L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des finances publiques

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des finances publiques

Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 12 février 2025 - Vol. 47 N° 64

Étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l’identité numérique nationale et modifiant d’autres dispositions


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures quinze minutes)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers collègues, très heureux de vous retrouver. Je constate que nous avons le quorum. Conséquemment, notre commission peut entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions. M. le secrétaire, bonjour. Bienvenue. Est-ce qu'il y aurait donc des remplacements ce matin?

Le Secrétaire : Oui, tout à fait, M. le Président. M. Allaire (Maskinongé) est remplacé par M. Lemay (Masson); M. Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont); M. Morin (Acadie) est remplacé par Mme Caron (La Pinière); Mme Zaga Mendez (Verdun) est remplacée par M. Zanetti (Jean-Lesage).

Le Président (M. Simard) : Bien. Alors, bienvenue à ces nouveaux collègues. Comme vous le savez, nous débutons par des remarques préliminaires. Et sans plus attendre, pour une période d'au maximum 20 minutes, je cède la parole au ministre.

M. Caire : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je serai beaucoup plus bref que 20 minutes, parce que je pense qu'on est tous ici pour échanger sur les articles en question. Beaucoup de choses ont été dites, M. le Président, dans les consultations particulières. Je veux quand même revenir sur certains, certains éléments de cette consultation-là, notamment sur le fait que je pense qu'a été salué le fait qu'on institue l'identité numérique nationale. Je pense qu'il est reconnu que c'est une obligation pour un gouvernement au XXIᵉ siècle de procéder ainsi. Le projet de loi l'institue, oui, mais en plus crée un cadre législatif parce qu'on comprendra que l'utilisation de cette identité-là doit être encadrée juridiquement pour avoir la même portée que nos... nos pièces d'identité ou nous attestations d'identité, pour utiliser le même langage, dans l'univers physique.

J'attire l'attention des collègues sur certains autres éléments, M. le Président, du projet de loi, puis notamment dans le contexte qu'on connaît avec les États-Unis, la nouvelle politique qui est mise de l'avant, bon, en tout cas pour laquelle il y a des menaces qu'elle soit mise de l'avant par le président américain, l'élargissement du rôle du courtier en infonuagique que nous souhaitons être maintenant un courtier en ressources informationnelles. Alors, il faut comprendre que ça, ça donne des possibilités au gouvernement, une fois qu'un fournisseur de services s'est qualifié. Et on aura l'occasion d'échanger avec mes collègues, évidemment, plus en détail, mais une fois qu'un fournisseur est qualifié, ça donne une possibilité au gouvernement, après ça, à l'intérieur des fournisseurs qualifiés, de choisir celui avec qui il veut faire affaire. Et ça, ça donne des leviers intéressants dans le contexte actuel, avec... en ligne avec les déclarations que le premier ministre a pu faire sur la souveraineté numérique et que moi-même j'ai pu faire.

Donc, j'ai hâte de pouvoir en discuter avec les collègues. On va le voir aussi au niveau des...

M. Caire : ...qualification. Et d'emblée j'avise cette Assemblée, M. le Président, que mon collègue d'Orford s'occupera de cet article-là en particulier, là, qui ajoute deux articles, là, où c'est extrêmement important pour le gouvernement de mandater officiellement le mais le MCN, parce qu'on le faisait officieusement avec les différents désavantages que ça pouvait amener, donc de mandater officiellement le MCN pour être ce fédérateur-là, ce coordonnateur là des infrastructures de communication du gouvernement du Québec à des fins non commerciales, là, clairement indiquées dans le projet de loi. Mais encore une fois, je vais laisser mon collègue d'Orford expliquer l'idée derrière cet article-là, parce que c'est son champ d'expertise depuis maintenant plus de six ans, et donc d'autres, d'autres éléments du projet de loi, là, qui vient, je vous dirais, avec l'expérience qu'on a, le ministère existe maintenant depuis trois ans, qui vient ajuster le rôle, les fonctions du ministère en fonction de son évolution et de sa mise en place. Donc, un projet de loi qui est extrêmement important à bien des égards, sur l'identité numérique, très certainement, mais sur d'autres aspects aussi du mandat du ministère et des outils qui sont... qui sont très importants pour nous, pour la suite des choses. Donc, sans plus tarder, M. le Président, j'ai bien hâte d'échanger avec mes collègues des oppositions. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le ministre. Et je cède maintenant la parole à la députée de Mont-Royal—Outremont.

• (11 h 20) •

Mme Setlakwe : Merci, M. le Président. Bien, ça me fait plaisir de vous retrouver ce matin. On a eu quelques jours de répit après les consultations. J'étais prise dans un autre projet loi, mais heureuse de vous retrouver pour qu'on puisse continuer les échanges concernant ce projet de loi important, le projet de loi n° 82, qui vise à établir une identité numérique nationale pour les citoyens québécois, qui constitue un projet de loi très important mais un projet structurant de société aussi très important et qui aura un impact majeur sur nous tous. Effectivement, il y a un impact potentiellement très positif lié à ce projet, car les Québécois s'attendent aux meilleurs services numériques de la part de l'administration publique. L'identité numérique nationale deviendrait la seule façon de s'identifier tant dans le monde réel que dans le monde numérique. Elle vise à permettre aux citoyens de s'authentifier en ligne pour accéder aux services gouvernementaux de manière sécuritaire. Du moins, c'est ce que l'on souhaite. Cette identité fonctionnerait comme un substitut pour les documents d'identité physique qu'on connaît, passeport, permis de conduire, certificat de naissance, etc.

Donc, ce sont des avancées qui peuvent être très positives, nous en convenons, mais on parle ici d'un projet loi qui a aussi le potentiel d'affecter négativement les Québécois au niveau notamment de la sécurité des données et de la protection de leurs renseignements personnels. La transparence, la planification, la communication, l'encadrement et le déploiement de ce projet vont nécessiter la plus grande rigueur, la plus grande prudence, M. le Président. Nous avons voté pour le principe, car nous partageons le souhait de moderniser les services de l'État. C'est un projet de société, je le répète, qu'il nous faut entamer. Et là-dessus, nous sommes d'accord avec le ministre, c'est un projet structurant. Donc, on ne souhaite pas mettre un frein à la modernité, mais on est inquiets sur plusieurs volets, M. le Président.

Donc, l'objectif qui est d'offrir aux citoyens des services numériques accessibles, sécuritaires et adaptés à leurs besoins, ça, on ne peut pas être contre cet objectif. On a d'ailleurs accumulé un retard important dans ce domaine. Il y a toute une panoplie d'experts qui sont venus en consultation. On les remercie d'ailleurs pour leur contribution. D'autres n'ont pas pu venir témoigner en commission, mais ont soumis des mémoires de grande qualité. On en a pris connaissance et on remercie donc tous ceux qui ont contribué à nos travaux. On a mentionné que ce type de projet avait été mis de l'avant dans différentes juridictions. Je ne les nommerai pas, on les connaît. Il y a notamment l'Estonie. Il y en a plusieurs autres. Au Canada, il y a la Colombie-Britannique qui a mis de l'avant un projet similaire. Et donc les experts, quand ils se prononcent sur les enjeux, sur les éléments de préoccupation, bien, ils parlent en connaissance de cause, en ayant étudié les projets qui ont été mis de l'avant dans d'autres juridictions.

On va s'assurer donc, dans le cadre de nos échanges, notamment durant l'étude détaillée, que tous les enjeux et que toutes les préoccupations qui ont été mises de l'avant dans le cadre des consultations et dans les mémoires soumis soient discutées en cette commission parlementaire. Je vous rassure, M. le Président, tout au long du processus, comme...

Mme Setlakwe : ...toujours. Nous, à la position officielle, on va travailler de façon constructive à l'analyse du projet de loi afin de le bonifier, car nous espérons sincèrement que cette identité numérique nationale va, oui, faciliter l'obtention des services publics pour le plus grand nombre possible de Québécois et qu'il viendra réduire les risques de fraude comme les vols d'identité, l'hameçonnage, les fuites, etc. Et on va trouver, on l'espère, on va, en tout cas, travailler très fort pour trouver l'équilibre entre l'efficience administrative, la protection des renseignements personnels et l'inclusion numérique. Bref, ce serait un exercice de trouver l'équilibre entre simplicité et sécurité.

Un élément que je me dois de mettre de l'avant comme un énorme bémol à notre vote en faveur du principe du projet de loi n° 82, c'est que le projet d'identité numérique nationale, à notre sens, c'est beaucoup plus que le libellé de cette pièce législative. Le ministre devra rassurer la population, fédérer les Québécois et mettre de l'avant un plan et une feuille de route qui assurera le succès de ce projet structurant. Le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, qui a joué un rôle déterminant, on va le rappeler dans le déploiement de SAAQclic et qui a admis lui-même en cette Chambre que le déploiement avait été un fiasco, sera-t-il cette fois-ci réunir les conditions gagnantes pour mener à terme et à bien ce projet structurant d'identité numérique nationale? Permettez-moi, M. le Président, de lever le drapeau.

Il y a plusieurs mises en garde qui ont été énoncées, notamment par la Vérificatrice générale. Je me permets de me référer à son mémoire brièvement. Elle fait état de trois principaux enjeux dans son mémoire : la question de la cybersécurité et de la protection des renseignements personnels, la question de l'accessibilité et de la qualité des services aux citoyens, et aussi, et c'est très important, la gestion du projet. Dans son mémoire, elle fait état de ses rapports d'audits passés pour lesquels elle ramène les recommandations, elle ramène les enjeux, elle ramène les problématiques qui avaient été soulevées dans le cadre des différents projets. Et elle nous invite à la prudence. En tout cas, moi, c'est comme ça que je l'ai reçue. Et, en conclusion, elle mentionne qu'il s'agit d'un projet intéressant, je le cite, «qui vise notamment à simplifier les échanges entre les citoyens et l'État, mais qui, cependant, pour obtenir l'acceptabilité sociale ainsi que la confiance des citoyens et leur adhésion, le MCN devra mettre en place une gouvernance efficace en garantissant la sécurité des données, en offrant un service accessible et de qualité ainsi qu'en s'assurant que les données sont exactes». En outre, bon, elle soulève le fait qu'il y a de nombreuses modalités qui doivent être fixées par règlement et elle invite le gouvernement à la prudence dans l'élaboration de ses règlements, etc. Mais elle parle... elle parle surtout — c'est ce qu'il faut retenir — de la planification et du déploiement du projet.

Quand je parle de conditions gagnantes, M. le Président, qui sont nécessaires à la réussite du projet, je parle d'éléments qui ne se retrouvent pas forcément dans le projet de loi mais qui sont cruciaux à la réussite du projet. Avant tout, il faut bien communiquer le projet aux citoyens afin qu'ils voient l'utilité du système et en quoi l'identité numérique leur offrira une meilleure accessibilité aux services gouvernementaux. L'importance de bien communiquer avec la population, elle est primordiale dans ce dossier. Cet élément de la communication, de la confiance, de l'adhésion, de l'acceptabilité sociale, elle revient, elle est revenue à maintes occasions, M. le Président, durant les consultations et dans les excellents mémoires qui nous ont été soumis.

Comment cette identité numérique nationale va-t-elle simplifier la vie aux Québécois? Est-ce qu'on leur a expliqué? Moi, à ce jour, je n'ai pas eu connaissance d'une prise de parole de la part du ministre ni en ayant déposé son projet de loi à la fin de l'année passée ni dans les semaines qui ont suivi. On s'apprête à étudier un projet de loi, mais on n'a pas encore communiqué, et il n'est pas trop tard pour le faire, démontrer un leadership et expliquer aux Québécois ce qui s'en vient, en quoi ce projet-là sera bénéfique, en quoi il sera utile. Si on s'inspire de la façon dont les autres juridictions ont mené à bien ces projets, il y a certains... dans certaines juridictions, ça s'est bien passé, dans d'autres moins bien, mais quand ça se passe moins bien, c'est parce que l'adhésion de la population n'y est pas. Alors...

Mme Setlakwe : ...dans ce cas-là, dans ce cas-là, c'est un échec. Ce qu'on veut, c'est que le plus grand nombre des Québécois participe. Et c'est, à mon sens, le devoir du ministre de s'assurer de bien communiquer avec la population. Mais, encore une fois, ce n'est pas nous qui l'inventons, là, cette importance de bien communiquer, je me réfère à un des excellents mémoires qu'on a reçus, c'est celui de l'Obvia, l'Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'IA et du numérique, à sa page 8, il parle des études de cas dans les autres juridictions, «qui démontrent que l'utilité perçue d'une identité numérique nationale est essentielle à son adoption, voire à son succès. Pour assurer cette utilité, il faut impliquer différents acteurs gouvernementaux et privés dans le processus, ainsi qu'à inclure la population utilisatrice pour développer un système répondant à ses besoins.»

Encore une fois, on n'est pas contre le principe. On veut avancer dans le sens de la modernité, mais on veut s'assurer que les choses se fassent correctement, dans l'ordre, avec la population qui participe et qui adhère au projet. Les citoyens doivent avoir confiance en cette identité numérique. L'acceptabilité sociale constitue un enjeu fondamental et elle se construit inévitablement par la confiance. Dans ce contexte, je me demande si le ministre n'a pas déjà manqué à son devoir premier dans ce dossier. Comment se fait-il que, quand il a déposé son projet de loi, il n'a pas tenu une conférence de presse, il n'a pas informé la population, il ne se soit pas adressé directement à elle en expliquant les bienfaits de son projet, les étapes et l'utilité surtout, et l'importance qu'on y adhère en plus grand nombre possible? Le projet de loi a été déposé dans le contexte de la mise à jour économique, et ça, M. le Président, c'est étonnant alors qu'on sait que la façon d'aborder ce projet aura pourtant une incidence sur son taux d'acceptation et d'utilisation.

• (11 h 30) •  

Un peu plus loin dans son mémoire, l'Obvia mentionne le résultat d'une enquête qu'ils ont menée auprès de 2000 citoyens québécois, une enquête récente menée à la fin... au printemps de 2024 sur... «portant sur la confiance, le partage de données et l'identité numérique. Et cette enquête a démontré que «25 % des personnes interrogées ne sont pas du tout ouvertes à l'identité numérique. Plus spécifiquement, une grande majorité de répondants, plus de 86 %, s'est déclarée favorable à l'utilisation de l'identité numérique si certaines conditions étaient respectées.»

Alors, ce sera bien important, nous, les parlementaires, de parler de ces conditions gagnantes et de s'assurer qu'elles soient réunies avant le déploiement de ce projet. Aussi, le projet... le succès du projet va dépendre des ressources que le gouvernement va y investir. Je parle ici de ressources humaines et financières adéquates dans le contexte du déficit record de 11 milliards de ce gouvernement des coupures budgétaires qu'on observe de la part de ce gouvernement, du manque d'expertise à l'interne au sein du ministère de la Cybersécurité et du Numérique qui le pousse à recourir de façon excessive à la sous-traitance et aussi du gel d'embauche, et ce gouvernement s'est imposé. Il est tout à fait normal qu'on se pose ces questions, M. le Président, avant d'entamer l'étude détaillée de la pièce législative et avant de donner notre aval final au projet.

Encore une fois, lors de l'étude, nous verrons à questionner et à talonner le ministre afin d'être rassuré pour... que ces conditions soient rencontrées pour le bien des Québécois qui n'ont pas envie de faire les frais, encore une fois, d'une planification bâclée. Le gouvernement doit apprendre de ses erreurs et les Québécois peuvent compter sur nous à cet égard, non pas pour ralentir indument le projet, mais pour soulever des préoccupations légitimes qui ont été entendues de la part des experts tout au long des consultations particulières.

Permettez-moi un bref retour sur ces consultations que se sont tenues les 28, 29 janvier. Encore une fois, merci aux groupes entendus et à tous ceux qui ont rédigé et déposé des mémoires. Comme je l'ai mentionné, ce projet soulève plusieurs enjeux importants, je vais en aborder quelques-uns. La question de la protection des renseignements personnels et de la vie privée, la Commission d'accès à l'information du Québec soulève... souligne que l'évolution de l'identité numérique nationale accroît les risques liés à la protection des renseignements personnels, qu'un encadrement juridique insuffisant pourrait diminuer la protection de la vie privée des citoyens et entraîner une perte de confiance envers cette identité numérique. Il y a la question de la sécurité des données, le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...il y a des préoccupations quant à l'hébergement centralisé d'une grande quantité de données personnelles et confidentielles, soulignant l'importance de mettre en place des ressources humaines et financières adéquates pour assurer la cybersécurité du projet. Il y a la question de la collecte des données biométriques. Cet élément est revenu souvent durant les consultations. M. le Président, quand on parle de nos données biométriques, c'est vraiment unique à chaque personne, on parle de notre... de tout ce qui nous distingue au niveau de nos éléments faciaux, les yeux, etc. Ce ne sont pas des choses, M. le Président, qu'on peut changer comme un code ou un identifiant. Si ces éléments extrêmement sensibles et personnels qui nous permettent de nous identifier se trouvaient entre les mains de personnes aux intentions malveillantes, les conséquences seraient extrêmement négatives. Alors, cette question, on va devoir en discuter et en débattre, étant donné que ces données biométriques sont intrinsèques à la personne et, comme je le disais, ne peuvent pas être modifiées en cas de compromission. Le syndicat professionnel du gouvernement du Québec partage cette inquiétude et recommande de se limiter à des données d'identité simples pour l'accès aux services gouvernementaux.

Quant à l'accessibilité des services, bien ça, on aura l'occasion d'en parler amplement, M. le Président, la convivialité, l'accessibilité devront être au rendez-vous. Il sera important de ne pas laisser de côté tout un pan de la population qui n'est pas dotée d'une littératie numérique adéquate leur permettant de bénéficier des outils technologiques. Le Protecteur du citoyen insiste sur la nécessité de maintenir l'accessibilité des services gouvernementaux par des moyens traditionnels pour les citoyens qui le préfèrent. Rappelons-nous, dans le cas de SAAQclic, on a fermé toutes les succursales. Et quand on a réouvert, c'était le chaos. On a surestimé la capacité de la population à s'adapter rapidement à la nouvelle plateforme et on a sous-estimé les ressources que le gouvernement devait mettre à la disposition des citoyens. Il ne faut absolument pas reproduire les mêmes erreurs, M. le Président.

La question de l'hébergement des données et de la souveraineté numérique est très importante et elle a été soulevée à maintes reprises durant les consultations. Nous discuterons avec le ministre de sa vision à cet égard. Est-ce qu'il va s'assurer que les données soient entreposées dans une infrastructure nuagique souveraine? Est-ce qu'elles seront stockées dans une infrastructure gouvernementale? Comment empêchera-t-on que les données puissent transiter ou être hébergées hors du Québec? Des acteurs comme Micrologic plaident pour que les données des Québécois demeurent sous contrôle québécois, recommandant l'intégration du principe de souveraineté numérique et l'établissement de seuils minimaux de contrats avec des entreprises locales pour la gestion des données numériques nationales, toutes des questions fondamentales, M. le Président, pour lesquelles il va falloir avoir des débats de fond. La question de l'interopérabilité et l'encadrement juridique, des préoccupations ont été mises de l'avant concernant ces enjeux. l'interopérabilité avec d'autres systèmes, les risques de dérives si l'encadrement juridique n'est pas suffisamment étoffé, elle appelle à un débat public transparent et informé sur l'ensemble du projet, la question de la gouvernance, tous ces éléments-là, M. le Président, on a beaucoup, beaucoup de questions et d'enjeux à discuter.

L'Institut de gouvernance numérique souligne quant à lui qu'au-delà de l'interopérabilité et la reconnaissance mutuelle des identités numériques à travers le pays, ce projet doit également mobiliser toutes les forces vives, publiques, privées, etc. Est-ce qu'on a ce plan? Est-ce qu'on a songé à tous ces éléments fondamentaux? Ce sont des questions auxquelles le ministre devra répondre. La question du profilage, plusieurs en ont parlé, ça se trouve à la page 10, notamment, du mémoire de l'Aubevia. Il y aura des croisements entre différentes banques de données. Comment on va assurer qu'on puisse contrôler l'utilisation des données?

Donc, encore une fois, M. le Président, en concluant, notre intention n'est pas de retarder indûment le projet. Notre intention, c'est de s'assurer qu'il y ait un débat sur tous ces enjeux fondamentaux, puis s'assurer que les facteurs clés de réussite soient réunis, soient discutés et soient... qu'on puisse cocher les cases de tous ces facteurs-là pour s'assurer, pour le bien des Québécois, encore une fois, pas pour satisfaire l'opposition officielle. Quand l'opposition officielle s'exprime, c'est parce qu'on a entendu des préoccupations. On se base sur le passé puis on espère...

Mme Setlakwe : ...vraiment que ce projet structurant puisse être mené à bien correctement et en respectant tous ces facteurs, ces facteurs clés de réussite. On aura l'occasion d'en débattre amplement, M. le Président.

Donc, en conclusion, je vous remercie. On aura l'occasion et on espère donc avoir des échanges constructifs et fructueux avec le ministre sur sa vision, sur le déploiement, afin d'assurer le succès du projet. Merci.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci à vous, chère collègue. Dans l'attente de l'arrivée de notre collègue de Jean-Lesage, d'autres collègues membres de cette commission souhaitent-ils intervenir? Mme la députée de La Pinière, à vous la parole.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, je vais entrer tout de suite dans le vif du sujet. Le projet de loi n° 82 qu'on est... qu'on s'apprête à étudier en article par article est un projet de loi qui ratisse très, très large pour créer une identité numérique nationale et qui mise beaucoup, et je dirais beaucoup trop sur la réglementation pour certains éléments. Je sais qu'on veut faire vite. On ne veut pas... on veut s'ajuster rapidement par la suite, après l'adoption du projet de loi, au fur et à mesure de l'implantation, mais c'est tellement important, ce projet de loi là, parce que tout le monde s'accordait en commission, en fait, plusieurs groupes sont venus dire que le Québec est 10 ans en retard à ce sujet-là, sur l'identité numérique nationale, et donc on est... c'est pour ça, ma collègue l'a dit, qu'on a voté en faveur du principe de ce projet de loi parce que c'est important d'aller de l'avant.

• (11 h 40) •

Mais le travail à faire est énorme. À mon point de vue, il y a du travail qui resterait à faire. Peut-être qu'on va avoir une surprise avec beaucoup d'amendements qui vont venir répondre aux préoccupations qui sont... qui ont été énoncées durant... par les groupes durant les auditions en commission parlementaire, c'est probablement ce qui va arriver, et puis on va prendre le temps de les regarder très attentivement. L'objectif, ici, c'est que le projet de loi soit bonifié, qu'il vienne répondre aux préoccupations qui ont été exprimées par des experts durant la commission parlementaire, et qu'on en fasse le projet de loi le meilleur possible pour réunir les conditions gagnantes pour que ça fonctionne.

Alors, j'aimerais juste rappeler, peut-être pour les personnes qui suivent les travaux, que les notes explicatives du projet de loi précisent que l'identité numérique nationale, c'est un ensemble de moyens dont dispose l'État pour permettre à toute personne d'avoir un accès sécurisé aux prestations électroniques des services gouvernementaux ainsi qu'un niveau de confiance élevé lors de ses interactions avec les organismes publics et dans la collectivité, notamment à l'aide d'attestations numériques gouvernementales. Et c'est fondamental, ce qui est inscrit là dans les notes explicatives : un accès sécurisé — tout le monde veut avoir un accès sécurisé — et un niveau de confiance élevé. Et ça, quand ma collègue parle de communication, ce n'est pas juste un exercice de communication pour vendre l'idée du projet de loi ou l'idée de l'identité numérique nationale, ce qu'il faut, c'est la communication d'où on s'en va avec ce projet de loi là, en répondant notamment aux préoccupations des experts qu'on a entendus en commission parlementaire. Ma collègue a utilisé le terme de feuille de route, c'est également ce que j'ai entendu en parlant aux experts. Ça prend une feuille de route qui va nous dire là où on s'en va, quels sont les objectifs de ce projet de loi, justement, pour rassurer la population qu'on ne s'en va pas dans l'intelligence artificielle pour vous surveiller, Big Brother, ce n'est pas ça. Mais il va y avoir de l'intelligence artificielle, qu'on le veuille ou non, qui va être utilisée à certains moments dans la chaîne, dans les processus. Les experts nous l'ont dit. Donc, il faut baliser cela. Et ça ne se retrouve pas dans le projet de loi. Alors, dans une feuille de route où on indique clairement où on s'en va, comment on va baliser certaines choses? Comment on planifie le tout? Bien, on voit, à ce moment-là, les citoyens sont à même de voir puis les parlementaires, aussi, de tous les partis que, bon, on a une vision qui est claire, qu'on partage, et ça va se faire étape par étape, et il y aura des tests avant de mettre le tout en oeuvre...

Mme Caron : ...et on aura une confiance et une utilisation. Les gens pourront adhérer à l'identité numérique nationale. Et ça, on nous a dit, en commission parlementaire, que la Colombie-Britannique, qui a mis en place un système d'identité numérique, ne réussit pas, il y a seulement 10 % des personnes qui s'en servent, parce que cette étape de bien communiquer, de rassurer... Et encore, j'insiste là-dessus, ce n'est pas qu'un exercice de communication, mais vraiment un exercice qui permet de montrer à la population où on s'en va, de démontrer qu'on balise les éléments qui peuvent leur... qui peuvent leur inspirer des craintes ou sinon des craintes, au moins... qui fait en sorte qu'ils sont un peu rébarbatifs à utiliser l'identité numérique nationale. Alors, c'est important... ça va être important de s'y attarder.

Et, dans tout cet objectif-là, donc, d'identité numérique, objectif qu'on partage, du projet de loi, bien, le hic, c'est qu'il y a beaucoup... il y a très loin de la coupe aux lèvres en ce moment. Peut-être, comme je l'ai dit tout à l'heure, qu'on recevra des amendements à étudier durant la période d'article par article, qui vont venir répondre aux préoccupations et qui vont bonifier le projet de loi d'une façon solide, qui nous permettront d'appuyer le tout.

Ma collègue a utilisé le terme de projet potentiellement très structurant, et c'est vrai, c'est un projet de loi qui peut... «un projet de loi»... un projet... Le projet d'identité numérique nationale peut être très structurant, mais encore faut-il que les éléments dont je viens de parler soient balisés, qu'on ait une feuille de route claire pour savoir où on s'en va et pour rassurer la population.

Ce qu'on nous a dit en commission parlementaire, durant les consultations, c'est que le gouvernement n'était pas du tout prêt, à l'heure actuelle, à légiférer sur ce projet de loi là. Le ministre nous a dit, durant ses remarques préliminaires, qu'il fallait mandater le ministère de la Cybersécurité et du Numérique dans le cadre de ce projet-là. Et, avec le nom du ministère de la... et du Numérique, je me demande bien quel autre ministère pourrait être mandaté si ce n'est celui-ci. Or, en plus des nombreux angles morts du projet de loi que les groupes ont fait ressortir, selon leurs préoccupations, durant les consultations, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique est loin, loin d'être prêt à mener à bien ce projet, tant au chapitre des ressources que des compétences nécessaires que de la vision et de la planification. Le chapitre de la vision et de la planification, comme je vous disais tout à l'heure, la feuille de route, elle est absente. On en a besoin pour savoir où on s'en va. Et, pour ce qui est des ressources et des compétences nécessaires, bien, on se l'est fait dire très, très carrément en commission parlementaire, durant les consultations, on n'a pas, au gouvernement, que ce soit au ministère de la... la Cybersécurité et du Numérique ou bien ailleurs au gouvernement... on n'a pas à l'interne ces ressources et ces compétences pour faire ce projet-là.

La Vérificatrice générale du Québec est venue en consultations également. Ma collègue de Mont-Royal-Outremont y a... l'a évoqué aussi. Et, quant à moi, la Vérificatrice générale du Québec, elle a utilisé un mot que je qualifie de talon d'Achille de ce gouvernement, le mot étant la planification. Le passé étant garant de l'avenir, la Vérificatrice générale est revenue dans son mémoire sur les résultats de ses travaux passés pour attirer l'attention sur trois principaux enjeux que ma collègue vient de nommer, c'est-à-dire la cybersécurité et la protection des renseignements personnels, le deuxième étant l'accessibilité et la qualité des services aux citoyens, et le troisième, la gestion de projets.

Si je fais référence au mémoire de la Vérificatrice générale, aux pages quatre, cinq et six, elle nous rappelle donc les études sur lesquelles elle a fait des audits et publié des rapports avec des recommandations. Par exemple, en novembre 2021, dans une étude sur la cybersécurité auprès de trois entités du gouvernement, elle a mentionné que «des améliorations étaient nécessaires, notamment pour les accès, les coupe-feu, les alertes de...

Mme Caron : ...sécurité automatisée et les tests d'intrusion, ça, c'est particulièrement pertinent pour un projet d'identité numérique.

En juin 2020, dans un rapport sur la gestion des identités et des accès informatiques, elle a recommandé d'améliorer les contrôles et les mesures de sécurité pour le personnel qui a des accès privilégiés, de réviser périodiquement les accès informatiques de l'ensemble du personnel et de renforcer la surveillance par les instances de gouvernance. Encore là, particulièrement important pour un projet d'identité numérique.

La VG nous dit aussi qu'il sera primordial que le ministère de la Santé... de la Cybersécurité et du Numérique prenne les mesures nécessaires pour s'assurer de la confidentialité des informations détenues, autant pour les données détenues par le ministère que celles détenues par les organismes.

Et, pour protéger ces informations, il sera également important que les échanges de données entre organismes soient bien encadrés, que seules les données nécessaires soient partagées avec les organismes qui en ont vraiment besoin, tout en s'assurant de la protection des données.

On peut dire que c'est ça qu'on veut faire, puis je suis certaine que c'est ça qu'on veut faire, mais, si la VG a pris le temps de noter ça, de nous rappeler ce qu'elle a fait dans ses travaux d'audit sur d'autres projets, je pense qu'il vaut la peine de s'y attarder, s'assurer que... Parce que c'est vraiment à la base, là, sur la sécurité donnée... des données, s'assurer que ces étapes-là vont être faites. Et, dans une feuille de route, dans une bonne planification de projet et un suivi ensuite au jour le jour, dans la mise en œuvre et dans l'utilisation par la suite, ça va être crucial pour la protection de nos données. Alors, il faut absolument qu'on tienne compte de ces recommandations-là.

• (11 h 50) •

En matière d'accessibilité et de qualité des services, la Vérificatrice générale avait aussi constaté des lacunes. En novembre 2023, si je vais aux pages six et sept, elle nous disait que, dans son rapport sur Services Québec, qui s'est penché sur l'accessibilité et la qualité des services aux citoyens, elle avait constaté que Services Québec n'était pas devenu un guichet multiservice d'envergure pour simplifier l'accès aux services gouvernementaux pour les citoyens. Ici, on veut que ce projet d'identité numérique nationale simplifie l'accès aux services gouvernementaux pour les citoyens, alors c'est important de ne pas faire les mêmes... entre guillemets, les mêmes erreurs ou les mêmes choix que Services Québec a faits puisqu'ils n'ont pas atteint l'objectif. Ici, on veut absolument atteindre l'objectif.

Et, dans son rapport d'octobre 2020 sur le Réseau national intégré de radiocommunication, le RENIR pour les intimes, sur les coûts et la performance, elle a constaté que la qualité des services offerts aux utilisateurs du réseau n'avait pas atteint le niveau désiré. Alors, c'est important, c'est... c'est une autre mise en garde de s'assurer que le projet d'identité nationale numérique ne va pas retourner dans les mêmes ornières, faire les mêmes... les mêmes erreurs que ces projets-là ont faites, ou connaître les mêmes pépins. Peut-être que le mot «erreur» est et fort, là, parce que tout le monde veut travailler le mieux possible, mais de toute évidence, ces projets-là ont eu des pépins, n'ont pas atteint les objectifs qu'ils s'étaient fixés. Et, le projet d'identité nationale numérique est tellement important, et il y a un potentiel d'être vraiment structurant, bien, on souhaite qu'il réussisse et donc que toutes les mises en garde, toutes les précautions, toutes les recommandations que la VG a faites sur les autres... les autres projets qui ont été faits, bien, qu'on en tienne... qu'on en tienne compte.

En matière de gestion de projet, je l'ai dit tout à l'heure, le maître mot, c'est la planification. La VG nous dit, en page 10 de son rapport, qu'une bonne planification est essentielle afin de limiter les retards et les dépassements de budget. Dans son rapport de juin 2021 sur les projets en technologies de l'information des universités, elle a constaté que les deux universités auditées avaient dépassé leur budget et accumulé plusieurs années de retard. C'était surtout en raison de problèmes dans la planification des projets. On sous-estime parfois la complexité, le coût des projets. Les processus utilisés pour sélectionner un fournisseur doivent être adéquats. Alors, encore là, c'est important de s'attarder assez à ces recommandations de la Vérificatrice générale...

