Journal des débats de la Commission des finances publiques
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
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Le
mercredi 9 juin 2021
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Vol. 45 N° 137
Entendre les intéressés et procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 219, Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal
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19 h 30 (version non révisée)
(Dix-neuf heures quarante-trois minutes)
Le Président (M. Simard) :
Chers collègues, bonsoir à toutes et à tous. Je constate que nous avons quorum,
nous pouvons donc entreprendre nos travaux. Comme vous le savez, la commission
est réunie afin d'entendre les intéressés de procéder à l'étude détaillée du projet
de loi n° 219, Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à
Montréal.
Mme la secrétaire, bonsoir.
La Secrétaire
:
Bonsoir.
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
M. le Président. Alors, M. Asselin (Vanier-Les Rivières) est
remplacé par M. Lemieux (Saint-Jean) et M. Barrette (La Pinière) est
remplacé par M. Arcand (Mont-Royal—Outremont).
Le Président (M. Simard) :
Merci et bienvenue à ces nouveaux collègues. Avant de commencer, je vous
informe qu'en vertu de la motion adoptée par l'Assemblée le 25 mai
dernier, les votes pour ce mandat devront se tenir par appel nominal, et ce
jusqu'au 11 juin.
Dans un premier temps, nous allons, bien
sûr, aborder cette étude d'un projet de loi privé, c'est un peu atypique comme
démarche, mais donc, nous allons entreprendre cette soirée par nos remarques
préliminaires. Chaque intervenant autour de la table pourra intervenir à sa
guise. Mais nous allons d'abord céder la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis
afin qu'elle puisse nous présenter brièvement le projet de loi et faire, donc,
ses remarques préliminaires. Chère collègue, soyez la bienvenue. C'est rare
qu'on vous a avec nous, à la Commission de la fonction publique, c'est un
privilège. Donc, je vous cède la parole.
Mme Maccarone : C'est un
privilège pour moi également. Merci, M. le Président. C'est un plaisir
aussi d'être parmi vous ce soir pour discuter du projet de loi concernant un
immeuble situé sur la rue University à Montréal, le projet de loi d'intérêt
privé, le 219.
Alors, d'emblée, je voulais partager avec
les collègues que ce projet de loi, c'est le fruit de notre travail de terrain
depuis un an. C'est le résultat de beaucoup de rencontres avec plusieurs
parties prenantes, incluant les requérants, le Centre universitaire de santé
McGill, le CUSM, l'université de McGill, plusieurs membres et groupes de la
communauté, Les Amis de la montagne, c'est sûr, mes collègues qui
m'accompagnent ce soir, aussi, ainsi que notre équipe.
J'avais aussi quand même des
préoccupations, surtout de conserver une vocation publique du site, parce qu'on
se comprend, à Westmount—Saint-Louis, nous avons aussi…
Mme Maccarone : …plusieurs
membres et groupes de la communauté, Les Amis de la montagne, c'est sûr, mes collègues
qui m'accompagnent ce soir aussi, ainsi que notre équipe. J'avais aussi quand
même des préoccupations, surtout de conserver une vocation publique du site,
parce qu'on se comprend, à Westmount—Saint-Louis, nous avons aussi des enjeux,
alors pour la valorisation du site. Et moi et mon équipe, nous avons travaillé
ardemment sur des propositions qui figurent à l'intérieur de ce projet de loi,
et je dois remercier tous ceux qui en ont cru… à ces sujets et ces ajouts.
Alors, un petit survol en ce qui concerne
le projet de loi d'intérêt privé. Le Centre universitaire de santé McGill, le
CSUM, est aujourd'hui propriétaire de l'ancien Hôpital du Royal Victoria à
Montréal. En 2015, avec l'ouverture du nouveau complexe hospitalier, les
activités hospitalières du Royal Victoria ont été transférées. Depuis 2015, le
site du Royal Victoria ainsi que les bâtiments qui s'y retrouvent ne sert plus
à soigner des personnes malades ou blessées, puisque cette activité est
dorénavant exercée dans le nouveau complexe hospitalier du CSUM. Ces immeubles
étant excédentaires, le CSUM souhaite donc s'en départir en collaboration avec
le ministère de la Santé et Services sociaux et la Société québécoise des
infrastructures. Le CSUM collabore donc à la démarche gouvernementale à ce
sujet.
Le 22 juin 2018, le gouvernement a
autorisé le CSUM à développer le site du Royal Victoria et à confier la
requalification à la SQI. La SQI entreprend des démarches permettant que les
titres de propriété du site du Royal Victoria lui soient transférés, de manière
à ce qu'elle soit gestionnaire de l'ensemble du site, et ce, jusqu'au moment où
une partie du site sera transférée à l'Université McGill. La SQI a donc fait réaliser
un examen des titres de propriété. Cet examen a relevé qu'une partie du site
était la propriété du CSUM en vertu d'une donation qui remonte à 1891. L'acte
de donation prévoit que les immeubles font l'objet des restrictions
suivantes : restrictions d'usage ou charge, stipulation… et
d'insaisissabilité. C'est des mots qu'on va répéter souvent, M. le Président,
ça fait qu'on va pratiquer. Ces restrictions empêchent tout transfert de
propriété et ne permettent pas de requalifier le site. Puisque ces restrictions
ont été imposées par le donateur dans les titres de la propriété, la seule
façon d'y remédier adéquatement consiste en l'adoption d'une loi à ce sujet. La
requalification entraîne un changement de vocation et un réaménagement de tout
le site du Royal Victoria et le transfert de celui-ci par le CSUM à la SQI. La
SQI a l'intention de réaliser la requalification du site en fonction des orientations
gouvernementales et en priorisant les usages publics.
C'est important, M. le Président, je
précise que les usages qui seront développés sur le site ne sont pas encore
connus. Des consultations publiques auront lieu avant de déterminer ces usages.
L'Université McGill occupera une partie du site à des fins d'enseignement,
d'apprentissage et de…
Mme Maccarone : …et en
priorisant les usages publics. C'est important, M. le Président, je précise que
les usages qui sont développés sur le site ne sont pas encore connus. Les consultations
publiques auront lieu avant de déterminer ces usages.
L'Université McGill occupera une partie du
site à des fins d'enseignement, d'apprentissage et de recherche axée sur le
développement durable et la lutte aux changements climatiques. Dans le cadre de
la requalification du site et du transfert à la SQI, il est nécessaire de
valider l'acte de transfert par Royal Victoria en faveur du CUSM.
Alors, projet de loi d'intérêt privé n° 219
contient donc des dispositions pour abolir les restrictions d'usage ou charges,
ainsi que toute stipulation d'inaliénabilité et d'incessibilité apparaissant
dans l'acte de donation, valider le transfert de propriété entre l'Hôpital
Royal Victoria et le CUSM, et de prévoir de nouvelles restrictions d'usage afin
de s'assurer que les parties de lots visées ne soient pas utilisées pour des
usages résidentiels de type copropriété ou d'établissement hôtelier commercial,
à moins que ces usages ne soient accessoires, ou ne fassent partie d'un projet
institutionnel ou public. Alors, au plaisir d'avoir des échanges avec les
collègues. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à vous, chère collègue. Avant d'aller plus loin, il me faut
officialiser la présence d'un député qui me tient beaucoup à coeur.
Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Alors,
est-ce… dans le fond, M. Bérubé (Matane-Matapédia) remplacerait M. Ouellet
(René-Lévesque).
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Donc, j'en profite pour souhaiter la bienvenue également à mon
collègue de Matane-Matapédia. Mme la présidente du Conseil du trésor, nous
pouvons poursuivre avec les remarques préliminaires.
Mme LeBel : Oui, bien, alors,
ça me fait plaisir, M. le Président, de revenir devant cette commission. On a
eu l'occasion de faire quelques projets de loi de façon plus traditionnelle,
effectivement. C'est mon premier projet de loi d'intérêt privé. Ça me fait
plaisir d'être avec ma collègue, et mes deux autres collègues, également, là,
tous mes collègues ici pour pouvoir travailler sur ce projet de loi, qui est
effectivement, également, important pour le gouvernement.
• (19 h 50) •
Je ne referai pas tout l'historique du
site de la donation qui part de 1891, où il y avait un usage pour des soins de
santé très spécifiques, usage qui est maintenant assuré par le CUSM. Donc, les
bâtiments deviennent excédentaires, vous l'avez bien dit. Et je pense que ce
qui est important de dire, c'est que, pour nous, ce projet de loi là, qui
permet, donc, de rectifier les usages, les restrictions d'usage qui grèvent
présentement les titres de propriété, pour nous permettre d'en faire d'autres
usages, est très important et va permettre, justement à la Société québécoise
des infrastructures, la SQI, d'acquérir, dans son entièreté, le site de
l'Hôpital Royal Victoria. Je pense que c'est une manière… ce projet de loi
constitue une manière adéquate, là, de corriger les problématiques des
restrictions qui le font… et je pense que c'est la bonne façon de s'assurer que
le transfert, dont les types de propriétés de certaines parties du site sont
affectés… les restrictions d'usage sont bien corrections.
Donc, ça s'inscrit, M. le Président, dans
la démarche gouvernementale, là, de requalification du site qui a été
entreprise en 2018. En effet, l'adoption de ce projet de loi, donc, est requise
pour permettre que les immeubles qui sont actuellement inutilisés,
excédentaires, par le CUSM, soient donc transférés à la SQI et qu'on puisse en
faire certains usages. Mais, encore là, les valves ne sont pas ouvertes entièrement.
Nous sommes…
Mme LeBel : ...dans la démarche
gouvernementale, là, de requalification du site qui a été entreprise en 2018.
En effet, l'adoption de ce projet de loi, donc, est requise pour permettre que
les immeubles qui sont actuellement inutilisés excédentaires par le CUSM soient
donc transférés à la SQI et qu'on puisse en faire certains usages.
Mais encore là les valves ne sont pas
ouvertes entièrement. Nous sommes très conscients et soucieux du fait que ce
site fait partie du site patrimonial du Mont-Royal, donc on a... et la SQI a la
responsabilité gouvernementale de requalifier le site, mais il y aura
effectivement certaines restrictions qui seront discutées. Entre autres, il est
à noter que, dans la partie de l'acte de cessation qui sera fera ultérieurement
entre McGill et la SQI, il est précisé que McGill n'utilisera qu'une seule
partie du site, je pense qu'il faut le préciser, McGill n'utilisera pas. Il
restera quand même une dizaine de bâtiments qui devront trouver usage ultérieur
après consultation, effectivement, comme ma collègue l'a mentionné, par la SQI.
Et la partie du site qui va être confiée à l'Université McGill devra... c'est
notre souhait, là, qu'elle soit utilisée exclusivement à des fins
d'enseignement ou de recherche qui incluent les usages complémentaires qui
peuvent être associés, dont notamment des résidences pour étudiants, mais de
façon très restreinte, justement, pour usage universitaire simplement.
Donc, il restera encore à déterminer les
autres usages, il est trop tôt pour le faire, mais tout ça dans le respect de
notre patrimoine. Et c'est très important que ce site-là, M. le Président,
trouve un second souffle, une autre vie, dans le respect, justement du fait
qu'il fait partie du site patrimonial du Mont-Royal, alors ça nous fait très
plaisir.
Je vais terminer mes remarques, parce
qu'on aura le temps d'en discuter abondamment, mais dans l'essence, là, c'est
ça, c'est l'intention gouvernementale. Et on va naturellement voter pour, mais
on va discuter, là, de l'article par article en temps et lieu. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Je cède maintenant la parole au député de Matane-Matapédia et chef de
son groupe parlementaire.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. Un projet de loi fort important, fort controversé, proprement
scandaleux, si vous voulez mon opinion, appuyé à la fois par le Parti libéral
du Québec et la Coalition avenir Québec. Qui l'aurait cru?
Déjà dans le titre : Loi concernant
un immeuble situé sur la rue University à Montréal. Pas d'adresse, pas de nom,
on utilise cette portion de l'avenue Robert-Bourassa que la communauté
anglophone n'a pas voulu qui s'appelle Robert-Bourassa, ça s'appelle
University, et ça va être ça. Dans un projet de loi privée, on va faire un
changement majeur qui aura un impact considérable sur Montréal et on va faire
ça dans une loi privée, en fin de session, comme en 2018 avec le Parti libéral.
C'est arrivé.
Je me suis dit : On va changer de
gouvernement, et puis on va abandonner ce projet. Oh que non! La Coalition
avenir Québec, soucieuse de poursuivre l'oeuvre du Parti libéral, non seulement
y souscrit, mais l'accélère avec le projet de loi n° 61 et le projet de
loi n° 66, qui est adopté.
Ma formation politique est profondément
contre ce projet avec une conviction très sincère. Ce que nous nous apprêtons à
faire est considérable...
M.
Bérubé
:
...l'accélère avec le projet de loi n° 61 et le projet
de loi n° 66, qui a été adopté.
Ma formation politique est profondément
contre ce projet, avec une conviction très sincère. Ce que nous nous apprêtons
à faire est considérable, et j'ai l'impression que le fait qu'il n'y a pas eu
de consultation suffisante sur cet enjeu-là nous prive d'un débat nécessaire et
éclairant. On ne peut pas disposer d'un tel enjeu aussi simplement dans un projet
de loi privé. Ça m'attriste au plus haut point, M. le Président, et le projet
de loi n° 219, loi concernant un immeuble quelconque
situé sur la rue University à Montréal, ne rend pas justice à l'enjeu.
Vous savez, M. le Président, le site de
l'ancien Hôpital Royal Victoria, il doit poursuivre
sa vocation initiale d'offrir des services sociaux. Nous demandons, comme bien
des gens, que son usage futur et sa propriété soient décidés et gérés de façon
démocratique et écologique, et ce, au service du bien commun, et ce n'est pas
ce qui va se passer avec ce projet de loi, M. le Président.
Trois ans après le déménagement des
services de santé de l'ancien Hôpital Royal Victoria... c'était en 2015, un peu
plus que ça... le gouvernement du Québec autorisait l'Université McGill à se
doter d'un nouveau campus sur une portion du site, et lui accordait un soutien
financier, en plus, de 37 millions de dollars pour l'accompagner. Quand
même. Cette décision majeure, à propos d'un site public offrant un énorme
potentiel pour continuer à servir la population montréalaise, fut prise sans
aucune consultation de la société civile ni des résidents et résidentes du
quartier, et sans débat à l'Assemblée nationale du Québec.
Nous ne sommes pas foncièrement opposés à
ce qu'une section du site puisse être utilisée comme campus par l'Université
McGill, qui a aussi pour vocation de servir l'intérêt public en matière
d'éducation, mais il faut s'assurer de la pérennité de cette dernière, et
éviter que l'Université McGill soit, un jour, tentée de privatiser certains de
ses immeubles, à l'exemple d'autres institutions aux abords du mont Royal.
Ce gouvernement, celui de la Coalition
avenir Québec, a une propension, qui est la même que le gouvernement précédent,
de d'abord servir les grandes institutions anglophones. C'est le cas avec le
collège Dawson, on en a parlé abondamment. C'est le cas avec l'Université
McGill, l'université la plus riche au Canada, qui dispose de fonds importants à
travers sa fondation. Alors, ce cadeau de près de 1 million de dollars, on
ne le fait pas à l'Université de Montréal, on ne le fait pas à l'UQAM, on ne le
fait pas à Concordia. On le fait à l'Université McGill.
Alors, je veux saluer les gens qui ont
fait du lobby à l'Université McGill, parce qu'ils ont réussi à convaincre deux
formations politiques, deux gouvernements différents, du bien-fondé, pour leur
institution, de céder le Royal Victoria, des terrains importants, et une partie
du mont Royal. Ce n'est pas rien. Puis le Royal Victoria, il a été financé par
des fonds de tout le monde au Québec, M. le Président. Ça fait partie de notre
patrimoine. Mais pour trouver la meilleure vocation possible, il faut certainement,
certainement un débat beaucoup plus large que celui que nous aurons aujourd'hui.
Moi, je m'interroge sur la méthode choisie
pour discuter de l'opportunité d'un projet de donation d'une telle ampleur, 700 millions
de...
M. Bérubé : ...financé par
des fonds de tout le monde au Québec, M. le Président, ça fait partie de notre
patrimoine, et, pour trouver la meilleure vocation possible, il faut certainement,
certainement un débat beaucoup plus large que celui que nous aurons aujourd'hui.
Moi, je m'interroge sur la méthode choisie
pour discuter de l'opportunité d'un projet de donation d'une telle ampleur, 700 millions
de dollars au bas mot, qui aura des répercussions majeures sur le plan de la langue
française. J'aimerais que le gouvernement du Québec note qu'il a déposé un projet
de loi, le projet de loi n° 96, dont le principal objectif, c'est de faire
croire qu'il s'intéresse à l'avenir du français au Québec. Déjà avec Dawson, et
en plus avec celui-là, c'est déjà plombé d'avance, M. le Président. Il n'y a
pas un acteur sérieux de la langue qui croit que le gouvernement est sérieux
s'il s'enligne dans ces projets-là. Je le rappelle, non seulement ils adhèrent
à ce que le gouvernement libéral avait mis sur la table, en plus ils
l'accélèrent, imaginez. L'enjeu de l'urbanisme et de l'occupation d'un site
colossal en plein coeur du centre-ville de Montréal aussi, c'est un enjeu.
Des dizaines d'organismes de la société
civile, notre formation politique, plusieurs acteurs, des intellectuels ont
demandé au gouvernement s'il entendait poursuivre la politique de laisser-aller
linguistique du gouvernement précédent, le gouvernement du premier ministre
Couillard, parmi plusieurs bévues monumentales de son mandat, mais il avait
décidé de donner juste après la session parlementaire du printemps 2018, très précisément
le vendredi 22 juin, l'ancien hôpital Royal Victoria à McGill. Aujourd'hui, on
a notre réponse par l'entremise de la présidente du Conseil du trésor, qui a
fait adopter le projet de loi n° 66. On a attendu avant
de savoir quelle était l'intention du gouvernement de la CAQ là-dessus. Bien,
c'est à travers un projet de loi privé que la CAQ entend régler pour de bon
cette saga plutôt discrètement, vous en conviendrez, pas avec toute l'attention
médiatique nécessaire, avec le travail fait par le Parti libéral, comme quoi la
différence en cette matière n'est pas si grande entre le Parti libéral du
Québec et la CAQ.
D'abord, la méthode, elle est légitime au
plan parlementaire. À l'inverse, elle souffre d'un grand manque de légitimité
au plan de l'opinion publique. Déposé en novembre 2020, il faut s'en souvenir,
ce projet de loi, dont le titre est de nature à ne pas éveiller les soupçons, Loi
concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal — alors,
on pourrait se promener ce soir puis, tu sais, dans la suite, de quel immeuble
il s'agit. Pas le courage de le nommer, M. le Président, pas rien! — qui
sera lourd de conséquences s'il était adopté par l'Assemblée nationale,
constitue un affront, rien de moins qu'un affront à la cinquantaine
d'organismes qui s'y opposent, un puissant affront aux universités francophones
comme l'Université de Montréal et l'UQAM, un affront enfin à tous les
Montréalais et à tous les Québécois qui méritent, comme les citoyens et comme
contribuables, d'être informés sur les retombées de ce projet.
• (20 heures) •
Alors, c'est la question du moment, M. le
Président : Pourquoi le gouvernement de la CAQ refuse de dire clairement
qu'il est favorable à ce projet sur la place publique pleinement et sans la
moindre hésitation, plutôt que de faire faire le travail par une autre
formation politique? Ça passe en dessous du radar. Ça ne m'apparaît pas
acceptable. On devrait cesser de poursuivre une politique de laisser-aller
linguistique à Montréal…
20 h (version non révisée)
M. Bérubé : …refuse de dire
clairement qu'il est favorable à ce projet sur la place publique, pleinement et
sans la moindre hésitation, plutôt que de faire faire le travail par une autre
formation politique. Ça passe en dessous du radar, ça ne m'apparaît pas acceptable.
