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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le jeudi 18 août 1988 - Vol. 30 N° 22

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières sur la révision de la Loi électorale, sur le Document de réflexion et de consultation sur la révision de la Loi électorale et sur le document intitulé 'Résultats des travaux du comité de travail sur la révision de la Loi électorale'


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Marcil): Je déclare la séance ouverte tout en rappelant le mandat de cette commission qui est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques afin d'examiner toute proposition de révision de la Loi électorale, notamment sur la base du "Document de réflexion et de consultation sur la révision de la Loi électorale" déposé à l'Assemblée nationale le 15 mars 1988 et du document intitulé "Résultats des travaux du comité de travail sur la révision de la Loi électorale".

Les changements sont les mêmes que ceux d'hier. J'inviterais l'Association des centres d'accueil du Québec à se présenter. Si vous voulez bien présenter vos collaborateurs. Vous avez 20 minutes pour votre exposé suivi d'une période de questions.

Association des centres d'accueil du Québec

M. Girard (Jean-Marie): M. le Président, mon nom est Jean-Marie Girard. Je suis président de l'Association des centres d'accueil du Québec et directeur général d'un centre d'accueil dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. À ma droite, M. Jean-Yves Poisson, directeur général de l'Estrie et président de la Commission des centres d'accueil et d'hébergement; à mon extrême-gauche, M. Jean-Louis Vaillancourt, de Montréal, représentant des centres d'accueil et d'hébergement de Montréal et directeur général également; M. Jacques-Gilles Laberge, directeur général de Montréal, président de la Commission des centres d'accueil et de réadaptation.

M. le Président, ce que nous voulons faire aujourd'hui, c'est peut-être une synthèse du mémoire que vous avez tous reçu et vous rappeler que notre association regroupe 382 centres d'accueil publics et que l'ensemble de nos établissements dessert annuellement plus de 60 000 personnes en difficulté.

Notre mémoire traite de quatre points en particulier: le bureau de dépôt itinérant, le vote par procuration, la localisation du bureau de votation et le bureau du directeur de scrutin: un bureau de dépôt. Ce sont les quatre volets sur lesquels notre mémoire va surtout porter.

Le bureau de dépôt itinérant. L'établissement de bureaux de dépôt itinérants dans les centres hospitaliers et les centres d'accueil constitue une mesure à laquelle notre association souscrit entièrement. Cette mesure faciliterait grandement non seulement l'inscription sur la liste électorale des personnes qui résident de façon plus ou moins prolongée dans ces établis- sements, mais également la mise à jour détaillée de ladite liste électorale.

Cependant, les dispositions habilitantes devraient prévoir que de tels bureaux itinérants peuvent être installés seulement dans des établissements au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. On sait que le mot "établissement" recouvre ici tout autant l'établissement public que l'établissement privé au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Donc, cela regroupe les hôpitaux, les CLSC, les centres d'accueil et tous ceux qui sont nommés dans la loi.

Le vote par procuration. Il est clair dans l'esprit de tous que le droit de vote est un droit fondamental en démocratie. D'autre part, dans l'esprit des dirigeants des centres d'accueil, il est tout aussi fondamental que les personnes en perte d'autonomie extrêmement sévère, les personnes ayant une déficience intellectuelle, les personnes souffrant d'une déficience physique ou qui traversent une période aiguë d'alcoolisme ou de toxicomanie soient protégées dans leur droit de ne pas voter et leur droit à ce que personne d'autre à leur place n'exerce sans leur assentiment plein, entier et librement consenti, leur droit de vote.

Ces personnes sont extrêmement fragiles et la plupart d'entre elles ne pourraient jamais véritablement porter plainte pour sollicitation de procuration. Le vote est secret et personnel. Avant d'envisager toute mesure d'exercice du droit de vote par un tiers, il faut, d'abord et avant tout, à notre avis, favoriser par tous les moyens raisonnables l'accessibilité physique à la boîte de scrutin par les personnes elles-mêmes.

En second lieu, une personne qui est incapable, pour des raisons de déficience physique, d'exprimer seule son droit de vote devrait pouvoir recevoir l'aide d'une autre personne tout en lui assurant la possibilité de contrôler visuellement l'expression de sa volonté. Ce n'est qu'après avoir épuisé les mesures envisageables sous ces deux premiers critères qu'on devrait envisager le vote par procuration. Il va sans dire que pour notre clientèle, nous croyons, de manière générale, que les bureaux de votation devraient être situés en priorité dans les centres d'accueil et les centres hospitaliers de soins de longue durée.

La localisation du bureau de votation. À notre avis, il ne devrait jamais y avoir un seul bureau de scrutin établi dans une résidence privée pour les seuls résidents de ladite résidence dans le but de protéger le secret du vote d'un groupe déterminé. La notion d'un endroit public facile d'accès nous semble être la plus adéquate, puisqu'elle précise qu'il n'y a pas de

bureau de votation dans des endroits privés et que, deuxièmement, ces endroits publics doivent être faciles d'accès pour les personnes à mobilité réduite ou ayant une déficience.

Nous sommes favorables à la possibilité pour le personnel électoral de déplacer l'urne. Cela devrait exister que des personnes se déplacent à l'intérieur d'un établissement pour faciliter le vote d'une personne à mobilité réduite ou ayant une déficience.

Je passerais à notre conclusion immédiatement. On ira plus loin à la période de questions. L'Association des centres d'accueil du Québec est soucieuse de favoriser autant que possible l'expression du droit de vote des citoyens dont nos établissements ont charge dans des conditions favorables et respectueuses de leur condition humaine. Toute mesure visant à favoriser l'expression par la personne elle-même de son droit de vote reçoit notre assentiment.

Notre association est consciente de l'attrait que peut représenter pour les partis politiques l'introduction du vote par procuration. Il s'agit là, en théorie, d'une façon simple de favoriser l'expression du droit fondamental de voter. Par ailleurs, notre association est également consciente, sans paternalisme ni surprotection, de la fragilité et de la vulnérabilité d'un grand nombre de personnes qui nous sont confiées par la société. Nous attribuons une très grande importance à ce que les mécanismes de fonctionnement de notre démocratie leur garantissent la protection de leurs droits dans le contexte particulier de leurs conditions de vie. Je vous remercie. Les gens qui m'accompagnent seront sans doute en mesure de répondre à vos questions.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Girard. Il est important de souligner que si certains de vos collaborateurs étaient appelés à intervenir, ils devraient s'identifier au moins une fois pour le Journal des débats. Cela va?

Je vais maintenant reconnaître M. le ministre responsable de la réforme de la Loi électorale.

M. Gratton: M. le Président, je tiens à remercier les représentants de l'Association des centres d'accueil du Québec d'avoir répondu à notre invitation et d'être venus exprimer leur point de vue, notamment sur les quatre sujets spécifiques. Le comité parlementaire qui a travaillé et qui a précédé les travaux de la commission avait indiqué son intérêt à connaître le point de vue de l'association qui, manifestement, possède une certaine expertise dans ce domaine particulier, soit l'exercice du droit de vote par les personnes âgées. Je me limiterai aux questions qui touchent les points que vous avez mentionnés dans votre mémoire bien qu'il ne soit pas impossible que d'autres membres de la commission puissent vouloir vous interroger et avoir votre opinion sur d'autres sujets.

Quant à moi, je voudrais commencer par la section sur le vote par procuration. Je crois comprendre très clairement que votre association est réticente à l'introduction du vote par procuration. Elle prétend que celui-ci ne serait pas nécessaire si on préconisait plutôt que les bureaux de scrutin soient situés dans les centres d'accueil et les centres hospitaliers et qu'une journée de vote par anticipation soit réservée aux personnes à mobilité réduite. C'est justement ce dernier point que je voudrais toucher parce que je le trouve particulièrement intéressant. Vous suggérez de réserver une journée de vote par anticipation aux personnes à mobilité réduite qui ont besoin d'assistance pour voter. Donc, si je comprends bien, les gens seraient appelés à voter sur plus d'une journée au moment du vote par anticipation. Voici la question que je me pose: est-ce que vous réserveriez la journée additionnelle, en supposant qu'on ajouterait une journée pour cette catégorie d'électeurs, à ces personnes qui ont une difficulté de mobilité ou si on doit interpréter votre suggestion comme permettant que l'ensemble des personnes dans un centre d'accueil, par exemple, puissent voter, indistinctement de leur capacité ou de leur mobilité, au cours des deux journées?

M. Girard: M. Jean-Yves Poisson va répondre à la question.

M. Poisson (Jean-Yves): Jean-Yves Poisson. Sur la première partie, sur le vote par procuration, on ne dit pas qu'on est complètement en désaccord avec le principe du vote par procuration. On dit que, d'abord et avant tout, on devrait s'assurer que tous les moyens physiques pour permettre aux gens de voter soient mis à leur disposition et qu'en dernier ressort seulement, lorsque ces moyens seront tous épuisés, que là, on puisse permettre le vote par procuration, mais seulement en dernier ressort.

En ce qui concerne la deuxième partie, le vote par anticipation, on a souvent droit, lors de la journée du vote par anticipation, à des scènes où on voit arriver des gens en fauteuil roulant, des gens en marchette, des gens en béquilles qui doivent faire la queue et attendre pour voter alors qu'un grand nombre de personnes bien portantes sont là aussi pour exercer leur droit. De façon à éviter ce genre de spectacles, n'y aurait-il pas lieu d'avoir deux journées, une journée où les gens, que ce soit ceux de nos centres ou les autres personnes handicapées qui vivent à domicile, pourraient avoir accès au vote par anticipation et une deuxième, pour ceux qui ont une certaine mobilité?

M. Gratton: D'accord. Dans l'hypothèse du vote par procuration, j'ai compris que ce serait après qu'on aurait fourni toutes les autres façons physiques de voter. Vous suggérez et vous exigez même que le mandataire soit de la même circonscription électorale. Quelle est la raison derrière cela? Ne craignez-vous pas que cela

puisse, par exemple, empêcher un parent d'être mandataire d'une personne en hébergement?

Une voix: M. Poisson.

M. Poisson: Nous croyons que, le plus possible, ce devrait être des gens de la même circonscription et même, à la limite, des gens du même "poll" de manière que la personne qui donne une procuration se sente en toute confiance, soit assurée que la personne va voter pour son candidat à elle, alors que si c'est quelqu'un qui vient... Prenons l'exemple de quelqu'un vivant dans un centre d'accueil à Granby qui dit à son fils vivant dans un quartier de Montréal: Tu viens voter pour mon candidat à Granby, est-ce que la personne va véritablement se déplacer de Montréal pour venir voter à Granby?

M. Grattoir Je comprends ce que vous nous dites, sauf que moi, ce que je crois comprendre, c'est que si quelqu'un veut faire exercer son droit de vote par un mandataire, c'est à lui, à la personne qui veut voter, de le choisir. Il me semble que si j'étais dans cette situation, je préférerais, et de loin, pouvoir confier le mandat à quelqu'un que je connais bien, peut-être à un membre de ma famille qui ne serait pas nécessairement un résident de la même section de vote. Vous allez même plus loin. Je viens de réaliser que vous n'exigez pas seulement qu'il soit de la même circonscription, mais de la même section de vote. Ne trouvez-vous pas que c'est un peu restrictif?

M. Poisson: Cela peut paraître restrictif mais vous savez que dans nos établissements, il y a aussi des amitiés qui se développent et très souvent les gens vont préférer - on en a l'expérience parce que la procuration existe du côté du fédéral - donner leur mandat à la voisine de chambre ou à quelqu'un dans la maison plutôt qu'à quelqu'un de l'extérieur. Dans nos centres, on a vécu cela à maintes reprises. On sait qu'en campagne électorale chacun veut faire élire son candidat ou celui pour qui il penche. Alors bien souvent, il y a des espèces de pressions qui s'exercent par des gens qui viennent et qui disent: Écoute, qui dans la maison ici va-t-on pouvoir faire voter par procuration? On va trouver des personnes pour voter pour eux. Ou encore, ce sont des membres de la famille qui disent: Moi je suis de telle couleur, mon père va voter de telle couleur. Inquiète-toi pas, je vais avoir une procuration pour cela.

On pense que si c'était à tout le moins dans la même section de vote, cela éliminerait peut-être une partie des pressions que ces gens-là reçoivent. Et pour nous, ce qui est important, si on va vers la procuration, c'est qu'en même temps on puisse limiter et même éliminer par une forme pénale ou légale la sollitation qu'il peut y avoir là-dedans. C'est important parce que bien que ce soient des personnes "matures" qui ont une expérience de vie, bien souvent aussi, ce sont des personnes un peu insécures qui sont facilement troublées par l'intimidation, la sollicitation sous quelque forme que ce soit pour voter, pour des dons ou pour toutes sortes de choses. Je pense qu'on devrait quand même être prudents de ce côté-là.

M. Gratton: II va de soi que si on devait permettre le vote par procuration la sollicitation serait interdite et sujette à des peines quelconques. On limiterait même le nombre de mandats qu'une même personne pourrait avoir.

L'Association pour la santé mentale nous a suggéré, hier, que parmi les mandataires, on devrait exclure, d'une façon spécifique, le personnel de l'établissement. Quelle est votre opinion là-dessus?

M. Poisson: Je suis totalement en accord avec cela. Bien souvent, bien que certaines amitiés se développent entre les résidents et le personnel, les bénéficiaires sont toujours vulnérables aux pressions du personnel. On va prendre des exemples autres que celui des élections. Dans nos maisons, le bénéficiaire hésite toujours à se plaindre s'il n'est pas bien servi par un employé. Il craint toujours en se disant: Si cela se sait, je risque d'être pénalisé par après. Or, ramenez cela à la dimension politique. Un bénéficiaire dirait: On m'a demandé ou je donne une procuration à tel employé. Est-ce qu'il la donnera de plein droit, de son propre chef ou est-ce qu'il la donnera par crainte de se voir un petit peu manipulé ou pénalisé par la suite? On ne peut faire autrement que d'être d'accord avec la prise de position de cette association qui dit: Pas au personnel.

M. Gratton: Dans le cas des bureaux de dépôt itinérants et de la localisation des bureaux de vote dans les centres d'accueil, vous exprimez l'opinion qu'ils ne devraient être permis que dans les centres d'hébergement, tels que définis dans la Loi sur les affaires sociales. Donc, vous éliminez la possibilité de bureaux de dépôt itinérants de même que de bureaux de scrutin dans des centres d'accueil privés; par exemple des HLM. Est-ce que vous ne croyez pas que c'est discriminer, finalement, des catégories de personnes que de permettre, dans le cas des établissements dits publics, à ces résidents de pouvoir plus facilement exercer leur droit de vote en s'inscrivant sur la liste au bureau de dépôt et en exerçant leur droit de vote par rapport à ceux qui, pour toutes sortes de raisons, ne sont pas dans ce réseau?