Mme Caron : ...Elle nous dit aussi dans sa conclusion, la Vérificatrice générale, qu'il s'agit évidemment d'un projet intéressant et elle nous dit que pour obtenir l'acceptabilité sociale ainsi que la confiance des citoyens et leur adhésion, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique devra mettre en place une gouvernance efficace en garantissant la sécurité des données, en offrant un service accessible et de qualité ainsi qu'en s'assurant que les données sont exactes. En outre, de nombreuses modalités doivent être fixées par règlement, c'est ce dont je parlais au début, et elle invite le gouvernement à faire preuve de prudence dans l'élaboration de ses règlements.

Très important aussi, il ne faut pas laisser pour compte les personnes qui... Il ne faut pas pénaliser ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas avoir un identifiant numérique national ou s'en servir. La Vérificatrice générale le dit en page 7 de son mémoire, il est prévu de ne pas pénaliser ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas avoir un identifiant numérique national. Il sera important de s'assurer que ce sera effectivement le cas et que ceux-ci pourront accéder facilement et efficacement à tous les services gouvernementaux. Cet enjeu d'utilisation ou de non-utilisation de l'identité numérique est très important parce qu'il y a un risque d'exclusion qui est rattaché à cette... à ce projet. Je dirais, un risque d'exclusion que je présenterais en trois volets. Le premier volet, c'est la littératie, la littératie, point, là, savoir lire ou écrire. Le deuxième volet, c'est la littératie numérique. Et le troisième volet, c'est la pauvreté.

Alors, le premier volet, c'est un triste constat que seulement 46,8 % des Québécois et des Québécoises maîtrisent les compétences en littératie, c'est-à-dire savoir lire, savoir apprendre, pouvoir agir à partir de ce qu'on a lu, donc, comprendre ce qu'on lit. Alors, s'il y a seulement 46,8 % des Québécois qui peuvent faire ça, ça veut dire que 53,2 % des Québécois ne le peuvent pas. Ça ne veut pas dire qu'ils ne savent pas lire. Il y en a qui ne savent pas lire et il y en a qui savent lire, mais pas suffisamment pour comprendre le sens d'une phrase. Ils ne comprennent pas... Ils comprennent chaque mot, mais pas le sens de la phrase, pas suffisamment pour être capables de savoir ce qu'il faut faire après avoir lu la phrase. Alors, s'ils sont obligés d'accéder aux services en ligne, bien, ils ont déjà un obstacle important, là.

Il y a aussi l'autre, la question de la littératie numérique, c'est-à-dire des personnes qui savent très bien lire, qui savent très bien écrire, mais qui ont de la difficulté avec l'informatique. Alors là, il peut avoir une fracture numérique générationnelle, c'est à celle-là à laquelle... c'est à celle-là à laquelle on pense le plus souvent. Donc, vous connaissez probablement tous dans vos familles un parent ou un grand-parent qui utilise un téléphone cellulaire, qui utilise une tablette pour se divertir. Mais par contre, quand vient le temps de prendre un rendez-vous sur Clic Santé, ou d'aller sur SAAQclic, ou même de faire des transactions bancaires, ils sont très, très rébarbatifs, ils sont très réticents parce qu'ils ont peur de se tromper, ils ne veulent pas se faire arnaquer. Alors, souvent, bien, c'est un proche qui va les aider, un parent, un enfant, un petit-enfant. Mais là où je veux mettre le gouvernement en garde, c'est que les personnes aînées qui subissent de la maltraitance financière. On connaît plein de cas de fraude, là, on en entend... on en entend parler beaucoup dans les médias, de la fraude, des fraudeurs qui s'attaquent particulièrement aux personnes aînées, mais la maltraitance financière, malheureusement, c'est souvent l'origine, le plus souvent qu'autrement, les statistiques le montrent, c'est dans la famille. Alors, si pour avoir des services, les personnes aînées doivent avoir de l'aide de leurs enfants ou petits-enfants, il y a un risque, là. Et ça, le gouvernement doit en être... doit en être conscient.

Et finalement, la pauvreté. Bien, oui, malheureusement, au Québec, il y a des gens qui n'ont pas cellulaire, qui...

Mme Caron : ...n'ont pas accès à un ordinateur, qui n'ont pas accès à une bibliothèque municipale, où il y a un réseau, ou qui n'ont pas d'argent pour se payer le forfait. Et, un seul exemple, pour aller au TAL, il faut prendre un rendez-vous en ligne. Le Comité logement de Rive-Sud me dit que les gens doivent aller les voir pour qu'eux écrivent au TAL pour obtenir un rendez-vous et, ensuite, reçoive le courriel et rappelle la personne pour lui dire : Bien, ton rendez-vous est à telle heure. Ça, c'est la fracture numérique. Il ne faut pas que l'identité numérique vienne aggraver ça. Il faut que ce soit simplifié, mais il faut conserver les services en personne, pas à 200 et 300 kilomètres, mais il faut conserver les services en personne pour ceux qui ne pourront pas utiliser l'identité numérique nationale. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, chère collègue. Y aurait-il d'autres intervenants dans le cadre de ces remarques préliminaires? Sans quoi, nous allons procéder à l'étude des motions préliminaires. J'ai été avisé par, bien sûr, mon secrétaire que notre collègue la députée de Mont-Royal—Outremont souhaitait déposer une motion, qui se trouve, depuis quelques minutes, sur Greffier, et auquel, donc, vous pouvez avoir accès. Chère collègue, comme le veut la tradition, auriez-vous d'abord l'amabilité de nous faire lecture de cette motion pour, ensuite, en débattre?

• (12 heures) •

Mme Setlakwe : Oui, tout à fait, monsieur.... Merci. Donc, je vais faire la lecture de cette motion, cette première motion préliminaire que nous proposons, que nous avons déposée. Donc, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin :

«Que la Commission des finances publiques entende, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, Mme Sonia LeBel.»

Est-ce que j'ai, donc, 30 minutes, M. le Président, pour fournir nos arguments?

Le Président (M. Simard) : Tout à fait. Absolument.

Mme Setlakwe : Merci. M. le Président, je l'ai mentionné dans mes remarques préliminaires qu'on avait entendu à maintes reprises, durant les consultations, et on a lu également dans les mémoires, qu'il est essentiel que les conditions gagnantes soient réunies pour assurer aux Québécois, là, qu'on puisse leur livrer ce service important, qu'on puisse leur livrer ce projet, qui, on l'espère, va simplifier la façon dont ils peuvent transiger avec les autorités gouvernementales. Et parmi ces conditions essentielles qui doivent être réunies, on nous a dit : Ça va prendre les ressources financières et les ressources humaines pour pouvoir mener à bien ce projet.

Alors, M. le Président, oui, on a une pièce législative à étudier, nous y viendrons, mais, à la lumière de ce qu'on a entendu en commission de la part de plusieurs acteurs... et, en particulier, un groupe qui a vraiment insisté sur cet élément, là, des ressources humaines surtout, c'est le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. Je pourrai y revenir en détail, à ce qu'ils ont mentionné durant leur présentation, et ce qu'ils ont mis de l'avant dans leur mémoire. Mais pour s'assurer, donc, qu'on a les conditions gagnantes, qu'on ait ces ressources humaines et financières adéquates, à l'interne, au sein du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, ça nous prendrait... M. le Président, les parlementaires ont besoin d'être rassurés et d'entendre celle qui est responsable de ce dossier, et, en l'occurrence, c'est la présidente du Conseil du trésor.

Je vous rappelle que, durant les consultations particulières, lorsque nous avions... lorsque nous échangions avec les représentants de la... du SPGQ, donc le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, quand eux, ils ont... ils ont mis de l'avant leurs préoccupations, à savoir : Attention, il y a des modifications à faire dans la classification des emplois. Attention, on n'a pas l'expertise interne, il manque de monde, il manque de développeurs. Attention, on a beaucoup... on dépend beaucoup de la sous-traitance, on utilise des ressources externes... Tout ça est documenté. Le ministre a répondu quoi? Il a répondu : Ça, ça relève de ma collègue la présidente du Conseil du trésor, je ne peux répondre.

On a poursuivi nos échanges, M. le Président, avec les représentants du SPGQ et on a eu, donc, des éléments...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...très intéressants et très fondamentaux qui ont été portés à notre attention. Et je pense qu'il pourrait être extrêmement bénéfique non seulement pour les parlementaires, mais également pour tous les Québécois, de s'assurer de pouvoir échanger avec la présidente du Conseil du trésor. Donc, avant de se lancer dans ce grand projet, posons-nous la question : Est-ce qu'on va encore davantage avoir recours à des ressources externes, ce qui implique des coûts importants, ce qui implique de ne pas avoir cette expertise à l'interne?

Permettez-moi l'image suivante, M. le Président : Est-ce que la maison... est ce que la fondation de la maison est assez solide pour qu'on puisse envisager d'y ajouter un étage? Parce que c'est ça qu'on est en train de faire. Déjà, le MCN a plusieurs projets. On a hâte de voir ces projets se réaliser. Il y a des délais, il y a des coûts importants, mais on comprend que c'est un jeune ministère, donc on est patients. On a bien hâte toutefois de voir des résultats pour le bien des Québécois. Mais alors qu'il y a des retards, alors que les projets débordent, on nous présente ce nouveau projet structurant d'identité numérique nationale sans savoir, M. le Président, si on va être capables de le mener à bien, si on a les ressources internes suffisantes pour pouvoir le réaliser.

Alors, on a discuté durant les consultations, mais on n'échangeait pas, mais les questions demeurent non répondues, parce que le ministre a dit : Ça relève de ma collègue. On comprend comment ça fonctionne dans un gouvernement. Le portefeuille, le dossier du ministre, c'est la cybersécurité et le numérique, un dossier extrêmement important. Mais comment peut-il livrer des résultats pour la population si l'ensemble du gouvernement n'est pas derrière lui, n'est pas derrière le projet et ne fournit pas les ressources financières et humaines nécessaires à son bon déploiement? Donc, d'où l'importance de donner suite à notre demande ce matin, de pouvoir échanger avec la présidente du Conseil du trésor.

Revenons aux groupes qui ont soulevé ces éléments importants. Il y en a plusieurs, M. le Président, donc ce n'est pas nous qui sortons ça de notre chapeau, ça a été dit et répété en commission, ça a été mentionné dans les mémoires. J'en ai quelques-uns sous les yeux. Celui de l'Association québécoise des technologies, première page de leur document, il y a un sommaire avec les priorités d'intervention et les orientations clés pour une mise en œuvre efficace. L'élément central, au niveau des orientations clés, pour une mise en œuvre efficace : stabiliser et valoriser les ressources humaines. Ils nous disent d'introduire des mesures incitatives pour garantir la continuité et la stabilité des équipes, assurer que les ressources clés disposent des moyens nécessaires pour mener à bien le projet. La Vérificatrice générale, on en a parlé un peu plus tôt, elle a mis de l'avant toutes sortes de mises en garde, et elle aussi a fait référence à des rapports d'audit passés qu'elle a soumis. Elle nous suggère fortement de nous y référer, de nous en inspirer et de s'assurer de ne pas répéter des erreurs du passé. Entre autres, elle mentionne, à la page 11, de son mémoire : «Le MCN, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique doit s'assurer d'avoir les ressources humaines compétentes pour réaliser ce projet». Elle continue en disant que «le processus contractuel pour ce projet ne doit pas rendre le ministère dépendant d'un seul fournisseur», etc. Donc, ce sont des éléments qui ont été mis de l'avant et qui ont vraiment suscité une certaine inquiétude de notre part. Et on s'est dit : Il faut aller au fond des choses, M. le Président, pour ne pas répéter les erreurs du passé et s'assurer encore une fois que les fondations de la maison soient assez solides avant d'envisager d'y ajouter un étage.

Le syndicat de la fonction publique du Québec, dans son mémoire sur l'identité numérique... c'est bien ça le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, à la page 14, parle de sous-traitance, et je les cite : «Le SFPQ comprend mal qu'alors que le gouvernement mène des politiques d'austérité et que des projets du MCN tardent depuis longtemps à voir le jour en raison du manque de personnel, le ministre dépose ce projet de loi n° 82. En effet — et je continue de les citer — il importe que l'ensemble des ressources informationnelles supportant la mise en place d'une identité...

Mme Setlakwe : ...numérique nationale soient des ressources internes au gouvernement. Il en va de l'intégrité, de la sécurité et de la pérennité du projet. En effet, comment anticiper que les données numériques de la population québécoise seront en sécurité, si elles sont stockées, traitées ou gérées, même partiellement, par l'entreprise privée? Dans un contexte où une proportion substantielle des postes en informatique au gouvernement ne sont toujours pas pourvus, on a encore du mal à voir comment le gouvernement réduira le recours à la sous-traitance pour assurer que l'identité numérique nationale ne se fasse pas à grands frais et au détriment de la souveraineté de l'administration publique sur ses propres affaires. Par conséquent, le SFPQ recommande qu'avant de se doter des outils législatifs nécessaires à la mise en place de l'identité numérique nationale, le gouvernement réinvestisse massivement dans ses capacités en informatique afin de mettre fin à la sous-traitance qui prévaut, entre autres, particulièrement au MCN.» Voilà. On pourra y revenir, à ce mémoire. Mais ça... je pense que, quand on ajoute tout ça ensemble, c'est une... c'est de toute évidence une préoccupation légitime.

Donc, comme je disais plus tôt dans mes remarques préliminaires, oui, on a une pièce législative qui vaut la peine d'être étudiée, oui, on va y venir. Mais, avant d'aller de l'avant puis d'adopter une pièce législative qui propose un projet aussi important, regardons le contexte général, regardons l'ensemble des ressources dont on a actuellement à notre disposition, l'ensemble des projets qui sont sur la table et qui tardent à se réaliser, regardons aussi... tirons les conclusions du fiasco SAAQclic, où le déploiement a été, rappelons-nous, un réel fiasco. Les Québécois ont fait les... en font... en ont fait les frais, continuent d'en faire les frais, parce que ce fiasco a engendré des coûts, des millions additionnels à ce qui avait été prévu, et d'ailleurs rappelons-nous que la Vérificatrice générale va soumettre un rapport d'audit par rapport à ce fiasco dans les prochaines semaines, les prochains mois. Donc, prenons le temps, en tout respect, de se demander et d'avoir la ministre responsable du dossier, présidente du Conseil du trésor, venir échanger avec nous pour s'assurer qu'on ne... qu'on s'en aille dans la bonne direction, s'assurer qu'on ait les ressources appropriées.

• (12 h 10) •

Juste ce matin, à la... Un petit peu plus tôt ce matin, à la période de questions, j'entendais le ministre des Finances répondre à votre ancien collègue, le député de Saint-Jérôme. Il a dit : «Ma collègue la présidente du Conseil du trésor s'assure d'avoir, et je lui fais confiance, s'assure d'avoir les ressources disponibles à l'interne pour que le gouvernement du Québec puisse livrer les services à la population.» Je pense qu'il référait, bon... éducation, santé. Mais vous voyez ce que je veux dire. Donc, il... clairement, c'est important pour lui, c'est un... il a parlé de sa collègue, il a mentionné que c'est elle qui est responsable de s'assurer que le gouvernement... que tous les projets des collègues reçoivent toute l'attention et toutes les ressources nécessaires pour le bien des Québécois.

Donc, essentiellement, on va se demander, avec l'aide de... tous les parlementaires ensemble, on doit se demander et on doit pouvoir échanger avec la présidente du Conseil du trésor afin de pouvoir répondre à la question suivante et de rassurer les Québécois : Est-ce que le MCN a tous les outils pour mener à bien ce projet d'identité numérique nationale, aussi important soit-il? Je veux bien, là, on a un retard, puis on ne veut pas, encore une fois, retarder indûment le processus. Mais ce qu'on veut surtout, c'est de s'assurer qu'on ne se trompe pas encore une fois, puis qu'on ait les bons outils, puis, si on ne les a pas, bien, qu'on comprenne ce dans quoi on s'embarque en termes de coûts additionnels, en termes de dépendance accrue à la sous-traitance, en termes de dépendance à des entreprises privées. Ce sont pour nous des éléments fondamentaux qu'on va devoir évacuer et discuter à fond avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi.

Permettez-moi de me référer au fameux mémoire du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec. On se rappellera tous de leur passage en commission, ils en avaient beaucoup à dire, et, durant nos échanges avec eux, ils ont mis de l'avant donc leurs préoccupations. Je me réfère à la page 5 de leur mémoire. Ils ont dit que, selon une analyse préliminaire, les constats qu'ils ont faits, c'est que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique gagne en pouvoirs et en responsabilités supplémentaires au niveau de la gouvernance, de la gestion centralisée de l'identité numérique nationale de même que...  

Mme Setlakwe : ...et en responsabilités supplémentaires au niveau de la gouvernance, de la gestion centralisée de l'identité numérique nationale de même que la responsabilité de fournir aux ministères et organismes les services relatifs, la création d'un registre de l'identité numérique nationale, le développement d'une vision globale des infrastructures et des services de télécommunications, le développement et l'exploitation d'un réseau d'infrastructures de connectivité en lien avec les services en télécommunications, le pouvoir de rendre disponibles aux ministères et organismes, en plus des offres infonuagiques, certains biens et services en technologies spécialisées, l'obligation des ministères et organismes de recourir au MCN pour réaliser des activités de cybersécurité, l'obligation d'aviser le MCN lors d'un bris de confidentialité pouvant causer un préjudice sérieux, le pouvoir de rendre applicable cette obligation à toute personne et à toute entité propriétaire ou exploitante d'un système ou d'une infrastructure essentielle», etc.

Oui, on comprend que ce jeune ministère, donc, a beaucoup de pouvoirs, a beaucoup de responsabilités et, en soi, on n'a... on n'est pas contre le principe, mais il faut s'assurer que tous ces engagements, tous ces pouvoirs, toutes ces obligations peuvent être réalisés.

«Globalement, le SPGQ — donc le syndicat — est favorable à ce que le MCN se voie octroyer des pouvoirs supplémentaires par le projet de loi n° 82. Se basant sur l'expertise et l'expérience de ses membres — parce qu'ils ont des membres au ministère de la Sécurité... Cybersécurité et Numérique — le SPGQ identifie cependant un certain nombre de facteurs clés de réussite pour la mise en œuvre du projet de loi n° 82 et l'ensemble des pouvoirs existants que la loi confère au MCN depuis sa création au début janvier 2022.»

Il y a trois... trois facteurs clés de réussite qui sont mis de l'avant, on en a déjà parlé, il faut... il faut les réitérer, M. le Président : «diminuer la dépendance du gouvernement face à la sous-traitance en technologies de l'information et de la communication; moderniser rapidement la classification des emplois en technologies de l'information et de la communication et les conditions de travail pour tenir compte des réalités du marché de l'emploi en technologies de l'information et de la communication; procéder à l'embauche de ressources internes pour combler les postes vacants le plus rapidement possible, notamment des ressources qui font de la programmation ainsi que de l'analyse et de l'architecture organiques».

Donc, ces trois points-là, les facteurs clés de réussite, diminuer la dépendance à la sous-traitance, moderniser rapidement la classification des emplois en TIC, procéder à l'embauche de ressources internes pour combler les postes vacants le plus rapidement possible, tout ça relève de la présidente du Conseil du trésor. Il faut qu'on puisse échanger avec elle, M. le Président, et c'est... notre demande va dans ce sens, et nous avons hâte d'entendre la réponse du ministre, à savoir s'il va donner suite à notre demande.

Allons-y, donc, au niveau de la dépendance du gouvernement à la sous-traitance. Dans des rapports... plusieurs rapports en 2012, 2014, 2015 et 2018, le VGQ, donc Vérificateur général, «s'inquiétait du recours important du gouvernement aux ressources externes et à la sous-traitance en technologies de l'information et de la communication, particulièrement dans les fonctions stratégiques. Dans son rapport de 2018, le VGQ exprimait ses préoccupations à l'égard des fonctions stratégiques confiées à des ressources externes. En fait, les ministres... les ministères et organismes avaient encore recours au secteur privé pour combler des besoins pour des activités de niveau stratégique. Le recours fréquent aux ressources externes dans le but de combler des besoins pour des activités de nature stratégique expose les entités à des risques liés à l'intégrité du processus de gestion contractuelle. En effet, les ressources externes sont près des personnes qui prennent les décisions et elles peuvent influencer, notamment les orientations et les décisions stratégiques.» C'est assez important, M. le Président, qu'on s'assure d'avoir les... suffisamment de ressources à l'interne.

Je continue de citer le mémoire du SPGQ : «Les entités doivent demeurer vigilantes, notamment parce que les défis de recrutement et de rétention du personnel ayant l'expérience et les compétences nécessaires dans ce domaine demeurent encore bien présents. Malgré le fait que l'ajout d'effectifs supplémentaires ait été autorisé pour diminuer le recours aux ressources externes et reprendre la maîtrise des fonctions stratégiques, le VGQ plaidait en faveur que le gouvernement se dote d'un portrait suffisamment complet lui permettant de suivre et d'apprécier dans quelle mesure les ministères et organismes détiennent les compétences nécessaires pour mener à terme leur mission.»

Donc, toute cette question d'avoir un portrait de main-d'oeuvre en ressources... ici, on parle en ressources informationnelles et en ressources internes...

Mme Setlakwe : ...et externes, etc., le nombre de postes vacants, ce sont des données dont dispose le Secrétariat du Conseil du trésor. Je pense qu'il serait important que nous, parlementaires, puissions bénéficier d'un inventaire à jour de ces ressources avant d'ajouter un projet, là, sur la table à dessin du ministère de la Cybersécurité et du Numérique.

De 2022... de 2020 à 2022, dernière année de données disponibles, on remarquait que les secteurs public et parapublic, de même que de la santé et des services sociaux, enregistraient une augmentation sensible du nombre des ressources externes. Il serait intéressant de voir ce qui se passe au sein du MCN, d'avoir un portrait à jour.

Le SPGQ a sondé ses membres sur la sous-traitance en 2023. Voici les principales conclusions de ce sondage. La sous-traitance, elle est coûteuse. Les taux journaliers moyens demandés par les consultants peuvent s'élever à près du double ou plus que celui d'une ressource interne. C'est une question de saine gestion des finances publiques. C'est l'argent des contribuables, dont on parle ici, donc assurons-nous d'avoir un portrait juste avant d'ajouter ce projet, encore une fois, à la table à dessin. «Des étapes névralgiques qui devraient toujours être réalisées à l'interne pour des raisons d'efficacité et afin d'éviter des conflits d'intérêts, selon le VGQ, sont effectuées par des consultants. Le transfert d'expertise est souvent inadéquat et favorise la dépendance envers les consultants. La dépendance envers les consultants est encore bien réelle et fortement présente. L'efficience des travaux réalisés en sous-traitance pose souvent un problème en comparaison avec ceux réalisés à l'interne. Dans plusieurs contextes, les difficultés de recrutement incitent le gouvernement à faire appel à des consultants.

«Les membres en technologies de l'information et de la communication du SPGQ dans les ministères et organismes, dont le MCN, constatent qu'il y a toujours du budget pour les contrats en sous-traitance. Cependant, des employés occasionnels en technologies de l'information seront mis à pied lorsqu'on peine à combler les postes vacants dans plusieurs secteurs d'expertise. Des contrats de service externes, habituellement pour des termes de trois ans, sont renouvelés perpétuellement. Certains de ces contractuels sont présents dans nos milieux de travail depuis plus de 20 ans. Le non-respect fréquent des budgets et des échéanciers dans les contrats de sous-traitance en technologies de l'information est un irritant.

• (12 h 20) •

«Les membres, Technologies de l'information et de la communication du SPGQ, sont préoccupés par les répercussions financières et sur la capacité du gouvernement à réaliser ses objectifs de la dépendance de ce dernier aux firmes privées responsables de la création de services informatiques fermés.» Et là ils ont... ils mettent de l'avant, donc, toutes ces préoccupations et toutes les répercussions financières liées à cette dépendance à l'externe. En deux mots, là, c'est... c'est temps et argent.

Le recours aux logiciels... logiciels... aux systèmes informatiques fermés versus logiciels libres, on aura l'occasion d'en reparler, mais il mentionne que : «Le SPGQ est d'avis que le recours aux logiciels libres, l'interopérabilité de systèmes ainsi que la programmation par des ressources internes éviteraient les situations déplorables, les irritants liés à la dépendance à l'externe et des systèmes informatiques fermés.

«Le SPGQ craint que le projet d'identité numérique national soit victime des mêmes situations s'il est confié au secteur privé. Les données confiées au privé dans le cadre de ce projet sont très sensibles.

«Le projet de loi n° 82 donne la possibilité au gouvernement de faire affaire avec des entreprises nationales et internationales pour le développement de l'identité numérique.» On pourra revenir au libellé en question.

Il y a même la question aussi du fait que le gouvernement sous-traite, donc, les données : «Et, une fois que le gouvernement a sous-traité les données, il est à la merci des fournisseurs et parfois sous la juridiction du pays où les données sont stockées.» Ça aussi, on pourra y revenir, sur l'hébergement des données aux États-Unis.

«Le transfert d'expertise ne se fait pas même s'il est mentionné dans les contrats. Les entreprises sont déjà en train de préparer les prochains contrats pour l'entretien des systèmes. On nous dit que les organismes publics gèrent beaucoup de deniers personnels avec peu de moyens. Un des facteurs clés du succès du projet de loi n° 82 serait que le MCN priorise les organismes avec peu de moyens pour implanter les meilleures pratiques en matière de sécurité et de gestion des données.» Des sujets qu'on va devoir aborder à fond. Le...

Mme Setlakwe : ...le deuxième volet du mémoire du SPGQ traite de la modernisation de la classification des emplois en technologies de l'information. Le SPGQ est d'avis que le gouvernement du Québec doit moderniser son système de classification des emplois professionnels, notamment en TIC, technologies de l'information et de la communication. Pour le Secrétariat du Conseil du trésor, la classification des emplois... bon, on sait c'est quoi, c'est l'ensemble des règles qui régissent le classement des personnes selon une structure d'emploi déterminée. Il serait vraiment intéressant de pouvoir échanger avec elle, M. le Président. Les emplois professionnels, qui sont généralement liés à la conception, au développement, à la mise en œuvre de politiques, programmes, etc., bon, ce sont... bien oui, les emplois professionnels, c'est ça, sont liés à la conception, à des volets stratégiques. Les connaissances et les habiletés minimales requises nécessitent des niveaux d'études supérieures. Mais le point qu'il met de l'avant, c'est que le SPGQ pense qu'il faudrait à la base sortir les TIC de la classe 108, et donc créer une catégorie pour les analystes de l'informatique et une autre pour les analystes des procédés administratifs. Il faut également distinguer les différents types d'emplois en TIC pour offrir des conditions de travail et de salaire plus concurrentiels par rapport aux mêmes types d'emplois dans le secteur privé.

Il existe un écart important en ce qui a trait aux conditions de salaire et de travail en technologies de l'information au gouvernement du Québec et celles en technologies de l'information des secteurs privés et autres publics. Et cela a pour conséquence que le gouvernement n'arrive pas à se doter... à doter certaines catégories de postes, ce qui le rend vulnérable et dépendant de la sous-traitance.

Donc, tous ces éléments qui sont mis de l'avant doivent être pris au sérieux et doivent être discutés. On doit pouvoir entendre la présidente du Conseil du trésor, à savoir elle planche sur quoi. Est-ce que c'est quelque chose sur lequel elle travaille? Quel sera l'échéancier? Quelle est sa vision? À quel moment est-ce qu'on pense que les ajustements nécessaires, le cas échéant, seront mis en place pour qu'on puisse donc recruter des ressources à l'interne?

On sait très bien qu'il y a des emplois qui sont prisés, prisés par le public et le privé, notamment les développeurs ou codeurs, et que le gouvernement peine à les attirer. Mais on doit se demander quelles sont les pistes de solution, M. le Président. Et la personne qui va pouvoir nous rassurer, avec qui on va pouvoir échanger, ce serait la présidente du Conseil du trésor.

L'expertise interne en technologies de l'information évolue constamment. Tout employeur dans ce domaine devrait tenir un inventaire minutieux de l'expertise des gens qui travaillent pour lui pour construire des équipes TIC efficaces et complètes.

Un autre volet important de leur mémoire, c'est l'embauche de ressources internes, évidemment. Selon le syndicat, si le gouvernement revoit la classification, il deviendra plus concurrentiel par rapport aux autres employeurs et sera en meilleure posture pour embaucher de nouvelles ressources. Il pourra alors substantiellement diminuer son nombre de postes vacants qui oscillait entre 7,8 % et 16,3 % en 2022, dépendamment de différents critères. Si le gouvernement devient attractif et cesse de recourir à la sous-traitance, les consultants actuellement à l'emploi de firmes privées accepteront des postes au sein du gouvernement. Des équipes internes qualifiées et maîtrisant la mission gouvernementale pourront ainsi s'acquitter avec succès des nouvelles responsabilités dévolues au MCN dans le projet de loi n° 82.

C'est un mémoire qu'on doit absolument prendre au sérieux. Ce sont des préoccupations qui nous viennent, M. le Président, d'employés qui sont là, qui sont à l'œuvre, des professionnels, des ressources précieuses qui, dans le cadre de leur activité quotidienne, observent des choses, constatent des choses. Ils sont eux aussi des contribuables. Nous sommes tous des contribuables québécois. On veut tous... Évidemment, on n'est pas en train de dire qu'il y a une solution miracle, mais il doit bien y avoir une solution, il doit bien y avoir un plan, il doit bien y avoir une vision. Et celle qui pourrait nous informer, celle qui pourrait nous éclairer, celle qui pourrait fournir un apport significatif et essentiel à nos travaux dans le cadre du projet d'identité numérique nationale, c'est la présidente du Conseil du trésor. Donc, en tout respect, on soumet qu'il est essentiel qu'elle puisse participer à nos travaux, encore une fois dans l'optique de pouvoir rassurer la population qu'on s'en va dans la bonne direction.

On comprend aussi que les choses ne vont pas se régler du jour au lendemain...

Mme Setlakwe : ...mais quand j'entends le ministre en consultation dire ça ne relève pas de moi, ça relève de ma collègue, je ne peux pas vous répondre, je ne peux pas fournir des réponses, des informations claires et précises aux éléments que vous soulevez, on va parler d'autre chose, bien, nous, notre devoir, c'est de ramener le débat sur l'ensemble des enjeux. Puis l'enjeu des ressources humaines au sein du MCN, c'est un enjeu fondamental, M. le Président.

Je vous laisse sur un autre extrait de cet excellent mémoire. Ils font... Ils ont fait référence spécifiquement à la conduite du projet SAAQclic, M. le Président. Les professionnels avaient demandé de retarder le lancement du projet pour faire plus de tests afin de s'assurer du bon fonctionnement du programme. On ne les a pas écoutés et on n'a pas respecté leur expertise. Est-ce que, cette fois-ci, on peut, s'il vous plaît, les écouter et entendre la présidente du Conseil du trésor? Merci.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci à vous, chère collègue. Est-ce que... Oui. Alors, je vois que la députée de La Pinière souhaite intervenir, et vous disposez, madame, de 30 minutes.

• (12 h 30) •

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, bien sûr, je fais écho, je fais mienne la motion qui a été déposée par ma collègue, la députée de Mont-Royal—Outremont, pour qu'on puisse entendre dans cette commission la présidente du Conseil du trésor. C'est important parce que le projet est d'une telle envergure et un tel potentiel d'être structurant qu'il faut s'assurer d'avoir les moyens, que ce soit les ressources à l'interne ou les moyens financiers de le mener à bien. Alors, la présidente du... En fait le conseil... le Conseil du trésor est un comité qu'on... un comité permanent du Conseil des ministres, vous le savez, avec la présidente donc du Conseil du trésor, qui est la ministre responsable de l'Administration gouvernementale. Et il y a des ministres qui y siègent, qui sont aussi des ministres très importants. Tous les ministres sont importants, mais je pense, par exemple, au ministre du Travail, au ministre responsable des Infrastructures. Je souligne ces deux-là parce qu'on sait que ce sont des... Les travaux qu'ils font et l'agriculture aussi sont structurants, doivent être structurants et ont un impact sur, je dirais, sur la vie des gens, oui, mais sur les ressources dont l'ensemble du gouvernement peut disposer. Et je pense que, donc, la présidente du Conseil du trésor, puisque le ministre de la Cybersécurité et du Numérique nous a dit en commission qu'il ne pouvait pas répondre aux questions relativement aux ressources humaines, aux compétences à l'interne, je pense que sa présence est un incontournable.

