leurs industries, incluant les commerces et incluant les résidents. Autrement dit, comme une compagnie en aluminerie ou autre, lorsqu'ils ont des besoins nécessaires en électricité, il faut qu'on réponde à cette demande-là dans un cadre précis. Ça, c'est l'obligation d'Hydro-Québec Distribution. Et c'est eux autres qui vont évidemment...

On a Hydro-Québec Production qui, elle, produit de l'électricité, elle produit par des barrages ou d'autres, et cette compagnie-là, Production, elle a une obligation de fournir ce qu'on appelle le bloc patrimonial de 165 TWh à Hydro-Québec Distribution pour que finalement Hydro-Québec Distribution puisse fournir de l'électricité. En dehors de 165 TWh, Hydro-Québec Distribution fait des appels d'offres pour aller chercher des blocs énergétiques. Ça peut être Production, ça peut être ailleurs, comme le cas d'éoliennes, où le 1 000 MW d'éoliennes qu'on a signé il n'y a pas longtemps, ça, ça a été acheté par Hydro-Québec Distribution, et ce n'est pas par Hydro-Québec Production.

Maintenant, Hydro-Québec Production, une fois qu'elle a répondu à ses obligations et elle a bâti une marge de manoeuvre ou des réserves énergétiques, elle peut évidemment exporter. Donc, ce n'est pas Hydro-Québec Distribution qui exporte, c'est Hydro-Québec Production qui fait l'exportation, mais en répondant à ses obligations. Donc, si Hydro-Québec exporte de l'énergie, il n'y a aucun effet négatif sur les Québécois, parce qu'on a répondu à la demande, et maintenant on exporte. C'est comme... Je ne sais pas, je prends un exemple, je ne sais pas, l'aluminerie, elle répond à la demande de ses clientèles, une fois qu'elle a répondu à la demande ou à un carnet de commandes, elle essaie d'en développer d'autres pour avoir d'autres clients, pour vendre à d'autres. Mais, normalement, l'autre vente additionnelle ne devrait pas nuire à sa clientèle actuelle, et, dans le même esprit, ce qu'Hydro-Québec Production exporte...

Maintenant, vous avez parlé, Pr Gagné, sur l'exportation, et, en 2003, on a exporté à peu près 9,6 TWh. Et, moi, j'ai les chiffres ici, je suis chanceux d'avoir un peu de chiffres, mais, depuis 1990, les exportations, à Hydro-Québec, ça varie entre 10 TWh et 24 TWh. Alors, elles sont variées; le plus bas, c'est 10 TWh, et le plus haut, on monte à 22 TWh, 23 TWh. Évidemment, Hydro-Québec importe aussi de l'énergie. Ça, il ne faut pas l'oublier aussi, on a des moments où on importe de l'énergie. Et le bilan, évidemment, là, si on fait exportations-importations, en 2003, on est, net, on l'appelle marge nette, à 3,9 TWh. Donc, ça fait longtemps qu'on exporte de l'énergie aux États-Unis, c'est connu, avec des prix différents.

Dans l'histoire, si on regarde les prix ou les revenus de l'exportation, les ventes nettes, ils ont varié en fonction du marché. Et ça, vous avez raison évidemment, le marché détermine les prix. La tendance dans les dernière années est à la hausse, les ventes sont moindres, par contre le prix est plus élevé. Et évidemment Hydro-Québec, en 2003, si ma mémoire est bonne, 40 % de ses profits viennent de l'exportation. Donc, il y a une chose certaine, claire ici, c'est qu'il y a deux choses: exporter ne doit pas nuire d'aucune façon ? comme gouvernement, pour nous, c'est clair ? à la demande intérieure; et l'exportation actuellement, avec les chiffres qu'on a, ça nous remet de l'argent. Maintenant, le risque ? vous parlez de risque, parce que le mot «risque» est revenu souvent ? c'est des contrats actuellement... on n'est plus à la vague des contrats de long terme effectivement, donc ça donne un peu plus de risques, mais on vend au prix qu'on pense qui est bon.

Évidemment, Hydro-Québec, à date, vend à un prix heureusement, et très bien, nettement supérieur au coût de production. On les connaît, les chiffres, on parle de 0,08 $, on peut monter à 0,11 $ et 0,12 $ le kilowattheure. Et, lorsqu'on dit qu'un nouveau projet hydroélectrique au Québec aujourd'hui coûte à peu près 0,06 $, ça, c'est la construction; on ajoute à ça évidemment le transport, etc. Donc, l'exportation actuellement ne présente pas de risques financiers pour Hydro-Québec. Le prix peut représenter un risque plus tard, mais on verra au moment même. Il y a les États-Unis, et on sait très pertinemment aussi que le besoin énergétique dans les années à venir... Par exemple, l'Ontario, ils ont à renouveler 15 000 MW de blocs d'ici les prochaines années. Le problème de charbon, le nucléaire, etc. Et aussi, ce qui est un facteur majeur actuellement ? et vous, vous le vivez très bien, l'industrie de l'aluminium ? c'est le prix du pétrole. Le prix du pétrole, personne ne pensait qu'à un moment donné il allait dépasser 50 $US le baril, et le prix du pétrole actuellement, à ce qu'on voit, est en hausse continue. Donc, le prix du pétrole en hausse, le prix de tout ce qui est énergétique est en hausse, le gaz, etc., ça suit le marché.

Et ça, c'est un élément... une mauvaise nouvelle pour certains, mais c'est une bonne nouvelle pour l'électricité qui est produite au Québec, parce qu'on est... ça nous donne une marge de manoeuvre lorsque les centrales à côté sont... Évidemment, le charbon, c'est un gros concurrent à l'électricité, c'est évident, ça ne coûte pas cher, le charbon; cependant, là, évidemment, espérons qu'au point de vue environnement on va diminuer le charbon. Alors, moi, je pense que de... en termes... J'aimerais avoir votre commentaire maintenant à ce que je viens de dire. Moi, je pense que l'exportation ne nuira pas... ne doit pas nuire ni à l'économie du Québec. Au contraire, ça doit améliorer l'économie du Québec et ça doit créer une richesse. Et cette richesse-là peut se traduire par plusieurs choses.

n(14 h 30)n

L'élément qui peut arriver, c'est qu'il peut y avoir un surplus énergétique qui n'est pas vendu, et ce surplus énergétique là devient un bloc intéressant peut-être à mettre en disposition dans les régions du Québec. Lorsqu'on a un surplus qu'on n'est pas capable de vendre, ça peut être intéressant dans ce cas-là, mais évidemment toujours avec une vision à court terme, à ce niveau-là. J'aimerais ça avoir vos commentaires sur ça.

Le Président (M. Jutras): M. Van Houtte.

M. Van Houtte (Christian L.): Je peux répondre au début et demander à Robert Gagné de compléter, si vous permettez, M. le ministre.

Vous avez tout à fait raison. Je pense que notre position n'est pas de dire qu'il faut tout mettre dans les alumineries et négliger les exportations. On n'est pas des gens extrémistes, on est des gens, je pense, raisonnables et qui cherchons un juste équilibre pour le bien-être de nos industries et pour le bien-être du Québec, pour le bien-être des régions et des emplois qui en dépendent. Donc, je suis d'accord avec vous, M. le ministre, que, s'il y a des surplus, s'il y a des conditions avantageuses dans des créneaux, dans des périodes précises, l'exportation, c'est une source extraordinaire de revenus, puis, le temps que ça dure, bien, si on peut en profiter, tant mieux. Et, bon, si nos voisins ou nos acheteurs deviennent autosuffisants un jour, bien on pourra réajuster notre politique, si on n'a pas mis tous nos oeufs dans le même panier. Si on a un portefeuille énergétique équilibré, je pense qu'on pourra, à ce moment-là, faire les ajustements qui s'imposent.

Et je voudrais peut-être profiter de l'occasion qui m'est offerte, M. le Président, M. le ministre, pour encore une fois essayer de revenir sur ce mythe qui est véhiculé depuis des années à l'effet que les alumineries ne paient pas leur électricité, que c'est quelque chose qui leur est donné, que c'est du cheap puis c'est bon marché. Tous les qualificatifs ont été employés. Lorsque les contrats à partage de risques en vigueur ont été signés, ce sont des contrats qui ont été signés entre deux parties et de bonne foi. Il n'y a personne qui a signé ces contrats-là avec un revolver sur la tempe. D'autre part, les gens savaient exactement dans quel contrat ils s'engageaient. Et essayer de tirer des conclusions sur des contrats à long terme, qui ont 24 ans, et essayer, après six mois, huit mois, 10 mois, deux ans, six ans, de présumer ce que sera le bilan total après 24 ans, moi, je pense que ça ne tient pas la route, ça non plus. Et Hydro-Québec a dit et a redit qu'elle faisait ses frais à la fois avec le tarif L bien sûr et à la fois avec les contrats à partage de risques.

Le tarif L, en général beaucoup de gens pensent qu'il s'applique encore là uniquement aux alumineries. Ce n'est pas vrai. Le tarif L, il y a plus de 1 000 entreprises au Québec qui consomment plus que 5 MW, qui sont alimentées au tarif L. Donc, ce n'est pas uniquement les alumineries, loin de là. Et le tarif L s'applique à l'entreprise qui prend 6 MW ou à celle qui en prend 350. Donc, je pense qu'il y a un mythe qui est véhiculé, que certains ont véhiculé pour essayer de faire dire ou d'interpréter des décisions qui ont été prises à la fin des années soixante-dix, au début des années quatre-vingt, alors qu'on disposait effectivement de surplus énergétiques qui provenaient de la mise en service des barrages de la Baie James. Mais tout ça a généré une croissance économique extraordinaire dans un grand nombre de régions du Québec.

Et essayer de prendre un argument réducteur et dire: C'est de l'électricité bon marché, c'est de l'électricité... L'an dernier, les contrats... Parce que vous savez qu'on consomme 4 500 MW par année. Au total, il y en a la moitié qui est autogénérée par les barrages d'Alcan ou les barrages qui appartiennent à Alcoa avec Abitibi-Consolidated. Donc, la moitié, les 2 200 MW que nous achetons d'Hydro-Québec soit en vertu des contrats à partage de risques soit en vertu du tarif L qui est le tarif grande puissance que paient toutes les grandes entreprises, ça a généré plus de 600 millions US de revenus à Hydro-Québec. Donc, ce n'est quand même pas donné. Et la mise en service, dans quelques semaines ? c'est déjà commencé ? de l'Aluminerie Alouette, à Sept-Îles, viendra ajouter à cette facture. Et Alouette, qui construit son usine de 1,4 milliard de dollars et qui a démarré sa mise en service il y a quelques semaines, paie son électricité au tarif grande puissance, comme n'importe quelle industrie qui consomme plus de 5 MW. C'est la grille tarifaire qui a été adoptée par Hydro-Québec. Alors...

M. Hamad: M. Van Houtte, j'aimerais ça que vous répondiez à la... Vous parlez des mythes, vous avez bien commencé de répondre à ça. Dites-moi, sur la création d'emplois, sur les coûts par emploi, sur les coûts d'énergie, et tout ça, là, faire un portrait de... votre portrait, là, de l'impact sur la sous-traitance dans un projet que vous faites. Votre industrie, qu'est-ce qu'elle crée? Combien d'emplois qu'elle crée? Pas seulement dans l'usine, autour. Quel est l'impact ou l'apport de votre industrie dans le milieu en termes d'emplois? Vous savez, il y a des chiffres qui disent que c'est 100 000 $, 300 000 $ par emploi que ça coûte, etc. Alors, comment vous répondez à ça?

M. Van Houtte (Christian L.): Oui. Écoutez, j'ai vu comme vous tous ces chiffres qui circulent. Ça va de un demi-million de dollars par emploi à 170 000 $. Puis il y en a... C'est suivant la saveur du jour. Mais on n'a jamais vu... Moi, en tout cas, je n'ai jamais vu les détails de ces chiffres-là. Alors, on part d'hypothèses pour faire d'autres hypothèses. Et on fait souvent des calculs relativement simplistes, hein? On prend une valeur hypothétique de l'électricité, qu'on multiplie par le nombre de mégawatts ou de térawatts, et puis on arrive à un chiffre qu'on divise par le nombre d'emplois créés. Je pense que c'est des arguments... Ça devient presque un sophisme. À un moment donné, on ne peut pas, nulle part, valider ces données-là et en assurer la véracité.

Ce que l'on sait par contre, c'est qu'au Québec on a 8 500 emplois directs dans nos régions, on a 15 000 emplois indirects, des gens qui travaillent soit à l'usine d'Alcan, à l'usine d'alumine à Vaudreuil, soit dans les installations portuaires, soit dans les entreprises en amont et en aval de nos installations. Et, si l'on compte les emplois indirects et induits en sous-traitance, les gens qui gravitent autour de nos installations, ça représente probablement au-delà de 45 000 personnes.

Le plus bel exemple, on l'a vécu, M. le ministre, malheureusement l'année dernière avec la longue grève à l'aluminerie de Bécancour. On a vu toute une région, en Mauricie?Centre-du-Québec, qui a souffert de la fermeture de l'aluminerie de Bécancour. Des centaines de PME, qui créaient des centaines et des milliers d'emplois, ont cessé ou réduit considérablement leurs opérations à cause de cette grève qui heureusement est réglée maintenant.

On voit, sur la Côte-Nord, ce que ça représente. On voit l'agrandissement d'Alouette à Sept-Îles, 1,4 milliard de dollars. 80 % ? 80 %, c'est beaucoup d'argent ? c'est 1,1 milliard de dollars qui a été dépensé ici, au Québec, dans les entreprises et les bureaux d'ingénieurs-conseils du Québec. C'est énorme. Et c'est cette masse critique, qui ne s'applique pas seulement au niveau de la construction ou au niveau de la sous-traitance, mais je parlais, dans ma présentation, de la grappe industrielle. On a ici, au Québec, probablement la plus grande concentration de Ph. D. dans l'industrie de l'aluminium au monde. Le Centre des technologies de l'aluminium, qui a ouvert récemment à Saguenay, le CQRDA, qui est en grande partie financé, aidé par le gouvernement du Québec, le Réseau Trans-Al, plein d'organismes qui gravitent, qui se développent autour de l'industrie de l'aluminium, et ça continue de mois en mois, de semaine en semaine. Je pense que c'est cet impact-là que souvent on ne mesure pas. On regarde par le petit bout de la lorgnette.

Les emplois que l'on crée dans nos usines, M. le ministre, ce n'est pas des emplois ? avec tout le respect que j'ai pour les dépanneurs ? des emplois de dépanneur. Ce sont des emplois stables, de qualité, où la moyenne salariale est l'une des plus élevées de tout le secteur manufacturier du Québec. Et donc, c'est là-dessus qu'il faut bâtir. Il y a plein de gens qui vivent directement et indirectement de l'industrie, et ces emplois-là sont des emplois stables. Nous avons des usines modernes qui sont capables de résister à des chocs éventuellement tarifaires de marché. Et je pense qu'on a vu des usines ailleurs fermer, dans le monde, mais ici on a continué à produire. On a gardé ce niveau de production et de... Comme je vous disais, en 1901, on a ouvert les usines. Aujourd'hui, on produit 2,5 millions de tonnes, auxquelles il faudrait ajouter 350 000 tonnes avec l'ajout d'Alouette cette année. On va dépasser le 3 millions de tonnes presque au Canada en 2005-2006. C'est énorme, mais il y a des retombées importantes. Et vous le savez, au niveau des régions, ce que ça représente.

M. Hamad: Il y a un groupe qui est venu nous voir il n'y a pas longtemps et ils nous ont parlé d'aluminium liquide. Et ils disaient qu'il n'y en avait pas assez de disponible, de l'aluminium liquide, et ils nous faisaient la démonstration ? leur démonstration ? qu'on prenait beaucoup d'énergie pour évidemment refroidir l'aluminium, et on le transporte, et, après ça, il faut le fondre pour l'utiliser. Et cette entreprise-là disait qu'on peut le prendre liquide, et on l'amène à l'entreprise, donc on va sauver de l'énergie pour les deux parties. Sauf que leur problème, c'est qu'actuellement ils trouvent qu'il n'y en a pas assez de disponible. Alors, qu'est-ce que vous répondez à ces gens-là?

n(14 h 40)n

M. Van Houtte (Christian L.): Le transport de l'aluminium liquide, ce n'est pas nouveau. Vous le savez, au Saguenay, Alcan n'a pas des centres de coulée dans toutes ses usines, et il y a des véhicules spéciaux, avec des creusets, qui transportent de l'aluminium d'une usine à un centre de coulée. À Bécancour, il y a une quinzaine d'années, à l'époque, Reynolds avait construit sur un terrain adjacent à l'Aluminerie de Bécancour une usine de tige, qui est encore en opération d'ailleurs et qui appartient à Alcoa maintenant, et qui recevait du métal liquide directement de l'Aluminerie de Bécancour.

Je pense que l'idée est intéressante. Le problème, c'est les quantités et les volumes. Vous savez qu'il y a beaucoup de PME qui n'ont pas les équipements ou les moyens... On ne peut pas livrer 100 lb ou 200 lb ou 1 tonne de métal liquide, là, ce n'est pas comme livrer des pommes de terre ou des tomates. Donc, il faut que nos équipements soient adaptés à cette livraison, mais il faut que celui qui reçoit le métal soit capable de le recevoir. S'il faut attendre pendant trois jours qu'il coule ce métal-là, il va y avoir des problèmes. Donc, il faut adapter ça. Je pense que l'idée est intéressante surtout, probablement, pour des grandes quantités. Des petites quantités, ça peut aussi s'envisager. Mais je pense que ça fait partie, ça aussi, de l'évolution des choses. J'ai lu comme vous, M. le ministre, le mémoire de cette entreprise, et il y a probablement des pistes qui pourront être suivies.

M. Hamad: Une dernière question, et je laisserai après mes collègues... Les tarifs. Où se situent selon vous, évidemment, les tarifs pour un «greenfield», là, une nouvelle usine, par rapport à un «brownfield»? Où se situe le Québec actuellement, selon vous, par rapport à nos concurrents mondiaux, là, l'Islande, la Jamaïque et d'autres pays, là, Bahreïn, et d'autres, la Chine?

M. Van Houtte (Christian L.): Écoutez, je vais tenter de vous donner une réponse, mais qui ne sera pas exhaustive, parce que vous comprendrez que l'importance de l'électricité dans l'évaluation d'un projet, que ce soit un «brownfield» ou un «greenfield», varie d'une entreprise à l'autre. Chaque entreprise peut avoir ses objectifs, son plan de match, et c'est difficile pour moi de dire quelle est la position d'une entreprise par rapport à une autre. Ce que je peux vous dire toutefois, c'est qu'il y a des centaines d'entreprises, d'alumineries dans le monde qui paient l'électricité moins cher que nous, au Québec. Il y a également l'inverse. J'admets qu'il y a certains pays en voie de développement où l'électricité se paie plus cher. Mais, quand on regarde l'ensemble des éléments nécessaires à analyser un projet, je pense que l'électricité joue un facteur important, mais il y a d'autres facteurs qui jouent.

On peut trouver dans le monde aujourd'hui de l'électricité à 0,01 $ le kilowatt, facile. Il y a les pays du golfe Persique qui sont assis sur des quantités énormes de gaz naturel. Les usines à Bahreïn, Dubaï, Oman se développent d'une façon exponentielle, c'est incroyable: les plus grandes alumineries du monde, 1 million de tonnes. Bon. Mais je pense qu'il ne faut pas voir ça isolément, il faut voir ça comme un tout.

Le Président (M. Jutras): Alors, on va passer maintenant aux députés de l'opposition. Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Moi, j'ai plutôt un certain nombre de questions. La première a trait à une donnée qui nous a été présentée hier par les manufacturiers exportateurs, parce que j'essaie de trouver une manière de comparer des choses peut-être comparables, là, que je pense comparables. Ils nous ont parlé du revenu ou de la valeur des expéditions manufacturières, exportées en dollars, par kilowattheure consommé, par le secteur manufacturier, et c'est une donnée que je trouvais intéressante, quand on la compare avec le revenu par kilowattheure exporté brut, là, directement par Hydro-Québec. Est-ce que, sans dévoiler de chiffres confidentiels des entreprises, sur l'ensemble des expéditions de l'industrie de l'aluminium exportées ? donc, vous recevez des devises pour ça ? par rapport à la consommation en kilowattheures, vous avez ce chiffre-là?

M. Van Houtte (Christian L.): Je n'ai pas ce chiffre-là, madame.

Mme Dionne-Marsolais: Pourriez-vous nous le faire parvenir?

M. Van Houtte (Christian L.): Oui. Ce que je peux vous dire, c'est que 20 % de l'aluminium est transformé ici, on exporte 80 %, principalement sur les marchés américains, bien sûr. Je pourrai vous trouver ce chiffre-là et vous le faire parvenir.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

M. Van Houtte (Christian L.): Je pense...

M. Gagné (Robert): Je peux ajouter quelque chose là-dessus?

M. Van Houtte (Christian L.): Oui.

Le Président (M. Jutras): M. Gagné, oui.

M. Gagné (Robert): Je ne vous donnerai pas le chiffre, parce que je ne le connais pas, mais j'aimerais quand même remettre en contexte cette approche-là qui est une certaine méthodologie, en fait. Ce qu'on essaie de traduire par là, quand on met des exportations sur des kilowattheures, puis tout ça, ce qu'on essaie tout simplement de traduire, c'est la technologie des entreprises. Comment elles transforment l'électricité en meubles, en lampes, en microphones, en verres d'eau, hein? C'est tout ce qu'on... Donc, c'est une, si on veut, caractérisation des différentes industries qui existent au Québec ou ailleurs dans le monde, tout simplement. Mais ce n'est pas un objectif. C'est une réalité, mais ce n'est pas un objectif. Si l'objectif, c'était d'exporter le plus par kilowattheure, bien là on pourrait utiliser des petites bicyclettes pour pédaler, on pourrait avoir des technologies d'il y a 100 ans, où on ne consommait pratiquement pas d'électricité, et là on va fabriquer des meubles à la main, ce qui fait qu'on ne consommera pas beaucoup d'électricité; on va exporter ces meubles-là, et, si on veut, la valeur ajoutée par kilowattheure va être pratiquement infinie. Voyez-vous? Donc, c'est...

Mme Dionne-Marsolais: Je vous arrête, M. le professeur, tout de suite, parce que je ne suis pas sûre que vous vous rendez service, là, et d'autre part parce que la référence... le seul point que les manufacturiers voulaient démontrer et qui m'apparaît crédible, c'est qu'une mesure de revenu par kilowattheure consommé, revenu, disons, de devises étrangères, c'est une mesure intéressante et qui témoigne de la transformation, avec tous les facteurs de production qu'il y a dedans, j'en conviens, mais c'est quand même une mesure de référence intéressante par rapport à la vente directe de kilowattheures, qui nous rapporte...

M. Gagné (Robert): Ce n'est pas un objectif. C'est un fait. On ne peut pas...

Mme Dionne-Marsolais: Fait, objectif, appelez ça comme vous voulez, c'est un résultat, pareil, intéressant. Et, moi, je pense que, pour moi... On peut en parler après, si vous voulez, vous m'expliquerez ce que visiblement je ne semble pas comprendre, mais, dans ma compréhension, c'est une donnée qui m'apparaît significative et qui vaut la peine d'être calculée.

Dans la question concernant l'aluminium liquide, on a effectivement ici eu des gens qui sont venus nous en parler, et leur objectif était: On pourrait en transformer plus, de l'aluminium, ici. Quand je regarde le tableau que vous nous présentez, je lis: 8 500 emplois directs au Québec dans l'industrie ? c'est ça? ? et 4 800 en première transformation. C'est pas mal, quand même.

M. Van Houtte (Christian L.): C'est pas mal, oui.

Mme Dionne-Marsolais: C'est quasiment la moitié. En fait, c'est plus que la moitié. Non?

M. Van Houtte (Christian L.): Oui.

Mme Dionne-Marsolais: Ça veut dire qu'il y a déjà... il y a un multiplicateur d'impacts, dans ça, quand même, là, au-delà de la théorie. Dans les faits, il y en a actuellement.

M. Van Houtte (Christian L.): Tout à fait. Et, pour rejoindre votre commentaire précédent sur la valeur des exportations par mégawatt, etc., ça rejoint un petit peu votre deuxième commentaire, je pense qu'il y a encore là une mauvaise interprétation, une méconnaissance de ce qu'est l'industrie de l'aluminium. On peut faire de l'aluminium, faire des lingots qui servent uniquement à la refonte, et ces lingots-là se vendent à un prix déterminé à la Bourse des métaux de Londres.

Mais il y a déjà une première transformation qui se fait dans la majorité des grandes alumineries que nous avons au Québec. On ajoute à cet aluminium des alliages. On allie le métal pour en faire des plaques qui vont servir à faire des avions, qui vont servir à faire du laminage, du papier d'aluminium, tout ce que vous voulez. On va en faire des billettes d'extrusion qui vont servir à faire d'autres types de produits. Et cette première transformation, qui est souvent négligée, se fait à même les grandes alumineries d'ici, au Québec.

