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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 17 janvier 2017 - Vol. 44 N° 150

Consultations particulières et auditions publiques à l’égard du document intitulé Consolider le Régime pour renforcer l’équité intergénérationnelle et du document de soutien Constats sur la retraite au Québec


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Carlos J. Leitão

M. Alain Therrien

M. Marc Picard

Auditions

Réseau FADOQ

Corporation des thanatologues du Québec (CTQ)

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Comité d'experts sur l'avenir du système de retraite québécois

Autres intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. André Fortin

M. Jean-Denis Girard

*          M. Maurice Dupont, Réseau FADOQ

*          M. Danis Prud'homme, idem

*          M. Denis Desrochers, CTQ

*          M. Jacques Poirier, idem

*          Mme Annie Saint-Pierre, idem

*          M. Yves-Thomas Dorval, CPQ

*          M. Michel St-Germain, idem

*          M. Stéphane Forget, FCCQ

*          M. Claude Paradis, idem

*          M. Alexandre Gagnon, idem

*          M. Alban D'Amours, Comité d'experts sur l'avenir du système de retraite québécois

*          M. Bernard Morency, idem

*          M. Luc Godbout, idem

*          M. René Beaudry, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quatorze heures cinq minutes)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et, bien sûr, je demande à toutes les personnes dans la salle, qui sont très nombreuses, d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et auditions publiques à l'égard du document intitulé Consolider le Régime pour renforcer l'équité intergénérationnelle et du document de soutien Constats sur la retraite au Québec.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Bonnardel (Granby) est remplacé par M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Spénard (Beauce-Nord) est remplacé par M. Lefebvre (Arthabaska).

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le secrétaire. Alors, bon après-midi à tous. Bienvenue aux parlementaires qui vont participer à cette commission fort importante pour les Québécoises et les Québécois. Donc, c'est d'avenir qu'on va discuter au niveau de la Régie des rentes. Bienvenue aux gens de Retraite Québec qui sont ici présents. M. le ministre, merci d'être là. Merci à vous tous.

Remarques préliminaires

Donc, sans plus tarder, M. le ministre, la parole est à vous, vous avez environ six minutes pour vos remarques préliminaires.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour aussi de souhaiter la bienvenue aux collègues parlementaires, surtout les nouveaux arrivants. Alors, je suis sûr que vous allez bien apprécier nos travaux parlementaires. Vous commencez bien, parce que c'est une bonne commission parlementaire. Donc, bienvenue. Cher collègue député de Sanguinet, bonjour, M. le Président, chers collègues du côté ministériel, bonjour, bonne année, mesdames messieurs. Alors, je suis ravi de constater la bonne représentativité des groupes concernés par cette consultation, ils vont pouvoir éclairer et enrichir notre consultation, et qui vont pouvoir aussi alimenter notre réflexion.

Je suis heureux de pouvoir échanger sur les propositions et les mesures mises de l'avant dans le document de consultation sur le Régime des rentes du Québec que j'ai déposé à l'Assemblée nationale le 8 décembre dernier. Je vous remercie à l'avance de votre participation à cette consultation, qui vise à faire évoluer et à consolider le régime afin de renforcer l'équité intergénérationnelle.

Permettez-moi également de vous présenter les personnes de Retraite Québec qui nous accompagnent — alors, M. Michel Després, bien sûr, président-directeur général; M. Clément D'Astous, vice-président aux politiques et aux programmes; Mme Sonia Potvin, ici à ma droite, directrice du régime public des rentes; M. Charles Cossette, chef du Service de développement des programmes — et M. Jean-François Therrien, chef du Service d'évaluation et d'administration provisoire et actuaire en chef, de la Régie des rentes.

Alors, la question de la retraite est fondamentale pour les Québécoises et les Québécois. C'est important, car il s'agit de notre sécurité financière, de notre bas de laine, comme on dit souvent. Au Québec, notre système de retraite est constitué de trois paliers représentant les principales sources de revenus à la retraite : le premier étant les programmes de Sécurité de la vieillesse et le supplément du revenu garanti; le deuxième, le Régime des rentes; et le troisième, les régimes de retraite des employeurs et l'épargne personnelle. La consultation que nous débutons aujourd'hui portera sur le deuxième palier, le Régime des rentes du Québec.

Il y a plus de 50 ans, le Québec s'est doté d'une forme d'assurance publique et obligatoire pour offrir une sécurité financière de base à la retraite pour le plus grand nombre de citoyens. C'est ainsi que le Régime de rentes du Québec a vu le jour, fondé sur les valeurs de justice sociale, de stabilité et d'équité ainsi que sur une responsabilité partagée entre l'État, les employeurs et les travailleurs. Aujourd'hui, le régime est en bonne santé financière notamment grâce aux différentes mesures de redressement introduites par le gouvernement du Québec au cours des dernières années. Cette santé financière lui permet d'offrir aux Québécoises et aux Québécois une protection financière de base à la retraite, au décès et en cas d'invalidité.

Lors de ces consultations, nous voulons nous tourner vers l'avenir et discuter des propositions d'évolution du régime dans son environnement sociodémographique. Nous voulons le faire en gardant à l'esprit trois objectifs fondamentaux, principes qui ont guidé notre réflexion dans l'élaboration de ces propositions : d'abord, adapter le régime à son environnement socioéconomique et démographique afin de renforcer sa pérennité; deuxièmement, respecter la capacité de payer des travailleurs et des entreprises; et finalement réaliser tout cela dans le respect du principe d'équité intergénérationnelle. Nous voulons le faire aussi en considérant les défis auxquels nous faisons face : l'espérance de vie, qui continue d'augmenter; le vieillissement de la population, qui est plus important au Québec qu'ailleurs au Canada; le taux d'activité, qui est plus faible chez les travailleurs québécois de 60 ans et plus par rapport aux juridictions voisines.

• (14 h 10) •

En raison de la place que le Régime des rentes occupe dans le système québécois de sécurité financière à la retraite mais également parce que nos enfants et nos petits-enfants puissent profiter, eux aussi... nous avons la responsabilité et le devoir de poursuivre l'adaptation du régime aux nouvelles réalités des travailleurs québécois ainsi qu'aux transformations du marché du travail. Le régime doit demeurer juste, fiable et équitable pour toutes les générations.

La consultation qui s'amorce s'articulera autour de deux axes. Un premier axe dans lequel nous traitons de la question de la bonification du régime. Trois propositions principales sont présentées. Si chacune d'elles vise à répondre aux problématiques soulevées, ces propositions présentent certains avantages mais aussi certains inconvénients. C'est pourquoi j'avais pris l'engagement de soumettre ces propositions lors d'une consultation. Il est important de permettre aux parties directement concernées — les travailleurs, les employeurs — de pouvoir s'exprimer sur ces positions-là. Nous pourrons avoir des discussions franches et ouvertes sur celles-ci, discussions qui devront tenir compte de la capacité de payer des travailleurs à plus faibles revenus, des entreprises, du taux de remplacement du revenu à la retraite ainsi que des effets induits notamment sur les programmes fédéraux comme le SRG. Nous voulons, grâce à ces consultations, entendre les parties prenantes pour enrichir notre réflexion et prendre la meilleure décision dans l'intérêt du Québec et des Québécois.

Dans un deuxième axe, plusieurs mesures structurantes sont proposées aussi afin de renforcer la pérennité du régime, par exemple examiner le relèvement de l'âge minimal de la retraite... de la rente de retraite anticipée pour favoriser le maintien en emploi des travailleurs expérimentés, augmenter les revenus de retraite et stabiliser les cotisations, simplifier et uniformiser la protection en cas d'invalidité à partir de l'âge minimal d'admissibilité à la rente de retraite anticipée pour offrir une meilleure protection en cas d'invalidité et assurer la pleine capitalisation des améliorations au régime et introduire aussi un facteur de longévité.

En terminant, soyez assurés de notre ouverture et de notre écoute. Nous espérons donc avoir des échanges constructifs sur celles-ci afin d'alimenter les réflexions. Rappelons, pour conclure, que les générations qui nous suivent ont autant le droit que celles qui les ont précédées à de bonnes conditions de retraite, et c'est dans cette perspective que nous voulons travailler. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, pour vos remarques préliminaires. Je vais me tourner vers le député de Sanguinet, porte-parole officiel de l'opposition.

M. Alain Therrien

M. Therrien : ...combien de temps?

Le Président (M. Bernier) : 3 min 30 s, mais...

M. Therrien : Ce n'est pas assez.

Le Président (M. Bernier) : ...si jamais vous en prenez plus, à ce moment-là on peut diminuer ailleurs. Il n'y a pas de problème.

M. Therrien : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Vous savez, il y a toujours un plus et un moins, en ce qui me concerne.

M. Therrien : Oui, je le sais, oui. Je le sais. Alors, permettez-moi de vous saluer, M. le Président. Je suis très content de vous voir. Et vous menez toujours vos commissions d'une main de maître, et je suis convaincu que vous allez justement remplir encore une fois votre mandat avec une grande compétence qui vous caractérise bien. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : Heureux d'être de retour. Merci.

M. Therrien : Je salue le ministre. C'est toujours agréable de travailler avec le ministre, avec son équipe, avec l'équipe de députés qui l'accompagnent. Les collègues de la seconde opposition, le nouveau venu, je vous salue particulièrement. Bravo pour votre victoire très, très étincelante. Écoutez, je suis ici temporairement. Le député de Beauharnois sera là à partir de jeudi après-midi, selon ce qui a été convenu. Donc, je serai là de façon temporaire. Je vais essayer de remplir ce mandat-là avec compétence, je vais travailler fort en ce sens-là.

Évidemment, écoutez, on était sur le projet de loi n° 106 voilà pas longtemps puis on avait dénoncé ça au départ, cette façon de faire là. On avait appelé ça, à l'époque, un déficit démocratique. Ça veut dire qu'avant d'arriver dans les vacances on avait envoyé les convocations pour une commission qui commençait très rapidement par la suite, et les gens, à l'époque, avaient critiqué beaucoup cette façon de faire là, parce qu'ils disaient : On n'a pas eu le temps pour se préparer puis on aurait aimé ça réfléchir davantage à ce qui a été proposé, ainsi de suite. Et là on refait le coup avec une convocation qui a été lancée le 21 décembre pour arriver très tôt au lendemain des fêtes avec justement l'analyse d'un dossier. Puis, le ministre l'a vraiment mentionné avec brio, c'est un dossier extrêmement important, on parle de quelque chose d'essentiel pour l'ensemble de la communauté québécoise, ça veut dire l'avenir financier de nos Québécois et nos Québécoises. Et il y a des gens qui ont soulevé cette façon de procéder et qui ont condamné ça.

On avait demandé à la Caisse de dépôt de venir. Finalement, le gouvernement n'avait pas voulu, au départ, faire cette demande. Par la suite, la Caisse de dépôt a été invitée. Ils ont refusé. On ne sait pas pourquoi. L'Ordre des CPA nous a dit formellement qu'il avait refusé l'invitation parce qu'il n'avait pas le temps justement d'arriver avec un éclairage assez précis sur cette proposition qui a été faite par le gouvernement, puis c'est d'autant plus étonnant qu'on attendait... Parce que la loi sur les régimes de retraite du Québec, avec l'article 218.1, nous mentionne qu'à tous les cinq ans il faut faire cet exercice-là. Donc, c'était dû en automne 2014, on a attendu pendant deux ans, alors que la limite ultime, c'était l'automne 2015. On a attendu. Et là on se réveille, on précipite les choses. On ne peut pas dire qu'on est très satisfaits de cette façon de procéder là. Et, malheureusement, ça se répète. Puis, je vais vous dire franchement, je ne lance même pas la pierre au ministre, parce que les autres ministres font de même. Je pense que l'ordre vient de plus haut. Puis, peu importe d'où ça vient, bien, je ne peux pas dire que le ministre est exceptionnel dans sa façon de procéder, c'est ce qui est malheureux, c'est qu'on voit que c'est généralisé.

Écoutez, c'est un dossier important. Le rapport D'Amours nous mentionne que, justement, le financement public des retraites a évidemment une importance capitale pour l'ensemble des Québécois, mais aussi c'est un support essentiel pour la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées, les régimes privés. Alors, ça, c'est extrêmement important à comprendre. Les Québécois méritent une meilleure couverture de leurs vieux jours, alors c'est important de bien, bien analyser ça. On a une semaine au lieu de deux... habituellement, c'est deux semaines qui nous est attribué, pour justement faire un éclairage plus... moi, je vous dirais, plus intelligent. Évidemment, plus c'est long, plus on a des arguments solides. L'équité intergénérationnelle dans ce qui nous est proposé, c'est difficile. Il y a des gens qui ont soulevé justement leurs inquiétudes par rapport à l'équité intergénérationnelle. Il y a une absence à ce niveau-là. La capacité de payer par rapport aux travailleurs, par rapport aux PME... Il faut trouver un point d'équilibre entre, justement, assurer l'avenir financier des Québécois et la capacité de payer de ces derniers.

Dernier point important, et ça, c'est assez unique, le gouvernement qui est le plus fédéraliste de l'histoire du Québec a négocié une position, par rapport aux régimes de retraite, avec le reste du Canada. Ils ont été incapables de s'entendre, et ça, ça crée un problème de concordance. Et moi, je vais questionner le ministre, pendant le temps que je vais être ici, là, sur la concordance, à quel point il a prévu cette concordance-là, ce manque de concordance là, parce que le régime fédéral... bien, le régime des autres provinces sera plus avantageux, plus généreux que celui du Québec, et ça va créer des problèmes, de graves problèmes quand viendra le temps d'appliquer les changements proposés par le gouvernement. Alors, ça, c'est la preuve, encore une fois de plus, que, quand tu négocies à genoux avec le reste du Canada, tu obtiens de très mauvais résultats. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Sanguinet, de votre présentation. J'invite donc le porte-parole officiel au niveau du deuxième groupe d'opposition, le député de Chutes-de-la-Chaudière... Et, bien sûr, permettez-moi de souhaiter la bienvenue au député d'Arthabaska à la Commission des finances publiques. Bienvenue. Vous savez, c'est un privilège d'être député. Vous en avez le mandat maintenant. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, M. le Président. Permettez-moi tout d'abord de saluer les collègues parlementaires ainsi que tout le personnel qui va nous accompagner, cette semaine, sur cet important sujet, cette consultation. Je tiens aussi à remercier les gens et les groupes présents qui se feront entendre tout au long de la semaine de la consultation publique sur le Régime des rentes du Québec, cette consultation qui, disons-le, porte sur un sujet sensible et complexe qui nécessite toute notre attention.

Le sujet des retraites au Québec est un sujet extrêmement important qui concerne l'ensemble des Québécois et surtout qui aura des répercussions à long terme. Nous serons particulièrement à l'écoute des différents acteurs qui se feront entendre dans les prochains jours, afin de connaître le portrait réel de la retraite au Québec. Actuellement, il est difficile de prendre position entre les différents scénarios, mais nous sommes intimement convaincus qu'il est primordial de miser sur l'équilibre, l'équilibre au sens où il est important que les Québécois puissent avoir un revenu de retraite décent tout en assurant la pérennité du régime, mais pas au détriment des travailleurs québécois, déjà qui sont surtaxés, en leur imposant des augmentations de cotisation trop importantes. Et, tout comme il ne faut pas non plus imposer un fardeau plus important à nos petites et moyennes entreprises, il est clair, M. le Président, qu'à long terme les cotisations devront être augmentées afin de préserver la pérennité du système. Cependant, un équilibre devra être trouvé entre tous ces aspects et les aspects qui seront soulevés par les différents groupes que nous entendrons cette semaine.

Les Québécois bénéficient, aujourd'hui, de plusieurs outils pour planifier leur retraite. Certains outils ont été rendus disponibles dans les dernières années, par exemple le régime volontaire d'épargne-retraite. Qu'en est-il des résultats aujourd'hui? Le constat que nous avons est que ce programme n'a pas eu l'effet escompté.

• (14 h 20) •

À notre avis, la réflexion sur la retraite devrait être beaucoup plus étendue de ce qui est proposé. Exemple, M. le Président, on parle de plus en plus... il y a des gens qui travaillent sur un régime de revenu minimum garanti. Si un jour c'est instauré, quel impact ça va avoir sur les prestataires de revenus des rentes du Québec? Le ministre pourrait peut-être nous éclairer là-dessus. Mais aussi, dans cette consultation, il y a plusieurs mesures qui mériteraient d'être étudiées et il serait pertinent de considérer les diverses positions sur le sujet, notamment, on en entend beaucoup parler depuis quelques jours, la prestation de décès.

Comme à l'habitude — M. le Président, vous me connaissez depuis plusieurs années — j'offre mon entière collaboration à travailler et à faire avancer cette consultation, d'être bien à l'écoute des gens qui vont venir nous donner leurs points de vue sur ce document, mais, je dois avouer, aussi je suis peiné un petit peu qu'on limite la consultation. Oui, il y a des témoins qui se sont désistés cette semaine, donc il y avait des espaces dans l'horaire, et il y a aussi des gens qui ont demandé à être entendus puis que nous n'avons pas jugé nécessaire d'entendre. J'ai trois documents ici des gens qui ont déposé... qui disaient qu'ils voulaient être entendus. Je comprends que l'horaire était serré au début, mais là il s'est dégagé du temps, puis on ne l'a pas accaparé. Donc, je suis peiné de cette situation-là.

Donc, M. le Président, je termine là-dessus et je vous souhaite une très bonne année 2017.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

Auditions

Donc, sans plus tarder, nous allons débuter notre consultation avec le Réseau FADOQ. Donc, bienvenue, messieurs et madame. Vous avez 10 minutes pour votre présentation. Je crois que c'est M. Dupont qui va prendre la parole. Donc, M. Maurice Dupont, la parole est à vous, allez-y.

Réseau FADOQ

M. Dupont (Maurice) : Alors, tout d'abord, nous sommes heureux d'être parmi les rares privilégiés à pouvoir vous présenter la perspective de notre organisation dans le cadre du projet de bonification de la RRQ.

Je suis accompagné du directeur général, Danis Prud'homme, ainsi que de notre conseillère aux affaires publiques et relations gouvernementales, Caroline Bouchard, qui m'assisteront particulièrement pour la période de questions.

Le Réseau FADOQ est un regroupement de personnes de 50 ans et plus qui compte plus de 475 000 membres. M. le Président, M. le ministre, messieurs dames les députés, la fenêtre que nous croyons grande ouverte afin de favoriser une qualité de vie adéquate à la retraite semble se rétrécir petit à petit au Québec. Permettez-moi d'abord de déplorer la formule de consultation à laquelle nous prenons part, qui est viciée de par son délai raisonnable, et la ferme position gouvernementale que préconise le scénario Québec sans qu'un réel débat sur la volonté des Québécois n'ait eu lieu. Vous nous voyez particulièrement déçus qu'un processus de réévaluation de la RRQ se voie accorder quatre jours de délibération pour des enjeux aussi fondamentaux que la bonification des rentes du Québec, l'équité intergénérationnelle et la pérennité du régime.

Nous avions la chance ici de faire preuve de vision, d'aller bien au-delà des considérations électorales et strictement actuarielles pour réfléchir les assises de la société de demain. Alors que l'issue de la proposition canadienne de la bonification au RPC est décevante, le scénario Québec est encore moins avantageux. Comment pouvons-nous aujourd'hui justifier que les retraités du Québec seront les parents pauvres du Canada? À ce titre, nous sommes particulièrement étonnés que le gouvernement québécois de 2016 pousse le Québec vers une position strictement distincte, alors que le gouvernement de 2013 se ralliait, lui, à une position de bonification et de nivellement par le haut dans le cadre des négociations avec la fédération.

Le Réseau FADOQ se positionne fermement en faveur d'une bonification supérieure, sinon égale à la proposition canadienne, et ce, pour de multiples raisons que nous vous présenterons. Nous sommes d'avis que la proposition que fait le gouvernement du Québec comporte, à très court terme, des mesures ayant pour conséquences l'appauvrissement des futurs retraités, l'accroissement de leur dépendance au régime d'aide de dernier recours en plus de constituer une mesure discriminatoire. Le scénario Québec taxerait de manière systémique les Québécois sur qui reposerait le fardeau d'assurer leurs vieux jours, favorisant ainsi les plus nantis de la société.

En premier lieu, le Réseau FADOQ a consulté plusieurs économistes qui démontrent clairement que la proposition actuelle appauvrirait les Québécois de manière irrévocable. De fait, il semble que, contrairement au Canada, les Québécois ne bénéficieraient pas d'une bonification de prestations de 33,3 %, puisqu'en excluant le premier 50 % du maximum des gains admissibles les retraités qui cotisent au nouveau MGA ne bénéficieraient concrètement que de 29,6 % du taux de remplacement. Par contre, la grande majorité des travailleurs, que cette réforme dit vouloir aider, recevraient beaucoup moins. D'ailleurs, plusieurs économistes évaluent l'écart de revenus entre la proposition RPC et la proposition RRQ à 12,26 % au maximum de la rente, mais le pourcentage est d'autant plus important que les travailleurs à faibles revenus... Comment peut-on justifier cette disparité, particulièrement lorsque l'on pense que les Québécois ont payé plus cher de cotisations depuis des décennies?

En deuxième lieu, si le gouvernement adopte le scénario Québec, rien ne permettra aux Québécois à faibles et moyens revenus de sortir de la trappe fiscale qu'est le SRG. Or, avec sa proposition, le Canada, quant à lui, entreprend d'outiller ses ménages à plus faibles revenus afin qu'ils s'extirpent des ficelles de dépendance au SRG. Dans le cas présent, le Québec ne fait pas une priorité... laissant ainsi un vaste pourcentage de la population assujetti et tributaire d'un régime fédéral tout en présumant que celui-ci sera maintenu dans le futur, alors que rien n'est moins certain.

Aussi, le scénario Québec introduit un nouveau principe dit d'équité intergénérationnelle, nommément le facteur de longévité. Si nous saisissons bien la proposition gouvernementale, nous devons stopper la longévité pour les femmes, qui se situe déjà au seuil toléré pour la prestation déterminée, sans quoi, en 2030, leurs prestations seront réduites. Donc, on transforme le RRQ d'un régime à prestations déterminées pour en faire un régime à prestations cibles. Il s'agit là carrément d'une proposition antiprogressiste. Autrement, le gouvernement a-t-il pris en considération qu'il est scientifiquement démontré que l'espérance de vie des ménages à faibles revenus est moindre que celle des ménages plus nantis?

En troisième lieu, mentionnons qu'à la lecture de l'article 3 de la loi sur les régimes de pension du Canada (L.R.C., 1985) on peut y lire l'obligation pour un régime général de pension provincial d'être comparable tant par ses cotisations que par ses versements. Or, l'alternative proposée par le gouvernement du Québec n'est clairement pas comparable, principalement du fait que ni ses cotisations ni ses versements ne seront comparables à ceux de nos homologues canadiens.

En dernier lieu, le Réseau FADOQ est particulièrement préoccupé par cette constatation, qui ferait des retraités québécois les porteurs d'eau du Canada, mais, plus encore, il créerait des différentes classes de citoyens sur un même territoire. D'abord, comment le gouvernement envisage-t-il de gérer les contributions des travailleurs fédéraux qui pour le moment se font à la Caisse de dépôt? Effectivement, un citoyen québécois bénéficierait d'environ 22 000 $ de moins à la retraite que les autres Canadiens. Il n'a aucun avantage à continuer à contribuer au Québec. Ensuite, comment le gouvernement envisage-t-il de régler les enjeux liés aux syndicats nationaux? Plusieurs employeurs sont pancanadiens, et le travailleur résidant sur le territoire québécois fera moins que son collègue de l'Ontario, malgré qu'ils travaillent tous deux pour la même compagnie et font partie d'un même syndicat. Aussi, comment le gouvernement entend gérer une situation où un travailleur contribue au RPC mais habite le territoire du Québec? Retirera-t-il le RRQ? Autrement, comment le gouvernement considère qu'il sera en mesure de maintenir le levier de négociation, un vote et une voix dans les discussions entourant le RPC? Évidemment, ce ne devrait plus être possible. Ce faisant, comment pouvons-nous justifier de s'exclure unilatéralement?

Finalement, comment le gouvernement envisage-t-il d'expliquer aux Québécois que de travailler et contribuer au Québec représente un revenu à la retraite moins important que leurs confrères des autres provinces? Comment ne s'agit-il pas là de la plus grande discrimination? À la lumière des réactions gouvernementales précédentes, il serait important que ces questions ne soient pas résolues ultérieurement par règlement, puisqu'elles constituent d'importants éléments au présent débat.

En conclusion, le Réseau FADOQ prend fermement position en faveur du scénario que proposent les provinces canadiennes, puisqu'actuellement, en proposant aux Québécois des prestations inférieures d'au minimum 12 %, le gouvernement affirme haut et fort qu'il ne reconnaît pas une valeur équivalente au travail de ses contribuables. Nous sommes passés à côté d'une chance unique de faire bénéficier les Québécois d'une retraite décente. Rappelons-nous que le Québec vit une situation démographique particulière et qu'il serait extrêmement pertinent d'ouvrir un dialogue public sur les options qui se présentent à nous sans se limiter à une bonification mineure, moins qu'une bonification mineure ou le statu quo. D'ailleurs, plusieurs scénarios avaient été proposés, notamment la solution 10-10-10 ou encore la bonification à 40 % comme l'envisageait l'Ontario. À notre sens, il s'agit d'un manque de confiance envers la créativité et la volonté de notre société. Le défi exige des solutions novatrices qui feraient du Québec un leader dans l'adaptation de la société au vieillissement.

Pourquoi faisons-nous le choix conscient de se limiter à moins que le minimum? La bonification des régimes de retraite est une façon d'assurer le maintien de la vitalité économique du Québec et de maintenir le pouvoir d'achat des retraités de la classe moyenne. Rappelons qu'à partir de 2031 la proportion de 65 ans et plus dépassera 25 %. Comment allons-nous stimuler notre économie si un quart de notre population est pauvre? Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Dupont, de votre présentation. Nous allons donc procéder aux échanges avec les parlementaires et nous allons débuter avec la partie ministérielle. M. le ministre, la parole est à vous.

• (14 h 30) •

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, madame messieurs, d'être là. Je dirais d'entrée de jeu que nous n'avons pas de décision prise, d'emblée. On a ces consultations pour voir s'il y a un consensus. Donc, c'est le début du processus, ce n'est pas la fin du processus. Il y aura par la suite une réflexion qui va se faire par nous, par le gouvernement, par Retraite Québec à la lumière de toutes les représentations qui seront faites ici, les groupes qui seront venus mais aussi les autres qui nous ont envoyé des mémoires et éventuellement il y aura des changements législatifs et donc il y aura d'autres commissions parlementaires où on pourra discuter longuement de ces choses à nouveau. Donc, on est au début du processus, on est très loin d'être à la fin, et, en fin de compte, il y a essentiellement trois propositions sur la table, je n'ai pas pris de décision a priori sur laquelle on va statuer : il y a le statu quo, bien sûr, il y a une proposition qui serait celle adoptée en juin dernier par le gouvernement canadien et les autres provinces et il y en a une troisième, qui est celle que nous avons proposée à cette réunion-là en juin à Vancouver, donc. Et c'est pour ça que nous avons ces consultations pour qu'on puisse avancer dans cette réflexion.

L'autre élément, et ici je rejoins entièrement les propos de mon collègue de la CAQ, c'est que, quoi qu'on fasse, il faut qu'on le fasse à l'intérieur de notre capacité de payer. Vous avez parlé, donc, des déséquilibres entre les prestations, que les retraités québécois recevraient moins que les retraités canadiens, mais vous n'avez pas mentionné les cotisations. Ce sont aussi les employés et les employeurs québécois qui doivent financer le système, et une chose où, je pense, nous sommes tous d'accord, c'est que quelque changement qui soit fait, quelque bonification qui soit faite doivent être pleinement capitalisés. Donc, ce seront les employés et les employeurs qui vont la financer, et déjà, au Québec, nos cotisations sont un peu plus élevées.

Alors, j'aimerais vous entendre un peu là-dessus, sur : Comment vous voyez... vous avez abordé l'aspect prestations, et je comprends très bien votre point, comment vous envisagez le côté contributions? Jusqu'où est-ce que les contribuables québécois et les entreprises... jusqu'où on peut aller en termes d'alourdir le fardeau fiscal?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Oui. Donc, je devrais dire tout d'abord, d'entrée de jeu, que, si on regarde les scénarios qui avaient été acceptés ailleurs, si on regarde, l'Ontario, ce qu'ils avaient fait, qu'ils se sont ralliés au scénario Canada, on le sait. Par contre, je pense que ça avait été bien analysé. On a vu les études qu'ils avaient faites, on a vu les chiffres, les cotisations. Donc, si c'était viable pour eux ou, si le scénario Canada est viable pour le Canada et le Québec, on dit : On a de la difficulté à accepter de tels scénarios, bien, la question que nous, on pose, c'est... Je ne pense pas que nos gens sont moins compétents, moins intelligents, moins performants. Alors, si le reste du Canada est capable d'aller de l'avant avec une telle proposition, je pense que le Québec est capable aussi, d'entrée de jeu.

