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Étude des crédits du ministère
des Finances
(Dix heures vingt-cinq minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II y a
consentement unanime pour commencer les travaux de cette commission
parlementaire des finances et des comptes publics, malgré que le quorum
ne soit pas encore atteint.
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
MM. Laberge (Jeanne-Mance) en remplacement de Bordeleau (Abitibi-Est); Go-din
(Mercier) en remplacement de Charbonneau (Verchères); Gagnon
(Champlain), Goulet (Bellechasse), Bisaillon (Sainte-Marie) en remplacement de
Grégoire (Frontenac); Beauséjour (Iberville) en remplacement de
Michaud (Laprairie); Parizeau (L'Assomption), Raynauld (Outremont) et Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce).
Les intervenants sont: MM. Boucher (Rivière-du-Loup), Ciaccia
(Mont-Royal), Gosselin (Sherbrooke), Guay (Taschereau), Jolivet (Laviolette),
Martel (Richelieu), O'Gallagher (Robert Baldwin), Russell (Brome-Missisquoi) et
Samson (Rouyn-Noranda).
Il y aurait lieu maintenant de désigner un rapporteur pour la
commission. M. le député d'Outremont propose le
député de Mercier. Est-ce accepté?
M. Godin: II n'a pas de choix, mais, de toute façon,
ça me fait plaisir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion est adoptée. M. le député de Mercier sera le
rapporteur de la commission. M. le ministre des Finances, je vous cède
la parole.
M. Parizeau: M. le Président, j'ai avec moi ce matin, M.
Cazavan, le président de la Caisse de dépôt et placement du
Québec. Avant que nous commencions, je me suis entendu avec mes
collègues ici pour que l'on aborde l'examen du ministère des
Finances et des différentes régies qui répondent à
l'Assemblée nationale par le ministre des Finances, par la Caisse de
dépôt. Ensuite, nous pourrions aborder les crédits du
ministère des Finances proprement dit.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord, M. le ministre. M. le député d'Outremont.
M. Raynauld: Nous nous sommes entendus sur cet ordre du jour pour
ce matin, par conséquent je n'ai aucune objection à
procéder ainsi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. Est-ce que l'Union Nationale est d'accord?
M. Fontaine: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas
entendu...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce
matin, avant d'entreprendre l'étude programme par programme, on
parlerait de la Caisse de dépôt et placement du Québec,
dont un représentant est ici.
M. Fontaine: Oui, mais avant tout ça, c'est ce que
j'étais en train de discuter avec notre whip, tout à l'heure,
avant le début des travaux de la commission, le ministre dés
Finances nous a demandé si nous étions consentants à
siéger, si besoin il y a, vendredi prochain, au cours de la
matinée. En ce qui regarde l'Union Nationale, que nous
représentions 4% ou 20% de la population, ce n'est pas là
où je veux en venir, mais vendredi prochain nous avons un caucus
à l'extérieur de Québec pour tous les
députés, de huit heures du matin jusqu'à tard dans la
soirée. Je ne sais pas si, en dehors des travaux de la commission il y
aurait lieu, ce n'est pas parce que je veux être mauvais joueur, on a
essayé de s'entendre depuis le début pour être
présents, mais c'est fait, on ne s'attendait vraiment pas à ce
qu'il y ait des commissions...
M. Parizeau: Je suggérais simplement que jeudi soir
prochain, on voie jusqu'où on peut filer et...
M. Fontaine: Quant à moi, je serais prêt à
donner mon consentement...
M. Parizeau: ... s'il devait y avoir une autre réunion par
la suite, on la fixera à ce moment-là.
M. Goulet: Essayer de terminer avant vendredi ou prolonger jeudi
soir, mais pour vendredi, est-ce que ça va?
M. Parizeau: Dans ces conditions, on laisserait tomber vendredi
et on reportera, s'il y a lieu, à une troisième
réunion.
M. Goulet: M. le Président, je vous remercie, ainsi que
les membres de la commission.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. La Caisse de dépôt et placement. M. le ministre des
Finances, est-ce que vous auriez une déclaration d'ouverture à
faire?
Caisse de dépôt et placement du
Québec
M. Parizeau: Rien de particulièrement spectaculaire
à ce sujet, M. le Président. Au cours de l'année
écoulée, le conseil d'administration de la Caisse de
dépôt et placement a été très largement
renouvelé. La caisse elle-même commence maintenant à
fonctionner en vertu du nouveau régime qui découle des
amendements que nous avons présentés à sa loi. Ceci lui
donne, entre autres, un peu plus de latitude quant au recrutement de son
personnel, problème qui existait depuis de très nombreuses
années, presque depuis sa création, où les
présidents de la caisse de dépôt se plaignaient justement
d'un peu trop de rigidité dans le choix d'un personnel très
hautement technique et qui n'avait pas vraiment de correspondance dans la
fonction publique proprement dite. Je pense que c'est un des problèmes
qui, effectivement, a été réglé. (10 h 30)
Quant au fonctionnement même de la caisse, ce que nous en
connaissons et ses grandes orientations n'ont pas été
substantiellement modifiées, sauf, bien sûr, que les fonds
ségrégatifs prennent de plus en plus d'importance et un fonds
tout à fait nouveau s'est ajouté à ces fonds
ségrégatifs, c'est-à-dire le fonds d'assurance automobile
qui devient une source de fonds très importante à la caisse de
dépôt. Dans ces conditions, la part de la Régie des rentes,
à proprement parler, dans la caisse de dépôt tend à
décroître. C'est un mouvement qui est susceptible de se
poursuivre, tant et aussi longtemps qu'une décision n'aura pas
été prise quant au régime de contribution au régime
de rentes. Comme on le sait, un comité avait été
nommé pour examiner cette question, à la fois les modifications
des contributions et, possiblement, l'amélioration du régime. Ce
rapport de COFIRENTES qui a été présenté à
un moment donné va avoir amené le gouvernement à prendre
un certain nombre de décisions.
Tant que ces décisions ne sont pas prises, il est clair
qu'à la Caisse de dépôt, les fonds autres que ceux de la
Régie des rentes, à la Caisse de dépôt vont prendre
de plus en plus d'importance.
Je pense qu'avec cette introduction, on peut peut-être passer tout
de suite à la discussion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député d'Outremont.
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
dire que la Caisse de dépôt et placement du Québec,
à mes yeux, est une des entreprises les plus intéressantes dans
l'ensemble des institutions publiques au Québec, et comme j'ai souvent
exprimé des réserves sérieuses sur ces entreprises
publiques, je voudrais profiter de l'occasion pour dire que ces réserves
ne s'appliquent pas à la Caisse de dépôt et placement.
Au contraire, je pense que cette institution est une institution qui a
trouvé les moyens et je suppose que les gouvernements, les uns à
la suite des autres, lui ont également donné les moyens de
définir ce que pouvait être l'intérêt public, dans
les circonstances concrètes de ses opérations. Cet
intérêt public a toujours passé par des politiques de
placement telles que les règles de marché ont été
suivies, qu'on n'a pas voulu donner à cette institution toutes sortes de
béquilles, toutes sortes de fonctions accessoires, de subventions
déguisées, comme c'est arrivé dans le cas de beaucoup
d'autres entreprises publiques au Québec. Il n'y a pas, dans le bilan de
la Caisse de dépôt, des placements pour raisons d'État, par
exemple, et je l'apprécie beaucoup.
Je pense que, dans les circonstances, cette caisse joue un rôle
primordial. Je n'ai, bien entendu, aucune espèce d'objection à ce
que la Caisse de dépôt et placement contribue au financement des
opérations budgétaires, des opérations publiques du
gouvernement du Québec, dans les proportions qui ont été
les siennes depuis la fondation de la Caisse de dépôt et placement
et je suis très heureux de voir l'évolution qu'a prise au cours
des années cette institution. Elle joue un rôle
considérable aujourd'hui. Non seulement fait-elle fructifier des
épargnes associées à divers régimes de retraite,
à divers régimes d'assurance, comme celui de l'assurance
automobile, mais cette fructification des épargnes se fait encore une
fois, dans une perspective de rendement le plus élevé possible
pour ses déposants, ce qui est tout à fait légitime, tout
à fait essentiel et nécessaire.
En même temps, par les opérations que la Caisse de
dépôt fait en ce qui concerne ses placements, elle contribue
également à jouer un rôle très positif dans le
développement économique du Québec.
À l'heure où, aujourd'hui, on parle de créer des
institutions à droite et à gauche, où l'on veut des
crédits touristiques ici, des crédits agricoles là, des
crédits pour secteurs mous, des crédits pour secteurs durs, je
suis tout à fait heureux de voir que la Caisse de dépôt et
placement a pu éviter d'être impliquée dans ce genre
d'activités plus ou moins acceptables, plus ou moins recommandables.
Ceci dit, je voudrais maintenant passer à des questions un peu
plus particulières en ce qui concerne la Caisse de dépôt et
placement. Peut-être aurais-je dû ajouter, dans ces remarques
générales le ministre a fait allusion tout à
l'heure à certains changements récents en ce qui concerne le
statut du personnel de la Caisse de dépôt et placement que
j'ai participé à cette décision en tant que membre de la
commission parlementaire l'année dernière. J'étais
très heureux de donner un peu plus de flexibilité à la
Caisse de dépôt et placement à l'égard du
recrutement et à l'égard de ses politiques
générales de personnel. S'il y avait d'autres obstacles du genre
qui s'opposaient à une saine gestion de la Caisse de dépôt
et placement, je serais très heureux d'apporter mon concours à
toute suggestion visant à remédier ou à surmonter ces
obstacles.
Je voudrais maintenant passer à des questions un peu plus
particulières. La première question que je voudrais poser, M. le
Président, se rapporte au traitement que le ministre des Finances va
donner à la récupération des contributions d'employeurs
qui a été annoncée dans le dernier discours du budget.
Dans quelle mesure de recouvrement des contributions d'employeurs au
régime de retraite passe-t-il par la Caisse de dépôt,
suivant quelles règles et est-ce que, dans ce cas particulier, on suit
les mêmes règles qu'en ce qui concerne l'ensemble des versements
qui sont faits de toute origine à la Caisse de dépôt et
placement du Québec?
Ma deuxième question s'adressera peut-être plus
particulièrement à M. Cazavan, que nous
avons le plaisir d'avoir avec nous ce matin. Je demande au ministre
s'il a la réponse, bien entendu s'il existe des
prévisions, si la caisse fait des prévisions sur les
rentrées de fonds sur une base régulière. Je pense, en
particulier, aux fonds principaux, comme la Régie des rentes du
Québec. Est-ce qu'il existe des prévisions qui permettent
à la Caisse de dépôt et placement du Québec de
savoir quelles seront les rentrées, les contributions nettes des
déposants, eu égard aux déposants principaux que nous
avons là? En ce qui concerne la Régie des rentes du
Québec, par exemple, on s'aperçoit que ces contributions ont
baissé, de $298 millions en 1976, à $212 millions en 1978. Cela
m'apparaît inférieur aux prévisions qui étaient
parues antérieurement dans différents rapports en ce qui concerne
la Régie des rentes du Québec. Il me semble qu'on s'attendait que
ces contributions ne commenceraient pas à diminuer si tôt. Donc,
je voudrais savoir s'il existe des prévisions pour les dix, quinze ou
vingt prochaines années, en ce qui concerne ces contributions,
évidemment, en supposant que le régime ne serait pas
changé, puisqu'on ne peut pas prévoir les changements que le
gouvernement pourra décider.
Est-ce que les mêmes prévisions existent en ce qui concerne
la Régie d'assurance automobile? Puisque effectivement, je connais des
prévisions qui sont faites là-dessus, j'aimerais qu'on puisse en
discuter, peut-être voir s'il y aurait lieu de faire distribuer ce
renseignement, de façon qu'on voie un peu mieux quelle va être
l'évolution à venir de la Régie des rentes du
Québec.
Ma troisième question est la suivante. J'aimerais attirer
l'attention du ministre, sur le rapport du Vérificateur
général en ce qui concerne la Caisse de dépôt, et
avoir ses commentaires sur les recommandations et les constatations qui sont
faites par le Vérificateur général, où ce dernier
exprime l'avis que la documentation est insuffisante en ce qui concerne les
systèmes des actions, des obligations et de la comptabilité. Il
recommande que les procédures écrites existent pour un certain
nombre de tâches: la préparation des documents pour
l'informatique, les actions à prendre ou les personnes à
contacter lors de l'interruption d'une production informatique, les corrections
de transactions selon le type d'erreurs, l'utilisation des rapports et la
signification des différents champs d'information et les autres aspects
des travaux selon les besoins des usagers et des informaticiens.
Je voudrais donc demander si quelque chose a été fait
à la suite de ce rapport du Vérificateur général en
ce qui concerne ces recommandations particulières.
Enfin, je voudrais, M. le Président, me reporter à une
déclaration que le ministre des Finances avait faite l'année
dernière en ce qui concerne la publication éventuelle de la liste
des entreprises qui font partie du portefeuille d'actions ou de placements de
la Caisse de dépôt et placement, je voudrais savoir s'il y a eu un
changement de politique à cet égard. Le ministre, l'année
derniè- re, avait exprimé un avis favorable à la
publication avec une certaine période de décalage dans le temps,
de façon à ne pas affecter le marché, mais je voudrais
savoir s'il a donné suite à cet avis favorable. Est-ce qu'il y a
eu des discussions qui ont suivi ses déclarations? Où en
sommes-nous à l'heure actuelle à ce sujet-là?
Je ne sais pas si c'est le moment d'en parler vraiment, M. le
Président, mais mon dernier point porte sur la Régie des rentes
du Québec en tant que telle et la suite à donner au rapport
COFIRENTES.
Je vais en rester là pour l'instant. Cela fait déjà
cinq ou six questions. Je pense que ça peut commencer le
débat.
Le Président (M. Laberge): Cela peut alimenter un quart
d'heure. M. le ministre.
M. Parizeau: Étant donné qu'il s'agit de questions
de différentes natures, on peut peut-être les prendre dans l'ordre
qu'elles ont été exprimées et les traiter une à
une. Pour ce qui a trait à la récupération...
Je voudrais simplement, à titre d'introduction, faire
vérifier une chose. J'espère que le député
d'Outremont, dans ses remarques préliminaires, n'a pas indiqué
que le crédit agricole était une initiative déplorable.
J'ai cru comprendre ça... Si c'était ça, je pense qu'on
devrait tout de suite lui donner l'occasion d'expliciter un peu plus sa
pensée.
M. Raynauld: Non, je ne suis pas opposé au crédit
agricole. Je ne suis opposé à aucun crédit en particulier,
mais je trouve que cette prolifération d'institutions
spécialisées pour différents types de crédit,
différents types d'activités, si on suit cette pente, on va finir
par avoir 75 banques d'affaires au Québec, et c'est à ça
surtout que je m'en prends.
