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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le jeudi 4 décembre 1975 - Vol. 16 N° 191

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi 64 - Loi concernant les mesures anti-inflationnistes


Journal des débats

 

Commission permanente des finances,

des comptes publics et du revenu

Etude du projet de loi no 64

Loi concernant les mesures anti-inflationnistes

Séance du jeudi 4 décembre 1975

(Vingt heures quarante-deux minutes)

M. Cornellier (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

La commission des finances, des comptes publics et du revenu se réunit ce soir pour faire l'étude, article par article, du projet de loi no 64. Vous me permettrez tout d'abord de mentionner quelques changements à la liste des membres pour ce soir.

M. Fraser (Huntingdon) remplace M. Boutin (Abitibi-Ouest); M. Marchand (Laurier) remplace M. Pépin (Sherbrooke); M. Côté (Matane) remplace M. Saindon (Argenteuil); M. Séguin (Pointe-Claire) remplace M. Déom (Laporte).

Il y aurait lieu maintenant de nommer le rapporteur de la commission. Est-ce que je pourrais suggérer le nom de M. Mercier (Bellechasse)? L'honorable député de Bellechasse, M. Mercier, sera le rapporteur de la commission.

Nous procédons immédiatement à l'article 1. L'honorable ministre.

M. Garneau: Je voulais simplement indiquer que j'ai distribué aux membres de la commission une copie des différents amendements, huit ou neuf, que je suggérerai au fur et à mesure que nous atteindrons les articles, de telle sorte que les députés puissent en prendre connaissance dès maintenant.

M. Morin: M. le Président, je note la présence du président de la régie, M. De Coster, du futur président de la régie, puisque la loi n'est pas encore adoptée, et je me demandais s'il partageait l'avis de M. Pepin suivant lequel il va être infiniment plus facile de contrôler les salaires que de contrôler les prix.

M. Garneau: On pourrait avoir une longue discussion là-dessus, parce que cette question lui a déjà été posée. Pas à M. De Coster, mais à M. Pepin. Est-ce qu'on dit M. Pepin ou M. Pépin, dans ce cas-là?

M. Marchand: M. le Président, est-ce que je peux faire remarquer au chef de l'Opposition qu'il doit s'adresser au président et non aux fonctionnaires qui viennent accompagner le ministre?

Préliminaires

M. Morin: Je m'étais adressé au président, M. le Président, on peut peut-être procéder tout de suite à l'étude article par article, mais, avant de commencer, je me demande s'il ne serait pas utile que le ministre dépose, à tout le moins, les grandes normes qui vont régir la conduite de la régie, du commissaire, ce qu'on pourrait appeler les principes directeurs. Je ne lui demande pas tous les détails, tous les indicateurs, toutes les directives, mais au moins les principes directeurs de la lutte contre l'inflation.

Je lui ai déjà fait observer, en Chambre, qu'au niveau fédéral, le gouvernement avait déposé un livre blanc qui contenait, à tout le moins, des indications sur la politique que le gouvernement entendait suivre.

Ce que le ministre nous demande, actuellement, c'est en quelque sorte un chèque en blanc; il nous demande de créer un organisme, d'approuver un projet de loi, sans nous indiquer quelles seront, au moins, les grandes normes sur lesquelles se fondera l'action des organismes qui vont lutter contre l'inflation.

Pourrais-je, derechef, demander au ministre, au moment où nous abordons l'étude du projet de loi article par article, alors que nous aborderons dans le détail les principes directeurs, les indicateurs ou les directives, comme on les appelle dans le projet québécois, s'il ne serait pas indiqué, même nécessaire, qu'il dépose un document qui nous éclairerait sur les intentions gouvernementales? Ou devons-nous tenir pour acquis que le Québec s'alignera, sur toute la ligne, sur les indicateurs fédéraux, sur les directives fédérales?

M. Garneau: Après la rencontre des premiers ministres des provinces et du premier ministre du Canada, le chef du gouvernement du Québec a, dans une conférence de presse, indiqué que le gouvernement du Québec souscrivait aux objectifs du plan canadien de lutte à l'inflation, en soulignant que, depuis un certain nombre d'années, certainement au cours des deux ou trois dernières années, à l'occasion de rencontres fédérale-provinciales, le Québec avait attiré l'attention des autorités canadiennes et de celles des autres provinces sur l'importance d'avoir une action concertée de lutte à l'inflation. Lorsque M. Bourassa a fait sa conférence de presse, il a indiqué que le Québec avait décidé de souscrire aux objectifs du plan de lutte à l'inflation tel qu'annoncé par le premier ministre du Canada, de telle sorte que les directives générales ou le sens qui était donné au programme auquel nous souscrivons étaient bien connus dans le document fédéral, et nous n'avons pas l'intention de reprendre en détail le même document.

Ce que nous ferons, ce sera de déposer, au fur et à mesure qu'ils seront prêts les règlements qui seront édictés en vertu de la loi et qui, eux, auront force de loi, alors que les directives générales, les principes directeurs n'ont pas force de loi.

C'est au niveau de la réglementation que nous avons l'intention d'agir, réglementation que j'aurais aimé déposer avant ou au moment où nous entreprenons l'étude article par article du projet de loi, tel que je l'avais indiqué en Chambre, en

réponse à des questions qu'on m'avait posées, ou encore, dans le contexte où on a exposé une deuxième lecture, mais un certain nombre de secteurs qui doivent être incorporés dans des règlements où il n'y a pas eu encore entente entre les provinces, ce qui retarde le dépôt de ces règlements, puisque nous avons indiqué à plusieurs reprises notre intention d'avoir, non seulement dans la loi, mais dans les réglementations, un schéma de référence qui soit comparable à ce qu'il se fera ailleurs dans les autres provinces. C'est la raison pour laquelle je ne suis pas en mesure de déposer ce règlement. D'ailleurs, le même problème s'est posé à l'occasion de la discussion du projet de loi C-73 au niveau du gouvernement fédéral. Egalement, au niveau des législatures provinciales qui ont décidé d'avoir des projets de loi, entre autres, si les informations que j'ai eues, sont justes, du côté de l'Alberta et de la Saskatchewan.

M. Morin: M. le Président, est-ce que le ministre nous éclairera au moins sur la façon dont ces règlements vont être rédigés? J'entends bien que les règlements fédéraux ne sont pas parus encore.

M. Garneau: Non.

M. Morin: On a parlé d'un retard de deux à trois semaines avant qu'ils ne paraissent. Est-ce que c'est cela qui, au fond, retarde la parution des règlements québécois? Autre question qui découle de celle-là, est-ce que les règlements québécois, en gros, du moins, seront calqués sur les règlements fédéraux?

M. Garneau: Les règlements fédéraux qui sont en préparation, le sont en collaboration avec les provinces. C'est la raison pour laquelle nous avons eu deux rencontres en peu de temps, ensemble les ministres des Finances des provinces canadiennes et le gouvernement fédéral. Justement, parce qu'il y a encore des points obscurs, il n'y a pas de règlements qui sont disponibles actuellement, ni au niveau fédéral, ni au niveau des provinces, en particulier, en ce qui concerne la question des honoraires professionnels où il y a des divergences, également en ce qui concerne certains aspects de la rémunération où il n'y a pas entente actuellement. Les gens se disent: On a discuté des principes, il va falloir coucher cela sur papier et voir tous les textes mot à mot. Dans la rémunération, entre autres, à savoir si l'augmentation d'échelons dans un système de rémunération doit être comprise comme étant une augmentation de rémunération au sens de la loi et surtout au sens que donneront les règlements.

Là aussi, certaines provinces voulaient que l'augmentation d'échelons fasse partie de la rémunération intégrale et soit incluse dans les 10% ou 12% qui peuvent être accordés au rythme de croisière de l'augmentation des traitements. Ce sont quelques raisons qui expliquent le non-dépôt des règlements jusqu'à maintenant.

M. Morin: Mais le ministre nous dit que ces règlements vont faire l'objet d'une coopération entre les provinces et le gouvernement fédéral.

M. Garneau: Oui.

M. Morin: J'ai cru noter qu'au moins quatre provinces, de tendance sociale-démocrate — et on nous dit que le gouvernement actuel du Québec est également social-démocrate, cela en ferait cinq si c'était la vérité — ces provinces sociales-démocrates ont fait observer qu'elles se posaient de très grosses questions sur l'efficacité du contrôle des salaires.

Je me dis: Si c'est vraiment le cas, on n'est pas encore au bout des peines, à Ottawa, dans la rédaction des règlements. Est-ce que c'est possible que les règlements soient retardés de trois semaines, deux mois, trois mois? Si les provinces ne sont pas d'accord, est-ce qu'Ottawa va retarder l'adoption de ces règlements ou si elle va finir par les imposer à la volonté des provinces?

M. Garneau: Dans les provinces où il n'y a pas de loi, il est évident que, pour ce qui est du secteur privé, en particulier, le fédéral va certainement procéder. Pour ce qui est du secteur public de ces provinces, c'est plus compliqué. J'imagine bien que, s'il n'y a pas entente, à un moment donné, si le fédéral est appelé à appliquer, dans ces provinces qui n'ont pas légiféré, une réglementation pour le contrôle des prix et des salaires, il va falloir qu'il prenne une décision.

Mais, dans le cas des provinces sociales-démocrates, comme l'indique le chef de l'Opposition, il n'y a pas nécessairement entente dans chacune d'elle. Les raisons qui motivent certaines réticences peuvent être dues à des moins qu'à des plus, c'est-à-dire qu'il y a des provinces qui voudraient que la réglementation soit plus stricte. Entre autres, sur la question des augmentations d'échelons dont je parlais. On dit: Dans la fonction publique québécoise, il y a une augmentation de 10% sur les échelons. Mais, en plus de l'augmentation des 10%, le passage d'une année d'expérience donne entre 3.5% et 4%, de telle sorte que l'augmentation de la rémunération d'un employé n'est pas de 10%, mais de 14% ou de 13.5%, dans le fond. Certaines des provinces démocrates voulaient que cette augmentation d'échelons soit comprise dans le contrôle.

Une des provinces sociales-démocrates était plus de notre avis. Elle admettait que le contrôle dans les augmentations de rémunération ne devait pas avoir pour objectif de modifier le système de rémunération en application depuis un certain nombre d'années et qui fonctionnait. C'est là un des points où il n'y a pas nécessairement entente. Or, à écouter les différentes discussions que j'ai, j'ai l'impression, que l'on soit social-démocrate, libéral ou conservateur, que dans ces domaines, à un certain moment, les discussions sont ténues.

M. Morin: II n'en reste pas moins que, sur la question des prix, ces provinces avaient tendance à être du même avis.

M. Garneau: Sauf sur les prix du secteur public...

M. Morin: Oui.

M. Garneau:... où on aimerait mieux contrôler les autres que se contrôler soi-même.

M. Morin: Oui, mais même pour ce qui est du secteur public, j'ai cru en voir au moins deux qui ne faisaient pas cette distinction. Il y en avait peut-être d'autres qui la faisaient.

M. Garneau: Je ne sais pas ce qu'elles ont dit à la radio ou à la télévision.

M. Morin: C'est dans les journaux que j'ai vu cela.

M. Garneau: C'est dans les journaux.

M. Morin: Peut-être peut-on aborder la discussion des articles, mais je ne peux m'empêcher de souligner que c'est à regret que nous nous engageons dans ce processus. C'est que je me serais attendu, à tout le moins, à avoir des principes directeurs devant moi. Ce que le ministre nous demande ce soir — il faut en être conscient et il faut en tenir compte, je pense, dans notre attitude et nous allons certainement en tenir compte dans notre attitude à l'égard du projet, comme nous l'avons fait en deuxième lecture. Si nous n'avons aucun principe directeur, on nous demande, en somme, en troisième lecture, pour l'adoption finale du projet de loi, de donner une sorte de chèque en blanc au gouvernement. Et cela, je pense que l'Opposition à Ottawa, pour d'autres motifs, a cru bon de voter contre, et je le dis au ministre, bien sincèrement, l'absence de principes directeurs constitue pour nous un obstacle très important dans le vote que nous aurons à donner sur ce projet de loi.

M. le Président, si vous voulez appeler les articles.

Le Président (M. Cornellier): J'appellerais l'article 1. Interprétation.

M. Morin: C'est un article d'interprétation. A moins que le ministre n'ait de savantes explications à nous donner, nous sommes prêts à l'adopter.

M. Garneau: Je pense que c'est assez précis.

Le Président (M. Cornellier): Article 1. Adopté.

Section II. Article 2. Application de la loi.

Application de la loi

M. Morin: Pour ce qui est de l'article 2, on nous parle des secteurs qui sont de la compétence constitutionnelle du Québec. J'avoue que c'est un terme qui m'a un peu surpris parce que c'est un article de portée constitutionnelle certaine et je n'ai jamais vu le mot secteur utilisé dans ce contexte.

Je le vois bien dans la version anglaise "sectors". Probablement que cela a été traduit de l'article du projet de loi fédéral parce que j'ai l'impression qu'en français ce n'est pas ainsi qu'on le dirait. J'ai l'impression qu'on dirait "domaine" ou quelque chose comme cela.

M. Garneau: Je ne crois pas qu'il y ait d'article concordant dans la loi fédérale de cette nature.

M. Morin: II n'y a pas un article qui dit que cela s'applique au domaine de compétence fédérale? Remarquez que c'est implicite de toute façon. Ce n'est pas absolument nécessaire, mais je pensais qu'il y en avait un.

M. Garneau: Non, il n'y en a pas. On l'a mis, parce qu'on croyait qu'un des objectifs de cette législation, en même temps, c'est d'asseoir notre compétence constitutionnelle et d'éviter tout imbroglio ou toute interprétation ultérieure du geste que nous posions, et nous avons cru important de l'indiquer. Maintenant, est-ce que cela devrait être "secteur" ou "domaine", en termes...

M. Morin: Mais dans d'autres projets de loi, je crois qu'on utilise "domaine". J'ai déjà vu "domaine", en tout cas. Je peux vous dire qu'en droit constitutionnel, en français, je n'ai jamais vu utiliser le mot "secteur" pour décrire un domaine de compétence.

Le Président (M. Cornellier): On va vérifier au dictionnaire.

M. Morin: En attendant, je pourrais peut-être demander au ministre quels sont ces secteurs qui sont de compétence constitutionnelle du Québec, plus particulièrement... Est-ce qu'il a une réponse à ma question de tout à l'heure ou si...

M. Garneau: Non, ce sont d'autres informations.

M. Morin: J'allais lui demander quels sont les domaines qui sont de juridiction québécoise. Est-ce que plus particulièrement les prix de gros sont, d'après le ministre, un domaine de compétence provinciale?