Si on regarde au niveau des cotisations, évidemment, il y a une hausse de cotisation, oui, parce que, on le voit, au niveau de l'Ontario et comme au niveau du scénario Canada actuellement, il y a une hausse de cotisation. Je pense que, quand on dit... et c'était aujourd'hui dans les journaux avec ce qui se passe à Davos, on dit que la majorité de nos PME au Canada voient d'un bon oeil les années à venir, que près des trois quarts pensent réinvestir des sommes quand même considérables, bien, je pense qu'un investissement dans les travailleurs, c'est l'investissement de base si on veut que les PME continuent à évoluer, et toutes nos entreprises au Canada. Donc, on doit voir les cotisations de l'employeur comme un investissement dans ses ressources qui sont ses ressources primaires, les humains et, du côté de l'humain, donc du travailleur, de voir qu'il investit dans sa retraite future.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Écoutez, je veux aussi laisser la parole à mes collègues, mais je soulignerais qu'on est d'accord, là, ce n'est pas une question de compétence ou quoi que ce soit, c'est une question de capacité de payer et le fait que nous avons un profil démographique qui est bien différent de ceux de nos voisins canadiens et aussi le fait que notre richesse collective est moins élevée que celle des provinces voisines. Donc, pour pouvoir avoir les mêmes prestations que nos voisins, même si on ne change rien d'autre, juste pour avoir les mêmes prestations, il faut cotiser plus. Si on veut avoir les mêmes cotisations que nos voisins canadiens, on va avoir moins de prestations qu'eux. Donc, ça, c'est la réalité dans laquelle nous vivons.

Ultimement, ce sera une question de choix : Jusqu'où est-ce qu'on peut imposer un fardeau à nos entreprises et à nos travailleurs? Comme je vous ai dit tantôt, je n'ai pas d'idée préconçue. La proposition canadienne, c'est un scénario. La proposition québécoise que nous avons faite en juin, je pense qu'elle a aussi plusieurs mérites, mais c'est de ça qu'on va juger. Et, si j'ai bien compris votre intervention, vous êtes entièrement du côté de la proposition canadienne, donc que le Québec devrait au minimum adopter ce qui a été discuté en juin à Vancouver.

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : En fait, comme on l'a mentionné, effectivement, ce n'est pas le meilleur scénario, mais, pour nous, c'est le mieux qu'on a sur la table actuellement. Ce n'est pas ce qu'on préconisait. On préconisait davantage. On a fait campagne, depuis les dernières années, au Québec avec plein d'autres organisations qui demandaient à ce qu'on se penche sérieusement, sur une longue période, à savoir comment réévaluer notre système de retraite, surtout avec tous les changements de loi qu'il y a eu lieu concernant tous les régimes complémentaires de retraite et toutes les fermetures et changements pour différentes sortes de systèmes de retraite, alors que des rapports d'experts démontraient que le RPD était le système par excellence qu'on devait conserver.

Donc, c'est sûr que, si on revient aux cotisations — peut-être que je me suis mal exprimé — ce que je voulais dire, c'est que je pense qu'on est capables d'aller chercher les cotisations que ça prend pour avoir un système de retraite équivalent à ce qui se passe au reste du Canada, et je pense qu'il faut le voir non pas comme un fardeau, parce que, vous l'avez bien répété, je l'ai réentendu, pour moi, c'est un investissement que l'employeur fait dans sa main-d'oeuvre, et, l'employé, c'est un investissement dans sa retraite. Donc, je pense qu'il faut le voir comme ça.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Leitão : Peut-être une dernière chose, collègues, avant de vous passer la parole. J'ai bien entendu, mais est-ce qu'on est d'accord sur le fait que toute future modification ou amélioration, bonification du régime de pension, tout futur changement, amélioration devront être pleinement capitalisés, donc qu'il n'y a pas de changement de subvention intergénérationnelle?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : On est d'accord avec la capitalisation pour le surplus, oui.

M. Leitão : O.K. Très bien.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Merci à nos invités qui se sont déplacés aujourd'hui. M. Dupont, M. Prud'homme, Mme Bouchard, merci d'être avec nous. M. le Président, bien, bravo pour votre retour, on est contents de vous avoir parmi nous et de vous voir en pleine forme. Et, bien sûr, à tous les collègues, un bon début d'année, une bonne continuité dans nos travaux.

J'ai quelques questions pour vous en lien avec votre mémoire que vous avez déposé, évidemment, là, parce qu'à l'intérieur de votre mémoire vous dites, comme il a été dit, là... au minimum, ce que vous souhaitez, c'est le scénario qui est proposé, disons, par le gouvernement fédéral. Alors, peut-être que je peux m'attarder à certaines des différences, si vous voulez, entre le scénario que le ministre avait amené à la table et celui du fédéral juste pour bien comprendre ce que vous voyez comme avantages tant pour le travailleur que pour le retraité, si on s'entend.

Une des grandes différences que moi, je vois, là, dans les deux scénarios, c'est les gens qui font en bas de 27 500 $. Si je ne me trompe pas, là, c'est là qu'il y a une différence entre le taux de remplacement du revenu qui est proposé, donc, ce qui veut dire que, dans le scénario fédéral, oui, il y a des prestations qui sont supérieures, mais il y a des cotisations qui sont supérieures également. Alors, si je pense à une travailleuse, disons, qui travaille au salaire minimum environ... donc, si je l'extrapole, quelqu'un qui fait le salaire minimum, qui travaille à temps plein fait environ, disons, 20 000 $ par année, O.K.? Quelqu'un qui fait 20 000 $ par année, et j'en connais beaucoup, il y en a beaucoup dans mon comté, parce que, quand il y a des hauts et des bas, là, dans certains cycles comme l'industrie forestière, chez nous, souvent, on se retrouve avec des emplois au salaire minimum. Est-ce que, parce que je le retrouve souvent dans votre mémoire... Le maintien de leur niveau de vie à la retraite, c'est ce que vous souhaitez pour la plupart des Québécois. Je comprends, c'est ce qui est souhaitable, mais pour quelqu'un qui est au salaire minimum est-ce que, dans le scénario proposé par le Québec... Moi, je comprends que cette personne-là est capable de maintenir son niveau de vie. On s'entend que c'est un niveau de vie, là, qui était au salaire minimum, mais qu'à la retraite il peut quand même maintenir son niveau de vie, ce maintien-là est assuré.

Est-ce que vous avez la même compréhension que moi par rapport à cette question-là?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

• (14 h 40) •

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, quand on parle de niveau de vie, si on regarde les chiffres, évidemment, plus on se rapproche du salaire minimum, plus le remplacement... Quand on regarde les différents étages que le ministre parlait d'entrée de jeu, bien, il y a un étage qui est le sous-sol, qui est le supplément de revenu garanti, qu'on n'a pas parlé, là, comme tel, parce qu'avant d'arriver à la Sécurité de la vieillesse il y a aussi celui-là. Donc, les gens bénéficient, et on le mentionne dans notre mémoire, de ça.

Le but, la façon... si on ne bonifie pas du zéro à 27 500 $, ce que ça fait, c'est que ces gens-là sont totalement tributaires de ce que le supplément de revenu garanti va faire à l'avenir pour assurer un minimum de base. Et, quand on regarde au niveau du minimum qu'on doit apporter, bien, vous savez, si on se fie sur le seuil de pauvreté... C'est 17 000 $, à peu près, calculé par les statistiques. Donc, 17 000 $, là, si on ne s'entend pas, ce n'est pas une qualité de vie, là, quand on est à la retraite, c'est : on est proche de ne pas être capable de joindre les deux bouts chaque fois qu'il y a une augmentation de tous les services utilitaires, de tout ce qui est le panier d'épicerie, donc, et on s'isole et on a des médicaments qu'on ne peut plus payer. Donc, c'est un cercle sans fin qui mène, malheureusement, à l'isolement et la mort, donc ce n'est pas ça qu'on veut.

Par contre, c'est sûr que, si on bonifie... et c'était dans les scénarios que nous, on a proposés dans les dernières années, il y a une exemption qui va devoir être regardée, ce qui est 3 500 $ actuellement, aujourd'hui. Bien, trouvons le milieu, avec les calculs savants, pour arriver à un juste milieu par rapport au travailleur qui fait moins, pour ne pas qu'il soit pénalisé trop pendant sa vie courante.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Fortin (Pontiac) : Je vais rester sur le cas, là, de quelqu'un qui est aux environs, là, du salaire minimum, là. Et on parlait de voir ça comme un investissement dans leur avenir plutôt qu'un fardeau. Pour quelqu'un qui est au salaire minimum, par exemple, c'est dur de se mettre dans cette mentalité-là et de voir que ce n'est pas un fardeau de faire un investissement additionnel. Vous allez être d'accord avec moi là-dessus, là. Mais, parce que vous avez parlé du supplément de revenu garanti, peut-être qu'on peut y revenir un petit peu plus, là. Savez-vous quelque chose que je ne sais pas, moi?

Vous dites que la prestation fédérale est à risque. Est-ce que vous avez de l'information particulière là-dessus?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : On n'a pas dit qu'elle était à risque, on a dit que, et on l'a vu avec les gouvernements passés, ça peut fluctuer. Donc là, oui, on l'a bonifié, pour les plus vulnérables, à deux reprises, à des pressions que la population a faites, menées de front par des organisations, dont la nôtre, mais on comprend... et c'est pour ça, le scénario, il faut regarder à des façons d'investir dans nous-mêmes, autant les employeurs dans les ressources que nous dans nous-mêmes pour notre retraite.

C'est que le vieillissement de la population, premièrement, ce n'est pas un fardeau, c'est quelque chose qui est réellement devant nous, et je pense qu'on se doit, nous, comme province au Canada qui vieillit le plus vite, regarder à s'assurer des différents scénarios pour que les gens aient une qualité de vie adéquate, comme on mentionne, à la retraite mais aussi pour s'assurer qu'on puisse aller de l'avant avec tous nos mécanismes qu'on a. Et actuellement la majorité de nos mécanismes, qu'on parle de la santé, ou autres, ne sont pas adéquats. Et c'est pour ça que je pense que... on le dit, quatre jours, pour nous, ce n'est pas assez. On est en train de parler de l'avenir du Québec, l'avenir de prestations qui ont pris des années à mettre sur pied et en quatre jours on va modifier quelque chose qui pourrait être très important, donc.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Fortin (Pontiac) : ...M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Ça va? Autres questions? M. le député de Trois-Rivières.

M. Girard : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de saluer les collègues. C'est un plaisir de vous revoir après cette période des fêtes, M. le Président, de vous revoir en santé, tous les collègues députés. Les gens de la FADOQ, merci d'être avec nous.

Donc, à la lecture du mémoire... on regarde le mémoire, puis, bon, on demande de meilleures prestations, on demande un équivalent, on compare avec l'Ontario, on compare avec le Canada, il y a des choses où il y a certains manques au niveau du mémoire. Au niveau du coût de financement, oui, on compare. Vous disiez tantôt : Si l'Ontario est capable de le faire, on est capables de le faire. Si on regarde le niveau de taxation de nos Québécois, il faut regarder notre système de santé, il faut regarder notre système d'éducation, il faut regarder notre taux de taxation, les taxes de vente, etc., le taux de taxation sur certains produits, sur l'essence, etc. Donc, lorsque vient le temps de financer, on ne peut pas dire juste : On va augmenter les prestations et, si l'Ontario le fait, on peut le faire, il faut aller beaucoup plus loin dans l'étude et l'analyse. Donc, je trouve que, dans votre mémoire, on ne s'attarde pas suffisamment à comment on va financer ces augmentations-là.

Pour moi, l'équité intergénérationnelle — j'ai des enfants, j'ai des petits-enfants — l'équité intergénérationnelle est extrêmement importante. Il ne faut pas refiler la facture, nécessairement... ou faire un endettement majeur comme le fédéral est en train de le faire. Pour moi, l'équilibre budgétaire d'une province est extrêmement important, ce qui nous permet d'investir aux bons endroits, ce qui va nous permettre d'avoir des finances en santé pour les générations qui vont nous suivre, qui, elles, vont pouvoir prendre les bonnes décisions. Donc, moi, l'inquiétude que j'ai, c'est d'augmenter le fardeau fiscal de nos jeunes, de nos travailleurs et de nos plus jeunes, nos futurs travailleurs.

Il n'y a aucune solution concernant les hausses d'espérance de vie. On sait que les régimes de retraite ont été faits il y a plusieurs années. L'espérance de vie est beaucoup plus élevée qu'elle était. Les taux de rendement que l'on a sont beaucoup plus faibles que ce qu'ils étaient. À l'heure actuelle, on a plus de prestataires que de cotisants. Vous savez qu'on a certains retraités au Québec qui vont être plus longtemps à la retraite qu'ils étaient au travail.

Donc, un point sur lequel je suis d'accord avec vous, c'est qu'il y a beaucoup de variables, il faut vraiment analyser au complet, mais moi, je trouve que votre analyse du financement des hausses de nos retraités est un peu boiteuse. On ne compare pas des pommes avec des pommes, quand on compare avec l'Ontario, le Canada au niveau de notre système de taxation, au niveau de la façon dont on finance notre régime de retraite, avec l'ensemble des facteurs, tout ce que notre contribuable a à payer en taxes et impôts divers.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, le temps, malheureusement, est écoulé. Si on veut une courte remarque de la part de M. Prud'homme sur le sujet, allez-y, M. Prud'homme, je vous donne une courte remarque.

M. Prud'homme (Danis) : En fait, le mémoire n'est pas boiteux, c'est, je vous dis... ce qu'on a écrit là-dedans, c'est pour résumer pour que les gens puissent le comprendre, c'est un tout qui se tient. Quand on parle qu'on va travailler plus longtemps, est-ce qu'on a développé au Québec ou ailleurs des indices de pénibilité pour le travail? Parce qu'on dit : 65, 67, 70 ans à la retraite, c'est bien beau, là, mais ce n'est pas tout le monde qui peut se rendre là, première chose.

Deuxièmement, quand on regarde au niveau des systèmes, quand on parle d'investissement — vous parlez de fardeau fiscal — la retraite, à ce que je sache, ce n'est pas un fardeau fiscal, c'est nous qui se la payons, donc, oui, ça ajoute par-dessus les taxes. Mais, si on parle cotisant pour cotisant, qu'on travaille en Ontario, en Colombie-Britannique ou ici, si on est capable de cotiser quand on est travailleur, dépendant que les salaires soient semblables d'une province à l'autre, si on regarde le taux de taxation, bien là il faut peut-être se pencher sur ce qu'on a comme systèmes et comme services qui n'est peut-être plus efficace et qu'on paie trop cher et qu'il faut revoir comment on fait les choses pour regarder à optimiser les ressources qu'on peut mettre de l'avant comme fardeau fiscal. Donc, c'est rien que ma réponse. Vous m'avez dit d'aller rapidement. Donc, c'est une partie de ma réponse.

Le Président (M. Bernier) : Nous allons passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, tous les trois. J'ai bien aimé lire votre rapport et aussi vous entendre. On s'entend sur bien des points.

Vous avez parlé, à votre façon, de ce que j'avais appelé le déficit démocratique. Je pense que la réflexion doit être plus profonde de ce qui est proposé dans la démarche. On dit qu'on est en début de processus, mais on a exclu un paquet de groupes, on a des plages de disponibles, on a quatre jours seulement pour réfléchir à tout ça. Moi, je veux vous entendre. Écoutez, j'aurais un paquet de questions à vous poser, mais j'essaie de voir, là, comment je peux soutirer de l'information, là, qui peut nous aider le plus possible.

Cet été, le gouvernement québécois a fait des propositions au reste des provinces. Ça a été exclu. Ils ont leurs propres régimes. Ils se sont entendus là-dessus, et nous, on a reçu ça... ou à peu près, là, ce qui a été déposé, sans trop de changements. C'est problématique, là, parce que vous en avez parlé, de la concordance, du fait que l'ensemble du Canada va dans un sens et nous, on résiste à aller dans ce sens-là. Ça crée des problèmes, puis moi, à la limite, je me demande, je dis : Coudon, ils veulent-u juste le statu quo? Parce qu'il n'y a pas eu de réflexion. Ils n'ont pas eu de réaction à ce qui a été dit au départ. Ça fait qu'ils ont dit, sans trop changer les choses : On va proposer ça. Mais à quelque part, tu sais, on ne s'est pas adapté à la situation.

Je voudrais vous entendre sur les problèmes de concordance, parce qu'il n'y a pas de concordance, là, actuellement dans les régimes de retraite. Vous en avez parlé un peu. Je sais que le député de Pontiac est près des frontières de l'Ontario puis j'imagine que les gens vont affluer à son bureau de comté pour justement se poser de sérieuses questions sur ce qu'on est en train de discuter aujourd'hui. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Écoutez, pour regarder au niveau des points qui sont boiteux, si je reprends le terme qui a été utilisé, au niveau de la concordance, aujourd'hui, si on avait un statu quo, bien, la concordance est d'autant plus grande que, si le scénario Canada avec les autres provinces... Et, si on a le scénario Québec, il y a quand même une concordance qui n'est plus là, donc un écart encore, aussi. Si on prend un travailleur qui travaille à Ottawa mais qui reste à Gatineau, donc, il cotise avec son employeur au RPC, et, quand il prend sa retraite au Québec, il va retirer la RRQ, ce n'est plus pareil, là. Il va recevoir ce que le Québécois reçoit, alors que lui, il aurait dû recevoir plus parce qu'il a payé pour recevoir le RPC. Si on regarde au niveau des entreprises, tout ce qui est fédéral mais qui a des bureaux ici, il y a une concordance, dans la loi, depuis 1966 qui dit que, comme les régimes sont de cotisations semblables et de rentes semblables, le Canada autorise les fonctionnaires fédéraux à payer le RRQ et à recevoir le RRQ. Aujourd'hui, bien, il va recevoir moins que ses collègues qui travaillent pour la même compagnie. C'est de la discrimination, donc il n'y a plus de concordance.

Donc, si on regarde ces différentes choses-là, pour nous, on ne peut pas faire ça, parce qu'après ça, si on décide que, tous ceux qui sont au fédéral mais travaillent au Québec, eux autres, c'est le RPC, que, ceux qui travaillent en Ontario mais restent au Québec, c'est le RPC, bien là c'est... premièrement, ça va coûter des frais de gestion effrayants à essayer de gérer une affaire comme ça, et, deuxièmement, bien, le travailleur québécois qui dit : O.K., pourquoi moi, je n'ai pas droit à un scénario, alors que ceux-là restent au Québec, c'est... Tout simplement, on essaie de soulever le point que c'est d'une importance capitale, que, si on n'est plus de concordance avec le régime RPC, avec la loi qui a été mise, à moins qu'on change la loi, on ne pourra plus s'asseoir avec le RPC puis aller parler, avec les autres, de ce système-là. Il y a plusieurs, là... puis je ne veux pas... c'est beaucoup trop long, mais, quand on regarde la loi du RPC qui a été mise en place, bien, il y a plein de facteurs qu'on ne répondra plus à ce moment-là.

• (14 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : C'est sûr que Québec ne sera pas invité à la table de la réflexion sur les régimes de retraite, là, qui couvre l'ensemble des Canadiens. Moi, je vais vous avouer, là, puis je veux vous entendre là-dessus, je suis un peu surpris, parce qu'il n'y a aucune réaction à ça de la part du gouvernement. C'est de dire : Regardez, là, ce qu'on a présenté, là, bien, à quelque part, ça ne fonctionne plus, parce que le reste du Canada va dans un sens, ça crée des problèmes de concordance, ça crée des problèmes chez les fonctionnaires, ça crée des problèmes aussi sur les liens qu'on a à l'intérieur des régimes de retraite canadiens. On dirait, là, que le gouvernement, il est ailleurs, là, il ne s'est pas posé la question en disant : Bien, il va falloir qu'on travaille, trouver les solutions.

Mon collègue parlait de cotisations, ainsi de suite. Moi, je n'ai pas vu ce travail de réflexion là, je ne l'ai pas vu, ce point d'équilibre qu'on est capable de trouver, et de faire en sorte d'éviter ce problème de concordance. Est-ce que vous êtes étonnés de voir que c'est comme s'ils ne sont pas adaptés à ce qu'on a vécu cet été? Je voudrais vous entendre là-dessus. Êtes-vous étonnés de ça, vous?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Nous, ce qu'on voit quand on analyse au niveau des cotisations, c'est qu'en ayant moins pour le travailleur québécois à la retraite les cotisations des employeurs vont être similaires à celles du Québec par rapport au reste du Canada. Donc, si on veut favoriser nos employeurs et non les travailleurs, c'est le scénario, entre guillemets, Québec. Donc, c'est ce qu'on voulait essayer de faire ressortir dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, je comprends, et on dit que ça nous coûte plus cher au Québec, mais, en même temps, je pense qu'il faut commencer à... Ce n'est pas d'hier, là, qu'on sait qu'on va avoir une population vieillissante. Ça ne prenait pas un doctorat en mathématiques pour savoir qu'on allait, pendant 30, 40 ans à venir, jusqu'en 2050, 2060, avoir une population qui vieillit, une pyramide qui s'est inversée en 2011, mais on n'a rien fait, on n'a rien fait. Donc, nous, on dit — ce n'est pas d'hier non plus qu'on vous le dit — qu'il faut bouger, là. Donc, c'est sûr que, quand on ne rénove pas une maison puis que, 20 ans plus tard, il faut la rénover, elle va coûter plus cher à rénover. Donc, c'est là qu'on est aujourd'hui. Donc, les coûts additionnels pourraient effectivement survenir, entre autres, de systèmes comme ça, parce qu'on n'a pas bougé à temps. Ça fait depuis les années 80 que la Régie des rentes devrait bouger ses cotisations, et elle l'a fait minimalement. Il y a plein d'actuaires à travers le Québec qui ont travaillé, qui ont déposé des rapports pour dire que ça devait augmenter, mais on n'a pas voulu l'augmenter. Mais là on paie les pots cassés qu'on n'a pas voulu, à ce moment-là, calfeutrer, filtrer, réparer. Et là, bien, aujourd'hui, oui, ça va coûter plus cher, mais pas au détriment du travailleur québécois. Si on fait ça, on manque le bateau, là. Un gouvernement est élu pour le peuple, pas pour les entreprises uniquement, pour le peuple.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : D'où l'idée, puis moi, je parle de point d'équilibre, de chercher un point d'équilibre pour que, justement, la société québécoise se trouve gagnante à tous les niveaux. Et il faut faire ça en quatre jours, il faut se dépêcher.

Alors donc, écoutez, je voudrais vous entendre. Vous n'avez pas parlé de ça, puis dites-moi si vous avez réfléchi à ça, je veux vous entendre, sinon ce n'est pas grave, j'aurai d'autres questions. Mais le rapport D'Amours mentionnait qu'il fallait bonifier les régimes publics pour permettre l'éclosion et la pérennité des régimes à prestations déterminées, hein, parce qu'on est tous d'accord que c'est l'idéal pour les Québécois. Est-ce que vous avez vérifié à savoir est-ce que cette bonification-là proposée par le gouvernement va permettre justement une amélioration du taux de capitalisation des régimes à prestations déterminées? Avez-vous fait des recherches là-dessus ou... sinon, j'ai d'autres questions. Je ne veux pas vous mettre dans l'embarras, parce que... Oui, c'est ça, je vais vous laisser répondre puis j'aurai d'autres questions par la suite.

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Ce qu'on a regardé de ce côté-là, c'est, on sait, avec les dernières années, les différents projets de loi puis la façon que les régimes complémentaires de retraite ont été malmenés, quoique le rapport D'Amours disait, au niveau des prestations déterminées, que c'était le régime qu'il fallait garder et s'assurer qu'on puisse conserver... Oui, on a fait certaines étapes vers ça, mais, malgré ça, on voit que beaucoup de prestations déterminées ont été fermées et, encore plus, ont été transférées en cotisations déterminées ou en toutes les autres bibittes qu'on a essayé d'imaginer entre les deux, là.

Une chose qu'il faut savoir, c'est que, la cotisation déterminée, de façon très vague, ça prend beaucoup plus d'argent pour avoir le même rendement qu'une prestation déterminée. Donc, à la base, si on est pour mettre plus d'argent, on a aussi le véhicule qui est la rente du Québec, le RPC ou le RRQ, qui est... en fait, on a un compte où on épargne puis notre employeur épargne. Donc là, il faut se poser des questions, jusqu'à quel point, au niveau des régimes de retraite... comment on fait la concordance quand on parle des régimes complémentaires, des régimes publics et des épargnes personnelles qu'on fait. Et je pense que, ça, dans bien des cas, on l'a regardé sous l'angle : Bien, il y a beaucoup de gens qui ont des régimes de retraite. Si on a la RRQ bonifiée, bien, eux autres vont avoir beaucoup plus d'argent. Oui, mais ça, c'est un employeur qui nous a offert ça, ce n'est pas le commun des mortels. Les Québécois, c'est : 60 % des Québécois n'en ont pas. Donc, il faut penser en fonction de la majorité.

Donc, pour ce qui est, pour nous, de la Régie des rentes, il ne faut pas le lier aux RPD puis il ne faut pas penser à avoir un mécanisme, parce qu'on ne sait pas où s'en vont les RPD en ce moment. Puis, si ça suit la tendance, il n'y en aura plus beaucoup dans quelques années.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci, M. le Président. Merci, M. Prud'homme, M. Dupont, Mme Bouchard. D'entrée de jeu, vous avez parlé à plusieurs reprises que... et on en parle aussi dans le document, là, que notre population va vieillir plus vite que le reste du Canada, des revenus, puis tout ça.

J'aurais une question au ministre, là... ou un engagement que je lui demande. Est-ce qu'on pourrait avoir le détail par province? Parce que, là, on parle du reste du Canada, mais on peut-u l'avoir par province, l'Ontario, toutes les provinces pour voir, là... On dit que nous sommes ceux qui vieillissons le plus rapidement, mais, par province, ce serait peut-être intéressant à voir aussi sur les différentes facettes, les différentes variables qui sont dans le document. Donc, ça, c'est ma première question.

Le Président (M. Bernier) : On va les laisser vérifier puis on reviendra à la fin, M. le député.

M. Picard : Oui, oui, c'est ça. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Allez-y avec les échanges avec...

M. Picard : Si je reviens au document de la FADOQ, dans votre conclusion, à la page 13, vous indiquez, un petit peu à la fin, là : «Le défi exige des solutions novatrices qui feraient du Québec un leader dans l'adaptation de la société au vieillissement.»

Pouvez-vous l'expliquer? Avez-vous des exemples? Avez-vous fait des travaux là-dessus? Parce que vous dites que, qu'est-ce que je retiens, le pire des scénarios actuellement sur la table, c'est celui du Canada, mais c'est le moins pire. C'est ça qu'on s'entend. Donc, si vous avez des solutions novatrices, est-ce que vous les avez travaillées? Si oui, expliquez-nous-les, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Bien, écoutez, certaines choses... parce qu'on a déjà, par les années passées, rencontré relativement souvent la Régie des rentes pour discuter de différentes choses, sous différents gouvernements, principalement en ce qui a trait à la retraite, et il y a des choses qu'on discutait et qui se font ailleurs, dans d'autres pays dans le monde, dont je n'ai pas les données, là, parce que je ne m'attendais pas à cette question-là.

Mais, si on regarde au niveau des compagnies qui offrent des régimes de retraite, actuellement, quand on change de compagnie, bien, il n'y en a plus. Donc, il y a des endroits où ce qu'on fait, c'est : le compte de l'individu, la compagnie verse dedans, et, quand on change de compagnie... Et là on parle de régime complémentaire, on ne parle pas de la Régie des rentes ou de RPC, là. Donc, il y a des comptes comme ça qui sont faits, où on va toujours avoir un compte de retraite au niveau complémentaire. Ça, c'est des scénarios qui existent. Si on regarde au niveau d'autres scénarios, bien, si on est pour abolir tous les régimes à prestations déterminées, bien, peut-être qu'on devrait tous se tourner vers un compte Danis Prud'homme n° 2, à la Régie des rentes, où mon employeur verse des cotisations, et moi, j'en verse, additionnelles, au besoin. Quand on parlait, tout à l'heure, des gens à salaire minimum, bien, effectivement, peut-être qu'eux ne peuvent pas verser... en fait, ils ne peuvent pas verser des cotisations additionnelles. Donc, tout ce qu'on sort actuellement... et c'est des choses comme ça qu'il faut imaginer, là, il faut être novateurs, il y a des endroits où ça se fait. Quand on sort des RVER qui ne fonctionnent pas pour la majorité des gens qui ont de bas salaires, donc, quand on sort... on sort des outils qui sont super, là, tant mieux si on a de l'argent puis on peut investir dedans, mais pensons au Québécois moyen qui fait un salaire moyen... le salaire moyen, au Québec, autour de 40 000 $, si je ne m'abuse, un peu plus bas que le Canada, donc pensons en termes de 40 000 $, là, comment un employé peut survivre, dans différentes régions du Québec, payer ses choses puis s'assurer qu'il va pouvoir... Parce que c'est une responsabilité de se créer une retraite, là. Ce n'est pas la pensée magique, on est bien conscients de ça, mais je pense qu'il faut tourner ça, parce qu'on ne l'a peut-être jamais mis en force.

Donc, c'est beaucoup de scénarios comme ça qu'il faut regarder. Si on parle de travailler, parce qu'on parle de retraite, bien, où est l'indice de pénibilité que le Québec aurait dû longtemps penser à développer pour s'assurer que nos travailleurs qui peut-être peuvent travailler plus longtemps, mais pas dans tous les emplois... Il y a des emplois qu'on ne pourra jamais travailler jusqu'à 65 ans. On fait quoi avec ces travailleurs-là?

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Prud'homme (Danis) : Donc, c'est des choses importantes pour nous, ça.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, vous avez une...

• (15 heures) •

M. Picard : Vous savez, M. le Président, dans le cadre de notre travail, on rencontre souvent des personnes de l'âge d'or, et, les gens, les premières années qu'ils prennent leur retraite, ça va bien, mais, avec le peu d'indexation, il y a toujours une dégradation de leur pouvoir d'achat, ce qui est malheureux, parce que, si on veut que les gens vieillissent dignement, ça leur prend des revenus dignes aussi.

