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(Onze heures sept minutes)
Le Président (M. Leclerc): La commission des institutions
se réunit pour effectuer des consultations particulières et
auditions publiques afin d'examiner toute proposition de révision de la
Loi électorale. Je reconnais donc M. Jean-Marc Hamel, Directeur
général des élections du Canada.
M. Jean-Marc Hamel, Directeur général
des élections du Canada
M. Hamel (Jean-Marc): Merci, M. le Président.
Permettez-moi tout d'abord de vous dire que l'invitation que vous m'avez faite
de participer à vos travaux m'honore grandement. J'ai eu le plaisir de
travailler avec M. Robert Burns en 1975-1976, quand il préparait la Loi
sur la réforme électorale pour le financement des partis
politiques. J'ai eu également le plaisir de participer aux travaux de
certains comités des Législatures de l'Ontario et du
Nouveau-Bruns-wick, mais c'est la première fois que j'ai l'honneur de
travailler avec une commission du Québec. Alors j'en suis très
heureux. Je n'ai pas préparé de texte, préférant
plutôt me mettre à la disposition des membres de la commission
pour discuter de questions qui les intéressent d'une façon toute
particulière.
Toutefois, en guise d'introduction, j'aimerais partager avec vous
brièvement certains de mes soucis concernant une question sur laquelle
les législateurs se pencheront peut-être, je pense surtout
à la question de l'intervention des tiers dans le processus
électoral. Selon moi, si l'on veut perpétuer les réformes
qui ont été amorcées au milieu des années soixante,
il est essentiel que cette question soit résolue.
Deux des principes fondamentaux, en effet, qui sous-tendent toute la
question du contrôle des dépenses d'élection sont en jeu,
c'est-à-dire les limites que l'on impose aux candidats et aux partis
politiques de même que la divulgation des sources de financement ou, en
d'autres termes si vous voulez, la transparence. Le problème, c'est de
réussir - ce qui n'est pas facile - à réglementer
l'intervention des tiers tout en respectant la liberté d'expression que
la Charte canadienne des droits et libertés garantit. On sait que la
disposition de la Loi électorale du Canada a été
contestée avec succès devant la Cour du banc de la reine de
l'Alberta. Et pourtant, la loi fédérale n'est pas tellement
sévère. Elle interdit de faire des dépenses
d'élection. Elle interdit, c'est-à-dire, à toute personne
ou à tout groupe autre qu'un candidat ou un parti politique reconnu, de
faire des dépenses d'élection. Dépenses d'élection
s'entendent comme toutes dépenses dont le but est de favoriser
directement, pendant une élection, l'élection d'un candidat ou
d'un parti politique et, comme corollaire évidemment, toutes
dépenses dont le but est de s'opposer directement à tout parti
politique ou à un candidat. Ce qui veut dire que notre loi permet donc
aux groupes, aux associations de continuer leurs activités normales
durant une période électorale, de continuer à promouvoir
la cause pour laquelle ils existent, la cause qu'ils défendent en temps
normal et poursuivre les buts qu'ils poursuivent en tout temps.
Par exemple, dans le cas des mouvements ou des groupes qui favorisent la
liberté de choix ou ce qu'on appelle Pro-Vie, pendant une
élection, ils peuvent continuer même si le sujet est devenu assez
litigieux, ce qui fait partie du domaine politique. Le cas
échéant la loi permet que ces groupes continuent de le faire. La
seule chose qu'elle défende, c'est de franchir le pas et inviter les
gens directement ou nommément à voter pour ou contre les
candidats ou les partis politiques qui partagent ou qui ne partagent pas leur
vue. Néanmoins, le juge a à juger si cette disposition
contrevient à l'article 2 de la Charte des droits et libertés en
ce qui touche la liberté d'expression.
En principe, le jugement ne s'appliquait qu'en Alberta, puisqu'il
relevait d'une cour de l'Alberta. Mais, comme on le sait, malheureusement la
décision n'a pas été portée en appel. Donc, en
principe, la décision ne s'appliquait qu'en Alberta mais, par souci
d'équité, nous avons décidé, le commissaire aux
élections fédérales qui est le fonctionnaire de mon bureau
qui s'occupe tout particulièrement des enquêtes et des poursuites,
de ne pas appliquer cette disposition de la loi dans les neuf autres provinces
parce que nous trouvions que c'était injuste à l'endroit des
candidats ou des groupes des provinces autres que l'Alberta.
Honnêtement, je dois admettre, par exemple, que tout en gardant
l'oeil ouvert, tout en suivant un peu ce qui se passait, il n'y a pas lieu de
croire - nous n'avons aucun indice - qu'il y a eu des abus durant la
dernière élection. Peut-être que M. Bailie pourra vous en
parler plus longuement. Là-dessus, la loi de l'Ontario ne semble pas
interdire l'intervention des tiers. À ma connaissance, ou du moins de ce
que j'ai pu en lire ou y voir lors de la dernière élection
provinciale en Ontario, il ne semble pas non plus y avoir eu d'abus. Cependant,
quelle sera la situation à la prochaine élection? Seul le temps
nous le dira. Il semble y avoir plusieurs questions qui soulèvent
beaucoup de passion, et c'est dans ce temps-là que c'est dangereux.
L'injustice, selon moi, dans tout cela, c'est que nous avons une
série de règles, un code d'éthique qui réglemente
la conduite de ceux qui participent au jeu électoral,
c'est-à-dire les candidats et les partis politiques. Toutes sortes de
contraintes - dans le cas de la loi fédérale, par exemple,
interdiction d'annoncer ou de faire de la publicité électorale en
dehors d'une période définie, obligation de respecter certaines
limites quant au montant d'argent, obligation de divulguer les sources de
financement y compris même les noms des personnes ou des groupes qui
peuvent contribuer plus qu'un certain montant - ne s'appliquent pas aux tiers.
À mon point de vue, c'est souverainement injuste à l'endroit de
ceux qui désirent participer ou se porter candidat à une charge
publique.
Le danger évidemment, c'est que certaines personnes soient
tentées, plutôt que de contribuer à la caisse d'un candidat
et d'un parti politique, de faire la dépense directement sans se soucier
des contraintes d'identification ou de limite quant aux montants ou quant
à la source de la contribution, etc. Selon moi, la prochaine
élection fédérale devrait être déterminante
vu le climat qui semble prévaloir présentement. J'ai l'impression
que nous sommes rendus un peu à une croisée et qu'à la
prochaine élection, en ce qui touche du moins la loi
fédérale, on devrait en arriver non pas nécessairement
à une impasse, mais on devrait voir quelle direction les choses
devraient prendre.
Je dois admettre, en terminant, que nous avions espéré,
lors du procès qui se déroulait en Alberta, que les provinces ou
du moins certaines provinces auraient pu se joindre au Procureur
général du Canada puisqu'il s'agissait d'une cause qui relevait
de la charte, mais je pense que, dans un premier temps, les provinces ont
préféré s'abstenir. Cependant, probablement ou, je
l'espère du moins, si la cause avait été portée en
appel, à ce moment-là nous aurions peut-être insisté
davantage pour que les procureurs généraux des provinces, du
moins celles qui sont dans la même situation, s'impliquent.
Alors, là-dessus, M. le Président, j'aimerais conclure mes
remarques préliminaires. Je demeure à la disposition des membres
de la commission pour toute question supplémentaire qui pourrait les
intéresser.
Le Président (M. Leclerc): Je vous remercie M. Hamel. Je
cède la parole à M. le ministre délégué
à la Réforme électorale.
M. Gratton: Merci, M. le Président. Je désire
remercier M. Jean-Marc Hamel, Directeur général des
élections du Canada, non seulement pour avoir accepté notre
invitation de venir nous rencontrer ce matin... Il l'a souligné
lui-même, sauf erreur, c'est la première fois, en tout cas dans
son cas à lui, je pense que c'est une première en ce qui concerne
la présence de directeurs généraux d'élections
autres que celui du Québec qui, lui, est très souvent devant la
commission des institutions, et nous en sommes fort aise. Donc, on le remercie
d'être ici. On le remercie également de l'excellente collaboration
qu'il a fournie, lui et son personnel, au Secrétariat à la
réforme électorale dans la préparation et dans toute la
démarche qui a précédé cette commission
parlementaire. Je le remercie particulièrement de nous avoir
donné son point de vue sur l'intervention des tiers en campagne
électorale qui, comme il le soulignait lui-même, risque fort de
créer des remous à l'approche d'une élection
fédérale imminente avec l'apparition la semaine dernière,
par exemple, d'une campagne de publicité qu'on a évoquée
ici d'ailleurs.
Sur le sujet de l'intervention des tiers, je me limiterai simplement
à constater que, contrairement à l'Alberta, ici au Québec,
un jugement a été rendu alors qu'on contestait la validité
de l'article 33 de la Loi sur les consultations populaires qui, à toutes
fins utiles, reprend les mêmes dispositions que les articles pertinents
dans la Loi électorale. La Cour supérieure a tranché dans
le sens contraire de l'Alberta. Elle a décidé qu'effectivement,
l'article 33 de la Loi sur les consolidations populaires ne faisait pas de
discrimination à l'égard de quiconque, n'était pas une
atteinte à la liberté d'expression. D'ailleurs, la Cour d'appel
avait rejeté la demande d'appel de l'intimé. C'est dire que,
quant à nous, dans l'état actuel des choses, compte tenu des
représentations que nous avons entendues et du point de vue
exprimé par les membres non seulement des formations politiques
représentées à I'Assemblée nationale, mais d'autres
formations politiques, de façon générale, il semble y
avoir un très large consensus sur le fait qu'au Québec le
maintien des dispositions actuelles devrait prévaloir sur toute autre
considération. Je pense qu'il y a de fortes chances, sans être
celui qui en décide seul, que les dispositions actuelles de la Loi
électorale devraient normalement être maintenues, en tout cas, en
ce qui a trait... J'apprécie que M. Hamel nous ait fait part des raisons
qui l'amènent à plutôt reconnaître le
bien-fondé de l'interdiction de ces interventions.
Cela dit, je souhaiterais poser quelques questions à M. Hamel sur
d'autres sujets; le temps, malheureusement, est limité et on en aurait
pour très longtemps. Évidemment, je suis sûr que
l'Opposition en fera de même.
Si on parlait du vote des Québécois hors Québec. On
sait que le projet de loi C-79 prévoit certaines dispositions. Il semble
faire consensus ici, au Québec, qu'on devrait trouver une façon
de permettre l'exercice du droit de vote des Québécois hors
Québec. Est-ce que, M. Hamel, vous pourriez brièvement nous
décrire les dispositions qui s'appliqueront, éventuellement, si
jamais le projet de loi C-79 était adopté, quant aux
critères pour circonscrire la clientèle, quant aux
mécanismes qu'on a prévus pour l'inscription sur la liste
électorale de ces personnes, quant
aux mécanismes de votation, soit vote par courrier ou autrement
et aussi si on a pensé aux règles applicables au financement des
partis politiques à l'égard de ces personnes?
M. Hamel (Jean-Marc): Je pense, d'abord, M. le Président,
qu'il faut distinguer entre ceux qui sont absents tout en maintenant leur
résidence ou leur domicile, soit au Québec ou, dans notre cas,
nous, au Canada. Dans ce groupe, par exemple, je place ceux qui
s'évadent pour quelques mois ou quelques semaines l'hiver, alors qu'ils
s'en vont dans des climats un peu plus chauds tout en maintenant leur
résidence ou leur domicile, si vous voulez, au Canada ou au
Québec. Dans ces cas-là, le projet de loi C-79 prévoyait
de les faire voter par procuration. Parce que tant que nous n'aurons pas, au
niveau fédéral comme à tout autre niveau, une liste
permanente de type conventionnel, c'est-à-dire avec inscription, avec
signature de l'électeur, carte d'électeur, personnellement, je
crains énormément le vote par la poste. La procuration, je n'en
suis pas un fanatique, parce que cela présente quand même certains
problèmes. Ce n'est certainement pas la forme la plus populaire de vote,
mais c'est le moindre de deux maux, l'autre étant la perte totale du
droit de vote.
Donc, en vertu du projet de loi C-79, ce groupe-là aurait
voté par procuration. Il aurait fallu qu'il soit recensé de la
façon usuelle et de façon normale et à voir à ce
qu'une procuration soit donnée à quelqu'un. Il y a l'autre
groupe. C'est celui dont on parle beaucoup. C'est le groupe de ceux qui n'ont
plus de résidence au Canada, mais qui ont temporairement ou
provisoirement établi une résidence à l'étranger.
Par exemple, tous ceux qui sont à contrat avec certaines grosses
compagnies canadiennes d'un, de deux ou de trois ans, pour un projet
d'exploration pétrolière en Lybie, en Afrique quelque part ou au
Moyen-Orient pour des programmes de communication, etc.
Dans ces cas-là, le projet de loi C-79 prévoyait une
extension de ce qui existe déjà dans notre loi en ce qui touche
les membres des forces armées, leurs dépendants, de même
que les membres de la fonction publique fédérale et leurs
dépendants, c'est-à-dire un système de fichier
électoral permanent, un système de fichier électoral
où les gens s'inscrivent dans le cas des membres des Forces
armées au moment de leur enrôlement, dans le cas des
fonctionnaires au moment de leur mission ou le moment où ils partent en
mission à l'étranger.
On leur donne, ou la loi leur donne un certain nombre d'options en ce
qui touche le lieu de résidence. Habituellement, c'est le dernier lieu
connu de résidence, c'est-à-dire la résidence qu'ils
avaient avant de partir pour l'étranger. Dans certains cas, cependant,
la loi prévoyait qu'ils peuvent choisir un autre endroit.
Voilà en gros le système que la loi C-79 proposait
d'appliquer à tous les Canadiens, provisoirement, j'insiste sur le mot
"provisoirement" parce que la loi ne prévoyait pas donner le droit de
vote à ceux qui étaient partis du Canada de façon
définitive sans aucune intention de revenir...
Le contrôle s'établissait de la façon suivante:
D'abord, il y avait une inscription qui se faisait. Pour le moment, il
s'agissait d'inscrire ceux qui sont déjà à
l'étranger et, à l'avenir, ceux qui partiraient pour
l'étranger devraient s'inscrire avant de partir et avec contrôle
annuel, ce qui se fait un peu dans la plupart des pays où vous avez un
fichier électoral permanent comme l'Australie, l'Angleterre ou peu
importe. On doit faire un contrôle annuellement de façon à
épurer les listes, enlever les noms de ceux qui ne devraient plus
être sur la liste, voire les changements d'adresses et ainsi de
suite.
Cela se faisait par courrier une fois l'an, au mois d'août ou
septembre. Il y a une discussion là-dessus. Si quelqu'un ignorait la
communication après un rappel, son nom était immédiatement
radié de la liste. Chaque année, nous devions fournir - comme
nous le faisons présentement d'ailleurs pour les membres des Forces
armées et ceux de la fonction publique - à chaque
député la liste complète de ceux de sa circonscription qui
se sont inscrits comme pouvant voter dans la circonscription. Au moment du
retour, présentement, lorsqu'un diplomate ou un fonctionnaire quelconque
revient au Canada, c'est relativement facile pour le ministère de radier
son nom de la liste. Cela aurait été un peu moins facile dans le
cas des autres. Mais avec le contrôle annuel, nous croyons que la liste
aurait pu être raisonnablement à jour.
Plusieurs questions se sont posées. Par exemple, le modèle
de l'Angleterre qui a adopté tout récemment une formule pour ses
citoyens à l'étranger. L'Angleterre a décidé
d'imposer une limite de temps, soit sept ans. Ce devait être cinq ans,
mais cela a été porté à sept ans. Ou l'inverse, je
ne me rappelle pas trop. Mais enfin, il y a une limite de temps. C'est une
façon d'aborder la question. Il y a un élément arbitraire
ici, en ce sens qu'on doit éliminer souvent des gens qui sont
restés très attachés à leur province, à leur
ville, à leur pays mais qui, par la force des circonstances, vont rester
plus longtemps que cinq ou sept ans à l'étranger. On parle
présentement de notre ambassadeur à Washington, par exemple, qui
est là depuis sept ans. On a eu un ambassadeur à Moscou qui a
été là pendant quatorze ans ou dix-sept ans.
Je dois dire que le gros de la correspondance que je reçois
pendant une élection est plutôt de la part des missionnaires qui
peuvent être à l'étranger depuis 20 ans ou 25 ans, mais qui
écoutent Radio-Canada international, qui sont abonnés à
des journaux et qui tiennent beaucoup à voter. Or, si on met une limite
de 5, 7 ou 10 ans, on se trouve à les exclure. Commencer à faire
des exceptions est évidemment dangereux.
Le gouvernement, en présentant son projet
de loi C-79, a plutôt retenu le modèle américain qui
n'impose pas de limite mais qui établit d'autres sortes de
contrôles. Même si le projet de loi C-79 prévoyait des
contrôles qui n'existent pas dans le système américain,
c'est-à-dire au moment de l'inscription, il prévoyait que la
personne, en plus de donner l'adresse - non pas la circonscription - au Canada
où elle avait sa dernière résidence et son adresse
à l'étranger devait également nous dire vers quelle date
elle s'attendait de revenir au Canada. C'est dire qu'elle avait l'intention de
revenir et vers quelle date. À ce moment-là, nous aurions
établi un contrôle par ordinateur pour voir si vraiment la
personne revenait à cette date et si ses plans avaient changé. En
gros, c'est un peu le modèle.
M. Gratton: Est-ce que l'article C-79 prévoyait quoi que
ce soit par rapport au contrôle des dépenses électorales
à l'égard de ces gens-là?
M. Hamel (Jean-Marc): Non, pas du tout.
M. Gratton: Ni des souscriptions ou des contributions aux partis
politiques?
M. Hamel (Jean-Marc): Non. Dans le projet de loi, la question a
été soulevée, à savoir que le nombre de noms...
Vous savez, comme chez nous, je pense que - j'imagine que c'est un peu la
même situation au provincial - au gouvernement fédéral, les
limites des dépenses que peuvent engager les candidats et les partis
politiques sont basées sur le nombre de noms, sur les listes
préliminaires, c'est-à-dire sur les listes non
révisées. À plusieurs reprises, il a été
question justement que l'on ajoute à ces listes les noms de ceux qui
sont présentement à l'étranger, soit les membres des
Forces armées et les membres de la fonction publique parce que la
plupart des partis politiques ou les candidats aiment bien se tenir en contact
avec eux.
Je crois, en dernière alternative, que cette disposition aura
probablement été ajoutée au moment où le projet de
loi aura été discuté en comité.
M. Gratton: Dans l'hypothèse où nous retiendrons,
pour notre prochaine élection, le fait de permettre le vote des
Québécois hors Québec et, à défaut, que le
projet de loi C-79 ait été adopté par la Chambre des
communes, dois-je comprendre que, par entente de service, nous pourrions
compter sur la possibilité d'obtenir les listes des personnes des Forces
armées et des gens de la fonction publique, mais cela se limiterait
à cela dans l'état actuel des choses? (11 h 30)
M. Hamel (Jean-Marc): Oui. D'ailleurs, même
présentement dans le contexte actuel, il n'y aura aucun problème.
Dans le projet de loi C-79, j'avais demandé et obtenu qu'une disposition
spécifique soit mise dans le projet de loi préci- sant que toutes
les listes électorales préparées aux fins des
élections fédérales soient également disponibles
aux fins d'élections provinciales. D'une part, j'ai demandé que
l'accès à nos listes soit davantage restreint. Jusqu'à
présent, j'ai toujours restreint l'accès aux listes
électorales par décision administrative. La loi sur la protection
des renseignements personnels me donne un certain appui, mais je
préférais avoir, dans la Loi électorale, une disposition
disant que les listes électorales ne sont disponibles ou ne peuvent
servir à aucune fin autre que celles pour lesquelles elles ont
été établies, soit l'administration de l'élection
et le travail des candidats. L'article C-79 ajoutait également "pour
fins d'élections provinciales".
M. Gratton: Tout en espérant que le député
d'Abitibi-Ouest vous posera des questions sur le vote par procuration, je vais
passer à un autre article.
M. Gendron:...
Le Président (M. Doyon): M. le ministre, il resterait une
minute sauf que M. Hamel n'a pas pris le temps qui lui était
réservé, alors il reste une dizaine de minutes pour...
M. Gratton: Je vais terminer avec une dernière question
pour revenir possiblement, s'il reste du temps, ensuite. Quant à
l'interlocuteur ministériel du Directeur général des
élections, on sait qu'au gouvernement fédéral, le
Directeur général des élections a comme interlocuteur le
président du conseil privé, si je ne m'abuse. J'aimerais que vous
nous disiez, M. Hamel, si, pour vous, cela constitue une "entache" de quelque
façon à votre indépendance face à l'exécutif
et si, pour vous, cela comporte des avantages ou des désavantages
quelconques, compte tenu de l'expérience vécue depuis plusieurs
années.
M. Hamel (Jean-Marc): Je ne vois pas en quoi cela pourrait porter
atteinte à mon statut d'indépendance à l'endroit du
gouvernement parce que le ministre, à ce moment-là, n'est que le
canal de communication entre mon bureau, entre moi et le cabinet. Maintenant,
il faut reconnaître que dans la Loi fédérale, le Conseil
des ministres a des responsabilités, je pense, peut-être plus
grandes qu'au niveau provincial ou du moins dans certaines provinces. Par
exemple, la nomination des directeurs du scrutin chez nous est encore faite par
le Conseil des ministres; je dois faire établir, c'est moi qui
l'établis, mais il doit être approuvé par le Conseil des
ministres, ce qu'on appelle le tarif des honoraires, c'est-à-dire le
montant qui doit être versé à chaque fonctionnaire
d'élection. J'ai un budget administratif modeste tout de même qui
doit être approuvé par le Conseil du trésor et qui doit
être également présenté au Conseil du trésor
par un membre du
Conseil des ministres. Alors, dans l'ordre normal des choses, cela
devient assez routine, je présente et je fais la demande au ministre
désigné lequel transmet ma requête au cabinet et cela va
très bien. J'ai eu pendant une certaine période une situation un
peu cocasse, si vous voulez, dans ce sens que, autrefois le ministre
était désigné dans la loi même, c'était le
Secrétaire d'État. Or, très souvent, le Secrétaire
d'État avait beaucoup d'autres fonctions et s'intéressait plus ou
moins à la réforme électorale ou s'intéressait plus
ou moins à la chose politique et, vers la fin des années
soixante, le premier ministre avait décidé de demander au
président du conseil privé de s'occuper de la réforme
électorale. Là, j'étais assis un peu entre deux chaises
alors que, d'une part, légalement, je devais communiquer avec le
Secrétaire d'État mais, d'autre part, je savais pertinemment que
le ministre responsable était le président du conseil
privé. Et même si le Secrétaire d'État, je le
savais, ne se formalisait pas de ce que je pouvais faire, je tenais tout de
même à le mettre au courant. Alors, c'est en 1970 justement que la
loi ou la disposition actuelle de la loi a été adoptée et
qui veut que le ministre soit celui désigné par décret du
conseil et, traditionnellement, c'est le président du conseil
privé mais ce pourrait être quelqu'un d'autre. Mais pour
répondre à votre question, au contraire, je sais exactement par
qui passer, je sais exactement à qui faire affaire. Cela dit, cependant,
les communications dans l'autre sens ne suivent pas toujours le même
canal mais cela ne me dérange pas. Si je pense qu'il y a lieu d'en
avertir le ministre désigné, je le fais, mais s'il s'agit d'une
question un peu routinière. Par exemple, quand il s'agit du
déclenchement de l'élection, cela vient rarement par le canal du
ministre désigné, cela vient par un autre canal, mais
l'obligation pour moi est de communiquer avec le cabinet et avec le Conseil des
ministres par le ministre désigné.
M. Gratton: Merci. M. le Président, j'indique tout de
suite que j'aurai d'autres questions si évidemment il reste du
temps.
Le Président (M. Doyon): S'il reste du temps. Merci M.
Hamel. Alors, je cède la parole à M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Très rapidement, M. Hamel, je tiens à
vous remercier au nom de l'Opposition et en mon nom personnel. Je pense que
c'est intéressant que vous soyez là ce matin, compte tenu de
votre très grande expérience et compte tenu que vous aussi au
Canada étiez en réflexion par rapport à des changements
majeurs de la loi électorale qu'il est toujours nécessaire
d'ajuster parce que toujours en évolution. Et, également, je vous
remercie du support que vous avez offert au comité administratif et au
comité de députés qui ont travaillé sur la
préparation du document. On a senti qu'on pouvait compter sur votre
vaste expérience de même que sur l'information disponible au
niveau du Canada.
Rapidement, parce qu'on a toujours le problème de temps. Je pense
qu'on aurait plusieurs questions à vous poser. Mais on va y aller tout
de suite compte tenu du facteur temps. Ma première question est dans le
même sens que celle du ministre de la réforme. Je pense que vous
avez pas mal touché aux éléments concernant les
modalités administratives de la gestion du vote des
Québécois. C'est-à-dire de permettre aux
Québécois à l'étranger d'avoir droit de vote lors
des élections.
Il y a une question sur laquelle j'aimerais revenir. J'aimerais que vous
appréciez peut-être un petit peu plus la notion que vous avez
invoquée d'une limite de temps qui présentait des
inconvénients alors que dans mon esprit je n'en voyais pas beaucoup. Si
on met cela en parallèle, le petit nombre de Québécois ou
de Canadiens qui, éventuellement, seraient brimés par une
question de limite de temps versus le sens de leur donner le droit de vote...
Même si le père missionnaire quelque part en Afrique reçoit
de temps en temps, six mois plus tard, une information sur ce qu'il se passe,
ce n'est pas contre lui que j'en ai, c'est contre le sens du vote, de lui
donner le droit de vote pour infléchir, bon, ce n'est pas lui tout seul,
mais c'est quant au principe, la gestion d'un État... je trouve que
c'est gros par rapport à l'inconvénient de délai.
Autrement dit, j'aimerais que vous creusiez un peu plus compte tenu de votre
expérience. Quel est le drame de dire: Tout Québécois,
à l'étranger, après dix ans, prendra les nouvelles comme
tout le monde, mais pas nécessairement lui donner le droit compte tenu
de l'incidence de la valeur du vote?
M. Hamel (Jean-Marc): Oui. D'abord, avant de répondre
à votre question, j'aimerais faire une réflexion très
personnelle. C'est vrai que le processus électoral doit faire l'objet de
réflexion continuellement. Mais je me sens jaloux parfois de mon
homologue du Québec, parce que les choses semblent bouger beaucoup plus
rapidement ici que chez nous.
Cela dit, passant à votre question. Écoutez, c'est une
décision politique. Parce que, quelle que soit la décision que
vous preniez, il y a toujours un élément arbitraire. Et si vous
décidez d'imposer une limite quelconque de cinq ans, de sept ans ou de
dix ans, il y a cet élément-là. Par contre, il y a
certains autres dangers, si vous voulez, et c'est ce qui a peut-être
retardé les choses à Ottawa. Plusieurs s'inquiètent du
nombre possible de gens qui pourraient s'inscrire. Je ne partage pas leurs
craintes. Soit dit en passant, rappelons-nous que d'après le
ministère des Affaires extérieures, il y aurait au-delà de
2 000 000 de Canadiens vivant à l'étranger. Maintenant, beaucoup
ont laissé le pays d'une façon définitive. Beaucoup sont
des gens qui sont venus ici, qui sont devenus citoyens canadiens et
sont retournés dans leur pays et leurs enfants qui n'ont jamais
habité ici, mais par la générosité de notre Loi sur
la citoyenneté, sont citoyens canadiens. Alors je pense que ces
gens-là s'élimineraient d'eux-mêmes.
Très souvent on peut copier le système américain
même s'il y a un élément qui peut fausser un peu les
données ici, en ce sens que dans le cas des Américains,
l'élection est toujours connue davance. La date est toujours connue
davance. Ce qui est un peu plus facile pour l'inscription. Dans notre cas, vu
l'incertitude dans laquelle nous nous trouvons continuellement en ce qui touche
la date de l'élection, il est fort possible que le nombre serait
légèrement plus faible. Or, si l'on se fie au modèle
américain, j'estime à environ 200 000 à 250 000 le nombre
de Canadiens qui pourraient, dans le cadre d'une élection
fédérale, s'inscrire pour voter, ce qui fait presque 1000 par
circonscription en moyenne, ce qui veut dire que dans certaines
circonscriptions, le nombre pourrait être assez considérable. Si
vous regardez le résultat même de la dernière
élection, le nombre de députés qui ont été
élus avec une majorité de moins de 1000 est quand même
assez considérable. C'est ce qui inquiète beaucoup de
personnes.
Si vous suivez le modèle américain sans limite, c'est
peut-être la situation à laquelle vous devez être
prêts à faire face.
Le Président (M. Leclerc): M. le député.
M. Gendron: Pour terminer, je ne sais pas si le
secrétariat a cette formule, je ne détesterais pas qu'on prenne
note de la faire venir, parce que dans votre premier commentaire à M. le
ministre tantôt, vous avez mentionné que la formule du
délai a des inconvénients et, parce qu'elle a des
inconvénients, je privilégie la formule américaine qui
n'en a pas. Par contre, dans la formule américaine on a trouvé
d'autres façons de restreindre, de limiter et de baliser, si vous me
permettez l'expression. Donc, il serait peut-être intéressant de
l'avoir pour l'analyser plus en profondeur plutôt que de vous demander de
la commenter compte tenu des contraintes de temps.
