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(Seize heures une minute)
Le Président (M. Kehoe): Je déclare la commission
ouverte. Je répète le mandat de la commission qui est de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 33, Loi modifiant le Code de procédure civile concernant le
recouvrement de pensions alimentaires, et du projet de loi 72, Loi modifiant la
Loi sur les jurés.
Je comprends qu'il y a une motion faite par le ministre d'inverser
l'ordre de procéder à l'étude des deux lois; je comprends
aussi qu'il y a consentement des deux côtés? M. le
député de Taillon, est-ce que vous suivez les...
M. Filion: Oui, oui, je vous écoute.
Le Président (M. Kehoe): Je demande à la
secrétaire d'annoncer les remplacements.
La Secrétaire: II n'y a aucun remplacement, M. le
Président.
Le Président (M. Kehoe): Y a-t-il des motions
préliminaires?
Une voix: Non, monsieur.
Le Président (M. Kehoe): Y a-t-il des remarques
préliminaires?
M. Filion: J'aimerais qu'on fasse une motion pour qu'on convoque
ici tous les jurés pour les entendre sur le projet de loi, mais on ne
fera pas ça.
Projet de loi 72 Tableau des jurés
Le Président (M. Kehoe): Est-ce que le projet de loi est
adopté? J'appelle l'article numéro 1.
M. Filion: M. le Président, au niveau préliminaire,
j'ai posé une question tantôt au ministre. Le droit au
procès par jury fait partie de la Charte canadienne des droits et
libertés, c'est l'article 11f. Il prévoit, comme je l'ai
mentionné, une exception relative aux infractions relevant de la justice
militaire d'une part, et deuxièmement, relevant aux crimes dont la peine
est inférieure à cinq ans.
Je posais la question un peu par curiosité: Est-ce que ce droit
au procès par jury n'est pas inclus dans la charte
québécoise des droits? Est-ce que c'est parce que la
procédure criminelle relève du gouvernement
fédéral? C'est une question de curiosité.
M. Rémillard: Pourquoi on ne le retrouve pas dans...
M. Filion: Oui, dans la charte québécoise des
droits.
M. Rémillard: Voici, c'est qu'on sait, en premier lieu,
que les procès par jury sont abolis au civil depuis 1976 ou 1977,
quelque chose comme ça.
M. Filion: Je ne parle pas du civil.
M. Rémillard: Par conséquent, le droit criminel est
de compétence fédérale.
M. Filion: Mais notre charte...
M. Rémillard: Alors notre charte ne s'applique que dans
les domaines de compétence de la province.
M. Filion: Oui, c'est ça que j'ai souligné.
M. Rémillard: Donc, par le fait même, la charte
canadienne, elle, s'applique à l'ensemble des juridictions,
fédérale ou provinciales. Alors dans la charte canadienne, vous
avez, à l'article 11, cette garantie d'être entendu par un jury,
tandis que dans la charte québécoise, vous ne l'avez pas, parce
que le droit criminel se réfère strictement à la
compétence fédérale.
M. Filion: Mais je regarde aller - je dis ça en passant,
tout simplement - votre collègue à l'Environnement, il n'est pas
exclu que dans nos lois, et vous me corrigeriez si je me trompe, mais est-ce
qu'il est exclu que l'Assemblée nationale du Québec puisse voter
des lois qui contiennent des peines supérieures à deux ans de
prison?
M. Rémillard: A ce moment-là, il faudrait voir.
Cela pourrait être dans son "pit and substance", déclaré
comme un crime, et l'Assemblée nationale n'a pas le droit de
créer un crime. Un crime relève de la juridiction du gouvernement
fédéral; seul le gouvernement fédéral peut faire
des crimes. Nous, ici, au Québec, nous sommes...
M. Filion: On crée des infractions. M.
Rémillard: On crée des infractions.
M. Filion: Oui, mais...
M. Rémillard: Alors il y a une marge de manoeuvre qui est
quand même assez mince. La jurisprudence n'est quand même pas
très claire sur ce cas-là, mais on doit rechercher l'intention du
législateur. Et si l'intention du législateur
était de créer un crime, de faire un nouveau crime, du
fait, par exemple... Vous citez le cas en matière d'environnement. Si,
en matière d'environnement, on en arrivait à dire, de par les
dispositions de la loi et par l'intention du législateur qui se
dégagerait de l'ensemble de la loi, on en arriverait à la
conclusion qu'il s'agit d'un crime; et par le fait même, ça
pourrait être inconstitutionnel, parce que de juridiction
fédérale, et non pas de la juridiction de la province.
M. Filion: Je reviens à ma question du début, et
encore une fois, uniquement pour satisfaire la compréhension que j'ai de
l'institution du procès par jury. Est-ce que l'Assemblée
nationale peut créer des infractions qui condamnent à plus de
deux ans de prison?
M. Rémillard: II s'agirait de le situer dans son contexte,
et de voir si c'est un crime ou pas.
M. Filion: Parce que vous voyez...
M. Rémillard: C'est l'ensemble qui pourrait
déterminer. Il n'y a pas simplement... Il y a deux ans, d'abord, de
peine, oui, qui peuvent être pris en considération, mais il y a
beaucoup d'autres aspects qui sont pris en considération, dans
l'ensemble de la loi. C'est ce qu'on recherche dans la règle, la fameuse
règle du "pit and substance", l'intention du législateur.
M. Filion: Comprenez-vous le sens de ma question?
M. Rémillard: Oui, oui.
M. Filion: C'est que si nous en arrivions, au Québec,
à créer des infractions qui seraient de la nature de celles qui,
dans la Charte canadienne des droits et libertés, garantissent un
procès devant ses pairs, à ce moment-là, il y aurait
probablement lieu, pour nous, uniquement par souci d'avoir une charte aussi
complète que possible, d'inclure, dans la charte
québécoise des droits, une disposition garantissant le même
procès par jury pour des infractions punissables par un terme de plus de
cinq ans.
M. Rémillard: Dans le contexte du partage des
compétences législatives qui existent présentement, le
droit criminel au fédéral, le droit pénal de la province,
je ne crois pas qu'on puisse en arriver à une situation pareille.
M. Filion: Droit pénal, c'est en bas de...
M. Rémillard: En bas de deux ans. C'est une des
règles avec aussi d'autres règles où on recherche vraiment
l'Intention du législateur.
M. Filion: Mais, vous comprenez que ça m'est venu en
comparant les deux chartes et en voyant que l'une garantissait quelque chose
que l'autre ne garantissait pas. Alors, ça va sur la question
préliminaire.
Le Président (M. Marcil): Donc, je vais appeler l'article
1.
M. Filion: Oui, il a déjà été
appelé, je pense, mais vous pouvez le rappeler. L'article 1 modifie
l'article 18. Je ne sais pas si le ministre a des commentaires.
M. Rémillard: M. le Président, je veux simplement
dire ce que j'ai mentionné tout à l'heure. C'est vraiment pour
permettre qu'il y ait un seul tirage de cartes par année judiciaire au
lieu d'en faire un avant chaque session. Cela va simplifier les choses. Cela va
aussi permettre au shérif de mieux organiser l'ensemble de son travail
pour permettre à des gens de faire partie des jurys.
M. Filion: Combien de cartes va-t-on tirer pour redresser un
tableau?
M. Rémillard: Combien? En moyenne, Je vais voir cela,
peut-être... On a mentionné quelques chiffres la dernière
fois. On a fait vérifier. Cela peut être 150 par tableau. C'est
une possibilité. 150 en moyenne par procès. Pour avoir 150, il
faut en assigner 200.
M. Filion: 200, pour un tableau.
M. Rémillard: Pour en arriver à un tableau à
150.
M. Filion: Combien y a-t-il de tableaux à peu près
au Québec? Peut-être que j'ai été distrait au moment
où vous l'aviez...
M. Rémillard: Cela dépend des districts
judiciaires.
M. Filion: Mais à Montréal ou au Québec?
Une voix: À Montréal, par exemple, il y a cinq
termes.
M. Filion: Un instant, s'il vous plaît.
Le Président (M. Marcil): Est-ce que vous voulez vous
identifier, s'il vous plaît? Quand vous vous adressez, pourriez-vous vous
identifier?
M. Breton (Conrad): Conrad Breton. À Montréal, par
exemple, il y a cinq termes d'assises par année. À chacun de ces
termes, il y a sept divisions qui procèdent. Évidemment, combien
de tableaux peut-on confectionner, c'est sept fois cinq, c'est 35 à
Montréal, pour l'année.
M. Filion: 35 tableaux. M. Breton: Oui.
M. Filion: Donc, uniquement pour le district de Montréal,
je multiplierais 35 par 200, ce qui me donnerait 7000.
M. Breton: 7000, oui.
M. Filion: II y a 7000 personnes grosso modo qui reçoivent
une assignation.
M. Breton: Ce qui veut dire également que par
année, il y a 35 000 cartes qui sont tirées.
M. Filion: Est-ce que c'est l'annuaire téléphonique
qui sert de base?
M. Rémillard: Non.
M. Filion: Non, ah!
M. Rémillard: Les listes électorales.
M. Filion: Les listes électorales.
M. Rémillard: C'est par les listes électorales. On
va tirer un numéro. Il y a un ensemble de numéros. Ils tirent un
numéro. Cela peut être le numéro 30. Le numéro 30 se
retrouve dans tous les "polls".
M. Filion: Mon doux, d'où l'utilité d'avoir des
listes électorales à jour.
M. Rémillard: Exactement.
M. Filion: Vous savez que votre gouvernement, non seulement n'a
pas procédé à des corrections de liste électorale,
mais contrairement à ce qui avait été d'abord
initié, même s'il y a des réformes de la carte
électorale, on ne met pas la carte électorale à jour, ce
qui est doublement déplorable. J'ai l'impression qu'à ce
moment-là on tire des numéros qui, étant donné les
déménagements, correspondent à des mauvais... Si ce n'est
pas la bonne personne à la bonne adresse, évidemment, personne ne
se présente? Est-ce exact?
M. Rémillard: Non.
M. Filion: Ou est-ce qu'on fait le changement?
M. Rémillard: Si on peut la retrouver, peut-être,
mais, en fait, ce qu'on cherche, c'est la personne avec l'adresse qui
apparaît sur la liste électorale.
M. Filion: Cela m'a toujours un peu fasciné, ces tableaux
de jurés. Est-ce que le tirage des jurés se fait en public?
M. Rémillard: Pardon?
M. Filion: Est-ce que ça se fait en public?
M. Rémillard: Non. Le shérif tire un numéro.
Vous savez, ce n'est quand même pas la loto, mais il reste que le tirage
se fait et, comme ça se fait pour l'ensemble des polls à un
même numéro, ça ne pose pas particulièrement de
difficultés.
Le Président (M. Marcil): Ce n'est pas la Lotto 6/49,
c'est la Mini-Loto.
M. Filion: Profitant de la présence de vos fonctionnaires,
M. le ministre, on établit à 7000 grosso modo, à
Montréal, le nombre de personnes assignées. Est-ce qu'on a un
chiffre approximatif pour l'ensemble du Québec?
Le Président (M. Marcil): M. le ministre.
M. Filion: C'est probablement le triple ou le double, si on prend
la population, etc.
M. Rémillard: On fait des calculs, M. le
Président.
Le nombre est difficile à déterminer parce que ça
dépend du nombre de procès dans chaque district judiciaire. Mais
ça fait un nombre considérable.
M. Filion: Comment se fait le partage? Il y a des tableaux de
jurés français et des tableaux de jurés anglais. Comment
procède-t-on à ce partage étant donné que c'est
fait par une liste électorale, donc sans distinction de langue?
M. Rémillard: II y a deux boîtes: une boîte
pour les jurés francophones et une boîte pour les jurés
anglophones. Quant au procès, c'est déterminé si le
procès sera en français ou en anglais. Les jurés sont donc
de langue française ou de langue anglaise et, en fonction de ça,
on fera la composition du jury. Alors, on se réfère à
l'article 20 de la Loi sur les jurés. Il y a l'article 19 aussi qui est
assez explicite, où on voit que...
M. Filion: Oui, oui, d'accord.
M. Rémillard:... on peut procéder, selon la
décision d'avoir un procès en français ou en anglais, avec
un jury français ou anglais.
M. Filion: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Marcil): L'article 1 est adopté.
M. le ministre, j'aurais une question. S'il y avait à un moment
donné, au Québec, un procès dans une langue autre que
l'anglais ou le français, je prends l'exemple d'un Italien ou d'un
Espagnol qui aurait immigré au Québec depuis quelques
années, est-ce que ce serait, encore là,
uniquement en français ou en anglais?
M. Rémillard: Oui. Les deux langues officielles au Canada
sont le français et l'anglais. Si l'accusé parle une autre langue
que le français ou l'anglais, il y a une traduction, un service
d'interprète à sa disposition.
Le Président (M. Marcil): D'accord. Cela va? Merci.
L'article 1 est adopté. J'appelle l'article 2. M. le
député de Taillon.
M. Filion: Est-ce que le ministre a des commentaires sur
l'article 2?
M. Rémillard: Non, je n'ai pas de commentaires, M. le
Président.
M. Filion: C'est de la concordance ou à peu
près.
Le Président (M. Marcil): Adopté? M. Filion:
Adopté.
Le Président (M. Marcil): L'article 2 est
adopté.
J'appelle maintenant l'article 3.
M. le ministre, est-ce qu'il y a des commentaires sur l'article 3?
M. Rémillard: C'est un article pour protéger la
confidentialité du tableau des jurés jusqu'au jour du
procès. C'est le but de l'article.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 4.