On devrait cesser de poursuivre une politique de laisser-aller linguistique à Montréal,
parce qu'il y aura un impact là-dessus. On envoie le message que le prestige,
c'est dans une université anglophone, l'Université McGill. C'est plus qu'un
symbole, c'est du financement. C'est la même chose que Dawson. Montréal, c'est
le coeur du Québec, et ça ne doit pas être à l'écart du Québec français. Le
message qu'on envoie aujourd'hui, il est épouvantable. Et je sais, M. le
Président, que le ministre responsable de la langue française est totalement
d'accord avec moi, et il ne va jamais le nier. C'est ça pour Dawson, c'est ça
pour McGill. Je regrette qu'il ait perdu toutes ses batailles au Conseil des
ministres, mais le destin du Québec se poursuit. Et s'il ne peut pas parler de
cela, je le ferai, M. le Président, et je vais continuer de le faire longtemps.
J'invite le gouvernement, qui est axé sur
les communications, comme l'a reconnu ce matin la vice-première ministre, avec
la candeur qu'on lui connaît, à commander un sondage sur ce que pensent les
Montréalais de l'est de l'île et les Québécois, de donner sans vergogne, sans
sourciller, sans l'assumer publiquement, plus de 700 millions à une
corporation privée à charte royale, bien qu'elle reçoive des fonds publics,
tant du gouvernement du Québec que celui du Canada. L'Université McGill est
privée. Et vous savez quoi? Elle va le demeurer.
Je serais très étonné que les Québécois
soient heureux de la réalisation de ce projet s'ils connaissaient toutes ses
implications. Et comment pourraient-ils les connaître, les supposer, les jauger
si le gouvernement adhère à la méthode du Parti libéral, si le gouvernement ne
décrète pas un moratoire sur le projet de donation — possibilité — et
s'il n'y a pas une commission parlementaire réelle à ce sujet? On pourrait
entendre de nombreux acteurs crédibles qui sont intervenus à travers de lettres
ouvertes, notamment, sur cet enjeu, des gens qui connaissent ça, des gens qui
n'ont pas d'intérêt direct, des gens qui souhaitent préserver la montagne,
préserver ce site public.
La méthode, aujourd'hui, c'est d'utiliser
une loi privée pour expédier un projet de donation d'une telle ampleur. Je
tiens à le dire, c'est inapproprié, non pas sur le plan législatif, mais quant
au nécessaire débat démocratique qui exige du temps et de réelles
consultations.
Pourquoi qu'il n'y a pas eu de réelles
consultations? Parce que le gouvernement a inclus le Royal V dans le projet de
loi n° 66 en le soustrayant à plusieurs exigences, c'est astucieux, dont
celle de consultation de l'Office de consultation publique de Montréal.
Symbolique, tellement symbolique. L'agrandissement de McGill figure parmi les
quelque 200 projets visés par le projet de loi n° 66 et pour lequel le
gouvernement souhaite une accélération. Ce n'est pas beau, ça, M. le Président?
Il y a 100 ans, lorsque ces terrains se
donnaient en servitude, le tout était conditionnel à ce que la vocation,
service à prodiguer des soins, soit celle qui était permanente. Si cette clause
n'était pas respectée, les terrains devraient revenir au propriétaire. Est-ce
que j'en comprends, et en suivant cette logique, ces servitudes seraient donc
la propriété de la ville de Montréal? Si on continue l'exercice : Pourquoi
la ville de Montréal n'est-elle pas ici pour nous en parler...
M. Bérubé : …soit celle qui
était permanente. Si cette clause n'était pas respectée, les terrains devraient
revenir au propriétaire. Ce que j'en comprends et en suivant cette logique,
cette servitude serait donc la propriété de la ville de Montréal. Si on
continue l'exercice, pourquoi la ville de Montréal n'est-elle pas ici pour nous
en parler? Ah! on n'a pas voulu les inviter. Alors, c'est le Parti libéral qui
va parler pour la ville de Montréal. Ce que je veux, c'est de démontrer que cet
enjeu est d'ordre public avant tout, et que tout cela doit être débattu plus en
profondeur. Le parti gouvernemental, ce soir, comprendra qu'on n'entend pas à
rire sur cet enjeu-là.
Notre projet de loi n° 66 adopté en
décembre 2020, le gouvernement de la CAQ est venu contredire tout effort de
protéger le français, notre langue commune et officielle, ça doit se savoir. En
effet, dans le projet de loi n° 66, le projet n° 120,
on spécifie que l'aménagement sur une partie du site de l'hôpital Royal
Victoria du Centre universitaire de santé McGill bénéficiera des mesures
permettant l'accélération de projets d'infrastructure. Le gouvernement cède
donc à l'Université McGill l'ancien Hôpital Royal Victoria au complet et des
terrains qui font partie du Mont-Royal. Il s'agit là de la cession d'un énorme
patrimoine public québécois francophone au profit d'intérêt particulier
anglophone. Là, ce n'est plus juste des transferts linguistiques, c'est le
transfert d'actif public à une fondation privée. Et, nous, on accepte ça ici,
en fait, une partie des parlementaires de l'Assemblée nationale, je n'ose pas
le croire, c'est pourtant une réalité.
Pourquoi sans frais?
Pourquoi à titre gratuit? Qui le gouvernement a-t-il consulté avant de décider
si c'était une bonne idée, qui? Ce n'est pas banal, c'est pas mal même
consternant, au Parti québécois, on s'y oppose fermement à ce projet, M. le
Président. C'est sans équivoque pour nous, le gouvernement aurait dû renoncer à
ces investissements et les investir dans les institutions francophones qui en
ont bien besoin, qui n'ont pas la richesse de l'Université McGill qui,
manifestement, comme pour le Parti libéral, a la cote pour la Coalition avenir
Québec. Je me ferai un plaisir, M. le Président, d'indiquer à chacun des
députés de la Coalition avenir Québec, qui ont des cégeps sur leur territoire,
des universités, leur rappeler le choix que le Conseil des ministres a fait
pour eux.
Aujourd'hui, sous ce projet
de loi, le gouvernement vient se donner des moyens importants pour concrétiser
le projet, parce que la ministre l'a indiqué tout à l'heure, elle est en faveur
du projet comme le Parti libéral, c'est incroyable. Une pensée pour mes anciens
collègues du Parti québécois qui doivent vivre avec ça. Recommençons depuis le
début de cette saga, McGill, Dawson, parce qu'on a encore du temps. D'une part,
la CAQ investit 50 millions pour l'agrandissement du collège Dawson, un
cégep anglophone qui est aussi le plus populeux au Québec, je ne parle pas du
cégep de Matane avec 700 élèves, ici, M. le Président. En janvier 2021, Dawson
a mentionné que le projet d'agrandissement coûtera 100 millions. Ça monte.
Qui va financer le 100 millions supplémentaires, le gouvernement. D'autre
part, l'Université McGill pourra profiter d'un investissement majeur de
700 millions, en plus de se voir donner une majeure partie de l'ancien
Hôpital Royal Victoria, un précieux morceau du patrimoine public montréalais.
C'est Noël en juin, M. le Président.
Aux crédits 2021‑2022, on a
été…
M. Bérubé : …le gouvernement.
D'autre part, l'Université McGill pourra profiter d'un investissement majeur de
700 millions, en plus de se voir donner une majeure partie de l'ancien Hôpital
Royal Victoria, un précieux morceau du patrimoine public montréalais. C'est
Noël en juin, M. le Président.
Aux crédits 2021‑2022, on a été attentifs.
La ministre de l'Enseignement supérieur a refusé de répondre à savoir combien
le gouvernement allait injecter dans cette cession et cette réfection. Elle ne
voulait pas le dire. On parle de fonds publics, et cette absence de réponse est
inacceptable pour les parlementaires que nous sommes tous.
Ces deux projets ont plusieurs choses en
commun. Ils ont tous les deux été initiés par l'ancien gouvernement libéral
quelques semaines avant les dernières élections, celles de 2018. Et aussi, et
pire, ils vont tous les deux contribuer au recul de la langue française à Montréal
ainsi qu'à l'anglicisation du Québec. Il y a ça en commun. Pour notre langue,
ces deux projets, c'est une catastrophe. En bref, la CAQ et les libéraux, leur
souhait, c'est financer et accélérer l'anglicisation du Québec. En tout cas, si
ce n'est pas leur souhait, c'est le résultat.
Petit comparatif des dernières actions de
la CAQ en matière de langue française. En tout, Dawson et McGill, c'est
750 millions pour financer l'anglicisation et le recul du français.
Septembre 2020, la CAQ annonce un maigre 5 millions à l'OQLF pour financer
la francisation par l'embauche de 50 employés. En comparaison, ses
investissements en francisation sont 150 fois moins importants que les
investissements à Dawson et McGill. S'il y a des directeurs généraux de cégeps
francophones du Québec, j'espère que ce message se rend à vous. Mais, pour m'en
assurer, je vais envoyer moi-même cet extrait et ces chiffres à tous les
directeurs généraux des cégeps du Québec…
Les actions de la CAQ en matière de langue
française, en général, sont décevantes. Ce n'est pas pour rien que j'en parle,
parce que ça va conditionner tout le reste. On ne peut pas annoncer qu'on a un
plan costaud et brader le patrimoine populaire montréalais. Je veux dire, ça
n'a pas de sens.
Après avoir attendu deux ans avant de
déposer un projet de loi, force est d'admettre que celui-ci ne s'attaque pas
aux véritables enjeux pour freiner le déclin marqué du français au Québec. Oui,
nous abordons cet enjeu au plan linguistique. On parle de modifications de
façade. Enseignement supérieur continuera de créer une dynamique linguistique
inéquitable. On va financer le plus grand cégep au Québec, encore
50 millions, pour accueillir encore plus d'étudiants, plus de
francophones, choisir les meilleurs. Une demi-mesure pour interdire l'exigence
indue de l'anglais dans les milieux de travail, aucune mesure pour imposer une
immigration francophone au Québec, demi-mesure pour les entreprises, aucune
mesure pour retirer le statut bilingue des villes où le nombre de francophones
est de bien loin majoritaire de celui des anglophones, aucune mesure pour
valoriser la culture, le français écrit, etc.
Concernant Dawson, sur les 48 cégeps
publics du Québec, un seul, un seul reçoit le privilège de voir son
agrandissement priorisé et accéléré : Dawson, un collège privé et
anglophone. Il s'agit déjà du cégep le plus populeux avec 8 000 étudiants,
11 000 avec la formation continue. Et c'est un cégep anglophone qui…
M. Bérubé : …un seul, un seul
reçoit le privilège de voir son agrandissement priorisé et accéléré, Dawson, un
collège privé et anglophone. Il s'agit déjà du cégep le plus populeux avec
8 000 étudiants, 11 000 avec la formation continue. Et c'est un
cégep anglophone qui contribue à l'anglicisation de la société québécoise ainsi
qu'au recul de la langue française à Montréal et dans les régions avoisinantes.
Si on fait un comparatif, à l'Université
McGill, un investissement de 700 millions pour 40 000 étudiants,
c'est un investissement par étudiant de 17 500 $ par tête, par
étudiant. Dawson, 50 millions, environ 8 000 étudiants, c'est
6 250 $. Je connais plusieurs cégeps qui rêveraient d'être le
chouchou du gouvernement de la Coalition avenir Québec au même titre qu'ils l'ont
été de celui du Parti libéral du Québec.
• (20 h 10) •
Fonds d'immobilisation, très important.
Avec 19 % du total en 2020, McGill touche la plus importante des sommes en
immobilisation de toutes les universités au Québec. Je connais ça un peu, M. le
Président, j'ai été vice-président de la FEUQ quand j'étais plus jeune. Les
fonds d'immobilisation investis dans les universités francophones et
anglophones de Montréal sont à quasi-égalité sur toute la période 2001 à
2020. Cela est tout de même étonnant étant donné qu'en 2001, 38 %
d'effectif universitaire seulement est inscrit dans les universités anglophones
sur l'île de Montréal, puis c'est 39,5 % en 2019. Sur l'île de Montréal,
un étudiant pondéré qui étudie en anglais bénéficie de 56 % de plus de fonds
d'immobilisation qu'un étudiant qui étudie en français, 56 % de plus. Il y
a des gens qui devraient regarder à terre. McGill récolte 68,6 % plus
d'argent par étudiant effectif à temps plein, pondéré que sa plus proche
concurrente, la grande Université de Montréal. McGill est donc l'université
hégémonique qui est en train, comme un trou noir, de satelliser et d'aspirer
les autres universités dans son orbite.
Ça me fait penser que… À la fois pour les
libéraux et la CAQ, il y a deux systèmes d'éducation supérieure au Québec, les
universités dans les régions puis les universités à chartes. Mais encore là, il
n'y en a qu'une seule qui se démarque autant, c'est l'Université McGill. Un, où
les établissements se débattent pour être mieux financés, avoir des meilleures
infrastructures et par le fait même pour avoir de meilleurs profs et de
meilleurs étudiants. On parle ici, bien sûr, des universités francophones de
Montréal, mais aussi de celles en région, qui est notre réseau d'Universités du
Québec puis les cégeps qui gravitent d'elles. Le second réseau est celui de
l'opulence et des dons à 1 milliard et des agrandissements mirobolants. Je
parle ici de McGill et de Dawson.
Patrimoine. Je renchérirais sur la valeur
patrimoniale importante de cet établissement. On parle ici d'un des emblèmes de
la ville de Montréal. C'est un lieu historique et charnière qui a eu pour
mission le mieux-être des Montréalais et Montréalaises. Le changement de
vocation de cet établissement se doit donc d'être pris avec un sérieux à la hauteur
de son histoire. Il serait clairement plus utile de pérenniser la vocation
initiale de cet établissement en maintenant le giron public.
Les nombreux groupes qui ont fait des
lettres ouvertes depuis plusieurs mois — je les ai avec
moi — ont d'ailleurs plusieurs bonnes idées, mais on ne pourra pas
les entendre ce soir…
M. Bérubé : …donc d'être pris
avec un sérieux à la hauteur de son histoire. Il serait clairement plus utile
de pérenniser la vocation initiale de cet établissement en maintenant le giron
public.
Les nombreux groupes qui ont fait des
lettres ouvertes depuis plusieurs mois, je l'ai avec moi, ont d'ailleurs
plusieurs bonnes idées, mais on ne pourra pas les entendre ce soir. Pourquoi ne
pas réétudier ces locaux pour aider les organismes communautaires ou le céder
au réseau de l'Université du Québec qui est présent à Montréal? Reste qu'il y a
quelque chose d'indécent de faire un don d'une valeur de plus d'un milliard de
dollars à une organisation qui n'y en pas vraiment besoin, considérant toutes
celles qui pourraient l'utiliser à meilleur escient, M. le Président. Bien,
c'est ça, le projet qui nous est présenté ce soir, projet de loi privé sur un
bâtiment sur la rue University à Montréal. C'est un déplacement majeur, majeur
d'infrastructure pour la communauté francophone…
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Bérubé : …qui vont venir
s'ajouter à une ghettoïsation accélérée, une hégémonie de l'Université McGill
qui a trouvé une oreille chez le Parti libéral et aussi à la CAQ.
Le Président (M. Simard) :
Merci beaucoup. Merci à vous, cher collègue. Y aurait-il d'autres députés qui
souhaitent intervenir dans le cadre de ces remarques préliminaires? Je cède
maintenant la parole au député de Mont-Royal—Outremont.
M.
Arcand
:
Merci, M. le Président. Simplement vous dire, on aura l'occasion, j'imagine,
article par article, de pouvoir répondre à certaines des interventions, mais je
voulais simplement vous souligner à ce stade-ci qu'on a déposé des amendements
qui, je crois, se retrouvent à ce moment-ci dans le Greffier.
Le Président (M. Simard) : En
effet, l'un pour le préambule et l'autre pour l'article 3, si mes informations
sont bonnes.
M.
Arcand
:
C'est ça.
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il d'autres remarques dans le cadre de la section portant dans sur les
remarques préliminaires?
Sans quoi, nous allons procéder à la
seconde étape, en fait, à la deuxième étape, nous allons entreprendre les
auditions des intéressés. J'invite maintenant le représentant du requérant, le
Centre universitaire de santé McGill à se présenter et à nous exposer les
grandes lignes de ce projet de loi. Alors, mesdames, messieurs, vous disposez
de cinq minutes pour cette présentation, après quoi, nous aurons une
période d'échange avec les députés ici présents de cinq minutes. M. Gfeller,
auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Gfeller (Pierre) : Oui.
Bonsoir, tout le monde. Merci, M. le Président. Mmes et MM. les membres de la
commission, mon nom est Pierre Gfeller, je suis le président directeur général
du Centre universitaire de santé McGill, et je suis accompagné de Mme Sophie
Mayes, qui est la directrice générale responsable de la requalification du site
de l'Hôpital Royal Victoria à SQI, et de ma collègue du ministère de la Santé
et des Services sociaux, Mme Carole Arbour, qui est responsable des dossiers
spéciaux et des transactions immobilières au ministère.
Alors, si vous me le permettez, M. le
Président, Centre universitaire de santé McGill sollicite l'Assemblée nationale
afin que celle-ci adopte le projets de loi d'intérêt privé n° 219.
J'aimerais rappeler à tous, pour éviter
toute équivoque, que le Centre universitaire de santé McGill est une
institution du réseau…
M. Gfeller (Pierre) : ...si
vous me le permettez, M. le Président, le Centre universitaire de santé McGill
sollicite l'Assemblée nationale afin que celle-ci adopte le projet de loi
d'intérêt privé 219.
J'aimerais rappeler à tous pour éviter
tout équivoque. Le Centre universitaire de santé McGill est une institution du
réseau public de santé et des services sociaux du Québec et que, malgré son
nom, c'est une entité complètement distincte de l'Université McGill.
Le CUSM est le requérant de ce projet de
loi donnant ainsi suite aux intentions exprimées par le ministère de la Santé
et des Services sociaux. Je désire remercier la députée de
Westmount—Saint-Louis, Mme Jennifer Maccarone, d'avoir accepté de la
parrainer.
Le CUSM a travaillé sur ce dossier avec la
Société québécoise des infrastructures, la SQI, jusqu'à sa présentation
aujourd'hui.
L'ancien site de l'Hôpital Royal Victoria,
dont il est question dans le projet de loi aujourd'hui, est actuellement la
propriété du CUSM. Il s'agit dans notre jargon d'un immeuble dit excédentaire.
Ce site n'étant plus utilisé depuis la construction et la mise en service en
2015, il y a six ans déjà, du nouveau site Glen, où s'est situé de nouveaux
complexes hospitaliers du CUSM et où ont été relocalisés tous les services qui
étaient offerts au Royal Victoria.
Conformément aux orientations
ministérielles du MSSS, du ministère de la Santé et des Services sociaux, le
Centre universitaire de santé McGill souhaite donc s'en départir en faveur de
la Société québécoise des infrastructures, laquelle procéderait ensuite à sa
requalification.
Une partie du site fait actuellement
l'objet de restrictions d'usage et de stipulations imposées par les donateurs
dans l'acte de 1891, lesquelles imposent des conditions au transfert de propriété.
La seule façon de remédier à cet état de situation adéquatement consiste à
l'adoption d'une loi à ce sujet.
Il me fera plaisir de répondre à vos
questions ou, pour les aspects plus techniques, de référer à Mme Mayes ou
à Mme Arbour. Au nom du Centre universitaire de santé McGill, je vous
remercie d'avance pour votre intérêt envers l'adoption de ce projet de loi
d'intérêt privé. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à vous, M. Gfeller. Y aurait-il consentement afin que le
temps dévolu à la formation Québec solidaire soit reporté dans sa totalité à
celle du Parti québécois? Consentement. Alors, très bien, nous commençons par
Mme la présidente du Conseil du trésor, qui dispose de
2 min 30 s pour son intervention.