Dans les différents scénarios que vous... bien, tantôt, vous avez parlé d'un compte, mais c'est un peu le RVER, sauf que la problématique au Québec, c'est que nous sommes pauvres, donc on n'a pas d'argent à mettre. Le coffret est là, mais on n'a pas les moyens de mettre de l'argent pour notre retraite. Vous faites le même constat? C'est ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Danis) : Bien, on constate qu'en gros, là, et je fais des chiffres ronds, là, c'est du 10 % à 20 % des personnes les plus riches qui peuvent bénéficier de tous les outils. Donc, la grosse majorité des Québécois ne peuvent pas bénéficier de ces outils-là actuellement. Donc, si on veut s'assurer que les gens puissent aller de l'avant avec une retraite appropriée, bien, oui, il faut changer la mentalité comme quoi c'est une responsabilité de s'assurer qu'on ait une retraite. Il ne faut pas penser, là, que ça va se faire tout seul. Ça, on est d'accord.

Mais je pense qu'il faut y aller graduellement, avec différents outils, mais il faut surtout bonifier le fait que dans nos entreprises... Pourquoi plein d'entreprises n'ont aucun régime pour leurs employés, si c'est une ressource principale pour les entreprises qui font de l'argent? Et je ne veux pas partir de débat sur est-ce qu'ils devraient en faire autant ou pas, ce n'est pas ça, le débat. Le débat est : Si on fait de l'argent comme entreprise, pourquoi est-ce qu'on n'a pas des régimes pour assurer que notre ressource primaire va avoir une retraite décente quand elle ne sera plus capable de travailler? C'est là la question qu'on doit se poser comme peuple qui a un phénomène de vieillissement devant soi depuis bien des années mais qu'on a tardé à le faire, donc là il faut y aller à la vitesse grand V. Et ça, à ce qu'on sache, ce n'est pas nécessairement abordé très... non plus, à ce niveau-là, beaucoup. Pardon.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Dupont, M. Prud'homme, Mme Bouchard, de votre participation avec le Réseau FADOQ. Merci. Ça a été fort intéressant.

Je vais suspendre quelques instants afin de permettre à la Corporation des thanatologues du Québec de prendre place. Je suspends.

(Suspension de la séance à 15 h 2)

(Reprise à 15 h 8)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît. Donc, nous reprenons nos travaux. Nous avons le plaisir de recevoir la Corporation des thanatologues du Québec, représentée par M. Denis Desrochers, Mme Annie Saint-Pierre, M. Jacques Poirier. Bienvenue. La parole est à vous. Vous avez dix minutes pour votre présentation.

Corporation des thanatologues du Québec (CTQ)

M. Desrochers (Denis) : Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les députés, bonjour et merci de nous recevoir aujourd'hui à cette consultation publique. Je suis Denis Desrochers, président de la Corporation des thanatologues du Québec, président et copropriétaire des Centres funéraires Grégoire & Desrochers au Centre-du-Québec. J'ai, à ma gauche, M. Jacques Poirier, président de Magnus Poirier à Montréal, et, à ma droite, Mme Annie Saint-Pierre, directrice générale de la Corporation des thanatologues du Québec.

Nous sommes, à la Corporation des thanatologues du Québec, le plus important rassemblement volontaire de professionnels dans le domaine funéraire. Plus de 70 % du domaine funéraire est membre à la Corporation des thanatologues du Québec. Nous sommes le principal interlocuteur au sein de toutes les instances gouvernementales, que ce soit le ministère de la Santé, le ministère de la Justice, avec le Bureau du coroner, le Directeur de l'état civil avec les déclarations de décès. Bref, nous travaillons avec le gouvernement étroitement dans plusieurs dossiers pour permettre justement que les rituels funéraires se passent le mieux possible au Québec.

• (15 h 10) •

La situation est alarmante. La prestation de décès que rentes Québec offre aux familles endeuillées ne répond plus aux besoins. 2 500 $ non indexés depuis 1998. La majorité des Québécois compte sur cette prestation de décès lors du décès d'un de leurs proches. Nous venons vous demander de bonifier et d'indexer la prestation de décès. Dans cette démarche, nous avons l'appui de la FADOQ, de l'association québécoise des retraités du secteur public et de l'association des cimetières du Québec. Naturellement, comme il a été mentionné, à cause du court délai que nous avons, nous sommes en démarche auprès d'autres associations qui travaillent directement en lien avec les personnes endeuillées pour nous soutenir dans notre démarche.

L'origine du problème date de 1998. À la création de la Régie des rentes du Québec dans les années 60, la prestation de décès visait à aider les familles en deuil pour payer l'essentiel. En 1998, la prestation de décès maximale était de 3 590 $, selon les cotisations. Depuis 1998, elle a été plafonnée et non indexée à 2 500 $ de façon maximale pour les personnes qui ont cotisé au régime. Pas besoin de vous dire que, depuis 1998, les frais funéraires, les rituels funéraires et les sépultures, les prix ont augmenté. Avant 1998, la moyenne des services funéraires et des rituels était à un petit peu moins que 4 900 $. Aujourd'hui, on parle d'une moyenne de rituels funéraires au Québec et de sépultures pour plus de 6 500 $. Bref, les travailleurs qui ont cotisé toute leur vie s'endettent au moment de leur mort alors qu'ils laissent des dizaines de milliers de dollars dans les fonds de Retraite Québec. On tente d'offrir des rituels funéraires et des funérailles dignes aux défunts. Avec 2 500 $, désolé, ce n'est pas digne.

Je vais passer maintenant la parole à mon collègue, M. Jacques Poirier, pour nous parler de la réalité de Montréal.

Le Président (M. Bernier) : M. Poirier.

M. Poirier (Jacques) : Merci. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je me nomme Jacques Poirier, président de Magnus Poirier inc., entreprise familiale québécoise fondée en 1923. Je représente ici les grandes entreprises qui ont signé le mémoire déposé il y a quelques jours, dont vous avez obtenu copie. Nous desservons principalement la grande région métropolitaine et son bassin des nombreuses communautés culturelles et religieuses, et ce, dans tous les secteurs, des mieux nantis aux plus démunis, et aussi aux très démunis.

En 2017, le 2 500 $, ça couvre quoi? Par expérience, cela ne permet plus que le minimum, et encore. Lorsqu'on parle des frais associés tels qu'église, mosquée, cimetière, salon funéraire, à strictement parler, vous ne faites pas de rituel funéraire, vous disposez du corps, c'est tout, point à la ligne. Ce que je rencontre régulièrement moi-même... mes conseillers dans nos bureaux ou encore au téléphone, ce sont des familles qui sont tiraillées par l'urgence de la situation et qui ont des choix difficiles à faire alors qu'en réalité il y a très peu de choix à faire. Que fait-on? On réduit les funérailles de son époux, de son père, sa mère à sa plus simple expression quand il y a des funérailles ou on s'endette. Encore là, de plus en plus, et vous allez le constater, de plus en plus, il y a des défunts qui deviennent des cas non réclamés. Encore là, trop de cendres ou d'urnes sont abandonnées ici et là. Seulement dans la journée de dimanche dernier, chez Magnus Poirier, nous avons reçu, entre autres, quatre familles, et ces familles n'avaient que la prestation de décès de Retraite Québec, pas un sou de plus. Elles se demandaient comment elles seraient capables d'organiser des funérailles. Mesdames et messieurs, au nom des travailleurs qui laissent des dizaines de milliers de dollars dans les coffres, vous devez corriger cette iniquité.

Je cède la parole à M. Denis Desrochers. Merci.

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : La prestation de décès représente 119 millions de dollars en 2015 au Québec. C'est moins de 1 % de l'ensemble de prestations versées par la Régie des rentes du Québec. Nous recommandons de bonifier la prestation de décès de Retraite Québec pour obtenir la parité avec les régimes qui existent déjà au sein des régimes que nous cotisons au Québec, soit la CSST et la Société d'assurance automobile du Québec. Ces régimes sont tous contributifs, et la prestation de décès pour la CSST et la Société d'assurance automobile du Québec se situe à 5 700 $.

Pour nous, la mort d'un travailleur dans un hôpital ne vaut pas moins que la mort sur la route ou dans un milieu de travail. Nous demandons l'indexation annuelle de la prestation de décès pour qu'on cesse de léser les défunts et leurs proches. Nous, les gens de la Corporation des thanatologues du Québec, nous sommes aux premières lignes du deuil et nous sommes à même de constater l'effet néfaste de la perte d'un être cher. Les Québécois n'ont pas à assumer, en plus du deuil de leurs défunts, le deuil financier de la situation.

Je termine en vous disant que l'évolution de notre société... l'évolution, pardon, de notre société est souvent évaluée par la façon dont on traite ses morts. Pour moins de 1 % du régime, ne faisons pas de l'économie sur la dignité. Maintenant, nous sommes prêts à prendre vos questions.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Desrochers et M. Poirier, de votre présentation. M. le ministre, un sujet fort important.

M. Leitão : Absolument.

Le Président (M. Bernier) : Donc, on vous donne la parole pour débuter.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup. Madame messieurs, bonjour, merci d'être là. En effet, comme M. le président a dit, un sujet très important. Avant d'y arriver par contre, j'aimerais juste quelques précisions sur les discussions que nous avons eues avec le groupe précédent.

D'abord, je vais réitérer le fait qu'il n'y a aucune décision qui va être prise en quatre jours. On n'est pas ici pour ça. On commence le processus maintenant. On va écouter tous les groupes qui vont venir nous présenter leurs mémoires, d'autres qui ont déposé leurs mémoires, on prendra le printemps, l'été pour réfléchir à tout cela, et éventuellement il y aura un projet de loi où il y aura des changements législatifs. On aurait à nouveau l'occasion d'en discuter pleinement. Le changement canadien, le changement fédéral va commencer en janvier 2019, donc on n'a pas besoin de se précipiter tout de suite, on a le temps. On va prendre le temps qu'il faut pour analyser une question qui est très importante. Donc, c'est ce que j'aimerais préciser.

Le Président (M. Bernier) : ...que vous vouliez faire. Bon. Ça va.

M. Leitão : Voilà. Maintenant, on revient...

Le Président (M. Bernier) : Donc, passons à nos invités.

M. Leitão : ...à votre question, qui est certainement très importante aussi, je sais que plusieurs de mes collègues veulent aussi s'exprimer là-dessus, mais ma première réaction, si vous voulez.

Vous avez mentionné, donc, à la fin de votre présentation... fait un parallèle avec la Société d'assurance automobile du Québec et la CSST, bon, maintenant la CNESST. En effet, il y a une très grande différence. Mais, comme vous savez très bien aussi, à la SAAQ, c'est à peu près 300, 350 cas par année. Retraite Québec, c'est 50 000 décès par année. Donc, l'ordre de grandeur n'est pas du tout le même. À la CSST, on parle d'à peu près 200 cas par année. Donc, vous voyez qu'on est dans une situation qui est complètement différente. 119 millions, c'est ce que ça coûte présentement à Retraite Québec.

Si on le bonifiait comme vous suggérez, comment est-ce que ça serait financé? Comment est-ce que Retraite Québec financerait ces dépenses additionnelles?

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Merci, M. le Président. Il faut comprendre d'où on part pour arriver où est-ce qu'on est aujourd'hui. On part de 1998. Si la... et là on parle toujours dans un monde hypothétique, si la Régie des rentes du Québec avait été indexée depuis 1998, on n'en serait pas là aujourd'hui. Il y a un tort qui a été fait en 1998. On est obligé de faire du rattrapage.

Effectivement, on parle de 119 millions. Je ne crois pas que les travailleurs et travailleuses du Québec, au nom de la dignité humaine, on se doit de calculer que... C'est cher payer, mais c'est un prix à payer, en tant que société, pour traiter nos morts de façon digne et responsable.

• (15 h 20) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Bon. En 1998, c'est un choix qui a été fait à ce moment-là, et le choix avait été fait dans l'optique de préserver la pérennité du régime. Et ce choix a été fait.

Donc, je reviens à ma question. Si maintenant on fait un choix différent et on bonifie ces prestations-là, ça serait peut-être, je ne sais pas, moi, 0,2 %, 0,3 %, 0,4 % d'augmentation des cotisations des travailleurs et des entreprises pour pouvoir financer un montant additionnel, donc ça s'ajoute aux taxes sur la masse salariale des entreprises et des travailleurs, donc c'est cette question-là qu'il faut tenir en considération aussi. Je ne dis pas que ce n'est pas quelque chose qu'on ne doit pas faire, qu'on ne doit pas considérer, mais, quand on considère ça, de bonifier un régime, il faut aussi penser comment on le finance.

Peut-être une dernière chose avant de passer la parole à mon collègue. On a vu récemment... je pense, c'était hier ou aujourd'hui, dans les médias un économiste qui n'est pas associé au gouvernement du tout mentionner que, par exemple, dans le cas de la prestation de décès, il y aurait peut-être lieu de changer le système et donc de le rendre beaucoup plus ciblé : donc, les 20 % ou 25 % des citoyens qui se trouvent dans une situation extrêmement précaire peut-être, pour eux, améliorer le régime, pendant que pour les autres, qui ont des régimes d'assurance, etc., ne pas le fournir du tout. Comment est-ce que vous réagissez à une telle proposition?

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Premièrement, oui, j'ai lu l'article, comme vous, M. le ministre, mais vous comprendrez mon étonnement par rapport à ce qu'on voit ou ce qui se traduit sur le terrain.

Ce qu'on voit sur le terrain, là, c'est... peut-être que des gens ont des assurances vie, mais nous, on est à la première ligne. Quand un décès arrive, c'est là que ça se passe. Et bien souvent, les gens, les ressources financières qu'ils ont... ils ne savent pas s'ils ont une police d'assurance vie, ils ne savent pas non plus si elle est valide. Dans la grande majorité des cas, ça arrive, des fois, que les polices d'assurance vie ne sont pas valides. Ils ne connaissent pas nécessairement les dispositions financières que leurs parents ont. La seule chose qu'ils ont, le rempart qu'ils ont ou la donnée de base qu'ils ont, c'est la Régie des rentes du Québec. À 2 500 $, quand il faut prendre des décisions en dedans de 24 heures, vous comprendrez que bien souvent les gens se rabattent par... tout simplement, comme on le mentionnait tout à l'heure, il n'y en a pas, de rituel funéraire. Il n'y en a simplement pas, parce que les gens n'ont pas de ressources financières pour être capables de subvenir à un rituel funéraire digne et respectueux. Donc, nous, on est devant ces situations-là, jour après jour, dans nos bureaux, avec des familles pour essayer de les aider à trouver des solutions et des façons de faire des rituels funéraires qui sont tout à fait à la hauteur de ce qu'ils peuvent attendre à leurs êtres chers, sauf que, de l'autre côté, les ressources financières ne sont plus là.

Et, comme je le mentionnais, en 1998, le 3 500 $ représentait, si la moyenne des funérailles était à 4 500 $ à peu près, représentait quand même une bonne partie des frais funéraires. Il y avait un manque à gagner, là, les familles... sauf que, dans le moment, la situation, avec la moyenne des rituels funéraires... Puis, on va s'entendre sur une chose, là, les rituels funéraires ont changé au Québec, là, ce n'est plus ce que c'était en 1978, puis ça, je suis à la même place que vous là-dessus, sauf qu'il faut être conscients que l'écart est tellement grand à combler pour avoir un simple rituel funéraire, là, pas quelque chose de bien, bien élaboré, là, un rituel funéraire digne et respectueux... on se ramasse dans une situation où est-ce que les gens font des funérailles à crédit, et bien souvent les membres de la famille sont obligés de se cotiser pour être capables d'avoir le 2 500 $ de la Régie des rentes du Québec. Ils sont obligés de se cotiser entre eux autres pour prouver qu'ils ont payé les frais funéraires, pour être capables d'avoir le 2 500 $ de la Régie des rentes du Québec. Vous comprendrez qu'on part de loin, là. Donc, dans le contexte que vous l'expliquez, il faut aussi mettre en relief qu'il y a du rattrapage à faire.

Maintenant, on est tout à fait conscients que la situation des finances publiques est... quelle est la situation des financières publiques. Par contre, il faut être aussi conscients que le Régime de rentes du Québec, ce n'est pas l'argent du gouvernement, ce n'est pas l'argent de rentes Québec, c'est l'argent des contribuables, c'est chacun d'entre nous qui a cotisé à ce fonds-là. Et, à la fin de notre vie, on a beau dire qu'il y a des gens... L'espérance de vie augmente au Québec, mais je peux témoigner devant vous aujourd'hui qu'il y a des gens qui ne se rendent pas à leur retraite, là, puis qui décèdent.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Une dernière question rapidement : Est-ce que vous avez pu prendre une position, réfléchir aux autres éléments de nos propositions, donc la bonification du Régime de rentes du Québec, la proposition canadienne, la proposition du Québec? Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

M. Desrochers (Denis) : Sincèrement, c'est ça.

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Je suis un directeur de funérailles, je ne suis pas un actuaire ni un fiscaliste, je vous dirais, honnêtement.

M. Leitão : O.K.

M. Desrochers (Denis) : Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Merci aux gens de la Corporation des thanatologues du Québec qui sont ici avec nous aujourd'hui, et je suis content de voir M. Poirier, qui est ici. C'est toujours un plaisir de voir les entrepreneurs accompagner les dirigeants des associations et des corporations.

Le ministre a fait référence, là, à l'article qui était dans LeJournal de Montréal ce matin, je crois. Je n'en manque pas un, Journal de Montréal, évidemment, là, donc je l'ai vu, moi aussi, comme vous. Et, si j'ai bien compris vos propos et ceux de l'économiste, là, qui étaient dans le journal ce matin, lui, il disait : Il y a environ 80 % des gens qui ont une assurance vie, et vous, vous dites : Peut-être, sauf que les gens qui viennent nous voir ne savent pas que leurs parents ou leurs conjoints, ou peu importe, ont une assurance vie, c'est un petit peu compliqué. Les gens, j'imagine, vous, vous leur dites, là, qu'il y a un 2 500 $ qui est disponible à travers la Régie des rentes, ils ne le savent peut-être pas automatiquement, sur le coup, tout de suite, sauf que la solution que vous proposez, c'est une solution pour tout le monde.

Donc, moi qui ai une assurance vie, que ma conjointe sait que j'ai une assurance vie, qu'elle sait qu'il y a une somme d'argent assez importante qui va venir si jamais il m'arrivait quelque chose, elle le sait. Est-ce que, dans une situation comme ça, elle a besoin de la solution que vous proposez, qui est 5 100 quelques dollars indexés, là, pour tout le monde?

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers ou M. Poirier?

M. Poirier (Jacques) : Je pense que je vais laisser...

M. Desrochers (Denis) : Premièrement, vous comprendrez que, dans la mécanique de la chose, quand survient un décès, généralement on a des décisions à prendre en dedans de 48 heures.

Toujours, si vous citez LeJournal de Montréal, vous me permettrez de dire qu'il n'y a pas si longtemps, dans un des journaux au Québec, on disait qu'il y a à peu près 50 % des gens qui ne gagnent pas 50 000 $ au Québec, par année, comme salaire. Dans un contexte où est-ce qu'on a à organiser des funérailles, des rituels funéraires et, bien souvent, c'est quelque chose qu'on doit faire dans un relativement court laps de temps, on n'a pas le temps d'évaluer... Si vous êtes bien organisés dans vos finances personnelles, c'est une chose, mais il faut bien comprendre qu'encore une fois c'est un sujet qui est tabou, les rituels funéraires. C'est un sujet qu'on met sur la place publique puis on utilise tous les moyens qu'il faut pour être capables d'en parler, sauf qu'aujourd'hui la grande majorité des Québécois sont encore mal à l'aise de dire à leurs femmes, ou à leurs conjoints, ou à leurs enfants, dire : Bien, regarde, j'ai de l'assurance vie, j'ai de l'argent, j'ai ci, j'ai ça. Ce n'est pas nécessairement donné à tout le monde de faire ça.

Il y a une partie de la population, effectivement, qui sont bien couverts, qui sont bien nantis, mais il y a une partie de la population aussi qui a besoin de la prestation de décès pour être capable de subvenir à ses rituels funéraires. Maintenant, à savoir...

M. Fortin (Pontiac) : ...

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y.

M. Fortin (Pontiac) : ...si vous me permettez, là, M. le Président, parce qu'il reste un peu de temps.

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y, parce qu'il vous reste environ 1 min 40 s.

M. Fortin (Pontiac) : O.K. Donc, de votre mémoire, là, ce que je vois, c'est : vous demandez 5 100 $ indexés pour tout le monde. À certains des services que vous offrez, là, je comprends bien. Par exemple, la crémation, dans votre mémoire, c'est marqué : Le coût est d'environ — juste la crémation, on s'entend, là — 2 280 $. Avec les taxes, ça fait à peu près 2 600 $.

Vous, ce que vous proposez, c'est que l'argent du Régime des rentes vous soit versé à vous directement, donc un 5 100 $ indexé qui va aux thanatologues. Mais, si nous, on choisit une crémation pure et simple, là, qui coûte 3 000 $, qu'est-ce qui se passe avec le 2 000 $ dans votre scénario?

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

• (15 h 30) •

M. Desrochers (Denis) : Pardonnez-moi de peut-être préciser, en fait, le mémoire. Ce n'est pas ce que le mémoire dit.

La recommandation qu'on fait, c'est qu'on dit, comme l'assurance générale, comme l'assurance de dommages, que le chèque vienne conjoint entre la famille et la maison funéraire, tout simplement, encore une fois dans un but bien précis, qu'il y ait une vérification et une balance entre l'entreprise funéraire... Si la famille, pour eux, le rituel funéraire digne et respectueux se situe à 2 900 $, O.K., bien, que le chèque vienne conjointement, et la maison funéraire ou... on aura un moyen, pardon, de rembourser la famille. Mais on vient mettre aussi un mécanisme de protection, dans le système, qui existe déjà pour l'aide sociale. L'aide sociale, c'est comme ça que ça fonctionne, là, le chèque est versé directement à la maison funéraire sur présentation d'une facture.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Nous allons passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je vous salue, tous les trois. Merci d'être ici avec nous. C'est un sujet particulier, on n'entend pas... moi, ça fait quelques années, là, que je m'intéresse aux régimes de retraite, puis, voyez-vous, c'est quelque chose qui passe souvent sous le radar, là, donc je suis très content de vous voir pour qu'on puisse s'apercevoir, là, qu'il y a des situations qui sont reliées justement aux régimes de retraite puis qui ont des applications concrètes, là.

Revenir sur la question intéressante du député de Pontiac. Je ne sais pas à quel point on a épuré le dossier, là, je veux revenir là-dessus, par rapport au fait que vous demandiez d'être mandataires. J'aimerais peut-être revenir là-dessus, parce que j'ai plus ou moins compris votre réponse. Ça veut dire que vous auriez l'argent de Retraite Québec et ensuite vous disposeriez des surplus. Et, advenant que le choix de la famille soit inférieur au montant, donc vous vous assurez que ce montant-là retournerait aux héritiers. C'est ce que je comprends, là, mais je ne suis pas sûr encore.

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Juste pour être bien clair. On demande un chèque conjoint. C'est un chèque conjoint. On ne demande pas un chèque à l'entreprise funéraire, on demande un chèque aux deux, essentiellement. Et M. Poirier veut ajouter quelque chose.

M. Poirier (Jacques) : ...

Le Président (M. Bernier) : M. Poirier.

M. Poirier (Jacques) : Excusez-moi. Dans la mécanique actuelle de la Régie des rentes du Québec, si la famille fait des arrangements funéraires qui coûtent 1 500 $, le remboursement est fait à une personne particulière, et le supplément est versé au nom de la succession. Ça pourrait être la même mécanique. C'est déjà opérationnel, cette partie-là.

M. Therrien : O.K. Là, écoutez, par rapport à ce que le ministre mentionnait, puis, bon, écoutez, il faut regarder ça de cette façon-là aussi, c'est que c'est des dépenses, puis il faut faire en sorte que ces dépenses-là soient financées, à quelque part.

Vous, vous êtes pour une prestation universelle, unique, dire : C'est un montant quelconque, ou vous seriez prêts à essayer de réfléchir à une variabilité de l'argent qui serait donné aux familles du défunt? Est-ce que c'est, vous, là... C'est sûr que simplement on pourrait dire : Mettons, c'est plus de 5 000 $, mais 5 200 $ à tout le monde, nonobstant le niveau de revenus, la situation financière ou quoi que ce soit, ou vous seriez prêts à dire : Bien, écoutez, on pourrait peut-être essayer de réfléchir à... Par rapport aux assurances, ça ne semble pas une bonne idée — ce que j'ai compris. Alors, est-ce que vous seriez prêts à proposer peut-être une solution qui ferait en sorte qu'on aurait une variabilité du montant selon la situation financière?

M. Desrochers (Denis) : ...

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Pardonnez-moi, M. le Président. Mais, dans le moment, il n'y a rien qui nous pousse à faire une modulation quelconque dans le régime, pour la simple et bonne raison que, dans le moment, tant les plus démunis que ceux qui ont cotisé au régime ont droit à une prestation de décès. Quand on a construit le régime au milieu des années 60, on s'est assuré dans le régime... on avait un contrat social avec les gens qui cotisaient à la Régie des rentes du Québec, en disant : Bien, on vous donne, au terme de votre contrat, une prestation de décès pour être capables d'avoir des funérailles dignes et responsables.

Ceci étant dit, je ne suis pas tellement d'accord à changer les règles du jeu en cours de route, parce que c'est un bris dans l'engagement qu'on a dans notre contrat social qu'on s'est donné. Le régime a été bâti comme ça et fait pour ça.

M. Therrien : Donc, vous considérez que la prestation...

Une voix : ...

M. Therrien : Vous avez quelque chose à rajouter?

M. Desrochers (Denis) : M. Poirier voudrait ajouter quelque chose.

M. Therrien : Bien, allez-y, allez-y.

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, M. Poirier.

M. Poirier (Jacques) : Actuellement, il y a une mécanique également qui s'applique au 2 500 $. Le 2 500 $ a été fixé de 1998 à 2013, en autant qu'on réponde aux conditions pour recevoir la prestation du 2 500 $. En 2013, il y a eu un changement et, à partir de ce moment-là, pour ceux qui avaient cotisé pas suffisamment pour répondre aux critères, en autant qu'on ait contribué à 500 $, il y a un remboursement des cotisations qui peut s'effectuer jusqu'à concurrence du 2 500 $. C'est applicable actuellement, là. Donc, il y a, comme, fixe, 2 500 $, mais, si la personne n'a pas contribué suffisamment, il y a un remboursement de ses cotisations à partir du 500 $ : entre 500 $ et 2 500 $. Ça permet aux personnes qui n'ont pas tout à fait touché au seuil exact de pouvoir avoir une petite prestation de décès. C'est opérationnel depuis 2013.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Ce qui se passe dans le reste du Canada, je pense, c'est 2 500 $ aussi.

M. Desrochers (Denis) : Pour le Canada Pension Plan, dans le moment, c'est 2 500 $.

M. Therrien : Puis, avec la réforme qu'ils proposent, est-ce qu'il y a un changement à ce niveau-là?

M. Desrochers (Denis) : Je vais être honnête avec vous, je ne le sais pas du tout.

M. Therrien : O.K. C'est ça, peut-être, la question que vous avez posée tantôt, hein? C'est ça. Je n'ai comme pas... O.K. Ça sera baissé, M. le ministre? Vous avez fait un signe. Ça va être baissé?

M. Leitão : Non, non. Ce que je voulais dire, si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Bernier) : Bien, c'est sur le temps du député, là.

M. Therrien : ...

M. Leitão : Au Canada, c'est différent, c'est moins généreux que la prestation québécoise.

M. Therrien : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Therrien : Vous faisiez ça, ça veut dire que vous êtes d'accord avec l'ensemble de mes propos depuis le début, c'est ça? O.K. Bon. Non. Alors, O.K. Parce qu'il y a un... le problème étant le suivant : c'est que, si on avait quelque chose qui n'est pas une prestation universelle, là, c'est qu'on pourrait dire : Mettons, on va y aller selon la cotisation de chacun, sauf que ça ne règle pas le problème, parce que c'est les gens qui ont eu le moins de cotisations qui ont le plus de problèmes.

La clientèle, là, qui pose problème, là, c'est combien? C'est 5 %, 10 %, 20 %?

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Je vous dirais que ça joue plus aux alentours de 30 %.

M. Therrien : 30 %. C'est quand même important, là. Alors, si je résume, là, vous y allez pour la facilité. Un deuil, ce n'est pas drôle, vivre ça. Vous dites : La personne arrive, il faut parler de financement, on n'est pas sûr de rien, on a peut-être des assurances ou non, on n'est certain de rien. Vous, vous voulez encadrer la démarche financière pour que les personnes qui sont endeuillées puissent se garantir d'avoir un service adéquat et aussi faire en sorte que le chèque vous soit, en tout cas, rapidement versé, parce que j'imagine que ça fait partie du service clés en main que tout le monde espère avoir dans une situation aussi pénible à vivre que ça. C'est ce que je comprends, là.

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Dans votre compréhension, vous êtes tout à fait à la bonne place. Vous comprenez que le rôle de thanatologue a évolué au fil des années. À une certaine époque, on était strictement des embaumeurs, et, au fil des années, naturellement, notre rôle a évolué en fonction justement des besoins des gens.

Les rituels funéraires ont changé au Québec. Il n'y a pas si longtemps, à peine il y a une trentaine d'années, tout le monde allait à l'église, tout le monde allait au cimetière, puis ça faisait partie des rituels funéraires. Force est d'admettre qu'aujourd'hui les rituels funéraires ne sont plus là et on est beaucoup plus dans l'organisation des événements, des rituels funéraires en lien avec les valeurs des gens. On n'est pas des juges, on est des gens qui assistent les familles en deuil. C'est une réalité qu'on vit dans nos bureaux à tous les jours, où est-ce qu'on aide des familles à trouver des solutions pour être capables de réaliser des rituels funéraires en lien avec leurs valeurs, avec leurs budgets et aussi le faire de façon adéquate, bien souvent dans un court laps de temps.