La présidente du Conseil du trésor doit voir à ce qu'on s'assure d'avoir les ressources à l'interne, autant pour la planification du projet, et c'est un projet d'envergure, autant pour la réalisation du projet et pour ce projet. Parce qu'il faudra accompagner les citoyens dans tout ça. Une fois, là, que le projet va avoir vu le jour, que tout va avoir été testé, peaufiné à l'interne, on l'espère, que les personnes dans la fonction publique qui ont à s'en servir vont avoir été formées, vont être capables de s'en servir au jour le jour sans écueils, il va aussi falloir que la fonction publique, en fait, les personnes dans la fonction publique qui sont en... qui sont sur la première ligne soient capables d'accompagner les citoyens là-dedans. Et j'illustre cette nécessité-là, ce besoin-là d'accompagner les citoyens par un exemple qui nous a été donné dans le mémoire du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, le SFPQ, en page 9 de son mémoire, qui nous dit que plusieurs services offerts à la population impliquent des dossiers complexes nécessitant une intervention humaine et un accompagnement pour en assurer le traitement adéquat, exemple, aide sociale, prestations de la CNESST...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Caron : ...etc. Dans ces cas, le contact humain est essentiel pour assurer un service de qualité aux citoyens et répondre à leurs besoins de manière efficace. Un recours accru aux services numériques propulsé par l'identité numérique nationale s'il n'est pas suivi d'un accompagnement humain adéquat risque d'être un échec dans plusieurs cas. La compréhension des droits ainsi que des décisions effectuées dans son dossier par le citoyen risquent de pâtir de cette dématérialisation. Un tel projet fait également courir le risque d'une augmentation des erreurs administratives dans les dossiers complexes. De plus, dans un contexte où les ministères et les organismes publics devront systématiquement utiliser les données déjà mises à leur disposition via l'identité numérique nationale, il existe un risque d'erreur supplémentaire si ces mêmes données venaient à être modifiées par un événement, comme un changement d'adresse».

Alors, tout à l'heure, je faisais référence aux personnes qui ne voudront pas ou ne pourront pas utiliser l'identité numérique nationale parce qu'en raison de difficultés de littératie ou bien de littératie numérique, je donnais un exemple, l'exemple d'une personne qui a besoin de prendre rendez-vous au Tribunal administratif du logement et qui est obligée de passer par un organisme communautaire, parce que cette personne n'a pas les moyens d'avoir les outils technologiques et le forfait de données ou de wifi chez elle pour pouvoir prendre le rendez-vous. Mais si en plus la personne a de la difficulté à bien comprendre ce qu'elle lit, si tout ce qui est... tout son dossier tout est bien expliqué, même si c'est très bien expliqué sur un site Web, elle va s'y perdre et elle aura de la difficulté à aller, j'utiliserais l'expression juridique aller en appel, même si ce n'est pas l'expression la plus juste ici, mais pour parler à une autre personne, si tout doit se faire, doit se faire en ligne. Je ne crois pas que l'objectif du projet de loi soit de tout faire en ligne, on veut, mais il faut maintenir les services en personne. Mais même si on fait les choses en ligne — et c'est pourquoi j'y fais référence — on a besoin de ressources humaines pour accompagner les citoyens et même, je dirais, les utilisateurs dans les autres ministères ou organismes. Alors, qui peut nous enligner, je dirais, qui peut nous rassurer sur le fait que les ressources pourront être là, les ressources humaines à l'interne du gouvernement, aux ministères, et ailleurs? Parce que, dans les autres ministères aussi, c'est un projet qui va avoir un effet transversal, bien entendu, sur l'ensemble des ministères et organismes qui vont s'en servir. Alors, il faudra s'assurer que soit des ressources en place sont formées pour pouvoir accompagner les citoyens, pour pouvoir s'en servir eux-mêmes dans le cadre de leur travail, dans le cadre des tâches qu'ils ont à faire, tout comme au ministère lui-même, de la Cybersécurité et du Numérique, là. Le ministre nous a demandé, tout à l'heure, dans ses remarques préliminaires... nous a dit qu'il faut que le... son ministère ait clairement le mandat de ce de ce projet. Alors, là aussi, il faut avoir les ressources nécessaires. Ce qu'on nous a dit en commission parlementaire durant les consultations, c'est que les ressources sont insuffisantes. Ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont nous a d'ailleurs dit que... en référence aux mémoires, que les projets actuellement sur la table ne peuvent même pas se réaliser. Les projets ne peuvent... ne se font pas en raison d'un manque de ressources.

Maintenant, on ne sait pas si ces projets qui ne se font pas est-ce que ce sont des projets qui sont nécessaires pour pouvoir mettre en place le projet d'identité numérique nationale, ça, on ne le sait pas. Peut-être que non, mais je me doute que s'il y a des projets informatiques qui doivent être faits, il y a peut-être un petit lien entre les deux. Dans une conjoncture, un contexte économique...

Mme Caron : ...où le gouvernement a accumulé un déficit record de 11 milliards, ça, c'était, en date, je vous le rappelle, de mars 2024. On est en 2025, près d'un an plus tard. On va bientôt... Il y aura bientôt, dans quelques semaines, le dépôt d'un nouveau budget 2025-2026. Est-ce que les sommes seront au rendez-vous pour réaliser ce projet, ce projet d'identité numérique nationale? On est tous touchés par Santé Québec qui doit faire 1,5 milliard d'économies, qui doit trouver des moyens de couper. On essaie... On dit qu'on ne coupe pas dans les services, mais, tous les jours, tous les jours, on voit, dans des articles, dans le journal, de personnes qui viennent de perdre leur poste, des personnes essentielles qui sont sur la première ligne en santé, qui viennent de perdre leur poste. On va peut-être les mettre ailleurs. Mais les besoins sont tellement grands en santé si on va couper dans l'essentiel, là, est-ce que c'est parce qu'on veut sauver de l'argent pour réaliser ce projet-là? J'en doute, là.

N'en demeure pas moins que si, en santé, on est obligé d'aller couper 1, 5 milliard, considérant qu'on a un déficit record de 11 milliards et qu'on ne sait pas encore quel sera le déficit qui nous sera annoncé au budget dans quelques semaines; considérant que le ministre des Finances a dit également en période de questions, ce matin, qu'il y avait un plan de redressement des finances publiques... en fait, un plan d'équilibre budgétaire, évidemment qu'il ne va pas... sûrement pas réaliser en une année, parce que le déficit est beaucoup trop gros, mais il va sûrement avoir un plan étalé sur quelques années pour revenir à l'équilibre budgétaire.

Dans ce contexte-là, moi, ce que j'aimerais savoir, et je pense que c'est ce que ma collègue veut savoir, et probablement les citoyens aussi, quel est le plan de la présidente du Conseil du Trésor pour doter le ministère de la Cybersécurité et du Numérique des ressources nécessaires à l'interne? Et là il ne s'agit pas, dans ce cas-là, juste de dire: On a besoin... On évalue qu'on a besoin de tant de personnes qui jouent tel rôle, pendant tant de temps, pour réaliser ce projet-là. Parce qu'on nous a dit, en commission parlementaire, durant les consultations, qu'on avait du mal à retenir des analystes, des programmeurs. Le seul titre qu'on peut leur accoler, c'est le titre d'analyste, et que la rémunération n'est pas du tout compétitive avec ce qu'un programmeur-analyste peut aller chercher au privé, peut-être qu'on peut en avoir des plus jeunes qu'on forme et qui s'en vont, on peut les comprendre, travailler ailleurs par la suite.

• (12 h 40) •

Pour un projet d'une importance et d'une ampleur et d'une envergure comme celui de l'identité numérique nationale, on a besoin de gens chevronnés. On a besoin des meilleurs pour que le projet soit bien fait, pour qu'il fonctionne au bout du compte, et qu'il remplisse son rôle, et qu'il permette au gouvernement, qui nous dépose le projet de loi 82, d'atteindre son objectif de faciliter, simplifier l'accès aux services à la population, y compris, comme je l'ai dit tantôt, la population qui ne pourra pas utiliser le service d'identification numérique. Une des raisons qu'on nous a dite pour cette incapacité à retenir des programmeurs, c'est l'incapacité de les rémunérer correctement. Parce que ça fait tellement longtemps qu'on a les chartes ou les listes d'emploi, avec les titres, et que ça n'a pas été mis à jour, qu'on ne sait pas trop où les placer.

Alors ça, c'est un c'est un travail d'envergure. J'imagine que la présidente du Conseil du trésor a déjà commencé à y travailler depuis le temps qu'elle est dans...

Mme Caron : ...ses fonctions. Mais ce que j'aimerais qu'elle nous dise en commission parlementaire, dans le cadre du projet de loi n° 82, c'est où elle en est. Est-ce que ça va être possible, non seulement, comme je disais tout à l'heure, d'identifier le nombre de personnes, le type de poste, le type de travail, de rôle que les personnes seront en mesure de jouer pour réaliser le projet? Et combien ça va coûter, pas uniquement ça, quoique c'est... c'est... c'est majeur, mais est-ce que ce sera possible de le faire dans le cadre actuel?

Alors, si le travail... si le travail n'a pas commencé pour créer ces nouvelles classes d'emploi avec des... avec lesquelles on peut avoir une rémunération qui concurrentielle pour pouvoir embaucher les personnes qu'il nous faut, les personnes qu'il faudra au ministère de la Cybercité et... la Cybersécurité et du Numérique, bien, si le travail n'est pas fait, quel est l'échéancier pour le faire? Parce que, de toute évidence, on en a besoin. Et, si le travail est amorcé, ce qui serait une très bonne nouvelle, bien, il reste combien de temps avant que ça puisse être mis en place? C'est... C'est majeur. C'est... C'est à la base. C'est... C'est vraiment... Hein? On ne peut pas... On ne peut pas dire : je vais construire la maison puis je n'ai personne qui a un marteau pour le faire ou qui est capable de se servir d'un marteau.

Alors, ici, on a un projet énorme, d'une grande ampleur, d'une grande importance. Et on comprend, on se l'est fait dire, si on ne le savait pas, on se l'est fait dire en commission parlementaire, que le Québec était 10 ans en retard sur d'autres législations par rapport à ce projet-là. Alors, je comprends que le gouvernement veut aller de l'avant, et je suis d'accord pour aller de l'avant, mais avons-nous les bases nécessaires pour le faire? Et, les ressources humaines, bien, c'est absolument essentiel.

Une fois qu'on a dit ça, est-ce qu'on est capables d'accueillir dans notre système, avec nos classifications de postes, les personnes qui ont l'expérience et les connaissances et les compétences nécessaires pour faire le travail? Et, une fois qu'on a franchi cette étape-là, est-ce que le gouvernement a l'argent nécessaire pour faire ce travail-là, pour réaliser ce projet-là? Et, comme je le disais tout à l'heure, pas uniquement le planifier et le réaliser, mais les suites après, là, pour pouvoir accompagner autant le personnel qui aura besoin de se servir du système que les... d'accompagner les citoyens qui auront besoin des services publics et qui auront besoin d'aide dans tout ça.

Alors, la présidente du Conseil du trésor, puisque la ministre nous a dit qu'il n'avait pas ces réponses-là, bien, je pense que la présidente du Conseil du trésor est la personne la mieux placée pour venir... pour venir nous renseigner. Et ce n'est pas un projet qu'on doit prendre à la légère. Ce n'est pour un projet de loi qu'on doit prendre à la légère. Il faut avoir toute l'information nécessaire. Et la présidente du Conseil du trésor pourra nous en fournir un bon... un bon pan.

Pourquoi... Pourquoi on s'attarde à cela et pourquoi c'est si important d'avoir l'expertise à l'interne? Bien, c'est justement pour ne pas dépendre d'une entreprise privée, pour ne pas dépendre d'une entreprise étrangère.

Le gouvernement a, je crois, une très bonne idée en voulant utiliser le code libre, un code libre pour son système. Mais, ce qu'il faut savoir, c'est que le code libre, il est mis à jour par la communauté des utilisateurs du code libre. Et ce serait peut-être bien qu'on ait à l'interne des membres de cette communauté, des utilisateurs capables de procéder aux mises à jour du code libre aussi pour que le gouvernement ne se retrouve pas, du jour au lendemain, à avoir un code libre, oui, mais qui ne suit pas adéquatement... qui ne va pas assez vite pour les mises à jour dont le gouvernement aurait besoin. Alors, c'est important d'avoir ces compétences-là à l'interne.

Aussi, si tout va en sous-traitance, c'est sûr que si on disait : Bien, pas besoin de la présidente du Conseil du trésor pour venir nous...

Mme Caron : ...nous parler de son plan pour intégrer des personnes, des programmeurs qui ont l'expérience, et les connaissances, et les compétences au sein du ministère de la Cybersécurité et du Numérique. On veut tout donner en sous-traitance, et là c'est là que beaucoup de groupes nous ont mis en garde durant les consultations. Si on mise sur la sous-traitance pour réaliser ce projet là, bien, on n'a aucune expertise à l'interne au gouvernement. C'est trop important. On parle de nos données, de nos données personnelles. C'est trop important pour que ce soit confié à l'externe.

Et ma collègue de Mont-Royal—Outremont a fait référence à un élément qui a été dit durant les consultations en commission parlementaire. Dans certains ministères, il y a des externes qui sont là depuis 20 ans. Je ne sais pas, là, mais des externes qui sont là depuis 20 ans, ça, c'est parce qu'on n'est pas capable de les rémunérer à l'intérieur de nos systèmes, à l'intérieur de la machine. On ne veut pas répéter ça dans le cadre d'un système d'identité numérique nationale, qui revêt une telle importance, parce que nos données personnelles y seront. On veut s'assurer... hein, on a... il y a eu plusieurs... plusieurs enjeux qui nous ont été amenés en commission parlementaire. La question des données biométriques, de baliser correctement les données biométriques. On a parlé de traçabilité, la traçabilité des transactions, d'être capables que, vous et moi, comme citoyens, puissions avoir accès... et voir qui est allé consulter nos données, le journal des transactions, qui est allé consulter nos données. Est-ce que c'est normal ou est-ce que ce n'est pas normal? Si ce n'est pas normal, il faut... il faut... pour avoir une possibilité de dire que ce n'est pas... ce n'est pas normal.

Alors, ça, c'est un des enjeux qui nous a été amené, l'enjeu des... de la traçabilité dans l'autre sens, c'est-à-dire qu'on ne veut pas que le gouvernement ou l'intelligence artificielle qui serait dirigée ailleurs que dans le gouvernement, si tout était en sous-traitance... on ne veut pas que ça puisse suivre exactement tout ce qu'on fait dans la vie de tous les jours. Et, j'insiste, ce n'est pas l'objectif, là, du projet de loi, ce n'est pas l'objectif du gouvernement, mais pour s'assurer qu'il n'y a pas des gouvernements externes ou des entreprises privées externes qui mettent la main là-dessus, il faut avoir la maîtrise d'œuvre et d'opérationnalisation, et le contrôle au sein du gouvernement, et, pour ça, on a besoin des ressources à l'interne et on a besoin de la présidente du Conseil du trésor pour venir nous dire ce qu'il sera possible de faire et quel est son plan.

M. le Président, est-ce que j'ai écoulé mon temps?

• (12 h 50) •

Le Président (M. Simard) : Non, madame, il vous reste 7 min 42 s, pour être très, très précis.

Mme Caron : D'accord, parce que je voyais votre regard et, comme je n'ai pas allumé mon chronomètre...

Le Président (M. Simard) : Ah! non, non, je vous ferai signe.

Mme Caron : ... je pensais que j'arrivais... j'arrivais au temps...

Le Président (M. Simard) : Je vous ferai signe lorsqu'il restera une minute.

Mme Caron : D'accord, merci.

Le Président (M. Simard) : C'est que je suis très attentif à vos propos. Voilà pourquoi.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors donc, je reviens sur le fait que le syndicat de... voyons... le SFPQ, donc le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec nous a mis... nous a fait plusieurs mises en garde, donc, sur la sous-traitance, qui était le sujet où j'étais juste avant, là. Et donc il faut avoir... il faut avoir les ressources à l'interne, et, pour ça, bien, il faut que les élus qui sont responsables de cela, notamment la présidente du Conseil du trésor, puissent nous dire si c'est, effectivement, faisable, et il faut trouver un moyen de le faire. Il faut que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique ait les coudées franches, je dirais, bien entendu, dans un certain cadre budgétaire.

Mais il faut que tout le monde qui... dont on a besoin pour bâtir la maison puisse être là, et qu'il n'y ait pas de brèches du secteur privé ou de d'autres pays pour avoir un accès à nos données ou contrôler... tu sais, mettre le gouvernement dans une situation où, bien, il n'a pas le...

Mme Caron : ...de toujours payer plus, plus, plus pour... parce qu'il est dépendant de l'externe, du privé.

L'autre... l'un des autres points qui nous a été soulevé durant les consultations, c'est la question de l'infonuagique. Alors, l'infonuagique, bien, il y a... tout le monde connaît AWS, donc l'infonuagique d'Amazon. On n'aurait pas eu cette conversation-là, peut-être, il y a six mois parce qu'on faisait confiance que ce soit... que l'infonuagique soit dans les mains d'une entreprise au Canada ou aux États-Unis. On était... tout était... notre économie est tellement intégrée, on est des alliés depuis presque toujours. On n'aurait pas eu cette conversation-là parce qu'on faisait confiance. Aujourd'hui, on a un éveil un peu brutal, un réveil un peu brutal, et on se dit qu'effectivement, au Québec, c'est le gouvernement québécois qui doit nous protéger, c'est le gouvernement québécois qui doit protéger nos données.

Alors, il faut regarder toute cette question-là aussi. Avons-nous les ressources, au Québec, pour le faire? Je conviens que l'infonuagique ne se fera pas à l'interne du gouvernement, là, ce ne sera pas à l'intérieur du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, à moins qu'on annonce autre chose, mais c'est une question qui est importante aussi. Puis il faut qu'on ait... si je fais référence à ça, c'est qu'il faut qu'on ait, au gouvernement, au sein du ministère... il faut aussi avoir des personnes qui sont des salariés du ministère, qui ont l'expertise de conseiller du ministère. Donc, ne pas aller... ne pas dépendre de l'externe pour conseiller le ministère sur ce qui est le mieux à faire pour l'infonuagique, pour le stockage de nos données, mais bien avoir cette expertise-là à l'interne. Puis c'est peut-être plate, et c'est comme ça dans d'autres domaines, en génie, par exemple, mais la façon dont les choses fonctionnent, tout est balisé, ça doit l'être aussi, mais on a... au gouvernement, on n'a pas toujours les moyens à l'interne, rarement d'ailleurs, d'avoir des personnes qui ont des expertises techniques avec une compétence, une expérience de longue date pour nous protéger, et on va souvent en sous-traitance pour ce genre de projet là. Ici, c'est trop important, les données sont trop cruciales pour qu'on se permette de faire ça.

Donc, il faut que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique s'assure d'avoir le budget nécessaire dans le budget de cette année, mais dans les suivants aussi pour réaliser ce projet là, pour avoir les ressources à l'interne pour le faire. Puis il faut que la présidente du Conseil du trésor puisse venir nous dire de quelle manière elle va s'y prendre pour que le ministère puisse embaucher les personnes qui ont la compétence, l'expertise, et puis l'expérience pour leur donner des... leur offrir des conditions de travail, une rémunération globale qui sera compétitive pour pouvoir les embaucher, pour pouvoir les retenir aussi et que vraiment le ministère ait la maîtrise d'œuvre de ce projet-là,et qu'on ne soit pas à la merci d'entreprises privées auxquelles on sera attaché pendant trop d'années et qu'on puisse s'assurer de bien faire les choses pour les Québécois.

Parce que, comme je l'ai dit depuis tout à l'heure, comme ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont l'a dit aussi, c'est un projet qui a un très grand potentiel d'être structurant. On veut qu'il fonctionne, on veut faciliter la vie des Québécois, mais on veut aussi protéger les Québécois en même temps et protéger leurs données et s'assurer qu'il y aura toujours des personnes en place au gouvernement pour assurer le contrôle de tout cela, pour être capable de mettre en œuvre les recommandations de la Vérificatrice générale du Québec. On comprend que les vérifications qu'elle a faites... les recommandations s'adressaient à des projets particuliers dans des ministères particuliers, mais il y avait beaucoup de points très pertinents qui, si on ne fait pas les mêmes...

Mme Caron : ...on ne fait pas les mêmes... on n'a pas les mêmes précautions, les précautions qui découlent de ces recommandations, bien, si on ne fait pas les mêmes précautions dans ce projet ci, bien, on risque de ne pas... de manquer le coche, finalement, et puis de ne pas bien protéger nos données des Québécois et de bien réussir ce projet. Alors, vivement que la présidente du Conseil du trésor puisse venir nous exposer son plan. Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, chère collègue. Y aurait-il d'autres interventions? M. le ministre, vous disposez de 30 minutes pour ce faire. Pas d'intervention. Alors, compte tenu de l'heure, il me faut vous partager une information très importante.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Pardon?

M. Caire : ...d'ici 13 heures. On a le temps de voter la motion.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, nous sommes prêts à procéder au vote sur la motion. Est-ce que cette motion...

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Pardon?

Mme Setlakwe : ...par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous en prie.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?

Mme Setlakwe : Pour. Et déçue de ne pas avoir eu de réponse de la part du ministre.

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît, sans commentaires.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Pour.

Le Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

Le Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

Le Secrétaire : Mme Mallette (Huntingdon)?

Mme Mallette : Contre.

Le Secrétaire : Mme Abou-Khalil (Fabre)?

Mme Abou-Khalil : Contre.

Le Secrétaire : M. Thouin (Rousseau)?

M. Thouin : Contre.

Le Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

Le Secrétaire : Et M. Simard (Montmorency)?

Le Président (M. Simard) : Abstention. Cette motion est donc rejetée.

Compte tenu de l'heure, je vous avise du fait qu'évidemment nous sommes mercredi. Et qui dit mercredi, dit motion du mercredi, motion qui aura lieu cet après-midi en cette Chambre. Conséquemment, nos travaux seront dans la salle Kirkland à 15 heures. Je suspends donc nos travaux.

(Suspension de la séance à 13 heures)


 
 

14 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 03)

Le Président (M. Simard) : Alors, à l'ordre, chers collègues! Nous sommes en ondes. J'aimerais vous souhaiter la bienvenue.

Comme vous le savez, la Commission des finances publiques reprend ses travaux afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions.

Et, avant de débuter, je tiens à saluer la présence de stagiaires de la Fondation Bonenfant qui sont parmi nous cet après-midi dans le cadre de leurs travaux. Donc...


 
 

15 h (version non révisée)

Le Président (M. Simard) : ...Ceci étant dit, ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont m'avait signifié son intention de nous soumettre une motion préliminaire. Alors, chère collègue, la parole est à vous. Cette motion se retrouvant déjà sur Greffier.

Mme Setlakwe : Merci, M. le Président. Donc, je vais en faire la lecture. Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, demande au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de transmettre à la commission, dans les plus brefs délais, un état de situation complet de l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Chère collègue, nous vous écoutons.

Mme Setlakwe : Merci. Mais, écoutez, c'est une question qui est dans l'air du temps. On en parle beaucoup ces jours-ci avec le contexte politique qui plane aux États-Unis, les menaces qui planent de la part de l'administration Trump. On doit se questionner. Je ne dis pas que le gouvernement ne le fait pas, mais le gouvernement doit se questionner sur sa dépendance et ses liens contractuels avec des entreprises américaines plus particulièrement, évidemment, dans le... en l'occurrence, c'est la question des données, de l'hébergement, des données qui nous intéresse, la question de l'infonuagique. Et puis je pense qu'il serait extrêmement pertinent, M. le Président, qu'on obtienne un état de situation complet quant à l'hébergement des données avant qu'on débute l'étude détaillée, parce que la question de l'hébergement local a été soulevée à maintes reprises et c'est une préoccupation tout à fait légitime. D'ailleurs, il y a eu beaucoup d'articles de presse récemment. Et les ministres, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a fait des déclarations dans l'espace public, le premier ministre également. On comprend que le gouvernement du Québec réévalue actuellement 179 millions en contrats avec Amazon. Ça faisait l'objet récemment d'un article dans Le Devoir, sous la plume de François Carabin et Marie-Michèle Sioui, où notamment donc on soulève que le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a confirmé que son gouvernement avait commencé à passer au peigne fin ses contrats actifs avec Amazon, depuis que l'entreprise appelait décision de fermer l'ensemble de ses entrepôts québécois. Donc, ça, c'est une nouvelle qui est toute récente et qui, en fait, n'a fort probablement rien à voir avec les ambitions du président Trump. Mais ça demeure quand même très pertinent de se poser la question spécifique par rapport à Amazon.

Je poursuis. Donc, le ministre aurait même ajouté la volonté de s'émanciper des technologies américaines. Et là, quant au premier ministre, il avait mentionné précédemment au salon rouge : Il n'y a rien dont je rêverais de plus que de remplacer Amazon. Québec dénombre une cinquantaine de contrats d'une valeur de 170 millions de dollars avec l'entreprise de Jeff Bezos. La plupart avec la filiale Amazon Web Services, qui fournit des services et des infrastructures d'infonuagique. C'est ce qui a été expliqué par le ministre de la Cybersécurité et du Numérique. Donc, on se rappelle encore une fois qu'on est sur le point d'entamer l'étude détaillée de ce projet d'identité, de la loi qui va prévoir, donc, la mise sur pied, et les registres, et tous les systèmes entourant donc le déploiement de cette nouvelle identité numérique nationale. Et la question de l'infonuagique et de l'hébergement des données dans un contexte d'assurer notre souveraineté numérique, d'assurer que les données soient bien protégées, d'assurer que le gouvernement américain ne puisse pas mettre la main sur nos données, y accéder comme ça, selon sa bonne volonté. D'ailleurs, en vertu des différentes lois, je vais y arriver, c'est une préoccupation qui nous occupe, c'est une préoccupation, donc, qu'on doit prendre au sérieux. On doit prendre le temps de faire le point, M. le Président, et d'avoir un état de situation complet avant d'en rajouter, avant d'aller de l'avant avec ce nouveau projet qui va forcément impliquer, donc, de l'hébergement de données.

Rappelons-nous, et ça faisait l'objet de l'article en question, qu'une entreprise québécoise, Micrologic, ils sont venus ici en commission et ils sont cités dans l'article du Devoir, je pense qu'ils ont déjà des contrats avec le gouvernement, mais c'est une entreprise qui aimerait en faire plus pour le gouvernement. Ils ont comme rêve aussi de remplacer Amazon. C'est ce qu'ils ont, c'est dans l'espace public. Ça fait 10 ans qu'on...

Mme Setlakwe : ...un cloud québécois", a dit le président Stéphane Garneau. "On a l'impression de ne pas être entendus quand on voit les contrats qui sont envoyés aux Américains." Sa compagnie se spécialise en infrastructures et en centres de données et est plus que prête, selon le président, à prendre le relais d'Amazon et de Microsoft, a-t-il attesté.»

Et puis finalement donc : «Le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a dit qu'il souhaite, comme son premier ministre, que l'État se serve de ces contrats... s'il souhaite, comme son premier ministre, que l'État se serve de ces contrats, il faudra le faire chirurgicalement. On le comprend. On fait l'analyse technologique parce qu'on ne peut pas nécessairement prendre des charges et envoyer ça vers une autre technologie. C'est ce qui était survenu lors du fiasco entourant sa SAAQclic à la Société de l'assurance automobile du Québec. Le ministre, c'est ce qu'il avait rappelé. Donc, on ne veut pas que ça se répète sans aucune considération.»

Donc, écoutez, c'est pour mettre la table, là, pour expliquer le pourquoi on demande cet état de situation. On sait que, de toute façon, le gouvernement est en train de le faire. Le gouvernement se pose les questions. On comprend que ce n'est pas du jour au lendemain qu'on peut... qu'on peut changer les choses. On peut... On est liés par des... par des contrats. Il y a des... Il y a une analyse à faire. Mais on demande que tous les parlementaires soient informés de cette... des résultats de cette analyse et que donc l'état de situation complet de l'hébergement des données numériques pour tous les ministères et organismes soit rendu public.

• (15 h 10) •

Ce n'est pas... Ce n'est pas des caprices de l'opposition officielle, ce ne sont pas des tactiques, là, pour retarder indûment le processus. On pense que, vraiment, il faut aller au fond des choses, M. le Président. Et d'ailleurs, plusieurs experts nous l'ont mentionné durant les consultations ou dans les mémoires qui ont été soumis, en particulier... Et je les ai mentionnés ce matin lors de mes remarques précédentes, l'Observatoire, le OBVIA, qu'on... je n'ai pas le nom complet sous... Observatoire international sur les impacts, merci, sociétaux de l'intelligence artificielle et du numérique, OBVIA, qui a fourni un mémoire fort pertinent et qui était venu en commission, touchent à plusieurs enjeux et ils posent même des questions dans le mémoire. Puis, quand j'ai lu leur mémoire, je me suis dit : Mais, ça, ce sont des questions pour le ministre de la Cybersécurité et du Numérique. «Deux questions demeurent néanmoins... je les cite, deux questions demeurent néanmoins centrales dans ce débat. Y aura-t-il un dispositif infonuagique souverain au Québec pour héberger les données gouvernementales? Qui sera propriétaire des données inférées et des données d'usage? Ce sont des questions, M. le Président, vous me direz, qu'on pourra en discuter lors de l'étude détaillée, mais ce sont... ce ne sont pas forcément des questions qui vont être directement en lien avec un libellé dans le... dans le... dans la pièce législative. C'est un élément qui est central. C'est un élément essentiel dont il faut... dont il faut débattre et qui est absolument... qui est essentiel, donc, au déploiement de ce projet-là, la question de l'hébergement. Ici, les experts posent la question, nous, les parlementaires, on doit s'assurer d'avoir les réponses. Et on pense que l'analyse qui est en cours au sein du gouvernement, elle doit nous être partagée.

Il y a d'autres experts qui sont venus parler de l'importance de l'infonuagique et de l'hébergement. L'Association québécoise des technologies, dans son mémoire, à la première page, parle de gérer les données dans les règles de l'art. Premièrement, favoriser la décentralisation des données auprès des organismes responsables et privilégier l'hébergement local, ils ont bien dit, dans la province du... dans notre province, donc au Québec, idéalement, mais pas à l'extérieur du pays. Assurer la résilience des centres de données à travers une redondance exemplaire. Bon. Mais toute la question de privilégier l'hébergement local a été mise de l'avant aussi par l'Association québécoise des technologies.

La Ligue des droits et libertés, qui nous amène toujours à réfléchir à différents enjeux et dont la contribution est toujours importante dans l'étude des projets de loi, a également évoqué cette question-là dans son mémoire, que je cherche. Oui, elle est ici. Donc, à la page six de leur mémoire...

Mme Setlakwe : ...ils mentionnent que la question se pose, donc, de l'endroit où sont stockées les données de l'identité numérique nationale. Le projet de loi n° 82 n'indique rien à ce sujet. Donc, il ne faut pas attendre l'étude détaillée, M. le Président, là, il faut vraiment échanger sur cette question-là, qui est tout à fait pertinente et surtout dans le contexte actuel. Eux aussi nous disent qu'il faut... il faut la considérer.

Je les... Je continue de les citer : «Le stockage hors frontières ou via des entreprises soumises au contrôle de gouvernements étrangers, notamment américain, peut compromettre la souveraineté numérique du Québec sur les données de ses citoyens.» Et ils nous rappellent : «Rappelons que, depuis 2001, le Patriot Act adopté par... aux États-Unis autorise les services de sécurité américains à accéder aux données détenues par des particuliers ou des entreprises et stockées sur le territoire américain. De plus, depuis mars 2018, le Cloud Act permet à ces mêmes autorités américaines d'accéder aux données hébergées en infonuagerie par un fournisseur américain même si ces données sont stockées à l'étranger.»

Donc, on voit ici que ces deux lois qui touchent les renseignements personnels et qui sont en vigueur, donc, chez nos voisins du Sud, ont des portées extraterritoriales. Et ce n'est pas pour faire peur, là, aux Québécois, mais c'est la réalité, nos données, si elles sont... en vertu de certains contrats, même si elles sont, donc... on pense qu'elles sont gardées chez nous, peu importe, les lois américaines qui s'appliquent à ce type de contrats pour ce type de services ont des portées extraterritoriales et peuvent... et peuvent viser nos données, les données sensibles des Québécois, M. le Président.

