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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mardi 2 novembre 2004 - Vol. 38 N° 57

Consultation générale sur le projet de loi n° 61 - Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des finances publiques donc reprend ses travaux. J'inviterais toutes les personnes présentes dans la salle à bien s'assurer d'avoir éteint la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît, afin de ne pas gêner nos travaux.

La Commission des finances publiques est réunie, ce matin, afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec.

Mme la secrétaire, d'abord, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Rioux (Iberville) est remplacé par M. Tomassi (LaFontaine). Je vous rappelle que M. Legault (Rousseau) est remplacé, pour la durée du mandat, par M. Simard (Richelieu).

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Alors, je vais d'abord faire lecture de l'ordre du jour de la séance du 2 novembre. Nous accueillerons d'abord, ce matin, l'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec. Par la suite, ce sera la Société de transport de Montréal. Et finalement, ce matin, nous accueillerons le Syndicat professionnel des scientifiques à pratique exclusive de Montréal. Cet après-midi, après la période des affaires courantes, nous accueillerons Bombardier Transport puis la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Et nous conclurons notre journée en recevant le Regroupement des partenaires du gouvernement en technologie de l'information.

Auditions (suite)

Sans plus tarder, j'inviterais les représentants de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec de bien, s'il vous plaît, s'avancer et de prendre place à la table des témoins.

Une voix: Témoins?

Une voix: La table des témoins?

Le Président (M. Paquet): Témoins, bien des témoins en commission, de ceux qui lisent les mémoires. Effectivement, ce n'est pas... Je ne me suis pas trouvé de mandat d'avocat ce matin, là. Je rappelle que ce n'est pas une de mes caractéristiques. Alors, bonjour. Alors donc, nous accueillons M. Jean-Maurice Forget, président de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Avec les gens qui vous accompagnent, nous vous souhaitons la bienvenue. Si vous voulez bien, s'il vous plaît, entreprendre votre présentation et présenter les gens qui vous accompagnent.

Association des constructeurs de routes
et grands travaux du Québec (ACRGTQ)

M. Forget (Jean-Maurice): Merci, M. Paquet. D'abord, bonjour à vous. Bonjour, Mmes, MM. les ministres et députés. Les gens qui m'accompagnent sont d'abord Mme Gisèle Bourque, la directrice générale de l'association, M. Alain Robert, à ma gauche, premier vice-président, et M. Pierre Tremblay, directeur adjoint.

D'abord, quelques mots sur notre association. Je ne vous demanderai pas de répéter les six lettres qui composent son nom, mais en fait on est l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, qu'on va intituler ACRGTQ à partir de maintenant, et on représente la majorité des principaux entrepreneurs, fournisseurs de biens et services qui travaillent dans la construction de routes, d'ouvrages de génie civil et de grands travaux au Québec. C'est très important de souligner que les membres de notre association exécutent environ 90 % du volume total des contrats octroyés par les principaux donneurs d'ouvrage publics et parapublics de notre secteur.

n (9 h 40) n

On apprécie beaucoup l'opportunité qui nous est donnée de formuler nos commentaires sur le projet de loi n° 61, particulièrement parce que le domaine des infrastructures routières et souterraines sert de référence en matière de PPP. Pour les gens, je crois, qui sont allés à l'étranger ou qui se documentent sur les partenariats public-privé, le mot «PPP» et le mot «infrastructures routières» sont indissociables. Les expériences des agences étrangères sont, dans tous les cas, associées à des infrastructures routières. Pas uniquement des infrastructures routières mais majoritairement des infrastructures routières.

D'entrée de jeu, on tient à affirmer que nous encourageons toutes les solutions qui favorisent la mise en oeuvre de procédés novateurs pour développer et réhabiliter les infrastructures routières. Ainsi, depuis la réalisation d'une étude qui évalue notamment les procédés de mise en oeuvre pour effectuer des travaux sur les réseaux routiers ailleurs dans le monde, l'ACRGTQ est convaincue que les partenariats public-privé représentent une solution efficace mais aussi indispensable pour le Québec, en regard de quoi l'ACRGTQ ne peut qu'appuyer le projet de loi visant à instituer l'Agence des PPP du Québec, une agence qui aura pour mission de contribuer au renouvellement des infrastructures publiques et à l'amélioration de la qualité des services aux citoyens par la mise en oeuvre de projets de partenariats public-privé.

Toutefois, notre appui envers les PPP, et par conséquent envers le projet de loi n° 61, n'est pas inconditionnel, et nous tenons fermement à faire entendre certaines réserves quant aux PPP et à émettre quelques commentaires sur le contenu du projet de loi. Vous n'êtes pas sans savoir que la collaboration entre le secteur public et privé ne date pas d'hier, surtout pas dans le domaine de la construction routière, et qu'elle peut prendre à cet effet plusieurs formes. Si les administrations publiques recourent aux services d'entrepreneurs privés dans le domaine des travaux d'infrastructures, c'est qu'elles considèrent que leur contribution permet de réaliser des avancées majeures.

Essentiellement, deux motivations poussent les administrations à solliciter leur participation ? et là je vais faire ça un peu simpliste ? réduire les coûts, réduire les délais parce que fondamentalement tous les autres bénéfices ne servent qu'à réduire les coûts et à réduire les délais quand on fait appel à l'entreprise privée, surtout parce qu'on met d'abord en compétition des entrepreneurs privés, ce qui oblige les entrepreneurs privés à faire preuve de beaucoup d'imagination pour réduire les coûts. Et, comme les délais sont généralement fixés par l'agence qui demande les travaux, l'entreprise privée est contrainte à exécuter à l'intérieur des délais, sinon elle va subir des pénalités. Donc, coûts et délais sont le nerf de la guerre. La compétition permet d'arriver là, et aussi les mécanismes de gestion de l'entreprise privée, qui sont beaucoup, beaucoup axés sur les résultats.

Notre étude nous a aussi permis de constater que la collaboration la plus complète entre les secteurs public et privé prenait de plus en plus fréquemment la forme des partenariats public-privé. Pour l'instant, les expériences sont assez limitées au Québec, mais elles continuent de se multiplier à l'échelle de la planète. En effet, la réalisation des projets en PPP a connu une poussée fulgurante au cours des dernières années. À la lecture du mémoire que nous vous avons soumis, vous avez certainement pu constater le nombre important d'exemples de réussite de PPP. Je ne vais pas énumérer tous ces exemples. Cependant, nous tenons à vous rappeler les grands avantages des PPP au niveau de la réalisation des travaux d'infrastructures.

Pour nous, ce sont ces avantages qui motivent la mise en oeuvre de travaux dans le cadre des partenariats public-privé, et il ne fait aucun doute que ceux qui y ont eu recours ont considéré ces avantages. Je vais me consacrer principalement à quatre grands avantages qu'on voit dans les partenariats public-privé. Le premier ? et je reviens à ce que je disais un peu plus tôt ? si les secteurs publics ont eu recours au privé pour réduire les coûts et les délais, les partenariats public-privé poussent cet argument-là encore plus loin et permettent à l'État de réduire encore davantage les coûts et les délais qu'il doit assumer pour la réalisation des travaux d'infrastructures. Ainsi, avec la même quantité d'argent, on peut faire plus de travaux.

Rapidement, pourquoi est-ce qu'on arrive à réduire les coûts et les délais avec un PPP? Le processus actuel d'une mise en oeuvre de projet implique naturellement l'identification de besoins, des études d'avant-projet, préparation des plans et devis, mise en oeuvre d'un appel d'offres, choix d'un entrepreneur, choix d'un surveillant de travaux, choix d'un laboratoire, début des travaux, exécution des travaux, réception des travaux. Après ça, exécution des déficiences. Après ça, commence le stade d'entretien. L'ouvrage est mis en oeuvre, utilisé par les usagers, et, quand il survient des problèmes au niveau de l'ouvrage lors de sa durée de vie, des problèmes généralement d'usure, on doit soit avoir des effectifs pour nous-mêmes, pour que l'État lui-même puisse réparer les travaux ou, si les travaux sont plus majeurs, retourner en demande de proposition, retourner en conception, retourner en surveillance, retourner en appel d'offres pour avoir encore un autre entrepreneur qui vient réaliser les travaux. Et, lors de tout ce processus, il se perd une quantité importante de synergies entre le nombre important d'intervenants sur une période qui peut durer de 25 à 30 ans.

Le grand bénéfice des PPP, c'est d'intégrer tout ça sous le même chapeau. Pas tout en fait, parce que l'État demeure l'identificateur des besoins et certainement l'élaborateur des avant-projets, mais, à partir du moment où les besoins des avant-projets sont déterminés, l'entreprise privée est certainement en mesure d'intégrer toutes les étapes, qui incluent la conception, la construction, la surveillance des travaux et d'autant plus l'entretien et toutes les exécutions pour s'assurer la pérennité de l'ouvrage. Et l'arbitrage entre la conception initiale et l'entretien est intégré par quelqu'un qui essaie d'y créer le plus grand bénéfice pour les usagers et pour son entreprise, et il y a là effectivement beaucoup de synergies qui peuvent être capturées.

Ensuite, deuxième avantage, après les coûts et les délais, c'est que les expériences étrangères démontrent que l'atteinte d'une meilleure efficience dans la production, telle que je viens de vous la décrire, ne se réalise pas au détriment de la qualité des services. Au contraire, avec cette intégration, on améliore, on est en mesure d'améliorer la qualité des services. Les standards de qualité sont fixés par l'État, indiquent un niveau de qualité garanti. Si le niveau n'est pas atteint, c'est assez clair, on applique des pénalités financières qui sont imposées à l'entrepreneur. Ce dernier point permet de mettre en lumière l'avantage que représente le recours au PPP par rapport à la privatisation pure et simple. Ainsi, grâce au PPP, l'État conserve la possession de l'infrastructure ainsi que le contrôle sur ses conditions et sa sécurité.

Le Québec a à cet effet des expériences fort intéressantes qui ont été lancées par le ministère des Transports aussi tôt qu'en 1994, qui se sont intitulées les contrats de performance. Les contrats de performance n'intègrent pas autant d'éléments qu'un partenariat public-privé mais intègrent des éléments qui sont importants, en l'occurrence la conception d'un ouvrage routier, sa construction, sa surveillance et aussi des périodes d'entretien mais qui sont pour l'instant relativement courtes, puisque les contrats de performance du ministère des Transports impliquent des périodes d'entretien de l'ordre de cinq à sept ans. Il y a déjà, à ma mémoire, près d'une dizaine d'exemples de contrats de performance qui ont été exécutés depuis 1994 et ont permis effectivement de pouvoir certainement bénéficier de l'implication de l'entrepreneur dans la période d'entretien, même si elle est courte, dans la période d'entretien de l'ouvrage.

Troisième gros avantage, les PPP garantissent le financement adéquat de l'infrastructure durant une longue période de temps. Et je veux insister énormément sur cet avantage-là parce que ce n'est pas le cas dans la méthode traditionnelle. Dans la méthode traditionnelle, on débloque des fonds pour exécuter la construction initiale de travaux, mais on ne provisionne pas les fonds nécessaires lors de sa période... de sa durée de vie, lors de son entretien. Comme on sait que les coûts de construction initiaux représentent seulement à peu près un tiers des coûts de l'ouvrage durant sa durée de vie, bien soudainement on se retrouve avec un problème dans la méthode traditionnelle. Puis je pense qu'on peut certainement citer notre réseau en exemple: quand les fonds ne sont pas dédiés ou provisionnés pour l'entretien, bien, dans divers arbitrages, cet entretien-là devient déficient, les sommes ne sont pas consacrées, et on se retrouve avec un réseau, qu'il soit routier ou souterrain, qui a des carences très importantes tout simplement parce qu'on n'a pas eu la discipline d'y allouer les coûts à l'entretien. Les PPP ont un avantage indéniable par rapport à la méthode traditionnelle, c'est que, dans le contrat initial, tout l'argent nécessaire à l'entretien de l'ouvrage au moins pendant une période de 25 à 30 ans est provisionné et inclus dans la démarche initiale.

n (9 h 50) n

Finalement, les PPP permettent à l'État de demeurer imputable. L'État doit pouvoir rendre des comptes concernant la façon dont l'argent est dépensé. Grâce aux standards de qualité établis par l'État, elle peut toujours expliquer à quelles fins sont dépensées les sommes engagées et elle peut se donner de cette façon les moyens de vérifier si les fonds sont utilisés à bon escient. Dans un souci de transparence, je pense que c'est un avantage non négligeable. Les contrats de PPP étant des contrats qui sont éminemment publics, on est en mesure de valider tout ça.

Donc, en guise de résumé, les administrations publiques ayant judicieusement mis en oeuvre des PPP pour effectuer des travaux majeurs sur leurs réseaux ont constaté les avantages que présente cette méthode. Effectivement, en sollicitant la collaboration des entrepreneurs privés tout en leur soumettant des standards de performance et de qualité à respecter, la production de ces services publics s'effectue dorénavant à moindre coût.

Bien que les conclusions préliminaires fournies par notre étude nous amènent à donner un fort appui aux PPP, nous jugeons nécessaire d'émettre certaines réserves face à ceux-ci. Essentiellement, encore quatre points à soulever.

À tort ou à raison, les PPP ne font pas toujours l'unanimité au Québec, particulièrement en ce qui concerne leur accessibilité au maximum d'entreprises. En effet, l'ACRGTQ estime que les PPP ne doivent pas être l'apanage des entreprises de grande envergure uniquement et être ainsi à la portée de seulement quelques privilégiés. Nous suggérons donc que le gouvernement du Québec envisage la réalisation de PPP de moindre envergure. Puis, quand je parle de moindre envergure, je parle d'une échelle qui peut aller peut-être de 50 à 100 millions de dollars dans le domaine de l'entretien de réseaux, pas seulement du développement de réseaux, tel que le gouvernement l'envisage actuellement, mais aussi dans le domaine de l'entretien de réseaux.

Et, à titre d'exemple, je pourrais citer des partenariats public-privé dans ce qui est communément appelé la gestion déléguée. C'est-à-dire qu'on confie à des entreprises généralement locales la gestion de réseaux... la gestion de l'entretien de réseaux routiers importants dans leurs secteurs géographiques. Et, quand je dis l'entretien, ce n'est pas que l'entretien déneigement et coupe de gazon, on parle aussi de réfections mineures, nids-de-poule, fissures et même, à l'occasion, réfections majeures qui permettent, sur une longue période de temps, d'optimiser les coûts d'entretien nécessaire. Un réseau de quelques centaines de kilomètres peut être confié à un entrepreneur dans les régions ou un groupe d'entrepreneurs dans des régions de façon à ce qu'ils deviennent responsables, sous des critères de performance fixés par l'État, de l'entretien complet du réseau. Et, s'il y a lieu, ils peuvent prendre des décisions d'investissements majeurs dans certains secteurs de ces réseaux-là de façon à réduire leurs coûts d'entretien durant la période prolongée où ils sont responsables du réseau.

Deuxième suggestion sur les PPP ? et c'est aussi un volet crucial ? selon nous, devrait faire partie intégrante dudit projet de loi un volet québécois. Malgré que cela puisse sembler une évidence, il faut prévoir un mécanisme qui obligerait les partenaires qui auront à se procurer des biens, des services, de l'expertise à le faire au Québec, et ce, afin d'encourager le plus possible l'industrie et les gens de chez nous. Nous suggérons donc que les PPP du Québec soient soumis au Règlement sur les contrats d'approvisionnement, de construction et de service des ministères et organismes publics.

Troisièmement, comme vous le savez, la réalisation d'un projet de PPP réussi passe par une bonne répartition des risques. L'entreprise privée est en mesure d'assumer une quantité importante de risques à condition qu'elle puisse être garantie d'un niveau minimum de revenus. L'entreprise privée est en mesure d'assumer le risque du coût des travaux, assumer le risque des délais, assumer le risque de la conception, mais, où les risques deviennent très élevés, c'est quand il s'agit de prévoir les revenus d'un ouvrage. Et d'ailleurs les expériences étrangères ont démontré qu'un trop grand risque sur les revenus pour le partenaire privé a souvent mené à des fiascos, parce que, quand ces revenus-là ne sont pas disponibles pour diverses raisons qui peuvent découler de la difficulté d'évaluer les revenus, surtout quand on parle de péage, bien on se retrouve devant un problème de toute façon parce que l'entreprise partenaire peut se retrouver devant des difficultés financières, et l'État doit reprendre possession de l'ouvrage. Donc, on suggère qu'un niveau minimum de revenus soit garanti par le gouvernement à la mise en oeuvre de chaque PPP.

Finalement, dernier commentaire sur les PPP ? quatrième et dernier ? nous tenons à dire que nous sommes préoccupés par la composition du conseil d'administration et des comités de l'agence. Nous croyons que ceux-ci devraient être composés des acteurs concernés par les projets que vous souhaitez réaliser en partenariat. Et on peut facilement constater que, dans la liste des 10 projets qui a été soulevée dans le plan de modernisation de l'État, il y a plusieurs projets qui font référence... qui sont des travaux routiers. Le conseil d'administration et les comités devront être représentatifs et inclure tant les acteurs provenant des administrations publiques et du secteur privé. Comme justement les projets impliquent beaucoup de projets routiers, nous sommes persuadés que l'ACRGTQ doit participer de façon active au processus.

En guise de conclusion ? ça tombe bien, il reste trois minutes ? permettez-moi de profiter de cette tribune pour vous rappeler que la réussite de tout projet d'infrastructure passe par le financement adéquat de sa construction et aussi de son entretien. Le plus grand bénéfice des PPP ? et je l'ai dit précédemment ? pour le Québec est que les infrastructures qui seront construites avec ce mode de construction bénéficieront d'un financement privilégié lors de leur période d'entretien. Malheureusement, seuls des projets d'expansion actuellement sont dans la mire du gouvernement. Il est primordial que les PPP puissent aussi faire profiter aux infrastructures actuelles du privilège du financement de l'entretien.

Pourquoi seules les nouvelles constructions jouiraient de fonds dédiés à leur conservation, alors qu'un tiers de notre réseau routier québécois nécessite actuellement des réfections majeures? Nous proposons donc que le gouvernement se penche sur la création d'une société de réfection et d'entretien du réseau routier qui bénéficierait de fonds dédiés pour l'entretien du réseau à l'image des PPP, car, soyons réalistes, la situation actuelle du réseau ne peut perdurer. En effet, chaque année, 1,5 % de notre réseau supérieur passe dans la catégorie des routes à reconstruire. Les PPP actuels proposés ne changeront malheureusement rien à cette situation.

Pour finir, nous tenons à vous réitérer notre appui au projet de loi n° 61 visant à créer l'Agence des PPP au Québec. Ainsi, à titre de président du conseil d'administration du l'ACRGTQ, je tiens à vous assurer de notre entière collaboration dans la réalisation de projets en partenariat. Je vous souligne aussi qu'il nous fera plaisir de vous faire bénéficier de notre expertise dans l'industrie du génie civil et de la voirie, et ce, dans les domaines technique, juridique ou des relations de travail. Étant la seule association représentative de ce secteur d'activité au Québec, l'expérience que nous... devrait bien servir les objectifs que vous poursuivez. Maintenant, il ne me reste plus qu'à dire, et ce, autant dans l'intérêt de nos membres que pour l'ensemble des citoyens du Québec: Il est temps de passer à l'action. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Forget. Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor.

n (10 heures) n

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, on entame notre deuxième semaine, M. Forget. Alors, comme vous êtes mon homonyme, je vérifierai après s'il y a un lien de parenté entre vous et moi. M. Robert, Mme Bourque et M. Tremblay, je veux vous féliciter pour le mémoire que vous avez présenté et vous remercier de vous être déplacés pour venir nous rencontrer et exprimer votre appui et vos réserves. C'est là bien sûr un travail colossal que vous avez fait. Manifestement, le mémoire est très étoffé, et je vous remercie infiniment. Je suis sûre que tous mes collègues vous remercient justement de ce travail que vous avez fait.

Maintenant, vous soulevez quelque chose dans votre mémoire ? je pense que c'est à la page 23 ? où vous dites, vous exprimez le souhait qu'on mette dans le fond ce qu'on pourrait appeler une clause Québec pour dans le fond privilégier les entreprises de chez nous et leur donner un accès aux partenariats public-privé. Et ce que vous soulevez est exprimé par plusieurs entrepreneurs justement qui ne voulaient pas que ce soit une façon où seulement les grandes entreprises puissent se prévaloir de cet outil que sont les partenariats public-privé. Maintenant, vous exprimez dans votre mémoire... vous semblez affirmer que la loi sur les marchés publics actuellement permettrait justement d'avoir cette clause Québec, et je ne pense pas qu'elle le permette. Mais de facto ça se passe, et ça se passe à peu près partout dans le monde, parce que bien sûr que, même si un consortium, pour un grand projet... Parce qu'un consortium ne se déplacera pas pour une petite affaire, là. Même, un consortium, ça ne se déplacera pas pour 50 millions, c'est évident. Et, je veux dire, c'est clair que ce sont les entreprises de chez nous qui vont être impliquées dans tous ces projets d'infrastructures. De facto, c'est ça qui s'est passé. Mais est-ce que vous pouvez élaborer davantage sur justement cette loi sur les marchés publics qui à mon avis nous empêche de mettre cette clause Québec?

Le Président (M. Paquet): M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Je vais certainement aller dans le même sens que vous quand il s'agit que cette clause-là s'applique de facto. Il est clair que l'entreprise... tout projet de construction d'infrastructure est éminemment local, O.K.? D'abord, les matériaux sont locaux. On n'a pas vu des matériaux pour faire des projets d'infrastructures voyager très, très loin. Il y a peu de matériaux pour les projets d'infrastructures qui traversent l'Atlantique ou qui prennent des distances importantes en camion, puisque ce sont essentiellement des matériaux granulaires, des matériaux locaux. Donc, il n'y a pas un grand risque au niveau des matériaux. Les matériaux vont provenir des mêmes sources en fait qu'ils proviennent actuellement dans la méthode traditionnelle. Il en va de même pour la main-d'oeuvre, hein? La main-d'oeuvre va provenir des mêmes sources que dans les méthodes traditionnelles; ce n'est pas l'arrivée d'un consortium qui va pouvoir changer ça. Ça, on est très conscients de ça. Donc, il est clair que la majorité de ce que même une entreprise étrangère pourrait faire ici va être éminemment québécois.

Où on a certainement une préoccupation, c'est au niveau de l'expertise. On pense que ce serait important que les PPP servent à développer une expertise au Québec dans le domaine justement de leur réalisation, de leur financement, de leur gestion de projets, et ça, ça s'exporte beaucoup plus facilement. C'est sûr qu'on a avantage à avoir de l'expertise ou de profiter d'un transfert technologique de la part de gens qui ont beaucoup d'expérience dans ce domaine-là, mais on voudrait qu'il reste quelque chose au Québec pour qu'avec le temps les entreprises d'ici puissent s'approprier pleinement la capacité de faire des PPP, et même des PPP majeurs, et c'est ce qui nous préoccupe.

Comment peut-on l'insérer dans la loi ou dans un PPP? J'avoue que cette mécanique-là m'échappe, je suis obligé de vous le dire. Mais je pense que c'est une préoccupation qu'il faut avoir. Et, si vous souhaitez qu'on se penche un peu sur l'aspect juridique de ça, on est certainement en mesure de fouiller et d'élaborer un peu plus loin. Mais je pense que le plus important, c'est nos préoccupations, nos préoccupations de dire qu'il faut qu'il reste quelque chose pour les entreprises québécoises si... Après deux ou trois grands projets de PPP qui sont exécutés ici, il faut qu'il reste quelque chose aux entreprises québécoises.

De là toujours mon petit aparté à dire: Si on en fait des plus petits, c'est sûr que ça va rester ici. Et on revient toujours sur cet élément-là: on a certainement la capacité de prendre les risques d'expertise sur des projets de moins grande envergure qui permettraient peut-être de décoller les PPP avec risque moindre et de bâtir graduellement l'expertise québécoise. Je ne dis pas nécessairement que les petits projets devraient remplacer les gros, mais je pense que les deux sont nécessaires pour que les entreprises du Québec et l'expertise du Québec se développent à bon escient.

Le Président (M. Paquet): Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Oui. Je partage tout à fait votre souhait qu'on développe une expertise au Québec. L'intention de l'agence, c'est développer également une expertise à l'intérieur du gouvernement. C'est ça, l'intention, parce que très souvent on a tendance à faire affaire seulement justement avec des gens de l'extérieur. Alors, je pense qu'il y a un souhait à cet égard-là de... puis je me suis inspirée beaucoup de l'impact qu'avait eu la construction d'Hydro-Québec avec la création de nos grosses firmes d'ingénieurs qu'on connaît aujourd'hui et qui rayonnent à travers le monde.

Maintenant, j'aimerais vous poser une question parce que j'ai l'impression que vous nous passez un autre message à travers votre mémoire, c'est l'implantation d'une société de réfection. Dans le fond, c'est d'un budget dédié aux routes. Ça fait longtemps qu'il y a des personnes qui nous passent ce message. Pouvez-vous expliquer davantage votre proposition de cette société de réfection et d'entretien?

Le Président (M. Paquet): M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Oui, merci. En fait, l'idée de discuter d'une société d'entretien et de réfection du réseau nous vient d'exemples dans le passé et actuels sur qu'est-ce qui se passe avec certains organismes de ce type-là. On se souvient très bien de l'Office des autoroutes, à l'époque, qui avait la capacité d'avoir des revenus qu'elle pouvait certainement dédier à l'entretien de certains réseaux. Des choix ont été faits, et on ne les met pas en cause, mais actuellement il n'y a pas de source de revenus directement de la route qui sont dédiés à la route.

Je vais vous donner un autre exemple. La création de l'Agence métropolitaine de transport, qui a elle-même des fonds dédiés à son fonctionnement, ça a permis quand même, je crois, dans la région métropolitaine, de faire de grandes percées dans le domaine des trains de banlieue, dans le domaine des stationnements incitatifs, dans divers domaines grâce justement à des fonds dédiés d'une façon récurrente dans... consacrés à une mission, à une vocation qui est le développement du transport en commun.

Donc, on s'aperçoit que l'entretien et la réfection du réseau ne jouit pas d'aucun mécanisme qui lui garantisse de pouvoir accomplir la mission qui, je pense, est importante pour les citoyens du Québec, la mission que notre infrastructure routière soit de qualité et qu'elle le demeure. Et actuellement cette situation fait qu'on est rendus, comme je le disais précédemment, à un kilomètre sur trois de nos routes qui ont besoin d'être reconstruites et, à chaque année, on a 1,5 % de plus de routes qui doivent être reconstruites.

Et, oui, c'est vrai que je me sers un peu des PPP pour dire: Il y a un grand privilège qui est donné aux PPP, c'est d'avoir le financement pendant une longue période. Je ne pense pas que ce privilège-là devrait être limité uniquement à quelques projets mais devrait être dédié à l'ensemble du réseau routier québécois ou certainement le réseau routier supérieur, qui est l'épine dorsale économique de la province. Donc, pour nous, ça nous apparaît important.

Est-ce que les PPP peuvent nous aider à faire ça? Bien, certainement, certainement. Ils ne vont pas tout faire; ils peuvent certainement nous aider. Mais ce serait d'autrement plus facile de faire des PPP dans le domaine de l'entretien du réseau si une dite société d'entretien avait une capacité d'avoir des fonds dédiés avec lesquels elle pourrait en l'occurrence assurer l'entretien, que ce soit avec ou sans PPP. Mais, si les PPP permettent de sauver des coûts, pourquoi est-ce qu'on ne les utiliserait pas même dans l'entretien du réseau grâce à ces fonds dédiés?

Et on me dit toujours, là: Ah, les fonds dédiés, les ministres des Finances ont horreur de ça, ont horreur de ça! Il n'y a pas beaucoup de budgets qui n'ont pas alloué des fonds dédiés. Récemment, je ne pourrai pas vous donner beaucoup de détails, mais, dans le dernier budget, il y a, je crois, une surcharge de l'immatriculation sur des véhicules, de grosses cylindrées, qui va créer des revenus d'environ 50 millions, qu'on a mis dans un fonds dédié pour les infrastructures municipales. La route sert à financer plein d'affaires, sauf elle-même, O.K.? On se sert de la route, que ce soit par l'immatriculation, par l'essence, par plein, plein de mécanismes... On a toujours appelé la route la poule aux oeufs d'or du Québec parce qu'elle génère des revenus très, très, très importants qui ne lui sont jamais rendus. Et j'ai toujours ma petite boutade qui dit: La poule aux oeufs d'or du Québec crée les nids-de-poule de la province, tu sais. C'est vraiment un genre d'aberration.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu et porte-parole de l'opposition officielle pour le Conseil du trésor.

M. Simard: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour de remercier l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec pour la qualité de son mémoire. D'emblée, je vous dirais ? et je le soulignais lorsque nous avons commencé nos travaux ? l'hypothèse de l'utilisation, comme outil de développement de certains grands travaux, des PPP ne nous choque pas en principe, hein? Et les exemples que nous avions cités à ce moment-là étaient justement des exemples routiers. Le gouvernement précédent d'ailleurs avait commencé, dans ce secteur, un certain nombre de démarches, vous le savez.

Cependant, il semble bien qu'il n'y ait pas de perspective... Vous-même d'ailleurs, vous sentez le malaise, dans votre mémoire. Les perspectives ne sont pas énormes de très grands projets. Si vous avez bien entendu et écouté la présidente du Conseil du trésor, la semaine dernière, qui essaie de nous donner une lecture un petit peu apaisante de son projet, ce ne serait que quelques grands projets. Et les quelques grands projets, on peut même les évoquer, ils ne sont pas si nombreux que ça et ils se situent à de très hauts niveaux financiers. On parle de l'autoroute 30: environ 1 milliard de dollars. On parle du pont sur la 25: autour de 250 millions de dollars. La fourchette se situe entre 250 et 1 milliard de dollars.

n (10 h 10) n

Première remarque que vous avez faite, que vous faites à l'intérieur de votre mémoire, c'est: Il n'y a pas beaucoup d'entreprises québécoises qui seraient à même de supporter le poids financier de travaux de cette dimension-là. Donc, l'hypothèse la plus vraisemblable, c'est l'arrivée de grands consortiums internationaux. Vous citez vous-même... Je vous demanderais d'aller vérifier d'ailleurs un certain nombre d'exemples, en Amérique du Sud notamment, vous y verriez qu'il s'agit de grands consortiums européens et américains dans la grande majorité des cas qui ont eu ces travaux-là. Donc, vous-même soulevez un problème majeur, c'est qu'à ce niveau d'investissement il y a peu de firmes qui ont les reins assez solides pour financer en partie ces travaux sur des périodes de 25 ou 30 ans. Alors, il faut être bien conscient de ça.

Alors, pour la partie qui vous intéresse, c'est la partie que la ministre nous dit ne pas être dans son projet de loi, c'est-à-dire un PPP qui n'en est pas un, c'est-à-dire la gestion déléguée des routes, l'entretien, des fonds dédiés à l'entretien, ou que l'on confie au secteur privé le soin, sur plusieurs années, d'entretenir les routes. Ce n'est pas sans intérêt, mais vous êtes conscients que ce n'est pas selon la définition. Je cite la ministre: à l'occasion d'un aparté sur la 407, par exemple, elle a bien précisé qu'il ne s'agit pas d'un PPP, il s'agit de l'entretien... enfin, d'une autoroute qui a été vendue au privé pour être entretenue par le privé.

Évidemment, ces grands projets auxquels nous avons tous fait allusion jusqu'à maintenant, vous comprendrez bien que leur financement est dans tous les cas, jusqu'à maintenant, assuré par le citoyen, l'usager; c'est par péage. Parce que les autres exemples que vous donniez des projets de 25 millions, de 12 millions, de 34 millions, vous n'allez pas vous imaginer qu'on va parsemer le territoire du Québec de postes de péage à toutes les routes ou presque pour nous assurer de garantir l'entretien de la route pendant 20 ans, 30 ans, 40 ans. Vous pouvez l'espérer, là, mais il me semble que c'est peu vraisemblable que ça se réalise. Je ne sais pas si les citoyens de la députée de Matane seraient très heureux d'apprendre ? en tout cas, nous, à Sorel, là... que leur bout de route, là, qui traverse chez eux, dorénavant ils devraient payer, passer à des péages pour l'entretenir. Alors, si ce n'est pas des péages, c'est donc l'État qui va financer l'entretien.

Qu'il y ait des déficiences dans la planification de l'État, nous en sommes tous. Les sommes consacrées à l'entretien des routes comme à l'entretien des édifices publics, comme à l'entretien des infrastructures ont été, de tout temps, inférieures aux besoins, tout le monde est clair là-dessus. Mais la question, c'est: Comment faire face maintenant à cette obligation? Où trouver les sommes d'argent? Quelle priorité devrons-nous donner dorénavant à l'entretien? Il n'y a rien de plus choquant que d'arriver de l'Ontario ou des États-Unis et de tomber sur une route québécoise qui est toute cahoteuse, où l'hiver a laissé des traces insupportables. On se dit: Leur climat est à peu près le même que le nôtre; il y a donc eu un problème. Le même climat et le même type de construction devraient donner normalement le même type de routes au bout de la ligne. C'est donc dire qu'il y a eu des manques au niveau notamment de l'entretien. Parce que, jusqu'à maintenant, vous les construisez toutes, les routes du Québec, j'aurais envie de me tourner vers vous puis dire: Elles vont mal, là, c'est vous qui les avez construites; on sait bien que ce n'est pas si simple que ça, hein?

Vous savez très bien que, lorsque vous disiez tout à l'heure: Dans un PPP, il y a la conception, il y a la surveillance, il y a les travaux eux-mêmes, la livraison des travaux... Mais tout ça, vous le faites déjà, vous êtes déjà liés avec le ministère des Transports. Dans chacun des contrats routiers que vous avez, vous êtes liés. Vous avez des pénalités si vous dépassez le coût. Vous avez des pénalités si vous dépassez le temps. Ces contrats, avec les années, se sont perfectionnés, ils sont rendus d'une très grande précision, mais, malgré tout ça, malgré ces contrats béton avec des pénalités, vous livrez des routes souvent en retard et souvent en dépassement de coûts. En quoi la formule des PPP changerait grand-chose à ça? Le risque, vous l'avez déjà. Il existe déjà, ce risque. Il est différent, mais il existe.

Alors, je sais que je vous transmets un certain nombre de réactions un peu dans le désordre, mais vous vous rendez compte que la dimension des travaux que la ministre vise jusqu'à maintenant dans les PPP ne correspond pas aux ambitions que vous semblez manifester aujourd'hui, dans votre mémoire.

