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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 23 février 2000 - Vol. 36 N° 46

Consultations particulières sur le projet de loi n° 87 - Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
M. Roger Bertrand
M. Jacques Côté
M. Jacques Dupuis
M. François Ouimet
M. Marc Boulianne
M. Henri-François Gautrin
*M. Pierre Landry, ADMA
*M. Jacques Martineau, idem
*Mme Sophie Fortin, OCRIQ
*M. Florent Francoeur, idem
* M. Alphonse Galluccio, Ordre des comptables en management accrédités du Québec
*M. François Renauld, idem
*M. Louis Beaulieu, OOAQ
*Mme Ginette Diamond, idem
*M. Charles Bernard, CMQ
*M. André Garon, idem
*M. Rémi H. Lair, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quatorze heures trois minutes)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît. La commission des institutions est réunie afin de tenir des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. En application de l'article 130, M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Pelletier (Chapleau).

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Au niveau de l'ordre du jour proposé, une période de 30 minutes sera réservée pour les remarques préliminaires. Ensuite suivront des blocs de 45 minutes où nous aurons l'occasion de rencontrer des représentants des organismes suivants: l'Ordre des administrateurs agréés du Québec, l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec, l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec, l'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec et, enfin, le Collège des médecins. Nous devrions ajourner, en principe, à 18 h 15.

Est-ce que cet ordre du jour est adopté?

Une voix: Adopté.


Remarques préliminaires

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Alors, nous passons donc à l'étape des remarques préliminaires. Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, merci, M. le Président. Donc, je tiens à saluer tous nos collègues de l'Assemblée nationale qui sont présents aujourd'hui. Ça fait un petit bout de temps que nous n'avons pas été en commission, alors bonjour. Et bonjour, mesdames et messieurs qui, comme toujours, acceptez de donner de votre temps pour nous informer davantage, et toujours dans le but de vouloir légiférer de façon, je dirais, la plus intelligente possible, mais surtout en s'assurant des besoins de nos citoyens, qui doivent toujours être le premier élément à considérer et l'élément le plus important.

Alors, le projet de loi n° 87, nous savons tous qu'il est important pour le système professionnel québécois. Il faut rappeler qu'il s'agit d'abord de plusieurs ajustements aux règles et à l'organisation de nos professions. Jusqu'ici, le projet a pris plusieurs formes et aura bénéficié de beaucoup, beaucoup d'attention. On se rappelle le projet de loi n° 454 et divers travaux que nous avons menés substantiellement sur les mêmes sujets. Il n'est donc pas nécessaire de vous rappeler par le détail les échanges que nous avons déjà eus sur plusieurs des dispositions qui sont proposées et que vous connaissez. Outre les travaux parlementaires déjà tenus, l'Office des professions a lui-même mené diverses consultations auprès des milieux concernés.

Les échanges que nous entreprenons aujourd'hui sont une étape supplémentaire dans la consultation. Nous sommes là pour écouter celles et ceux qui nous aideront par leur expérience à mettre un point final à l'élaboration des dispositions les plus adéquates en la matière. Les échos que j'ai déjà eus jusqu'à maintenant et ceux reçus par l'ensemble du système professionnel m'indiquent que ce projet de loi répond particulièrement à de nombreuses attentes maintes fois exprimées et débattues. Nous comprenons toutefois que le besoin ait pu être exprimé d'une ultime consultation en vue d'éclaircir les derniers points, et surtout à la demande de nos collègues de l'opposition. C'est une des raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui, pour débattre encore de certains points qui, je pensais, étaient réglés. Mais, on va voir un petit peu ce qu'il en est, c'est l'objet de cette consultation, et je suis convaincue que nous allons pouvoir finaliser ce projet de loi dans les meilleurs délais.

Alors, il est évident que certaines problématiques sont soit vécues ou appréhendées en lien avec les dispositions. C'est principalement en vous écoutant que nous allons être à même de préciser exactement la teneur de vos appréhensions ou encore nous permettre d'expliquer notre perception de ce projet de loi avec les modifications que nous proposons. Les sujets sont variés et ils sont connus, mais je vais me permettre d'en signaler quelques-uns qui vont être invoqués, soit la vente des lunettes de lecture prêtes à porter, le domaine des orthèses podiatriques, le titre de docteur, l'inspection professionnelle, la formation continue obligatoire ou encore le titre de conseiller en management.

Entre-temps, des multiples questions que concerne le projet de loi n° 87, il ne faut pas perdre de vue que nous sommes dans le cadre d'une bonification continue de nos règles et mécanismes et non d'une vaste mise à jour du système professionnel. Comme vous le savez, nous menons de front à la fois l'ajustement régulier et la mise à jour de l'ensemble du système professionnel. J'ai indiqué au milieu professionnel à l'automne que, malgré tout le travail que suppose l'exercice de mise à jour, le travail sur les mécanismes et structures du système, cela ne nous empêcherait pas d'apporter d'ici là des solutions ponctuelles à des problèmes identifiés et que des aménagements plus vastes ne retarderont pas les efforts que nous menons au quotidien pour garder l'efficacité du système tel qu'il est. Les travaux que nous entreprenons aujourd'hui en sont, je le crois, un exemple concret.

J'aimerais profiter de l'occasion pour vous rappeler que nous avons présenté, voilà trois mois, un plan d'action qui vise justement à moderniser le système professionnel, notamment en allégeant la réglementation et en favorisant la collaboration des professionnels. Il y a six chantiers qui ont été ouverts, alors je les rappelle brièvement: l'allégement de la réglementation et de son processus; l'amélioration des mécanismes de contrôle que sont l'inspection et la discipline; les nouveaux modes d'exercice et les formes modernes de regroupement; les bénéfices nets du système professionnel; la révision des champs de pratique des architectes et des ingénieurs; et, enfin, la modernisation de l'organisation professionnelle du secteur de la santé et des relations humaines.

Alors, la mise en oeuvre de ces chantiers est en bonne voie. Comme vous le savez, il y a deux chantiers qui ont été lancés incessamment, soit celui sur la déréglementation et celui de la santé, et j'en profite pour remercier tous ceux et celles qui ont accepté de siéger sur ces comités parce qu'il y a beaucoup de travail à faire. Et, quant aux autres chantiers, ils sont en bonne voie, Me Samson. Ils sont presque tous nommés, il reste quelques personnes. Alors, jusqu'à maintenant, on ne m'indique aucun retard dans les délais que nous avions annoncés.

Alors, maintenant, M. le Président, je vous dirais sur un ton positif que nous sommes sur la bonne voie. Il est évident que les perspectives de ce grand chantier de la réforme du système professionnel créent beaucoup d'attentes, mais il y a également de grands espoirs, et, des discussions que j'ai eues jusqu'à maintenant, je peux vous assurer que les travaux vont bon train et que c'est l'ensemble du système professionnel qui en sortira gagnant. Alors, aujourd'hui, nous allons écouter pour mieux comprendre et pour mieux légiférer dans les meilleurs délais. Je vous remercie.

Excusez-moi, juste avant, j'ai oublié également de saluer tous les gens de l'Office des professions qui nous accompagnent, qui sont en arrière. Et ce sont des gens que vous rencontrez régulièrement, qui discutent avec les ordres professionnels, et je tiens à les remercier de leur collaboration. Merci.

(14 h 10)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, Mme la ministre. Toujours à l'étape des remarques préliminaires, M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de D'Arcy-McGee.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: M. le Président, Mme la ministre, MM. les députés, il me fait plaisir de participer aux travaux de cette commission parlementaire à l'occasion des consultations particulières sur le projet de loi n° 87, soit la Loi modifiant le Code des professions. Je suis heureux que la ministre de la Justice et ministre responsable de l'application des lois professionnelles ait consenti – je vous remercie – à entendre certains ordres professionnels. Je voudrais aussi souhaiter la bienvenue aux différents intervenants des ordres professionnels et les remercier de leur implication au présent débat.

M. le Président, j'aimerais vous faire remarquer que ce projet de loi, comme l'a mentionné la ministre, est quasi identique à l'ancien projet de loi n° 454 déposé en 1998, avec les changements et les améliorations qui ont été faites. Le projet de loi n° 454 n'a jamais passé le stade de sa présentation. J'aimerais vous rappeler, à cette occasion, que j'avais demandé au ministre de tenir, dans le temps, des auditions publiques parce que je croyais et je crois toujours qu'il est important de connaître les opinions des divers organismes de services et des ordres professionnels sur les questions qui les touchent de près et qui auront des conséquences importantes pour le futur. Nous avions d'ailleurs reçu des mémoires présentés par les ordres professionnels exprimant leurs points de vue sur le projet de loi n° 454, et je tiens à remercier les ordres professionnels qui ont participé à ce «process» et les assurer que leurs commentaires ont été étudiés avec diligence.

Comme je l'ai affirmé lors de l'adoption du principe du projet de loi n° 87, ce projet de loi touche plusieurs aspects de notre système professionnel et, par le fait, son adoption aura des conséquences sur les activités de 44 ordres professionnels. Nous nous devons d'être vigilants et prudents. N'oublions pas que plus de 225 000 professionnels seront régis par cette loi. Que ce soit le domaine de la santé, des services sociaux, de l'habitation, du système juridique, des sciences, technologie, tous les aspects de notre vie quotidienne sont intimement liés à notre système professionnel.

Lors de l'étude du présent projet, nous entendons nous concentrer sur trois éléments essentiels. En premier lieu, nous devons nous assurer que les nouvelles dispositions législatives qu'entend introduire la ministre ne viendront pas entraver le fonctionnement du système professionnel québécois, mais au contraire en faciliter l'existence et l'application.

En second lieu, en considérant que le rôle du législateur n'est pas de créer des tensions dans les divers ordres professionnels, de leurs administrateurs ou de leurs membres actuels et futurs, mais plutôt d'encourager une cohabitation harmonieuse, il faudra se demander au cours de la présente consultation si le projet de loi n° 87 engendre des conditions d'exercice plus difficiles ou, au contraire, des conditions bonifiées et améliorées pour les milliers de professionnels et les administrateurs et le public.

Le troisième élément essentiel et celui que je considère le plus important, M. le Président, c'est de veiller à la protection du public. Notre mission première, comme législateurs, était et demeure la protection du public. Pour la population du Québec, et d'ailleurs à l'étranger, le recours aux services professionnels québécois doit demeurer comme il est aujourd'hui, synonyme des standards élevés de compétence, de rigueur, d'honnêteté et d'intégrité. Les ordres professionnels sont notre gage de confiance et de sécurité envers les professionnels. Les professionnels constitués en ordres ont le mandat de maintenir les conditions essentielles de cette protection du public, à savoir le contrôle de la compétence des professionnels, la vérification de leurs pratiques, l'élaboration et l'application du code de déontologie qui fixerait les règles fondamentales de comportement et enfin un dispositif d'enquête et de discipline permettant aux ordres professionnels de sanctionner les manquements et erreurs de leurs membres.

Nous avons un système composé de partenaires importants tels que l'Office des professions – et je prends ce moment pour aussi exprimer la bienvenue aux membres de l'Office des professions et particulièrement pour remercier le président, M. Samson, pour sa disponibilité et son conseil; il est un professionnel vraiment de premier ordre, et je le remercie beaucoup pour l'attention qu'il apporte à l'Office des professions – le conseil des professions et les ordres professionnels qui ont tous fait leurs preuves. Nous avons un système professionnel de qualité, qui fait l'envie partout dans le monde, et nous pouvons être fiers qu'il se soit donné comme mission principale de s'assurer que chaque ordre professionnel respecte son mandat de protection du public.

Je souhaite une modernisation du système professionnel, et, nous aussi, l'opposition officielle, suivons les travaux que la ministre a entamés, l'étude que vous avez entamée et les six volets. Nous avons fait une demande par écrit à la ministre, et, je la répéterai ici publiquement, j'espère qu'il y aura une place dans chaque commission, un siège pour l'opposition, un siège ad hoc dans les études qui seront entamées. J'espère que la ministre répondra dans une manière positive pour permettre à l'opposition de suivre les travaux de chacun de ces six volets. Nous allons écouter avec intérêt les opinions des divers ordres qui seront devant nous sur le projet de loi n° 87, et je vous remercie, M. le Président, pour le temps que vous m'avez donné.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de D'Arcy-McGee. Oui, M. le député de Saint-Jean.


M. Roger Paquin

M. Paquin: Alors, au nom de la formation politique formant le gouvernement et du corps législatif de cette formation, il me fait plaisir, aujourd'hui, de saluer l'ensemble des participants à la commission et également tous ceux qui viendront ici, afin de favoriser la qualité de nos travaux, témoigner de leurs points de vue sur les différentes mesures proposées à l'intérieur du projet de loi.

Ce qu'il est important de signaler, c'est que, bien sûr, je pense qu'il est important de poursuivre le chantier de la réforme du système professionnel, mais que pour autant il ne faut pas s'empêcher, au fur et à mesure, dans un processus d'amélioration continue, de faire en sorte que les dispositions soient adoptées pour faciliter la cohabitation harmonieuse entre les différents ordres de façon à aplanir certaines tensions qui pourraient émerger si on hésitait à agir au fur et à mesure pour faire les corrections et les ajustements qui s'imposent. Et c'est pour ça que je pense qu'il est important que nous adoptions au fil des ans des dispositions qui, tout en visant centralement à faire la protection du public, ont comme effet de faciliter le vécu de ces 220 000 et quelques professionnels, de ces 44 ordres qui font au Québec un travail extrêmement important, un travail fondamental pour la population.

Alors, le présent projet de loi apporte certaines modifications de différents ordres, vise à assouplir certains aspects du cadre réglementaire, vise à revoir certains éléments sur, par exemple, la publicité des décisions ou différents éléments comme ça. Je pense qu'il est important, dans ce cadre-là, que nous portions une attention sérieuse à ce qui va nous être dit par ceux qui vivent ces éléments-là au quotidien, et nous abordons ce travail-là dans une perspective d'ajustements réguliers, d'adaptation continue, de bonification continue d'un système qui, jusqu'à ce qu'il soit remplacé par les fruits de ce chantier sur la réforme du système professionnel, demeure quand même éminemment adéquat et fait en sorte que le public bénéficie de services professionnels de grande qualité.


Auditions

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le député de Saint-Jean. S'il n'y a pas d'autres interventions à l'étape des remarques préliminaires, j'inviterais les représentants du premier groupe que nous rencontrons dans le cadre de ces consultations particulières sur le projet de loi n° 87. Il s'agit de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec, dont son président M. Michel Côté.

Alors, je rappelle donc qu'aux fins de la présente rencontre nous avons réservé une période de 45 minutes, qu'une quinzaine de minutes est réservée pour la présentation proprement dite, et nous passerons ensuite aux échanges. Alors, vous avez la parole, M. Côté, en vous invitant à nous présenter la personne qui vous accompagne.


Ordre des administrateurs agréés du Québec (ADMA)

M. Landry (Pierre): Alors, M. le Président, je vous présente M. Martineau, qui m'accompagne – Jacques Martineau – président du secteur CMC, Conseil en management certifié, à l'Ordre des administrateurs agréés. Moi-même, je suis Pierre Landry, directeur général et secrétaire. Et M. Côté, étant absent du pays, n'a pas pu être présent cet après-midi.

(14 h 20)

Alors, M. le Président, Mme la ministre, M. le président de l'Office, membres de la commission, nous désirons, dans un premier temps, comme il se doit, vous remercier de nous avoir donné l'occasion de nous exprimer sur certains aspects du projet de loi. Nous sommes, de façon très générale, en accord avec ce projet qui vise finalement à améliorer... à procéder à des ajustements, qui seront bienvenus, au Code des professions et qui permettront vraisemblablement à nous, comme Ordre, de mieux jouer notre rôle. Notre intervention cet après-midi sera très limitée – et non limitative – pour ne porter finalement que sur un aspect très précis du projet de loi, soit sur l'article 2 du projet. Et, d'ailleurs, dans la foulée du n° 454 et d'autres projets précédents, effectivement, nous sommes toujours un peu surpris de voir cette question, alors que le projet, dans son ensemble, vise toute la mécanique du système, l'économie, comme on dit, de la loi. Bref, nous allons y aller de la présentation.

Dans le fond, l'article 2 vise à modifier l'article 36i du Code des professions en ajoutant, après le mot «conseiller en management», le mot «certifié». C'est une modification qui paraît anodine et, dans le fond, qui vient sortir, à notre point de vue, du Code des professions l'appellation de «conseiller en management» et, donc, finalement permettre à tout un chacun, membre du public, professionnel ou autre, de pouvoir utiliser ce titre qui, jusqu'à maintenant, dans le fond, est réservé à l'Ordre des administrateurs agréés. Nous n'avons pas l'intention de vous faire une argumentation partisane, étroite et corporatiste, je vais simplement essayer de rappeler un peu le contexte dans lequel cette addition a été faite au Code des professions.

Vers, au fond, 1992-1993, dans le cadre de la fusion de l'Institut des conseillers en management du Québec, on attribuait à notre ordre la mission d'encadrer le titre de CMC aussi bien que l'appellation de conseil en management. Il s'agit, pour certains, d'une erreur à réparer. Nous croyons que, au contraire, les années ayant passé – et nous allons tenter de vous en faire la démonstration – ce serait peut-être une erreur que d'essayer de réparer une erreur qui libéralise ce titre.

Quelques mots, peut-être, sur l'industrie du conseil. Il y aurait, semble-t-il, quelque – et là les chiffres varient énormément – 25 000 personnes qui oeuvrent aujourd'hui dans le conseil en management. Nous en regroupons, à l'Ordre des administrateurs agréés, quelque 800 à 900 membres d'un ordre. Il est bien clair pour nous que l'industrie du conseil en management, nous ne prétendons pas pouvoir l'encadrer au complet comme c'est là. Nous savons également – et c'est la nature des choses actuelles – que beaucoup de ces conseillers sont également des membres d'autres ordres professionnels. Il est clair que les comptables agréés, les comptables généraux licenciés, les ingénieurs, les conseillers en relations industrielles, les comptables en management accrédités exercent et font du conseil en management.

Aux termes du Code comme il est actuellement, en tant que gardiens de la désignation, nous aurions la possibilité légale de poursuivre ces professionnels pour usurpation de titre. Nous aurions pu le faire. Nous ne l'avons pas fait, et on nous le reproche à l'occasion. Nous ne l'avons pas fait pour deux motifs. Un motif qui est d'ordre purement économique: nous sommes un petit ordre, nos moyens sont modestes. Mais nous ne l'avons pas fait aussi pour une autre raison, c'est que nous n'avons pas la prétention de croire qu'il n'existe pas de bonnes pratiques chez ces autres professionnels et un certain conseil de qualité, et c'est dans cette foulée que notre argument actuel vise à vouloir conserver le titre au sein du système professionnel.

Revenons pour un moment au centre du débat qui nous occupe. L'objectif fondamental d'octroyer un acte exclusif, un titre réservé, un champ évocateur vise finalement, fondamentalement, à protéger le public ou à protéger un certain public. Parlons pour un moment de l'industrie du conseil et des PME. On sait qu'à l'heure actuelle, une proportion importante qu'on évalue jusqu'à... dépendant des chiffres et dépendant des définitions, qui peut se promener entre 50 %, 60 % et jusqu'à 95 % de l'économie québécoise est entre les mains des PME et, comme on dit des fois, des TTE. Des recherches récentes, qui ont été commanditées tant par les universités, par le ministère de l'Industrie et du Commerce, même par le Développement économique Canada, ces recherches nous disent, dans le fond, à l'heure actuelle, nous démontrent qu'il existe un lien important entre le conseil en management, la survie même des PME, leur développement, voire, évidemment, une croissance accélérée.

Il y a pourtant un frein important à la consommation ou à la première consommation du conseil en management. Parce que, ici, contrairement à la cigarette, on essaie de vouloir aider les gens à consommer une première fois et, dans le fond, il existe un frein chez l'entrepreneur, chez le dirigeant de PME. Ce frein-là, il est souvent d'ordre économique, mais il est d'autant plus... Et, les recherches que nous avons entre les mains actuellement nous le montrent, c'est la crainte de l'entrepreneur de faire affaire avec quelle sorte de conseiller. Avec qui je vais faire affaire? Est-ce que cette personne-là va être en mesure de m'aider ou est-ce que cette personne-là va simplement utiliser de grands honoraires et, finalement, me jouer des tours? La résistance de l'entrepreneur se situe à ce niveau-là.

Les entrepreneurs nous disent aussi dans les «focus groups», en substance: S'il existait un endroit, un point de référence, un label de qualité où est-ce qu'on pourrait se référer et se dire: Il semble exister à cet endroit... il y a des bonnes chances, quand je vais faire appel à cet endroit, à ce centre de référence, que j'aie affaire à un professionnel qui donne un conseil de qualité et qui, de surcroît, puisse me donner des recours, nous y ferions référence davantage ou nous utiliserions davantage les services d'un conseiller.

C'est un peu avec ces réflexions que notre ordre, dans le fond, des réflexions sur la modestie de nos moyens, si on veut, d'une part, d'autre part, sur ce dont on vient de parler précisément, la nécessité d'une qualité dans le conseil en management, sur la présence économique importante du conseil en management, que nous avons entamé chez les administrateurs agréés depuis cet automne des discussions et des échanges avec d'autres ordres, et des ordres parmi ceux que j'ai nommés auparavant, pour voir comment nous pourrions nous concerter pour conserver au sein du système professionnel le conseil en management, établir ensemble, par table de concertation ou autrement, une façon de s'harmoniser, d'établir ensemble des standards, un encadrement, une meilleure communication au public, et ce, dans le respect des compétences de chacun des ordres, parce que, au fond, il serait facile... Jusqu'à un certain point, ça a peut-être été vu comme ça pour un moment, dire: Il est facile de devenir conseiller en management certifié, devenez administrateur agréé. Alors, on peut comprendre qu'il y ait des réserves là-dessus quand on est déjà ingénieur ou comptable, et l'appartenance à deux ou trois ordres, ce n'est pas nécessairement une collection qu'on veut faire, à mettre sur nos murs.

Alors, le modèle auquel on fait, pour le moment, référence pourrait s'apparenter à celui qu'on voit en planification financière. On n'est pas allé très loin dans l'élaboration de ces modèles, mais l'analogie qui nous vient le plus facilement, c'est celle des planificateurs financiers où six ordres professionnels se voient la possibilité d'encadrer des gens qui possèdent le titre de planificateur financier au sein du système professionnel. Il y a d'autres modèles, mais c'est un peu celui-ci qui nous venait spontanément à l'esprit.

En conclusion, nous sommes d'accord avec le projet dans sa nature générale. Nous ne croyons pas que le débat qui est porté à votre attention devrait se faire. En fait, le débat ou l'argumentation qu'on vous apporte, on croit que c'est comme une excroissance dans le projet de loi actuel, nous croyons que le conseil en management ne devrait pas être retiré ou libéralisé du système professionnel, et ce, pour des motifs de protection du public et aussi en vue du développement économique des Québécois. Nous proposons que le conseil en management soit géré à l'intérieur du système d'une façon analogue – et vous comprendrez que nous n'avons pas élaboré davantage à ce moment-ci – à celle des planificateurs financiers. Nous avons aussi déjà commencé une réflexion avec d'autres ordres qui se disent intéressés à regarder cette formule. Ça terminerait ma présentation.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. Landry, à titre de directeur général et secrétaire de l'Ordre. Nous passons donc à la période d'échanges. Mme la ministre et députée de Lévis.

Mme Goupil: Merci, M. Martineau.

Une voix: M. Landry.

Mme Goupil: M. Landry. M. Martineau, c'est l'autre après, excusez-moi.

(14 h 30)

Vous avez dit tout à l'heure que vous aviez des échanges actuellement avec certains de vos collègues, les C.A., les C.G.A. et ingénieurs, est-ce que nous pourrions savoir un petit peu... Est-ce qu'il se dessine un consensus ou est-ce qu'il y a... Où en êtes-vous rendus dans vos discussions avec vos collègues concernant... Là, je ne sais pas, j'imagine que vous devez parler aussi de cette particularité-là, et est-ce qu'il y a un consensus qui semble se dessiner ou des solutions?

M. Landry (Pierre): Bien, en fait, nous avons déjà regardé... Effectivement, nous avons eu quelques rencontres avec les ordres que vous avez nommés, ce qui n'est pas à l'exclusion d'autres ordres qui pourraient se joindre à cette discussion. Ce que nous avons regardé à l'heure actuelle, c'est un peu le processus, si on veut, j'oserais dire, d'encadrement du conseil en management et les voies de promotion aussi, parce qu'il est clair aussi qu'il y a un aspect promotionnel, au sens où, si quelques ordres se joignaient, si on veut, dans une formule un peu plus commune, nous pourrions probablement mieux faire connaître qu'il existe telle chose que du conseil en management, un conseil en management de qualité. Là-dessus, je dirais, sur la base des principes, on s'entend assez bien.

La formule à trouver, ce n'est pas évident. Comme je vous ai dit, on parle davantage... Est-ce qu'on pourrait, par exemple, réserver un titre entre un certain nombre d'ordres, comme je parlais tantôt, de planification financière? Mais ce qu'on voudrait faire, c'est vraiment d'être en mesure quand même de normer, si on veut, ou d'avoir un certain standard sur le conseil, même si on ne parle pas ici du processus de conseiller en management certifié, qui est un processus quand même... il y a un processus d'accréditation qui existe, et tout ça, et ce n'est pas de ça qu'on parle ici. Et dans le fond, parmi les gens qui dans d'autres ordres feraient du conseil en management, nous regardons la possibilité d'établir, si on veut, une espèce de formule-parapluie ou une formule où tout le monde ensemble on pourrait élaborer ces normes communes, ces standards.

