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Question avec débat
(Dix heures sept minutes)
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Cette
séance de la commission permanente des finances et des comptes publics
se réunit aujourd'hui, le 27 avril, pour discuter la question avec
débat du député de Jonhson et leader parlementaire de
l'Union Nationale au ministre des Finances sur le sujet suivant: Le
déroulement des négociations des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic.
Je vous rappelle le principal règlement. Vous avez droit, M. le
leader parlementaire de l'Union Nationale, ainsi que M. le ministre des
Finances, à un droit de parole privilégié, mais un droit
de parole privilégié ne signifie pas, je le répète,
un droit de parole exclusif. Dans une première intervention, M. le
leader parlementaire de l'Union Nationale, vous avez droit de prendre vingt
minutes et je vous cède immédiatement la parole.
Exposé du sujet M. Maurice Bellemare
M. Bellemare: M. le Président, je suis très heureux
qu'en vertu de l'article 162A vous ayez rappelé les règles du
jeu. Cela n'empêche pas mes collègues de l'Opposition de prendre
vingt minutes sur toute la période, en vertu de l'article 162A. J'en
suis très heureux.
Dans un premier temps, il serait nécessaire, pour les gens qui
nous écoutent, de dresser un portrait des parties en présence.
Cette ronde de négociations est terriblement mêlée, elle
s'étend sur deux signatures de conventions collectives qui, aujourd'hui,
dans les secteurs public et parapublic, sont devant le gouvernement.
D'abord, dans les syndicats, deux catégories. Ceux dont les
conventions collectives sont expirées depuis le 30 juin 1978, pour un
total de 70 276 fonctionnaires, et le cas de la Provincial Association of
Catholic Teachers, 3500, dont je parlerai tout à l'heure. Il y a
peut-être eu, depuis ce temps, une signature ou un protocole. Il n'y a
peut-être pas eu une signature de convention collective.
Deuxièmement, il y a le Cartel des organismes professionnels de la
santé, le COPS, 24 810. Troisièmement, la
Fédération des infirmiers et des infirmières du
Québec, la FIIQ, 4000. Quatrièmement, le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec, le SFPQ, 37 875 employés ou
fonctionnaires. Il y a aussi le Syndicat professionnel des médecins du
gouvernement du Québec, le SPMGQ. Il s'agit, dans tout cela, de
syndicats indépendants. Je voudrais que la population comprenne bien la
mise en garde que je fais parce que tous et chacun de ceux que je viens de
nommer sont des syndicats indépendants.
Ceux dont les conventions collectives expireront le 30 juin 1979 sont
environ 230 000 travail- leurs comprenant 44 conventions collectives. Il y a
là, je pense, un front commun qui établit les règles du
jeu.
Pour le gouvernement, on retrouve d'abord le Conseil du trésor
qui est le grand coordonnateur et trois ministères: 1) le
ministère de la Fonction publique; 2) le ministère de l'Education
et ses partenaires: la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec, la Fédération des CEGEP, la Quebec
Association of Protestant School Boards; 3) le ministère des Affaires
sociales et ses partenaires: l'Association des centres de services sociaux,
l'Association des centres d'accueil du Québec, l'association des
directeurs et des établissements privés, l'Association des
établissements privés, l'Association des hôpitaux de la
province de Québec, la Fédération des centres locaux de
services communautaires du Québec. Toutes ces associations sont
regroupées à l'intérieur du comité patronal de
négociation du secteur des affaires sociales.
Je commence maintenant l'énumération des questions qui
vont être à l'ordre du jour. Il ne faut jamais perdre de vue que
le gouvernement négocie avec un certain nombre de syndicats que je viens
d'énumérer depuis le 1er juillet 1978, depuis donc dix mois,
incontestablement. En déposant des offres à ce premier groupe de
syndiqués, le ministre se trouve en même temps à sonder le
terrain pour mieux négocier avec le second groupe qui, lui aussi, en
vertu de la loi 59, doit commencer si ce n'est déjà fait
ses propres négociations. En pratique, le gouvernement se trouve
à avoir fondu en une seule les deux périodes de
négociations prévues par la loi. Cette juxtaposition de ces deux
rondes de négociations permet sûrement une meilleure coordination,
j'en suis persuadé, pour le gouvernement bien sûr, et place ce
dernier dans la situation où il pourra éventuellement offrir la
même chose en même temps à tous les employés dont la
convention collective sera échue au mois de juin 1979. Ceci constitue,
je pense, une excellente stratégie, très habile, de la part du
ministre et des négociateurs.
Le 23 juin 1978, l'Assemblée nationale adoptait deux projets de
loi. Je le mentionne devant la télévision parce que les gens ne
sont pas au courant de cela; c'est peut-être ennuyeux pour le ministre
qui connaît la loi et ceux qui l'ont bâtie. L'Assemblée
nationale adoptait deux projets de loi qui fixent le cadre juridique dans
lequel devra se dérouler la ronde de négociations des conventions
collectives dans le secteur public et aussi du secteur parapublic.
La loi 55 en est une; elle définit d'abord les rapports qui
doivent être établis entre les parties patronales et syndicales
aux fins de négociations collectives dans les secteurs de
l'éducation, des affaires sociales et des organismes gouvernementaux.
Elle établit les modalités de partage, les matières
négociables à l'échelle nationale d'abord c'est
défini dans la loi et celles négociables à
l'échelle locale. Cela n'existait pas avant l'adop-
tion de la loi. En 1978, on a fait passer le local bien après le
national et cela a eu des répercussions malheureuses, surtout au
ministère de l'Education. Le projet de loi 55 consacre, entre autres, le
président du Conseil du trésor, M. Parizeau, dans le rôle
de grand coordonnateur des négociations pour la partie patronale. Je
vous remercie, M. le ministre, d'être ici ce matin avec la bonne humeur
qu'on vous connaît. J'espère qu'on va pouvoir s'en tirer avec
beaucoup de "gentleman agreement".
La deuxième loi, la loi 59, que dit-elle? Pour le peuple, c'est
bien important de le savoir, quand on parle de négociations.
Après cela, on entrera dans le vif du sujet. Elle prévoit un
calendrier très précis pour le déroulement des
négociations des conventions collectives qui viendront à
échéance le 30 juin 1979 comme celles qui sont venues à
échéance le 30 juin 1978. En parcourant les étapes de ce
calendrier, nous ferons, le cas échéant, les prévisions
voulues pour tenir compte de l'évolution de chacun des dossiers.
Premièrement, la première étape a eu lieu au cours du mois
d'octobre 1978. Il s'agissait de la période de maraudage. C'était
bien entendu. C'était d'ailleurs dans la loi. Si mes rapports sont
exacts, sauf à l'Hydro-Québec pour les employés de bureau,
il n'y a aucun problème à signaler pour cette première
étape qui s'est acheminée graduellement telle que prévue.
La deuxième étape prévue dans le calendrier est celle de
la répartition des matières à négocier.
C'était dans le texte de la loi. D'abord, au palier national et ensuite
au palier local. Cette dernière étape a eu lieu au cours des mois
d'octobre, novembre, décembre 1978. (10 h 15)
II s'agissait en somme de l'étape qu'on appelle habituellement
les "prénégociations" et, en pratique, celle qui comprend trois
grands éléments; la signature d'un protocole de fonctionnement
des comités patronaux. Sur ce point, le projet de loi 55 prévoit
qu'il y aura une entente sur les modalités de fonctionnement du
comité patronal et la détermination des matières à
l'intérieur desquelles les représentants du gouvernement et les
représentants du ministre ont une voix prépondérante lors
des délibérations du comité. Et là commence, je
pense, la série des questions. Une telle entente existe pour le
réseau des affaires sociales. Je pense que c'est dans le Soleil qu'on
retrouve cela, le 8 décembre 1978, sous la signature de Claude
Vaillancourt: "Le texte innove sur le modus vivendi des négociations
antérieures en favorisant le concept de la prépondérance
par rapport à celui du consensus. Ce qui veut dire que le
ministère des Affaires sociales se voit attribuer le rôle de
définir les politiques en matière de santé, de services
sociaux et d'allocations des ressources, tandis que les établissements
de santé sont chargés de l'organisation, du développement
des programmes de santé ainsi que de l'administration
générale des ressources dont ils disposent."
C'est là qu'on nous a répondu que, dans les mêmes
renseignements sur la prépondérance, ils quand c'est
spécifié dans une loi et que cela faisait partie de la
stratégie des négociations. Ecoutez! Si on innove sur le modus
vivendi des négociations antérieures en favorisant le concept de
la prépondérance, je ne sais pas. Il en est de même sur le
budget affecté à cette négociation; on a répondu:
On ne peut pas vous donner les chiffres, on vous en donnera dans quelques
instants.
Selon ce qui a été plus ou moins bien
préparé, selon que les partenaires utilisent plus ou moins leur
vote prépondérant, selon que le consensus soit plus ou moins
possible, de là dépend tout le climat qui prévaut
aujourd'hui et qui prévaudra dans l'avenir. Cependant, au niveau des
négociations, il semble très difficile de pouvoir obtenir des
renseignements précis sur l'existence et le contenu d'un tel protocole
d'entente et ceci, pour des raisons de stratégie. J'aimerais que le
ministre nous fasse part aujourd'hui du point sur lequel la négociation
touche particulièrement le fonctionnement des tables patronales. Le
ministre est certainement conscient de la très grande influence du bon
fonctionnement des tables patronales, surtout sur le processus de la
négociation. Je reviendrai à cela dans deux minutes. Il n'y a
qu'une table des négociations qui négocie actuellement sur les
67.
La deuxième étape que je viens de vous nommer de
prénégociations touche la question des libérations
syndicales aux fins des négociations. Il semblerait qu'au niveau des
affaires sociales cette étape cruciale a été franchie sans
trop de problèmes, mais on ne peut pas dire la même chose à
l'éducation. J'aimerais bien que le ministre nous dise s'il est exact
qu'à l'heure actuelle, dans le secteur de l'éducation, il n'y a
qu'une seule table qui fonctionne sur 67, pour la bonne raison, entre autres,
que dans plusieurs cas on n'a pas encore réussi à s'entendre au
sujet des libérations des négociateurs. Au moins 60 tables de
négociations sur 67 je pense que je n'exagère pas
c'est un article de Pierre Vennat, qui a cité dans le journal La Presse,
le 24. Après information auprès des autorités et le peu de
renseignements qu'on a bien voulu leur donner, il dit qu'il y a seulement une
table qui négocierait maintenant. C'est seulement pour 9 des 67
négociations qu'on avait déposé les offres aux
syndicats.
C'est ainsi qu'une première entente prévoit la
libération de cinq enseignants entre le 5 avril et le 15 juin,
libération défrayée moitié-moitié par les
parties, comme c'est le cas pour les Bois-Francs. A Saint-Hyacinthe, par
ailleurs, on libère trois personnes mais jusqu'au 1er novembre. Aux
Eco-res, dans la région de Montréal, en partage aussi 50%-50% le
coût, la période étant limitée à 20 jours. A
la commission des Manoirs, deux des six personnes libérées le
sont aux frais du syndicat pour une période continue de 20 jours.
Le ministre pourra peut-être me répondre sur ce point parce
que c'est très important. J'aimerais que le ministre nous explique
comment il se fait que plus
de quatre mois après la fin de l'étape normalement
prévue pour les négociations d'une telle entente dans la loi 59,
ce problème de la libération pour les négociations ne soit
pas encore réglé dans le secteur de l'éducation. Pourquoi
cette lenteur? Le ministre pourra peut-être me répondre. Cela sera
une question mais il y en a une autre.
La troisième phase de cette étape de
prénégociations qui devait se dérouler entre les mois
d'octobre et décembre 1978 concerne le partage des objets de
négociations locales et provinciales. Nous avons très peu
d'information sur cette étape extrêmement importante pour le bon
déroulement des négociations dans les secteurs public et
parapublic. Il semblerait que dans le secteur des affaires sociales, le dossier
présente moins de problèmes que dans le secteur de
l'éducation. Est-ce exact? Le ministre nous le dira.
Nous savons, entre autres, que de nombreux syndicats ne s'entendent pas
avec les commissions scolaires au sujet du partage et particulièrement
des objets de négociations. Il paraît extrêmement important
aujourd'hui que celui qui joue le rôle de grand coordonnateur pour la
partie patronale nous dise si, conformément à la loi 55, dans le
cas où il n'y a pas eu d'entente sur les partages des objets de
négociations avant le premier janvier 1979, le gouvernement a
utilisé son pouvoir de décider que telle ou telle matière
serait négociée à l'échelle nationale. Pour vous
citer la loi, je lis la dernière phrase de l'article 5 de la loi 55: Les
matières qui n'ont pas été ainsi définies à
l'expiration de ce délai font l'objet de stipulations
négociées et agréées à l'échelle
nationale à moins que le gouvernement n'en décide autrement. Je
pense que contrairement à la dernière ronde de
négociations, les négociations locales et provinciales auront
lieu simultanément cette fois. Je ne crois pas faire erreur en affirmant
qu'en 1976 les ententes locales avaient été
négociées bien après les ententes provinciales. Je l'ai
dit tout à l'heure.
Il va de soi, de plus, que toute cette question touche également
la création de la table centrale. Au niveau du problème de la
table centrale des négociations, j'aimerais que le ministre nous indique
aujourd'hui si on a surmonté les difficultés dont a fait part la
Presse, il y a à peine un mois, au moment où le gouvernement a
déposé ses offres conformément au délai prescrit
par la loi 59.
J'aimerais que le ministre nous dise si on a réussi à
conclure une entente à la table centrale. Nous savons qu'à
l'heure actuelle seront négociés à cette table centrale
les salaires, les droits patronaux, les primes d'éloignement et,
semble-t-il aussi, le régime de retraite. Est-ce que cette liste
déjà connue a été allongée à la table
centrale? Y a-t-il un accord pour que soient transférés au niveau
central des sujets initialement prévus pour les tables sectorielles?
Enfin, au niveau de la table centrale, est-ce qu'on s'est entendu sur le
caractère public des pourparlers ou des négociations entre les
deux parties? Dans l'affirmative, est-ce que le nouveau conseil d'information
qui vient juste d'être formé aurait un rôle à jouer
dans cette publicité de la table centrale?
Les autres étapes importantes prévues à la loi 59
après la phase de prénégociations étaient celles du
dépôt des demandes syndicales qui devait se faire avant le 1er
février 1979 et, ensuite, le dépôt des offres patronales
qui devait se faire au plus tard le 1er avril 1979. Nous pouvons dire que ces
délais ont été respectés en vertu de la loi qui y
pourvoyait. D'ici juillet 1979, tous ceux dont les conventions collectives ne
seraient pas expirées sont considérés comme étant
en période de négociation et ne pourront exercer leur droit de
grève ou de lock-out qu'à compter du 1er juillet 1979. Les seuls
à l'heure actuelle qui ont le droit de grève légale sont
ceux dont la convention collective est expirée le 30 juin 1978,
c'est-à-dire les fonctionnaires, les infirmiers et infirmières,
les enseignants non anglo-catholiques. D'ailleurs, le ministre nous en donnera
des nouvelles; je pense qu'ils ont déjà signé une entente
avec le gouvernement.
A ce jour, il n'y a eu qu'une journée de grève vraiment de
la part des infirmières, qui n'a pas été un gros
succès, entre nous. Même si elles ont voulu, à un moment
donné, en mettre plus que demandé au point de vue des services
essentiels, elles se sont trouvées un peu trompées. Elles ont
protesté à cause de la lenteur des négociations. Il se
pourrait qu'il y ait d'autres grèves de la part des infirmières
et des infirmiers, mais on nous annonce des nouvelles assez sensationnelles
pour très bientôt. Le ministre pourra peut-être s'ouvrir un
peu là-dessus, sans briser le secret qui doit lier les tables de
négociations. Si les négociations continuent à
piétiner... Aujourd'hui, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a une
rupture avec les fonctionnaires et je pense que le fossé est cependant
beaucoup plus grand au chapitre de la clause d'indexation où les
salariés, selon les dernières propositions gouvernementales,
perdraient une somme de plus de $7 500 000, dans le cas où l'indice des
prix à la consommation dépasserait 7% d'augmentation.
C'est en grosses lettres dans les journaux: "Rupture avec les
fonctionnaires". Cela avait l'air beau, cela avait l'air bien. On avait
même commencé à chanter victoire ici en Chambre, sous les
applaudissements des "PQuiou", et on avait dit: Ah! un triomphe effrayant! Le
triomphe est moins grand qu'on pense, parce que là, cela commence
à être un peu plus rétréci.
Je pense que les raisons de l'impasse sont l'horaire de travail, la
rémunération pour la deuxième année de la
convention, et particulièrement l'indexation des salaires. Mais la
raison principale c'est l'indexation, je pense, qu'on retrouve à la
table. Et les 120 000 cégépiens qui sont en grève
forcée, ce matin, je me demande si ce ne serait pas une cloche d'alarme,
cela aussi. Ils ont commencé par une journée d'étude. Il y
a 120 000 cégépiens qui sont en grève ce matin, en
journée d'étude. J'aimerais que le ministre nous dise aussi
où il en est rendu avec les infirmières, le Cartel des organismes
de la santé, COPS, qui, dans les deux groupements, ramasse 28 000
travailleurs dans le domaine de la santé et qui touche tous les
hôpitaux. Est-ce qu'à ce niveau tout cela existe
pour les fonctionnaires provinciaux, à ce stade-ci?
Il est juste d'affirmer que ce qui bloque le règlement des
conventions, c'est d'abord et avant tout la négociation d'une formule
d'indexation des salaires. Il faudrait aussi, à titre de remarque
générale, aborder la question très controversée de
l'indexation des salaires qui, on le sait très bien, est la cause
principale de la rupture des négociations avec les fonctionnaires
provinciaux.
Le ministre a commencé en disant que la formule d'indexation
était absolue: a) le ministre a dit cela au début des
négociations il n'est pas question d'indexation, la formule
d'indexation est absolument "out", en laissant entendre au début qu'il
n'y aurait pas d'indexation de salaires. Il s'est ensuite ravisé pour
dire qu'il jonglait avec plus d'une formule, mais que le principe final
à ce niveau devait être dorénavant une formule d'indexation
des salaires suffisante, mais non absolue. A en juger par les offres
déjà déposées par le gouvernement, au niveau des
conventions collectives échues depuis le mois de juin 1978, il est
évident qu'il est extrêmement difficile, à ce moment-ci,
d'évaluer les offres salariales avant que le gouvernement rende publique
sa formule d'indexation, car en définitive, c'est cette formule
d'indexation qui fera toute la différence dans les
négociations.
A l'heure actuelle, à en juger par les formules soumises à
l'Hydro-Québec ainsi qu'aux enseignants anglo-catholiques, le
gouvernement s'oriente, je pense, vers une formule qui se limitera à
maintenir le pouvoir d'achat des salariés et à refuser tout
véritable enrichissement réel. J'aimerais bien que le ministre
nous donne plus de détails sur la formule d'indexation suffisante, mais
non absolue. Qu'il nous explique ceci également; dans le budget
déposé pour 1979/80, dernièrement, on parle de
l'indexation des traitements et des dépenses assimilées des
employés de la fonction publique et du secteur parapublic.
Je cite, à la page 51...
Le Président (M. Richard): M. le leader de l'Union
Nationale...
M. Bellemare: J'ai fini, j'ai fini, je reviendrai. A la page 51,
finances et indexation des traitements et dépenses assimilées des
employés de la fonction publique et du secteur parapublic, $84 millions.