M. Laberge (Jacques-Gilles): Habituellement, les personnes qui habitent dans les HLM sont relativement autonomes ou...

M. Gratton: Excusez-moi, mais est-ce

vraiment le cas? Je voudrais qu'on m'assure que...

M. Laberge: Absolument. Celles qui habitent dans les centres d'accueil ou d'hébergement pour personnes âgées sont vraiment des personnes à mobilité réduite, c'est évident. Celles qui habitent dans des HLM ou des résidences privées sont capables. D'ailleurs, aussitôt que ces gens-là ont une dépendance physique quelconque, il y a des demandes d'admission qui sont acheminées vers les centres d'accueil et d'hébergement. C'est la même chose pour les personnes physiquement handicapées qui habitent dans ces immeubles. Ces gens-là sont capables de sortir de leur immeuble pour aller dans un bureau de scrutin avoisinant, puisque régulièrement ils sortent avec le transport adapté pour vaquer à leurs occupations journalières. (10 h 30)

M. Gratton: En supposant que le problème n'est pas là, que les gens ont la capacité et la mobilité nécessaires, qu'est-ce qui justifie de ne pas leur permettre un accès plus facile tant à l'inscription au bureau de dépôt qu'à l'exercice du droit de vote, du simple fait que c'est un établissement qui n'est pas public ou dit public?

M. Laberge: Bien sûr. Est-ce qu'on ferait faire du porte à porte pour aller chercher le vote des autres citoyens et citoyennes du Québec? Je pense que c'est cela l'argument.

M. Gratton: Dans le cas du bureau itinérant, j'ai compris que vous le limitiez à l'intérieur d'un établissement et non pas...

M. Laberge: Effectivement. Pour les personnes qui sont alitées qui ne peuvent absolument pas se déplacer, par exemple. Dans des centres hospitaliers de soins de longue durée, des gens sont pleinement conscients mais ne peuvent quitter leur unité de traitement parce qu'ils sont alités. Dans d'autres centres pour personnes âgées, des gens sont confinés à leur lit et ne peuvent absolument pas descendre à la salle communautaire pour aller voter. Cependant, ce sont des gens pleinement conscients et ils ne sont pas interdits, ils n'ont pas de curateur. Il faudrait donc favoriser le droit de vote de ces gens-là. C'est pour cela qu'on favorise le bureau de vote itinérant.

M. Girard: Je pourrais peut-être ajouter également que dans la philosophie de nos organisations, on favorise l'autonomie des personnes et on essaie d'éviter la dépendance. Donc, l'esprit que nous préconisons constamment c'est de dire: laissons autonomes les personnes qui sont autonomes, n'essayons pas de les marginaliser en leur donnant des conditions particulières alors que, dans le fond, il y a des personnes déjà prises avec ces situations-là.

Chaque fois qu'on peut faire de l'éducation ou qu'on peut pousser une idée, on se dit que, comme ils sont dans le milieu, comme ils vivent dans le milieu, ils doivent y participer comme tout citoyen. Si la loi prévoit qu'on doit faciliter cela davantage, dans les coins où il n'y aurait pas de possibilité, pas de centre, pas d'édifice public, et je pense qu'on le dit aussi, on devrait prévoir être présent dans ces maisons-là, par exemple.

M. Gratton: J'ai compris d'ailleurs qu'exceptionnellement, vous n'aviez pas d'objection à ce que des bureaux de scrutin soient installés dans des centres dits privés, là où il n'y aurait pas, à proximité, de centre défini comme public Si j'ai bien compris aussi, vous souhaiteriez que ce bureau de scrutin ne serve pas uniquement aux résidents de ces centres mais soit, en quelque sorte, le bureau de scrutin d'un voisinage quelconque, ce qui permettrait de protéger le secret de vote du groupe qui habite là.

M. Girard: Oui, effectivement. D'ailleurs, dans les expériences passées... Je peux parler par expérience de mon établissement à Chicoutimi, au Centre gérontologique Beau Manoir, les communautés environnantes et les gens du quartier viennent à l'établissement en même temps que la clientèle à l'intérieur de l'établissement. Ils font partie du même secteur de votation.

M. Gratton: Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Je vais reconnaître le député d'Abitibi-Ouest, représentant de l'Opposition.

M. Gendron: Oui. Je voudrais d'abord saluer les porte-parole de l'Association des centres d'accueil du Québec. Je pense qu'il est important que vous répondiez positivement à la demande qui vous a été faite par le ministre responsable de la Réforme électorale, considérant qu'il est difficile de modifier la Loi électorale et de ne pas être sensible à un phénomène que nous vivons ou allons vivre tous, le vieillissement de la population du Québec. En conséquence, je pense qu'il y a toujours lieu d'ajuster nos lois électorales. Les gens du comité ont travaillé dans l'esprit d'améliorer et de maximiser les possibilités pour qu'il y ait le plus de citoyens possible qui puissent ou pas exercer librement leur droit de s'exprimer dans une élection. Il y a effectivement des gens qui souhaitent ne pas le faire et il est clair qu'il faut conserver cette prérogative.

Vous avez fait le choix, à l'invitation du ministre délégué à la Réforme électorale, de toucher plus particulièrement les quatre sujets qu'il a lui-même évoqués: le bureau de dépôt itinérant, le vote par procuration, la localisation du bureau de votation et le bureau du directeur du scrutin.

Concernant le premier point, ce n'est pas

tellement, en tout cas en ce qui me concerne, une question, mais je pense, étant donné votre expertise, que vous devriez vous assurer que tout autant le gouvernement que le DGE aient les statistiques les plus fraîches possible concernant les clientèles. On est souvent enclin à porter des jugements - suivant ma connaissance, toujours avec une lunette bien limitée à ma circonscription - qui ne donnent pas nécessairement une vision du Québec. Vous mentionniez tantôt que les résidences à caractère privé ne devraient pas être des bureaux de dépôt ou des endroits de scrutin. J'achète ça, je suis complètement d'accord là-dessus, sauf qu'on se fait toujours dire: Écoutez, dans les HLM, il y a quand même des personnes en perte d'autonomie assez grande. En ce qui me concerne, je ne partage pas ce point de vue.

J'aimais bien votre approche quand vous disiez: Voilà encore une façon de marginaliser des situations. On tient un discours sur l'intégration ou sur les droits pleins et entiers des citoyens dans la société, mais on dit: Est-ce qu'on ne pourrait pas favoriser un accès plus grand aux personnes âgées? Pourquoi? Je n'ai rien contre ça. Bref, je pense qu'il vous appartiendrait, parce que vous êtes plus capables que nous, de toujours nous fournir l'heure juste. Dans les établissements publics du réseau, il n'y a aucun doute dans mon esprit tant pour ce qui est du bureau itinérant que du bureau de scrutin. Normalement, la clientèle des HLM du Québec est autonome; je la vois régulièrement à mon bureau de comté pour toutes sortes de demandes et de questions et ces personnes sont capables de se déplacer pour toutes ces demandes et je ne verrais pas pourquoi elles n'auraient pas la même disponibilité. Donc je pense que votre point de vue est valable.

Je voudrais revenir sur le vote par procuration. Pour moi, c'est une question fondamentale et qui a été abordée par presque tous les groupes ou les intervenants qui sont venus nous voir depuis le début des audiences sur la réforme électorale. À la question du ministre délégué à la réforme, M. Poisson a mentionné tantôt, à moins que je ne fasse erreur: On n'est pas chaud pour le vote par procuration, mais on ne s'y oppose pas en principe. J'ai lu attentivement votre mémoire, et très attentivement ces questions en particulier, et j'y voyais des libellés assez forts qui me permettaient en tout cas de prétendre que vous vous opposiez au principe du vote par procuration. Je ne veux pas les citer à nouveau, mais il me semble que je pourrais mettre en contradiction certains principes évoqués très fortement et qui, uniquement au niveau du principe, seraient complètement incompatibles si on le permettait. À la question précise, même si vous avez évoqué à deux reprises que, dans le fond, ce serait une situation de pis-aller, si le législateur décidait de l'autoriser, j'aimerais vous entendre un peu plus longuement sur les dangers que, avec votre expérience, vous voyez au vote par procuration, sans porter de jugement sur le principe. On le dégagera nous-mêmes.

Le Président (M. Marcil): M. Poisson.

M. Poisson: Je veux juste rappeler que vous avez raison dans ce que vous dites, mais vous souligner qu'à la page 5, on vous dit: Lorsqu'on aura épuisé toutes les autres mesures pour faciliter l'accès et l'exercice du droit de vote, et là seulement, on accepterait les votes par procuration. Bien sûr, on préfère qu'il y en ait le moins possible ou qu'il n'y en ait pas du tout, mais qu'on se dote de tous les moyens pour permettre d'exercer le droit de vote.

Le danger qu'on voit dans l'exercice par procuration, c'est, bien sûr, que le respect du choix du mandataire ne se fasse pas. On craint également la sollicitation parce qu'on la voit régulièrement sous toutes ses formes, que ce soit en politique ou autrement. Ces gens de notre société sont très vulnérables; ils se sentent "insécures". Bien souvent, lors d'une élection, certains préfèrent ne pas voter parce qu'un de leurs fils est rouge et l'autre bleu et qu'ils se disent: Je ne veux choquer ni l'un ni l'autre. Si on insère le vote par procuration, est-ce qu'ils seront sollicités par le rouge ou par le bleu? Comment vont-ils se sentir? On voudrait que, à la limite, si cela allait jusque là, parce qu'ils ne peuvent pas voter, cela soit vraiment bien encadré. Mais c'est bien certain que s'ils ont toutes les facilités de voter à l'intérieur de l'établissement, on n'aura peut-être pas besoin du vote par procuration.

M. Girard: M. Laberge voudrait aussi s'exprimer là-dessus.

M. Laberge: En ce qui concerne les personnes physiquement handicapées à cause d'une déficience motrice ou visuelle, ce que l'on craint, c'est que le vote par procuration régularise la situation de sorte que cela ne sera peut-être pas aussi nécessaire de rendre accessibles tous les bureaux de scrutin alors que ces gens-là ont pleinement le droit d'exercer librement leurs droits. Pour eux, si on insiste beaucoup sur le vote par procuration, les efforts pour rendre accessible le bureau de votation sur le plan de l'architecture et du mobilier seront plus grands.

M. Gendron: Est-ce que vous êtes en mesure de nous donner des chiffres - si vous ne les avez pas, pourriez-vous les obtenir - quant au nombre de personnes dans les établissements et centres d'accueil du Québec qui font usage du vote par anticipation?

M. Girard: Au moment où on se parle, on n'est pas en mesure de vous donner de statistiques.

M. Gendron: Non. Avez-vous une idée si...

Quand même... Probablement que quelques-uns d'entre vous vivez assez près des centres d'accueil... Est-ce que c'est une journée ou deux qui est prévue dans la loi pour le vote par anticipation?

Des voix: Deux.

M. Gendron: II y a deux jours de vote par anticipation. Dans ces deux jours, quelle est la fébrilité? Est-ce qu'il y en a une? Est-ce que vous sentez dans le système actuel, pour ce qui est du vote par anticipation, que les personnes âgées de vos centres d'accueil sont des usagers assez réguliers du vote par anticipation?

M. Poisson: Je peux vous dire, par expérience, que chez moi, c'est un petit centre et, lorsqu'on a un bureau de scrutin dans notre établissement, il y a très peu de votes par anticipation. Lorsqu'il n'y a pas de bureau de scrutin dans l'établissement même, le vote par anticipation est beaucoup plus utilisé. Dans quelle proportion exactement? Je ne suis pas en mesure de vous répondre parce que je ne surveille pas ceux qui y vont et ceux qui n'y vont pas, mais je peux vous dire qu'il y en a certainement beaucoup plus quand il n'y a pas de bureau de scrutin.

M. Gendron: Moi, tout comme le ministre, j'ai trouvé que votre suggestion d'envisager d'allonger - cela peut être une solution - le vote par anticipation en le publicisant, peut-être plus particulièrement à l'intention des personnes du troisième âge, c'est une formule plus adéquate que de spécifier une journée particulière pour les personnes du troisième âge. J'aurais de la difficulté à fonctionner avec cela à ce moment-ci. Si jamais on se retrouve avec une population comptant 80 % de gens âgés, ce que je ne souhaite pas...

M. Poisson: Si vous me permettez, M. Gendron, on ne se limite pas aux personnes du troisième âge. Ce n'est pas cela qu'on dit, on parle des personnes qui présentent des problèmes de mobilité ou des handicaps physiques ou mentaux. Ce n'est pas ouvert à toutes les personnes âgées du Québec, ce n'est pas ce qu'on dit. On est là pour traiter les personnes qui souffrent d'un manque d'autonomie assez important. Il ne faudrait pas que cela soit ouvert à tout le monde.

M. Gendron: Excusez-moi, vous avez raison, je le vois, vous l'avez ouvert à toutes les clientèles. Cela pourrait être intéressant dans la perspective où il y a moyen d'évaluer ce que cela peut représenter au Québec et si le vote requiert une journée de plus. Je pense qu'il est intéressant que vous fassiez cette suggestion pour ouvrir des possibilités puisqu'on disait tantôt que lorsqu'on discute de maximiser l'accès au droit de vote ou non, il faut que cela se traduise concrètement par des mesures qui auront comme effet la réalisation de cet objectif.

Il y a également une autre question que j'aimerais approfondir. Comment cela se passe-t-il actuellement quant à ce qu'il me paraît fondamental de sauvegarder, soit toute la question des pressions le jour même du scrutin dans un centre d'accueil? La question que je veux vous poser, c'est: Croyez-vous que le législateur, par le biais de la Loi électorale, devrait avoir non pas un catéchisme à n'en plus finir, mais au moins quelques règles d'éthique très sévèrement observées le jour du scrutin dans les centres d'accueil? Est-ce que vous croyez qu'il y a assez de fonctionnement douteux de la part de qui que ce soit dans les centres d'accueil pour envisager de baliser, toujours pour les mêmes raisons que vous avez évoquées? (10 h 45)

Je ne veux pas marginaliser tout le monde. Mais tous conviennent que les personnes âgées ont un degré de vulnérabilité plus grand pour toutes sortes de raisons: perte de mémoire, difficultés, gêne, autonomie réduite, etc.. Parce qu'elles sont dans un centre d'accueil, on dit que ce sont des gens avec un degré de handicap assez lourd. Depuis plusieurs années, elles sont assujetties à des dépendances. Elles relèvent d'une infirmière, d'un infirmier et de Mme Y qui s'en occupe. Psychologiquement, cela se cultive, ce sentiment d'être dépendant de quelqu'un d'autre.