Deuxième question, ce n'est pas mon dada, c'est une
préoccupation majeure en particulier au Québec, savoir toute la
question du vote par procuration. Personnellement, j'ai peur de cela comme ce
n'est pas possible. Je pense que mes appréhensions sont
confirmées par beaucoup de groupes qui sont venus ici en commission
parlementaire. Il n'y en a pas beaucoup qui soient d'accord pour ouvrir
là-dessus, en particulier pour des raisons historiques, de tradition. Et
là je prétends que c'est le temps de parler de notre
spécificité québécoise. Ce n'est pas parce que
l'Ontario le vit et que vous avez envie de le vivre que j'ai envie de plonger
là-dedans. Compte tenu de votre grande expérience, vous avez
mentionné tantôt que vous n'étiez pas non plus un chaud
partisan du vote par procuration mais que, de temps en temps, entre deux maux
il fallait choisir le moindre. Vous avez dit que le vote par procuration
était moindre, comme inconvénient, à moins que j'aie mal
compris, que l'éventualité de voter par courrier ou voie postale
quand cela marche.
J'aimerais que vous me disiez pour l'instant, compte tenu de votre
expérience, ce qui vous fait peur pécisément dans le vote
par procuration. C'est ma question.
M. Hamel (Jean-Marc): D'abord, il y a plusieurs aspects. Le
premier concerne la question de principe. En fait, le vote par procuration,
c'est de légaliser ce que, normalement, la loi défend.
Deuxièmement, le vote par procuration, et c'est là les
quelques expériences malheureuses qu'on a eues, souvent ou parfois du
moins, va permettre à certaines personnes peu scrupuleuses d'exercer des
pressions sur des personnes âgées ou des personnes qui n'ont
peut-être pas le caractère suffisamment fort pour résister
à ce genre de pression. C'est pour cela qu'une des choses que nous
avions proposées et qui a été acceptée dans le C-79
c'est que la personne qui solliciterait une procuration se rendrait coupable
d'une infraction, d'une manoeuvre frauduleuse.
Quant aux grands abus, on n'en a pas eu tellement. On a eu surtout des
abus de procédure plus que des abus de fonds, je pense. Oh, il y a bien
parfois des gens qui vont aller dans un foyer pour personnes
âgées, par exemple, avec des formules en blanc pour demander aux
personnes de signer la formule. C'est ce qu'on veut éviter à
l'avenir.
Ceci dit...
M. Gendron: Excusez-moi. Rapidement là-dessus, avez-vous
eu une évaluation? Avez-vous une petite évaluation de gens qui
ont eu ce comportement-là d'aller solliciter et quérir...
M. Hamel (Jean-Marc): Non. Je n'ai pas de nombre, mais on m'a
quand même rapporté certaines histoires. Je dois préciser,
par exemple, que dans les provinces où la procuration existe au niveau
provincial, l'usage au niveau fédéral est beaucoup plus grand
dans les provinces comme le Québec où la procuration n'existe
pas. Au Québec, la procuration est utilisée d'une façon
très restreinte, alors qu'en Nouvelle-Écosse et en Ontario on y
recourt d'une façon beaucoup plus courante. (11 h 45)
J'ai dit tout à l'heure que la procuration existe dans notre loi
depuis 1970 et, selon moi, c'est le moindre de deux maux, le deuxième
mal étant la perte totale du droit de vote. C'est une façon de
permettre à certaines personnes de voter.
Par contre, le vote par courrier, personnel-
lement, je vais être très honnête, dans nos
circonscriptions... Une province l'a et cela semble marcher très bien,
mais c'est une province où la moyenne d'électeurs par
circonscription est d'environ 11 000. Alors on peut établir à ce
moment-là des contrôles que, dans des circonscriptions comme
celles qu'on retrouve au niveau fédéral, de 120 000 ou 125 000
électeurs, on ne pourrait pas établir. Là, à ce
moment-là, c'est particulièrement dangereux.
M. Gendron: M. Hamel, pourriez-vous nous donner la garantie,
c'est-à-dire tout simplement nous fournir - c'est plus correct, je pense
- l'information concernant les statistiques d'usage de la formule de
procuration qui existe au fédéral, dans les diverses provinces?
Vous avez ces chiffres-là.
M. Hamel (Jean-Marc): Oui.
M. Gendron: Je trouverais intéressant de confirmer ma
prétention que si ce n'est pas beaucoup utilisé au Québec,
c'est justement parce que cela ne fait pas partie de nos moeurs. Il serait
important d'avoir ces informations pour les distribuer à nos
collègues ou à un éventuel législateur qui
s'apprêterait à faire un pas dans l'abîme électoral
là-dessus.
M. Hamel (Jean-Marc): D'accord. Je ne les ai pas avec moi, mais
je vais les faire compiler et vous les faire parvenir.
M. Gendron: Troisièmement, j'aimerais aborder la question
du vote des handicapés mentaux. Je sais que, dans C-79, vous vous
apprêtiez à faire ce qui m'apparaît non seulement logique,
mais presque obligatoire compte tenu des chartes, de l'évolution des
mentalités et de cette nécessité de restreindre le moins
possible le droit à l'expression démocratique lors d'une
élection. Cependant, même si vous ne l'avez pas vécu parce
que, que je sache, c'est dans C-79, vous en connaissez quand même les
modalités d'application. Est-ce que vous pourriez nous donner quelques
précisions concernant l'encadrement de ce vote par rapport aux gens
vraiment plus lourdement handicapés que les autres sans embarquer dans
un système de qualifications, d'interdits, de ceux sous curatelle, etc.
J'aimerais, encore là, profiter de votre expérience pour que vous
nous donniez des précisions sur l'encadrement que vous pensez être
capable d'offrir et d'assumer pour toujours garder le caractère
d'intégrité du vote.
M. Hamel (Jean-Marc): Là-dessus, nous n'avons pas
d'expérience. D'ailleurs, très peu de provinces l'ont, mais
l'Ontario l'a, au moins d'une ou de deux élections.
J'ai mis sur pied un groupe de travail qui est justement en train
d'élaborer le genre d'encadrement que nous aimerions apporter parce que,
même si le projet de loi C-79 n'est pas adopté, je crois que la
question sera portée devant les tribunaux au tout début de
l'élection. Au cas où les tribunaux décideraient que les
dispositions actuelles de la Loi électorale qui privent totalement de
leur droit de vote certains groupes, et j'insiste sur le "certains groupes" de
handicapés mentaux, il faut que nous nous préparions en
conséquence.
D'après les quelques renseignements que j'ai pour le moment, et
ils sont très fragmentaires, il semblerait que les choses, le triage se
fasse un peu de lui-même, que les gens qui ne sont vraiment pas en mesure
de poser le jugement que comporte l'exercice du droit de vote s'en abstiennent
habituellement. Cependant, il y a toujours le danger de pressions qui peuvent
venir de la part des personnes qui peuvent les encadrer et c'est là
qu'il va falloir que nous travaillions assez près, surtout dans les
institutions où ces gens-là peuvent être confinés.
Présentement, vous savez fort bien qu'il y a beaucoup de gens qui ne
sont pas en institution et qui ne rencontrent peut-être pas les
conditions que la loi prescrit pour les priver du droit de vote et qui ne
seront probablement pas plus en mesure de voter que d'autres qui sont en
institution. On me dit que le nombre, du moins l'expérience le
révèle - j'aimerais plutôt entendre M. Bailie - est
relativement faible de ceux qui votent réellement.
M. Gendron: Une autre question, M. Hamel. Plusieurs groupes nous
ont suggéré d'envisager une espèce de journée
particulière, autre que celle du vote par anticipation, pour les
personnes dites handicapées mentales ou handicapées physiques
lourdement, et toute personne un peu traumatisée par la bousculade du
jour du scrutin. Il me semble que cela me paraissait un peu logique, mais je
n'ai pas assez d'expérience pour évaluer l'impact des coûts
et du nombre. Vous-même, avez-vous une opinion pour creuser un peu plus
cette hypothèse?
M. Hamel (Jean-Marc): La loi fédérale
prévoit en plus de la journée de l'élection
elle-même les trois jours de vote par anticipation et prévoit
également le vote dans le bureau du directeur du scrutin, ce qu'on
appelle le vote dans le bureau du président d'élection. Notre
mise en candidature est faite quatre semaines avant l'élection et,
dès le lundi suivant, le lundi de la mise en candidature, on a le vote
dans le bureau du président d'élection. C'est une formule que
nous avons empruntée de la Nouvelle-Zélande, que j'ai
suggérée vers 1977 et qui, je dois l'admettre, marche très
bien. J'étais un peu inquiet au début parce qu'elle se fonde
énormément sur la crédibilité du président
d'élection, du directeur du scrutin. Or, je dois dire qu'on a environ 1
% de nos électeurs qui votent de cette façon et 3 % ou 4 % qui
votent au bureau spécial. C'est ouvert à toute personne qui
ne
peut pas physiquement se rendre au bureau de scrutin, soit le bureau de
vote par anticipation ou la journée même de l'élection,
même si, cette fois-ci, nous ferons des efforts supplémentaires
pour que tous les bureaux de vote par anticipation donnent accès de
plain-pied et permettent l'accès aux chaises roulantes ou aux
handicapés assez sérieux. Mais en plus de cela, elles peuvent
aller au bureau du président d'élection qui, obligatoirement,
doit être accessible aux personnes handicapées. Je peux dire que
notre expérience, qui a d'ailleurs été imitée par
plusieurs provinces, est excellente.
Le Président (M. Doyon): Merci, M. Hamel. Le temps de M.
le député d'Abitibi-Ouest étant expiré, je
cède la parole au député de Gouin pour les dix minutes
réglementaires.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. À mon tour,
je veux saluer M. Hamel et le remercier de sa contribution à nos
travaux. Immédiatement une question reliée à cette
participation des tiers aux campagnes électorales. J'avoue que je me
suis interrogé, compte tenu de la connaissance que j'ai de la
législation québécoise et de la connaissance que je n'ai
pas de la législation fédérale, sur les mécanismes
qui vous permettaient à vous comme Directeur général des
élections du Canada de décider qu'une disposition d'une loi qui
est invalidée par un tribunal au niveau d'une province fait en sorte que
vous pouvez décider que cela ne s'appliquera pas dans tout le Canada.
Quelles sont les dispositions particulières de votre loi qui vous
permettent de prendre une telle décision? J'avoue que je ne conteste pas
le fait que vous le fassiez sauf qu'en vertu de nos lois, je ne sais trop
à partir de quelle disposition le Directeur général des
élections du Québec pourrait décider une telle chose. Je
voudrais essayer de comprendre le processus que cela doit suivre.
M. Hamel (Jean-Marc): C'est une décision purement
administrative fondée sur les pouvoirs un peu discrétionnaires
que j'ai en vertu de l'artice 4 de la loi. J'en ai fait rapport à la
Chambre à la suite de l'élection et cela n'a soulevé
aucune opposition. Je dois admettre que, d'abord, le fait que le gouvernement
de l'époque - la décision a été rendue à la
toute fin de juin - a décidé de ne pas porter la décision
en appel pouvait laisser entendre que celui-ci était en accord avec la
décision. D'autre part, le chef de l'Opposition avait manifesté
clairement son désaccord avec cette disposition particulière de
la Loi électorale. C'est un peu sur cet appui, appelons-le politique si
vous voulez, que le commissaire aux élections et moi-même avons
décidé non pas de fermer les yeux, mais de ne pas faire
enquête dans ces cas de façon systématique. Cela dit, je
dois admettre qu'aucune plainte, aucun cas de violation de cet article
particulier de la loi n'a été porté à notre
attention.
M. Rochefort: D'accord. Un autre point que je voudrais aborder
avec vous, qui a été longuement débattu au comité
technique et en commission parlementaire, a trait à toutes les
règles devant être suivies pour amener l'autorisation d'un parti
politique. On sait que les règles, au Québec, ont
été considérablement assouplies dans la deuxième
moitié des années soixante-dix. Cela a eu des implications
d'ouverture sûrement pour un certain nombre de nouvelles formations
politiques, mais, par contre, cela a donné lieu aussi à des abus
évidents qui ont été observés, notamment au dernier
scrutin, avec des implications sur la crédibilité des
institutions politiques, et aussi des implications quant au processus
démocratique lui-même et quant à des coûts
additionnels engendrés par cette possibilité pour des farfelus de
se glisser dans un processus devenu très souple.
Nous, ici, on a essayé d'envisager des mesures pour resserrer, un
tant soit peu, ces règles d'autorisation. J'avoue que les
résultats de la commission, jusqu'à maintenant, nous
amèneront probablement à réviser ce type de mesure de
rigidité nouvelle qu'on voulait apporter. J'aimerais que vous nous
expliquiez, brièvement, quelles sont les règles d'autorisation
d'une nouvelle formation politique qui sont actuellement en vigueur chez vous
et peut-être qui sont corrigées par le projet de loi C-79?
M. Hamel (Jean-Marc): Chez nous, il y a, à tout instant ou
assez périodiquement du moins, des suggestions que les règles
soient rendues un peu plus rigides parce qu'on trouve que c'est un peu trop
facile pour certains nouveaux groupements de se former. Par contre, il y a
l'autre côté qui est l'aspect de liberté d'association. Il
ne faut quand même pas que les partis qui détiennent le pouvoir ou
qui font les lois donnent l'impression de créer une espèce de
chasse gardée.
Présentement - le projet de loi C-79 posait certains ajouts
à ceci - le parti politique qui est déjà formé -
parce que là-dessus, il y a énormément de confusion... On
pense que pour enregistrer un parti politique, cela veut dire le former. Alors,
la loi fédérale prévoit quelque chose de différent,
c'est-à-dire que le groupe qui vient chez nous pour demander
l'enregistrement doit nous prouver qu'il existe déjà, qu'il a
déjà un chef, un bureau de direction, un conseil
d'administration, un agent financier, un vérificateur public, un compte
de banque et des dossiers. En principe, ce sont les renseignements de base
qu'on doit nous fournir. De plus, les intéressés doivent nous
démontrer qu'ils ont au moins 100 membres en règle,
c'est-à-dire que la demande d'enregistrement doit être
appuyée par la signature de 100 membres du parti; ce n'est pas beaucoup,
mais c'est quand même un début. Évidemment, le nom ne doit
pas porter à con-
fusion avec le nom d'un parti déjà accepté,
déjà reconnu. Là-dessus, j'ai le pouvoir de refuser si le
nom devait porter à confusion.
La demande doit être faite pas plus tard que 60 jours avant une
élection. Si l'élection est déclenchée moins de 60
jours après la réception de la demande d'enregistrement,
l'enregistrement est reporté à l'élection suivante, de
façon à nous donner le temps de vérifier vraiment si les
100 personnes qui ont signé sont vraiment membres du parti.
Si la demande est acceptée dans les règles, etc., dans les
périodes prescrites, le parti ne devient officiellement
enregistré que la journée où il a parrainé 50
candidats dans tout le Canada, ou plutôt a parrainé des candidats
dans 50 circonscriptions. C'est-à-dire que, dans l'ensemble, si vous
voulez, les candidats de ce parti ont déposé 10 000 $ comme
caution, parce que notre caution est toujours de 200 $. Mais à partir de
ce moment-là, ils ont tous les avantages, tous les privilèges,
mais également toutes les obligations d'un parti reconnu. Cependant, si
le parti ne réussit pas à faire élire douze
députés, à la prochaine élection, il continue
à être parti enregistré; il continue à avoir le
financement public, si vous voulez, mais un financement direct dans notre cas,
parce qu'il n'y a pas de financement direct entre les élections. Mais
s'il ne parraine pas 50 candidats, il perd automatiquement son enregistrement.
Ces candidats deviennent indépendants ou quelque chose du genre. (12
heures)
M. Rochefort: Merci. L'autre question. On a parlé du vote
par procuration. J'aimerais que vous nous parliez du vote itinérant qui,
je crois, est appliqué au niveau fédéral depuis au moins
la dernière élection fédérale, c'est-à-dire
où l'urne se promène. J'aimerais que vous nous disiez,
étant donné cette expérience que vous avez du vote
itinérant, quel est l'utilité que vous voyez du vote par
procuration étant donné la clientèle qu'on voudrait
rejoindre par le vote par procuration et des désavantages que nous y
voyons tous?
M. Hamel (Jean-Marc): Précisons d'abord que le seul vote
itinérant que nous avons présentement existe dans les
institutions où on peut porter l'urne d'une chambre à l'autre
pour recueillir le vote des personnes alitées. Cette disposition existe
depuis plusieurs années et je dois admettre que cela marche très
bien.
Voici ce que le projet de loi C-79 proposait. Vu que, de plus en plus,
les institutions ont tendance à être petites, de 15, 18 ou 20
personnes de façon non pas surtout à minimiser les coûts,
mais surtout à protéger l'identité ou la
confidentialité du vote comme groupe, on trouve assez dangereux
d'établir un bureau de scrutin, par exemple, dans une institution
où il y a moins de 25 ou 30 personnes.
Alors, ce que le projet de loi C-79 propo- sait, c'est que nous
puissions grouper un certain nombre de petites institutions et l'urne se serait
promenée d'une institution à l'autre en indiquant à
l'avance quelles sont les heures, de façon à pouvoir recueillir
au total peut-être 150 à 175 personnes.
Cela dit, le vote par procuration vise quand même d'autres... Le
vote par procuration n'est pas nécessaire dans ces institutions. Il vise
surtout les personnes qui sont peut-être confinées au lit chez
elles qui ne peuvent pas sortir. Il vise également ceux... Enfin,
initialement, le but était de rejoindre ceux qui ne peuvent aller
à un bureau de srutin, comme les pêcheurs, les prospecteurs, ceux
qui font de l'exploration soit minière, pétrolière, etc.,
de même que les étudiants.
Le vote par procuration, chez nous, a été instauré
au moment où l'âge du vote a été réduit de 21
ans à 18 ans. Or, avant, tout étudiant avait le droit d'avoir son
nom sur deux listes, sur la liste de la résidence de ses parents et sur
la liste du secteur où l'institution était située.
Or, en baissant l'âge du vote à 18 ans, cela faussait
d'abord le nombre de noms sur les listes et cela rendait - même si la loi
disait que l'étudiant tout en étant sur deux listes ne devait
voter qu'une seule fois - le contrôle absolument impossible. Alors, comme
le législateur a décidé d'enlever ce privilège que
l'étudiant avait, il a décidé de lui en donner un autre,
c'est-à-dire que s'il est sur la liste du lieu de sa résidence,
de son domicile normal et qu'il ne peut pas retourner pour voter, il peut le
faire par procuration. Alors, cela a été un peu l'origine. Par
ailleurs, c'était surtout pour les personnes allitées et pour
ceux et celles que l'urne ne peut pas rejoindre.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.
M. Gratton: Très rapidement, M. le Président, au
sujet de l'extension de la révision, on sait que le projet de loi C-79
prévoit ou prévoyait l'extension de la période de la
révision de la Loi électorale jusqu'au vendredi
précédant le jour du scrutin avec session spéciale de
là Commission de révision pour statuer sur les demandes.
Quant à nous, cela représente une amélioration
importante que nous souhaiterions retenir. Mais, M. Hamel, est-ce que vous
pourriez nous dire si, pour vous, cela pourrait poser des problèmes
particuliers d'application?
M. Hamel (Jean-Marc): Non, pas du tout. D'ailleurs, M. Bailie
pourrait en parler. Ces gens ont déjà l'expérience.
Même, ils vont un peu plus loin. Sur le plan fédéral, il y
a une question de charte, également. Chez nous, on fait une distinction
entre l'électeur urbain et l'électeur rural. Dans le cas de
l'électeur d'une section
rurale, il peut voter même si la journée même de
l'élection, son nom n'est pas sur la liste. Or, dans le cas de
l'électeur urbain, le nom doit obligatoirement être sur la liste.
Présentement, les listes ferment le 17e jour avant l'élection.
Vous avez un décalage de 17 jours entre les deux. Plusieurs
spécialistes en droit constitutionnel prétendent que ce serait
difficile de justifier en cour cette distinction faite entre l'électeur
urbain et l'électeur rural.
En prolongeant la révision au vendredi précédant
l'élection - je dois admettre que j'avais recommandé qu'on ait
l'ajout la journée même de l'élection, un bureau
spécial de révision, cela n'a pas été
accepté - le décalage n'étant que de trois jours, ce
serait défendable, en vertu de la charte. À la dernière
élection, si on se rappelle, une élection d'été, le
recensement avait été un peu difficile. J'ai quand même des
pouvoirs discrétionnaires assez étendus dans la loi en vertu de
l'article 4. J'avais invoqué ces pouvoirs pour prolonger le recensement,
non pas jusqu'au vendredi précédant l'élection mais
jusqu'au mardi ou mercredi, quelque chose comme cela. On a inscrit pendant
cette période de prolongation au-delà de 85 000 personnes. Ce qui
veut dire...
M. Gratton:... particulières.
M. Hamel (Jean-Marc): Pardon?
M. Gratton: Sans que cela crée des difficultés?
M. Hamel (Jean-Marc): Sans aucun problème, non. On avait,
par exemple... Ce que la loi C-79 prévoyait, c'est qu'il n'y aurait
qu'un seul centre de révision, ce qu'on appelle un seul réviseur.
Les demandes devaient être faites en personne ou par le truchement
d'officiers assermentés, ce qu'on appelle des agents réviseurs.
Nous ne prévoyions aucun problème particulier.
M. Gratton: Dernière question, si vous le permettez, M. le
Président, concernant la diffusion d'écrits en période
électorale. On se rappellera qu'à la dernière
élection générale au Québec, des livres, notamment
celui de M. Monière, qui était alors président du Parti
nationaliste et de M. Gil Rémillard, candidat libéral...
L'interprétation de la loi actuelle avait fait en sorte qu'on avait
jugé que la vente et la diffusion de ces écrits devait être
comptabilisées dans les dépenses électorales des partis
politiques. Est-ce que vous pourriez nous donner votre opinion et l'état
de la loi actuelle, les dispositions de la loi C-79, à l'égard
de...
M. Hamel (Jean-Marc): Je ne connais pas les dispositions de la
loi du Québec, alors je ne peux pas me prononcer là-dessus. La
loi C-79 ne prévoyait pas de changement. Chez nous, dans l'état
actuel des choses, on fait une distinction entre une publication mise à
la disposition du public et vendue au public dans le cours normal des choses et
la publication distribuée gratuitement.
Je vais vous donner un exemple assez clair. Au cours de
l'élection de 1980, je pense, un livre a été publié
il y a quelques années par l'ancien premier ministre de Terre-Neuve,
lequel comporte un chapitre qui n'est pas tendre à l'endroit de M. John
Crosbie. Ce livre est en vente dans les librairies. L'élection arrive,
il n'est pas question de suspendre la vente de ce livre. Si quelqu'un veut
l'acheter à 25 $, il l'achète. Mais un bon matin, il y a quelques
milliers de copies du livre qui sont distribuées gratuitement, comme par
hasard, dans la circonscription de M. Crosbie. À ce moment, cela devient
une dépense d'élection. Donc, il nous a fallu essayer de
l'interdire. D'abord, on a fait enquête pour savoir d'où cela
provenait. Cela représentait quelques milliers de dollars. On a
découvert que c'était quelqu'un qui habitait en dehors du Canada
et qu'on ne pouvait pas rejoindre.
C'est la distinction que nous faisons. Si quelqu'un écrit un
livre, qui est publié pendant la période électorale, et
que ce livre est vendu de la façon normale, dans les librairies, cela ne
tombe pas sous l'interdit de notre loi. Cependant, si quelqu'un s'avisait d'en
acheter plusieurs milliers de copies et de les distribuer gratuitement, c'est
une question différente.
M. Gratton: Mais on ne fait de distinction quant à la date
de la publication, que ce soit en période électorale,
précédant ou...
M. Hamel (Jean-Marc): Non, pas du tout. Si...
M. Gratton: D'accord.
M. Hamel (Jean-Marc): Si le livre est vendu de la façon
normale, que ce soit pendant la période d'élection ou non...
M. Gratton: M. le Président, je remercie encore une fois
M. Hamel de son concours et de sa collaboration. Nul doute que, lorsque nous
aboutirons à des amendements à la Loi électorale
québécoise, il pourra lui aussi sentir qu'il y a contribué
de façon très positive. Merci.
M. Hamel (Jean-Marc): C'est moi qui vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Leclerc): Alors, M. Hamel, Directeur
général des élections du Canada, la commission vous
remercie de vous être déplacé pour nous rencontrer.
M. Hamel (Jean-Marc): Merci.
M. Warren Bailie, Directeur général des
élections de l'Ontario
Le Président (M. Leclerc): Juste pour le Journal des
débats, je voudrais confirmer à Mme la secrétaire que
les remplacements sont les mêmes qu'hier.
Now, I would like to welcome Mr. Warren Bailie, Chief Election Officer
of Ontario. Welcome, Mr. Warren Bailie. Feel free to speak English, there is no
problem. You have 20 minutes to give us your comments and there will be
questions after.
M. Bailie (Warren): Merci beaucoup. Bonjour, mesdames et
messieurs. C'est avec grand plaisir que j'ai accepté d'être parmi
vous aujourd'hui. Comme mon français est limité, je vais
continuer en anglais, si vous me le permettez.
With me today is my assistant, Alan Stewart. I want to say that I am
honoured to have this opportunity to address you today. I am afraid that my
remarks must be entirely in English, although I hope they may still be of some
assistance to you.
I think you might want to know that I have been a deputy returning
officer in the polls; I have been a federal returning officer for two
elections; I have also been a provincial returning officer for two elections.
That will give you a little idea of my background.
I know from reviewing the proceedings that have already taken place in
this committee that there is a concern for protecting the integrity of the
electoral process and of course, in Ontario, we share that concern. Some of our
proceedings, such as the vote by proxy, have been limited in scope at first and
only extended after they have been shown to be compatible with a fair process
and to help the people of Ontario to have full access to the right to vote.
The voting rights of the mentally handicapped. Since 1984, there has
been no provision in Ontario law disqualifying the mentally handicapped from
voting. This means that the patient in a psychiatric institution is treated, as
far as it is possible, in the same way as any other elector. The patient who,
having chosen to be put on the list of electors for that institution, is able
to perform the formalities of voting by stating his name and address, taking
the ballot, going over to the voting screen and marking his ballot, with the
assistance of the poll officials if requested, and returning to the deputy
returning officer, surrendering his ballot to be deposited in a ballot box is
entitled to vote. In the 1987 election, 2160 patients in Ontario's eleven
psychiatric institutions were on the list of electors and approximately 50 % of
these voted. (12 h 15)
I understand that there is some concern that the ability of a mentally
handicapped person to vote by proxy risks the exploitation of some of our most
vulnerable citizens. Protection against this, in Ontario, comes from the limits
of the natural design of our system. An elector enumerated in a psychiatric
facility can vote in the polling place established on that facility and the Act
provides for the poll officials to attend upon the electors at their bedside,
if necessary, to allow them to cast their vote. If an elector in a psychiatric
facility is enumerated in the electoral district of his permanent residence,
then his proxy will ordinarily be a family member or another person living at
that residence, who would be a natural choice to exercise the proxy with a full
respect for the wishes and the interests of the elector.
Proxy voting. Proxy voting was instituted in 1929 in one special
situation. Mariners were allowed to appoint a family member (wife, husband,
parent, brother, sister or child) to vote for them. So that gives you an idea
of how long we have had the proxy: 1929. Then, on the recommendation of the
Legislative Assembly's Select Committee on Election Laws, the proxy right was
extended to Canadian Forces members, employees in the business of long distance
transportation who were absent for the period of the election and persons
certified by a doctor to be physical incapable of attending a polling place. It
is interesting to note from the debates of that legislation that the extension
of proxy voting was considered to be uncontroversial and not a matter of
dispute. There seemed to be at that time, as the minutes will show, agreement
from all parties.
In 1971, the proxy right was further extended to students absent from
their regular residence by reason of attending an educational institution. At
that time, the choice of proxies was extended to any qualified voter in the
same electoral district, not just family members, subject to the qualification
that an elector could act as a proxy for no more than one family member.
In 1984 a new Election Act was passed and the proxy right was further
extended to people unable to vote at the advance poll or on polling day by
reason of business commitments or employer's directions, participation in a job
training or retraining program or being an inmate in a penal institution not
under sentence of imprisonment.
The major complaint about the proxy voting in Ontario has been that it
is not accessible to more electors, such as people absent from the province on
vacation or for other personal reasons. The proxy voting system in Ontario has
worked well and has proven so useful to the electors that I have recommended,
in my report to the Legislative Assembly in July, that the availability of
proxy voting be extended to any elector with reason to believe that he or she
will be unable to vote at the advance poll or on polling day for any reason
whatsoever.
I do not feel that such a provision would
create the danger of wide-spread abuse. My estimate of the number of
proxies issued in the General Election of 1987 is 30 000, which is about one
twentieth of one percent of the total number of electors in Ontario or
approximately 250 per riding. One protection against misuse of the proxy right
is that people see voting as a personal right and will only use the proxy if no
other means are available for them to vote. This keeps the number of
applications for proxies at a manageable level and ensures that any systematic
attempt to gather a large number of improper proxies would not escape the
notice of the returning officer. The returning officer or revision assistant
issues the proxy certificate only if he is satisfied as to the eligibility and
qualifications of the elector and the proxy and the reason for the proxy being
appointed. Any person who appoints a proxy for reward, or induces an elector to
appoint a proxy by undue influence, or unduly solicits an appointment as proxy
is guilty of corrupt practice and is liable to a fine of 5000 $ and
imprisonment for a term of six months, or both.