C'est là, je pense, un aperçu général. J'aurai le
temps, tout à l'heure, de toucher ce qui concerne le coût des
négociations en 1976, qui fut de $4 966 000, et le coût qu'on
prévoit pour cette année, $12 millions.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
Réponse du ministre M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: A la fin de l'été 1977, le
gouvernement a décidé de créer une commission pour
examiner le cadre dans lequel devraient se dérou- ler les
négociations dans le secteur public et parapublic. Ce n'était un
secret pour personne qu'à l'occasion des négociations
précédentes un bon nombre de difficultés s'étaient
présentées et les formules devaient être modifiées.
Tout le monde reconnaît que la matière est extraordinairement
complexe et que ce n'est pas quelque chose qu'on réoriente du jour au
lendemain, d'une part parce que cela implique des centaines de milliers de
personnes et, d'autre part, parce qu'on ne part pas de rien. Il y a à la
fois toute une série d'expériences des rapports entre le
gouvernement et ses partenaires patronaux et les syndicats et aussi
passablement d'accrochages si on envisage cela sur la période, par
exemple, des quinze dernières années. (10 h 30)
Ce qu'il est convenu d'appeler la commission Martin-Bouchard s'est mis
au travail pour réexaminer toute cette question. Elle nous a soumis, le
15 février 1978, un certain nombre de recommandations. Après
avoir examiné ces recommandations, le gouvernement, ainsi que le disait
le leader parlementaire de l'Union Nationale tout à l'heure, a
adopté le 23 juin 1978, c'est-à-dire dans des délais assez
courts, les projets de loi 55 et 59 qui ont été
déposés à l'Assemblée nationale et
acceptés.
Ces projets de loi, je ne vais pas les résumer puisque le
député de Johnson l'a fait tout à l'heure, mais il faut
évidemment comprendre que ces deux projets de loi s'appuient sur un
certain nombre d'innovations importantes. La première, qui
découle des recommandations du rapport Martin-Bouchard, consiste
à assurer une coordination beaucoup plus serrée des
négociations du côté gouvernemental et du côté
patronal par le truchement du Conseil du trésor. D'autre part, ces lois
prévoient des obligations très strictes quant au délai
à respecter de façon qu'un certain nombre de gestes soient
posés avant que les conventions collectives viennent à
échéance et non pas plusieurs mois plus tard comme on avait pu le
constater dans le passé.
Troisièmement, ces lois prévoient comment les parties, le
gouvernement va être associé à ses partenaires
patronaux.
Finalement je simplifie beaucoup ici mais, enfin, il faut
comprendre l'essentiel le projet de loi no 59 prévoit que le
président du Tribunal du travail ce n'est pas le gouvernement,
c'est le président du Tribunal du travail crée un
comité des services essentiels, surtout du côté des
organismes de santé et, d'autre part, un comité d'information
pour tenir le public au courant de ce qui se passe, et qui soit en mesure
objectivement d'expliquer à la fois les demandes et les offres qui vont
apparaître.
M. Bellemare: Avec trois mois de retard.
M. Parizeau: Le député de Johnson vient de dire
avec trois mois de retard. Je dois dire, dans ce cas, qu'encore une fois ce
sont deux organismes créés par le juge en chef du Tribunal du
travail et non pas par le gouvernement lui-même. Il faut établir
une distinction.
M. Bellemare: Ici, il a la permission d'oublier la loi.
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Union Nationale, s'il vous plaîtl Je pense que vous n'avez pas
été interrompu durant vos 20 minutes tout à l'heure. M. le
ministre des Finances.
M. Parizeau: Or, une fois ces lois déposées, tout
n'était pas dit pour lancer les négociations. Bien au contraire,
une série de gestes devaient être posés. D'abord, il
fallait que, du côté gouvernemental, on s'entende sur un certain
nombre de principes généraux; qu'on sache, en somme, à peu
près où on devait aller. Parmi ces principes
généraux d'action du gouvernement, trois me paraissent avoir une
importance particulière.
Le premier principe consistait pour le gouvernement à
reconnaître que, dans le passé, les syndicats étaient
finalement très mal informés des données dont le
gouvernement lui-même disposait, qu'il avait en main. Je pense que pour
tous ceux qui ont une certaine expérience des négociations, on se
rend compte que sur le plan budgétaire, sur le plan des chiffres
utilisés par le gouvernement, sur le plan des renseignements dont il
peut disposer assez facilement, les syndicats non seulement n'étaient
pas sur la même longueur d'onde, mais n'avaient pas accès à
ces renseignements essentiels pour qu'une négociation se conduise
normalement. Le gouvernement a donc clairement indiqué que ses livres
seraient ouverts, qu'à la fois sur le plan budgétaire et sur le
plan des données dont il se sert pour établir, par exemple, des
comparaisons de salaire, les syndicats auraient accès à tout ce
qu'ils veulent.
Deuxièmement, deuxième principe, le gouvernement a
décidé de comparer les rémunérations dans les
secteurs public et parapublic avec ce qui se paie dans le secteur privé,
en cherchant à faire en sorte que l'écart ne devienne pas trop
grand entre ce qui est payé dans le secteur public et ce qui est
payé dans le secteur privé.
Troisième grand principe, aux fins de ces comparaisons, on a
décidé de retenir la rémunération globale.
C'est-à-dire pas seulement le salaire, mais tous les avantages marginaux
chiffrables. Il y en a qui sont très difficiles à chiffrer et
dont on ne peut pas tenir compte dans une comparaison comme celle-là.
Par exemple, la sécurité d'emploi. La sécurité
d'emploi des fonctionnaires, on peut difficilement mettre un chiffre dessus en
disant: Cela vaut tant de cents l'heure. Mais tout ce qui était
chiffrable en termes de congés de maladie, de vacances, etc., a
été incorporé dans le concept de
rémunération globale. C'est cela qu'on compare avec la
rémunération globale dans le secteur privé.
A partir de là nous devons, à partir de maintenant
dans mon exposé établir, dans le même sens que ce
que faisait le député de Johnson, une distinction très
nette entre deux groupes de syndiqués: ceux dont les conventions
collectives sont venues à échéance avant le 1er juillet
1978 et les autres. Les conventions collectives venues à
échéance avant le 1er juillet 1978 ne sont pas astreintes aux
nouvelles lois. Elles se déroulent selon l'ancienne formule. Bien
sûr, ceux qui sont communément appelés les syndicats du
front commun dont les conventions collectives viennent à
échéance le 30 juin prochain sont couverts par les nouvelles
lois. Il n'en reste pas moins que, sur le plan interne du gouvernement, nous
avons, à l'occasion de ces conventions qui sont déjà
venues à échéance, rodé la machine qu'on a
montée autour du Conseil du trésor. La coordination interne du
gouvernement, nous avons commencé, bien sûr, à la roder
à l'égard des conventions collectives qui sont venues à
échéance, même si elles ne sont pas couvertes par les
nouvelles lois.
Je voudrais maintenant, M. le Président, essayer de donner une
idée un peu précise du déroulement actuel pour à la
fois le premier groupe et le second. Et j'aurai l'occasion, dans ces
conditions, de répondre à certaines des questions que me posait
le député de Johnson. Dans le cas des conventions collectives
déjà échues, le député de Johnson se
demandait à l'égard des professeurs anglo-catholiques si
c'était signé. Oui, effectivement, la convention collective a
été signée, il y a déjà quelque temps. Pour
ce qui a trait aux fonctionnaires, nous avons fait un bon bout de chemin
ensemble. Pour une très grande partie des clauses, je pense qu'on peut
dire M. Harguin-deguy a eu d'ailleurs l'occasion de le dire en public
à quelques reprises qu'à peu près sur l'essentiel
de cette convention une sorte d'entente était intervenue. Il reste
encore maintenant des choses que nous avons à rediscuter et je pense que
le député de Johnson avait parfaitement raison, la question de la
clause d'indexation est une des choses auxquelles, manifestement, le syndicat
des fonctionnaires veut repenser et dont il veut rediscuter avec ses
membres.
Je crois qu'en toute justice mon collègue de la Fonction
publique pourra avoir l'occasion tout à l'heure d'en rediscuter il
faut reconnaître que les rapports que le gouvernement, par le truchement
du ministre de la Fonction publique, a entretenus avec le syndicat des
fonctionnaires ont été ce qu'ils doivent être. Cela s'est
déroulé dans une atmosphère... M. le Président, je
pense qu'il faut reconnaître ici et les deux parties le
reconnaissent d'ailleurs que, jusqu'à maintenant, le
déroulement des négociations s'est fait fort bien.
Pour ce qui a trait aux services de la santé, c'est-à-dire
au Cartel des organismes professionnels de la santé, communément
appelé COPS et à la Fédération des
infirmières et infirmiers du Québec, c'est-à-dire FIIQ,
dans le cas des négociations de COPS, le plus gros groupe des deux, nous
avons vu depuis une quinzaine de jours ou même trois semaines un
déblocage assez important. Il y avait encore il y a trois semaines
passablement de clauses normatives qui n'étaient pas
réglées. Un bon bout de chemin, là aussi, a
été fait et passablement de discussions sont en cours
sur les clauses monétaires.
L'Hydro-Québec, c'est une convention qui tombe un peu entre les
deux groupes, c'est-à-dire qu'elle est venue à
échéance en décembre 1978. Toutes les propositions et les
demandes sont sur la table. Il est évident je pense que ce n'est
pas un secret pour personne que le déroulement des
négociations... est un peu lent.
Je souligne ici un cas qui me préoccupe, qui est celui de la
Société des alcools. Je reconnaîtrai volontiers que, dans
le cas de la Société des alcools, à l'heure actuelle, le
déroulement est très lent. Nous avons, grâce à
l'aide du ministre de la Fonction publique ici, pris les moyens, depuis une
dizaine de jours, pour que cela s'accélère. Je pense que c'est
peut-être le cas, à l'heure actuelle, le plus préoccupant
sur le plan d'un déroulement normal des négociations. Je
reconnais que, dans le cas de la SAQ, c'est vraiment assez lent.
M. Bellemare: Des grèves, des grèves sauvages.
M. Parizeau: M. le Président, je n'ai pas interrompu le
député de Johnson pendant son exposé.
M. Bellemare: J'ai le droit de vous poser une question. Cela ne
devrait pas...
M. Parizeau: Je souhaiterais vivement pouvoir terminer mon
exposé dans un calme relatif, s'il me le permet.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des Finances,
vous pouvez poursuivre.
M. Parizeau: Pour ce qui a trait aux groupes dits du front
commun, dont les conventions collectives vont venir à
échéance le 30 juin 1979, c'est-à-dire dans deux mois, je
pense qu'il faut faire le point de l'état d'avancement des tractations,
et d'une façon, dans ce cas, assez précise en raison, d'une part,
de l'importance de ces négociations et, d'autre part, de la très
grande complexité de l'opération.
Je voudrais ici souligner à quel point les rapports entre le
gouvernement et ses partenaires provinciaux ont avancé de façon
à la fois rapide et, je pense, très satisfaisante. Nous en sommes
arrivés à une sorte de partage des tâches qui me
paraît porteur, pour l'avenir, d'un déroulement peut-être
plus normal que celui qu'on a pu connaître dans le passé. Je pense
que ceci est maintenant fait, les règles du jeu sont bien
établies et je pense que chacune des parties patronales sait à
quoi s'en tenir quant au rôle de chacun.
Pour ce qui a trait à l'ouverture des livres du gouvernement,
l'opération, si on me le permet, M. le Président, je la
qualifierai de brillante. Depuis septembre 1978, nous nous échangeons
une foule et littéralement des vingtaines de documents de toute
espèce. Les syndicats ont demandé une foule de renseignements
aussi bien sur le plan des comparaisons de salaires que nous avions faites, de
rémunérations globales, certains documents budgétaires.
Nous leur avons fourni tout ce que nous avions.
Je crois que, de ce côté, on n'a pas entendu publiquement
de plaintes et je ne me souviens pas d'en avoir entendues en privé non
plus. On avait dit que les livres seraient ouverts et j'ai bien l'intention de
faire en sorte qu'ils continuent de l'être. Je fais remarquer d'ailleurs
à ce sujet que beaucoup des renseignements sur les comparaisons de
salaires que font les syndicats à l'heure actuelle dans les journaux
viennent, la plupart du temps, des chiffres que nous leur avons fournis. Ce qui
est tout à fait normal d'ailleurs et, à mon sens, tout à
fait bien. D'aucune espèce de façon je n'imagine que le
gouvernement a la science infuse et a raison dans toutes les comparaisons qu'il
fait. Ces comparaisons de salaires que nous avons faites avec le secteur
privé auront à être débattues à la table de
négociations. Je reconnais qu'elles doivent l'être, qu'il y a des
interprétations que l'on peut faire. Non seulement je l'admets, je le
souhaite.
En troisième lieu, les offres gouvernementales et des partenaires
patronaux ont été déposées à toutes les
tables dans les délais prévus par la loi. Je ferai remarquer, M.
le Président, que c'est la première fois que cela se fait, que
trois mois avant la fin des négociations collectives, les offres
gouvernementales sont déposées partout.
Quatrièmement, les libérations syndicales. Il est
évident qu'il faut s'entendre sur les libérations syndicales pour
que les négociations puissent s'amorcer. Je voudrais souligner ici qu'il
y a une ambiguïté considérable à ce sujet dans le
sens suivant. Pour ce qui a trait aux tables sectorielles, les
libérations syndicales sont toutes négociées, sauf dans le
cas de la FTQ pour les employés de soutien dans l'enseignement. A part
cet unique cas, les libérations syndicales, sauf erreur, sont
négociées partout. Ce à quoi faisait allusion le
député de Johnson tout à l'heure, ce sont les
libérations syndicales dans le cas des négociations locales dans
les commissions scolaires, ce qui est autre chose. (10 h 45)
Mais pour ce qui a trait à la partie sectorielle gouvernementale
et à la partie patronale ensemble, c'est fait sauf dans un cas, FTQ,
soutien-enseignement. Les objets de négociations dans l'enseignement au
niveau national par opposition au niveau local: une entente est intervenue
entre les commissions scolaires et les syndicats sur quatorze points qui ont
été décrétés, conformément à
la loi, par le gouvernement par un arrêté en conseil. Donc, le
partage des tâches a été fait.
Le fonctionnement de la table centrale, maintenant. Cette table
centrale, nous avions un certain nombre de vues sur son fonctionnement; les
membres du front commun aussi. Nous avons discuté ces choses pendant
quelques semaines et je dois dire, M. le Président, que nous sommes
très proches d'une entente. Je serais même étonné
que nous n'arrivions pas, d'ici quelques jours, à une entente sur ce
sujet. Il restait, à ma connais-
sance, un point de désaccord au cours des jours
précédents et je pense que nous allons trouver le moyen de le
régler. Donc, un progrès considérable a été
fait quant à la constitution de la table centrale, quant à son
fonctionnement, quant aux sujets qui seront abordés.
Il reste, évidemment, que l'on peut trouver des choses qui
accrochent, mais encore faut-il savoir si vraiment cela correspond... Encore
faut-il interpréter correctement. Le député de Johnson
disait tout à l'heure: Dans un article de journal, on écrivait:
Une table sur sept négocie à l'heure actuelle. Entendons-nous, il
s'agit des tables locales dans les commissions scolaires. Je comprends en un
certain sens que les tables locales ne se déclenchent pas plus
rapidement que les négociations elles-mêmes. Nous sommes, à
l'heure actuelle, à deux mois de la fin des conventions collectives; il
nous reste encore deux mois avant que cela soit fini. Une fois toutes les
étapes dont j'ai parlé franchies et elles le sont presque
toutes maintenant les négociations vont s'amorcer, je pense,
rapidement au niveau sectoriel, au niveau national, au niveau de la table
centrale, et on devrait voir normalement les tables locales, dans les
commissions scolaires, se dérouler à peu près au
même rythme. En tout cas, je l'espère. Cela représenterait
un changement majeur comme le disait le député de Johnson
par rapport au passé où on a vu les tables négocier
bien plus tard que la table nationale.
Je conclurai, M. le Président, de la façon suivante: Nous
avons, par rapport au passé, dans certains cas, cinq ou six mois
d'avance. Dans d'autres cas, presque un an d'avance. On s'était
fixé une série d'étapes à franchir avant la fin des
négociations collectives du 30 juin 1979; nous les avons franchies pour
une bonne part. Il y a un certain nombre de grands enjeux que ces
négociations posent inévitablement et, de ces grands enjeux, j'en
vois trois qui me paraissent avoir une importance particulière. Le
premier de ces grands enjeux est un rythme de progression des salaires qui soit
juste à la fois pour les travailleurs du secteur public et parapublic et
qui soit juste aussi pour les travailleurs du secteur privé,
c'est-à-dire qu'on ne perde pas de vue qu'il doit y avoir un
équilibre entre ce que les quatre cinquièmes à peu
près de la population reçoivent dans le secteur privé
comme rémunération et ce que reçoit le cinquième
qui se trouve à travailler dans les secteurs public et parapublic.
Deuxième grand enjeu: Je crois qu'il est inutile de chercher
à dégager un peu plus de souplesse, lorsque c'est possible, dans
l'administration du secteur public. Beaucoup de rigidité est intervenue
au cours des conventions collectives antérieures. Je comprends que cela
est une matière très délicate mais je pense qu'il faut
examiner la question froidement et avec sérénité.
Troisièmement...
Le Président (M. Richard): Sans vouloir vous interrompre,
je vous signale...
M. Parizeau: Je conclus là-dessus, M. le Président.
Il me paraît essentiel aussi que l'on cherche à améliorer,
là où il le faut, la protection des travailleurs, la
sécurité d'emploi des employés du secteur public et
parapublic. Ceci me paraît être les trois grands enjeux de la
négociation à venir. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Portneuf.
Discussion générale
M. Pagé: Merci, M. le Président. Le sujet de ce
matin, soit le déroulement des négociations dans les secteurs
public et parapublic, est certainement un sujet d'une importance primordiale
dans le présent débat et pendant cette période où
l'Assemblée nationale siège. Je ne crois pas, cependant, M. le
Président, qu'une séance comme celle de ce matin puisse nous
permettre de faire le tour du problème. On peut présumer que la
présente session sera marquée assurément par d'autres
procédures où nous aurons l'occasion de discuter de ces questions
à la lumière de l' évolution dans certains secteurs qui
font l'objet de la présente négociation.
M. le Président, vous conviendrez avec moi que nous n'avons pas
de droit de parole privilégié ce matin. Nous devons intervenir
une fois que notre collègue de Johnson l'a fait. Ce matin, ni moi ni mon
collègue, le député de Saint-Laurent, nous ne voudrions
brimer le droit qui appartient, en vertu de notre règlement, au
député de Johnson.
Je me limiterai donc à de très brefs commentaires et
à quelques questions que je voudrais formuler à M. le ministre
des Finances, ce matin, ou encore à son collègue de la fonction
publique qui l'accompagne. A entendre le ministre des Finances, cela semble
aller très bien, cela semble aller pour le mieux dans le meilleur des
mondes et tout semble se dérouler normalement. Or, M. le
Président, celui-ci aura certainement constaté, comme vous et
comme d'autres de mes collègues, comme le public en
général, qu'on a quand même des situations assez
délicates qui se présentent dans certains secteurs. Le
député de Johnson, tout à l'heure, a fait état de
la grève d'une journée des infirmières. Il a fait
état aussi du fait qu'aujourd'hui plusieurs CEGEP sont fermés au
Québec pour fins de journée d'étude. On connaît,
à la Société des alcools, des grèves perlées
d'une journée ou des journées d'étude d'une journée
de temps à autre, etc. Cela, M. le Président, vous le savez,
laisse entrevoir, ou peut laisser entrevoir des problèmes qui se
poseront avec davantage d'acuité au fur et à mesure que la
situation pourra évoluer.