M. Garneau: Je ne suis pas un "constitution-naliste". Autant sur d'autres aspects je me sentirais plus à l'aise, dans ce domaine. Mes connaissances sont quand même plus limitées, mais nous convenons que dans le domaine de tout le secteur public et parapublic et des institutions qui relèvent du gouvernement québécois, il s'agit là de domaines ou de secteurs qui sont de compétence constitutionnelle québécoise. Nous considérons de même que la formation, que le prix d'un bien est un domaine qui fait partie d'un contrat, donc du domaine de juridiction provinciale.

Evidemment, il y a la question des prix pour les biens du commerce interprovincial qui crée une difficulté, mais le domaine des prix est soit du secteur privé, soit du secteur public, le domaine de la rémunération du secteur privé qui est négocié dans des conventions collectives régies en vertu de la loi provinciale ferait partie du domaine de la juridiction provinciale.

M. Morin: C'est bien mon avis aussi.

M. Garneau: Dans le secteur du taux d'intérêt, si nous devions le contrôler comme tel, je pense bien que ce serait un domaine qui pourrait être de juridiction fédérale s'il s'agissait du taux bancaire ou du taux de réescompte. Je pense bien que ce sont là les principaux éléments qui doivent être couverts par cette loi et qui font partie de la compétence constitutionnelle provinciale.

M. Morin: Je pense que les prix de gros aussi bien que les prix de détail sont effectivement de compétence provinciale; du moins, c'est la solution constitutionnelle qui a toujours prévalu dans le passé, sauf en cas d'urgence, comme, par exemple, en temps de guerre, le gouvernement fédéral a allégué l'urgence de la situation pour contrôler les prix. D'ailleurs, il allègue encore l'urgence de la situation pour faire adopter ce projet de loi C-73; c'est sur les pouvoirs d'urgence, constitutionnellement, qu'il se fonde. En partie, en tout cas. Il n'allègue pas que ça.

M. Garneau: Sans le dire d'une façon très précise.

M. Morin: II va être obligé de le dire, parce que, si ça se ramasse devant les tribunaux, s'il ne peut pas invoquer les pouvoirs d'urgence, ça va être mince comme base constitutionnelle.

M. Garneau: Comme notre objectif était d'avoir une certaine efficacité dans cette lutte contre l'inflation, une autre des raisons pour lesquelles nous avons décidé de légiférer, c'est que l'objectif étant de combattre l'inflation, on ne voulait pas que l'objectif fondamental soit assombri ou remplacé par un débat constitutionnel. En couvrant par l'article 2 les secteurs de juridiction provinciale, de compétence constitutionnelle québécoise, et en permettant, en vertu des articles qui suivront et de l'article 50 de la loi fédérale des ententes administratives, nous pouvions atteindre l'objectif et assumer nos responsabilités constitutionnelles tout en atteignant l'objectif qui est de lutter contre l'inflation.

C'est une des raisons pour lesquelles nous avons décidé de légiférer.

Le mot secteur...

D'après le Flammarion, ni l'un ni l'autre ne serait admis dans ce sens. On va essayer d'avoir un dictionnaire plus complet.

M. Morin: Le mot domaine est celui qui est courant, en tout cas, dans le jargon constitutionnel francophone.

M. Garneau: ... ni l'un ni l'autre.

M. Morin: De toute façon, on peut remettre cette question à un peu plus tard. J'étais en train d'interroger le ministre sur ce qui, à son avis, faisait partie du domaine de la compétence constitutionnelle du Québec. Nous avons dit les prix de gros aussi bien que de détail, bien sûr; les salaires, bien sûr; les loyers; le taux d'intérêt, lorsqu'il touche un contrat privé comme, par exemple, un taux portant sur hypothèque, un prêt hypothécaire?

M. Garneau: On pourrait peut-être en faire une discussion constitutionnelle à laquelle j'aurais besoin de lumière des gens qui m'assistent. Mais, pour les fins de la loi, ce n'est pas visé.

M. Morin: Ah!

M. Garneau: C'est l'article 3a). M. Morin: L'article 3a).

M. Garneau: L'objectif de la loi et des règlements, on le prend plutôt du côté des profits, au lieu de le prendre sur des articles.

M. Morin: Oui, mais les banques viennent de connaître — vous l'avez vu ces jours-ci — des profits de l'ordre de 40%.

M. Garneau: Alors, les profits des banques pourront être contrôlés, mais pas par le biais du taux de l'argent. C'est surtout par la marge de profits. C'est en contrôlant l'augmentation des prix qui ne serait autorisée que pour tenir compte de l'augmentation des coûts que le contrôle va se faire et non pas par les articles comme le serait le taux de l'argent, par exemple.

M. Morin: Mais si, par exemple, le loyer de l'argent, dans le cas d'une hypothèque, échappe, en vertu de l'article 3, à la réglementation, vous admettez, du moins, que c'est de la compétence constitutionnelle du Québec?

M. Garneau: Pour ce qui est de la formation d'un prix...

M. Morin: Du taux d'intérêt, sur hypothèque.

M. Garneau: Si c'est le taux d'intérêt sur hypothèque qui lie par contrat un prêteur et un emprunteur, j'imagine que cela devrait être de compétence constitutionnelle québécoise.

M. Morin: C'est ce que je pense aussi. Maintenant, prenons le loyer de l'argent pour une firme aussi réputée que Household Finance.

M. Bacon: Qui? AVCO ou Household? M. Morin: Household Finance.

M. Bacon: On voit que vous n'êtes pas habitué là-dedans.

M. Morin: Les lecteurs du Jour auront compris mon allusion.

M. Bacon: Nous, on pourrait vous les nommer toutes.

M. Fraser: Si tu ne paies pas, tu perds "ton" chemise!

M. Morin: Je vois que le député de Trois-Rivières a des engagements avec toutes les compagnies de finance de son coin.

M. Garneau: Cela te rappelle ta vie d'étudiant. M. Morin: J'imagine que le ministre convient...

M. Garneau: Sur la question des taux d'intérêt des compagnies de finance, la Loi de la protection du consommateur a certaines dispositions qui, me semble-t-il, sont de nature à démontrer que, pour les compagnies de finance, il y a certainement quelque chose.

M. Morin: II y a des dispositions, mais il y a des échappatoires aussi. Du moins, vous admettez que le loyer de l'argent sur les prêts personnels tombe également sous la compétence québécoise.

M. Garneau: En autant que mes informateurs, conseillers juridiques, me disent la vérité, j'admets cela, sauf au niveau des banques.

M. Morin: Oui, les banques tombent sous la compétence fédérale. J'essayais de départager ce qui fait partie de notre beau domaine provincial pour montrer que cela a une certaine étendue, pour m'interroger par la suite quant au domaine réel que nous couvrons avec ce projet de loi. Le député de Trois-Rivières a déjà deviné ce à quoi je voulais en venir.

J'imagine aussi que le crédit à la consommation, autre que le crédit bancaire, tomberait également sous la compétence...

M. Garneau: ... finance pour l'achat d'une automobile dans un garage?

M. Morin: Par exemple, oui, tomberait dans le domaine constitutionnel du Québec.

Cela fait pas mal de choses: les prix de gros, les prix de détail, les salaires, les loyers, les taux d'intérêt sur hypothèque, sur crédit à la consommation, sur les emprunts personnels non bancaires. Le domaine de compétence du Québec est très étendu.

M. Bacon: Cela a l'air de vous surprendre.

M. Morin: Non. Ce qui va vous étonner, tout à l'heure, c'est de voir à quel point, bien qu'ayant à notre disposition un champ d'action aussi vaste, nous ne l'occupons pas, ou peu, ou pas assez.

Le ministre a-t-il résolu l'énigme de la traduction du mot "sector"?

M. Garneau: Les deux sont un peu synonymes, d'après le Robert, mais le mot "domaine" serait meilleur que "secteur".

M. Morin: D'ailleurs c'est utilisé dans d'autres projets. Si le ministre veut en convenir, on peut le faire. A mon avis, c'est une simple erreur de traduction.

Le Président (M. Cornellier): Les membres de la commission acceptent-ils cet amendement à l'article 2, soit de remplacer le mot "secteur" par le mot "domaine"?

M. Garneau: Adopté.

M. Morin: M. le Président, merci. L'article 2 est adopté.

M. Séguin: M. le Président...

Le Président (M. Cornellier): Un instant, le député de Pointe-Claire.

M. Séguin: C'était pour savoir si dans les exceptions que l'on fait ici, aux organisations...

Le Président (M. Cornellier): C'est l'article 3. Si vous voulez, nous allons compléter l'article 2, on vient d'accepter un amendement à l'article...

M. Séguin: Je parle de l'article 2, c'est cela. Le Président (M. Cornellier): Très bien.

M. Séguin: Sous quel sous-paragraphe — a), b), c), d), etc — trouvez-vous...

Le Président (M. Cornellier): Vous êtes à l'article 3.

M. Séguin: Alors, je m'excuse.

Le Président (M. Cornellier): L'article 2 avec l'amendement adopté plus tôt, à savoir, remplacer le mot "secteur" par le mot "domaine", est-il adopté?

M. Séguin: Je pensais que c'était fait.

Le Président (M. Cornellier): Alors nous passons à l'article 3. Le député de Pointe-Claire peut faire ses commentaires.

M. Séguin: Je veux entendre les explications et peut-être que ma question n'aura pas sa raison d'être, je ne sais pas. Je vais la poser. Dans la liste ici, je ne vois pas où certaines institutions, certaines sommes, certains fonds, etc., ne sont pas visés par la présente loi.

Dans le cas d'un investissement dans un trust, pour un plan de retraite garanti, il y a des compa-

gnies de trust qui ont différentes sortes de secteurs où une personne peut investir. Disons, par exemple, que, dans le secteur, au Royal Trust, il y aurait un fonds qui s'appelle M. Funds, c'est un "mortgage funds". Est-ce que cela est couvert ici?

Une Voix: D.

M. Séguin: Non, ce n'est pas un fonds mutuel.

M. Morin: Je ne crois pas que D...

M. Séguin: Ce n'est pas un fonds mutuel.

M. Bacon: C'est un fonds "M", comme il dit... une compagnie de fiducie...

M. Séguin: Oui, un "mutual funds", M, ce n'est pas "mutual", c'est...

M. Bacon: Non, mais c'est quand même administré, c'est la même chose qu'un fonds mutuel à ce moment.

M. Garneau: Je dois dire que, d'une façon générale, l'article 3 exclut des mesures de contrôle le taux de l'argent et les rendements ou la plus-value que peut prendre un titre, qu'il soit une action, un billet, une hypothèque, un mortgage, ou des titres semblables. Ce ne serait, évidemment, pas possible et ce serait illogique de vouloir contrôler ces choses où une entreprise pourrait faire accroître le volume de ses profits, sans augmenter ses prix. Une entreprise qui fabriquerait 100 chaises et qui passerait à un million de chaises, même si elle les vend toujours le même prix, donc sans augmentation de prix de vente, pourrait augmenter le volume de son profit. A ce moment, les actions de ladite compagnie prendraient une plus-value. On ne veut pas empêcher ce rendement de la productivité. C'est pourquoi sont nommément exclus les genres de titres auxquels vous faisiez allusion.

M. Séguin: C'est que, dans un groupe semblable, il y a une fluctuation assez normale qui suit le marché. Je me demandais tout simplement si, dans le "listing" que vous avez fait, on comprendrait une organisation du genre ou un fonds du genre. Disons qu'à un moment donné, le prix peut être de 11%.

M. Garneau: Ce qu'on veut contrôler, c'est le prix.

M. Séguin: Cela peut être de 11%, cela peut tomber à 9%, cela peut tomber à 7%.

M. Garneau: C'est cela.

M. Séguin: Alors, cela ne sera pas affecté.

M. Garneau: II n'y a pas de mesures, il n'y aura pas de règlements qui seront édictés en vertu de cette loi qui couvrirait ces fluctuations.

M. Séguin: C'est cela, d'accord. Merci.

M. Morin: M. le Président, je vais m'attarder sur le paragraphe a) où on nous dit que l'argent n'est pas visé par la présente loi. Ai-je raison de croire — c'est ma première question — que l'argent signifie, notamment le loyer de l'argent, le taux d'intérêt donc, le taux des hypothèques, autre exemple, le crédit à la consommation? Est-ce que j'ai raison de croire que l'expression "l'argent" couvre tous ces appendices de l'argent? Est-ce que j'en ai oublié?

M. Garneau: Dans le sens des propos que vous tenez, je répondrai affirmativement que vous avez raison, sauf que les profits desdites entreprises pourront, eux, être contrôlés.

M. Morin: De quelle façon? Pourriez-vous m'expliquer comment vous entendez contrôler...

M. Garneau: Je m'excuse... M. Morin: Oui.

M. Garneau: ... j'ai fait une erreur. Les prix de vente des biens produits sont contrôlés, ainsi que leur augmentation, de telle sorte que, éventuellement, les actions de l'entreprise qui produit ces prix vont avoir un effet sur le contrôle de l'argent indirectement et non directement. Si la question du chef de l'Opposition est de savoir si, en vertu de la loi, il y aura des règlements pour contrôler les taux d'intérêt, je dis: Non.

M. Morin: C'est parce que les banques et les compagnies de finance pourraient augmenter les prix de leurs services — le loyer de l'argent, c'est le prix de leurs services, en fait — pour ainsi dire sans limite.

Parce que, M. le Président, si le ministre nous dit qu'il va contrôler les profits, il se peut que ces compagnies prêtent plus aussi. Donc, leurs profits peuvent augmenter en conséquence.

M. Garneau: C'est pour cela que, tout à l'heure, j'ai retiré une phrase sur laquelle je m'orientais pour indiquer que c'est par le prix des services qu'on voulait contrôler plus que par le profit, parce que le volume de profit peut être déterminé par une augmentation des prix ou par une augmentation de volume, et l'intention n'est pas de limiter l'augmentation du volume d'activités des entreprises.

M. Morin: Non, j'ai bien compris. Alors, dans le cas, par exemple, d'une entreprise qui prête sur hypothèque ou qui fait des prêts personnels aux jeunes ménages, dans le cas des familles endettées, enfin, tout ce complexe que nous connaissons bien, au Québec, puisque nous sommes la province la plus endettée per capita, comment allez-vous contrôler, justement, le prix des services rendus, dans ces cas?

M. Garneau: Le cas du loyer de l'argent?

M. Morin: Oui.

M. Garneau: II est nommément exclu.

M. Morin: Alors, quel genre de contrôle allez-vous pouvoir exclure? Si vous me dites, d'une part... J'ai bien compris que les taux d'intérêt sont nommément exclus. Vous avez, je pense, bien interprété le mot "argent". Cela comprend tout cela. Mais si, d'une part, vous ne contrôlez pas le taux d'intérêt, le crédit à la consommation, du moins le taux du crédit à la consommation, et si, d'autre part, c'est embêtant de contrôler les profits, parce que ceux-ci peuvent être fonction aussi bien de l'augmentation des taux que de l'augmentation de la masse prêtée, comment allez-vous contrôler, dans ce cas?