Assignation des jurés
M. Rémillard: M. le Président, l'article 4 est
important dans le sens qu'il va permettre de n'assigner les jurés que
pour le jour du procès. On va éviter d'assigner les jurés
et de les renvoyer chez eux parce qu'ils n'ont pas à officier, à
ce moment-là, dans un procès. Là, on fait en sorte que le
shérif va les assigner pour le jour du procès où il vont
servir comme jurés.
Le Président (M. Marcil): M. le député de
Taillon.
M. Filion: Mais au moment où on se parie, les jurés
ne sont pas appelés à l'ouverture du terme, du moins, je n'ai
jamais vu ça. (16 h 15)
M. Rémillard: Je vais demander à M. Pleau de
répondre à votre question bien technique.
Le Président (M. Marcil): Me Yves Pleau.
M. Pleau (Yves): Oui, Yves Pleau. C'est qu'actuellement, pour
contourner la difficulté, ce qui se fait en pratique, c'est qu'on
assigne les jurés au moins 30 jours, mais pour une période
postérieure au jour de l'ouverture de la session. Alors, à ce
moment-là, tout ce que fait la loi c'est de venir...
M. Filion: C'est ça.
M. Pleau:... finalement, corriger une situation et valider une
situation qui se fait en pratique.
M. Filion: Je comprends. Parce que je n'ai jamais vu de
jurés à l'ouverture du terme. Il y a assez d'avocats et
d'accusés là, s'il fallait mettre les jurés, ça ne
finirait plus.
Est-ce que, M. le ministre, un peu dans le même esprit...
Évidemment, le juré, une fois qu'il est choisi pour siéger
comme juré lors d'un procès... Le déroulement de
l'ensemble du procès appartient au juge. Cela est clair. Mais est-ce
qu'avant d'être choisi, il existe... Je pense qu'il existe une petite
brochure du ministère de la Justice qui explique ce qu'est un
juré? En deux mots, est-ce qu'il y a de l'information qui est transmise
au juré, soit par écrit avec son assignation, soit autrement?
M. Rémillard: Oui, il y a une documentation pour leur
expliquer quel est leur rôle. Vous savez aussi que, bien sûr, au
cours du procès, le juge peut leur expliquer ce qu'ils peuvent faire et
ce qu'ils ne peuvent pas faire. Mais, comme préparation, il y a une
publication. Il y a aussi le shérif qui est là pour donner des
indications et leur donner des renseignements sur leur rôle.
M. Filion: Est-ce que la documentation à laquelle vous
faites allusion mentionne la possibilité d'être exempté, le
mécanisme à suivre pour être exempté, oui?
M. Rémillard: Oui, il y a un titre qui dit: "Que faut-il
faire pour être exempté d'agir comme juré?" et un autre
titre: "Quelles sont les personnes qui peuvent demander d'être
exemptées d'agir comme juré?"
M. Filion: D'accord.
Le Président (M. Marcil): Cela va?
M. Filion: Je le souligne en passant et sous réserve de
prendre connaissance de ça, un des problèmes que j'ai
rencontrés pratiquement, est que les jurés reçoivent
ça mais ne savent pas trop dans quoi ils s'embarquent. Mais je fais bien
la distinction, et je la refais, une fois que le procès est
commencé, c'est le juge qui s'occupe de voir à... Le juré
fait partie, en deux mots, des préoccupations du juge. Mais, souvent,
le
problème des jurés est qu'ils ne savent pas dans quoi ils
s'embarquent. Alors peut-être seriez-vous assez aimable pour faire
circuler la documentation que vous avez avec vous, afin que je puisse en
prendre connaissance rapidement et savoir si c'est vraiment complet?
Alors...
Le Président (M. Marcil): Est-ce que voulez que j'accepte
ce...
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil):... dépliant comme
dépôt?
M. Filion: Oui, ça va. Acceptez-le comme
dépôt.
Le Président (M. Marcil): C'est un document public.
M. Filion: Bien oui.
Le Président (M. Marcil): Cela veut dire qu'il a
déjà été publié.
M. Filion: Cela ne sera pas long. Je vais juste jeter un petit
coup d'oeil là-dessus. Je remarque qu'une des craintes des jurés
c'est la séquestration.
M. Rémillard: Oui, bien sûr.
M. Filion: Parce qu'ils trouvent ça très
agréable de vivre une expérience comme ça, mais lorsque le
procès... Pour différentes raisons, il appartient au juge de
décider s'il y a séquestration ou pas. Mais je dois vous
dire...
M. Rémillard: Cela arrive souvent.
M. Filion: Cela arrive de plus en plus souvent parce qu'on veut
protéger le jury des influences extérieures. L'autre chose qui
doit les rebuter - on a discuté de ça tantôt - c'est quand
ils voient quelles sont les indemnités versées au juré.
Là, ils se rendent compte qu'ils ont 25 $ par jour alors que... Par
exemple, si un ébéniste qui est à son compte en gagne 500
$ ou 1000 $ par semaine, là, il trouve ça un peu moins jojo
d'agir comme juré. Alors je vois avec votre réplique de
tantôt que vous avez pris bonne note de cet
élément-là qu'il convient de réviser. Alors
ça va. Adopté.
Le Président (M. Marcil): Article 4, adopté. M.
Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): J'appelle maintenant l'article
5.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, ça va?
Adopté?
M. Filion: C'est nouveau en somme. C'est nouveau ça, par
exemple. C'est le droit nouveau.
M. Rémillard: C'est la possibilité pour un
juré d'aller à une session et de dire: Écoutez, je ne peux
pas à cette session-ci parce que je suis en examen ou je m'en vais
à la pêche, je suis un pêcheur, enfin, tous ces exemples
qu'on peut donner de gens qui, par leur situation professionnelle ou
personnelle, sont empêchés d'agir comme jurés à une
session, mais qui disent: J'aimerais bien l'être à la session
suivante. Alors, ils peuvent l'être à la session suivante. Pendant
un an, ils demeurent dans le circuit, si vous voulez, pour être
appelés comme jurés.
M. Filion: C'est une bonne idée. Souvent, le juré
qui veut s'y dérober dit: Je ne peux pas parce que j'ai cela. Alors, on
va lui dire: D'accord, mais revenez la prochaine fois. Je pense que c'est une
excellente initiative.
Le Président (M. Marcil): Cela va? M. Filion: Cela
va.
Le Président (M. Marcil): J'appelle l'article 6.
M. Rémillard: M. le Président, d'une part, cet
article permettra à un juré de demander d'être
renvoyé à une session ultérieure lorsque sa situation rend
difficile l'accomplissement de son devoir pendant la session et, d'autre part,
lorsqu'il est assigné, de ne l'obliger à signifier, par la poste,
sa demande d'exemption ou de renvoi que s'il a été assigné
au moins 30 jours avant la date du procès. C'est le fond de ce dont on
discutait tout à l'heure, cette possibilité, pour un juré,
de demander de faire partie d'un jury, mais à une session
ultérieure.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 7.
M. Filion: Adopté
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 8. M. le ministre, est-ce que vous avez des commentaires à
faire sur cet article?
M. Rémillard: M. le Président, c'est un article qui
édicte les règles relatives au juré dont la demande de
renvoi à une session ultérieure a été
acceptée. Il prévoit donc que le nom de ce juré sera de
nouveau au tableau des jurés. Cet article traite aussi de la
possibilité de faire une nouvelle demande de renvoi et de la
libération du juré. Évidemment, après un an, il
est
libéré.
Le Président (M. Marcil): Cela va? M. Filion:
Adopté
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 9.
M. Filion: Concordance. Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 10.
M. Filion: Je suppose que la date fixée par le
gouvernement sera probablement assez...
M. Rémillard: Rapidement.
M. Filion:... rapprochée.
M. Rémillard: Assez rapprochée.
Le Président (M. Marcil): Cela va?
M. Filion: Pour la session de janvier, peut-être?
M. Rémillard: On va la proclamer pour qu'elle puisse
être en vigueur pour la prochaine composition des...
M. Filion: C'est janvier.
M. Rémillard: L'année judiciaire se termine au mois
de juin. Ce sera probablement en juin prochain, afin que le nouveau
régime s'applique pour la nouvelle année judiciaire.
Le Président (M. Marcil): Cela va? Adopté? M.
Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Est-ce que le titre du projet de
loi 72 est adopté?
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Est-ce que le
projet de loi est adopté?
M. Filion: Adopté, évidemment, M. le
Président. Maintenant, je pense que sur les indemnités, le
ministre et moi, nous nous sommes bien compris. Je ne reviendrai pas à
la charge dans un mois là-dessus. Mais il me semble que cela ne devrait
pas être tellement long de regarder cela. Est-ce que le ministre peut me
donner une indication du moment où je devrais - ce que je ne fais pas
souvent - aller fouiller dans la Gazette officielle pour voir si le
ministre de la Justice vient de modifier ou a l'intention de modifier les
allocations et les indemnités au cours de la première partie de
l'an prochain?
M. Rémillard: Écoutez...
M. Filion: Cela ne devrait pas être une opération
tellement complexe.
M. Rémillard: Oui, le plus tôt possible. J'ai
demandé qu'on revoie ces indemnités. Mais j'ai aussi
demandé qu'on fasse des comparaisons avec les autres provinces et je me
suis aperçu qu'on était l'une des provinces qui payaient le plus,
qui avaient les plus fortes indemnités.
M. Filion: Oui?
M. Rémillard: J'ai été un peu surpris
d'avoir ces résultats. J'ai demandé qu'on revoie cela en fonction
de barèmes qui seraient les nôtres et qui nous amèneraient
à hausser ces tarifs qui n'ont pas été touchés
depuis 1979.
M. Filion: Bien oui. Vous savez, les comparaisons avec l'Ontario,
parfois c'est bon et parfois c'est moins bon. Sur bien des plans, on est
distincts. On ne peut pas s'adresser à ministre plus au fait que le
Québec forme une société distincte.
M. Rémillard: Voilà, M. le
député.
M. Filion: En ce sens, j'espère qu'il saura
résister aux analystes du Conseil du trésor qui tenteront de lui
démontrer, avec les éternels tableaux comparatifs qu'ils
utilisent quand cela fait leur affaire, mais qu'ils n'utilisent pas quand cela
ne fait pas leur affaire, qu'au Québec, on croit à cela, les
jurés. Deuxièmement, je crois véritablement que... J'ai
des procès à l'esprit, je ne les citerai pas, mais ce sont des
procès retentissants, il n'y a pas tellement longtemps, avec des
policiers, où le verdict peut parfois faire l'objet de discussions.
Mais, en fin de compte, le meilleur argument, c'est de dire: Écoutez
voilà le verdict des pairs, alors qu'est-ce que vous voulez avoir de
mieux que cela? On n'a pas encore trouvé une façon de faire
descendre le bon Dieu pour nous dire qui est coupable ou qui n'est pas
coupable.
Donc, on demande aux être humains de décider, alors...
Bref, une belle institution, mais donnons-nous les moyens pratiques de
démontrer à ces milliers de citoyens qui sont appelés,
chaque année, que nous, comme parlementaires, et vous, comme ministre de
la Justice, y croyons. Voilà.
Projet de loi 33
Le Président (M. Marcil): Cela va? Et maintenant, je vais
appeler le projet de loi 33, Loi modifiant le Code de procédure civile
concernant le recouvrement de pensions alimentaires. Est-ce qu'il y aurait des
remarques préliminaires de part et d'autre? M. le ministre?
Remarques préliminaires
M. Rémillard: Oui, M. le Président. I! s'agit d'un
projet de loi qui veut pallier à certaines lacunes concernant le
paiement des pensions alimentaires. Très souvent, ce sont des femmes qui
sont les créancières de ces pensions alimentaires et qui ont de
la difficulté à percevoir leur pension alimentaire.
Alors, nous créons un mécanisme, par ce projet de loi, qui
permettra de faciliter la perception de ces créances par les femmes, la
perception des pensions alimentaires qui leur sont dues.
Le Président (M. Marcil): Cela va? M. le
député de Taillon?
M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. D'abord, je
le souligne encore une fois, c'est avec...
M. Rémillard: Excusez-moi, M. le député.
Vous me permettrez de déposer un amendement, c'est un tout petit
amendement technique et je crois que je devrais le déposer
immédiatement, si vous me le permettez.
Le Président (M. Marcil): Mais l'amendement est en vertu
de quel article?
M. Rémillard: C'est en fonction de l'article 3.
Le Président (M. Marcil): On l'acceptera au moment
où on passera article par article.
M. Rémillard: Au moment de l'article 3? Ah! M. Claude
Filion
M. Filion: Non, je pense que le ministre est en train de prendre
une bonne habitude, celle de saisir l'Opposition de ses amendements au
début. Comme cela, quand on va arriver à l'article, cela va aller
plus vite. Non pas que ce projet de loi soit... Mais si jamais nous
retravaillons ensemble sur des projets de loi plus volumineux, c'est un type de
pratique tout à fait intelligent pour nous parce qu'à ce
moment-là, on a le temps de...
Le Président (M. Marcil): Donc, nous avons un ministre
intelligent. M. le ministre, c'est un compliment qu'il vous fait,
là.
M. Filion: Sur... Certainement.
M. Rémillard: Pourvu que cela dure!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Comment est-ce qu'ils vont écrire
cela dans le Journal des débats?
Le Président (M. Marcil): Vous n'avez pas à savoir
comment cela va s'écrire, c'est déjà écrit.
M. Filion: Mais vous savez, la politique, c'est fait de
perceptions. Deux remarques préliminaires: premièrement, je suis
heureux, M. le Président, de constater que le ministre ne cède
pas à la faute grammaticale de sa collègue. Je pense qu'elle est
maintenant convaincue, avec nos interventions de la semaine dernière,
que, lorsqu'elle écrivait qu'avec le projet de loi 33 on avait une
perception automatique des pensions alimentaires, cela n'avait pas de sens de
dire cela au monde.
