Journal des débats de la Commission des finances publiques
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mercredi 12 février 2025
-
Vol. 47 N° 64
Étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l’identité numérique nationale et modifiant d’autres dispositions
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11 h (version non révisée)
(Onze heures quinze minutes)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, très heureux de vous retrouver. Je constate que nous avons le
quorum. Conséquemment, notre commission peut entreprendre l'étude détaillée du projet
de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres
dispositions. M. le secrétaire, bonjour. Bienvenue. Est-ce qu'il y aurait donc
des remplacements ce matin?
Le Secrétaire
: Oui,
tout à fait, M. le Président. M. Allaire (Maskinongé) est remplacé par M. Lemay
(Masson); M. Beauchemin (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par Mme Setlakwe
(Mont-Royal—Outremont); M. Morin (Acadie) est remplacé par Mme Caron
(La Pinière); Mme Zaga Mendez (Verdun) est remplacée par M. Zanetti
(Jean-Lesage).
Le Président (M. Simard) :
Bien. Alors, bienvenue à ces nouveaux collègues. Comme vous le savez, nous
débutons par des remarques préliminaires. Et sans plus attendre, pour une
période d'au maximum 20 minutes, je cède la parole au ministre.
M.
Caire
: Oui.
Merci beaucoup, M. le Président. Je serai beaucoup plus bref que 20 minutes,
parce que je pense qu'on est tous ici pour échanger sur les articles en
question. Beaucoup de choses ont été dites, M. le Président, dans les consultations
particulières. Je veux quand même revenir sur certains, certains éléments de
cette consultation-là, notamment sur le fait que je pense qu'a été salué le
fait qu'on institue l'identité numérique nationale. Je pense qu'il est reconnu
que c'est une obligation pour un gouvernement au XXIᵉ siècle de procéder ainsi.
Le projet de loi l'institue, oui, mais en plus crée un cadre législatif parce qu'on
comprendra que l'utilisation de cette identité-là doit être encadrée
juridiquement pour avoir la même portée que nos... nos pièces d'identité ou
nous attestations d'identité, pour utiliser le même langage, dans l'univers
physique.
J'attire l'attention des collègues sur
certains autres éléments, M. le Président, du projet de loi, puis notamment
dans le contexte qu'on connaît avec les États-Unis, la nouvelle politique qui
est mise de l'avant, bon, en tout cas pour laquelle il y a des menaces qu'elle
soit mise de l'avant par le président américain, l'élargissement du rôle du
courtier en infonuagique que nous souhaitons être maintenant un courtier en
ressources informationnelles. Alors, il faut comprendre que ça, ça donne des
possibilités au gouvernement, une fois qu'un fournisseur de services s'est
qualifié. Et on aura l'occasion d'échanger avec mes collègues, évidemment, plus
en détail, mais une fois qu'un fournisseur est qualifié, ça donne une
possibilité au gouvernement, après ça, à l'intérieur des fournisseurs
qualifiés, de choisir celui avec qui il veut faire affaire. Et ça, ça donne des
leviers intéressants dans le contexte actuel, avec... en ligne avec les
déclarations que le premier ministre a pu faire sur la souveraineté numérique
et que moi-même j'ai pu faire.
Donc, j'ai hâte de pouvoir en discuter
avec les collègues. On va le voir aussi au niveau des...
M. Caire : ...qualification.
Et d'emblée j'avise cette Assemblée, M. le Président, que mon collègue d'Orford
s'occupera de cet article-là en particulier, là, qui ajoute deux articles, là,
où c'est extrêmement important pour le gouvernement de mandater officiellement
le mais le MCN, parce qu'on le faisait officieusement avec les différents
désavantages que ça pouvait amener, donc de mandater officiellement le MCN pour
être ce fédérateur-là, ce coordonnateur là des infrastructures de communication
du gouvernement du Québec à des fins non commerciales, là, clairement indiquées
dans le projet de loi. Mais encore une fois, je vais laisser mon collègue
d'Orford expliquer l'idée derrière cet article-là, parce que c'est son champ
d'expertise depuis maintenant plus de six ans, et donc d'autres, d'autres
éléments du projet de loi, là, qui vient, je vous dirais, avec l'expérience
qu'on a, le ministère existe maintenant depuis trois ans, qui vient ajuster le
rôle, les fonctions du ministère en fonction de son évolution et de sa mise en
place. Donc, un projet de loi qui est extrêmement important à bien des égards,
sur l'identité numérique, très certainement, mais sur d'autres aspects aussi du
mandat du ministère et des outils qui sont... qui sont très importants pour
nous, pour la suite des choses. Donc, sans plus tarder, M. le Président, j'ai
bien hâte d'échanger avec mes collègues des oppositions. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, M. le ministre. Et je cède maintenant la parole à la députée de Mont-Royal—Outremont.
• (11 h 20) •
Mme Setlakwe : Merci, M.
le Président. Bien, ça me fait plaisir de vous retrouver ce matin. On a eu
quelques jours de répit après les consultations. J'étais prise dans un autre
projet loi, mais heureuse de vous retrouver pour qu'on puisse continuer les
échanges concernant ce projet de loi important, le projet de loi n° 82,
qui vise à établir une identité numérique nationale pour les citoyens
québécois, qui constitue un projet de loi très important mais un projet
structurant de société aussi très important et qui aura un impact majeur sur
nous tous. Effectivement, il y a un impact potentiellement très positif lié à
ce projet, car les Québécois s'attendent aux meilleurs services numériques de
la part de l'administration publique. L'identité numérique nationale
deviendrait la seule façon de s'identifier tant dans le monde réel que dans le
monde numérique. Elle vise à permettre aux citoyens de s'authentifier en ligne
pour accéder aux services gouvernementaux de manière sécuritaire. Du moins,
c'est ce que l'on souhaite. Cette identité fonctionnerait comme un substitut
pour les documents d'identité physique qu'on connaît, passeport, permis de
conduire, certificat de naissance, etc.
Donc, ce sont des avancées qui peuvent
être très positives, nous en convenons, mais on parle ici d'un projet loi qui a
aussi le potentiel d'affecter négativement les Québécois au niveau notamment de
la sécurité des données et de la protection de leurs renseignements personnels.
La transparence, la planification, la communication, l'encadrement et le
déploiement de ce projet vont nécessiter la plus grande rigueur, la plus grande
prudence, M. le Président. Nous avons voté pour le principe, car nous
partageons le souhait de moderniser les services de l'État. C'est un projet de
société, je le répète, qu'il nous faut entamer. Et là-dessus, nous sommes
d'accord avec le ministre, c'est un projet structurant. Donc, on ne souhaite
pas mettre un frein à la modernité, mais on est inquiets sur plusieurs volets,
M. le Président.
Donc, l'objectif qui est d'offrir aux
citoyens des services numériques accessibles, sécuritaires et adaptés à leurs
besoins, ça, on ne peut pas être contre cet objectif. On a d'ailleurs accumulé
un retard important dans ce domaine. Il y a toute une panoplie d'experts qui
sont venus en consultation. On les remercie d'ailleurs pour leur contribution.
D'autres n'ont pas pu venir témoigner en commission, mais ont soumis des
mémoires de grande qualité. On en a pris connaissance et on remercie donc tous
ceux qui ont contribué à nos travaux. On a mentionné que ce type de projet
avait été mis de l'avant dans différentes juridictions. Je ne les nommerai pas,
on les connaît. Il y a notamment l'Estonie. Il y en a plusieurs autres. Au
Canada, il y a la Colombie-Britannique qui a mis de l'avant un projet
similaire. Et donc les experts, quand ils se prononcent sur les enjeux, sur les
éléments de préoccupation, bien, ils parlent en connaissance de cause, en ayant
étudié les projets qui ont été mis de l'avant dans d'autres juridictions.
On va s'assurer donc, dans le cadre de nos
échanges, notamment durant l'étude détaillée, que tous les enjeux et que toutes
les préoccupations qui ont été mises de l'avant dans le cadre des consultations
et dans les mémoires soumis soient discutées en cette commission parlementaire.
Je vous rassure, M. le Président, tout au long du processus, comme...
Mme Setlakwe : ...toujours.
Nous, à la position officielle, on va travailler de façon constructive à
l'analyse du projet de loi afin de le bonifier, car nous espérons sincèrement
que cette identité numérique nationale va, oui, faciliter l'obtention des
services publics pour le plus grand nombre possible de Québécois et qu'il
viendra réduire les risques de fraude comme les vols d'identité, l'hameçonnage,
les fuites, etc. Et on va trouver, on l'espère, on va, en tout cas, travailler
très fort pour trouver l'équilibre entre l'efficience administrative, la
protection des renseignements personnels et l'inclusion numérique. Bref, ce
serait un exercice de trouver l'équilibre entre simplicité et sécurité.
Un élément que je me dois de mettre de
l'avant comme un énorme bémol à notre vote en faveur du principe du projet de
loi n° 82, c'est que le projet d'identité numérique nationale, à notre
sens, c'est beaucoup plus que le libellé de cette pièce législative. Le
ministre devra rassurer la population, fédérer les Québécois et mettre de
l'avant un plan et une feuille de route qui assurera le succès de ce projet
structurant. Le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, qui a joué un
rôle déterminant, on va le rappeler dans le déploiement de SAAQclic et qui a
admis lui-même en cette Chambre que le déploiement avait été un fiasco,
sera-t-il cette fois-ci réunir les conditions gagnantes pour mener à terme et à
bien ce projet structurant d'identité numérique nationale? Permettez-moi, M. le
Président, de lever le drapeau.
Il y a plusieurs mises en garde qui ont
été énoncées, notamment par la Vérificatrice générale. Je me permets de me
référer à son mémoire brièvement. Elle fait état de trois principaux enjeux
dans son mémoire : la question de la cybersécurité et de la protection des
renseignements personnels, la question de l'accessibilité et de la qualité des
services aux citoyens, et aussi, et c'est très important, la gestion du projet.
Dans son mémoire, elle fait état de ses rapports d'audits passés pour lesquels
elle ramène les recommandations, elle ramène les enjeux, elle ramène les
problématiques qui avaient été soulevées dans le cadre des différents projets.
Et elle nous invite à la prudence. En tout cas, moi, c'est comme ça que je l'ai
reçue. Et, en conclusion, elle mentionne qu'il s'agit d'un projet intéressant,
je le cite, «qui vise notamment à simplifier les échanges entre les citoyens et
l'État, mais qui, cependant, pour obtenir l'acceptabilité sociale ainsi que la
confiance des citoyens et leur adhésion, le MCN devra mettre en place une
gouvernance efficace en garantissant la sécurité des données, en offrant un
service accessible et de qualité ainsi qu'en s'assurant que les données sont
exactes». En outre, bon, elle soulève le fait qu'il y a de nombreuses modalités
qui doivent être fixées par règlement et elle invite le gouvernement à la
prudence dans l'élaboration de ses règlements, etc. Mais elle parle... elle
parle surtout — c'est ce qu'il faut retenir — de la
planification et du déploiement du projet.
Quand je parle de conditions gagnantes, M.
le Président, qui sont nécessaires à la réussite du projet, je parle d'éléments
qui ne se retrouvent pas forcément dans le projet de loi mais qui sont cruciaux
à la réussite du projet. Avant tout, il faut bien communiquer le projet aux
citoyens afin qu'ils voient l'utilité du système et en quoi l'identité
numérique leur offrira une meilleure accessibilité aux services
gouvernementaux. L'importance de bien communiquer avec la population, elle est
primordiale dans ce dossier. Cet élément de la communication, de la confiance,
de l'adhésion, de l'acceptabilité sociale, elle revient, elle est revenue à
maintes occasions, M. le Président, durant les consultations et dans les
excellents mémoires qui nous ont été soumis.
Comment cette identité numérique nationale
va-t-elle simplifier la vie aux Québécois? Est-ce qu'on leur a expliqué? Moi, à
ce jour, je n'ai pas eu connaissance d'une prise de parole de la part du
ministre ni en ayant déposé son projet de loi à la fin de l'année passée ni
dans les semaines qui ont suivi. On s'apprête à étudier un projet de loi, mais
on n'a pas encore communiqué, et il n'est pas trop tard pour le faire,
démontrer un leadership et expliquer aux Québécois ce qui s'en vient, en quoi
ce projet-là sera bénéfique, en quoi il sera utile. Si on s'inspire de la façon
dont les autres juridictions ont mené à bien ces projets, il y a certains...
dans certaines juridictions, ça s'est bien passé, dans d'autres moins bien,
mais quand ça se passe moins bien, c'est parce que l'adhésion de la population
n'y est pas. Alors...
Mme Setlakwe : ...dans ce
cas-là, dans ce cas-là, c'est un échec. Ce qu'on veut, c'est que le plus grand
nombre des Québécois participe. Et c'est, à mon sens, le devoir du ministre de
s'assurer de bien communiquer avec la population. Mais, encore une fois, ce
n'est pas nous qui l'inventons, là, cette importance de bien communiquer, je me
réfère à un des excellents mémoires qu'on a reçus, c'est celui de l'Obvia,
l'Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'IA et du numérique,
à sa page 8, il parle des études de cas dans les autres juridictions, «qui
démontrent que l'utilité perçue d'une identité numérique nationale est
essentielle à son adoption, voire à son succès. Pour assurer cette utilité, il
faut impliquer différents acteurs gouvernementaux et privés dans le processus,
ainsi qu'à inclure la population utilisatrice pour développer un système
répondant à ses besoins.»
Encore une fois, on n'est pas contre le
principe. On veut avancer dans le sens de la modernité, mais on veut s'assurer
que les choses se fassent correctement, dans l'ordre, avec la population qui
participe et qui adhère au projet. Les citoyens doivent avoir confiance en
cette identité numérique. L'acceptabilité sociale constitue un enjeu
fondamental et elle se construit inévitablement par la confiance. Dans ce
contexte, je me demande si le ministre n'a pas déjà manqué à son devoir premier
dans ce dossier. Comment se fait-il que, quand il a déposé son projet de loi,
il n'a pas tenu une conférence de presse, il n'a pas informé la population, il
ne se soit pas adressé directement à elle en expliquant les bienfaits de son
projet, les étapes et l'utilité surtout, et l'importance qu'on y adhère en plus
grand nombre possible? Le projet de loi a été déposé dans le contexte de la
mise à jour économique, et ça, M. le Président, c'est étonnant alors qu'on sait
que la façon d'aborder ce projet aura pourtant une incidence sur son taux
d'acceptation et d'utilisation.
• (11 h 30) •
Un peu plus loin dans son mémoire, l'Obvia
mentionne le résultat d'une enquête qu'ils ont menée auprès de 2000 citoyens
québécois, une enquête récente menée à la fin... au printemps de 2024 sur...
«portant sur la confiance, le partage de données et l'identité numérique. Et
cette enquête a démontré que «25 % des personnes interrogées ne sont pas
du tout ouvertes à l'identité numérique. Plus spécifiquement, une grande majorité
de répondants, plus de 86 %, s'est déclarée favorable à l'utilisation de
l'identité numérique si certaines conditions étaient respectées.»
Alors, ce sera bien important, nous, les
parlementaires, de parler de ces conditions gagnantes et de s'assurer qu'elles
soient réunies avant le déploiement de ce projet. Aussi, le projet... le succès
du projet va dépendre des ressources que le gouvernement va y investir. Je
parle ici de ressources humaines et financières adéquates dans le contexte du
déficit record de 11 milliards de ce gouvernement des coupures budgétaires
qu'on observe de la part de ce gouvernement, du manque d'expertise à l'interne
au sein du ministère de la Cybersécurité et du Numérique qui le pousse à
recourir de façon excessive à la sous-traitance et aussi du gel d'embauche, et
ce gouvernement s'est imposé. Il est tout à fait normal qu'on se pose ces
questions, M. le Président, avant d'entamer l'étude détaillée de la pièce
législative et avant de donner notre aval final au projet.
Encore une fois, lors de l'étude, nous
verrons à questionner et à talonner le ministre afin d'être rassuré pour... que
ces conditions soient rencontrées pour le bien des Québécois qui n'ont pas
envie de faire les frais, encore une fois, d'une planification bâclée. Le gouvernement
doit apprendre de ses erreurs et les Québécois peuvent compter sur nous à cet
égard, non pas pour ralentir indument le projet, mais pour soulever des
préoccupations légitimes qui ont été entendues de la part des experts tout au
long des consultations particulières.
Permettez-moi un bref retour sur ces
consultations que se sont tenues les 28, 29 janvier. Encore une fois, merci aux
groupes entendus et à tous ceux qui ont rédigé et déposé des mémoires. Comme je
l'ai mentionné, ce projet soulève plusieurs enjeux importants, je vais en
aborder quelques-uns. La question de la protection des renseignements
personnels et de la vie privée, la Commission d'accès à l'information du Québec
soulève... souligne que l'évolution de l'identité numérique nationale accroît
les risques liés à la protection des renseignements personnels, qu'un
encadrement juridique insuffisant pourrait diminuer la protection de la vie
privée des citoyens et entraîner une perte de confiance envers cette identité
numérique. Il y a la question de la sécurité des données, le Syndicat de
professionnels du gouvernement du Québec...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Setlakwe : ...il y a
des préoccupations quant à l'hébergement centralisé d'une grande quantité de
données personnelles et confidentielles, soulignant l'importance de mettre en
place des ressources humaines et financières adéquates pour assurer la
cybersécurité du projet. Il y a la question de la collecte des données
biométriques. Cet élément est revenu souvent durant les consultations. M. le
Président, quand on parle de nos données biométriques, c'est vraiment unique à
chaque personne, on parle de notre... de tout ce qui nous distingue au niveau
de nos éléments faciaux, les yeux, etc. Ce ne sont pas des choses, M. le
Président, qu'on peut changer comme un code ou un identifiant. Si ces éléments
extrêmement sensibles et personnels qui nous permettent de nous identifier se
trouvaient entre les mains de personnes aux intentions malveillantes, les
conséquences seraient extrêmement négatives. Alors, cette question, on va
devoir en discuter et en débattre, étant donné que ces données biométriques
sont intrinsèques à la personne et, comme je le disais, ne peuvent pas être
modifiées en cas de compromission. Le syndicat professionnel du gouvernement du
Québec partage cette inquiétude et recommande de se limiter à des données d'identité
simples pour l'accès aux services gouvernementaux.
Quant à l'accessibilité des services, bien
ça, on aura l'occasion d'en parler amplement, M. le Président, la convivialité,
l'accessibilité devront être au rendez-vous. Il sera important de ne pas
laisser de côté tout un pan de la population qui n'est pas dotée d'une
littératie numérique adéquate leur permettant de bénéficier des outils
technologiques. Le Protecteur du citoyen insiste sur la nécessité de maintenir
l'accessibilité des services gouvernementaux par des moyens traditionnels pour
les citoyens qui le préfèrent. Rappelons-nous, dans le cas de SAAQclic, on a
fermé toutes les succursales. Et quand on a réouvert, c'était le chaos. On a
surestimé la capacité de la population à s'adapter rapidement à la nouvelle
plateforme et on a sous-estimé les ressources que le gouvernement devait mettre
à la disposition des citoyens. Il ne faut absolument pas reproduire les mêmes
erreurs, M. le Président.
La question de l'hébergement des données
et de la souveraineté numérique est très importante et elle a été soulevée à
maintes reprises durant les consultations. Nous discuterons avec le ministre de
sa vision à cet égard. Est-ce qu'il va s'assurer que les données soient
entreposées dans une infrastructure nuagique souveraine? Est-ce qu'elles seront
stockées dans une infrastructure gouvernementale? Comment empêchera-t-on que
les données puissent transiter ou être hébergées hors du Québec? Des acteurs
comme Micrologic plaident pour que les données des Québécois demeurent sous
contrôle québécois, recommandant l'intégration du principe de souveraineté
numérique et l'établissement de seuils minimaux de contrats avec des
entreprises locales pour la gestion des données numériques nationales, toutes
des questions fondamentales, M. le Président, pour lesquelles il va falloir
avoir des débats de fond. La question de l'interopérabilité et l'encadrement
juridique, des préoccupations ont été mises de l'avant concernant ces enjeux. l'interopérabilité
avec d'autres systèmes, les risques de dérives si l'encadrement juridique n'est
pas suffisamment étoffé, elle appelle à un débat public transparent et informé
sur l'ensemble du projet, la question de la gouvernance, tous ces éléments-là, M.
le Président, on a beaucoup, beaucoup de questions et d'enjeux à discuter.
L'Institut de gouvernance numérique
souligne quant à lui qu'au-delà de l'interopérabilité et la reconnaissance
mutuelle des identités numériques à travers le pays, ce projet doit également
mobiliser toutes les forces vives, publiques, privées, etc. Est-ce qu'on a ce
plan? Est-ce qu'on a songé à tous ces éléments fondamentaux? Ce sont des
questions auxquelles le ministre devra répondre. La question du profilage,
plusieurs en ont parlé, ça se trouve à la page 10, notamment, du mémoire
de l'Aubevia. Il y aura des croisements entre différentes banques de données.
Comment on va assurer qu'on puisse contrôler l'utilisation des données?
Donc, encore une fois, M. le Président, en
concluant, notre intention n'est pas de retarder indûment le projet. Notre
intention, c'est de s'assurer qu'il y ait un débat sur tous ces enjeux
fondamentaux, puis s'assurer que les facteurs clés de réussite soient réunis,
soient discutés et soient... qu'on puisse cocher les cases de tous ces facteurs-là
pour s'assurer, pour le bien des Québécois, encore une fois, pas pour
satisfaire l'opposition officielle. Quand l'opposition officielle s'exprime, c'est
parce qu'on a entendu des préoccupations. On se base sur le passé puis on
espère...
Mme Setlakwe : ...vraiment que
ce projet structurant puisse être mené à bien correctement et en respectant
tous ces facteurs, ces facteurs clés de réussite. On aura l'occasion d'en
débattre amplement, M. le Président.
Donc, en conclusion, je vous remercie. On
aura l'occasion et on espère donc avoir des échanges constructifs et fructueux
avec le ministre sur sa vision, sur le déploiement, afin d'assurer le succès du
projet. Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous, chère collègue. Dans l'attente de l'arrivée de notre collègue de
Jean-Lesage, d'autres collègues membres de cette commission souhaitent-ils
intervenir? Mme la députée de La Pinière, à vous la parole.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors, je vais entrer tout de suite dans le vif du sujet. Le projet
de loi n° 82 qu'on est... qu'on s'apprête à étudier en article par
article est un projet de loi qui ratisse très, très large pour créer une identité
numérique nationale et qui mise beaucoup, et je dirais beaucoup trop sur la
réglementation pour certains éléments. Je sais qu'on veut faire vite. On ne
veut pas... on veut s'ajuster rapidement par la suite, après l'adoption du
projet de loi, au fur et à mesure de l'implantation, mais c'est tellement
important, ce projet de loi là, parce que tout le monde s'accordait en
commission, en fait, plusieurs groupes sont venus dire que le Québec est
10 ans en retard à ce sujet-là, sur l'identité numérique nationale, et
donc on est... c'est pour ça, ma collègue l'a dit, qu'on a voté en faveur du
principe de ce projet de loi parce que c'est important d'aller de l'avant.
• (11 h 40) •
Mais le travail à faire est énorme. À mon
point de vue, il y a du travail qui resterait à faire. Peut-être qu'on va avoir
une surprise avec beaucoup d'amendements qui vont venir répondre aux
préoccupations qui sont... qui ont été énoncées durant... par les groupes
durant les auditions en commission parlementaire, c'est probablement ce qui va
arriver, et puis on va prendre le temps de les regarder très attentivement.
L'objectif, ici, c'est que le projet de loi soit bonifié, qu'il vienne répondre
aux préoccupations qui ont été exprimées par des experts durant la commission
parlementaire, et qu'on en fasse le projet de loi le meilleur possible pour
réunir les conditions gagnantes pour que ça fonctionne.
Alors, j'aimerais juste rappeler,
peut-être pour les personnes qui suivent les travaux, que les notes
explicatives du projet de loi précisent que l'identité numérique nationale,
c'est un ensemble de moyens dont dispose l'État pour permettre à toute personne
d'avoir un accès sécurisé aux prestations électroniques des services
gouvernementaux ainsi qu'un niveau de confiance élevé lors de ses interactions
avec les organismes publics et dans la collectivité, notamment à l'aide
d'attestations numériques gouvernementales. Et c'est fondamental, ce qui est
inscrit là dans les notes explicatives : un accès sécurisé — tout
le monde veut avoir un accès sécurisé — et un niveau de confiance
élevé. Et ça, quand ma collègue parle de communication, ce n'est pas juste un
exercice de communication pour vendre l'idée du projet de loi ou l'idée de
l'identité numérique nationale, ce qu'il faut, c'est la communication d'où on
s'en va avec ce projet de loi là, en répondant notamment aux préoccupations des
experts qu'on a entendus en commission parlementaire. Ma collègue a utilisé le
terme de feuille de route, c'est également ce que j'ai entendu en parlant aux experts.
Ça prend une feuille de route qui va nous dire là où on s'en va, quels sont les
objectifs de ce projet de loi, justement, pour rassurer la population qu'on ne
s'en va pas dans l'intelligence artificielle pour vous surveiller, Big Brother,
ce n'est pas ça. Mais il va y avoir de l'intelligence artificielle, qu'on le
veuille ou non, qui va être utilisée à certains moments dans la chaîne, dans
les processus. Les experts nous l'ont dit. Donc, il faut baliser cela. Et ça ne
se retrouve pas dans le projet de loi. Alors, dans une feuille de route où on
indique clairement où on s'en va, comment on va baliser certaines choses?
Comment on planifie le tout? Bien, on voit, à ce moment-là, les citoyens sont à
même de voir puis les parlementaires, aussi, de tous les partis que, bon, on a
une vision qui est claire, qu'on partage, et ça va se faire étape par étape, et
il y aura des tests avant de mettre le tout en oeuvre...
Mme Caron : ...et on aura une
confiance et une utilisation. Les gens pourront adhérer à l'identité numérique
nationale. Et ça, on nous a dit, en commission parlementaire, que la
Colombie-Britannique, qui a mis en place un système d'identité numérique, ne
réussit pas, il y a seulement 10 % des personnes qui s'en servent, parce
que cette étape de bien communiquer, de rassurer... Et encore, j'insiste
là-dessus, ce n'est pas qu'un exercice de communication, mais vraiment un
exercice qui permet de montrer à la population où on s'en va, de démontrer
qu'on balise les éléments qui peuvent leur... qui peuvent leur inspirer des
craintes ou sinon des craintes, au moins... qui fait en sorte qu'ils sont un
peu rébarbatifs à utiliser l'identité numérique nationale. Alors, c'est
important... ça va être important de s'y attarder.
Et, dans tout cet objectif-là, donc,
d'identité numérique, objectif qu'on partage, du projet de loi, bien, le hic,
c'est qu'il y a beaucoup... il y a très loin de la coupe aux lèvres en ce
moment. Peut-être, comme je l'ai dit tout à l'heure, qu'on recevra des
amendements à étudier durant la période d'article par article, qui vont venir
répondre aux préoccupations et qui vont bonifier le projet de loi d'une façon
solide, qui nous permettront d'appuyer le tout.
Ma collègue a utilisé le terme de projet
potentiellement très structurant, et c'est vrai, c'est un projet de loi qui
peut... «un projet de loi»... un projet... Le projet d'identité numérique
nationale peut être très structurant, mais encore faut-il que les éléments dont
je viens de parler soient balisés, qu'on ait une feuille de route claire pour
savoir où on s'en va et pour rassurer la population.
Ce qu'on nous a dit en commission
parlementaire, durant les consultations, c'est que le gouvernement n'était pas
du tout prêt, à l'heure actuelle, à légiférer sur ce projet de loi là. Le
ministre nous a dit, durant ses remarques préliminaires, qu'il fallait mandater
le ministère de la Cybersécurité et du Numérique dans le cadre de ce projet-là.
Et, avec le nom du ministère de la... et du Numérique, je me demande bien quel
autre ministère pourrait être mandaté si ce n'est celui-ci. Or, en plus des
nombreux angles morts du projet de loi que les groupes ont fait ressortir,
selon leurs préoccupations, durant les consultations, le ministère de la
Cybersécurité et du Numérique est loin, loin d'être prêt à mener à bien ce
projet, tant au chapitre des ressources que des compétences nécessaires que de
la vision et de la planification. Le chapitre de la vision et de la
planification, comme je vous disais tout à l'heure, la feuille de route, elle
est absente. On en a besoin pour savoir où on s'en va. Et, pour ce qui est des
ressources et des compétences nécessaires, bien, on se l'est fait dire très,
très carrément en commission parlementaire, durant les consultations, on n'a
pas, au gouvernement, que ce soit au ministère de la... la Cybersécurité et du
Numérique ou bien ailleurs au gouvernement... on n'a pas à l'interne ces
ressources et ces compétences pour faire ce projet-là.
La Vérificatrice générale du Québec est
venue en consultations également. Ma collègue de Mont-Royal-Outremont y a...
l'a évoqué aussi. Et, quant à moi, la Vérificatrice générale du Québec, elle a
utilisé un mot que je qualifie de talon d'Achille de ce gouvernement, le mot
étant la planification. Le passé étant garant de l'avenir, la Vérificatrice
générale est revenue dans son mémoire sur les résultats de ses travaux passés
pour attirer l'attention sur trois principaux enjeux que ma collègue vient de
nommer, c'est-à-dire la cybersécurité et la protection des renseignements personnels,
le deuxième étant l'accessibilité et la qualité des services aux citoyens, et
le troisième, la gestion de projets.
Si je fais référence au mémoire de la
Vérificatrice générale, aux pages quatre, cinq et six, elle nous rappelle donc
les études sur lesquelles elle a fait des audits et publié des rapports avec
des recommandations. Par exemple, en novembre 2021, dans une étude sur la
cybersécurité auprès de trois entités du gouvernement, elle a mentionné que
«des améliorations étaient nécessaires, notamment pour les accès, les
coupe-feu, les alertes de...
Mme Caron : ...sécurité
automatisée et les tests d'intrusion, ça, c'est particulièrement pertinent pour
un projet d'identité numérique.
En juin 2020, dans un rapport sur la
gestion des identités et des accès informatiques, elle a recommandé d'améliorer
les contrôles et les mesures de sécurité pour le personnel qui a des accès
privilégiés, de réviser périodiquement les accès informatiques de l'ensemble du
personnel et de renforcer la surveillance par les instances de gouvernance.
Encore là, particulièrement important pour un projet d'identité numérique.
La VG nous dit aussi qu'il sera primordial
que le ministère de la Santé... de la Cybersécurité et du Numérique prenne les
mesures nécessaires pour s'assurer de la confidentialité des informations
détenues, autant pour les données détenues par le ministère que celles détenues
par les organismes.
Et, pour protéger ces informations, il
sera également important que les échanges de données entre organismes soient
bien encadrés, que seules les données nécessaires soient partagées avec les
organismes qui en ont vraiment besoin, tout en s'assurant de la protection des
données.
On peut dire que c'est ça qu'on veut
faire, puis je suis certaine que c'est ça qu'on veut faire, mais, si la VG a
pris le temps de noter ça, de nous rappeler ce qu'elle a fait dans ses travaux
d'audit sur d'autres projets, je pense qu'il vaut la peine de s'y attarder,
s'assurer que... Parce que c'est vraiment à la base, là, sur la sécurité
donnée... des données, s'assurer que ces étapes-là vont être faites. Et, dans
une feuille de route, dans une bonne planification de projet et un suivi
ensuite au jour le jour, dans la mise en œuvre et dans l'utilisation par la
suite, ça va être crucial pour la protection de nos données. Alors, il faut
absolument qu'on tienne compte de ces recommandations-là.
• (11 h 50) •
En matière d'accessibilité et de qualité
des services, la Vérificatrice générale avait aussi constaté des lacunes. En
novembre 2023, si je vais aux pages six et sept, elle nous disait que, dans son
rapport sur Services Québec, qui s'est penché sur l'accessibilité et la qualité
des services aux citoyens, elle avait constaté que Services Québec n'était pas
devenu un guichet multiservice d'envergure pour simplifier l'accès aux services
gouvernementaux pour les citoyens. Ici, on veut que ce projet d'identité
numérique nationale simplifie l'accès aux services gouvernementaux pour les
citoyens, alors c'est important de ne pas faire les mêmes... entre guillemets,
les mêmes erreurs ou les mêmes choix que Services Québec a faits puisqu'ils
n'ont pas atteint l'objectif. Ici, on veut absolument atteindre l'objectif.
Et, dans son rapport d'octobre 2020 sur le
Réseau national intégré de radiocommunication, le RENIR pour les intimes, sur
les coûts et la performance, elle a constaté que la qualité des services
offerts aux utilisateurs du réseau n'avait pas atteint le niveau désiré. Alors,
c'est important, c'est... c'est une autre mise en garde de s'assurer que le
projet d'identité nationale numérique ne va pas retourner dans les mêmes
ornières, faire les mêmes... les mêmes erreurs que ces projets-là ont faites,
ou connaître les mêmes pépins. Peut-être que le mot «erreur» est et fort, là,
parce que tout le monde veut travailler le mieux possible, mais de toute
évidence, ces projets-là ont eu des pépins, n'ont pas atteint les objectifs
qu'ils s'étaient fixés. Et, le projet d'identité nationale numérique est
tellement important, et il y a un potentiel d'être vraiment structurant, bien,
on souhaite qu'il réussisse et donc que toutes les mises en garde, toutes les
précautions, toutes les recommandations que la VG a faites sur les autres...
les autres projets qui ont été faits, bien, qu'on en tienne... qu'on en tienne
compte.
En matière de gestion de projet, je l'ai
dit tout à l'heure, le maître mot, c'est la planification. La VG nous dit, en
page 10 de son rapport, qu'une bonne planification est essentielle afin de
limiter les retards et les dépassements de budget. Dans son rapport de juin
2021 sur les projets en technologies de l'information des universités, elle a
constaté que les deux universités auditées avaient dépassé leur budget et
accumulé plusieurs années de retard. C'était surtout en raison de problèmes
dans la planification des projets. On sous-estime parfois la complexité, le
coût des projets. Les processus utilisés pour sélectionner un fournisseur
doivent être adéquats. Alors, encore là, c'est important de s'attarder assez à
ces recommandations de la Vérificatrice générale...