Mme LeBel : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M. Gfeller. Donc, dans le fond,
ce que je comprends bien de l'introduction, puis ce qu'il faut bien comprendre,
c'est que, quand on parle, bon, de bâtiment excédentaire, c'est que tous les
usages traditionnels ou les usages antérieurs ont été transférés, là, dans le
nouveau bâtiment du CSUM. Donc, les gens... l'esprit de la donation, à
l'origine, qui était d'apporter des soins aux gens sans discrimination, là...
je résume, naturellement, et je simplifie à outrance, là...
Mme LeBel : …traditionnels ou
les usages antérieurs ont été transférés, là, dans le nouveau bâtiment du CSUM,
donc les gens… l'esprit de la donation, à l'origine, qui était d'apporter des
soins aux gens sans discrimination, là… je résume, naturellement, et je simplifie
à outrance, là, est continu, cette mission continue dans le nouveau bâtiment,
là.
M. Gfeller (Pierre) : Oui, Mme
la ministre. En effet, tous les services qu'on retrouvait sur le site du Royal
Victoria, qui est situé sur la rue Université et sur l'avenue des Pins se
retrouve maintenant au site Glenn, sur la rue Décarie, près de l'autoroute 720.
Il y a même une partie de cet édifice-là, ce nouvel édifice, qui s'appelle
encore l'Hôpital Royal Victoria. Donc, tous les services ont été relocalisés
dans des installations modernes, avec des chambres privées, le nec plus ultra
des structures hospitalières, à l'heure actuelle, comme le CHUM. Donc, c'est un
hôpital nouveau. Depuis 2015, on offre tous les services qui étaient offerts au
Royal Victoria.
Mme LeBel : Excusez-moi, je
pensais que vous m'aviez adressé la parole, non?
Le Président (M. Simard) : Il
y a un peu d'écho.
Mme LeBel : Oui, je m'excuse.
Donc, je comprends que, compte tenu de l'acte de donation d'origine qui
prévoit, là, que les immeubles font l'objet de restrictions d'usage, de
charges, d'aliénabilité, incessabilité, il est indispensable pour le CSUM, justement,
ou le Centre universitaire de santé McGill d'avoir ce genre de projet de loi
pour pouvoir requalifier le site, le transférer, là, parce que, sinon, le seul
usage possible, c'est l'usage d'origine, c'est-à-dire de donner des soins, là.
M. Gfeller (Pierre) : Oui. Peut-être
que je laisserai Mme Mayes, de la SQI, répondre en partie à la question, mais
la mission originale d'offrir des soins sans aucune discrimination aux gens de
toute religion, de toute couleur, de toute race… site Glen, à l'heure actuelle.
Mme LeBel : …de faire tout
autre usage, à moins d'avoir ce projet de loi.
• (20 h 20) •
M. Gfeller (Pierre) : C'est
que nous, nous n'avons plus besoin de cet immeuble, à l'heure actuelle, puisque
nous avons le site Glen, qui remplit de façon très supérieure les usages qu'on
avait au Royal Victoria, et nous n'avons plus besoin de cet édifice.
Le Président (M. Simard) :
Merci, M. Gfeller. Je cède maintenant la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Bonsoir, Dr Gfeller, Me Bégin, Mme Mayes et Mme Arbour. Un plaisir
de vous voir. Tel que Dr Gfeller avait mentionné, moi, je vais céder mon temps
à Mme Mayes pour qu'elle complète la réponse de la ministre, qui a été posée à
Dr Gfeller, si elle souhaite répondre puis compléter, certainement.
Mme Mayes (Sophie) : Bien, je
peux juste… Merci, Mme la députée. Je pourrais compléter en indiquant que le
mandat de la SQI, c'est vraiment de piloter la requalification du site dans le
respect de ses valeurs patrimoniales, en fonction des priorités gouvernementales,
bien sûr, et dans le respect de la gestion responsable des finances publiques…
Mme Mayes (Sophie) : ...je
pourrais compléter en indiquant que le mandat de la SQI, c'est vraiment de
piloter la qualification du site dans le respect de ces valeurs patrimoniales, en
fonction des priorités gouvernementales, bien sûr, et dans le respect de la
gestion responsable des finances publiques, mais le tout, là, afin de redonner
vie à cet ancien complexe hospitalier, en créant une valeur d'usage pour les
pavillons et pour le site.
Donc, je pense que, comme le
Dr Gfeller l'a dit tout à l'heure, le site ne peut plus servir à sa
vocation d'origine, donc ne répond plus aux besoins de la médecine moderne et
des façons de faire pour les soins des patients. Donc, on veut trouver une
nouvelle vocation, redonner vie au site en trouvant des nouveaux usages.
Le Président (M. Simard) : Il
vous reste 15 secondes, chère collègue.
Mme Maccarone : C'est complet
pour moi, merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) : Ça
passe très rapidement. M. le député, vous avez 50 secondes.
M.
Bérubé
:
Merci, M. le Président. Bonsoir. Si votre projet s'est retrouvé dans le
projet de loi n° 61 et le projet de loi n° 66, c'est que vous avez dû convaincre des membres du
conseil exécutif. J'aimerais savoir quels ministres vous avez rencontrés dans
vos représentations?
M. Gfeller (Pierre) : Est-ce
que la question s'adresse à moi, M. le député?
M.
Bérubé
: Aux
personnes qui ont fait les représentations pour que votre projet se retrouve
dans un projet de loi du gouvernement.
M. Gfeller (Pierre) : En
fait, le Centre universitaire de santé McGill n'a pas de projet sur ce site-là,
à l'heure actuelle. Nous, nous sommes déménagés en 2015, cet immeuble-là
est excédentaire. Donc, pour répondre à votre question, je n'ai rencontré aucun
ministre par rapport à ce projet de loi.
M.
Bérubé
:
D'accord. Il n'y a eu aucune représentation faite auprès d'un ministre du
gouvernement actuel.
M. Gfeller (Pierre) : Aucune.
En fait, on a eu une commande du ministère de la Santé et des Services sociaux
en disant : Il y a lieu de céder cet immeuble-là, il est excédentaire,
vous n'en avez plus besoin, et pour ça, bien, ça doit aller à la SQI.
Le Président (M. Simard) :
Merci beaucoup. Alors, 50 secondes, c'est vite passé. Vous en avez même eu
55, donc, en bonus. Alors, voilà qui met un terme à notre première édition.
Mesdames, messieurs, merci pour votre contribution à nos travaux. Vous n'allez
pas trop loin parce qu'on se retrouve plus tard dans l'étude de ce projet de
loi.
Mais pour l'instant, nous allons suspendre
momentanément, le temps de faire place à nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 20 h 23)
20 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 20 h 31)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Et nous
sommes en présence de représentantes de la Coalition Royal Vic pour le bien
public. Alors, mesdames, bienvenue. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous
présenter, s'il vous plaît?
Mme Smith-Kingston (Christa) :
Bien, bonsoir, moi, c'est Christa Smith-Kingston.
Le Président (M. Simard) : Mme
Constantin?
Mme Constantin (Louise) :
Bonsoir, Louise Constantin.
Le Président (M. Simard) :
Alors, nous vous écoutons.
Mme Smith-Kingston (Christa) :
Bien, bonsoir, M. le Président, Mmes, MM. les députés. On est les membres de la
Coalition Royal Vic pour le bien public. Et la Coalition Royal Vic pour le bien
public a été créée afin d'assurer que la voix des citoyens et citoyennes, ainsi
que des groupes communautés soit prise en compte dans le projet de
requalification du site de l'ancien Hôpital Royal Victoria.
Par le mémoire que nous présentons ce
soir, nous souhaitons faire valoir que son usage et la gestion de la propriété
soient décidés et gérés de façon démocratique et écologique, et ça, au service
du bien commun.
Mme Constantin (Louise) : Le projet
de loi n° 219 représente une excellente opportunité pour le gouvernement
de réaliser un projet novateur sur un grand site hospitalier. Cette
requalification représente également une chance inouïe pour la ville de
Montréal et la communauté de contribuer à la mise sur pied d'un projet élaboré
par et pour les citoyennes et citoyens de la métropole. La coalition souhaite apporter
certaines recommandations quant au processus de requalification, processus qui,
selon nous, aurait un impact majeur sur la finalité du projet proposé à la
communauté.
Tout d'abord, et tel que mentionné dans le
projet de loi n° 219, le Royal Victoria est incorporé avec la mission
d'offrir des services de santé à toute personne malade ou blessée, et ce, sans
distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe ou
la religion. La coalition croit que c'est cette vision qui doit perdurer et
guider le projet de requalification mené par la SQI. Elle considère plutôt
fondamental que le site maintienne…
Mme Constantin (Louise) : …et
ce, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur,
le sexe ou religion. La coalition croit que c'est cette vision qui doit
perdurer et guider le projet de requalification mené par la SQI. Elle considère
plutôt fondamental que le site maintienne sa mission historique d'offrir de
services de santé et que c'est cette définition de la santé qui doit être mise
à jour afin d'inclure les enjeux de santé publique et de comorbidité comme la
santé mentale, l'itinérance, l'insécurité alimentaire, la violence conjugale,
les besoins en logements sociaux, etc. il s'agit donc d'une vision qui prend en
compte l'aspect préventif et non seulement curatif de la santé.
Mme Smith-Kingston (Christa) :
Ensuite, la coalition considère que les principes de base du développement
durable doivent être explicitement inscrits comme conditions sine qua non du
projet de requalification. Le développement durable doit ainsi inclure la
composante sociale, notamment une véritable participation citoyenne.
Dans cette optique, la coalition s'oppose
à la vente partielle ou complète, au morcellement, à la division ou subdivision
des lots rénovés, incluant la portion dédiée au projet de l'Université McGill.
La privatisation du site serait contraire à cette vision de pérennité d'un site
requalifié par et pour la communauté. La coalition est d'accord avec le point 3
du projet de loi n° 219, qui stipule que les parties
de lot visées par les restrictions ne pourront être utilisées aux fins
d'exercice d'un usage de type copropriété divise ou d'établissement hôtelier et
commercial, à moins que ces usages ne soient accessoires ou ne fassent partie
d'un projet institutionnel ou public. Cela étant, nous souhaiterions que la
définition de «public» comprenne explicitement des initiatives communautaires
et d'économie sociale.
Par ailleurs, la coalition remet en question
le processus menant à l'inclusion du projet de l'Université McGill sur le site.
Cette décision a été prise derrière des portes closes, sans avis ou consultation
publique, sans appel d'offres, sans débat à l'Assemblée nationale, en plus
d'être assortie d'une subvention de 37 millions de dollars accordée par le
gouvernement à l'université pour que cette dernière réalise une étude de
faisabilité. L'investissement d'argent public doit être assorti de conditions
et de garanties. Tout d'abord, l'Université McGill doit garantir la pérennité
de son engagement. D'autre part, elle doit inclure du logement social pour les
étudiants et étudiantes de son institution. Les grandes institutions d'enseignement
doivent s'intégrer à la communauté où elles se trouvent, et non venir troubler
la qualité de vie des gens qui y résident.
Mme Constantin (Louise) : En
conclusion, notre mémoire porte sur le projet de loi n° 219,
qui concerne la section du site visée par l'Université McGill. La coalition… et
les recommandations que nous faisons aujourd'hui s'y appliquent, également…
Mme Smith-Kingston (Christa) : …gens
qui y résident.
Mme Constantin (Louise) : En
conclusion, notre mémoire porte sur le projet de loi n° 219 qui concerne
la section du site visée par l'Université McGill. La coalition… (panne de son)
…et les recommandations que nous faisons aujourd'hui s'y appliquent également.
Nous souhaiterions la tenue d'un véritable débat public sur l'avenir du site du
Royal Victoria qui permette de faire valoir tout le potentiel qu'il offre pour
répondre aux besoins de l'ensemble de la population.
Le Président (M. Simard) :
Merci.
Mme Constantin (Louise) : En
effet, nombreux…
Le Président (M. Simard) : En
conclusion, s'il vous plaît.
Mme Constantin (Louise) : Oui.
Nombreux sont les besoins exprimés par les résidentes et résidents du secteur,
mais également par divers groupes communautaires. Mais il semblerait que le
plan directeur soit sur le point d'être déposé. Nous nous interrogeons sur la
prise en compte des préoccupations citoyennes dans le plan directeur. Nous
précisons que nous avons eu très peu de communications, malgré nos demandes
répétées, avec la SQI. Nous vous remercions de votre attention.
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme Constantin. Peut-être que pour la suite de nos échanges, vous
pourriez éteindre le retour du son, si c'était possible. Alors, je cède
maintenant la parole à la présidente du Conseil du trésor.
Mme LeBel : Oui. Merci,
Mme Constantin. Merci, Mme Smith-Kingston de vos remarques.
D'ailleurs, je tiens à préciser que… Bon, je pense que juridiquement parlant,
même les usages que vous proposez pour le site de l'Hôpital Royal Victoria
demanderaient, là, une requalification des titres, parce que l'usage
présentement qui a été fait par… est extrêmement restreint. Et l'élargir, comme
vous le souhaitez, demanderait qu'on passe par le processus par lequel on passe
présentement.
Je tiens à… Dans le fond, je vais prendre
mon temps pour peut-être vous faire plus un commentaire d'ordre général. Je
tiens à vous rassurer. Il y aura effectivement un plan directeur, mais ce plan
directeur fera l'objet de consultations. Parce qu'une très grande partie du
site demeure encore à requalifier ou auquel trouver des usages. Et rien n'est
exclu à ce stade naturellement sauf les usages commerciaux — je tiens
à vous rassurer — ce n'est pas l'objectif, mais pas du tout. Et là,
vous allez le voir dans le projet de loi actuel. Mais toutes les idées dont
vous avez fait part, les potentiels usages pourront faire l'objet de la
consultation, et ça va être très certainement être tenu en compte par la
Société… par la SQI dans le futur. Il reste encore, je vous dirais, plus des
deux tiers, ou près des deux tiers des bâtiments à requalifier. Donc, je pense
qu'on aura des belles discussions sur le plan directeur. Je vais vous laisser
les quelques secondes qui me restent si vous voulez ajouter quelque chose. Mais
ça sera extrêmement pertinent de vous entendre lors de la consultation sur
l'usage du site en question.
Le Président (M. Simard) :
Éventuellement, Mme Constantion, en 30 secondes, s'il vous plaît.
Mme Constantin (Louise) : Oui,
en fait, nous ce qu'on considère, c'est de ne pas attendre les consultations.
Nos demandes, dès la publication d'une lettre ouverte, étaient que nous
participions en amont à l'élaboration du plan directeur également. Quand il y a
une…
Mme Constantin (Louise) :
…oui. En fait, nous ce qu'on considère, c'est de ne pas attendre les consultations.
Nos demandes, dès la publication d'une lettre ouverte, étaient que nous
participions en amont à l'élaboration du plan directeur également. Quand il y a
une consultation, c'est que, déjà, tout est défini à l'avance, alors que nous,
nous voulions nous insérer dans le processus dès le début de l'élaboration.
Le Président (M. Simard) :
Merci, Mme Constantin. Je cède maintenant la parole à députée de Westmount—Saint-Louis
pour 1 min 40 s.
• (20 h 40) •
Mme Maccarone :
1 min 40 s, ce n'est pas très long. Bonsoir, Mmes Constantin…
Mme Smith-Kingston, c'est sûr c'est un plaisir de vous voir ce soir et de vous
accueillir avec nous en ce qui concerne le projet de loi n° 219. Vous
savez, nous avons travaillé quand même ensemble en ce qui concerne quelques
modifications à l'intérieur du projet de loi n° 219, surtout pour protéger
le transfert du bâtiment, pour éviter la privatisation dont vous avez évoquée
dans vos remarques préliminaires. Alors, je voulais quand même le soulever puis
vous remercier pour votre contribution, parce que c'est très cher, pour nous,
d'entendre surtout des citoyens, surtout des citoyens de mon comté. C'est
clair, c'est très important pour moi d'entendre votre voix et aussi de vous
assurer qu'évidemment je reflète le sentiment de la ministre, je remercie la ministre
de l'avoir dit, que ça ne fait pas partie quand même de ce qui est souhaité par
le gouvernement, d'aller vers l'avant avec un développement commercial.
Alors, peut-être dans les quelques qui
nous restent, peut-être, vous pouvez parler de ce qui est souhaité de votre
part en ce qui concerne la consultation. Je sais que ça s'en vient, mais qu'est-ce
que vous souhaitez puis qu'est-ce que vous aimerez voir à l'intérieur de ceci?
Le Président (M. Simard) :
…30 secondes, s'il vous plaît. Mme Smith.
Mme Smith-Kingston (Christa) :
Oui. Donc, je crois qu'à la base on n'est peut-être pas d'accord sur qu'est-ce
qui est une véritable participation citoyenne. Comme Louise Constantin a
mentionné, lorsqu'un plan est développé, puis ensuite livré, puis là on donne
de la vie, ce n'est pas ce qu'on a en tête quand on parle de participation
citoyenne. On veut faire partie du processus du début jusqu'à la fin pour que
la voix de la citoyenne…
Le Président (M. Simard) :
Très bien.
Mme Smith-Kingston (Christa) :
…et du citoyen soit prise en compte en écrivant le plan.
Le Président (M. Simard) : Merci,
Mme Smith. Je cède maintenant la parole au député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. Bonsoir, mesdames. Alors, vous recevez des félicitations à la fois
de Coalition avenir Québec et du Parti libéral, mais ça ne change pas votre
position. Moi, je l'ai lu, votre lettre, vous vous opposez au projet, et on est
entièrement d'accord pour les mêmes raisons au Parti québécois. C'est un
projet, quant à nous, qui est scandaleux au plan environnemental, au plan de
l'urbanisme, au plan de la consultation démocratique. Alors, qu'est-ce que vous
pouvez ajouter pour essayer de convaincre le parti au pouvoir et le Parti
libéral de renoncer à ce projet?
Le Président (M. Simard) : En
20 secondes… Mme Constantin.
Mme Constantin (Louise) : Oui.
Bien, en fait, on a déjà fait état, là, de plusieurs éléments…
M.
Bérubé
: …pour
essayer de convaincre le parti au pouvoir, le Parti libéral de renoncer à ce
projet.
Le Président (M. Simard) : En
20 secondes, Mme Constantin. Mme Constantin.
Mme Constantin (Louise) : Oui.
Bien, en fait, on a déjà fait état de plusieurs éléments à prendre en compte.
On sait qu'on vit actuellement une grave crise du logement, de problèmes de
gentrification, une crise d'itinérance, une crise de santé publique, et là on a
un site qui est exceptionnel au centre-ville et qui pourrait servir à résoudre
une partie des problèmes qu'on vit actuellement à Montréal. On a un projet, une
vision d'ensemble qui tient compte non seulement du logement, mais également de
toute une vision d'un vivre-ensemble…
Le Président (M. Simard) :
Merci.
Mme Constantin (Louise) : …que
ce soit de l'agriculture urbaine, des services d'économie sociale, un milieu de
vie…
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Merci beaucoup.
Mme Constantin (Louise) : …et
ça, ça n'a pas été entendu ou, en tout cas, on n'a pas entendu cette
préoccupation-là beaucoup.
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M.
Bérubé
: Nous
vous avons entendu au Parti québécois.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, mesdames, désolé, on disposait de très peu de temps. On
aurait été à votre écoute beaucoup plus longtemps, mais on est contraint, là,
par nos travaux. Alors, merci beaucoup de votre précieuse contribution et, sur
ce, nous allons suspendre à nouveau avant de procéder à la prochaine étape.
(Suspension de la séance à 20 h 43)
(Reprise à 20 h 49)
Le Président (M. Simard) :
Bien. Chers collègues, merci pour ce retour et votre ponctualité. Donc, avant
d'entreprendre l'étude détaillée, comme le veulent nos règlements, je dois vous
demander s'il y a des motions préliminaires. M. le député de Matapédia-Matane, à
vous la parole.
M.