Le ministère de la Justice n'a jamais employé cette
expression. La ministre déléguée à la Condition
féminine persiste... et je regarde les regards de mes collègues
en face. Si, à la prochaine campagne électorale, M. le
Président, je vois un député, au Québec, qui dit:
Vous savez, on a amené la perception automatique des pensions
alimentaires, parce que les recherchistes du Parti libéral vont avoir
écrit cela comme une des réalisations du Parti libérai
pendant son mandat, je vais trouver cela "hirsute" et inacceptable.
Parce que ce n'est pas vrai. Le projet de loi 33 ne fait pas une
perception automatique des pensions alimentaires. Il facilite le travail du
percepteur des pensions alimentaires mais il ne l'automatise pas. Et surtout,
il n'automatise pas la collecte de la pension alimentaire par la
créancière de l'obligation alimentaire. Alors, première
remarque.
Deuxième remarque. Sans reprendre tout le discours que j'ai
prononcé en deuxième lecture, sur l'aspect fiscal de la pension
alimentaire, j'ai signalé au ministre, ainsi qu'à la ministre
déléguée à la Condition féminine,
l'importance de sensibiliser leurs collègues, au ministère des
Finances, sur l'impact du régime fiscal en matière de pension
alimentaire. (16 h 30)
J'ai souligné au ministre le fait que la pension alimentaire soit
déductible en entier du revenu de celui qui la verse et imposable en
entier dans les mains de la personne qui la reçoit. Il faut
considérer une chose: la personne qui reçoit une pension
alimentaire, dans 60 % des cas, elle a la garde des enfants, ce qui veut dire
que la personne qui a la garde est pénalisée parce qu'elle doit
payer de l'impôt, alors que le montant a été fixé
pour les enfants. Je dois vous dire ceci. Lorsqu'on se promène - je vais
attendre que le ministre m'écoute, c'est important - dans les cours de
justice, lorsqu'on voit plaider et fixer les pensions alimentaires par les
tribunaux, les juges ou les tribunaux, ce qu'Hs disent c'est que le
régime fiscal, ce n'est pas de leur ressort. Et c'est vrai aussi. Les
juges ne sont pas là pour modifier le régime fiscal. Les juges
sont là pour fixer une pension alimentaire qui tient compte de deux
facteurs: les revenus de
l'un et les besoins de l'autre. Je me souviens d'avoir plaidé ce
fait là, précisément devant la Cour d'appel du
Québec et m'être fait répondre indirectement que le
régime fiscal peut être modifié par l'exécutif et le
législateur, en tout temps. Cela n'appartient pas au juge. Bien
sûr, ils ont une connaissance de l'actualité et savent un peu ce
qui en est mais, quand même, il demeure que c'est la
responsabilité du gouvernement de modifier le régime fiscal pour
arriver à faire en sorte que la pension alimentaire atteigne les buts
fixés, à savoir combler les besoins de la personne qui a la garde
des enfants, bien sûr.
Dans ce sens, je vais aller un petit peu plus loin aujourd'hui.
Premièrement, la portion ou la pension alimentaire qui est versée
pour les enfants ne devrait pas être ajoutée au revenu du conjoint
qui a la garde des enfants et, deuxièmement, la portion de la pension
alimentaire qui est versée pour la personne elle-même, sans tenir
compte de la garde des enfants, devrait faire l'objet d'un régime fiscal
différent. La majorité des montants des pensions alimentaires est
très basse, elle n'est pas élevée. Je l'ai dit, je ne me
souviens pas de la moyenne des pensions alimentaires, je pense que c'est 200 $
par mois. Alors, ce ne sont pas des montants élevés, mais
lorsqu'on est obligés de payer de l'impôt, ce n'est pas
drôle, d'autant plus qu'encore une fois, celui qui pale ne se pose pas de
questions. Il donne à son comptable le montant de la pension alimentaire
versée et c'est déduit automatiquement. Je pense qu'il serait
temps de regarder le régime fiscal pour le rendre plus équitable
et plus conforme aux objectifs qui sont poursuivis. Voilà ma
deuxième remarque.
M. le Président, ma troisième remarque vise à faire
en sorte que l'on ne se contente pas du projet de loi 33, mais qu'on examine de
plus près la possibilité d'instaurer un véritable
régime de perception automatique des pensions dans les cas où
ça arrive. Si les provinces de l'Ouest ou le Manitoba ont
été capables de le faire, on est sûrement capables de le
faire au Québec. Bien sûr qu'il y a des coûts à cela
mais, par contre, il y a une économie. Pourquoi y a-t-il une
économie? Parce que les personnes qui ne reçoivent pas leur
pension alimentaire sont souvent dépendantes d'un programme d'assistance
sociale. Alors, le gouvernement épargnerait finalement avec un
régime centralisé de perception automatique des pensions
alimentaires. C'est ce qui avait poussé les législateurs
canadiens dans certaines provinces à le faire et ça ferait
surtout en sorte que la personne qui est créancière de la pension
alimentaire, la femme qui a ses deux enfants, puisse véritablement
compter sur cet argent. Parce que c'est cela le problème d'une pension
alimentaire impayée. C'est que la femme qui a deux enfants, au mois de
septembre, c'est le temps de l'école, c'est le temps de les habiller. Si
le mari ne pale pas parce qu'il a été transféré
à Toronto, il travaillait pour une chocolaterie et on
récupère les sièges sociaux, alors le mari est rendu
à Toronto et la femme n'a plus de pension alimentaire, ou bien, il a
changé d'emploi et le temps que ça prend pour le retracer, on est
rendus au mois de novembre. Mais madame, elle, pendant ce temps-là, elle
est dans vous savez quoi, parce qu'elle a ses obligations à rencontrer
avec ses enfants. Je pense que 60 % des personnes qui sont
créancières d'une pension alimentaire n'ont pas d'autres revenus,
elles ne travaillent pas. Vous imaginez-vous que ce n'est pas long que ces
personnes sont rendues sur le bien-être social. Et là, la femme,
qu'est-ce qu'elle fait sur l'aide sociale? Voulez-vous que je vous le dise?
Elle reste là parce que, sur l'aide sociale, elle est sûre qu'elle
va avoir son chèque régulièrement alors qu'avec sa foutue
pension alimentaire, elle n'est pas sûre de l'avoir. Alors, elle dit
à son mari: Veux-tu, on va diminuer la pension alimentaire, cela va
coûter moins cher, mais au moins, j'aurai l'aide sociale et j'aurai mon
chèque régulièrement? La réalité, M. le
ministre, c'est ce que je viens de décrire. La réalité qui
est vécue par à peu près 50 % du monde, c'est
celle-là. Or, les femmes qui ont la garde des enfants, en
général, se disent: La foutue pension alimentaire, j'aime bien
mieux avoir mon chèque d'aide sociale. Au moins, je peux compter dessus.
Mon mari n'est pas fiable.
Là, je vous laisse deviner, c'est la fin de mon argument: Qui
paie pour faire vivre madame et ses enfants, sinon nos taxes? M. le ministre,
ce ne sont pas les boubous macoutes - j'emploie l'expression parce que le
ministre l'a employée - mais les inspecteurs de l'aide sociale qui vont
visiter qui peuvent régler ce problème. Au lieu d'investir autant
d'énergie à bâtir des guides d'enquête pour nos
inspecteurs et nos enquêteurs qui disent: Allez donc espionner et
observer la résidence et allez donc jaser avec le dépanneur pour
obtenir des informations additionnelles, comme c'est le cas
présentement, je pense qu'on devrait investir un peu d'énergie
à bâtir un solide régime de perception automatique des
pensions alimentaires, et on va avoir réglé beaucoup plus de
problèmes qu'avec ces supposées enquêtes sur des cas de
fraude qui n'en sont pas. Je suis d'accord que la gestion des fonds publics
doit se faire selon des normes et c'est notre argent à tous, et je suis
d'accord qu'il y ait un resserrement des critères, mais aller
enquêter sur le monde en parlant au dépanneur et en allant
observer la maison pour savoir s'il n'y a pas un monsieur qui entre là
à 19 heures le soir, je trouve que cela n'a pas de sens. Cela n'a pas de
sens et il y a tellement d'énergie qui est perdue actuellement dans le
gouvernement libéral par cette obsession que les assistés sociaux
sont des fraudeurs. On étudie un projet de loi de pension alimentaire
qui constitue une maudite bonne façon d'aborder le problème.
C'est vrai que cela demande des coûts, il n'y a pas de doute, mais ce ne
serait pas long qu'on récupérerait notre investissement en
procédant de cette façon.
Deuxièmement, M. le ministre, ce serait beaucoup plus humain que
toutes les enquêtes ou au stade où on en est rendus que les
enquêtes qui sont faites par le ministère de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu sur les bénéficiaires de
l'aide sociale, mauditement plus humain. Deuxièmement, cela
sécuriserait aussi les femmes qui sont là à attendre des
chèques qui ne viennent pas parce que monsieur a une nouvelle blonde et
que la nouvelle blonde lui dit: Ne paie pas, pour qu'on aille en vacances
l'été prochain à Acapulco. C'est la réalité.
Dans les premières années, les pensions alimentaires sont assez
bien payées, mais, au bout de cinq, six, sept ou huit ans, les
débiteurs des pensions alimentaires comprennent un petit peu moins bien
les obligations de madame et, comme il y a un homme dans le décor, ils
disent: Que le monsieur paie donc et puis bon. C'est la réalité.
Il y a un bon pourcentage de gens qui ont des pensions alimentaires à
payer pour des enfants qu'ils ne voient plus, ils perdent le contact avec ces
enfants dans bien des cas, malheureusement. Qu'on se comprenne bien, je
déplore cette situation, mais c'est une réalité.
Bref, M. le ministre, je suis parti de loin, vous allez me dire.
C'est-à-dire que je ne suis pas parti de loin, je suis parti du projet
de loi et je suis arrivé loin, mais c'est pour montrer que tout cela est
relié ensemble. Lorsque votre collègue, la ministre
déléguée à la Condition féminine a
envoyé son communiqué le 17 juin 1988 à la fin de la
session où elle nous disait dans le premier paragraphe qu'elle
était bien heureuse d'annoncer le dépôt et l'adoption d'un
projet de loi - l'adoption, bon, elle n'est pas encore faite, je pense qu'elle
devrait le savoir, je pense qu'on a dû expliquer un peu cela à son
attaché de presse ce qu'est un processus d'adoption de loi; bref,
passons - le dépôt d'adoption d'un projet de loi favorisant
l'implantation d'un système de perception automatique des pensions
alimentaires. Je dois vous dire que je bouillais, M. le ministre. Je trouve que
cela n'a pas de sens. Dans une matière non litigieuse, il n'y a personne
là-dedans, il n'y a pas de partisanerie politique là-dedans.
C'est une matière non litigieuse, il n'y a pas de pression. Qu'on dise
des choses comme celle-là uniquement peut-être pour satisfaire un
engagement électoral parce que c'était un des nombreux
engagements électoraux du Parti libéral. J'ai hâte de voir
ce qui va se produire à la prochaine élection, M. le
ministre.
Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais mon troisième
commentaire vise à demander au ministre s'il serait ouvert à
étudier davantage la possibilité de l'instauration d'un
système de perception automatique des pensions alimentaires.
Le Président (M. Marcil): M. le ministre, en
réplique, vos remarques préliminaires.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le
député de Taillon m'avait fait valoir ses commentaires lorsque
nous avons discuté le principe de ce projet de loi. Il revient sur la
question de la perception automatique. Nous avons préféré
nous référer à un système semi-automatique,
c'est-à-dire que nous avons voulu privilégier quand même le
principe de la responsabilité. Ce que nous nous disons c'est qu'au
départ, et je cite une statistique que le député de
Taillon a lui-même citée, dans 76 % des cas, il n'y a pas de
problème. Il y a des problèmes dans 24 % des cas. À partir
de là, on se dit: II faut qu'on puisse quand même laisser aux
parties la responsabilité de faire face à leurs obligations. Vous
savez, dans cette société du pèse-bouton -
pèse-bouton, une réaction, peu importe, on n'a pas à se
demander pourquoi on l'a fait, dans quelles circonstances on l'a fait - c'est
automatique. Tout est automatique. Pas de problème. On n'a pas à
se poser de question. Tout est automatique.
Dans ce cas-ci, il s'agit d'un cas qui réfère à des
situations très souvent pénibles. La séparation d'un
couple est toujours difficile. À 99 %, il s'agit des femmes qui sont
créancières, c'est-à-dire qui reçoivent une pension
alimentaire pour elles et pour les enfants parce qu'elles ont consacré
une grande partie de leur vie à élever ces enfants et qu'elles se
retrouvent tout à coup avec cette rupture du lien qui les liait à
leur compagnon, leur conjoint et se retrouvent sans ressource. Elles ont besoin
d'une pension alimentaire. Mais il faut se fonder aussi sur la
responsabilité du débiteur, c'est-à-dire du conjoint, du
mari qui doit payer cette pension alimentaire. De par les statistiques, on sait
que dans 76 % des cas ça va. Le mari paie sa pension alimentaire, la
femme reçoit sa pension alimentaire et ça va bien. Il faut
protéger cette relation fondée sur la responsabilité de
chacun des conjoints. On décide de mettre fin à une union. Il y a
des conséquences. L'une de ces conséquences, eh bien! c'est que
le mari devra payer une pension alimentaire.