Mme Caron : ...Elle nous
dit aussi dans sa conclusion, la Vérificatrice générale, qu'il s'agit évidemment
d'un projet intéressant et elle nous dit que pour obtenir l'acceptabilité
sociale ainsi que la confiance des citoyens et leur adhésion, le ministère de
la Cybersécurité et du Numérique devra mettre en place une gouvernance efficace
en garantissant la sécurité des données, en offrant un service accessible et de
qualité ainsi qu'en s'assurant que les données sont exactes. En outre, de
nombreuses modalités doivent être fixées par règlement, c'est ce dont je
parlais au début, et elle invite le gouvernement à faire preuve de prudence
dans l'élaboration de ses règlements.
Très important aussi, il ne faut pas
laisser pour compte les personnes qui... Il ne faut pas pénaliser ceux qui ne
veulent pas ou ne peuvent pas avoir un identifiant numérique national ou s'en
servir. La Vérificatrice générale le dit en page 7 de son mémoire, il est
prévu de ne pas pénaliser ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas avoir un
identifiant numérique national. Il sera important de s'assurer que ce sera
effectivement le cas et que ceux-ci pourront accéder facilement et efficacement
à tous les services gouvernementaux. Cet enjeu d'utilisation ou de
non-utilisation de l'identité numérique est très important parce qu'il y a un
risque d'exclusion qui est rattaché à cette... à ce projet. Je dirais, un
risque d'exclusion que je présenterais en trois volets. Le premier volet, c'est
la littératie, la littératie, point, là, savoir lire ou écrire. Le deuxième
volet, c'est la littératie numérique. Et le troisième volet, c'est la pauvreté.
Alors, le premier volet, c'est un triste
constat que seulement 46,8 % des Québécois et des Québécoises maîtrisent
les compétences en littératie, c'est-à-dire savoir lire, savoir apprendre,
pouvoir agir à partir de ce qu'on a lu, donc, comprendre ce qu'on lit. Alors,
s'il y a seulement 46,8 % des Québécois qui peuvent faire ça, ça veut dire
que 53,2 % des Québécois ne le peuvent pas. Ça ne veut pas dire qu'ils ne
savent pas lire. Il y en a qui ne savent pas lire et il y en a qui savent lire,
mais pas suffisamment pour comprendre le sens d'une phrase. Ils ne comprennent
pas... Ils comprennent chaque mot, mais pas le sens de la phrase, pas
suffisamment pour être capables de savoir ce qu'il faut faire après avoir lu la
phrase. Alors, s'ils sont obligés d'accéder aux services en ligne, bien, ils
ont déjà un obstacle important, là.
Il y a aussi l'autre, la question de la
littératie numérique, c'est-à-dire des personnes qui savent très bien lire, qui
savent très bien écrire, mais qui ont de la difficulté avec l'informatique.
Alors là, il peut avoir une fracture numérique générationnelle, c'est à
celle-là à laquelle... c'est à celle-là à laquelle on pense le plus souvent.
Donc, vous connaissez probablement tous dans vos familles un parent ou un
grand-parent qui utilise un téléphone cellulaire, qui utilise une tablette pour
se divertir. Mais par contre, quand vient le temps de prendre un rendez-vous
sur Clic Santé, ou d'aller sur SAAQclic, ou même de faire des transactions
bancaires, ils sont très, très rébarbatifs, ils sont très réticents parce
qu'ils ont peur de se tromper, ils ne veulent pas se faire arnaquer. Alors,
souvent, bien, c'est un proche qui va les aider, un parent, un enfant, un
petit-enfant. Mais là où je veux mettre le gouvernement en garde, c'est que les
personnes aînées qui subissent de la maltraitance financière. On connaît plein
de cas de fraude, là, on en entend... on en entend parler beaucoup dans les
médias, de la fraude, des fraudeurs qui s'attaquent particulièrement aux
personnes aînées, mais la maltraitance financière, malheureusement, c'est
souvent l'origine, le plus souvent qu'autrement, les statistiques le montrent,
c'est dans la famille. Alors, si pour avoir des services, les personnes aînées
doivent avoir de l'aide de leurs enfants ou petits-enfants, il y a un risque,
là. Et ça, le gouvernement doit en être... doit en être conscient.
Et finalement, la pauvreté. Bien, oui,
malheureusement, au Québec, il y a des gens qui n'ont pas cellulaire, qui...
Mme Caron : ...n'ont pas accès
à un ordinateur, qui n'ont pas accès à une bibliothèque municipale, où il y a
un réseau, ou qui n'ont pas d'argent pour se payer le forfait. Et, un seul
exemple, pour aller au TAL, il faut prendre un rendez-vous en ligne. Le Comité
logement de Rive-Sud me dit que les gens doivent aller les voir pour qu'eux
écrivent au TAL pour obtenir un rendez-vous et, ensuite, reçoive le courriel et
rappelle la personne pour lui dire : Bien, ton rendez-vous est à telle
heure. Ça, c'est la fracture numérique. Il ne faut pas que l'identité numérique
vienne aggraver ça. Il faut que ce soit simplifié, mais il faut conserver les
services en personne, pas à 200 et 300 kilomètres, mais il faut conserver les
services en personne pour ceux qui ne pourront pas utiliser l'identité
numérique nationale. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, chère collègue. Y aurait-il d'autres intervenants dans le cadre de ces
remarques préliminaires? Sans quoi, nous allons procéder à l'étude des motions
préliminaires. J'ai été avisé par, bien sûr, mon secrétaire que notre collègue
la députée de Mont-Royal—Outremont souhaitait déposer une
motion, qui se trouve, depuis quelques minutes, sur Greffier, et auquel, donc,
vous pouvez avoir accès. Chère collègue, comme le veut la tradition,
auriez-vous d'abord l'amabilité de nous faire lecture de cette motion pour,
ensuite, en débattre?
• (12 heures) •
Mme Setlakwe : Oui, tout à
fait, monsieur.... Merci. Donc, je vais faire la lecture de cette motion, cette
première motion préliminaire que nous proposons, que nous avons déposée. Donc,
conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais
motion afin :
«Que la Commission des finances publiques
entende, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant
l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, la ministre
responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du
trésor, Mme Sonia LeBel.»
Est-ce que j'ai, donc, 30 minutes, M. le
Président, pour fournir nos arguments?
Le Président (M. Simard) : Tout
à fait. Absolument.
Mme Setlakwe : Merci. M. le
Président, je l'ai mentionné dans mes remarques préliminaires qu'on avait
entendu à maintes reprises, durant les consultations, et on a lu également dans
les mémoires, qu'il est essentiel que les conditions gagnantes soient réunies
pour assurer aux Québécois, là, qu'on puisse leur livrer ce service important,
qu'on puisse leur livrer ce projet, qui, on l'espère, va simplifier la façon
dont ils peuvent transiger avec les autorités gouvernementales. Et parmi ces
conditions essentielles qui doivent être réunies, on nous a dit : Ça va
prendre les ressources financières et les ressources humaines pour pouvoir
mener à bien ce projet.
Alors, M. le Président, oui, on a une
pièce législative à étudier, nous y viendrons, mais, à la lumière de ce qu'on a
entendu en commission de la part de plusieurs acteurs... et, en particulier, un
groupe qui a vraiment insisté sur cet élément, là, des ressources humaines
surtout, c'est le Syndicat des professionnelles et professionnels du
gouvernement du Québec. Je pourrai y revenir en détail, à ce qu'ils ont
mentionné durant leur présentation, et ce qu'ils ont mis de l'avant dans leur
mémoire. Mais pour s'assurer, donc, qu'on a les conditions gagnantes, qu'on ait
ces ressources humaines et financières adéquates, à l'interne, au sein du
ministère de la Cybersécurité et du Numérique, ça nous prendrait... M. le
Président, les parlementaires ont besoin d'être rassurés et d'entendre celle
qui est responsable de ce dossier, et, en l'occurrence, c'est la présidente du
Conseil du trésor.
Je vous rappelle que, durant les
consultations particulières, lorsque nous avions... lorsque nous échangions
avec les représentants de la... du SPGQ, donc le Syndicat de professionnelles
et professionnels du gouvernement du Québec, quand eux, ils ont... ils ont mis
de l'avant leurs préoccupations, à savoir : Attention, il y a des
modifications à faire dans la classification des emplois. Attention, on n'a pas
l'expertise interne, il manque de monde, il manque de développeurs. Attention,
on a beaucoup... on dépend beaucoup de la sous-traitance, on utilise des
ressources externes... Tout ça est documenté. Le ministre a répondu quoi? Il a
répondu : Ça, ça relève de ma collègue la présidente du Conseil du trésor,
je ne peux répondre.
On a poursuivi nos échanges, M. le
Président, avec les représentants du SPGQ et on a eu, donc, des éléments...
12 h (version non révisée)
Mme Setlakwe : ...très
intéressants et très fondamentaux qui ont été portés à notre attention. Et je
pense qu'il pourrait être extrêmement bénéfique non seulement pour les
parlementaires, mais également pour tous les Québécois, de s'assurer de pouvoir
échanger avec la présidente du Conseil du trésor. Donc, avant de se lancer dans
ce grand projet, posons-nous la question : Est-ce qu'on va encore
davantage avoir recours à des ressources externes, ce qui implique des coûts
importants, ce qui implique de ne pas avoir cette expertise à l'interne?
Permettez-moi l'image suivante, M. le
Président : Est-ce que la maison... est ce que la fondation de la maison
est assez solide pour qu'on puisse envisager d'y ajouter un étage? Parce que c'est
ça qu'on est en train de faire. Déjà, le MCN a plusieurs projets. On a hâte de
voir ces projets se réaliser. Il y a des délais, il y a des coûts importants,
mais on comprend que c'est un jeune ministère, donc on est patients. On a bien
hâte toutefois de voir des résultats pour le bien des Québécois. Mais alors qu'il
y a des retards, alors que les projets débordent, on nous présente ce nouveau
projet structurant d'identité numérique nationale sans savoir, M. le Président,
si on va être capables de le mener à bien, si on a les ressources internes
suffisantes pour pouvoir le réaliser.
Alors, on a discuté durant les
consultations, mais on n'échangeait pas, mais les questions demeurent non
répondues, parce que le ministre a dit : Ça relève de ma collègue. On
comprend comment ça fonctionne dans un gouvernement. Le portefeuille, le
dossier du ministre, c'est la cybersécurité et le numérique, un dossier
extrêmement important. Mais comment peut-il livrer des résultats pour la
population si l'ensemble du gouvernement n'est pas derrière lui, n'est pas
derrière le projet et ne fournit pas les ressources financières et humaines
nécessaires à son bon déploiement? Donc, d'où l'importance de donner suite à
notre demande ce matin, de pouvoir échanger avec la présidente du Conseil du
trésor.
Revenons aux groupes qui ont soulevé ces
éléments importants. Il y en a plusieurs, M. le Président, donc ce n'est pas
nous qui sortons ça de notre chapeau, ça a été dit et répété en commission, ça
a été mentionné dans les mémoires. J'en ai quelques-uns sous les yeux. Celui de
l'Association québécoise des technologies, première page de leur document, il y
a un sommaire avec les priorités d'intervention et les orientations clés pour
une mise en œuvre efficace. L'élément central, au niveau des orientations clés,
pour une mise en œuvre efficace : stabiliser et valoriser les ressources
humaines. Ils nous disent d'introduire des mesures incitatives pour garantir la
continuité et la stabilité des équipes, assurer que les ressources clés
disposent des moyens nécessaires pour mener à bien le projet. La Vérificatrice
générale, on en a parlé un peu plus tôt, elle a mis de l'avant toutes sortes de
mises en garde, et elle aussi a fait référence à des rapports d'audit passés qu'elle
a soumis. Elle nous suggère fortement de nous y référer, de nous en inspirer et
de s'assurer de ne pas répéter des erreurs du passé. Entre autres, elle
mentionne, à la page 11, de son mémoire : «Le MCN, le ministère de la
Cybersécurité et du Numérique doit s'assurer d'avoir les ressources humaines
compétentes pour réaliser ce projet». Elle continue en disant que «le processus
contractuel pour ce projet ne doit pas rendre le ministère dépendant d'un seul
fournisseur», etc. Donc, ce sont des éléments qui ont été mis de l'avant et qui
ont vraiment suscité une certaine inquiétude de notre part. Et on s'est dit :
Il faut aller au fond des choses, M. le Président, pour ne pas répéter les
erreurs du passé et s'assurer encore une fois que les fondations de la maison
soient assez solides avant d'envisager d'y ajouter un étage.
Le syndicat de la fonction publique du
Québec, dans son mémoire sur l'identité numérique... c'est bien ça le Syndicat
de la fonction publique et parapublique du Québec, à la page 14, parle de
sous-traitance, et je les cite : «Le SFPQ comprend mal qu'alors que le
gouvernement mène des politiques d'austérité et que des projets du MCN tardent
depuis longtemps à voir le jour en raison du manque de personnel, le ministre
dépose ce projet de loi n° 82. En effet — et je continue de les
citer — il importe que l'ensemble des ressources informationnelles
supportant la mise en place d'une identité...
Mme Setlakwe : ...numérique
nationale soient des ressources internes au gouvernement. Il en va de l'intégrité,
de la sécurité et de la pérennité du projet. En effet, comment anticiper que
les données numériques de la population québécoise seront en sécurité, si elles
sont stockées, traitées ou gérées, même partiellement, par l'entreprise privée?
Dans un contexte où une proportion substantielle des postes en informatique au
gouvernement ne sont toujours pas pourvus, on a encore du mal à voir comment le
gouvernement réduira le recours à la sous-traitance pour assurer que l'identité
numérique nationale ne se fasse pas à grands frais et au détriment de la
souveraineté de l'administration publique sur ses propres affaires. Par
conséquent, le SFPQ recommande qu'avant de se doter des outils législatifs
nécessaires à la mise en place de l'identité numérique nationale, le
gouvernement réinvestisse massivement dans ses capacités en informatique afin
de mettre fin à la sous-traitance qui prévaut, entre autres, particulièrement
au MCN.» Voilà. On pourra y revenir, à ce mémoire. Mais ça... je pense que,
quand on ajoute tout ça ensemble, c'est une... c'est de toute évidence une
préoccupation légitime.
Donc, comme je disais plus tôt dans mes
remarques préliminaires, oui, on a une pièce législative qui vaut la peine
d'être étudiée, oui, on va y venir. Mais, avant d'aller de l'avant puis
d'adopter une pièce législative qui propose un projet aussi important,
regardons le contexte général, regardons l'ensemble des ressources dont on a
actuellement à notre disposition, l'ensemble des projets qui sont sur la table
et qui tardent à se réaliser, regardons aussi... tirons les conclusions du
fiasco SAAQclic, où le déploiement a été, rappelons-nous, un réel fiasco. Les
Québécois ont fait les... en font... en ont fait les frais, continuent d'en
faire les frais, parce que ce fiasco a engendré des coûts, des millions
additionnels à ce qui avait été prévu, et d'ailleurs rappelons-nous que la
Vérificatrice générale va soumettre un rapport d'audit par rapport à ce fiasco
dans les prochaines semaines, les prochains mois. Donc, prenons le temps, en
tout respect, de se demander et d'avoir la ministre responsable du dossier,
présidente du Conseil du trésor, venir échanger avec nous pour s'assurer qu'on
ne... qu'on s'en aille dans la bonne direction, s'assurer qu'on ait les
ressources appropriées.
• (12 h 10) •
Juste ce matin, à la... Un petit peu plus
tôt ce matin, à la période de questions, j'entendais le ministre des Finances
répondre à votre ancien collègue, le député de Saint-Jérôme. Il a dit :
«Ma collègue la présidente du Conseil du trésor s'assure d'avoir, et je lui
fais confiance, s'assure d'avoir les ressources disponibles à l'interne pour
que le gouvernement du Québec puisse livrer les services à la population.» Je
pense qu'il référait, bon... éducation, santé. Mais vous voyez ce que je veux
dire. Donc, il... clairement, c'est important pour lui, c'est un... il a parlé
de sa collègue, il a mentionné que c'est elle qui est responsable de s'assurer
que le gouvernement... que tous les projets des collègues reçoivent toute
l'attention et toutes les ressources nécessaires pour le bien des Québécois.
Donc, essentiellement, on va se demander,
avec l'aide de... tous les parlementaires ensemble, on doit se demander et on
doit pouvoir échanger avec la présidente du Conseil du trésor afin de pouvoir
répondre à la question suivante et de rassurer les Québécois : Est-ce que
le MCN a tous les outils pour mener à bien ce projet d'identité numérique
nationale, aussi important soit-il? Je veux bien, là, on a un retard, puis on
ne veut pas, encore une fois, retarder indûment le processus. Mais ce qu'on
veut surtout, c'est de s'assurer qu'on ne se trompe pas encore une fois, puis
qu'on ait les bons outils, puis, si on ne les a pas, bien, qu'on comprenne ce
dans quoi on s'embarque en termes de coûts additionnels, en termes de
dépendance accrue à la sous-traitance, en termes de dépendance à des
entreprises privées. Ce sont pour nous des éléments fondamentaux qu'on va
devoir évacuer et discuter à fond avant d'entreprendre l'étude détaillée du
projet de loi.
Permettez-moi de me référer au fameux
mémoire du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du
Québec. On se rappellera tous de leur passage en commission, ils en avaient
beaucoup à dire, et, durant nos échanges avec eux, ils ont mis de l'avant donc
leurs préoccupations. Je me réfère à la page 5 de leur mémoire. Ils ont dit
que, selon une analyse préliminaire, les constats qu'ils ont faits, c'est que
le ministère de la Cybersécurité et du Numérique gagne en pouvoirs et en
responsabilités supplémentaires au niveau de la gouvernance, de la gestion
centralisée de l'identité numérique nationale de même que...
Mme Setlakwe : ...et en
responsabilités supplémentaires au niveau de la gouvernance, de la gestion
centralisée de l'identité numérique nationale de même que la responsabilité de
fournir aux ministères et organismes les services relatifs, la création d'un
registre de l'identité numérique nationale, le développement d'une vision
globale des infrastructures et des services de télécommunications, le
développement et l'exploitation d'un réseau d'infrastructures de connectivité
en lien avec les services en télécommunications, le pouvoir de rendre
disponibles aux ministères et organismes, en plus des offres infonuagiques,
certains biens et services en technologies spécialisées, l'obligation des
ministères et organismes de recourir au MCN pour réaliser des activités de
cybersécurité, l'obligation d'aviser le MCN lors d'un bris de confidentialité
pouvant causer un préjudice sérieux, le pouvoir de rendre applicable cette
obligation à toute personne et à toute entité propriétaire ou exploitante d'un
système ou d'une infrastructure essentielle», etc.
Oui, on comprend que ce jeune ministère,
donc, a beaucoup de pouvoirs, a beaucoup de responsabilités et, en soi, on
n'a... on n'est pas contre le principe, mais il faut s'assurer que tous ces
engagements, tous ces pouvoirs, toutes ces obligations peuvent être réalisés.
«Globalement, le SPGQ — donc le
syndicat — est favorable à ce que le MCN se voie octroyer des
pouvoirs supplémentaires par le projet de loi n° 82. Se basant sur l'expertise
et l'expérience de ses membres — parce qu'ils ont des membres au
ministère de la Sécurité... Cybersécurité et Numérique — le SPGQ
identifie cependant un certain nombre de facteurs clés de réussite pour la mise
en œuvre du projet de loi n° 82 et l'ensemble des pouvoirs existants que la loi
confère au MCN depuis sa création au début janvier 2022.»
Il y a trois... trois facteurs clés de
réussite qui sont mis de l'avant, on en a déjà parlé, il faut... il faut les
réitérer, M. le Président : «diminuer la dépendance du gouvernement face à
la sous-traitance en technologies de l'information et de la communication;
moderniser rapidement la classification des emplois en technologies de
l'information et de la communication et les conditions de travail pour tenir
compte des réalités du marché de l'emploi en technologies de l'information et
de la communication; procéder à l'embauche de ressources internes pour combler
les postes vacants le plus rapidement possible, notamment des ressources qui
font de la programmation ainsi que de l'analyse et de l'architecture
organiques».
Donc, ces trois points-là, les facteurs
clés de réussite, diminuer la dépendance à la sous-traitance, moderniser
rapidement la classification des emplois en TIC, procéder à l'embauche de
ressources internes pour combler les postes vacants le plus rapidement
possible, tout ça relève de la présidente du Conseil du trésor. Il faut qu'on
puisse échanger avec elle, M. le Président, et c'est... notre demande va dans
ce sens, et nous avons hâte d'entendre la réponse du ministre, à savoir s'il va
donner suite à notre demande.
Allons-y, donc, au niveau de la dépendance
du gouvernement à la sous-traitance. Dans des rapports... plusieurs rapports en
2012, 2014, 2015 et 2018, le VGQ, donc Vérificateur général, «s'inquiétait du
recours important du gouvernement aux ressources externes et à la
sous-traitance en technologies de l'information et de la communication, particulièrement
dans les fonctions stratégiques. Dans son rapport de 2018, le VGQ exprimait ses
préoccupations à l'égard des fonctions stratégiques confiées à des ressources
externes. En fait, les ministres... les ministères et organismes avaient encore
recours au secteur privé pour combler des besoins pour des activités de niveau
stratégique. Le recours fréquent aux ressources externes dans le but de combler
des besoins pour des activités de nature stratégique expose les entités à des
risques liés à l'intégrité du processus de gestion contractuelle. En effet, les
ressources externes sont près des personnes qui prennent les décisions et elles
peuvent influencer, notamment les orientations et les décisions stratégiques.»
C'est assez important, M. le Président, qu'on s'assure d'avoir les...
suffisamment de ressources à l'interne.
Je continue de citer le mémoire du
SPGQ : «Les entités doivent demeurer vigilantes, notamment parce que les
défis de recrutement et de rétention du personnel ayant l'expérience et les compétences
nécessaires dans ce domaine demeurent encore bien présents. Malgré le fait que
l'ajout d'effectifs supplémentaires ait été autorisé pour diminuer le recours
aux ressources externes et reprendre la maîtrise des fonctions stratégiques, le
VGQ plaidait en faveur que le gouvernement se dote d'un portrait suffisamment
complet lui permettant de suivre et d'apprécier dans quelle mesure les
ministères et organismes détiennent les compétences nécessaires pour mener à
terme leur mission.»
Donc, toute cette question d'avoir un
portrait de main-d'oeuvre en ressources... ici, on parle en ressources
informationnelles et en ressources internes...
Mme Setlakwe : ...et externes,
etc., le nombre de postes vacants, ce sont des données dont dispose le Secrétariat
du Conseil du trésor. Je pense qu'il serait important que nous, parlementaires,
puissions bénéficier d'un inventaire à jour de ces ressources avant d'ajouter
un projet, là, sur la table à dessin du ministère de la Cybersécurité et du
Numérique.
De 2022... de 2020 à 2022, dernière année
de données disponibles, on remarquait que les secteurs public et parapublic, de
même que de la santé et des services sociaux, enregistraient une augmentation
sensible du nombre des ressources externes. Il serait intéressant de voir ce
qui se passe au sein du MCN, d'avoir un portrait à jour.
Le SPGQ a sondé ses membres sur la
sous-traitance en 2023. Voici les principales conclusions de ce sondage. La
sous-traitance, elle est coûteuse. Les taux journaliers moyens demandés par les
consultants peuvent s'élever à près du double ou plus que celui d'une ressource
interne. C'est une question de saine gestion des finances publiques. C'est
l'argent des contribuables, dont on parle ici, donc assurons-nous d'avoir un
portrait juste avant d'ajouter ce projet, encore une fois, à la table à dessin.
«Des étapes névralgiques qui devraient toujours être réalisées à l'interne pour
des raisons d'efficacité et afin d'éviter des conflits d'intérêts, selon le
VGQ, sont effectuées par des consultants. Le transfert d'expertise est souvent
inadéquat et favorise la dépendance envers les consultants. La dépendance
envers les consultants est encore bien réelle et fortement présente.
L'efficience des travaux réalisés en sous-traitance pose souvent un problème en
comparaison avec ceux réalisés à l'interne. Dans plusieurs contextes, les
difficultés de recrutement incitent le gouvernement à faire appel à des
consultants.
«Les membres en technologies de
l'information et de la communication du SPGQ dans les ministères et organismes,
dont le MCN, constatent qu'il y a toujours du budget pour les contrats en
sous-traitance. Cependant, des employés occasionnels en technologies de
l'information seront mis à pied lorsqu'on peine à combler les postes vacants
dans plusieurs secteurs d'expertise. Des contrats de service externes,
habituellement pour des termes de trois ans, sont renouvelés perpétuellement.
Certains de ces contractuels sont présents dans nos milieux de travail depuis
plus de 20 ans. Le non-respect fréquent des budgets et des échéanciers dans les
contrats de sous-traitance en technologies de l'information est un irritant.
• (12 h 20) •
«Les membres, Technologies de
l'information et de la communication du SPGQ, sont préoccupés par les répercussions
financières et sur la capacité du gouvernement à réaliser ses objectifs de la
dépendance de ce dernier aux firmes privées responsables de la création de
services informatiques fermés.» Et là ils ont... ils mettent de l'avant, donc,
toutes ces préoccupations et toutes les répercussions financières liées à cette
dépendance à l'externe. En deux mots, là, c'est... c'est temps et argent.
Le recours aux logiciels... logiciels...
aux systèmes informatiques fermés versus logiciels libres, on aura l'occasion
d'en reparler, mais il mentionne que : «Le SPGQ est d'avis que le recours
aux logiciels libres, l'interopérabilité de systèmes ainsi que la programmation
par des ressources internes éviteraient les situations déplorables, les
irritants liés à la dépendance à l'externe et des systèmes informatiques
fermés.
«Le SPGQ craint que le projet d'identité
numérique national soit victime des mêmes situations s'il est confié au secteur
privé. Les données confiées au privé dans le cadre de ce projet sont très
sensibles.
«Le projet de loi n° 82 donne la
possibilité au gouvernement de faire affaire avec des entreprises nationales et
internationales pour le développement de l'identité numérique.» On pourra
revenir au libellé en question.
Il y a même la question aussi du fait que
le gouvernement sous-traite, donc, les données : «Et, une fois que le
gouvernement a sous-traité les données, il est à la merci des fournisseurs et
parfois sous la juridiction du pays où les données sont stockées.» Ça aussi, on
pourra y revenir, sur l'hébergement des données aux États-Unis.
«Le transfert d'expertise ne se fait pas
même s'il est mentionné dans les contrats. Les entreprises sont déjà en train
de préparer les prochains contrats pour l'entretien des systèmes. On nous dit
que les organismes publics gèrent beaucoup de deniers personnels avec peu de
moyens. Un des facteurs clés du succès du projet de loi n° 82 serait que
le MCN priorise les organismes avec peu de moyens pour implanter les meilleures
pratiques en matière de sécurité et de gestion des données.» Des sujets qu'on
va devoir aborder à fond. Le...
Mme Setlakwe : ...le deuxième
volet du mémoire du SPGQ traite de la modernisation de la classification des
emplois en technologies de l'information. Le SPGQ est d'avis que le
gouvernement du Québec doit moderniser son système de classification des
emplois professionnels, notamment en TIC, technologies de l'information et de
la communication. Pour le Secrétariat du Conseil du trésor, la classification
des emplois... bon, on sait c'est quoi, c'est l'ensemble des règles qui
régissent le classement des personnes selon une structure d'emploi déterminée.
Il serait vraiment intéressant de pouvoir échanger avec elle, M. le Président.
Les emplois professionnels, qui sont généralement liés à la conception, au
développement, à la mise en œuvre de politiques, programmes, etc., bon, ce
sont... bien oui, les emplois professionnels, c'est ça, sont liés à la
conception, à des volets stratégiques. Les connaissances et les habiletés
minimales requises nécessitent des niveaux d'études supérieures. Mais le point
qu'il met de l'avant, c'est que le SPGQ pense qu'il faudrait à la base sortir
les TIC de la classe 108, et donc créer une catégorie pour les analystes
de l'informatique et une autre pour les analystes des procédés administratifs.
Il faut également distinguer les différents types d'emplois en TIC pour offrir
des conditions de travail et de salaire plus concurrentiels par rapport aux
mêmes types d'emplois dans le secteur privé.
Il existe un écart important en ce qui a
trait aux conditions de salaire et de travail en technologies de l'information
au gouvernement du Québec et celles en technologies de l'information des
secteurs privés et autres publics. Et cela a pour conséquence que le gouvernement
n'arrive pas à se doter... à doter certaines catégories de postes, ce qui le
rend vulnérable et dépendant de la sous-traitance.
Donc, tous ces éléments qui sont mis de
l'avant doivent être pris au sérieux et doivent être discutés. On doit pouvoir
entendre la présidente du Conseil du trésor, à savoir elle planche sur quoi.
Est-ce que c'est quelque chose sur lequel elle travaille? Quel sera
l'échéancier? Quelle est sa vision? À quel moment est-ce qu'on pense que les
ajustements nécessaires, le cas échéant, seront mis en place pour qu'on puisse
donc recruter des ressources à l'interne?
On sait très bien qu'il y a des emplois
qui sont prisés, prisés par le public et le privé, notamment les développeurs
ou codeurs, et que le gouvernement peine à les attirer. Mais on doit se
demander quelles sont les pistes de solution, M. le Président. Et la personne
qui va pouvoir nous rassurer, avec qui on va pouvoir échanger, ce serait la
présidente du Conseil du trésor.
L'expertise interne en technologies de l'information
évolue constamment. Tout employeur dans ce domaine devrait tenir un inventaire
minutieux de l'expertise des gens qui travaillent pour lui pour construire des
équipes TIC efficaces et complètes.
Un autre volet important de leur mémoire,
c'est l'embauche de ressources internes, évidemment. Selon le syndicat, si le
gouvernement revoit la classification, il deviendra plus concurrentiel par
rapport aux autres employeurs et sera en meilleure posture pour embaucher de
nouvelles ressources. Il pourra alors substantiellement diminuer son nombre de
postes vacants qui oscillait entre 7,8 % et 16,3 % en 2022,
dépendamment de différents critères. Si le gouvernement devient attractif et
cesse de recourir à la sous-traitance, les consultants actuellement à l'emploi
de firmes privées accepteront des postes au sein du gouvernement. Des équipes
internes qualifiées et maîtrisant la mission gouvernementale pourront ainsi
s'acquitter avec succès des nouvelles responsabilités dévolues au MCN dans le
projet de loi n° 82.
C'est un mémoire qu'on doit absolument
prendre au sérieux. Ce sont des préoccupations qui nous viennent, M. le
Président, d'employés qui sont là, qui sont à l'œuvre, des professionnels, des
ressources précieuses qui, dans le cadre de leur activité quotidienne,
observent des choses, constatent des choses. Ils sont eux aussi des
contribuables. Nous sommes tous des contribuables québécois. On veut tous...
Évidemment, on n'est pas en train de dire qu'il y a une solution miracle, mais
il doit bien y avoir une solution, il doit bien y avoir un plan, il doit bien y
avoir une vision. Et celle qui pourrait nous informer, celle qui pourrait nous
éclairer, celle qui pourrait fournir un apport significatif et essentiel à nos
travaux dans le cadre du projet d'identité numérique nationale, c'est la
présidente du Conseil du trésor. Donc, en tout respect, on soumet qu'il est
essentiel qu'elle puisse participer à nos travaux, encore une fois dans
l'optique de pouvoir rassurer la population qu'on s'en va dans la bonne direction.
On comprend aussi que les choses ne vont
pas se régler du jour au lendemain...
Mme Setlakwe : ...mais
quand j'entends le ministre en consultation dire ça ne relève pas de moi, ça
relève de ma collègue, je ne peux pas vous répondre, je ne peux pas fournir des
réponses, des informations claires et précises aux éléments que vous soulevez,
on va parler d'autre chose, bien, nous, notre devoir, c'est de ramener le débat
sur l'ensemble des enjeux. Puis l'enjeu des ressources humaines au sein du MCN,
c'est un enjeu fondamental, M. le Président.
Je vous laisse sur un autre extrait de cet
excellent mémoire. Ils font... Ils ont fait référence spécifiquement à la
conduite du projet SAAQclic, M. le Président. Les professionnels avaient
demandé de retarder le lancement du projet pour faire plus de tests afin de
s'assurer du bon fonctionnement du programme. On ne les a pas écoutés et on n'a
pas respecté leur expertise. Est-ce que, cette fois-ci, on peut, s'il vous
plaît, les écouter et entendre la présidente du Conseil du trésor? Merci.
Le Président (M. Simard) :
Alors, merci à vous, chère collègue. Est-ce que... Oui. Alors, je vois que la
députée de La Pinière souhaite intervenir, et vous disposez, madame, de
30 minutes.
• (12 h 30) •
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors, bien sûr, je fais écho, je fais mienne la motion qui a été
déposée par ma collègue, la députée de Mont-Royal—Outremont,
pour qu'on puisse entendre dans cette commission la présidente du Conseil du
trésor. C'est important parce que le projet est d'une telle envergure et un tel
potentiel d'être structurant qu'il faut s'assurer d'avoir les moyens, que ce
soit les ressources à l'interne ou les moyens financiers de le mener à bien.
Alors, la présidente du... En fait le conseil... le Conseil du trésor est un
comité qu'on... un comité permanent du Conseil des ministres, vous le savez,
avec la présidente donc du Conseil du trésor, qui est la ministre responsable
de l'Administration gouvernementale. Et il y a des ministres qui y siègent, qui
sont aussi des ministres très importants. Tous les ministres sont importants,
mais je pense, par exemple, au ministre du Travail, au ministre responsable des
Infrastructures. Je souligne ces deux-là parce qu'on sait que ce sont des...
