(Onze heures trente-huit minutes)
Le Président (M.
Bachand) :
Bonjour, tout le monde.
Très content de vous revoir. Alors, c'est la première fois que la Commission
des institutions se réunit pour étudier un projet de loi dans le nouveau
mandat. Alors, très, très, très heureux, et on se souhaite un bon mandat, qui
va être très occupé.
Alors donc, ayant constaté le quorum, je déclare
la séance de la Commission des institutions ouverte. Je vous souhaite encore
une fois la bienvenue.
La commission est réunie afin de procéder aux
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 8, Loi visant à améliorer l'efficacité et l'accessibilité de la
justice, notamment en favorisant la médiation et l'arbitrage et en simplifiant
la procédure civile à la Cour du Québec.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a-t-il
des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par Mme Labrie
(Sherbrooke).
Remarques préliminaires
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Donc, nous allons débuter ce matin
par les remarques préliminaires, puis nous entendrons par la suite les
organismes suivants, soit l'Association professionnelle des notaires du Québec
et le Centre de justice de proximité de Québec.
J'invite donc maintenant le ministre de la
Justice à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez de six minutes.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M.
le Président. Un plaisir de vous retrouver, de retrouver les membres de la Commission des institutions. Je salue mes collègues des oppositions. Je salue
également M. le député de Vanier-Les Rivières, Mme la
députée d'Anjou—Louis-Riel,
Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, Mme la députée de Laval-des-Rapides, M. le député de Saint-Jean
et Mme la députée de Vimont, qui vont participer aux consultations aujourd'hui.
Écoutez, essentiellement, le projet de loi
visant à améliorer l'efficacité de... visant à améliorer l'efficacité et l'accessibilité de la justice, notamment en
favorisant la médiation et l'arbitrage et en simplifiant la procédure civile à
la Cour du Québec, le projet de loi n° 8, traite quatre axes
principaux dans le cadre de ce projet de loi là. Et c'est un projet de loi,
véritablement, qui va amener une diminution des délais, une simplification pour
les citoyens. Et on est très fiers d'avoir pu déposer rapidement ce
projet de loi en début de mandat.
Notamment, M. le Président, dans le cadre du
projet de loi, vous avez un service de médiation obligatoire et d'arbitrage
automatique à la division des petites créances. On va débuter par les dossiers
de 5 000 $ et moins, donc, pour
débuter, et ensuite une procédure simplifiée et accélérée à la Cour du Québec,
donc les dossiers dont la valeur des litiges se situe entre 15 000 $
et 75 000 $.
On amène une clarification des obligations de
transparence et une meilleure représentativité des personnes victimes au sein du Conseil de la magistrature,
donc on va nommer un membre après consultation des organismes de soutien
aux personnes victimes.
Et on va
rendre également les notaires admissibles à la profession de juge avec
10 ans de pratique. M. le Président, je crois que c'est une avancée
significative pour la profession notariale, mais aussi pour l'ensemble du
système de justice pour faire participer
tous les acteurs du système de justice, tous les juristes qui pourront amener
une contribution.
• (11 h 40) •
Donc, vous savez, au cours des dernières années,
on a eu une augmentation des délais dans le système de justice. Il faut combattre ces délais, il faut les diminuer le plus
rapidement possible, notamment à la division des petites créances,
écoutez, on a une moyenne de 664 jours pour être entendu. Parfois, c'est
des délais de trois ans, dans certains districts. Ça n'a pas d'allure. Ça n'a pas de bon sens. Et
c'est notamment pour ça qu'on dépose le projet de loi n° 8.
On va avoir également, je le crois, une
meilleure expérience pour les justiciables. Et, lorsqu'on travaille en matière de justice, le critère le plus important,
c'est la confiance du public à l'intérieur du système de justice. Et comment
pouvez-vous avoir confiance, lorsque vous êtes un justiciable, lorsque votre
dossier est sans cesse reporté, n'est pas entendu, et que ça prend des mois,
des années avant d'être entendu?
Donc, la
médiation obligatoire nous permettra justement de faire en sorte de régler plus
rapidement les dossiers et surtout de faire participer les individus à
la solution de leur problématique. Écoutez, dans les cas de médiation, avec les projets pilotes qu'on avait déjà, il y a un taux de
règlement de près de 60 %. Alors, la médiation fonctionne, mais il faut
vraiment inciter les gens à l'utiliser. Par la suite, il y a l'arbitrage
automatique qu'on va mettre en place. On pourra l'étudier.