On va bientôt procéder avec d'autres projets de loi qui
vont venir améliorer sensiblement aussi la situation de la femme
lorsqu'on va parler du patrimoine commun. Lorsque le projet de loi sur le
patrimoine commun sera présenté, sera discuté, on pourra
aborder aussi ce sujet parce que là aussi le patrimoine commun pourra
aider la situation de la femme, considérablement. Alors, dans ce
contexte, M. le Président, ce que nous avons voulu faire par ce
système qui n'est pas complètement automatique, qui n'est
automatique que lorsqu'il y a défaillance de la part du débiteur,
donc du mari, de l'ancien mari, de l'ancien conjoint de payer sa pension
alimentaire, il y a donc à ce moment, par le percepteur, un
mécanisme qui s'établit et qui fait que le percepteur peut
prendre les moyens pour qu'il y ait une perception automatique. À ce
niveau, l'article 553. 6 est clair. On dit, et je me permets de le
lire, M. le Président: Dès qu'il est informé que le
percepteur des pensions alimentaires est chargé de la perception de la
pension, le débiteur doit lui payer directement les arrérages
ainsi que, à leur échéance, les versements à
échoir de la pension. (16 h 45)
Deuxième paragraphe: II peut opposer à une saisie un
paiement fait par la suite directement au créancier plutôt qu'au
percepteur mais, dans ce cas, les frais de saisie et d'opposition relatifs
à ce paiement sont à sa charge, même si l'opposition est
accueillie.
Il y a donc possibilité de saisie de la part du percepteur pour
faire en sorte que le débiteur soit obligé, même à
la source, s'il y a nécessité, de payer cette pension
alimentaire. Donc, quant à la première remarque, j'en arriverais
à la conclusion que pour nous, et c'est ce que ma collègue, la
ministre déléguée à la Condition féminine a
mentionné; c'est automatique dans la mesure où le
débiteur, le mari, ne paie pas. Et à ce moment, le percepteur
prend les moyens. Dans ce contexte, je pense que ma collègue a
parfaitement raison.
En ce qui regarde la fiscalité, le député de
Taillon a raison de soulever ces questions de fiscalité qui sont
Importantes lorsqu'on parle de pension alimentaire. Mais pour nous, il est
difficile, bien sûr, de tenir compte du fait que la fiscalité
intervient. Pour le débiteur, c'est une déduction fiscale, pour
la créancière, c'est-à-dire qui reçoit la pension
alimentaire, elle doit l'ajouter à ses revenus. Mais il faut tout de
même comprendre une chose: de plus en plus notre jurisprudence nous
démontre que les juges tiennent compte de cette fiscalité. Il y a
eu un cas dernièrement, de 1988, il n'y a pas tellement longtemps,
où le juge arrive à la conclusion qu'il faut à madame 18
000 $ par année pour qu'elle puisse vivre avec les enfants. Le juge n'a
pas donné 18 000 $; étant donné l'effet de
fiscalité, au mari, à l'ancien conjoint et son revenu, donc son
taux d'imposition, il a fixé, si ma mémoire est bonne, cette
pension alimentaire à 35 000 $.
Donc, cela se passe de plus en plus, parce que les juges et les avocats
le plaident. C'est difficile pour le législateur de prévoir tous
les cas. Là, c'est une question de fiscalité. Les juges sont
parfaitement conscients et les avocats qui plaident les droits de leur client
ou de leur cliente sont là pour plaider. Donc, ces aspects de
fiscalité, ils vont dire: M. le juge, ma cliente a besoin de 18 000 $,
mais bien sûr qu'elle devra payer des impôts pour 18 500 $
ajoutés à d'autres revenus qu'elle peut avoir, tandis que
l'ex-conjoint qui paiera 18 000 $ aura une déduction fiscale en
conséquence selon son taux d'Imposition et selon son revenu. Alors, il y
a là un équilibre à établir. Les avocats le
plaident et les juges de plus en plus tiennent compte de ces aspects. Alors, il
faut à mon sens, M. le Président, ne pas essayer de tout
prévoir dans un projet de loi. C'est une manie dangereuse, vous me
permettrez l'expression. On ne peut pas tout prévoir. On met nos
principaux principes. On met ce qui est essentiel qui est au fondement.
Ensuite, on se laisse tout de même la possibilité que nos intances
démocratiques - nos tribunaux en ce qui nous concerne - puissent
appliquer en tenant compte de la situation sociale, politique et
économique de la société, et puissent tenir compte du
contexte. Ce ne sera pas possible au législateur de prévoir tous
les cas. Ce serait impossible. Il faudrait en avoir des projets de loi et des
modifications et des amendements à des projets de lof s'il fallait
essayer de tout prévoir dans un projet de loi.
Cependant, pour nous du gouvernement, M. le Président, nous
croyons que les citoyens et les citoyennes doivent être responsables de
leurs gestes. Lorsqu'il y a séparation, lorsqu'il y a dissolution de ce
lien du mariage, un conjoint qui est obligé envers l'autre conjoint de
lui fournir une pension alimentaire doit répondre de son obligation.
S'il ne le fait pas - et je reviens sur une statistique: 76 % le font - s'il ne
le fait pas, nous prévoyons dans ce projet de loi la possibilité,
par un percepteur, de percevoir cet argent directement avec les
arrérages, percevoir cette pension et de le faire parvenir directement
à la bénéficiaire, à la dame, la femme qui a besoin
de cette pension alimentaire.
Quant à l'aspect de la fiscalité, comme je le mentionnais
tout à l'heure, c'est évident que les avocats font valoir ce
point de vue et c'est évident de par notre jurisprudence que de plus en
plus les tribunaux tiennent compte de cette donnée. J'ai Ici une
décision qui a été rendue par l'honorable juge Jean Moisan
qui est très clair à ce sujet. Cela a été rendu le
7 septembre 1988, M. le Président. Alors voilà une
jurisprudence... Pardon?
M. Filion: II y en a beaucoup de jugements de pensions
alimentaires au Québec dans une journée.
M. Rémillard: Écoutez, ce que je veux vous dire,
c'est qu'il s'agit là d'une décision et vous savez comment notre
système judiciaire est construit, M. le député de Taillon.
Vous savez que nous sommes dans un régime qui tient compte de la
jurisprudence. Alors, il y a là un jugement qui vient d'être rendu
et qui servira de référence aux avocats qui auront à
plaider des situations pareilles. Il ne s'agit pas d'un jugement de la Cour
d'appel, j'en conviens. Ce n'est pas un jugement de la Cour suprême non
plus. Il s'agit d'un jugement de la Cour supérieure, par un juge de
grande réputation, le juge Moisan, un très bon jugement. Je suis
convaincu que beaucoup d'avocats vont faire valoir ce jugement pour plaider les
droits de leurs clientes, quand on parle de pension alimentaire.
Voilà, M. le Président, mes remarques avant d'aborder
l'étude article par article de ce projet de loi. J'ai l'impression que,
dans nos remarques,
on a commenté à peu près chacun des articles qu'on
retrouve dans ce projet de loi ou à toutes fins utiles. Je comprends que
le député de Taillon aurait préféré un
régime entièrement automatique. Je diffère d'opinion avec
lui sur ce point. Je comprends ses remarques sur la fiscalité et ce que
je lui dis, c'est que le meilleur moyen d'avoir des dispositions concernant la
fiscalité qui pourront s'adapter à l'évolution de notre
contexte social, politique et économique, c'est de laisser les tribunaux
en décider. C'est ce qu'ils font présentement. Dans ce contexte,
M. le Président, je terminerai là mes remarques.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre.
Y a-t-il d'autres députés qui voudraient intervenir en ce qui a
trait aux remarques? Il y avait le député de Roberval.
M. Blackburn: Cela vient répondre en grande partie, je
pense bien, aux questions que je me posais. Peut-être que le
député de Taillon aurait une réponse à une
statistique que je ne connais pas. La créancière, la personne qui
perçoit la pension... Combien ont à payer des impôts -
parce que le taux marginal d'impôt, le seuil minimal est rendu quand
même assez élevé - j'imagine que ça doit être
très peu de personnes qui perçoivent des pensions alimentaires et
qui ont à déduire une somme à cause de ce montant de 2400
$ ou 3600 $ si elles reçoivent 300 $ par mois, à payer des
impôts? Si vous avez ces statistiques, ça nous
éclairerait.
M. Filion: Écoutez, il peut y avoir trois choses.
Le Président (M. Marcil): C'est en réponse à
la question du député, c'est ça?
M. Filion: Non. Trois choses...
Le Président (M. Marcil): Excusez, M. le
député de Taillon. Allez-vous utiliser ces arguments tantôt
dans l'article pratique?
M. Filion: M. le Président, on est au stade des remarques
préliminaires. Je n'ai pas épuisé mon temps.
Le Président (M. Marcil): Oui, ça va. Je voulais
juste savoir. Il n'y a aucun problème à ce niveau, si vous voulez
répondre à la question.
M. Filion: Voilà. Trois choses. Premièrement, je
voudrais bien que le ministre comprenne que le projet de loi 33 n'apporte
aucune modification substantielle à la situation existante, sauf pour
permettre au percepteur des pensions alimentaires d'agir sans qu'il soit
nécessaire de procéder à une saisie. Tout ce que le
ministre disait tantôt, existe déjà. Et quand il emploie le
qualificatif de semi-automatique, ce n'est pas plus exact de parler de
semi-automatique que d'automatique, parce que la situation existante, M. le
ministre, et précisément celle que vous croyez qu'apporte le
projet de loi 33... Tout ce que le projet de loi 33 fait, il permet au
percepteur des pensions alimentaires d'agir sans qu'il ne soit
nécessaire de procéder à une saisie. C'est tout. En deux
mots, il peut prendre l'appareil téléphonique, écrire une
lettre et se substituer au droit du créancier ou de la
créancière de l'obligation alimentaire. C'est le sens du projet
de loi 33, comme le disent fort bien les notes explicatives du projet de
loi.
Ce que vous nous dites, c'est le discours qu'il aurait fallu tenir
lorsqu'on a adopté la loi précédente qui était la
loi 80 et quelques, sauf erreur, à l'époque. Or, parler de
perception semi-automatique, c'est un bel effort pour sauver votre
collègue, mais cela ne se tient pas plus que de parier d'automatisme.
Alors, vous disiez tantôt qu'il y a 76 % des cas où cela se passe
bien; bien oui, cela ne changera pas vos statistiques, mais dans les 24 % des
cas où cela ne se passe pas bien, la procédure... puis en
réalité, il faut bien se comprendre, ça donne un peu plus
d'autorité au percepteur ce projet de loi. C'est ce que cela fait: cela
lui donne un peu plus de marge de manoeuvre. Il peut utiliser plusieurs
façons au lieu de procéder uniquement... C'est ce que j'ai fait
comprendre à votre collègue la dernière fois, que je
m'évertue à vous dire pour qu'on n'emploie pas de terminologie
qui pourrait induire la population en erreur. Si vous pensez que
semi-automatique c'est ce qui existe maintenant, c'est très bien que
vous employiez le qualificatif encore, mais on ne peut pas dire que le projet
de loi 33 rend la perception automatique, semi-automatique ou au quart
automatique ou dizième automatique. C'est mon point et je pense qu'une
analyse rigoureuse de la situation ne peut que nous amener à cette
conclusion.
Deuxièmement, c'est parce que dans mes remarques
préliminaires... Excusez, M. le député de Taillon, je vous
ai permis d'intervenir, parce que normalement vous n'avez pas à
répliquer aux remarques préliminaires du ministre. Je comprends
qu'on est aussi bien de tout dire au début et cela va bien aller par la
suite, sauf qu'à la question du député de Roberval, je
voudrais savoir si vous étiez pour lui répondre. Cela va?
Allez-y, M. le député.
M. Filion: Je n'oublie pas la question du député de
Roberval, je dis: Moi-même je me suis posé la question. Elle est
bonne la question qu'il a posée et j'y arrive. Je peux bien intercaler
un deuxième point. La moyenne, et j'ai tout pris dans les documents du
ministère de la Justice, la moyenne des pensions alimentaires... je
pense que c'est ça... la moitié des pensions versées ne
dépasse pas 260 $ par mois et le montant mensuel moyen est de 368 $.
Alors, si on multiplie par 12, la pension moyenne multipliée par 12, on
ne paie pas d'impôt à 4000 $. C'est quoi le plancher actuel? 7000
$?
M. Dauphin: C'est rendu à 21 000 $ ou à 22 000
$.
Mme Bleau: 22 000 $.
M. Dauphin: Au provincial.
M. Filion: Non, au gouvernement fédéral.
Mme Bleau: Ah, au fédéral.
M. Filion: Bref, mais il ne faut pas oublier la contrepartie. La
contrepartie, c'est celui qui verse la pension alimentaire et
bénéficie d'un avantage fiscal et il n'y a pas un juge qui peut
corriger cela, il bénéficie d'un avantage fiscal énorme,
é-nor-me, à tel point que cela fait d'ailleurs dire à des
gens, M. le ministre, que c'est plus payant, au Québec, d'être
séparé ou divorcé que d'être marié, parce que
si je suis séparé ou divorcé... Premièrement vous
n'avez pas de politique familiale. On va se parler français un peu,
même si on est entre nous, mais quand même, c'est plus payant
d'être divorcé ou séparé, parce que je prends ma
pension alimentaire: si je gagne 45 000 $, j'en paie 15000 $ ou 20 000 $ ou 22
000 $, je me retrouve à 22 000 $ et je ne paie plus d'impôt; alors
que si je vivais avec ma tendre moitié et ma progéniture,
à ce moment-là je paierais de l'impôt: de là
l'absurdité de la situation. Ce que je m'évertue à dire,
en cette fin d'après-midi automnal, au ministre et sans élever la
voix, bien simplement. Je suis convaincu que les gens qui ont à coeur la
cause de la condition féminine, il n'y a pas beaucoup de femmes autour
de cette table, Mme la députée de Groulx, mon adjointe, mais je
suis convaincu que si on avait devant nous des groupes de femmes qui
étudiaient la situation des femmes depuis maintes années, elles
ne seraient pas heureuses de vous entendre dire que c'est le juge qui va
décider. (17 heures)
En commission parlementaire, quant on a étudié le
patrimoine familial, M. le Président, c'est vous qui présidiez,
ce que nous ont dit les groupes de femmes, elle nous ont dit: Le moins de
discrétion judiciaire possible. Le ministre nous dit: Laissons les juges
décider. Je trouve que... Je vais donner un autre exemple, que me
souffle à l'oreille mon excellent recherchiste. L'indexation, vous
n'avez pas hésité à passer un projet de loi pour
l'indexation, pour faire en sorte que l'indexation qui est accordée dans
bien des cas par les juges, maintenant cela fait partie des règles du
jeu, qu'il faut plutôt demander d'être soustrait de l'indexation,
alors là aussi c'est un exercice de discrétion judiciaire et vous
auriez pu me répondre à l'époque: Bien vous savez les
juges tiennent compte de la réalité et l'indexation, il n'y a pas
besoin de la mettre dans les lois, parce que la majorité des juges en
tiennent compte. Ce que je vous dis, il faut éviter là-dedans de
donner une trop grande latitude. Il faut tenter d'influer un peu sur le cours
des événements à l'intérieur d'une politique
cohérente. Alors donc, dans ce sens-là, ce que Je dis au
ministre, c'est que, j'ai bien entendu sa réponse...