Le Président (M. Paquet): M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Oui, merci. Je vais essayer de répondre à vos diverses interrogations dans l'ordre ou dans le désordre, là. D'abord, pour ce qui est des groupes internationaux, c'est clair que, quand un projet est un projet majeur, si on parle d'une échelle de, disons, au-dessus de 500 millions ou 2 milliards, les partenaires internationaux sont nécessaires. Ce n'est pas tant à cause de la capacité des entreprises québécoises mais bien à cause de leur expertise, soyons clairs. Les Européens ont beaucoup, beaucoup plus d'expérience dans les partenariats public-privé, ce qui fait qu'ils sont naturellement plus sujets à s'y intéresser et aussi à y être performants. Les exemples cités dans notre mémoire pour l'Amérique du Sud incluaient, oui, des partenaires internationaux mais toujours avec des partenaires locaux, il faut comprendre. Et ce qui est transporté par le partenaire international, c'est bien l'expertise. D'ailleurs, si vous suivez un peu les regroupements qui se font et se défont au fil du temps au Québec pour des groupes ou des consortiums relatifs à la préparation d'offres dans le domaine des PPP, parce qu'on en parle déjà depuis au moins cinq ans, il n'y a jamais plus d'un partenaire international sur des groupes qui vont de trois à cinq partenaires totaux. Donc, on parle toujours de deux à quatre partenaires locaux.

Pour ce qui est du financement, les entreprises qui font les PPP ne financent pas eux-mêmes, ils font appel à des groupes financiers extérieurs qui sont des banques. Et, encore là, l'expertise européenne, l'expertise et l'expérience des banques européennes s'est développée à l'usage. Donc ? puis je reviens encore là-dessus ? ce n'est pas tellement la non-capacité des entreprises ici, des banques canadiennes à financer, mais bien qu'ils sont avec moins d'expertise.

J'étais, hier, à une conférence sur justement le financement des partenariats public-privé et j'ai été impressionné de voir comment des groupes banquiers canadiens, des groupes importants, sont documentés, prêts, organisés. Ils se mettent devant les entrepreneurs privés pour faire des offres de façons de financer. Moi-même, j'en suis renversé, tout le monde se prépare, et je pense que tout le monde va être prêt.

Si je continue un peu dans votre raisonnement, le fameux problème des péages, soyez assuré actuellement que n'importe quel bout de route, aussi court soit-il, dans la province, qui est en mauvais état constitue un péage pour le citoyen, O.K.? Chaque nid-de-poule est un péage au Québec, là. Soyons bien clairs, O.K.? Il ne s'agit pas, là, qu'on ne paie pas, là, on paie. Tous les citoyens paient, mais ils paient aux garagistes, O.K.? On souhaiterait bien pouvoir payer ailleurs, je pense. Si l'État ou si le gouvernement nous en donnait l'occasion, je pense que tous les citoyens préféreraient mettre l'argent pour rouler sur une route de qualité plutôt que de passer au garage tous les trois mois, O.K.? Et, à cet effet, c'est sûr que la mécanique pour créer des péages sur des réseaux dédiés est, j'en conviens, à peu près impossible, mais on peut certainement se servir de sources de financement actuelles.

Et je reviens sur le fait que la route est la poule aux oeufs d'or du Québec. On peut certainement se servir des argents actuellement dans l'immatriculation ou dans l'essence pour y dédier des sommes qui vont garantir qu'au lieu de payer au garage on va payer à l'État pour avoir des routes de qualité. Donc, pour moi, le péage, il existe déjà, O.K.? Et la solution, c'est de prendre l'argent de l'essence et de l'envoyer vers des... envoyer des sommes dédiées, des portions dédiées vers une éventuelle société d'entretien du réseau routier.

Bon, vous dites qu'on a construit ces routes et qu'elles sont en problème. Bon, je sais que vous avez fait peut-être un résumé rapide de ce qui se passe, O.K.? Il faut être conscient, comme je le disais, que, quand un entrepreneur, on lui confie la construction d'une route alors que les plans et devis sont déjà tout élaborés, c'est un peu triste à dire, mais on est confinés souvent au rôle de pousser la brouette dans la direction où on nous dit de la pousser, là, parce que tout est inscrit sur comment est-ce qu'on doit faire, et il n'y a que 30 % de l'ensemble de l'investissement d'une route qui est fait par l'entrepreneur. On ne fait pas la conception, on n'en fait pas l'entretien, il y a plein de choses qu'on ne fait pas. Il y a beaucoup d'entrepreneurs, je vous dirais, qui s'insurgent, trois ans ou cinq ans après qu'ils ont construit une route, de voir que l'entretien est complètement délaissé puis là ils sont capables de dire au ministère: Écoutez, là, il va arriver tel problème si vous ne prenez pas telle mesure d'entretien. Si les entretiens ne se font pas, tous les entrepreneurs vont avoir l'air fou, je suis d'accord avec vous. Confiez-leur l'entretien, O.K., et vous allez voir que les désastres que vous nous décrivez actuellement ne se reproduiront plus parce qu'ils vont avoir la capacité d'intervenir durant la période d'entretien.

Donc, ça, c'est quelque chose... Je suis peut-être un petit peu vif sur... de mettre les entrepreneurs au banc des accusés pour la qualité des routes. Il ne s'agit pas que de la construire, il s'agit de s'en occuper aussi. Puis confiez ça aux entrepreneurs, vous allez voir, la qualité des routes va s'améliorer grandement.

n (10 h 20) n

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Forget. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Alors, M. le Président, simplement apporter un éclaircissement. Quand mon collègue le député de Richelieu dit que ça va s'adresser seulement pour les grands projets pour faire appel à l'agence, mais il n'y a rien qui empêche les entrepreneurs et le ministère des Transports de faire des PPP plus petits sans avoir besoin finalement de l'agence. L'agence, c'est une... On parle ici de la création d'une agence qui va donner des conseils pointus au niveau contractuel. Alors, c'est ça qui est important, là, c'est de ça qu'on discute.

Mais par ailleurs je suis d'accord avec vous, M. Forget, que de parler de PPP, moi, je suis renversée combien tout le monde m'en parle dans le moment. Et tout le monde en parle parce qu'ils voient là une avenue pour toutes sortes de volets dans l'économie québécoise qui souvent ne sont pas des partenariats public-privé. C'est simplement ou de la privatisation ou une entente entre le public et le privé, là, pour construire quelque chose, mais ce ne sont pas ce que j'appelle des partenariats public-privé.

Maintenant, vous avez parlé également des petits projets et vous avez parfaitement raison, mais il n'y a rien qui empêche justement de développer cette même philosophie de partenariat public-privé, c'est-à-dire d'entretien, de planifier, d'entretenir... de bâtir et d'entretenir un projet qui est moins que même 50 millions. D'ailleurs, il y a des projets qui ont été faits en gestion déléguée au Québec. Il n'y en a pas beaucoup, mais il y en a eu quelques-uns. Donc, je pense que l'expertise qu'on peut développer va pouvoir s'élargir à plein d'autres volets inférieurs en termes de coût mais quand même qui vont apporter un enrichissement au niveau de la qualité de notre patrimoine, je dirais, routier.

Vous avez parlé également de péage, mon collègue a parlé de péage. Et, à bien des égards, c'est bien important de le rappeler, ça, c'est qu'en Angleterre ils ont construit plein de routes en partenariat public-privé, il y en a une qui est payante, d'accord, contrairement à la France où tout le monde paie, et ça fait partie de la culture. On remarquera par ailleurs que les routes françaises sont belles, d'accord? Quand on se promène en France, on ne se pose pas la question si on va tomber sur un nid-de-poule ou pas, il n'y en a pas.

Alors, maintenant, je voudrais poser une question. Vous avez parlé de contrats par gestion déléguée. Et, de plus en plus justement, souvent, on met en doute la longueur des contrats en gestion déléguée. C'étaient déjà des contrats de 30 ans, on tente de les diminuer à 20 ans. On veut, en Europe notamment, réduire à 12 ans pour augmenter la concurrence. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

Le Président (M. Paquet): M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Merci. Je dirais qu'il y a une contrepartie dans les deux options. C'est sûr que, pour augmenter la concurrence, si on garde la période de la gestion déléguée entre 10 et 15 ans, oui, on va atteindre notre but, mais on ne pourra pas bénéficier de la capacité d'une entreprise, sur 10 ou 12 ans, de faire le choix d'une réfection majeure qui lui permettrait de financer des économies d'entretien sur une période de l'ordre de 25 ou 30 ans. Et je vous dirais qu'on se priverait, en allant de 10 à 15 ans, de cette possibilité-là que quelqu'un décide de dépenser 5 millions le premier jour de sa gestion déléguée pour sauver 5,2 millions de dollars sur 20 ans, O.K.? On se priverait de ça, parce que la période, pour une route, 10 à 15 ans, c'est relativement court. Je pense... on a avantage à garder la période importante si on veut bénéficier d'investissements majeurs. Si on garde les périodes courtes, on risque de tomber dans une difficulté pour changer le modèle, c'est-à-dire le modèle actuel qui décide d'étirer l'infrastructure qu'on a qui est déjà rendue à sa durée de vie. On l'étire encore pendant cinq ans, on l'étire encore pendant sept ans, on l'étire encore. Et, moi, ma crainte, c'est que, si les périodes sont courtes, on va perpétuer le modèle actuel qui est d'étirer les infrastructures qui sont déjà rendues au bout de leur durée de vie.

Donc, je vous dirais, il y a une contrepartie. La compétition est importante, mais il faut aussi que l'entreprise ait la capacité de faire des investissements et de récupérer son argent sur une période assez longue. Et, dans le domaine de la route, 20 ans est à peu près, pour une construction neuve, la durée de vie minimum qu'on doit envisager. Généralement, de plus en plus, les durées de vie des conceptions actuelles tendent à aller beaucoup plus vers 25, 30 et même, à l'occasion, 40 ans. Parce qu'on réalise bien que 20 ans, là, c'est vite passé, hein? On vient rapidement, là, avec le problème de reconstruire.

Donc, comment est-ce qu'on fait pour avoir le beurre et l'argent du beurre dans ce domaine-là? Peut-être en faisant attention sur la grandeur des réseaux qu'on confie. Peut-être que la solution serait de confier des réseaux de gestion déléguée de moindre importance mais sur des périodes plus longues ou de prévoir, sur le plan contractuel, des mécanismes plus détaillés pour qu'on puisse rétrocéder des contrats à d'autres entreprises. Il y a peut-être moyen de regarder des solutions dans ce domaine-là. Ce serait définitivement à investiguer.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Je vais laisser la parole à ma collègue la députée de Matane.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. M. Forget, ma question revient toujours sur une des recommandations importantes que vous avez faites dans votre rapport, et je la cite: «...nous insistons [également] sur le fait que ce genre de programme ne doit pas demeurer l'apanage d'un nombre [inférieur] d'entreprises de grandes envergures, au détriment d'un nombre beaucoup plus élevé de petites et moyennes entreprises.»

Notamment dans le domaine de la construction des routes, j'ai de la difficulté, M. Forget, à imaginer comment il pourrait être rentable pour une entreprise, petite ou moyenne entreprise, de se réserver uniquement l'entretien des routes. Et où peut-on réaliser plus de bénéfices que sur le mode actuel où on est... On sait bien, actuellement, le ministère des Transports donne la plupart des contrats d'entretien à sous-contrat ou, comme on parlait tout à l'heure, de contrats à gestion déléguée qui ramènent finalement au secteur privé une grande partie des opérations au niveau de l'entretien des routes. Je pourrais comprendre, dans un contrat de grande envergure, que le constructeur d'une route puisse vouloir améliorer la qualité de l'infrastructure pour justement économiser sur les coûts d'entretien et ainsi réaliser des économies d'échelle considérables, mais, lorsqu'un entrepreneur ne fait qu'assumer l'entretien des routes, comment peut-il pouvoir avoir une marge de manoeuvre suffisante pour réaliser plus de bénéfices qu'il n'en fait sous forme de sous-contrats ou de contrats à gestion déléguée?

Le Président (M. Paquet): M. Forget, en trois minutes.

M. Forget (Jean-Maurice): Excellente question. Il faut comprendre la dynamique actuelle des entreprises de construction routière. Si on regarde les budgets de construction routière alloués par le gouvernement du Québec au ministère des Transports des 10 ou 15 dernières années, c'est très facile à comprendre, la difficulté de gérer des entreprises de construction routière, et ça, c'est à cause de la fluctuation des sommes allouées à l'entretien du réseau. Elles passent du simple au triple à l'intérieur de cinq ans, autant à la hausse qu'à la baisse. Donc, le volume de travail qui est disponible pour les entreprises privées de la province dans le domaine de la réfection routière est très variable. Ça amène des aléas très... Elle est variable sur le plan de l'ensemble du Québec, elle l'est encore plus sur le plan régional, parce que même si le budget... Supposons que le budget du ministère des Transports soit relativement constant dans le temps, elle peut varier énormément d'une région à l'autre, ce qui fait que les entrepreneurs régionaux sont tributaires de variations énormes dans la quantité de travaux qui leur sont accessibles des fois à des quantités importantes, des fois, presque rien. Essayer de comprendre comment une entreprise privée réussit à faire sa planification à long terme et sa gestion à long terme de sa main-d'oeuvre et de ses équipements dans ce contexte-là, ça relève de la quadrature du cercle.

Ce que des contrats à long terme permettraient, c'est d'abord, un, de pouvoir financer mieux des acquisitions d'équipement en disant: Regardez, j'ai un contrat de 20 ans, je suis capable d'aller m'acheter cet équipement-là. Je n'ai pas un contrat de trois mois, là, que je ne sais pas si, l'année prochaine, le contrat va revenir parce que peut-être que l'argent va être rendu dans l'autre région. L'autre chose, il va pouvoir aussi, sur la main-d'oeuvre, prendre des engagements à long terme et développer une main-d'oeuvre qui est toujours la même plutôt que d'avoir de la main-d'oeuvre qui se déplace constamment d'une région à une autre parce que les sommes varient. Donc, facilité de planification des équipements, facilité de planification de la main-d'oeuvre. Et je ne crois pas que les entreprises se limiteraient à ne faire que de l'entretien. Au contraire, elles jumelleraient des activités continues, récurrentes d'entretien, sur une période assez longue, à des activités plus ponctuelles de constructions routières importantes qui peuvent passer dans leurs régions à l'occasion. Donc, je pense que c'est une combinaison d'un revenu stable que permettrait la gestion déléguée avec des projets plus ponctuels de réfection majeure qui permettrait à nos entreprises régionales d'avoir certainement une meilleure santé financière. Merci.

n(10 h 30)n

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Merci, M. le Président. Bon. Tout à l'heure... Je ne vais pas revenir sur l'ensemble des questions, mais il est évident, et la présidente du Conseil du trésor l'a confirmé, que tout le secteur que vous voudriez ouvrir, de l'entretien des routes, ne relève pas des PPP tels que définis par le projet de loi n° 61 qui est devant nous, là. On est dans la gestion déléguée. Il y a des formules qui peuvent être intéressantes. Vous-même insistez beaucoup sur la nécessité d'assurer un financement pour la durée des routes ou une partie de la durée des routes, de fonds... Vous parlez de fonds dédié. Il y a toutes sortes de formules qu'il va falloir certainement creuser davantage, étant entendu que les méthodes actuelles ne semblent pas donner les résultats. Mais on n'est pas dans les PPP. Là où on l'est, par contre, c'est dans les grands projets.

Et êtes-vous conscient que ces partenariats risquent d'être un peu déséquilibrés? Je pense, par exemple, à l'exemple de l'autoroute 30. Actuellement, le nombre de passages quotidiens dans cet axe ? on peut envisager qu'avec une autoroute il augmente, mais en même temps il sera partagé entre l'autoroute et les autres routes ? c'est à peu près 25 000 véhicules par jour. S'il y avait une vérité des coûts et un véritable partenariat, avez-vous imaginé quels seraient les coûts de péage nécessaires pour le financement de la construction et l'entretien de ces routes-là? Ça risquerait d'être faramineux. Est-ce que vous êtes conscient qu'un PPP dans un projet comme celui-là, ça va être une très, très forte participation de l'État, des deux ordres de gouvernement d'ailleurs, et un contrat de participation au risque de l'entreprise privée surtout pour l'entretien et la continuité de la route, donc par des péages?

Le Président (M. Paquet): M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Oui. Je pense que le recours aux PPP, pour beaucoup d'agences gouvernementales, a servi d'abord à devancer des projets qui sont reconnus, étant nécessaires dans un horizon pas nécessairement immédiat. Je pense que, quand on décide de construire un ouvrage pour une période de 40 ans... En fait, nos routes, on ne les détruit jamais, hein, à partir du moment où on en met une, on l'entretient pour une durée de temps que j'appellerais illimitée. Mais, quand on décide de lancer un ouvrage, ce qui suppose qu'on a un horizon de 50 ans, il est clair que le moment où il devient absolument nécessaire, il est trop tard pour réfléchir à le construire. On doit débuter sa construction, le processus d'avant-projet, et tout ça, dans l'horizon qu'au moment où il sera en service il sera nécessaire. Et, comme les délais sont importants, je pense qu'il faut prévoir ces délais-là.

Vous faites référence à des trafics de l'ordre de 25 000 véhicules par jour pour la 30. Bon. Je ne peux pas commenter sur ce chiffre-là, mais c'est clair que, si c'est le cas, 25 000 véhicules par jour, vous avez raison, ce n'est pas très élevé et ça risque... ça pourrait potentiellement faire des péages importants. Mais qu'est-ce qui se produit si on ne la construit pas puis qu'on attend d'avoir 100 000 véhicules par jour pour la construire? Quels vont être les coûts sociaux d'avoir attendu? Donc, il y a une interrogation.

Le meilleur exemple pour ça, c'est la fameuse autoroute 407. Lorsque la 407 a été planifiée, dans les cartons du gouvernement de l'Ontario, il était clair que, si le gouvernement de l'Ontario se lançait à faire la 407 dans le procédé traditionnel, il leur en aurait pris environ 15 ans, tronçon par tronçon, selon les tronçons les plus prioritaires, où le trafic probablement motive un peu mieux la construction, vers des tronçons moins nécessaires. Graduellement, et sur un horizon de 15 ans, ils auraient fait des petits bouts d'autoroute, mais à chaque fois qu'ils font un petit bout d'autoroute, ils ne sont pas capables d'en utiliser le plein potentiel parce qu'il manque le petit bout qui amène un 10 000 ou un 15 000 véhicules par jour de plus qui permet au bout le plus sollicité de devenir rentable.

Donc, le gouvernement de l'Ontario a pris un risque mais aussi une attitude, je crois, très proactive de dire: Écoutez, on va construire sur un horizon de quatre ans. C'est ce que ça a permis. On a devancé la livraison complète d'un tronçon de 67 km, je parle bien du tronçon initial. Maintenant, il va être poursuivi. Il est poursuivi pour un peu plus long, mais le tronçon initial était de 67 km. On a décidé sur quatre ans de construire 67 km plutôt que d'attendre 15 ans, et immédiatement le bénéfice du trafic s'est produit parce qu'avec 67 km les gens se sont mis à utiliser une infrastructure qui avait une masse critique suffisante pour qu'elle soit efficace. La méthode traditionnelle est d'en faire 5 km à tous les ans, mais chaque 5 km ne produit pas son bénéfice, donc il faut à un moment donné se lancer pour en construire une quantité suffisante.

La démonstration de la 407 est d'autant plus éloquente qu'après avoir construit 67 km ? avec le risque de dire: Peut-être qu'il y a des bouts là-dedans qui sont un petit peu moins urgents ? ils ont vite réalisé qu'il fallait qu'ils en rajoutent un autre 40 km, parce que ? comme on dit: construisez une route, le trafic viendra, là ? elle a généré une activité économique telle que soudainement le 40 km additionnel a été nécessaire. Et à l'intérieur de l'horizon de 15 ans que ça aurait pris pour faire le 67 km original, en fait, au bout de 10 ans à peine, ils vont avoir 100 km d'autoroute, donc c'est carrément deux fois plus vite, ça, là. Je pense que c'est important.

La 30 ne pourra pas se construire en petits bouts, là. Vous faites le pont, le monde va aller où, là? Il faut qu'elle se fasse d'un bout à l'autre. Et c'est vrai qu'elle va se faire peut-être avec des trafics qui sont limites, mais par le temps qu'elle va être terminée, les trafics ne seront plus de 25 000 véhicules par jour, ils vont nettement être supérieurs à ça.

Le Président (M. Paquet): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, en 2 min 25 s.

M. Picard: Merci, M. le Président. M. Robert, dans les avantages, tantôt, vous parliez de réduction des coûts, des coûts de réalisation. Et aussi, à une réponse tout à l'heure d'un de mes collègues, vous avez parlé que, hier, vous étiez à un colloque où on a parlé des banques canadiennes qui étaient après financer les PPP. Vous savez que les opposants aux PPP souvent lancent l'idée que le gouvernement peut emprunter à moindres coûts par rapport aux consortiums, aux entreprises privées. Hier, dans votre colloque, est-ce qu'on a parlé de structures de financement? Et qu'est-ce qu'on pourrait espérer, je veux dire, comme taux de financement des projets en PPP? Est-ce que ce serait l'équivalent des gouvernements, un petit peu plus? Est-ce que vous pourriez élaborer là-dessus, s'il vous plaît?

Le Président (M. Paquet): 1 min 30 s, M. Forget.

M. Forget (Jean-Maurice): Certainement. Les taux des entreprises privées ou des banques canadiennes pour financer les PPP vont être supérieurs légèrement aux taux que les gouvernements peuvent obtenir, c'est clair. Par contre, si on met dans la balance tous les autres bénéfices des PPP puis qu'on regarde ça dans un ensemble, il reste des économies. Globalement, il reste des économies à utiliser l'entreprise privée pour faire à la fois le financement, la construction et l'entretien des réseaux importants.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, au nom de la Commission des finances publiques, je remercie l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, M. Forget, Mme Bourque, M. Tremblay, M. Robert, pour votre participation à nos travaux. Je suspends les travaux de la commission pour quelques instants et j'invite les prochains invités à bien vouloir se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 10 h 38)

 

(Reprise à 10 h 40)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant... nous poursuivons nos travaux et nous accueillons la Société de transport de Montréal. M. Pierre Vandelac, directeur général de la Société de transport, bienvenue, et si vous voulez présenter, s'il vous plaît, les gens qui vous accompagnent. Et vous disposez d'une période maximale de 20 minutes pour votre présentation. Bienvenue.

Société de transport de Montréal (STM)

M. Vandelac (Pierre): Merci, M. le Président. À mon extrême gauche, donc, M. Robert Olivier, qui est directeur Planification et soutien à l'exploitation; Me Sylvie Tremblay, qui est secrétaire de la STM et directrice des affaires juridiques; à mon extrême droite, M. Sylvain Gonthier, directeur des ressources humaines; et finalement Mme Francine Gauthier, directrice exécutive Finances et approvisionnement.

Je tiens donc à vous remercier pour l'opportunité que vous nous donnez d'exposer nos commentaires sur le projet de loi. Donc, ma présentation tentera de résumer le mémoire et me permettra d'insister et de clarifier, je l'espère, certains points.

Dans le mémoire qu'on vous a présenté, la Société de transport de Montréal tient à vous signifier d'abord qu'elle partage les préoccupations du gouvernement concernant l'efficacité, l'efficience et la qualité, qu'elle adhère à l'approche des partenariats public-privé, l'appliquant déjà à certaines de ses activités, dépendamment de la définition qu'on lui donne.

Toutefois, la STM considère le P3 comme un des moyens et non comme une fin en soi. Cependant, elle a certaines réserves quant au rôle prévu de l'agence de même que sur le processus décisionnel de la mise en place des P3.

Finalement, la STM partage la position prise par l'association des transporteurs urbains du Québec, qui a analysé article par article le projet de loi. L'ATUQ, donc l'association, la présentera dans quelques jours devant cette commission. Quant à nous, nous nous concentrerons sur les enjeux spécifiques qui nous concernent directement.

Je vais d'abord, si vous le permettez, présenter sommairement ce qu'est la Société de transport de Montréal, la STM, donc une entreprise publique de transport en commun qui est au coeur même du développement économique de la région de Montréal, qui développe et exploite un réseau de transport en commun intégré.

La STM assure, par les modes de transport collectif, la mobilité des personnes sur l'île de Montréal. Elle dessert 3,5 millions d'habitants dans la grande région de Montréal. Elle assume près de 85 % des déplacements effectués en transport collectif de la région de Montréal et près de 75 % de tous ceux réalisés au Québec. Elle emploie plus de 7 600 personnes. Elle gère un budget de 811 millions et possède un vaste patrimoine dont la valeur de remplacement est estimée à 8,8 milliards de dollars. Elle figure au 18e rang des entreprises en importance au Québec. Annuellement, elle assure donc plus de 363 millions de déplacements, dont 218 millions dans le réseau du métro.

Prenons quelques instants pour vous décrire brièvement le réseau et les infrastructures de la STM. Donc, le réseau du métro est composé d'abord de quatre lignes totalisant 66 km de tunnels et 65 stations. Le métro opère avec 759 voitures, dont 336 ont été mises en service pour l'ouverture du métro en 1966. Elles parcourent 60 millions de kilomètres par année.

Quant au réseau des autobus, il compte 1 590 autobus dans son parc, dont l'âge moyen est de 8,5 ans. Répartis dans sept centres de transport, ces autobus desservent 165 lignes, dont 98 sont accessibles aux personnes en fauteuil roulant. Les autobus parcourent près de 71 millions de kilomètres par année.

La société assure également un service de transport adapté. Elle répond aux besoins de quelque 15 000 clients qui effectuent annuellement près de 1,5 million de déplacements, soit 6 000 par jour. Le service est assuré en régie par 93 minibus et par une trentaine de compagnies de taxi avec qui elle a des ententes contractuelles. Près de 70 % des déplacements en transport adapté sont effectués en taxi.

L'objet central de ce mémoire porte sur la création de l'Agence des partenariats public-privé. Mais, avant de l'aborder spécifiquement, il m'apparaît important, dans le contexte actuel, d'apporter quelques éléments de précision quant à la position de la STM face au P3. La société donc considère que le P3 est un moyen et non une fin en soi et qu'il doit être réalisé dans le respect des conditions de travail de ses employés. Elle croit que ce mode de gestion peut être bénéfique s'il contribue directement à l'accroissement de la performance de l'entreprise, à l'amélioration de la satisfaction de la clientèle ou à une diminution des coûts pour un même service. Plus précisément, la contribution des partenaires privés doit permettre aux organismes publics d'envisager les P3 comme un moyen d'améliorer la qualité et l'accessibilité des services, d'améliorer l'efficacité des méthodes et pratiques technologiques et d'accélérer les investissements.

Toutefois, la pertinence d'appliquer un P3 à la STM en tout ou en partie ne peut s'envisager sans une évaluation rigoureuse de la performance et du coût des services rendus. À cet effet, depuis plusieurs années, le réseau du métro fait l'objet d'une comparaison continue avec d'autres réseaux publics et privés au niveau international. Selon l'Imperial College of London, le réseau du métro de Montréal se situe parmi les plus performants dans le monde, et ce, dans sa catégorie. Pour le réseau des autobus, la STM a pris le leadership d'un groupe de balisage concurrentiel international, donc de la même forme que pour ce qui est du métro.

La STM entend généraliser cette pratique continue d'évaluation de la performance à l'ensemble de ses activités, élément dominant de son plan d'affaires 2004-2008. D'ailleurs, depuis plusieurs années, la STM profite de l'expertise du secteur privé dans certains champs d'activité comme la gestion, l'installation, l'entretien et le financement de plus de la moitié du parc des abribus de la STM, la gestion de l'entretien des autobus depuis quelques années, la mise sur pied de bureaux de projets pour la réalisation de différents programmes, entre autres Réno-Systèmes.

Abordons maintenant le coeur du sujet, le projet de loi n° 61 sur la création de l'agence. Le guichet unique favorisé par le projet de loi présente certes un intérêt en matière de concentration des expertises relativement aux P3, mais il soulève des questionnements, à la STM, formulés ici sous forme de préoccupations qui concernent d'une façon plus particulière le rôle de l'agence, le processus décisionnel et la mise en place des P3, les modifications législatives inhérentes à la concrétisation des P3 et la participation des ressources humaines.

La STM émet quelques réserves quant au rôle dévolu à l'agence dans le projet de loi, notamment en ce qui concerne l'obligation de recourir à ses services avant la mise en place de tout projet d'infrastructure, d'équipement ou de prestation de services publics financé en tout ou en partie par le gouvernement. Déjà, il existe un programme de financement du ministère des Transports pour l'ensemble de l'infrastructure dans les sociétés de transport pour l'évaluation de la faisabilité en mode P3, pour le choix des partenaires, pour la négociation et la conclusion des contrats.

L'agence se place comme maître d'oeuvre des projets pour chacune des phases, et ce, même dans des domaines d'expertise spécifiques comme le transport en commun. Ainsi, selon notre compréhension, le gouvernement peut confier à l'agence le mandat de choisir un partenaire et de conclure un contrat en vue de sa réalisation. Avec de tels pouvoirs et peu importe son niveau d'apport financier, le gouvernement pourrait s'approprier la gestion du processus de mise en place de tout partenariat.

L'effet combiné du présent projet de loi, du projet de loi n° 60 sur la Société de financement des infrastructures locales du Québec et du Programme d'aide gouvernemental au transport collectif des personnes amène la société à se questionner sur les effets de l'appropriation et de la diffusion du pouvoir décisionnel du gouvernement sur nos priorités et sur nos besoins d'investissements majeurs.

Une seconde préoccupation de la STM porte sur le processus décisionnel et la mise en place des P3 proposés dans le projet de loi. Selon les procédures prévues à la politique-cadre pour la réalisation d'un projet d'infrastructure en mode P3, le ministre devra intervenir jusqu'à quatre reprises avant qu'un contrat puisse être octroyé. Cette situation risque de produire des délais importants et d'alourdir les processus administratifs.

Pour la STM, cette question de délais additionnels constitue un enjeu majeur qui s'explique par les raisons suivantes: tout d'abord, l'urgence d'agir dans le métro. La majorité des équipements fixes du métro ont atteint, même dépassé, la fin de leur vie utile. La plupart des infrastructures n'ont pas été remises à neuf depuis l'inauguration du métro en 1966. La STM possède un des plus vieux parcs de matériel roulant. Les MR-63 donc ont été mis en service en 1966. Nous en avons 336. Ils ont donc actuellement 38 ans, et, avant de pouvoir penser les renouveler, évidemment on pourrait être rendu à l'âge de 43, 45 ans. Je peux vous dire que la moyenne dans le monde, c'est autour de 30 ans où il y a des changements, des renouvellements de parcs de matériel roulant.

n(10 h 50)n

La somme des investissements requis au cours de la prochaine décennie pour le métro atteint les 2,4 milliards. Le réseau des autobus requiert également des investissements importants. Près de 1 milliard est requis pour l'achat d'autobus et le renouvellement des infrastructures d'entretien et de remisage des autobus, et ça aussi pour les 10 prochaines années. Tout délai supplémentaire compromettra le bon fonctionnement des infrastructures du métro. Cet élément est au coeur de nos préoccupations. Il ne fait aucun doute quant aux conséquences néfastes qu'engendrerait cette situation non seulement pour la clientèle du transport en commun, mais également pour l'ensemble des déplacements de la région métropolitaine de Montréal.

La STM se préoccupe aussi des difficultés d'application de la démarche proposée par le projet de loi. La négociation avec les soumissionnaires, au coeur du principe des P3, ne peut s'effectuer dans l'encadrement législatif strict actuel des sociétés de transport. Le législateur devrait prévoir dans la Loi sur l'Agence que les contrats en P3 qui seront conclus par un organisme public ne seront pas soumis aux mêmes règles d'octroi de contrats actuellement prévues, entre autres, dans la Loi des sociétés de transport en commun. Par cet énoncé, il faut bien comprendre que la STM ne veut pas que la loi permette d'éviter les règles de transparence liées à la procédure d'appel d'offres. Bien au contraire, elle veut plutôt faire ressortir que les règles actuelles auxquelles elle est assujettie ne permettent pas la négociation par étapes qui est nécessaire à la conclusion des ententes de partenariat. En fait, la loi devrait fournir les balises et donner les moyens de choisir le meilleur partenaire avec lequel elle pourra négocier la meilleure entente.

Le dernier élément mais non le moindre. Bien sûr, nous sommes d'avis que tout projet doit se faire dans le respect de nos conventions collectives.

En conclusion. Par conséquent, après l'examen du projet de loi, la STM recommande au gouvernement de modifier, d'adapter son projet de loi selon les énoncés suivants. L'agence doit avoir un rôle de promoteur, d'accompagnateur, de conseil et d'expertise en matière de P3 et ainsi laisser aux autorités locales le contrôle de leurs infrastructures et services, et ce, en mode privé ou public. La décision de procéder à un P3 doit revenir à l'organisme public dans le respect des orientations et directives gouvernementales. Le rôle de l'agence en matière de négociation et d'octroi doit se limiter aux projets qui sont entièrement financés par le gouvernement. Le projet de loi doit se faire dans le respect des conventions collectives. Le projet de loi doit circonscrire davantage la définition des projets applicables, l'ampleur des projets, le niveau de participation financière du gouvernement, le type de financement, etc. Également, le processus de développement d'un partenariat doit être simplifié et limité dans le temps. Les projets critiques de la STM, comme le maintien de son infrastructure de métro, ne doivent pas donc en faire les frais. Et finalement le projet de loi doit prévoir des modifications législatives appropriées, notamment devrait contenir un assouplissement à la procédure d'appel d'offres contenue dans les différentes lois municipales et les sociétés de transport.

Enfin, au-delà des considérations techniques, ce projet de loi amène des conséquences importantes sur le financement et sur l'autonomie des AOT dans l'accomplissement de leur mission. Par ce projet, la STM espère que le gouvernement du Québec n'a pas opté pour la voie d'évitement en ce qui a trait à la révision du cadre institutionnel et financier du transport en commun. Je tiens à vous remercier d'avoir écouté nos préoccupations et recommandations à l'égard du projet de loi. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, M. Vandelac, bienvenue à votre équipe également. Évidemment, la Société de transport, c'est un organisme bien important, et je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie surtout d'avoir pris le soin de rédiger un mémoire et de réfléchir dans le fond sur le mandat, la mission et le fonctionnement d'une agence, tels que compris dans le projet de loi n° 61.

Maintenant, j'aimerais... Vous mentionnez plusieurs craintes à l'effet que ça occasionnerait énormément de délais si vous deviez poursuivre dans l'évaluation de tous vos contrats que vous avez finalement avec le secteur privé pour déterminer s'il s'agit d'un projet de PPP ou non. Et, en page 9 de votre mémoire, en particulier, vous soulignez que le législateur ne précise pas s'il s'agit de projet actuel ou de projet à venir seulement, et il ne définit pas non plus le niveau de financement du gouvernement du Québec ni l'ampleur du projet.