Je ne veux pas être trop long. J'aime mieux vous entendre que de vous parler là-dessus moi-même.

M. Poisson: M. Vaillancourt va apporter une réponse.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Dans les centres d'accueil de Montréal que je connais, surtout les grands établissements, je n'ai jamais senti, depuis les dernières années du moins, de pressions effectives, surtout au moment des élections. C'est généralement une activité d'une journée tant chez moi que dans quelques autres centres d'accueil que je connais très bien... On parle déjà de pressions. En fait, ce ne sont pas des pressions. Chaque parti politique vient faire son tour dans la semaine qui précède l'élection, va voir tout le monde ou à peu près et les gens exercent leur droit le jour du vote.

Je voudrais revenir - je profite de l'occasion - sur le vote par procuration. Qu'on soit pour ou contre ou entre les deux, c'est le législateur qui décidera. Mais je pense que ce qui est extrêmement important, c'est la manière dont les procurations pourront être données. C'est là qu'il faut vérifier. Quant à votre question de voir s'il n'y aurait pas lieu d'émettre - sans en faire un catéchisme comme vous le disiez - un certain nombre de règles, des règles je pense qu'il y en a assez. À un moment donné, il faut

arrêter d'ajouter des barrières. On veut promouvoir ou permettre l'exercice d'un droit, il ne faut pas y mettre des clôtures.

M. Gendron: Une seconde! Les règles ne porteraient pas sur l'exercice ou non du droit. Les règles porteraient sur la direction... Les centres d'accueil émettraient certaines règles.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Oui.

M. Gendron: Ce sont les partis politiques qui écoperaient et non pas les individus. Il n'est pas question de brimer le droit de vote. Il est question, justement, parce que c'est sérieux, que cela se fasse sérieusement. C'était plus cela.

M. Poisson: II ne faudrait pas encadrer cela dans la Loi électorale du Québec et dire qu'en ce qui concerne les centres d'accueil, il y a une règle particulière pour empêcher les bénévoles et les partis politiques d'aller aider les gens à voter ou de les sortir pour les emmener voter par anticipation ou des choses comme cela. Mais je pense qu'il appartient à chaque direction d'établissement qui s'est déjà dotée d'un règlement concernant la sollicitation, les heures de visite et tout cela de s'assurer qu'il n'y a vraiment pas d'abus de la part de qui que ce soit.

C'est bien certain que si, le matin d'élection, la chicane éclate a l'intérieur d'un centre d'accueil, parce que deux ou trois formations politiques envoient leurs équipes de bénévoles pour faire voter les gens, la direction de l'établissement va dire: Écoutez, on va vous limiter à une ou deux personnes, mais pas à des bataillons. Je pense que ce n'est pas dans un cadre de loi qu'on doit prévoir cela, mais qu'il faut bien plus se fier au bon jugement des directions d'établissement qui ne veulent pas voir perturber les activités régulières et l'atmosphère de leur établissement pendant une journée.

M. Gendron: Cela me va, merci.

Le Président (M. Marcil): Cela va. Merci beaucoup, M. le député. Je vais reconnaître M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Merci, M. le Président. J'ai un certain nombre de questions assez précises à vous adresser, parce que je considère qu'on a le privilège ce matin de se rapprocher beaucoup plus du terrain que cela n'a été le cas hier et avant-hier avec la comparution, fort importante par ailleurs, de gens qui ont la responsabilité d'appliquer des grands principes dans notre société, mais qui sont moins quotidiennement en relation avec le terrain, avec le concret quotidien des personnes dont on parle à l'occasion.

Je suis donc heureux d'avoir l'occasion d'aborder un certain nombre de questions avec vous. Je vais revenir rapidement aux dernières questions du député d'Abitibi-Ouest, par exemple, sur le rôle des formations politiques et de leurs équipes pendant la campagne électorale et le jour du vote. Vous nous dites: On a des règles particulières qu'on se donne et qui font qu'on peut encadrer ce processus. J'aimerais que vous parliez un peu plus sur les règles. Par exemple, vous êtes quatre directeurs généraux d'établissement. Je suis conscient qu'il n'y a pas une série de règles communes à tous les établissements. On a quatre directeurs d'établissement assez différents les uns des autres et de régions différentes. Quelles sont les règles que vous appliquez à ce sujet dans vos établissements?

M. Poisson: Ce ne sont pas des règles qui visent particulièrement les formations politiques. Ce sont des règles concernant la sollicitation dans nos établissements ou dans l'organisation d'activités par des gens bénévoles qui viennent de l'extérieur.

Chez nous, pour un, les vendeurs de billets de tirage de toutes sortes, c'est interdit.

M. Rochefort: On va revenir à la politique, si vous permettez.

M. Poisson: Si on revient à la politique, disons qu'il n'y a pas de règle écrite pour dire que c'est tant pour un parti politique et tant pour un autre. Supposons un centre d'accueil de 47 lits et l'exemple des deux formations politiques, ici, au Québec. Si les libéraux débarquent avec cinq personnes et les péquistes avec cinq personnes et qu'ils disent: Nous autres, cela presse, on fait voter tout ce monde. On va leur dire: Ne pouvez-vous pas en avoir chacun un? Cela aurait plus d'allure que d'en avoir cinq. C'est sur le terrain, avec ces gens, qu'on va faire cet arrangement.

Cela n'empêchera pas que, dans le centre à côté où il y aurait 300 lits, on dise: Oui, chacun peut avoir deux équipes de deux ou trois équipes de deux. On veut essayer de garder, de ne pas perturber l'atmosphère ou les activités quotidiennes de la maison, que ce soit, au cours de cette journée, un branle-bas de combat dans la maison et que les partis - parce que parfois, c'est chaud entre les partis - viennent s'affronter sur le terrain à qui réussirait à amener le plus de gens à voter. C'est ce genre de chose qu'on essaie d'éviter. Chacun va trouver une expérience particulière et dire qu'il y en a un qui a le contrôle, que l'autre a barré ses portes. Que se passe-t-il?

Il n'appartient pas à la Loi électorale de dire que dans les centres d'accueil, c'est tant de représentants par parti ou que, de telle heure à telle heure, c'est un parti et de telle heure à telle heure, c'est un autre. Il appartient aux directions d'établissement d'exercer leur droit de libre accès à l'établisssement, comme cela se fait pour les autres visites d'ailleurs. S'ils vont trop loin dans un sens ou dans l'autre, ils sont aussi vulnérables aux pressions à savoir si ce qu'ils

font, c'est correct ou pas correct, ils en répondront.

Le Président (M. Marcil): M. Vaillancourt.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Je parle pour les établissements que je connais. Dans la plupart des cas, il n'y a pas de règle écrite, pas de bible qui dit que telle chose se fait ou ne se fait pas. C'est la règle du gros bon sens. En général, nos résidents veulent avoir la paix. Que ce soit pour la politique ou pour tout autre motif, chez nous, les solliciteurs de toutes sortes ne sont pas accueillis.

M. Rochefort: Y compris les gens qui sollicitent un appui électoral?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Si les gens veulent venir visiter les citoyens, ils en ont le droit. De façon... on appelle cela du harcèlement... Je ne citerai pas les noms de certaines formations, non pas politiques mais religieuses, qui venaient harceler les gens à tout bout de champ pour les faire participer à certaines activités de leur secte. On les a foutus dehors, ceux-là. Que le député ou le candidat du comté vienne faire son tour tous les jours, cela ne me dérange pas. Mais qu'il ne vienne pas, comme M. Poisson le disait, avec un grand groupe pour faire des "blitz". Cela, on ne l'accepterait pas. Que le député ou les candidats viennent faire leur tour la journée des élections, on est d'accord là-dessus. Il n'y a pas de contrainte à cela. L'idée est d'éviter le harcèlement auprès de nos gens.

M. Poisson: J'ajouterais un autre point d'information. À l'intérieur de nos établissements, il y a aussi des comités de bénéficiaires. Souvent, les comités de bénéficiaires demandent à la direction générale d'empêcher toute sollicitation, ce qu'ils appellent du porte à porte, du chambre en chambre. Ils considèrent que... Dans leur chambre, ils ne veulent pas. Ils sont inquiets. Les gens ne sont pas identifiés. Ils préfèrent - en tout cas chez moi - qu'en période électorale, les gens soient invités dans un grand salon, qu'ils soient avisés que M. Untel ou Mme Unetelle va venir. Là, ils descendent ou on les descend au grand salon ou dans la salle publique pour qu'ils puissent les rencontrer. Après cela, ces gens peuvent les voir individuellement, prendre un rendez-vous ou venir à l'heure des visites. Généralement, dans nos établissements, les gens vivent une certaine inquiétude par rapport à toute personne qu'ils ne connaissent pas, donc ils ne veulent pas de sollicitation et cela inclut évidemment les politiciens, qu'ils soient municipaux, fédéraux ou provinciaux. Plusieurs comités de bénéficiaires demandent qu'il n'y ait pas de porte à porte, aucun porte à porte, même pour les communautés réligieuses. Chez moi, en tout cas, il est interdit de faire du porte à porte. À la demande du comité des bénéficiaires, on doit les rencontrer au salon parce qu'il y a des gens qui donnent, qui sont trop gênés pour refuser et qui, après, viennent nous dire: on n'a plus de sous parce que M. le curé est parti avec mes 20 $ et c'était mes 20 $ pour les trois semaines à venir. Il est vrai un peu... Ces personnes sont comme cela.

M. Rochefort: D'accord. On a parlé un peu du volet sollicitation, si on parlait du vote lui-même. D'abord, j'ai une question d'information. Sauf erreur, il existe des dispositions pour le vote itinérant au niveau fédéral, est-ce que c'est en application dans vos institutions? Quel jugement portez-vous sur le vote itinérant puisque vous l'avez observé au moins une fois? Au fond, quand je vous dis: quel jugement... On ne remettra pas en question la loi fédérale, ce n'est pas le lieu pour le faire, mais ici, il faut décider si on introduira ou pas cette formule. Il y a des gens qui nous ont parlé de ces formules-là en bien et d'autres, en moins bien. Vous autres qui avez observé cela d'un niveau neutre politiquement, quant au respect de la dignité de la personne et de ses volontés, avez-vous, un certain jugement à porter sur ce mécanisme?

M. Girard: M. Vaillancourt ou M. Poisson.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Par expérience, je peux vous dire que j'ai chez moi des résidents qui sont alités, tout à fait lucides, mais absolument incapables de se déplacer: ils ont 88 ans ou 90 ans et ils sont grabataires. Ils lisent encore les journaux et regardent la télévision, ils sont au courant de ce qui se passe et ils veulent voter. L'expérience a été vécue aux dernières élections fédérales, ces gens-là ont pu exprimer leur vote. L'officier rapporteur s'est promené avec son urne et tout le groupe s'est rendu dans les chambres. Trois ou quatre personnes et même plus ont eu l'occasion de profiter de ce service.

M. Rochefort: Cela s'est limité à trois ou quatre personnes?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Je vous dis trois ou quatre, c'est peut-être dix.

M. Rochefort: Non, mais l'ordre de grandeur quant à la taille de votre établissement?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Sur 300, cela peut être environ une vingtaine. Je n'ai pas de statistiques précises.

M. Rochefort: Ce sont des gens qui ont voté parce qu'ils ont fait la demande pour que le vote itinérant se rende à eux ou qu'il y a eu...

M. Vaillancourt (Jean-Louis): C'est-à-dire que nous l'avons demandé pour eux.

M. Rochefort: Pour des gens bien précis.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Bien oui, nous les avons identifiés.

M. Rochefort: Non, non, c'est cela.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Ceux qui ne pouvaient descendre, on les a identifiés en disant: à telle chambre, il y a M. X; dans telle chambre, Mme Y...

M. Rochefort: D'accord, c'est correct.

M. Vaillancourt (Jean-Louis):... si vous voulez y aller. Cela n'a pas créé de problème parce que cela s'est fait...

M. Rochefort: Correct.

M. Vaillancourt (Jean-Louis):... dans l'ordre et dans l'espace d'une demi-heure, trois quarts d'heure environ.

M. Rochefort: D'accord. M. Girard: M. Laberge.

M. Laberge: C'est la même chose dans l'établissement que je dirige. Deux personnes étaient handicapées. La veille, nous avons fait parvenir au président du bureau des élections la liste des bénéficiaires qui nécessiteraient le vote itinérant.

M. Rochefort: Quant aux autres, ils sont descendus au bureau de votation qui était dans l'établissement.

M. Laberge: Bien oui. M. Girard: C'est cela.

M. Rochefort: Qui encadre généralement ce processus d'amener les bénéficiaires au bureau de votation de l'établissement? Le font-ils seuls, avec l'aide du personnel lorsqu'ils requièrent l'aide ou avec l'aide de bénévoles des formations politiques?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Je peux parler pour mon établissement. Généralement, pour aller voter, cela se passe comme pour aller au bingo ou un peu partout. C'est le même personnel ou les mêmes bénévoles qui sont là régulièrement. Le jour de la votation, on mobilise plus de bénévoles pour accélérer le processus de descendre et remonter, en fait, tous ceux qui sont incapables de se déplacer par eux-mêmes totalement. Certains le font avec une marchette, d'autres avec un fauteuil roulant. Le petit nombre de ceux qui sont mobiles s'y rend tout seul.

M. Rochefort: Dans vos règles internes, non écrites, est-ce vous permettez à des militants de formations politiques, le jour du vote, d'aller sur les étages chercher M. X. au lit 224 et de l'amener voter?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Le problème ne s'est jamais posé...

M. Rochefort: Cela ne se pose pas.

M. Vaillancourt (Jean-Louis):... chez moi.

M. Rochefort: Personne ne sollicite le pouvoir de faire cela.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Non, chez moi, cela ne s'est jamais posé.

M. Girard: M. Laberge.

M. Laberge: Dans l'établissement que je dirige, le comité des bénéficiaires, de concert avec le conseil d'administration, interdit aux formations politiques la sollicitation le jour de l'élection. Les bénéficiaires, s'ils veulent se choisir un transport pour aller voter, si le bureau de scrutin est à l'extérieur de l'établissement, libre à eux de choisir un transport appartenant à un parti politique. Le jour de l'élection, seuls les bénévoles inscrits au conseil des personnes bénévoles de l'établissement ou les familles peuvent assister les personnes handicapées. (11 heures)

M. Rochefort: Juste une dernière question, relative au recensement cette fois. Sauf erreur, dans vos établissements c'est à vous que revient le rôle de fournir la liste des personnes qui devraient être inscrites sur la liste électorale? C'est le cas?