Le Président (M. Marcil): M. le député
de
Taillon.
M. Filion:... je suis également au fait de sa
préoccupation, le ministre nous dit: Je ne veux pas diluer les
responsabilités des parties. Je suis au fait aussi de l'importance, mais
je pense, M. le Président, que si on arrive à créer ce
régime de perception automatique, la responsabilité du
débiteur, l'obligation de payer sa pension alimentaire, elle va rester
là. Sauf qu'il ne la paiera pas directement. Mais sa
responsabilité va rester là. Et la personne qui a la charge des
enfants et qui doit faire vivre ces deux mondes, bien elle va pouvoir compter
sur une entrée de fonds prévue, stable, connue et
indépendante d'une volonté, que vous avez si bien
qualifiée vous-même dans votre discours de deuxième
lecture, d'une volonté tellement: aléatoire. Voilà, M. le
Président, le sens de mes propos.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député de Taillon. M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, il y a peut-être un autre
élément, M. le Président, tout d'abord, ici, je ne pense
pas que ce sort le forum approprié pour déterminer les quanta des
pensions alimentaires. On n'est pas ici pour déterminer quel devrait
être le montant des pensions alimentaires. On est ici pour discuter du
projet de loi 33, sur la perception des pensions alimentaires.
Un autre élément qui nous amène à être
très réservés sur cette possibilité d'avoir une
perception automatique, c'est le fait que le paiement de la pension alimentaire
par un des conjoints est souvent un dernier lien qui demeure entre les
conjoints, et ce n'est pas toujours négatif. Dans certains cas, et on
nous l'a fait valoir, ce lien, à cause de ia pension alimentaire qui
demeure entre les anciens conjoints, va permettre parfois de rétablir
les contacts et même de reprendre le lien. Elle existe, cette
possibilité, c'est un dernier lien, qui est là, et on a des cas,
plusieurs personnes, plusieurs groupes de personnes sont venus nous en parler.
Vous savez, si vous mettez immédiatement automatique le paiement de la
pension alimentaire, vraiment vous coupez tout et c'est ia théorie du
bouton que vous pressez. Il n'y a plus de responsabilité de la part du
conjoint qui doit payer cette pension alimentaire. Il n'y a plus de lien, il y
a des visites pour les enfants, lorsqu'il y a des enfants, mais quelquefois il
n'y a pas d'enfants, ce peut être une pension alimentaire payée
à madame, tout simplement et vous coupez un lien qui peut servir
à lier de nouveau, peut-être, les conjoints.
Donc, mes deux remarques que je voudrais faire pour conclure, M. le
Président, c'est qu'ici nos discussions ne doivent pas être en
fonction du quantum des pensions alimentaires, nous ne sommes pas à la
bonne place pour en discuter, et d'autre part, sur le principe de la perception
automatique, nous apportons ici, avec ce projet de loi, des possibilités
très intéressantes pour compléter le rôle du
percepteur qui, auparavant, avait un rôle uniquement de saisissant et qui
maintenant voit son rôle agrandi, élargi, pour pouvoir jouer ce
rôle de façon efficace au bénéfice des femmes qui
bénéficient d'une pension alimentaire et qui ont de la
difficulté à percevoir cette pension alimentaire.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Je vais
reconnaître maintenant le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je veux profiter de
cette occasion pour saisir le ministre de la Justice d'un jugement dont II est
sûrement au courant, qui a été rendu concernant des gens
qui sont de mes commettants et dont le fils majeur a quitté la maison, a
été exclu de la maison... incompatibilité,
impossibilité de continuer la vie à l'intérieur de la
famille. Il a poursuivi ses parents pour obtenir une pension alimentaire de
plusieurs centaines de dollars. Les parents sont venus me voir et ils n'ont pu
porter la cause en appel, faute de moyens. Actuellement, ils se voient - je ne
veux pas aller sur le fond du jugement, mais les faits sont là
-actuellement pris pour payer une pension alimentaire, à leur fils
majeur, de plusieurs centaines de dollars. Cela leur crée des
problèmes considérables. Cela peut avoir, bien sûr, un
effet d'entraînement et une influence sur des causes semblables ou des
cas qui pourraient se développer de la même façon. Ces
parents souffrent d'une injustice considérable en ce qui a trait
à l'impossibilité dans laquelle ils sont d'obtenir quelque
déduction fiscale que ce soit pour la pension mensuelle de plusieurs
centaines de dollars qu'ils doivent payer à leur fils.
Je considère que c'est là un cas qui n'est pas encore
fréquent, mais qu'on risque de voir se reproduire. L'opinion que le juge
a exprimée dans le jugement est dans le sens que l'obligation
alimentaire des parents se prolonge au-delà de la majorité et
qu'elle permet à des enfants majeurs de pouvoir recourir à leurs
parents, même s'ils ont quitté la maison en de très mauvais
termes, pour pouvoir continuer des études qu'ils poursuivent -
d'après les renseignements que j'ai dans un cas semblable - cahin-caha.
Je voulais tout simplement porter à l'attention du ministre ceci: Est-ce
que cette situation est considérée, d'une façon ou d'une
autre, dans le projet de loi que nous avons? Est-ce qu'on peut
considérer que les parents pourront, au-delà d'un jugement qui
les affecte financièrement d'une façon négative
très sérieusement, être en butte à un percepteur des
pensions alimentaires qui va leur rendre visite et les mettre dans une
situation encore plus mauvaise? Je ne sais pas si cette situation a
été envisagée, mais qu'est-ce que le ministre envisage en
ce qui concerne un cas semblable?
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député de Louis-Hébert. Je vais reconnaître M. le
ministre.
M. Rémillard: M. le Président, je remercie le
député de Louis-Hébert pour sa question. Il fait
référence à une cause qui a fait l'actualité il n'y
a pas tellement longtemps, une cause qui est difficile. Vous savez, lorsque des
parents, d'une part, et des enfants, d'autre part, se retrouvent devant un
tribunal pour régler leur différend, c'est triste, très
triste. Mais quand, en plus, ce différend porte sur le lien de
subsistance du parent face à l'enfant, je trouve cela encore plus
triste, plus difficile.
Il y a eu un jugement qui a été rendu par un juge de la
Cour supérieure, si ma mémoire est bonne. Cela n'a pas
été porté en appel. C'est ce jugement donc qui s'applique.
Il y a une pension alimentaire qui doit donc être versée à
l'enfant majeur, étudiant, si ma mémoire est bonne.
M. Doyon: Exactement.
M. Rémillard: Dans ce cas-là, il y a pension
alimentaire, il y a créancier d'une pension alimentaire, il y a
débiteur-parent et le projet de loi doit s'appliquer. C'est un cas,
j'espère, qu'on ne verra pas très souvent, mais c'est un cas qui
est là. Le percepteur sera là pour percevoir la pension, la
créance alimentaire pour cet étudiant, en application du
jugement, comme il est là pour percevoir la créance, la pension
alimentaire d'une femme qui est divorcée et qui perçoit une
pension alimentaire de son exconjoint, alors le projet de loi s'applique. Je
dois dire que c'est une situation triste, difficile et, si on voulait toucher
au fondement du problème, si on voulait remettre en cause ce lien qui
existe par cette décision rendue par un juge de la Cour
supérieure, soit de l'obligation des parents envers leurs enfants
même majeurs, il faudrait retourner au Code civil et revoir les principes
de droit qui gouvernent cette situation.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre.
Maintenant que les remarques préliminaires sont terminées, sur.
consentement...
M. Filion: Je peux la faire à l'article 1, cela ne me
dérange pas.
Le Président (M. Marcil): Est-ce que vous permettez que M.
le député de Taillon continue en ce qui a trait aux remarques
préliminaires? M. le ministre, cela va?
M. Filion: J'aime mieux liquider nos différends avant
de...
Le Président (M. Marcil): Allez-y de façon
très brève.
M. Filion: L'argument du ministre me concerne et rejoint mes
préoccupations. Vous savez que payer une pension alimentaire est souvent
le seul lien. Ma petite expérience pratique de la vie en
général me dit que, lorsqu'il n'y a pas d'argent, cela discute
"mauditement" mieux entre deux personnes. L'argent, les pensions alimentaires
sont beaucoup plus souvent qu'autrement, dans une très grande
majorité des cas, une source de discorde entre conjoints et
ex-conjoints. Il y a des fois où c'est source de quelque chose et il y a
des fois où ce n'est source de rien. Généralement, si les
deux sont responsables, etc., cela se paye. Ce n'est pas parce qu'il la paie
qu'il va y avoir un lien et ce n'est pas parce qu'il ne la paie pas... Vous
comprenez qu'entre gens responsables il n'y en a pas de problèmes. Mais
il arrive toutes sortes de circonstances des fois qui font que les gens
responsables ne resteront pas à 100 % responsables tout le temps.
Deuxièmement, par la force des choses, il y a une catégorie de
gens qui existe qui ne le sont pas beaucoup non plus. Or, moi, je soumets
à votre réflexion que les liens financiers sont
généralement dans fa société dans laquelle nous
vivons beaucoup plus des éléments négatifs que des
éléments positifs. Si on veut chercher à rapprocher des
ex-conjoints, parents d'enfants - et il faut qu'ils demeurent tous les deux
parents d'enfants, c'est ce que vise le ministre dans ses propos et moi aussi
cela me rejoint - si on cherche à avoir deux parents qui vont assumer
leurs responsabilités, il serait beaucoup mieux de créer un
climat serein, en écartant peut-être justement ces maudits
éléments financiers.
Je suis convaincu aussi qu'il existe au Manitoba un système qui
dit que, si on ne veut pas, si les deux parties sont d'accord pour ne pas
être dessus, elles ne sont pas dessus. Non, c'est cela et c'est
important, mais le jugement est respecté. La dame n'a pas le droit
d'aller à l'aide sociale. Bon, elle n'est pas dessus, mais à la
minute où elle s'inscrit elle est inscrite et cela finit là.
C'est ce que dit au Manitoba la perception automatique des pensions
alimentaires. Moi, je vous soumets cela comme élément de
réflexion. La décision va se prendre à votre niveau. Ce
que ma suggestion vise à faire est tout simplement de ne pas
arrêter les travaux. Je suis convaincu qu'une équipe avec les
Finances, le Revenu, la Justice, si elle regardait cela, conclurait que ce
serait à l'avantage des parties, des contribuables et du gouvernement
d'instaurer un tel système.
La Présidente (Mme Bleau): M. le ministre.
M. Rémillard: Pour terminer les remarques
préliminaires, je veux dire au député de Taillon que le
processus pour nous ne s'arrête pas là avec ce projet de loi.
Tantôt j'ai mentionné qu'il y aurait éventuellement un
autre projet de loi que nous amènerons concernant le fonds commun, le
patrimoine commun. C'est autre chose, mais c'est lié. En ce qui regarde
les pensions alimentaires, il s'agit de voir comment les choses vont
évoluer et d'apporter des éléments complémentaires
qu'on pourra Juger en temps et lieu. Mais pour le moment, je suis content des
remarques du député de Taillon, Je m'aperçois qu'il
commence à être plus nuancé au sujet du principe que ce
soit automatique. Il y a beaucoup d'éléments à prendre en
considération. C'est pour cela que pour le moment, pour nous, la
situation qui nous semble la plus équitable et la plus effective est
celle que nous proposons avec le projet de loi. Voilà, Mme la
Présidente. (17 h 15)
La Présidente
(Mme Bleau): Alors, est-ce qu'on
commence à étudier le projet de loi article par article?
J'appelle l'article 1, s'il vous plaît. M. le ministre.
Code de procédure civile Du percepteur des
pensions alimentaires
M. Filion: Je vous suggère, Mme la Présidente, vu
que l'article 1 contient des sous-articles, peut-être de les
appeler...
La Présidente (Mme Bleau): Bien. J'appelle l'article 553.
3.
M. Filion: J'aimerais entendre le ministre là-dessus.
J'aimerais comprendre la portée exacte de l'article 553. 3 par rapport
à l'article 641. 1 de l'actuel Code de procédure civile.
M. Rémillard: L'article 653. 3... M. Filion: 5.
M. Rémillard: Excusez-moi, l'article 553. 3 prévoit
à quelles conditions et à quelles fins le percepteur va
être chargé du dossier. C'est le premier élément
qu'on trouve à cet article 553. 3.
M. Filion: Mais on l'a à 65... Pardon, excusez.
M. Rémillard: Oui, mais là on précise les
nouvelles fonctions du percepteur: d'être chargé pour le futur,
pendant un an - cela peut aller à un an on va le voir tout à
l'heure - de la perception de la pension et ce, au lieu de simplement faire
procéder à l'exécution forcée du Jugement. C'est la
différence.
