L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des finances publiques

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des finances publiques

Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 20 novembre 2003 - Vol. 38 N° 19

Consultations particulières sur le projet de loi n° 20 - Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives


Élection du président et du vice-président


Étude détaillée du projet de loi n° 20 - Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures huit minutes)

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): S'il vous plaît! Bonjour. Je déclare la séance de la commission des finances publiques ouverte. Avant de débuter, je demanderais aux gens qui sont dans la salle, s'il vous plaît, d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires pour ne pas interrompre ou gêner les travaux de la commission.

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 20

La commission est réunie aujourd'hui afin de continuer l'étude ou la... l'étude, pardon, détaillée du projet de loi n° 20 en procédant à des consultations particulières. Le projet de loi n° 20 est intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives. Nous avions suspendu, mercredi, nous avions suspendu à l'étude de l'article 25, et donc nous allons reprendre avec l'étude 25 en procédant aux consultations particulières ce matin.

Alors, je souhaiterais la bienvenue à Mme Pauline Champoux-Lesage, Protectrice du citoyen, Me Lucie Lavoie, adjointe à la Protectrice, Me Jean-Claude Paquet, conseiller juridique, et Me Micheline McNicoll, commissaire à la qualité des services. Nous vous souhaitons la bienvenue.

D'abord, juste avant de continuer, s'il vous plaît, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gautrin (Verdun) est remplacé par M. Bouchard (Mégantic-Compton) et M. Paquin (Saint-Jean) est remplacé par M. Dubuc (La Prairie).

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Mme la secrétaire. Alors donc, nous allons procéder... la façon dont nos travaux procéderont ce matin: pour chaque groupe entendu, nous avons une période de prévue de 45 minutes, où nos témoins ont une période de 15 minutes pour faire part de leurs commentaires, et par la suite c'est suivi d'une période de 15 minutes à la disposition des membres du gouvernement de la commission, et les membres de l'opposition ont aussi une période de 15 minutes, incluant questions et réponses. Alors, nous vous souhaitons la bienvenue, et, Mme Champoux-Lesage, je vous cède la parole.

M. Lelièvre: M. le Président.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Oui. Pardon. M. le député de Gaspé.

n (9 h 10) n

M. Lelièvre: Oui. Il y a peut-être lieu de préciser... Bonjour. Il y avait peut-être lieu de préciser que nous allons traiter particulièrement de l'article 25 et des différentes composantes qu'on y retrouve.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Oui. Effectivement, M. le député de Gaspé, comme je l'avais mentionné, dans la lettre d'invitation qui est parvenue aux organismes, on avait mentionné effectivement que l'objet particulièrement de la consultation portait sur l'article 25 et les dispositions prévues au projet de loi à cet article. Alors, Mme Champoux-Lesage.

Protecteur du citoyen

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Merci, M. le Président. Bonjour. Alors, je suis désolée de ne pas pouvoir vous remettre un document, mais, comme l'invitation nous est parvenue assez tardivement mardi après-midi et que j'étais à Montréal hier ? je suis entrée en fin d'après-midi ? alors vous nous excuserez, on n'a pas été en mesure de préparer un texte écrit. Vous le comprendrez sûrement.

Alors, on vous a présenté mes adjoints. Je veux dire d'une façon particulière que ce sont Me McNicoll et mon conseiller juridique qui ont fait l'analyse du projet de loi, donc je leur céderai la parole lors des échanges, probablement. Et, comme vous l'évoquez, je n'ai pas de commentaires à faire particulièrement sur l'ensemble du projet de loi. Ça me semblait davantage des modifications de concordance, des précisions, des ajustements techniques. Alors, je limite mes commentaires, comme en faisait part votre invitation, à l'article 25.

Alors, de droit nouveau, cette disposition donnerait à un fonctionnaire du ministère du Revenu du Québec de nouveaux pouvoirs pour prévenir ou réprimer les infractions aux lois fiscales ou aux règlements pris par le gouvernement pour leur application. Ces nouveaux pouvoirs permettent à un fonctionnaire du ministère du Revenu de demander à un juge de la Cour du Québec de l'autoriser à, et je cite, «utiliser un dispositif, une technique ou une méthode d'enquête, ou à accomplir tout acte qu'il mentionne, qui constituerait sans cette autorisation une fouille, une perquisition ou une saisie abusive à l'égard d'une personne ou d'un bien; le fonctionnaire ainsi autorisé peut se faire assister par un agent de la paix».

Étant donné que cette autorisation ne pourra être accordée que s'il n'y a aucune disposition dans une loi fiscale ou dans le Code de procédure pénale qui prévoit un mandat, une autorisation ou une ordonnance permettant une telle utilisation ou l'accomplissement d'un tel acte, j'en déduis qu'il s'agit d'autre chose que d'un pouvoir de perquisition, puisque celui-ci est déjà prévu à l'article 40 de la Loi sur le ministère du Revenu. Il s'agit, en fait, de pouvoirs de surveillance faisant notamment appel aux technologies permettant l'installation de dispositifs de télésurveillance.

Il ne manque pas de décisions de la Cour suprême du Canada à l'effet que ces formes de surveillance constituent des invasions dans la vie privée et qu'elles doivent être autorisées par un tiers. En l'occurrence, le projet de loi prévoit que c'est un juge de la Cour du Québec qui autorisera le recours à ces méthodes de surveillance. Donc, sur le plan technique, la modification à l'article 40.1.1 reprend les mêmes conditions et donne les mêmes garanties que l'article 487.01 du Code criminel. On peut même souligner que l'avant-dernier paragraphe de l'article 40.1.1 du projet de loi n° 20 donne des garanties supplémentaires en précisant les coordonnées de l'exécution. Donc, sur ce plan, rien à redire.

C'est davantage sur l'opportunité et la nécessité elle-même de donner de tels pouvoirs au ministère du Revenu que je m'interroge. N'est-ce pas la fonction des corps policiers d'effectuer de telles opérations? L'acquisition et l'utilisation de ces dispositifs aux méthodes d'enquête ne devraient-elles pas être l'apanage des corps policiers? Quelle est la nécessité pour un ministère de se doter lui-même de cette expertise et de ce matériel? Qu'est-ce qui empêche le ministère du Revenu de dénoncer la situation à la police et que ce soient des agents de la paix qui soient autorisés en vertu de l'article 487.01 du Code criminel? N'est-ce pas déjà la situation qui prévaut? Y a-t-il des problèmes de fonctionnement qui justifient d'accorder de tels pouvoirs à un ministère? La surveillance et la télésurveillance sont des pratiques qu'une société n'a certes pas intérêt à multiplier. Donner ces pouvoirs équivaut à permettre le développement d'expertises et l'acquisition de matériel technologique que l'on cherchera certainement à rentabiliser en l'utilisant de plus en plus. La grande question qui demeure, c'est: Qu'est-ce que le ministère du Revenu fera de plus ou de mieux qu'un corps de police dûment autorisé ne pourrait faire?

Et, si vous le permettez, je demanderais à Mme McNicoll d'ajouter à mes propos. Parce que c'est l'essentiel du commentaire que nous avons à faire, nous aurions donc davantage des questions et des interrogations, et je demanderais à Me McNicoll d'ajouter à mon propos, si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Certainement. Me McNicoll.

Mme McNicoll (Micheline): Je veux juste un peu resituer la problématique dans laquelle, chez le Protecteur du citoyen, on envisage ce genre de questions, tout en demeurant en mode questionnement et en vous faisant état de la compréhension que nous en avons, compte tenu du libellé et du contexte législatif. J'aimerais rappeler que, en 1996, déjà la Loi sur le ministère du Revenu avait été amendée pour donner de larges pouvoirs pour lutter contre l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent, etc., et, à l'époque, ce qui était désiré, c'était de pouvoir opérer une surveillance des citoyens, des contribuables, donc, via les banques de données, et nous nous étions fortement et bruyamment insurgés contre de tels pouvoirs qui mettraient toute la population sous surveillance via les banques de données. Finalement, il y avait eu des amendements qui nous avaient satisfaits, en termes de garanties sur les droits et libertés, sur la protection de la vie privée, en obligeant le ministère à soumettre des plans de travail sur l'évasion fiscale et en encadrant les intrusions dans la vie privée par le biais du dépôt d'un plan qui est encore fait et qui est surveillé par la Commission d'accès.

Ce que l'on comprend actuellement, c'est que le ministère veut de plus amples pouvoirs de surveillance. Puisqu'il a déjà des pouvoirs de perquisition, ce qu'il reste, enfin ce qu'on en comprend, à moins que vous nous disiez le contraire, c'est des pouvoirs de surveillance, d'installer des dispositifs, d'utiliser certaines technologies qui sont en elles-mêmes, bien sûr, là pour aider l'administration et la police à lutter contre l'évasion fiscale et toutes ces choses.

La question que l'on se pose, c'est... Jusqu'à présent, le ministère n'avait pas ce pouvoir-là, hein, et on imagine que, lorsque c'était nécessaire d'opérer une surveillance qui n'était pas du ressort du ministère via la vérification comptable, via ce qu'il possède déjà comme capacité d'aller chercher des renseignements dans les banques de données qui lui sont autorisées... Pourquoi ça ne marche plus, ça? Pourquoi est-ce qu'il faut maintenant ces pouvoirs-là? Dans notre compréhension des choses, c'est la police qui fait ce genre de choses. D'ailleurs, dans le Code criminel, c'est un agent de la paix. Là, c'est un fonctionnaire qui va être autorisé, et on se demande vraiment qu'est-ce qui a changé, là, qu'est-ce qui fait qu'on a maintenant besoin de cette expertise... de ces pouvoirs-là.

Et je viens de faire un lapsus sur «l'expertise» parce que, effectivement, ce qui est derrière l'acquisition de tels pouvoirs pour des fins tout à fait conformes à la mission du ministère, on n'est pas contre ça. Sans être une experte, là, on commence à savoir un petit peu que les méthodes de surveillance et de télésurveillance... Et je ne parle pas de la vidéosurveillance, là, hein? C'est autre chose. La télésurveillance, on met un petit dispositif quelque part qui nous indique les allées et venues de quelqu'un, et on sait à quel point ça peut être sophistiqué. Et c'est légitime de vouloir l'utiliser. Mais c'est le développement d'une expertise très pointue. C'est aussi l'acquisition de matériel... Enfin, ce qu'une avocate peut en savoir, c'est ce qu'on lit dans les décisions de notre Cour suprême et d'autres cours qui font état justement de dispositifs très sophistiqués. Et ce que l'on craint un petit peu derrière ça, c'est: Bon, est-ce qu'il y a une police parallèle, là, qui est en train de se développer, avec des moyens de surveillance extrêmement sophistiqués? Il faudrait que ce soit justifié par des problèmes réels, qui ne nous apparaissent pas évidents. Alors, notre crainte et ce qui est soulevé ici, à moins qu'on n'ait vraiment pas compris, là, le sens de cet article, c'est un peu ce qu'on vient de vous soulever.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Mme McNicoll. Mme Champoux-Lesage.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Alors, si vous permettez, pour conclure avant de passer aux échanges, c'est que nous sommes bien sûr tout à fait d'accord avec la lutte à l'évasion fiscale, hein, il va de soi, mais on considère par ailleurs que, pour mettre des mesures exceptionnelles, il faut des raisons exceptionnelles et il faut que ces mesures-là soient bien encadrées, ce qui est prévu, je crois, dans le projet de loi. Mais notre crainte, c'est un peu ce que Mme McNicoll évoquait, c'est qu'on développe un système parallèle, qu'on s'outille et que, par la force des choses, on arrive à vouloir rentabiliser tous nos équipements. Nous croyons qu'on devrait confier cette responsabilité, ou maintenir cette responsabilité, à un agent de la paix qui pourrait éventuellement être assisté par un fonctionnaire. Mais la compréhension que nous avons aussi de la loi fédérale, c'est que c'est un agent de la paix qui exerce ces fonctions. Je vous remercie.

n (9 h 20) n

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup. Nous allons donc débuter la période d'échange. Je reconnais M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Alors, Mme Champoux-Lesage, Me Lavoie, Me Paquet, Me McNicoll, merci pour votre présentation. Nous nous excusons pour le court délai de l'invitation et on apprécie que vous êtes ici avec une invitation qui avait un très court délai.

En somme, c'est toujours le défi, dans une société, de chercher un juste équilibre entre les droits du contribuable au respect de sa vie privée et de ne pas faire l'objet de perquisitions qui sont abusives, et aussi le droit et l'obligation de l'État pour s'acquitter de ses responsabilités et, certainement au ministère du Revenu, pour s'acquitter de ses responsabilités en matière d'application des lois et, comme vous avez mentionné, de lutter avec efficacité contre la fraude fiscale. C'est le but. Et le but de la loi devant nous, certainement et toujours, c'est d'assurer une sorte d'équilibre.

Premièrement, si on prend la Loi sur le ministère du Revenu, l'article 2 nous donne la base de nos devoirs, de nos obligations, où c'est mentionné que «le ministre du Revenu est chargé de la direction et de l'administration du ministère du Revenu. Il est également chargé de l'application des lois fiscales...» Mais, pour appliquer les lois fiscales, il doit avoir les pouvoirs qui sont nécessaires, et, si on regarde à l'article 72.4, il y a une indication de quelques effets de ses pouvoirs.

Mais le deuxième commentaire aussi que vous avez fait, commentaire sur la surveillance, vous avez fait référence à la télésurveillance et vous faites référence à l'article 25 qui propose l'article 40.1.1 où on parle «à utiliser un dispositif, une technique ou une méthode d'enquête ou à accomplir tout acte qu'il mentionne». Mais, comme vous le savez, cet article reprend, en fait...

Et vous avez fait référence à la loi fédérale et à l'article 487.01. Mais, en prenant cet article de loi fédérale, on a omis les alinéas 4 et 5 qui font référence spécifiquement aux surveillances vidéo et à d'autres dispositions applicables. Alors, à mon avis, il y a quelques dispositifs de la loi fédérale qui étaient omis dans notre loi, et les questions de surveillance et télésurveillance sont bien limitées dans la loi qui est devant nous aujourd'hui. Certainement que le juge, en prenant en considération... aura à prendre en considération le fait qu'on a omis spécifiquement ces alinéas 4 et 5 de la loi fédérale.

En fait, je voudrais savoir de vous: Pourquoi est-ce qu'on doit limiter les pouvoirs du ministère du Revenu alors qu'il y a les pouvoirs équivalents au Code criminel pour l'application des lois... les cas des lois fédérales? Et, certainement, si on cherche le juste équilibre, on doit aussi être certain que le ministère a les pouvoirs nécessaires pour appliquer la Loi sur le ministère du Revenu.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Paquet.

M. Paquet (Jean-Claude): M. le ministre, nous croyons que, en ayant un parallèle entre l'article 487.01 du Code criminel et le nouvel article 40.1.1, on retrouve certaines balises, certains critères, la question de l'autorisation préalable par un juge. Et, sur le point de la préservation des droits avec cette autorisation préalable, nous sommes, je pense, satisfaits de la méthode qui est décrite. Cette méthode-là, on a fait quelques vérifications, c'est déjà en usage en vertu du Code criminel. On sait qu'il y a une certaine jurisprudence qui balise, mais c'est surtout a posteriori. Et, comme Mme Champoux-Lesage vous l'a dit, on est un peu en mode questionnement aussi, ici, compte tenu du peu de temps qu'on a eu.

Mais une chose qui nous a frappés, c'est que dans le Code criminel on donne le pouvoir à un agent de la paix. On a posé quelques questions aux légistes et juristes du ministère du Revenu, on nous explique que le ministère applique déjà la loi sur la TPS, en vertu de soit délégations législatives soit ententes, et qu'il bénéficie déjà de ces pouvoirs pour la TPS. Mais, quand on regarde l'article 487.01, c'est à un agent de la paix qu'est confié le pouvoir. Or, dans la loi ici, c'est à un fonctionnaire du ministère du Revenu qu'est confié le pouvoir, qui peut se faire assister par un agent de la paix.

La question qu'on se pose, c'est: Pourquoi est-ce que, alors que le Code criminel prévoit que c'est un agent de la paix qui est autorisé, ici ce sera un fonctionnaire, qui peut être assisté par un agent de la paix? Pourquoi est-ce que ce n'est pas l'inverse? Pourquoi est-ce que ce n'est pas un agent de la paix qui a ce pouvoir-là, comme en vertu du Code criminel, et qui peut être accompagné par un fonctionnaire du ministère du Revenu? En fait, c'est: Est-ce que... Et là on pose la question: Est-ce qu'on ne donne pas plus de pouvoirs pour la loi provinciale qu'on en donne pour la loi sur la TPS pour exercer les mêmes fonctions?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Oui. J'apprécie vos commentaires et je suis content que vous avez mentionné que ce pouvoir existe en ce moment. Il a existé pour 10 ans en vertu d'une loi fédérale, et même le ministère du Revenu a ces mêmes pouvoirs dans l'application de la TPS, et c'est les mêmes fonctionnaires qui administrent cette loi depuis le temps que le Québec administre la TPS. Mais, en plus, vous faites référence à l'agent de la paix. Mais, pour retourner à la base de cette autorisation, les cours ont fait réflexion sur cet item que l'administration du monde en général doit être soumise à un contrôle d'un arbitre impartial et indépendant. Vraiment, c'est la base de cet article, où un arbitre impartial et indépendant peut contrôler la validation de la demande qui est faite à lui par le ministère. Et, en fait, en vertu de cet article, le juge bénéficie d'un pouvoir, qui est discrétionnaire, d'accorder ou de refuser l'émission du mandat, et le principe important de l'article 40.1.1, c'est que le juge peut accorder cette autorisation, pourvu que toutes les conditions, pas seulement une ou deux, qui sont prévues dans la loi soient accordées. Et, à travers toutes les étapes de ce mandat, le juge, en fait, surveille le mandat en donnant, disons, les balises dans les délais et en recevant un rapport de la proposition qui a été faite.

n (9 h 30) n

Alors, est-ce que vous ne croyez pas que la surveillance judiciaire, en fait, suffit et donne qu'est-ce que j'ai appelé l'équilibre pour protéger le citoyen? En fait, le juge doit être certain qu'il existe des motifs raisonnables pour que les renseignements relatifs à l'infraction soient obtenus en vertu de cette autorisation. Mais, plus important, il devrait être convaincu qu'il n'existe aucune autre disposition permettant l'accomplissement de cet acte de, disons, investigation par le ministère. Alors, il y a des conditions qui sont très sévères pour que le ministère fasse la preuve nécessaire pour avoir l'autorisation judiciaire.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme Champoux-Lesage.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Dans mon exposé, j'ai bien dit que nous considérions que les conditions qui étaient là étaient suffisantes et que ce que vous venez d'évoquer est tout à fait juste. Notre interrogation touche la question suivante: Pourquoi confie-t-on cette responsabilité-là à un fonctionnaire et pourquoi ne la confierait-on pas à un agent de la paix? Autrement dit, sur le processus même du contrôle de l'évasion fiscale, nous sommes d'accord, mais ce que nous craignons, c'est l'instauration d'un système parallèle, dans le fond, alors qu'il y a actuellement la possibilité que ce soit fait par un agent de la paix.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu, en vous rappelant qu'il reste environ trois minutes à la période d'échange, trois minutes à ce bloc d'échange.

M. Bergman: Juste une courte question pour vous donner la... pour répondre. La base de la pensée, ici, c'est pour respecter qu'est-ce que, moi, j'appelle une de nos obsessions au ministère du Revenu, et une obsession personnelle, c'est la confidentialité, et c'est vraiment une obsession. Comme vous le savez, l'importance qu'on donne à la confidentialité pour protéger ce même citoyen... Et certainement que les pouvoirs qui sont donnés aux fonctionnaires du ministère sont, en fait, surveillés par le juge. Alors, il n'y a pas beaucoup de latitude qui est donnée aux fonctionnaires en question.

Est-ce que je peux juste vous demander un commentaire sur la question de confidentialité?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme Champoux-Lesage.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Je suis tout à fait d'accord avec la question de la confidentialité, mais c'est aussi le ministère du Revenu qui s'est fait autoriser à transmettre des informations à la police et, je me dis, avec les mêmes conditions de sécurité que vous proposez dans ce cas-ci. Alors, c'est là le sens de notre interrogation. Pourquoi, dans ce cas-ci, il faudrait que ce soient les fonctionnaires, alors que, dans d'autres cas, quand on fait... On peut demander aussi à la police et on a... Il y a une autorisation qui a été donnée en vertu d'une autre loi. Si Mme McNicoll peut donner des précisions, là, on était...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me McNicoll.

Mme McNicoll (Micheline): Dans le projet de loi n° 14, là, un dernier projet de loi où le ministère du Revenu s'est fait autoriser à donner aux corps policiers des renseignements s'il avait des doutes qu'il y avait des gens qui étaient dans le crime organisé, les organisations criminelles... Et puis là il passe par un juge pour avoir la permission de donner ces renseignements-là à la police. Bon, c'est bien. Maintenant, ce qu'on constate, c'est qu'il ne veut plus transmettre d'information à la police quand il a des doutes, il veut faire lui-même le travail. Bon, c'est comme la main droite, la main gauche, on ne sait pas pourquoi il y aurait telle chose.

J'en profite pour revenir un petit peu tout à l'heure sur la surveillance. On avait vu qu'il y a des articles qui sont exclus, sauf que qu'est-ce qu'il y a qui équivaut à une perquisition et qui n'en est pas une? C'est quelque chose qui s'installe avant pour faire une intrusion quelque part dans la vie privée, dans les biens, etc., et là-dessus on n'a pas plus de renseignements.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci. 30 secondes, M. le ministre.

M. Bergman: Oui. En vertu de l'article 69.0.0.12 de la Loi sur le ministère du Revenu, l'information fiscale qu'on peut transmettre à un corps de police est limitée très, très spécifiquement dans les cas de, en fait, crime organisé. Mais l'utilisation générale qu'on demande ne se limite pas aux investigations du crime organisé, mais c'est pour les investigations fiscales et pour l'application des lois fiscales. Alors, il y a une différence quand on transmet l'information à un corps policier en respectant l'article 69.0.0.12.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Merci beaucoup encore une fois d'être présents ici à cette commission avec le court délai que nous avons eu. Il faut dire qu'il a fallu discuter et négocier très fort pour avoir des consultations particulières. Au point de départ, elles étaient refusées, et, compte tenu de l'ampleur des pouvoirs que le ministre veut attribuer à l'appareil administratif, j'étais d'avis qu'il fallait absolument que nous puissions consulter quelques organismes. Mais, malheureusement, on est restreints dans le nombre, mais la qualité est là.

Le Protecteur du citoyen a un rôle majeur à jouer dans la société. On retrouve à l'intérieur de ce projet de loi aussi toute la question de la protection du secret professionnel, parce que toute personne est visée, que ce soient les comptables, les notaires, les avocats. Il y a les notaires et les avocats dont on protège le secret professionnel parce qu'il y a comme une protection quasi constitutionnelle, ou constitutionnelle, et les autres professionnels qui ont à intervenir avec les citoyens ne sont pas à l'abri d'une intrusion dans le secret professionnel, des informations qui sont sensibles, là, à l'égard d'une personne, qui peuvent leur être transmises.

Et hier j'ai appris, comme tous les autres citoyens du Québec, en écoutant les nouvelles, que Radio-Canada prétend, ou annonce, en ayant obtenu des informations particulières, que le ministère du Revenu, en collaboration avec le ministère des Finances, s'apprête à mettre sur pied une superagence de perception. Alors, l'objectif, à mon avis, de ce projet de loi, puisqu'on inverse des rôles et qu'on est dans une société de droit... Et le ministre devrait comprendre la situation, puisqu'il a été, dans ses fonctions antérieures, responsable des lois professionnelles à titre de critique de l'opposition officielle pendant qu'ils étaient à l'opposition, que c'est une partie extrêmement sensible et que la confidentialité du secret professionnel emporte des considérations monétaires.

Moi, madame, j'aimerais savoir, parce que je sais que le Protecteur du citoyen s'intéresse à cette question-là également, toute la question de la protection des renseignements, de la confidentialité, qu'est-ce que vous en pensez, de ça, que le secret professionnel est réservé uniquement à deux catégories de professionnels qui sont les notaires et les avocats. Et, les autres, bien, on verra. Puis c'est dans le projet de loi, là. Il vont prendre des mesures pour protéger le secret professionnel des notaires et des avocats, et, les autres, on verra. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme Champoux-Lesage.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Merci, M. le Président. En parcourant le projet de loi, j'avais aussi sourcillé en lisant ça. Je m'étais renseigné auprès de mon conseiller juridique en disant: Comment se fait-il qu'il n'y a que les notaires et les avocats? Mais, malheureusement, on n'a pas réfléchi beaucoup à la situation, nous étant concentrés ? le temps était limité ? sur l'article 25. Mais peut-être que Jean-Claude...

n (9 h 40) n

M. Paquet (Jean-Claude): C'est sûr qu'étant avocat et... C'est ça, c'est à l'article suivant, 40.1.3, dans la question d'une ordonnance à un tiers de fournir des documents ou même de préparer des documents. On a constaté que l'ordonnance peut être assortie des modalités que le juge estime appropriées notamment pour protéger le secret professionnel de l'avocat ou du notaire. En discutant avec Mme Champoux, je lui exprimais que le secret professionnel de l'avocat ou du notaire, c'est un secret reconnu depuis longtemps en «common law». Même si le secret professionnel en général est reconnu à la Charte des droits et libertés de la personne, c'est un secret peut-être plus particulier parce que des confidences de nature juridique ou des documents peuvent être confiés à l'avocat ou au notaire.

Mais, même si on n'a pas insisté sur cet aspect-là, on pourrait se demander: Qu'en est-il des comptables qui ont des documents de même nature, les comptables agréés, les comptables généraux, etc., ou peut-être d'autres professions? En fait, l'idée, ce serait... Et ce pourrait peut-être être intéressant de ratisser un peu plus large et d'aller dans la plus grande protection du secret professionnel. Bien évidemment que, dans des questions, je ne sais pas, de santé, les professionnels sont moins susceptibles d'avoir de tels renseignements en leur possession, quoiqu'on peut peut-être se poser la question. Mais, effectivement, à présent que vous le soulignez, bien, on peut s'interroger sur la nécessité de le limiter à ce secret-là, même si on lui donne un statut particulier en droit.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Et ce qui est particulièrement frappant dans ces quelques articles qu'on retrouve à l'intérieur, dans le fond, d'un projet de loi qui modifie une procédure d'envoi, au lieu d'avis, simplement pour généraliser et s'adapter aux nouvelles technologies, c'est qu'on se retrouve avec un projet de loi... On parle de perquisition secrète, hein? Si vous allez à l'article 40.1.1, page 9 du projet de loi, on parle de perquisition secrète. Elle peut durer trois ans, il peut y avoir de l'écoute électronique, des vidéos qui sont installés, et ça, comme vous l'avez mentionné, on confie à des civils qui n'ont pas nécessairement la formation d'un agent de la paix, qui ne connaissent pas nécessairement les techniques policières... Donc, ce sera le ministère du Revenu qui va intervenir, lui, directement. Alors, ils deviennent...

Est-ce que, le ministère du Revenu, c'est sa mission d'être un corps policier? Est-ce qu'on veut constituer un corps policier parce qu'on veut leur donner des pouvoirs d'agent de la paix? La fonction publique du Québec sera investie de pouvoirs policiers. Moi, je partage totalement votre avis, je trouve que c'est démesuré. Et j'aimerais bien que le ministre, à un moment donné, puisse, au cours des échanges que nous aurons ultérieurement, nous donner les détails. Pourquoi veut-il absolument que ça se fasse, ces modifications? Et on retrouve ça dans un article du projet de loi. Moi, je l'ai lu attentivement. Le commun des mortels n'est pas au courant que, lorsque ce projet de loi peut être adopté, parce que la majorité du gouvernement va peut-être forcer son adoption... Comment se fait-il qu'on veut faire une adoption assez rapide, quand même? Parce que, moi, je trouve que les pouvoirs sont assez exorbitants. On parle d'une durée maximale de trois ans. On peut obtenir des prolongations concernant la perquisition secrète, tout simplement se présenter devant un juge ou même par téléphone, un télémandat, obtenir tout ça. Alors, j'aimerais ça... Dans le fond, tout le monde est pris de court, hein, dans ce projet de loi parce que... Moi, on me refusait des consultations particulières. J'ai réussi à en avoir quelques-unes aujourd'hui, ce matin...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Excusez. Pardon, M. le député de Gaspé. J'aimerais juste donner un élément de précision pour l'ensemble de nos auditeurs et de nos témoins. Je voudrais quand même rectifier un fait. L'entente qu'il y a eu entre les deux membres... les membres de la commission des deux côtés de la Chambre s'est faite très facilement pour avoir des consultations particulières ce matin. Et j'aimerais, pour le bénéfice de nos invités, qu'ils sachent très bien que là-dessus il y a une collaboration très grande autant des membres de l'opposition officielle que des membres du gouvernement et du ministre du Revenu. C'est une question de fait que j'aimerais rappeler pour nos auditeurs et nos témoins. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Mais, M. le Président, je dois vous dire, je dois vous dire que, la semaine dernière, en Chambre, j'ai demandé des consultations particulières. La leader adjointe du gouvernement les a refusées, et il a fallu négocier par la suite. L'adoption du principe a été faite parce que Mme la députée de... Mme Éthier, là... Alors, à ce moment-là, je pense que, si nous avions eu, au point de départ...

M. Bernier: Je pense qu'il serait bon que le ministre puisse expliquer correctement cette façon de faire. Question de règlement. Il pourrait peut-être préciser des choses, là. Il serait peut-être important de le faire.

M. Lelièvre: Mais, si le ministre l'explique, ce ne sera pas pris sur mon temps, ça va être pris sur son temps.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre, question de règlement, oui.

M. Bergman: Oui. M. le Président, le projet de loi a été adopté en principe à l'Assemblée. L'opposition officielle a voté en faveur de l'adoption du principe du projet de loi. À la première demande du député de Gaspé à cette commission parlementaire, le jour avant qu'on a commencé l'étude article par article, j'ai reçu communication du bureau du leader du gouvernement qu'il y avait une demande qui était faite par le député de Gaspé par l'entremise du bureau du leader de l'opposition officielle. Et j'ai été consulté, c'était mardi soir de cette semaine, et j'ai donné mon accord immédiat au leader du gouvernement pour ces consultations particulières. Mercredi matin, avant qu'on ait commencé les auditions sur l'article par article, j'ai rencontré le député de Gaspé et vous, M. le Président, et encore j'ai donné mon consentement. L'invitation a été envoyée. On a convenu ensemble, nonobstant que je demande que cette commission commence à siéger à neuf heures et demie le matin, qu'on commence à 9 heures ? on finira plus tard ? et j'ai donné toujours mon consentement, M. le Président, avec le respect que j'avais pour les groupes qui étaient invités.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): D'accord. Merci, M. le ministre. Alors, le point, c'était une question de rétablir, là, par rapport à l'ensemble des membres de la commission... Je vais encore souligner le fait qu'il y a une très grande collaboration des membres de l'opposition officielle et du gouvernement sur l'organisation des consultations ce matin. Et donc, c'était ceci que je voulais préciser. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Juste sur ce point, M. le Président, je suis entièrement d'accord avec vous, pour ce matin. Maintenant, j'aimerais, parce que, bon, j'imagine...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Donc, il vous reste 6 min 35 s. Le bloc recommence, là. S'il vous plaît.