Vous parlez également, à la Société de transport de Montréal, de 35 projets pour un total de 312 millions. Bon, j'ai fait un calcul, c'est 8 millions par projet. Vous comprendrez que ce n'est pas 12 à 15 personnes dans une agence qui vont vouloir s'immiscer dans des projets de 8 millions. Je pense que ça ne tient pas la route, là. Ce n'est manifestement pas possible, souhaitable, nécessaire. Et que ça s'accompagne d'améliorations... Manifestement, on n'a pas besoin d'une agence pour faire un contrat de 8 millions. Ce pourquoi on a des agences un peu partout dans le monde, c'est précisément quand il s'agit de grands projets majeurs et de développer une expertise au niveau contractuel pour assister, aider les gens à développer.

Maintenant, vous avez raison. Vous avez raison au niveau de l'évaluation. Il ne faut pas prendre trop de temps pour retarder le processus, mais il faut également bien faire le processus. Et je ne veux pas être méchante, mais je vous rappellerai que, dans la proposition du métro de Laval, on avait oublié 1,2 km, ce qui a été rapporté dans les journaux. Peut-être que vous allez nous rapporter que ce n'était pas exact, mais il n'en demeure pas moins que, lors d'une soumission, on avait omis d'inclure 1,2 km dans le métro de Laval.

Je vais vous poser une question très directement: Pour le métro de Laval, voyant l'expérience qu'on a connue, est-ce que vous croyez qu'il aurait été opportun de passer en PPP?

M. Vandelac (Pierre): Bon, pour le métro de Laval, évidemment, on est a posteriori à partir du moment où on connaît les résultats. On sait toutefois que les coûts au kilomètre varient entre 100 et 150 millions du kilomètre. Et, lorsqu'on regarde ce qui a été... le nombre de kilomètres au métro de Laval et qu'on multiplie par 150 millions comme ça s'est fait à Toronto, par exemple, on arrive à peu près au montant qu'on a aujourd'hui. Donc, est-ce qu'on aurait réussi à contenir les coûts à ce qui avait été annoncé au départ? Et, quand vous faites référence au 1,2 km, évidemment c'est en tout début de projet, et ce projet-là a évolué dans le temps, et lorsqu'il a été approuvé finalement, il était connu, le nombre de kilomètres exact à faire, donc à construire.

Donc, le métro de Laval, aujourd'hui, selon... il serait difficile de savoir si on aurait contraint les coûts. Il s'agit toujours, dans un PPP, évidemment d'évaluer avec précision l'ensemble des risques qui sont associés, les risques qui sont pris par le secteur privé, la garantie qui leur est accordée, et, dans ce sens-là, aujourd'hui, on peut dire que le métro de Laval, lorsqu'il sera complété, sera à l'intérieur, à tout le moins, des coûts qu'on peut évaluer dans la construction au niveau... dans le monde, actuellement.

Le Président (M. Bertrand): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Bonjour, M. le Président, bienvenue.

Le Président (M. Bertrand): Bonjour, madame.

Mme Jérôme-Forget: Moi, je vous dirai que voilà un projet qu'on aurait pu faire en partenariat public-privé et qui, potentiellement en tous les cas, aurait pu se traduire par une gestion plus rigoureuse du projet, et qu'on n'aurait pas eu des nouvelles successives comme on a eues pendant plusieurs mois où, de mois en mois, le projet augmentait de quelques millions de dollars, pour ne pas dire quelques centaines de millions de dollars.

Je veux simplement vous rappeler... C'est amusant parce que je lisais, dans le Financial Times d'hier... Un pays, l'Inde, un des pays les plus protectionnistes au monde, d'accord, où les entreprises étrangères étaient vues avec grande méfiance, imaginez-vous donc qu'ils ont emprunté des Japonais, ils vont construire 225 stations de métro, et le titre du journal, c'est: Clean, Efficient, on Time... Welcome to the New India. D'accord? Pour que le Financial Times en parle, c'est parce que manifestement il y a un changement de vision, de culture, d'approche, y compris en Inde. D'accord? Et quiconque est allé en Inde, M. le Président... Et comme je suis une amoureuse de l'Inde, vous comprendrez que j'étais surprise de lire ça. Et ça a été fait en PPP. C'est fait en partenariat public-privé.

n(11 heures)n

Alors, tout ça pour dire que tout... Vous avez raison, je suis parfaitement en accord pour dire que ce n'est pas une panacée. C'est pour ça d'ailleurs que, dans l'énumération, il y a quelques projets qui sont énumérés, qui ont été annoncés, la 25, la 30, des grands projets, là, d'infrastructures. Et ce sont les approches... D'ailleurs, il faut commencer à faire notre apprentissage comment les faire, les PPP, développer l'expertise, ne pas nous tromper, pour ensuite réussir. Mais voilà un peu le volet, là, l'approche. Maintenant, est-ce que vous croyez que vous feriez appel à l'agence à quelque moment que ce soit?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Mme la ministre, les investissements, tels que je les mentionnais tantôt, évidemment sont importants pour les 10 prochaines années, à la STM. On parle, combinés, métro et autobus, de plus de 3 milliards de dollars. Donc, à l'intérieur de ce 3 milliards de dollars là, bien sûr vous avez des projets qui sont des projets de renouvellement d'équipement du métro, entre autres, les MR-63, qui est un projet majeur qui représente 1,2 milliard de dollars. Ce que nous avons fait pour ce projet en particulier, nous avons, en collaboration avec le ministère des Transports, mandaté une firme pour regarder les différentes options qui s'offrent à nous en termes de financement de cette infrastructure à renouveler. Donc, nous sommes à travailler actuellement avec la firme pour regarder l'ensemble des options dans un mode traditionnel jusqu'à un mode élaboré de PPP.

Donc, nous allons regarder toutes les solutions qui s'offrent à nous. Nous allons en retenir probablement deux ou trois pour fins d'approfondissement et pour faire un choix avec bien sûr le gouvernement, puisque le ministère des Transports, avec son programme d'aide, nous subventionne le renouvellement du parc à 75 %. Donc, voilà un projet que nous étudions attentivement quant à son mode de financement, et, compte tenu évidemment de l'urgence d'agir, nous allons procéder rapidement à cette étude-là.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...M. le Président. Vous mentionnez dans votre mémoire que vos négociations avec les soumissionnaires ne peuvent s'effectuer dans l'encadrement strict actuel. Qu'est-ce que vous voulez dire par ça?

Le Président (M. Paquet): Une minute, M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Actuellement, la loi... lorsqu'on fait un choix d'un soumissionnaire, lorsque nous allons, c'est-à-dire, en soumissions et que nous analysons les offres, il faut choisir le plus bas soumissionnaire conforme bien sûr, et nous ne pouvons plus négocier avec lui par la suite. Donc, c'est vraiment une question habituellement de prix et de conformité évidemment au devis qui est présenté. Donc, ça nous limite. Il n'y a pas de négociation possible avec le fournisseur. Donc, ça, c'est la loi actuelle. Dans un partenariat, il faut évoluer dans une solution où évidemment il y aura négociation. Et, pour nous permettre de le faire, il faudrait donc qu'il y ait des modifications à notre loi constitutive.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Merci, M. le Président. Bienvenue, à mon tour, aux dirigeants de la Société de transport de Montréal. Vous avez fait une démonstration extrêmement importante dans ce mémoire. D'ailleurs, nous avions entendu de la part de vos employés, depuis quelques semaines déjà, la même démonstration. Vous êtes une société efficiente, efficace, et le seul barème pour l'évaluer, c'est évidemment la comparaison internationale. Dans votre secteur, on ne peut pas comparer le métro de Montréal et celui de Chicoutimi, donc vous êtes allés en comparaison avec les grandes sociétés semblables à travers le monde et vous avez été jugés extrêmement performants, c'est-à-dire que, pour l'argent investi, le service rendu est très élevé, le ratio est extrêmement élevé.

Je vais aller très directement. Dans l'hypothèse où le renouvellement de l'équipement des rames de métro, au coût approximatif... on parle de plus de 2 milliards de dollars. Au cas où on vous amènerait ? prenons la formule la plus directe ? à choisir une formule de partenariat public-privé qui impliquerait évidemment une participation de la gestion du privé aux services que vous rendez, à l'entretien des voies et des véhicules, est-ce que vous seriez plus performants que vous ne l'êtes actuellement?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Donc, effectivement, on se classe très bien en termes de performance lorsque nous sommes comparés, balisés avec les autres métros dans le monde. Effectivement, nous sommes, selon un certain nombre d'éléments, parmi les cinq premiers en termes de performance: tantôt premier, tantôt troisième, tantôt cinquième. Donc, nous avons une performance, à l'entretien, en particulier, du métro de Montréal, qui est assez exceptionnelle, compte tenu bien sûr de l'âge des équipements et du matériel roulant.

Donc, il est effectivement plus difficile, lorsqu'on est très performant, évidemment de pouvoir trouver des économies de l'ordre de 10 %, 15 %, 20 %, 30 %. Moi, ce que j'en pense là-dessus, c'est que ça prend une analyse très rigoureuse de la performance actuelle connue, ce que nous avons déjà fait, et il faudra la comparer bien sûr, si tel est le cas, à des offres qui nous seront faites du secteur privé et en comparaison évidemment avec le coût du capital investi, donc l'investissement lui-même, et les coûts d'entretien ou d'exploitation.

Nous avons un renouvellement de flotte, les MR-63, qui est partiel évidemment, puisque nous avons 759 voitures, et il y en a 336 à renouveler. Et donc, avec un seul centre de contrôle, ça complexifie notre opération, mais évidemment ça nécessite des travaux beaucoup plus approfondis pour détailler en soi l'ensemble de l'opération, puisque les autres véhicules au niveau de la flotte, le matériel roulant, ce sont les MR-73, qui donc effectivement sont 10 ans plus jeunes, mais qui seront renouvelés finalement au moment où on aura renouvelé les MR-63.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui. Étant donné, M. Vandelac, que... M. le Président, j'aimerais poser cette question: Étant donné, M. Vandelac, que l'investisseur privé potentiel, pour le renouvellement de ce matériel, serait obligé d'emprunter évidemment... d'avoir recours à des consortiums bancaires, où ses coûts d'emprunt seraient plus élevés que le gouvernement, étant donné qu'il devrait se garder une marge bénéficiaire, une marge de profit supplémentaire, est-ce que vous pouvez envisager sérieusement que les économies de gestion ? vous qui êtes déjà une entreprise extrêmement performante et qui se compare aux meilleures au monde ? ces économies de gestion pourraient combler à la fois les surcoûts de financement et le profit attendu par l'investisseur?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Bon, il est clair qu'en ce qui concerne les coûts de financement le secteur privé devrait en effet payer une prime par rapport à un financement qui est d'ordre public. Bon, à quelle hauteur? 0,5 %, 1 %, 1,5 %? Et là c'est toute la question de la qualité de la notation de crédit de l'entreprise comme telle. Donc, évidemment qu'une entreprise bien cotée aurait un taux qui se rapprocherait davantage de ceux que nous avons, nous, comme société; une moins bien cotée, bien, l'écart grandirait. Et donc c'est en fonction vraiment de cet écart-là qu'on pourrait mesurer évidemment. À partir de la performance et des économies qu'ils pourraient nous présenter dans une proposition, on pourrait être en mesure d'analyser. Mais effectivement il y a un écart au niveau du financement. C'est la hauteur de l'écart qui devient importante évidemment. Dans un financement, quand on parle de 1 milliard, 1,5 milliard, évidemment ça peut faire une grande différence.

n(11 h 10)n

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Questions rapides: M. Vandelac, est-ce que vous êtes rassuré par les propos de la ministre, étant entendu que le projet de loi n° 61 concerne l'ensemble de tous les ministères et organismes au Québec? Est-ce que vous êtes rassuré de voir que tous vos projets de partenariat avec le privé devraient passer par cette agence, sachant que le nombre d'employés de cette agence, qui est actuellement, au secrétariat, de six, passerait à 12 ? on vient d'en gagner trois ce matin ? possiblement 15? Est-ce que ça vous rassure sur la rapidité du traitement de vos dossiers?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Il est clair... Bon. Nous avions cette préoccupation ici, ce matin. Les propos tantôt de la ministre, mentionnant que ce seraient des projets d'envergure... Donc, il s'agit de déterminer évidemment l'ampleur des projets et évidemment la participation financière du gouvernement, jusqu'à quelle hauteur ces projets seront soumis effectivement à l'agence. Donc, il s'agit de voir l'ampleur des projets et le pourcentage de financement du gouvernement pour que ça puisse passer par... effectivement étudié par l'agence mise sur pied.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui. Évidemment, vous faites la même lecture qu'à peu près tous les groupes qui sont venus ici. Dans sa rédaction, son libellé actuel, le projet de loi ne précise pas l'ampleur des projets. Vous, c'est tout à fait normal que vous soyez inquiets et que vous y voyiez hypothétiquement l'ensemble de vos projets soumis à l'agence parce que le texte de loi que vous avez devant vous ne prévoit pas de limite. «Grands projets», tout ça est toujours relatif, hein? Pour vous, dans votre vie privée, 1 million de dollars, c'est beaucoup. Est-ce que «grands projets», c'est cinq, c'est 10, c'est 100, c'est 500? Rien ne le précise dans le projet de loi, d'où l'inquiétude qui s'empare actuellement de plusieurs secteurs au Québec.

M. le président, je vais vous poser une question rapide mais quand même inquiétante, enfin qui reflète une inquiétude de ma part. Vous avez récemment réalisé un partenariat public-privé dans le domaine de la publicité dans les métros ? c'est les médias qui nous ont rapporté ça ? sans aller en appel d'offres public. Est-ce que vous considérez que c'est une chose normale?

M. Vandelac (Pierre): Bon. D'abord...

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Excusez. D'abord, ce qu'il faut dire, c'est que, depuis 2002, la Loi des sociétés de transport en commun prévoit que la STM dispose de tous les pouvoirs d'une personne morale pour réaliser des activités commerciales. Il est prévu dans la loi effectivement que nous puissions négocier de gré à gré pour ce qui est des revenus des activités commerciales connexes, donc négocier de gré à gré avec des partenaires. La loi, elle est très claire là-dessus, le permet et elle a été interprétée à maintes reprises. Donc, là-dessus, ça, c'est très clair.

Donc, un partenariat dans le sens de celui que vous évoquez au niveau de la publicité... Donc, nous avons créé une coentreprise. Nous étions déjà en affaires avec cette entreprise-là, avec des contrats de publicité qui ont peut-être une dizaine d'années, je crois, donc en affaires avec, et ils nous ont vraiment présenté un nouveau produit pour rendre plus dynamique l'information à notre clientèle et effectivement la publicité. Et donc c'est dans ce sens-là que nous avons négocié avec eux, pendant plusieurs mois, l'entente qui nous a permis de réaliser le projet.

Le Président (M. Paquet): Merci. Avec le consentement, Mme la députée de La Pinière, vous pourrez intervenir. Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Vandelac, Mesdames et messieurs de la Société de transport de Montréal, merci pour votre mémoire.

M. Vandelac, j'ai été un petit peu surprise par le diagnostic que vous avez fait des PPP. Vous avez dit que c'était un processus qui allait alourdir le mécanisme administratif, que ça allait engendrer des délais supplémentaires. Le groupe qui vous a précédés, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, qui sont un peu dans la même pratique que vous, parce que vous êtes des gens d'expertise, ils font le diagnostic opposé. Et ils sont venus nous dire, ce matin, que cela va réduire les délais, que réduire les délais, ça veut dire réduire les coûts, que c'est une gestion par résultats. Et, en vous écoutant et en lisant vos deux mémoires, je me demandais si on parlait de la même chose, si on comprenait la même chose lorsqu'on parlait des PPP ou s'il n'y a pas peut-être un objectif ou un devoir de pédagogie à faire pour qu'au moins les gens qui ont la main à la pâte, qui opèrent dans ces domaines-là comprennent la même chose que ce qu'on veut leur proposer par le projet de loi n° 61. Ça, vraiment, là, ça m'a... Ce matin, ça a été un constat que j'ai fait, puis je me suis dit: Comment ça se fait qu'on arrive à des diagnostics opposés à partir d'un projet de loi, à partir d'une expertise qui vient des gens qui sont vraiment dans le domaine? J'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus.

Deuxième volet à ma question. Lorsqu'on parle de réduire ou d'alléger le processus administratif par les PPP, donc réduire les délais, donc réduire les coûts, on compare avec le processus actuel d'attribution des contrats, et vous êtes très familier, M. Vandelac, avec ça et vous savez que ça prend un temps fou. Je donne un exemple concret de l'échangeur Taschereau, que vous connaissez. Ça m'a pris quatre ans avec le gouvernement du Québec pour débloquer 86 millions, premier engagement financier. Et le projet, qui actuellement est de l'ordre de 110 millions de dollars, est échelonné sur six ans, et chaque année on fait un petit bout, et chaque année on fait un appel d'offres, et chaque année on attend les crédits. On a même annoncé la mort de l'échangeur Taschereau il y a quelque temps, parce qu'on avait des difficultés financières.

Est-ce que vous ne pensez pas que, dans ce cas comme dans d'autres grands projets peut-être encore plus grands que celui-là, le fait de procéder par PPP, d'intégrer tous les éléments de la conception à l'entretien, ça nous permettrait de régler justement ce problème de délais, de revenir à la charge à chaque année? Parce que le gouvernement fonctionne avec des années financières et il ne peut pas s'engager sur trois ans, sur quatre ans, encore moins sur 25 ans. Expliquez-moi, vous qui êtes un homme de terrain et qui connaissez ces choses-là, et vous savez comment ça marche.

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): D'abord, vous avez parfaitement raison, une définition universelle de PPP, ça n'existe pas. Donc, pour avoir fait quelques recherches et même avec l'association des transporteurs urbains du Québec, on s'est rendu compte qu'effectivement les définitions sont propres à peu près à chacun. Donc, dans ce sens-là, il est difficile effectivement, lorsqu'on parle de PPP, de bien en juger toutes les dimensions selon évidemment la définition qu'on lui donne.

Maintenant, les délais. En ce qui nous concerne effectivement, nous, nous avons déjà toute une démarche avec le ministère des Transports qui subventionne l'ensemble de notre infrastructure. Donc, autant l'achat d'autobus que l'infrastructure des garages, les dépôts, le métro, etc., donc sont discutés, analysés, approuvés par le ministère des Transports dans évidemment un PTI, bon, un programme triennal d'immobilisations. C'est la première étape. Donc, nous avons à faire valoir évidemment chacun des projets et à faire valoir effectivement le besoin de ces projets-là. Donc, c'est la première étape.

n(11 h 20)n

On a actuellement... Il y a sur la table également une corporation qui est la corporation d'investissement, ce qu'on appelle la CFIL, qui aussi interviendra au niveau du financement. Et on parle de l'Agence des partenariats privé-public au moment où, dans la définition... En fait, l'interprétation que nous avons faite du texte nous dit qu'aussitôt qu'il y aura une subvention du gouvernement on pourrait être appelés donc à déposer le projet à l'agence. Donc, pris comme exploitant, quand on regarde tout ça, c'est des délais pour nous qui... Ça pourrait être des délais importants, dans chacune de ces étapes-là, avant de réaliser un projet. Donc, le questionnement que nous avons est vraiment à l'effet que l'ensemble des interventions que nous devrons faire pourrait faire en sorte d'allonger les délais. Et, compte tenu de l'urgence des investissements que nous avons à faire au niveau du métro, donc cette inquiétude-là nous est venue en lisant le projet de loi.

Maintenant, on est conscients, fort conscients que les demandes d'investissements au-delà de 3 milliards sur 10 ans, c'est important, et, pour un gouvernement, effectivement qu'on travaille à trouver les meilleures solutions pour réaliser ces investissements-là et les financer ? c'est tout à fait approprié, puisqu'on partage bien sûr le fait qu'on veut être les plus efficients, les plus efficaces possible ? et donc qu'on fasse nos projets au moindre coût et qu'on puisse les entretenir également au moindre coût.

Donc, dans ce sens-là, voilà notre inquiétude, nous, quant aux délais qui pourraient être impartis suite évidemment à tout le processus que nous avons à suivre. On sait fort bien également qu'un processus au niveau d'un PPP, si on veut bien le faire, si on veut être très rigoureux, il faut d'abord connaître exactement la situation dans laquelle nous sommes, donc la performance là où on se trouve, la valeur des investissements, les risques qui sont à prendre sur ces investissements, la durée des travaux, puisque souvent on est obligés... ça dépasse une année financière effectivement, on est obligés de phaser même des travaux pour différentes raisons. Mais il reste que ce financement-là par voie de PPP demande également vraiment une rigueur absolue dans tout le processus comme tel, et donc, dans les investissements majeurs, on a vu que ça pouvait prendre un an, deux ans, trois ans avant la mise en place d'un tel processus.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de La Pinière, 2 min 30 s.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup. Dans votre mémoire, vous êtes très préoccupés, voire même inquiets de la portée du projet de loi n° 61 et vous le dites clairement. Vous dites que le rôle de l'agence... Elle embrasse trop, elle a un pouvoir d'obligation à caractère prescriptif, et vous voulez limiter son rôle à un rôle conseil, si j'ai bien compris.

Est-ce que vous allez jusqu'à rejoindre la position qui a été exprimée par le milieu municipal à l'effet que, telle que définie, l'agence serait comme une ingérence dans l'autonomie d'une administration? Est-ce que c'est comme ça que vous le voyez ou vous apportez des nuances?

M. Vandelac (Pierre): Bien, nous, ce qu'on dit...

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Excusez, M. le Président. Ce que nous disons, c'est: Si les projets sont financés à 100 % par le gouvernement, bien sûr, à partir de ce moment-là, il appartient au gouvernement de choisir le moyen et d'en discuter avec les AOT. Ça, c'est le premier élément.

Pour ce qui est des autres éléments, on est ouverts donc à regarder les meilleurs moyens. Et, comme on dit, on ne veut pas se limiter à un seul moyen. On n'en fait pas une fin en soi, mais on en fait vraiment un moyen parmi tant d'autres pour arriver aux meilleurs résultats. Donc, dans ce sens-là, on n'exclut pas aucune solution qui pourrait nous apporter évidemment soit une expertise additionnelle, meilleure qualité des services, diminution des coûts, etc. On est prêts à regarder ça.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui. Merci, M. le Président. La Société de transport de Montréal fait face actuellement à des problèmes considérables. Vous avez adopté, si je ne me trompe, votre budget, la semaine dernière, vous y étiez requis par la loi. J'imagine que le manque de financement, le fait que l'État ne soit pas venu suppléer vos revenus va probablement vous forcer à prendre des décisions assez impopulaires dans les prochains mois. Donc, vous êtes dans une situation financièrement, dès le départ, vraiment serrée.

Vous rappelez avec justesse que vous avez devant vous l'obligation de renouveler un matériel qui a été mis en circulation à la fin des années soixante, donc qui a 40 ans d'usage, de bon usage, ce qui prouve que c'était du bon matériel. Mais il arrive un moment où il faut absolument remplacer ces équipements, ce qui entraîne évidemment des coûts considérables ? on parle de plusieurs milliards de dollars ? à un moment où l'État, qui a réussi, au cours des dernières années, à ramener à zéro son déficit ? son budget annuel a éliminé tout déficit de ses opérations ? est pris quand même avec une dette publique considérable et envisage toujours avec beaucoup de réticence d'augmenter, même pour des équipements de cette nature, son endettement. Il faut cependant toujours se rappeler ici que c'est un endettement avec, en contrepartie, un équipement de très grande valeur, qui a une fonction économique et sociale considérable sur une longue durée. Mais vous comprenez la difficulté actuelle de l'État pour faire face à ces financements très importants.

Vous avez devant vous le projet de création d'une agence auquel vous semblez plutôt réticents pour toutes les raisons que vous avez abordées. Vous avez vous-mêmes noté tout à l'heure que les coûts de financement du privé seraient sans doute plus élevés, et, si je me réfère à l'expérience passée dans les principaux pays occidentaux, c'est rarement les chiffres que vous avez donnés tout à l'heure. C'est bien plus de l'ordre de 1,5 % à 2 %, les taux que... sauf quelques très grands consortiums peuvent aller chercher sur le marché financier. Donc, il y a une prime importante à aller au privé.

Il y aussi, évidemment, annuellement un profit. Les actionnaires de ces entreprises, dès la première année, exigent un profit sur le capital investi, vous vous en doutez bien. Comment pouvez-vous envisager actuellement faire face à vos obligations face à vos usagers, c'est-à-dire leur fournir un service de qualité à un coût qui socialement soit acceptable, tout en envisageant l'hypothèse de devoir rembourser à une société privée ces profits supplémentaires et ces primes au financement bancaire qu'elle devrait envisager? Alors, l'effet réel sur l'usager de ces nouvelles façons de financer un projet.

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): D'abord, en ce qui concerne le budget, il sera adopté très bientôt. Ce qu'on a pu lire dans les journaux, évidemment, c'est de l'information qui est préliminaire. Mais effectivement nous comptons sur une révision du cadre financier, et ce, depuis plusieurs années, pour pleinement être capables de rencontrer notre mission et de faire en sorte qu'on puisse maintenir notre taux de pénétration de l'utilisation du transport en commun, un des plus élevés et même le plus élevé en Amérique du Nord. Donc, ce cadre financier nous est nécessaire pour rencontrer l'ensemble de nos obligations et maintenir des tarifs et une qualité de service qui est appropriée.

Donc, en ce qui concerne évidemment ce budget, il y a, à l'intérieur de ce budget, des coûts qui sont rattachés au financement, donc les coûts de capital, le service de dette et les intérêts. Et encore une fois nous devrons mesurer l'ampleur des propositions ou analyser d'une façon très rigoureuse l'ensemble des propositions que nous sommes à regarder actuellement avec une firme pour des fins de financement et voir quel est le meilleur mode, le plus approprié pour des investissements de cette ampleur dans le métro.

Le Président (M. Paquet): Ça va? M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

n(11 h 30)n

M. Picard: Merci, M. le Président. M. Vandelac, moi, je vais aborder le côté ressources humaines. Dans votre mémoire, vous en parlez, vous indiquez que «la loi [amène] peu d'encadrement pour le passage d'une activité du public au privé». Et, dans vos recommandations, à la fin, vous indiquez que «le projet de loi doit encadrer la protection du droit des travailleurs et assurer la participation des syndicats dans l'identification des solutions».

Certaines centrales syndicales que nous avons reçues la semaine dernière demandaient à la ministre un temps d'arrêt, un temps de réflexion pour créer une table de concertation, discuter de différentes pistes de solution pour nous amener vers les PPP. Même, certaines centrales étaient plus réfractaires aux PPP, mais ils demandaient un temps d'arrêt. Qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là de certaines centrales?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac.

M. Vandelac (Pierre): Nous, dans notre mémoire, on fait référence effectivement au capital humain et aux conventions collectives que nous avons signées et que nous devons, comme toute bonne administration, respecter. Dans ce sens-là, les conventions collectives ne nous permettraient pas actuellement de procéder à un transfert d'activités en tout ou en partie, selon évidemment les opinions que nous avons obtenues de nos juristes. Donc, dans ce sens-là, c'est ce que nous disons, il va falloir considérer le fait que nos conventions collectives ne nous permettent pas de transférer des activités, sauf évidemment si on s'entend avec la partie syndicale.

Le Président (M. Paquet): ...M. Vandelac. D'autres questions? Il reste deux minutes.

M. Simard: Oui. Là-dessus, je pense que vous avez, dans votre mémoire...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: M. le Président, dans le mémoire de la Société de transport de Montréal, les rédacteurs ont, avec beaucoup, je pense, de corrections... se sont assurés de cette préoccupation du personnel, de l'avenir du personnel. Vous dites qu'il n'y a même pas de marge de manoeuvre dans l'état actuel de la législation. Mais, étant donné ce qui s'est passé l'an dernier avec les modifications à l'article 45, la volonté affirmée du gouvernement d'aller de l'avant dans ces partenariats, n'avez-vous pas l'impression que les modifications législatives qui pourraient être nécessaires pourraient être imposées par le gouvernement de façon à permettre ces partenariats public-privé auxquels le gouvernement libéral semble si attaché?

Le Président (M. Paquet): M. Vandelac, une minute.

M. Vandelac (Pierre): Je ne pourrais répondre pour le gouvernement quant à ses intentions, mais je réitère le fait qu'actuellement nos conventions collectives ne permettent pas effectivement de transférer des activités en tout ou en partie au secteur privé. Donc, dans ce sens-là, ça prendrait des modifications, effectivement.

Le Président (M. Paquet): Alors, merci beaucoup. Au nom de la Commission des finances publiques, je remercie la Société de transport de Montréal, représentée par M. Vandelac, M. Gonthier, Mme Gauthier, Me Tremblay et M. Olivier, pour votre participation à nos travaux. Je suspends quelques instants et j'inviterais les prochains intervenants à s'approcher de la table pour la présentation du prochain mémoire. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

 

(Reprise à 11 h 38)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant le Syndicat professionnel des scientifiques à pratique exclusive de Montréal représenté par M. Robert Millette, son président. Et si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît. Nous vous souhaitons la bienvenue.

Syndicat professionnel des scientifiques
à pratique exclusive de Montréal (SPSPEM)

M. Millette (Robert): Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames messieurs de la commission. Donc, en guise de présentation, le Syndicat professionnel des scientifiques à pratique exclusive de Montréal est un nouveau syndicat issu de la création de la nouvelle ville de Montréal. En effet, nous regroupons quatre anciens syndicats, soit ceux des arpenteurs-géomètres, des chimistes, des ingénieurs et des médecins vétérinaires. Nous comptons, aujourd'hui, près de 200 membres.

Nos professionnels possèdent des expertises dans une grande variété de champs d'activité. On leur doit plusieurs réalisations importantes sur l'île de Montréal, notamment les usines de production d'eau potable, les réseaux de distribution d'eau potable et de drainage, l'assainissement des eaux usées, l'assainissement de l'air, l'aménagement des îles Sainte-Hélène et Notre-Dame ainsi que le métro de Montréal. On constate facilement l'étendue du rôle qu'ils ont joué dans le développement de la société montréalaise où leur participation remonte au début du siècle.

Après 20 ans d'expérience à la ville de Montréal, je constate encore la motivation des employés municipaux à vouloir offrir aux citoyens des services de qualité au moindre coût. Bien sûr, ils veulent de bonnes conditions de travail comme tout le monde et comme les employés du secteur privé, mais ils sont également fiers de bien servir la population. Il est facile de véhiculer une image négative de l'ensemble des employés municipaux. Cependant, si on y regarde de plus près, on y voit des êtres humains préoccupés par les services qu'ils offrent.

En lisant un livre récemment sur le partenariat, qui s'appelle Le partenariat: Entre utopie et réalité, j'ai été surpris par la clarté de la citation suivante: «Le fait que des gens se réunissent pour travailler dans un but commun ne signifie tout simplement pas qu'ils font partie d'un partenariat. Il ne peut y avoir de partenariat que si les motivations personnelles cèdent largement le pas à un engagement authentique de la part de tous les participants dans une démarche collective.»

n(11 h 40)n

Malheureusement, le projet de création de l'Agence des partenariats public-privé du Québec ne respecte pas cette approche. En effet, l'approche utilisée correspond plutôt à un type de partenariat institutionnalisé, c'est-à-dire qui est réalisé sans que les acteurs du terrain soient mobilisés au préalable. Il s'agit d'un partenariat forcé. Cette approche ne nous apparaît toutefois pas un gage de réussite et laisse présager, malgré toutes les précautions qui peuvent être prises, un manque de transparence dans sa réalisation.

De plus, dans le même livre, les auteurs mentionnent le constat suivant: «La mise en place d'un partenariat repose sur la reconnaissance d'une nécessité, celle de résoudre des problèmes très souvent considérés comme étant difficilement solubles autrement. Sans cette reconnaissance, il est risqué de procéder à l'élaboration d'une démarche. C'est alors que la nécessité, pour les responsables de l'opération en question de présenter en des termes clairs et concis les avantages de cette mise en commun des forces et des capacités de chacun des participants, revêt toute son importance.»

Encore une fois le projet de loi n° 61 ne répond pas à cette condition. Sans la présentation en des termes clairs des raisons qui amènent le gouvernement à vouloir améliorer la qualité des services aux citoyens en favorisant l'émergence de partenariats public-privé plutôt que l'amélioration de l'efficacité et de l'efficience du secteur public, on ne peut parler de l'établissement d'un véritable partenariat.

Tout ce discours du gouvernement peut sembler nouveau ou innovateur, mais en réalité c'est une vieille histoire. En effet, dès 1996, le projet de loi sur la création de sociétés d'économie mixte visait le même but. On cherche encore à faire faire en espérant que ce sera mieux fait plutôt que d'essayer de mieux faire les choses qui doivent être faites. C'est la voie de la non-confiance dans la capacité des employés et des élus du secteur public et, par ricochet, dans la population québécoise de rendre des services efficaces.

En résumé, le gouvernement ne semble pas avoir l'intention de créer de véritables partenariats. Son approche correspond plutôt à une diminution de la participation de l'État dans la réalisation des services publics, ce qui ne peut être autre chose qu'une forme de privatisation des services publics. Pourtant, il y a un large consensus au Québec pour rejeter cette approche. Le Québec n'est pas à vendre. Donc, tant qu'il sera difficile de connaître les véritables motifs qui justifient la création de l'Agence des partenariats public-privé, il sera difficile d'y adhérer.

Le problème de renouvellement des infrastructures publiques est cependant bien réel. En effet, les investissements considérables consentis par les gouvernements dans le patrimoine des infrastructures amènent inévitablement, un jour, le problème de leur entretien. De nombreux experts évaluent les besoins à plusieurs milliards de dollars.

Le contexte politique vient cependant compliquer la situation. En effet, une partie importante des infrastructures est souterraine, et les répercussions d'un manque d'entretien sont à long terme. Dans un rapport publié en 2000, le Bureau d'audiences publiques en environnement du Québec résume bien cette problématique en disant: «Le système politique ne parvient pas à prendre les décisions qui s'imposent à long terme, en particulier en ce qui concerne la pérennité des infrastructures.»

Ainsi, depuis le début des années quatre-vingt-dix, le recours au secteur privé pour le renouvellement des infrastructures a souvent été soulevé et il le sera sûrement encore longtemps. Mais les arguments pour le rejeter demeurent toujours les mêmes.