Je poursuis. Encore, je me réfère à l'excellent mémoire, donc, du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, que j'ai eu la chance de citer ce matin... a toute une rubrique sur la localisation des données. À la page 15 de leur mémoire, ils continuent de poser des questions très importantes : «Où seront situées les infrastructures de technologies de l'information liées à l'identité numérique? Au Québec? Au Canada? Aux États-Unis? En Europe?»

Donc, encore une fois, est-ce que... quelle est la vision du ministre? Et quel est... Le ministre planche sur quoi actuellement? Quand il fait son analyse, il analyse les contrats qui sont en cours, est-ce que... Est-ce qu'on peut avoir un état de la situation? Est-ce qu'on peut savoir si ces contrats-là... bien, leur durée, les modalités? Est-ce qu'ils peuvent... Est-ce qu'on peut y mettre fin sans pénalité? Comment ça fonctionne si on souhaite changer de fournisseur? Quelles sont les garanties qui sont prévues dans ces contrats-là pour assurer la sécurité des données, assurer que l'accès puisse être limité aux seules personnes dont l'accès est nécessaire, etc.? Avant, donc, encore une fois, de mettre de l'avant un nouveau projet, il faut s'assurer, donc, qu'on aura... il faut qu'on se questionne à savoir à qui est-ce qu'on va confier l'hébergement de ces données si précieuses pour les Québécois.

Je poursuis. Donc, dans leur mémoire, le syndicat des professionnels du gouvernement du Québec mentionne : «Le fait de confier à des entreprises privées internationales autant d'informations sur les citoyennes et citoyens en indispose plusieurs. Cela pose, entre autres, le problème du contrôle des données et de la propriété des renseignements. Si vos données sont stockées dans un autre pays avec des lois différentes des nôtres, comment garder le contrôle? Comment s'assurer du traitement sécuritaire de ces données? Comment exiger des employés en technologies de l'information étrangers une habilitation de sécurité?» Il nous mentionne que «le problème s'est posé avec la mise en place de l'infonuagique gouvernementale. Par exemple, il y a des données sensibles du gouvernement du Québec qui sont situées au Royaume-Uni.» Ce serait intéressant, vraiment, d'avoir un état de situation complet, M. le Président.

Le syndicat pense que toute la question, donc, de la... de l'hébergement et de... et du contrôle sur nos données devrait rester entièrement au Québec. «Les entreprises Microsoft Azure et Amazon qui ont obtenu des contrats externes du...

Mme Setlakwe : ...des infrastructures au Québec pour l'infonuagique. Donc, ce sont donc des lois du Québec s'appliquent, mais en principe. Mais rien ne garantit que ces sites ne pourraient pas fermer. Donc, c'est toutes des questions qu'on doit poser. Il faut vraiment qu'on connaisse les modalités des contrats et qu'on prenne en compte les lois qui ont une portée extraterritoriale. Et c'est là où eux, ici, ils mentionnent l'impact des lois américaines, les deux lois qui touchent les renseignements personnels, qui ont des portées extraterritoriales, donc le Patriot Act et le Cloud Act. Les entreprises américaines sont soumises à ces lois, même à l'extérieur des États-Unis. Donc, même si les contrats prévoient que les données, nos données sont gardées sur des infrastructures au Québec, les entreprises américaines qui sont soumises à ces deux lois là, même si elles opèrent chez nous, elles sont quand même tenues. Donc, ces deux lois s'appliquent à elles quand même. Donc, ces lois permettent au gouvernement des États-Unis d'exiger d'une entreprise américaine de fournir les données qu'il veut.

À l'interne, c'est le nuage gouvernemental du Québec qui est responsable des données infonuagiques. Le problème de la gestion des données à l'externe, c'est que toutes les données sont accessibles aux compagnies privées. Elles peuvent carrément les vendre au plus offrant sans que le gouvernement ou les citoyens soient au courant. Donc, ça, c'était le syndicat des professionnels qui lève le drapeau également.

Et enfin, j'avais noté que le CEST, dans son mémoire, la Commission de l'éthique en science et en technologie, parle aussi donc de souveraineté des données. La question de savoir où seront hébergées les données de l'identité nationale est aussi cruciale. La dépendance à des géants américains comme Microsoft ou Amazon pourrait exacerber les inquiétudes de la population liée aux fuites de données sensibles, en plus de soulever des enjeux de cybersécurité à l'échelle collective advenant un accroissement des tensions politiques entre les deux États.

• (15 h 20) •

Alors donc, encore une fois, M. le Président, ce n'est pas... ce sont des préoccupations qui ont été soulevées par plusieurs experts qu'on a entendus, et puis qui viennent donc soutenir notre demande à l'effet d'avoir accès à cette analyse, d'avoir un portrait complet pour savoir, donc, quel est l'état de situation actuelle et pour savoir comment on peut... quelle est la vision pour la suite des choses en lien avec le projet de loi n° 82.

J'ai été... Je me permets, M. le ministre, de revenir sur les échanges de ce matin. On s'est laissé avec le vote sur la première motion, et j'ai été étonnée que le ministre ne fournisse pas de réponse. Peut-être la réponse viendra-t-elle plus tard, mais quand il y a deux députés de l'opposition qui portent la voix, donc des experts qui portent la voix des Québécois, qui soulèvent des enjeux qui sont pertinents et que ces deux députés ont pris la peine de mentionner qu'elles ne sont pas contre le projet, que l'idée d'avoir une identité numérique, elle est louable, que c'est un projet porteur, c'est un projet qui, potentiellement, peut avoir des effets très positifs pour les Québécois — on a dit ça d'entrée de jeu et on veut que ça fonctionne — mais qui ont dit : Il y a des questions légitimes qui se posent au niveau de l'expertise interne, au niveau des... au niveau des coûts qu'entraîne cette dépendance à des ressources externes, à la sous-traitance et qu'on porte la voix des experts qui travaillent sur le terrain, qui sont au courant, qui voient dans le quotidien les... qui vivent, donc, dans le quotidien ces interactions avec les entreprises externes qui soulèvent différentes choses et qui proposent des pistes de solutions, qui nous disent : Il faut reclassifier les emplois, il faut être plus attractif pour attirer et retenir du personnel, etc., et voici toutes les conséquences de cette dépendance, moi, je me serais attendu à ce que le ministre réponde quelque chose. On n'a pas eu de réponse. On comprend que la présidente du Conseil du trésor ne viendra pas s'asseoir avec nous en commission, mais, à tout le moins, le ministre aurait pu fournir des réponses au nom de son gouvernement, au nom de sa collègue. Donc, c'était plutôt décevant.

Encore une fois, nous, ce qu'on souhaite, c'est que le projet fonctionne. On se rappellera que, dans le passé, il y a des projets qui n'ont pas vu le jour, qui ont été retardés...

Mme Setlakwe : ...au sein du ministère de la Cybersécurité et du Numérique. On en a sorti, on a même... on a fait une courte recherche, là, sur l'actualité, de la revue de presse, pour réaliser... Donc, ici, c'est une première entrevue dans L'Actualité au sujet, donc, du ministre, qui est intitulé, bon, Le ministre de la Cybersécurité du numérique mettre fin au trip d'informaticien au gouvernement du Québec, ça, c'est en 2018 qu'il mentionnait lui-même qu'il était lui-même, donc, un grand critique de tous les ratés informatiques du gouvernement au cours de la dernière décennie. Il a dit, et c'est relaté dans l'article de 2018 dans L'Actualité, il croit que ces délais et ces dépassements de coûts ont été causés par une incompréhension crasse des réels besoins des citoyens. Au final, le client nous avait demandé un cheval et on lui livrait un éléphant. Le nouveau ministre veut que l'État mise sur des architectes d'affaires pour mieux analyser les solutions. «Si on ne comprend pas bien le besoin du citoyen — je le cite — on va repartir dans nos trips, on va faire des patentes incroyables qui font des affaires complètement surréalistes mais qui sont trop compliquées pour le monde et qui donnent un paquet de services dont le monde n'a pas besoin. Ça, il faut que ça arrête». Plus loin, quand on parle des différents projets : Pour y arriver, on doit investir. Le ministre croit que son plus grand défi sera la main-d'œuvre. À l'heure où les entreprises s'arrachent les informaticiens, il se dit prêt à payer davantage, mais il croit aussi devoir leur offrir un milieu de travail stimulant. Je le cite : «Si on les parque derrière les petits paravents bruns à faire toujours la même chose, je pense qu'on a beau déplier bien des dollars, ça ne va pas... ça ne va pas faire. Au final, l'objectif, c'est toujours d'économiser», etc. Donc, ça, c'est une entrevue d'il y a quelques années, où le ministre mentionnait lui-même, donc, l'importance des ressources internes.

Ici, j'ai un article du 7 mai 2024, donc l'an dernier, ça, c'était suite, je pense, à l'échange qu'on avait eu aux crédits, et le... C'est un article de Nicolas Lachance, Journal de Québec... Journal de Montréal, Éric Caire... pardon, Le ministre de la Cybersécurité et du Numérique remise son important projet d'application mobile pour son identité numérique. Et on mentionne que la rareté de main-d'œuvre nuit à son déploiement complet, ce que le ministre avait admis lui-même, encore une fois lors de l'étude des crédits budgétaires en avril dernier. Je le cite : «Je ne vous le cache pas, il y a des projets qu'on met sur pause actuellement. Le projet de Carrefour, qui est l'application numérique de services numériques du gouvernement, on va le mettre sur pause», le ministre avait-il mentionné. Or, déjà, en 2022, Québec admettait qu'il ne détenait pas l'expertise à l'interne pour créer cette infrastructure informatique. «Le ministre est incapable de garantir à la Commission d'accès à l'information qu'il respectera la protection des données personnelles». Bon, il y a certains projets qui avaient été proposés, qui ont eu... qui ont vu des changements en cours de route, qui ont pris une nouvelle trajectoire pour toutes sortes de raisons, qui n'ont pas vu le jour. Et ça, on peut, dans une certaine mesure, l'accepter, le comprendre. Mais moi, ce que je ne comprends pas, c'est quand on demande aujourd'hui, face à un nouveau projet aussi prometteur soit il, on demande d'être rassuré, on demande d'entendre les collègues du gouvernement qui ont une vision, qui ont les deux mains sur le volant au niveau des ressources humaines et financières, et qu'on nous réponde... on ne nous répond pas, on ne nous explique pas pourquoi la ministre ne viendra pas, mais je trouve ça vraiment décevant.

Un éditorial de La Presse intitulé La Terre appelle le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, signé par Stéphanie Grammond, aussi, là, donc, nous rappelle... C'était dans le contexte du fiasco SAAQclic, etc. Et puis donc rappelait... nous rappelle que... qu'il y a des projets, depuis la formation de ce nouveau ministère, qui... il y en a qui n'ont pas vu le jour, il y en a qui ont vu le jour avec la participation du ministre. On ne dit pas qu'il était le seul maître d'œuvre du projet de SAAQclic, mais, néanmoins, il avait un rôle important à jouer dans ce projet-là. Et...

Mme Setlakwe : ...c'est ce qui est arrivé, M. le Président. Les citoyens ont fait... ont fait la file d'attente pendant des semaines. Les citoyens... Encore une fois, on a surestimé le degré de sophistication, on a surestimé le fait qu'ils allaient être prêts à adopter la nouvelle plateforme et on a complètement sous-estimé les ressources, l'accompagnement, etc.

Donc, pour moi, de... toutes les questions qu'on soulève, là, durant nos... dans le cadre de nos motions préliminaires, sont tout à fait... sont tout à fait pertinentes et méritent tout le sérieux... méritent le... qu'on... qu'on les traite avec tout le sérieux qu'elles méritent. Parce qu'ultimement, c'est... c'est vraiment... on veut que le projet fonctionne, on veut que les Québécois puissent bénéficier de services accessibles, conviviaux, simples efficaces, et où on veut aussi que le gouvernement puisse s'occuper de ceux et celles qui n'ont pas la littératie numérique suffisante pour bénéficier pleinement des outils technologiques. Et donc on va rester sur notre appétit puis on va continuer de poser les questions, M. le Président, si on n'a pas des réponses à nos questions.

Un autre article du 7 mai 2024, dans le Journal de Québec, intitulé Un autre projet suspendu, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique est la risée des experts. Il y avait un projet qui était... bon, le projet d'identité numérique, qui était une promesse figée, prétendument en raison du manque de main-d'œuvre. Le projet annoncé... L'identité numérique devait offrir aux Québécois une application mobile donnant accès à tous les services gouvernementaux sur leur téléphone d'ici 2025. C'est un projet qui était... qui avait été annoncé en 2019. Il vient s'échouer face à la rareté de main-d'œuvre.

• (15 h 30) •

Je cite ici un expert en cybersécurité, Éric Parent, P.D.G. de Éva Technologies : «On a le talent au Québec. Alors, si on payait les salaires, qu'on montait vraiment une cellule d'experts pour faire ce genre de projet là, il n'y aurait aucun problème», rétorque M. Parent.

Et donc voilà, ça complète mon... Je voulais compléter l'énoncé de ce matin en lien avec l'expertise interne.

Permettez-moi de prendre les derniers instants qui me restent, je pense qu'il me reste peut-être un petit deux minutes, M. le Président, pour revenir sur toute cette question... cette question des contrats publics de Québec avec des fournisseurs américains. À tous les jours, les médias s'y intéressent. Je l'ai dit d'entrée de jeu, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique s'y intéresse lui-même, son premier ministre aussi. Il y a des articles dans les journaux quotidiennement. Ici, dans La Presse : Qui sont nos fournisseurs américains? Bon, évidemment, ce n'est pas tout... tous les tableaux qui sont fournis ne concernent pas tous des services informatiques, mais on voit ici un tableau qui démontre ce que reçoit Microsoft, ce que reçoit Amazon Web Services, et c'est non négligeable.

Il faut vraiment qu'on sache dans quoi on s'embarque, M. le Président, avec le projet d'identité numérique. Rappelons-nous qu'en domaine... dans le domaine de la santé et des services sociaux, c'est la firme Epic, une entreprise américaine, qui va... qui a récolté... qui a... à qui on a octroyé le contrat, là, pour le dossier santé numérique. Là, le contrat est signé avec eux. Est-ce qu'il y aurait eu des compagnies québécoises? Bon, je ne veux pas rouvrir le débat, mais c'est... les médias s'y intéressent, les Québécois s'y intéressent. Les données sensibles des Québécois et des Québécoises, ça intéresse clairement les Québécois et les Québécoises, ça nous intéresse, nous.

Et, avant de plonger dans ce... dans ce projet d'identité numérique nationale qui va impliquer forcément l'hébergement de données, avec tout ce qu'on a entendu des experts au niveau de l'importance de garder le contrôle, l'importance d'avoir une souveraineté numérique, je vous demande, M. le Président, et je demande aux collègues de la partie gouvernementale de donner suite et de voter en faveur de notre motion, qui demande donc de transmettre à la commission un état de situation complet de l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, chère collègue. Mme la députée de La Pinière. Vous disposez également de 30 minutes.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, heureuse de vous retrouver et de retrouver les collègues de cette commission.

Alors, à mon tour, je vais m'exprimer sur la motion préliminaire...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Caron : ...dont a fait lecture ma collègue la députée de Mont-Royal-Outremont. Et je prends la parole au nom du chef de l'opposition officielle. Donc, ce qu'on demande, c'est que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique transmette à la commission, dans les plus brefs délais, un état de situation complet de l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes.

Alors, je mettrais la table en disant d'abord qu'on a vu, dans un... dans un article de La Presse, qui a été publié le 8 février dernier et qui... en fait, qui portait sur autant le gouvernement fédéral que le gouvernement québécois. L'article s'intitulait Qui sont nos fournisseurs américains? Alors, bien entendu, on comprend, là, que c'est dans le contexte actuel. Il n'est pas question ici de blâmer le gouvernement québécois ou le gouvernement fédéral d'avoir donné des contrats à des fournisseurs américains. Jusqu'à assez récemment, il n'y avait aucun problème avec ça. Mais, pour mettre la table, donc, qui donne des contrats à des fournisseurs américains? Parmi les organismes publics québécois ayant octroyé les contrats les plus importants à des fournisseurs américains depuis le 1er janvier 2023, donc dans les deux dernières années, alors il y a le ministère de la Santé et des Services sociaux, qui a donné six contrats, surtout pour des systèmes informatiques, il y a aussi eu des contrats pour un service de marketing, mais évidemment, ici, on s'intéresse à l'infonuagique, on s'intéresse au stockage de nos données, on s'intéresse à la dépendance que le gouvernement a pour certains projets en informatique. Il y a aussi le Conseil du trésor, dont on souhaitait rencontrer la présidente. On en a débattu assez longuement, ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont et moi, ce matin, avec aucune espèce de réponse de la part du ministre, alors que la motion et la demande expliquée en long et en large, deux fois 30 minutes, je pense, était assez... assez claire et pertinente. Alors, peut-être que c'est parce que le ministre aura les réponses en commission. Parce que, ce qui nous a poussés... ce qui nous avait poussés à demander à faire cette motion, c'était que, la semaine dernière, dans cette salle même où les experts sont venus témoigner... pas «témoigner» mais ont déposé leurs mémoires et répondu à nos questions, ont eu des échanges avec nous, le ministre ne pouvait pas répondre parce que ce n'est pas lui qui avait les réponses, c'était sa collègue. Alors, pourquoi la collègue... pourquoi s'est-il opposé à ce que la collègue vienne nous répondre?

Autres... Autres donneurs de contrats à des fournisseurs américains, il y avait le Service de l'eau de la ville de Montréal, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, Hydro-Québec et 210... 217 autres organismes.

Alors, comme je disais, M. le Président, je voulais mettre la table. Donc, ce n'est pas une vue de l'esprit, là, quand on dit qu'il y a des contrats qui sont donnés aux États-Unis. C'en est un survol, un bref survol.

Je disais qu'il y a deux ans, on ne se posait pas de questions, il y a même un an ou même six mois, on ne se posait pas de questions sur la... outre le fait qu'on aime bien que les contrats soient donnés à des entreprises québécoises ou canadiennes, mais il y avait... nos économies sont tellement intégrées qu'il n'y avait pas d'enjeu à donner des contrats aux États-Unis par rapport à la sécurité.

Par contre, ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont a fait référence à la Cloud Act. Alors, ça, c'est la loi sur le nuagique, la loi fédérale américaine. C'est une loi qui a été sanctionnée en 2018 et qui venait modifier la loi. Et vous me permettrez de faire la traduction libre, M. le Président. La loi sur le nuagique amendait principalement la Loi sur les communications stockées de 1986 pour permettre à la Police fédérale américaine d'obliger des entreprises technologiques basées aux États-Unis de fournir, via un mandat ou bien un subpoena, de fournir donc les données demandées qui sont stockées sur des serveurs, peu importe si les données sont stockées aux États-Unis ou à l'étranger. Donc, avec cette loi-là, le gouvernement fédéral américain peut obliger les entreprises d'infonuagique, de stockage de données, à...

Mme Caron : ...remettre au gouvernement américain des données qui sont stockées aux États-Unis, mais à l'étranger, à l'étranger.

Nous sommes l'étranger pour les États-Unis en ce moment. En tout cas, pour toujours, j'espère. Alors, ce n'était pas un risque avant. Maintenant, c'en est un. Ça nous inquiète. Ça nous préoccupe. On n'est pas les seuls d'ailleurs.

La motion de demander un état de situation complet de l'hébergement des données numériques pour tous les ministères et organismes du Québec vise à ce que le gouvernement fasse preuve de transparence en nous informant, en nous donnant cet état de situation et en permettant aussi au citoyen de comprendre. Et, en s'assurant que le risque est géré, bien géré et surtout qu'il est réduit, qu'à partir de maintenant, on va réduire ce risque pour s'assurer que nos données sont stockées au Québec ou au Canada. Alors, c'est important devant l'ampleur du projet de loi qui est devant nous sur l'identité nationale numérique.

• (15 h 40) •

Je me permets de rappeler aussi que la RAMQ, donc la Régie de l'assurance maladie du Québec, est venue pendant les consultations. C'était le P.D.G. de la RAMQ qui a fait la présentation, qui a répondu à nos questions. Et, en page six de son allocution, il nous disait : «Finalement, nous tenons à souligner un ajout intéressant en matière contractuelle. Le MCN, donc le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, agit à titre de courtier en infonuagique pour le compte des organismes publics en rendant disponibles des offres infonuagiques par type de biens ou par type de services. À cette fin, le courtier, donc le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, donc le courtier élabore un catalogue d'offres infonuagiques destiné à répondre aux besoins de tels organismes et il accompagne en la matière.»

«Et l'article 36 du projet de loi qui est devant nous - donc plus précisément, l'article 36 se situe dans la section intitulée Règlement sur les contrats des organismes publics en matière de technologies de l'information - donc cet article 36 prévoit l'élargissement des services offerts par le courtier, MCN, ministère de la Cybersécurité et du Numérique, en ajoutant la technologie spécialisée à son catalogue. Cet ajout est positif pour le secteur de la gestion contractuelle car il permet de bonifier les options actuellement proposées qu'en infonuagique. Cependant, il aurait été bénéfique de permettre dans le projet de loi l'octroi de contrats de 5 à 10 ans dans le cas d'acquisition de biens par le courtier. À notre avis, avoir étendu la durée de ce type de contrats aurait permis d'obtenir des gains d'efficacité. Il faut se rappeler que les coûts d'acquisition et d'implantation des technologies militent, selon nous, pour un amortissement des efforts pour une plus longue période.»

Donc, finalement, ce que... cet aspect-là, là, que je viens de citer, c'est que, si le projet de loi permettait l'octroi de contrats de 5 à 10 ans, bien, on changerait moins souvent, et les coûts seraient moindres parce qu'il y a toujours des coûts qui sont associés à changer trop souvent de fournisseur. Et, souvent, quand on change de fournisseur, on change le système ou on apporte des modifications au système et on doit reformer... reformer tout le monde.

Mais pourquoi je fais référence à ça? C'est parce que le ministère agit à titre de courtier en infonuagique pour le compte des organismes publics. C'est bien correct comme ça, là, je ne remets pas du tout ça en question. Mais, si le ministère rend disponibles des offres infonuagiques puis qu'il y a un catalogue d'offres infonuagiques destiné à répondre aux besoins des ministères et organismes, j'imagine qu'il y a déjà une liste de fournisseurs. Alors, quand on demande de transmettre à la commission dans les plus brefs délais un état de situation complet de l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes, il y a déjà, je pense, un gros du travail qui est déjà fait, qui doit être quand même facile à nous transmettre. Alors, ce n'est pas une demande frivole qu'on va là... qu'on fait là, et ça ne prendrait pas un temps énorme pour répondre à cette demande...

Mme Caron : ...on a parlé, M. le Président... c'est-à-dire, «on a parlé», les experts nous ont parlé de souveraineté numérique, principalement d'absence de souveraineté numérique. Et là je vais me permettre de citer le mémoire de Micrologic, Micrologic étant une entreprise 100 % québécoise, fabricant d'un cloud souverain, qui aurait le goût de faire... de stocker nos données. Le ministre semblait très, très bien connaître le président de l'entreprise, qui est venu... qui est venu expliquer son mémoire. Mais là où je veux attirer votre attention, M. le Président, c'est sur le premier enjeu, absence de souveraineté numérique. Et ce que Micrologic nous dit c'est qu'«actuellement les données des Québécois circulent d'un nuage informatique à l'autre, souvent entre les mains d'entreprises étrangères, franchissant ainsi des frontières géographiques et juridiques. Cette exposition accrue rend les données vulnérables, posant des risques considérables pour les entreprises et les institutions. Toutes les données n'ont pas la même sensibilité. Un arrêté du 2 décembre 2024 a instauré un modèle de classification de sécurité des données numériques gouvernementales et, en fonction de cette classification, les données les plus sensibles, qui sont nommées données classifiées ou données protégées, devraient impérativement être hébergées dans un nuage souverain québécois ou canadien.»

Alors, quand on demande, par cette motion, un état de situation complet de l'hébergement des données numériques pour tous les ministères et organismes, bien, c'est ça, c'est qu'on veut de la transparence, on veut que le gouvernement nous dise qu'est-ce qui est hébergé au Québec, qu'est-ce qui est hébergé à l'étranger, dans quels pays étrangers, quelles données. S'agit-il de données sensibles? Et, si c'est le cas, bien, il faut commencer à penser, avoir un plan pour que nos données sensibles soient hébergées au Québec ou au Canada.

Je pense que... On parlait... Tout à l'heure, dans les interventions qu'on a faites au début de la commission aujourd'hui, là, ce matin, on parlait de feuille de route, on disait que la Vérificatrice générale nous... en fait, incitait le gouvernement à bien planifier. La planification du projet, la gestion contractuelle sont des incontournables, et, pour ça, ça prend une feuille de route. Et c'est dans cette feuille de route qu'on prévoit la communication avec le public et avec les utilisateurs, bien entendu, du... des systèmes. Et, comme je le disais, ce n'est pas... la communication, ce n'est pas juste un exercice de communication pour convaincre que tout est beau, non, c'est un exercice de communication factuel qui dit : Voilà, on a... c'est ça, l'état de la situation, c'est... c'est là qu'on s'en va. Pour y arriver, pour que vous soyez confiants que les... vos données sont en sécurité, que vous allez pouvoir continuer d'avoir des services même si vous n'utilisez pas les services en ligne, voici, nous allons faire ça, ça, ça. C'est ça, une feuille de route.

Alors, un état de situation complet, là, de l'hébergement des données numériques, bien, ce serait des... ce serait un élément qu'on aurait dans la partie communication de cette feuille de route pour agir en transparence et pour rassurer la population qu'on fait tout ce qu'il faut pour que les données soient en sécurité et que chacun puisse utiliser le système... en fait, l'identité nationale numérique sans crainte.

Toujours dans le mémoire de Micrologic, sous cet enjeu d'absence de souveraineté numérique actuellement, on nous donne comme information la définition de la souveraineté numérique... la souveraineté infonuagique par exemple... par contre, par le gouvernement français. Alors, le gouvernement français la définit comme suit, la souveraineté infonuagique : «"un modèle de déploiement dans lequel l'hébergement et l'ensemble des traitements effectués sur des données sont physiquement réalisés dans les limites du territoire national par une entité de droit nationale et en application des lois et normes nationales". À ce sujet, il est important de mentionner que la France mais aussi l'Union européenne et plusieurs autres pays comme l'Australie sont...

Mme Caron : ...beaucoup plus avancés que nous en matière de souveraineté numérique.

Et la souveraineté numérique repose sur deux principes fondamentaux : la souveraineté des données et la souveraineté opérationnelle. La souveraineté des données implique qu'elles soient régies par les lois nationales, hébergées sur le territoire et soumises à un contrôle d'accès sous autorité de l'État. Quant à la souveraineté opérationnelle, elle se définit par la résilience et la pérennité des données, par la gestion par du personnel régi et imputable aux lois nationales ainsi que par la capacité de transférer les données entre différents environnements numériques, sans restriction.

Alors, cette définition de la souveraineté infonuagique et de la souveraineté numérique joint les deux... les sujets des deux motions qu'on a faites jusqu'à présent, M. le Président. Ce matin, on demandait la présence de la présidente du Conseil du trésor, parce qu'on veut savoir quels sont les plans, quelle est la marge de manœuvre pour avoir des ressources humaines, des compétences, une expertise à l'interne du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, en nombre suffisant pour un temps suffisant pour mener à bien ce projet. Parce que, je le répète, on veut que ça fonctionne. On veut que ça fonctionne, ce projet.

• (15 h 50) •

Et la motion qui est devant nous, où on demande l'état de situation complet et l'hébergement des données numériques pour tous les ministères et organismes, pour savoir où on en est et qu'est-ce qu'on... qu'est-ce qu'on a l'intention de faire pour gérer le risque, pour réduire le risque et pour s'assurer, comme le dit cette définition, que l'hébergement puis l'ensemble des traitements effectués sur les données soient physiquement réalisés dans les limites du territoire national, donc dans les limites du Québec, par une entité de droit et nationale, et en application des lois et normes nationales, donc en fonction de nos lois, par une entité d'ici. Par exemple, ça pourrait être le ministère de la Cybersécurité et du Numérique qui encadre tout cela. D'ailleurs, le ministre a dit : Il faut qu'on donne le mandat à son ministère, et je suis bien d'accord là-dessus. Mais, en toute transparence, on veut avoir l'état de la situation actuellement sur l'hébergement de nos données numériques et on veut avoir l'état de la situation sur les travaux au Conseil du trésor pour être capables d'avoir les classifications d'emploi nécessaires pour avoir des compétences à l'interne et non pas dépendre d'entreprises privées et, encore pire, d'entreprises étrangères pour ce projet d'identité numérique.

Je pense, M. le Président, que les experts, les experts ont parlé. Moi, avant d'arriver à cette commission, je savais ce qu'était l'identité numérique ou je pouvais me... je pouvais me douter de ce qu'était l'identité numérique et le projet d'identité numérique nationale, que je vois d'un bon œil. Par contre, toutes les préoccupations qui nous ont été amenées par les experts... Évidemment, c'est pour ça qu'on fait des commissions parlementaires et qu'on invite des experts à déposer des mémoires, ça fait réfléchir, ça fait réfléchir.

Et, comme je le disais ce matin aussi, on n'aurait peut-être pas la même conversation, si on avait fait ce projet il y a six mois, un an, deux ans, trois ans. Mais aujourd'hui, on se rend compte que la souveraineté de nos données, la souveraineté du stockage de nos données, c'est un élément très important. Peut-être que le ministre et ses équipes travaillaient sur ce projet de loi il y a quelques mois, alors que ce n'était pas un enjeu. Mais là, le projet de loi, il est devant nous maintenant. On est dans une situation où on se doit de protéger les Québécois et leurs données. Et je pense qu'il faut faire... il faut prendre toutes les précautions nécessaires pour que le projet fonctionne, que ça facilite la vie, que l'identité numérique facilite la vie des Québécois pour obtenir leurs services publics, puis aussi augmente, on le souhaite, l'efficacité...

Mme Caron : ...l'efficience au sein des ministères et organismes. C'est un but tout à fait louable et qu'on partage, mais il ne faut pas le faire à tout prix, à n'importe quel prix. Et la situation actuelle commande qu'on fasse attention et qu'on soit aux aguets, qu'on soit vigilants pour avoir le meilleur projet de loi possible et puis se donner toutes les chances d'avoir une identité numérique qui va bien fonctionner.

Un autre point que j'aimerais apporter, c'était... en fait, ça nous a été soulevé par, si je ne m'abuse par M. Steve Waterhouse, je vais simplement vérifier, M. le Président. Effectivement, dans le mémoire de M. Steve Waterhouse, en annexe de son mémoire, l'annexe B, il y a le cadre de confiance du Conseil canadien de l'identification et de l'authentification numérique. Et ce cadre de confiance, donc, a été adopté après... à la suite, en fait, de recommandations d'un groupe de travail sur l'examen du système de paiement du gouvernement fédéral, des dirigeants des secteurs public et privé du Canada ont créé, donc, ce groupe de travail pour élaborer un cadre de confiance pour répondre aux besoins de l'économie numérique. Et ce cadre de confiance pancanadien se base sur des principes et des valeurs clés, notamment contribuer à la fiabilité et à l'interopérabilité des capacités de confiance et d'identité numérique des secteurs public et privé, tout en donnant la priorité à la conception, à la confidentialité, à la sécurité, à la commodité centrée sur l'utilisateur. Deuxièmement, de rassembler les meilleures pratiques. Il s'appuie sur les normes politiques et les lignes directrices existantes en tenant compte des contributions de plusieurs parties prenantes. Alors, le CCIAN, donc le Conseil canadien d'identification de l'authentification numérique, que j'ai nommé tout à l'heure, s'est engagé à s'aligner sur les cadres pertinents du monde entier pour faciliter l'interopérabilité et l'adoption. Et, troisièmement, largement applicable, basé sur les résultats indépendants de la technologie ouverte et flexible. Et ça, c'est autant pour les particuliers, pour les entreprises que pour le gouvernement. Le cadre de confiance pancanadien en question porte sur l'authentification et les justificatifs pour ce qui est du respect de la vie privée et ensuite sur toute l'infrastructure de technologie et d'opération. Il y a aussi l'authentification, les justificatifs, les portefeuilles numériques, l'avis de... avis et consentements, les registres de confiance, les personnes vérifiées, organisations vérifiées. Et ce que M. Waterhouse nous disait, c'est qu'il y a déjà certaines choses qu'on fait. Le Québec qui entre dans le cadre de confiance pancanadien. Alors, si je fais référence à ça, M. le Président, c'est que, dans ce projet de loi qui est devant nous, et on veut qu'il réussisse, bien, il faut avoir l'humilité aussi de se baser sur les meilleures pratiques de pays qui y ont travaillé avant nous, qui ont mis en place une identité numérique avant nous. M. Waterhouse en mentionné huit qui l'ont fait avant nous : Singapour, la Suède, l'Estonie, la Belgique, l'Inde, le Danemark, les Pays-Bas et le Nigéria. Et après un rapport de Beyond Encryption, bien, il y a des enjeux qui ont été relevés que ces pays-là ont eu à négocier. Alors, inspirons-nous de ça pour aller tout de suite vers ce qui est le plus... le plus garant, je dirais, de succès. Et en matière... Bon. Il y a plusieurs points. Il y a cinq points. L'infrastructure premièrement. Alors, les gouvernements ont besoin de réseaux robustes, capables de gérer une forte demande et de protéger les données et ils doivent également s'assurer que les cartes d'identité numériques fonctionnent avec les outils existants afin que les utilisateurs puissent passer aux solutions numériques. Les systèmes existants peuvent compliquer les choses. Est-ce qu'on s'est assuré de cela? La cybersécurité, bien, les cartes d'identité numériques contiennent des données sensibles, ce qui en fait des cibles à très...