La deuxième et troisième transformation, lorsque les produits sortent de nos usines, ils sont à la fois ou laminés ou extrudés pour faire des produits de consommation. Mais, dans le public en général, on a tendance à confondre, on dit: Vous avez des grandes usines puis vous ne faites pas assez de chaudrons ou de casseroles. Il y a des étapes entre les deux, je pense, qui sont importantes, et il faut que la population et les gens comprennent. Puis je pense qu'il y a même beaucoup d'économistes qui ont comparu devant vous qui semblent avoir de la difficulté à comprendre cette notion-là. Et vous avez tout à fait raison, madame, il y a un effet multiplicateur important.

n(14 h 50)n

Mme Dionne-Marsolais: Oui, déjà, d'ailleurs. Et la difficulté, vous l'avez bien exprimée, je ne sais pas lequel des deux, là, la difficulté, c'est quand Hydro-Québec veut faire une politique industrielle avec sa vision, plutôt qu'une politique énergétique. Et, évidemment, au niveau des parlementaires, nous, c'est une politique énergétique dont on discute et qui pourrait être un atout pour la politique industrielle.

La difficulté qu'on a... Puis, quand le ministre vous disait: On a trois Hydro-Québec, Production, Distribution, puis c'est tout séparé, c'est vrai. Mais, dans la loi n° 116, le problème qu'on a, c'est qu'il y a un plafond pour l'énergie patrimoniale. Et donc, l'énergie patrimoniale, on l'atteint, là, au niveau de la demande du Québec. On l'atteint, d'après les prévisions d'Hydro, sous peu, là, en 2005. Et l'enjeu, c'est pour les quantités, si je comprends bien, requises pour l'expansion de l'industrie. Et donc, il faut que l'on... Il faudrait en quelque sorte que, dans les prochains approvisionnements, vos approvisionnements viennent d'Hydro-Québec Production, si on veut garder des prix compétitifs, c'est-à-dire d'une forme d'énergie qui... d'une source, là, qui soit la plus basse possible. Et, dans ce contexte-là, il faut changer la loi n° 116, parce qu'actuellement on ne les connaît pas, les prix d'Hydro-Québec Production. Et Hydro-Québec Production n'est pas obligée de soumissionner à Hydro-Québec Distribution. Donc, à la limite, si on voulait vous garantir, par exemple, un prix, il faudrait absolument, j'allais dire, forcer Hydro-Québec Production à soumissionner.

M. Van Houtte (Christian L.): On peut, par de savants calculs que vous connaissez, madame, arriver à déterminer à peu près quels sont les coûts de production d'Hydro-Québec.

Mme Dionne-Marsolais: Encore faut-il qu'elle soumissionne.

M. Van Houtte (Christian L.): Voilà. Tout à fait. Tout à fait.

Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, c'est ça, mon point. Je sais que mes collègues vont parler, là, mais j'ai une autre question que je voudrais vous poser: Est-ce que l'industrie serait intéressée? Puis, réfléchissez-y, vous n'êtes pas obligé de répondre tout de suite. Mais on a un potentiel éolien au Québec. Ce potentiel-là, il n'est pas tellement... il est en région aussi, souvent près de vos usines. Est-ce que l'industrie, comme elle l'a fait quand elle s'est approprié certains droits... quand on lui a accordé certains droits hydrauliques... Est-ce qu'elle serait intéressée à s'associer pour une production éolienne, je dirais, pour s'assurer d'une disponibilité d'énergie, en rendant disponibles en temps opportun d'autres kilowattheures?

M. Van Houtte (Christian L.): C'est une très bonne question, madame, et je pense que les entreprises qui vont comparaître devant vous pourront mieux que moi peut-être répondre à cette question.

Ce que tout simplement je voudrais ajouter, c'est que, comme je le disais dans ma présentation, ce que l'on veut, c'est être un peu créatifs. Et si ça, c'est une forme de créativité, pourquoi pas? Je pense qu'on n'est pas fermés à quoi que ce soit dans la façon dont on va articuler la politique énergétique et la politique industrielle, qui doivent marcher en parallèle, toutes les deux.

Mme Dionne-Marsolais: O.K. Et la dernière question: Sur l'aluminium liquide, si le gouvernement décidait de développer une politique de promotion d'investissements sur les marchés mitoyens, notamment américains, dont on sait que certaines usines de transformation d'aluminium vont sans doute fermer ? parce que ça va commencer à coûter pas mal cher, s'approvisionner en aluminium liquide aux États-Unis, si mes lectures sont bonnes ? est-ce qu'une stratégie de promotion d'investissements ou de sollicitation d'investissements d'entreprises qui utilisent l'aluminium liquide pourrait constituer, pour l'industrie de l'aluminium du Québec, un intérêt pour nous? Parce qu'en fait la conséquence, c'est qu'il va falloir que l'industrie reconnaisse qu'elle va accorder, qu'elle va réserver, de la même façon qu'on lui donne des tarifs... qu'on pourrait lui donner des tarifs préférentiels, mais qu'elle va réserver un certain pourcentage d'aluminium liquide pour favoriser l'implantation de ces entreprises-là. Est-ce que c'est quelque chose qui s'étudierait?

M. Van Houtte (Christian L.): Il y a plusieurs réponses à votre question. La première, c'est que l'aluminium liquide, c'est une voie, une solution. Encore faut-il trouver l'entreprise qui veuille le recevoir, hein?

Mme Dionne-Marsolais: C'est le problème du gouvernement de solliciter ça, là.

M. Van Houtte (Christian L.): Il faut créer des entreprises qui sont capables de faire des produits avec cet aluminium-là. On est bien prêts à en livrer, mais il faut trouver les clients.

D'autre part, l'aluminium liquide ne peut pas se transporter sur des centaines ou des milliers de kilomètres. L'aluminium étant liquide, il se refroidit et à un moment donné il devient du métal dur. Donc, il y a des limites à ça, et, pour nous, c'est passablement important parce que ça conditionne aussi l'utilisation qu'on va faire.

Et, pour faire une analogie, il y a quelques années, le gouvernement avait exigé, à la demande des PME, que de l'aluminium soit mis à la disposition des petites et moyennes entreprises. Et vous vous souviendrez peut-être, madame, qu'à l'époque Alcan avait dit: Nous allons mettre à la disposition 50 000 tonnes par année, dans des formats qui conviendraient plus à la PME pour la refonte. Selon mes informations, il y a eu pas ou peu de demandes, très, très, très peu de demandes.

Mme Dionne-Marsolais: Donc, il n'y aurait pas de danger à dire oui.

M. Van Houtte (Christian L.): Bien, je pense qu'il faut étudier ça. Vous comprendrez que les gens qui sont venus devant vous, qui vous ont présenté leur projet d'aluminium liquide, passaient leur message, comme, moi, j'essaie de passer le mien aujourd'hui. Donc, c'est de bonne guerre, mais chacun, je pense, devra faire les études qui se rapportent à cela.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. Van Houtte et M. Gagné, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre mémoire. Alors, c'est une commission parlementaire qui va être passablement suivie par un ensemble d'intervenants. Il y a 138 mémoires de déposés, à ma connaissance. Et je disais ce matin: Il y en a qui sont pour des petites centrales, pour pas des petites centrales, il y en a qui sont contre les blocs patrimoniaux, il y en a d'autres... qu'il faut hausser le tarif L. Bref, il y a un ensemble de monde qui viennent devant nous. Et, moi, j'ai une inquiétude, puis je vais aller directement dans le vif du sujet.

Vous êtes les représentants de l'ensemble des alumineries au Canada. On se comprend? Il y a Alcoa, Alcan, vous, vous êtes les représentants, vous êtes... Vous parliez tout à l'heure de 2010 et 2020. Ça, 2010 et 2020, c'est les contrats qui étaient à partage de risques, si je ne me trompe pas.

M. Van Houtte (Christian L.): ...

M. Dufour: À ma connaissance à moi, dans un dossier très particulier de ma région, qui est Alcoa, à Baie-Comeau, il y a aussi des dates butoirs qui sont 2011, au niveau des droits d'eau, et 2014, par rapport à des anciens contrats de partage de risques. Alors, je vous dirais que là où est-ce que ça accroche, même pas par rapport au... bien, oui, par rapport aux contrats de partage de risques, qui vont venir à échéance, mais par rapport au tarif L et à la hausse prévisible des tarifs d'électricité, ça va avoir des coûts inhérents, ça, là, O.K., et ça va être le choix que vous allez avoir à faire. De là vient mon inquiétude. J'ai entendu M. Belda, à la Chambre de commerce de Montréal, le printemps dernier, et il y a une fenêtre d'ouverte au Québec pour des investissements, et, si la garantie n'est pas là, ils vont aller ailleurs. Donc, la fenêtre est ouverte là.

Alors, quelle est pour vous, l'Association des représentants de l'aluminium, la prévisibilité des tarifs ou la garantie des hausses tarifaires à long terme? C'est quoi, pour vous, la prévisibilité?

M. Van Houtte (Christian L.): Je pense que... je ne voudrais pas rentrer dans les considérations, qui sont purement commerciales, de chaque entreprise. Ce que l'on veut simplement, c'est savoir quelles seront les augmentations, de quel ordre elles seront sur une durée de 10 ans ou de 15 ans. Donc, est-ce que c'est l'inflation? L'inflation moins 1 %, l'inflation plus... Bon, il y a plein de possibilités. Mais ce que l'on veut avant d'investir des milliards, c'est savoir combien par année on va payer pour 35 % de nos coûts d'opération. Comme on fait des contrats d'approvisionnement à long terme pour une autre matière première qui est l'alumine... Les compagnies, en général, beaucoup sont verticalement intégrées, donc elles ont également leurs sources d'approvisionnement en alumine et connaissent leurs coûts en approvisionnement. On fait la même chose dans d'autres secteurs où il faut assurer une prévisibilité des coûts pour plusieurs années.

Le chiffre, je ne l'ai pas. Je pense que c'est chaque entreprise qui, quand elle fait ses calculs, décide de l'importance, du poids relatif qu'elle accorde à ça par rapport à d'autres. Mais, pour nous, la prévision est importante, la durée à la fois du bloc d'énergie et ses coûts dans le temps.

M. Dufour: Juste une petite additionnelle, peut-être?

Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de René-Lévesque, oui.

n(15 heures)n

M. Dufour: Je vous dis ça parce que, bon, je peux comprendre, là... Bon. Si j'avais tous les employeurs en avant de moi, je pourrais leur demander, tout chacun, quel est leur... C'est juste parce que, à un moment donné, sur des chiffres dans un dossier particulier, il y avait une hypothèse que, bon, c'était 1 % ou 1,5 % d'augmentation selon l'inflation, puis le calcul se faisait sur 40 ans. Alors, sur un investissement, exemple, je donne un exemple, de 1 milliard, si 1 % à 1,5 % de hausse de tarifs d'électricité par année se fait, apparemment que, sur une période de 40 ans, c'est un coût de 10 milliards de dollars pour une industrie. Alors, s'il y a un investissement de 1 milliard, ça fait que tu ne rentres pas dans ton investissement. Alors, comprenez-vous, là? Alors, 40 ans, 25 ans, 15 ans, je voulais juste avoir un ordre de grandeur.

M. Van Houtte (Christian L.): Je n'ai pas la réponse à votre question, mais je pourrai consulter et vous la trouver. Merci. M. le Président?

Le Président (M. Jutras): Oui.

M. Van Houtte (Christian L.): Est-ce que je pourrais faire un petit complément d'information?

Le Président (M. Jutras): Oui, oui. Allez-y.

M. Van Houtte (Christian L.): On a parlé, au cours des derniers jours, beaucoup d'efficacité énergétique. Vous savez que nous sommes de grands consommateurs d'énergie, c'est connu. Il y a quelques semaines, l'Association de l'aluminium du Canada et Hydro-Québec ont signé conjointement, pour la première fois au Québec, un protocole de collaboration en matière d'efficacité énergétique. Hydro-Québec et nous avons convenu de mettre sur pied un groupe de travail immédiatement de façon à analyser, recommander, pour chacune des usines que nous avons au Québec, des politiques ou des recommandations visant à améliorer notre efficacité énergétique. Et je pense que c'est un signal que nous voulions donner, en faisant ça, pour nous assurer que chez nous, comme on est des grands consommateurs, il n'y a pas de petites économies; toutes les économies sont importantes et valent de l'argent.

L'autre point. On a parlé beaucoup des entreprises... des gaz à effet de serre, l'entreprise polluante. L'industrie de l'aluminium a signé, en 2001, avec le ministre de l'Environnement de l'époque la première et seule entente volontaire de réduction de gaz à effet de serre au Québec. Une première au Canada. Les trois alumineries... les trois compagnies, les 10 alumineries se sont engagées à réduire leurs émissions de 200 000 tonnes métriques de CO2 équivalent entre 2001 et 2007. Un an et demi après l'entrée en vigueur de cette entente, nous avions déjà réduit nos émissions de 600 000 tonnes, et ça continue. Donc, il y a des efforts, tant au niveau de l'efficacité énergétique, qu'au niveau des émissions de gaz à effet de serre, que de la consommation énergétique. On est, je pense, un secteur progressiste, on veut le demeurer. On veut demeurer des leaders dans le domaine. Et la publicité qui a été faite par le gouvernement du Québec disant que le Québec est un champion, la capitale de l'industrie de l'aluminium, je pense que ça reflète extrêmement bien ce que j'ai voulu vous dire cet après-midi.

Le Président (M. Jutras): Alors, il y avait le député du Lac-Saint-Jean... 40 secondes, là, question et réponse rapides.

M. Tremblay: Bien, écoutez, en fait, étant donné qu'il reste peu de temps, je ne poserai pas de question, sauf que je me réjouirai du commentaire que vous avez fait par rapport... le fait que vous maintenez l'offre, pour les PME régionales, d'offrir de l'aluminium liquide. Et ça, je pense que, si ça n'a pas été... s'il n'y a pas eu une grosse demande dans le passé... Comme vous le savez, nous travaillons fort à développer des PME dans la transformation, et de ne pas avoir à faire refondre l'aluminium que nous pouvons nous procurer, je crois que c'est un atout concurrentiel pour les régions à proximité des alumineries. Sauf que mon souhait, c'est que si... étant donné que, par exemple, la compagnie Alcan, qui, ayant fusionné, a maintenant dans son réseau beaucoup d'usines de transformation, mon souhait serait que vous soyez tout de même ouverts à vendre de l'aluminium liquide à une entreprise qui n'est pas dans le giron de votre association et qui, par le fait, serait une compétitrice. Mais, nous, ce qu'on cherche en région, c'est la création d'emplois, et je crois que le fait de pouvoir avoir accès à ce métal liquide est un avantage pour les régions. Merci.

Le Président (M. Jutras): Un bref commentaire?

M. Van Houtte (Christian L.): Ah! Un bref commentaire. Tout à fait d'accord avec vous, je pense que... Vous vous souvenez de la carte routière technologique qui a été élaborée il y a quelques années par le CQRDA, par le ministère de l'Industrie et du Commerce, à l'époque, et d'autres, et qui a permis, entre autres, la création du Centre des technologies de l'aluminium. Cette carte routière, on m'a informé cette semaine qu'elle était en révision, on voulait former un comité pour la réactualiser. Et je pense que votre suggestion, que votre proposition pourrait être un élément supplémentaire à considérer dans l'élaboration et dans la mise à jour de la carte routière qui sera éventuellement soumise au gouvernement et aux intéressés.

Le Président (M. Jutras): Alors, je vous remercie, M. Van Houtte et M. Gagné. Et, M. Van Houtte, je voudrais vous rappeler l'engagement que vous avez pris, là, de fournir des données, là, quant aux kilowattheures générés, là, par l'exportation.

M. Van Houtte (Christian L.): ...

n(15 h 10)n

Le Président (M. Jutras): Oui, d'accord.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bachand): Donc, messieurs, nous allons reprendre nos travaux. Donc, messieurs d'Alcoa Canada, c'est un plaisir de vous recevoir ici, en commission. Je vous rappelle rapidement les règles de la commission. Ce n'est vraiment pas compliqué. Vous avez de toute façon suivi nos travaux, j'en suis convaincu: 20 minutes donc pour votre présentation; 20 minutes pour la présentation du côté ministériel; et 20 minutes du côté de l'opposition. Donc, sans plus tarder, messieurs, je vais vous demander, pour le bénéfice des membres de la commission, de vous présenter. Allez-y, messieurs.

Alcoa Canada Première Fusion

M. Gilardeau (Jean-Pierre): M. le Président, M. le ministre délégué, distingués membres de la commission. Tout d'abord, je vais me présenter, Jean-Pierre Gilardeau, je suis président d'Alcoa Canada Première Fusion. Donc, d'abord, merci de nous donner l'occasion de faire valoir notre point de vue dans ce débat crucial pour l'avenir du Québec et celui d'Alcoa. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Richard Lamarche, notre vice-président Énergie, et de M. Pierre Després, notre vice-président Affaires publiques et gouvernementales.

M. le Président, cette commission parlementaire se penche sur l'avenir énergétique du Québec. Du même coup, elle se penche sur le futur d'une industrie dont l'avenir est très prometteur et pour laquelle le Québec possède des atouts majeurs. Il ne faut pas manquer ce rendez-vous avec la prospérité du Québec et de ses régions. Et pourtant je dois admettre mon inquiétude à la lecture de l'analyse de certains économistes et experts qui prétendent que notre industrie ne contribue pas à l'enrichissement de notre société. Ces experts, qui n'ont pas de comptes à rendre à personne, avancent des chiffres qui me donnent le vertige tellement ils sont énormes. Ils oublient que chaque dollar dépensé en énergie électrique au Québec par Alcoa génère presque deux fois plus de dépenses en biens, en services, en salaires et taxes, et tout cela, principalement en région. Je n'inclus pas dans ce calcul toutes les retombées indirectes que crée notre activité économique. Nous savons tous que, selon les indices en usage, ces retombées indirectes ont pour effet de multiplier par au moins deux les retombées directes, dans une industrie comme la nôtre. Comment peut-on comparer le prix obtenu par Hydro-Québec sur le marché américain à une activité économique régionale qui génère des retombées aussi importantes pour les Québécois et les Québécoises?

On nous sert aussi régulièrement la question de la création d'emplois. On dit que l'industrie de l'aluminium crée moins d'emplois que d'autres industries à haut contenu en main-d'oeuvre, mais on oublie de dire que les emplois dans les industries dont on parle sont souvent précaires, cycliques et beaucoup moins bien rémunérés que les emplois chez nous. On oublie aussi de dire que ces industries n'ont pas la pérennité de nos alumineries, qui ont maintenu leur activité avec une grande stabilité indépendamment des hauts et des bas de notre économie. Les emplois dans nos alumineries ont su soutenir des régions entières depuis longtemps. Malgré ces performances exceptionnelles, M. le Président, il ne faut pas prendre notre industrie pour acquise.

Sur cette toile de fond, j'aimerais maintenant vous parler d'Alcoa et d'énergie. 2004 a été une année pour le moins difficile, et je ne citerai à titre d'exemple que l'échec de nos négociations avec le gouvernement du Québec. Mais, si nous ne pouvons changer le passé, nous pouvons au moins essayer d'influencer l'avenir. Les travaux de cette commission parlementaire nous donnent l'occasion de regarder ensemble vers les années qui viennent.

D'abord, quelques mots pour situer Alcoa au Québec. Notre entreprise, c'est 5 milliards de dollars d'actif, plus de 5 000 employés permanents dont la rémunération moyenne est de 60 000 $ par année, soit la plus élevée de toute l'industrie manufacturière au Québec. C'est une production annuelle de plus de 1 million de tonnes d'aluminium. Les taxes municipales versées par Alcoa comptent pour près du quart des revenus de la ville de Baie-Comeau, de la moitié de celle de Bécancour et de presque 90 % des revenus de la municipalité de Deschambault-Grondines. Alcoa, c'est plus de 1 milliard de dollars dépensés par année principalement dans les régions. Alcoa, c'est un profond engagement à l'endroit des communautés où nous sommes implantés. À tout cela, il faut ajouter les emplois indirects, les emplois induits qui découlent de l'activité de nos usines. Alcoa, c'est aussi un soutien très important à l'ensemble des communautés où nous sommes installés et à tout un réseau d'entreprises dont les produits et services se vendent partout dans le monde. Grâce à toutes ces activités, le Québec est reconnu comme la capitale mondiale du savoir et du savoir-faire en aluminium.

La prochaine politique énergétique du Québec s'élaborera dans la perspective du développement durable. C'est une orientation qu'Alcoa soutient sans réserve, puisqu'elle fait partie de nos valeurs. C'est un fait reconnu par de nombreux prix et témoignages d'excellence que nous avons reçus au Québec, au Canada et dans le monde entier. Tout récemment, à l'occasion du Forum de Davos, Alcoa a été reconnue comme une des trois meilleures entreprises au monde à ce chapitre. Alcoa, c'est aussi l'entreprise la plus importante dans le secteur de la transformation de l'aluminium au Québec. Elle se distingue, entre autres, avec son usine Howmet, à Laval, qui dessert le marché de l'aéronautique. Howmet est un important fournisseur de pièces forgées en aluminium qui se retrouvent, entre autres, dans le nouvel Airbus 380; elles se retrouvent aussi dans les turbines Pratt & Whitney à Longueuil. Sachant que Montréal est le troisième pôle mondial de l'industrie aéronautique, il est intéressant de savoir que plusieurs des avions fabriqués par Bombardier sont habillés par de l'aluminium produit à notre aluminerie de Baie-Comeau. De plus, Emballage Reynolds, une filiale d'Alcoa, a deux usines, à Laval, dans le domaine de l'emballage alimentaire.

Alcoa est donc une entreprise très importante chez nous et son développement s'inscrit au coeur de celui des régions du Québec. Ces régions comptent sur notre industrie comme moteur de leur développement économique et social. Cela est particulièrement d'actualité au moment où d'autres industries liées à l'exploitation de ressources naturelles traversent des moments extrêmement difficiles. La nouvelle politique de l'énergie, qui fera suite aux travaux de cette commission, aura un impact déterminant sur l'avenir d'Alcoa au Québec et conséquemment pour les régions où elle opère. Comme toute grande entreprise sur la scène mondiale, il est essentiel que nous poursuivions notre croissance. C'est une condition sine qua non de survie dans un domaine aussi compétitif que le nôtre. Le surplace, dans notre industrie, n'est pas acceptable.

n(15 h 20)n

Cette croissance, nous comptons l'assurer grâce notamment à nos efforts d'amélioration continue. Nous pouvons réaliser des gains en faisant toujours mieux ce que nous avons à faire. Cela, c'est le court terme, le quotidien. À titre d'exemple, la moyenne d'augmentation de puissance des alumineries existantes à travers le monde, donc de leur production, est de l'ordre de 1 % par année. C'est une réalité incontournable. Les usines qui ne réussissent pas à atteindre cet objectif voient leur compétitivité amoindrie année après année. Alcoa, au Québec, doit relever ce défi comme toutes les alumineries dans le monde. Quand on nous refuse toute fourniture supplémentaire d'électricité, aussi minime soit-elle, on nous condamne à mourir à petit feu. Une telle attitude est d'autant plus déplorable que notre fournisseur occupe une situation de monopole au Québec, ce qui ne nous laisse aucune solution de repli pour obtenir les apports d'énergie dont nous avons absolument besoin.

Je vous le répète, M. le Président, il s'agit d'une question vitale pour toute aluminerie, qu'elle soit au Québec ou ailleurs dans le monde.

Le long terme, maintenant. Compte tenu des investissements colossaux qu'exigent nos activités et aussi l'ampleur des installations qui caractérise notre industrie, nous ne pouvons gérer au jour le jour. Quand Alcoa planifiait des investissements de l'ordre de 3 milliards de dollars au Québec, nous pensions alors en fonction d'un horizon de 50 ans. Ce temps-là est terminé, cette page est tournée. Aujourd'hui, nous pensons malheureusement en fonction d'un horizon de moins de 10 ans, puisque c'est en 2011 et 2014 que nous devons renouveler nos droits d'eau et les blocs d'énergie que nous achetons présentement d'Hydro-Québec. Ceci veut dire qu'aucun investissement ne sera fait dans nos usines, à moins d'avoir un retour très rapide, de l'ordre de cinq ans. Certainement pas une bonne façon pour gérer des entreprises pour le long terme.

Au coeur de ces conditions essentielles que nous souhaitons obtenir pour planifier nos activités de demain se trouve le risque énergétique. Vous comprendrez que, lorsque votre facture d'électricité représente 35 % de vos coûts d'opération, vous ne pouvez laisser ce volet au hasard. La consolidation et le développement de notre entreprise au Québec passent donc obligatoirement par des assurances en termes de fiabilité des approvisionnements, en termes de tarifs d'électricité et de leur évolution dans le temps.

Nous pensons que, dans le contexte économique actuel, les projets de plusieurs milliards de dollars ne sont pas légion au Québec. Dans le domaine de l'aluminium, ces projets se réalisent dans des pays où de telles conditions sont réunies. C'est le cas actuellement en Islande, au Brésil, en Australie, à Trinidad-et-Tobago et ailleurs dans le monde. À cet égard, je tiens à souligner à cette commission que, selon une étude indépendante du CRU, un cabinet d'experts-conseils indépendant, les quelque 200 alumineries recensées à travers le monde ont obtenu un prix moyen pour leur électricité, en 2003, qui était inférieur de 30 % au tarif L du Québec. Il faut se rendre à l'évidence, le prix de l'électricité au Québec n'est plus un atout.