Mme Goupil: Parce que vous avez parlé d'un type qui pouvait être certifié puis un qui ne l'était pas? C'est bien ça?

M. Landry (Pierre): Oui.

Mme Goupil: O.K.

M. Martineau (Jacques): Est-ce que je pourrais faire un commentaire?

Mme Goupil: Oui, oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. Martineau.

M. Martineau (Jacques): Oui. Bien, je sais que certains ordres professionnels s'objectent à notre démarche et supportent donc qu'on rajoute le terme «certifié» dans l'article, voulant dire par là que le titre «conseil en management» pourrait être porté par qui le voudra bien. Je présume que, si ces ordres-là s'intéressent à la question, c'est parce que certains de leurs membres désirent porter ce titre-là. Sans ça, je ne vois pas pourquoi ils s'intéresseraient à cet élément-là.

Je pense qu'on mélange souvent le titre CMC du titre conseil en management. Ici, pour nous, on distingue complètement les deux. Le titre CMC, c'est un titre qui est encore protégé dans la nouvelle loi, qui demande des accréditations assez importantes, une démarche assez rigoureuse, tandis que le titre conseil en management, nous, on s'entendrait pour qu'il soit dissocié du titre CMC mais qu'il reste à l'intérieur des ordres professionnels au sens large du terme pour ne pas que n'importe qui puisse porter ce titre-là.

Parce que les CMC... En même temps, comme étant une partie de l'Ordre, comment voulez-vous que les CMC développent une stratégie de protection du public quand à peu près tout le monde peut porter le titre? Alors, il y a quelque chose qui est un peu embêtant quand on se fait dire que la seule mission d'un ordre, c'est la protection du public et que les CMC, si le titre conseil en management est dans le public, ne pourront pas avoir des éléments de coordination avec les ordres. Alors, ce que je voulais surtout amener ici, c'est que je pense qu'on associe, des fois on mélange CMC et conseil en management. Je crois que ça pourrait être deux choses différentes. C'est un peu notre proposition.

Mme Goupil: Je vous remercie, monsieur.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc.

M. Côté (Dubuc): Oui. Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Vous avez répondu, M. Martineau, en partie à la question que je voulais poser, mais je vais quand même vous demander: Le titre de conseil en management, est-ce que ça existe en soi? C'est-à-dire est-ce que quelqu'un peut dire: Moi, je suis conseil en management ou s'il faut être absolument... il faut avoir une autre profession pour l'exercer? C'est-à-dire, est-ce qu'il faut être comptable, soit être CGA ou...

M. Martineau (Jacques): Non, pas tel que la loi n° 87 le propose. Le seul titre qui serait protégé, c'est le titre conseil en management certifié. Donc, quelqu'un qui signe sur sa carte d'affaires conseil en management n'aurait pas à appartenir à quelque ordre que ce soit. Nous, ce qu'on propose, c'est qu'il fasse au moins partie d'un ordre pour qu'on puisse protéger le public dans le conseil en management, avec une coordination dans le public.

Vous savez, présentement dans les examens CMC il y a à peine la moitié des candidats qui passent l'examen à chaque année, puis pourtant, c'est un examen très simple de comment exercer une profession d'un conseiller en management. Alors, ce n'est pas si évident que ça de pratiquer cette profession-là, et au moins l'encadrement d'un ordre, ça serait le minimum requis, en se coordonnant entre nous.

M. Côté (Dubuc): Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, Mme la ministre.

Mme Goupil: Pour une précision, le fait que nous ajoutions certifié actuellement, certifié qui veut dire agréé aussi, c'est la même chose, est-ce qu'en soi ça ne constitue pas une mesure qui est efficace pour la publicité quant à la compétence de vos membres?

M. Martineau (Jacques): Bien, c'est surtout la particule CMC qui est intéressante. La particule CMC est une particule qui est utilisée partout à travers le monde. Il y a un institut international qui est à Genève et aussi au Canada. Moi-même, je suis vice-président de l'Association canadienne des conseillers en management.

Alors, il y a tout un momentum qui se fait autour de ça, et c'est le titre CMC que les gens utilisent. C'est ça qui nous distingue. Le titre d'affaires à côté ne nous préoccupe plus. Bien, en passant il n'y a personne qui va devenir CMC seulement parce qu'il veut avoir le titre conseil en management. Nous, notre raisonnement est à l'inverse. Quelqu'un qui s'affiche comme conseil en management pourrait laisser croire que...

Mme Goupil: De par les propos que vous venez de tenir, en fait ce qui est important, c'est que le public, lorsqu'il fait affaire avec des gens, fasse affaire avec des gens compétents. Ce que j'entends ou ce que je comprends, c'est que vous voudriez réserver un titre ou une activité à certains groupes de personnes alors qu'actuellement il y a différentes personnes qui peuvent occuper ce champ-là.

M. Martineau (Jacques): Je ne suis pas sûr si je saisis bien la question, là.

Mme Goupil: Non? C'est parce que, de la façon dont vous en parlez, c'est comme si le fait que nous ajoutions certifié ou agréé, ça viendrait compliquer un peu la perception du public pour la compétence de ces membres qui auraient le titre certifié ou agréé.

M. Martineau (Jacques): Bien, c'est que présentement, quelqu'un qui fait affaire avec quelqu'un qui signe conseiller en management, il se trouve à être sous la protection d'un ordre professionnel, bon, avec tous les codes d'éthiques, etc.

Nous, on trouve que, dans le public, expliquer à quelqu'un de faire bien attention, qu'il faut vérifier que la particule certifié est au bout du titre, sinon c'est Jos Public qui peut porter ce titre-là, on trouve ça trop ouvert. N'importe qui peut s'afficher comme conseiller en management alors que, jusqu'à aujourd'hui, on est incapable d'utiliser ce titre-là si on n'est pas certifié.

Mme Goupil: Alors, si je comprends bien, c'est que ce serait un CMC qui pourrait faire ce travail-là. Vous voudriez que ce soit seulement que CMC?

M. Martineau (Jacques): Non.

Mme Goupil: Non?

M. Martineau (Jacques): Non. On dit quelqu'un qui est CMC, c'est une démarche en soi.

Mme Goupil: Qui est reconnu par le Code.

M. Martineau (Jacques): On ne veut pas revenir là-dessus. De toute façon, la loi ne change rien, et on n'a pas de problème avec ça.

Ce qu'on dit, c'est que quelqu'un qui ferait l'ouvrage d'un conseil en management devrait appartenir à au moins un ordre professionnel. C'est ça, notre position.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. Landry, en complément.

(14 h 40)

M. Landry (Pierre): Peut-être ce que j'aimerais tenter de repréciser. C'est qu'en ajoutant la particule certifié au texte actuel je comprends que l'Office des professions, le législateur essaient de faire une adéquation parfaite entre le titre CMC et le conseiller en management certifié.

Mais ce qu'on essaie de dire, c'est que ce faisant et ne réservant dans la loi que le conseil en management certifié, on libéralise le titre de conseiller en management. On le rend public. Il devient de nature complètement publique. N'importe qui peut l'utiliser. Or, on sait que, depuis deux ou trois ans – et ce n'est pas pour mettre la pierre dans le champ de qui que ce soit – il y a énormément de gens qui se sont improvisés tout d'un coup conseiller en management. Tous nos gens qui ont pris des fabuleuses retraites avec des fonds en or sont devenus des conseillers en management, souvent du jour au lendemain. Or, gérer un CLSC, gérer un entreprise de façon adéquate et de façon saine, et faire du conseil dans ces domaines-là, c'est deux activités différentes. Et on pense que l'activité du conseil, ça demande, je veux dire, une préparation, ça demande un encadrement et ça demande une certaine surveillance.

Le conseiller en management peut amener une entreprise dans des situations absolument aberrantes si ce n'est pas fait de façon adéquate.

Mme Goupil: Et à ce moment-là vous voyez un danger pour les citoyens du fait que des personnes se qualifient comme conseillers en management?

M. Landry (Pierre): Je sors ma carte, conseiller en management, puis on y va.

Mme Goupil: Parce que vous savez qu'il y a des parallèles dans le Code des professions quand on pense, entre autres, aux évaluateurs agréés, il y a quand même des possibilités pour différentes personnes de porter ce titre-là. On n'exige pas nécessairement d'être membre d'un ordre professionnel de façon particulière. C'est ça? Je vais vous dire...

M. Landry (Pierre): Ça demeure un titre réservé, c'est bien évident.

Mme Goupil: Ce que vous dites, c'est que le fait d'ajouter certifié, on va venir permettre à beaucoup d'autres personnes dans l'avenir de porter le titre de conseiller en management et qu'à ce moment-là la sécurité du public serait mise en péril. C'est ça?

M. Landry (Pierre): C'est ce qu'on tentait de dire.

Mme Goupil: C'est ça?

M. Landry (Pierre): Oui, oui.

Mme Goupil: Est-ce que vous avez des exemples concrets jusqu'à maintenant de gens qui auraient été lésés, ou il serait arrivé quelque chose qui justifierait la crainte que vous avez, à votre connaissance, là?

M. Landry (Pierre): D'abord, il y a eu de bons exemples qui ont été apportés à la télévision il y a quelques semaines, au niveau canadien, exemples de conseillers non encadrés, si on veut, je pense, des beaux exemples de cas juteux. Je n'ai pas le «vidéotape» avec moi malheureusement, mais on pourrait s'y référer.

Mme Goupil: Mais je parle dans notre entourage, ici, actuellement, à votre connaissance.

M. Landry (Pierre): Je vous donnerais comme exemple une des pratiques qui se développe actuellement qui est, par exemple, de faire du conseil auprès d'une entreprise, de faire du reenginering, ou appelez ça le mot que vous voudrez parce que les modes changent tous les jours, mais où un conseiller est rémunéré sur la base, si on veut, des revenus accrus d'une entreprise. Une des formules simples, c'est de mettre beaucoup de gens à pied, par exemple. Et dans le fond on peut accroître rapidement des revenus d'entreprise sous peine que peut-être elle ne fonctionne plus dans deux ans, dans trois ans. Mais ce que j'essaie de dire par un exemple comme celui-là, c'est qu'il y a des normes d'éthique aussi minimales qui devraient être respectées. Il y a des principes quand même, si on veut, à la gestion. Et dans le fond des exemples de conseil en management ayant porté préjudice, oui, il en existe.

Mme Goupil: O.K. Je vous remercie.

M. Martineau (Jacques): Mais, moi, j'aimerais quand même...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): En terminant, brièvement.

M. Martineau (Jacques): Brièvement. Le conseil en management, la question qu'on doit se poser, c'est: Est-ce que c'est un acte professionnel ou ça n'en est pas un? En le libéralisant, vous nous dites que ça n'en est pas un, tout simplement. Je ne veux pas rentrer dans la sémantique et vous donner des exemples de champs qui ont fonctionné ou pas. C'est qu'en le libéralisant, vous nous dites: Ce n'est plus un acte professionnel. Mais un conseiller en management certifié, ça, c'est un acte professionnel. Ça, on trouve que c'est trop étroit comme raisonnement pour pouvoir fonctionner, tout simplement.

Ceci dit, je peux vous dire, moi, au nom des CMC, que ce n'est pas ce titre-là qui nous préoccupe, c'est plutôt la question: Comment assumer la protection du public dans un tel quiproquo, tout simplement?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais encore retourner à la question de la protection du public. Vous dites que, si cette modification est adoptée et le fait que maintenant vous serez des conseillers en management certifiés, il y a une réduction de la protection du public. J'aimerais que vous développiez ce thème, le manque de protection du public, car à mon avis en ce moment il y a un type de confusion. Les initiales CMC ne correspondent vraiment pas à votre titre de conseiller en management. Ainsi, il me semble qu'il y a une clarification pour le public, une clarification à l'effet que vous serez maintenant conseiller en management certifié.

Alors, pouvez-vous expliquer à cette commission comment on voit une réduction de la protection du public?

M. Landry (Pierre): Regardez, je pense que dans l'argumentation on a tenté de vous dire qu'on pourrait jusqu'à un certain point dissocier le conseil en management du conseil en management certifié. Vous voyez un peu le genre de difficultés que nous avons ici sur le plan de la compréhension de cette technicalité qu'on est en train de faire, qu'on essaie de faire.

Allez expliquer à M. Public ou à Jos Public, comme on dit souvent, dans le fond que conseil en management certifié puis conseil en management, ce n'est pas pareil. Pour nous, c'est deux titres qui sont indissociables. C'est l'activité de conseil en management, et il y a des gens qui portent un titre de conseiller en management certifié. On parle à un moment donné de clarification pour le public et à mon avis on s'en va vers une confusion plus grande. On libéralise le titre, on le laisse aller à tout vent.

Nous, notre simple point, c'est qu'on se dit: Écoutez, on ne cherche pas à en faire une guerre partisane. On se dit: Pourquoi est-ce que ceci n'est pas conservé dans le système professionnel? Le management comme tel est une des professions qui émerge le plus rapidement avec l'informatique. Et tantôt au fond on va se retrouver – et on est déjà là – avec une foule de conseillers en management qui se disent conseillers en management comme ça, du soir au lendemain, et qui pratiquent peut-être pas nécessairement de façon très adéquate.

M. Bergman: Mais vous êtes d'accord pour faire les changements pourvu qu'on retienne le titre dans le système professionnel.

Une voix: C'est ça.

M. Bergman: D'accord. Si cet amendement n'est pas adopté, le titre de conseiller en management appartient seulement à votre ordre. Si l'amendement est adopté, alors à ce moment il peut y avoir des étapes pour retenir le titre de conseiller en management à l'intérieur du système professionnel.

M. Martineau (Jacques): Oui. Bien, on reconnaît que le conseil en management a évolué depuis la version actuelle de la loi et on ne recommande pas le statu quo; on dit tout simplement que le titre de conseiller en management ne devrait pas être exclusif au CMC, ne devrait pas être exclusif à l'Ordre des administrateurs agréés, mais devrait rester par contre à l'intérieur de l'ordre professionnel. Parce qu'on s'est fait dire depuis 10 ans que le conseil en management, c'était une profession. Là, vous nous dites que ça n'en est plus une. C'est ça que vous dites en rajoutant le mot «certifié», parce que le conseil en management peut être porté par qui le voudra bien.

M. Bergman: Si je vous comprends bien, vous êtes d'accord avec l'article tel que proposé dans le projet de loi n° 87, mais vous suggérez d'autres modifications au Code des professions pour que le titre de conseiller en management reste à l'intérieur du système professionnel.

M. Martineau (Jacques): Si vous le voulez, c'est une façon de voir la chose, oui.

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. S'il n'y a pas d'autres questions, il me reste donc à remercier les représentants de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec, M. Landry, son directeur général et secrétaire, de même que M. Martineau, pour leur participation à nos travaux.

Alors, nous allons suspendre quelques instants, tout juste pour permettre aux représentants de l'Ordre des conseillers en relations industrielles de prendre place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 14 h 49)

(Reprise à 14 h 56)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

Nous allons donc rencontrer les représentants de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec, et notamment par Mme Fortin, sa présidente. Je rappelle que nous avons 45 minutes de consacrées pour cette rencontre, dont une quinzaine pour la présentation. Alors, je vous inviterais à bien vouloir nous présenter les personnes qui vous accompagnent.


Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec (OCRIQ)

Mme Fortin (Sophie): Alors, bonjour, Mme la ministre, M. le Président, Mmes, MM. les députés membres de la commission. Tout d'abord, permettez-moi de vous présenter mes collègues: donc, à ma gauche, M. Florent Francoeur, qui est président-directeur général de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec; à ma droite, Mme Martine Hébert, qui est directrice des affaires professionnelles et gouvernementales; et, à sa droite, Me Marie-Josée Dufour, qui est directrice aux affaires réglementaires.

Permettez-moi aussi de vous mentionner qu'à titre de bénévole à l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec je suis aussi vice-présidente, ressources humaines et administration, pour Bristol-Myers Squibb. Donc, les propos que je vais vous tenir au cours des prochaines minutes risquent d'être teintés d'une certaine connaissance pratique.

M. Dupuis: Travaillez-vous sur la commission sur l'assurance médicaments aussi?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fortin (Sophie): Après mon 45 minutes. M. le Président, nous sommes ici aujourd'hui pour vous demander d'inscrire au projet de loi n° 87 l'ajout du titre réservé de conseiller en ressources humaines agréé à l'usage des membres de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec. Comme vous pouvez le constater, afin d'assurer la protection du public il est impératif pour les quelque 4 000 professionnels en ressources humaines et en relations industrielles membres de l'Ordre d'avoir accès à un titre professionnel qui reflète les nouvelles réalités du marché du travail.

L'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec existe depuis le début des années soixante-dix. Il regroupe aujourd'hui 4 000 professionnels qui exercent leurs activités dans les secteurs public et privé, dans les organisations gouvernementales, patronales et syndicales. Leur champ de pratique s'étale des relations de travail à la gestion des ressources humaines en passant par la santé et sécurité au travail, par la rémunération, par la formation et par le développement professionnel et organisationnel.

Cette diversité fait donc de l'Ordre des conseillers en relations industrielles une organisation privilégiée pour débattre et réfléchir sur les enjeux que pose le marché du travail. Réunissant des représentants des divers milieux du travail du Québec, l'Ordre se distingue par sa volonté de rechercher des solutions novatrices. La composition diversifiée de ses membres en fait aussi un interlocuteur qui peut réfléchir avec objectivité sur les enjeux auxquels font face les travailleurs et les travailleuses en ce début de millénaire. C'est d'ailleurs notamment ce qui fait en sorte que l'Ordre a été invité à siéger à la Commission des partenaires du marché du travail ainsi que sur le comité consultatif de la Commission de l'équité salariale.

Notre Ordre exerce son rôle dans les plus hauts standards de qualité et de professionnalisme. D'ailleurs, en 1998, c'est le premier ordre professionnel au monde à avoir été accrédité ISO 9002. À son instar, ses membres exercent leur profession encadrés par un code de déontologie strict, qui par ailleurs a été le premier code de déontologie à se conformer aux nouvelles dispositions du Code civil.

(15 heures)

Le code de déontologie impose aux membres d'agir avec compétence, diligence et intégrité, et ceci revêt donc un caractère essentiel. Dans une société démocratique telle que la nôtre, où, par exemple, la protection des renseignements personnels est une valeur fondamentale, il est primordial que dans un contexte de travail les professionnels qui ont accès à des renseignements personnels soient régis par les normes les plus strictes. Pour permettre aux professionnels de conserver cette qualité et au public de les reconnaître, l'ajout du titre réservé de conseiller en ressources humaines agréé est aujourd'hui devenu une nécessité incontournable.

En effet, le titre de conseiller en relations industrielles a été adopté en 1973, soit il y a plus de 25 ans. Depuis lors, à l'instar de notre société, le domaine des relations industrielles a subi de profondes transformations. Et on a qu'à penser à la durée de vie des conventions collectives, au style de négociations qui est de plus en plus ouvert, aux communications entre patronat syndicats, il y a de nombreux exemples qui nous montrent cette transformation du milieu du travail. Dans ce contexte, il est donc impératif que les organisations et le public puissent reconnaître sans problème l'ordre constitué de professionnels dans ce domaine et aussi qu'il garantissent leurs compétences. Il s'agit là d'un principe qui est le fondement même de notre système professionnel.

La profession de conseiller en relations industrielles a notamment évolué au rythme des bouleversements qu'a connus le marché du travail. La mondialisation des marchés, les innovations technologiques et les changements structurels des économies ont conduit, entre autres, à une diversification importante de l'organisation du travail et à une prolifération du travail atypique, soit le travail autonome, le travail à temps partiel, le télétravail, etc. Ces changements affectent de façon permanente l'approche aux relations individuelles et collectives au sein des organisations et, par le fait même, le travail de nos membres, qui doivent gérer ces nouvelles réalités.

Le rôle des conseillers en relations industrielles a aussi évolué au rythme de la législation du marché du travail. Alors qu'il y a quelques années des lois telle que la Loi sur les normes du travail régissaient les relations entre employeurs et employés, des lois d'une toute autre nature sont récemment apparues. Mentionnons la Loi sur l'équité salariale, la Loi favorisant le développement et la formation de la main-d'oeuvre et, encore plus récemment, la Loi interdisant les disparités de traitement. Ceci a provoqué des changements importants dans le domaine des relations de travail. En fait, au chapitre des changements législatifs, on peut affirmer que les professionnels des relations industrielles et de la gestion des ressources humaines ont été les plus touchés.

On peut facilement voir que la dynamique de l'emploi s'en trouve aussi bouleversée. Les règles du jeu sont changées en matière de main-d'oeuvre. Cette conjoncture a un impact important sur l'exercice de la profession car elle modifie de façon substantielle la façon traditionnelle de gérer l'emploi. Les nouvelles législations étendent donc l'exercice de la profession. Les actes posés par les conseillers en relations industrielles ne sont plus circonscrits simplement à la gestion des relations de travail. Les conseillers en relations industrielles sont maintenant appelés à occuper des fonctions reliées à la gestion des ressources humaines, soit la gestion du travailleur, de son développement professionnel et de sa relation avec son environnement. Il s'avère d'autant plus important que les actes soient posés par des personnes qualifiées pour le faire dont la compétence est garantie par un ordre professionnel reconnu et aussi reconnu par le public. Encore faut-il cependant être à même d'identifier un tel ordre, car ce qui fait la force d'un ordre à titre réservé, c'est la clarté de son titre.

Une étude exhaustive effectuée par l'Ordre auprès de ses membres en 1999 révélait que 44 % des titres utilisés dans leur emploi incluaient le terme «ressources humaines», alors que seulement 1 % comportaient l'appellation «relations industrielles» – et je tiens à le souligner, M. le Président, seulement 1 %. Un sondage effectué par une firme indépendante auprès des membres de l'Ordre en septembre 1998 a révélé que plus de 67 % des répondants estiment que l'appellation la plus appropriée pour désigner l'ensemble de la profession est celle de «ressources humaines». Ce constat était d'ailleurs corroboré par le Conseil du patronat du Québec dans une lettre adressée à l'Ordre en septembre 1998 par son président, M. Taillon, qui affirmait, et je cite: «La demande de l'Ordre nous apparaît, en effet, tout à fait pertinente, compte tenu de l'évolution de la profession. Nous constatons, nous aussi, que les entreprises n'utilisent pratiquement jamais l'expression "relations industrielles". C'est pourquoi l'appellation "conseiller en ressources humaines agréé" permettrait sûrement aux membres de votre Ordre de mieux se définir et surtout de se distinguer des autres professions.» Fin de la citation.

Les observations de l'Ordre se confirment également à l'examen de la classification nationale des professions, qui contient les renseignements sur les professions au Canada. Sur quelque 25 000 appellations répertoriées, on en retrouve 44 qui sont liées à la gestion des ressources humaines, lesquelles sont regroupées en différentes catégories, comme les directeurs ressources humaines, les spécialistes en ressources humaines, etc. L'appellation «relations industrielles» ne se retrouve pas du tout dans ces catégories. Ceci démontre bien que sa fréquence d'utilisation est nettement inférieure à celle de «ressources humaines».

C'est dans l'ensemble de ces perspectives que l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec, conscient de ce qui fait la force d'un ordre professionnel à titre réservé – et, je le répète, c'est la clarté de son titre – a entrepris des démarches afin d'obtenir l'ajout du titre de conseiller en ressources humaines agréé pour ses membres. L'Ordre juge essentiel que ses quelque 4 000 membres, parmi lesquels, je le réitère, seulement 1 % utilisent l'appellation «relations industrielles», se reconnaissent dans leur organisation, lui conférant ainsi l'influence nécessaire à l'application des normes strictes régissant l'exercice de la profession, et ce, dans le plus grand d'intérêt du public.

C'est pourquoi l'Ordre demande, tout en maintenant le titre de conseiller en relations industrielles, qui demeure une spécialité et une expertise chez certains de ses membres, l'ajout de celui de conseiller en ressources humaines agréé. La demande d'ajout de titre réservé est d'autant plus fondée que, face à la nouvelle réalité incontournable de la profession, la majorité des provinces canadiennes et les États-Unis utilisent déjà ce titre depuis plusieurs années. Par exemple, depuis 1990, les professionnels ontariens qui oeuvrent dans la gestion des ressources humaines ont accès au titre de certified human resources professional. Cette situation est la même aux États-Unis et elle est la même dans d'autres provinces canadiennes tels le Manitoba et l'Alberta. Le titre de conseiller en ressources humaines agréé est couramment utilisé dans sa version anglaise pour désigner les professionnels visés.

Notons également que huit provinces, dont le Québec, cherchent à conclure un protocole permettant aux membres de ces différentes associations de faire reconnaître leur titre dans les autres provinces. Malheureusement, le Québec n'est pas en mesure, à l'heure actuelle, de proposer l'équivalent français du titre utilisé en anglais dans les autres provinces. À la lumière de ces comparaisons, nous pouvons facilement voir qu'il est impératif pour le Québec de confirmer la réalité, de la même façon que l'ont fait les autres provinces canadiennes, en obtenant l'équivalent français du titre certified human resources professional.