Le principal argument invoqué pour recourir au partenariat dans le renouvellement de ces infrastructures est souvent l'incapacité des gouvernements à financer le montant élevé des investissements. En réalité, il serait plus juste de dire que ce n'est pas le gouvernement qui n'a pas les moyens financiers mais bien les citoyens. En effet, si un gouvernement ne peut emprunter davantage sur les marchés financiers, c'est parce que son niveau de taxation est considéré élevé par rapport à la capacité de payer de ses contribuables. Si, pour un motif de financement, on fait appel à un partenaire privé par l'entremise d'un partenariat, il ne fera qu'agir en bailleur de fonds. Il faudra quand même le rembourser en plus de lui consentir un rendement sur son investissement. Pourquoi alors ne pas prendre avantage des taux avantageux d'emprunt des gouvernements?

On est alors en droit de se demander qui paiera le partenaire privé. Est-ce le gouvernement, selon les termes d'un contrat détaillé, ou les utilisateurs par le biais d'une tarification? Il serait étonnant que ce soit le premier scénario, parce que, si le gouvernement recourt au partenariat parce qu'il n'a pas en principe la capacité financière, il n'a pas plus la capacité financière de payer le partenaire. Le deuxième scénario est plus probable, soit l'établissement de tarifs, par exemple pour l'utilisation de l'eau potable et le passage sur une autoroute ou sur un pont. Cette façon de faire est simplement le remplacement de l'impôt sur le revenu par une tarification. Et la tarification pour des services essentiels n'est pas souhaitable. Il faut conserver le contrôle sur la gestion des services publics.

Avec l'argument du financement, on introduit habituellement la notion de partage de risques. Il est important de l'analyser dans deux situations. La première est celle de la construction d'infrastructures. En principe, ce partage de risques se traduit par le fait qu'une entreprise s'engage à livrer l'infrastructure au prix et dans les délais consentis dans le contrat. Par expérience, il est souvent difficile de prouver que les dépassements de coûts et d'échéance demandés par les compagnies ne sont pas justifiés. Le partage de risques devient alors plutôt théorique que réel.

La deuxième situation est celle de l'exploitation de services publics. Également dans ce cas, il est difficile d'imaginer qu'une entreprise privée opérerait à perte un service public pendant 30 ans. Elle demandera une hausse des tarifs ou elle diminuera la qualité des services prévus pour arriver à boucler son budget. Encore là, il n'y a pas réellement de partage de risques.

Donc, peu importe la provenance du financement, l'ensemble des investissements à réaliser est toujours supporté par les contribuables. De plus, les coûts de financement plus élevés du secteur privé, ajoutés à sa marge incontournable de profit, amènent inévitablement un coût de rénovation des infrastructures plus élevé que dans le secteur public. Un partenariat financier n'est donc pas une solution économique au renouvellement des infrastructures publiques.

Le deuxième argument souvent évoqué est celui de la meilleure productivité du secteur privé. Cette affirmation n'a aucun fondement réel. En effet, comme les conditions de travail des employés du secteur public ont été honnêtement acquises après négociation et entente entre les parties, elles sont légitimes. Et, puisque les autorités gouvernementales ont consenti ces conditions, c'est qu'elles doivent être compétitives au marché. Malgré tout, si un gouvernement soutient que les conditions de travail de certains groupes d'employés sont trop généreuses, il devrait tenter de corriger la situation lors de la prochaine négociation. S'il n'a pas le courage de le faire et que cela devient un des objectifs du recours au partenariat, ce stratagème relève du non-respect des institutions publiques.

De plus, sans nier la présence d'une bureaucratie inefficiente dans certains cas, les organismes publics sont parfois plus performants que les organisations privées. Chaque cas est une situation particulière, et c'est la compétence et la motivation des employés en place qui peuvent faire la différence. Encore une fois, un partenariat pour améliorer la productivité n'est pas automatiquement une solution plus économique.

De même, on mentionne souvent que la sécurité d'emploi est un facteur qui nuit à la recherche d'une plus grande productivité dans le secteur public. Cet argument serait vrai si les gouvernements étaient obligés de payer des employés à ne rien faire. Mais, si on songe à signer des contrats de partenariat sur des périodes de 30 ans, c'est qu'on estime qu'il y a du travail à faire pour 30 ans. Alors, pourquoi des employés qui sont embauchés par le secteur public pour faire le même travail ne pourraient pas l'être pour 30 ans?

En favorisant l'établissement de partenariats public-privé, le gouvernement se trouve à renoncer à l'option de valoriser les employés du secteur public dans la recherche d'une optimisation des services publics. Pourquoi ne pas opter plutôt pour une mise en valeur des ressources du secteur public en leur permettant plutôt de proposer des programmes d'amélioration de la prestation des services publics? Pourquoi ne pas créer l'agence sur la performance des services publics? En effet, la modernisation de l'État pourrait s'articuler autour de l'implantation de mécanismes concrets d'amélioration de la performance du secteur public. Ainsi, en faisant appel aux compétences, à l'expérience et à l'imagination des employés du secteur public, l'amélioration de la performance pourrait être possible. Cette approche nous apparaît positive et porteuse de gains pour la population comparativement au projet démobilisant des partenariats.

De plus, les employés du secteur public sont les mieux placés pour effectuer le contrôle des coûts et des échéances et s'assurer du respect des normes établies. En effet, contrairement aux employés des firmes privées, ils n'ont aucun intérêt à ce que les coûts soient plus élevés et que les délais soient prolongés. De même, ils vont toujours privilégier le respect des normes à la rentabilité de l'entreprise.

n(11 h 50)n

Finalement, la création de l'Agence de partenariats public-privé ne peut constituer un endroit pour développer de réelles expertises exportables. Les vraies expertises se situent au niveau des divers services offerts, et, si on veut faire en sorte que le Québec soit un leader, ces expertises doivent être développées par des gens d'ici. De plus, comment le petit groupe restreint d'employés de l'agence pourra assurer à la population que ses décisions d'octroyer un partenariat ne sont pas partisanes?

En conclusion, l'approche utilisée par le gouvernement avec son projet de création d'une agence des partenariats public-privé nous amène à conclure que nous ne sommes pas en présence d'un véritable partenariat. Nous sommes plutôt dans la situation d'une association forcée du secteur public avec le secteur privé dans des domaines traditionnellement pris en charge par le secteur public.

Deuxièmement, les arguments les plus souvent invoqués pour justifier le recours, dans une forme plus ou moins avancée de privatisation, au secteur privé dans la prestation des services publics sont non fondés. En effet, les coûts de financement plus élevés du secteur privé, ajoutés à sa marge incontournable de profit, amènent inévitablement des coûts plus élevés que dans le secteur public. De même, la recherche d'une plus grande productivité n'est pas l'apanage du secteur privé. Par contre, si l'intention est d'utiliser la diminution des conditions de travail comme gain de productivité, le gouvernement devrait avoir le courage de le négocier plutôt que de le camoufler dans la création de partenariats.

Et finalement une approche qui mettrait en valeur et qui reconnaîtrait les compétences et l'engagement des employés du secteur public serait un atout important. Un projet stimulant pour la fonction publique québécoise deviendrait automatiquement avantageux pour la population du Québec. Merci de votre attention.

Le Président (M. Paquet): Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je vais me permettre, M. le Président ? d'abord, monsieur, bienvenue pour votre présentation ? je vais me permettre gentiment de rappeler à mon collègue de Richelieu qu'effectivement le 29 octobre 2004, à 11 h 30, j'ai bien mentionné de 12 à 15 personnes. Je sais que mon collègue avait eu l'amabilité de dire que peut-être qu'il s'excusait et il l'avait dit privément, mais je voulais juste lui souligner qu'effectivement j'avais bien dit 12 à 15 personnes. C'est parce qu'il y a un petit...

M. Simard: Je veux simplement...

Le Président (M. Paquet): ...consentement, M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui, M. le Président. Simplement dire que j'avais émis la remarque que vient de faire la présidente du Conseil du trésor. Je me rends aux faits, elle avait bien mentionné 15, et j'en suis très heureux. Ceci dit, le problème reste entier, mais on en reparlera à un autre moment.

Le Président (M. Paquet): Merci.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le député de Richelieu.

Le Président (M. Paquet): Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: D'abord, je voulais vous demander si, M. Millette, vous étiez intervenu lors du dépôt du projet de loi, en novembre 2000, dont le titre était le suivant: Loi concernant les partenariats en matière d'infrastructures de transport.

M. Millette (Robert): Non.

Mme Jérôme-Forget: Vous êtes au courant qu'il y avait eu un projet de loi présenté par nos prédécesseurs sur les partenariats public-privé pour la construction d'infrastructures?

M. Millette (Robert): Non. Personnellement, non.

Mme Jérôme-Forget: Bon, d'accord. Je voulais simplement savoir. Maintenant, je vais vous poser une question, parce que j'ai lu votre mémoire et je le trouverais, à bien des égards, extrémiste, je vais être très franche avec vous. Est-ce que vous voyez dans le... Si je lis votre mémoire dans sa philosophie, c'est que tout devrait être fait par le public.

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Non, pas nécessairement. Mais tous les services publics traditionnellement offerts par les services publics pourraient continuer à l'être si on a l'intention de chercher à améliorer l'efficacité de ces services-là. Ce n'est pas... Tout peut se faire d'un côté comme de l'autre. Il pourrait ne rien avoir de fait par le gouvernement, et tout pourrait être fait par l'entreprise privée, ou l'inverse. On n'en est pas là. On ne remettait pas en question ce qui doit être fait; on regardait plutôt ce qui est fait et essayer de le faire du mieux possible.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Ça, tout le monde est d'accord avec vous, mais, comme le projet s'intéresse principalement à des grands projets d'infrastructures, ce que je voulais savoir de vous: Est-ce que vous croyez que les grands projets d'infrastructures devraient être construits par des fonctionnaires, des employés de l'État, comme on le fait, là, comme on pourrait le faire?

M. Millette (Robert): Vous savez qu'il y a beaucoup...

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Oui, merci, excusez. Même actuellement, il y a beaucoup de grands projets d'infrastructures qui sont conçus et réalisés par le secteur privé. On regarde à la ville de Montréal, c'est même seulement ça. Il y a une partie de la conception qui effectivement... quand les villes sont assez importantes, peuvent faire une partie de la conception, mais la réalisation se fait presque systématiquement par le secteur privé. Donc, on n'a pas objection à ce que le secteur privé fasse des grands projets d'infrastructures, mais on ne comprend pas pourquoi ça prendrait d'autres mécanismes que ceux qui sont là actuellement, puisqu'ils répondent à la demande, dans le sens que, s'il y a des projets encore d'envergure, bien il y en a déjà eu. S'il y en a d'autres, on en a sur la table, à la ville de Montréal, en ce moment, mais on ne comprend pas pourquoi ça ne pourrait pas continuer comme ça s'est fait, dans le sens qu'on continue à donner des contrats spécifiques pour de la construction de projets spécifiques. Et pourquoi englober le financement? Pourquoi englober l'exploitation des de ces infrastructures-là par après? Ça déborde un peu de ce qui s'est toujours fait, mais je pense que le privé a sa place à ce moment-là.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, M. Millette, je voudrais peut-être que vous nous éclairiez. Vous êtes au courant comme moi qu'il y a des dépassements de coûts dans les constructions de projets dans plusieurs projets, dans la majorité des projets, des dépassements de coûts d'au moins 25 %. Alors, quels sont les problèmes reliés actuellement au fait qu'on a de tels dépassements de coûts dans la presque totalité des projets?

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Je ne sais pas où vous prenez votre statistique. En général, il y a 25 % de dépassement des coûts, mais je vous dirais que, même si c'était un organisme privé qui faisait la réalisation, vous auriez peut-être aussi 25 % de dépassement. Je vous donne un exemple. On a, par exemple, à la ville de Montréal, construit l'usine Des Baillets. On est allés en appel d'offres. Il y a eu quatre soumissionnaires. On a octroyé le contrat à 80 millions, et ça a fini à 200 millions. Pourquoi y a-t-il des dépassements de coûts? Quand même qu'on ferait n'importe quel partenariat qu'on voudra, le partage de risques ne fera pas en sorte que l'entreprise privée va, au bout du compte, construire une usine de 200 millions qui devrait coûter 80 millions. C'est parce qu'il y a une mauvaise soit planification ou identification des coûts au départ ou un mauvais suivi de la réalisation des travaux. Il y a plusieurs endroits où les dépassements peuvent se faire, mais, si c'est si systématique que ça qu'il y a des dépassements, il faut prendre les moyens pour qu'il n'y en ait pas.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Mais ma question, M. le Président, est la suivante, dans... Où j'ai pris les statistiques? C'est très simple, j'ai fait sortir les PTI qui ont été votés et j'ai regardé l'écart entre la soumission et le résultat. C'est aussi simple que ça. Puis, dans certains secteurs, ce n'est pas 25 %, M. le Président, dans bien des cas, c'est 100 % d'augmentation. Alors, vous avez raison, le problème, c'est qu'on évalue mal le coût au départ. Mais, dans un partenariat public-privé, les vertus, c'est précisément qu'au départ on doit s'entendre sur le prix. Donc, avant de débuter, on sait que Des Baillets va coûter 200 millions. Puis, si quelqu'un l'a proposé pour 80 millions, il va devoir défrayer le coût de l'écart entre le 80 et le 200.

Au niveau du Pont de la Confédération ? je vous donnerai comme exemple le pont de la Confédération ? l'entrepreneur a sous-estimé ses coûts de 200 millions. Ce ne sont pas les payeurs de taxes qui ont payé l'écart, c'est l'entrepreneur qui a assumé cet écart de 200 millions donc parce qu'il avait mal géré ou évalué... ou mal géré les coûts, mal géré le projet. Un des volets, ce n'est pas parce que les gens sont méchants, ce n'est pas parce que les gens sont mesquins, ce n'est pas parce que les gens sont de mauvaise foi, c'est parce que tout à coup on procède, je dirais, de façon pas suffisamment structurée pour justement créer une pression sur l'entrepreneur pour gérer ses coûts et pour les gens, que ce soient les hommes, les femmes politiques de quelque niveau de gouvernement que ce soit, de bien évaluer les coûts avant de débuter.

n(12 heures)n

Alors, c'est pour ça que je me posais la question. Vous avez raison, la majorité des produits que nous avons sont effectués par le secteur privé. Que ce soient les routes, les constructions d'hôpitaux, c'est le secteur privé qui vient construire, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a des dépassements de coûts, et c'est là les vertus d'un... Enfin, je vous dirai, que ce soit en Suède, en Italie, en France, en Angleterre, en Irlande... Là, je mentionnais, ce matin, l'Inde fait ça, l'Italie le fait. D'ailleurs, mon ancien collègue Joseph Facal a pris bien plaisir, dans une émission de radio, de dire qu'il y avait un État dans le monde qui n'en faisait pas, de partenariats public-privé, c'est la Corée, la Corée du Nord. Même pas la Corée du Sud, la Corée du Nord. Alors, vous imaginez, là, que c'est une formule qui est de plus en plus répandue et... Alors, peut-être, M. Millette, que vous pourriez nous éclairer à cet égard-là.

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Mais je vous dirais que, si vous voulez contrôler les coûts, vous n'avez pas besoin de partenariats. Vous pouvez tout simplement donner un contrat clé en main qui dit: Construisez-moi cette usine pour 200 millions. Vous n'avez pas besoin de partenariat pour faire ça. On l'a déjà fait, et ça se fait encore, et je ne vois pas pourquoi... Puis, si les soumissionnaires se trompent, comme vous dites, dans leur soumission, dans leur évaluation des coûts, ce sont les entreprises privées qui se trompent dans leur évaluation. S'ils se trompent au point qu'ils doivent payer 200 millions de leurs poches et continuer à survivre, bien tant mieux pour le contribuable, là, je veux dire, c'est lui qui... c'est un plus pour le contribuable si la compagnie perd 200 millions. Mais je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de compagnies au Québec ou même des consortiums qui vont être prêts à accepter des déficits comme ça souvent.

Mme Jérôme-Forget: ...question, monsieur...

Le Président (M. Paquet): Oui, d'accord. M. le député de Richelieu.

M. Simard: ...je vais, dans un premier temps, d'abord vous remercier de l'intérêt que vous avez porté à cette question. Et d'avoir ainsi préparé un mémoire éclaire beaucoup la commission. Moi, je vais simplement me raccrocher, dans un premier temps, aux dernières questions que vous avez reçues pour que les choses soient claires. Et ce n'est pas une formule magique, les PPP, là, c'est ça que vous nous expliquez. Il y a, d'un côté, un donneur d'ouvrage, il y a quelqu'un qui paie quelque part. Il y a un gouvernement qui décide de réaliser un projet d'infrastructure et il y a, de l'autre côté, associé à quelque titre que ce soit, un réalisateur, un entrepreneur privé qui réalise. S'il dépasse les prévisions de dépenses prévues au départ, il y a beaucoup de causes à ça. Théoriquement, une entreprise qui a un contrat pour réaliser, dans des délais précis, avec un coût précis, des travaux normalement doit les réaliser, sinon il est pénalisé.

Alors, de toute évidence, le problème qu'évoque la présidente du Conseil du trésor est un véritable problème, c'est celui de la prévision des coûts. Et c'est un problème que je pourrais, là... Il n'y a pas de partisanerie à faire là-dedans, on peut le retracer au cours des 40 dernières années, le lien entre les coûts annoncés et la réalité; il y a toujours une distorsion considérable. Cette distorsion vient de plusieurs facteurs, notamment la différence dans le temps entre le moment où un projet est pris en considération et annoncé et le moment de sa réalisation. Il est aussi inscrit dans d'autres facteurs beaucoup plus complexes: de fonctionnaires de l'État qui poussent leurs projets et qui veulent en convaincre le politique en sous-estimant parfois, à la limite, les coûts potentiels; de réalisateurs politiques, c'est-à-dire de décideurs politiques qui ont intérêt, à certains moments donnés, à sous-estimer les coûts de façon à convaincre un Conseil des ministres, ou des collègues, ou un Conseil du trésor, par exemple, d'aller de l'avant.

On est mardi. Mme la présidente s'est fait remplacer ce matin. La séance du mardi du Conseil du trésor comporte toujours des dépassements de coûts, hein? Je ne ferai pas insulte ici, par exemple, au ministère des Transports, mais chaque mardi on a, au Conseil du trésor, dans tel dossier, une demande de rallonge de 8 millions, de 19 millions. Puis ça, toujours parfaitement justifié, là, mais le résultat, c'est que ça existe. Et sachez que les analystes du Conseil du trésor qui passent à travers ces demandes sont extrêmement rigoureux et n'acceptent d'accorder ou de recommander d'accorder ces rallonges que lorsque la justification est sérieuse. C'est donc dire que ce n'est pas... le fait qu'un projet coûte plus cher que ce qu'il a été annoncé cinq, huit, 10 ans auparavant ne signifie pas que l'argent a été jeté par les fenêtres, signifie simplement que notre processus de prévision et d'annonce est vicié quelque part et qu'il faut nécessairement l'améliorer.

Que se passerait-il dans le cas d'un partenariat public-privé? Eh bien, avec un travail sans doute plus en profondeur, en tenant compte de tous les coûts, nous aurions dès le départ probablement le coût final ou une partie... En tout cas, on se rapprocherait du coût final. Mais ça ne changerait rien au coût pour la population. C'est vrai que la prévision serait plus juste, mais l'équipement en question coûterait quand même. Et en plus il faut prévoir que l'entreprise privée, bon, ce n'est pas du bénévolat, là. L'entreprise privée essaierait d'avoir quand même une garantie quelconque, donc inclurait aussi dans les coûts un facteur de risque qu'elle doit courir.

Vous avez vous-même mentionné tout à l'heure le cas des projets clé en main qui arrivent exactement au même résultat sans changer le mode d'attribution, sans aller vers les partenariats public-privé. Des dizaines de pays utilisent cette méthode couramment. Je pense que, dans cette volonté d'attribuer au privé une partie des fonctions de l'État, le gouvernement donne à ce privé des vertus qu'il n'a pas, c'est-à-dire de prévoir à tous coups, de façon certaine, le coût des travaux, alors que nous sommes, depuis des années, dans un système de collaboration avec le privé où ces gens reçoivent des contrats très précis ? grands constructeurs de routes, constructeurs d'édifices, ou constructeurs de métros, ou quoi que ce soit ? reçoivent des contrats extrêmement détaillés, mais, malgré tout cela, nous avons eu des dépassements de coûts. Donc, il ne faut pas penser une seconde que le fait que ce soit un PPP mettra fin aux dépassements... mettra peut-être fin aux dépassements, mais les coûts resteront les mêmes pour les citoyens, qu'ils soient contribuables ou tarifés dans le cas maintenant de cette volonté d'aller en tarification dans plusieurs domaines. Moi, je pense que, là-dessus, nous nous rejoignons.

J'aimerais cependant vous entendre sur... Vous avez bien lu le projet de loi, est-ce que vous pensez qu'il est suffisamment clair dans ses objectifs? Et est-ce qu'il nous offre des garanties de transparence et des dispositions éthiques qui sont appropriées à ce genre de projet?

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Avant de répondre à votre question, je veux juste revenir sur le contrôle des coûts. Si une entreprise privée est capable de réaliser un projet d'un pont et perdre 200 millions, soit qu'elle avait surestimé les coûts exprès puis qu'en réalité elle ne perd rien... Ça ne se peut pas qu'une compagnie perde 200 millions et continue à faire des affaires.

Et là je reviens à votre deuxième question. Donc, c'est dans comment faire pour identifier comme il faut à l'avance l'ensemble des coûts, comment faire pour être certain qu'on a tout couvert puis comment faire pour être certain que ça va être plus économique. Parce que souvent on entend, dans le milieu municipal, des compagnies qui sollicitent les élus municipaux en leur disant: Je vous garantis que ça va coûter 10 % moins cher, 20 % moins cher. Sur quelles bases, c'est dit, ça? C'est lancé en l'air comme ça, mais ce n'est jamais démontré. Donc, c'est de la poudre aux yeux qui est difficile... Même si on voudrait l'expliquer, décrire en détail ce à quoi il faut arriver, on n'arrivera jamais à tout mettre. On le vit régulièrement dans une foule de contrats, la compagnie s'engage à livrer tel produit, elle nous arrive: Voici des situations justifiables qu'on n'avait pas prévues, qui n'étaient pas prévues nulle part, donc il y a des coûts additionnels. Ça arrive fréquemment. Donc, on pense que ça va être difficile pour l'agence d'assurer la population que ces résultats-là vont être atteints. Et puis, après ça, de les démontrer, ça va être aussi difficile. Je ne suis pas certain que, parce que c'est une agence puis que les gens sont là en disant: Oui, oui... Ils vont dire à la population: Oui, oui, il y a des économies. Je ne suis pas certain que la population va les croire automatiquement, ça va être difficile à démontrer.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Et ma question? Je vous ai quand même posé une question sur est-ce que vous avez trouvé que les mécanismes de transparence et d'éthique qui sont nécessaires dans ce genre d'approche sont suffisamment couverts par le projet de loi.

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Non, ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant. C'est entre les mains d'un petit groupe de personnes qui... Ils ont beau être obligés de rendre des comptes, mais rendre des comptes sur quoi? Comment... Je posais la question, je ne le sais pas, comment ce groupe de 12 ou 15... Je ne veux pas être dans vos débats personnels, là, mais que ce soit 12 ou 15, que ce petit groupe de personnes là... comment ils vont faire pour démontrer qu'il y a réellement des économies? Ce n'est pas dit dans la loi, ça. C'est dit qu'ils devraient le faire, mais ce n'est même pas dit qu'ils devraient démontrer qu'il y a des économies. Donc, je ne sais pas comment ils vont pouvoir faire.

n(12 h 10)n

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: J'ai terminé.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull.

M. Cholette: Avec plaisir. Merci, M. le Président. Chers collègues, M. Millette et M. ? je vais essayer de bien prononcer ça, là ? Osseyrane...

Une voix: ...

M. Cholette: Ça va? Bon. Alors, merci de votre présentation. Bienvenue à la commission parlementaire. On a regardé et on a lu avec attention votre mémoire. J'aurai conséquemment, suite à mon intervention, une question concernant un paragraphe que vous avez inséré à la page 7 de votre mémoire, mais auparavant laissez-moi vous poser une première question avant d'aller plus en détail.

Premièrement, votre organisme, c'est un syndicat relativement nouveau qui regroupe, si je comprends bien, 200 professionnels fonctionnaires de la ville de Montréal. C'est bien ça?

M. Millette (Robert): C'est bien ça, mais les syndicats fondateurs de ce syndicat-là existent depuis 30 ans.

M. Cholette: D'accord. Et j'imagine, dans votre groupe de professionnels, d'ingénieurs, d'arpenteurs, d'architectes, j'imagine, toutes sortes de professionnels, j'imagine qu'il y en a plusieurs qui viennent du secteur privé, tout comme plusieurs d'entre... de gens de chez vous pourraient éventuellement aller vers le privé, et j'imagine que vous considérez la compétence d'un et de chacun comme étant équivalente.

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Il y a des compétences dans le secteur privé et il y a des compétences dans le secteur public, oui.

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Cholette: ...comparable très certainement, puisque ce sont les ordres professionnels qui contrôlent et attribuent les permis de pratique. Donc, le but de mon propos, c'est peut-être de résumer ma compréhension de votre mémoire, comme je vous disais, avant d'arriver à la question à la page 7. Alors, votre mémoire porte beaucoup plus sur le fondement des partenariats public-privé que sur l'agence. Vous restez relativement muets sur l'à-propos.

Si le gouvernement décidait et l'Assemblée nationale décidait d'utiliser les PPP comme c'est déjà le cas parce qu'il y a une loi qui a été votée par le gouvernement précédent... Donc, sans une modification législative, les partenariats public-privé sont permis pour les travaux routiers. D'ailleurs, dans le projet de loi, on parle déjà de tarification. Le ministre des Transports de l'époque, Guy Chevrette, était très, très heureux de ce projet de loi là. Alors, sans modifier la loi, c'est possible, et vous nous dites aujourd'hui: Malgré le fait que c'est possible, nous, on est contre ça, et vous restez muets sur l'à-propos... Considérant que les PPP peuvent être une solution, vous restez muets sur l'à-propos justement d'avoir une agence qui pourrait encadrer cette pratique. D'ailleurs, l'encadrement de cette pratique est une de vos préoccupations.

Ce que vous dites également, c'est que vous reconnaissez ? et vous venez de le faire d'ailleurs ? que le secteur privé a très certainement des compétences présentement tant au niveau des professionnels, vous venez de me le dire, mais aussi au niveau de la réalisation, puisque la grande majorité des travaux d'infrastructures au Québec sont réalisés justement par le secteur privé mais encadrés présentement par des professionnels publics comme la ville de Montréal. En passant, c'est à peu près ça que l'agence ferait, l'encadrement du processus pour la réalisation par le privé. Alors, dans le fond, je peux faire une similitude, en termes d'encadrement, entre votre groupe de 200 professionnels compétents de la ville de Montréal puis une agence qui regarde et analyse la question contractuelle avec le secteur privé.

Vous reconnaissez également dans vos propos que présentement, très souvent, il y a des coûts supplémentaires au modèle actuel. Et j'imagine que vous considérez que c'est une limite d'ailleurs au système actuel, puisque vous nous proposez d'autres modèles comme les contrats clé en main. Soit dit en passant, la différence entre le contrat clé en main et ce qui est proposé avec les PPP, c'est très certainement la prise en charge sur une beaucoup plus longue période mais aussi le partage de risques. Mais d'ailleurs c'est votre solution pour régler, si je comprends bien, la question des dépassements de coûts. Et vous reconnaissez également qu'il y a des délais de livraison qui sont souvent dépassés, souvent reliés soit à la conjoncture actuelle soit aux situations particulières du Québec.

Vous nous indiquez également que vous avez des inquiétudes par rapport à un éventuel PPP par rapport aux tarifs et qu'éventuellement, sur des contrats, les tarifs pourraient augmenter si c'est le privé qui s'occupait de ça, et que la qualité pourrait baisser. C'est ce que vous nous avez dit. Encore là, il me semble que d'avoir abordé la question de l'agence aurait peut-être répondu à cette question, puisque, pour prémunir l'État de ce genre de situation, l'entente contractuelle est au coeur du débat, et la capacité de l'agence de bien encadrer ça va justement diminuer les capacités du secteur privé d'augmenter les tarifs et de baisser la qualité.

D'ailleurs, l'association des grands travaux, je ne sais pas si vous étiez avec nous un peu plus tôt, ce matin, mais reconnaissait quatre grands avantages aux partenariats public-privé qui sont réalisés en matière d'infrastructures routières ailleurs: très certainement la question de la réduction de coûts et des délais ? on nous a expliqué pourquoi; la question de l'augmentation d'efficience ? je vais y revenir tantôt; la question des garanties de financement; finalement, l'imputabilité de l'État. Pour eux, c'étaient quatre avantages indéniables de faire affaire avec le secteur privé dans le cadre d'un PPP.

Et, savez-vous, à la lecture de la page 7 ? et j'arrive donc à ma question ? il me semble que vous nous dites en termes voilés que dans le fond vous croyez à ça également, vous croyez que, dans certains cas, il est possible que ce soit avantageux d'aller en PPP, et je vais vous lire le paragraphe que vous nous soumettez: «De plus, sans nier la présence d'une bureaucratie inefficiente dans certains cas ? vous parlez du public ? les organisations publiques sont parfois ? parfois ? plus performantes que les organisations privées.» En utilisant le mot «parfois», ça veut dire qu'il y a des fois que ça ne l'est pas. «Chaque cas est une situation particulière et c'est la compétence et la motivation des employés en place qui peut faire la différence.» Ça doit être vrai aussi dans le privé. «Encore une fois, un partenariat pour améliorer la productivité n'est pas automatiquement une solution plus économique.» Mais elle peut l'être.

Si je vous disais que le rôle de l'agence était justement pour déterminer quelles sont ces situations où le PPP est plus économique et plus efficient, procure des avantages à la société tout en gardant le rôle du public dans ce partenariat public-privé, est-ce que votre association serait ouverte, dans ces cas-là où l'agence démontrerait un avantage économique et un avantage de résultat pour les citoyens, est-ce que votre association serait d'accord à l'instauration de l'agence et à l'octroi de contrats en PPP?

Le Président (M. Paquet): M. Millette.

M. Millette (Robert): Il y a plusieurs facettes à votre intervention. Donc, la première, c'est que je ne fais pas de lien avec le gouvernement précédent, dans le sens que si on n'est pas intervenu... Parce que ça existe, comme vous dites, la possibilité de partenariat dans les travaux routiers. Ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas dénoncé qu'on approuvait. Donc, je ne veux pas revenir à cet événement-là, parce qu'on ne l'a pas commenté.

Si vous me dites: Est-ce qu'on serait d'accord si... Je ne sais pas comment... Il faudrait que vous m'expliquiez, pour que je sois d'accord, comment vous allez faire. C'est facile de dire: Oui, il y a une agence, et c'est sa responsabilité d'encadrer le processus. En passant, nous, on n'encadre pas des processus, on encadre des activités techniques, et on suit le déroulement des projets, et on critique à toutes les étapes de la réalisation ou de la conception. Donc, on ne fait pas que de l'encadrement de processus, on fait de l'encadrement technique. Je ne pense pas que l'agence ait le même rôle que le rôle qu'on joue dans les municipalités en tant que professionnels. Si vous l'assimilez au même, bien je n'ai pas compris ce qu'est le rôle de l'agence. Donc, est-ce que l'agence pourrait faire en sorte qu'elle nous démontre que c'est plus économique dans un certain cas? C'est ce que vous me dites. Il faudrait que vous me disiez comment elle va faire ça, sur quelles bases elle va me démontrer que, là, elle est en train de prendre l'intérêt du public et que, là, on s'en va vers une voie qui est plus économique. Parce que justement on ne l'a pas critiqué, le projet de l'agence, parce que ce n'est pas clair comment tout ça va se passer. Si vous m'expliquez ça, bien je vais pouvoir vous répondre. Mais là j'ai de la difficulté à répondre comment l'agence va pouvoir nous démontrer l'économie.

Le Président (M. Paquet): 40 secondes.

n(12 h 20)n

M. Cholette: Oui. Bien, peut-être une suggestion de lecture pour répondre à votre question. Le gouvernement du Québec, en septembre 2002, a publié un guide qui s'appelle [Dossiers] d'affaires, qui justement établit de façon assez explicite comment les comparaisons public-privé pourraient se faire. En 2002, ce n'est pas notre formation qui était là mais plutôt les gens d'en face, et il y a tout un guide au Conseil du trésor justement pour la comparaison, pour répondre à la question que vous nous soulevez. Bonne lecture.

Le Président (M. Paquet): M. le député...

M. Millette (Robert): Mettons que vous allez l'introduire dans la loi, c'est ça?

M. Cholette: Bien, c'est déjà là. C'est déjà un guide...

M. Millette (Robert): C'est un guide. O.K.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...M. le Président. Bonjour. La semaine dernière, on a eu l'occasion d'entamer cette étude en commission parlementaire et on a reçu les unions municipales, c'est-à-dire la FQM, l'UMQ également, qui ont demandé, qui demandent d'être exclues, parce que, si vous avez pris connaissance de l'article 8 du projet de loi, c'est qu'«un organisme public doit recourir aux services de l'agence pour l'évaluation de la faisabilité en mode de partenariat public-privé de ses projets d'infrastructures, d'équipements ou de prestation de services publics». Eux ont dit: Nous, on ne veut pas être soumis à ça. On a tout notre personnel, on a des compétences, on a l'expertise, on sait où on s'en va avec nos projets, et il y a une longue... une série de considérants que chacun, à tour de rôle, les différents maires qui étaient présents, nous a mentionnés pour être exclu.

Donc, si on exclut l'ensemble des municipalités du Québec de ce projet de loi... Parce que ce qu'ils craignent, c'est la lenteur dans l'analyse. Parce que la ministre nous dit qu'il y aura entre 12 et 15 personnes qui vont travailler à l'agence. Bon, est-ce que c'est réaliste de penser que 12 à 15 personnes seront en mesure d'analyser en profondeur l'ensemble des projets qui leur seront soumis dans un délai raisonnable pour en arriver à la réalisation d'un projet quelconque? À moins que la ministre pense que les filiales dont la loi permet la création puissent venir pallier à ça puis qu'on assiste à la création d'un monstre ou d'une pieuvre, hein, avec une multitude de façons d'agir qui permettraient peut-être, là, de pouvoir encadrer ou au moins analyser l'ensemble de tous les projets.