M. Parizeau: Je voudrais simplement dire une chose à ce
sujet avant qu'on aborde les autres questions, M. le Président. Nous
sommes justement le premier gouvernement qui essaie de faire en sorte que ses
transactions de prêts à des emprunteurs spécialisés
soient faites par les banques et les caisses populaires. Alors, ça
tombe, en un certain sens, un peu mal que le premier gouvernement qui cherche
justement à faire en sorte que ça passe par des canaux
réguliers bancaires, comment dire, se fasse attraper sur un sujet comme
celui-là. Il est évident, par exemple, que, quant aux
crédits touristiques, avant de savoir si ça va devenir une
institution de prêts spécialisés, il faudrait d'abord
savoir si ce ne sont pas les banques aussi qui vont les faire.
Ceci étant dit, j'aborde les questions qui ont été
soulevées par le député d'Outremont. D'abord, la question
de la récupération des contributions de l'employeur. J'imagine
qu'il fait allusion aux modifications qui ont été
apportées au traitement du déficit actuariel des fonds de pension
du gou-
vernement et du paiement des contributions de l'employeur par le
gouvernement dans ces fonds de pension. Il s'agit d'opérations qui ne
passent pas par la Caisse de dépôt, en ce sens que le gouvernement
a à faire ou aurait dû faire avant, ce qu'il ne faisait pas, mais
enfin, aurait dû faire, sauf dans le RREGOP, comptabiliser ses paiements
d'employeur au fonds de pension des enseignants et au fonds de pension des
fonctionnaires qui sont au-delà de ce qui va à la Caisse de
dépôt.
En somme, bien sûr, le 1,8% a toujours été
payé à la Caisse de dépôt, mais au-delà de
ça, le fonds de pension du gouvernement n'était pas
alimenté, la comptabilisation n'était pas faite. Donc, tout ce
qui est apparu dans le discours du budget a trait à des transactions qui
ont une incidence sur le déficit actuariel des fonds de pension, mais
qui se situent au-delà du 1,8%, donc, et cela n'affecte en rien les
rapports qu'il peut y avoir entre le gouvernement comme employeur et la Caisse
de dépôt. C'était évidemment réglé
depuis longtemps. (10 h 45)
M. Raynauld: Cela n'affecte en rien les rapports avec la Caisse
de dépôt. La façon la plus simple que le gouvernement
pouvait imaginer d'adopter était précisément de verser ces
montants additionnels au titre des fonds en particulier, des fonds auxquels ils
s'appliquaient. À ce moment, on n'avait qu'à suivre les
règles normales suivant lesquelles ces fonds versent la
différence à la Caisse de dépôt entre les
contributions que ces fonds reçoivent et les prestations qu'elle verse
et les frais d'administration.
M. Parizeau: Non, c'est...
M. Raynauld: La différence est versée à la
Caisse de dépôt pour administration.
M. Parizeau:... vraiment technique, je m'excuse. Les fonds de
pension du gouvernement, par exemple le fonds de pension des enseignants au
gouvernement et le fonds de pension des fonctionnaires ne sont pas
gérés par la Caisse de dépôt, ils ne l'ont jamais
été.
M. Raynauld: Nous ne parlons pas de l'administration des fonds.
Je dis justement que la façon la plus simple de procéder aurait
été, pour le ministre des Finances, de dire: Nous versons des
fonds supplémentaires aux fonds de pension en question pour
administration et la différence entre les contributions nettes que ces
fonds reçoivent, les prestations et leurs frais d'administration est
versée, pour fins de placement, à la Caisse de
dépôt. C'est comme ça qu'à l'heure actuelle, le
régime fonctionne.
M. Parizeau: Non.
M. Raynauld: Mais oui, écoutez! Quand on voit le
Régime de retraite des employés du gouvernement qui a
versé à la Caisse de dépôt $150 millions en 1978,
c'est la contribution nette, ce sont toutes les entrées moins les
sorties et la différence est versée à la Caisse de
dépôt...
M. Parizeau: C'est pour ça qu'on appelle le RREGOP...
M. Raynauld: Oui...
M. Parizeau: ... mais le fonds de pension, le vieux fonds de
pension des enseignants et le vieux fonds de pension des fonctionnaires, qui ne
sont plus alimentés aujourd'hui... Ce sont des fonds de pension qui ont
commencé il y a des générations. Je n'ai jamais
compté, mais quand est-ce que cela a commencé? À la fin du
XIXe siècle? On ne sait pas, je ne veux même pas avancer une date.
Jusqu'en 1973, ces fonds-là ont toujours été tenus sur une
espèce de base de caisse. On comptabilisait les entrées et les
sorties. Au fond, on se fichait du déficit actuariel. Depuis 1973, il
n'y a plus de nouveaux arrivants dans ces fonds. Les nouveaux arrivants ont
été passés dans le RREGOP et celui-ci, bien sûr, est
administré par la Caisse de dépôt. Mais les vieux fonds, on
ne pouvait pas les faire administrer; il n'y avait rien à administrer:
c'était fait sur une base de caisse. L'essentiel des déficits
actuariels ne se trouve pas dans le RREGOP, il se trouve dans ces deux vieux
fonds-là. C'est là qu'on approche, pour les deux fonds seulement,
d'un déficit actuariel de l'ordre de $6 milliards. Plus personne n'entre
dedans. Le déficit croît d'autant plus vite que, justement parce
que personne n'entre dedans, l'âge moyen de ceux qui sont couverts par
ces deux vieux fonds de pension s'accroît terriblement vite dans ces
conditions.
On ne peut donc pas passer à la Caisse de dépôt
quelque chose qui: a) n'y a jamais été; et b) n'a jamais vraiment
été administré comme un fonds de pension. J'ai donc, comme
ministre des Finances, le problème de réduire le déficit
actuariel de ces deux vieux fonds dans lesquels personne n'entre plus, mais
qui, néanmoins, sont là et représentent des engagements
pour le gouvernement.
Quant à tous les nouveaux employés depuis 1973, tout
ça va dans le RREGOP et le RREGOP va à la Caisse de
dépôt.
M. Raynauld: Et les contributions qui ont été
versées cette année pour réduire le déficit
actuariel n'ont rien à voir avec ces fonds-là.
M. Parizeau: Avec le RREGOP? Non, ce sont les deux vieux
fonds.
M. Raynauld: Ces deux vieux fonds s'appliquent aux enseignants
et...
M. Parizeau: Aux fonctionnaires. M. Raynauld: Aux
fonctionnaires.
M. Parizeau: Oui. Les deux fonds qui ont été en
pratique remplacés, pour les nouveaux arrivants, par le RREGOP en
1973.
M. Raynauld: Bon.
M. Parizeau: Je ne sais pas si on pourrait avoir une copie du
discours du budget de 1977/78, il y avait une évaluation des
déficits dans chacun des trois fonds, alors le contraste est
extraordinairement frappant. On va aller en chercher une copie. On peut
peut-être passer à d'autres questions et, quand j'aurai une copie
de 1977/78, on pourra passer à travers les déficits actuariels,
le contraste est saisissant.
M. Raynauld: Avant de passer à un autre sujet, cela veut
dire que les contributions qui sont versées par le gouvernement à
l'heure actuelle sont des contributions que le gouvernement conserve dans un
compte extra budgétaire dont il va se servir à 100% pour le
financement de ses emprunts.
M. Parizeau: II comptabilise, essentiellement, à la fois
d'abord les intérêts, cela a été la première
étape, ensuite les contributions d'employeurs et ensuite, un
amortissement du déficit actuariel, graduellement. Cela sert
essentiellement au financement du secteur public, bien sûr.
M. Raynauld: Je dois avouer qu'il m'avait échappé
qu'un traitement différent était donné à ces vieux
fonds par rapport aux nouveaux et je ne comprends pas pourquoi cette chose
m'avait échappé. Est-ce qu'il n'y a pas de
référence dans le dernier discours du budget sur...
M. Parizeau: Non, c'est dans l'annexe 3.
M. Raynauld: ... la Caisse de dépôt, par
exemple?
M. Parizeau: Le traitement de ces fonds de pension, le nouveau
traitement a été explicité dans l'annexe 3 du budget
1977/78. Ce n'est pas celui-là.
M. Raynauld: Oui, je sais mais...
M. Parizeau: La marche à suivre... Au fond, ce qu'on a
fait cette année avait été annoncé en 1977/78 en
deux étapes. La première étape a été faite
en 1978/79, la deuxième étape dans le discours du budget
1979/80.
M. Raynauld: Cela dit, je comprends pourquoi le ministre a
travaillé de cette façon. Est-ce que, dans les circonstances, il
n'aurait pas pu choisir de verser ces contributions à la Caisse de
dépôt, tout simplement, comme il le fait pour tout le reste?
M. Parizeau: Dans la mesure où on part d'une situation
invraisemblablement déficitaire, et où les corrections ne peuvent
se faire que graduellement, cela n'aurait pas eu de signification profonde
d'envoyer cela à la Caisse de dépôt. Il ne faut pas oublier
une chose, les gestes posés sont très astreignants pour le
gouvernement. Dans l'hypothèse où on veut se limiter à une
augmentation des dépenses totales, y compris les versements, y compris
la comptabilisation de ce vieux fonds de pension, à peu près au
rythme du produit national brut, je ne suis pas du tout certain de pouvoir
aller jusqu'au point où, graduellement, le déficit actuariel de
ces vieux fonds de pension puisse tomber ou se régulariser.
Pour moi, c'est déjà une victoire énorme que de
faire en sorte qu'un déficit qui doublait tous les cinq ans puisse
être stabilisé. Est-ce qu'on pourra, à un moment
donné* en réduisant, en serrant encore davantage les
dépenses, atteindre une situation graduellement où le
déficit actuariel pourrait tomber substantiellement? Peut-être, je
l'espère; on verra. Mais il faut bien comprendre qu'on part d'une
situation, d'un déficit actuariel complètement explosif et
où c'est déjà un effort que de payer les
intérêts et payer les contributions d'employeurs, comptabiliser
les intérêts, comptabiliser les contributions d'employeurs et
commencer à amortir le déficit.
C'est un amortissement du déficit sur une échelle assez
petite, j'en conviens, mais au moins, le déficit actuariel va cesser
d'exploser. Cela fait une situation tout à fait baroque, il ne faut pas
se faire d'illusion. Dans le secteur privé, la régie des rentes
n'aurait jamais accepté une situation comme celle-là. Il y a
même ici, si on peut dire, une question de crédibilité du
gouvernement dans ce qu'il fait à l'égard de certaines grandes
villes au Québec où le déficit actuariel est important.
C'était terriblement difficile, dans le passé, de faire la
leçon à certaines grandes villes quand le gouvernement
lui-même avait le pire des déficits actuariels et le plus explosif
de tous.
Le fait d'envoyer ça à la Caisse de dépôt
n'aurait rien changé. En fait, c'est une opération
essentiellement budgétaire chaque année, avec un objectif, de
faire en sorte que les dépenses n'augmentent pas plus vite que le
produit national brut et compte tenu des dépenses réelles qu'il
va falloir faire, qu'est-ce qu'il y a de disponible pour ce genre
d'opération.
M. Raynauld: Oui. Je ne sais pas s'il convient d'aller plus loin
là-dedans. Il reste que la Caisse de dépôt, pour moi, c'est
un organisme qui, essentiellement, fait fructifier des fonds publics et cela
aurait sûrement été pensable que ces fonds publics,
reliés à ces vieux fonds de retraite, puissent également
être administrés par la caisse. La différence aurait
été considérable puisque, à ce moment-là, le
gouvernement, s'il avait suivi les mêmes règles que pour le reste,
en aurait récupéré seulement 50% pour ses fins de
financement immédiat. Mais, comme les fonds auraient été
également disponibles à la Caisse de dépôt, il
était sûrement pensable de procéder de cette façon,
plutôt de la façon que le ministre en a décidé cette
fois-ci.
Je ne suis pas en mesure, ce matin, d'en analyser toutes les
conséquences, le pour et le contre de chacune des deux façons qui
étaient
disponibles, qui étaient possibles et je ne veux pas laisser
entendre que la décision qui a été prise est
nécessairement mauvaise, mais je pense que c'est une chose qui se
discute. Cela peut se débattre. Comme je pense encore aujourd'hui que la
Caisse de dépôt joue un rôle très important dans
l'ensemble de ces opérations financières, c'est une occasion qui
n'a pas été saisie de renforcer et de donner un réservoir
de ressources plus grand à la Caisse de dépôt, au
bénéfice d'opérations internes, d'opérations
purement non budgétaires, dans le cadre des opérations
budgétaires générales du gouvernement du Québec,
plutôt que de passer par l'intermédiaire de la Caisse de
dépôt, comme il est fait dans le cas des autres régimes de
retraite ou autres fonds spéciaux qui sont confiés à la
Caisse de dépôt.
M. Parizeau: M. le Président, je voudrais seulement
ajouter deux choses ici. Quand on dit que la Caisse de dépôt fait
fructifier des fonds, bien sûr, elle fait fructifier des fonds, sauf que
je signale que les taux d'intérêts qui sont comptabilisés
pour les deux vieux fonds de retraite dont on parlait tout à l'heure, ce
taux d'intérêt est établi justement sur la base du taux
obtenu par la Caisse de dépôt. De ce point de vue, c'est bonnet
blanc, blanc bonnet, sur le plan du rendement.
Deuxièmement, je voudrais simplement souligner une chose qu'on
oublie trop souvent de mentionner. Dans toutes les provinces canadiennes, la
totalité de fonds qui viennent du régime des rentes est
affectée au financement des gouvernements et des sociétés
d'État et des municipalités, dans certains cas; dans certaines
provinces, les municipalités, dans d'autres provinces non. Mais du
secteur public exclusivement, il n'y a qu'une seule province où une
partie de cela... C'est bien connu, mais, quelquefois, il faut le souligner. Le
Québec est la seule province où une partie du régime de
rentes va au financement du secteur privé.
Ce que me suggère le député d'Outremont, c'est que
dans cet effort tout à fait inédit que nous faisons pour
épurer le déficit actuariel des vieux fonds de retraite du
gouvernement, il faudrait qu'on s'astreigne à quelque chose d'encore
plus exigeant que ce à quoi on s'est toujours astreint au Québec,
c'est-à-dire de passer une partie de ces fonds à la Caisse de
dépôt pour les investir dans le secteur privé, en plus de
tout ce qu'elle investit déjà dans le secteur privé avec
le régime de rentes.
Au Québec, on s'était donné une barrière
très élevée à franchir, unique au Canada et,
là, on voudrait qu'on mette une deuxième barrière
pardessus. On peut faire sauter un cheval par-dessus une barrière, M. le
Président, mais lui faire sauter deux barrières à la fois,
quelquefois, c'est compliqué.