M. Garneau: Les entreprises dont les profits sont déterminés par le taux de l'argent, on ne pourra pas les contrôler. De toute façon, ce serait très illusoire, à cause de la fluidité des capitaux. On ne peut pas contrôler le taux d'intérêt sans contrôler l'échange. Parce que je peux aller emprunter, je ne sais pas, moi, $100,000 d'un Américain, ou vous pouvez aller emprunter $200,000 d'un Allemand, $2 millions, $10 millions; à ce moment, comment établir ce contrôle? Réellement, c'est le marché qui va déterminer le taux d'intérêt.

M. Morin: Oui, mais moi, je ne vous parle pas des emprunts du gouvernement québécois, de l'Hydro-Québec ou d'une puissante société. Je vous parle du crédit à la consommation, des petites gens qui sont endettés, pour qui le taux d'intérêt peut être un élément considérable de l'augmentation du coût de la vie. Cela peut même représenter une portion dramatique de leur budget.

C'est pour cela que je vous dis: Est-ce-que cela semble être... Si, vraiment, il n'y a aucun moyen de contrôler cela, c'est une lacune majeure de la loi.

M. Garneau: Je n'ai pas d'autre chose à ajouter à ce que j'ai dit au chef de l'Opposition tout à l'heure. C'est un élément qui ne sera pas couvert par la loi en termes du loyer de l'argent.

M. Morin: Ni en termes de profits, en fin de compte.

M. Garneau: Non plus, parce que c'est par le prix des marchandises achetées, mais pas par le crédit. Le crédit lui-même n'est pas contrôlé par cette loi.

M. Morin: Oui, mais le taux d'intérêt, M. le ministre, c'est un prix, en quelque sorte. C'est le prix du service.

M. Garneau: Si je comprends bien, le chef de l'Opposition n'est pas d'accord sur cet aspect de la loi.

M. Morin: Je trouve cela une lacune importante dans votre projet de loi.

M. Garneau: C'est un sujet qui a fait l'objet de discussions au niveau interprovincial, également, dans nos rencontres et finalement, le consensus s'est établi ainsi.

M. Morin: Pour ce qui est du Québec, la province la plus endettée, vous n'avez pas pensé que peut-être il y aurait lieu de faire quelque chose de plus?

M. Garneau: Si nous devions le faire ou si nous voulions le faire, nous en arriverions, probablement, à une restriction du crédit et ce n'est pas notre intention de limiter par cet aspect de lutter contre l'inflation.

M. Morin: En ce qui me concerne, je me demande à quoi ce projet peut bien servir, fondamentalement, si l'un des prix qui compte parmi les plus importants pour la famille québécoise, le prix de l'argent n'est pas inclus dans les contrôles dont on dit qu'on va se servir pour lutter contre l'inflation.

J'observe, d'ailleurs, qu'en période d'inflation — et je pense que le ministre le sait — on note toujours que le secteur qui fait le plus de profit, c'est précisément les banques et les rapports qui viennent de sortir sur 1975 sont clairs là-dessus: 40% à peu de chose près d'augmentation de profit en une année. Alors quoi? C'est un trou béant dans votre loi.

M. Garneau: Je ne peux certainement pas, avec les champs de compétence couverts par la constitution, déterminer seul au Québec, quel serait le taux de l'argent. Cela voudrait dire que, si nous le contrôlions, il faudrait ajouter beaucoup d'autres éléments pour être capable de contrôler le coût de l'argent et cela impliquerait le contrôle des changes parce que, comme je l'ai mentionné, tout à l'heure, il y a une libre circulation des capitaux avec comme barrière, le taux de change lorsque c'est rentable ou non, où les taux d'intérêt peuvent exister dans un pays comparativement à un autre pays. Je ne vois pas comment on pourrait, seulement au Québec, contrôler les taux d'intérêt. D'ailleurs, dans l'ensemble du problème que posent tous les alinéas de l'article 3, l'argent, les actions du capital-actions d'une corporation ou le droit de les acquérir, les actions ou parts d'une coopérative, d'une caisse d'épargne et de crédit ou d'un organisme semblable, les unités d'une fiducie, de fonds mutuel ou d'une fiducie semblable, les obligations, billets, hypothèques, "mortgages", etc., ont été nommément exclus parce qu'il était pratiquement impossible de contrôler...

M. Morin: En régime de laisser faire économique et social, je reconnais que c'est difficile de contrôler les actions. Cela serait contraire au système.

M. Garneau: Je lisais, avec beaucoup d'intérêt, les propos du chef de l'Opposition, hier soir, à Laval ou je ne sais pas, devant les relations internationales...

M. Morin: Oui.

M. Garneau: ... où il disait que son parti n'avait pas l'intention d'établir un régime socialiste. Donc, il demeurait dans un système de libre entreprise.

M. Morin: Sociale-démocrate.

M. Garneau: Bien oui, mais...

M. Morin: On parle d'investissement.

M. Garneau: ... quand même, on est blanc ou on est noir dans ce domaine.

M. Morin: C'est pour cela que je ne vous ai pas cherché querelle sur les actions ou les parts de coopérative ou de caisse d'épargne, etc. Je ne vous ai pas cherché querelle là-dessus, mais socialement au Québec, de laisser les jeunes ménages qui ont tous une hypothèque sur le dos ou des gens qui sont moins jeunes et qui ont tous du crédit chez Avco Finance ou Dieu sait où, les laisser aux prises avec ce problème, sans contrôle, je dis que c'est un trou considérable dans votre système de lutte contre l'inflation.

M. Garneau: Je ne suis pas d'accord avec le chef de l'Opposition parce que ce qu'il mentionne, ce n'est pas par le biais, nécessairement, du taux d'intérêt qu'on le couvrirait, c'est par des restrictions de crédit, empêcher les gens d'acheter à crédit, tout simplement. C'est cela qui serait une solution au problème tel que le chef de l'Opposition l'expose.

Mais le projet que nous étudions, la loi que nous étudions, n'a pas pour objectif de restreindre l'activité économique, d'essayer d'étouffer une reprise économique qui pourrait être suscitée par des achats de biens, de services, ou par des investissements et si nous devions dire que tout investissement, ou tout prêt d'argent au Québec se ferait à un taux contrôlé, donc le chef de l'Opposition sous-tend dans sa discussion qu'il devrait être plus bas et s'il est plus bas, comment pouvez-vous concevoir qu'on aurait, même nos voisins, nous-mêmes... est-ce que vous accepteriez de prêter votre argent à 5% quand vous pouvez avoir 8%, 9%, 10%, 12% sur le marché? Cela voudrait dire que si nous faisions cela seuls, il y aurait simplement une sortie de capital qui irait s'investir ailleurs, à moins que l'on établisse des contrôles, contrôle des changes, même pas entre le Canada et les Etats-Unis ou entre le Canada et les autres pays, mais entre le Québec et les autres provinces.

M. Morin: Remarquez que la même lacune se trouve dans le projet de loi fédéral.

M. Garneau: Oui.

M. Morin: C'est la même lacune.

M. Garneau: Parce que l'objectif n'était pas de restreindre l'activité économique qui aurait pu être engendrée par un contrôle des taux d'intérêt.

M. Morin: Qui aurait pu être engendré par des restrictions à l'expansion du crédit, mais si vous mettez...

M. Garneau: Oui, là, à ce moment-là, on ne touche pas le prix nécessairement, on touche l'expansion du crédit comme tel.

M. Morin: Oui, mais vous pouvez aussi contrôler le taux d'intérêt.

M. Garneau: Comment?

M. Morin: Pas bancaire, d'accord, mais sur les prêts de ces compagnies de petits prêts.

M. Garneau: Les compagnies ou les caisses populaires, qui font des prêts personnels, récupèrent. Elles n'impriment pas cet argent, elles vont le chercher auprès des épargnants.

M. Morin: Oui.

M. Garneau: Ces épargnants ne peuvent donner de l'intérêt à 10% à l'épargnant et reprêter à l'emprunteur à 8%. C'est ce qui se produirait si on essayait de le contrôler seul. Si on le faisait sur l'ensemble canadien, à ce moment-là, on aurait un effet de restriction du crédit et l'objectif, quand on regarde ce qui sous-tend la démarche du plan de lutte à l'inflation et contrairement à ce qui s'est fait dans d'autres endroits, aux Etats-Unis, par exemple, où depuis un certain nombre d'années on a essayé de restreindre le crédit, on a eu des mesures comme, par exemple, l'évolution de la masse monétaire qui a évolué à un taux beaucoup plus bas qu'au Canada. Ils ont eu un certain nombre de mesures également beaucoup plus strictes et qui ont amené, peut-être, une évolution de leur économie à un taux de croissance ou un taux d'évolution plus bas que chez nous. La démarche du plan canadien, actuellement, auquel nous souscrivons, c'est d'essayer de contrôler l'évolution des prix et des salaires sans étouffer la croissance de l'économie, ce qui se produirait si on essayait de limiter en vase clos, dans une région donnée, les taux d'intérêt.

M. Morin: M. le Président, je persiste à croire qu'il y aurait moyen d'agir là-dessus étant donné surtout l'importance sociale que cela représente. Je ne veux pas prolonger indûment le débat. Je pense que là, nous sommes probablement devant les conceptions différentes de l'économie. Je consentirais que cet article soit adopté, mais sur division parce qu'en ce qui me concerne, je ne saurais l'approuver.

Le Président (M. Cornellier): L'article 3 est adopté sur division.

M. Morin: Et je précise que c'est surtout à l'égard du paragraphe a) que j'exprime des réserves.

Le Président (M. Cornellier): Article 4.

M. Garneau: M. le Président, à l'article 4, j'aimerais suggérer ceci: "Les directives gouvernementales prévues par la présente loi peuvent s'appliquer à compter du" et remplacer la parenthèse par "14 octobre 1975". Je vais expliquer pourquoi. Nous espérons pouvoir en arriver à des ententes administratives pour ce qui est de l'administration de cette loi et des règlements qui seront édictés en vertu de cette loi, en vertu d'ententes administratives qui seraient signées avec le gouvernement fédéral en vertu des pouvoirs qui nous sont donnés par l'article 22 de la loi et par l'article 5-1 de la loi fédérale. Sur le plan strictement administratif, je ne voudrais pas qu'il y ait, entre le 4 novembre 1975, qui a été la date du dépôt de la loi et la date de la déclaration ministérielle fédérale du 14 octobre 1975, il y a un hiatus de quelques jours qui ferait que toute l'administration serait compliquée parce qu'il pourrait y avoir eu des gestes posés entre le 14 octobre et le 4 novembre et ceci pourrait constituer des problèmes de contestation juridique.

M. Morin: Une fois aligné sur Ottawa comme vous l'êtes, autant aller jusqu'au bout.

M. Garneau: Cela m'apparaît être... D'ailleurs, je ne m'en suis pas caché, je l'ai dit au chef de l'Opposition.

M. Morin: Est-ce que je pourrais demander une petite explication avant l'adoption de cet article, M. le Président? Est-ce que je pourrais savoir pourquoi on emploie l'expression "peuvent s'appliquer" au lieu de dire simplement "s'appliquent"?

M. Garneau: Parce qu'il se peut que certains règlements entrent en vigueur à un moment qui serait postérieur au 14 octobre. Si, par exemple, dans six mois, il y avait un règlement qui était édicté et mentionnant qu'il entrerait en vigueur au moment de sa publication, il pourrait s'appliquer ultérieurement; "peuvent s'appliquer", mais pas nécessairement à compter de cette date. On me donne comme exemple les loyers. Si nous devions appliquer un contrôle plus strict sur les loyers, on ne pourrait pas revenir en arrière et rouvrir des contrats qui ont été dûment signés.

M. Morin: Autrement dit, vous voulez vous garder de la latitude dans l'action.

M. Garneau: S'il y a des règlements qui doivent être un peu plus souples.

M. Morin: Certains règlements pourraient en- trer en vigueur rétroactivement; d'autres, plus tard.

M. Garneau: C'est ça.

M. Morin: Bien, nous sommes prêts à adopter l'article 4, M. le Président.

Le Président (M. Cornellier): L'amendement proposé par le ministre de remplacer la parenthèse, à la fin de l'article 4, par les chiffres et mots "14 octobre 1975", et l'article 4 sont donc adoptés. Article 5.

M. Morin: Ah, l'article 5 est intéressant! Intéressant, parce que j'ai l'impression que ça va beaucoup plus loin que ce que le ministre veut faire. Ces directives, nous dit-on, prévalent sur les dispositions contraires de toute loi et de tout règlement adopté en vertu d'une loi. Si je prends ça strictement, ça veut dire que même une loi postérieure ne peut pas aller à rencontre de ces règlements. Même une loi abolissant la présente loi?

Je pense que ce que vous voulez dire...

M. Garneau: Les lois postérieures... On m'informe qu'une loi postérieure ne serait pas nécessairement couverte par cet article, mais une loi antérieure le serait.

M. Morin: Ecoutez, je pense que vous devriez peut-être consulter les conseillers en loi pour savoir s'il n'y aurait pas lieu d'ajouter, après "toute loi", le mot "antérieure", ou "existante". Parce que, de la façon que ça se présente, ça peut prêter à confusion. Cela a l'air de l'emporter sur les lois ultérieures aussi bien que sur les lois antérieures.

M. Garneau: On me dit que c'est le sens de l'article 5, parce qu'on ne peut pas s'engager. L'explication qu'on me donne, c'est qu'une loi qui serait postérieure... Le législateur a le pouvoir de défaire ce qu'il a fait et on ne peut pas engager pour... Le législateur a le pouvoir de faire et de défaire.

M. Morin: Mais là, vous entrez dans un beau débat constitutionnel sur la souveraineté du Parlement et il y a des arrêts dans d'autres pays du Commonwealth qui nous apprennent qu'à certaines conditions, une législature de type britannique peut se lier les mains pour l'avenir. Elle peut se lier les mains, non pas sur le fond de la législation, mais elle peut se lier les mains sur la procédure d'adoption. J'avoue qu'à la lumière de cette jurisprudence, l'article 5 me paraît ambigu et je suggère au ministre, pour sa tranquilité ultérieure, de...

M. Garneau: D'ajouter le mot "antérieure".

M. Morin:... d'ajouter le mot "antérieure" ou le mot "existance"...

M. Garneau: Après toute loi?

M. Morin: ... qui serait peut-être plus précis encore. De toute loi existante.

M. Garneau: Le légiste me dit que c'était le sens de l'article 5; il ne voit pas d'objection à l'indiquer, "à toute loi antérieure".