M. Lelièvre: Bon. Le Protecteur du citoyen, vis-à-vis, là, vis-à-vis du contenu de ce projet de loi, vous avez mentionné tout à l'heure que, dans le passé, vous avez pris des positions quand même très importantes afin de protéger... empêcher l'intrusion, je dirais, à outrance dans la vie privée des citoyens. Et est-ce que j'ai bien compris que vous n'avez pas eu de réponse à votre question? Parce que vous avez posé une question au ministre: Qu'est-ce que le ministère du Revenu fera de mieux que les corps policiers? Et j'aimerais ça qu'on aille plus en profondeur, parce que, quand vous avez étudié les modifications antérieures qu'on retrouve aux articles, j'imagine, là... à la section VIII de la Loi sur le ministère du Revenu, la confidentialité des renseignements pis les pouvoirs d'enquête, etc. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, qu'est-ce qui vous a motivés à faire en sorte que, bon, on limite le pouvoir d'intrusion dans la vie privée du ministère du Revenu puis qu'on confie aux corps policiers le travail, dans le fond, de faire ces enquêtes et être assistés éventuellement par le ministère du Revenu. Parce que vous êtes d'accord qu'on puisse transmettre des informations confidentielles à la police dans les cas de fraude. Normalement, c'est convenu au Code criminel.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme Champoux-Lesage.

Mme Champoux-Lesage (Pauline): Merci, M. le Président. Je veux réitérer notre position, qui est: on considère que, pour faire des intrusions dans la vie privée, il faut des raisons exceptionnelles et il faut que ce soit bien encadré. Ce projet de loi ci dit qu'on le fait dans des raisons exceptionnelles, dit que ça va être bien encadré par un jugement, etc. Notre point de vue est qu'on devrait confier la responsabilité à un... On devrait inverser, en fait, la proposition. Plutôt que de dire: Ça devrait être un fonctionnaire qui pourrait, le cas échéant, être accompagné d'un agent de la paix, nous, nous considérons que ce devrait être un agent de la paix qui, le cas échéant, pourrait être accompagné d'un fonctionnaire. Autrement dit, on reconnaît la possibilité pour le ministère du Revenu d'être capable de s'outiller de moyens pour lutter contre l'évasion fiscale.

n (9 h 50) n

Par ailleurs, ce que l'on craint, c'est que ce soit un pouvoir trop grand qui soit donné à des fonctionnaires alors que je n'ai pas la démonstration, au-delà de l'argument de la culture, là, et avec tout le respect que j'ai pour M. le ministre, de la culture du ministère du Revenu, en quoi, le fait de confier à un agent de la paix, en collaboration avec un fonctionnaire du ministère pour l'application de la loi fiscale... on ne pourrait pas atteindre les mêmes objectifs. Et, ce faisant, on éviterait de monter une expertise que je qualifierais peut-être de parallèle au ministère du Revenu alors qu'il y a tout ce qu'il faut du côté de la Sûreté.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Dans votre présentation, vous avez parlé de... Il y avait comme un encadrement, hein, ou un plan, un suivi que vous avez fait, que vous faites encore à la suite des modifications qui sont intervenues, puisque, dans le passé, on a sollicité votre collaboration concernant les pouvoirs d'enquête. Est-ce que j'ai bien compris ce que vous avez mentionné ce matin, que... Oui?

Mme McNicoll (Micheline): Oui. Je faisais référence aux modifications de 1996 où nous étions intervenus pour qu'il y ait des meilleures garanties, parce que le ministère du Revenu voulait avoir accès de façon assez illimitée, et il y avait des dispositions dérogatoires au pouvoir de contrôle et de surveillance de la Commission d'accès pour les banques de données sur tous les citoyens. Et nous ne sommes pas en surveillance là-dessus, c'est le rôle de la Commission d'accès. Nous avions beaucoup travaillé pour que la Commission d'accès conserve tous ses pouvoirs de surveillance a priori sur les programmes de lutte à l'évasion fiscale qui sont déposés à l'Assemblée nationale, il me semble, de façon continue. Mais là-dessus, nous, chez le Protecteur du citoyen, on n'opère pas de contrôle là-dessus, c'est la Commission qui le fait.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Me McNicoll. M. le député de Gaspé. Il reste deux minutes et demie environ.

M. Lelièvre: Pardon?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Il reste deux minutes et demie à trois minutes.

M. Lelièvre: Aviez-vous proposé des... Vous aviez proposé des modifications, à ce moment-là. Vous avez proposé un meilleur encadrement, vous avez... J'aimerais ça vous entendre là-dessus, parce que, dans le fond, vous proposez au ministre d'inverser les rôles, c'est-à-dire que ce soient les agents de la paix qui se fassent accompagner de la machine administrative ? je suis entièrement d'accord avec vous ? comme la situation actuelle le prévoit. En 1996, lorsqu'il y a eu des modifications, vous aviez proposé quoi? De limiter le pouvoir d'intrusion, d'aller chercher davantage d'information?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me McNicoll.

Mme McNicoll (Micheline): Ce qu'on avait proposé, ce qui a été aussi fait, c'est que les dispositions dérogatoires qui enlevaient le pouvoir de surveillance de la Commission ont été rétablies. Alors, à notre point de vue, ça faisait en sorte que des meilleures garanties étaient données. Et il ne pouvait pas y avoir de surveillance systématique dans toutes les banques de données, le ministère devait identifier des choses. Dans le même esprit, on dit: Bien, oui, le ministère peut faire certaines choses, puisqu'il a la mission de le faire, mais encadré d'une certaine manière qui apporte des garanties.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Si je comprends bien, à la lecture de ces articles, la Commission d'accès n'aura pas un mot à dire non plus parce qu'elle ne pourra plus surveiller quoi que ce soit, étant donné qu'on donne un mandat à un fonctionnaire qui, lui, va se faire assister d'un agent de la paix qui a un délai minimal de trois ans pour faire une enquête avec des dispositifs électroniques de toutes sortes. Moi, je n'ai pas vu encore de disposition dans ce projet de loi qui prévoit que la Commission d'accès à l'information sera une collaboratrice, là, à moins que le ministre puisse nous donner d'autres indications éventuellement. L'économie générale de ces modifications-là nous amène à conclure que la Commission d'accès ne pourra pas exercer un pouvoir d'encadrement ou de surveillance.

Mme Lavoie (Lucie): Je pense que, contrairement à...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Lavoie.

Mme Lavoie (Lucie): C'est ça. Contrairement à ce qui se passait en 1996, le projet qui est devant nous n'est pas le croisement de banques de données. Je ne pense pas que ce soit, comme tel, de la mission de la Commission d'accès. Ce que l'on parle aujourd'hui, je pense que c'est dans des cas normalement qui devraient être très exceptionnels et qui se rapprochent beaucoup du droit criminel. Et d'ailleurs c'est comme ça qu'on emprunte des dispositions que l'on retrouve au Code criminel. On parle d'évasion fiscale qui... Dans certains cas, on va parler de blanchiment d'argent, on va parler de vendeurs de drogue, on va parler de, jointes à ça, souvent des dispositions carrément à l'encontre du Code criminel. Alors, à notre avis, on parle davantage de pouvoir policier que de croisement de banque de données.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Alors, merci beaucoup, les membres du bureau du Protecteur du citoyen: la Protectrice du citoyen, Mme Pauline Champoux-Lesage, Me Lavoie, Me Paquet et Me McNicoll. Au nom des membres de la commission, nous vous remercions d'avoir participé à nos travaux ce matin.

Je suspends les travaux pour quelques instants afin de permettre aux prochains invités de se joindre à nous. Merci.

(Suspension de la séance à 9 h 55)

 

(Reprise à 9 h 59)

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Alors, la commission des finances publiques reprend donc ses auditions. Étant donné un retard routier pour les intervenants qui devaient paraître à 9 h 45, nous allons juste interchanger l'ordre des auditions.

n (10 heures) n

Alors, la prochaine audition va être faite par l'Ordre des comptables agréés du Québec, qui est représenté par Me Christiane Brizard, directrice des affaires juridiques. Me Brizard, nous vous souhaitons la bienvenue au nom des membres de la commission. Et donc, comme nous avons expliqué un peu plus tôt, là, vous avez une période de 15 minutes pour faire vos commentaires concernant... Particulièrement, nos travaux portent, ce matin... nous vous entendons sur l'article 25 du projet de loi n° 20. Vous avez une période de 15 minutes pour faire vos commentaires, qui sera suivie par une période d'échange: 15 minutes, du côté des membres de la commission, du côté ministériel et 15 minutes du côté des membres de l'opposition. Alors, Me Brizard, je vous reconnais.

Ordre des comptables agréés du Québec (OCAQ)

Mme Brizard (Christiane): Alors, bonjour à tous. Merci de nous recevoir. Écoutez, peut-être une mise en situation parce que je considère que c'est important. Je suis avocate donc à l'Ordre des comptables agréés du Québec. Je ne suis pas spécialiste en droit fiscal et je ne suis pas spécialiste en droit criminel. Aujourd'hui, ce que je vais faire, c'est plus soulever des questions à la lecture du projet de loi et à la lecture de ma connaissance du droit. Il est possible que, ces questions-là, on a déjà répondu à ces questions-là, mais, pour là, c'est important de soulever certains éléments qui apparaissaient peut-être porter atteinte à certains droits garantis par soit la Charte canadienne ou la Charte québécoise.

Peut-être faire un petit rappel. Pour certains, j'imagine que c'est déjà connu, mais le Code civil du Québec reconnaît, à l'article 35, que chaque personne a une garantie ou a un droit au respect à la vie privée. Et, à l'article 36 du même Code, on prévoit spécifiquement ce qui peut être une atteinte à cette vie privée. On prévoit spécifiquement, entre autres, que la surveillance ? une caméra vidéo ? et l'interception d'écoute électronique constituent une atteinte à la vie privée. L'article 8 de la Charte canadienne protège également tout citoyen contre des fouilles abusives, et l'article 9 de la Charte québécoise protège le secret professionnel et oblige les professionnels qui sont visés par une loi, donc qui sont visés par le Code des professions et qui sont assujettis à un secret professionnel... protège ce secret professionnel là.

Le Code des professions, qui régit l'ensemble des professions de 45 ordres professionnels, dont les comptables agréés, mais les c.g.a., les c.m.a., les a.d.m.a., prévoit spécifiquement qu'ils ont un secret professionnel et qu'ils doivent s'assurer de protéger les confidentialités qui sont échangées entre le client et le professionnel. Les codes de déontologie de tous ces professionnels-là, dont celui des c.a., prévoient spécifiquement qu'ils sont assujettis à la protection du secret professionnel. Donc, quand on examine le projet de loi n° 20, on note qu'il y a plusieurs amendements qui sont de nature technique, mais il y a également des amendements qui vont beaucoup plus loin et qui touchent ou qui pourraient toucher les garanties dont j'ai traité avec les articles du Code civil ou des deux chartes. La première réflexion que j'ai, c'est de me dire: Pourquoi n'y a-t-il pas eu de consultations plus particulières? Parce qu'il pourrait y avoir atteinte finalement soit aux droits garantis par la Charte ou par le Code civil.

Quand on examine plus spécifiquement l'article 40.1, on note qu'il n'y a pas vraiment de comparable au niveau fédéral. Je note aussi que l'article 40.1 finalement s'est inspiré... le rédacteur s'est inspiré de ce qu'on retrouve au Code criminel à l'article 487.01. Et, en fait, c'est presque une rédaction... bien, plus que similaire, c'est presque un copier-coller de 487.01. Et, quand on examine dans quels cas 487.01 s'applique, cet article-là ne s'applique que s'il n'y a pas d'autre disposition dans le Code criminel qui prévoit plus spécifiquement des mesures en matière de perquisition. Et on voit dans le Code criminel, quand on le feuillette, qu'il y a des mesures spécifiques en matière de perquisition, que ce soit au niveau des armes à feu, que ce soit au niveau de l'interception d'écoute électronique, que ce soit au niveau de la surveillance par caméra vidéo, que ce soit même en constituant des registres d'appels, de surveillance d'appels particuliers. Dans chacune de ces dispositions spécifiques du Code criminel, on prévoit des mesures qui entourent l'obtention de ces mandats-là, et ces mesures-là sont très contraignantes. Donc, on ne peut pas obtenir ces mandats spécifiques là, sauf si on respecte ces mesures-là. 487.01 est donc un plancher minimal et ne s'applique que s'il n'y a pas de mesure additionnelle.

La première question que je soulève est la suivante, et je n'ai pas de réponse. Je ne fais que soulever les questions. Est-ce que 40.1 prévoit des mesures qui sont suffisantes pour minimiser l'atteinte à la vie privée? C'est la première question. Et je décline à ce moment-ci la question en une sous-question: Est-ce que 40.1 permet l'interception via l'écoute électronique? J'avoue mon ignorance au niveau criminel et je vous dis que je suis portée à me dire que non parce que, quand je lis l'article 184 du Code criminel, je comprends qu'on ne peut pas intercepter par écoute électronique des conversations, sauf si on est autorisé en vertu du Code criminel par les articles 184 et suivants. Mais c'est une question que je soulève.

Si effectivement on ne vise pas l'écoute électronique, à ce moment-là je vous suggérerais de le dire spécifiquement dans la loi. Si, par contre, on vise l'écoute électronique, à ce moment-là il faudra examiner les dispositions particulières au niveau de l'interception qui est prévue au Code criminel aux articles 183 à 186, qui nous dit, entre autres, qu'on ne peut pas obtenir cette écoute-là, sauf par des policiers qui sont spécifiquement désignés pour ce faire et par des procureurs qui sont spécifiquement désignés pour ce faire. Et on doit en tout premier lieu établir qu'on ne peut pas obtenir cette information-là par d'autres moyens qui sont disponibles.

L'article 40.1 ? quand je le lis, il est d'une portée très générale ? pourrait aussi viser donc la surveillance par caméra vidéo. Si c'est le cas, à ce moment-là je fais encore une comparaison avec le Code criminel et je vous dis qu'au Code criminel, à l'article 487.01 et suivants, on prévoit spécifiquement que, si on veut intercepter par caméra vidéo, il faut respecter les mêmes règles qu'en matière d'écoute électronique. Donc, ce sont des règles qui sont encore plus contraignantes qu'un mandat général de perquisition. Si on vise donc aussi l'utilisation de caméras vidéo, pour quelle raison est-ce qu'on n'a pas prévu les mesures spécifiques qu'on retrouve dans le Code criminel à l'article 41.1 et suivants? Je ne le sais pas. Je soulève encore une question.

Deuxième question: Que fait-on du secret professionnel qui est garanti par la Charte québécoise? Est-ce que, par 40.1, le législateur se dit que, comme pour le mandat de perquisition, qui est prévu à 40, le ministère du Revenu n'est pas assujetti au processus du secret professionnel, sauf pour les avocats et les notaires, parce que 46 de la Loi sur le ministère du Revenu prévoit cela spécifiquement... Et est-ce qu'on doit étendre cette exception-là à 40.1? Pour moi, ce n'est pas clair. Et, si c'est le cas, à ce moment-là je m'interroge encore, puisque je pense qu'il faut faire une distinction entre vouloir prendre possession de documents ou de dossiers qui sont chez un professionnel et surveiller par écoute électronique ou par caméra des individus.

Quand on a un mandat de perquisition et qu'on va exécuter chez un comptable agréé, un c.g.a., un a.d.m.a. ? en fait ça vise une série de professionnels ? nécessairement on va prendre possession des documents qui ont trait à un seul client, et donc le secret professionnel des autres clients est protégé. La vie privée des autres clients est protégée. Si on place une caméra vidéo chez le comptable agréé ou qu'on intercepte ses conversations téléphoniques, bien, ce ne sont pas simplement celles qui visent le client qui est enquêté qui vont être interceptées, c'est l'ensemble des conversations, c'est l'ensemble du va-et-vient. Est-ce que c'est ce qu'on vise? Et, si c'est ce qu'on vise, je pense qu'on devrait, à ce moment-là, avoir des balises plus contraignantes à cet égard-là.

n (10 h 10) n

Je ne suis pas nécessairement en accord avec la portée de 46, mais je peux comprendre qu'on a voulu avoir les mêmes outils qui existent au niveau fédéral. Parce que au niveau fédéral le ministère du Revenu fédéral n'est pas lié par le secret professionnel qui est visé par la Charte québécoise. Mais je ne sais pas si c'est à propos d'étendre cette exception-là à une intrusion qui est beaucoup plus importante. On note qu'à 40.1.3 on a permis, dans certains cas particuliers, que l'ordonnance soit assujettie notamment à des mesures appropriées pour protéger le secret professionnel de l'avocat ou du notaire. Bien, ce que je vous suggère, c'est que ces mesures-là devraient s'étendre à l'ensemble des professionnels qui sont assujettis au Code des professions.

Sans vouloir vous citer ? mais c'est une déformation professionnelle ? sans vouloir vous citer des décisions qui ont traité du sujet de l'obligation de minimiser l'atteinte à la vie privée ou l'atteinte au principe du secret professionnel, je vous référerai à une décision récente qui a été rendue par la Cour suprême le 14 novembre dernier dans l'affaire Maranda, qui vise un avocat ? mais les principes généraux sont les mêmes ? et aussi une décision de la Cour d'appel qui a été rendue en 2001 dans l'affaire la Reine contre Robitaille, où le juge Proulx indique qu'il est important, surtout quand on intercepte des conversations avec des professionnels, de mettre en place des mesures a priori plutôt qu'a posteriori pour protéger à la fois le secret professionnel et l'atteinte à la vie privée.

J'aurais une autre remarque. C'est encore une remarque générale. C'est en ce qui a trait à l'article 40.1.3b où on prévoit qu'on peut obtenir une autorisation, toujours ex parte, de... et qui vise, on comprend, un tiers, parce que c'est à l'exception de la personne qui fait l'objet de l'enquête. On peut demander donc à un tiers de préparer un document à partir de documents ou renseignements existants et de le communiquer. Qu'est-ce qu'on vise quand on a ce pouvoir-là? Est-ce que ça pourrait viser, par exemple pour un comptable agréé, qu'on pourrait lui demander de faire la liste des dépenses que son client a faites et dont il a connaissance parce que c'est partie de ses états financiers depuis 10 ans? Est-ce que ce serait de préparer un état financier consolidé des entreprises du client? Est-ce que ce serait de certifier certains postes aux états financiers? Alors, je pose la question, je n'ai pas la réponse. Très pragmatique, probablement parce que les comptables agréés déteignent sur moi, qui va payer ces frais-là? Qui va payer les honoraires du professionnel qui aurait à préparer un document à partir de documents ou de renseignements qu'il a en sa possession?

On prévoit, toujours à 40.1.3, la possibilité encore d'avoir une ordonnance assortie de modalités pour protéger le secret professionnel. Mais est-ce qu'on ne devrait pas avoir des ordonnances qui prévoient aussi des modalités ? il me reste cinq minutes? ? pour entourer quels sont les documents qui pourraient être fournis? C'est une question. Est-ce qu'on pourrait aussi, comme le prévoit l'article 231.2 de la loi fédérale, avoir un mécanisme de révision? C'est-à-dire que l'ordonnance est émise, mais, si le professionnel juge que c'est soit une intrusion au niveau du secret professionnel ou que ça demande beaucoup trop de travail, est-ce qu'on pourrait, à ce moment-là, avoir une possibilité de demander la révision de la décision du juge au moins pour avoir une façon d'encadrer l'ordonnance?

Alors, pour résumer, je vous dirais que l'Ordre des comptables agréés n'a pas d'objection à ce que les fonctionnaires du ministère du Revenu puissent prévenir ou punir les infractions de nature fiscale, qu'on pense au blanchiment d'argent, qu'on pense à l'évasion fiscale. Les seules réflexions que l'on a, c'est: Est-ce que les mesures qui sont en place pour protéger le secret professionnel et l'atteinte à la vie privée sont adéquates? Et est-ce qu'on ne doit pas penser à mettre en place des mesures qui seraient peut-être plus spécifiques à cet égard-là?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup, Me Brizard. Je reconnais maintenant M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Me Brizard, merci pour votre présentation. On apprécie. On sait que c'était un court délai, mais on apprécie que vous avez pris le temps pour venir ici ce matin, d'être avec nous. Il y a deux questions que vous avez soulevées, sur lesquelles je vais faire un commentaire, peut-être avoir votre opinion. Vous avez parlé à quelques reprises sur l'écoute électronique et s'il y a la possibilité d'avoir de l'écoute électronique, et la réponse est non. Et la raison, c'est que ? et je voudrais voir si vous avez un commentaire; je m'excuse ? dans l'article 25, à l'article 40.1.1, on parle d'une autorisation pour utiliser un dispositif, une technique ou une méthode d'enquête ou accomplir tout acte qu'il mentionne. Mais, pour qu'on puisse avoir ces pouvoirs, il doit y avoir des conditions d'application qui sont essentielles pour le juge pour donner l'autorisation. Et, si on regarde ensemble l'article parallèle du Code criminel, on voit qu'il y avait dans cet article les sous-sections 4 et 5 où il y a mention du vidéo et écoute électronique, et, spécifiquement, ces paragraphes ont été omis du projet de loi qui est devant nous. Alors, c'est la raison ? et si vous avez des commentaires ? quand on dit qu'il n'y a pas la possibilité d'avoir l'écoute électronique.

Sur la question du secret professionnel, je dis que, oui, le secret professionnel, dans ce cas, est limité au secret des avocats et notaires, et je vous fais référence, maître, au jugement dans la cause de Tower contre Canada qui est un jugement rendu par la Cour d'appel fédérale, rendu le 22 juillet 2003. Et, si je peux le citer pour le bénéfice de cette commission, le juge a dit que «le privilège du secret professionnel de l'avocat, qui est fondamental à la bonne administration de la justice, est nécessaire pour que le client puisse, à la faveur d'avis confidentiels, ester en justice pour défendre ses droits contre des réclamations indues. Les avocats sont tenus par la loi et par leur code de déontologie de préserver et de protéger l'intérêt public dans l'administration de la justice. Les comptables, par contre, ne sont pas assujettis à ces obligations et ils ne donnent pas des avis juridiques, sinon ils contreviendraient aux lois provinciales et territoriales régissant les professions légales. D'après mon analyse, aucune considération de politique générale prépondérante ne permet d'assimiler au privilège de l'avocat les conseils obtenus de comptables.»

Et, dans le jugement, le juge aussi indique à nous, maître, que, «bien que le caractère confidentiel soit préférable, la relation entre un expert-comptable et son client n'est pas aussi fondamentale pour la société et l'administration de la justice que l'est la relation d'un avocat avec le sien». Maintenant, quand il mentionne «avocat», pour nos lois au Québec, c'est aussi les notaires. Et, quand on mentionne un secteur professionnel en relation de ce projet de loi, on parle du droit pour une personne de présenter une défense pleine et entière et le droit d'un inculpé à un procès équitable. Alors, c'est le commentaire que j'avais à vos commentaires. Et, si vous voulez peut-être réagir à ces commentaires, j'apprécierai beaucoup.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): D'une part, bien, j'apprécie la précision au niveau de l'écoute électronique et de la surveillance vidéo. J'imagine que c'est une question plus de légistique, mais est-ce que ce ne serait pas approprié de le préciser, que vous ne pouvez pas, par le biais de ce 40.1, procéder à l'écoute électronique et à la surveillance vidéo? Parce qu'on pourrait... En tout cas, pour moi, ce n'est pas nécessairement évident. C'est la première question.

La deuxième, je pense que la décision que vous citez, c'est une affaire qui concerne un cabinet qui s'appelle BDO. C'est vrai que plusieurs décisions ont traité du fait que le comptable agréé n'avait pas le même secret professionnel, mais souventefois ces décisions-là réfèrent à des législations soit fédérales ou à des législations d'autres provinces, et je ne suis pas sûre que ces décisions-là ont été rendues alors qu'il s'agissait d'un comptable agréé du Québec, qui, lui, est assujetti à la Charte québécoise. Il n'en demeure pas moins qu'il y a une charte québécoise qui protège le secret professionnel.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu.

n(10 h 20)n

M. Bergman: Merci, M. le Président. Le commentaire direct que j'aurais à votre observation, c'est que la Charte des droits et libertés de la personne au Québec permet d'exclure des professionnels du secret professionnel par une loi. Et l'article 46 de la Loi sur le ministère du Revenu, qui existe et qui n'est pas amendé par le projet de loi devant nous, exclut tous les professionnels, sauf pour l'avocat et notaire, pour les lois fiscales. Et, vraiment, ici le but est de préserver le secret professionnel pour être certain, comme j'ai dit avant, des droits pour une personne de présenter une défense pleine et entière. Alors, il y a une différence entre le secret professionnel de l'avocat et notaire, qu'on doit protéger, et celui du comptable.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Mais là on rentrerait dans des débats sophistiqués en droit. Alors, j'apprécie vos commentaires, mais là on rentrerait dans la distinction entre le privilège, le secret professionnel et tout ça, puis c'est un débat qui peut être assez technique, puis je ne suis pas convaincue que c'est peut-être à propos aujourd'hui ici de discuter de ça. Mais il y a quand même une distinction. Mais je sais très bien que le législateur, étant souverain, pouvait décider de faire en sorte que la Charte ne s'appliquait pas, à certains égards, à certains professionnels. Et j'ai pris connaissance de l'article 46 et je le connais très bien. Mais on soulève quand même la question à savoir: Est-ce que c'est approprié que ce soit toujours le cas?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Est-ce que vous êtes d'accord que le ministère, par ses lois, doit trouver un juste équilibre pour, dans un côté, respecter les droits privés des citoyens et, l'autre côté, pour l'application des lois fiscales pour la collectivité, qu'il y ait toujours une nécessité pour avoir ce juste équilibre? Et, en parlant de juste équilibre, on sait que, en vertu du Code criminel, les pouvoirs qui sont mentionnés dans 40.1.1 existent depuis 10 ans et même sont appliqués par les mêmes fonctionnaires au ministère du Revenu en relation des lois fiscales fédérales qu'on administrait. Mais on n'a pas ces mêmes pouvoirs pour les lois québécoises. Mais, depuis le temps que l'administration a fait des lois fiscales fédérales, il n'y a pas aucun abus. Est-ce que vous n'êtes pas d'accord que le ministère doit avoir les mêmes pouvoirs en relation de ses propres lois?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): En fait, je suis convaincue que pour l'instant il n'y a pas d'abus. C'est si on... Peut-être qu'on peut paraphraser une décision, justement, là, de la Cour d'appel dans le dossier Robitaille où le juge Proulx nous dit: «Le respect d'un droit ne peut être assujetti à une procédure qu'il n'est pas possible de surveiller ou de maîtriser: "la protection des droits fondamentaux ne devrait pas être fondée sur la confiance à l'égard du comportement exemplaire permanent du ministère public, chose qu'il n'est pas possible de surveiller ni de maîtriser".»

Alors, ce que je vous dis tout simplement, et c'est une question que je soulève: Est-ce qu'on ne peut pas mettre en place des mesures, non pas que le ministère du Revenu n'aurait pas le droit d'exercer les pouvoirs, mais de mettre en place des mesures qui seraient équivalentes à celles qui existent pour les notaires et les avocats, soit la mise sous scellés... Il y a sûrement des mesures qui font en sorte que vous pouvez autant exercer vos pouvoirs, parce que je pense que vous devez exercer ces pouvoirs-là, mais d'avoir les mêmes protections qui sont offertes aux avocats et aux notaires.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Pour retourner encore aux protections des citoyens, est-ce que vous vous êtes satisfaite que le fait que le ministère, pour exercer les pouvoirs qui sont donnés à lui en vertu de ces articles, doit aller devant un juge qui doit donner son consentement, et en suivant les conditions, et... que toutes les conditions sont remplies... Est-ce que c'est une protection assez complète, dans votre pensée, pour les citoyens?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): C'est déjà une garantie qui est très importante. À partir du moment où on obtient l'autorisation d'un juge, le juge est censé quand même se conduire en respectant les diverses dispositions qui sont à 40.1. Mais je soulève toujours une question. Je ne prétends pas que je suis spécialiste et je ne peux pas répondre, mais je vous dis: Est-ce que cette mesure-là est suffisante? Je m'interroge. Est-ce qu'elle est suffisante? Est-ce qu'on ne doit pas avoir aussi d'autres garanties qui sont offertes à ces autres professionnels là? Je n'ai pas la réponse. Je soulève la question.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): D'accord. D'autres interventions du côté du gouvernement? Ça va? Alors, je reconnais M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Me Brizard, merci d'avoir répondu à l'invitation de la commission dans un délai aussi court. Je vous écoutais parler tout à l'heure concernant les garanties. L'article 25, dans son premier paragraphe, là, l'article 25 qui insère 40.1.1, me semble donner des pouvoirs illimités, hein, au ministère du Revenu, et particulièrement le premier paragraphe, quand on dit que le ministère du Revenu, une fois qu'il aura été autorisé par un juge de la Cour du Québec, là, il pourra utiliser un dispositif, une technique, une méthode d'enquête ou accomplir tout acte qu'il mentionne, qui constituerait, sans cette autorisation, une fouille, une perquisition, une saisie abusive à l'égard d'une personne ou d'un bien. Et on accorde ces pouvoirs à un civil qui n'a pas... Ce n'est pas un agent de police. Le ministère du Revenu, ce n'est pas un corps policier. Le ministère du Revenu, c'est un ministère qui traite avec des citoyens, et je ne me souviens plus le nombre de transactions qu'on a pu faire l'année passée avec les citoyens, mais, en tout cas, c'est dans les millions. Alors, mon inquiétude par rapport à ces pouvoirs... Et on prend la peine de préciser dans un autre alinéa que les pouvoirs n'ont pas pour effet de permettre de porter atteinte à l'intégrité physique de la personne. C'est des pouvoirs qui... Si on a pris la peine d'y penser, ça veut donc dire qu'on veut se protéger, à quelque part, dans mon interprétation, pour avoir déjà fait du droit pénal, du droit criminel, du droit civil...

J'aimerais ça vous entendre, parce que la Protecteur du citoyen, qui est venue tout à l'heure, nous disait: Pourquoi changer? Pourquoi ne pas laisser aux corps policiers cette responsabilité de faire les enquêtes? Ils ont l'expérience, ils ont une formation, ils ont, etc., puis ils vont aller chercher les autorisations, et le ministère du Revenu viendrait en support, et non pas l'inverse. Pourquoi qu'on veut changer cette culture? Est-ce que le ministère du Revenu a l'intention de créer... On ne le sait pas encore, parce qu'il y a une nouvelle qui est sortie hier à l'effet qu'une superagence serait mise sur pied, qui, bon... Est-ce que cette agence qui aurait ces pouvoirs ne répondrait plus au Parlement, à l'Assemblée nationale? Il y a beaucoup de questions qui sont soulevées, là.