Est-ce qu'on aborde la question des prévisions de fonds?
Je passerai la parole à M. Cazavan, si on me le permet, à
ce sujet, mais je voudrais simplement faire une courte introduction. Il faut
bien comprendre que la Régie des rentes et la Régie de
l'assurance automobile font leurs propres prévisions. Elles les font
périodiquement. Quant à la façon dont la Caisse de
dépôt traite ces prévisions qui sont faites par les
organismes, si M. Cazavan a un certain nombre de choses à dire, je lui
passerai la parole, je pense bien que nos collègues sont d'accord. (11
heures)
J'aimerais bien que vous me la passiez tout de suite, parce que vous
êtes à dire tout ce que j'avais à dire.
Il est exact que nous n'administrons pas de régime, il faut bien
que ce soit compris, nous ne sommes pas des administrateurs de régime.
Cela, je le dis pour le public en général. Souvent nous recevons
des appels de gens nous demandant beaucoup de choses qui sont pertinentes
à l'administration d'un régime et des questions qui s'appliquent
à la Régie des rentes et, depuis quelque temps, à la
Régie de l'assurance automobile. Cependant, comme nous sommes
l'organisme qui place les fonds de ces deux autres organismes, nous devons
avoir ce que vous appelez les réserves, c'est par des prévisions
actuarielles qui nous sont fournies par ces organismes. Dans le cas de la
Régie des rentes, tous les cinq ans, il y a des prévisions
officielles, mais nous recevons annuellement des prévisions officieuses
qui sont préparées par les actuaires de la Régie des
rentes, dont je vais plutôt parler, parce que notre politique, notre
expérience en ce qui concerne la Régie de l'assurance automobile,
est encore très mince.
Nous nous servons de ces prévisions pour disons que, dans
le cas d'obligations, c'est peut-être plus facile à comprendre
acheter des obligations qui viennent à échéance ou
qui peuvent être transigées pendant une période de temps
qui correspondrait aux retraits éventuels, si jamais il n'y avait pas de
changements de primes ou de cotisations dans le régime de rentes. Soit
dit en passant, nous sommes plutôt portés à croire qu'il y
aura éventuellement des changements, mais il faut, comme vous l'avez dit
tout à l'heure, fonctionner comme s'il ne devait pas y en avoir. Nous,
c'est par les achats, par la liquidité de certains achats, par toute
cette expérience qui est donnée à nos gens, que nous nous
traçons un tableau et que certaines années, nous achetons.
Là, je vous dirai bien que, si des échéances de 40 ans
dans des gouvernements ou des municipalités redevenaient à la
mode, à moins qu'elles ne soient d'une "marchandabilité" assez
extraordinaire, nous n'en achèterions pas. Maintenant, je fais la
différence des gouvernements majeurs, dont les obligations se transigent
assez facilement sur le marché secondaire, parce qu'il est très
rare, dans le cycle des taux d'intérêt, que nous conservions une
obligation que nous avons achetée jusqu'à
l'échéance complète. Cela fait l'effet, par la suite,
lorsque l'échéance raccourcit, d'échanges, de transactions
avec d'autres institutions qui sont des caisses populaires ou d'autres
institutions, des compagnies de fiducie, qui veulent acheter des
échéances à plus court terme. Pour nous, si ça ne
correspond plus à nos exigences actuarielles, nous faisons ce que nous
appelons le "trading", l'arbi-
trage avec d'autres institutions, en fait, le marché qui est
connu.
Dans les actions, c'est un peu plus facile, parce qu'il s'agit de nous
en tenir à des actions de grands marchés ou de nous en tenir,
pour une certaine partie de notre portefeuille, à des actions à
grands marchés.
Est-ce que je réponds à votre question? Nous, c'est par
les prévisions actuarielles de données qui nous sont fournies.
Dans le moment, j'ai plutôt parlé de la Régie des rentes;
éventuellement viendra le tour de la Régie de l'assurance
automobile, qui a encore des données assez imprécises, parce que
l'expérience n'est pas encore là pour les...
M. Raynauld: J'aurais aimé, si cela avait
été possible, qu'on nous donne ce genre de prévisions pour
nous faire une idée des flux de contributions attendus par la Caisse de
dépôt. Il me semble que ça nous donnerait des perspectives
et ça nous permettrait également de voir dans quelle mesure il
est urgent d'apporter des modifications à certains de ces
régimes. Je ne sais pas si c'est possible, mais j'aurais aimé
avoir ces prévisions par écrit. Par exemple, en ce qui concerne
la Régie de l'assurance automobile, j'ai vu un document qui a
été préparé par la régie et qui montrait
qu'il y avait une caisse qui s'accumulait jusqu'à $10 milliards en
1990...
M. Parizeau: De $11 milliards, oui.
M. Raynauld: Oui, de $11 milliards. J'ai été
abasourdi et étonné de voir ce papier, mais on n'a pu en discuter
parce, comme il arrive souvent, on demande des documents aux commissions
parlementaires et on les reçoit après que la commission a
terminé ses travaux, alors, c'est reporté
indéfiniment.
M. Parizeau: Si vous permettez, juste sur le fonctionnement de la
commission parlementaire, il y a un problème, c'est que ces projections,
aussi bien de la Régie des rentes que de la Régie de l'assurance
automobile, relèvent d'autres commissions parlementaires et d'autres
ministères. La Régie des rentes relève du ministère
des Affaires sociales et la Régie de l'assurance automobile
relève du ministère des Consommateurs, Coopératives et
Institutions financières.
En somme, je ne peux pas fournir des documents de première main
ici à cette commission parlementaire. Tout ce que je ferais, ce serait
de les obtenir des autres ministères.
M. Raynauld: C'est pour cela que j'ai posé ma question
tout à l'heure pour la Caisse de dépôt qui, pour les fins
de sa propre administration, a besoin de prévisions comme
celles-là, parce que, justement, une des premières règles
du placement, c'est d'avoir des échéances qui correspondent aux
obligations que la Caisse de dépôt peut avoir. À ce moment,
il me semblait qu'il serait approprié que je demande, au sein de cette
commission parlementaire, au moment où on discute de la Caisse de
dépôt, quelles sont les prévisions dont la Caisse de
dépôt se sert. Si ce ne sont pas des documents de première
main, ce seront des documents de deuxième main, cela ne me fait
rien.
M. Parizeau: Je ne suis pas certain de quelle façon ou par
quel canal on doit procéder ici. La Caisse de dépôt
reçoit ces estimations. Ce qui fournit les estimations, ce sont d'autres
corps publics qui sont la Régie des rentes et la Régie de
l'assurance automobile. Ce sont ces organismes qui les fabriquent. C'est eux
qui les mettent au point. C'est eux qui les fournissent. Je n'ai aucune
espèce d'objection à demander à ces deux régies
qu'elles nous les envoient aux fins de la commission ici, mais est-ce que c'est
la façon de procéder? Je me rendrai à la décision
de la présidence là-dessus.
M. Raynauld: M. le Président, avant de rendre une
décision là-dessus, est-ce que la Caisse de dépôt
n'a pas ses propres prévisions? Elle peut s'inspirer des documents
qu'elle reçoit d'ailleurs, mais sûrement qu'elle doit exercer un
jugement là-dessus, comme elle exerce un jugement sur tout. Il n'est pas
dit que ce dont se sert la Caisse de dépôt sera
nécessairement et exactement, au dollar près, les documents qui
peuvent lui venir de certains autres organismes. Je pense que la Caisse de
dépôt est un organisme autonome qui fait sûrement ses
propres évaluations sur ce qui va se produire pour les quinze prochaines
années.
M. Parizeau: Je peux vous dire qu'il y a certainement quelque
chose que nous pourrions fournir, mais je pense que nous deviendrions le
porte-parole de certains autres organismes, ce dont j'aurais peur. Je dois vous
dire que ces prévisions que nous recevons, j'aimerais mieux, parce
qu'elles sont en état constant d'ébullition, parce qu'il y a eu
des changements dans le passé, même dans les avantages des divers
régimes... Ce sont des prévisions qui sont mises à jour
assez régulièrement. S je peux vous faire une suggestion dans le
but de vous aider, non pas dans le but de vous nuire ou de ne pas vous fournir
ce que vous voulez qu'on vous fournisse, il me semble qu'il vous serait facile
de recevoir ce que je crois être un document public directement de ces
régies, les fascicules qui sortent assez régulièrement et
qui vous donnent les prévisions pour l'avenir.
Quant à nous, nous n'aimerions pas être pris dans une
situation où je vous donnerais un chiffre qui nous a été
fourni il y a six mois et qui serait corrigé dans une période de
cinq ou six mois, et qui serait un chiffre tout à fait différent.
Il faut vous dire que, dans ces prévisions, les plus exactes sont celles
de la Régie des rentes. Quant aux autres, l'Office de la construction
entre autres, les prévisions, je vous dis qu'elles sont faites un petit
peu par oreille, selon la situation.
M. Goulet: De toute façon, il n'y a rien qui fonctionne
à l'Office de la construction. Ne vous gênez pas pour le dire,
nous, on le sait.
M. Parizeau: Non, je ne veux pas m'immiscer là-dedans.
À la Commission des accidents du travail, nous avons rodé, nous
commençons à obtenir des renseignements qui étaient
très imprécis au début, parce que ces gens
n'étaient pas habitués à faire des remises de
prévisions à qui que ce soit. C'était tout à fait
interne. Depuis que c'est passé à la caisse, on a une
équipe qui a des relations avec tous les déposants. La
Régie de l'assurance-maladie s'est retirée, mais c'était
vers la fin que nous commencions à avoir des montants qui étaient
substantiellement les mêmes que ceux qui étaient
présentés au début. Je peux vous dire que la seule sur
laquelle nous nous fions, s'il n'y a pas de modification au régime dans
le cours de l'année, c'est la Régie des rentes. À
l'assurance automobile, nos relations sont excellentes, mais M. De Coster ne
peut pas donner plus que ce qu'il a dans le moment et plus que
l'expérience... Ses propres actuaires ne sont pas capables... En toute
honnêteté, et je ne veux pas que vous considériez cela avec
une attitude négative, je crains les chiffres que nous pouvons vous
apporter, parce que nous en avons. C'est sûr que nous les étudions
constamment avec nos chefs de service pour effectuer nos placements pour ces
différents comptes. J'aurais une certaine crainte, je vous l'avoue,
parce que, nous aussi, nous faisons nos prévisions qui sont des
corrections des prévisions des autres.
M. Raynauld: J'en étais sûr.
M. Parizeau: C'est ce qui est arrivé dans le cas de la
Commission des accidents du travail.
Comment peut-on juger d'une correction quand on ne connaît pas le
document de base?
C'est un peu cela que j'ai...
M. Raynauld: Est-ce que de mémoire, par exemple, vous
pourriez nous dire quant à la Régie des rentes du Québec,
si les montants qui sont inscrits là, qui sont partis de $300 millions
en 1976, $212 millions en 1978, tombent à zéro en 1983, en 1980
ou...
M. Parizeau: Un peu plus loin, mais ça tombe à
zéro. La courbe actuarielle, comme on dit en termes d'actuariat, devient
"flat".
M. Raynauld: Oui...
M. Parizeau: Alors, c'est...
M. Raynauld: À l'origine, c'était 1983 où la
caisse atteignait un plateau. Ensuite, ça commençait à
diminuer.
M. Parizeau: 1985. Oui.
M. Raynauld: D'après le rapport COFIRENTES, c'est 1983,
j'ai vérifié...
M. Parizeau: Non, prenez les premières...
Non, ça, c'est parce qu'il y a eu des corrections, M. le
député.
M. Raynauld: Ah bon! Les toutes premières...
M. Parizeau: II y a eu, par la suite, certaines corrections. Il y
a deux corrections. Une correction à la hausse et une correction
à la baisse. Une correction à la hausse qui a été
des bénéfices augmentés et, par rapport aux
prévisions originales, les taux d'intérêts ont
été substantiellement plus élevés que les taux
prévus au tout début du régime. Si je me souviens bien,
les premiers taux étaient de l'ordre de 5,5% à 6%, alors que nous
avons atteint des taux très supérieurs à ce
montant-là. Cela a fait durer le régime un peu plus
longtemps.
M. Raynauld: Parce que ce que j'ai ici...
M. Parizeau: II est assez remarquable d'ailleurs, en 1965, au
moment de la deuxième lecture du projet de loi créant la caisse,
on prévoyait, sur la base des projections actuarielles, mais aussi des
taux d'intérêt de l'époque, qu'en 1976, la caisse aurait un
actif de $2 milliards. En 1976, on a constaté qu'il était de $4
300 000 000. Effectivement, les taux d'intérêt utilisés
dans les projections ont des grosses différences sur... Mais, une chose
est claire depuis le début du régime, tout le monde l'a toujours
su, c'est qu'il y a, pour la Régie des rentes proprement dite, une phase
de croissance, une phase de plateau dans les années 1980 et, ensuite,
ça tombe comme une roche.
M. Raynauld: Enfin, on a la dernière estimation que je
connaisse, mais il y en a peut-être d'autres plus récentes encore.
Pour le rapport de COFIRENTES, le début du plateau est en 1984 où
la réserve sera de $8 300 000 000 et le sommet sera atteint en 1989 et,
ensuite, comme le ministre y a fait allusion tout à l'heure...
M. Parizeau: Est-ce que je pourrais simplement compléter
des renseignements que je donnais tout à l'heure sur les fonds de
pension? J'ai mis la main sur les chiffres. Pour le déficit actuariel
tel qu'établi au 31 décembre 1975 et qui m'a justement
amené à poser les gestes que nous avons posés depuis ce
temps-là, pour le vieux fonds de pension des enseignants, le
déficit actuariel était de $2 900 000 000. Pour le vieux fonds de
pension des fonctionnaires, il était de $1 600 000 000 j'arrondis
et pour le RREGOP, il était de $200 millions seulement. On voit
tout de suite la différence d'ampleur du problème. Pour le
RREGOP, c'est très facile à corriger et ça, bien
sûr, c'est la Caisse de dépôt, mais pour les deux vieux
fonds de pension, seulement ces deux-là ensemble, $4 500 000 000 et,
alors, si on n'avait rien fait, ça doublait tous les cinq ans, de $4 500
000 000 à $9 milliards et à $18 milliards.
M. Raynauld: Cela va.
M. Parizeau: Rapport du Vérificateur. On peut
peut-être simplement finir ces questions et, ensuite, on passera...
M. Goulet: ... des réponses aux questions du
député de...
M. Parizeau: Pour le rapport du Vérificateur, je pourrais
peut-être laisser M. Cazavan faire quelques commentaires puisque, au
fond, c'est la régie interne de...