M. le Président, un des éléments qui a quand
même fait l'objet de beaucoup de discussions depuis le début,
depuis la déclaration, entre autres, du ministre des Finances en
septembre ou octobre 1978, si ma mémoire est fidèle, a
été cette fameuse
question de l'indexation. Je dois, dans un premier temps, me montrer
surpris d'une contradiction, de ce qui nous apparaît comme étant
une contradiction de la part du gouvernement. J'aimerais que le ministre des
Finances puisse revenir là-dessus tout à l'heure. Comment le
ministre peut-il expliquer que dans sa déclaration initiale on se
rappellera la conférence de presse qu'il avait faite, et là il
m'excusera, c'est soit en septembre ou en octobre 1978 il avait
clairement indiqué que, compte tenu de l'obligation que le gouvernement
avait de limiter les dépenses gouvernementales, compte tenu aussi du
fait qu'on avait eu un rattrapage assez substantiel à la dernière
convention, que l'inflation n'avait pas été, au cours des trois
dernières années, ce qu'elle avait été dans la
période couverte par la précédente convention, il n'y
aurait pas d'indexation dans les offres patronales et que les clauses
d'indexation ne seraient pas ce qu'elles avaient déjà
été.
Mais c'est de là qu'est partie la confusion, vous savez. Beaucoup
de gens ont interprété cette déclaration comme
étant une fin de non-recevoir à toute clause d'indexation. Le
ministre des Finances, par la suite, a fait des déclarations. On se
rappellera ses déclarations dans la presse, où on nous disait:
Vous savez, le ministre jongle présentement avec différentes
clauses d'indexation. On n'est pas sans savoir non plus que dans les offres
à l'Hydro-Québec, il y a une formule d'indexation. Même
chose dans les offres qui sont faites, qui ont été
formulées auprès du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
Québec.
M. le Président, je pense que ce matin le moment serait
peut-être le mieux choisi pour que le ministre nous dise ce qui en est
exactement. Je conviens que celui-ci, tout à l'heure, nous a dit que
cela allait bien avec la partie syndicale, qu'avec les parties syndicales, il y
avait des échanges de renseignements, des communications constantes, et
tout cela. J'aimerais qu'il en fasse autant pour l'Assemblée nationale,
d'autant plus qu'on est à la télévision maintenant.
Pour le bénéfice du public en général, les
contribuables du Québec, ceux qui nous écoutent
présentement, le ministre devrait nous dire, dans un premier temps,
quelle est la clause de protection de revenu, quelle est l'approche, en termes
de protection de revenu, que le gouvernement entend donner aux travailleurs des
secteurs public et parapublic.
Je m'explique. M. le ministre, vous savez pertinemment que l'indexation
est une forme de protection de revenu. Il y a d'autres possibilités pour
un gouvernement ou pour un patron d'introduire dans ses conventions collectives
des dispositions qui protègent le revenu du travailleur. Est-ce que le
gouvernement c'est là l'objet de ma première question
envisage de se servir d'autres formes de protection de revenu, par
exemple, des conventions collectives qui auraient des durées beaucoup
plus courtes, plus brèves? Est-ce que le gouvernement a envisagé
la possibilité de rouvrir certaines conventions? Le problème dans
tout cela, c'est qu'on ne connaît pas l'avenir. Si le ministre des
Finances ou les représentants syndicaux étaient capables de
prévoir ce que sera l'inflation dans les deux prochaines années,
on n'aurait pas besoin d'indexation. En fait, ces clauses sont strictement pour
protéger le revenu du travailleur et il y a différentes
façons de le protéger, ce revenu. Dans un premier temps,
j'aimerais que le ministre des Finances nous dise s'il se fonde
essentiellement, pour les clauses de protection de revenu, sur l'indexation
comme telle. Est-ce que le ministre privilégie cette forme, cette
approche pour protéger le revenu? Le ministre nous dit qu'il a
jonglé avec plusieurs formules. Au moins, même si notre
débat est très bref ce matin, celui-ci pourrait nous indiquer
quelle est la formule qu'il entend privilégier et ce vers quoi on se
dirige, quelle sera cette fameuse formule.
Entre autres M. le Président, je me permets ici de lui
faire une suggestion, en même temps qu'une interrogation vous avez
dit cela a été répété à
plusieurs reprises et je pense que c'est tout à fait justifié
dans une certaine mesure que le gouvernement devait favoriser un
rapprochement entre les avantages et les salaires payés aux travailleurs
dans le secteur public avec ce qui est versé aux travailleurs du secteur
privé. Vous avez d'ailleurs déposé des documents. Le
ministre de la Fonction publique nous en a fait état aux crédits
de la Fonction publique et tout cela. Une question bien spécifique:
L'indexation ne pourrait-elle pas, tout comme le niveau de salaire, faire
l'objet d'un appareillement avec l' évolution des salaires dans le
secteur privé? Le ministre des Finances me dira que c'est
peut-être difficile. Le ministre des Finances me dira que ce serait un
calcul, ce seraient des procédures, ce serait peut-être assez
appréciable comme boulot, comme travail, ce serait peut-être
difficile d'en arriver à un chiffre exact. Mais s'il veut être
vraiment sérieux dans sa démarche en voulant faire en sorte que
le salaire payé au travailleur dans le secteur public soit comparable
à celui du travailleur qui a les mêmes responsabilités dans
le secteur privé, peut-être qu'éventuellement le
gouvernement pourrait en arriver à une clause d'indexation qui serait
comparable ou appareillée à ce qui est payé dans le
secteur privé depuis quelques années ou encore dans les
conventions collectives qui ont été signées cette
année.
Mais la grande question, M. le Président, dans tout cela, peu
importent les formules, peu importe le résultat du jeu ou ce avec quoi
le ministre des Finances peut jongler actuellement, c'est qu'il y a quand
même des travailleurs qui sont inquiets, compte tenu des offres qui ont
été présentées. Est-ce que le gouvernement peut
garantir je pense que c'est bien simple qu'aucun travailleur dans
les secteurs public et parapublic n'aura à subir de perte de revenu
réelle suite aux offres qui sont déposées? Entre autres,
on se rappellera le ministre des Finances s'en souviendra certainement
la déclaration de son collègue, le ministre des Affaires
sociales, devant le comité provincial des affaires sociales à
Trois-Rivières où il a dit qu'il n'était pas question de
remettre en
cause aucun des droits acquis au cours des négociations
antérieures. J'aimerais bien que le ministre nous dise ce qu'il en est.
Peut-être qu'il pourra y répondre en répondant à la
question que je lui formulais tout à l'heure: Est-ce qu'il peut garantir
qu'aucun travailleur n'aura à subir de perte de revenu
réelle?
La question des services essentiels est assez importante. Cet aspect est
certainement un aspect appréciable de tout le dossier. Je laisserai le
soin à mon collègue, le député de Saint-Laurent,
d'intervenir quelques minutes là-dessus avant que mon temps de parole
soit épuisé.
Voilà l'essentiel des questions principales que je voulais
formuler au ministre des Finances ce matin. Je pense que c'est là qu'est
le problème dans le moment. C'est évident qu'il y a tout l'aspect
de la mécanique, de l'information, des conseils pour l'information, des
échanges d'information, etc. C'est un aspect, je pense, qui est
résiduaire, quand même, au dossier. L'aspect principal dans ce
dossier et je pense que les déclarations de part et d'autre en
témoignent c'est l'aspect financier, c'est l'aspect des clauses
d'indexation. J'ai formulé peut-être cinq ou six questions. J'ai
formulé des suggestions ce matin et j'ose croire que le ministre pourra
y répondre tout à l'heure et peut-être qu'on pourra revenir
sur la question si le temps le permet. (11 heures)
J'aurais cependant quelques questions spécifiques avant de
terminer. Une question au niveau des enseignants. Le ministre nous a dit qu'au
niveau local cela allait très bien, même s'il y a seulement une
table sur 67 qui négocie. Celui-ci nous a dit que dans la
précédente convention, au niveau local, les choses
s'étaient négociées beaucoup plus tardivement, une fois
que pas mal de boulot avait été effectué au niveau de la
table centrale. Il y a quand même une chose, il y a l'arrêté
en conseil no 262 du mois de janvier 1979 qui a été
adopté, et ce en vertu de la loi 55, et qui fait que plusieurs
syndicats, plusieurs enseignants du Québec ne sont pas du tout
satisfaits. Le ministre des Finances, comme d'autres de mes collègues,
auront certainement reçu des représentations de la part des
enseignants dans chacun de leur comté. Je n'ai qu'à prendre un
des nombreux télégrammes j'en ai reçu au moins une
dizaine jusqu'à maintenant où les représentants des
syndicats d'enseignants font des représentations auprès du
ministre de l'Education et lui disent à peu près ceci: "A
l'occasion de l'ouverture de la table sectorielle de négociations, nous
réitérons notre volonté ferme de voir ramenés au
niveau local les points suivants: dossier personnel, congés sociaux,
affectation et mutation ainsi que le retrait de l'article 111 du décret
sur le partage des objets de négociation. Nous refusons de
négocier localement aussi longtemps que le respect de ces droits acquis
ne nous sera pas garanti." C'est peut-être un des éléments
importants du problème que vous rencontrez actuellement au niveau des
tables locales.
Un autre aspect bien spécifique du dossier que je voudrais porter
à l'attention du ministre des Finances: le dossier de la
Société des alcools. Comment expliquer que le gouvernement ait
placé en dehors de la négociation, et ce encore en vertu de la
loi 55, la négociation avec les employés de la
Société des alcools? Votre argument était que c'est une
entreprise de nature privée de mise en marché, mais j'aimerais
que le ministre nous donne plus de détails sur les arguments que le
gouvernement invoque pour que le dossier de la Société des
alcools ne soit pas à la table centrale.
Une autre question bien spécifique sur le dossier de la
Société des alcools. Il y a eu des grèves perlées
depuis quelques jours, même si le ministre nous dit que cela va
très bien et qu'il n'y a pas de problème. Est-ce que le ministre
est informé d'une plainte qui a été formulée,
présentée par des représentants syndicaux à la
suite de la fermeture d'un magasin dans la région de Sherbrooke
où le gouvernement aurait procédé à l'embauche de
travailleurs occasionnels pour maintenir le magasin ouvert? On sait que des
plaintes ont été formulées auprès du ministre du
Travail cette semaine, cela se serait déroulé lundi dernier. Les
travailleurs de ces secteurs ont été vraiment choqués, ils
ont porté une plainte au ministre du Travail, ils ont porté une
plainte au ministre de la Justice aussi parce que cela ne va certainement pas
dans le sens de la loi 45 qui a été adoptée par le
gouvernement du Québec.
Une dernière question. Le ministre des Finances a fait
état de la négociation à l'Hydro-Québec nous disant
que cela était assez ralenti là-bas. J'aurais peut-être une
question spécifique qu'il aura certainement présumée parce
que c'est une question qui revient souvent, c'est la question des fonds de
pension des travailleurs de l'Hydro-Québec. Jusqu'à maintenant,
à plusieurs reprises, dans le cas de ceux qui, avant la nationalisation
de 1962, évoluaient pour des compagnies privées et qui ont
été intégrés à l'Hydro-Québec, des
représentations ont été faites; on sait que ces gens ne
sont pas satisfaits du nouveau régime ou du fonds de pension qu'ils ont
actuellement. Ceux-ci soutiennent qu'ils auront à subir des pertes de
revenu appréciables. C'est strictement une question au ministre: Ne
croit-il pas que le moment le mieux choisi serait peut-être la
présente négociation pour régler ce problème?
M. le Président, c'était là l'essentiel de mes
commentaires. Je sais qu'il reste quelques minutes à mon intervention
et, par un droit de substitution, M. le Président, vous me permettrez de
céder la parole, pour quelques minutes, à mon collègue le
député de Saint-Laurent pour qu'il intervienne sur le sujet
spécifique dont j'ai donné préavis au ministre tout
à l'heure. Merci.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Portneuf, je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que vous venez de
dire en ce qui concerne le droit de substitution. Je pense que le leader
parlementaire de l'Union Nationale a un droit de
parole privilégié en la matière et à moins
qu'il y ait un consentement unanime, je ne saurais accepter pareille
substitution.
M. Bellemare: Je vais poser quelques nouvelles questions et le
ministre répondra. Quand on parle d'indexation pour les formules
suffisantes mais non absolues, est-ce qu'il y a une formule ou plusieurs
formules différentes? Deuxièmement, est-il vrai que la FTQ aura
un décret de prolongation de la convention collective en juin 1979, pour
un an, avec la fixation de nouveaux salaires et avec le consentement du
ministre? On a annoncé qu'il y aurait une convention prolongée
d'un an à la CEQ. Le ministre a dû lire cela avec beaucoup
d'intérêt lui aussi. Cela me surprend énormément
qu'à cette période des négociations on vienne l'affubler
de cette notion.
Je demande aussi des détails sur la notion de souplesse des
conventions collectives. C'est quoi, au juste? Est-ce que cela touche seulement
les conditions de travail? Chose certaine, mon collègue de Portneuf est
revenu assez fermement sur la notion d'indexation des salaires; je pense que
les questions qui ont été posées tout à l'heure
devraient avoir une réponse.
Quand on parle de revenir sur la table centrale, est-ce que c'est la
question de la publicité des négociations à cette table
qui pose le plus grand problème maintenant? Dans l'article de la Presse:
"Reste la table centrale. Il semble que l'on arrive à un compromis qui
prévoira des débats publics entre les deux parties où le
front commun et le syndicat expliqueront chacun périodiquement leur
position." Avec le nouveau conseil d'information, je pense que cela...
Maintenant, pourquoi ne pas avoir créé le centre de
données, tel que le recommandait le rapport Martin-Bouchard?
C'était un des principaux objectifs qu'avait eus la commission dans sa
recommandation, établir un centre de données. On aurait pu
éviter, je pense, la controverse entre le gouvernement et le front
commun sur les conditions de travail dans les sections privées. Je pense
qu'il y aurait là un partage des tâches entre le syndicat et les
commissions scolaires.
Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir copie de l'arrêté
ministériel qu'a cité tout à l'heure le ministre pour les
quatorze articles sur lesquels on s'était entendu? Je demande qu'on me
la fasse parvenir; non, pas tout de suite.
M. Parizeau: Je peux le déposer si vous voulez.
M. Bellemare: Bien, merci.
M. Parizeau: M. le Président, je l'ai.
M. Bellemare: Merci. Est-ce que vous en voulez une copie,
messieurs?
M. Parizeau: II manque un exemplaire, M. le Président,
mais on peut demander qu'on en fasse faire d'autres.
Le Président (M. Richard): On va s'arranger pour faire
photocopier le document.
M. Bellemare: Allez donc faire faire des copies. J'aborderai, un
peu plus tard, les coûts, M. le Président, sur les
négociations en cours. Je vous donnerai un certain aperçu qu'on
nous a déposé ici en Chambre, l'examen des crédits
budgétaires de la fonction publique, 1978/80; j'aborderai cela tout
à l'heure. Je vais laisser le ministre répondre à
plusieurs des questions que nous avons formulées, mon collègue de
Portneuf et moi-même.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, commençons par
répondre à ces questions dans l'ordre à peu près
où elles ont été posées. D'abord, la question de
l'indexation. Il n'y a à l'heure actuelle, je pense, plus de confusion
du tout si jamais il y en a eu quant à l'attitude que le gouvernement a
à l'égard de l'indexation. Dans la déclaration que j'avais
faite il y a quelques mois et à laquelle le député de
Portneuf faisait allusion, j'avais indiqué très clairement que
les formes d'indexation qu'on a connues autrefois, il n'en était pas
question.
M. Bellemare: Je n'ai pas très bien compris. Il n'en
était pas question?
M. Parizeau: Que les formes d'indexation qu'on a connues dans les
conventions précédentes, il n'en était pas question. Mais
vous ne trouverez nulle part dans ma déclaration une affirmation qu'il
n'y en aurait pas d'autre. Le fait est qu'à l'heure actuelle il y en a
une d'acceptée dans une convention collective signée,
c'est-à-dire celle de PACT, les enseignants anglo-catholiques; il y en a
une autre de déposée, précise, à
l'Hydro-Québec, où la compensation se fait essentiellement par du
forfaitaire; il y en a une de déposée à la fonction
publique et au COPS, au Cartel des organismes professionnels de la
santé.
M. Bellemare:... de vos $84 millions?
M. Parizeau: La question que pose le député de
Johnson est d'un autre ordre. Les conventions collectives en cours à
l'heure actuelle prévoient certaines formes d'indexation. Il faut les
assurer. C'est tout à fait autre chose.
Je parle de l'avenir, de ce que nous sommes en train de négocier.
Il y a des formes d'indexation qui sont sur la table. Il serait incroyable que
je dise maintenant, et à l'égard des conventions collectives qui
viennent à échéance dans quelques mois, que la formule
d'indexation serait différente ou nouvelle avant de savoir comment les
propositions que j'ai aux tables où on négocie, avant de voir
comment cela tourne et comment cela aboutit. Je n'ai d'aucune espèce de
façon le goût de me barrer les pieds sur le plan de la
définition de ce qu'est une formule d'indexation. Cela se
négocie
et je ne vais pas préjuger du résultat de la
négociation. J'en ai mis deux sur la table et je regarde. Dans un cas,
cela les a tentés. Ils ont signé. Dans les autres cas, on
discute. La négociation, c'est cela.
Le député de Portneuf disait: On pourrait peut-être
chercher à utiliser les réouvertures de conventions collectives
comme alternative à des formes d'indexation. On y a pensé. Il n'y
a pas de doute que cette question a été discutée avec le
syndicat des fonctionnaires. Le député de Portneuf disait: On
pourrait aussi chercher à apparier les augmentations dans le secteur
public avec celles que l'on constate dans le secteur privé si je
comprends bien sa pensée année après année
ou période après période.
Je pense qu'il faut faire attention à cette formule pour la
raison suivante. Nous avons, à l'heure actuelle, dans le secteur public
des gens qui sont payés au niveau du secteur privé ou en dessous
de la moyenne du secteur privé. Je pense ici, par exemple, aux ouvriers
de la fonction publique. Eux, ils sont clairement au niveau du marché ou
en dessous du marché. On ne peut pas leur donner la même chose, le
même pourcentage d'augmentation qu'à des gens dans le secteur
public il y en a aussi qui sont 35% en avant du secteur
privé. Il ne faut pas se faire d'illusion. Ce n'est pas parce qu'on a
souvent mis l'accent et moi aussi, d'ailleurs sur le fait que
plusieurs groupes dans le secteur public sont en avant du secteur privé
que tout le monde dans le secteur public est en avant du secteur privé.
Il y a encore des cas de rattrapage. Il y a des cas où il faut donner
des pourcentages d'augmentation plus substantiels que dans d'autres, si on veut
justement garder un certain rapport avec ce qui se paie dans le secteur
privé. C'est pour cela que je suis obligé de répondre au
député de Portneuf: Une sorte de formule unique pour tous les
groupes, ce n'est pas pensable, parce que les écarts par rapport au
secteur privé sont vraiment trop grands.
Quant à la question de l'arrêté en conseil, la liste
des quatorze points, pour ce qui a trait au partage des matières dans le
cas des commissions scolaires entre ce qui sera matières locales et ce
qui sera matières à la table centrale, effectivement,
l'arrêté en conseil confirme l'entente intervenue entre les
parties sur quatorze points. Mais comme l'a dit le ministre de l'Education, ce
n'est pas exclusif. S'il y a des ententes sur des points additionnels, cela
fera plaisir au gouvernement de les confirmer. A l'heure actuelle, je suis
parfaitement conscient du fait que beaucoup de syndicats de l'enseignement
voudraient ajouter aux quatorze points un certain nombre d'autres points et,
effectivement, ils sont en discussion là-dessus. Mais ce que nous avons
fait, au gouvernement, c'est de dire: Au moins, vous vous êtes entendus
sur quatorze points. On confirme cela par un arrêté en conseil
selon les dispositions de la loi.