Bérubé
: Merci,
M. le Président. Conformément à l'article 244 du Règlement de l'Assemblée
nationale, je fais motion afin :
«Que la Commission des finances publiques
tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219,
Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal (site de
l'hôpital Royal Victoria), des consultations particulières et qu'à cette fin
elle entende M. Gilles Paquin, journaliste à la retraite de LaPresse.»
Le Président (M. Simard) :
Chers collègues, on va suspendre quelques instants, le temps de pouvoir
transmettre cette motion à notre secrétariat pour qu'on puisse la mettre sur
Greffier. Ça vous va? On suspend.
(Suspension de la séance à 20 h 49)
(Reprise à 20 h 53)
Le Président (M. Simard) :
Bien. À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes en mesure de reprendre nos
travaux. La motion se retrouve maintenant sur le site Greffier. Vous pouvez
tous la consulter sans plus tarder. Cher collègue, à vous la parole.
M. Bérubé : Merci, M. le Président.
Vous avez entendu les intervenants tout à l'heure indiquer que ça prend une
consultation, une démocratie, une contribution de plusieurs acteurs et c'est le
cas... journaliste de La Presse, qui s'est beaucoup intéressé à la
question avec ses amis avocats, je parle de M. Gilles Paquin.
Je pense que c'est important d'inviter
M. Paquin, qui a beaucoup écrit là-dessus, beaucoup fait de recherches sur
les implications que ça représente. J'aimerais qu'il soit ici et j'aimerais
qu'on puisse l'entendre. Alors, ce que je vais faire, c'est que je vais
utiliser mon temps pour vous lire ce qu'il pense du dossier. Et j'ai un texte
devant moi que je pourrai déposer par la suite, pour le bénéfice de la
commission. Alors, ça s'appelle comme suit : Non au don de l'Hôpital
Royal Victoria, de plusieurs immeubles et d'une vaste partie du Mont-Royal,
soit plus d'un milliard de dollars à l'Université McGill. C'est le
titre. Puis, des fois, je vais commenter le texte.
«Le moment est venu pour le
gouvernement québécois de la CAQ d'agir selon les principes qu'il dit défendre
et qu'il a le devoir de défendre dans l'intérêt de la nation québécoise.» Beau
mot, «nation», pas mal mieux que «province». «Ce gouvernement doit renoncer à
exécuter la promesse abusive faite par le dernier gouvernement libéral de
donner à l'Université McGill plus...
M. Bérubé : …qu'il dit défendre
et qu'il a le devoir défendre dans l'intérêt de la nation québécoise.» Beau
mot, «nation», pas mal mieux que «province». «Ce gouvernement doit renoncer à
exécuter la promesse abusive faite par le dernier gouvernement libéral de
donner à l'Université McGill plus de 1 milliard de dollars en subventions
et en immeubles publics, dont une bonne partie du mont Royal, la faisant passer
ainsi de "ghetto McGill" à "forteresse McGill" qu'il lui
sera impossible de contrôler. Le gouvernement doit tout simplement et
immédiatement renoncer à exécuter ce projet de donation scandaleusement abusive
et illégale et socialement injuste et inacceptable.
«Depuis l'annonce de ce projet, dans les
derniers jours du gouvernement libéral», on est en 2018 à ce moment-là, vous
savez, il y a eu quelques projets de loi privés, moi, j'avais fait celui sur le
journal La Presse, projet de loi n° 400, pour ceux qui s'en souvienne,
«de nombreux intéressés, dont plus d'une cinquantaine d'organismes de toutes
sortes — notamment les organismes de l'Université McGill — l'ont
dénoncé comme étant encore une fois, un traitement privilégié accordé à l'élite
de McGill à l'encontre de l'intérêt commun des Québécois et des Montréalais,
fait à l'insu de la population et de ses institutions et contraire à leurs
besoins et à la justice.
«Devant ces protestations, le gouvernement
du premier ministre actuel a semblé avoir un moment d'hésitation au départ… il
a décidé de procéder à des consultations au sujet de la décision des libéraux.
Dans les faits, ces consultations ont été des réunions privées… sur invitation
seulement, où n'étaient invités que des intervenants ne présentant aucun risque
de contestation du projet déjà décidé.» Ça, ça semble… un trait de caractère
gouvernemental, M. le Président. «Ces fausses consultations ont été dénoncées
comme elles devaient l'être — vous l'avez entendu encore
tantôt — mais le gouvernement n'a pas encore osé arrêter le projet
dans lequel il semble se croire piégé par la promesse des libéraux.» Il n'en
est rien, il est libre d'arrêter ce projet s'il le souhaite. D'ailleurs, le premier
ministre dit souvent : Quand on se trompe, on le dit, puis on corrige. Alors,
voici un bel exemple. Je vais applaudir, moi, s'il décide de l'abandonner.
«Il est grand temps de le faire — pas
mal là, même. À l'heure de la loi n° 96, qui confirme le danger
d'extinction imminente des francophones, et… l'heure où le gouvernement sent le
besoin de se doter d'une loi constitutionnelle, il est urgent qu'il mette fin
au traitement abusivement et injustement favorable des universités, des cégeps
anglophones, au premier chef de l'université McGill, fondée, faut-il le
rappeler, avec l'argent et les biens donnés ou confiés — vous qui
vous intéressez à l'histoire, ça va vous intéresser — aux Jésuites et
aux Sulpiciens par des francophones et dont ils ont été dépouillés par le
gouverneur anglais.» Notre argent rendu à McGill, mais ce n'est pas assez, on
en envoie encore, on leur en doit, semblerait-il.
«Comme le montre éloquemment Frédéric
Lacroix dans le présent texte Québec préfère les universités anglaises
et dans son livre Pourquoi la loi 101est un échec, il est grand
temps d'accorder aux institutions francophones le traitement que justifie leur
nombre et de mettre fin au traitement injustement privilégié des établissements
anglophones, au premier chef l'université McGill…
M. Bérubé : …comme le montre
éloquemment Frédéric Lacroix dans le présent texte, Québec préfère les
universités anglaises et dans son livre, Pourquoi la loi 101 est un
échec, il est grand temps d'accorder aux institutions francophones le
traitement que justifie leur nombre et de mettre fin aux traitements
injustement privilégiés des établissements anglophones, au premier chef, de
l'Université McGill. Ce n'est pas en lui donnant 1 milliard de dollars de
plus qu'on atteindra cet objectif. Cette énorme injustice a trop duré. C'est
maintenant que la justice doit commencer. M. Lacroix parle très
clairement.
Ça, c'est cité dans le texte de
M. Gilles : «Au Québec, les universités anglophones bénéficient d'un
net avantage, d'un facteur quatre en proportion au poids démographique, pour ce
qui est des fonds d'immobilisation investis par le gouvernement du Québec. Sur
l'île de Montréal, un étudiant pondéré qui
étudie en anglais bénéficie de 56 % de plus de fonds d'immobilisation
qu'un étudiant qui étudie en français.»
«Rappelons que McGill dispose annuellement
de revenus de quelque 1,44 milliard de dollars, possède 1,7 milliard
de dollars dans sa fondation et des biens évalués à 4,9 milliards de
dollars. Alors, que l'Université du Québec dépend à 90 % des fonds versés
par le gouvernement et les étudiants du Québec, moins de la moitié du budget de
McGill est dépendant de ces deux sources de revenus. McGill est un véritable
empire financier.»
Vous, qui avez enseigné à L'UQO, M. le
Président, vous savez très bien que cette université, située en Outaouais, ne
dispose pas des moyens de McGill. Et si vous étiez dans d'autres circonstances,
je suis pas mal sûr que vous me donneriez raison.
«McGill est également un important
propriétaire foncier — et ça, il faut le savoir — elle
dispose de 730 000 mètres carrés d'espace dont
613 000 mètres carrés reconnus par le ministère de l'Enseignement
supérieur. Même si McGill n'accueille pas le plus important effectif étudiant,
elle est l'université possédant le plus vaste campus au
Québec — déjà.»
À toutes fins utiles, rappelons aussi que,
un, une administration publique n'aliène jamais son domaine public. C'est une
règle cardinale. L'Hôpital Royal Victoria, ces divers immeubles et les parties
du Mont-Royal en question font partie du domaine public du Québec et
appartiennent à tous les Québécois. Le gouvernement québécois a le devoir
impérieux de respecter l'intégrité de ce domaine public et de ne pas l'aliéner.
Il existe d'ailleurs de nombreux exemples
de solutions au problème que peut poser l'intégrité du domaine public. Un cas
récent, l'Hôtel Dieu de Paris avait des graves problèmes de financement. Il
fallait à la fois assurer des rénovations très coûteuses et un financement de
roulement tout aussi onéreux. Alors, qu'est-ce qu'ils ont fait? L'administration
a donc décidé de mettre en location le tiers de l'immeuble pour
80 millions d'euros. Ainsi, on peut rénover tout l'immeuble et obtenir un
financement de roulement, mais on ne vend pas le domaine public puis on ne
l'aliène pas non plus. Et surtout on ne donne pas à des intérêts privés comme
le gouvernement du Québec veut maintenant le faire avec le Mont-Royal et
l'Hôpital Royal Vic. Ça, j'aimerais ça que le gouvernement note ça, parce que
c'est une alternative qui existe… en France. Et si on allait vers ça, on
n'aurait pas besoin de faire ce qu'on fait présentement. Il n'est pas trop
tard. En tout cas, je l'aurai dit.
• (21 heures) •
Deux, le don de plus de 1 milliard de
dollars à McGill n'est pas justifié. Avant que les libéraux s'engagent à lui
céder l'ancien hôpital et une partie du Mont-Royal — quand même, une
partie du…
21 h (version non révisée)
M.
Bérubé
: …et
si on allait vers ça, on n'aurait pas besoin de faire ce qu'on fait présentement,
il n'est pas trop tard, en tout cas, je l'aurai dit. Deux, le don de plus de 1 milliard
de dollars à McGill n'est pas justifié. Avant que les libéraux s'engagent à lui
céder l'ancien hôpital une partie du Mont-Royal, quand même, une partie du Mont-Royal,
McGill avait déjà indiqué qu'elle souhaitait acheter une partie de ce domaine — ça,
c'est le bout — et prévoyait de dépenser plus de 700 millions
pour aménager ce qui pourrait devenir un nouvel institut. Et depuis que le gouvernement
libéral du Québec a déclaré qu'il allait lui en faire cadeau : Gardez
votre 700 millions, c'est un cadeau, mais la chancelière de McGill a
déclaré qu'elle voulait maintenant, en plus de recevoir l'aide de Québec, pour
accompagner ce cadeau, 37 millions. Ce n'est pas croyable. McGill estime maintenant
que son projet va coûter au Québec plus de 1 milliard de dollars et qu'il
faut sûrement ajouter des coûts cachés considérables. McGill a, par exemple,
déclaré prévoir la construction d'un auditorium, tiens, de 2 000 places,
avec des stationnements peut-être, sur le mont Royal, saviez-vous ça?
Trois, la Société québécoise des
infrastructures a fait un examen partiel… partial, plutôt, ce n'est pas pareil.
La Société québécoise des infrastructures, chargée d'examiner ce qu'il faudrait
faire des immeubles et terrains de l'Hôpital Royal Victoria n'a examiné aucune autre
possibilité que le don à l'Université McGill — c'était ça ou rien.
Pourtant, il y a d'autres options — elle semble ainsi ignorer les
servitudes inscrites aux donations créant l'Hôpital Royal Victoria. Ne
serait-ce pas normal qu'elle examine d'autres possibilités, par exemple, la
mise en location d'une part du domaine pour financer la restauration d'une
grande partie de l'ensemble, comme on l'a fait pour l'Hôtel-Dieu de Paris? Si
on avait eu une vraie consultation, on serait arrivé à un autre modèle, à moins
que ce soit si important faire comme ça parce que McGill veut ça, puis il y a
au moins deux formations politiques qui veulent absolument leur donner tout ce
qu'ils veulent.
Quatre, la nouvelle forteresse McGill. Il
faut aussi savoir que ce projet de McGill s'inscrit dans un projet beaucoup
plus vaste d'investissements et de revalorisation de son immense domaine
immobilier dans le centre-ville de Montréal, ce qu'on appelle
déjà — c'est l'appellation populaire — le ghetto McGill. En
gros, de la rue Peel, jusqu'à la rue du Parc, et du boulevard Maisonneuve
jusqu'à l'intérieur du Mont-Royal. McGill étudie, déjà depuis plusieurs années,
des projets pour transformer ses énormes biens immeubles en tours
d'appartements et de tours de bureaux. On va passer du ghetto McGill à la
forteresse McGill, qui, dans les faits, sera fermée aux Québécois francophones,
sauf aux professeurs, aux étudiants et au personnel. Les francophones se
trouveront dépossédés pour toujours d'une partie très importante du
centre-ville de Montréal. On reviendra aux beaux jours du Mille-Carré-Doré, le
«Golden Square Mile», M. le Président, où les seuls francophones qui étaient
admis étaient les manoeuvres et les domestiques. C'est ce qu'on appelle
maintenant la requalification de McGill.
Cinq, le nouveau projet de McGill. Vous
allez en apprendre, des choses, ce soir. Il faut dire un mot du projet que
McGill prétend réaliser sur le site des immeubles de l'Hôpital Royal Victoria.
Il s'agirait d'un important projet international qui est déjà présenté comme un
projet «Canadian» et qui vise à attirer encore plus de professeurs et
d'étudiants anglophones. De plus, il est évident que les fonds publics que le
Québec et le Canada vont mettre dans…
M.
Bérubé
: …
Vous allez en apprendre, des choses, ce soir. Il faut dire un mot du projet que
McGill prétend réaliser sur le site des immeubles de l'Hôpital Royal Victoria. Il
s'agirait d'un important projet international qui est déjà présenté comme un
projet «Canadian» et qui vise à attirer encore plus de professeurs et
d'étudiants anglophones. De plus, il est évident que les fonds publics que le
Québec et le Canada vont mettre dans ce projet n'iront pas aux universités et
aux institutions francophones, oh! que non, ce qui ne fera qu'accentuer
l'écart, encore une fois, déjà énorme entre le financement des institutions
anglophones et francophones à l'avantage scandaleux de la minorité anglophone,
ce que Frédéric Lacroix décrie éloquemment. Et, bien entendu, la réalisation d'un
projet à McGill empêcherait la réalisation de trop de projets du même genre par
un établissement francophone, c'est évident. Pourquoi ne pourrait-on pas faire
un institut regroupant les meilleurs talents des universités québécoises et de
la francophonie ou faire le même projet avec McGill en français? Nous n'aurions
pas pu aussi… Nous n'aurions pas intérêt à financer un véritable projet
international francophone avec l'appui de la Francophonie? En encourageant
ainsi aveuglément la réalisation d'un tel projet à McGill, on anéantit la possibilité
de réaliser tout projet d'importance équivalent en français.
«Six. Le respect des servitudes inscrites
dans les donations. Par ailleurs, il est important de soulever un obstacle
juridique d'importance : les donations, deux sommes de 500 000 $
en 1886 et 1887, ont été faites spécifiquement et exclusivement pour la
création d'un hôpital, et la ville de Montréal a ensuite loué à cet hôpital les
terrains nécessaires à perpétuité, en français dans le texte de la donation.
Pour ce qui est des terrains, on sait déjà que dans la donation de 1887, il est
écrit expressément que, si le Royal Vic cesse d'exister comme hôpital, les
terrains qui lui ont été loués à perpétuité doivent retourner à qui? À la ville
de Montréal, qui n'est pas avec nous ce soir. Qu'est-ce qu'on
dit? "In such case, the said City of Montréal shall reenter into
possession of the above-described property." Cela constitue une
servitude qui ne peut être ignorée, modifiée ou effacée. S'il y a transmission
de propriété, les servitudes doivent être transmises aussi et elles doivent
être respectées absolument. Il convient de se demander si le gouvernement du
Québec, représenté ici par la présidente du Conseil du trésor, a la propriété
légale de ces terrains, et, si les servitudes ont été respectées, bonjour les
surprises.
«On le voit, il est absolument illégitime
et contraire à l'intérêt des Québécois, des francophones en particulier, de
continuer d'insister pour donner plus de 1 milliard de dollars du domaine
public et en fonds publics à l'Université McGill. Le gouvernement du Québec
doit agir dans l'intérêt des Québécois, de tous les Québécois, et non seulement
de la minorité anglophone traditionnelle privilégiée.» Gilles Paquin,
journaliste retraité de LaPresse.
Combien de temps il me reste, M. le
Président?
Le Président (M. Simard) : 17
minutes, cher collègue.
M.
Bérubé
: Cet
enjeu est tellement important, M. le ministre, là. Il l'est au plan
urbanistique, il l'est au plan du patrimoine, il l'est au plan de la langue, il
l'est au plan de l'équité entre les institutions postsecondaires. Je ne blâme
pas l'Université McGill de vouloir le Royal Victoria, de vouloir les
bâtiments — parce qu'il y en a plusieurs autres dont on n'a pas parlé
encore — de vouloir une partie de Mont-Royal. Je me demande où réside
l'intérêt de deux gouvernements, le gouvernement précédent du premier ministre
Philippe Couillard…
M. Bérubé : ...je ne blâme pas l'Université
McGill de vouloir le Royal Victoria, de vouloir les bâtiments, parce qu'il y en
a plusieurs autres dont on n'a pas parlé encore, de vouloir une partie de Mont-Royal.
Je me demande où réside l'intérêt de deux gouvernements, le gouvernement
précédent du premier ministre Philippe Couillard, et le gouvernement actuel de
la très nationaliste Coalition avenir Québec, c'est de l'ironie, à céder une
partie de notre patrimoine à une communauté qui a déjà passablement
d'institutions qui fonctionnent bien. Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas
qui a convaincu ces gouvernements et à quelle fin. Je sais ce que ça va
rapporter à McGill. Je sais que les universités francophones de l'île de
Montréal sont témoins de ce qui se passe. Je sais que les cégeps également.
J'ai parlé de la saga de Dawson. Il y a un enjeu d'équité. Ma responsabilité
comme député de Matane-Matapédia, où j'ai deux collèges, très petits, cégep de
Matane, centre d'études collégiales de la Matapédia, et où 100 % des
étudiants qui doivent quitter pour l'université le font à l'extérieur de ma
région, notamment à Rimouski où vous et moi, M. le Président, nous avons
étudiés. On était beaucoup plus jeunes à l'époque. Mais ailleurs aussi, on a
besoin d'équité, d'équité pour chacun des étudiants, pour la recherche, pour
les infrastructures, mais ce n'est pas ça qu'on a. On augmente l'écart entre
McGill et les autres universités et je ne peux pas accepter ça. Je suis aussi
un ancien leader étudiant.
Je suis l'ancien vice-président de la
Fédération étudiante universitaire du Québec, à l'époque où Nicolas Ducharme,
maintenant sous-ministre, était mon président. Certains s'en souviendront. Et
il y avait bien d'autres personnes, qui sont dans certains cabinets d'ailleurs
aujourd'hui, qui m'accompagnaient à l'époque. Ces enjeux-là, on les connaît
très bien et on souhaitait l'équité pour tous. Mais là on augmente, on augmente
les disparités entre les institutions.
L'Université McGill est riche. Elle a
l'avantage d'avoir une philanthropie forte, et tant mieux. Ses étudiants sont
attachés à l'institution, ces anciens étudiants, et sont plutôt fortunés, plus
qu'ailleurs. Puis ils ont des immobilisations importantes et ils dégagent des
revenus importants. Ce n'est pas le cas de tout le monde. Et ce cadeau, parce
que c'est un cadeau qu'on leur fait, on ne leur demande rien, on leur donne
même 37 millions pour les accompagner, ça vient envoyer plusieurs
messages. D'abord, continuez de vous développer avant tout le monde.