Les travaux qu'ils font et l'agriculture aussi sont structurants, doivent être
structurants et ont un impact sur, je dirais, sur la vie des gens, oui, mais
sur les ressources dont l'ensemble du gouvernement peut disposer. Et je pense
que, donc, la présidente du Conseil du trésor, puisque le ministre de la
Cybersécurité et du Numérique nous a dit en commission qu'il ne pouvait pas
répondre aux questions relativement aux ressources humaines, aux compétences à
l'interne, je pense que sa présence est un incontournable.
La présidente du Conseil du trésor doit
voir à ce qu'on s'assure d'avoir les ressources à l'interne, autant pour la
planification du projet, et c'est un projet d'envergure, autant pour la
réalisation du projet et pour ce projet. Parce qu'il faudra accompagner les
citoyens dans tout ça. Une fois, là, que le projet va avoir vu le jour, que
tout va avoir été testé, peaufiné à l'interne, on l'espère, que les personnes
dans la fonction publique qui ont à s'en servir vont avoir été formées, vont
être capables de s'en servir au jour le jour sans écueils, il va aussi falloir
que la fonction publique, en fait, les personnes dans la fonction publique qui
sont en... qui sont sur la première ligne soient capables d'accompagner les
citoyens là-dedans. Et j'illustre cette nécessité-là, ce besoin-là
d'accompagner les citoyens par un exemple qui nous a été donné dans le mémoire
du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, le SFPQ, en
page 9 de son mémoire, qui nous dit que plusieurs services offerts à la
population impliquent des dossiers complexes nécessitant une intervention
humaine et un accompagnement pour en assurer le traitement adéquat, exemple,
aide sociale, prestations de la CNESST...
12 h 30 (version non révisée)
Mme Caron : ...etc. Dans ces
cas, le contact humain est essentiel pour assurer un service de qualité aux
citoyens et répondre à leurs besoins de manière efficace. Un recours accru aux
services numériques propulsé par l'identité numérique nationale s'il n'est pas
suivi d'un accompagnement humain adéquat risque d'être un échec dans plusieurs
cas. La compréhension des droits ainsi que des décisions effectuées dans son
dossier par le citoyen risquent de pâtir de cette dématérialisation. Un tel
projet fait également courir le risque d'une augmentation des erreurs
administratives dans les dossiers complexes. De plus, dans un contexte où les
ministères et les organismes publics devront systématiquement utiliser les
données déjà mises à leur disposition via l'identité numérique nationale, il
existe un risque d'erreur supplémentaire si ces mêmes données venaient à être
modifiées par un événement, comme un changement d'adresse».
Alors, tout à l'heure, je faisais
référence aux personnes qui ne voudront pas ou ne pourront pas utiliser l'identité
numérique nationale parce qu'en raison de difficultés de littératie ou bien de
littératie numérique, je donnais un exemple, l'exemple d'une personne qui a
besoin de prendre rendez-vous au Tribunal administratif du logement et qui est
obligée de passer par un organisme communautaire, parce que cette personne n'a
pas les moyens d'avoir les outils technologiques et le forfait de données ou de
wifi chez elle pour pouvoir prendre le rendez-vous. Mais si en plus la personne
a de la difficulté à bien comprendre ce qu'elle lit, si tout ce qui est... tout
son dossier tout est bien expliqué, même si c'est très bien expliqué sur un
site Web, elle va s'y perdre et elle aura de la difficulté à aller, j'utiliserais
l'expression juridique aller en appel, même si ce n'est pas l'expression la
plus juste ici, mais pour parler à une autre personne, si tout doit se faire,
doit se faire en ligne. Je ne crois pas que l'objectif du projet de loi soit de
tout faire en ligne, on veut, mais il faut maintenir les services en personne. Mais
même si on fait les choses en ligne — et c'est pourquoi j'y fais
référence — on a besoin de ressources humaines pour accompagner les
citoyens et même, je dirais, les utilisateurs dans les autres ministères ou organismes.
Alors, qui peut nous enligner, je dirais, qui peut nous rassurer sur le fait
que les ressources pourront être là, les ressources humaines à l'interne du
gouvernement, aux ministères, et ailleurs? Parce que, dans les autres
ministères aussi, c'est un projet qui va avoir un effet transversal, bien
entendu, sur l'ensemble des ministères et organismes qui vont s'en servir.
Alors, il faudra s'assurer que soit des ressources en place sont formées pour
pouvoir accompagner les citoyens, pour pouvoir s'en servir eux-mêmes dans le
cadre de leur travail, dans le cadre des tâches qu'ils ont à faire, tout comme
au ministère lui-même, de la Cybersécurité et du Numérique, là. Le ministre
nous a demandé, tout à l'heure, dans ses remarques préliminaires... nous a dit
qu'il faut que le... son ministère ait clairement le mandat de ce de ce projet.
Alors, là aussi, il faut avoir les ressources nécessaires. Ce qu'on nous a dit
en commission parlementaire durant les consultations, c'est que les ressources
sont insuffisantes. Ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont
nous a d'ailleurs dit que... en référence aux mémoires, que les projets actuellement
sur la table ne peuvent même pas se réaliser. Les projets ne peuvent... ne se
font pas en raison d'un manque de ressources.
Maintenant, on ne sait pas si ces projets
qui ne se font pas est-ce que ce sont des projets qui sont nécessaires pour
pouvoir mettre en place le projet d'identité numérique nationale, ça, on ne le
sait pas. Peut-être que non, mais je me doute que s'il y a des projets informatiques
qui doivent être faits, il y a peut-être un petit lien entre les deux. Dans une
conjoncture, un contexte économique...
Mme Caron : ...où le
gouvernement a accumulé un déficit record de 11 milliards, ça, c'était, en
date, je vous le rappelle, de mars 2024. On est en 2025, près d'un an plus
tard. On va bientôt... Il y aura bientôt, dans quelques semaines, le dépôt d'un
nouveau budget 2025-2026. Est-ce que les sommes seront au rendez-vous pour
réaliser ce projet, ce projet d'identité numérique nationale? On est tous
touchés par Santé Québec qui doit faire 1,5 milliard d'économies, qui doit
trouver des moyens de couper. On essaie... On dit qu'on ne coupe pas dans les
services, mais, tous les jours, tous les jours, on voit, dans des articles,
dans le journal, de personnes qui viennent de perdre leur poste, des personnes
essentielles qui sont sur la première ligne en santé, qui viennent de perdre
leur poste. On va peut-être les mettre ailleurs. Mais les besoins sont tellement
grands en santé si on va couper dans l'essentiel, là, est-ce que c'est parce
qu'on veut sauver de l'argent pour réaliser ce projet-là? J'en doute, là.
N'en demeure pas moins que si, en santé,
on est obligé d'aller couper 1, 5 milliard, considérant qu'on a un déficit
record de 11 milliards et qu'on ne sait pas encore quel sera le déficit qui
nous sera annoncé au budget dans quelques semaines; considérant que le ministre
des Finances a dit également en période de questions, ce matin, qu'il y avait
un plan de redressement des finances publiques... en fait, un plan d'équilibre
budgétaire, évidemment qu'il ne va pas... sûrement pas réaliser en une année,
parce que le déficit est beaucoup trop gros, mais il va sûrement avoir un plan
étalé sur quelques années pour revenir à l'équilibre budgétaire.
Dans ce contexte-là, moi, ce que
j'aimerais savoir, et je pense que c'est ce que ma collègue veut savoir, et
probablement les citoyens aussi, quel est le plan de la présidente du Conseil
du Trésor pour doter le ministère de la Cybersécurité et du Numérique des
ressources nécessaires à l'interne? Et là il ne s'agit pas, dans ce cas-là,
juste de dire: On a besoin... On évalue qu'on a besoin de tant de personnes qui
jouent tel rôle, pendant tant de temps, pour réaliser ce projet-là. Parce qu'on
nous a dit, en commission parlementaire, durant les consultations, qu'on avait
du mal à retenir des analystes, des programmeurs. Le seul titre qu'on peut leur
accoler, c'est le titre d'analyste, et que la rémunération n'est pas du tout
compétitive avec ce qu'un programmeur-analyste peut aller chercher au privé,
peut-être qu'on peut en avoir des plus jeunes qu'on forme et qui s'en vont, on
peut les comprendre, travailler ailleurs par la suite.
• (12 h 40) •
Pour un projet d'une importance et d'une
ampleur et d'une envergure comme celui de l'identité numérique nationale, on a
besoin de gens chevronnés. On a besoin des meilleurs pour que le projet soit
bien fait, pour qu'il fonctionne au bout du compte, et qu'il remplisse son
rôle, et qu'il permette au gouvernement, qui nous dépose le projet de loi 82,
d'atteindre son objectif de faciliter, simplifier l'accès aux services à la
population, y compris, comme je l'ai dit tantôt, la population qui ne pourra
pas utiliser le service d'identification numérique. Une des raisons qu'on nous
a dite pour cette incapacité à retenir des programmeurs, c'est l'incapacité de
les rémunérer correctement. Parce que ça fait tellement longtemps qu'on a les
chartes ou les listes d'emploi, avec les titres, et que ça n'a pas été mis à
jour, qu'on ne sait pas trop où les placer.
Alors ça, c'est un c'est un travail
d'envergure. J'imagine que la présidente du Conseil du trésor a déjà commencé à
y travailler depuis le temps qu'elle est dans...
Mme Caron : ...ses fonctions.
Mais ce que j'aimerais qu'elle nous dise en commission parlementaire, dans le
cadre du projet de loi n° 82, c'est où elle en est. Est-ce que ça va être
possible, non seulement, comme je disais tout à l'heure, d'identifier le nombre
de personnes, le type de poste, le type de travail, de rôle que les personnes
seront en mesure de jouer pour réaliser le projet? Et combien ça va coûter, pas
uniquement ça, quoique c'est... c'est... c'est majeur, mais est-ce que ce sera
possible de le faire dans le cadre actuel?
Alors, si le travail... si le travail n'a
pas commencé pour créer ces nouvelles classes d'emploi avec des... avec
lesquelles on peut avoir une rémunération qui concurrentielle pour pouvoir
embaucher les personnes qu'il nous faut, les personnes qu'il faudra au
ministère de la Cybercité et... la Cybersécurité et du Numérique, bien, si le
travail n'est pas fait, quel est l'échéancier pour le faire? Parce que, de
toute évidence, on en a besoin. Et, si le travail est amorcé, ce qui serait une
très bonne nouvelle, bien, il reste combien de temps avant que ça puisse être
mis en place? C'est... C'est majeur. C'est... C'est à la base. C'est... C'est
vraiment... Hein? On ne peut pas... On ne peut pas dire : je vais
construire la maison puis je n'ai personne qui a un marteau pour le faire ou
qui est capable de se servir d'un marteau.
Alors, ici, on a un projet énorme, d'une
grande ampleur, d'une grande importance. Et on comprend, on se l'est fait dire,
si on ne le savait pas, on se l'est fait dire en commission parlementaire, que
le Québec était 10 ans en retard sur d'autres législations par rapport à
ce projet-là. Alors, je comprends que le gouvernement veut aller de l'avant, et
je suis d'accord pour aller de l'avant, mais avons-nous les bases nécessaires
pour le faire? Et, les ressources humaines, bien, c'est absolument essentiel.
Une fois qu'on a dit ça, est-ce qu'on est
capables d'accueillir dans notre système, avec nos classifications de postes,
les personnes qui ont l'expérience et les connaissances et les compétences
nécessaires pour faire le travail? Et, une fois qu'on a franchi cette étape-là,
est-ce que le gouvernement a l'argent nécessaire pour faire ce travail-là, pour
réaliser ce projet-là? Et, comme je le disais tout à l'heure, pas uniquement le
planifier et le réaliser, mais les suites après, là, pour pouvoir accompagner
autant le personnel qui aura besoin de se servir du système que les...
d'accompagner les citoyens qui auront besoin des services publics et qui auront
besoin d'aide dans tout ça.
Alors, la présidente du Conseil du trésor,
puisque la ministre nous a dit qu'il n'avait pas ces réponses-là, bien, je
pense que la présidente du Conseil du trésor est la personne la mieux placée
pour venir... pour venir nous renseigner. Et ce n'est pas un projet qu'on doit
prendre à la légère. Ce n'est pour un projet de loi qu'on doit prendre à la
légère. Il faut avoir toute l'information nécessaire. Et la présidente du
Conseil du trésor pourra nous en fournir un bon... un bon pan.
Pourquoi... Pourquoi on s'attarde à cela
et pourquoi c'est si important d'avoir l'expertise à l'interne? Bien, c'est
justement pour ne pas dépendre d'une entreprise privée, pour ne pas dépendre
d'une entreprise étrangère.
Le gouvernement a, je crois, une très bonne
idée en voulant utiliser le code libre, un code libre pour son système. Mais,
ce qu'il faut savoir, c'est que le code libre, il est mis à jour par la
communauté des utilisateurs du code libre. Et ce serait peut-être bien qu'on
ait à l'interne des membres de cette communauté, des utilisateurs capables de
procéder aux mises à jour du code libre aussi pour que le gouvernement ne se
retrouve pas, du jour au lendemain, à avoir un code libre, oui, mais qui ne
suit pas adéquatement... qui ne va pas assez vite pour les mises à jour dont le
gouvernement aurait besoin. Alors, c'est important d'avoir ces compétences-là à
l'interne.
Aussi, si tout va en sous-traitance, c'est
sûr que si on disait : Bien, pas besoin de la présidente du Conseil du
trésor pour venir nous...
Mme Caron : ...nous parler de
son plan pour intégrer des personnes, des programmeurs qui ont l'expérience, et
les connaissances, et les compétences au sein du ministère de la Cybersécurité
et du Numérique. On veut tout donner en sous-traitance, et là c'est là que
beaucoup de groupes nous ont mis en garde durant les consultations. Si on mise
sur la sous-traitance pour réaliser ce projet là, bien, on n'a aucune expertise
à l'interne au gouvernement. C'est trop important. On parle de nos données, de
nos données personnelles. C'est trop important pour que ce soit confié à
l'externe.
Et ma collègue de Mont-Royal—Outremont
a fait référence à un élément qui a été dit durant les consultations en
commission parlementaire. Dans certains ministères, il y a des externes qui
sont là depuis 20 ans. Je ne sais pas, là, mais des externes qui sont là depuis
20 ans, ça, c'est parce qu'on n'est pas capable de les rémunérer à l'intérieur
de nos systèmes, à l'intérieur de la machine. On ne veut pas répéter ça dans le
cadre d'un système d'identité numérique nationale, qui revêt une telle
importance, parce que nos données personnelles y seront. On veut s'assurer...
hein, on a... il y a eu plusieurs... plusieurs enjeux qui nous ont été amenés
en commission parlementaire. La question des données biométriques, de baliser
correctement les données biométriques. On a parlé de traçabilité, la
traçabilité des transactions, d'être capables que, vous et moi, comme citoyens,
puissions avoir accès... et voir qui est allé consulter nos données, le journal
des transactions, qui est allé consulter nos données. Est-ce que c'est normal
ou est-ce que ce n'est pas normal? Si ce n'est pas normal, il faut... il
faut... pour avoir une possibilité de dire que ce n'est pas... ce n'est pas
normal.
Alors, ça, c'est un des enjeux qui nous a
été amené, l'enjeu des... de la traçabilité dans l'autre sens, c'est-à-dire
qu'on ne veut pas que le gouvernement ou l'intelligence artificielle qui serait
dirigée ailleurs que dans le gouvernement, si tout était en sous-traitance...
on ne veut pas que ça puisse suivre exactement tout ce qu'on fait dans la vie
de tous les jours. Et, j'insiste, ce n'est pas l'objectif, là, du projet de
loi, ce n'est pas l'objectif du gouvernement, mais pour s'assurer qu'il n'y a
pas des gouvernements externes ou des entreprises privées externes qui mettent
la main là-dessus, il faut avoir la maîtrise d'œuvre et d'opérationnalisation,
et le contrôle au sein du gouvernement, et, pour ça, on a besoin des ressources
à l'interne et on a besoin de la présidente du Conseil du trésor pour venir
nous dire ce qu'il sera possible de faire et quel est son plan.
M. le Président, est-ce que j'ai écoulé
mon temps?
• (12 h 50) •
Le Président (M. Simard) : Non,
madame, il vous reste 7 min 42 s, pour être très, très précis.
Mme Caron : D'accord, parce
que je voyais votre regard et, comme je n'ai pas allumé mon chronomètre...
Le Président (M. Simard) : Ah!
non, non, je vous ferai signe.
Mme Caron : ... je pensais
que j'arrivais... j'arrivais au temps...
Le Président (M. Simard) : Je
vous ferai signe lorsqu'il restera une minute.
Mme Caron : D'accord, merci.
Le Président (M. Simard) : C'est
que je suis très attentif à vos propos. Voilà pourquoi.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors donc, je reviens sur le fait que le syndicat de... voyons...
le SFPQ, donc le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec
nous a mis... nous a fait plusieurs mises en garde, donc, sur la
sous-traitance, qui était le sujet où j'étais juste avant, là. Et donc il faut
avoir... il faut avoir les ressources à l'interne, et, pour ça, bien, il faut
que les élus qui sont responsables de cela, notamment la présidente du Conseil
du trésor, puissent nous dire si c'est, effectivement, faisable, et il faut
trouver un moyen de le faire. Il faut que le ministère de la Cybersécurité et
du Numérique ait les coudées franches, je dirais, bien entendu, dans un certain
cadre budgétaire.
Mais il faut que tout le monde qui... dont
on a besoin pour bâtir la maison puisse être là, et qu'il n'y ait pas de
brèches du secteur privé ou de d'autres pays pour avoir un accès à nos données
ou contrôler... tu sais, mettre le gouvernement dans une situation où, bien, il
n'a pas le...
Mme Caron : ...de toujours
payer plus, plus, plus pour... parce qu'il est dépendant de l'externe, du
privé.
L'autre... l'un des autres points qui nous
a été soulevé durant les consultations, c'est la question de l'infonuagique.
Alors, l'infonuagique, bien, il y a... tout le monde connaît AWS, donc
l'infonuagique d'Amazon. On n'aurait pas eu cette conversation-là, peut-être,
il y a six mois parce qu'on faisait confiance que ce soit... que l'infonuagique
soit dans les mains d'une entreprise au Canada ou aux États-Unis. On était...
tout était... notre économie est tellement intégrée, on est des alliés depuis
presque toujours. On n'aurait pas eu cette conversation-là parce qu'on faisait
confiance. Aujourd'hui, on a un éveil un peu brutal, un réveil un peu brutal,
et on se dit qu'effectivement, au Québec, c'est le gouvernement québécois qui
doit nous protéger, c'est le gouvernement québécois qui doit protéger nos
données.
Alors, il faut regarder toute cette
question-là aussi. Avons-nous les ressources, au Québec, pour le faire? Je
conviens que l'infonuagique ne se fera pas à l'interne du gouvernement, là, ce
ne sera pas à l'intérieur du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, à
moins qu'on annonce autre chose, mais c'est une question qui est importante
aussi. Puis il faut qu'on ait... si je fais référence à ça, c'est qu'il faut
qu'on ait, au gouvernement, au sein du ministère... il faut aussi avoir des
personnes qui sont des salariés du ministère, qui ont l'expertise de conseiller
du ministère. Donc, ne pas aller... ne pas dépendre de l'externe pour
conseiller le ministère sur ce qui est le mieux à faire pour l'infonuagique,
pour le stockage de nos données, mais bien avoir cette expertise-là à
l'interne. Puis c'est peut-être plate, et c'est comme ça dans d'autres
domaines, en génie, par exemple, mais la façon dont les choses fonctionnent,
tout est balisé, ça doit l'être aussi, mais on a... au gouvernement, on n'a pas
toujours les moyens à l'interne, rarement d'ailleurs, d'avoir des personnes qui
ont des expertises techniques avec une compétence, une expérience de longue
date pour nous protéger, et on va souvent en sous-traitance pour ce genre de
projet là. Ici, c'est trop important, les données sont trop cruciales pour
qu'on se permette de faire ça.
Donc, il faut que le ministère de la
Cybersécurité et du Numérique s'assure d'avoir le budget nécessaire dans le
budget de cette année, mais dans les suivants aussi pour réaliser ce projet là,
pour avoir les ressources à l'interne pour le faire. Puis il faut que la
présidente du Conseil du trésor puisse venir nous dire de quelle manière elle
va s'y prendre pour que le ministère puisse embaucher les personnes qui ont la
compétence, l'expertise, et puis l'expérience pour leur donner des... leur
offrir des conditions de travail, une rémunération globale qui sera compétitive
pour pouvoir les embaucher, pour pouvoir les retenir aussi et que vraiment le
ministère ait la maîtrise d'œuvre de ce projet-là,et qu'on ne soit pas à la
merci d'entreprises privées auxquelles on sera attaché pendant trop d'années et
qu'on puisse s'assurer de bien faire les choses pour les Québécois.
Parce que, comme je l'ai dit depuis tout à
l'heure, comme ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont
l'a dit aussi, c'est un projet qui a un très grand potentiel d'être
structurant. On veut qu'il fonctionne, on veut faciliter la vie des Québécois,
mais on veut aussi protéger les Québécois en même temps et protéger leurs
données et s'assurer qu'il y aura toujours des personnes en place au
gouvernement pour assurer le contrôle de tout cela, pour être capable de mettre
en œuvre les recommandations de la Vérificatrice générale du Québec. On
comprend que les vérifications qu'elle a faites... les recommandations
s'adressaient à des projets particuliers dans des ministères particuliers, mais
il y avait beaucoup de points très pertinents qui, si on ne fait pas les
mêmes...
Mme Caron : ...on ne fait
pas les mêmes... on n'a pas les mêmes précautions, les précautions qui
découlent de ces recommandations, bien, si on ne fait pas les mêmes précautions
dans ce projet ci, bien, on risque de ne pas... de manquer le coche,
finalement, et puis de ne pas bien protéger nos données des Québécois et de
bien réussir ce projet. Alors, vivement que la présidente du Conseil du trésor
puisse venir nous exposer son plan. Merci.
Le Président (M. Simard) :
Merci à vous, chère collègue. Y aurait-il d'autres interventions? M. le
ministre, vous disposez de 30 minutes pour ce faire. Pas d'intervention.
Alors, compte tenu de l'heure, il me faut vous partager une information très
importante.
Une voix : ...
Le Président (M. Simard) :
Pardon?
M.
Caire
:
...d'ici 13 heures. On a le temps de voter la motion.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, nous sommes prêts à procéder au vote sur la motion. Est-ce
que cette motion...
Une voix : ...
Le Président (M. Simard) :
Pardon?
Mme Setlakwe : ...par
appel nominal, s'il vous plaît.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous en prie.
Le Secrétaire
: Pour,
contre, abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?
Mme Setlakwe : Pour. Et
déçue de ne pas avoir eu de réponse de la part du ministre.
Le Président (M. Simard) :
S'il vous plaît, sans commentaires.
Le Secrétaire
: Pour,
contre, abstention. Mme Caron (La Pinière)?
Mme Caron : Pour.
Le Secrétaire
: M. Caire
(La Peltrie)?
M.
Caire
:
Contre.
Le Secrétaire
: M. Bélanger
(Orford)?
M. Bélanger : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Mallette
(Huntingdon)?
Mme Mallette : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Abou-Khalil
(Fabre)?
Mme Abou-Khalil : Contre.
Le Secrétaire
: M. Thouin
(Rousseau)?
M. Thouin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire
: Et M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée.
Compte tenu de l'heure, je vous avise du
fait qu'évidemment nous sommes mercredi. Et qui dit mercredi, dit motion du
mercredi, motion qui aura lieu cet après-midi en cette Chambre. Conséquemment,
nos travaux seront dans la salle Kirkland à 15 heures. Je suspends donc
nos travaux.
(Suspension de la séance à 13 heures)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 03)
Le Président (M. Simard) : Alors,
à l'ordre, chers collègues! Nous sommes en ondes. J'aimerais vous souhaiter la
bienvenue.
Comme vous le savez, la Commission des
finances publiques reprend ses travaux afin de poursuivre l'étude détaillée du projet
de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres
dispositions.
Et, avant de débuter, je tiens à saluer la
présence de stagiaires de la Fondation Bonenfant qui sont parmi nous cet
après-midi dans le cadre de leurs travaux. Donc...
15 h (version non révisée)
Le Président (M. Simard) : ...Ceci
étant dit, ma collègue députée de Mont-Royal—Outremont m'avait
signifié son intention de nous soumettre une motion préliminaire. Alors, chère
collègue, la parole est à vous. Cette motion se retrouvant déjà sur Greffier.
Mme Setlakwe : Merci, M. le
Président. Donc, je vais en faire la lecture. Conformément à l'article 244
du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission
des finances publiques, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82,
Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres
dispositions, demande au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de
transmettre à la commission, dans les plus brefs délais, un état de situation
complet de l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les
ministères et organismes.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Chère collègue, nous vous écoutons.
Mme Setlakwe : Merci. Mais, écoutez,
c'est une question qui est dans l'air du temps. On en parle beaucoup ces jours-ci
avec le contexte politique qui plane aux États-Unis, les menaces qui planent de
la part de l'administration Trump. On doit se questionner. Je ne dis pas que le
gouvernement ne le fait pas, mais le gouvernement doit se questionner sur sa
dépendance et ses liens contractuels avec des entreprises américaines plus
particulièrement, évidemment, dans le... en l'occurrence, c'est la question des
données, de l'hébergement, des données qui nous intéresse, la question de l'infonuagique.
Et puis je pense qu'il serait extrêmement pertinent, M. le Président, qu'on
obtienne un état de situation complet quant à l'hébergement des données avant
qu'on débute l'étude détaillée, parce que la question de l'hébergement local a
été soulevée à maintes reprises et c'est une préoccupation tout à fait
légitime. D'ailleurs, il y a eu beaucoup d'articles de presse récemment. Et les
ministres, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a fait des
déclarations dans l'espace public, le premier ministre également. On comprend
que le gouvernement du Québec réévalue actuellement 179 millions en
contrats avec Amazon. Ça faisait l'objet récemment d'un article dans Le Devoir,
sous la plume de François Carabin et Marie-Michèle Sioui, où notamment donc on
soulève que le ministre de la Cybersécurité et du Numérique a confirmé que son
gouvernement avait commencé à passer au peigne fin ses contrats actifs avec
Amazon, depuis que l'entreprise appelait décision de fermer l'ensemble de ses
entrepôts québécois. Donc, ça, c'est une nouvelle qui est toute récente et qui,
en fait, n'a fort probablement rien à voir avec les ambitions du président
Trump. Mais ça demeure quand même très pertinent de se poser la question
spécifique par rapport à Amazon.
Je poursuis. Donc, le ministre aurait même
ajouté la volonté de s'émanciper des technologies américaines. Et là, quant au
premier ministre, il avait mentionné précédemment au salon rouge : Il n'y
a rien dont je rêverais de plus que de remplacer Amazon. Québec dénombre une
cinquantaine de contrats d'une valeur de 170 millions de dollars avec
l'entreprise de Jeff Bezos. La plupart avec la filiale Amazon Web Services, qui
fournit des services et des infrastructures d'infonuagique. C'est ce qui a été
expliqué par le ministre de la Cybersécurité et du Numérique. Donc, on se
rappelle encore une fois qu'on est sur le point d'entamer l'étude détaillée de
ce projet d'identité, de la loi qui va prévoir, donc, la mise sur pied, et les
registres, et tous les systèmes entourant donc le déploiement de cette nouvelle
identité numérique nationale. Et la question de l'infonuagique et de l'hébergement
des données dans un contexte d'assurer notre souveraineté numérique, d'assurer
que les données soient bien protégées, d'assurer que le gouvernement américain
ne puisse pas mettre la main sur nos données, y accéder comme ça, selon sa
bonne volonté. D'ailleurs, en vertu des différentes lois, je vais y arriver, c'est
une préoccupation qui nous occupe, c'est une préoccupation, donc, qu'on doit
prendre au sérieux. On doit prendre le temps de faire le point, M. le Président,
et d'avoir un état de situation complet avant d'en rajouter, avant d'aller de l'avant
avec ce nouveau projet qui va forcément impliquer, donc, de l'hébergement de
données.
Rappelons-nous, et ça faisait l'objet de l'article
en question, qu'une entreprise québécoise, Micrologic, ils sont venus ici en
commission et ils sont cités dans l'article du Devoir, je pense qu'ils ont déjà
des contrats avec le gouvernement, mais c'est une entreprise qui aimerait en
faire plus pour le gouvernement. Ils ont comme rêve aussi de remplacer Amazon.
C'est ce qu'ils ont, c'est dans l'espace public. Ça fait 10 ans qu'on...
Mme Setlakwe : ...un cloud québécois",
a dit le président Stéphane Garneau. "On a l'impression de ne pas être
entendus quand on voit les contrats qui sont envoyés aux Américains." Sa
compagnie se spécialise en infrastructures et en centres de données et est plus
que prête, selon le président, à prendre le relais d'Amazon et de Microsoft,
a-t-il attesté.»
Et puis finalement donc : «Le
ministre de la Cybersécurité et du Numérique a dit qu'il souhaite, comme son
premier ministre, que l'État se serve de ces contrats... s'il souhaite, comme
son premier ministre, que l'État se serve de ces contrats, il faudra le faire
chirurgicalement. On le comprend. On fait l'analyse technologique parce qu'on
ne peut pas nécessairement prendre des charges et envoyer ça vers une autre
technologie. C'est ce qui était survenu lors du fiasco entourant sa SAAQclic à
la Société de l'assurance automobile du Québec. Le ministre, c'est ce qu'il
avait rappelé. Donc, on ne veut pas que ça se répète sans aucune
considération.»
Donc, écoutez, c'est pour mettre la table,
là, pour expliquer le pourquoi on demande cet état de situation. On sait que,
de toute façon, le gouvernement est en train de le faire. Le gouvernement se
pose les questions. On comprend que ce n'est pas du jour au lendemain qu'on
peut... qu'on peut changer les choses. On peut... On est liés par des... par
des contrats. Il y a des... Il y a une analyse à faire. Mais on demande que
tous les parlementaires soient informés de cette... des résultats de cette
analyse et que donc l'état de situation complet de l'hébergement des données
numériques pour tous les ministères et organismes soit rendu public.
• (15 h 10) •
Ce n'est pas... Ce n'est pas des caprices
de l'opposition officielle, ce ne sont pas des tactiques, là, pour retarder
indûment le processus. On pense que, vraiment, il faut aller au fond des
choses, M. le Président. Et d'ailleurs, plusieurs experts nous l'ont mentionné
durant les consultations ou dans les mémoires qui ont été soumis, en
particulier... Et je les ai mentionnés ce matin lors de mes remarques
précédentes, l'Observatoire, le OBVIA, qu'on... je n'ai pas le nom complet
sous... Observatoire international sur les impacts, merci, sociétaux de
l'intelligence artificielle et du numérique, OBVIA, qui a fourni un mémoire
fort pertinent et qui était venu en commission, touchent à plusieurs enjeux et
ils posent même des questions dans le mémoire. Puis, quand j'ai lu leur
mémoire, je me suis dit : Mais, ça, ce sont des questions pour le ministre
de la Cybersécurité et du Numérique. «Deux questions demeurent néanmoins... je
les cite, deux questions demeurent néanmoins centrales dans ce débat. Y
aura-t-il un dispositif infonuagique souverain au Québec pour héberger les
données gouvernementales? Qui sera propriétaire des données inférées et des données
d'usage? Ce sont des questions, M. le Président, vous me direz, qu'on pourra en
discuter lors de l'étude détaillée, mais ce sont... ce ne sont pas forcément
des questions qui vont être directement en lien avec un libellé dans le... dans
le... dans la pièce législative. C'est un élément qui est central. C'est un
élément essentiel dont il faut... dont il faut débattre et qui est
absolument... qui est essentiel, donc, au déploiement de ce projet-là, la
question de l'hébergement. Ici, les experts posent la question, nous, les
parlementaires, on doit s'assurer d'avoir les réponses. Et on pense que
l'analyse qui est en cours au sein du gouvernement, elle doit nous être
partagée.
Il y a d'autres experts qui sont venus
parler de l'importance de l'infonuagique et de l'hébergement. L'Association
québécoise des technologies, dans son mémoire, à la première page, parle de
gérer les données dans les règles de l'art. Premièrement, favoriser la
décentralisation des données auprès des organismes responsables et privilégier
l'hébergement local, ils ont bien dit, dans la province du... dans notre
province, donc au Québec, idéalement, mais pas à l'extérieur du pays. Assurer
la résilience des centres de données à travers une redondance exemplaire. Bon.
Mais toute la question de privilégier l'hébergement local a été mise de l'avant
aussi par l'Association québécoise des technologies.
La Ligue des droits et libertés, qui nous
amène toujours à réfléchir à différents enjeux et dont la contribution est
toujours importante dans l'étude des projets de loi, a également évoqué cette
question-là dans son mémoire, que je cherche. Oui, elle est ici. Donc, à la
page six de leur mémoire...
Mme Setlakwe : ...ils
mentionnent que la question se pose, donc, de l'endroit où sont stockées les
données de l'identité numérique nationale. Le projet de loi n° 82 n'indique
rien à ce sujet. Donc, il ne faut pas attendre l'étude détaillée, M. le
Président, là, il faut vraiment échanger sur cette question-là, qui est tout à
fait pertinente et surtout dans le contexte actuel. Eux aussi nous disent qu'il
faut... il faut la considérer.
Je les... Je continue de les citer :
«Le stockage hors frontières ou via des entreprises soumises au contrôle de
gouvernements étrangers, notamment américain, peut compromettre la souveraineté
numérique du Québec sur les données de ses citoyens.» Et ils nous
rappellent : «Rappelons que, depuis 2001, le Patriot Act adopté par... aux
États-Unis autorise les services de sécurité américains à accéder aux données détenues
par des particuliers ou des entreprises et stockées sur le territoire
américain. De plus, depuis mars 2018, le Cloud Act permet à ces mêmes autorités
américaines d'accéder aux données hébergées en infonuagerie par un fournisseur
américain même si ces données sont stockées à l'étranger.»