Vous savez comme moi que, la grande majorité du temps, on peut difficilement prévoir le décès de quelqu'un. Ça arrive quand ça arrive et, forcément, ça arrive la nuit, ça arrive la fin de semaine, et on n'est pas toujours prêt pour ça. Donc, la réalité familiale, la dynamique, on se doit quand même d'avoir... On s'est donné des outils pour être capables de répondre, sauf que les outils... le constat qu'on fait aujourd'hui après la réforme de 1998, les outils sont nettement insuffisants pour donner les rituels funéraires dignes et responsables aux familles au Québec qui dépendent de la prestation de décès de la Régie des rentes du Québec pour être capables de faire leurs rituels funéraires.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci, M. le Président. Merci, M. Desrochers, Mme Saint-Pierre, M. Poirier. Rapidement, là, pour peut-être améliorer la compréhension de tous, là. Dans la vraie vie des choses, là, on m'a dit et j'ai eu connaissance que, le fait que le chèque ne soit pas fait conjointement, là, il y a des dollars de la Régie des rentes qui s'en vont au Mexique pour un voyage après des funérailles. Ça se fait dans la vraie vie. Vous parlez de 30 %. Je ne dis pas que c'est 30 % des gens qui font ça, mais il y a des gens qui ont beaucoup de difficultés.

De par vos fonctions, vous avez un minimum de qualité à offrir comme rites funéraires. Avec le 2 500 $, là, est-ce que vous respectez toujours l'esprit de la loi ou la loi? Je vais vous avouer que je n'ai pas analysé la loi de façon... mais je sais que vous avez des obligations à offrir des services adéquats et corrects pour les défunts.

• (15 h 40) •

Le Président (M. Bernier) : M. Poirier.

M. Poirier (Jacques) : Alors, je réponds. À ce moment-ci, je pourrais vous dire que je ne connais pas d'entreprise funéraire qui refuse de faire des funérailles pour des personnes qui sont dans le besoin. Il existe des programmes pour l'aide financière spéciale, l'aide sociale, qui est également le même montant.

Maintenant, ici, on parle de la Régie des rentes du Québec. Il ne faut pas oublier que le montant achète des biens taxés puis que c'est un montant qui est également imposable à la succession. Or, le 2 500 $, quand on achète des biens taxés, on parle de 2 174 $, puis, à partir de là, le 2 174 $ s'en va à la succession et il est imposable. Forcément, les familles ont peu de choix, mais, globalement, on a des personnes dans notre entreprise qui sont attitrées à trouver des solutions, des moyens de financement, que ce soient des programmes de crédit ou des périodes de remboursement plus longues, ou, tout simplement, on demande aux familles de reconsidérer leur choix, ainsi de suite.

Maintenant, la problématique aussi, c'est que, malgré tout, il y a beaucoup de Canadiens puis de néo-Québécois avec des valeurs différentes puis des besoins différents. À ce moment-ci, quand les personnes arrivent ici... On les a accueillies ici, mais beaucoup meurent ici aussi. À ce moment-là, ce n'est pas nécessairement comme un Canadien français, un Canadiens anglais, que, par la pérennité, le transfert de certains biens de cimetière... On peut donc utiliser un bien de cimetière, et donc ça nous coûte un peu moins dispendieux, parce que notre grand-père, notre grand-mère a fait l'achat d'un bien au cimetière. Ces personnes-là n'ont pas ces facilités-là, elles doivent partir à zéro. Et ce qui arrive, c'est que souvent les personnes peuvent décéder et ne se rendent pas à leurs vieux jours, comme on l'a mentionné précédemment. Ça fait 10 ans, 15 ans, 20, 25 ans qu'ils cotisent, puis, globalement, ils ont 2 500 $ pour aider à faire les funérailles. Le montant est définitivement en deçà des besoins pour subvenir au strict minimum.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Picard : À la page 15 de votre mémoire, vous parlez du chèque conjoint, mais aussi vous voudriez avoir «un accès rapide et sécuritaire à la décision de» Revenu Québec... de Retraite Québec. Excusez. Donc, je comprends que ce n'est pas tout le monde qui reçoit le 2 500 $ — tantôt, vous l'avez expliqué — et vous voudriez avoir accès, par un système informatique, par une ligne téléphonique...

Le Président (M. Bernier) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Il n'y a pas si longtemps, à l'époque peut-être où est-ce que j'avais des cheveux, quand j'ai commencé dans la profession, il existait une ligne téléphonique où est-ce qu'on appelait à la Régie des rentes du Québec puis on nous donnait, sur-le-champ... voir si la personne, un, était éligible à la prestation de décès. Donc, ça sécurisait déjà d'emblée la famille quand ces situations-là arrivaient. Force est d'admettre que, depuis quelques années, rentes Québec ne nous aide pas tellement, et je vous dirais que c'est plus une fin de non-recevoir à toutes les demandes, même si on est en mode collaboration, qu'on essaie d'aider les familles en deuil. D'après moi, pour rentes Québec, on n'est pas les bienvenus.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député, une minute.

M. Picard : Mais, en tout cas, c'est quand même surprenant comme information lorsqu'on considère qu'il y a près de 50 000 décès. Donc, c'est soit un système informatique ou une personne à temps plein qui pourrait répondre, là. Mais j'entends, puis le ministre aussi entend, et le président de Retraite Québec aussi entend votre réflexion.

Je vous dirais qu'avant les fêtes on a adopté plusieurs lois qui... on indexait différentes pénalités dans beaucoup de lois puis on disait : Ah! bien, on avait oublié de les indexer, là, on va donner un gros coup. Je pense que ce serait une situation peut-être qu'il faudrait que le ministre regarde. Tantôt, bien, le ministre indiquait qu'on ne sait pas trop combien ça coûte, mais il faudra le savoir lorsque ce sera le temps de passer la loi. Et aussi, tantôt, M. le ministre disait : Ce n'est pas pour prochainement, là. Je vous dirais, moi, c'est ma troisième consultation que je fais ici pour la Régie des rentes, là, mais, ma première, ça a pris quatre ans avant que la loi soit là. Donc, cette fois-ci, là, malheureusement, ce ne sera pas ce gouvernement-là qui va passer la loi, là, parce que ça va être dans deux ans, et donc... Non, non, mais, peu importe, même si vous êtes réélus, ce ne sera pas le même gouvernement. Il faut bien entendre qu'est-ce qu'on dit. Donc, il faut prendre le temps, mais il faut être ouverts aussi aux commentaires, parce que, si on consulte... Puis peut-être qu'on pourrait innover puis refaire une autre consultation plus élargie, là, parce que je comprends que beaucoup de gens voulaient venir ici nous faire leurs commentaires sur l'avenir du Régime des rentes. Donc, merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. le député. Merci aux représentants de la Corporation des thanatologues du Québec, de votre participation. La Commission des finances publiques...

Oui? Qu'est-ce que vous voulez nous dire, madame? Je vous vois le petit doigt en l'air. Allez-y.

Mme Saint-Pierre (Annie) : Bonjour. Juste un petit commentaire sur l'option qui a été avancée concernant les assurances vie.

Premièrement, effectivement, lorsque l'argent de la police d'assurance vie est débloqué, ça fait longtemps que la funéraille est faite. Et, secundo, bien souvent, l'argent de l'assurance vie sert à payer d'autres choses que des funérailles : la maison, l'auto et toutes les dettes qui vont avec. Secundo, sur le financement, vous avez parlé d'une bonification des cotisations s'il était question d'une quelconque bonification. On n'est pas des actuaires, mais on a quand même des comptables, et, selon nos estimations, à 119 millions actuellement pour la prestation de décès, ça représente 0,9 % des cotisations. En 2065, 263 millions représenteraient 0,2 % des cotisations. Il ne faudrait pas oublier une chose, c'est que les personnes qui ont cotisé à la Régie des rentes laissent de l'argent dans le bas de laine lorsqu'elles décèdent, elles sont rarement dans le négatif.

Le Président (M. Bernier) : Merci, madame, de votre commentaire, nous l'apprécions.

Donc, je vais suspendre quelques instants afin de permettre au Conseil du patronat du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 47)

(Reprise à 15 h 52)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, nous avons le plaisir de recevoir le Conseil du patronat du Québec, représenté par son président-directeur général et expert au niveau de la Commission des finances publiques, M. Yves-Thomas Dorval — bienvenue — et M. Michel St-Germain, qui l'accompagne. La parole est à vous pour 10 minutes.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

M. Dorval (Yves-Thomas) : Merci, M. le Président. Alors, pour les fins de l'enregistrement, je suis accompagné d'un expert actuaire d'une firme d'actuaires reconnue et qui travaille beaucoup avec le CPQ pour nous aider à consulter tous nos membres.

Vous savez que le CPQ représente indirectement ou directement plus de 70 000 employeurs au Québec. Donc, pour nous, c'est important, les questions qui touchent la retraite, puisque les employeurs sont des parties prenantes importantes dans ce système de retraite. Et nous avons eu l'occasion, au cours de l'automne, de consulter l'ensemble des employeurs du Québec, en plus de nos membres, mais également nos membres et nous avons tenu des rencontres, d'ailleurs, en comité plus récemment et nous avons pris connaissance de plusieurs données. Le sujet de la retraite, ce n'est pas récent, c'est un sujet pour lequel on est venus à la commission parlementaire ici à plusieurs occasions.

Alors, M. le Président, on est très heureux que vous nous ayez invités à cette commission. On salue l'ensemble des membres ainsi que les gens de Retraite Québec également.

Et disons d'entrée de jeu que, lorsqu'on a regardé, évidemment, cet enjeu de retraite, il y a des constats importants, il y a des constats qu'on retrouve qui sont très bien faits — en passant, les documents de Retraite Québec sur les constats sont très bien faits — par rapport aux régimes, mais on a aussi notre propre analyse de cette situation.

Première des choses, quand on parle des besoins d'épargne pour la retraite, parce qu'on veut assurer un revenu décent pour les gens à la retraite, un revenu, je dirais, comparable par rapport à leurs besoins, premier constat, toutes les études le démontrent, c'est que ce n'est pas l'ensemble des citoyens qui ont des enjeux d'épargne pour la retraite. Il y a des citoyens à plus faibles revenus qui ont accès à différents programmes qui assurent un certain revenu minimum également, soit le supplément de revenu garanti, et ainsi de suite, et il y a également des gens plus à l'aise qui ont la possibilité, évidemment, d'accumuler davantage dans différents moyens et il y a les revenus moyens, puis, dans les revenus moyens, c'est là où on va retrouver un certain nombre de citoyens qui n'auront pas peut-être accumulé suffisamment d'épargne pour leur retraite pour assurer un revenu qui correspond à leurs besoins, et c'est dans ce sens-là que plusieurs pistes ont été discutées. D'ailleurs, au Québec, on a eu la commission D'Amours, qu'on appelle, qui vont venir, qui vont nous suivre également un petit peu plus tard aujourd'hui, il y a eu plusieurs échanges. Et, au Canada, ces mêmes débats sont repris. L'Ontario avait voulu arriver avec des modifications assez drastiques sur leurs régimes. Et finalement, en réponse à ça, le gouvernement du Canada est arrivé avec des bonifications au Régime de pensions du Canada qui ont rencontré, je dirais, les besoins de plusieurs provinces et qui répondaient à plusieurs enjeux, et au Québec, évidemment, on a regardé ça avec d'autres circonstances. Et ça, j'attire votre attention sur ces circonstances-là parce qu'elles sont importantes.

La première des choses, c'est qu'on a dit que ce n'est pas tout le monde qui avait les mêmes enjeux d'avoir accès à des revenus additionnels pour épargner à la retraite, mais il y a également la situation du régime lui-même, et au Québec on a un régime qui a été établi et qui n'a pas été capitalisé au début complètement de la même façon que le Régime de pensions du Canada et on a un vieillissement démographique plus rapide, et ça fait en sorte que, déjà depuis plusieurs années, les travailleurs, les employeurs du Québec augmentent leurs cotisations au régime pour faire en sorte d'assurer la santé financière, la sécurité financière du régime. Donc, il y a déjà des augmentations qui sont pas mal constantes au Québec, là, pour répondre aux besoins du régime. Ça, c'est un premier élément. Et ça a causé un écart. D'ailleurs, si on regarde les cotisations de l'employeur, parce qu'on représente les employeurs, on parle de 5,4 % en 2017, qui est le pourcentage de cotisation de l'employeur. La cotisation de l'employeur au RPC, c'est 4,95 %. Donc, il y a déjà un écart qui est là. Et, si on regarde les projections actuarielles, étant donné les besoins de capitalisation, étant donné le vieillissement démographique accéléré et la durée de vie plus longue, ça va amener encore plus de pression, et donc le régime va continuer d'exiger des cotisations additionnelles dans le futur pour une certaine période de temps qu'on peut prévoir comme étant quand même encore pour un bon bout de temps. Alors, face à ça, le Régime de pensions du Canada, on pourrait penser, si on regarde ça avec des experts, que même ce pourcentage-là du RPC pourrait peut-être diminuer en termes de cotisation d'employeur parce que les perspectives ne sont pas tout à fait les mêmes que celles du Québec.

Donc, c'est sûr que toute augmentation, toute bonification au Régime de rentes du Québec pourrait accroître d'abord plus d'écart avec le reste du Canada mais également plus de pression au niveau des cotisations sur la masse salariale des employeurs. Puis ça, c'est important, puisque dans notre consultation les employeurs nous ont ramené ça souvent.

Vous savez, M. le Président, actuellement, quand on regarde l'écart des prélèvements sur la masse salariale pour des programmes ou des demandes des gouvernements au Québec, c'est 15,13 %, alors qu'au Canada, en moyenne, c'est 9,67 %. Donc, il y a déjà un écart quand même significatif au niveau des cotisations sur la masse salariale, qui est composé de différents éléments, dont le Régime de rentes, qui lui-même a un écart... si on regarde avec le Régime de pensions du Canada. Donc, il faut faire attention, dans ces considérations-là, de ne pas regarder seulement la question du Régime de rentes, mais également la capacité de payer et des travailleurs et des employeurs dans un contexte où on a déjà un écart défavorable au niveau des cotisations sur la masse salariale.

Donc, c'est des éléments, ça, qui préoccupent beaucoup les employeurs. Les employeurs sont responsables, ils veulent contribuer à l'amélioration de la situation de leurs employés. D'ailleurs, on a eu, il n'y a pas longtemps, une commission parlementaire ici et on a eu une bonification, des modifications importantes au niveau des régimes à prestations déterminées. Il y en a eu aussi sur les régimes multientreprises. Donc, il y a quand même plusieurs éléments. Et on sait que, depuis le 1er janvier, au Québec, aussi on a instauré l'obligation pour les employeurs ayant plus que cinq employés d'avoir des régimes d'épargne collectifs, évidemment le RVER s'il n'y a pas d'autre élément. Mais on sait qu'il n'y a pas juste le RVER, il y a les REER collectifs et d'autres types de régimes, dont ceux à cotisation déterminée ou à prestations déterminées. Et ça, c'est des éléments pour lesquels on n'a pas encore vraiment un portrait clair, parce que ça vient de commencer. Donc, ça va prendre quand même quelques années, ça va prendre au moins cinq ans, avant de voir quel est l'impact de cette nouvelle réglementation également, parce qu'au début probablement que les employeurs ou les employés, parce qu'on parle de cotisation volontaire, peut-être, ils ne seront pas nécessairement portés à contribuer beaucoup, mais, selon la situation, on présume que ça peut évoluer avec le temps. Et ça prend, de toute façon, plus de fonds dans ces régimes-là si on veut s'assurer que les fournisseurs puissent avoir la masse critique nécessaire pour que les coûts puissent être absorbés dans le régime pour éviter d'avoir des coûts administratifs trop élevés.

Donc, il y a des choses qui sont mises en place également, il y a des besoins qui ne sont pas nécessairement universels, il y a la modification du régime fédéral, et, dans le fond, aujourd'hui, on a deux enjeux principaux : un, il y a le constat du régime lui-même et des propositions d'amélioration sur le régime en tant que tel et, deux, il y a la réponse à donner au Québec par rapport aux modifications qui ont été faites au fédéral au niveau du RPC.

• (16 heures) •

Alors, là-dessus, on a consulté nos membres. Et, compte tenu de ce que je vous ai dit, notamment la question des écarts de taxe sur la masse salariale, le fait que le régime nécessite des contributions additionnelles de plus en plus importantes pour en assumer la bonne santé financière, ça mène les employeurs qu'on a consultés dans une situation qui est la suivante... Dans le fond, il y a des employeurs qui regardent les bonifications au fédéral, puis ils disent : Nous, ça nous apparaît correct, ces bonifications-là, surtout par rapport à ce que l'Ontario voulait proposer. Ça pouvait régler bien des problèmes pour plusieurs employeurs, surtout ceux qui ont des employés à la grandeur du Canada. Cependant, ce n'est qu'une portion des gens. Et je sais que la tâche ne doit pas être facile, et pour vous, les législateurs, et pour le ministre responsable, d'arriver à une décision finale, parce qu'il y a plusieurs intérêts puis il y a plusieurs enjeux pour chacun.

Beaucoup d'employeurs nous ont parlé aussi, surtout ceux qui ont contribué, dans des régimes à prestations déterminées ou à cotisation déterminée, pour leurs employés. Ils disent : Nous, on a fait notre part, pouvez-vous, s'il vous plaît, arrêter de nous solliciter encore pour davantage de contributions, alors que nous, on a pris nos responsabilités puis on contribue? Ça serait une forme de statu quo pour ces gens-là, dans le fond, qu'ils envisageraient. Mais je dirais que, si on tient compte de ce qui s'est passé dans le reste du Canada, si on tient compte de la situation particulière au Québec, dans le fond, l'objectif recherché, ça serait, bien sûr, d'améliorer notre régime mais en évitant des cotisations additionnelles. En fait, l'objectif qu'on devrait poursuivre par rapport au régime, c'est de réduire l'écart des cotisations qui existent au Québec pour ceux qui cotisent au RRQ versus le Régime de pensions du Canada. Et c'est ça qu'on devrait avoir comme objectif. Et, pour atteindre cet objectif-là, bien, il y a... Vous savez, ça fait presque 50 ans que le régime existe, puis on n'a pas procédé quand même à des grandes modifications, là, au cours des dernières années, mais je pense que le moment serait vraiment pertinent pour arriver avec des modifications sur le régime pour faire en sorte qu'on puisse davantage contrôler les coûts, et surtout l'objectif étant de réduire l'écart avec le Régime de pensions du Canada, et on pense notamment à des questions sur l'âge de la retraite, 65 ans... Pas l'âge de la retraite, mais l'âge de 65 ans fixé comme un critère, il y a moyen de modifier ça. La majorité des pays de l'OCDE ont modifié ça. On devrait être dans la même ligne.

Et, M. le Président, je vais terminer avec ma conclusion. Il y a ça, il y a d'autres choses qu'on retrouve dans notre mémoire, mais, quant au choix d'un scénario, évidemment, ce qu'on voudrait, c'est un scénario où il n'y a pas d'augmentation de cotisation additionnelle pour les employeurs. Donc, au pire, la position qui est proposée par le Québec serait la moins dommageable. Mais ça ne règle pas toujours cet écart de cotisation entre le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Dorval, pour votre présentation. M. le ministre, je vous laisse la parole.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Dorval, M. St-Germain, merci beaucoup d'être là et merci beaucoup d'avoir pris le temps de faire l'analyse, c'est très apprécié, et vous l'avez fait très bien, comme d'habitude. J'aurais beaucoup, beaucoup de questions, mais je vais essayer d'être discipliné.

Un point que je pense qui, bien, en tout cas, à mon avis, est très important, donc, c'est le coût des régimes de pension. C'est clair qu'on veut tous améliorer, bonifier le régime du mieux qu'on peut, mais ça coûte quelque chose à quelqu'un de le faire. Alors, de votre côté, évidemment, vous soulevez le fait que, déjà en partant, la pression sur les taxes sur la masse salariale des entreprises québécoises est bien plus élevée qu'ailleurs au Canada. J'avais tantôt, au début... je ne sais pas si vous étiez là ou pas, j'avais utilisé un peu le... l'analogie est peut-être un peu trop rapide, mais j'aimerais avoir votre opinion là-dessus, que... je disais, le suivant, c'est-à-dire qu'au Québec, pour avoir les mêmes prestations de retraite que nos voisins canadiens, on doit cotiser plus parce qu'il y a toutes sortes de questions démographiques, et autres. Si on veut garder les mêmes cotisations que nos voisins canadiens, nos prestations vont être nécessairement moins élevées.

Alors, j'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec ça et, peut-être, M. St-Germain, aussi, d'un point de vue d'un actuaire, comment vous voyez cet équilibre-là à plus long terme.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. Dorval.

M. Dorval (Yves-Thomas) : ...un petit bout. Je vais laisser M. St-Germain contribuer également.

Et la première des choses, c'est que ce n'est pas nécessairement qu'on doit réduire les prestations, mais on doit, à tout le moins, revoir la façon dont on arrive aux prestations. Par exemple, je reviens toujours sur cette question de 65 ans, à notre avis...

Une voix : ...

M. Dorval (Yves-Thomas) : À notre avis, c'est une façon qui ne correspond pas arbitrairement... mais qui correspond à une réalité.

Il y a plus de 50 ans, on a mis en place ce régime-là, puis, à ce moment-là, si je ne me trompe pas, l'âge moyen, là, d'espérance de vie, c'était 71, si je ne me trompe pas, ou quelque chose comme ça. Aujourd'hui, on est à plus de 80 et on est 50 ans plus tard puis on n'a pas changé le régime, puis c'est encore 65 qui est le critère en termes d'âge pour regarder les pénalités, ou autres, etc. En plus de ça, c'est qu'au Québec, en plus de ça, les gens prennent une retraite plus hâtive que les comparables. Donc, c'est certain. En plus de ça, en plus de ça, la société québécoise a besoin d'avoir accès à une main-d'oeuvre, parce qu'on est dans un vieillissement démographique, et, la main-d'oeuvre d'expérience, on en a besoin aussi sur le marché du travail.

Alors, pour toutes ces raisons-là, il y a des moyens d'arriver au même résultat sans nécessairement affecter toute la prestation, mais il y en a d'autres, moyens, par exemple. On a parlé, et dans votre document vous en parlez — M. le Président, dans le document, on en parle — de l'équité intergénérationnelle.

L'équité intergénérationnelle. Il faut savoir que, lorsque le régime a été mis en place, il n'était pas pleinement capitalisé. Bien, aujourd'hui, les gens qui reçoivent des prestations n'ont pas entièrement contribué au régime, mais on demande aux futurs, ceux qui arrivent non seulement de rembourser l'écart pour arriver à une certaine capitalisation, et éventuellement même de le bonifier. Alors, l'intérêt, en passant, de la formule fédérale, c'était que l'investissement additionnel pour la bonification serait capitalisé. Au moins, là-dessus, on évite d'avoir encore un autre déplacement. Mais il y a un problème d'équité intergénérationnelle, donc il y a un moyen de regarder du côté également de comment on pourrait mettre en place quelque chose de prévisible également pour l'âge de la retraite. Il faut que ce soit prévisible, ne pas surprendre les gens à la dernière minute, lorsqu'on a commencé. Il faut que ce soit fait sur une certaine période de temps, que ce soit prévisible. La même chose pour la question de l'ajustement des prestations en fonction, par exemple, d'une situation où le régime ne serait pas sain financièrement. Bien, pourquoi est-ce que c'est les futurs qui seraient obligés de tout contribuer à ça? Peut-être qu'il y aurait des ajustements, mais sur une base prévisible et surtout automatique pour les indexations. Pas nécessairement les prestations, mais au moins les indexations.

Et on n'est pas là nécessairement pour arriver avec la solution magique, mais une chose est certaine, c'est qu'au Québec la pression est plus forte. Il faut trouver des moyens de contrôler davantage les coûts. Mais peut-être que monsieur...

Le Président (M. Bernier) : M. St-Germain.

M. St-Germain (Michel) : Oui. Merci, M. le ministre, pour votre question. Avant de commencer, je voudrais souligner que, dans mon rôle, je vois des rapports actuariels de plusieurs pays à travers le monde et d'analyses et maintenant c'est la saison des oscars, et je dois vous dire que vos actuaires, à Retraite Québec, méritent l'Oscar des meilleurs rapports actuariels et des meilleures analyses, et je leur ai dit tantôt.

Le Président (M. Bernier) : Je n'ai pas de statuette.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. St-Germain (Michel) : Vous n'en avez pas? Écoutez, vous avez bien posé la question.

Au Québec, donner 1 $ de retraite par un régime public, ça coûte plus cher qu'au reste du Canada. C'est bien documenté. Je veux juste souligner que ce sont des choses qui sont sous notre contrôle. La raison pour laquelle ça coûte plus cher, c'est qu'on choisit de prendre une retraite plus tôt. On choisit de travailler moins d'heures par semaine. On choisit de moins se fier à l'immigration pour faire face au vieillissement de la population. C'est nous, les Québécois, qui choisissons ça. En conséquence, c'est parfaitement normal de demander : Qu'est-ce que les Québécois préfèrent lorsqu'on se compare au reste du Canada? Les mêmes contributions ou les mêmes prestations? Ce qui est proposé ici par les employeurs du Québec, c'est que, si on prend l'approche des mêmes cotisations plutôt que des mêmes prestations, ça devrait engendrer une prospérité économique au Québec par un plus grand nombre d'emplois.

Les employeurs sont aussi préoccupés par le contrôle des coûts, et je ne veux pas entrer dans les détails techniques, mais j'ai l'impression qu'au fédéral, lorsque je regarde certaines tendances, les hypothèses qui sont faites et les mécanismes de stabilisation de la cotisation, il y a un contrôle des coûts qui est plus prévisible qu'au Québec. Et je vous encourage à regarder ces méthodes de contrôle là que le fédéral a instituées.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Je ne pense pas que ce soit une question de coûts administratifs, je ne pense pas que ce soit le cas, de l'administration du programme, c'est plutôt les critères de sélection de la retraite : plus tôt ou plus tard. Aussi, le fait que c'est un bassin de travailleurs, d'entreprises qui est aussi beaucoup plus large que le nôtre, avec un profil démographique qui est différent, ça aussi, ça...

• (16 h 10) •

M. St-Germain (Michel) : ...les coûts administratifs du Régime de rentes du Québec.

Je veux souligner que, dans tous les programmes du gouvernement, au niveau de l'administration, ma lecture, c'est que le Régime de rentes du Québec est probablement celui qui est le moins critiqué, où les prestations sont les plus versées à temps, les cotisations sont reliées. Lorsque je parle d'écart de coût, ce sont des phénomènes reliés à la date de retraite — on se retire plus tôt au Québec qu'ailleurs — c'est, je le répète encore, des phénomènes comme l'immigration. Le reste du Canada est peut-être chanceux, ils peuvent compter sur un grand nombre d'immigrants pour contrôler les coûts. Et, je le répète encore, il y a, au fédéral, un mécanisme de partage des risques entre les différentes cohortes. Ça n'a pas été fait au Québec. C'est dans votre document de consultation. Et moi, je vous encourage à le faire. Toutes ces méthodes-là viendraient réconforter les employeurs, qui sont très préoccupés par cet écart de coût là et qui sont préoccupés que cet écart de coût là pourrait s'accélérer, pourrait être plus grand dans le futur.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Une des propositions, justement, c'est de regarder l'âge auquel les personnes peuvent prendre une rente anticipée qui va être pénalisée, oui, mais qui peuvent prendre cette rente, parce que beaucoup de personnes la prennent à 60 ans, par exemple, même s'il y a des pénalités, mais ils préfèrent la prendre à 60 ans et proposent de remettre ça un peu plus tard. C'est quelque chose qui...

Le Président (M. Bernier) : M. Dorval.

M. Dorval (Yves-Thomas) : Oui. En fait, dans mes propos, on parlait surtout de 65 ans comme étant un critère, puis là on parle de pénalités à partir de quel moment puis jusqu'où, etc.

Une chose est certaine, il peut y avoir des coûts associés à ça aussi, là, alors il faut que ce soit fait évidemment à coût nul, premièrement, donc il faut ajuster les pénalités en fonction de l'âge. Mais, si on y va graduellement jusqu'à 67, par exemple, c'est ce que d'autres pays de l'OCDE ont fait aussi, donc ce n'est pas irraisonnable, c'est tout à fait compréhensible, surtout que les gens... Puis, j'y reviens, c'est que le régime a été bâti au moment où l'espérance de vie était de 71 ans et là on arrive à plus de 80 ans. Alors, il n'est pas anormal de réviser aussi certains critères comme ceux-là.

Il y a des commentaires qui nous sont faits souvent sur la pénibilité de certaines tâches et le fait qu'il y a des individus qui n'ont pas nécessairement la même capacité de travailler dans certaines fonctions rendus à un certain âge. Et là-dessus, je dirais, bien, la plupart du temps, dans ces cas-là, les employeurs et les employés ont convenu aussi de régimes de retraite, dans ces entreprises-là, qui pallient à ça, que ce soient les corps de police, que ce soient les travailleurs dans les mines, que ce soit même le régime de retraite dans le secteur de la construction. Alors, il ne faut pas tout mettre sur le dos du régime public non plus, et d'ailleurs, dans notre mémoire, on est très clairs là-dessus, il faut laisser, hein, les mécanismes également du secteur... Quand je dis «le secteur privé», ça s'applique aussi aux employeurs du secteur public, mais là on parle du régime de retraite universel ou des régimes employeur-travailleur. Il y a donc des moyens de contourner ces éléments-là, d'ailleurs même on arrive à la fin avec certaines pistes peut-être nouvelles, mais, chose certaine, on ne peut pas continuer à laisser aller le régime de cette façon-là. Comme M. St-Germain l'a dit, plusieurs des raisons qui nous amènent à ça sont des choses qui sont issues d'ici. Ce n'est pas une question de malchance, c'est une question qu'il y a des éléments qui sont entrés en ligne de compte.