Quand vous parlez, dans votre mémoire, à la page 6, de la pertinence de la mise en place de partenariats, vous référez à un contexte politique en disant: Ça vient compliquer la situation. Bon, nulle part ailleurs, on ne retrouve les éléments du contexte politique auquel vous faites référence, mais, d'un autre côté, vous dites aussi: «Le système politique ne parvient pas à prendre les décisions qui s'imposent à long terme...» Et, tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas de... les sommes ne sont pas... les taxes ne sont pas au rendez-vous dans une seule cagnotte, bien, là, on est toujours dans le même dilemme, il faut avoir un partenaire fédéral avec un partenaire du Québec et les municipalités. On est toujours en train de fonctionner comme ça à l'heure actuelle.

Et la capacité du secteur public... Parce que vous dites: Le secteur public aussi détient une expertise. Vous défendez le secteur public, mais comment se fait-il qu'on en arrive toujours ? puis on a parlé des dépassements de coûts... qu'on n'est pas en mesure de sortir un devis qui donne l'heure juste? Et j'aurais aimé aussi entendre la présidente du Conseil du trésor sur le fait, sur l'exemple qu'elle donne du 200 millions, qu'elle nous donne davantage de détails sur la globalité de ce projet, en quoi ça consistait, c'était quoi, le 200 millions de dépassement. Est-ce que c'est uniquement une route? Et, pour votre information, peut-être que ce serait pertinent que vous sachiez de quoi on parle ? on parle de dépassement de coûts de 200 millions dans un projet ? que vous ayez toute l'information pour pouvoir analyser et, en même temps, vous faire une opinion.

Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, là, sur ces éléments-là, parce que, dans un dossier, comme le disait mon collègue tout à l'heure, un dossier qui commence, d'abord on détermine s'il y a un besoin en matière d'infrastructure, par exemple pour l'eau potable. Si on construit une route, bien, habituellement on s'organise pour faire aussi la réfection ou l'installation de services, hein? On va mettre les égouts, les aqueducs pour l'eau puis on va faire la construction. Est-ce qu'on en oublie un bout? Est-ce que le projet, par exemple, prend tellement de temps à se réaliser puis que des analyses, au ministère, demandent ci, demandent ça, des analyses environnementales, toutes sortes de considérants... que le projet finit par prendre cinq ans? Bien là, il faut faire l'indexation des coûts. Alors, on vit avec cette réalité-là.

Moi, ça fait 10 ans que je suis à l'Assemblée nationale, donc j'ai pu le voir, au fil des ans, comment les projets ont augmenté parce que le gouvernement n'arrivait pas à prendre une décision dans un délai rapide, assez rapide pour faire... après deux ans, par exemple, ou trois ans. Des fois, cinq ans, six ans que les dossiers ont traîné, puis pas parce que les besoins n'étaient pas justifiés: on est en train de régler encore, dans des villages, la livraison d'une eau potable pour la population.

Alors, je pense que le gouvernement, l'État doit s'interroger d'abord sur ses façons de faire et ensuite dire: Bon, bien, ça ne fonctionne pas, c'est la faute des fonctionnaires, je regrette, mais ça dépend comment ça fonctionne, et c'est l'organisation du travail. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Paquet): M. Millette, quatre minutes.

M. Millette (Robert): Oui, rapidement. Bien, je me demande effectivement comment, le risque, on va l'évaluer. Parce que, si on me dit... M. le député, vous me dites: L'agence, elle a les moyens, vous me donnez un document qui fait en sorte qu'elle va savoir vraiment, mais il faut quand même que, là, il y ait eu quelqu'un qui fasse une évaluation. Les firmes vont vous avoir soumis les coûts qu'eux autres pensaient que ça va coûter soit pour la construction soit pour l'exploitation pendant 30 ans, parce que, là, on va avoir soit les coûts de financement... Donc, ils vont tout avoir prévu ça, puis c'est certain qu'ils vont avoir gonflé ça un peu pour être sûrs de ne pas arriver dans le trou avec ça. Mais, vous, à l'agence, c'est vous qui prenez le risque de dire: Oui, c'est les bons coûts qu'ils nous soumettent là, puis vous prenez la chance que ce ne soient pas les bons coûts puis que ce soient des coûts trop élevés par rapport à ce qu'ils vous ont dit, par rapport aux coûts réels, et vous allez les accepter. Ce n'est pas parce qu'il y a 12 personnes qui disent: Oui, c'est ça, les vrais coûts, puis c'est ça qu'il faut faire parce que c'est plus économique... il n'y a rien qui nous garantit ça. Vous prenez un risque en faisant ça.

On est mieux d'y aller par étapes au lieu d'engager des firmes sur 30 ans puis dire: Vous allez vous en tenir aux coûts que vous nous avez donnés, puis qu'après quelques années ils n'arrivent pas à rencontrer les coûts qu'ils nous ont donnés. Vous avez beau me dire: Bien, ils feront faillite ou ils n'augmenteront pas les tarifs, puis ils vont garder la même qualité, comment pouvez-vous être sûrs?

En Europe, ce qui s'est passé, ce n'est pas ça qui s'est passé. Effectivement, il y a des investissements qu'ils étaient supposés faire qu'ils n'ont pas faits parce qu'ils n'arrivaient pas. Puis, dans d'autres cas, ils ont diminué la qualité des services; ils ont étiré ça le plus possible pour ne pas avoir à arriver en dessous. Donc, comment pouvez-vous être sûrs que, sur 30 ans, c'est ça qui va se passer? Même si vous avez un beau document qui a bien préparé ça, vous prenez un gros risque.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé, il reste 1 min 15 s environ.

M. Lelièvre: Bien, écoutez, je vous invite à prendre connaissance de l'article 8 parce qu'il est clair, hein? Et, moi, je pense, je suis convaincu que vous en avez pris connaissance certainement, mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus, parce que par rapport à cette obligation qui est faite à tous les... en fin de compte à toutes les administrations... Alors, il ne reste pas grand temps, je vous laisse la parole.

M. Millette (Robert): Un petit commentaire rapide pour terminer sur cet article-là qui effectivement va trop loin. Mais, comme on m'a dit en entrée de jeu que notre mémoire était extrémiste, je pense que cet article-là est extrémiste.

Le Président (M. Paquet): Alors, au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. Millette et M. Osseyrane, du Syndicat professionnel des scientifiques à pratique exclusive de Montréal, pour leur participation à nos travaux. Je suspends nos travaux jusqu'après la période des affaires courantes.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

 

(Reprise à 15 h 18)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des finances publiques reprend ses travaux. Nous entendons cet après-midi... nous accueillons d'abord les gens de Bombardier Transport, mais juste auparavant je rappellerais à tout le monde qui est présent dans la salle de bien s'assurer que leurs téléphones cellulaires aient une sonnerie éteinte, s'il vous plaît.

Alors, nous poursuivons nos travaux donc dans le cadre des auditions publiques, dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 61, Loi sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec. Alors, sans plus tarder, j'invite M. William Spurr, président, Amérique du Nord, de Bombardier Transport, de bien vouloir commencer la présentation et bien sûr de nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Bombardier Transport

M. Spurr (William): Merci, M. le Président. M. le Président de la commission, Mme la présidente du Conseil du trésor, membres de la commission, mesdames et messieurs, bonjour. D'abord, merci pour cette opportunité de venir vous présenter notre mémoire aujourd'hui. Je suis accompagné de mes collègues: Hélène Gagnon, qui est directrice, Affaires publiques; Ann MacDonald, directeur, Développement des affaires; et David Kaija, directeur, Financement des ventes et projets, Ingénierie financière.

J'aimerais débuter par simplement vous mettre à jour sur Bombardier. Le siège social de Bombardier est à Montréal, Canada, avec des effectifs de quelque 64 600 personnes de par le monde, des revenus de 15 milliards et demi en dollars US pour l'exercice de la fin de janvier 2004. Le plus important à noter, c'est que 95 % des revenus générés par Bombardier sont générés en dehors du Canada. Bombardier aujourd'hui est une société basée sur deux piliers industriels: d'une part, le transport à 45 % et l'aéronautique à 53 %.

n(15 h 20)n

Bombardier Transport est aujourd'hui le chef de file mondial dans la fabrication et les services de matériel de transport sur rails avec une vaste gamme de produits. Nos débuts bien sûr ont été... des activités étaient au Québec. Vous reconnaissez tous, sur le projecteur, l'usine de La Pocatière, qui a grandi énormément au fil des ans. Le contrat qui nous a lancés, c'est le contrat du métro de Montréal, en 1974, pour les MR-73. Pour ensuite, on a pris notre expansion sur le marché américain et, aujourd'hui, on est le numéro un en Amérique du Nord, avec 40 % du marché. Le contrat pour les 825 voitures pour le métro de New York, en 1982, nous a établis comme une force dans le domaine du transport et a permis la percée du marché américain. L'année passée, en juillet 2003, on a complété la livraison de 1 030 voitures de métro et, de même pour Bombardier Transport en Amérique du Nord, 95 % de nos ventes sont en effet en dehors du Québec et du Canada. On est aujourd'hui le numéro un en tant que Bombardier Transport dans le... le numéro un mondial du secteur de transport de passagers sur rails et des services avec une gamme très importante de produits.

Nos chiffres d'affaires. On a à peu près 35 000... un peu plus que 35 000 employés de par le monde qui sont répartis sur 21 pays avec des sites de production, donc on est une vraie multinationale aujourd'hui.

Au Québec, Bombardier Transport, on a environ 1 600 employés: on en a 600 dans des postes d'ingénierie, de gestion de projet et d'administration, à notre siège social, à Saint-Bruno; à La Pocatière, c'est bien sûr les activités de fabrication et d'assemblage. Aujourd'hui, on a 1 000 employés à La Pocatière, avec une capacité bien sûr d'à peu près 2 000 employés. On a fabriqué plus que 4 500 voitures depuis 1974.

Alors, j'aimerais laisser à Hélène le soin de vous parler des propositions de modifications au projet de loi n° 61. Merci.

Le Président (M. Paquet): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Hélène V.): Merci. Alors, notre but aujourd'hui, c'est vraiment de partager notre expérience avec vous et de vous suggérer certains éléments que vous pourriez considérer pour améliorer le projet de loi. Je pense que c'est important par contre de comprendre que pour une entreprise comme la nôtre, pour Bombardier Transport, c'est sûr que c'est toujours plus simple de se voir octroyer un contrat de type conventionnel pour du matériel roulant ou pour des services en contrepartie de fonds publics.

Par contre, ce qu'on a réalisé, c'est que la plupart de nos clients, qui sont des autorités de transport public et des gouvernements à travers le monde, font face à des restrictions budgétaires et ont exploré ou ont mis en oeuvre différentes formes de partenariats public-privé. Donc, on s'est adaptés à la réalité de nos clients, et c'est comme ça qu'on a développé une expérience et une expertise au niveau des partenariats public-privé à travers le monde. Donc, c'est dans ce contexte-là qu'on vous soumet humblement quelques éléments à considérer.

Alors, comme premier élément, on vous souligne que c'est important d'octroyer à l'agence tous les pouvoirs décisionnels qui découlent de son mandat de négocier. Dans le projet de loi, vous confiez à l'agence le mandat d'effectuer une étude de faisabilité, et de choisir un partenaire, et de négocier une entente de partenariat public-privé, mais nous voulons nous assurer que vous allez bien donner à l'agence les pouvoirs qui découlent de ce mandat de négocier pour éviter que l'agence ait à consulter d'autres interlocuteurs gouvernementaux avant de prendre une décision sur l'un ou l'autre des aspects de la négociation. On pense que c'est important, puisque les partenariats public-privé sont des négociations parfois complexes. Il faut s'assurer que l'agence ait les pouvoirs décisionnels qui découlent de son mandat.

Comme deuxième élément, nous voudrions attirer votre attention sur la crédibilité financière de l'agence et surtout de ses filiales. Vous savez que, dans votre projet de loi, vous permettez à l'agence de créer des filiales. Certaines filiales pourraient être détenues à 51 % seulement. Je pense qu'il est important que l'agence et ses filiales puissent bénéficier d'une cote de crédit intéressante qui va permettre d'assurer une garantie adéquate de ses engagements financiers. C'est un élément très important pour des partenaires du secteur privé.

Comme troisième élément, dans le projet de loi, nous considérons qu'il n'est pas tout à fait clair à qui vous confiez la responsabilité de gérer le projet une fois l'entente de partenariat public-privé négociée. Donc, ce que nous vous soumettons, c'est qu'il serait important de confier la gestion du projet au ministère concerné et non à l'agence, d'après notre expérience.

Comme quatrième élément, nous vous soumettons qu'il serait intéressant d'élargir les types de pouvoirs du gouvernement afin de couvrir d'autres types de situations dans le cas de partenariats public-privé, surtout dans le secteur du transport de passagers. À l'article 45 du projet de loi n° 61, vous prévoyez uniquement des cas de remboursement de dette, mais le secteur privé rechercherait un arrangement plus large qui couvrirait d'autres types de soutien financier. Donc, ce qu'on vous souligne, c'est qu'en plus de garantir des emprunts, d'autoriser le ministre des Finances à avancer des sommes à l'agence, on vous soumet qu'il serait intéressant que le gouvernement se laisse de la latitude pour couvrir d'autres types de soutien, comme, par exemple, d'octroyer des subsides d'exploitation, d'octroyer des sommes visant à garantir l'achalandage ou même d'adopter des allégements fiscaux. Ça ne veut pas dire que ce sont des pouvoirs qui seraient utilisés dans toutes les situations, mais ce sont des types de pouvoirs qui pourraient être considérés dans le cadre de partenariats public-privé pour le secteur du transport de passagers.

Comme cinquième élément, nous vous soumettons qu'il serait intéressant de reconnaître que les coûts de développement d'un partenariat public-privé sont des coûts inhérents aux projets, qui devraient être remboursés aux firmes qui ne sont pas retenues. Vous aurez peut-être lu, dans Le Soleil de ce matin, un titre plutôt accrocheur: Québec [devrait] être plus généreux, affirme Bombardier. Je pense qu'on a peut-être un petit peu exagéré notre proposition ici. Je pense que j'aimerais peut-être vous expliquer ce que nous mentionnons dans cette proposition. Ce que nous vous soulignons, c'est qu'il serait intéressant pour vous de prévoir, dans les pouvoirs de l'agence, que, dans certains cas, il pourrait être important de prévoir que les firmes ou les consortiums qui vont déposer des soumissions pour les partenariats public-privé puissent se voir rembourser une partie ou la totalité de leurs coûts de préparation de soumissions s'ils ne sont pas retenus ou, pire encore, si le projet est annulé en cours de route. On a vu des cas, dans le cas par exemple de Vancouver, où le projet a failli être annulé en cours de route, et, à ce moment-là, les consortiums avaient déjà engagé des sommes en millions pour préparer les soumissions. Donc, il faudrait prévoir dans des cas comme ça, si vous voulez encourager la concurrence, de prévoir une forme de remboursement des coûts pour encourager la concurrence.

Comme sixième élément, nous pensons qu'il serait important de confirmer au secteur privé quelles sommes ont été prévues au budget et allouées par type de projet pour que le secteur privé soit à même d'évaluer au départ si un projet est viable en fonction des sommes publiques qui ont été prévues. Donc, nous pensons que ce serait un élément à clarifier qui serait important pour vos partenaires potentiels.

Donc, je vais maintenant passer la parole à Ann MacDonald, qui va vous parler d'expériences particulières de Bombardier en partenariat public-privé.

Le Président (M. Bertrand): Mme MacDonald.

Mme MacDonald (Ann): Donc, je vais... Merci. Je vais couvrir, pour les quelques minutes qu'il nous reste, quelques exemples concrets de projets qu'on a faits dans notre industrie sous la formule PPP.

Tout d'abord, au niveau de l'industrie, ce qu'on note. On note une nette tendance à une augmentation importante des projets dits ferroviaires public-privé dans notre industrie, et ce, depuis 1999, une tendance donc qui s'amorce, là, de plus en plus, presque trois fois plus vite en termes d'augmentation des projets public-privé ? c'est ce qu'on va voir dans les cinq prochaines années ? par rapport au système de transport conventionnel où on achète des équipements de façon classique.

Dans notre industrie, encore là, il n'existe pas une seule formule comme telle de type partenariat privé-public. Dans le cas de nouveaux projets de développement d'infrastructures ferroviaires où il n'y a pas de système existant, il y a plusieurs formules possible qu'on a expérimentées et qu'on a vues, dépendant des besoins du client, formules qui vont d'une formule de construction et exploitation par le privé pour ensuite transférer le système de retour au public après une certaine période déterminée fixe, d'autres formules plus larges qui vont aller de la conception, construction, exploitation et entretien également du système. Donc, pas une seule formule qui existe, mais, dépendant des besoins, il y a différentes possibilités.

Dans le cas où il y a déjà des infrastructures de transport en place, un système en place, les prestations du secteur privé peuvent prendre encore là différentes formes. Et, sur le tableau, on peut aller d'un niveau moins complexe, à gauche, en augmentant la complexité en s'en allant vers la droite.

Tout d'abord, il peut y avoir une maintenance pure du parc de véhicules et de trains entreprise par le privé, selon un contrat à durée déterminée et selon des devis de performance précis. Deuxième niveau, implication plus importante du privé où on voit une concession, où on donne non pas seulement la maintenance mais également l'exploitation du système ferroviaire. Troisième niveau où on voit une participation accrue où il peut y avoir un transfert plus ou moins important de l'exploitation de tout le système, à la fois les trains mais également les infrastructures, voies, mises à niveau des infrastructures, stations, systèmes de signalisation, etc.

Dans chacun des cas, si on regarde les exemples concrets, maintenance de parcs de véhicules, c'est ce que Bombardier fait depuis 1997 avec GO Transit, à Toronto, où nous sommes contraints à un... où nous sommes soumis à un contrat de performance avec des critères bien précis à rencontrer et pour lequel GO Transit bénéficie, depuis ce temps, annuellement d'économies de l'ordre de 30 %.

n(15 h 30)n

Contrat d'exploitation et maintenance, c'est ce qu'on a comme concession avec notre partenaire connexe à Boston, où, de concert avec eux, nous faisons l'exploitation et l'entretien de la flotte du réseau de trains de banlieue. Inclus également dans l'enveloppe était le service à la clientèle. Dans le cas de Boston, on cherchait également, par le biais de la formule PPP, à garantir un niveau optimal de services aux usagers et on cherchait donc à transférer le service à la clientèle et s'assurer, selon les critères de performance, que les usagers bénéficieraient d'un niveau de services sinon égal au moins plus performant que ce qu'ils avaient.

Dernier cas et non pas le moindre, celui du métro de Londres, on en entend parler abondamment. Le métro de Londres est quand même une référence extrêmement intéressante dans notre domaine. C'est un cas où London Underground, donc l'autorité publique, a retenu la responsabilité de la gestion globale du système de métro, responsabilité liée à la billetterie, conducteurs, établissement des horaires, contrôle du réseau et également les risques qui étaient liés à l'achalandage. Donc, une mainmise fort importante encore du public mais un transfert des responsabilités liées à toute l'exploitation du réseau, planification du renouvellement du matériel roulant, mise à niveau des infrastructures. Ça faisait partie du mandat et ça fait partie du mandat.

Dans chacun des cas que je viens de mentionner, la clé de voûte derrière la structure de PPP, c'est le contrat de services. C'est ce qu'on appelle le contrat de services. Ce contrat de services soumet le privé à la rencontre de critères de performance extrêmement précis, et c'est ces critères de performance-là, et je vais y revenir, qui font en sorte et qui assurent au gouvernement que le service aux usagers va être optimal, qui assurent que les infrastructures vont être remises à niveau, mais dans des temps prescrits et à l'intérieur d'enveloppes budgétaires très claires.

Exemples de critères auxquels on est soumis. Sur le métro de Londres par exemple, on est soumis à des critères au niveau de la capacité en matière de temps total de déplacement, alors: nombre de trains en service, la fréquence des trains en service, la propreté à l'intérieur des trains, l'ambiance générale de tout le réseau de transport en commun du métro de Londres. Il y a des enquêtes qui sont faites auprès de la clientèle. Les résultats de cette enquête-là vont jouer énormément dans notre capacité de pouvoir facturer, en tant que société privée, pour les services que nous rendons.

Donc, il y a aussi cette notion qu'il y a ici du financement privé, et donc les investisseurs privés, le retour qu'ils pourront chercher sur leur investissement est directement relié à la performance que le privé donnera dans le contrat, d'où l'intérêt pour nous et les deux parties en fait ? il s'agit vraiment d'un intérêt réel des deux ? de transférer et de partager et les risques et les bénéfices. Dans le cas de Londres et souvent dans d'autres cas, si notre performance est au-dessus des requis, les bénéfices seront partagés de part et d'autre entre le privé et le public. Je vais laisser William conclure.

Le Président (M. Bertrand): Merci.

M. Spurr (William): En conclusion, le projet de loi est très intéressant, et nous espérons que le législateur retiendra nos commentaires, qui auront pour effet en fait de clarifier le cadre réglementaire pour tous les partenaires potentiels. En somme, notre expérience à nous démontre que les PPP ont réussi ailleurs, et nous ne voyons pas de raison que ça ne réussisse pas au Québec, au contraire. Merci.

Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie de votre présentation. Je vous invite, Mme la ministre, à débuter la rencontre.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, M. Spurr et toute l'équipe de Bombardier, bienvenue. Je vous dirai que c'est intéressant de vous avoir ici, aujourd'hui, puisque vous êtes vraiment impliqués dans des PPP un peu partout dans le monde. Au fait, ma foi, je pense que vous êtes les premiers qui venez nous rencontrer et qui avez de l'expérience dans ce secteur.

Je vais vous soulever quelques réserves qui ont été soulevées et par mon collègue de l'opposition et finalement par plusieurs intervenants, ici, qui sont venus nous rencontrer. Vous souhaitez avoir plus de pouvoirs au niveau de l'agence. Tous les intervenants presque, qui sont venus nous rencontrer, nous ont dit qu'ils pensaient que l'agence avait trop de pouvoirs. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi vous souhaitez que l'agence ait plus de pouvoirs?

Et, toujours dans ce volet et dans cette question, dans ce volet, quand je suis allée en Angleterre, et j'ai rencontré à peu près tous les groupes qui s'intéressent aux partenariats public-privé là-bas, il est clair que Partnerships UK n'a pas également tous les pouvoirs. Les ministères ont également... ont souvent les pouvoirs. L'agence joue un rôle déterminant mais aide les ministères et favorise ce lien avec le secteur privé. Alors, peut-être que vous pourriez m'expliquer pourquoi vous le souhaitez au Québec et pourquoi vous le souhaitez davantage qu'en Angleterre, par exemple.

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Oui, merci.

Le Président (M. Bertrand): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Hélène V.): Oui. Écoutez, je pense que vous faites référence au point où nous mentionnons, dans notre mémoire, que, si vous confiez le pouvoir à l'agence de négocier, nous souhaitons que l'agence ait tous les pouvoirs décisionnels qui découlent de son mandat de négocier. En fait, si le gouvernement décide de ne pas confier à l'agence le mandat de négocier et le confie au ministère ou quoi que ce soit, ce sera votre décision.

Ce qu'on vous souligne, c'est que l'autorité à votre choix qui aura le mandat de négocier doit avoir le pouvoir de négocier. Donc, c'est-à-dire que, si c'est l'agence... Et, d'après ce qu'on a compris du projet de loi, c'était l'agence qui avait le mandat de faire l'étude de faisabilité, de choisir le partenaire et de négocier une entente de partenariat public-privé. Donc, ce que, nous, on vous dit, c'est que, si vous confiez le mandat à l'agence de négocier, on veut s'assurer que l'agence a bel et bien les pouvoirs de négocier qui découlent de ce mandat-là. Mais ce sera, bien entendu, à vous... Nous, on vous souligne un peu l'importance de l'interlocuteur public qui est en face du ou des partenaires privés et on veut s'assurer que l'interlocuteur, quel qu'il soit, ait le pouvoir qui découle de son mandat.

Le Président (M. Bertrand): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Bon. Simplement, encore pour irriter un peu mon collègue de l'opposition, je rafraîchirai, au niveau de l'article 5, les pouvoirs de l'agence: «...conseille le gouvernement [...] en ce qui concerne la sélection et la priorité de réalisation de projets; met à la portée des personnes [...] un centre de connaissances et d'expertise[...]; informe les organismes [...] sur le concept de gestion publique en mode [...] PPP[...]; suscite, accueille, évalue et propose des projets[...]; fournit aux organismes publics [des services d'expertise relatifs à] la faisabilité...»

Nous nous sommes beaucoup inspirés de ce qui se faisait en Grande-Bretagne et de ce qui se fait en Colombie-Britannique comme modèles, justement laissant au ministère où se trouve fondamentalement l'expertise pointue au niveau du secteur... mais développant à l'agence le côté pointu au niveau des contrats. Et par conséquent l'agence servirait... aiderait les ministères. Mais le ministère des Transports est beaucoup mieux placé ? parce qu'il connaît le transport ? que n'importe qui d'autre pour développer des PPP au niveau du transport. C'est la même chose au niveau de la santé. Le ministère de la Santé est beaucoup mieux placé pour construire un hôpital que le serait l'agence dans le fond qui n'a pas cette expertise-là. Sauf qu'au niveau de l'agence, ce qu'on souhaitait faire, c'est développer une expertise au niveau contractuel, vous savez, puisque ces contrats sont complexes.

Maintenant, j'aimerais vous poser une autre question. Vous parlez... Vous souhaitez qu'on dédommage les partenaires qui soumissionnent, parce qu'effectivement il y a des coûts élevés. Et effectivement, quand nous avons rencontré des gens, des compagnies, c'est très coûteux de faire une soumission en PPP. Sauf qu'encore là, quand j'étais en Angleterre, généralement ? je ne dirais pas tout le temps ? généralement, il n'y avait pas de dédommagement.

Est-ce que vous pouvez nous éclairer justement à cet égard, puisque vous avez de l'expérience? Est-ce que, quand vous soumissionnez ailleurs, à l'étranger, vous recevez un dédommagement? Et est-ce que tous ceux qui participent reçoivent un dédommagement?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Oui. Certainement, Mme la ministre. Certainement. Dans certains cas, dépendamment de la lourdeur du processus, généralement, on octroie des dédommagements. Par exemple, à Londres, pour le métro de Londres, les dédommagements étaient assez importants, et ce qu'ils avaient demandé en fait, c'est au soumissionnaire gagnant d'inclure le coût de dédommagement dans son financement à lui. Donc, le gagnant avait financé le dédommagement des autres consortiums. Alors, c'est ça qui s'est passé dans ce cadre-là. À Vancouver, en Colombie-Britannique, c'est l'agence même qui dédommage en cas d'annulation de contrat ou pour les perdants du contrat. Alors, vraiment, ça dépend vraiment de la lourdeur du processus. En Grande-Bretagne aussi, il y a des PFI ? c'étaient les projets de... la plupart des projets de métros légers ? où, dans certains cas, ils dédommageaient les consortiums perdants.

Le Président (M. Bertrand): Mme la ministre.

n(15 h 40)n

Mme Jérôme-Forget: Oui. Bon, je peux imaginer pour le métro de Londres qu'il y avait un dédommagement parce que c'est un projet d'une telle envergure, je ne sais pas de combien de milliards de «pounds», de livres que ça devait représenter, mais le projet, c'est un projet d'une telle envergure que manifestement, si on voulait avoir de la concurrence et permettre aux gens... ça, je peux comprendre. Mais généralement... j'étais très étonnée parce que, même pour la construction de gros hôpitaux, comme Barts à Londres ou Middlesex, j'ai rencontré justement une des compagnies qui n'avaient pas gagné le concours, et là ce qu'on nous disait, c'est: Bien, on espère gagner le prochain, mais ils n'étaient pas dédommagés. Je ne sais pas si vous voulez réagir, là, peut-être que vous ne construisez pas d'hôpitaux, là.

M. Spurr (William): Mme la ministre, on a vécu les deux. On a vécu des projets où on n'a pas été dédommagés et auxquels on a participé, on a soumis, et puis d'autres où on a été dédommagés. Donc, vraiment ça dépend de l'envergure du projet, de l'importance du projet, ce n'est pas une demande qu'on fait, une proposition sine qua non. C'est vraiment cas par cas.

Mme Jérôme-Forget: Maintenant, peut-être que vous pourriez nous expliquer, parce qu'ici il y a souvent des gens qui interrogent et qui se posent la question suivante: Comment pouvez-vous le faire à meilleur compte, alors que vous empruntez pour plus cher que le gouvernement? Souvent, cette question-là a été posée parce que les gens ne croient pas qu'au niveau de l'efficience vous soyez capables de le faire à meilleur compte que la forme traditionnelle dans la construction d'un projet quelconque. Peut-être que vous pourriez nous éclairer à cet égard-là, puisque, vous avez raison, le National Audit Office a remarqué que, dans 80 % des cas, c'était à l'intérieur des coûts et à l'intérieur des budgets, et ordinairement des coûts inférieurs de l'ordre de 15 % à 20 % minimum, nous a-t-on dit. Alors, peut-être que vous pourriez nous dire, quand vous faites quelque chose de façon traditionnelle versus le faire en mode PPP, pourquoi dans le fond les gouvernements y voient-ils leur compte?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Bon. C'est vraiment... Vous soulevez deux problèmes complètement séparés ici. D'abord, c'est vrai que, dans le cas des PPP, le taux d'emprunt de la société qui est créée pour faire le PPP est probablement plus élevé que le taux d'emprunt d'un gouvernement par exemple, ça va de soi, mais ce qui est important, c'est le taux d'emprunt du projet, des risques du projet. Alors, quand on monte un projet, on partage les risques et les bénéfices du projet. Généralement, notre expérience à nous, et on peut seulement parler de notre expérience, c'est que, dans tous les cas où on a gagné un projet et qu'on l'a mis en vigueur, en réalisation, dans le cadre d'un PPP, que ce soit un PPP complexe ou non, on a toujours vu des bénéfices nets qui allaient à l'autorité ou au gouvernement qui a accordé la concession. Ça, je n'ai pas d'exemple où ça n'a pas réussi. Simplement, je suppose que c'est... le rendement du privé est basé sur la performance, est axé sur la performance, donc les choix sont limités, les prix sont garantis, donc il y a moins de latitude d'aller au-delà des échéanciers ou de ne pas rencontrer les budgets. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

Mme Jérôme-Forget: D'accord.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Évidemment, on a très peu de temps pour aborder une foule de questions que votre présentation soulève. Je ferai remarquer que les exemples que vous nous citez de vos expériences à l'étranger par exemple, très peu coïncident à la définition que le projet de loi ou en tout cas que la ministre donne des PPP. Vous avez des concessions d'exploitation et de maintenance, vous avez toutes sortes de formules qui sont effectivement des contrats entre vous et un organisme public mais qui ne correspondent pas parfaitement à la définition qui est donnée par la ministre, depuis le début de ces audiences, en fonction de son projet d'agence.

Donc, c'est... je pense qu'on pourrait au moins s'entendre là-dessus, à peu près tous les cas que vous soulevez ou auxquels vous avez participé sont des cas d'espèce ayant souvent de très fortes différences avec d'autres cas. Le cas du métro de Londres est très différent de GO Transit, par exemple, c'est très, très évident. Alors, c'est difficile de faire des règles de fonctionnement et de retrouver le projet de loi n° 61 dans l'ensemble de vos projets. Mais je vais quand même vous poser deux questions et vous laisser tout le temps qu'il faut pour essayer de nous éclairer.

D'abord, vous insistez pour que l'on donne la responsabilité au ministère, et non à l'agence, de la réalisation de ces ententes, de ces partenariats. Je voudrais avoir les raisons vraiment assez complètes pourquoi vous souhaitez cela. Vous avez vu, dans le projet de loi, que c'était l'agence, c'est la lecture que la plupart des lecteurs en font. Donc, vous voulez une agence plus forte que celle qui est prévue, n'est-ce pas, alors que la ministre nous dit que ce sont les ministères. J'aimerais avoir plus de clarté à ce point de vue là.

Mais surtout on nous parle, depuis le début, du partage de risques. Vous ne trouvez pas que vous allez un petit peu loin lorsque vous parlez d'octroyer des subsides d'exploitation, d'octroyer des sommes qui garantissent l'achalandage? Vous demandez d'adopter des allégements fiscaux, vous demandez de financer les études préalables, les devis que vous préparez; il va vous rester quoi, comme risques, si nous acceptions d'aller au devant de vos demandes? À la limite, on parle bien de partage de risques. Quel est le partage de risques lorsqu'on est garanti... Moi, je pense que tout le monde pourrait à la limite faire tous ces travaux s'il avait autant de garanties.

Une dernière question, et, celle-là, peut-être plus compliquée, plus complexe, mais elle traduit bien le fond de ma pensée: Qu'est-ce qu'un PPP fait de plus qu'un contrat clé en main lorsqu'il s'agit de la construction? Je ne parle pas ici d'entretien, de gestion prolongée, là, mais, dans le domaine de la construction, qu'est-ce qu'un PPP donne plus à la société, enfin, au gouvernement, à l'autorité qui le commande, qu'un contrat clé en main où les délais et les coûts sont préfixés?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): ...question, Mme Gagnon va répondre.

Le Président (M. Bertrand): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Hélène V.): Oui. Alors, comme vous avez trois questions, je pense qu'on va se partager les réponses. Alors, M. Simard, écoutez, pour votre première question, je vais me permettre de revenir sur ce que Mme la présidente du Conseil du trésor a dit tout à l'heure. Nous avons compris que, dans le projet de loi, il était prévu que l'agence allait négocier l'entente, donc développer l'expertise au niveau contractuel, et tout ce qu'on a dit, c'est qu'il fallait donner les pouvoirs de négocier qui découlaient de ce mandat de négocier l'entente contractuelle.

Par contre, vous aurez vu que nous mentionnons qu'il faut donner au ministère la gestion du projet une fois que l'entente est négociée, et en cela je rejoins ce que Mme Jérôme-Forget a dit, parce qu'effectivement les ministères sont plus à même d'avoir l'expertise au niveau des différents projets qui vont être négociés de concert avec l'agence, puisque ce n'est pas vrai qu'une agence du type qui est prévu par le projet de loi, c'est-à-dire une agence avec une quinzaine de personnes, va pouvoir devenir des experts à la fois en transport, en santé, et en tout autre sujet qui lui sera confié.

Donc, en cela, je pense que ce que nous proposons est peut-être de préciser cet élément-là qui ne nous semblait pas tout à fait clair, mais ce n'est pas en contradiction, je pense, avec ce que Mme Jérôme-Forget a mentionné tout à l'heure. Deuxième question.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. Spurr.