The location of polling places (in homes for the aged and other
institutions). In order to facilitate the voting in homes for the aged and
nursing homes, Section 14 provides that a polling place shall be establishmed
on the premises of an institution of 20 beds or more, and that returning
officiers shall arrange for the deputy returning officer and the poll clerk
necessary, to attend upon the electors at their bedside. I understand that
there is some concern that such a procedure allows for the possibility of
political allegiance of the electors in a specific institution to be
identified, but the alternative is to have no opportunity to vote. The benefit
in convenience to the elector far outweighs this disadvantage, in our
experience. We also have Section 46 (5), which you will find in the Election
Act reproduced in the document of June 15th, which allows the ballot box to be
moved in ordinary polls to facilitate the voting by the elderly or disabled
electors. What that means is that we are prepared to move the ballot box to the
curb if an elderly or handicapped voter arrives at the poll but is unable to
mount the steps that may be there. We have actually been encouraging our poll
officials to do that for ten or twelve years now and, in 1984, we put it right
in the Act.
Vote for nonregistered voters. As you know, in Ontario we allow an
elector to be added to the voters' list until and including the day before the
election. The elector must satisfy the returning officer, or the revision
assistant, that the applicant has provided sufficient grounds for the addition
to be made. The elector is then issued a certificate, which is surrendered to
the deputy returning officer at the poll where the elector intends to vote.
In addition, in rural polls, persons may be added to the list on polling
day by having an elector from the same polling division vouch on oath that he
knows the person whose name has been omitted and that he believes the person to
be qualified to be entered on the list. We do not have complete statistics on
the frequency of vouching because electors added in this way are recorded only
in the poll books maintained by the deputy returning officers, but we have
examined a representative sample of ten electoral districts and estimated that
about 49 000 electors were added to the list through vouching in the last
election, or about eight hundredths of one percent of the total number of
electors.
We believe strongly that eligible electors should be able to vote, if at
all possible, and not be disfranchised because they have failled to get
themselves on a list. I have recommended to the Legislative Assembly that
Ontario adopt a provision similar to the one used in Manitoba, allowing
electors to be added to the list on election day in urban or rural polls if
they take an affidavit of eligibility and satisfy the deputy returning officer
as to their qualifications. To some extent, this will ensure a better check
against abuse than we currently have in rural polls, because under the existing
law a deputy returning officer must add an elector to the list if he or she is
vouched for by another elector under oath, but it is only an oral oath. I
recommend that a deputy returning officer be required to add an elector to the
list only if he is satisfied as to the elector's qualifications. This puts the
ultimate authority in the hands of the deputy returning officer who will
usually be a resident of the same polling division and is in a better position
than the returning officer to protect against abuse of the right to be added to
the polling on election day.
Accessibility to the handicapped. Ontario law requires that a returning
officer shall select locations which give access to wheelchairs for advance
polls other than in the office of the returning officer. Regular polls must be
situated to give access to wheelchairs so far as is reasonably possible.
In the 1987 election, steps were taken to attempt to maximize the access
of the disabled to the polls. Returning officers were required to compile a
detailed report on polling place accessibility for the disabled, based on the
preliminary selection of the polling places. Returning officers were also
required to obtain prior permission from the Chief Election Officer if it was
necessary to establish a returning office in an inaccessible location, and the
returning officers were told at the time of their instruction that, if they
were to make application for an exception to this rule, they would probably
find that I would be offering to come out to see them, take them by the hand
and help them find an accessible location. So, needless to say, we had very few
of these applications.
In my report to the Legislative Assembly in July, I noted that the
availability of accessible
locations across Ontario was not sufficiently widespread yet to allow a
statutory requirement that all returning officers or polling places be fully
accessible to the disabled. Enhanced administrative efforts to ensure that
polls are accessible so far as is reasonably possible seems to be the way to
proceed, in our experience. Mr. Chairman, those were my remarks.
Le Président (M. Leclerc): Thank you very much, Mr.
Bailie. M. le ministre.
M. Grattoir Yes, Mr. Chairman, I want to thank Mr. Bailie. I
think that, in this case too, it is a first for a Quebec parliamentary
committee to welcome a chief returning officer from another province. We were
indeed very pleased that, not only have you accepted to come here, but you seem
to have done your homework very well. In your text, you have answered many
questions which are very pertinent to our discussions and to the ongoing
discussions that we have had over the past few months. You have indeed answered
some of the questions that I had listed to be put forward today.
On the question of the exercise of the vote for mentally handicapped
people, how is the list of voters of that category made up? Is it done through
the normal procedures or is there any special procedure that you follow when
drawing up the voters' list?
M. Bailie: It is interesting that you should ask that question
because I studied very carefully, when Quebec first gave the right to vote to
the prisoners, how the list was prepared, thought on it carefully and decided
that, taking into consideration the possibility that some people in these
institutions would prefer to protect their anonymity and not vote, instead of
going as we would in our enumeration to every room in the institution and the
name gets on, period, we had the administrator put up a notice that our
enumerators would be in the library, in a certain room, activity room, and that
anyone who wanted to be on the list could go there to have his name added. That
gave them an option, if they preferred to keep it very quiet, they were there;
if they preferred not to be on the list that would be distributed to all the
political parties, they had that opportunity.
Furthermore, I used my authority under the Act to recommend to the
returning officers that each one of these institutions be designated a rural
polling division. That allowed anyone of the patients there to change their
mind; right up until 8 o'clock the night before election day, they could decide
to still be added to the list by a certificate to vote or, even on election
day, they could still have one of the people who had registered the vote vouch
for them and have their name added. So, I felt that this was the compassionate
way to proceed and, yet, still maintain the security of our system.
(12 h 30)
M. Gratton: Some people earlier - I think it was yesterday -
mentioned that there was a practice at times in institutions - I am talking
about our experience, not Ontario's - where enumerators would go to the
administrators of the institution and sometimes be told not to put so-and-so on
the list, based on the difficulties that it might represent for the
administration to have these people vote. If I understand correctly, in
Ontario's case, an eligible voter must make a personal effort to register and
be on the voters' list. He is not put on the list by the testimony of some
administrator of the institution, for example.
M. Bailie: Well, Mr. Minister, I have to tell you that
unfortunately, cases such as you have described do happen in Ontario as well, I
am sorry to say. We have tried to be very careful to instruct our returning
officers to instruct their enumerators that they really should see each and
every person who goes on the list. But in practical terms, that is not always
possible and some of the lists and some of the names on the lists in
institutions are there and are given by the administrator and, I am sorry to
say, some of the names that may not be on the list are omitted because the
administrator has said: That person is completely senile, there is no point in
putting his name on the list.
But this is contrary to my instructions and I am very firm about it. We
are trying to eliminate that type of thing. I will just tell you a little
story, if I may take a moment. When I was a returning officer, one of my
enumerators reported to me that in a small nursing home, she was not allowed to
enumerate the patients. So I called up the administrator and told her in no
uncertain terms what the law said. So she allowed the enumeration of this
establishment even though she said to the enumerator and to me: These people
are all senile, they will not know what to do on election day. Knowing that my
enumerator had had difficulties with this institution as small as it was, I
always had a practice, as a returning officer, of visiting as many of the polls
on election day as I humanly could, so I decided I would visit that
institution. As soon as I walked in the door, I saw this lady in a white smock
coming quickly towards me and I thought: Oh! I guess I am going to get it now!
But I was really pleased. She said: Mr. Bailie, I am so glad that you persisted
in having these people put on the list. She said: I can hardly believe it, but
as soon as they started talking about the election, some of these people that
on another day do not know what their name is - they do not know whether they
had their dinner or not, they are just out of it and these are her terms - all
of a sudden they perked up. She said: That one lady over there is almost
completely senile, but for the last eight or nine days she is talking about
elections, telling us
about when MacKenzie King came here to campaign, etc., etc. She said:
The next day, she may not even know her name, but you are right, they should be
on the list and they should have an opportunity to vote. That is just one
example.
M. Gratton: How can I tell you how happy I am that political
activity might have such a beneficial effect on some people!
Is the work or the presence of political party representatives regulated
in any way in these institutions? Are there special rules that prevent
political militance of different parties to do certain things that they are
allowed to do in other circumstances?
M. Bailie: Well it is not covered by the Election Act or our
guidelines. The political parties did make representations to these
institutions and in some institutions, the candidates were allowed to go in to
the library or activity room and a meeting was organized and they were allowed
to speak to the patients. In some others, by agreement with the candidates,
they merely supplied some material to be left in the activity room for the
patients. We did not have any difficulty there; with the cooperation of the
parties and the candidates, it worked well.
M. Gratton: Does the vote in institutions take place - how do
you call it, "le vote par anticipation" - at the advance polls or on regular
voting day?
M. Bailie: No, it takes place on regular voting day.
M. Gratton: Only. M.Bailie: Only.
M. Gratton: No special provision for advance polls.
M. Bailie: No.
M. Gratton: I understand from your text that it is an obligation
to have a polling station in any institution with 20 or more patients. Is that
correct?
M. Bailie: Twenty or more beds, even.
M. Gratton: Twenty or...
M. Bailie: It could be 20 beds, 16 patients.
M. Gratton: And you make no consideration, whether the
institution is public or privately owned?
M. Bailie: No. As a matter of fact, you will notice in the
legislation that we put a poll in senior citizen residences too. So, if it is
an apartment building with senior citizens in it, and there might only be 30 or
40 people there, we will put a special poll in it, just to make access to the
poll handier for the voters.
M. Gratton: And it is an obligation to have a special polling
section, even in old age homes, for example.
M. Bailie: Yes, and senior citizen apartments as well.
M. Gratton: I see. And is access to voting in these special
offices limited to the residents of those buildings or do they include people
in the surronding area?
M. Bailie: No, it is not limited. In fact, in order to cut down
on the number of small polls, we recommend that the returning officer seek the
approval of the administrator to have the poll for the local area in their
establishment. Number one: because, often, these buildings are level access or
wheelchair accessible, so they are desirable locations. Number two: we found
that the people in these homes find it very interesting to see the local people
coming in to vote. They think they are all visitors; they are quite pleased to
see them. I know, I was on the board of directors of a large senior citizens
home. We actually put two polls in the activity room there. And when I went
over to check it out, as the returning officer as well as a director of the
institution, at the front door, there were about 15 people in wheelchairs, just
inside the front door, greeting all the voters coming in, smiling and nodding.
So, it might have curtailed some of the activities that day, but it seemed good
to have them together. So, we encourage that wherever possible.
M. Gratton: Where is the vote of these patients... I know where
they are counted physically, but where are they allocated? In the riding where
the establishment is located or in the riding of the former residence of these
people?
M. Bailie: No. If they are entitled to a poll, it is on the basis
that they are residents there. So, they have to declare their residence there,
even if only temporarily. We take the declaration of a voter that this is his
residence. That is how we are able to handle the psychiatric patients voting.
The statement that they are a resident is prima facie evidence of the fact, in
our opinion.
M. Gratton: But the resident of a larger institution, who claims
to be there on a temporary basis, would then be allowed to vote in his riding
of residence.
M. Bailie: Yes. If the person was in an institution and her
statement was: Well, I am
just here temporarily, I consider my home to be where my family is, as
my true residence, then she would be expected to be on the list there and would
have to vote by proxy. Some prefer that.
M. Gratton: I see. One last question on the subject. Are any
particular or special means used to ensure or to facilitate the vote of people
in smaller institutions where there is not a special poll?
M. Bailie: When you consider twenty beds, it gets to be a pretty
small institution, because the law in Ontario or the administration of homes
for the aged in Ontario is such that there are very few institutions or homes
smaller than that. But, we still have the provision, because under the Ontario
Election Act, there must be at least one polling place in every polling
division. So, it would be up to the returning officer to decide if he had a
small nursing home in an outlying location and even though there were ten beds
and that he made the decision to establish a poll there, it would be acceptable
to me as the administrator.
M. Gratton: On voting day, your deputy returning officer can go
around each room and have the people vote in their room. Is that available
outside institutions, this movable voting office?
M. Bailie: No. There is a provision, wherever we are talking
about institutions, where there are bedridden patients. Any institution where
there are bed-ridden patients, the poll officials are allowed to perambulate
the polls - it is the term we use. So, what usually happens is that they will
speak to the administrator and say: What would be the best time to secure the
vote of the bedridden patients? I think what they usually say is: Wait until
after lunch, because they always get dressed up and come down for lunch and if
they have not come down by that time... So, we usually perambulate the poll at
approximately, say, two o'clock until three thirty, and the two poll officials
go to the bedside and if there are any scrutineers present representing the
parties, they are allowed to go, but the scrutineers must only go to the door,
not the bedside and, then, the poll officials go and ask if that person needs
any assistance. If she requires it, then, the deputy returning officer, in the
presence of the poll clerk, will assist her with the marking of the ballot.
M. Gratton: Of course, they will only go to the door of a person
who has taken the trouble to be inscribed on the voters' list. They would not
visit...
M. Bailie: Exactement.
M. Gratton: Thank you. I hope that time will allow me to come
back later on.
Le Président (M. Leclerc): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Boulerice: Mr. Bailie, perish any bad thought, you will be
questioned by the shadow cabinet minister for Foreign Affairs! It is only a
matter of the knowledge of English. Proxy voting is - we can name it that way -
a tradition in your province, because it has already been established, as you
wrote it, since 1929 with certain limitations which you have extended. My first
question is: What is the average voting percentage in a legislative election in
Ontario?
M. Bailie: Well, that is an embarrassing question! I can tell you
that it is not as good a turnout as it would be in Quéebec or any of the
other provinces. Unfortunately, our average turnout would be in the
neighborhood of 60 %, 62 % in the last election, but it goes down to 57 % or 58
%. It is not high; it is not something we are proud of.
M. Boulerice: Yes, I know. Well, maybe you could hold referendums
that would help to rise the number!
M. Bailie: Peut-être.
M. Bouferice: You have mentioned that only 250 people per riding
lose used proxy voting. How do you explain such a low...
M. Bailie: Low number.
M. Boulerice: Low number, yes.
M. Bailie: Well, as I said earlier in my comment, you have to
remember that if you have a proxy it means you do not get to make the X
yourself. What we believe happens is that someone does not take that action
lightly. You do not turn over your right to put the X without careful thought
and usually, it has to be the only alternative. So, I think one approaches it
very carefully. That is why the numbers are low.
M. Boulerice: Did you have, Mr Bailie, complaints from voters who
have given their proxy voting forms as a mandate and the people who had it did
not exercise it for the voters? (12 h 45)
M. Bailie: No, we have not had any specific complaints. But it is
something that we would watch very carefully and follow up on, should we
receive such a complaint. But to date, we have never had a complaint.
M. Boulerice: You have also mentioned on page - it is not
numbered, anyway, but I guess
you remember your text - that "any person who appoints a proxy for
reward or induces an elector and so on, is guilty of corrupt practice and
liable to a fine of 5000 $ and imprisonment for a term of not more than six
months". Were you in a position to exercise such a sentence?
M. Bailie: Oh yes! The application form that is filled out by the
person and signed by the person who is going to act as a proxy. I should have
supplied you with some of the forms. We have tried to design it very carefully
to make the point that this is a serious offense to induce a person to make out
a proxy. When you sign your name in big black letters, right below, it says the
penalty is a 5000 $ fine, six months in jail or both. So, we have tried, by the
design of the form, to make it very clear that we consider this as a very
important matter. If we had complaints of a substantial nature, we would
certainly proceed. We have no complaints on that, so we have not proceeded.
M. Boulerice: When you are requesting amendments to a law, is
this... I guess the answer that will come will be yes, because if I look at the
numbers you give me, 62 and 57, it is to raise the number of participating
members at a vote.
M. Bailie: Exactement. When we have meetings with the committee
on the Legislature and individual members even, they say to me: It is really
bad, the turnout of voters. What would you recommend to help us get more
participation? So, you are right that proxy provisions are part of the answer
to try to increase the participation.
M. Boulerice: But the... Excuse me if I qualify your
participation in Ontario legislative election, but those amendments you are
giving the law, do you figure that they will really raise the numbers, because
if I can remember right, there are only 250 people per riding who really use
it?
M. Bailie: I do not propose the amendments personally just to
increase participation. It is a commitment that I have to the system that I
want to remove any impediment, real or imagined, that would affect the turnout
of the voting. That is a commitment I have. So, even if it did not increase the
turnout a great deal, it would still be my philosophy to remove any impediment
that was consistent with the security of the system.
M. Boulerice: You said that you have, I will call them walking
ballot boxes in some institutions. In those institutions where the walking
ballot boxes are walking around or going up and down, can people also use the
proxy voting procedure?
M. Bailie: In a small home?
M. Boulerice: Yes, or the big ones.
M. Bailie: You see, a person in an institution is not able to
make the claim that she will not be there on election day. It is not as easy
for them to make that claim because if they are handicapped and remain in
institution, they would likely be there on election day. But, if it were a
small institution, let us say ten beds, or a chronic care section of an
hospital with ten beds, they would not be entitled by law to a poll, so then,
they would be entitled to use the proxy. But, if we have a poll in there, then,
they cannot use a proxy.
M. Boulerice: In the case of the mentally handicapped, do you
have some critiques about the use of the proxy voting procedure for that very
specific category of voters?
M. Bailie: No, we have not had complaints because, since the
mentally handicapped have received the right to vote only in the two last
elections, the balloting has been in their institutions. So, though they are
now entitled to vote, those in institutions would have the opportunity to vote
on their own if, in a person's private home, there is a person. In the past,
all they would have to do is declare that they were medically unable to get to
the poll and the proxy could have been issued. So, that is not anything new.
But we have still not received complaints.
I remember one time that a lady called the office on one occasion. She
intimated that a proxy was issued and it was not correct because she was the
relative that was closest to this person. And, so we did look into it. And it
happened to be another person who was a niece of the man and visited him a
little more often and he gave the proxy to that individual. Well, it was his
decision to decide whether he would ask his daughter to vote as his proxy or
his niece and we could not find any reason to believe that she had exerted any
undue influence on him, so this was just something we looked into and felt
there were no grounds for any case.
M. Boulerice: Have you observed some cases of manipulation or
harassment in the 1987 election? Again, for people who are mental
handicapped.
M. Bailie: Well, in one institution, I did hear that the
volunteers who were bringing the patients down to the polling place, those who
had to go in wheelchairs, were whispering in their ear: Make sure you vote for
number two or number three, whatever. And, I very quickly went to that
institution and asked that they be very careful to instruct these people who
were
handling the wheelchairs that they should not do it, but it is pretty
hard to control. After all, when a regular voter is picked up to be driven to
the poll, sometimes the driver might whisper something to him. So, it is
difficult to control. But we try to watch it very carefully. And we have only
that one complaint that I am aware of.
M. Boulerice: You write that in the 1987 election 2160 patients
in Ontario's 11 psychiatric institutions were on the electors' list and 50 of
these voted.
M. Bailie: Fifty percent.
M. Boulerice: Fifty percent, yes. Which is again under your - if
I can call it that - your provincial or national level.
M. Bailie: Right.
M. Boulerice: How do you explain that?
M. Bailie: Well, it is not possible for me to explain because
voting is a private matter. I could guess, of course, that some people thought
differently after registration and decided not to vote. But it would be pretty
hard for me to guess. It is a free will idea, so...
M. Boulerice: In those psychiatric institutions, a politicial
party is allowed to - and of course the candidates - go in a happy-go-lucky way
or is there really a kind of frame? Are there structures or a procedure to
follow and all that stuff?
M. Bailie: Well, the procedure which allows the candidates to
canvass is not in the Election Act in any way. The institutions did talk to the
candidates who showed an interest, and made accommodations that were agreeable
to both. And . I know in some institutions they agreed to have a meeting and
have the people there, and then the candidates would all speak and they would
have a chance to answer questions. In another institution, the candidates were
satisfied - because I did not have any complaints from candidates - to just
leave some literature there that was distributed. So, I think there were a
variety of arrangements, which is really between the candidates and the
institution, and it seemed to work well. I did not have any complaints from
candidates.
M. Boulerice: Are those ways of doing it a regulation by the
direction of the institutions or is it a way that has been promoted by hospital
committees - I do not know what the right word is - comités des
bénéficiaires, I mean...
M. Bailie: Well, I am not sure. I think that in the institutions,
they do have residents committees.
M. Boulerice: Residents, yes.
M. Bailie: And I believe they would have had input on the system,
because I did not receive one letter of complaint from a voter in an
institution or a candidate. So, sometimes, I am not sure why, I do have
somebody watching over me during elections, that may be part of it, but so far,
no complaint.
M. Boulerice: Okay. Mr. Bailie, Mr. Stewart, thank you for coming
and being such nice neighbors and sharing your observations and experience with
us. Again, thank you and I hope you will profit by your stay in Quebec city, it
is beautiful.
M. Bailie: Merci beaucoup.
Le Président (M. Leclerc): M. le ministre.
M. Gratton: Just one last question perhaps, Mr. Bailie, if you
will allow me. Article 13. 3 of your Act reads as follows: 'The poll may be
situated in any public building or on private property and shall so far as is
reasonably possible give access to wheelchairs. " Could that mean that a poll
could be located in a private home, for example?
M. Bailie: Yes. We have polls... That allows us to have a poll in
any place. We had some polls established in the garage of a home. So, they vote
in the garage, in the driveway because access is good and if the weather is
good. We can locate a poll any place by that wording.
M. Gratton: Is preference given to public buildings however?
M. Bailie: Yes, preference is given to public buildings because,
generally, they might have better access, but there is no restriction on
private homes. In our instruction to the returning officers, we set down
certain criteria which usually eliminate most private homes because of the
steps and narrow doorways, but it would not eliminate them entirely because, in
certain isolated locations, a private home might be more accessible because it
is geographically closer. I caution the returning officers not to come to me
and say: Now, we are picking this school because it is wheelchair accessible,
and then, they have voters coming from 14 miles in every direction. That is not
accessible. It is accessible if you get there, but suppose someone does not
have a car or suppose they do not want to phone one of the candidates for a
ride. So, that poll is not accessible in my opinion. I require them to be very
careful that the polls are not removed too far from the polling division just
to find a building that is wheelchair accessible; it must be
accessible geographically as well and not too far removed. So, we do use
homes and they must be chosen with great care.
M. Gratton: Mr. Chairman, I think that it might be worthwhile to
quote from your opening remarks which you did not read into the transcript
today, partially at least. You say that the basic premise of Ontario law is
that "election laws, procedures and officials exist in order to facilitate and
protect the right to vote. If a proposed reform extends the opportunity to vote
to people who would otherwise be unable to exercise that right, then the idea
should get the benefit of the doubt. " I think that your testimony this morning
shows that indeed you were living up to that principle and I, for one, whole
heartedly agree that the importance must be given to the voter and to making it
as easy and as accessible for him to exercise that right.
Inclosing, Mr. Bailie, I would like to thank you as I did Mr. Hamel, not
only for appearing before the committee and answering our questions in a most
efficient way, but also in having been good enough to cooperate with the
secretariat in the work leading up to this committee.
I am sure that by the time we end this discussion by presenting a bill
to the National Assembly, we might have again occasion to call on your
expertise and we thank you in advance for your constant cooperation.
M. Bailie: It was my pleasure and of course the staff are so
charming, it makes it much easier.
M. Gratton: Thank you.
Le Président (M. Leclerc): Thank you very much, Mr.
Bailie, and have a safe trip back home.
La commission reprendra ses travaux à 15 heures et entendra le
Directeur général des élections du Québec.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons poursuivre nos travaux pour entendre le Directeur
général des élections du Québec, M. Pierre-F.
Côté. M. Côté, nous vous laissons la parole pour
environ 20 minutes.
M. Pierre-F. Côté Directeur
général des élections du Québec
M. Côté (Pierre-F. ): Merci, M. le Président.
Au départ, je voudrais vous présenter mes deux adjoints. À
ma droite, M. Jean Lambert, adjoint au financement; à ma gauche, M. Jean
Jolin, adjoint aux scrutins. D'autres personnes de mon bureau sont ici pour
apporter assistance, le cas échéant.
Je désire avant tout vous remercier, ainsi que les membres de
cette commission, de m'avoir demandé de participer à vos travaux.
Comme vous le savez, c'est pour moi et les membres de mon personnel la
continuation de ce que je crois être une fructueuse collaboration au
processus de modification à la Loi électorale, processus
amorcé par M. le ministre délégué à la
Réforme électorale et poursuivi par votre comité et la
présente commission.
La participation du Directeur général des élections
a d'abord pris la forme, au printemps 1986, d'un dépôt au Conseil
consultatif d'une trentaine de réflexions sur d'éventuels
amendements à la Loi électorale, tant en regard du scrutin que du
financement des partis politiques. Ainsi amorcée, notre contribution
nous a permis de soumettre en juillet et août 1987 une liste de 95
propositions additionnelles au ministre délégué à
la Réforme électorale pour un total d'environ 125 sujets
d'étude.
Par l'intermédiaire de Me Eddy Giguère, répondant
du Directeur général des élections auprès du
comité de travail sur la révision de la Loi électorale
dont la formation fut annoncée en mars 1988 par le ministre
délégué à la Réforme électorale, nous
vous avons fourni par écrit des commentaires sur un très grand
nombre de sujets.
Permettez-moi de vous souligner jusqu'à quel point nous avons
apprécié travailler en collaboration avec le secrétariat
à la Réforme électorale. Nos relations furent non
seulement cordiales mais empreintes d'échanges fructueux.
Le document intitulé "Résultats des travaux du
comité de travail sur la révision de la Loi électorale"
nous montre que la méthode de travail privilégiée s'est
avérée tout à fait positive quant au nombre de points qui
ont fait à ce jour l'objet de consensus.
Par contre, sur un certain nombre de sujets, le comité a choisi
de référer la problématique à la présente
commission parlementaire afin que le débat sur ces questions soit
élargi à l'ensemble des intervenants concernés. Mon
intervention de cet après-midi se limitera à souligner certains
points sur lesquels je crois nécessaire d'attirer votre attention. Le
seul objectif que je poursuis est celui de vous soumettre des commentaires pour
alimenter vos réflexions et vous indiquer, si possible, les
conséquences administratives des décisions que vous prendrez.
Certains sujets furent soulevés en particulier lors des audiences
de la semaine dernière et de cette semaine. Il y en a d'autres sur
lesquels je crois opportun d'insister à nouveau. Il s'agit du vote des
handicapés mentaux, du vote des malentendants, du vote des non-voyants,
du vote des analphabètes, des bureaux de scrutin itinérants, du
vote des Québécois hors Québec,
des bulletins de vote des détenus, de la liberté
d'expression des tiers, du débat des chefs, du financement des partis
politiques non représentés à l'Assemblée nationale,
des critères d'autorisation d'un parti politique, de la
dénomination officielle des partis politiques et, finalement, des
rapports financiers annuels et rapports financiers de fermeture.
Le vote des handicapés mentaux. Faire cesser la discrimination
envers cette catégorie d'électeurs me semble tout à fait
en harmonie avec les principes d'universalité du droit de voté et
ne semble pas poser de difficultés pratiques majeures. Les balises
à établir pour assurer l'intégrité du vote de ces
électeurs devront être à la fois rigoureuses et souples
pour en assurer le bon déroulement tout en s'adaptant aux circonstances.
L'expérience toute récente de l'Ontario à cet égard
est précieuse. Les remarques qui ont été soulevées
quant aux concordances nécessaires avec les exigences du Code civil me
semblent importantes. Il faudrait que les juristes les étudient avec
soin.
Le vote des malentendants. Le problème que connaissent les
personnes ayant une déficience auditive pourrait être
pallié si ces électeurs pouvaient obtenir l'assistance de
l'interprète qui les accompagne tel que le prévoit l'article 226,
cinquième alinéa de la Loi sur les élections et les
référendums dans les municipalités.
Le vote des non-voyants. Les non-voyants disposent présentement
d'un gabarit qu'ils peuvent utiliser lors du scrutin. Il existe deux autres
moyens qui pourraient être utilisés: des coches qu'on retrouve sur
le côté droit du bulletin de vote ou l'impression en braille du
bulletin. Cette dernière solution s'avère très difficile
à réaliser. Une solution qu'il faut déjà avancer
concernant les personnes ayant des difficultés visuelles serait
d'afficher dans les bureaux de vote des reproductions géantes sous forme
de poster des bulletins de vote.
Le vote des analphabètes. On ne possède pas de
façon rigoureuse le nombre exact d'analphabètes au Québec.
Cependant, certaines estimations nous laissent croire qu'il serait de l'ordre
de plus d'un demi-million d'électeurs. Ces données justifient
à elles seules de prendre des mesures pour faciliter l'exercice du droit
de vote chez cette catégorie d'électeurs.
Ma récente expérience d'observateur canadien à
Haïti m'a permis de constater que, malgré les résultats
pitoyables d'un essai de vie démocratique, les responsables des
élections ont réussi à produire un bulletin de vote d'une
très grande qualité pour permettre à une population qui
comprend 80 % d'illettrés d'exercer son droit de vote. Ce bulletin
comportait la photo de chaque candidat ainsi que le sigle de son parti
politique.
Si vous décidiez que soit dorénavant apposé le
sigle d'un parti politique ou d'un candidat indépendant sur le bulletin
de vote, cela entraînerait peu de coûts supplémentaires
selon les informations dont nous disposons présentement. Il faudrait
cependant bien déterminer les conditions du choix d'un sigle et de son
utilisation.
Quant à l'idée d'avoir un bulletin de vote qui
comprendrait la photo du candidat, une estimation préliminaire a permis
d'établir que cela coûterait 25 % de plus que le coût
d'impression des bulletins lors des dernières élections
générales. Le coût global d'impression s'est
élevé à environ 500 000 $. Il faudrait donc envisager un
déboursé additionnel de 125 000 $. Si cette suggestion
était retenue, il faudrait éventuellement procéder
à l'impression des bulletins de vote sur une base régionale.
Les bureaux de scrutin itinérants. Déplacer la boîte
de scrutin pour faciliter l'exercice du vote ne présente pas de
difficultés majeures si cela est fait à l'intérieur de
l'immeuble où est localisé le bureau du scrutin, pour autant que
le processus à suivre est bien établi. Il en va autrement s'il
s'agit de déplacer l'urne à l'extérieur de l'immeuble
où est localisé le bureau de scrutin, soit dans le voisinage
immédiat, soit d'un immeuble à un autre.