Je dois vous dire, si on regarde ça, ça commence
surtout... Les deux premiers paragraphes semblent trouver certaines
nettetés et des précisions des données. Ce que vous
regardez lorsqu'on demande des procédures écrites, elles sont
faites depuis ce temps-là, mais je dois vous dire qu'à cette
période-là, il y avait beaucoup de traitement des données
qui se faisait à l'extérieur. Nous n'étions pas
équipés. Je n'oserais pas affirmer que nous sommes
complètement équipés, mais nous sommes mieux
équipés dans le moment pour les faire chez nous, à des
prix plus acceptables ou, en fait, plus normaux, vu que les opérations
le justifient, que les prix que nous payions à des
sociétés de l'extérieur. (11 h 15)
Maintenant, je tiens à vous dire je ne veux pas amorcer
une critique quelconque, il faut comprendre que le Vérificateur
général est un CA, j'en suis un moi-même, un mouton noir de
la profession; je n'ai jamais fait beaucoup de vérification que
nous avions embauché déjà quelqu'un pour faire une
révision de nos traitements des données et ces choses. Alors, en
ce qui concerne cette procédure écrite, ce qu'il a
décelé, c'était déjà décelé
avant qu'il nous le mentionne. On l'avait fait nous-mêmes et je ne
critique pas le travail de M. Larose qui dit toujours qu'il y a une excellente
collaboration de notre part et nous, nous trouvons qu'il travaille aussi
très bien. Mais lorsqu'il trouve une erreur, souvent c'est une erreur
que nous avons corrigée déjà entre-temps, une erreur qu'il
a soulignée ou que certaines personnes du personnel du
Vérificateur général ont découverte.
Je pense que, mutatis mutandis, j'aurais pu vous apporter les
procédures écrites qui sont là, qui avaient
été préparées pour notre compte par la firme de
Raymond Chabot que vous connaissez probablement et que nous avions
engagée, justement, pour passer de l'étape de la mitaine à
l'étape de l'ordinateur, et le temps nécessaire.
Je peux vous dire qu'il n'y a rien dans ces choses qui nous ait
étonné, rien qui nous ait renversé et je suis porté
à vous dire que probablement au prochain, vous ne reverrez plus cette
remarque. Il y aura peut-être autre chose. Comme là, on parle
d'accès à la salle d'ordinateur. Nous sommes dans un
édifice loué. Nous ne pouvons pas obtenir la permission de faire
ce qu'il nous suggère: une serrure électronique et tout
ça. On ne nous permet pas dans un édifice loué, en cas de
feu ou n'importe quoi, d'avoir une serrure électronique où nous
serions les seuls à avoir le contrôle. Il pourrait y avoir un feu,
alors on a d'au- tres systèmes de compensation, mais il y a des choses
comme ça qu'on ne peut pas avoir à la Place Victoria. On trouvait
que la suggestion avait son sens, mais ça nous est absolument impossible
de répondre à cette exigence.
M. Raynauld: Ce qui nous intéresse, je suppose, dans un
cas comme celui-là, c'est la raison pour laquelle le vérificateur
peut proposer une chose comme celle-là, parce que je pense que de
restreindre l'accès d'une salle où on peut avoir accès
à tous les dossiers, c'est une règle assez
élémentaire et si cette solution n'est pas bonne, j'aimerais que
vous nous disiez qu'il existe d'autres solutions que celle-là et qu'on
peut être certain que ce n'est pas n'importe qui qui peut y entrer et
sortir les dossiers.
M. Parizeau: La salle est toujours sous clef et les clefs sont
à la disposition de deux personnes qui sont en charge du service. Mais,
en toute honnêteté, la serrure électronique était
une meilleure solution. Le fait est qu'on n'a pas eu un feu, mais on a
déjà eu un dégât d'eau dans cette salle et ça
aurait été un désastre s'il y avait eu une serrure
électronique à ce moment, parce que nous avont été
avisés par les gardiens de l'édifice qui sont en communication
directe avec nos gens.
M. Raynauld: En ce qui concerne, les remarques antérieures
que vous nous avez faites, je trouve tout à fait normal pour un
vérificateur d'endosser ou de ne pas endosser ce qu'il peut trouver. Je
veux dire, ce n'est pas parce que ce n'est pas lui-même qui a
trouvé ça... Je sais comment ces choses se font, parmi les choses
qu'il voit, lesquelles ont besoin d'être réaffirmées,
lesquelles n'ont pas besoin d'être réaffirmées et
lorsqu'elles sont affirmées par le Vérificateur
général, je pense que ça veut dire simplement qu'il
trouvait ça suffisamment important pour s'assurer que les
décisions soient vraiment prises.
Le Vérificateur général aujourd'hui, ce n'est plus
ce qu'il pouvait être autrefois. Ce n'est pas nécessairement un
policier qui vient faire des enquêtes, mais il veut s'assurer que les
décisions soient prises au moment opportun et le fait de mentionner des
choses comme celles-là, peut-être que ça incite justement
les entreprises à procéder à des modifications. Parfois,
l'entreprise en question ou les services concernés pouvaient y avoir
déjà pensé peut-être même avoir pris certaines
dispositions déjà, mais le fait que le vérificateur
l'affirme, c'est pour s'assurer que les recommandations sont suivies et je vous
remercie de nous avoir dit que ces recommandations ont déjà
été mises en application.
M. Parizeau: Je ne voudrais pas faire une critique parce que nos
relations avec le vérificateur, de part et d'autre sont excellentes
je n'ai jamais demandé à aucun ministre d'avoir un
vérificateur autre que le Vérificateur général de
la province. Je voudrais simplement dire que parfois ça frappe comme
quelque chose qui a été découvert et c'est
peut-être une façon de se défendre contre ces
choses-là.
Encore deux questions: la publication de la liste des actions et
COFIRENTES. La publication de la liste des actions, la première fois que
j'en ai parlé au conseil d'administration, alors que j'en étais
membre, c'était sous le prédécesseur de M. Cazavan. C'est
une préoccupation que j'ai depuis dix ans trop longtemps
... Disons que, dans les milieux de la caisse, elle est bien connue.
Ceci étant dit, il faut bien comprendre que, sur le plan de
l'autonomie de la gestion de la caisse, la caisse a à décider si
ça l'intéresse ou pas. Dans la mesure où elle
décide que, pour toute espèce de raisons, ce n'est pas une chose
à faire, non seulement je n'ai aucun moyen, mais je ne devrais
pas, je ne dois pas je ne dois pas chercher à faire des pressions
sur elle à cet égard. Il y a là une question qui est
confirmée dans la loi d'ailleurs. Bien entendu, je peux, comme ministre
responsable, demander à la caisse, en vertu de l'article 44, tout
renseignement que je veux. Mais, quant à savoir si elle rend ça
public dans son rapport annuel, par exemple, ce serait aberrant pour moi de
dire que la chose ne m'intéresse pas, ça fait dix ans que je dis
que ça m'intéresse, dix ans, d'autre part aussi, que la caisse a
à déterminer ce qu'elle a à faire.
Quant à COFIRENTES, je ne veux actuellement annoncer quoi que ce
soit. D'abord, parce qu'effectivement, comme le soulignait le
député d'Outremont, il ne faut pas non plus changer de
commission. Il est clair que c'est la commission des affaires sociales qui va
avoir à discuter sérieusement à un moment donné des
recommandations du rapport de COFIRENTES, en distinguant cependant deux choses.
C'est là où, à un moment donné, ça va avoir
à revenir à cette commission. Il y a deux éléments
importants dans le rapport de COFIRENTES. De combien doit-on rajuster les
contributions pour que le système actuel puisse se poursuivre sans
tomber en faillite à un moment donné. On sait depuis le
début que le système, tel qu'il existe actuellement, va, à
un moment donné, devenir déficitaire. Alors, il y a une question
qui est, au fond, presque une question de taxation. À quel niveau
faut-il porter les contributions pour que les fonds ne disparaissent pas?
La deuxième question, c'est beaucoup plus fiscal, financier;
à un moment donné, il y a une décision à prendre
là-dessus, la deuxième décision à prendre et qui a
intéressé beaucoup les rédacteurs du rapport de
COFIRENTES: quelles améliorations faut-il apporter au régime?
Est-ce que le régime des pensions, tel qu'il existe actuellement au
Québec, est satisfaisant et suffisant? Est-ce que les prestations
devraient être augmentées? Est-ce qu'elles devraient être
étendues à des gens auxquels ça ne s'applique pas
actuellement, etc.? Il y a là des questions de politique sociale qui,
effectivement, relèvent de l'autre commission.
Il est clair qu'à un moment donné cependant il va falloir
se brancher à la fois sur la première question et aussi sur la
deuxième. Comme ministre des Finances, je devrai me brancher sur la
première question seulement, à un certain moment, indépen-
damment des décisions qui pourraient être prises quant à la
deuxième question.
M. Raynauld: Là-dessus, je comprends que le ministre pose
des problèmes. L'année dernière, je pense qu'on a
posé la question devant cette commission, à savoir s'il avait
entrepris de faire un suivi de ce rapport. Cette année, il nous
répète ce qu'il nous a dit l'année dernière, qu'il
faudra bien prendre une décision. Je peux lui demander s'il y a des
choses en marche à l'heure actuelle pour examiner ce rapport et savoir
ce qu'il va en faire.
Par exemple, il y a toutes sortes de recommandations là-dedans
sur la structure des contributions qui n'affecteraient pas
nécessairement, si vous voulez, le niveau général des
contributions. Il y a toutes sortes de recommandations particulières qui
sont faites en ce qui concerne les analyses actuarielles, la façon de
les faire, etc. Est-ce qu'il y a une action qui a été entreprise,
de quelque nature que ce soit? Ce rapport a été soumis le 30
septembre 1977, ça va faire deux ans bientôt, tout le monde admet
qu'il y a un problème, il va falloir effectivement que des
décisions soient prises. L'année dernière, le ministre a
dit que ce qu'il aurait aimé, ça aurait été qu'il y
ait une espèce d'entente avec les autres provinces, de façon que
toutes les contributions des régimes de pension augmentent en même
temps, ce qui m'avait paru un peu extraordinaire. Mais je n'étais pas
là à ce moment-là, j'ai relu ça après
coup.
Est-ce qu'il croit vraiment à ça, est-ce qu'il croit
possible qu'il puisse y avoir une action concertée comme
celle-là, d'une part? D'autre part, est-ce qu'il y a un comité
d'étude qui existe sur le sujet? Est-ce qu'il y a des discussions en
cours sur la suite à donner à ce rapport? C'est un rapport
important. Il y a toutes sortes d'autres choses qui sont reliées
à ça, qui ne sont pas nécessairement
étudiées ici, mais sûrement que le ministre doit se
rappeler que j'ai participé moi-même à la rédaction
d'un rapport en 1970 ou 1971, sur les régimes supplémentaires de
rentes. Cela s'appliquait en particulier aux municipalités. Il y avait
des recommandations là-dedans qui n'ont jamais été
suivies, évidemment, mais qui étaient bonnes. Par exemple, savoir
si on ne pourrait pas donner accès à certaines
municipalités à la Caisse de dépôt pour le placement
de certains fonds de retraite; on avait même proposé qu'il y ait
un régime de retraite provincial offert aux municipalités, pour
les employés des municipalités.
Pour le cas des petites et moyennes villes qui ne trouvaient pas
avantageux d'avoir un régime spécial pour elles-mêmes et,
à côté de ça, d'un régime
général qui aurait pu être administré par l'ensemble
de la province, auquel les villes auraient pu avoir accès, il y avait
aussi cette idée de donner accès à la Caisse de
dépôt sur la même base que les régimes actuels, comme
le RREGOP, par exemple, pour le placement des sommes qui sont actuellement
administrées de façon plus ou moins professionnelle.
Il y a toutes sortes d'aspects à ces questions de régime
de retraite que soulève justement un
rapport comme celui de COFIRENTES. Je voudrais savoir s'il y a des
choses qui se passent dans ce domaine, à l'heure actuelle, si on entend
examiner ces problèmes et si on entend donner suite à un certain
nombre de ces recommandations, même si... Évidemment, ce n'est
jamais agréable de penser qu'on devrait augmenter les contributions de
3,6% à 4,2% ou à 4,6%, ce qui est proposé par le
comité COFIRENTES et qui représente évidemment une
taxation accrue. Je pense que c'est comme ça qu'il faut l'appeler. Mais,
d'un autre côté, il me semble qu'on est rendu à une
étape où ce n'est plus suffisant de dire: Les problèmes
sont là et il faudra prendre une décision à un moment
donné. Peut-être qu'on la prendra dans deux ans, dans trois ans,
dans cinq ans. Il me semble qu'il serait opportun d'engager une étude
interne au ministère pour examiner ces questions, si ce n'est pas
déjà fait, de façon que le ministre soit en mesure de
prendre une décision lorsqu'il trouvera que la question devient
urgente.
M. Parizeau: II y a plus qu'une étude interne au
ministère. Actuellement, il y a un comité au ministère des
Finances qui est en train de réexaminer ça. Il y a un
comité avec les Affaires sociales, pour les raisons que j'indiquais tout
à l'heure, Finances et Affaires sociales. Il y a un comité
fédéral-provincial qui est en train de réexaminer tout
ça et où, bien sûr, on est représentés. Le
gouvernement de l'Ontario lui-même est en train de procéder
à une étude de son côté. (11 h 30)
J'ai pensé, à un moment donné, qu'on pourrait
probablement en arriver à une assez large entente entre les provinces,
mais singulièrement avec l'Ontario, parce que le gouvernement de
l'Ontario avait été le premier à soulever cela et semblait
décidé à marcher.
Depuis ce temps, cependant, M. Darcy McKeough a cessé
d'être ministre des Finances de l'Ontario et l'accent n'est plus tout
à fait le même. Il me paraît très important, en tout
cas, par le truchement du comité fédéral-provincial, qu'on
puisse au moins savoir dans quelle mesure et jusqu'à quel point il y
aura moyen de bouger ensemble.
Il ne faut pas oublier que la contribution au niveau des entreprises va
être appelée à monter, et qu'il ne serait probablement pas
très utile que la bisbille se place à la fois dans la
façon de traiter cela, les montants en cause et les taux applicables aux
entreprises, par exemple au Québec et en Ontario.
Ce serait irresponsable de ma part de ne pas chercher à faire en
sorte qu'on voit au moins quel bout de chemin on est capable de faire ensemble.
Mais je ne cacherai pas que le fait que M. Darcy McKeough ne soit plus ministre
des Finances a enlevé, à la fois, pas mal de pression et pas mal
d'accent.
Cela étant dit, je ne suis pas pressé, en termes de mois
sur une période de plusieurs années, oui, il va falloir le
faire, on le sait bien pour la raison suivante: c'est qu'on manipule des
sommes énormes, lorsqu'on commence à bouger les taux de
contribution ou la définition des plans. Ce sont des sommes
considérables, bien plus élevées que des tas de programmes
de dépenses dont on parle. Là, on déplace des milliards de
dollars. Tant que je n'aurai pas fait moi-même le tour de tout cela et
tant que je n'aurai pas vu, avec les autres provinces, jusqu'où, encore
une fois, on peut aller ensemble, je ne suis pas pressé de me brancher.