M. le Président, permettez-moi finalement de souligner que ces évidences sont partagées par l'ensemble des acteurs concernés. L'Ordre est supporté et appuyé dans sa requête par les instances universitaires, patronales et syndicales du Québec. Les impacts liés à la demande de l'Ordre sont perçus positivement par ces acteurs, comme en font foi, par exemple, les lettres adressées à l'Ordre par la FTQ en 1999 et par le Conseil du patronat du Québec en 1998. Et on peut y lire: «Notre appui tient compte également du fait que ce nouveau titre réservé ne créera aucune obligation pour les organisations, qui ne seront nullement tenues d'embaucher un membre de votre Ordre.» Donc, aucune embûche administrative en vue. Par contre, un net avantage, celui d'avoir la certitude d'employer une personne qualifiée et soumise à un code de déontologie quand on embauche un conseiller en ressources humaines agréé. Mentionnons que, dans une correspondance adressée à l'Ordre en 1999, l'Alliance des manufacturiers et exportateurs du Québec partageait également cette opinion.

D'autre part, la demande de l'Ordre est aussi forte de l'appui des ordres concernés des secteurs droit, administration et affaires, tel que décrit par le Conseil interprofessionnel du Québec. Les ordres des comptables généraux licenciés du Québec, des comptables en management accrédités du Québec et des administrateurs agréés du Québec, qui sont trois ordres ayant un domaine d'activité lié au champ de pratique de nos professionnels, ont donné leur appui à notre démarche.

En conclusion, M. le Président, la demande d'inscrire au projet de loi n° 87 l'ajout du titre de conseiller en ressources humaines agréé à l'usage des membres de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec, et qui n'est pas dans le projet de loi qui est sur la table actuellement, est liée à la nécessité de tenir compte de la réalité du monde actuel du travail et à la conscience aiguë que notre Ordre a de son rôle, d'abord, la protection du public qui constitue sa mission fondamentale, et, pour cela, l'Ordre doit être facilement reconnu tout comme ses membres grâce à la clarté de leur titre. C'est ce qui fait la force d'un ordre professionnel à titre réservé. C'est seulement de cette façon que l'Ordre pourra être un phare dans le domaine de la gestion des ressources humaines au Québec et une source d'inspiration pour l'ensemble de sa profession.

(15 h 10)

L'obtention à l'usage de ses membres du titre de conseiller en ressources humaines agréé fera de l'Ordre une organisation capable d'entrer de plain-pied dans le troisième millénaire, celui d'un marché du travail en constante évolution, pour faire face à la mondialisation. En proposant enfin à ses membres l'équivalent français du titre certified human resources professional utilisé partout ailleurs au Canada, le titre représentera davantage la réalité de la profession.

Enfin, tout ceci pour dire que nous partageons l'opinion émise par la ministre responsable de la Justice et responsable des ordres professionnels lors de son allocution au lancement du plan d'action sur la modernisation du système professionnel, le 26 novembre dernier, et je me permets de la citer: «Les changements dans l'environnement de nos professions et dans notre société en général nous ont mis devant l'évidence d'une adaptation nécessaire du monde professionnel, d'une réelle mise à jour.» Fin de la citation.

C'est ainsi que l'ajout du titre réservé de conseiller en ressources humaines agréé à l'usage des membres de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec est nécessaire – et permettez-moi humblement, M. le Président, de reprendre les termes de Mme la ministre – «afin de faire vivre nos professionnels en harmonie avec leur époque». Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, Mme Fortin, à titre de présidente de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Goupil: Merci, M. le Président. C'est agréable d'être citée vraiment tel que les choses ont été dites. Je vous remercie, Mme Fortin. D'abord, vous comprendrez, les propos qui ont été tenus tant par les conseillers en relations industrielles avec l'Office des professions que, sur le fond, nous sommes tout à fait en accord. La problématique se situait davantage lorsqu'on vous avait demandé vraiment de faire des démarches pour connaître quels pouvaient être les diplômes concernés, et tout ça. D'ailleurs, la résolution, vous y avez fait allusion tout à l'heure, et on vous recommandait, entre autres, de faire certaines démarches. Est-ce que vous pourriez nous dire, depuis la résolution, quelles ont été les démarches que vous avez faites dans le sens qui était demandé par la résolution du 27 janvier 2000?

Mme Fortin (Sophie): Je m'excuse, Mme la ministre. Les résolutions au niveau des diplômes?

Mme Goupil: Tout à fait, oui, c'est ça.

Mme Fortin (Sophie): Des comités?

Mme Goupil: Oui.

Mme Fortin (Sophie): Écoutez, tout d'abord, on a respecté ce que l'Office nous a demandé. Nous avons effectivement mis sur pied un comité de formation pour regarder deux nouveaux diplômes que nous avions demandés, et je crois que le comité de formation a fait sa recommandation – et je comprends que c'est un comité qui est consultatif – au B.A. à l'effet d'adopter ces deux diplômes.

Par ailleurs, écoutez, je me permets de questionner cette demande, parce que, en fait, on est ici aujourd'hui pour demander l'ajout d'un titre professionnel. Si je ne me trompe pas, en 1973, quand les dispositions du Code professionnel ont été mises de l'avant, il y a eu des titres qui ont été réservés sans nécessairement regarder les diplômes qui y étaient associés. Je pense que la demande d'un titre réservé est pour assumer la protection du public. Et on a toujours dit: Notre demande de titre réservé est pour représenter la réalité du marché, qui a évolué au cours des 25 dernières années. Je vous rappelle que notre titre de conseiller en relations industrielles date depuis 1975 et, depuis ces années-là, et on le sait tous, le milieu du travail a énormément évolué. Et, que l'on regarde l'ensemble des diplômes ou non, on serait ici aujourd'hui pour vous demander l'ajout du titre pour refléter la réalité du marché, qui n'a aucun rapport avec les diplômes. On regarde l'évolution des diplômes au niveau des ressources humaines, au niveau des relations industrielles, il y a une évolution aussi au niveau du diplôme. Les étudiants qui graduent avec un Bac en relations industrielles travaillent dans le milieu des ressources humaines parce que c'est la réalité du marché du travail aujourd'hui.

Mme Goupil: Je vous remercie, Mme Fortin. En fait, le but de votre demande est vraiment d'avoir un titre réservé. Lorsqu'on veut le réserver à des personnes, il est important, je pense, de savoir et de connaître quelles sont les personnes qui pourraient avoir ce titre réservé. Et, vous savez, la formation des programmes, elle est importante parce que, lorsqu'on a des gens qui sont formés... On dit que, pour avoir le droit d'avoir ce titre réservé, vous devez avoir une certaine formation. Le but de l'exercice était justement de s'assurer que l'on puisse connaître quelle pouvait être la formation nécessaire pour pouvoir occuper cette fonction dans le cadre d'un titre réservé. Et je pense que la réponse va de soi. Si on veut être capable un jour de donner un titre réservé, il faut être capable également de savoir quelles sont les personnes qui sont compétentes pour avoir ce titre réservé.

Mme Fortin (Sophie): En fait, on a toujours dit, encore une fois, que notre demande de titre était pour refléter l'évolution du marché. En même temps et, je pense, comme tout ordre qui se respecte se doit de façon régulière de réviser ses critères d'admission et, donc, de réviser les diplômes qui sont associés avec ces critères d'admission, ça, on le fait, encore une fois, comme tout ordre professionnel devrait le faire. Et peu importe notre demande par rapport à l'ajout d'un titre, nous avons entrepris une démarche pour regarder l'ensemble des diplômes universitaires, s'assurer que l'ensemble des diplômes universitaires reflétaient aussi les réalités du marché de façon à ce qu'éventuellement on regarde les critères de notre Ordre. Mais, encore une fois, c'est une démarche qui est tout à fait accessoire et parallèle au fait que l'on demande le changement ou l'ajout de notre titre professionnel.

Il faut comprendre que même les universités qui ont mis en place différents programmes au niveau des ressources humaines ont mis en place des programmes en ressources humaines où le curriculum de ces programmes-là ressemble étroitement au curriculum des gens qui graduent avec un Bac en relations industrielles, parce que les bacs en relations industrielles eux aussi ont évolué avec la réalité du marché.

Donc, ce que l'on dit, c'est que notre titre doit refléter la réalité du marché de façon parallèle. Et on a déjà mentionné qu'on avait entrepris cette démarche, qui est une démarche, on en convient, à long terme parce qu'on met ensemble trois partenaires, les universités, le milieu du travail et notre Ordre professionnel. On s'assure que ces trois partenaires-là suivent l'évolution du marché. Et ça, c'est une démarche qu'on a entreprise de façon parallèle, mais une démarche à long terme.

Mme Goupil: D'accord. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc.

M. Côté (Dubuc): Merci, M. le Président. Alors, Mme Fortin, Mme Dufour, M. Francoeur, et permettez-moi de saluer particulièrement Mme Hébert que j'ai eu le plaisir de connaître dans d'autres circonstances. Ma question va peut-être un petit peu dans le sens de celle de Mme la ministre. Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez, peut-être que je ne suis pas... Advenant le cas, par exemple, où on vous accorde le titre de conseiller en ressources humaines agréé... J'ai l'exemple d'une PME de 50 employés où il y a un directeur des ressources humaines ou un conseiller en ressources humaines. Est-ce que cette personne-là va être automatiquement conseiller en ressources humaines agréé ou si elle pourra exercer quand même le titre simplement de conseiller en ressources humaines ou elle devra faire partie de votre Ordre professionnel?

Mme Fortin (Sophie): Bon. Il y a une différence entre une fonction dans une entreprise, donc conseiller en ressources humaines, et un titre réservé, qui est conseiller en ressources humaines agréé, et c'est la raison pour laquelle on met «agréé» à côté des mots «conseiller en ressources humaines». Parce que, tout comme dans la PME ou comme dans la fonction publique, il existe des fonctions qui s'appellent conseiller en ressources humaines. Donc, c'est la raison pour laquelle on demande le titre ou le mot «agréé» à côté de «conseiller en ressources humaines». Il ne sera pas automatiquement accepté dans l'Ordre simplement parce qu'il travaille dans une fonction ressources humaines. On a des critères d'admission, et il devra, comme tout le monde, faire application à l'Ordre et rencontrer les critères d'admission avant d'être éligible à porter le titre.

M. Côté (Dubuc): Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de D'Arcy-McGee et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Mme Fortin, M. Francoeur, Mme Hébert, Me Dufour, merci pour votre présentation que je trouve intéressante. Je trouve intéressant aussi que vous ayez 4 000 membres dans votre Ordre professionnel. Et, quand on cherche des ordres à titre réservé pour avoir beaucoup de membres, vous êtes un bon exemple, un ordre qui a 4 000 membres. Alors, je vous félicite.

Vous appuyez votre demande de modification de titre en faisant notamment état des changements qui sont survenus dans le monde du travail. J'aimerais que vous reveniez sur l'appui que vous avez à cet égard des principaux intervenants du monde du travail québécois et même, je crois, des universités, des gens qui connaissent la réalité du monde du travail. Ça serait bon pour nous, à la commission, d'entendre vos démarches et vos appuis.

Mme Fortin (Sophie): En fait, tout au long de notre démarche, on s'est assurés d'une consultation très étroite avec le milieu patronal, le milieu syndical et le milieu universitaire, qui sont effectivement les acteurs-clés dans notre dossier.

Et je peux peut-être, M. le Président, juste vous lire un extrait d'une lettre que nous avons reçue de la FTQ et qui est, en fait, très représentative et du milieu patronal et du milieu syndical. Alors, je me permets de vous citer un très court passage: «La demande de l'Ordre nous apparaît, en effet, tout à fait pertinente compte tenu de l'évolution de la profession. Nous constatons nous aussi que les entreprises n'utilisent pratiquement jamais l'expression "relations industrielles". C'est pourquoi l'appellation "conseiller en ressources humaines agréé" permettrait sûrement aux membres de votre Ordre de mieux se définir et surtout de se distinguer des autres professions.»

(15 h 20)

Bon. Il y a le Conseil du patronat, il y a l'AMEQ qui nous ont aussi écrit la même chose. Et, je dois vous dire aussi, de la part de l'ensemble des universités du Québec, tant anglophones que francophones, il y a le même support et le même genre de démonstration écrite. Nous avons reçu d'autres... L'ensemble des universités nous ont supportés.

M. Bergman: Si on peut avoir des copies de ces lettres, ce serait intéressant pour nous.

Mme Fortin (Sophie): Oui, absolument.

M. Bergman: Mme Fortin, dans le même ordre d'idées, vous dites que «le Québec se distingue du reste du Canada et des États-Unis dans l'utilisation du titre d'emploi en matière de relations de travail. On fait bande à part avec notre terminologie "relations industrielles"». Voudriez-vous commenter ce sujet? Votre demande a pour objet, si je comprends bien, d'harmoniser notre vocabulaire à la terminologie utilisée en Amérique du Nord.

Mme Fortin (Sophie): Absolument. Effectivement, notre demande a certainement deux objectifs, un, de représenter la réalité du marché du travail ici, au Québec, qui est un marché du travail beaucoup plus axé sur la gestion des ressources humaines que strictement sur les relations de travail. Mais, dans un deuxième ordre, on siège à ce moment-ci sur une association canadienne où l'ensemble des provinces canadiennes utilisent un terme qui est «certified human resources professional» et, lorsque, nous, on dépose notre titre, qui est un titre en relations industrielles, on est très limités dans l'exemple des gestes que l'on pose de par le titre et, donc, on ne peut pas du tout, à ce moment-ci, présenter un titre qui est l'équivalent d'un titre qui existe dans les autres provinces du Canada. On a donc un titre qui est très limitatif par rapport aux gestes qui sont posés dans les autres provinces.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Ce que vous dites, Mme Fortin, dans le fond, sur ce sujet-là – parce que ça m'a frappé – en relation avec le titre dans les autres provinces, c'est que ça affecte même la mobilité de la main-d'oeuvre. Je veux dire, il peut y avoir des gens à l'extérieur du Québec qui voudraient engager des conseillers en ressources humaines agréés du Québec, mais qui sont empêchés de le faire parce que c'est flou, là. Est-ce qu'ils ont les mêmes compétences?

Mme Fortin (Sophie): Effectivement, en fait, si une organisation qui oeuvre en Alberta, par exemple, aimait embaucher un conseiller en ressources humaines agréé qui est reconnu par un ordre professionnel, bien, elle ne peut pas le faire parce que, nous, tout ce qu'on a ici, c'est des conseillers en relations industrielles reconnus par un ordre professionnel, ce qui n'est pas le cas... Nous, on pourrait embaucher un conseiller en ressources humaines qui vient de l'Ontario, il serait conseiller en ressources humaines agréé et reconnu par un ordre professionnel d'une autre province.

M. Dupuis: Alors, donc, il y va, dans le fond... Ça, c'est une raison strictement économique extrêmement valable pour demander ce que vous demandez au chapitre de la mobilité de la main-d'oeuvre, n'est-ce pas?

Mme Fortin (Sophie): Tout à fait. Et, je dirais, au-delà de ça, c'est aussi pour mieux positionner l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec au sein de l'organisme canadien aussi, qu'on ait notre place, tout comme les autres provinces.

M. Dupuis: Bon. Dites-moi une autre chose. Vous avez parlé tantôt du Bac en relations industrielles qui est donné à l'université. J'ai bien compris que le changement que vous demandez ou l'ajout que vous demandez dans le projet de loi doit refléter, selon vous, le marché du travail et la profession telle qu'elle a évolué. Iriez-vous jusqu'à dire, Mme Fortin, que, même à l'université, on devrait changer l'appellation du baccalauréat et le renommer baccalauréat en ressources humaines agréé?

Mme Fortin (Sophie): Je ne prendrais pas cette décision, mais je peux vous dire certainement ce qui se passe à ce moment-ci. Premièrement, l'ensemble des universités qui donnaient et qui remettent des bacs en relations industrielles ont, au cours des dernières années, fait évoluer leur curriculum. Et, si on regarde, à ce moment-ci, les curriculums des universités qui donnent un Bac en relations industrielles et les universités qui donnent maintenant des bacs en gestion des ressources humaines, les curriculums sont fort semblables. Alors, éventuellement, il va y avoir définitivement un mouvement vers les ressources humaines. D'ailleurs, il y a une université, et c'est l'Université du Québec à Hull, qui vient de changer le titre de son Bac en relations industrielles pour Bac en gestion des ressources humaines. Alors, c'en est un exemple de la réalité.

M. Dupuis: Dites-moi une chose. Compte tenu du fait que vous dites dans votre mémoire qu'il y a à peu près 1 % des conseillers en relations industrielles qui emploient encore ce titre-là, est-ce que vous jugeriez à propos, si le gouvernement le décidait ainsi, qu'au fond dorénavant, le titre réservé pourrait être celui exclusif de conseiller en ressources humaines agréé et abolir le titre de conseiller en relations industrielles? Je comprends qu'il peut y avoir des problèmes de transition, mais...

Mme Fortin (Sophie): Oui, écoutez, je vous dirais...

M. Dupuis: ...iriez-vous jusque-là?

Mme Fortin (Sophie): Je n'irais pas jusque-là. Nous tenons à garder le titre de conseiller en relations industrielles pour une partie de nos membres – j'en conviens, c'est une infime partie de nos membres, mais on respecte l'ensemble de nos membres – qui oeuvrent strictement dans les relations de travail. Je peux vous donner deux exemples: les avocats en droit du travail qui ne font strictement que des relations de travail et nos représentants syndicaux qui vraiment travaillent dans le milieu des relations industrielles et, donc, qui tiennent à garder ce titre-là. Bon. D'où vient le 1 %? Ce n'est pas zéro, là, c'est 1 %. Et ce 1 % là vient de ses membres.

M. Dupuis: O.K. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, très brièvement, M. le Président. Mme Fortin, aidez-moi à comprendre pourquoi la ministre ou le gouvernement refuse votre demande. J'ai entendu la question que vous a posée la ministre. Ça a trait un petit peu à la formation. Mais pourriez-vous le clarifier pour les membres de la commission? Pourquoi y a-t-il refus? Et où est-ce que ça bloque?

Mme Fortin (Sophie): Je vais essayer de moi-même comprendre, M. le Président, la raison du refus. Ce qu'on nous demande, c'est de réviser l'ensemble des diplômes pour avoir des diplômes qui reflètent la demande d'ajout d'un nouveau titre. Ce qu'on répond à ça, et ce qu'on répond depuis quelque temps déjà: Notre demande de rajouter un titre n'a aucun rapport avec la modification des diplômes. Notre demande de rajouter un titre est pour refléter la réalité du marché. Un conseiller en relations industrielles, ça représente 1 % des praticiens. Moi, je suis vice-présidente ressources humaines, je ne suis pas vice-présidente relations industrielles. Et, moi, je représente la réalité du marché. C'est ça. Nos membres travaillent en ressources humaines, et c'est pour ça qu'on veut changer le titre.

Les diplômes ont évolué, je l'ai dit tout à l'heure. Un diplôme en relations industrielles, maintenant il y a des cours en santé sécurité, il y a des cours en gestion des ressources humaines, ce n'est pas le même cours en relations industrielles qui était donné il y a 25 ans. Les universités ont évolué, le marché a évolué. On veut simplement que notre titre représente cette évolution-là aussi. C'est tout.

M. Dupuis: Alors, au fond... Si vous me permettez.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bien là c'est le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Dupuis: Ah! O.K. Allez-y.

M. Bergman: Mme Fortin, qu'est-ce que votre demande change dans la réalité? Est-ce que ça représente des coûts additionnels pour les employeurs et notamment pour le gouvernement?

Mme Fortin (Sophie): Je m'excuse, M. Bergman, je n'ai pas...

M. Bergman: Qu'est-ce que votre demande change dans la réalité? Est-ce que ça représente des coûts additionnels pour les employeurs et notamment pour le gouvernement?

Mme Fortin (Sophie): Ça ne change absolument rien. Au niveau économique, au niveau social, l'ajout du titre ne change absolument rien. On réalise que, dans la fonction publique – et je l'ai mentionné tout à l'heure – tout comme dans les entreprises, il y a le titre de conseiller en ressources humaines, mais, afin d'éviter des problèmes au niveau de cette dualité de titres, nous avons demandé de rajouter le terme «agréé» à côté de ce terme-là.

D'ailleurs, le Conseil du patronat, M. Taillon aussi, si je peux me permettre de le citer, nous a envoyé une lettre, encore une fois, en nous appuyant et en nous disant que ce nouveau titre réservé ne créerait aucune obligation pour les organisations qui ne sont, encore une fois, nullement tenues d'embaucher un membre de notre Ordre. Il n'y a pas absolument aucun coût de lié à embaucher, à ne pas embaucher un conseiller en relations industrielles ou un conseiller en ressources humaines agréé.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: M. le Président. Mme Fortin, l'opposition est prête à faire un amendement au projet de loi quand nous serons au stade des amendements du projet de loi. Nous sommes d'accord, à ce moment-ci, pour confirmer que l'on fera un amendement au projet de loi en faveur de votre demande.

Mme Fortin (Sophie): Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je pense qu'il faut peut-être rétablir un petit peu certaines choses, parce que j'ai bien entendu ce que vous avez exprimé et je vous ai dit que nous n'étions pas en désaccord, vous n'avez pas reçu de refus de la part de l'Office, à ce stade-ci. Vous savez, ce que l'on veut faire, c'est réserver un titre de conseiller en ressources humaines agréé.

Vous savez également qu'il y a des jeunes actuellement qui suivent des cours où il y a une formation de gestion des ressources humaines et ils n'ont aucune garantie actuellement qu'ils auraient les compétences pour avoir ce titre réservé. Et, vous savez, nous sommes dans le monde du travail actuellement où on demande de la multidisciplinarité, de la souplesse, alors je suis convaincue que vous comprenez bien l'importance de s'assurer que les programmes qui actuellement forment des jeunes dans les ressources humaines – il y en a différents, je ne peux pas vous faire la nomenclature de cela...

(15 h 30)

Mais la demande qui vous a été faite n'est pas impertinente, en soi, loin de là. Il est important de savoir quels sont les champs de compétence qui seront identifiés de façon précise pour permettre à ceux et à celles qui voudront avoir ce titre réservé, dans l'avenir, de l'obtenir. Et je comprends que vous êtes de bonne foi puis que vous vous occupez des gens chez vous puis que vous vous assurez de leur formation, mais, en même temps, aujourd'hui on a des gens qui sont... Je vous donne un exemple. Un psychologue qui fait de la formation et qui soutient les gens dans le cadre des relations de travail, est-ce que ça pourrait être un diplôme que vous seriez prêts à reconnaître pour que ces gens-là aient le titre réservé de conseiller en ressources humaines agréé? Ça en est un exemple concret de ça.

Mme Fortin (Sophie): Aujourd'hui, quelqu'un qui a un Bac en psychologie, sans aucune expérience en gestion des ressources humaines, ne pourra pas faire partie de notre Ordre. D'accord? Il faut comprendre qu'on a des critères d'admission, on a des équivalences pour les gens... Les étudiants qui sortent et qui n'ont aucune expérience ne peuvent pas faire partie de notre Ordre. On a des équivalences. Comme tout autre ordre professionnel, on a des équivalences. Maintenant, ce que je vous dis, c'est qu'aujourd'hui un jeune qui sort avec un Bac en relations industrielles ou un individu qui a un Bac en gestion des ressources humaines et 10 ans d'expérience va être accepté à notre Ordre et pourra porter le titre de CRI. Ce qu'on dit, c'est que ce titre-là, malgré les diplômes qu'on lui confère, ne représente pas la réalité. Ce qu'on dit, c'est: Avec ces mêmes diplômes là, avec cette même expérience-là, donnons-lui un titre qui représente la réalité dans laquelle il ou elle travaille. C'est ce qu'on dit. C'est juste ça qu'on demande.

De plus – et je me permets de le répéter – tout ordre professionnel doit évoluer avec son marché, et c'est ce qu'on fait. Ce qu'on dit aujourd'hui, c'est: Nonobstant notre demande que nous avons, qu'on formule devant vous aujourd'hui, Mme la ministre, nonobstant ça, nous sommes à réviser l'ensemble des critères. On le fait de façon méthodique, avec les intervenants du marché, soit les universités, les entreprises, et on dit: Entre l'Ordre, le milieu universitaire et le milieu du marché, est-ce qu'il y a une cohésion? Est-ce qu'on s'entend sur ce dont on a besoin? Et c'est une démarche à long terme, une démarche que tout ordre qui se respecte devrait faire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, madame.

Mme Goupil: Justement, quand vous dites que nous devons nous assurer que les gens aient la formation nécessaire pour pouvoir avoir ce titre réservé, ce que nous avons demandé, c'est que nous puissions savoir actuellement quels seraient les programmes ou les diplômes qui feraient en sorte que vous seriez prêts à reconnaître leur expertise pour qu'on puisse leur donner un titre réservé. Et c'est de le faire en amont aussi, parce que, vous savez, il y a bien des gens qui viennent nous rencontrer ici puis qui, aujourd'hui, vivent des problématiques avec le titre réservé. Nous avons des gens qui viennent nous exprimer: Nous avons les compétences pour le faire, il faut une modification législative. Ou: On a toutes sortes, je vous dirais, de difficultés à pouvoir être reconnus parce que l'Ordre ne nous accepte pas. Alors, ce que nous avons demandé, c'est de faire en sorte – dans l'intérêt, toujours, de la société – avant d'accorder le titre réservé, de savoir et de bien connaître quelles sont les formations, actuellement, qui seraient reconnues pour être qualifié de titre réservé.

M. Fortin (Sophie): Je vais me permettre de répondre. Après ça, je vais passer la parole à M. Francoeur qui, peut-être, va s'exprimer d'une meilleure façon que je le fais.

Encore une fois – et je comprends votre question, Mme la ministre – ce que je vous dis, c'est...

Mme Goupil: Vous vous exprimez très bien, là, c'est juste qu'on veut comprendre. C'est très clair.