Mais j'ajouterais aussi, en passant, que, dans les prévisions actuarielles au fédéral puis au provincial, elles sont un petit peu différentes, et les rendements sont un petit peu différents aussi au fédéral et au provincial. C'est des éléments aussi qui jouent dans le long terme sur l'état du régime.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Deux minutes.

M. Leitão : Bon. Une dernière question. Ça a été soulevé plus tôt aujourd'hui que, si on se désharmonise trop du régime fédéral, ça va causer toutes sortes de maux de tête pour les employeurs québécois.

Le Président (M. Bernier) : M. St-Germain.

M. St-Germain (Michel) : C'est certain que, pour les employeurs, leur vie serait plus facile pour les employeurs nationaux d'avoir exactement les mêmes prestations, de sorte que leurs régimes puissent être coordonnés de façon systématique. Moi, j'appellerais ces complications-là comme... je ne dirais pas «inutiles», plutôt indésirables, mais elles sont gérables. À mon avis, ce n'est pas un facteur important de discussion.

Je reconnais qu'il y a des difficultés. En fait, si je peux dire quelque chose, moi, je suis plus préoccupé par les difficultés au niveau de la conception du supplément de revenu garanti si vous avez un régime séparé. À mon avis, cet enjeu-là de complexité, il est plus grand avec le SRG qu'avec des régimes d'employeur.

M. Dorval (Yves-Thomas) : Si vous me permettez, M. le Président, je rajouterais un autre élément, parce qu'on a consulté nos membres et on a eu des discussions à ce sujet-là et il est possible d'avoir une plus grande harmonisation. Si on a une harmonisation des coûts de cotisation, M. le Président, vous allez voir ça, que les employeurs du Québec vont être bien d'accord pour une harmonisation plus grande avec les mécanismes du Régime de pensions du Canada.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, il vous reste une minute.

M. Leitão : Collègue...

Le Président (M. Bernier) : Bien, il vous reste minute.

M. Leitão : ...vous avez une question à poser?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député de Trois-Rivières.

M. Girard : Peut-être rapidement. On va essayer de faire ça vite, en une minute.

On a parlé de taxe sur la masse salariale. On en sait quelque chose, au comité d'allègement réglementaire. Vous avez mentionné tantôt que la taxe sur la masse salariale, qui inclut la RRQ, le RQAP, la RAMQ, la CNESST, etc., est plus élevée au Québec qu'ailleurs. Tantôt, les gens comparaient directement le Québec, l'Ontario, le reste du Canada. Ça ne se fait pas en termes de cotisation, parce que déjà on est plus élevés. On sait que notre économie... de moins en moins de grandes entreprises, de plus en plus de PME, de petites entreprises qui innovent, qui ont besoin d'argent, besoin de cash-flow.

Quel serait l'impact d'une augmentation des cotisations sur nos PME de 1 % ou 2 %? Comment nos PME vont réagir?

Le Président (M. Bernier) : Courte réponse, M. Dorval.

M. Dorval (Yves-Thomas) : M. le Président, chaque entreprise a un modèle d'affaires qui peut être différent. Il y en a, si c'est plus simple, ils vont essayer de négocier avec leurs employés une réduction de contribution à leurs régimes d'avantages collectifs, mais, vous savez, il y a beaucoup d'employeurs au Québec qui sont la sommation de plusieurs acquisitions avec le temps puis qui traînent les régimes de retraite de plusieurs entreprises. Quand vous rentrez dans un secteur, par exemple, fortement syndiqué, avec de nombreux types de régimes différents puis que vous commencez une négociation avec des employés, vous n'êtes pas sortis du bois.

Ça, c'est vrai pour des employeurs aussi, il y en a qui ont des marges de manoeuvre, qui peuvent jouer sur une marge de manoeuvre, mais, quand vous êtes dans un secteur — prenons le commerce de détail, par exemple, ou l'alimentation — où la marge de profitabilité est tellement mince que toute modification dans les coûts d'opération au niveau de la masse salariale va être soit difficilement absorbable, parce qu'ils ont été déjà au maximum... et ça va être transféré au client.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Dorval. On va passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je vous salue. Écoutez, je pense que vous commencez à être des habitués de l'Assemblée nationale, c'est toujours un plaisir de vous questionner et surtout de vous entendre. Moi, je veux vous entendre sur quelque chose et je vais faire un préambule, puis ensuite, comme dirait Dédé Fortin, je vais vous passer la puck, O.K.?

Quand on fait une taxe... Ce n'était pas de vous que je parlais, c'est du chanteur.

Le Président (M. Bernier) : C'est pour ça que je le regardais, je me demandais...

M. Therrien : Oui. Il était content. Je n'ai pas le droit de vous appeler par votre nom, de toute façon.

Quand on taxe une entreprise, généralement, l'entreprise aura trois choix : soit qu'elle va payer la taxe avec une modification de salaire des travailleurs, soit qu'elle va changer le prix chez le consommateur ou soit qu'elle va diminuer le profit chez les producteurs, chez les possesseurs de l'entreprise en question. Ce qui va déterminer qui va payer la taxe, c'est l'élasticité de ces trois marchés-là : le marché du travail, le marché des biens et services ou le marché, si on veut, des investissements. Prenons l'exemple du pétrole : quand tu taxes les entreprises pétrolières, étant donné que notre demande est complètement inélastique, ils refilent tout ça au consommateur, puis c'est : Merci, bonsoir. Si moi, j'augmente la cotisation — puis là je vous demande de répondre à cette question-là — si j'augmente, mettons, la cotisation... ce n'est pas ça qui est nécessairement proposé ici, là, si j'augmente la cotisation pour les régimes de retraite de façon égale, là, chez le travailleur et chez l'employeur, l'employeur, lui, là, il a deux possibilités, soit qu'il diminue son... bien, trois possibilités : soit qu'il diminue son rendement — puis vous me voyez venir, hein? — qu'il augmente les prix ou qu'il joue sur le salaire de ses employés.

Étant donné que ça bénéficie aux employés, avez-vous déjà vérifié la corrélation qu'il peut y avoir entre une imposition, mettons, de 1 % de plus de la cotisation chez l'employeur et voir à quel point il y aura une pression sur les salaires à la baisse de ce pourcentage-là? L'équivalent, pour une raison simple, c'est que l'élasticité des producteurs et des possédants des entreprises est beaucoup plus grande que l'élasticité des travailleurs québécois, parce qu'ils sont québécois, et il y a une barrière au niveau de la langue, de la culture, puis ils veulent rester ici et, de toute façon, ils vont être condamnés à payer de cette façon-là la cotisation. Je veux vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. Dorval.

• (16 h 20) •

M. Dorval (Yves-Thomas) : M. le Président, c'est une question tellement intéressante qu'on est en plein débat actuellement sur l'augmentation du salaire minimum, en plus, et ça, il ne faut pas la négliger, cette question-là, parce que, soit dit en passant, là, une des raisons pour lesquelles on devrait refuser l'harmonisation avec le fédéral, c'est qu'eux autres, à partir du premier dollar gagné, il y a un escompte d'à peu près 5 000 $, je pense, il y a un crédit.

Mais, si vous commencez à augmenter le salaire minimum au Québec de façon plus accélérée que dans le passé, vous rajoutez le pourcentage de la cotisation sur le Régime de rentes, la solution fédérale, c'est que les gens qui ont des employés au salaire minimum vont être doublement perdants, parce qu'ils vont payer non seulement une cotisation additionnelle, mais ils vont, en plus de ça, sur un pourcentage où le salaire minimum va augmenter.

La position du Québec là-dessus, d'arriver à ne pas imposer d'augmentation de bonification pour un salaire inférieur à 27 500 $, ça ne protège pas tous les emplois au salaire minimum ou toutes les entreprises au salaire minimum, mais ça a quand même une certaine protection s'il arrivait une augmentation du salaire minimum. Je ne suis pas en train de proposer une augmentation du salaire minimum plus grande que d'habitude, mais je suis en train juste de dire qu'il y a certainement un débat là-dessus.

Alors, j'arrive à votre question, M. le Président. C'est intéressant, parce que, dans les faits, M. le député l'a mentionné dans son préambule, c'est qu'il n'y a pas un secteur industriel qui se comporte de la même façon, tout dépend des marges, tout dépend de la capacité. Je vais prendre le secteur de l'alimentation pour donner un bon exemple. Le secteur de l'alimentation a fait face à des augmentations du coût, et, les détaillants, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont refilé une partie du poids sur les fournisseurs, hein, ils ont demandé aux fournisseurs d'abaisser leurs prix, etc., ils ont été à la limite. Les détaillants dans l'alimentation, la marge de profitabilité est très, très, très mince. Ça fait que, quand on parle de profitabilité et jouer sur le profit puis le travailleur n'en a pas... Également, dans le secteur de l'alimentation, puis c'est le cas du commerce de détail, de la restauration, là, le profit est très, très, très mince. Donc, la seule façon, dans certains secteurs, c'est de refiler la facture finalement aux payeurs, aux consommateurs. Alors, tout dépendant du modèle d'affaires, c'est sûr que, si vous êtes dans une industrie à forte valeur ajoutée, il y aura probablement des marges beaucoup plus élevées, puis là, à ce moment-là, le jeu n'est pas le même. C'est pour ça d'ailleurs que, quand on fait des consultations auprès de nos membres, il y en a un pourcentage significatif qui dit : Ah! la formule du fédéral, pour moi, c'est correct, puis je suis capable de vivre avec ça, puis c'est moins compliqué, puis il y en a d'autres qui disent, un bon pourcentage, qui disent : Bien, la proposition du Québec m'agrée mieux parce qu'elle coûte moins cher que le fédéral, puis etc. Puis il y en a d'autres qui disent : Moi, j'aimerais mieux le statu quo, parce que, des augmentations de cotisation, là, je n'en veux plus. Alors, la réponse, c'est que ça dépend toujours, quand on regarde ces entreprises-là puis on les questionne... ça dépend de leurs modèles d'affaires, alors, exactement comme vous avez mentionné, l'élasticité, par rapport à l'offre et la demande, de ses prix, par rapport à l'offre et la demande de ses produits, de ses intrants, et ainsi de suite.

On a raison de dire qu'il n'y a pas un modèle seulement. La seule chose qu'on peut vous dire, c'est que, dans tous les cas que je viens de mentionner, il y a un pourcentage significatif d'employeurs qui vont être touchés plus que d'autres. C'est la même chose, d'ailleurs, quand on parlait des discussions sur le salaire minimum, c'est qu'il y a des secteurs pour lesquels ça ne touchera pas puis il y a des secteurs pour lesquels... vont être fortement touchés. Alors, c'est la même chose ici. Quand on touche la masse salariale, ça dépend toujours de la marge de manoeuvre de l'employeur à la fin puis si sa marge de manoeuvre, sa profitabilité vient plus du volume que de la marge de manoeuvre sur chaque vente.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : Oui. Merci, M. le Président. Mais, moi, ça m'a toujours intrigué, à savoir s'il y avait vraiment... Même s'il y a des secteurs qui sont plus touchés que d'autres, là, je n'ai jamais vu d'analyse ou d'étude macroéconomique qui faisait, justement, le lien entre ces deux situations-là. C'est juste que, vu qu'on parle de cette question-là puis vous représentez le secteur privé, en gros, là, je me demandais si ça existait. Puis là, ce que vous me dites... je comprends très, très bien ce que vous me dites, là, je ne suis pas en désaccord avec vous du tout, là, mais ça m'étonne que ça n'ait pas été fait, parce que ça pourrait nous aider à prendre des choix éclairés dans des situations comme on connaît actuellement, à l'intérieur de nos quatre jours. On aurait aimé ça en avoir plus, vu qu'on n'est pas pressés, comme disait le ministre. On aurait peut-être aimé avoir deux semaines, peut-être plus, vu qu'on n'est pas si pressés que ça, mais, bon, alors... C'est une flèche que je vous envoie, M. le ministre.

Mais, pour la suite, là, si on a une amélioration, mettons, comme le reste du Canada, là... Vous parlez des cotisations, c'est plus difficile pour une économie comme la nôtre de tolérer une augmentation de la générosité du régime. Tu sais, mettons, si on se dit, là : On y va avec le reste du Canada, dans le même sens que le reste du Canada... Puis ce qu'on a entendu, c'est : On n'a pas les moyens, parce que la productivité est plus faible ici, entre autres, ainsi de suite. Mais il y a des provinces qui ont signé ça puis qui sont plus pauvres que le Québec. Parce qu'honnêtement, depuis le début, j'entends ça puis je ne suis pas en désaccord avec ça, là. Tu sais, quand on dit : Bien, il faut regarder la capacité de payer des citoyens puis des entreprises, moi, j'écoute ça puis... tu sais, avec le vieillissement de la population... puis, tu sais, je ne suis pas en train de sauter dans les rideaux, là, je comprends ça.

Mais moi, je me pose la question : Comment ça se fait qu'il y a des provinces qui ont, techniquement, des productivités plus faibles qui, elles, se sont permis ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Dorval.

M. Dorval (Yves-Thomas) : M. le Président, je vais essayer de résumer ça brièvement. Il y a un élément, d'ailleurs, qui pourrait peut-être l'expliquer, mais ce n'est pas une preuve par l'absolu.

Mais, vous savez, on a les plus hauts taux de cotisation sur la masse salariale, mais, quand on se compare, on a un taux de salaire moyen plus bas aussi. Alors, il y a sûrement un effet entre les cotisations sur la masse salariale puis le salaire que les employés peuvent mettre dans leurs poches aussi, parce qu'à quelque part l'employeur voit la masse salariale totale, pas seulement la question d'un salaire, d'un revenu, etc. Ça, c'est un élément.

Le deuxième élément, c'est qu'au niveau de... je suis en train de perdre mon objectif, mais, en termes de... comment je pourrais dire ça?, donc, de... Je suis bloqué.

M. Therrien : Bon, écoutez, moi, j'ai plein de questions...

Le Président (M. Bernier) : Bien, écoutez, on va devoir passer du côté...

M. Therrien : Non. J'en ai plein, de questions.

Une voix : ...

M. Therrien : Je n'ai pas fini encore.

Le Président (M. Bernier) : On va aller du côté...

M. Therrien : Non. Je connais vos réponses, elles ne sont pas intéressantes. Oui.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci, M. le Président.

M. Dorval (Yves-Thomas) : Ah oui! la faible productivité — je m'excuse, M. le Président, parce que c'était ça, le mot que je cherchais — la question de la faible productivité ou pourquoi au Québec ça serait différent. Mais, les taxes sur la masse salariale, il y a un écart de 40 % à 45 % avec le reste du Canada. Alors, on ne parle pas de pinotte, là, on parle quand même d'un écart important. On s'est donné des régimes plus généreux et plus coûteux.

Le Président (M. Bernier) : M. Dorval, vous allez avoir l'occasion de répondre au député de Chutes-de-la-Chaudière maintenant.

M. Picard : Merci, M. le Président. Tout à l'heure, M. St-Germain, vous avez dit qu'il y avait peut-être un travail à faire au niveau du SRG plutôt que du Régime de rentes du Québec, si j'ai bien saisi. Vous avez bien dit ça?

M. St-Germain (Michel) : Oui. En fait, ce que j'ai dit, c'est que le SRG est un programme national et qu'il me semble qu'il y a... il faut s'assurer, lorsqu'on construit le régime québécois, que ça reste un programme national, d'une certaine façon. C'est ça que j'ai dit. Maintenant, je reconnais aussi que le SRG a des forces et a des faiblesses, là, là-dessus.

M. Picard : Je vais faire un énoncé. Vous me direz si ça tient la route ou non, il n'y a pas de problème là. Tantôt, on parlait : Si on avait tous les mêmes cotisations au Canada, il faudrait baisser les prestations au Québec. C'est ce que je comprends. Mais les bas salariés récupéreraient du SRG automatiquement, parce qu'ils auraient des revenus plus bas. Est-ce que je suis correct ou je ne suis pas correct?

M. St-Germain (Michel) : Oui. En fait, si vous décidez que l'équivalence se fait sur les contributions plutôt que sur les prestations et qu'en conséquence les prestations du régime de retraite du Québec sont inférieures à celles du fédéral, relativement parlant, les Québécois vont recevoir plus de SRG que les autres provinces — ce qui est déjà le cas, en passant, maintenant.

M. Picard : O.K. Mais ce serait peut-être un moyen... si, un jour, on vise d'avoir les mêmes cotisations à la grandeur du Canada, ça pourrait être un moyen, puis il y aurait un impact qui serait atténué par le SRG. C'est ce que je comprends.

M. St-Germain (Michel) : Vous avez raison. Mais je veux simplement dire que le SRG, c'est un bouche-trou, cette affaire-là, là. Je suis un petit peu nerveux quand vous utilisez le SRG pour construire un régime à long terme qui doit rester pour 50 ans. Ça a cet effet-là, mais, si j'étais vous... Je le répète, là, le SRG, c'est un bouche-trou qui fonctionne bien, là, mais c'est là comme bouche-trou.

M. Dorval (Yves-Thomas) : En fait, c'est un filet social, M. le Président, c'est un filet social pour ceux qui arrivent à un niveau... Ce n'est pas le même principe qu'un régime d'assurance où est-ce qu'on cotise pour avoir une retraite, c'est vraiment un filet social pour s'assurer d'un certain revenu minimum pour une couche de la population qui n'aurait pas été capable d'assumer... Alors, la question est pertinente, là, mais en même temps, quand on dit «le bouche-trou», c'est : un filet social.

M. Picard : Tantôt, M. Dorval, vous avez parlé des RVER. Pouvez-vous nous donner un portrait de vos membres, là, comment ça fonctionne actuellement? Avez-vous des statistiques un peu là-dessus?

M. Dorval (Yves-Thomas) : En fait, c'est peut-être plus Retraite Québec qui pourrait donner des statistiques là-dessus, mais la réalité, c'est que, nous, ce qu'on a fait, c'est un sondage au niveau de la connaissance : Est-ce qu'avant le 1er janvier 2017 les employeurs étaient au courant des nouvelles exigences qui faisaient en sorte qu'on exige qu'un employeur ait un régime d'épargne collectif pour la retraite?, et ça, la majorité, là, la très grande majorité... Donc, l'effort de communication de Retraite Québec, des firmes-conseils aussi, des comptables, etc., là, a été très bon, parce que les employeurs sont au fait. La question en termes d'adhésion : ce n'est pas tout d'ouvrir un RVER. Une fois que tu as ouvert un RVER, c'est juste l'offre d'un service, mais il faut que les gens contribuent aussi. Là où il y a un enjeu actuellement, c'est qu'on n'est pas rendus au niveau de cotisation désirable pour faire en sorte que les fournisseurs puissent avoir la masse critique nécessaire pour avoir des coûts administratifs raisonnables. Mais ça, c'est normal, on vient de commencer.

• (16 h 30) •

L'autre chose, c'est qu'il y a d'autres régimes, la loi permet d'autres régimes d'épargne collectifs. Le RVER, c'est juste, je dirais, le... par défaut, ça prend au moins ça, mais beaucoup, beaucoup de gens sont dans des REER collectifs, et ça, les informations tardent un petit peu plus à venir. Si je ne me trompe pas, là... je ne veux pas embarquer dans les données financières, mais ce n'est pas Retraite Québec qui compile ces données-là, là, je pense qu'il faut aller au fédéral, ou quelque chose comme ça. Mais on n'a pas toute l'information à jour sur les REER collectifs. Ce qu'on sait, par contre, je le répète, c'est que les employeurs sont au courant de la mise en place, qu'il y a des solutions qui existent, le RVER, c'est par défaut et qu'il y a un enjeu actuellement en termes de cotisation. Il y a des organisations qui disent : Bien, pourquoi vous n'obligeriez pas des cotisations obligatoires, etc.? C'est une piste, les cotisations obligatoires pour les employés. Mais, à ce moment-là, les gens vont dire : Ça va prendre aussi des cotisations obligatoires pour les employeurs. On revient au même problème. Alors, nous, on dit : Les RVER, c'est un bon outil. Mais ce n'est pas le RVER qui est un bon outil, c'est l'obligation d'avoir, d'offrir un régime d'épargne collectif pour la retraite qui est un bon outil, à notre avis, puis il faut lui laisser le temps de fonctionner un peu, et peut-être qu'il pourrait y avoir des bonifications.

Vous regarderez dans notre mémoire, vers la fin, une des recommandations qu'on fait. C'est peut-être une façon d'arriver à, je dirais, rendre plus attrayantes des contributions dans des régimes comme le RVER, parce qu'à ce moment-là on pourrait faire en sorte d'avoir un effet neutre pour des augmentations, des bonifications, etc. Regardez notre mémoire. Il y a une petite proposition là-dessus.

M. Picard : Merci.

Le Président (M. Bernier) : M. Dorval, M. St-Germain, du Conseil du patronat du Québec, merci de votre participation à la Commission des finances publiques.

Je vais suspendre quelques instants afin de permettre à la Fédération des chambres de commerce du Québec de prendre place. Je suspends.

(Suspension de la séance à 16 h 32)

(Reprise à 16 h 36)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, nous avons le plaisir de recevoir les représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec, représentée par M. Stéphane Forget, son président-directeur général; M. Alexandre Gagnon, directeur; et M. Claude Paradis, consultant. Bienvenue, messieurs. La parole est à vous.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

M. Forget (Stéphane) : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je veux vous offrir mes meilleurs voeux pour la nouvelle année. Je pense qu'on peut se le permettre encore, on est encore à la mi-janvier.

Alors, rapidement, peut-être vous rappeler qui nous sommes. J'aime toujours rappeler que la fédération porte deux chapeaux : elle est à la fois la fédération qui réunit et qui fédère les 140 chambres de commerce au Québec et aussi la chambre provinciale, donc, la Chambre de commerce du Québec, avec près de 1 200 entreprises qui sont directement membres de la fédération. Donc, nous avons la chance, grâce à notre membership, d'avoir une vision régionale, sectorielle et aussi de représenter les employeurs dans les différents dossiers, ce qui nous amène devant vous aujourd'hui.

Donc, je veux tout d'abord remercier la commission de nous permettre de nous exprimer sur cette importante question.

Depuis quelques années, les gouvernements du Canada et des provinces sont préoccupés par la possibilité que certains Canadiens arrivent à la retraite avec des revenus inadéquats. Dans cette foulée, les gouvernements ont entrepris une réflexion sur la possibilité de réformer le Régime de pensions du Canada et, pour le Québec, le RRQ afin d'améliorer les revenus de retraite des Canadiens mais également trouver des incitatifs intéressants pour maintenir le plus longtemps possible les travailleurs expérimentés sur le marché du travail. Une première série de mesures a d'ailleurs été instaurée suite à la dernière réforme de 2009. Plus récemment, la fédération a supporté la décision du gouvernement du Québec de ne pas entériner l'entente survenue au sommet des ministres des Finances canadiens ayant eu lieu à Vancouver en juin 2016. Le ministre des Finances du Québec avait alors mentionné avoir l'idée, et je le cite, d'une «solution un peu différente», considérant la situation particulière du Québec.

Si je fais un bref retour en arrière, au début des années 60, le gouvernement du Québec avait pris la décision d'établir son propre régime de retraite public avec l'objectif de pouvoir l'adapter au contexte socioéconomique et démographique particulier qui est le nôtre. La fédération est d'avis que le gouvernement du Québec a donc la flexibilité pour prioriser les besoins présents et futurs de la population québécoise dans le cadre de cette réforme et n'a donc pas à suivre une quelconque direction envisagée par le reste du Canada.

Cela dit, nous aimerions faire mention d'une première mise en garde, considérant le fardeau fiscal global des employeurs notamment par la taxe sur la masse salariale pour les entreprises québécoises.

Tel que démontré dans le document de consultation, toute réforme du Régime de rentes du Québec aurait comme conséquence de hausser les prélèvements sur la masse salariale des employeurs québécois. Pourtant, ces taxes sur la masse salariale sont déjà les plus importantes au Canada, supérieures de plus de 50 % à la moyenne canadienne. Imposer des taxes salariales plus importantes aux entreprises québécoises nuirait à leur compétitivité sur le marché nord-américain et donc, dans certains cas, à la croissance de l'emploi au Québec. Nous croyons qu'il est possible d'envisager de bonifier le RRQ sans augmenter les charges globales relatives aux taxes sur la masse salariale. La fédération invite les parlementaires à n'envisager une éventuelle bonification que dans un contexte global, en révisant les bénéfices associés aux différents programmes sociaux, afin de tenir compte de la capacité de payer des contribuables québécois, entreprises comme particuliers. À cet égard, nous croyons que la politique gouvernementale du cran d'arrêt doit impérativement être maintenue, et toute bonification du RRQ devrait se faire à coût nul pour les employeurs québécois.

Le document de consultation contient également des propositions afin de renforcer la pérennité du régime, propositions auxquelles nous tâcherons de répondre dans les quelques prochaines minutes. Il y est, premièrement, proposé de relever l'âge minimal d'admissibilité à la rente anticipée du régime. À ce sujet, mentionnons que le Régime de rentes du Québec permet actuellement à un travailleur de recevoir une rente réduite aussi tôt qu'à l'âge de 60 ans. Un grand nombre de Québécois décident de recevoir leur rente dès cet âge, malgré le fait qu'elle est réduite d'un maximum de 36 %.

• (16 h 40) •

En tenant compte des constats résumés ci-dessus et des mesures prises par d'autres pays de l'OCDE, la fédération favoriserait de hausser l'âge minimal d'admissibilité à la rente de retraite de 60 à 62 ans. Dans un même ordre d'idées, nous recommandons de hausser également l'âge normal de la retraite de 65 à 67 ans. Ces modifications permettraient différentes choses, notamment, dans un contexte de hausse de l'espérance de vie, de rééquilibrer la période d'accumulation pendant la vie active et la période de versement des prestations, d'améliorer le ratio des participants actifs sur les participants retraités, d'aider à changer le comportement des Québécois, qui se retirent plus hâtivement que tout autre travailleur en Amérique du Nord, et de suivre la tendance observée dans les pays de l'OCDE qui ont déjà procédé à cet ajustement afin d'assurer la pérennité de leurs régimes publics. Nous comprenons que cette modification devrait être accompagnée d'une période de transition, évidemment, afin de permettre aux travailleurs québécois de s'adapter à cette nouvelle réalité dans leur planification de la retraite.

Concernant les prestations de survivant, nous reconnaissons que le RRQ prévoit une prestation aux survivants d'un travailleur décédé avant la retraite. Tout comme pour la prestation d'invalidité, nous croyons que ce type de prestation doit être modernisé, surtout, par exemple, dans le cas de la prestation pour survivant, sachant que le taux d'activité des femmes s'est grandement accentué depuis la mise en place de cette prestation. Je crois qu'il faut se rappeler les raisons pour lesquelles les choses ont été mises en place et reconnaître que le contexte a évolué. Nous supportons donc les propositions de moderniser les parties uniformes de la rente de conjoint survivant et de réviser le montant maximal de la rente combinée afin de s'assurer qu'elle n'excède pas la rente de retraite maximale versée à un travailleur qui se retire.

Le document de consultation fait également mention de propositions visant à assurer une stabilité du taux de cotisation du régime. Nous désirons supporter l'instauration d'une approche de pleine capitalisation si jamais des améliorations étaient apportées au régime. Cette action permettrait une meilleure prévisibilité des coûts et une approche disciplinée avant de procéder à une modification éventuelle du régime.

Finalement, quant à la proposition concernant l'introduction d'un facteur de longévité, nous croyons qu'elle ne doit pas être traitée différemment des autres hypothèses actuarielles. Cependant, et nous l'expliquons davantage dans notre mémoire, nous considérons que certains facteurs ont des impacts plus importants sur le régime, notamment les estimations de rendement futur et la croissance plus lente des salaires, par exemple. Aussi, nous recommandons... nous ne recommandons pas, pardon, l'adoption de cette mesure aux effets, somme toute, plutôt nuls.

En conclusion, nous désirons réitérer que la meilleure décision semble être celle du statu quo. Nous entrevoyons déjà que le vieillissement de la population aura un impact majeur sur la viabilité du Régime de rentes du Québec, et il nous apparaît risqué d'envisager une quelconque bonification. Toutefois, si vous en décidez autrement, une bonification du régime avec la proposition au Québec devrait être privilégiée et accompagnée d'une revue du régime de base actuellement offert afin de minimiser l'impact financier des bonifications offertes et ainsi assurer une pérennité du régime pour les décennies à venir. Les modifications du régime sont peu fréquentes, et nous devons immédiatement prendre en compte les obstacles de demain, notamment une diminution importante des cotisants alors qu'il y aura une augmentation importante du nombre de rentiers.

Enfin, et je tiens à le réitérer, alors que le gouvernement du Québec a reconnu que les taxes sur la masse salariale imposées aux entreprises québécoises sont un obstacle à leur compétitivité, toute hausse des cotisations au Régime de rentes du Québec devrait au minimum être compensée par une baisse équivalente ailleurs. Le Québec doit s'inspirer de l'expérience des autres pays qui ont généralement pris la décision de hausser l'âge normal de la retraite à 67 ans, haussant, par le fait même, l'âge minimal d'accès au régime à 62 ans. Le Québec doit inciter davantage les travailleurs à rester plus longtemps sur le marché du travail. Il s'agit là d'un puissant incitatif à notre disposition. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Forget, de votre présentation. M. le ministre, si vous voulez débuter les échanges, oui.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, M. Forget, messieurs, merci d'être là, merci d'avoir pris le temps d'analyser notre publication et de faire vos commentaires. C'est toujours très apprécié.