M. Morin: Je me doutais bien que c'était le sens de l'article, mais c'est toujours mieux de le dire de façon précise.

M. Garneau: Antérieure. M. le Président, il faudrait ajouter... Existante.

M. Morin: Existante est préférable, oui.

M. Garneau: A la deuxième ligne, après le mot loi, ajouter le mot "existante" et tout règlement adopté en vertu de pareille loi ou d'une...

M. Morin: En vertu d'une telle loi. M. Garneau: D'une pareille ou... M. Morin: Ou d'une telle loi. M. Garneau: Ou d'une telle loi?

M. Morin: Oui, ce serait plus français, je pense.

M. Garneau: M. le Président, à la deuxième ligne, après le mot "loi", on ajouterait le mot "existante " et, à la troisième ligne de l'article 5, avant le mot loi, on ajouterait le mot "telle".

M. Morin: Bien.

Le Président (M. Cornellier): Ces amendements à l'article 5 qui prévoient d'ajouter, à la deuxième ligne, après le mot "loi", le mot "existante" et à la troisième ligne, avant le mot "loi", le mot "telle" sont-ils acceptés?

M. Morin: Oui, c'est une amélioration très nette.

Le Président (M. Cornellier): Adopté. Article 6.

M. Morin: A l'article 6, je pense qu'il y a une proposition de modification de la part du ministre.

M. Garneau: De remplacer, dans la troisième ligne du premier alinéa, les mots "le ministre des Finances" par les mots "Sa Majesté du chef du Québec".

M. Morin: Savez-vous, à tout prendre, je ne vois pas pourquoi le ministre des Finances se dévalue de la sorte. C'était très bien de dire le ministre des Finances du Québec. Est-ce qu'il y a une explication constitutionnelle profonde à cette dévaluation du ministre des Finances?

M. Garneau: Savez-vous, je ne suis pas offus- qué du tout. De toute façon, on m'indique que cela a été une erreur au niveau de la transcription et le ministre des Finances, cela ne couvre pas tout le champ qu'on veut couvrir.

M. Morin: Ah oui!

M. Garneau: C'est la façon juridique d'exprimer...

M. Morin: C'est la couronne. Sa Majesté du chef du Québec, c'est la couronne aux droits du Québec. C'est peut-être plus large que le ministre des Finances.

M. Garneau: Parce qu'autrement, ce seraient les mandataires et les organismes — et ce n'est pas du ministre des Finances — c'est de l'ensemble du gouvernement.

Le Président (M. Cornellier): Cet amendement à l'effet de remplacer les mots "le ministre des Finances" par les mots "Sa Majesté du chef" est adopté?

Une Voix: Adopté.

M. Morin: Ce n'est pas Sa Majesté du chef de l'Opposition, je peux vous dire cela, M. le Président.

Le Président (M. Cornellier): Autres commentaires sur l'article 6, tel qu'amendé?

M. Morin: Oui, j'en ai. Etant donné la nomination des commissaires de l'Hydro-Québec par le gouvernement...

M. Garneau: Oui.

M. Morin: Etant donné que l'Hydro-Québec serait, aux termes de l'article 6, considérée comme un organisme gouvernemental, j'en conclus que ce projet de loi s'applique aux tarifs aussi bien qu'aux salaires de l'Hydro-Québec.

Mais les tarifs en question et les salaires, accessoirement, quoique ce soit la question des tarifs qui m'intétesse en ce moment, qui va les contrôler? Est-ce qu'ils vont se trouver sous la compétence de la régie des organismes québécois ou des organismes fédéraux?

M. Garneau: Ils seront définitivement sous la compétence des organismes québécois.

M. Morin: Lesquels exactement?

M. Garneau: II y aura des règlements qui seront édictés en vertu de la loi pour déterminer la façon dont la fixation des prix, dans le secteur public, va être déterminée et ils devront se soumettre à ce genre de directives, de règlements qui seront édictés en vertu de la loi.

M. Morin: De façon plus précise, est-ce

qu'une question comme les tarifs de l'Hydro, par exemple, cela tomberait sous la juridiction ou la compétence de la régie? De la régie que ce projet de loi va créer, ou bien sous la compétence de la Régie de l'électricité et du gaz, par exemple?

M. Garneau: Je m'excuse.

M. Morin: Je vous demandais... Vous m'avez dit que cela relève du Québec.

M. Garneau: Oui.

M. Morin: Là-dessus, je pense que vous avez complètement raison. Mais je vous demande quel organisme?

Cela peut être la régie créée par ce projet de loi, cela peut être la Régie provinciale de l'électricité et du gaz qui contrôle déjà les tarifs de gaz, et cela peut être, également, la régie dont nous entretient quelquefois le ministre des Richesses naturelles, la fameuse régie de l'énergie, qui n'a pas vu le jour encore et qui ne verra peut-être jamais le jour pour diverses raisons. J'aimerais savoir auquel de ces trois organismes il faudra s'adresser si on veut contrôler les tarifs d'Hydro.

M. Garneau: A la régie dans le sens de cette loi.

M. Morin: De sorte que...

M. Garneau: Mais il faut comprendre que le règlement qui déterminera le schéma de référence auquel doit se soumettre un organisme public dans la détermination de son prix, le sera en vertu d'un règlement adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil, en vertu de la loi. A toutes fins utiles, cela veut dire, pour Hydro-Québec, que ce serait le lieutenant-gouverneur en conseil, évidemment, parce qu'il peut, en dernier ressort, modifier le règlement qu'il aura adopté.

M. Morin: Oui, j'entends bien. J'imagine que le sens de ce que le ministre vient de dire... Il se laisse distraire par des dessins pornographiques que lui passe le député de Joliette?

M. Quenneville: Non, je regrette infiniment. M. Garneau: II n'y a pas de dessins...

M. Morin: C'est parce que je voyais circuler un certain papier tout à l'heure; je pensais qu'on vous avait gratifié également de la bonne blague!

M. Garneau: Le député de Joliette est trop sérieux pour cela.

M. Quenneville: Certainement.

M. Garneau: D'ailleurs, c'est l'oncle d'un de vos collègues?

M. Morin: M. le Président, dois-je comprendre que les tarifs d'Hydro-Québec pourront faire l'objet d'un contrôle par la régie? C'est bien clair?

M. Garneau: C'est juste.

M. Morin: Donc, la régie sera soumise aux mêmes règles que les autres agents économiques et devra justifier l'augmentation de tarif qu'elle proposera au gouvernement ou à la population.

M. Garneau: Si c'est la façon dont les règlements sont édictés, ce que vous dites est juste.

M. Morin: Si les règlements le prévoient.

M. Garneau: Les règlements vont le prévoir c'est évident; il s'agit de savoir maintenant dans le coût — parce qu'on dit: Dans le secteur privé, les augmentations des prix devront refléter uniquement des augmentations de coût — si les intérêts intercalaires d'un projet en construction font partie d'un coût.

M. Morin: Non seulement les intérêts intercalaires, mais le financement tout court.

M. Garneau: Ce sont les intérêts payés sur le financement d'un projet qui est en construction et qui ne produit pas de revenus.

M. Morin: Autrement dit...

M. Garneau: C'est le grand problème des provinces sociales-démocrates.

M. Morin:... on peut s'attendre à une augmentation de 10% des tarifs d'Hydro même s'ils ne peuvent pas être justifiés du point de vue de l'augmentation des coûts des kilowatts qu'elle vend à la population.

M. Garneau: C'est le problème des provinces sociales-démocrates qui ont décidé de ne pas légiférer provincialement.

M. Morin: En ce sens qu'elles vont tomber sous le...

M. Garneau: ... contrôle fédéral?

M. Morin: Dois-je comprendre que l'un des buts de la loi québécoise est de faire en sorte que Hydro échappe aux contrôles fédéraux?

M. Garneau: Non, c'est de faire en sorte que les organismes québécois n'aient pas à faire rapport à un autre niveau de gouvernement.

M. Morin: Ce qui revient au même. M. Garneau: Bien...

M. Morin: Vous me dites, en termes très élégants, exactement la même chose que je vous disais.

M. Garneau: Cela dépend. Probablement que, si nous avions agi dans le sens inverse, vous auriez également employé une argumentation inverse.

M. Morin: J'avoue que, jusqu'ici, je n'avais pas pensé à cette astuce. C'est malin, pour faire échapper Hydro aux contrôles fédéraux.

M. Garneau: Je dois vous dire que ce n'est pas l'objectif de la loi 64.

M. Morin: Disons que c'est un sous-objectif.

M. Garneau: Si vous tenez pour acquis que tout projet de construction, qu'il soit privé ou public, qui est en période de formation de capital, doit payer des taux d'intérêt, un financement quelconque, et que cela fasse partie de ses coûts, que ce soit le secteur privé ou public, c'est la même considération. A ce moment-là, le problème ne se pose véritablement pas, pas avec les genres d'augmentation de taux qu'Hydro-Québec a connus. Si on le compare avec certaines augmentations ailleurs, il pourrait y avoir des difficultés, mais pas avec celles qu'on a eues. D'ailleurs, je pense que seulement les augmentations de traitements l'auraient peut-être justifié.

M. Morin: Justement, c'est toute la question à savoir si l'augmentation...

M. Garneau: De financement...

M. Morin: ... de coûts. Si, par exemple, vous incluez le financement de la baie James, par exemple, vous en venez rapidement à la conclusion que les augmentations n'ont pas tellement pour but de faire face à l'augmentation des coûts réels pour les kilowatts vendus en 1975. Vous en venez à la conclusion qu'on finance la baie James, au moins en partie, en augmentant les tarifs.

M. Garneau: Je pense que c'est normal qu'une entreprise finance une partie de ses investissements à l'intérieur de son "cash flow". Autrement, on se placerait dans une situation économique difficile, que ce soit le secteur privé ou le secteur public.

M. Morin: Oui, mais cela peut nous conduire loin, parce que si les difficultés de financement dont j'entretenais le ministre des Finances — je ne sais plus si c'était hier ou aujourd'hui même, je pense que c'est aujourd'hui même en Chambre, c'était hier — si ces difficultés financières sur lesquelles le premier ministre ne m'a pas apporté d'éclaircissement, d'ailleurs, comme il avait dit qu'il le ferait, quant à l'ampleur des intentions d'emprunt de l'Hydro...

M. Garneau: Je crois que le premier ministre a répondu que le programme d'emprunt jusqu'à maintenant pour 1976 était de l'ordre de $1.2 milliard. C'est ce qu'il a répondu.

M. Morin: Oui, mais, justement, c'était le sens de ma question. Je ne sais pas si le ministre a suivi le débat que j'ai eu avec le premier ministre là-dessus. C'est une parenthèse que nous ouvrons, mais elle pourra servir à expliciter ma pensée par la suite. Vous vous souvenez peut-être qu'à la commission parlementaire en juillet, M. Giroux avait dit: Nous avons l'intention d'emprunter $1.2 milliard. Tout récemment, le premier ministre, ou était-ce vous, le ministre des Finances, je ne me souviens plus, annonce qu'il y a une coupure de $500 millions dans les emprunts de l'Hydro. Ce n'est peut-être pas vous qui l'avez annoncé, mais le gouvernement l'a annoncé.

M. Garneau: Entre la façon dont cela a été publié et la réalité, il y a quand même une différence. A un moment donné, un représentant de l'Hydro, en réponse à des questions, je crois, a mentionné qu'il y avait des coupures. Je ne sais pas si cela a été volontaire ou pas, si c'est une erreur, si c'est une restriction ou un manque d'information additionnelle. C'est qu'il y a des coupures qui se font à partir de demandes, et il y en a d'autres qui se font à partir d'un programme. Si je me place en termes du gouvernement du Québec, je pourrais indiquer, par exemple, que nous avons coupé nos dépenses de $2 milliards en mettant en comparaison ce que nous allons inscrire dans le budget et les demandes qui nous viennent des différents services, des différents ministères. A ce moment, je pense qu'il y a cet aspect, parce que je me suis entretenu avec certaines autorités de l'Hydro, et il y a eu cet aspect qui a peut-être été mal expliqué.

M. Morin: Est-ce qu'on peut envoyer voir, M. le Président? C'est peut-être le vote de deuxième lecture sur le projet de loi? Pourtant non, mais j'aimerais le savoir.

M. Garneau: II y a quelqu'un qui va aller s'enquérir.

M. Morin: Oui. En l'occurrence, au mois de juillet, l'Hydro a fait part de son intention d'emprunter $1.2 milliard. Cela fait partie des demandes qui viennent au gouvernement et que vous avez à approuver ou à ne pas approuver. Par la suite, on nous dit: Cela va être coupé de $500 millions. Alors, pas besoin de sa règle à calcul, tout le monde dit: $1.2 milliard moins $500 millions, il reste $700 millions d'emprunt à l'Hydro. J'aimerais qu'on m'explique comment il se fait que, quelques jours après la déclaration gouvernementale, M. Giroux déclare: Ce que nous nous apprêtions à emprunter, de toute façon, c'est $1.7 milliard. Moins $500 millions, cela fait toujours $1.2 milliard. Voilà qui fait, monsieur, que l'Hydro-Québec va emprunter, de toute façon, ce qu'elle avait l'intention d'emprunter.

M. Garneau: Encore là, je n'ai pas vu les déclarations de M. Giroux, je ne les ai pas entendues surtout. J'aimerais bien savoir s'il a parlé du pro-

gramme d'investissement ou du programme de financement. Cela me paraît une chose importante. C'est pourquoi il m'est difficile de faire des commentaires là-dessus, compte tenu du fait que je ne sais pas le contexte de ce qu'il a dit, parce qu'il y a une partie d'autofinancement et il y a une partie qui est financée par les emprunts. Alors, je ne sais pas exactement ce qu'il a dit, mais, de ma conversation avec lui, je sais fort bien que l'Hydro, depuis quelques mois, revoyait son programme d'investissement. Excusez, M. le Président, vous avez un message.

Le Président (M. Cornellier): On me dit qu'il y a un vote en Chambre. La commission suspend ses travaux pour la durée du vote. On se retrouve ici immédiatement après le vote, à moins d'instructions contraires de la Chambre.

(Suspension de la séance à 21 h 50)

Reprise de la séance à 21 h 57

M. Cornellier (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

La commission, après cette fausse alerte que nous avons eue, reprend ses travaux ou continue ses travaux. Nous en étions à l'article 6.

M. Morin: M. le Président, nous pouvons refermer cette parenthèse que nous avons ouverte il y a un instant, mais je l'avais ouverte simplement pour démontrer qu'au fond, là encore, nous serons probablement devant une lacune du système, j'entends la question des tarifs de l'Hydro.

Nous pouvons peut-être adopter cet article 6.

Le Président (M. Cornellier): Article 6, adopté. Article 7.