M. Poisson: Je ne sais pas si cela nous revient, mais c'est pratique courante que cela se fasse comme cela.

M. Rochefort: Bon, l'une des propositions qui nous a été faite pour une autre catégorie d'établissements - mais j'imagine que dans la philosophie des gens qui vont rédiger la loi, on va essayer le moins possible de catégoriser toutes les mécaniques - notamment dans les établissements psychiatriques, voulait que ce soit au comité des bénéficiaires - et puisque vous avez, vous aussi, des comités de bénéficiaires, cela pourrait être les vôtres - que revienne la responsabilité de faire le recensement ou carrément que ce soit les recenseurs nommés par le directeur du scrutin ou que d'autres recenseurs soient nommés spécifiquement pour vos établissements. Comment réagissez-vous à ces deux choix par rapport à la situation présente?

Le Président (M. Marcil): M. Poisson,

brièvement.

M. Poisson: Disons qu'actuellement ce sont des recenseurs nommés par le directeur du scrutin du comté qui viennent...

M. Rochefort: Qui viennent vous voir, mais je parle d'accès direct aux bénéficiaires.

M. Poisson: Nous ne serions pas opposés à ce que ces gens viennent nous voir et nous disent: Écoutez, est-ce qu'on pourrait avoir la liste complète de vos bénéficiaires? On leur sortira alors la liste informatisée qui nous est produite par le ministère du Travail. Habituellement, c'est cela qu'on leur donne. On l'expurge des informations confidentielles. Les gens nous disent: Y a t-il de nouvelles admissions? C'est tout. Ce n'est pas parce que nous leur limitons l'accès aux bénéficiaires.

M. Rochefort: C'est parce que la loi, actuellement, fait que cela fonctionne ainsi. Si cela devait être des recenseurs qui allaient sur les étages ou, par exemple, l'hypothèse du comité de bénéficiaires, cela vous dirait quoi?

M. Poisson: L'hypothèse du comité de bénéficiaires comme telle ne me sourit pas tellement parce qu'il arrive assez souvent que ce ne sont pas nécessairement des personnes de l'intérieur qui en font partie. Il y a aussi les centres de jour. Les gens qui sont dans les centres de jour peuvent aussi être membres du comité de bénéficiaires et, lorsque aucune personne ne veut y participer, cela peut être des bénévoles de l'extérieur.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. M. le ministre, en conclusion.

M. Gratton: M. le Président, dans son mémoire, l'association se prononce favorablement sur l'opportunité du déplacement de l'urne à l'intérieur d'un établissement. Par contre, M. Poisson disait tantôt: L'une des raisons qui nous fait hésiter ou qui nous fait ne pas privilégier le vote par procuration, c'est qu'on doit respecter le droit des personnes de ne pas voter, si c'est là leur volonté et donc de se faire solliciter pour donner une procuration qui, soit dit en passant, serait interdite, mais pourrait violer ce droit. D'autre part, M. Girard disait que, dans certains établissements, on interdit le porte-à-porte parce que souvent des personnes sont trop gênées pour dire non. La question que je vous pose c'est: Est-ce que le fait de déplacer l'urne à l'intérieur d'un établissement avec le scrutateur, le greffier et les représentants des partis n'est pas tout aussi, sinon plus, intimidant quant au respect du droit de la personne de ne pas voter? Là, on s'en va dans sa chambre lui dire, tu as la chance de voter. Il y a, de même, la gêne que les personnes éprouvent de dire non.

J'aimerais que vous réagissiez à cela. M. Girard: M. Vaillancourt.

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Écoutez, c'est bien sûr que le gros bon sens préside à ces activités. Avant de désigner à l'officier scrutateur le nom et l'adresse des personnes qui devraient être visitées à domicile, entre guillemets, on s'enquiert évidemment auprès de ces gens s'ils veulent voter, justement pour éviter d'aller les déranger. S'ils veulent voter, on s'occupe d'aller chercher leur vote et s'ils ne veulent pas, on ne dérange personne.

M. Gratton: Est-ce que vous êtes en train de dire, M. Vaillancourt, qu'on pourrait possiblement permettre le déplacement de l'urne mais seulement à la demande de l'électeur?

M. Vaillancourt (Jean-Louis): Oui, oui, bien sûr.

M. Gratton: Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup M. Vaillancourt, M. Girard de même que M. Poisson et M. Laberge de vous êtes prêtés à cet exercice. Nous vous souhaitons un bon voyage de retour.

Maintenant, j'appellerais les représentants de la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec à s'avancer et à prendre place à l'avant.

Mme Francine Picard, présidente, M. Richard Geoffrion, directeur général, et M. Michel Trottier, secrétaire du conseil d'administration, nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission parlementaire. Vous êtes, M. Geoffrion?

Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec

M. Geoffrion (Richard): C'est cela. Je voudrais peut-être juste faire une correction au départ, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): C'est bon. Allez.

M. Geoffrion: À ma droite ici... Pour corriger... Mme France Picard, présidente du conseil d'administration, n'a pu se présenter aujourd'hui.

Le Président (M. Marcil): Cela va.

M. Geoffrion: C'est Mme Carole Hamel...

Le Président (M. Marcil): Carole?

M. Geoffrion:... Carole Hamel, vice-présidente du conseil d'administration qui nous accompagne et M. Trottier qui va faire l'essentiel

de la présentation, aujourd'hui.

Le Président (M. Marcil): Pour M. Trottier, vous aurez seulement à orienter le micro vers sa figure. C'est cela. Vous avez une vingtaine de minutes pour faire votre présentation...

M. Geoffrion: C'est cela.

Le Président (M. Marcil):... et on suivra avec une période de questions.

M. Geoffrion: C'est cela.

Le Président (M. Marcil): Allez-y.

M. Geoffrion: Alors on va laisser la parole à M. Trottier.

M. Trottier (Michel): Nous sommes heureux de vous livrer nos commentaires et recommandations concernant une plus grande accessibilité au droit de vote pour les personnes handicapées. Nous tenons à souligner que la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec, communément appelée COPHAN, est un regroupement multidéficiences d'une trentaine d'associations provinciales et d'une vingtaine d'associations régionales sans but lucratif vouées à la promotion des intérêts, à la défense des droits et à l'amélioration des conditions de vie des personnes handicapées.

Directement issue de la table de concertation des organismes provinciaux de promotion des droits et intérêts des personnes handicapées du Québec en 1982, notre organisme, la COPHAN, a vu officiellement le jour en octobre 1985. Il est l'aboutissement d'efforts soutenus de la part de Québécois et Québécoises ayant une déficience, pour se doter d'un organisme de représentation collectif. Si le besoin s'est fait sentir chez les personnes handicapées de posséder leur propre mécanisme de représentation, c'est que par le passé, on parlait toujours pour elles. Maintenant, ces personnes ayant une déficience physique, psychique, intellectuelle, organique ou sensorielle, plus de 486 000 au Québec, occupent de plus en plus leur place de citoyens et citoyennes de plein droit. Il est normal et primordial qu'elles parlent par et pour elles-mêmes.

Nous avons pour objectifs, entre autres, de promouvoir leurs intérêts et défendre leurs droits, de nous assurer de la mise en application effective de la politique d'ensemble "À part... égale!" avant la fin de la décennie des personnes handicapées en 1992 et de sensibiliser les instances gouvernementales et décisionnelles, le public et les personnes handicapées.

Ce bref aperçu de notre existence, nous en sommes redevables pour une part à la reconnaissance de notre pleine participation et égalité par les Nations unies et je cite: "Ce sont souvent les personnes handicapées elles-mêmes qui ont entrepris de mieux faire comprendre le processus de l'égalisation des chances et qui ont plaidé en faveur de leur intégration dans la vie de la société. "

Plus près de nous, la politique "À part... égale!" dit: "Comme tous leurs concitoyens et concitoyennes, les personnes handicapées doivent avoir accès aux structures de pouvoir selon leurs aspirations et leur potentiel. On doit donc éliminer les barrières qui gênent leur participation et leur implication. Cet objectif doit être atteint dans tous les domaines de participation: vie politique, économique, culturelle, sociale. "

Notre participation aux auditions au sujet de la réforme de la Loi électorale est importante car c'est essentiellement par des mesures politiques, législatives et sociales que l'on assure aux personnes handicapées le droit de participer à la vie de leur société.

Nous adhérons au principe de l'égalité des personnes handicapées et des personnes non handicapées en pensant que ce principe implique que les besoins de chaque individu sont d'égale importance. Ces besoins doivent être pris en considération dans la planification de notre société québécoise et toutes les ressources doivent être mises en oeuvre pour assurer à tous et toutes, citoyens et citoyennes, une participation égale.

Il est entendu que les personnes handicapées peuvent jouer leur rôle dans la société et remplir les obligations qui incombent aux membres adultes de la collectivité. Cela signifie que les personnes handicapées ont les mêmes droits que quiconque. Elles ont les mêmes obligations. Elles ont le devoir de participer à l'édification de notre société. Par-delà leur déficience, leur invalidité et leur handicap, tel que défini par le Programme d'action mondial concernant les personnes handicapées et mis de l'avant par les Nations unies, nous ne saisissons pas en ces personnes suffisamment l'être humain. Pour une plus grande compréhension de tout geste posé à leur égard, nous devons axer notre attention sur les capacités des personnes handicapées et non pas sur leurs incapacités.

Compte tenu du fait que la responsabilité finale de remédier aux conditions qui accentuent leur handicap et de faire front aux conséquences de leur incapacité vous incombe, nous nous invitons à prendre en considération nos recommandations suivantes:

Une personne handicapée a le droit d'adhérer à un regroupemenet et d'y être active, sans discrimination basée sur une déficience ou les moyens qu'elle utilise pour compenser ses limitations fonctionnelles. Ce droit implique celui d'être acceptée aux assemblées, de pouvoir prendre la parole, quelle que soit sa façon de s'exprimer. Il implique aussi le droit de voter de manière adaptée, si nécessaire, qu'il s'agisse d'un vote secret ou non. On doit donc lui fournir les mêmes outils, textes, illustrations, etc., dans un média qui lui est accessible afin qu'elle puisse participer en toute égalité. "

Le droit de vote des malades mentaux. Compte tenu de la primauté du droit de vote dans une société libre et démocratique, de la diversité des situations englobées dans la notion d'incapacité mentale, de la difficulté d'établir des catégories d'incapables selon leur aptitude ou non à voter, de la faiblesse de l'impact réel sur le système électoral de l'obtention du droit de vote par les malades mentaux par rapport à l'importance morale de la reconnaissance d'un droit fondamental qui ne souffre aucune discrimination, de l'importance que la Loi électorale ait des modifications suivant l'esprit des propositions de réforme du Code civil, de l'importance morale de faire cesser cette discrimination qui est plus grande que l'influence d'un petit nombre d'erreurs sur le résultat d'un vote, selon nous, la restriction du droit de vote basée sur l'incapacité mentale, telle qu'édictée par l'article 54 de la Loi électorale, doit être levée complètement.

Nous recommandons l'octroi du droit de vote à toutes les personnes handicapées dont la nature de leur déficience se qualifie "malade mental" par la suppression pure et simple du paragraphe 4 de l'article 54. (11 h 15)

Compte tenu que l'exercice du droit démocratique constitue un pas vers la responsabilisation et l'autonomie de la personne, nous recommandons que la Loi électorale reconnaisse le principe de l'établissement de bureaux de dépôt itinérants, de même que de bureaux de scrutin itinérants ainsi que les critères généraux les régisssant afin de faciliter l'inscription sur la liste électorale et le vote des personnes handicapées et permettre l'établissement de tels bureaux.

Nous appuyons le principe d'accessibilisation du droit de vote pour plusieurs citoyens et citoyennes restreints à cet égard.

Il y aurait intérêt à ce que ces mesures s'appliquent non seulement pour les personnes à mobilité réduite, mais également pour toute personne handicapée, peu importe la nature de sa déficience et de sa limitation fonctionnelle.

Par conséquent, pour favoriser le plus large exercice possible du droit de vote, nous recommandons d'assouplir et de diversifier les conditions qui régissent la Loi électorale en tenant compte des besoins particuliers des personnes handicapées.

Nous recommandons que le principe visant à permettre le droit de vote par procuration pour certaines catégories de votants soit inscrit dans une démarche qui s'additionne à des mesures d'accessibilisation plus grandes des lieux de vote et que la personne mandatée pour exercer le droit de vote par procuration ne l'exerce pas pour plus de deux individus et ce, dans le but d'éviter qu'un seul individu s'arroge ce droit fondamental et individuel de façon massive, ce qui pourrait avoir une influence sur les résultats du vote dans un milieu donné. Nous tenons à souligner que le vote par procuration s'effectue à l'intérieur d'une procédure simple et bien définie.

Nous recommandons que les bureaux de vote soient situés dans un local spacieux et facile d'accès au public et nous comprenons, par cette recommandation, que tous les bureaux de dépôt doivent être munis d'un plain-pied. Nous recommandons également que le bureau des directeurs et directrices de scrutin soit également un dépôt facile d'accès aux personnes handicapées et de prévoir que le personnel électoral puisse déplacer l'urne pour faciliter le vote d'un électeur ou d'une électrice handicapé, y compris de l'amener, au besoin, à l'extérieur du bureau de scrutin, par exemple sur le terrain de stationnement ou sur le bord de la rue pour permettre à l'électeur ou I'électrice de voter dans une voiture.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Trottier. Avez-vous d'autres commentaires à ajouter, M. Geoffrion? Non? Nous allons donc procéder immédiatement à la période de questions.

Je vais reconnaître M. le ministre.

Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Je vous remercie d'avoir accepté de présenter un mémoire à cette commission. Il est très clair mais j'aurais quand même quelques questions à vous poser. Quand la confédération, je l'ai vu par votre mémoire, favorise l'établissement obligatoire de bureaux de scrutin dans les établissements de soins psychiatriques comme en Ontario, comment envisagez-vous que devrait se dérouler l'information partisane? Croyez-vous que les candidats des différents partis devraient aller rencontrer les malades à l'hôpital ou s'il y a une autre manière selon laquelle devrait se dérouler cette partie de l'élection?

M. Trottier: Je pense que la personne déficiente, qui a des problèmes de santé mentale, qui fait une démarche pour pouvoir voter doit avoir des possibilités d'information à l'intérieur de l'institution lors d'une quelconque soirée où on permet aux différents partis d'exprimer leur volonté.

Mme Bleau: Si une soirée était organisée pour rencontrer les candidats, c'est la manière qui dérangerait le moins les patients.