Le député de Portneuf soulevait la question de la SAQ. Je
signalerai au député de Portneuf que la Société des
alcools est effectivement sous l'empi- re de la loi 55. La SAQ apparaît
dans l'annexe des organismes d'Etat qui sont assujettis à la loi. Quant
à ce magasin de Sherbrooke où on aurait embauché du
personnel extérieur à la place des gens qui faisaient une
grève d'une journée, je dois dire que je n'ai pas
été averti de cela. Je remercie le député de
Portneuf de me l'indiquer et je vais faire une enquête
immédiatement là-dessus. Cela me paraît très
important. Il serait incroyable que le gouvernement, ses partenaires et les
organismes du secteur public ne respectent pas les lois qui ont
été adoptées. Je n'ai pas de renseignements sur ce magasin
spécifique de Sherbrooke, mais je suis content qu'on me l'ait fait
observer. Je vais demander des renseignements à ce sujet. (11 h 15)
M. Pagé: II a été déposé mardi
ou mercredi de cette semaine au ministère du Travail et au
ministère de la Justice.
M. Parizeau: Au ministère du Travail. Alors, je vais
demander au ministère du Travail de faire enquête et, M. le
Président, je remercie le député de Sherbrooke de m'avoir
alerté à...
M. Pagé: Portneuf, je vous en prie. M. Parizeau:
Comment?
M. Pagé: Je ne suis pas le député de
Sherbrooke.
M. Parizeau: Excusez-moi, pas Sherbrooke.
M. Pagé: Pas pour le comté, mais pour le
député.
M. Parizeau: C'est le magasin de Sherbrooke et le
député de Portneuf. Mes excuses.
Pour ce qui a trait à la question qui a été
posée sur l'Hydro-Québec, effectivement, M. le Président,
c'est un problème qui est discuté depuis bien longtemps. Il
s'agit du fonds de retraite ou des pensions payées aux employés
des anciennes sociétés qui ont été
nationalisées. Cela a été discuté longuement par
l'ancien gouvernement, longuement par nous. C'est un problème à
la fois complexe et très embêtant parce que, après tout,
des compagnies privées qui entrent dans le secteur public, il y en a
beaucoup. Il n'y a pas que des compagnies d'électricité qui
avaient des fonds de retraite de compagnies privées et qui, soit par
nationalisation, comme c'est le cas de ces compagnies, soit par achat par le
secteur public, sont entrées dans le secteur public. Qu'est-ce qu'on
fait avec ces fonds de retraite?
Là, je suis un peu embarrassé dans le sens suivant. C'est
évidemment une question interne à une société. Ce
n'est pas un objet de convention collective. Mais je suis au courant que
l'Hydro-Québec est prête à faire une proposition pour
essayer d'améliorer la situation de ceux qui émargent des fonds
de pension des sociétés électriques qui ont
été nationalisées. Cela m'embêterait un peu, M. le
Président comment dire d'aller
au devant d'une déclaration que l'Hydro-Québec n'a pas
encore faite et qui est, au fond, une question d'administration de la
société et qui n'est pas une matière de convention
collective. Si vous me le permettez, M. le Président, je
préférerais que l'Hydro-Québec fasse sa déclaration
avant que j'en fasse état publiquement.
M. Pagé: J'aurais une très brève question
là-dessus. Est-ce qu'on peut présumer que l'Hydro-Québec
pourra formuler cette proposition dans des délais quand même assez
brefs? Est-ce que cela se fera à l'intérieur de la
présente négociation?
M. Parizeau: Non. M. Pagé: Non.
M. Parizeau: Ce sera fait indépendamment puisque cela
n'est pas un objet de négociation.
M. Pagé: D'accord.
M. Parizeau: Je comprends que cela peut être assez rapide.
Cela veut dire quelques semaines probablement, j'imagine.
M. Pagé: D'ici quelques semaines ou, au plus tard, d'ici
quelques mois, la société...
M. Parizeau: Non, je ne pense pas que ce soit d'ici quelques
mois. Je pense que c'est plutôt d'ici quelques semaines.
M. Pagé: D'ici quelques semaines, la société
devrait présenter une proposition visant à améliorer ou
à corriger cette situation qui a été créée
pour les employés nationalisés.
M. Parizeau: C'est ce qu'on m'a indiqué.
M. Pagé: Espérant que ce sera satisfaisant.
Merci.
M. Parizeau: Mais, encore une fois, je suis un petit peu
embarrassé par la question parce que cela n'est pas un objet de
négociation, ce n'est pas dans la convention collective. C'est une
décision interne de la société, de l'Hydro-Québec.
Ce ne serait quand même pas correct qu'on se substitue à la
direction, au conseil d'administration pour annoncer cela.
J'en viens maintenant aux questions posées par le
député de Johnson. Sa première question, c'était:
Est-ce que, pour la CEQ, on va prolonger la convention d'un an? J'ai lu cela
avec le plus grand intérêt dans le journal. C'est la
première fois que j'entendais parler de cela. Je ne suppose pas que je
connaisse tout ce qui se passe partout et dans toutes les conversations
privées ou publiques qui peuvent se produire, mais vraiment j'ai
été renversé par cela. J'avais pensé à bien
des choses, mais pas à cela.
M. Bellemare: Je pense qu'il l'avait annoncé et qu'il l'a
dénoncé en même temps.
M. Parizeau: J'ai l'impression. Oui, le premier paragraphe puis
le deuxième paragraphe, mais enfin... Encore une fois, c'est la
première fois que j'entendais parler d'un truc pareil. Je ne vois pas
pourquoi, grand Dieu, on recourrait à une technique pareille.
M. Bellemare: Si le ministre me le permet, c'est peut-être
un essai pour le référendum.
M. Parizeau: Ah! Parfois, on lance comme cela... Il n'y pas que
les politiciens qui lancent des ballons pour voir.
M. Bellemare: Non. Je ne sais pas, mais c'est drôle, c'est
lui qui le crève tout de suite après.
M. Parizeau: Je n'ai pas très bien compris ce que le
député de Johnson voulait dire par cette question de souplesse
des conventions collectives. Est-ce que je pourrais lui demander d'expliciter
avant de répondre? Je ne suis pas certain d'avoir saisi ce qu'il voulait
dire.
M. Bellemare: Je pense que c'est vous-même qui nous avez
dit dans votre réponse au début et j'ai noté: Je demande
des détails sur la notion de souplesse des conventions collectives.
Qu'est-ce que c'est au juste?
M. Parizeau: Ah! Je comprends. Dans la conclusion tout à
l'heure de ma déclaration.
M. Bellemare: Oui.
M. Parizeau: Ce que je veux dire essentiellement, c'est ceci. Je
vais essayer d'en donner un exemple qui me frappe de plus en plus, Mme la
Présidente, depuis quelques mois. Prenons le cas de l'enseignement. On
se trouve, à l'heure actuelle, dans une situation qui est
complètement inversée par rapport à celle qu'on a connue
dans les années soixante ou même au début des années
soixante-dix, en ce sens que le nombre d'élèves tombe. Il tombe
pour des raisons de chute dans le taux de natalité et il tombe aussi,
dans certaines régions comme l'île de Montréal, parce que
la population se déplace dans les banlieues.
Quand vous combinez les deux choses, vous arrivez à des chutes
extraordinairement substantielles du nombre des élèves. Cela a
deux conséquences: la première est qu'une école qui avait
400 élèves et qui n'en a plus que 300, et qui n'en a plus que 200
ne s'administre pas tout à fait de la même façon que quand
la clientèle était élevée. Il arrive un moment
où, si les conventions sont trop précises, trop
spécifiques, laissent très peu de marge, cela devient
extraordinairement difficile d'administrer cela correctement.
Je comprends assez bien que la Fédération des commissions
scolaires dise: Ecoutez, donnez-
nous un peu de latitude pour nous adapter à cette situation
complètement nouvelle qui est celle de la réduction du nombre des
élèves. A l'opposé, la même réduction du
nombre des élèves entraîne chez les enseignants une
inquiétude parfaitement compréhensible pour leur emploi. Non
seulement la fermeture des écoles, mais le fait que dans les commissions
scolaires, chaque année, on met sur les listes de disponibilité
un assez grand nombre de gens et d'enseignants qui, très souvent, ont
une expérience assez avancée. On voit des enseignants, à
l'heure actuelle, qui ont dix ans d'expérience qui sont mis sur les
listes de disponibilité. Je comprends très bien que les
enseignants commencent à avoir des inquiétudes très
sérieuses quant à la façon dont leurs emplois sont
protégés. Cela ne me paraît pas aberrant que l'on dise: A
cause du même phénomène, c'est-à-dire la
réduction du nombre des élèves, il faut un peu plus de
souplesse sur le plan de l'administration et il faut une meilleure
sécurité sur le plan de l'emploi. Cela doit pouvoir se discuter,
un échange de cet ordre. Ce n'est pas une l' évolution, c'est
simplement une adaptation au fait que la situation a changé et que
devant la chute du nombre des élèves, il y a des problèmes
sur le plan de l'administration des commissions scolaires et il y a des
problèmes très sérieux sur le plan de la
sécurité d'emploi du côté des enseignants.
M. Bellemare: Je sais que la CEQ s'oppose fermement à
cela.
M. Parizeau: Avant de s'opposer fermement, il faudrait d'abord
commencer par en discuter.
M. Bellemare: Je l'ai vu. Mais, cela m'a surpris quand j'ai vu
que la CEQ s'opposait à ce raisonnement.
M. Parizeau: Cela doit pouvoir être discuté parce
qu'il faut bien comprendre; la situation s'est complètement
renversée. Il ne faut pas chercher à projeter, à l'heure
actuelle, dans ce domaine notre façon de négocier ou de
préciser des clauses dans les années soixante. Dans les
années soixante, on gérait l'expansion; là, on est en
train de gérer la contraction. Cela ne se fait pas de la même
façon, c'est clair.
Pour ce qui a trait à la table centrale, le député
de Johnson disait...
M. Bellemare: La publicité.
M. Parizeau: ... est-ce la publicité qui accroche? Non,
là-dessus, on s'est entendu.
M. Bellemare: Ah bon!
M. Parizeau: II y aura une table centrale où on
négociera à huis clos et, d'autre part, au début et
ensuite périodiquement, il y aurait des discussions de caractère
public pour faire le point et indiquer où on en est rendu, mais cela se
ferait en parallèle. Là-dessus, je pense que cela va; il n'y a
plus de points d'accrochage sérieux sur la question de la
publicité.
Pour ce qui a trait maintenant au centre de données, il nous a
fallu...
M. Bellemare: Les accrochages à la table centrale,
n'est-ce pas la publicité?
M. Parizeau: D'après ce que je comprends, Mme la
Présidente, ce qui reste à régler à l'heure
actuelle, c'est qui siégerait à la table centrale et les
organismes syndicaux qui seraient représentés. On a encore un
petit problème à régler qui ne me paraît d'ailleurs
pas insurmontable.
M. Bellemare: C'est le conflit des personnalités.
M. Parizeau: Dernière question, la question du centre des
données. Le ministère du Travail est en train de s'équiper
pour avoir une espèce de grande banque de données. Mais nous ne
pouvions pas attendre, au Conseil du trésor, qu'une telle banque de
données soit créée. Il fallait qu'on bouge très
vite, dans la mesure où on avait dit: On présentera à la
partie patronale et à la partie syndicale toute espèce de
données, toute espèce de comparaisons de salaires. Cela demande
quand même pas mal de préparation. C'est donc dans le cadre du
Conseil du trésor que cela s'est fait jusqu'à ce que quelque
chose de plus formel soit monté, mais cela nous a permis de
démarrer, au Conseil du trésor, immédiatement, il y a
déjà plus d'un an.
M. Bellemare: II reste que la lettre qui avait été
envoyée au premier ministre, en 1977, est demeurée sans
réponse sur les centres de données, et cela fait longtemps. En
1978, en février, ils avaient recommandé cela dans leur rapport.
Il y avait eu une lettre personnelle envoyée au premier ministre en 1977
pour la formation du centre de données et cela n'avait pas encore
été exécuté en 1978 et pas encore en 1979.
M. Parizeau: En pratique, étant donné la
façon dont le Conseil du trésor fonctionne, c'est-à-dire
ramasse ces données, les étudie, les analyse et les rend
disponibles immédiatement, en principe, les données ont
été rassemblées et ont été fournies.
M. Bellemare: Je pense que le gouvernement n'était pas
intéressé à l'établir.
M. Parizeau: Au contraire, non. La décision est prise, Mme
la Présidente. A l'heure actuelle, l'organisme en question au
ministère du Travail est en train d'être monté. Dès
qu'il sera en mesure de prendre l'ensemble des données dont nous
disposons au Conseil du trésor, on les lui fournira. S'imaginer
cependant qu'un centre de données c'est là-dessus que je
terminerai élimine des controverses, c'est un peu...
M. Bellemare: Les négociations vont être finies
quand il va être prêt à servir.
M. Parizeau: ... illusoire. Il ne faut pas s'imaginer, quand on
brasse des données statistiques, que nécessairement une partie a
de la science infuse. Quand on commence à comparer A avec B, X avec Y,
il y a toujours marge pour des interprétations et ces
interprétations vont donner lieu à des négociations aux
tables, j'en suis convaincu. Comme je le disais dans mon exposé
d'ouverture, j'en suis ravi.
M. Bellemare: Surtout sur A et B. C'est surtout privé ou
public.
M. Parizeau: C'est cela.
M. Bellemare: C'est cela qui est le principe.
M. Parizeau: C'est bien sûr.
M. Bellemare: C'est là qu'est l'achoppement.
M. Parizeau: Ce n'est pas l'achoppement. C'est que les
données sont fournies à la partie syndicale. Il y a toutes nos
comparaisons avec le secteur privé, et on leur dit: Regardez cela et
dites-nous ce que vous en pensez. Voici la liste des établissements
qu'on a utilisés, voici ce que cela a donné, voici comment cela
se compare, voici comment on passe du salaire à la
rémunération globale. Regardez tout cela...
M. Bellemare: A la table des fonctionnaires, M. le ministre, si
vous me permettez, il y a eu une discussion qui a duré deux jours sur
seulement un article de comparaison qui a été assez difficile
à établir quant à l'intérêt privé.
Deux jours.
M. Parizeau: Mais c'est peu.
M. Bellemare: Et cela n'a pas été
réglé.
M. Parizeau: Bien non, cela a été
réglé, justement, cela a duré deux jours, cela s'est
réglé.
M. Bellemare: Non, cela ne s'est pas réglé. Ce
point ne s'est pas réglé parce qu'on manque du centre de
données nécessaires pour arriver à une solution pratique.
On a dit: Ecoutez, laissons faire, laissons porter pour le moment.
M. de Belleval: Je pourrais dire là-dessus
qu'effectivement il y a eu des discussions qui ont porté...
M. Bellemare: Comment?
M. de Belleval: II y a eu effectivement des discussions qui ont
porté sur certains emplois pour lesquels il y avait des comparaisons,
pour des emplois comparables, entre le secteur privé et le secteur
public. Il y a eu des discussions. Le syndicat est arrivé avec certains
arguments. On les a confrontés et il y a eu accord. Actuellement, au
moment où on se parle sur ces points particuliers, comparaison secteur
privé et secteur public pour différents types d'emplois...
M. Bellemare: Même celle qui a fait l'objet d'un grand
débat sur...
M. de Belleval: Est-ce que vous pourriez me laisser terminer?
M. Bellemare: Oui, j'espère que vous allez nous parler de
ce qui n'a pas été réglé.
M. de Belleval: Mais pour prendre ce point qui est
intéressant, comparaison secteur privé et secteur public, il y a
des interprétations différentes, des controverses. Tout centre de
données objectif pourrait exister, mais il y aurait toujours de ces
controverses, de ces discussions. S'il n'y avait pas de controverses, s'il n'y
avait pas de discussions, si on pouvait régler tout cela par des
statistiques, ce serait merveilleux. On n'aurait même pas besoin de
négociations compliquées. On confierait toutes ces questions
à un ordinateur, qui nous fournirait les réponses. Ce n'est pas
comme cela que cela fonctionne. Il ne faut pas non plus accorder une magie que
n'ont pas ces centres de données. Dans le secteur des fonctionnaires, il
y a eu des discussions sur ces points en particulier de la négociation
qui est en cours; d'ailleurs, il y a à toutes fins utiles des ententes.
Les points qu'il reste à régler et là-dessus je
profite de cette intervention pour faire le point sur notre point de vue
à nous; le syndicat, hier, a fait le sien. De notre point de vue
à nous, les négociations, bien entendu, ne sont pas rompues. Je
ne dirais même pas qu'elles sont suspendues. Je dirais qu'au contraire le
processus de négociations continue, comme il a d'ailleurs
continué dans le passé. (11 h 30)
A plusieurs reprises durant les derniers mois, il y a eu, à
l'occasion, non pas des suspensions de négociation, mais des
périodes où les parties ont demandé de retourner vers
leurs mandataires pour clarifier certaines choses. C'est un peu la situation
qui se passe actuellement. Le syndicat des fonctionnaires a
décidé de retourner consulter certains de ses mandataires, sa
base, d'une certaine façon, comme nous l'avons fait d'ailleurs nous
autres, dans le passé, à certaines périodes.
Alors, nous avons bon espoir qu'une fois ces consultations faites, nous
nous retrouverons de nouveau...
M. Bellemare: Cela n'ira pas avant le mois de septembre.
M. de Belleval: Pas du tout, nous nous retrouverons de nouveau
à la table des négociations à courte
échéance. De notre côté, nous avons encore des
choses à discuter. Le syndicat lui-même aussi aura des choses
à discuter; il aura des points de vue nouveaux. Pour ma part, le
processus continue normalement. Il faut faire attention à ce
caractère alarmiste; d'ailleurs, faussement alarmiste. A mon point de
vue, en tout cas. C'est mon point de vue et je crois être assez bien
informé pour le donner.
M. Bellemare: Ils ont dit le 15 juin ce matin.
M. de Belleval: Je pense qu'il faut se méfier du
caractère alarmiste, faussement alarmiste, comme je le pense, de
certaines manchettes. Le processus est peut-être plus lent qu'on ne
pourrait l'espérer à certains égards, mais, à mon
avis, il se déroule, comme d'ailleurs l'a indiqué tantôt le
ministre des Finances, correctement. Pour ma part, je ne pense pas faire preuve
de trop d'optimisme en disant qu'effectivement nous aurons bientôt, dans
quelques semaines au plus tard, une convention collective pour les
fonctionnaires.
M. Forget: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le
député...
M. Bellemare: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: Je vous remercie, Mme la Présidente. Il me
semble, à écouter, depuis une heure, les échanges entre le
ministre des Finances, son collègue de la Fonction publique, le
député de Johnson et mon collègue de Portneuf, que le
gouvernement, à ce moment-ci, n'aura pas beaucoup de mal à
créer une impression générale que tout va bien, une
impression générale de sérénité dans cette
négociation. D'ailleurs, tout s'y prête: le fait que nous n'ayons
pas encore été témoins de confrontation importante,
peut-être une journée de grève ici et là, mais rien
de très sensible. Les media d'information, d'ailleurs, sont largement
silencieux sur le sujet des négociations. Je pense bien que c'est connu
aussi qu'à la fois du côté patronal et du côté
syndical, on ne s'attend à rien de sensationnel avant peut-être
l'automne prochain. Cela concorderait à peu près avec le
calendrier normal pour ce genre de débat.