Moi, dès que j'ai vu dans ce projet de loi ces pouvoirs énormes de perquisition, d'enquête, de fouille et d'arrestation même... Il y a des pouvoirs d'arrestation qui sont contenus dans ce projet de loi. J'aimerais savoir, d'après vous, compte tenu des dispositions du Code criminel que vous mentionnez, s'il n'y a pas une démesure par rapport à ce qu'on veut faire.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Honnêtement, je n'ai pas totalement réfléchi à la question, compte tenu du court délai, et je ne suis pas sûre que ce que je vous donnerais comme réponse, c'est une réponse qui est songée. Mais je vous dirais d'emblée que je pense qu'on pourrait avoir des fonctionnaires qui seraient désignés, qui seraient des fonctionnaires qui seraient dûment autorisés, qui pourraient le faire. D'emblée, j'aurais cette réaction-là. Est-ce qu'elle est adéquate? Est-ce qu'il faudrait nécessairement que ce soit un agent de la paix? Je ne suis pas nécessairement convaincue que c'est une mesure qui encadrerait mieux le processus.

n(10 h 30)n

Je fais un parallèle, puis je comprends qu'on n'a pas des pouvoirs d'enquête aussi imposants, mais, à certains égards, au niveau des ordres professionnels, on peut faire des perquisitions dans les cabinets, et c'est soit le syndic ou soit moi-même, comme directrice des affaires juridiques, qui exerce ces mesures-là, et on n'est pas accompagnés par un agent de la paix. Alors, je ne prétends pas que je donne une réponse songée, mais je pense qu'on pourrait très bien, comme le Code criminel le prévoit dans certains cas spécifiques, avoir des gens qui sont spécifiquement désignés pour ce faire mais qui seraient des fonctionnaires.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Donc, mais pas de façon... On ne parle pas d'une délégation de pouvoirs illimités ou encore un nombre non plus défini, là. On cible, on désigne des personnes. Ces personnes-là, on leur attribue des pouvoirs spécifiques, une commission, alors que, si je comprends bien ce qui est indiqué dans le projet de loi, c'est qu'on peut prendre un ministère, le transformer en agence, et tout le monde a ces pouvoirs-là, à la limite.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Bien, c'est la compréhension, moi, que j'ai aussi de cette loi-là. Et je fais un parallèle à l'effet qu'il n'y a pas de disposition semblable au fédéral.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Alors, je vais donner la chance, M. le Président, à mes collègues aussi de poser des questions.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Me Brizard, bienvenue. Merci de votre participation. Vous avez mentionné tantôt, pour les fins de l'enregistrement, vous avez parlé de l'article 40.1.3 du projet de loi n° 20, et l'on parle de l'ordonnance, à b, où on parle de préparer un document à partir de documents ou renseignements existants et de le communiquer, et le juge peut rendre cette ordonnance s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire... et l'on mentionne les motifs. Ce qui est important, c'est que cette ordonnance peut être assortie des modalités que le juge estime appropriées notamment pour protéger le secret professionnel de l'avocat ou du notaire.

Vous avez mentionné qu'à votre avis on devrait extensionner cette liste de professionnels. Est-ce que vous pouvez spécifier si vous avez des noms en tête, là, de professionnels?

Mme Brizard (Christiane): Bien, en fait...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Pardon. Je ne ferai pas de distinction, hein, ce seraient les professionnels qui sont assujettis au secret professionnel qui est visé par l'article 9 de la Charte québécoise, donc les professionnels qui sont visés au Code des professions. Il y en a 45.

Mme Beaudoin: D'accord. Merci.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme la députée de Mirabel, ça va?

Mme Beaudoin: Ça va.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Charlevoix et vice-président de la commission.

M. Bertrand: Très rapidement, si ça s'avère, là, que le projet de loi va beaucoup trop loin... Vous mentionnez qu'à part les notaires et les avocats, qui sont automatiquement protégés, il y a d'autres professionnels, mais on sait que maintenant, de plus en plus, il y a d'autres groupes non reconnus sur le plan professionnel mais qui reçoivent des confidences des clients ou clientes tout aussi importantes, même parfois, je pense, plus. Je pense évidemment aux planificateurs financiers, je pense aux assureurs-vie, je pense aux courtiers d'assurance. Je pense que, aujourd'hui, de plus en plus il y a des compagnies d'assurance ou des institutions financières qui ont leurs propres employés, qui vont aussi très, très loin.

Est-ce que vous allez jusqu'à penser, par l'interprétation que vous en faites, que, même ces gens-là, il n'y a aucune protection pour eux autres, et évidemment pour leurs clients, qui en découle? Parce que vous avez pris la peine de dire tout à l'heure que, si ça allait jusque-là, ces appréhensions-là, il n'y a plus personne qui est protégé. Le téléphone qui est tapé, ça peut être quelqu'un d'autre, mais il y a des confidences aussi, vidéo, etc. Est-ce que ça va aussi loin que ça?

Une voix: ...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Je rappellerais, s'il vous plaît, aux gens présents dans la salle... d'avoir éteint leurs téléphones cellulaires. Je songe toujours à la possibilité d'émettre une taxe spéciale pour les gens qui contreviendraient à cet ordre de la présidence de la commission, qui pourrait créer un fonds CFP. Excusez. Alors, Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Oui. Alors, j'attendais. Écoutez, vous me demandez de répondre rapidement. C'est déjà, déjà une prémisse qui est peut-être inexacte. Écoutez, l'atteinte, tel que les articles sont rédigés, l'atteinte à la vie privée... Moi, je parle au nom de l'Ordre des comptables agréés du Québec, mais, oui, l'atteinte à la vie privée peut toucher justement les situations que vous avez invoquées, tout comme ça peut toucher le courtier en valeurs mobilières aussi qui a une série d'informations à l'égard d'un client qui pourraient sûrement intéresser le ministère du Revenu.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: ...être très, très précise et très, très courte: Est-ce que, au nom de l'Ordre des comptables agréés, vous croyez que certains articles ? pas tous les articles, mais certains articles dont on parle ? sont vraiment inquiétants pour la vie privée des citoyens et citoyennes?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): En fait, si on n'ajoute pas des mesures pour s'assurer de la protection ou de l'encadrement, hein, nous donner des balises, je pense que ça soulève des questions.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci. Donc, M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Me Brizard, sur la question de la protection de la vie privée, certainement que le juge a le contrôle non seulement des conditions, mais des modalités, et certainement que je vous demanderais si vous trouvez la loi assez claire sur ce sujet. Mais aussi le député de Gaspé a indiqué que, en vertu de ces lois, les fonctionnaires du ministère du Revenu auront le droit d'arrestation. Juste pour ceux qui suivent nos débats, pour être clair, ce droit n'existe pas en vertu de ces lois.

Mais, en plus, en vertu du Code de procédure pénale du Québec, l'article 87 se lit comme suit: «Les pouvoirs conférés dans le présent chapitre aux agents de la paix ainsi que les devoirs qui leur sont imposés sont aussi attribués aux personnes chargées dans une loi de l'application de cette loi ou d'une autre loi.»

Mais le deuxième alinéa dit: «Toutefois, ces dernières personnes:

«1° ne peuvent, en vertu de l'article 75, arrêter une personne en train de commettre une infraction s'il s'agit d'une infraction qui risque de mettre en danger la vie ou la santé des personnes ou la sécurité des personnes ou des biens.»

Alors, je pense que, vous serez d'accord avec moi que les droits d'arrestation n'existent pas aux fonctionnaires du ministère du Revenu.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): En fait, je le savais, et je n'ai pas pensé que vos droits s'étendaient jusque-là, d'aucune façon. Et le projet de loi ne le laisse pas sous-entendre non plus.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup, M. le ministre. Me Brizard. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu.

M. Lelièvre: Vous avez parlé tout à l'heure du mandat de perquisition, des autorisations. J'aimerais ça qu'on revienne sur la question de l'écoute électronique, ou de l'utilisation de technologies nouvelles ou encore qui éventuellement pourraient être utilisées, ou encore les banques de données. Si on veut aller dans les banques de données, par exemple, d'un autre ministère, est-ce que l'article... Vous parlez de 487 du Code criminel...

Mme Brizard (Christiane): 487.01.

M. Lelièvre: 487.01?

Mme Brizard (Christiane): Oui.

M. Lelièvre: Est-ce que, d'après vous... Vous nous dites, de la façon que le texte du projet de loi est rédigé, que le juge qui autoriserait, dans le fond, la personne à utiliser une technique ou une méthode d'enquête, mais surtout les techniques... Technique, ça veut dire: On a des équipements et on peut jouer avec les fichiers, etc. Donc, à ce moment-là, il pourrait y avoir des croisements de fichiers de d'autres ministères, de d'autres organismes. J'aimerais savoir si dans votre esprit on peut aller jusque-là, à la lecture du texte de loi, du projet de loi.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard... Pardon. M. le député.

n(10 h 40)n

M. Lelièvre: Dans le 40.1.1, le premier paragraphe, là... Parce que le premier paragraphe, il est très général, et je ne vois pas, dans les restrictions, ce qui peut restreindre, dans le fond, l'agissement, les actes de ceux qui seraient mandatés ou autorisés à faire ces perquisitions. Parce qu'on parle de tout moyen, là. Il n'y a plus aucune limite, chez l'employeur, chez...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Je ne pourrais pas répondre à ça. Est-ce qu'on pourrait viser ça? Ce que j'ai compris, de toute façon, de ce que le ministre Bergman a expliqué tout à l'heure, c'est qu'on ne vise pas l'écoute électronique. Ça, j'ai très bien compris ça. Alors, ce que vous dites, c'est: Est-ce qu'on pourrait, par un mandat de perquisition, installer un système quelconque qui nous permettrait d'intercepter des données qui vont d'un ministère à un autre?

M. Lelièvre: ...aller voir...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...aller vérifier des dossiers, puisque ce n'est pas interdit. Mais, si vous le dites, dans le fond, ce serait peut-être une mesure de prudence de restreindre par des amendements, si je comprends bien ? puisqu'on aurait exclu l'écoute électronique ou d'autres procédures de cette nature par des amendements ? restreindre les pouvoirs de ceux qui auraient ces autorisations.

Mme Brizard (Christiane): Je répondrais...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Pardon. Je répondrais, là, comme ça, sans aller plus loin dans ma réflexion, que je serais étonnée qu'on obtienne ex parte une autorisation pour pouvoir intercepter entre ministères des informations sans qu'un autre ministère soit au courant. Je ne pense pas que ce serait... Je ne pense pas qu'entre ministères on ferait ça, parce qu'il y a une question de transparence. Je vois difficilement le ministère du Revenu aller obtenir ex parte une autorisation d'intercepter des données d'un autre ministère. Ça m'apparaît peu probable, et je ne pense pas qu'on puisse utiliser 40.1.1 pour ce faire. Je ne sais pas si on peut aller jusque-là, mais c'est ma réaction première.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Et, si on allait dans le privé ou encore auprès d'une compagnie de téléphone, donc ce n'est pas exclu, là?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): Ce n'est pas exclu, sous réserve que je comprends qu'au niveau de l'écoute électronique le projet de loi ne vise pas l'écoute électronique, compte tenu de la portée de l'article 184 du Code criminel.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): En 30 secondes, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui, mais par ailleurs on pourrait aller voir n'importe quelle entreprise privée et lui demander de l'information sur vous, sur moi, sur quiconque, là.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard.

Mme Brizard (Christiane): En fait, par 40.1.1, on n'irait pas demander à l'entreprise cette information-là, mais on pourrait obtenir par un moyen quelconque cette information-là en interceptant peut-être les courriels ou les télécopieurs.

M. Lelièvre: Toute information, quoi.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre du Revenu. Il reste une minute sur votre bloc.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Pour retourner aux questions qui étaient posées à vous sur la vidéo, l'écoute téléphonique, je veux retourner au sujet pour dire que spécifiquement le législateur parle pour des raisons. Et, comme on l'a mentionné, dans la loi fédérale, il y avait les conditions d'application où on fait référence à la surveillance vidéo et autres dispositions applicables alors qui font mention de l'écoute électronique. Alors, comme vous voyez, dans l'article 40.1.1, ces conditions d'application, qui sont essentielles pour que le juge fasse une décision, ne sont pas incluses. Alors, je vous demande la même question, avec la même observation que ce n'est pas l'intention du législateur, ici, pour ceux qui suivent nos débats, pour que le vidéo ou l'écoute électronique soient inclus parmi les pouvoirs de l'autorisation générale.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Brizard, en deux secondes ? votre temps est écoulé ? s'il y a autre chose. Ça va?

Mme Brizard (Christiane): Oui, ça va. Je n'aurai pas de commentaire.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup, Me Brizard. Donc, au nom de la commission, je vous remercie. Me Brizard, vous représentez l'Ordre des comptables agréés du Québec. Merci de votre participation à nos travaux. Je suspends pour quelques instants ? moins d'une minute ? pour permettre au Barreau du Québec de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 10 h 45)

 

(Reprise à 10 h 49)

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, au nom des membres de la commission, je souhaite la bienvenue aux représentants du Barreau du Québec: Me Denis Mondor, vice-président du Barreau, Me Marc Sauvé, qui est au Service de la législation du Barreau, et Me Stéphane Eljarrat-Lambotin, qui est conseiller au Barreau. Alors, messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue et nous vous remercions de participer aux travaux de la commission.

Vous avez une période de 15 minutes pour faire vos commentaires et observations. Nos travaux portent ce matin sur l'article 25 du projet de loi n° 20. Ce sera suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission séparée en périodes de 15 minutes pour les membres du côté du gouvernement et 15 minutes pour les membres de l'opposition. Alors donc, sans plus tarder, je vous cède la parole, Me Mondor.

Barreau du Québec

M. Mondor (Denis): Merci, M. le Président. Merci pour votre invitation. Alors, je vais tout de suite, comme nous avons un temps serré, passer la parole à Me Sauvé, qui est du Service de législation, qui va vous faire part de la position que nous souhaitons vous livrer ce matin.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup.

n(10 h 50)n

M. Mondor (Denis): Par la suite, j'ai compris que Me Sauvé va vous entretenir d'une certaine partie, là, sur les positions sur lesquelles... les points qu'il soulève, et Me Eljarrat fera également... soulèvera certains arguments.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci. Alors, Me Sauvé.

M. Sauvé (Marc): Alors, écoutez, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de cette auguste Assemblée, nous avons reçu, au Barreau, cette invitation à comparaître il y a à peine 36 heures, alors vous comprendrez que, compte tenu des délais, on n'a peut-être pas eu le temps de faire toute la recherche, toute l'analyse qu'on aurait pu faire autrement. Et, c'est peut-être un commentaire qu'on pourrait faire, on comprend les contingences, là, des fins de session parlementaire, et tout ça. Si c'était possible de faire des efforts additionnels, dans la mesure du possible, pour permettre aux intervenants, là, peut-être d'avoir un peu plus de temps de façon à donner des avis un peu plus éclairés peut-être et être un peu plus avisés dans leurs interventions, ce qui serait profitable aux parlementaires...

Ceci étant dit, un commentaire préliminaire comme ça, c'est qu'on a un article devant nous, un article qui est très important, là ? ce n'est pas des détails ? et c'est glissé comme ça, mine de rien, dans un projet de loi, projet de loi n° 20, où il y a des procédures civiles. C'est glissé comme ça et puis ça aurait pu très facilement nous échapper et échapper à plusieurs observateurs alors que ça vient quand même ajouter des pouvoirs considérables au fisc. On pense que c'est certain qu'on vit un contexte budgétaire difficile, on le sait tous, mais il y a quand même des limites, là. Je pense qu'il y a des précautions à prendre avant d'aller de l'avant avec une telle pièce législative. Alors, si vous me le permettez, on va jeter un coup d'oeil d'abord sur le 40.1.1 qui est apporté par l'article 25.

Alors, à la première lecture, quand on lisait ça, on était frappés d'abord par la totale imprécision des fameux dispositifs techniques ou méthodes d'enquête. Alors, il y a de l'écoute électronique. On comprend, ce matin, là, que ça ne visait pas ça. Ce serait peut-être bon de l'écrire, parce que l'écoute électronique, ce n'est pas un détail, là, c'est prévu dans le Code criminel. L'écoute électronique, c'est un crime, si on ne respecte pas la partie VI du Code criminel. La question qu'on s'était posée: Est-ce qu'on peut autoriser dans une loi du Québec que quelqu'un pose un crime ou fasse de l'écoute électronique sans respecter le Code criminel?

Il y a aussi la surveillance vidéo. Est-ce que c'est là-dessus qu'on s'enligne? Ça aussi, il faut que ce soit encadré. Il faut respecter quand même les règles du Code criminel. On est d'avis, nous, qu'il faudrait préciser de quoi il s'agit, qu'est-ce qu'on veut faire exactement.

Ensuite, on dit «tout fonctionnaire». Alors, autoriser tout fonctionnaire, je pense qu'il doit y avoir une certaine proportionnalité entre les risques d'atteinte à la vie privée et aux droits fondamentaux et la personne qui est appelée à agir. Est-ce que ça peut être tout fonctionnaire? Est-ce que ça peut être n'importe quel fonctionnaire? Est-ce qu'il ne doit pas y avoir un critère de formation quelconque ou d'imputabilité? Enfin, on se posait franchement cette question-là. Donc, c'est des questions qui nous venaient spontanément à l'esprit.

On se demandait aussi, d'une façon plus générale, pourquoi avoir mis de côté le Code de procédure pénale. Il existe donc, en matière pénale, pour l'ensemble de la législation provinciale... C'est comme si on avait deux régimes. On a un régime fiscal qui a sa propre procédure et puis un régime général pour les lois du Québec. Et on se demandait aussi ? et ça, c'est un débat de société qu'on peut soulever: Est-ce qu'on peut mettre sur un même pied d'égalité des crimes comme, je ne sais pas, moi, le meurtre, le trafic d'armes, le trafic de stupéfiants et la délinquance fiscale? Est-ce que c'est des choses qui demandent les mêmes remèdes, les mêmes moyens, les mêmes outils? On peut, je pense, honnêtement s'interroger sur ces questions-là même si on est dans un contexte budgétaire difficile.

Un peu plus loin, quand on regarde cet article 40.1.1, on voit, au critère b, qu'on dit: «Le juge peut accorder son autorisation s'il est convaincu, à la fois», bon, a et b. Alors, on voit évidemment que b, c'est très, très général, très vaste: la délivrance de l'autorisation servirait mieux l'administration de la justice. Là encore, compte tenu de l'importance et des impacts potentiels de ces mesures-là, on penserait qu'il serait peut-être préférable de baliser davantage ce critère-là, de faire référence à un critère de nécessité ou faire ressortir le caractère exceptionnel. Et c'est important, ces mesures-là, parce que même le législateur le prévoit. On parle d'intégrité physique. Alors, ça, ça nous met la puce à l'oreille quand même, là, «n'a pas pour effet de permettre de porter atteinte à l'intégrité physique».

Un autre point, la question des perquisitions secrètes. Alors, est-ce qu'il ne devrait pas y avoir quand même un peu plus de balises que ce qui est là? Dans quelles circonstances des perquisitions secrètes pourraient être admises? Est-ce que le législateur ne devrait pas le prévoir? Et on prévoit ici qu'il peut y avoir un délai jusqu'à trois ans avant d'aviser le contribuable qu'il y a eu une perquisition secrète en matière fiscale. Là aussi, ça soulève des interrogations. Trois ans... Donc, pendant trois ans, la personne ne saura pas qu'il y a eu... quels sont ses recours. Ça, je pense que ça nous interpelle quand même.

Et, dans cette disposition-là, contrairement à ce qu'on voit à 40.1.3, on ne fait pas allusion au secret professionnel, il n'y a pas de disposition sur le secret professionnel, alors qu'à 40.1.3 on en fait allusion, quand même, là, après l'alinéa c. Ici, il n'y a pas un mot là-dessus, alors que la jurisprudence et la Charte prévoient le droit au secret professionnel, qui est un droit constitutionnalisé. Alors, toutes ces remarques-là nous amènent à penser que cette disposition-là doit être réexaminée en profondeur avant d'accorder des outils additionnels au fisc. On sait que le fisc est pas mal équipé en matière d'outils pour coincer les gens. Je pense qu'il y a quand même un certain fardeau de l'administration de démontrer, là, la nécessité ? et pas juste l'utilité, mais la nécessité ? d'avoir ces outils-là. Est-ce que dans les autres provinces on a ce genre d'outils là? Est-ce qu'on est une société distincte à ce point-là? Je pense que c'est des questions qu'il faut vraiment se poser. Il y a des questions de société aussi: Est-ce qu'on peut mettre sur un pied d'égalité des crimes de la nature d'un meurtre ou autres, et les outils qu'on a pour les combattre, avec les questions d'évasion fiscale?

Ceci m'amène au point 40.1.3. Là, ce qui nous a fait un peu tiquer, c'est le paragraphe b, parce qu'on nous dit qu'on peut obtenir une ordonnance qui fait en sorte qu'une personne ait à préparer un document à partir de documents ou de renseignements existants et de le communiquer. Alors, première question très pragmatique: Qui paie pour ça? Ça coûte des sous, ça. Si on va voir un comptable pour qu'il commence à nous confectionner un état de l'avoir net ou des documents très élaborés, quelqu'un va payer au bout de la ligne. Surtout si la loi n'oblige pas le contribuable à fournir ce genre de document là, où est-ce que ça va reposer, ça, cette obligation-là de faire payer ce document-là? Alors, ça, c'est le premier élément.

Et aussi on étend ça à «préparer un document à partir de documents ou de renseignements existants». «Renseignements existants», bon, est-ce que ça veut dire qu'il va y avoir comme une enquête à l'intérieur d'une enquête? Et, si c'est ça, est-ce que la personne qui va faire le document va glisser ses opinions dans ce document-là qui pourront influencer le fisc? Est-ce que notre contribuable va pouvoir conserver son droit au silence dans un cadre d'enquête indirecte par cette personne-là? Alors, ça, c'est des questions qui nous sont venues spontanément.

Il y a la disposition aussi du secret professionnel, hein? On dit, bon, tel qu'écrit, là: «L'ordonnance peut être assortie des modalités que le juge estime appropriées.» Alors, nous, on pense que ça ne devrait pas être «peut être» mais «doit être» assortie des ordonnances qui sont propres à assurer la protection du secret professionnel. Aussi, on pourrait avoir des mécanismes d'avis au syndic parce que le syndic est évidemment la personne la plus avisée ou la plus autorisée pour vérifier si, oui ou non, la communication de certains renseignements sont susceptibles de constituer un bris du secret professionnel.

Je passerais la parole peut-être à Stéphane pour des ajouts.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Eljarrat, donc, je vous concède la parole.

n(11 heures)n

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Oui. Alors, écoutez, premièrement, ce qu'on aimerait dire quand même, là, c'est que l'analyse de l'article 25 présente vraiment deux mécanismes différents. Je commencerai par celui qui nous apparaît plus approprié ou, de façon générale, beaucoup moins problématique. Il y a même une initiative, je pense, intéressante à 40.1.3 en général, sous réserve des remarques qu'on a faites par rapport au paragraphe b. Étant donné qu'on sait que le fisc s'est retrouvé dans une situation, comme d'autres organismes, d'enquête difficile suite à l'arrêt Jarvis de la Cour suprême, qui est venu empêcher le ministère, lorsqu'il fait des enquêtes de nature pénale, d'effectuer une demande péremptoire, donc il apparaissait quand même logique, surtout qu'on pense que les demandes péremptoires, par exemple, étaient envoyées à des banques... Sans cet article-là, est-ce qu'on pourrait se la poser, la question, que le ministère serait obligé de procéder par voie de perquisition dans des banques, avec tout ce que ça représente? C'est peut-être là un objectif louable, une tentative louable de tenter de se conformer à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Jarvis, sous réserve des...

Donc, de ce côté-là, on trouve que c'est une initiative qui mérite quand même d'être étudiée plus en détail mais, a priori, n'est pas aussi problématique et aussi frappante que l'article 40.1.1. En effet, l'article 40.1.1, bien qu'on est conscients qu'il s'agit d'une importation, j'appellerais, partielle d'une disposition du Code criminel qui est l'article 487.01, qui a été adopté dans un contexte très particulier et à l'intérieur d'un code criminel justement qui prévoit toutes sortes d'autres dispositions, où chacune des dispositions doit se lire les unes dans les autres... Et c'est pour ça très bien qu'un lecteur qui lit 487.01 dans le cadre de l'analyse de ces dispositions-là, dans le cadre d'une enquête criminelle, n'aura pas besoin de se poser la question: Est-ce qu'on peut faire de l'écoute électronique ou non? puisque la réponse est claire, puisque la partie VI du Code criminel prévoit qu'il s'agit... Quiconque intercepte des communications privées commet une infraction, un crime. Donc, par conséquent, il va de soi que l'article suivant ne saurait être interprété comme permettant l'écoute électronique. Par contre, on remarque qu'on a omis d'importer une partie importante de la disposition qui se retrouve à 487.0.1, qui est tout, si on veut, le balisage ou l'encadrement de la surveillance vidéo.

Alors, dans le cas du 487, premièrement, on assimile la surveillance vidéo à de l'écoute électronique et on exige que l'écoute, ce genre de surveillance vidéo, au Code criminel, ne peut se faire que dans le cas des crimes graves listés comme permettant l'écoute électronique, et ces crimes-là sont listés à l'article 183 du Code criminel. Alors, on voit déjà que le législateur fédéral, dans son analyse des crimes graves, n'a pas jugé important de retenir l'évasion fiscale comme un crime permettant l'écoute électronique, d'une part. Donc, d'autre part, on peut comprendre que, lorsqu'on lit 487.0.1 dans le contexte d'une enquête fédérale, il n'y aurait pas possibilité de faire de la surveillance vidéo, puisqu'il y aurait un encadrement qui serait fait, puisqu'on l'assimile, comme je viens de le dire. Alors là c'est la première inquiétude.

Maintenant, je comprends qu'on nous dit que, effectivement, 40.1.1 ne vise pas l'écoute électronique. Hé bien, c'est très intéressant parce que, si c'est le cas, c'est justement le danger de tenter d'importer une disposition du Code criminel qui s'inscrit dans un contexte particulier, en plus que, naturellement, on sait que le Code criminel vise à réprimer une multitude de crimes, dont des crimes violents, où les policiers, des agents de la paix, qui ont une formation naturellement importante en matière de méthodes d'enquête, ont des formations en matière de droits de la personne, de droits des suspects, reçoivent, que ce soit à Nicolet ou, dans le cas de la Gendarmerie royale, dans le cadre de leur formation... ont quand même les connaissances nécessaires pour savoir dans quelles circonstances les appliquer ou non.

D'autre part, on se retrouve dans une situation ici où on importe partiellement, on crée une exception, c'est-à-dire qu'on juge que pour toutes nos autres lois provinciales ce n'est pas nécessaire d'utiliser ces nouveaux moyens d'autorisation générale du Code criminel, mais ça devient nécessaire pour des enquêtes fiscales. Et, en l'important, bien, on importe telle quelle la disposition en utilisant les termes «dispositif technique ou méthode d'enquête». Alors, évidemment, les techniques ou méthodes d'enquête, c'est très large.

Et rien ne pourrait penser qu'un fonctionnaire imaginatif pourrait vouloir, par exemple, installer un virus. On sait que le ministère du Revenu permet, par exemple, la transmission par voie électronique ou encourage la transmission par voie électronique des déclarations fiscales. Or, on sait qu'il existe des dispositifs... Quand j'emploie «virus», je ne l'emploie pas naturellement au terme péjoratif du terme mais comme outil d'enquête possible qui serait d'installer sur l'ordinateur visé d'une personne chez qui on veut perquisitionner secrètement... à partir de ce moment-là, de suivre en direct, en fait, tout ce qui se passe à son écran ou tout ce qu'il enregistre dans son ordinateur.

Il n'y a rien qui nous balise. On peut penser naturellement que, vu que c'est mis entre les mains d'un juge, un juge ne le permettrait pas, mais je pense qu'il y a un devoir du législateur effectivement de limiter ou de baliser les moyens d'enquête qui sont à la disposition des différentes personnes, ce qui n'est pas fait, d'après nous, dans ce contexte-là.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup, Me Eljarrat. Donc, nous commençons notre période d'échange. M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Alors, je vous remercie beaucoup pour être ici avec nous sur un court délai d'invitation. Comme vous le savez, c'était un accord mutuel entre l'opposition et le gouvernement pour faire cette consultation particulière. C'est la raison pour le court délai. Mais, comme vous le savez, vous êtes tout de même, comme tout autre ordre professionnel, un partenaire, un intervenant très, très important, et votre opinion est toujours valorisée.

Vous avez mentionné que cet article a glissé dans le projet de loi, mais ça n'a à aucun moment été l'intention. Le projet de loi certainement a été déposé à l'Assemblée nationale avec cet article, ça a été mentionné au moment de l'adoption en principe, et certainement que ce n'est jamais l'intention du législateur pour essayer de glisser un article dans un projet de loi. Certainement, chaque article, chaque mot qui est adopté par l'Assemblée nationale est important et doit être débattu dans une manière très publique.

Vous avez mentionné quelque chose qui pour moi est très important. Vous avez mentionné que dans le contexte budgétaire c'est nécessaire d'avoir ces pouvoirs. Je veux être très, très clair pour ceux qui suivent nos débats que pour moi, comme ministre du Revenu, et pour l'assermentation que j'ai prise, j'entends appliquer les lois qui existent au ministère du Revenu à 100 %. Et ce n'est pas une question de contexte budgétaire ou du temps de l'année, mais c'est une question d'équité. Je suis convaincu, et c'est une partie du serment que j'ai pris, que chaque personne, chaque citoyen, chaque entreprise doit payer sa part, qu'est-ce qui est dû à l'État, avec aucune exception, et ça doit être très, très clair. Et je sais que, comme les hommes de droit et les juristes, vous êtes d'accord que la loi s'applique à tous également et que chaque personne doit suivre la loi. Je n'en doute pas. Moi, j'entends, comme ministre du Revenu, faire appliquer ces lois. Et je sais qu'il y avait peut-être une référence à une nouvelle d'hier soir, et pour moi il n'y a aucun changement dans notre politique: la loi s'applique, et la loi va s'appliquer, et on va trouver l'équité. Alors, ce n'est pas dans un contexte budgétaire ou de temps de l'année où on va essayer de faire appliquer la loi.

n(11 h 10)n

Dans les questions des dispositifs que vous avez discutées, dans l'article 40.1.1, dispositif technique, méthode d'enquête, je suis certain que vous êtes d'accord avec moi que la loi, question d'équité, doit s'appliquer. Est-ce que peut-être vous êtes prêts pour suggérer au gouvernement que les questions de vidéo et les questions d'écoute doivent être mises dans notre loi pour donner plus de pouvoirs au ministère pour appliquer les lois fiscales de notre province? Est-ce que vous suggérez que peut-être que ces pouvoirs doivent être mis dans ce projet de loi, avec une précision?