Procédure simplifiée
à la Cour du Québec également, écoutez, ça fait suite au jugement de la Cour
suprême. On vient faire en sorte que les citoyens, ce soit le plus simple
possible, et qu'ils défraient le moins de coûts possible également pour que
leur dossier soit entendu et que les délais également soient réduits. On a
toujours en tête d'avantager le citoyen, que son expérience dans le réseau de
la justice soit la plus simple possible.
Troisièmement, au
niveau du Conseil de la magistrature, on amène des obligations de transparence,
également de saine gestion des fonds publics, et aussi, le point le plus
important, qu'on fait de la place aux personnes victimes avec un représentant
qui travaille dans les organismes. Je pense qu'en matière déontologique, c'est
fort important que les personnes victimes aient une voix au chapitre.
Et le quatrième axe
du projet de loi, on permet aux notaires d'accéder à la fonction de juge. On va
bénéficier de leur expertise. On diversifie l'expertise de la Cour du Québec,
de la compétence, de l'expérience aussi. Et vous savez, les notaires, ils ont
une bonne expérience basée sur la médiation, sur la conciliation des parties,
ce sont des officiers publics, donc ils jouent un rôle important dans le
système de justice. On leur fait une place également à la magistrature. Je
pense que c'est amplement mérité.
Alors, écoutez, M. le
Président, je vais conclure ici. Le projet de loi, à date, a été salué par de
nombreux groupes, vous l'aurez constaté. Je crois également que mes collègues
des oppositions y voient du bon dans le projet de loi. Alors, on entame les
consultations et les travaux parlementaires avec ouverture et on a bien hâte de
faire un changement dans le système de justice ensemble.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup,
M. le ministre. M. le député de l'Acadie, pour vos remarques
préliminaires, pour une durée de 3 min 36 s. M. le député, s'il
vous plaît.
M. André Albert Morin
M. Morin : Merci.
Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre. Alors, bonjour à tous les
collègues parlementaires et à tous les
autres collègues. C'est, en fait, ma première intervention dans une commission
parlementaire. Alors, je suis particulièrement heureux, d'autant plus
que c'est un projet de loi important. On ne peut pas être contre l'accès à la
justice, on ne peut pas être contre la simplification des procédures, et c'est
la raison pour laquelle nous étions tout à fait d'accord avec le principe du
projet de loi.
Je
comprends que pour le gouvernement, il y avait également un enjeu de répondre
assez rapidement, et M. le ministre y
a fait référence, compte tenu de cette décision de la Cour suprême du Canada.
Et il y a une partie importante de ce projet de loi qui traite
exactement de ça.
Cependant, dans le
projet de loi, il y a également deux ajouts que je qualifierais d'innovants,
c'est-à-dire de soumettre le Conseil de la magistrature à la loi sur l'accès à
l'information des organismes publics. Et donc, là, ça demande réflexion. Ça va
demander, évidemment, des explications, et on pourra le voir éventuellement,
parce que vous comprendrez que l'indépendance du Conseil de la magistrature est
aussi un élément qui est archi important dans notre société. Ça, c'est une
chose.
Et il y a aussi
donner ouverture aux notaires à l'accession à la magistrature. Et j'écoutais M.
le ministre, tout à l'heure, quand il parlait de l'ajout ou de l'atout pour la
Cour du Québec, mais je pense qu'il s'agit là d'un élément très différent, qui
ne s'est jamais fait et qui n'a jamais été vécu. Et d'où l'importance,
évidemment, d'entendre différents groupes et associations dans le cadre de
cette commission pour bien cerner l'importance et, je vous dirais, la
pertinence, et de voir un lien, s'il y en a un, entre l'accessibilité des
notaires à la magistrature et l'accessibilité des citoyens à la justice.
Alors, je vais
arrêter à ce stade, M. le Président, et je vous remercie.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la députée de Sherbrooke, pour 1 min 12 s.
Mme Christine Labrie
Mme Labrie : Merci,
M. le Président. Je vais être très brève. De toute façon, effectivement, on
voit le projet de loi d'un bon oeil, comme plusieurs de mes collègues autour de
la table. J'ai néanmoins très hâte d'entendre les groupes qui vont participer
aux auditions, parce qu'il y a quand même quelques surprises, dans ce projet de
loi là, dont certaines qui sont susceptibles de ne pas générer de consensus.
Donc, on va être très attentifs aux commentaires, aux recommandations des
groupes qui vont être présents afin d'avoir le meilleur projet de loi possible.
Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la députée de Vaudreuil-Dorion, s'il vous plaît.