Ce qui intéresse le public, à ce moment-ci, ce n'est pas
tellement la négociation et les péripéties de la forme, la
discussion sur la forme des tables et des sujets qui seront ou ne seront pas
discutés. Ce serait peut-être qu'on donne quelques indications,
quelques assurances, si possible, face à l'interrogation qu'à peu
près tout le monde conserve à l'esprit, savoir si, lorsque ces
confrontations viendront, lorsque le noeud va se nouer, probablement à
l'automne, les droits des usagers, particulièrement dans le secteur de
la santé, qui est un secteur particulièrement vulnérable,
ont des chances d'être mieux respectés cette fois-ci qu'à
une autre période dans le passé. Dieu sait qu'on a connu, depuis
une dizaine d'années, plusieurs arrêts de travail catastrophiques
dans le monde de la santé, dans le monde des hôpitaux en
particulier et des centres d'accueil.
Si on peut faire le point, à ce moment-ci, cela nous amène
à faire certaines constatations. D'ailleurs, on l'a mentionné
tout à l'heure, le premier élément qui nous frappe, c'est
que la mesure par excellence qui avait été créée
par le gouvernement actuel pour faire face à ce danger,
c'est-à-dire le Conseil sur le maintien des services de santé et
des services sociaux en cas de conflit de travail, ce conseil, dis-je, a
été créé avec un certain retard. Cela a
été mentionné. En soi, il n'y a rien qu'on puisse y faire.
Il devait être créé avant le 1er janvier, cette
année; il a été créé un peu plus tard.
D'ailleurs, il y a eu d'autres retards sur lesquels je n'insiste pas. Mais ce
n'est pas seulement le retard qui est remarquable, c'est aussi la composition
de ce conseil sur le maintien des services essentiels, composition qui,
déjà, a créé des difficultés de
fonctionnement pour ce conseil.
Même s'il n'est pas dans le feu de l'action encore, on peut
déjà prévoir qu'il sera difficile à ce conseil de
fonctionner adéquatement parce qu'il comporte des éléments
hétérogènes, très hétérogènes.
En particulier, les gens qui sont familiers avec le milieu de la santé
savent qu'il y a une personne en particulier qui est issue du milieu syndical
et qui est peut-être la personne qui a à son actif, si on peut
dire, le fait d'avoir fait sortir plus de monde, comme on dit, dans les
hôpitaux du Québec que toute espèce de permanent ou de
responsable syndical dans le milieu hospitalier. On comprend que cela
crée un certain climat qui, jusqu'à maintenant, semble avoir
empêché ce conseil des services essentiels de s'entendre sur le
rôle qu'il devait jouer.
Par exemple, on sait que son mandat prévoit je le lis
que "ce conseil est chargé d'informer le public sur la situation
qui prévaut en matière d'ententes des ententes pour donner
des services essentiels ou les listes syndicales qui tiennent lieu d'ententes
à défaut de pouvoir en conclure ou en matière de
listes syndicales et de maintien des services essentiels lors d'un conflit de
travail." Le public n'a pas été très informé; je
pense que c'est de notoriété publique. On ne sait pas, par
exemple, qu'à l'heure actuelle il existe, dans le secteur de la
santé et des services sociaux, quelque 500 établissements
où il n'y a ni liste, ni entente sur un total d'environ 1200
établissements. C'est donc une carence assez significative, il y a un
vide de ce côté-là. Bien sûr, le gouvernement peut
dire, lorsqu'il n'y a ni entente, ni liste, que le droit de grève ne
s'applique pas. Il y a suspension du droit de grève en vertu de
l'article 99 I. Nous reviendrons tout à l'heure à cette
question.
Il faut remarquer que, pour mettre en route la suspension du droit de
grève, il faut une intervention gouvernementale. Il serait
intéressant de savoir quelle sera l'attitude du gouvernement dans ces
cas-là, parce que non seulement faut-il constater qu'il n'y a ni
entente, ni liste, mais il faut que le gouvernement soit d'avis qu'il y a un
risque, qu'il y a un danger. C'est une question d'appréciation, on s'en
rend compte, et il serait intéressant de savoir d'avance quelle
interprétation le gouvernement va
faire de l'absence de dispositif dans un établissement pour
donner les services essentiels. Enfin, il y a également dans la loi une
disposition qui est inquiétante.
M. Bellemare: L'article 162A de notre règlement
spécifie que le député "peut prendre la parole aussi
souvent qu'il lui plaît, à condition de ne pas parler plus de
vingt minutes en tout. " Est-ce pour le groupe ou pour le député?
Une chose reste sûre: Précédemment, on avait établi
une espèce de règle, de consensus voulant que ceux qui parlaient,
à part celui qui posait la question principale, avaient, pour le groupe,
un droit de parole de vingt minutes.
La Présidente (Mme Cuerrier): Ce n'est pas
spécifié dans cet article 162A du règlement, M. le leader
de l'Union Nationale. Vous n'aviez pas de question comme telle...
M. Bellemare: J'ai un droit de parole
privilégié.
La Présidente (Mme Cuerrier): ... au moment où M.
le député de Saint-Laurent a commencé. Il pourrait, en
théorie, avoir droit à vingt minutes.
M. Pagé: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): De toute façon, M. le
député...
M. Pagé: ... si vous me permettez d'intervenir sur la
question.
La Présidente (Mme Cuerrier): Sur la question de
règlement?
M. Pagé: Oui. Mon collègue a non seulement en
théorie le droit d'intervenir vingt minutes, mais en pratique. Je pense
que vous étiez là, Mme la Présidente, lors du débat
entre le ministre de la Justice et le député de
Marguerite-Bourgeoys où, entre autres, les députés de la
majorité ministérielle ont eu droit à vingt minutes et
où moi-même, comme député de Portneuf, j'ai eu droit
à vingt minutes. Je pense que mon collègue de Saint-Laurent peut
continuer purement et simplement et prendre tout le temps qui lui est
alloué.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent. Je reviendrai à vous ensuite, M. le leader.
M. Forget: Je vous remercie, Mme la Présidente.
M. Bellemare: Avec un droit de parole privilégié,
on perd notre temps. On ne peut pas parler quand c'est le temps. C'est le Parti
libéral qui prend le pouvoir, même si c'est un droit de parole
privilégié.
M. Pagé: C'est le Parti libéral qui va prendre le
pouvoir, c'est certain.
M. Bellemare: Jamais! M. Pagé: C'est certain. M.
Bellemare: Non, non. M. Forget: N'anticipez rien.
M. Bellemare: II pense prendre le pouvoir, mais il ne prendra pas
le pouvoir.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le leader de l'Union
Nationale...
M. Bellemare: Ne vous fiez pas à cela, ne rêvez pas
en couleur.
La Présidente (Mme Cuerrier): ... nous pourrons terminer
plus rapidement, puisque c'est votre demande, avec les vingt minutes de M. le
député de Saint-Laurent si nous n'avons pas d'intervention, si
vous me le permettez. M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: C'était d'ailleurs le dernier point de cette
espèce de tour d'horizon de ce qui se passe dans le domaine des services
essentiels ou des mesures prises ou à prendre pour garantir la
prestation de services minimums, essentiels, au moment de grèves
lorsqu'elles se produiront. Le dernier point, c'est que l'avis de grève
n'est plus que de deux jours. Il y a donc là une situation où
lorsque la liste est déposée, lorsque la liste syndicale de
services qui sont jugés par le syndicat comme essentiels ou lorsqu'il y
a une entente, le droit de grève pour être mis en application
nécessite un avis de deux jours seulement. Or, il est bien clair que
s'il s'agit d'une liste, il est possible que la liste soit insatisfaisante,
soit déficiente. Si plusieurs listes provenant de plusieurs
établissements sont déposées à peu près en
même temps et si, peu de temps après, on reçoit des avis de
grève de deux jours, il est bien clair que le Conseil sur le maintien
des services essentiels aura fort à faire pour vraiment se livrer
à l'analyse de la situation et avertir le public, avertir le
gouvernement du risque qu'il peut y avoir dans la situation.
Ceci pose une question face à l'attitude du gouvernement
relativement à cette question. Il semble que le Conseil sur le maintien
des services de santé et des services sociaux essentiels n'ait pas
reçu beaucoup d'appui et de soutien technique pour l'exécution de
son rôle. Non seulement a-t-il été créé en
retard, non seulement sa composition a-t-elle déjà donné
lieu à des difficultés de fonctionnement, difficultés dans
la compréhension de son rôle, mais il ne semble pas disposer des
ressources suffisantes pour analyser, au moment où ils lui seront
transmis, les renseignements, les données de manière à
pouvoir avertir le public c'est là sa vocation selon la loi
de même que d'avertir le gouvernement qui devra définir une
position, en vertu de l'article 99 I, et dire si oui ou non il y a un risque,
si oui ou non le droit de grève peut être exercé.
Donc, à ce moment-ci, ce que l'on peut constater, c'est qu'il y a
plusieurs points d'interrogation qui se posent face à l'attitude du
gouvernement relativement à cette question des services essentiels. Dans
le climat de sérénité actuel, il serait facile de passer
par-dessus cela et dire: Bien, advienne que pourra, on verra plus tard. Mais
c'est à ce moment-ci que le gouvernement peut vraiment prendre les
dispositions nécessaires pour apporter quelque réassurance.
Plusieurs membres du gouvernement ont affirmé, le premier ministre
lui-même, le ministre des Affaires sociales il y a deux ans, il y a un
an, que les services essentiels seraient maintenus, que le public pouvait
être rassuré là-dessus. C'est à la suite de ces
affirmations qu'ils ont apporté ce projet de loi no 59 qui a
été adopté l'an dernier.
Il reste qu'il ne s'agit pas seulement de le dire, il va falloir le
faire. Les gestes concrets qui ont été posés
jusqu'à maintenant, l'absence de ressources, par exemple, pour le
conseil, et même les modalités qui ont entouré sa
création je termine là-dessus il est bien clair que
le gouvernement a voulu minimiser sa propre responsabilité. Par exemple,
dans la formation du conseil, il confie le travail au président du
Tribunal du travail, ce qui permet maintenant de dire au ministre des Finances:
Nous ne sommes pas responsables du retard, c'est le président du
Tribunal du travail qui doit disposer de cela. Même pour la composition
du conseil, c'est le président du Tribunal du travail. Dans le
mécanisme même de détermination des services essentiels, ce
n'est bien sûr pas le gouvernement, ce n'est même pas le Conseil
sur les services essentiels; dans un certain nombre de cas, il s'agit
strictement d'une décision syndicale de la liste syndicale. Et
là, le gouvernement va dire: Bien, ce n'est pas notre faute, c'est le
syndicat qui a jugé que les services essentiels devaient être tels
ou tels et ce n'est pas notre décision.
Malgré cet effort visible du gouvernement pour diminuer les
reproches qu'on peut lui adresser en plaçant sur d'autres la
responsabilité de donner les services essentiels, il y a un certain
nombre de décisions qui relèvent de lui, en particulier: donner
des services adéquats, des services de soutien adéquats pour que
le Conseil sur le maintien des services essentiels puisse assumer sa
tâche, qui est une tâche immense qui doit être faite
très rapidement, face à des centaines d'établissements
différents, et aussi nous indiquer quelle sera son attitude dans les cas
où il n'y a ni liste, ni entente, parce que ces cas sont encore
très nombreux. On devrait être actuellement dans la situation de
pouvoir dire: II y a soit une entente, soit des listes. (11 h 45)
II semble que, par stratégie ou autrement, un certain nombre de
syndicats, même s'ils ont le pouvoir de déterminer
unilatéralement la définition des services essentiels dans leur
établissement, se sont abstenus de le faire. Doit-on présumer
qu'il y a encore des négociations dans chacun des cas? C'est une
présomption qui ne peut pas être faite. C'est une
présomption qui n'est pas réaliste, qui n'est pas conforme
à la réalité. Donc, il y a un trou. Quelle sera l'attitude
du gouvernement? Il ne faut pas attendre qu'on soit en face d'une situation
d'urgence. Il faudrait le savoir dès maintenant. Il faudrait être
sûr au moins que le gouvernement sache, même s'il ne veut pas le
dire, ce qu'il va faire dans cette conjoncture. Rien n'est moins
évident. Lorsque l'automne arrivera, j'ai l'impression que le
gouvernement sera largement démuni face à la situation,
peut-être pas plus me dira le ministre des Finances que
d'autres gouvernements ont été démunis dans le
passé, mais je ferai et c'est vraiment ma dernière
remarque à ce sujet simplement allusion à la
décision qu'a prise le gouvernement du Parti québécois
dès son arrivée au pouvoir d'abandonner toutes les poursuites
face aux syndicats relativement au non-respect d'ordres de retour au travail ou
d'injonctions. Cette sanction qu'on a voulu retirer à ce
moment-là aux lois qui existaient à l'époque, qui avaient
été adoptées par un vote unanime de l'Assemblée
nationale à l'époque va revenir hanter le gouvernement parce que,
lui aussi, il aura le problème de faire respecter les lois. Quelle
certitude aura-t-il en dernière analyse que ces lois seront mieux
respectées que d'autres lois, étant donné l'attitude qu'il
a adoptée en 1977 relativement aux poursuites en cours à ce
moment-là? Il y a là aussi un immense point d'interrogation.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Saint-Laurent. M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je remercie le
député de Saint-Laurent de son intervention parce qu'elle a
certainement trait à un des aspects les plus compliqués des
négociations dans le secteur public depuis presque maintenant une
quinzaine d'années. On se rend compte qu'il est parfaitement conscient,
étant donné les postes qu'il a occupés au gouvernement, du
genre de difficultés que cela représente. Cela nous a permis
d'entendre une évaluation assez nuancée à la fois des
difficultés qu'on peut avoir et, d'un côté, des
progrès qui ont été faits. Ceci étant dit, je
voudrais cependant préciser une chose. Dans ce domaine, je suis un peu
sorti des eaux dans lesquelles normalement je navigue; comme président
du Conseil du trésor, j'ai à coordonner la partie patronale, mais
le fonctionnement du comité des services essentiels relève du
Code du travail. Les membres en sont nommés, comme je le disais
précédemment et comme l'a dit le député de
Saint-Laurent, par le président du Tribunal du travail. J'aurais
évidemment souhaité cela n'a pas été
possible ce matin que le ministre du Travail soit ici pour pouvoir en
discuter.
Donc, ce que je vais dire ici, ce n'est pas comme président du
Conseil du trésor. Ce n'est pas comme ministre des Finances
chargé de coordonner la partie patronale. Je vais fournir un certain
nombre de renseignements que j'ai et la perception que je peux avoir de ces
choses à l'heure actuelle.
Je voudrais seulement souligner brièvement une chose à
laquelle le député de Saint-Laurent a fait allusion, mais c'est
bien important de comprendre. Dans la loi 59, il y a deux façons
d'établir les services essentiels: ou par entente négociée
ou, s'il n'y a pas d'entente négociable entre je ne sais pas
l'hôpital et son syndicat, le syndicat dépose alors sa
liste de services essentiels, qui prime. Et ce sera au comité de
surveillance des services essentiels de dire: La liste déposée
par le syndicat est suffisante, à notre avis, ou elle ne l'est pas.
C'est tout à fait nouveau dans notre législation. C'est un
concept tout à fait inédit. On n'a jamais essayé cela
avant. Jusqu'à maintenant, le "score", si je puis m'exprimer ainsi, est
le suivant. Sur 1180 ententes ou listes que l'on devrait avoir pour couvrir
l'ensemble du secteur de la santé nous nous entendons donc le
député de Saint-Laurent et moi sur les chiffres, il disait 1200,
et 1180, c'est la même chose au 18 avril, il était
entré au ministère des Affaires sociales, comme ententes
négociées ou comme listes déposées, 777 listes.
Donc, à peu près les deux tiers.
On dira que, pour une première expérience, tout n'est pas
parfait; bien sûr, tout n'est pas parfait, mais les deux tiers des
unités sont maintenant couvertes si je peux m'exprimer ainsi
par des ententes négociées ou des listes
déposées. Ce n'est pas parfait, c'est certain, mais c'est quand
même bougrement mieux que certaines des négociations que j'ai
connues dans le passé ou longtemps avant, longtemps après
plutôt... Concernant l'échéance des conventions
collectives, il n'y a à peu près rien de réglé
encore. Encore une fois, on peut faire de l'angélisme en disant: Tout
devrait être couvert. On peut dire: C'est sérieux parce que la
bouteille est au tiers vide. On peut être plus optimiste en disant: La
bouteille est aux deux tiers pleine. On dit la même chose, mais on
regarde cela d'une façon différente. Je préfère
considérer que, pour une fois qu'on modifiait les règles
applicables aux services essentiels, on a réussi à faire les deux
tiers du chemin du premier coup.
Une Voix: Et avant on n'avait pas de bouteille.
M. Parizeau: Ce n'est pas si mal. Avouez-le. Comme le dit mon
collègue, avant, de toute façon, on n'avait pas de bouteille.
Je voudrais, cependant, établir une distinction entre deux
choses, entre deux groupes avec lesquels nous négocions. Pour ce qui a
trait au COPS, le Cartel des organismes professionnels de la santé,
à la FIIQ, les infirmières et infirmiers du Québec, je
voudrais souligner que, comme nous sommes en négociation avec eux, leurs
conventions collectives sont venues à échéance avant. Il y
a des ententes ou des listes de déposées dans un assez grand
nombre de cas. C'est assez bien couvert. Là où, semble-t-il, nous
avons un peu plus de problèmes à l'heure actuelle, c'est dans le
cas de la Fédération des affaires sociales dont la convention
collective vient à échéance dans deux mois. En somme, il y
a un certain contraste entre les gens dont les conventions collectives sont
venues à échéance, où le travail a
été plus avancé, et ceux qui sont dans ce dernier cas.
Finalement, je voudrais dire une chose au sujet des services mis
à la disposition du comité des services essentiels. Vous
comprendrez que le président du Conseil du trésor ne peut
entendre qu'avec une oreille sympathique toute demande de fonds, qui viendrait
d'un comité de services essentiels, destinée à faciliter
sa tâche à lui, le président du Conseil du trésor,
comme coordon-nateur des négociations. Je n'ai jamais refusé un
sou sur le plan des services que ce comité des services essentiels
pourrait vouloir. Je n'ai pas du tout, d'aucune espèce de façon,
l'intention de lui rationner le personnel, les locaux ou quoi que ce soit. Je
peux donner au moins l'assurance au député de Saint-Laurent qu'il
ne sera pas soumis au rationnement.
Ceci étant dit, M. le Président, ce sont les quelques
observations que j'avais à faire sur l'intéressante intervention
du député de Saint-Laurent.
M. Bellemare: Est-ce que le ministre pourrait compléter en
nous disant si c'est vrai, d'après un article qui a paru dans le Soleil
du 12 janvier 1979, que 93% des syndiqués affiliés à la
CSN-négocia-tions n'ont pas encore rencontré la partie patronale,
malgré l'échéancier restreint, que 84% des syndicats de
l'Alliance des paramédicaux sont dans la même situation, que 30%
des sections du Syndicat canadien de la fonction publique ont conclu des
ententes, que 54% d'entre elles sont toujours en négociation, que 12%
des groupes de la section 298 FTQ ont conclu une entente sur les services
essentiels et que 72% d'entre eux poursuivent des discussions, malgré la
date d'échéance du 1er janvier 1979, que 85% des syndicats de la
Fédération des infirmières et infirmiers du Québec,
pour la plupart dans la région de Montréal, sont en
négociation avec leur employeur ou ne l'ont pas encore rencontré,
que 58% du Syndicat des infirmières du Québec avaient
réussi à s'entendre avec la partie patronale et que bien que 24%
du SPIC avaient pu déposer une liste, aucun accord ne devait encore...?