Il est clair qu'il va falloir arriver à une décision, à un
moment donné.
M. Raynauld: Est-ce que des réunions ont lieu au sein du
comité fédéral-provincial?
M. Parizeau: À peu près tous les deux mois.
M. Raynauld: À peu près tous les deux mois. Et
c'est actif, ce n'est pas un comité endormi?
M. Parizeau: C'est un des sous-comités du comité
permanent des sous-ministres des Finances au Canada. Le comité permanent
existe depuis une quinzaine d'années. Pour y avoir participé
assez fréquemment, c'est un rouage important de la machine
fédérale-provinciale.
M. Raynauld: Qui est lourde. M. Parizeau: Et importante
aussi.
M. Raynauld: II n'y a pas de calendrier prévu à
l'heure actuelle dans ces matières?
M. Parizeau: Tant que je n'y verrai pas plus clair, je n'y
mettrai pas un calendrier, sûrement pas.
M. Raynauld: Je voudrais quand même exprimer ici ma
préoccupation en soulevant ces questions. Dans la mesure où nous
savons que les obligations ou le passif de ces régimes augmentent plus
vite, en termes de coûts économiques des régimes de
pension, que l'argent qu'on y consacre à l'heure actuelle, chaque
année qui passe va accroître ces obligations et cela va rendre la
solution de plus en plus difficile. On sera peut-être amené,
à un moment donné, à faire le même genre
d'opération que le ministre des Finances s'est vu obligé de
faire, en ce qui concerne les fonds des enseignants et des fonctionnaires,
où on a tellement attendu qu'on est obligé d'apporter des
solutions qui ne sont pas vraiment les solutions les plus appropriées
dans les circonstances.
C'est cette préoccupation qui m'inspire. Je suis
entièrement d'accord avec le ministre que quand on en vient à
discuter de taux ou de contribution des entreprises, qu'il serait
éminemment souhaitable...
M. Parizeau: J'imagine.
M. Raynauld:... qu'on ne procède pas de façon
indépendante dans un domaine comme celui-là,
qu'on essaie d'harmoniser un peu les solutions et les décisions.
Je suis entièrement d'accord là-dessus. Je ne sais pas, mais il
semble que je vois là un peu plus d'urgence à examiner et
à respecter les échéances. Je pense bien que ce n'est pas
une catastrophe, mais, tout de même, essayez d'accélérer
les travaux de façon qu'on ne soit pas placé dans une situation,
d'ici deux ou trois ans, où on devra faire des efforts beaucoup plus
grands pour résoudre des problèmes qui n'auront pas
été résolus au moment opportun.
C'est cette préoccupation que j'ai à l'heure actuelle. Je
suis entièrement d'accord sur la façon dont le ministre peut
aborder le problème actuellement. S'il existe un comité
fédéral-provincial, tant mieux, mais est-il possible que le
gouvernement du Québec exprime un peu plus d'empressement à
examiner ces questions? Peut-être s'agirait-il d'y penser? La seule
démarche concrète qu'il conviendrait peut-être de prendre
à l'heure actuelle, c'est d'exprimer une certaine diligence à
vouloir examiner ces problèmes et voir ensuite à ce que les
décisions soient prises dans les meilleurs délais.
M. Parizeau: M. le Président, il faudrait quand même
aussi mettre les choses dans une perspective correcte.
Sur le plan des fonds de retraite des enseignants et fonctionnaires, il
n'y a pas eu un gouvernement qui a voulu bouger sur cette affaire, en
dépit du fait qu'on savait que c'était de la dynamite. J'ai
passé deux ans à essayer de corriger ça; cela a
impliqué, dans une optique parce que ça devait
s'accompagner d'une compression des dépenses des efforts non
seulement considérables, mais tellement considérables que,
finalement, personne ne voulait y toucher; on savait qu'il y avait un tonneau
de dynamite là et on ne voulait pas le regarder. Ces deux fonds s'en
allaient chez le diable! Ce n'était pas une question de quelques
années, on était pris avec une situation absolument explosive.
Cela m'a pris deux ans pour faire ça et cela a impliqué
singulièrement, dans le dernier discours du budget, une ponction, un
effort de compression énorme des autres dépenses pour
régler ça.
L'autre question sur le régime de rentes: on l'a dit il y a
quatorze ans que ce n'était pas complètement capitalisé;
le gouvernement fédéral a refusé de capitaliser, il
voulait un "pay as you go", comme le député d'Outremont s'en
souviendra. Ce que Mme Judy LaMarsh voulait, c'était un "pay as you go"
qui nous aurait placés dans une situation effroyable aujourd'hui, si on
avait adopté ça. Le gouvernement du Québec du temps a
été le seul gouvernement à pousser pour avoir un fonds
complètement capitalisé. On a fait finalement un compromis
à la canadienne, c'est-à-dire que ce n'était pas un "pay
as you go" et que ce n'était pas complètement capitalisé;
on a simplement reporté le tonneau de dynamite de 20 ou 25 ans. Le
tonneau de dynamite n'est pas pour aujourd'hui; les deux affaires que j'ai
réglées, c'était pour aujourd'hui et il fallait les
régler.
Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, j'ai été,
à ma connaissance, le premier ministre des Finances à appuyer
immédiatement le ministre des Fi- nances de l'Ontario, dès qu'il
a commencé à dire qu'il fallait quand même commencer
à s'occuper de cette question. Nous avons poussé tous les deux
dans le même sens pendant une bonne année. Que les règles
du jeu aient changé dans l'intervalle n'enlève rien non seulement
à ma préoccupation, mais à la certitude que j'ai qu'il va
falloir régler cela. Qu'on ne me demande pas de régler des
histoires de cette ampleur tout en même temps en quelques mois; ça
n'est pas faisable. Cela n'enlève rien à la persistance qu'il y a
à mettre là-dessus; j'ai tout à fait l'intention de mettre
autant de persistance de ce côté que j'ai pu en mettre pour
arranger les deux vieux fonds de retraite dont nous parlions tout à
l'heure. Cependant, quand les choses n'ont pas été
réglées pendant 10 ans, pendant 15 ans et, dans certains cas,
pendant 50 ans quand on prend les vieux fonds de retraite il ne
faut pas s'imaginer qu'en un an on règle tout.
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé, M. le
député d'Outremont? M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, je me demandais si on devait
interrompre les économistes, bien qu'on ait formulé le voeu, au
début, que ce soit court.
Au niveau des commentaires généraux, je passerai outre.
J'avais naturellement beaucoup de questions que le député
d'Outremont a posées. Bien sûr, la Caisse de dépôt
semble très bien administrée, sauf les quelques remarques du
Vérificateur général, mais quant à une
amélioration éventuelle, je pense que M. Cazavan a répondu
là-dessus, et ces remarques étaient très peu sur
l'administration, c'est-à-dire que le Vérificateur
général nous a dit que c'est une très bonne
administration. C'étaient des détails de serrure, vous avez le
mot juste.
Quant à la gestion et au placement, M. le ministre nous a bien
dit que la Caisse de dépôt décidait si cela
l'intéressait ou pas, était le seul maître d'oeuvre de ces
actions, que c'est la Caisse de dépôt qui décidait.
Au niveau de la Société nationale de l'amiante, vous allez
investir là-dedans, vous avez des montants de prévus pour
investir dans la Société nationale de l'amiante.
M. Parizeau: Pour tout dire, nous investirons. Évidemment,
il faudrait encore connaître sous quelle forme la société
va vouloir emprunter. Dans le moment, je ne peux pas... Il faut connaître
le genre d'émission, pour nous, quelle sera l'émission...
M. Goulet: II y a quelque chose qui m'a frappé tout
à l'heure. Au niveau des principes, M. le ministre a dit: C'est la
caisse qui décide si cela l'intéresse ou pas. Si je me
réfère aux propos qu'a tenus hier le ministre des Richesses
naturelles, lors de son intervention de deuxième lecture en Chambre sur
le projet de loi 125, qui va faire en sorte que le gouvernement puisse
étatiser la Société nationale de l'amiante, il ne semblait
pas
vous laisser le choix. Il disait: II y a des milliards qui dorment
là. Ils sont à nous, on va s'en servir. Voici comment on va s'en
servir, et ainsi de suite.
M. Parizeau: Excusez-moi, mais vous citez le ministre des
Richesses naturelles?
M. Goulet: Oui.
Ml. Parizeau: Ce n'est pas tout à fait cela que j'ai
entendu, mais, enfin...
M. Goulet: Je ne voudrais pas induire les membres de la
commission en erreur, mais il semblait dire qu'il y a tout ce qu'il faut. Vous
êtes d'accord qu'il faut investir là, et vous allez...
M. Parizeau: Je vais vous dire que je ne suis pas au courant des
remarques du ministre des Richesses naturelles. Même s'il n'en avait pas
parlé, c'est certainement notre intention d'investir. Je pense que je
peux donner ma version, quand on dit que les administrateurs de la caisse sont
nommés par le gouvernement, qui décide de ces choses. Il n'y a
quand même pas une cloison étanche, qui veut dire qu'on ne peut
pas se parler. Il y a toujours eu une collaboration qui a existé, et du
côté du gouvernement et de tous les gouvernements, parce que tous
les gouvernements y ont passé depuis la création de la caisse,
entre la caisse et les divers gouvernements à divers niveaux. C'est
sûr que, pour nous, la Société nationale de l'amiante est
une préoccupation. D'ailleurs, pour tout dire, nous avons
déjà des actions dans Asbestos. Je n'aimerais pas vous
répondre quand je ne connais pas quelle va être la forme. Est-ce
que cela sera une forme d'équité? Est-ce que cela sera une forme
d'emprunt? Encore là, vous me parlez de base actuarielle. Si
c'était sur une base de trente ans, ce serait compliqué pour
nous. Il y a un tas de choses à analyser dans ce domaine. C'est
sûr que c'est une chose à laquelle la caisse est
intéressée à participer et elle va y participer.
M. Goulet: Quant à la...
M. Parizeau: Je voudrais peut-être ajouter une chose, si
vous me permettez, là-dessus. Pour tout ce qui a trait à la
Société nationale de l'amiante, il ne faut pas oublier que
l'intervention de la caisse se fait par deux canaux distincts. D'abord, le
gouvernement va souscrire des actions dans la SNA. Cette souscription d'actions
dans la SNA entre dans les besoins financiers de caisse du gouvernement, et la
Caisse de dépôt finance une partie de ces besoins de caisse du
gouvernement comme chaque année. Vous voyez que cela ne s'applique pas
nécessairement à la SNA, mais, dans la mesure où le
gouvernement a des besoins financiers de $1 milliard... On dit: Chaque
année, la caisse va placer à peu près la moitié de
ses placements dans l'Hydro-Québec, et les besoins financiers du
gouvernement se trouvent à entrer là-dedans. Donc, il y a une
espèce d'effet de vase communicant, il faut bien le comprendre.
Deuxième opération. La SNA embarque dans un certain nombre de
compagnies qui ne sont pas la SNA, mais dans lesquelles elle prend des actions.
Par exemple, on a annoncé l'affaire du magnésium, MANIAQ, LUPEL,
toutes ces sociétés qui ne sont pas la SNA, mais dans lesquelles
la SNA peut avoir un intérêt, peuvent être amenées
à faire des émissions d'actions ou des émissions
d'obligations comme sociétés. La caisse doit être en mesure
de regarder ces émissions et de dire: Cela, ça
m'intéresse; ça, ça ne m'intéresse pas. (11 h
45)
L'important là-dedans, c'est que la caisse, à ce niveau
d'intervention, puisse regarder et dire: Je marche ou je ne marche pas. C'est
la raison pour laquelle... C'est fondamental. D'ailleurs, ça rejoint un
peu ce que disait le député d'Outremont dans son introduction de
tout à l'heure. C'est une des raisons pour lesquelles on a donné
au président de la caisse, dans la charte de la caisse, une protection
de nature juridique qui n'existe nulle part ailleurs, il n'y a pas une
société d'État où la présidence est
protégée comme ça, justement pour éviter de
développer des appétits. Cela pourrait devenir extraordinairement
facile de tordre le bras et de dire: On se lance dans six compagnies
différentes; la caisse, ramassez tout! Toutes les dispositions ont
été prises pour que ça ne puisse justement pas se faire.
Il est évident que, dans la mesure où il se développe un
secteur industriel du côté de l'amiante, bien sûr, la caisse
est intéressée là-dedans, comme la caisse est
intéressée par tous les développements industriels qui se
font au Québec, mais étant bien entendu qu'il faut lui laisser
cette capacité ou cette aptitude de dire: Cela, oui; cela, non. Cela,
ça m'intéresse, ou même de prendre l'attitude inverse qui
consiste à dire: Présentée comme ça, votre
émission ne m'intéresse pas. Mais si vous la présentiez
autrement, ça m'intéresserait.
M. Goulet: Mais quant à...
M. Parizeau: Je m'excuse. Cela, ce sont des affirmations que je
préfère faire moi-même. Quant à...
M. Goulet: Mais quant à la gestion et au placement, si on
s'en tient au niveau des principes, je pense que la caisse a le devoir, les
administrateurs de la caisse, son président, ont le devoir de faire
fructifier les fonds au meilleur...
M. Parizeau: Oui.
M. Goulet:... de leur connaissance, mais aussi pour que ce soit
le plus efficace possible. Mais quand il nous arrive quelque chose comme la
Société nationale de l'amiante, M. le ministre, peut-être
au niveau des formalités... Mais quand vous dites: C'est la caisse qui
décide, si la caisse décidait, à un moment donné,
on n'y va pas, après que le gouvernement aurait pris une décision
semblable, qu'est-ce que vous feriez? Ces gens n'ont
quasiment pas le choix: Ou ils seraient remplacés ou...
Remarquez, je ne veux pas accuser... Je ne veux pas parler de tordage de bras,
mais j'en suis au niveau des principes. Si la caisse, quand je parle de la
caisse, si le président décide de ne pas marcher, ça ne
l'intéresse pas, parce qu'il dit: Pour faire fructifier les fonds, ce
n'est pas le meilleur placement qu'on peut faire. On peut aller dans
d'autres... Et le gouvernement, au niveau d'une politique nationale,
décide: On a besoin d'argent et on a besoin... C'est la...
Écoutez, à un moment donné...
M. Parizeau: Vous êtes exactement dans la même
situation.
M. Goulet: Je me demande s'ils ont vraiment toute la latitude.
Dans les principes, dans les écrits, je suis bien d'accord,
d'après leurs fonctions, mais, dans les faits, au jour le jour, M.