M. Morin: A l'article 7, j'aimerais demander si la hausse de tarifs de 40% de la CTCUM va être sujette au contrôle, éventuellement, aux normes de la lutte anti-inflation. Ce que je note, c'est qu'au paragraphe a), on trouve, parmi les communautés urbaines considérées comme des organismes municipaux, la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal.

M. Garneau: M. le Président, la réglementation dans ce secteur est un des autres éléments où, au niveau interprovincial, il n'y a pas un accord sur le genre de réglementation qui devrait être appliqué. Mais j'ajouterai, de toute façon, que, pour ce qui est de l'augmentation des tarifs de la CTCUM, étant donné que c'est un organisme déjà largement subventionné, le principe général de l'augmentation de prix pour couvrir les augmentations de coûts ne créerait aucune difficulté pour l'augmentation qu'il y a eue à la CTCUM, parce que c'est déjà un organisme déficitaire et le problème de... Lorsqu'on pose le principe que toute augmentation des prix ne doit pas refléter plus que l'augmentation des coûts, pour le cas auquel se réfère le chef de l'Opposition, cette augmentation n'irait pas à rencontre des directives. D'autant plus que l'augmentation des tarifs ne diminuera même pas la subvention que le gouvernement du Québec accorde à cet organisme, en plus de l'argent qu'elle perçoit pour la vente de ses services.

Le Président (M. Cornellier): Article 7, adopté?

M. Morin: Bien! M. le Président, c'est encore, tout de même, une grosse lacune dans la lutte contre l'inflation, parce que les choses qui risquent d'augmenter considérablement au cours des mois et des années qui viennent sont précisément celles qui ne seront pas du tout contrôlées ou qui pourront connaître des augmentations presque sans limite.

Ce que je dois constater, au point où nous en sommes, c'est que les moyens d'action, de lutte

que se donne le gouvernement contre l'inflation sont des moyens, en fin de compte, assez limités.

M. Garneau: Le problème d'un organisme public subventionné déficitaire se pose de toute façon, soit par une augmentation des tarifs ou par une augmentation de la fiscalité pour couvrir ces tarifs.

Si nous prenons la situation d'une commission de transport qui est déjà déficitaire, si les tarifs ne sont pas corrigés à la hausse, cela veut dire que le déficit devra être financé d'une autre façon et le déficit le serait par une augmentation de la fiscalité, si on appliquait tout simplement les façons prescrites dans la loi pour répartir le déficit, de telle sorte qu'on est placé devant une situation où la meilleure méthode de lutte contre l'inflation dans ces secteurs sera un contrôle beaucoup plus strict des dépenses.

M.Morin: Parmi les amendements que le ministre s'apprête à présenter à l'article 11, nous trouvons un nouveau paragraphe e) qui reconnaît, justement, le principe du contrôle lorsqu'un élément inflationniste a une importance fondamentale pour la lutte contre l'inflation. J'imagine que l'une des idées maîtresses de ce projet de loi est vraiment de lutter contre l'inflation, dans tous les domaines.

Alors, si les hausses de tarif dans les transports ne peuvent pas, parmi tant d'autres éléments de la situation, être contrôlés, j'ai l'impression que la lutte contre l'inflation n'ira pas bien loin.

M. Garneau: Comme je viens de l'indiquer, dans le domaine des secteurs publics déficitaires, la meilleure façon de lutter contre l'inflation sera de contrôler davantage le niveau des dépenses parce qu'autrement, si nous disions qu'il ne peut y avoir en aucune circonstance augmentation de tarif des services publics, cela voudrait dire qu'il faudrait trouver une autre façon de les financer. Cela serait par le biais de la fiscalité.

Alors, on reviendrait, en termes de charge, dans une situation qui signifierait quand même des augmentations de coût pour les utilisateurs, soit directement ou indirectement. L'objectif que nous voulons essayer de viser est que ces augmentations de coût — et c'est un élément que j'ajoute à ce que je disais tout à l'heure — ne devraient pas résulter d'une diminution des contributions gouvernementales qui existaient antérieurement.

M. Morin: Evidemment, là, on tombe dans les grands objectifs sociaux. On peut se demander si les transports publics qui sont utilisés par les éléments de la population qui sont les plus défavorisés, généralement, ne sont pas ceux-là justement qui ont besoin le plus d'être aidés par rapport à d'autres secteurs de la population.

Mais, le ministre est-il si sûr que cela que les dépenses de la CTCUM ont augmenté de 40%, ce qui pourrait justifier leur augmentation récente?

M. Garneau: Je n'ai pas les chiffres des bud- gets du transport en commun à Montréal, mais si on prend depuis le début — malheureusement, je ne m'en souviens pas — les déficits d'exploitation ont augmenté à un rythme presque effarant. Evidemment, comme le secteur du transport en commun et la grande composante de son coût, c'est la main-d'oeuvre et le financement, et que le financement, entre autres, d'une partie importante du service de transport de la CUM que constitue le métro, a été subventionné, le service de la dette a été subventionné.

Il faut en conclure que l'autre élément qui a monté le plus, c'est celui des traitements. D'ailleurs, je crois que le dernier règlement les situait autour de 37%. Pardon?

M. Morin: 34%.

M. Garneau: C'est 34 ou 37%. Je n'ai pas le... Evidemment, il n'y avait pas eu d'augmentation de tarifs depuis un certain temps, il y avait quand même eu des augmentations de traitement antérieures de telle sorte que je ne serais pas surpris de constater que les taux d'augmentation de tarifs ne traduisent même pas les augmentations de dépenses.

M. Morin: J'ai l'impression qu'on a peut-être été tenté quand même d'anticiper un peu sur l'inflation à venir, comme l'ont fait tant d'autres. Mais, M. le Président, nous sommes disposés à adopter l'article 7.

Le Président (M. Cornellier): Article 7, adopté. Article 8?

M. Morin: A l'article 8, il s'agit des sociétés dont le capital-actions est contrôlé à 90% par le gouvernement; c'est en tout cas ce que nous dit le renvoi à l'article 717 de la Loi sur les impôts. Seulement, pour en avoir le coeur net, cela veut certainement dire, par exemple, SIDBEC, SEBJ, la Société d'énergie de la baie James, SOQUEM, SOQUIP. Est-ce que j'en oublie? Probablement.

M. Garneau: REXFOR, SGF, SDI, quoi que ce ne soit pas un organisme, SOQUIA, enfin tous les organismes.

M. Morin: SDI est un organisme prêteur.

M. Garneau: Ce n'est pas un organisme à profits.

M. Morin: Oui, cela épuise à peu près la liste. Très bien.

Le Président (M. Cornellier): Article 8 adopté.

M. Morin: Nous n'avons pas d'objection à l'article 8.

Le Président (M. Cornellier): A l'article 9, une modification est proposée pour insérer dans la sixième ligne du deuxième alinéa, après le mot "téléphone" les mots "de câblodistribution".

M. Morin: Cela, c'est l'article...

Le Président (M. Cornellier): A l'article 9, deuxième alinéa.

M. Morin: Est-ce qu'on a l'intention, à la lumière de cet article 9, de faire en sorte que les entreprises d'utilité publique ne puissent augmenter leurs prix ou tarifs sans autorisation de la régie?

M. Garneau: Nous avons l'intention de couvrir ces articles également par le biais des organismes régulateurs qui existent déjà, comme la Régie de service de l'électricité et du gaz, la Régie des loyers, la Régie des marchés agricoles, en fait tous ces organismes, la Régie des services publics, la Commission des transports, qui sont habilités à réglementer le prix des biens. On pourra, pour éviter, en fait, de doubler les interventions, utiliser l'article 130 que nous verrons plus tard, pour imposer à ces régies l'obligation d'appliquer dans leurs décisions les règlements qui seront édictés par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de la présente loi.

M. Morin: De sorte que vous rejoindriez, par exemple, des organismes comme Québec-Téléphone, la compagnie Bell aussi.

M. Garneau: Non, parce que la compagnie Bell est une compagnie...

M. Morin: Parce qu'elle a été déclarée d'intérêt national.

M. Garneau: Elle est interprovinciale.

M. Morin: Oui, par une déclaration spéciale du Parlement. Encore une "petite vite" qu'on s'est fait passer par le gouvernement fédéral.

Cela couvre certainement aussi les compagnies d'autobus, les compagnies de transport...

M. Garneau: Qui doivent obtenir des permis de la Commission des transports pour majorer le prix de leurs billets.

M. Morin: Les traversiers.

M. Garneau: Oui. Là, il reste tellement peu d'endroits maintenant où ils sont...

M. Morin: II en reste quelques-uns tout de même. L'Hydro-Québec aussi, en fait. Vous rejoindriez l'Hydro à nouveau grâce à cet article puisqu'il s'agit d'une entreprise d'utilité publique. Nous n'avons pas d'objection à ce qu'on adopte l'article 9.

Le Président (M. Cornellier): Article 9, adopté. Article 10?

M. Morin: II y a un amendement.

Directives gouvernementales Le Président (M. Cornellier): II y a une modi- fication pour proposer d'ajouter l'alinéa suivant: Ces principes directeurs aussi bien que les directives prévues ci-après peuvent s'appliquer à l'ensemble des personnes visées à la présente section ou à des catégories d'entre elles ou à l'ensemble des dividendes ou à des catégories entre eux.

M. Morin: M. le Président, j'aimerais demander quelques éclaircissements au ministre sur ce que seront ces principes directeurs.

Je sais qu'il n'a pas l'intention de les déposer, mais peut-être peut-il nous donner quand même quelques éclaircissements.

M. Garneau: Oui, je peux répondre.

M. Morin: Par exemple, quant aux augmentations de base des salaires, est-ce que le principe directeur sera du même ordre qu'au niveau fédéral, c'est-à-dire 8%?

M. Garneau: II sera du même ordre pour la première année d'application, 8%, plus 2%...

M. Morin: Pour le rattrapage.

M. Garneau: ... pour tenir compte de la productivité...

M. Morin: A la productivité, oui.

M. Garneau: ... avec la possibilité d'aller au-delà de 10% pour les conventions qui se sont terminées avant l'adoption de la présente loi ou des effets d'adoption de la présente loi avant le 14 octobre 1975, qui n'étaient pas encore signées au moment de cette déclaration ou il pourra y avoir prise en considération de la période courue entre le moment de la signature de la convention et le moment de la fin de la convention précédente en termes d'augmentation du coût de la vie pour cette période non couverte. Il y a également des possibilités d'extension de ce barème pour la première année entre 8% et 12% pour les secteurs d'activité où il sera nécessaire d'avoir des augmentations plus substantielles pour tenir compte de la rétention du personnel, pour tenir compte de certaines situations particulières de corps d'emploi. On vient de le voir dans le domaine de la fonction publique ou dans le secteur ouvrier. Il était nécessaire d'accroître cette norme de 10% à cause de la situation du marché et nous pouvons interpréter également ces directives en termes de groupe et non pas uniquement en termes d'individu, de telle sorte que, dans le secteur public, il y a eu une augmentation de traitement globale qui tenait compte des directives, mais, appliquée à des groupes elle pouvait signifier pour certains 38%, 39%, 40%, 44% pour les infirmières, pour d'autres moins, mais, dans l'ensemble, le taux d'augmentation se situe à l'intérieur de ces barèmes, pour ce qui est de la rémunération.

Pour ce qui est des dividendes, les directives qui s'appliqueront, sans vouloir en faire force de règlement, tel que je vais l'exprimer, mais l'objectif

est de faire en sorte que les dividendes payés à un actionnaire ne soient pas supérieurs à ceux qui lui ont été versés l'année précédente. Pour ce qui est des prix, l'intention générale est que les prix des biens et des services ne manifestent pas une augmentation qui serait supérieure à l'augmentation des coûts.

Pour ce qui est des services professionnels, c'est un problème beaucoup plus complexe sur lequel je ne peux pas me prononcer maintenant et il y a déjà quelques semaines que des groupes se rencontrent pour essayer de déterminer cette réglementation. Je ne suis pas en mesure de la préciser parce qu'il faut tenir compte, en plus de l'augmentation des tarifs, de l'augmentation du volume de travail des professionnels en particulier, ce qui peut signifier des augmentations de revenu et qui n'ont pas d'impact en termes inflationnistes puisque, si le professionnel, au lieu de travailler cinq heures par jour, décide de travailler dix heures et de voir deux fois plus de clients, son revenu augmenterait et ne serait pas dû à une augmentation de prix. Ce sont ces différents aspects qu'il nous faut couvrir et dont nous n'avons pas arrêté le mécanisme par lequel nous allons les couvrir.

J'ai fait les prix, les rémunérations, les dividendes.

M. Morin: Les exemptions de contrôle pour salariés gagnant moins de $6,000, est-ce que la même norme va être tenue parmi...

M. Garneau: La norme sera probablement portée à $7,000 au lieu de $6,000, ce qui veut dire que tout salarié gagnant moins de $6,000 pourrait avoir, théoriquement, des augmentations supérieures à 10% sans autre considération, sans justification quelconque. Quelqu'un qui gagnerait $5,000, par exemple, pourrait avoir une augmentation pour porter son traitement à $7,000, ce qui dépasserait largement les directives et ne serait pas soumis au contrôle.

M. Morin: Quand vous nous dites que ça va être probablement porté à $7,000, vous voulez dire dans les projets fédéraux ou dans les projets québécois?

M. Garneau: Le consensus qui semble s'indiquer dans les consultations que nous avons eues avec les différentes provinces serait de l'ordre de $7,000 de revenu.

M. Morin: Et l'augmentation maximale de... M. Garneau: De $2,400. M. Morin: ... $2,400.

M. Garneau: Elle sera maintenue ici également et, de la même façon, elle s'appliquera pour ce qui est des groupes de salariés, elle devra être respectée en termes de groupes, plus qu'en termes d'individus, de telle sorte que la masse salariale ou le coût à l'entreprise, qui pourrait se reflé- ter dans les prix, ne soit pas supérieur à une augmentation de $2,400 par individu pour cette entreprise.

M. Morin: Pour ce qui est des augmentations de prix, vous allez tenir compte, j'imagine, des coûts. Cela va être en fonction des coûts.

M. Garneau: Cela va être en fonction des coûts. Le principe directeur qui va sous-tendre la réglementation va être relié aux coûts.

M. Morin: Et pour les augmentations de profits, comment allez-vous procéder? Allez-vous tenir compte des cinq dernières années?

M. Garneau: Les profits ne seront pas contrôlés comme tels, sauf par le biais des prix de ces entreprises. Comme je l'indiquais tout à l'heure, notre intention n'est pas de diminuer l'activité industrielle ou commerciale ou professionnelle des gens. C'est de faire en sorte que, par le biais d'une augmentation d'activités, il n'y ait pas d'augmentation dans les prix.