Le gouvernement du Québec actuel, il va
plus loin que les libéraux. Il dit : C'est correct, mais en plus, avec
nous autres, ça va plus vite. On fonce plus vite dans l'anglicisation, ça vous
vas-tu? Réponse : Ça va être correct. Quand j'ai parlé de ce projet de loi
cet après-midi, il fallait savoir qui s'inquiétait. «Usual suspect», comme on
dit. Tu es toujours suspect de vouloir défendre les francophones au Québec.
Donc, il y a un problème d'équité. Il y a
le symbole que ça envoie aussi, que la langue de prestige pour l'enseignement,
c'est l'anglais. C'est ça, le symbole que ça envoie. Aïe, qu'est-ce que vous
faites à l'Université du Québec à Montréal? Faites quelques kilomètres vers
l'ouest, c'est à McGill que ça se passe...
M. Bérubé : …donc, il y a un
problème d'équité. Il y a le symbole que ça envoie, aussi, que la langue de
prestige pour l'enseignement, c'est l'anglais. C'est ça, le symbole que ça
envoie. Aïe, qu'est-ce que vous faites à l'Université du Québec à Montréal?
Faites quelques kilomètres vers l'ouest, c'est à McGill que ça se passe. Les
universités à charte, c'est pour les deuxièmes tours, les troisièmes tours. Ce
n'est pas vrai, c'est ça qui se dit.
L'UQAM aurait pu bénéficier un tel legs,
un tel cadeau, mais non. L'UQAM est à Montréal. L'Université
de Montréal est encore plus près. Ça aurait pu être le cas, mais non
plus. Alors qui sont ces lobbyistes si puissants qu'ils sont capables de
convaincre successivement deux gouvernements de céder un ancien hôpital, des
terrains situés avantageusement à Montréal, une partie du mont Royal, puis de
se le faire financer en plus, avec 37 millions. Ces gens-là sont
certainement très doués pour avoir réussi un tel coup. C'est un coup de force,
M. le Président, ce projet de loi. C'est regrettable qu'il ne soit pas plus
suivi, c'est un projet de loi privé. Même le titre semble tout destiné à ce
qu'il ne suscite pas beaucoup de discussion, hein? Un édifice sur la rue
University, quelque part, devinez où. Ah! c'est un ancien hôpital. Trop tard,
on a adopté le projet de loi.
• (21 h 10) •
Mais on va avoir le temps d'en parler
puis on va regarder des cartes, aussi, pendant ce projet de loi. J'ai des
cartes avec moi, M. le Président. J'ai aussi quelques surprises que les
législateurs n'ont pas pensées. Ça va être compliqué de voter pour ça, pas mal
plus qu'on le pense. Quelqu'un, tantôt, en arrivant, a dit : Ah! ça
devrait être assez facile. Non, ça ne sera pas facile parce qu'il y a beaucoup
d'intérêts en jeu. Il y a des intérêts puissants, mais il y a les intérêts
démocratiques, écologiques, d'équité, l'enseignement supérieur, tout ça, ça a
de valeur au Québec. Et moi, comme parlementaire, ça m'importe, et je suis fier
de faire partie d'une formation politique qui a ça à coeur. Et l'enseignement
supérieur, on en a fait un enjeu d'importance.
Je me souviens très bien, à l'époque où je
travaillais pour le premier ministre actuel, on avait développé le collège Gérald-Godin
dans l'ouest de Montréal. Ça a été une belle réussite. Pour la première fois de
l'histoire, il y avait un collège francophone dans l'ouest de Montréal, alors
que les jeunes de Sainte-Anne-de-Bellevue, ou de Senneville, ou deRoxboro, Dollard-des-Ormeaux, Pierrefonds
devaient se rendre au centre-ville de Montréal, bien souvent, ou
André-Laurendeau. On a développé le cégep Gérald-Godin, c'est une réussite. Je
suis fier de ça, moi. Humble conseiller politique que j'étais à l'époque, dans
le cabinet du premier ministre, qui était ministre de l'Éducation, c'était une
immense source de fierté pour moi qu'on ait développé, avec le premier ministre
Bouchard, le collège Gérald-Godin
Mais là on est ailleurs, là. Là, on
revient à des années qu'on croyait révolues,
où c'est les grandes universités anglophones…
qui est le haut du pavé, puis le gouvernement leur fait des cadeaux en plus. Ça
ne marche pas, M. le Président, on ne peut pas faire ça.Tu sais, je ne blâme
pas McGill, je ne blâme pas Dawson. Ils font des demandes, tu sais…
M. Bérubé : ...mais là on est ailleurs,
là. Là, on revient à des années qu'on croyait révolues où c'est les grandes universités
anglophones qui est le haut du pavé, puis le gouvernement leur fait des cadeaux
en plus. Ça ne marche pas, M. le Président, on ne peut pas faire ça.
Tu sais, je ne blâme pas McGill, je ne
blâme pas Dawson. Ils font des demandes, tu sais, c'est comme rêve d'université
ou rêve de cégep. C'est quoi, votre rêve le plus fou? Bien, ils l'ont fait.
Bien, câline, ils l'ont eu. Ils n'y croyaient pas, ils l'ont eu parce qu'on
leur donne. Si c'était nous, on ne leur donnerait pas, il y aurait de l'équité
avant d'en remettre à McGill puis Dawson. On leur en donne.
Alors, je ne sais pas comment se sentent
les gens de Concordia, ce soir, ou l'Université de Montréal, ou de l'ETS, ou de
l'UQAM, ou l'Université de Sherbrooke, l'UQO, l'Université du Québec à
Chicoutimi, l'Université du Québec à Rimouski, toutes ces universités, ces
centres universitaires de recherche. Ils se disent : Comment on va faire,
nous, pour être aussi puissants dans la communication pour rejoindre le
gouvernement puis les convaincre d'investir chez nous parce que McGill sont trop
forts? Je ne sais pas comment qu'ils font, mais ils sont forts pas à peu près.
Convaincu le premier ministre Couillard, convaincu le premier ministre actuel,
ils ont mis ça dans un projet de loi, puis il a dit : En plus, nous
autres, les libéraux ont mis la barre là, mais avec la CAQ, nous autres, on le
fait aussi puis on l'accélère. C'est quelque chose, ce n'est pas rien.
Depuis tout à l'heure, il y a des gens qui
suivent la commission qui n'ont jamais entendu parler du projet de loi avant.
Je peux-tu vous dire qu'ils sont en train de regarder les dossiers puis les
documents, puis il y a quelques cabinets d'avocats, à Montréal, qui font la
même chose présentement, M. le Président. Ils se sont mis à regarder ça pour le
plaisir. Ils m'ont écrit tout à l'heure. Ils disent : C'est-u sérieux,
vous faites vraiment ça? Pas les moindres.
Alors, moi, je pense qu'on devrait
suspendre cette étude-là. Évidemment, le Parti libéral qui propose le projet de
loi ne voudra pas, il a... habité d'une certaine urgence. Puis la CAQ est déjà
allée bien que trop loin avec le projet de loi n° 66. Mais ça n'a aucun
sens, ce projet de loi là. À sa face même, on l'a dit combien de fois? Puis ce
ne sont pas des exaltés qui ont dit ça, des gens qui en ont parlé avec
professionnalisme.
Alors, le message du Parti québécois est
toujours le même : défendre nos institutions, défendre l'équité. Et ça, ça
ne peut pas marcher. Et je me serais attendu à ce que le gouvernement soit
critique. Mais, en même temps, comme il avait placé ça dans le projet de loi
n° 66, je n'avais jamais eu la réponse pourquoi c'était là, mais je me
suis dit : Ça doit être bien important pour eux autres, ils doivent miser
beaucoup sur les étudiants de McGill pour ce gouvernement-là, ça doit être très
important. J'imagine ça a beaucoup voté pour la CAQ à McGill. Ça doit être ça,
quelque chose du genre. Il doit y avoir une cellule de la CAQ, là, des jeunes
de la CAQ, ça doit marcher du feu de Dieu, M. le Président, bien important.
Bien non. Au Bar Gerts, là, à McGill, là, tu sais, il n'y avait pas le comité
de la CAQ qui regardait l'élection, là, en 2018, là, à côté du Keg House, là,
il n'y avait pas ça.
Trêve de plaisanteries. On a une
responsabilité ici, sur la commission...
M. Bérubé : …M. le Président,
bien important. Bien non. Au Bar Gerts, là, à McGill, là, tu sais, il n'y avait
pas le comité de la CAQ qui regardait l'élection, là, en 2018, là, à côté du
Keg House là, il n'y avait pas ça.
Trêve de plaisanteries. On a une
responsabilité. Ici, c'est la Commission des finances, c'est une commission
très importante à l'Assemblée nationale, on regarde des chiffres, puis on
compare, puis on s'assure de l'équité pour les régions du Québec, pour nos
circonscriptions, pour les gens qui en ont besoin. C'est important. On ne peut
pas faire l'économie de faire les comptes et de faire aussi l'économie de ce
que ça représente comme symbole pour le Québec, d'accorder autant d'argent,
autant de valeur mobilière à McGill.
Puis là on a parlé tantôt de certains
bâtiments, le Royal Victoria, mais il y a d'autres bâtiments. Puis moi, il n'y
a rien qui m'indique que ça ne pourrait pas passer dans le domaine du privé
éventuellement, vendu au profit de McGill, détour. Je veux dire, il y a un
potentiel exceptionnel à Montréal, là, chaque mètre carré est important. On a
vu, pas plus tard que samedi dernier, je crois, les statistiques sur le prix de
la construction à Montréal. Quelqu'un qui voudrait s'acheter une maison à
Montréal, je veux dire, combien ça coût, c'est énorme. Alors, bien sûr que ça
intéresse les promoteurs. C'est sûr que ça intéresse les promoteurs au
centre-ville de Montréal. Ce n'est pas rien, le centre-ville de Montréal.
Donc, moi, je suis d'avis, comme M. Gilles
Paquin, à travers la lettre que je vous ai lue, qu'il y a plusieurs écueils. Tu
sais, tous les désavantages, je peux vous les démontrer. Les avantages, c'est
pour qui, la chansonnière de McGill, les anciens? Tu sais, on
récupère le Golden Square Mile, «like the good old days». C'est ça, le
plan pour Montréal, le même jour où la mairesse de Montréal annonce l'arrivée
d'un commissaire à la langue française, qu'on va créer une enclave à Montréal
où ça va se passer en anglais essentiellement? Ça ne marche pas ça, M. le
Président.
Moi, je sais que l'enjeu de la langue, ce
n'est pas gagné d'avance. Et, si on perd Montréal, comme le disait Pierre
Bourgault, on perd tout. Et je vous sais sensible à l'enjeu de la langue
française depuis le temps que je vous suis. Du mouton noir jusqu'à aujourd'hui,
la langue, c'est quelque chose d'important parce que ça conditionne beaucoup de
choses, c'est la culture, c'est cette originalité, mais en même temps, c'est
stratégique, la langue, c'est démographique, c'est politique. Si on n'occupe
pas l'île de Montréal avec la langue, mais l'anglais est présent.
Et d'ailleurs, avec les transferts
linguistiques que ne se font pas suffisamment, malheureusement, encore trop de
nouveaux arrivants à Montréal vont se tourner vers l'anglais tôt ou tard.
Alors, c'est compliqué, c'est difficile. Alors, la moindre des choses qu'on
peut faire, comme gouvernement, comme Assemblée nationale, c'est d'envoyer les
bons signaux. Alors, si je suis un nouvel arrivant, étudiant universitaire qui
arrive à Montréal cette année, et que je suis les débats de l'Assemblée
nationale, je me dis : Il y a plein d'universités, il y a l'UQAM qui est
près de chez moi, qui est l'université francophone où je vais, j'ai un
programme qui m'intéresse…
M.
Bérubé
:
…moindre des choses qu'on peut faire, comme gouvernement, comme Assemblée
nationale, c'est d'envoyer les bons signaux. Alors, si je suis un nouvel
arrivant, étudiant universitaire qui arrive à Montréal cette année, et que je
suis les débats de l'Assemblée nationale, je me dis : Il y a telle université,
il y a l'UQAM qui est près de chez moi, qui est l'université francophone où je
vais, j'ai un programme qui m'intéresse, je vais être là pour trois ans… Je
sais qu'il y en a d'autres, j'ai des amis qui sont dans d'autres universités.
Et là j'apprends que, bon, à l'UQAM, c'est compliqué, il y a des enjeux de financement,
il y a des projets de développement qui sont sur la glace, qu'on aimerait faire
depuis longtemps. Je connais très bien l'UQAM, M. le Président, j'y ai étudié,
j'y ai travaillé aussi. Bon, il n'y a pas tant d'argent que ça, je peux
comprendre.
Mais là McGill vont bien parce qu'Ivy
League va recevoir un don de 700 millions. Ça vaut 700 millions. Mais
pourquoi, pourquoi on ferait ça? Pourquoi ce ne serait pas celles qui en ont le
plus besoin, présentement, comme cette chère UQAM ou l'Université de Montréal? C'est
ça qui ne me rentre pas dans la tête, là. C'est ça que le gouvernement va faire
avec le Parti libéral du Québec. Dommage.
Plus que ça, moi, ça me fâche, et je vais
résister, moi, M. le Président, je vais le redire à chaque fois, que c'est un
non-sens qu'on en soit rendu là. Puis en fin de session, j'apprends ça ce
matin… mon équipe, qui sont derrière moi, ici, qui me disent : Bien, il
faut se préparer pour ça, c'est là, sans avertissement. Il n'y aura pas de
débat au bleu, il n'y aura pas de point de presse là-dessus. Je n'ai pas
entendu ni la présidente du Conseil du trésor, ni la ministre de l'Enseignement
supérieur, ni le ministre de la Santé convoquer la presse pour dire : On
fait quelque chose de majeur. On va donner le Royal Victoria, des terrains puis
une partie du Mont-Royal, à McGill, puis ça se fait bientôt, là, vous devriez
suivre ça. Pantoute. En dessous du radar. Bien, ce n'est pas rien.
Comme parlementaire, je me sens bousculé
par ça et je sens que je suis la seule voix de toute cette commission qui va
parler pour ceux qui ont envie de parler là-dessus, puis d'échanger, puis de
proposer une vision moderne, puis préserver le patrimoine. C'est autant des francophones
que des anglophones, M. le Président, des deux côtés. Il n'y a pas de solitude
là-dessus. Les amants du patrimoine, là, des francophones, des anglophones… la
montagne est importante, puis l'urbanisme, puis l'aménagement, là, sensé du
centre-ville de Montréal. Là, on arrive avec un projet digne de l'époque
coloniale, où on va céder des actifs importants à la puissante université de
McGill. Moi, je ne peux pas accepter ça, puis ma formation politique
n'acceptera pas ça non plus.
Combien me reste-t-il de temps, M. le
Président?
• (20 h 20) •
Le Président (M. Simard) :
2 min 12 s.
M.
Bérubé
:
2 min 12 s. En conclusion, ça fait longtemps que je suis ce
dossier-là, parce que je connais bien McGill, et je connais bien le réseau universitaire,
et je sais très bien qu'il y a eu à un moment donné où McGill est passé en
avance sur sa capacité de proposer des projets.
Tantôt, ce n'est pas pour rien que je
posais la question sur qui approchait qui. Bon, j'ai peut-être mal compris mais
je comprends que c'est le réseau de la santé qui avait un excédent, qui avait
un bâtiment excédentaire puis qui a fait une offre. Il a pris le premier qui
était à côté puis il a dit : C'est McGill. Un fou dans une poche, comme on
dit, McGill a accepté…
M.
Bérubé
: …de
proposer des projets. Tantôt, ce n'est pas pour rien que je posais la question
sur qui approchait qui. Bon, j'ai peut-être mal compris mais je comprends que
c'est le réseau de la santé qui avait un excédent, qui avait un bâtiment
excédentaire puis qui a fait une offre. Il a pris le premier qui était à côté
puis il a dit : C'est McGill. Un fou dans une poche, comme on dit, McGill
a accepté. Ça, ça serait intéressant, pour le bénéfice des parlementaires, de
savoir qui a approché qui, hein? Au bal, c'est qui, qui est allé voir qui? Parce
que ça change l'histoire pas mal.
Si le ministère de la Santé a dit :
J'ai des bâtiments excédentaires puis j'en parle à un groupe, McGill, bien,
McGill, il regarde ça puis dit : Bien, certain, que ça m'intéresse.
J'aimerais savoir s'ils en ont parlé à l'UQAM. Y a-tu quelqu'un qui peut me
dire ça? Je vois les collaborateurs de la ministre, je vois son directeur de
cabinet, il y a quelqu'un qui a l'information en quelque part. Moi, j'aimerais
ça, le savoir. Peut-être que l'UQAM se l'est fait proposer puis ils ont
dit : Ça ne nous intéresse pas. J'aimerais ça le vérifier juste pour être
sûr. Même affaire, avec l'Université de Montréal, encore plus proche.
Ça, c'est des informations qui sont
pertinentes pour légiférer… passer un projet de loi rapidement, là, espérer,
là, passer un projet de loi rapidement pour une telle incidence, là. Ça va nous
survivre, ça, ce don-là, à McGill, là. Ça va être là bien après nous. Moi, je
ne veux pas participer à ça, moi, je ne veux pas voter pour ça, je veux voter
contre ça. Et je sens que je vais porter la voix de pas mal de monde, pas mal
d'organismes, pas mal de citoyens. Puis ça va être encore pire quand les gens
vont découvrir c'est quoi.
Alors, il n'est pas trop tard pour ne pas
être associé à ça. Le Parti libéral y tient manifestement, ils se sont essayés
en 2018, ils reviennent. La CAQ, je ne sais pas d'où ça vient, je ne sais
pas ce qu'ils cherchent à prouver à McGill ou à la communauté anglophone. Mais
je leur dis : Reculez.
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M.
Bérubé
:
Soyez pas là.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, cher collègue. Je cède maintenant la parole à la députée de
Westmount—Saint-Louis. Souhaitez-vous intervenir à ce stade-ci?
Mme Maccarone : Non, merci,
M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Pas
de commentaire. Mme la ministre?
Mme LeBel : Non, merci.
Le Président (M. Simard) : Pas
de commentaire. Y aurait-il d'autres remarques que quelqu'un souhaite formuler
sur cette motion? Sans quoi, nous allons procéder à la mise aux voix.
Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Oui. M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé
:
Pour.
La Secrétaire
: Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis)?
M.
Bérubé
:
C'est ça qu'il faut que je dise.
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire
: Mme LeBel
(Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres de l'opposition officielle, M. Arcand (Mont-Royal—Outremont)?
Pardon.
M.
Arcand
:
Contre.
La Secrétaire
: M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée. M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
:
M. le Président, si vous le permettez, j'ai une deuxième motion
préliminaire.
Le Président (M. Simard) :
Tout à fait.
Alors, nous allons suspendre momentanément.
(Suspension de la séance à 12 h 24)
(Reprise à 21 h 27)
Le Président (M. Simard) :
Bien, chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Et au
moment de suspendre, le député de Matane-Matapédia nous avisait de son
intention de déposer une motion préliminaire. Cher collègue, à vous la parole.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée
nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques…
Le Président (M. Simard) :
...reprendre nos travaux. Et au moment de suspendre, le député de Matane-Matapédia
nous avisait de son intention de déposer une motion préliminaire. Cher collègue,
à vous la parole.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. «Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée
nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques tienne,
avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219,
Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal (site de
l'hôpital Royal Victoria), des consultations particulières et, qu'à cette fin,
elle entende M. Frédéric Lacroix, scientifique et auteur».
Le Président (M. Simard) :
Alors, votre motion se retrouve sur Greffier. Mais avant de vous céder la
parole, je m'excuse, je dois simplement vous aviser officiellement du dépôt du
mémoire qui nous a été soumis par la Coalition Royal Vic tout à l'heure. Voilà.
C'est officiellement déposé. Cher collègue, merci.