M. Fortin (Sophie): Ce que je vous dis, c'est qu'on essaie de prendre ce titre-là avec lequel... Bon, on a des critères d'admission, on a des équivalences aussi, et on dit: Ce titre-là, il n'est plus représentatif du marché. Il est très représentatif des diplômes, il n'est pas représentatif du marché. Et là tout ce qu'on veut, c'est qu'il le soit. Ça, c'est une première chose. Alors, c'est pour ça que j'essaie de vous expliquer, ça n'a pas rapport avec l'évolution des diplômes parce que les diplômes ont évolué au cours des 25 dernières années. C'est le titre qui n'a simplement pas évolué depuis un quart de siècle.

Et, dans un deuxième temps aussi – puis à moins qu'on se trompe sur le Code des professions – ce qu'on regarde, bon, en 1973, les dispositions du Code, il me semble, prévoyaient de réserver un titre, et après ça on regardait les diplômes. Si on regarde aussi l'article 25 du Code des professions, à savoir les différents facteurs qui existent pour constituer un ordre professionnel, je ne retrouve pas qu'il faille absolument voir les diplômes puis, après ça, conférer le titre. On réserve le titre, on s'assure qu'un titre représente le marché ou l'environnement dans lequel il évolue et, après ça, bien on fait l'exercice des diplômes. C'est deux exercices qui sont parallèles.

Mme Goupil: En fait, pour juste ajouter, ça a peut-être été une façon de faire dans le passé, mais en même temps, vous savez, bien que nous ayons un excellent système professionnel, nous avons appris qu'il fallait peut-être mieux s'assurer en amont d'avoir des gens qui ont une formation et qui seront reconnus compétents pour obtenir ce titre réservé. Vous avez raison, dans le passé, ça ne se faisait pas nécessairement de la même façon, mais les modifications et les changements dans le milieu du travail font en sorte, aujourd'hui, qu'il y a des gens, bien que leur formation ait été différente, qui ont développé une expertise qui peut être reconnue, et ça, l'ordre professionnel va s'assurer de le faire. Mais, prenons l'exemple d'un étudiant au Bac en administration des affaires option ressources humaines, est-ce que cette personne-là pourrait avoir le titre de conseiller en ressources humaines agréé?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. Francoeur, enfin, vous avez la parole.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Francoeur (Florent): En fait, ce qu'il faut comprendre, c'est que, je dirais, le profil normal d'un membre de notre ordre professionnel, c'est un titulaire d'un Baccalauréat en relations industrielles, et nous, on veut ajouter – on a eu de la correspondance avec l'Office à cet effet-là – un diplômé d'un Baccalauréat en gestion des ressources humaines. Alors, je vous dirais que ça, c'est le profil normal d'un membre qui veut devenir membre chez nous. Il va toujours demeurer des exceptions à ça, et ça, on va les couvrir par le règlement sur les normes d'équivalence, c'est-à-dire que, disons... Par exemple, prenons le cas d'un ou d'une psychologue industriel qui désire être membre chez nous. On va regarder, via le règlement sur les équivalences de diplômes, si elle peut devenir membre ou pas chez nous, et, à ce moment-là, ça va être par sa qualification qu'elle va avoir obtenue via d'autres diplômes universitaires. Mais il est clair qu'on ne veut pas étendre à 15, ou 20, ou 50 diplômes universitaires l'accès à notre titre professionnel, ce qu'on dit, c'est que le titre professionnel pour les membres de l'Ordre, normalement, comme dans tout ordre professionnel, c'est le titulaire d'un baccalauréat en relations industrielles ou en gestion des ressources humaines. Pour le reste, ça fera partie des exceptions qu'on considérera via le règlement sur les normes d'équivalence.

Mme Fortin (Sophie): Si...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Allez-y, Mme Fortin. Sur mon temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Fortin (Sophie): Je vous remercie. Si je peux juste rajouter très brièvement, lorsqu'on a fait l'exercice de revoir le titre et la justification de faire un rajout pour représenter la réalité du marché, il ne faut pas oublier qu'on a fait ça avec les acteurs concernés, dont les universités, et les universités n'ont pas dit: Non, non, non, écoutez, il y a tel diplôme, il y a tel diplôme. Les universités étaient d'accord de dire: Oui, le titre représente la réalité du marché, il faut l'ajouter. Ceci dit, on est aussi d'accord pour entreprendre une démarche beaucoup plus à long terme pour regarder l'ensemble des diplômes et ce dont les entreprises ont besoin. On n'oublie jamais que le but, éventuellement, c'est de faire travailler ces gens-là. D'accord? Et ça, nous l'avons entreprise, la démarche. On l'a d'ailleurs signifié à l'Office, cette démarche-là, elle est entreprise, mais, encore une fois, c'est très clair que c'est parallèle à la demande d'un titre qui est un besoin immédiat pour refléter la réalité du marché.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Mme Fortin, pour répondre aux interrogations de la ministre qui... Parce que, dans le fond, le but, c'est que la ministre comprenne votre point de vue. C'est ça, le but. C'est elle qui a la majorité. Dans le fond, là, vous admettez maintenant des gens dans votre Ordre, ils ont des qualifications qui doivent rencontrer vos exigences. Demain matin, la ministre consent à votre demande d'ajouter le titre réservé «conseiller en ressources humaines agréé», ça ne change strictement rien à l'admission ou non des gens qui vont demander l'admission à votre Ordre.

Mme Fortin (Sophie): Absolument. Il n'y a aucun changement. Aucun.

M. Dupuis: C'est ça. Alors donc, vous êtes d'accord avec moi que le changement que vous demandez n'affecte en rien, de quelque façon que ce soit, l'admission ou non d'un candidat à votre Ordre aujourd'hui, demain ou dans trois semaines. Ça, c'est une première chose. Vous êtes d'accord avec moi?

Mme Fortin (Sophie): Absolument. Vous avez tout à fait raison.

M. Dupuis: Et, évidemment, ce que vous dites en réponse aux questions de la ministre, c'est que c'est bien sûr qu'à mesure que le temps avance et à mesure que la profession évolue, à mesure que le marché évolue, on va adapter nos exigences au marché du travail, on va le faire comme tout le monde doit le faire, comme toutes les professions doivent le faire, mais ça, ce n'est pas un frein à la demande qu'on fait aujourd'hui. C'est exact?

Mme Fortin (Sophie): Vous avez tout à fait raison. Encore une fois, nonobstant ce rajout du titre, c'est ce que nous allons faire.

M. Dupuis: Alors, moi, je vais vous suggérer de prendre les galées – les galées, c'est ce qu'on dit ici; tout ça, c'est enregistré, c'est écrit – puis envoyez-les lui, elle va les lire.

Mme Fortin (Sophie): Merci du conseil.

(15 h 40)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): S'il n'y a pas d'autres interventions, j'aimerais, au nom des membres de la commission, remercier, donc, les représentants de l'Ordre des conseillers en relations industrielles du Québec pour leur contribution à nos travaux et j'inviterais immédiatement également les représentants de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec à bien vouloir prendre place à la table, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, dans cette atmosphère joyeuse, je rappelle que la commission des institutions est réunie afin de procéder aux consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives, que nous en sommes à entendre les représentants de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec et notamment son président-directeur général, M. François Renauld.

Que les représentants de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec s'avancent. Je leur souhaite la bienvenue au nom des membres de la commission. Je rappelle que nous avons 45 minutes de réservées au présent exercice, dont une quinzaine de minutes pour l'exposé de votre mémoire ou de votre point de vue. Alors, vous avez la parole.

Une voix: Bonjour.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bonjour.


Ordre des comptables en management accrédités du Québec

M. Galluccio (Alphonse): M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, je m'appelle Alphonse Galluccio et je suis président du Bureau de l'Ordre des comptables en management accrédités. Je suis également directeur principal au sein du cabinet Arthur Andersen. Celui qui m'accompagne aujourd'hui est M. François Renauld, président et directeur général de l'Ordre.

Je veux tout d'abord vous remercier de nous avoir donné l'occasion, aujourd'hui, de nous faire entendre dans le cadre de vos travaux sur le projet de loi n° 87. Comme vous avez probablement pu le constater dans notre mémoire, la question la plus particulière que nous souhaitons traiter est celle reliée à la correction de l'erreur législative entourant le titre CMC, Certified Management Consultant. Comme il s'agit là d'un dossier qui remonte à près de sept ans, M. le Président, j'aimerais céder la parole au président-directeur général, M. Renauld, qui, étant en poste depuis plusieurs années, a une bonne connaissance du dossier. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. Renauld.

M. Renauld (François): M. le Président, vous aurez compris que la disposition du projet de loi qui nous amène ici aujourd'hui, comme M. Galluccio vient de le mentionner, se retrouve au paragraphe 1° de l'article 2 du projet de loi n° 87. Elle est très simple, elle propose d'ajouter au titre de conseiller en management le qualificatif «certifié». Alors, vous aurez compris, sans doute, que l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec appuie cette modification que nous proposons depuis près de sept ans. En adoptant cette disposition, l'Assemblée nationale viendra corriger un problème important créé en juin 1993, au moment de l'adoption de la loi 72, devenue depuis le chapitre 38 des lois de 1993.

Nous remercions Mme la ministre responsable de l'application des lois professionnelles d'avoir su prendre cette initiative. Également, nous exprimons notre reconnaissance à l'Office des professions qui, de façon, il faut le dire, transparente et non équivoque, a reconnu l'erreur législative commise en 1994 et qui a tenté dès ce moment de convaincre nos collègues administrateurs agréés de collaborer au règlement du problème.

À quelques reprises, au cours des dernières années, les administrateurs agréés sont effectivement revenus à la charge avec des propositions, mais des propositions non pertinentes, et vous allez comprendre pourquoi. Que visaient-elles, ces propositions? Soit à faciliter l'accès au titre de CMC à certains groupes professionnels, soit à permettre le partage parmi ces mêmes ordres professionnels. Prenons garde aux mirages, M. le Président, et ne nous laissons pas berner par des solutions qui n'en sont pas, des solutions qui viennent, en fait, créer davantage d'irritants qu'elles n'en règlent.

Premièrement, il nous apparaît utile de rappeler que, malgré tout le respect que nous avons pour le titre de CMC, les CMA ne sont aucunement en quête d'un autre titre professionnel. Sans prétention, mais également sans fausse modestie, les CMA sont des experts en gestion stratégique et financière ayant des compétences reconnues même internationalement. Le fait que notre service de placement ait du mal à répondre à tous les mandats que lui confient les employeurs québécois démontre à lui seul la crédibilité dont il jouit.

Voyons maintenant la piste que nos collègues proposent relativement au partage du titre et qui a été évoquée à nouveau cet après-midi. Alors, un partage du titre, je le rappelle, parmi les ordres professionnels qui sont concernés par ce dossier. Est-ce logique que, une fois une erreur reconnue par des gens sensés et raisonnables, on s'entête à lui trouver des accommodements pour vivre avec plutôt qu'à la corriger? L'Ordre n'entend pas, M. le Président, être complice et tirer profit d'une erreur législative, d'une erreur qui, sur le plan strictement des affaires, marginalise le Québec et nuit à sa compétitivité. L'Ordre des CMA ne rêve pas de se voir accorder des privilèges monopolistiques. Bien, au contraire, comme ordre à titre réservé, nous nous satisfaisons pleinement du seul et unique privilège consenti par le législateur en 1987, soit celui du port du titre de CMA pour «comptable en management accrédité».

Notre défi, comme ordre, consiste à maintenir à jour nos compétences et notre formation pour garder la confiance des entreprises. Alors, la table est bien garnie, et nous n'en demandons pas plus. Tout ce que nous désirons, ce sont des règles du jeu équitables à la fois pour le public et pour nos professionnels, ce que les anglophones appellent des règles de fair-play. En réservant le titre de conseiller en management sans le qualifier, le législateur a malencontreusement conféré une sorte d'exclusivité sur l'activité elle-même, puisque seuls les administrateurs agréés peuvent légalement, depuis 1993, s'afficher comme conseillers en management. Or, dites-moi quelle distinction peut-on faire entre l'organisation et la gestion des affaires, qui sont le champ descriptif des CMA tel que défini à l'article 37a, et l'activité de fournir des conseils en matière de direction et de gestion d'organismes publics ou d'entreprises, activité associée, elle, aux administrateurs agréés, comme on l'identifie à l'article 37i du Code?

Voilà pourquoi nous souhaitons que le gouvernement corrige un problème juridique qui a pour objet d'octroyer un quasi-champ exclusif à un groupe professionnel, manoeuvre qui fait – il faut bien le dire – indirectement ce que l'État ne veut pas faire directement. Il s'agit là d'un dangereux précédent, selon nous, qui va certainement à l'encontre des orientations gouvernementales au chapitre de la logique et de l'allégement réglementaire et qui, il faut le dire aussi, détourne le système professionnel de sa finalité.

M. le Président, les dirigeants de l'Ordre croient en un système professionnel bien branché sur la réalité du marché, en un système fonctionnant dans une économie ouverte, où des professionnels sont reconnus en fonction de leur compétence et non pas en regard des privilèges conférés par l'État. La crédibilité, l'équité et le respect des autres sont des valeurs que nous privilégions. C'est précisément sur la base d'une telle toile de fond que l'Ordre, soutenu en cela par plusieurs autres groupes et forces vives du monde des affaires et des milieux universitaires et professionnels, salue l'initiative gouvernementale contenue dans le présent projet de loi.

La modification proposée par le paragraphe 1° de l'article 2 du projet de loi, soit la qualification, je le rappelle, du générique «conseiller en management» par l'ajout du mot «certifié», constitue une solution raisonnable qui rétablit l'équité. Elle est recommandée par l'Office des professions du Québec et par des milliers de gestionnaires, CMA et non CMA, ayant une formation et une expertise qui font autorité. En plus d'avoir le mérite d'être simple, cette solution a le triple avantage, d'abord, de faire coïncider le nouveau titre ainsi réservé – conseiller en management certifié – avec les initiales CMC qui sont déjà réservées dans la loi; également, autre avantage, de ne rien retrancher aux droits et privilèges de nos collègues administrateurs agréés; et, enfin, de permettre à d'autres groupes professionnels, des diplômés universitaires, des gestionnaires, de pouvoir à nouveau s'afficher comme des conseillers en management. Nous estimons donc que la solution proposée par Mme la ministre Goupil constitue une voie raisonnable et que l'équité ainsi retrouvée éliminerait tout risque de judiciarisation du problème.

En terminant, M. le Président, nous souhaitons rappeler aux membres de la commission qu'au cours des dernières décennies l'Ordre ne s'est jamais fait tirer l'oreille pour collaborer activement à des échanges ou à des initiatives sur l'amélioration du système professionnel ou même – il faut le dire – sur la rationalisation de la profession comptable. Nous avons maintes fois démontré que c'est d'ailleurs bien davantage l'avenir qui nous intéresse que le passé. Aussi, nous entendons participer activement au plan d'action que Mme la ministre responsable de l'application des lois professionnelles a annoncé en novembre dernier en vue de mettre à jour le système professionnel. Ce qui nous plaît le plus dans ce plan d'action, on souhaite le dire, c'est son approche à la fois réaliste et bien pragmatique. Chaque fois que la chose est possible, pourquoi ne pas régler des problèmes simples avec des solutions à la fois simples et équitables?

(15 h 50)

Voilà, M. le Président. Ceci complète notre présentation. M. Galluccio et moi-même serions évidemment disposés à répondre à des questions et à échanger avec les membres de la commission. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. Renauld. Merci, M. Galluccio. Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, merci beaucoup pour l'échange que nous avons, parce que, en commission parlementaire, évidemment, nous avons des gens qui nous proposent certaines choses, d'autres personnes... Mais vous avez raison de dire que, lorsque nous pouvons simplifier les choses... c'est notre façon de faire et c'est ce que l'on souhaite également.

Moi, il y aurait une question, par exemple, avec laquelle j'ai de la difficulté à comprendre un petit peu. Lorsque vous dites qu'on ne peut pas utiliser le titre de conseiller en management, dans quelle mesure la confusion est-elle perçue actuellement au niveau du public?

M. Renauld (François): Bon, Mme la ministre, M. le Président, présentement, il faut bien le dire, et depuis longtemps, les CMA, d'autres groupes de professionnels, de non-professionnels, je pense à nos diplômés universitaires, aux titulaires du MBA, aux bacheliers en administration, beaucoup de ces gens-là sont habilités par leur formation, par leur expérience à donner du conseil en management, mais il faut comprendre qu'actuellement, comme le titre de conseiller en management, qui équivaut, qui est très près de l'activité elle-même du conseil en management, est réservé par la loi, ceci empêche ces professionnels-là, ces gradués universitaires là, tout ce monde, tous ces gestionnaires de s'afficher comme des conseillers en management, ce qu'ils sont dans la vie de tous les jours.

Mme Goupil: D'accord. Alors, ça viendra simplifier les choses.

M. Renauld (François): Bien, je pense que oui, parce que, en fait, avec ce qui est proposé dans le projet de loi, on viendra baliser, on viendra qualifier un titre, et, comme je viens de le mentionner tout à l'heure, ça permettra de faire coller à des initiales... Parce qu'il faut bien comprendre que...

Mme Goupil: CMA.

M. Renauld (François): ...CMC, ce n'est pas un titre. Ce sont des initiales qui sont réservées effectivement dans la loi, mais ce que le législateur a oublié de faire, probablement par mégarde, en 1993, c'est de qualifier ce titre-là, de décliner ces lettres-là, et c'est ce qu'on souhaite et c'est ce qui serait fait avec le mot «conseiller en management certifié».

Mme Goupil: Merci, monsieur.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à la commission. Vous avez parlé tout à l'heure, lorsque vous... On a eu un groupe, l'Ordre des administrateurs agréés, qui a proposé, contraire à vous, la solution contraire. Vous avez parlé de l'erreur législative de 1993, est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus? Puis est-ce que vous avez eu des pourparlers avec l'Ordre, par exemple, des administrateurs? Est-ce qu'il y a une possibilité d'entente? Est-ce que vous pouvez élaborer sur ça?

M. Renauld (François): Bien, en fait, l'erreur législative, elle est reliée à ce que nous venons de dire, c'est que le législateur, en ayant réservé une expression de nature générique, s'est quasiment trouvé à réserver, dans le fond, une espèce de champ d'activité à un groupe professionnel, et, nous, on ne croit pas que c'était l'intention du législateur. Nos collègues administrateurs agréés, tout à l'heure, l'ont rappelé, ça a été fait à l'époque pour permettre le regroupement des titulaires du CMC, qui étaient à l'extérieur du système professionnel à cette époque... leur permettre de se regrouper à l'intérieur avec nos collègues administrateurs agréés. Donc, c'était l'intention, je pense, de l'époque, et on voulait réserver dans la loi à ce moment-là non pas un champ, une activité, mais on voulait réserver un titre professionnel. Mais, par le fait que le législateur ait réservé un titre professionnel de nature générique, il s'est trouvé à réserver un quasi-champ exclusif, et c'est ça, l'erreur législative. Comme je l'ai dit tout à l'heure aussi, dans le fond, on s'est trouvé à faire indirectement ce qu'on ne voulait pas faire directement, puisque, à mon avis, si le législateur avait voulu réserver un champ exclusif, il se serait prévalu de l'article 26 du Code et aurait tout simplement fait une législation en ce sens-là.

M. Boulianne: Et est-ce qu'il y a des possibilités de rapprochement avec l'Ordre des administrateurs agréés à ce chapitre-là? Parce qu'ils ont une position complètement contraire à la vôtre.

M. Renauld (François): Oui. Je dois dire que, à plusieurs reprises... Vous allez comprendre, dans un dossier comme ça, qui, en apparence, a l'air tout à fait simple, parce qu'on parle d'un mot, là, ce n'est pas sorcier, il me semble... Évidemment, vous allez comprendre qu'il y a eu plusieurs rencontres, plusieurs démarches, et, dans tout ça, je pense que... En tout cas, je peux parler juste pour nous, je pense qu'on a été de bonne foi, et on a essayé d'envisager différentes pistes avec différentes personnes, différents présidents de l'Ordre des administrateurs agréés, on a regardé différentes solutions. Une des dernières solutions qui ont été mises de l'avant, je l'ai évoqué tout à l'heure rapidement, et ça a été repris par nos collègues administrateurs agréés, c'est celle du partage du titre à l'intérieur de système professionnel.

Nous, on n'est évidemment pas confortables avec ça. Alors, c'est une piste qui ne nous convient pas. D'ailleurs, on pense que le fait de régler le problème, de régler l'erreur législative, c'est-à-dire de qualifier l'expression «conseil en management», va permettre de toute façon aux administrateurs agréés, par la suite, de discuter de partage avec d'autres collègues des ordres professionnels, mais on parlera de partager un titre qui a été qualifié, qui est décliné en fonction des initiales qui sont réservées dans la loi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. Galluccio, vous vouliez intervenir également sur cette question?

M. Galluccio (Alphonse): Bien, je voulais compléter un peu ce que M. Renauld vient de mentionner. Le fait que le conseil en management soit réservé strictement à l'Ordre des administrateurs agréés ne permet pas à nos professionnels qui sortent d'un programme universitaire avec un baccalauréat, qui ont subi des examens d'entrée, qui ont un encadrement de l'utiliser à bon escient aussi pour protéger le public. Lorsque vous allez avoir le public qui va avoir un conseiller en gestion, s'il a un titre professionnel CMA, disons, à ce moment-là le public est d'autant plus protégé, parce que, aujourd'hui, c'est sûr que vous pouvez avoir des individus qui vont se présenter comme conseillers en gestion sans aucun titre professionnel qui l'accompagne. Donc, ces gens-là ne sont pas nécessairement régis par absolument aucun ordre professionnel. Nous, ça serait, je crois, de redonner à nos membres... Puis nos membres ont été silencieux jusqu'à maintenant parce qu'ils savent que l'Ordre, on travaille dans le dossier, comme on disait tantôt, depuis sept ans. Donc, nos gens n'ont pas, si vous voulez, pris d'initiatives dans le public ou quoi que ce soit, mais nos membres sont lésés de ce fait-là. Et, si on veut protéger le public encore plus, bien, en ayant un membre CMA qui est conseiller, si vous voulez, en gestion, je pense qu'on atteint le but visé.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Alors, M. Renauld, M. Galluccio, merci pour votre présentation. Merci, pour l'information que vous nous donnez sur le sujet.

Dans votre mémoire, vous faites référence à un jugement, la Corporation professionnelle des administrateurs agréés du Québec contre Mantha, où le juge dit qu'une activité ne devrait pas faire l'objet d'une réservation de titre ou d'une exclusivité. Est-ce que vous pouvez faire des commentaires sur ce jugement?

M. Renauld (François): Oui. Si vous permettez, M. le Président, en fait ce à quoi on fait référence, c'est une situation tout à fait analogue à celle dont il est question avec le titre de conseiller en management, où on parle d'une expression générique. Alors, ce cas-là dont on parle dans notre mémoire est un cas où c'était l'expression «conseiller en gestion», et le juge, dans ce cas-là, a tout simplement , dans le fond, un peu soutenu l'argumentaire que nous avons, de dire qu'un titre qui représente une activité, l'activité du conseil en gestion, qui est tout à fait semblable au conseil en management, on ne peut pas travailler avec ça, c'est-à-dire que le législateur a réservé dans le Code l'expression – dans ce cas-là on parlait des administrateurs agréés – «administrateur agréé». Alors, c'est ce titre qu'on a réservé, et quelqu'un peut s'afficher comme conseiller en gestion, devrait pouvoir s'afficher comme conseiller en management. Alors, c'est à ce cas-là qu'on faisait référence et qui est tout à fait analogue à la situation qu'on vit présentement, de sorte que, s'il y avait judiciarisation de cette situation-là, ça amènerait toutes sortes de complications.

Comme M. Galluccio a dit, jusqu'à maintenant on a demandé à nos membres de faire preuve de retenue, que le législateur était convaincu qu'il y avait là une erreur. C'est reconnu par l'Office des professions depuis 1994, et on avait toujours espoir, et c'est pour ça qu'on est heureux de le voir enfin dans un projet de loi. Mais il reste que ça crée une injustice, un manque d'équité pour nos membres qui sont, encore une fois, dûment formés comme des conseillers en management.

Et il faut faire attention. Quand on parle aussi du public auquel on s'adresse, il faut faire attention un petit peu à ce qu'on dit. Vous savez, que ce soient des CMA, que ce soient des CMC, des C.A., etc., ce n'est pas nécessairement Jeanne Blancheville ou Jos Bleau qui utilise les services de ces gens-là. Principalement, quand on parle du public, notre public utilisateur de nos services professionnels, c'est un public un peu plus averti, c'est un public d'entreprises, c'est des chefs d'entreprises, et puis, si dans le système, par mégarde, il y a des petits imposteurs, bien je vais vous dire de quoi, Ils ne feront pas beaucoup de millage, parce que les entreprises, là... C'est bien beau de vouloir protéger les entreprises, mais, il faut faire attention, les entreprises sont capables de discriminer aussi, elles n'ont pas besoin d'être tenues comme à la maternelle.

(16 heures)

M. Bergman: Pouvez-vous nous parler un peu comment la protection publique serait améliorée avec les changements qu'on va faire en vertu de ce projet de loi, à l'article 2?