M. Trottier: C'est cela, les laissant libres d'y participer ou non.

Mme Bleau: Bien. Au nombre des critères à élaborer pour régir l'établissement de bureaux itinérants, vous dites qu'un bureau itinérant serait une bonne chose pour les handicapés. Le groupe qui s'est présenté avant vous nous a parlé seulement des établissements régis par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Dans les autres établissements qu'on appelle privés, est-ce que vous voyez également la

nécessité de donner les mêmes services? Contrairement à ce qu'on a dit, en tout cas, je connais certains établissements privés de mon comté où demeurent des gens avec un peu plus de moyens, mais, quand même, en perte d'autonomie et qui ne veulent à aucun prix sortir à l'extérieur de leur établissement. Voyez-vous les mêmes services à l'intérieur de ces établissements privés que ceux accordés dans les établissements publics?

M. Trottier: Je pense qu'il faut être plus souple et penser en fonction de rendre davantage accessible une possibilité de vote à ces personnes. Si cela a lieu, si on peut rendre la chose possible, cela pourrait favoriser un grand nombre de personnes.

Mme Bleau: Alors vous favorisez qu'il n'y ait pas de différence entre les établissements privés qui en auraient besoin et les établissements publics.

M. Trottier: Ce sont des citoyens comme les autres.

Mme Bleau: Bien. Une autre question. Si le vote itinérant était introduit, la décision d'en tenir un et l'identification des endroits visités devraient-elles être à la discrétion du directeur du scrutin ou, au contraire, est-ce qu'il devrait être tenu de répondre à toute demande qui serait faite dans ce sens-là par les établissements ou par les gens?

M. Trottier: Je pense que le directeur du scrutin peut voir les besoins exprimés, prendre une part de responsabilité et voir dans quelle mesure il peut y répondre.

Mme Bleau: Mais devrait-il attendre d'en avoir la demande ou devrait-il plutôt déterminer, parmi tous ces établissements, lesquels pourraient en avoir besoin ou non?

M. Trottier: II doit au moins s'arranger pour connaître le groupe de personnes cible, de votants qui vont se présenter. À ce moment-là, connaissant la clientèle, il verrait les besoins susceptibles d'être satisfaits.

Mme Bleau: Si j'ai bien lu votre mémoire, vous n'êtes pas, au départ, contre le vote par procuration.

M. Trottier: Non, on n'est pas contre. Mme Bleau: Au contraire.

M. Trottier: C'est un dernier recours. Vous savez, c'est toujours en fonction de rendre les choses accessibles. Il ne faut quand même pas exagérer. Si, pour certaines personnes, cela correspond à leurs besoins de voter par procura- tion, à ce moment-là, c'est un moyen de plus et il ne faut pas le mettre de côté.

Mme Bleau: Mais, dans votre rapport, est-ce que vous voyez ce vote par procuration réservé seulement aux handicapés physiques ou mentaux ou est-ce qu'on pourrait l'étendre à toutes les catégories de personnes qui pourraient en avoir besoin?

M. Trottier: Je pense qu'il devrait être étendu. C'est sûr qu'à la confédération, on vous parle de la clientèle des personnes handicapées physiques, intellectuelles ou psychiques. Mais ce que la confédération veut, c'est que les personnes handicapées soient traitées sur le même pied que n'importe quel autre individu, en citoyen. Les besoins qui rejoignent ceux des personnes handicapées ne sont pas tellement différents de ceux de l'ensemble de la société. Il se peut fort bien que d'autres personnes, dans d'autres contextes, aient des besoins similaires et, à ce moment-là, il s'agit d'y répondre si on veut favoriser une plus grande participation de la population et la rendre davantage consciente de ses responsabilités.

Mme Bleau: On parle de bureaux de scrutin ou de bureaux de dépôt de plain-pied, croyez-vous qu'on devrait apporter d'autres mesures ou si elles sont suffisantes?

M. Trottier: II y a peut-être un fait qu'on oublie souvent, c'est toute la question du transport. Par exemple, certaines personnes dont les mobilités sont réduites, ne peuvent voyager en taxi et on leur envoie une auto ordinaire pour favoriser leur présence au bureau de scrutin. À ce moment-là, on devrait favoriser le transport adapté, le rendre davantage accessible durant cette journée-là pour donner une chance aux électeurs. Mais le fait que ce soit de plain-pied améliorerait énormément les conditions.

Mme Bleau: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marcil): Je vais maintenant reconnaître M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui. Je voudrais remercier la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec d'avoir profité de l'occasion qu'on leur a offerte de venir, probablement pas pour la première fois, exprimer leur point de vue sur des questions qui, je l'ai mentionné à plusieurs reprises, sont susceptibles de recevoir le meilleur éclairage possible.

Par un heureux hasard, on se rend compte, et je pense que c'est correct, que les organismes qui ont des préoccupations communes s'expriment sur des sujets communs. La plupart des intervenants qui sont venus en commission parlementaire ont presque toujours touché les clientèles dites un peu plus en difficulté. D'abord, vous

posez le principe, la question fondamentale du droit de vote pour les personnes handicapées physiques ou mentales, en particulier mentales, parce que les handicaps physiques ne posent pas de problème. Je veux vous signaler que vous réaffirmez avec vigueur, précision, détermination qu'il y a un problème avec l'article 54, particulièrement au paragraphe 4 de la loi actuelle, et vous avez raison.

On peut bien tourner autour du pot, mais nous sommes prêts comme société, compte tenu des expériences faites ailleurs, de l'évolution des mentalités dans la population, même si cela ne va pas, et avec raison, au rythme que vous souhaitez, je pense que les mentalités ont évolué au point d'arriver à la conclusion qu'on ne peut pas discourir sur l'intégration et les belles politiques, etc., si à un moment donné cela ne se traduit pas comme tout le monde. Pour traduire comme tout le monde que ce n'est pas juste un discours, je pense que le droit de vote doit être accordé sans nuance aux handicapés mentaux. C'est ce que vous réclamez avez raison et, personnellement, je n'ai pas de problème à vivre avec cela.

Pour ce qui est du... Ma question, mon dada fatigant, c'est le vote par procuration. Tout en vous respectant énormément, j'étais surpris de vous entendre répondre, tantôt, à la question posée par la députée de Groulx: Oui, nous, nous sommes pour cela parce que notre objectif est de rendre les choses plus favorables, plus faciles. Vous le dites sans mesurer la signification d'octroyer aux personnes âgées affligées d'un lourd handicap sur le plan mental, ce genre de tractations, ce genre de situation que peut créer le vote par procuration alors qu'on a toute une autre série d'alternatives: déplacement de l'urne, possibilité de multiplier les jours de vote par anticipation pour faciliter cet exercice. Quant au vote par procuration, compte tenu des dangers de manipulation très grands, personne ne m'a convaincu jusqu'à maintenant qu'il n'y a pas lieu de retenir toutes les autres hypothèses avant de l'envisager.

Ma première question est la suivante: Vous, qui représentez une série d'organismes provinciaux regroupant des personnes handicapées, quelle est votre réflexion - je ne veux pas savoir si vous êtes pour ou contre, vous l'avez exprimé dans votre mémoire - sur les dangers particuliers que représente le vote par procuration, en particulier dans les institutions où il y a une forte concentration de personnes lourdement handicapées?

Mme Hamel (Carole): Au point de départ, de toute façon, il faut nuancer l'assertion voulant que la COPHAN, la Conféfération des organismes provinciaux, donne un appui inconditionnel au vote par procuration. C'est déjà un peu nuancé dans le mémoire lorsqu'on dit que cette mesure s'ajoute à différentes mesures dont le vote par anticipation, les mesures d'accessibilité et de mobilité des urnes. Je pense qu'il s'ajoute à une série. On pense, fondamentalement, que ce principe peut être acceptable. Malheureusement, on n'a pas élaboré sur tous les dangers qui sont réels, parce qu'il ne faut pas oublier que le droit de voter, le droit d'exercer son choix politique est un droit fondamental de l'individu, un droit qui doit s'exercer d'une façon personnelle. Donc, pour aliéner en partie en confiant cette mission à une autre personne, il faut avoir vraiment confiance. (11 h 30)

Notre réflexion s'est vraiment articulée, d'abord, sur la mise en exercice de toutes les mesures pour "accessibiliser" le vote. Cela veut dire, comme le disait notre confrère, l'accessibilité au transport. Si on pense qu'une journée de vote, c'est très limité dans le temps, si on pense à toutes les difficultés que les personnes handicapées ou les personnes qui ont des problèmes de mobilité peuvent affronter, c'est important "d'accessibiliser" le transport, les lieux où elles votent. On peut, également, à cause de ces problèmes, jouer avec toute l'action du temps en visant le vote par anticipation justement et, en dernière mesure, avec le vote par procuration.

On n'est pas contre le principe, mais c'est une mesure qui s'ajoute aux autres mesures qui, pour nous, apparaissent prioritaires.

M. Gendron: Cela va. Tantôt, l'Association des centres d'accueil préconisait d'envisager la possibilité d'avoir une journée plus particulièrement réservée pour toutes les personnes - pas juste les personnes âgées - présentant des problèmes quelconques, que ce soit des problèmes d'accessibilité physique ou autre, des problèmes de mobilité, de handicap et ainsi de suite. Comment cela vous sourit-il? Est-ce que vous êtes favorable à cela? Envisagez-vous cela?

Mme Hamel: Je pense que cela peut être une mesure intéressante à analyser. Par contre, il faut vérifier... Quand on pense à réserver une journée comme telle, cela peut porter préjudice, par exemple, à la confidentialité dans le sens où il y aura peut-être moins d'électeurs qui seront sur la route cette journée-là. Donc, il y a des mesures à prendre pour préserver cette confidentialité et ce grappin partisan qui pourrait s'établir à l'égard de ces personnes.

M. Gendron: Mais pourquoi dites-vous cela rapidement. Je saisis très bien.

Mme Hamel: Oui.

M. Gendron: J'entends ce que vous dites. Je ne comprends pas la difficulté. À partir du moment où c'est juste une journée, tout reste là, il n'y a pas de divulgation quelconque, d'aucune façon.

Mme Hamel: C'est une variante du vote par anticipation.

M. Gendron: Oui? Mme Hamel: Oui.

M. Gendron: Est-ce que vous prétendez que, pour ce qui est du vote par anticipation, on n'a pas de bonnes idées sur la façon dont cela se passe?

Mme Hamel: Notre organisme ne s'est pas vraiment penché sur l'alternative présentée par l'Association des centres d'accueil. Cette suggestion pourrait éventuellement être analysée, repensée et discutée entre nous pour voir si cette mesure-là ne discrimine pas ou ne "ghet-toïse" pas les groupes, les personnes que nous représentons.

M. Gendron: M. Trottier, j'aimerais vous entendre, si c'est possible, sur le vécu bien concret, les difficultés réelles et quantifiables rencontrées dans les buraux de scrutin en ce qui a trait à l'accessibilité physique. C'est grave, c'est peu, beaucoup, passionnément... Y a-t-il une espèce d'ordre de grandeur? Pour nous, c'est difficile. Le DGE fait bien son possible, il donne des statistiques, nous, nous regardons un peu comment cela se passe dans nos circonscriptions, mais nous n'avons pas la vision d'un organisme comme le vôtre.

Votre organisme devrait être en mesure de nous indiquer là-dessus qu'on ne l'a pas du tout. C'est cela que je veux savoir. Est-ce qu'on l'a un peu, est-ce qu'on ne l'a pas du tout, est-on encore loin de ce que vous souhaitez comme accessibiité réelle? Encore là, on ne veut pas seulement avoir des discours, il faut avoir des informations pertinentes pour apporter les correctifs qu'il y a lieu d'apporter.

M. Trottier: Disons que le problème... Autrefois, j'étais en institution. À ce moment-là, c'était assez facile d'avoir accès aux bureaux de scrutin. Mais il faut penser qu'avec la désinstitu-tionnalisation, on vit de plus en plus un éparpillement. À ce moment-là, ce sont réellement les questions de transport qui deviennent difficiles et le fait d'être sensibilisé davantage à l'importance pour tout citoyen de s'assurer de cette responsabilité d'aller voter.

Il faut penser également, en ce qui concerne les personnes handicapées, à toute la formation d'intégration sociale qu'elles ont à vivre. C'est récent. Les personnes handicapées n'ont pas nécessairement eu la chance d'être suffisamment stimulées à la participation sociale. C'est nouveau. Les personnes qui s'impliquent font des démarches pour obtenir l'information suffisante pour pouvoir prendre des décisions.

M. Gendron: Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Puisqu'il n'y a pas d'autres questions, nous vous remercions de vous être déplacés pour assister à cette commission parlementaire. Naturellement, les points que vous soulevez dans votre mémoire ont été soulevés par d'autres regroupements. Par contre, il est important pour nous de vous entendre répondre de vive voix à certaines questions. Cela nous éclaire davantage et nous permettra de nous ajuster en fonction de nos besoins particuliers. Merci beaucoup, Mme Hamel, M. Geoffrion, M. Trottier et bon voyage de retour!

Mme Hamel: C'est nous qui vous remercions.

Le Président (M. Marcil): Cela va. J'inviterais à ce moment-ci le Parti des travailleurs du Québec à prendre place dès que les sièges seront libres.

Nous allons poursuivre. M. Lachance.

Parti des travailleurs du Québec

M. Lachance (Gérard): Un instant, je vais me placer vis-à-vis d'un micro. Gérard Lachance, chef du Parti des travailleurs du Québec.

Le Président (M. Marcil): Nous vous donnons le temps de présenter votre mémoire. Ce sera suivi d'une période de questions. Allez-y.

M. Lachance: Merci. Bonjour. Le Parti des travailleurs du Québec, dont je suis l'un des fondateurs, a été fondé le 26 avril 1974. Il a tenu son premier congrès les 14 et 15 février 1975, y a adopté ses statuts et règlements, le manifeste et les 24 points devant servir de base à l'élaboration d'un programme.

Dès 1976, lors de l'élection générale, le Parti présente douze candidats et, avec un fonds électoral de 1500 $, récolte 1249 votes. Par la suite, nous avons participé à plusieurs élections partielles et à l'élection générale de 1981. Nous avons été "désautorisé" lors de l'élection générale de 1985, notre dixième candidat n'ayant pu déposer sa candidature à temps, parce qu'il n'y avait plus de formule au bureau de scrutin où il devait la déposer. Nos neuf autres candidats sont donc devenus des candidats indépendants, sans l'appellation. C'est ainsi que le parti n'a pu participer à cette élection.

Comme parti, nous nous retrouvions à la case zéro jusqu'au mois de décembre 1986, où nous avons demandé une nouvelle autorisation. Nous nous sommes alors posé la question sur les possibilités, pour des gens ordinaires, de pouvoir s'organiser politiquement dans notre système bipartite alors que les lois qui régissent les partis politiques et le mode de scrutin ont été élaborées par et pour les deux grands partis.