Donc, on voit ici que ces deux lois qui
touchent les renseignements personnels et qui sont en vigueur, donc, chez nos
voisins du Sud, ont des portées extraterritoriales. Et ce n'est pas pour faire
peur, là, aux Québécois, mais c'est la réalité, nos données, si elles sont...
en vertu de certains contrats, même si elles sont, donc... on pense qu'elles
sont gardées chez nous, peu importe, les lois américaines qui s'appliquent à ce
type de contrats pour ce type de services ont des portées extraterritoriales et
peuvent... et peuvent viser nos données, les données sensibles des Québécois,
M. le Président.
Je poursuis. Encore, je me réfère à
l'excellent mémoire, donc, du Syndicat des professionnelles et professionnels
du gouvernement du Québec, que j'ai eu la chance de citer ce matin... a toute
une rubrique sur la localisation des données. À la page 15 de leur mémoire, ils
continuent de poser des questions très importantes : «Où seront situées
les infrastructures de technologies de l'information liées à l'identité
numérique? Au Québec? Au Canada? Aux États-Unis? En Europe?»
Donc, encore une fois, est-ce que...
quelle est la vision du ministre? Et quel est... Le ministre planche sur quoi
actuellement? Quand il fait son analyse, il analyse les contrats qui sont en
cours, est-ce que... Est-ce qu'on peut avoir un état de la situation? Est-ce
qu'on peut savoir si ces contrats-là... bien, leur durée, les modalités? Est-ce
qu'ils peuvent... Est-ce qu'on peut y mettre fin sans pénalité? Comment ça
fonctionne si on souhaite changer de fournisseur? Quelles sont les garanties
qui sont prévues dans ces contrats-là pour assurer la sécurité des données,
assurer que l'accès puisse être limité aux seules personnes dont l'accès est
nécessaire, etc.? Avant, donc, encore une fois, de mettre de l'avant un nouveau
projet, il faut s'assurer, donc, qu'on aura... il faut qu'on se questionne à
savoir à qui est-ce qu'on va confier l'hébergement de ces données si précieuses
pour les Québécois.
Je poursuis. Donc, dans leur mémoire, le
syndicat des professionnels du gouvernement du Québec mentionne : «Le fait
de confier à des entreprises privées internationales autant d'informations sur
les citoyennes et citoyens en indispose plusieurs. Cela pose, entre autres, le
problème du contrôle des données et de la propriété des renseignements. Si vos
données sont stockées dans un autre pays avec des lois différentes des nôtres,
comment garder le contrôle? Comment s'assurer du traitement sécuritaire de ces
données? Comment exiger des employés en technologies de l'information étrangers
une habilitation de sécurité?» Il nous mentionne que «le problème s'est posé
avec la mise en place de l'infonuagique gouvernementale. Par exemple, il y a
des données sensibles du gouvernement du Québec qui sont situées au
Royaume-Uni.» Ce serait intéressant, vraiment, d'avoir un état de situation
complet, M. le Président.
Le syndicat pense que toute la question,
donc, de la... de l'hébergement et de... et du contrôle sur nos données devrait
rester entièrement au Québec. «Les entreprises Microsoft Azure et Amazon qui
ont obtenu des contrats externes du...
Mme Setlakwe : ...des
infrastructures au Québec pour l'infonuagique. Donc, ce sont donc des lois du
Québec s'appliquent, mais en principe. Mais rien ne garantit que ces sites ne
pourraient pas fermer. Donc, c'est toutes des questions qu'on doit poser. Il
faut vraiment qu'on connaisse les modalités des contrats et qu'on prenne en
compte les lois qui ont une portée extraterritoriale. Et c'est là où eux, ici,
ils mentionnent l'impact des lois américaines, les deux lois qui touchent les
renseignements personnels, qui ont des portées extraterritoriales, donc le
Patriot Act et le Cloud Act. Les entreprises américaines sont soumises à ces
lois, même à l'extérieur des États-Unis. Donc, même si les contrats prévoient
que les données, nos données sont gardées sur des infrastructures au Québec,
les entreprises américaines qui sont soumises à ces deux lois là, même si elles
opèrent chez nous, elles sont quand même tenues. Donc, ces deux lois
s'appliquent à elles quand même. Donc, ces lois permettent au gouvernement des
États-Unis d'exiger d'une entreprise américaine de fournir les données qu'il
veut.
À l'interne, c'est le nuage gouvernemental
du Québec qui est responsable des données infonuagiques. Le problème de la
gestion des données à l'externe, c'est que toutes les données sont accessibles
aux compagnies privées. Elles peuvent carrément les vendre au plus offrant sans
que le gouvernement ou les citoyens soient au courant. Donc, ça, c'était le
syndicat des professionnels qui lève le drapeau également.
Et enfin, j'avais noté que le CEST, dans
son mémoire, la Commission de l'éthique en science et en technologie, parle
aussi donc de souveraineté des données. La question de savoir où seront
hébergées les données de l'identité nationale est aussi cruciale. La dépendance
à des géants américains comme Microsoft ou Amazon pourrait exacerber les
inquiétudes de la population liée aux fuites de données sensibles, en plus de
soulever des enjeux de cybersécurité à l'échelle collective advenant un
accroissement des tensions politiques entre les deux États.
• (15 h 20) •
Alors donc, encore une fois, M. le
Président, ce n'est pas... ce sont des préoccupations qui ont été soulevées par
plusieurs experts qu'on a entendus, et puis qui viennent donc soutenir notre
demande à l'effet d'avoir accès à cette analyse, d'avoir un portrait complet
pour savoir, donc, quel est l'état de situation actuelle et pour savoir comment
on peut... quelle est la vision pour la suite des choses en lien avec le projet
de loi n° 82.
J'ai été... Je me permets, M. le ministre,
de revenir sur les échanges de ce matin. On s'est laissé avec le vote sur la
première motion, et j'ai été étonnée que le ministre ne fournisse pas de
réponse. Peut-être la réponse viendra-t-elle plus tard, mais quand il y a deux
députés de l'opposition qui portent la voix, donc des experts qui portent la
voix des Québécois, qui soulèvent des enjeux qui sont pertinents et que ces
deux députés ont pris la peine de mentionner qu'elles ne sont pas contre le
projet, que l'idée d'avoir une identité numérique, elle est louable, que c'est
un projet porteur, c'est un projet qui, potentiellement, peut avoir des effets
très positifs pour les Québécois — on a dit ça d'entrée de jeu et on
veut que ça fonctionne — mais qui ont dit : Il y a des questions
légitimes qui se posent au niveau de l'expertise interne, au niveau des... au
niveau des coûts qu'entraîne cette dépendance à des ressources externes, à la
sous-traitance et qu'on porte la voix des experts qui travaillent sur le
terrain, qui sont au courant, qui voient dans le quotidien les... qui vivent,
donc, dans le quotidien ces interactions avec les entreprises externes qui
soulèvent différentes choses et qui proposent des pistes de solutions, qui nous
disent : Il faut reclassifier les emplois, il faut être plus attractif
pour attirer et retenir du personnel, etc., et voici toutes les conséquences de
cette dépendance, moi, je me serais attendu à ce que le ministre réponde
quelque chose. On n'a pas eu de réponse. On comprend que la présidente du
Conseil du trésor ne viendra pas s'asseoir avec nous en commission, mais, à
tout le moins, le ministre aurait pu fournir des réponses au nom de son
gouvernement, au nom de sa collègue. Donc, c'était plutôt décevant.
Encore une fois, nous, ce qu'on souhaite,
c'est que le projet fonctionne. On se rappellera que, dans le passé, il y a des
projets qui n'ont pas vu le jour, qui ont été retardés...
Mme Setlakwe : ...au sein du
ministère de la Cybersécurité et du Numérique. On en a sorti, on a même... on a
fait une courte recherche, là, sur l'actualité, de la revue de presse, pour
réaliser... Donc, ici, c'est une première entrevue dans L'Actualité au sujet,
donc, du ministre, qui est intitulé, bon, Le ministre de la Cybersécurité du
numérique mettre fin au trip d'informaticien au gouvernement du Québec, ça,
c'est en 2018 qu'il mentionnait lui-même qu'il était lui-même, donc, un grand
critique de tous les ratés informatiques du gouvernement au cours de la
dernière décennie. Il a dit, et c'est relaté dans l'article de 2018 dans
L'Actualité, il croit que ces délais et ces dépassements de coûts ont été
causés par une incompréhension crasse des réels besoins des citoyens. Au final,
le client nous avait demandé un cheval et on lui livrait un éléphant. Le
nouveau ministre veut que l'État mise sur des architectes d'affaires pour mieux
analyser les solutions. «Si on ne comprend pas bien le besoin du citoyen — je
le cite — on va repartir dans nos trips, on va faire des patentes
incroyables qui font des affaires complètement surréalistes mais qui sont trop
compliquées pour le monde et qui donnent un paquet de services dont le monde
n'a pas besoin. Ça, il faut que ça arrête». Plus loin, quand on parle des
différents projets : Pour y arriver, on doit investir. Le ministre croit
que son plus grand défi sera la main-d'œuvre. À l'heure où les entreprises
s'arrachent les informaticiens, il se dit prêt à payer davantage, mais il croit
aussi devoir leur offrir un milieu de travail stimulant. Je le cite : «Si
on les parque derrière les petits paravents bruns à faire toujours la même
chose, je pense qu'on a beau déplier bien des dollars, ça ne va pas... ça ne va
pas faire. Au final, l'objectif, c'est toujours d'économiser», etc. Donc, ça,
c'est une entrevue d'il y a quelques années, où le ministre mentionnait
lui-même, donc, l'importance des ressources internes.
Ici, j'ai un article du 7 mai 2024, donc
l'an dernier, ça, c'était suite, je pense, à l'échange qu'on avait eu aux
crédits, et le... C'est un article de Nicolas Lachance, Journal de Québec...
Journal de Montréal, Éric Caire... pardon, Le ministre de la Cybersécurité et
du Numérique remise son important projet d'application mobile pour son identité
numérique. Et on mentionne que la rareté de main-d'œuvre nuit à son déploiement
complet, ce que le ministre avait admis lui-même, encore une fois lors de
l'étude des crédits budgétaires en avril dernier. Je le cite : «Je ne vous
le cache pas, il y a des projets qu'on met sur pause actuellement. Le projet de
Carrefour, qui est l'application numérique de services numériques du
gouvernement, on va le mettre sur pause», le ministre avait-il mentionné. Or, déjà,
en 2022, Québec admettait qu'il ne détenait pas l'expertise à l'interne pour
créer cette infrastructure informatique. «Le ministre est incapable de garantir
à la Commission d'accès à l'information qu'il respectera la protection des
données personnelles». Bon, il y a certains projets qui avaient été proposés,
qui ont eu... qui ont vu des changements en cours de route, qui ont pris une
nouvelle trajectoire pour toutes sortes de raisons, qui n'ont pas vu le jour.
Et ça, on peut, dans une certaine mesure, l'accepter, le comprendre. Mais moi,
ce que je ne comprends pas, c'est quand on demande aujourd'hui, face à un
nouveau projet aussi prometteur soit il, on demande d'être rassuré, on demande
d'entendre les collègues du gouvernement qui ont une vision, qui ont les deux
mains sur le volant au niveau des ressources humaines et financières, et qu'on
nous réponde... on ne nous répond pas, on ne nous explique pas pourquoi la
ministre ne viendra pas, mais je trouve ça vraiment décevant.
Un éditorial de La Presse intitulé La
Terre appelle le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, signé par
Stéphanie Grammond, aussi, là, donc, nous rappelle... C'était dans le contexte
du fiasco SAAQclic, etc. Et puis donc rappelait... nous rappelle que... qu'il y
a des projets, depuis la formation de ce nouveau ministère, qui... il y en a
qui n'ont pas vu le jour, il y en a qui ont vu le jour avec la participation du
ministre. On ne dit pas qu'il était le seul maître d'œuvre du projet de
SAAQclic, mais, néanmoins, il avait un rôle important à jouer dans ce
projet-là. Et...
Mme Setlakwe : ...c'est ce qui
est arrivé, M. le Président. Les citoyens ont fait... ont fait la file
d'attente pendant des semaines. Les citoyens... Encore une fois, on a surestimé
le degré de sophistication, on a surestimé le fait qu'ils allaient être prêts à
adopter la nouvelle plateforme et on a complètement sous-estimé les ressources,
l'accompagnement, etc.
Donc, pour moi, de... toutes les questions
qu'on soulève, là, durant nos... dans le cadre de nos motions préliminaires,
sont tout à fait... sont tout à fait pertinentes et méritent tout le sérieux...
méritent le... qu'on... qu'on les traite avec tout le sérieux qu'elles
méritent. Parce qu'ultimement, c'est... c'est vraiment... on veut que le projet
fonctionne, on veut que les Québécois puissent bénéficier de services
accessibles, conviviaux, simples efficaces, et où on veut aussi que le
gouvernement puisse s'occuper de ceux et celles qui n'ont pas la littératie
numérique suffisante pour bénéficier pleinement des outils technologiques. Et
donc on va rester sur notre appétit puis on va continuer de poser les
questions, M. le Président, si on n'a pas des réponses à nos questions.
Un autre article du 7 mai 2024, dans
le Journal de Québec, intitulé Un autre projet suspendu, le ministre de la
Cybersécurité et du Numérique est la risée des experts. Il y avait un projet
qui était... bon, le projet d'identité numérique, qui était une promesse figée,
prétendument en raison du manque de main-d'œuvre. Le projet annoncé...
L'identité numérique devait offrir aux Québécois une application mobile donnant
accès à tous les services gouvernementaux sur leur téléphone d'ici 2025. C'est
un projet qui était... qui avait été annoncé en 2019. Il vient s'échouer face à
la rareté de main-d'œuvre.
• (15 h 30) •
Je cite ici un expert en cybersécurité,
Éric Parent, P.D.G. de Éva Technologies : «On a le talent au Québec.
Alors, si on payait les salaires, qu'on montait vraiment une cellule d'experts
pour faire ce genre de projet là, il n'y aurait aucun problème», rétorque M.
Parent.
Et donc voilà, ça complète mon... Je
voulais compléter l'énoncé de ce matin en lien avec l'expertise interne.
Permettez-moi de prendre les derniers
instants qui me restent, je pense qu'il me reste peut-être un petit deux
minutes, M. le Président, pour revenir sur toute cette question... cette
question des contrats publics de Québec avec des fournisseurs américains. À
tous les jours, les médias s'y intéressent. Je l'ai dit d'entrée de jeu, le ministre
de la Cybersécurité et du Numérique s'y intéresse lui-même, son premier
ministre aussi. Il y a des articles dans les journaux quotidiennement. Ici,
dans La Presse : Qui sont nos fournisseurs américains? Bon, évidemment, ce
n'est pas tout... tous les tableaux qui sont fournis ne concernent pas tous des
services informatiques, mais on voit ici un tableau qui démontre ce que reçoit
Microsoft, ce que reçoit Amazon Web Services, et c'est non négligeable.
Il faut vraiment qu'on sache dans quoi on
s'embarque, M. le Président, avec le projet d'identité numérique.
Rappelons-nous qu'en domaine... dans le domaine de la santé et des services
sociaux, c'est la firme Epic, une entreprise américaine, qui va... qui a
récolté... qui a... à qui on a octroyé le contrat, là, pour le dossier santé
numérique. Là, le contrat est signé avec eux. Est-ce qu'il y aurait eu des
compagnies québécoises? Bon, je ne veux pas rouvrir le débat, mais c'est... les
médias s'y intéressent, les Québécois s'y intéressent. Les données sensibles
des Québécois et des Québécoises, ça intéresse clairement les Québécois et les
Québécoises, ça nous intéresse, nous.
Et, avant de plonger dans ce... dans ce
projet d'identité numérique nationale qui va impliquer forcément l'hébergement
de données, avec tout ce qu'on a entendu des experts au niveau de l'importance
de garder le contrôle, l'importance d'avoir une souveraineté numérique, je vous
demande, M. le Président, et je demande aux collègues de la partie
gouvernementale de donner suite et de voter en faveur de notre motion, qui
demande donc de transmettre à la commission un état de situation complet de
l'hébergement des données numériques, et ce, pour tous les ministères et
organismes. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, chère collègue. Mme la députée de La Pinière. Vous disposez également
de 30 minutes.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors, heureuse de vous retrouver et de retrouver les collègues de
cette commission.
Alors, à mon tour, je vais m'exprimer sur
la motion préliminaire...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Caron : ...dont a fait
lecture ma collègue la députée de Mont-Royal-Outremont. Et je prends la parole
au nom du chef de l'opposition officielle. Donc, ce qu'on demande, c'est que le
ministère de la Cybersécurité et du Numérique transmette à la commission, dans
les plus brefs délais, un état de situation complet de l'hébergement des
données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes.
Alors, je mettrais la table en disant d'abord
qu'on a vu, dans un... dans un article de La Presse, qui a été publié le 8 février
dernier et qui... en fait, qui portait sur autant le gouvernement fédéral que
le gouvernement québécois. L'article s'intitulait Qui sont nos fournisseurs
américains? Alors, bien entendu, on comprend, là, que c'est dans le contexte
actuel. Il n'est pas question ici de blâmer le gouvernement québécois ou le
gouvernement fédéral d'avoir donné des contrats à des fournisseurs américains.
Jusqu'à assez récemment, il n'y avait aucun problème avec ça. Mais, pour mettre
la table, donc, qui donne des contrats à des fournisseurs américains? Parmi les
organismes publics québécois ayant octroyé les contrats les plus importants à
des fournisseurs américains depuis le 1er janvier 2023, donc dans les deux
dernières années, alors il y a le ministère de la Santé et des Services
sociaux, qui a donné six contrats, surtout pour des systèmes informatiques, il
y a aussi eu des contrats pour un service de marketing, mais évidemment, ici,
on s'intéresse à l'infonuagique, on s'intéresse au stockage de nos données, on
s'intéresse à la dépendance que le gouvernement a pour certains projets en
informatique. Il y a aussi le Conseil du trésor, dont on souhaitait rencontrer
la présidente. On en a débattu assez longuement, ma collègue députée de
Mont-Royal-Outremont et moi, ce matin, avec aucune espèce de réponse de la part
du ministre, alors que la motion et la demande expliquée en long et en large,
deux fois 30 minutes, je pense, était assez... assez claire et pertinente.
Alors, peut-être que c'est parce que le ministre aura les réponses en
commission. Parce que, ce qui nous a poussés... ce qui nous avait poussés à
demander à faire cette motion, c'était que, la semaine dernière, dans cette
salle même où les experts sont venus témoigner... pas «témoigner» mais ont
déposé leurs mémoires et répondu à nos questions, ont eu des échanges avec
nous, le ministre ne pouvait pas répondre parce que ce n'est pas lui qui avait
les réponses, c'était sa collègue. Alors, pourquoi la collègue... pourquoi s'est-il
opposé à ce que la collègue vienne nous répondre?
Autres... Autres donneurs de contrats à
des fournisseurs américains, il y avait le Service de l'eau de la ville de
Montréal, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique, Hydro-Québec et
210... 217 autres organismes.
Alors, comme je disais, M. le Président,
je voulais mettre la table. Donc, ce n'est pas une vue de l'esprit, là, quand
on dit qu'il y a des contrats qui sont donnés aux États-Unis. C'en est un
survol, un bref survol.
Je disais qu'il y a deux ans, on ne se
posait pas de questions, il y a même un an ou même six mois, on ne se posait
pas de questions sur la... outre le fait qu'on aime bien que les contrats
soient donnés à des entreprises québécoises ou canadiennes, mais il y avait... nos
économies sont tellement intégrées qu'il n'y avait pas d'enjeu à donner des
contrats aux États-Unis par rapport à la sécurité.
Par contre, ma collègue députée de
Mont-Royal-Outremont a fait référence à la Cloud Act. Alors, ça, c'est la loi
sur le nuagique, la loi fédérale américaine. C'est une loi qui a été
sanctionnée en 2018 et qui venait modifier la loi. Et vous me permettrez de
faire la traduction libre, M. le Président. La loi sur le nuagique amendait
principalement la Loi sur les communications stockées de 1986 pour permettre à
la Police fédérale américaine d'obliger des entreprises technologiques basées
aux États-Unis de fournir, via un mandat ou bien un subpoena, de fournir donc
les données demandées qui sont stockées sur des serveurs, peu importe si les
données sont stockées aux États-Unis ou à l'étranger. Donc, avec cette loi-là,
le gouvernement fédéral américain peut obliger les entreprises d'infonuagique,
de stockage de données, à...
Mme Caron : ...remettre au
gouvernement américain des données qui sont stockées aux États-Unis, mais à
l'étranger, à l'étranger.
Nous sommes l'étranger pour les États-Unis
en ce moment. En tout cas, pour toujours, j'espère. Alors, ce n'était pas un
risque avant. Maintenant, c'en est un. Ça nous inquiète. Ça nous préoccupe. On
n'est pas les seuls d'ailleurs.
La motion de demander un état de situation
complet de l'hébergement des données numériques pour tous les ministères et
organismes du Québec vise à ce que le gouvernement fasse preuve de transparence
en nous informant, en nous donnant cet état de situation et en permettant aussi
au citoyen de comprendre. Et, en s'assurant que le risque est géré, bien géré
et surtout qu'il est réduit, qu'à partir de maintenant, on va réduire ce risque
pour s'assurer que nos données sont stockées au Québec ou au Canada. Alors,
c'est important devant l'ampleur du projet de loi qui est devant nous sur
l'identité nationale numérique.
• (15 h 40) •
Je me permets de rappeler aussi que la
RAMQ, donc la Régie de l'assurance maladie du Québec, est venue pendant les
consultations. C'était le P.D.G. de la RAMQ qui a fait la présentation, qui a
répondu à nos questions. Et, en page six de son allocution, il nous
disait : «Finalement, nous tenons à souligner un ajout intéressant en
matière contractuelle. Le MCN, donc le ministère de la Cybersécurité et du
Numérique, agit à titre de courtier en infonuagique pour le compte des
organismes publics en rendant disponibles des offres infonuagiques par type de
biens ou par type de services. À cette fin, le courtier, donc le ministère de
la Cybersécurité et du Numérique, donc le courtier élabore un catalogue
d'offres infonuagiques destiné à répondre aux besoins de tels organismes et il
accompagne en la matière.»
«Et l'article 36 du projet de loi qui
est devant nous - donc plus précisément, l'article 36 se situe dans la
section intitulée Règlement sur les contrats des organismes publics en matière
de technologies de l'information - donc cet article 36 prévoit
l'élargissement des services offerts par le courtier, MCN, ministère de la
Cybersécurité et du Numérique, en ajoutant la technologie spécialisée à son
catalogue. Cet ajout est positif pour le secteur de la gestion contractuelle
car il permet de bonifier les options actuellement proposées qu'en
infonuagique. Cependant, il aurait été bénéfique de permettre dans le projet de
loi l'octroi de contrats de 5 à 10 ans dans le cas d'acquisition de biens
par le courtier. À notre avis, avoir étendu la durée de ce type de contrats
aurait permis d'obtenir des gains d'efficacité. Il faut se rappeler que les
coûts d'acquisition et d'implantation des technologies militent, selon nous,
pour un amortissement des efforts pour une plus longue période.»
Donc, finalement, ce que... cet aspect-là,
là, que je viens de citer, c'est que, si le projet de loi permettait l'octroi
de contrats de 5 à 10 ans, bien, on changerait moins souvent, et les coûts
seraient moindres parce qu'il y a toujours des coûts qui sont associés à
changer trop souvent de fournisseur. Et, souvent, quand on change de
fournisseur, on change le système ou on apporte des modifications au système et
on doit reformer... reformer tout le monde.
Mais pourquoi je fais référence à ça?
C'est parce que le ministère agit à titre de courtier en infonuagique pour le
compte des organismes publics. C'est bien correct comme ça, là, je ne remets
pas du tout ça en question. Mais, si le ministère rend disponibles des offres
infonuagiques puis qu'il y a un catalogue d'offres infonuagiques destiné à
répondre aux besoins des ministères et organismes, j'imagine qu'il y a déjà une
liste de fournisseurs. Alors, quand on demande de transmettre à la commission
dans les plus brefs délais un état de situation complet de l'hébergement des
données numériques, et ce, pour tous les ministères et organismes, il y a déjà,
je pense, un gros du travail qui est déjà fait, qui doit être quand même facile
à nous transmettre. Alors, ce n'est pas une demande frivole qu'on va là...
qu'on fait là, et ça ne prendrait pas un temps énorme pour répondre à cette
demande...
Mme Caron : ...on a parlé, M.
le Président... c'est-à-dire, «on a parlé», les experts nous ont parlé de
souveraineté numérique, principalement d'absence de souveraineté numérique. Et
là je vais me permettre de citer le mémoire de Micrologic, Micrologic étant une
entreprise 100 % québécoise, fabricant d'un cloud souverain, qui aurait le
goût de faire... de stocker nos données. Le ministre semblait très, très bien
connaître le président de l'entreprise, qui est venu... qui est venu expliquer
son mémoire. Mais là où je veux attirer votre attention, M. le Président, c'est
sur le premier enjeu, absence de souveraineté numérique. Et ce que Micrologic
nous dit c'est qu'«actuellement les données des Québécois circulent d'un nuage
informatique à l'autre, souvent entre les mains d'entreprises étrangères,
franchissant ainsi des frontières géographiques et juridiques. Cette exposition
accrue rend les données vulnérables, posant des risques considérables pour les
entreprises et les institutions. Toutes les données n'ont pas la même
sensibilité. Un arrêté du 2 décembre 2024 a instauré un modèle de
classification de sécurité des données numériques gouvernementales et, en
fonction de cette classification, les données les plus sensibles, qui sont
nommées données classifiées ou données protégées, devraient impérativement être
hébergées dans un nuage souverain québécois ou canadien.»
Alors, quand on demande, par cette motion,
un état de situation complet de l'hébergement des données numériques pour tous
les ministères et organismes, bien, c'est ça, c'est qu'on veut de la
transparence, on veut que le gouvernement nous dise qu'est-ce qui est hébergé
au Québec, qu'est-ce qui est hébergé à l'étranger, dans quels pays étrangers,
quelles données. S'agit-il de données sensibles? Et, si c'est le cas, bien, il
faut commencer à penser, avoir un plan pour que nos données sensibles soient
hébergées au Québec ou au Canada.
Je pense que... On parlait... Tout à
l'heure, dans les interventions qu'on a faites au début de la commission
aujourd'hui, là, ce matin, on parlait de feuille de route, on disait que la
Vérificatrice générale nous... en fait, incitait le gouvernement à bien
planifier. La planification du projet, la gestion contractuelle sont des
incontournables, et, pour ça, ça prend une feuille de route. Et c'est dans
cette feuille de route qu'on prévoit la communication avec le public et avec
les utilisateurs, bien entendu, du... des systèmes. Et, comme je le disais, ce
n'est pas... la communication, ce n'est pas juste un exercice de communication
pour convaincre que tout est beau, non, c'est un exercice de communication
factuel qui dit : Voilà, on a... c'est ça, l'état de la situation,
c'est... c'est là qu'on s'en va. Pour y arriver, pour que vous soyez confiants
que les... vos données sont en sécurité, que vous allez pouvoir continuer
d'avoir des services même si vous n'utilisez pas les services en ligne, voici,
nous allons faire ça, ça, ça. C'est ça, une feuille de route.
Alors, un état de situation complet, là,
de l'hébergement des données numériques, bien, ce serait des... ce serait un
élément qu'on aurait dans la partie communication de cette feuille de route
pour agir en transparence et pour rassurer la population qu'on fait tout ce qu'il
faut pour que les données soient en sécurité et que chacun puisse utiliser le
système... en fait, l'identité nationale numérique sans crainte.
Toujours dans le mémoire de Micrologic,
sous cet enjeu d'absence de souveraineté numérique actuellement, on nous donne
comme information la définition de la souveraineté numérique... la souveraineté
infonuagique par exemple... par contre, par le gouvernement français. Alors, le
gouvernement français la définit comme suit, la souveraineté
infonuagique : «"un modèle de déploiement dans lequel l'hébergement
et l'ensemble des traitements effectués sur des données sont physiquement
réalisés dans les limites du territoire national par une entité de droit
nationale et en application des lois et normes nationales". À ce sujet, il
est important de mentionner que la France mais aussi l'Union européenne et
plusieurs autres pays comme l'Australie sont...
Mme Caron : ...beaucoup plus
avancés que nous en matière de souveraineté numérique.
Et la souveraineté numérique repose sur
deux principes fondamentaux : la souveraineté des données et la
souveraineté opérationnelle. La souveraineté des données implique qu'elles
soient régies par les lois nationales, hébergées sur le territoire et soumises
à un contrôle d'accès sous autorité de l'État. Quant à la souveraineté
opérationnelle, elle se définit par la résilience et la pérennité des données,
par la gestion par du personnel régi et imputable aux lois nationales ainsi que
par la capacité de transférer les données entre différents environnements
numériques, sans restriction.
Alors, cette définition de la souveraineté
infonuagique et de la souveraineté numérique joint les deux... les sujets des
deux motions qu'on a faites jusqu'à présent, M. le Président. Ce matin, on
demandait la présence de la présidente du Conseil du trésor, parce qu'on veut
savoir quels sont les plans, quelle est la marge de manœuvre pour avoir des
ressources humaines, des compétences, une expertise à l'interne du ministère de
la Cybersécurité et du Numérique, en nombre suffisant pour un temps suffisant
pour mener à bien ce projet. Parce que, je le répète, on veut que ça
fonctionne. On veut que ça fonctionne, ce projet.
• (15 h 50) •
Et la motion qui est devant nous, où on demande
l'état de situation complet et l'hébergement des données numériques pour tous
les ministères et organismes, pour savoir où on en est et qu'est-ce qu'on...
qu'est-ce qu'on a l'intention de faire pour gérer le risque, pour réduire le
risque et pour s'assurer, comme le dit cette définition, que l'hébergement puis
l'ensemble des traitements effectués sur les données soient physiquement
réalisés dans les limites du territoire national, donc dans les limites du
Québec, par une entité de droit et nationale, et en application des lois et
normes nationales, donc en fonction de nos lois, par une entité d'ici. Par
exemple, ça pourrait être le ministère de la Cybersécurité et du Numérique qui
encadre tout cela. D'ailleurs, le ministre a dit : Il faut qu'on donne le
mandat à son ministère, et je suis bien d'accord là-dessus. Mais, en toute
transparence, on veut avoir l'état de la situation actuellement sur
l'hébergement de nos données numériques et on veut avoir l'état de la situation
sur les travaux au Conseil du trésor pour être capables d'avoir les
classifications d'emploi nécessaires pour avoir des compétences à l'interne et
non pas dépendre d'entreprises privées et, encore pire, d'entreprises
étrangères pour ce projet d'identité numérique.
Je pense, M. le Président, que les
experts, les experts ont parlé. Moi, avant d'arriver à cette commission, je
savais ce qu'était l'identité numérique ou je pouvais me... je pouvais me
douter de ce qu'était l'identité numérique et le projet d'identité numérique
nationale, que je vois d'un bon œil. Par contre, toutes les préoccupations qui
nous ont été amenées par les experts... Évidemment, c'est pour ça qu'on fait
des commissions parlementaires et qu'on invite des experts à déposer des
mémoires, ça fait réfléchir, ça fait réfléchir.
Et, comme je le disais ce matin aussi, on
n'aurait peut-être pas la même conversation, si on avait fait ce projet il y a
six mois, un an, deux ans, trois ans. Mais aujourd'hui, on se rend compte que
la souveraineté de nos données, la souveraineté du stockage de nos données,
c'est un élément très important. Peut-être que le ministre et ses équipes
travaillaient sur ce projet de loi il y a quelques mois, alors que ce n'était
pas un enjeu. Mais là, le projet de loi, il est devant nous maintenant. On est
dans une situation où on se doit de protéger les Québécois et leurs données. Et
je pense qu'il faut faire... il faut prendre toutes les précautions nécessaires
pour que le projet fonctionne, que ça facilite la vie, que l'identité numérique
facilite la vie des Québécois pour obtenir leurs services publics, puis aussi
augmente, on le souhaite, l'efficacité...
Mme Caron : ...l'efficience au
sein des ministères et organismes. C'est un but tout à fait louable et qu'on
partage, mais il ne faut pas le faire à tout prix, à n'importe quel prix. Et la
situation actuelle commande qu'on fasse attention et qu'on soit aux aguets,
qu'on soit vigilants pour avoir le meilleur projet de loi possible et puis se
donner toutes les chances d'avoir une identité numérique qui va bien
fonctionner.
Un autre point que j'aimerais apporter,
c'était... en fait, ça nous a été soulevé par, si je ne m'abuse par
M. Steve Waterhouse, je vais simplement vérifier, M. le Président.
Effectivement, dans le mémoire de M. Steve Waterhouse, en annexe de son
mémoire, l'annexe B, il y a le cadre de confiance du Conseil canadien de
l'identification et de l'authentification numérique. Et ce cadre de confiance,
donc, a été adopté après... à la suite, en fait, de recommandations d'un groupe
de travail sur l'examen du système de paiement du gouvernement fédéral, des
dirigeants des secteurs public et privé du Canada ont créé, donc, ce groupe de
travail pour élaborer un cadre de confiance pour répondre aux besoins de
l'économie numérique. Et ce cadre de confiance pancanadien se base sur des
principes et des valeurs clés, notamment contribuer à la fiabilité et à
l'interopérabilité des capacités de confiance et d'identité numérique des
secteurs public et privé, tout en donnant la priorité à la conception, à la
confidentialité, à la sécurité, à la commodité centrée sur l'utilisateur.