Je vais continuer pour quelques moments. Aussi, vous avez mentionné la phrase «tout fonctionnaire». Mais, vous savez, c'est ça, tout fonctionnaire. Dans le Code criminel, ils parlent de tout agent de la paix. Vous savez, nonobstant que c'est une clause... mais le fonctionnaire en question, il a son autorité qui vient du ministre, sous-ministre, etc., alors il y a une chaîne de commande appropriée dans un ministère, et certainement que ceux qui vont devant le juge doivent en premier lieu expliquer leur autorité pour être devant le juge. Alors, il y a une question d'autorité de la personne qui va devant le juge, à moins que j'aie mal compris vos remarques de «tout fonctionnaire».

Vous avez parlé des questions des crimes pour faire une analyse ou une comparaison entre les types de crimes. Ce n'est pas à moi de juger d'autres crimes, comme ministre du Revenu et au ministère du Revenu. Pour nous, nous devons appliquer une loi. Et, s'il y a des crimes qui sont commis en relation de la Loi sur le ministère du Revenu, moi, je dois appliquer la loi au bout pour être certain que, ces personnes qui commettent des crimes contre le gouvernement, on ait tous les moyens à notre disposition dans notre société démocratique, en respectant les chartes, pour qu'on puisse recevoir les montants d'argent qui sont dus, incluant les pénalités, etc., et ce, en respect non seulement de l'équité, mais en respect de 99,9 % des citoyens de cette province qui respectent les lois fiscales. Et c'est un respect envers eux.

Vous avez parlé de la question d'intégrité physique. Mais je pense que la loi est claire, à moins que vous pensiez que ce n'est pas clair. L'alinéa qui dit que «le premier alinéa n'a pas pour effet de permettre de porter atteinte à l'intégrité physique d'une personne», je pense que c'est très, très clair en relation avec les instructions que le juge va avoir pour donner l'autorisation.

Sur les questions du délai de trois ans, dans les cas où il y a une évasion fiscale, on fait face des fois à des personnes qui emploient des dispositifs très, très sophistiqués pour détourner pour leur bénéfice la loi, et des fois c'est très compliqué. Premièrement, le délai important, c'est le délai de 15 jours, 30 jours et 30 jours. Le juge peut seulement accorder à nous un délai de 30 jours, mais on peut l'interpréter comme un délai de 45 jours si on commence l'opération du premier jour où on a eu l'autorisation. Alors, c'est un délai seulement de 45 jours pour faire appliquer le mandat général. Mais des fois c'est dans l'intérêt de la collectivité que cette opération demeure secrète, au cas où il y aurait d'autres autorisations générales qui s'appliquent au même temps, pour donner au ministère le temps pour compléter toutes les autorisations générales en question et pour compléter leur opération. Mais, en fait, ce n'est pas le ministère qui va décider le délai, c'est un juge, qui est un arbitre indépendant. Alors, certainement qu'on peut avoir confiance dans le juge. Et le juge peut donner un délai de huit mois ou sept mois, par exemple, mais on peut retourner à lui pour demander une extension. Ça existe dans le Code criminel et ça existe depuis 10 ans dans le Code criminel.

Vous avez fait référence au secret professionnel, et je pense que vous serez d'accord avec nous qu'on respecte le secret professionnel. J'avais quelques autres commentaires, mais je vois que le temps... et j'aimerais vous donner une chance pour peut-être répondre à ces quelques remarques. Et, si on a encore le temps, je vais avoir d'autres remarques. Merci.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Alors, Me Eljarrat.

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Merci, M. le ministre. Premièrement, pour être très clair, là, pour ce qui a trait de l'écoute électronique, il m'apparaît clair qu'il faut comprendre que, au départ, le Code criminel est régi, toutes les actions de tout agent du gouvernement sont régies par la Charte canadienne des droits et libertés, notamment l'article 8 qui est en cause ici, l'article 8 qui nous protège tous contre des intrusions à notre vie privée. Alors, ça, c'est le principe fondamental de notre société.

Alors, à partir de ce moment-là, le législateur, lorsqu'il a fait l'étude des crimes, est arrivé à la conclusion que pour certains types de crimes il avait besoin d'outils plus sophistiqués que dans d'autres types de crimes. Et c'est normal, il y a une gradation. C'est-à-dire, plus le crime devient grave ou dangereux, plus les enquêteurs auront besoin, à ce moment-là, d'outils pour contrer cette criminalité-là. Et c'est pour ça que le Code criminel fonctionne par étapes.

Alors, on prévoit toutes sortes de méthodes d'enquête. On prévoit naturellement le mandat de perquisition. On y prévoit des mandats particuliers, par exemple, pour enregistrer des numéros de téléphone, des choses comme ça. Et, dans des cas vraiment spécifiés à l'article 183 du Code criminel, la partie VI, on liste: Voici les crimes graves pour lesquels on permet l'écoute électronique. Donc, on voit là quand même l'importance rattachée au fait qu'on reconnaît qu'il s'agit là de quelque chose de grave. De plus, il faut savoir que, lorsqu'on parle d'écoute électronique, les demandes ne sont pas présentées par n'importe quel procureur de la couronne, que ce soit fédéral ou provincial, mais ça doit être une personne autorisée par le Solliciteur général. Alors, on peut voir tout l'encadrement, la partie VI au complet, là, qui vient encadrer toute l'écoute électronique, parce que c'est l'atteinte ultime à la vie privée, c'est l'écoute de conversations entre deux personnes à leur insu. Alors, je pense que, de ce côté-là, on ne saurait pouvoir, de toute façon, permettre à un juge, par le biais de cette disposition à la Loi sur le ministère du Revenu, de contrevenir à l'interdiction de faire de l'écoute électronique, à moins qu'un juge l'ait permis en vertu de dispositions pertinentes, et on sait que, dans ce cas-ci, ce ne serait pas possible.

Pour ce qui est de la surveillance vidéo, encore une fois, le législateur a effectivement adopté la disposition plus complète que 40.1.1 et, comme je le disais tout à l'heure, a également à ce moment-là balisé ça en limitant encore une fois le type de crimes, la gravité des crimes sur lesquels on permettait la surveillance vidéo. Donc, là, ici, on s'élèverait finalement avec des standards moindres lorsqu'il s'agit d'évasion fiscale, où on permettra, à ce moment-là, la surveillance vidéo.

Puis il y a une problématique particulière que j'aimerais aborder aussi, c'est: au Québec, on sait que le ministère du Revenu est chargé de l'application, en matière de taxes de vente, tant de la LTVQ, la Loi sur la taxe de vente du Québec, que de la Loi sur la taxe d'accise, la TPS. Or, là, il m'apparaît qu'il y a un autre problème supplémentaire qui se rajoute, c'est que la surveillance vidéo en matière de TPS ne serait pas permise. On sait que, si c'est dans une enquête fédérale qui serait menée dans une autre province, ils pourraient décider de vouloir... à certaines dispositions, mais ils seraient barrés de faire de la surveillance vidéo à cause des dispositions de 487.01.5. Alors, au Québec, on pourrait le faire. On pourrait le faire indirectement en obtenant un mandat de perquisition ou un mandat général en matière de TVQ. Et on sait que les faits applicables, ou la preuve recueillie en matière de TVQ est automatiquement applicable en matière de TPS, et on aurait recueilli donc cette preuve indirectement en matière de TPS, qui, il faut le rappeler...

n(11 h 20)n

Il y a une distinction importante quand même juridictionnelle, c'est qu'une infraction à la TPS, c'est une infraction criminelle, tandis qu'une infraction à la TVQ est une infraction naturellement de nature pénale de par la division des pouvoirs. Alors, je pense qu'il faut être très prudent là-dessus.

Puis le dernier petit élément aussi qu'il faudrait retenir, c'est qu'on devrait prendre la peine de préciser quels crimes, en vertu des lois fiscales, quelles dispositions est-ce qu'on vise par ça, parce que, pour l'instant, c'est toute loi ou tout règlement pris par le gouvernement. Est-ce que ça veut dire qu'on pourrait faire ça, par exemple, en matière de tenue de registre non adéquate? Il n'y a aucune limite, il n'y a aucune balise, alors que les autres législateurs, quand ils balisent ça, ils prévoient, là, de façon extrêmement spécifique... Donc, je pense que, de ce côté-là, c'est quand même important de tenir en compte que les tribunaux... Et le législateur, lorsqu'il a adopté le Code criminel, les dispositions, va par gradation.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup. Alors donc, je cède la parole au député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Merci beaucoup d'être présents ici à cette commission. Je comprends que vous n'avez pas eu un très long délai pour vous préparer, mais vos commentaires, vos observations sont des plus pertinents et renseignent de façon...

Une voix: ...

M. Lelièvre: Est-ce que le président va vous imposer une amende?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est de l'écoute électronique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lelièvre: Votre téléphone est-il branché? Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Me Sauvé.

Une voix: ...

M. Lelièvre: Oui. Donc, votre présence est très importante, puisque le Barreau est déjà intervenu dans plusieurs dossiers concernant la question du secret professionnel, etc. Et aussi il y a d'autres organisations qui... Je pense au Conseil interprofessionnel du Québec qui représente quand même pas mal de personnes, qui est très inquiet des mesures que le gouvernement s'apprête à adopter.

Il y a une nouvelle qui n'a pas encore été démentie, mais... que Québec part en guerre contre l'évasion fiscale, en date d'aujourd'hui, et on parle d'une escouade, là, très spécialisée du ministère des Finances, de la Sécurité publique et naturellement du Revenu qui seront interpellés, puis on parle des enquêteurs du ministère du Revenu, de fiscalistes, de comptables, de d'autres spécialistes qui seraient supervisés par la Sûreté du Québec. À la lecture du projet de loi, on voit que c'est l'inverse, c'est que c'est le ministère du Revenu qui, lui, va piloter et qui va aller requérir le support de la Sûreté du Québec, et non pas comme on le fait actuellement.

Moi, j'aimerais... Je regarde le projet de loi, je me dis: Il y a des dangers qu'on parte à la pêche, hein, sur un immense plan d'eau, avec des sonars, puis qu'on essaie de dire: Bon, on prospecte, on fait de la prospection et on recherche, dans le fond, des cas potentiels au travers d'une perquisition, ou d'une fouille, ou encore d'une démarche qui à première vue est légale, obtenue, comme vous avez mentionné tout à l'heure, donc on fait une... Et parfois on doit présumer de la bonne foi, là, mais, effectivement, on peut déborder largement lors de la recherche d'éléments de preuve. Ce projet de loi m'amène à réfléchir et à penser que, dans le fond, les dispositions sont tellement larges que les balises qu'on devrait mettre, c'est presque une réécriture du projet de loi. Parce qu'il va falloir que, si jamais le ministère du Revenu veut créer une agence pour se donner des pouvoirs illimités, bien, il le dise, ou encore qu'on continue à procéder comme nous procédons à l'heure actuelle.

J'aimerais savoir de votre part: Le ministère du Revenu, à l'heure actuelle, pourrait-il utiliser le Code criminel, avec des motifs raisonnables et probables de croire... et les dispositions qui sont contenues lorsque... Par exemple, on a eu récemment, bon, on a eu des mégaprocès. On a des personnes qui ont des revenus quand même très importants et on ne peut pas leur attribuer la propriété légale. Par contre, on sait qu'ils ont de l'argent. Donc, est-ce que le ministère du Revenu pourrait se servir de quelques dispositions du Code criminel pour aller chercher cette information-là? J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que le ministère du Revenu peut, avec les moyens qu'il a autrement, procéder de façon légale et aussi en arriver à ses fins, c'est-à-dire faire respecter la loi, comme le gouvernement veut le faire? Donc, il y a deux démarches, le criminel et l'administratif.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Eljarrat.

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Alors, vous touchez à un point extrêmement important, parce qu'il y a un principe naturellement que personne ne va nier, ce n'est sûrement pas le Barreau du Québec qui va venir nier l'importance pour l'État d'aller recouvrer les sommes qui sont légalement dues par l'ensemble des contribuables. Mais, effectivement, le ministère du Revenu, puis c'est des problématiques qui se posent constamment, a un double rôle. Il fait un rôle d'enquête civile, où là il n'y a pas de problème, vu qu'à ce moment-là la vie, ou l'intégrité de la personne n'est pas en danger, on ne peut pas être emprisonné, et le ministère doit avoir, dans ce cas-là, tous les pouvoirs nécessaires pour établir l'impôt. Étant donné que nous vivons dans un régime d'autocotisation, il est normal que le ministère puisse s'assurer, par tous les moyens nécessaires de niveau civil...

Là où on commence à avoir un problème, c'est quand on passe de l'autre côté de la frontière. On tombe en matière d'enquêtes pénales. Et là, potentiellement, c'est quand on parle de TPS, éventuellement d'une enquête criminelle en bout de ligne, qu'il faut, à ce moment-là, être beaucoup plus prudent et beaucoup plus encadrer, là, les pouvoirs qui sont utilisés.

Il faut aussi comprendre l'importance, ou le choix de société important que représente 40.1.1 dans le fait qu'on précise que cette perquisition ou saisie serait autrement abusive. Donc, on vient prendre pour acquis, à partir de ce moment-là, que c'est un objectif assez important pour contrevenir à la vie privée et contrevenir à l'article 8 de la Charte qui nous protège. Donc, à partir de ce moment-là, on élimine déjà une étape de l'analyse, puisqu'on sait que, lorsqu'un mandat de perquisition régulier est autorisé, qu'il est légalement autorisé puis qu'il est correctement exécuté, il n'y a pas d'atteinte à la vie privée. Les tribunaux l'ont reconnu, c'est un objectif louable. Donc, à ce moment-là, on doit respecter les règles tant au niveau de l'autorisation que de l'exécution.

Mais, si on dit: Bien, même si c'était abusif à l'égard de la personne ou d'un bien, ce n'est pas grave, le juge va pouvoir l'autoriser quand même, on vient de franchir déjà une grande étape, on vient de passer la première analyse de l'article 8 de la Charte. Il ne nous reste plus qu'à nous poser la question maintenant: Le juge, dans sa discrétion, comment il va décider de l'exercer? Alors, effectivement, c'est évident qu'on fait et on doit faire confiance à nos juges, mais, d'un autre côté, il y a aussi une responsabilité du législateur d'encadrer le type de mandat et le type d'outils qu'il donne à ses enquêteurs.

Puis c'est intéressant aussi que vous mentionniez la question des récents amendements au secret fiscal, parce qu'on en a parlé tout à l'heure. M. le ministre mentionnait que, bon, on parlait de tout fonctionnaire, donc c'était... Oui, effectivement, ça voulait dire «tout fonctionnaire», mais, dans le fond, c'est une personne qui serait effectivement déléguée soit par la loi sur... les règlements de l'application fiscale qui désigneraient telle ou telle personne qui serait autorisée. Mais pourtant il faut savoir que, pour quelque chose qui m'apparaît beaucoup moins grave, qui était une brèche au secret fiscal permettant, dans certaines circonstances de crime organisé, à des fonctionnaires du ministère du Revenu de transmettre de l'information à la police par le biais d'un juge, on a pris la peine de préciser qu'il s'agissait d'un directeur des enquêtes seulement qui avait ce pouvoir-là. Alors, je pense que, dans des dispositions récemment adoptées, on a pris la peine quand même, lorsqu'on a donné un pouvoir, d'au moins... d'avoir une imputabilité à un niveau supérieur de gestion au ministère du Revenu.

Or, ici, il s'agit d'une brèche encore plus grave, là. On porte atteinte à à peu près tout, sauf l'intégrité physique de la personne. On porte atteinte à à peu près tout, mais on le laisse entre les mains potentiellement de n'importe qui et on laisse la désignation tomber à un simple niveau, là, de réglementation ou de décret interne. Alors, ça, je pense, que ça soulève des questions importantes aussi. Je pense qu'il est louable que le ministère veuille se doter des outils nécessaires pour suivre l'évolution puis les techniques utilisées par les criminels, les gens qui font de l'évasion fiscale. Il n'y a pas de problème. Mais, à partir de ce moment-là, qu'on indique clairement quels sont les dispositifs qu'on vise puis qu'on les encadre afin de minimiser au maximum l'atteinte à la vie privée, à l'instar du Code criminel.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Donc, si je comprends bien, à la lecture de ce projet de loi, vous ne trouvez pas que les mesures d'encadrement requises, nécessaires, indispensables sont là.

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Non.

M. Lelièvre: Maintenant, vous nous avez parlé tout à l'heure de l'affaire Jarvis. Pourriez-vous nous... Concernant les demandes péremptoires, il y avait deux mécanismes différents à l'article 25. Je ne veux pas prendre tout le temps que nous avons, parce que nous avons 15 minutes, mais si vous pouviez nous dire en quoi ça pourrait être utile pour le ministère du Revenu ou encore pour nous de bien comprendre l'ensemble de ces mécaniques-là, rapidement.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Eljarrat.

n(11 h 30)n

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Merci. Si on parle de 41... On parle ici de 40.1.3. Le contexte est le suivant: le ministère du Revenu du Québec, comme d'ailleurs le ministère du Revenu fédéral, dans son mandat de vérifier que l'ensemble des sommes de tous les contribuables sont payées en matière civile, utilisait et utilise toujours d'ailleurs ce qu'on appelle un mécanisme de demandes péremptoires. C'est que le ministère a deux façons finalement de demander des documents à quelqu'un. Il peut les demander, comme on dit, poliment, en appelant la personne et en lui demandant de bien vouloir fournir les documents, mais, naturellement, on sait qu'il y a des gens qui sont récalcitrants et qui vont refuser de communiquer de l'information qui est importante. À partir de ce moment-là, on a le mécanisme de la demande péremptoire qui permet au ministre d'envoyer une lettre à une personne qui n'est pas forcément une personne visée par une enquête ? ça peut être n'importe qui ? lui dire: Veuillez me fournir ces documents-là dans un délai ? habituellement ? de 30 jours, et, si vous ne le faites pas, là, vous êtes passible de poursuite pour non-respect de la demande péremptoire. Et, dans un arrêt de la Cour suprême, l'affaire McKinlay, la Cour suprême a reconnu que ce pouvoir en matière civile était tout à fait acceptable, étant donné encore la mission importante, dans le contexte d'un principe d'autocotisation en matière fiscale, que le ministère ait tous ces pouvoirs-là.

Mais là le problème qui s'est posé au fur et à mesure de l'évolution du temps, c'est que le ministère, de plus en plus, a pris... La partie enquête, ou la partie des enquêtes spéciales, qu'on appelle, les gens qui font les enquêtes en matière d'évasion fiscale ont commencé naturellement à faire de plus en plus d'enquêtes, et c'est normal. Et, ce faisant, on voyait souvent des problématiques où un vérificateur du ministère du Revenu pénal communiquait avec un vérificateur du Revenu civil qui, lui, pouvait obtenir des demandes péremptoires, par exemple, et utiliser ces demandes péremptoires là qui pouvaient potentiellement porter atteinte à l'auto-incrimination. Parce que, si je m'adresse à la personne, puis vous n'êtes pas visé par une enquête, puis je vous envoie une lettre: Veuillez me fournir les documents, vous, vous n'avez rien à craindre. La seule chose que vous avez à craindre, c'est que, si vous n'avez pas déclaré comme il faut vos revenus, bien, vous allez en subir les conséquences. Mais ça, c'est normal.

Maintenant, si, par contre, vous êtes visé par une enquête pénale, à caractère pénal, dont l'objet prédominant est une enquête à caractère pénal, le ministère ne peut plus vous forcer à vous auto-incriminer, puisqu'on a cette protection-là, tous et chacun, de ne pas s'auto-incriminer. Alors, c'est monté jusqu'à la Cour suprême dans deux affaires, l'affaire Jarvis et l'affaire Ling, L-i-n-g, l'année dernière, et la Cour a établi des balises par rapport à ça et est venue clarifier ce que l'on pensait qui devrait être le cas. C'est-à-dire que, lorsque l'objet prédominant de l'enquête n'est plus de nature civile, n'est plus de vérifier l'impôt payable mais bien plutôt de faire une enquête à caractère pénal, on ne peut plus utiliser les pouvoirs de demande péremptoire. Donc, on ne peut plus s'adresser aux gens puis obtenir des documents sous peine de poursuite.

Alors, je comprends que le ministère se trouvait dans une situation difficile par rapport à ces enquêtes pénales, parce que, effectivement, avant, ce qu'il faisait, par exemple, dans une enquête: il pouvait envoyer une demande, par exemple, péremptoire à une banque, ce qui est beaucoup moins intrusif que d'aller perquisitionner des banques à tour de bras. Alors, dans ce cas-là, je pense qu'on essaie, dans 40.1.3, de se conformer, si vous voulez, à Jarvis, dans un certain sens. On essaie de trouver un outil, en fait, qui se conforme à Jarvis, parce qu'on fait intervenir un juge. Et en même temps, bien, on permet une facilitation des enquêtes. Et l'objectif général de cet article-là ne nous semble pas choquant, moyennant des aménagements, là, notamment la question de la préparation des documents.

Mais ce qui est intéressant au niveau du secret professionnel, c'est que 40.1.3, qui est beaucoup moins intrusif et a un objectif, d'après moi, qui est très clair et qui quand même est inspiré de règles établies par la Cour, vient quand même rappeler que l'ordonnance peut être assortie de modalités notamment pour protéger le secret professionnel. Donc, on a pris la peine, là, à 40.1.3, de préciser le secret professionnel. Or, on ne prend pas la peine de le préciser à 40.1.1. On pourrait se faire répondre qu'il y a un article à la Loi sur le ministère du Revenu qui encadre les perquisitions lorsqu'on parle de bureaux d'avocats ou autres, mais il faut savoir encore une fois que ça, ça devient inquiétant dans le contexte actuel, vu que la Cour suprême aussi récemment a invalidé un article similaire dans le Code criminel qui encadrait les perquisitions dans les bureaux d'avocats. Donc, je pense qu'il est extrêmement important, si on veut doter le ministère d'outils très spécifiques supplémentaires aux outils qui sont là aujourd'hui, de clairement, clairement indiquer que le secret professionnel est protégé, et il est protégé par une phrase qui ne permet pas l'erreur. Il devrait vraiment dire clairement que le juge doit rendre une ordonnance pour protéger le secret professionnel lorsqu'il permet ce genre de perquisition, surtout si on parle d'une perquisition secrète.

On peut imaginer une... On voudrait quand même... On ne pense naturellement pas qu'aucun juge ne le permettrait, là, mais, théoriquement, d'après les dispositions telles que rédigées, on pourrait imaginer, là, une perquisition secrète dans un bureau d'avocats, et ça pourrait poser des problèmes. Évidemment, on ne pense pas que le ministère n'irait jamais faire ça, mais je pense qu'à ce moment-là on est peut-être mieux justement de le préciser de façon claire et précise relativement à ça, pour le secret professionnel.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci. M. le député de Gaspé, en moins d'une minute.

M. Lelièvre: Bien, je vais laisser la possibilité à ma collègue de poser une question. Je verrai tout à l'heure. Parce que la question, c'est que, le secret professionnel, est-ce qu'on ne devrait pas en faire une disposition générale à la section VI? Parce qu'on va insérer ces dispositions-là à la section VI, là. Donc, à ce moment-ci, je pense qu'il n'y a pas juste le secret professionnel des avocats, des notaires, il y a les comptables et tous les autres. Donc, à ce moment-là, on va aller chercher à peu près n'importe quoi, n'importe où, dans des parties de pêche. Alors, c'est ça qu'il faut éviter, là.

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Ça, je suis entièrement d'accord avec vous...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. Eljarrat.

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Excusez-moi. Merci. Je suis d'accord avec vous, sauf que là on va se trouver avec une problématique particulière. Parce qu'il y a une distinction quand même à faire entre le secret professionnel de l'avocat ou du notaire et les autres secrets professionnels prévus, protégés par l'article 9 de la Charte. On sait que la Cour suprême, encore vendredi, a rappelé que le secret professionnel de l'avocat est une règle de droit fondamentale. Elle est élevée. Ce n'est pas une règle de preuve, et c'est à tout prix ce qui doit être protégé. Dans ce contexte-là, c'est pour ça qu'effectivement il est important de le prévoir.

Maintenant, si je comprends votre question, vous dites: Pourquoi est-ce qu'on ne prévoirait pas, là, de façon générale l'application du secret professionnel? Je suis d'accord avec vous qu'il y aurait lieu, notamment probablement pour l'Ordre des comptables ou les autres organismes, de faire valoir qu'un certain secret professionnel, au moins un certain encadrement, notamment dans les bureaux de comptables, là, puisse être fait.

Une voix: ...

M. Eljarrat-Lambotin (Stéphane): Oui.

M. Sauvé (Marc): D'ailleurs, l'article 115...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Sauvé, très rapidement, s'il vous plaît.

M. Sauvé (Marc): ...l'article 115 du Code de procédure pénale couvre le secret professionnel, là, de l'ensemble des membres d'ordre professionnel. Merci.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup. Alors, le bloc de temps est écoulé. On a pris peut-être quelques instants de plus.

M. Bergman: M. le Président.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le ministre.

M. Bergman: Juste pour l'information de la commission et du Barreau, j'entends déposer un amendement, quand on reprend nos travaux cet après-midi, déposer un amendement en relation du secret professionnel en ce qui concerne l'article 40.1.1.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, M. le ministre. Alors donc, au nom des membres de la commission, je voudrais remercier les membres du Barreau, les représentants du Barreau du Québec, Me Mondor, Me Sauvé et Me Eljarrat, pour avoir participé à nos travaux. Je suspends pour moins d'une minute pour permettre aux prochains intervenants de pouvoir prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 38)

 

(Reprise à 11 h 47)

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Alors, au nom des membres de la commission, j'aimerais souhaiter la bienvenue à Me Daniel Bourgeois, qui est le nouveau président-directeur général de l'Association de planification fiscale et financière, Association que j'ai eu l'honneur de pouvoir participer à certains de leurs congrès au cours de la dernière année. Alors, Me Bourgeois, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous procédons à la discussion sur l'article 25 du projet de loi n° 20. Vous disposez d'un temps de parole de 15 minutes pour faire vos observations et commentaires. Ce sera suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, Me Bourgeois.

Association de planification
fiscale et financière (APFF)

M. Bourgeois (Daniel): Alors, merci, M. Paquet. M. le Président de la commission des finances publiques, M. le ministre du Revenu, membres de la commission, chers députés, M. le sous-ministre et collègues du ministère du Revenu, alors merci de l'occasion que vous nous offrez aujourd'hui de venir commenter, brièvement quand même, le projet de loi n° 20.

Comme vous venez à peine de le mentionner, M. le Président, notre organisme est connu par le gouvernement, vous-même pour avoir participé à deux reprises cette année à nos activités, entre autres lors du dernier congrès, qui a regroupé plus de 700 personnes au mois d'octobre, et M. le ministre, avec qui j'ai eu l'honneur de prendre le petit déjeuner un jeudi matin au mois d'octobre cette année et qui nous a assurés de son entière collaboration, et nous prenons cette invitation aujourd'hui comme un exemple de cette collaboration que vous attendez de notre organisation. D'ailleurs, il y a un membre de votre comité, Me Nancy Charest, qui est encore membre de l'APFF. Et d'ailleurs l'APFF, Association de planification fiscale, avait, à l'origine de sa constitution, deux membres importants, soit l'actuel ministre des Finances, M. Yves Séguin, ainsi que Mme Monique Gagnon-Tremblay, qui tous deux ont été très importants comme personnes-ressources lors de la constitution de notre organisme.

Pour les membres ici qui ont moins une connaissance de qu'est-ce que l'APFF, alors, brièvement, nous sommes un organisme non gouvernemental, sans but lucratif, qui regroupe des professionnels issus de tous les secteurs de l'activité économique, mais en particulier comptables agréés et avocats, dont je suis. L'APFF est à la fois le centre d'information et de formation... le plus important éditeur au Canada français en matière de ressources fiscales et financières. En bref, nous croyons à juste titre que nous sommes un interlocuteur approprié pour commenter ou débattre, comme aujourd'hui, des projets de loi à caractère fiscal, tout d'ailleurs comme le Barreau, puisque plusieurs de nos membres sont également membres du Barreau, comme Me Sauvé et Eljarrat ici un peu plus tôt.

J'ai cependant un caveat à vous faire d'entrée de jeu. Vous savez, la qualité de nos interventions est un peu tributaire de notre capacité comme organisme à regrouper et à colliger dans un temps record l'expertise nécessaire que l'on retrouve chez nos membres pour commenter un tel projet de loi aujourd'hui. Ce n'est pas du tout un reproche que je fais à la commission, c'est plutôt un choix que j'aimerais voir exaucé à l'avenir: dans la mesure du possible, si toujours c'est possible, nous aimerions évidemment être convoqués avec un peu plus de délai à l'avance. Je crois que la qualité de nos interventions pourra justement bénéficier aux membres de cette commission.

Donc, en tant que nouveau président-directeur général de l'APFF et pour... de nos membres, nous sommes honorés encore une fois d'être consultés aujourd'hui. J'ose espérer que nos interventions, même si elles seront brèves ? en fait, j'en ai deux principales; je crois que c'est assez important, les deux, mais on ne s'étirera pas sur plus que deux ? pourront vous aider à remplir votre mandat de législateur au sein de cette commission.

n(11 h 50)n

Alors, d'entrée de jeu sans plus tarder, vous avez eu évidemment l'avantage d'entendre les gens du ministère... pas du ministère mais du Barreau qui m'ont précédé, avec qui je partage pour l'essentiel la majorité des commentaires. Pour bien comprendre l'article 25 du projet de loi n° 20, c'est-à-dire l'article projeté 40.1.1, il faut à juste titre faire un bref rappel historique très rapide des dispositions qui permettent au ministère du Revenu de faire la perception fiscale: les pouvoirs d'enquête, les pouvoirs de perception et de saisie. Ces règles actuelles ont été balisées par le passé par des décisions importantes de la Cour suprême du Canada et aussi, au Québec, par la Charte des droits et libertés de la personne. À l'origine, ces articles-là ? on parle des articles 39, 40, 40.1 ? tels que libellés, ne respectent pas les garanties constitutionnelles, et, au fil des ans, le ministère a dû modifier, à juste titre, sa législation pour tenir compte de ces garanties constitutionnelles là.