M. Bérubé : À la bonne heure.
M. le Président, qui est Frédéric Lacroix? Frédéric Lacroix est un auteur, un
homme de sciences et il est l'auteur du livre politique de l'année à
l'Assemblée nationale du Québec, prix qu'il a reçu il y a quelques semaines.
Pour l'auteur que vous êtes vous-même, ça va certainement vous intéresser, Pourquoi
la loi 101 est un échec. Frédéric Lacroix est une des sommités en
matière linguistique au Québec. Il s'est attardé au dossier de McGill, au
dossier de Dawson et, malheureusement, pour le projet de loi n° 96,
dans sa mansuétude, le ministre responsable de la Langue française n'a pas cru
bon de l'inviter. Il a probablement plus important à inviter, mais il n'a pas
cru bon l'inviter. D'ailleurs, j'en parlerai dans une autre forme.
Donc, Frédéric Lacroix, auteur du livre
politique de l'année avec l'Assemblée nationale, a étudié ça, et je vous
partage quelques-unes de ses réflexions sur le dossier.
Je cite Frédéric Lacroix : «Dans mon
livre, Pourquoi la loi 101 est un échec, je démontre que les universités anglophones jouissent d'une
surcomplétude institutionnelle d'un facteur 3 en faisant le rapport des
effectifs étudiants sur le poids démographique. Ils reçoivent environ
3,7 fois plus d'argent globalement qu'il y a d'anglophones langue
maternelle au Québec. Ça veut dire quoi? Ce qui signifie que les universités
francophones sont sous-financées relativement au poids démographique des
francophones au Québec. Quand on fait le rapport entre le fonds
d'immobilisation et le poids démographique des anglophones, on constate que les
universités anglophones bénéficient de quatre fois plus d'argent relativement
au poids démographique des anglophones sur la période 2001‑2020, soit un
ratio encore plus élevé que celui calculé pour le revenu global, 3,7 fois.
L'apport attribué aux immobilisations pour les universités anglophones, 32,3 %,
dépasse nettement l'apport de leurs effectifs universitaires et aussi l'apport
des revenus globaux que recueillent ces universités. Ces données renforcent la
thèse de l'incomplétude institutionnelle qui mine les universités de langue
française au Québec.
• (21 h 30) •
Réalité désagréable pour certains :
les universités anglophones sont surfinancées; les universités francophones
sont sous-financées. Cette réalité est connue du gouvernement, et du
gouvernement précédent. Et malgré ça, on rajoute 700 milliards de
dollars... 700 millions de dollars dans la corbeille de McGill...
21 h 30 (version non révisée)
M. Bérubé : …pour
certains : les universités anglophones sont surfinancées; les universités
francophones sont sous-financées. Cette réalité est connue du gouvernement, et
du gouvernement précédent. Et malgré ça, on rajoute 700 milliards de
dollars… 700 millions de dollars dans la corbeille de McGill. Ça, c'est
une réalité.
Si j'étais ministre de l'Enseignement
supérieur, je peux-tu vous dire que je m'intéresserais à rétablir l'équité
entre les réseaux au même titre que certaines régions, parfois, nous font signe
en disant : Dans notre région, en matière de santé, on est sous-financés.
C'est le cas de Lanaudière, par exemple, qui régulièrement, depuis des années,
arrive avec ce thème.
Alors, qui va défendre le sous-financement
des institutions francophones au Québec? Est-ce que ça va être le Parti libéral
du Québec? Est-ce que ça va être la Coalition avenir Québec? Est-ce que ça va
être Québec solidaire, que je n'ai pas vu encore? Mais je peux vous dire que,
moi, j'en parle ici; nous, on en parle. Si les gens s'intéressent à l'équité
dans les réseaux, ils peuvent compter sur le Parti québécois. Puis
manifestement ça va être les seuls envers qui ils vont pouvoir se tourner parce
qu'on est les seuls qui en parlent, et que ça semble intéressé.
Mais ce n'est pas fini sur McGill. Je cite
Frédéric Lacroix encore, il est intéressant : «Avec 19 % du total en
2020, McGill touche la part la plus importante des sommes en immobilisation de toutes
les universités au Québec — c'est les champions. L'Université de
Montréal recueille 16,3 % puis Laval 16,9 %. Les sommes affectées aux
immobilisations reflètent bien le rang des universités dans l'écosystème
universitaire à Montréal : McGill d'abord, l'Université de Montréal,
Concordia puis bien après l'UQAM. À Montréal, McGill est l'université
hégémonique qui est en train, comme un trou noir, de "satelliser" et
d'aspirer les autres universités dans son orbite. L'Université de Montréal, par
exemple, a maintenant un recteur issu du sérail de McGill. Ce n'est pas anodin.
«On constate que les fonds
d'immobilisation investis dans les universités francophones et anglophones de
Montréal sont à quasi-égalité sur toute la période 2001-2020. Cela est
tout de même étonnant étant donné qu'en 2001, 38 % de l'effectif
universitaire seulement était inscrit dans les universités anglophones de l'île
de Montréal, 39,5 % en 2019. Pour les anglophones, la moitié des fonds
d'immobilisation est attribuée à seulement 39,5 % des effectifs.
«Au Québec, les universités anglophones
bénéficient d'un net avantage — d'un facteur quatre, je l'ai dit tout
à l'heure, en proportion du poids démographique — pour ce qui est des
fonds d'immobilisation investis par le gouvernement du Québec. Sur l'île de
Montréal, un étudiant « pondéré » qui étudie en anglais
bénéficie de 56 % de plus de fonds d'immobilisation qu'un étudiant qui
étudie en français.
«Un tel écart laisse songeur : pour
reprendre une terminologie à la mode, serions-nous en présence d'une
discrimination "systémique" envers les universités de langue
française au Québec? Les juristes qui traitent de discrimination concluent à
l'existence d'une telle chose dès lors que des effets indirects, même
involontaires, entraînent une différence de traitement constante et
incapacitante sur la base d'une distinction comme la langue. Ce qui semble le
cas ici.»
Les institutions francophones
d'enseignement supérieur sont victimes de discrimination et ça n'a pas l'air
parti pour que les deux autres partis, qui sont présents avec moi, dénoncent ça
à soir…
M.
Bérubé
: …de
traitement constante et incapacitante sur la base d'une distinction comme la
langue. Ce qui semble le cas ici. Les institutions francophones d'enseignement
supérieur sont victimes de discrimination et ça n'a pas l'air parti pour que
les deux autres partis qui sont présents avec moi dénoncent ça ce soir.
Cette iniquité de répartition des fonds
s'ajoute aux iniquités d'attribution des fonds de recherche qui favorisent
aussi les universités anglophones ainsi qu'à la politique de déréglementation
des droits de scolarité pour les étudiants internationaux qui bénéficient
presqu'exclusivement aux universités anglaises. Celles-ci récoltaient 65 %
des fonds versés par les étudiants internationaux, en 18-19, soit
68,6 millions pour Concordia et 89 millions pour McGill. Combien à
l'Université de Montréal? J'ai dit 68,6 à Concordia, 89 millions à
McGill, 13 millions à l'Université de Montréal. McGill, l'aristocrate de
notre réseau universitaire, récolte la somme la plus importante en
investissements d'immobilisation de tout le réseau, et ce depuis au moins
20 ans, les données antérieures n'étant pas accessibles. McGill, c'est
68,6 % plus d'argent pondéré que sa plus proche concurrente, l'Université
de Montréal.
Voilà le contexte dans lequel il faut
analyser le don que le gouvernement du Québec s'apprête à faire de l'ancien
Hôpital Royal Victoria à McGill, un projet gargantuesque qui augmenterait de
façon très importante la surface et les étudiants à temps plein reconnus à
McGill, ce qui augmenterait ensuite de façon permanente les investissements en
immobilisation… ça suit le financement.
Pour McGill, la propulsant encore plus
haut dans le classement, le gouvernement du Québec s'apprête à consolider la
position dominante de l'université la plus riche au Québec. Rappelons que
McGill dispose annuellement de revenus de quelque 1,44 milliard de
dollars, dont 236 millions d'Ottawa, 365 millions provenant des frais
de scolarité, possède 1,7 milliard de dollars dans sa fondation et des
biens évalués à 4,9 milliards de dollars alors que l'Université du Québec
dépend à 90 % des fonds versés par le gouvernement et les étudiants du
Québec, moins de la moitié du budget de McGill, en dépendent, de ces deux
sources de revenus. McGill est devenu un empire financier.
McGill est également un important
propriétaire foncier, 730 000 m² d'espace, dont 613 000 m²
reconnus par le ministère de l'Enseignement supérieur. Même si McGill
n'accueille pas le plus important effectif étudiant, il est l'université
possédant le plus vaste campus au Québec, et on a envie de l'augmenter. Ce qui
a fait dire à Frédéric Lacroix dans un ouvrage : «Québec préfère les
universités anglaises».
Et là, je peux vous parler du revenu global
des universités. Vous me dites quand il me reste moins de temps mais je
commence. Les universités québécoises tirent des revenus de plusieurs sources.
Par ordre d'importance, il s'agit en moyenne et pour l'ensemble du
réseau : un, du gouvernement québécois, 49,9 % des revenus totaux,
deux, d'Ottawa, 20,9 %, trois, des droits de scolarité payés par les
étudiants québécois, canadiens, internationaux, 16,4 % et
quatre autres sources comme par exemple dons, fondations, secteur privé,
12,9 %.
Les subventions versées par le
gouvernement du Québec sont majoritairement normées selon certains critères
objectifs : surface d'enseignement en m², personnel, effectifs étudiants.
Elles devraient donc être équitablement distribuées entre chaque institution. Cela
n'est cependant pas le cas pour les autres sources de revenus des universités.
Ottawa, par exemple…
M.
Bérubé
:
...dont fondations, secteur privé, 12,9 %.
«Les subventions versées par le
gouvernement du Québec sont majoritairement normées selon certains critères
objectifs, surface d'enseignement-mètres carrés, personnel, effectifs,
étudiants. Elles devraient donc être équitablement distribuées entre chaque
institution. Cela n'est cependant pas le cas pour les autres sources de revenus
des universités. Ottawa, par exemple, investit dans les universités surtout par
le biais de subventions de recherche, attribuées par concours. Ce mécanisme
d'attribution a tendance à favoriser les institutions qui ont déjà obtenu des
subventions d'excellence par le passé. Il s'agit d'un cercle vertueux pour ces
universités et vicieux pour les autres.
«On notera, par exemple, que McGill
University, à elle seule, obtient le tiers des fonds versés au Québec par
Ottawa, sous prétexte de l'excellence de ses demandes et de ses chercheurs. Et
qu'est-ce que cette excellence? Bien, McGill, la première université fondée au
Québec, a toujours bénéficié de l'appui de l'élite financière anglophone. Le
gouverneur anglais du Québec a fait don à McGill, à sa naissance, comme une
bonne fée, de généreux capitaux de départ, puisant à même les biens confisqués
aux sulpiciens et aux jésuites, en plus du capital légué par James McGill,
riche marchand écossais esclavagiste. Son excellence est due en bonne partie à
sa richesse, richesse due à une iniquité historique, iniquité due à la Conquête
anglaise, injustice jamais redressée ou corrigée.»
Alors, ça, c'est l'histoire du Québec, M.
le Président. C'est ça, l'histoire de McGill. McGill, là, ce n'était pas un
chercheur ou un intellectuel. C'était un riche marchand, esclavagiste en plus.
Une université qui, à bien des égards, n'a pas de leçon à donner, mais a fait
de l'argent avec ses fondations, et tout ça, et réussit très bien. Puis c'est
une grande université. L'enjeu n'est pas là. Notre rôle, ce n'est pas de n'en
supporter qu'une. C'est de les supporter toutes également, de toutes les
supporter, dans les régions du Québec, dans leur diversité, dans leur mission.
Et quand on fait ça, on a beau dire :
Bien, McGill, c'est un joyau qui mérite d'être financé, mais vous dites quoi
aux autres? Combien de personnes dans cette salle sont diplômées de l'Université
Laval, ou de l'UQAM, ou de l'Université de Sherbrooke? Plusieurs. Est-ce que
ces universités ont le droit à ce traitement? La réponse, c'est non. Mais si
vous gagnez la loterie, que vous êtes allé à McGill, dans les dernières années,
ou que vos enfants puissent y aller, bien, ils ont un avantage sur les autres
jeunes, les autres étudiants, et ça, ce n'est pas acceptable.
Alors, je vous ai prouvé qu'en termes de
parc immobilier, en termes de mètres carrés de campus, en termes de fondations,
de revenus, de capacité d'aller chercher des soutiens internationaux, dans tous
les cas McGill est premier. Et on choisit, et on retiendra de ce projet de loi
que le Parti libéral, qui propose, pour une deuxième fois, un projet de loi
privé... et la Coalition avenir Québec qui dit : O.K., mais nous, on va
faire plus, on va même l'accélérer. Bien, c'est ça qu'ils font. Avec tout ce
que je dis là, c'est sûr que ça s'est rendu à eux, mais ils veulent quand même
le faire. Qui qui les a convaincus, et pourquoi? Qui a une telle influence sur
le gouvernement national des Québécois et Québécoises? Il y a quelqu'un, à quelque
part, qui a l'oreille des premiers ministres. Je ne sais pas c'est qui...
M. Bérubé : ...avec tout ce que
je dis là, c'est sûr que ça s'est rendu à eux, mais ils veulent quand même le
faire. Qui qui les a convaincus et pourquoi? Qui a une telle influence sur le gouvernement
national des Québécois et Québécoises? Il y a quelqu'un, à quelque part, qui a
l'oreille des premiers ministres. Je ne sais pas c'est qui, mais je connais
l'impact. Ça me sidère.
Des fois, je pense au recteur de l'Université
du Québec à Rimouski qui vient d'arriver, le nouveau. Puis j'ai envie de lui
dire : Il faudrait trouver une façon, là, de se faire entendre comme McGill.
Je vais donner un coup de main avec d'autres, tu sais, des anciens diplômés,
essayer quelque chose, tu sais. L'enjeu est trop important, l'enjeu est trop important.
Puis le Québec, ça ne peut pas juste être McGill comme université. Ça prend de
l'équité. C'est l'argent durement gagné des Québécois et des Québécoises, et
puis des étudiants qui travaillent pour payer leurs frais de scolarité, des
gens qui ont économisé, pour qui c'est important. Mais il ne peut pas en avoir
juste pour McGill. C'est une erreur d'avoir proposé à McGill.
• (21 h 40) •
Puis évidemment que l'université est intéressée,
je ne la blâme pas. Si mon message se rend dans Montreal Gazette, ou
dans le Suburban, ou dans Le Délit français, qu'on me cite
correctement. Je suis plus qu'étonné, je suis scandalisé que deux gouvernements
successifs disent exactement la même chose sur un même enjeu, surtout que le
précédent n'est plus là parce que l'autre l'a remplacé, et celui qui l'a
remplacé a réussi à le remplacer en disant qu'il ne serait pas comme le
précédent. Bien, pas dans ce domaine-là, M. le Président.
Pour ce qui est de l'enseignement
supérieur, la même chose, continuité, il n'y a personne qui va être perdu dans
le dossier. Résumé des épisodes précédents : un gouvernement voulait faire
un cadeau énorme à McGill. Épisode suivant : il est raccord avec le
premier, ils vont procéder puis ils vont même l'accélérer pour passer à autre chose.
Je crains l'«autre chose», qu'est-ce qui va y avoir après. Ils font la même
chose avec Dawson.
Le malaise, M. le Président, quand je
parle de ça au ministre responsable de la Langue, du genre : Tu le sais
bien que je suis d'accord avec vous autres, mais le reste de mon groupe, il ne
veut pas, il me l'a déjà dit. Puis moi, je me fais un plaisir de le rappeler.
C'est la vérité. J'aurais aimé ça qu'il ne soit pas le seul nationaliste à la
CAQ à plaider ça. Bon Dieu! j'aimerais ça que les gens... Les gens qui ont
quitté ma formation politique pour aller à la CAQ, j'en connais, j'en vois même
un devant moi, là-bas. J'aurais aimé ça qu'ils amènent avec eux cette force
d'influence, j'aimerais ça que ça paraisse. Je me réjouis, moi, pour le Québec,
quand on avance au plan nationaliste. Mais ceux qui décident, manifestement, ce
n'est pas quelque chose qui est considéré.
Ce n'est pas nationaliste faire ce qu'on
fait là aujourd'hui, là, pas du tout. Au contraire, c'est une capitulation très
claire à l'égard de McGill, qui est la seule bénéficiaire de ça. Ça ne me rend
pas fier, ça ne me rend pas fier du tout. Puis...
M. Bérubé : …ce n'est pas
quelque chose qui est considéré, ce n'est pas nationaliste faire ce qu'on fait
là aujourd'hui, là, pas du tout. Au contraire, c'est une capitulation très
claire à l'égard de McGill, qui est la seule bénéficiaire de ça. Ça ne me rend
pas fier, ça ne me rend pas fier du tout. Puis jamais on ne pourra se faire
faire des leçons de nationalisme après avoir voté ce projet de loi là. Moi, je
vais le garder dans ma poche, je pense, m'a le sortir au besoin. Quand ça
compte, là, quand il y a de la grosse argent d'impliquée puis il y a des
décisions qui ont un impact sur des décennies, là, bien, le gouvernement était
présent, puis il était là au projet de loi en juin 2021, un mercredi soir,
jusqu'à 22 h 30.
Ça n'a pas d'allure. Moi, j'aimerais ça
qu'après, là, quand on va avoir fini, ce soir, là, les formations politiques
qui sont en faveur retournent voir leurs groupes puis disent : Non, non,
ça ne marche pas. Comme gestionnaires, on ne prend pas la bonne décision. Comme
parlementaires, on ne prend pas la bonne décision. On n'a pas le souci du bien
commun, quand on fait ça. On n'a pas le souci de s'assurer de l'équité.
Qu'est-ce qu'on va dire aux autres universités? Qu'est-ce qu'on va dire à l'Université
de Montréal puis à l'UQAM? On va vous trouver un autre terrain à quelque part
puis on va vous le vendre. Bien non, on ne leur dira pas ça. Il y en a pour McGill
seulement.
Moi, je suis… j'aimerais ça que ces
signaux-là se rendent au caucus de la CAQ. Je sais certainement qu'il y a des
gens qui pensent comme moi, qu'il faut commencer par bien financer tous nos
petits cégeps en région, qui sont fantastiques, qui font des belles choses, qui
n'ont pas beaucoup de moyens, mais qui ont de la créativité. C'est un beau
réseau, le réseau collégial du Québec, puis le réseau des universités du Québec
aussi, en Abitibi-Témiscamingue, au Lac-Saint-Jean, au Bas-Saint-Laurent. C'est
un beau réseau, ça mérite d'être encouragé. Mais c'est décourageant pour les
administrateurs de voir ça, encore McGill. Ce n'est pas juste une classe
d'université, là, il faut aider tout le monde. Moi, ça me fait de la peine,
même, ça, pour les autres universités.
Ça me fait penser, une fois, j'avais
visité une école qui a eu vraiment, là, énormément de moyens, ils avaient
10 millions pour à peu près 100 quelques élèves, dans mon comté. Je
l'avais visitée, puis j'étais heureux pour les enfants puis triste en même
temps, parce que je savais que les autres enfants des autres écoles allaient
finir par découvrir cette école-là, ils n'auraient pas accès aux mêmes choses
que cette école-là. Alors, j'étais heureux pour ces enfants-là, mais triste
pour les autres. Puis je n'ai jamais vu d'école qui ressemble à celle que j'ai
vue.
Les étudiants universitaires, pour qui la
valeur du diplôme a de l'importance… finalement, c'est le diplôme qui, au bout
du compte, a une valeur, bien, la valeur de McGill va augmenter puis celle des
autres universités ne va pas augmenter. Mais on peut faire différemment. Vous
pouvez décider qu'on ne fait pas ça. On peut faire d'autres choses à Montréal,
on peut faire du logement social, ça, c'est bon, même pour des étudiants
universitaires. La créativité au plan écologique, au plan de l'urbanisme, au
plan du design, les étudiants de McGill sont fantastiques, ils sont créatifs,
ils font des choses, là, incroyables. Donnez-leur, là, un an, là, pour étudier
ce terrain-là puis ces bâtiments-là, là, vous allez voir qu'ils vont arriver
avec quelque chose, là, qui va faire la fierté du Québec…
M.