Deuxièmement, de rassembler les meilleures pratiques. Il s'appuie sur les
normes politiques et les lignes directrices existantes en tenant compte des
contributions de plusieurs parties prenantes. Alors, le CCIAN, donc le Conseil
canadien d'identification de l'authentification numérique, que j'ai nommé tout
à l'heure, s'est engagé à s'aligner sur les cadres pertinents du monde entier
pour faciliter l'interopérabilité et l'adoption. Et, troisièmement, largement
applicable, basé sur les résultats indépendants de la technologie ouverte et
flexible. Et ça, c'est autant pour les particuliers, pour les entreprises que
pour le gouvernement. Le cadre de confiance pancanadien en question porte sur
l'authentification et les justificatifs pour ce qui est du respect de la vie
privée et ensuite sur toute l'infrastructure de technologie et d'opération. Il
y a aussi l'authentification, les justificatifs, les portefeuilles numériques,
l'avis de... avis et consentements, les registres de confiance, les personnes
vérifiées, organisations vérifiées. Et ce que M. Waterhouse nous disait,
c'est qu'il y a déjà certaines choses qu'on fait. Le Québec qui entre dans le
cadre de confiance pancanadien. Alors, si je fais référence à ça, M. le
Président, c'est que, dans ce projet de loi qui est devant nous, et on veut
qu'il réussisse, bien, il faut avoir l'humilité aussi de se baser sur les
meilleures pratiques de pays qui y ont travaillé avant nous, qui ont mis en
place une identité numérique avant nous. M. Waterhouse en mentionné huit
qui l'ont fait avant nous : Singapour, la Suède, l'Estonie, la Belgique,
l'Inde, le Danemark, les Pays-Bas et le Nigéria. Et après un rapport de Beyond
Encryption, bien, il y a des enjeux qui ont été relevés que ces pays-là ont eu
à négocier. Alors, inspirons-nous de ça pour aller tout de suite vers ce qui
est le plus... le plus garant, je dirais, de succès. Et en matière... Bon. Il y
a plusieurs points. Il y a cinq points. L'infrastructure premièrement. Alors,
les gouvernements ont besoin de réseaux robustes, capables de gérer une forte
demande et de protéger les données et ils doivent également s'assurer que les
cartes d'identité numériques fonctionnent avec les outils existants afin que
les utilisateurs puissent passer aux solutions numériques. Les systèmes
existants peuvent compliquer les choses. Est-ce qu'on s'est assuré de cela? La
cybersécurité, bien, les cartes d'identité numériques contiennent des données
sensibles, ce qui en fait des cibles à très...
Mme Caron : ...pour les
pirates. Et c'est pour ça qu'on demande un état de situation complet de
l'hébergement des données numériques et qu'on souhaite que l'hébergement se
fasse au Québec et qu'on souhaite mettre en œuvre toutes les précautions pour
nous protéger contre... les contre les pirates. «Il y a toujours, en fait de
cybersécurité... Les pays doivent protéger ces systèmes par des mesures de
sécurité solides, des mises à jour opportunes et des plans d'intervention
clairs en cas de violation.» La Vérificatrice générale nous a dit que ça n'a
pas été fait dans d'autres projets, donc important de le faire, ici. Et on
nous... on nous dit que les pirates informatiques évoluent rapidement, d'où la
nécessité d'une vigilance constante.
«La confiance du public. Les gens peuvent
craindre une utilisation abusive ou une surveillance des données, mais des
politiques claires, une communication transparente et des avantages visibles
tels qu'un service plus rapide et une sécurité renforcée contribuent à
instaurer la confiance. Pourtant, les points de vue culturels sur la protection
de la vie privée varient d'un pays à l'autre.»
• (16 heures) •
Alors, on le redit, ici. Je suis
consciente qu'on se répète, mais eux aussi disent que des politiques claires
puis une communication transparente permet d'aller chercher l'adhésion des
utilisateurs, donc des citoyens et aussi des gens dans l'appareil qui vont
répondre, qui vont donner le service public. Ça fait partie de la fameuse feuille
de route, cette communication-là. Puis, un des éléments de cette communication,
c'est d'avoir un état de la situation complet de l'hébergement des données
numériques au Québec.
Le quatrième point, la culture numérique,
alors : «Pour utiliser les identifiants numériques en toute confiance, les
gens ont besoin de compétences techniques de base. Et des formations, des
guides utiles, des interfaces faciles à utiliser peuvent permettre à un plus
grand nombre de personnes d'en bénéficier. Pourtant, l'accès universel reste un
défi de taille.» Et, ça, je le disais ce matin, les questions de littératie, de
littératie numérique, de fracture numérique et de pauvreté font en sorte que
tous ne pourront pas utiliser l'identité nationale numérique et les services auxquels
ça va donner accès. Donc, il ne faut pas mettre de côté les services qui sont
offerts de manière traditionnelle.
Et, le dernier point qui était soulevé,
les lois sur la protection des données. «Le respect des règles mondiales en
matière de confidentialité des données protège les droits des personnes et rend
les identifiants numériques plus fiables. Des lois solides rassurent les
utilisateurs en leur montrant que leurs données sont traitées avec soin. Mais
l'application de ces lois dépend du système juridique de chaque pays.
«De ces enjeux présentés actuellement,
selon M. Waterhouse, le Québec a la note de 2,5 sur cinq. La confiance du
public est sérieusement à travailler, tout comme augmenter les connaissances
numériques par l'intégration de programmes scolaires dignes de ce nom, et non
en ajouter une couche sur le lot de travail des enseignants actuels aux prises
avec ce quotidien endiablé.» Puis le 0,5... Il donne 0,5 à la Commission de
l'accès à l'information, «qui doit faire connaître et respecter la loi 25,
entre autres pour la protection des données personnelles.»
Alors, M. le Président, après avoir dit
tout cela, j'espère sincèrement que nous aurons droit à un état de la situation
complet de l'hébergement des données numériques des ministères et organismes
pour savoir où on en est, et ensuite, pour savoir où le... quelles sont les
intentions du gouvernement pour l'hébergement dans l'infonuagique, est-ce que
ce sera au Québec, au Canada ou est-ce que ce sera à l'étranger. L'idée, c'est
de donner confiance. Ça fait partie de la communication, ça fait partie d'un
plan clair et ça fait partie de ce dont on a besoin pour aller chercher
l'adhésion des citoyens. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, chère collègue. Toujours sur cette motion préliminaire, M. le député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Oui, M. le
Président. En fait, c'est que j'aurais une motion préliminaire à déposer
moi-même, mais je ne souhaite pas nécessairement intervenir sur celle-là. Mais
j'en aurais une à déposer quand vous serez prêt.
Le Président (M. Simard) : Alors,
pour l'instant, nous allons compléter les tours de parole sur cette motion qui
fut déposée par notre collègue de Mont-Royal—Outremont.
M. Zanetti : Parfait.
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il d'autres interventions à ce sujet? M. le ministre, vous savez que
vous disposez de 30 minutes afin d'intervenir?
M. Caire : ...
Le Président (M. Simard) : Bon.
Alors, sans quoi, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que cette
motion est adoptée?
Des voix : ...
Le Président (M. Simard) : Alors,
M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?
Mme Setlakwe : Pour...
16 h (version non révisée)
Le Secrétaire
: Mme Caron
(La Pinière)?
Mme Caron : Pour.
Le Secrétaire
: M. Caire
(La Peltrie)?
M.
Caire
:
Contre.
Le Secrétaire
: M. Bélanger
(Orford)?
M. Bélanger : Contre.
La Secrétaire
: Mme Abou-Khalil
(Fabre)?
Mme Abou-Khalil : Contre.
Le Secrétaire
: M. Thouin
(Rousseau)?
M. Thouin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Zanetti
(Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire
: Et M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) :
Abstention. Cette motion est donc rejetée.
Alors, à ce jour, nous avons reçu deux
autres motions préliminaires, soit une émanant de notre collègue de Mont-Royal—Outremontet une autre émanant
du député de Jean-Lesage. Celle émanant du député de Jean-Lesage fut reçue
après la vôtre, chère collègue, mais comme le veut notre tradition, on tente de
faire une alternance. Donc, je vais laisser la parole au député de Jean-Lesage
afin qu'il puisse déposer sa motion préliminaire.
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Alors, je voudrais déposer une motion préliminaire. Vous l'avez reçue.
Le Président (M. Simard) :
Elle est au Greffier.
M. Zanetti : Ah! Elle est
au Greffier. Donc, formidable. Je vais vous en faire la lecture à l'instant.
Alors :
«Que conformément à l'article 244 du
règlement de l'Assemblée nationale, la Commission des finances publiques, avant
d'entendre l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité
numérique nationale et modifiant d'autres dispositions, tienne des
consultations particulières et qu'à cette fin l'entendent les groupes suivants :
la Fédération des cégeps.»
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Vous disposez de 30 minutes, cher collègue.
M. Zanetti : Merci.
Alors, c'est un groupe qui avait demandé à être entendu en consultations
particulières, qui n'a pas eu la chance de venir le faire et qui a parlé d'aspects
qui n'ont pas été nommés par les autres concernant le projet de loi sur l'identité
numérique nationale. Et ce que je voudrais faire, M. le Président, pour, en
fait, convaincre que les membres de cette commission de la pertinence d'inviter
la Fédération des cégeps pour pouvoir exposer leurs points en bonne et due
forme, c'est de lire simplement un extrait de leur point de vue, c'est-à-dire
un communiqué de presse, essentiellement, qu'ils ont émis au sujet du projet de
loi n° 82. Alors, la Fédération des cégeps a déposé un mémoire auprès de
la Commission des finances publiques de l'Assemblée nationale du Québec,
exprimant ses préoccupations et recommandations à l'égard du projet de loi n° 82,
Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres
dispositions.
Troisième modification législative en
matière de ressources informationnelles en quatre ans, ce nouveau projet de loi
vise notamment à rehausser la maturité numérique de l'administration publique
et à soutenir les organismes publics dans la transformation numérique. Si la fédération
souscrit à ses objectifs, elle souhaite cependant attirer l'attention sur
plusieurs éléments préoccupants pour le réseau collégial public. En tant qu'acteurs
clés dans la mission de transformation numérique gouvernementale, les cégeps
redoublent d'efforts pour être exemplaires en la matière. Cependant, dans un
contexte marqué par des restrictions budgétaires importantes et un gel du
recrutement, ces exigences répétées risquent de compromettre sérieusement la
capacité des cégeps à maintenir la qualité et l'efficacité des services offerts
à la population étudiante, de même qu'à répondre aux besoins grandissants en
enseignement supérieur et en recherche. Nous rappelons le gouvernement à tenir...
Nous appelons le gouvernement à tenir compte des réalités et des besoins
spécifiques du réseau collégial public pour toute modification législative
touchant ces ressources informationnelles, a indiqué Marie Montpetit,
présidente-directrice générale de la Fédération des cégeps.
Plus particulièrement, la fédération
exprime de vives inquiétudes concernant les répercussions du p.l. no° 82
et de l'introduction de l'article 5.2 dans la Loi sur le ministère de la Cybersécurité
et du Numérique, qui confère au ministre de la sécurité... de la Cybersécurité
et du Numérique le pouvoir de coordonner les actions des organismes publics au
regard des infrastructures de télécommunication. Cette disposition pourrait
compromettre l'accès privilégié du réseau collégial public au Réseau d'informations
scientifiques du Québec, le RISQ, un outil essentiel pour la mission d'enseignement
supérieur et de recherche des cégeps. Le RISQ, réseau exclusif au secteur de l'éducation
et interconnecté avec l'infrastructure nationale de recherche CANARIE, garantit
une connectivité sécurisée, performante et adaptée aux besoins spécifiques des
établissements d'enseignement supérieur. Par ailleurs, la Fédération des cégeps
reconnaît les efforts du gouvernement pour uniformiser l'accès aux services
étatiques par l'identité numérique nationale, mais exprime des réserves quant à
l'intégration de ce service dans le réseau collégial public. Les nouvelles
obligations prévues au p.l. no° 82, notamment l'adhésion obligatoire au
service d'authentification gouvernementale d'ici 2028, pourraient en effet
engendrer des coûts financiers et humains importants pour assurer l'interopérabilité
des infrastructures numériques des cégeps.
Dans son mémoire, la Fédération souligne
également les risques liés à la centralisation des données personnelles
sensibles et demande que le réseau collégial...
M. Zanetti : ...exempté de ses
obligations pour préserver l'autonomie et la sécurité de ces services
numériques. Dans les faits saillants, on dit que les cinq recommandations de la
Fédération des cégeps concernant le projet de loi sur l'identité numérique sont
les suivants, donc il faut éviter la dilution de la qualité de l'offre des
services spécialisés, préserver un actif public répondant aux particularités de
l'enseignement supérieur, demeurer prudent quant à l'assujettissement obligatoire
des organismes publics à des services uniformisés, exclure le réseau collégial
public, consulter systématiquement le réseau collégial public. La Fédération
des cégeps reste engagée à collaborer avec le gouvernement pour assurer que les
mesures du p.l. 82 soient mises en œuvre de manière à soutenir le développement
de l'enseignement supérieur et de la recherche au Québec sans compromettre la
qualité des services et l'autonomie du réseau collégial. Et évidemment vous
pouvez consulter le mémoire de la Fédération sur son site Web et aussi, je le
présume, sur Greffier. Donc, ça m'apparaît être quelque chose qui est
extrêmement important comme point. Il y a un réseau qui a été créé par la...
par les cégeps au Québec. Ils sont inquiets des conséquences de la nouvelle
loi. Ils n'ont pas eu l'occasion, vraiment, d'exposer, dans toute son
amplitude, leurs préoccupations et leurs solutions. Et c'est le genre d'effet,
je pense que... j'en suis certain, le ministre veut lui-même éviter d'avoir des
effets collatéral imprévus... des effets collatéraux imprévus, pardon, sur des
systèmes et infrastructures publiques qui fonctionnent bien déjà.
• (16 h 10) •
Alors, je pense que ce serait vraiment
une... disons, une contribution extrêmement importante à nos discussions et à
nos réflexions, M. le Président, c'est pourquoi j'invite les collègues de la
commission à voter en faveur de cette motion. Je pense que ça pourrait se faire
très bien, inviter la fédération, ils pourraient venir, j'en suis certain,
demain, puis on pourrait continuer les travaux de la commission sans délai.
Le Président (M. Simard) : Je
vous remercie, cher collègue. Alors, nous poursuivons. Y a-t-il d'autres
interventions sur cette motion? Mme la députée de Mont-Royal—Outremont.
Mme Setlakwe : Dites-moi, M.
le Président, j'ai droit à combien de temps?
Le Président (M. Simard) :
30 minutes.
Mme Setlakwe :
30 minutes? Merci. Mais, écoutez, j'appuie sans réserve, nous appuyons
sans réserve la motion qui est soumise par notre collègue le député de
Jean-Lesage, c'est ça, du deuxième groupe d'opposition qui est tout à fait
pertinente. Lui et moi nous sommes également porte-parole en Enseignement
supérieur. Et donc moi aussi, j'ai appris, là, de la Fédération des cégeps,
dans le cadre de mes échanges avec eux, qu'ils avaient des préoccupations en
lien avec le projet de loi n° 82. On va se rappeler, M. le Président, que
la Fédération des cégeps, généralement, là, c'est important de le dire et de le
redire, a plusieurs défis ces jours-ci. Vraiment, jamais le réseau des cégeps a
été autant mis à mal. On n'est pas ici pour parler de l'état des
infrastructures, mais il y a... Moi, pour avoir fait le tour de quelques
cégeps, avoir parlé à plusieurs directeurs, les plafonds qui ont été posés dans
les budgets d'investissement, les heures rémunérées...
(Interruption)
Mme Setlakwe : ...les heures
rémunérées qui sont plafonnées, limitées. Le gel d'embauche touche très
difficilement... touche directement et impacte très négativement le réseau de
nos 48 cégeps publics dont nous sommes très fiers et dont la mission
première, on se rappelle, est d'assurer l'accessibilité aux jeunes Québécoises
et Québécois à l'enseignement supérieur. Et, dans ce contexte difficile, moi,
j'ai été... je suis allé dans des cégeps en personne, j'ai eu des réunions en
virtuel, j'ai suivi toutes les réactions publiques, les entrevues qui ont été
données dans les derniers mois par Mme Montpetit, et je peux vous dire que
ce qu'on entend, c'est que les temps sont durs. Les temps sont difficiles. Ce
sont des équipes qui demeurent très optimistes et qui font des miracles avec
les moyens qu'ils ont. On n'est pas en train de dire que c'est la catastrophe,
mais vraiment, on ne s'en va pas dans la bonne direction. Il faut vraiment
qu'on prenne soin, qu'on prenne meilleur soin de notre réseau des cégeps. Mais
quand on parle, donc, de plafond d'investissement, et d'heures rémunérées qui
sont limitées, et de gel d'embauche, mais ça veut dire, concrètement, que les
équipes sont étirées, que les ressources sont limitées, qu'on ne déborde pas,
là, de... personne ne se tourne les pouces, et loin de là, il y a des personnes
qui portent plusieurs chapeaux et ils travaillent très, très fort...
Mme Setlakwe : ...à maintenir
les services à la population étudiante. C'est ça, le plus important. Et, dans
un contexte difficile où, en plus, on est venu dire que... dans le cadre du...
de l'adoption du projet de loi n° 74, qu'on va imposer des quotas dans les
inscriptions d'étudiants internationaux, bien, ça, ça suscite également des
inquiétudes, parce qu'on se dit : Mais comment on va faire pour, donc,
offrir tous ces... toute cette gamme de programmes partout en région, pas
seulement dans les grands centres?
Donc, je vous expose les défis, les enjeux
auxquels font face le réseau des cégeps actuellement pour en arriver, donc, au
projet de loi n° 82. Dans... La semaine dernière, pas plus tard que la
semaine dernière, j'étais en réunion justement à la Fédération des cégeps. J'ai
rencontré Mme Montpetit et des membres de son équipe, et elle m'a fait part,
donc, de ses demandes dans le cadre des consultations prébudgétaires. On a
parlé de toute cette panoplie de défis, et elle m'a dit aussi qu'ils avaient,
donc, des commentaires, qu'ils avaient soumis un mémoire dans le cadre des
consultations, là, du projet de loi n° 82. On n'a pas eu la chance de les
entendre, mais je pense qu'il serait tout à fait pertinent de le faire. Ils
ont... Ils ont mis de l'avant des préoccupations. Mon collègue de Jean-Lesage
en a fait mention. Je pense que ça vaut la peine d'essayer de venir ajouter
quelques détails et de réitérer, de renforcer le point qui a été fait, que je
pense que, comme parlementaires, on n'est pas si pressés que ça ici, là. On
a... D'ailleurs, nous, on a... on a mis de l'avant d'autres enjeux qui valent
la peine d'être débattus et qui ne sont pas prévus à la lettre dans la pièce
législative. Mais ici, qu'on prenne le temps d'entendre un groupe qui déjà fait
face à différents obstacles, là, je pense que ce n'est pas... ce n'est pas du
tout superflu. Je pense qu'on pourrait prendre... prendre le temps de les
entendre.
Dans la lettre qui a été adressée au
ministre de la Cybersécurité et du Numérique, datée du 30 janvier dernier, qui
accompagnait le mémoire... Écoutez, je vais... au cas où le ministre
n'accepterait pas de les appeler en commission parlementaire, je vais... je
vais prendre la peine, donc, de lire ce que Mme Montpetit, la présidente de la
Fédération des cégeps, a mis de l'avant dans sa lettre qui accompagnait son
mémoire.
Donc, elle dit que, «dans le cadre des
consultations sur le projet de loi n° 82, la Fédération des cégeps
souhaite faire part des préoccupations du réseau collégial public quant aux
répercussions de certaines dispositions du projet de loi sur la mission des
cégeps en enseignement supérieur et en recherche».
Je me permets, avant de lire les trois...
les trois paragraphes qui résument les trois préoccupations principales... que
la mission des cégeps, j'en ai parlé, là, c'est de rendre accessible
l'enseignement supérieur aux jeunes Québécois et Québécoises sur tout le
territoire du Québec, et leur mission est une mission louable et fondamentale.
Et, ces temps-ci, on se rappelle qu'ils ont toutes sortes de défis pour... qui
leur rend la vie et leur mission plus difficiles à accomplir. Leur mission, là,
c'est l'accessibilité, c'est la réussite éducative de nos jeunes. Et ils ont
donc, comme je l'ai mentionné, des ressources en ce moment qui sont plutôt
limitées. Il n'y a pas de... Il n'y a pas de surplus. Ils ont beaucoup à faire,
à gérer avec des équipes qui sont très, très, très occupées, sur lesquelles il
y a beaucoup de pression déjà. Quand on parle de plafond d'investissement, là
on peut penser que ça concerne juste les infrastructures, que ça concerne juste
le béton, ce n'est pas vrai. Ça concerne aussi des achats d'équipements qui
sont nécessaires et essentiels au déploiement complet, entier et intègre des
différents programmes. Et donc ça touche à la mission, ça touche à la réussite
éducative de nos jeunes. Et, dans ce contexte-là, je pense qu'il faut vraiment
être à l'écoute, ces jours-ci, de la Fédération des cégeps. Quand ils viennent
nous dire qu'il y a des dispositions d'un projet de loi qui peut avoir des répercussions
sur la mission des cégeps en enseignement supérieur et en recherche,
écoutons-les.
Donc, tout d'abord, le premier enjeu, «les
cégeps s'inquiètent des effets potentiels de l'article 5.2 du projet de
loi. Cet article confère au ministère de la Cybersécurité et du Numérique un
rôle centralisé dans la gestion des infrastructures de télécommunications des
organismes publics». Donc, c'est un pouvoir, un rôle, donc, qui va être
centralisé auprès du ministère, du MCN. Ce qu'on nous dit à la Fédération des
cégeps, c'est que «l'application de cette disposition pourrait compromettre
l'accès privilégié du réseau collégial public au RISQ, le Réseau d'information
scientifique du Québec». D'ailleurs, le RISQ...
Mme Setlakwe : ...a fait, nous
a contactés aussi. Je pense qu'ils ont peut-être soumis un mémoire. Je me
trompe peut-être. Mais, en tout cas, ils ont mis de l'avant des
préoccupations : «Rappelons que le RISQ, ce réseau, donc, était un acteur
essentiel pour soutenir les établissements d'enseignement supérieur en matière
de connectivité sécurisée et performante.» La Fédération des cégeps nous dit
qu'«il est primordial que les particularités de ce réseau spécialisé soient
préservées afin d'assurer la qualité et la sécurité des échanges d'information
nécessaires aux activités pédagogiques et de recherche des cégeps et des
universités.»
Donc, le RISQ... permettez-moi un petit
instant, là, de bifurquer vers des notes que j'avais prises, bon, que je ne
semble pas trouver. Mais c'est... ce n'est pas grave. Le RISQ nous a... nous a
contactés. Et puis, de mémoire, ce qu'il nous disait c'est : On est un
partenaire et on veut continuer d'être un partenaire, on veut... oubliez-nous
pas, là, dans tout ce processus-là, on a un rôle à jouer, on est... on est au
service, donc, du réseau collégial, et autres, et puis on est un acteur
essentiel, il faut qu'on puisse nous traiter en partenaires, etc. Donc, la
préoccupation qui est mise de l'avant par la Fédération des cégeps va dans le
même sens.
• (16 h 20) •
Deuxième enjeu : «Donc, par ailleurs,
si la Fédération des cégeps reconnaît l'importance d'uniformiser l'accès aux
services étatiques par l'identité numérique nationale, elle exprime des
réserves quant à l'adhésion obligatoire du réseau collégial public au SAG, le
fameux Service d'authentification gouvernementale d'ici 2028.» La Fédération
nous dit : «Non seulement l'implantation de cette mesure entraînerait des
coûts financiers et humains importants pour nos établissements, mais cela
soulève également de réels enjeux liés à l'interopérabilité des infrastructures
numériques existantes. De plus, la centralisation des données personnelles
sensibles pose des risques qu'il convient d'évaluer avec rigueur. C'est
pourquoi la Fédération des cégeps recommande que le réseau des cégeps soit
exempté de cette obligation afin de préserver l'autonomie et la sécurité de ses
services numériques.»
J'aimerais bien entendre le ministre
réagir à ces... bien, aux trois enjeux, là, mais à tous les enjeux qui sont mis
de l'avant par la Fédération des cégeps. Mais qu'est-ce que... qu'est-ce qu'il
leur répond? Qu'est-ce qu'il répond à la Fédération des cégeps quand la
fédération demande d'être exemptée de cette obligation, donc, d'adhésion
obligatoire au SAG d'ici 2028 afin de préserver l'autonomie et la sécurité de
ses services numériques? C'est un... C'est une question qui vaut... qui doit
être répondue, donc, par le ministre.
Enfin, troisième enjeu : «La
Fédération insiste sur l'importance de consulter systématiquement le réseau
collégial public avant l'adoption de règlements touchant ses ressources
informationnelles. L'introduction de nouvelles obligations en matière de
gouvernance numérique ne doit pas se faire sans tenir compte des réalités et
des contraintres... contraintes propres au cégep, particulièrement dans un
contexte de restrictions budgétaires et de gel du recrutement.»
Comme je mentionnais tout à l'heure, leurs
demandes, leur mémoire s'inscrit dans un contexte plus global de restrictions
budgétaires et de gel du recrutement. Donc, on ne peut pas faire abstraction de
ces défis, on ne peut pas faire abstraction de ces gestes qui ont été posés par
le gouvernement de la CAQ tout récemment, là. Et il y en a... il y en a
plusieurs. Si on fait... J'ai fait le décompte plus tôt, là, de tout ce qui a
été fait dans la dernière année, ça crée un contexte difficile pour les
établissements d'enseignement collégial. Et donc je pense qu'on doit prendre au
sérieux leurs préoccupations.
Je continue de les citer : «Une
approche concertée permettrait d'assurer une transition efficace et réaliste
sans compromettre la qualité des services offerts à la population étudiante.
C'est l'objectif numéro un. Et donc la Fédération des cégeps, qui aurait
souhaité venir en commission, évidemment, reste à la disposition du ministre
pour poursuivre le dialogue et contribuer à l'élaboration d'un cadre législatif
qui soutienne à la fois la transformation numérique du Québec et le
développement de l'enseignement supérieur.» Et puis, ils soumettent à notre
attention, donc, le mémoire.
Des voix : ...
Mme Setlakwe : Ah oui. Merci.
Et puis ce mémoire, donc, il est assez... il est assez étoffé, M. le Président.
C'est un mémoire de...
Mme Setlakwe : ...d'une
douzaine de pages. On pourrait peut-être s'en tenir au sommaire, là. Et la
conclusion et le sommaire, mais je présume que la partie gouvernementale a pris
connaissance, donc, des impacts du projet de loi n° 82 sur les réseaux de
télécommunication des cégeps. Je pense qu'idéalement on devrait leur faire une
place puis les entendre, mais permettez-moi donc de relire la conclusion de
leur mémoire. La fédération réitère l'importance de considérer les réalités et
les besoins spécifiques du réseau collégial public pour toute modification
législative touchant les ressources informationnelles. Les cégeps demeurent des
acteurs clés dans la mission de la transformation numérique gouvernementale et
redoublent d'efforts pour assurer un comportement exemplaire en la matière.
La fédération tient à rappeler qu'il s'agit maintenant de la troisième
modification des lois en matière de ressources informationnelles en quatre ans,
ce qui témoigne d'une volonté constante d'encadrement, mais qui met également à
l'épreuve la capacité des établissements à s'y conformer. Le réseau collégial
public fait déjà preuve d'une agilité, d'une efficience et d'une capacité
d'adaptation exceptionnelle pour assurer une conformité adéquate. La Fédération
des cégeps appelle donc à une reconnaissance accrue des particularités
opérationnelles auxquelles font face les établissements, ainsi qu'à l'adoption
d'une approche concertée et réaliste tenant compte des ressources limitées du
milieu collégial public, ressources limitées qu'on a mentionnées plus tôt dans
l'intervention.
Donc, un récapitulatif de la
recommandation.
Recommandation 1. Éviter la dilution
de la qualité de l'offre de services. La Fédération des cégeps dénonce la
centralisation sous-jacente à l'élargissement de l'offre des services du
ministre de la Cybersécurité et du Numérique. Elle craint que celle-ci mène à
une diminution de la qualité des services spécialisés offerts par ce dernier
aux organismes publics, plus particulièrement à ceux du réseau collégial
public.
Recommandation numéro 2. Préserver un
actif public répondant aux particularités de l'enseignement supérieur. La
Fédération des cégeps croit qu'il est impératif de préserver un actif public
répondant aux particularités de l'enseignement supérieur tel que le RISQ, le
réseau dont on a parlé précédemment, et de maintenir une stratégie identique
aux standards nationaux et internationaux en matière d'échange d'informations
dans le milieu de l'enseignement supérieur et de la recherche. La perte d'un
tel actif aurait des conséquences graves sur la sécurité de l'échange de
l'information et sur la confiance des utilisateurs dans le réseau et nuirait
grandement aux services offerts à la population étudiante des cégeps.
Moi, quand j'entends que la Fédération des
cégeps est inquiète de perdre un actif, qu'il pourrait y avoir des conséquences
graves sur la sécurité de l'échange de l'information et la confiance des
utilisateurs dans le réseau et nuirait grandement aux services offerts à la
population étudiante, on devrait... ça devrait allumer des lumières tout autour
de la table, ici, là. On parle amplement, abondamment dans les médias, ces
jours-ci, des difficultés et des défis auxquels font face les cégeps. Mais
quand on parle de difficultés, vous savez, les cégeps, bien, il faut penser aux
étudiants. C'est les étudiants avant tout, là, qui doivent... dont on doit se
soucier. Les étudiants, ils étaient... Les fédérations d'ailleurs qui
représentent les associations étudiantes étaient dans nos tribunes hier. Ils
sont très, très mobilisés ces jours-ci, depuis plusieurs mois, sur une panoplie
d'enjeux. On parle de notre jeunesse ici, là. On parle de jeunes qui évoluent
dans des locaux, qui évoluent dans des contextes difficiles. Nos cégeps sont en
mauvais état. Il y en a deux tiers qui sont en mauvais état. Ça, c'est la
Vérificatrice générale qui le dit. Il y a un manque d'espace. Il manque sept
cégeps au Québec. C'est ça, là. C'est les données démographiques qui sont à la
hausse, et il faut qu'on prévoie l'avenir. Les sommes qui sont prévues d'être
investies ne sont pas suffisantes. Ça, c'est la Vérificatrice générale qui le
dit. On parle de programmes qui ne peuvent pas être déployés. On parle
d'équipements insuffisants, des équipements qui ne peuvent pas être déployés,
on parle d'équipements insuffisants, des équipements qui ne peuvent pas être
renouvelés, modernisés quand il y a des bris ou qui doivent renouvelés pour
qu'on s'assure de former nos jeunes sur l'équipement qui est utilisé dans le
vrai monde, là, sur le marché du travail. C'est de ça dont on parle quand on
parle de services offerts à la population...
Mme Setlakwe : ...On parle
de... On parle de programmes éducatifs, on parle de réussite éducative. On
parle aussi, quand on dit qu'il y a... qu'il y a un gel d'embauche, un gel de
recrutement, bien, c'est du personnel, qui, indirectement, fait en sorte que
les services sont offerts aux étudiants. Si on n'a pas de réceptionnistes, on
n'a pas de gens qui coordonnent les horaires, si on n'a pas de gens qui peuvent
accueillir les étudiants, qui ont besoin des services psychologiques, etc., si
on ne peut pas renouveler. C'est ce qu'on m'a dit à Trois-Rivières quand je
suis allée visiter à la fin de l'année passée. Il y a des logements étudiants,
il y a... il y a seulement un concierge pour je ne sais plus combien d'unités.
Qu'est-ce qu'on fait? On ne peut pas... Il y en a un qui est en congé de
maladie ou autre, on ne peut pas le remplacer. Il faut passer par le Conseil du
trésor, imaginez-vous donc, M. le Président, pour avoir une autorisation pour
engager un deuxième concierge. Mais c'est ça, les services offerts à la
population. Donc déjà ces services ne sont pas optimaux. Et là, on a un projet
de loi qui est... qui est bien beau, bien intéressant, là, mais est-ce que,
dans la... dans la réalité actuelle... est-ce que, dans le contexte actuel,
est-ce que c'est réaliste? Est-ce qu'on en demande trop encore aux
établissements? Il faut se poser la question. Il faut les entendre.
• (16 h 30) •
Recommandation trois : «Demeurer
prudent quant à l'assujettissement obligatoire des organismes publics à des
services uniformisés. La Fédération des cégeps appelle à la prudence concernant
l'assujettissement obligatoire des organismes publics à des services
uniformisés qui ne prennent pas en compte leurs particularités et qui
pourraient compromettre, entre autres, l'activité des cégeps.»
Recommandation quatre. Encore une fois, on
l'a mentionné plus tôt, exclure le réseau collégial public : «La
Fédération des cégeps demande que le réseau collégial public ne soit pas rattaché
au service de l'identité numérique nationale ni aux SAG, le Service
d'authentification gouvernementale, quant à l'entièreté de leur infrastructure
de services numériques.»
Cinquième et dernière recommandation,
consulter systématiquement le réseau collégial public : «La Fédération des
cégeps demande une consultation systématique auprès du réseau collégial public
concernant l'élaboration des directives qu'entend déterminer le ministre afin
d'assurer une mise en place réaliste des règles de gouvernance, et ce, avant...
avant leur adoption et après leur mise en œuvre.»
Écoutez, ça, c'est juste un sommaire, M.
le Président, là. Le mémoire, comme je vous mentionnais, est un mémoire d'une
douzaine de pages qui a été soumis, donc, par la Fédération des cégeps et
qui... qu'on doit prendre au sérieux, là. Il faut... Tout ce qu'on demande ici,
par la voie... par le biais de cette motion préliminaire, c'est... c'est de...
c'est de les entendre. C'est qu'avant d'entreprendre l'étude détaillée, qu'on
tienne des consultations particulières ou qu'on... qu'on... qu'on prolonge les
consultations particulières et qu'à cette fin qu'on entende la Fédération des
cégeps. Ce qui est... Ce qui est tout à fait souhaitable.
Et, encore une fois, M. le Président, on
appuie tout à fait, donc, cette motion de notre collègue de Jean-Lesage. Je
vous remercie.