Cela fait une liste.
M. Parizeau: M. le Président, cette liste-là...
M. Bellemare: Vous m'avez dit... M. Parizeau: ... date de quand?
M. Bellemare: 777 listes sur 1180.
M. Parizeau: Les chiffres que le député de Johnson
me donne datent de quand?
M. Bellemare: Du 12 janvier 1979.
M. Parizeau: Ah oui!. Le 12 janvier, je veux bien... Les chiffres
que je citais sont du 18 avril.
M. Bellemare: 777 listes sur 1180.
M. Parizeau: Sur 1180, au 18 avril.
M. Bellemare: Est-ce que le ministre est bien au courant des
syndicats qui font défaut?
M. Parizeau: Pardon?
M. Bellemare: Est-ce que le ministre est bien au courant et
pourrait nous donner les noms des syndicats qui font défaut?
M. Parizeau: Non. J'ai essayé, dans les grandes lignes, de
l'indiquer tout à l'heure, mais ces ententes ou listes
déposées le sont au ministère du Travail et, ensuite,
elles sont communiquées au ministère des Affaires sociales. Je
n'ai pas cela syndicat par syndicat parmi ceux qui font défaut, mais
j'imagine que ce doit être possible de le trouver par le truchement du
ministère du Travail. D'ailleurs, le ministre des Affaires sociales,
interrogé en Chambre périodiquement je sais que le
député de Saint-Laurent l'a interrogé à plusieurs
reprises a toujours donné une série très
précise des cas qui étaient en cause à ce
moment-là.
M. Bellemare: Si je fais un résumé de ceux qui
manquent, ce sont probablement ceux de la CSN?
M. Parizeau: J'imaginerais que la différence entre 777 et
1180, pour une bonne part, doit être la Fédération des
affaires sociales.
M. Bellemare: L'autre question que je voudrais poser
s'adresserait au ministre de la Fonction publique. M. Harguindeguy disait ce
matin à la radio que ce sera long maintenant, contrairement à ce
que nous disait tout à l'heure l'honorable ministre. Il disait ce matin
à la radio que ce n'est pas avant la fin de juin qu'il pourra avoir
l'avis des centrales de son syndicat et qu'après cela pourrait
s'éterniser encore pendant plusieurs semaines avant qu'un consensus
puisse s'établir. Je prévois donc que ce n'est pas avant
septembre ou peut-être le commencement d'octobre que la position des
fonctionnaires sera véritablement connue. Est-ce que le ministre, au
lieu de nous dire quelques jours, quelques semaines, pourrait
interpréter la déclaration de M. Harguindeguy?
M. de Belleval: Comme on dit, cela prend deux personnes pour
danser le tango; cela prend aussi deux parties pour conclure une convention
collective.
M. Bellemare: C'est M. Trudeau qui dit cela?
M. de Belleval: Ne mêlons pas davantage ceux qui nous
écoutent, M. le député de Johnson.
M. Bellemare: C'est un aparté, vous avez donné un
exemple.
M. de Belleval: Donc, cela prend l'accord de deux parties pour
conclure une convention collective et pour la conclure à un moment
donné.
M. Bellemare: Pour ouvrir une parenthèse, cela prend
deux...
M. de Belleval: Pour dérider un peu cette salle un peu
austère. Vous ne pourrez pas m'accu-ser de maintenir ce climat.
M. Bellemare: Est-ce que c'est la prévision du ministre
que cela va être plus rapide que ce que disait ce matin M.
Harguindeguy?
M. de Belleval: Je peux donner mon appréciation
personnelle. Je ne peux pas parler pour M. Harguindeguy. Il a ses propres
perceptions. Mais il faut bien voir aussi le genre d'échéancier
dans lequel lui-même est actuellement impliqué. Il y a un
congrès général de son syndicat qui sera tenu à la
mi-mai. Evidemment, dans la quinzaine de jours qui précèdent ce
congrès, il doit y avoir un certain nombre d'opérations normales
qui se déroulent au sein de ce syndicat pour la formation des
délégations, etc. Ceci veut dire qu'il n'est pas beaucoup en
mesure, d'après ses propres paroles, de procéder aux
consultations approfondies qu'il estime devoir faire dans les circonstances
avant la conclusion de ce congrès. Donc, on peut prétendre
qu'après le 15 mai les choses seront plus claires. Je n'ai pas à
préjuger des affaires internes du syndicat; je mentionne tout simplement
qu'il y a effectivement...
M. Bellemare: Nous non plus, mais on considère cela.
M. de Belleval: ... un tel congrès et que cela pose des
contraintes de la part du syndicat, des contraintes que je respecte. A ce
moment-là, c'est normal qu'on attende vers la fin du mois de mai pour la
conclusion finale de nos négociations. Je suis confiant qu'à la
fin du mois de mai, au cours du mois de juin, on sera en mesure de conclure une
convention collective avec le Syndicat des fonctionnaires.
M. Bellemare: Est-ce que le ministre pourrait nous donner son
avis sur la loi 59 qui est en vigueur? Ils disent qu'il y a un conseil
d'information sur les négociations chargé d'informer le public.
"Ce conseil doit faire rapport au public au plus tard le 30e jour qui suit la
date du dépôt des propositions patronales et la date d'expiration
d'une convention collective", c'est-à-dire le 30 avril 1979. (12
heures)
M. de Belleval: Je crois que le ministre des Finances a
répondu tantôt à cette question en ce sens que la formation
du comité est de la responsabilité du président du
Tribunal du travail, que ce comité a maintenant été
formé et qu'il se prépare à fonctionner normalement.
Maintenant, en ce qui concerne les négociations avec les fonctionnaires,
comme vous l'avez vous-même fait remarquer, nous fonctionnons en fonction
des anciennes lois, puisque la convention collective des fonctionnaires est
expirée depuis le 30 juin 1978. Donc, cette question du comité
d'information ne s'applique pas aux négociations avec les
fonctionnaires.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Très
brièvement, j'aimerais revenir à l'exemple de la bouteille du
ministre des Finances. Il est exact que sa bouteille est aux deux tiers pleine
et on peut s'en réjouir avec lui. Elle est également au tiers
vide. Quant à la partie qu'il a remplie, quant à la partie qui
est pleine, il y a quand même quelque chose qui mérite
d'être dit, c'est que sur les 777 ententes ou listes qui sont
déposées au ministère du Travail, il y a seulement 250
ententes et quelque chose comme 525 listes, si mes informations sont exactes.
Or, comme les listes, par définition, ce ne sont pas des ententes, elles
posent un problème d'appréciation, d'évaluation.
Le problème d'appréciation et d'évaluation, c'est
évidemment une chose que le Conseil sur le maintien des services
essentiels doit faire. Il doit se rendre compte et c'est beaucoup plus
exigeant dans le cas d'une liste que dans le cas d'une entente, pour des
raisons évidentes si ces listes sont adéquates pour
vraiment garantir le maintien des services essentiels, et en informer le
public. Or, il semble que, de ce côté, il y a un différend
au sein du comité sur les services essentiels, entre le
côté syndical et le côté patronal. Je n'aime pas
utiliser ces expressions parce qu'ils sont tous censés avoir la
même optique et le même objectif, mais il reste que tout le monde a
des antécédents, à ce comité. Il y a des
comités neutres, mais il n'y a pas d'individus neutres. Il semble y
avoir un différend quant à l'interprétation du mandat.
Certains voudraient voir le comité passer des jugements et les
rendre publics sur la suffisance ou l'insuffisance des listes syndicales, et
d'autres souhaitent tout simplement borner leur information à la
divulgation du nombre de listes. Il est évident qu'on se trouve devant
la situation où, effectivement, la bouteille est aux deux-tiers pleine
mais, dans le fond, à moins que le comité ait le mandat d'aller
plus loin, on ne sait pas de quoi elle est pleine. On ne sait pas si elle est
pleine d'ententes et de listes adéquates pour garantir le maintien des
listes essentielles ou si elle est pleine de listes et d'ententes qui ne sont
pas adéquates pour le maintien des services essentiels. La formulation
de la loi là-dessus était suffisamment ambiguë pour que
chacune des deux versions reçoive un semblant d'appui d'après
l'analyse des textes. Quelle est l'intention du gouvernement? Est-ce que le
gouvernement, puisque c'est lui qui a fait adopter cette loi, voulait que le
comité des services essentiels se prononce sur la validité en
quelque sorte des listes, ou simplement sur leur existence? Je pense que, d'ici
quelques jours, d'ici quelques semaines au plus tard, le gouvernement devra
prendre position et interpréter cette loi parce qu'il est bien sûr
que ce n'est pas le tribunal qui va interpréter la loi. Cela devrait
être le gouvernement qui indique le sens qu'il faut donner au mandat du
comité sur les services essentiels.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Saint-Laurent. M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, le comité sur le
maintien des services essentiels a tenu jusqu'à maintenant neuf
réunions, et les neufs réunions qu'il a tenues ont porté
essentiellement sur l'examen des listes, c'est-à-dire que le travail
dont parle le député de Saint-Laurent est en train d'être
fait. Il se fait là au moment où on se parle; il y a des
réunions qui se tiennent qui regardent les listes et ce qu'il y a
dedans. Quant à savoir quelles sont les intentions du gouvernement, de
passer ce point comme jugement qu'il peut porter sur les listes, il faut que le
recensement ait été fini. Il est évident que quelles que
soient les interprétations qu'on puisse donner au mandat du
comité de maintien des services essentiels, lui il a une analyse
à faire des listes, et on va voir très rapidement, au rythme
où il siège, combien de ces listes ont l'air d'être, en
gros, satisfaisantes, et combien d'autres, manifestement, ne permettraient pas
vraiment le maintien de services essentiels corrects.
Cela me paraît prématuré aujourd'hui, alors qu'ils
sont en plein travail et qu'ils évoluent très vite dans l'examen
des listes, de dire: Quand le gouvernement aura une vue complète des
listes, qu'est-ce qu'il va faire? Je préférerais que le
comité de M. Picard finisse rapidement l'examen des listes qu'il a
devant lui. Je peux difficilement aller plus loin que cela, à l'heure
actuelle. Je regrette que le ministre du Travail ne soit pas ici, mais, comme
on l'a dit dans cette Assemblée, il est souffrant pour quelques jours,
donc au lit; il n'a pas pu participer au débat de ce matin alors
qu'effectivement cela relèverait de lui.
Mais, encore une fois, laissons le comité sur les services
essentiels faire le tour des listes avant de se demander, si elles
n'étaient pas correctes ces listes, ce que le gouvernement ferait. On va
voir.
M. Forget: M. le Président, ce n'est pas là la
nature du problème. Il semble que, loin de faire l'analyse des listes,
le comité en question a occupé une grande partie de ses
réunions, jusqu'à maintenant, à se poser des questions sur
son mandat. Les doutes étaient à ce point aigus qu'il a
récemment résolu d'adresser une lettre au ministre du Travail
pour éclairer son action future. Quant à ce qui est des
ressources, le ministre a dit qu'il donnerait les ressources pour permettre
l'analyse des listes, mais c'est une nouvelle, parce que, jusqu'à
maintenant, il y a très peu de ressources pour ce comité. Je suis
sûr qu'ils se réjouiront de l'affirmation du ministre des
Finances. Essentiellement, il ne s'agit pas de savoir quelle sera l'attitude du
gouvernement face aux listes, mais de savoir si le comité
lui-même, comme comité autonome chargé d'assurer le
maintien des services essentiels, peut, lui, porter un jugement sur la
suffisance ou le caractère de validité des listes qui lui sont
fournies et qui sont déposées au ministère du Travail.
C'est cela qui pose une question.
Certains croient qu'il s'agit simplement de donner le décompte
des listes en public et que son mandat est rempli. D'autres croient au
contraire qu'il faudra porter un jugement, que le Conseil des services
essentiels devrait porter un jugement sur la suffisance de ces listes, sans
attendre le conflit de travail. Si on lit l'article 99i, on peut
prétendre que le jugement du conseil sur le caractère suffisant
ou non du maintien des services essentiels, cela doit être connu
seulement au moment où il y a effectivement conflit de travail,
effectivement grève.
On peut aussi l'interpréter autrement, en disant que, dès
maintenant, ils doivent dire: Cette liste, si elle devait être
utilisée telle quelle un jour, elle est insuffisante à sa face
même. C'est là qu'est le débat, c'est là qu'est
l'incertitude, et une grande partie du temps de ce comité a
été utilisée à débattre indéfiniment
cette difficulté d'interprétation. J'espère que le
ministre du Travail récupérera ses forces suffisamment pour
répondre à la lettre qui lui sera adressée, qui lui a
été adressée, je pense, par M. Picard. Mais il y a
là un problème juridique d'interprétation sur lequel les
membres du comité ne s'entendent pas. Tant qu'ils ne s'entendent pas,
ils ne peuvent pas remplir leur rôle, à moins que
l'interprétation qu'on prenne soit la plus étroite possible;
à ce moment, bien sûr, ils le remplissent, mais ils ne sont
guère utiles.
M. Parizeau: M. le Président, moi il me semble que, tel
que défini par le député de Saint-Laurent, le
problème des mandats prend des dimensions absolument hors de proportion
avec la réalité des choses. J'imagine que le comité sur
les services essentiels ne doit pas recevoir les listes une à une, en
mesurer l'opacité du papier, regarder ceux qui les ont envoyés,
vérifier que les signatures sont conformes, puis ne pas regarder le
contenu; ce serait quand même extraordinaire. Il ne faut quand même
pas exagérer les conflits qu'il peut y avoir sur le mandat; ils ne sont
pas chargés de vérifier l'authenticité des signatures et
donner le nombre de pages dans chaque liste. Ils doivent regarder quand
même ce qu'il y a dedans, j'imagine. Ils doivent se faire une
idée; enfin, ils ont été nommés pour cela.
Je viens d'apprendre que le député de Joliette a rejoint
au téléphone le ministre du Travail; il aurait, je pense, un
certain nombre de précisions à apporter à ce sujet, M. le
Président, si vous m'autorisez à lui passer la parole.
Le Président (M. Richard): Certainement, M. le ministre
des Finances.
M. Chevrette: Dans un premier temps, je veux l'excuser
officiellement; le ministre du Travail, il ne se cache pas, il est
véritablement malade. Contrairement à certaines
allégations, le ministre du Travail est bel et bien au lit.
Je voudrais vous dire qu'il est un peu surpris, parce qu'il a la chance
de nous écouter en direct, d'entendre certaines allégations. Il
se demande, dans un premier temps, où le député de
Saint-
Laurent peut bien avoir pris les informations quant à l'absence
de ressources, par exemple, au comité, puisqu'ils ont des
attachés d'administration, des recherchistes à leur disposition,
les locaux, le personnel de soutien.
Pour répondre à une partie de sa dernière question,
il a même mis au service du comité toute la collaboration possible
du service d'arbitrage du ministère du Travail pour permettre toutes les
expertises possibles permettant de donner des jugements concernant les listes.
On sait même de bonne source le ministre du Travail pourra le
confirmer que le président est entièrement satisfait de la
collaboration du ministère du Travail dans tout le processus, dans tout
le cheminement du dossier. Avec tout ce qu'on a mis à la disposition du
comité, il ne faudrait pas s'inquiéter outre mesure; il fait son
travail normalement, il n'y a aucune complication. Je ne sais pas si cela
répond à une partie de votre question.
M. Bellemare: Le président a dit qu'ils ont tous droit de
parole, qu'ils parlent. C'est bon à rien, ce règlement de droit
de parole privilégiél
M. Chevrette: Nous disons d'abord que le service d'arbitrage du
ministère est à l'entière disposition du comité;
c'est déjà une source d'information privilégiée
pour le comité.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Joliette-Montcalm. M. le...
M. Bellemare: Ma question s'adresse au ministre. Cette fois, je
dois respecter le règlement, ce doit être à mon tour, si
j'ai un droit de parole privilégié; il n'est quasiment pas
respecté, mais cela ne fait rien, on peut l'oublier et commencer une
discussion ouverte.
Le Président (M. Richard): C'est à votre tour, M.
le leader de l'Union Nationale.
M. Bellemare: Les 777 sur les 1180 ce sont des listes d'entente
que vous avez reçues?
M. Parizeau: II y a 1100...
M. Bellemare: 1180 groupes.
M. Parizeau: 1180 groupes de syndiqués...
M. Bellemare: Oui.
M. Parizeau:... qui doivent présenter soit une entente
négociée ou bien une liste qu'ils établissent
eux-mêmes, l'une ou l'autre.
M. Bellemare: Sur les 777, il y a un pourcentage de combien
d'accepté?
M. Parizeau: Sur les 777, ententes et listes ensemble, il y a 268
ententes négociées et 509 listes déposées, au 18
avril.
M. Bellemare: Ah! Ce n'est pas pareil!
M. Parizeau: C'est le travail. Le comité des services
essentiels regarde actuellement non pas tellement les ententes, parce qu'elles
ont été négociées et on s'imagine qu'elles l'ont
été correctement, mais les listes qui passent à travers
cela.
M. Bellemare: C'est-à-dire que sur les 1200 il y en a
à peu près un quart d'accepté.
M. Parizeau: Non.
M. Bellemare: Sur les 1180, il y en a 268 qui...
M. Parizeau: Non, non, entendons-nous. Ce que la loi
prévoit, c'est qu'il y a deux façons de définir des
services essentiels: ou bien une entente négociée ou une liste
déposée. Ces deux gestes, reconnus par la loi, ont
été portés dans 777 cas sur 1180, donc dans les deux tiers
des cas. Le fait de déposer une liste n'a rien d'anormal ni
d'illégal; au contraire, c'est prévu comme une procédure
normale en vertu de la loi. Ce n'est pas parce que des listes sont
déposées qu'il faut dire que quelque chose ne fonctionne pas, la
loi prévoit cela spécifiquement.
M. Bellemare: Nous allons, M. le Président, si vous le
permettez, avec un document qui nous a été transmis par le
ministre de la Fonction publique lors de l'étude de ses crédits,
voir ce que cela a coûté pour 1978/79 jusqu'à
présent les négociations. Pour le Syndicat des fonctionnaires et
ouvriers, Me Richard Drouin, honoraires, $70 l'heure, dépenses, $100 par
semaine. Le montant autorisé était de $23 552 pour les
honoraires, plus $32 000. On a payé $45 821.25. Le même homme,
pour la convention des agents de la paix, avait retiré $60 l'heure, $100
par semaine pour ses dépenses. Sur un montant prévisible de $12
000, il avait retiré $7147. Si j'additionne cela pour la même
année, cela fait $52 000 environ pour Me Richard Drouin.
Jusque-là, c'est d'accord, on n'a rien à dire à cela.
Une Voix: Un bon conservateur.
M. Bellemare: Je le connais. Vous savez, il n'y a pas de couleur,
quand il s'agit de l'argent de l'Etat. Il n'a pas été
nommé par nous, il a été nommé par eux, cette
fois-ci. (12 h 15)
Concernant, le coût des négociations collectives dans les
secteurs public et parapublic, la réponse qui nous a été
fournie par l'honorable ministre et qui a été
déposée, c'est $4 966 000. On prévoit cette année,
dans un article qui, je pense, même si c'est dans le Devoir...
Une Voix: Cela a déjà fait autorité.
M. Bellemare: Oui, mais ce n'était pas ex cathedra. On
prévoit donc que les négociations vont coûter au moins $20
millions. Est-ce que le ministre pourrait nous donner un aperçu de ce
que cela va coûter? Quelques-uns disent, dans un article, que le
gouvernement évalue à environ $12 millions ce qui a
été dépensé ou sera dépensé pour les
négociations au cours de la prochaine année.