Cazavan dit: Oui, on se parle. Il n'y a pas de cloison étanche. Je
comprends ça, mais qu'est-ce qui arriverait s'ils disaient: On n'y va
pas. Cela ne nous intéresse pas, parce qu'on peut mettre ça
ailleurs et ce sera bien plus rentable? Qu'est-ce qui arriverait, à
l'encontre d'une politique nationale, une politique du gouvernement?
M. Parizeau: Vous posez exactement le type de question qu'on
s'est toujours posée dans les rapports, dans des pays, j'allais dire
complets, qu'il y a entre le ministre des Finances ou le gouvernement, d'une
part, et le directeur de la Banque centrale, d'autre part. La seule
façon d'assurer que le tordage de bras ne se pratique pas, c'est
justement d'avoir un type de protection de caractère exceptionnel et ce
type de protection est le suivant: Dans toutes les autres
sociétés d'État, on peut remplacer un président par
arrêté en conseil. Le gouvernement peut décider: Je n'en
veux plus; j'en prends un autre. Il est évident que le tordage de bras y
trouve là un canal, si on veut, qui est assez facile à
appliquer.
Dans le cas aussi bien du gouverneur de la Banque du Canada que du
président de la Caisse de dépôt, il ne peut perdre son
poste que par un vote de l'Assemblée nationale... Minute! Je ne sais pas
si vous vous rendez compte de la différence. C'est qu'un gouvernement
qui ne s'entend pas... On a eu un cas au Canada comme ça. Cela a
été l'affaire Coyne.
M. Raynauld: II y avait un débat de 35 heures. M.
Goulet: ... une fois que le problème a...
M. Parizeau: C'est arrivé une fois, au Canada dans
l'affaire Coyne et j'imagine que tous les gouvernements se sont tous promis une
chose, c'est que ça ne se produirait pas une deuxième fois. Il
faudrait comprendre, le gouvernement gagne, bien sûr, mais après,
un débat public et des explications publiques qui font un tort
inimaginable au gouvernement qui fait ça. On l'a bien vu dans le cas du
gouvernement conservateur, au moment du débat avec M. Coyne. Il faut
dire, en somme, nous voulons aller contre le meilleur jugement de cet homme et
on va vous expliquer pourquoi. Qu'un gouvernement essaie d'expliquer un tordage
de bras en public dans un débat de 35 heures, on sait bien qui va payer
le débat.
Dans ce sens, on vous parlait tout à l'heure de protection
certaine et à mon sens, c'est absolument nécessaire qu'il en soit
ainsi. Vous noterez également à quel point la Loi de la Caisse de
dépôt définit les pouvoirs du ministre. Les pouvoirs du
ministre sont des pouvoirs de renseignement, d'obtenir des renseignements. Vous
ne trouverez pas ça dans d'autres lois non plus. Ce n'est pas pour rien
que cela a été placé dans la charte. Le ministre doit
être au courant, bien sûr, mais il peut demander des
renseignements, d'accord. Mais la caisse doit être autonome.
M. Goulet: Est-ce que le ministre essaie de nous démontrer
que le président de la caisse a autant d'autonomie qu'un juge? Parce que
quand vous me dites... le Conseil des ministres...
M. Parizeau: Non...
M. Goulet: ... mais je veux dire en comparaison.
M. Parizeau: ... parce qu'il y a un conseil d'administration,
c'est ça.
M. Goulet: Ce que je veux dire, vous me faites penser à
peu près à la même porte que le ministre d'État
à l'aménagement du territoire a prise l'autre jour. Si le Conseil
des ministres, à un moment donné, décide que le
président de la caisse ou que le conseil d'administration
appelez-le comme vous le voudrez; mais parlons du président dans
telle ou telle action, ça ne l'intéresse pas, c'est son meilleur
jugement d'après cet homme, et que le gouvernement, étant
conscient, décide sincèrement que d'après lui, ce n'est
pas un bon jugement, pour telle ou telle raison, le Conseil des ministres
décide de le remplacer. Que ce soit un ministre ou un Conseil des
ministres, vous n'êtes pas un gouvernement minoritaire; on n'est pas
à Ottawa, on est à Québec. Vous décidez demain
matin, vous dites: Le président vient de prendre une décision.
Exemple, dans la Société nationale de l'amiante, il juge que pour
la gestion, il peut faire fructifier l'argent à meilleur compte à
d'autres endroits et il ne veut pas embarquer de quelque façon que ce
soit dans la Société nationale de l'amiante. En haut, vous avez
un gouvernement qui dit: C'est une politique nationale et on ne veut pas faire
rire de nous avec ça et on embarque. Comme dit le député
d'Outremont, vous reportez le débat de 35 ou 40 heures, il va y avoir
des "filibusters", il va y avoir ce que vous voulez. Même si vous me
disiez: On veut faire passer, on veut prouver ou aller à l'encontre
ce sont à peu près les mots que vous avez dits du
meilleur jugement de cet homme. Ce sont à peu près les propos que
vous avez tenus. Lui, ça peut être son
meilleur jugement, mais moi, vous, ou le député
d'Outremont peut dire: Non, ce n'est pas son meilleur jugement et nous autres,
on décide qu'on le renverse. Vous pouvez le faire.
M. Parizeau: Le gouvernement élu a toujours le droit de
présenter au Parlement tout ce qu'il veut et le Parlement a le droit de
tout faire, sauf, disait-on, de transformer un homme en femme et encore,
à notre époque, ce n'est pas certain. D'accord?
M. Goulet: Dans ce temps-là, il se transforme tout seul;
ne vous en faites pas. Pas besoin de nous casser la tête!
Une voix: Dans mon cas, mettez la pédale douce.
M. Raynauld: II vont vous payer par l'assurance-maladie.
M. Parizeau: II se fera payer par l'assurance-maladie.
Si vous me dites: Est-ce qu'un gouvernement qui fait passer une loi au
Parlement, ne peut pas faire ce qu'il veut faire? Bien sûr, ça va
de soi et c'est vrai partout. Il ne faut pas être naïf non plus. Je
disais simplement qu'à partir du moment où vous donnez un certain
nombre de protections dans une loi qui littéralement force le
débat public, vous donnez en pratique une protection devant laquelle les
gouvernements - ce n'est pas propre au Québec - ont toujours
reculé, sauf dans des cas... De temps à autre, il y a eu des
accidents comme l'afffaire Coyne, et on s'en souvient encore un quart de
siècle après.
Il n'y a pas un gouvernement démocratique qui pourra dire: Je
renonce à ce que le Parlement exerce ses pouvoirs. On peut faire en
sorte, par exemple, que dans l'exercice de ces pouvoirs-là, on fasse
attention, et sérieusement. Je pense, d'ailleurs, que M. Cazavan voulait
ajouter autre chose. Est-ce que vous permettez qu'on l'entende?
Le Président (M. Boucher): Avec plaisir.
M. Parizeau: Contrairement à une société
privée, même si je suis le président de la caisse, je suis
plus soumis à un conseil d'administration qui est nommé par le
lieutenant-gouverneur en conseil je pense que le terme est
changé, le gouvernement ne l'emploie pas trop qui est tout
à fait différent, qui représente certaines couches de la
société et certains aspects. Si jamais il y avait une question de
valeur de jugement d'un seul homme, ce serait peut-être dangereux, mais
je pense qu'une part du jugement que cet homme doit avoir, c'est de s'assurer
que son conseil le suit. Si une situation comme celle que vous venez de
soulever se présentait, si c'était ma décision, mon
jugement, il faudrait que ce soit au moins appuyé par le conseil
d'administration par un vote majoritaire.
Je pense que n'importe quel homme dans cette situation-là n'irait
pas affronter le gouvernement sans l'appui de son conseil. Avec l'appui du
conseil, je pense que c'est une situation bien différente. Pour prendre
l'exemple de la SNA, si tout le conseil disait: Non, on ne fonctionne pas
là-dedans, non seulement ce serait mon droit mais ce serait mon devoir
de faire face à la musique et de dire: Nous n'investissons pas. Mais ce
ne serait pas la décision d'un seul homme, jamais.
M. Fontaine: Je comprends tout ça, je ne voudrais pas non
plus que mes propos soient mal interprétés, mais nous sommes en
train de discuter une loi. Il y a une chose que je trouve curieuse. Un parti
politique a formulé un programme il y a au-delà de dix ans. Il
peut prendre le pouvoir ou non, on ne le sait pas. Au bout de huit ou dix ans,
voilà que le parti politique en question est au pouvoir et il a un
programme, écrit noir sur blanc, qui dit: Les mines d'amiante, on va les
étatiser et on va les acheter. On va mettre de l'ordre là-dedans
et on va se porter acquéreur de ça. Une fois qu'il a
décidé ça, il ne peut pas reculer, c'est sa politique et
il vient nous voir pour dire: Écoutez, c'est notre politique, nous
sommes le gouvernement, ça fait dix ans qu'on promet ça et il
faut le faire. On en a besoin et... Ce n'est pas comme ça que ça
se passe? On arrondit peut-être les coins, mais...
M. Parizeau: Non, je peux vous assurer que ce n'est pas comme
ça que ça se passe.
M. Fontaine: Non, et si vous décidiez de ne pas embarquer
là-dedans, qu'arriverait-il?
M. Parizeau: Je ne fais pas de distinction entre les partis
politiques: J'ai dit tout à l'heure que les trois partis politiques en
présence ici ont été les dirigeants ou, enfin, il y a eu
des ministres des Finances de la caisse. Je ne fais pas de distinction, mais je
pense que le conseil d'administration et moi-même qui préside le
conseil d'administration, si nous étions convaincus que cette
politique-là va à l'encontre des bénéfices que
ça peut procurer à nos déposants, on ne l'accepterait pas.
J'en suis convaincu. Vous prenez là une situation pas mal
extraordinaire, mais si tout le conseil d'administration, y compris le
président, était unanime à déclarer que cette
politique ne serait pas bonne, je pense qu'il faudrait faire face à la
musique.
Là encore, il y a une confusion qui s'établit
là-dedans, dans ce que j'appelais les vases communicants tout à
l'heure. Imaginons qu'un gouvernement dise: On veut nationaliser tout un
secteur et ça va coûter des centaines de millions. C'est le
gouvernement qui a à payer pour ces compagnies-là. Il faut que
l'argent sorte de sa caisse. Ce ne sont pas les compagnies qui empruntent, il
n'y a pas de titres de compagnies qui sont émis, il y a un gouvernement
qui émet des obligations. Cela va entrer dans le financement des
activités du gouvernement de cette année-là. Dans le
finance-
ment des titres d'État, la Caisse de dépôt
intervient pour un pourcentage qu'on connaît. Ce pourcentage, il serait
tout à fait pensable qu'à un moment donné il soit
augmenté. C'est une coutume qui s'est établie depuis environ une
dizaine d'années, qu'en gros, ça se balade de 45% à 55%
habituellement, la part des fonds de la caisse qui servent à l'Hydro et
au gouvernement ensemble. (12 heures)
Imaginons que, je ne sais pas, ce n'est pas sacramentel, le financement
de la Baie James aurait été plus difficile que prévu sur
les marchés privés, il aurait été tout à
fait pensable qu'un gouvernement, n'importe lequel, dise: Étant
donné la masse énorme d'argent à aller emprunter pour le
financement de la baie James, pendant deux ou trois ans, aux fins du
financement de la baie James, le pourcentage ne sera pas de 50% ou de 55%, mais
de 65% ou de 70%. Vous remarquerez d'ailleurs que, depuis deux ans,
plutôt que de laisser ce pourcentage simplement coutumier et pas
très connu, je l'annonce dans le discours du budget. Chaque
année, depuis deux ans, j'annonce dans le discours du budget: Je
m'attends que la caisse va financer à peu près tant, de
l'Hydro-Québec et du gouvernement.
Dans l'hypothèse que vous soulevez, ce serait par le financement
par l'achat d'obligations du gouvernement de Québec que la caisse
interviendrait. Il peut se poser un cas, il s'en est posé un, où
une des sociétés d'État fait une émission qui n'est
pas vraiment vendable, parce que la situation financière de la
société d'État en question est telle que ce n'est pas
vendable. On a eu un cas à la Caisse de dépôt,
c'était la garantie du gouvernement sur SIDBEC. C'était il y a
plusieurs années, je crois, cinq, six ou sept ans. SIDBEC devait faire
une émission d'obligations. Compte tenu de sa situation
financière, ça n'aurait pas été vendable, pas plus
sur le marché privé qu'à la Caisse de dépôt,
une émission comme celle-là.
Alors, le gouvernement a donné sa garantie, il a fait de cet
emprunt un emprunt garanti. C'était un emprunt de SIDBEC, mais avec la
garantie du gouvernement, c'est-à-dire que ça devient une
obligation gouvernementale. La Caisse de dépôt, qui en a
acheté à ce moment-là, achetait en fait des obligations du
gouvernement. Là, il n'y a pas de raison d'établir une
distinction entre une obligation de SIDBEC garantie par le gouvernement et une
obligation directe du gouvernement, c'est la même chose. À toutes
fins utiles, la caisse se trouve à prêter de l'argent au
gouvernement.
C'est pour ça que j'établissais une distinction entre
ça, d'une part, et des actions ou des obligations de compagnies dans
lesquelles des sociétés d'État peuvent avoir un
intérêt. Prenez par exemple la SGF, société
d'État, qui a des actions dans Donohue. Donohue décide de faire
une nouvelle émission d'actions. Tout ça est hypothétique,
je ne dis pas que c'est en préparation, il est important que la caisse
puisse dire: J'en prends ou je n'en prends pas. C'est fondamental à
présent.
M. Raynauld: Autrement dit, il y a beaucoup de façons pour
le gouvernement de se financer.
M. Parizeau: Évidemment. Les gouvernements...
M. Raynauld: S'il y en a une qui ne fonctionne pas, il y en a une
autre.
M. Parizeau: II est évident que la première
fonction d'un gouvernement, c'est de gouverner et la deuxième fonction
d'un gouvernement, c'est de se financer, ça va de soi.
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé, M. le
député de Bellechasse?
M. Goulet: J'ai terminé, mais je ne suis pas convaincu, M.
le Président.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'on peut passer
à l'étude du programme 1?
M. Raynauld: Non, M. le Président. Excusez-moi, j'ai
encore...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: ... peut-être une question à poser sur
le sujet.
Je voudrais avoir quelques informations supplémentaires sur les
politiques de placement de la caisse en ce qui concerne les actions.
Peut-être pour mettre les choses dans une perspective un peu plus large,
pourriez-vous expliquer la politique de la caisse en ce qui concerne justement
les fonds spécialisés? Je remarque que vous avez un fonds pour
les actions, un fonds pour les obligations, un fonds pour les
hypothèques ou les immeubles. Alors, qu'est-ce qui préside
à ces placements dans certains fonds en particulier, par rapport au
fonds général? Est-ce que c'est en fonction des contributions que
vous recevez ou si c'est une politique de placement de votre part?