Bon. J'ai deux questions. J'ai promis à mes collègues que je leur donnerais un peu plus de temps cette fois-ci, mais je commence avec deux questions, et puis on verra. On a parlé de l'âge de la retraite. Donc, il y a les deux aspects : l'âge minimal pour pouvoir avoir une retraite anticipée et puis l'âge de la retraite : 65 ans à plus tard. Comment est-ce que vous voyez ça? Est-ce qu'on devrait faire les deux? Est-ce qu'une est meilleure que l'autre? Ça veut dire de modifier l'âge minimal d'accès à la retraite anticipée et laisser l'âge normal à 65 ou ne pas toucher à l'âge minimal et dépasser l'âge normal? Est-ce que vous avez regardé ça ou ce n'est pas...

Le Président (M. Bernier) : M. Forget.

M. Forget (Stéphane) : Oui. Bien, évidemment, je pense qu'on peut se permettre cette réflexion-là et probablement cette décision-là, compte tenu de l'espérance de vie et compte tenu, comme je le mentionnais précédemment, du besoin d'avoir des travailleurs expérimentés sur le marché du travail. On a une réalité, et vous l'avez mentionné tantôt, démographique qui est différente des autres provinces canadiennes, essentiellement. Mais, de notre point de vue, on pense que... que l'âge minimal soit à 62 ans amène d'aller à 67 ans pour l'âge de la retraite. Claude, je ne sais pas si vous voulez compléter à cet égard-là.

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : Bien, je pense qu'on doit tenir compte des deux volets, je vais appeler ça le volet âge d'admissibilité à la retraite et l'âge normal de retraite. Je crois qu'il doit y avoir une coordination entre les deux. Si on faisait seulement un changement de passer de 60 à 62 dans les dispositions actuelles, ça augmenterait les coûts, et ce n'est pas ça qu'on recherche. Je pense que, je veux dire, ce qu'on recherche, c'est premièrement de permettre à des gens de pouvoir retarder leur retraite, étant donné tous les facteurs et les constats qui ont été donnés, mais, en plus de ça, c'est que, le même système, de le ramener sur deux ans plus tard, ça veut dire l'âge de l'admissibilité à 62 ans et l'âge normal à 67 ou vers 67. Ça fait que je pense qu'il faut que ça soit fait en même temps pour être capables de garder un équilibre dans la période... Ce qu'on dit, c'est qu'il faut maintenir l'équilibre entre la période de cotisation et la période de versement de rente, et actuellement il y a un déséquilibre, actuellement.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Merci. Je vois aussi que vous êtes d'accord et je pense que nous sommes tous d'accord que, quoi qu'on fasse, quelque bonification que ce soit, qu'elle doit être pleinement capitalisée. Donc, je pense que, là, il y a un vaste consensus là-dessus.

Ça a été soulevé aussi avant, et, je pense, probablement demain ça sera un peu la même chose, par certains groupes que, s'il y a une très grande désharmonisation, une très grande différence avec le régime canadien, ça va mener à toutes sortes de problèmes opérationnels pour les entreprises. Enfin, comment vous voyez ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : M. le ministre, oui, si on le prend seulement d'une façon simple, là, oui, il pourrait y avoir un certain déséquilibre. Je n'étais pas sur le marché du travail à ce moment-là, quand le régime a été mis en place en 1966, mais le Québec s'est doté de son propre régime parce qu'il voulait avoir la flexibilité de pouvoir l'adapter à, premièrement, sa population et la façon qu'on voulait gérer l'épargne-retraite au Québec.

Si on regarde ça en disant : Si on veut satisfaire les besoins de la population québécoise et si la population québécoise se différencie du reste du Canada avec le temps, comme c'est le cas actuellement, je crois qu'on doit s'adapter à la réalité québécoise au lieu d'essayer d'harmoniser le reste du Canada, et effectivement on essaierait toujours de maintenir quelque chose qui est le plus proche possible... mais il va arriver un temps où on devra faire des choix. Et je crois qu'étant donné la façon que le Québec a traité son régime pour satisfaire la population québécoise il va falloir qu'il y ait des différenciations, à un moment donné, si, entre autres, la démographie change. Ça fait que je crois qu'on devra se rendre vers là, effectivement, à ce moment-là.

M. Forget (Stéphane) : Si vous le permettez, mon collègue Alexandre voudrait ajouter...

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. Gagnon, vous voulez ajouter des...

M. Forget (Stéphane) : ...un petit commentaire à votre question.

Le Président (M. Bernier) : Oui? Bien, on va vous écouter.

M. Gagnon (Alexandre) : Merci. En fait, très rapidement pour dire que, oui, un peu comme M. Paradis a dit, il faut qu'on ait le plus d'éléments semblables, effectivement, mais on a d'autres législations, on a d'autres façons de faire également où on se permet certaines différences. Les entreprises sont habituées de faire affaire dans les différences législatives entre les différentes provinces, entre les différents pays de plus en plus, donc il ne faut pas s'arrêter à ce qu'il y ait des différences par rapport au RPC. On est capables de passer outre ces différences-là puis d'adapter notre propre régime à nous comme on a fait le choix, là, en tant que société à l'époque, là.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : ...collègue, si vous avez des questions.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Merci à nos invités qui sont ici aujourd'hui. Je sais que vous êtes arrivés un petit peu tôt, là, et vous avez entendu les gens qui étaient ici avant vous.

Très rapidement, très rapidement, là. Les gens du Conseil du patronat nous ont parlé d'une variable, par rapport à la démographie, qui pourrait avoir un impact particulier sur la viabilité du Régime des rentes. Et vous, vous en parlez beaucoup, là, d'assurer la viabilité du régime, vous parlez de toutes sortes de mécanismes qui peuvent nous aider à consolider l'âge normal, l'âge minimal d'admissibilité, etc.

Je ne vous ai pas entendus sur la question de l'immigration. Rapidement, ils ont dit que l'immigration pouvait avoir un impact assez important sur la viabilité à long terme de notre régime. Et donc les décisions qu'on prendra face à l'immigration vont avoir un impact là-dessus. Avez-vous une opinion ou une vision particulières sur cette question-là?

Le Président (M. Bernier) : M. Forget.

M. Forget (Stéphane) : De façon plus large, je pense que nous sommes face, au Québec, plus qu'ailleurs, comme vous le savez, à un défi démographique avec le vieillissement de la population. L'un des moyens, c'est évidemment d'accroître cette population-là, et ça passe évidemment par l'immigration. On est intervenus beaucoup l'an passé, lors de la réflexion sur la nouvelle politique en matière d'immigration. On est intervenus sur notre capacité d'accueillir une immigration qui est plus en adéquation avec notamment nos besoins de main-d'oeuvre.

On le sait, on est à un niveau à peu près de 50 000, par année, d'immigrants qui arrivent ici. Il y en a, bon an, mal an, une quinzaine de milliers qui quittent le Québec. Donc, au net, année après année, mis à part, là, les réfugiés, on est à peu près à 35 000. Évidemment, c'est bien insuffisant. Donc, nous, on l'a dit, on l'a mentionné, il faut avoir une immigration plus économique, mieux en lien avec nos besoins de main-d'oeuvre. Et, si on arrive à faire ces choix-là, bien, on va accroître, de ce fait, notre population et, de ce fait, aider à notre régime. Mais là on a un défi qui est au-delà du régime, de choisir une immigration qui est en lien avec nos besoins.

Le Président (M. Bernier) : ...M. le député. M. le député de Trois-Rivières.

M. Girard : Merci, M. le Président. Donc, Stéphane, toujours un plaisir de te revoir avec ton équipe, merci d'être là. Tantôt, au niveau du mémoire, au niveau de votre allocution, vous parliez d'un statu quo. Si j'ai bien compris, le statu quo est vraiment pour les cotisations des entreprises. Donc, si on veut améliorer le régime pour nos prestataires, c'est de faire d'autres modifications. Vous avez parlé peut-être de baisses équivalentes ailleurs. Quand on parle de baisses ailleurs, est-ce que vous avez des suggestions? Ou encore est-ce que vous préconisez un changement à l'intérieur... dont les âges de retraite, et tout ça, un changement dans le régime pour ne pas toucher aux cotisations ou vous préconisez des baisses ailleurs et augmenter les cotisations de nos entreprises à la RRQ, mais en diminuant peut-être d'autres services à la population?

Le Président (M. Bernier) : M. Forget.

M. Forget (Stéphane) : Merci. Bien, tout d'abord, avant de laisser la parole à mes collègues, je vous dirais que, et c'est vrai ici et c'est vrai dans bien d'autres dossiers où on a l'occasion de le répéter, on n'aime pas beaucoup le phénomène de sédimentation, mais on fait beaucoup ça trop souvent où on a des mesures en place, des crédits, des subventions, et autres, et, plutôt que de se poser la question, à savoir : Qu'est-ce qu'on enlève pour améliorer ce que l'on fait?, bien, on ajoute, on ajoute et on ajoute. Donc, ce qu'on dit : Si on veut bonifier le régime, bien, peut-être qu'on devrait faire une réflexion sur les autres avantages du régime ou peut-être même les autres programmes sociaux pour que ça se fasse à coût nul. Et ça, il y a un exercice à faire déjà entamé par la commission Godbout à l'époque, entamé aussi par la commission Robillard avec deux rapports extrêmement touffus et précieux qui, je pense, méritent qu'on continue de s'y attarder. Alors, nous, ce qu'on dit, c'est : Peut-être qu'il y a des bonifications à faire, mais il faut que ça se fasse à coût nul. Deuxièmement, peut-être que le régime de base doit être revu.

J'écoutais tantôt l'argument, par exemple, de l'association des thanatologues, et nous sommes très sensibles aux enjeux des gens qui n'ont pas les moyens d'enterrer les gens qui sont décédés. Cela étant dit, quand plus de 80 %, et même plus, des Québécois de tout âge ont un régime, une protection d'assurance vie, est-ce que tous les Québécois devraient recevoir cette prestation-là? Il faut se poser la question. Est-ce que les gens à hauts revenus qui le reçoivent devraient le recevoir aussi? C'est ce genre de réflexion là, et c'est un exemple que je donne, qu'on devrait se faire. Si on le bonifie, bien, ayons le courage de regarder l'ensemble du régime et peut-être les autres régimes sur lesquels nous cotisons, employeurs et employés, et par la suite, bien, peut-être qu'on aura des meilleures contributions à des endroits où on considère que c'est plus important qu'ailleurs. Je ne sais pas si, Claude, à cet égard-là, vous voulez ajouter ou...

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : Il y a peut-être un élément sur lequel on pourrait mettre l'emphase. Quand on dit de revoir, de réformer le régime de base, sûrement, quand on parle de passer de 65 à 67 ans sur une certaine période, avec une période de transition... pourrait libérer des cotisations qui pourraient servir, par exemple, à l'amélioration du régime dans la proposition qui est faite actuellement. Là, ici, on parle de réformer, de bonifier le régime, mais je pense que l'un ne va pas sans l'autre. Si on veut faire ça, il faut au moins entamer la réflexion de la réforme du régime de base pour que ça se fasse en même temps et d'en arriver à un résultat.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Ça va?

M. Girard : Ça va.

Le Président (M. Bernier) : C'est beau. M. le député de Sanguinet, la parole est à vous.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Merci d'être ici parmi nous.

Première des choses, et il y a quelque chose que vous avez dit sur lequel j'aimerais revenir, quand vous parlez de 1965 comme étant un moment où on avait garanti une certaine flexibilité des régimes de retraite du Québec par rapport aux autres provinces, bien, c'est plus ou moins le cas, parce qu'à l'époque on se posait la question sur la cohérence, sur justement qu'il fallait que les plans se ressemblent, parce que la gestion, entre autres, était plus facile pour quelqu'un qui passait d'une province à une autre, un travailleur ou un employeur qui passait d'une province à une autre. Étant donné qu'il y a une garantie que les régimes de retraite sont semblables, c'est facile de transférer l'argent au courant de sa vie. Tu sais, s'il travaille 13 ans dans une province, six ans à une autre puis 13 ans à une autre, bien, les provinces ne font que se transférer de l'argent pour justement compenser les paiements de la retraite. Et ça, c'est possible uniquement parce que le Québec a uniformisé, d'une certaine façon, les régimes de retraite avec le reste du Canada.

À la seconde où on pose l'hypothèse qu'on accepte et que le plan du ministre, là, c'est ce qu'il nous propose, puis on... bon, admettons, on fait de la politique-fiction, là, à ce moment-là, ça veut dire qu'on ne peut plus faire ça et qu'on se fait sortir du régime canadien, on n'a plus cet avantage-là. Alors, quand vous me dites que ça amène de la flexibilité, moi, je pense qu'on a un gros problème là, entre autres. Puis là on parle des fonctionnaires fédéraux aussi, qui est définitivement un problème.

Alors, vous, vous ne percevez pas ce genre de problème là pour les entreprises québécoises qui vont engager des gens peut-être d'autres provinces ou qui peuvent avoir des filiales dans d'autres provinces?

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : Chaque changement qu'on fait ou si on dévie légèrement de qu'est-ce qui se fait ailleurs, c'est sûr que ça ajoute des défis liés, par exemple, aux transferts interprovinciaux. Ça, on ne se le cachera pas. On va trouver une solution. Ça, on en trouve toujours, des solutions. Mais je crois que pour la...

M. Therrien : ...

M. Paradis (Claude) : Pardon?

M. Therrien : ...solution, c'est la souveraineté du Québec. Je voulais juste le dire.

M. Paradis (Claude) : Je n'ai pas entendu.

M. Therrien : C'est la souveraineté du Québec, notre solution à nous autres.

M. Paradis (Claude) : Ah! O.K.

Le Président (M. Bernier) : C'est un commentaire.

M. Paradis (Claude) : C'est un autre sujet.

M. Therrien : Il faut que j'en parle une fois par jour. Là, je l'ai fait. Bon. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis, continuez.

Une voix : ...

M. Therrien : Ah oui! c'est vieux comme la terre, l'autodétermination des peuples, hein, c'est vieux, hein? Bien oui.

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis, continuez.

M. Paradis (Claude) : Mais, si je reviens sur le Régime de rentes du Québec, je crois que c'est : les transferts interprovinciaux représentent une minorité des cas par rapport à la majorité, qui est de procurer une rente aux Québécois, et je crois qu'on doit focusser sur cet aspect-là, de procurer une rente aux Québécois avec notre capacité de payer, avant de commencer à penser aux transferts interprovinciaux, puis on va trouver une solution pour les transferts interprovinciaux.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Moi, je veux juste vous dire qu'il y a plusieurs problèmes qui sont liés à ça. La seconde où est-ce qu'on dit : Bon, on va trouver des solutions aux problèmes, moi, je n'ai pas de problème avec ça, on est là pour en trouver, des solutions, mais, quand arrivent des situations telles que proposées par le ministre, je pense qu'il faut qu'on ait les coudées franches puis qu'on sache vers quoi on se dirige. C'est problématique. Je comprends qu'on peut trouver des solutions, mais il reste qu'il y a problèmes qui sont liés à ça, il faut bien les connaître, il faut peser le pour et le contre et faire en sorte que les décisions qu'on va prendre vont être les meilleures décisions pour les producteurs, pour les gens que vous représentez mais aussi pour les Québécois en général.

J'aimerais revenir sur les prestations déterminées. C'est sûr que je vais poser la question à M. D'Amours, que je vois, là, puis je vais vous la poser à vous aussi, là. Vous parlez de coût nul. Tu sais, vous dites : On n'est pas contre, là, changer, à quelque part, les taxes sur la masse salariale, mais à coût nul. Moi, je trouve ça intéressant. Quand on parle des entreprises qui offrent des prestations déterminées à leurs employés, est-ce qu'on peut dire que les bonifications qu'on peut avoir au régime de retraite sont, pour ces gens-là, à coût nul?

Le Président (M. Bernier) : M. Gagnon? M. Forget? Qui lève la main? M. Paradis.

• (17 heures) •

M. Paradis (Claude) : Je vous dirais qu'actuellement, pour que ça soit à coût nul, il faudrait que la bonification qui serait, par exemple, proposée au Régime de rentes du Québec soit intégrée totalement dans les régimes à prestations déterminées. On sait que ça ne se fait pas aussi automatiquement que ça. Et il y a aussi l'ampleur du changement pour essayer d'intégrer cette bonification-là dans les régimes de retraite à prestations déterminées des entreprises. Je vous dirais que, dans certains cas, il pourrait être plus facile... les employeurs vont dire : Bien, écoute, oui, je vais modifier mon régime pour être capable d'absorber l'augmentation de coût pour que ça soit à coût nul. Dans d'autres cas, peut-être par mesure de simplification, ils ne voudront pas le faire et ils vont, par exemple, faire autre chose, par exemple réduire les salaires, pour être capables de compenser la différence.

Ce sont toutes des options qui sont sur la table, mais il y a différents éléments, il y a différentes options qui sont là, pas nécessairement l'intégration dans le régime de retraite à prestations déterminées.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Forget (Stéphane) : Si je peux me permettre...

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. Forget.

M. Forget (Stéphane) : ...un petit commentaire, très brièvement.

Je vous le rappelle, lorsqu'on est à 15 % sur les taxes sur la masse salariale versus 9 % sur la moyenne canadienne, c'est un chiffre qu'il faut regarder puis voir comment on peut tendre vers le bas. Il y a les enjeux des entreprises elles-mêmes, là, avec leurs régimes à prestations déterminées, ou autres, mais je pense que, ce chiffre-là, on doit le garder à l'esprit parce qu'il y a un enjeu de compétitivité, là, qui finit par s'appliquer. Et, lorsqu'on me sert l'argument : Oui, mais en contrepartie on paie les salaires moins élevés au Québec, moi, je ne vois pas ça comme un argument très positif, c'est plutôt inquiétant et plutôt dommage. Alors, il faut tendre dans l'autre sens, à mon avis.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Je vous ai bien entendu là-dessus. Je pense que votre propos est clair, et puis il est noté. Donc, ça, c'est clair aussi. Parce que vous avez parlé de ça, puis je voulais faire du pouce un peu là-dessus. L'âge de la retraite, vous voulez l'augmenter.

Je vous pose la question très simplement : Est-ce que vous pensez que c'est une menace à l'équité intergénérationnelle de fonctionner comme ça ou si ça n'a pas de lien?

M. Forget (Stéphane) : Moi, je n'en vois pas, de lien.

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : ...votre question, c'est de dire : Si on passe de 65 à 67 ans, est-ce que ce n'est pas bon pour l'équité intergénérationnelle? C'est ça que vous dites?

M. Therrien : Bien, comparativement à ceux qui reçoivent actuellement des prestations, comparativement à ceux qui éventuellement en recevront. Il y en a qui vont avoir les prestations plus tard. Donc, il y a une classe de population, une génération qui va avoir hérité d'une situation favorable que les autres... Ah! là, je vois le monsieur plus jeune, là, se lever. Là, il se sent impliqué davantage, c'est bien.

Le Président (M. Bernier) : M. Gagnon.

M. Forget (Stéphane) : C'est le plus jeune du groupe, d'ailleurs.

M. Therrien : C'est ça. Il a levé le doigt, je l'ai bien vu.

M. Gagnon (Alexandre) : Celui qui va subir, là... Non, en fait, il faut comprendre que notre situation a complètement changé, là, on s'entend, notre espérance de vie a changé, notre âge de rentrée sur le marché du travail a changé, donc notre durée de cotisation au régime également a changé, et pourtant le régime lui-même n'a pas été modifié au courant des années. Donc, si on parle d'équité intergénérationnelle, il faut prendre l'ensemble des critères en ligne de compte et non pas uniquement la fin de notre durée... d'âge de retraite, là.

M. Therrien : Je veux bien vous comprendre. Moi, je vous pose des questions puis je suis là pour vous écouter, là. Quand vous dites que l'âge de l'entrée... Dites-moi si j'ai bien compris, là, puis je pense qu'on avait discuté de ça avant, là. Je pense que les gens entrent sur le marché du travail un peu plus tard.

Une voix : ...

M. Gagnon (Alexandre) : Avec les années, évidemment, le niveau de scolarité des Québécois a augmenté. C'est une bonne chose, évidemment. Donc, par la force des choses, évidemment, avant d'entrer dans un emploi à temps plein, évidemment, on rentre plus vieux sur le marché du travail.

M. Therrien : Donc, vous seriez, à la limite, contre le facteur longévité qui est proposé par le ministre pour faire en sorte de diminuer, passé 22 ans, diminuer l'argent qu'on va recevoir de la retraite, parce que vous proposez ça, qui est plus simple. C'est ce que je comprends?

Le Président (M. Bernier) : M. Paradis.

M. Paradis (Claude) : Ce n'est pas qu'on est contre le facteur de longévité. Ce qu'on dit, c'est qu'au lieu d'appliquer un facteur de longévité qui va faire qu'on va réduire la rente quand la hausse de l'espérance de vie va se faire plus que ce qui est anticipé on dit : Bien, prenons les choses comme elles sont, c'est de dire : Bien, le facteur de longévité, c'est la même chose que de changer l'âge de la retraite de 65 à 67, avec le temps. Ça fait qu'on a dit : Faisons les choses comme il faut, faisons passer juste l'âge de retraite, et le facteur de longévité, la longévité en tant que telle est une hypothèse dans l'évaluation actuarielle au même titre que les augmentations de salaire, comme les taux d'activité, puis ainsi de suite, et que, si on regarde, par exemple, l'évaluation actuarielle, on s'aperçoit que l'impact de hausse de salaire plus lente qu'anticipé a autant d'impact, sinon plus d'impact sur le taux de cotisation que la hausse de longévité.

Je veux dire, ceci étant dit, traitons l'espérance de vie comme étant une hypothèse comme une autre, mais axons-nous sur la conception du régime et sur l'âge de retraite.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Therrien : Merci beaucoup. C'est intéressant. Merci.

M. Picard : ...M. le Président. Merci, messieurs, de votre participation aux travaux de la commission. Merci aussi de rappeler au ministre le principe du cran d'arrêt, qui n'est pas seulement qu'un slogan, là, qu'on utilise de temps à autre.

Je vous dirais, là, tout à l'heure, d'entrée de jeu, j'ai indiqué que c'est ma troisième consultation sur le régime de retraite du Québec, et ça donne un délai, ça donne un délai. J'ai fait sortir les données. La première consultation que j'ai participé, c'était en 2004, et le projet de loi est arrivé en 2008, donc il y a eu quatre ans de délai. La deuxième consultation, c'était à l'été 2009, et le projet de loi est arrivé en novembre 2011. Puis, si je reviens à ma prémisse du cran d'arrêt, puis vous dites que vous êtes pour la bonification mais à moindre coût ou à coût nul pour les entreprises, donc je vous offre la possibilité d'indiquer au ministre qu'est-ce qu'il devrait faire d'ici au moins les deux prochaines années pour diminuer les taxes sur la masse salariale pour permettre la bonification du Régime des rentes, parce que vous dites que c'est le moindre des deux maux, là.

Donc, je vous offre cette possibilité-là de donner des suggestions — le ministre est en préparation du budget — si on peut diminuer la masse salariale. Et ce que je décode des employeurs, c'est qu'ils sont d'accord, sauf qu'ils sont étouffés actuellement par les masses salariales. Même dans le document, on le dit aussi, là. Ce n'est pas méchant, là. Donc, je vous offre cette possibilité-là. Allez-y. La puck est sur votre palette, comme on dit.

Le Président (M. Bernier) : M. Forget.

M. Forget (Stéphane) : Oui. Bien, tout d'abord, c'est une comparaison canadienne aussi, là, on se compare par rapport aux autres. Ce qu'on essaie de faire quand on vient en commission parlementaire... Évidemment, là, on parle du Régime de rentes, mais on regarde l'ensemble des mesures qui existent ou qui sont en discussion, ou autres, puis les entreprises sont très conscientes, très préoccupées par ça.

Et là il y a un contexte. Tantôt, mon prédécesseur a parlé de la réflexion en cours sur le salaire minimum, quel impact ça aura sur la réalité des entreprises. On regarde aussi nos enjeux de compétitivité. On regarde le système de plafonnement et d'échange des droits d'émission, qui a un impact aussi sur les employeurs. À un autre niveau, les entreprises actuellement sont très préoccupées par ce qui se passe du côté américain. Vous allez me dire que je m'éloigne du régime de retraite, mais je me rapproche pareil de la réalité et de la compétitivité des entreprises québécoises. Donc, quand je prends l'ensemble de ces facteurs-là, ce qu'on dit, c'est : Soyons prudents sur notre volonté de bonifier, parce que, vous allez l'entendre dans les prochains jours, là, il faut beaucoup bonifier. Mais la réalité sur le terrain, c'est qu'on a un défi démographique, on a des enjeux de compétitivité, on a nos voisins américains et ontariens, qui ont une réalité différente de la nôtre. Donc, quand je suis entrepreneur chez nous et je regarde l'ensemble de ces éléments-là, je me dis : Attention, là, soyons prudents. Je suis toujours d'accord à ce que mes employés aient des avantages sociaux intéressants, mais, comme employeur, ma responsabilité, c'est de faire fonctionner mon entreprise, et là j'ai une préoccupation.

Ceci dit, pour répondre plus clairement à votre question, il y a les taxes sur la masse salariale, qui sont un enjeu. On a parlé tantôt de revoir le régime de base. Si on modifie l'âge de la retraite, on va peut-être se donner une marge de manoeuvre sur un élément. Tantôt, je parlais avec le ministre... excusez-moi, M. Girard de l'allègement réglementaire et administratif. Le fardeau qui n'est pas inclus dans la taxe sur la masse salariale mais que les entreprises subissent au quotidien, ça, c'est un autre élément extrêmement important. Puis le troisième élément qui est très important, pour nous, on aura l'occasion d'en parler avec le ministre prochainement — on a parlé du défi démographique un peu plus tôt : les entreprises ont un défi de productivité au Québec. Et ça, si on veut améliorer la rentabilité de nos entreprises, notre capacité de croître, on va devoir travailler très, très fort et augmenter nos moyens pour aider et appuyer nos entreprises à accroître leur productivité. Alors, ça, pour nous, c'est des éléments très importants qui, pris dans leur ensemble, ont des impacts réels, de façon positive ou négative, sur les entreprises québécoises.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Picard : Très rapidement. Vous vous rappelez, quand on parle d'allègement réglementaire, le premier rapport, M. Lemaire, dans les années 80, si je me rappelle bien. C'est assez incroyable qu'on est 30 ans plus tard et on parle encore du même sujet. C'est un frein, un frein pour l'économie du Québec. Je termine là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député. Donc, M. Forget, M. Gagnon et M. Paradis, de la Fédération des chambres de commerce du Québec, merci de votre participation à la Commission des finances publiques.

Je vais suspendre quelques instants nos travaux pour permettre au groupe représenté par M. Alban D'Amours de prendre place. Je suspends.

(Suspension de la séance à 17 h 11)

(Reprise à 17 h 15)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, nous recevons M. Alban D'Amours, président du Comité d'experts sur l'avenir du système de retraite québécois. Donc, merci de votre participation à la Commission des finances publiques. La parole est à vous. Vous avez 20 minutes pour votre présentation, M. D'Amours.

Comité d'experts sur l'avenir du système de retraite québécois

M. D'Amours (Alban) : Merci, M. le Président. Alors, comme vous venez de me présenter, je dois vous dire, je suis accompagné de MM. Bernard Morency, René Beaudry et Luc Godbout, trois membres du Comité d'experts. On est honorés, bien sûr, d'avoir été invités à témoigner devant vous. Et nous partagerons d'ailleurs cette présentation à nous quatre.

En introduction, nous tenons à rappeler que le mandat de notre comité visait à incarner, dans le système de retraite québécois, une vision globale de la sécurité financière à la retraite. Nous avons rapidement réalisé qu'il fallait innover pour pérenniser le système de retraite et adapter nos régimes aux nouvelles réalités socioéconomiques et démographiques. Notre rapport, publié en 2013, a entraîné un haut niveau d'acceptabilité sociale entourant les constats et les recommandations qu'il contenait. Tous ont alors reconnu que le statu quo n'était pas une option, qu'il y avait urgence d'agir et qu'un nouveau contrat social s'imposait pour renforcer la sécurité financière à la retraite de tous les travailleurs québécois. Le gouvernement, d'ailleurs, a adopté trois lois, les lois nos 15, 29 et 13, en plus de mettre en place un nouveau véhicule, le RVER, qui font du Québec un leader dans ce domaine.

Il est maintenant temps de passer à la prochaine étape et de revoir le Régime de rentes du Québec. Nous partageons les objectifs poursuivis ainsi que les principes énoncés tant au niveau de l'amélioration du Régime de rentes du Québec que de l'importance d'en assurer la pérennité. L'équité intergénérationnelle, les besoins et la capacité d'épargne des travailleurs et la nécessité de maintenir la compétitivité de nos entreprises doivent guider nos décisions. Nous tenons également à souligner la qualité tant du document de consultation que de celui sur les constats.

Le système de retraite québécois a été conçu dans les années 60 avec comme principal objectif de combattre la pauvreté chez les personnes de plus de 65 ans, et ça a fonctionné. En effet, le taux de pauvreté chez les personnes de 65 ans et plus au Canada est autour de 6 %, soit environ la moitié de la médiane des 35 pays membres de l'OCDE, laquelle est légèrement supérieure à 12 %. Il faut maintenir cet acquis tout en adaptant notre système aux nouvelles réalités socioéconomiques et démographiques, tels les bas taux d'intérêt, l'augmentation de l'espérance de vie et la réduction du nombre et de la qualité des régimes de retraite offerts par les employeurs. Le graphique 1 de l'annexe 1 montre d'ailleurs l'impact combiné de la baisse du taux d'intérêt et de l'augmentation de l'espérance de vie sur la rente annuelle que l'on peut acheter avec 100 000 $ de capital à 65 ans. Donc, pour faire face à de tels défis, les Québécois ont besoin d'un système de retraite qui leur offre une sécurité de base fondée sur la flexibilité, la mutualisation des risques, une gestion efficace à faible coût et la diversité des sources de revenus. Fort de ces principes, ce système pourra se transformer au fil du temps et permettre à chacun de prendre en compte ses propres circonstances pour décider de sa retraite et du niveau d'épargne dont il aura besoin.