En conséquence, M. le Président, nous avons trois grands messages à livrer à cet égard aux membres de la commission. Le premier concerne le court terme. Il est très important de nous assurer, maintenant et pour le futur, de la capacité concurrentielle de nos usines au Québec. Or, à court terme, notre compétitivité est conditionnelle à l'obtention de petits blocs d'énergie additionnelle nécessaires aux besoins d'amélioration continue de nos installations. Comme je l'ai expliqué précédemment, je veux parler de quelques mégawatts additionnels par année pour permettre à l'ensemble de nos usines de se maintenir à niveau. Ce sont ces petits blocs d'énergie qu'on nous refuse actuellement, M. le Président.

Cette course en avant dans la performance énergétique et la meilleure utilisation de l'énergie est une réalité fondamentale dans nos alumineries. Prenons, par exemple, l'aluminerie de Deschambault ? une aluminerie que je connais relativement bien. Lorsque je l'ai construite et lancée en opération, en 1991, sa capacité nominale était de 215 000 tonnes métriques par année; aujourd'hui, elle produit 35 000 tonnes de plus d'aluminium, et ce, grâce à nos gains de productivité, au savoir-faire de nos employés et à une meilleure compréhension de la technologie. La réalisation de ces gains constants, dans le monde d'aujourd'hui, constitue un avantage compétitif, une condition sine qua non de survie. Mais, sans électricité additionnelle, notre progression s'en trouvera bloquée, avec les conséquences désastreuses que j'ai déjà mentionnées.

Notre second message concerne le moyen terme. Pour maintenir nos activités, nous devons avoir l'assurance que les droits hydrauliques dont nous disposons et dont l'extension a déjà été convenue avec le ministère des Ressources naturelles et la compagnie Hydro-Manicouagan seront renouvelés à compter de 2011. Nous demandons également que des blocs d'énergie qui sont prévus dans nos contrats actuels soient renouvelés après 2014 à des tarifs concurrentiels.

La consolidation de nos activités au Québec passait par la modernisation de notre aluminerie de Baie-Comeau et par l'expansion de notre aluminerie de Deschambault. Mon rêve était de faire d'Alcoa Canada le centre de gravité de toutes les activités d'Alcoa primaire en Amérique du Nord, c'est-à-dire le centre opérationnel de 13 alumineries. Pour cela, il fallait absolument disposer des blocs énergétiques supplémentaires à un prix concurrentiel pour le long terme. Il faut se rappeler que c'est suite à l'annulation de nos ententes par le gouvernement du Québec que ces investissements ont été retirés de la liste des projets d'Alcoa. Nos yeux se portaient alors sur un horizon de 50 ans. En d'autres termes, nous aurions ainsi assuré la pérennité de nos installations pour 50 ans. Nous avons dû nous ajuster, et aujourd'hui notre horizon est réduit à neuf ans.

Notre troisième message concerne le long terme, plus précisément l'évolution du tarif L d'Hydro-Québec. Actuellement, nos 5 milliards d'actif au Québec génèrent 1 milliard de dollars de dépenses directes dans l'économie du Québec et de ses régions. D'ailleurs, la création de conditions favorables à la consolidation de nos activités chez nous pourrait générer près de 1,5 milliard de retombées directes, soit 500 millions de plus, particulièrement dans l'économie régionale. Nous parlons alors d'un impact économique direct de près de 40 milliards sur 25 ans, et ce, sans compter les recettes fiscales que vont en tirer les gouvernements et les retombées induites par ces activités.

Mais, pour procéder, M. le Président, nous avons absolument besoin d'une assurance quant à notre sécurité énergétique à court terme, à moyen terme et à long terme, et ce, je le répète, tant en ce qui concerne les volumes d'énergie requis que l'évolution du tarif L. Hydro-Québec doit avoir comme objectif de convenir des augmentations de ses tarifs à une fraction de l'indice des prix à la consommation. Le prix de l'aluminium, quoique très variable année après année, a augmenté moins vite que l'inflation depuis les 25 dernières années. Nous ne prévoyons pas que la situation va changer dans le temps. C'est de 50 % de l'IPC que nous avons dû nous contenter.

Dans notre mémoire, nous avons abordé quelques moyens pour faciliter l'atteinte des conditions dont je viens de parler quant à notre sécurité énergétique. Nous vous ferons grâce de l'élaboration de ces moyens qui vous sont offerts comme outils de réflexion et qui ne sont pas au coeur de notre message. Ce sont des pistes de réflexion. Ces quelques avenues sont présentées à titre d'exemples et ne sont en aucune façon exhaustives.

Distingués membres de cette commission, nous avons voulu, dans les quelques minutes qui nous ont été allouées, vous sensibiliser aux grands enjeux de notre industrie, j'irais même à dire de tout le secteur de la grande entreprise. Nous venons de le voir, nous faisons face à des défis très importants pour assurer la pérennité de nos installations au Québec. La sécurité énergétique loge au coeur de ces grands défis. Vous l'aurez compris, il s'agit d'une condition essentielle non seulement au développement de nos activités, mais aussi à la poursuite de ces activités chez nous, au Québec. La taille des investissements requis et les délais nécessaires pour les mener à bien nous forcent à agir rapidement. Nous devons dès maintenant travailler sur un horizon de long terme avec les yeux fixés sur une contrainte absolue, celle d'être toujours et en tout temps compétitifs à l'échelle mondiale.

Pour vous donner un point de repère, je vous dirai qu'aujourd'hui une aluminerie moderne et compétitive à l'échelle mondiale doit permettre une production de 500 000 tonnes par année. L'Aluminerie Alouette vient d'accéder à ce club sélect grâce à un bloc d'énergie additionnel qui lui a été consenti. Sans ces apports additionnels d'énergie, la rentabilité des alumineries est menacée. On construit déjà, ailleurs dans le monde, des complexes conçus pour produire près de 1 million de tonnes par année. Or, nos installations à Baie-Comeau ont une capacité, aujourd'hui, de 440 000 tonnes dont presque la moitié est produite à partir d'un procédé dit «Söderberg», et ce sont ces cuves Söderberg qui doivent être modernisées. C'était le but de notre projet, pour lequel nous n'avons pas pu nous entendre avec le gouvernement. Ce qui revient à dire que nous ne produirons éventuellement que 260 000 tonnes à Baie-Comeau, ce n'est qu'une question de temps. Notre usine de Deschambault produit 250 000 tonnes par année. Pour la même raison, nous avons dû renoncer à notre projet d'agrandissement, qui est pourtant nécessaire pour assurer la pérennité de cette usine. Ces chiffres révèlent crûment la réalité à laquelle nous faisons face. C'est un immense défi que de rester compétitif avec un tel handicap.

n(15 h 30)n

Ces données illustrent clairement nos besoins en termes d'énergie, une énergie pour laquelle nous devons absolument être assurés quant à son prix à long terme et à sa disponibilité. J'espère ardemment que les travaux de cette commission feront une différence et nous permettront d'obtenir les conditions dont nous avons besoin. D'ailleurs, vous en conviendrez, personne n'engagerait des milliards de dollars d'investissement sans avoir des garanties requises pour assurer le succès de leurs projets.

En terminant, M. le Président, j'insiste encore une fois sur l'importance d'assurer la sécurité énergétique des Québécois, incluant bien sûr celle des entreprises comme la nôtre. Le gouvernement possède les leviers pour le faire. Il n'appartient qu'à lui de les utiliser pour, premièrement, prendre les moyens pour générer plus d'énergie au Québec, créant la première condition pour la survie de nos entreprises.

Deuxièmement, prendre des orientations fermes afin de rendre les tarifs prévisibles et de permettre de limiter les augmentations des prix d'électricité en deçà de l'inflation. D'ailleurs, est-il nécessaire de rappeler qu'Hydro-Québec aujourd'hui est une entreprise très profitable? Son défi est de demeurer profitable tout en gardant ses coûts parmi les plus bas et en conséquence offrir des tarifs concurrentiels.

Comme vous pouvez le constater, Alcoa souhaite poursuivre les discussions avec une grande ouverture d'esprit. Nous sommes parfaitement conscients que notre développement au Québec ne pourra se concrétiser qu'en étroite collaboration avec ses communautés et avec le gouvernement du Québec. Je profite d'ailleurs de cette occasion pour remercier ceux et celles qui nous ont apporté leur soutien, notamment les gens de Baie-Comeau, les gens de Deschambault-Grondines et de Bécancour, où nos usines sont installées. Je termine en souhaitant, M. le Président, que le Québec saura mettre en place les moyens afin de demeurer un grand leader sur la scène mondiale dans le domaine de l'aluminium. Je vous remercie pour votre attention. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Gila... Gi...

M. Gilardeau (Jean-Pierre): ...lardeau.

Le Président (M. Bachand): ...lardeau. Voilà! C'est un souhait qu'on partage avec vous, M. Gilardeau. Donc, je vais donner l'opportunité... 20 minutes du côté ministériel. M. le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. M. le ministre.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Vous avez plein de messages, plein de messages et plein de... le reflet des discussions que nous avons déjà eues ensemble, et on a répondu à ces questions-là, certain, avant. Je vais parler aujourd'hui plus sur votre mémoire et on va... Bien sûr, le gouvernement du Québec ne va pas fermer aucune usine, au Québec. Ça, c'est clair. On ne va pas fermer d'usines, nous autres. On ne sera jamais la cause d'une fermeture d'usine. Et on veut travailler pour le bien-être des Québécois, évidemment; on est là pour gouverner, puis on va gouverner avec ça, on va gouverner pour l'intérêt des Québécois et l'intérêt des gens qui vivent au Québec.

Première question, c'est... Bon, il y a des idées intéressantes dans le mémoire, ça vaut la peine qu'on en discute puis qu'on voie pour aller plus loin là-dedans. D'abord, vous demandez, dans votre mémoire, vous recommandez que le gouvernement vous permette de développer un site hydroélectrique dans le domaine... d'avoir votre propre chute, mettons, hydroélectrique dans le but évidemment de produire de l'électricité et puis évidemment bien sûr fournir à vos usines, répondre à votre demande.

Sur le plan économique, aujourd'hui, une centrale hydroélectrique, on parle d'un chiffre moyen, là, tout dépend évidemment de la situation financière, l'emprunt, etc., mais en général on parle de 0,06 $ du kilowatt. Et le prix que... votre tarif d'Hydro-Québec, que vous avez, c'est tarif L, 0,038 $. Juste m'expliquer comment ça peut être plus rentable pour vous de faire votre propre barrage, par rapport à un tarif actuellement à Hydro-Québec, juste voir comment le calcul est fait. Et surtout lorsqu'on regarde, mettons, les centrales, les vieilles centrales qu'Alcan et d'autres ont, évidemment ça a été bâti il y a longtemps, et la clé dans ça, c'est l'amortissement. Quand elles sont déjà amorties, évidemment les coûts baissent, donc la production, le coût de production devient plus intéressant lorsqu'on a... Mais, aujourd'hui, greenfield, là, c'est évidemment plus cher.

Le Président (M. Bachand): M. Gilardeau? Ou M. Lamarche, peut-être? M. Lamarche.

M. Lamarche (Richard): Si vous permettez, je pense qu'une bonne partie de la réponse est dans votre question, c'est l'approvisionnement à long terme, et, quand on regarde sur une très longue période et après amortissement, l'hydroélectricité est un projet intéressant.

Mais vous conviendrez que ce qu'on a fait dans le mémoire, c'est vous donner des pistes. On a mis sur la table différentes solutions qui doivent être examinées en détail, et ce qu'on dit, c'est qu'on serait prêts à regarder le développement de grands projets hydroélectriques avec des partenaires, sous une forme de partenariat public-privé. C'est ce qu'on dit dans notre mémoire, et on pourrait le faire de concert avec nos communautés, avec Hydro-Québec ou avec d'autres partenaires. Et il y a différentes façons de le structurer pour essayer d'arriver à nos objectifs, c'est-à-dire d'avoir des quantités, des volumes d'énergie qui seraient disponibles pour nous à des prix qu'on pourrait... qui seraient prévisibles.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Alors, automatiquement je comprends bien que vous serez en faveur, un jour, d'augmenter la marge de 50 MW. Développement privé, au Québec, actuellement c'est 50 et moins. Et il y en a d'autres fédérations et associations qui nous ont demandé d'augmenter le 50 à 100 MW.

Le Président (M. Bachand): M. Lamarche.

M. Lamarche (Richard): Évidemment, ce qu'on dit: C'est des grands ouvrages hydroélectriques, donc ça devrait être plus que 50 MW. Et, comment ce serait fait, je vous laisse le soin de le concevoir.

M. Hamad: ...veine d'idées. On a parlé... vous avez parlé, dans votre mémoire, d'ouvrir le marché de détail de l'électricité au Québec, d'enlever le monopole, et, pour les producteurs privés, vous pouvez vendre... Et, encore une fois, un producteur privé au Québec, c'est la même théorie encore une fois, un producteur privé, si on ouvre le marché, mettons, évidemment son premier intérêt, c'est le vendre plus cher et... Comment vous pouvez être concurrentiels là-dedans, c'est-à-dire comme client, parce que, vous, vous devenez client à un producteur privé qui va vendre à 0.06 $, et vous avez déjà avez déjà un tarif L plus bas? Comment ils vont, ces gens-là, vont vendre ailleurs? Comment ils vont faire de l'argent au Québec?

Le Président (M. Bachand): M. Lamarche.

M. Lamarche (Richard): M. le ministre, ce qu'on a proposé dans ce cas-là aussi, on sait que la réglementation actuellement pourrait permettre de faire des cas pilotes d'ouverture de marché de détail. Ce qu'on dit, c'est qu'on serait prêts à en discuter puis voir comment on pourrait concevoir ça. On pense pouvoir... il y a des occasions, comme vous le savez, durant l'année, durant la journée, durant les saisons, où les prix de l'énergie sur les marchés peuvent être intéressants. Ce qu'on dit, c'est de permettre à des industriels qui seraient prêts à se commettre à long terme de pouvoir avoir accès à ces marchés-là lorsque les prix peuvent être intéressants. Mais, là encore, c'est une des pistes de solution, ce n'est pas exhaustif, c'est une de ces pistes-là qu'on propose, et la solution réside probablement plus dans une série de moyens que dans un seul.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Gilardeau.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): En fait, je pense que ce qu'on voulait faire, c'est de signifier à la commission que l'énergie, pour nous, est suffisamment importante qu'on est prêts à penser en dehors de la boîte puis de sortir des sentiers battus, principalement dans un moment où on a de la difficulté à s'approvisionner. Encore une fois, on n'a pas fait des études exhaustives, on a lancé des idées, puis on serait certainement intéressés à en parler si jamais elles sont retenues. Mais on n'est certainement pas prêts, aujourd'hui, à en discuter avec une grande profondeur.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Je comprends bien. L'idée, c'est juste explorer et de savoir un petit peu c'est quoi, l'idée en arrière.

La dernière question. Mettons, Hydro-Québec Production réussit à obtenir l'objectif d'augmenter sa marge de manoeuvre, augmenter son volume et pouvoir exporter. Évidemment, tantôt, Pr Gagné a parlé un petit peu du risque du marché, etc. Comment vous voyez ça, ce bloc d'énergie, la marge de manoeuvre d'Hydro-Québec Production, à partir d'exportations et la possibilité d'avoir des blocs disponibles? Je ne sais pas, là, je suis dans le futur, je suis dans... il n'y a aucune stratégie, ce n'est pas le gouvernement qui parle, c'est juste... on fait des simulations, là. Et comment vous voyez ça, ces blocs-là, pour le développement régional, pour... Ici, on ne parle pas de... on ne parle pas dans 20 ans, là, on suppose qu'en 2014... on va commencer, 2012, 2011, tout dépend comment ça marche, l'hydraulicité et les développements des projets.

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Gilardeau, oui.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): On n'a pas de problème... puis, ce que vous disiez tantôt, je trouvais ça très intéressant puis, moi, personnellement, je ne vois pas de problème à ce que le Québec développe son potentiel énergétique puis puisse éventuellement se retrouver sur le marché extérieur; il y a pas de problème. Ce qui m'inquiète, ce qui m'inquiète, c'est la vision actuelle où on est dans une espèce de situation de flottement, où on ne sait pas exactement où le gouvernement et Hydro-Québec veut s'en aller avec sa tarification. Donc, c'est ce flottement-là actuellement, là, qui, je pense, nuit à notre industrie puis nuit à nos projets.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

n(15 h 40)n

M. Hamad: On parle de flottement en termes de tarifs ou... flottement de tarifs, là, hein? C'est ça?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Flottement en termes d'évolution potentielle de tarifs.

M. Hamad: O.K., flottement de tarifs. Mettons, si on bâtit une réserve intéressante, et, cette réserve-là, on fait la démonstration, un jour, que le kilowattheure... parce qu'au lieu de l'exporter, mettons, on va exporter une bonne partie pour faire des profits évidemment puis ramener ça au Québec. Mais, si vous seriez un jour capable de faire la démonstration que le kilowattheure, si aussi on l'utilise au Québec, en transformation dans votre industrie, peut ramener, par exemple, encore rapidement des cennes et de l'argent plus profitable, est-ce que ça, ça veut dire, un jour, qu'on peut être intéressé davantage, dans ce bloc-là d'Hydro-Québec Production, de peut-être voir des blocs développement?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Malheureusement... si j'ai bien compris, vous parlez dans le bloc patrimonial? C'est de...

M. Hamad: Non. Non. En fait, on touchera... Hydro-Québec Distribution a un mandat de répondre à la demande au Québec. Je parle d'Hydro-Québec Production, où elle est, Hydro-Québec Production, elle est sur le marché, à vendre... en fait où elle peut faire des profits, à vendre au meilleur prix qu'elle peut obtenir. Donc, elle va vendre... elle va exporter, l'exportation, parce que c'est un moyen de vendre à meilleur prix. Et, si on est dans, je ne sais pas, 2015, 2014 ou 2011, et on a, mettons... on a bâti une réserve assez intéressante et, dans ces réserves-là, à un moment donné, on peut dire: Nous, comme industrie, là... ou mettons que je me mets à votre place, on dit: Nous, là, donne-nous un mégawatt ou un kilowattheure, puis on va vous faire avec ça une transformation, une création d'emplois, qui finalement, le calcul économique en bas qui dit: Pour le gouvernement du Québec, si Hydro-Québec le vend, nous autres, on va amener encore plus d'argent que l'exportation, l'argent qu'on fait avec l'exportation. Est-ce que c'est faisable?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): C'est déjà le cas.

M. Hamad: C'est le cas?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): C'est déjà le cas. C'est déjà le cas. Aujourd'hui, un kilowatt ou un mégawatt qu'on envoie dans une aluminerie, qu'on paie, au tarif L, trois point quelques sous, puis qui crée des retombées économiques de l'ordre de deux fois plus que ce qu'on paie en électricité en région, des retombées directes... Ça veut dire que ce trois point quelques sous là va générer des activités économiques en région de l'ordre de plus que le double de ce prix-là. Puis on sait très bien ? ça, ce sont des retombées directes ? si on multiplie ça par, disons, juste deux... Il y a plus de retombées, à mon sens, aujourd'hui ? aujourd'hui ? à envoyer un mégawatt ou un kilowatt dans des régions, à faire tourner des industries qui sont porteuses d'emplois qu'envoyer ça aux États-Unis puis recevoir un chèque de 0,08 $. Mon opinion.

M. Hamad: O.K.

Le Président (M. Jutras): Alors, M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Alors, merci, M. le Président. Alors, moi aussi, je suis content de vous accueillir évidemment à cette commission, les gens de l'aluminerie Alcoa-Deschambault et de tout le groupe. On est au coeur évidemment d'un flottement, si j'ai bien compris, puis là j'aurais deux questions. Bon, vous aviez demandé lors... bien, en fait, ce qui était convenu dans l'entente initiale, en tout cas dans le MOU, là, qui existait, on parlait de 500 MW, puis là vous avez demandé 10 kW à Hydro-Québec, puis Hydro-Québec ne semble pas être capable, en tout cas, de répondre à cette demande de 10 kWh. Alors, c'est un petit peu surprenant, là, d'avoir une réponse comme celle-là, d'une part. Maintenant, le fait que votre principal concurrent ait le droit à des droits d'eau pour 2 000 MW, est-ce que ça joue contre vous? Parce que, vous, vous avez droit seulement à 500 MW? Est-ce que votre adversaire principal a un avantage économique à avoir des droits d'eau sur une plus grande quantité de mégawatts?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je comprends votre question, mais je ne comprends pas comment je peux répondre à cette question-là. Je n'ai pas ni des outils ni l'information, puis je ne pense pas que ça va servir à la commission de débattre de ça, là. Alcan a un portfolio différent du nôtre puis a des activités différentes des nôtres, puis je ne suis certainement pas placé pour pouvoir commenter si on est en meilleure ou moins bonne position.

M. Soucy: C'est parce que je faisais suite à ce qui est indiqué au mémoire... Une des options que vous avez ouvertes, c'était le fait de produire ou d'avoir vous-mêmes des droits d'eau sur des rivières. Alors, je me disais: Si on... Comme il y a un différentiel de 1 500 MW, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de négocier des ententes sur des rivières pour vous permettre d'avoir des droits d'eau?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): C'est une des options qu'on a voulu ouvrir, de dire: Y a-t-il lieu de regarder des projets dans des endroits, avec Hydro-Québec ou avec d'autres, puis de voir s'il n'y a pas une formule qui pourrait être intéressante et pour l'industrie, et pour les régions, et pour le gouvernement, et l'Hydro-Québec, où il y aurait une situation gagnante-gagnante. La formule, je ne l'ai pas, mais c'est certainement un volet qu'on voudrait ou pourrait regarder.

M. Soucy: Dans le mémoire aussi, M. Gilardeau, vous faites état du fait qu'Hydro-Québec exerce un monopole. Évidemment, ça vous met dans une situation un petit peu défensive. Est-ce que vous souhaiteriez qu'il y ait du développement privé au niveau hydroélectrique qui soit... ou qu'on permette davantage le développement privé en hydroélectricité?

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Écoutez, je pense que la situation actuelle est très conjoncturelle, elle est d'aujourd'hui. Je n'ai pas de commentaire à faire sur: On serait-u mieux autrement? Mais définitivement, aujourd'hui, ça nous met dans l'embarras, parce qu'on considère qu'avec des demandes faibles, d'être pris avec un monopole, ça ne fonctionne pas. Mais j'imagine que dans le futur ça devrait se résorber si le gouvernement ou le Québec et Hydro-Québec développent plus de ressources.

M. Soucy: Bien, si j'interviens là-dessus, c'est qu'on sait... en tout cas, toutes les démarches ou toutes les présentations qui ont été faites dans le passé par certains experts qui sont venus nous dire que chaque emploi coûtait 500 000 $ à Hydro-Québec, puis ça a comme laissé une mauvaise image, si j'ose dire. Alors, moi, ce que j'essaie de faire, ce que j'essaie de voir dans l'avenir, de projeter, c'est le fait qu'Hydro-Québec satisfasse les besoins, en vertu du volet patrimonial, pour les citoyens, puis que le volet industrie soit comme plus autonome. Alors, c'est comme ça que je voyais que ce serait plus acceptable pour les citoyens du Québec de voir: Écoutez, ils ont des droits sur une rivière, ils produisent leur électricité, ils sont autonomes, puis ça n'a pas trop d'influence ou ça n'a pas trop d'impact négatif sur le tarif pour le citoyen ordinaire.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je pourrais-tu essayer de répondre à votre première question? Je sais qu'elle a été adressée à mon ami Christian Van Houtte, le président de l'association. Quand j'entends que les emplois créés ou... les emplois créés, oui, dans l'industrie offrent une subvention de plusieurs centaines de milliers de dollars par emploi... Un, je suis d'accord avec Christian, premièrement, on n'a jamais vu, compris ces chiffres-là. Ça fait qu'on part de loin. Mais, même si on essaie de faire un calcul, j'ai de la misère avec cette approche-là. À la régie, des experts ont déposé que le tarif L offrait un retour de l'ordre de 14 %, 15 % à Hydro-Québec. Donc, le tarif L offre un retour à Hydro-Québec, qui est une entreprise qui fait de l'argent avec le tarif L.

Moi, j'achète de l'électricité au tarif L. Je transforme cette énergie-là dans un produit, et mon retour est inférieur à celui d'Hydro-Québec. Dans ces conditions-là, quand quelqu'un offre un service à quelqu'un d'autre et fait plus d'argent que celui qui l'utilise, comment peut-il taxer celui qui l'utilise d'être subventionné par le produit qu'il lui sert?

M. Soucy: J'ai ma réponse.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je ne comprends pas.

M. Soucy: Alors, je vous remercie.

Le Président (M. Jutras): Est-ce qu'il y a d'autres... Oui, M. le député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue.

M. Bernard: Oui. Bonjour, messieurs. Moi, j'aurais une question qui fait référence en partie au mémoire de l'Association de l'aluminium, précédemment, mais qui vous concerne aussi, parce que vous allez être capables peut-être de me donner des bons éléments de réponse, étant donné que vous avez des alumineries à plusieurs endroits sur la planète.

n(15 h 50)n

Moi, à Rouyn-Noranda, j'ai une industrie qui s'appelle Noranda, qui a une fonderie. Noranda et Falconbridge ensemble ont six fonderies au Canada, O.K., trois au Québec, deux en Ontario, une au Nouveau-Brunswick. Puis, dans la dynamique de l'année dernière, peut-être que vous allez vous rappeler que Noranda a failli être achetée par China Minmetals, on a donc beaucoup parlé de la compétitivité des fonderies autant au Canada et qu'ailleurs sur la planète. Puis, dans le discours entre autres, ils nous ont effectivement parlé de l'énergie. Mais les gens de Noranda, à l'époque, nous ont dit qu'eux, maintenant, sur la planète, ne construiraient plus jamais de fonderie en milieu industrialisé, soit Amérique du Nord et également en Europe. Ils ont parlé d'énergie, oui, je vais revenir là-dessus, mais les autres facteurs qu'ils ont beaucoup mentionnés: la main-d'oeuvre. La main-d'oeuvre, les normes du travail, les normes environnementales, qui étaient très importantes, parce que, la main-d'oeuvre, on l'oublie quand même, mais elle a une part importante.