Donc, à l'heure actuelle où l'on se parle, les pouvoirs qu'a le ministère du Revenu dans sa vérification fiscale respectent, quant à nous, aujourd'hui les points, ou les conditions essentielles pour valider les perquisitions et les saisies et surtout pour respecter les garanties constitutionnelles. Brièvement, ces conditions sont une autorisation préalable de la loi, ce qui serait le cas et ce qui est le cas lorsqu'on lit l'article 40, 40.1 et le nouveau 40.1.1. Une deuxième condition, ce serait une vérification de la dénonciation. Il faut qu'elle soit, si on veut, vérifiée par un juge indépendant, ce qui est le cas. Et ça prend surtout l'existence d'une déclaration assermentée, comme je l'ai dit, mais qui relève des motifs hautement suffisants pour permettre à ce que ces outils-là de recherche ? qui sont, en passant, exorbitants du droit commun, comme vous avez pu le constater ? pour que ces outils-là de recherche soient accordés par un juge.

Ce qui me vient... Excusez-moi. Ce qui nous vient à l'esprit lorsqu'on regarde, on fait une première lecture de l'article 40.1.1, on voit... Évidemment, c'est calqué un peu sur le Code criminel, un peu, pas mal sur le Code criminel à l'heure actuelle. Et d'ailleurs certaines dispositions du Code criminel sont dans le projet de loi C-45 à l'heure actuelle, sur d'autres dispositions. Mais ce qui nous vient à l'esprit en regardant 40.1.1... Comme moi, ce qui m'a sauté tout de suite aux yeux dans un contexte d'administration des lois fiscales, c'est que l'article, tel que libellé, pourrait être utilisé dans le but de prévenir les infractions, parce qu'on dit, au paragraphe a, au préambule... pas au préambule mais après le deuxième alinéa ? c'est ça ? paragraphe a, «qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction à une loi fiscale ou à un règlement pris par le gouvernement pour son application a été ou sera commise», ou qui pourrait être commise, et ça, évidemment, c'est calqué du Code criminel. Et, comme vous avez pu entendre mes prédécesseurs, le Code criminel, il y a une gradation, une gradation des infractions.

Là, il ne faut pas oublier que nous sommes en matière fiscale. En matière fiscale, le but et le rôle du gouvernement, c'est de s'assurer que les déclarations des contribuables respectent la situation comptable, légale et juridique dans laquelle ils sont, hein? Bon. Nous sommes dans un système d'autodéclaration, d'autocotisation, donc il n'est que normal que le ministère jouisse de pouvoirs de vérifier a posteriori ? j'insiste sur ce mot, «de vérifier a posteriori» ? si effectivement les renseignements, tels que déclarés ou non déclarés du tout par les contribuables, respectent les impératifs des lois fiscales. Le projet de loi, s'il s'était limité à vérifier pour des crimes passés, entrerait, selon moi, directement dans le mandat du gouvernement. Ici, on dit «des infractions non encore commises».

Écoutez, en matière fiscale... Il faut comprendre que ce qui est normal en matière criminelle pour des crimes de grande importance... Parce que l'article a, ou le paragraphe a, est calqué du Code criminel, comme je l'ai dit. Il faut comprendre qu'en matière criminelle il y a des crimes de grande importance. Loin de nous, à l'APFF, de minimiser l'importance de la fraude fiscale, mais il faut toujours analyser les pouvoirs du ministère dans un contrôle a posteriori pour voir si les déclarations sont exactes. Ici, on parle de vérifier à l'avenir si des infractions pourront être commises dans l'avenir. Alors, ce qui est normal dans un cas de crime grave contre la personne, par exemple un meurtre, un viol, ou la drogue, ou des événements terroristes qui peuvent faire des choses absolument incroyables, alors ce qui est compréhensible et normal dans ce genre de catégorie de crimes là, où aucune réparation n'est possible, alors, dans un contexte comme celui-là, le législateur fédéral a décidé de baliser et d'autoriser ce genre de recherches, de perquisitions et de saisies particulières. Mais ici nous sommes en matière fiscale, alors...

De toute façon, ce que le fisc cherche, c'est de percevoir son dû. Qui dit percevoir son dû dit nécessairement ce qui devait être déclaré, donc ce qui est dû pour les années fiscales passées et courantes. On ne parle pas d'années fiscales à venir pour des transactions légales à venir. Alors, légalement, on chercherait à vérifier des transactions commerciales non encore réalisées. J'ai beaucoup de difficultés avec ça. Il faut baliser, il faut donner les pouvoirs nécessaires au fisc de mesurer et de vérifier les déclarations qu'un contribuable doit faire. Mais, de là à prévenir tout geste futur, je crois que c'est un peu aller au-devant du rôle du ministère.

Comme je l'ai dit, il est normal qu'au Code criminel on retrouve ce pouvoir-là dans des cas extrêmes, dans des crimes très graves de meurtre, de drogue, de terrorisme, de viol, des choses comme ça, parce qu'on cherche à prévenir des préjudices qui ne sont pas, ou difficilement, réparables. En matière fiscale, tout est réparable. Si on découvre le pot aux roses de contribuables qui ont fraudé, bien, le but essentiel, c'est d'aller percevoir les impôts, les intérêts et les pénalités, le cas échéant, mais toujours a posteriori. Ici, on voudrait... Alors, on tombe un peu dans l'intention, on va intercepter des communications... On va intercepter quoi? Des choses à commettre? Alors, ça, on a, en fait, un peu un problème avec ça, premier point.

Le deuxième point, c'est... Et j'ai eu la chance d'entendre avant moi les commentaires des représentants du Barreau. Il n'y a pas, selon nous, un système de gradation. À l'heure actuelle, les pouvoirs sont assez grands, sont balisés par les articles dont j'ai fait état, les articles qui sont présentement en vigueur, de pouvoir d'enquête, de perquisition et de saisie. On parle, ici, dans le nouveau 40.1.1, de mesures extraordinaires, comme je vous ai dit, exorbitantes du droit commun. Il faudrait à tout le moins soit une déclaration assermentée ou une preuve par le fonctionnaire du ministère du Revenu à l'effet qu'aucun des moyens actuels, ou des enquêtes prévues, ou des pouvoirs prévus aux articles 40, 40.1 n'ont fonctionné, ou sont utiles, ou n'ont été utiles, ou se sont avérés efficaces. Là, on parle tout de suite d'aller d'entrée de jeu dans... Ce n'est pas décrit, mais on parle de tout dispositif, technique et méthode d'enquête. Alors, selon nous, il y a un système de gradation, avant de pouvoir ultimement recourir à ces intrusions dans la vie privée, selon nous, qui devrait être intégré dans une prochaine modification, si modification il y a, bien sûr.

Écoutez, c'est certain qu'on peut donner des exemples grossiers, très gros. Je sais que c'est de l'intention du ministère du Revenu d'utiliser ces cas-là à des cas extrêmes. J'ai confiance beaucoup aux gens du ministère du Revenu, pour les connaître personnellement. Mais, tel que libellé, l'article est très large. Alors, à la limite, si on intercepte une conversation téléphonique entre un client et son avocat, bien, évidemment, ceux qui écoutent, ils ne diront pas: Bon, bien, oui, c'est le privilège de la confidentialité, le secret, donc on va mettre l'intercepteur à «off» ? excusez l'expression ? puis on va reprendre après. Non. Écoutez, ils vont l'écouter pareil, et donc l'exclusion de la preuve dans un système comme celui-là est très important. Et, à cet effet-là, je rejoins entièrement les remarques de mon confrère précédent sur les vidéos et l'écoute électronique qui à l'heure actuelle pourraient être visés par ce projet de loi là.

n(12 heures)n

Alors, en conclusion, M. le Président, il faut bien se comprendre, l'APFF est d'accord avec l'ensemble des mesures d'enquête et de perception actuelles du ministère du Revenu, puisque nous sommes dans un système d'autocotisation et d'autodéclaration. Le système fiscal québécois est basé sur ces principes, et il est illusoire de croire que tous les contribuables de ce monde appliquent à la règle une observance maximale et fiscale.

Ceci étant dit, il ne faut pas oublier que ces pouvoirs-là doivent être balisés par les principes que la Cour suprême nous a indiqués et surtout par les règles, les garanties constitutionnelles de la Charte québécoise des droits. Certaines personnes pourraient avoir tendance à dire: Bien, écoutez, ceux qui n'ont rien à se reprocher n'ont pas à craindre ces nouvelles mesures. Mais, vous savez, quand on dit ça, ce serait là, M. le Président, une erreur, parce qu'une société démocratique comme le Québec doit protéger ces garanties constitutionnelles là. Et nous croyons que l'actuel 40.1 devrait être circonscrit pour tenir compte des deux commentaires que j'ai faits et des commentaires précédents dont j'ai eu la chance d'entendre, là... par les prédécesseurs du Barreau.

Écoutez, c'est les seules remarques que j'aurai à vous faire aujourd'hui. Je vois que mon temps est écoulé, M. le Président. Mais, c'est certain, comme je l'ai dit auparavant, nous avons été convoqués à un peu plus de 36 heures d'avis. Je faisais une conférence ce matin dans un autre forum, pas aussi distingué que celui-là, mais quand même, et disons qu'on a pédalé énormément au cours des 36 dernières heures. La qualité de nos interventions, je crois que... J'espère qu'elles vous auront été utiles, mais j'ose croire qu'à l'avenir, le cas échéant, des délais plus grands pourront nous être accordés pour améliorer notre présentation. Alors, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci beaucoup, Me Bourgeois. Alors, je reconnais maintenant M. le ministre du Revenu.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Me Bourgeois, de ma part aussi je...

M. Lelièvre: ...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...de consentement nous poursuivions nos travaux.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): L'avis de la Chambre qui a été donné hier nous donnait jusqu'à midi trente aujourd'hui pour avoir les...

M. Lelièvre: O.K. Parce que j'avais cru comprendre, d'après nos ordres de convocation, qu'on terminait à midi. Merci.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Non, c'est midi trente. Merci. M. le ministre du Revenu, oui.

M. Bergman: M. le Président, il semble qu'on était d'accord avec l'équipe de l'opposition d'aller jusqu'à une heure moins quart, si nécessaire. Mais sans doute qu'on va finir à midi et demie.

Me Bourgeois, félicitations pour votre nouveau poste comme président-directeur général de l'Association de planification fiscale et financière. J'ai été présent au congrès où vous êtes devenu le président, et je vous félicite. Votre Association est une association qui est bien reconnue, et, quand j'ai vu vos prédécesseurs... On voit que c'est une association qui a beaucoup de distinction, beaucoup de respect, et vos opinions sont toujours très, très importantes. Alors, j'aimerais vous assurer publiquement de ma disponibilité pour votre organisation et pour vous dire que le téléphone est toujours ouvert, et on est toujours prêts pour recevoir vos commentaires, de quelque nature que ce soit, en relation du ministère du Revenu.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Excusez. Pardon. Je voulais simplement remercier le ministre pour sa disponibilité.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): O.K. M. le ministre du Revenu, oui.

M. Bergman: Aussi, mes excuses pour le délai de convocation, mais c'était une convocation qui était constructive de ma part et de la part de l'opposition officielle. Et, vraiment, vos interventions ce matin, la qualité de vos interventions... On voit que vous n'avez pas besoin beaucoup de temps pour préparer des commentaires qui sont constructifs, et je vous félicite aussi.

Vous avez fait référence à deux items vraiment, le respect des garanties constitutionnelles, qui sont primordiales, et le respect du citoyen, le respect de son droit de vie privée. C'est la raison que, dans l'article 40.1.1, pour obtenir une autorisation générale, on doit avoir l'opinion et le contrôle d'un arbitre impartial, indépendant afin de contrôler la validation de façon préalable de la demande qui est faite en cour par le fonctionnaire du ministère du Revenu. Et le juge a un pouvoir discrétionnaire d'accorder ou de refuser l'émission du mandat général. Alors, c'est un arbitre qui... L'article 40.1.1 est très, très clair que le juge peut accorder son autorisation, et le juge n'accordera son autorisation que s'il est convaincu que toutes les conditions mentionnées dans le projet de loi, dans l'article en question, sont suivies. Et, si je peux la répéter pour le bénéfice de cette commission, la première condition, «qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction [...] fiscale [...] a été ou sera commise»...

Vous avez misé beaucoup sur les mots «ou sera commise». La question se pose: Si un commerçant a acheté un logiciel Zapper, peut-on croire qu'une infraction sera commise? Moi, je n'ai aucune hésitation. Quand on parle du domaine «est-ce qu'une infraction sera commise», vous savez que, dans le droit fiscal et dans les matières commerciales, il y a beaucoup de personnes innocentes qui sont des fois prises dans une situation où c'était un schéma qui était fabriqué, il y avait beaucoup de contraventions à des lois fiscales. Et, si le ministère, parmi d'autres, peut prévenir ces crimes fiscaux qui affectent des personnes innocentes, pour moi c'est une étape qui est très, très importante. Comme vous, j'ai eu la chance de rencontrer des personnes qui ont été affectées par des graves crimes fiscaux où elles étaient innocentes mais où elles ont perdu tous leurs biens. Alors, nous, comme société, on ne fait rien, mais on doit faire quelque chose, et je pense que c'est un but de cet article.

Les autres conditions: «que des renseignements relatifs à l'infraction seront obtenus grâce à une telle utilisation ou à l'accomplissement d'un tel acte». Et aussi c'est pour éliminer des expéditions de pêche par le ministère, car, avec la preuve qu'on doit faire au juge, c'est une preuve très, très particulière, très méticuleuse qui doit être faite.

Et vous avez fait référence à une déclaration assermentée de la preuve, mais c'est une condition de l'article qu'il doit y avoir une déclaration assermentée avec une preuve devant le juge. Et le juge va décider si l'information présentée devant lui est suffisante. Aussi, le juge doit décider si le mandat servira au mieux l'administration de la justice. Et finalement, et très, très important, le juge devra décider et être convaincu qu'il n'existe aucune autre disposition permettant l'accomplissement d'un tel acte. Alors, on donne au juge de graves responsabilités, mais, dans notre société démocratique, le judiciaire joue un rôle, à mon avis, qui est très important et qui est bien fait.

n(12 h 10)n

Vous avez, dans vos conclusions, parlé d'autres cotisations, autres déclarations, équité, observance aux lois fiscales, et comme vous je suis d'accord que, dans notre société, avec les règles d'autocotisation, comme je l'ai mentionné avant, on doit être assuré qu'il y a une équité et que chaque citoyen respecte les lois fiscales, que les lois s'appliquent à tous, mais toujours, toujours en respectant les chartes devant nous. Et c'est la base de notre système légal, que les chartes soient respectées. Et je vous remercie pour vos interventions, M. Bourgeois.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, M. le ministre. M. Bourgeois... Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Oui. Alors, brièvement, vous avez fait référence, M. le ministre, aux exemples bien connus de fraude fiscale qui mettaient en oeuvre le Zapper, mais, effectivement, lorsque... Les Zappers, c'est dans les restaurants, là, beaucoup plus connus. Ils permettaient aux restaurateurs de dévier des transactions commerciales ordinaires, faire des transactions au comptant, bon... Et je veux que notre message soit clair, l'APFF est absolument contre la fraude fiscale. On parle ici de garanties constitutionnelles, bien entendu.

Là où j'ai insisté sur une intervention, c'est lorsqu'on dit que des infractions pourront être commises ou seront commises. Alors, si le Zapper est là, c'est que des infractions ont été commises. Vous avez justifié peut-être le recours à cette référence-là, «des infractions seront commises», en disant que vous êtes préoccupé par la prévention. Bien, je pense que, comme contribuables québécois, nous sommes tous préoccupés par la prévention, mais la prévention ne doit pas être légiférée dans les pouvoirs du ministère. La prévention, si elle est souhaitable, doit se faire par une meilleure communication auprès de tout le monde. On ne peut pas légiférer de la prévention, sinon on tombe dans des procès d'intention ? d'accord? ? ce qui est très dangereux.

Et je ne veux pas tomber dans la... être démagogue ce matin, mais on a tous connu une brève expérience, voilà quelques semaines, alors que des agents de la Sûreté du Québec qui n'étaient absolument pas commandés par le gouvernement ont décidé de faire de la prévention, hein, et faire des enquêtes sur certains groupes défusionnistes. Et les agents, avec raison, se sont fait corriger dans leur tir: Écoutez, il n'y a aucune infraction criminelle. Si vous pensez qu'il y a une infraction criminelle, enquêtez, mais, juste pour faire de la prévention, ce n'est pas suffisant.

Alors, c'est uniquement mes remarques. Comme vous voyez, c'est uniquement... «Une infraction qui sera commise», nous avons, comme citoyens contribuables québécois, un peu l'épiderme sensible sur des infractions qui n'ont pas encore été commises mais qui pourraient l'être. Je pense que le but et le mandat du fisc, c'est de poursuivre les contrevenants et les fraudeurs avec les outils nécessaires ? d'accord? ? mais pour des fraudes commises, et d'avoir des outils pour détecter ces fraudes-là. Je crois que l'APFF va vous supporter dans vos efforts et je crois qu'à l'heure actuelle les articles sont quand même... actuels de la loi sont quand même assez forts.

Alors, au niveau de la prévention, je crois que ce n'est pas dans la loi qu'on fait de la prévention, c'est avec des mesures comme vous avez entreprises au cours des dernières années avec le BLEF. Le BLEF, pour ceux qui ne connaissent pas, c'est le Bureau de lutte à l'évasion fiscale. Évidemment, ce sont des outils nécessaires, mais, que voulez-vous, on peut bien indiquer au contribuable la façon de s'administrer, mais il y aura toujours des contrevenants. Ça, je crois que ça fait partie de la nature humaine. Mais, de là à légiférer sur des infractions à venir, je ne crois pas que le fisc doit nécessairement tomber dans les infractions potentielles, parce que ça ouvre la voie... Et je sais très bien, connaissant Me Tremblay et les collègues du ministère du Revenu, je sais très bien que ce n'est pas du tout l'intention du fisc, mais, dans cinq ans d'ici, moi, vous, on ne sera peut-être plus là, et les dispositions vont demeurer. Alors, de quelle façon elles seront appliquées? C'est ça, le problème avec de la législation de prévention.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Me Bourgeois. M. le ministre du Revenu, environ trois minutes et demie.

M. Bergman: Oui. M. Bourgeois, on retourne aux mots «sera commise», et il y a une distinction entre, disons, la prévention et essayer de, disons, intervenir juste avant un acte qui sera commis, qui est une infraction aux lois fiscales. La prévention, à mon avis, c'est l'indication qu'on fait au ministère et la diffusion d'information. Ça, c'est, en fait, de la prévention. Mais, dans ce cas, c'était qu'un acte sera commis contre les lois fiscales, et on doit présenter au juge le motif raisonnable pour croire qu'un acte sera commis, qui est contre les lois fiscales.

Maintenant, ce matin l'opposition officielle nous a donné indication qu'ils sont très offusqués avec toutes ces méthodes pour contrevenir... la lutte à l'évasion fiscale. Et vous avez mentionné le BLEF, le Bureau de lutte contre l'évasion fiscale, mais ce Bureau a été fondé par le gouvernement précédent, par l'opposition quand elle était en gouvernement. Alors, je dois leur faire souvenir de ce point.

Finalement, vous mentionniez que dans cinq ans on ne serait pas là. Peut-être. Mais, dans note société démocratique, le judiciaire sera toujours là, et, certainement, avec respect à tous les fonctionnaires du ministère du Revenu, qui sont des fonctionnaires qui sont très, très, très compétents, très dévoués et qui agissent dans une manière qui est exemplaire dans notre société, il y a toujours le judiciaire pour les surveiller dans les fonctions et dans les matières en application des lois fiscales de cette nature. Alors, on a toujours la certitude qu'il y aura, comme on dit en anglais, les «checks and balances» qui est nécessaire dans un article de cette nature qu'on a devant nous.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, M. le ministre. Me Bourgeois, en 20 secondes.

M. Bourgeois (Daniel): Merci beaucoup. C'est tout ce que j'ai besoin... Vous avez référé, et je reviens, à l'expression «qui sera commise». Avec respect pour l'opinion contraire et surtout déférence pour votre opinion, M. le ministre, je crois que le ministère du Revenu n'a pas juridiction, n'a pas les pouvoirs nécessaires pour enquêter sur quelque chose qui pourrait être fait. La juridiction du ministère du Revenu, c'est pour vérifier, enquêter des registres, des lois fiscales, donc ce que le contribuable doit déclarer, a dû déclarer, avec respect. Et peut-être que je me trompe, mais je crois qu'il découle de l'économie générale de nos lois fiscales que, si vous voulez enquêter sur quelque chose qui n'a pas encore eu lieu, je crois que le ministère n'a pas juridiction pour ça.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Me Bourgeois. Alors donc, nous entrons dans le prochain bloc de 15 minutes. Juste pour rappeler que l'ordre de la Chambre hier parlait de midi trente. Nous avions convenu par consentement unanime mardi dernier que nous pourrions poursuivre légèrement après midi trente, si nécessaire, pour pouvoir permettre de terminer l'échange entrepris avec notre invité. Alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...d'accord. J'accorde mon consentement, M. le Président.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Me Bourgeois, merci d'être ici aujourd'hui. Oui, je partage vos appréhensions, parce que, en ce qui a trait à réprimer des crimes qui seront commis, on a une disposition semblable dans la Loi sur les mesures de guerre. C'est-à-dire qu'on peut parler d'insurrection appréhendée, mais elle n'est pas encore arrivée. Donc, est-ce qu'on veut introduire un nouveau concept juridique à l'intérieur des lois fiscales ou dans les autres lois?

Vous avez mentionné à juste titre que, dans le fond, les acteurs passent mais les textes demeurent. Et cette loi-là que le ministre du Revenu nous propose aujourd'hui, il n'y a plus de retour en arrière possible. Lorsque le pouvoir est accordé, le pouvoir est accordé. Et je n'ai jamais vu une institution qui recule, qui dit: Moi, je n'ai plus besoin de ces pouvoirs-là, je modifie mes lois. La machine, et ce n'est pas propre au ministère du Revenu, une machine gouvernementale est toujours en quête de plus de pouvoirs. Nous sommes dans des institutions démocratiques et nous visons à protéger aussi, à maintenir, à mettre un frein ou à les restreindre dans cette soif de pouvoirs, je pourrais dire. Mais je ne dis pas que c'est mal intentionné, c'est la nature humaine qui est faite ainsi.

n(12 h 20)n

40.1.1, à mon avis, est une disposition qui autorise les parties de pêche et qui va permettre à des personnes qui n'ont pas le statut d'agent de la paix mais qui vont devenir des intervenants dans le domaine policier... Non pas que je doute de leur compétence scientifique ou académique, ce n'est pas ça. Mais jusqu'où ça va arrêter? Par exemple, je regarde dans le Code de procédure pénale. Lorsqu'une perquisition est effectuée puis qu'il n'y a pas personne, on doit donner un avis, hein? Comment se fait-il que dans cette disposition-là... Trois ans, hein? Il y a une disposition que l'enquête... la perquisition... s'il s'agit d'une perquisition... «Le juge qui accorde une autorisation de perquisitionner secrètement ou un juge compétent pour décerner une telle autorisation peut accorder une prolongation, initiale ou ultérieure, du délai visé au cinquième alinéa, d'une durée maximale de trois ans...» Il y a des dispositions qu'on ne retrouve même pas ? en tout cas, à moins que je me trompe ? dans le Code criminel.

Lorsqu'on va chercher un mandat de perquisition, c'est pour agir parce qu'on a des preuves et non pas aller chercher des preuves. Ce que le ministère du Revenu nous demande comme citoyens puis comme législateurs, c'est de dire: Donnez-nous les moyens pour aller vérifier un peu partout nos soupçons, et ensuite on va tenter de monter une preuve, et ensuite on va aller chercher un jugement, une condamnation ou encore une demande de paiement puis obtenir le paiement des sommes qui seraient dues au ministère du Revenu. Alors, moi, oui, je partage vos appréhensions là-dessus, mais je voudrais savoir: Si vous êtes d'avis que 40.1.1 permet ces parties de pêche, comment devrions-nous le restreindre?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Merci. Alors, nous ne sommes pas contre le principe derrière l'actuel article; nous croyons simplement qu'il devrait être balisé. Ce que j'ai dit un peu plus tôt, c'est qu'un mécanisme de gradation devrait être inclus, et je crois que mes prédécesseurs vous ont entretenus à ce sujet, lequel mécanisme de gradation... Il faudrait être assuré que les autres articles préalables, 40, 40.1, ne sont pas efficaces, et ça, c'est parce que, de la manière qu'il est libellé à l'alinéa c, seul le juge, qui, entre vous et moi, n'est pas un spécialiste des lois fiscales, tout ça, devant qui le mandat sera déposé pourra analyser si la demande assermentée du ministère... s'il n'y a pas d'autres dispositions de lois fiscales dans le Code de procédure pénale qui peuvent s'appliquer.

Bon, là, sur les épaules du juge, on lui en donne beaucoup. Probablement que, dans l'affidavit circonstancié, j'imagine que, s'il est bien préparé, on aura, je l'espère, prévu cette circonstance-là. Mais, comme je le disais un peu plus tôt, le Code criminel, d'où cette disposition-là semble... pas semble, mais est importée, est appliqué dans des situations... dans des crimes et peut se justifier, dans notre société, pour des crimes très graves, très graves, et ce qui est nécessaire, comme j'ai dit un peu plus tôt. Donc, si des modifications devaient être apportées à cet article, je les verrais plus, moi, du côté de voir qu'est-ce qui s'est fait au Code criminel. Ce n'est pas parce que je veux ? du tout ? que le Québec calque les dispositions fédérales ? on connaît tous les questions de juridiction ? mais c'est uniquement que l'historique et l'expérience du Code criminel... Parce qu'ils se sont fait annuler plusieurs dispositions légales par le passé. Alors, les dispositions actuelles ont passé les tests des garanties constitutionnelles. Donc, dans la mesure où ces modifications-là peuvent apporter...

Écoutez, on l'a dit plus tôt, l'APFF n'est pas contre la vertu et va toujours soutenir le ministère du Revenu dans ses pouvoirs d'enquête, dans la mesure où les garanties sont respectées.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: D'autre part, à 40.1.1, à la toute fin, on dit que, l'autorisation qui est requise pour la perquisition, ou une fouille, ou une saisie, qui même pourrait être considérée abusive si on n'avait pas l'autorisation, on peut aller chercher ça par télémandat. Donc, la présentation d'une preuve sera restreinte, dans le sens qu'on peut échanger... On va suivre la procédure qui est prévue au Code de procédure pénale, mais le juge va prendre la déclaration assermentée d'un fonctionnaire et, à ce moment-là, sur la foi des allégations, va autoriser ces perquisitions. Alors, il n'y a pas d'enquête, là. Il n'y a pas nécessairement d'enquête. C'est qu'il va en prendre connaissance, ou encore on va lui présenter, avec un affidavit, dans le cadre d'une dénonciation, parce qu'il sera sous serment... Mais le juge ne questionne pas nécessairement les éléments. Alors, c'est là que je trouve... C'est gros comme... C'est large comme pouvoir dans cette démarche-là. Et je partage votre opinion à l'effet qu'on doit...

Lorsque le ministère du Revenu fait ses enquêtes, c'est de vérifier que chacun à chaque année se conforme aux lois fiscales, et à ses amendements, et à sa réglementation. Alors, pourquoi veut-on aller dans le futur? Je ne le sais pas. Je ne le sais pas. Peut-être que vous pouvez me renseigner là-dessus. Pourquoi qu'on veut... Est-ce que c'est commun, en dehors du Québec, qu'on fasse ces démarches-là aussi, qu'on veut aller vérifier des situations qui sont des appréhensions et qu'on veut prévenir? Est-ce que, à l'extérieur du Québec, on fait ce genre de procédure?

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): En fait, le pourquoi, ce n'est certainement pas à moi de répondre, mais on peut tous imaginer que le pourquoi, c'est de viser une meilleure observance des lois fiscales. C'est un but louable et légitime. Maintenant, ce qui se fait à l'étranger, je ne pourrais pas vous répondre, puisque je n'ai pas l'expertise nécessaire sur ce qui se passe outre-frontières.

M. Lelièvre: Au Canada, là, ou dans les autres provinces?

M. Bourgeois (Daniel): Bien, les autres, elles ont leur propre Code de procédure pénale. Je ne peux pas vous dire. Mais je crois que les balises qui sont celles que l'on retrouve au Code criminel à l'heure actuelle pour des crimes, comme je le mentionnais un peu plus tôt, à caractère beaucoup plus grave, dont il n'y a aucune réparation de possible... Je crois que l'article du Code criminel est justifié dans ces cas-là, puisqu'on porte atteinte ici à des choses qui sont extrêmement importantes, qui sont, bon, bien, les discussions téléphoniques, l'écoute vidéo... c'est-à-dire la prise de vidéo sur nous, surtout quand le vidéo est couplé à de l'écoute électronique. Donc, il y a des critères, il y a des gradations que l'on retrouve dans le Code criminel, que l'on ne retrouve pas ici.

Parce que, je répète, c'est que, dans la mesure où on peut retrouver cette gradation-là dans l'actuel 40.1.1, bien là il m'apparaîtrait à tout le moins que les garanties constitutionnelles seraient plus protégées. Mais, encore là, ça prend nécessairement une gradation des risques, il faut avoir une preuve, et je crois que... Mais c'est tout le problème des requêtes ex parte faites devant le juge alors qu'il n'y a aucune enquête de faite, là, hein? Il n'y a pas personne qui est capable de dire: Non, ce n'est pas vrai.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le Président, je vais permettre à ma collègue de poser une...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Il y a encore cinq minutes. Ou Mme la députée de Mirabel?

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Merci pour votre participation, Me Bourgeois. Ma question est la suivante. Concernant l'article 40.1.3 concernant le secret professionnel, j'aimerais avoir vos commentaires. Lorsque l'on mentionne que «l'ordonnance peut être assortie des modalités que le juge estime appropriées, notamment pour protéger le secret professionnel de l'avocat ou du notaire», tantôt le Barreau du Québec a suggéré un amendement à l'effet que, au lieu de mentionner «l'ordonnance peut être assortie», il suggérait «l'ordonnance doit être assortie des modalités». Et l'on suggérait également que le syndic pourrait intervenir. J'aimerais avoir vos commentaires concernant ces propositions-là par le Barreau du Québec.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Alors, pour revenir brièvement à ce que j'ai dit un peu plus tôt, dans quelles circonstances... évidemment, si le juge qui est saisi de cette requête ex parte là ne juge pas opportun ou oublie de mentionner quelque chose, évidemment, son pouvoir discrétionnaire, donc, il ne l'exerce pas. Il peut ne pas l'exercer pour différentes raisons. Mais c'est certain que l'agent qui va faire de l'écoute électronique ou va ouvrir le courrier, par exemple, de la Société canadienne des postes, même si c'est un crime... Mais là il aurait été autorisé... Qu'est-ce qui va arriver? Qu'est-ce qu'il va faire devant une lettre, un avis juridique confidentiel ou devant des conseils juridiques au téléphone? Est-ce qu'il va dire: Non, si je n'ai pas d'ordonnance là-dessus ou de limitation, je vais m'arrêter?

n(12 h 30)n

En tout cas, il est possible de croire ? je ne sais pas si ça peut se faire ? mais il est possible de croire que les fonctionnaires puissent continuer à faire de l'écoute. Je crois que les propositions dont vous faites état par le Barreau seraient quand même un rempart contre ces possibilités-là.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Mme la députée de Mirabel.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Est-ce que vous pensez qu'on devrait extensionner la liste des professionnels?