Toutes les études le démontrent, ceux qui ont le plus besoin d'aide sont les Québécois de la classe moyenne et les plus jeunes, ceux de moins de 45 ans, qui bénéficient de moins en moins souvent d'un régime de retraite à prestations déterminées, et ils doivent pouvoir compter sur un régime de rentes du Québec plus généreux pour les aider à mieux gérer les risques financiers et de la longévité.

Une des grandes forces du système de retraite québécois est le partage des responsabilités entre les individus, leurs employeurs et l'État. Déjà, les Québécois ont modifié leur comportement face à la retraite en retardant leur départ définitif à la retraite et en acceptant d'épargner davantage lorsqu'ils le peuvent. Il est maintenant nécessaire de demander aux employeurs de cotiser davantage au régime. Ceux qui offrent un régime d'épargne-retraite à leurs employés pourront le faire à coût nul en adaptant leurs régimes privés. Pour les autres, il s'agira d'une façon très efficace et peu coûteuse de contribuer à l'épargne-retraite de leurs employés.

Je demanderais maintenant à Bernard de poursuivre.

• (17 h 20) •

M. Morency (Bernard) : Merci, Alban. Alors, le document de consultation que le gouvernement a préparé soumet deux propositions d'amélioration : une qui est celle qui a été convenue par le gouvernement fédéral et les autres provinces, ce qu'on a appelé dans notre mémoire l'option RPC; puis l'autre, qui est très semblable mais qui exclurait les salaires au-dessous de la moitié du maximum des gains admissibles, qu'on a appelée pour les fins de discussion l'option 50 % MGA.

Or, dans les deux cas, les améliorations seraient pleinement capitalisées, elles seraient financées 50-50 par des cotisations déductibles d'impôt à la fois des employés et des employeurs. Donc, c'est des améliorations qui sont sensiblement identiques. Dans les deux cas, elles seraient mises en vigueur progressivement d'ici 2025 et elles n'entreraient en vigueur que 40 ans plus tard, soit en 2065. Ça, ça veut dire que les gens qui vont bénéficier pleinement des décisions qu'on prend maintenant, là, c'est les gens qui sont nés en l'année 2000 ou depuis ce temps-là. C'est dans cette perspective-là qu'on doit tenir nos discussions, une perspective de quelque chose qui va se passer sur les prochains 40 ans, donc qui est à long terme, qui doit tenir compte des besoins des gens de la classe moyenne, qui doit tenir compte des besoins des jeunes.

À la lumière de ça, nous, nous favorisons nettement l'option RPC, donc une amélioration du Régime de rentes du Québec similaire à ce qui est proposé pour le Régime de pensions du Canada. La première raison, c'est que l'option RPC répond beaucoup mieux aux besoins de la classe moyenne et des jeunes. On vous a donné un graphique à l'annexe 2 qui démontre le taux de remplacement du Régime de rentes actuel, à 25 %, qui démontre l'augmentation suite à l'option 50 % du MGA et qui démontre le remplacement pour l'option Canada. Donc, on peut voir que l'option Canada répond beaucoup, beaucoup mieux aux salariés de la classe moyenne. Les gens qui gagnent 40 000 $, 45 000 $ vont avoir une bien meilleure rente avec l'option RPC. Première raison.

Deuxième raison, les cotisations additionnelles qui sont requises pour l'option RPC, et c'est bien documenté dans le document de consultation à la page 17, sont un excellent investissement pour les Québécois. Il y a deux exemples, l'exemple de Bernard et l'exemple d'Élodie — d'ailleurs, je vous félicite pour le choix du nom de l'exemple — et dans ces...

M. Leitão : C'est fait exprès.

M. Morency (Bernard) : Merci. Je vous remercie. On démontre très bien dans ce graphique-là à la page 17 que les cotisations additionnelles requises sont environ de 240 $ par année mais que la rente additionnelle, elle, elle est de 2 176 $. Ça veut dire que, pour chaque dollar de cotisation annuelle additionnelle, on va recevoir une rente neuf fois plus élevée, un ratio de neuf pour un. C'est un excellent investissement pour les Québécois. Deuxième raison.

Troisième raison, c'est qu'en améliorant le régime de cette façon-là on diminue la dépendance des cotisants au Régime de rentes du Québec au supplément de revenu garanti. Or, il faut savoir, et c'est, encore une fois, bien documenté dans les documents que vous nous avez soumis et aussi dans notre rapport, que la pension de Sécurité de la vieillesse et le supplément de revenu garanti perdent de leur efficacité à chaque année parce qu'ils sont indexés selon le coût de la vie et non pas indexés selon l'augmentation des salaires. Alors, c'est un petit peu à chaque année, mais, sur 40 ans, ça fait toute une différence. Donc, de diminuer la dépendance, c'est une excellente chose. Deuxième point, c'est que le supplément de revenu garanti, c'est un volet d'assistance sociale, ce n'est pas un volet structurant du régime de retraite. Et plus on bonifie le régime de retraite, plus on diminue la dépendance vers ce volet-là, mieux c'est pour les Québécois.

Puis finalement, le Régime de rentes du Québec, on le contrôle ici. Cet argent-là, il est investi par la Caisse de dépôt, c'est sous contrôle de l'Assemblée nationale, alors que le supplément de revenu garanti, c'est un programme sur lequel on a très peu d'influence. Donc, d'être moins dépendants de ça, c'est une bonne chose.

Je passerais la parole à Luc pour les autres raisons.

Le Président (M. Bernier) : M. Godbout.

M. Godbout (Luc) : Bonjour. Il faut noter comme quatrième raison que l'option RPC prévoit déjà un mécanisme compensatoire pour les cotisations additionnelles que les bas salariés devront verser. On pense aux salariés gagnant moins de 20 000 $ par année. Le mécanisme compensatoire se fait via la prestation fiscale pour revenu de travail, une mesure fédérale qui, a priori, peut sembler complexe mais qui permet pleinement de compenser immédiatement les bas salariés pour les cotisations additionnelles qu'ils devront verser. Nous avons d'ailleurs illustré à l'annexe 3 comment des cotisations additionnelles dans le RPC pour un résident de l'Ontario, puisque c'est cette province-là qui a embarqué dans le régime fédéral... comment pour cette province-là un contribuable gagnant 20 000 $ paierait 165 $ de cotisation additionnelle : il pourrait les déduire tant au fédéral que dans sa province et il pourrait bénéficier de la bonification de la prestation fiscale pour revenu de travail du fédéral, qui, donc, au net, il ne paierait pas... il n'y aurait pas de coût additionnel pour les cotisations, mais il y aurait des prestations bonifiées à la retraite.

La bonification de la PFRT règle le cas, à notre avis, de la principale objection que soulèvent plusieurs quant au risque de perte de récupération pour le supplément de revenu garanti pour les gens à faibles revenus. En outre, il est important de noter que la récupération que les gens pourraient... donc, la perte potentielle du supplément de revenu garanti va se faire graduellement pour les retraités d'ici 2065, alors que la bonification de la prestation fiscale pour revenu de retraite, elle sera immédiate.

L'annexe 4, de son côté, présente des comparaisons pour mesurer les effets globaux qu'auront les prestations, les effets globaux, incluant la perte potentielle du supplément de revenu garanti. Dans tous les cas, que l'on prenne un célibataire qui gagne 20 000 $, que l'on prenne un célibataire gagnant le maximum des gains admissibles ou qu'on prenne un couple où les revenus sont partagés 20 000 $ et 30 000 $, dans tous les cas les prestations globales seront améliorées, dans tous les cas l'option RPC procure des meilleures prestations globales. Et donc ce qu'il faut constater, c'est que, si le reste du Canada va avec la bonification RPC et que le Québec va avec la bonification 50 % du maximum des gains admissibles, les citoyens de l'Ontario vont avoir des meilleures prestations publiques à revenu égal que les citoyens du Québec.

Un autre argument qui pousse pour l'option RPC, c'est qu'à nos yeux le coût nous apparaît raisonnable et que sa mise en place graduelle d'ici 2025 permettra, tel que mentionné à la page 23 du document de consultation, permettra aux entreprises de profiter de ce délai pour s'adapter aux modifications apportées.

Cette fois, nous avons produit l'annexe 5. Donc, dans l'annexe 5, on peut voir des graphiques qui montrent l'impact des cotisations annuelles requises pour les employeurs selon que l'employé gagne le salaire minimum ou selon qu'il gagne le maximum des gains admissibles. Oui, il y a un impact de la bonification du régime, mais ça reste très marginal. Comme le régime est mis en oeuvre progressivement, si on regarde en 2019, pour quelqu'un qui travaillerait au salaire minimum, on a indexé le salaire minimum selon la moyenne des cinq dernières années au rythme d'à peu près 0,22 $ par année, on s'aperçoit qu'en 2019 le salaire minimum sera... l'impact en termes de bonification option RPC serait de 0,02 $ de l'heure. Si on s'en va au maximum des gains admissibles, l'impact sera, pour un salaire d'à peu près 28 $, l'impact sera de 0,05 $ l'heure pour l'employeur. Puis, si on s'en va à terme, une fois que le régime sera pleinement mis en oeuvre, on parle d'un impact, selon qu'on soit au salaire minimum ou au maximum des gains admissibles, on parle d'un impact entre 0,11 $ et 0,29 $. Puis je tiens à vous dire que tous les petits sous que je vous parle, là, présentement, pour l'employeur, c'est déductible tant dans la déclaration fédérale que dans la déclaration provinciale, et donc je vous parle de sommes brutes, mais le coût net pour l'entreprise est encore moindre.

On peut aussi regarder puis arriver à un constat similaire en reprenant l'encadré 4 de la page 21 du document de consultation publique. Dans ce cas-là, on prenait le cas d'une entreprise puis on montrait la différence de cotisation selon qu'on prenne la bonification RPC ou selon que l'on prenne la bonification maximum 50 % des gains admissibles. Oui, il y a un impact, dans ce cas-là, pour l'entreprise, il y a un impact de 12 000 $, mais il y a un impact de 12 000 $ sur une masse salariale de 3 millions. Et donc ça représente 0,4 % de la masse salariale. Et je vous rappelle qu'on intègre ça entre 2019 et 2025. C'est donc une mise en place qui serait progressive.

Autre argument qui milite pour l'option RPC, c'est que pour les employeurs qui offrent des régimes privés de retraite, comme le gouvernement du Québec le fait pour ses employés, il sera plus facile de coordonner son régime de retraite avec l'option RPC, et ce, à coût nul. Avec l'option 50 % du maximum des gains admissibles, cette coordination sera plus difficile à concevoir, plus difficile à communiquer, et on peut penser que ça ne générera pas, dans ce cas-là, des épargnes de cotisation additionnelle pour l'employeur, ce qui pourrait être le cas dans l'option RPC.

Aussi, comme autre point que j'aimerais soulever, je tiens à souligner que, oui, nous sommes conscients que les taux de prélèvement sur la masse salariale sont plus élevés au Québec. Toutefois, le coût de nos programmes sociaux de retraite et d'assurance reste relativement similaire à ceux offerts ailleurs au Canada.

On entend beaucoup parler, là, des écarts de taux de masse salariale entre le Québec et les autres provinces. À l'annexe 6, nous avons reproduit le graphique 4 du document de consultation, qui se trouve à la page 20, on a reproduit exactement le graphique 4, qui avait été produit avec des chiffres du ministère des Finances, mais on a fait une étape de plus, on a compartimenté, séparé qu'est-ce qui fait qu'on a un taux de 15 % alors que les autres provinces ont un taux moindre et, lorsqu'on regarde ça, bien, on s'aperçoit que, le Régime des rentes du Québec ou RPC, assurance-emploi/RQAP, santé et sécurité au travail, on a le même poids que l'Ontario ou que les autres provinces canadiennes et que les écarts de taux sur la masse salariale s'expliquent par les choix du gouvernement du Québec, qui a voulu imposer des taxes sur la masse salariale pour le financement de la santé.

Donc, hormis les taxes sur le financement de... le FSS sur la masse salariale et le taux de 1 % pour la formation de la main-d'oeuvre, le Québec a les mêmes taux de cotisation pour les autres charges sociales. Donc, c'est important de le rappeler. Qu'est-ce qui distingue le Québec, c'est essentiellement le FSS. Alors, sans plus tarder, je passe la parole à Bernard.

• (17 h 30) •

M. Morency (Bernard) : Alors, en terminant, la dernière raison pour laquelle on favorise l'option RPC, c'est que l'option 50 % du MGA, elle présente quand même des défis administratifs importants. Il y a de plus en plus de Québécois qui occupent deux emplois, soit un emploi qui leur donne, mettons, 15 000 $ de salaire, un autre emploi qui leur donne 20 000 $. Ça leur fait 35 000 $ au total. Quel employeur on fait cotiser si on exclut les salaires en bas de 28 000 $? Ni un ni l'autre ne va vouloir cotiser. On pense aussi aux Québécois qui changent d'emploi en cours d'année. Ils gagnent 25 000 $ avec un employeur, changent d'emploi, gagnent 25 000 $ avec un autre employeur. Lequel des deux employeurs on va cotiser? On pense aux Québécois qui déménagent d'une province à une autre. Comment on va faire pour faire ces choses-là? Alors, c'est des questions administratives. Il n'y a rien là-dedans qui est ingérable, mais c'est un souci administratif additionnel avec l'option 50 % du MGA qu'on n'a pas avec l'option Canada.

Ce qui m'amène à parler du deuxième axe du document de consultation, qui sont les mesures qui sont soumises à la population afin de renforcer la pérennité du Régime de rentes du Québec.

D'abord, on tient à dire qu'on est entièrement d'accord d'ouvrir ce débat-là. L'enjeu de la pérennité du Régime de rentes du Québec, c'est un enjeu réel, surtout quand on se place dans une perspective de 20, 30, 40 ans. Il y a plusieurs propositions qui sont faites. Ce qu'on aimerait faire aujourd'hui, c'est entamer la discussion sur trois d'entre elles : la pleine capitalisation des améliorations potentielles, le facteur de longévité et le relèvement de l'âge minimum de retraite pour la retraite anticipée. Cependant, c'est une discussion qui va certainement se poursuivre, et on est très disponibles pour poursuivre la discussion ultérieurement.

Alors, commençons par la pleine capitalisation. D'abord, on veut réitérer la recommandation, qui était dans notre rapport en avril 2013, que toute amélioration du Régime de rentes du Québec doit être pleinement capitalisée de façon à éviter d'autres transferts intergénérationnels. C'est ce qui est proposé dans le document de consultation, et on réitère notre support à ça. Maintenant, il faut être conscients que, lorsqu'on capitalise pleinement un régime comme le Régime de rentes du Québec, on augmente de façon importante la taille des actifs sous gestion. Or, juste pour illustrer ça, aujourd'hui déjà, dans le rapport actuariel du Régime de rentes, on a à peu près 60 milliards de dollars dans ce fonds-là qui sont gérés par la Caisse de dépôt. Et, dans le rapport, on dit : Ce montant-là va augmenter autour de 160 milliards d'ici 2040. Ça, c'est avant faire toute amélioration. Parce que l'amélioration serait pleinement capitalisée, probablement que le 160 milliards doublerait. Alors, on a fait des estimations, là, on n'a pas de chiffre précis, en fait, mais on parle de 320 milliards de dollars, un autre 160. Donc, c'est des chiffres importants. Donc, si on y va avec cette pleine capitalisation là, ça va être très important de bien encadrer ça.

On est bien équipés, au Québec, pour faire face à ce défi-là. On a Retraite Québec, on a la Caisse de dépôt et placement du Québec. On a deux organismes qui sont très bien équipés pour faire face à ce défi-là, mais c'est quand même un défi important, surtout au niveau de la gestion des risques.

Un des éléments cruciaux ici, ça va être le mécanisme d'ajustement s'il y a des surplus ou des déficits dans le régime. Alors, dans le document de consultation, on réfère à la façon dont le Régime de pensions du Canada fonctionne et on dit que, lorsqu'il y a un manque à gagner, lorsqu'il y a un déficit dans l'évaluation, 50 % de ça est comblé par un ajustement des cotisations des participants, et 50 % est comblé par un ajustement des prestations. Nous, on pense que c'est une excellente façon de fonctionner, c'est en ligne avec ce qu'on avait dit dans notre rapport, de partage des risques. On pense que c'est une bien meilleure façon de faire que de dire : Tout écart serait comblé par un ajustement de cotisation. Donc, ça, ça nous permet de répartir les risques sur les cotisants et les prestataires du régime plutôt que de mettre tout le risque sur les cotisants. Donc, on encouragerait une discussion à cet effet-là.

Le deuxième élément, c'est le facteur de longévité. Alors, les enjeux démographiques ne sont pas uniques au Québec, mais c'est vrai qu'ils sont amplifiés ici par trois phénomènes. On a eu un plus gros baby-boom que les autres dans les années 50, 60. Bien, ces gens-là, c'est moi, on est rendus à 64, 65. Quand on prend nos retraites, ça crée un défi. Le deuxième élément, c'est qu'il y a une migration nette négative du Québec vers les autres provinces canadiennes, donc ça diminue le nombre de cotisants. Et le troisième élément, c'est qu'ici, au Québec, on a tendance à prendre une retraite un peu plus hâtive qu'ailleurs au Canada. Et d'ailleurs c'est ça qui explique la différence entre le 10,8 % au Québec, le 9,9 %, et j'espère que, durant la période des questions, on va pouvoir revenir à ce débat de : Est-ce qu'on devrait avoir les mêmes prestations à un coût plus élevé ou les mêmes coûts et des prestations plus basses? On aimerait ça en discuter avec vous, tout à l'heure, de ça.

Heureusement, l'espérance de vie, elle va continuer d'augmenter. L'Institut canadien des actuaires vient de sortir des statistiques, une nouvelle table de mortalité en 2014. On l'a mis dans notre document, ici. Un Québécois qui a 60 ans aujourd'hui, là, il y en a quelques-uns dans la salle ici, là, hein, 50 % de ces Québécois-là vont se rendre à l'âge de 89 ans, 25 % vont se rendre à l'âge de 94 s'ils sont des hommes. Dans le cas des femmes, c'est 91 ans et 96 ans. Ça, c'est maintenant, là, on ne vous parle pas en 2050, là, maintenant. Donc, c'est une réalité. Et on félicite le gouvernement d'avoir amené sur la place publique le débat quant à l'impact que ça, ça a sur les coûts du régime de retraite, les coûts du Régime de rentes du Québec.

Donc, la proposition qui est faite du facteur de longévité, il faudrait en discuter, parce qu'évidemment c'est un débat de fond. On est vraiment dans un débat de fond qui a des implications partout, qui a des implications sur toutes sortes d'autres programmes sociaux au Québec, donc on aimerait participer à ce débat-là. On pense que c'est bien de l'avoir, mais c'est un débat qu'il faut avoir, et non pas de se précipiter pour faire un ajustement au Régime de rentes du Québec. Je vais maintenant passer la parole à René.

Le Président (M. Bernier) : Je vais vous laisser environ deux, trois minutes pour faire votre présentation, parce que, si on veut faire des échanges... Là, je suis déjà sur le temps du gouvernement. Donc, allez-y.

M. Morency (Bernard) : O.K. On s'excuse, on s'excuse.

M. Beaudry (René) : Je vais précieusement prendre mon trois minutes pour parler de l'âge minimal, en réponse à une question qu'il va me poser, de toute façon.

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y, M. Beaudry, on vous écoute. Je voulais juste vous prévenir de ça.

M. Beaudry (René) : Alors, le Régime de rentes du Québec prévoit déjà des facteurs, des mécanismes d'équivalence actuarielle pour les gens qui prennent leur retraite... ou prennent leur rente avant 65 ans. Il y en a qui le font parce qu'ils ont cessé de travailler. Il y en a qui ont besoin de cette rente-là. Il y en a d'autres qui demandent leur rente, même s'ils occupent un emploi à temps plein ou à temps partiel. Et, dans tous les cas, la rente est ajustée pour être à un coût relativement neutre pour le régime.

Puis, comme vous le savez, prendre sa pension puis prendre sa retraite, ce n'est plus la même chose au Canada. Tu peux prendre ta retraite mais ne pas prendre ta pension, et puis tu peux retarder des choses. Les gens qui ont cette option-là présentement de prendre leur rente ou de recevoir leur rente entre 60 et 70 ans, on pense qu'ils valorisent cette option-là. Nous pensons que ça devrait être maintenu.

Par contre, dans le contexte de ce facteur de longévité qui est introduit, c'est évident qu'il y a des facteurs de réduction puis de bonification avant puis après 65 ans qu'il va falloir qu'ils soient examinés et analysés dans le contexte de ce facteur de longévité là. Par exemple, il y a des choses qu'on fait au Québec, notre réduction avant 65 ans. Il n'y en a pas juste une, il y en a diverses, dépendamment du niveau des rentes. On ne fait pas ça dans le Régime de pensions du Canada. Il y a des sources d'épargne de coût qui sont là.

Ce dont on veut vous parler plutôt, c'est un nouveau concept global à coût neutre qui attire beaucoup d'attention ici puis ailleurs au Canada. Comme je le disais — je suis en haut de la page 6 de notre document — la plage pour demander la rente, elle est entre 60 puis 70 ans. Nous, on vous recommande de l'étendre jusqu'à 75 ans. On parle beaucoup de l'âge de rente à 65 ans. Moi, je dirais que c'est plutôt l'âge de vente à 65 ans. Le Régime de rentes du Québec, il est vendu comme un régime à 25 % à 65 ans, puis, comme vous l'avez vu dans les documents qui nous ont été fournis, bien, il est plutôt acheté comme un régime à 16 % par 70 % du monde à 60 ans, mais, dans les faits, ce régime-là, c'est un régime à 35 % à 70 ans. Toute personne qui prend sa rente avant 70 ans dans le Régime de rentes du Québec reçoit une rente inférieure au 35 % qu'elle peut recevoir à 70 ans. Il y a énormément de flexibilité qui existe dans notre système, puis il ne faut pas garder le Régime de rentes du Québec dans un vacuum. Si on étend jusqu'à 75 ans la plage, on peut facilement prévoir que la rente qui est payable à 65 ans serait... on dit «presque doublée», elle serait au moins doublée. Et la pension de Sécurité de vieillesse, depuis seulement trois années, aussi peut être revalorisée à 70 ans. Elle devrait être permise à des gens d'être prise plus tard, à 75 ans.

Dans notre rapport, on faisait deux recommandations qui visaient justement cette flexibilité pour les Québécois qui veulent demander leur rente de retraite à des dates différentes.

• (17 h 40) •

La première, c'était que les gains après l'âge de 60 ans, s'ils sont inférieurs à la moyenne de leurs gains en carrière, n'influencent pas à la baisse le niveau de leur rente, un peu comme on le fait avec des gens qui ont des baisses de salaire parce qu'ils s'occupent d'enfants de moins de sept ans, comme des gens qui sont en CSST. Avant 1984, il y avait ça dans le Régime de rentes du Québec : à partir de 65 ans, les gains n'étaient pas considérés. Ça, ça permettrait davantage à des Québécois de prendre leur rente un peu plus tard, probablement inciter, comme vous le désirez, davantage de Québécois à envisager une transition travail-retraite : trois, quatre jours-semaine.

Il y a une autre recommandation qu'on avait : permettre le versement des prestations variables d'un régime à cotisation déterminée comme dans un fonds de revenu viager à l'intérieur du régime. Ça, vous avez implanté ça déjà, c'était une de nos recommandations qui a déjà été implantée. Mais il y en a une qui est très importante pour que tout ça se tienne, c'est de permettre à des gens qui ont des comptes de retraite immobilisés de sortir leur argent plus vite après 60 ans. Ce qu'on veut faire, c'est se servir de nos régimes gouvernementaux pour enlever le risque de longévité, permettre aux gens d'avoir des rentes importantes qui commencent plus tard puis qu'ils utilisent leurs économies pour la première retraite. C'est difficile, après 75 ans, d'acheter des rentes pour se prémunir du risque de longévité et ce n'est pas facile, après 75 ans, de gérer des actifs importants dans des régimes à cotisation déterminée.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. D'Amours (Alban) : ...donc, en conclusion.

Le Président (M. Bernier) : Oui. Allez-y, M. D'Amours.

M. D'Amours (Alban) : Je pense que je vais libérer l'espace. On a probablement abordé tous les sujets puis on laisse place aux questions.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Vous nous accordez combien...

Le Président (M. Bernier) : ...minutes, parce que j'ai confisqué votre temps pour nos experts.

M. Leitão : Ça va, c'est très bien. Donc, c'était très utile de faire ça, la confiscation.

Le Président (M. Bernier) : ...en ministre du Revenu.

M. Leitão : C'est vrai. Merci beaucoup, messieurs, d'être venus, de nous avoir fait votre présentation.

Donc, l'axe 1, l'axe 2. On ira à l'axe 1 après. Commençons par l'axe 2. La première partie, je pense qu'on est tous d'accord pour la pleine capitalisation des améliorations éventuelles. Ça, je pense qu'il y a un vaste consensus là-dessus. Intéressant. M. Morency, vous avez mentionné, bon, la question que les actifs vont probablement augmenter rapidement, vous avez parlé donc des enjeux que ça soulève en termes de gestion de risques.

Pouvez-vous juste élaborer un peu plus, pour le bénéfice de tous ceux qui nous écoutent?

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

M. Morency (Bernard) : Comme point de départ, d'abord, présentement, le régime, il est partiellement capitalisé. Partiellement capitalisé, ça veut dire que, quand on se projette dans le futur, environ 75 % du coût des prestations va être financé par les cotisations, puis à peu près 25 %, par les revenus de placement. Dans le nouveau volet, parce qu'il va être pleinement capitalisé, ces chiffres-là sont inversés : environ 25 % va être financé par les cotisations, et 75 %, par les revenus d'intérêts. Or, tout de suite, ça nous dit l'importance de bien gérer le risque de placement, parce que, toutes choses étant égales par ailleurs, c'est trois fois plus important dans le nouveau volet que dans l'ancien. Premier point.

Deuxième point, les chances qu'on ait des accidents de parcours, bien, sont d'autant plus grandes, hein? Le monde du placement, ce n'est pas une science exacte. Des fois, on a des bonnes années, des fois on en a des moins bonnes, c'est plus volatile. Donc, le deuxième élément de ça, c'est de dire : Dans un contexte comme celui-là, il est bon de répartir ce risque-là à la fois sur les cotisants et sur les prestataires. Au fédéral, la façon, dont ça se fait, c'est que, s'il y a un déficit ou un surplus, la même chose peut arriver, parce qu'on peut avoir de très bonnes années puis là on a plus d'argent qu'on pensait en avoir. Ce qui va se passer... les ministres des Finances peuvent toujours s'entendre puis prendre une décision sur la façon de traduire ça dans le régime. Mais, pour faciliter le travail, il y a un principe de base qui a été mis, de dire que la moitié de l'écart va se transformer par soit une hausse ou une baisse de cotisation, puis l'autre moitié, par une hausse ou une baisse de prestation. Pour ne pas baisser les rentes en cours de versement, ce qu'on ferait, c'est qu'on suspendrait l'indexation pendant une période de temps. Donc, on économiserait, parce qu'on n'indexerait plus les prestations. Donc, c'est une façon de partager les risques. Étant donné la démographie du Québec, le nombre important de prestataires, c'est d'autant plus à propos de le faire.

Donc, ce qu'on dit, c'est que, dans le volet, on encouragerait d'enchâsser ça dans le Régime de rentes du Québec plutôt que de dire : S'il y a un manque à gagner, on va le mettre tout sur la cotisation comme c'est le cas présentement. Présentement, on l'a vu dans la dernière évaluation actuarielle, on a dit : Le taux de 10,8 % devrait être de 10,87 %, parce qu'on est un petit peu... mais là, si on avait ce principe-là, bon, ce ne serait pas 10,87 %, ce serait 10,835 %, on mettrait la moitié là et la moitié ailleurs. Donc, c'est une meilleure gestion des risques, selon nous.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Merci. Maintenant, l'autre chose aussi que vous avez mentionnée, et on avait aussi déjà parlé de ça avant dans les groupes avant, donc, la question des mêmes prestations pour les mêmes cotisations, étant donné notre réalité sociodémographique, si vous pouvez aussi élaborer là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

M. Morency (Bernard) : Bien, je pense que, si on faisait un sondage auprès des Québécois et on leur disait : Bon, regardez, c'est ça, le choix, nous, on a décidé qu'on aurait notre propre régime de rentes, on l'a fait pour d'excellentes raisons... Puis je pense que les gens qui l'ont fait dans les années 60 sont très fiers d'eux puis, s'ils avaient à le refaire, ils referaient la même chose. Ça a un coût. Notre démographie, elle est ce qu'elle est.

Donc, voici le choix : on va se donner les mêmes avantages, les mêmes prestations de retraite, un régime équivalent, mais ça va nous coûter un peu plus cher ou, non, nous autres, on va payer le même prix puis on va avoir moins de prestations. Moi, j'aimerais ça faire ce sondage-là. Lorsque les employeurs le font, lorsqu'ils vont voir leurs employés et qu'ils leur offrent ce choix-là, dans 98 % des cas, les employés décident d'avoir un peu plus de cotisations pour maintenir leurs prestations. C'est ça, la réalité des entreprises, et je pense que c'est ça, la réalité des Québécois. Et, selon nous, c'est clairement le choix que les gens feraient s'ils avaient à se prononcer. René, peut-être que tu peux...

M. D'Amours (Alban) : ...en passant...

Le Président (M. Bernier) : M. D'Amours.

M. D'Amours (Alban) : ...que c'est renforcé, cet argument-là, par le fait que les entreprises qui avaient des régimes à prestations déterminées l'abandonnent, et de plus en plus ce sont les travailleurs qui portent tous les risques financiers et de longévité.