M. de Belleval: Ecoutez, M. le Président, je n'ai pas
à commenter des articles de journaux. Je peux commenter des documents
gouvernementaux. Les évaluations faites par des personnes non
officielles, à partir de chiffres plus ou moins officieux ou officiels,
je ne suis pas compétent ce matin pour les commenter. Je peux commenter
les chiffres qui viennent du ministère de la Fonction publique ou du
gouvernement, des chiffres officiels.
M. Bellemare: Ma question s'adresse au ministre des Finances qui,
lui, est le coordonnateur suprême, pas vous.
M. de Belleval: Vous avez eu...
M. Bellemare: Vous êtes un drôle de ministre, vous,
qui servez de paravent.
M. de Belleval: Vous avez cité un document que j'aurais
déposé.
M. Bellemare: Vous êtes un peu le concierge, comme vous
vous êtes déjà appelé. Alors, le ministre des
Finances va me répondre, il arrive justement. Alors, si les
négociations...
M. de Belleval: Je voudrais juste vous poser une question.
Le Président (M. Richard): M. le ministre de la Fonction
publique.
M. de Belleval: Vous avez fait allusion à un document qui
a été déposé. C'est un document qui a
été déposé par qui?
M. Bellemare: Par le gouvernement.
M. de Belleval: Par qui? Les documents ne sont pas
déposés par le gouvernement en général; ils sont
déposés par un ministre en particulier.
M. Bellemare: Ce sont des questions que j'avais posées au
feuilleton et on a eu le rapport. Je peux vous l'envoyer, c'est bien
officiel.
M. de Belleval: Par quel ministre?
M. Bellemare: C'est écrit ici: Traitement à la
table centrale, $844 000; à la table sectorielle, $1 624 000; coût
des négociations pour le Syndicat des agents de la paix de la fonction
publique, pas disponible.
Une Voix: Quel ministre a déposé cela?
M. Bellemare: C'est le ministre...
M. de Belleval: Si c'est vous qui avez posé la question,
est-ce que vous l'avez posée à un ministre en particulier? Vous
devez savoir à qui vous avez posé la question.
M. Bellemare: Par le ministre de la Fonction publique.
M. de Belleval: Bon, nous y voilà!
M. Bellemare: Alors, puis? Ce n'est pas vrai?
M. de Belleval: M. le Président, au fil des mois, j'ai
appris à fonctionner avec le député de Johnson qui a
beaucoup d'habileté à citer des chiffres, des articles de
journaux, etc.
M. Bellemare: Oui.
M. de Belleval: J'ai appris qu'avec ce fin renard qu'est le
député de Johnson il faut aller plus loin pour éclaircir
les choses avant de répondre.
M. Bellemare: Mais vous ne nierez toujours pas le rapport que
vous avez déposé vous-même.
M. de Belleval: Je tiens à vous faire remarquer que vous
venez de dire que la question s'adressait au ministre des Finances, alors que
vous venez de citer un document que j'ai déposé.
M. Bellemare: Je veux savoir du ministre des Finances si les $4
966 000 vont être dépassés cette année et s'il va
répondre à l'article du Devoir qui dit que les
négociations vont coûter $20 millions. Un instant! Je pense qu'il
y a une grosse différence entre $4 millions et $20 millions.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je vais utiliser mon droit
privilégié, selon ce que dit le règlement, pour apporter
la précision suivante. Le député de Johnson a posé
deux questions. La première s'adresse évidemment au ministre de
la Fonction publique qui va répondre et la deuxième, quant au
coût total, s'adresse au ministre des Finances et, à ce
moment-là, je répondrai.
M. Bellemare: Alors, il a commencé par me donner des
réponses vaille que vaille. On dit que le gouvernement évalue
à $12 millions ce qu'il a dépensé ou dépensera aux
fins des négociations dans la prochaine année.
M. Parizeau: M. le Président, je reviens sur ce que je
disais tout à l'heure.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: Les questions par lesquelles le député
de Johnson a commencé, quant au docu- ment qu'il brandissait tout
à l'heure, s'adressent évidemment au ministre de la Fonction
publique. Il a reconnu lui-même qu'il a obtenu ces chiffres en adressant
une question au ministre de la Fonction publique qui est assis à
côté de moi. Alors, que le ministre de la Fonction publique prenne
cela en charge. Quant aux $12 millions ou aux $20 millions dont il parle, je
serai heureux de lui apporter toute précision après.
M. Bellemare: Répondez tous les deux.
M. Parizeau: L'un après l'autre, dans l'ordre où
vous avez posé les questions.
Le Président (M. Richard): M. le ministre de la Fonction
publique.
M. Bellemare: C'est $4 966 000 pour la dernière
négociation et c'est quoi là, pour la prochaine, celle qu'on a
présentement? Cela va vous coûter combien à peu
près?
M. Parizeau: Je vais vous répondre à cela tout
à l'heure.
M. Bellemare: Ah oui?
Le Président (M. Richard): M. le ministre de la Fonction
publique.
M. de Belleval: Je suis prêt à répondre, M.
le Président, non pas vaille que vaille, mais précisément.
Ce qui est vaille que vaille, c'est la question du député de
Johnson. J'ai essayé de la préciser et je pense que, maintenant,
on sait un peu plus de quoi il parle, de quels documents il parle, qui a
signé ces documents, etc. On a réussi à établir ce
point. Maintenant, je lui poserai une question avant de répondre: Quelle
question me pose-t-il précisément? A quel...
M. Bellemare: Est-ce que les négociations ont
dépassé de beaucoup ce qui a été payé lors
de la dernière négociation?
M. de Belleval: La réponse, en ce qui me concerne, c'est
non.
M. Bellemare: C'est non?
M. de Belleval: Souvent, vous me dites que je vous donne une
réponse vague. Y a-t-il une réponse plus précise, plus
concise, plus claire...
M. Bellemare: Avez-vous dépassé le montant de $4
millions?
M. de Belleval: ... sans moins de détours que la
réponse que je viens de donner?
M. Bellemare: Avez-vous dépassé le montant de $5
millions qu'ont coûté approximativement les négociations en
1976?
M. de Belleval: La réponse, c'est non.
M. Bellemare: C'est non?
M. de Belleval: C'est non.
M. Bellemare: C'est impossible! Vous payez des gens $52 000, pour
un négociateur seulement, dans un temps limité. Pour les autres,
combien cela coûtera-t-il?
M. de Belleval: Je vais...
M. Bellemare: On a la liste complète de tous ceux que vous
nous avez donnés et je vous garantis que je suis bien...
M. de Belleval: C'est un bon exemple que donne le
député de Johnson, et cela va expliquer pourquoi je
prévois que cela ne coûtera pas plus cher. Entre autres, les
honoraires que nous payons à nos négociateurs actuellement sont
du même niveau que les honoraires que payait l'ancien gouvernement dans
la ronde de 1975/76. Malgré l'inflation et malgré les
augmentations d'honoraires qui ont été constatées dans
tous les autres secteurs, nos négociateurs ont accepté
d'être payés au même tarif qu'ils étaient
payés il y a trois ou quatre ans. Je tiens à dire que dans ce
domaine, dans le secteur privé, là encore, on paierait des tarifs
d'honoraires 30%, 40% et 50% plus élevés. C'est à cause de
cette frugalité qu'acceptent d'ailleurs nos négociateurs que je
peux répondre catégoriquement au député de Johnson:
Non, cela ne coûtera pas plus cher.
M. Bellemare: Cela veut dire, d'après votre
réponse, qu'eux payaient trop.
Une Voix: Ce n'est pas la question. M. de Belleval: Ce que
cela veut dire...
M. Bellemare: Parce qu'ils ont trop payé, vous justifiez
que vous allez payer juste assez.
M. de Belleval: Ce que cela veut essentiellement dire, c'est que
nos négociateurs acceptent des taux d'honoraires qui sont
inférieurs actuellement à ce qui se paie dans le secteur
privé. Je pense que c'est normal que je leur rende hommage d'accepter
ces honoraires actuellement.
M. Bellemare: A l'ancien gouvernement d'avoir payé un prix
raisonnable?
M. Parizeau: M. le Président...
Le Président (M. Richard): M. le ministre des Finances,
pour votre réponse maintenant.
M. Parizeau: ... la raison pour laquelle le ministre de la
Fonction publique peut être aussi catégorique, c'est que la
négociation, comme on l'a indiqué plus tôt, avec la
fonction publique est très avancée. Il a indiqué ce
qu'étaient les taux et, d'autre part, une bonne partie du chemin est
faite dans les négociations. A l'égard maintenant des
négociations avec la table centrale, CEQ, CSN, FTQ, combien c'est
susceptible de coûter par rapport à ce que cela a
coûté en 1975/76? Là, je dois vous dire que je suis
absolument incapable de donner quelque réponse que ce soit parce que les
négociations commencent. On sait comment on commence une
négociation, mais on ne sait pas comment on la finit. Est-ce que cela va
être très court, moyennement court, assez long? Comme ces
négociateurs sont payés, non pas à l'année
ce ne sont pas des salariés ils sont payés à la
vacation, à la journée ou à l'heure, mais dépendant
du nombre de réunions, du temps que cela va prendre, cela fera une
addition plus ou moins élevée. Il est évident que, comme
ministre des Finances, j'ai intérêt à ce que cela ne
coûte pas trop cher, et comme président du Conseil du
trésor, j'ai intérêt à ce que les
négociations ne durent pas trop longtemps. Mais si vous voulez demander
un nombre de millions, je serais très intéressé à
savoir d'ailleurs qui a pu lancer un certain nombre de millions dans les
journaux en disant: A mon avis, cela devrait durer, cette négociation,
à peu près tant de mois. J'aimerais le rencontrer parce que cela
me ferait plaisir de savoir qu'il y a une boule de cristal de cet ordre.
M. Bellemare: Paule des Rivières, dans le journal
de...
M. Parizeau: Oui, mais ce n'est probablement pas elle qui a
inventé les chiffres. J'imagine qu'elle est allée les chercher
quelque part.
M. Bellemare: II y a une chose qui reste sûre, c'est que le
ministre dit que moins cela durera, plus ce sera satisfaisant pour lui. Mais
comment...
M. Parizeau: Pas seulement pour moi, je pense. Pour les
syndiqués aussi.
M. Bellemare: Comme ministre des Finances. Mais comment
explique-t-il que pendant l'espace d'un an, il y en a une de
réglée sur les quatre autres?
M. Parizeau: Sur celles qui relèvent de l'ancienne
loi?
M. Bellemare: Oui, de l'ancienne loi, en 1978.
M. Parizeau: Je pense que, comme l'a indiqué le ministre
de la Fonction publique et comme j'ai eu l'occasion de le dire pour le COPS, on
a, dans le cas de deux tables importantes, des progrès très
significatifs qui sont faits. Là encore, on peut faire de
l'angélisme en disant: Cela aurait dû prendre moins de temps. J'ai
reconnu, tout à l'heure, qu'à mon sens il y avait des
délais, je pense, trop longs, dans le cas de la SAQ. J'ai indiqué
aussi qu'on avait pris certaines mesures pour accélérer cela un
peu. Si un cas me pa-
raît je crois qu'on peut le dire anormalement long,
c'est celui de la Société des alcools. Cela traîne un peu.
Mais, ailleurs, je pense qu'on aura assisté, au contraire, à un
déroulement qui, en tout cas, me paraît avoir été
très satisfaisant. Il est clair que cela n'a pas toujours
été au même rythme. Par exemple, le Cartel des organismes
professionnels de la santé; comme j'ai eu l'occasion de le dire
je n'ai rien caché, au départ, à cette discussion
il est évident que, depuis quelques semaines, cela va beaucoup mieux que
cela allait mettons il y a trois ou quatre mois. Au fond,
simplement sur le plan de la stratégie, on ne se comprenait pas
très bien. Il y a eu une espèce d'ambiguïté
fondamentale dans nos rapports avec le COPS où, à un moment
donné nous avions pour simplifier un peu l'impression
qu'ils préféraient se laisser déporter vers le front
commun dont les conventions collectives viennent à
échéance le 30 juin. Eux semblaient avoir l'impression que, nous
aussi, on avait intérêt à ce qu'ils soient
déportés vers le front commun alors que, de part et d'autre, on
était prêt à discuter. Quand on s'est rendu compte de cette
espèce d'ambiguïté, de cette espèce de comédie
d'erreurs, cela s'est mis à débouler beaucoup plus
rapidement.
M. Bellemare: Si cela a pris un peu plus d'un an pour
régler une convention sur cinq, même si les autres sont
déjà pas mal avancées, qu'est-ce qui va se produire avec
les 44 autres? Ce ne sera pas avant juin 1980 que cela sera
réglé.
M. Parizeau: Entendons-nous. M. Bellemare: Imaginez le "cost".
M. Parizeau: Mais non.
M. Bellemare: Je peux dire au ministre qu'il a peut-être de
bonnes intentions, comme le ministre de la Fonction publique. On le lui a dit
lors de l'étude de son budget. Il est bien inspiré et il s'est
bien amendé. Je ne parle pas de vous, je parle du ministre de la
Fonction publique. Il s'est bien amendé; il est sorti de son cercueil
vivant celui-là, après avoir été enseveli. On lui a
dit que...
M. de Belleval: Ne faites pas de comparaisons dangereuses.
M. Bellemare: Oui, mais une chose est certaine, c'est que...
M. de Belleval: Laissez cela au chef du Parti libéral.
M. Bellemare: La main de Dieu. C'est un mal qui s'attrape.
Trudeau a dit la même chose aussi. Est-ce que le ministre des Finances ne
prévoit pas un dilemme d'au moins un an pour régler les 44
autres? S'il en a réglé une en l'espace de treize mois...
M. Parizeau: Là, je pense...
M. Bellemare: En juin 1980, cela ne sera pas
réglé.
M. Parizeau: M. le Président, je pense que nous entrons
vraiment dans de la pure spéculation. La préparation...
M. Bellemare: ... aussi.
M. Parizeau: Quand le député de Johnson dit qu'il y
a 44 groupes dont les conventions collectives viennent à
échéance le 30 juin prochain, il faut bien comprendre que, du
côté de ces groupes, un front commun s'est organisé. Entre
le gouvernement et ses partenaires et ce front commun, les règles de
négociation ont été graduellement établies, y
compris la table centrale dont j'ai eu l'occasion de dire à quel point
le travail était avancé quant à la définir.
C'est-à-dire que les règles de démarrage des
négociations n'ont jamais dans le passé été aussi
avancées; tout le monde le reconnaît.
S'il y a une chose sur laquelle, à la fois les syndiqués,
le gouvernement, ses partenaires, les fonctionnaires qui assistent à ces
choses-là depuis une quinzaine d'années, tout le monde est
d'accord, c'est que jamais cela n'a été aussi en avance.
L'important, c'est que, de part et d'autre, on se rende compte de
l'évolution un peu privilégiée qui s'est produite depuis
quelque temps et qu'on fasse un effort délibéré,
persistant, pour faire en sorte que ces négociations se déroulent
pas trop rapidement pour ne pas escamoter les problèmes, mais assez
rapidement pour qu'ils ne s'enlisent pas et que, régulièrement,
toutes les semaines et tous les mois, chacun soit bien convaincu, de part et
d'autre, que ces négociations sont bien engagées et pourraient
aboutir si tout le monde y met la bonne volonté nécessaire. (12 h
30)
C'est, en tout cas, tout à fait l'intention du gouvernement
à cet égard. On dira: En pratique, combien de temps cela va-t-il
durer? Je dis: C'est de la spéculation pure et simple; ce serait
enfantin de ma part de commencer à mettre une espèce de date
limite ou de moment critique. L'important, c'est la volonté de
négocier.
M. Bellemare: M. le Président, je suis convaincu que le
ministre prêche l'optimisme, c'est sûr. Le maréchal Foch
disait: Avançons ou, sinon, disons qu'on avance; nous gagnerons la
guerre. Il l'a gagnée aussi. C'est ce qui est arrivé. Mais je
pense que c'est justement le cas du ministre, il prêche l'optimisme:
Avançons; si on n'avance pas, disons qu'on avance. C'est cela la
stratégie de l'honorable ministre des Finances. Il prêche
l'optimisme mais il n'est pas rendu au bout. Vous allez voir qu'il va y avoir
des lignes où il va être difficile de passer. Je ne suis pas
contre cela; au contraire, je suis d'accord pour l'encourager, s'il y avait
moyen, pour que les fonctionnaires des secteurs
public et parapublic soient satisfaits d'une entente.
J'ai négocié quelques conventions collectives dans ma vie
et je sais combien c'est difficile. On commence par des départs lents;
on progresse, à un moment donné, très rapidement et on
arrive à un "deadlock" qui peut durer un ou deux mois et, à un
moment donné, le "deadlock" se solutionne on vient à bout de
trouver une solution pratique et cela se règle, mais on passe par ces
difficultés. Le ministre peut prêcher l'optimisme mais il sait
qu'il va rencontrer d'autres difficultés. C'est bon pour lui de dire que
cela va bien mais est-ce que c'est vrai quand on voit à tous les jours
des grèves de la Société des alcools partout? Il y en a eu
chez nous, il y en a eu dans d'autres parties de la province, il y en a ce
matin encore. Quand on voit 120 000 cégépiens les gars de
CEGEP comme le dit le député de Portneuf ce matin... Cela
commence, cela commence.
M. Parizeau: M. le Président.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: Le député de Johnson faisait appel
à son expérience dans ce domaine et, sur le plan des
années, du temps, son expérience coïncide à peu
près avec la mienne. Il était ministre et j'étais
conseiller du gouvernement à cette époque; on a passé
à travers bien des négociations ensemble, n'est-ce pas? Quand il
met à ce point l'accent sur les grèves d'une ou deux
journées dans certains magasins de la SAQ à l'heure actuelle, se
souviendra-t-il de la dernière grève de la SAQ que nous avons
connue ensemble, lui et moi?
M. Bellemare: Vous allez renverser votre problème pour le
régler mais êtes-vous capable de le remettre dans la fiole une
fois qu'il est renversé? Jamais dans cent ans. Laissez donc faire ce qui
est arrivé.
M. Parizeau: Elle avait duré cinq mois. M. Bellemare:
On le sait.
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Union Nationale, s'il vous plaît! Vous avez été calme ce
matin.
M. Bellemare: Je peux lui en dire sur cela; ils sont venus couper
les haies chez nous; ils ont défoncé mes vitrines; je m'en
souviens.
M. Parizeau: M. le Président, cette grève, la
dernière de la SAQ que nous avons connue ensemble, le
député de Johnson et moi, avait duré cinq mois. Alors,
est-ce qu'on peut ne pas comparer et ne pas faire d'alarmisme un,
deux, trois, quatre ou cinq magasins qui, à un moment donné, font
une grève d'un jour ou deux plutôt, sous forme d'avertissement, et
ces espèces de conflits massifs que nous avons connus? Tout l'effort du
gouvernement depuis un an et demi... Je ne dis pas que cela va marcher
parfaitement dans tous les cas; je ne dis pas qu'on n'aura pas de
problèmes; évidemment, on va en avoir. J'ai assez
d'expérience dans ce domaine pour savoir que ce n'est pas un chemin
pavé de roses tous les matins et tous les soirs et qu'il y a des
épines qui font drôlement mal. Je sais tout cela mais on a fait un
effort délibéré pour changer des règles de
négociation dont tout le monde s'accordait à dire qu'il fallait
les changer. Qu'à l'heure actuelle on nous dise: Oui, ce matin, il y a
une grève d'une demi-journée dans les CEGEP, bien sûr, mais
pourquoi? Essentiellement pour un problème qui revient à cette
question de sécurité d'emploi dont je parlais
précédemment, les fameuses listes, la date du 1er mai, la peur
d'un certain nombre d'enseignants que, devant la diminution du nombre des
élèves, leur emploi soit mis en péril. Je n'approuve pas
le fait qu'une demi-journée de grève... C'est quand même
une grève illégale, je ne peux pas approuver que cela se fasse
comme cela mais j'ai dit tout à l'heure à quel point je pense que
le gouvernement comprend le genre de problèmes majeurs auxquels les
enseignants ont à faire face à la suite de la réduction du
nombre des élèves.