Le profit, s'il est la conséquence d'une augmentation de prix, sera contrôlé. S'il est la conséquence d'une augmentation de productivité ou de volume d'affaires, il ne sera pas contrôlé.

M. Morin: Au niveau fédéral, M. le Président, on a dit qu'il n'était pas toujours possible de contrôler les prix d'une société qui fabrique, par exemple, une très large gamme, un très large éventail de produits, 40 produits, 50 produits, voire davantage. On a dit que, dans ce cas-là...

M. Garneau: Les marges bénéficiaires.

M. Morin: Dans ce cas-là, on ferait appel, justement, aux profits.

M. Garneau: Aux marges bénéficiaires.

M. Morin: Aux marges, si vous voulez, aux marges bénéficiaires, et on prendrait une moyenne de plusieurs années. Est-ce que c'est le système? C'était le sens de ma question. Je vous demandais si on allait faire la même chose qu'à Ottawa là-dessus.

M. Garneau: C'est dans ce sens-là. Lorsqu'on prend un magasin à succursales, où c'est difficile de savoir si le carton d'allumettes qui se vendait $0.01 devrait se vendre $0.02, cela va être sur la marge bénéficiaire de l'expérience accumulée des entreprises au cours des dernières années. La façon dont cela va être transmis dans un règlement, c'est une autre chose.

Le principe directeur derrière la réglementation est celui que je viens de mentionner.

M. Morin: Mais, si je comprends bien, en tout état de cause, vous allez vous aligner sur les positions fédérales.

M. Garneau: Dans le cas du secteur privé, puisque c'est de cela qu'on parle surtout, nous allons nous aligner sur le secteur fédéral par le biais des consultations qui existent présentement. Nous aurons vraisemblablement une autre conférence des ministres des Finances, sinon avant Noël, au début de janvier. A ce moment-là, le gouvernement fédéral sera lui-même en mesure de déposer ses projets de règlements qui auront également été soumis à l'information des députés de la Chambre des communes. Quant à nous, nos équipes sont à l'oeuvre depuis déjà plusieurs semaines et l'objectif est certainement de se coller le plus près possible à ce qui va se faire ailleurs au Canada. Autrement, ce serait impossible d'en arriver à des ententes administratives, si c'était complètement différent.

M. Morin: Est-ce que je pourrais faire une suggestion au ministre? Je pense qu'il devrait s'y montrer ouvert. La suggestion, M. le Président, de convoquer une commission parlementaire pour que nous puissions prendre connaissance des principes directeurs, lorsqu'ils seront publiés ou lorsqu'ils feront l'objet... Je ne sais pas s'ils feront l'objet — ai-je bien compris — d'une publication du lieutenant-gouverneur. C'est un décret, c'est un règlement, en fait.

M. Garneau: C'est cela, qui devra être publié dans la Gazette officielle.

M. Morin: Est-ce qu'avant la publication ou plutôt, avant l'entrée en vigueur, il n'y aurait pas lieu de convoquer la commission parlementaire pour en discuter, étant donné que cela va vraiment être le coeur du système, cela va être le fond du système?

M. Garneau: M. le Président, en principe, j'aurais objection à ce que les règlements puissent être soumis à la discussion avant leur entrée en vigueur.

Mais, je n'ai pas d'objection à consulter le leader parlementaire du gouvernement et mes collègues pour voir s'il y aurait possibilité, une fois que les règlements seront publiés, d'avoir quand même une discussion qui pourrait éventuellement amener des modifications, mais je ne voudrais pas qu'il y ait des règlements qui soient déposés et qui laissent un temps entre le moment où ils seront déposés et le moment où ils vont s'appliquer. C'est un peu comme des mesures fiscales. Si, du côté de mes collègues et du leader de la Chambre, il y a possibilité d'avoir une telle discussion, personnellement, je n'y vois pas d'objection de principe, mais après leur parution dans la Gazette officielle.

M. Morin: Alors, je peux considérer que le ministre étudiera sérieusement la possibilité d'un débat ou d'une discussion, d'un examen...

M. Garneau: Postérieur...

M. Morin: ... à tout le moins postérieur...

M. Garneau: Je n'ai pas d'objection de principe.

M. Morin: ... en commission parlementaire.

M. Garneau: S'il y a moyen de trouver du temps, si la Chambre siège encore, ou même si elle ne siège pas, personnellement, je n'y vois pas d'objection de principe.

M. Morin: Bien. Je n'ai pas d'objection à ce que l'on adopte l'article 10.

M. Garneau: Tel qu'amendé?

Le Président (M. Cornellier): L'article 10, adopté tel qu'amendé. A l'article 11, il y a ici encore des modifications proposées par le ministre.

M. Garneau: Ce sera à l'article e), M. le Président.

Le Président (M. Cornellier): A l'article c) et à l'article e).

M. Garneau: C'est exact.

Le Président (M. Cornellier): A l'article c), on suggère de retrancher, dans les première et deuxième lignes du paragraphe, les mots "ou de catégories de services".

M. Morin: J'aimerais bien que le ministre nous explique la portée de ce changement.

M. Garneau: En vertu de l'article 10 que nous venons d'adopter et de l'amendement également adopté, nous avons fait les catégories d'une façon globale, à l'article 10, et nous les éliminons dans les autres articles.

M. Morin: Je vois. Vous remplacez le paragraphe e)?

Le Président (M. Cornellier): Le paragraphe e) serait remplacé pour se lire comme suit: "Les fournisseurs de biens ou de services du secteur privé y compris les bailleurs d'immeubles, que le lieutenant-gouverneur en conseil déclare, par un règlement adopté sur rapport de la régie en vertu de l'article 40, être d'une importance fondamentale pour la lutte contre l'inflation. Les directives...

M. Garneau: Non, c'est... Oui, d'accord.

Le Président (M. Cornellier): Les directives touchant les fournisseurs visés au paragraphe e) peuvent s'appliquer à compter de la date de la demande adressée à la régie par le lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de l'article 40, ou à compter de toute date ultérieure à celle-ci, mais antérieure à celle du règlement d'adoption, si le ministre en donne préavis publiquement, et à l'Assemblée Nationale, si elle est en session."

M. Garneau: L'objectif est de pouvoir couvrir

certains champs qui ne le sont pas, entre autres des entreprises de moins de 500 employés, si, après un rapport de la régie, nous étions avisés que le comportement de ces fournisseurs de biens ou de services pouvait affecter le comportement général des prix.

M. Morin: J'observe d'ailleurs que les bailleurs d'immeubles constituent une addition fédérale; ce doit être, je crois, à la suite de votre...

M. Garneau: Non, parce que le contrôle des loyers...

M. Morin: Au Québec, oui, mais dans les autres provinces.

M. Garneau: Dans les autres provinces, l'intervention fédérale ne viendrait que si les provinces acceptaient et ne voulaient pas créer leur propre régie et laissaient au fédéral le soin d'agir à leur place. L'information que j'ai est que les provinces acceptent d'avoir leur propre régie de contrôle des loyers.

M. Morin: Cette fois, nous ne touchons plus aux grands principes directeurs, nous touchons aux directives. A mon avis, elles devraient faire l'objet, étant donné leur importance, d'une étude en commission parlementaire avant leur entrée en vigueur. Je crois que ce serait vraiment nécessaire d'avoir la possibilité d'un débat là-dessus.

Est-ce que le ministre accepterait, toutefois, que les directives... je ne parle pas des grands principes directeurs, ils ont peut-être moins de portée, les directives, elles sont exécutoires. Elles peuvent être fort contraignantes s'il y avait une erreur là-dedans et qu'on ne puisse pas en débattre. Ce serait regrettable.

M. Garneau: M. le Président, s'il y avait véritablement une erreur qui se glissait dans un règlement, le même règlement pourrait toujours être amendé. Je reprends l'explication que je donnais tout à l'heure au chef de l'Opposition, c'est que je n'ai pas d'objection de principe à consulter le leader gouvernemental et mes collègues pour juger de l'occasion de tenir une telle commission, mais à mon sens, elle devrait être postérieure à la parution des règlements, comme je l'indique, règlements qui pourraient être amendés après une telle discussion, si elle avait lieu.

M. Morin: Ce qui m'inquiète dans le cas des prix, je ne vous cacherai pas que c'est l'idée que le contrôle de l'augmentation des prix, je l'ai dit d'ailleurs en deuxième lecture, je me suis longuement étendu là-dessus, vient a posteriori, vient après que l'augmentation ne soit entrée en vigueur. Je trouve que c'est un contrôle bien aléatoire, bien sporadique que celui qui consiste à contrôler après leur entrée en vigueur des milliers de hausses de prix. Effectivement, je pense que cela va être à peu près impossible. C'était d'ailleurs le sens de la remarque de M. Pépin l'autre jour quand il a dit d'un air un peu désabusé qu'il allait être beaucoup plus facile de contrôler les salaires que les prix. A mon sens, toute augmentation de prix décrétée par le secteur privé, portant en tout cas sur des biens essentiels, je me restreins aux biens essentiels, ceux qui touchent le plus la population et les gagne-petit, par exemple, le combustible, les aliments, je pense aux aliments périssables dans les grandes chaînes, qui ont fait l'objet d'une réglementation de la part de la Colombie-Britannique, ce serait peut-être plus facile au niveau du gros, en particulier pour les aliments non périssables, tous ces éléments d'augmentation du coût de la vie devraient faire l'objet d'une autorisation préalable de la régie ou de tout autre organisme délégué par la régie. Vous pouvez déjà commenter cette déclaration. J'aimerais faire observer au ministre qu'il y a des choses qui auraient pu être faites au Québec en attendant que soit vraiment mis sur pied le système outaouais qui tarde beaucoup à venir.

Je pense, en particulier, à ce que M. Barrett a fait. Pour un gouvernement qui se dit social-démocrate, ce serait là un modèle à suivre, il me semble.

M. Garneau: Mais également forcer le retour au travail d'une série d'employés, à la veille des élections...

M. Morin: II l'a fait, parce qu'il estimait que c'était absolument essentiel à l'économie de la Colombie-Britannique, mais il l'a fait sans provocation. Il a évité de se comporter comme le gouvernement du Québec le fait d'ordinaire à l'égard des syndicats.

M. Garneau: II a forcé le retour au travail. M. Morin: II l'a fait sans provocation.

M. Garneau: Cela dépend de ce qu'on entend par provocation.

M. Morin: C'est une autre question. Je pense que là, on parle de la lutte contre l'inflation.

M. Garneau: Je comprends bien l'attitude de M. Barrett. Il a posé des gestes qui, à mon sens, n'ont pas de signification très grande, de déclarer du haut d'un balcon, à un moment donné, qu'on gèle tous les prix, c'est une chose, mais d'avoir le mécanisme pour contrôler de tels gels, c'est une autre chose.

M. Morin: Oui, mais cela a fonctionné effectivement.

M. Garneau: M. le Président, les gels décrétés de cette façon fonctionnent pour le temps que durent les roses, et il s'agit de voir ce qui s'est fait dans d'autres pays où on a décrété des gels qui n'ont pas duré. Pour revenir aux propos du début, du chef de l'Opposition, qui m'apparaissent beaucoup plus fondés et qui, d'ailleurs, s'inscrivent dans la démarche des consultations qui ont eu lieu au niveau des ministres des Finances et avec la régie fédérale dans le cadre de la préparation de la façon de procéder pour atteindre l'objectif, cette liste de biens essentiels dont parle le chef de l'Opposition, c'est l'intention de ceux qui collabo-

rent au plan de l'établir, de telle sorte que, plutôt que d'assurer un contrôle préalable à des milliers et des millions de prix, ce qui prendrait une armée de fonctionnaires non seulement pour les approuver, mais pour contrôler véritablement si tes décisions ont été exécutées, l'objectif est d'essayer de déterminer plutôt un certain nombre de biens qui ont une importance assez grande sur l'évolution du coût de la vie et d'exiger que les prix ne puissent varier qu'après une approbation effective de la régie plutôt qu'une vérification postérieure.

Si nous réussissons à établir cette liste, le système général de formation des prix, à l'intérieur des règlements, pourra être vérifié a posteriori pour une liste importante, pour un nombre important de prix, mais pour ceux qui ont un rôle direct sur l'augmentation du coût de la vie, tel que ceux mentionnés par le chef de l'Opposition — il y en a d'autres également — la réglementation pourra stipuler qu'il devra y avoir une approbation antérieure, par la régie, avant l'entrée en vigueur de l'augmentation du prix.

Il y aura, en fait, deux sections, lorsque cette liste... Evidemment, il aurait été préférable que tout cela entre en vigueur au moment de l'annonce du programme, ce qui était difficile, parce que cela prend tout le mécanisme pour y arriver, et le mécanisme est constitué en vertu de la loi, l'objectif étant donc d'en arriver à établir cette liste. Cela a fait l'objet d'une longue discussion, lors de la conférence des ministres des Finances, le fait d'avoir cette liste de biens et peut-être de services, qui auront besoin de l'approbation antérieure avant d'entrer en vigueur, et...

M. Morin: On a quand même parlé, à Ottawa, de cette possibilité.

M. Garneau: Oui. D'ailleurs, les représentants de la Colombie-Britannique y étaient aussi, et je dois dire qu'ils souscrivent à l'objectif du programme également, et...

M. Morin: Ils l'ont complété admirablement bien. C'est justement le succès des cinq premières semaines qui a amené le prolongement.

Je me demande pourquoi...

M. Garneau: II y a eu une baisse...

M. Morin: ... le Québec n'a pas eu le même genre d'attitude en attendant que les mesures fédérales deviennent vraiment efficaces, parce que les prix ont continué de monter, vous le savez comme moi.

M. Garneau: Si les renseignements que j'ai eus sont exacts, il y aurait eu une baisse de l'indice des prix dans plusieurs secteurs, à Montréal, selon le dernier indice qui est sorti, par rapport à celui du mois précédent, dans les secteurs — il faudrait que je vérifie — mais, de mémoire, il me semble que c'est dans le secteur de l'alimentation où...

M. Morin: Je n'ai pas vu ça.

M. Garneau: Cela a fait l'objet de nouvelles dans les journaux et cela m'a frappé. Je pourrais essayer d'obtenir ce renseignement de façon plus précise.

M. Morin: Oui.

M. Garneau: Evidemment, si cela dure pour une période de temps très courte...

M. Morin: Parce qu'il est certain que l'action de M. Barrett a eu un succès assez considérable, au point qu'en pleine période électorale, avec tous les risques que cela comporte, il a décidé de la prolonger.

M. Garneau: Je ne sais pas si cela comporte des risques...

M. Morin: Cela comporte des risques, en ce sens que...

M. Bacon: II est meilleur stratège que vous...

M. Morin: ... j'imagine qu'il y a des gens qui n'ont pas dû être contents, par exemple, que les loyers commerciaux soient gelés et que les commerçants soient tenus de justifier chacune de leur hausse de prix, que le gouvernement s'est mis...