Deuxième question, reliée à ça, les
placements qui sont faits, j'aurais aimé les avoir, et j'aimerais que
vous nous donniez des explications à ce sujet. J'aurais aimé les
avoir de façon à faire ressortir le secteur public et le secteur
privé. Vous le faites dans le cas des obligations pour le fonds
général, je pense, et le fonds d'obligations, on voit
gouvernement du Canada, gouvernement du Québec, Hydro-Québec et
autres, garantie par octroi, etc.
Lorsqu'on arrive au placement en actions, aux valeurs convertibles,
j'aurais aimé avoir une classification. Est-ce qu'il y a des entreprise
publiques là-dedans; combien y en a-t-il, des entreprises publiques du
genre Donohue, par exemple, ou d'autres? Autrement dit, est-ce qu'il y a une
ventilation par secteur public et secteur privé, en dehors des
obligations qui, elles, sont déjà ventilées en fonction du
secteur privé ou public?
M. Parizeau: Les actions publiques, voulez-vous me les...?
M. Raynauld: Les actions, les valeurs convertibles, par exemple
fonds A; est-ce qu'il y a des
entreprises publiques là-dedans qui émettent des actions
que vous avez achetées?
M. Parizeau: Auriez-vous des exemples à me donner?
M. Raynauld: Au début, il y avait la SGF qui
émettait des actions dans le secteur privé. Aujourd'hui, il n'y
en a plus. Est-ce qu'il y a d'autres entreprises qui sont...?
M. Parizeau: Reliées au gouvernement?
M. Raynauld: Oui, c'est cela que je veux dire.
M. Parizeau: De mémoire, je vous dirais que les seules
actions de cette catégorie qu'il nous reste, ce seraient quelques
actions privilégiées de Marine Industrie, qui ont
été acquises il y a longtemps. Nous n'avons pas d'actions
ordinaires. Nous avons les seules actions privilégiées qui sont
en circulation. De la SGF, d'ailleurs, il n'y en a plus, cela a tout
été retiré.
M. Raynauld: Cela a tout été racheté.
M. Parizeau: Je ne vois pas, à moins que vous n'ayez des
exemples à l'idée, dans le public, qu'est-ce...
M. Raynauld: II aurait pu y avoir...
M. Parizeau: Pour Donohue, nous avons des obligations de la
nouvelle corporation avec B.C. Forest, Donohue-Saint-Félicien.
M. Raynauld: Donohue-Saint-Félicien.
M. Parizeau: À Donohue-Saint-Félicien, nous avons
des obligations, nous n'avons pas d'actions.
M. Raynauld: Vous avez des obligations. Est-ce qu'on les voit,
ces obligations, comme étant du secteur public ou privé? On ne
les voit pas, n'est-ce pas?
M. Parizeau: Je ne pense pas que cette distinction soit faite. Il
ne peut pas y en avoir tellement. Je pense bien que la distinction...
Si vous permettez, je vais vous répondre quant aux fonds
spécialisés. Comme vous le savez, ce sont des régimes
supplémentaires de rentes qui sont administrés si on parle
du RREGOP, l'Office de la construction la meilleure chose, c'est de
regarder les déposants au début, le Régime
supplémentaire de rentes; la baie James, cela va disparaître; le
régime supplémentaire de rentes de l'Université du
Québec; le régime supplémentaire de rentes CSN, cela va
disparaître. Dans les régimes supplémentaires de rentes,
les gros, c'est évidemment le RREGOP, et c'était l'Office de la
construction qui, éventuellement, devrait redevenir un gros
déposant.
Les administrateurs des régimes, à chaque période
d'environ six mois, de six mois en six mois, nous dictent une seule chose,
c'est le pour- centage de montants que nous devons déposer, soit en
actions, soit en obligations, ou soit en hypothèques, sans nous dicter
le choix des compagnies que nous devons acheter.
C'est la seule contrainte que nous ayons et ce choix-là, je dois
le dire, se fait souvent en relation avec des études, des rencontres qui
ont lieu entre les gens de ces régimes et les gens de la Caisse de
dépôt qui vont les informer, soit au point de vue
économique, soit au point de vue des actions, soit au point de vue des
obligations et des hypothèques, de ce qui se déroule dans les
marchés actuels. Et en même temps, nous les avisons de ce que nous
faisons dans le fonds général. Mais ils sont entièrement
libres de prendre la décision qu'ils veulent prendre quant au
pourcentage que nous devons investir dans chaque secteur. C'est la seule
contrainte que nous ayons. Et cela, ce n'est strictement que pour les fonds
spécialisés, pour les régimes supplémentaires de
rentes.
Je voudrais simplement ajouter pour les actions, c'est la question que
posait le député d'Outremont.
M. Laberge: Vous êtes fiduciaires dans ces
cas-là!
M. Parizeau: Oui.
M. Laberge: Vous êtes fiduciaires de tout, d'ailleurs.
M. Parizeau: Pour la question des actions ou des obligations
à répartir entre privé et public, ce serait une
sacrée tâche à faire. Je vais essayer de l'expliquer de la
façon suivante: La SGF a le contrôle de Donohue, mais je ne me
souviens pas, de mémoire, quel pourcentage d'actions elle a. Admettons
qu'elle a 60% de Donohue. Et il y en a 40% dans le privé.
Donohue, à son tour, a 60% dans Donohue-Saint-Félicien et
B.C. Forest a 40%. Là, la Caisse de dépôt détient
des obligations de Donohue-Saint-Félicien, parce que c'est public. Une
compagnie publique a 60% dans une compgnie qui, à son tour,
contrôle 60% d'une autre compagnie. Vous me direz: Là,
étant donné que le contrôle est clairement public, oui, on
pourrait peut-être le considérer comme public. Mais la SDI a des
actions dans des compagnies dont la Caisse de dépôt peut
être actionnaire aussi, même si 80% des actions restent dans le
secteur privé. Mettons qu'il y en ait 10% à la SDI et 10%
à la Caisse de dépôt, est-ce que c'est public? SOQUIA est
intéressée dans je ne sais combien d'entreprises privées,
très souvent avec de petits pourcentages, où la caisse peut avoir
des actions ou des obligations.
Si on voulait faire une ventilation comme celle-là, il faudrait
qu'on s'établisse une borne pour définir ce qui est public et ce
qui ne l'est pas. Autrement, sans qu'on ait une espèce de ligne de
partage, il n'y a vraiment pas de réponse à donner à
ça.
Cela pourrait être intéressant de le faire, mais il
faudrait avoir un certain nombre de critères, un certain nombre de
bornes et qu'on dise: Toute société qui dépasse ces bornes
est considérée comme publique et alors, là, on
établit une ventilation.
M. Raynauld: Pour faire ça, il faudrait avoir les
critères. Je demandais si ce fait avait préoccupé la
caisse de savoir dans quelle mesure elle donne son concours à des
entreprises qui sont également dans le secteur public, en outre des
achats d'obligations du gouvernement du Québec. Si je comprends bien,
cette question n'a pas été une préoccupation majeure.
M. Parizeau: Non, je ne pense pas. Dans le sens que vous le
définissez, j'aimerais avoir des noms, ainsi je pourrais vous
dire...
M. Raynauld: ...
M. Parizeau: C'est ça, ça peut être un
concours de circonstances. Quand M. Parizeau parle de SOQUIA, ce serait
probablement elle qui aurait investi après que nous ayons acheté
des actions. Ce serait un concours de circonstances plus qu'autre chose.
Dans ce cas il doit y avoir une copie de cas où la caisse a
investi et ensuite SOQUIA n'a plus qu'à examiner tout cela.
Oui.
M. Raynauld: Pour revenir à des considérations plus
générales. Si je comprends bien, la Caisse de dépôt
ne décide pas de consacrer un certain pourcentage de ses rentrées
de fonds en actions, en obligations ou en immeubles, c'est dicté...
M. Parizeau: Dans les fonds spécialisés.
M. Raynauld: Dans les fonds spécialisés. Mais c'est
ce que je ne comprends pas très bien.
M. Parizeau: Dans le fonds général? M. Raynauld:
Oui, dans le fonds général.
M. Parizeau: C'est complètement la caisse qui
décide, en termes...
M. Raynauld: Le fonds général peut décider
d'acheter également des actions, c'est ça?
M. Parizeau: Le conseil de la caisse, par l'entremise des cadres,
achète des actions, des hypothèques, des obligations, mais non
pas selon des directives qui lui parviennent de ses déposants.
Ce que je vous ai dit, je le spécifie, c'est pour les
régimes supplémentaires de rentes qu'on appelle, pour les fins de
la cause: Les fonds spécialisés.
M. Raynauld: Autrement dit, tous les fonds
spécialisés sont des fonds dont les rentrées sont
dictées par les fonds supplémentaires de rentes...
M. Parizeau: D'investissements.
M. Raynauld: D'investissements?
M. Parizeau: Oui, selon une des trois classes.
M. Raynauld: Très bien. Ensuite, vous avez le fonds
général; celui-là est à votre discrétion et,
dans le fonds général, vous avez effectivement des placements en
obligations et des placements en actions également...
M. Parizeau: Et en hypothèques.
M. Raynauld: En hypothèques vous avez, en 1978, $700
millions investis dans des actions. Cela est à votre discrétion.
Évidemment, les rendements respectifs des divers placements que vous
avez faits sont assez volatiles, en ce qui concerne les actions. Je vois ici
c'était une bonne année qu'en 1978 vous avez eu un
rendement, sur des actions et valeurs convertibles, de 5,72. Vos placements sur
obligations ont été de 9,5 et sur placements hypothécaires
de 10.
M. Parizeau: Où voyez-vous les 5,72? M. Raynauld:
Au tableau 9.
M. Parizeau: Là, il faut faire bien attention, quand on
parle de 5,72 pour les actions, on ne parle que des dividendes qui sont
rapportés, ça ne tient pas compte de la réserve
générale, de ce qu'on pourrait appeler, en termes populaires: "le
profit de capital" que nous faisons et qui a été énorme
à cause de toutes les fusions en 1978. C'est un rendement... C'est
même une colonne que je ne trouve pas tout à fait exacte, parce
que vous pourriez avoir zéro dans certains cas, je pense que c'est
arrivé dans l'huile. Les stocks les plus appréciables en capital,
souvent ne donnent pas un très gros rendement. Alors, ça, c'est
un rendement strictement sur une base de dividendes. (12 h 15)
M. Raynauld: Justement, j'avais vu la petite note en bas, assez
importante, des profits et pertes sur les ventes de valeurs, où il
était indiqué... C'est pour cela que j'attirais l'attention
là-dessus. Il me semble que, pour des fins de comparaison dans un
tableau comme celui-là, cela prête un peu à...
M. Parizeau: Si ce n'était pas de changer quelque chose
qui a déjà existé et quand on change quelque chose
qu'on a déjà montré et qu'on ne montre plus, cela a l'air
de vouloir cacher quelque chose cette colonne disparaîtrait, selon
moi, parce que je trouve que cela fausse la vérité quasiment. Si
vous enlevez une colonne, la pre-
mière question que vous avez, c'est: Pourquoi l'avez-vous
enlevée? Qu'est-ce qu'il y avait là-dedans? Alors, je n'ai pas
osé la faire disparaître.
M. Raynauld: Je ne voudrais pas suggérer...
M. Parizeau: Non, je ne parle pas de vous, je parlerais
plutôt d'une autre classe de gens qui ne sont pas des
députés.
M. Raynauld: Non, je ne voudrais pas que vous l'enleviez du tout.
Au contraire, j'aurais voulu peut-être qu'il y ait un calcul de taux de
rendement effectif, compte tenu justement des valeurs au marché,
indépendamment même des pertes et des gains qui sont faits sur
réalisation. Un rendement sur actions, on calcule cela sur les valeurs
au marché. Je pense que, là-dessus, c'est conforme à
toutes les procédures comptables. Je me suis payé le luxe de lire
cela hier soir. C'est cela qui ressort tout le temps. Souvent, dans la
comptabilité qui est faite, on ne tient pas toujours compte des valeurs
au marché et des profits et pertes encourus plutôt que
réalisés, mais il me semble qu'un taux de rendement comme
celui-là, si c'était fait en fonction... D'ailleurs, vous l'avez
ici: Valeur comptable, valeur de réalisation, c'est la valeur au
marché, je suppose? La valeur de réalisation, c'est la valeur au
marché? C'est pour cela que je trouve cela un peu curieux que,
là, on calcule un taux de rendement qui dit... D'ailleurs, je ne savais
pas comment c'était calculé, parce que dans la note il est
simplement dit: Le rendement est exprimé en moyenne
pondérée. J'aurais aimé savoir si c'était un
rendement sur les dividendes comme vous venez de le dire. Vous êtes
sûr de cela?
M. Parizeau: Ce que je veux vous dire, c'est que c'est pour fins
de comparaison. Je ne dis pas que ce n'est pas valable, mais pour fins de
comparaison, c'est dangereux, parce que cela dépend de l'attitude qu'ont
les compagnies vis-à-vis des dividendes. Je me souviens d'une question
qu'on a eue une fois au bureau où les huiles, pétrole et gaz, je
ne me souviens pas de cela par coeur, 4,72; je pense qu'à un moment
donné, c'était 0,66 ou quelque chose comme cela. Alors, il y
avait eu presque un titre dans les journaux.
M. Raynauld: Sans enlever les colonnes...
M. Parizeau: Ce n'est pas dans notre intention de l'enlever.
M. Raynauld: Non, mais je regarde cela, valeur comptable, valeur
de réalisation. Pourriez-vous nous dire exactement ce que c'est? Est-ce
la valeur au coût et la valeur au marché?
M. Parizeau: II y a trois valeurs: la valeur de
réalisation, c'est la valeur au marché.
M. Raynauld: La valeur au marché. Qu'est-ce que c'est, la
valeur comptable?
M. Parizeau: Quelle est l'autre valeur? Il y en a...
M. Raynauld: C'est marqué valeur comptable. M.
Parizeau: II y en a trois, n'est-ce pas? M. Raynauld: Non, il y en a
deux. M. Parizeau: II y a la valeur nominale.
M. Raynauld: La valeur nominale, c'est pour les obligations. Sur
les actions, il y en a seulement deux.
M. Parizeau: La valeur comptable, c'est le coût que nous
avons payé.
M. Raynauld: C'est la valeur au coût.
M. Parizeau: Si vous prenez les obligations, la valeur nominale
quant à les faire toutes les trois, si vous voulez bien vous
achetez $100 000 d'obligations du Québec, vous les payez 99 3/4, c'est
la valeur comptable, c'est le prix que vous avez payé, et la valeur de
réalisation, à une certaine période, vous évaluez
votre portefeuille et, à la fin de décembre, vous dites: Elles
valent 99... Je suis mieux de les mettre plus hautes...