Et, à ce moment-là, d'où la force des pays, comme l'association en a parlé précédemment, l'Asie, c'est-à-dire une main-d'oeuvre peu dispendieuse et avec également des normes environnementales beaucoup plus légères. Eux, du côté de l'énergie, nous ont dit, oui, ils sont attrayants à ce moment-ci, mais la Chine va faire face à des problèmes à cause du type d'énergie qu'ils emploient. Ça fait qu'eux, dans leur discours, nous ont dit que d'ici une quinzaine d'années, au niveau énergétique, ils vont avoir à faire face à des problèmes, et d'où l'avantage compétitif que nous avons au Québec de toute façon, même s'il ne paraît pas à ce moment-ci.

Alors, quelle est votre position face à ce genre d'information là, moi, que j'ai eue pour un autre secteur ? c'est des fonderies ? mais pas... la même que les vôtres.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je vais vous répondre par notre expérience de quelques années. On est en train de regarder à travers le monde où se situent des blocs d'énergie qui soient, qui sont et qui pourraient être compétitifs. Puis on réussit à trouver, pas facilement, mais on réussit à trouver suffisamment d'endroits pour penser qu'on va pouvoir se développer avec des tarifs qui vont être en deçà du tarif L, le tarif du Québec, et ça, pour le long terme. On a plusieurs exemples puis on est en train de débloquer des projets qu'on a annoncés dans plusieurs de ces endroits-là.

Il reste que, même si le tarif L, aujourd'hui, est moins compétitif qu'il l'a déjà été, les entreprises du Québec, puis principalement les entreprises déjà établies puis qu'on voudrait agrandir, du genre Deschambault, ou moderniser, genre Baie-Comeau, ont déjà toute une infrastructure, ce qui fait que le capital investi par tonne produite, pour ces modernisations ou ces agrandissements, est beaucoup plus bas qu'une nouvelle aluminerie ou une nouvelle usine que tu installerais, disons, en Islande. Donc, même à un prix d'électricité plus élevé, on peut réussir à se justifier à l'implantation encore au Québec.

Votre point sur la main-d'oeuvre est certainement aussi intéressant. Définitivement, avec la force du dollar... la faiblesse du dollar américain ou la force du dollar canadien, là, la main-d'oeuvre devient principalement, dans une industrie qui est reconnue pour donner des très bonnes conditions, des salaires très élevés à ses employés... c'est sûr que ça devient un défi un peu plus grand.

Mais le défi le plus grand auquel on fait face aujourd'hui, quand on regarde notre industrie et son futur, c'est de pouvoir penser que le tarif L ou le tarif industriel va devenir prévisible. On ne mettra pas... On a un genre d'industrie, comme les autres fonderies, où, une fois que tu as coulé puis tu as fait ton milliard d'investissement, tu ne peux plus déménager ça deux ans, trois ans plus tard, mettre ça sur un camion puis t'en aller avec. C'est là pour 20, 30, 40, 50 ans. De ne pas penser ou de ne pas pouvoir imaginer que le tarif d'électricité va être un peu contrôlé, ça crée une incertitude qui fait que les gens sont... c'est difficile de se justifier de faire un projet.

Des mathématiques peuvent marcher avec le tarif L d'aujourd'hui, on est capables de faire un projet qui va lever de terre. Où on devient complètement inconfortables, c'est le long terme. Puis il faut comprendre que dernièrement on a reçu des messages tout à fait contradictoires. On a eu le président d'Hydro-Québec qui a fait des déclarations à l'emporte pièce, qui ont été contredites par notre premier ministre. Mais il reste qu'on reçoit toutes sortes de messages aujourd'hui, là, puis, quand on regarde ça, on se dit: Dans quelle direction on s'en va?

C'est pour ça que les travaux de cette commission, puis les résultats de cette commission, puis, j'espère, la politique énergétique qui va en découler vont mettre au moins une toile de fond sur laquelle on va pouvoir regarder le futur puis dire: Bien, là, on sait où on s'en va. Ça fait que c'est... je trouve ça très approprié que cette commission se penche sur ça, c'est tout à fait juste et à temps.

Le Président (M. Jutras): Alors, oui. Maintenant, on va passer du côté de l'opposition. Alors, Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Vous n'êtes pas tout seuls à avoir des messages contradictoires, si je peux me permettre ce petit mot d'esprit, sans offense à mes collègues. Mais, dans ça comme dans d'autre chose, le gouvernement a montré qu'il pouvait changer d'idée. Je me réfère évidemment à UbiSoft, où est-ce que tout à coup on a compris les mathématiques.

Cela étant dit, si je... D'abord, je dois vous dire que j'ai bien aimé votre... à la page 2, quand vous définissez ce qu'est la sécurité énergétique pour Alcoa, et vous dites: «C'est la garantie que les besoins en électricité seront satisfaits en tout temps afin d'assurer la pérennité de nos usines et la stabilité économique des communautés où nous sommes implantés.» Changer le mot «électricité» par «énergie», et puis c'est la même chose pour... ce devrait être la même chose pour le gouvernement. Dans ce contexte-là, vous avez fait une analyse un peu... très polie, un peu dévastatrice mais très polie, du rapport du Pr Fortin, et je dois vous dire que j'en suis ravie, parce que j'ai trouvé ça pénible à entendre. Et c'est un confrère; professionnellement, c'est encore plus dur. Et tout ce qu'il a dit était vrai en théorie, mais en pratique, quand on regarde la dynamique, et la réalité, et l'application, c'était vraiment bien triste, et ce n'était pas... je crois... en tout cas, moi, je n'ai pas trouvé ça constructif et je le lui ai dit.

Cela étant, vous faites des remarques sur l'écart défavorable, vous venez d'en parler, entre les prix payés par vos concurrents à travers le monde et le tarif L d'Hydro-Québec. Ça, je dois vous dire que ça nous préoccupe tous, et ça doit nous préoccuper, parce que l'électricité a toujours été, au Québec, un facteur de développement économique et social, il faut le dire, en plus d'être régional, et ce qui n'est pas une mince affaire. Et j'aimerais ça que vous me donniez, si vous pouvez le faire... Moi, j'ai entendu parler qu'un pays comme la Norvège, par exemple, qui ressemble un peu, en termes de conditions d'ensemble, au Québec, hein, c'est quand même un pays où est-ce qu'il y a une certaine production hydroélectrique, ils ont une grande richesse récente de pétrole. Est-ce que c'est vrai qu'ils offrent des conditions d'investissement à des entreprises fortes consommatrices d'électricité, des alumineries, pour ne pas les mentionner, des conditions qui sont beaucoup plus... bien, en tout cas, plus avantageuses que le Québec?

Pouvez-vous qualifier ça ou nous orienter, ou nous donner un site Internet qui nous permettrait d'aller valider cette information-là? Parce que, si la Norvège peut offrir des tarifs compétitifs en brûlant du pétrole, aux conditions d'aujourd'hui, bien il me semble qu'il y a quelque chose, là, qu'il faudrait qu'on comprenne.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je n'ai malheureusement pas les données fraîches en mémoire, mais il existe des études, puis j'y référais tantôt, des études indépendantes, puis je pense que le ministère et les gouvernements ont aussi commandé ces études-là, le CRU ? il me semble que j'ai déjà eu des discussions avec des gens des ministères qui ont accès à ces données-là. C'est un organisme qui se spécialise dans le domaine puis qui font des études sur l'énergie, sur les matières premières, puis n'importe qui peut s'y abonner, pas gratuitement, comme de raison, ils vendent leur expertise. Mais, là-dedans, on voit clairement les orientations, on voit clairement... puis ce n'est pas exact, parce que c'est des estimés, mais c'est directionnellement correct.

Mme Dionne-Marsolais: M. Gilardeau, l'opposition n'a pas les budgets du gouvernement, et je ne le sais pas si c'est possible pour moi d'aller consulter ces rapports-là. Je ne vous demande pas une copie, mais j'aimerais ça en lire un pour au moins avoir une idée. Alors, je ne le sais pas si c'est possible, mais je vous le demande, là. Le cas échéant, je suis facile à rejoindre, j'aimerais bien ça le lire et je suis certaine que j'ai des collègues aussi qui seraient intéressés à le lire.

n(16 heures)n

Vous avez mentionné tout à l'heure une affirmation intéressante, que la régie a démontré qu'avec le tarif L la rentabilité pour... le retour sur investissement était de 14 % à 15 % pour Hydro-Québec Distribution ? c'est ça? Pouvez-vous me donner exactement la cause où est-ce que cette conclusion a été démontrée? Ah, si vous ne l'avez pas, vous pourrez nous l'envoyer, aux membres de la commission, là, parce que, pour nous, pour retrouver exactement les composantes de ça, si on veut comprendre exactement ce que ça signifie, ce serait intéressant de l'avoir.

Ensuite, vous faites, à la page 7, quand on parle du... Je veux parler du cadre réglementaire, là, vous parlez des alternatives lorsque le monopole d'État refuse de vous fournir et de livrer l'électricité aux termes et conditions prévus dans le règlement tarifaire. C'est pas mal gros, ce que vous dites là. Et vous faites référence au monopole d'État, là, vous en parlez aussi à la page 10. Et là je vais vous poser une question qui est peut-être plate, mais il faut que je vous la pose: Est-ce que vous pensez que la loi n° 116 devrait être révisée? Je ne vous dis même pas abrogée, là, mais celle qui finalement vous cause problème. Enfin, tout ça semble découler de cette nouvelle loi... bien, de cette nouvelle loi, de la loi n° 116. Est-ce qu'à votre avis, là, puis je vous demande... Puis c'est nous qui l'avons... Je me sens bien à l'aise de le demander, c'est notre gouvernement qu'on l'a passée, cette loi-là. Mais, aujourd'hui, est-ce qu'elle devrait être abrogée ou modifiée?

Le Président (M. Jutras): Oui, M. Gilardeau.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Merci. Je veux parler en premier puis je vais aussi demander à Richard de donner son opinion. Mais j'irais jusqu'à dire: Le moyen m'intéresse moins, parce qu'on n'est pas des spécialistes du domaine, que le résultat, puis ce que j'aimerais imaginer... Puis on a fait des calculs, on a essayé de simuler, si Hydro-Québec avait une croissance de l'ordre de 1 %, 1,5 % par année puis si cette croissance-là devait venir de barrages, de nouveaux ouvrages à un prix beaucoup plus élevé, quel serait l'effet sur le tarif moyen, le tarif L puis l'évolution des tarifs, en gardant la structure telle qu'elle est, en assumant qu'Hydro-Québec Distribution s'approvisionnerait de la production. Puis, selon nos estimés ? encore avec la limite de nos compétences ? on pourrait gérer ça, à l'intérieur de 1 %, 1,5 %. Donc, on pense qu'il serait possible, si Hydro-Québec voulait maintenir son niveau de profitabilité puis continuer à avoir comme approche de dire que l'électricité, au Québec, va être offerte au meilleur coût qu'on peut tout en faisant nos profits, on pense qu'Hydro-Québec pourrait, dans le temps, ne pas voir évoluer le tarif... les tarifs en fait, pas rien que le tarif, les tarifs, à un rythme plus élevé qu'une fraction du coût de la vie.

C'est ça, le défi. Puis c'est ça, le défi, selon nous pour garder notre grande entreprise au Québec, c'est de réussir à battre l'inflation. C'est notre défi à nous comme industrie, on n'a pas le loisir de se contenter de plus. Ça fait que c'est ça, notre défi, nous autres, de se battre contre ça. Puis c'est sûr que si l'énergie... Puis, encore une fois, on ne voudrait pas penser qu'Hydro-Québec vendrait à perte. Ce n'est pas ça, l'idée, c'est de dire qu'Hydro-Québec est mise dans un contexte comme on l'est, où on les pousse à donner des résultats qui les gardent dans cette marge-là.

Si vous me permettez, pendant que j'ai le microphone, je ne peux pas m'empêcher de vouloir faire un aparté. On a vu dernièrement une déclaration d'un fameux économiste qui disait que, malgré le fait que de l'énergie comme la nôtre prend 42 % de l'électricité disponible, qu'elle ne génère que 32 % des revenus. Je suis ingénieur de formation, puis ça fait longtemps que je gère des business. Je n'ai aucune prétention d'être un économiste, mais, moi, quand je regarde une business, le revenu ne m'intéresse pas, c'est le profit. Puis, si je vends un produit cher, mais je n'ai pas de marge, ça ne m'avance pas. J'aime mieux vendre un produit moins cher qui fait une marge que de vendre un produit plus cher qui ne fait pas de marge. Donc, de faire une corrélation entre le volume de ventes puis le volume de revenus, dans ma tête, c'est tout à fait inutile comme donnée. Puis qu'un économiste mette ça public puis crée une confusion dans la tête des gens qui lisent ça, je trouve ça difficile à comprendre. Donc, je ne pouvais pas m'empêcher de le faire, je me sens mieux. Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: ...

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Oui, oui, ça m'a fait du bien.

Le Président (M. Jutras): Pas d'autres questions?

Mme Dionne-Marsolais: Tant mieux. J'ai juste une autre petite question sur... avant de... Je sais que mon collègue veut poser des questions aussi, là, puis, moi, j'en ai plein. Mais enfin je vais me limiter, je reviendrai après s'il y a du temps. Vous dites que le monopole de distribution actuellement n'aurait... je ne me souviens plus exactement où, là, mais n'a plus l'obligation de vous fournir l'électricité. Pouvez-vous nous expliquer ça? C'est depuis quand, ça, c'est depuis...

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Ça fait un bout de temps, là, qu'on essaie de demander à Hydro-Québec et au ministère de nous fournir un petit peu plus d'énergie. On a eu plusieurs rencontres avec Hydro-Québec, et définitivement on nous répond toujours à la négative. On a dernièrement écrit au ministre, qui nous a répondu, puis le ministre me disait tantôt qu'il y a une réponse qui nous arriverait bientôt. Donc, c'est un sujet qui est encore dans les airs, mais définitivement Hydro-Québec, pour l'instant, reste sur sa position, qu'il prétend qu'il n'a pas l'obligation de servir, prétention que l'on ne considère pas acceptable. Dans une situation de monopole, notre fournisseur d'énergie qui nous dit tout simplement: Vous ne pouvez pas avoir des petits blocs d'énergie, on a de la difficulté avec ça. Ça fait qu'on est en train de regarder toutes les options qui sont disponibles à nous pour faire valoir notre droit, mais, pour l'instant, on est encore en discussion avec le ministère.

Mme Dionne-Marsolais: ...raison parce que ce n'était certainement pas le sens des changements de loi. Parce que, comme vous dites, un monopole doit au moins répondre à la demande, je veux dire. Sinon, ça n'a plus de sens, là, je ne sais pas où est-ce qu'on s'en va.

Je fais juste vous lire la demande que j'ai faite à l'association de l'industrie de l'aluminium parce que j'aimerais ça que vous la compreniez puis que vous leur aidez à définir... à nous donner le chiffre: «Le secteur manufacturier, par ses exportations, génère 0,69 $ par kilowattheure qu'il consomme. C'est pas mal mieux que les 0,09 $ du kilowattheure que peuvent offrir les exportations d'électricité aux États-Unis.» Ce qu'il fallait démontrer. J'attends la démonstration. Je vous remercie beaucoup. Je ne sais pas s'il reste... j'espère qu'il reste...

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je vous promets une réponse, mais je ne l'ai pas, malheureusement.

Mme Dionne-Marsolais: D'accord.

Le Président (M. Jutras): M. le député de René-Lévesque.

M. Dufour: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Gilardeau, M. Lamarche, M. Després, la première fois qu'on s'est rencontrés, je pense que c'était à la maison mère, à Montréal. Alors, il se disait beaucoup de choses dans le dossier. Et, quand je me suis présenté à vous, je me suis présenté comme étant Marjolain Dufour, député du comté René-Lévesque, mais je me suis aussi présenté à vous comme étant Marjolain Dufour, 6449, mon numéro de matricule. Et je commence ma 29e année d'ancienneté à Alcoa, à Baie-Comeau, alors j'accumule encore mon ancienneté. Je le dis bien honnêtement, parce que, Reynolds avant a été le fleuron de l'industrie de l'aluminium au Québec, il est dans notre coin, on souhaite qu'Alcoa le devienne aussi. Et il est clair qu'après tant d'années on a un sentiment d'appartenance, parce qu'on a eu une certaine pérennité financière, et la région a eu aussi une pérennité financière par rapport à ce que vous faites comme produits et ce que vous faites aussi comme acteur social et économique important par rapport à la communauté. Ça, je vais vouloir vous entendre là-dessus, là, c'est une première question.

Et j'ai pris des notes sur ce qui s'est dit tout à l'heure, là, et ça parle de flottement. Bien, il va falloir que ça déflotte bientôt, là, tu sais? J'ai posé une question peut-être pas au bon endroit tout à l'heure, je parlais de 2011, 2014, mais vous m'avez donné un peu dans les réponses, là, la prévisibilité que vous avez par rapport au court terme, au moyen terme et au long terme.

J'ai posé des questions à M. Caillé, qui a été le premier qu'on a reçu ici lorsque la commission parlementaire a ouvert, et je lui avais posé des questions l'année dernière: Est-ce qu'il y avait des mégawatts graduels pour la modernisation d'Alcoa à Baie-Comeau? La réponse a été oui, et la réponse va toujours être oui. Il a pris bien soin de me dire que, s'il y avait des pertes d'emplois au Québec, ce n'était pas de sa faute. Le ministre vient de nous répondre que ce ne serait pas non plus la faute... le gouvernement ne sera pas responsable de fermetures d'usines. Mais là ce n'est pas de la faute d'Hydro-Québec, ce n'est pas la faute du gouvernement, c'est de la faute à qui?

n(16 h 10)n

J'ai un problème majeur. Parce que le problème majeur que j'ai, puis ça, il faut que le monde le comprenne... Puis j'ai maîtrisé le dossier pas parce que je travaille là, parce que, comme député, j'ai fait partie de la coalition. C'est grave, ce qui se passe, là. Dans les régions comme la nôtre, si, en 2010, il n'y a pas d'entente... Puis c'est pour ça que j'apprécie le fait que, quand on va avoir fini cette commission-là, ça va nous prendre une vision très rapide, parce que, moi, en 2010, les cuves Söderberg de Baie-Comeau, c'est fini, je perds 900 jobs. Multiplié par trois en indirect, plus les pertes des familles, c'est 5 000 personnes, ce qui équivaut à à peu près 100 000 personnes à Montréal. J'ai un problème majeur. L'importance de la commission parlementaire, je vais vous dire, je la suis, c'est une école pour moi, il y a plusieurs visions, mais il va falloir opérer puis arrêter de flotter, tu sais, il va falloir déflotter à un moment donné.

Ça me fait de la peine un peu de voir qu'Alcoa veut construire ses propres barrages. Je vous ai parlé au niveau du communautaire, j'aimerais ça que vous m'en parliez tout à l'heure un peu. Mais, par rapport à Alcoa qui veut construire ses propres barrages, est-ce que c'est par rapport à du court terme au niveau de des petits blocs additionnels, au niveau de la mise à niveau? Vous ne pouvez pas avoir des barrages puis vous donner 500 MW pour l'agrandissement d'une usine à Deschambault, là. J'aimerais ça avoir des éclaircissements là-dessus aussi.

Le Président (M. Bachand): M. Gilardeau.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Oui. Il y a plusieurs questions dans votre question.

M. Dufour: Oui, on n'a pas grand temps.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): Je vais essayer d'y répondre du mieux que je peux puis je vais demander de l'aide à Richard aussi pour m'aider. Premièrement, les communautés, vous avez probablement remarqué que pour Alcoa puis pour moi personnellement... Là, je parle de Jean-Pierre Gilardeau, les communautés ont toujours été au coeur de mes préoccupations. Je suis une personne qui a démarré des usines dans des communautés rurales où l'industrie était importante, puis j'ai toujours cru essentiel qu'une industrie ait un lien étroit avec sa communauté. Ça me déchire le coeur de penser qu'éventuellement on pourrait avoir à réduire de façon importante nos activités dans des régions comme Baie-Comeau qui, je sais, vont avoir énormément de difficultés à récupérer ou à trouver une diversité qui va faire qu'ils vont pouvoir se développer. Mais j'ai pris l'engagement avec les gens de Baie-Comeau ? puis on va essayer d'y travailler autant qu'on peut ? de trouver des méthodes, des moyens pour justement diversifier leur économie puis de réussir à trouver des niches où on pourrait avoir un peu de succès au cas où on ait une catastrophe qui arrive là-bas. Ça, c'est un engagement que j'ai pris vis-à-vis du maire de Baie-Comeau, d'ailleurs qui nous a toujours donné un support constant vis-à-vis nos démarches.

Pour la deuxième question, je pense que ce qui se passe aujourd'hui est tout à fait sain. On a eu une période de flottement, il y a eu toutes sortes d'opinions, puis les travaux de cette commission puis les résultats qui vont en découler vont probablement nettoyer l'eau, là. Puis je trouve qu'on est dans de la bouette un peu ? je m'excuse pour le terme ? mais ça va permettre de nettoyer les choses. Ce qui m'inquiète, c'est ces fameux économistes là, là, qui ne doivent rien à personne puis qui envoient des messages qui sont tout à fait irréalistes, puis qui peuvent faire bouger l'opinion publique dans une direction, puis avoir comme conséquence qu'on peut prendre des mauvaises décisions. Ça, ça m'inquiète. Je n'en reviens pas de voir des gens qui ont des degrés d'éducation élevés pouvoir faire des erreurs aussi fondamentales en économie, puis en tout cas ça, ça m'inquiète.

Mais je lève mon chapeau au gouvernement, qui actuellement remet le dossier sur la table puis se pose les vraies bonnes questions, puis j'espère qu'on va trouver les vraies bonnes réponses. Ça fait que j'apprécie définitivement la chance de pouvoir venir m'exprimer, comme je le fais aujourd'hui, devant une commission puis pouvoir mettre les choses sur la table. Ça fait que certainement un merci au ministre puis à ceux qui ont permis à ça d'arriver.

La troisième question, sur les blocs énergétiques, encore une fois, si jamais on arrive dans un cul-de-sac, j'aimerais ça pouvoir penser qu'on va aller regarder cette alternative-là comme il faut puis d'imaginer qu'on pourrait être partenaires dans un grand projet puis là assurer la pérennité de nos installations pour le long terme. Je ne suis pas sûr que ça va marcher, parce que les équations sont peut-être dures à faire arriver. Dans le cas d'Hydro-Québec, qui a une grosse, grosse partie de ses actifs qui sont déjà amortis, d'ajouter un barrage, ça peut... ça peut puis ça se gère. C'est sûr que, quand tu pars avec un projet «stand alone», là, puis que tu veux faire un barrage de 500 MW ou 600 MW, ça va demander énormément de travail pour pouvoir trouver une façon de faire tourner ça pour que ce soit bon pour le long terme.

Le Président (M. Bachand): J'ai quelques minutes pour vous, M. le député de Vanier. Allez-y.

M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour à vous. Merci d'être là. Si on garde à l'esprit ce qu'on a parlé tantôt au niveau d'un petit bloc d'énergie de disponible que vous essayez d'avoir et que malheureusement vous n'êtes pas capables, moi, j'aimerais toucher au point qu'on n'a pas parlé encore, au niveau efficacité énergétique. C'est un domaine... L'industrie, c'est un facteur important, l'efficacité énergétique. J'aimerais vous entendre sur ce qui s'est passé dans le passé, dans le «day-to-day», puis à venir au niveau efficacité énergétique, parce que, s'il vous manque d'énergie, est-ce que l'efficacité énergétique, pour vous, c'est un aspect extrêmement important pour justement même... peut-être pas la survie de l'entreprise, mais là on parle, là, d'année, là, 2010-2011? C'est légèrement inquiétant, là, je trouve. Alors, j'aimerais vous entendre sur ce sujet-là.

Le Président (M. Bachand): Très rapidement, en 30 secondes.

M. Gilardeau (Jean-Pierre): 30 secondes. Oui, la réponse est oui. De l'efficacité énergétique, on a des comités usines, on a des comités secteurs, on a un comité régional, on a un comité qui est à la grandeur de la province pour regarder toutes les pertes d'énergie qu'on a puis essayer de récupérer tout ce qu'on peut récupérer, parce que, pour nous autres, récupérer de l'énergie, c'est de pouvoir la convertir puis faire de l'aluminium avec. Ça fait que les pertes d'énergie, pour nous autres, c'est se tirer dans le pied. Alors, il n'y a pas de place chez nous pour ça.

n(16 h 20)n

Le Président (M. Bachand): M. Gilardeau, M. Després, M. Lamarche, merci infiniment de votre présence à la commission. Je vous souhaite un bon retour. Et je vais inviter tout de suite Bechtel Québec ltée à prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bachand): Messieurs, vous ne pourrez nous le reprocher, on était à s'informer de votre histoire, en fait de celle de Bechtel, et puis pour le bénéfice donc de tous les parlementaires qui nous écoutaient, qui écoutaient le ministre et Mme la députée de Rosemont. Donc, nous n'étions pas hors d'ordre, mais nous vous avons fait attendre quand même.