M. Spurr (William): Oui. Au sujet des partages de risques, et vous demandez: Il reste quoi, comme risques, au privé? Moi, je vais vous donner des exemples, parce que la meilleure façon de répondre à une question, c'est toujours par des exemples vraiment qui sont concrets. Le métro de Londres, avant qu'il soit privatisé, le gouvernement, enfin, britannique investissait considérablement, et la ville investissait considérablement dans le métro. Il y avait des contrats de 300, 400 millions, 500 millions de livres anglaises d'investissement sur plusieurs projets, mais le gouvernement ne voyait jamais la fin des travaux. Les travaux ne finissaient pas. Il y avait toujours besoin de plus d'argent pour compléter les travaux, avec un service envers les usagers qui ne s'améliorait pas du tout avec le temps, alors d'où la décision d'aller en PPP. Mais pourquoi?

n(15 h 50)n

Je vais vous citer un autre exemple où on prend des risques, pour vous dire qu'est-ce que le privé prend comme risques. D'abord, il y a la performance d'exploitation du système avec pénalités. Donc, on a des requis dans notre contrat, le contrat de services que Mme MacDonald nous a décrit, où on doit vivre avec une réalité, chaque jour, d'un certain niveau de service pour pouvoir être payé et rémunéré pour le travail qu'on est en train de faire. Donc, automatiquement, cela met un certain seuil de qualité sur les travaux effectués par le privé.

Deuxièmement, c'est aussi un projet clé en main. Donc, le privé prend la responsabilité fiduciaire pour compléter ce qu'on appelle la responsabilité de compléter les travaux. Et, si jamais le privé ne rencontre pas les échéanciers ou le budget, c'est le privé qui paie la différence, et ce n'est pas le gouvernement qui paie la différence. Alors ça, c'est... Je pense qu'on a beaucoup d'exemples qu'on vit ici et ailleurs où c'est vraiment le cas. Et le privé peut éviter ce cas-là.

Troisièmement, dans plusieurs projets de PPP, le privé aussi met de l'équité ou un investissement dans le projet. Alors, parfois, surtout dans le domaine des transports... Je ne sais pas si vous connaissez bien le domaine des transports. C'est quand même une industrie où l'achalandage ne paie pas nécessairement les revenus nécessaires pour avoir des retours intéressants comme un investissement. Donc, il y a des formules d'ajustement, mais qui forcent le privé à vivre dans une enveloppe bien précise avec toutes les subventions.

Donc, si le privé ne livre pas un certain niveau de service avec une certaine qualité, il perd de la rémunération ou la rémunération est ajustée, premièrement. Deuxièmement, s'ils prennent un certain risque d'achalandage, l'achalandage est... il y a un ajustement de ce côté-là aussi. Donc, en gros, les risques que le privé est en train de prendre dans ces projets est en fait énorme. Et puis il y a les risques, aujourd'hui, qu'on ne voit pas. C'est les risques inhérents dans des projets qui sont... enfin, je ne dirais pas mal gérés nécessairement, mais gérés d'une façon différente qui permet une évolution parfois des travaux d'une façon différente et qui mène à des surcharges et des dépenses extraordinaires qui n'ont pas été prévues dans les budgets.

Alors, dans un cadre de PPP, tout est bien défini, tout est bien encadré dans une enveloppe financière bien déterminée avec des conditions de performance bien déterminées. Et, tant qu'on reste dans cette enveloppe, le risque est vraiment avec le privé. C'est ça.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Richelieu, est-ce que ça va? Est-ce que ça a répondu à vos questions?

M. Simard: Oui, pour l'instant. Nous aurons l'occasion de revenir.

Le Président (M. Bertrand): Il vous reste une minute.

M. Simard: Écoutez, rapidement, une question très simple. J'attends une réponse rapide et peut-être pas de réponse: Quels sont les projets que vous avez en tête? Quels sont ceux que vous souhaiteriez réaliser, au cours des prochaines années, en PPP au Québec?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Bon. Au Québec, en fait il y a deux grands organismes, au Québec, où bien sûr on a un intérêt. D'abord, on peut parler de la STM et, aujourd'hui, le métro de Montréal. En fait, on a lu le mémoire de la STM, et je dois dire qu'on appuie leur position en ce qui a trait au besoin urgent de renouveler le matériel roulant et les autres équipements du métro.

Aujourd'hui, l'âge moyen, je pense, des voitures est de 32 ans. La première génération de voitures date d'à peu près 40 ans. Même si on prend une décision aujourd'hui de renouveler les voitures, on ne les verra pas avant six ans, le temps de faire la conception, la construction, et tout le reste, et d'avoir un appel d'offres.

Donc, aujourd'hui, nous... je pense que c'est assez urgent. De ne pas remédier rapidement à cette situation pourrait avoir un impact sur la qualité de service aux usagers, les coûts d'entretien qui montent graduellement et à la sécurité. Alors, je pense que, dans ce cadre-là, les PPP seraient beaucoup plus applicables pour des extensions du métro, alors quand ça devient un peu plus complexe que simplement l'achat de voitures ou de systèmes de signalisation.

Mais, par contre, par exemple, nous pensons que c'est beaucoup plus propice d'appliquer un PPP, par exemple, dans le cadre des trains de banlieue de Montréal pour plusieurs raisons. D'abord, l'AMT est aujourd'hui victime de son propre succès. Au point de vue achalandage, elle fait face à une grande demande des usagers, d'où le besoin de, par exemple, plus de matériel roulant, plus de nouvelles lignes, par exemple, pour l'AMT. L'entretien, dans l'AMT, est déjà fait par le privé, qui est en l'occurrence CN. Pardon.

Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse. Mme la ministre, il reste 6 min 30 s à votre groupe, et j'ai la députée de Matane aussi...

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, alors, vous comprendrez, bien sûr je vais essayer de prendre le moins de temps possible.

Un des volets ? c'est bien important que chaque... comme vous êtes ici ? un des volets qu'on a souvent mentionné, c'est en particulier par la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen qui souhaitaient justement que l'information, les contrats soient divulgués et que les règles, qui s'appliquent actuellement à toute entente contractuelle entre le privé et le public, soient élargies. Qu'est-ce qui se passe généralement quand vous avez de tels contrats ailleurs dans le monde, pour nous éclairer à cet égard-là, au niveau de l'accès à l'information?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Excusez-moi. Je répondrai d'abord sur la transparence, Mme la ministre. Je pense que, dans tous les projets où on est impliqué, spécifiquement en Grande-Bretagne, en Europe, en Amérique du Nord, MBTA, à Boston, la transparence est la règle numéro un dans tous les cas. L'accès à l'information, surtout aux États-Unis, par exemple «the Sunshine Law», en Californie... et la transparence des processus est toujours appliquée. C'est notre expérience, et ça ne change pas du tout dans le processus. Aujourd'hui, il y a des autorités qui ont des règlements de... par exemple, la STM a certains règlements d'appels d'offres qu'il faut suivre. Aller vers les PPP ne change pas le processus et la transparence; au contraire, ça peut même augmenter la transparence. Je ne sais pas si je réponds à votre question, Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: ...est-ce que ça veut dire, à ce moment-là, que la totalité du contrat devrait être rendue publique?

M. Spurr (William): Il y a certains éléments, je suppose, financiers au contrat peut-être qu'il ne faut pas rendre publics parce que c'est quand même... il faut protéger les sociétés privées, il y a quand même des secrets commerciaux qui sont dans les contrats. Ce qu'on fait généralement aux États-Unis, dans les soumissions, ils nous demandent d'identifier les pages qu'on n'aimerait pas qui soient rendues publiques, et c'est discuté généralement avec l'agence en question, ou l'État, ou le gouvernement en question, et on s'entend sur les pages qui sont de nature purement commerciale et privée... par rapport au privé, qui ne doivent pas être rendues publiques.

Mme Jérôme-Forget: La présidente de la commission de protection du citoyen nous demandait d'avoir... de déposer les plans d'affaires. Est-ce que vous trouvez que cette demande-là priverait les compagnies de soumissionner au Québec?

M. Spurr (William): Les plans d'affaires pour le projet ou...

Mme Jérôme-Forget: Pour le projet.

M. Spurr (William): Oui. Je pense que pour... Le plan d'affaires pour le projet, je pense que ça... même je dirais que ça encouragerait les soumissionnaires à participer dans les projets. Ça leur donnera plus d'informations. Une fois que les propositions sont soumises à l'agence ou au ministère en question, je pense... je maintiens toujours que certains éléments peuvent être négociés et ne pas être, enfin, mis sur un site Web, par exemple. Mais, par contre, on a vécu des exemples aux États-Unis, de par la loi aux États-Unis. Donc, on rentre avec les yeux grands ouverts, on sait ce qui va se passer. En Floride par exemple, notre soumission pour le train rapide entre Tampa et Orlando, c'est sur le site Web. Toute l'information est sur le site Web. Donc, il y a...

Mme Jérôme-Forget: Merci. Je vais laisser ma collègue de Matane poser la...

Le Président (M. Bertrand): Mme la députée de Matane, il vous reste deux minutes.

Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Ma question concerne l'implication... la plus grande implication, que vous revendiquez pour l'agence, notamment à l'égard de la négociation des contrats et de la crédibilité financière.

n(16 heures)n

On entendait précédemment Mme la présidente du Conseil du trésor dire que notre loi s'inspire grandement des lois de la Grande-Bretagne notamment et où l'agence a des pouvoirs plus restreints. Et, comme je sais que vous avez une expérience mondiale, donc vous avez eu à transiger avec des pays qui ont ce type d'agence avec des pouvoirs plus restreints et d'autres, j'imagine, avec des pouvoirs plus étendus, ma question est donc la suivante: Est-ce que, dans le cadre de vos recommandations, vous vous fondez sur de mauvaises expériences vécues dans les pays où les agences ont des pouvoirs moins étendus? Et, si oui, quels ont été ces problèmes? Et, si vous vous fiez non pas sur cela mais sur des pays où l'agence avait des pouvoirs plus étendus, quels ont été les éléments favorables qui vous incitent à nous faire une telle recommandation?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Oui. Enfin, ce qui est important, comme Mme Gagnon a souligné un peu plus tôt, c'est qu'une fois qu'un mandat est donné à une agence ou à un ministère qui est mandaté par l'agence pour un PPP, que ce soit plus ou moins irrévocable, sauf en cas de décision globale politique que ce projet n'aura plus lieu.

Je vous donne un exemple concret, ce qui se passe par exemple en Colombie-Britannique. L'agence qui est responsable du projet de PPP RAVCO, qui s'appelle RAVCO, est une conglomération de plusieurs agences, dont la municipalité... les différentes municipalités de Vancouver. Donc, les 22 municipalités de la grande région de Vancouver ont leur mot à dire à chaque étape, mais, ce qu'ils essaient de faire, c'est de changer le processus et de remettre en question le projet même. Donc, il y a un manque de consensus inhérent dans le processus même, et c'est ça qu'il faut éviter. Il faut, une fois... il faut d'abord établir le consensus, mandater le ministère en question et s'assurer que ce ministère-là a le mandat et le nécessaire pour mener à bien les négociations et le contrat.

Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie beaucoup. Mme la députée de Mirabel, en vous rappelant qu'il reste 5 min 30 s à votre groupe parlementaire.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Messieurs dames, merci pour votre participation à cette commission, d'autant plus qu'en tant que députée de Mirabel je souhaite longue vie à Bombardier chez nous.

Vous mentionnez, à la page 5 de votre mémoire... et vous insistez sur l'importance, pour l'agence et ses filiales, de se bâtir une crédibilité financière et d'obtenir une cote de crédit des grandes agences de crédit internationales. Doit-on comprendre que vous envisagez des projets en PPP où l'agence assurerait une partie du financement?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Oui. Je demanderai à M. Kaija de répondre.

Le Président (M. Bertrand): M. Kaija.

M. Kaija (David): Oui. Dans le cas encore de Vancouver, l'agence responsable, c'est RAVCO, et, dans ce cas-là, RAVCO est responsable des paiements d'exploitation. Or, c'est important pour nos prêteurs que ces paiements d'exploitation reliés avec la performance soient garantis par une agence cotée par les agences de crédit avec une cote, ce qu'on appelle, A ou mieux. Sinon, le coût de financement va être très élevé, et même ça va être difficile de trouver les prêteurs dans le marché. Alors, c'est pour ça que, nous, on trouve que c'est important que l'agence responsable pour s'assurer que ces paiements sont faits ait une certaine cote de crédit de ces agences-là.

Le Président (M. Bertrand): Mme la députée.

Mme Beaudoin: Non. Vas-y.

Le Président (M. Bertrand): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Dans votre Sommaire exécutif, vous indiquez que l'agence devrait être en mesure de confirmer au privé quelles sommes qui ont été budgétisées et allouées. Je comprends que c'est pour savoir si le projet est viable, mais est-ce que vous ne voyez pas, je dirais, un problème pour les deniers publics si, je ne sais pas, un projet qui est... On va en soumissions pour un PPP puis on dit: O.K., on a 100 millions. Il est très probable que les soumissionnaires vont arriver entre 95 millions et 100 millions, ce qui...

Ou je comprends mal, parce que le danger que je vois, c'est que, si l'agence dit: O.K., on a un montant, c'est que les soumissions vont arriver près de ce montant-là. Peut-être qu'il n'y aura pas d'économie pour les citoyens.

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Compte tenu des investissements nécessaires du côté privé pour soumissionner même, dépendamment de la lourdeur du processus, etc., et, du côté de, enfin, la transparence doit être une double voie dans les deux directions. Donc, pour attirer les soumissionnaires, il faut vraiment qu'il y ait un contexte financier faisable, c'est-à-dire une étude de faisabilité, avec des contextes, une enveloppe financière.

Une fois qu'on est en train de compétitionner contre d'autres compétiteurs, on est contre la compétition, on n'est pas là à se compétitionner contre le budget qui a été alloué. Je peux vous citer des cas très clairs, enfin, aux États-Unis, où on a soumissionné, où, dans chaque cas, l'autorité en question a toujours publié ses budgets, et parfois tous les soumissionnaires étaient ou en dessus du budget ou vraiment en dessous du budget; c'est rare qu'on tombe exactement sur le budget. Parfois, les budgets sont sous-estimés, parfois les budgets sont surestimés ou parfois ils ne réalisent pas l'importance de la compétition dans une situation.

L'important, c'est avoir de la compétition et de la transparence, et puis c'est tout. Les budgets, c'est pour informer le monde que ce projet est réalisable, et ce n'est pas une partie pour aller à la pêche de pourboires, comme on dit.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le député de Richelieu, en une minute, question et réponse.

M. Simard: Oui. Je reviens à votre réponse de tout à l'heure à ma question: Quels projets vous intéressent? Et vous avez très rapidement misé, enfin, visé le projet du renouvellement des... pas des infrastructures mais du matériel roulant pour le métro de Montréal.

Dans votre esprit, ce que vous visez et ce que vous trouvez dans ce projet de loi, c'est la possibilité non seulement de vendre du matériel que vous produisez, mais également, si j'ai bien compris, un contrat de gestion et d'entretien, c'est-à-dire un projet à long terme en PPP. Est-ce que j'ai bien compris?

Le Président (M. Bertrand): M. Spurr.

M. Spurr (William): Non. Non, j'ai dit le contraire, monsieur. J'ai spécifié que, dans le cas de la STM, à cause de la priorité du projet et de la criticalité de la situation, ce n'est peut-être pas le bon projet à mettre en PPP et qu'au contraire il faut appliquer le PPP pour des extensions futures du métro où, par exemple, il y aurait le besoin de construire un prolongement du métro, une nouvelle ligne de métro qui inclurait le matériel roulant, tous les systèmes, etc. Alors, ce serait une enveloppe beaucoup plus complexe que ce qu'on parle aujourd'hui pour remplacer du matériel roulant, et c'est tout ce que je disais. Je parlais plutôt de l'AMT, où c'est beaucoup plus facile de réaliser en fait un PPP dans ce cadre-là qui permettra à l'AMT de rencontrer les besoins futurs de l'AMT au point de vue achalandage nouvelle ligne sur une période déterminée de 10 à 20 ans.

Le Président (M. Bertrand): Mme MacDonald, Mme Gagnon, M. Spurr et M. Kaija, merci beaucoup. Et je demande aux représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante de se préparer.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 8)

 

(Reprise à 16 h 11)

Le Président (M. Bertrand): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons maintenant... nous recevons maintenant les représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. M. Fahey, je vous demande de présenter la personne qui vous accompagne, et vous pouvez débuter votre présentation de 20 minutes.

Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, Québec (FCEI-Québec)

M. Fahey (Richard): Merci, M. le Président. Je suis accompagné d'André Lavoie, qui est notre analyste principal de politiques à la fédération.

Écoutez, d'abord, merci pour cette opportunité qui nous est donnée de parler de PPP. On s'entend que les PME que nous représentons ne seront pas les principaux récipiendaires de ces contrats-là mais qui fort probablement vont faire partie des consortiums qui éventuellement, éventuellement pourraient être créés au lendemain de la réalisation d'un projet de partenariat public-privé. Pour nous, on va l'analyser, ce projet de loi de création de l'agence, sous trois aspects.

Premier élément. À titre d'éventuel contractant ou de sous-traitant de grandes entreprises qui pouvaient se voir octroyer de pareils contrats, on se rappellera que 71,5 % des entreprises, des PME, n'auraient pu voir le jour sans la réalisation d'un contrat de sous-traitance et que, dans 96 % des cas, dans 96 % des contrats de sous-traitance qui ont été octroyés, les entreprises ont maintenu, voire augmenté le nombre d'emplois qu'elles détenaient préalablement à ces contrats.

Mais ce n'est pas juste à ce titre d'éventuels bénéficiaires d'un contrat de PPP que les PME s'intéressent au débat. Elles s'intéressent d'abord et avant tout au débat d'un point de vue fiscal. On s'explique. On le sait, les Québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord, et de surcroît le régime de taxation actuel désavantage les PME par rapport à leurs homologues canadiens et canadiennes.

La modernisation, pour nous, de l'État québécois, ce n'est pas un dérapage aveugle à la sauce idéologique. Moderniser l'État québécois, c'est s'assurer que son gouvernement poursuit la mise en oeuvre de ses missions essentielles de la manière la plus efficace et efficiente possible. Les besoins en infrastructures sont énormes, on s'entend là-dessus, et la capacité fiscale ou la capacité financière pour réaliser ces projets-là sont pour le moins limitées.

Quelques rappels. Juste pour donner l'ampleur de la problématique, on va parler de la dette. La dette totale, en 2003-2004, s'élevait à 115 milliards de dollars, en hausse de 16,7 % par rapport à 1997-1998. C'est au chapitre des immobilisations que la hausse est la plus faramineuse, et c'est là qu'on veut mettre l'emphase: 1998-1999, les immobilisations représentaient 8 % de la croissance annuelle du compte de la dette, essentiellement attribuable au réseau routier, ce qui correspondait à des déboursés nets de 217 millions de dollars pour l'année, encore, 1998-1999.

Cette proportion a gonflé rapidement par la suite, atteignant jusqu'à 43 % en 2001-2002, soit des immobilisations, pour cette année-là, de 1 milliard de dollars. En 2002-2003, on constate une nouvelle augmentation de près de 50 % du compte des dépenses d'immobilisations qui monte, à ce moment-là, à 1,5 milliard de dollars transférés au compte de la dette, soit 35 % de sa croissance annuelle totale. On espère qu'en 2003-2004 le gouvernement va réaliser la réduction anticipée de 50 % des dépenses d'immobilisations et une réduction à 29 % de la responsabilité de ce secteur-là dans la croissance de la dette.

Mais la dette, c'est beau, c'est une problématique: vieillissement de la population oblige, il va falloir qu'on s'y attaque un jour, mais ça a des conséquences fiscales annuelles. Il n'y a pas grand monde qui savent qu'au 1er avril 44 % du budget du ministère des Transports disparaît en capital et intérêts, Ça, c'est la moitié du budget qui ne sert pas à s'occuper de nos routes, à repaver des bouts de la 20 qui sont raboteux, pour dire le moins. Le même phénomène grève 37 % du budget des Affaires municipales et du Loisir. Ces données-là sont tirées des documents budgétaires que le ministre des Finances dépose annuellement.

Donc, on a un problème de dette, on a un problème de finances publiques courantes aussi, parce qu'il y a beaucoup d'argent qui s'en va en capital et intérêts, et on a des citoyens qui s'attendent et qui veulent de meilleurs services publics mais qui sont limités par les ressources disponibles. Donc, on s'attend, et ils s'attendent, à ce que leur gouvernement demeure à l'avant-garde en matière des mécanismes de livraison efficace des services.

Pour nous, les PPP, pour réaliser des projets d'immobilisations, permettraient de libérer certains fonds publics afin de les consacrer à d'autres priorités, dans le sens que, si le partenaire privé assume le financement du projet sur une période, bien, c'est plus facile à financer, étant donné que ce n'est pas dans les livres gouvernementaux.

Le PPP permettrait un partage de risques avec l'entreprise privée qui se verrait rémunérée en fonction de la performance dans l'ouvrage effectué. Pour nous, l'adoption d'une politique-cadre constitue l'expression du gouvernement qui tente de trouver des solutions à une problématique de sous-investissement dans ses infrastructures, dans un contexte de contraintes financières importantes.

Les PPP, il s'en fait partout dans le monde, il pourrait s'en faire plus au Québec, et là-dessus je laisserais la parole à André Lavoie qui va vous entretenir de deux aspects qui, pour nous, sont essentiels. On a essayé de regarder, dans la littérature puis dans les expériences étrangères, c'est quoi, les critères ou les éléments qui vont garantir le succès d'un PPP.

Le Président (M. Bertrand): M. Lavoie. Excusez, est-ce que vous aviez fini?

M. Fahey (Richard): Oui. J'allais dire simplement: Ensuite, on pourra passer aux améliorations qu'on vous suggérerait au projet de loi n° 61. Merci.

Le Président (M. Bertrand): M. Lavoie, il vous reste 13 minutes.

M. Lavoie (André): Oui. Merci, M. le Président. Alors, effectivement, nous avons voulu, dans le mémoire, de façon très succincte, reprendre un certain nombre d'expériences de partenariats public-privé qui, d'une part, ont fonctionné à travers le monde mais, d'autre part, n'ont pas nécessairement fonctionné non plus. Et on ne prétend pas, ici, que les PPP sont la panacée à tous les maux, et c'est pour ça que nous croyons important...

Il y avait un article de deux professeurs de l'Université de Montréal, qui étaient M. Benoit Aubert et M. Michel Patry, que nous avons trouvé quand même assez intéressant. Certains des principes qu'on retrouvait dans cet article-là se retrouvaient, d'une part, dans la politique gouvernementale sur les partenariats public-privé et, à certains égards, ne l'étaient pas, d'où justement les recommandations que nous faisons ici, aujourd'hui.

Donc, oui, effectivement, Richard... M. Fahey me pointe également: ces principes-là, on les retrouve également au niveau de l'OCDE. Vous avez en référence, là, à la page 10, en référence 14, l'ouvrage de l'OCDE dans lequel on les retrouvait.

La première chose, c'était une question de partage équitable des gains, donc l'importance pour le gouvernement de se concentrer sur sa mission de base. Comme on l'a indiqué tout à l'heure, de gouverner et de gérer... plutôt que de gérer une gamme assez extraordinaire d'activités, un appui inconditionnel de la part des dirigeants en politique, et, en ce sens-là, il est important que les gens... qu'il y ait une éducation qui soit faite au niveau de la population pour bien faire comprendre vers où le gouvernement s'en va. Vous allez voir tout à l'heure qu'on insiste sur la question de la transparence non seulement au niveau de l'agence, mais au niveau de tout le processus, de tout le mécanisme pour que la population soit bien renseignée et voie bien vers où le gouvernement s'en va lorsqu'il prend l'avenue des PPP.

La protection des droits des travailleurs. Nous allons invoquer tout à l'heure la question justement de la période pendant laquelle les conventions collectives devraient être respectées, j'y viendrai tout à l'heure. Mais, juste pour vous souligner que, justement dans l'article de MM. Aubert et Patry, il est intéressant de voir qu'effectivement ils disaient qu'il est très important de respecter la prise en charge des employés de l'État qui seraient affectés, par exemple, à des intérêts privés mais pour une période de temps qui soit déterminée.

n(16 h 20)n

Les ressources humaines de qualité. Donc l'importance justement, de ce point de vue là, dans l'introduction des PPP, qu'on modifie considérablement le rôle de l'État et des administrations publiques, comme on le disait tout à l'heure, une définition précise des objectifs visés et évidemment une sélection rigoureuse des partenaires, d'où l'importance... et là j'y viens, à la question de la transparence et de l'imputabilité.

On ne saurait assez insister sur le fait... On confie, là, dans le projet de loi n° 61, ni plus ni moins qu'à l'agence un rôle de centre de veille, de vigie sur les expériences de PPP. On voit l'agence comme un centre de connaissances, d'expertises qui pourrait informer sur les bons comme les mauvais projets de PPP et mieux conseiller le gouvernement de ses choix. Mais on ne saurait trop insister sur l'importance d'une indépendance décisionnelle du conseil d'administration par rapport au gouvernement. Vous allez voir que nous faisons une recommandation dans ce sens-là, et j'y reviendrai tout à l'heure.

À cet égard, l'obligation qui est faite de soumettre à l'analyse de l'agence les projets d'immobilisations garantis constitue selon nous une garantie afin que le seul guide décisionnel soit l'intérêt du contribuable. D'ailleurs, là-dessus, je vous réfère au projet ontarien sur les partenaires public-privé où justement on retrouvait peut-être plus à certains égards que ce qu'on retrouve dans le projet de loi actuel ou même dans la politique gouvernementale, et je le dis très respectueusement, mais justement cette importance-là que toutes les décisions soient prises justement dans l'intérêt ultime du contribuable.

Afin de constituer un pare-feu, il importe à notre avis que le président du conseil d'administration soit distinct du directeur général. Et, à ce moment-là, on va recommander certaines modifications effectivement pour faire en sorte qu'il y ait transparence. Et, de la même manière, actuellement, au niveau du projet de loi, on ne retrouve aucune spécification sur la provenance, l'origine des huit membres du conseil d'administration de l'agence qui vont être nommés par le gouvernement. Et nous croyons qu'il devrait y avoir une modification, en ce sens-là, au niveau du projet de loi, pour assurer la plus grande transparence possible.

Le processus de nomination doit être non seulement transparent, mais on doit s'assurer que les gens qui siégeront, soit sur le conseil d'administration de l'agence ou soit sur les comités d'experts que l'agence va s'adjoindre, aient la plus grande compétence dans tous les domaines. Et là vous disiez, tout à l'heure, Mme la ministre, que la compétence se retrouvait au niveau des ministères. C'est exact, mais nous croyons également que c'est important qu'il y ait une compétence d'un point de vue légal, d'un point de vue financier, d'un point de vue d'ingénierie parce que ça va impliquer des connaissances scientifiques également. Donc, on ne saurait trop insister là-dessus.

Je reviens encore à la question, pour terminer dans la question de transparence, de la reddition de comptes. Si on veut que le public ait confiance dans les processus de partenariats public-privé, on croit que c'est important qu'il y ait une reddition de comptes, que l'agence ait une reddition de comptes au niveau de l'Assemblée nationale, donc que ce soit supervisé par la Commission des finances publiques annuellement et que les dirigeants de l'agence soient soumis au questionnement des députés en ce sens-là.

Je vais faire ça rapidement. Je vais peut-être passer à la question de la gestion efficace du risque au bénéfice du contribuable. Et là-dessus je vous amène à la page 14 de notre mémoire où on disait que la politique-cadre cherche à obtenir un partage optimal des risques et que l'analyse de faisabilité par l'agence permet certes d'identifier les projets justifiant le recours aux PPP, mais il importe toutefois que son mandat soit intégré.

Qu'est-ce qu'on veut dire par là? C'est-à-dire que, une fois que l'analyse est complétée et que la recommandation de procéder par PPP est entérinée, il nous apparaît que... Il y avait des questionnements, tout à l'heure, chez Bombardier, lors de la présentation de Bombardier, sur la question des appels d'offres par M. le député, et nous croyons que l'agence devrait les gérer, les appels d'offres, et structurer les projets en partenariats en collaboration et avec le secteur privé et avec les ministères concernés.

Un mot rapide sur la question du traitement équitable des employés concernés. Et là-dessus, bon, évidemment, nous avons... Vous avez tous eu une position, lors de la commission parlementaire, sur le projet de loi n° 31 sur la question de la sous-traitance. La position de la FCEI était à l'effet qu'il était important qu'on ait, pour des petites entreprises qui pourraient être impliquées éventuellement dans des consortiums, une réalité qui soit gérable au niveau des travaux qui seront réalisés pour accomplir justement l'objet ultime de ces partenariats-là, qui est ni plus ni moins la construction d'un hôpital, la construction d'une route, etc.

Donc, ce que nous disions, c'est qu'il est important, oui, que les droits des travailleurs soient respectés, mais qu'on comprenne également qu'ultimement ce sont des petits entrepreneurs qui vont venir effectivement à avoir, au sein de leurs entreprises, des gens qui vont travailler, et ils ne sauraient, par exemple, nécessairement être capables de supporter le coût de conventions collectives qui soient transférées de façon ultime et pendant toute la durée d'un partenariat.

Je vous souligne là-dessus qu'on a posé la question à nos membres tout récemment sur... s'il appartenait au gouvernement de fixer les salaires versés aux employeurs du secteur privé qui travaillent dans le cadre de marchés publics, et 63 % de nos membres n'étaient pas de cet avis-là. Ils jugeaient que les salaires prescrits devraient correspondre aux salaires versés dans... qui correspondent aux salaires versés dans les grandes entreprises, et les entreprises syndiquées ne correspondent pas nécessairement à leur réalité et qu'on doit tenir compte de ça évidemment si on parle de faire des économies d'échelle en bout de ligne.

Donc, pour qu'une saine concurrence s'établisse entre les ressources internes de l'organisation et les sous-traitants externes et qu'un suivi serré des réductions des coûts et des gains d'efficacité s'opèrent, il importe que tous bénéficient d'un traitement équitable qui soit basé sur les lois du marché. Le Québec doit offrir un environnement d'affaires ainsi qu'un bassin de ressources humaines qualifiées mais rémunérées de manière compétitive par rapport aux systèmes de rémunération offerts dans les systèmes publics.

Vous vous rappellerez peut-être que, dans le débat justement sur le Code du travail, nous avions proposé une approche qui était non dogmatique, qui était la question de l'introduction d'une clause qui consisterait ni plus ni moins qu'à l'instauration de ce qu'on appelle le «Compulsory Competitive Tendering», d'origine britannique, à la fonction publique québécoise, c'est-à-dire...

Je vois M. Simard sourire, et je sens qu'on va avoir un débat là-dessus. Mais nous croyons fermement que notre approche repose justement sur la capacité des partenaires potentiels, tant du secteur public que du secteur privé, d'être capables de s'arrimer en bout de ligne pour faire en sorte justement qu'on ait la réalité la plus tangible possible dans la réalisation des partenariats. Alors, je vais laisser peut-être M. Fahey conclure.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Lavoie. M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Oui. Merci, M. le Président. En fait, peut-être... On s'est attardés dans notre analyse sur les missions, le pouvoir de... la mission et les pouvoirs de l'Agence des partenariats public-privé. Pour nous, il est très clair que cette agence devrait être augmentée, renforcée, avoir plus de pouvoirs et avoir un caractère indépendant, et là-dessus on s'explique.

L'agence a un mandat de faire une analyse de faisabilité. Elle fait l'analyse, elle recommande aux ministères concernés: Oui, nous devrions procéder à un hôpital en partenariat public-privé. À partir de ce moment-là, il y a décision du Conseil des ministres ? pour nous, dans notre philosophie ? décision du Conseil des ministres qui dit: On construit un hôpital de 800 millions de dollars, avec 122 chambres, 12 machines tomographiques et toutes les spécifications qu'ils peuvent avoir développées au ministère de la Santé, et voilà là le mandat qui est donné à l'agence. L'agence a un cahier de charges, a une enveloppe budgétaire que le gouvernement est prêt à mettre dans le projet, et l'agence, avec ce mandat-là, se retourne, lance les appels d'offres, négocie les contrats avec le secteur privé, de manière indépendante. La décision gouvernementale a été prise, c'est 800 millions avec x nombre de spécificités.

n(16 h 30)n

À partir de ce moment-là... Et c'est là pourquoi on veut supplémenter, ajouter des pouvoirs et aussi du personnel expert à l'agence. C'est que structurer des PPP, c'est complexe, ça prend des expertises ? André y faisait référence ? en architecture financière, en ingénierie de financement, des avocats, et ainsi de suite, et c'est des négociations intenses. Et on croit, et je pense que, sur la base d'un mandat clair donné par un ministère ou le Conseil des ministres, que l'agence est la mieux placée pour être l'interface avec le partenaire privé et que, sur cette base-là, elle octroie les contrats suite à l'appel d'offres et, à ce moment-là, fait le suivi de l'exécution de la prestation confiée au partenaire privé et vient présenter, annuellement, à la Commission des finances publiques, son administration.

Donc, pour la FCEI, cette agence doit être indépendante, efficace et avoir comme seul phare l'intérêt du contribuable, le bien commun. Pour nous, faire des PPP pour faire des PPP, ce n'est pas utile. Faire des PPP pour multiplier les projets d'investissements, pour augmenter l'investissement privé, diminuer la pression sur les finances publiques, améliorer nos infrastructures, voilà ce qu'il faut viser par les PPP. Le contribuable qui a un bon service à un coût moindre en sortira simplement gagnant. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Fahey. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, M. Fahey, M. Lavoie, bienvenue. Merci de votre mémoire, et ça va être très intéressant d'avoir la discussion qui va suivre parce que vous apportez des volets, des volets qui vont à bien des égards à l'encontre de ce qu'on a entendu précédemment.

Maintenant, j'aimerais simplement soulever avec vous une question, en particulier au niveau de l'agence et de ses pouvoirs. Vous avez fait référence à BC Partnerships. Vous savez que BC Partnerships peut faire... peut avoir des clients du public et du privé. L'agence, quant à nous, doit servir exclusivement le gouvernement, et donc son client, c'est le citoyen exclusivement, contrairement à BC Partnerships qui... cette agence peut... parce qu'elle peut vendre ses services à l'entreprise privée. Alors, voilà une différence importante quand même avec BC Partnerships et l'agence que nous comptons mettre en place.

Maintenant, vous dites que l'agence devrait avoir plus de pouvoirs parce qu'elle va devoir prendre des décisions au niveau contractuel, notamment au niveau de l'expertise, l'ingénierie et le financement. En Angleterre, ce qu'ils ont noté, c'est que l'agence UK Partnerships a développé l'expertise au niveau contractuel, mais qu'il n'en demeure pas moins que la responsabilité doit revenir aux ministères, et certains ministères sont plus habiles que d'autres dans l'élaboration des contrats et dans le fond le suivi des contrats.