Mais il doit y avoir moyen de s'entendre sur des formules dans ce
domaine. Il doit y avoir moyen de s'entendre et, dans ce sens, ce que je peux
faire, je pense, de mieux et de plus utile, c'est d'être capable de dire
aux syndiqués: Les règles ont été changées.
On pense qu'elles sont meilleures, on pense qu'elles permettent de
régler une série de problèmes qu'on a eus dans le
passé. Là, maintenant que le terrain est passablement
déblayé, il faut s'asseoir ensemble et essayer de passer le plus
rapidement possible à travers ces négociations. Qu'on vienne me
dire: Cela ne marchera pas toujours comme vous voulez, bien sûr, M. le
Président, je le sais. Je ne fais pas d'angélisme, non plus, de
mon côté.
M. Bellemare: Est-ce qu'il y aura avant longtemps, à la
Société des alcools, un changement pour faire ce qu'on avait
préconisé dans mon temps à moi, une commission
indépendante qui soit sous la tutelle du gouvernement, bien entendu, une
compagnie d'Etat?
Le Président (M. Richard): M. le ministre des Finances,
justement, je voudrais dire à M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale qu'après l'avoir très nettement
privilégié dans l'exercice du droit de parole je
reconnaîtrai tout de suite après M. le député de
Joliette-Montcalm pour revenir avant la fin à vous, M. le leader
parlementaire de l'Union Nationale.
M. Bellemare: Pourquoi me faire des reproches quand c'est la
procédure parlementaire qui me donne ce droit? Pourquoi me reprocher
cela?
Le Président (M. Richard): Des reproches?
M. Bellemare: Ah oui! vous me "pointez" là, vous. Je vous
connais.
Le Président (M. Richard): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: La Société des alcools est une
société d'Etat. Les changements de structures au fond, n'ont pas
grande portée sur la façon dont se déroulent les
négociations. Il y a à la SAQ, à l'heure actuelle, un
certain nombre de problèmes qu'on connaît bien qui n'ont rien
à voir avec la structure administrative de la SAQ, mais qui sont
liés fondamentalement à des questions, par exemple, d'horaires de
travail. Un des problèmes majeurs qu'on a avec la SAQ est le suivant.
Là encore, il est facile à comprendre, ce problème.
J'espère qu'on a pris les moyens pour essayer d'aboutir assez rapidement
au moins à des esquisses de solutions. Le problème est le
suivant: Les syndiqués de la SAQ considèrent comme une victoire
majeure d'avoir enlevé le travail obligatoire le samedi. Le samedi, ils
se portent volontaires pour travailler s'ils le veulent, mais ils ne sont pas
obligés de travailler. La SAQ est un peu embêtée par les
résultats de cette clause, en ce sens que ses gérants vont
travailler le samedi, mais que, dans beaucoup de magasins, le personnel est
composé le samedi d'occasionnels ou d'étudiants qui n'ont
évidemment pas la même connaissance du métier que les
employés réguliers. Or, le samedi, c'est évidemment une
très grosse journée pour la clientèle. Il y a beaucoup de
clients et il y en a qui disent: Ecoutez, on n'a pas le samedi le type de
service qu'on voudrait. Il s'agit de savoir si on peut trouver une solution par
laquelle le service aux clients correspond à peu près aux
attentes que le client a, et, d'autre part, si cette espèce de grande
victoire syndicale de ne pas obliger les gens à travailler le samedi
peut être respectée. Cela se combine.
M. Bellemare: Combien d'heures par semaine?
M. Parizeau: C'est 40 heures. C'est un problème, remarquez
bien, qui évidemment existe pour le personnel de magasin. Au contraire,
dans les discussions que nous avons avec le personnel ouvrier de la
Société des alcools, cela va beaucoup mieux. Cela a avancé
d'une façon plus normale.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, je
voudrais dire que je suis un petit peu surpris parce que les
représentants de l'Opposition ont semblé reprocher au ministre
des Finances de dire que cela n'allait pas si mal. C'est eux autres qui ont
posé la question au feuilleton. Ils ont des réponses sur des
situations de fait et ils semblent surpris de cela, jusqu'à
prétendre pratiquement: Attendez, vous verrez. Je pense que le Parlement
comme tel a rempli ses obligations. Le cadre des négociations dans la
fonction publique en général et au parapublic aussi était
désuet. Tout le monde a participé à la préparation
de la loi 45 qui changeait des choses et de la loi 55 qui changeait des choses,
qui sont mises à l'épreuve, bien sûr, avec la
présente ronde de négociations. La responsabilité aussi du
Parlement, c'est de tenter de créer un meilleur climat de
négociation, la meilleure approche possible pour que les gens discutent
à un endroit bien précis qui est aux tables de
négociations et non pas à l'Assemblée nationale.
J'aimerais, ou que l'occasion nous en est fournie justement avant qu'on entre
dans le vif Je la négociation, faire certaines mises en garde. J'ose
espérer, justement, que l'Assemblée nationale ne se mêlera
pas du contenu des négociations, mais qu'on respectera les structures
mises en place et les tables de négociation.
Je me souviens très bien que durant la négociation de
1972, j'étais le porte-parole de l'ensemble des enseignants de
l'élémentaire et du secondaire du Québec. Je dois vous
dire bien carrément que cela a vraiment changé, parce
qu'après douze mois de négociations intensives, on n'avait
même pas des offres globales sur l'ensemble des sujets. Quand le
gouvernement a décrété la convention collective, en 1972,
parce qu'il n'y a pas eu entente, il n'y avait même pas eu, aux tables de
négociation, des offres pour l'éducation permanente et les
enseignants du Nouveau-Québec encore, et on allait déposer un
décret.
Donc, actuellement, deux mois avant la fin des conventions collectives,
on a, à toutes les tables de négociation, des offres globales.
Elles ne sont peut-être pas satisfaisantes à 100% sur l'ensemble
des sujets, loin de là, mais les négociations viennent à
peine de s'amorcer. C'est à la table de négociation que tu
améliores les contenus, que tu discutes et que tu peux amener, une
partie comme l'autre, à changer, à modifier son approche et faire
en sorte qu'on ait un contrat collectif négocié. Cela a un
immense avantage d'avoir des offres globales, pour celui qui connaît
véritablement la négociation, parce que quand tu arrives dans une
fin de course et que tu as l'ensemble du portrait, cela te permet les
échanges possibles, ce qu'on appelle les "package deals" de fin de
course. Mais, quand tu es à une table de négociation et que tu
n'as pas l'ensemble du portrait, tu n'as même pas les offres patronales
devant toi, cela t'est difficile de faire des concessions sur des bouts, parce
que tu te dis: Qu'est-ce qu'il va arriver avec l'autre bout. On ne le sait pas,
on n'a pas d'offres.
On a corrigé cette situation. Je pense que les syndicats
là-dessus doivent être heureux de constater qu'il y a des offres
globales. Cela leur permet maintenant d'avoir une stratégie globale de
négociations et de faire en sorte qu'on puisse accélérer
tout le processus de la négociation. Cette partie, je pense que le
Parlement comme tel, tous les parlementaires ont fait leur travail, en ce sens
que le cadre de la négociation est changé et de nature à
favoriser les meilleurs échanges.
Il y a un autre aspect cependant qui me tient aussi à coeur, dans
la présente négociation, et
c'est un peu pour cela que j'y ai consacré trois heures ce matin,
c'est l'attitude en négociation. Je pense que, par le passé, on a
voulu politiser, à l'intérieur de ce noble salon bleu, les
négociations comme telles. On en profitait, on profitait de notre
immunité parlementaire pour "blaster" les leaders syndicaux et provoquer
des affrontements. Jusqu'à maintenant, je dois féliciter les
coordonna-teurs de la négociation de ne pas être tombés
dans ce piège de nos prédécesseurs. J'espère que,
jusqu'à la fin de la négociation, on va respecter nos
vis-à-vis, les gens qui ont à négocier aux tables de
négociation. J'invite les ministres sectoriels à garder
l'attitude qu'ils ont eue depuis le début, à inciter les gens
à s'asseoir aux tables de négociation et à régler
des contenus là, et non pas à politiser les débats dans ce
noble salon bleu, pour en retirer un capital politique, quelle que soit la
formation politique.
Je terminerai, M. le Président, en vous disant que
peut-être que l'Opposition trouve qu'on dit trop que cela va bien. Je
dirai tout au moins que cela ne va pas si mal, dans les circonstances. Mais, on
est bien obligé de dire une chose: A se regarder on se désole,
mais quand on se compare, on se console. Avec ce qu'on a vécu de 1970
à 1976, on a toutes les raisons de se consoler.
M. Bellemare: M. le Président.
Le Président (M. Richard): M. le leader parlementaire de
l'Union Nationale.
M. Bellemare: Je n'admets pas du tout cette intervention du
député de Joliette. Je ne l'admets pas. J'ai passé mon
temps ce matin à essayer de donner de l'information au public, non pas
à politiser le problème. C'est faux, on n'a pas fait cela. J'ai
passé presque 20 minutes à expliquer ce qu'étaient
véritablement les nouveaux procédés, les nouvelles
structures, 55 et 59. On vient nous reprocher d'avoir politisé cela?
Jamais dans cent ans, au contraire! J'ai essayé de rester serein et je
le suis encore. Je ne veux pas recevoir de leçon du député
de Joliette, jamais! J'ai admis que c'était fini, les discussions dans
les boîtes à part, dans les chambres d'hôtel ou
ailleurs.
Une Voix: Le décorum!
M. Bellemare: A quoi ai-je manqué?
Le Président (M. Richard): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je voudrais dire au député de Johnson
que je n'ai pas du tout voulu l'insulter; loin de là, j'ai même
dit qu'on devrait s'abstenir de le faire. (12 h 45)
M. Bellemare: J'ai passé mon temps, ce matin, à
essayer de donner de l'information au public qui nous écoute.
M. Chevrette: Oui, mais ne prenez pas cela pour une insulte, je
viens de vous inviter à continuer.
M. Bellemare: J'ai parlé des lois 55 et 59, des nouvelles
structures qui ont amélioré les négociations. C'est ce que
j'ai fait, je n'ai pas critiqué pour rien.
M. Chevrette: Non, je vous invite à continuer ce que vous
avez fait.
M. Bellemare: Ah! Là, vous revenez!
M. Chevrette: C'est ce que j'ai dit, c'est parce que vous n'avez
pas compris. Ce n'est pas la première fois, d'ailleurs, que vous ne
comprenez pas.
M. Bellemare: Votre emballage n'est pas bon. Ce matin, on a
assisté...
Le Président (M. Richard): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: ... à une séance très paisible
d'information qui a fait un bien énorme à la population qui nous
écoute. Plusieurs questions ont été réglées
par les réponses apportées et très bien
préparées par les deux ministres, celui de la Fonction publique
et trésorier provincial, le ministre des Finances, grand coordonnateur
des négociations. Après avoir répondu à certaines
obligations de la loi, tel qu'on l'a expliqué, qui sont en vigueur
depuis le 1er janvier 1979 pour les nouvelles négociations de 1979,
j'aimerais partager d'une manière très réservée
l'optimisme du gouvernement. La réalité m'oblige à
être prudent, quand je regarde ce qui est arrivé dans le cas des
fonctionnaires provinciaux, la rupture; cela avait l'air de bien aller. On a
fourni au public des réponses qu'il sera content d'avoir. On a
posé des questions et on a eu de bonnes réponses. J'espère
bien que cela va se concrétiser.
La CEQ, en particulier, se prépare à aborder les
négociations sur un pied de guerre, je pense, d'après ce qu'on a
pu voir dans les discussions. Je crains également que cette ronde de
négociations coûte cher, beaucoup plus cher que celle qui a
précédé, contrairement à ce que nous a
affirmé le ministre de la Fonction publique.
Je termine en disant à l'honorable ministre que je suis content
qu'on ait sorti les négociations des chambres d'hôtel et des
boîtes un peu cachées. On ne fait plus de négociation dans
les boîtes, surtout pas dans les chambres d'hôtel. On en fait au
grand jour et on doit dire que cela a amené une grande
amélioration. Par contre, on devra faire attention aussi à un
autre point, il faudrait vivre selon nos moyens. Ce serait bien raisonnable que
le ministre, qui nous a fait un discours sur le budget assez restrictif il y a
à peine un mois, puisse mettre en pratique certaines valeurs qu'il a
développées en disant: Soyez assuré d'une chose, il va
falloir que le gouvernement fasse sa part, mais vous aussi. Vous avez des
droits que vous donne la convention collective, d'accord, mais vous avez aussi
des devoirs à remplir vis-à-vis de l'intérêt
général de la population, vis-à-vis de la
société québécoise.
J'espère bien que ce que nous avons fait ce matin va prouver
à la population que les négociations sont entreprises, que les
lois que nous avons adoptées, ici dans cette Chambre, sont en
application et sont maintenant complétées avec le conseil
d'information. J'espère bien que ce qui manque, le centre des
données, cela viendra parce que c'était dans le rapport
Martin-Bouchard. J'espère que cela viendra compléter le tout. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci. Souhai-teriez-vous
intervenir une minute, M. le député de Portneuf?
M. Pagé: Oui, M. le Président, très
brièvement. Je voudrais ajouter ma voix à celle du
député de Johnson pour remercier les membres du cabinet qui, ce
matin, ont voulu répondre à nos questions. Evidemment, on aurait
pu avoir un débat beaucoup plus long. Je pense que les semaines qui vont
suivre vont certainement nous permettre un nouveau débat comme
celui-là, soit sous cette formule de question avec débat du
vendredi matin ou encore par d'autres procédures qui sont possibles ici
à l'Assemblée. C'est évident que plusieurs questions sont
demeurées sans réponse, dont quelques-unes que j'avais eu
l'occasion de poser au ministre. Ce n'est peut-être pas le temps d'y
revenir à quelques minutes de l'ajournement. Je dois aussi vous exprimer
ma satisfaction que ce débat se soit quand même
déroulé sans trop trop de politisation. Je pense que le seul qui
a voulu peut-être politiser un peu le débat ici ce matin
c'est regrettable c'est notre collègue de Joliette-Montcalm. Vous
savez, cela fait bien sourire quand celui-ci dit qu'il ne faudrait pas que le
débat des négociations vienne ici à l'Assemblée
nationale, que ce soit les élus, que ce soit ceux qui ont à
siéger comme députés qui participent directement à
la négociation. J'en conviens mais je me demande jusqu'où cela
peut être compatible avec les démarches que lui pouvait
entreprendre comme représentant syndical en 1972 quand on le voyait ici
en avant du parlement, derrière les barricades. En tout cas, c'est un
autre aspect de la question sur lequel on pourra revenir et qui
témoigne, entre autres, de la contradiction combien éloquente et
combien fréquente de plusieurs des membres non seulement de
l'équipe ministérielle mais, dans plusieurs cas, des membres de
l'équipe du gouvernement, M. le Président.
Ce n'est qu'un au revoir sur le sujet parce qu'on reviendra. Je suis
convaincu que nous aurons l'occasion de poser, soit mon collègue de
Saint-Laurent ou d'autres collègues de l'Opposition, des questions au
ministre des Finances, surtout parce que le ministre de la Fonction publique
semble jouer un rôle très très minime dans le débat,
malheureusement. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Portneuf. M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je vais quand même
avoir une brève intervention sur la dernière phrase du
député de Portneuf et, après cela, j'essaierai de
conclure.
M. Pagé: II s'est lui-même identifié comme
jouant un rôle secondaire dans ce dossier.
M. Parizeau: Puisque le député de Portneuf
lançait cette flèche pour terminer, je voudrais ici indiquer
à quel point, jusqu'à maintenant, la coordination qui s'est faite
des négociations dans les secteurs public et parapublic entre le
président du Conseil du trésor, le ministre de la Fonction
publique, le ministre des Affaires sociales et le ministre de l'Education me
semble être une amélioration très nette dans sa formule sur
tout ce que j'ai vu à l'époque où, dans d'autres
capacités, je m'occupais de ce genre de négociations au
gouvernement. Je pense que cette espèce de formule quadripartite a,
jusqu'à maintenant en tout cas, donné des résultats qui me
paraissent appréciables. Je remercie infiniment mes trois
collègues de leur collaboration et de leur activité dans ce
domaine.
Ceci étant dit, je voudrais conclure exactement dans le sens du
député de Johnson. Je le remercie de m'avoir donné cette
occasion, ainsi qu'à mes collègues, de nous expliquer avec autant
de candeur que possible devant l'opinion publique. Cela me paraît
être une démarche extraordinairement importante. Les
négociations dans les secteurs public et parapublic, on a beau dire, ce
n'est pas comme des négociations dans les entreprises privées ou
dans les entreprises de production, ce n'est pas vrai.
Le public est touché dans ses services les plus directs que ce
soient les hôpitaux, que ce soient les écoles, que ce soit la
multitude de services rendus par la fonction publique. C'est le public qui est
touché quand cela va mal et le public a le droit de savoir. Le public a
le droit de suivre cela et de comprendre ce qui se passe, d'être averti
autrement, par exemple, que par des affiches publicitaires publiées dans
les journaux par les deux parties patronales et syndicales.
Il doit être capable de participer au débat et l'occasion
que le député de Johnson nous a fournie d'avoir ce débat
ce matin me paraît porteuse de développements intéressants
dans l'avenir. Quand le député de Portneuf dit: Ce n'est qu'un au
revoir, je le souhaite vivement. Je pense qu'il est très important que
périodiquement, on mette le public au courant de ce qui se passe.
C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, dans l'organisation de la
table centrale que nous allons avoir avec le front commun, j'ai insisté
aussi pour que certaines séances soient publiques de façon
à ce que les journalistes, de façon que les media d'information
d'une façon générale puissent périodiquement faire
le point avec les parties. Plus le public aura une compréhension nette
de ce qui se passe, plus les négociations elles-mêmes en seront
affectées.
J'ai dit: Nous avons tout intérêt à ce que ces
négociations se déroulent normalement. Une des conditions, bien
sûr, c'est que les deux parties acceptent de jouer ces
négociations, de faire en sorte que ces négociations se
déroulent de la façon la plus sérieuse possible. Mais une
autre des conditions pour que les négociations aboutissent correctement,
c'est qu'en tout temps, le public comprenne vraiment quels sont les objectifs
de chacune des deux parties, où sont les problèmes majeurs,
quelles sont les avenues de solution.
Dans la mesure où, aujourd'hui, je pense, nous avons tenu une
réunion à la fois sereine, précise, aussi précise,
en tout cas, qu'on pouvait le faire, j'en suis personnellement ravi et je
remercie aussi bien mes collègues du côté
ministériel que mes collègues des partis de l'Opposition pour
cette réunion de ce matin.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre des
Finances. Je mets un terme à cette commission en vous remerciant,
messieurs, de la sérénité avec laquelle vous avez
participé à ce débat. Je crois que les fins pour
lesquelles l'Assemblée nationale existe ont été ce matin
fort bien servies. Merci.
Fin de la séance à 12 h 55