Le Président (M. Simard) : C'est
moi qui vous remercie, chère collègue. Mme la députée de La Pinière,
souhaitez-vous intervenir? Vous disposez de 10 minutes pour faire votre
intervention.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors, M. le Président, je pense qu'on a un bel exemple, par la
motion qui est présentée par le collègue de Jean-Lesage à la demande de la
Fédération des cégeps. On a un cas patent d'absence de communication et
d'information. J'ai parlé ce matin, j'ai parlé en début d'après-midi de la
fameuse feuille de route dont le ministère aurait dû se doter avant même de
déposer ce projet de loi. Pour tout ce qui est de la partie communication,
information, comme je le disais, ce n'est pas un exercice de communication, de
vente ou de marketing, ça se doit d'être un exercice pour susciter l'adhésion
basée sur des faits, sur un état de situation, sur l'objectif qu'on veut
atteindre, sur notre vision, sur ce qu'on va faire et sur ce qu'on ne va pas
faire. Et, dans cet exercice-là, la Fédération des cégeps aurait dû être
incluse. La Fédération des cégeps aurait pu présenter les préoccupations
qu'elle a. Le ministère aurait pu en tenir compte et déjà présenté un projet de
loi, déposé un projet de loi qui aurait tenu compte de ces préoccupations. Je
pense que c'est quand même...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Caron : ...assez majeure
comme préoccupation ici. Et je ne sais pas s'il y a d'autres organismes, d'autres
ministères qui ont des préoccupations semblables, ça aurait été intéressant de
le savoir, parce que si on a un beau système, si les pouvoirs du ministre sont
accrus comme veut le faire le projet de loi... Et quand je dis ça, M. le
Président, là, je parle... je ne parle pas de la personne qui occupe la
fonction, là, quand on parle du ministre dans le projet de loi, c'est la
personne qui est en place à n'importe quel moment où on fait... on se réfère au
projet de loi, alors ça peut être la personne qui occupe la chaise maintenant,
mais ça peut en être une autre plus tard, là. Donc, le ministre aurait pu tenir
compte de ces grandes préoccupations-là pour s'assurer qu'en voulant faire une
bonne chose avec une identité numérique nationale qu'on ne vienne pas détruire
autre chose qui fonctionne bien entre temps, parce que c'est peu ça, là, la
situation qui est mise devant nous aujourd'hui, M. le Président. J'ai pris
connaissance du mémoire de la Fédération des cégeps et de leur demande par le
député de Jean-Lesage dans les minutes qui viennent de passer, et ce que je
comprends, c'est que le Réseau d'information scientifique du Québec, auquel est
relié le réseau collégial public, donc, le réseau des cégeps, c'est un outil
indispensable dans la poursuite de la mission des cégeps en matière d'enseignement
supérieur et de recherche. Et ça fonctionne. Ils ont... de ce que je comprends,
ils ont des ressources humaines, ils ont des experts qui y travaillent, ils ont
une gouvernance. Et d'ailleurs, on le voit, là, en page 8, où la
fédération dit : «Faut-il rappeler que les cégeps possèdent déjà des
équipes d'expertes et experts en ressources informationnelles qui oeuvrent à
trouver des solutions et travaillent sans cesse pour assurer une conformité aux
règles constamment changeantes. Par ces modifications — les
modifications par le projet de loi n° 82 — il ne faudrait pas
que ces équipes soient reléguées uniquement à un rôle de soutien technique
plutôt que d'accomplir leur rôle en matière d'innovation et de réponse aux
besoins diversifiés et particuliers». Alors, pourquoi défaire quelque chose qui
fonctionne déjà? C'est ça, la question. Et vous me permettrez, M. le Président,
de faire un parallèle. Dans ce cas-ci, le parallèle, ce n'est pas avec quelque
chose qui fonctionne déjà parce que ça fonctionne très mal, en ce moment, mais
c'est comme la création de Santé Québec, où là tout est centralisé et où les CISSS
et les CIUSSS ne savent plus quoi faire. On a des cas de comté, on téléphone à
nos agents, on essaie d'avoir des informations, les P.D.G. ne savent même pas
eux-mêmes qui va prendre quelle décision, quoi... Alors là, il ne faudrait pas
qu'on reproduise un modèle de centralisation à outrance avec ce projet de loi
là qui vient défaire, dans ce cas-ci, quelque chose qui semble bien fonctionner
pour tout mettre dans les mains d'un même ministère ou d'un même ministre. On
veut, je l'ai dit précédemment, je le répète, on veut que l'identité numérique
nationale, ça fonctionne. Les experts nous ont dit que, pour que ça fonctionne,
ça prend une feuille de route qui explique, qui communique avec les
utilisateurs pour s'assurer qu'on va éviter les pépins, on va éliminer les
pépins, on va répondre aux préoccupations pour qu'il y ait une adhésion, pour
qu'en fin du compte ça fonctionne. Mais on n'a pas fait ça avec la Fédération
des cégeps. Et je me demande combien d'autres.
Alors, la motion qui est déposée par le
député de Jean-Lesage pour qu'on puisse entendre la Fédération des cégeps ici,
là... Puis je rappelle que d'entendre la Fédération des cégeps ne serait pas
très long, là, la Fédération des cégeps aura 10 minutes pour nous
présenter son mémoire, les points saillants de son mémoire, puis, ensuite, le
temps habituellement convenu, 20 minutes, pour que le ministre puisse les
interroger et peut-être aussi les rassurer tout de suite, là, ou, au moins,
voir avec ses équipes ce qu'il y aurait à faire pour les rassurer sur les
préoccupations tout à fait légitimes...
Mme Caron : ...qui sont
apportées dans leur mémoire, et ça pourrait servir de modèle s'il y en a
d'autres, organismes ou ministères, qui ont des difficultés, des préoccupations
importantes, qui ne sont peut-être pas dans... sur l'écran radar, je dirais, du
ministère, puis ça, c'est possible, là. Un oubli est si vite arrivé, comme on
dit. Mais je pense qu'ici la commission, pour bien faire son travail, faire le
travail le plus complet possible, devrait effectivement entendre la Fédération
des cégeps... et que le ministre réponde à leurs préoccupations et, s'il faut
qu'il y ait des amendements qui soient apportés au projet de loi, bien, qu'on
les fasse correctement pour bonifier le projet de loi et surtout pour bonifier
le projet d'identité numérique nationale, pour que ça fonctionne bien, et que,
s'il y a des exceptions à faire, comme semble le demander la Fédération des
cégeps, dans l'état actuel du projet de loi qui est devant nous, bien, qu'elles
soient faites, parce qu'au bout du compte on ne veut pas que ce projet-là, qui
nous semble porteur, qui nous semble structurant, qui a besoin d'être bonifié,
qui a besoin d'être mieux expliqué, qui a besoin d'être bien planifié... bien,
on ne veut pas que ça vienne détruire autre chose, là. Alors, on ne peut pas...
on ne peut pas... Je sais qu'il y a une expression qui dit : On ne peut
pas faire d'omelette en cassant des oeufs, mais on ne veut pas rien casser ici,
là. On veut que ça réussisse, ce projet-là. Et la demande des cégeps est tout à
fait légitime, et on devrait... on devrait absolument... absolument les
entendre. Alors...
• (16 h 40) •
Il y a aussi... Il y a même... Il y a même
des impératifs financiers, là, qui sont... qui sont évoqués par les cégeps. Ma
collègue, qui est porte-parole de l'opposition officielle pour l'enseignement
supérieur, s'y connaît beaucoup mieux que moi dans l'état des finances des
cégeps, dans les demandes, les besoins des cégeps. On l'a entendu encore en
période de questions aujourd'hui, les besoins sont criants. Il y a des cégeps
qui...
Excusez-moi, M. le Président, mais c'est
parce que je suis distraite par les collègues de la banquette gouvernementale
qui jasent pendant que je prends la parole. Merci.
Le Président (M. Simard) : ...chère
collègue.
Mme Caron : Merci. Alors...
Le Président (M. Simard) : Vous
pouvez poursuivre.
Mme Caron : Donc... Alors, je
disais... je disais donc qu'en période de questions ce matin on a vu à quel
point il y a des besoins criants dans des cégeps. À un moment donné... À moins
que le ministère du... de la Cybersécurité et du Numérique ait les moyens de
donner plus d'argent aux cégeps pour faire tout ce qu'ils ont... tout ce qu'ils
ont à faire et... dans le cadre du projet de loi actuel, s'il n'y a pas de
changement. Bien, sinon, ça veut dire qu'il y a d'autres besoins auxquels les
cégeps ne répondront pas. Puis il y a quand même 200 000 étudiants,
là, qui ont besoin des cégeps. On ne veut pas... On ne veut pas être dans une
situation où on ne peut plus enseigner au cégep, où on ralentit les parcours
académiques parce qu'on met des... on met des freins financiers et
technologiques à nos institutions.
Alors, M. le Président, je pense que la
motion qui est devant nous devrait être adoptée.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, merci à vous, chère collègue. Sur ce, y aurait-il d'autres
interventions? M. le ministre, vous savez que vous disposez d'une période de
30 minutes.
M. Caire : ...
Le Président (M. Simard) : Alors,
cette motion est-elle adoptée?
Mme Setlakwe : ...
Le Président (M. Simard) : Un
vote par appel nominal. M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Zanetti (Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire
: M. Caire
(La Peltrie)?
M.
Caire
:
Contre.
Le Secrétaire
: M. Bélanger
(Orford)?
M. Bélanger : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Abou-Khalil
(Fabre)?
Mme Abou-Khalil : Contre.
Le Secrétaire
: M. Thouin
(Rousseau)?
M. Thouin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Setlakwe
(Mont-Royal—Outremont)?
Mme Setlakwe : Pour.
Le Secrétaire
: Mme Caron
(La Pinière)?
Mme Caron : Pour.
Le Secrétaire
: Et M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) : Abstention.
Cette motion est donc rejetée. Et nous poursuivons avec la motion préliminaire
qui a été déposée par ma collègue de Mont-Royal-Outremont. Alors, chère
collègue, auriez-vous l'amabilité, tout d'abord, de nous faire lecture de cette
motion, qui se trouve déjà sur...
Mme Setlakwe : Oui. Donc, M.
le Président : «Conformément à l'article 244 du Règlement de
l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des finances
publiques entende, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi
concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions,
M. Martin Bouchard, P.D.G. de QScale.»
Le Président (M. Simard) : ...à
votre écoute.
Mme Setlakwe : M. le
Président, parlons d'économie, parlons de...
Mme Setlakwe : ...nationalisme
économique. Parlons de participation de nos entreprises dans cette économie,
dont la part... pour laquelle la part des entreprises québécoises n'est pas si importante.
Donc, on parle d'infonuagique de façon plus particulière. Ça fait des semaines,
là, que cette question de dépendance envers des compagnies américaines fait
l'objet de discussions, à juste titre. On peut penser donc à cette annonce
d'Amazon de fermer des entrepôts, je ne me souviens plus combien, mais on a
laissé... C'étaient plusieurs entrepôts. Du jour au lendemain, on annonce que
ces entrepôts seront fermés, ce qui a laissé près de 3 500 personnes
et leurs familles, donc, dans l'incertitude.
Nous, on a réagi à la position officielle,
là, par la voix de notre collègue, le porte-parole en matière d'économie. Il a
demandé au gouvernement de la CAQ de réévaluer sa relation avec les géants
technologiques étrangers. Notre collègue, à ce moment-là, c'est le
26 janvier dernier, réclamait que la CAQ prenne rapidement des mesures
afin de réévaluer l'utilisation de la plateforme Amazon. De plus, notre
collègue estimait que la conduite d'Amazon devait allumer des lumières au sein
du gouvernement. Et c'est... c'est ce que... c'est ce qui a été fait. On a
compris que le gouvernement réagissait, souhaitait étudier les contrats. Et
donc on souhaitait que le gouvernement se saisisse de ce dossier, de cette
analyse, compte tenu des contrats lucratifs pour l'hébergement de données
consenties par le Québec à Amazon quant à la nécessité de s'assurer que les
entreprises d'ici puissent croître et avoir une place dans les contrats
gouvernementaux en matière d'infonuagique.
En fait, la question de la protection des
données personnelles qui sont hébergées chez les géants du web comme Amazon
inquiète également notre... bien, notre caucus, notre porte-parole ainsi que,
je dirais, l'ensemble des parlementaires. Il demandait, notre collègue, que le
gouvernement de la CAQ rassure les Québécois à ce sujet et fournisse des
garanties claires que ces données ne pourront être consultées par quiconque,
hormis le gouvernement du Québec, en aucune circonstance. Ce qu'on demandait au
gouvernement de la CAQ, M. le Président, c'était de revoir l'utilisation de la
plateforme Amazon de la part du gouvernement du Québec et favoriser l'achat au
Québec. Alors ça, on comprend que c'est... c'est quelque chose qui doit...
qu'on doit avoir des réflexes en continu suite à la fermeture des entrepôts.
Ensuite, réviser les liens d'affaires entre le gouvernement et Amazon dans
l'ensemble des dossiers actifs du gouvernement. Et aussi, et c'est là où il y a
un lien avec l'étude du projet de loi et notre motion préliminaire, planifier
une stratégie qui fait une place à la croissance pour les joueurs québécois de
l'infonuagique comme... et d'autres. Il y a un Micrologique aussi qu'on a
entendu en commission, mais... on ne les a pas entendus. Et finalement donc,
rassurer les Québécois sur les protections de nos données personnelles confiées
à Amazon et aux géants du web.
Bon, notre collègue avait notamment dit
dans l'espace public : Nous devons mettre à niveau notre relation afin de
permettre à notre économie de croître et permettre à tous les Québécois d'avoir
un emploi d'avenir et à notre économie d'être axée vers le futur. Il nous faut
aussi avoir une réelle vision pour nous assurer que les entreprises québécoises
aient leur juste place dans l'infonuagique. C'est une question de fierté et de
sécurité pour les Québécois. Je suis certaine que quand on parle de fierté,
quand on parle de nationalisme économique, ce sont des thèmes qui rejoignent et
qui interpellent les collègues de la banquette gouvernementale et le ministre
de la Cybersécurité et du Numérique. En tout cas, nous, ça nous interpelle
beaucoup. Quand on voit ce qui... comment se comporte le président Trump, les
menaces qui planent et qui sont malheureusement mise à exécution avec sursis,
on attend tous dans l'incertitude. Notre économie est mise à mal. Si ces
menaces sont mises à exécution, notre économie va souffrir sans aucun doute, et
il y aura des pertes d'emploi. On se doit, comme parlementaires, de se demander
qu'est ce qu'on peut faire pour moins dépendre des entreprises américaines. Et
c'est ce qui est sur les lèvres de tous, là, c'est le sujet de l'heure. On ne
peut pas se...
Mme Setlakwe : ...on ne peut
pas rompre nos liens commerciaux avec les Américains du jour au lendemain.
C'est évident. Ça prend des décennies, là, à bâtir des relations comme ça et à
imbriquer nos chaînes d'approvisionnement l'une dans l'autre. Et on a des
contrats qui sont... qui sont en cours, on a des contrats qui ont été signés,
mais comme parlementaires responsables, on se doit de se questionner sur nos façons
de faire plus que jamais. Même si le président Trump ne met pas à exécution ses
menaces, il est impératif qu'on... qu'on... qu'on fasse preuve, donc, de
solidarité puis qu'on mette en place les mesures et les conditions gagnantes
pour que nos entreprises puissent croître, pu être... puissent survivre,
puissent prospérer, etc., des entreprises, qui... et surtout dans des domaines
où le gouvernement octroie des contrats lucratifs.
Donc, on rejoint ici... c'est sûr que nos
motions préliminaires se rejoignent, se chevauchent. On a demandé un état de
situation. On a demandé de connaître, donc, l'analyse qui est en cours au
niveau des contrats lucratifs qui sont octroyés à des entreprises américaines
comme Amazon. Mais, ici, l'objet de notre motion, c'est dire : Bien,
entendons cette entreprise, QScale, qui est locale, qui est basée tout près
d'ici, à Lévis, qui a été... qui a fait l'objet d'une revue de presse récente,
qui souhaite prendre sa place, qui crée des emplois ici, chez nous. Je vais y
venir. Mais l'essence, donc, de notre demande, c'est de... c'est de les
entendre, de comprendre leur modèle d'affaires, de comprendre leur champ
d'activité et en quoi ils pourraient participer, donc, aux contrats qu'octroie
le gouvernement, comment est-ce qu'on peut réfléchir, comment est-ce qu'on peut
en arriver à une vision qui leur donne une place plus importante. Je pense que
c'est tout à fait pertinent et important de le faire.
• (16 h 50) •
Je pense qu'on est tous d'accord avec
l'importance et l'intérêt et la pertinence de favoriser la participation
d'entreprises québécoises dans ce secteur stratégique. Et donc on se rappelle,
là, dans le cadre du projet de loi n° 82, un des enjeux importants, c'est...
c'est l'importance cruciale de l'hébergement des données localement pour
protéger les informations sensibles des Québécoises et des Québécois. On le
sait, on l'a... on l'a dit, on le répète dans l'actualité ces jours-ci, on ne
cesse de mentionner la dépendance grandissante envers les entreprises
américaines, par exemple Amazon, WebServices, Google, Microsoft, et ses
implications et ses conséquences pour les contribuables, pour nous tous, en
termes de coût, en termes de souveraineté numérique, en termes de
cybersécurité. Alors, si on a des entreprises d'ici qui peuvent nous aider à
répondre à ces enjeux, à diminuer les risques, à diminuer les impacts négatifs,
bien, on pourrait les entendre comme on a entendu Micrologic.
Donc, encore une fois, je fais appel ici
au nationalisme économique que je suis certaine qui habite le ministre de la
Cybersécurité et du Numérique. Dans sa réflexion, qui est en cours, je suis
certaine qu'il pourrait bénéficier d'une discussion avec l'entreprise QScale,
et qu'on puisse échanger à savoir quelle est sa vision pour qu'il y ait une
participation accrue des entreprises québécoises comme celle-là dans le secteur
stratégique de l'infonuagique pour réduire notre dépendance et promouvoir le
nationalisme économique. Nous sommes très fiers de nos entreprises ici. Il faut
tout faire pour favoriser leur développement et leur prospérité et la création
d'emplois, des emplois intéressants pour les Québécois.
Bon. On se rappelle que les... qu'il y a
une centralisation des services numériques chez certains géants américains. Les
géants américains dominent le marché. Il y a une part importante, donc, de
marché qui est... dont bénéficie Amazon dans l'hébergement cloud. On se
rappelle des risques associés avec cette part... cette concentration importante
de données hébergées chez ce fournisseur, contrôle étranger sur des données
locales, on en a parlé dans le cadre d'une motion précédente, aussi toute la
portée extraterritoriale des des lois américaines comme le Patriot Act...
Mme Setlakwe : ...et le Cloud
Act qui font en sorte que le gouvernement américain a une main mainmise sur des
données sensibles des Québécois. L'absence de garanties sur la confidentialité
à long terme de nos données sensibles. Et donc une vulnérabilité face aux
sanctions, aux pressions externes. Les conséquences pour le Québec, évidemment,
une perte d'autonomie dans la gestion des infrastructures stratégiques. Je le
réitère, combien d'experts sont venus nous dire, qui sont venus nous parler,
ils sont venus mettre... ils sont venus marteler l'importance d'assurer une
souveraineté numérique. Donc, il ne faut pas s'en aller dans le sens d'une
perte d'autonomie, il faut s'assurer de miser sur des stratégies qui vont
favoriser une autonomie, une souveraineté numérique. Et évidemment, bien, un
drainage économique vers l'extérieur a tout l'effet contraire, donc, qui
souhaité. Et ce qu'on souhaite, c'est stimuler l'économie locale, M. le Président. Parlons-en
de QScale, parce que cette entreprise-là, il faut qu'on en parle. Elle a fait
l'objet d'une revue de presse récemment. Donc, c'est une entreprise québécoise
spécialisée dans l'hébergement de données et les infrastructures durables. Ils
sont, comme je l'ai mentionné, pas loin d'ici. Il semble y avoir des... Ils
semblent être alignés sur plusieurs de nos valeurs, là, en termes de
développement durable, de protection de l'environnement, d'innovation,
fiabilité. Écoutez, je suis en train de faire la promotion. Moi, je les connais
très peu, mais j'aimerais en apprendre davantage sur cette entreprise locale.
Une chose est certaine, QScale et d'autres entreprises québécoises pourraient
jouer un rôle clé dans la mise en place d'une infrastructure numérique,
sécuritaire, et durable, et locale. Et donc on répète que dans le... qu'il est
important de créer un écosystème technologique local autour de l'identité
numérique et que QScale pourrait venir échanger avec nous sur leur offre des
services et d'essayer de voir comment on pourrait assurer que des entreprises
québécoises comme celles-là puissent occuper une place plus importante dans cet
écosystème. Je l'ai mentionné, il pourrait y avoir que des... il peut y avoir
des retombées économiques importantes, donc la création d'emplois spécialisés,
ici, au Québec, il y a une stimulation de l'innovation dans le secteur
technologique, et évidemment réduire notre dépendance envers des géants
étrangers. QScale...
Mais avant de parler de QScale, revenons
brièvement sur les contrats qui sont donnés à des fournisseurs américains. On
le disait, là, La Presse a publié un dossier assez étoffé, là, sur les contrats
publics de Québec et d'Ottawa qu'on est... qu'ils ont intitulé Qui sont nos
fournisseurs américains, sous la plume de Jean-Hughes Roy, publié le
8 février. Il s'est demandé donc que... Donald Trump a beau suspendre sa
menace d'imposer des droits de douane, Québec et Ottawa pourraient avoir besoin
de riposter en cessant de donner des contrats aux Américains. Qui sont ces
fournisseurs? Ils se sont intéressés donc aux fournisseurs, aux fournisseurs
des organismes publics. Dans quelle mesure les organismes publics québécois et
canadiens en dépendent-ils? La Presse a donc, dans ce contexte, examiné le
quart de millions de contrats publics attribués au cours des deux dernières
années pour mesurer la place des États-Unis dans l'ensemble. Et les États-Unis
occupent une part assez importante selon le domaine. Mais quand on parle
d'organismes publics ayant octroyé des contrats, les contrats les plus
importants à des fournisseurs américains depuis le 1er janvier 2023, on
voit que, dans le domaine de la santé et des services sociaux, ce secteur
occupe 42 % des... de la valeur totale des contrats octroyés, la valeur
totale étant de 1,4 milliard. On pense donc que c'est... ici, on parle de
données de santé, là, le contrat a été fourni à Epic. C'est le ministère de la
Santé, là, qui est responsable de ce projet, mais évidemment que le ministère
de la Cybersécurité et du Numérique joue un rôle important dans son
déploiement. Alors, c'est une question qui doit se poser aussi au sein du
gouvernement, autant de la part... autant chez le ministre de la Santé que chez
le ministre de la Cybersécurité du Numérique : Qu'est-ce qui arrive avec
nos données de santé, là, dans le contexte du contrat qui a été octroyé à Epic.
Au niveau du Conseil du trésor, on voit que c'est 7 %, au niveau du CAG,
le Centre d'acquisition. Est-ce qu'il y a des données qui sont touchées? Est-ce
que... C'est toutes des questions importantes qui se posent. On voit qu'ici
Hydro-Québec aussi a des... octroie des contrats. Qu'est-ce que ça... qu'est-ce
que ça implique...
Mme Setlakwe : ...puis les
fournisseurs américains, bon, encore une fois Epic, Microsoft, Amazon,
WebServices, Microsoft, pour 112 millions sur le 104 milliards... sur
le 1,4 milliard, Epic, 546 millions, c'est 39 %, là, du total de
la valeur des contrats octroyés à des entreprises américaines. Donc,
honnêtement, M. le Président, il y a du... c'est une réflexion qui est très
importante. Et notre demande, donc, s'inscrit dans ce contexte plus général,
là, dont on dispose, qu'on martèle depuis... depuis ce matin et depuis...
depuis plusieurs jours, c'est de prendre... de prendre acte de la situation
actuelle dans le... dans le détail et puis d'avoir un... il y a une séquence
logique, là, d'avoir un état de situation et d'offrir la possibilité à des
entreprises québécoises de venir échanger avec nous et de pouvoir nous faire
valoir ce qu'ils peuvent faire, ce qu'ils peuvent offrir, et essayer de... Et
d'entendre le ministre, à savoir quelle est sa... quelle est sa vision. Moi,
j'aimerais savoir quelle est la vision du gouvernement en matière de
souveraineté numérique. Est-ce que le gouvernement envisage de prioriser les
entreprises québécoises pour des projets stratégiques comme l'identité
numérique? Quels moyens est-ce que... est-ce que le gouvernement va mettre à
la... va mettre en place pour favoriser les entreprises locales? Qu'est-ce que
le gouvernement prévoit comme mesures pour limiter notre dépendance aux géants
américains? Comment assurer que les projets numériques soutiennent à long terme
l'économie locale?
• (17 heures) •
Je pense que ça vaut la peine qu'on se
pose ces questions-là, là, avant... avant l'étude article par article. Ce sont
encore une fois tous des éléments autant, sinon plus importants que la pièce
législative elle-même. Si on n'a pas une bonne maîtrise, une bonne vue
d'ensemble et on n'a pas une stratégie pour répondre à tous les enjeux dont on
discute depuis ce matin, on a beau avoir une pièce législative bien rédigée,
bien ficelée, le déploiement ne sera pas optimal pour les Québécoises et les
Québécois.
Donc, QScale. Récemment, donc, on
apprenait... c'était... en fait, c'est à l'automne, l'automne dernier, en
septembre 2024, que QScale était prêt à investir 1,5 milliard au Québec
sans l'aide du gouvernement. Bon. Il y a toute la question des blocs d'énergie.
Ils ont besoin d'électricité, là, pour leur centre de traitement de données,
notamment parce que, bon, les données explosent partout dans le monde en raison
principalement des avancées de l'intelligence artificielle. On nous... On nous
apprend dans l'article que «l'entreprise québécoise est pour l'instant bien
positionnée avec son campus à Lévis, mais celle-ci arrivera au bout de son
projet plus tôt que tard.» C'est une question de... donc, de leur fournir les
blocs d'électricité qui sont... qui sont demandés. Ça, c'est un tout autre
sujet, mais qui est quand même fondamental pour eux. Ils ont plusieurs phases à
leur campus, il y en a sept... huit, au total, et il semble y avoir plusieurs
bâtiments. Ils doivent en ériger plusieurs, donc, sur huit ans. Donc, sur les
huit phases, il y en a seulement deux qui sont complétées. Et M. Bouchard, qui
est le... qui est le P.D.G., estime que l'ensemble des édifices seront loués
dans les... dans 6 à 18 mois et construits d'ici la fin 2026. On nous
apprend, donc, évidemment au-delà de leurs doléances par rapport à leurs
échanges avec Hydro-Québec, ils disent que la.... que là, les demandes
explosent, qu'ils ont gagné le prix du centre de données de l'année en Amérique
du Nord, ils sont rendus à un autre niveau. Le P.D.G. de QScale, donc, M.
Martin Bouchard, il se dit ouvert à tous les scénarios, sauf celui d'acheter un
terrain puis de faire une requête à Hydro-Québec à travers un formulaire. Il
aimerait discuter avec le gouvernement pour connaître leurs attentes. «On est
capables de s'installer quasiment partout», etc. Et d'autant plus ils disent
que, selon eux, ils se sont donné... doté comme mission d'être le plus
écologique possible. On comprend que les ordinateurs fonctionnent comme des
radiateurs. «Ils chauffent et on capture 98 % de la chaleur pour la
redistribuer.» C'est ce que met de l'avant le P.D.G. Mais mieux encore, selon
lui, «comme nos clients nous demande d'être en activité 24 h sur 24, nous
possédons des...
17 h (version non révisée)
Mme Setlakwe : ...et nous
pouvons nous brancher... nous débrancher du réseau d'Hydro-Québec pendant les
heures de pointe. Et ce n'est pas l'hiver que nous consommons le plus, c'est l'été
avec la climatisation. L'article se termine avec un élément intéressant. Ils
sont courtisés par d'autres pays et d'autres provinces. Ils insistent. Donc, l'énergie,
on en a besoin maintenant, pas dans cinq ans. Encore une fois, ils détiennent
1,5 milliard de dollars. Nous pouvons investir sans aucune subvention. Des
Américains et des Européens viennent nous voir. Ils requièrent une place dans
notre centre de données pour développer leur intelligence artificielle. Et ils
posent la question : Est ce que Québec peut vraiment se permettre de
passer à côté? Si je n'ai pas les blocs d'énergie, je vais devoir regarder d'autres
alternatives. Nous sommes Québécois. On veut s'étendre ici, créer de la
richesse et des emplois. Mais des provinces canadiennes et plusieurs pays s'intéressent
à nous.
Alors, je trouve que ça vaut la peine de
les entendre, M. le Président. Je trouve, je trouve intéressant... Moi, j'aimerais
en apprendre plus sur cette entreprise. Et encore une fois, je ne dis pas qu'ils
répondent à tous les besoins, ce n'est pas du tout ça, mon propos. Mon propos,
c'est de dire on ne peut pas se permettre de ne pas avoir ces discussions, on
ne peut pas se permettre de ne pas regarder les alternatives et de ne pas
discuter et de prendre le temps aussi d'entendre la vision du ministre pour
pouvoir faire une place plus importante à des entreprises locales, notamment...
Ça peut être d'autres aussi. Il y a un autre article, donc, plus récent, en
décembre, le 3 décembre dans LaPresse, sous la plume
de Camille Dauphinais Pelletier qui parle plus des phases 3 et 4 du centre
à Lévis. L'entreprise a pu lever 320 millions pour le développement de ces
phases-là. Donc, encore une fois, la demande est folle. Ils sont rendus aux
phases 3 et 4. Et c'est donc intéressant de suivre... de suivre tout ça et
de s'intéresser à leur... à leur plan d'affaires, essentiellement, et à savoir
comment ils peuvent... ils pourraient répondre aux besoins grandissants du
gouvernement, M. le Président.
Donc, encore une fois, offrons-leur la
possibilité de venir, de venir nous parler comme on l'a fait pour Micrologique.
On se rappellera, là. Micrologique aussi est dans les médias. Ils sont venus
nous voir, ils ont... Ils ont dit qu'ils avaient l'expertise. Encore une fois,
je ne suis pas en train de porter un jugement à savoir si les besoins sont
parfaitement arrimés. Ce que je dis, c'est qu'il faut... Il faut leur tendre la
main, il faut leur... il faut leur parler. C'est une question d'économie locale.
C'est une question de résilience. C'est une question d'assurer qu'on puisse s'occuper
nous-mêmes ici, avec l'expertise locale et l'expertise québécoise, de nos données.
Étudions les différents scénarios. Les questions vont se poser, là, M. le
Président, au fil de l'étude, article par article. On va les ramener, les
questions. On va demander à la partie gouvernementale et au ministre de nous
dire où il en est, où il en est rendu dans sa réflexion. Moi, je trouvais
intéressant de le voir échanger avec les représentants de Micrologique. Il
réfléchissait un peu tout haut, posait des questions, tout ça. Il essayait de...
Je voyais qu'il était extrêmement intéressé à savoir, mais à savoir comment...
On avait l'impression qu'il était en train de, sur le champ, là, de tenter de
formuler une vision. Mais je suis certaine qu'il a avancé dans sa réflexion. Et
puis tout ce qu'on peut faire comme parlementaires pour contribuer à cette
réflexion et pour alimenter nos propres... nos propres réflexions, on ne peut
pas passer... passer à côté.
Donc, encore une fois, on va se demander
comment les projets numériques... C'en est un, projet numérique de grande
importance, donc, qui vont pouvoir soutenir à long terme l'économie locale.
Encore une fois, le projet de loi n° 82, c'est une opportunité pour
renforcer la souveraineté numérique du Québec. On le sait, l'hébergement local
des données est un enjeu stratégique essentiel. Je pourrais, encore une fois,
faire le tour des mémoires. On le on l'a fait ce matin, et ma collègue de La
Pinière aussi. Elle a fait état des nombreux experts qui sont venus parler de
cet enjeu d'hébergement et de souveraineté numérique. Des entreprises
québécoises comme... pourraient potentiellement jouer un rôle plus important
pour garantir l'autonomie technologique. Moi, je suis intéressé, et je pense
que ce serait intéressant pour les parlementaires, ici, dans la commission, qui
se penchent sur ce projet de loi, sur ça, surtout sur ce projet très important
de...
Mme Setlakwe : ...de se poser
ces questions-là. Il y a vraiment ici, une... il y a des questions économiques.
Bon, peut-être qu'on n'est pas... on n'avait pas de boule de cristal,
évidemment, il y a quelques années, personne ici n'est en train de pointer du
doigt et de porter le blâme. Ma collègue, elle l'a dit aussi tout à l'heure.
Les circonstances ont fait en sorte qu'on est allé vers d'autres entreprises,
mais là on se questionne vraiment à savoir est-ce que ces entreprises
américaines on leur en accorde trop dans les circonstances. Les États-Unis
étaient un partenaire, un allié pendant, évidemment, en tout cas, tout mon
vécu, tout notre vécu puis les choses sont en train, malheureusement, de
changer. On a non seulement des entreprises qui quittent le territoire pour
lesquelles on peut se demander, comme Amazon, mais est-ce qu'elles étaient
vraiment engagées envers le Québec? Elles avaient donc du jour au lendemain...
elles ont du jour au lendemain annoncé qu'elles fermaient des centres de
distribution. Et là on a un président qui nous traite avec mépris, qui fait
rupture avec cette tradition, là, de partenariat économique et d'allié. Alors,
toutes ces questions-là sont pertinentes. Encore une fois, on ne prétend pas
que c'est la compagnie vers laquelle il faut se tourner, ce qu'on dit,
c'est : Regardons ensemble les alternatives, regardons ensemble ce qui
s'offre à nous au Québec. Et je trouve qu'en fait s'il y a un élément positif
dans tout ce contexte difficile, c'est que les Québécois et les Canadiens se
serrent les coudes actuellement. Et il y a une fierté. En tout cas, moi, j'ai
la fierté d'être Québécoise et aussi d'être canadienne, mais il y a cette
fierté pour notre économie, pour nos valeurs, pour nos institutions, pour notre
pays, pour notre souveraineté. Tout ça est mis de l'avant, occupe de plus en
plus d'espace. Alors, je trouve ça... je trouve que c'est bon, c'est quelque
chose de positif, c'est quelque chose sur lequel il faut miser. Et donc de
faire de l'identité numérique un projet porteur pour l'économie québécoise et
une vitrine de notre expertise, c'est quelque chose de très positif et quelque
chose que je considère qui est même... qui est transpartisan. Je suis certaine
que le gouvernement est interpellé par ces questions.