M. Renauld (François): Bien, en fait, M. le député, c'est plus la perspective d'être équitable et de ne pas limiter l'offre de service qui nous préoccupe. C'est plus dans cette perspective-là, parce qu'actuellement... Encore une fois, parce que l'expression qui est réservée dans loi est générique, donc elle tend à laisser croire qu'il y a une espèce de quasi-champ exclusif réservé à un groupe de professionnels, ça limite l'offre de ce service professionnel qui est fondamental dans notre économie, ça limite cette offre-là, ça tend à limiter l'offre aux seuls administrateurs agréés. Et c'est en ce sens-là que ça ne favorise pas le public et c'est en ce sens-là aussi que ça porte préjudice au plan tout simplement de la compétitivité de nos entreprises. Il ne s'agit pas de créer des monopoles artificiels avec l'exercice de ce genre de fonction là.

M. Bergman: Vous faites mention de «restriction indue à la liberté d'expression» dans votre mémoire. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi il y a une restriction indue de la liberté d'expression sans l'amendement qui a été apporté ici?

M. Renauld (François): Bien, M. le Président, je pense que, quand on fait référence à ça, on se pose plus une question, nous, en se disant: Est-ce que ce n'est pas là une façon de brimer la liberté d'expression? C'est que, encore une fois, à partir du moment où des gens sont dûment qualifiés, bien formés à l'université, etc., et qu'ils ont les compétences voulues pour pratiquer du conseil en gestion ou du conseil en management, quand on limite ces gens-là à cause de la réservation d'une expression générique dans la loi et quand, par surcroît, on est la seule province, le seul coin dans le monde à faire ça, bien je pense qu'il faut se poser des questions. Je pense que ça serait là un bon cas à soulever à cet égard-là au niveau des libertés d'expression.

M. Bergman: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Ça me fait plaisir de vous rencontrer. Je comprends tout à fait ce que vous demandez comme question, mais j'aurais un sujet légèrement connexe à vous poser et je ne voudrais pas manquer la chance que j'ai de pouvoir vous parler pour poser ce sujet connexe.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Toujours dans le cadre du projet de loi n° 87.

M. Gautrin: Bien sûr, mais écoutez, c'est un projet de loi omnibus. Ne vous inquiétez pas.

Vous êtes l'association ou la corporation qui regroupez le plus de planificateurs financiers. Donc, parmi...

M. Galluccio (Alphonse): Vous vous trompez.

M. Gautrin: Non? Je me trompe? Vous ne regroupez pas de planificateurs financiers?

M. Renauld (François): On a plusieurs membres évidemment qui font de la planification financière, mais relativement peu de ces membres portent le titre de planificateur financier, en raison des nouvelles dispositions avec le Bureau des services financiers.

M. Gautrin: Oui, oui, je comprends, au point de vue du titre, mais de ceux qui font de la planification financière...

M. Renauld (François): Mais la réponse à votre question, c'est non. Nous sommes...

M. Gautrin: Parce qu'à un moment, lorsqu'on avait réfléchi sur la possibilité de créer soit un ordre de planificateurs financiers, soit de les intégrer à l'intérieur d'un ordre, et je pense que c'était le vôtre dans lequel on avait pensé les intégrer... Je me trompe?

M. Renauld (François): C'était plutôt avec les administrateurs agréés, je pense.

M. Gautrin: Excusez-moi, je fais à ce moment-là une erreur. Vous en avez seulement peu. Vous, vous...

M. Renauld (François): C'est un bon groupe aussi, vous savez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Bien sûr. Donc, c'est à eux que je poserai la question. Et, à l'heure actuelle, c'est un fait que les planificateurs financiers sont fractionnés dans un certain nombre, il y a des CA, il y a des CGA, il y a des avocats. Est-ce que ça pose problème ou pas? Vous en représentez un petit groupe.

M. Renauld (François): Bien, j'ai ma propre opinion là-dessus.

M. Gautrin: C'est celle que j'aimerais savoir.

M. Renauld (François): Je pense que ce n'est certainement pas un modèle à suivre, parce que, quand on a la prétention de vouloir protéger le public, il faut se demander si le public va se retrouver dans tout ça.

M. Gautrin: Je partage le même point de vue que vous dans une croisade que je mène depuis plusieurs années.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition...

M. Galluccio (Alphonse): Mais juste dans le fait de compléter...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Oui, M. Galluccio.

M. Galluccio (Alphonse): ...il faut réaliser que – merci, M. le Président – la machine des ordres professionnels, comme les CMA, CA, nous avons un syndic au niveau des plaintes. Ce n'est pas tous les ordres professionnels qui ont des syndics aussi pour recevoir des plaintes pour protéger le public. C'est juste la notion qu'au niveau des planificateurs financiers je crois qu'on ouvre un certain champ où le public doit être protégé. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, M. Renauld, M. Galluccio, je vous remercie. J'ai pris bonne note également de l'ouverture qui a été faite tant par l'Ordre des administrateurs, qui ont été les premiers intervenants. M. Gautrin, c'est dommage, ils ont passé les premiers. Ha, ha, ha! Alors...

M. Gautrin: Madame, je sais, j'ai beaucoup de qualités, mais je n'ai pas le don d'ubiquité.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Pas encore.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Mais je travaille fortement dans ce sens-là, ça s'en vient. Ha, ha, ha!

Mme Goupil: Mais ce que je retiens également, si vous me permettez, M. le Président, c'est que ce matin on nous a dit qu'il y avait des échanges importants qui avaient lieu pour s'assurer d'avoir peut-être un partenariat. Je pense que c'est rassurant de voir qu'effectivement... bien que nous ayons chacun dans nos secteurs particuliers à défendre nos ordres professionnels, mais surtout de voir qu'il est nécessaire de travailler en partenariat et en solidarité pour faire face à cette nouvelle façon de travailler. Je vous remercie également de votre collaboration dans le cadre de la réforme du système professionnel. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il me reste également, au nom des membres de la commission, à vous remercier, M. Galluccio, à titre de président du Bureau de l'Ordre, de même que M. Renauld, président-directeur général. Merci.

Alors, la commission donc poursuit ses consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

Nous avons un peu d'avance sur notre horaire, mais si les membres représentant l'Ordre des orthophonistes et audiologistes veulent bien s'avancer; nous allons suspendre quelques minutes seulement, mais on peut déjà s'installer.

(Suspension de la séance à 16 h 6)

(Reprise à 16 h 14)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.


Documents déposés

J'informe les membres de la commission que, tel qu'il avait été convenu, la correspondance appuyant la position de l'Ordre des conseillers en relations industrielles est maintenant déposée. Elle a dû vous être distribuée, j'imagine, tel qu'il avait été entendu.

Alors donc, nous avons devant nous les représentants de l'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec, dont son président, M. Louis Beaulieu. Je rappelle que nous avons 45 minutes grosso modo pour les échanges, dont une quinzaine de minutes pour la présentation. Alors, M. Beaulieu, vous avez la parole, en vous invitant à présenter bien sûr les personnes qui vous accompagnent.


Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec (OOAQ)

M. Beaulieu (Louis): Merci beaucoup, M. le Président. Madame, messieurs de la commission, Mme la ministre, bonjour. Je vous présente Mme Isabelle Vendette, qui est vice-présidente de l'Ordre, et je vous présente aussi Mme Ginette Diamond, qui est trésorière. Nous constituons à nous trois la délégation de l'Ordre.

D'abord, vous dire que nous sommes très heureux d'être ici devant la commission. Nous avons préparé un mémoire qui devrait vous être distribué avec une pochette de présentation de l'Ordre. Alors, je vais lire en partie ce mémoire, sauter quelques bouts parce que ça dépasserait largement le temps qui m'est imparti.

L'Ordre apprécie de pouvoir s'adresser aux membres de la commission, et c'est avec un souci constant d'amélioration du fonctionnement du système professionnel québécois qu'il vient exposer les considérations qui suivent. L'Ordre espère que ses commentaires permettront d'enrichir le projet sans retarder indûment l'adoption de ce bill omnibus, puisqu'il est souhaitable que plusieurs des dispositions qui y sont proposées soient mises en vigueur rapidement.

L'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec a pour mission d'assurer la protection du public au regard du domaine d'exercice de ses membres, soit les troubles de la communication. L'Ordre surveille l'exercice professionnel des orthophonistes et des audiologistes et voit à favoriser l'accessibilité du public à des services de qualité afin de contribuer à l'intégration sociale des individus et à l'amélioration de la qualité de vie de la population québécoise.

L'Ordre compte 1 080 membres, dont un peu plus de 180 audiologistes et un peu moins de 900 orthophonistes qui exercent dans le réseau de la santé et des services sociaux, dans le réseau de l'éducation et en pratique privée.

Par leurs compétences, les professionnels des troubles de la communication dépistent, évaluent et traitent les problèmes de la communication. Les orthophonistes concentrent leurs interventions sur les difficultés de langage oral ou écrit, de la parole, de la voix et aussi de dysphagie, et les audiologistes, sur les problèmes d'audition. Ils agissent auprès de personnes de tout âge qui présentent un large spectre de problématiques. Ils contribuent à la santé, au développement et au bien-être des personnes en leur permettant de développer ou de retrouver leurs capacités à communiquer dans leur milieu de vie, à l'école, au travail et dans la communauté.

Dans une société où l'accès à l'information et l'habileté à communiquer sont déterminants pour apprendre, travailler et s'épanouir, le rôle de professionnel des troubles de la communication est crucial. Les audiologistes et les orthophonistes doivent compléter une formation universitaire de maîtrise pour pouvoir être admis à l'Ordre.

En octobre 1999, en réponse à la demande de l'Office des professions du Québec, l'Ordre formulait un avis relativement à la préparation du présent projet. L'Ordre constate que plusieurs des commentaires qu'il a émis sont intégrés au projet, que les dispositions quant au pouvoir habilitant en matière de formation continue ont été bonifiées et que d'autres éléments devraient être améliorés, notamment ceux concernant des dispositions relatives à la réserve d'un titre supplémentaire en anglais, d'abréviations et d'initiales, au permis restrictif et à la limitation du droit de pratique dans les cas d'incompétence grave.

Les commentaires et les propositions que l'Ordre formule dans ce mémoire se situent dans le cadre de sa réalité actuelle. L'Ordre est un ordre à titre réservé. Tout comme l'ensemble des ordres, il a pour mission d'assurer la protection du public. Il a les mêmes devoirs et les mêmes obligations. Toutefois, comme l'ensemble des ordres qui n'ont pas de réserve en exclusivité du champ d'exercice, l'Ordre est confronté à certaines limites quant à l'exercice de ses devoirs.

En effet, il constate que des individus exercent des activités qui ne devraient être accomplies que par des membres, compte tenu des compétences et des habilités nécessaires non seulement pour rendre un service de qualité à la population, mais surtout pour assurer la protection des individus qui requièrent de tels services.

Jusqu'à l'adoption du Code des professions en 1973, la profession d'orthophoniste et d'audiologiste était encadrée par la Loi des orthophonistes et des audiologistes qui reconnaissait la nécessité de protéger le public par un exercice exclusif réservé aux professionnels orthophonistes et audiologistes. Depuis ce temps, l'Ordre constate les limites inhérentes à son statut d'Ordre à titre réservé et déplore de ne pas pouvoir exercer pleinement sa fonction principale de protection du public.

Commentaires sur les dispositions déjà prévues au projet de loi. Pouvoir habilitant en matière de formation continue. Le maintien des compétences est un des garants de la qualité de la pratique. À l'entendement de l'Ordre, les modifications apportées dans le projet de loi n° 87 aux articles 17 et 20 vont dans la bonne direction. En effet, elles permettront à l'Ordre d'imposer aux membres ou à une classe d'entre eux de suivre des activités de formation continue. Ce nouveau pouvoir permettra certainement d'améliorer la pratique des membres ou de groupes de membres lorsque des carences seront identifiées dans les compétences, permettant ainsi de dépasser le cas par cas.

Au-delà de pallier des lacunes et dans une perspective d'excellence, il serait hautement souhaitable pour un ordre de se servir de ces nouveaux pouvoirs dans le but d'améliorer de façon continue l'exercice chez ses membres afin de tenir compte de l'évolution très rapide des connaissances et des technologies. Le libellé proposé à l'article 20 du projet de loi permettra la mise en place du cadre nécessaire pour assurer chez tous les professionnels un minimum de formation continue. Il y a ainsi l'obligation déontologique à celle du maintien de la compétence.

(16 h 20)

Dans les faits, l'instauration d'un règlement obligeant les membres à répondre à un certain nombre d'exigences en matière de formation continue permettra d'identifier plus clairement quels sont ceux qui agissent pour maintenir leur compétence à jour. Pour ceux qui failliront à cette obligation, l'Ordre pourra décider de les inspecter en priorité.

Commentaires sur des dispositions que l'on devrait ajouter au projet. Afin d'améliorer la protection du public, l'Ordre considère qu'il y a lieu de modifier l'article 36m du Code par l'ajout, dans sa version anglaise, d'un titre à réserver, soit le titre «Speech Language Pathologist», et par l'addition, dans ses versions française et anglaise, d'abréviations et d'initiales. En effet, l'usage nord-américain chez les anglophones, tant canadiens qu'américains, le commande.

Malgré les limites importantes inhérentes au statut d'un ordre où seul le titre est réservé, la réserve du titre demeure la marque la plus déterminante pour faire en sorte que nos concitoyens soient assurés de recours pour les activités à risque de préjudice qui doivent être réalisées par les membres de l'Ordre. C'est pourquoi l'Ordre souhaite que ce titre soit ajouté au Code le plus rapidement possible et que soit maintenue la réserve du titre «Speech Therapist», puisque ce dernier jouit toujours d'une certaine notoriété auprès du public et des employeurs. En effet, ce titre est réservé depuis 1964. Le retirer dès maintenant pourrait avoir comme conséquence que des personnes se l'approprient et laissent croire à tort qu'elles sont membres de l'Ordre.

Il y a aussi lieu de réserver des initiales et des abréviations, puisque de plus en plus de membres de l'Ordre, tout particulièrement dans la communauté anglophone du Québec et même des personnes non-membres, les utilisent pour s'identifier auprès du public. À cet égard, je dois dire que le président de l'Office des professions nous a déjà signifié travailler à notre demande.

Permis restrictif afin de pouvoir encadrer des individus qui ne répondent pas provisoirement à l'ensemble des conditions pour se voir délivrer un permis en vertu des dispositions à l'article 40. L'Ordre considère nécessaire de pouvoir encadrer la pratique professionnelle d'individus qui, pour différents motifs, ne peuvent se voir délivrer un permis en vertu des dispositions prévues aux articles 40, qui concerne la délivrance du permis, ou 41, qui concerne la délivrance d'un permis temporaire en vertu des exigences de la Charte de la langue française.

Des personnes provenant de l'extérieur du Québec ou du Canada peuvent être qualifiées en partie pour exercer la profession auprès d'un segment de la population ou pour poser certains actes. Pour l'ensemble des ordres et surtout pour ceux où il n'y a pas de réserve en exclusivité du champ de pratique, la possibilité de pouvoir encadrer des individus, en limitant leur exercice dans des activités à réaliser tout autant que dans le temps, permettrait d'assurer qu'un plus grand nombre de ces personnes soient encadrées au sein du système professionnel.

Dans le cas particulier des ordres à titres réservés, il arrive régulièrement que des individus ne peuvent se voir délivrer un permis d'exercice, que ces individus décident tout de même de travailler sans nécessairement avoir toutes les compétences exigées pour la délivrance du permis au candidat formé au Québec. Trop souvent, l'Ordre reçoit des appels de personnes insatisfaites ou, pire encore, inquiètes des actes posés par des individus qui ne sont pas membres de l'Ordre.

Il faut mettre en place des dispositions pour limiter l'exercice de la profession à des individus qui ne peuvent pas se voir délivrer un permis en vertu des dispositions prévues à l'article 40. À cet égard, l'Ordre envisage deux pistes de solution. La première vise à bonifier l'article 40 ou l'article 41 par l'ajout d'un libellé qui permettrait d'octroyer un permis restrictif à certaines personnes ou catégories de personnes pour une durée limitée dans le temps. Ce pouvoir permettrait au bureau d'un ordre d'établir quelles sont les personnes ou catégories de personnes concernées, quelles sont les conditions d'encadrement de ces personnes, notamment en regard de la limitation de l'exercice, que ce privilège est limité dans le temps et qu'il vise à ce que des individus s'engagent à prendre les mesures nécessaires pour normaliser leur situation en vue de se voir délivrer un permis en vertu de l'article 40.

Il pourrait être particulièrement intéressant d'ajouter une telle disposition à l'article 41 qui concerne la délivrance d'un permis temporaire tout en s'assurant de bien distinguer le libellé des obligations à remplir en vertu des dispositions relatives à la Charte de la langue française.

La seconde possibilité pourrait être d'apporter des précisions à l'article 39 qui permet au président d'un ordre d'accorder une autorisation spéciale d'utiliser au Québec le titre réservé aux membres de l'Ordre à une personne légalement autorisée à exercer hors Québec. À l'entendement de l'Ordre, le libellé de 39 ne permet pas de décider des conditions qui permettent de limiter l'usage du titre au-delà du délai indiqué dans l'autorisation. Si cette possibilité était retenue, il faudrait ajouter des dispositions qui indiqueraient que l'utilisation du titre pourrait être soumise à certaines restrictions qui devraient être déterminées au moment où l'autorisation serait produite.

De telles conditions devraient permettre d'indiquer les limitations de pratique et de préciser les activités pouvant être réalisées et sur quel segment de la population ils pourraient agir lorsqu'ils utilisent le titre réservé aux membres de l'Ordre. Ces individus, ainsi autorisés, devraient être également soumis à l'ensemble des obligations et des devoirs des membres de l'Ordre, notamment ceux liés au respect des lois, règlements et normes de même qu'à la possibilité d'être inspecté.

L'Ordre considère que ces deux approches ont leur mérite, principalement parce qu'elles permettraient d'améliorer la protection du public. Toutefois, il croit qu'il vaudrait sans doute mieux faire un ajout à l'article 40, ou encore mieux 41, puisque ces derniers réfèrent aux permis temporaires.

Dans une perspective où la mobilité de la main-d'oeuvre s'accroît, de telles dispositions pourraient faciliter l'accueil d'individus qui n'ont pas complété leur formation au Québec dans des domaines où il y a souvent pénurie et besoin marqué de services.

En effet, la reconnaissance d'un niveau de compétence élevé chez les individus, sans qu'il soit cependant suffisant pour que l'Ordre puisse leur décerner un permis complet, permettrait tout de même de les encadrer et de les encourager à compléter leur formation afin qu'ils puissent répondre à l'ensemble des standards exigés pour la pratique au Québec.

De telles dispositions pourraient être également utiles pour encadrer des étudiants ou des stagiaires qui doivent compléter leurs études terminales avant de pouvoir obtenir un permis en vertu de l'article 40. Ils seraient ainsi soumis au respect des obligations du Code et des règlements de la profession tout en étant sous la supervision d'un membre de l'Ordre.

Le pouvoir de limitation du droit de pratique dans les cas d'incompétence tels qu'identifiés par le Comité d'inspection professionnelle. Les modifications proposées au libellé de l'article 113 constituent des progrès intéressants en vue d'améliorer la protection du public. En effet, il sera utile aux ordres, par décision du bureau et sur recommandation du Comité d'inspection professionnelle de pouvoir limiter ou suspendre le droit d'un membre d'exercer ses activités professionnelles jusqu'à ce qu'il ait rencontré l'obligation de compléter avec succès un stage, ou un cours de perfectionnement, ou les deux.

L'Ordre croit toutefois qu'il faudrait également pouvoir limiter ou suspendre le droit d'un membre d'exercer dès que le Comité d'inspection professionnelle constate que la protection du public l'exige, compte tenu de la nécessité de protéger le public pendant la période nécessaire à l'organisation et au démarrage d'un stage de perfectionnement. L'Ordre croit donc que des modifications devraient être apportées à l'article 55 ou 113 en vue de rendre possible la limitation ou la suspension du droit du membre d'exercer ses activités professionnelles dès que le Comité d'inspection le juge nécessaire, en prévoyant la nécessité d'une décision du bureau dans les meilleurs délais pour confirmer le maintien de la décision du CIP.

En conclusion, l'Ordre des orthophonistes et audiologistes est conscient que certaines des modifications demandées pourraient exiger une étude plus approfondie et même des débats. Il espère que les changements qu'il propose, tout particulièrement au regard de la réserve d'un titre supplémentaire, d'abréviations et d'initiales, ainsi que de la possibilité de pouvoir disposer d'un permis restrictif temporaire, pourront devenir réalité très rapidement. En effet, ces outils lui permettront de mieux remplir ses obligations de protéger le public, compte tenu des limites inhérentes à son statut d'ordre à titre réservé.

À moyen terme, l'Ordre considère qu'il faudra, pour le bénéfice de nos concitoyens, donner à tous les ordres les moyens d'assumer pleinement leur mission par des outils plus performants. Au regard de la pratique des orthophonistes et des audiologistes, cela devra nécessairement se traduire par la reconnaissance d'une exclusivité d'exercice qui permettra, d'une part, de donner des droits de recours et une assurance de qualité et, d'autre part, de prévenir les préjudices réels et potentiels auxquels sont actuellement exposés nos concitoyens lorsqu'ils consultent des personnes qui ne sont pas membres de l'Ordre pour des difficultés ou des troubles de la communication.

(16 h 30)

L'Ordre est confiant que l'exercice de mise à jour du système professionnel, auquel sont conviés le monde professionnel et la société québécoise, permettra d'améliorer la protection du public et le fonctionnement du système professionnel. C'est dans l'esprit de collaboration qui l'anime et avec le souci constant d'assurer à nos concitoyens des services professionnels de haute qualité que l'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec s'engage dans ces travaux initiés par la ministre de la Justice et ministre responsable de l'application des lois professionnelles, Mme Linda Goupil. L'Ordre considère que cet effort collectif permettra d'améliorer non seulement la protection et l'équité, mais aussi la santé et le bien-être des Québécois et des Québécoises. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le président. Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. Beaulieu, merci beaucoup, ainsi que les gens qui vous accompagnent. Nous avons déjà eu l'occasion d'échanger à quelques reprises, et j'ai pris bonne note de votre collaboration et surtout des propos que vous nous avez apportés de façon complémentaire aujourd'hui. Je suis convaincue que vous allez être quelqu'un qui allez – votre Ordre – collaborer à faire en sorte que, dans le cadre de la réforme du système professionnel, en ce qui touche particulièrement l'inspection et pour s'assurer de la compétence des gens... Vos propos ainsi que votre collaboration seront tout à fait appréciés dans le cadre de cette réforme.

Maintenant, j'ai un petit peu de difficultés avec le permis restreint, parce que, évidemment, si on ne peut pas utiliser soit l'article 33 ou l'article 39 qui actuellement permet déjà aux ordres d'utiliser, avec une autorisation spéciale... à des gens d'exercer, comment pourrions-nous autoriser quelqu'un avec un permis restreint s'il ne rencontre pas déjà, je vous dirais, l'encadrement de votre Ordre professionnel?

M. Beaulieu (Louis): Ce que je répondrais sur cela, c'est que, pour avoir été interpellé à quelques reprises en vertu de l'article 39, sur l'autorisation spéciale, comme je disais dans mon mémoire, la seule possibilité que nous y voyons de limiter l'exercice, c'est dans le temps. Et les membres à qui nous autorisons l'usage du titre ne sont pas des membres de l'Ordre – je m'excuse, j'ai fait un abus de langage en disant ça comme ça. Les personnes à qui nous donnons le droit d'utiliser le titre ne sont pas des membres, donc ne sont pas soumis, dans notre compréhension, à l'ensemble des obligations du Code. Bon. Ceci étant dit, deuxièmement, nous ne pouvons pas limiter leur exercice.

Ce à quoi nous faisons référence, c'est que plusieurs candidats étrangers que nous recevons au Québec ne peuvent pas se qualifier pour l'ensemble des compétences, pour l'ensemble du curriculum exigé pour les Québécois ou pour ceux qui font leurs études dans une université québécoise ou, à la rigueur, canadienne, puisqu'il y a des reconnaissances d'équivalence. Alors, nous ne pouvons même pas leur permettre d'exercer auprès d'une partie de la population, alors que cela serait possible de le faire. Et j'ai de la difficulté à utiliser 39 pour faire cela parce que je ne peux pas limiter leur exercice en vertu de 39. Alors, c'est presque comme, dans mon esprit, si je leur signais un chèque en blanc.

Et c'est pour ça que j'arrive avec cette proposition de modifier 41, où, avec des règles bien précises, nous pourrions dire: Telle personne se verrait accorder le droit d'exercer au Québec, mais serait soumise à l'ensemble des mécanismes du Code, règlement et inspection, ce que, à mon avis, ne permet pas 39.

Mme Goupil: Je vais vous dire, on va le regarder, hein. Parce que j'échangeais avec M. Samson... Parce qu'il est évident que, si on ne peut pas utiliser actuellement soit l'article 33 pour l'exercice exclusif ou 39 pour réservé, c'est assez surprenant qu'on puisse permettre à quelqu'un d'exercer avec un permis restrictif. Parce que, s'il n'a pas les compétences pour le faire, quel serait l'intérêt de lui accorder un permis restrictif pour le faire? Je comprends ce que vous dites. C'est qu'actuellement il y aurait certaines équivalences qui ne sont pas reconnues actuellement, ce qui fait en sorte qu'on pourrait, par le permis restrictif, leur autoriser...

M. Beaulieu (Louis): Je vais m'expliquer autrement. Je n'ai pas dû être clair. Je vais vous donner un exemple de ce que j'entends. Supposons un candidat qui vient, disons, de France. Ce candidat nous arrive avec un curriculum qui n'est pas équivalent mais avec lequel il nous fait la démonstration qu'il pourrait très bien travailler avec les enfants mais pas les adultes, compte tenu des exigences de la profession et de ce qu'il a dans son curriculum qu'il a obtenu par son diplôme.