M. Raynauld: Oui, alors...
M. Parizeau: Encore faut-il être bien prudents dans ces
valeurs de réalisation. Quand vous regardez le portefeuille du
Québec et qu'on prend la cote normale des obligations du Québec,
avec la masse que nous avons, je ne peux pas vous promettre que nous pourrions
liquider notre portefeuille à la valeur de réalisation. C'est une
indication de ce que cela vaut...
M. Raynauld: Oui.
M. Parizeau: II y a seulement au Canada. C'est son
problème.
Une voix: II y a un gros marché. Je pensais toujours que
vous étiez de ce côté.
M. Raynauld: Pour revenir à cela, vous avez des actions
à valeur convertible, valeur au coût $126 millions.
M. Parizeau: $126 millions, oui.
M. Raynauld: La valeur au marché est à peu
près la même. Est-ce que ces valeurs au marché qui seraient
les mêmes dans les mines et métaux, c'est parce qu'elles ont
été achetées très récemment ces actions?
Vous n'avez pas d'idée, je suppose.
M. Parizeau: Je ne peux pas vous répondre comme cela.
M. Raynauld: Non. Enfin...
M. Parizeau: Le portefeuille roule assez
régulièrement.
M. Raynauld: Ce que vous avez dit, c'est que la colonne de
rendement ici ne tenait pas compte du tout des deux autres colonnes qui sont
là, valeur comptant, valeur au marché. Ce seraient simplement les
dividendes versés sur le coût d'acquisition, je suppose.
M. Parizeau: C'est ça, exactement.
M. Raynauld: Les dividendes sur le coût d'acquisition.
Mais, à partir des deux colonnes que vous avez là, il me semble
que vous pourriez calculer aussi un taux de rendement effectif tenant compte de
la valeur au marché au moment où le bilan est fait.
M. Parizeau: Attention. Non, il y a deux choses distinctes. Il y
a les pertes et les gains effectivement encourus à l'occasion d'une
vente. Il s'en vend et il s'en achète toute l'année. À la
fin de l'année, il y a une perte ou un gain net effectivement encouru.
Par opposition à la différence entre les deux colonnes, la
deuxième colonne, valeur de réalisation, étant
l'évaluation au 31 décembre, ça n'a pas été
réalisé, ça.
M. Raynauld: Non, non.
M. Parizeau: La bourse peut se renverser le mois suivant.
M. Raynauld: Oui, je sais bien.
M. Parizeau: C'est la valeur au jour même.
M. Raynauld: Je le sais bien, ça. Je ne suis pas un
comptable, mais il me semble que c'est courant de voir quelle est la valeur au
marché du portefeuille à un moment donné et on peut, sur
la base de cette valeur au marché, même si les pertes ou les gains
n'ont pas été réalisés, calculer un taux de
rendement qu'on aurait obtenu si on avait disposé du portefeuille au 31
décembre 1978. C'est toujours comme ça qu'on fait ça,
non?
M. Parizeau: Non, cela dégagerait au moins trois taux de
rendement. Il y aurait celui tel qu'il est calculé là, un
deuxième taux de rendement qui incorporerait les dividendes plus les
pertes et les gains encourus effectifs, qui ont été
constatés durant le courant de l'année, et un troisième
taux qui s'appliquerait à la valeur du 31 décembre, non
réalisée. Cela ferait trois taux de rendement qui
apparaîtraient.
Je ne sais pas si...
Je ne sais pas exactement lequel des trois...
Je ne sais pas si j'ai bien compris, mais je réponds à
votre question. La valeur de réalisation, ce serait la valeur que nous
obtiendrions si nous étions capables de liquider notre portefeuille au
31 décembre dans sa totalité au prix du marché tel
qu'indiqué là.
M. Raynauld: C'est ce que j'ai compris, oui. M. Parizeau:
Ce n'est pas réaliste.
M. Raynauld: Et ceci donne un taux de rendement courant, si je
peux dire, qu'on voit souvent dans les rapports.
M. Parizeau: Non, là, vous auriez une perte de $5
millions, si vous regardez simplement les actions. Mais, d'autre part, il faut
tenir compte des profits. Ces pertes sont dues à des prises de profits
qui ont été faites dans le cours de l'année. Quand vous
voyez des achats et que la valeur de réalisation n'est pas loin, c'est
que ces achats ont normalement été faits vers la fin de la
période.
M. Raynauld: C'est ça. Mais...
M. Parizeau: Bon! D'autre part, si on liquidait tout ça,
on perdrait $5 millions et, d'un autre côté, il faudrait tenir
compte des profits et pertes qui ont été accumulés dans ce
secteur.
M. Raynauld: Je m'excuse, vous ne perdriez pas $5 millions. La
dernière colonne, si j'ai bien compris, c'est la baisse dans le
portefeuille d'actions...
M. Parizeau: Mais si on les vendait...
M. Raynauld:... en 1978 en valeur comptable. Si vous les vendiez,
vous feriez un profit considérable, parce que la valeur au coût
est de $612 millions...
M. Parizeau: Ah...
M. Raynauld: ... et la valeur au marché est de $777
millions.
M. Parizeau: Mais ce serait purement théorique.
M. Raynauld: Oui, ce serait purement théorique...
M. Parizeau: Non, mais ce serait purement théorique, parce
que...
M. Raynauld:... mais c'est ça qui détermine...
M. Parizeau: ... si on vendait $777 millions le même jour
à la bourse, la bourse s'effondrerait.
M. Raynauld: Je comprends, mais c'est également ce taux
qui détermine la politique de l'entreprise, à savoir si elle doit
vendre les actions ou si elle doit les conserver dans son portefeuille? C'est
très important, cette donnée.
M. Parizeau: Non, titre par titre.
M. Raynauld: Oui, titre par titre.
M. Parizeau: Titre par titre, oui, mais pas pour des
agrégats comme ça. Il peut y avoir, dans n'importe quelle des
catégories, 25 titres.
M. Raynauld: Non, je comprends, c'est bien sûr.
M. Parizeau: Mais l'agrégat moyen n'a pas de
signification. C'est un jeu de mots.
M. Raynauld: Non, je comprends bien, mais je dis que c'est quand
même ce taux de rendement, courant ou effectif on peut l'appeler
de toutes sortes de façons qui détermine s'il est
avantageux de conserver, je ne sais pas, moi, les actions, par exemple, qu'on
peut avoir dans les services financiers et suivant les projections, parce que
même cette information n'est pas suffisante, j'en suis bien sûr,
mais si on prévoit, par exemple, que les actions au marché vont
baisser pour les dix prochaines années, l'institution va essayer de se
débarrasser de cette action particulière. Elle le voit justement
en comparant la valeur comptable de ce qu'elle a versé quand elle les a
achetées et la valeur au marché. Si, au contraire, elle
prévoit, comme dans le cas, par exemple, des services financiers ici,
où on voit qu'il y a un gain de 45%, $145 millions par rapport à
$100 millions, si cette appréciation doit continuer, à ce moment
l'institution dit: On serait aussi bien de garder ces actions-là, si
elles sont pour s'apprécier davantage. Autrement dit...
M. Parizeau: Cela ne peut pas se faire autrement qu'action par
action. Tout ce que ça peut vouloir dire, la différence entre les
deux colonnes, c'est que certains titres ont été achetés
il y a très longtemps et ont pris considérablement de valeur
parce qu'ils n'ont pas été vendus. Ou ça peut vouloir dire
exactement l'inverse, qu'ils ont été achetés il y a trois
mois et, tout à coup, il y a une augmentation formidable des cotes. Ce
n'est pas à partir d'un tableau général comme ça
qu'on est capable d'en tirer une conclusion quelconque.
Il y a deux choses que l'on sait. Il y a une analyse de secteur pour
tâcher de minimiser les risques, pour être présent dans tous
les secteurs. D'abord, il y a une analyse de secteur et, si on pense que le
secteur a fait son effort et qu'on doit changer de secteur ou avoir une moyenne
plus forte dans d'autres secteurs, il y a une analyse qui se fait titre par
titre; même dans un secteur qui est valable, il peut y avoir des titres
qui ne sont pas valables. Alors, l'analyse, ce qui est le travail de nos
analystes et de nos recherchistes, c'est justement de faire les analyses de
chaque secteur, de faire une pondération basée sur des
expériences qui nous sont fournies par d'autres institutions, par les
bourses et toutes ces choses et, par la suite, dans chaque secteur, nous avons
une analyse de chaque valeur. Selon la tendance du secteur et d'une valeur en
particulier, c'est ce qui décide si on en vend ou non. Ce n'est pas
nécessairement le fait que l'on fait un profit ou non.
Notre crainte de montrer les profits, ce serait surtout, dans les fonds
spécialisés, d'un petit peu induire les gens à vendre sur
la base d'un seul profit, ce qui pourrait être dangereux, à
l'occasion.
M. Raynauld: Je ne voulais pas nécessairement approfondir
le sujet des taux de rendement. Quand j'ai posé la question, c'est parce
que je pensais que cette comparaison pouvait prêter à de mauvaises
interprétations, vous l'avez vous-même souligné.
Maintenant, de façon plus générale, j'ai vu dans le
rapport qu'en ce qui concerne les actions, les achats d'actions, la politique
de la caisse est d'acheter des actions d'entreprises qui sont cotées en
bourse; c'est exact?
M. Parizeau: Pour la liquidité.
M. Raynauld: Pour la liquidité, pour être capable...
Et vous considérez ces placements comme étant plutôt
à court terme?
M. Parizeau: Beaucoup plus "marchandables". On revient à
notre politique de prévisions actuarielles. Alors, si je prends des
titres simples, c'est plus facile de vendre du Bell Téléphone
qu'un titre Guaranty Trust, en dessous du comptoir ou "under.."
C'est sûr que nous avons non seulement un penchant, mais que nous
avons presque tout notre portefeuille dans des actions qui sont cotées
à la bourse. C'est même plus analysé que ça. Elles
sont divisées dans des portefeuilles selon leur
"marchandabilité", selon le taux de "marchandabilité". Alors,
même les autorisations que le conseil donne au directeur
général et à ses adjoints sont plus limitées
lorsque la "marchandabilité" est moins forte. Il y a une analyse faite
pour savoir combien, dans chaque valeur, se transigeant à chaque
année, les moyennes sont établies. Alors, si c'est une valeur qui
se transige moins, la délégation d'autorité est
basée sur le fait que nous pouvons en acheter moins. Plus un stock se
transige, plus nous avons une liberté d'acheter et de posséder ce
stock.
M. Raynauld: Vous participez aussi à des achats sur le
marché primaire?
M. Parizeau: Nous y avons participé. Il y en a tellement
peu de ce temps-ci que je n'aime pas dire qu'on y participe, mais, s'il y en
avait, on y participerait probablement.
M. Raynauld: Mais, dans un cas comme celui-là, est-ce que
les entreprises sont cotées en bourse?
M. Parizeau: Généralement oui; elles s'engagent
à se coter en bourse dans les prochains six mois. Parfois, il y a des
techniques qui font qu'elles ne peuvent pas se coter immédiatement.
Mais, généralement, quand il y a une émission de
l'Imperial Oil ou de la Banque Canadienne Nationale ou des droits, ces valeurs
sont généralement co-
tées à la bourse, même les droits sont cotés
à la bourse assez rapidement.
M. Raynauld: Étant donné qu'il est 12 h 30, M. le
Président, est-ce qu'il serait inapproprié que je demande
à M. Cazavan: Si le marché primaire est aussi
déprimé que ça, est-ce que c'est parce que le
régime d'épargne-actions a fonctionné?
M. Parizeau: Vous me posez la question?
M. Raynauld: Oui. Je vous pose la question, si le ministre ne la
trouve pas inappropriée. Je ne veux pas que ce soit une... (12 h 30)
M. Parizeau: Je la trouve inappropriée. Il me semble que
demander en commission parlementaire à quelqu'un qui n'est ni ministre
ni député, des commentaires sur un projet de loi qui n'est pas
encore déposé, me paraît tout à fait
inapproprié. On demandera l'avis de M. Cazavan quand la loi sera sur la
table.
M. Raynauld: M. le Président, je vais poser ma question de
façon différente, je ne veux pas faire de blague. Je voulais
l'avis d'un expert dans ce domaine pour savoir si le secteur d'émissions
primaires au Québec est un marché qui présente des
potentialités de développement.
M. Parizeau: C'est tout à fait approprié. J'ai dit
que c'est une situation temporaire. Il va falloir revenir au marché
primaire, c'est certain. Il y a le marché primaire de détail et
le marché primaire institutionnel. Il y a une assez grande distinction
qu'il faut faire entre les deux.
M. Raynauld: Ensuite, il y a la distinction, même sur le
marché primaire, entre obligations et actions.
M. Parizeau: C'est ça. Je m'en tenais aux actions.
M. Raynauld: Je fais référence à la page 17
du rapport qui se lit comme suit: "La participation de la Caisse de
dépôt au marché primaire canadien du secteur privé
en 1978 a été moindre que prévue, bien que l'ensemble des
portefeuilles ait affiché en fin d'exercice, une hausse de $84 700 000
au chapitre des obligations des com- pagnies. En effet, le volume des
émissions s'est à nouveau contracté au cours de
l'année". On parle plutôt des obligations que des actions, mais si
c'est vrai des obligations, je suppose que c'est vrai aussi des actions.
M. Parizeau: Qu'il y en a eu moins en 1978, certainement.
M. Raynauld: Oui. Vous pensez que c'est une situation
temporaire?
M. Parizeau: Oui, exactement.
M. Raynauld: Quels sont les montants impliqués dans ce
genre de marché d'actions primaires, normalement? Dans l'ensemble, je ne
veux pas faire de distinction.
M. Parizeau: Non, je ne pourrais pas vous en faire, parce que je
pense qu'on ne peut pas parler de situation normale dans cette
situation-là. Il y a des situations qui sont presque toujours
exceptionnelles. Quand il n'y en a pas assez, c'est exceptionnellement bas et,
quand il commence à y en avoir, c'est exceptionnellement trop haut, trop
élevé. Il n'y a donc pas réellement de situation normale.
Pour parler de gros marchés, si vous allez aux États-Unis, pour
employer les termes, les calendriers sont trop remplis ou ils ne le sont pas
assez. Il n'y a pas de situation réellement satisfaisante.
M. Raynauld: Merci.
Le Président (M. Boucher): Messieurs, nous sommes à
l'heure de l'ajournement. La commission ajourne donc ses travaux sine die.
M. Parizeau: M. le Président, est-ce que je pourrais
demander si on a complété la Caisse de dépôt?
Le Président (M. Boucher): La Caisse de dépôt
est-elle terminée?
Une voix: Je voudrais remercier M. Cazavan.
Le Président (M. Boucher): Jeudi prochain, on abordera
probablement le programme 1.
Fin de la séance à 12 h 33