À titre d'exemple, le ministère de la Santé a développé une très grande expertise en Angleterre, mais ils ne veulent absolument pas, en Angleterre, que ce soit l'agence qui gère tout. Ils veulent au contraire que le ministère de la Santé soit responsable de surveiller dans le fond le contrat, en compagnie de l'agence UK Partnerships, mais il y a quand même un lien ombilical entre les deux, et il est très important que les ministères demeurent imputables. Alors, peut-être, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ça, parce que ça va un peu à l'encontre de ce que vous nous proposez.

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Je pourrais vous dire oui et non: oui à première vue, non plus fondamentalement, parce que pour nous, l'agence, une fois qu'elle a fait la détermination que ce projet d'immobilisations important peut ou il serait souhaitable que ça se réalise en PPP, à ce moment-là... Et c'est là peut-être le... Je me suis mal expliqué. C'est qu'à ce moment-là le ministère décide: Oui, nous allons réaliser cet hôpital-là en partenariat public-privé.

Pour nous, avant de lancer des appels d'offres, l'agence retourne avec le ministère et conclut ce qui pourrait être un contrat essentiellement, à savoir, le ministère dit: Voici le cahier de charges pour mon hôpital, et, moi, en tant que ministre de la Santé, j'ai 800 millions à mettre pour ce projet-là, pas plus, pas moins; voici ce que je suis prêt à mettre là-dedans.

À partir de ce moment-là, l'agence devient l'interface avec le privé. Et, je suis d'accord avec vous, on ne suggère pas de répliquer complètement BC Partnerships. Pour moi, l'agence est une agence gouvernementale dont le seul phare, et je l'ai dit en présentation, c'est l'intérêt du contribuable. Donc, que ce soit une bête publique, j'en suis à 100 %.

Donc, revenons à notre exemple. On a notre cahier de charges, on a notre enveloppe, on négocie avec le privé, et pour le privé il y a un seul interlocuteur, c'est l'agence. Ça ne veut pas dire que l'agence ne parle plus jamais au ministère de la Santé, que le personnel du ministère de la Santé n'accompagne pas les gens de l'agence, mais, pour l'interlocuteur privé, son contact, c'est l'agence parce que c'est avec lui qu'il a signé le contrat et c'est avec lui qu'il va réaliser le projet en vertu des conditions qu'il y a au contrat.

Ce qu'on veut éviter, c'est que l'agence fasse une recommandation, que le ministère dise: D'accord, on va de l'avant, que l'agence signe le contrat et que les choses se passent au-dessus de la tête de l'agence ? alors que c'est elle qui est signataire du contrat ? et se passent avec le ministère. Donc, il y a deux portes où ils peuvent cogner, et, comme on sait, des grands projets, comment les coûts peuvent exploser, comment des horreurs comme on peut constater à Laval ou à la Gaspésia, ou ainsi de suite, ces projets-là, les dépassements de coûts sont hors contrôle et, en définitive, c'est le contribuable qui doit payer, quand ce n'est pas les petits entrepreneurs de la Gaspésia.

Donc, dans notre conception à nous, il y a un contrat et un seul interlocuteur, un seul signataire de ce contrat-là, et c'est l'agence avec le partenaire privé. Ça n'exclut pas la relation avec le personnel, comme vous dites, experts compétents des ministères, mais, pour le partenaire privé, il y a un seul interlocuteur en fonction de notre conception.

M. Lavoie (André): Et... si vous me permettez...

Le Président (M. Paquet): M. Lavoie.

M. Lavoie (André): Si vous me permettez d'ajouter, Mme la Présidente... Mme la ministre, je vous dirais, je vous dirais également que dans le fond ça correspond peut-être un petit peu à ce que Bombardier est venue vous dire auparavant, c'est-à-dire que nous voyons... Peut-être que ce qui est venu confondre, c'est la terminologie d'«agence privée» que nous avons utilisée dans notre mémoire. Et je ne crois pas que nous voulions faire allusion à une agence privée au sens de BC Partnerships nécessairement. Nous citions l'exemple de BC Partnerships, mais ce que nous signifions, c'est que, même si c'est une bête publique, cette agence-là doit jouir d'une indépendance et ne pas répondre nécessairement à l'exécutif mais répondre véritablement à l'ensemble des élus de l'Assemblée nationale, d'où notre recommandation justement de venir répondre à la Commission des finances publiques et de voir son action contrôlée par la Commission des finances publiques.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Je voulais également revenir sur un autre volet, le conseil d'administration. Vous souhaitez qu'il y ait une division entre le président puis le président-directeur général et que cette agence ait un haut niveau d'autonomie, se rapporte à l'Assemblée nationale pour répondre de ses agissements, etc.

Au niveau du processus de nomination au niveau du conseil d'administration, au niveau de BC Partnerships, les membres du conseil d'administration sont nommés par le gouvernement. Est-ce que vous avez... outre le fait que vous souhaitiez avoir des gens avec beaucoup d'expertise pointue ? vous avez mentionné des gens spécifiquement, des gens avec des connaissances en ingénierie, etc. ? est-ce qu'il y a d'autres volets que vous voulez soulever au niveau du conseil d'administration?

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Pour nous, il est clair que le conseil d'administration de l'agence va devoir être nommé par le gouvernement. Pour nous, c'est clair, le gouvernement a cette prérogative de nommer les administrateurs.

De la même façon, lors des rencontres du conseil d'administration de l'agence, il y a fort à parier, comme ça existe dans les autres sociétés d'État ou agences gouvernementales, que le sous-ministre du ministère concerné puisse siéger, sans droit de vote, pour alimenter en quelque sorte les discussions. Pour nous, ça, c'est du fonctionnement normal, et on n'a pas de... comment vous dire, on ne recommande pas que l'agence ou le conseil d'administration soit nommé, par exemple, par l'Assemblée nationale. Ce n'est pas ça, je pense que le gouvernement a cette prérogative de nommer les membres du conseil d'administration.

n(16 h 40)n

Par ailleurs, ce qu'on veut souligner, c'est qu'une fois que ces gens-là sont nommés, et c'est des gens dont l'expertise, la probité, ainsi de suite, sont reconnues, une fois que ces gens-là sont nommés, ce qu'on souhaite, c'est que ce conseil d'administration là soit indépendant, qu'il y ait le moins possible d'ingérence ou d'influence des différents ministères au-delà de l'analyse d'un dossier donné qui relève de ce ministère parce que pour nous on croit... et c'est la clé de démystifier en quelque sorte les partenariats public-privé au Québec.

Au Québec, c'est, comme tu sais, c'est presque le démon, puis pour nous au contraire, c'est une façon de faire des choses qui est différente, qui s'applique à certains investissements plus qu'à d'autres, et pour nous je pense que le gouvernement doit poursuivre dans cette voie-là mais doit le faire de façon responsable et reconnaître l'indépendance de cette agence-là qui va être à ce moment-là composée de personnel compétent, expert et qui va avoir comme phare encore une fois l'intérêt du contribuable.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Richelieu.

M. Simard: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Fahey, M. Lavoie. Vous avez d'entrée de jeu, M. Fahey, situé votre appui aux PPP et à la loi n° 61 sur la base de l'endettement de l'État, des finances publiques et de la solution pratiquement miraculeuse qu'apportent les PPP aux problèmes de financement des infrastructures au Québec.

Dois-je vous rappeler d'abord que les dépenses qu'il y a eu dans les dernières années ont été traitées par tout le monde, y compris par la ministre, comme insuffisantes? Dois-je vous rappeler qu'il y a même des organismes qui demandent au gouvernement, aux différents niveaux de gouvernement, d'investir 15 milliards en infrastructures simplement au niveau municipal au Québec au cours des 10 prochaines années? Dois-je vous rappeler que les besoins en infrastructures vont rester considérables?

Vous allez m'expliquer comment le financement par un autre mode que le mode classique, qui passe par l'emprunt gouvernemental, va apporter un allégement pour le contribuable dont vous dites être le représentant aujourd'hui. En quoi le fait que ? et je vous cite, là: Ça va être plus facile, étant donné que ce ne sera pas dans les livres... Bel exemple de transparence: ce ne serait pas dans les livres.

Actuellement, c'est dans les livres, c'est clair que ça apparaît, chaque année, dans les livres du gouvernement, l'endettement du gouvernement. Et effectivement aucune obligation dans la loi... et les méthodes comptables là-dessus sont extrêmement, sont extrêmement complexes à saisir. Mais est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver, au lieu d'avoir une dette subventionnée classique, connue, remboursée comme vous remboursez votre hypothèque pour votre magasin ou votre maison, avec, chaque année, des obligations pour chacun des ministères extrêmement élevées, la carte de crédit, sans avoir la possibilité d'avoir un portrait clair? Lorsque vous empruntez avec un PPP, non seulement vous empruntez pour la réalisation, mais en plus, souvent, pour la gestion pendant x... 10, 15, 20 ans. Où les citoyens, les contribuables vont-ils voir clairement quels sont leurs engagements? Où est-ce que la somme de ces engagements va apparaître? Est-ce que vous tenez vraiment à votre formule: C'est plus facile, étant donné que ce n'est pas dans les livres?

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Merci, M. le Président. Premièrement, la solution miraculeuse... Pour nous, les PPP, ce n'est pas un remède universel à tous les maux de la terre. Ça s'applique dans des contextes très précis de très grandes immobilisations. Les besoins en infrastructures, on les partage. Les aqueducs et les systèmes d'égout, particulièrement à Montréal, sont défaillants.

Maintenant, je vais vous poser une question: Croyez-vous que le gouvernement, à ce moment-ci, a les capacités de répondre à ces besoins-là, compte tenu de sa marge de manoeuvre financière? La réponse ? bien, en tout cas, celle que mes membres pensent dans le cadre des sondages ? la réponse, c'est non, parce que le fardeau fiscal fait juste augmenter, le fardeau de la dette fait juste augmenter. On pense que la dette va disparaître comme ça. Mais, aujourd'hui, si le gouvernement nous refilait la facture de sa dette actuellement, chaque contribuable au Québec aurait 30 000 $ de dette qu'il devrait commencer à repayer, puis ça, c'est en plus de son hypothèque, sa carte de crédit, et ainsi de suite.

Mais, à un moment donné, il faut qu'on réalise que le gouvernement n'a plus les moyens de réaliser de tels projets. Et là je pense que c'est une constatation qu'il va falloir faire, à un moment donné, au Québec, que notre dette est hors contrôle, et il faut la gérer. Ça, c'est le premier constat.

Le deuxième élément. Pour nous, ce qui est important, c'est qu'il y ait transparence dans le processus. Et c'est pour ça qu'on dit, M. le député, qu'à chaque année l'agence doit venir ici faire rapport de ses projets réalisés en PPP. Et donc pour nous, si le gouvernement doit aller en PPP, c'est tout simplement parce qu'il n'a plus les moyens de financer les immobilisations qui sont... ou les besoins en immobilisations qui existent. Et c'est là, à un moment donné, qu'il va falloir profiter de la capacité d'emprunt du privé, de la capacité de réalisation des projets, et ça, c'est inévitable, à notre avis.

M. Simard: Enfin, moi, je...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: ...M. le Président, non seulement je n'ai pas été convaincu par la réponse, mais elle me confirme qu'il s'agit d'une réponse et d'un point de vue qui est pour le moins teinté idéologiquement et qui ne regarde pas la réalité.

Si... est-ce que... Je repose la question différemment: Est-ce qu'en créant 15, 20, 25 milliards d'obligations pour les citoyens du Québec par exemple par PPP, au cours des 10 prochaines années, nous nous retrouverions dans une situation d'endettement moindre que simplement de gérer la dette telle qu'elle existe actuellement? En quoi on s'est avancés en créant des obligations qui n'apparaissent pas effectivement à la dette du Québec mais dont vous admettrez, comme nous tous ici, qu'il va bien falloir la rembourser?

Les contrats de PPP, là, ça, c'est... Il n'y a rien de gratuit là-dedans. En plus, les taux d'intérêt payés par l'entreprise privée sont, dans tous les cas, supérieurs aux taux d'intérêt payés par l'État, auxquels il faut ajouter les bénéfices et les profits tout à fait normaux que les entreprises voudront retirer de leur participation au financement.

Alors, expliquez-moi comment le contribuable et le citoyen, là, peu importe la structure d'État, là, si ça apparaît à un livre plutôt qu'à un autre, en quoi le citoyen, au niveau du financement, va se retrouver tout à coup délié de ses obligations et l'État, de son endettement, du simple fait que la dette vient d'un contrat avec des particuliers plutôt que d'un endettement classique normal?

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Bien, c'est parce qu'il y a une partie de l'équation qu'on manque. C'est que, si on va en PPP, c'est parce qu'on pense contrats signés en bonne et due forme en conséquence avec des objectifs de réalisation, des objectifs de résultat et que, là, on pense que le privé ou le partenaire privé avec lequel on va entrer dans ce contrat-là va être plus efficace, il va livrer un service à moindre coût.

Nous, si le gouvernement signe des contrats qui coûtent plus cher par rapport à une fourniture gouvernementale, bien, on sera ici pour le dénoncer. Mais le gouvernement, en ce moment, n'a pas les moyens de le réaliser, et, deuxièmement, l'analyse que l'agence va faire, ça va être... Quand on dit analyse de faisabilité, l'agence va analyser s'il est plus opportun de le faire en PPP que de le faire avec le ministère. Lorsque l'agence aura fait cette détermination-là, c'est parce qu'elle sera convaincue qu'il y a des gains d'efficacité, que le contribuable va y trouver son compte, va être plus avantagé de réaliser ce projet-là dans le cadre d'un partenariat public-privé. Et je pense que c'est ça, le mandat de l'agence.

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Simard: Donc, je conclus, en terminant, que ce n'est pas le financement qui vous préoccupe. Vous pensez que la gestion sera plus efficace par le privé que par le public, et ce n'est pas pour diminuer l'endettement des Québécois, mais c'est pour obtenir une meilleure gestion des engagements financiers du gouvernement.

Vous avez, dès le début de votre mémoire...

M. Fahey (Richard): Pas sûr, pas sûr que c'est ce que j'ai dit, mais, en tout cas.

M. Simard: Vous avez...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Vous avez insisté sur cet aspect du financement, mais j'aimerais vous ramener à un autre aspect. Vous parlez de la nécessité d'assurer la plus grande transparence possible des opérations entourant les partenariats public-privé. Transparence, reddition de comptes aussi, vous en avez parlé. Comment voyez-vous cette transparence et cette reddition de comptes si elle doit, d'abord et avant tout, passer par une information, la capacité d'avoir accès à l'information?

n(16 h 50)n

On a eu la Commission d'accès à l'information qui est venue nous dire que manifestement il n'y avait pas de provisions suffisantes dans cette loi pour faire face aux nouvelles réalités que créeraient les PPP, c'est-à-dire la connaissance par les citoyens de la réalité des contrats avec le privé.

La Protectrice du citoyen est venue nous redire essentiellement la même chose: Nous n'avons pas, dans le projet de loi actuellement, des garanties suffisantes de transparence, notamment parce que ? et c'est déjà le cas dans cette loi qui a 20 ans et qui doit être refaite ? dès que des tiers privés sont impliqués dans un contrat avec le gouvernement, l'accès à l'information devient presque impossible pour les citoyens. Alors, comment voyez-vous la solution à cet aspect de la question?

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Premièrement, concernant le commentaire, pour nous il y a une dynamique financière puis il y a une dynamique d'efficacité dans un partenariat public-privé; les dissocier, c'est se mettre un bandeau devant les yeux.

Deuxième élément, concernant votre reddition de comptes, pour nous il est clair que l'agence est une agence gouvernementale, et donc un peu comme on passe à l'étude des crédits d'un ministère, on pourrait faire le même exercice dans le cadre de l'analyse de la gestion de l'agence, annuellement, devant cette commission. Donc, l'accès à l'information, c'est détenu dans l'agence et devrait être fourni à la demande des députés ici, en commission.

Bien entendu, il y a des volets de, comment je pourrais dire, peut-être de recette industrielle, là, de produits...

Une voix: Secrets.

M. Fahey (Richard): ...secrets industriels, là, de propriété intellectuelle que, là, il faudrait peut-être protéger, mais, au-delà de ça, je pense que le processus de l'Assemblée est tout à fait transparent et que l'agence devrait venir témoigner annuellement ici.

Le Président (M. Paquet): Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, en termes de transparence, je pense que c'est important, je voudrais donner une référence, ici, du Fonds monétaire international, et peut-être que le député serait intéressé d'en prendre note parce que c'est sur le site Web, c'est International Monetary Fund, Public-Private Partnerships, et ça a été fait en consultation avec la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement.

Donc, c'est un document important sur toute une analyse et une évolution des partenariats public-privé. Et justement, au niveau de la comptabilité, en page 38 du document, on lit ceci, M. le Président, et vous me permettez de le lire en anglais, puisque c'est une référence: «Accounting and reporting of the PFI is transparent. Unitary charges are included in the current expenditure totals in the Financial Statement and Budget Report and in departmental accounts.»

Alors, il y a toute une description qui fait qu'on doit rapporter justement, de façon transparente, les coûts qui sont encourus et les engagements pour les 30 prochaines années. Alors, c'est tout ce que je voulais faire, mais...

M. Simard: ...dans le projet de loi...

Mme Jérôme-Forget: ...mais, M. le Président, je pense que mon collègue va peut-être vouloir le consulter, parce que c'est un document intéressant. Maintenant, je vais laisser mon collègue le député de...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Hull...

Mme Jérôme-Forget: ...de Hull...

Le Président (M. Paquet): ...et adjoint parlementaire de la présidente du Conseil du trésor.

M. Cholette: Merci, M. le Président. Chers collègues, M. Fahey, M. Lavoie, merci de votre présentation. Je vais débuter par vous dire que j'aurai une question concernant vos commentaires de la page 17 et 18 du mémoire.

Mais je voudrais commencer par vous dire combien je suis un peu étonné des propos que je viens d'entendre, là, de l'ancien président du Conseil du trésor. Parce qu'il me semble que le député de Richelieu vient, vient nous faire revivre un mauvais film. Ce que j'entends, c'est quelqu'un qui nous dit: Écoutez, ça se fait partout ailleurs dans le monde, mais, nous autres, on est plus smattes, puis le Québec, on ne devrait pas en faire, de PPP. Ce que j'entends également, c'est quelqu'un qui me dit... qui nous dit: Écoutez, nous, on a eu des expériences extrêmement heureuses avec le métro de Laval. Vraiment, c'est un modèle de gestion, et le public devrait être garant de l'ensemble des progrès sociaux, étant donné la capacité énorme de planifier des projets comme ceux-là.

Puis je l'entends aussi me dire: Et, vous savez, notre gouvernement s'est trompé, en 2000, lorsqu'on a fait adopter sans commission parlementaire un projet de loi qui faisait que le ministère des Transports pouvait faire des PPP en transport. Quand même, vous ne pouvez pas nier ça, là? Et, M. le Président...

M. Simard: M. le Président, je m'excuse, mais...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: ...tenter de citer des paroles que je n'ai pas prononcées... On est ici, en commission, devant nos invités ici.

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! C'est une question de règlement?

M. Simard: Est-ce que le député pourrait s'adresser à nos invités et poser des questions plutôt que de tenter de régler quelques petites... quelques petits cas politiques personnels...

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Bon.

M. Simard: ...à la hauteur du niveau de ce député?

Le Président (M. Paquet): O.K. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors donc, je pense, là, les échanges allaient bien à la commission. Je pense que c'est bien allé ce matin. Et, dans d'autres occasions... des argumentations qui se font. Je vous demande de ne pas commencer à répliquer les uns par rapport aux autres, sinon sur votre propre temps de parole, quand c'est le temps, de part ou d'autre. Et j'invite évidemment à la bonne pratique habituellement qui a cours dans les commissions, de continuer dans ce même esprit. Alors, M. le député de Hull.

M. Cholette: On voit où le bât blesse. Alors, M. le Président, simplement pour dire que je suis un peu étonné de voir un peu la gymnastique intellectuelle qu'on tente de faire de l'autre côté, mais ça ne convainc pas grand monde.

Alors, messieurs, le mémoire que vous nous présentez fait état que vous êtes tout à fait ouverts, même plus qu'ouverts justement à la mise en place de ce qu'on appelle l'agence concernant les PPP. Vous nous dites également: Écoutez, vous devriez peut-être penser à la rendre un peu plus forte, un peu plus exécutoire ou décisionnelle. Je pense que c'est des commentaires qui devront être analysés en profondeur.

Maintenant, la question que je me pose, c'est vraiment le lien que vous faites, en pages 17 et 18, entre le fait que le projet de loi semble indiquer que le transfert des employés devrait se faire aux conditions équivalentes au secteur public... et vous faites un lien entre ça en nous disant: Écoutez, vous devriez y aller mollo avec ce genre de clause. Mais, en contrepartie, vous nous dites: Écoutez, le processus devrait être assorti d'une mesure de comparaison; lorsque le projet est présenté en PPP, on devrait être capable de le comparer avec les ressources internes.

Moi, j'aimerais que vous nous expliquiez ça, votre lien, premièrement, entre les deux sujets mais aussi particulièrement comment vous voyez ça, la capacité de l'État de comparer le projet du PPP avec un projet qui pourrait être réalisé à l'interne.

M. Fahey (Richard): En fait...

Le Président (M. Paquet): M. Fahey, en deux minutes.

M. Fahey (Richard): Merci, M. le député, M. le Président. En fait, la technique de ce qu'on appelle «Compulsory Competitive Tendering», c'est en fait de dire aux fonctionnaires: Êtes-vous capables de réaliser ce projet-là et êtes-vous capables... faites-nous en quelque sorte votre meilleure offre pour réaliser quelconque projet, quelconque... qui pourrait éventuellement être soumis aux PPP.

Donc, à ce moment-là, la fonction publique, répondant en quelque sorte à cet appel d'offres là, est en mesure de dire: O.K., moi, je suis prêt à assumer une diminution de mes conditions de travail, à augmenter mon efficacité pour la livraison d'un service à coûts moindres qu'on le livre actuellement. Parce que l'objectif pour le gouvernement de se lancer dans un PPP ou dans un exercice de sous-traitance, c'est de regarder est-ce qu'il y a moyen de livrer un service équivalent à moindres coûts ou un meilleur service aux mêmes coûts? Et donc, dans ce contexte-là, pour nous, c'est de donner la chance en quelque sorte à nos fonctionnaires, qui sont de qualité, de pouvoir répondre à la demande, répondre aux besoins du contribuable qui veut avoir de meilleurs services. Si ces fonctionnaires-là ou les gens de la fonction publique n'arrivent pas à battre la meilleure offre du secteur privé, à ce moment-là on verse dans l'univers de sous-traitance ou de partenariats public-privé.

Donc, il y a une première étape où, là, il y a une chance qui est donnée en quelque sorte aux coureurs, aux fonctionnaires pour éventuellement répondre à la réalisation de ce service-là à moindres coûts pour le contribuable. C'est dans ce sens-là. C'est de donner une chance en quelque sorte avant qu'on transfère dans l'univers privé.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui. Merci, M. le Président. Je ne peux pas m'empêcher de revenir au financement, parce que, dès le départ, c'est ce que vous avez invoqué ? vous n'êtes pas le seul à le faire ? comme justification du recours systématique au privé. Le fait que l'endettement global des Québécois, par le biais de leur dette publique subventionnée, ait atteint un niveau trop élevé selon vous ponctionne une part trop grande du budget de certains ministères ? vous avez cité quelques cas ? alors que la formule dont vous vous faites le promoteur, elle, n'aurait pas ces inconvénients-là.

n(17 heures)n

Prenons, pour fins d'étude, là, pour fins d'analyse, prenons pour acquis que... Ça, je pense que ça mériterait un sérieux examen, et nous allons le faire ici, mais prenons pour acquis qu'il y a des économies à faire. En quoi le fait que cette méthode, selon vous ? hein, je ne parle pas des études du FMI, là, selon vous, et je vous cite, «ne sera pas dans les livres», hein, ça n'apparaîtra pas dans les livres, donc sera plus facile ? en quoi cette méthode d'opération va amener, va faciliter le financement et surtout faire en sorte que le contribuable sera moins endetté, aura moins d'obligations que dans le système actuel?

Vous dites: Je ne peux pas séparer les avantages de la gestion du mode de financement, mais vous avez commencé par utiliser l'argument: l'État est trop endetté pour poursuivre actuellement son endettement actuel. Les routes que nous construisons évidemment sont payées par la dette publique, vous le savez bien, parce qu'elles ont une certaine durée, et on prétend que les générations futures doivent partager avec nous leur coût. C'est peut-être des choses sur lesquelles il faut revenir, mais ça a toujours été ça, la pratique. Vous construisez un hôpital, vous ne demandez pas à ce que les citoyens du Québec le paient «cash down» la première année. Vous comprenez, on comprend tous qu'il faut étaler le paiement.

En quoi ce principe d'étalement, donc d'endettement, tout à coup s'envolerait en fumée du simple fait qu'il s'agit d'une formule de partenariat public-privé? Et là je reviens à la transparence, tenez-vous vraiment à ce que ça n'apparaisse pas dans les livres?

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): Premièrement, pour la FCEI, les PPP, ce n'est pas une panacée, on l'a dit; ce n'est pas un remède universel, on l'a dit. Les recours systématiques à des PPP, on ne l'a jamais dit. Pour nous, c'est une autre façon de livrer un service, de réaliser des investissements pour le plus grand bénéfice des contribuables.

Maintenant, faisons un exercice ensemble, revenons à notre idée d'hôpital qu'on va réaliser. Le ministère de la Santé dit: Moi, j'ai 800 millions pour cet hôpital-là, pas une cent de plus. L'entreprise privée dit: Moi, je suis prête à mettre 1 milliard pour cet hôpital-là. On réalise un superbe hôpital de 1,8 milliard de dollars. Donc, il y a 800 millions du gouvernement qui va passer là, dans ses livres, puis il y a 1 milliard qui va être financé par le secteur privé et qui, dans le contrat, va avoir des clauses de remboursement à même les clauses du contrat, à l'intérieur. Ce milliard-là n'apparaît pas aux livres du gouvernement la première année; il est assumé par le privé. Généralement, quand tu parles d'un contrat, c'est que c'est «Build, Own, Operate, Transfer» au bout de 30 ans. Mais, au bout de 30 ans, M. le député, on va l'avoir remboursé, cet investissement-là.

M. Simard: ...PPP auront été remboursés.

M. Fahey (Richard): Bien, là, moi, je n'ai pas de chiffres. À moins que la présidente du Conseil du trésor vous ait donné des chiffres là-dessus. Nous, on n'est pas à même de commenter là-dessus. Mais l'idée, c'est qu'il y a une partie du financement qui est financée par le secteur privé qui se rembourse à même des clauses prévues au contrat et qui sont là...

Une voix: ...

M. Fahey (Richard): Vas-y.

M. Lavoie (André): Et, si vous me permettez...

Le Président (M. Paquet): M. Lavoie.

M. Lavoie (André): ...c'est d'où justement la nécessité pour nous d'avoir... Quand on parle de transparence, ce n'est pas pour faire des cachettes, de dire: Ce n'est pas aux livres ou quoi que ce soit, parce que vous avez vraiment accroché là-dessus, mais c'est d'où la nécessité d'avoir un examen attentif des travaux de l'agence et du nombre de partenariats qui sont accordés au secteur privé annuellement par l'Assemblée nationale et justement de permettre aux députés de faire leur travail et de questionner le niveau d'endettement de l'État québécois à ce niveau-là. Et, à ce moment-là, si annuellement, effectivement, on s'aperçoit que le gouvernement prend des décisions et, comme vous dites, est en train de donner l'ensemble des travaux au Québec en partenariats public-privé, bien il appartiendra, à ce moment-là, à la commission parlementaire en question de soulever ce problème-là et d'alerter les citoyens québécois à ce niveau-là.

M. Simard: M. Lavoie, est-ce que...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: M. le Président, est-ce que... M. Lavoie, est-ce que vous accepteriez, contrairement à M. Fahey, qui dit: C'est plus facile, étant donné que ce n'est pas dans les livres...

M. Lavoie (André): Écoutez...

M. Simard: Est-ce que vous accepteriez que l'obligation soit faite dans la loi elle-même d'avoir, chaque année, comme on l'a lors des crédits, l'ensemble du portrait de l'endettement, l'ensemble du portrait des obligations en partenariats public-privé sur l'ensemble de la durée de ces partenariats? C'est ainsi d'ailleurs que la présidente du Conseil du trésor, tout à l'heure, nous donnait une référence du FMI qui faisait la promotion de ce type de transparence. Est-ce qu'on ne devrait pas se donner cette première transparence d'avoir clairement dans les livres de l'État, accessible à l'ensemble des citoyens, et pas selon la formule «c'est plus facile, étant donné que c'est pas dans les livres, là»... Ce sera facile parce que ce sera dans les livres, ce sera clair.

M. Fahey (Richard): M. le Président.

Le Président (M. Paquet): M. Fahey.

M. Fahey (Richard): En tout cas, je ne veux pas entrer dans un débat partisan, parce que la FCEI n'est pas partisane, mais de faire dire à l'organisation que je représente qu'on essaie de cacher des choses pour ne pas que ce soit dans les livres parce que c'est plus facile, puis on va faire de l'argent sur le dos du pauvre monde, ce n'est jamais le cas, puis on va le dénoncer.

M. le Président, je pense qu'on a été assez clairs ici pour dire que l'agence devrait faire rapport à la Commission des finances publiques de son administration en toute transparence et qu'il y ait le moins possible d'ingérence politique dans son administration des partenariats public-privé. Donc, qu'on n'essaie pas de nous faire dire ce qu'on n'a pas dit. Ce qu'on essaie ici, c'est d'avoir une agence qui est efficace, qui va convaincre les citoyens du Québec, comme tout le reste des concitoyens à travers le monde, que les PPP constituent une formule dans certains projets qui valent la peine d'être réalisés sous cette forme et que, dans ce contexte-là, l'indépendance et la transparence de l'agence vont être garantes de la réalisation de projets qui sont au bénéfice de tous les Québécois et Québécoises.

Le Président (M. Paquet): Alors, au nom de la Commission des finances publiques, M. Fahey et M. Lavoie, pour la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, nous vous remercions de votre participation à nos travaux. Je suspends les travaux de la commission pour quelques instants afin de permettre à nos prochains invités de se joindre à nous.

(Suspension de la séance à 17 h 7)

(Reprise à 17 h 10)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous accueillons maintenant les représentants du Regroupement des partenaires du gouvernement en technologie de l'information. Alors, je vous souhaite la bienvenue au nom des membres de la commission. M. Patrick O'Hara, secrétaire général du regroupement, je vous inviterais à partager... à présenter, pardon... à partager, oui, vos opinions mais à présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Regroupement des partenaires
du gouvernement en technologie
de l'information (RPGTI)

M. O'Hara (Patrick): Merci, M. le Président. À votre droite, M. Gratien Côté, membre du RPGTI; et, encore plus à votre droite, M. Claude Lemieux, qui est le président de notre regroupement; et, à votre gauche, M. Rolland Gadbois, vice-président du même regroupement.

Alors, dans un premier temps, M. le Président, nous tenons à vous remercier pour l'occasion de présenter notre point de vue sur le projet de loi sur les partenariats. Notre regroupement représente 14 des plus importantes entreprises oeuvrant dans le domaine des technologies de l'information au Québec. Fondé il y a 10 ans, notre regroupement a pour mission d'établir un dialogue mutuellement profitable entre le gouvernement et notre domaine. D'ailleurs, il est de notoriété publique que les entreprises de l'industrie des TI au Québec accompagnent de façon importante et depuis déjà fort longtemps le gouvernement québécois dans le développement et la modernisation de l'État. Concrètement, notre domaine compte 100 000 employés au Québec. Une partie importante de ces personnes travaillent directement ou indirectement avec les ministères et organismes de l'État.

M. le Président, j'aimerais maintenant passer la parole à M. Gratien Côté pour vous présenter sommairement la position du RPGTI à propos du projet de loi sur l'Agence des partenariats public-privé.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. O'Hara. Alors, M. Côté.

M. Côté (Gratien): M. le Président, nous voulons tout d'abord préciser que nos commentaires sont ciblés essentiellement pour le secteur des technologies de l'information, soit le créneau où opère le RPGTI. Également, nous tenons à indiquer en entrée de jeu que nous sommes en faveur des objectifs poursuivis par le gouvernement à l'égard du projet de loi n° 61 concernant l'Agence des partenariats public-privé. Nous croyons qu'il s'agit d'un mode de collaboration permettant d'accélérer et d'améliorer la prestation de services gouvernementaux, avec un impact qui peut être positif sur les dépenses de l'État.

L'approche de partenariat, dans les grands projets du gouvernement, favorise la responsabilisation du partenaire retenu quant aux résultats attendus. C'est souvent préférable à la pratique actuelle qui tend à morceler la réalisation de projets en plusieurs composantes et où plusieurs fournisseurs se succèdent. On retrouve ainsi une responsabilité diluée.

En fait, nos préoccupations se situent plutôt au niveau de la façon dont le gouvernement entend opérationnaliser le concept de partenariat. Nous vous présenterons brièvement les éléments principaux issus de notre réflexion en termes de questionnements et de pistes d'amélioration possibles. Nous croyons que ces éléments pourraient influencer soit la loi elle-même ou encore la réglementation qui viendra en préciser l'application. Nous vous demandons d'y reconnaître un appui sincère de nos membres pour contribuer à faire des partenariats un vif succès.

Nous débutons par nos commentaires concernant les articles du projet de loi déposé. Les articles 8 à 10 décrivent brièvement le mode d'intervention de l'Agence des partenariats face aux ministères et organismes. Nous n'avons pu en déduire le mode d'intervention visé pour l'agence auprès des ministères et organismes. L'Agence des partenariats aura-t-elle comme mission d'encourager ou d'imposer des partenariats dans certains dossiers? Le choix du mode d'intervention pourra avoir un impact déterminant sur les chances de succès.

Nous prônons l'adhésion volontaire des organismes aux partenariats. Leur adhésion doit reposer sur un ensemble de conditions favorables, incluant la promotion, le soutien financier et organisationnel et une valeur ajoutée liée à cette approche. La coercition risquerait de miner sérieusement les chances de succès des partenariats proposés.

L'article 11 du projet de loi mentionne que le gouvernement peut confier à l'agence le mandat d'évaluer la faisabilité d'un projet en mode de partenariat. Nous suggérons de déterminer au préalable les règles qui baliseront la sélection des projets de partenariat, tout en recherchant un large consensus auprès des ministères et organismes visés.