Comme ordre, je ne peux pas actuellement dire: Je vais lui donner un permis complet ou un permis en vertu de l'article 40 parce que ça voudrait dire que je l'autorise à pratiquer dans l'ensemble du champ d'exercice, auprès de toutes les populations. Par contre, je me sentirais à l'aise de dire: Cette personne a suffisamment de compétences pour travailler avec les enfants, je lui demande de s'engager à compléter ce qui lui manque pour normaliser sa situation en vertu de l'article 40, pour pouvoir lui donner un permis complet.

Autrement dit, je lui facilite l'arrivée ici; je rends service à ma population, puisque j'ai des graves problèmes de pénurie de services – vous avez dû voir ça dans les journaux à plusieurs reprises, pour ce qui est des services aux enfants en particulier – je trouve des solutions pour ça; je rends les conditions de vie de cette personne qui veut venir travailler ici meilleures; et je lui dis clairement, par un permis restreint de durée temporaire: Vous avez d'autres obligations à compléter; ceci est un privilège, vous pourrez perdre ce privilège-là.

De la même façon que, quand on parle des exigences de la Charte de la langue française, ça ne peut pas être ad infinitum qu'on renouvelle le permis. Et d'ailleurs, même, c'est l'Office de la langue française qui doit donner un avis pour qu'on puisse renouveler le permis de quelqu'un qui n'a pas satisfait les exigences en vertu de la Charte. Je pense que ça devrait se faire dans le même esprit pour les candidats étrangers qui arrivent ici et dont on a souvent besoin, mais avec lesquels l'Ordre n'est pas à l'aise de décerner des permis complets.

Mme Goupil: Est-ce que ça ne vous inquiète pas qu'il puisse y avoir différentes sortes de permis qui soient émis pour travailler pour des gens et pour l'employeur de gérer tout ça?

M. Beaulieu (Louis): Je vous dirais qu'à mon avis c'est un moindre mal que de voir des gens pratiquer et ne pas être encadrés dans le système professionnel. À mon avis, ça, c'est pire. Je trouve ça pire de voir quelqu'un qui arrive d'Europe, par exemple, ou d'ailleurs – je ne veux pas stigmatiser, parce qu'il y a des candidats qu'on reconnaît d'Europe – de voir que ces gens-là font une demande à l'Ordre, ne sont pas satisfaits des conclusions et décident d'aller travailler quand même et sont engagés par certains employeurs et des fois même des employeurs du gouvernement. Je dois dire qu'il y a un certain resserrement depuis quelque temps par rapport à ça.

Mais on connaît des gens qui travaillent et qui n'utilisent tout simplement pas le titre, et ça, ça me préoccupe beaucoup, surtout quand j'ai des appels du public qui me disent: J'ai rencontré telle personne, est-ce que c'est bien un membre de chez vous? On dit non. Et là, bien, qu'est-ce qu'on fait? On se croise les bras puis on dit: C'est dommage, on ne peut rien faire pour vous. S'il y a quelque chose qui s'est passé au civil, bien, allez faire votre démarche devant les tribunaux. Ce qu'on peut toujours faire, c'est aviser l'employeur, dire: Écoutez, cette personne-là n'a pas normalisé sa situation, n'est pas membre de l'Ordre, n'est pas soumise à l'ensemble des obligations déontologiques, etc. Et par ailleurs on peut tout simplement constater ça. Et je trouve que là il y a une faille importante dans la protection du public. Et c'est pour ça que je pense que le permis restrictif pourrait être une façon de régler une partie de ces problèmes-là, parce que je ne tiens pas à faire ici le débat sur la problématique des titres réservés, mais c'est lié, c'est très, très lié.

Mme Goupil: Merci.

M. Beaulieu (Louis): Je cherche un mécanisme palliatif, pour le moment.

Mme Goupil: O.K. Merci, M. Beaulieu.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc.

M. Côté (Dubuc): M. Beaulieu, bonjour. Madame, bonjour. Moi, d'abord, je voudrais vous féliciter pour la qualité de votre présentation. Je pense que c'est un document très bien fait. Il y a une chose. Vous avez répondu en partie, mais pas tout à fait assez. Il y a une phrase que vous dites dans votre introduction qui m'interpelle particulièrement et qui m'apparaît lourde de conséquences. Vous dites: «Depuis ce temps, l'Ordre constate les limites inhérentes à son statut d'ordre à titre réservé et déplore ne pouvoir exercer pleinement sa fonction principale de protection du public.» À moins que vous élaboriez un petit peu plus, vous l'avez fait un peu, mais en donnant que certaines personnes pratiquent sans permis. Et j'aimerais que vous me donniez aussi, que vous me disiez quelles sont vos relations avec les médecins en particulier ou en général.

M. Beaulieu (Louis): D'accord. Alors, pour la première partie de votre question, effectivement, j'ai répondu pour des candidats qui peuvent venir de l'étranger, mais c'est aussi vrai pour certaines personnes qui n'ont pas terminé leurs études complètement au Québec, qui auraient pu décider de ne pas terminer la maîtrise et qui ont été embauchées à une certaine époque et qui existent dans le système. Bon. On pourrait dire que c'est l'équivalent de certaines clauses grand-père. D'accord, c'est une chose.

Par ailleurs, l'autre problématique qu'on rencontre souvent, c'est que des membres qui ne sont pas satisfaits – des gens qui sont membres actuellement – des conclusions, par exemple, de l'inspection professionnelle ou encore à la suite de sentences en discipline, décident tout simplement de quitter l'Ordre et continuent de travailler. Et, par moment, certaines de ces personnes-là sont même protégées à l'intérieur des conventions collectives des divers employeurs, dont le gouvernement, par l'existence de ce qu'on appelle des doubles appellations à l'intérieur des conventions collectives.

Par exemple, on a l'appellation «orthophoniste» et on a l'appellation «thérapeute du langage et de la parole». Ce sont deux appellations qui sont considérées équivalentes. Et l'employeur peut exiger comme condition à l'embauche que la personne soit membre de l'Ordre mais pas comme condition de maintien à l'emploi. Alors là l'Ordre constate des choses comme ça et sent beaucoup d'impuissance, interpelle les employeurs là-dessus, mais l'employeur n'a pas beaucoup de droit de gérance quand la personne est syndiquée.

Mme Diamond (Ginette): Si vous me permettez de compléter par une... Est-ce que vous entendez bien?

Une voix: Allez-y.

Mme Diamond (Ginette): Alors, je dois vous dire que même sur le terrain, pour le vivre tous les jours, dans une même boîte, on travaille dans un service d'orthophonie, on est 10 personnes, on est présentés par notre employeur comme étant tous des orthophonistes, donc le public croit faire affaire avec des orthophonistes dans tous les cas, et il se retrouve que deux, trois personnes ne sont pas membres de l'Ordre, donc, n'ont aucun encadrement par rapport au Code des professions. Et ça, c'est monnaie courante dans nos milieux de travail. Alors, il y a des gens qui pratiquent l'orthophonie, mais qui ne sont pas encadrés par notre système professionnel.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

(16 h 40)

Mme Goupil: Mais j'ose espérer, madame, que le même employeur qui emploie ces personnes-là est responsable et s'assure que les services sont des services de qualité. Parce que, vous avez raison, c'est la double appellation. Puis il n'y a pas seulement dans votre secteur que ça existe; également dans d'autres. Mais il reste quand même que, pour le citoyen, si jamais il y a une faute, il y a l'aspect contractuel qui est là puis, à tout le moins, il peut se retourner contre quelqu'un. Alors que, dans un dossier, celui dont vous parliez tout à l'heure, l'exemple, c'est que c'est quelqu'un qui vient de l'extérieur qui, malheureusement, a offert des services et qui n'avait pas les compétences pour le faire. Et les gens sont victimes, à ce moment-là. Puis là ils n'ont pas de lien employeur pour poursuivre et ils se retrouvent un peu...

Mme Diamond (Ginette): Mais on vit quand même une difficulté avec nos clients parce que, eux, ils ne savent pas que, moi, je suis orthophoniste et que la voisine de bureau n'est pas orthophoniste. Elle pratique la même profession que moi, elle a la même formation universitaire que moi, par contre, elle travaille peut-être depuis 20 ans, mais elle n'a jamais été encadrée par un système professionnel.

Mme Goupil: D'accord. Mais elle travaille avec vous puis – on prend l'exemple – pour le même employeur...

Mme Diamond (Ginette): Alors, je suis présentée dans une équipe de travail et on va dire: Voici Mme Diamond, orthophoniste; voici Mme X, orthophoniste. Pourtant, moi, je sais très bien que ma voisine de bureau n'est pas encadrée par le système professionnel.

Mme Goupil: Parce que, si on poussait un petit peu ce que vous dites, il y aurait... même, ce serait le cas d'une poursuite pénale. Il y a une infraction pénale dans ce que vous dites, là, actuellement. Vous savez, c'est illégal de faire ça, là.

Mme Diamond (Ginette): Oui, oui, on le sait très bien.

M. Beaulieu (Louis): Mais la grande difficulté par rapport à ça, c'est le fameux «sciemment». Il faut démontrer que la personne l'a fait sciemment, et, devant les tribunaux, il faut relever ses manches jusqu'aux épaules pour arriver à le faire. Ceux qui ont essayé de le faire se sont souvent cassé les dents.

Mais, ceci étant dit, nous ne sommes pas en train de dire que les employeurs en général ne sont pas responsables. Nous sommes en train de dire qu'il y a un cadre qui est le système professionnel, et, si on juge, on croit à ce système-là, on croit qu'il a de la valeur et on voudrait qu'il soit capable de s'appliquer comme il doit s'appliquer, qu'il n'y ait pas deux régimes à l'intérieur. Pour répondre à la question de M. Dubuc, je crois... Pardon?

M. Côté (Dubuc): Côté, de Dubuc.

M. Beaulieu (Louis): M. Côté, de Dubuc, excusez-moi. Nos relations avec les médecins sont bonnes. Évidemment, par moment, il peut y avoir certaines frictions qui peuvent relever de champs de pratique qui se frottent. Mais nos relations avec les médecins sont bonnes, rassurez-vous.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: La personne qui ne fait pas partie de l'Ordre, ça ne veut pas dire nécessairement qu'elle est moins... Est-ce que c'est ça que vous dites, qu'elle est moins compétente que l'autre ou...

M. Beaulieu (Louis): Écoutez, moi, la personne qui ne fait pas partie de l'Ordre, j'ai beaucoup de difficultés à apprécier sa compétence parce que je n'ai pas de regard sur le maintien de sa formation continue, je ne sais pas si elle maintient sa formation continue. La seule personne qui peut s'en assurer, c'est l'employeur. Si elle pratique en privé – Dieu merci, c'est très rare, les orthophonistes ou les professionnels qui vont pratiquer... – à cet égard-là, c'est surprenant de voir que les compagnies d'assurances ont des exigences plus poussées sur l'emploi du titre qu'on peut en avoir à l'intérieur même de notre gouvernement. Mais je suis sûr qu'on va s'attaquer à cette problématique-là. Je suis confiant. Mais, de ce côté-là, l'employeur peut le savoir, mais, moi, je ne peux pas le savoir. Et je ne peux même pas aller vérifier sa compétence par le mécanisme d'inspection professionnelle. Et, s'il y a des plaintes, je ne peux pas considérer ces plaintes-là.

Bon. Je vous dirais que, dans l'évolution du système de santé au Québec, on a de plus en plus fait disparaître ce qu'on appelle les chefs de services, en tout cas, dans nos professions. C'est de plus en plus des programmes, et un autre professionnel peut difficilement apprécier la qualité des actes qui sont posés par un orthophoniste, toute infirmière soit-elle ou tout médecin soit-il – excusez-moi d'avoir fait ce lapsus-là – et c'est la même chose dans le système d'éducation, et encore plus dans le système d'éducation. Alors, l'inspection, à mon avis, reste un moyen très efficace d'aller vérifier sur le terrain ce qui se passe, à condition qu'on puisse inspecter les gens.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci. M. Beaulieu, merci pour votre présentation, Mme Vendette, Mme Diamond. Moi aussi, je suis très concerné avec les problèmes auxquels les ordres professionnels à titre réservé font face. Et je soulève le même problème qui a été soulevé par le député de Dubuc. Vous dites, à un moment, dans votre présentation, qu'il faut «mettre en place des dispositions pour limiter l'exercice de la profession à des individus qui ne peuvent pas se voir délivrer un permis en vertu des dispositions de l'article 40». Quelles dispositions est-ce que vous suggérez? Comment est-ce qu'on peut contrôler l'exercice de cette profession par des personnes qui ne sont pas membres? C'est un problème qui est grave. Est-ce que vous avez des suggestions? Comment on peut prévenir ce problème?

M. Beaulieu (Louis): Écoutez, dans notre esprit, ça passe beaucoup par la réserve en exclusivité de la pratique ou d'une partie de la pratique. Dans les faits, il y a déjà certaines choses qui existent. Étonnamment, comme je disais, jusqu'en 1973, il y a eu une loi d'exercice exclusif pour les orthophonistes et les audiologistes. Donc, on considérait, à l'époque, que c'était suffisamment préjudiciable au public pour encadrer la profession comme ça. Il s'est passé des choses en 1973 qui ont fait en sorte que cet exercice a été en partie perdu. Mais il y a des dispositions dans la loi d'un autre ordre professionnel ou d'un autre corps professionnel qui donnent un quasi-pouvoir de prescrire aux orthophonistes et aux audiologistes. Conséquemment, c'est tout comme si on leur reconnaissait, puisqu'ils ont la possibilité de prescrire, la compétence pour évaluer, et c'est ce qui est aussi dans notre champ.

Maintenant, pour ce qui est de l'ensemble des ordres à titre réservé, je pense qu'on devrait être capable d'identifier des activités à réserver, peut-être un exercice, un champ d'exercice à réserver. Je ne suis pas, à ce stade-ci, avec une seule idée dans ma tête, je reste ouvert pour pouvoir évoluer, mais je considère, quand je regarde les types de préjudices qui peuvent être créés...

Dans notre cas à nous, quand l'évaluation est mal faite, surtout chez les enfants, c'est, des fois, trois, quatre, cinq ans plus tard qu'on va voir les conséquences parce que l'enfant ne se sera pas développé avec son plein potentiel. Et, on le voit, les enfants arrivent à l'école, ils ont de la difficulté à réussir à l'école, et ça, c'est lié aussi à toute une autre problématique, qui est un problème de pénurie de services importante au Québec. On n'est pas capable de voir les enfants au bon moment. Mais, au-delà de ça, par moments, ce ne sont pas les personnes qualifiées qui les voient, et ça, ça cause des préjudices importants et qui sont coûteux pour la société.

M. Bergman: Vous avez soulevé la question de formation obligatoire et le fait que vous êtes un ordre à titre réservé. Est-ce que c'est possible que ça va inciter des membres pour démissionner au lieu de passer leur formation obligatoire?

M. Beaulieu (Louis): C'est effectivement un risque auquel on pourrait être confronté. Je dois vous dire que, malgré ce que j'amène ici devant cette auguste Assemblée, la valeur du titre d'orthophoniste et d'audiologiste à la bourse du système professionnel est très bonne. Les gens tiennent à leur titre, et de plus en plus. Arriver en contraignant ou en mettant certaines obligations qui visent la qualité et l'excellence pourrait, chez certaines personnes, engendrer un comportement qui pourrait les amener à quitter l'Ordre, surtout que ce que nous souhaiterions faire éventuellement, c'est lier cette obligation de formation continue avec l'inspection professionnelle, parce que nous pensons qu'il y a un mécanisme là qui est assez circulaire. Les gens qui maintiennent leur formation sont, à mon avis, plus susceptibles de demeurer compétents que ceux qui ne se forment pas régulièrement. Alors, effectivement, oui, on aurait des craintes, mais on serait probablement prêts à prendre le risque de pousser un petit peu plus loin l'expérience avec la formation continue obligatoire ou une partie, en fonction du règlement qu'on aura à établir.

M. Bergman: Vous avez une recommandation de la possibilité de limiter ou de suspendre un membre dès que le comité d'inspection le juge nécessaire. Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est une suggestion qui est un peu trop sévère et qu'il peut y avoir des abus, même?

M. Beaulieu (Louis): Effectivement, il y a toujours des risques d'abus lorsqu'on confère un pouvoir. Par ailleurs, je pourrais vous dire que, par expérience, les comités d'inspection professionnelle sont très réservés avant d'aller limiter l'exercice de quelqu'un et ils vont le faire dans les cas graves d'incompétence.

Là où ça m'inquiète, c'est, par moments, les délais nécessaires à l'organisation de stages. Vous savez, quand on envoie quelqu'un en stage qui a des problèmes de compétence graves, il n'y a pas grand monde, en général, qui court après ce genre de défi là. Alors, ça peut être assez laborieux à organiser. Vous avez bien vu que, bien entendu, le maintien de la suspension serait lié à une confirmation par le bureau de l'Ordre. Bien entendu, ça peut vouloir dire, dans certains cas, des délais de un à deux mois avant que le bureau se penche sur la question. Écoutez, ce que je souhaite là-dedans, c'est vraiment m'assurer que, quand quelqu'un a un problème d'incompétence grave, il ne continue pas d'exercer, à cause des préjudices qui peuvent être liés.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun, sur cette question précise?

M. Gautrin: Mais, oui, bien sûr. Écoutez, je comprends ce que vous me dites, mais, tant que vous n'avez pas la pratique exclusive, ce que vous dites, ça ne sert à rien, parce que vous allez pouvoir me suspendre n'importe qui du droit d'être membre de votre corporation, donc il ne portera plus le titre, mais, une fois que... En général, si je connais bien la situation, le titre est nécessaire pour obtenir l'emploi, mais n'est pas nécessaire pour maintenir son emploi, dans les hôpitaux et parfois dans certaines commissions scolaires. Vous allez pouvoir le suspendre. Ça ne servira à rien. Il ne sera plus membre de votre ordre, mais il continuera à pratiquer.

M. Beaulieu (Louis): Bien, écoutez, je vais vous dire...

M. Gautrin: Ça sert à quoi, votre... On peut bien vous donner ce pouvoir-là, c'est...

M. Beaulieu (Louis): Bien, écoutez, ce que je peux vous dire...

M. Gautrin: Tant qu'on n'a pas été beaucoup plus profondément vers le concept d'une certaine forme de pratique exclusive, votre recommandation m'a l'air d'être totalement inopérante. Excusez-moi de vous poser la question aussi clairement que ça.

(16 h 50)

M. Beaulieu (Louis): On est là pour parler des vraies choses, et je suis très à l'aise avec ça. Ce que je peux vous dire là-dessus, c'est qu'il existe dans certains règlements et même dans certaines lois – mais, en ce qui nous concerne, dans certains règlements – des obligations de porter le titre pour pouvoir agir. Je vous donne un exemple très précis. Dans le règlement sur les aides auditives assurées en vertu de la Loi sur l'assurance maladie, une personne de 75 ans et plus ou un enfant de zéro à 12 ans et parfois 18 ans doit avoir rencontré un audiologiste pour pouvoir obtenir une aide de suppléance à l'audition ou une prothèse auditive, si vous voulez. Donc, de ce côté-là, c'est comme si on allait un petit peu plus loin dans le règlement qu'à l'intérieur du cadre...

M. Gautrin: ...le règlement, ça vous donne une certaine forme, par la porte de derrière, de pratique exclusive.

M. Beaulieu (Louis): Exactement.

M. Gautrin: Vous me permettez une sous-question? Moi, je vais vous poser la question: Est-ce que j'ai bien compris que – et j'ai noté ça sur le papier – quand vous étiez sur la loi des audiologistes, vous aviez un champ exclusif? Est-ce que j'ai bien compris dans votre présentation?

M. Beaulieu (Louis): Jusqu'en 1973, oui, le champ était...

M. Gautrin: O.K. Et, lorsqu'on vous a intégrés dans le Code des professions, vous êtes devenus un titre réservé, mais vous avez perdu votre pratique exclusive. Je vous pose la question parce que je ne connais pas bien. Je comprends, c'est beau ce que vous nous donnez, mais je ne connais pas. Est-ce que ça serait concevable de dire que vous soyez devenus non pas une profession à titre réservé mais à pratique exclusive? Est-ce qu'on peut définir clairement votre champ de pratique pour qu'il vous soit exclusif? Est-ce qu'il est définissable?

M. Beaulieu (Louis): Oui. D'ailleurs, si vous regardez ce qui est dans le Code des professions, c'est très précis.

M. Gautrin: Oui, je sais ce qu'il y a dans le Code des professions, mais dans la vraie vie, ce que vous faites, est-ce qu'on peut vraiment... C'est à vous de nous le dire, vous savez, je ne sais pas bien ce que vous faites. Est-ce que dans la vraie vie on pourrait dire: Notre champ de pratique est suffisamment circonscrit pour pouvoir être à pratique exclusive?

M. Beaulieu (Louis): Tout à fait. Et, pour compléter sur la question dont vous parliez, quand quelqu'un est membre de l'Ordre dans l'année courante, à partir du moment où il a payé sa cotisation pour une année à l'autre, à moins que ça soit par ignorance, mais je ne connais pas de mécanisme où le membre va nous dire: Je ne suis plus membre de l'Ordre, pendant cet exercice-là. À mon avis, il reste membre jusqu'à temps que l'exercice se termine. Donc, la suspension de l'exercice peut au moins fonctionner de cette façon-là. Mais je vous dirais que c'est vraiment par un souci de qualité puis de protection du public que je souhaite, en tout cas, si on n'est pas prêt à déterminer qu'on doit avoir ce pouvoir-là maintenant, qu'on continue d'y réfléchir de façon très active.

M. Gautrin: Et vous seriez prêts à devenir une profession à pratique exclusive.

M. Beaulieu (Louis): Mais je pense que c'est tout à fait requis pour les besoins de la population québécoise.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Oui. La section IV du projet de loi abroge l'article 44. Ça, c'est les conditions de résidence. Est-ce que vous êtes d'accord avec l'abrogation de cet article-là?

M. Beaulieu (Louis): Je vous dirais qu'en ce qui nous concerne l'obligation de résidence n'est pas importante dans la mesure où on peut gérer l'ensemble des autres dispositions, notamment s'assurer de savoir où sont les dossiers des gens qui ont été consultés chez un professionnel. Mais je ne crois pas que l'obligation de résidence soit nécessaire dans ce cas-là. Je ne pourrais pas me prononcer pour d'autres professions, mais le cas échéant où certains auraient besoin d'une obligation de résidence ou de quelque chose qui s'y apparente, je crois qu'il faudrait l'aménager. Mais en ce qui nous concerne, ce n'est pas requis.

M. Bergman: Juste une petite question sur cette réponse: Si ce n'est pas important, comment est-ce que vous allez suivre vos membres? Comment est-ce que vous allez surveiller les activités de vos membres, s'ils peuvent avoir résidence hors Québec? Comment est-ce que vous allez suivre leurs fonctions?

M. Beaulieu (Louis): Bien, écoutez, je vous dirais qu'on le fait déjà, puisqu'on a des membres qui sont hors Québec. On a déjà ces gens-là au sein de l'Ordre. De ce que je comprends dans le règlement, sur la tenue des dossiers, aux dispositions sur la cessation de l'exercice, le membre est tenu de nous informer lorsqu'il va cesser pratique de façon temporaire ou définitive. Bien entendu, si le membre ne nous informe pas, nous pourrions peut-être avoir plus de difficultés à le suivre s'il déménage, par exemple, en Colombie-Britannique. Je n'ai pas réfléchi très longuement à cette question-là, mais je vous dirais que, dans la pratique au quotidien, ce n'est pas une obligation.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Oui. Brièvement, sur le même sujet qui a été abordé par mon collègue de D'Arcy-McGee, sur la limitation du droit de pratique, votre recommandation, elle est à portée générale, c'est-à-dire elle porte les articles 55 et 113 qui ne sont pas uniquement dans la loi sur ce qui touche votre profession, mais ils touchent l'ensemble des professions. Je me pose des questions parce que je comprends que peut-être chez vous, ça pourrait s'appliquer, mais j'imaginerais comment ça pourrait poser des problèmes dans certains ordres. Mais vous tenez à ce que ça soit... Autrement dit, quel est l'argument que vous pourriez nous faire pour qu'on ait quelque chose d'une telle portée générale?

M. Beaulieu (Louis): Bien, écoutez, en vertu de la protection du public et des délais qui peuvent être impartis, comme je disais tantôt, entre le moment où le comité d'inspection qui, à mon avis, est une instance des plus compétentes pour décider...

M. Gautrin: Oui, je connais.

M. Beaulieu (Louis): ...a jugé et fait une recommandation positive au bureau, je pense qu'à ce moment-là ça justifie en soi si l'incompétence est grave.

M. Gautrin: Vous savez que tous les ordres ne fonctionnent pas nécessairement comme le vôtre...

M. Beaulieu (Louis): Je le sais bien.

M. Gautrin: ...avec la même unanimité, et ça peut poser certains problèmes dans certains ordres.

M. Beaulieu (Louis): Effectivement, et je vous l'apportais essentiellement à titre de réflexion et pour aider à la prise de décision. Mais nous croyons que ce serait un pouvoir utile.

M. Gautrin: Je comprends. Mais je pourrais vous citer les problèmes que ça pourrait créer dans certains cas. Ha, ha, ha!

M. Beaulieu (Louis): J'en imagine quelques-uns.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, s'il n'y a pas d'autres questions, il me resterait, au nom des membres de la commission, à remercier les représentants de l'Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec, M. Beaulieu, son président, Mme Vendette, vice-présidente, et Mme Diamond, trésorière. Merci.