Bérubé
:
…créativité au plan écologique, au plan de l'urbanisme, au plan du design. Les
étudiants de McGill sont fantastiques, ils sont créatifs, ils font des choses,
là, incroyables. Donnez-leur, là, un an, là, pour étudier ce terrain-là puis
ces bâtiments-là, là, vous allez voir qu'ils vont arriver avec quelque chose,
là, qui va faire la fierté du Québec et du monde aussi. Donnons-nous du temps.
Il n'y a rien qui presse, là. Il y a-tu quelqu'un qui veut construire un centre
d'achats là? Il y a-tu quelqu'un qui veut passer une route là? Il y a-tu quelqu'un
qui veut monter un «outlet» sur le campus de McGill? Je ne pense pas, moi.
Bien, pourquoi ça presse comme ça?
Pourquoi ça pressait avant la fin de la législature précédente puis là ça
presse là, là? Ils ne nous ont pas parlé de l'urgence. Ceux qui plaident ça,
là, les vrais, là, ceux qui sont derrière ça, probablement qu'ils nous écoutent
ou qu'ils ne nous écoutent même pas puis qu'ils sont convaincus que ça va
passer. Bien, eh! on a un deal, là, les libéraux sont pour, la CAQ est pour, on
est corrects. PQ, on sait bien. Mais la CAQ, on est surpris, on ne pensait pas…
on pensait qu'ils étaient nationalistes un peu. Ah bien, ils sont avec nous
autres aussi. Correct. C'est étonnant. C'est étonnant. J'ai pris beaucoup de
notes, depuis tantôt, là, de ça.
Combien me reste-t-il de minutes, M. le
Président?
Le Président (M. Simard) :
11 min 45 s.
M.
Bérubé
: J'ai
discuté de cette question-là avec mes collègues, dont certains ont les mêmes
enjeux au plan collégial, au plan du financement. J'ai parlé du cégep de
Matane, on a parlé du cégep de Baie-Comeau, mon cousin s'occupe des finances.
On a parlé de plusieurs cégeps où j'ai des amis qui sont administrateurs. Le
D.G. du cégep de Chicoutimi est un ami, celui qui était à Victoriaville aussi.
Ils me parlent de l'état des finances, ils ne savent pas comment ils vont
pouvoir maintenir leurs collèges pour l'avenir, ça va être compliqué. Il n'y a
pas énormément de monde puis il y a de la concurrence. Il y a même le privé qui
est autorisé, depuis… donner des formations courtes, ce n'est pas évident.
Au Québec, on a conçu des universités,
beaucoup avec le monde religieux, l'Université de Montréal, l'Université Laval,
l'Université de Sherbrooke, une université à charte. On s'est aussi donné, sous
le premier ministre Daniel Johnson père, le réseau de l'Université du Québec
pour démocratiser l'accès partout sur le territoire. À un moment donné, j'avais
entendu un député qui voulait se faire élire chef de sa formation politique,
qui disait qu'il devrait y avoir deux réseaux, il devrait y avoir le premier
réseau, là, d'universités à charte, puis ceux qui font la formation de base,
là, le réseau UQ. Ça m'avait tellement choqué, quand il avait dit ça, mais il
n'avait pas été choisi chef de son parti. Ce n'est pas dans mon parti, c'était
dans un autre. Et il avait séparé ça comme ça, lui, j'avais trouvé ça
épouvantable. Un étudiant universitaire, là, qu'il soit à McGill ou qui soit à
Rimouski, s'engage autant. Il est fier d'aller dans ses cours, puis il y a des
renoncements qu'il doit faire, puis il met de l'effort, puis il vit les fins de
session comme les autres, puis il espère que son diplôme va lui permettre de
réaliser ses ambitions comme étudiant.
Mais là je crains que, quand on va se
comparer, on va lever le nez sur d'autres diplômes, on va dire : Bien, tu
aurais bien dû aller à McGill, tu sais, ou tu avais juste à parler anglais. Ça,
c'est une autre affaire, ça, on en reparlera, du projet de loi sur la langue,
éventuellement…
M. Bérubé : …de session comme
les autres, puis il espère que son diplôme va lui permettre de réaliser ses
ambitions comme étudiant.
Mais là je crains que, quand on va se
comparer, on va lever le nez sur d'autres diplômes, on va se dire : Bien,
tu aurais bien dû aller à McGill, tu sais. Ou : Tu avais juste à parler
anglais. Ça, c'est l'autre affaire. Ça, on en parlera, du projet de loi sur la
langue, éventuellement, ce que ça veut dire, l'abdication de l'enjeu
linguistique, qu'on en est rendus à penser que, pour sauver l'avenir du Québec,
pour l'avenir de la langue, ça prend, là, une astuce, là, qu'on va placer dans
la Constitution, tellement épeurante et tellement contraignante que le Parti
libéral du Québec, Justin Trudeau puis Stéphane Dion sont en faveur. Ça doit
être terriblement, là, engageant comme astuce. Ça ne vaut rien, M. le Président.
Moi, je crois aux gestes. Tu as de l'argent,
ça parle, ça, où tu la mets? Tu la mets-tu aux plus riches ou tu la mets à ceux
qui en ont besoin pour se développer? Ça, ça parle. Une loi, ça parle. Un plan
costaud, il est costaud à partir du moment où les autres trouvent qu'il est
costaud. On a sondé cette semaine, il n'est pas très costaud. C'est service
minimum. C'est gênant. Le ministre le premier, il trouve ça gênant. Parlez
avec, il va vous le dire, puis il est dans votre caucus, là, il va vous en dire
bien plus à vous qu'à moi. C'est ça, la réalité.
Puis là il se joue des gros enjeux présentement
au Québec. Enjeu de la langue en est un. L'enjeu de McGill, c'en est un majeur.
L'enjeu du transport aussi, comment on va desservir Montréal. Il y a des enjeux
importants qui sont liés avec ça : la ligne bleue, le REM, le SRB Pie-IX,
tout ça. Tout ça est politique, et l'idée, c'est : Desservir qui en
priorité? C'est ça, l'enjeu.
Alors, moi, comme parlementaire, je vais toujours
contribuer à adopter les meilleures pièces législatives possible, même si le projet
de loi est voté, puis je ne suis pas en accord. Mais je veux avoir dit tout ce
qui est nécessaire avant qu'on prenne une décision et je crois parfois au
miracle que ça peut faire changer d'idée des partis qui ont décidé peut-être en
caucus ou que quelqu'un en haut a dit : Bien, c'est ça qu'on va faire.
Donc, c'est pour ça que je vous ai lu Frédéric Lacroix. J'ai bien plus long que
ça de ce qu'il a dit là-dessus. C'est de valeur qu'on n'ait pas pu l'entendre
ici. C'est de valeur qu'il n'est même pas invité à aller parler sur le projet
de loi n° 96. Il n'est pas assez important, lui. Il a remporté le Prix du
livre politique, mais ça ne vaut rien parce qu'il est critique, parfois, sur le
gouvernement, puis semblerait-il que ça, ce n'est pas acceptable. Dommage.
• (21 h 50) •
Il y en a d'autres, personnes, qui vont
dire qu'ils ne sont pas d'accord avec le projet de loi du gouvernement. Tu
sais, quand le premier ministre nous dit que, si on fait la promotion du cégep
en français, qui est une mesure essentielle parmi d'autres… puis qu'on est des
extrémistes, c'est les mots du premier ministre, puis qu'on découvre dans un
sondage qu'il y a une majorité de francophones qui sont en faveur de la motion,
ça fait de l'extrémisme, ça, M. le Président. Est-ce que le ministre
responsable de la Langue aura le courage de dire au grand Guy Rocher, qui est
un nonagénaire et qui était là avec le grand Dr Camille Laurin lorsque la
loi 101 a été écrite et adoptée… de lui dire : M. Rocher…
M.
Bérubé
: …ça
fait de l'extrémisme, ça, M. le Président. Est-ce que le ministre
responsable de la Langue aura le courage de dire au grand Guy Rocher, qui est
un nonagénaire et qui était là avec le grand Dr Camille Laurin lorsque la
loi 101 a été écrite et adoptée, de lui dire : M. Rocher, j'ai
lu sur vous, vous êtes un homme qui m'inspire mais le premier ministre pense
que vous êtes un extrémiste et j'ai l'impression qu'il va falloir que je pense
comme ça aussi? Je n'ai pas hâte de voir ce moment-là, M. le Président.
Moi, je veux le regarder, Guy Rocher, puis je veux dire : Quand tu as Guy
Rocher dans ton camp et que tu as la jeunesse qui est en faveur de la mesure,
tu es en bonne compagnie.
Et sur le dossier de la langue, parce que
ça fait partie du dossier de la langue, fiez-vous, M. le Président, à des
gens qui ont toujours… pour qui ça a toujours été un enjeu fondamental, qui
n'ont pas commencé à penser à ça avant une élection, qui n'en font pas un enjeu
électoral, un enjeu qui les habite pour vrai, qui est à la base de leur
engagement politique, qui les fait, là, frémir, cet enjeu-là, tellement il est
important, celui de la promotion de la langue, celui de la défense de la langue
française et ça, c'est nous.
Vous savez, j'ai tout entendu sur ma
formation politique. Il y a une chose qu'on a. On a beaucoup de coeur,
M. le Président, puis on a des convictions inébranlables. Puis on a encore
beaucoup de monde qui ont de l'affection puis qui ont du respect pour nous, et
qui savent que dans le domaine de la langue, on a une certaine expertise. Puis
on les mène, les combats. Puis il y a des gens qui nous aiment… qui ne nous
aimeront pas.
Pensez-vous que le Dr Laurin, quand
il a fait adopter la loi 101, ça a été facile? Il s'est fait traiter de
tous les mots possibles, il a même déjà été frappé devant l'Assemblée nationale,
Dr Laurin. Ce n'était pas unanime à l'Assemblée nationale, maintenant tous
les partis se réclament de la loi 101, une grande langue canadienne, même,
semblerait-il, selon Stéphane Dion, Justin Trudeau.
En 77, l'opposition officielle a voté
contre la loi 101, contre la loi 101, imaginez, mais on l'a fait.
Puis quand, en 2012, j'ai eu l'immense privilège d'être nommé au Conseil
des ministres et que la première ministre Mme Marois a proposé le projet
de loi n° 14 avec la ministre Diane De Courcy, un projet de loi pour
améliorer la loi 101, bien, je pensais que c'était là, le moment.
Bien, les deux formations politiques
ce soir qui appuient le don de 700 millions de dollars à McGill étaient
contre notre projet de loi, pour améliorer la loi 101. C'est les
deux mêmes formations politiques qui étaient contre notre projet de charte
et qui pouvaient se dire après, dans le cas d'une : Nous, on va être
capables de le faire. Oui, ils sont majoritaires, c'est ça, la différence mais
avec bien moins d'intensité, bien moins de cohérence. Toujours mieux de se fier
à l'original, M. le Président, c'est de meilleure qualité puis c'est plus
durable.
Alors, sur l'enjeu du français, on est en
plein dedans. Le signal qu'on envoie, de prestige de la langue anglaise à
l'Université McGill, c'est épouvantable. Je ne sais pas qui a eu l'idée mais ce
n'était pas une bonne idée…
M. Bérubé : …toujours mieux de
se fier à l'original, M. le Président. C'est de meilleure qualité puis c'est plus
durable.
Alors, sur l'enjeu du français, on est
plein dedans. Le signal qu'on envoie, de prestige de la langue anglaise à l'Université
McGill, c'est épouvantable. Je ne sais pas qui a eu l'idée, mais ce n'était pas
une bonne idée. J'aimerais savoir, c'est qui. J'aimerais savoir s'il est
toujours dans l'orbite du premier ministre. Comment on a pu convaincre une
telle affaire dans un projet de loi privé où le titre est un affront même de
notre démocratie, Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à
Montréal? Je suis franchement déçu qu'une telle pièce législative nous soit
présentée et qu'elle survive dans nos… et qu'elle va permettre à des gens qui
attendent juste ça, de dire : Enfin, on a le Royal Vic, on a un terrain.
C'est une grosse game de Monopoly où le banquier puis l'acheteur, c'est la même
personne. Voilà, M. le Président. Je vous remercie.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, cher collègue. Y aurait-il d'autres interventions, Mme la députée
de Westmount—Saint-Louis?
Mme Maccarone : Non, M. le
Président. Merci.
Le Président (M. Simard) : Pas
d'autres… Mme la ministre.
Mme LeBel : Oui, peut-être
juste recadrer quelques petites choses, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Je
vous en prie.
Mme LeBel : Je pense que c'est
important de préciser, pour les gens qui nous écoutent, que le projet de loi ne
cède rien à personne. Le projet de loi vient lever les restrictions d'usage qui
étaient très précises, qui avaient été faites dans le cadre de la donation. Et
le projet de loi permettra donc de pouvoir valoriser des installations
patrimoniales de ce site-là qui ne cessent de se détériorer depuis qu'on a
cessé de les utiliser. Je pense que c'est important de le dire : Le projet
de loi actuel ne cède rien à personne, il vient lever les restrictions d'usage.
Ceci étant dit, sur la motion pour
consultations particulières, je n'ai pas d'autres commentaires.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Y aurait-il d'autres remarques? En fait, M. le député de…
M.
Arcand
:
…simplement pour rappeler parce que depuis maintenant près de deux heures,
on entend le député de Matane expliquer que les universités francophones n'ont
rien. Or, moi, je viens d'un comté, qui est Mont-Royal—Outremont,
dans lequel il y a un campus absolument fabuleux de l'Université de Montréal,
sur des anciens terrains, entre autres, qui s'appelle le campus MIL. Et vous
avez là, un complexe des sciences à l'avant-garde et qui avait été initié par
notre gouvernement à l'époque. Et c'est une contribution évidemment majeure et
une expansion formidable de l'Université de Montréal. Voilà. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous. Alors, Mme la secrétaire, pour la mise aux voix, s'il vous plaît.
La Secrétaire
: Oui.
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Pour.
La Secrétaire
:
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres de l'opposition officielle, M. Arcand (Mont-Royal—Outremont)?
M.
Arcand
:
Contre.
La Secrétaire
:
Mme LeBel (Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
: Et
M. Simard (Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc refusée. Y aurait-il d'autres motions
préliminaires? M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le Président…
La Secrétaire
: ...Mme LeBel
(Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
: Et M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc refusée. Y aurait-il d'autres motions
préliminaires? M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : M. le
Président :
«Conformément à l'article 244 du règlement
de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances
publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219, Loi concernant un immeuble situé sur la rue
University à Montréal (site de l'hôpital Royal Victoria), des consultations
particulières et, qu'à cette fin, elle entende Me André Sirois, avocat
auprès des Nations unies».
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Nous allons suspendre momentanément, le temps d'acheminer le tout au
secrétariat.
(Suspension de la séance à 21 h 58)
22 h (version non révisée)
(Reprise à 22 h 5)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. La
motion est maintenant acheminée sur le site Greffier. La parole appartient maintenant
au député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
: À la
bonne heure, M. le Président. Conformément à l'article 244 du Règlement de
l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances
publiques tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219, Loi concernant un immeuble situé sur la rue
University à Montréal (site de l'hôpital Royal Victoria), des consultations
particulières, et qu'à cette fin elle n'entende nul autre que Me André Sirois,
avocat auprès des Nations unies.
Le Président (M. Simard) : …
M.
Bérubé
:
Juste avant, vous me permettrez de répondre à une affirmation que la ministre,
la présidente du Conseil du trésor a eue tout à l'heure, en indiquant que ce
n'était pas tout à fait ce que je disais. En fait, on fait sauter les verrous,
mais après, ça permet de céder. C'est juste une question d'ordre, donc c'est la
première démarche, puis après ça va être possible de céder. On revient au même
point que je disais.
Alors, Me Sirois, qui est un éminent
juriste, nous a transmis une traduction de l'acte de servitude initial. Ça, ça
va éclairer toute la commission. Alors, je l'ai en anglais, je ne suis pas
tellement bon pour lire en anglais, je vais vous le lire en français, mais je
pourrais fournir à la commission le texte exact en anglais. Alors, la
traduction de Me Sirois. Ça, c'est traduction de l'acte de servitude initial.
J'ouvre les guillemets….
M. Bérubé : …de l'acte de
servitude initial. Ça, ça va éclairer toute la commission. Alors, je l'ai en
anglais. Je ne suis pas tellement bon pour lire en anglais, je vais vous le
lire en français, mais je pourrais fournir à la commission le texte exact en
anglais. Alors, la traduction de Me Sirois, ça, c'est traduction de l'acte
de servitude initial, j'ouvre les guillemets : «Et comme il est stipulé
dans ledit bail que celui-ci deviendra nul et non avenu si l'Hôpital Royal
Victoria omet d'y ériger et d'y maintenir en bon état les bâtiments nécessaires
et utiles pour un hôpital, ou si des bâtiments qui doivent être érigés sur
ledit lot servent à d'autres fins que celle d'hôpital pour les malades et les
souffrants de toutes les croyances et origines, la ville de Montréal reprendra
possession de la propriété décrite ci-dessous.» C'est ce que je croyais qui se
passerait, mais ce n'est pas le cas. En tout cas, la ville de Montréal ne
semble pas trop impliquée là-dedans, là, ça se passe avec l'Assemblée nationale.
C'est particulier.
Donc, selon Me Sirois, cela veut dire que,
un, la donation concerne les terrains, et ceux-ci restent propriété de la ville
de Montréal qui les loue par bailemphytéotique. Deux, si
l'hôpital ne construit pas de bâtiment sur ces terrains ou si les bâtiments qui
auront été construits sur ces terrains ne servent plus d'hôpital, la ville de
Montréal reprend possession de ces terrains. J'ajouterai que la ville de
Montréal pourrait ensuite décider de donner ces terrains au gouvernement du
Québec, mais les bons avocats de la ville de Montréal devraient alors mettre
une nouvelle servitude stipulant que, si le gouvernement du Québec ne les veut
plus, il n'en a plus besoin, il devra les retourner à la ville de Montréal.
André Sirois, avocat.
Je ne sais pas pourquoi la ville de
Montréal n'est pas plus engagée dans ce débat. Peut-être qu'un expert présent
ici, à travers mon temps, pourrait me l'expliquer, sur mon temps de 30 minutes,
peut-être, vous, Mme la présidente?
Mme LeBel : Parce qu'il y a eu
un projet de loi…
Le Président (M. Simard) :
S'il vous plaît! Non, s'il vous plaît, non, il n'y a pas de débats qui sont
permis à ce stade-ci, M. le député.
Mme LeBel : Ah! sur son temps.
J'irai à la fin, à la fin de votre temps.
M. Bérubé : C'était tentant,
elle était là.
Le Président (M. Simard) :
Non, non, mais… merci beaucoup.
M. Bérubé : Bon, alors, je me
parle à moi-même. Je me demande pourquoi la ville de Montréal n'est pas plus
présente dans cet enjeu. Donc, la vocation initiale du site ne me semble pas
garantie par ce qu'on veut y faire présentement. Il y a une très grande
latitude à McGill. Il y a une possibilité d'activités commerciales, de
développement immobilier, voire même de spéculation dans un endroit très prisé
de Montréal, où chaque mètre carré vaut une fortune. C'est facile à vérifier,
il faut regarder la valeur locative de plusieurs édifices avoisinants,
plusieurs transactions qui ont eu lieu également autour de cet endroit, récemment,
dans les dernières années. C'est une mine d'or, ça vaut beaucoup d'argent, et
c'est franchement quelque chose d'important.