Le vote des Québécois hors Québec. Établir
des modalités pour permettre aux Québécois hors
Québec d'exercer leur droit de vote est une mesure qui, elle aussi, est
en harmonie avec les principes d'universalité du droit de vote.
Cependant, la formule proposée dans le document de réflexion et
de consultation sur la Loi électorale fait appel au vote par
correspondance. On se rappelle que cette façon de procéder dans
certains pays européens a créé des difficultés. Par
ailleurs, aux États-Unis, il semble qu'il n'y aurait pas de
difficulté d'application; il est bien connu qu'il n'y a pas dans ce pays
des délais comme ceux que nous rencontrons ici. Cette difficulté
est, par ailleurs, minimisée si l'électeur exprime son choix non
pas pour un candidat, mais pour un parti politique. Cela permet l'envoi du
bulletin dès le début de la campagne électorale.
Une autre façon de faire, ce serait de permettre à ces
Québécois de voter par procuration. Quelles que soient les
modalités retenues, le domicile et la durée de celui-ci hors
Québec sont des aspects importants de cette question qu'il faudrait bien
déterminer.
Le bulletin de vote des détenus. Il serait approprié de
modifier à nouveau le bulletin de vote utilisé par les
détenus, tel qu'actuellement prévu à l'annexe e de la Loi
électorale. Au lieu du bulletin actuel, qui requiert du votant
l'inscription manuelle du choix de son candidat sur le bulletin, basé
sur la liste des candidats de sa circonscription électorale, il serait
préférable que les électeurs détenus utilisent le
même bulletin de vote qu'utilisent tous les autres électeurs. La
raison pour laquelle le changement actuel avait été
proposé résidait dans l'impression et la distribution des
bulletins de vote dans les maisons de détention. Ce
procédé était lourd et coûteux lorsque les bulletins
étaient ceux
imprimés dans chaque circonscription électorale. La
solution à ce problème est assez simple: autoriser le Directeur
général des élections à imprimer les bulletins de
vote qui serviront à cette catégorie d'électeurs. Les
coûts de distribution seront alors minimes.
L'impression des bulletins qui seraient utilisés dans les maisons
de détention, bulletin de vote des circonscriptions électorales
où les détenus ont leur domicile, serait la responsabilité
du Directeur général des élections et corrigerait, ipso
facto, l'annulation de bulletin dont le nom du candidat est écrit de
façon illisible.
La liberté d'expression des tiers. La discussion à prendre
à l'égard de cette question en est une qui relève d'une
politique à maintenir ou à modifier. Il faut se rappeler que
l'exercice d'une liberté est la plupart du temps conditionné par
l'exercice d'une autre liberté. Le législateur doit
déterminer quels sont les paramètres d'exercice de l'une par
rapport à une autre. La liberté d'expression sans limite
extraîne la totale liberté de dépenser. Le contrôle
des dépenses électorales entraîne une limitation d'exercice
de liberté d'expression.
Les dispositions actuelles de la Loi électorale en regard du
financement des partis politiques et du contrôle des dépenses
électorales en constituent les éléments clés. On
peut modifier, évidemment, l'économie générale de
la loi à cet égard. Il faut bien réaliser, cependant, que
l'équilibre actuel des dispositions les unes par rapport aux autres ne
saurait être modifié sans que cela n'entraîne d'importantes
conséquences sur la pensée politique qu'on y retrouve.
Des organismes ont exprimé devant vous leur opinion, à
savoir qu'il faut privilégier la totale liberté d'expression.
Leurs sérieuses interventions portent à réfléchir.
Il vous est peut-être difficile d'aller à l'encontre de leur
opinion et de maintenir le statu quo. Il n'y a cependant pas de demi-mesures
dans ce domaine. Si vous décidez de maintenir les dispositions qui
prévalent présentement, il ne faut pas rejeter l'hypothèse
de défendre devant les plus hautes instances judiciaires ces conceptions
du contrôle de la liberté d'expression plutôt que
d'envisager de les abandonner rapidement.
C'est un choix difficile. L'application de la loi ne fut pas chose
facile. Cela a soulevé des tollés de protestations. Les
journalistes qui se sont exprimés là-dessus - tous très
éminents et correspondants parlementaires ou politiques en 1985 - l'ont
fait de façon éloquente. Je ne vous lirai pas ici les cinq
citations. Je vais n'en lire qu'une - à la page 9 - celle de M. Lesage:
"Ce sont les députés qui font la loi, pas le directeur
général. Ce dernier l'interprète certes, en fonction de
l'équité, un critère éminemment subjectif. À
moins de faire la preuve du contraire, ses avis et décisions semblent
respecter, à ce jour, non seulement la lettre, mais l'esprit d'une loi
trop sévère, trop sévère, restrictive et
contraignante. C'est donc elle qu'il faut modifier avant de trouver des
boucs-émissaires. "
Ces extraits parlent d'eux-mêmes. Ils expriment l'absolue
nécessité que cette question, comme celle du débat des
chefs et de la diffusion de livres, soit éclaircie par le
législateur. Il importe que celui-ci précise sa pensée si
on veut que la Loi électorale soit non seulement respectée mais
acceptée. Vous me confiez le mandat d'assurer le bon déroulement
du processus électoral et surtout d'en garantir
l'intégrité. La solution à ces questions doit être
clairement exprimée, si vous souhaitez que le Directeur
général des élections conserve sa
crédibilité. Quelles que soient les orientations que vous
déciderez d'adopter, il m'apparaîtrait approprié
d'entreprendre une campagne d'information sur les dispositions de la Loi
électorale et particulièrement sur cet aspect de la
liberté d'expression.
Le débat des chefs. On se rappelle évidemment la
polémique qui a entouré cette question lors de la campagne
électorale. L'application de la loi, là encore, ne fut pas chose
facile. Je me réjouis de constater que vous en êtes arrivés
à la conclusion d'exclure ce genre d'émissions du contrôle
des dépenses électorales. Les médias d'information
détermineront librement les règles du jeu et les électeurs
les apprécieront.
Permettez-moi cependant de vous souligner qu'il vous faudrait
régler non seulement le débat des chefs mais également
tous les autres débats entre candidats ou représentants de
formations politiques. Il m'apparaîtrait important que les médias
bénéficient, en ces cas, de toute la liberté dont ils
disposent habituellement. J'irais d'ailleurs plus loin en suggérant quo
toute émission d'affaires publiques, en période
électorale, soient exclues de la notion de dépenses
électorales et ce, qu'elle soit régulière ou
spéciale. Il faudrait prévoir un amendement similaire, le cas
échéant, pour la presse écrite.
Le financement des partis politiques non représentés
à l'Assemblée nationale. La prise de position du comité
face à cette question mérite d'être soulignée. Notre
système démocratique ne peut qu'être renforcé par
l'aide financière que l'État peut apporter à tous les
partis politiques. Ils reflètent les courants de pensée de notre
société et en révèlent toutes les formes de
vitalité. La difficulté réside en son mode d'application,
les critères pour ce faire étant difficiles à
déterminer. Vous avez devant vous plusieurs propositions sur la
façon dont la répartition de l'aide financière pourrait se
faire. Nous étudions présentement ces propositions. Je vous
soumettrai lors d'étude en commission parlementaire des suggestions qui
pourraient vous aider à trouver les solutions les plus
appropriées. Je m'empresse cependant de vous dire qu'il faudrait
être très prudent, si vous retenez la suggestion de
déterminer le montant de l'allocation à un parti politique,
à partir d'une grille d'évaluation de la vitalité d'un
parti politique qui renfermerait des critères subjectifs.
Quant à la longévité d'un parti, je vous
rappelle que la loi prévoit déjà six conditions
dont le non-respect peut entraîner un retrait d'autorisation.
Je vois que l'heure avance, M. le Président, je peux soit
terminer la lecture, soit résumer les points qui restent, selon votre
convenance.
Le Président (M. Marcil): II vous reste encore cinq
minutes.
M. Côté (Pierre-F. ): Bon, je poursuis.
Les critères d'autorisation d'un parti politique. Si un
resserrement des conditions en vue d'obtenir une autorisation pour un parti
politique est envisagé, il faudra tenir compte de certaines contraintes
administratives. Il ne serait pas raisonnable d'augmenter indûment le
nombre des pétitionnaires favorables à la demande d'autorisation
d'un parti politique si, en contrepartie, on n'accorde pas au Directeur
général des élections le temps de vérifier
sérieusement la validité de la liste des pétitionnaires.
Les délais dans la loi entre la prise d'un décret et la fin des
mises en candidature nous invitent à rejeter cette solution, du moins
pour toute demande d'autorisation qui serait produite après
l'émission d'un décret ordonnant la tenue d'une
élection.
L'élargissement du nombre de pétitionnaires accompagnant
une demande formulée avant l'émission d'un décret
pourrait, par ailleurs, trouver son application, et, si le législateur
maintient la possibilité pour un parti politique de demander une
autorisation après l'émission d'un décret, peut-être
serait-il préférable, si l'on veut renforcer les critères
à cet égard, d'exiger dans ce dernier cas que le parti s'engage
à présenter des candidats dans un plus grand nombre de
circonscriptions.
La dénomination officielle des partis politiques.
L'économie de la loi fait en sorte que la sanction ultime pour
non-respect des dispositions de la loi entraîne le retrait d'autorisation
d'une entité autorisée. Encore faut-il s'assurer qu'une
entité ne puisse obtenir, peu de temps après son retrait
d'autorisation, une nouvelle autorisation sous la même
dénomination.
La loi n'est pas très explicite quant à la
possibilité ou non d'obtenir une nouvelle autorisation sous la
même dénomination, suite à un retrait d'autorisation, et
tout semble reposer sur un pouvoir discrétionnaire du Directeur
général des élections. Il serait certainement
préférable que la loi apporte un encadrement minimal quand vient
le temps de traiter cet épineux problème.
Par exemple, la loi pourrait prévoir que la dénomination
officielle d'une entité politique qui s'est vu retirer son autorisation
à la suite d'un non-respect des dispositions de la Loi électorale
ne puisse être réutilisée pendant une période de
temps donnée. Dans le cas d'un retrait d'autorisation à la suite
de la demande d'un chef de parti politique, la loi, par contre, pourrait
permettre plus de souplesse.
Les rapports financiers annuels et les rapports financiers de fermeture.
Les réflexions fournies au comité de travail sur la
qualité des rapports financiers produits par les partis politiques en
relation avec leurs instances autorisées ont incité le
comité à réévaluer sa position et à
référer ce sujet à la présente commission
parlementaire. Il s'agit surtout de l'aspect de ces rapports que l'on a
appelé rapports consolidés.
Tout en tenant compte de multiples facteurs, dont plus
particulièrement le fait que les partis politiques font appel à
des bénévoles qui n'ont pas toujours des compétences en
comptabilité, il est dans l'intérêt du principe fondamental
de la transparence que certaines améliorations raisonnables puissent
être apportées et le document de réflexion produit à
ce sujet renferme, à mon avis, une proposition raisonnable qui
mérite sûrement d'être prise en considération.
Conscient de l'importance pour les électeurs de connaître
les données financières d'un parti politique entre le moment de
son autorisation et la perte de celle-ci, je me réjouis que le
comité de travail ait accepté certaines propositions favorisant
la production d'un rapport financier de fermeture.
Par contre, le refus du comité de travail d'inscrire dans la loi,
comme motif de retrait d'une autorisation, le défaut de combler, dans un
délai déterminé, un poste vacant de représentant
officiel et également le refus d'exiger qu'un représentant
officiel démissionnaire produise auprès du chef de son parti un
rapport financier pour la période pour laquelle il a agi comme
représentant officiel depuis le dernier rapport financier annuel, risque
d'affaiblir l'objectif d'avoir des données complètes pour toute
l'existence d'un parti.
Dans ce contexte et tenant compte du rôle clé que joue un
représentant officiel, exiger qu'un représentant officiel
démissionnaire produise un rapport financier au chef de son parti ne
m'apparaît pas une contrainte majeure. Cette mesure, non seulement
contribuerait à aider les partis politiques dans une optique de
continuité à mieux respecter les dispositions de la loi au
chapitre de la production des rapports financiers annuels mais également
rendrait disponible la donnée financière utile à la
production, le cas échéant, d'un rapport financier de fermeture.
Il peut en fait s'écouler en pratique quinze mois entre la
démission du dernier représentant officiel et le retrait
d'autorisation d'un parti politique pour défaut de produire un rapport
financier annuel. Ce qui rend difficile alors pour le dernier
représentant officiel en question ou le chef du parti en cause de
colliger des informations pour la production du rapport financier de
fermeture.
M. le ministre Gratton a mentionné ces jours derniers que je
serais associé de près à vos travaux lorsque vous vous
réunirez dans les semaines à venir pour finaliser vos consensus
sur
les modifications à apporter à la Loi électorale.
Je serai très heureux de participer activement, avec les membres de mon
équipe, à cette dernière étape de vos travaux.
Permettez-moi en terminant d'émettre une suggestion qui pourrait
faciliter la mise en application de nouvelles dispositions de la Loi
électorale. Les dispositions de l'article 11 de la Loi électorale
prévoyant la possibilité d'un mécanisme de votation,
pourraient être élargies pour englober d'autres dispositions dont
on aimerait faire l'expérimentation avant de les appliquer dans tout le
Québec avec ou sans modification.
M. le Président, mesdames et messieurs les membres de la
commission des institutions, je vous remercie de votre attention et je demeure
évidemment à votre disposition pour répondre à
toute question qu'il vous plaira de m'adresser.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le Directeur
général des élections. Je vais maintenant
reconnaître M. le ministre responsable de la Réforme
électorale.
M. Gratton: Merci, M. le Président. Évidemment, il
va sans dire que nous sommes particulièrement heureux d'accueillir le
Directeur général des élections qui, à l'occasion
de sa comparution cet après-midi, n'a fait qu'effleurer les nombreux
sujets et les nombreuses discussions que nous avons eues jusqu'à
maintenant et que, manifestement, nous continuerons d'avoir entre nous dans ce
processus de révision de la Loi électorale. Et je voudrais tout
de suite exprimer ma satisfaction sur la façon dont se sont
déroulés les échanges et surtout sur la collaboration que
nous ont apportée M. Côté et son personnel tout au cours de
nos démarches jusqu'à maintenant. On pourrait difficilement
imaginer pouvoir en arriver à apporter des amendements à la Loi
électorale qui, dans leur application, respecteraient les objectifs
qu'on s'est fixés sans pouvoir compter sur l'apport essentiel et
l'expertise du Directeur général des élections et de son
personnel.
Je me félicite et me réjouis que la collaboration a
toujours été pleine et entière de part et d'autre et cela,
pour le plus grand bénéfice de ceux qui comptent, finalement,
c'est-à-dire des électeurs.
Évidemment, dans ce contexte, il n'est pas question, au cours
d'une heure d'échanges, d'aborder chacun des sujets et d'aller dans le
détail. Je me permettrai donc, dans un premier temps, de signaler la
suggestion que M. le Directeur général des élections nous
fait à la toute dernière page, dans sa conclusion, quant à
la possibilité d'élargir les expériences et les rodages
qu'on pourrait faire des nouvelles dispositions de la loi. Cela
m'apparaît peut-être une façon de pallier le manque de
concertation et de consensus qui peut exister à l'égard de
certaines améliorations que certains souhaite- raient et qui ne font pas
nécessairement un consensus compte tenu du manque d'expérience
vécue qu'on peut avoir ici au Québec de ces nouvelles
formules.
Pour ma part, il me semble qu'il s'agit là d'une suggestion
extrêmement intéressante. Par exemple, on pourrait envisager que
dans certains cas, on pourrait, à la faveur d'élection partielle,
par exemple, en arriver à roder certaines dispositions qu'on ne serait
pas nécessairement prêt à inclure dans la loi de
façon permanente mais qu'on pourrait mettre à l'épreuve
à cette occasion. On s'y penchera sûrement de très
près.
J'aurais quelques questions de façon à faire
préciser un certain nombre de choses. Lorsqu'on parle du débat
des chefs aux pages 10 et 11, M. Côté, je crois comprendre que
vous nous dites d'abord que vous êtes d'accord avec l'orientation du
comité quant à l'occasion d'exclure le débat des chefs de
parti de la notion de dépenses électorales. Vous dites même
que cela devrait également s'appliquer à tous les débats
entre autres candidats ou représentants de formation politique. Dois-je
comprendre que vous suggérez, par exemple, que, lors des débats
organisés dans les circonscriptions électorales, il soit
laissé à la discrétion des médias d'information de
déterminer si tous les candidats de cette circonscription peuvent
être invités, en d'autres mots, doit-on laisser entière
liberté aux médias.
M. Côté (Pierre-F. ): Assurément. Les
émissions d'information et d'affaires publiques sont finalement du
ressort des médias d'information, la radio et la
télévision. Un certain nombre de règles les gouvernent
déjà et, s'il arrivait qu'en organisant, même sur une base
régionale ou locale, un débat qui fasse montre d'une prise de
position très évidente ou qui ne soit pas suffisamment
équitable, je pense que c'est eux qui en souffriaient tout de suite. Une
réaction se produirait et des protestations
s'élèveraient.
Je ferais confiance aux différents médias pour tout ce qui
concerne les émissions d'information et d'affaires publiques. Une des
difficultés de la loi actuelle est de référer à des
émissions qu'on retrouve habituellement. Il faut dire qu'en
période électorale, il y a certaines émissions qu'on ne
retrouve pas habituellement, alors c'est très difficile d'application.
On a eu, lors de la dernière élection générale, un
grand nombre de demandes - je peux vous citer certains exemples de
Trois-Rivières, de Châteauguay, de Hull, de Chicoutimi ou de
Québec - de débats locaux. Selon notre interprétation de
la loi ou la façon dont elle est formulée présentement,
cela nous a amenés à dire: Non, de la façon dont vous
l'envisagez, vous n'avez pas le droit de le faire. Je serais porté
à dire qu'il faudrait être un peu plus libéral à cet
égard qu'on l'est dans la loi actuelle.
M. Gratton: Lorsque vous parlez des médias écrits,
de la presse écrite, allez-vous jusqu'à
suggérer qu'on devrait également laisser toute la latitude
voulue, par exemple, à la presse écrite de publier des entrevues
à sa guise avec entière liberté. (15 h 30)
M. Côté (Pierre-F. ): Oui. En fait, je veux
être logique avec moi-même, si on veut appliquer le même
raisonnement que celui que je viens de dire, et là encore je pense que
c'est l'autodiscipline et les règles d'éthique et de conduite des
médias qui devraient les réglementer, c'est très
difficile, vous savez, pour une personne de l'extérieur, quelle qu'elle
soit. On aurait pu penser à vous suggérer une autre solution et
à vous dire: Pourquoi ne pas confier la responsabilité de
l'application au Conseil de presse ou à un autre organisme? Mais je
doute que qui ce soit ait, non seulement la compétence, mais aussi toute
la capacité de pouvoir juger de façon très précise
la ligne de démarcation entre ce qui est équitable, ce qui ne
l'est pas, ce qui est quantativement correct et ce qui ne l'est pas. C'est
très difficile. Je serais porté à dire qu'il vaudrait en
tout cas la peine d'en faire l'expérience.
M. Gratton: Dans un autre sujet, le vote par procuration, vous
mentionnez, à la rubrique des votes des Québécois hors
Québec, que vous préférez favoriser le vote par
procuration plutôt que le vote par correspondance. Y a-t-il d'autres
catégories d'électeurs qui vous sembleraient susceptibles
d'être mieux servies par l'utilisation du vote par procuration?
M. Côté (Pierre-F. ): Le vote par procuration, c'est
un peu intentionnellement que je n'en ai pas traité dans mon texte,
ayant assisté à vos débats depuis quelques jours et
réalisant que les opinions étaient assez partagées, on l'a
vu avec toutes les explications qui ont été données ce
matin tant par mes collègues du fédéral et des autres
provinces et toutes les réserves qu'on peut avoir, que cela
représente des difficultés. Il y a des arguments pour et des
arguments contre. Je serais porté à vous dire qu'il vaudrait
peut-être la peine qu'on tente une certaine expérience, par
exemple, pour voir si c'est si difficile ou si dangereux qu'on serait
porté à le croire. Juste pour vous donner une idée, on a
fait un petit calcul. Si on transposait l'expérience de l'Ontario au
Québec, on arriverait sur le nombre de personnes qui se sont
prévalues de leur droit de vote. Il y a 3 464 000 personnes qui se sont
prévalues de leur droit de vote aux dernières élections.
Si on appliquait le pourcentage de 0, 5 % qu'ils ont eu comme personnes qui ont
utilisé le vote par procuration, on arriverait à environ 17 000
électeurs qui s'en seraient prévalu au Québec. Si on fait
le même calcul sur l'ensemble des électeurs, 4 500 000, on
arriverait à environ 20 000 électeurs.
Ma réflexion est si 22 000 personnes l'utilisaient. Ce que les
autres provinces nous ont dit, c'est que ce n'est pas utilisé de
façon inconsidérée ou de façon
désordonnée en très grand nombre. C'est utilisé
avec beaucoup de parcimonie. Il y a un certain nombre d'exigences pour le
faire. Il reste quand même le fait qu'il peut y avoir des influences
indues sur le choix du mandataire. C'est la grosse question, c'est le gros
problème qu'il reste à déterminer. Cette difficulté
est-elle assez forte pour dire non, il ne faudrait pas qu'il y ait de vote par
procuration? Pour ma part, je trouve qu'il est très difficile de
trancher la question de façon définie et dire oui, je suis en
faveur de. Ce n'est pas parce que vous êtes tous les deux d'avis
contraire, mais je vous dis très franchement que ce problème
m'apparaît difficile, parce qu'on n'a pas d'expérience au
Québec de confier à une autre personne, de donner un mandat et
qu'une réalisation soit satisfaisante à tous égards.
Peut-être que cela vaudra la peine de suivre la suggestion de mon
dernier paragraphe et d'en faire l'expérimentation, à un moment
donné, lors d'une élection partielle et de voir ce que cela
donnerait.
M. Gratton: Oui, effectivement. Compte tenu de la prise de
position de part et d'autre, c'est un peu à cela que je pensais comme
possibilité d'en venir justement à vivre une expérience et
voir ce que cela donne en termes réels.
Effectivement, je ne pense pas que ce soient les gens qui
décideraient d'exercer leur droit de vote par procuration qui font
problème. Les abus seraient surtout du côté de ceux qui
voudraient y voir là une façon d'abuser, non seulement d'abuser
mais de trahir le déroulement normal du vote. Il y aurait sûrement
des moyens de circonscrire cela, tout au moins partiellement.
Le bulletin de vote des détenus. Vous mentionnez au bas de la
page 6 que la solution à ce problème est assez simple. Elle doit
être tellement simple que je n'ai pas saisi de quoi il s'agissait
exactement. Je me demande si vous ne pourriez pas expliciter.
M. Côté (Pierre-F. ): Oui. Je n'ai peut-être
pas été assez explicite. Ce qui s'est produit, ce qu'on avait
lorsque les détenus ont voté la première fois, on
utilisait le bulletin de vote qui était utilisé partout.
Cependant, les bulletins de vote étaient imprimés dans chacune
des circonscriptions, dans les 120, 122 ou 125 circonscriptions. Quand est
arrivé le temps de faire voter les détenus la première
fois qu'ils ont voté au jour du vote par anticipation on est allé
chercher dans chacune des circonscriptions électorales des exemplaires
des bulletins de vote pour faire voter les détenus. On peut trouver dans
une maison de détention, par exemple, 100 circonscriptions
représentées. Alors, il a fallu aller les chercher. C'est ce qui
a représenté des coûts incroyables. Cela nous a
amenés à vous faire la proposition qui est maintenant dans la loi
de changer le mode de scrutin et de dire que le détenu inscrive
lui-même le nom du candidat
sur le bulletin de vote. On a réalisé avec cette
expérience que cela entraînait un grand nombre d'annulations de
bulletins parce que c'était mal écrit ou que le détenu ne
savait pas écrire.
Quand on dit que la solution est assez simple, nous vous
suggérons de revenir à l'ancien système,
c'est-à-dire le bulletin de vote qu'on va retrouver dans chacune des
circonscriptions mais, au lieu d'aller chercher ce bulletin imprimé dans
les 125 circonscriptions, nous l'imprimerions. Nous prendrions la liste des 125
circonscriptions, des 125 candidats et on aurait le même bulletin de
vote, le même qui serait utilisé dans chacune des
circonscriptions, on l'imprimerait et on ferait sa distribution. On
épargnerait ainsi des sommes considérables. C'est pourquoi je dis
que la solution est assez simple, on aurait peut-être pu y penser avant,
mais c'est comme l'oeuf de Christophe Colomb.
M. Gratton: Mais le fait d'imprimer un très grand nombre
de bulletins différents... Est-ce que ce serait le même genre de
bulletins, le même papier...
M. Côté (Pierre-F. ): Exactement la même
chose, le même modèle, etc. D'abord, le papier est fourni par
nous, le modèle d'impression de tous les bulletins est identique dans
toute la province, que ce soit fait n'importe où en province, les
règles sont tellement sévères, les imprimeurs sont
assujettis à des règles sévères, c'est le
même bulletin qu'on trouve partout, le même pattern. Sur le
bulletin de vote, ce seraient les noms des candidats qui apparaissent dans
telle ou telle circonscription.
M. Gratton: Ce sont seulement les noms qui changeraient.
M. Côté (Pierre-F. ): C'est cela. M. Gratton:
Le nom des candidats. M. Côté (Pierre-F. ): C'est
cela.
M. Gratton: C'est vrai que c'est simple, sauf que je n'avais pas
compris. Ha, ha!
Une dernière question pour le moment. Hier, vous avez
assisté à la présentation du mémoire du Protecteur
du citoyen quant à l'opportunité de soumettre ou d'étendre
la juridiction du Protecteur du citoyen aux activités électorale.
J'ai ici les réflexions que vous aviez fait parvenir au comité
dans lesquelles je crois voir deux objections de fond - il y en a plus que cela
- deux objections primordiales, soit l'atteinte à la
crédibilité du Directeur général des
élections dans la mesure où la Loi du Protecteur du citoyen lui
permet de publiciser ses avis et ses constatations et, dans un deuxième
temps, quant à l'indépendance nécessaire et essentielle du
Directeur général des élections quant au droit d'appel
à l'exécutif que possède le
Protecteur du citoyen dans sa loi. Compte tenu de ce que nous disait
hier Me Jacoby, à savoir qu'en ce qui a trait à l'administration
électorale, il faudrait probablement soustraire de l'application de ces
deux dispositions l'aspect électoral. Est-ce que, dans ces
circonstances, en supposant qu'on éliminerait la possibilité et
même le pouvoir du Protecteur du citoyen de publiciser ses avis et,
deuxièmememt, le pouvoir d'en appeler à l'exécutif, les
objections demeurent aussi fondamentales de votre côté quant
à la possibilité de confier au Protecteur du citoyen une certaine
juridiction de recommandation comme c'est le cas dans la loi actuelle?
M. Côté (Pierre-F. ): Oui, effectivement, hier, j'ai
bien écouté et j'ai lu le mémoire du Protecteur du
citoyen. La première remarque qu'il fait dans son document à
laquelle je souscris entièrement est à savoir que c'est à
vous de décider finalement - je vais être très clair
là-dessus - parce qu'en émettant une opinion ou même en
écrivant le texte qu'on a écrit, je suis un peu juge et partie en
la matière et c'est toujours délicat de me prononcer. Alors je
vous laisse le soin... Cela va de soi que c'est à vous de trancher. Je
pense que c'est important de vous le souligner parce que, vous le
réalisez par les écrits et les échanges qui ont eu lieu
antérieurement à ce sujet, je suis un peu allergique, c'est le
moins que je puisse dire, à l'intervention du Protecteur du citoyen.
Hier, quand il a admis qu'il faudrait exclure explicitement cette
référence qu'il y a dans la loi à la publicité qui
peut porter atteinte à l'intégrité... Imaginez s'il y a
une difficulté qui se présente et qu'une publicité est
faite à l'occasion d'une élection, cela peut être
très difficile d'administrer les élections de la façon
dont c'est interprété. Alors, lui-même a dit: II faudrait,
comme vous l'avez mentionné, exclure... et la relation avec
l'exécutif également. Cela me semble déjà
être une façon de restreindre la façon de procéder
du protecteur.
D'autre part, il a aussi mentionné, à une question du
député, M. Doyon, je pense, que, pour un certain nombre de cas,
il faut qu'il réfère à la Commission des droits de la
personne. C'est une question que je trouve intéressante et sur laquelle
il faudrait se pencher, éventuellement.
Finalement, ce que je voudrais souligner, c'est qu'il y a eu très
peu de cas, jusqu'à présent...
Une voix: Oui.