J'inviterais maintenant les représentants du Collège des médecins, représenté par le Dr Charles Bernard, administrateur notamment, à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, je rappelle que la commission des institutions est réunie afin de procéder aux consultations particulières sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

Alors, si les représentants du Collège des médecins sont disponibles, ils pourraient simplement s'avancer à la table. Bon, alors, nous allons...

M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez, ils étaient dans la commission où j'étais moi aussi d'ailleurs, sur les médicaments.

Une voix: Ils sont dans l'édifice.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien.

Des voix: Ils sont ici.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, nous allons suspendre quelques instants, le temps de rapatrier nos représentants.

(Suspension de la séance à 16 h 58)

(Reprise à 17 h 3)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives.

Nous avons avec nous, pour les 45 prochaines minutes, les représentants du Collège des médecins. Alors, je rappelle que nous avons donc, pour la présentation, environ 15 minutes. Vous avez la parole. Vous nous présentez les personnes qui vous accompagnent.


Collège des médecins du Québec (CMQ)

M. Bernard (Charles): Oui, alors, ça nous fait plaisir. Mon nom est Charles Bernard. Je suis membre du comité administratif du Collège des médecins, je représente la région de Québec au Collège des médecins plus particulièrement. Je suis accompagné, à ma droite, du Dr Rémi H. Lair. Le Dr Lair est secrétaire général adjoint au Collège, et, à ma gauche, le Dr André Garon, qui est également secrétaire général adjoint. Alors, je suis bien appuyé. On peut commencer.

M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. membres de cette commission, d'abord, nous voulons vous remercier pour nous avoir donné l'occasion de nous exprimer sur le projet de loi n° 87 modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives, dont la Loi médicale.

Pour l'essentiel, notre mémoire aborde trois questions: l'usage du titre de docteur; l'obligation de suivre des activités de formation continue ainsi que de pouvoir suspendre de façon immédiate et provisoire le droit d'exercice d'un médecin. Et nous terminerons cette présentation par quelques observations sur d'autres propositions de modification.

D'abord, l'usage du titre de docteur. L'article 8 du projet de loi n° 87 veut introduire une modification au Code des professions par l'ajout d'un article 58.1 qui précise les conditions à rencontrer pour utiliser le titre de docteur pour les détenteurs d'un doctorat dans une discipline autre que la médecine, la chirurgie dentaire ou la médecine vétérinaire. Pour nous, cette orientation est inacceptable parce qu'elle va à l'encontre de l'objectif de la protection du public.

De l'avis de tous nos administrateurs, même de ceux qui sont nommés par l'Office des professions du Québec et qui représentent le public aux instances décisionnelles du Collège, cette orientation créerait une confusion chez le public. En effet, il devient difficile pour le citoyen de distinguer entre ceux qui sont habilités à exercer la médecine, d'une part, et un ensemble d'autres professionnels qui exercent dans le domaine de la santé, d'autre part.

Le titre réfère avant tout, dans l'usage traditionnel, à la profession exercée. Or, le titre de docteur tel qu'on l'utilise présentement réfère à une situation bien précise dans votre tête, dans notre tête aussi et dans celles de tous nos concitoyens: on parle d'un médecin, d'un dentiste ou d'un médecin vétérinaire. On en reparlera tantôt à la période de questions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bernard (Charles): Même si l'article de loi imposait au professionnel de mentionner la discipline dans laquelle il détient un doctorat, l'usage courant va faire en sorte que rapidement il utilisera le terme «docteur» avant son nom en toute occasion, omettant de répéter à chaque fois la discipline dans laquelle il est autorisé d'exercer.

Alors, pour le Collège, la proposition suivante constitue une amélioration définitive du statu quo et elle est à l'effet que le professionnel ne peut prendre le titre de docteur ou utiliser une abréviation de ce titre, sauf s'il est médecin, dentiste ou vétérinaire. Toutefois, s'il détient un doctorat dans une discipline particulière, il peut faire suivre son nom du titre de docteur en mentionnant ladite discipline. Cette manière de faire devrait être accessible à toutes les disciplines constituant les 23 ordres professionnels du domaine de la santé et des services sociaux. Enfin, considérant l'annonce pressante d'importants travaux pour réformer le système professionnel, toute cette question devrait être réexaminée à la lumière de ceux-ci, puisqu'elle est étroitement liée aux dispositifs dont le public peut, en l'an 2000, avoir besoin pour se protéger.

Deuxièmement, les activités de formation professionnelle, qui sont le deuxième sujet plus particulier. Concernant les activités de formation continue que les membres d'un ordre ou d'une classe d'entre eux devront suivre, l'article 20 du projet de loi n° 87 introduit, à l'article 94 du Code des professions, de nouvelles dispositions. Celles-ci donneront un pouvoir nouveau aux ordres professionnels, soit celui d'obliger un membre à suivre des activités de formation continue.

Pour l'essentiel, nous sommes tout à fait d'accord avec ce nouveau pouvoir qui permettra au Collège des médecins de mieux assumer sa mission qui est de promouvoir une médecine de qualité. Nous y sommes non seulement favorables, mais très intéressés. À nos yeux, ces articles font de ce projet de loi une pièce maîtresse.

Nous avons toutefois une interrogation majeure et un point sur lequel nous sommes en désaccord. Notre interrogation porte sur la signification du mot «cadre» lorsqu'on parle, au paragraphe o, de «déterminer le cadre des activités de formation continue». Pour nous, un cadre d'activités de formation continue ou un règlement-cadre d'activités de formation continue peut conduire à exiger un nombre d'heures de formation continue que les membres de l'Ordre doivent suivre annuellement. Or, ce n'est ni opportun ni gérable en fonction d'objectifs particuliers, bien que cela puisse être comptabilisable. Nous étions fort aise avec le libellé à cet effet que nous apportait le projet de loi n° 454, projet qui précédait celui-ci. On y retrouvait le pouvoir de déterminer des activités de formation continue que les membres de l'Ordre ou d'une classe d'entre eux doivent suivre.

En lien avec ce qui précède, notre point de désaccord est encore plus important. En effet, le processus d'approbation réglementaire proposé par l'article 21 n'est pas réaliste, du moins pour une profession comme la médecine. Nous sommes d'avis que les dispositions de l'article 95.1 du Code des professions sont de loin préférables à celles de l'article 95.2.

En effet, l'article 95.1 prévoit qu'«un règlement adopté par le bureau [...] est transmis à l'Office pour dépôt et entre en vigueur le quinzième jour qui suit la date de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qu'indique le règlement». L'article 95.2 prévoit qu'un règlement adopté par le bureau [...] est transmis à l'Office pour examen, qui peut l'approuver avec ou sans modification».

Nous vous soumettons que le rythme d'évolution des connaissances et des techniques en médecine est tel que les obligations de formation doivent de plus en plus rencontrer sans délai indu... Excusez. Est-ce que vous avez bien compris cette phrase?

Des voix: Oui.

(17 h 10)

M. Bernard (Charles): Parce que j'ai fait une petite embûche. Oui, ça va? Sans prétention, nous estimons être plus en mesure que quiconque de définir avec nos partenaires une éducation médicale continue, ce que sont les besoins de formation de nos membres eu égard notamment à l'évolution de la science. Dans les cas où tout autre organisme pourrait entretenir des attentes en matière de formation continue des médecins, celle-ci pourrait être soumise au bureau du Collège pour examen.

En résumé, nous sommes assez fiers de l'expérience et de l'expertise que nous avons développées en matière d'éducation médicale continue en association avec d'autres organismes. Que nos initiatives soient renforcées par le pouvoir d'obliger les membres à suivre ces activités de formation, cela nous apparaît tout à fait pertinent et complémentaire avec l'obligation déjà faite à tout médecin, selon son code de déontologie, de mettre à jour ses connaissances.

Donc, nous vous recommandons d'utiliser un libellé tel que: déterminer soit les activités de formation continue, soit le cadre de telle activité que les membres de l'Ordre ou une classe d'entre eux doivent suivre. Également, nous vous recommandons fortement que le processus d'examen et d'approbation de ce type de règlement... de l'article 95.1 du Code et non de l'article 95.2.

Troisième, le pouvoir de suspendre et de limiter le droit d'exercice. Le pouvoir de suspendre de façon immédiate et provisoire le droit d'exercice d'un professionnel pendant la période nécessaire pour qu'une décision finale soit rendue est un sujet sur lequel nous sommes intervenus plus d'une fois formellement, par écrit, auprès des autorités concernées. Aujourd'hui, publiquement, nous réitérons notre demande dont le nouveau président de l'Office fut saisi pour la première fois le 13 septembre dernier lorsqu'il nous a consultés sur le présent projet de loi. Bien que nous croyions que notre besoin doit être le même pour tous les autres professionnels, nous nous limiterons à exprimer le nôtre et à réclamer une modification de la Loi médicale plutôt que celle du Code des professions.

Une voix: ...

M. Bernard (Charles): Oui. Allez-y.

M. Garon (André): Je vais continuer, si vous me permettez. Alors, il arrive de temps à autre qu'en situation d'urgence les autorités d'un établissement doivent suspendre les privilèges d'un médecin exerçant dans cet établissement, particulièrement lorsque ce médecin présente un état physique ou psychique incompatible avec l'exercice de la médecine. Une fois suspendu, ce médecin peut aller exercer en cabinet privé ou continuer à exercer dans un autre établissement où ses privilèges sont maintenus.

Pour la protection du public, de telles situations peuvent être tout à fait inacceptables. À notre point de vue, le Collège, vis-à-vis de ses propres membres, devrait disposer d'un pouvoir comparable à celui conféré à un chef de département, à un directeur des services professionnels ou à un président de conseil des médecins, dentistes et pharmaciens par l'article 251 de la Loi sur les services de santé et services sociaux dont copie est annexée au présent mémoire.

Il nous apparaît que, lorsqu'il y a danger pour le public à laisser exercer un professionnel, compte tenu de son état physique ou psychique, le bureau ou le comité administratif de l'Ordre doit pouvoir le suspendre de façon immédiate et provisoire pendant la période nécessaire pour qu'une décision finale soit rendue à la suite d'un examen médical.

Autrement dit, les articles 48 et suivants du Code des professions, tels que formulés, ne sont pas suffisants pour assurer la protection du public. En effet, les délais pour obtenir les résultats de ce genre d'examen sont longs, pouvant aller facilement jusqu'à cinq ou six mois lorsque le médecin soumis à l'examen ne collabore pas. Dans le cadre légal actuel, le Collège ne peut agir promptement, donc adéquatement. Par conséquent, nous insistons pour que, sinon le Code des professions, à tout le moins la Loi médicale soit modifiée. À ce sujet, nous vous soumettons le projet de libellé suivant, que nous pouvons également déposer en pièce à part, qui vise l'ajout d'un article 21 à la Loi médicale.

Donc, ça se lirait comme suit: «En cas d'urgence, sur dépôt d'un rapport médical attestant l'inaptitude du médecin à exercer la médecine, compte tenu de son état de santé physique ou psychique, ou d'un rapport d'enquête du syndic permettant de croire à l'inaptitude du médecin à exercer la médecine pour les mêmes motifs, le bureau ou le comité administratif peut, après avoir donné au médecin l'occasion de faire valoir ses représentations écrites dans un délai de cinq jours, suspendre ou assortir de conditions le droit du médecin d'exercer des activités professionnelles. Cette suspension ou limitation du droit d'exercice demeure en vigueur aussi longtemps que le bureau ou le comité administratif n'ait statué différemment, et ce, dans les 15 jours suivant la réception du rapport de l'examen médical décrit à l'article 49 du Code des professions.» Voilà donc ce que nous avions à exprimer sur le pouvoir de suspension ou de limitation immédiat du droit d'exercice d'un médecin.

Par ailleurs, l'article 7 du projet de loi introduit une modification à l'article 55 du Code des professions, créant pour le professionnel l'obligation non seulement de suivre un stage de perfectionnement, mais aussi de le compléter avec succès. Le Collège appuie cette modification qui permet de prolonger un stage de perfectionnement jusqu'à sa réussite.

Cependant, nous désirons faire part à la commission d'une problématique que nous rencontrons dans le cas de certains médecins qui échouent à répétition un stage de perfectionnement imposé par le bureau du Collège sur recommandation du comité d'inspection professionnelle ou du comité de discipline ou dans les autres cas prévus par la réglementation du Collège. Le Collège des médecins du Québec a déjà eu l'occasion à quelques reprises de soulever cette problématique également auprès de l'Office des professions il y a plusieurs années de cela et de demander que soit donné au bureau d'un ordre professionnel le pouvoir de limiter le droit d'exercer d'un professionnel sur recommandation du comité d'inspection ou du maître de stage lorsqu'un stage de perfectionnement a été imposé et effectué mais sans que les objectifs aient été atteints.

En effet, l'expérience de plus de 25 ans d'application du Code a amplement démontré que certains médecins ne peuvent tirer profit d'un stage de perfectionnement. L'expérience a montré que certains médecins ne peuvent reconstituer une base de connaissances pour leur permettre d'exercer sans restriction, et ce, même après un ou plusieurs stages de perfectionnement. Dans ces cas, la capacité d'apprentissage de ces médecins, pour toutes sortes de raisons, est limitée.

Alors, bon, un petit peu plus loin, là, vous verrez, on vous propose donc l'ajout à l'article 55 d'un troisième et quatrième alinéa qui se lirait comme suit: «Le bureau d'un ordre peut, sur recommandation du comité d'inspection professionnelle, limiter le droit d'exercer des activités professionnelles d'un membre de cet ordre qui a échoué un stage imposé. Le bureau d'un ordre peut, sur recommandation du maître de stage, limiter le droit d'exercer des activités professionnelles d'un membre de cet ordre qui a échoué un stage imposé.»

Nous comprenons qu'avec l'assentiment des parties à cette commission de telles modifications, l'une à la Loi médicale et d'autres au Code des professions, pourraient être enfin soumises à l'Assemblée nationale pour adoption.

Par ailleurs, nous avions quelques autres commentaires. Je vois que le temps presse. On vous dirais que, d'abord, on aimait beaucoup l'article 1 du projet de loi n° 454, qui visait à modifier l'article 12.3 du Code des professions, où il était proposé qu'on ajoute les mots «modalités de paiement». En ajoutant ça, on voyait que le législateur aurait pu favoriser que d'éventuelles conditions de paiement soient raisonnables du point de vue du citoyen qui s'adresse au Collège en révision.

Par ailleurs, un petit peu plus loin dans le texte – je vous fais grâce du paragraphe qui suit parce que j'ai compris, à partir des commentaires des gens de l'Office aujourd'hui, que le projet de loi actuel couvrait ce qui est contenu dans le paragraphe qui suit, mais je vous ramène un petit peu plus loin – on dit que, quant à l'orientation sous-jacente à l'article 90 du projet de loi qui vient modifier 31 de la Loi sur la protection de la santé publique, le Collège continue de s'interroger sur la vente par un professionnel d'un produit qu'il prescrit. Malgré les pressions venant de divers groupes d'intérêt qui doivent s'exercer sur vous, la protection du public doit en tout temps prévaloir. C'est dans notre commentaire sur l'article 90 du projet de loi, bien que nous soyons conscients que le code de déontologie des podiatres contient une disposition similaire à celle du code de déontologie des médecins relativement à la sauvegarde de l'indépendance professionnelle et à la nécessité d'éviter toute situation où le professionnel se trouvera en conflit d'intérêts. Quant à nous, nous n'envisageons aucunement requérir pour nos membres spécialisés en orthopédie une disposition semblable à celle apportée par cet article 90 aux podiatres. Voilà, pour l'essentiel, ce que nous avions à vous dire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, merci, M. Garon, merci, M. Bernard, pour votre présentation. Nous allons passer à la période d'échanges. Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, évidemment, il y a des éléments d'information qui vont demander à ce qu'il y ait d'autres discussions avec l'Office également parce qu'il y a certaines précisions que j'ai demandées à M. Samson, et elles pourront être précisées ultérieurement. Moi, je vais vous dire, en regard du titre de docteur... Parce que, évidemment, vous savez qu'actuellement il y a certaines personnes qui utilisent le titre de docteur lorsqu'il y a un doctorat. Et j'aimerais vraiment savoir, actuellement, l'utilisation du titre du docteur à l'extérieur du Québec, ça fonctionne comment?

M. Garon (André): On entend les nouvelles comme vous. Nous sommes conscients qu'il y a des pratiques qui sont fort différentes et qui font que même des gens arrivant ici au Québec s'imaginent que ça fonctionne au Québec comme en Ontario. Je vous dirais qu'on ne déchirera pas notre sarrau, là, sur une question comme celle-là. Mais ça nous apparaissait important de vous dire que, en tout cas dans le cadre de la pratique actuelle au Québec, on pourrait engendrer une certaine confusion. D'ailleurs, si on comprend bien les cas qui circulent de ce temps-ci dans les nouvelles, on voit bien que le public a pu être confondu. Voilà.

(17 h 20)

Mme Goupil: Actuellement, de quelle façon le Collège intervient-il face à des non-membres qui utilisent le titre de docteur? Est-ce que vous avez déjà réagi à cela? Oui?

M. Lair (Rémi H.): Oui. Si c'est des personnes qui ne sont pas des professionnels, le Collège, après enquête, dépose des plaintes pour usurpation de titre et, en même temps, c'est souvent associé à l'exercice légal de la médecine. Alors, on poursuit un certain nombre d'individus à chaque année à ces deux chapitres. Quand c'est un professionnel qui ne respecte même pas sa propre loi, on se contente d'avertir l'ordre professionnel concerné. Des fois, on a une collaboration; des fois, on n'a pas de collaboration.

Mme Goupil: Merci. Vous demandez également qu'on puisse retirer le fait qu'on doit se présenter actuellement à un comité de discipline parce que vous dites: On a des délais qui sont de l'ordre d'à peu près cinq, six mois puis, pour vous, ça crée un problème. Un médecin qui a été, par exemple, reconnu... pas coupable, mais que l'on décide de congédier, comme, par exemple, dans un hôpital, là, il doit passer par la suite au comité de discipline. C'est bien ça?

M. Lair (Rémi H.): Non, ce n'est pas ça.

Mme Goupil: Non?

M. Lair (Henri H.): Me permettez-vous?

Mme Goupil: Oui, tout à fait.

M. Lair (Rémi H.): Habituellement, quand un hôpital prend une mesure d'urgence telle qu'une suspension à l'égard d'un médecin, c'est quand un médecin se présente pour exercer alors qu'il n'est pas en état d'exercer. C'est un médecin qui a peut-être un problème d'alcoolisme ou de toxicomanie. Et évidemment le Collège, à ce moment-là, vient à être informé de cette suspension-là. Et on trouve ça normal qu'un hôpital puisse procéder à l'égard d'un médecin d'une façon urgente et que le Collège doive, à ce moment-là, procéder devant le comité de discipline, avec tout ce que ça implique comme délai.

Il faut comprendre par ailleurs que le comité de discipline, selon nous, n'est pas le forum idéal pour régler, à l'égard d'un professionnel, un problème d'éthylisme, ou de toxicomanie, ou de santé mentale, ou de santé physique. Je pense que le comité de discipline est un endroit pour régler des problèmes d'inconduite, des problèmes d'incompétence dangereuse, mais ce n'est pas l'endroit pour statuer sur l'état de santé d'un médecin. D'ailleurs, le comité de discipline n'a pas cette... Et le comité de discipline est souvent mal placé lorsqu'il a à statuer ou à rendre une décision à l'égard d'une accusation portée contre un professionnel ou contre un médecin qui n'est pas en état souvent de comprendre qu'est-ce qui se passe. C'est une personne qui est malade, qui a un gros problème.

Ce qu'on veut actuellement, c'est qu'on veut trouver une façon de protéger le public qui est plus rapide que les dispositions des articles 48 et suivants du Code des professions. Ces articles-là permettent au bureau d'un ordre professionnel d'ordonner l'examen d'un professionnel lorsqu'il semble présenter un problème ou un état de santé, un état physique ou psychique qui serait incompatible avec l'exercice de la médecine.

Les délais que l'on retrouve à l'article 49 sont tels... D'abord, 20 jours pour nommer un premier examinateur... Non, le premier, c'est le bureau qui le nomme. Vingt jours pour que le médecin nomme le deuxième examinateur et, après ça, un autre 20 jours pour que les deux médecins choisis en nomment un troisième, et un autre 90 jours pour que les trois médecins déposent le rapport d'expertise qui est le rapport de l'examen médical. Alors, si on calcule tout ça – et ça arrive très souvent que les délais sont étirés jusqu'au maximum – ça peut prendre de quatre à cinq mois avant que le bureau ait en main les rapports nécessaires pour statuer sur le cas du médecin. Et, pendant ce temps-là, le médecin, il exerce, et souvent il n'est pas en condition d'exercer. Et, s'il n'est pas en condition d'exercer, c'est une menace pour le public.

Souvent, évidemment ces cas-là sont portés à l'attention du bureau soit par le syndic qui obtient l'information ou soit par l'hôpital qui a fait un certain chemin. Des fois, l'hôpital a en main, par exemple, un rapport médical qui laisse entendre que le médecin n'est pas apte à exercer. Et ce qu'on demande, dans le fond, c'est une mesure provisoire urgente qui nous permette au moins de protéger le public jusqu'à ce qu'on puisse statuer sur son état de santé. Je peux vous assurer que, quand une telle mesure sera mise en place, un peu comme on en a devant le comité de discipline pour une radiation provisoire, le professionnel aura intérêt à ce que ça aille plus vite. Actuellement, il a plutôt intérêt à prendre son temps et à continuer à exercer, à étirer les délais au maximum.

Mme Goupil: Alors, ce que vous me dites, c'est que les outils qu'il y a actuellement dans le Code des professions – parce qu'on a l'article 54, qui dit, dans l'état de santé, motif d'abstention...

M. Lair (Rémi H.): Article 54?

Mme Goupil: Article 54, quand on dit: «Tout professionnel doit s'abstenir d'exercer sa profession ou de poser certains actes professionnels dans la mesure où son état de santé y fait obstacle.» Ça, c'est une chose. Et il y a la radiation provisoire qui peut exister en vertu de 130. On accuse en vertu de 54 puis, après, on peut utiliser la radiation provisoire, qui est à 130. Vous me dites que le mécanisme qui existe actuellement dans le Code des professions ne vous permet pas d'agir aussi rapidement que vous le souhaiteriez.

M. Lair (Rémi H.): Effectivement. Je vous redis encore, madame, que le comité de discipline n'est pas le meilleur endroit pour régler ce genre de problème là. D'abord, il faut obtenir des témoignages de personnes qui ont vu l'individu, et ça traîne en longueur. Et le comité de discipline est toujours mal placé pour statuer dans un dossier de santé physique ou mentale. On en a eu quelques-uns, et ça n'aboutit pas.

Moi, je ne pense pas que le recours à une requête en... Il faut accuser l'individu d'avoir commis une infraction et il faut faire la démonstration devant le comité de discipline qu'effectivement son état de santé faisait obstacle au moment même où ça s'est présenté. Des fois, le médecin, il peut arriver à l'hôpital, puis il n'a posé aucun geste clinique. Il voudrait en poser, mais il n'a rien fait, on l'a retourné chez lui avant qu'il pose quelque acte que ce soit. On va l'accuser de quoi? D'être venu à l'hôpital?

Mme Goupil: Mais c'est la même preuve, un peu, qu'on fait devant le bureau.

M. Lair (Rémi H.): Devant le bureau, non. Ce qu'on allègue devant le bureau, c'est qu'on a des motifs de croire que son état de santé est incompatible avec l'exercice de la médecine.

Mme Goupil: C'est ça.

M. Lair (Rémi H.): Et c'est là-dessus qu'on doit statuer. Et je pense que, pour décider ça, ce n'est pas un comité de discipline qui peut décider ça, c'est une expertise faite par des médecins, des experts.

Mme Goupil: Merci. Il y avait une autre question...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac avait une question. On peut y revenir, Mme la ministre?

Mme Goupil: Oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac.

Mme Goupil: Merci. Je vais revenir tout à l'heure.

M. Boulianne: Oui, merci. Dr Bernard, concernant la formation continue, alors vous dites que vous êtes d'accord avec ça, obliger un membre à suivre des activités de formation continue. Il y a plusieurs groupes qui se sont opposés à cette formation obligatoire là, parce qu'on prétend que la personne est responsable puis que ça va de soi qu'on ait de la formation. Alors, lorsque vous offrez des activités de formation, est-ce que c'est à dire que les médecins ne participent pas puis que vous êtes obligés de les inscrire à des formations?

M. Bernard (Charles): Oui. Bien là tout le monde veut répondre. Un à la fois.

Une voix: Vas-y.

M. Garon (André): O.K. Excusez.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Dr Garon.

M. Garon (André): Écoutez...

M. Bernard (Charles): On a tous quelque chose à dire là-dessus.

M. Garon (André): Oui, oui, oui. Écoutez, comme on le dit dans le mémoire, le Collège a une expérience intéressante en matière d'éducation médicale continue. Il y a un conseil d'éducation médicale continue qui existe depuis plusieurs années dont le Collège soutient les activités. Et ce conseil-là regroupe un certain nombre d'organismes que sont les universités, les fédérations, le Collège royal des médecins du Canada, le Collège des médecins de famille, etc., beaucoup de monde qui s'intéresse à la même chose que nous.

Évidemment, les activités qui sont préparées en éducation médicale continue sont des activités libres. Les médecins sont informés de ces activités-là, qui vont se tenir en région ou à Québec ou à Montréal, et s'y inscrivent si le coeur leur en dit, comme on dit.