Puis aussi, bien, vous avez entendu tantôt
le groupe Royal Vic qui parlait de d'autres alternatives, par exemple, la crise
du logement, il y a une opportunité, le communautaire, des initiatives
écologiques, tu sais. Eux, ils veulent faire ça puis ils ne savent pas vraiment
ce que McGill veut faire. Si la chancelière de McGill était ici, elle pourrait
nous présenter c'est quoi, le plan, parce qu'eux, ils s'attendent, au cours des
prochains jours, à ce que la loi soit votée…
M. Bérubé : ...du logement, il
y a une opportunité, le communautaire, des initiatives écologiques, tu sais.
Eux, ils veulent faire ça puis ils ne savent pas vraiment ce que McGill veut
faire. Si la chancelière de McGill était ici, elle pourrait nous présenter
c'est quoi, le plan, parce qu'eux, ils s'attendent, au cours des prochains
jours, à ce que la loi soit votée, puis là c'est le permis pour faire... Tu
sais, je vous ai parlé du rêve tantôt, le rêve de l'université, là, ils le
réalisent, eux autres, ils l'ont eu, ils ont tiré la capsule, puis ils l'ont
eu. Donc, ils vont pouvoir le faire.
J'aimerais ça qu'ils nous le précisent
davantage, ça a toujours été flou. En tout cas, ça a toujours été flou pourquoi
le gouvernement appuyait ça, le gouvernement libéral, le gouvernement de la
CAQ. Je ne sais pas. De tous les projets au Québec en postsecondaire, c'est lui
qui est prioritaire. Ça presse, il ne faut pas trop poser de questions.
Laissez-les faire. Moi, je me méfie dans ce temps-là, M. le Président, je me
méfie.
Alors là, je pose des questions, je
m'exprime. J'espère que quelqu'un prend des notes. Sinon, ça tend à donner
l'impression qu'il n'y a pas trop de chance que ça change. Donc, c'est ce que
je voulais dire. Et ça met fin à ma troisième motion, M. le Président. Je vous
l'avais dit qu'elle était plus courte.
• (22 h 10) •
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Y aurait-il des commentaires? Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Je vais céder la parole, avec votre permission, à la ministre. Je
crois qu'elle a une intervention à faire.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Mme la présidente.
Mme LeBel : Juste un point
d'information. La ville de Montréal a cédé tous ses droits en 1988 dans un
projet de loi n° 224. Donc, ça répond à la question de mon collègue. Je
n'ai pas d'autre commentaire sur sa motion.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. D'autres remarques?
M. Bérubé : ...motion? On va
voter avant.
Le Président (M. Simard) :
Malheureusement... Oui, il faut voter, tout à fait. D'autres remarques? Sans
quoi, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Oui.
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Pour.
La Secrétaire
:
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres de... pour les membres de l'opposition officielle, pardon,
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont)?
M.
Arcand
:
Contre.
La Secrétaire
:
Mme LeBel (Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
:
M. Simard (Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée. M. le député de Matane, je crois
comprendre que vous souhaiteriez déposer une autre motion?
M. Bérubé : Oui, comme le veut
notre règlement.
Le Président (M. Simard) :
Alors, nous allons suspendre momentanément nos travaux.
(Suspension de la séance à 22 h 11)
(Reprise à 22 h 13)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, merci à vous. Nous pouvons reprendre nos travaux. La
parole appartient maintenant au député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
: Merci,
M. le Président. Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée
nationale, je fais motion afin :
«Que la Commission des finances publiques
tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219,
Loi concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal, des
consultations particulières, et
«Qu'à cette fin, elle entende Robert
Laplante, directeur de L'Action nationale.»
Le Président (M. Simard) : On
vous écoute...
M.
Bérubé
:
Robert Laplante, qui est-il? Un des hommes les plus fascinants que j'aie
rencontrés en matière d'identité québécoise, de langue, d'innovation. C'est le
directeur de L'Action nationale, une magnifique publication où... Je
suis abonné depuis plusieurs années à L'Action nationale. C'est une
vénérable institution. Et Robert Laplante aurait bien aimé se faire entendre,
tout comme sur le projet de loi n° 96, mais ça lui a
aussi été refusé.
Alors, votre collègue, le ministre
responsable de la Langue française, n'a pas cru bon d'entendre ni Frédéric
Lacroix ni Robert Laplante. Mais je vais leur rendre justice en faisant lecture
ici du témoignage qu'il aurait aimé livrer à la commission. Alors, Robert, si
tu es à quelque part, et tu nous écoutes, je vais lire tes mots.
Le Président (M. Simard) : On
continue de s'adresser à la présidence. Merci, cher collègue.
M.
Bérubé
:
Alors, à travers vous, je parle à Robert.
Le Président (M. Simard) :
Très bien, mais c'est difficile de parler à Robert à travers moi. Allez,
poursuivez.
M.
Bérubé
: Oui.
Alors, Robert Laplante, sur cet enjeu, a écrit, dans la page Idées... les pages
Idées du journal Le Devoir, le 16 février 2021... et ça va comme
suit :
«S'il faut en croire Mme Suzanne Fortier,
la rectrice surpayée de McGill, le Québec aurait tout à gagner de donner le
site du Royal Victoria pour planter sur la montagne un grand pôle d'excellence
en développement durable, comme le rapportait LaPresse. Qui
pourrait trouver à redire? L'environnement est une préoccupation mondiale, et
il ne serait que justice qu'une université de réputation mondiale comme...
M.
Bérubé
: …la
rectrice surpayée de McGill. Le Québec aurait tout à gagner de donner le site
du Royal Victoria pour planter sur la montagne un grand pôle d'excellence en développement
durable, comme le rapportait LaPresse. Qui pourrait trouver
à redire? L'environnement est une préoccupation mondiale et il ne serait que
justice qu'une université de réputation mondiale comme McGill apporte sa contribution.
L'élite scientifique qu'elle rassemble déjà n'en serait que plus forte encore
si elle pouvait compter sur une injection de fonds publics pour en soutenir les
prétentions.
Après tout, la vénérable institution
draine déjà plus de la moitié des fonds de recherche consacrés aux universités québécoises.
Elle accueille, avec son club fermé de Concordia, plus des trois quarts des
étudiants étrangers qui viennent en anglais s'encanailler rue Prince-Arthur
entre deux séminaires de classe mondiale. Quiconque a déjà pu constater ce que
donne, en Asie ou ailleurs, ce rayonnement auquel McGill contribue, pourrait
aisément en témoigner. La référence québécoise y est insignifiante, si ce n'est
pour évoquer les charmes de la «latin atmosphere» qui rend le séjour si
agréable. De fait, sans l'apport des étudiants étrangers, cette université ne
pourrait maintenir aucun de ses programmes-clés. La raison est facile à
comprendre, la démographie n'en justifie ni n'en soutient la viabilité. Elle ne
peut le faire qu'en usant et en abusant de la faiblesse du gouvernement du
Québec et de l'ensemble des dirigeants universitaires qui n'osent pas reconnaître
que la reine est nue.
Chaque mardi, Le Devoir offre
un espace aux artisans d'un périodique. Cette semaine, nous vous proposons une
version abrégée d'un texte paru dans la revue L'Action nationale, janvier 2021,
volume CX — je continue — on ne reproche pas tant à la
rectrice de jouer son jeu qu'au monde universitaire francophone son esprit
démissionnaire. Cela fait des siècles que les dirigeants de l'UQAM se plaignent
du sous-financement et une éternité que les… du réseau n'en finissent plus de quémander.
Et que dire du silence des syndicats et de professeurs, de chargés de cours qui
restent silencieux et résignés devant les projets qui consacrent leur
marginalisation et, pire encore, leur déclassement professionnel? Il faut être
singulièrement candide pour s'imaginer que le grand projet de McGill ne
signerait pas le déclin rapide de l'UQAM, déjà en passe de se faire damner le
pion par Concordia. Le devenir des universités et de la recherche en français
sera définitivement scellé.
On connaît trop bien les réflexes de
coloniser à la base du silence coupable de notre élite de gestionnaires
universitaires. Un grand projet en anglais les fera baver d'envie, le mimétisme
leur dictera leurs plus lubriques pulsions et ils ne tarderont pas à tenter de
se convaincre que la meilleure façon de composer avec l'ogre de la montagne
sera de s'angliciser encore davantage et d'offrir des programmes en anglais.
Ils se perdront trop tard en lamentations, ils ne se rendront pas compte que
s'ils tiennent pour de la grandeur ce qui est en réalité un manque d'ambition,
c'est bien de ça qu'il s'agit : McGill manque d'ambition. Si tant est que
sa rectrice dise vrai et que cette université soit réellement soucieuse de
faire rayonner le Québec, elle ferait de ce projet un puissant levier pour
l'ensemble du monde universitaire montréalais, voire québécois. On s'étonne,
sans trop s'en surprendre, que les recteurs de l'Université de Montréal, de
Polytechnique, de l'UQAM, de l'École de technologie supérieure n'y aient pas
songé. Si un projet comme celui du Royal Victoria doit avoir de l'envergure, il
doit précisément l'être d'un projet comme celui… être de dimension nationale.
Il devrait être l'occasion de former une grande institution de convergence qui
démultiplierait la force de frappe de ce mégacentre. Le gouvernement…
M. Bérubé : …l'Université de
Montréal, de Polytechnique, de l'UQAM, de l'École de technologie supérieure n'y
aient pas songé. Si un projet comme celui du Royal Victoria doit avoir de
l'envergure, il doit précisément l'être d'un projet comme celui… l'être de
dimension nationale. Il devrait être l'occasion de former une grande
institution de convergence qui démultiplierait la force de frappe de ce
mégacentre. Le gouvernement du premier ministre ne comprend franchement pas
grand-chose à ce que la construction et la défense de la nation peut bien
signifier. C'est franchement scandaleux de voir renforcer la logique du
développement séparé.
«Si le gouvernement du Québec avait le
sens d'intérêt national, il cesserait de financer l'apartheid universitaire et
assortirait son soutien d'une obligation d'inscrire les ambitions de McGill
dans une architecture institutionnelle au service du français et du
développement d'un système universitaire nationale.
«Si McGill avait de l'ambition et si son
attachement au Québec était autre chose qu'une formule rhétorique, c'est l'idée
d'une institution d'envergure nationale qu'on devrait charpenter en projet.
«Si McGill était aussi vertueuse et
inclusive, comme nous le répètent à l'envi ses thuriféraires, le projet du
Royal Victoria inclurait les universités françaises.
«Si McGill était soucieuse de partager le
destin du Québec, un destin français, elle accepterait de fonctionner dans une
structure où elle ne serait que la démographie de l'histoire, on en fait… et
ont fait et devraient faire un partenaire majoritaire, méritoire, certes, mais
néanmoins poussé par son statut à s'inscrire dans la dynamique nationale du
Québec.
«Si McGill était soucieuse de l'avenir du
français au Québec, elle accepterait que ce projet s'incarne dans une
institution française. Une institution qui consacrerait le statut de notre
langue au centre-ville.
«Non, décidément McGill manque
d'envergure. À moins que se ne dégagent d'un de ses réflexes les plus primaires
des relents de la vieille maxime orangiste : Never under French rule!»
C'était le commentaire de Robert Laplante
que je vous partage. C'est terminé.
Le Président (M. Simard) :
C'est tout? Je vous remercie. Y aurait-il d'autres remarques? Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Non, j'aurais
juste hâte que, s'il y a une autre motion, que ça serait plus lié au sujet du
projet de loi d'intérêt privé.
• (22 h 20) •
Le Président (M. Simard) :
Merci. Mme la présidente du Conseil du trésor.
Mme LeBel : Non, je n'ai pas
d'autre commentaire sur la motion pour une consultation particulière.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Y aurait-il d'autres remarques? Sans quoi nous allons procéder à la mise
aux voix. Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Oui.
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Pour.
La Secrétaire
:
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres de l'opposition officielle, M. Arcand (Mont-Royal—Outremont)?
M.
Arcand
:
Contre.
La Secrétaire
:
Mme LeBel (Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
:
M. Simard (Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée. À ce stade-ci, M. le député de
Matane-Matapédia, souhaitez-vous déposer une motion préliminaire? Très bien.
Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 22 h 21)
(Reprise à 22 h 22)
Le Président (M. Simard) :
Bien. Chers collègues, au moment de suspendre nos travaux, le député de Matane-Matapédia
nous... nous annonçait, dis-je, son intention de déposer une motion. Alors,
cher collègue, à vous la parole.
M. Bérubé : Merci, M. le
Président. Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée
nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques tienne,
avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219, Loi
concernant un immeuble situé sur la rue University à Montréal, des
consultations particulières, et qu'à cette fin elle entende M. Jean-Denis
Archambault, professeur de droit à la retraite de l'Université d'Ottawa.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Nous vous écoutons.
M. Bérubé : Jean-Denis
Archambault, un observateur attentif, un juriste de talent, un contributeur à
l'espace public, un homme que j'aurais aimé entendre aujourd'hui. C'était sa
présentation.
Il nous gratifie de son analyse du projet
de loi, qu'on a reçue aujourd'hui, et je vous partage cette analyse. Le
Pr Archambault nous dit la chose suivante, il parle de son collègue,
Me André Sirois : «André Sirois comprend parfaitement, sur la foi de
la restriction aux servitudes imposées expressément, lors de la donation ou
cessation en 1891, des fonds immobiliers en question au Royal Vic, que la
transaction survenue en mai 2020 entre le Royal Vic et CUSM, en faveur de ce
dernier, viole directement cette clause restrictive, violation que reconnaît
implicitement l'article 2 du projet de loi privé qui aurait pour effet
explicite de valider la transaction de mai 2020 — prenez des
notes, tout le monde, là, ça, c'est sérieux. À cet égard, les notes
introductives du projet de loi démontrent une audace, une fourberie
qualifiable.» Ce n'est pas mes mots, là, c'est les siens. Mais il nous invite à
aller voir ce qui... Il y a quelque chose là. «Les premières notes
introductives...
M. Bérubé : …la transaction de
mai 2020.» Prenez des notes, tout le monde, là. Ça, c'est sérieux. «À cet
égard, les notes introductives du projet de loi démontrent une audace, une
fourberie qualifiable.» Ce n'est pas mes mots, là, c'est les siens. Mais il
nous invite à aller voir ce qui… Il y a quelque chose là. «Les premières notes
introductives affirment, en effet, et je souligne : "Attendu que le
Centre universitaire de santé McGill, ci-après appelé le ‘CUSM', est
propriétaire — il a souligné — des lots rénovés
1 341 182 et 1 354 912 du cadastre du Québec,
circonscription foncière de Montréal, ci-après appelés l'‘Immeuble', acquis
avec d'autres lots de Royal Victoria, ci-après appelé ‘Royal Victoria', aux
termes — il souligne — d'un acte de cession, ci-après
appelé l'‘Acte de transfert', reçu par Angelo Febbraio, notaire, le 26 mai
2020, sous sa minute 1627, et publié au bureau de la publicité des droits de la
circonscription foncière de Montréal, le 26 mai 2020, sous le numéro 25
401 715."»
Ses commentaires : «Outre l'arnaque
sur laquelle repose cette allégation de propriété, leurs auteurs en reconnaissent
tacitement l'irrégularité, puisqu'ils veulent, par la loi, valider d'aujourd'hui
la transaction de mai 2020. Or, de deux choses l'une, ou bien la transaction de
mai 2020 est légale et valide, auquel nul besoin de la valider par la loi, ou
bien la transaction de mai 2020 n'est ni valide ni légale, auquel cas le
législateur devrait savoir, un, de quelle illégalité ou invalidité il s'agit
puis, deux, qui a intérêt à la camoufler, et cela sans faire état des sophismes
et mascarades que contiennent, par ailleurs, les notes préliminaires que…
particulièrement l'article 3 du projet lui-même.»
Autrement dit, avec ce que je viens de
vous révéler, si on continue dans la même voie, il va falloir que je découvre
qui a intérêt à ce que ça soit écrit comme ça, et, croyez-moi, je vais le
trouver. Alors, j'invite fortement la députée qui a fait la rédaction d'un
projet de loi et les personnes qui l'ont conseillée à se pencher sur ce que je
viens de dire, qui va apparaître dans l'espace public demain matin. Ça, c'est un
enjeu important, puis il y a quelqu'un qui va devoir répondre à ça. Et j'invite
le gouvernement du Québec à se dépêcher de s'en dissocier. C'est le conseil que
je donne aux parlementaires. Et j'aurais d'autres commentaires de cette
nature-là à faire sur les intérêts qui soutiennent ce projet de loi, M. le
Président. Ce sera la fin pour cette proposition.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, collègue. Y aurait-il des remarques? Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis?
Mme Maccarone : Non, M. le
Président, merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Mme la présidente du Conseil du trésor?
Mme LeBel : Non, aucun
commentaire.
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il d'autres remarques? Sans quoi nous allons procéder à la mise aux
voix.
La Secrétaire
: Oui.
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Pour.
La Secrétaire
: Pardon.
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres de l'opposition officielle, M. Arcand (Mont-Royal—Outremont)?
M.
Arcand
:
Contre.
La Secrétaire
:
Mme LeBel (Champlain)?
Mme LeBel : Contre.
La Secrétaire
: Pour
les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
: Et
M. Simard (Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée. Nous pouvons poursuivre nos travaux.
Cher collègue, je présume que vous auriez une motion?
M. Bérubé : Je terminerais
là-dessus.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, nous allons suspendre momentanément.
(Suspension de la séance à 22 h 27)
La Secrétaire
: Pour les
membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
La Secrétaire
: Et
M. Simard (Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée. Nous pouvons poursuivre nos travaux.
Cher collègue, je présume que vous auriez une motion?
M. Bérubé : Je terminerais
là-dessus.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors nous allons suspendre momentanément.
(Suspension de la séance à 22 h 27)
(Reprise à 22 h 48)
Le Président (M. Simard) :
Alors, chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. M. le
député de Matane-Matapédia, à vous la parole.
M. Bérubé : M. le Président,
conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je
fais motion afin que la Commission des finances publiques tienne, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 219, loi concernant
un immeuble situé sur la rue University à Montréal, des consultations
particulières, et qu'à cette fin elle entende la Société Saint‑Jean‑Baptiste.
Vous me devez un verre de gin.
Le Président (M. Simard) :
Voilà. Nous vous écoutons.
M. Bérubé : M. le Président,
il me reste une minute, que retenir de nos échanges? Sinon que nous
abordons, ce soir, un projet de loi d'envergure sous forme d'un projet de loi
privé où le véritable enjeu n'est pas dans le titre, mais se trouve dans les
détails, et se trouve dans l'intérêt public qui n'est pas bien servi par ce
projet de loi là. Et vous voyez bien que depuis le début de nos échanges, je
donne des chiffres, je donne des interprétations de la loi, je rends service au
gouvernement en lui disant de se dépêcher de se décoller de ce projet de loi là
pour son propre intérêt, surtout dans les prochaines heures. Je l'aurai dit
ici. Alors, ce pense que tout n'a pas été dit sur ce projet de loi là, et si
j'avais plus de temps, j'en dirais plus, mais on n'a pas besoin de l'adopter
maintenant, ça ne presse pas. Et je compte beaucoup sur le gouvernement de la
CAQ pour changer d'idée là-dessus.
• (20 h 30) •
Le Président (M. Simard) :
Merci beaucoup, cher collègue. Compte tenu de l'heure, nous allons ajourner nos
travaux sine die…
22 h 30 (version non révisée)
M. Bérubé : …sur ce projet de
loi là. Et si j'avais plus de temps, j'en dirais plus. Mais on n'a pas besoin
de l'adopter maintenant, ça ne presse pas. Et je compte beaucoup sur le gouvernement
de la CAQ pour changer d'idée là-dessus.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup, cher collègue. Compte tenu de l'heure, nous allons ajourner nos travaux
sine die. Et merci à nouveau pour votre précieuse collaboration de fin de
soirée.
(Fin de la séance à 22 h 30)