M. Côté (Pierre-F. ):... et les cas qui ont
été portés à la connaissance du protecteur sont des
cas qui, je crois, pour la majeure partie, trouvèrent leur solution par
les décisions ou consensus auxquels vous en êtes arrivés,
qu'on ait une clause omnibus, analogue à celle qu'on retrouve au
fédéral ou en Ontario. À ce moment-là, je
me dis: Si cette clause omnibus - il faudrait au moins en faire
l'expérience, on ne l'a pas au Québec - permet de pallier ces
difficultés et que la responsabilité totale du déroulement
du processus électoral et celle du Directeur général des
élections, en ajoutant - je pense que c'était dans un des
documents - l'obligation qui me serait faite de faire rapport des plaintes et
de la façon dont elles ont été traitées, cela me
semblerait rejoindre, de façon générale, le
procédé ou d'apprécier le travail du Directeur
général des élections jusqu'à présent et
qui, la plupart du temps, enfin qui est forcément, s'il s'agit d'une
élection, a posteriori. Alors, vous devinez que... Supposons que vous
prenez cette décision, vous dites "vous avez une plainte, traitez-en,
réglez-la et faites-nous rapport", j'ai l'impression qu'on va se
grouiller drôlement pour qu'on trouve des réponses rapides,
peut-être plus qu'auparavant. C'est quand même frappant que,
jusqu'à présent, il n'y ait pas beaucoup de plaintes. Dans le
processus de l'administration de la Loi électorale, il n'y en a pas
énormément chez nous et il n'y en a pas eu beaucoup du
côté du Protecteur du citoyen. C'est pour cela que je me dis:
Est-ce qu'il y a urgence de le trancher dans ce sens-là?
Je reviens à mon point de départ. Je trouve cela
délicat de dire de façon absolue: non, oui. Je pense que c'est
à vous autres de voir quelle serait la meilleure façon.
M. Gratton: II y a une chose, en terminant, M. le
Président, qui va sûrement améliorer la situation, c'est
l'inclusion d'une clause omnibus qui habilitera le Directeur - je tiens pour
acquis qu'on fait consensus là-dessus - général des
élections de régler un certain nombre de choses qui, prima facie,
nécessite une intervention. Je me suis posé la question, hier, en
écoutant M. Jacoby: Est-ce qu'à l'occasion, compte tenu de la
nature de la plainte ou de la décision que devrait prendre le DGE, si
vous-même vous n'auriez pas, parfois, le goût de consulter un
tiers, qui pourrait être le Protecteur du citoyen? Bien entendu, il n'est
pas nécessaire d'assujettir le Directeur général des
élections au Protecteur du citoyen pour que vous fassiez appel à
quiconque peut vous éclairer de ce côté-là, mais
c'est une réflexion que j'ai faite hier en me demandant: Est-ce que dans
des cas particuliers qui pourraient causer des difficultés pour le
Directeur général des élections de décider "est-ce
que j'interviens et dans quel sens j'interviens?", s'il était muni d'une
recommandation du Protecteur du citoyen, cela pourrait peut-être
être utile? Évidemment, on n'en est pas là pour le moment.
Je vous remercie pour vos réponses, M. Côté.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre.
Maintenant, je vais reconnaître le député d'Abitibi-Ouest
et représentant de l'Opposition.
M. Gendron: M. le Président, très rapidement,
puisqu'on est habitué de travailler avec lui. On ne dira pas qu'on est
content de le voir, je pense que cela aurait été anormal - ce
n'est pas parce qu'on ne l'est pas - d'entendre les autres DGE et de ne pas
avoir l'occasion d'entendre le nôtre. Je suis très heureux que
l'équipe de M. Côté soit présente; elle a presque
constamment suivi le déroulement de nos travaux. Elle nous a
assistés également, très étroitement, dans ce
travail que certains ont qualifié d'assez riche, d'autres d'un peu plus
pauvre, mais peu importe le résultat du document de travail qu'on a
expédié aux intervenants qui voulaient nous donner leur avis. Je
pense qu'il y a là quand même un début d'une excellente
réflexion et c'est parce qu'on a eu la collaboration de ceux qui sont
plus dans la cuisine, si vous me permettez l'expression.
Alors, je suis très heureux de vous voir là. Vous avez
produit une note, un mémoire, en disant qu'il y a des points sur
lesquels vous allez nous aider davantage à parfaire notre
réflexion et surtout à prendre des décisions, à un
moment donné. Vous avez indiqué un certain nombre de sujets sur
lesquels vous croyez utile, dès aujourd'hui, de nous faire part de
quelques réflexions additionnelles. Je pense que c'est heureux qu'il en
soit ainsi. (15 h 45)
Je vais commencer tout de suite par les quelques questions que j'ai
à vous poser. Quant au vote des handicapés mentaux, je pense que
tout le monde en a parlé. Vous avez indiqué dans votre
mémoire que les balises devraient être à la fois
rigoureuses et souples. Je n'ai pas de problème de compréhension
des termes, mais j'ai un peu de difficulté à suivre. Comment
vont-ils faire cela? Des balises à la fois rigoureuses et souples...
J'ai un problème à traduire cela. Ma question est plus... pour
éviter de rester dans le vocabulaire.
En Ontario - à moins que j'aie mal compris et c'est possible,
compte tenu de la langue utilisée; je n'en fais pas un reproche, on
était d'accord - on a laissé tomber toute restriction et on dit:
Le bénéficiaire est celui qui exerce complètement son
droit de vote dans les conditions où il est, avec le moins de
restrictions possible. Ce n'est pas compliqué quand on dit: Les
handicapés auront le droit de vote mais ils l'exerceront dans les
mêmes conditions que n'importe quel citoyen. Est-ce dans ce sens que vous
voulez parler de souplesse? Si c'est cela, on se comprend bien. À ce
moment, vous allez m'expliquer ce que vous entendiez par des règles
rigoureuses.
M. Côté (Pierre-F. ): Vous avez un peu raison quant
à l'antonymie qu'il y a dans les termes. Quand j'ai rédigé
cela, j'ai pensé en particulier au mémoire présenté
par le groupement qui représentait l'hôpital
Louis-Hippolyté-Lafontaine. On disait "rigoureux" dans le sens
où il faut que cela soit fait de façon très
sérieuse, selon les normes établies, qu'il n'y ait pas de
laxisme. En d'autres termes, qu'on soit plus prudent qu'on ne l'est
habituellement. Mais avec une certaine souplesse pour - comme il y a eu des
suggestions faites - s'adapter aux exigences de chacun des
établissements. C'est le sens que j'ai voulu donner à ces deux
termes.
Quant à l'idée de permettre aux handicapés mentaux
de voter, je crois que... Si on en juge par l'expérience qui a
été faite ailleurs, cela se réglemente automatiquement.
Les gens qui peuvent voter votent. Ceux qui ne peuvent pas voter ne votent pas.
C'est aussi simple que cela.
M. Gendron: Vous ne voyez pas de difficulté, comme DGE -
si demain matin le législateur disait: II est temps qu'on leur accorde
un réel droit de vote - de prime abord, quant à la gestion de
cette nouvelle autorisation?
M. Côté (Pierre-F. ): Non, quand on parle de rigueur
aussi, si vous en arrivez à la conclusion que le mode de scrutin serait
itinérant dans une institution, là encore, il faudrait que ce
soit fait avec... On a eu les expériences ce matin avec l'Ontario
où, par exemple, le représentant reste à la porte de la
chambre. Il y a certaines réglementations qui ont été
mises relativement à la façon de procéder. Je ne vois pas
de problème majeur.
En somme, la question fondamentale, pour cette catégorie comme
pour d'autres, est de faciliter l'exercice du droit de vote, même si sur
le plan administratif... D'ailleurs, dans un des documents, on retrouve cela,
le secrétariat. Il peut se poser des problèmes administratifs.
C'est à nous de les régler. Il n'y a pas de chose insurmontable
pour autant qu'on est capable de faire face aux exigences de réalisation
pratique.
M. Gendron: Pour rester dans la même clientèle,
est-ce que vous seriez favorable à ce que, effectivement, la loi mandate
le DGE - ou carrément que cela soit spécifié dans la loi -
pour qu'il y ait une certaine forme d'encadrement par rapport pas
nécessairement au comportement mais à la façon de
procéder des partis politiques dans les institutions où il n'y a
que des chroniques, que des personnes qui n'ont sûrement pas le
degré d'autonomie? Est-ce que vous êtes favorable à un
certain nombre de règles d'éthique aux partis politiques, quels
qu'ils soient, y compris la belle province?
M. Côté (Pierre-F. ): En principe, oui. La
difficulté est de les déterminer et de voir à leur
application. Si on entre dans cette catégorie d'établissement des
règles d'éthique, seulement pour cette catégorie
d'électeurs spéciale, cela me semble un peu plus difficile. Ce
qui m'a plu dans les interventions faites par les représentants des deux
hôpitaux, est qu'ils ont dit avoir eux-mêmes leur propre
système de réglementation et d'autorisation d'intervenants de
l'extérieur, que ce soit des politiciens ou autres, À ce moment,
c'est peut-être suffisant.
Quand je parlais aussi de souplesse, vous m'avez poussé un peu au
pied du mur en mettant de l'opposition, dans les deux termes. Il faudrait
peut-être établir des façons de l'appliquer qui pourraient
s'adapter en faisant appel à la collaboration des comités de
bénéficiaires et voir de quelle façon le tout pourrait se
dérouler le plus harmonieusement possible.
Pour l'intervention des partis politiques, il faudrait - sans
établir de règle politique formelle - faire un certain rappel de
ma part auprès des partis politiques et dire: C'est une clientèle
dont on est susceptible d'abuser, entre guillemets, éventuellement et
attirer l'attention de tout le monde pour être prudent. Cela pourrait
être une façon de procéder mais je serais un peu
réticent à tenir des règles d'éthique.
M. Gendron: Si jamais le législateur décidait
d'autoriser le vote par procuration - ce que je ne souhaite pas,
évidemment - est-ce que vous auriez des inquiétudes, en
particulier pour ce qu'on appelle les bénéficiaires
institutionnalisés, en institution?
M. Côté (Pierre-F. ): C'est là qu'est la
difficulté, c'est là qu'il faut réfléchir plus
sérieusement, c'est là que les gens sont susceptibles
d'être influencés dans le choix du mandataire, de la même
façon, d'ailleurs, que les personnes âgées. On l'a
mentionné ici; il y a des gens qui ont mentionné cela. C'est la
principale difficulté. Par ailleurs, je me dis: Est-ce que cela ne
vaudrait pas la peine de le voir et de tenter certaines expériences, en
tout cas, pour voir ce que cela donnerait? Parce qu'en ne le faisant pas, par
crainte d'influence indue, est-ce qu'on ne se trouve pas à priver les
électeurs de leur droit de vote? C'est certain que je suis sur un
terrain délicat parce que je sais qu'il n'y a pas consensus.
M. Gendron: Ah! mais il ne faut pas toujours être...
M. Côté (Pierre-F. ): Enfin, je vous donne
mon...
M. Gendron: II ne faut pas toujours être
agréablement à côté de la table, de temps en temps
il faut être...
M. Côté (Pierre-F. ): Bien, oui; il faut se mouiller
un peu. Ha, ha, ha!
M. Gendron: En ce qui a trait aux bureaux itinérants,
est-ce que vous êtes d'avis que cela devrait à tout le moins, si
on les autorise, être à la demande des bénéficiaires
des institutions?
M. Côté (Pierre-F. ): Mais là, depuis
quel-
ques jours, j'entends cette notion, et, je vais être très
franc avec vous, j'ai de la difficulté.
Ce n'est pas que la boîte de scrutin soit itinérante
à l'intérieur d'un même...
M. Gendron: Oui, cela...
M. Côté (Pierre-F. ):... établissement, c'est
à l'extérieur. Là, à l'extérieur, j'ai de la
difficulté puis je pense qu'il faudrait y repenser très
sérieusement, en équipe, puis revoir, même avec des
organisateurs politiques, comment cela va se vivre. Par exemple,
l'expérience que donnait M. Bélisle, ce matin, de
déménager la boîte de scrutin. De prime abord, je trouve
que c'est un risque de procéder comme cela, d'avoir une boîte de
scrutin qui se déménage dans la nature.
M. Gendron: Non, quant à cela, je suis content que vous
l'ayez clairement mentionné dans votre mémoire. Écoutez,
déplacer la boîte de scrutin pour faciliter l'exercice à
l'intérieur d'un édifice, cela a l'air de se gérer puis
qu'il y a moins d'interrogations évidentes. Mais c'est sûr
qu'à partir du moment où l'on sort cela dehors, entre autres un
certain 2 décembre que j'ai connu en Abitibi, cela n'est pas
drôle, parce que je ne suis pas sûr que cela n'aurait pas pris de
bonnes amarres pour la retenir, compte tenu des vents violents.
M. Côté (Pierre-F. ): Oui, mais il y a deux autres
difficultés...
M. Gendron: II ventait dans tous les sens, le 2
décembre.
M. Côté (Pierre-F. ):... si la boîte de
scrutin est itinérante, si on peut la transporter. Bon, ça y est,
j'ai perdu mon idée, je m'en excuse.
M. Gendron: Bien, vous dites qu'on pourrait la transporter
à l'intérieur d'un même édifice et qu'à
l'extérieur cela pose des problèmes.
M. Côté (Pierre-F. ): Oui, mais transporter la
boîte à l'intérieur d'un immeuble... Ah, oui! La
difficulté est la suivante: À quel moment va-t-on le faire le
jour du vote, et, si on le fait le jour du vote par procuration, à quel
moment aussi? Parce que la boîte, si elle est transportée, n'est
plus au bureau de vote où elle doit être. Je dois vous dire qu'on
a tenté une expérience - peut-être faudrait-il revoir
attentivement ce qu'on a fait - on a tenté quelque chose d'assez
exceptionnel dans le Nouveau-Québec, lors du référendum,
et qu'on va tenter lors de l'élection du 6 février prochain: un
des matins du vote par anticipation, de 10 heures à 12 heures, la
boîte de scrutin va se promener dans chacun des villages, dans chacune
des maisons où il y a un handicapé physique, une personne qui ne
peut vraiment pas se déplacer. Pendant cette période de
temps-là... Évidemment, je dis que, pour bien aller, il faudra
voir ce que cela donne comme expérience. C'est qu'il y a 3000
électeurs dans les 14 villages; alors, il n'y a pas beaucoup
d'électeurs; tout le monde se connaît. Alors, il y a un
contrôle qui peut se faire relativement facilement. Mais, c'est une
expérience qui peut être assez concluante pour l'élargir
sur un plus grand nombre d'électeurs.
M. Gendron: Quant à la suggestion que vous avez
titré, vous, pour les analphabètes, même si je reconnais
qu'ils seraient probablement ceux qui seraient les plus sensibles à
cette mesure, l'éventualité d'apposer la photo des candidats et
des candidates sur le bulletin de vote, quant à moi, je ne trouve pas
cela bête, je suis pas mal sûr que sur cette base-là on
gagnerait 15 comtés de plus - cela, c'est une "joke" -...
Une voix: C'est une " joke". Une voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Oui, oui. Très sérieusement, je me
demande si cela a été essayé dans les régimes
britanniques ou à mentalité américaine. Est-ce qu'il y a
d'autres provinces qui font cela?
M. Côté (Pierre-F. ): Pas à ma connaissance.
Au Canada, je ne le pense pas. Mais, pour revenir à mon
expérience d'Haïti, j'ai tellement été frappé
par la qualité...
M. Gendron: Vous avez eu le temps de voir cela, à
Haïti, que les photos...
M. Côté (Pierre-F. ): C'est la seule chose que j'ai
eu le temps de voir. À l'heure qu'on a pu visiter les bureaux de vote
et, malheurement à cause de ce qui s'est passé par la suite.
Après l'heure et quart où on a pu visiter, comme je disais... Et
pour cause, le vote a été arrêté. La seule chose
qu'on a regardée attentivement dans quatre bureaux de vote que mon
collègue et moi avons visités, ce sont les bulletins de vote.
Juste pour vous donner un exemple, il y avait 26 candidats à la
présidence sans compter les innombrables candidats au Sénat et
à l'Assemblée législative. Et, des 26 candidats à
la présidence, il y avait 26 bulletins de vote, bulletins de vote qui
étaient doubles. Alors, sur le côté gauche du bulletin
apparaissait la photographie, sur le côté droit, le nom du
candidat, le nom du parti et le sigle du parti. Mais la qualité de la
photographie est la chose qui m'a le plus surpris. Alors les électeurs
arrivaient et choisissaient. Ils prenaient une pile de 26 noms, allaient
derrière l'isoloir, choisissaient le nom de leur candidat et jetaient
les autres dans une poubelle qu'il y avait là. Mais c'est la
qualité qui m'a frappé. Et je dis que c'est une solution
extraordinaire dans un pays comme celui-là qu'on réussisse
à faire cela où il y a 80 % d'illettrés. Ils ont pu
exercer leur droit de vote.
Alors je dis à tout le moins, ce qu'il faudrait peut-être
avoir ici, parce que j'ai insisté là-dessus en revenant et je
sais que cela ne fait pas l'affaire de tout le monde parce que c'est un peu
délicat d'en parler... Quand on dit qu'il y a au Québec
près de 500 000 personnes qui ne savent pas lire, est-ce qu'il y a
autant de personnes que cela qui n'exercent pas leur droit de vote? À ce
moment-là, il faut leur permettre d'exercer leur droit de vote. Et comme
ce sont des personnes qui ont une mémoire visuelle, à tout le
moins je pense qu'il faudrait avoir le sigle sur un bulletin de vote.
M. Gendron: C'est un peu dans ce sens-là et très
sérieusement. Souvent, comme vous le dites, on est un petit peu mal
à l'aise quand on se pense tellement avancé comme
société et qu'on a l'occasion de toucher à des
statistiques concernant notre taux d'analphabètes, on reste surpris. Ce
que je souhaiterais cependant, pour être plus éclairés,
c'est d'essayer d'avoir des données là-dessus, vous comme DGE,
pour être capable de mieux évaluer effectivement si on en a tant
que cela et, dans ce sens-là, si cela s'inscrit dans la volonté
qui nous animait, en tout cas dans la réflexion, a savoir de maximiser
le droit de vote. Je pense que là on ne devrait même pas
hésiter. Parce que vous nous laissez voir qu'au chapitre des
coûts, il n'y a pas grand-chose là. S'il n'y a pas beaucoup
d'interrogations quant aux coûts et que ça rentre carrément
dans l'objectif qui est de tout mettre en oeuvre pour permettre au plus grand
nombre de citoyens et citoyennes du Québec d'exercer leur droit de vote,
il me semble qu'on devrait y aller.
M. Côté (Pierre-F. ): Si on prend le dernier aspect.
Vous avez soulevé la question des coûts. Il est certain que si
vous arrivez à la conclusion qu'on doive mettre la photographie sur le
bulletin de vote, le coût serait plus élevé. C'est certain.
Ce ne sont pas toutes les imprimeries d'ailleurs qui pourraient le faire. Il
faudrait repenser la façon d'imprimer le bulletin de vote. Mais,
à tout le moins, au début, je pense qu'on pourrait avoir le
sigle. Mais on pourrait certainement essayer de fouiller davantage cette
question-là. J'ai par exemple ici un autre bulletin de vote avec des
photographies qui a été utilisé dans un pays
d'Amérique latine. On pourrait trouver des exemplaires des endroits
où cela a été utilisé et qu'est-ce que cela peut
représenter comme... Parce que ce que je vous donne comme coûts
approximatifs... On s'est informés ces jours derniers seulement. On
pourrait certainement fouiller cette question-là davantage et sur le
nombre d'analphabètes et sur l'application des solutions.
M. Gendron: D'accord. Quant aux résidents hors
Québec, M. Côté, c'est la première fois que je
voyais cela - encore là je ne trouve pas que c'était terrible de
le suggérer - mais je trouve cela bon d'envisager que pour les
résidents hors Québec - je suis surtout un partisan d'essayer de
trouver un délai le plus juste possible...
Le Président (M. Marcil): Votre temps est
épuisé. M. le député, en conclusion.
M. Gendron: Vous aviez beau me le dire avant. Je vais continuer
juste cette question-là.
Le Président (M. Marcil): Je vous laisse terminer cette
question-là.
M. Gendron: D'accord. Alors à cette question-là, M.
le Président...
Le Président (M. Marcil): Au nom de la
démocratie.
M. Gendron: Je vais respecter la démocratie. Vous
suggérez que pour les résidents hors Québec, que ce soit
davantage un vote pour un parti politique plutôt que pour un candidat ou
une candidate. Je trouve que cela a un sens. Cela a un sens important parce que
quelqu'un qui a quitté le Québec depuis cinq ou six ans, il y a
une logique à ce qu'il s'exprime davantage pour un parti politique
plutôt que pour un candidat en Abitibi-Ouest, même s'il est
déjà resté là, ou le député de La
Peltrie. Dans ce sens-là, je trouvais original d'envisager cela. Voici
la question que je vous pose: Est-ce qu'encore là, pour une alternative
comme cela, vous avez un peu d'analyses d'ailleurs?
M. Côté (Pierre-F. ): Cette idée-là
vient du projet de loi C-79 tout simplement. C'est qu'il y a possibilité
de voter soit pour le candidat, soit pour le parti politique dans le projet de
loi fédéral qui est supposé être à
l'étude actuellement. Alors en votant pour le parti politique et non pas
pour le candidat, cela permet que le vote par correspondance parte beaucoup
plus rapidement tout de suite après le décret. Cependant, cela
présente l'inconvénient majeur de difficultés pour les
candidats indépendants à moins d'avoir une façon de les
identifier. Je ne sais trop.
M. Gendron: J'en avais une justement pour terminer, pour rallier
mon collègue de Gouin qui siège malheureusement comme
député indépendant. En ce qui nous concerne, on pourrait
simplement écrire: les deux formations politiques et tout autre tiers
parti pour les résidents à l'étranger. On fractionnerait
une partie des votes. Merci, M. Côté.
Le Président (M. Marcil): Je vous remercie beaucoup, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Compte tenu qu'il n'y a plus de
questions, M. le Directeur général des élections, on vous
remercie pour votre participation à cette commission. Nous nous
reverrons sûrement au cours des semaines qui
viennent pour terminer ce travail.
M. Côté (Pierre-F. ): Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Marcil): Nous allons suspendre pour une
minute afin de permettre aux représentants de la
Fédération de l'âge d'or du Québec de s'avancer et
prendre siège.
(Suspension de la séance à 16 h 1)
(Reprise à 16 h 3)
Fédération de l'âge d'or du
Québec
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous accueillons maintenant la Fédération de l'âge
d'or du Québec, représentée par Mme Rose-Aimée
Leblanc, présidente, et M. Yvanhoë Lemay, permanent. Nous vous
souhaitons la bienvenue.
Vous connaissez les règles du jeu, je pense. Vingt minutes vous
sont allouées pour votre exposé. Compte tenu que tous les
députés ont déjà lu votre mémoire, nous
allons poursuivre... On n'a pas eu ce mémoire, on s'excuse. Donc, vous
avez 20 minutes pour exposer votre opinion et, ensuite, une période de
questions suivra. Allez-y.
Mme Leblanc (Rose-Aimée): J'aurais voulu vous faire
parvenir la liste des sujets que je voulais aborder. Je sais qu'avec ces deux
briques, cela travaillait très bien. Cependant, je vais essayer de vous
faciliter la chose parce que je ne l'ai pas reçue. Je ne sais pas si
c'est parce que la poste s'est déclarée en vacances à
partir de cette nuit, mais, en tout cas, je vais essayer d'arranger cela
autrement.
Vous avez dit mon nom. J'ai glané un peu d'expérience ici
et là en étant mère de famille et pourvoyeuse et
professeur à la polyvalente, et vous m'accuserez aussi d'avoir fait un
peu de politique. J'en suis à mon cinquième mandat à la
présidence de la fédération et vice-présidente de
la Fédération internationale des associations de personnes
âgées.
Pour la présentation de notre organisme, je pense que cela peut
être intéressant quand je ferai mes interventions, parce que je
réfère souvent au bien-être et à
l'amélioration de vie de nos personnes. L'objectif premier de la
Fédération de l'âge d'or du Québec, celui de contrer
les quatre "i": l'isolement, l'inactivité, l'inutilité et
l'insécurité, s'est élargi à mesure que ses membres
prenaient de l'assurance, ne reculant pas devant la peur de s'affirmer. Notre
organisme fait maintenant partie d'un mouvement sans frontières
puisqu'il est associé à la Fédération
internationale des associations de personnes âgées, où sont
présents tous les continents y compris l'ONU et ('UNESCO. Par ses
structures, notre fédération constitue un réseau à
travers toutes les provinces. Cela s'explique par 200 000 membres
répartis en 1250 clubs, regroupés en 18 régions dont les
conseils d'administration servent d'intermédiaire entre le conseil
d'administration de la fédération et les clubs.
Ce réseau se veut un véhicule d'information, de formation
dans tous les domaines: socio-éducatif, socioculturel, loisirs et
surtout dans les services d'entraide, ce qui amène progressivement nos
membres à s'éveiller à une conscience individuelle et
créer une conscience collective.
Nos personnes âgées veulent prendre part à un grand
projet de société, celui de créer une culture nouvelle
pour un monde nouveau où chacun y trouve sa place sans devenir un
fardeau socio-économique. La FADOQ, c'est-à-dire la
Fédération de l'âge d'or du Québec, travaille
sagement à éclairer pour concentrer les demandes dans des besoins
essentiels. Elle veut ses pressions choisies, prudentes et efficaces dans ses
revendications pour ses membres. Elle se préoccupe beaucoup de son
partenariat avec les organismes similaires et les instances gouvernementales de
trois niveaux: municipal, provincial et fédéral.
Pour compenser pour la liste que je devais vous remettre, je traiterai
du sujet 2, Clause omnibus, sujet 7, Droit de vote des malades mentaux, sujet
8, Délai de résidence, sujets 9 et 24, c'est-à-dire vote
des Québécois hors Québec par anticipation ou par
procuration. J'irai aussi au sujet 29, Rejet des bulletins non paraphés.
Est-ce que cela va?
Je commence. Sujet 2, Clause omnibus. Comme on le dit si bien dans ce
livre, pour préserver le principe de la primauté d'un droit
fondamental, il est à souhaiter que la loi prévoie une
autorisation au DGE lui permettant de protéger le droit de vote des
électeurs contre des erreurs de copie ou administratives.
De plus, il arrive très souvent que nos personnes
âgées comprennent mal l'avis qui les informe sur la date limite de
la période de révision et ne peuvent ainsi se faire inscrire sur
la liste électorale.
Pour le sujet 7, le droit de vote des malades mentaux. Personne n'ignore
la tendance d'associer fa notion de vieillesse à celle de perte de
facultés mentales. Soit par intérêt ou pour tout autre
motif, on place certaines personnes âgées en cure fermée ou
sous la juridiction d'un curateur. Il y a de ces personnes qui sont capables de
comprendre la portée de l'acte de voter. C'est pourquoi, qu'importe
l'impact sur le système de l'obtention du droit de vote, les malades
mentaux ayant la capacité de s'exprimer par le vote ne devraient pas
être privés de leur droit. Même plus, ces personnes
devraient être éclairées de façon à pouvoir
l'exercer avec discernement, surtout dans les conditions dans lesquelles elles
vivent, soit sous juridiction de curateur.
Le sujet 8, délai de résidence. Compte tenu que beaucoup
de personnes âgées résident un
certain temps dans des pays où le climat est plus favorable
à leur santé, compte tenu aussi de l'arrivée massive
d'immigrants - j'ai peut-être des réticences mais, en tout cas,
j'y vais - dans notre province et que parmi ces nouveaux résidents se
trouvent des personnes âgées, nous sommes en faveur de la solution
2, que le délai de résidence soit réduit à six
mois.
Sujets 16, 14 et 15 que je traiterai en même temps: bureaux
itinérants, visites du recenseur et heures de fermeture des bureaux de
dépôt. J'écoutais le DGE tout à l'heure, je ne sais
pas si cela va aller avec qu'il a dit.
Pour permettre ou faciliter l'exercice du droit de vote des personnes
âgées vivant en résidence, en centre d'accueil, en foyer
d'hébergement, etc., où souvent le jour du scrutin passe
absolument inaperçu, nous optons pour la solution 2, soit de
prévoir expressément dans la loi l'établissement de
bureaux itinérants.
Il va de soi que le sujet 14 sur les visites des recenseurs dans ces
établissements doit être précisé pour s'assurer que
ces personnes seront inscrites sur la liste électorale.
Quant aux heures de fermeture des bureaux de dépôt, le
sujet 15, malgré le peu d'achalandage, nous souhaitons que le personnel
demeure en place jusqu'à la fermeture du bureau avec la formule
d'harmonisation avec l'heure de fermeture des bureaux de scrutin, soit 20
heures.
Sujet 9, vote des Québécois hors Québec. Nos
personnes âgées prennent de plus en plus le goût de voyager
en pays étranger et hors Québec, ce qui est très favorable
à leur épanouissement physique, intellectuel et moral. Elles
doivent cependant planifier leur voyage à cause de leur budget restreint
pour plusieurs d'entre elles. D'autres peuvent occuper des postes temporaires
à l'extérieur. C'est pourquoi selon le sujet 24, le vote par
anticipation, je dis qu'il doit comporter des mesures de contrôle
adéquates. Cependant, il faudra permettre alors à tout
électeur qui prévoit l'impossibilité d'exercer son droit
de vote au jour prévu pour le vote de pouvoir le faire.
Pour le vote par procuration, demeurant toujours dans le même
objectif de préserver la primauté d'un droit fondamental, celui
d'exercer son droit de vote, nous sommes d'accord avec le député
de Mille-Îles et nous insistons sur le fait que nos personnes
âgées, les handicapés et les malades mentaux capables
d'exercer leur droit de vote aient la possibilité de voter par
procuration ou par courrier. La démocratie québécoise doit
prendre certains risques, c'est vrai, et doit en payer certains
coûts.
Sujet 29, le rejet des bulletins non paraphés. À notre
avis, il serait absolument injuste qu'un électeur soit
pénalisé pour l'erreur commise par un autre. Nous sommes d'accord
avec la proposition du DGE de retenir la solution adoptée par l'article
234 de la Loi sur les référendums dans les municipalités
de parapher le bulletin après coup, après vérification du
nombre de bulletins et assermentation, cela va de soi, puisque le scrutateur
est déjà assermenté.