M. Filion: C'est ce que je disais tantôt.
M. Rémillard: Bien oui, mais c'est là la grande
différence.
M. Filion: Non, non, mais c'est ce que je disais
tantôt.
M. Rémillard: C'est ça qui est intéressant
comme approche, comme nouveauté.
M. Filion: M. le ministre, c'est précisément ce que
je disais tantôt. Maintenant la seule différence est que le
percepteur n'est pas obligé de procéder juste par saisie. Vous
venez juste de ie dire.
M. Rémillard: C'est ça qui est Important. M.Filion: Bon, bon. On se comprend. M. Rémillard:
imaginez... Oui.
M. Filion: Enfin, vous admettez ça. Alors, c'est
très bien, c'est très bien.
M. Rémillard: C'est ce que je vous disais,
semi-automatique. C'est justement là et vous le voyez.
M. Filion: Mais en quoi est-ce semi-automatique?
M. Rémillard: Vous n'avez pas besoin de procéder
par instance judiciaire...
M. Filion: Oui, mais écoutez...
M. Rémillard:... avec la saisie, la vente, etc., alors que
vous avez la perception qui se fait dès qu'il y a défaut.
M. Filion: D'accord.
M. Rémillard: C'est ça qui est intéressant,
et pour un délai d'un an.
M. Filion: Alors, M. le ministre, pour se comprendre...
M. Rémillard: Oui.
M. Filion: Ce qui est semi-automatique, ce n'est pas la
perception, c'est le fait que le percepteur soit substitué au
créancier de l'obligation alimentaire. Point. Vous comprenez ce qu'est
une perception automatique.
M. Rémillard: Écoutez bien...
M. Filion: Si je dis à quelqu'un: Tu vas percevoir
automatiquement tes 10 $, cela veut dire que ses 10 $ rentrent automatiquement.
Est-ce qu'on se comprend sur les termes?
M. Rémillard: Mais, qu'est-ce que va être
"l'automaticité", si vous me permettez cette expression?
M. Filion: Vous, vous t'appliquez à la perception. Je dis
que ça ne s'applique pas à la perception, ça s'applique au
mieux à ce qui existe déjà en bonne partie pour la saisie,
mais avec la substitution du créancier de l'obligation alimentaire.
M. Rémillard: J'ai l'impression qu'on pourrait en parler
toute la soirée et qu'on ne s'entendrait pas, parce que pour nous ce qui
est important c'est que l'argent qui est dû à la femme, elle
puisse l'avoir le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions
possible. Or, précédemment, lorsqu'il y avait défaut, il
pouvait y avoir saisie, vente en justice, etc., en fonction des normes
judiciaires que nous connaissons, alors que présentement le percepteur
va être chargé de percevoir les arrérages et ensuite...
M. Filion: C'est déjà ça.
M. Rémillard:... toutes les autres
mensualités...
M. Filion: Oui, mais ça existe déjà.
M. Rémillard:... ou les autres montants - permettez-moi de
finir - et les autres montants pendant un an.
M. Filion: Cela existe déjà, un an. Cela existe
déjà pour les arrérages: c'est l'article 641. 1. Cela
existe déjà avec la saisie-arrêt.
M. Rémillard: Dans ce cas-ci, lorsque la pension n'est pas
payée...
M. Filion: écoutez, on va en finir là. Mais
perception automatique veut dire que c'est perçu automatiquement et
automatiquement cela veut dire sans la participation de la volonté. Bon.
Écoutez, ça ne me fait rien que votre collègue fasse les
pirouettes qu'elle veut, mais je pense qu'il faut arrêter de les faire.
J'aimerais juste ça. Vous voyez l'incidence de ça, c'est
d'éviter de le dire au monde. C'est tout. Ce ne serait pas correct
à mon sens de dire ça au monde.
On se comprend quand même. Ici, l'article 553. 3 comparé
à 641. 1, c'est la même chose sauf qu'il n'y a pas... Le
percepteur peut faire plus que la saisie. C'est ça.
M. Rémillard: Ce n'est pas la même chose.
M. Filion: C'est la même chose.
M. Rémillard: II peut aller plus loin.
M. Filion: Bien si, c'est la même chose,
c'est-à-dire qu'il y a la saisie et plus. M. Rémillard:
Bien oui.
M. Filion: Qu'est-ce qu'il peut faire d'autre que la saisie? Je
vous pose la question.
M. Rémillard: II peut prendre les moyens. Justement, II a
la possibilité pendant un an de demeurer au dossier et c'est cela qui
est important. Ce ne sera pas à recommencer à tous les mois et
à dire: Ma prestation n'est pas rentrée, on va retourner, on va
revenir. Pendant un an, il va demeurer au dossier. C'est important aussi.
M. Filion: La deuxième partie de l'article 641. 1 nous dit
ceci: "S'il n'y a pas d'autre réclamation au dossier et si
l'exécution n'a pas été suspendue conformément
à l'article 659. 5 ce doit être par un juge - la mainlevée
ne peut être donnée qu'un an après que les arrérages
de la pension ont été acquittés, y compris ceux qui ont
été accumulés depuis la
saisie. "
M. Rémillard: Justement, c'est une question de
mainlevée. C'est Juste en fonction de la mainlevée.
M. Filion: Oui, c'est cela.
M. Rémillard: Cela ne veut pas dire que la perception peut
se faire pendant un an.
M. Filion: Non, mais s'il y a une saisie...
M. Rémillard: C'est une question de mainlevée.
M. Filion:... c'est bon pour un an.
M. Rémillard: Non, mais écoutez bien...
M. Filion: Bon! Posons la question autrement Que peut-il faire
d'autre à part la saisie, le percepteur?
M. Rémillard: II peut prendre les moyens...
M. Filion: Lesquels?
M. Rémillard:... qu'il juge appropriés.
M. Filion: Oui, mais donnez-moi un exemple, à part de
prendre le téléphone ou d'écrire des lettres.
M. Rémillard: Les articles prévoient directement ce
qu'il peut faire. Il peut prendre les moyens judiciaires nécessaires
pour que la pension soit payée.
M. Filion: Quels sont les moyens judiciaires à part la
saisie?
M. Rémillard: Ce qu'il est Important de retenir dans cela,
c'est que la perception va se faire. À un moment donné, une femme
dit: Ma pension du mois n'est pas entrée. Au lieu de procéder
mois par mois, avec tous les problèmes et tout ce qui se passe avec les
arrérages, on va se retrouver dans un système qui va permettre au
percepteur de percevoir les arrérages, de percevoir la pension qui est
due et, ensuite, pendant un an, permettre au débiteur d'avoir de
nouvelles habitudes de paiement et non pas revenir à chaque fois avec un
processus judiciaire et retourner chez le percepteur.
M. Filion: Vous avez tort. La saisie-arrêt pratiquée
actuellement par le percepteur reste en vigueur tant qu'il n'y a pas de
mainlevée et la mainlevée répond aux critères de
l'article 641. 1, c'est-à-dire qu'elle peut rester là pendant un
an.
M. Rémillard: La mainlevée peut se faire
après un an, après un mois, après une semaine, deux
semaines...
M. Filion: C'est sûr.
M. Rémillard: Cela se fait très souvent. Alors que
là, tel que prévu statutairement par la loi, il reste au dossier
pendant un an.
M. Filion: Revenons à la question de la saisie. On se
comprend sur la saisie, cela va bien. Quel moyen judiciaire autre que la saisie
le percepteur peut-il prendre pour percevoir une pension alimentaire?
M. Rémillard: C'est le moyen qui existe... M. Filion:
D'accord, donc... M. Rémillard:... pour faire payer. M.
Filion: C. Q. F. D. M. Rémillard: Bien oui.
M. Filion: Le reste, c'est la menace. C'est tout ce qu'il reste.
Finalement, c'est l'autorité du percepteur, M. le ministre.
M. Rémillard: Mais, écoutez,
l'autorité...
M. Filion: Son moyen judiciaire, c'est la saisie.
M. Rémillard: Je comprends que c'est l'autorité du
percepteur. C'est pourquoi on fait en sorte que ce soit plus facile d'avoir
recours au percepteur. C'est là que va être l'avantage de la loi.
C'est ce qui va permettre à une femme d'avoir sa pension alimentaire
beaucoup plus rapidement et dans de meilleures conditions.
Le Président (M. Marcil): Mme la députée de
Groulx voulait Intervenir sur le même sujet.
Mme Bleau: J'aurais une question à vous poser, M. le
ministre. Une dame ou un monsieur - vous dites toujours une dame, il y a des
messieurs qui ont des pensions alimentaires...
M. Rémillard: Oui, madame, il y a des messieurs.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bleau: La personne à qui la pension alimentaire n'a
pas été payée attend peut-être une semaine et
"achale" son conjoint: Qu'est-ce que tu fais avec ma pension? Deux semaines et
elle décide d'aller voir le percepteur. Combien de temps cela prend-il
après la demande pour que la personne reçoive les
arrérages et sa pension? C'est cela qui est important.
M. Filion: Pendant qu'il... Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Mme la députée a une
excellente question. Le but du projet de loi, c'est justement de faciliter la
perception et que ce soit rapide. Qu'on ne se retrouve pas dans la situation
qui existe présentement, avec des processus judiciaires qui font qu'une
femme attend toujours sa pension et, pendant ce temps, il faut qu'elle
vive.
Mme Bleau: C'est cela.
M. Rémillard: Alors, on veut que ce soit un processus
rapide, qu'on puisse procéder et qu'on ait une action par le percepteur
qui puisse se faire le plus rapidement possible. C'est ce qui est le mieux.
Alors, dans ce contexte-là, on va donc procéder... S'il n'y a pas
saisie, cela peut aller assez facilement, cela ne pose pas de problèmes.
S'il y a saisie, on peut penser à des délais qui peuvent prendre
une semaine...
Mme Bleau: Ah, pas plus que cela? M. Rémillard:...
ou deux semaines. Mme Bleau: C'est merveilleux. M. Claveau: Ho,
ho, ho!
Mme Bleau: même si cela prenait quinze jours ou trois
semaines, pour moi, cela me paraît un délai raisonnable. Je veux
dire si cela ne va pas prendre trois, quatre, cinq ou six mois.
M. Rémillard: Non. Écoutez bien.
Mme Bleau: C'est ce que je veux savoir, juste cela.
M. Rémillard: Écoutez. C'est difficile de
déterminer une période de temps fixe, mais on peut dire que
vraiment cela va être plus rapide, beaucoup plus rapide. Une saisie peut
prendre aussi plus de temps, remarquez. Cela peut prendre plus de temps.
Normalement, cela devrait procéder assez rapidement.
Mme Bleau: J'espère parce que c'est cela qui est
Important.
M. Rémillard: Votre question est... On va le voir par la
pratique.
Mme Bleau: C'est cela.
M. Rémillard: Vous savez, on va le voir par la pratique.
M. le Président, dans ce contexte-ià, il faut se
référer, bien sûr, à des normes de pratique qui vont
devoir s'appliquer. On va voir comment le système va
procéder.
Le Président (M. Marcil): M. le député
de
Taillon.
M. Filion: Évidemment, on discute uniquement pour avoir
l'heure juste. C'est bien Important.
Le Président (M. Marcil): II est exactement 17 h 25.
M. Filion: On discute juste pour cela. Quand Mme la
députée de Groulx demande combien de temps cela va prendre,
d'abord, il faut se comprendre. Actuellement, le percepteur de la pension
alimentaire, je pense qu'il écrit une lettre avant et des fois il prend
le téléphone. Il va continuer à faire cela.
Deuxièmement, une fois que la saisie est faite - M. le ministre
j'aimerais que vous m'écoutiez - ce ne sera pas plus court avec le
projet de loi 33. La saisie reste la même. Ce sont les mêmes
procédures de saisie-arrêt, en main tierce... Cela ne change rien.
Il n'y a pas une saisie-arrêt... En tout cas, des délais d'une
semaine sur une saisie-arrêt, je dois dire, permettez-moi de sourire un
petit peu. J'ai pratiqué le droit.
M. Rémillard: Je vais demander à M. Pleau de vous
expliquer.
M. Filion: Laissez-moi terminer peut-être.
M. Rémillard: Excusez-moi. Je vous présente mes
excuses, M. le député.
M. Filion: Bon, chacun notre tour. M. Rémillard:
J'ai terminé. Allez-y.
M. Filion: De dire cela, ce n'est pas exact. C'est tout. Il ne
faut quand même pas en faire un grand plat. Pour dire l'heure juste, ce
n'est
pas cela. Après le projet de loi 33, les dames ou les messieurs
qui vont avoir une créance alimentaire, je vais vous dire, cela va
être à peu près... Espérons un peu moins...
Admettons que le percepteur va avoir plus de liberté, mais les
délais ne seront pas raccourcis de trois mois à une semaine. Ils
vont peut-être passer de douze semaines à onze semaines comme
délai moyen. Voilà. Et dire plus que cela... En moyenne, j'ai
bien dit. Il y a des cas où cela peut aller plus vite, mais celui qui ne
veut pas payer, il ne paie pas plus même s'il a reçu un coup de
téléphone. Celui qui est sous saisie, il est sous saisie quand
même, avec le projet de loi 33 ou sans le projet de loi 33. Cela ne
change rien. En ce qui concerne la saisie, cela ne change rien, cela n'ira pas
plus vite, M. le ministre. Les saisies vont toujours demeurer l'arme Judiciaire
par excellence pour le percepteur. Il n'y en aura pas d'autre, à moins
que vous en inventiez dans le Code de procédure civile.
M. Rémillard: M. le Président, est-ce que je
pourrais demander à Me Pleau...