Depuis 1867, le Québec a toujours vécu dans le bipartisme, régime électoral qui se rattache à l'esprit sportif du peuple britannique et qui le porte à considérer les luttes politiques comme un match entre équipes rivales, comme le dit

Salvador de Madariaga, cité par Maurice Duver-ger dans son livre Les partis politiques, publié chez Point, Paris, 1981.

Pour terminer cette présentation, nous aimerions citer Paul-André Comeau qui, dans un éditorial du Devoir, le jeudi 14 novembre 1985, écrivait: "Le même vieux modèle impose encore ses séductions toutes britanniques, dès que se profile l'ombre du pouvoir gouvernemental. Il est ironique de voir les dirigeants des deux principales formations se féliciter du pluralisme qui caractérise désormais la société québécoise. Il est tout aussi ironique de voir ces mêmes leaders, une fois devenus législateurs, oublier ce thème du pluralisme. Un régime électoral qui, par sa mécanique, réduit le jeu et le débat partisans à deux possibilités, ne reflète pas ce pluralisme social. C'est se gargariser de mots, c'est se raccrocher à une conception typiquement britannique du jeu électoral. Parvenus au pouvoir ou sur le point d'y accéder, nos hommes politiques succomberaient-ils tous à une forme d'acculturation politique qu'explique un siècle et demi de gouvernement responsable vécu à l'anglaise? Ni la démocratie ni les hommes politiques n'ont gagné à perpétuer un état de fait qui nie l'expression, au niveau parlementaire, du pluralisme social. " Actuellement, le Parti des travailleurs du Québec compte une cinquantaine de membres actifs et environ 3500 sympathisants répartis dans la région montréalaise, dans l'Outaouais et dans les Laurentides.

Le vote des Québécois hors Québec. Nous sommes d'accord que le droit de vote aux Québécois hors Québec soit accordé à la demande expresse des personnes intéressées à participer à la vie politique du Québec, quelles que soient la raison et la durée de leur absence.

Les Québécois vivant dans d'autres provinces pourraient s'inscrire directement sur une liste au bureau du DGE qui, lors d'élections générales, pourrait fournir à ces personnes une certaine documentation sur les partis autorisés et sur leurs candidats. Cette documentation pourrait alors apparaître comme une dépense électorale pour les partis et être comptabilisée à partir du nombre d'inscrits sur la liste du DGE.

Pour les Québécois à l'étranger, la même procédure pourrait être envisagée après entente avec le gouvernement fédéral pour l'utilisation soit des ambassades, soit des consulats. Le vote de ces Québécois pourrait être ajouté à ceux de la circonscription électorale de leur dernière adresse postale au Québec.

Vote des étudiants et travailleurs temporaires. Pour nous, ce n'est pas l'application de l'article 60 qui pose un problème de fond quant aux conséquences de son application sur la représentativité et la légitimité du représentant élu d'une circonscription, mais bien le mode de scrutin qui fait que gagner des élections, c'est gagner des sièges et non gagner une majorité populaire. Cela crée des distorsions et une situation où un élu gagne son siège par un vote minoritaire. Voir le document du ministre d'État à la réforme électorale, 1982.

De plus, il faut tenir compte d'une autre réalité. Les étudiants et les travailleurs temporaires ne sont pas plus temporaires que les centaines de milliers de gens qui déménagent tous les ans, entre deux élections générales et qui, pour choisir leur nouveau domicile, ne tiennent aucunement compte du représentant élu de leur nouvelle circonscription, parce qu'ils ne l'ont pas élu. Ceci s'applique davantage pour les circonscriptions urbaines et le Québec est plus urbain que rural. Nous oserions même avancer que l'implication politique est plus motivée par des thèmes comme la santé, l'éducation, l'emploi, la question nationale etc. que par l'élu.

Nous croyons que les étudiants et les travailleurs temporaires devraient avoir le choix de voter au lieu temporaire ou au lieu du domicile et, dans ce dernier cas, de pouvoir se prévaloir du vote par procuration.

Déclaration de candidature. Tout en nous référant au document de réflexion et de consultation sur la révision de la Loi électorale, nous aimerions faire des commentaires sur la cueillette des signatures et sur les dépenses des candidats à partir de notre propre expérience.

Tout candidat membre d'une des formations principales peut obtenir ses signatures lors d'une assemblée d'investiture et le tour est joué. En ce qui nous concerne, comme nos membres et sympathisants sont éparpillés, nous allons de porte en porte pour recueillir les signatures d'appui à la candidature et nous trouvons cette pratique très démocratique car nous nous adressons directement aux électeurs et nous prenons soin de nous assurer que les personnes qui signent ont la qualité d'électeurs. (11 h 45)

En ce qui nous concerne, la cueillette de 60 signatures nous semble suffisante. A cause de candidatures farfelues, doit-on rendre la vie encore plus difficile aux tiers partis qui, entre deux élections générales, maintiennent un siège social, ont des activités régulières et s'impliquent dans la vie politique du Québec? Nous nous opposons fermement à la réintroduction d'un dépôt en argent, car il n'empêchera pas les candidatures farfelues mais empêchera celles des gens ordinaires qui ne pourront pas se payer ce luxe, même si le dépôt est remboursable après l'élection. Il en est de même pour les partis dont les membres sont des petites gens et des laissés pour compte ainsi que pour les candidats. La politique redeviendrait une activité pour les gens des classes aisées.

Les dépenses des candidats. Il est arrivé, au PTQ, que les fonds du parti aient servi à défrayer les dépenses des candidats, car ces derniers étaient ou chômeurs ou assistés sociaux ou petits salariés. N'ayant rien dépensé parce qu'ils n'avaient rien, ils n'ont pu faire autrement que de déclarer qu'ils n'avaient rien dépensé. Déjà exclus de par leur situation économique,

doit-on les exclure de l'activité politique s'ils veulent s'impliquer et défendre leurs intérêts? Au PTQ, nous croyons que les dépenses électorales des candidats pauvres doivent être faites par le parti car ils se présentent pour le parti. Pour cette section de la Loi électorale, nous favorisons le statu quo.

Vote par procuration. Nous soutenons que les désavantages du vote par procuration sont minimes par rapport à l'exercice du droit de vote dont pourraient se prévaloir plusieurs milliers de personnes qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent se rendre au bureau de scrutin le jour du vote. Nous appuyons l'introduction du vote par procuration. Nous croyons même que plutôt que d'être une source de fraude, il freinerait certaines pratiques qui entachent encore notre système électoral.

Vote de l'électeur non inscrit. Quelles que soient les raisons pour lesquelles des électeurs ne se sont pas inscrits sur la liste électorale, tout devrait être mis en oeuvre pour qu'ils puissent s'inscrire et exercer leur droit de vote. Nous appuyons la solution suivante: l'inscription en tout temps au bureau du directeur du scrutin jusqu'à trois jours avant le jour du scrutin et l'émission d'un certificat d'autorisation à l'endroit de l'électeur.

Autorisation d'un parti politique. Le PTQ est l'un des douze partis politiques qui s'est vu retirer son autorisation lors de la dernière élection générale pour la raison déjà évoquée. Il est normal pour les membres de la classe politique venant de l'élite d'ignorer ce que représente pour les gens des classes inférieures de s'organiser politiquement. Moi, je ne vote plus. C'est une phrase que nous avons entendue souvent lors du porte à porte dans les milieux populaires et ce, à tel point que nous avons décidé de faire une campagne d'inscription sur les listes électorales dans ces milieux et cela, même avant les prochaines élections. Que l'on parle de reserrer les exigences pour qu'un parti soit autorisé ou autorisé de nouveau à chaque élection générale et l'on fera taire beaucoup de gens en les éloignant des voies légales et démocratiques.

À la lecture de la documentation, on a l'impression qu'un parti politique, pour être sérieux, devra être capable de déposer une certaine somme d'argent auprès d'une institution gouvernementale, devra aller chercher des milliers de signatures et présenter un grand nombre de candidats lors de l'élection générale et tout cela avant même de se faire connaître, d'avoir fait connaître son programme et son idéologie. Ceci fait totalement abstraction de la conception différente que peuvent avoir des gens concernant un parti politique et l'action politique. Le mot "sérieux", dans ce contexte, semble vouloir signifier: riche, nombreux et avoir déjà une bonne machine. Le reflet des deux principales formations devient ainsi un modèle et tout cela au nom d'une plus grande pratique démocratique. Nous sommes pour le maintien du statu quo et pour la remise entre les mains de l'électorat de la crédibilité électorale.

Statut du candidat officiel à la suite du retrait d'autorisation. Ayant eu à vivre cette situation lors de la dernière élection générale, nous suggérons que dans un tel cas, le candidat, à moins qu'il ne retire sa candidature, devienne automatiquement un candidat autorisé.

Financement des partis politiques par l'État. Depuis quelque temps, il est reconnu par plusieurs commentateurs politiques, analystes et même par des législateurs que les tiers partis sont les parents pauvres de la politique au Québec et, de ce fait, se retrouvent dans un cercle vicieux: pas d'argent, pas de vote, pas de vote, pas d'argent. Et, comme l'a si bien dit un ancien premier ministre du Québec: "On ne va pas chercher des votes avec des prières".

Nous nous retrouvons donc dans une situation où il y a deux partis riches qui se partagent toutes les allocations gouvernementales et il y a les autres, qui ont peu et qui ne reçoivent rien. Pour être très britannique, la ligne de départ des coureurs n'est pas la même pour tous lors du déclenchement d'une élection. Un parti politique est souvent à l'image de ses membres et de ses sympathisants. Lorsque ces derniers appartiennent aux couches défavorisées, le parti l'est. Pour vérifier la véracité de cet énoncé, il n'y a qu'à consulter les listes d'électeurs qui ont donné 100 $ et plus, publiées dans le rapport du DGE sur les états financiers des partis.

Maintenir un bureau, l'éclairer, le chauffer, payer les taxes représentent souvent plus de 80 % des recettes, ce qui laisse peu pour l'action politique proprement dite. Les tiers partis n'ont même pas droit à des documents comme les projets de loi et la Gazette officielle du Québec. Ils doivent les acheter ou aller les consulter dans les bibliothèques, car les partis ne peuvent se payer le luxe de s'abonner. Comment, dans cette situation, diffuser un programme, organiser des activités politiques et participer à la vie politique comme parti?

À cette aisance des deux grandes formations, il faut ajouter leur présence massive dans les médias tant écrits qu'électroniques et la comparer à l'absence presque totale de couverture des prises de position ou des activités des tiers partis. Nous nous fatiguons à payer des communiqués de presse qui restent lettre morte. Nous n'avons jamais oublié cette remarque d'un cadre d'un grand quotidien de Montréal: "Posez des bombes et on vous donnera la première page. " Comme vous pouvez le remarquer, le Parti des travailleurs du Québec n'a pas encore eu la première page d'aucun quotidien. Ce ne sont pas des conditions matérielles qui favorisent le pluralisme et son expression au niveau parlementaire. La démocratie n'y gagne pas.

Nous suggérons donc qu'une allocation minimale soit accordée aux partis autorisés ayant un bureau et des activités permanentes plus une

allocation par vote obtenu lors d'une élection générale.

Divulgation des contributions. En ce qui nous concerne: 1° quant à la nature des informations divulguées, la loi peut rester telle qu'elle est; 2° quant à la forme de la divulgation des informations, la loi peut imposer que la liste des donateurs soit alphabétique à l'échelle de l'ensemble du Québec; 3° quant au montant à partir duquel la divulgation est imposée, la loi peut être maintenue telle quelle, soit à partir de plus de 100 $.

Intervention des tiers en période électorale. C'est un sujet de fond et un problème de société. L'État contrôle les dépenses électorales des partis politiques tout en interdisant à tout autre individu ou groupe le droit de dépenser pour exprimer une opinion ou diffuser de l'information, pour intervenir dans une campagne électorale, ce qui a pour effet de brimer la liberté d'expression. Mais, en même temps, la liberté d'expression est directement liée à la capacité financière soit des individus, soit des groupes qui voudraient intervenir, car il est de plus en plus difficile de s'exprimer sans dépenser si l'on veut que le propos atteigne véritablement le public.

Pour illustrer cette situation, comparons la capacité d'intervention du Conseil du patronat à celle d'un groupe de jeunes assistés sociaux entre 18 et 30 ans. Pour le moment, nous favorisons l'approche suivante: modifier la définition des dépenses électorales pour exclure les frais engagés par des personnes ou des groupes sans caractère politique partisan pour faire connaître leur opinion ou pour informer, à condition que cet acte ne soit pas le résultat d'une entente avec un candidat ou un parti, tout en fixant un maximum pour de tels frais et trouver un moyen pour que les moins nantis puissent, eux aussi, exercer leur droit d'expression.

Temps d'antenne gratuit et débat des chefs. Nous nous retrouvons, encore ici, avec un problème qui découle de notre système électoral et de notre mode de scrutin qui favorisent deux formations politiques, ainsi que d'une certaine conception de la politique. On ne peut parler d'égalité des chances entre partis et candidats et de répartition équitable qualitativement et quantitativement quand la loi ne favorise que les deux partis présents à l'Assemblée nationale. La politique est une certaine forme de pédagogie et il est impossible de faire de la pédagogie en quelques minutes. L'apothéose des images implique l'évacuation des idées. Un débat des chefs est un événement sportif, genre Canadien contre Nordiques, avec chacun ses partisans marquant les bons points.

Toutes les législations en vigueur tendent seulement à limiter le poids de l'argent, du marketing et de la publicité dans la démocratie électorale comme si celle-ci était condamnée à rester sur la défensive, reconnaissant implicite- ment que la politique est bien une marchandise de plus à consommer, la promotion des ventes électorales, un spectacle à financer dont il faut tempérer les excès!" Christian de Brie, Monde diplomatique, avril 1988.

Une solution pourrait être retenue: Permettre un débat entre les chefs des partis présents à l'Assemblée nationale et permettre un autre débat avec l'ancien premier ministre et les chefs des partis d'opposition non représentés à l'Assemblée nationale. Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Lachance.

Je vais maintenant reconnaître M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. En tout premier lieu, M. Lachance, j'aimerais vous féliciter sincèrement pour la qualité, la clarté et la précision de votre mémoire. Compte tenu des moyens dont votre parti dispose, c'est vraiment quelque chose d'impressionnant et c'est tout à votre honneur. Cela fait trois jours qu'on est ici et je peux vous assurer que vous avez fait un travail de clarté et de précision qu'on ne voit pas souvent. Je pense que cela démontre le sérieux de votre intervention. Votre mémoire est tellement précis sur certains points que cela va peut-être, je pense, éviter des questions très longues et des débats très orageux.