Dans l'évolution globale de la société, il est
à remarquer que l'augmentation du nombre des personnes
âgées constitue et constituera un apport important à
l'électorat. De là l'importance, la nécessité
même de leur faciliter l'exercice du droit de vote, de mousser leur
intérêt à la chose politique de façon qu'elles
veuillent exercer ce droit de vote, ce droit qu'elles ont longtemps
considéré comme un devoir.
Je vous remercie pour tout ce travail qui nous a vraiment
facilité la tâche parce qu'on était un peu à court
de temps.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme Leblanc. Je
reconnais maintenant M. le ministre délégué à la
Réforme électorale.
M. Grattoir M. le Président, je voudrais remercier les
représentants de la Fédération de l'âge d'or du
Québec d'avoir accepté de venir nous faire connaître leur
point de vue sur les différents sujets dont vient de traiter Mme
Leblanc. D'abord, parce qu'on sait que la fédération est un
groupement très représentatif des personnes âgées et
que c'est une préoccupation première de l'ensemble des
parlementaires, membres de la commission ou autres, de s'assurer que ce droit
de vote qui leur est acquis puisse être exercé de la façon
la plus efficace possible. Je voudrais que vous sachiez que malgré que
vous n'ayez pas présenté de mémoire écrit, cela ne
risque en rien de passer inaperçu puisque, par la transcription du
Journal des débats, la commission parlementaire qui, dans une
deuxième étape, devra analyser et cerner les consensus qui
devront se dégager pour amender la Loi électorale, les
parlementaires pourront se référer au Journal des
débats pour prendre connaissance de votre point de vue, que vous
avez d'ailleurs exprimé de façon très claire, très
nette. C'est tout à votre honneur, je vous en remercie.
Je note que vous êtes favorable à l'inclusion d'une clause
omnibus, à la reconnaissance du droit de vote pour les malades mentaux.
Vous êtes favorable, également, à la réduction du
délai de résidence à six mois. Donc, sur plusieurs sujets,
vous rejoignez certaines des recommandations du comité de travail de
parlementaires.
Je voudrais poser quelques questions sur des sujets que vous n'avez
peut-être pas effleurés encore, mais qui s'y rapportent. Par
exemple, vous avez parlé du vote par anticipation. On s'est posé
la question au comité de parlementaires, à savoir: Est-ce que le
vote par anticipation devrait être accessible, de façon
générale, à toutes les personnes âgées,
qu'elles aient ou non une difficulté ou une raison de croire qu'elles ne
pourront se présenter la journée du vote? On sait que,
présentement, la Loi électorale réserve aux seules
personnes qui croient ne pas être en mesure d'aller voter le jour du
scrutin de pouvoir voter par anticipation. Est-ce que vous
êtes d'avis que la loi devrait être amendée, de
façon à permettre à toutes les personnes
âgées, quels que soient les motifs, de pouvoir voter par
anticipation?
Mme Leblanc: Je dis qu'il y a beaucoup de personnes
âgées qui vont aimer mieux aller voter par elles-mêmes. Cela
établit, je dis: Pourquoi ne pas mettre à leur portée...
Je vais vous dire pourquoi. C'est parce que je vois... C'est qu'il serait pas
mal plus difficile de faire des exceptions pour certaines personnes
âgées que de l'établir pour toutes les personnes
âgées non capables d'exercer leur droit de vote le jour du
scrutin. Est-ce que cela répond à votre question?
M. Gratton: Oui. Mme Leblanc: Oui.
M. Gratton: En fait, ce que vous me dites, finalement, c'est que
vous souhaiteriez la plus large liberté possible.
Mme Leblanc: Oui, pour que ce soit moins difficile, dans le fond,
à contrôler. Si vous êtes obligé de contrôler
pour savoir si une personne n'est réellement pas capable d'aller voter
ce jour-là, cela cause encore des difficultés, tandis que si vous
établissez cela de façon générale, d'après
moi, c'est plus facile à contrôler.
M. Gratton: II faudrait, évidemment, se poser la question:
Si en élargissant à ceux qui sont admissibles à voter par
anticipation, si le volume de gens qui se prévalent de ce
droit-là ne viendra pas encombrer les bureaux de vote par anticipation,
à ce point qu'on va exactement faire le contraire de ce qu'on souhaite
faire... C'est une évaluation qu'on peut faire.
Mme Leblanc: Oui, il y a cela.
M. Gratton: Dans le même ordre d'idée, la
Fédération des centres d'accueil nous a suggéré de
prévoir une journée de vote par anticipation additionnelle qui
serait réservée spécifiquement aux personnes à
mobilité réduite. On parlait surtout, probablement, de bureaux de
vote par anticipation qui seraient situés dans des centres d'accueil,
par exemple, ou dans des institutions. On nous suggère qu'il pourrait y
avoir deux journées de vote par anticipation: la première
journée qui serait réservée à des personnes qui ont
des problèmes de mobilité, par exemple, qui sont en chaise
roulante, qui requièrent une assistance physique pour se
présenter au bureau de scrutin et la deuxième journée pour
tous les autres. Est-ce que vous avez une opinion à émettre sur
cette suggestion, à savoir d'ajouter une journée de vote par
anticipation?
Mme Leblanc: Je n'ai rien à ajouter là-dessus.
M. Gratton: D'accord. En ce qui a trait au vote par procuration,
vous nous dites, finalement, que pour les personnes âgées, les
personnes handicapées et les malades mentaux, que ce serait là
une façon adéquate, selon vous, de permettre d'exercer un droit
de vote qui parfois est difficile. Est-ce que j'ai bien compris votre
présentation?
Mme Leblanc: Oui. Mais j'ai toujours ajouté les personnes
- les malades mentaux - qui sont jugées capables d'exercer ce droit de
vote.
M. Gratton: Oui.
Mme Leblanc: J'ai toujours ajouté cela.
M. Gratton: J'ai compris cela. Sauf que là, on a un petit
problème dans l'état actuel de la législation.
Éventuellement, quand le nouveau Code civil sera en vigueur, on pourra
catégoriser les gens qui souffrent d'incapacité mentale de
façon à cerner ceux qui sont capables de voter et ceux qui ne le
sont pas. Malheureusement, le nouveau Code civil n'entrera en vigueur
qu'à une date ultérieure qu'on ne connaît pas encore.
La question se pose immédiatement, à savoir si on va
continuer à priver les malades mentaux - dont la vaste majorité a
la capacité de voter - de l'exercice de leur droit de vote en attendant
l'entrée en vigueur du Code civil. Ou si nous ne devrions pas
plutôt élargir et laisser l'entière liberté en
espérant que ceux qui ne sont pas capables de voter ne votent pas. C'est
peut-être ce qui nous mènera finalement à hésiter
à accorder aux handicapés mentaux le pouvoir de voter par
procuration. Non pas qu'on craint que les gens eux-mêmes abusent, mais
des tiers pourraient profiter de cette incapacité de certains et de leur
fragilité relative à l'égard de pressions qui pourraient
être faites pour ce qui constituerait des abus et possiblement de la
fraude. Ce sont là des questions qu'on devra trancher le plus rapidement
possible si on veut que la nouvelle Loi électorale en fasse état
avant la prochaine élection générale.
Mme Leblanc: Si vous en faites l'expérience d'ici
là, la loi aura autant de chances d'être bien faite.
M. Gratton: C'est une suggestion qui nous a été
faite par le Directeur général des élections qui a son
mérite et qu'on va sûrement étudier comme
possibilité.
L'Association des centres d'accueil nous a aussi fait valoir que des
bureaux de votation qu'on pourrait permettre d'installer dans les centres
d'accueil ou dans des institutions devraient se limiter aux seules institutions
reconnues par la loi sur les services de santé. Donc, ce qu'on appelle
les établissements publics. Ce qui exclurait la possibilité
d'installer un bureau
de vote dans un centre d'accueil privé ou dans un HLM. Est-ce que
la fédération a un point de vue à émettre
là-dessus? Est-ce que vous avez des réserves quant à la
possibilité d'installer des bureaux de votation dans des
établissements privés?
Mme Leblanc: Certainement, on a des réserves. Est-ce que
cela serait juste que ceux qui habitent des centres d'accueil privés -
soit parce qu'ils en ont les moyens, soit parce qu'ils ne peuvent pas faire
autrement - soient privés du droit d'exercer leur droit de vote?
M. Gratton: Donc, ce que vous nous dites, c'est que vous
souhaiteriez qu'on ne fasse pas de distinction entre les établissements
privés et publics.
Mme Leblanc: Si on veut être juste dans l'exercice du droit
de vote, je ne vois pas comment on peut faire autrement.
M. Gratton: L'association faisait valoir que dans les
établissements privés, ce sont surtout des gens autonomes. Donc,
ils n'ont pas de difficultés de mobilité, par exemple. Est-ce que
c'est votre point de vue?
Mme Leblanc: Pas toujours, non. Ce ne sont pas toujours des gens
si autonomes que cela. Tout à l'heure, je vous ai dit que j'avais
déjà touché à la politique. Entre autres, vous
savez ce que c'est que d'être pointeuse pendant une élection.
M. Gratton: J'ai déjà été pointeur,
en tout cas.
Mme Leblanc: On va s'entendre sur ce point-là. J'avais
remarqué, en faisant la visite avec le candidat, ici et là, les
poignées de main chaudes. Autant elles étaient chaudes, autant
elles étaient froides pour aller faire leur croix le jour du scrutin.
C'est pour cela que dans ce que je vous ai dit tout à l'heure, j'ai
parlé d'essayer de mousser leur intérêt à la chose
politique. Il y a un désintéressement. Comme les personnes
âgées vont être une partie importante de
l'élec-torat, j'insiste pour qu'il y ait des moyens à trouver.
Nous, on va faire notre part pour que, justement, ils exercent ce droit de
vote. C'est un de leurs pouvoirs, cela, le pouvoir gris, la montée de la
vague grise; le droit de vote est un de leur pouvoir, s'ils exercent bien leur
droit de vote.
M. Gratton: Probablement le pouvoir qui risque de mieux les
servir à condition, évidemment, qu'ils l'utilisent à bon
escient.
Mme Leblanc: Celui-là et celui de parler à
temps.
M. Gratton: Oui.
Mme Leblanc: Ha, ha, ha!
M. Gratton: Une dernière question, M. le Président,
si vous me le permettez. En ce qui concerne le recensement,
spécifiquement celui des centres d'accueil et des institutions, le Forum
des citoyens âgés nous a parlé hier de difficultés
dont ces gens avaient été témoins lorsque, à
l'occasion, les recenseurs se présentent dans un établissement
tandis que la direction leur indique que telle ou telle personne ne devrait pas
être inscrite sur la liste électorale parce que, finalement, ce
sont des gens - on donne toutes sortes de raisons - dont on dit qu'ils sont
séniles ou n'ont pas la capacité de voter, alors que, parfois, la
vraie raison pour la direction, de ne pas vouloir les voir inscrits sur la
liste électorale, c'est que cela leur occasionne des problèmes au
moment de les faire voter parce qu'elle doit leur fournir une assistance
physique et souvent, avec le personnel réduit dans certains centres,
cela crée un problème administratif sérieux. Est-ce que
vous avez, lors de vos contacts réguliers avec les gens de la
fédération, été saisie de ce genre de situation
où des gens seraient privés de leur droit de vote parce qu'ils ne
sont pas inscrits sur la liste électorale en fonction de la
décision de la direction de l'établissement?
Mme Leblanc: Oui. Bien, comme je le disais tout à l'heure,
ils ne vont pas vérifier sur l'avis qu'ils ont reçu quand finit
la révision. Là, c'est un cas... Ils sont corrects quand ils
refusent comme cela. Par contre, ils peuvent toujours se servir de
l'assermentation pour faire voter celui qui se présente. Moi, je dirais,
comme l'a dit le Directeur général des élections tout
à l'heure, qu'il faut faire confiance plus que cela. J'aurais une
question à vous poser: Est-ce qu'une carte d'identification aiderait? Il
en a été question pour les candidats - pour l'électeur -
dans certains pays cela se pratique. C'est une question que je jette en l'air,
comme cela. Ensuite, l'uniformisation de la liste électorale, je vois
que c'est presque impossible, cependant, j'ai vu qu'on se préparait
à nous donner la permission de la transmettre, par exemple, à la
secrétaire municipale. La Sûreté du Québec m'a
déjà demandé, à moi, pour un programme
étudiant, de lui passer une liste électorale pour, par exemple,
buriner des meubles pendant les vacances, c'était un travail de
vacances. Je serais bien contente si on pouvait nous donner cette permission,
parce que cela rend vraiment service.
M. Gratton: La permission de?
Mme Leblanc: De passer la liste électorale, après
que le recenseur aurait fait sa liste.
M. Gratton: Si vous parlez de se servir de
la liste électorale pour faire la vérification, pour
s'assurer que les gens qui ont le droit d'être inscrits... Est-ce ce dont
vous parlez?
Mme Leblanc: Non, non. Je parle, par exemple, du projet que la
Sûreté du Québec avait fait avec des étudiants, pour
leur donner du travail, d'aller buriner dans toutes les maisons les objets
précieux; c'était l'opération Volcan, pour faciliter le
travail aux étudiants qui ne connaissaient pas toutes les paroisses ou
tous les rangs, et ainsi de suite; on leur fournissait la liste
électorale. Cela facilitait la tâche des étudiants.
M. Gratton: Oui. Bien, quant à la distribution des listes
électorales...
Mme Leblanc: C'est un exemple, entre autres.
M. Gratton: Oui, mais je vous donne la réponse
là-dessus. On va plutôt dans le sens contraire de restreindre la
distribution de listes électorales puisque effectivement - c'est un
sujet qui fait l'objet de discussion et qui fera l'objet de discussion à
la commission parlementaire - on voudrait encadrer ceux qui ont accès
à la liste électorale. Au sujet de la carte d'identification de
l'électeur, je dois vous dire que non, il n'en sera pas question
à cette étape-ci, ni aux étapes ultérieures. Et
vous aviez soulevé un autre problème, est-ce que c'était
la liste permanente?
Mme Leblanc: L'uniformisation. M. Gratton: Oui, pour les
fins... Mme Leblanc: Non, cela, c'est.
M. Gratton:... d'élections scolaires et municipales.
Mme Leblanc: Non.
(16 h 30)
M. Gratton: Tant et aussi longtemps que le cens électoral
ne sera pas le même à chaque niveau... Par exemple, on sait que,
pour avoir le droit de vote au municipal, les conditions ne sont pas les
mêmes que pour avoir le droit de vote au provincial, par exemple. Et cela
crée donc des problèmes dans la mesure où une liste
électorale provinciale n'inclut pas nécessairement le nom de tous
ceux qui ont le cens électoral et la capacité de voter. Par
contre, ce sujet-là fait l'objet de...
Mme Leblanc: Oui, j'avais compris ça, parce que cela
coûterait plus cher que ce que cela économiserait, mais je voulais
être éclairée sur l'histoire de pouvoir passer la liste
électorale après le vote, comme je l'ai dit tout à
l'heure.
M. Gratton: Merci infiniment, Mme Leblanc.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Lemay (Yvanhoë): J'avais une partie à faire. Il
restait cinq minutes.
M. Gratton: Ah bon! Alors allez-y! Le Président (M.
Marcil): D'accord.
M. Lemay: Mon nom est Yvanhoë Lemay. Je suis membre d'un
club de l'âge d'or de Laval, en banlieue de Montréal. Je suis
également permanent à la Fédération de l'âge
d'or du Québec depuis onze ans. Dans le sillage de la présidente
de la FADOQ, permettez-moi de vous livrer ma réflexion sur trois points:
la localisation des bureaux de vote, les congés dans les écoles
et le vote des Québécois hors Québec.
Localisation des bureaux de vote. Nous suggérons qu'on fasse
disparaître le terme "endroit public" pour désigner les bureaux de
vote. Le terme est trop restrictif. Ainsi, un centre d'accueil pour personnes
âgées, un hôpital à soins prolongés, une
résidence ou un foyer pour les aînés, qu'ils soient
à caractère public ou privé, pourront, s'il y a lieu,
servir de bureau de scrutin pourvu que les lieux retenus permettent aux
personnes âgées d'exercer plus facilement leur droit de vote. Dans
la même foulée, nous recommandons de prévoir la
possibilité de tenir un vote itinérant dans les
établissements pour personnes âgées ou à
mobilité réduite. De permettre aussi au personnel
électoral de déplacer l'urne à l'extérieur du
bureau de scrutin, par exemple, sur le bord de la rue ou dans un terrain de
stationnement afin que l'électeur ou l'électrice puisse voter de
sa voiture. Tout cela selon le grand principe général de rendre
plus facile l'exercice du droit de vote aux personnes âgées,
handicapées et aux personnes qui se déplacent plus
difficilement.
Ensuite, le congé dans les écoles. Même si je viens
à titre de représentant de la FADOQ, j'aimerais donner mon
opinion personnelle sur le congé dans les écoles le jour de
scrutin. Je suis père de deux jeunes enfants du primaire au
réseau scolaire Chomedey de Laval. Je suis pleinement d'accord pour que
l'on supprime le traditionnel congé des employés des commissions
scolaires le jour du scrutin. Ce sera autant de sauvé sur les nombreuses
journées pédagogiques que les enseignants prennent durant
l'année. Les membres de la commission qui voyagent beaucoup à
l'étranger savent sans doute que le nombre des journées de classe
dans les écoles du Québec est inférieur à celui de
beaucoup d'autres pays. À titre d'exemple, permettez-moi de vous dire
qu'au Japon les enfants du primaires on 80 journées de plus
d'enseignement par année qu'ici au Québec. Cela représente
16 semaines, soit quatre mois. C'est à faire réfléchir. Il
n'est pas surprenant que les jeunes asiatiques figurent parmi les meilleurs
écoliers de la planète au point de vue
connaissances et assiduité au travail. Sans vouloir copier
l'Orient, il faudra bien veiller à ce que la journée
d'élection ne vienne pas entamer l'horaire déjà trop court
de nos écoles québécoises. Par exemple, dans mon quartier
de Laval, le bureau de scrutin est toujours situé à
l'école secondaire Saint-Martin. Pourquoi déranger mes deux
jeunes enfants qui fréquentent l'école primaire dans le voisinage
et déranger les enseignants en donnant congé d'école?
Pourquoi même donner congé à tous les élèves
de l'école secondaire retenue alors que seul le gymnase qui a ses
propres portes d'entrée est utilisé pour la votation? La
direction des écoles choisies pourra décider elle-même de
l'opportunité de donner congé aux élèves ou non.
Et, s'il n'y a pas moyen de trouver une solution là-dessus, pourquoi ne
pas tenir la journée de scrutin le dimanche?
Et, mon dernier point: le vote des Québécois hors
Québec. Maintenant, c'est à titre d'ancien résident
à l'étranger que je livre ma dernière réflexion. Je
suis tout à fait d'accord pour accorder aux résidents hors
Québec, moyennant toutefois certaines conditions, la possibilité
d'exercer leur droit de vote. Je parle en connaissance de cause, je fus
missionnaire au Japon de 1956 à 1977. Durant ces 21 ans de vie à
l'extérieur du Québec, je n'ai pu, à mon grand regret, et
cela sur tous les plans, tant municipal, provincial ou fédéral,
exercer mon droit fondamental de citoyen, celui de voter et cela, tant dans mon
pays d'origine que dans mon pays d'adoption. J'en ai souffert. Il m'a pris 20
jours pour me rendre en train et en cargo au Japon en 1956 mais cette
façon de voyager a disparu et on peut s'y rendre maintenant en une
quinzaine d'heures. Fini le temps où les missionnaires partaient pour la
vie et sans retour. Les missionnaires du Japon reviennent maintenant au moins
à tous les trois ans. Tout cela pour vous dire que les efforts doivent
être faits pour permettre aux militaires, aux diplomates, aux
missionnaires, aux hommes ou femmes d'affaires qui font un long séjour
à l'étranger de pouvoir voter. Ces hommes et ces femmes sont de
mieux en mieux renseignés et aptes à porter un jugement sur les
candidats ou les partis politiques à élire.
Je souhaite que la réforme de la loi mette en place des
mécanismes qui puissent permettre à ces résidents
étrangers d'exercer leur droit de vote. Tous ne le feront pas certes,
mais les plus informés, les plus intéressés prendront
sûrement les moyens de le faire si des moyens adéquats sont mis
à leur disposition. Ainsi, des bureaux de scrutin pourraient être
établis dans les ambassades ou consulats canadiens ou même dans
les différentes maisons du Québec à l'étranger. Je
suis d'accord cependant avec les membres du comité de travail pour
procéder par étapes à l'octroi de ce droit de vote aux
Québécois hors Québec afin de garder le contrôle sur
l'application de ces nouvelles dispositions.
Je suis tout à fait d'accord à accorder aux
résidents hors Québec, moyennant toutefois... Les militaires
canadiens et les membres des corps diplomatiques vivant à
l'étranger peuvent, je crois, au niveau fédéral, exercer
déjà leur droit de vote. Pourquoi ne pas le faire au niveau
provincial et pourquoi ne pas l'étendre aux missionnaires, aux hommes et
femmes d'affaires résidant à l'étranger? Ce sont aussi de
bons ambassadeurs entre leur pays d'origine et leur pays d'adoption. Les bonnes
relations qui existent entre le Québec et le Japon, tant sur le plan
culturel et commercial, sont peut-être le résultat indirect de
l'action de ces personnes vivant parmi eux.
De toute façon, l'expérience mérite d'être
tentée et un plus grand nombre de citoyens y trouveront satisfaction.
C'est l'essentiel de mon message. Merci de m'avoir écouté.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Lemay.
Je vais maintenant reconnaître le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Mme Leblanc, M. Lemay, comme le ministre l'a fait, je
veux vous remercier sincèrement pour avoir choisi de venir nous faire
une réflexion qu'on aurait souhaité, bien sûr, pouvoir
prendre connaissance avant mais j'ai compris les difficultés qui
étaient vôtres. L'important était de venir la livrer, ce
que vous avez fait et, surtout, de toucher les sujets sur lesquels il y a lieu
de recevoir un éclairage additionnel, surtout de gens qui sont en
contact et qui représentent ce que vous avez appelé, avec raison,
"le pouvoir gris" qui grandit rapidement. En conséquence, il
était important que cette grande partie de la population puisse
s'exprimer à travers des instances représentatives comme l'est
sûrement la Fédération de l'âge d'or du
Québec. Je vous remercie d'avoir exprimé votre point de vue. On a
la chance que nos débats soient enregistrés, donc, cela nous
permettra d'effectuer des retours et des vérifications sur ce que vous
avez mentionné, parce que vous avez soulevé pas mal de points
intéressants et on sent que c'était étoffé d'une
bonne expertise, d'un bon vécu.
Je commencerai tout de suite par M. Lemay, même si c'est Mme
Leblanc qui a présenté la première partie, parce que c'est
frais. Deux choses, M. Lemay. Vous avez mentionné que vous voudriez
même qu'on envisage le déplacement de l'urne, je trouve que vous y
êtes allé pas mal fort, dans les stationnements pour permettre
à des gens de pouvoir voter de leur voiture.
M. Lemay: Oui, c'est cela.
M. Gendron: J'ai noté que vous avez dit cela.
M. Lemay: Cela se fait dans d'autres
provinces.
M. Gendron: Oui? M. Lemay: Oui.
M. Gendron: On nous dit que c'est exact, que cela se fait dans
quelques autres provinces. Ce n'est pas pour rien que nous sommes censés
avoir une clause différente dans une espèce de papier qui a
été signé, la spécificité du Québec.
Cela ne me dérange pas même s'il y a d'autres choses qui se font
dans les autres provinces. De temps en temps, il faut évaluer les
conséquences, M. Lemay. Ne croyez-vous pas qu'en déplaçant
l'urne il y a quand même des inconvénients majeurs. D'abord, il y
en a un premier. Si on la déplace, elle n'est plus là où
elle était traditionnellement, donc, il y a un problème.
Supposons qu'il y ait un déplacement de l'urne dans les stationnements
où il y aurait une manifestation ou peu importe, pour permettre à
ces gens-là de voter lors de la journée du vote, j'aimerais que
vous nous indiquiez un peu plus les conséquences du reste; là,
elle n'est plus là où les gens votent habituellement, donc elle
est ailleurs et, lorsque l'urne est ailleurs, il me semble qu'on ouvre
énormément de difficultés de contrôle et
d'inquiétudes concernant la sécurité. Je suis un peu
surpris car, pour des gens qui ont habituellement beaucoup de sagesse et de
réflexion, là, tous ces inconvénients... La question que
je vous pose est la suivante: est-ce que vous avez évalué ces
points?
M. Lemay: C'est surtout de faire disparaître les mots
"endroits publics" qui ont fait problème durant les élections
précédentes. On se demandait si une résidence
privée pouvait être un endroit public. C'est pour rendre plus
accessible le pouvoir d'exercer son droit de vote.
M. Gendron: Sur la distinction entre les deux notions, je vous ai
écouté et je trouve que vous avez raison. On ne peut pas avoir
l'objectif de faciliter l'exercice et avoir un paquet de contraintes dont la
conséquence est d'atteindre l'objectif inverse. Vous avez raison
là-dessus; il me semble qu'il faille simplifier et s'assurer qu'à
chaque endroit où il y a lieu d'offrir une accessibilité plus
grande... Mais, pour moi, c'était plus sur l'aspect de l'urne qui se
promène. Le déplacement de l'urne à l'intérieur
d'un même édifice, je ne suis pas chaud là-dessus, mais je
ne comprends pas... Quand on commence à permettre aux gens de voter de
leur voiture dans les stationnements, je voulais juste savoir si vous avez fait
une évaluation des dangers et des conséquences que cela peut
représenter pour la crédibilité et
l'intégrité de notre système d'élection.
M. Lemay: Non, je n'ai pas fait d'expertise sur ça.
M. Gendron: D'accord. Concernant la question des citoyens hors
Québec, c'est une question.
M. Lemay: Ah, là, par exemple...
M. Gendron: Dans la perspective où le législateur
décide de l'offrir, croyez-vous qu'on devrait se creuser les
méninges pour limiter, dans un délai quelconque, la
période de temps où le citoyen est hors Québec? Un exemple
concret, est-ce que vous êtes favorable à l'introduction d'un
délai en disant: Tout ceux qui sont hors Québec depuis dix ans,
c'est un exemple, cela ne veut pas dire que je sois arrêté sur les
dix ans, mais, pour que ma question soit bien comprise, est-ce que vous
êtes favorable à un délai ou aimez-vous mieux qu'il n'y en
ait pas?
M. Lemay: Un délai ni trop court ni trop long. Quelqu'un
qui ait été hors Québec durant 30 ans, je pense que je
mettrais des gens qui ont environ cinq ans ou entre trois et cinq ans, quelque
chose comme cela. Il faudrait mettre une certaine limite. C'est au Directeur
général des élections et à vous, membres de la
commission, de vous pencher là-dessus.
M. Gendron: C'est ça, mais vous n'êtes pas
opposé, sur le principe, à ce qu'il y ait un délai dans la
loi.
M. Lemay: Oui, oui. Ah oui!
M. Gendron: Parfait.
Mme Leblanc, j'ai été très attentif à cette
partie-là, parce qu'elle me préoccupe davantage. Vous avez
mentionné que vous n'étiez pas opposée au vote par
procuration, d'ailleurs vous avez pris la peine, en réponse à une
question du ministre, de dire: À la condition que les personnes
âgées soient capables de voter, et, à deux reprises, quand
il vous a interrogée là-dessus, vous avez tout de suite
renchéri en disant: Oui, mais on a toujours parlé et
ajouté la notion de capacité de voter.
Mme Leblanc:... les malades mentaux.
M. Gendron: Oui, oui. On se comprend bien.
Mme Leblanc: Cela va.
M. Gendron: La question que je vous pose est la suivante.
À partir du moment où vous êtes sensible aux
inconvénients que cela peut créer puisque vous dites que vous
souhaitez que le vote par procuration soit réservé uniquement
à ceux qui sont capables de voter, au-delà de l'aspect du Code
civil, parce que, quant à moi, je ne trouve pas que le Code civil va
régler grand-chose, mais les distinctions au Code civil seront tellement
marginales, les interdits, ceux qui sont
sous curatelle publique qu'il restera encore énormément de
gens qui auront l'épithète malheureuse de "handicapé
mental" ou "souffrant de handicap"... je souhaite que ces gens-là aient
le plein droit de vote. Je ne veux pas qu'ils l'aient par procuration, mais
dans les mêmes conditions que les autres. Si un handicapé est en
mesure de poser lui-même le geste d'aller s'exprimer, je veux qu'il ait
le droit de vote et ce n'est pas à moi à dire qu'il est interdit
ou qu'il a ceci ou cela.
La question précise que je vous pose est la suivante, est-ce que
vous pensez que la capacité de déterminer pour eux le fait qu'ils
sont aptes ou non à voter n'est pas plus grande que celle d'accorder le
vote par procuration?
Mme Leblanc: C'est clair que cela porte à
conséquence. Je pourrais peut-être...
M. Gendron: Qui déterminera... Mme Leblanc:
Pardon?
M. Gendron: Qui déterminera leur capacité de
voter?
Mme Leblanc: C'est cela. Moi aussi je me posais la question: qui
va le déterminer? La personne peut se dire capable de voter; elle peut
aussi se dire incapable de voter parce qu'elle n'a pas envie de voter, il y a
ça aussi. Maintenant, les institutions dans lesquelles ces malades sont,
on parle de... - est-ce que je vais être capable de le dire? Vous savez
ce que je veux dire. Bon.
M. Gendron: Très bien. J'ai autant de misère que
vous à le dire: désinstitutionnalisa-tion.