Donc, M. Brian Kenny, M. Filion, bienvenue à la commission. Je vous rappelle un petit peu les règles de la commission: 20 minutes pour votre présentation et 40 minutes en tout de part et d'autre, du côté ministériel et du côté de l'opposition. Donc, sans plus tarder, je vous demanderais de vous présenter, même s'il semble que c'est déjà fait, et de commencer votre mémoire. Allez-y, messieurs.

Bechtel Québec ltée

M. Kenny (Brian): M. Bachand, on a une présentation ici... est-ce qu'on peut faire la diffusion? Est-ce que...

Le Président (M. Bachand): Absolument, oui. Est-ce que ce n'est pas déjà fait? Ah, la distribution, oui.

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand): Mme la secrétaire va vous assister, M. Filion.

Donc, allez-y, M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Alors, je commence par me présenter, je suis le président de Bechtel Canada et Bechtel Québec. Puis je demeure ici, dans la province, et je suis ici depuis, je ne sais pas, une trentaine d'années maintenant. Donc, je me considère un Québécois, tandis que je suis né à Dublin, hein, en Irlande. Et mon collègue, c'est Jean Filion, qui est maintenant consultant, mais c'est l'ancien président de Bechtel Québec.

Alors, M. le ministre, M. Bachand, chers députés du PLQ, PQ et le monsieur de l'ADQ inclus avec nous et membres de la commission, ça nous fait plaisir de vous adresser la parole. Puis ça commence à être tard, donc on veut être efficaces et passer rapidement notre message, qu'on espère que ce sera un message clair, hein?

Alors, on a fait part d'une espèce de présentation PPP et si on peut... Je suggère que vous tournez à la page 1. Nous, durant la présentation, on veut commencer avec une espèce de vision du Québec, que M. Hamad a mentionnée, c'est une espèce de vision de l'avenir du Québec, en 2015, qu'est-ce qui va assurer la prospérité des Québécois en 2015. Puis, après ça, on a une recommandation pour le développement de l'hydroélectricité puis, après ça, l'utilisation de l'hydroélectricité dans les alumineries, plus pour les autres métaux, comme le cuivre, ou l'acier, ou le magnésium, etc. Ensuite, après ça, on regarde les facteurs de compétition sur le plan mondial pour les alumineries. Et finalement on regarde l'emploi que les compagnies comme Bechtel génèrent dans le domaine. Et on finit avec une recommandation sommaire de qu'est-ce qu'on voit comme stratégie.

Alors donc, pour nous, une vision du Québec dans l'année 2015, il y aura deux volets. Alors, un volet d'une économie de haute valeur ajoutée. Et je crois qu'on voit les tendances, que la fabrication de basse gamme va passer en Indonésie, ou en Chine, ou en Inde, donc il n'y a pas un futur là. Et puis, dedans, on veut mettre l'emphase sur deux aspects, deux volets: alors, le volet d'ingénierie ? et c'est déjà un point fort du Québec et également la fabrication de pointe des équipements alors pour les alumineries, par exemple. Mais le deuxième volet, qu'on considère fatal, est que, vu qu'on est 6, 7 millions dans un pays vaste, il faut qu'il y ait exploitation durable des richesses naturelles. Donc, on voit là plusieurs volets, mais l'hydroélectricité doit créer une grande partie de notre futur, hein?

Alors, la page suivante, déjà, évidemment, c'est proposé de regarder 20 000 MW additionnels. Pour nous, juste pour simplifier, on propose 1 000 MW par an, par année. Il faut accélérer la cadence des projets. Ces projets prennent 10 ans généralement, alors, dès le commencement jusqu'à la production d'énergie, c'est 10 ans. Et puis c'est clair que, dans les années récentes, il n'y avait pas une stratégie claire, car, à l'heure actuelle... c'est même étonnant qu'on fait l'importation des kilowattheures dans le Québec; on est déficitaires à l'heure actuelle, hein? Donc, là, il faut accélérer la cadence de développement de projets et viser 1 000 MW par année pendant les prochains 20 ans.

n(16 h 30)n

Alors, qu'est-ce qu'il faut faire avec l'énergie? Alors, nous, on voit trois volets. Donc, disons, sur 10 ans, il y aura une croissance générale qui impacte sur la qualité de vie de toute la population. Mettez-la à 3 000 ou 4 000 MW... L'exportation vers les États-Unis est très rentable. Alors ça, ça pourrait être un volet aussi. Mais finalement... Alors, c'est l'aspect sur lequel, nous, on veut mettre l'emphase dans notre présentation, c'est le soutien à l'industrie d'aluminium, et l'acier et les autres métaux, et là on propose que, sur 10 ans, le tiers soit consacré à ça. Alors donc, d'environ 2 000 à 3 000 MW.

Alors, la page 3, si on regarde la situation actuelle dans le Québec, à Québec, on produit 10 % de l'aluminium, aluminium primaire produit sur le plan mondial. Là, il y a toutes les données. Alors, ça monte à 2,9 millions de tonnes par année. La production mondiale est de 28 millions de tonnes par année. Alors, selon le taux de croissance de la production d'aluminium, d'ici 2015, il y aura, en 2015, 40 000 tonnes à peu près par année. Alors, nous, on propose un objectif assez simple, que tout le monde peut comprendre, alors de rester à 10 % de la capacité mondiale.

Alors, qu'est-ce que ça donne? Ça fait qu'en 2015, d'ici 10 ans, il faut ajouter une capacité de 1,1 million, 1,2 million de tonnes par année. Ces jours-ci, comme vous l'avez entendu de M. Gilardeau et que vous allez l'entendre d'Alcan aussi, ça, c'est deux, trois projets majeurs, alors d'envergure. Donc, ça fait un projet majeur chaque trois ans, et alors ce n'est pas quelque chose... ce n'est pas une révolution, c'est un peu le taux de projets qu'on a faits dans les 10 ans du passé. Il y avait Alma, il y avait Alouette, qui termine à l'heure actuelle. Alors, qu'est-ce qui sera requis en mégawatts, c'est à peu près 2 000 MW pour l'aluminerie et peut-être un autre 1 000 pour le cuivre, ou l'acier, ou le magnésium, ou le silicone, ou tous les autres métaux.

Puis il y a un deuxième volet. Alors, c'est que, si on regarde le 2,9 millions de tonnes de production qui existe, il y a à peu près peut-être, là, 1 million de tonnes qui est désuet. C'est le problème de Baie-Comeau, c'est le problème d'Arvida. C'est soit des usines qui utilisent l'ancienne technologie, Söderberg, ou des usines où les cuves sont très petites, donc pas efficaces. Alors là, donc, comme deuxième volet, on suggère qu'il y ait un encouragement du gouvernement de moderniser la capacité existante. Et puis si on regarde qu'est-ce que ça donne comme investissements dans l'industrie, alors, juste pour le chiffrer, nous, on utilise le chiffre de 4 000 $US par tonne de capacité annuelle pour un «smelter». Donc, s'il y a 1 million de tonnes par année à ajouter, ça donne 4 milliards US. Et, si on regarde la modernisation, on considère que c'est 2 000 $ par tonne par année. Donc, ça donne les 2 milliards. Donc, un total de 6 milliards à être investi par des entrepreneurs, par les privés dans les 10 ans.

La carte. Si on regarde le Québec, il y a certains faits saillants dans l'industrie de l'aluminium. Dans un premier temps, il faut comprendre que l'Alouette, à Alma, et Lauralco sont un des plus... c'est parmi les alumineries avec les plus fortes performances sur le plan mondial. Il n'y a qu'une aluminerie en Afrique du Sud qui est dans les premières cinq. Deuxièmement, il y a Alcoa et Alcan. Alors, les deux, sur le plan mondial, sont très installés ici et ils ont une production très importante. Comme le député de Baie-Comeau a mentionné et M. Gilardeau, alors c'est bien compris que les emplois créés par les alumineries sont très stables. Et ils ont de longues durées, alors c'est des jobs de 30 ans, 40 ans. Et c'est une industrie qui soutient des communautés entières, alors Baie-Comeau, Sept-Îles, Saguenay, etc., là, il y a plusieurs exemples.

Et, parmi les autres créateurs d'emplois, évidemment on commence avec les directs et indirects, mais, après ça, il y a pour les entrepreneurs puis les équipementiers. Et finalement ? et c'est un volet important ? alors, il y a des firmes comme nous. Et, nous, on a 1 000 employés dans le Québec, si on considère Bechtel, et notre compagnie a joint avec BPR ? c'est BPR-Bechtel on a 1 100 employés ici, à Québec. Il y a 60 % qui oeuvrent dans le domaine de l'aluminium et il y a 50 % alors qui font de l'ingénierie pour l'exportation. Ce n'est pas des projets ici, à Québec. Donc, à l'heure actuelle, on réalise Islande pour Alcoa ? c'est notre bureau à Montréal ? on réalise Mosjoen ? c'est en Norvège à partir de notre bureau à Montréal, on soumissionne sur le projet d'Oman; à l'heure actuelle, ça va se faire en partie ici, à Montréal. Donc, on ne dépend pas, à l'heure actuelle, des projets dans le Québec, mais, s'il n'y a pas une stratégie d'encourager l'industrie à Québec, dans le temps, bien on va disparaître, vous savez, ce n'est pas... J'imagine mal la possibilité qu'on puisse survivre dans 10 ans s'il n'y a pas des projets ni d'expansion ni de modernisation ici, à Québec.

Alors, la page 5. Si on est investisseur, bien qu'est-ce qui est essentiel pour le choix d'investissement? Bien, dans un premier temps, c'est évidemment l'électricité à long terme, coût modeste, stable, etc., et puis d'autres éléments qui existent chez nous, alors environnement politique stable puis proximité des marchés.

Mais je veux souligner quelques éléments ici, car il y a une compétition farouche sur le plan mondial pour les alumineries. Et puis, si on regarde la vie d'une idée de construire une aluminerie, dès le commencement jusqu'à la mise en service, bien ça va être quelque chose de cinq à huit ans. Et puis, donc, les projets qui sont en train d'être étudiés à l'heure actuelle ne sont pas ici. Alors, déjà il y a un problème, vous savez. Alors, si on regarde, dans les cinq, six ans, il y avait un peu, comme il a été mentionné, de flottement dans la politique, ce n'était pas clair. Donc, déjà, si on regarde, bien Alcoa, c'est publié, et c'est Trinidad, c'est Brunei, c'est le Ghana, etc. Alcan, c'est Oman, c'est Coega, en Afrique du Sud, c'est le Moyen-Orient, etc. Alors donc, je veux passer le message qu'il est absolument primordial que le Québec se dote d'une politique claire, sinon la prochaine série d'alumineries, bien ils se vont se faire par ailleurs, hein? Même si finalement l'électricité commence à devenir disponible, il y a une période de pré-études, une année, deux ans, alors qui est essentielle.

Alors, à la page 6, qu'est-ce que c'est que la compétition pour le Québec dans le monde? C'est une compétition farouche. Au Moyen-Orient, alors c'est l'Arabie saoudite, c'est le projet Maaden; à Bahreïn, là on est là, on fait la deuxième ligne chez aluminerie de Bahreïn; Oman, c'est Alcan; à Qatar, c'est Hydro, et ils commencent l'étude, là, d'un projet, c'est l'énergie à partir de gaz. C'est des pays très accueillants, alors des majors comme Alcoa, Alcan, alors c'est le tapis rouge. Alors, ils sont très intéressés. C'est l'Afrique du Sud, l'hydroélectricité, c'est la Russie, c'est le Trinidad, sur la base du gaz; c'est l'Islande, c'est l'hydroélectricité et également le thermique. Donc, là... Et ça, c'est juste la liste partielle, il y a beaucoup de pays. Et puis eux, ils vendent, alors... ils vendent le fait qu'ils seront un bon partenaire, un partenaire à long terme, «streamliné», alors... amener chez eux, hein?

n(16 h 40)n

À la page 7, comme j'ai mentionné, nous, on a 1 100 employés entre nous et BPR-Bechtel, et puis plus que 70 % de ces employés sont dans le domaine de l'aluminium. Si on regarde l'idée d'une grappe, il y a déjà une grappe d'ingénierie des alumineries, à Montréal, dans le sens où, à Oman, il n'y a que deux soumissionnaires, il y a nous et nos cousins, alors... que je ne mentionne pas mais qui sont bien connus, hein? Il n'y a que deux. Alors donc, il y a deux soumissionnaires, tous les deux de Montréal, hein? Nous, on a notre centre d'excellence ici, à Montréal. On a fait un investissement avec BPR-Bechtel, puis, eux, maintenant, ils ont un mandat mondial. Ils sont installés aux États-Unis et en Jamaïque. Ils regardent un investissement à Johannesburg, alors... Et puis il y a plus que 700 employés dans le BPR-Bechtel. Également, il y a le Saguenay où il y a un créneau des firmes spécialisées dans le domaine des équipements et services spécialisés pour l'industrie de l'aluminium, et, nous, on essaie de donner un coup de main à... Alors, moi, j'ai personnellement visité quatre, cinq fois, et puis on travaille un peu prochement avec Alcan dans le domaine.

Alors, la page 8, donc qu'est-ce que ça donne? Alors, nous, on croit que, dans un premier temps, il faut une politique claire. Alors, ça tourne en rond un peu, ça décourage. Pour nous, c'est décourageant. Évidemment, c'est décourageant pour nos clients, comme Alcoa, même Alcan. Quand, moi, je discute alors avec des clients, ils ne sont pas tellement intéressés même de rafraîchir un investissement ici, à Québec, alors c'est trop difficile, ils vont le faire ailleurs alors. O.K.? Et, nous, on est impliqués dans les pré-études pour des projets d'alumineries sur le plan mondial, et on le sait où est-ce qu'ils vont aller alors, et ce n'est pas ici, hein, à l'heure actuelle. Et on considère qu'avec un potentiel de plus que 40 000 MW dans la province il faut viser un plan multiannées de 20 000, disons 1 000 par année, et que, dans le 1 000, il y a de la place pour croissance générale, l'exportation vers les États-Unis et puis de soutenir l'industrie existante.

Et juste un mot final. Alors, moi, même que je suis le président de Bechtel, et évidemment alors je suis entrepreneur, hein... Mais je veux souligner mon accord à 100 % avec ce que M. Gilardeau a dit, qu'il faut faire beaucoup attention à des cultes économiques. Alors, il y a des économistes qui disent: Mais il faut faire comme ci, comme ça et comme ci. Mais, moi, je considère que le «golden mean» est peut-être le meilleur, alors il faut mettre plusieurs paris. Alors donc, le pari, pour le Québec, d'une industrie de métaux primaires, c'est un bon pari, c'est une évidence, ça fonctionne, et il faut le soutenir. Autrement, ça va chuter, puis on va tuer quelque chose de bon, alors qui soutient des communautés entières. Alors, c'est grave. Alors, nous, on préconise donc cette politique-là qui est équilibrée et qu'on considère que, bien, c'est facilement réalisable.

Le Président (M. Bachand): Merci, M. Kenny. Messieurs, donc on est à la période de questions, pardon, excusez. M. le ministre donc de la Faune, de... Bon, on est partis dans les erreurs, M. le ministre. Donc, M. le ministre ? désolé ? des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. Allez-y, M. le ministre, à vous.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Kenny, M. Filion. Bienvenue à Québec. Bon, vous avez, à la page... Je ne me rappelle pas quelle page, mais ce que vous dites, c'est que vous voulez développer 20 000 MW. En fait, vous nous suggérez de développer, page 8, développer... En fait, c'est votre stratégie équilibrée, là. Vous dites: Il faut qu'on développe 20 000 MW, et le 20 000 MW, le tiers pour répondre à la croissance, le tiers pour l'exportation et le tiers pour répondre à la demande et maintien de la position mondiale du Québec en aluminium primaire. Bon.

Dites-moi, le 20 000 que vous voyez, vous êtes Bechtel, c'est des gens qui ont bâti des barrages, qui ont bâti des centrales, comme... Vous connaissez ça en fait et vous êtes au Québec depuis longtemps. Même les grands barrages aux États-Unis, Hoover Dam, etc. Dites-moi, comment vous voyez ça, les coûts, là? Le 20 000, là, sur... 1 000 par année, là, mettons, d'ici 10 ans, à quel...

M. Kenny (Brian): Ça fait que, M. le ministre...

Le Président (M. Bachand): M. Kenny, allez-y.

M. Kenny (Brian): O.K. Ça fait que malheureusement, à l'heure actuelle, si on regarde le pipeline d'Hydro-Québec ? et c'est explicité dans le dossier ? ça manque. Donc, il faut absolument alors y changer quelque chose, car, si on continue comme on est à l'heure actuelle, bien ça ne va pas se passer. O.K.? C'est clair, hein? Donc, nous, on n'est pas partisans, on n'a pas un avis sur soit que ce soit Hydro-Québec ou avec des partenaires, vous savez, ça, ce n'est pas notre domaine, hein? Moi, j'ai beaucoup d'admiration pour Hydro-Québec, c'est une compagnie excellente, qui réalise très bien des projets et qui est financièrement très forte, hein? Donc, ce n'est pas un problème, à mon sens, d'Hydro-Québec comme société, c'est un problème de stratégie alors. O.K.? C'est un problème de haut niveau. Il faut établir la stratégie pour M. Caillé.

Moi, quand j'écoute les discours de M. Caillé, pour moi, rien n'est clair, hein? O.K.? Ce n'est pas clair. O.K.? Donc, c'est une question de régler, si M. Caillé est responsable de dégager de l'argent, des profits, ou qu'il y a des enjeux de stratégie de la province à l'heure actuelle. Et c'est ça qui n'est pas clair, je crois.

Le Président (M. Bachand): M. le ministre.

M. Hamad: Je vais vous donner quelques éclaircissements, si ce n'est pas clair. En fait, l'Hydro-Québec, il n'y a pas longtemps, on a annoncé un plan d'investissement d'Hydro-Québec, 3,5 milliards de dollars par année pendant 19 ans, les prochains 19 ans. Évidemment, ces investissements-là, il y a une partie qui va pour le développement de nouveaux projets, il y a une partie qui va pour payer l'entretien et maintenance d'autres équipements, et d'autres dépenses. Et d'ailleurs c'est le plus gros programme qu'il n'y a jamais eu dans l'histoire de l'Hydro-Québec et dans l'histoire du Québec. Alors ça, ça veut dire que l'Hydro-Québec peut investir sur 19 ans.

Maintenant, je reviens à votre proposition à vous, parce que c'est là que j'aimerais ça avoir plus de détails. Votre 20 000, il peut être hydraulique, il peut être d'autres sources, si je comprends bien. Vous, c'est le montant. Vous n'en avez pas parlé, mais vous pouvez le dire, c'est quoi.

Et, quand vous allez faire le 1 000 MWh, en 2010, mettons, n'importe laquelle année, évidemment il y a le coût du cent du kilowattheure, il sera combien. Et c'est quoi, votre 20 000? Décrivez-moi, pour commencer, votre 20 000. Puis, après ça, dites-moi le coût que vous pensez dans ces années-là et comment vous allez le vendre après.

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Si vous permettez, M. le ministre, nous, on n'est pas experts dans le domaine des coûts négociés entre Hydro-Québec ou le gouvernement du Québec et puis nos clients, alors. Mais on sait que de manière générale, sur le plan mondial, ils cherchent à avoir 0,02 $US. Vous savez, c'est ça, le chiffre, hein? Mais comment alors les coûts vont évoluer en 2010, on ne sait pas, ce n'est pas dans notre domaine. Donc, si j'ai bien saisi votre question, là.

M. Hamad: ...20 000 MW, là, c'est quoi?

M. Kenny (Brian): ...20 000 MW? Bien, ce sera un ajout. Alors donc, à l'heure actuelle, il y a 43 000, il faut ajouter 20 000 MW sur 20 ans, et on va aller jusqu'à 63 000, alors...

M. Hamad: En quoi? Le 20 000, c'est en...

M. Kenny (Brian): De base hydraulique. Alors, s'il y a... Moi, je considère que s'il y avait... À l'heure actuelle, c'est peut-être 2 %, 3 % thermique. Alors, si le pourcentage de thermal, alors ça veut dire, sur la base du charbon, montera jusqu'à 5 %, 6 %, 7 %, 8 %, ce ne sera pas grave alors, mais c'est surtout l'hydroélectricité qu'on voit là.

M. Hamad: ...il n'est pas question charbon au Québec, mais le 20 000 que vous parlez, là, est-ce que l'éolien, est-ce qu'il est inclus dans le...

M. Kenny (Brian): Surtout l'hydroélectricité; éolienne, peut-être un peu de gaz naturel. Alors, il y a Gentilly, il y a toutes sortes d'affaires. Mais, nous, nous imaginons que ça va être 90 %, mais 80 % hydro alors. O.K.?

M. Hamad: En fait, vous êtes dans le domaine, là, vous êtes un expert, là...

M. Kenny (Brian): À l'heure actuelle, on n'est pas dans le domaine d'Hydro-Québec à l'heure actuelle. Juste pour être clair, là. O.K.?

n(16 h 50)n

M. Hamad: Le prix, vous pensez que ça va être, en 2010, 2015, le prix de l'électricité? Une centrale hydroélectrique, là, ça prend 10 ans à 12 ans à faire, à la bâtir, hein, au Québec, à cause de tous les paramètres, l'étude, l'ingénierie, l'approbation, l'environnement, permis, mise en service. Et, pour faire ça, évidemment, mettons, il y a un prix, là, de rentabilité qu'on fait. Aujourd'hui, par exemple, il y a des centrales qui coûtent 0,044 $, il y a d'autres centrales qui coûtent 0,06 $, ça varie d'un projet à l'autre. Et, plus qu'on avance dans le temps, c'est clair qu'en 2010, si on fait des projets en 2010 pour 2020, le prix/cent du kilowattheure évidemment est plus élevé, et pour plusieurs raisons. Une des raisons, c'est l'augmentation du coût de la vie. Deuxième raison, c'est que les meilleures centrales, on les a déjà exploitées parce qu'elles sont le plus proches. Et, si on s'éloigne puis on fait d'autres, elles coûtent plus cher.

M. Kenny (Brian): C'est difficile comme question, alors. Mais ça fait que je ne vois pas pourquoi ça devrait être plus cher ici que dans n'importe quel autre pays, il n'y a pas de... sauf l'hiver, alors... O.K.?

M. Hamad: Je vais laisser mes collègues poser des questions, s'ils en ont.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Roberval, j'ai cru comprendre que vous aviez une question.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. M. Kenny, M. Filion, bonjour. Bienvenue. On va toucher un élément qui m'intéresse beaucoup et qui fait partie intégrante, je dirais, de cette commission parlementaire, qui est principalement l'hydroélectricité. Vous avez mentionné tout à l'heure... vous avez nommé M. Caillé par rapport à certaines orientations vis-à-vis Hydro-Québec, et le potentiel, et tout ce que ça représente. Moi, je vous avouerai qu'au Québec on est drôlement fiers d'Hydro-Québec pour ce que ça peut représenter. Bien sûr qu'Hydro-Québec génère des revenus intéressants pour l'ensemble de la société québécoise qui reviennent en services. Ça, c'est une partie de sa... je dirais, une facette des activités d'Hydro-Québec. L'autre facette d'Hydro-Québec, c'est de s'assurer qu'à quelque part, grâce à ces ressources que nous avons sur notre territoire, on peut arriver à faire de la création d'emplois, faire de l'investissement, du développement économique. Ça, je pense que c'est un autre avantage que nous avons à ce niveau-là, et bien sûr tout ça, ça se fait dans un contexte de développement pour faire en sorte que nous puissions aller rechercher le maximum de retombées économiques ici, dans le milieu.

Alors, lorsqu'on a parlé, au cours des différentes interventions qui ont été faites dans la journée puis depuis quelques jours, sur est-ce qu'on doit faire de l'exportation au détriment de la disponibilité d'hydroélectricité pour faire des projets, moi, je pense qu'un n'empêche pas l'autre, et c'est là qu'il est important de faire bien la distinction. On a un potentiel énorme sur le territoire du Québec. Actuellement, il y a, quoi, 1 % des rivières qui sont harnachées, qui sont en production. D'une part, bien sûr qu'on veut en faire davantage pour en faire profiter la société québécoise et en même temps être capables de faire du développement économique avec des entreprises et des industries qui vont venir chez nous, sur notre territoire, faire de la création d'emplois, mais, d'autre part, on ne veut pas non plus arriver puis détruire notre territoire sans considération.

Alors, il est là d'avoir une importance, je dirais, relative entre l'aspect économique et l'aspect environnemental. De mon point de vue, on a encore d'après moi beaucoup de marge de manoeuvre encore pour être capables de le faire davantage et de faire en sorte qu'on puisse faire de la création d'emplois sur notre territoire. On parle bien sûr de d'autres pays. On a parlé de la Norvège, on a parlé de pays dans l'Afrique, en Asie, en Arabie Saoudite. Au Québec, on a des avantages, on a des outils puis on a de l'expertise.