Vous avez soulevé des points qui ont été aussi soulevés par un autre parti politique, le Parti indépendantiste entre autres, concernant l'information gouvernementale, que ce soit les avant-projets de loi, les projets de loi, les rapports de sociétés d'État, bref, tout ce qui sort du gouvernement, et Dieu sait s'il en sort beaucoup. Je pense que, là aussi, notre société se doit d'informer tous ses citoyens, tous ses regroupements de citoyens, ses partis. Je n'aime pas beaucoup les mots "tiers partis", parce qu'on n'a pas le droit, je pense, de qualifier les citoyens de tiers. On est tous égaux au Québec, à mon avis. Appelons cela de petits partis politiques, dans le bon sens du mot. Je pense que vous avez droit à de l'information. En tout cas, c'est une question qu'on s'est posée au cours de la commission et c'est une question à laquelle on devra répondre.

Vous avez également souligné un autre point important, celui de faire la première page. Je souhaite qu'on trouve un moyen pour que vous la fassiez sans appliquer la phrase célèbre du cadre du journal. Ce n'est quand même pas la meilleure façon.

Vous avez soulevé un autre point - cela m'intrigue parce que beaucoup de partis en ont parlé, on en a même parlé chez nous - quant à la forme de divulgation des informations qu'on peut imposer et quant à la liste aphalbétique des donateurs à l'échelle du Québec. On sait que c'est un sujet qui a fait l'objet de litige. Certains partis voudraient que ce soit fait de

façon alphabétique et dans l'ensemble du Québec, d'autres par région, d'autres par comté, et ainsi de suite. Pouvez-vous préciser un peu là-dessus? Ce sera ma seule question parce que le reste est très clair. (12 heures)

M. Lachance: Disons que je suis parti de notre propre situation pour prendre cette position. À cause du nombre de membres que nous avons, nous aurions parfois à faire une liste pour un seul nom dans une circonscription et une autre liste de quatre ou cinq noms dans une autre, etc. Donc, cela ajouterait. Si on fait une liste par ordre alphabétique pour la totalité de ce que nous avons, je trouve que cela facilite et le travail du parti et le travail de consultation pour les gens de l'extérieur. C'est pour cela que je l'ai mise comme cela.

M. Maltais: Un dernier petit point concernant le vote par procuration. Vous semblez donner votre accord total au vote par procuration et vous ne voyez pas là une façon de manipuler. Au contraire, vous y voyez une plus grande expression de la voie démocratique. Pouvez-vous nous donner un peu plus d'explications là-dessus?

M. Lachance: J'ai connu le vote par procuration ayant vécu en Europe pendant plus de neuf ans. J'ai vu la pratique du vote par procuration et, d'après ce que j'ai vécu à l'époque, j'y ai trouvé un avantage parce que cela donnait la chance à beaucoup plus de gens de voter.

Quant à la question de manipulation qui a été soulevée tout à l'heure par le groupe qui nous a précédés, je crois que, comme le vote par procuration s'adresse d'un individu à un autre, c'est pour cela que nous mettons - je ne sais pas si je l'ai mentionné - le vote par procuration pour une personne seulement.

Donc, le risque de manipulation n'existe pas lorsque c'est une personne. Personnellement, si je connais très bien une personne et que je lui dis: Voici mon vote pour tel candidat, tel parti, etc., cela ne diminue pas mon droit et cela me permet de participer si physiquement ou autrement, je suis incapable de me présenter dans un bureau de scrutin.

M. Maltais: Je vous remercie beaucoup.

La Présidente (Mme Pelchat): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Rapidement, je voudrais/ vous remercier, M. Lachance, pour la qualité de votre mémoire. Considérant l'absence de moyens dont disposent les tiers partis comme vous le dites, vous avez quand même produit un mémoire très bien rédigé, très bien écrit, clair, rafraîchissant à certains égards. C'est peut-être le premier, depuis un certain moment, où il y a passablement d'éléments à caractère plus philosophique. On pourrait discourir pendant quelques minutes, parce que vous portez des jugements sur plusieurs choses. Je ne vous en fais pas reproche, au contraire. En plusieurs endroits vous portez des jugements. On devrait avoir plus de temps pour discuter sur votre perception des choses.

On pourrait s'amuser aussi un peu à certains endroits, mais uniquement dans le bon sens, pour se dérider. Quand vous parlez du débat des chefs, c'est un peu un événement sportif Canadien-Nordiques. Certaines élections, dans un contexte bipartite, ressemblent à cela aussi, sauf qu'en ce qui concerne les partielles, je trouve que les Nordiques ne gagnent pas souvent. Donc, ce n'est pas tout à fait cela. Il y a d'autres éléments. On peut sûrement qualifier les libéraux de Canadiens compte tenu de leur lien fédéral.

Au-delà de cela, M. Lachance, vous avez quand même touché des sujets qui nous préoccupent et sur lesquels le législateur se doit de progresser, encore là pour s'assurer que la démocratie puisse véritablement avoir des outils et des moyens de sortir du phénomène du bipartisme au Québec. Dans la société, il n'y a sûrement pas juste des tendances bipartisanes et, dans ce sens-là, vous suggérez entre autres, et c'est même un peu étonnant que le législateur n'y ait pas déjà pensé, que les partis dûment enregistrés aient à tout le moins des informations à caractère d'État. Vous l'avez évoqué et trois ou quatre groupes l'ont évoqué aussi. En ce qui me concerne je suis pas mal sûr que c'est réglé. Le législateur conviendra que les documents formels comme les projets de loi, les dispositions qui figurent à la Gazette officielle, les arrêtés en conseil, les règlements qui doivent lancer votre action politique au plan de la critique ou de l'appréciation, vous soient au moins fournis. C'est une heureuse remarque. Il y en a d'autres mais je ne les relèverai pas toutes. Je vais aller aux quelques questions que j'aimerais vous poser.

Ma première question concerne les étudiants et les travailleurs temporaires. Autant je crois votre mémoire passablement clair, autant, là-dessus je trouve que vous n'avez pas très clairement exprimé votre position. Vous avez plutôt porté le jugement, à savoir que les étudiants ne sont pas plus temporaires que d'autres catégories de travailleurs, mais cela ne nous dit pas exactement comment vous voudriez que soit comptabilisé l'exercice de leur droit de vote. Supposons que je sois étudiant dans la circonscription d'Abitibi-Ouest, mais que j'aille au collège de Rouyn-Noranda; c'est une situation pratique. La question que je vous pose est la suivante: est-ce que vous pensez que ces étudiants doivent effectivement voter davantage dans la circonscription où ils demeurent peut-être deux, trois ou quatre ans comme étudiants plutôt que dans celle de leur domicile? Est-ce que vous voulez que ce choix soit complètement libre, que ce soit l'étudiant qui décide d'être

inscrit ou non sur la liste électorale de la circonscription d'où il provient ou qu'il ait la capacité, parce qu'on ne peut être inscrit dans deux circonscriptions, en tout cas autant que possible, de ne pas voter là où il étudie? Quel est le véritable choix que vous suggérez d'inscrire dans la Loi électorale?

M. Lachance: L'étudiant aurait le choix de s'inscrire ou non là où il étudie lorsqu'il y a le décret d'élections générales. Il pourrait voter par procuration dans sa circonscription ou y aller le jour du scrutin, mais c'est lui qui déciderait. C'est l'étudiant qui déciderait si, oui ou non, il va voter dans la circonscription où il étudie ou dans celle où il demeure.

Il arrive souvent... Par exemple, à Montréal, beaucoup d'étudiants viennent de l'extérieur et y passent presque onze mois par année, parce qu'ils y restent pour travailler entre les sessions. Ils deviennent presque aussi permanents que ceux qui y demeurent. Si je parle des déménagements, c'est justement parce qu'il y en a tellement au Québec que l'étudiant n'est pas plus temporaire que celui qui déménage presque à tous les ans et qui se trouve à changer de comté.

Donc, il me semble que l'étudiant ou le travailleur temporaire devrait avoir le choix, mais c'est sûr qu'il doit s'inscrire à un endroit ou à un autre. C'est très clair. Si sa mère lui téléphone et lui dit: Je t'ai fait inscrire sur la liste, c'est à lui de décider s'il reste inscrit sur cette liste-là ou s'il lui dit: Non, lors de la révision, fais-moi biffer et je m'inscris dans la circonscription où je demeure dix ou onze mois par année. Il peut y avoir une implication politique de la part de l'étudiant dans le comté où il étudie et il ira chez lui probablement trois semaines ou un mois par année.

M. Gendron: Une deuxième question concerne le dépôt. Vous êtes assez catégorique sur le fait qu'exiger un dépôt pour les candidatures empêchera les gens ordinaires qui ne pourront pas payer. Pour le bénéfice de tout le monde, je veux juste rappeler que, dans presque toutes les provinces du Canada, il y a l'exigence d'un dépôt. Malheureusement, la plupart le relient à un pourcentage de vote quelconque pour avoir la possibilité d'être remboursé. Ce qu'il y a de nouveau dans la suggestion qu'on fait, c'est qu'il n'y a pas ce lien-là et c'est là que je diffère d'opinion avec vous. Je prétends qu'il est très gratuit d'affirmer qu'un dépôt, quand on sait qu'on a la garantie formelle qu'on sera remboursé, n'est qu'une formalité de contrôle pour s'assurer que quels que soient les candidats qui se présentent à quelque élection que ce soit et pour quelque parti politique que ce soit, on soit en mesure de s'assurer a tout le moins qu'il y a une espèce de lien organique qui oblige, pour toucher le dépôt exigé, un rapport au DGE pour fins de statistiques. Je pense que c'est normal, si on veut corriger des choses, d'avoir le portrait le plus exact possible de ce qui se passe, à savoir combien il y a eu de candidats indépendants, de tiers partis, ainsi de suite et ce n'est que ça.

Je veux juste vous dire que vous auriez raison si c'était comme la plupart des autres provinces. Si vous avez eu 50 % des votes du candidat élu, comme en Alberta, c'est 100 $ et vous êtes remboursé, ailleurs, c'est 15 % des votes valides, d'autres c'est 10 %... Au Québec, nous, dans notre réflexion en comité, nous nous sommes dit: II serait peut-être intéressant de réinstaurer cela, uniquement pour avoir la garantie que la personne qui veut le remboursement produise son rapport au DGE. Cela n'a pas de référence au vote. En 1988... moi, je ne vis pas dans un comté bien riche. Cela m'étonnerait... On sait que pour toutes sortes de raisons - un trois roues dangereux, un "seadoo" ou n'importe quelle bebelle - il y a un paquet de gens, c'est drôle, qui trouvent la capacité, même s'ils ne l'ont pas, d'aller chercher un emprunt de 250 $ ou de 300 $. Moi, je prétends que pour la valeur du geste démocratique d'être candidat à une élection du Québec il faut avoir une petite exigence surtout quand on rembourse. On lui dit: Tu as juste à faire ton rapport et on te rembourse. Je voulais juste savoir si vous étiez au courant que dans le rapport on ne maintenait pas de lien entre le dépôt et un pourcentage de votes?

M. Lachance: Oui, oui, je l'avais remarqué, mais comme je vous le disais, nous partons de notre propre expérience. Je me souviens qu'en 1976, on devait déposer 200 $ à cette époque.

M. Gendron: Oui.

M. Lachance: On avait 18 candidats de prévus pour notre première fois, nous, en 1976 et nous avons été obligés de descendre à 12 parce qu'on ne pouvait pas trouver les 200 $ pour les autres. Une fois que les 200 $ ont été payés, nous nous sommes ramassés avec très peu pour le reste de l'élection générale. C'est pour cela que je disais que dès qu'on est obligé de faire un dépôt, cela nous enlève des possibilités, surtout dans la situation où nous sommes.

M. Gendron: Oui, mais c'est aussi la situation qui existait à ce moment-là. C'est cela que je voulais savoir.

M. Lachance: Aussi, oui.

M. Gendron: D'accord. Sur le vote par procuration, j'aimerais que vous soyez explicite, surtout que vous portez un jugement à savoir que le vote par procuration, selon vous, aurait comme conséquence de freiner certaines pratiques qui entachent notre système électoral. Donc, d'après vous, autoriser le vote par procuration, c'est même un avantage parce que cela freinerait

certaines pratiques douteuses. J'aimerais que vous m'en précisiez quelques-unes. Comment pouvez-vous affirmer qu'un vote par procuration aurait comme conséquence de freiner certaines pratiques douteuses?

M. Lachance: C'est que la possibilité du vote par procuration ferait que des gens voteraient alors qu'on sait qu'il existe, depuis les années 1800, une pratique qu'on appelle les télégraphes. Cela aiderait à éliminer les possibilités d'aller voter pour d'autres parce que les gens auraient la possibilité de voter.

M. Gendron: Mais d'après vous, si on l'accordait, pour quelle raison devrait-on permettre le vote par procuration et pour qui?

M. Lachance: Pour les personnes physiquement incapables de se rendre dans un bureau de scrutin ou les personnes âgées qui sont physiquement incapables ou les personnes handicapées, etc., mais, aussi pour les personnes qui... Par exemple, le vote par anticipation se fait ordinairement combien de jours à l'avance? Je ne m'en souviens pas.

M. Gendron: Une semaine.

M. Lachance: Une semaine avant. Entretemps, disons qu'une personne est appelée à aller à l'extérieur, soit pour un travail, soit pour autre chose. Elle ne sera pas là le jour du scrutin. Donc, il y aurait la possibilité quand même de voter par procuration. Ce sont surtout ces gens-là.

M. Gendron: Oui, mais admettez-vous que si on instaure le vote des résidents hors Québec, c'est une meilleure formule, puisque les résidents qui sont hors Québec, la proportion de résidents que je sache, ce n'est pas entre le moment du vote par procuration ou une élection qu'ils apprennent qu'ils sont hors Québec. Donc, cela pourrait être pour des cas très exceptionnels. Par exemple, entre le moment du vote par anticipation, j'apprends que...

Une voix:...

M. Gendron:... je me retrouverai en France pour les trois prochaines années. Je vais peut-être négocier, si je tiens tellement à mon droit de vote, de me laisser deux jours et je partirai pour la France après l'élection. Autrement dit, on peut bien philosopher, mais quand on a à préciser si on met d'autres dispositions: Premièrement, oui, on est pour un vote des résidents hors Québec. Moi, je suis pour cela. On en a réglé une bonne partie. Deuxièmement, je serais plus d'accord d'envisager un vote itinérant ou toujours le mécanisme autour du vote par anticipation qui doit demeurer une mesure exceptionnelle, parce que s'il y a plus de gens au

Québec qui votent par anticipation que le jour du scrutin, on a un problème. (12 h 15)

Donc, le sens, la logique de voter par anticipation, c'est dans des cas exceptionnels. Quand on décortique tous ces éléments, que reste-t-il d'exceptionnel pour s'embarquer dans quelque chose qui, d'après moi, a énormément de danger d'être appliqué, vu que ce n'est pas dans nos traditions de dire à quelqu'un d'autre: Tu vas faire ma job à ma place?