M. Filion: II y a quand même des limites.
M. Rémillard:... de nous faire le point sur cette
question? Je pense que Mme la députée a posé une
excellente question et on va faire le point là-dessus: comment on
fonctionne présentement et comment on va fonctionner maintenant avec ce
projet de loi. M. Pleau, voulez-vous nous expliquer cela, parce qu'il y a
l'aspect technique de l'informatique qui rentre en ligne de compte, enfin, la
façon dont on procède mécaniquement? M. Pleau va nous
l'expliquer.
M. Pleau: Un des problèmes actuels causant des
délais, avec l'informatique on fonctionne présentement à
des paiements mensuels. Si l'heure de tombée est le 31 du mois et que
les arrérages sont entrés, le chèque va être
envoyé. Mais si les arrérages entrent le lendemain, c'est
retardé d'un mois. Ce que le ministère veut faire, c'est d'avoir
un système informatique qui va permettre de faire des versements
même hebdomadaires. A ce moment-là...
M. Filion: Cela n'a rien à voir avec le projet de loi
33.
M. Pleau: C'est à l'occasion du projet de loi 33 que ce
système-là va être mis en vigueur.
M. Filion: Cela n'a rien à voir avec le projet de loi 33,
changer l'informatisation des systèmes de perception et de paiement.
C'est à l'occasion du projet de loi 33, mais cela n'a rien à voir
avec le projet de loi 33. Non mais, c'est juste pour qu'on se comprenne. Je ne
veux pas faire un...
M. Rémillard: Écoutez, il faut qu'on se comprenne.
Si le projet de loi 33 n'existait pas, on ne pourrait pas !e faire selon le
processus du projet de loi 33.
M. Filion: Oui, l'informatisation des systèmes de...
M. Rémillard: Voyons donc!
M. Filion:... perception et de paiement pourrait être faite
sans le projet de loi 33. (17 h 30)
M. Rémillard: Si on n'a pas le droit, on ne peut pas
exercer le droit.
M. Filion: C'est administratif, M. le ministre, uniquement
administratif. Dans l'état actuel des choses, vous avez les mêmes
articles.
M. Rémillard: M. le Président, simplement Ce que !e
député de Taillon ne semble pas comprendre, c'est que
présentement on ne perçoit que les arrérages, alors qu'on
va pouvoir percevoir pendant un an. C'est ça qui est
intéressant.
M. Filion: Cela existe déjà...
M. Rémillard: Ça y est.
M. Filion:... l'année.
M. Rémillard: Cela recommence.
M. Filion: Non, mais je vous donne le numéro de l'article
qui permet au percepteur d'y aller pendant un an, c'est l'article - on va le
retrouver, si on peut le retrouver - 641. 1 qui dit: "S'il n'y a pas d'autre
réclamation au dossier et si l'exécution n'a pas
été suspendue conformément à 659. 5, la
mainlevée ne peut être donnée qu'un an après que les
arrérages de la pension ont été acquittés, y
compris ceux qui ont été accumulés depuis la saisie. "
Mme Bleau: On parle seulement des arrérages.
M. Filion: Non, non, un an: la mainlevée ne peut
être donnée qu'un an après...
Mme Bleau: Les arrérages.
M. Filion:... que les arrérages... Bien, cela donne un an.
Alors, le débiteur doit se mettre à jour et après cela on
garde la saisie tenante pendant un an. C'est la même chose.
M. Rémillard: Là, on parle des arrérages...
M. Filion: Ouf.
M. Rémillard:... alors qu'il se peut fort bien - en plus
de ça, c'est dans un cas de
saisie - qu'il n'y ait pas de saisie, qu'après une
première mise en demeure il paie. Alors, II va demeurer quand même
au dossier pour le reste du temps pendant un an, qu'il y ait saisie ou qu'il
n'y ait pas de saisie. Cela est intéressant aussi.
M. Filion: On revient à ce que j'ai dit au départ.
Quand il n'y a pas de saisie, et c'est la seule modification du projet de loi
33, le percepteur a un pouvoir au delà de la saisie. En tout cas! Je ne
veux pas faire un long débat avec ça, mais... Je suis
convaincu.
M. Rémillard: M. le Président, on sait très
bien que, dans les faits, il y a des suspensions qui, habituellement, se font
après six mois.
M. Filion: Dans le projet de loi, à l'article 553. 9,
dernier alinéa: Toutefois, le percepteur cesse d'être
chargé de la perception de la pension dès qu'il est avisé,
par un jugement, que le débiteur a été
libéré du paiement de... ou que le débiteur a
été libéré du paiement... et qu'aucun
arrérage n'était dû en date de la libération. C'est
différent un peu, mais...
M. Rémillard: C'est sûr que c'est différent,
j'essaie de vous dire...
M. Filion: Quand même!
M. Rémillard:... depuis une heure et demie que c'est
différent.
M. Filion: Bien, M. le ministre, je m'excuse.
M. Rémillard: Vous venez de me le dire, c'est
différent. Bravo, vous avez compris!
M. Filion: Je m'excuse.
M. Rémillard: C'est différent.
M. Filion: Je m'excuse, M. le ministre, vous connaissez mal votre
projet de loi. Ce que vous avez dit au début n'était pas
exact.
M. Rémillard: Bien non!
M. Filion: II n'y a pas de changement...
M. Rémillard: Cela vous a pris une heure et demie pour en
arriver à la conclusion que c'était différent.
M. Filion: Non, non, non.
M. Rémillard: Vous venez de dire que c'est
différent.
M. FHion: Écoutez!
M. Rémillard: N'est-ce pas cela que vous avez dit tout
à l'heure?
M. Filion: Je vous l'ai dit que c'était différent
au niveau...
M. Rémillard: Bon!
M. Filion:... de la saisie, je l'ai dit au début...
M. Rémillard: Voyons donc!
M. Filion:... mais que cela ne change pas le fond de la
réalité du système. D'ailleurs, M. Pleau vient de le dire,
c'est surtout au niveau de l'informatisation que ça va jouer et cela est
administratif. Quand même! En tout cas, j'en ai assez des remarques
préliminaires.
Le Président (M. Marcil): Bien non, nous en étions
à l'article 1, article 553. 1.
M. Filion: Ah oui! Bon, l'article 553. 3, cela va.
Le Président (M. Marcil): Cela va, adopté? M.
Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 553. 4
aussi?
M. Filion: Est-ce qu'il y a des changements par rapport au texte
actuel?
M. Rémillard: M. le Président, c'est un article qui
a trait aux modalités de présentation de la demande du
créancier. Lorsque madame voit que sa créance ne lui est pas
payée, donc qu'elle est créancière, ce sont les
modalités de présentation de sa demande. Alors, cet article
reprend essentiellement la règle actuelle qui est édictée
à l'article 659. 2 pour la situer dans la nouvelle section qui est
consacrée au percepteur des pensions alimentaires, tout en supprimant la
notion d'exécution forcée du jugement. On enlève la notion
d'exécution forcée du jugement pour faire la concordance avec
l'article 553. 3 qu'on vient de voir.
Le Président (M. Marcil): Adopté? J'appelle
l'article 553. 5.
M. Rémillard: M. le Président, c'est un statu quo.
Cet article regroupe essentiellement, sous l'article 553. 5, les règles
actuelles édictées aux articles 659. 3 et 661. 1.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
l'article 553. 6.
M. Rémillard: Cet article établit, au premier
alinéa, l'obligation pour le débiteur d'une pension alimentaire
d'effectuer, dès qu'il est informé que
le percepteur est chargé du dossier, les versements à ce
percepteur, même s'il n'y a pas saisie.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Article 553.
7?
M. Rémillard: M. te Président, c'est un article qui
regroupe dans la nouvelle section les règles prévues aux articles
659 3 et 661. 1, en précisant les pouvoirs qu'exercera le percepteur en
tant que responsable de la perception de la pension pension alimentaire aux
lieu et place du créancier, car le percepteur sera subrogé dans
les droits de celui-ci.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Article 553.
8?
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. Article 553.
9?
M. Rémillard: Cet article prévoit le fameux
délai d'un an auquel je me référais tout à l'heure
et indique jusqu'à quel moment le percepteur demeure chargé du
dossier. Donc, il pourra demeurer pendant un an.
M. Filion: Oui, j'ai lu cet article rapidement tantôt quand
je vous l'ai cité, mais, selon le troisième alinéa de
l'article 553. 9, cela veut dire que le débiteur, lorsqu'il n'y a plus
d'arrérages de pension alimentaire, peut s'adresser à un juge qui
le libère. C'est ça, n'est-ce pas? À ce
moment-là...
M. Rémillard: Non. On va lire le troisième
alinéa...
M. Filion: Je l'ai lu.
M. Rémillard: "Toutefois, le percepteur cesse d'être
chargé de la perception de la pension dès qu'il est avisé,
par un jugement, que le débiteur a été
libéré du paiement de tous les arrérages en vertu desquels
le percepteur demeurait chargé de la perception de la pension ou que le
débiteur a été libéré du paiement de la
pension alimentaire et qu'aucun arrérage n'était dû
à la date de la libération. "
C'est bien évident, si, pendant que le percepteur est en train
d'agir comme percepteur, un jugement vient porter sur les arrérages ou
sur la pension alimentaire elle-même, en disant que c'est terminé,
que le créancier n'a plus à payer une pension alimentaire
à la débitrice, à madame. Par le fait même,
ça change.
M. Filion: Est-ce que ce jugement peut intervenir durant
l'année?
M. Rémillard: Cela se peut, oui.
M. Filion: Donc, durant l'année, I est possible que le
percepteur cesse de percevoir la pension alimentaire?
M. Rémillard: Oui. Cela se peut. M. Filion: C'est
important.
M. Rémillard: II peut y avoir un jugement qui en arrive
à cette conclusion.
M. Filion: Voilà! Et le jugement en vient tout simplement
à la conclusion que le débiteur est libéré. Il faut
faire attention.
M. Rémillard: Bien oui.
M. Filion: II a été libéré du
paiement de la pension alimentaire et aucun arrérage n'était
dû à la date de la libération.
M. Rémillard: Si la pension est annulée par suite
d'un jugement...
M. Filion: Non pas annulée, non, non. Pas la pension
annulée, vous vous trompez. La libération à l'effet qu'il
a acquitté régulièrement sa pension alimentaire, ce n'est
pas la pension annulée, non, non, non. C'est pour ça que je vous
dis que j'ai mal lu tantôt, parce que j'ai pensé comme vous qu'on
parlait d'une annulation de pension alimentaire. Mais, ce n'est pas ce dont
traite le dernier alinéa de 553. 9.
M. Rémillard: il y a deux cas, si je lis bien. Le
débiteur a été libéré du paiement de tous
les arrérages en vertu desquels le percepteur demeurait chargé de
la perception de la pension, c'est le premier cas.
M. Filion: Ou que?
M. Rémillard: Ou le débiteur a été
libéré du paiement de la pension alimentaire - plus de pension,
terminé - et aucun arrérage n'était dû à la
date de la libération.
M. Filion: Donc, selon la première hypothèse, soit
que le débiteur a été libéré du paiement de
tous les arrérages en vertu desquels le percepteur demeurait
chargé de la perception de la pension alimentaire, cela veut dire que le
débiteur peut obtenir une libération de son paiement si ses
arrérages ont été acquittés.
M. Rémillard: II se peut fort bien que, par un jugement
rétroactif, on dise que les arrérages, parce que la pension
alimentaire n'a plus raison d'être et que le jugement peut être
rétroactif à telle date...
M. Filion: Oui, c'est ça, il est rétroactif.
M. Rémillard: Cela pouvait être
considéré, à ce moment-là, comme des
arrérages et ce ne l'est plus à cause de l'effet du jugement.
M. Filion: Bon, alors...
M. Rémillard: II s'agit simplement de prendre en
considération l'effet du jugement.
M. Filion: Non, mais la rétroactivité existe encore
aujourd'hui.
M. Rémillard: Bien oui.
M. Filion: Alors, M. le ministre, quelle est la différence
entre l'alinéa 3 de 553. 9 et le dernier alinéa de 641. 1 actuel?
Je ne parle pas de jugements annulant la pension alimentaire. Je parle de la
première partie de l'hypothèse du dernier alinéa de 553.
9. Le 641. 1, dernier alinéa.
M. Rémillard: Le dernier paragraphe ou le dernier
alinéa?
M. Filion: Oui, oui, le dernier paragraphe.
M. Rémillard: "S'il n'y a pas d'autre réclamation
au dossier et si l'exécution n'a pas été suspendue
conformément à l'article 659. 5, la mainlevée ne peut
être donnée qu'un an après que les arrérages de la
pension aient été acquittés, y compris ceux qui ont
été accumulés depuis la saisie. " C'est une autre chose,
cela. C'est une autre possibilité dans le cas où I y a
mainlevée et dans certaines circonstances.
Ici, c'est dans le cas où on se prononce sur la pension
alimentaire. Il peut y avoir différentes circonstances où on
déclare que la pension alimentaire n'existe plus.
M. Filion: Non, ce n'est pas cela qui est dit. C'est dit que le
débiteur a été libéré du paiement de tous
les arrérages en vertu desquels le percepteur demeurait chargé.
Et être libéré du paiement, c'est avoir acquitté le
paiement. Il va aller devant un juge, il va dire: Moi, j'ai payé mes
arrérages et je demande à être acquitté.
M. Rémillard: Mais écoutez, ici, ce que nous avons
dans 553. 9, dernier paragraphe, c'est la possibilité qu'y y ait un
jugement et que ce jugement en arrive à la conclusion que même les
arrérages n'étaient pas dus à cause de certaines
circonstances ou points de droit.
M. Filion: Bien non, ce n'est pas cela qui est dit. Il dit que...
Mais s'i a été acquitté, il est libéré du
paiement, en vertu de nos règles de droit?