Vous parliez tout à l'heure, dans votre mémoire, de la création de 20 000 MW additionnels sur 20 ans. Et, lorsque le ministre vous a parlé de la durée que ça peut prendre pour créer un projet, c'est là un peu que j'ai un problème, parce que je me dis: Si on veut arriver à faire ça, moi, j'achète ça, moi, 100 milles à l'heure, mais, si on veut réaliser ce projet-là sur 20 ans, est-ce qu'il n'y aurait pas des mécanismes à assouplir pour arriver à la création de 20 000 MW sur 20 ans?

Le Président (M. Bachand): Alors, M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Merci, M. Bachand. En ce qui concerne l'aspect environnemental, c'est clair et net que tout projet devrait être réalisé de façon durable, avec des études... bien, les meilleures études environnementales qui existent. Et puis, dans le Québec, il y a des compagnies très spécialisées dans le domaine qui rendent de tels services sur le plan mondial. Mais il faut qu'il y ait une volonté. Je crois qu'il y a une volonté de réaliser des projets de façon... Bien, c'est une place où la qualité est mondiale. Alors, ça va sans dire, là, à mon sens. Puis, si vous regardez, presque tous les chiffres de la performance environnementale des projets d'hydroélectricité, c'est très bon alors, c'est meilleur que tout autre projet, donc... Évidemment, il y a toujours des... ça nuit à quelque chose, mais, si on compare avec d'autres types de projets énergétiques, ils sont beaucoup meilleurs que tout autre. O.K.?

Je n'ai pas bien saisi ta question sur le 20 000 MW. Alors, c'est...

Le Président (M. Bachand): ...

M. Blackburn: Bien, écoutez, je vais vous donner un exemple, on va parler du projet de la Péribonka, à Saint-Félicien. On parle d'un projet de 350 MW, puis ça prend un certain nombre d'années avant d'arriver à la mise sur pied et à ouvrir l'interrupteur à «on» pour pouvoir générer de l'activité électrique. Alors, si je prends 20 000 MW et je me dis: Pour faire 350 MW, ça peut prendre cinq, six, 10, 12 ans avant de faire un barrage comme ça, comment je peux arriver, sur 20 ans, à penser que je peux générer 20 000 MW?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): C'est une très bonne question, mais... Et, comme j'ai dit à M. Hamad, aux cadences actuelles, nous, on ne croit pas que ça va être fait, que ça va être réalisé.

M. Blackburn: Alors, c'est là que je vous demande...

M. Kenny (Brian): Il faut accélérer, alors il faut faire autrement. Car, si on regarde le pipeline de projets chez Hydro-Québec et le taux d'avancement, alors ça ne marche pas, là, c'est...

M. Blackburn: C'est là ma question: Il faut faire quoi pour que ça aille plus vite?

M. Kenny (Brian): Il faut faire autrement. Alors, on n'a pas réfléchi avant la... Alors, il faut... ce n'est pas... il n'y a pas des... c'est des questions alors très complexes.

M. Blackburn: Je suis prêt à tendre la main, moi, je suis prêt à tendre la main aux gens de l'opposition, parce qu'effectivement vous êtes d'accord avec nous que ça prend de la création d'emplois.

Le Président (M. Bachand): M. Blackburn...

M. Blackburn: Non, non, c'est pour continuer.

Le Président (M. Bachand): ...tendez la main à M. Kenny pour les questions et les réponses, ça va être suffisant. Allez-y, M. le député de Roberval.

M. Kenny (Brian): Alors, ce n'est pas impossible, il faut regarder les étapes, les démarches dans un projet typique. Et puis il faut deux choses, il faut identifier tout le projet maintenant pour commencer le développement et il faut essayer d'accélérer, un, deux ans à chaque, alors donc 10 ans à huit ans ou 10 ans à sept ans. Alors, c'est ça qu'il faut faire. Alors, il n'y a pas de panacée ? excuse-moi. Alors, il n'y a pas de réponse miracle à ça. Alors, ça prend du temps.

Le Président (M. Bachand): M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Bien, j'aurais voulu tendre encore une fois la main aux gens de l'opposition.

Le Président (M. Bachand): Non, on va s'en passer, M. le député. Avez-vous des questions, M. le député de Roberval?

M. Blackburn: C'est parce que la bataille est commune. Je pense que l'objectif de la commission parlementaire...

Le Président (M. Bachand): Donc...

M. Blackburn: Non, mais, M. le Président, je pense que mon point est pertinent, l'objectif de la commission parlementaire...

Le Président (M. Bachand): Mais, écoutez, M. le député de Roberval...

M. Blackburn: Non, mais je ne veux pas faire de débat, là.

Le Président (M. Bachand): ...si vous avez des commentaires à faire, ce n'est pas tout à fait l'endroit, honnêtement. Si vous avez une question, par contre, vous êtes tout à fait à l'endroit pour le faire.

M. Blackburn: ...de l'avenir énergétique du Québec, et, moi, je pense que le travail que nous sommes en train de faire actuellement, bien sûr c'est d'entendre des individus et des groupes qui viennent nous faire part de leurs commentaires quant au futur et comment qu'on devrait aborder ça, mais en même temps j'interpelle aussi les gens de l'autre côté, qui à mon avis, d'après les discussions qui ont été tenues ici de par les projets existants et les projets futurs, je pense, partagent tout à fait la vision dans laquelle il faut qu'on puisse faire davantage de développement électrique, que ce soit par l'éolien, que ce soit par l'hydroélectricité, que ce soit par l'économie d'énergie. Je vois mon collègue de Baie-Comeau qui hoche de la tête. Effectivement.

Alors, dans ce contexte-là, donnons-nous ensemble les mécanismes pour pouvoir faire en sorte que nous puissions soit accélérer la procédure ou le processus de faire du développement électrique, hydroélectrique particulièrement, donnons-nous des outils aujourd'hui qui vont nous permettre justement de devancer ça. Parce qu'à quelque part, si la commission parlementaire dans laquelle nous sommes n'arrive pas à dégager cet objectif commun, qui est celui de tous les Québécois, je pense alors, là, on a comme un problème en termes de forum sur lequel nous pouvons discuter.

Le Président (M. Bachand): Nous allons aussi avoir un problème de temps, puisque je dois donner aussi la parole à la députée de Rosemont, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie. Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour et bienvenue. Je pense qu'on a discuté avec les intervenants d'Alcoa, tout à l'heure, de la conjoncture mondiale, mais vous faites un constat que je trouve intéressant, et j'aimerais savoir pourquoi vous le faites. Vous dites: On a 10 % du total mondial de l'aluminium primaire, qui est produit au Québec, et on devrait garder ça dans l'avenir. Pourquoi on devrait garder ça dans l'avenir?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

n(17 heures)n

M. Kenny (Brian): Bien, c'est... Vous savez, moi, je considère qu'il faut commencer avec une vision. Et puis, avec une vision, on peut travailler les détails. Et, si ça fonctionne, alors donc ça donne une façon claire d'imaginer le futur, hein? Donc, c'est juste une suggestion. Alors que, si vous regardez les chiffres et si ça fonctionne, alors donc ça donne une façon claire d'imaginer le futur, hein? Donc, c'est juste une suggestion. Alors, si vous regardez les chiffres, ça fonctionne; ça fait qu'on ajoute 1 million de tonnes, ça fait deux, trois projets dans 10 ans. C'est le taux réel auquel on a créé des alumineries existantes. Si vous regardez, dans les 10 ans, on a fait Alma. Mais... il y avait Alouette, à l'heure actuelle. Puis, avant ça, il y avait... je ne sais pas, je ne me souviens plus alors qui était avant ça, mais il y avait trois alumineries construites dans les derniers 10 ans. Donc, c'est le taux auquel on a développé l'industrie de l'aluminium québécoise, dans les 10 ans. Donc, c'est faisable, O.K.? Ça a amené des bons fruits. Alors donc, c'est pour ça qu'on a dit: Voilà un objectif, est-ce que ça fonctionne? Et ça fonctionne. O.K.?

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Moi, je partage votre avis, c'est faisable. Sauf que... enfin, c'était faisable sur une période donnée. Là, nous entrons dans une autre phase où il y a de nouveaux concurrents, où les conditions changent au niveau de la concurrence internationale.

Moi, je me dis: 10 %, ça m'apparaît beaucoup pour les 20 prochaines années. Est-ce qu'à ce moment-là... par contre, je partage votre avis quand vous dites: Il faut garder ce qu'on a, l'augmenter. Mais de là à dire: On fait un grand programme pour garder 10 % de la part de marché mondial, disons que j'ai un peu de réserves. Je pense qu'il faudrait voir les coûts comparatifs et surtout, je pense que c'est ce qui compte, les efforts et les effets de transformation en aval. Parce que c'est ce qui devrait... le Québec d'il y a 20 ans et le Québec d'aujourd'hui est différent, et les besoins du développement industriel du Québec, pour répondre à la compétence de sa main-d'oeuvre et à son intérêt, nécessitent aussi qu'on évolue dans nos choix d'investissement. Vous ne pensez pas?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Bien, juste pour... Alors, il y a plusieurs façons de voir le million de tonnes par année, madame. Je suis absolument d'accord avec vous qu'il faut garder la capacité existante. Mais je vais vous dire une chose, que, s'il n'y a pas une politique claire envers ça, ça va diminuer. Le monsieur à droite, il reconnaît que, s'il n'y a pas un accord sur Baie-Comeau, éventuellement Baie-Comeau va fermer. C'est la même chose pour des installations chez Alcan, sans les mentionner, qui sont désuètes: anciennes technologies, beaucoup de pollution, etc.

Et puis vous avez vu que, l'année passée, la nouvelle direction d'Alcan n'hésite pas à fermer des usines; ce n'est pas la même mentalité qu'il y a cinq ans. Donc, s'il n'y a pas une politique de modernisation des usines existantes, il y aura des fermetures puis il y aura une diminution de production. Ça, c'est une chose.

Deuxième élément, si on regarde l'aspect économique d'une usine comme Baie-Comeau, ça fait qu'alors le «sweet spot» pour l'investissement, ça demande d'ajouter un peu de capacité. Donc, déjà, il y aura une demande d'ajouter... je ne me souviens pas les chiffres, excuse-moi, monsieur, mais c'est peut-être encore 150 MW ou 200 MW qu'il faut ajouter. Alors, si on regarde 2 000 MW, et il y a 200 là et puis 100 là, et puis Alma, par exemple, alors 250 là, Deschambault, déjà, ça existe, c'est logique, 400, 500 là, bien, vous savez, 2 000 ne va pas loin, hein, dans ce sens. Alors donc, même sur le plan modernisation, il faut un peu plus de jus. Alors... O.K.? Je crois que ce n'est pas possible de garder les économies, la performance financière pour ces compagnies avec le chiffre existant. Voilà.

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Je partage votre avis à l'effet qu'il faut vraiment une stratégie industrielle, à ce niveau-là, qu'elle soit claire et qu'on s'aligne là-dessus. Et je partage aussi votre commentaire quand vous dites que ce n'est pas très clair, le discours du président d'Hydro-Québec en ce moment, et je pense qu'une des réflexions de cette commission, c'est justement d'établir les balises de la vision énergétique du Québec de demain, dans l'esprit d'une sécurité énergétique et d'un développement économique et environnemental, donc durable, et je pense qu'un des points importants qu'il faut faire, c'est séparer la stratégie énergétique de la stratégie industrielle.

Dans le cas du développement du secteur de l'aluminium, les choix d'investissement que le gouvernement va faire vont devoir tenir compte des autres possibilités d'investissement dans d'autres secteurs, c'est évident. Sauf que, ce qu'on entend ici depuis quelques... ça fait deux semaines maintenant, et même, ce matin, on a entendu la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante nous dire: Il faut augmenter les tarifs d'Hydro pour payer la dette.

Vous, vous... Oui, ne croisez pas les... Ne froncez pas les sourcils, là, c'est page A-10 dans le journal. Ils sont venus nous présenter un plan de remboursement de dette, qui est peut-être très bon, là, je ne sais pas, là, mais qui n'a rien à voir avec une stratégie énergétique.

Moi, je vais vous poser une question très directe: Est-ce que, dans votre vision du développement du Québec et de la compétitivité du Québec, avec les atouts que l'on a, que ce soient ressources humaines, que ce soit énergie hydroélectrique, est-ce que, si on augmente les tarifs d'Hydro dans un objectif supérieur de rembourser ou de payer la dette du Québec, c'est un choix que vous considérez un choix d'affaires?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Bien, madame, il y a une chose... L'une, que, s'il y a des... s'il y a une très haute utilisation d'énergie électrique pour le chauffage des maisons et si les maisons ne sont pas bien isolées, ça, c'est une perte, qui mène à rien alors. O.K.? Donc, s'il y avait une politique d'augmenter le taux d'électricité pour les consommateurs, comme moi, comme tout le monde, mais avec des incitatifs d'augmenter l'efficacité puis, oui, l'isolation, et tout ça, bien je considère que ce sera très bon, O.K.? Et, dans la mesure où une telle stratégie peut libérer de l'énergie pour les industries soit lourdes soit d'autres industries légères, alors, bien ça, ça devrait être efficace pour la prospérité générale alors. Le gaspillage d'énergie électrique sur le chauffage au moyen de mauvaise isolation, bien c'est un non-sens pour nous qui sont formés comme ingénieurs. Ce n'est pas une bonne affaire, là. O.K.?

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Quand on augmente les tarifs, on va les augmenter pour tout le monde. Alors, nos alumineries ne seront plus compétitives. On n'aura plus d'avantages par rapport à eux à ce moment-là. Vous allez perdre vos clients, mon vieux! Pardon, monsieur, vous allez... C'est vrai, là! Est-ce qu'on ne va pas en même temps, ce faisant, en augmentant les tarifs avec un objectif de rembourser la dette, est-ce qu'on ne va pas mettre en péril justement le revenu des hommes et des femmes qui travaillent dans des industries comme la vôtre?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Non, mais j'ai dit à madame «pour les consommateurs», je n'ai pas dit «pour l'industrie». Alors, excuse-moi, hein!

Mme Dionne-Marsolais: Ah! Bien, les industries sont des consommateurs.

M. Kenny (Brian): O.K. Non, mais ça, c'est... Alors, il faut une stratégie au niveau du Québec. Alors, c'est une stratégie de développement industriel, comme auparavant mentionné, puis qui est répercutée sur Hydro-Québec, donc tout ça... Alors, il faut établir la stratégie.

Moi, je crois personnellement que des compagnies comme Alcan ou Alcoa ou Hydro, alors Norsk Hydro, ne sont pas contre la notion d'une augmentation dans le temps, mais ils veulent que ce soit préétabli, vous savez, pour qu'ils peuvent planifier. Car, comme mentionné, les sommes qu'il faut investir dans les alumineries sont colossales. Alors, le projet à Baie-Comeau, si je me souviens, était... c'est un projet de modernisation, c'était de 700 millions, 800 millions de dollars pour la modernisation. Donc, avec ces sommes, qui sont difficilement disponibles sur le plan équité ou dette, alors tout le monde qui sont impliqués, bien ils insistent à voir des positions très claires dans la...

Mme Dionne-Marsolais: Dans le temps.

M. Kenny (Brian): Oui, sur 20 ans, disons, O.K.? Donc...

Le Président (M. Bachand): Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Dans la compétition farouche, là, qui courtise les entreprises de ligues majeures, que vous avez identifiée, là, vous avez le Moyen-Orient, vous avez l'Afrique du Sud. Est-ce que... On entend souvent... on se fait dire souvent que la qualité du réseau ou de l'onde électrique, en Afrique du Sud ou en Russie, n'est pas comparable avec celle du Québec. Est-ce que c'est faux ou c'est vrai, ça?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

n(17 h 10)n

M. Kenny (Brian): C'est peut-être vrai ou c'est peut-être faux, mais ça n'empêche pas que les alumineries fonctionnent. O.K.?

Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que... Avec une caractéristique comme ça, est-ce que les alumineries sont aussi performantes?

M. Kenny (Brian): Non. Ça fait... si vous permettez, monsieur...

Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Kenny. Excusez-moi.

M. Kenny (Brian): Non, ça fait que, si... comment ça fonctionne, l'aluminerie? S'il y a un coup de téléphone d'Hydro-Québec à Alcan ou Alcoa en disant que, d'ici 8 heures, il y aura une coupure d'énergie, ça va, alors ils peuvent vider les cuves, hein. Le problème arrive s'il y a une perte soudaine et que l'électricité ne revienne pas à l'intérieur de... c'est trois à quatre heures, hein. Dans ce cas, alors le métal dans les cuves gèle, et puis... Il y avait eu un incident comme ça chez Alcoa. Alors, le réseau d'Alcoa à San Luis de Potosi, au Brésil, ça a coûté 30 millions de dollars pour les réparations. C'est grave, hein?

Donc, ce n'est pas la fiabilité et...

Mme Dionne-Marsolais: L'inaccessibilité.

M. Kenny (Brian): Si le réseau est bien géré mais que l'électricité est un peu fluctuante, ce n'est pas grave, à condition qu'il y ait un préavis. S'il y a des pertes... s'il y a des pertes de tension pour des brèves périodes, ce n'est pas grave. S'il y a une perte de jus alors pour les cas... c'est grave, donc. Selon mes connaissances, en Afrique du Sud et en Russie, bien ça fonctionne, il n'y a pas de tels incidents ou des problèmes, vous savez, plus que dans d'autres pays. Alors, c'est... O.K.?

Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: J'ai parlé... Je vois que vous travaillez en Norvège, et on parle de la Norvège. C'est toujours surprenant pour nous d'apprendre que les pays nordiques, qui sont aussi développés que nous finalement, construisent de nouvelles usines d'aluminerie.

Ma question est la suivante: Est-ce qu'ils vont faire aussi de la transformation là-bas, première ou deuxième transformation, ou si c'est une aluminerie pour faire des lingots?

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Bien, il y a une chose qu'il faut comprendre alors. Puis, nous, on n'est pas des producteurs ni d'aluminium ni de produits secondaires, mais il faut comprendre une chose, que presque tous les profits d'Alcan, Alcoa, etc., se dégagent dans la partie primaire. Les autres parties sont très difficiles. Il y a... le retour sur l'investissement est très difficile. Par exemple, les laminoirs, ça coûte une fortune, puis le retour sera 5 %, 6 %, 7 %, qui n'est pas intéressant. Alors, en Norvège, à Mosjoen, il y avait une ancienne opération de Söderberg qui a été modernisée il y a trois ans. C'était bien fait, ça tourne bien. Maintenant, on installe une usine de production d'anodes, qui sont les plus importantes productions d'anodes sur le plan mondial, ça va produire jusqu'à 300 000 tonnes par année d'anodes. Les anodes sont destinées à l'usine sur place et à la nouvelle usine en Islande. Et c'était un projet, discuté à l'époque, entre Alcoa et le gouvernement du Québec et la SGF; il y avait même une entrée devant être installée, je ne sais pas, à Lauralco, mais, à cause des décisions prises, alors c'est rendu là. O.K.?

Le Président (M. Bachand): Mme la députée, oui, allez-y.

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Bon. En fait, ce que vous nous dites, c'est que, si on ne prend pas des décisions dans une période de temps donnée, les investisseurs peuvent aller ailleurs, et, aujourd'hui, les occasions d'affaires existent également ailleurs, à l'intérieur des plages de tarifs qu'on ne pourrait avoir ici.

Le Président (M. Bachand): M. Kenny.

M. Kenny (Brian): Oui. Il y a une fenêtre d'opportunité pour les projets, puis les investisseurs s'impatientent alors, évidemment, jusqu'à un certain moment, mais finalement il faut prendre acte, il faut décider quelque chose, et puis, s'il n'est pas possible de régler à l'intérieur de... je ne sais pas, je ne dis pas juste le Québec, alors ça arrive ailleurs évidemment, mais, s'ils ne sont pas en mesure de régler quelque chose, noir et blanc, avec un pays ou un producteur d'électricité, bien ils décident autrement. Alors, c'est ça, la nature des choses.

Le Président (M. Bachand): Allez-y en dernière question, Mme la députée.

Mme Dionne-Marsolais: Dernière question. D'accord. Est-ce que vous savez, je ne sais pas si vous pouvez nous le dire, mais quel est le coût du kilowattheure en Norvège?

M. Kenny (Brian): Excuse-moi, hein?

Mme Dionne-Marsolais: Quel est le coût du kilowattheure pour la production de l'aluminium, en Norvège, ou d'anodes, là, ce que vous dessinez là-bas, ce que vous construisez là-bas?

M. Kenny (Brian): Vous savez, on ne connaît pas les détails des contrats entre nos clients et les producteurs.

Mme Dionne-Marsolais: Non?

M. Kenny (Brian): Mais je peux vous dire une chose, que, nous, on a des modèles économiques puis on utilise dans la fourchette de 0,018 $US à 0,025 $US, sur la fourchette.

Mme Dionne-Marsolais: 0,018 $, 0,025 $.

M. Kenny (Brian): Excuse.

Mme Dionne-Marsolais: 0,018 $US, 0,025 $US?

M. Kenny (Brian): Oui, oui.

Mme Dionne-Marsolais: C'est ça? O.K.

M. Kenny (Brian): Oui, oui, oui.

Le Président (M. Bachand): M. Kenny... Malheureusement, Mme la députée de Rosemont, c'est tout le temps qu'on a à votre disposition.

M. Kenny, M. Filion, il nous reste, au nom de la commission, à vous remercier infiniment, et on vous souhaite un bon retour chez vous. Merci d'être venus à la commission.

Je vais inviter Mme Margaret Kraenzel et M. Eric Chouinard à prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bachand): Alors, nous allons reprendre rapidement. Donc, madame... M. Chouinard, dites-moi si j'ai bien prononcé le nom de votre collaboratrice.

Mme Margaret Kraenzel
et M. Eric Chouinard

M. Chouinard (Eric): Parfait.

Mme Kraenzel (Margaret): Très bien.

Le Président (M. Bachand): O.K. Donc, Mme Kraenzel et M. Chouinard, bienvenue à notre commission. Vous connaissez un peu les règles de la commission: 20 minutes pour votre présentation, et, de part et d'autre, il y aura des questions de l'opposition et du côté ministériel.

Merci de venir à cette commission-là, et je vais vous prier, M. Chouinard, de présenter donc votre collaboratrice. Allez-y, monsieur.

M. Chouinard (Eric): Merci. Merci pour l'invitation. Margaret Kraenzel, ma conjointe, est biologiste et c'est elle qui va surtout présenter le document, le mémoire qu'on a préparé, puis je vais conclure un petit peu, par la suite, en ajoutant quelques commentaires supplémentaires.

Moi, personnellement, mon nom est Eric Chouinard. Je suis dans le domaine de l'aventure touristique, et aussi je m'occupe dans plusieurs dossiers environnementaux dans ma région, aussi en lien avec l'association Aventure écotourisme Québec, qui est notre organisme professionnel au niveau du tourisme d'aventure. Ça fait sept années que je suis impliqué à ce niveau-là. Donc, je connais un peu le côté touristique, qui est notre domaine, je dirais, le plus connu ou dans lequel on travaille. Ça fait que je vais laisser Margaret commencer. Merci.

Mme Kraenzel (Margaret): O.K.? Alors, je vais faire un survol de notre mémoire. Je ne vous lirai pas tout, mais, les points importants, je vais les lire pour nous remettre dans le bain.

Alors, d'abord, je vais commencer avec les enjeux environnementaux liés à l'énergie. Alors, je voudrais parler un peu de changements climatiques. J'ai utilisé, pour cette section-là, des connaissances que j'avais déjà. J'ai fait une maîtrise dans cette... sur cette question-là, les changements climatiques. Puis, aussi, pour préparer ça, j'ai utilisé le livre d'Hubert Reeves. Alors, je vais vous lire ça.

n(17 h 20)n

L'accumulation des gaz à effet de serre dans l'atmosphère, causée par la combustion des combustibles fossiles, menace la stabilité du climat et pose une menace sérieuse pour l'avenir des humains sur le globe. Alors, ce que M. Reeves nous dit, c'est que nos connaissances des systèmes climatiques ne sont pas assez bonnes pour dire exactement qu'est-ce que ça va faire, l'émission des gaz à effet de serre, si on continue à garder le modèle de développement que nous avons maintenant. Il y a des chances que ce ne soit pas si grave que ça, que les humains puissent s'adapter. Mais il y a aussi une chance que ce soit très grave pour les écosystèmes et, dans ce cas-là, pour les humains aussi.

Alors, les manifestations du réchauffement du climat nous sont désormais visibles à divers points sur la Terre, et les scientifiques ne peuvent prédire exactement quelle échelle de grandeur auront les effets de ce réchauffement à l'avenir. Une chose est sûre, plus on émet de gaz à effet de serre, plus les effets risquent d'être importants. Nous pouvons aussi dire que nous trouverons la façon de s'adapter aux changements quand ils s'imposent, parce que nous risquons jusqu'à éliminer les conditions nécessaires pour la survie de notre espèce sur la planète. En tant que nation munie de grandes richesses, il nous incombe de se détourner des combustibles fossiles dès aujourd'hui et de devenir meneurs dans la recherche et le développement de sources d'énergie plus propres.

L'exploitation de pétrole dans le golfe Saint-Laurent a des impacts négatifs potentiels sur la faune marine du secteur, incluant les mammifères marins et les poissons. On sait que c'est un écosystème qui est déjà sous grande pression. On connaît le cas de la morue, bien sûr. Ça nous a affectés beaucoup dans notre histoire. C'est un indicateur que l'écosystème est sous pression. Il y a beaucoup de pêche. Il y a aussi des espèces invasives qui, comme la moule zébrée, commencent à avoir un effet dans cet écosystème-là.