• (17 h 10) •
Donc, voilà, c'est une question de fierté
nationale, d'économie, d'économie locale, de s'assurer qu'on soit solidaire,
donc, avec les entreprises de chez nous. Il y a des entreprises de chez nous,
on le sait, là, je n'ai pas en faire la liste cet après-midi, mais qui sont
partis de quelques dépanneurs qui sont devenus des chaînes bien connues sur... à
l'échelle mondiale. Vous savez, là, le Québec qui fait notre fierté et qui a
pris sa place, mais ça commence par des... ça commence... il commence petit et
finalement, au fil du temps, ils deviennent des leaders. Donc, voilà, c'est
quelque chose qui fait notre fierté. Et je pense qu'il y a une compagnie comme
QScale, dans le contexte du projet de loi, du projet qu'on étudie, vaudrait la
peine, ça vaudrait la peine qu'on les entende, M. le Président. Voilà. Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous, chère collègue. Je crois comprendre que la députée de La Pinière
souhaite intervenir. Et vous disposez pour ce faire, Mme, d'une période de
30 minutes.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. Alors, la motion préliminaire qui est devant nous, déposée par ma
collègue de Mont-Royal—Outremont, demande à ce que la
commission des finances publiques entende M. Martin Bouchard, P.D.G. de
QScale. Moi non plus, tout comme ma collègue, je ne connais pas cette
entreprise ni le P.D.G., mais je pense que ça vaudrait vraiment la peine de
l'entendre à la lumière de la revue de presse que j'ai vue sur cette
entreprise. Pourquoi? Parce qu'on a devant nous un mégaprojet, le projet
d'identité numérique nationale. Je l'ai dit et redit dans toutes mes interventions,
nous voulons que ce projet fonctionne. Et il y a un élément dont il n'aurait
pas été question, je l'ai dit aussi, il y a six mois, il y a un an, il y a deux
ans, l'élément de l'incertitude qui est devant nous, l'incertitude créée par
tous les décrets du président américain actuellement. On a reçu l'entreprise
Micrologic qui nous a surtout parlé de la souveraineté numérique et donc dans
les enjeux qu'elle identifiait il y avait l'absence de souveraineté numérique
dans le projet de loi et nous proposait d'introduire dans cette loi...
Mme Caron : ...le concept de
souveraineté numérique et ses principes fondamentaux concernant les données les
plus sensibles de l'État québécois, c'est-à-dire les données classifiées
protégées, permettant ainsi aux entreprises de répondre aux exigences légales
et d'assurer un hébergement et un contrôle local des données.»
Ce participant à nos travaux, durant la
phase des consultations, nous a dit et redit que son entreprise, et le ministre
le savait puisqu'il semblait bien le connaître... que son entreprise était
capable d'offrir des... le stockage de données dans l'infonuagique, hein? C'est
une entreprise québécoise, fabricant d'un cloud souverain 100 % canadien.
C'est déjà quelque chose qu'ils font. Ils ont plus de 1,3 milliard de revenus
générés, plus de 300 experts. Alors, c'est une entreprise d'ici qui pourrait
répondre au besoin qui va... qui va être créé avec l'identité numérique
nationale. Et le contexte... le contexte, oui, économique, mais surtout le contexte
de politique économique étrangère à l'heure actuelle fait en sorte qu'on se
questionne sur la relation du Québec avec les géants technologiques étrangers,
notamment américains. D'ailleurs, c'était l'une des motions préliminaires qu'on
a déposées plus tôt. On souhaite avoir un état... un état des lieux, un état de
situation, que le ministre a rejeté du revers de la main sans même prendre la
parole sur ça, après nos interventions.
Je me questionne beaucoup parce qu'on a
ici des entreprises québécoises, de chez nous, Micrologic, là, qui est venue
nous voir la semaine passée, dans la revue de presse, QScale, qui est une
entreprise d'ici, qui sont prêtes à travailler ici pour nous, pour protéger nos
données, pour stocker nos données, dans les balises que le ministre va leur
donner, respecter la loi au Québec et au Canada, ne pas ouvrir de brèche à
l'étranger... Bon, je dis «ouvrir de brèche», il y en a déjà une, par la force
des choses, étant donné les contrats qui existent à l'heure actuelle et qui
sont donnés aux Amazon de ce monde. Bon, on ne peut rien y faire pour l'instant
parce qu'il y a des contrats, mais, si on avait un état de situation, par
contre, on pourrait savoir où est-ce qu'on s'en va avec ces contrats-là, ça
dure jusqu'à quand, et se préparer à faire un changement à un moment donné ou
voir combien il nous en coûterait pour résilier certains de ces contrats. Bref,
QScale, qui est prête à investir 1 milliard et demi au Québec sans l'aide du
gouvernement. Cette entreprise-là a demandé 0 $ en subvention au
gouvernement du Québec. Elle a demandé, par contre, des blocs d'électricité
fournis par Hydro-Québec. Et c'est là... c'est sur cet os-là qu'on tombe, là.
Depuis des mois que ma formation politique
talonne le gouvernement à propos du projet de Northvolt et des blocs d'énergie
qui ont été consentis à Northvolt pour un projet qui ne va pas commencer
bientôt, s'il commence. Les blocs d'énergie sont coincés là, puis on a des
entreprises d'ici qui sont prêtes, dans plusieurs domaines, à prendre de l'expansion,
de la croissance pour l'économie québécoise dans les régions du Québec, le
développement économique du Québec et des régions. Ce gouvernement se disait un
gouvernement des régions. Ces entreprises ont besoin de blocs d'énergie
supplémentaires, et on leur dit non, ou il y a un... on ne dit pas pourquoi,
parce que c'est confidentiel. Il y a un formulaire à remplir, un formulaire à
remplir, puis c'est oui ou c'est non.
QScale, dans un article du mois de
septembre 2024, disait que... «Contrairement à d'autres entreprises qui
acceptent de s'implanter au Québec seulement avec l'aide financière du
gouvernement, QScale se dit prête à dépenser plus de 1 milliard de dollars pour
prendre de l'expansion, mais impossible au Québec sans les blocs d'électricité
fournis par Hydro-Québec. Alors qu'on sait que les demandes des centres de
traitement de données explosent partout dans le monde en raison principalement
des avancées de l'intelligence artificielle, cette entreprise-là, québécoise,
est bien...
Mme Caron : ...pour
profiter de cette croissance-là, elle a un campus à Lévis, mais elle arrive au
bout de son projet et elle a besoin d'énergie. L'intelligence artificielle,
c'est énergivore. Au début, dit M. Martin Bouchard, le P.D.G. de Qscale,
on louait un mégawatt. Maintenant, les clients réclament 10 et
20 mégawatts, et ça va monter. À Lévis, nous avons une capacité de
140 mégawatts fournis par Hydro-Québec. Et puis ils devaient ériger des
bâtiments sur huit ans. Les bâtiments de leur campus de Lévis, ça devait leur
prendre, ils avaient planifié huit ans pour les construire. Ils souhaitaient
s'assurer de remplir les espaces avant de débuter le chantier, mais ils ont dû
accélérer parce que la demande est tellement forte. Alors, sur les huit phases
de leur projet, il y en a deux qui étaient déjà complétées, là, quand l'article
a été écrit en septembre 2024. Et puis ils estimaient que l'ensemble des
édifices vont être loués dans 6 à 18 mois et construits d'ici la fin de
2026. Et pour répondre à la sollicitation, QScale doit prendre de l'expansion
si son entreprise veut continuer de croître.
• (17 h 20) •
Le hic? Hydro-Québec et le ministère de
l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie ont considérablement réduit
l'octroi de blocs d'électricité. En effet, peut-on lire, avec les défis
énergétiques auxquels le Québec est confronté, un processus plus rigoureux de
sélection des projets industriels de plus de cinq mégawatts a été mis en place
en 2023. Bon, peut-être qu'en 2023, le ministère de l'Économie, de l'Innovation
et de l'Énergie et Hydro-Québec ne savait pas qu'on aurait devant nous
aujourd'hui, février 2025, un projet de loi sur l'identité numérique nationale,
projet qui va requérir du stockage de données énergivore, qui va requérir de
l'espace dans l'infonuagique. Il y a quatre ans, donc en 2021, en
automne 2020, puisque l'article a été créé en septembre 2024, il y a
quatre ans, donc, on nous déclarait : Pas de problème, on va vous en
donner de l'électricité. Hydro-Québec vendait des surplus à l'extérieur. Et du
jour au lendemain, on nous a dit que c'est terminé, nous a indiqué
M. Bouchard, le P.D.G. de Qscale. La société d'État a rejeté
l'agrandissement à Lévis pour quatre modules supplémentaires. Pourtant, selon
M. Martin Bouchard, QScale peut accroître sa station à 250 mégawatts.
Un projet de 50 mégawatts a également
été refusé à Saint-Bruno-de-Montarville, en Montérégie, en février 2024. Donc,
il y a un an. Écoutez bien ça, M. le Président. Parce que Qscale a offert
gratuitement sa chaleur à Saint-Bruno et à Énergir pour chauffer les projets
immobiliers qui s'en viennent dans ce secteur. En résumé, les mégawatts d'Hydro
serviraient deux fois et il n'y aurait quasiment aucune perte d'énergie. Alors,
les mégawatts, que souhaitait obtenir cette entreprise pour un projet à
Saint-Bruno-de-Montarville allaient servir pour le stockage des données allait
créer de la chaleur. Cette chaleur allait être récupérée pour chauffer des
projets immobiliers de M. et Mme Tout-le-Monde, des projets immobiliers à
Saint-Bruno-de-Montarville, puis même allait en donner à Énergir, Énergir qui
fournit du gaz naturel pour le chauffage de maison également. On a ici, et puis
là ce n'est pas parce que je veux faire l'apologie de cette entreprise, mais à
sa face même, on a une entreprise québécoise qui a une expertise recherchée, en
demande dans le monde entier, qui investit son argent sans demander aucune...
aucun investissement du gouvernement du Québec, aucun, aucun fonds public pour
s'établir ici. Ça fonctionne. Ils sont obligés d'accélérer le rythme de
construction des phases de leur projet. Ils seraient soumis à toutes les
balises que le...
Mme Caron : ...ministre de la
Cybersécurité et du Numérique voudrait leur imposer? Nos données dans
l'infonuagique, dans le stockage chez QScale ou chez Micrologic, là, nos
données seraient ici, au Québec, protégées. Il y aurait une meilleure adhésion
de la population au projet d'identité numérique, sachant que c'est ici que ça
se passe. C'est une entreprise en plus qui a une conscience environnementale,
jusqu'à réutiliser la chaleur qui est produite, donc les mégawatts
d'Hydro-Québec qui leur seraient confiés seraient utilisés deux fois. J'y vois
une très grande valeur ajoutée. Ça s'appelle de l'économie circulaire, ça.
Réutiliser l'énergie qui est créée par notre activité ou réutiliser les rejets
ou les déchets qui sont créés par une activité économique, c'est de l'économie
circulaire, ça. Est-ce qu'on peut demander mieux? Un projet d'ici, des
propriétaires d'ici qui ne demandent aucun investissement du gouvernement, des
fonds publics, qui n'ont besoin que de blocs d'énergie, et pas des milliers de
blocs d'énergie, là, pas des milliers de mégawatts, là, quelques centaines,
140. Le projet de Saint-Bruno-de-Montarville, c'était juste 50 mégawatts qui
leur a été refusé. Je me dis mais qu'est-ce qu'on peut demander de mieux comme
développement économique? Le Québec d'abord, là, c'est ça. C'est développement
des entreprises d'ici, le développement économique des entreprises d'ici. Ces
entreprises, là, domaine de pointe, expertise de pointe, ils en créent, des
jobs payantes, comme dirait le premier ministre. Bien, pourquoi on ne s'ouvre
pas à ces entreprises-là plutôt qu'aux grandes entreprises étrangères. Pourquoi
on ne leur donne même... on ne donnerait pas à QScale la possibilité de venir
nous dire ce qu'elle pourrait faire dans le cadre du projet de loi n° 82,
c'est-à-dire dans le cadre de l'implantation de l'identité numérique? Il me
semble qu'on pourrait profiter de leur expertise. On pourrait s'ouvrir sur nos
entreprises. Puis là, ce sont deux entreprises, il en existe peut-être
d'autres, là, il en existe peut-être d'autres qu'on... qu'on ne connaît pas.
Pourquoi on les... on les... on les mettrait à l'écart?
Parlant d'une autre entreprise,
effectivement, la... un article, cette fois-ci, celui qui a été publié plus
récemment, le 3 décembre 2024 dans La Presse Affaires, on nous
mentionne... on nous dit que QScale n'est pas seule dans cette situation, qu'un
autre exploitant de centre de données, Vantage Canada s'est buté au même
problème en 2023. Le problème, c'est de ne pas avoir... c'est de ne pas avoir
la possibilité d'obtenir des mégawatts au Québec, alors qu'on a une économie
qui est basée sur cette ressource verte, qu'est l'hydroélectricité, qu'on
réserve... qu'on a réservé à des grandes entreprises étrangères comme
Northvolt, alors que nos entreprises d'ici crient famine.
Là, on a un... on a un projet d'identité
numérique nationale qui va requérir beaucoup d'énergie. Est-ce qu'on va le
donner... Est-ce qu'on va donner les blocs à des entreprises d'ici, qui vont
créer des jobs, qui vont rester ici, qui vont protéger nos données, qui vont
être soumises aux lois québécoises et canadiennes et non pas au Cloud Act, là,
la loi sur l'infonuagique, la loi fédérale américaine, qui, comme je le disais
tout à l'heure, permet à la police fédérale américaine d'obliger les
entreprises américaines à fournir les données qu'elles ont, même si elles sont
à l'étranger, donc au Québec. Il me semble qu'on a une occasion...
Mme Caron : ...en or, là, avec
une entreprise comme QScale ou une entreprise comme Micrologic. Pourquoi ne pas
donner la chance à ces entreprises-là d'être partenaires avec le gouvernement
du Québec, pour le bénéfice des Québécois? Il me semble que c'est une question
légitime. Il me semble que, quand on est un gouvernement de l'économie, qu'on
se dit un gouvernement de l'économie puis un gouvernement des régions c'est
quelque chose qu'on devrait envisager très, très sérieusement, et pas juste
sérieusement, mais avec beaucoup d'enthousiasme. C'est ça, le Québec qu'on
veut. Alors...
Les PME québécoises... on le sait, les PME
québécoises, c'est l'épine dorsale de notre économie. Ça a toujours été comme
ça, ça ne va pas changer, et puis, dans le contexte actuel, ça va peut-être
s'accélérer. Alors, donnons donc une chance aux entreprises québécoises de
participer à ce projet porteur et structurant d'une identité nationale
numérique, et d'avoir nos données chez nous. Il va y avoir... je suis certaine
qu'il va y avoir une adhésion beaucoup plus grande de la population.
• (17 h 30) •
Évidemment, il faut que le projet soit
bien fait, soit bien planifié, soit bien géré. La fameuse feuille de route dont
nous parlait la Vérificatrice générale, il faudrait l'établir, avec une vision
claire de ce qu'on va faire, ce qu'on ne va pas faire en matière de biométrie,
en matière d'intelligence artificielle, en matière de stockage de nos données,
et en matière, évidemment, de communication, de bien communiquer ce qu'on veut
faire pour rassurer la population, pour rassurer les utilisateurs, même dans
les ministères et organismes, de la... de tous ceux qui vont utiliser donc,
la... l'identité numérique nationale. Ça nous permettrait peut-être aussi de
savoir si le gouvernement prévoit des aides aux entreprises technologiques
québécoises, qui vont devoir adapter leur technologie pour adapter les... pour
s'adapter aux solutions existantes chez les différents ministères et
organismes.
On a eu, tout à l'heure, la motion du
député de Jean-Lesage à propos de la Fédération des cégeps. Fédération des
cégeps, on voit qu'il y a un... une grande préoccupation, et avec raison, là.
Ils ont un réseau qui fonctionne très bien, qui est essentiel dans le domaine de
l'enseignement supérieur, et ils craignent, en tout cas, selon la façon dont le
projet de loi est libellé actuellement, d'être obligés d'aller ailleurs, de ne
peut-être pas avoir d'interopérabilité. On n'est pas plus avancés. On a fait...
on a fait la discussion, ma collègue et moi, après le député de Jean-Lesage,
mais, comme le ministre s'est refusé à dire quoi que ce soit sur cette
motion-là aussi, on ne sait pas. Peut-être qu'il y a déjà des plans pour
répondre à cette préoccupation-là, mais on ne peut qu'imaginer parce qu'on n'a
aucune réponse là, aucune... aucun mot. Tout va bien, Mme la Marquise, on passe
au suivant. C'est un petit peu ça qu'on voit aujourd'hui là, dans la commission
parlementaire, peu importe qu'on tente de faire un travail rigoureux dans le
but de s'assurer que le projet se réalise correctement, qu'il ne fasse pas un
autre SAAQclic et que tout le monde soit bien servi.
Et puis, si le projet se fait bien, bien,
tant mieux pour le gouvernement aussi, parce que ce sera une réussite. Mais il
faut mettre tous les atouts de son côté et considérer les obstacles qui peuvent
se poser au projet. C'est sûr que, quand on a de l'enthousiasme pour un projet,
on veut qu'il se... qu'il se réalise, on veut foncer, et tout ça. C'est
parfait. Mais il ne faut pas faire fi de tout ce qui existe ou de tout ce qui
arrive autour. Et quand quelqu'un nous dit : Hum! attention, un autre va
dire : Hum! attention... Ce n'est pas de l'idéologie, là, on ne parle pas
de questions philosophiques, existentielles ou idéologiques qui seraient
toujours contre un type de projet X. On parle de préoccupations très terre à
terre...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Caron : ...la protection
de nos données, le stockage de nos données localement, ça s'appelle de la
souveraineté numérique. Ça s'appelle, je dirais, presque du nationalisme
numérique. L'importance, l'importance de rassurer les citoyens, pas seulement
par une opération de communication marketing, surtout pas par ça, mais basée
sur des faits, sur la réalité, sur vers où on s'en va avec ce projet-là, quelle
est la vision du projet, qu'est-ce qu'on veut faire, qu'est-ce qu'on ne veut
pas faire. En matière de biométrie, en matière d'intelligence artificielle, en
matière d'infonuagique, où seront nos données? Qu'est-ce qu'on va faire pour
offrir des services à ceux qui ne pourront pas ou ne voudront pas utiliser l'identité
numérique?
En matière budgétaire aussi, en matière de
ressources, on l'a dit, on voulait entendre la présidente du Conseil du trésor.
Parce qu'on a eu zéro réponse, même zéro mot du ministre, après nos
argumentaires pour tenter de le convaincre, puisque lui nous a dit... a dit, plutôt,
à des groupes qui sont venus en commission la semaine dernière : Bien,
moi, je n'ai pas les réponses, ça, ça appartient à ma... à ma collègue. Le
ministre lui-même, sauf erreur, a dit que c'était un projet transversal. Et c'est
vrai, c'est un projet transversal, l'identité numérique, parce que tout le
monde, tous les ministères et organismes vont être appelés à s'en servir. C'est
effectivement transversal. On ne peut pas avoir un projet plus transversal que
ça. Mais, bon Dieu! Ne travaillons pas déjà en silo en partant en disant :
Bien, ça, les ressources humaines, ça appartient à ma collègue du Trésor. Puis
est-ce que le budget pour faire ça, ça va appartenir au ministre des Finances?
Puis, bien, on fonce, on fait le projet, mais tant pis si ça ne marche pas
trop, si on n'a pas les ressources humaines, ou si on n'a pas les compétences à
l'interne, ou si on n'a pas le budget pour le faire. Rappelons-nous qu'on est
dans un... dans une situation de déficit record de 11 milliards de
dollars. Alors, c'est sûr que la question du budget va arriver un jour ou l'autre,
surtout s'il faut embaucher des ressources à l'interne. Puis on sait qu'il faut
le faire. Puis on espère que ce sera fait et qu'on ne dépendra pas... qu'on ne
continuera pas à dépendre d'entreprises externes auxquelles on est liés à la
vie, à la mort, dirait ma mère, pendant des années parce que c'est eux qui ont
l'expertise. Puis, nous, bien, on paie.
Alors, je pense que ce projet-là, qui est
un projet transversal, a tout ce qu'il faut pour être un projet avec une
expertise québécoise. Il y a des entreprises qui sont capables de répondre.
Puis là, je ne suis pas en train de dire qu'il faut privilégier cette
entreprise-là ou cette entreprise-là. On pourrait peut-être avoir un consortium
d'entreprises québécoises qui répond à tous nos... à tous nos besoins découlant
de ce projet d'identité numérique nationale. Mais écoutons-les, invitons-les.
Pourquoi ne pas leur parler? Ce sont des gens qui ont des expertises. Il y en a
plusieurs qui sont venus nous mettre en garde. Puis je pense que, dans un
projet comme ça, les mises en garde, ce n'est pas des blâmes. Ce n'est pas des :
Non, non, allez-y pas, ou : Vous ne savez pas comment faire. Au contraire,
ils prennent de leur temps pour préparer un mémoire. Ils prennent de leur
temps. Ils se déplacent. Ils ne sont pas tous à Québec, là, ils se déplacent.
Pour venir nous faire une présentation de 10 minutes, pour répondre aux
questions des parlementaires, c'est parce qu'ils ont ça à cœur, parce qu'ils veulent
mettre leur expertise au service des Québécois, au service du gouvernement
québécois.
Même chose pour... Là, ce sont... je
parlais d'entreprises, mais tous les autres qui sont venus, c'est aussi parce
qu'ils ont à cœur que ça fonctionne bien. Les syndicats d'employés qui sont
venus pour nous dire : Écoutez, il y a plein de projets qui ne se font pas
actuellement, des projets qui sont mis sur la glace, des projets informatiques,
là, qui ne se font pas, qui sont mis sur la glace. Alors, ça veut dire qu'ils
ne se feront jamais? Ou qu'ils vont être reportés aux calendes grecques pour qu'on
puisse faire celui-ci? Ou bien c'est juste que celui-ci, bien, on va adopter le
projet de loi puis on verra quand ça va se produire? Il y a des questions. Il y
a... Il y a de nombreuses questions auxquelles on n'a pas eu réponse...
Mme Caron : ...et des
questions qui méritent d'avoir une réponse de la part du ministre ou, puisqu'il
a dit lui-même qu'il ne pouvait pas répondre... bien, c'est pour ça qu'on a dit :
Invitons la... Invitons la présidente du Conseil du trésor pour répondre aux
questions auxquelles il n'a pas la réponse, parce que ce n'est pas un projet
qui doit se faire en silo. Si le projet se fait en silo entre les... autour de
la table du Conseil des ministres, on est bien mal parti. Puis, si le projet se
fait sans écouter plus d'experts qui ont quelque chose à nous dire ou plus
d'organisations, comme la Fédération des cégeps, qui ont des préoccupations
très légitimes, bien, encore là, c'est bien mal parti.
Nous, ce qu'on veut, c'est que le projet
réussisse. Et le ministre aura tous les bravos si le projet réussit, mais on
souhaite qu'il se donne les conditions gagnantes pour réussir. Ça lui fera
plaisir sans doute, mais surtout ça sera un service à rendre aux Québécois puis
aux ministères et aux organismes québécois.
• (17 h 40) •
Alors, je réitère la motion qui a été
déposée par ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, que, conformément à
l'article 244 du Règlement de l'Assemblée nationale, elle a fait motion,
donc, afin que «la Commission des finances publiques entende, dans le cadre de
l'étude du projet de loi n° 82, Loi concernant l'identité numérique
nationale et modifiant d'autres dispositions, M. Martin Bouchard, P.D.G. de QScale»,
dont nous avons parlé abondamment et qui mérite certainement qu'on l'entende,
qu'il nous parle d'où il est rendu, même, avec son projet, parce que les
articles qu'on vous a cités datent de septembre et de décembre 2024, dans le
contexte actuel, là, qui... auquel on fait face chaque jour, là. Chaque jour,
le matin, en se levant puis en écoutant la radio, on en entend des vertes et
des pas mûres. Alors, il a peut-être des... il a peut-être bien des
informations intéressantes à nous donner qui pourraient éclairer le ministre
dans la conduite de ce projet-là, le ministre et ses équipes dans la conduite
de ce projet.
Alors, M. le Président, j'appuie, bien
entendu, la motion déposée par ma collègue. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Simard) : Je
vous remercie, très chère collègue. Y aurait-il d'autres interventions sur
cette motion? Sans quoi nous allons procéder à la mise aux voix. Alors, cette
motion est-elle adoptée?
Mme Setlakwe : ...nominal,
s'il vous plaît.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, M. le secrétaire, veuillez procéder, je vous prie.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?
Mme Setlakwe : Pour.
Le Secrétaire
:
Mme Caron (La Pinière)?
Mme Caron : Pour.
Le Secrétaire
:
M. Caire (La Peltrie)?
M.
Caire
:
Contre.
Le Secrétaire
:
M. Bélanger (Orford)?
M. Bélanger : Contre.
Le Secrétaire : Mme Abou-Khalil
(Fabre)?
Mme Abou-Khalil : Contre.
Le Secrétaire
: M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire : Et M. Simard
(Montmorency)?
Le Président (M. Simard) : Abstention.
Cette motion est donc rejetée. Et nous poursuivons. J'ai été avisé par ma
collègue de Mont-Royal-Outremont qu'une motion préliminaire avait été déposée.
Alors, Mme, la parole vous appartient.
Mme Setlakwe : Merci, M. le
Président. Donc, je vais faire lecture de cette quatrième motion
préliminaire :
«Conformément à l'article 244 du
Règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des
finances publiques, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 82, Loi
concernant l'identité numérique nationale et modifiant d'autres dispositions,
demande au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de transmettre à la
commission, dans les plus brefs délais, une copie du plan d'implantation et de
communication publique de l'identité numérique nationale.»
Le Président (M. Simard) : Alors,
vous disposez, bien sûr, de 30 minutes.
Mme Setlakwe : Merci, M. le
Président. J'aimerais réitérer l'importance de bien communiquer avec la
population pour un projet aussi structurant et important que celui de
l'identité numérique nationale. On se rappellera que le projet de loi a été
déposé à la fin de l'année dernière, dans le... je crois que c'était la semaine
où la mise à jour économique a été faite, et le ministre de la Cybersécurité et
du Numérique n'a fait aucune conférence de presse, n'a fait aucune
communication officielle publique pour expliquer le projet à la population. Et
ça, on le déplore, M. le Président. Et, en fait, on ne le... on ne le comprend
pas et...
Mme Setlakwe : ...et
rappelons-nous que les experts sont venus nous dire, ce n'est pas nous, là, qui
inventons, que le succès d'un projet de ce de cette nature dépend de la
confiance qu'on va générer et de la confiance qu'on va susciter auprès de la
population pour générer une adhésion optimale. Comment se fait-il que le
ministre de la Cybersécurité et du Numérique... C'est lui qui est... qui est le
chef, c'est lui qui est le chef d'orchestre, c'est lui qui est à la tête du
ministère et c'est lui qui est donc ce chef d'orchestre de la transformation
numérique tant souhaitée de l'appareil gouvernemental, et donc c'est lui, avec
tous les pouvoirs et tout le leadership qui lui appartient, qu'il devrait
incarner, c'est à lui à communiquer clairement avec la population et à
expliquer ce qu'on entend par identité numérique nationale d'une façon
vulgarisée, d'une façon simple et conviviale, s'assurer que la population
comprenne qu'est ce qu'on entend par ce projet, qu'est ce qu'on entend par
identité numérique nationale, comment est ce que ça va simplifier la vie des
Québécoises et des Québécois, expliquer de façon encore une fois vulgarisée et
simple, comment ça va s'opérer, comment les citoyens vont pouvoir plus
facilement compléter des transactions, interagir, obtenir des services
gouvernementaux par le biais des outils technologiques.
On le sait aujourd'hui, la quasi-totalité
des Québécois et Québécoises ont un... ont des appareils technologiques. C'est
tout à fait normal. Encore une fois, on ne s'oppose pas à la modernisation, on
la souhaite. Ce qu'on dit, c'est : Communiquons adéquatement avec la
population. Ce qu'on veut pour que le projet soit un succès, c'est que la
population comprenne et embarque. Parce que ce ne sera pas obligatoire. Mais
l'idée ce n'est pas de mettre de l'avant un projet en se disant : Bien, ce
n'est pas obligatoire. Donc, ce n'est pas grave, ce n'est pas important si les
citoyens adhèrent. Oui, c'est important. On veut qu'il y ait une très grande
majorité des citoyens québécois qui choisissent de... choisissent d'adhérer à
l'identité numérique nationale. Et donc... Mais pour qu'ils le fassent, il faut
qu'il en saisisse l'utilité, il faut qu'ils en saisissent les bienfaits. Il
faut qu'ils comprennent comment ça va fonctionner aussi, qu'ils soient rassurés
au niveau de la sécurité de leurs renseignements personnels.
Et aussi, je dirais, et ça a été mentionné
durant les consultations, il y a un expert qui est venu nous dire aussi que si
le projet n'est pas... n'est pas bien communiqué, et c'est là où il faut
prendre les devants, et c'est là où le ministre doit assumer son leadership,
exercer son leadership, agir en leader et bien communiquer, ce qu'on veut,
c'est éviter qu'il y ait de la désinformation et que la... et que la peur
s'installe. Nous, on n'est pas en train de dire que ces enjeux-là n'ont pas
de... n'ont pas de solution. Tous les enjeux qui ont été mis de l'avant peuvent
être encadrés, mais c'est important dès le départ d'expliquer, de fédérer.
C'est sa responsabilité au ministre de fédérer les Québécois. C'est ce que fait
un leader. Ce n'est pas des explications techniques compliquées que les... que
les Québécois veulent entendre. Ils ne veulent pas... ne veulent pas entendre
parler de... de tout ce que ça implique comme... comme exigence technologique,
comme la question, là, du «watching» était vraiment intéressante, mais les
Québécois, ce qu'ils veulent comprendre, c'est... Ce qu'ils veulent comprendre,
ce n'est pas comment ça va... comment ça va fonctionner dans le... au niveau
des détails technologiques, mais plutôt quels seront les bienfaits, leur
expliquer comment ils vont pouvoir prendre leur téléphone, leur iPad, leur
tablette ou autre et facilement s'identifier, comment on va se débarrasser du
papier, comment on va pouvoir rapidement transiger avec le gouvernement et dans
quelles circonstances est ce qu'on va demander les renseignements a, b, c, d, e.
Parce qu'on va vouloir, évidemment, que les organismes publics n'aillent
chercher que les éléments qui sont nécessaires. Je ne m'explique pas pourquoi
il n'y a pas eu un plan d'implantation et de communication. Là on parle plus de
communication, aujourd'hui. On va arriver à l'implantation...
Mme Setlakwe : ...mais plus on
tarde, plus on risque qu'il y a des craintes non fondées, qu'il y ait de la
désinformation qui s'installe. Ce n'est pas moi qui le dis, ça a été dit par la
Commission de l'éthique en sciences et technologies. Il va falloir qu'on
explique clairement et ça n'a pas été fait encore. Et rappelons-nous, M. le
Président, l'expert Steve Waterhouse qui d'ailleurs, sauf erreur, a été à
l'emploi du ministère de la Cybersécurité et du Numérique, on l'entend beaucoup
dans les médias, on l'entend sur les réseaux sociaux, il est très sollicité, il
est très actif, il donne son point de vue sur des enjeux de cybersécurité. Il
est venu ici en commission. Ça a été vraiment un plaisir de l'entendre et de le
lire. Je tiens son mémoire dans mes mains, et ce qu'il dit, et c'est ce qu'il
faut retenir à la page 2 de son mémoire, parce que son mémoire couvre
différents enjeux, différents points technologiques, etc., différents éléments
sur lesquels il faut se pencher, mais ce que j'ai retenu de son mémoire, ce
n'est pas les éléments technologiques, c'est des éléments qui ont trait, donc,
à l'aspect humain. Il dit, et je le cite : «Pour y arriver, le travail de
gagner la confiance des citoyens demeure à mon sens l'enjeu numéro un avant
d'aller plus loin». Alors, ce n'est pas moi, là, qui sors ça de mon chapeau,
là. Je n'invente pas cet élément-là. Je me suis intéressé au projet, j'ai lu
les mémoires et j'ai échangé avec M. Waterhouse. Et ce que je retiens comme
la condition gagnante la plus importante qu'il faut s'assurer de respecter,
c'est la question de la communication, c'est la question de l'adhésion, de
l'acceptabilité sociale et de la confiance qu'il faut aller chercher auprès des
citoyens.
• (17 h 50) •
Quand on parle de communication, ça a été
mentionné aussi dans l'excellent mémoire qui a été produit par l'Obvia, qui est
l'Observatoire international sur les impacts sociétaux de l'intelligence
artificielle et du numérique. En résumé, bon, ils nous disent que c'est un
projet structurant, on l'a dit nous aussi. Mais l'Obvia, donc, sur la base
aussi d'une enquête qui a été faite auprès de 2 000 citoyens québécois,
examine les conditions nécessaires à la réussite de ce projet structurant.