Mme Leblanc: Bien, ceux qui se promènent dans la rue,
décident d'aller au scrutin et s'en vont voter. Ils décident de
dire au scrutateur: Je ne suis pas capable de voter seul. Quelqu'un va dans
l'isoloir et lui aide. Cela se fait. Ces gens sont sous serment. Donc, avec
tout cela, il me semble qu'il y a moyen d'arranger cela.
D'un autre côté, qui va décider si la personne a la
capacité de voter? Dans ce cas, par exemple, je ne me sens pas capable
de trouver la solution.
M. Gendron: D'accord. Une autre chose me préoccupe. Les
handicapés, au sens large, sans les définir, nous disent souvent
vous, les membres d'un gouvernement ou de l'Assemblée nationale, ne
pouvez pas constamment prêcher l'intégration et nous cantonner
dans des mesures particulières. Cela va mais cela va être pour les
handicapés.
J'ai été très peu surpris, mais je trouve qu'on
s'oriente souvent dans le même filon avec les personnes
âgées en disant qu'il faudrait faciliter le vote, il faudrait
avoir des mesures d'exception, il faudrait envisager une journée
spéciale. Je n'ai sincèrement rien contre cela. Voici la question
que je pose: Ne risque-t-on pas, à un moment donné, de se faire
dire: Nous ne voulons pas être des citoyens différents des autres,
et avec un paquet de situations particulières dans la législation
où il y a toujours quelque chose de prévu pour le
troisième âge ou le "grey power"? Dans ce sens, je voulais juste
savoir parce qu'on a l'occasion d'avoir des gens qui vivent avec ces gens, des
gens de la fédération. Quel est votre sentiment?
Mme Leblanc: Je pourrais bien vous dire, vous parlez de
risque...
M. Gendron: Oui.
Mme Leblanc: Où est-ce qu'il n'y a pas de risque?
Même avec la manière de voter établie maintenant, le
scrutin, le jour, déjà le vote par procuration est établi.
On sait cela. Par anticipation plutôt. Je m'excuse. Le vote par
anticipation est établi. Il y a aussi des risques à cela. Il y a
toujours des risques.
Ce qu'on semble vouloir préserver dans les documents qu'on nous a
remis, c'est justement ce principe fondamental du droit d'exercer le vote.
Donc, il y a un risque à prendre.
M. Gendron: Mme Leblanc, je pense que cela a été
bien compris. Je voulais surtout simplement savoir si vous rencontrez des gens
du troisième âge qui font de temps en temps la réflexion
que j'ai faite, qui nous est souvent faite par les personnes
handicapées. C'est juste cela que je voulais savoir.
Mme Leblanc: Oui. Voulez-vous répéter cette
réflexion?
M. Gendron: Ah! La répéter. C'est que les personnes
handicapées nous disent, et sont venues nous le dire ici:
Écoutez, vous avez tous de beaux discours d'intégration dans la
société, des citoyens de plein droit, à part
entière, etc. Mais, à chaque fois que vous touchez à
quelque chose, on a toujours nos petites cases. Vous nous intégrez dans
une série de petites cases particulières parce qu'on est des
handicapés.
Mme Leblanc: Ils ne veulent pas être
marginalisés.
M. Gendron: Ils ont dit: On est tannés de cela.
Voilà.
Mme Leblanc: Oui. Ils ne veulent pas être
marginalisés.
M. Gendron: Je voulais savoir s'il y a des personnes
âgées qui vous tiennent ce discours ou si cela leur fait plaisir
de lire le discours mais avoir leurs petites cases.
Mme Leblanc: Non. Ils ne nous tiennent pas grand discours.
M. Gendron: Non.
Mme Leblanc: Ils parlent beaucoup avant les élections.
C'est comme je vous l'ai dit tout à l'heure, quand vient le jour du
scrutin, ils sont réticents.
J'ai dit que j'ai été pointeuse. J'ai été
autre chose aussi. Je vais vous dire comment on a recours à moi. Vous
avez entendu parler des analphabètes tout à l'heure.
M. Gendron: Oui.
Mme Leblanc: On va me téléphoner et on va me dire
que l'on connaît un tel. Je sais tout de suite de quel parti il est.
Est-il sur la troisième ou la quatrième ligne? J'ai le droit de
le lui dire. Je sais pour qui il veut voter. Si je suis honnête, je lui
dis la bonne ligne. Il s'en va voter. Quoi? Qu'y a-t-il?
M. Gendron: II n'y a rien. Tout va bien. Une voix: II dit
notez cela.
M. Gendron: Moi, j'écoute avec cette oreille et je parle
au président avec l'autre...
Mme Leblanc: Cela est un fait. C'est arrivé que j'ai
reçu des appels téléphoniques. Je peux dire qu'il y a une
dame, sans être malade mentale à renfermer, elle n'était
pas toute à elle, elle était analphabète en plus et, que
ce soit aux élections municipales, il y en a un qui s'est trompé
une fois parce que je n'avais pas droit de vote municipalité-paroisse,
j'avais le droit de vote municipalité-village. Donc, il se trompe. Il
s'informe auprès de moi. Je dis que je n'ai pas le droit de vote,
informez-vous à mon mari, il a le droit de vote. Il voulait savoir sur
quelle ligne... C'était quelqu'un qui avait déjà
été - on dit échevin maintenant - conseiller municipal. Je
calculais que c'était honnête de répondre
adéquatement à la personne qui était au
téléphone parce qu'elle voulait exercer son droit de vote.
D'autres sont venus me demander pour aller les chercher parce que leurs enfants
ne voulaient pas aller les mener... ils n'étaient pas du même
parti.
M. Gendron: Dernière question en ce qui me concerne, pour
des considérations de temps. Entre la confidentialité du vote et
prétendre que dans les HLM privés, je ne parle pas des foyers -
cela fait douze ans que je suis député, j'en ai visité pas
mal, j'ai fait le tour du Québec à plusieurs reprises - je
prétends que, en règle générale, dans les HLM
privés, le lot de personnes âgées incapables de se
déplacer est très faible selon les statistiques que j'ai vues de
mes yeux. En conséquence, entre l'échange d'une meilleure
sécurité du droit de vote sur le plan de la
confidentialité et éventuellement permettre à une ou deux
personnes qui souffriraient de mobilité réduite pour faciliter le
droit de vote, moi, je choisis la confidentialité du vote. Je veux
savoir quel est votre choix à vous.
Mme Leblanc: Moi aussi, je choisis la confidentialité.
C'est essentiel, c'est loyal, cela fait partie de la morale. Par exemple, vous
parliez des HLM. Autrefois, on ne se gênait pas pour transporter les gens
qui n'étaient pas capables d'aller voter. Vous dites que dans les HLM,
c'est à leur portée. Quand le HLM est à un demi-mille du
scrutin, il y a des personnes qui ont de la misère à s'y rendre.
Pourquoi ne pas s'arranger pour leur rendre service, aller les chercher et les
amener voter si elles veulent y aller?
M. Gendron: Là-dessus on est d'accord, mais en
règle générale...
Mme Leblanc: C'est un moyen qui était utilisé
autrefois.
M. Gendron:... cela se fait encore largement. Mme Leblanc:
Largement?
M. Gendron: Peut-être pas par le parti "J'en arrache".
Mme Leblanc: J'ai des réticences à dire
"largement", quand ils sont rendus à venir nous téléphoner
dans notre maison parce que le garçon ne veut pas aller le mener ou
n'importe quoi, ce n'est plus largement.
M. Gendron: En tout cas, là, on va le faire. C'est une
leçon pour nous autres. On va parler à nos directeurs
d'organisation et on va leur dire: Vous ne faites pas votre job. Il faut aller
chercher le "grey power".
Mme Leblanc: Non, non. Tout à l'heure, vous avez dit cela:
Prenez note. J'espère que ce n'est pas pour m'envoyer en cellule.
M. Gendron: Bien, voyons! Ha, ha! Des voix: Ha, ha!
Mme Leblanc: Non, non, je suis venue ici pour parler
honnêtement.
M. Gendron: Merci beaucoup, Mme Leblanc et M. Lemay de votre
contribution.
M. Gratton: On vous remercie infiniment, madame.
Mme Leblanc: On vous remercie, nous aussi, de nous avoir permis
de comparaître de-
vant vous.
Le Président (M. Marcil): On vous remercie d'avoir
assisté à cette commission et on vous souhaite un bon voyage de
retour.
On va suspendre nos travaux quelques minutes afin de permettre au
ministre des Communications du Québec, M. Richard French,
député de Westmount, de prendre place à l'avant.
(Suspension de la séance à 16 h 53)
(Reprise à 16 h 55)
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, nous vous
souhaitons la bienvenue à cette commission. Nous sommes - comment
pourrais-je dire cela, M. le ministre...
Une voix: Honorés, peut-être!
Le Président (M. Marcil):... honorés...
M. Gratton: Oui.
Le Président (M. Marcil):... de sa présence. Nous
nous attendons à avoir des opinions très ouvertes et
éclairées sur le sujet sur lequel nous travaillons aujourd'hui.
Donc, je vous laisse la parole. Vous avez une vingtaine de minutes à
votre disposition; ce sera suivi de questions de part et d'autre. Allez-y.
M. Richard French, ministre des Communications
M. French: Merci, M. le Président. Je vais essayer de ne
pas prendre...
Le Président (M. Marcil): Votre document est
déposé, je suppose.
M. French: Non.
Le Président (M. Marcil): Non, d'accord.
M. French: Je vais essayer de ne pas prendre la vingtaine de
minutes que vous me prodiguez si généreusement. J'ai pensé
parler sur le volet de votre mandat qui touche la publicité, puisque
c'est de ce volet dont je suis plus particulièrement qualifié, en
vertu de mes fonctions ministérielles, en peut-être quatre ou cinq
points.
Le premier point: Quelle publicité fait le gouvernement?
Très rapidement, quels sont les problèmes potentiels pour
l'exercice de la démocratie occasionnés par la publicité
gouvernementale? Troisièmement, donc, dans quel sens ou de quelle
manière l'Assemblée nationale devrait-elle s'adresser à
ces problèmes potentiels? Quatrièmement, une suggestion ou
quelques hypothèses de solution. Je ne peux pas parier pour le
gouvernement pour ce qui est de ce dernier point, puisque, dans le fond, le
document de discussion que vous avez lancé, que le ministre a
lancé, vos travaux ont brassé un paquet de problèmes,
d'hypothèses et de possibilités... Je pense que le gouvernement
et plus particulièrement le ministre responsable voudront garder une
marge de manoeuvre à cet égard, donc je ne parle que pour
moi-même lorsque j'adresse une hypothèse de solution possible.
Donc, le premier volet: Quelle publicité fait le gouvernement? Il
y a vraiment deux types de publicité gouvernementale. Il y a la
publicité dite obligatoire, une publicité dite par mandat. La
publicité obligatoire compose à peu près de 30 % à
40 % de la publicité gouvernementale, et par mandat, donc, de 60 %
à 70 %. La publicité obligatoire est la publicité qui est
requise par une cinquantaine de dispositions législatives ou
réglementaires. On peut penser aux appels d'offres, aux avis publics,
aux appels de candidatures, à certains décrets qui doivent
être publiés. Cette publicité se fait essentiellement dans
l'imprimé. Ce n'est pas, pour le moment du moins, dans
l'électronique qu'on trouve la publicité par mandat. Vous avez
tous vu, je pense, la publicité obligatoire dans les pages
"classifiées" des journaux surtout.
La publicité par mandat est la partie de la publicité
gouvernementale qui est peut-être un peu plus délicate, un peu
plus controversée. On peut diviser le genre de publicité par
mandat que nous faisons en quatre types: une publicité essentiellement
commerciale et promotionnelle, la publicité administrative et
"informative", la publicité institutionnelle et la publicité
"sociétale". C'est là où on touche, donc, toute une
série d'activités gouvernementales où la publicité
devient un outil un peu semblable à l'outil que veut utiliser le
décideur du secteur public lorsqu'il veut mettre en marché un
produit, informer les citoyens sur sa corporation ou son entreprise, etc.; il
veut modifier les comportements, normalement le comportement de la
consommation, dans ce cas-là.
Donc, l'État se trouve à faire la promotion touristique,
la promotion de ses obligations d'épargne, la promotion de ses
publications, la promotion de ses parcs, etc.; on peut appeler cela la
publicité commerciale, promotionnelle.
L'État a également la responsabilité d'informer la
population sur toute une série de lois, de règlements et de
contingences qui affectent la population, la publicité sur le transport,
la période de dégel, les limites de charge, l'état des
routes, les dispositions à prendre s'il y a une grève des postes,
pour utiliser un exemple ponctuel, les demandes de prêts et bourses aux
étudiants, tout ce qui touche les loyers, la période de
déménagement, la Régie du logement, tout ce qui touche la
fiscalité, les impôts, etc.
Le troisième secteur, la publicité institutionnelle, un
secteur que nous surveillons de très près. Quelques exemples:
valorisation des écoles publiques, le cinquantième anniversaire
de
l'Union des artistes, le mérite forestier, la campagne au sujet
de la culture de la forêt, la campagne entourant le Sommet de
Québec. Finalement, la publicité "sociétale" qui vise
à modifier les comportements des citoyens dans le sens que les pouvoirs
publics voudraient et essentiellement pour les objectifs non
controversés, parfois par les moyens qui peuvent, eux, être
controversés dont dénonciation de la violence conjugale,
prévention des MTS, lancement du programme APPORT, placements
étudiants, lutte au braconnage, etc.
Là on commence à parler des campagnes qui peuvent
coûter, pour les plus modestes des objectifs que j'ai
réitérés, peut-être 5000 $, 10 000 $, 15 000 $, 20
000 $, 50 000 $ jusqu'à quelques millions de dollars par année et
on touche, comme je vous l'ai dit, quelque chose entre 60 %, 70 % et 80 % de la
publicité gouvernementale dans une année donnée.
Le contrôle de cette publicité se fait, d'une part, par le
contrôle budgétaire normal du gouvernement et, d'autre part, par
l'exigence pour le ministère annonceur de passer par le ministre des
Communications pour obtenir un avis préalable, c'est-à-dire une
approbation préalable en fonction d'une directive du Conseil du
trésor, directive 678. Donc, c'est essentiellement le type de
contrôle qui s'applique. Je vais vous parler tantôt du genre de
critère que j'applique en tant que ministre du gouvernement actuel
lorsque je regarde ces propositions de campagne de publicité de mes
collègues.
Votre deuxième point... Oh! Juste une parenthèse: Combien
d'argent l'État dépense-t-il en publicité gouvernementale?
Cela se situe depuis 1981 entre 11 000 000 $ et 20 000 000 $ par année
pour la publicité gouvernementale. Le chiffre pour 1987 est 13 300 000 $
et la projection pour 1988 est 15 200 000 $. Cela est allé
jusqu'à 19 500 000 $ et aussi peu que 11 100 000 $. Donc, cela varie
énormément et, soit dit en passant, le gouvernement du
Québec n'est pas un des grands annonceurs, même parmi les
gouvernements. Le gouvernement de l'Ontario est très substantiellement
plus actif dans le domaine et le gouvernement du Canada l'est encore plus. Je
pense que, toute proportion gardée, le gouvernement de l'Ontario est le
plus grand annonceur parmi les pouvoirs publics.
Alors, le deuxième point que je voulais soulever: Quels sont les
problèmes politiques ou les problèmes potentiels
occasionnés par la publicité gouvernementale pour l'exercice de
la démocratie? On sait que la publicité privée est
très réglementée et entourée de plus en plus
d'ailleurs de contrôle que les pouvoirs politiques ont mis en place, dans
l'intérêt du consommateur. Il n'y a pas de tels contrainte ou
contrôle sur la publicité gouvernementale, ne serait-ce qu'en
Saskatchewan où il y a une interdiction de publicité, sauf pour
les cas d'urgence, en période électorale. Donc, quels sont les
problèmes, les abus ou les dangers possibles?
Je pense, pour avoir fait une révision de l'activité
publicitaire des gouvernements depuis une dizaine d'années, pour avoir
suivi la question bien avant mon arrivée au ministère des
Communications, qu'il y a deux problèmes potentiels. Le premier
problème potentiel, c'est la publicité gouvernementale qui
s'adresse à une question qui divise profondément la population,
exemple: l'avortement. On pense... Je pense que vous serez d'accord avec moi,
messieurs et mesdames de la commission et M. le Président, que ce serait
abusif d'utiliser la publicité gouvernementale pour essayer d'influencer
le citoyen dans son choix d'option, dans ses choix de valeurs en ce qui a trait
à l'avortement ou à la peine de mort. On peut en donner d'autres,
mais ce n'est pas le moment, peut-être, d'évoquer les choses plus
délicates. Moi, personnellement, j'ai été très
effrayé par la publicité du gouvernement fédéral et
par la publicité du gouvernement provincial au moment du
référendum qui est, je pense, un sujet que les citoyens devraient
être libres de décider sans se faire influencer par la
publicité payée par leur propre contribution en impôt.
Donc, premier danger, l'usage de publicité gouvernementale pour
influencer la population sur les sujets très controversés qui
divisent profondément la population.
Deuxième genre d'abus possible ou de publicité
gouvernementale à éviter, la publicité qui vise
essentiellement à promouvoir les bienfaits ou les bons coups d'un
organisme public, d'un ministère, d'un gouvernement, d'un ministre. Cela
aussi, ce genre de publicité, on l'a vu, je pense que cette
publicité laisse l'électeur dans une situation un peu frustrante,
soit celle de se faire dire ou de se faire manipuler par la publicité
payée par ses propres impôts dans son choix démocratique,
sa liberté essentielle d'évaluer un gouvernement, un politicien,
une politique, une institution publique. Je pense qu'on ne doit donc pas faire
de "pétage" de bretelles de ce genre ou de manipulation propagandiste ou
partisane de ce genre.
Comment s'adresser - troisième point de mon exposé -
à ces dangers et abus possibles. J'ai invité la commission
à interpréter son mandat, à couvrir l'abus possible de la
publicité gouvernementale, non seulement en temps électoral, mais
en tout temps. Si j'avais une chose à vous laisser aujourd'hui,
j'aimerais vous laisser la pensée ou l'hypothèse que vos
responsabilités doivent couvrir l'ensemble de la publicité
gouvernementale, parce qu'il me semble évident que l'électeur
doit être aussi libre six mois avant l'élection que six mois
après l'élection ou qu'au milieu d'une élection, dans son
choix d'évaluation des politiques publiques. J'aimerais vous convaincre
aujourd'hui que, si un régime de contrôle de publicité
gouvernementale est nécessaire, ce régime doit s'adresser
indifféremment en période électorale ou en période
entre élections du gouvernement. Il me semble que si on réussit
à créer un régime qui contrôle
les abus possibles, ce régime pourrait continuer à
fonctionner et qu'il n'y aurait pas de danger et de difficulté en
période électorale.
Quelles sont les difficultés pratiques occasionnées par un
régime unique en période électorale? Dans un gouvernement,
pas celui qui fait 15 000 000 $ de publicité par année, les
problèmes pratiques occasionnés par la nécessité de
stopper toute publicité gouvernementale en temps d'élection sont
assez graves. Il me semble qu'on n'arrêtera pas de promouvoir le tourisme
provincial pendant la période électorale. Il me semble qu'on ne
va pas arrêter d'essayer de faire la promotion des obligations
d'épargne du Québec. Il me semble qu'on n'est pas
intéressé à arrêter une campagne contre les MTS au
moment où les étudiants retournent à l'école,
qu'ils soient en période électorale ou non. Donc, moi, je pense
que, si on a un régime de publicité gouvernementale qui est
acceptable et qui contrôle les abus possibles, on peut l'appliquer
indifféremment et que cela règle le problème de
publicité en temps d'élection, parce que cela règle le
problème de la publicité, point. Je pourrais parler plus en
détail de ces problèmes pratiques mais je ne veux pas vous faire
entrer dans les détails des opérations publicitaires du
gouvernement. Je pense que, si cela représente un intérêt,
on pourra en discuter en long et en large.
Donc, quel type de régime serait approprié? Je pense que
je peux vous suggérer, en guise de réponse partielle à
cette question, le type de régime que nous avons actuellement, parce que
c'est moi qui donne les avis préalables, parce que c'est moi qui ai
discuté de cela avec mes collègues. De par mon pouvoir et ma
responsabilité en vertu de la directive 6. 78, j'applique un certain
nombre de critères qui n'ont pas été formellement
approuvés par le gouvernement mais qui ont été
utilisés dans les faits et qui ont maintenant au moins le statut de
précédent fondamental, pour ce qui est de la publicité
gouvernementale. 2. 1 Dans la publicité électronique, il n'y a
pas d'image, il n'y a pas de voix, il n'y a pas de présence
d'élus. Il n'y a pas de présence de ministres ou d'autres
personnages politiques élus dans la publicité
électronique. 2. 2 Nous évitons de faire la publicité des
sujets très controversés, du genre que je viens d'invoquer, et
d'ailleurs, je dois vous dire que je n'ai jamais eu l'occasion de refuser une
campagne sur un sujet semblable, ce n'est pas venu comme cela.
Finalement, on essaie d'appliquer une série de critères
qui décriraient les objectifs... Oh! excusez-moi! Troisièmement,
nous essayons, bien sûr, d'éviter le "pétage" de bretelles
et la promotion d'une institution ou les bons coups d'un gouvernement ou d'un
organisme, ou les bénéfices d'une politique. Nous essayons
plutôt de situer chaque campagne à l'intérieur d'une
série d'objectifs acceptables que je vais vous lire et que je peux vous
distribuer et qui sont déjà dans le discours que j'ai fait il y a
quelques mois et qu'on m'a dit avoir distribué aux membres de la
commission. Juste pour vous rafraîchir la mémoire.
Donc, dans la publicité par mandat, nous envisageons de
permettre, et nous permettons actuellement, la publicité pour aider les
citoyens à prendre l'initiative pour bénéficier d'un
programme ou d'un service gouvernemental. "Le citoyen doit avoir besoin de
cette information-là pour bénéficier du programme. On ne
lui dit pas qu'on a fait un bon coup avec tel ou tel programme. On lui dit: Si
vous voulez bénéficier d'un tel programme, voici qui contacter,
voici la formule, voici le numéro de téléphone et voici
les critères d'admissibilité; 2° Informer la population
relativement à la tenue d'une enquête ou d'une consultation
publique; 3° Informer les citoyens sur les lois et règlements qui
les régissent; 4° Promouvoir la réalisation d'objectifs
économiques bien précis, tel l'achat des produits
québécois ou des obligations d'épargne, la promotion du
tourisme ou l'ouverture aux investissements étrangers; 5° Promouvoir
les objectifs de sécurité, de santé, de scolarité
et de formation, de protection des consommateurs, d'environnement et de
sauvegarde du patrimoine culturel. Finalement, promouvoir la participation de
la population aux élections - et on pense particulièrement aux
élections scolaires - ou les relations harmonieuses et
égalitaires entre les individus et les divers groupes qui composent la
société québécoise.
Munis de mauvaise foi et d'un peu d'astuce, il n'y aurait pas de
difficulté à faire de la publicité abusive à
l'intérieur de ces critères-là. Cela se fait. Cela ne se
ferait pas dans la mesure où je suis le ministre ou si un de mes
successeurs voulait appliquer les mêmes critères. Mais je vous dis
tout de suite que ces critères ne sont pas absolument
étanches.
En terminant ma présentation et, encore une fois de façon
personnelle et non pas au nom du gouvernement, je veux inviter la commission
des institutions à se pencher sur la possibilité d'un
régime qui s'appliquerait à l'intérieur comme à
l'extérieur des périodes électorales et qui viserait la
codification d'une version du genre de critères que je viens d'invoquer
et qui aurait un peu plus de pérennité que la série de
critères que j'applique en tant que ministre. Cela peut être par
une loi votée par l'Assemblée nationale ou peut-être par
une directive gouvernementale. Je vous rappelle qu'une loi solennelle serait
beaucoup plus, je pense, importante et lierait davantage les gouvernements
subséquents qu'une directive qui, elle, pourrait changer au gré
d'un Conseil du trésor.
Cela fait longtemps que je considère que le gouvernement canadien
a abusé de la publicité gouvernementale, peut-être pas de
façon massive mais d'une façon qui, pour moi, laisse une
espèce de tache sur notre démocratie. Je ne crois pas que cette
publicité abusive ou manipulative soit
efficace sur le fond. De toute façon, je donne plus de
crédit au jugement de l'électeur. Mais je pense que ce genre de
publicité amène la chose publique à avoir une image ternie
parmi la population, en tout cas la population qui en est consciente. Je trouve
cela un abaissement de la chose publique, une vulgarisation et une dilution de
l'intégrité de l'État face à ses électeurs.
Une forme de manque de respect pour le jugement de la population, des
électeurs.
Je terminerai en invitant la commission des institutions à se
poser peut-être la question si le moment n'est pas venu de faire - non
pas dans un climat partisan et sans citer des exemples nécessairement ou
aller relire l'histoire - d'un commun accord une législation qui aurait
un pouvoir d'exemple important pour les gouvernements subséquents. Et
qui, tout en reconnaissant qu'elle ne sera jamais tout à fait
étanche puisqu'il y a trop d'interprétation et trop de
circonstances imprévisibles qui pourraient survenir, pourrait au moins
donner un caractère plus fondé aux objections que des citoyens
ont, des membres de l'Opposition, des journalistes ou d'autres qui examinent
les pratiques publicitaires du gouvernement et une base un peu plus solide pour
ce genre de critiques qui devraient, à mon sens, toujours se faire
puisqu'il serait toujours facile de faire de la publicité
gouvernementale lorsqu'on ne peut pas régler un problème de fond.
Merci, M. le Président. (17 h 15)
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre
des Communications. Je vais maintenant reconnaître le ministre
responsable de la Réforme électorale.
M. Gratton: M. le Président, j'apprécie
particulièrement que notre collègue le ministre des
Communications, ait accepté de venir répondre aux questions et
témoigner devant la commission des institutions. On sait que
l'intérêt qu'il manifeste pour la question de la publicité
gouvernementale ne date pas de son accession au ministère des
Communications mais qu'il avait même, en tant que membre et
député de l'Opposition, déposé un projet de loi
à l'Assemblée nationale, en collaboration avec un membre de la
députation ministérielle. Je lui dis d'emblée que cette
suggestion qu'il fait d'encadrer la publicité gouvernementale non
seulement en campagne électorale mais en tout temps, me sourit dans la
mesure où, effectivement, comment distinguer ce qui est une
publicité acceptable, quel que soit le moment où cette
publicité est faite.
Lorsque le ministre nous parlait tantôt des problèmes
potentiels que la publicité gouvernementale peut susciter, il
mentionnait qu'il y en a deux types: celle qui est de nature à diviser
la population et, donc, à la diriger vers les tenants d'une option ou
d'une autre et celle qui vise à promouvoir les bienfaits d'un
personnage, soit un ministre, une société d'État ou peu
importe.
Il y a une question à laquelle j'aimerais que le ministre
réfléchisse et nous fasse profiter de ses réflexions. On a
parlé tantôt de la campagne référendaire. Lorsqu'on
faisait la promotion du port de la ceinture de sécurité, ce
n'était pas une question qui divisait la population, ce n'était
pas non plus une question qui faisait la promotion des bienfaits d'un
personnage ou d'une mesure nécessairement mais le thème choisi
pouvait porter à interprétation: On s'attache au
Québec.
Un exemple encore plus évident est peut-être la campagne du
gouvernement fédéral qui faisait la promotion non pas de
l'abstinence mais de la modération dans la consommation d'alcool et dont
le thème central était: Non, merci, alors que c'était
là un terme du Comité du non dans la campagne
référendaire.
Là, je me demande comment on en arrive à cerner et
à contrôler cela. Peut-être que le ministre pourrait nous
dire... Je suis sûr qu'il y a des façons mais j'aimerais les
connaître parce que sans faire intervenir une espèce de
censure...
M. French: Je ne pense pas qu'il y ait des façons
absolument étanches de s'attaquer au problème particulier que
vous avez mentionné. Ce que j'aimerais voir, c'est de commencer à
jeter les bases d'une philosophie publique qui ferait en sorte que la
publicité gouvernementale ne serait pas utilisée pour accomplir
les objectifs essentiellement politiques partisans. Il y aurait toujours, avec
un peu d'astuce, un peu de fric et un peu moins de conscience, la
possibilité d'abuser parce que les messages à double sens se font
tout le temps.
Si on avait une loi, ce qui serait différent, c'est que les gens
pourraient brandir la loi et faire payer aux gouvernements - pluriel ou
singulier - le prix de leurs gestes. Ils auraient une base. Ils pourraient
dire: Voici ce que l'Assemblée nationale a dit. Elle a dit cela pour une
raison. Oui, c'est vrai que techniquement vous êtes à
l'intérieur mais vous n'êtes pas moralement à
l'intérieur, vous abusez de l'argent des citoyens en essayant de les
convaincre d'un point de vue sur lequel ils ont le droit de prendre la
décision en toute liberté hormis la publicité payée
par les deniers publics. Cela ne veut pas dire que les partis politiques ne
peuvent pas faire de la publicité ou d'autres groupements dans la
société mais que ce soient les États qui fassent cela,
c'est abusif.
Je vous dis immédiatement qu'il n'y a pas de façon
absolument fiable pour empêcher ce genre de double message ou ce genre de
reconnaissance technique, mais non pas morale ou non pas réelle des
critères que je viens d'évoquer.
M. Gratton: M. le Président, comme solution possible, le
ministre des Communications nous suggère, à titre de commission
parlementaire, de faire possiblement une recommandation ou exprimer un voeu,
sinon au gouvernement, à l'Assemblée nationale, ayant trait
à une codifica-
tion quelconque. Je crois comprendre que vous souhaiteriez que cette
codification prenne la forme d'une loi plutôt que d'un code
d'éthique ou d'une directive gouvernementale.