M. Lachance: Je suis d'accord. Ce n'est pas notre tradition. C'est beaucoup plus une tradition européenne.

M. Gendron: Voilà.

M. Lachance: Ayant vécu en Europe, c'est là que j'ai pris connaissance de cette tradition. Je suis d'accord avec vous que cela devrait être limité à des cas exceptionnels et non pas à un moyen général de votation. Seulement, en le limitant à un vote, une personne seulement et non pas... Il y a eu des suggestions où une personne pourrait être le mandataire pour deux ou trois. En le limitant à une personne seulement et dans des cas exceptionnels, mais venant s'ajouter à toute une série d'autres moyens d'élargir la possibilité du vote, je le favoriserais. Mais, exceptionnellement, non pas un moyen général d'aller voter. Je me lève le matin et je dis: Ce matin, cela ne me tente pas de sortir. Je ne vais pas voter, je vais envoyer quelqu'un d'autre. Cela prendrait une raison valable quand même.

M. Gendron: Une dernière question en ce qui me concerne. Vous avez mentionné que, quant à vous, l'intervention des tiers en période électorale est une question majeure. Vous avez raison. En tout cas, d'après moi. Vous avez suggéré de modifier la définition de dépenses électorales pour exclure les frais engagés par des personnes ou des groupes sans caractère politique partisan pour faire connaître leur opinion et ainsi de suite.

Si on est obligé de dire cela, si on est obligé de dire: On serait d'accord, mais pour les groupes qui n'ont pas un caractère partisan, la question que je vous pose, c'est: Pourquoi pensez-vous qu'à cette période-là, ils veulent faire une intervention particulière?

M. Lachance: II y a certainement des cas où cela va être pour des intérêts corporatifs ou des intérêts propres aux groupes. J'ai pensé à tout cela, parce que c'est vraiment un sujet chatouilleux. Comment permettre la liberté tout en ne détruisant pas la liberté de l'autre, ce fameux équilibre entre tout cela? La question que l'État arriverait avec, disons... Lorsqu'un groupe non partisan veut se prononcer, que ce soit de l'information. Oui, mais les opinions? On a aussi

le droit d'opinion. Que cela devienne aussi une opinion.

Est-ce qu'on va limiter l'opinion et l'information à "intérêt général"? Qu'est-ce que l'intérêt général? Par exemple, dans le cas d'un syndicat dont le gouvernement est l'employeur, cela devient aussi chatouilleux. Comment délimiter et ne pas empiéter sur les libertés tout en maintenant un équilibre entre la liberté des partis, celle de l'État et celle des tiers intervenants? J'avoue que ce n'est pas facile.

Avec un montant de dépenses maximum fixé pour les intervenants, cela empêcherait quelqu'un de puissant... Il y a une remarque dans la documentation concernant l'expérience aux États-Unis qui est très intéressante, d'ailleurs, et qui démontre que cela pourrait déborder. Finalement, la puissance de certains groupes financiers peut faire que même les partis politiques peuvent être mis de côté et deviennent moins importants.

M. Gendron: Merci. Je veux tout simplement vous dire - parce qu'on me dit que mon temps est expiré - que j'espère qu'on va entendre davantage parler de vous, comme parti politique.

M. Lachance: Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Merci, M. le Président. Moi aussi, je veux saluer M. Lachance pour la qualité de son mémoire et de son intervention. Je voudrais m'arrêter à un seul aspect des questions soulevées dans son mémoire, en ce qui a trait aux règles entourant l'autorisation des partis politiques.

Je comprends très bien les propos tenus dans le mémoire qui nous est présenté. Ils sont fort cohérents, logiques et parfaitement pertinents. Cela dit, le problème qui se pose est que dans la mesure où les règles sont fort souples - il faut le reconnaître - il se glisse toutes sortes de monde, y compris des gens on ne peut plus farfelus qui amènent un discrédit sur la chose politique, qui encourent des coûts importants pour l'ensemble de la société, qui, à l'occasion, peuvent créer de la confusion dans une période électorale. L'objectif qu'on visait - je reconnais que, de toute évidence, on n'y est pas vraiment arrivé - en resserrant d'une certaine façon les règles d'autorisation des partis politiques visait non pas à rendre la vie plus difficile à des groupes comme le vôtre, bien au contraire.

En ce qui me concerne, je suis favorable à l'ouverture maximale de la représentation de toutes les tendances dans notre société. Il ne faut pas se le raconter, cela prend des moyens. Je m'excuse parce qu'à l'occasion, cette comparaison m'agresse, mais elle est simple et bien évidente. C'est un peu comme le savon. Il faut au moins que l'on sache qu'il existe et qu'on l'ait essayé une fois ou deux pour savoir que ce n'est pas pire et que cela donne des résultats intéressants pour qu'on finisse par en acheter. C'est souvent la même chose dans d'autres domaines, pour ne pas ajouter aux exemples. Donc, il faut aussi permettre que les formations politiques sérieuses - je pense que vous en êtes une démonstration éloquente - puissent vivre mais vivre encore beaucoup plus que vous n'en avez eu les possibilités jusqu'à maintenant. Il faut donc penser à un soutien financier de l'État et à un certain nombre de soutiens additionnels à ceux qui existent actuellement. J'aimerais que vous nous convainquiez un peu, en ce qui me concerne, qu'on n'est peut-être pas allé dans la bonne direction dans les règles pour resserrer l'accréditation des formations politiques pour éviter les farfelus. J'aimerais que vous nous aidiez par contre à trouver des formules qui nous permettraient à la fois d'éviter la présence de farfelus mais qui ne viendraient pas gêner l'action de formation comme la vôtre. Là, j'avoue que c'est de moins en moins clair. On voit de plus en plus les inconvénients de toutes les formules, mais j'avoue qu'on trouve de moins en moins des formules qui nous permettraient d'y arriver. Je vous laisse la parole.

M. Lachance: Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de faire la différence entre l'autorisation d'un nouveau parti avant une élection et ce que j'appelle dans le document la "réautorisation" à chaque élection générale?

M. Rochefort: Précisez un peu.

M. Lachance: Par exemple, pour devenir autorisé, c'est exactement la même chose que pour participer à l'élection générale. C'est 60 signatures par candidat dans dix circonscriptions, c'est le même nombre. Dix circonscriptions, 60 signatures par circonscription. Là, vous faites la demande pour vous faire autoriser. C'est la même chose lorsque arrive l'élection générale, c'est 60 signatures dans dix circonscriptions. Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de faire une légère différence entre les partis déjà existants et de nouvelles règles pour ceux qui demandent l'autorisation pour une première fois? Il y aurait peut-être quelque chose à trouver entre ces deux formules. Je sais que c'est aussi plus restreignant pour...

M. Rochefort: Si on admettait que cela répond à une partie de la question dans la mesure où l'État contribuerait à un certain nombre et d'une certaine façon à un financement du fonctionnement de base des formations politiques, je ne vois pas tellement comment ce type de règles nous permettrait d'éviter qu'on finance n'importe qui qui ferait n'importe quoi avec ces sommes.

M. Lachance: II faudrait décider si l'aide

financière arrive dès l'autorisation ou si elle arrive après un certain temps de fonctionnement. Parce qu'il y a toute la question du temps aussi pour une formation, à savoir si oui ou non elle est sérieuse ou pas. Quand une formation arrive à la veille d'une élection générale, on ne le sait pas. On le sait après comme c'est arrivé à la dernière élection générale. On l'a appris après. Quand c'est arrivé, on ne le savait pas. Mais alors, est-ce que, par des règlements aussi dans d'autres articles, sans rendre la vie difficile à ceux qui, disons, ont déjà une certaine permanence ou un certain temps, pourrait-on voir, surtout lorsque la demande se fait juste avant une élection générale... il y a quelque part dans le document un endroit où on mentionne qu'il faut faire la demande au moins six mois avant pour participer à l'élection générale. Ou bien est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir quelque chose comme cela?

M. Rochefort: Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. M. le ministre délégué à la Réforme électorale.

M. Gratton: Oui, M. le Président, je voudrais moi aussi dire à M. Lachance - j'ai eu l'occasion de le lui dire en privé - et lui dire publiquement que je suis très impressionné par la qualité de son mémoire et que vous venez nous rappeler en faisant des recommandations très précises sur des sujets précis, qu'effectivement on a beau avoir la meilleure volonté du monde en tant que représentants de partis qui ont des députés à l'Assemblée nationale pour faire en sorte de consacrer le principe de la chance égale à tous, mais l'expérience vécue d'une personne comme moi qui appartient au Parti libéral du Québec depuis toujours ne peut pas équivaloir à celle dont vous nous faites part aujourd'hui. Et je peux vous assurer que les recommandations que vous nous avez faites vont sûrement nous inspirer non seulement quant aux sujets sur lesquels on n'a pas fait consensus mais peut-être bien - et je crois comprendre que le député d'Abitibi-Ouest dans certaines de ses remarques pourrait possiblement me rejoindre - réviser certains consensus qu'on a déjà établis entre nous.

Effectivement, par exemple, en réponse aux questions du député de Gouin, je pense que vous avez ouvert une possibilité. Parce qu'on se pose toujours la question: Comment assurer certaines ressources minimales - ne les appelons pas les tiers partis, appelons-les les partis qui ne sont pas représentés à l'Assemblée nationale - sans pour autant ouvrir la chose à ce que cela devienne une invitation à des gens qui n'ont vraiment pas intérêt à former un parti politique mais qui ont plutôt intérêt à amuser le public, de se faire autoriser pour avoir droit à ces sommes-là? Et vous nous ouvrez une piste en nous disant: Bien, il pourrait y avoir des conditions d'autorisation préalable mais ce pourrait être d'autres conditions et non seulement celles du nombre de votes obtenus à une élection qui pourraient présider à l'allocation de sommes en provenance de l'État. On va sûrement se pencher là-dessus.

M. Lachance, en regard de ce que vous dites dans votre document et qui peut porter à confusion, dans le cas de l'autorisation des partis, vous semblez avoir compris qu'un parti autorisé devrait être capable de déposer une certaine somme d'argent auprès d'une institution gouvernementale. J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer hier qu'au sein du comité des parlementaires, au contraire, on a décidé et fait consensus qu'il n'y aurait pas de dépôt exigé pour un parti. Donc, tenez pour acquis qu'on est tous sur la même longueur d'onde là-dessus.

En ce qui a trait à l'allusion que vous faites, à savoir que les partis autorisés présentement n'ont pas même la possibilité d'obtenir les projets de loi, les déclarations ministérielles, j'ai indiqué à M. Rhéaume, le chef du Parti indépendantiste, qui était avec nous hier, que cela n'a pas besoin de faire l'objet d'une modification à la Loi électorale, selon moi. J'ai vérifié et on m'a indiqué que les partis qui ont fait la demande d'obtenir le Journal des débats, par exemple, avaient été informés qu'ils devaient s'y abonner. Or, je me suis engagé hier, et je veux que vous le sachiez, à écrire au président de l'Assemblée nationale de qui cela relève et à lui demander - évidemment, ce sont ses budgets; c'est à lui de prendre la décision; je pense que la dépense ne serait pas à ce point énorme - de le fournir aux partis autorisés. Et peut-être bien qu'on se posera la question: À quels partis autorisés? S'il y a un parti autorisé qu'on ne peut pas rejoindre et qu'effectivement on lui envoie les documents - c'est le cas d'un parti présentement - qui nous reviennent parce que c'est resté lettre morte ou poste restante, c'est évident qu'on n'a pas à dépenser les deniers publics inutilement. Donc, cela est encore un élément qui pourra vous permettre, en tout cas à vous, le Parti des travailleurs du Québec, d'avoir un minimum d'information.

Je vous dis sans ambages qu'il me semble que la démocratie sera mieux servie au Québec quand les gens et les partis comme le vôtre seront mieux habilités à faire valoir leur point de vue de la façon la plus large possible. Je suis très heureux que vous soyez venus nous rencontrer ce matin. J'ai nettement l'impression que votre témoignage ici, aujourd'hui, aura - en tout cas, je le souhaite vivement - un impact certain sur la façon dont on finira pas s'acquitter de notre mandat, en tant que législateurs, d'amender la Loi électorale.

M. Lachance: Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): M. Lachance ainsi que les personnes qui vous ont accompagné, on

vous remercie beaucoup d'avoir bien voulu accepter notre invitation de participer à cette commission parlementaire. Bon voyage de retour.

M. Lachance: Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): Nous allons suspendre les travaux jusqu'à 12 h 45. J'aimerais que les députés reviennent à 12 h 45 parce qu'il nous reste un parti à entendre, le Parti vert du Québec, qui était prévu pour 13 heures, mais les personnes ne sont pas encore arrivées. Alors, à 12 h 45, si les gens n'étaient pas arrivés, à ce moment-là, on décidera si on ajourne à la semaine prochaine. Cela va? Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

(Reprise de la séance à 12 h 59)

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux pour constater que nos invités ont omis de se présenter. Ils étaient attendus à 13 heures. Ce que j'ai à faire, c'est d'abord de vous remercier de votre présence cette semaine. M. le ministre, vous voudriez prendre la parole.

M. Gratton: Oui. Simplement pour qu'il n'y ait pas méprise. On sait que le Parti vert du Québec devait venir nous rencontrer. Au début, c'était prévu pour 15 heures cet après-midi. Compte tenu de l'information que nous avons obtenue hier, à savoir que le Parti citron, qui devait suivre à 16 heures, ne venait pas nous rencontrer, nous avions demandé au Secrétariat des commissions de communiquer avec le Parti vert pour lui demander d'être présent pour 13 heures aujourd'hui. Effectivement, le message a sûrement été reçu puisqu'on avait indiqué au Secrétariat des commissions que le chef du parti serait présent à 13 heures.

Or, on constate que le chef du Parti vert n'est pas présent et que, le parti n'ayant pas déposé de mémoire au préalable, il ne nous sert absolument à rien de poursuivre nos travaux.

Je voudrais tout simplement indiquer que si on devait avoir de nouvelles communications avec le Parti vert, on pourrait examiner ensemble la possibilité de replacer l'audition plus tard, la semaine prochaine. Mais, dans les circonstances, M. le Président, si cela agrée aux membres de la commission, je suggérerais que nous ajournions nos travaux à mardi, 10 heures.

Le Président (M. Marcil): Cela va? Vous êtes d'accord avec cela? Donc, nous allons ajourner les travaux à mardi, 10 heures.

(Fin de la séance à 13 h 1)

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