L'analyse révèle que l'acceptabilité sociale constitue un enjeu fondamental
avec 86,9 % des citoyens favorables à l'identité numérique sous certaines
conditions, particulièrement en matière de sécurité et de protection des
renseignements personnels. Les mémoires soulignent l'importance d'une
gouvernance centralisée incarnée par le ministère de la Cybersécurité et du
Numérique, tout en relevant certaines zones d'ombre concernant l'hébergement
des données, dont on a parlé amplement, les enjeux de vie privée et le rôle du
secteur privé. On a parlé de ça aussi. Dans leur mémoire, il y a six
recommandations qui sont formulées portant sur l'acceptabilité sociale, la
cybersécurité et la protection de la vie privée, l'implication des parties
prenantes, la présence d'une autorité centrale et l'utilité du système pour les
citoyens. Ces recommandations s'appuient sur une analyse des expériences
internationales et vise à assurer le succès durable de l'identité numérique
nationale québécoise. Le mémoire conclut que le projet de loi n° 82
constitue une avancée significative, mais nécessite des précisions et des
garanties supplémentaires pour répondre pleinement aux attentes et aux
préoccupations des citoyens en matière de sécurité, et de protection des
données, et d'accessibilité des services. Une de leurs recommandations, donc,
encore une fois, c'est de maximiser la valeur et l'utilité quotidienne de
l'identité numérique nationale pour les citoyens. C'est la
recommandation 6 et ça rejoint donc l'objet de notre motion. Quand on
demande un plan d'implantation et de communication publique de l'identité
numérique nationale, c'est parce qu'on veut que ça fonctionne et on pense qu'il
y a des éléments manquants à l'heure actuelle, M. le Président. Le plan
d'implantation, c'est quoi la feuille de route? Ça, on va y venir. Il y a des
acteurs, des experts qui l'ont mentionné spécifiquement dans leurs
interventions, dans leur mémoire. Puis tout l'aspect de la communication...
Mme Setlakwe : ...revenu...
c'est revenu partout. Tout le monde en a parlé. Et donc, c'est extrêmement
important que le ministre l'explique à la population, ce qu'il n'a pas fait
encore.
Je continue avec l'OBVIA. Donc, sa sixième
recommandation, maximiser la valeur et l'utilité quotidienne de l'identité
numérique nationale pour les citoyens : «Les expériences internationales
sur la création et l'implantation de systèmes d'identité numérique démontrent
que l'utilisation croissante de l'identité numérique augmente sa valeur aux
yeux des citoyens. Par exemple, une utilisation quotidienne de ce système
accroît son taux d'adoption parce qu'il est perçu comme étant utile et
sécuritaire.» Il aurait pu y avoir une vidéo. Il aurait pu y avoir, avec cette
présentation, pas juste du... pas juste une présentation verbale, mais une vidéo,
quelque chose de très imagé, de très simple à comprendre. Tout de suite, on
donne... on donne l'envol au projet. On s'assure que, tout de suite, d'attirer
l'attention puis de susciter l'intérêt des citoyens. Ça n'a pas été fait.
«Si nécessaire, je me... je retourne au
mémoire, la collaboration avec le secteur privé, par exemple, pour élargir les
possibilités d'utilisation puis renforcer cette perception d'utiliser...
d'utilité auprès de la population visée.» Bien, d'ailleurs, on ne le sait pas.
Quelle est la vision du ministre, la vision complète du ministre par rapport à
l'identité numérique nationale? Est-ce qu'on s'en tient aux organismes publics
ou est-ce qu'éventuellement cette identité... cette authentification va
permettre aux citoyens de transiger avec des entreprises privées aussi? Si on
avait un plan d'implantation, une feuille de route, on le saurait. Mais là, on
ne le sait pas. Et je ne suis pas la seule à poser la question. Il y a des
experts qui sont venus poser la question en commission.
Donc, ils poursuivent, au niveau du
mémoire de l'OBVI, en disant : «Pour ce faire, il est crucial de protéger
les données personnelles et de respecter la vie privée des utilisateurs en
renforçant les processus et mécanismes d'authentification, en limitant le
partage des informations personnelles, en permettant aux utilisateurs de garder
le contrôle sur leurs données personnelles et en assurant une interaction
sécuritaire avec les organismes publics et les entreprises privées prestataires
de services.» Encore une fois, une communication simple que tout le monde
aurait pu comprendre, les bienfaits et l'encadrement pour éviter qu'il y ait
des... qu'il y ait des dérives, et qui viserait à rassurer la population sur
l'encadrement du nouveau système.
Dans leur conclusion, ils nous disent que
ce sont donc tous des aspects cruciaux du projet de loi qui méritent d'être
précisés. Et, encore une fois, c'est... c'est... c'est pour maintenir la
confiance des citoyens et pour avoir... influencer sur l'acceptabilité sociale.
On n'aura jamais une acceptabilité sociale parfaite, on n'aura jamais
100 % de la population qui va adhérer, mais on peut certainement viser à
avoir une grande majorité de citoyens qui y croient et qui l'utilisent. Alors,
ça, pour l'OBVIA.
Steve Waterhouse, on en a... on en a
parlé. Il y a d'autres acteurs qui sont venus parler de l'importance de bien
communiquer. Durant sa participation à la commission, la présidente de la CAI,
la Commission d'accès à l'information, elle a soulevé plusieurs points. On
pourra éventuellement en parler durant l'étude détaillée. Mais l'un des... l'un
des points qu'elle a soulevés, c'est la question du triangle de confiance. Elle
a parlé du triangle de confiance. Elle a parlé de la définition des rôles et
responsabilités et des raisons pour lesquelles c'est important de sanctionner
les acteurs qui ne respectent pas les règles. Mais donc, elle a... quand elle
parle de ce triangle de confiance, ça rejoint l'objet de notre motion de
demander au ministre quel est son plan de communication. Il n'a pas été
divulgué. Il n'est pas connu. On aimerait, comme parlementaires qui travaillons
à ce projet... on y croit, on l'a dit, on a voté pour le principe. Est-ce qu'il
pourrait nous faire part de son plan?
L'Association québécoise des technologies,
l'AQT, parle de miser sur la transparence et l'acceptabilité sociale évidemment
de bien gérer les données. J'ai leur mémoire sous les yeux : «Communiquer
clairement les objectifs et les modalités du projet pour renforcer la confiance
et l'adhésion, assurer une mise en œuvre planifiée et réfléchie pour prévenir
les erreurs et les malentendus.» C'est exactement ce qu'on demande, une mise en
œuvre planifiée puis une communication adéquate. Donc, ce n'est pas une demande
frivole et un caprice de l'opposition officielle, c'est demandé par les
experts. On veut essentiellement que ça fonctionne. On veut aider le ministre à
ce que ça fonctionne. Dans le passé, il y a...
Mme Setlakwe : ...eu des
projets pour lesquels la planification n'était pas optimale. Et là je suis
généreuse dans mon choix de mots. Évitons... apprenons des erreurs passées,
abordons ce projet structurant, ce projet de société de la bonne façon, en
communiquant clairement les objectifs pour s'assurer que la population comprenne
l'utilité. Si on comprend puis qu'on est rassuré, on va avoir envie
d'embarquer.
La Ligue des droits et libertés est venue
en commission. Ils ont aussi déposé un mémoire. Eux déplorent le manque de
transparence et déplore l'absence de débat. Est-ce que, vraiment, la question
de l'identité numérique a fait l'objet d'un débat? En tout cas, à tout le
moins, il faudrait qu'on commence par bien communiquer, surtout quand ça fait
des années qu'on entend parler de ce concept. À un moment donné, la population
finit par ne plus y croire. Mais si on a, vraiment, maintenant, un projet
structurant et bien ficelé à proposer, le ministre ne devrait pas hésiter à
déposer le plan d'implantation et de communication publique. J'en ai parlé de
la Commission de l'éthique en science et en technologie, là, qui dit que si on
ne communique pas adéquatement, ça peut donner lieu à de la désinformation.
C'est la dernière chose qu'on veut. Je l'ai dit, Steve Waterhouse, lui, son
enjeu numéro un : gagner la confiance du public.
• (18 heures) •
Et il y a eu, évidemment, la Vérificatrice
générale du Québec, Mme Leclerc, qui est venue avec son équipe en
commission et qui a déposé un mémoire. Elle aussi parle, donc, d'un plan, d'une
feuille de route, d'un plan de communication et vraiment d'un... d'une gestion
de projet adéquate. On se rappellera que, dans son mémoire, elle soulève trois
principaux enjeux. Dans un premier temps, la cybersécurité et la protection des
renseignements personnels. Dans un deuxième temps, l'accessibilité et la
qualité des services aux citoyens. Et son troisième bloc est relatif à la
gestion de projet. Et au fil de nos discussions, de nos échanges avec elle, on
a réalisé que ce qui était le plus important, donc, c'était tous les contrôles,
tout l'encadrement mais toute la feuille de route qui sera nécessaire... Et
pour qu'il y ait un déploiement optimal, donc, du projet. On se rappelle que la
Vérificatrice générale, au fil des dernières années, elle a livré des rapports
sur différents projets pour lesquels la planification n'était pas idéale et
pour lesquels, donc, il y a des recommandations qui ont été émises. Elle nous
dit, dans son mémoire, et elle nous a dit en commission, d'en prendre compte,
d'en tenir compte pour s'assurer qu'on ne reproduise pas les erreurs du passé.
Elle dit qu'il est important que le ministère de la Cybersécurité et du
Numérique réussisse à simplifier, à faciliter et à améliorer l'accès pour les
citoyens aux services gouvernementaux, comme il est espéré avec le projet de
loi n° 82. Mais pour cela, l'adhésion des organismes sera nécessaire.
Quand on parle de gestion de projet, et c'est vraiment ces commentaires qui
nous ont fait réaliser, en bonne partie, qu'effectivement on n'avait pas sous
les yeux un plan d'implantation, une feuille de route. Elle nous dit, au niveau
de la gestion de projet, que le projet de loi n° 82 confié au ministre de
la Cybersécurité et du Numérique la responsabilité de la gouvernance et de la
gestion centralisée de l'identité numérique nationale. On le sait. De plus, il
mentionne que le ministre coordonne les actions des organismes publics pour les
infrastructures de télécommunication dans l'objectif d'assurer une gouvernance
intégrée de ces infrastructures à l'échelle gouvernementale. Pour commencer,
elle nous dit qu'il faut bien définir les besoins. Dans mon rapport
d'octobre... dans son rapport d'octobre 2020, je la cite, sur le RENIR, Réseau
national intégré de radiocommunication, le RENIR : «J'ai remarqué — c'est
la Vérificatrice générale qui parle — que les utilisateurs ont été
peu consultés pour son développement. Cela a créé un écart entre leurs besoins
et les services obtenus. Le RENIR n'était pas devenu le réseau national de
radiocommunication qu'il devait être, comme prévu au début du projet...
18 h (version non révisée)
Mme Setlakwe : ...objectif de
créer le RENIR pour permettre une plus grande interopérabilité des
communications lors des situations d'urgence n'était donc pas atteint. Le
ministre... Le MCN devra consulter les utilisateurs, c'est-à-dire les citoyens
et les organismes gouvernementaux, pour s'assurer de répondre à leurs besoins.»
Je poursuis, et c'est l'extrait le plus
pertinent : «Une bonne planification est également essentielle afin de
limiter les retards et les dépassements de budget. La vérificatrice nous dit
que dans son rapport de juin 2021 sur les projets en technologies de l'information
des universités, elle a constaté que les deux universités auditées avaient
dépassé leur budget et accumulé plusieurs années de retard. C'était surtout en
raison de problèmes dans la planification des projets. Cela a mené les
universités à sous-estimer la complexité et le coût de leurs projets. En plus,
les processus utilisés pour sélectionner un fournisseur n'étaient pas adéquats,
ce qui a fait en sorte qu'elles se sont associées à des firmes dans les
services qui ne répondaient pas à leurs besoins.» Bon. Elle enchaîne. Elle
parle de l'importance d'avoir les ressources humaines compétentes, ça, on en a
parlé amplement ce matin, et aussi de la dépendance, donc, à un fournisseur.
Mais ce qu'il faut retenir, c'est que,
quand on a un projet de cette envergure, un projet aussi important dont l'impact
peut être, rappelons-le, très positif pour les citoyens, mais qui comporte des
risques, bien, d'où l'importance d'avoir un plan de match. Un plan d'implantation
très clair, avec toutes les étapes, ça ne sert qu'à rassurer la population.
Alors, je pense que le ministre doit en avoir un tel plan. Alors, on lui
demande tout simplement d'en transmettre copie à la commission afin qu'on
puisse en prendre connaissance. C'est dans l'intérêt public, M. le Président. C'est
dans l'intérêt, pas seulement des parlementaires... c'est dans l'intérêt public
de savoir quelle est la feuille de route, quel est le point de départ.
Et là, on comprend aussi que l'identité
numérique, ça fait un certain temps qu'on en parle, bien, qu'on fasse aussi le
bilan de ce qui a été fait jusqu'à maintenant. Puis, de prendre les
informations qui sont dans l'espace public. Il y avait différentes phases à l'identité
numérique. Ce n'est toujours pas clair exactement, le projet qu'on a sous les
yeux aujourd'hui, il s'inscrit où exactement, dans l'identité numérique dont on
parle depuis plusieurs années. Donc, une espèce de bilan, de compte rendu d'où
on est rendus, des étapes qu'on a... on a franchies jusqu'à maintenant,
évidemment, où on en est rendus avec les organismes publics, qui vont devoir...
qui vont être soumis à l'utilisation de cette... de ce nouveau système, où
est-ce qu'on en est rendus dans nos échanges avec eux, à quel moment est-ce qu'on
pense qu'on va déployer ce système, on va commencer par quel organisme, par
quoi, quelle va être la séquence, quelle va être... on va... on va... de quelle
façon est-ce qu'on va accompagner ceux qui sont moins sophistiqués. On le sait,
le gouvernement, le ministère a... octroie une cote à différents... aux
différents organismes publics. C'est que c'est un... c'est une façon d'évaluer
leur sophistication, si vous me prêtez l'expression, au niveau numérique.
Certains sont très autonomes, ils sont très sophistiqués et ont déjà les outils
et les façons de faire, d'autres ont besoin de plus d'accompagnement. Le
ministre l'a déjà dit publiquement, que ça dépend des circonstances. Il n'y a
pas le même niveau d'intervention avec certains organismes publics par rapport
à d'autres. Ça dépend de leur niveau de... leur niveau de... c'est ça, de
sophistication au niveau numérique. Mais quel est le plan de match? On commence
avec qui? Qui a besoin de plus d'accompagnement? Dans quel ordre est-ce que ça
va se faire? Combien est-ce que ça va coûter? Je vous rappelle les... ce que la
Vérificatrice générale a mentionné. Ce que les contribuables vont vouloir
savoir, évidemment, c'est combien ça va coûter et combien de temps ça va
prendre. Peut-être que le ministre est réticent à fournir des dates, mais il va
falloir qu'il en fournisse. Il va falloir qu'il donne une estimation de ses
objectifs au niveau du déploiement du projet et expliquer, encore une fois,
pourquoi, jusqu'à maintenant, les différents volets, les différentes phases de
l'identité numérique n'ont pas encore vu le jour.
Encore une fois, tout ça, c'est dans l'optique
de susciter une adhésion accrue, de susciter une adhésion intéressante,
adéquate. En Colombie-Britannique, on se le... on se rappelle, c'est une
juridiction...
Mme Setlakwe : ...une province
qui a mis de l'avant un tel projet, mais pour lequel malheureusement,
apparemment, il n'y a pas énormément de participation de la part du public.
Rappelons-nous le fiasco SAAQclic. Je sais
que c'est douloureux de toujours ramener ça, mais c'est normal qu'on le fasse,
M. le Président. On n'a pas été capables de façon efficace, au niveau du
gouvernement caquiste, d'offrir aux Québécois une plateforme, un service simple
et efficace pour renouveler des permis de conduire et des certificats
d'immatriculation. Tu sais, on n'était pas capables de le faire, pour ce volet
qui était, somme toute, je pense, plus simple, en tout cas qui ne concernait
pas des services critiques comme des services de santé, on a vraiment
déstabilisé la population. Le plan d'implantation, clairement, comportait des
failles. D'ailleurs, dans les semaines, les mois à venir, on aura l'occasion de
lire la vérificatrice générale. Elle fait actuellement, donc, l'audit de ce
projet, de ce fiasco. Et on veut éviter que ces situations-là se reproduisent.
• (18 h 10) •
Dans le plan d'implantation de SAAQclic,
il a été décidé de fermer les succursales pendant quelques semaines, et
ensuite, de déployer la plateforme. Avec tous les retards, avec tout le... pas
«les retards», mais toutes les transactions qui étaient en attente, donc il y
avait énormément de demandes au moment où on a rouvert le système, déployé le
système. Et là c'était le chaos total. Parce que les gens, encore une fois, la
population n'était pas prête. On avait surestimé... On avait surestimé leur
capacité de rapidement s'adapter. On avait surestimé la performance de la
plateforme du système. On avait sous-estimé au contraire l'encadrement,
l'accompagnement qui était nécessaire. Et ça a causé, comme on sait, des files
d'attente, des Québécois qui ont perdu des heures et des heures de leur temps
précieux, qui ont dû s'absenter de leur travail pour aller faire la file devant
des succursales de la SAAQ pour parler à des employés de l'État, pour
renouveler leur permis de conduire et leur certificat d'immatriculation, des
transactions somme toute assez de base, assez assez simples. C'est ce qu'on
aurait espéré.
Il faut à tout prix s'assurer qu'on a un
plan d'implantation bien réfléchi, qui a... qui a suivi toutes les étapes et
qui soit soumis aux membres de la commission. Encore une fois, on a beau
étudier un projet de loi, c'est... c'est... c'est sur papier, là. Sur papier,
on va prévoir les encadrements, sur papier, on va prévoir des balises, on va
souvent s'en remettre à des règlements, mais il n'en demeure pas moins que les
conditions gagnantes, encore une fois, rappelons-nous les conditions gagnantes
pour un déploiement à succès de ce projet dépend surtout d'un plan
d'implantation et de communication publique réfléchi et étoffé. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Simard) : C'est
moi qui vous remercie, chère collègue. Je cède maintenant la parole à la
députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, M. le
Président. D'entrée de jeu, je voudrais dire que ma collègue et députée de
Mont-Royal-Outremont, qui a déposé cette motion pour demander au ministre, au
ministère de la Cybersécurité et du Numérique de transmettre à la commission,
dans les plus brefs délais, une copie du plan d'implantation et de
communication publique à l'identité numérique nationale... alors ma collègue a
fait référence à SAAQclic, au fiasco des changements technologiques, à la
surestimation de la capacité de la population, et même des employés, et je
dirais à rendre ça opérationnel, à s'habituer du jour au lendemain. On a pu
rattraper la SAAQ parce qu'il y avait des gens qui... des employés qui étaient
là qui ont pu aider les gens en personne. Mais, avec les données, on ne pourra
pas rattraper si on fait une erreur. Si le plan n'est pas fait de manière
complète, avec toutes les... toutes les balises nécessaires et en répondant aux
différentes recommandations, en mettant le tout...
Mme Caron : ...le tout en
place, dans le bon ordre et en informant tout le monde, en formant tout le
monde, que ce soient les employés qui devront s'en servir, qui devront
accompagner les citoyens. Bref, si on ne fait pas ça pour... ce qu'on n'a pas
fait dans le cadre de SAAQclic. Si on ne le fait pas non plus pour le projet
d'identité numérique nationale, les conséquences seront beaucoup plus graves,
parce que nos données sont cruciales. La propriété de nos données est cruciale,
la protection de nos données est cruciale.
Alors, je vais faire référence au mémoire
de l'Association québécoise des technologies, qui a presque tout ce qu'il faut.
Si jamais le ministère n'a pas préparé de plan d'implantation ou, en tout cas,
de plan de communication publique, avec ce mémoire, je trouve qu'il y a déjà un
très bon point de départ, parce que le mémoire en question nous dit que le
projet de loi représente une opportunité pour moderniser l'accès aux services
publics et pour renforcer la confiance des citoyens envers les institutions
dans un contexte de transformation numérique. Et n'oubliez pas que, pour qu'une
institution demeure solide ça prend la confiance. L'ingrédient numéro un, c'est
ça. Faites le cours Principes et enjeux de la démocratie, là, le premier cours
à l'ENAP, et c'est ce qu'on va vous dire. Une institution, pour que ça vive
dans le temps, pour que ça perdure, l'ingrédient, c'est la confiance des
citoyens. Quand la confiance s'effrite, l'institution va moins bien puis elle
est moins forte. Alors, il faut s'assurer qu'on a la confiance et, dans le
cadre de l'identité numérique nationale, il faut s'assurer d'avoir la confiance
des citoyens pour que ça fonctionne bien, pour que cette institution soit
solide.
Alors, ce qu'on... il y a plein de... il y
a trois priorités d'intervention, des orientations clés pour une mise en œuvre
efficace, ce que propose l'Association québécoise des technologies. Je ne
passerai pas à travers tout ça, mais je vais... je vais m'attarder sur la
deuxième priorité d'intervention, qui dit de miser sur la transparence et
l'acceptabilité sociale, et ça, ça se décline en communiquer clairement les
objectifs et les modalités du projet pour renforcer la confiance et l'adhésion
et assurer une mise en œuvre planifiée et réfléchie, pour prévenir les erreurs
et les malentendus. Alors, en quelques mots, ça résume la feuille de route que
des groupes nous ont dit qu'il nous fallait avoir, où on communique, on dit ce
qu'on a planifié, on dit où on s'en va et on élimine une à une, les
préoccupations, parce qu'on montre qu'on est capables de répondre à ces
préoccupations-là.
Par exemple, l'un des commentaires... En
fait, l'AQT, l'Association québécoise des technologies a commenté plusieurs des
articles du projet de loi. Un exemple. À l'article 10.2... en fait, ils ont
plusieurs commentaires sur l'article point 2, où c'est écrit, dans le projet de
loi : «L'identité numérique nationale représente l'ensemble des moyens
dont dispose l'État pour garantir à toute personne un accès sécurisé aux
prestations électroniques de services gouvernementales et lui permettre d'avoir
un niveau de confiance élevé lors de ses interactions avec les organismes
publics.» La question que pose l'AQT : «Le gouvernement est-il prêt à
garantir l'accès aux équipements et ressources nécessaires pour les organismes
utilisateurs, notamment ceux situés en régions éloignées ou de taille modeste,
afin d'assurer leur conformité aux exigences du projet de loi?» Ça, ça devrait
être une réponse qui est dans la feuille de route, et qui est communiquée, pour
obtenir l'adhésion des organismes utilisateurs.
Ensuite, on dit, toujours à l'article 10.2
du projet de loi : «L'identité numérique nationale permet également à
chaque personne qui l'utilise de réaliser des interactions dans la
collectivité, notamment à l'aide d'attestations numériques gouvernementales
dont elle détient le contrôle à partir d'une application où ces attestations
sont déposées de façon sécurisée.» La question qui est posée : «La notion
d'interaction dans la collectivité doit être clarifiée. Comprend-elle la
possibilité que le service d'identification soit accessible à des entreprises
privées?» Que la réponse soit oui, que la réponse soit non, il faut que ce soit
dit, en toute transparence, et pour que les gens comprennent de quoi ça
retourne, et puis, ensuite, peuvent accorder leur confiance et adhérer au
projet...
Mme Caron : ...toujours en...
à l'article 10.2 : «Au sens de la présente loi, on entend par
attestation numérique gouvernementale un document technologique permettant
d'établir l'authenticité ou la véracité d'une information ou d'un fait se
rapportant à une personne.» Le commentaire qu'on lit de l'AQT : «Il est
important de préciser que le représentant de l'organisme ne peut accéder qu'aux
informations strictement nécessaires pour confirmer l'admissibilité à un
service. Par exemple, vérifier que l'âge requis est atteint pour consommer un
bien tel que l'achat d'un billet de loterie.» Donc, l'année de naissance, mais
pas nécessairement la date de naissance. Et, sauf erreur, je crois que durant
les consultations, le premier... pas «le premier ministre», pardon, le ministre
de la Cybersécurité et du Numérique a dit qu'effectivement on aurait... les
personnes auraient accès uniquement aux informations nécessaires, strictement
nécessaires. Mais encore faudrait-il resserrer le libellé, s'assurer que c'est
clair.
À l'article 10.4, alinéa un,
«définir, mettre en œuvre et appliquer un cadre de gouvernance des
renseignements personnels dans la collecte, la communication et l'utilisation
sont nécessaires pour l'identification et l'authentification des personnes.»
Alors, le commentaire, et il faut l'écrire dans le projet de loi, selon...
selon l'AQT, c'est de «consentir aux citoyens le droit de retrait du
consentement au traitement, le droit de rectification de ses données, le droit
à l'effacement de ces données, le droit de savoir si ses données ont été
consultées grâce à la traçabilité.» Ça, ça fait partie de ce qu'on appelle...
de ce que les experts ont appelé l'autosouveraineté des données. Je... Ce sont
mes données, je suis maître de mes données. Alors, si c'est ça qu'on veut
effectivement faire, il faut que ce soit écrit dans le projet de loi. Il faut
que ce soit dans la feuille de route. Il faut que ce soit expliqué, que ce soit
communiqué dans la phase communication, dans le plan d'implantation, une
communication qui fait l'objet de la présente motion préliminaire.
• (18 h 20) •
À l'article 10.4, toujours, l'alinéa
deux dit «mettre en place des processus pour vérifier la cohérence et la
qualité de ces renseignements.» Bien, les données collectées doivent être
limitées à un objectif précis. «Seules les données nécessaires à cet objectif
doit être utilisée. Les données sensibles comme les données biométriques
doivent faire l'objet d'une protection renforcée. Les données doivent être
supprimées dès qu'elles ne sont plus utiles. Des principes de sécurité tels que
le chiffrement et la limitation des accès doivent s'appliquer à toutes les
données traitées. Un délégué à la protection des données doit être désigné pour
assurer la conformité aux réglementations en fonction des traitements
réalisés.» Ça doit être écrit en toutes lettres, ça doit être dit, ça doit être
communiqué.
À l'article 10.5 : «Un organisme
public est tenu de recourir aux services visés au premier alinéa, aux
conditions déterminées par le ministre. Le gouvernement peut toutefois
soustraire un organisme public à cette obligation.» J'ai le goût de dire :
Va-t-il le faire pour la Fédération des cégeps? «Les questions qui se
posent : comment le projet de loi garantit-il que les ministères et
organismes publics disposeront des ressources nécessaires pour respecter les
nouvelles obligations en matière d'identité numérique et de cybersécurité?» Ça
aurait été intéressant de savoir de la part de la présidente du Conseil du
trésor puisque le ministre n'a pas pu répondre. «Les systèmes informatiques
actuels des ministères et organismes publics étant souvent hétérogènes, quels
mécanismes seront mis en place pour assurer l'interopérabilité des systèmes
existants avec les infrastructures centralisées prévues dans le projet de loi?»
Ça aussi, il faut le... il faut le dire, il faut l'expliquer, il faut dire ce
qu'on a l'intention de faire. Là, ce n'est peut-être pas à ce niveau-là,
l'adhésion des citoyens...
(Interruption)
Mme Caron : À vos souhaits,
chère collègue. Ce n'est peut-être pas l'adhésion des citoyens, mais c'est
l'adhésion des parties prenantes dans les ministères et organismes qui vont
devoir changer leurs façons de faire, qui vont devoir se conformer à la
nouvelle loi.
À l'article 10.6, on lit «Le ministre
agit d'office comme source officielle de données numériques gouvernementales
aux fins prévues au présent chapitre. Dans l'exercice de cette fonction, le
ministre recueille, utilise ou communique des données numériques
gouvernementales ou recueille auprès de toute personne des renseignements, incluant
des renseignements personnels, lorsque cela est nécessaire.» Et la question qui
est posée par l'AQT : Quelles mesures concrètes seront instaurées pour
prévenir tout accès non autorisé ou usage détourné des données? Ça aussi, il
faut que ce soit dit pour que les gens aient confiance, pour rassurer.
Toujours à l'article 10.6, à l'alinéa
trois... en fait, l'alinéa trois et la fin... et la fin de l'article, où on
dit : «Au présent... Au sens du présent chapitre, les données numériques
gouvernementales sont le nom, les dates et le lieu de naissance d'une personne
physique ainsi que le nom de ses parents, le nom et les coordonnées d'une
personne morale...
Mme Caron : ...ou d'une
société de personnes. Tout autre renseignement que détermine le gouvernement.»
«Tout autre renseignement que détermine le gouvernement», ça, c'est large en
titi, mes amis. Point de vigilance ici : «Cet alinéa soulève des
préoccupations quant à un possible manque de transparence.» Il faut préciser de
quel type de renseignement on veut... il s'agit, de quel type de renseignement
il s'agit, pas ouvrir la porte tous azimuts, une carte blanche à tout autre
type de renseignement. Je comprends qu'on veut faciliter l'implantation du
projet peut-être, on veut faciliter les choses pour le gouvernement, mais ça,
ce genre... ce genre d'article là, ça va miner la confiance des gens, il n'y a
personne qui va être rassuré par ça, là.
À l'article 10.7, l'alinéa 4°, «la
traçabilité de tout accès au registre par une personne, que ce soit pour y
déposer ces données, les utiliser ou en recevoir la communication». C'est très
important, cet aspect de traçabilité, et l'AQT nous dit : «Il faut mettre
en place un journal d'audit transparent, permettant aux citoyens de vérifier
qui a accédé à leurs données, et à quelles fins. Il faut garantir aux citoyens
une visibilité complète sur leurs données pour prévenir tout abus, à l'image de
ceux observés dans les systèmes de cote de crédit, informer les citoyens par le
biais de notifications chaque fois que leurs données sont consultées.» Alors,
ça, est-ce qu'on va le faire? Ça, ce sont des choses... Oui, ça va prendre du
travail, ça va prendre du temps, mais il faut le faire. Ce sont les experts qui
nous le disent, pour que la population adhère au projet. Est-ce qu'on va le
faire, oui ou non? Ça, ça devrait être dans la feuille de route, puis ça
devrait être expliqué dans la communication, dans le plan d'implantation et de
communication qui est demandé par cette motion.
À l'article 10.8 : «Le gouvernement
peut également déterminer les conditions et modalités d'une entente qu'un
organisme public peut conclure dans le but de rendre interopérable l'identité
numérique nationale avec les infrastructures et les systèmes de toute autre
personne ou entité sur le plan local, régional, national ou international, dont
la condition selon laquelle l'entente doit être conclue conjointement par
l'organisme public et le ministre.» Le point de vigilance ici, c'est que le
projet de loi pourrait entrer en contradiction avec les lois canadiennes sur la
protection des renseignements personnels. J'avoue que ce point-là est peut-être
moins lié à la communication, mais, certainement, c'est important dans
l'implantation.
À l'article 12.5.3, qui se lit
ainsi : «Un organisme public qui constate qu'une ressource
informationnelle ou une information sous sa responsabilité fait l'objet d'une
atteinte à sa confidentialité, à sa disponibilité ou à son intégrité et que
cette atteinte présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé doit, avec
vigilance, aviser le ministre.» Est-ce qu'il y a... dans les questions qui sont
posées, est-ce qu'une gradation des risques est prévue dans le cadre de ce
projet? Quel délai est fixé pour aviser le ministre en cas d'atteinte à la
confidentialité, à la disponibilité ou à l'intégrité des données? Comment les
citoyens concernés seront-ils informés de manière adéquate? On pourrait
peut-être dire que c'est détaillé, que ce sont des détails, mais, non, ce ne
sont pas des détails, ce sont des éléments importants, et, encore une fois, ce
sont des éléments auxquels on doit répondre, et, si les réponses sont
satisfaisantes, il y aura une adhésion de la part des citoyens et des
utilisateurs de ce système.
M. le Président, la Ligue des droits et
libertés, qui est venue durant... nous voir durant la période des
consultations, avait des demandes à l'effet d'un débat public. C'était sa
demande numéro un. «La Ligue des droits et libertés demande la tenue d'un débat
public informé, éclairé et transparent sur l'ensemble du projet gouvernemental
d'identité numérique, incluant le portefeuille numérique.» Je vous fais... je
vous fais grâce de la parenthèse. «Un tel débat public doit permettre aux
citoyennes et aux experts de se faire entendre et de discuter des choix faits par
le gouvernement.» Une consultation en ligne n'est pas... ne serait pas
suffisante, ne répond pas à cette exigence. Alors, cette demande s'inscrit dans
la phase de communication.
Ma collègue l'a rappelé, je l'ai dit aussi
aujourd'hui, en Colombie-Britannique, on a passé par-dessus cette phase, on a
fait fi de l'importance de communiquer aux citoyens... de rassurer les citoyens
en leur disant, pour tous les éléments que je viens d'énumérer, puis il y en a
d'autres encore : C'est ce qu'on va faire, c'est là qu'on s'en va, vous
n'aurez rien à craindre, parce qu'on va faire tout ce qu'il faut pour protéger
vos données. Et puis ils ne l'ont pas fait, et il y a juste 10 %...
Mme Caron : ...de la
population qui utilise le système. C'est un investissement quand même très
important pour que seulement 10 % de la population l'utilise. On n'ira pas
améliorer l'efficience dans les ministères ou dans la simplification des
services si on fait la même chose ici, d'où la demande, puisqu'aucune
information au préalable du projet de loi n'a été rendue publique. Là, je ne
parle pas de rendre le projet de loi public. On ne parle pas d'un outrage au
Parlement, là, on parle de communiquer sur un projet. Alors, il ne faut pas
faire fi de cela, et ça justifie la motion qui est devant nous.
M. le Président, il me reste combien de
temps?
Le Président (M. Simard) : Eh
bien, il vous reste au moins 12 minutes, mais notre session tire à sa fin.
Mme Caron : D'accord. Alors,
il reste combien de temps avant que la session...
Le Président (M. Simard) : À
peine 25 secondes.
Mme Caron : À peine 25
secondes? Alors, je dirai... puis je pourrai continuer plus tard, mais je dirai
que la question du profilage, la question de la biométrie sont abordées dans le
mémoire de la Ligue des droits et libertés, de même que les pouvoirs
réglementaires, et...
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, chers collègues, merci pour votre collaboration.
Sur ce, nous allons ajourner nos travaux
sine die, mais ne partez pas trop loin, parce que mon petit doigt me dit qu'on
se revoit demain.
(Fin de la séance à 18
h
30)