Et également, même, les changements climatiques ont un effet sur le golfe Saint-Laurent. L'année passée, il y a eu un rapport scientifique, qui a été fait à l'Institut Maurice-Lamontagne, qui a démontré que dans les dernières années il y a une baisse à 70 % de la quantité de krill dans l'estuaire du Saint-Laurent, puis le krill, c'est une espèce qu'on appelle fourragère, qui nourrit plein d'autres espèces. Alors, il y a beaucoup d'espèces de poissons et les baleines qui dépendent du krill, et leur hypothèse était que cette diminution-là était liée aux changements climatiques. Alors, c'est ça, les enjeux environnementaux que je voulais soulever.

Maintenant, notre vision de l'avenir énergétique. Comme la majorité des Québécois, nous appuyons le développement des secteurs de l'efficacité énergétique, éolien. Ce sont des secteurs qui nous permettent d'agrandir notre capacité énergétique sans avoir des impacts négatifs sur l'environnement.

Il y a eu un sondage Léger Marketing qui... ils ont sondé les Québécois, puis c'était leur préférence. Puis, de plus, il y a eu une étude qui nous a démontré que c'était les options les plus compétitives au niveau des prix. Puis il y a aussi des avantages environnementaux: elles ne produisent aucun gaz à effet de serre ou autre pollution atmosphérique et ne dégradent pas les écosystèmes aquatiques.

Alors, en parlant d'efficacité énergétique: avec une éducation bien ciblée, continue, on pourrait réduire les besoins québécois en énergie. Ceci nous permettrait une plus grande marge de manoeuvre pour ne choisir que le développement de filières énergétiques moins polluantes à l'avenir.

Alors, nous, ce qu'on souhaite, c'est que le gouvernement cesse les investissements dans le secteur pétrolier et aussi les appuis dans le secteur privé dans ce secteur-là. Nous croyons que ces investissements ne font que retarder le développement des formes d'énergie nouvelles moins polluantes, et il faut maintenant absolument prendre action pour stabiliser les niveaux de CO2 dans l'atmosphère. On ne peut pas attendre que les industriels le fassent d'eux-mêmes, parce que ce n'est pas qu'une question économique. Le gouvernement doit prendre action non seulement pour la santé de l'économie québécoise, mais également pour la santé humaine et de l'environnement. Ceci entend trouver un équilibre entre tous ces secteurs-là.

Alors, on va parler plus spécifiquement de notre région. La Gaspésie a de la difficulté à se bâtir des assises économiques solides, on le sait. La raison de ce malaise selon nous, c'est la base qui est non durable de la grande majorité des projets que nous avons chez nous. Ils ont toujours gravité autour de l'extraction des ressources naturelles, qui sont finies, qui, une fois que c'est terminé, cette extraction-là, les moulins ou les autres façons d'extraire s'en vont, et nous croyons que le pétrole, ça va faire la même chose. Ce ne sera pas la solution pour l'économie gaspésienne, ça va être quelque chose qui va être mauvais pour l'environnement, puis, aussi, elle ne sera pas là pour les générations à venir. Le pétrole, c'est vraiment limité dans le temps. Alors, on ne croit pas que c'est une forme de développement durable.

Si on parle du secteur éolien, on croit que, si la planification du secteur est faite en consultation avec les autres utilisateurs du territoire, il peut bien cohabiter avec le tourisme, parce qu'il y a déjà eu beaucoup, on pourrait dire, d'inquiétude, en Gaspésie, quant au développement du secteur éolien pour les paysages puis pour les autres utilisateurs. Nous croyons qu'il y a de l'espace pour ça puis nous croyons aussi que ça peut être une option très intéressante pour le développement de l'économie. Ce ne sera pas juste ça, ça pourrait faire partie d'une stratégie de développement durable pour notre région. On croit que la Gaspésie pourrait servir de modèle de ce type de développement là, parce qu'on a vraiment besoin d'innovation, ça pourrait être une place où on implante ces nouvelles idées là.

Pour terminer sur le secteur touristique: en Gaspésie, le secteur touristique, notamment écotouristique, serait appuyé par un développement positif, par l'environnement, tel que l'éolien, tandis que le développement de gisements de pétrole porterait atteinte au potentiel écotouristique de la Gaspésie.

On pourrait peut-être faire le lien avec le projet de Bennett's, dans la côte sud de la baie des Chaleurs, qui, déjà, menace le statut de la baie des Chaleurs, qui fait partie maintenant des plus belles baies du monde. Ça, ça fait partie de l'appel touristique. Si on développe d'une façon qui est négative pour l'environnement, ça porte atteinte au tourisme, surtout à l'écotourisme, qui est un secteur qui n'est pas encore bien sûr développé à son plein potentiel, c'est vraiment quelque chose qu'on veut bâtir.

Alors, en matière d'énergie, nous sommes, au Québec, en extrêmement bonne position pour assurer un accès à une énergie propre aux citoyens du Québec et à nos voisins, pour les générations à venir, avec notre capacité actuelle hydroélectrique, qui est très bonne, et le développement de l'efficacité énergétique et nos gisements de vent. Ce développement peut être intégré au développement durable de nos régions.

Le développement durable ne veut pas seulement dire le développement économique à long terme. Pour assurer un vrai développement durable, le Québec ne doit pas exploiter et explorer le pétrole ni l'encourager ou l'appuyer. Il faut commencer dès aujourd'hui à investir dans les solutions des problèmes environnementaux auxquels nos enfants vont faire face, par exemple les changements climatiques.

Je lisais le plan de développement durable, qui vient de sortir, et, Jean Charest, en présentant ce plan, exprimait le souhait que le plan hisse le Québec parmi les États de l'Amérique du Nord les plus progressifs dans cette matière. Puis, enfin, en réfléchissant aux performances des autres États de l'Amérique du Nord, ce n'est pas très ambitieux, parce qu'il n'y a pas grands États sur ce continent, ici, qui font vraiment bien ce travail-là. Puis, en fait, il faut vraiment... Moi, je crois que le Québec pourrait devenir un leader mondial dans ce secteur-là. C'est ça.

n(17 h 30)n

Il faut passer au prochain point. Alors, c'est ça, moi, j'ai une vision globale de comment le Québec pourrait contribuer au développement durable. Quand je dis «globale», je parle sur l'échelle de la planète. Si on pense à la croissance incroyable des pays asiatiques en ce moment, on sait qu'eux, ils empruntent le modèle que, nous, nous avons utilisé pour se développer de façon économique, puis c'est basé sur le pétrole.

J'écoutais un des reportages de Radio-Canada, puis il y avait un Québécois qui s'était installé en Chine avec une industrie pour faire des parties de moteurs. Puis, pour lui, c'était une occasion incroyable que la flotte de camions, en Chine, était vraiment désuète, il n'y en avait vraiment pas assez, puis il fallait complètement remplacer ça, puis pour lui, c'était une occasion en or. Mais, quand on pense à la biosphère, c'est inquiétant.

Alors, moi, je crois que le Québec pourrait... le rôle du Québec pourrait être d'investir dans l'innovation, dans les nouveaux secteurs d'énergie, puis ces choses-là pourraient être utilisées dans les nations qui sont en train de se développer. Comme c'est montré par l'éolien, si c'est vraiment avantageux, même au niveau des prix, ils vont favoriser ces modes de développement ou ces bases d'économie là qui sont l'énergie.

Alors, moi, je crois vraiment que le Québec devrait investir dans la recherche dans ce secteur-là, très important pour l'avenir énergétique du Québec. Puis peut-être que ça ne paraît pas, dans notre vie de tous les jours, qu'on est riches, mais on est dans les plus riches du monde. Alors, si, nous, on ne le fait pas, il n'y a pas personne qui va investir là-dedans, je crois. Alors, je pense que c'est vraiment... On est là aujourd'hui pour débattre d'une vision pour l'avenir du Québec, une vision de l'avenir énergétique, puis c'est ça que je voulais amener, le potentiel qu'on a, puis que peut-être on devrait essayer de changer le monde un petit peu.

Alors, je vais conclure. Alors, avec les richesses humaines, économiques et naturelles qu'on a, on devrait devenir un vrai leader mondial pour réinvestir dans la recherche d'un meilleur équilibre entre la satisfaction de nos besoins d'un côté, et la santé de nos ressources naturelles et les grands cycles qui les soutiennent. Démarquons-nous comme un peuple qui a détourné l'attention de notre confort de tous les jours pour regarder lucidement les problèmes qui entourent l'humanité, qui sont très grands, qui vont juste devenir plus grands dans l'avenir, si on pense à nos enfants, et se démarquer comme un peuple qui a agi. Je passe la parole à Eric.

M. Chouinard (Eric): Merci. Je ne serai pas beaucoup plus long. Je pense que... Ma première phrase, que j'avais notée, après avoir lu les notes à Margaret, c'est: Que dire de plus?

Le Président (M. Jutras): M. Chouinard, il vous reste cinq minutes. Alors...

M. Chouinard (Eric): Ça va être pas plus que ça.

Le Président (M. Jutras): D'accord.

M. Chouinard (Eric): O.K. Merci.

Le Président (M. Jutras): C'est parce que vous dites: Je ne serai pas beaucoup plus long.

M. Chouinard (Eric): O.K.

Le Président (M. Jutras): Ça va. Allez-y.

M. Chouinard (Eric): Merci. Bon, comme je l'avais noté, je vais... le premier commentaire que j'ai eu lorsque je lisais les notes à Margaret, c'est: Que dire de plus après ce qu'elle vient de dire? Ça reflète très bien ma pensée, on l'a partagée lorsqu'on a composé.

Juste dire... comme je disais, j'étais heureux de venir ici ce soir puis je me demandais, lorsque j'ai analysé ça, j'ai dit: Qu'est-ce qu'on va faire là? Comment ça qu'on est rendus là? Puis comment ça se fait qu'il y a toujours le goût d'aller plus loin, de dire ces choses-là? Je me suis impliqué dans quelques autres... à la commission Coulombe, on a présenté un mémoire, on s'occupe des PGAF dans notre région. Puis, ce qui m'est venu le plus à l'image, c'était de voir, je veux dire...

Moi, un jour, je me suis posé la question: Qu'est-ce que je vais offrir à mes enfants comme futur? Puis j'ai réalisé qu'à notre époque c'est une question qui est beaucoup plus dure à répondre que peut-être voilà... dans d'autres époques, ils se sont posé sûrement les mêmes questions, mais, aujourd'hui, on regarde ça puis on se dit: Mais c'est quand même inquiétant.

Puis, aujourd'hui, je m'en venais ? puis on s'en vient, il fait beau, tout ça ? puis, en rentrant à Québec, je vois l'annonce: Alarme de smog.

Mme Kraenzel (Margaret): Alerte.

M. Chouinard (Eric): Alerte de smog. Ça m'a vraiment frappé. Je suis un ancien résident de Québec, puis je me dis: On est rendus là, c'est ça, l'innovation. On innove, on met des panneaux pour nous avertir qu'on est rendus: Attention, il y a du smog! Là, j'ai presque hésité, j'ai dit: Moi, je ne rentrerai pas à Québec, je pense, ce n'est pas rassurant, je suis avec mon petit bébé, je veux dire, peut-être que je suis mieux de laisser faire. En tout cas, je m'excuse si je fais la joke avec ça, mais, pour moi, l'image était forte, c'était très fort, puis elle m'arrivait à dire: On en est rendus à s'avertir de faire attention à l'environnement; on en est rendus là. Moi, je pense qu'il faut qu'on soit capables... peu importent les partis politiques, peu importe qu'est-ce qu'on pense, il faut avoir une vision d'avenir, il faut être capables de prendre nos culottes maintenant, de dire: Aïe! on a des changements à faire, puis il faut commencer en quelque part. Puis je pense que, d'avoir cette occasion-là aujourd'hui qui nous est offerte, je me dis que c'est peut-être le seul message que j'aimerais enchérir. Moi, je... c'est vraiment dans le but... parce que je ne suis pas... je pense...

Margaret pourrait le dire, je ne suis pas un écologiste, je suis vraiment un père de famille, puis, dans ce sens-là, c'est vraiment pour moi important qu'on trouve des moyens d'assurer qu'aux niveaux environnemental et durable on ait des actions qui vont donner des résultats, peut-être justement dans 20 ans, pas juste d'autres résultats qui disent qu'on aurait dû faire ça. C'est tout.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci pour votre présentation, à tous les deux. Et, maintenant, j'inviterais M. le ministre à échanger avec vous, et les députés ministériels aussi.

M. Hamad: Merci, M. le Président. Je vais vous dire pour commencer, félicitations et bravo! Pour une chose, parce que vous avez pris la peine de préparer le mémoire, de préparer et de présenter vos idées. Évidemment, il y en a plein d'autres qui l'ont fait, mais, une compagnie, même si c'est un bel effort de la compagnie, quand même ils ont un peu plus de moyens que vous, un peu plus, pour préparer ça. Vous, vous avez pris la peine de vous déplacer, en plus, de la Gaspésie, si j'ai bien compris, avec votre enfant. C'est un effort qui mérite d'être souligné et apprécié. Bravo! Vous le faites parce que vous tenez à coeur vos enfants, vous tenez à coeur l'avenir de notre beau Québec et beau Canada, et vous voulez bâtir l'avenir. Alors ça, c'est apprécié, et ça, pour moi, là, ça me touche parce que vous avez fait un effort, et, si tout le monde peut faire ça, comme société, je suis convaincu, ça va porter encore beaucoup mieux.

J'ai beaucoup de questions maintenant, mais je vais laisser mes collègues aussi poser quelques questions. Vous savez, pour partager la richesse, il faut la créer, il faut avoir l'argent, et il ne faut jamais surestimer notre richesse, au Québec, jamais la surestimer. Il y a des années qu'on a pensé qu'on avait assez d'énergie pour répondre au Québec, et maintenant on est dans une position où il faut vraiment faire attention de développer notre énergie.

On a beaucoup de ressources naturelles, on a beaucoup de richesses, au Québec, mais les données, les chiffres que nous avons, au Québec, actuellement en termes de PIB, le produit intérieur brut, nous montrent... Je vous donne un exemple, juste pour montrer notre richesse, au Québec. C'est vrai qu'on est plus riches que beaucoup d'autres pays, mais on peut faire mieux encore. Pourquoi on peut faire mieux? Parce que le PIB, au Québec, actuellement, c'est 240 milliards, pour 7,5 millions de personnes au Québec. Le PIB, au Massachusetts, juste l'État voisin, ici, il est de 340 milliards de dollars américains, pour une population de 6,5 millions de personnes. Ils sont beaucoup plus riches que nous, malgré qu'ils n'ont pas autant de ressources naturelles que nous, ils n'ont pas autant de ressources ou de richesse qui est sur leur territoire que nous. On a l'hydroélectricité, on a les mines, les métaux, on a plein de ressources, la forêt, etc. Évidemment, il faut... je ne dis pas que, demain matin, on rentre puis on enlève toutes ces ressources-là sans penser à l'avenir. Le développement durable, c'est ça, utiliser les ressources dans un esprit d'avenir, aussi maintenir ça dans l'avenir.

Donc, il y a quelque chose aussi, au Québec, actuellement qu'on devrait faire pour continuer à créer cette richesse-là, pour un but: c'est la partager et aussi la garder pour l'avenir, O.K., l'avenir pour nos enfants. Donc, il faut vraiment... selon moi, il ne faut pas surestimer qu'on est riches, trop riches. On n'est pas assez riches, on pourrait encore mieux mais en le faisant d'une façon intelligente, d'une façon responsable. Responsable, ça veut dire développement durable.

Quand vous parlez de... Vous savez que, dans le golfe Saint-Laurent, actuellement, il y a un potentiel de gaz et de pétrole qui correspond, selon les experts, à 25 ans de besoins au Québec. Actuellement, ce qu'on fait, on importe le pétrole, on importe le gaz pour des consommations... actuellement, elles sont là, ces consommations-là, les voitures, l'essence, et vous êtes conscients que, demain matin, on ne peut pas tout arrêter ça. On peut peut-être essayer de trouver un remplaçant à l'hydrocarbure, on peut diminuer l'utilisation du gaz, dans un esprit d'efficacité énergétique et efficacité d'usage, oui, mais il reste qu'il va continuer d'avoir besoin, et actuellement on l'importe. On l'importe puis on le paie, le prix, à partir de la source plus tout le transport chez nous. Et, si on a une ressource comme ça, viable, chez nous, pourquoi ne pas l'utiliser, cette source-là ? de toute façon, elle vient d'ailleurs ? pour le bénéfice de tous les Québécois et les Québécoises? Et, dans le fond, c'est pour évidemment dans un usage... Faire attention à l'environnement bien sûr; ça, c'est aucun doute.

n(17 h 40)n

Alors, qu'est-ce que vous... Puis, en plus, il n'est pas loin de votre région, c'est 400 km, mais 400 km dans l'eau, là, on parle, à peu près. Et évidemment il y aura des impacts positifs, très positifs, économiques, dans votre région, et c'est une région où, vous le savez très bien, elle est... elle vit des conditions difficiles, économiques et sociales, et a besoin d'aide. Alors ça, ça peut amener des retombées intéressantes chez vous et ça peut amener des retombées intéressantes pour le Québec, l'ensemble, créer encore plus de richesse puis la partager. Qu'est-ce que vous en pensez, de ça?

Mme Kraenzel (Margaret): O.K. Ma réponse à ça, ce serait... D'abord, moi, je serais beaucoup plus heureuse si on investissait dans un remplacement, tout de suite, du gaz. Je pense que c'est quelque chose qui est très important. Si tout le monde sur la planète dit: On va s'enrichir sur les réserves qu'on a avant de changer de système, on va avoir un sérieux problème au niveau des changements climatiques. Alors, c'est pour ça que, moi, je suis contre l'exploitation de ce gaz-là qui est là.

Puis aussi, pour le développement de la Gaspésie, comme vous dites, c'est 25 ans. Puis les gens, après, sont laissés avec un environnement qui est en moins bon état, ils n'ont pas des métiers qui vont durer, qu'ils vont pouvoir passer à leurs enfants. Alors, pour moi, je ne crois pas que ce soit... Moi, je crois que la Gaspésie n'est pas en si mauvais état que ça, dans le sens qu'on peut quand même choisir des projets qui sont durables. C'est ça que je dirais.

M. Chouinard (Eric): Je peux échanger. On parle de créer plus de richesse, parce que vous compariez avec le PIB. C'est un peu ça aussi, le débat, de dire, à un moment donné: Est-ce qu'on est obligés d'être aussi riches que tout le monde dans... ou la façon d'être... C'est la façon aussi d'être riches, de s'enrichir. S'enrichir d'une façon durable, c'est peut-être plus payant aussi.

Moi, les projets que j'ai quand je travaille, c'est une entreprise de développement durable qu'on fait, on fait du tourisme d'aventure, l'écotourisme; c'est pour 100 ans, c'est pour 200 ans peut-être, là, les sentiers... ou les randonnées dans des sentiers qu'on souhaite qu'ils vont être encore là dans 100 ans, et on se dit: Nos REER, notre richesse, ça va être ces redevances-là de ce produit-là qu'on développe qui vont se faire. Mais que je sois plus vieux, j'espère que mes petits-enfants, mes enfants vont faire... pouvoir utiliser ces mêmes ressources là.

Donc, c'est toujours... C'est un peu ça, c'est de dire comment qu'on veut... on se compare à quoi, on veut innover. Je pense que créer de la richesse, c'est un objectif qui est tout à fait louable, qu'on peut atteindre, mais c'est comment la créer, cette richesse-là. Nous autres, on dit: Il y a d'autres façons. On dit qu'on peut innover, aller vers des technologies nouvelles, et peut-être qu'on créera la richesse d'une façon durable, et, sur 20 ans, d'ici 30 ans, on aura des résultats beaucoup plus positifs.

Le Président (M. Jutras): Oui, madame.

Mme Kraenzel (Margaret): Est-ce que je peux rajouter quelque chose? C'est que je crois qu'un investissement dans les nouvelles technologies, dans le secteur énergétique, ce n'est pas juste... ce n'est pas une perte d'argent. On va mettre de l'argent, mais ça peut devenir une partie de notre économie. Ça peut être favorable pour nous, pour notre économie, de devenir les premiers qui sortent une certaine façon de faire. Qu'est-ce qu'on va faire après le pétrole? Ça va venir assez rapidement qu'il n'y en aura plus. Alors, si on est là puis on a un prototype puis on a développé une méthode de faire fonctionner notre développement sans le pétrole, bien on va en profiter. Alors, pourquoi pas investir tout de suite?

M. Hamad: On est tous d'accord pour développer des produits de remplacement, faire la recherche et développement, tout le monde est d'accord. On est d'accord pour faire l'écotourisme. Pour amener les touristes chez vous, ça prend des routes, ça prend des aéroports, ça prend quelque chose pour amener ce monde-là. Donc, il faut investir. Ils sont là, mais, quand même, il faut continuer à investir pour l'entretenir, ces routes-là, pour en faire d'autres aussi pour amener du monde, et, pour le faire, ça prend de l'argent.

Pour trouver un produit de remplacement, il faut faire de la recherche et développement. Il faut investir de l'argent pour finalement trouver ça. Donc, pour vivre finalement vous avez besoin... Pour améliorer notre situation, malheureusement on a besoin des efforts de l'argent. Je ne dis pas que notre objectif, c'est être le plus riche; notre objectif, c'est avoir... ah! maintenir notre belle société puis continuer à avoir une belle société qui vit dans un environnement sain, et évidemment faire la lutte contre la pauvreté, aider les gens, aider tout le monde. Mais, pour faire ça, ça prend des moyens. On ne peut pas faire ça en s'assoyant chez nous, on dit: On ne bouge pas. C'est dangereux, puis on attend. Pour investir, il faut qu'on ait des moyens, et les moyens qu'on fait, c'est créer de la richesse, et cette richesse-là sert à avoir un meilleur milieu qui va nous aider, aider nos familles, aider tout le monde pour l'avenir. Alors, on est d'accord pour la recherche et développement, mais, pour...

Parce que je prends votre domaine, c'est le tourisme. Vous êtes dans le récréotourisme, mais, pour amener du monde là... d'abord, les gens qui veulent aller là, il faut qu'ils aient l'argent pour dépenser là. S'ils n'ont pas d'argent, ils ne viendront pas. Ça, c'est le premier élément pour un touriste. Pour qu'ils aillent là, il faut qu'ils aient les moyens et, deux, il faut qu'ils aient aussi, il faut qu'ils aillent... Vous aurez des installations qui permettent à ces gens-là d'apprécier de venir chez vous, parce que le Québec est tellement beau que toutes les régions sont en compétition puis chaque région essaie d'avoir les meilleures installations pour attirer les gens.

Donc, je suis d'accord avec votre idée, mais il faut investir avant pour attirer ces gens-là, il faut avoir les moyens. Si le Massachusetts, aujourd'hui, ils sont riches, c'est parce qu'ils ont fait un peu de richesse, dans les années 1900, par le commerce à l'extérieur, en Chine; puis, cette richesse-là, ils l'ont investie dans la recherche et développement. Ils ont investi dans les hôpitaux, dans l'éducation, et cet argent-là, cet investissement-là amène d'autre argent, aujourd'hui, qui fait en sorte que cet État-là est très riche. Alors, nous... pourquoi pas, nous, on n'est pas capables de le faire? On le fait évidemment, on le fait déjà. Tous les autres gouvernements le font, mais il faut continuer à le faire. Donc, il ne faut pas arrêter le développement, sous prétexte que là ce n'est pas bon puis, là, il faut tout changer. Oui, il faut changer, mais il faut avoir les moyens de changer.

Le Président (M. Jutras): Oui, M. Chouinard.

M. Chouinard (Eric): Je pense... Vous dites: Il faut créer des moyens... créer des façons d'avoir de l'argent pour entretenir nos routes, entretenir nos choses. Nous, ce qu'on dit, c'est que l'argent qu'on met actuellement dans l'exploration pétrolière, qui est quand même de l'argent considérable, on pourrait-u le prendre puis s'en servir pour aller l'investir ailleurs, dans d'autres façons de... dans d'autres recherches? L'exploration qui va se faire, il y a des sous et des impacts.

Mme Kraenzel (Margaret): Moi, ce que j'ajouterais, c'est qu'on parle.. on dit, tous les deux, qu'on a besoin de développement. C'est la forme de développement. On est d'accord qu'on a besoin de richesse pour continuer notre système. On ne veut pas arrêter toutes les autos demain. Ce qu'on veut faire, c'est d'intégrer des nouvelles façons de faire, à mesure qu'on est capables de le faire, mais commencer tout de suite. Puis aussi, arrêter tout de suite d'investir dans les secteurs qu'on voit, qui sont négatifs, qui vont nous amener... pas nous amener plus près de notre but, ils nous éloignent de notre but de développement durable.