M. Garneau: A qui?

M. Morin: Auprès du gouvernement, parce qu'autrement, ils portent aussitôt plainte, en vertu du système...

M. Garneau: Oui, mais quel organisme va accueillir cela? Cette province n'a pas de structures pour accueillir ces plaintes.

Il ne faut pas oublier que, dans les secteurs où il y a des augmentations de prix qui seraient déraisonnables et qui ne respecteraient pas les objectifs de la lutte à l'inflation, prenons comme exemple une grande chaîne d'alimentation, elle pourrait être pénalisée. On verra plus tard, puisqu'il y a concordance entre la loi québécoise et la loi fédérale sur les pénalités, que ces pénalités sont très grandes, qu'elles peuvent aller à des amendes élevées. Ceci m'amène à dire que les entreprises qui connaissent déjà des objectifs généraux et qui passeraient à des augmentations de prix qui iraient à l'encontre de ces directives générales pourraient être pincées par la suite. Ainsi, les effets, comme on joue sur la psychologie des gens, soit par le biais de la déclaration de M. Barrett ou par l'attitude qui a été suivie ailleurs au Canada, m'apparaissent donner à peu près le même résultat ou les chances sont qu'elles donnent le même résultat, en attendant qu'un mécanisme très strict puisse être mis sur pied tant au niveau canadien, dans l'ensemble, qu'au niveau de la Colombie-Britannique, d'une façon plus spéciale.

M. Morin: Je doute qu'on puisse obtenir les mêmes résultats, surtout qu'en Colombie-Britannique, on a mis en route des coopératives alimentaires pour faire concurrence aux chaînes d'alimentation.

M. Garneau: C'est une déclaration de M. Barrett...

M. Morin: Oui.

M. Garneau: ... qui dit qu'éventuellement, il va essayer de faire cela.

M. Bacon: Le chef de l'Opposition nous parle d'un article de journal, mais a-t-il des indices mathématiques sérieux sur les mesures...

M. Morin: Oui.

M. Bacon: ... qu'il nous cite dans cet article? Vous avez des chiffres?

M. Morin: Je sais qu'on a dit...

M. Bacon: Vous parlez des loyers commerciaux...

M. Morin: ... que cela a été un succès qui a étonné là-bas.

M. Bacon: Oui. Le succès a étonné en vertu de quoi? C'est aléatoire cela encore. C'est pas mal subjectif.

M. Morin: Evidemment, quand on ne veut pas intervenir, on se trouve toujours de bonnes raisons.

M. Bacon: Vous parliez des loyers commerciaux, tout à l'heure, et, deux minutes auparavant, vous avez parlé de choses comme le combustible et ces choses. Je pense que vous êtes pas mal loin.

M. Morin: C'est que, là-bas aussi, on a pris des mesures, non seulement pour le gel des prix et de la nourriture, mais également pour les médicaments, pour l'huile à chauffage, pour le gaz propane, pour l'essence, pour le gaz naturel, pour l'électricité, pour les transports publics. Il y a même des tarifs marchandises. Cela va assez loin et cela porte non seulement sur les choses essentielles, mais aussi sur un certain nombre de points sensibles comme les loyers commerciaux, qui connaissaient et qui connaissent ici aussi au Québec une hausse...

M. Bacon: Vous êtes au courant des hausses de prix depuis un an ou deux ans dans des endroits comme Vancouver et Victoria. C'est beau d'intervenir à ce moment-ci, mais c'est de beaucoup dépasser ce qui a pu arriver ici.

Le Président (M. Brisson): Le député d'Abitibi-Ouest avait demandé la parole.

M. Houde (Abitibi-Est): D'Abitibi-Est, s'il vous plaît. Dans toutes ces réformes, M. le chef de l'Opposition, je pense que vous avez parlé, tout à l'heure, d'un gel possible des denrées périssables, demandant qu'on puisse enquêter avant d'augmenter le prix de ces denrées.

Selon l'expérience que vous avez semblé discerner en Colombie-Britannique, y a-t-il eu réellement une baisse de l'indice des denrées périssables depuis que les mesures Barrett sont en application?

M. Morin: Je pensais à un contrôle au niveau du gros. C'est beauoup plus facile pour ce qui est des denrées périssables d'avoir un contrôle au ni- veau du gros plutôt qu'au niveau du détail. Et ce que j'en sais, c'est que l'ensemble des mesures Barrett a connu un succès inespéré.

M. Garneau: Je me dis que c'est tout simplement une attitude déclaratoire que M. Barrett a utilisée et, de l'autre côté, le plan fédéral s'inscrit dans une autre dialectique, mais qui joue également sur la psychologie des gens. Il s'agit de savoir si les entreprises ont plus peur d'une déclaration de M. Barrett, en campagne électorale, qu'elles auraient peur d'une loi fédérale qui vient d'être adoptée en troisième lecture hier et qui prescrit que les augmentations de prix ne doivent pas dépasser les augmentations du coût dans d'autres cas lorsque c'est diffcile d'établir des prix par article, des marges bénéficiaires.

Sur la psychologie des gens, lequel des deux a le plus de chance de réussir?

M. Morin: Le programme fédéral est encore plus déclaratoire que le programme Barrett qui, lui au moins, est bien concret et a été mis tout de suite en route.

M. Garneau: Pour être capable de mettre un programme en route et d'avoir des mesures de contrôle dans son application, cela prend des pouvoirs législatifs et cela prend un appareil administratif...

M. Morin: Oui.

M. Garneau: ... et depuis que j'assiste aux conférences, à l'exception de la Régie des loyers qui existait en Colombie-Britannique depuis peu de temps, je crois et qui existe au Québec depuis plusieurs années à cette exception près, il n'y avait pas de régie existante, il n'y avait pas tout un appareil administratif prêt à contrôler cela, d'autant plus que d'après les informations que j'ai, jusqu'à maintenant, on n'avait pas l'intention de présenter une législation typiquement provinciale de contrôle général. Je me dis: Alors, il reste quoi? Il reste tout simplement l'intention ou la force de persuasion ou de discipline des gens à se coller à une déclaration d'un premier ministre au niveau de la Colombie-Britannique, où a une déclaration de contrôle, où il y a une loi qui vient d'être votée et ici, elle est à l'étude. Je me dis: La différence qu'il y a entre les deux mécanismes ou les deux façons de procéder devient très ténue.

M. Morin: Je pense qu'il ne faut quand même pas sous-estimer les efforts qui ont été faits par la Colombie-Britannique et qui ont porté fruit. Je pense à l'assurance-automobile, je pense aux transport. Ces gens ont réussi tout de même. Là, vous allez me dire: C'est par l'intervention du secteur public, on n'est plus dans le secteur privé. Je veux bien en convenir, mais un gouvernement qui est décidé à intervenir et qui veut agir, peut avoir un effet sur les prix. Ma foi, l'Ontario l'a eu en gelant le prix du pétrole pendant un certain temps. Cela a tout de même donné des résultats.

M. Garneau: Jusqu'après l'élection.

M. Morin: Même au Québec, il semble qu'en principe on y a cru. En principe, je dis bien parce qu'on l'a gelé en plein été, alors cela n'a pas donné de bien gros résultats, mais je pense que, si le gouvernement du Québec avait voulu agir pendant la longue période qui nous sépare, peut-être, du moment où la législation fédérale sera vraiment efficace, sera devenue efficace, il aurait pu prendre des mesures temporaires comme celles que M. Barrett a adoptées, non sans succès à ce qu'il semble.

M. Houde (Abitibi-Est): Est-ce que le chef de l'Opposition est au courant que, dans les tablettes des super-marchés en Colombie-Britannique, il manque beaucoup de denrées actuellement à cause du gel des prix?

M. Morin: On a fait observer, M. le Président, que le succès a été tel que contrairement à ce que disait les prophètes de malheur, les magasins n'ont pas fermé leurs portes faute de profits intéressants. Ils ont continué à faire des profits convenables et il n'a pas manqué, que je sache, je n'ai pas entendu parler qu'on ait manqué de produits essentiels, en tout cas. Je n'ai pas entendu parler de cela. Si le député a des raisons d'affirmer le contraire, j'aimerais bien qu'il me montre où il a pris ces renseignements-là.

M. Houde (Abitibi-Est): A moins qu'il s'agisse de propagande tout à fait malhonnête, je me souviens d'avoir vu, lors des premières semaines de l'application des mesures de M. Barrett, des photos d'étalages complets de magasins, surtout dans l'alimentation, des étalages complètement vides de laitue de Californie, de tomates et de tout ce que vous voudrez.

M. Morin: Vous parlez du temps où il y avait la grève. Ce n'est pas la même chose.

M. Houde (Abitibi-Est): Non. Pas longtemps après les mesures de...

M. Morin: En tout cas, d'après ce que nous en savons, d'après ce qui nous est parvenu, ce qui est parvenu à nos oreilles, au contraire, cela a été plutôt un succès.

M. Houde (Abitibi-Est): Dans le cas des denrées périssables, comment ont-ils réussi à résoudre le problème, à ne pas augmenter les prix? Parce qu'on sait que la laitue, à ce temps-ci de l'année, est beaucoup plus chère qu'elle peut l'être au mois de septembre.

M. Morin: L'une des premières mesures que ces gens ont prises et on aurait pu sans doute l'adopter ici au Québec, c'est qu'ils ont forcé les commerçants à afficher les prix, non seulement de la semaine, mais des semaines précédentes, de façon que les consommateurs sachent à l'oeil, en arrivant dans le magasin, que les choses ont augmenté de tant depuis tant de jours. Le seul fait de forcer le commerçant à afficher ses prix a eu un effet de ralentissement.

M. Houde (Abitibi-Est): II n'y a pas eu de gel absolu.

M. Morin: C'est-à-dire que...

M. Garneau: Ils n'ont pas de méthode de le contrôler. C'est déclaratoire. Toute mon argumentation est de dire: Est-ce que les gens, quand il n'y a pas de législation qui a des dents... Il s'agit de savoir si les institutions, les entreprises, les individus sont plus disposés à se conformer à une déclaration faite du haut d'un balcon, qu'ils le sont à une autre forme de déclaration qui a été faite par le premier ministre du Canada à la télévision et qui a été approuvée par le premier ministre du Québec et par d'autres premiers ministres dans tout le Canada.

M. Morin: Je ne vous dis pas qu'il y a eu un gel, du moins pas pour l'alimentation, pour les loyers commerciaux il y a eu un gel précis. Là, gel efficace, c'est déjà quelque chose. Pour les aliments, il y a un recours possible, le gouvernement...

M. Garneau: Pour ce qui est des loyers commerciaux...

M. Morin: ... pouvait porter plainte devant la régie fédérale de contrôle de révision des prix, je pense qu'on l'appelle ainsi, et on a noté que seulement le fait de forcer les gens à afficher leurs prix avait déjà un effet psychologique considérable et... ce n'est pas un gel, ce n'est pas un gel total.

M. Bacon: Vous venez de mettre en évidence... qui relevait du chef de l'Opposition tantôt, vous venez de mettre en évidence un gel de prix et vous nous dites après ça qu'ils affichent les prix de la semaine d'avant, l'autre semaine, l'autre semaine. S'ils affichent des prix...

M. Morin: Ce sont des mesures antiinflationnistes comportant des gels dans certains secteurs et d'autres mesures dans d'autres secteurs. Je m'excuse, mais je trouve que ça fait preuve d'imagination. Bien oui, il est arrivé à des résultats.

M. Garneau: On va le voir quand les indices vont sortir après...

M. Morin: Evidemment, c'est un gouvernement social-démocrate, un vrai celui-là, un vrai.

M. Garneau: Les autres ne le sont pas? Les autres gouvernements sociaux-démocrates, NPD par exemple ne le sont pas?

M. Morin: Ils le sont apparemment moins.

M. Garneau: Est-ce que la différence entre les deux n'est pas le temps...

M. Houde (Abitibi-Est): Le temps des élections, mais je...

M. Morin: Je ne pense pas parce que connaissant M. Barrett, je pense qu'il est un homme de décision, c'est un homme imaginatif, il a décidé de prendre le taureau par les cornes en attendant que les contrôles fédéraux entrent en vigueur. Parce que c'est temporaire, il l'a bien dit clairement, c'est en attendant les quelques semaines qui nous séparent de l'entrée en vigueur du régime fédéral. Il a calculé que ce ne serait peut-être pas avant le 16 février que ça entrerait en vigueur. Vous vous rendez compte de tout ce qui peut se passer avant le 16 février?

M. Garneau: Vous vous rendez compte aussi...

M. Houde (Abitibi-Est): Le temps des élections.

M. Garneau: ... de l'aléatoire qu'il y a de déclarer que les prix sont gelés quand vous n'avez pas de mesure législative et d'appareil administratif pour aller les contrôler.

M. Morin: Attention, on a parlé du gel des loyers commerciaux...

M. Garneau: Le gel des loyers commerciaux... M. Morin: ... les transports...

M. Garneau: ... le chef de l'Opposition va admettre que ces loyers commerciaux ne sont pas des baux annuels. Ce sont des baux de dix ans, quinze ans, vingt ans et quand on décrète pendant quinze jours, trois semaines, un mois qu'on gèle des baux, on les gèle par rapport à quoi, uniquement ceux qui arriveraient en renouvellement à cette période. Cela n'a pas de sens.

M. Morin: Le ministre sait qu'il y a des loyers commerciaux qui sont quand même pour des périodes moins longues que ça. Dans les centres commerciaux, peut-être que ce sont des baux plus longs...

M. Garneau: II faudrait situer uniquement les baux qui auraient été renouvelés durant la période de quinze jours, trois semaines, qui auraient pu être affectés et qui auraient pu avoir un impact sur les prix.

M. Bacon: Quand vous parlez de baux commerciaux...

M. Morin: Ecoutez, quand on ne veut pas agir, je suis sûr qu'on peut se trouver mille et une bonnes raisons. Sûrement.

M. Garneau: C'est tout simplement une ap- proche différente et les deux approches sont des situations où il y a une période de temps entre le moment où l'intention est déclarée et le moment où la loi est entrée en vigueur et où le mécanisme pour contrôler l'application de la loi est véritablement efficace. La seule différence qu'il y a entre les deux, c'est qu'il y en a un qui a fait une déclaration dans un sens et l'autre a fait une déclaration différente, mais pour les deux, il s'agit de savoir si la loi et les dents de la loi peuvent s'appliquer.

Est-ce que les citoyens, dans un cas, sont plus dociles que dans l'autre cas? Je me dis que c'est bonnet blanc, blanc bonnet.