Mais ce que nous, on dit en rapport avec ce que le projet de loi n° 87 prévoit, c'est que c'est intéressant de pouvoir exiger d'un groupe qu'il puisse se soumettre à des activités de formation – je dis bien des activités de formation – dans le sens où la médecine évolue de telle manière qu'on pourrait, à un moment donné, avoir une technique de laparoscopie, par exemple, qu'on pense qu'un groupe de médecins devrait maîtriser rapidement dans le cadre de leur exercice, et on pourrait, à ce moment-là, prévoir, toujours avec nos partenaires en éducation médicale continue, mettre au point l'activité et exiger qu'elle soit rencontrée par tous les membres du groupe dans un délai donné.

(17 h 30)

Ce que le projet de loi n° 87 – contrairement à 454 – prévoit, là, on parle du cadre des activités. Et là on vous lance un peu la question, on ne sait pas ce que ça veut dire tout à fait, le cadre des activités. Ce qu'on a cru déceler, c'est que, finalement, on aurait des obligations un peu paramétriques qui seraient faites à des groupes. Ce n'est peut-être pas le cas. Mais, de toute façon, nous, on se dit: Notre besoin... probablement que les besoins des autres sont différents, si je comprends bien, mais notre besoin à nous autres, comme ordre, c'est d'être en mesure d'exiger ce que je vous mentionnais tantôt, que les membres d'un groupe se soumettent finalement à des activités particulières de formation continue. On ne pense pas qu'on a la disposition pour le faire à ce moment-ci. Puis on pense que c'est à nous, au niveau du bureau du Collège, de déterminer ces choses-là et non pas à d'autres niveaux.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Mme la ministre.

Mme Goupil: Pour vous rassurer immédiatement, je vais vous dire que de façon unanime, le 454, au début ce qu'il proposait était beaucoup plus rigide. Ce qui a été demandé, c'est qu'il puisse y avoir de la souplesse pour permettre à chacun des ordres professionnels d'utiliser ou de convenir des modalités d'activité qui correspondraient à vos attentes à vous. Alors, l'objectif n'est pas de vouloir s'ingérer, c'est de s'assurer qu'au niveau de l'Office des professions il y ait un cadre général qui fasse en sorte qu'on permette la souplesse à chacun des ordres professionnels d'intervenir de la façon dont ils le veulent.

M. Garon (André): Oui. Mme la ministre, vous permettez. S'il était rigide, c'est en raison de 95.2, parce que le processus d'approbation le rigidifie. Moi, je vous soumets que, si le processus d'approbation est fait en fonction de 95.1 – donc c'est fait par le bureau et non pas par l'Office – c'est beaucoup plus souple. Il y a un lien entre la substance de l'article et le processus d'approbation. Je vous le soumets.

Mme Goupil: Alors, ce qui va être fait dans... Parce que, dans le cadre d'une commission, c'est plus difficile, mais vous allez voir, lorsqu'on va faire la lecture en parallèle et de 454 et versus ce que nous proposons, c'est que c'est beaucoup plus souple, et ça vous permet justement de travailler avec la souplesse dont vous avez besoin. Mais on pourra... Parce que c'est la première fois que vous nous le soumettez, là. Même l'Office me disait qu'il n'y avait pas eu de discussion particulière suite...

M. Garon (André): Il y en aurait eu au CIQ, semble-t-il, mais vis-à-vis de l'Office, à ma connaissance, non.

Mme Goupil: Bien, je n'ai pas été informée, moi, en tout cas. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va pouvoir prolonger pour s'assurer que la compréhension commune, elle est la même. Parce que l'objectif n'est pas de vouloir encadrer et surtout pas se substituer à un ordre professionnel qui a toute l'expertise pour le faire, et ce n'est ni le rôle de l'Office et ce n'est pas non plus sa volonté, là, je vais vous dire, ils en ont déjà beaucoup à faire, c'est de s'assurer que l'on encadre tout cela avec un cadre uniforme qui permet à chacun des ordres professionnels de s'ajuster en fonction de son ordre. Et évidemment, vous avez raison, dans le domaine de la santé, ça évolue, et c'est un domaine où on doit s'assurer vraiment de la protection du public. Vous savez plus que quiconque quelle est la formation qui est nécessaire chez vos membres.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Dr Bernard, Dr Lair, Dr Garon, merci pour votre présentation.

Il y avait quelques questions que j'aurais à vous soumettre. À un moment, vous indiquez que les délais pour organiser les cours de formation sont un peu trop longs. Plus loin dans votre mémoire, vous indiquez que certains médecins ne peuvent tirer profit d'un stage de perfectionnement et que vous acceptez ce type de situation. Vous indiquez que l'expérience a montré que certains médecins ne peuvent reconstruire une base de connaissances pour leur permettre d'exercer sans restriction. Et vous dites: «Il nous apparaît par ailleurs que ces médecins pourraient rendre encore des services si l'on restreignait la nature des actes qu'ils peuvent poser».

Je ne comprends pas. Est-ce que vous dites qu'il y a des médecins qui n'ont pas les compétences pour pratiquer, mais que vous tolérez une situation de fait ou c'est des droits acquis qu'un médecin a pour pratiquer dans votre ordre même s'il ne peut pas suivre un cours de perfectionnement ou qu'il ne veut pas le suivre?

M. Lair (Rémi H.): Je pense avoir compris votre question. Dans le fond, vous dites que, oui, il y a des médecins qui ont de la difficulté à assumer des connaissances lorsqu'on les met dans un cadre de stage de perfectionnement, mais que par ailleurs on dit également: Ils pourraient encore rendre service. Évidemment, on commence à pratiquer la médecine entre 20, 25 ou 30 ans, et c'est évident que, rendu à 60 ans, souvent on est moins bon dans certains secteurs de la médecine qu'on l'était quand on est sorti du cours de médecine, quand on a terminé sa formation.

On peut par ailleurs avoir développé certaines compétences et avoir oublié tout un pan de la médecine. On rencontre des fois des médecins qui persistent à vouloir faire, disons, de la chirurgie. Ils sont rendus à un stade où on les considère, nous, comme dangereux et ils ne sont plus capables, même si on les soumet à des stages à répétition, d'acquérir de nouvelles connaissances et ils ne sont plus capables dans le fond de remettre leurs connaissances à jour. Ça n'empêche pas que ces médecins-là ont d'autres connaissances, qui ne sont peut-être pas des connaissances chirurgicales mais des connaissances médicales, et, dans un certain secteur de la médecine, ils peuvent encore continuer à fournir des services.

Ce qui arrive bien souvent, c'est qu'on réussit à amener les médecins à restreindre leur champ d'activité. Par exemple, des médecins qui exerçaient dans le domaine de l'urgence réalisent, après avoir été l'objet d'une visite d'inspection professionnelle ou après avoir tenté de faire un stage de perfectionnement, qu'ils ne peuvent pas remettre leurs connaissances à jour dans ce domaine-là et acceptent, par exemple, de ne plus travailler dans une salle d'urgence, ou de ne plus faire d'obstétrique. Mais ces médecins-là ont quand même encore des connaissances qui, s'ils les utilisent de façon rationnelle, leur permettent de rendre service.

Il faut comprendre aussi qu'effectivement il y a des médecins qui ont pris des mauvaises habitudes, et ce n'est pas le stage de perfectionnement qui peut les aider. On perd notre temps à tenter de corriger leur comportement ou leurs habitudes par un stage de perfectionnement. Mais on n'a quand même pas suffisamment de motifs pour les suspendre à tout jamais. D'ailleurs, on n'a pas les pouvoirs pour faire ça.

Le Collège dans le fond il peut faire trois choses. Avec le Comité de discipline, il peut radier, suspendre ou limiter, mais là encore faut-il avoir déposé une plainte sérieuse, grave, au fait que cet individu-là est dangereux.

Il peut aussi évidemment... Suite à une recommandation du Comité d'inspection ou du Comité de discipline, parce qu'il y a certains de ces cas-là qui vont en discipline, ou dans un cas où le médecin doit faire un stage de perfectionnement conformément à la réglementation du Collège qui spécifie un certain nombre de conditions, le médecin, donc, peut être obligé de faire un stage de perfectionnement. Mais le problème qu'on a, c'est que, jusqu'à date, il n'y avait pas d'obligation de le réussir. Là, on veut introduire maintenant une obligation de réussir le stage, mais il y a des médecins, il y a des professionnels qui ne sont pas capables de réussir leur stage. Qu'est-ce qu'on fait avec?

On les retourne dans le champ de la pratique? Je pense que ce n'est pas correct de faire ça. Il faut trouver une façon de limiter ces gens-là sans suspendre leur exercice ou sans les radier du tableau mais limiter leur exercice dans une section où ils ne sont pas dangereux, et à ce moment-là, oui, ils vont continuer à rendre des services, certains services. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

M. Bergman: Oui, je vous comprends, mais, pour la protection du public, il semble y avoir un problème auquel le projet de loi ne répond pas.

M. Lair (Rémi H.): Peut-être.

M. Bernard (Charles): Dans quel sens?

M. Bergman: Dans quel sens?

M. Bernard (Charles): J'essaie de comprendre...

M. Bergman: C'est que vous dites très clairement qu'il y a des médecins qui ne peuvent pas ou ne veulent pas suivre les cours de perfectionnement, qui ne vont pas réussir, mais vous n'avez pas les moyens pour restreindre le champ d'exercice. Alors, comment est-ce que le public peut être assuré en face des faits de cette nature?

M. Lair (Rémi H.): En donnant le pouvoir aux bureaux, aux ordres, de limiter l'exercice d'un médecin qui, après avoir fait un, deux ou trois stages, n'a pas réussi; à ce moment-là, si les bureaux avaient le pouvoir de limiter l'exercice de ce médecin-là, ça serait une façon, je pense, appropriée de protéger le public.

M. Bergman: Mais vous n'avez pas ce pouvoir maintenant.

M. Lair (Rémi H.): On ne l'a pas, actuellement. On a juste le pouvoir de limiter son exercice durant la durée du stage. On ne peut pas garder un médecin en stage durant 10 ans.

M. Bergman: C'était ma question, avec respect pour les médecins, car j'ai un très grand respect pour les médecins et pour le travail que les médecins font sur le champ et pour les heures de travail que nous, le public, demandons à des médecins. C'est incroyable, l'effort que chaque médecin donne à sa profession.

Mais je me demande comment vous allez agir le lendemain de l'adoption de ce projet de loi quand vous avez le droit pour donner des cours obligatoires. Comment le Collège des médecins va agir à ce temps?

M. Bernard (Charles): Mais le Collège ne donne pas nécessairement les cours, là. Il faut comprendre que le Collège des médecins accrédite, donne un agrément à des organismes, comme les universités, par exemple, comme les écoles de médecine, comme d'autres organismes professionnels ou associations savantes. On leur donne l'accréditation pour en organiser, des stages.

(17 h 40)

Le Collège, les seuls stages qu'il organise lui-même, par son service d'inspection professionnelle, c'est lorsqu'un membre est trouvé inapte dans un domaine ou dans toute la médecine; on l'oblige à suivre un stage, et le Collège va organiser le stage pour le médecin.

Mais pour les chirurgies générales, en général, là, ce n'est pas le Collège qui organise ces stages-là. On va voir les écoles de médecine et les universités ou les sociétés savantes puis on accrédite leur activité. Je ne sais pas si vous voyez la différence. Alors, ce n'est pas nous qui allons organiser ça demain matin, là.

M. Lair (Rémi H.): Juste pour préciser. Quand le bureau du Collège impose un stage de perfectionnement au médecin, il faut que le Collège aide le médecin à se trouver un endroit pour faire son stage. Alors, on a des contacts dans les universités, dans les villes, à Québec, à Sherbrooke, à Montréal, et on trouve un endroit qui va accepter ce médecin-là pour une durée de deux, trois, quatre, cinq mois.

Évidemment, si on envoie des médecins qui ne réussissent pas leur stage, qui n'ont pas la capacité de réussir un stage de perfectionnement, on démotive à la longue ces milieux de stage – ils ne sont pas obligés – ils sont moins enclins à accepter les candidats, les stagiaires qu'on veut leur envoyer.

Le problème qu'on a actuellement, c'est qu'il y a un certain nombre de médecins, je le dis encore, qui ne réussissent pas le stage. Le Collège organise à peu près une trentaine de stages par année, de 30 à 35. Sur ce nombre-là, il y a des médecins qui ne sont pas aidables. On ne peut rien faire à l'égard du problème qu'ils ont. Et ce qu'on soumet, ce qu'on vous demande bien humblement, c'est de nous donner un outil additionnel pour protéger le public, qui serait de limiter la pratique de médecins qui ont échoué leur stage. Quand je vous dis: Échouer leur stage, c'est de façon lamentable ou qui ont échoué un deuxième stage répété qu'on a tenté d'organiser pour eux.

M. Bernard (Charles): Si ça peut vous rassurer aussi, je dois ajouter que c'est des cas d'exception, ce dont on parle, naturellement. Il n'y aura pas des masses de ça demain matin. Il faut bien se comprendre là-dessus.

M. Garon (André): Mais, quand il y en a un, il est important.

M. Bernard (Charles): Voilà, ne serait-ce qu'un cas, pour nous, c'est important. Mais c'est des cas d'exception.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...sur ce point-là?

Mme Goupil: Évidemment, tout à l'heure j'ai bien compris votre intervention, et justement les modifications que nous nous proposons de faire, c'est de vous donner les outils pour le faire, parce que, si on lit l'article 7 qui vient modifier l'article 55, on dit: «Le bureau d'un ordre peut, sur recommandation du comité d'inspection professionnelle ou du comité de discipline ou dans les cas prévus par un règlement adopté en vertu du paragraphe j de l'article 94, limiter ou suspendre le droit d'exercer les activités professionnelles de tout membre de cet ordre qu'il oblige à compléter avec succès un stage ou un cours de perfectionnement ou qu'il oblige aux deux à la fois, jusqu'à ce que ce membre ait rencontré à cette obligation.»

Alors, c'est écrit là.

M. Lair (Rémi H.): Vous permettez, madame?

Mme Goupil: Oui.

M. Lair (Rémi H.): Ce n'est pas si facile que ça en a l'air parce que...

Mme Goupil: Non, mais vous avez l'outil pour le faire.

M. Lair (Rémi H.): Je vous donne un exemple: on a organisé un stage de quatre mois pour un médecin. Il n'a pas rencontré tous les objectifs du stage, il ne l'a pas réussi. Il y a un secteur où il est très faible. Par exemple, c'est un chirurgien, il a des connaissances, mais, quand il s'agit d'appliquer ce qu'il sait, il n'est pas bon. On l'a retourné dans un deuxième endroit pour tenter de voir si on ne pourrait pas lui réapprendre comment opérer, et ça ne fonctionne pas.

Qu'est-ce qu'on fait avec ce médecin-là? On ne peut plus lui en organiser, de stage. Le stage est terminé et...

Mme Goupil: Mais qu'est-ce qu'il peut faire à ce moment-là? Vous dites: Il n'a pas les compétences pour le faire, il n'a pas rencontré les exigences, donc forcément...

M. Lair (Rémi H.): Non, mais on ne peut pas le limiter. On ne peut pas l'empêcher demain matin d'opérer. S'il se trouve un hôpital qui va l'accepter, il peut faire des interventions chirurgicales. Il a un permis d'exercice, et, le permis d'exercice de la médecine, ça comprend la chirurgie. Il a fait, il y a 20 ans – je vous donne un exemple, là – un cours de chirurgie. Il a été un certain temps sans faire de la chirurgie. Il doit réapprendre, mais...

Mme Goupil: Je comprends.

M. Lair (Rémi H.): ...il n'y a rien actuellement qui permet au Collège de limiter son exercice, même pas l'article qui est là.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Malheureusement, on ne pourra pas s'étendre trop sur cette question, par manque de temps. Également sur cette question, M. le député de D'Arcy-McGee?

M. Bergman: Je m'excuse, mais je pense que le projet de loi n° 87 est très clair. Il y a une obligation de réussir sur un cours qui est donné.

Une voix: Un stage.

M. Bergman: Un stage. Alors, s'il n'y a pas réussite, je vois mal comment le professionnel en question, qui n'est membre d'aucun ordre professionnel, peut continuer à pratiquer. Autrement, la loi, comme rédigée, n'a pas d'effet, et le législateur, s'il met un mot, ça doit avoir une application.

M. Lair (Rémi H.): Il faudrait le maintenir en stage éternellement.

Une voix: C'est ça, le problème.

M. Lair (Rémi H.): Alors, on se sert d'un mécanisme qui vise à améliorer l'exercice du médecin pour le limiter. C'est ça qu'on fait actuellement, là. C'est qu'on va dire: Il n'a pas réussi son stage; donc, on va l'obliger à réussir. On ne peut pas obliger quelqu'un à réussir quelque chose qu'il n'a pas les capacités pour le faire. Et je pense que ce n'est pas une bonne solution que de maintenir en stage, parce qu'il faut l'organiser, le stage. Le stage a un début, et c'est quand la fin? Quand il réussit? Ça ne fonctionne pas comme ça.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Dr Garon.

M. Garon (André): M. le Président, dans le fond ce qu'on comprend, là, avec les questions puis les hochements de tête, c'est que, vous, vous dites: L'article 7 qui vient modifier 55 du Code, il devrait nous donner les provisions qu'il nous faut. Nous, la lecture qu'on fait de l'article 7, c'est que ça ne nous donne pas les provisions qu'il nous faut.

Une voix: C'est incomplet.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): C'est une belle invitation à continuer effectivement d'échanger, avec, notamment, l'Office des professions.

Mme Goupil: C'est parce que, je vais vous dire... Vous savez, c'est important, mais, comme je vous l'avais dit en préambule tout à l'heure, de façon précise nous n'avions pas eu d'échanges. En tout cas, l'Office et moi, là, on n'a pas été de façon si spécifique. Ce que vous soulevez là, on me dit que vous avez tous les outils nécessaires pour intervenir, pour ne plus permettre à quelqu'un dans l'avenir de continuer à faire une opération chirurgicale précise parce que, comme il ne complétera pas le stage, forcément il va être orienté ailleurs.

Maintenant, vous me dites que, pour vous, ça ne règle pas votre problème. Alors, ce qui va être fait, il y aura des discussions qui vont être échangées directement avec l'Office, et nous aurons l'occasion d'en rediscuter s'il le faut.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de D'Arcy-McGee, en ajustant le temps imparti à l'opposition en conséquence des derniers échanges.

M. Bergman: C'est seulement encore pour revenir à cette question de réussir sur un stage et les effets de non-réussite.

M. Bernard (Charles): Ce que le Dr Lair vous explique depuis tantôt, c'est que, lorsqu'un stage est terminé et qu'il est non réussi, le médecin actuellement, il faut lui organiser un nouveau stage jusqu'à la réussite. C'est ça qui est le problème.

Une voix: Bien non.

M. Bernard (Charles): Non, mais il faut que ça ait une fin.

Des voix: Il n'y en a pas de fin.

M. Bernard (Charles): C'est ça, il n'y en a pas de fin là-dedans. Je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire.

Mme Goupil: Ça veut dire qu'il pourrait revenir six, sept, huit fois. C'est ça?

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! Là, écoutez, on peut... Je vous invite... La vie n'est pas fini après la présente séance. Vous allez pouvoir continuer à vous parler. Je suggère à ce moment-ci qu'on passe...

Des voix: À d'autres choses.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...à d'autres choses.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun, Dr Gautrin.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais être relativement bref. Lorsque vous avez... Dans votre premier document, vous dites: Le titre de docteur, tel qu'on l'utilise précédemment, réfère à une situation bien précise dans votre tête, comme s'il était évident que c'était médecin. Je répète que dans ma tête ça ne réfère pas à un médecin. Le titre de docteur, monsieur, fait référence d'abord et avant tout à un diplôme de troisième cycle obtenu par des gens qui ont d'abord eu un diplôme de premier cycle, après, un diplôme de deuxième cycle, et on fait un cycle de recherche, et à ce moment-là, après trois à quatre ans de recherche, on a obtenu un doctorat.

Pour des raisons historiques dans votre secteur mais uniquement dans votre secteur, c'est-à-dire dans le secteur de la santé, le diplôme de premier cycle porte le titre de docteur, docteur en médecine, et les diplômes de deuxième et troisième cycles, dans d'autres pays, on utilise le terme de professeur, par exemple, pour qualifier un médecin qui a eu une formation complémentaire, etc. Je ne veux absolument pas interférer dans votre secteur, mais je trouve inacceptable, de votre point de vue, que vous interfériez dans mon secteur. Autrement dit, dans mon secteur, si je vous amène dans un laboratoire de physique et que vous prétendez être docteur, les gens ne penseront pas nécessairement qu'on fait référence à un médecin lorsqu'on parle réellement à Dr Untel ou Dr Untel.

Donc, de grâce continuons la situation telle qu'elle est. Faisons en sorte, si vous me permettez, qu'à ce moment-là dans votre secteur, pour des raisons historiques que je respecte, qui est dans le secteur des sciences de la médecine, le diplôme de premier cycle s'appelle un doctorat. Et je ne conteste pas la raison de cette affaire-là et je... tout à fait votre droit de porter à ce moment-là un titre avec un diplôme de premier cycle, un titre de docteur, mais ne commencez pas à vouloir vous attribuer à ce moment-là et avoir la seule autorité dans ce cadre-là. Je ne vois pas en quoi vous êtes perturbés par le fait que des gens comme moi, qui suis docteur ès sciences physiques, ou des gens qui sont docteurs en biologie, ou des gens qui sont docteurs en économie, utilisent leur titre de docteur.

(17 h 50)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Vous avez le choix. Allez-y, Dr Lair.

M. Lair (Rémi H.): On ne veut pas partir une discussion, mais je pense que le Collège n'est pas du tout perturbé à ce qu'un docteur en physique s'appelle un docteur. Absolument pas.

M. Gautrin: Ah, bien, c'est bon.

M. Lair (Rémi H.): Là où ça nous dérange des fois, c'est quand des gens qui travaillent dans des mêmes cliniques où il y a des médecins, des optométristes, des chiropraticiens, ainsi de suite, à un moment donné, le patient, il s'y perd des fois. C'est juste ça.

M. Gautrin: O.K. Ça, je comprends. C'est clair.

M. Lair (Rémi H.): C'est des gens qui donnent des soins. Je pense qu'un docteur en physique, ça ne donne pas des soins, pas des soins de santé. Nous, ce qui nous inquiète, c'est l'utilisation du titre de docteur dans le domaine de la santé.

M. Gautrin: Parfait.

M. Bernard (Charles): C'est dans le champ de la santé. C'est bien clair.

Une voix: Seulement.

M. Gautrin: Si c'est ça, on va clarifier. C'est parfait.

M. Bernard (Charles): Si vous lisez le document, c'est bien dans les 23 ordres professionnels qui s'occupent de santé. S'ils ont un titre de docteur, on n'est pas contre l'utilisation de ce titre-là à la fin de leur nom, avec leur spécialité.

M. Gautrin: On va le clarifier parce que ce n'était pas ce qui est dans la loi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, ça répond à vos inquiétudes, Dr Gautrin?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Ça clarifie leur position, mais en fait ça permettra de clarifier le texte de la loi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Bergman: À l'article 4 du projet de loi n° 87, l'article 44 du Code des professions est abrogé. C'est la clarification de refuser de délivrer un permis à une personne qui n'est pas résidente au Canada. Avec l'abrogation, il n'y aura aucune condition de résidence. Est-ce que vous avez des commentaires sur cet article? Est-ce qu'un membre de vos ordres peut résider et demeurer hors de la province?

M. Lair (Rémi H.): Hors province, oui.

Une voix: Bien oui.

M. Lair (Rémi H.): On a une partie de nos membres qui résident à l'extérieur du Québec. Pour nous, la résidence, ça n'a aucune influence sur le permis.

M. Bergman: La raison que je vous demande la question: Si vous avez des membres qui résident hors de la province, comment est-ce que vous surveillez leur pratique?

M. Lair (Rémi H.): S'ils résident en dehors de la province... Est-ce qu'ils exercent dans la province?

M. Bergman: S'ils exercent hors de la province.

M. Garon (André): Qui exercent également hors de la province?

M. Bergman: Oui.

M. Lair (Rémi H.): On est d'avis que la surveillance de leur pratique, c'est d'abord la responsabilité de l'endroit où ils exercent. S'ils exercent en Colombie-Britannique, c'est au Collège des médecins de la Colombie-Britannique de surveiller leur exercice. Par ailleurs, le Collège pourrait intervenir s'il avait une plainte à l'égard d'un médecin d'une autre province compte tenu que, s'il est membre chez nous, il est tenu de respecter notre code de déontologie.

Alors, on a déjà, au Collège des médecins, déposé des plaintes contre des médecins qui résidaient et qui exerçaient en dehors du Québec parce que ça avait été porté à notre attention, sous forme de plainte, que cet individu-là n'avait pas respecté le code de déontologie des médecins. Donc, on a un pouvoir d'intervention, mais on n'est pas réellement bien placé pour surveiller leur exercice comme tel par le mécanisme de l'inspection professionnelle. C'est d'abord la responsabilité du Collège ou de l'ordre professionnel où il réside et où il exerce.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Avec le consentement, Mme la ministre tiendrait à faire une intervention.

Mme Goupil: Non. Ça va. On a répondu.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Bon. Très bien. Alors, il me reste donc, au nom des membres de la commission, à remercier les représentants du Collège des médecins pour leur contribution à nos travaux.

Sur ce, j'ajourne les travaux de la commission jusqu'à demain, 15 heures. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 54)


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