M. Bourgeois (Daniel): À l'heure actuelle...

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): M. Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Merci. Je n'ai pas fait de vérification dernièrement en ce qui concerne le Code des professions, et surtout le Code de procédure pénale, mais je crois que les seuls secrets professionnels qui sont garantis par les chartes sont le secret professionnel de l'avocat ou du notaire, mais surtout de l'avocat, dans un contexte où on ne peut pas... C'est un droit qui est garanti par les chartes, qui ont été maintes fois, maintes fois validées par la Cour suprême. Parce que l'on vient, à la base même de notre système judiciaire, pénal et criminel... du principe selon lequel on ne peut pas forcer quelqu'un à s'auto-incriminer. D'accord? Et, dans ce cadre-là, le secret professionnel, je crois, s'il est limité à la relation qu'un contribuable a avec son aviseur légal, serait suffisant. Je ne crois pas qu'on a besoin de l'étendre.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Merci, Me Bourgeois. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. La question de l'assistance qu'on retrouve à l'article 40.1.2, «le juge qui a accordé une autorisation en vertu de l'un des articles 40 et 40.1.1 peut ordonner à toute personne de prêter son assistance si celle-ci peut raisonnablement être nécessaire à l'exécution des actes autorisés», alors j'imagine que, bon, il y a une perquisition ou on va chercher de l'information, on va chez les planificateurs financiers, la personne est... On peut dire que c'est une perquisition secrète. Est-ce qu'on peut utiliser, dans le fond, tout le vocabulaire qui est inclus dans ces articles-là et d'autre part dire aux planificateurs: Bien, écoute, c'est une perquisition secrète, et vous avez une ordonnance du juge de ne pas en parler, mais continuez à travailler comme si de rien n'était? Je pense qu'il y a des questionnements à se faire à ce niveau-là. Ça peut être d'autres professionnels. Et j'aimerais ça que... Je comprends que nous sommes dans un processus législatif, on est en commission, on a déjà procédé article par article sur une partie technique, là, mais ce serait peut-être important de pouvoir prendre le temps nécessaire pour évaluer la portée de ces articles-là.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Me Bourgeois.

M. Bourgeois (Daniel): Oui. La loi, à l'heure actuelle, comporte déjà le pouvoir pour le ministre de demander à tout tiers, par des demandes péremptoires, des informations. Sauf votre respect, je ne crois pas que cet article-là vise ces situations-là. Comme planificateur financier, je crois... Mais là il faudrait le demander aux gens de l'administration fiscale. J'ai plutôt l'impression que cet article-là vise, par exemple, par exemple, en matière d'écoute électronique ou d'Internet... Là, on a parlé de virus un peu tantôt. Alors, dans la mesure où une certaine expertise n'était pas disponible à l'intérieur de la fonction publique, est-ce qu'on ne pourrait pas s'adresser à d'autres personnes pour faire une surveillance, par exemple, d'un site Internet, ou de courriels, ou de choses du genre? Mais je ne sais pas, là, parce que... Mais ça pourrait certainement être applicable à ce genre de personnes là.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Il reste 10 secondes, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Ah, il nous reste 10 secondes? Je vous remercie d'être venus. On s'excuse de vous avoir convoqués dans un délai si restreint.

Le Président (M. Paquet, Laval-des-Rapides): Alors, au nom des membres de la commission, je souhaite remercier Me Bourgeois pour sa présentation et sa participation à nos travaux. Alors donc, conformément au règlement, j'ajourne maintenant les travaux de la commission jusqu'au prochain avis de l'Assemblée, qui, je crois bien, a des bonnes chances d'arriver cet après-midi. Alors donc, merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

 

(Reprise à 15 h 33)

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la commission des finances publiques ouverte. Avant de débuter, je demanderais à tous ceux et celles qui ont un téléphone cellulaire de bien vouloir l'éteindre, s'il vous plaît.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives, et par la suite nous allons poursuivre l'étude détaillée du projet de loi article par article.

J'inviterais M. André Gariépy, du Conseil interprofessionnel du Québec, à faire son allocution. M. Gariépy, vous avez 15 minutes pour votre mémoire, et, par la suite, un bloc de 15 minutes au parti représentant le gouvernement et 15 minutes à l'opposition officielle. Merci. La parole est à vous.

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Gariépy (André): Alors, merci, M. le Président. Mmes et MM. les députés, M. le ministre, je suis André Gariépy, je suis avocat de profession, et ma job payante de jour, c'est directeur général du Conseil interprofessionnel du Québec, qui est un organisme reconnu par le Code des professions comme étant l'organisme-conseil de l'autorité publique en ce qui a trait aux affaires du système professionnel, et le Conseil regroupe les 45 corps professionnels que l'État québécois a créés pour gérer autant de pratiques à risque de préjudice pour la population. L'ensemble des 45 corps professionnels surveillent la pratique de 290 000 professionnels québécois dans des secteurs aussi stratégiques que le génie, l'aménagement et les sciences, le droit et les affaires, et la santé et les relations humaines.

Vous comprendrez que le délai, c'est très court. Et c'est ce matin que j'ai appris que je pouvais m'adresser à vous au nom du Conseil interprofessionnel et de ses 45 membres pour vous faire part de nos considérations sur le projet de loi n° 20, un projet de loi qui, je vous l'avoue... Et, M. le ministre, n'en soyez pas choqué, je n'ai pas l'habitude d'ouvrir les fichiers sur le site de l'Assemblée nationale du Québec lorsqu'on parle de la Loi sur le ministère du Revenu, n'en déplaise à tous vos collaborateurs, qui certainement font un très bon travail. Ma soeur est dans le domaine, elle est inspectrice à l'impôt, et, curieusement, elle inspecte les professionnels en pratique privée. Alors, vous pouvez vous imaginer les partys de Noël que nous avons. Donc, j'ai beaucoup de respect pour la fonction, dans notre société, du ministère du Revenu, mais je n'ai pas l'habitude de cliquer sur tout projet de loi qui concerne le ministère du Revenu, me disant que c'est une loi sur un ministère et ce n'est pas une loi sur des actions concrètes de programmes ou qui touchent les citoyens, etc.

C'est peut-être quelque chose à clarifier d'ailleurs dans la loi elle-même pour distinguer les choses. Donc, il ne faut pas être surpris que cette loi-là ait sorti de notre radar et que, il y a quelques jours, on nous ait appelés pour nous dire: Oh! il y a quelque chose à l'article 25 de ce projet de loi là, parce que ce projet de loi est un amalgame de toutes sortes de mesures. C'est souvent sympathique et utile d'avoir ce genre de projet de loi pour régler des problèmes ponctuels, mais là on voit que l'article 25 est d'un tout autre genre, et c'est la gravité de ce genre que je viens vous livrer aujourd'hui.

Il s'agit, comme le disent de façon assez anodine les notes explicatives, de prévoir des procédures d'autorisation générale et modifier certaines règles, bon... Il y a plus dans cet article 25, et pour nous il s'agit d'une importation, puisque, bon, on a démasqué la source du texte, qui est le Code criminel. On voit que c'est une inspiration du milieu policier, du milieu de la répression, prévention et répression des crimes ? quand on parle de crimes, ce n'est pas au sens large mais au sens du Code criminel même ? dans leur gravité objective, et, nous, on s'est dit: Mais qu'est-ce que c'est que cette affaire-là en milieu fiscal, en domaine fiscal? Est-ce que le fait de devoir de l'argent au gouvernement est devenu l'équivalent de commettre un meurtre?

Il ne faut pas dénaturer et dévaloriser les lois fiscales, sauf qu'il y en a beaucoup de lois où on doit de l'argent au gouvernement éventuellement. Il y a beaucoup de lois qui effectivement méritent qu'elles soient appliquées à 100 %. Mais, le 100 % étant l'objectif, est-ce que tous le moyens sont bons? Bien là il faut jauger les choses. Parce que, si je veux vivre dans une société qui applique ses lois, effectivement, je veux vivre aussi dans une société où j'aurai certaines libertés fondamentales, et on respectera les droits fondamentaux que j'ai comme citoyen. Alors, tout est donc question de proportionnalité là-dedans.

Et la Charte canadienne nous donne, à son article 1, cette proportionnalité qui fait que, lorsqu'une loi enfreint les droits fondamentaux ? on parle de droit à la vie privée, droit à la protection physique, la protection des biens, le secret professionnel ? lorsqu'une loi affecte ces droits-là, il faut jauger si l'objectif vaut cette mesure extraordinaire, si le besoin de plus grande efficacité... Le ministre parlait de maximal. Alors, quelquefois il faut parler peut-être plus d'optimal pour justement faire un équilibre avec les autres droits dans la société. Alors, il faut jauger les autres éléments qu'on retrouve dans le régime juridique qui nous garantit une société libre, une société toujours démocratique. Sinon, si l'objectif l'emporte sur tout, nous ne serons plus dans une société libre, une société démocratique. Alors, il faut faire excessivement attention, et la lettre qu'on vous a fait parvenir ce matin expose très bien notre souci philosophique derrière ça. Et je ne veux pas que ça demeure une discussion très théorique, il faut aller dans le concret des choses, et je vous amène dans ce concret des choses.

n(15 h 40)n

Le secret professionnel, pour certains décrié comme un attribut aristocratique pour embêter tout le monde et se penser plus smatte que les autres, en fait, le secret professionnel, c'est un droit fondamental pour le client. Et le secret professionnel, c'est aussi un outil pour le professionnel. Lorsque nous avons la garantie que nous pouvons confier correctement, en toute sécurité, des confidences à un professionnel, qu'il soit de toutes sortes de secteurs d'intervention, nous ajoutons à la qualité des services professionnels.

Prenons, par exemple, en santé mentale, qui est l'exemple le plus éloquent. Si nous n'avons pas la garantie que nous pouvons nous confier à un psychologue, à un psychiatre et bientôt, nous l'espérons, à un psychothérapeute... Parce qu'on attend longtemps, là, sur ce titre-là. Eh bien, la démarche même de se confier fait partie de la réponse aux besoins du citoyen, du client, de la personne qui est en quête de soins, en quête d'intervention professionnelle pour régler ses problèmes. Alors, si on n'a pas de telles garanties, bien, l'équilibre de la relation professionnel-client est complètement faussé. Les gens ne vont pas requérir les services dont ils ont besoin, et il est clair que tout notre système qui garantit aux citoyens d'avoir des services de qualité et de retrouver leur capacité d'être des citoyens participatifs à la société sur le plan économique, intellectuel et autre, et social, eh bien, tout ça va s'effondrer. Là, vous allez me dire: Vous en mettez un peu. Écoutez, lorsqu'on parle de valeurs fondamentales, il faut regarder loin, il faut regarder large parce que ce sont les fondements de la société.

J'ai entendu les échanges ce matin en commission parlementaire et je vous mets en garde contre le fait de distinguer un vrai secret professionnel, un faux secret professionnel, un secret professionnel de haut niveau et un secret professionnel sympathique ? mais, quand même, on peut le tasser pour rien. Je regrette, en contexte québécois, la société québécoise a fait des choix historiquement, il n'y a qu'un secret professionnel. Il tire sa source, pour ce qui est des juristes, d'une histoire et d'un support juridique qui est propre au domaine d'intervention des avocats, cadre judiciaire qui a été constitutionnalisé, ça, on n'en disconvient pas. Pour ce qui est des autres professionnels assujettis de par le Code des professions, les 44 autres ordres professionnels, l'effet est le même parce que c'est l'article 9 de la Charte québécoise qui, m'a-t-on dit dans mes cours de droit, a valeur quasi constitutionnelle en contexte québécois. Ça veut dire que l'effet est le même: des communications avec un professionnel, les renseignements qui sont transmis à un professionnel du fait de sa profession sont soumis aux mêmes règles d'encadrement en termes de secret.

La confidentialité est à la base même de l'intervention de l'État lorsqu'on encadre une profession. Regardez l'article 25 du Code des professions, deux critères portent sur justement le caractère confidentiel de la relation professionnel-client. Le premier critère dit: «Le caractère confidentiel des renseignements que ces personnes sont appelées à connaître dans l'exercice de leur profession, le caractère personnel des rapports entre ces personnes et les gens recourant à leurs services...» L'État s'est donné des balises pour dire: Dans ces cas-là ? et, justement, l'un des éléments, c'est la confidentialité et la sensibilité des informations ? nous allons intervenir pour encadrer. Et les professionnels qui sont appelés à détenir de telles informations, qu'ils soient avocats, qu'ils soient médecins, qu'ils soient psychologues, qu'ils soient technologues, ces gens-là seront soumis à des règles, un, de compétence, parce qu'il y a des préjudices à leur activité, mais, à l'égard des renseignements confidentiels, ils seront soumis à des règles d'intégrité et de respect du secret professionnel.

La Charte québécoise ne doit pas être banalisée. À l'article 9.1 de la Charte québécoise, on nous dit: Les droits, l'exercice des droits peut être aménagé par les lois. Eh bien, l'interprétation des cours à l'égard de l'article 9.1 de la Charte québécoise nous dit que ça équivaut au critère de l'article 1 de la Charte canadienne, c'est-à-dire qu'il faut qu'il n'y ait ni irrationalité ni arbitraire et que les moyens employés sont proportionnels à l'objet que l'on veut atteindre. Or, les moyens que l'on veut introduire dans la Loi sur le ministère du Revenu actuellement sont des moyens qui ont été déclarés proportionnels et adéquats pour des crimes selon le Code criminel. Et je vous mets en garde contre le fait d'importer abusivement, trop simplement un bel outil. Puis, j'en conviens, quand on travaille dans un ministère et qu'on est contre le mal et qu'on est pour le bien, c'est grisant, et, comme personne humaine, on voudrait avoir tous les outils. Puis on voit quelqu'un qui est dans un autre contexte philosophique et de valeur au fédéral qui, lui, se trouve à avoir toutes sortes de beaux outils, puis on voudrait l'avoir aussi. Un instant. La société québécoise a tracé des balises fondamentales avec sa Charte des droits et libertés, il faut en tenir compte.

Il n'y a pas de petit ou de grand secret professionnel. Au Québec, il n'y a qu'un secret professionnel. Chacun tire sa source dans son cadre procédural, pour ce qui est des juristes et tout, et chacun tire son interprétation et sa mise en oeuvre dans le cadre de sa pratique. Ne venez pas me dire, M. le Président, que les médecins qui répondent au serment d'Hippocrate... Et je pourrais vous le lire. C'est tellement lyrique! Mais là j'ai perdu le document. Ça fait 2000 ans que ce serment-là circule dans les sociétés occidentales. Ne venez pas me dire que ça ne fait pas partie de nos valeurs de société et que tous les professionnels de la santé, à la limite, sont des héritiers de ce serment-là. Nous avons fait des choix comme société, et le projet de loi, malheureusement, pour atteindre son objectif de plus grande efficacité, va un peu trop loin.

Et, lorsqu'on dit «tout dispositif», et tout, et tout, laissez-moi vous lire ce que la directive du Guide de pratiques policières interprète comme étant justement tout dispositif, technique, méthode d'enquête qui constituerait, sans ce mandat général, une fouille, une perquisition, une saisie abusive, par exemple. Le «par exemple», voici la liste... comment les policiers interprètent la chose et comment l'article qui sera introduit risque d'être interprété: «Fouille périphérique» ? c'est un terme, malheureusement, que je ne peux pas définir, «fouille périphérique»: installation d'un poste de surveillance sur un terrain privé, prise de photos d'un individu dans un endroit privé, saisie sur un suspect de vêtements, de lunettes, de son agenda, de bandages, avec l'assistance d'un médecin, perquisition par anticipation, exemple, saisie de chèques au fur et à mesure qu'ils seront déposés dans un compte, introduction dans un lieu pour y faire des photocopies et pour y prélever des données dans un ordinateur. Alors, ça peut être toutes sortes de choses. Ça peut être aussi et certainement des techniques invasives, et je crois qu'au Québec ce qu'on voudra s'assurer, c'est que, si on s'autorise à ça, il faut que quelqu'un le décide, autre que la personne qui pense avoir le besoin de le faire. On ne laisse pas aux policiers la liberté de faire les choses.

Et même au Code criminel c'est instauré comme ça, il y a des gens qui décident, mais aussi dans notre Code de procédure pénale. Et laissez-moi vous dire qu'en contexte québécois ? je vous parlais de la Charte ? lorsqu'on adopte une loi en contexte québécois, on respecte les valeurs du Québec et ses lois quasi constitutionnelles comme la Charte, le Code de procédure pénale qui permet au gouvernement de poursuivre, de faire des perquisitions et tout, de faire un travail d'enquêteur puis justement de répression et de prévention des infractions aux lois du Québec. Ce pourrait être aussi les lois fiscales. Qu'est-ce qu'on dit à l'article 115? Les personnes soumises au secret professionnel, les documents puis les perquisitions, il doit y avoir un juge, et on doit donner la possibilité de s'opposer, et le juge va trancher.

Et je vous disais qu'il n'y a pas de secret professionnel d'un bord et de petits secrets professionnels qu'on peut tasser. L'article 115 du Code de procédure pénale, qui est la loi générale des enquêtes et des poursuites pour appliquer des lois du Québec... Le ministère du Revenu s'est généré un petit régime à part, on comprendra, pour toutes sortes de finalités. Mais cette loi-là nous dit: Le secret professionnel dont il est question dans les lois, pour l'application des lois, c'est le secret professionnel pour les 45 ordres professionnels. Alors, moi, je vous dis: Ce projet de loi là est incomplet parce qu'il ne prévoit pas, à tout le moins pour le juge, de tenir compte obligatoirement de la présence en sol québécois d'un secret professionnel pour lequel il y a une valeur de société et auquel nous tenons comme citoyens, et il porte à faux par rapport à tout l'édifice législatif québécois, en commençant par sa loi suprême, à certains égards, c'est-à-dire la Charte des droits et libertés du Québec. Alors, pour nous, il est important de ne pas bâcler cette chose-là pour des questions de simple efficacité.

Je peux vous dire que, quand on parle à l'Association des...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): En conclusion, M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui, en conclusion. Quand on parle à l'Association des chefs de police du Canada, eux autres, là, il n'y en aurait plus, de Charte canadienne des droits et libertés. C'est bien, travailler contre le mal, mais il faut le faire d'une façon que ce soit crédible et confortable pour les citoyens. On ne voudrait pas vivre dans un État policier. Et je crois que la mesure, parce qu'on manque de balises, est disproportionnée pour l'application des lois fiscales.

n(15 h 50)n

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci, M. Gariépy. La deuxième phase, c'est: on va passer aux échanges, et, comme on l'a mentionné précédemment, M. le ministre du Revenu, on va débuter les échanges. 15 minutes.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Bienvenue, Me Gariépy. Bienvenue, Me Gariépy, le directeur général du Conseil interprofessionnel du Québec. Je dois vous dire, comme je vous l'ai dit dans le temps que j'étais le porte-parole de l'opposition en matière de code des professions, que j'ai un grand respect pour vous et certainement pour le Conseil interprofessionnel du Québec, en plus pour les 45 ordres professionnels et les 290 membres des ordres professionnels. Certainement que nous avons un des meilleurs systèmes professionnels dans le monde, un système professionnel qui a été fondé par un gouvernement du Parti libéral, sous la direction de M. Bourassa, et certainement qu'on peut être fiers, ici, au Québec, de notre système professionnel, et on retient cette fierté. Je suis même membre d'un ordre professionnel et j'en suis très fier.

Je m'excuse pour le court délai pour l'invitation, mais, en fait, ça démontre l'ouverture du côté ministériel: on a reçu votre demande d'invitation hier soir et on a mis en motion cette demande d'invitation pour acceptation même après que les cédules pour aujourd'hui étaient arrangées. Alors, bienvenue, et vous êtes toujours le bienvenu pour nous donner des suggestions et des commentaires.

Aussi, je suis en train de compléter, demain après-midi, une tournée que je fais des diverses succursales du ministère du Revenu pour rencontrer tous les employés du ministère. Alors, je suis certain, à un moment, que j'avais ou j'aurai la chance de rencontrer votre soeur et...

M. Gariépy (André): Elle travaille au fédéral.

M. Bergman: Alors, je n'aurai pas cette chance de la rencontrer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bergman: Vous avez fait cette présentation devant nous principalement sur la question du secret professionnel et vous avez raison que le secret professionnel des 290 000 membres, les membres autres que les membres du Barreau et la Chambre des notaires, n'est pas, disons, protégé dans le cadre de l'utilisation générale. Mais j'attire votre attention que ce n'est pas non plus protégé par les mandats de perquisition ordinaires qui existent en matière fiscale depuis au moins l'année 1972. Et pourtant on n'a pas eu des représentations du Conseil interprofessionnel du Québec depuis au moins 1992 et on n'a pas aussi eu des commentaires d'aucun abus. Alors, ça, c'est dans le background de qu'est-ce qu'on étudie aujourd'hui.

Vous avez aussi fait mention du type de propositions que nous avons devant nous ici avec l'article 25 et vous faites mention de quelqu'un qui doit de l'argent au fisc et que vous trouvez les mesures un peu difficiles pour quelqu'un qui doit de l'argent au fisc. Mais j'attire votre attention que le but de cet article n'est pas aux citoyens, aux contribuables, aux gens appelés notre client, le client du ministère qui doit de l'argent dans le cours ordinaire de ses affaires, mais celui qui veut détourner les lois, qui ne veut pas suivre les lois. Et, comme j'ai mentionné en Chambre cet après-midi, le ministère a un principe de base qu'on appelle équité, et chacun doit prendre sur son obligation de rendre son service à l'État dans la proportion demandée à lui par nos lois fiscales, et la loi s'applique à chaque citoyen, et il n'y a aucune exception, et chaque citoyen doit suivre la loi. Et, pour nous, pour le ministère, il n'y a pas de problème.

Et vous avez aussi parlé du mot «maximal», que j'ai employé en réponse aux questions du député de Gaspé, mais le maximal, c'est que, quand il y a des citoyens qui veulent détourner la loi, où il y a l'évasion fiscale, certainement de la fraude, certainement que la loi sera appliquée au maximum. Et je dis ça très, très clairement devant vous et devant cette commission parlementaire. Alors, pour moi, c'est un signe d'une société libre et démocratique quand on respecte 99,9 % de nos citoyens qui paient leurs taxes, leurs impôts à temps. On doit le respecter, et le respecter, ça, c'est un signe de société démocratique libre, qu'on doit avoir des lois pour éviter des évasions fiscales.

En ce qui concerne le secret professionnel, vous faites référence, au Québec, à la Charte des droits et libertés de la personne qui accorde le secret professionnel à tout professionnel ? l'article 9. Mais, vous savez, par ces articles aussi, il permet d'exclure des professionnels de ce secret professionnel. Ici, pour les fins de cette commission parlementaire, je peux lire l'article 9 en question: «Chacun a droit au respect du secret professionnel.» Il se lit comme suit: «Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi.» Fin de citation de ce premier alinéa. Moi, je dis, et c'était bien retenu, que le législateur ne parle pas pour rien. Alors, il y a une raison qu'il y a cette phrase qui dit «ou par une disposition expresse de la loi», et, certainement, dans la Loi sur le ministère du Revenu, l'article 46 exclut tous les professionnels, sauf l'avocat et le notaire, pour seulement les lois fiscales qui est devant nous aujourd'hui.

On ne banalise pas le secret professionnel. C'est très important. Le secret professionnel, c'est un principe de justice fondamental qui nous provient du «common law», le droit pour une personne de présenter une défense pleine et entière, et ça, on le reconnaît, et ça, c'est très important, et le droit d'un inculpé à un procès équitable. Ces principes ont été repris et protégés par la Charte canadienne, et la Charte canadienne des droits et libertés nous dit que le droit à une défense pleine et entière pour l'accusé, à l'article 7, cela implique les droits à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi que les droits d'un innocent de ne pas être déclaré coupable, le droit d'un inculpé à un procès équitable ? article 11d de la Charte.

La législation particulière comme le Code criminel, à laquelle vous avez fait référence, la législation particulière comme le Code criminel a traduit cela par l'introduction du secret professionnel uniquement pour l'avocat et, par extension, les notaires, et vous savez mon affinité pour les notaires. Il n'y a pas d'autres types de professionnels qui sont reconnus par les législations particulières suivantes, comme le Code criminel, la Loi sur la taxe d'accise et la loi sur l'impôt sur le revenu. Alors, toutes ces lois reconnaissent le secret professionnel, mais seulement pour l'avocat et, par extension, le notaire, pour protéger le droit pour une personne de présenter une défense pleine et entière, ce qu'on fait ici. Alors, à mon avis, on suit les lois qui sont devant nous, la Charte canadienne, le Code criminel, la Charte des droits et libertés de la personne encore.

n(16 heures)n

Et j'attire encore votre attention à l'article 9 qui nous donne une exception, et alors l'exception est très, très claire. Finalement, les juristes québécois... Et vous avez fait beaucoup référence à l'esprit québécois, dans votre présentation, qui est très, très important, n'est-ce pas? Mais, dans l'esprit québécois, les juristes québécois, doctrine, jurisprudence ont accepté cette exception, le fait que le secret professionnel ne s'applique pas aux autres professionnels, depuis au moins 1972, plus que 30 ans. Alors, je pense qu'on est dans la concordance de la législation fiscale devant nous.

Et est-ce que vous n'êtes pas d'accord qu'on doit toujours, dans une société, essayer de trouver un juste équilibre entre les droits individuels et les droits de la collectivité? Les droits individuels, quand quelqu'un détourne les lois, quelqu'un ne respecte pas les lois, quelqu'un commet une fraude fiscale vis-à-vis la collectivité, où il y a de la bonne foi et que la collectivité suit les lois fiscales, alors on doit avoir les outils pour appliquer la loi fiscale.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Alors, le ministre soulève une série de choses. Effectivement, nous avons eu une bonne collaboration, du temps où le ministre était porte-parole de l'opposition officielle en matière de lois professionnelles. Pourquoi, depuis l'entrée en vigueur de cet article 46, est-ce qu'il n'y a pas eu de représentations? Eh bien, tout simplement, M. le ministre, parce que la nature des interventions a évolué au fil des années. Et je peux vous dire que, depuis deux ans, depuis le fameux jugement Dupont à Trois-Rivières, il est arrivé une situation où là les ordres professionnels se sont dit: Un instant! Le ministère du Revenu change sa façon de faire, la criminalité et la fraude fiscale peut-être aussi changent, les choses évoluent, et là l'article se lit et s'applique maintenant dans un autre contexte. Et là on s'aperçoit que, si, à l'époque, lorsque cet article a été adopté, il y avait toutes sortes de considérations et que les ordres professionnels se sont dit: Bien, non, bon, nous, nos membres, pour la plupart, sont dans le secteur public, alors il n'y a pas tout à fait d'éléments comme ça, alors, s'il n'y avait pas d'éveil à une problématique claire, nous l'avons maintenant, et ce, depuis quelques années. Et le ministre responsable de l'application des lois professionnelles est avisé depuis l'an 2000 que nous avons une problématique avec le ministère du Revenu sur l'application du droit au secret professionnel comme il devrait être.

Et là ce que nous avons devant nous... Et je peux comprendre, pour vous, que vous disiez: Mais d'où vous sortez? Ça fait 10 ans que c'est là, puis vous n'avez pas bougé. Bien, parce qu'il n'y avait pas d'utilité concrète à bouger, peut-être, à l'époque ? je n'y étais pas, là, hein, ni vous, d'ailleurs, peut-être, à l'époque ? sur ces éléments-là. Mais ce que je peux vous dire, c'est que, depuis quelques années, nous avons une réflexion là-dessus, et il est temps, il est temps que les vraies valeurs de la société québécoise inscrites dans sa Charte mais aussi inscrites dans le Code de procédure pénale, qui dit, à l'article 115, que celui qui effectue une perquisition à l'égard de renseignements confidentiels détenus par une personne que la loi oblige au secret professionnel doit, avant de commencer la recherche d'un tel renseignement, donner une occasion, etc. Et là c'est un juge qui décide.

Pourquoi on n'a pas cette chose-là en matière fiscale? Pourquoi on n'a pas cette sensibilité-là en matière fiscale, puisque, depuis quelques années, oui, peut-être qu'il y a des choses qui demandent à être regardées et qui sont soumises au secret professionnel? Pourquoi n'avons-nous pas cette sensibilité, maintenant que la problématique se présente? Et ce à quoi je fais appel à vous, les législateurs, c'est à jauger cet équilibre-là et à suivre l'évolution de la société, à suivre l'évolution des pratiques du ministère du Revenu comme des types de situations dans lesquelles le secret professionnel se trouve impliqué. Les choses ont changé. On vous demande, comme législateurs, d'intervenir et de représenter l'ensemble des valeurs de la société québécoise, et pas juste une finalité d'une loi, si importante soit-elle, du fait d'un déficit, et tout, et tout, et tout.

Moi aussi, je suis pour l'application de la loi; mais on est dans un domaine humain. La meilleure application de la loi, là, c'est d'avoir un policier à côté de tout le monde 24 heures sur 24. Il n'y en aurait plus, de problème. Mais est-ce que c'est ça qu'on veut? Un, on ne pourra pas se le payer. Mais est-ce que c'est ça qu'on veut comme société?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): En conclusion, M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui. Et, quand le ministre nous cite qu'ailleurs c'est comme ça dans les autres lois, il ne cite que des lois fédérales. Je regrette, mais nous sommes en contexte québécois, ici, pour appliquer une loi fiscale québécoise, et il existe à côté une référence qui s'appelle le Code de procédure pénale, qui applique aussi des lois à caractère fiscal, incidemment, sur toutes sortes d'aspects. Pourquoi ne...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. Gariépy. M. Gariépy, un moment, s'il vous plaît. Je me dois de transférer la parole à l'opposition, et vous pourriez continuer tout à l'heure, après les commentaires et les questions. La parole est au député de Gaspé et porte-parole en matière de revenu.

M. Lelièvre: Alors, M. Gariépy, vous étiez sur une lancée. Je pense que votre plaidoirie est très convaincante et j'aimerais vous entendre là-dessus. J'ai regardé les lois fiscales existantes, entre autres celle sur le ministère du Revenu. Il y a des pouvoirs déjà quand même très importants, très exorbitants que le ministère du Revenu a, là, particulièrement aux articles 40, 40.1, toute la section des vérifications et enquêtes, la section VI de la loi. Alors, M. le Président, j'apprécierais que M. Gariépy puisse continuer ce qu'il nous disait tout à l'heure parce que je trouvais ça intéressant. C'est qu'il y a des chartes... il y a une charte, il y a un code de procédure pénale...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Un moment, M. le député de Gaspé. Il y a un vote. On doit suspendre, il y a un vote dans la Chambre dans quelques minutes. On se reprend, on se reprend, on...