Le Président (M. Bernier) : M. Giroux, vous voulez ajouter...

M. Beaudry (René) : Beaudry. Je ferais du chemin sur ce que Bernard vient de dire. Toujours, quand on sollicite l'opinion des employés, c'est la réponse qu'on obtient. Puis on revient sur une annexe dont Luc a parlé. On parle d'augmentation de coût, pour des gens qui sont au salaire minimum, de 0,02 $. On parle de passer le salaire minimum de 10,75 $ à 10,77 $.

Vous avez fourni un exemple qui nous parle d'un coût de 0,4 % sur huit ans. C'est ½ de 0,1 % par année. Ce n'est pas beaucoup, là. Je peux vous dire que présentement vous avantagez le Québec beaucoup plus avec les mesures que vous avez prises sur vos régimes privés d'enlever le financement de solvabilité. Je ne sais pas si vous êtes au courant, là, mais il y a des entreprises qui sont dans des bureaux en Ontario... dire au gouvernement : Nous, on va ouvrir des usines au Québec puis on va les fermer en Ontario, parce que c'est 4 %, 5 %, 6 % de la masse salariale de plus qu'on paie en Ontario parce qu'on a à financer nos régimes à prestations déterminées en tenant compte de la solvabilité. Ça, ça compte. Ça, de ce temps-ci, on parle pas mal plus de ça en Ontario que de ce dont on parle aujourd'hui. Ça fait qu'on a fait des gestes importants au Québec, on a pris de l'avance sur le reste du Canada. On a réglé notre problème sur les régimes privés puis là on essaie de s'harmoniser pour faire quelque chose qui est correct pour les gens qui n'ont pas de régime de retraite.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Beaudry. M. le ministre.

M. Leitão : Si on continue, la question de longévité, évidemment, elle est très importante, et on aurait aussi beaucoup, beaucoup à discuter, mais je veux revenir à l'axe 1, quand même. Il faut aussi revenir à l'axe 1, donc la question de l'harmonisation avec le régime fédéral, le nouveau régime canadien ou pas.

Deux questions. Premièrement, la question du SRG. Pour ce qui est du SRG, donc, vous souhaitez diminuer la dépendance des Québécois au SRG. En même temps — et nous, ça veut dire moi, le gouvernement — on avait dit l'été dernier que justement on voyait dans la proposition fédérale une façon que le gouvernement fédéral dépense moins dans un programme social comme le SRG et que cette charge-là soit assumée par les travailleurs des entreprises québécoises. Donc, je comprends votre argument, mais comment vous expliquerez ça à mon collègue de Sanguinet, par exemple, le député de Sanguinet, qu'avec votre proposition, on assisterait à un désengagement du gouvernement fédéral envers les Québécois à bas revenus?

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

• (17 h 50) •

M. Morency (Bernard) : M. le ministre, je ne suis pas sûr que j'utiliserais le mot «désengagement». Et, dans le document sur les constats, on le dit clairement. Au chapitre 3, on dit, lorsqu'on analyse le système de retraite... Votre propre document a dit : On va tenir compte de la pension de la vieillesse, on va tenir compte du Régime de rentes du Québec, mais on ne tiendra pas compte du supplément de revenu garanti, qui est un volet d'assistance sociale. Donc, je pense que le moins de Québécois il y a qui sont dépendants d'un volet d'assistance sociale, le mieux c'est.

Maintenant, le point que vous amenez, il a un impact budgétaire, fiscal, et c'est absolument normal pour le Québec de s'asseoir avec sa contrepartie fédérale et de dire : Bon, en échange de ça, qu'est-ce qu'on peut faire? Ça, c'est parfaitement normal. Mais le SRG, il doit être au service du système de retraite et non pas en contraindre l'évolution. Il ne faut pas qu'on se dise : Parce qu'on a ça, on va contraindre, on va s'empêcher de faire ce qu'on devrait faire pour donner une meilleure rente, pour mieux aider les Québécois à épargner. Il faut savoir, là, que la façon la plus efficace pour une entreprise d'aider ses employés à épargner pour la retraite, c'est de cotiser dans le Régime de rentes du Québec. Il n'y a pas de façon plus efficace, il n'y a pas de régime qui est mieux géré en termes de coût de gestion pour Retraite Québec, en termes de rendement sur les placements qui sont générés par la Caisse de dépôt, c'est impossible à battre, donc c'est la meilleure façon. Retenons-nous pas, ne privons pas les Québécois de cette opportunité-là. S'il y a des implications fiscales au niveau du SRG, négocions-les, entendons-nous, regardons les épargnes que ça va amener. Absolument, c'est correct, mais ce n'est, selon nous, pas une raison de se contraindre. Peut-être, Luc.

M. Godbout (Luc) : Oui. Bien, c'est sûr que...

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. Godbout.

M. Godbout (Luc) : ...il faut peut-être se rappeler, le revenu minimum garanti, à l'époque, quand ça a été créé, c'était un régime temporaire pour sortir rapidement les retraités d'hier de la pauvreté, puis ça a marché. Il n'a pas été conçu pour sortir les retraités de demain de la pauvreté, il a été conçu le temps que le RPC et le Régime des rentes soient pleinement actifs.

L'autre élément. C'est sûr qu'on aurait pu vouloir essayer de tout protéger, puis, si toutes les provinces étaient allées à l'option 50 %, ça serait comme ça, mais là toutes les provinces sont allées dans l'option RPC. Imaginons-nous dans 40 ans. Tout le monde s'en va dans l'option RPC, puis nous, on reste ici. Veux veux pas, le régime fédéral, avec le supplément de revenu garanti... le revenu minimum garanti va prendre de plus en plus d'importance pour le Québec puis il va diminuer d'importance dans les autres provinces. Ce n'est pas un programme qui est capitalisé, là. Imaginons-nous dans 50 ans. 50 % de ces chèques-là s'en viennent au Québec. Le fédéral décide de changer les règles du jeu du jour au lendemain. On fait quoi? C'est par prudence qu'on doit essayer de faire comme le reste.

Cela dit, on peut essayer de dire au gouvernement fédéral : Il va y avoir des économies qui vont découler de ça. Bien, peut-être qu'on peut modifier d'autre chose. Et il y a une piste intéressante, je crois, qui découle un peu avec l'axe 2. Dans vos éléments, on dit : On propose de demander au gouvernement fédéral d'ajouter une exemption dans des revenus de retraite, 1 000 $, 2 000 $ de revenus de retraite qui ne seraient pas pris en compte dans le supplément de revenu garanti. Bien, ça, c'est parfait. Ça, avec les économies qui découlent de ça, ça pourrait être fait puis ça pourrait être fait dès maintenant. Puis, il ne faut pas confondre les deux, ça, ça serait fait pour les retraités d'aujourd'hui, qui auraient une incitation à avoir un peu plus de revenus de retraite sans être pénalisés, mais les revenus des retraités de demain, ils vont être dans le nouveau régime, ils vont avoir 33 % de leur couverture par le régime public, et ce sera d'autre chose.

M. Beaudry (René) : ...

Le Président (M. Bernier) : 50 secondes.

M. Beaudry (René) : Excusez-moi. Allez-y, vous.

M. Leitão : Dernière question. Donc, il y a des mécanismes, et je les comprends, des mécanismes pour contrebalancer l'effet de l'augmentation des cotisations sur les particuliers et surtout les personnes à bas revenus. D'accord.

Est-ce qu'il y aurait des mécanismes auxquels vous pourriez penser aussi qui pourraient compenser les entreprises? On comprend bien que, la taxe sur la masse salariale, c'est le FSS, on comprend très bien, mais est-ce qu'il y aurait une autre façon qu'on pourrait négocier un moyen de compenser surtout les plus petites entreprises?

M. Morency (Bernard) : ...

M. Leitão : Pardon?

M. Morency (Bernard) : Je ne suis pas certain que vous allez aimer ma réponse, M. le ministre.

M. Leitão : Allez-y. On est là pour ça.

M. Morency (Bernard) : Il faudrait peut-être réduire le FSS.

M. Leitão : Oui.

M. Morency (Bernard) : Et d'ailleurs il y a une proposition... ce que je comprends, c'est qu'il y a une proposition, dans votre dernier exposé budgétaire, qui vise ça. Et c'est pour ça qu'on a mis à l'annexe 6 les taxes sur la masse salariale et qu'on a montré que, quand on compare l'Ontario et nous, là la seule différence qu'il y a, c'est la partie jaune, là. Le reste, c'est pareil, tu sais.

Donc, oui, je pense que vous avez raison de dire que le mécanisme de prestation fiscale pour revenu de travail, ça compense les bas salariés, mais ça ne compense pas l'employeur, vous avez entièrement raison. Mais je pense que la solution pour l'employeur, elle est ailleurs. S'il y a une préoccupation très légitime de la part du gouvernement, je pense que la solution, elle est ailleurs. On peut le voir, là, la partie jaune, au Québec, elle est beaucoup, beaucoup plus grande que partout ailleurs au Canada. Donc, c'est là qu'il faut travailler.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sanguinet.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci. Bienvenue à vous quatre. Vous êtes des incontournables quand il s'agit de parler de régimes de retraite. On apprécie toujours les commentaires que vous faites. Surtout les derniers commentaires au sujet, là, du revenu minimum garanti et du supplément de revenu, j'ai trouvé ça très, très intéressant. Il y a une façon d'aller chercher notre argent en négociant et en étant debout et représenter le Québec fièrement au lieu de se contenter de manigancer un régime de retraite pour garder un minimum de cet argent-là, alors que vous avez bien résumé que, le régime de retraite, la façon qu'il était construit afin de préserver ce montant-là venait un peu poser problème quand vient le temps d'assurer une pérennité de la situation financière des Québécois. Je pense que vous avez été extrêmement clairs et je vous en remercie.

Je me rappelle, quand vous étiez venus... puis dites-moi si je me trompe, là, mais je vous dis ça de mémoire, là, quand vous étiez venus les premiers temps qu'on parlait, là, de la réforme des régimes de retraite, vous parliez de la difficulté pour les gens qui avaient des revenus plus faibles, mettons, en bas de 55 000 $ par année... Ces gens-là n'avaient pas... dites-moi si je me trompe, là, parce que, je regarde vos yeux, là, je ne suis pas sûr que je suis dedans, là, mais, en tout cas, vous disiez que les gens qui avaient des revenus plus faibles étaient moins protégés par des REER, par des régimes privés et ces gens-là étaient plus dépendants des régimes publics. Et, quand on regarde la comparaison entre les deux régimes, on s'aperçoit que le régime canadien va davantage protéger ces gens-là que le régime québécois à cause, entre autres, de ce que vous avez expliqué tantôt. Est-ce que je me trompe ou...

Le Président (M. Bernier) : M. Beaudry.

M. Beaudry (René) : C'est sûr que le régime canadien, commençant au premier dollar puis en donnant le 8,33 %, va aider mieux ces gens-là. L'autre chose, il y a beaucoup de ces personnes-là qui sont dans des régimes à cotisation déterminée pas très généreux puis qui sont un peu désarmés lorsqu'ils arrivent à la retraite parce qu'il faut ou qu'ils s'achètent une rente ou qu'ils continuent à le gérer, et, malheureusement, le fait est qu'en vieillissant ta propension à prendre du risque puis générer des bons rendements, c'est un peu plus difficile. Ça fait que d'avoir un régime comme le Régime de rentes du Québec ou le RPC qui leur procure cette base-là, c'est sûr que c'est excellent.

On parlait des coûts tout à l'heure. Puis il y a certaines de ces personnes-là qui sont dans des régimes de retraite déjà qui sont adéquats. Bien, ces gens-là, lorsque leur employeur va leur dire que le régime à prestations déterminées qu'ils ont est agencé et coordonné pour tenir compte du nouveau régime pour que ce soit à coût nul pour eux et leur employeur, ils n'auront pas de problème : ils n'auront pas de problème du côté de la rente puis ils n'auront pas de problème du côté des cotisations.

Intégrer un régime qui part du premier dollar, ce n'est pas compliqué, on fait ça. Le RREGOP était intégré avec le Régime de rentes. Intégrer un régime qui commence à 50 %, ça veut dire que j'ai un régime qui a trois ou quatre niveaux. Je ne le sais pas, là, je ne l'ai jamais essayé, là, mais on est plusieurs actuaires à avoir regardé ça, puis ça n'a pas l'air à être simple, là. Je ne pense pas que ça serait la meilleure solution.

M. Therrien : Ça reste que vous disiez, là : Si quelqu'un a deux emplois, à quelque part, ça pose problème. Donc, quand vous étiez venus, vous aviez parlé, à ce moment-là, de réformer le régime public pour aider ces gens-là mais aussi pour assurer la pérennité des régimes à prestations déterminées, parce qu'à quelque part plus ton régime public est généreux, plus à ce moment-là les coûts vont diminuer pour ce genre de régime privé là. J'avais posé la question puis j'avais dit que je vous reposerais la question.

Ça veut dire que — puis je pense que vous avez un peu résumé ça — si ton régime public est plus généreux, à ce moment-là c'est à coût nul pour l'employeur qui offre des prestations déterminées, et ça assure, à quelque part, davantage de pérennité de ces régimes-là, qui est le but ultime qui est poursuivi par, entre autres, votre rapport. Est-ce que je me trompe?

Le Président (M. Bernier) : M. Beaudry.

M. Beaudry (René) : Bien, si je peux me permettre de compléter là-dessus. Si on gardait juste les régimes privés, il y a présentement, au Québec, avec les mesures que vous avez prises, des employeurs qui ont décidé de ne pas pousser aussi fort qu'ils l'auraient fait pour transformer leurs régimes à prestations déterminées en cotisations déterminées. Il y a des cas qui ont été négociés récemment, là. C'est réel, ça. Il y a eu des succès là-dedans, là. M. D'Amours en est pas mal content, d'ailleurs. Ça le réveillait la nuit, ça.

M. Therrien : Oui. Et donc, si on adoptait un régime plus généreux, j'imagine que ça freinerait davantage le transfert pour les cotisations déterminées.

M. Beaudry (René) : Notre conviction.

M. Therrien : O.K. Vous ne parlez pas de la rente de longévité. Je sais que ça vous tenait à coeur.

Une voix : ...

M. Therrien : Je suis désolé. On dirait qu'on vous a fait un dur traitement relativement à cette proposition-là, parce que par la suite, dans la suite des réformes qu'on a proposées, on ne l'a pas vue du tout. Est-ce que vous êtes tristes de ça?

Une voix : ...

M. Therrien : Oui, allez-y, puis j'ai une autre question après.

Le Président (M. Bernier) : M. D'Amours.

• (18 heures) •

M. D'Amours (Alban) : On est très pragmatiques, là, mais on pense bien sûr que la rente de longévité et le concept étaient très utiles pour réfléchir à l'évolution du système, compte tenu des prémisses que nous avions mises et des principes et des valeurs qu'on a avancés. Mais, en même temps, ce que la proposition... à toutes fins pratiques, s'inspire beaucoup de nos principes et des valeurs qu'on a mis de l'avant, alors on se console, d'une certaine manière, de cette façon-là. Mais le temps passe, et puis il faut maintenant... On était à la moitié de ce qu'on... Le RPC est peut-être la moitié de ce qu'on proposait, mais il ne faudrait pas être au quart de ce qu'on proposait, là.

M. Therrien : Mais, de toute façon, je pense que vous le savez, on a récupéré une bonne partie de votre réflexion, là.

M. Beaudry (René) : Mais, pour compléter...

M. Therrien : Oui, allez-y, mais j'aurais une question à poser par rapport à ça.

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. Beaudry.

M. Beaudry (René) : Mais, sur la rente de longévité, là, si vous appliquez le RPC puis vous avez bien regardé ce qu'il propose, il propose 8,33 % à 65 ans. Moi, je vous dis que, si le RPC et le RRQ sont maintenant modifiés pour que l'âge de retraite soit permis jusqu'à 75 ans... pas obligatoire, permis, la rente à 75 ans va être à peu près le double de celle à 65. Deux fois 8,33 %, là, ça fait à peu près 17 %.

Toutes les prémisses qualitatives du RPC et du régime que vous regardez sont celles qu'on a mises de l'avant.

M. Therrien : Bien, c'est justement là que je m'en allais, parce que ce que vous proposez à la page 6 par rapport à la prise de retraite à 75 ans, j'allais le dire, c'est un peu une certaine récupération de cette logique-là. Et vous avez entamé, là, tout de suite, là, vous avez... vous venez de me le dire, là. Allez-y, oui.

M. Godbout (Luc) : ...l'âge de retraite à 75 ans. On a proposé que les gens puissent prendre leur pension à 75 ans. Ils peuvent arrêter de travailler à 60 s'ils le veulent.

M. Therrien : Oui, oui, excusez-moi. Oui, oui, oui, excusez-moi. Je suis désolé.

M. Godbout (Luc) : Non, non, je vous dis, c'est parfait.

M. Therrien : Je me suis mal exprimé. Mais cette flexibilité-là nous amène les avantages qu'on aurait eus possiblement avec la rente de longévité. C'est ce que j'ai vu. Oui, je m'excuse, là, oui.

M. Godbout (Luc) : ...

M. Therrien : O.K. Donc, c'est intéressant. Vous aviez demandé de parler des mêmes coûts et de la même prestation. À un moment donné, vous posiez la question. Bon, vous y avez répondu tantôt à travers le sondage que vous proposeriez aux employeurs, là, par rapport aux employés. Vous avez bien répondu à ça.

Écoutez, l'âge minimal avec une retraite anticipée, je pense que c'est clair que ça n'a pas... quand les pénalités sont gérées adéquatement, c'est à coût nul, il n'y a pas de problème dans l'accès à une retraite anticipée.

M. Morency (Bernard) : Oui. Mais, en fait, vous avez raison...

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

M. Morency (Bernard) : ...pour les fins du Régime de rentes du Québec, la façon dont c'est fait, qu'une personne décide de prendre sa rente à 60, 61, 62, ça se fait à peu près à coût nul.

Il y a toujours des petites variations, là, mais je pense que le débat qui est là est bien posé dans le document de consultation, c'est celui de dire que, bien sûr, ça, c'est basé sur une espérance de vie, hein? Et il y a une chose qui est certaine sur l'espérance de vie, on va vivre un petit peu moins ou un petit peu plus, mais c'est très rare qu'on vive exactement le chiffre de l'espérance de vie. Alors, quand on fait une évaluation actuarielle comme ça, si moi, je meurs un peu plus tôt, bien, j'ai bien fait de prendre ma rente à 60 ans, je suis sur le côté gagnant de la médaille. Si je vis plus vieux, jusqu'à 90, 95 ans, là je suis sur le côté perdant de la médaille. Le problème avec ça, c'est que les gagnants, ils sont morts, ils ne peuvent pas venir nous dire merci, puis les perdants sont encore vivants et peuvent venir se plaindre. Alors, c'est ça, la réalité. Ça fait que c'est pour ça que, quand on conçoit ces choses-là, il faut y réfléchir comme il faut.

Alors, nous, ce qu'on vous dit ici, c'est : Commençons par réfléchir au niveau de l'impact global de l'augmentation de l'espérance de vie des Québécois sur le régime. S'il y a lieu de revoir le 65 ans, faisons ça. Après ça, posons-nous la question : Quel est l'âge minimum auquel on veut permettre aux gens de recevoir leur rente? Les gens valorisent beaucoup cette option-là présentement. Donc, avant de la revoir, il faut y penser comme il faut, parce que, on le voit dans les chiffres que vous nous avez donnés, 60 % des gens la demandent à 60 ans. Donc, c'est beaucoup de monde, ça, là, là, qu'on décevrait si on passait à 62, là. Donc, il faut se donner une bonne analyse. Et, nous, une piste qu'on vous propose d'examiner, une fois qu'on aura statué sur : Le 65 ans, est-ce qu'on le change ou on ne le change pas?, c'est de revoir les facteurs d'ajustement, et, avec ces facteurs d'ajustement là, on peut influencer le comportement des gens soit à la prendre plus tôt ou à la retarder un petit peu en bonifiant. Si on bonifie un petit peu plus ce qu'on reçoit en la prenant, bien, peut-être que les gens vont se dire : Ah! bien, coudon, finalement, peut-être que je devrais attendre à 63 ou 64, parce que ça vaut plus la peine de la prendre à cet âge-là. Donc, il y a moyen d'inciter les gens à prendre la bonne décision pour eux.

M. Beaudry (René) : Il faut se rappeler que c'est induit, ça, le 60 ans, là. Depuis 2008, on a encouragé les gens, pour les retenir au travail, à prendre la rente. Il y a d'autres options. Ce qu'on vous dit, c'est qu'on a suggéré de dire aux gens : Même si vous travaillez moins entre 60 et 65 ans, on ne pénalisera pas votre rente, ultimement. Il y a des gens qui la prennent pour ne pas la perdre, là, comme c'est là. Tu sais, on peut changer ça, là.

M. Therrien : Oui. Puis, de toute façon, quand vous parlez des risques, là, dans les calculs, vous dites qu'il n'y a personne qui vit, en moyenne... Quand on parle de la Régie des rentes du Québec, là on parle d'un paquet d'individus, ce qui fait en sorte que je pense que l'évaluation statistique est plus facile puis la marge d'erreur est beaucoup plus faible, là.

M. Morency (Bernard) : Non. Au global, il n'y a pas d'enjeu. L'enjeu, il est plus individuellement, individu par individu.

M. Therrien : C'est ça, c'est ça, exactement, exactement. Mais c'est pour ça qu'on peut davantage se permettre ça sans trop se tromper, avec une marge d'erreur réduite.

Dernière question. Il y a des gens qui disent que l'âge de la retraite devrait être variable selon la nature du travail, et ils ont dit ça, entre autres, chez les policiers puis les pompiers. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

M. Morency (Bernard) : Je pense que là-dessus il faut différencier entre un régime d'État comme le Régime de rentes du Québec... Lui, je ne crois pas qu'il devrait faire de différence et payer des rentes à différents âges, dépendant des métiers des gens. Ce n'est pas la mission d'un régime d'État. Un régime d'État, c'est une infrastructure.

On parle beaucoup d'infrastructures ces temps-ci, là. Bien, le Régime de rentes, c'est l'infrastructure du système de retraite, hein? Alors, elle doit être faite pour l'ensemble de la population, elle définit les règles, et après ça c'est aux gens de s'adapter. Au Québec, on a un système où on a l'infrastructure de base, la pension de vieillesse, le Régime de rentes du Québec et après ça on a des régimes d'employeur puis on a de l'épargne personnelle. C'est aux gens à s'ajuster, selon leur métier à eux, l'âge de retraite qu'ils veulent avoir, d'ajuster leurs épargnes.

Le Président (M. Bernier) : M. Morency, on va passer la parole au député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard : Merci, M. le Président. Pour une très courte intervention. Merci pour la clarté de vos documents, surtout, et qui parlent beaucoup, qui parlent beaucoup. Parce que tout à l'heure, dans mes remarques préliminaires, je parlais que c'était un équilibre qu'on devait trouver. Durant l'après-midi, on a parlé, pour les employeurs, de la masse salariale, là, les taxes, et par vos graphiques vous nous démontrez clairement, là, que, si on veut donner le meilleur régime aux Québécois, dans qu'est-ce qu'on a sur la table, c'est le RPC. La contrainte qu'on a entendue des employeurs : le ministre des Finances sait quoi faire, il s'agit de savoir s'il veut le faire. Ça, je lui laisse ses décisions. Mais je tiens vraiment à vous remercier pour la clarté de vos documents, ils sont toujours très clairs, les explications aussi, et je vous remercie, tout simplement.

Et je vais céder mon temps de parole à M. le ministre. Tantôt, il lui restait quelques questions, si j'ai bien compris, qu'il voulait poser à nos témoins. Allez-y si vous voulez.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. M. le ministre.

M. Leitão : Vous êtes très généreux, cher collègue. Non, je voulais encore continuer un peu dans la question de l'axe 1, donc l'aspect entreprise. Je comprends très bien qu'évidemment l'objectif serait de... et la chose la plus logique, ce serait de diminuer le FSS. Mais, si, pour une raison quelconque, on était incapable de diminuer le FSS, est-ce qu'il y aurait d'autres... pas solutions, mais d'autres recommandations, suggestions que vous avez pour essayer de minimiser l'effet, sur les entreprises, de l'augmentation des prestations?

Le Président (M. Bernier) : M. Beaudry.

M. Beaudry (René) : ...à l'automne 2015, d'entreprises québécoises qui vous ont dit : Mettez en place la rente de longévité. Elle coûtait 3,3 %. Mettez-la en place. Nous, on va s'occuper d'intégrer nos régimes. C'est intéressant, le FSS. Mais moi, je suis consultant à ces entreprises-là, là, je vais leur expliquer comment elles vont intégrer leurs régimes à coût nul. C'est une très, très bonne nouvelle pour une compagnie qui a un régime à cotisation déterminée et pour ses employés que, tout d'un coup, une partie à prestations déterminées garanties par 4 millions de personnes soit mise en place. Les gens n'auront pas de problème à diminuer un petit peu un autre bénéfice pour compenser par celui-là. Ceux qui vont vouloir le faire vont pouvoir le faire.

En Ontario, quand je parle à mes collègues, ils disent : Vous savez, l'expansion du RPC, c'est assez mineur. Ça fait que probablement que la plupart des Ontariens, les employeurs ontariens vont dire : En termes de rémunération globale, ça n'a pas un impact majeur, c'est 1 % de la masse salariale. Ça se peut qu'on l'intègre sur six, sept ans sans faire aucune modification. Eux autres sont rendus là. Parce que nous, on regarde le RPC.

Mais la vraie histoire depuis six mois, c'est qu'on est parti de l'ORPP, qui coûtait 4 %, puis là on s'est ramené à la moitié du chemin. On l'a fait, le compromis, là, on a réussi à couper ça de moitié. Ça fait qu'il faut sauter sur le lapin avant qu'il se sauve, là. On a convaincu les Ontariens de couper de moitié la demande qu'ils avaient, et ils étaient bien partis politiquement, honnêtement.

• (18 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : M. Morency.

M. Morency (Bernard) : Je pense, M. le ministre, que déjà vous avez en partie répondu à cette question-là dans vos documents, parce que vous dites : Ce dont on parle ici, ça va entrer en vigueur le 1er janvier 2019, et on va le faire progressivement sur sept ans. Ça fait qu'on se donne quand même neuf ans, là, à partir de maintenant, là. Alors, si on prend une décision, on dit aux employeurs : Regardez, là, le point dont René parle, cette coordination-là, vous avez neuf ans pour la faire, puis, ceux d'entre vous qui n'ont pas de régime de retraite, oui, on va avoir une demande additionnelle, bien, vous allez devoir regarder, sur l'ensemble de la rémunération que vous payez aux gens, sur les neufs prochaines années, comment vous allez intégrer ce 1 % là. C'est quand même 1 % sur neuf années, là. Tu sais, il faut ramener ça à sa dimension... Je pense que ce qui est sur la table, c'est très raisonnable en tant que l'entreprise privée est concernée pour l'intégrer. Je pense que déjà on a toutes sortes d'outils qui sont à notre disposition, si on est un employeur, pour pouvoir le faire, mais, oui, il y a une cotisation additionnelle sur la retraite.

Mais il faut se rappeler que, tu sais, ici, là, il y a toutes sortes d'études qui ont été faites, notre rapport, bien sûr, mais il y a eu toutes sortes d'autres études qui ont été faites au Canada. Elles sont unanimes, elles disent : Il y a entre 20 % et 50 % de la population qui n'épargne pas suffisamment pour sa retraite. Alors, il faut qu'on trouve une façon d'aider ces gens-là, et on ne peut pas le faire à coût nul. Par définition, si on améliore l'épargne-retraite... Et c'est de l'épargne. Ce n'est pas une taxe. On associe ça à une... Ce n'est pas une taxe, c'est de l'épargne. Cet argent-là, il va être géré, il va être remis au service de l'économie. Je veux dire, c'est une excellente façon, je pense, d'aider et de se prémunir contre les problèmes, en 2030, 2040, 2050, des gens qui arriveraient à la retraite et qui n'auraient pas les moyens de la prendre. Alors, c'est une façon ici de bien adresser cette question-là.

Le Président (M. Bernier) : ...

M. Godbout (Luc) : Regardez, on l'a montré quand même assez clairement aux annexes 5, que ce soit au salaire minimum ou quelqu'un qui est au maximum des gains admissibles, l'impact de cette réforme-là pour cette année, ce n'est rien.

L'impact de cette réforme-là pour l'année prochaine, de l'année 2018, ce n'est rien. En 2019, on parle, pour quelqu'un qui gagne quand même l'équivalent de 55 000 $, on parle de 0,05 $ de l'heure pour l'employeur; l'année suivante, 0,11 $ de l'heure; 0,16 $ de l'heure; 0,22 $ de l'heure; 0,29 $ de l'heure après cinq ans, et je vous rappelle que les petits sous sont déductibles au fédéral ou au provincial. Donc, on parle d'un coût net qui est quand même assez modeste. Bernard l'a quand même souligné, donc, M. le ministre, vous avez neuf ans pour mettre en place une mesure d'atténuation de ce petit impact là, et ce plan-là peut être fait. Vous avez déjà un programme de réduction du FSS qui est prévu dans le budget. Et je vous dirais, peut-être sourire en coin, que la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise pouvait vous donner des sources d'inspiration également pour réduire le Fonds de services de santé en termes de contributions.

M. Leitão : En effet.

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, M. D'Amours, M. Beaudry, M. Morency, M. Godbout, merci de votre immense travail et contribution sur ce sujet.

Et, compte tenu de l'heure, je lève la séance. Et la commission ajourne ses travaux à demain, 10 h 15, où elle poursuivra ce mandat. J'ajourne.

(Fin de la séance à 18 h 14)

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