Les articles 20 à 24 ne précisent pas les règles de composition du conseil d'administration. Nous croyons que ce conseil aurait avantage à inclure des représentants du secteur privé. On assurerait ainsi une adéquation des politiques et modes de fonctionnement entre les besoins du secteur public et les capacités du secteur privé à y satisfaire. Compte tenu des implications du recours aux partenariats privé-public sur les employés de l'État, nous croyons également que des représentants syndicaux devraient faire partie de ce conseil.

Nos commentaires sur les articles du projet de loi se limitent à ceux que nous venons de présenter. Toutefois, étant donné que le gouvernement a accompagné sa loi d'une politique-cadre lui permettant plus de souplesse dans l'orientation de son agence, nous aimerions pouvoir y apporter quelques suggestions.

La politique-cadre fait référence à la concurrence désirée dans l'attribution de partenariats. Nous supportons ces exigences dans un souci de transparence et d'équité. Toutefois, les règles actuelles guidant le processus d'acquisition gouvernemental nous semblent inadaptées dans un contexte de sélection de partenaires. Elles imposent un nivellement des réponses des soumissionnaires pour faciliter la comparaison des propositions. C'est acceptable dans un contexte d'acquisition de produits et de services simples. Par contre, dans un contexte de proposition de partenariat, ce processus contraint les possibilités de créativité attendues des partenaires soumissionnaires. Il faudrait revoir le processus d'acquisition pour qu'il permette la souplesse et la créativité du partenaire sans sacrifier pour autant la transparence et l'équité nécessaires.

Aussi, le document de politique-cadre fait référence au traitement de propositions non sollicitées ou spontanées. On y mentionne le besoin de respecter leur caractère confidentiel mais sans préciser comment y arriver. Si le gouvernement veut encourager la créativité et l'initiative du secteur privé, il devrait favoriser les propositions spontanées. Pour ce faire, les règles de traitement de ces propositions devront être revues par rapport à celles qui existent présentement dans la réglementation. Il importe de non seulement en assurer la confidentialité, mais aussi d'encourager les partenaires potentiels à en présenter.

La réalisation de projets en partenariat représente certes un potentiel intéressant d'économie pour le gouvernement. Toutefois, les économies réelles pour le gouvernement seront souvent décalées dans le temps par rapport aux investissements initiaux requis. De plus, les ministères ou organismes pourraient encourir des frais assez importants avant de pouvoir conclure le partenariat. Nous recommandons de prévoir un budget additionnel comme un fonds de lancement de partenariats. Ce fonds servira à supporter le décalage temporel entre la réalisation d'économies opérationnelles et les frais initiaux des projets de longue haleine. De même, le gouvernement pourra introduire le concept de récompense financière tant pour le partenaire et le ministère ou organisme lorsque les objectifs sont dépassés. Il s'agirait d'un autre encouragement pour inciter les ministères et organismes à aller de l'avant avec le partenariat.

Parmi les attentes du gouvernement face aux partenaires privés, on mentionne souvent l'investissement initial et le partage de risques. Effectivement, le secteur privé est généralement disposé à investir tôt dans un projet en échange de revenus par la suite avec un niveau acceptable de risque. Ces revenus peuvent généralement provenir de deux sources, soit du gouvernement lui-même ou directement des utilisateurs-payeurs. Nous considérons que les situations d'utilisateur-payeur représentent les meilleures opportunités de partenariat. Il est effectivement plus simple d'identifier des revenus basés directement sur l'utilisation d'un service plutôt que la réduction des coûts de production d'un service gouvernemental assumé par un partenaire. Dans des cas de prestation de services publics, le niveau de revenu du partenaire peut être fortement dépendant de l'utilisation des services, donc de l'adhésion des clientèles externes visées. Or, contrairement aux projets entièrement privés, le partenaire risque d'avoir peu de contrôle sur cette adhésion. Pour pallier à ces risques, l'agence devrait avoir l'autorité de forcer certains ou tous les ministères et organismes à adhérer au service offert par ledit partenaire. Les risques, étant minimisés pour le partenaire, se traduiront par des coûts plus intéressants pour le ministère ou l'utilisateur.

Le gouvernement pourrait aussi décider de limiter les efforts promotionnels du partenaire pour mousser le service auprès des utilisateurs visés. Il peut même concurrencer le partenaire en offrant des alternatives aux mêmes clientèles visées. Le partenaire peut-il être assuré du niveau d'achalandage des clientèles visées? Il est clair que le niveau d'engagement et d'investissement du partenaire sera dépendant du niveau d'engagement du gouvernement lui-même quant au volume d'affaires futur. Le niveau d'engagement que peut prendre le gouvernement pourrait, dans certains secteurs comme les réseaux de l'éducation et de la santé, être contraint par l'autonomie décisionnelle dont jouissent présentement les membres de ces réseaux.

n(17 h 20)n

Également, les projets de partenariat, surtout dans un contexte de prestation électronique de services intégrés, sont susceptibles de faire intervenir plusieurs organismes publics simultanément. Il en résulte une augmentation sensible du niveau de difficulté et de risque. Il serait bon d'élaborer des mécanismes de réduction ou de gestion des risques qui en découlent. On limiterait ainsi l'impact négatif sur les partenaires privés, donc sur le coût au gouvernement.

Finalement, la sensibilité des informations qui pourraient être véhiculées dans des projets de partenariat est susceptible d'interpeller la Commission d'accès à l'information. Par exemple, la prestation électronique de services implique souvent un regroupement d'informations provenant de différents ministères ou organismes. Or, la Commission d'accès à l'information a, par le passé, montré de l'hésitation à permettre de tels regroupements d'informations, surtout lorsque les données se retrouvent en dehors du périmètre gouvernemental. Il serait important que le gouvernement évalue certaines balises. Il faudrait rechercher un équilibre optimal entre la participation du partenaire privé et la prestation de services tout en maintenant le niveau nécessaire de protection des renseignements personnels partagés.

En conclusion, nous rappelons que le RPGTI est en faveur des objectifs poursuivis par le gouvernement avec son projet de loi sur l'Agence des partenariats. Il accueille bien le fait que la loi soit accompagnée d'une politique-cadre lui donnant ainsi plus de souplesse. En fait, la grande majorité des membres du RPGTI ont fait la promotion de cette approche depuis plusieurs années. Les principales recommandations ou inquiétudes que nous avons présentées dans ce mémoire ne visent donc pas à écarter le projet de loi. Nous désirons plutôt contribuer à le bonifier pour en accroître les chances de succès. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Côté. Alors, Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Alors, merci, M. O'Hara et votre regroupement, de vous être donné la peine de préparer un mémoire, et de venir nous le présenter, et de discuter avec nous de la portée du projet de loi n° 61 sur l'Agence des partenariats public-privé. J'aimerais tout de suite soulever avec vous un volet qui nous a été relaté en Angleterre, lors de ma visite là-bas et qui m'avait été donné également par le ministre de la Santé quand il était venu, lors d'une conférence qui se tenait sur les partenariats public-privé, à l'effet que les contrats en informatique se prêtaient mal aux partenariats public-privé, tellement qu'en Grande-Bretagne on a décidé justement d'exclure ce secteur-là. Et ce pourquoi on l'a exclu, si je comprends les arguments qui m'ont été invoqués, c'est que les demandes d'information ? d'abord, un partenariat public-privé, c'est un contrat à long terme ? les demandes d'information ou les demandes au niveau de l'informatique changent rapidement et que, par conséquent, la structure même d'un partenariat public-privé se prête mal. Peut-être que vous pourriez nous éclairer vis-à-vis cette approche pour ou contrer ou appuyer ce qu'on disait justement, ce qu'on nous disait en Grande-Bretagne.

Le Président (M. Paquet): M. O'Hara.

M. O'Hara (Patrick): Merci, M. le Président. M. Lemieux aimerait répondre à la question de la ministre, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): Oui, bonjour. Une chose est sûre, au niveau des technologies, c'est très différent de lorsqu'on a parlé des infrastructures de routes, puis ces choses-là. La durée est sûrement un élément. On n'aura jamais des PPP, au niveau des technologies, de 30 ans, là. Donc, je pense que les durées qui pourraient être envisagées, c'est de cinq à 10 ans. Mais ça peut quand même se faire très bien si on l'agrémente également... Il ne faut pas seulement voir technologies de l'information, il faut voir aussi... accrocher la technologie à une solution d'affaires, une gestion d'affaires. Donc, c'est sûr qu'il y a un bon volet technologie, mais il y a également d'autres fonctions d'affaires administratives qui s'accrochent au niveau de la technologie.

Puis, on voit, il y a quand même des exemples au Canada où ça s'effectue puis ça s'effectue très bien. On a même ici, au Québec, des modèles. Je regarde... Ça ne s'appelait pas comme ça, mais je regarde Placements Québec, c'est quand même un... c'en est un, en fin de compte, un PPP. Il n'y a peut-être pas toutes les règles de la loi actuelle, mais c'était vraiment une prise en charge du privé avec la coopération et... Tous les produits étaient quand même définis par le gouvernement du Québec, mais l'opérationalisation était faite par un partenaire privé.

Il y a également Tourisme Québec qui est un exemple de PPP. On l'appelle maintenant Bonjour Québec, là, mais, au départ, c'était Tourisme Québec, puis il y a eu un partage de risques. Puis ces projets-là comme Tourisme Québec, ça s'était fait dans un cadre... Dans le temps, voilà cinq ou six ans, dans les mécanismes d'acquisition, il y avait eu un mécanisme qui avait été mis en place comme projet pilote qui était le processus de sélection des partenaires. En fin de compte, c'était un projet pilote qui s'est fait, qui s'est exécuté au moins pour cinq à six projets à l'intérieur du gouvernement du Québec, puis les constatations qu'on en a faites, c'est que c'est un besoin quand même, au niveau des technologies de l'information, d'avoir un mécanisme d'acquisition du style des PPP.

Ça ne vise peut-être pas les mêmes buts que comme pour les infrastructures de routes ou ces choses-là, mais ça vise un but d'efficacité à mon avis, parce que présentement, au niveau des technologies de l'information, on est avec un processus d'acquisition qui morcelle énormément le processus d'achat. On a des appels d'offres... Pour en arriver au bout d'un projet, souvent on peut passer par cinq à six appels d'offres différents. Et souvent les partenaires changent à chaque fois, les fournisseurs sont différents. Un fournisseur va faire l'étude d'opportunité. Par la suite, c'est un autre fournisseur qui gagne l'architecture. C'est un autre fournisseur qui gagne la réalisation. Donc, il y a sûrement une très grande inefficacité qui se produit à ce moment-là au niveau... Donc, dans un projet plus global, dans un cadre d'un partenariat, je pense qu'il peut y avoir des économies pour le gouvernement et également pour le privé.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je suis très sympathique à ce que vous venez de dire parce qu'effectivement je suis sûre que mon collègue, quand il était président du Conseil du trésor, justement se voyait à l'occasion où on a commencé avec une entreprise pour faire une partie d'un contrat, où on allait en appel d'offres pour la deuxième partie, c'était une autre entreprise qui souvent disait que la première s'était trompée dans la façon de le faire, et dans la troisième étape... je veux dire, on remarquait ça. Effectivement, vous avez raison, mais il n'en demeure pas moins... Peut-être que ce que vous soulevez, c'est que ça ne peut pas avoir la durée de vie de ce qu'on appelle un partenariat public-privé qui est ordinairement de plus de 20 ans. Ce que vous exprimez, c'est que ça pourrait être de cinq à 10 ans, sauf de prendre la totalité de la gérance d'un projet. Autrement dit, de prendre le problème et de régler le problème plutôt que d'être invité à soumissionner à plusieurs étapes pour régler un problème.

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): De prendre un problème qui... Et, quand je parlais de l'adresser avec une gestion d'affaires également, c'est de prendre, disons... Si je prends un exemple d'un nouveau programme que le gouvernement voudrait lancer, il pourrait très bien faire un partenaire avec le privé pour dire: Vous vous occupez d'installer la technologie en place et vous prenez exactement les opérations de ce nouveau programme là. C'est sûr, quand je vous dis cinq à 10 ans... un nouveau programme, on le sait comment ça joue dans le temps, mais il reste quand même que le gouvernement est là pour donner les directives et donner les orientations à ce nouveau programme là. Le partenaire privé, il sera plus opérationnel, mais il aurait le choix des moyens pour arriver au résultat que le gouvernement veut.

C'est souvent ce qu'on n'a pas à l'heure actuelle. On n'a pas le choix des moyens et on est tellement pris dans un cadre précis au niveau des appels d'offres que... On a exactement un cadre, il faut... Quand on disait que ça nuit un peu à la créativité, c'est un peu ça, là. On répond à des critères très précis dans un cadre très précis. On nous dit: C'est cette technologie-là qu'on veut. Mais, si le partenaire privé avait le choix des moyens, les résultats seraient clairs au niveau du plan d'affaires qui serait négocié entre le ministère et le partenaire privé parce que, comme on dit, le ministère... Notre opinion à nous, c'est que c'est le ministère véritablement... Ce qu'on voit, c'est que l'agence est là pour supporter le ministère, parce que c'est quand même complexe, établir des contrats de partenariat. Donc, on dit: L'agence serait là pour supporter le ministère au niveau légal, toutes ces choses-là. Vraiment une aide, pas de l'imposition au ministère.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Moi, j'ai le goût de vous poser une question, parce que ça me préoccupe actuellement, le transfert de connaissances. On donne un contrat à une entreprise privée et là, tout à coup, on veut aller en appel d'offres pour... le contrat est terminé. Le transfert de connaissances à nos employés, moi, je le vois à l'occasion comme un problème. Il va falloir qu'on aborde ce sujet-là à un moment donné parce qu'il faut absolument qu'on développe à l'intérieur de notre boîte, comme je veux faire avec l'agence... développer une expertise, de sorte qu'on est capables quand même au gouvernement de pouvoir intervenir et de pouvoir être un joueur important dans la gestion d'un contrat. Et, au niveau des contrats pour le secteur que vous représentez, il y a toujours le problème avec nos employés. Qu'est-ce que vous répondez à mon inquiétude finalement qui est plus qu'une... qui est une grande préoccupation que j'ai?

n(17 h 30)n

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux. 1 min 30 s.

M. Lemieux (Claude): Oui. Je vous répondrais, je trouve, c'est un peu une question en dehors des PPP, en fin de compte, là. Lorsqu'on réalise des contrats, c'est certain qu'il faut s'y prendre dès le début pour voir comment on va faire ce transfert des connaissances là. Puis c'est sûr que le transfert des connaissances, ce n'est pas transmettre des manuels à la fin du projet puis former quelques personnes. Je pense qu'il faut impliquer les internes directement à l'intérieur, dans nos équipes. C'est d'ailleurs ce qui se fait la grande majorité du temps dans les contrats qu'on réalise actuellement. Souvent, il y a autant d'internes que d'externes à l'intérieur. On forme des équipes conjointes, puis c'est comme ça que le transfert des connaissances se fait, c'est graduellement. Ça prend quand même des contrats d'assez longue durée, là, mais graduellement les internes prennent de plus en plus les fonctions, et à la fin c'est de même que le transfert se fait. Parce qu'autrement, vous avez raison, le transfert de connaissances, il ne peut pas se faire en une courte période à la fin du projet, là, il faut qu'il se fasse tout au cours du projet.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Richelieu.

M. Simard: Pour suivre dans le même ordre d'idées que la présidente du Conseil du trésor, que je rejoins beaucoup dans ses préoccupations, évidemment prenons pour acquis au départ que ce dont il est question dans 61 se rapporte davantage à des projets d'infrastructures plus traditionnels et classiques ou à des services. On peut avoir des interprétations diverses. Mais il n'en demeure pas moins ? et je l'avais dit d'entrée de jeu dans ces débats ? que la participation, notamment d'entreprises en technologie de l'information, nous apporte à réfléchir aux nouveaux moyens que l'État doit mettre en oeuvre pour en faire des partenaires efficaces à la fois pour les services que cela rend et pour la suite des choses.

Je m'explique. Beaucoup des solutions que vous apportez sont du domaine des... d'un apport technologique qui n'a pas de suite pendant des années. Ce sont des solutions nouvelles à des problèmes nouveaux. Et, pour employer un anglicisme bien connu, ce sont des «one shot». Vous avez acquis une technologie, vous avez une expérience avec des ministères, des grandes entreprises. Nous avons besoin de cette expertise, donc nous vous donnons actuellement des contrats qui vous permettent de faire profiter l'État de vos compétences. Évidemment ? et je vois certains fonctionnaires du Conseil du trésor qui sont dans la salle, avec qui j'ai déjà travaillé ces questions-là ? il faut nous assurer, dans le contrat, du transfert technologique, parce que, quand vous serez partis, il faudra bien que les employés de l'État puissent assumer la continuité de ces technologies. Mais en même temps il serait inutile de penser que l'État puisse être le seul capable d'introduire ces technologies; vous voyez bien que ce serait extrêmement coûteux et probablement peu efficace.

Mais maintenant quel est le mode... quels sont les modes d'impartition autres que contractuels, tels que nous les connaissons actuellement, qui nous permettraient d'arriver à une plus grande efficience? C'est ça, le problème. Actuellement, nous allons en appel d'offres sur la place publique avec des devis extrêmement structurés. Il y a des équipes en technologie de l'information, au Conseil du trésor, qui sont extrêmement compétentes, qui... Le problème qui se pose, c'est que, quand le projet est trop gros ou trop complexe, on n'a pas beaucoup de concurrents, hein? J'ai vu des ouvertures d'offres de service où il y avait un seul fournisseur de services. Ça, c'est pour les grands projets. On parle notamment en communications, là, où il n'y a, sur l'ensemble du territoire du Québec, souvent qu'une seule entreprise ou très peu d'entreprises qui peuvent soumissionner pour des projets comme ça. Donc, l'absence de concurrence.

Le deuxième, c'est la difficulté pour des entreprises à faire face à ce défi en formant des consortiums, parce que chacune pourrait apporter sa partie d'expertise. Et on a beaucoup de difficultés à créer ces consortiums parce qu'on est liés par une règle absolue qui est le plus bas soumissionnaire. Donc, il y a certainement des formules nouvelles à explorer. Vous, vous avez senti que, dans les PPP, il y avait peut-être une partie de cela qui pourrait être utilisée. Je n'en suis pas si certain, mais peut-être est-ce le cas. Moi, j'aimerais un petit peu que vous continuiez devant nous votre réflexion. Qu'est-ce qui vous a amenés à penser que ce type de formule pourrait améliorer les services aux citoyens et diminuer les coûts?

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): Le fait de toute façon que ce ne sera pas toujours morcelé, déjà, en partant, il y a une économie, parce que la firme ou le privé qui va regarder le problème pour soumissionner, il va regarder s'il est libre de ses moyens. En fin de compte, c'est les résultats qu'il a à atteindre, puis il est libre de ses moyens. Il va... On est quand même... C'est quand même des très grosses firmes qu'on a au Québec, puis ces firmes-là travaillent aussi à l'extérieur. Et ils ont vu d'autres choses, ils ont bâti d'autres choses à l'extérieur, donc ils peuvent récupérer des choses, ce que la mécanique actuelle d'acquisition ne nous permet pas. C'est très difficile de récupérer les choses qu'on aurait pu faire à l'extérieur, dans un autre pays. Donc, au moins, juste en partant, un PPP où il y aurait un plan d'affaires, que le ministère créerait un plan d'affaires puis il émettrait exactement les résultats qu'il veut atteindre... C'est sûr que ça prend un plan d'affaires parce que le fournisseur... Puis, quand on dit un plan d'affaires, c'est un... un plan d'affaires, pas un cahier des charges structuré qui dit: Je veux ça, je veux ça, je veux ça, les résultats à atteindre. Puis là, à ce moment-là, il y aurait des soumissions, puis les fournisseurs...

C'est sûr qu'il faut changer la mécanique d'évaluation, parce que, présentement, l'évaluation, c'est des critères très précis: on veut un chargé de projets qui a tant d'années, on veut tant de... Il faut avoir la liberté de ça. Donc, il faut repenser un peu la mécanique. Puis je pense qu'au niveau des PPP l'agence, les contrats, ça va se faire quand même de façon à mon avis... chaque contrat aura ses particularités parce qu'on aura toujours des contextes différents.

Donc, à mon avis, des discussions sur les plans d'affaires déposés... ils vont devoir définir une méthode pour évaluer, pour la transparence, en fin de compte, quand le contrat va être accordé avec le partenaire. Donc, il y a un travail qui doit être fait avant que les discussions s'entament avec le partenaire. Le partenaire, je pense qu'il doit être sélectionné une fois que le plan d'affaires du ministère est fait. Puis là, après ça, il y a des discussions pour voir exactement comment il va... comment ils peuvent s'entendre. Je pense que c'est une mécanique d'acquisition qui pourrait permettre d'être plus économique dans l'atteinte des résultats.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

M. Simard: Oui. Si je vous ai bien compris, au lieu d'aller en appel d'offres sur des services précis, on irait en appel d'offres sur une problématique, des résultats à atteindre, et la firme retenue devrait mettre en oeuvre les moyens d'atteindre ces résultats donc en s'associant avec différents partenaires, en profitant d'expertise et d'expériences vécues auprès d'autres clients.

Mais la réponse que vous a donnée la présidente du Conseil du trésor, je la reprends un petit peu sous forme de question: Est-ce que c'est nécessairement sous forme de partenariats public-privé ou est-ce que des projets clé en main ne pourraient pas atteindre à peu près les mêmes objectifs?

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): Projets clé en main, tout dépend... Il faut quand même avoir une certaine... Ça dépend du type de projet. Je pense qu'à chaque fois il devra étudier la mécanique qu'il pourra avoir, parce que, si on parlait... On parlait justement des utilisateurs-payeurs. Avec des utilisateurs-payeurs, à ce moment-là le privé pourrait complètement financer les infrastructures technologiques, les façons de fonctionner. Et, selon les paramètres, en fin de compte, des achalandages qui seraient définis dans les discussions du contrat, on pourrait dire: On va se financer avec les revenus qui vont arriver. Donc, en fin de compte, tout ce qui est de... le financement de départ, le privé pourrait financer ces choses.

M. Simard: Vous insistez beaucoup...

Le Président (M. Paquet): M. le député.

M. Simard: Dernière question, M. le Président. Vous insistez beaucoup, dans votre mémoire, sur cet aspect de préférer des formules où le financement vient de l'utilisateur. Pouvez-vous concrètement nous dire à quoi ça pourrait ressembler? Moi, j'ai quelques objections à ce genre de formule, mais ça peut être, dans certains cas, intéressant. Pouvez-vous nous expliquer comment ça fonctionnerait?

M. Lemieux (Claude): Non, c'est en fin de compte...

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): C'est une formule où le service pourrait... on pourrait tarifer. Puis ça ne se prête pas à tout, là, mais ça se... où on pourrait tarifer, en fin de compte, la personne qui utilise le service. Puis, quand on disait que c'est plus simple, c'est que, si on fait, disons... on essaierait de faire un PPP où ce serait seulement des économies de coûts à l'intérieur des ministères, c'est beaucoup plus dur à évaluer que si on dit: Nous, on est prêts à tout bâtir cette technologie-là et de fournir le service aux citoyens puis, avec le gouvernement, on établit un tarif.

n(17 h 40)n

Je prends un exemple. Présentement, les appels d'offres électroniques sur... Quand on répond justement au mécanisme d'appel d'offres, là, l'ancien Merx, je ne sais pas si ça dit quelque... À chaque fois, nous, qu'on a un appel d'offres, c'est publié sur un babillard électronique, en fin de compte, puis là on fait une réquisition pour avoir le cahier des charges. Mais ça, présentement, il y a une tarification. Je sais que les utilisateurs paient, et le privé a bâti, en coopération avec le... après un appel d'offres avec le Conseil du trésor, a bâti toute la mécanique de service, il livre le service. Donc, le gouvernement se trouve à avoir... donne un service aux citoyens pour ses appels d'offres puis aux fournisseurs puis il n'a pas déboursé pour bâtir le modèle.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Jérôme-Forget: Oui, M. le Président. Je vais revenir sur un volet de votre mémoire, en page 8 notamment, où vous dites: «Nous craignons que l'approche actuelle de mise en place de partenariats s'appuie sur des intentions d'autofinancement à même les disponibilités budgétaires [des ministères et organismes] participant, ce qui est tout à fait irréaliste.» Bon.

Moi, j'aimerais quand même qu'on clarifie quelque chose, ici, là, les partenariats public-privé, ça n'imprime pas de l'argent. Ça fait appel à du capital privé, mais bien sûr ça fait appel également à des obligations ensuite à l'endroit du capital qui a été investi. Alors, c'est clair que tout le volet coûts rattachés aux opérations va devoir être rattaché à un ministère quelconque, vous comprenez, parce qu'on ne peut pas... Ce que vous souhaitez, c'est qu'il y ait dans le fond un fonds spécial qui soit là pour justement permettre des innovations au niveau des ministères. Mais ce n'est pas parce que c'est en PPP que ça donne nécessairement plus d'argent pour le financer par la suite.

Maintenant, il y a quelque chose d'autre que vous soulevez, des offres non sollicitées. Ça, bien sûr, vous comprendrez qu'au gouvernement on est très réfractaires à ça parce qu'évidemment il faut donner... non seulement il faut être transparents, il faut donner l'apparence d'être totalement transparents. Alors, des offres non sollicitées, on n'est pas très sympathiques à ça. Et, même si quelqu'un nous fait une offre, on va en appel d'offres malgré tout. Alors, comment est-ce que vous expliquez votre proposition d'aller avec des offres non sollicitées à l'intérieur du gouvernement et que, malgré tout, on réponde à tous les appels de transparence, d'imputabilité, qui sont légitimes?

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): Regardez, lorsqu'on laisse... En ce moment, dans la réglementation actuelle, ça existe, les propositions non sollicitées, mais, vous avez raison, la proposition non sollicitée n'aboutit pas à un contrat, aboutit à un lancement... à un appel d'offres qui suit.

Présentement, c'est qu'il y a eu une réglementation qui est en vigueur, qui dit: Si quelqu'un a une bonne idée, qu'il la propose au gouvernement. Mais là, à ce moment-là, la réglementation dit: Dans les processus suivants, il y aura des avantages au niveau de la qualité de son offre. Mais ce qu'on dit, c'est qu'on voit présentement qu'il y en a extrêmement peu, de propositions non sollicitées, donc on suppose... on voudrait que vous vous posiez la question: Pourquoi il y en a extrêmement peu? Parce que le gouvernement se prive de bonnes idées qui pourraient émettre du privé pour lancer au gouvernement, mais les gens... Il y a quand même un bon investissement pour venir présenter et développer cette idée-là. Et, si le fournisseur qui a cette idée-là sent qu'en allant la déposer il se nuit pratiquement par rapport à l'autre parce que, quand il va aller en appel d'offres, lui, il va avoir fait un investissement, des fois, assez grand, puis l'autre qui ne l'a pas fait à côté, il aura juste à couper son prix puis il va gagner l'appel d'offres...

Donc, ce qu'on dit, c'est... on ne dit pas que la proposition non sollicitée doit aboutir à un contrat de gré à gré. On dit que, si le gouvernement veut profiter d'avoir des idées provenant du privé, il doit, premièrement, émettre des moyens très clairs de protéger la confidentialité de qu'est-ce qui va être déposé pour ne pas que ça tombe dans les mains des compétiteurs, parce qu'ils vont être en compétition suivant... tout de suite après. Puis également il faut avoir un avantage... Étant donné qu'il y a énormément d'investissements, parce que ces propositions-là d'idées vont être faites pour quand même des dossiers de bonne ampleur, donc, avant d'aller déposer une idée au gouvernement, les gens vont vouloir les creuser puis s'assurer que ça fonctionne bien. Donc, ce qu'on dit, c'est que si le gouvernement... le gouvernement a un bon avantage à avoir des propositions, en fin de compte, des idées qui pourraient les aider à avoir des économies, le fournisseur aussi a un avantage à les déposer, mais il faut qu'ensemble ils trouvent un moyen enfin de pouvoir avoir ces idées-là puis que ce soit profitable pour la firme qui le dépose et pour le gouvernement.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Jérôme-Forget: Alors, je regardais votre mémoire. Également, vous avez fait référence à la Commission d'accès à l'information, nonobstant le fait, là, que, quand vous avez accès à des données confidentielles, manifestement les règles doivent s'appliquer, à savoir qu'on ne peut pas utiliser de l'information d'un ministère pour le faire conjointement avec un autre ministère. Je pense que tout le monde est d'accord avec ça. Mais, au niveau d'un contrat en PPP, est-ce que les règles devraient être plus rigoureuses que ce qu'elles sont actuellement quand vous allez en appel d'offres pour l'accès à l'information?

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): Mais c'est que ça peut se faire quand même, le PPP, si vraiment le fournisseur prenait plus les choses en main directement. Nous, présentement, quand on travaille, la grande majorité du temps, on travaille directement dans les ministères. Donc, les données, on ne les sort pas. On est là, on signe des confidentialités en arrivant dans le ministère puis on travaille avec eux. Mais, dans le cadre d'un PPP, ça ne veut pas dire nécessairement qu'on travaillerait dans les ministères, on pourrait travailler carrément à l'extérieur et gérer un programme, là. Donc, il y a... Ce qu'on dit en fin de compte vis-à-vis la Commission d'accès à l'information, c'est, lorsqu'il va y avoir des discussions sur les plans d'affaires ou les contrats, c'est un critère important, un paramètre important qui doit être considéré dès le départ pour ne pas négocier, avancer dans une chose puis arriver au bout, puis ça ne passe pas la rampe pour la loi de la Commission d'accès à l'information. Ce qu'on dit, c'est que ces paramètres-là sont importants, ils doivent être considérés dès le départ.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Moi, j'aimerais aborder la composition du conseil d'administration. À la page 6 de votre mémoire, vous dites qu'il y «aurait avantage à [y] inclure des représentants du secteur privé pour assurer une adéquation des politiques et [des] modes de fonctionnement entre les besoins du secteur public et la capacité du secteur privé à y satisfaire». On entend souvent les représentants des différentes associations qui nous parlent de transparence, d'information aux citoyens, donner confiance aux citoyens. Est-ce que vous voyez, dans votre proposition, peut-être qu'il y aurait une apparence de potentiel conflit d'intérêts? Parce que vous dites: Pour s'assurer que les capacités du privé puissent satisfaire aux besoins, c'est vrai puis c'est excellent, sauf que, je vais dire, le représentant d'une compagnie ABC qui est là puis que, par hasard, il y a un contrat, puis c'est lui qui l'a, le simple citoyen va dire: Bien oui, on comprend, là.

Donc, ici, j'aimerais vous entendre là-dessus puis aussi le fait... J'ai bien compris, au début, vous avez dit que votre proposition, c'était pour votre secteur d'activité, sauf que le conseil d'administration de l'agence va gérer plusieurs secteurs. Il va y avoir des infrastructures, des routes, il peut y avoir des technologies, il peut avoir des hôpitaux. Donc, il y a un problème aussi de nombre, tant qu'à moi.

Et j'aimerais aussi vous entendre sur la possibilité... Toujours, je vais dire, pour redonner ou donner confiance aux citoyens dans le processus démocratique, est-ce que les gens qui vont siéger au conseil d'administration ne devraient pas être choisis par une commission de l'Assemblée nationale à partir d'une liste qui serait élaborée par les gens du Conseil du trésor ou le dirigeant de l'agence?

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): La première question, au niveau des conflits d'intérêts, je crois que vous avez raison, ce serait une chose qui devrait être considérée. Je ne crois pas qu'un membre d'un conseil d'administration qui serait à l'intérieur d'une firme informatique pourrait arriver puis... À mon avis, pour ces questions-là, il faudra absolument qu'il se retire parce qu'il pourrait être en conflit d'intérêts, ça, c'est garanti. Ce qu'on dit, pourquoi qu'on voudrait les trois parties, privé, public et syndicats, c'est qu'à notre avis, dans tous les PPP qui pourraient toucher les technologies, ces trois membres-là, ils vont être touchés dans chacune. Donc, on dit: Au moins que le conseil d'administration puisse voir les points de vue des trois parties.

M. Picard: O.K. Merci.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Richelieu.

n(17 h 50)n

M. Simard: Oui, une dernière question. Vous m'avez un peu inquiété tout à l'heure, dans votre réponse, quand vous avez précisé ce que serait pour vous une tarification d'un PPP dans le domaine des technologies de l'information. Vous avez parlé de nouveaux programmes. Vous avez donné évidemment l'exemple de Merx. Mais là ce sont des entreprises qui ont accès à ça, ce n'est pas le citoyen ordinaire, et il a un intérêt à suivre, au jour le jour, les appels d'offres. Donc, d'investir dans l'information, ça va à peu près. Mais je vais vous donner un exemple complètement inverse, là, mais qui correspond à votre définition, le service d'accès en ligne pour le traitement des bourses des étudiants. On aurait pu vous confier ça en PPP, c'est-à-dire que des étudiants seraient obligés de payer pour avoir accès à leur dossier. Évidemment, je caricature un peu, là, mais il faut être très prudent lorsque vous annoncez que l'immense majorité de ces... ce que vous appelez les PPP, là, seraient financés par tarification. Moi, ce que vous avez ouvert là sur les programmes m'inquiète plutôt.

Le Président (M. Paquet): M. Lemieux.

M. Lemieux (Claude): J'amènerais une précision, c'est que je ne crois pas que ce serait le privé à faire la tarification. Moi, je crois que la tarification devrait être établie dès...

M. Simard: ...de bonne heure.

M. Lemieux (Claude): ...la négociation des contrats. Ce n'est sûrement pas le privé qui va décider comment tarifer le citoyen.

M. Côté (Gratien): Je pourrais peut-être ajouter quelque chose.

Le Président (M. Paquet): M. Côté.

M. Côté (Gratien): L'idée principale, ce n'était pas nécessairement de tarifer les services qui vont en partenariat. On disait que c'était plus facile de mesurer la valeur du service dans un cas où il y a un utilisateur ? on l'a appelé utilisateur-payeur mais... en fait où on peut compter le service ou l'utilisateur versus, à l'autre extrême, où c'est une réduction de coût par rapport à ce que ça aurait pu coûter si ça avait été fait à l'interne. Et ce n'est pas obligatoirement l'utilisateur qui doit payer, ça pourrait être le ministère. C'est juste que c'est plus facile de mesurer la valeur du service obtenu dans ces conditions-là.

M. Simard: Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. Alors, au nom de la Commission des finances publiques, je remercie M. O'Hara, M. Gadbois, M. Côté et M. Lemieux, du Regroupement des partenaires du gouvernement en technologie de l'information, pour leur participation à nos travaux. J'ajourne les travaux de la Commission des finances publiques jusqu'à demain après-midi, après les affaires courantes.

(Fin de la séance à 17 h 52)


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