Mme Caron : ...pour les pirates. Et c'est pour ça qu'on demande un état de situation complet de l'hébergement des données numériques et qu'on souhaite que l'hébergement se fasse au Québec et qu'on souhaite mettre en œuvre toutes les précautions pour nous protéger contre... les contre les pirates. «Il y a toujours, en fait de cybersécurité... Les pays doivent protéger ces systèmes par des mesures de sécurité solides, des mises à jour opportunes et des plans d'intervention clairs en cas de violation.» La Vérificatrice générale nous a dit que ça n'a pas été fait dans d'autres projets, donc important de le faire, ici. Et on nous... on nous dit que les pirates informatiques évoluent rapidement, d'où la nécessité d'une vigilance constante.

«La confiance du public. Les gens peuvent craindre une utilisation abusive ou une surveillance des données, mais des politiques claires, une communication transparente et des avantages visibles tels qu'un service plus rapide et une sécurité renforcée contribuent à instaurer la confiance. Pourtant, les points de vue culturels sur la protection de la vie privée varient d'un pays à l'autre.»

• (16 heures) •

Alors, on le redit, ici. Je suis consciente qu'on se répète, mais eux aussi disent que des politiques claires puis une communication transparente permet d'aller chercher l'adhésion des utilisateurs, donc des citoyens et aussi des gens dans l'appareil qui vont répondre, qui vont donner le service public. Ça fait partie de la fameuse feuille de route, cette communication-là. Puis, un des éléments de cette communication, c'est d'avoir un état de la situation complet de l'hébergement des données numériques au Québec.

Le quatrième point, la culture numérique, alors : «Pour utiliser les identifiants numériques en toute confiance, les gens ont besoin de compétences techniques de base. Et des formations, des guides utiles, des interfaces faciles à utiliser peuvent permettre à un plus grand nombre de personnes d'en bénéficier. Pourtant, l'accès universel reste un défi de taille.» Et, ça, je le disais ce matin, les questions de littératie, de littératie numérique, de fracture numérique et de pauvreté font en sorte que tous ne pourront pas utiliser l'identité nationale numérique et les services auxquels ça va donner accès. Donc, il ne faut pas mettre de côté les services qui sont offerts de manière traditionnelle.

Et, le dernier point qui était soulevé, les lois sur la protection des données. «Le respect des règles mondiales en matière de confidentialité des données protège les droits des personnes et rend les identifiants numériques plus fiables. Des lois solides rassurent les utilisateurs en leur montrant que leurs données sont traitées avec soin. Mais l'application de ces lois dépend du système juridique de chaque pays.

«De ces enjeux présentés actuellement, selon M. Waterhouse, le Québec a la note de 2,5 sur cinq. La confiance du public est sérieusement à travailler, tout comme augmenter les connaissances numériques par l'intégration de programmes scolaires dignes de ce nom, et non en ajouter une couche sur le lot de travail des enseignants actuels aux prises avec ce quotidien endiablé.» Puis le 0,5... Il donne 0,5 à la Commission de l'accès à l'information, «qui doit faire connaître et respecter la loi 25, entre autres pour la protection des données personnelles.»

Alors, M. le Président, après avoir dit tout cela, j'espère sincèrement que nous aurons droit à un état de la situation complet de l'hébergement des données numériques des ministères et organismes pour savoir où on en est, et ensuite, pour savoir où le... quelles sont les intentions du gouvernement pour l'hébergement dans l'infonuagique, est-ce que ce sera au Québec, au Canada ou est-ce que ce sera à l'étranger. L'idée, c'est de donner confiance. Ça fait partie de la communication, ça fait partie d'un plan clair et ça fait partie de ce dont on a besoin pour aller chercher l'adhésion des citoyens. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, chère collègue. Toujours sur cette motion préliminaire, M. le député de Jean-Lesage.

M. Zanetti : Oui, M. le Président. En fait, c'est que j'aurais une motion préliminaire à déposer moi-même, mais je ne souhaite pas nécessairement intervenir sur celle-là. Mais j'en aurais une à déposer quand vous serez prêt.

Le Président (M. Simard) : Alors, pour l'instant, nous allons compléter les tours de parole sur cette motion qui fut déposée par notre collègue de Mont-Royal—Outremont.

M. Zanetti : Parfait.

Le Président (M. Simard) : Y aurait-il d'autres interventions à ce sujet? M. le ministre, vous savez que vous disposez de 30 minutes afin d'intervenir?

M. Caire : ...

Le Président (M. Simard) : Bon. Alors, sans quoi, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : ...

Le Président (M. Simard) : Alors, M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?

Mme Setlakwe : Pour...


 
 

16 h (version non révisée)

Le Secrétaire : Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Pour.

Le Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

Le Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

La Secrétaire : Mme Abou-Khalil (Fabre)?

Mme Abou-Khalil : Contre.

Le Secrétaire : M. Thouin (Rousseau)?

M. Thouin : Contre.

Le Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

Le Secrétaire : M. Zanetti (Jean-Lesage)?

M. Zanetti : Pour.

Le Secrétaire : Et M. Simard (Montmorency)?

Le Président (M. Simard) : Abstention. Cette motion est donc rejetée.

Alors, à ce jour, nous avons reçu deux autres motions préliminaires, soit une émanant de notre collègue de Mont-Royal—Outremontet une autre émanant du député de Jean-Lesage. Celle émanant du député de Jean-Lesage fut reçue après la vôtre, chère collègue, mais comme le veut notre tradition, on tente de faire une alternance. Donc, je vais laisser la parole au député de Jean-Lesage afin qu'il puisse déposer sa motion préliminaire.

M. Zanetti : Merci, M. le Président. Alors, je voudrais déposer une motion préliminaire. Vous l'avez reçue.

Le Président (M. Simard) : Elle est au Greffier.

M. Zanetti : Ah! Elle est au Greffier. Donc, formidable. Je vais vous en faire la lecture à l'instant. Alors :

«Que conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la Commission des finances publiques, avant d'entendre l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, tienne des consultations particulières et qu'à cette fin l'entendent les groupes suivants : la Fédération des cégeps.»

Le Président (M. Simard) : Très bien. Vous disposez de 30 minutes, cher collègue.

M. Zanetti : Merci. Alors, c'est un groupe qui avait demandé à être entendu en consultations particulières, qui n'a pas eu la chance de venir le faire et qui a parlé d'aspects qui n'ont pas été nommés par les autres concernant le projet de loi sur l'identité numérique nationale. Et ce que je voudrais faire, M. le Président, pour, en fait, convaincre que les membres de cette commission de la pertinence d'inviter la Fédération des cégeps pour pouvoir exposer leurs points en bonne et due forme, c'est de lire simplement un extrait de leur point de vue, c'est-à-dire un communiqué de presse, essentiellement, qu'ils ont émis au sujet du projet de loi n° 82. Alors, la Fédération des cégeps a déposé un mémoire auprès de la Commission des finances publiques de l'Assemblée nationale du Québec, exprimant ses préoccupations et recommandations à l'égard du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions.

Troisième modification législative en matière de ressources informationnelles en quatre ans, ce nouveau projet de loi vise notamment à rehausser la maturité numérique de l'administration publique et à soutenir les organismes publics dans la transformation numérique. Si la fédération souscrit à ses objectifs, elle souhaite cependant attirer l'attention sur plusieurs éléments préoccupants pour le réseau collégial public. En tant qu'acteurs clés dans la mission de transformation numérique gouvernementale, les cégeps redoublent d'efforts pour être exemplaires en la matière. Cependant, dans un contexte marqué par des restrictions budgétaires importantes et un gel du recrutement, ces exigences répétées risquent de compromettre sérieusement la capacité des cégeps à maintenir la qualité et l'efficacité des services offerts à la population étudiante, de même qu'à répondre aux besoins grandissants en enseignement supérieur et en recherche. Nous rappelons le gouvernement à tenir... Nous appelons le gouvernement à tenir compte des réalités et des besoins spécifiques du réseau collégial public pour toute modification législative touchant ces ressources informationnelles, a indiqué Marie Montpetit, présidente-directrice générale de la Fédération des cégeps.

Plus particulièrement, la fédération exprime de vives inquiétudes concernant les répercussions du p.l. no° 82 et de l'introduction de l'article 5.2 dans la Loi sur le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, qui confère au ministre de la sécurité... de la Cybersécurité et du Numérique le pouvoir de coordonner les actions des organismes publics au regard des infrastructures de télécommunication. Cette disposition pourrait compromettre l'accès privilégié du réseau collégial public au Réseau d'informations scientifiques du Québec, le RISQ, un outil essentiel pour la mission d'enseignement supérieur et de recherche des cégeps. Le RISQ, réseau exclusif au secteur de l'éducation et interconnecté avec l'infrastructure nationale de recherche CANARIE, garantit une connectivité sécurisée, performante et adaptée aux besoins spécifiques des établissements d'enseignement supérieur. Par ailleurs, la Fédération des cégeps reconnaît les efforts du gouvernement pour uniformiser l'accès aux services étatiques par l'identité numérique nationale, mais exprime des réserves quant à l'intégration de ce service dans le réseau collégial public. Les nouvelles obligations prévues au p.l. no° 82, notamment l'adhésion obligatoire au service d'authentification gouvernementale d'ici 2028, pourraient en effet engendrer des coûts financiers et humains importants pour assurer l'interopérabilité des infrastructures numériques des cégeps.

Dans son mémoire, la Fédération souligne également les risques liés à la centralisation des données personnelles sensibles et demande que le réseau collégial...

M. Zanetti : ...exempté de ses obligations pour préserver l'autonomie et la sécurité de ces services numériques. Dans les faits saillants, on dit que les cinq recommandations de la Fédération des cégeps concernant le projet de loi sur l'identité numérique sont les suivants, donc il faut éviter la dilution de la qualité de l'offre des services spécialisés, préserver un actif public répondant aux particularités de l'enseignement supérieur, demeurer prudent quant à l'assujettissement obligatoire des organismes publics à des services uniformisés, exclure le réseau collégial public, consulter systématiquement le réseau collégial public. La Fédération des cégeps reste engagée à collaborer avec le gouvernement pour assurer que les mesures du p.l. 82 soient mises en œuvre de manière à soutenir le développement de l'enseignement supérieur et de la recherche au Québec sans compromettre la qualité des services et l'autonomie du réseau collégial. Et évidemment vous pouvez consulter le mémoire de la Fédération sur son site Web et aussi, je le présume, sur Greffier. Donc, ça m'apparaît être quelque chose qui est extrêmement important comme point. Il y a un réseau qui a été créé par la... par les cégeps au Québec. Ils sont inquiets des conséquences de la nouvelle loi. Ils n'ont pas eu l'occasion, vraiment, d'exposer, dans toute son amplitude, leurs préoccupations et leurs solutions. Et c'est le genre d'effet, je pense que... j'en suis certain, le ministre veut lui-même éviter d'avoir des effets collatéral imprévus... des effets collatéraux imprévus, pardon, sur des systèmes et infrastructures publiques qui fonctionnent bien déjà.

• (16 h 10) •

Alors, je pense que ce serait vraiment une... disons, une contribution extrêmement importante à nos discussions et à nos réflexions, M. le Président, c'est pourquoi j'invite les collègues de la commission à voter en faveur de cette motion. Je pense que ça pourrait se faire très bien, inviter la fédération, ils pourraient venir, j'en suis certain, demain, puis on pourrait continuer les travaux de la commission sans délai.

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie, cher collègue. Alors, nous poursuivons. Y a-t-il d'autres interventions sur cette motion? Mme la députée de Mont-Royal—Outremont.

Mme Setlakwe : Dites-moi, M. le Président, j'ai droit à combien de temps?

Le Président (M. Simard) : 30 minutes.

Mme Setlakwe : 30 minutes? Merci. Mais, écoutez, j'appuie sans réserve, nous appuyons sans réserve la motion qui est soumise par notre collègue le député de Jean-Lesage, c'est ça, du deuxième groupe d'opposition qui est tout à fait pertinente. Lui et moi nous sommes également porte-parole en Enseignement supérieur. Et donc moi aussi, j'ai appris, là, de la Fédération des cégeps, dans le cadre de mes échanges avec eux, qu'ils avaient des préoccupations en lien avec le projet de loi n° 82. On va se rappeler, M. le Président, que la Fédération des cégeps, généralement, là, c'est important de le dire et de le redire, a plusieurs défis ces jours-ci. Vraiment, jamais le réseau des cégeps a été autant mis à mal. On n'est pas ici pour parler de l'état des infrastructures, mais il y a... Moi, pour avoir fait le tour de quelques cégeps, avoir parlé à plusieurs directeurs, les plafonds qui ont été posés dans les budgets d'investissement, les heures rémunérées...

(Interruption)

Mme Setlakwe : ...les heures rémunérées qui sont plafonnées, limitées. Le gel d'embauche touche très difficilement... touche directement et impacte très négativement le réseau de nos 48 cégeps publics dont nous sommes très fiers et dont la mission première, on se rappelle, est d'assurer l'accessibilité aux jeunes Québécoises et Québécois à l'enseignement supérieur. Et, dans ce contexte difficile, moi, j'ai été... je suis allé dans des cégeps en personne, j'ai eu des réunions en virtuel, j'ai suivi toutes les réactions publiques, les entrevues qui ont été données dans les derniers mois par Mme Montpetit, et je peux vous dire que ce qu'on entend, c'est que les temps sont durs. Les temps sont difficiles. Ce sont des équipes qui demeurent très optimistes et qui font des miracles avec les moyens qu'ils ont. On n'est pas en train de dire que c'est la catastrophe, mais vraiment, on ne s'en va pas dans la bonne direction. Il faut vraiment qu'on prenne soin, qu'on prenne meilleur soin de notre réseau des cégeps. Mais quand on parle, donc, de plafond d'investissement, et d'heures rémunérées qui sont limitées, et de gel d'embauche, mais ça veut dire, concrètement, que les équipes sont étirées, que les ressources sont limitées, qu'on ne déborde pas, là, de... personne ne se tourne les pouces, et loin de là, il y a des personnes qui portent plusieurs chapeaux et ils travaillent très, très fort...

Mme Setlakwe : ...à maintenir les services à la population étudiante. C'est ça, le plus important. Et, dans un contexte difficile où, en plus, on est venu dire que... dans le cadre du... de l'adoption du projet de loi n° 74, qu'on va imposer des quotas dans les inscriptions d'étudiants internationaux, bien, ça, ça suscite également des inquiétudes, parce qu'on se dit : Mais comment on va faire pour, donc, offrir tous ces... toute cette gamme de programmes partout en région, pas seulement dans les grands centres?

Donc, je vous expose les défis, les enjeux auxquels font face le réseau des cégeps actuellement pour en arriver, donc, au projet de loi n° 82. Dans... La semaine dernière, pas plus tard que la semaine dernière, j'étais en réunion justement à la Fédération des cégeps. J'ai rencontré Mme Montpetit et des membres de son équipe, et elle m'a fait part, donc, de ses demandes dans le cadre des consultations prébudgétaires. On a parlé de toute cette panoplie de défis, et elle m'a dit aussi qu'ils avaient, donc, des commentaires, qu'ils avaient soumis un mémoire dans le cadre des consultations, là, du projet de loi n° 82. On n'a pas eu la chance de les entendre, mais je pense qu'il serait tout à fait pertinent de le faire. Ils ont... Ils ont mis de l'avant des préoccupations. Mon collègue de Jean-Lesage en a fait mention. Je pense que ça vaut la peine d'essayer de venir ajouter quelques détails et de réitérer, de renforcer le point qui a été fait, que je pense que, comme parlementaires, on n'est pas si pressés que ça ici, là. On a... D'ailleurs, nous, on a... on a mis de l'avant d'autres enjeux qui valent la peine d'être débattus et qui ne sont pas prévus à la lettre dans la pièce législative. Mais ici, qu'on prenne le temps d'entendre un groupe qui déjà fait face à différents obstacles, là, je pense que ce n'est pas... ce n'est pas du tout superflu. Je pense qu'on pourrait prendre... prendre le temps de les entendre.

Dans la lettre qui a été adressée au ministre de la Cybersécurité et du Numérique, datée du 30 janvier dernier, qui accompagnait le mémoire... Écoutez, je vais... au cas où le ministre n'accepterait pas de les appeler en commission parlementaire, je vais... je vais prendre la peine, donc, de lire ce que Mme Montpetit, la présidente de la Fédération des cégeps, a mis de l'avant dans sa lettre qui accompagnait son mémoire.

Donc, elle dit que, «dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 82, la Fédération des cégeps souhaite faire part des préoccupations du réseau collégial public quant aux répercussions de certaines dispositions du projet de loi sur la mission des cégeps en enseignement supérieur et en recherche».

Je me permets, avant de lire les trois... les trois paragraphes qui résument les trois préoccupations principales... que la mission des cégeps, j'en ai parlé, là, c'est de rendre accessible l'enseignement supérieur aux jeunes Québécois et Québécoises sur tout le territoire du Québec, et leur mission est une mission louable et fondamentale. Et, ces temps-ci, on se rappelle qu'ils ont toutes sortes de défis pour... qui leur rend la vie et leur mission plus difficiles à accomplir. Leur mission, là, c'est l'accessibilité, c'est la réussite éducative de nos jeunes. Et ils ont donc, comme je l'ai mentionné, des ressources en ce moment qui sont plutôt limitées. Il n'y a pas de... Il n'y a pas de surplus. Ils ont beaucoup à faire, à gérer avec des équipes qui sont très, très, très occupées, sur lesquelles il y a beaucoup de pression déjà. Quand on parle de plafond d'investissement, là on peut penser que ça concerne juste les infrastructures, que ça concerne juste le béton, ce n'est pas vrai. Ça concerne aussi des achats d'équipements qui sont nécessaires et essentiels au déploiement complet, entier et intègre des différents programmes. Et donc ça touche à la mission, ça touche à la réussite éducative de nos jeunes. Et, dans ce contexte-là, je pense qu'il faut vraiment être à l'écoute, ces jours-ci, de la Fédération des cégeps. Quand ils viennent nous dire qu'il y a des dispositions d'un projet de loi qui peut avoir des répercussions sur la mission des cégeps en enseignement supérieur et en recherche, écoutons-les.

Donc, tout d'abord, le premier enjeu, «les cégeps s'inquiètent des effets potentiels de l'article 5.2 du projet de loi. Cet article confère au ministère de la Cybersécurité et du Numérique un rôle centralisé dans la gestion des infrastructures de télécommunications des organismes publics». Donc, c'est un pouvoir, un rôle, donc, qui va être centralisé auprès du ministère, du MCN. Ce qu'on nous dit à la Fédération des cégeps, c'est que «l'application de cette disposition pourrait compromettre l'accès privilégié du réseau collégial public au RISQ, le Réseau d'information scientifique du Québec». D'ailleurs, le RISQ...

Mme Setlakwe : ...a fait, nous a contactés aussi. Je pense qu'ils ont peut-être soumis un mémoire. Je me trompe peut-être. Mais, en tout cas, ils ont mis de l'avant des préoccupations : «Rappelons que le RISQ, ce réseau, donc, était un acteur essentiel pour soutenir les établissements d'enseignement supérieur en matière de connectivité sécurisée et performante.» La Fédération des cégeps nous dit qu'«il est primordial que les particularités de ce réseau spécialisé soient préservées afin d'assurer la qualité et la sécurité des échanges d'information nécessaires aux activités pédagogiques et de recherche des cégeps et des universités.»

Donc, le RISQ... permettez-moi un petit instant, là, de bifurquer vers des notes que j'avais prises, bon, que je ne semble pas trouver. Mais c'est... ce n'est pas grave. Le RISQ nous a... nous a contactés. Et puis, de mémoire, ce qu'il nous disait c'est : On est un partenaire et on veut continuer d'être un partenaire, on veut... oubliez-nous pas, là, dans tout ce processus-là, on a un rôle à jouer, on est... on est au service, donc, du réseau collégial, et autres, et puis on est un acteur essentiel, il faut qu'on puisse nous traiter en partenaires, etc. Donc, la préoccupation qui est mise de l'avant par la Fédération des cégeps va dans le même sens.

• (16 h 20) •

Deuxième enjeu : «Donc, par ailleurs, si la Fédération des cégeps reconnaît l'importance d'uniformiser l'accès aux services étatiques par l'identité numérique nationale, elle exprime des réserves quant à l'adhésion obligatoire du réseau collégial public au SAG, le fameux Service d'authentification gouvernementale d'ici 2028.» La Fédération nous dit : «Non seulement l'implantation de cette mesure entraînerait des coûts financiers et humains importants pour nos établissements, mais cela soulève également de réels enjeux liés à l'interopérabilité des infrastructures numériques existantes. De plus, la centralisation des données personnelles sensibles pose des risques qu'il convient d'évaluer avec rigueur. C'est pourquoi la Fédération des cégeps recommande que le réseau des cégeps soit exempté de cette obligation afin de préserver l'autonomie et la sécurité de ses services numériques.»

J'aimerais bien entendre le ministre réagir à ces... bien, aux trois enjeux, là, mais à tous les enjeux qui sont mis de l'avant par la Fédération des cégeps. Mais qu'est-ce que... qu'est-ce qu'il leur répond? Qu'est-ce qu'il répond à la Fédération des cégeps quand la fédération demande d'être exemptée de cette obligation, donc, d'adhésion obligatoire au SAG d'ici 2028 afin de préserver l'autonomie et la sécurité de ses services numériques? C'est un... C'est une question qui vaut... qui doit être répondue, donc, par le ministre.

Enfin, troisième enjeu : «La Fédération insiste sur l'importance de consulter systématiquement le réseau collégial public avant l'adoption de règlements touchant ses ressources informationnelles. L'introduction de nouvelles obligations en matière de gouvernance numérique ne doit pas se faire sans tenir compte des réalités et des contraintres... contraintes propres au cégep, particulièrement dans un contexte de restrictions budgétaires et de gel du recrutement.»

Comme je mentionnais tout à l'heure, leurs demandes, leur mémoire s'inscrit dans un contexte plus global de restrictions budgétaires et de gel du recrutement. Donc, on ne peut pas faire abstraction de ces défis, on ne peut pas faire abstraction de ces gestes qui ont été posés par le gouvernement de la CAQ tout récemment, là. Et il y en a... il y en a plusieurs. Si on fait... J'ai fait le décompte plus tôt, là, de tout ce qui a été fait dans la dernière année, ça crée un contexte difficile pour les établissements d'enseignement collégial. Et donc je pense qu'on doit prendre au sérieux leurs préoccupations.

Je continue de les citer : «Une approche concertée permettrait d'assurer une transition efficace et réaliste sans compromettre la qualité des services offerts à la population étudiante. C'est l'objectif numéro un. Et donc la Fédération des cégeps, qui aurait souhaité venir en commission, évidemment, reste à la disposition du ministre pour poursuivre le dialogue et contribuer à l'élaboration d'un cadre législatif qui soutienne à la fois la transformation numérique du Québec et le développement de l'enseignement supérieur.» Et puis, ils soumettent à notre attention, donc, le mémoire.

Des voix : ...

Mme Setlakwe : Ah oui. Merci. Et puis ce mémoire, donc, il est assez... il est assez étoffé, M. le Président. C'est un mémoire de...

Mme Setlakwe : ...d'une douzaine de pages. On pourrait peut-être s'en tenir au sommaire, là. Et la conclusion et le sommaire, mais je présume que la partie gouvernementale a pris connaissance, donc, des impacts du projet de loi n° 82 sur les réseaux de télécommunication des cégeps. Je pense qu'idéalement on devrait leur faire une place puis les entendre, mais permettez-moi donc de relire la conclusion de leur mémoire. La fédération réitère l'importance de considérer les réalités et les besoins spécifiques du réseau collégial public pour toute modification législative touchant les ressources informationnelles. Les cégeps demeurent des acteurs clés dans la mission de la transformation numérique gouvernementale et redoublent d'efforts pour assurer un comportement    exemplaire en la matière. La fédération tient à rappeler qu'il s'agit maintenant de la troisième modification des lois en matière de ressources informationnelles en quatre ans, ce qui témoigne d'une volonté constante d'encadrement, mais qui met également à l'épreuve la capacité des établissements à s'y conformer. Le réseau collégial public fait déjà preuve d'une agilité, d'une efficience et d'une capacité d'adaptation exceptionnelle pour assurer une conformité adéquate. La Fédération des cégeps appelle donc à une reconnaissance accrue des particularités opérationnelles auxquelles font face les établissements, ainsi qu'à l'adoption d'une approche concertée et réaliste tenant compte des ressources limitées du milieu collégial public, ressources limitées qu'on a mentionnées plus tôt dans l'intervention.

Donc, un récapitulatif de la recommandation.

Recommandation 1. Éviter la dilution de la qualité de l'offre de services. La Fédération des cégeps dénonce la centralisation sous-jacente à l'élargissement de l'offre des services du ministre de la Cybersécurité et du Numérique. Elle craint que celle-ci mène à une diminution de la qualité des services spécialisés offerts par ce dernier aux organismes publics, plus particulièrement à ceux du réseau collégial public.

Recommandation numéro 2. Préserver un actif public répondant aux particularités de l'enseignement supérieur. La Fédération des cégeps croit qu'il est impératif de préserver un actif public répondant aux particularités de l'enseignement supérieur tel que le RISQ, le réseau dont on a parlé précédemment, et de maintenir une stratégie identique aux standards nationaux et internationaux en matière d'échange d'informations dans le milieu de l'enseignement supérieur et de la recherche. La perte d'un tel actif aurait des conséquences graves sur la sécurité de l'échange de l'information et sur la confiance des utilisateurs dans le réseau et nuirait grandement aux services offerts à la population étudiante des cégeps.

Moi, quand j'entends que la Fédération des cégeps est inquiète de perdre un actif, qu'il pourrait y avoir des conséquences graves sur la sécurité de l'échange de l'information et la confiance des utilisateurs dans le réseau et nuirait grandement aux services offerts à la population étudiante, on devrait... ça devrait allumer des lumières tout autour de la table, ici, là. On parle amplement, abondamment dans les médias, ces jours-ci, des difficultés et des défis auxquels font face les cégeps. Mais quand on parle de difficultés, vous savez, les cégeps, bien, il faut penser aux étudiants. C'est les étudiants avant tout, là, qui doivent... dont on doit se soucier. Les étudiants, ils étaient... Les fédérations d'ailleurs qui représentent les associations étudiantes étaient dans nos tribunes hier. Ils sont très, très mobilisés ces jours-ci, depuis plusieurs mois, sur une panoplie d'enjeux. On parle de notre jeunesse ici, là. On parle de jeunes qui évoluent dans des locaux, qui évoluent dans des contextes difficiles. Nos cégeps sont en mauvais état. Il y en a deux tiers qui sont en mauvais état. Ça, c'est la Vérificatrice générale qui le dit. Il y a un manque d'espace. Il manque sept cégeps au Québec. C'est ça, là. C'est les données démographiques qui sont à la hausse, et il faut qu'on prévoie l'avenir. Les sommes qui sont prévues d'être investies ne sont pas suffisantes. Ça, c'est la Vérificatrice générale qui le dit. On parle de programmes qui ne peuvent pas être déployés. On parle d'équipements insuffisants, des équipements qui ne peuvent pas être déployés, on parle d'équipements insuffisants, des équipements qui ne peuvent pas être renouvelés, modernisés quand il y a des bris ou qui doivent renouvelés pour qu'on s'assure de former nos jeunes sur l'équipement qui est utilisé dans le vrai monde, là, sur le marché du travail. C'est de ça dont on parle quand on parle de services offerts à la population...

Mme Setlakwe : ...On parle de... On parle de programmes éducatifs, on parle de réussite éducative. On parle aussi, quand on dit qu'il y a... qu'il y a un gel d'embauche, un gel de recrutement, bien, c'est du personnel, qui, indirectement, fait en sorte que les services sont offerts aux étudiants. Si on n'a pas de réceptionnistes, on n'a pas de gens qui coordonnent les horaires, si on n'a pas de gens qui peuvent accueillir les étudiants, qui ont besoin des services psychologiques, etc., si on ne peut pas renouveler. C'est ce qu'on m'a dit à Trois-Rivières quand je suis allée visiter à la fin de l'année passée. Il y a des logements étudiants, il y a... il y a seulement un concierge pour je ne sais plus combien d'unités. Qu'est-ce qu'on fait? On ne peut pas... Il y en a un qui est en congé de maladie ou autre, on ne peut pas le remplacer. Il faut passer par le Conseil du trésor, imaginez-vous donc, M. le Président, pour avoir une autorisation pour engager un deuxième concierge. Mais c'est ça, les services offerts à la population. Donc déjà ces services ne sont pas optimaux. Et là, on a un projet de loi qui est... qui est bien beau, bien intéressant, là, mais est-ce que, dans la... dans la réalité actuelle... est-ce que, dans le contexte actuel, est-ce que c'est réaliste? Est-ce qu'on en demande trop encore aux établissements? Il faut se poser la question. Il faut les entendre.

• (16 h 30) •

Recommandation trois : «Demeurer prudent quant à l'assujettissement obligatoire des organismes publics à des services uniformisés. La Fédération des cégeps appelle à la prudence concernant l'assujettissement obligatoire des organismes publics à des services uniformisés qui ne prennent pas en compte leurs particularités et qui pourraient compromettre, entre autres, l'activité des cégeps.»

Recommandation quatre. Encore une fois, on l'a mentionné plus tôt, exclure le réseau collégial public : «La Fédération des cégeps demande que le réseau collégial public ne soit pas rattaché au service de l'identité numérique nationale ni aux SAG, le Service d'authentification gouvernementale, quant à l'entièreté de leur infrastructure de services numériques.»

Cinquième et dernière recommandation, consulter systématiquement le réseau collégial public : «La Fédération des cégeps demande une consultation systématique auprès du réseau collégial public concernant l'élaboration des directives qu'entend déterminer le ministre afin d'assurer une mise en place réaliste des règles de gouvernance, et ce, avant... avant leur adoption et après leur mise en œuvre.»

Écoutez, ça, c'est juste un sommaire, M. le Président, là. Le mémoire, comme je vous mentionnais, est un mémoire d'une douzaine de pages qui a été soumis, donc, par la Fédération des cégeps et qui... qu'on doit prendre au sérieux, là. Il faut... Tout ce qu'on demande ici, par la voie... par le biais de cette motion préliminaire, c'est... c'est de... c'est de les entendre. C'est qu'avant d'entreprendre l'étude détaillée, qu'on tienne des consultations particulières ou qu'on... qu'on... qu'on prolonge les consultations particulières et qu'à cette fin qu'on entende la Fédération des cégeps. Ce qui est... Ce qui est tout à fait souhaitable.

Et, encore une fois, M. le Président, on appuie tout à fait, donc, cette motion de notre collègue de Jean-Lesage. Je vous remercie.