Le Président (M. Jutras): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Merci, M. le Président. Merci de votre présence. M. Chouinard, votre anecdote, que vous avez prise, tantôt, par rapport à l'alerte au smog, vous faites bien de l'utiliser, parce que c'est comme ça qu'il faut conscientiser les gens. Puis je peux vous dire même pire que ça, moi, j'ai déjà été dans une ville, à un moment donné, que je pensais entendre Orson Wells. À la radio, ils annonçaient, ils disaient: Alerte numéro 1. Ils disaient à tout le monde de rentrer dans les maisons et de ramasser leur linge sur la corde. C'était à Flin Flon, au Manitoba, à cause des retombées acides de la fonderie. O.K.? Alors... puis ça, ça date de 1990, alors... puis je peux vous dire que c'en est épeurant, quand tu entends ça à la radio. Alors donc... puis c'est ça qu'il faut faire pour conscientiser les gens, puis reprendre ce message-là. Donc, ça, je vous invite à le continuer.

Concernant l'énergie éolienne de la Gaspésie, vous en parlez, c'est très important. Puis qu'est-ce qui est intéressant à la commission parlementaire aussi, on entend des experts. On sait que l'éolien, peut-être, ce serait 10 %, 15 % de toute la capacité énergétique du Québec. Les experts nous disaient: Pour qu'elle soit efficace, il faut la répartir sur le territoire du Québec, pas toute à la même place, parce qu'il ne vente pas tout le temps, à la même place, la même journée. Donc, on apprend des choses intéressantes.

Moi, il y a un point, que vous avez mentionné tantôt, concernant les inquiétudes que les éoliennes ont soulevées en Gaspésie. Je sais qu'on en avait entendu parler un peu plus tôt, mais parlons-en donc un peu, s'il vous plaît, des inquiétudes que vous avez entendues, par rapport à la population, sur la venue des éoliennes puis des nouvelles lignes de transport en Gaspésie.

Mme Kraenzel (Margaret): Je dirais que le point que, moi, j'ai entendu, c'est que les gens s'inquiétaient pour la qualité des paysages, parce qu'on sait que ce qui attire les gens en Gaspésie, c'est la qualité des paysages. Alors, c'est sûr qu'il y a un équilibre entre les deux. Il faut trouver des places où les installer où ça ne dégrade pas la qualité visuelle du paysage gaspésien.

M. Chouinard (Eric): Ou le moins possible.

Mme Kraenzel (Margaret): C'est ça, le moins possible, oui.

M. Bernard: Puis, je sais qu'en suivant le débat il y a des municipalités entre autres qui ont dit: O.K., pas à moins de 1 km des municipalités, aussi, pas visibles des côtes, etc. Est-ce que ces mesures-là satisfont les gens, de manière générale?

Mme Kraenzel (Margaret): Personnellement, maintenant que le débat est... À Matane, elles ont été installées ça fait un bout, alors, maintenant, c'est installé puis je ne connais personne maintenant qui est malheureux, qui sont là.

n(17 h 50)n

M. Chouinard (Eric): Je pense que ce qui pourrait être dit, c'est que je pense qu'on comprend... On parlait tantôt de faire des choix, puis on comprend qu'on ne peut pas être dans le meilleur des mondes, et on aura le choix à un moment donné de qu'est-ce qu'on veut comme type d'énergie: est-ce qu'on préfère avoir des éoliennes ou avoir des puits de pétrole? Je pense que, les gens, c'est clair qu'ils veulent avoir les éoliennes dans leur cour plutôt que des puits de pétrole. Ça, d'après moi, c'est un des sentiments forts qu'on retrouve en Gaspésie.

Puis, moi, je peux vous dire, par le réseau de travail... je fais affaire avec l'ensemble de la Gaspésie, avec les Îles-de-la-Madeleine, on est en réseau et on se parle, et c'est une de nos craintes. Et on fait tellement d'efforts. Parce que, quand on parle de développement durable, dans le domaine de l'aventure puis du tourisme, en général au Québec il y a eu beaucoup de travail de fait. C'est en progression, c'est en émergence. Et on est sur nos plans, on travaille, on investit, on avance, mais souvent une de nos craintes... C'est justement, nous, on parle souvent avec le ministère de l'Environnement, puis on dit: Parlez-vous entre ministères pour faire une stratégie qui va se suivre. Parce que, nous, on est enlignés dans une façon, mais, dans la forêt, ce n'est pas nécessairement enligné de la même façon, puis là, l'énergie, au niveau pétrolier, ce n'est pas nécessairement les mêmes visions.

Ça fait que, là, c'est quel plan qu'on fait, là? Si on fait juste du pétrole, dites-nous-le, on va aller développer ailleurs. Mais, si on a décidé que c'était ce secteur-là... Puis je regarde les créneaux d'excellence, les programmes ACCORD dans nos régions, plusieurs millions qui s'en viennent, tu sais, on investit, puis c'est des projets qui vont amener des retombées à long terme. La SEPAQ, les «ecolodges», c'est des projets qui vont amener des retombées sur 20 ans, 30 ans. Est-ce qu'on va aller bousiller ça? Je pense que c'est à ça qu'il faut penser aussi. Puis je pense que...

Vous parliez tout à l'heure de feeling ou de ce que les gens en pensent, bien je pense qu'on s'est dit: Bien, aïe! on serait fiers d'avoir des éoliennes puis démontrer qu'on est dans un environnement sain, puis, des éoliens, c'est une façon d'être dans un environnement sain. Je pense que c'est un impact positif pour la commercialisation. Puis ça, je pense qu'unanimement dans la population, c'est le constat qu'on dit: On aime autant en avoir, des éoliens, que d'autre chose.

Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. M. Chouinard, Mme Kraenzel, bonjour. Moi aussi, je vais vous parler en tant que père de famille, parce que, tantôt, votre exemple nous a touchés un peu. Moi aussi, je suis un père de famille, j'ai quatre petits bonhommes, puis souvent les questions qu'on se pose, c'est: Comment on va arriver à mettre en place les mécanismes qui vont leur permettre ? moi, je viens de la région du Saguenay ?Lac-Saint-Jean ? qui vont leur permettre, je pense, de pouvoir travailler chez nous, vivre, avoir des enfants et pouvoir profiter de la belle région qu'on a? Et souvent la réponse n'est pas toujours évidente, hein?

Bien sûr qu'on parle beaucoup de création de richesse. On peut d'une part attendre que ceux qui occupent des emplois prennent leur retraite et qu'une certaine quantité de gens puissent les remplacer, ou on fait du développement économique et on essaie de créer de la richesse pour créer des emplois. Et, moi, je suis profondément convaincu qu'en utilisant les ressources naturelles, particulièrement dans ma région mais dans l'ensemble des régions du Québec, on va être capables de créer cette richesse-là.

Maintenant, à quel prix on le fait et comment on le fait? Et là, tout le contexte du développement durable prend son importance. Et la définition, pour moi, du développement durable, c'est de faire en sorte que nous puissions faire du développement économique avec les ressources qui nous entourent, en créant de la richesse mais en même temps en assurant la pérennité de ces ressources-là pour les générations qui nous suivent. C'est ça, le développement durable.

Alors, on parle... vous avez parlé de pétrole tantôt; moi, je veux parler d'hydroélectricité, parce que je pense qu'il y a un potentiel énorme que nous avons sur notre territoire, c'est bien sûr l'hydroélectricité. L'hydroélectricité est une ressource qui produit de l'énergie non polluante, renouvelable, verte, qui va directement dans la, je pense, dans la philosophie que vous défendez. Alors, à votre point de vue, est-ce que l'aspect de faire du développement important dans l'hydroélectricité est une alternative importante pour le Québec, pour faire du développement économique et créer de la richesse dans un contexte d'environnement sain?

Mme Kraenzel (Margaret): O.K. Je crois qu'il y a toute une gamme de formes d'énergie qui ont toute une gamme d'impacts sur l'environnement. On pourrait dire que l'éolien, c'est très faible, le pétrole, c'est très fort, puis l'hydroélectricité, pour moi, c'est entre les deux. Parce que c'est vrai qu'une fois que c'est installé, c'est vert, puis ça, c'est très important pour l'atmosphère, mais les impacts sur l'habitat aquatique sont énormes.

Alors, je crois que, si on cible... On a déjà développé beaucoup de rivières. Je crois que, si on veut développer davantage, je serais pour le développement de gros projets, pas de beaucoup de petits projets sur des petites rivières, parce qu'à chaque fois qu'on fait ça sur une rivière, ça affecte la rivière. Ce serait ça, ma réponse.

M. Blackburn: Il y a un élément que vous apportez dans votre réponse qui est intéressant. Mais, là où on peut apporter un bémol à ça, si je prends le lac Saint-Jean, le lac Saint-Jean qui, à mon avis, est un des plus beaux lacs au Québec, c'est un lac artificiel qui a été formé de par des barrages, et, à l'intérieur de ce lac-là, on a un saumon d'eau douce qui s'appelle la ouananiche. Donc, je comprends qu'il peut y avoir souvent des impacts sur la faune, mais, en même temps, les impacts ne sont pas toujours négatifs, et c'est là que souvent des gens comme vous peuvent nous donner un éclairage important pour que nous puissions nous faire une thèse importante.

Et j'apprécie la réponse que vous nous avez donnée par rapport au fait du potentiel du développement hydroélectrique. Moi, je pense que c'est un éclairage important, venant d'une personne comme vous, soucieuse de l'environnement, de nous dire que le développement hydroélectrique important, je pense, qui est une bonne alternative pour le Québec, puis c'est bien.

J'aimerais juste pour poser une dernière petite question, M. le Président...

Le Président (M. Jutras): Bien, oui, oui, très courte.

M. Blackburn: ...pour l'éolien, parce que vous êtes quand même spécialiste dans le changement climatique, et j'écoutais, l'autre jour, une émission qui mentionnait que le courant, les corridors de vent vont changer, compte tenu des changements climatiques.

Lorsqu'on sait qu'on installe des parcs éoliens, et ça prend une certaine quantité de vent, une certaine vitesse, une certaine hauteur, et que, si on fait des investissements importants dans l'éolien dans certains secteurs, il faut s'assurer que le vent va être là pendant encore plusieurs années. Est-ce que vous avez des données, vous, sur les changements de corridors des vents? Bon.

Mme Kraenzel (Margaret): Non, je n'ai pas de données, là-dessus.

M. Blackburn: Ah...

Mme Kraenzel (Margaret): Moi, quand je dis: J'ai étudié là-dedans, j'ai fait ma thèse au Panama sur le teck, sur l'arbre... les plantations de teck, alors je ne connais pas... je n'ai pas fait de modèle de climat... Mais, oui, c'est un bon point.

M. Chouinard (Eric): Si je peux répondre à ça. Moi, ce que je dirais, ce qui est peut-être l'avantage de l'éolien, c'est que, quand le vent changera de place, on les dépine puis on va les piner ailleurs, on les remet dans le corridor du vent, je veux dire.

Mme Kraenzel (Margaret): Il faut voir les conséquences... développement en conséquence. Oui.

M. Chouinard (Eric): ...c'est une infrastructure qui n'est pas si complexe... demande quand même des techniques pour le déplacer, puis tout ça, mais je pense que ce n'est pas comme un barrage; quand il n'y a plus d'eau, là, que là il n'y en a plus, là. Je veux dire, je ne donne pas... ce n'est peut-être pas le bon exemple, mais c'est pour dire que je pense que, par rapport à cet élément-là, moi, ma réflexion, lorsque j'entendais ça dans les médias, je me disais: Bon, c'est ça, on tassera les éoliens, on les mettra dans le vent. Je me dis: Il y a sûrement moyen... C'est peut-être un peu naïf comme vision, mais je me dis: En quelque part, c'est quand même plausible aussi, et je me dis: Si on arrive à cette problématique-là, je pense qu'il y aura sûrement des alternatives du genre qui pourraient être regardées.

Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Mme la députée de Rosemont.

Mme Dionne-Marsolais: Merci. Alors, bienvenue et merci de vos réflexions, qui nous donnent une perspective quand même globale et intéressante, et il faut toujours garder à la mémoire ? malheureusement, c'est la réalité ? qu'on a un voisin au sud qui est beaucoup plus difficile à gérer par rapport à nos priorités, surtout quand on réfléchit dans une optique globale. Je retiens donc que vous priorisez la recherche et le développement, autant, si je comprends bien, en efficacité énergétique qu'en énergie, en électricité, en somme.

Ma petite question, c'est qu'aujourd'hui on a eu des gens de la fédération de l'entreprise indépendante qui sont venus nous dire qu'il fallait augmenter les tarifs d'électricité pour créer un fonds énergétique pour éponger la dette du Québec. Et, vous qui êtes jeunes et qui allez éventuellement prendre la relève, qu'est-ce que vous pensez de cette réflexion-là, de cette recommandation de leur part?

M. Chouinard (Eric): Si je peux m'exprimer, moi, je pense que c'est peut-être des alternatives à regarder. Je vais vous avouer que je ne suis pas un expert non plus, puis vous me posez la...

Mme Dionne-Marsolais: Nous non plus. Alors, soyez bien à l'aise.

M. Chouinard (Eric): C'est ça. Mais, moi, je dirais qu'il faut... Dans des cas comme ça, moi, ce que je souhaite le plus, je dirais que, si c'est une activité qui aurait lieu ou si en même temps on appliquait ce processus, s'assurer que l'argent est bien utilisé, c'est peut-être plus là, le défi.

Dans toutes les sources qu'on ira chercher l'argent, de toutes les manières qu'on pourra aller chercher de l'argent pour développer, innover dans le secteur, il faudra s'assurer d'être rigoureux puis que nos investissements sont sérieux ou que les choix d'étude soient sérieux. Je pense que c'est toujours une bonne gestion qui est souhaitée dans... Moi, si je paie comme citoyen, puis l'utilisation de mes taxes, je pense que c'est toujours la vision.

Mme Dionne-Marsolais: Merci.

Le Président (M. Jutras): Oui, Mme la députée de Matapédia.

n(18 heures)n

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, d'autant plus que vous venez de ma région, de Matane, que ma famille et plusieurs membres habitent dans la MRC de Matane. Et je suis très sensible à vos propos, puis en même temps, vous savez, je veux vous poser des questions mais aussi vous faire des remarques en ce sens que, quand on est député, quand on est parlementaire ? et je suis sûre que c'est votre cas aussi ? des gens qui veulent vivre en Gaspésie, rester chez eux et ne pas s'expatrier comme beaucoup des nôtres sont obligés de le faire, on est toujours partagés entre: Est-ce que je fais la bonne chose en allant faciliter et favoriser un type de développement par rapport à un autre type de développement? Alors, ne serait-ce que de venir ici, au Parlement, venir nous dire: Réfléchissons donc à comment est-ce qu'on fait nos choix de société, on a besoin de vous pour faire ça. Puis je pense que, le ministre et les parlementaires, c'est rafraîchissant de vous entendre.

Puis, en même temps, moi qui suis une députée d'un comté où ce n'est pas facile de faire du développement ? on partage d'ailleurs la même association touristique de la Gaspésie, dont le siège social est à Sainte-Flavie, dans ma circonscription... Et, moi, j'ai... Vous savez, quand j'ai décidé d'être députée, en 1994, et j'ai été candidate en 1989 dans Gaspé, alors je les ai toutes visitées, dans Gaspé, les entreprises forestières. Chandler, qui est fermée, je l'ai visitée. Murdochville, la mine qui est fermée, je l'ai visitée. Puis, vous voyez, des années plus tard, on voit ces effets que ça peut avoir. Puis, en même temps, moi, j'ai combattu comme une acharnée avec des gens de mon comté pour aller chercher... doubler la superficie d'Uniboard dans ma circonscription, qui est une usine de panneaux mélamine.

Et quand je lis vos propos... vous dites: «La base des activités économiques ici ont été traditionnellement de nature éphémère ? pêcheries, exploitation forestière, exploitation minière...» Mais il ne faut pas oublier que pendant des années, à Murdochville, il y a du monde qui ont vécu là. C'est dramatique que la mine ait fermé, mais ça a une durée de vie, une mine. Des ressources, ça a de tout temps... Et puis, moi, à un moment donné, il faut... On est en 2005, et il faut penser que de tout temps l'homme ? l'homme étant l'espèce humaine ? a agi sur la nature. Alors, comment vous conciliez de ne pas toucher, à quelque part, ou de ne pas trop toucher, ou de faire des choix de société?

Et puis ma question, là, j'arrive dans mes questions. Cette semaine, il y a un M. Miller, de Corridor Ressources, qui est venu nous dire qu'il y avait des fuites de pétrole ? hein, j'ai bien compris ça? ? dans le Old Harry, là, que...

Une voix: ...

Mme Doyer: Pardon?

Le Président (M. Jutras): Pendant le transport, dit-elle.

Mme Doyer: Pendant le transport, pendant le transport. Mais il y a des... Moi, dans mon comté, j'ai du gaz naturel, j'ai du pétrole.

Mme Dionne-Marsolais: Non, non, pas pendant le transport, juste naturellement.

Mme Doyer: Naturellement, c'est ça. C'est bien ce que j'avais compris. Naturellement, dans le golfe, là où est-ce que bien des gens ne veulent pas qu'on aille toucher à ça, bien, je regrette, il y a des fuites naturelles.

Alors, si l'être humain intelligent que nous sommes, l'espèce humaine intelligente, si c'est bon pour Terre-Neuve, pourquoi ce n'est pas bon pour nous? Si c'est bon dans le golfe du Mexique... Quand, moi, je suis allée à la Riviera Maya... Il y a des puits de pétrole là. Pourquoi?

Et on est en compétition. Moi, je veux que le monde travaille chez moi, je ne veux pas qu'il y ait des jobines, je veux... Il y en a, puis tant mieux s'il y en a qui veulent faire ça, mais je suis tannée de tout ça. Je veux du vrai développement chez moi. Je veux des salaires qui ont de l'allure, puis qu'on pense qu'on peut s'acheter une maison, pas en louer une jusqu'à notre mort puis qu'elle ne nous appartienne pas.

Je sais que je fais un discours un peu comme ça, là, mais, moi, là... Puis, en même temps, je respecte vos propos puis je... En même temps, vous nous amenez une dimension. Donc, moi, il me semble qu'on serait peut-être mieux d'aller canaliser ce pétrole-là ou d'aller le chercher puis d'en faire un plus pour notre économie, puis en même temps de façon intelligente, de ne pas bousiller notre environnement.

Puis, on le sait, quand ils brûlent des déchets au Nouveau-Brunswick puis que les émanations, ça s'en vient dans la magnifique baie des Chaleurs, puis qu'il faut protéger Miguasha... Puis faire ça intelligemment, quand on fait de l'exploration minière. Mais, moi, je peux-tu vous dire que, s'ils en trouvent, du gaz naturel dans mon comté, puis qu'on peut faire de l'argent avec ça, je n'irai pas avec ceux qui vont avoir des pancartes pour dire: Ne touchons pas à ça.

Puis, moi, là, je veux vous demander aussi votre opinion sur les petits barrages, les minicentrales, parce que plusieurs sont venus... Boralex, à Rimouski, ça a été accepté, ça n'a pas fait de tollé, mais, Les Basques, on a vu Mikaël Rioux qui s'est suspendu ? un autre Bas-Laurentien ? il s'est suspendu dans les airs pour... puis il a aspergé notre président d'Hydro-Québec d'eau, n'est-ce pas, ici, dans cette auguste institution.

Alors, ma question, elle est fondamentale: Comment on fait pour rester chez nous, vivre chez nous dignement et avoir un avenir justement pour nos enfants, nos petits-enfants? Moi, j'en ai trois ? 10 ans, six ans et cinq ans ? puis je veux que, quand... Un an et demi. Et, quand ils vont aller s'instruire, je veux qu'ils reviennent chez nous, puis je veux même qu'ils s'instruisent chez nous. Moi, j'ai des cours de conduite de machinerie industrielle, de fabrication assistée par ordinateur, qui se donnent, puis les jeunes qui vont suivre ça, je veux qu'ils travaillent chez moi. Comment vous conciliez tout ça? Puis c'est légitime, ce que vous pensez, mais il faut concilier les usages. Voilà.

Le Président (M. Jutras): Quelle est votre réponse, M. Chouinard?

M. Chouinard (Eric): C'est sûr que c'est un débat qui n'est pas facile. Moi, quand je regarde, dans mes amis ou dans les pères de mes amis qui arrivent à ne pas finir... finalement à arriver à même une retraite, parce que, dans l'industrie forestière, ça va plus vite que prévu puis... Je me dis: À un moment donné, il faut être capable quand même de faire des choix.

Vous parliez tantôt de choix de développement. Moi, si c'est des choix qui sont bien faits, qui sont durables, c'est ça que je pense qui est la priorité. Est-ce qu'on fait des actions comme on l'a presque souvent toujours fait? Si on regarde les constats, veux veux pas, on se dit: Bien, ça n'a pas toujours été bien planifié, ça n'a pas toujours été... les retombées pour le milieu n'ont pas toujours été... il n'y en a pas toujours eu assez. Si on regarde Murdochville, je comprends que des fois on utilise des projets, puis on va exploiter un endroit, puis il faut que ça déménage. C'est une façon de voir les choses. Mais est-ce qu'on ne peut pas justement essayer d'en faire le plus possible dans des choix qui vont nous donner... qu'à long terme on n'aura pas à refaire le même exercice, ou à rechanger notre mode de vie, ou à aller s'exiler justement parce que la ressource sera exploitée à son maximum? Si on l'a bien exploitée... On voit des exemples au niveau de la forêt. Justement, de plus en plus, il y a des endroits qui... on peut arriver à trouver l'équilibre dans notre économie.

C'est ça qui est le débat, puis je pense qu'il faut faire attention de prendre... de toujours attendre, puis de... Bien, on a quand même une occasion: le gaz, il déborde, on va bien l'utiliser, il est là. Oui, mais est-ce qu'on ne pourrait pas... Il va déborder encore plus tard, aussi. On pourrait-u se donner des... commencer à voir, à faire ça autrement, puis miser sur ce choix-là, je dirais, comme un plus pour notre région, un plus qu'on parlait justement par rapport à une vision touristique, mais par rapport à une vision de dire qu'on vit autrement, on propose d'autres modes de vie? Moi, en tout cas, c'est...

Vous parliez tantôt de nos... ? juste pour rehausser un point ? vous parliez des minicentrales. À ce niveau-là, moi, j'ai de la misère à me prononcer, je vous avouerais. Je suis impliqué avec Aventure écotourisme Québec. Dans la démarche à ce niveau-là, j'appuyais quand même pas mal mon association à ce niveau-là, surtout pour le côté, encore là, de la qualité des sites. Je pense qu'il y a quand même des compromis là-dedans qui peuvent être faits, mais ce qui pourrait être intéressant, c'est des fois de voir les complicités entre l'industrie touristique et l'hydrographique. Il y a peut-être des complicités qui pourraient se développer, puis là on pourrait être gagnant-gagnant dans certains cas.

Puis, un dernier point, vous avez parlé de nos voisins puis des émanations qui viennent du Sud. Pour moi, c'est un manque de respect énorme. On parlait de la Semaine sans fumée. Actuellement, c'est une autre image que j'ai. On est dans la période de sensibilisation pour la fumée dans notre environnement. Mais, moi, j'ai une image: je suis en Gaspésie, je suis sur le bord de la grève, puis...

Une voix: ...

M. Chouinard (Eric): ...c'est ça, l'image que j'ai, là, puis là j'arrive à Québec... Je veux dire, ça va-tu cesser à un moment donné? On va-tu trouver des façons qui vont faire qu'on va être plus en harmonie avec notre environnement? Puis je pense que... Est-ce qu'on peut innover? Je pense que c'est ça, le défi. On est là ce soir un peu pour philosopher autour de ça, c'est un peu ça, ma réponse.

Mme Kraenzel (Margaret): Moi aussi, j'aimerais...

Le Président (M. Jutras): Oui, oui.

Mme Kraenzel (Margaret): ...répondre. Je dirais que ce que vous avez posé, c'est vraiment tout le débat qui entoure le développement durable, comment est-ce que l'humain se développe, mais aussi qu'on prend soin de notre santé ? de notre santé ? de nos corps, puis aussi d'être sûrs que toutes les ressources qu'on utilise pour notre développement vont toujours se renouveler. Puis ces choses-là sont en danger. Puis c'est pour ça qu'il faut qu'on regarde comment est-ce qu'on développe.

Je dirais... Pour moi, une réponse, c'est la recherche et l'innovation, de trouver des choses qui sont plus près de l'équilibre entre les deux. Puis, si on regarde Murdochville, par exemple, on a parlé de Murdochville: Qu'est-ce qui reste à Murdochville? C'est une place qui est contaminée, des gens qui ne savent même pas s'ils ont été contaminés eux-mêmes.

Puis, pour le gaz, je voudrais dire que c'est un cas spécial, ce n'est pas comme les forêts. Les forêts, ça peut être exploité durablement, ça peut être exploité en créant des emplois et tout en respectant cette ressource-là. Le gaz, c'est autre chose. Puis je comprends que, si ça coule, on veut récolter de ça, mais c'est au moment de le brûler que c'est vraiment dangereux pour l'environnement. Alors, c'est un cas, pour moi, qui est différent. Si on coupe la forêt, on fait des choses avec ça, on crée des emplois. La forêt va encore être là, si on le fait comme il faut, mais il n'y a pas de meilleure ou pire façon de brûler du pétrole. C'est ça.

Mme Doyer: Merci. C'est vraiment intéressant. Merci.

Le Président (M. Jutras): Alors, ça va? Donc, M. Chouinard, Mme Kraenzel, je vous remercie. Et les travaux sont donc terminés pour aujourd'hui. Les travaux de la commission sont ajournés à mardi 8 février, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 10)

 

 


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