M. Lelièvre: Alors, nous deux, nous sommes... on se sent brimés. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Oui. Je m'excuse, M. le député de Gaspé, je m'excuse, M. Gariépy, on va vous revenir dans quelques moments. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

 

(Reprise à 16 h 30)

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre. Il restait 14 min 10 s au bloc de l'opposition. Donc, je redonne la parole au député de Gaspé et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu. M. le député.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. M. Gariépy, au moment où le vote a été appelé, nous abordions notre temps d'intervention concernant les dispositions très particulières que le ministre du Revenu veut voir insérées dans cette loi-là. On sait déjà qu'à l'article 40, particulièrement à l'article 37.7 et suivants, Vérification et enquêtes, section VI de la Loi sur le ministère du Revenu, il y a énormément de pouvoirs qui lui sont conférés, au ministre du Revenu.

J'aimerais savoir: Eu égard à ce que vous avez lu donc dans le projet de loi, que vous avez entendu, est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont les avenues que le Conseil interprofessionnel du Québec souhaiterait voir empruntées par le ministre? Quelles sont les modifications à ce projet de loi qui sont souhaitables, indispensables dans le respect de nos lois, dans le respect également des chartes qu'on s'est données, de nos valeurs, etc., de nos principes? Et que le ministre puisse en prendre bonne note, parce que vous représentez quand même un très grand nombre de personnes, d'organismes au Québec, le Conseil interprofessionnel. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Bien. M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Merci, M. le Président. C'est à deux niveaux. Je discutais avec des gens du ministère du Revenu pendant que les députés étaient appelés à vivre la démocratie concrètement et je comprends que, la réflexion que nous avons entamée il y a quelques années avec notre ministre responsable de l'application des lois professionnelles en ce qui a trait au secret professionnel qui se trouve traversé par de nouvelles réalités qui amènent le ministère du Revenu peut-être à venir patauger et à s'intéresser aux informations qui sont soumises au secret professionnel, eh bien, il y a une réflexion de notre côté, mais il semble aussi qu'il y a une volonté de réflexion du côté du ministère du Revenu, et c'est ce que nous allions proposer à ce premier niveau. C'est que nous nous asseyions ensemble pour faire en sorte que, toute la dimension de la gestion de cette confidentialité très subtile, qui a beaucoup d'enjeux, c'est-à-dire liée à la pratique des professionnels ? pas n'importe quoi, là, pas la vie privée au sens large, non, non, la confidentialité associée à la pratique professionnelle ? eh bien, qu'on s'assoie ensemble pour regarder comment on peut bonifier et s'assurer que le ministère du Revenu atteigne son objectif, s'il est nécessaire d'avoir accès à des informations soumises au secret professionnel, mais qu'il le fasse d'une façon qui soit respectable par le citoyen, aux yeux du citoyen et aux yeux des professionnels qui sont pris dans cet étau entre le droit du citoyen et les pouvoirs du ministère du Revenu. Alors donc, s'asseoir ensemble.

Et nous l'avons déjà fait dans un autre projet de loi avec le gouvernement, sur la levée du secret professionnel ? ce n'est pas rien, quand même, hein, la levée du secret professionnel ? en cas de situation où la personne est en danger de mort ou de blessure, et nous avons travaillé plusieurs mois avec le gouvernement et plusieurs intervenants, et nous sommes arrivés à une rédaction fine, équilibrée, démocratiquement acceptable où là on atteint notre objectif lorsque c'est nécessaire que le secret professionnel soit levé, et il est protégé là où ce n'est pas nécessaire. Alors, à ce premier niveau, de travailler avec le ministère du Revenu, nous étions sur le point, M. le ministre, étant donné l'évolution depuis justement le 10 ans que vous dites, nous étions sur le point de vous saisir, profitant de votre bonne connaissance ? enfin, en voilà un du système professionnel à un fauteuil ministériel comme le vôtre ? nous étions sur le point de vous saisir de la chose.

Et l'autre élément, c'est: En attendant ce projet de loi là, qu'est-ce qu'on fait? Qu'est-ce qu'on fait? Eh bien, ce projet de loi là, moi, ce que je proposerais au ministre, c'est tout simplement de mettre des balises, parce qu'il ne s'agit pas, là... On peut toucher à ces articles-là sans même toucher à 46 et suivants de votre loi. Pourquoi? Parce que ces pouvoirs-là sont exceptionnels: on parle de perquisitions en secret. Ce n'est pas les perquisitions habituelles, là, où on peut utiliser 46 et tout, bon.. Il s'agit de pouvoirs exceptionnels. On pourrait donc baliser ceux-là pour le moment et faire une réflexion, comment on balise tout le reste des éléments de la loi, comme semblent être ouverts les gens de votre ministère.

Alors donc, ce que ça demanderait dans 40.1.1, c'est que l'alinéa qui dit: «L'autorisation doit énoncer les modalités que le juge estime appropriées pour que la fouille, la perquisition ou la saisie soit raisonnable dans les circonstances», on pourrait rajouter «notamment pour protéger le secret professionnel». Il ne s'agit pas pour le juge de dire: Ah! c'est soumis au secret, ce n'est pas accessible. Non. Il s'agit de dire au juge: Attention! Si c'est quelque chose soumis au secret professionnel, portez une attention, et, si, franchement, comme pour tous les autres éléments, on vous présente un dossier où c'est utile, nécessaire, en fait ? nécessaire; pas utile mais nécessaire ? de lever le secret professionnel et de rendre accessibles ces informations-là, le juge prendra la décision.

Le problème avec 40.1.1 actuellement, c'est qu'il n'y a aucune balise. Le juge, on ne lui rappelle même pas qu'il y a un secret professionnel et qu'il faut qu'il fasse attention. Il ne s'agit pas de bloquer... du fait de la présence du secret professionnel, mais il s'agit de faire attention et de laisser au bon jugement du juge comment il va traiter cette chose-là. Donc, ça ne vous empêche en rien, en rien d'atteindre votre objectif comme ministère du Revenu, en rien, mais ça rend plus acceptable, sur le plan démocratique, votre démarche. Et vous le faites dans 40.1.3, sauf que vous le faites seulement pour l'avocat et le notaire. Vous savez ce qu'il en est, dans les lois québécoises, la procédure pénale en droit québécois. Pour des lois tout aussi importantes sur le plan de l'application ? on parle de l'alcool, des courses et des jeux, etc., puis, disons-nous-le, des dimensions fiscales tout autant ? alors là il faudrait que ce soit un «doit», comme le Barreau vous l'a souligné ce matin. C'est: «L'ordonnance peut être assortie...» Ça devrait être: «L'ordonnance doit être assortie...» Et ça doit être simplement le secret professionnel tout court. Ça inclut l'avocat, ça inclut le notaire, ça inclut le secret professionnel que la société québécoise a assigné à des relations particulières.

Alors, ce sont les éléments. Un, baliser les articles du projet de loi qu'elle a actuellement tout de suite, parce que ça ne touchera pas à l'équilibre général de votre loi, de toute façon, parce que ce sont des mesures franchement extraordinaires d'extrême liberté qu'on prend sur les droits démocratiques. O.K.? Et entamons par la suite un échange avec le ministère sur une révision des enjeux nouveaux, des enjeux récents et des enjeux d'avenir touchant le secret professionnel.

M. le ministre, vous avez souligné ce matin une décision de la Cour fédérale qui est dans un autre contexte juridique, bien que connexe. Et, quand on dit que la relation entre un comptable et un citoyen est moins fondamentale pour la société, j'ai de la difficulté avec un raisonnement comme celui-là. Peut-être que c'est le cas en Ontario ou ailleurs, mais, au Québec, comme je vous l'ai dit, comme je vous l'ai démontré par toutes nos lois, sauf la Loi sur le ministère du Revenu, qui est un calque des fois de la loi fédérale, toutes nos lois indiquent que c'est une valeur fondamentale. Et, comme je le disais, le serment d'Hippocrate, qui a 2 000 ans d'âge, ne venez pas me dire que ça ne vient pas définir la relation fondamentale entre un médecin et son client. Ça, c'est quelque chose, c'est une relation valorisée.

En conclusion, moi, je fais appel aux députés, et au ministre, et à son ministère. Nous vous tendons la main. Mettons les balises tout de suite pour ces pouvoirs extraordinaires, comme nous vous le disons, pour que le juge ait au moins à l'esprit le fait qu'il faut qu'il regarde ça, et travaillons ensemble pour l'avenir dans les prochains mois ? ça peut se faire rapidement, on est prêts depuis un bon bout de temps; puis on était prêts d'ailleurs à vous soumettre cette proposition-là, M. le ministre ? travaillons ensemble à revoir cette question de confidentialité si cruciale pour la société québécoise qu'on a quasi constitutionnalisée dans notre Charte.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le Président, pourriez-vous nous dire combien de temps il nous reste, là?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): 5 min 10 s.

M. Lelièvre: Cinq minutes. M. Gariépy, je trouve que c'est la voix de la sagesse que vous proposez au ministre. J'espère que l'aile parlementaire et le ministre vont saisir cette opportunité qui leur a été faite. J'aimerais savoir: Vous représentez combien d'organismes dans le Conseil interprofessionnel?

M. Gariépy (André): 45 organismes qui sont eux-mêmes chargés d'appliquer une loi et qui sont bien contents d'avoir des bons outils, mais qui le font avec un équilibre démocratique également.

M. Lelièvre: Et qui touchent combien de professionnels?

M. Gariépy (André): 290 000 professionnels, et des millions de citoyens, et des millions d'actes professionnels.

M. Lelièvre: Ça, c'est important qu'on le rappelle à ceux qui nous écoutent, parce qu'il y en a qui suivent nos travaux aussi par Internet, parce qu'on est accessibles continuellement par le site de l'Assemblée nationale.

M. Gariépy (André): Je vous ai écoutés ce matin, d'ailleurs.

M. Lelièvre: Ah! Voyez-vous? Alors... Mais c'est légal.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gariépy (André): Oui, oui, oui.

n(16 h 40)n

M. Lelièvre: Vous avez fait ça en secret, mais c'est légal. Ha, ha, ha!

M. Gariépy (André): C'est on ne peut plus démocratique.

M. Lelièvre: Écoutez, les balises que vous voulez voir, est-ce que les caractéristiques de ces balises... Est-ce que vous pourriez nous en faire part, à quoi vous pensez, ou si c'est trop volumineux? Je comprends aussi que le ministère du Revenu a un travail à faire, mais on ne peut pas mettre de côté, dans le fond, des droits fondamentaux, des principes fondamentaux, des valeurs fondamentales également. Je suis convaincu que le ministre en est conscient, puisque, dans l'opposition, il était porte-parole de l'opposition officielle jadis concernant les lois professionnelles. Alors, certainement que le secret professionnel était quelque chose qui lui tenait à coeur. Et, après certaines vérifications, je sais que l'actuel leader du gouvernement, le député, pas de Chomedey, de...

Une voix: Saint-Laurent.

M. Lelièvre: ...Saint-Laurent, concernant les amendements qui ont été apportés à la Loi sur le ministère du Revenu dans le projet de loi n° 14 à l'époque, il a plaidé très fortement, pour ne pas dire déchiré sa chemise, ici, à cette Assemblée, hein, dans cette enceinte, pour justement que le ministère du Revenu balise ses pouvoirs, balises ses mécanismes d'intervention. Donc, M. le ministre, moi, je pense que ce serait une sage décision, et vous aurez toute la collaboration de l'opposition, si nous empruntions cette voie. Alors, je comprends que ça demanderait un peu de travail, mais nous sommes là pour travailler, nous sommes là pour voter des lois et que les citoyens, dans le fond, au bout de la ligne, soient rassurés, parce que ce n'est pas rassurant lorsqu'on voit les nouvelles, avec les nouvelles de l'Agence, les nouvelles de... avec les pouvoirs qu'on veut lui donner, etc. Et je suis convaincu que vous partagez nos interrogations et nos inquiétudes sur ça.

À ce stade-ci, M. le Président, j'offrirais à mes collègues qui ont des questions d'intervenir. Non?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Environ 1 min 30 s pour des questions.

M. Lelièvre: Alors, M. le ministre, je vais profiter de la minute et quelques secondes qu'il nous reste pour vous offrir cette opportunité de travail, et nous allons le faire dans un esprit constructif, si on agrée à la suggestion, parce que, dans le fond, c'est l'article 25 qui semble être problématique dans cette... 25, 26, c'est parce qu'on y réfère, mais les autres articles, ce sont des articles qu'on peut régler assez rapidement, comme d'ailleurs on en a réglé: modifier des mots, «par la poste» par «envoi», etc. Et, la loi facilitant les pensions alimentaires, le Régime de rentes du Québec, les modifications, je pense que vous allez avoir l'entière collaboration de l'opposition là-dessus. Alors, c'est dans cet esprit constructif et de collaboration que je vous offre, dans le fond, de bénéficier également de l'expertise du Conseil interprofessionnel du Québec et par la suite également de la Protectrice du citoyen qui a manifesté des inquiétudes marquées ce matin. Je pense qu'il faut prendre au sérieux ces coups de... pas ces rappels à l'ordre, mais ces représentations qui, dans le fond, sont faites avec le plus grand souci que les citoyens ne soient pas soumis à un régime dictatorial. Parce que qu'est-ce qui fait...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): En conclusion, M. le député.

M. Lelièvre: ...qu'est-ce qui fait qu'on a une société, dans le fond, dont les gens acceptent de s'autocotiser, l'autocotisation? Parce qu'on a un respect des institutions. Il ne faudrait pas que, en renforçant outre mesure donc le pouvoir de l'État, les citoyens se rebiffent contre l'État.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci au député de Gaspé. Merci, M. Gariépy, du Conseil interprofessionnel du Québec. Merci de votre présence. Nous, on va suspendre quelques instants pour vous laisser quitter et vous remercier. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 45)

 

(Reprise à 16 h 47)

Étude détaillée du projet de loi n° 20

Loi sur le ministère du Revenu

Appels à la Cour du Québec
et à la Cour d'appel (suite)

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre les travaux de la commission. Au moment de l'ajournement mardi dernier, nous en étions à l'article 38, et M. le député de Gaspé avait la parole. M. le député de Gaspé, il vous reste 17 min 40 s de temps de parole sur l'article 38. On peut se réajuster, à moins d'avis contraire, mais, comme on l'avait mentionné précédemment, nous allons reprendre l'article 38.

M. Lelièvre: Oui, M. le Président. Je vais prendre connaissance de l'article 38 parce qu'il y a un certain temps que nous avons touché à cet article. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Absolument, absolument. Durant que M. le député de Gaspé... Il nous reste une heure et quart avant l'ajournement des travaux pour vous mettre en contexte.

M. Lelièvre: Oui. Oui, oui. Je suis très conscient qu'il nous reste une heure et quart en ce jeudi 20 novembre 2003. C'est bien ça. Ça veut dire que vous suivez attentivement nos travaux, M. le député de Montmorency.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lelièvre: C'est bien, ça. Comme adjoint parlementaire, le ministre devrait être rassuré.

M. le ministre, dans le fond, cet article-là traite de l'appel qui est interjeté par requête, dans le fond. Et on discutait, lorsque nous avons ajourné nos travaux ? ça me revient graduellement ? toute la question des cotisations, hein? Si vous avez plusieurs cotisations, on peut, selon le document que vous nous avez remis, on peut réunir plusieurs cotisations, mais on ne peut pas réunir plusieurs personnes relativement aux mêmes cotisations.

Est-ce qu'il y a possibilité d'analyser cet aspect, dans le sens que... Si nous avons 10, ou neuf, ou sept personnes sur un conseil d'administration qui font face à la même cotisation, pourquoi que nous ne permettrions pas à ces personnes, si on prend le cas d'un conseil d'administration, qui sont responsables des montants qui sont dus au ministère du Revenu, pourquoi nous ne pourrions pas trouver une mécanique qui permettrait, dans le fond, de réunir les appelants, ou encore les opposants, pour les sommes qui sont identiques et pour lesquelles tout le monde est conjointement et solidairement responsables? Est-ce qu'on pourrait envisager quelque chose du genre, de cette nature, qui permettrait, dans le fond, aux contribuables, ou à ces bénévoles, ou à ces personnes d'économiser, un, sur les frais entourant la représentation par avocat, parce qu'il faut préparer les causes, et, deuxièmement, le temps? C'est le même objet. Alors, est-ce qu'il y a lieu de pouvoir y penser, y réfléchir ou... J'aimerais ça avoir des indications aujourd'hui là-dessus.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Merci, M. Le Président. Oui, il y a quelques points ici qu'on doit soulever. Premièrement, chaque personne qui a cotisé va avoir des faits différents dans son dossier. Ce n'est pas toujours les mêmes faits, premièrement. Deuxièmement, il n'y a pas obligation pour le ministère pour tous les actionner. Même s'ils sont solidairement responsables, le ministère peut choisir d'actionner une ou deux de cinq ou de 10. C'est la décision du ministère. Et, troisièmement, il y a toujours le juge qui, en décidant que ça convient de les mettre ensemble... Il peut, avec le consentement des parties ? car l'article indique que plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation ? le juge peut leur offrir d'être dans le même appel de cotisation. Alors, je pense ici que, pour simplification, on doit laisser le jugement au juge en question pour faire une décision et pour faire l'offre aux parties pour qu'elles soient dans le même appel de cotisation.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton):M. le député.

M. Lelièvre: Si je comprends bien, vous me parlez de la signification. Moi, je veux essayer de voir, là. Lorsqu'il y a une communauté d'intérêts, une similitude ou identité de la réclamation, je comprends que le ministère peut choisir les personnes qui sont les plus solvables, prendre celles... puis ensuite laisser les autres avoir des recours entre elles, par la suite, ou des appels en garantie, ou des choses du genre. Mais je ne sais pas si c'est fréquemment soulevé au niveau des organismes. Moi, je pensais juste, dans le fond, à regarder ce qui se passe au Québec depuis environ 15, 20, 30, 25 ans. Il y a une multiplication d'organismes qui naissent, des organismes à but non lucratif qui ont des conseils d'administration. Il y a des gens qui y sont et qui se retrouvent, bon, à répondre à des demandes du ministère du Revenu. Lorsqu'on en a discuté ? on en a discuté, la dernière fois, quand nous étions en commission parlementaire ? vous nous disiez que, bon, la personne qui ne s'est pas immiscée, ne s'est pas ingérée, n'a pas participé aux décisions, même si elle allait au conseil d'administration, elle est exclue, dans le fond, de la réclamation pour des sommes qui pourraient être dues au ministère du Revenu.

Écoutez, si vous me donnez l'assurance que, cette mesure, ou cette procédure, c'est marginal, qu'il n'y a pas personne qui a porté ça à votre connaissance, que ce n'est pas quelque chose qu'on peut mettre en place pour améliorer le service aux citoyens et aux citoyennes, écoutez, je vais prendre la parole du ministre là-dessus. S'il n'y a seulement que moi qui pense que c'est une bonne chose, puis que tout le monde pense que, à côté, il n'y a plus personne qui l'a demandé, puis qu'il n'y a pas de réflexion qui s'est faite là-dessus au ministère du Revenu dans le but...

Si j'ai bien compris lors du discours inaugural, c'est la qualité du service aussi qui est importante au niveau du Revenu, la qualité des relations entre les citoyens et le ministère, même si, au bout de la ligne, on veut que tout le monde paie les sommes qui sont dues au ministère du Revenu, les impôts, les cotisations, etc., qu'on retourne les taxes que l'on perçoit à titre de mandataire. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Alors, si vous me dites que je suis dans l'erreur, je vais accepter votre verdict, mais il me semble qu'il y a beaucoup de... Il y en a beaucoup d'organismes qui font appel à leurs députés, puis même à des avocats, pour se faire représenter devant le ministère du Revenu.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Actuellement, ce n'est pas pour moi de dire que mon collègue est en erreur. Certainement que les opinions de mon collègue sont toujours des opinions qu'on veut respecter, et ce n'est pas à moi de juger qu'il est en erreur. Je peux vous donner seulement mon opinion dans ma qualité de ministre. Ici, premièrement, je dois vous dire que ce n'était pas mon opinion, des administrateurs qui ne sont pas responsables d'un problème en particulier. On doit lire l'article 24.0.2 de la Loi sur le ministère du Revenu qui dit que l'article 24.0.1 ne s'applique pas à un administrateur qui a agi avec vraiment un degré de soin, de diligence et d'habileté raisonnable dans les circonstances. C'est un jugement, et la cour va certainement être en position pour juger s'il a agi avec un degré de soin, de diligence et d'habileté raisonnable.

Et aussi l'article nous dit qui, dans ces mêmes circonstances, n'a pu avoir connaissance d'une omission visée par cet article. C'est aussi une question de fait et une question de preuve devant la cour. Et, pour cette raison, à cause de ces exceptions, c'est dans l'intérêt de chacune de ces personnes visées par l'appel de cotisation de ne pas être jointes dans un même appel de cotisation, sauf pour le fait que le juge peut, dans une circonstance, avec une évaluation des particularités en question, décider de joindre toutes ces personnes dans un même appel de cotisation.

Je pense que ? si mon collègue veut mon opinion ? il y a des choses, des items qu'on doit se fier sur l'efficacité, le jugement du juge en question, et on doit avoir, dans notre société, confiance que le juge ? confiance qu'on a toujours dans nos juges, dans notre système judiciaire ? va faire la correcte décision pour ne pas nuire à des personnes dans notre société, spécifiquement des personnes qui sont impliquées dans une société à but non lucratif. Alors, le juge va employer son jugement, il va décider. Alors, certainement, dans un point de cette nature, je lui demande d'avoir confiance dans le juge et la cour.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton):M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: À cette étape-ci, je sais que le député de Chaudière-Appalaches voulait intervenir. Alors, je voudrais...

M. Picard: Chaudière-Appalaches, c'est une région.

M. Lelièvre: Chutes-de-la-Chaudière. Excusez-moi.

M. Picard: Merci.

M. Lelièvre: Alors, je sais que... Il m'a fait signe qu'il... Alors, ça me fait plaisir de lui permettre d'intervenir.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Bon, bien, M. le député des...

M. Picard: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Non, bien, juste pour expliquer le processus, M. le député de Gaspé, vous avez le droit à 20 minutes, vous aussi, dans le bloc de cet article-là. Donc, vous pouvez prendre la parole en tout temps pour un 20 minutes qui est comptabilisable minute après minute, article par article.

M. Picard: Dans le bloc de l'opposition?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Non, non.

M. Picard: Non?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Chaque député de la commission a le droit à 20 minutes sur chacun des articles, amendements, sous-amendements.

M. Picard: O.K. Non. Mais ce n'est pas mon but d'intervenir pour 20 minutes à chaque article.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Donc, je vous donne la parole avec plaisir, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: O.K.

M. Lelièvre: J'ai une question de directive.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Oui.

M. Lelièvre: Je pense qu'on n'a peut-être pas ? si vous permettez, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière ? on n'a peut-être pas expliqué comment nous procédions, mais je pense qu'on va procéder article par article, mais alinéa aussi par alinéa, éventuellement, pour que...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Absolument, absolument.

M. Lelièvre: O.K. Parfait.

n(17 heures)n

M. Picard: O.K. À titre d'exemple, M. le ministre, on lisait l'article de loi, là. Des exemples, il y en a actuellement, comme... Je ne sais pas si vous êtes au fait que les centres locaux de développement ? les CLD, qu'on appelle ? ont été cotisés de façon unilatérale. Tout le monde a passé... On a changé un taux de cotisation pour le FSS. Donc, ça, c'est peut-être des cas qui auraient pu se retrouver... Parce que là tout le monde va faire opposition, ils ont eu un mot d'ordre de l'association provinciale. Cette semaine, j'ai eu une lettre du président des concessionnaires d'autos. Le même principe, on a appliqué, là... On est revenu avec une ancienne interprétation, et tous les concessionnaires d'autos vont faire opposition. C'est des situations qui génèrent des frais à la société par des frais d'avocats, les frais de tracasseries administratives.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Comme le député le sait, en vertu de l'article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu, les dossiers des particuliers, des entreprises sont confidentiels, à moins que le contribuable en question fait une exception lui-même ou à moins que ça relève de d'autres exceptions prévues par la loi. Mais, comme vous le savez aussi, dans l'Assemblée nationale, dans cette commission parlementaire, on a la liberté de discussion. Ça a été statué par un président de l'Assemblée nationale en 1997, qui a dit que, nonobstant qu'il y a l'article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu, les débats dans l'Assemblée nationale ou dans une commission parlementaire, il y a liberté d'expression. Mais, en disant ça, le président de l'Assemblée a indiqué qu'on doit avoir prudence dans la discussion des faits personnels en ce qui concerne un contribuable, et certainement...

Le ministre du Revenu est, en fait, le gardien du secret fiscal et doit agir avec beaucoup de prudence. Et, quand vous soulevez des cas particuliers de cette nature, j'hésite d'entrer dans une discussion de cette nature dans cette commission parlementaire ou dans l'Assemblée nationale. Mais je pense que nos discussions doivent rester, M. le Président, sur l'article devant nous, l'article 38, et je pense que c'est dans l'intérêt des travaux parlementaires qu'on procède avec le plus d'efficacité.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Ça va?

M. Picard: Ça va.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé. Madame.

M. Lelièvre: Bien, je pense que ce que le député des Chutes-de-la-Chaudière soulève... Je ne pense pas qu'il identifie un cas précis, un organisme en particulier nommément. Mais en même temps c'est une réalité, si le ministère veut faciliter la vie aux citoyens, je pense que ça fonctionne des deux bords, des deux côtés, hein? Ça, il ne faut pas que ce soit à sens unique. Il faut que ce soit... À tout le moins, il faudrait qu'il y ait certaines volontés qui se rencontrent, qui se croisent, et qu'on analyse, et qu'on discute, et qu'on mette en place des mesures.

Moi, lorsque nous avions parlé de ces articles... Bon, je pense que le ministre a tout le loisir de pouvoir apporter des modifications aux amendements, de prévoir les nouvelles procédures. Si je comprends bien, même le député des Chutes-de-la-Chaudière est prêt à apporter sa collaboration pour permettre l'adoption de ces mesures-là de façon constructive. Et je pense que, mes collègues et moi, on pourrait partager les mêmes orientations, dans la mesure où on apporte un amendement... où, vous, vous apportez un amendement, plutôt, M. le ministre, avec le souci que les citoyens seront mieux servis et que le ministre du Revenu pose un geste qui, il considère, est louable, et progressiste, et facilitant.

Ce qu'on reproche aux administrations, c'est leur rigidité, hein? Je vous ai donné un cas l'autre jour. Je ne vous ai pas nommé l'organisme en question, mais je peux vous dire, hein, je peux vous dire, M. le ministre, que cette personne et quelques autres, hein, n'étaient pas concernées par la réclamation, et du personnel du ministère les ont induites à penser puis à croire... en leur disant: Vous êtes obligées de payer parce que vous êtes responsables. Alors, il faut bien qu'on puisse trouver une façon d'apporter des modalités de changement.

Bon, si nous avons déposé l'article en question, qu'il faudrait l'amender, je pense qu'on peut y revenir. Puis, s'il faut, au niveau de l'appel, modifier l'article concernant l'appel... L'article dont nous travaillons présentement... on peut toujours le modifier. Il faut le voir dans un esprit constructif.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Ce n'est pas la question de flexibilité, c'est une question d'harmonisation avec nos lois. Et, dans le Code de procédure civile, qui est le code de base de procédure, il y a un article 270 qui est très clair, et je le lis à vous, M. le député. L'article 270 se lit comme suit: «Même lorsque les réclamations ne résultent pas de la même source ou d'une source connexe, deux ou plusieurs demandes entre les même parties, portées devant la même juridiction, peuvent être réunies par ordre du tribunal, s'il lui paraît opportun de les instruire ensemble et qu'il n'en résulte pas un retard indu pour l'une d'elles ou un préjudice grave à un tiers intéressé par l'une des demandes.» Alors, vous voyez, ici, dans le Code de procédure civile, il y a la possibilité, par ordre du tribunal, pour réunir les actions ou pour réunir, dans ce cas, un appel de cotisation.

Alors, pourquoi, en fait, déroger de la pensée du Code de procédure civile? Il n'y a aucune raison concrète de déroger de cette pensée du Code de procédure civile. Réellement, pour avoir un peu d'uniformité, d'harmonisation, je pense qu'on doit aussi essayer d'avoir une concordance avec la terminologie du Code de procédure civile qu'on a, avec cet article 38 qui fait des modifications à l'article 93.1.17.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le ministre, comment vous interprétez, à l'égard de l'article 270 du Code de procédure civile, le paragraphe: «Dans le cas d'un appel de cotisation, cet appel peut réunir plusieurs cotisations. Toutefois, plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation»? Alors, à ce moment-là, une personne morale ou une personne physique, ce sont des personnes. Prenons le cas... On ne les identifie pas, on ne sait pas c'est lequel, mais les centres locaux de développement... Admettons qu'ils ont tous la même identité juridique, le même intérêt. Et là on dit: Ces personnes juridiques... Parce qu'une personne morale, c'est une personne, hein? Et là on ne peut pas les réunir dans un appel, à moins que ça se règle en première instance. Mais j'imagine que l'article initial aussi doit prévoir que les personnes ne peuvent pas contester en même temps l'avis de cotisation. Et là où on est dans l'appel. J'imagine qu'il doit y avoir la même disposition au niveau initial. Alors, qu'est-ce qu'on fait, là? On a la même personne morale, la même réclamation, la même nature de la réclamation, à tout le moins, qui porte sur un litige, à savoir: Sommes-nous ou non assujettis à telle ou telle cotisation? C'est ça, là, le litige. Alors, pourquoi ne pas faire... puis dire: Tout le monde va bénéficier des avantages, des retombées de cette décision?

n(17 h 10)n

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, si le député de Gaspé lit la section XI du Code de procédure civile, intitulée De la réunion d'actions, il va voir la pensée de la législation en question et voir qu'il y a des moyens pour le tribunal pour agir dans la veine qu'il suggère. Alors, pourquoi est-ce que la loi devant nous serait différente si on a le Code de procédure civile comme un guide dans cette instance? Certainement, en procédure civile, ça, c'est la loi sur laquelle nous nous basons dans notre société, et vraiment les réponses sont très, très claires. Oui, on peut joindre les appels de cotisation par la même personne, mais, s'il y a plusieurs personnes, on laisse à la discrétion du tribunal le fait de la réunion d'actions.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui, M. le Président. Je pense que ce qu'on nous propose, c'est que le tribunal qui serait saisi, par exemple, d'une demande pour que plusieurs personnes se joignent au même appel ne pourrait pas acquiescer à la demande. Parce que ce qu'on nous propose, c'est qu'on l'interdise dans la loi. Donc, s'il est interdit dans la Loi sur le ministère du Revenu, est-ce qu'il y a une...