Le Président (M. Simard) : C'est moi qui vous remercie, chère collègue. Mme la députée de La Pinière, souhaitez-vous intervenir? Vous disposez de 10 minutes pour faire votre intervention.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je pense qu'on a un bel exemple, par la motion qui est présentée par le collègue de Jean-Lesage à la demande de la Fédération des cégeps. On a un cas patent d'absence de communication et d'information. J'ai parlé ce matin, j'ai parlé en début d'après-midi de la fameuse feuille de route dont le ministère aurait dû se doter avant même de déposer ce projet de loi. Pour tout ce qui est de la partie communication, information, comme je le disais, ce n'est pas un exercice de communication, de vente ou de marketing, ça se doit d'être un exercice pour susciter l'adhésion basée sur des faits, sur un état de situation, sur l'objectif qu'on veut atteindre, sur notre vision, sur ce qu'on va faire et sur ce qu'on ne va pas faire. Et, dans cet exercice-là, la Fédération des cégeps aurait dû être incluse. La Fédération des cégeps aurait pu présenter les préoccupations qu'elle a. Le ministère aurait pu en tenir compte et déjà présenté un projet de loi, déposé un projet de loi qui aurait tenu compte de ces préoccupations. Je pense que c'est quand même...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Caron : ...assez majeure comme préoccupation ici. Et je ne sais pas s'il y a d'autres organismes, d'autres ministères qui ont des préoccupations semblables, ça aurait été intéressant de le savoir, parce que si on a un beau système, si les pouvoirs du ministre sont accrus comme veut le faire le projet de loi... Et quand je dis ça, M. le Président, là, je parle... je ne parle pas de la personne qui occupe la fonction, là, quand on parle du ministre dans le projet de loi, c'est la personne qui est en place à n'importe quel moment où on fait... on se réfère au projet de loi, alors ça peut être la personne qui occupe la chaise maintenant, mais ça peut en être une autre plus tard, là. Donc, le ministre aurait pu tenir compte de ces grandes préoccupations-là pour s'assurer qu'en voulant faire une bonne chose avec une identité numérique nationale qu'on ne vienne pas détruire autre chose qui fonctionne bien entre temps, parce que c'est peu ça, là, la situation qui est mise devant nous aujourd'hui, M. le Président. J'ai pris connaissance du mémoire de la Fédération des cégeps et de leur demande par le député de Jean-Lesage dans les minutes qui viennent de passer, et ce que je comprends, c'est que le Réseau d'information scientifique du Québec, auquel est relié le réseau collégial public, donc, le réseau des cégeps, c'est un outil indispensable dans la poursuite de la mission des cégeps en matière d'enseignement supérieur et de recherche. Et ça fonctionne. Ils ont... de ce que je comprends, ils ont des ressources humaines, ils ont des experts qui y travaillent, ils ont une gouvernance. Et d'ailleurs, on le voit, là, en page 8, où la fédération dit : «Faut-il rappeler que les cégeps possèdent déjà des équipes d'expertes et experts en ressources informationnelles qui oeuvrent à trouver des solutions et travaillent sans cesse pour assurer une conformité aux règles constamment changeantes. Par ces modifications — les modifications par le projet de loi n° 82 — il ne faudrait pas que ces équipes soient reléguées uniquement à un rôle de soutien technique plutôt que d'accomplir leur rôle en matière d'innovation et de réponse aux besoins diversifiés et particuliers». Alors, pourquoi défaire quelque chose qui fonctionne déjà? C'est ça, la question. Et vous me permettrez, M. le Président, de faire un parallèle. Dans ce cas-ci, le parallèle, ce n'est pas avec quelque chose qui fonctionne déjà parce que ça fonctionne très mal, en ce moment, mais c'est comme la création de Santé Québec, où là tout est centralisé et où les CISSS et les CIUSSS ne savent plus quoi faire. On a des cas de comté, on téléphone à nos agents, on essaie d'avoir des informations, les P.D.G. ne savent même pas eux-mêmes qui va prendre quelle décision, quoi... Alors là, il ne faudrait pas qu'on reproduise un modèle de centralisation à outrance avec ce projet de loi là qui vient défaire, dans ce cas-ci, quelque chose qui semble bien fonctionner pour tout mettre dans les mains d'un même ministère ou d'un même ministre. On veut, je l'ai dit précédemment, je le répète, on veut que l'identité numérique nationale, ça fonctionne. Les experts nous ont dit que, pour que ça fonctionne, ça prend une feuille de route qui explique, qui communique avec les utilisateurs pour s'assurer qu'on va éviter les pépins, on va éliminer les pépins, on va répondre aux préoccupations pour qu'il y ait une adhésion, pour qu'en fin du compte ça fonctionne. Mais on n'a pas fait ça avec la Fédération des cégeps. Et je me demande combien d'autres.

Alors, la motion qui est déposée par le député de Jean-Lesage pour qu'on puisse entendre la Fédération des cégeps ici, là... Puis je rappelle que d'entendre la Fédération des cégeps ne serait pas très long, là, la Fédération des cégeps aura 10 minutes pour nous présenter son mémoire, les points saillants de son mémoire, puis, ensuite, le temps habituellement convenu, 20 minutes, pour que le ministre puisse les interroger et peut-être aussi les rassurer tout de suite, là, ou, au moins, voir avec ses équipes ce qu'il y aurait à faire pour les rassurer sur les préoccupations tout à fait légitimes...

Mme Caron : ...qui sont apportées dans leur mémoire, et ça pourrait servir de modèle s'il y en a d'autres, organismes ou ministères, qui ont des difficultés, des préoccupations importantes, qui ne sont peut-être pas dans... sur l'écran radar, je dirais, du ministère, puis ça, c'est possible, là. Un oubli est si vite arrivé, comme on dit. Mais je pense qu'ici la commission, pour bien faire son travail, faire le travail le plus complet possible, devrait effectivement entendre la Fédération des cégeps... et que le ministre réponde à leurs préoccupations et, s'il faut qu'il y ait des amendements qui soient apportés au projet de loi, bien, qu'on les fasse correctement pour bonifier le projet de loi et surtout pour bonifier le projet d'identité numérique nationale, pour que ça fonctionne bien, et que, s'il y a des exceptions à faire, comme semble le demander la Fédération des cégeps, dans l'état actuel du projet de loi qui est devant nous, bien, qu'elles soient faites, parce qu'au bout du compte on ne veut pas que ce projet-là, qui nous semble porteur, qui nous semble structurant, qui a besoin d'être bonifié, qui a besoin d'être mieux expliqué, qui a besoin d'être bien planifié... bien, on ne veut pas que ça vienne détruire autre chose, là. Alors, on ne peut pas... on ne peut pas... Je sais qu'il y a une expression qui dit : On ne peut pas faire d'omelette en cassant des oeufs, mais on ne veut pas rien casser ici, là. On veut que ça réussisse, ce projet-là. Et la demande des cégeps est tout à fait légitime, et on devrait... on devrait absolument... absolument les entendre. Alors...

• (16 h 40) •

Il y a aussi... Il y a même... Il y a même des impératifs financiers, là, qui sont... qui sont évoqués par les cégeps. Ma collègue, qui est porte-parole de l'opposition officielle pour l'enseignement supérieur, s'y connaît beaucoup mieux que moi dans l'état des finances des cégeps, dans les demandes, les besoins des cégeps. On l'a entendu encore en période de questions aujourd'hui, les besoins sont criants. Il y a des cégeps qui...

Excusez-moi, M. le Président, mais c'est parce que je suis distraite par les collègues de la banquette gouvernementale qui jasent pendant que je prends la parole. Merci.

Le Président (M. Simard) : ...chère collègue.

Mme Caron : Merci. Alors...

Le Président (M. Simard) : Vous pouvez poursuivre.

Mme Caron : Donc... Alors, je disais... je disais donc qu'en période de questions ce matin on a vu à quel point il y a des besoins criants dans des cégeps. À un moment donné... À moins que le ministère du... de la Cybersécurité et du Numérique ait les moyens de donner plus d'argent aux cégeps pour faire tout ce qu'ils ont... tout ce qu'ils ont à faire et... dans le cadre du projet de loi actuel, s'il n'y a pas de changement. Bien, sinon, ça veut dire qu'il y a d'autres besoins auxquels les cégeps ne répondront pas. Puis il y a quand même 200 000 étudiants, là, qui ont besoin des cégeps. On ne veut pas... On ne veut pas être dans une situation où on ne peut plus enseigner au cégep, où on ralentit les parcours académiques parce qu'on met des... on met des freins financiers et technologiques à nos institutions.

Alors, M. le Président, je pense que la motion qui est devant nous devrait être adoptée.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, merci à vous, chère collègue. Sur ce, y aurait-il d'autres interventions? M. le ministre, vous savez que vous disposez d'une période de 30 minutes.

M. Caire : ...

Le Président (M. Simard) : Alors, cette motion est-elle adoptée?

Mme Setlakwe : ...

Le Président (M. Simard) : Un vote par appel nominal. M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Zanetti (Jean-Lesage)?

M. Zanetti : Pour.

Le Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

Le Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

Le Secrétaire : Mme Abou-Khalil (Fabre)?

Mme Abou-Khalil : Contre.

Le Secrétaire : M. Thouin (Rousseau)?

M. Thouin : Contre.

Le Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

Le Secrétaire : Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?

Mme Setlakwe : Pour.

Le Secrétaire : Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Pour.

Le Secrétaire : Et M. Simard (Montmorency)?

Le Président (M. Simard) : Abstention. Cette motion est donc rejetée. Et nous poursuivons avec la motion préliminaire qui a été déposée par ma collègue de Mont-Royal-Outremont. Alors, chère collègue, auriez-vous l'amabilité, tout d'abord, de nous faire lecture de cette motion, qui se trouve déjà sur...

Mme Setlakwe : Oui. Donc, M. le Président : «Conformément à l'article 244 du Règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques entende, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, M. Martin Bouchard, P.D.G. de QScale.»

Le Président (M. Simard) : ...à votre écoute.

Mme Setlakwe : M. le Président, parlons d'économie, parlons de...

Mme Setlakwe : ...nationalisme économique. Parlons de participation de nos entreprises dans cette économie, dont la part... pour laquelle la part des entreprises québécoises n'est pas si importante. Donc, on parle d'infonuagique de façon plus particulière. Ça fait des semaines, là, que cette question de dépendance envers des compagnies américaines fait l'objet de discussions, à juste titre. On peut penser donc à cette annonce d'Amazon de fermer des entrepôts, je ne me souviens plus combien, mais on a laissé... C'étaient plusieurs entrepôts. Du jour au lendemain, on annonce que ces entrepôts seront fermés, ce qui a laissé près de 3 500 personnes et leurs familles, donc, dans l'incertitude.

Nous, on a réagi à la position officielle, là, par la voix de notre collègue, le porte-parole en matière d'économie. Il a demandé au gouvernement de la CAQ de réévaluer sa relation avec les géants technologiques étrangers. Notre collègue, à ce moment-là, c'est le 26 janvier dernier, réclamait que la CAQ prenne rapidement des mesures afin de réévaluer l'utilisation de la plateforme Amazon. De plus, notre collègue estimait que la conduite d'Amazon devait allumer des lumières au sein du gouvernement. Et c'est... c'est ce que... c'est ce qui a été fait. On a compris que le gouvernement réagissait, souhaitait étudier les contrats. Et donc on souhaitait que le gouvernement se saisisse de ce dossier, de cette analyse, compte tenu des contrats lucratifs pour l'hébergement de données consenties par le Québec à Amazon quant à la nécessité de s'assurer que les entreprises d'ici puissent croître et avoir une place dans les contrats gouvernementaux en matière d'infonuagique.

En fait, la question de la protection des données personnelles qui sont hébergées chez les géants du web comme Amazon inquiète également notre... bien, notre caucus, notre porte-parole ainsi que, je dirais, l'ensemble des parlementaires. Il demandait, notre collègue, que le gouvernement de la CAQ rassure les Québécois à ce sujet et fournisse des garanties claires que ces données ne pourront être consultées par quiconque, hormis le gouvernement du Québec, en aucune circonstance. Ce qu'on demandait au gouvernement de la CAQ, M. le Président, c'était de revoir l'utilisation de la plateforme Amazon de la part du gouvernement du Québec et favoriser l'achat au Québec. Alors ça, on comprend que c'est... c'est quelque chose qui doit... qu'on doit avoir des réflexes en continu suite à la fermeture des entrepôts. Ensuite, réviser les liens d'affaires entre le gouvernement et Amazon dans l'ensemble des dossiers actifs du gouvernement. Et aussi, et c'est là où il y a un lien avec l'étude du projet de loi et notre motion préliminaire, planifier une stratégie qui fait une place à la croissance pour les joueurs québécois de l'infonuagique comme... et d'autres. Il y a un Micrologique aussi qu'on a entendu en commission, mais... on ne les a pas entendus. Et finalement donc, rassurer les Québécois sur les protections de nos données personnelles confiées à Amazon et aux géants du web.

Bon, notre collègue avait notamment dit dans l'espace public : Nous devons mettre à niveau notre relation afin de permettre à notre économie de croître et permettre à tous les Québécois d'avoir un emploi d'avenir et à notre économie d'être axée vers le futur. Il nous faut aussi avoir une réelle vision pour nous assurer que les entreprises québécoises aient leur juste place dans l'infonuagique. C'est une question de fierté et de sécurité pour les Québécois. Je suis certaine que quand on parle de fierté, quand on parle de nationalisme économique, ce sont des thèmes qui rejoignent et qui interpellent les collègues de la banquette gouvernementale et le ministre de la Cybersécurité et du Numérique. En tout cas, nous, ça nous interpelle beaucoup. Quand on voit ce qui... comment se comporte le président Trump, les menaces qui planent et qui sont malheureusement mise à exécution avec sursis, on attend tous dans l'incertitude. Notre économie est mise à mal. Si ces menaces sont mises à exécution, notre économie va souffrir sans aucun doute, et il y aura des pertes d'emploi. On se doit, comme parlementaires, de se demander qu'est ce qu'on peut faire pour moins dépendre des entreprises américaines. Et c'est ce qui est sur les lèvres de tous, là, c'est le sujet de l'heure. On ne peut pas se...

Mme Setlakwe : ...on ne peut pas rompre nos liens commerciaux avec les Américains du jour au lendemain. C'est évident. Ça prend des décennies, là, à bâtir des relations comme ça et à imbriquer nos chaînes d'approvisionnement l'une dans l'autre. Et on a des contrats qui sont... qui sont en cours, on a des contrats qui ont été signés, mais comme parlementaires responsables, on se doit de se questionner sur nos façons de faire plus que jamais. Même si le président Trump ne met pas à exécution ses menaces, il est impératif qu'on... qu'on... qu'on fasse preuve, donc, de solidarité puis qu'on mette en place les mesures et les conditions gagnantes pour que nos entreprises puissent croître, pu être... puissent survivre, puissent prospérer, etc., des entreprises, qui... et surtout dans des domaines où le gouvernement octroie des contrats lucratifs.

Donc, on rejoint ici... c'est sûr que nos motions préliminaires se rejoignent, se chevauchent. On a demandé un état de situation. On a demandé de connaître, donc, l'analyse qui est en cours au niveau des contrats lucratifs qui sont octroyés à des entreprises américaines comme Amazon. Mais, ici, l'objet de notre motion, c'est dire : Bien, entendons cette entreprise, QScale, qui est locale, qui est basée tout près d'ici, à Lévis, qui a été... qui a fait l'objet d'une revue de presse récente, qui souhaite prendre sa place, qui crée des emplois ici, chez nous. Je vais y venir. Mais l'essence, donc, de notre demande, c'est de... c'est de les entendre, de comprendre leur modèle d'affaires, de comprendre leur champ d'activité et en quoi ils pourraient participer, donc, aux contrats qu'octroie le gouvernement, comment est-ce qu'on peut réfléchir, comment est-ce qu'on peut en arriver à une vision qui leur donne une place plus importante. Je pense que c'est tout à fait pertinent et important de le faire.

• (16 h 50) •

Je pense qu'on est tous d'accord avec l'importance et l'intérêt et la pertinence de favoriser la participation d'entreprises québécoises dans ce secteur stratégique. Et donc on se rappelle, là, dans le cadre du projet de loi n° 82, un des enjeux importants, c'est... c'est l'importance cruciale de l'hébergement des données localement pour protéger les informations sensibles des Québécoises et des Québécois. On le sait, on l'a... on l'a dit, on le répète dans l'actualité ces jours-ci, on ne cesse de mentionner la dépendance grandissante envers les entreprises américaines, par exemple Amazon, WebServices, Google, Microsoft, et ses implications et ses conséquences pour les contribuables, pour nous tous, en termes de coût, en termes de souveraineté numérique, en termes de cybersécurité. Alors, si on a des entreprises d'ici qui peuvent nous aider à répondre à ces enjeux, à diminuer les risques, à diminuer les impacts négatifs, bien, on pourrait les entendre comme on a entendu Micrologic.

Donc, encore une fois, je fais appel ici au nationalisme économique que je suis certaine qui habite le ministre de la Cybersécurité et du Numérique. Dans sa réflexion, qui est en cours, je suis certaine qu'il pourrait bénéficier d'une discussion avec l'entreprise QScale, et qu'on puisse échanger à savoir quelle est sa vision pour qu'il y ait une participation accrue des entreprises québécoises comme celle-là dans le secteur stratégique de l'infonuagique pour réduire notre dépendance et promouvoir le nationalisme économique. Nous sommes très fiers de nos entreprises ici. Il faut tout faire pour favoriser leur développement et leur prospérité et la création d'emplois, des emplois intéressants pour les Québécois.

Bon. On se rappelle que les... qu'il y a une centralisation des services numériques chez certains géants américains. Les géants américains dominent le marché. Il y a une part importante, donc, de marché qui est... dont bénéficie Amazon dans l'hébergement cloud. On se rappelle des risques associés avec cette part... cette concentration importante de données hébergées chez ce fournisseur, contrôle étranger sur des données locales, on en a parlé dans le cadre d'une motion précédente, aussi toute la portée extraterritoriale des des lois américaines comme le Patriot Act...

Mme Setlakwe : ...et le Cloud Act qui font en sorte que le gouvernement américain a une main mainmise sur des données sensibles des Québécois. L'absence de garanties sur la confidentialité à long terme de nos données sensibles. Et donc une vulnérabilité face aux sanctions, aux pressions externes. Les conséquences pour le Québec, évidemment, une perte d'autonomie dans la gestion des infrastructures stratégiques. Je le réitère, combien d'experts sont venus nous dire, qui sont venus nous parler, ils sont venus mettre... ils sont venus marteler l'importance d'assurer une souveraineté numérique. Donc, il ne faut pas s'en aller dans le sens d'une perte d'autonomie, il faut s'assurer de miser sur des stratégies qui vont favoriser une autonomie, une souveraineté numérique. Et évidemment, bien, un drainage économique vers l'extérieur a tout l'effet contraire, donc, qui souhaité. Et ce qu'on souhaite, c'est stimuler l'économie locale, M. le Président.       Parlons-en de QScale, parce que cette entreprise-là, il faut qu'on en parle. Elle a fait l'objet d'une revue de presse récemment. Donc, c'est une entreprise québécoise spécialisée dans l'hébergement de données et les infrastructures durables. Ils sont, comme je l'ai mentionné, pas loin d'ici. Il semble y avoir des... Ils semblent être alignés sur plusieurs de nos valeurs, là, en termes de développement durable, de protection de l'environnement, d'innovation, fiabilité. Écoutez, je suis en train de faire la promotion. Moi, je les connais très peu, mais j'aimerais en apprendre davantage sur cette entreprise locale. Une chose est certaine, QScale et d'autres entreprises québécoises pourraient jouer un rôle clé dans la mise en place d'une infrastructure numérique, sécuritaire, et durable, et locale. Et donc on répète que dans le... qu'il est important de créer un écosystème technologique local autour de l'identité numérique et que QScale pourrait venir échanger avec nous sur leur offre des services et d'essayer de voir comment on pourrait assurer que des entreprises québécoises comme celles-là puissent occuper une place plus importante dans cet écosystème. Je l'ai mentionné, il pourrait y avoir que des... il peut y avoir des retombées économiques importantes, donc la création d'emplois spécialisés, ici, au Québec, il y a une stimulation de l'innovation dans le secteur technologique, et évidemment réduire notre dépendance envers des géants étrangers. QScale...

Mais avant de parler de QScale, revenons brièvement sur les contrats qui sont donnés à des fournisseurs américains. On le disait, là, La Presse a publié un dossier assez étoffé, là, sur les contrats publics de Québec et d'Ottawa qu'on est... qu'ils ont intitulé Qui sont nos fournisseurs américains, sous la plume de Jean-Hughes Roy, publié le 8 février. Il s'est demandé donc que... Donald Trump a beau suspendre sa menace d'imposer des droits de douane, Québec et Ottawa pourraient avoir besoin de riposter en cessant de donner des contrats aux Américains. Qui sont ces fournisseurs? Ils se sont intéressés donc aux fournisseurs, aux fournisseurs des organismes publics. Dans quelle mesure les organismes publics québécois et canadiens en dépendent-ils? La Presse a donc, dans ce contexte, examiné le quart de millions de contrats publics attribués au cours des deux dernières années pour mesurer la place des États-Unis dans l'ensemble. Et les États-Unis occupent une part assez importante selon le domaine. Mais quand on parle d'organismes publics ayant octroyé des contrats, les contrats les plus importants à des fournisseurs américains depuis le 1er janvier 2023, on voit que, dans le domaine de la santé et des services sociaux, ce secteur occupe 42 % des... de la valeur totale des contrats octroyés, la valeur totale étant de 1,4 milliard. On pense donc que c'est... ici, on parle de données de santé, là, le contrat a été fourni à Epic. C'est le ministère de la Santé, là, qui est responsable de ce projet, mais évidemment que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique joue un rôle important dans son déploiement. Alors, c'est une question qui doit se poser aussi au sein du gouvernement, autant de la part... autant chez le ministre de la Santé que chez le ministre de la Cybersécurité du Numérique : Qu'est-ce qui arrive avec nos données de santé, là, dans le contexte du contrat qui a été octroyé à Epic. Au niveau du Conseil du trésor, on voit que c'est 7 %, au niveau du CAG, le Centre d'acquisition. Est-ce qu'il y a des données qui sont touchées? Est-ce que... C'est toutes des questions importantes qui se posent. On voit qu'ici Hydro-Québec aussi a des... octroie des contrats. Qu'est-ce que ça... qu'est-ce que ça implique...

Mme Setlakwe : ...puis les fournisseurs américains, bon, encore une fois Epic, Microsoft, Amazon, WebServices, Microsoft, pour 112 millions sur le 104 milliards... sur le 1,4 milliard, Epic, 546 millions, c'est 39 %, là, du total de la valeur des contrats octroyés à des entreprises américaines. Donc, honnêtement, M. le Président, il y a du... c'est une réflexion qui est très importante. Et notre demande, donc, s'inscrit dans ce contexte plus général, là, dont on dispose, qu'on martèle depuis... depuis ce matin et depuis... depuis plusieurs jours, c'est de prendre... de prendre acte de la situation actuelle dans le... dans le détail et puis d'avoir un... il y a une séquence logique, là, d'avoir un état de situation et d'offrir la possibilité à des entreprises québécoises de venir échanger avec nous et de pouvoir nous faire valoir ce qu'ils peuvent faire, ce qu'ils peuvent offrir, et essayer de... Et d'entendre le ministre, à savoir quelle est sa... quelle est sa vision. Moi, j'aimerais savoir quelle est la vision du gouvernement en matière de souveraineté numérique. Est-ce que le gouvernement envisage de prioriser les entreprises québécoises pour des projets stratégiques comme l'identité numérique? Quels moyens est-ce que... est-ce que le gouvernement va mettre à la... va mettre en place pour favoriser les entreprises locales? Qu'est-ce que le gouvernement prévoit comme mesures pour limiter notre dépendance aux géants américains? Comment assurer que les projets numériques soutiennent à long terme l'économie locale?

• (17 heures) •

Je pense que ça vaut la peine qu'on se pose ces questions-là, là, avant... avant l'étude article par article. Ce sont encore une fois tous des éléments autant, sinon plus importants que la pièce législative elle-même. Si on n'a pas une bonne maîtrise, une bonne vue d'ensemble et on n'a pas une stratégie pour répondre à tous les enjeux dont on discute depuis ce matin, on a beau avoir une pièce législative bien rédigée, bien ficelée, le déploiement ne sera pas optimal pour les Québécoises et les Québécois.

Donc, QScale. Récemment, donc, on apprenait... c'était... en fait, c'est à l'automne, l'automne dernier, en septembre 2024, que QScale était prêt à investir 1,5 milliard au Québec sans l'aide du gouvernement. Bon. Il y a toute la question des blocs d'énergie. Ils ont besoin d'électricité, là, pour leur centre de traitement de données, notamment parce que, bon, les données explosent partout dans le monde en raison principalement des avancées de l'intelligence artificielle. On nous... On nous apprend dans l'article que «l'entreprise québécoise est pour l'instant bien positionnée avec son campus à Lévis, mais celle-ci arrivera au bout de son projet plus tôt que tard.» C'est une question de... donc, de leur fournir les blocs d'électricité qui sont... qui sont demandés. Ça, c'est un tout autre sujet, mais qui est quand même fondamental pour eux. Ils ont plusieurs phases à leur campus, il y en a sept... huit, au total, et il semble y avoir plusieurs bâtiments. Ils doivent en ériger plusieurs, donc, sur huit ans. Donc, sur les huit phases, il y en a seulement deux qui sont complétées. Et M. Bouchard, qui est le... qui est le P.D.G., estime que l'ensemble des édifices seront loués dans les... dans 6 à 18 mois et construits d'ici la fin 2026. On nous apprend, donc, évidemment au-delà de leurs doléances par rapport à leurs échanges avec Hydro-Québec, ils disent que la.... que là, les demandes explosent, qu'ils ont gagné le prix du centre de données de l'année en Amérique du Nord, ils sont rendus à un autre niveau. Le P.D.G. de QScale, donc, M. Martin Bouchard, il se dit ouvert à tous les scénarios, sauf celui d'acheter un terrain puis de faire une requête à Hydro-Québec à travers un formulaire. Il aimerait discuter avec le gouvernement pour connaître leurs attentes. «On est capables de s'installer quasiment partout», etc. Et d'autant plus ils disent que, selon eux, ils se sont donné... doté comme mission d'être le plus écologique possible. On comprend que les ordinateurs fonctionnent comme des radiateurs. «Ils chauffent et on capture 98 % de la chaleur pour la redistribuer.» C'est ce que met de l'avant le P.D.G. Mais mieux encore, selon lui, «comme nos clients nous demande d'être en activité 24 h sur 24, nous possédons des...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...et nous pouvons nous brancher... nous débrancher du réseau d'Hydro-Québec pendant les heures de pointe. Et ce n'est pas l'hiver que nous consommons le plus, c'est l'été avec la climatisation. L'article se termine avec un élément intéressant. Ils sont courtisés par d'autres pays et d'autres provinces. Ils insistent. Donc, l'énergie, on en a besoin maintenant, pas dans cinq ans. Encore une fois, ils détiennent 1,5 milliard de dollars. Nous pouvons investir sans aucune subvention. Des Américains et des Européens viennent nous voir. Ils requièrent une place dans notre centre de données pour développer leur intelligence artificielle. Et ils posent la question : Est ce que Québec peut vraiment se permettre de passer à côté? Si je n'ai pas les blocs d'énergie, je vais devoir regarder d'autres alternatives. Nous sommes Québécois. On veut s'étendre ici, créer de la richesse et des emplois. Mais des provinces canadiennes et plusieurs pays s'intéressent à nous.

Alors, je trouve que ça vaut la peine de les entendre, M. le Président. Je trouve, je trouve intéressant... Moi, j'aimerais en apprendre plus sur cette entreprise. Et encore une fois, je ne dis pas qu'ils répondent à tous les besoins, ce n'est pas du tout ça, mon propos. Mon propos, c'est de dire on ne peut pas se permettre de ne pas avoir ces discussions, on ne peut pas se permettre de ne pas regarder les alternatives et de ne pas discuter et de prendre le temps aussi d'entendre la vision du ministre pour pouvoir faire une place plus importante à des entreprises locales, notamment... Ça peut être d'autres aussi. Il y a un autre article, donc, plus récent, en décembre, le 3 décembre dans LaPresse, sous la plume de Camille Dauphinais Pelletier qui parle plus des phases 3 et 4 du centre à Lévis. L'entreprise a pu lever 320 millions pour le développement de ces phases-là. Donc, encore une fois, la demande est folle. Ils sont rendus aux phases 3 et 4. Et c'est donc intéressant de suivre... de suivre tout ça et de s'intéresser à leur... à leur plan d'affaires, essentiellement, et à savoir comment ils peuvent... ils pourraient répondre aux besoins grandissants du gouvernement, M. le Président.

Donc, encore une fois, offrons-leur la possibilité de venir, de venir nous parler comme on l'a fait pour Micrologique. On se rappellera, là. Micrologique aussi est dans les médias. Ils sont venus nous voir, ils ont... Ils ont dit qu'ils avaient l'expertise. Encore une fois, je ne suis pas en train de porter un jugement à savoir si les besoins sont parfaitement arrimés. Ce que je dis, c'est qu'il faut... Il faut leur tendre la main, il faut leur... il faut leur parler. C'est une question d'économie locale. C'est une question de résilience. C'est une question d'assurer qu'on puisse s'occuper nous-mêmes ici, avec l'expertise locale et l'expertise québécoise, de nos données. Étudions les différents scénarios. Les questions vont se poser, là, M. le Président, au fil de l'étude, article par article. On va les ramener, les questions. On va demander à la partie gouvernementale et au ministre de nous dire où il en est, où il en est rendu dans sa réflexion. Moi, je trouvais intéressant de le voir échanger avec les représentants de Micrologique. Il réfléchissait un peu tout haut, posait des questions, tout ça. Il essayait de... Je voyais qu'il était extrêmement intéressé à savoir, mais à savoir comment... On avait l'impression qu'il était en train de, sur le champ, là, de tenter de formuler une vision. Mais je suis certaine qu'il a avancé dans sa réflexion. Et puis tout ce qu'on peut faire comme parlementaires pour contribuer à cette réflexion et pour alimenter nos propres... nos propres réflexions, on ne peut pas passer... passer à côté.

Donc, encore une fois, on va se demander comment les projets numériques... C'en est un, projet numérique de grande importance, donc, qui vont pouvoir soutenir à long terme l'économie locale. Encore une fois, le projet de loi n° 82, c'est une opportunité pour renforcer la souveraineté numérique du Québec. On le sait, l'hébergement local des données est un enjeu stratégique essentiel. Je pourrais, encore une fois, faire le tour des mémoires. On le on l'a fait ce matin, et ma collègue de La Pinière aussi. Elle a fait état des nombreux experts qui sont venus parler de cet enjeu d'hébergement et de souveraineté numérique. Des entreprises québécoises comme... pourraient potentiellement jouer un rôle plus important pour garantir l'autonomie technologique. Moi, je suis intéressé, et je pense que ce serait intéressant pour les parlementaires, ici, dans la commission, qui se penchent sur ce projet de loi, sur ça, surtout sur ce projet très important de...

Mme Setlakwe : ...de se poser ces questions-là. Il y a vraiment ici, une... il y a des questions économiques. Bon, peut-être qu'on n'est pas... on n'avait pas de boule de cristal, évidemment, il y a quelques années, personne ici n'est en train de pointer du doigt et de porter le blâme. Ma collègue, elle l'a dit aussi tout à l'heure. Les circonstances ont fait en sorte qu'on est allé vers d'autres entreprises, mais là on se questionne vraiment à savoir est-ce que ces entreprises américaines on leur en accorde trop dans les circonstances. Les États-Unis étaient un partenaire, un allié pendant, évidemment, en tout cas, tout mon vécu, tout notre vécu puis les choses sont en train, malheureusement, de changer. On a non seulement des entreprises qui quittent le territoire pour lesquelles on peut se demander, comme Amazon, mais est-ce qu'elles étaient vraiment engagées envers le Québec? Elles avaient donc du jour au lendemain... elles ont du jour au lendemain annoncé qu'elles fermaient des centres de distribution. Et là on a un président qui nous traite avec mépris, qui fait rupture avec cette tradition, là, de partenariat économique et d'allié. Alors, toutes ces questions-là sont pertinentes. Encore une fois, on ne prétend pas que c'est la compagnie vers laquelle il faut se tourner, ce qu'on dit, c'est : Regardons ensemble les alternatives, regardons ensemble ce qui s'offre à nous au Québec. Et je trouve qu'en fait s'il y a un élément positif dans tout ce contexte difficile, c'est que les Québécois et les Canadiens se serrent les coudes actuellement. Et il y a une fierté. En tout cas, moi, j'ai la fierté d'être Québécoise et aussi d'être canadienne, mais il y a cette fierté pour notre économie, pour nos valeurs, pour nos institutions, pour notre pays, pour notre souveraineté. Tout ça est mis de l'avant, occupe de plus en plus d'espace. Alors, je trouve ça... je trouve que c'est bon, c'est quelque chose de positif, c'est quelque chose sur lequel il faut miser. Et donc de faire de l'identité numérique un projet porteur pour l'économie québécoise et une vitrine de notre expertise, c'est quelque chose de très positif et quelque chose que je considère qui est même... qui est transpartisan. Je suis certaine que le gouvernement est interpellé par ces questions.