Dans le cas du gouvernement du Québec, en plus de souscrire à l'objectif visé de lutte à l'inflation, nous avons agi, en présentant une législation et en travaillant, depuis le début de l'annonce de cette législation, à la préparation d'une réglementation qui va venir saisir l'objectif d'un mécanisme qui est capable de faire en sorte que l'objectif visé sera atteint.

En fait, tant que tout l'appareil administratif ne sera pas là pour vérifier les gestes que l'on veut vérifier, dans un sens comme dans l'autre, il faut se fier à la docilité des citoyens ou le sens civique des citoyens. Je me dis: Pourquoi y aurait-il plus de sens civique sous une forme de déclaration que sous l'autre forme; surtout lorsque la forme prise dans un cas ne m'apparaît pas devoir être suivie dans l'immédiat d'une législation qui va pouvoir faire appliquer cet objectif?

M. Morin: Vous avez dit tout à l'heure, M. le ministre, qu'il était possible qu'on exige une autorisation préalable dans certains secteurs.

M. Garneau: Oui. Actuellement, les gens essaient de faire le recensement de ces biens essentiels, savoir lesquels auront besoin d'une approbation antérieure.

M. Morin: Dans le cas du Québec, dans le secteur qui va être contrôlé par le Québec, est-ce que vous pourriez nous donner une idée? Nous n'en sommes pas encore au stade des directives, même des principes généraux, mais pourriez-vous nous donner une idée ou des exemples de secteurs qui feraient l'objet d'un contrôle préalable?

Est-ce que, par exemple, les transports, le logement, l'électricité ou l'assurance-automobile pourraient être du nombre?

M. Garneau: Dans le domaine de juridiction québécoise, prenons un champ qui est celui de l'alimentation. Ce n'est pas d'hier que les augmentations aux consommateurs doivent être approuvées avant d'entrer en vigueur, vous avez l'augmentation du lait nature, vous avez...

M. Morin: II y a des exemples déjà...

M. Garneau: ... qui fonctionnent déjà. Les commissions de transport qui veulent augmenter leur tarification doivent obtenir l'autorisation de la Régie de la commission des transports. C'est la

même chose du côté de la Régie de l'électricité et du gaz. Il y en a une foule déjà qui existent dans ce domaine-là.

Ce à quoi fait allusion le chef de l'Opposition, c'est à une autre dimension qui serait des biens qui ne sont pas nécessairement produits au Québec. Si on prend le boeuf de l'Ouest que nous importons, cela pourrait être ce genre de denrée qui devrait avoir une autorisation préalable avant de pouvoir augmenter ses prix.

En fait, on pourrait prendre d'autres exemples, comme le pétrole...

M. Morin: C'est plutôt au niveau fédéral, que ce système va s'appliquer?

M. Garneau: II est évident que pour ce qui est du secteur privé qui ne tombe pas sous la réglementation d'organismes provinciaux québécois, si on en arrive à cette entente administrative — et je ne vois pas pourquoi on n'y arriverait pas — cela va être réglementé ou administré par la régie fédérale, justement à cause de la grande difficulté qu'il y aurait de l'administrer uniquement sur une base provinciale, à cause du commerce interprovincial.

On pourrait avoir tout un appareil administratif mais on n'aurait pas grande autorité législative ou juridique pour aller vérifier le prix de certains biens, de certains services — de certains biens surtout — qui viennent de l'extérieur.

M. Morin: Admettons que, pour le boeuf, vous ayez raison, surtout que l'élevage québécois est en train de disparaître, mais pour ce qui est d'éléments qui relèvent nettement du Québec, comme par exemple, l'électricité, l'assurance automobile, le transport, envisagez-vous, dans ces domaines — je le mets au conditionnel — envisageriez-vous des autorisations préalables?

M. Garneau: Cela existe déjà dans le domaine des transports, dans le domaine de l'électricité. L'Hydro ne peut pas augmenter ses tarifs avant d'en avoir eu l'autorisation.

M. Morin: Ce ne sera pas contrôlé par la régie...

M. Garneau: Ce sera régi par le Québec. M. Morin: ... mais par le gouvernement.

M. Garneau: Comme c'est le gouvernement qui fait les règlements et en vertu de la loi, il est clair qu'on ne peut pas se diviser en deux.

M. Houde (Abitibi-Est): II y a même des commissions parlementaires à cet effet.

M. Morin: Au fond, à quoi sert l'organisme extérieur au gouvernement à ce moment? Toute l'idée, c'est d'avoir un organisme extérieur au gouvernement, qui peut se prononcer de façon autonome sur ces questions.

M. Garneau: C'est la même chose en

Colombie-Britannique, c'est la même chose au niveau canadien. La législation étant adoptée, les règlements en vertu de cette législation étant édictés par le gouverneur ou le lieutenant-gouverneur en conseil, c'est évident que, d'une façon ou d'une autre, peu importe le palier de gouvernement ou la région du Canada où cela s'applique, ce seront toujours des règlements édictés par un gouvernement.

M. Morin: Plus je vous écoute...

M. Garneau: A moins que... le chef de l'Opposition.

M. Morin: ...ceci dit très respectueusement, plus je vous écoute, plus je doute de l'efficacité de ces mesures, au niveau des prix en tous cas. J'ai l'impression que ça va continuer de grimper.

M. Garneau: II est évident qu'un tel programme — je l'ai mentionné dans mon intervention de deuxième lecture — n'est pas facile à appliquer, et cela prendra un certain temps avant de pouvoir en mesurer les effets. C'est pourquoi nous ne pensons pas que nous pourrons les sentir dans l'espace de deux, trois ou six mois; pour sentir les effets de la loi, il faudra problement attendre une période d'un an ou deux.

Quand on regarde les options à ce cheminement et qu'on voit ce qui s'est fait aux Etats-Unis ou en Angleterre, les mesures appliquées furent uniquement des gels décrétés arbitrairement et elles n'ont pas donné de résultat. Quand on compare l'augmentation de l'indice des prix à la consommation aux Etats-Unis et au Canada, on ne voit pas une très grande différence en termes d'augmentation de cet indice dans un pays où un gel a été décrété et dans un autre pays où il n'y a pas eu de gel décrété.

Alors, on se dit: Les gels décrétés arbitrairement comme cela, sans appareil administratif pour canaliser les efforts, cela ne donne pas des résultats aussi patents que ceux qu'on pense.

M. Morin: Les gels ne sont jamais absolus, de toute, façon. Ce sont des contrôles.

M. Garneau: Quand c'est un gel qui n'est pas appuyé par un mécanisme de contrôle, cela ne donne pratiquement rien. Dans le cas présent...

M. Morin: Prenez, par exemple, les produits pétroliers. Cela fait deux ans que le ministre des Richesses naturelles promet une régie des produits pétroliers. Elle n'a jamais été créée. Des influences sont intervenues. Finalement, il n'y a pas eu de contrôle des prix pétroliers, forcément, quand on ne se donne pas les organismes, après, on est bien placé pour dire: En l'absence d'organismes, on ne peut rien faire.

M. Garneau: Je soumets très respectueusement qu'une régie provinciale aurait peu d'influence sur le prix du pétrole au Venezuela et au Moyen-Orient d'où nous vient le pétrole.

M. Morin: C'est à voir.

M. Garneau: II y a des forces beaucoup plus grandes, économiquement, que le Québec qui ont essayé.

M. Morin: Oui, mais je veux dire...

M. Garneau: II faut quand même être sérieux.

M. Morin: ... une régie qui serait appuyée sur tout un réseau public de distribution et de stockage, et tout cela. C'est une autre affaire.

M. Garneau: Mais qui ferait les frais entre le prix d'achat et le prix de vente?

M. Morin: Je pense au mandat B de SOQUIP.

M. Garneau: Qu'est-ce qui ferait la différence entre le prix d'achat et le prix de vente?

M. Morin: S'il y avait un organisme d'Etat qui était apte à aller chercher le pétrole là où il est.

M. Garneau: Si le prix du pétrole importé est à $11 et qu'à un moment donné, il passe à $14, il y a deux façons. Si c'est un organisme public, c'est la taxation ou la tarification des prix.

M. Morin: Si on ne peut pas empêcher toute hausse, vous pouvez au moins vous assurer que vous obtenez la transparence des prix d'abord, alors que vous le pouvez difficilement avec toutes les compagnies étrangères qui sont dans ce domaine actuellement.

M. Garneau: L'Opposition voudrait qu'on entre dans un programme d'investissement d'achat de raffineries?

M. Morin: II en a été question. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé. Cela a fait l'objet d'un livre blanc, il n'y a pas si longtemps, de l'ancien ministre des Richesses naturelles.

M. Garneau: Le chef de l'Opposition suggère cela maintenant?

M. Morin: Je trouve que oui. Le mandat B de SOQUIP aurait dû... Savoir si je le ferais maintenant, avec les restrictions financières qui s'annoncent, c'est une autre affaire, mais on aurait pu le faire il y a quelques années et, aujourd'hui, nous aurions les bénéfices d'une décision comme celle-là.

M. Garneau: Je ne sais pas à quoi se réfère le chef de l'Opposition quand il parle du mandat B.

M. Morin: Le mandat B de SOQUIP.

M. Garneau: Personnellement, je ne connais pas les programmes de SOQUIP par les lettres alphabétiques.

M. Morin: C'est dans la loi, c'est le mandat qui autorisait SOQUIP, si le ministre me le permet. Le mandat A, c'est l'exploration et l'association avec des compagnies étrangères ou autres pour la prospection. Tandis que le mandat B, c'est le raffinage et la distribution. Ce mandat B, qui existe dans la loi, n'entrait en vigueur que sur proclamation expresse du gouvernement. Inutile de vous dire que cette proclamation n'a jamais eu lieu, bien sûr. Enfin, je m'excuse de cette parenthèse.

M. Garneau: Je sens bien ce que veut dire le chef de l'Opposition, mais je ne fais pas le rapprochement avec l'exercice, que l'on fait présentement, de lutte à l'inflation.

M. Morin: Non, c'est pour souligner que, si on avait voulu se donner des instruments de lutte dans le passé, on serait peut-être moins démuni aujourd'hui.

En tout cas, pour ce qui est de l'article, voyons, nous en étions à l'article 11...

Le Président (M. Cornellier): A l'article 11.

M. Morin:... M. le Président, personnellement, je m'abstiens sur cet article, mais je n'ai pas d'objection à ce qu'il soit adopté, parce qu'on pourrait en discuter toute la nuit...

Le Président (M. Cornellier): L'article 11 est adopté, tel qu'amendé, sur division.

M. Morin: Avec abstention.

Le Président (M. Cornellier): Avec abstention, pour reprendre les paroles du chef de l'Opposition officielle.

Je constate qu'il est 23 heures. Est-ce que...

M. Houde (Abitibi-Est): On pourrait peut-être adopter une couple d'autres articles.

M. Morin: Oui, on pourrait peut-être en adopter... Attendez! Je serais prêt à adopter l'article 17 immédiatement.

Le Président (M. Cornellier): ... décision.

M. Morin: Je n'ai pas d'observation sur l'article 17, et je ne pense pas qu'il y ait d'amendement soumis par le ministre.

M. Garneau: Nous étions à l'article 12...

Le Président (M. Cornellier): A l'article 11, qu'on vient d'adopter.

M. Garneau: Je m'excuse.

M. Morin: Oui. Je serais prêt à adopter les articles 12, 13, 14 et 15. Enfin, je ne suis pas prêt à les adopter, mais je n'ai pas d'objection à ce qu'on procède.

Le Président (M. Cornellier): Article 12...

M. Houde (Abitibi-Est): Je pense que l'article 16 suit les autres...

M. Morin: L'article 16...

M. Garneau: II y a un amendement à l'article 16.

M. Houde (Abitibi-Est): Oui, c'est vrai...

Le Président (M. Cornellier): Nous adoptons les articles 12, 13, 14 et 15. Adopté. A l'article 16, il y a...

M. Morin: M. le Président, l'article 16, c'est celui qui porte sur les directives fixées par règlement?

M. Garneau: Oui, c'est ça, sur la rémunération.

M. Morin: Portant sur la rémunération.

M. Garneau: II y avait un amendement de suggéré pour ajouter après le paragraphe b), le paragraphe c) se lirait: "Des personnes exerçant une profession libérale pour le compte d'un employeur qui est un fournisseur de services professionnels visés au paragraphe c) de l'article 11."

M. Morin: M. le Président, j'estime que ces directives devraient, cette fois, vraiment faire l'objet d'une étude en commission parlementaire avant leur adoption, et j'aimerais proposer l'amendement suivant, lequel pourrait s'ajouter comme second paragraphe à l'article 16 et pourrait se lire comme suit: "Les directives doivent, avant leur entrée en vigueur, faire l'objet d'une étude en commission parlementaire."

Pour justifier cette proposition d'amendement, je me réfère aux arguments que j'ai fait valoir plus tôt ce soir. Il s'agit d'une réglementation qui va limiter la rémunération, les salaires aussi bien du secteur public que, je crois, du secteur privé, les fournisseurs des biens et services, les personnes qui exploitent des entreprises dans la contruction, etc.

Aussi, j'estime que cela doit faire l'objet d'un débat public, mais pas après, avant, si possible.

Alors, je le propose formellement.

M. Garneau: Pour les raisons que j'ai mentionnées, tout à l'heure, je n'aurais pas d'objection de principe, sous réserve de consultation avec le leader parlementaire, à avoir une commission parlementaire qui pourrait analyser les règlements qui seront édictés en vertu de l'article 16, mais j'ai des objections à ce que, d'une façon générale, on dise que les directives, avant leur entrée en vigueur, doivent faire l'objet d'une commission parlementaire. Il y a des questions de délai en ligne de compte et je ne crois pas qu'il serait sage de se donner un tel modus Vivendi en ajoutant et en souscrivant à l'argumentation du chef de l'Opposition et, en particulier, en souscrivant à l'amendement qu'il propose.

C'est pourquoi je voterai contre cet amendement.

M. Morin: On va être embêté pour voter, puisque nous n'avons pas quorum.

Le Président (M. Cornellier): Non. Nous n'avons pas le quorum. Je le regrette.

M. Houde (Abitibi-Est): Le député de...

Le Président (M. Cornellier): Non, il n'est pas membre de la commission.

M. Morin: Non. Il n'est pas membre de la commission. Dans ces conditions, peut-être peut-on suspendre le débat? Le ministre va profiter de la nuit pour réfléchir à mon amendement et peut-être demain nous annoncera-t-il, ô surprise, qu'il concourt.

M. Garneau: Avant l'ajournement de nos travaux, je dois dire que cela a déjà fait l'objet de réflexions et de discussions.

On ajourne à demain, M. le Président?

M. Morin: C'est une conclusion un peu négative.

Le Président (M. Cornellier): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 4)

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