M. French: Personnellement, je pense qu'une loi serait plus
solennelle sur une affirmation plus clairement définie de l'ensemble de
la population et de ses représentants quant à ces pratiques
publicitaires. Que ce soit dans une loi électorale ou dans une autre
loi, personnellement, cela ne me dérange pas. Je pense qu'il y a un bon
argument pour dire que cela touche la liberté de l'électeur et sa
décision démocratique. Donc, si c'était dans une loi
électorale, ce ne serait peut-être pas mal placé. Cela
pourrait aussi être dans une loi indépendante.
M. Gratton: M. le Président, je conclurai tout simplement
en disant que la commission des institutions qui se penche présentement
sur la révision de la Loi électorale décidera si on doit
réglementer, légiférer ou prévoir, dans la Loi
électorale, des dispositions pour éliminer la publicité
gouvernementale susceptible d'influencer la décision des
électeurs au moment d'une élection. Mais je suis tout aussi
convaincu que ce genre de publicité, qui serait interdite en campagne
électorale, devrait aussi être interdite en tout temps. Ce n'est
donc pas aujourd'hui que la commission tranchera. Une deuxième
étape est prévue à nos travaux et elle nous permettra
d'identifier les points qui font un consensus suffisamment large pour qu'on
puisse amender la Loi électorale, ce qui n'exclut pas que les
recommandations de la commission puissent déborder la Loi
électorale et porter sur des recommandations qui auraient trait à
d'autres lois existantes ou à venir.
En l'occurrence, je pense qu'on a effectivement, au moment où on
se parle, consensus pour en arriver à trouver une solution à la
publicité gouvernementale indésirée en campagne
électorale. Quant à moi, avec la collaboration des membres de la
commission, on pourra sûrement pousser plus loin cette suggestion que
nous fait le ministre.
En terminant, je le remercie d'être venu nous faire part de son
point de vue.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant reconnaître le député d'Abitibi-Ouest,
représentant de l'Opposition.
M. Gendron: Oui, assez rapidement. Je pense qu'on a eu droit
à un peu d'histoire et à des distinctions exactes concernant les
types de publicité, la publicité gouvernementale comme telle, la
publicité obligatoire par mandat et tout ça.
Là où je suis un peu étonné, c'est justement
parce que la personne - parce que c'est ainsi que je voudrais m'adresser au
ministre des
Communications actuel, étant préoccupé depuis
longtemps par ces questions-là - ayant l'occasion qui ne se
présente pas tous les jours d'être aujourd'hui ministre des
Communications, membre d'un gouvernement qu'on a appris être en bonne
posture, surtout depuis 1985, dans un mémoire du Parti libéral en
plus...
M. Gratton: Posture à quel point de vue?
M. Gendron: Ah! En excellente situation au plan du financement,
du bénévolat, de la popularité, ainsi de suite. Les
premières pages...
M. Gratton: Ce que vous dites là est assez juste.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Je savais que c'était dans le ton.
Non, mais très sérieusement, cela m'étonne un peu
que le ministre des Communications nous dise: Écoutez, j'aimerais vous
convaincre et mon objectif aujourd'hui, même si je réussissais
juste à vous dire qu'il serait important que l'État
québécois - en dehors de la partisanerie poli tique - puisse se
doter d'un instrument de gestion de la publicité en tout temps, et je
trouve cela d'une logique presque implacable. Commencer à se creuser les
méninges pour savoir si oui ou non, en période électorale,
on va permettre des formes de publicité; en règle
générale, celle qu'on voudra éviter comme publicité
en campagne électorale, est probablement la même qu'on ne souhaite
pas, comme citoyen et contribuable, entendre en tout temps. À moins que
je ne me trompe, les périodes électorales sont, bien sûr,
des périodes de temps fort d'échanges et de "fighting" entre
guillemets, si vous me permettez l'expression, parce qu'on est des
Québécois et qu'on dit: Pour nous, c'est le sport et les
élections qui nous intéressent, et autre chose que je ne dirai
pas à ce moment-ci. Il me semble que c'est une période
limitée dans le temps, alors que la responsabilité d'un ministre
des Communications et d'un gouvernement face au contribuable quant au sujet
dont on discute, est constante et permanente. D'autant plus que vous avez
privilégié et vous avez dit, M. le ministre: Je trouverais plus
solennel un encadrement législatif. Je trouverais qu'une loi donnerait
un caractère plus solennel. Tous des "absolus", entre guillemets, que je
partage. Je dis, dans le fond, qu'est-ce qui manque au ministre pour assumer
ses responsabilités et présenter à son gouvernement,
puisqu'il est ministre, la plus belle loi? Ce sera probablement la plus belle,
compte tenu de votre intérêt sur la question, votre
compétence. Cela fait longtemps que vous traitez de ces questions. Je ne
caricature pas. Oui, on a eu l'occasion de lire les documents que vous avez
envoyés au secrétariat concernant les réflexions que vous
avez faites
là-dessus. Je dis qu'est-ce qui lui manque? Il a tout ce qu'il
faut pour s'acquitter de ses responsabilités ministérielles comme
membre d'un gouvernement et de présenter au Conseil des ministres la
plus belle loi qu'on n'a jamais vue concernant la gestion
générale de la publicité gouvernementale qui, selon lui,
ne devrait jamais avoir le caractère odieux d'"abusage". Je ne sais pas
si le terme existe. On va le mettre entre guillemets, mais d'abuser. Parce
qu'il y a des citoyens qui, par certaines formes de publicité, se
sentent sûrement victimes d'abus. Comme ce n'est pas notre objectif,
toute réflexion a sa place. Je suis de très bonne humeur. Je ne
pense pas qu'il soit du mandat d'une commission des institutions qui a à
se creuser les méninges pour améliorer notre Loi
électorale. C'était sur notre mandat. C'est pour cela qu'on a
entendu des intervenants préoccupés par ces questions alors que
le ministre pourrait aller tester son affaire dans une commission de la culture
avec un mandat d'initiative qu'il pourrait suggérer à son
président ou carrément, comme ministre des Communications, dire
à son gouvernement: Je pense que je suis en mesure de vous
suggérer une législation qui aurait le mérite de
régler nos interrogations par rapport à la publicité tout
court. En plus de cela, cela permettrait de contribuer à aider les gens
qui travaillent sur la réforme électorale à
départager le bon du mauvais en campagne électorale. J'ai
écouté le ministre tantôt. Il a dit: On a mis le sujet
parce qu'on pense qu'il est important d'éviter que des publicités
gouvernementales aient le caractère incisif par rapport à
altérer la liberté de conscience des citoyens de voter pour un
parti ou un autre. Je pense qu'il a raison là-dessus. Je ne suis pas
plus ouvert à baliser la publicité gouvernementale en campagne
électorale. Je ne pense pas que ce soit facilement faisable. Ce qui est
facilement faisable, c'est ce que vous nous avez proposé. Alors,
concrétisez votre proposition dans un beau dépôt de projet
de loi que moi, comme membre de l'Assemblée nationale, je serais des
plus heureux de pouvoir apprécier, sûrement discuter et
probablement voter. Merci.
M. French: Je ne sais pas si c'est une question ou des
commentaires de fermeture de mon témoignage. Je dirai au
député d'Abitibi-Ouest, pour lui raconter la petite histoire, ce
n'est pas très compliqué, je suis à la recherche
d'alliés pour la raison suivante. Au début du mandat, j'aurais
voulu procéder. Il devenait évident qu'il n'y avait pas
d'objection de fond sur le genre de critère que je voulais appliquer,
mais il y avait des interrogations sur la pertinence d'une législation
ou d'un règlement dans le domaine. On a conclu à ce moment de
tenter l'expérience pratique d'utiliser les critères à
l'intérieur des avis préalables, de pouvoir d'avis
préalables ou responsabilité d'avis préalables que
j'ai.
Tant et si bien que tout va bien. Une question se pose. Pourquoi
réparer la machine lorsque la machine fonctionne très bien? J'ai
une réponse à cela mais cette réponse n'est pas
nécessairement partagée par l'ensemble du gouvernement. En tout
cas, je n'ai pas la preuve encore que c'est le cas. La réponse est que
je veux faire en sorte que la machine fonctionne un bon bout de temps encore.
Je pense qu'une loi, pour changer la métaphore ou pour ne pas la
mélanger de façon très barbare, aurait cette
pérennité et cette solidité.
Je ne vous cache pas que tout gouvernement... C'est comme la loi sur
l'accès à l'information dans laquelle je me suis très
impliqué. C'est une espèce d'abnégation de
prérogative d'un gouvernement. Les partisans de cette abnégation
ne se trouvent pas nécessairement dans le gouvernement, mais souvent
dans l'Assemblée législative ou dans le Parlement. (17 h 30)
Donc, je n'ai pas essuyé de refus catégorique et formel
à ce sujet. J'attendais, comme le député d'Abitibi-Ouest
le sait, parce que c'est un parlementaire chevronné avec au-delà
de onze ou douze ans d'expérience politique, il faut sauter sur les
occasions et les exploiter. Quand j'ai vu la recrudescence de discussions sur
la publicité gouvernementale, j'ai dit: Ah, c'est peut-être le
moment voulu pour revoir cette question avec l'éclairage de l'Opposition
et pour faire valoir la nécessité d'un seul régime qui
s'appliquerait en tout temps et qui aurait la solidité voulue.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre.
M. Gratton: M. le Président, on aura au moins
constaté que, s'il y a des réticences quelque part, il semble que
cela ne soit pas du côté de l'Opposition et cela pourra
peut-être nous faciliter la tâche.
M. le Président, je voudrais faire une mise au point. J'ai commis
une erreur tantôt. Lorsque j'ai parlé de l'intérêt
manifesté bien avant l'arrivée du ministre des Communications au
ministère, son intérêt pour la publicité
gouvernementale, je maintiens que c'est vrai, mais j'ai fait allusion à
un projet de loi que le député de Westmount, maintenant ministre
des Communications, avait déposé à l'Assemblée
nationale sur la publicité gouvernementale. J'ai devant moi le projet de
loi 191 qui ne portait pas sur la publicité gouvernementale mais bien
sur les sondages et la publicité gouvernementale. Je note aussi, on me
l'a fait remarquer, qu'au comité des parlementaires on avait
exprimé le désir d'entendre le ministre des Communications sur la
question des sondages et je sais que les sondages ne relèvent pas de
lui, mais j'aimerais brièvement lui offrir l'occasion de nous donner son
opinion, s'il en a une, au sujet de la réglementation des sondages tout
en lui disant que, du côté du comité des parlementaires,
nous semblons nous diriger plutôt vers une liberté assez
complète en
faisant confiance aux médias d'information.
M. French: Je pense que vous ne vous trompez pas. Sur le plan
philosophique, il me paraît extrêmement difficile de discuter du
fait que les sondages sont une raison néfaste pour prendre une
décision arbitraire quant à son choix électoral, mais
qu'une photographie de politicien, c'est une bonne raison de trouver une raison
arbitraire pour faire son choix politique. Il me semble que les sondages sont
dans un environnement d'une information venant de toute part, parfois
très sélective ou très favorable ou défavorable.
Néanmoins, le produit de l'opération des médias avec les
forces et les faiblesses que cela peut comporter, c'est le pire système
au monde sauf tous les autres. Avec ce genre de liberté de presse, nous
avons réussi à bâtir une démocratie plus que
respectable et toute contrainte sur le plan philosophique qui s'applique aux
sondages ou à d'autres contrôles possibles que des gens
bien-pensants aimeraient peut-être établir, évoque chez moi
un sentiment de rejet très net.
Mais sur le plan pratique, vous vous donnez, si jamais vous embarquez
dans l'exercice de défendre la publication des sondages, une
espèce de carcan juridico-politique quasi impossible. Les médias
d'information, en commençant par Ottawa où toute la programmation
nationale en matière de nouvelles, par exemple, est régie par le
CRTC, par la loi fédérale est intouchable par l'Assemblée
nationale du Québec, de toute façon. Alors, il me paraît
non seulement peu souhaitable sur le plan philosophique mais peu faisable sur
le plan pratique de défendre la publication des sondages. Embarquer dans
une autre forme de réglementation me paraît un exercice pas mal
tâtillon pour très peu de résultats, de toute façon.
J'aimerais savoir combien de personnes autour de la table ont lu les
détails sur la façon dont le sondage a été fait
lorsqu'elles voient la petite boîte qui indique que cela a
été fait pour 1023 personnes situées entre 18 et 65 ans
dans les régions suivantes du Québec, entre les dates et les
heures suivantes, et la signification six fois sur neuf qu'un niveau de 2, 5 %
de fiabilité passe ici et là. C'est très
intéressant, c'est peut-être important que ce soit là, mais
je ne pense pas que cela change grand-chose dans la perception de la
population. On a vu des sondages bidon, ils ont donné des
résultats bidon, les gens n'ont pas cru par la suite les médias
qui avaient publié ces sondages bidon et le marché de l'opinion a
fonctionné comme il devrait fonctionner. Je ne sais pas si... En tout
cas, c'est une réaction personnelle, parce que, encore une fois, comme
ministre des Communications, je n'ai pas de mandat particulier à cet
égard. Je n'ai pas fait de sondages... J'ai peut-être fait une
couple de sondages dans le domaine des publications gouvernentales depuis que
je suis au ministère; je n'ai pas fait d'autres sondages, donc ce n'est
pas une activité avec laquelle je suis très familier en tant que
ministre.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre
des Communications.
M. Gendron: Je voudrais, tout simplement en conclusion, rappeler
quand même, très sérieusement, que le gouvernement actuel
devrait avoir, possiblement en tout cas, faire l'évaluation...
plutôt qu'avoir, aller plus loin par rapport à votre suggestion.
Je pense qu'un mandat d'initiative d'une commission parlementaire plus
habilitée à ces questions, probablement celle de la culture,
serait sûrement intéressant, puisque vous avez eu la franchise
d'indiquer, ministre des Communications, que, dans le fond, ce qui vous
intéressait le plus, c'est d'aller profiter de certaines tribunes pour
véhiculer une thèse à laquelle vous croyez. Dans ce
sens-là, ici, effectivement, c'était envisagé de venir
chercher un appui additionnel sur la nécessité d'avoir des
balises, mais pour un gouvernement concernant la publicité. Cela
pourrait très bien préparer un avant-projet de loi, une
réflexion plus poussée en ce qui concerne un mandat d'initiative
d'une commission parlementaire.
Je maintiens l'idée que ce serait intéressant que vous
continuiez à cheminer et à vous trouver d'autres appuis. Vous
avez celui de celui qui vous parle.
M. French: Je vous remercie beaucoup, M. le député
d'Abitibi-Ouest, M. le ministre, M. le Président, mesdames et
messieurs.
M. Gendron: Je suis dans l'Opposition, par exemple, il faut que
vous soyez conscient de cela.
M. French: D'accord.
Dépôt de mémoires
Le Président (M. Marcil): M. le ministre des
Communications du Québec, on vous remercie de vous être
prêté à cet exercice. Avant de procéder aux
remarques finales, je vais accepter le dépôt de trois documents,
trois mémoires: le mémoire 4-M de l'Office des personnes
handicapées du Québec, de même que le mémoire de M.
Bruno-Guy Héroux qui porte le numéro 7-M et le mémoire du
Parti humanisme du Québec portant le numéro 21 -M.
Maintenant, nous sommes à la phase finale de ces travaux. Nous
allons entendre les remarques finales du porte-parole de l'Opposition.
Remarques finales M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je vais être
peut-être plus court que ce qui a été
prescrit par l'horaire, ce sont toujours les membres de la commission
qui décident des ajustements en cours de route, sur l'horaire,
j'entends. Ce que je veux dire, c'est que, premièrement, j'ai
été globalement impressionné par l'ampleur des suggestions
valables, pertinentes qui nous ont été faites par les
différents groupes qu'on a décidé d'inviter et par ceux
qui ont décidé de venir nous voir. Je pense que sur des sujets
pas tellement - on ne peut pas employer toujours l'expression -
controversés, mais sur des sujets que j'appellerais à tout le
moins majeurs, comme le vote des handicapés mentaux, toute la question
des résidents hors Québec, toute la question de la
réglementation générale sur ce qu'on se donne, comme loi,
pour reconnaître un parti politique, après qu'on l'aura reconnu,
quel contrôle l'État doit-il faire de son financement, de ses
règles de financement, des règles de financement concernant les
contributions à des partis politiques, toute la question de faciliter le
vote, par anticipation ou par procuration.
Je pense que les objectifs que nous avions étaient
intéressants et ils le sont toujours. Pour ma part, j'estime que les
travaux, à quelques exceptions près, que nous avons faits depuis
les deux dernières semaines - la semaine dernière et cette
semaine - ce sont des travaux utiles, des travaux nécessaires et c'est
un apport significatif dont le législateur devra se servir. On ne peut
pas entendre des groupes et rapidement passer à autre chose, comme si on
avait donné suite à un exercice. Ce n'est pas un exercice sur des
questions aussi fragiles en démocratie que de constamment retourner aux
dires de groupes, d'instances, de personnes et d'approfondir la justesse ou non
de leurs propos, selon la lunette à travers laquelle on filtre leur
information ou leur apport d'information. Je souhaite que tout autant le
ministre a bénéficié d'une étroite collaboration du
secrétariat pour démarrer cette réflexion, je sais qu'il
l'aura, mais je souhaite que le secrétariat demeure très
préoccupé de s'assurer que sur les grands sujets, constamment le
ministre délégué à la Réforme
électorale a ses retours d'information pertinente qui nous a
été communiquée par les différents groupes. Je
voudrais, cependant, moi, très succinctement, rappeler ce que j'ai dit
lors de l'ouverture et je tiens à le faire au texte et c'est volontaire.
J'avais dit lors de l'ouverture de cette commission que, moi, en tout cas,
comme porte-parole, critique en ces matières et au nom de l'Opposition
officielle: Nous, nous considérons qu'en ces matières tout
consensus, c'est-à-dire fonctionner par consensus en ces matières
est une notion de légitimité, est une notion même de
nécessité. Et la légitémité d'un
gouvernement, cela tient en démocratie, en tout cas, à des
notions d'intégrité de confiance des citoyens mais, d'abord et
avant tout, envers leur processus électoral. Ces citoyens perdent
complètement confiance envers le processus électoral du
gouvernement qu'ils ont élu, je ne suis pas sûr qu'ils ont une
confiance véritable et mesurable de leur gouvernement si on ne l'a plus
envers le processus électoral. Toute notion d'intégrité,
d'équité, de transparence et d'accessibilité sont des
fondements clé du système électoral en démocratie.
Je l'avais rappelé et c'est important de le rappeler. Le ministre
lui-même avait cru bon de nous indiquer que, lui, comme ministre
responsable de la réforme, il se faisait aussi un devoir et une
règle stricte. Il n'a pas dit qu'il procéderait toujours par
consensus. Il a dit que la règle du consensus en ces matières
était une règle qu'il faisait sienne et qu'il était
important... Je ne veux pas revenir longuement sur les événements
malheureux de juin dernier mais c'est sûr que c'est une attitude que j'ai
déplorée et que je déplore encore. Et si l'attitude du
ministre dans la façon de traduire et finaliser les
éléments d'information qu'on a reçus et de pertinence sur
les sujets donnés était, il n'y a pas d'autre mot, aussi
cavalière que cela a été en fin de session en disant:
Écoutez, indépendamment de ce j'ai mis dans une loi mais,
aujourd'hui, je ne marche plus de même, parce que j'ai reçu un
mandat d'un gouvernement et là je fais spécifiquement
référence aux deux lois spéciales... Imaginez, qu'un
Parlement aille deux fois par loi spéciale pour contrer une disposition
introduite par le même personnage. Nous, on avait le droit d'avoir des
doutes et je n'ai pas besoin de vous dire que cela les a amplifiés. Cela
a amplifié les doutes qu'on peut avoir de la variabilité de la
notion de consensus dans son esprit. Il y a, évidemment, pour finir sur
une note heureuse, deux éléments qui me rassurent, c'est qu'on a
appris avec joie que le ministre délégué à la
Réforme électorale était aujourd'hui devenu
grand-père.
Une voix: Ha!
M. Gendron: Alors, premièrement, je l'en félicite,
mais deuxièmement, ce qui est le plus important, c'est que normalement
devenir grand-père, cela confère un degré de sagesse un
peu plus...
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron:... grand, un peu plus important. Alors dans ce
sens-là, je souhaite qu'il ait toute la sagesse requise de retenir les
bons éléments pour nous proposer, effectivement, une
réforme électorale, d'une part, consensuelle et, d'autre part,
qui retient les éléments. Le deuxième
élément avantageux aujourd'hui, c'est que je l'ai vu du bout de
sa chaise, il a été très impressionné par le
pouvoir gris de Mme Leblanc et comme il monte graduellement à constater
sa chevelure vers le pouvoir gris, c'est un autre élément de
sagesse additionnel quand on s'approche du "grey power" que je voudrais que le
ministre conserve et, ce faisant, fasse les bons choix, fasse les meilleurs
choix possible de
suggestions, parce que je serais malheureux - et je pense que les
parlementaires le seraient aussi - de savoir que le travail qui a
été fait par le comité de parlementaires, de même
que tous les mémoires entendus ne nous conduisent pas dans des
délais assez courts, parce qu'on ne doit pas uniquement faire cela pour
les générations qui nous suivront après l'an 2000, il faut
faire cela, une réforme électorale, quand on prétend,
comme législateur, que le moment est venu d'adapter notre
législation et je pense que le moment est venu d'adapter notre Loi
électorale à des éléments sur lesquels la
population du Québec souhaite qu'il y ait des modifications.
J'espère que sur ces éléments - le ministre sait
très bien lesquels - il y a lieu de retenir un certain nombre de
suggestions qui nous ont été . faites, comme il y a eu lieu, en
ce qui me concerne, d'écarter certaines suggestions qui nous ont
été faites et d'avoir l'éclairage suffisant pour les
justifier. Diriger, gouverner, c'est prendre des décisions et c'est
également avoir cette sagesse d'analyse qui permet de ne retenir que les
meilleurs. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Je vais maintenant passer la parole
à notre ministre délégué à la Réforme
électorale, le député de Gatineau, M. Gratton,
grand-père, comme vous l'avez mentionné, d'une grosse fille qu'on
va sûrement appeler, d'après ce qu'on nous a dit, d'un beau
prénom, Caroline. Cela nous aide à terminer cette commission
parlementaire sur une note positive. M. le ministre, nous attendons vos
commentaires et vos remarques finales.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, c'est évident, je
pense que cette commission a constitué une première à
plusieurs égards, outre les considérations personnelles sur
lesquelles je reviendrai à la fin.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Gratton: Mais, je pense que, effectivement, sauf erreur, c'est
la première fois qu'une commission parlementaire entend des personnes,
des organismes, de façon aussi formelle sur la Loi électorale. Je
me souviens que j'avais moi-même participé à des
consultations semblables sur la loi sur les consultations populaires. Mais
c'est probablement la première fois qu'on tient une commission
parlementaire pour entendre des personnes intéressées par la Loi
électorale. C'est sûrement la première fois que les
directeurs généraux d'élection, autre que celui du
Québec qui, comme je le soulignais ce matin, est un participant assidu
à nos travaux, ceux de l'Ontario et du gouvernement
fédéral, viennent nous rencontrer. Je pense que, effectivement,
pour ma part, cet exercice a été des plus
bénéfiques, non seulement pour nous permettre de tâter le
pouls de personnes qui ne sont pas directement représentées
à l'Assemblée nationale mais aussi pour nous rappeler que,
justement, notre rôle en tant que représentants de nos
circonscriptions respectives et membres de nos partis respectifs ne devrons
jamais perdre de vue les intérêts, les aspirations et les besoins
de personnes qui, à tort ou à raison, ne se sentent
peut-être pas parfaitement représentées à
l'Assemblée nationale. Notamment, sur un point très
précis, on a parlé de ce que certains appellent les partis
sérieux, d'autres, les tiers partis, on a parlé de petits partis,
mais, chose certaine, on a pu constater par la qualité de certains
mémoires qui ont été présentés et par le
manque de qualité de quelques autres... Et je pense qu'il y en avait
seulement deux qu'on pourrait qualifier de moins valables. Mais même ces
deux-là nous auront permis de faire la distinction entre ce qui est un
parti, entre guillemets, sérieux et ce qui ne l'est pas. Et même
au-delà des appréciations personnelles qu'on peut faire, il faut
reconnaître que notre jugement à l'égard d'un parti qu'on
ne considère pas sérieux, à partir du moment où il
rencontre les critères fixés dans la loi, doit être
considéré comme un parti représentant un courant d'opinion
quelconque et, à ce titre-là, doit avoir les mêmes
avantages ou, tout au moins, les chances égales aux autres.
Quant à moi, j'aurai sûrement une vision et une approche
fort différente à compter de maintenant dans nos discussions
à venir sur certains sujets grâce à l'éclairage et
aux points de vue qui ont été exprimés ici par des gens
qui, dans certains cas, l'ont fait de façon tout à fait
extraordinaire et qui, dans d'autres, n'étaient pas aussi positive, si
on veut, mais qui ont quand même servi à nous faire
réaliser qu'il y a énormément de considérations
à faire autres que celles auxquelles nous sommes habitués.
Je reviens sur la question du consensus. Il me semble qu'il faut faire
une distinction entre le consensus nécessaire en ce qui a trait à
tout amendement à la Loi électorale, un consensus le plus large
possible et le droit de veto d'une formation politique à une proposition
donnée. Et si on pense à l'exemple du recensement annuel, je note
que, hormis le Parti québécois, personne parmi les 26 ou 27
organismes qui sont venus nous rencontrés n'y a fait allusion. Et je ne
reprendrai pas l'argumentation. On va sûrement la reprendre lors de la
deuxième étape de nos travaux. Mais il me semble qu'il faudra
toujours chercher à trouver des consensus qui servent les
intérêts, qui servent les besoins et qui servent la protection des
droits des électeurs d'abord, avant de tâcher de faire consensus
sur la façon de bien servir un parti politique ou l'appareil
administratif du Directeur général des élections.
L'électeur doit primer, d'abord. Et je ne voudrais surtout pas qu'on
interprète des choses que j'ai pu dire et je continue à souhaiter
que nous
fassions des amendements qui répondront au plus large consensus
possible. Mais il ne faudra surtout pas penser que cela équivaudra
à devoir nécessairement obtenir l'unanimité ou à
conférer un droit de veto quelconque à qui que ce soit lorsque
les intérêts bien compris par le plus grand nombre possible
indiqueront qu'on doit procéder dans un sens ou dans l'autre.
Je suis sûr que le député d'Abitibi-Ouest que je
remercie d'ailleurs très sincèrement de sa façon de
faire... On a, en privé, au comité des parlementaires, ici en
public à la commission parlementaire, et évidemment de par nos
rôles de leader parlementaire respectif, des discussions et des
échanges constants. Je dois dire que ces échanges sont toujours
empreints de respect mutuel et de fair-play qui me convainquent que,
finalement, ce qu'on adoptera comme projet de loi et comme amendements à
la Loi électorale sera l'objet de consensus les plus larges possible et,
pourquoi pas, de l'unanimité si possible?
Je voudrais dire évidemment au leader de l'Opposition et
porte-parole en la matière pour son parti que, lui qui n'a ni cheveux
gris ni petits-enfants que je sache, il aurait peut-être aussi avantage
à jouir et à profiter de la sagesse que confèrent certains
de ces attributs. Évidemment, il est épaulé par d'autres.
Je note, par exemple, que dans mon cas la députée de Groulx est
grand-mère de onze petits-enfants. Donc, on est bien
épaulé de ce côté-là nous aussi.
Je dirai simplement au député d'Abitibi-Ouest qu'à
défaut de lui souhaiter de grisonner, je lui souhaiterai la joie de
devenir grand-père le plus tôt possible.
Merci, M. le Président, de votre collaboration et de la
façon remarquable avec laquelle vous avez présidé nos
travaux. Merci à l'ensemble des membres, tant de l'Opposition que du
parti ministériel et, bien entendu, le député de Gouin,
pour leur collaboration. Souhaitons qu'à compter des dates que vous
allez indiquer à l'instant même, M. le Président, on pourra
reprendre le travail et le mener à terme avant la fin de 1988.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre.
Naturellement, sans vouloir répéter tout ce qui a
été dit lors de ces remarques finales, je tiens à
remercier tous les députés de cette commission, autant du parti
ministériel que du parti de l'Opposition ainsi que le
député de Gouin pour leur participation, leur présence,
leur assiduité et leur attention également qu'ils ont
portée à l'écoute des exposés et de leurs
interventions également. La qualité des intervenants nous a
naturellement aidés à faire en sorte que notre travail fut fait
avec plus de joie et plus facilement également.
Je remercie aussi les membres du secrétariat de la commission des
institutions pour leur magnifique travail. La préparation de tous ces
documents nous a facilité ce travail de deux semaines.
Nous allons être appelés à siéger
probablement - ce sera confirmé dans les jours qui viendront - les 21,
22 et 23 septembre.
Une voix: 20, 21, 22.
Le Président (M. Marcil): C'est-à-dire les 20, 21
et 22 septembre pour continuer ce travail sur la réforme de la Loi
électorale.
D'ici là, bon voyage de retour. On souhaite toujours quand
même à notre grand-père un week-end extraordinaire en
compagnie de sa petite-fille, Caroline, puisqu'on nous a dit que ce serait le
prénom qu'on lui donnerait. C'est un très beau prénom.
Nous espérons avoir la chance de vivre également cette
expérience. Nous sommes encore jeunes, M. le député
d'Abitibi-Ouest, mais, un jour, on y arrivera.
Nous ajournons les travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 56)