• (17 h 10) •

Donc, voilà, c'est une question de fierté nationale, d'économie, d'économie locale, de s'assurer qu'on soit solidaire, donc, avec les entreprises de chez nous. Il y a des entreprises de chez nous, on le sait, là, je n'ai pas en faire la liste cet après-midi, mais qui sont partis de quelques dépanneurs qui sont devenus des chaînes bien connues sur... à l'échelle mondiale. Vous savez, là, le Québec qui fait notre fierté et qui a pris sa place, mais ça commence par des... ça commence... il commence petit et finalement, au fil du temps, ils deviennent des leaders. Donc, voilà, c'est quelque chose qui fait notre fierté. Et je pense qu'il y a une compagnie comme QScale, dans le contexte du projet de loi, du projet qu'on étudie, vaudrait la peine, ça vaudrait la peine qu'on les entende, M. le Président. Voilà. Merci.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci à vous, chère collègue. Je crois comprendre que la députée de La Pinière souhaite intervenir. Et vous disposez pour ce faire, Mme, d'une période de 30 minutes.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, la motion préliminaire qui est devant nous, déposée par ma collègue de Mont-Royal—Outremont, demande à ce que la commission des finances publiques entende M. Martin Bouchard, P.D.G. de QScale. Moi non plus, tout comme ma collègue, je ne connais pas cette entreprise ni le P.D.G., mais je pense que ça vaudrait vraiment la peine de l'entendre à la lumière de la revue de presse que j'ai vue sur cette entreprise. Pourquoi? Parce qu'on a devant nous un mégaprojet, le projet d'identité numérique nationale. Je l'ai dit et redit dans toutes mes interventions, nous voulons que ce projet fonctionne. Et il y a un élément dont il n'aurait pas été question, je l'ai dit aussi, il y a six mois, il y a un an, il y a deux ans, l'élément de l'incertitude qui est devant nous, l'incertitude créée par tous les décrets du président américain actuellement. On a reçu l'entreprise Micrologic qui nous a surtout parlé de la souveraineté numérique et donc dans les enjeux qu'elle identifiait il y avait l'absence de souveraineté numérique dans le projet de loi et nous proposait d'introduire dans cette loi...

Mme Caron : ...le concept de souveraineté numérique et ses principes fondamentaux concernant les données les plus sensibles de l'État québécois, c'est-à-dire les données classifiées protégées, permettant ainsi aux entreprises de répondre aux exigences légales et d'assurer un hébergement et un contrôle local des données.»

Ce participant à nos travaux, durant la phase des consultations, nous a dit et redit que son entreprise, et le ministre le savait puisqu'il semblait bien le connaître... que son entreprise était capable d'offrir des... le stockage de données dans l'infonuagique, hein? C'est une entreprise québécoise, fabricant d'un cloud souverain 100 % canadien. C'est déjà quelque chose qu'ils font. Ils ont plus de 1,3 milliard de revenus générés, plus de 300 experts. Alors, c'est une entreprise d'ici qui pourrait répondre au besoin qui va... qui va être créé avec l'identité numérique nationale. Et le contexte... le contexte, oui, économique, mais surtout le contexte de politique économique étrangère à l'heure actuelle fait en sorte qu'on se questionne sur la relation du Québec avec les géants technologiques étrangers, notamment américains. D'ailleurs, c'était l'une des motions préliminaires qu'on a déposées plus tôt. On souhaite avoir un état... un état des lieux, un état de situation, que le ministre a rejeté du revers de la main sans même prendre la parole sur ça, après nos interventions.

Je me questionne beaucoup parce qu'on a ici des entreprises québécoises, de chez nous, Micrologic, là, qui est venue nous voir la semaine passée, dans la revue de presse, QScale, qui est une entreprise d'ici, qui sont prêtes à travailler ici pour nous, pour protéger nos données, pour stocker nos données, dans les balises que le ministre va leur donner, respecter la loi au Québec et au Canada, ne pas ouvrir de brèche à l'étranger... Bon, je dis «ouvrir de brèche», il y en a déjà une, par la force des choses, étant donné les contrats qui existent à l'heure actuelle et qui sont donnés aux Amazon de ce monde. Bon, on ne peut rien y faire pour l'instant parce qu'il y a des contrats, mais, si on avait un état de situation, par contre, on pourrait savoir où est-ce qu'on s'en va avec ces contrats-là, ça dure jusqu'à quand, et se préparer à faire un changement à un moment donné ou voir combien il nous en coûterait pour résilier certains de ces contrats. Bref, QScale, qui est prête à investir 1 milliard et demi au Québec sans l'aide du gouvernement. Cette entreprise-là a demandé 0 $ en subvention au gouvernement du Québec. Elle a demandé, par contre, des blocs d'électricité fournis par Hydro-Québec. Et c'est là... c'est sur cet os-là qu'on tombe, là.

Depuis des mois que ma formation politique talonne le gouvernement à propos du projet de Northvolt et des blocs d'énergie qui ont été consentis à Northvolt pour un projet qui ne va pas commencer bientôt, s'il commence. Les blocs d'énergie sont coincés là, puis on a des entreprises d'ici qui sont prêtes, dans plusieurs domaines, à prendre de l'expansion, de la croissance pour l'économie québécoise dans les régions du Québec, le développement économique du Québec et des régions. Ce gouvernement se disait un gouvernement des régions. Ces entreprises ont besoin de blocs d'énergie supplémentaires, et on leur dit non, ou il y a un... on ne dit pas pourquoi, parce que c'est confidentiel. Il y a un formulaire à remplir, un formulaire à remplir, puis c'est oui ou c'est non.

QScale, dans un article du mois de septembre 2024, disait que... «Contrairement à d'autres entreprises qui acceptent de s'implanter au Québec seulement avec l'aide financière du gouvernement, QScale se dit prête à dépenser plus de 1 milliard de dollars pour prendre de l'expansion, mais impossible au Québec sans les blocs d'électricité fournis par Hydro-Québec. Alors qu'on sait que les demandes des centres de traitement de données explosent partout dans le monde en raison principalement des avancées de l'intelligence artificielle, cette entreprise-là, québécoise, est bien...

Mme Caron : ...pour profiter de cette croissance-là, elle a un campus à Lévis, mais elle arrive au bout de son projet et elle a besoin d'énergie. L'intelligence artificielle, c'est énergivore. Au début, dit M. Martin Bouchard, le P.D.G. de Qscale, on louait un mégawatt. Maintenant, les clients réclament 10 et 20 mégawatts, et ça va monter. À Lévis, nous avons une capacité de 140 mégawatts fournis par Hydro-Québec. Et puis ils devaient ériger des bâtiments sur huit ans. Les bâtiments de leur campus de Lévis, ça devait leur prendre, ils avaient planifié huit ans pour les construire. Ils souhaitaient s'assurer de remplir les espaces avant de débuter le chantier, mais ils ont dû accélérer parce que la demande est tellement forte. Alors, sur les huit phases de leur projet, il y en a deux qui étaient déjà complétées, là, quand l'article a été écrit en septembre 2024. Et puis ils estimaient que l'ensemble des édifices vont être loués dans 6 à 18 mois et construits d'ici la fin de 2026. Et pour répondre à la sollicitation, QScale doit prendre de l'expansion si son entreprise veut continuer de croître.

• (17 h 20) •

Le hic? Hydro-Québec et le ministère de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie ont considérablement réduit l'octroi de blocs d'électricité. En effet, peut-on lire, avec les défis énergétiques auxquels le Québec est confronté, un processus plus rigoureux de sélection des projets industriels de plus de cinq mégawatts a été mis en place en 2023. Bon, peut-être qu'en 2023, le ministère de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie et Hydro-Québec ne savait pas qu'on aurait devant nous aujourd'hui, février 2025, un projet de loi sur l'identité numérique nationale, projet qui va requérir du stockage de données énergivore, qui va requérir de l'espace dans l'infonuagique. Il y a quatre ans, donc en 2021, en automne 2020, puisque l'article a été créé en septembre 2024, il y a quatre ans, donc, on nous déclarait : Pas de problème, on va vous en donner de l'électricité. Hydro-Québec vendait des surplus à l'extérieur. Et du jour au lendemain, on nous a dit que c'est terminé, nous a indiqué M. Bouchard, le P.D.G. de Qscale. La société d'État a rejeté l'agrandissement à Lévis pour quatre modules supplémentaires. Pourtant, selon M. Martin Bouchard, QScale peut accroître sa station à 250 mégawatts.

Un projet de 50 mégawatts a également été refusé à Saint-Bruno-de-Montarville, en Montérégie, en février 2024. Donc, il y a un an. Écoutez bien ça, M. le Président. Parce que Qscale a offert gratuitement sa chaleur à Saint-Bruno et à Énergir pour chauffer les projets immobiliers qui s'en viennent dans ce secteur. En résumé, les mégawatts d'Hydro serviraient deux fois et il n'y aurait quasiment aucune perte d'énergie. Alors, les mégawatts, que souhaitait obtenir cette entreprise pour un projet à Saint-Bruno-de-Montarville allaient servir pour le stockage des données allait créer de la chaleur. Cette chaleur allait être récupérée pour chauffer des projets immobiliers de M. et Mme Tout-le-Monde, des projets immobiliers à Saint-Bruno-de-Montarville, puis même allait en donner à Énergir, Énergir qui fournit du gaz naturel pour le chauffage de maison également. On a ici, et puis là ce n'est pas parce que je veux faire l'apologie de cette entreprise, mais à sa face même, on a une entreprise québécoise qui a une expertise recherchée, en demande dans le monde entier, qui investit son argent sans demander aucune... aucun investissement du gouvernement du Québec, aucun, aucun fonds public pour s'établir ici. Ça fonctionne. Ils sont obligés d'accélérer le rythme de construction des phases de leur projet. Ils seraient soumis à toutes les balises que le...

Mme Caron : ...ministre de la Cybersécurité et du Numérique voudrait leur imposer? Nos données dans l'infonuagique, dans le stockage chez QScale ou chez Micrologic, là, nos données seraient ici, au Québec, protégées. Il y aurait une meilleure adhésion de la population au projet d'identité numérique, sachant que c'est ici que ça se passe. C'est une entreprise en plus qui a une conscience environnementale, jusqu'à réutiliser la chaleur qui est produite, donc les mégawatts d'Hydro-Québec qui leur seraient confiés seraient utilisés deux fois. J'y vois une très grande valeur ajoutée. Ça s'appelle de l'économie circulaire, ça. Réutiliser l'énergie qui est créée par notre activité ou réutiliser les rejets ou les déchets qui sont créés par une activité économique, c'est de l'économie circulaire, ça. Est-ce qu'on peut demander mieux? Un projet d'ici, des propriétaires d'ici qui ne demandent aucun investissement du gouvernement, des fonds publics, qui n'ont besoin que de blocs d'énergie, et pas des milliers de blocs d'énergie, là, pas des milliers de mégawatts, là, quelques centaines, 140. Le projet de Saint-Bruno-de-Montarville, c'était juste 50 mégawatts qui leur a été refusé. Je me dis mais qu'est-ce qu'on peut demander de mieux comme développement économique? Le Québec d'abord, là, c'est ça. C'est développement des entreprises d'ici, le développement économique des entreprises d'ici. Ces entreprises, là, domaine de pointe, expertise de pointe, ils en créent, des jobs payantes, comme dirait le premier ministre. Bien, pourquoi on ne s'ouvre pas à ces entreprises-là plutôt qu'aux grandes entreprises étrangères. Pourquoi on ne leur donne même... on ne donnerait pas à QScale la possibilité de venir nous dire ce qu'elle pourrait faire dans le cadre du projet de loi n° 82, c'est-à-dire dans le cadre de l'implantation de l'identité numérique? Il me semble qu'on pourrait profiter de leur expertise. On pourrait s'ouvrir sur nos entreprises. Puis là, ce sont deux entreprises, il en existe peut-être d'autres, là, il en existe peut-être d'autres qu'on... qu'on ne connaît pas. Pourquoi on les... on les... on les mettrait à l'écart?

Parlant d'une autre entreprise, effectivement, la... un article, cette fois-ci, celui qui a été publié plus récemment, le 3 décembre 2024 dans La Presse Affaires, on nous mentionne... on nous dit que QScale n'est pas seule dans cette situation, qu'un autre exploitant de centre de données, Vantage Canada s'est buté au même problème en 2023. Le problème, c'est de ne pas avoir... c'est de ne pas avoir la possibilité d'obtenir des mégawatts au Québec, alors qu'on a une économie qui est basée sur cette ressource verte, qu'est l'hydroélectricité, qu'on réserve... qu'on a réservé à des grandes entreprises étrangères comme Northvolt, alors que nos entreprises d'ici crient famine.

Là, on a un... on a un projet d'identité numérique nationale qui va requérir beaucoup d'énergie. Est-ce qu'on va le donner... Est-ce qu'on va donner les blocs à des entreprises d'ici, qui vont créer des jobs, qui vont rester ici, qui vont protéger nos données, qui vont être soumises aux lois québécoises et canadiennes et non pas au Cloud Act, là, la loi sur l'infonuagique, la loi fédérale américaine, qui, comme je le disais tout à l'heure, permet à la police fédérale américaine d'obliger les entreprises américaines à fournir les données qu'elles ont, même si elles sont à l'étranger, donc au Québec. Il me semble qu'on a une occasion...

Mme Caron : ...en or, là, avec une entreprise comme QScale ou une entreprise comme Micrologic. Pourquoi ne pas donner la chance à ces entreprises-là d'être partenaires avec le gouvernement du Québec, pour le bénéfice des Québécois? Il me semble que c'est une question légitime. Il me semble que, quand on est un gouvernement de l'économie, qu'on se dit un gouvernement de l'économie puis un gouvernement des régions c'est quelque chose qu'on devrait envisager très, très sérieusement, et pas juste sérieusement, mais avec beaucoup d'enthousiasme. C'est ça, le Québec qu'on veut. Alors...

Les PME québécoises... on le sait, les PME québécoises, c'est l'épine dorsale de notre économie. Ça a toujours été comme ça, ça ne va pas changer, et puis, dans le contexte actuel, ça va peut-être s'accélérer. Alors, donnons donc une chance aux entreprises québécoises de participer à ce projet porteur et structurant d'une identité nationale numérique, et d'avoir nos données chez nous. Il va y avoir... je suis certaine qu'il va y avoir une adhésion beaucoup plus grande de la population.

• (17 h 30) •

Évidemment, il faut que le projet soit bien fait, soit bien planifié, soit bien géré. La fameuse feuille de route dont nous parlait la Vérificatrice générale, il faudrait l'établir, avec une vision claire de ce qu'on va faire, ce qu'on ne va pas faire en matière de biométrie, en matière d'intelligence artificielle, en matière de stockage de nos données, et en matière, évidemment, de communication, de bien communiquer ce qu'on veut faire pour rassurer la population, pour rassurer les utilisateurs, même dans les ministères et organismes, de la... de tous ceux qui vont utiliser donc, la... l'identité numérique nationale. Ça nous permettrait peut-être aussi de savoir si le gouvernement prévoit des aides aux entreprises technologiques québécoises, qui vont devoir adapter leur technologie pour adapter les... pour s'adapter aux solutions existantes chez les différents ministères et organismes.

On a eu, tout à l'heure, la motion du député de Jean-Lesage à propos de la Fédération des cégeps. Fédération des cégeps, on voit qu'il y a un... une grande préoccupation, et avec raison, là. Ils ont un réseau qui fonctionne très bien, qui est essentiel dans le domaine de l'enseignement supérieur, et ils craignent, en tout cas, selon la façon dont le projet de loi est libellé actuellement, d'être obligés d'aller ailleurs, de ne peut-être pas avoir d'interopérabilité. On n'est pas plus avancés. On a fait... on a fait la discussion, ma collègue et moi, après le député de Jean-Lesage, mais, comme le ministre s'est refusé à dire quoi que ce soit sur cette motion-là aussi, on ne sait pas. Peut-être qu'il y a déjà des plans pour répondre à cette préoccupation-là, mais on ne peut qu'imaginer parce qu'on n'a aucune réponse là, aucune... aucun mot. Tout va bien, Mme la Marquise, on passe au suivant. C'est un petit peu ça qu'on voit aujourd'hui là, dans la commission parlementaire, peu importe qu'on tente de faire un travail rigoureux dans le but de s'assurer que le projet se réalise correctement, qu'il ne fasse pas un autre SAAQclic et que tout le monde soit bien servi.

Et puis, si le projet se fait bien, bien, tant mieux pour le gouvernement aussi, parce que ce sera une réussite. Mais il faut mettre tous les atouts de son côté et considérer les obstacles qui peuvent se poser au projet. C'est sûr que, quand on a de l'enthousiasme pour un projet, on veut qu'il se... qu'il se réalise, on veut foncer, et tout ça. C'est parfait. Mais il ne faut pas faire fi de tout ce qui existe ou de tout ce qui arrive autour. Et quand quelqu'un nous dit : Hum! attention, un autre va dire : Hum! attention... Ce n'est pas de l'idéologie, là, on ne parle pas de questions philosophiques, existentielles ou idéologiques qui seraient toujours contre un type de projet X. On parle de préoccupations très terre à terre...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

Mme Caron : ...la protection de nos données, le stockage de nos données localement, ça s'appelle de la souveraineté numérique. Ça s'appelle, je dirais, presque du nationalisme numérique. L'importance, l'importance de rassurer les citoyens, pas seulement par une opération de communication marketing, surtout pas par ça, mais basée sur des faits, sur la réalité, sur vers où on s'en va avec ce projet-là, quelle est la vision du projet, qu'est-ce qu'on veut faire, qu'est-ce qu'on ne veut pas faire. En matière de biométrie, en matière d'intelligence artificielle, en matière d'infonuagique, où seront nos données? Qu'est-ce qu'on va faire pour offrir des services à ceux qui ne pourront pas ou ne voudront pas utiliser l'identité numérique?

En matière budgétaire aussi, en matière de ressources, on l'a dit, on voulait entendre la présidente du Conseil du trésor. Parce qu'on a eu zéro réponse, même zéro mot du ministre, après nos argumentaires pour tenter de le convaincre, puisque lui nous a dit... a dit, plutôt, à des groupes qui sont venus en commission la semaine dernière : Bien, moi, je n'ai pas les réponses, ça, ça appartient à ma... à ma collègue. Le ministre lui-même, sauf erreur, a dit que c'était un projet transversal. Et c'est vrai, c'est un projet transversal, l'identité numérique, parce que tout le monde, tous les ministères et organismes vont être appelés à s'en servir. C'est effectivement transversal. On ne peut pas avoir un projet plus transversal que ça. Mais, bon Dieu! Ne travaillons pas déjà en silo en partant en disant : Bien, ça, les ressources humaines, ça appartient à ma collègue du Trésor. Puis est-ce que le budget pour faire ça, ça va appartenir au ministre des Finances? Puis, bien, on fonce, on fait le projet, mais tant pis si ça ne marche pas trop, si on n'a pas les ressources humaines, ou si on n'a pas les compétences à l'interne, ou si on n'a pas le budget pour le faire. Rappelons-nous qu'on est dans un... dans une situation de déficit record de 11 milliards de dollars. Alors, c'est sûr que la question du budget va arriver un jour ou l'autre, surtout s'il faut embaucher des ressources à l'interne. Puis on sait qu'il faut le faire. Puis on espère que ce sera fait et qu'on ne dépendra pas... qu'on ne continuera pas à dépendre d'entreprises externes auxquelles on est liés à la vie, à la mort, dirait ma mère, pendant des années parce que c'est eux qui ont l'expertise. Puis, nous, bien, on paie.

Alors, je pense que ce projet-là, qui est un projet transversal, a tout ce qu'il faut pour être un projet avec une expertise québécoise. Il y a des entreprises qui sont capables de répondre. Puis là, je ne suis pas en train de dire qu'il faut privilégier cette entreprise-là ou cette entreprise-là. On pourrait peut-être avoir un consortium d'entreprises québécoises qui répond à tous nos... à tous nos besoins découlant de ce projet d'identité numérique nationale. Mais écoutons-les, invitons-les. Pourquoi ne pas leur parler? Ce sont des gens qui ont des expertises. Il y en a plusieurs qui sont venus nous mettre en garde. Puis je pense que, dans un projet comme ça, les mises en garde, ce n'est pas des blâmes. Ce n'est pas des : Non, non, allez-y pas, ou : Vous ne savez pas comment faire. Au contraire, ils prennent de leur temps pour préparer un mémoire. Ils prennent de leur temps. Ils se déplacent. Ils ne sont pas tous à Québec, là, ils se déplacent. Pour venir nous faire une présentation de 10 minutes, pour répondre aux questions des parlementaires, c'est parce qu'ils ont ça à cœur, parce qu'ils veulent mettre leur expertise au service des Québécois, au service du gouvernement québécois.

Même chose pour... Là, ce sont... je parlais d'entreprises, mais tous les autres qui sont venus, c'est aussi parce qu'ils ont à cœur que ça fonctionne bien. Les syndicats d'employés qui sont venus pour nous dire : Écoutez, il y a plein de projets qui ne se font pas actuellement, des projets qui sont mis sur la glace, des projets informatiques, là, qui ne se font pas, qui sont mis sur la glace. Alors, ça veut dire qu'ils ne se feront jamais? Ou qu'ils vont être reportés aux calendes grecques pour qu'on puisse faire celui-ci? Ou bien c'est juste que celui-ci, bien, on va adopter le projet de loi puis on verra quand ça va se produire? Il y a des questions. Il y a... Il y a de nombreuses questions auxquelles on n'a pas eu réponse...

Mme Caron : ...et des questions qui méritent d'avoir une réponse de la part du ministre ou, puisqu'il a dit lui-même qu'il ne pouvait pas répondre... bien, c'est pour ça qu'on a dit : Invitons la... Invitons la présidente du Conseil du trésor pour répondre aux questions auxquelles il n'a pas la réponse, parce que ce n'est pas un projet qui doit se faire en silo. Si le projet se fait en silo entre les... autour de la table du Conseil des ministres, on est bien mal parti. Puis, si le projet se fait sans écouter plus d'experts qui ont quelque chose à nous dire ou plus d'organisations, comme la Fédération des cégeps, qui ont des préoccupations très légitimes, bien, encore là, c'est bien mal parti.

Nous, ce qu'on veut, c'est que le projet réussisse. Et le ministre aura tous les bravos si le projet réussit, mais on souhaite qu'il se donne les conditions gagnantes pour réussir. Ça lui fera plaisir sans doute, mais surtout ça sera un service à rendre aux Québécois puis aux ministères et aux organismes québécois.

• (17 h 40) •

Alors, je réitère la motion qui a été déposée par ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, que, conformément à l'article 244 du Règlement de l'Assemblée nationale, elle a fait motion, donc, afin que «la Commission des finances publiques entende, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, M. Martin Bouchard, P.D.G. de QScale», dont nous avons parlé abondamment et qui mérite certainement qu'on l'entende, qu'il nous parle d'où il est rendu, même, avec son projet, parce que les articles qu'on vous a cités datent de septembre et de décembre 2024, dans le contexte actuel, là, qui... auquel on fait face chaque jour, là. Chaque jour, le matin, en se levant puis en écoutant la radio, on en entend des vertes et des pas mûres. Alors, il a peut-être des... il a peut-être bien des informations intéressantes à nous donner qui pourraient éclairer le ministre dans la conduite de ce projet-là, le ministre et ses équipes dans la conduite de ce projet.

Alors, M. le Président, j'appuie, bien entendu, la motion déposée par ma collègue. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie, très chère collègue. Y aurait-il d'autres interventions sur cette motion? Sans quoi nous allons procéder à la mise aux voix. Alors, cette motion est-elle adoptée?

Mme Setlakwe : ...nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?

Mme Setlakwe : Pour.

Le Secrétaire : Mme Caron (La Pinière)?

Mme Caron : Pour.

Le Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

Le Secrétaire : M. Bélanger (Orford)?

M. Bélanger : Contre.

Le Secrétaire : Mme Abou-Khalil (Fabre)?

Mme Abou-Khalil : Contre.

Le Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

Le Secrétaire : Et M. Simard (Montmorency)?

Le Président (M. Simard) : Abstention. Cette motion est donc rejetée. Et nous poursuivons. J'ai été avisé par ma collègue de Mont-Royal-Outremont qu'une motion préliminaire avait été déposée. Alors, Mme, la parole vous appartient.

Mme Setlakwe : Merci, M. le Président. Donc, je vais faire lecture de cette quatrième motion préliminaire :

«Conformément à l'article 244 du Règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances publiques, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, demande au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de transmettre à la commission, dans les plus brefs délais, une copie du plan d'implantation et de communication publique de l'identité numérique nationale.»

Le Président (M. Simard) : Alors, vous disposez, bien sûr, de 30 minutes.

Mme Setlakwe : Merci, M. le Président. J'aimerais réitérer l'importance de bien communiquer avec la population pour un projet aussi structurant et important que celui de l'identité numérique nationale. On se rappellera que le projet de loi a été déposé à la fin de l'année dernière, dans le... je crois que c'était la semaine où la mise à jour économique a été faite, et le ministre de la Cybersécurité et du Numérique n'a fait aucune conférence de presse, n'a fait aucune communication officielle publique pour expliquer le projet à la population. Et ça, on le déplore, M. le Président. Et, en fait, on ne le... on ne le comprend pas et...

Mme Setlakwe : ...et rappelons-nous que les experts sont venus nous dire, ce n'est pas nous, là, qui inventons, que le succès d'un projet de ce de cette nature dépend de la confiance qu'on va générer et de la confiance qu'on va susciter auprès de la population pour générer une adhésion optimale. Comment se fait-il que le ministre de la Cybersécurité et du Numérique... C'est lui qui est... qui est le chef, c'est lui qui est le chef d'orchestre, c'est lui qui est à la tête du ministère et c'est lui qui est donc ce chef d'orchestre de la transformation numérique tant souhaitée de l'appareil gouvernemental, et donc c'est lui, avec tous les pouvoirs et tout le leadership qui lui appartient, qu'il devrait incarner, c'est à lui à communiquer clairement avec la population et à expliquer ce qu'on entend par identité numérique nationale d'une façon vulgarisée, d'une façon simple et conviviale, s'assurer que la population comprenne qu'est ce qu'on entend par ce projet, qu'est ce qu'on entend par identité numérique nationale, comment est ce que ça va simplifier la vie des Québécoises et des Québécois, expliquer de façon encore une fois vulgarisée et simple, comment ça va s'opérer, comment les citoyens vont pouvoir plus facilement compléter des transactions, interagir, obtenir des services gouvernementaux par le biais des outils technologiques.

On le sait aujourd'hui, la quasi-totalité des Québécois et Québécoises ont un... ont des appareils technologiques. C'est tout à fait normal. Encore une fois, on ne s'oppose pas à la modernisation, on la souhaite. Ce qu'on dit, c'est : Communiquons adéquatement avec la population. Ce qu'on veut pour que le projet soit un succès, c'est que la population comprenne et embarque. Parce que ce ne sera pas obligatoire. Mais l'idée ce n'est pas de mettre de l'avant un projet en se disant : Bien, ce n'est pas obligatoire. Donc, ce n'est pas grave, ce n'est pas important si les citoyens adhèrent. Oui, c'est important. On veut qu'il y ait une très grande majorité des citoyens québécois qui choisissent de... choisissent d'adhérer à l'identité numérique nationale. Et donc... Mais pour qu'ils le fassent, il faut qu'il en saisisse l'utilité, il faut qu'ils en saisissent les bienfaits. Il faut qu'ils comprennent comment ça va fonctionner aussi, qu'ils soient rassurés au niveau de la sécurité de leurs renseignements personnels.

Et aussi, je dirais, et ça a été mentionné durant les consultations, il y a un expert qui est venu nous dire aussi que si le projet n'est pas... n'est pas bien communiqué, et c'est là où il faut prendre les devants, et c'est là où le ministre doit assumer son leadership, exercer son leadership, agir en leader et bien communiquer, ce qu'on veut, c'est éviter qu'il y ait de la désinformation et que la... et que la peur s'installe. Nous, on n'est pas en train de dire que ces enjeux-là n'ont pas de... n'ont pas de solution. Tous les enjeux qui ont été mis de l'avant peuvent être encadrés, mais c'est important dès le départ d'expliquer, de fédérer. C'est sa responsabilité au ministre de fédérer les Québécois. C'est ce que fait un leader. Ce n'est pas des explications techniques compliquées que les... que les Québécois veulent entendre. Ils ne veulent pas... ne veulent pas entendre parler de... de tout ce que ça implique comme... comme exigence technologique, comme la question, là, du «watching» était vraiment intéressante, mais les Québécois, ce qu'ils veulent comprendre, c'est... Ce qu'ils veulent comprendre, ce n'est pas comment ça va... comment ça va fonctionner dans le... au niveau des détails technologiques, mais plutôt quels seront les bienfaits, leur expliquer comment ils vont pouvoir prendre leur téléphone, leur iPad, leur tablette ou autre et facilement s'identifier, comment on va se débarrasser du papier, comment on va pouvoir rapidement transiger avec le gouvernement et dans quelles circonstances est ce qu'on va demander les renseignements a, b, c, d, e. Parce qu'on va vouloir, évidemment, que les organismes publics n'aillent chercher que les éléments qui sont nécessaires. Je ne m'explique pas pourquoi il n'y a pas eu un plan d'implantation et de communication. Là on parle plus de communication, aujourd'hui. On va arriver à l'implantation...

Mme Setlakwe : ...mais plus on tarde, plus on risque qu'il y a des craintes non fondées, qu'il y ait de la désinformation qui s'installe. Ce n'est pas moi qui le dis, ça a été dit par la Commission de l'éthique en sciences et technologies. Il va falloir qu'on explique clairement et ça n'a pas été fait encore. Et rappelons-nous, M. le Président, l'expert Steve Waterhouse qui d'ailleurs, sauf erreur, a été à l'emploi du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, on l'entend beaucoup dans les médias, on l'entend sur les réseaux sociaux, il est très sollicité, il est très actif, il donne son point de vue sur des enjeux de cybersécurité. Il est venu ici en commission. Ça a été vraiment un plaisir de l'entendre et de le lire. Je tiens son mémoire dans mes mains, et ce qu'il dit, et c'est ce qu'il faut retenir à la page 2 de son mémoire, parce que son mémoire couvre différents enjeux, différents points technologiques, etc., différents éléments sur lesquels il faut se pencher, mais ce que j'ai retenu de son mémoire, ce n'est pas les éléments technologiques, c'est des éléments qui ont trait, donc, à l'aspect humain. Il dit, et je le cite : «Pour y arriver, le travail de gagner la confiance des citoyens demeure à mon sens l'enjeu numéro un avant d'aller plus loin». Alors, ce n'est pas moi, là, qui sors ça de mon chapeau, là. Je n'invente pas cet élément-là. Je me suis intéressé au projet, j'ai lu les mémoires et j'ai échangé avec M. Waterhouse. Et ce que je retiens comme la condition gagnante la plus importante qu'il faut s'assurer de respecter, c'est la question de la communication, c'est la question de l'adhésion, de l'acceptabilité sociale et de la confiance qu'il faut aller chercher auprès des citoyens.