M. Rémillard: II peut être acquitté, c'est
sûr. S'il n'y a plus de pension, s'il n'a pas de... S'il n'est plus
créancier...
M. Filion: Bon, alors. Non, non. S'il y a une pension, mais qu'il
l'ait payée?
M. Rémillard: il l'a payée. Mais s'il l'a
payée en trop, il n'avait pas à la payer. Donc, les
arrérages n'étaient pas de vrais arrérages.
M. Filion: II est libéré du paiement.
Écoutez, je prends 553. 9. Le débiteur a été
libéré du paiement de tous les arrérages, supposons qu'il
les a payés, est-t-il libéré du paiement, oui ou non? Non,
mais il peut le demander au juge.
M. Rémillard: Écoutez bien. Ce sont les
arrérages qui déclenchent le processus qui implique le
percepteur. Le percepteur va agir lorsqu'il y a des arrérages et, par
conséquent, va demander que les arrérages soient payés et
il va demeurer au dossier pendant un an ensuite pour qu'il n'y ait plus de
même situation et que la femme reçoive sa pension.
En fonction de cela, s'il y a un jugement qui arrive et que ce jugement
porte sur les arrérages, parce qu'on dit que la pension alimentaire
n'existait pas et qu'elle n'existait pas à telle date, donc, les
arrérages qui ont été perçus n'ont pas besoin
d'être perçus.
M. Filion: Cet exemple qui annule les arrérages par un
jugement de cour, c'est clair. Mais, ce que je vous dis, c'est dans le cas
où N y a paiement des arrérages par le débiteur de
l'obligation. Est-ce qu'il y a quelque chose qui empêcherait le
débiteur d'obligation de s'adresser à un juge, de demander
d'être libéré et puis d'envoyer le jugement au percepteur
pour qu'il y ait une mainlevée? C'est cela que dit l'article.
M. Rémillard: S'il a payé en trop...
M. Filion: Non, non, il n'a pas payé en trop. Il a
seulement payé.
M. Rémillard: Écoutez, il a payé et puis il
y a un jugement qui lui dit qu'il n'avait pas d'affaire à payer. Il va
recevoir son argent.
M. Filion: Non, non, laissez faire le jugement. Regardez,
là. Je dois une pension alimentaire, je les ai payés, mes
arrérages. Je m'adresse au juge, comme c'est écrit là, et
je lui dis: Je les ai acquittés, mes paiements. Peut-être parce
que le juge en a réduit une portion, peu importe, mais le juge dit que,
quand je paie ma pension alimentaire, je suis libéré du paiement.
(17 h 45)
M. Rémillard: Mais s'il a été
acquitté, il est libéré du paiement en vertu de nos
règles de droit? M. le député, j'ai de la
difficulté à
percevoir votre question. Essayez...
M. Filion: Je vais la poser autrement.
M. Rémillard:... de la poser autrement. Nous sommes
plusieurs Ici. Je ne suis pas seul, nous sommes trois, quatre. J'ai de
très bons conseillers et nous ne comprenons pas de quoi vous parlez.
M. Filion: Deux questions. Est-ce que, en vertu de l'article 553.
9, un débiteur, qui a acquitté ses arrérages de pension
alimentaire, peut s'adresser au juge pour demander, conformément au
dernier paragraphe, d'être déclaré libéré du
paiement de ses arrérages? C'est ce que cela me dit. Je suis avocat.
M. Rémillard: La seule façon dont il pourrait
l'être, c'est si la pension n'existe plus. Tant que la pension existe, la
loi va s'appliquer et, pendant un an, le percepteur va être dans le
dossier.
M. Filion: Je vais poser ma question autrement. En vertu de
l'article 641. 1, la mainlevée ne peut être levée, sauf en
certaines conditions, qu'un an après le paiement des arrérages.
D'accord? En vertu de l'article 553. 9, même si on ne s'entend pas sur le
libellé du dernier paragraphe, c'est le même délai d'un an.
Il n'y a pas de changement dans la situation actuelle.
M. Rémillard: Le délai d'un an que nous trouvons au
niveau du percepteur, il est de rigueur, c'est-à-dire que le percepteur
demeure, pendant un an, dans le dossier.
M. Filion: Quand il y avait une saisie aussi. M.
Rémillard: C'est Impératif.
M. Filion: Oui, mais il y avait... Et l'article 640. 1?
M. Rémillard: II pouvait y avoir mainlevée.
M. Filion: II pouvait y avoir mainlevée uniquement dans
certaines conditions. Donc, on a le même délai d'un an.
M. Rémillard: II n'y a pas de suspension. Le délai
d'un an ici, il est de rigueur pendant un an. C'est ce que j'essaie de vous
expliquer. Je m'en excuse, je n'ai peut-être pas les termes exacts, mais
j'essaie de vous le dire, j'ai tous mes conseillers ici qui essaient de vous
dire aussi la même chose. Il faut bien comprendre que le délai
d'un an va s'appliquer de rigueur, c'est-à-dire que le percepteur va
être dans le dossier pendant un an.
M. Filion: II est au dossier pendant un an.
Mais, dans les cas de saisie, M. le ministre?
Prenons la situation actuelle, la mainlevée ne peut être
accordée qu'après l'expiration d'un délai d'un an. On
s'entend là-dessus? Oui ou non?
M. Rémillard: Comment me dites-vous cela?
M. Filion: Pour bien comprendre le projet de loi, il faut
comprendre la situation actuelle. Dans le cas de la situation actuelle, une
mainlevée ne peut être accordée qu'un an après le
paiement des arrérages, soit après que les arrérages aient
été payés.
M. Rémillard: À moins qu'il y ait une suspension de
l'obligation.
M. Filion: Oui, mais c'est entendu. On se comprend
là-dessus.
M. Rémillard: C'est entendu, mais c'est important.
M. Filion: Oui, mais l'article 553. 9 aussi prévoit une
suspension d'obligation.
M. Rémillard: Oui, mais l'article 553. 9 est fondé
essentiellement, comme tout le projet de loi, sur une obligation. Si vous avez
un créancier, vous avez un débiteur, donc vous avez une
obligation. Si l'obligation n'existe plus, par le fait même, les
règles de droit ne s'appliquent pas.
M. Filion: C'est la même chose actuellement aussi, M. le
ministre. Vous vous imaginez bien que le débiteur, qui est
libéré de sa pension alimentaire actuellement, n'a pas une saisie
sur le des pendant un an. C'est le même état du droit.
M. Rémillard: II y a une saisie, pour faire face...
M. Filion: Laissez-moi finir, vous allez comprendre. Laissez-moi
terminer. La situation actuelle, c'est qu'il faut attendre un an après
le paiement des arrérages pour obtenir mainlevée de la saisie,
premièrement. Deuxièmement, avec le projet de loi 33, il va
falloir attendre un an après le paiement des arrérages.
M. Rémillard: Un an pendant lequel le percepteur va
être dans le dossier pour percevoir les pensions alimentaires.
M. Filion: S'il y a une saisie, il est au dossier un petit peu.
C'est lui qui fait la saisie.
M. Rémillard: Bien sûr, I y a une saisie pour payer
les arrérages. Ensuite, il ne peut pas faire une saisie pour payer le
futur. S'il y a des arrérages, il va faire une saisie pour payer les
arrérages.
M. Filion: C'est la même chose actuellement.
M. Rémillard: Ce qui va suivre, par contre, c'est qu'il va
demeurer automatiquement dans le dossier pour un an, à compter de la
date des arrérages.
M. Filion: C'est la même chose, c'est la situation
actuelle.
M. Rémillard: Non, parce que dans la situation actuelle,
il peut être relevé de son obligation. Alors qu'ici, le percepteur
demeure dans le dossier.
M. Filion: On va avancer. Deux choses. Premièrement, je ne
suis pas sûr que le dernier paragraphe de l'article 553. 9 soit bien
rédigé. Supposons qu'il soit bien rédigé, que vos
juristes vous disent qu'il soit bien rédigé. À tête
reposée, dans une semaine, faites venir vos conseillers et ils vont vous
dire que le délai d'un an, c'est la même chose que dans la
situation actuelle. Il n'y a pas de changement. Dans le cas d'une saisie, il
n'y a pas de changement. Si une saisie reste au dossier actuellement, et s'il y
a une saisie, elle restera au dossier avec le projet de loi 33.
Alors, sur division.
Le Président (M. Marcil): Sur division.
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): J'appelle 553. 10.
M. Filion: Quel est l'ordre de grandeur, M. le ministre, des
frais que vous envisagez d'imposer au débiteur par règlement?
M. Rémillard: Si le débiteur paie suivant la mise
en demeure, il peut y avoir un tarif de 25 $, qui serait donc
réclamé du débiteur, et un tarif de 50 $, dans les cas
où il y a exécution forcée. On est en train
d'étudier cela, ce n'est pas définitif.
M. Filion: Ma suggestion, c'est que vous ne devriez pas imposer
de frais à celui qui paie sur simple mise en demeure. Après tout,
il n'entraîne pas de frais énormes, une lettre, etc., quitte
à en imposer peut-être davantage à celui qui ne se rend pas
à la mise en demeure. Je trouve que cela fait bien des 25 $ pour une
lettre. C'est ma suggestion. C'est un projet de règlement, on va le voir
passer à un moment donné.
M. Rémillard: Oui, je prends bonne note de votre remarque,
mais je voudrais simplement vous dire que la mise en demeure déclenche
tout de suite le processus du percepteur, parce que là, il est en
défaut.
M. Filion: Oui, c'est sûr.
M. Rémillard: Alors il demeure pendant un an avec le
dossier.
M. Filion: Mais la mise en demeure a été
envoyée au moment où l'on se parle. Cela existe.
M. Rémillard: Ce que je veux vous dire, c'est qu'il y a un
tarif de 25 $, mais il faut comprendre que, même si le débiteur
paie suivant la mise en demeure, le créancier, lui, demeure au dossier
pendant un an, donc il y a des frais. Il y a des conséquences.
M. Filion: Oui, mais le projet de loi ne vise pas à faire
faire de l'argent au gouvernement.
M. Rémillard: Non, absolument pas.
M. Filion: Le gouvernement va en faire par exemple, parce qu'en
imposant des frais quand il y a une saisie, le gouvernement va faire de
l'argent. Ce que je dis, c'est que dans les cas où il n'y a pas de
saisie, il me semble que le gouvernement devrait se passer de collecter des
frais d'un débiteur qui se rend à une simple lettre.
M. Rémillard: Écoutez, si votre recherchiste peut
trouver un moyen pour que le gouvernement fasse de l'argent là-dedans,
qu'il nous le fournisse.
M. Filion: Bien, il en fait avec le 50 $. Non, mais il y est;
c'est pour faire de l'argent. C'est le Conseil du trésor qui vous a
suggéré cela. Il en fait de l'argent avec cela; des 50 $, il va y
en avoir.
M. Rémillard: Bien, écoutez... M. Filion:
Alors, sur division.
De la saisie-arrêt
Le Président (M. Marcil): Sur division. L'article 1 est
adopté sur division. J'appelle maintenant l'article 2, 625. 1.
M. Filion: Cela va.
Le Président (M. Marcil): Cela va, adopté?
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): L'article 2 est
adopté?
M. Filion: II y a un amendement à un moment
donné.
Le Président (M. Marcil): J'appelle l'article 3, il y a un
amendement. Premièrement, "Sup-
primer dans le mot "exécution" de la première ligne du
texte proposé la lettre "c" devant la lettre "é", et
deuxièmement, "supprimer à la fin du paragraphe b) ce qui suit
"le cas échéant".
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): L'amendement est adopté.
L'article 3 est adopté tel qu'amendé?
M. Filion: Oui. Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle
maintenant l'article 4.
M. Filion: Adopté.
De la saisie-exécution mobilière pour le
paiement des pensions alimentaires
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 5?
M. Filion: Oui, c'est de la concordance, c'est correct.
De la suspension de la saisie-arrêt des
traitements, salaires ou gages
Le Président (M. Marcil): Cela va, adopté.
L'article 6? C'est de la concordance aussi.
M. Filion: Oui. Adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 7?
M. Filion: Oui, cela va.
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 8?
M. Filion: Cela va.
De la saisie-exécution des immeubles
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 9?
M. Rémillard: C'est de la concordance, M. le
Président.
M. Filion: Je m'excuse, 661. 1. Alors cela va, adopté.
Le Président (M. Marcil): Adopté?
M. Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): L'article 10?
M. Rémillard: II s'agit d'un article de concordance, M. le
Président.
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Cela va pour l'article 10?
M. Filion: Adopté.
Loi sur l'aide sociale
Le Président (M. Marcil): Adopté. L'article 11?
M. Rémillard: II s'agit d'un autre article de concordance,
M. le Président.
M. Filion: Adopté.
Code de procédure civile (suite) Le Président (M.
Marcil): Adopté. L'article 12?
M. Rémillard: II s'agit d'une disposition transitoire pour
les créanciers qui, au moment de l'entrée en vigueur de la loi,
auront confié leur dossier au percepteur en vue des anciennes
dispositions. Nous pourrons alors lui demander d'agir en vertu des nouvelles
dispositions.
Le Président (M. Marcil): Adopté?
M. Filion: II s'agit d'une disposition transitoire, en somme.
Cela va.
Le Président (M. Marcil): Cela va? Adopté? M.
Filion: Oui.
Le Président (M. Marcil): L'article 13? M. Filion:
Adopté.
Le Président (M. Marcil): Le titre du projet de loi est
adopté?
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Le projet de loi est
adopté tel qu'amendé?
M. Filion: Adopté.
Le Président (M. Marcil): Donc, à ce stade-ci, la
commission a accompli son mandat et j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 17 h 56)