Une voix: ...

M. Lelièvre: Bien, «toutefois, plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation». Alors, comment qu'on doit comprendre...

Et je vous offre, M. le ministre, si vos collaborateurs veulent nous donner... Si vous leur permettez d'intervenir, moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'ils interviennent. Mais je veux bien comprendre cette disposition à l'effet que la loi l'interdirait. Alors, si la loi l'interdit, le Code de procédure civile ne peut pas... Un juge ne peut pas, en s'appuyant sur le Code de procédure civile... Parce qu'il va y avoir une objection en disant: Écoutez, plusieurs personnes ne peuvent pas se joindre dans un même appel de cotisation. Alors, je pense que le juge sur le banc qui va entendre une requête comme ça, en vertu du chapitre XI, ne pourra pas aller à l'encontre de la loi particulière qui est la Loi sur le ministère du Revenu, à moins que je suis dans l'erreur, et je ne pense pas. L'interprétation me semble... Si, par une loi particulière, je déroge au Code de procédure civile... Alors, on pourra proposer un amendement au Code de procédure civile puis dire «Nonobstant le chapitre XI, le juge peut réunir des actions malgré l'article 93.1.17 de la Loi sur le ministère du Revenu.»

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, c'est bien évident qu'on a fait la discussion de l'article de A à Z avec vous, on a passé tous les cas possibles, mais je suis prêt pour rester ici tant que ce sera nécessaire pour vous convaincre, avec grand respect, M. le député. Voici encore une fois. C'est très, très clair qu'une personne peut réunir plusieurs cotisations, mais, toutefois, plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation. Il y a des particularités qui peuvent affecter l'appel de chacune de ces personnes, et c'est au juge pour décider si, pour l'efficacité de la cour et pour rendre les droits à ces personnes, et en vertu du chapitre XI du Code de procédure civile, c'est dans l'intérêt de la justice pour réunir les actions en question.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci, M. le ministre. Messieurs et madame de l'opposition.

M. Lelièvre: Oui, bien...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: J'essaie de comprendre pourquoi le ministre ne peut pas voir un avantage particulier. Parce que, si je ne me trompe pas, au Québec, il y a présentement environ 96 MRC. Il y a, dans les grandes MRC, peut-être plus qu'un CLD, mais, à tout le moins, par contre, par hypothèse, il y en a 96 qui ont la même identité juridique, donc une corporation. Elles ont reçu, toutes et chacune, un avis de cotisation du ministère du Revenu que le ministère du Revenu modifie leur taux de cotisation et qui dit: Vous me devez tel montant d'argent. Et le litige, c'est de savoir: Est-ce que l'organisme est assujetti ou non à cette cotisation? Est-ce que le ministère du Revenu va faire 96 auditions, 96 décisions, hein, 96... si on ne peut pas les réunir dans un... en première instance? C'est ça que je demande au ministre.

La disposition qui interdit que plusieurs personnes se joignent dans un même appel de cotisation, elle existe avant l'appel, donc elle existe, cette interdiction, j'imagine, au niveau de l'opposition. Mais les 96 organismes ne peuvent pas s'opposer collectivement. Bon. Mais pourtant elles ont une communauté d'intérêts. Donc, il va y avoir 96 personnes qui vont s'occuper chacun de leurs cas. C'est ça que je comprends. Bien. Et, s'il y en a un qui ne fait pas sa contestation, son opposition, il va être réputé l'avoir abandonnée, malgré qu'il attend la décision du ministère du Revenu, que les autres attendent une décision. Alors, ça va prendre 96 oppositions, l'exemple qui nous occupe. Bon. Alors, c'est pour ça que je dis, dans le fond: Dans les cas comme ça ? puis il doit y en avoir d'autres, cas, hein, il doit y en avoir d'autres ? est-ce qu'il n'y a pas lieu d'instaurer une mécanique plus souple?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, M. le député, la réponse à votre question est très claire. Si vous regardez l'article 271 du chapitre XI, intitulé De la réunion d'actions, l'article 271, M. le Président, se lit comme suit: «Le tribunal peut en outre ordonner que plusieurs actions portées devant lui, impliquant ou non les mêmes parties, soient instruites en même temps et jugées sur la même preuve; il peut également ordonner que la preuve faite dans l'une serve dans l'autre ou que l'une soit instruite et jugée la première, les autres étant suspendues jusque-là.» Fin de citation. Alors, vous voyez, M. le Président, qu'il y a des provisions dans nos lois, spécifiquement dans le Code de procédure civile. Et certainement que le député sera d'accord qu'on ne peut pas, dans la Loi sur le ministère du Revenu, réécrire in extenso tous les articles qui se trouvent dans le Code de procédure civile. Alors, avec l'article 38 devant nous, qui est un remplacement de l'article 93.1.17, l'appel devant la Cour du Québec est interjeté par requête conformément à la procédure ordinaire régissant les demandes en justice en matière civile. Alors, vraiment, si le député lit le premier alinéa et est de bonne foi, il va reconnaître que ces articles devant nous du Code de procédure civile, nommément les articles 261 à 270 et suivants, s'appliquent dans ce cas.

n(17 h 20)n

C'est très, très clair, par le premier alinéa, qu'on dit que l'appel est interjeté par requête conformément à la procédure ordinaire régissant les demandes en justice en matière civile. Alors, qu'est-ce que vous voulez de plus quand vous avez cette indication, cette instruction? Et je vous cite les articles en question en vertu du chapitre XI, intitulé De la réunion d'actions, dans le Code de procédure civile. Alors, vous avez vos réponses à vos questions.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le ministre, je dois vous dire que, concernant le paragraphe auquel vous venez de référer, je comprends que l'appel est interjeté en vertu de... Il peut être interjeté et comporter une réunion d'actions, mais je vous demande de me dire: Est-ce que le second paragraphe, qui dit que plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation, va faire obstacle à l'article 270 ou à ce chapitre-là?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député... M. le ministre.

M. Bergman: Pour vous dire, M. le Président, M. le député, pour dire la réponse à votre question, c'est au juge pour le régler en vertu des pouvoirs en sa faveur, en vertu du Code de procédure civile. Si vous lisez le premier alinéa de l'article 93.1.17 qui est proposé, on dit «conformément à la procédure ordinaire». Alors, la procédure ordinaire, c'est dans le Code de procédure civile que vous avez cette procédure ordinaire, alors, avec les modifications proposées dans le deuxième alinéa.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Une disposition spécifique... une interdiction spécifique dans une loi particulière va réussir à faire obstruction ou empêcher l'application d'une disposition générale?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, M. le député, si vous lisez la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 93.1.17, l'interdiction ici, que plusieurs personnes ne peuvent se joindre dans un même appel de cotisation ou dans une même requête... Mais plusieurs requêtes peuvent être entendues la même fois en vertu du Code de procédure civile.

M. Lelièvre: Ça, ça me va, au niveau des requêtes, oui. Il peut y avoir plusieurs requêtes qui soient entendues en même temps, mais on peut faire une seule requête aussi. Mais c'est ça que vous interdisez. Vous interdisez que... Plusieurs personnes peuvent, dans une même requête... C'est ça. Mais le ministère du Revenu ? ce que je dis, dans le fond ? interdit qu'il y ait une opposition collective donc qui réunit plusieurs personnes dans un recours parce qu'il peut y avoir une identité d'intérêts, etc., et d'autre part une identité d'organismes aussi. C'est le cas qui nous occupe présentement. Donc, à ce moment-là, si on parle d'allégement administratif, M. le ministre, je pense que, si nous parlons d'allégement administratif, hein, votre formation politique...

Et d'ailleurs le premier ministre, dans son discours inaugural, en parlait, d'alléger les procédures, de rendre ça plus simple. Alors, pourquoi qu'on va demander, dans l'exemple que je vous donnais, là, qui est un cas concret... Je l'ai limité à 96, mais je pense qu'il y en a plus que ça. Comment se fait-il qu'on ne peut pas prévoir, réfléchir et rédiger un texte...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Votre temps imparti serait terminé.

M. Lelièvre: Sur le premier paragraphe? Parce que ce que je vous ai demandé tout à l'heure...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Oui, c'est ça.

M. Lelièvre: C'est que nous allons procéder article par article, paragraphe par paragraphe.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Les directives, selon notre secrétaire, les directives du président, au départ, avaient été mentionnées qu'on y allait article par article et non paragraphe par paragraphe.

M. Lelièvre: Ça va.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Article par article, vous devriez demander au départ... Et j'aurais dû le demander au départ ? sauf que l'article était déjà commencé ? si on y allait paragraphe par paragraphe. Au début de cet article-là, vous n'avez fait point cette demande, que je me fais dire, parce que l'article était déjà commencé. Donc, on y allait sur l'article...

M. Lelièvre: M. le Président, vous me voyez...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): ...selon la bonne foi de notre secrétaire, naturellement, là, qui était présente avec vous au début de l'article.

M. Bernier: M. le Président.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton):Oui. Le député de Montmorency.

M. Bernier: On a débuté les études d'articles mardi, et la façon de procéder était article par article. O.K.? C'est comme ça qu'on s'est entendus au départ. Donc, s'il y a des modifications, on pourra en rediscuter...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): On peut le demander... Je m'excuse, M. le député de Montmorency. À votre question de règlement, on peut le demander à tout article...

M. Bernier: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): ...mais au début de l'article.

M. Bernier: C'est ce que je veux vous préciser...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Donc, cet article-là, vous avez... Oui.

M. Bernier: On est déjà en cours. On reprend ou on poursuit l'analyse de l'article.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Absolument, M. le député de Montmorency. C'est absolument...

M. Bernier: Et on reviendra par après, là.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci. C'est absolument ce que je mentionnais. L'article étant commencé, on doit le poursuivre sur l'article. Pour les prochains, vous avez...

M. Lelièvre: Je m'excuse, M. le Président, mais de consentement on peut tout faire à l'Assemblée.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Absolument. On peut demander le consentement, si vous voulez bien. Mais, pour s'en tenir aux règles, aux règles de l'art, je vous dirais qu'on avait commencé article par article dans cet article-là. Il n'a pas demandé d'alinéas et de sous-paragraphes, donc on va devoir compléter cet article, et par la suite on ira article par article et alinéa par alinéa, si vous le voulez.

M. Lelièvre: ...trouver une solution à ce problème-là à l'article 38. Mais, écoutez, si mon temps est écoulé puis que...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Est-ce qu'il n'y a pas d'autres collègues qui veulent s'exprimer sur cet article? Je passerais cet article aux voix.

M. Lelièvre: M. le Président.

M. Bergman: Adopté.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lelièvre: Alors, vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Absolument. Mme la secrétaire, vote nominal.

La Secrétaire: M. Bergman (D'Arcy-McGee)?

M. Bergman: Adopté.

La Secrétaire: M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier: Adopté.

La Secrétaire: Mme Charest (Matane)?

Mme Charest (Matane): Adopté.

La Secrétaire: M. Dubuc (La Prairie)?

M. Dubuc: Adopté.

La Secrétaire: M. Lelièvre (Gaspé)?

M. Lelièvre: Contre.

La Secrétaire: Mme Beaudoin (Mirabel)?

Mme Beaudoin: Contre.

La Secrétaire: M. Bertrand (Charlevoix)?

M. Bertrand: Contre.

La Secrétaire: M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière)?

M. Picard: Contre.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton):Le président va être obligé de jouer un rôle.

La Secrétaire: M. Bouchard (Mégantic-Compton)?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Pour.

5 pour, 4 contre. L'article est adopté. Article 38... article 39.

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, je l'ai mentionné tout à l'heure, pour éviter tout imbroglio et nous permettre de travailler de façon constructive dans ce projet de loi, j'apprécierais, dorénavant ? et je vous fais la requête, là ? que nous procédions, pour les articles 39 et suivants, que nous procédions article par article, paragraphe par paragraphe, alinéa par alinéa.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé, évidemment, c'est le choix des membres de cette commission. Et, vu votre requête, je n'aurai choix d'accepter votre requête, comme au livre des procédures.

M. Lelièvre: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Donc, pour l'article 39, pour informer cette commission, il y aura deux blocs de 20 minutes impartis par membre de la commission.

M. Bergman: M. le Président.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Oui, M. le ministre.

n(17 h 30)n.

M. Bergman: Puisque cet article... Cette commission travaille avec beaucoup d'efficacité, avec beaucoup de... dans une manière très constructive, avec beaucoup de bonne foi, et je trouve déplorable la position de l'opposition. C'est seulement une manière d'obstruction de nos travaux parlementaires. Certainement que nous avons examiné les articles, jusqu'à ce moment, avec beaucoup d'efficacité, avec beaucoup de prudence, en répondant à chacune des questions du député de Gaspé. Alors, je suis prêt pour étudier ce projet de loi, la balance, dans la manière de suivre les règles de cette commission. Et, si le député de Gaspé insiste d'examiner chaque article alinéa par alinéa, on n'a pas le choix, mais je pense qu'il trouve une manière qui est très inefficace, et je me demande c'est quoi, le but, et je vois le but comme une manière d'agir avec obstruction. Mais je suis vos conseils, M. le Président.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Lelièvre: ...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Oui. J'entends bien et je cède la parole au député de Gaspé.

M. Lelièvre: Écoutez, question de règlement. Je ne pense pas que le ministre puisse nous prêter des intentions quand il dit que nous faisons de l'obstruction systématique, ou de l'obstruction tout court, dans l'étude de ce projet de loi. C'est contraire à notre règlement. Je ne pense pas que le travail que nous avons fait jusqu'à maintenant constitue de l'obstruction. Je ne pense pas non plus qu'il y a une intention de faire de l'obstruction et que, conformément à nos règles de procédure, conformément aussi à ce qui existe comme orientations gouvernementales...

À l'article précédent, j'avais des points à faire valoir. Vous m'avez dit que ma période de temps était écoulée. Je n'ai pas eu de consentement, il y a eu un vote et on a dû clore la discussion sur cet article. Ce n'est pas dans le but de faire de l'obstruction que je posais les questions. Tout ce que je dis à cette commission, c'est de répondre aux exigences et de trouver, par nos interventions mutuelles, la meilleure façon de donner un service à la population pour que les contribuables, les justiciables puissent avoir un respect des institutions, que les personnes qui sont, comme on les considère au ministère du Revenu, des clients, une clientèle, puissent avoir des services. Donc, lorsque j'intervenais, ce n'était pas dans le but de faire de l'obstruction au ministre, parce que de l'obstruction systématique peut nous amener aussi à perdre énormément de temps. Et je peux vous dire que, pour avoir été au gouvernement, l'opposition précédente a mis à contribution énormément d'heures, et d'heures, et d'heures pour faire de l'obstruction systématique.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé, je vous ai entendu pour une question de règlement, je vous ai laissé la parole relativement longtemps pour une question de règlement. Vous avez demandé une requête pour l'article qui va suivre. C'est votre droit. On va faire l'article selon les deux alinéas qu'il y a, deux blocs de 20 minutes, et nous procéderons après ça à tous les articles à votre gré et au gré des membres de la commission.

Donc, je me vois... d'aller immédiatement à l'article 39, paragraphe un. Donc, M. le ministre, si vous voulez bien nous expliquer le premier alinéa. Et on verra, pour les autres articles, M. le député de Gaspé, comment on procédera, article par article par la suite, et c'est vous qui demanderez les requêtes ou les membres de la commission demanderont une requête à chaque fois.

M. Bergman: Merci, M. le Président. L'article 39 qui est devant nous: L'article 93.1.18 de cette loi est modifié par le remplacement du premier alinéa par le suivant:

«93.1.18. Les frais dont le montant est déterminé par règlement doivent être payés au greffier lors de la production de la requête.»

M. le Président, cette modification vise à ce que les frais pour la production d'une requête soient déterminés par règlement, et la clé de cet article, c'est d'harmoniser avec le mode établi dans le cadre des procédures judiciaires en matière civile, et c'est un but d'harmonisation avec le Code de procédure civile.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le ministre, l'article actuel, l'ancien texte prévoit que c'est une somme de 90 $ qui doit être versée au greffier de la cour lors de la production de la requête, et cette somme est remboursée au requérant s'il réussit totalement ou partiellement en appel. Si je comprends bien, vous abrogez cette partie de cet article-là, dans le sens qu'il n'y aura plus de remboursement? Il n'y aura plus de remboursement de la somme qui a été versée si la personne réussit totalement ou partiellement en appel?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. J'apprécie les questions du député de Gaspé. La question est que, si nous lisons l'ancien article 93.1.18, il se lisait: «Lors de la production de cette requête, la personne doit verser au greffier de la Cour une somme de 90 $ qui lui est remboursée si elle réussit totalement ou partiellement en appel.» Le nouvel article se lit comme suit: «Les frais dont le montant est déterminé par règlement doivent être payés au greffier lors de la production de la requête.» Alors, le député veut savoir si le montant sera remboursé. Si le contribuable réussit totalement ou partiellement en appel, en vertu du Code de procédure civile, ce remboursement sera fait si la personne en question réussit totalement ou partiellement en appel.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. M. le ministre... nous dire, au niveau du Code de procédure civile, où on peut retrouver l'information en question concernant le 93.1.18? Puisqu'on dit que les frais dont le montant est déterminé par règlement sont payés au greffier lors de la production de la requête et on remplace 93.1.18 par une nouvelle rédaction, alors... Et, d'autre part, l'autre partie de 93.1.18, qui dit que «la Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels», ça disparaît, si je comprends bien, puisque, dans le document que nous avons, dans le texte de loi que nous avons sous les yeux, il y aura un règlement qui va déterminer les frais pour la production.

Est-ce que je dois comprendre que le contribuable, ou les contribuables qui font opposition devront, hein, devront payer au ministère du Revenu, et, s'ils gagnent, ce sont des frais que le ministère du Revenu va conserver?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

n(17 h 40)n

M. Bergman: M. le Président, M. le député, dans l'article devant nous, la modification, premièrement, la somme en question sera déterminée par règlement. Deuxièmement, cette somme doit être payée au greffier lors de la production de la requête, et, en vertu du Code de procédure civile, s'il y a une réussite par le contribuable, le montant payé, en vertu de ce règlement, sera remboursé à lui.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député.

M. Lelièvre: À quel article on peut retrouver ça, M. le ministre?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, en vertu de l'article 477 du Code de procédure civile, le premier alinéa, qui se lit comme suit: «La partie qui succombe supporte les dépens, frais du sténographe compris, à moins que, par décision motivée, le tribunal ne les mitige, ne les compense ou n'en ordonne autrement.» Alors, en rédigeant ce nouvel article pour concordance, pour harmonisation avec le Code de procédure civile, le projet d'article est présenté dans cette nature, et, pour les questions de remboursement, on peut se baser sur l'article en question du Code de procédure civile.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton):M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. M. le ministre, je comprends l'explication que vous donnez. Je comprends que la Loi sur le ministère du Revenu est une loi particulière, d'application particulière, hein? Donc, tout ce qu'on y retrouve est d'application. Dans le texte ancien, on parle d'une somme de 90 $ qui est remboursable et, d'autre part, que la Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels. Le ministre nous propose de procéder par règlement dorénavant. Donc, ce n'est pas une modification à l'article, qui est 93.1.18, que l'on fait, c'est un remplacement d'article, hein? Ce n'est pas une modification, là, ce n'est pas un amendement à l'article. Je pense qu'il faut être clair là-dessus, on remplace un article pour permettre au gouvernement de déterminer quels seront les frais qui seront payés par les contribuables pour aller en appel, alors que le texte actuel impose une obligation de rembourser le 90 $, c'est-à-dire la totalité des frais qui sont prévus pour déposer l'appel, et d'autre part que la Cour ne peut pas imposer des frais additionnels. On ne retrouve pas ça nulle part dans le texte que vous nous proposez, au niveau du remplacement, M. le ministre.

La question que je vous pose par rapport à ça: Est-ce qu'éventuellement vous allez modifier le principe qu'on y retrouve, à 93.1.18, c'est-à-dire que le contribuable va payer, puis, s'il a gain de cause, il n'aura pas de remboursement? Est-ce que vous êtes en train d'établir des frais que le ministère du Revenu ou la Cour va conserver et retourner au ministère du Revenu?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président, M. le député, j'apprécie vos questions sur cet article, dans le sens que, vraiment, quand vous avez parlé de remplacement, c'est le remplacement seulement du premier alinéa. Alors, le deuxième alinéa de l'article 93.1.18 reste et il se lit comme suit: «La Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels.»

Ce n'est pas le remplacement de l'article, c'est le remplacement seulement, et je l'ai lu à vous, c'est le remplacement seulement du premier alinéa par le nouvel alinéa, et le deuxième alinéa va rester.

Sur la question des montants, le montant sera déterminé par règlement, certainement par règlement, et le montant doit être payé au greffier lors de la production de la requête. Mais, certainement, le deuxième alinéa, qui se lit: «La Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels», reste dans l'article.

Aussi, je dois porter à votre attention l'article qu'on vient de débattre, l'article 38, qui fait le remplacement de l'article 93.1.17, où, dans le premier alinéa, c'est clairement indiqué que l'appel devant la Cour du Québec est interjeté par requête, conformément à la procédure ordinaire. Alors, la procédure ordinaire, c'est la procédure établie par le Code de procédure civile. Et, si on examine l'article 93.1.19, qu'on va voir dans quelques moments, de la Loi sur le ministère du Revenu, il y a indication qu'on sera soumis aux procédures conformément au Code de procédure civile.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci. M. le député de Gaspé. Immédiatement après, le député de Charlevoix.

M. Lelièvre: Oui. Je comprends que le député de Charlevoix veut parler, M. le Président, si je lui laisse l'opportunité de poser sa question, je comprends, si je ne perds pas le temps qu'il me reste sur...

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Non, non. Absolument pas. M. le député de Gaspé, votre temps est à chacun imparti de 20 minutes chacun, et là, dans cet article-là, c'est sur chacun des alinéas. M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: M. le Président, est-ce que je comprends bien que, en remplaçant l'article, le coût actuel est quand même fixé par la loi, on le fait disparaître, et à l'avenir ça va être par règlement? Donc, il n'y a aucun coût... Ça peut être beaucoup plus, ça peut être... Aujourd'hui, la loi fixe le coût à 90 $, donc on est sûr que ce n'est jamais plus que ça. Mais, si je comprends bien ce qu'on est en train de faire, à partir de maintenant, il n'y a plus de 90 $, on va passer un nouveau règlement qui va dire, exemple, 125 $ ou 130 $. Ce serait surprenant que ce soit en bas de 90 $. Donc, pour les citoyens, est-ce qu'il n'y a pas là, en tout cas, un danger que ça coûte plus cher?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. M. le député de Charlevoix, comme vous le savez, généralement, les frais de cour sont toujours par règlement. Alors, dans ce cas, c'est vraiment une harmonisation pour que dorénavant les frais de cour soient, par règlement, établis par le gouvernement. Mais il y a un changement qui est, dans un sens, positif, si on prend votre deuxième question, c'est que, s'il y a, disons, trois requêtes par le même contribuable et trois cotisations, il y aura seulement un frais, le frais établi par le règlement, qui n'existait pas avec l'ancien premier alinéa de l'article 93.1.18.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Quand vous dites que dorénavant, bon, il pourrait y avoir trois demandes et un frais uniquement, on ne le retrouve pas dans la loi. Est-ce qu'on va la retrouver, cette affirmation-là, dans le règlement?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Si vous faites référence à l'article 38 de ce projet de loi, le deuxième alinéa, qui se lit: «Dans le cas d'un appel de cotisation, cet appel peut réunir plusieurs cotisations», alors le règlement va couvrir le cas où il y a plusieurs cotisations.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci. M. le député de Gaspé.

n(17 h 50)n

M. Lelièvre: M. le ministre, concernant le remboursement total et partiel, actuellement, si la personne a gain de cause, le 90 $ peut lui être versé en totalité ou partiellement. Pourriez-vous nous expliquer comment cette mécanique s'applique? Parce que qui détermine que la personne qui aura versé ce 90 $ va récupérer une partie ou la totalité? Sur quel critère? Sur quelle base? Et je vous fais remarquer que ça disparaît aussi, hein?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. M. le député, vraiment, il y a concordance, comme j'ai dit, avec le Code de procédure civile. Et, vous avez raison, dans l'ancien alinéa, le premier alinéa de cet article 93.1.18, il y avait référence s'il avait réussi totalement ou partiellement un appel. Mais, si vous lisez le premier alinéa de l'article 477 du Code de procédure civile, on indique que «la partie qui succombe supporte les dépens, frais du sténographe compris, à moins que, par décision motivée, le tribunal ne les mitige, ne les compense ou n'en ordonne autrement». Alors, vraiment, il y a discrétion d'un tribunal ici. C'est un autre mode de présentation d'une manière dans laquelle il y aurait remboursement des frais judiciaires.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député.

M. Lelièvre: Je comprends, M. le Président, que c'est pour le futur, ça, là. Mais le présent? Au moment où on se parle, c'est encore en application. Ce n'est pas amendé. Alors, comment ça s'applique? Le 90 $, est-ce que le ministère est en mesure de nous dire la fréquence que vous le remboursez? Est-ce que vous le conservez? Je vous parle de la situation actuelle, là, par rapport à ce que vous nous proposez. Est-ce que le ministère du Revenu conserve, s'organise pour s'opposer à ce que le 90 $ soit remboursé aux contribuables, en tout ou en partie?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Les sommes de 90 $ qui sont reçues du contribuable en ce moment se rendent au fonds consolidé, et même avec... Si le projet de loi en question serait adopté, alors, dans les cas auxquels vous faites référence, le montant en question est tenu par... ou a été déposé dans le fonds consolidé, et il y aura remboursement si le contribuable réussit totalement ou partiellement l'appel. Selon le jugement qui est rendu et selon les modalités, le juge peut ordonner en tout temps... et le ministère va respecter le jugement. Et il y aura toujours une transition aux nouvelles méthodes décrites par le nouvel article 93.1.18 qui fait référence à l'article 477 du Code de procédure civile.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Oui, M. le Président. Toujours sur les frais de 90 $, dans l'amendement, on vient dire que ça va être déterminé par règlement, puis on dit que c'est une harmonisation au Code de procédure civile. Donc, actuellement, c'est quoi, là? La journée que le projet de loi va être sanctionné, c'est quel montant que les gens vont payer?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: M. le Président... Merci pour la question, M. le député. En ce moment, le règlement n'est pas adopté, alors je n'ai aucune possibilité de répondre à votre question. Et, jusqu'à ce que le règlement soit adopté, on va suivre les montants qui sont ciblés dans l'ancien article. Mais c'est la responsabilité du gouvernement, le moment que l'article est adopté, le projet de loi est adopté, et, avec l'article, alors le règlement peut être adopté.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Merci, M. le ministre. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, ça va?

M. Picard: Ça va.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le Président, c'est un peu curieux quand même. Là, actuellement, il y a un montant de 90 $ qui est chargé et qui peut être remboursé. Actuellement, est-ce que le ministère est en mesure de nous dire combien il a retiré, combien les contribuables ont retiré à la suite de l'application de l'article 93.1.18? Parce que le 90 $, il est fonction du nombre de recours qui est exercé. Alors, à combien s'élève annuellement la contribution des personnes qui doivent débourser ce 90 $? Est-ce qu'elles doivent... Bon, si la personne réussit totalement ou partiellement en appel...

C'est parce que je voudrais voir comment ça se passe dans la vraie vie, là. Est-ce que c'est le juge qui décide? Est-ce que c'est le ministère? La procédure pour la réclamation, est-ce qu'on fait une réclamation au ministère puis on fait de l'argumentation pour aller chercher le 90 $? Est-ce que le ministère attend que les gens fassent la demande, puis, s'ils ne font pas la demande, après un certain délai, le 90 $ est conservé par le ministère? Quelle est la somme que ça représente annuellement? C'est du fric, là. C'est de l'argent, là. Puis le nombre d'appels aussi qui est logé, là... Parce que c'est en fonction du nombre d'appels. Chaque appel qui est déposé, ça rapporte beaucoup d'argent, M. le ministre. Il semble qu'on va devoir discuter longuement sur la question du règlement que vous allez adopter.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Il y a à peu près 700 à 800 appels par année et...

Une voix: ...

M. Bergman: Oui, 700 à 800 appels par année devant les tribunaux, et dans chacun des cas il y aurait un jugement et il y aurait un mémoire de fait. Le juge va transiger dans chaque cas en question.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, est-ce que le ministre peut prendre l'engagement à l'égard des parlementaires que, lorsqu'il aura un projet de règlement, à tout le moins, la commission des finances publiques en soit saisie pour qu'on puisse en discuter? Est-ce que l'objectif du ministère, c'est d'avoir un règlement qui permet de hausser les coûts pour pouvoir rencontrer les exigences, là, les frais inhérents à l'appel, au traitement des dossiers en appel? Est-ce que c'est ça, éventuellement, puisqu'on le retire? Et vous retirez également la clause des frais maximums. Donc, c'est un article de loi qui dit que «la Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels». Alors, dans quels cas on peut demander à un particulier de payer des frais additionnels si vous enlevez cette clause-là, cet article-là?

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): M. le ministre.

M. Bergman: Oui, M. le Président. Premièrement, comme je l'ai dit avant, on n'enlève pas le deuxième alinéa de l'article 93.1.18. Cet alinéa reste, et la Cour ne peut imposer à un particulier le paiement d'aucuns frais additionnels. En ce qui concerne le règlement, comme mentionné précédemment avec l'article précédent, il y aurait un règlement qui serait soumis au gouvernement pour adoption, et, après l'adoption, il serait publié dans la Gazette officielle et disponible à vous pour examination.

M. le député de Gaspé, je note que l'heure est...

Une voix: L'heure est tardive.

M. Bergman: L'heure est... Non, pas «l'heure est tardive», moi, je suis prêt pour rester ici aussi longtemps que vous voulez.

M. Lelièvre: Oui. M. le Président, j'ai toute la soirée. Ha, ha, ha! Mais mes collègues ont des obligations, quand même.

M. Bergman: Cette séance viendra à la fin bientôt. Est-ce qu'on peut mettre l'article 39 au vote?

Une voix: Est-ce qu'on peut voter?

n(18 heures)n

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): La demande du ministre est... Pour les collègues de la commission, le ministre aimerait mettre l'article 39 aux voix.

M. Lelièvre: Oui, M. le Président. J'accepte que l'article 39 soit mis aux voix, à moins qu'il y ait d'autres collègues... des interventions particulières à faire éventuellement là-dessus et que le temps nous manque, ou, du côté gouvernemental... Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Eh bien, je mets, considérant le consentement...

M. Lelièvre: On peut aussi, on peut ne pas l'adopter, cette partie-là, pour leur donner la chance de parler aussi, là.

Le Président (M. Bouchard, Mégantic-Compton): Considérant le consentement, M. le député de Gaspé, je vais mettre l'article 39 aux voix.

M. Bergman: Adopté...

(Panne de son)

(Fin de la séance à 18 h 1)


Document(s) associé(s) à la séance