• (17 h 50) •

Quand on parle de communication, ça a été mentionné aussi dans l'excellent mémoire qui a été produit par l'Obvia, qui est l'Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'intelligence artificielle et du numérique. En résumé, bon, ils nous disent que c'est un projet structurant, on l'a dit nous aussi. Mais l'Obvia, donc, sur la base aussi d'une enquête qui a été faite auprès de 2 000 citoyens québécois, examine les conditions nécessaires à la réussite de ce projet structurant. L'analyse révèle que l'acceptabilité sociale constitue un enjeu fondamental avec 86,9 % des citoyens favorables à l'identité numérique sous certaines conditions, particulièrement en matière de sécurité et de protection des renseignements personnels. Les mémoires soulignent l'importance d'une gouvernance centralisée incarnée par le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, tout en relevant certaines zones d'ombre concernant l'hébergement des données, dont on a parlé amplement, les enjeux de vie privée et le rôle du secteur privé. On a parlé de ça aussi. Dans leur mémoire, il y a six recommandations qui sont formulées portant sur l'acceptabilité sociale, la cybersécurité et la protection de la vie privée, l'implication des parties prenantes, la présence d'une autorité centrale et l'utilité du système pour les citoyens. Ces recommandations s'appuient sur une analyse des expériences internationales et vise à assurer le succès durable de l'identité numérique nationale québécoise. Le mémoire conclut que le projet de loi n° 82 constitue une avancée significative, mais nécessite des précisions et des garanties supplémentaires pour répondre pleinement aux attentes et aux préoccupations des citoyens en matière de sécurité, et de protection des données, et d'accessibilité des services. Une de leurs recommandations, donc, encore une fois, c'est de maximiser la valeur et l'utilité quotidienne de l'identité numérique nationale pour les citoyens. C'est la recommandation 6 et ça rejoint donc l'objet de notre motion. Quand on demande un plan d'implantation et de communication publique de l'identité numérique nationale, c'est parce qu'on veut que ça fonctionne et on pense qu'il y a des éléments manquants à l'heure actuelle, M. le Président. Le plan d'implantation, c'est quoi la feuille de route? Ça, on va y venir. Il y a des acteurs, des experts qui l'ont mentionné spécifiquement dans leurs interventions, dans leur mémoire. Puis tout l'aspect de la communication...

Mme Setlakwe : ...revenu... c'est revenu partout. Tout le monde en a parlé. Et donc, c'est extrêmement important que le ministre l'explique à la population, ce qu'il n'a pas fait encore.

Je continue avec l'OBVIA. Donc, sa sixième recommandation, maximiser la valeur et l'utilité quotidienne de l'identité numérique nationale pour les citoyens : «Les expériences internationales sur la création et l'implantation de systèmes d'identité numérique démontrent que l'utilisation croissante de l'identité numérique augmente sa valeur aux yeux des citoyens. Par exemple, une utilisation quotidienne de ce système accroît son taux d'adoption parce qu'il est perçu comme étant utile et sécuritaire.» Il aurait pu y avoir une vidéo. Il aurait pu y avoir, avec cette présentation, pas juste du... pas juste une présentation verbale, mais une vidéo, quelque chose de très imagé, de très simple à comprendre. Tout de suite, on donne... on donne l'envol au projet. On s'assure que, tout de suite, d'attirer l'attention puis de susciter l'intérêt des citoyens. Ça n'a pas été fait.

«Si nécessaire, je me... je retourne au mémoire, la collaboration avec le secteur privé, par exemple, pour élargir les possibilités d'utilisation puis renforcer cette perception d'utiliser... d'utilité auprès de la population visée.» Bien, d'ailleurs, on ne le sait pas. Quelle est la vision du ministre, la vision complète du ministre par rapport à l'identité numérique nationale? Est-ce qu'on s'en tient aux organismes publics ou est-ce qu'éventuellement cette identité... cette authentification va permettre aux citoyens de transiger avec des entreprises privées aussi? Si on avait un plan d'implantation, une feuille de route, on le saurait. Mais là, on ne le sait pas. Et je ne suis pas la seule à poser la question. Il y a des experts qui sont venus poser la question en commission.

Donc, ils poursuivent, au niveau du mémoire de l'OBVI, en disant : «Pour ce faire, il est crucial de protéger les données personnelles et de respecter la vie privée des utilisateurs en renforçant les processus et mécanismes d'authentification, en limitant le partage des informations personnelles, en permettant aux utilisateurs de garder le contrôle sur leurs données personnelles et en assurant une interaction sécuritaire avec les organismes publics et les entreprises privées prestataires de services.» Encore une fois, une communication simple que tout le monde aurait pu comprendre, les bienfaits et l'encadrement pour éviter qu'il y ait des... qu'il y ait des dérives, et qui viserait à rassurer la population sur l'encadrement du nouveau système.

Dans leur conclusion, ils nous disent que ce sont donc tous des aspects cruciaux du projet de loi qui méritent d'être précisés. Et, encore une fois, c'est... c'est... c'est pour maintenir la confiance des citoyens et pour avoir... influencer sur l'acceptabilité sociale. On n'aura jamais une acceptabilité sociale parfaite, on n'aura jamais 100 % de la population qui va adhérer, mais on peut certainement viser à avoir une grande majorité de citoyens qui y croient et qui l'utilisent. Alors, ça, pour l'OBVIA.

Steve Waterhouse, on en a... on en a parlé. Il y a d'autres acteurs qui sont venus parler de l'importance de bien communiquer. Durant sa participation à la commission, la présidente de la CAI, la Commission d'accès à l'information, elle a soulevé plusieurs points. On pourra éventuellement en parler durant l'étude détaillée. Mais l'un des... l'un des points qu'elle a soulevés, c'est la question du triangle de confiance. Elle a parlé du triangle de confiance. Elle a parlé de la définition des rôles et responsabilités et des raisons pour lesquelles c'est important de sanctionner les acteurs qui ne respectent pas les règles. Mais donc, elle a... quand elle parle de ce triangle de confiance, ça rejoint l'objet de notre motion de demander au ministre quel est son plan de communication. Il n'a pas été divulgué. Il n'est pas connu. On aimerait, comme parlementaires qui travaillons à ce projet... on y croit, on l'a dit, on a voté pour le principe. Est-ce qu'il pourrait nous faire part de son plan?

L'Association québécoise des technologies, l'AQT, parle de miser sur la transparence et l'acceptabilité sociale évidemment de bien gérer les données. J'ai leur mémoire sous les yeux : «Communiquer clairement les objectifs et les modalités du projet pour renforcer la confiance et l'adhésion, assurer une mise en œuvre planifiée et réfléchie pour prévenir les erreurs et les malentendus.» C'est exactement ce qu'on demande, une mise en œuvre planifiée puis une communication adéquate. Donc, ce n'est pas une demande frivole et un caprice de l'opposition officielle, c'est demandé par les experts. On veut essentiellement que ça fonctionne. On veut aider le ministre à ce que ça fonctionne. Dans le passé, il y a...

Mme Setlakwe : ...eu des projets pour lesquels la planification n'était pas optimale. Et là je suis généreuse dans mon choix de mots. Évitons... apprenons des erreurs passées, abordons ce projet structurant, ce projet de société de la bonne façon, en communiquant clairement les objectifs pour s'assurer que la population comprenne l'utilité. Si on comprend puis qu'on est rassuré, on va avoir envie d'embarquer.

La Ligue des droits et libertés est venue en commission. Ils ont aussi déposé un mémoire. Eux déplorent le manque de transparence et déplore l'absence de débat. Est-ce que, vraiment, la question de l'identité numérique a fait l'objet d'un débat? En tout cas, à tout le moins, il faudrait qu'on commence par bien communiquer, surtout quand ça fait des années qu'on entend parler de ce concept. À un moment donné, la population finit par ne plus y croire. Mais si on a, vraiment, maintenant, un projet structurant et bien ficelé à proposer, le ministre ne devrait pas hésiter à déposer le plan d'implantation et de communication publique. J'en ai parlé de la Commission de l'éthique en science et en technologie, là, qui dit que si on ne communique pas adéquatement, ça peut donner lieu à de la désinformation. C'est la dernière chose qu'on veut. Je l'ai dit, Steve Waterhouse, lui, son enjeu numéro un : gagner la confiance du public.

• (18 heures) •

Et il y a eu, évidemment, la Vérificatrice générale du Québec, Mme Leclerc, qui est venue avec son équipe en commission et qui a déposé un mémoire. Elle aussi parle, donc, d'un plan, d'une feuille de route, d'un plan de communication et vraiment d'un... d'une gestion de projet adéquate. On se rappellera que, dans son mémoire, elle soulève trois principaux enjeux. Dans un premier temps, la cybersécurité et la protection des renseignements personnels. Dans un deuxième temps, l'accessibilité et la qualité des services aux citoyens. Et son troisième bloc est relatif à la gestion de projet. Et au fil de nos discussions, de nos échanges avec elle, on a réalisé que ce qui était le plus important, donc, c'était tous les contrôles, tout l'encadrement mais toute la feuille de route qui sera nécessaire... Et pour qu'il y ait un déploiement optimal, donc, du projet. On se rappelle que la Vérificatrice générale, au fil des dernières années, elle a livré des rapports sur différents projets pour lesquels la planification n'était pas idéale et pour lesquels, donc, il y a des recommandations qui ont été émises. Elle nous dit, dans son mémoire, et elle nous a dit en commission, d'en prendre compte, d'en tenir compte pour s'assurer qu'on ne reproduise pas les erreurs du passé. Elle dit qu'il est important que le ministère de la Cybersécurité et du Numérique réussisse à simplifier, à faciliter et à améliorer l'accès pour les citoyens aux services gouvernementaux, comme il est espéré avec le projet de loi n° 82. Mais pour cela, l'adhésion des organismes sera nécessaire. Quand on parle de gestion de projet, et c'est vraiment ces commentaires qui nous ont fait réaliser, en bonne partie, qu'effectivement on n'avait pas sous les yeux un plan d'implantation, une feuille de route. Elle nous dit, au niveau de la gestion de projet, que le projet de loi n° 82 confié au ministre de la Cybersécurité et du Numérique la responsabilité de la gouvernance et de la gestion centralisée de l'identité numérique nationale. On le sait. De plus, il mentionne que le ministre coordonne les actions des organismes publics pour les infrastructures de télécommunication dans l'objectif d'assurer une gouvernance intégrée de ces infrastructures à l'échelle gouvernementale. Pour commencer, elle nous dit qu'il faut bien définir les besoins. Dans mon rapport d'octobre... dans son rapport d'octobre 2020, je la cite, sur le RENIR, Réseau national intégré de radiocommunication, le RENIR : «J'ai remarqué — c'est la Vérificatrice générale qui parle — que les utilisateurs ont été peu consultés pour son développement. Cela a créé un écart entre leurs besoins et les services obtenus. Le RENIR n'était pas devenu le réseau national de radiocommunication qu'il devait être, comme prévu au début du projet...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...objectif de créer le RENIR pour permettre une plus grande interopérabilité des communications lors des situations d'urgence n'était donc pas atteint. Le ministre... Le MCN devra consulter les utilisateurs, c'est-à-dire les citoyens et les organismes gouvernementaux, pour s'assurer de répondre à leurs besoins.»

Je poursuis, et c'est l'extrait le plus pertinent : «Une bonne planification est également essentielle afin de limiter les retards et les dépassements de budget. La vérificatrice nous dit que dans son rapport de juin 2021 sur les projets en technologies de l'information des universités, elle a constaté que les deux universités auditées avaient dépassé leur budget et accumulé plusieurs années de retard. C'était surtout en raison de problèmes dans la planification des projets. Cela a mené les universités à sous-estimer la complexité et le coût de leurs projets. En plus, les processus utilisés pour sélectionner un fournisseur n'étaient pas adéquats, ce qui a fait en sorte qu'elles se sont associées à des firmes dans les services qui ne répondaient pas à leurs besoins.» Bon. Elle enchaîne. Elle parle de l'importance d'avoir les ressources humaines compétentes, ça, on en a parlé amplement ce matin, et aussi de la dépendance, donc, à un fournisseur.

Mais ce qu'il faut retenir, c'est que, quand on a un projet de cette envergure, un projet aussi important dont l'impact peut être, rappelons-le, très positif pour les citoyens, mais qui comporte des risques, bien, d'où l'importance d'avoir un plan de match. Un plan d'implantation très clair, avec toutes les étapes, ça ne sert qu'à rassurer la population. Alors, je pense que le ministre doit en avoir un tel plan. Alors, on lui demande tout simplement d'en transmettre copie à la commission afin qu'on puisse en prendre connaissance. C'est dans l'intérêt public, M. le Président. C'est dans l'intérêt, pas seulement des parlementaires... c'est dans l'intérêt public de savoir quelle est la feuille de route, quel est le point de départ.

Et là, on comprend aussi que l'identité numérique, ça fait un certain temps qu'on en parle, bien, qu'on fasse aussi le bilan de ce qui a été fait jusqu'à maintenant. Puis, de prendre les informations qui sont dans l'espace public. Il y avait différentes phases à l'identité numérique. Ce n'est toujours pas clair exactement, le projet qu'on a sous les yeux aujourd'hui, il s'inscrit où exactement, dans l'identité numérique dont on parle depuis plusieurs années. Donc, une espèce de bilan, de compte rendu d'où on est rendus, des étapes qu'on a... on a franchies jusqu'à maintenant, évidemment, où on en est rendus avec les organismes publics, qui vont devoir... qui vont être soumis à l'utilisation de cette... de ce nouveau système, où est-ce qu'on en est rendus dans nos échanges avec eux, à quel moment est-ce qu'on pense qu'on va déployer ce système, on va commencer par quel organisme, par quoi, quelle va être la séquence, quelle va être... on va... on va... de quelle façon est-ce qu'on va accompagner ceux qui sont moins sophistiqués. On le sait, le gouvernement, le ministère a... octroie une cote à différents... aux différents organismes publics. C'est que c'est un... c'est une façon d'évaluer leur sophistication, si vous me prêtez l'expression, au niveau numérique. Certains sont très autonomes, ils sont très sophistiqués et ont déjà les outils et les façons de faire, d'autres ont besoin de plus d'accompagnement. Le ministre l'a déjà dit publiquement, que ça dépend des circonstances. Il n'y a pas le même niveau d'intervention avec certains organismes publics par rapport à d'autres. Ça dépend de leur niveau de... leur niveau de... c'est ça, de sophistication au niveau numérique. Mais quel est le plan de match? On commence avec qui? Qui a besoin de plus d'accompagnement? Dans quel ordre est-ce que ça va se faire? Combien est-ce que ça va coûter? Je vous rappelle les... ce que la Vérificatrice générale a mentionné. Ce que les contribuables vont vouloir savoir, évidemment, c'est combien ça va coûter et combien de temps ça va prendre. Peut-être que le ministre est réticent à fournir des dates, mais il va falloir qu'il en fournisse. Il va falloir qu'il donne une estimation de ses objectifs au niveau du déploiement du projet et expliquer, encore une fois, pourquoi, jusqu'à maintenant, les différents volets, les différentes phases de l'identité numérique n'ont pas encore vu le jour.

Encore une fois, tout ça, c'est dans l'optique de susciter une adhésion accrue, de susciter une adhésion intéressante, adéquate. En Colombie-Britannique, on se le... on se rappelle, c'est une juridiction...

Mme Setlakwe : ...une province qui a mis de l'avant un tel projet, mais pour lequel malheureusement, apparemment, il n'y a pas énormément de participation de la part du public.

Rappelons-nous le fiasco SAAQclic. Je sais que c'est douloureux de toujours ramener ça, mais c'est normal qu'on le fasse, M. le Président. On n'a pas été capables de façon efficace, au niveau du gouvernement caquiste, d'offrir aux Québécois une plateforme, un service simple et efficace pour renouveler des permis de conduire et des certificats d'immatriculation. Tu sais, on n'était pas capables de le faire, pour ce volet qui était, somme toute, je pense, plus simple, en tout cas qui ne concernait pas des services critiques comme des services de santé, on a vraiment déstabilisé la population. Le plan d'implantation, clairement, comportait des failles. D'ailleurs, dans les semaines, les mois à venir, on aura l'occasion de lire la vérificatrice générale. Elle fait actuellement, donc, l'audit de ce projet, de ce fiasco. Et on veut éviter que ces situations-là se reproduisent.

• (18 h 10) •

Dans le plan d'implantation de SAAQclic, il a été décidé de fermer les succursales pendant quelques semaines, et ensuite, de déployer la plateforme. Avec tous les retards, avec tout le... pas «les retards», mais toutes les transactions qui étaient en attente, donc il y avait énormément de demandes au moment où on a rouvert le système, déployé le système. Et là c'était le chaos total. Parce que les gens, encore une fois, la population n'était pas prête. On avait surestimé... On avait surestimé leur capacité de rapidement s'adapter. On avait surestimé la performance de la plateforme du système. On avait sous-estimé au contraire l'encadrement, l'accompagnement qui était nécessaire. Et ça a causé, comme on sait, des files d'attente, des Québécois qui ont perdu des heures et des heures de leur temps précieux, qui ont dû s'absenter de leur travail pour aller faire la file devant des succursales de la SAAQ pour parler à des employés de l'État, pour renouveler leur permis de conduire et leur certificat d'immatriculation, des transactions somme toute assez de base, assez assez simples. C'est ce qu'on aurait espéré.

Il faut à tout prix s'assurer qu'on a un plan d'implantation bien réfléchi, qui a... qui a suivi toutes les étapes et qui soit soumis aux membres de la commission. Encore une fois, on a beau étudier un projet de loi, c'est... c'est... c'est sur papier, là. Sur papier, on va prévoir les encadrements, sur papier, on va prévoir des balises, on va souvent s'en remettre à des règlements, mais il n'en demeure pas moins que les conditions gagnantes, encore une fois, rappelons-nous les conditions gagnantes pour un déploiement à succès de ce projet dépend surtout d'un plan d'implantation et de communication publique réfléchi et étoffé. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : C'est moi qui vous remercie, chère collègue. Je cède maintenant la parole à la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je voudrais dire que ma collègue et députée de Mont-Royal-Outremont, qui a déposé cette motion pour demander au ministre, au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de transmettre à la commission, dans les plus brefs délais, une copie du plan d'implantation et de communication publique à l'identité numérique nationale... alors ma collègue a fait référence à SAAQclic, au fiasco des changements technologiques, à la surestimation de la capacité de la population, et même des employés, et je dirais à rendre ça opérationnel, à s'habituer du jour au lendemain. On a pu rattraper la SAAQ parce qu'il y avait des gens qui... des employés qui étaient là qui ont pu aider les gens en personne. Mais, avec les données, on ne pourra pas rattraper si on fait une erreur. Si le plan n'est pas fait de manière complète, avec toutes les... toutes les balises nécessaires et en répondant aux différentes recommandations, en mettant le tout...

Mme Caron : ...le tout en place, dans le bon ordre et en informant tout le monde, en formant tout le monde, que ce soient les employés qui devront s'en servir, qui devront accompagner les citoyens. Bref, si on ne fait pas ça pour... ce qu'on n'a pas fait dans le cadre de SAAQclic. Si on ne le fait pas non plus pour le projet d'identité numérique nationale, les conséquences seront beaucoup plus graves, parce que nos données sont cruciales. La propriété de nos données est cruciale, la protection de nos données est cruciale.

Alors, je vais faire référence au mémoire de l'Association québécoise des technologies, qui a presque tout ce qu'il faut. Si jamais le ministère n'a pas préparé de plan d'implantation ou, en tout cas, de plan de communication publique, avec ce mémoire, je trouve qu'il y a déjà un très bon point de départ, parce que le mémoire en question nous dit que le projet de loi représente une opportunité pour moderniser l'accès aux services publics et pour renforcer la confiance des citoyens envers les institutions dans un contexte de transformation numérique. Et n'oubliez pas que, pour qu'une institution demeure solide ça prend la confiance. L'ingrédient numéro un, c'est ça. Faites le cours Principes et enjeux de la démocratie, là, le premier cours à l'ENAP, et c'est ce qu'on va vous dire. Une institution, pour que ça vive dans le temps, pour que ça perdure, l'ingrédient, c'est la confiance des citoyens. Quand la confiance s'effrite, l'institution va moins bien puis elle est moins forte. Alors, il faut s'assurer qu'on a la confiance et, dans le cadre de l'identité numérique nationale, il faut s'assurer d'avoir la confiance des citoyens pour que ça fonctionne bien, pour que cette institution soit solide.

Alors, ce qu'on... il y a plein de... il y a trois priorités d'intervention, des orientations clés pour une mise en œuvre efficace, ce que propose l'Association québécoise des technologies. Je ne passerai pas à travers tout ça, mais je vais... je vais m'attarder sur la deuxième priorité d'intervention, qui dit de miser sur la transparence et l'acceptabilité sociale, et ça, ça se décline en communiquer clairement les objectifs et les modalités du projet pour renforcer la confiance et l'adhésion et assurer une mise en œuvre planifiée et réfléchie, pour prévenir les erreurs et les malentendus. Alors, en quelques mots, ça résume la feuille de route que des groupes nous ont dit qu'il nous fallait avoir, où on communique, on dit ce qu'on a planifié, on dit où on s'en va et on élimine une à une, les préoccupations, parce qu'on montre qu'on est capables de répondre à ces préoccupations-là.

Par exemple, l'un des commentaires... En fait, l'AQT, l'Association québécoise des technologies a commenté plusieurs des articles du projet de loi. Un exemple. À l'article 10.2... en fait, ils ont plusieurs commentaires sur l'article point 2, où c'est écrit, dans le projet de loi : «L'identité numérique nationale représente l'ensemble des moyens dont dispose l'État pour garantir à toute personne un accès sécurisé aux prestations électroniques de services gouvernementales et lui permettre d'avoir un niveau de confiance élevé lors de ses interactions avec les organismes publics.» La question que pose l'AQT :  «Le gouvernement est-il prêt à garantir l'accès aux équipements et ressources nécessaires pour les organismes utilisateurs, notamment ceux situés en régions éloignées ou de taille modeste, afin d'assurer leur conformité aux exigences du projet de loi?» Ça, ça devrait être une réponse qui est dans la feuille de route, et qui est communiquée, pour obtenir l'adhésion des organismes utilisateurs.

Ensuite, on dit, toujours à l'article 10.2 du projet de loi : «L'identité numérique nationale permet également à chaque personne qui l'utilise de réaliser des interactions dans la collectivité, notamment à l'aide d'attestations numériques gouvernementales dont elle détient le contrôle à partir d'une application où ces attestations sont déposées de façon sécurisée.» La question qui est posée : «La notion d'interaction dans la collectivité doit être clarifiée. Comprend-elle la possibilité que le service d'identification soit accessible à des entreprises privées?» Que la réponse soit oui, que la réponse soit non, il faut que ce soit dit, en toute transparence, et pour que les gens comprennent de quoi ça retourne, et puis, ensuite, peuvent accorder leur confiance et adhérer au projet...

Mme Caron : ...toujours en... à l'article 10.2 : «Au sens de la présente loi, on entend par attestation numérique gouvernementale un document technologique permettant d'établir l'authenticité ou la véracité d'une information ou d'un fait se rapportant à une personne.» Le commentaire qu'on lit de l'AQT : «Il est important de préciser que le représentant de l'organisme ne peut accéder qu'aux informations strictement nécessaires pour confirmer l'admissibilité à un service. Par exemple, vérifier que l'âge requis est atteint pour consommer un bien tel que l'achat d'un billet de loterie.» Donc, l'année de naissance, mais pas nécessairement la date de naissance. Et, sauf erreur, je crois que durant les consultations, le premier... pas «le premier ministre», pardon, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a dit qu'effectivement on aurait... les personnes auraient accès uniquement aux informations nécessaires, strictement nécessaires. Mais encore faudrait-il resserrer le libellé, s'assurer que c'est clair.

À l'article 10.4, alinéa un, «définir, mettre en œuvre et appliquer un cadre de gouvernance des renseignements personnels dans la collecte, la communication et l'utilisation sont nécessaires pour l'identification et l'authentification des personnes.» Alors, le commentaire, et il faut l'écrire dans le projet de loi, selon... selon l'AQT, c'est de «consentir aux citoyens le droit de retrait du consentement au traitement, le droit de rectification de ses données, le droit à l'effacement de ces données, le droit de savoir si ses données ont été consultées grâce à la traçabilité.» Ça, ça fait partie de ce qu'on appelle... de ce que les experts ont appelé l'autosouveraineté des données. Je... Ce sont mes données, je suis maître de mes données. Alors, si c'est ça qu'on veut effectivement faire, il faut que ce soit écrit dans le projet de loi. Il faut que ce soit dans la feuille de route. Il faut que ce soit expliqué, que ce soit communiqué dans la phase communication, dans le plan d'implantation, une communication qui fait l'objet de la présente motion préliminaire.

• (18 h 20) •

À l'article 10.4, toujours, l'alinéa deux dit «mettre en place des processus pour vérifier la cohérence et la qualité de ces renseignements.» Bien, les données collectées doivent être limitées à un objectif précis. «Seules les données nécessaires à cet objectif doit être utilisée. Les données sensibles comme les données biométriques doivent faire l'objet d'une protection renforcée. Les données doivent être supprimées dès qu'elles ne sont plus utiles. Des principes de sécurité tels que le chiffrement et la limitation des accès doivent s'appliquer à toutes les données traitées. Un délégué à la protection des données doit être désigné pour assurer la conformité aux réglementations en fonction des traitements réalisés.» Ça doit être écrit en toutes lettres, ça doit être dit, ça doit être communiqué.

À l'article 10.5 : «Un organisme public est tenu de recourir aux services visés au premier alinéa, aux conditions déterminées par le ministre. Le gouvernement peut toutefois soustraire un organisme public à cette obligation.» J'ai le goût de dire : Va-t-il le faire pour la Fédération des cégeps? «Les questions qui se posent : comment le projet de loi garantit-il que les ministères et organismes publics disposeront des ressources nécessaires pour respecter les nouvelles obligations en matière d'identité numérique et de cybersécurité?» Ça aurait été intéressant de savoir de la part de la présidente du Conseil du trésor puisque le ministre n'a pas pu répondre. «Les systèmes informatiques actuels des ministères et organismes publics étant souvent hétérogènes, quels mécanismes seront mis en place pour assurer l'interopérabilité des systèmes existants avec les infrastructures centralisées prévues dans le projet de loi?» Ça aussi, il faut le... il faut le dire, il faut l'expliquer, il faut dire ce qu'on a l'intention de faire. Là, ce n'est peut-être pas à ce niveau-là, l'adhésion des citoyens...

(Interruption)

Mme Caron : À vos souhaits, chère collègue. Ce n'est peut-être pas l'adhésion des citoyens, mais c'est l'adhésion des parties prenantes dans les ministères et organismes qui vont devoir changer leurs façons de faire, qui vont devoir se conformer à la nouvelle loi.

À l'article 10.6, on lit «Le ministre agit d'office comme source officielle de données numériques gouvernementales aux fins prévues au présent chapitre. Dans l'exercice de cette fonction, le ministre recueille, utilise ou communique des données numériques gouvernementales ou recueille auprès de toute personne des renseignements, incluant des renseignements personnels, lorsque cela est nécessaire.» Et la question qui est posée par l'AQT : Quelles mesures concrètes seront instaurées pour prévenir tout accès non autorisé ou usage détourné des données? Ça aussi, il faut que ce soit dit pour que les gens aient confiance, pour rassurer.

Toujours à l'article 10.6, à l'alinéa trois... en fait, l'alinéa trois et la fin... et la fin de l'article, où on dit : «Au présent... Au sens du présent chapitre, les données numériques gouvernementales sont le nom, les dates et le lieu de naissance d'une personne physique ainsi que le nom de ses parents, le nom et les coordonnées d'une personne morale...

Mme Caron : ...ou d'une société de personnes. Tout autre renseignement que détermine le gouvernement.» «Tout autre renseignement que détermine le gouvernement», ça, c'est large en titi, mes amis. Point de vigilance ici : «Cet alinéa soulève des préoccupations quant à un possible manque de transparence.» Il faut préciser de quel type de renseignement on veut... il s'agit, de quel type de renseignement il s'agit, pas ouvrir la porte tous azimuts, une carte blanche à tout autre type de renseignement. Je comprends qu'on veut faciliter l'implantation du projet peut-être, on veut faciliter les choses pour le gouvernement, mais ça, ce genre... ce genre d'article là, ça va miner la confiance des gens, il n'y a personne qui va être rassuré par ça, là.

À l'article 10.7, l'alinéa 4°, «la traçabilité de tout accès au registre par une personne, que ce soit pour y déposer ces données, les utiliser ou en recevoir la communication». C'est très important, cet aspect de traçabilité, et l'AQT nous dit : «Il faut mettre en place un journal d'audit transparent, permettant aux citoyens de vérifier qui a accédé à leurs données, et à quelles fins. Il faut garantir aux citoyens une visibilité complète sur leurs données pour prévenir tout abus, à l'image de ceux observés dans les systèmes de cote de crédit, informer les citoyens par le biais de notifications chaque fois que leurs données sont consultées.» Alors, ça, est-ce qu'on va le faire? Ça, ce sont des choses... Oui, ça va prendre du travail, ça va prendre du temps, mais il faut le faire. Ce sont les experts qui nous le disent, pour que la population adhère au projet. Est-ce qu'on va le faire, oui ou non? Ça, ça devrait être dans la feuille de route, puis ça devrait être expliqué dans la communication, dans le plan d'implantation et de communication qui est demandé par cette motion.

À l'article 10.8 : «Le gouvernement peut également déterminer les conditions et modalités d'une entente qu'un organisme public peut conclure dans le but de rendre interopérable l'identité numérique nationale avec les infrastructures et les systèmes de toute autre personne ou entité sur le plan local, régional, national ou international, dont la condition selon laquelle l'entente doit être conclue conjointement par l'organisme public et le ministre.» Le point de vigilance ici, c'est que le projet de loi pourrait entrer en contradiction avec les lois canadiennes sur la protection des renseignements personnels. J'avoue que ce point-là est peut-être moins lié à la communication, mais, certainement, c'est important dans l'implantation.

À l'article 12.5.3, qui se lit ainsi : «Un organisme public qui constate qu'une ressource informationnelle ou une information sous sa responsabilité fait l'objet d'une atteinte à sa confidentialité, à sa disponibilité ou à son intégrité et que cette atteinte présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé doit, avec vigilance, aviser le ministre.» Est-ce qu'il y a... dans les questions qui sont posées, est-ce qu'une gradation des risques est prévue dans le cadre de ce projet? Quel délai est fixé pour aviser le ministre en cas d'atteinte à la confidentialité, à la disponibilité ou à l'intégrité des données? Comment les citoyens concernés seront-ils informés de manière adéquate? On pourrait peut-être dire que c'est détaillé, que ce sont des détails, mais, non, ce ne sont pas des détails, ce sont des éléments importants, et, encore une fois, ce sont des éléments auxquels on doit répondre, et, si les réponses sont satisfaisantes, il y aura une adhésion de la part des citoyens et des utilisateurs de ce système.

M. le Président, la Ligue des droits et libertés, qui est venue durant... nous voir durant la période des consultations, avait des demandes à l'effet d'un débat public. C'était sa demande numéro un. «La Ligue des droits et libertés demande la tenue d'un débat public informé, éclairé et transparent sur l'ensemble du projet gouvernemental d'identité numérique, incluant le portefeuille numérique.» Je vous fais... je vous fais grâce de la parenthèse. «Un tel débat public doit permettre aux citoyennes et aux experts de se faire entendre et de discuter des choix faits par le gouvernement.» Une consultation en ligne n'est pas... ne serait pas suffisante, ne répond pas à cette exigence. Alors, cette demande s'inscrit dans la phase de communication.

Ma collègue l'a rappelé, je l'ai dit aussi aujourd'hui, en Colombie-Britannique, on a passé par-dessus cette phase, on a fait fi de l'importance de communiquer aux citoyens... de rassurer les citoyens en leur disant, pour tous les éléments que je viens d'énumérer, puis il y en a d'autres encore : C'est ce qu'on va faire, c'est là qu'on s'en va, vous n'aurez rien à craindre, parce qu'on va faire tout ce qu'il faut pour protéger vos données. Et puis ils ne l'ont pas fait, et il y a juste 10 %...

Mme Caron : ...de la population qui utilise le système. C'est un investissement quand même très important pour que seulement 10 % de la population l'utilise. On n'ira pas améliorer l'efficience dans les ministères ou dans la simplification des services si on fait la même chose ici, d'où la demande, puisqu'aucune information au préalable du projet de loi n'a été rendue publique. Là, je ne parle pas de rendre le projet de loi public. On ne parle pas d'un outrage au Parlement, là, on parle de communiquer sur un projet. Alors, il ne faut pas faire fi de cela, et ça justifie la motion qui est devant nous.

M. le Président, il me reste combien de temps?

Le Président (M. Simard) : Eh bien, il vous reste au moins 12 minutes, mais notre session tire à sa fin.

Mme Caron : D'accord. Alors, il reste combien de temps avant que la session...

Le Président (M. Simard) : À peine 25 secondes.

Mme Caron : À peine 25 secondes? Alors, je dirai... puis je pourrai continuer plus tard, mais je dirai que la question du profilage, la question de la biométrie sont abordées dans le mémoire de la Ligue des droits et libertés, de même que les pouvoirs réglementaires, et...

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, chers collègues, merci pour votre collaboration.

Sur ce, nous allons ajourner nos travaux sine die, mais ne partez pas trop loin, parce que mon petit doigt me dit qu'on se revoit demain.

(Fin de la séance à 18 h 30)


 
 

Document(s) associé(s) à la séance