Mme Marie-Claude Nichols
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Moi aussi, je vais être très brève. Bien sûr, j'adhère
au principe. Je pense que l'accès à la
justice, c'est... est quelque chose, là. Vous êtes sollicités, vous aussi, dans
vos bureaux de comté, on reçoit des appels,
c'est long, les petites créances, puis c'est des choses qui pourraient être
traitées... traitées rapidement. Donc, le principe du projet de loi est
pertinent, intéressant, puis, bien sûr, vous aurez toute notre collaboration.
Bien hâte à l'article par
article pour apporter certaines suggestions, bien sûr, après avoir entendu les
groupes. Et je déclare d'emblée mon... je suis membre du Barreau du Québec,
donc j'ai déjà reçu plusieurs appels, et mon frère est notaire, donc j'ai déjà
eu aussi les conversations sur les divergences d'opinions entre avocats et
notaires. C'est parti, chez nous, la grande discussion, donc je vous
rapporterai certains propos fort intéressants.
Auditions
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée
de Vaudreuil. Alors donc, je souhaite la bienvenue aux représentants de
l'Association professionnelle des notaires du Québec. Ils sont en
visioconférence. Alors, bienvenue. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre présentation. Après ça, nous allons procéder à une
période d'échange avec les membres de la commission. Donc, la parole est à
vous, mais je vais vous inviter à vous présenter aussi, s'il vous plaît. Merci.
Association
professionnelle des notaires du Québec (APNQ)
M. Houle (Kevin) : Parfait.
Merci beaucoup. Donc, Mmes, MM. les
députés, bonjour. Tout d'abord, je
voudrais remercier la Commission des institutions de nous avoir invités
à partager notre point de vue sur le projet de loi n° 8.
Donc,
effectivement, permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Kevin Houle, je suis
président de l'Association professionnelle des notaires du Québec, donc
l'APNQ, et notaire spécialisé en droit des affaires. Je suis accompagné
aujourd'hui par Me François Bibeau, notaire émérite et directeur général
de notre association.
Donc,
d'emblée, je tiens à exprimer le soutien sans équivoque de l'APNQ au projet de
loi n° 8 qui, à nos yeux, constitue non seulement
une avancée significative en matière de médiation et d'arbitrage, mais aussi
d'efficacité et d'accessibilité à la justice.
L'APNQ constitue donc la principale association
québécoise nationale des notaires. Notre mission est de défendre, de promouvoir
et de représenter les intérêts socioéconomiques des notaires afin qu'ils
puissent contribuer adéquatement à l'administration de la justice.
Dans ce qui suit, Me Bibeau et moi-même
vous présenterons les raisons pour lesquelles l'APNQ soutient le PL n° 8, notamment en mettant en relief les fonctions
juridiques que possèdent actuellement les notaires.
En ce qui concerne la Loi sur les tribunaux
judiciaires, bien, l'APNQ tient à féliciter le ministre de la Justice afin
d'introduire... pour avoir introduit un amendement à cet article, à
l'article 87 de cette loi, qui permettrait, donc, aux notaires d'accéder à
la fonction de juge pour la Cour du Québec. Il s'agit d'une approche courageuse
et novatrice qui, selon nous, met fin à un anachronisme inexplicable, d'autant
plus que cette cour est sous la juridiction et de compétence provinciale. Les notaires
ont, à plus d'une reprise, porté à l'attention des précédents ministres de Justice qu'ils possédaient de solides
connaissances juridiques ainsi qu'une robuste expérience juridique dont le
système de justice pourrait
bénéficier davantage. En ouvrant enfin aux notaires l'accès à la magistrature,
on permet finalement à la justice et au public de tirer pleinement
profit de leur contribution. À notre avis, la combinaison des fonctions du
notaire, soit d'officier public, de conseiller juridique et collaborateur à
l'administration de la justice, ne peut être que gagnante et faire du notaire
un candidat idéal à la magistrature.
Le notaire est d'abord et avant tout un
conseiller juridique compétent. Lorsqu'il agit à ce titre, le notaire jouit
donc d'une autonomie totale, il a l'obligation de bien conseiller son client et
de voir d'abord aux intérêts de ce dernier, tout comme le fait l'avocat. La
rédaction d'un avis juridique peut aussi très bien s'inscrire dans l'activité
dite de conseil élargie. Donc, ainsi le
notaire peut participer à l'éducation et à l'information des citoyens sur une
législation et il peut coopérer à son application en prodiguant un avis
juridique particularisé. Il y a là, nous semble-t-il, donc, un champ de
pratique pour lequel le notaire est bien préparé. Nous sommes donc d'opinion
que le notaire, notamment en raison de sa fonction de conseiller juridique
appelé à donner des conseils juridiques, est tout aussi bien préparé que
l'avocat pour exercer la fonction de juge. La seule distinction, c'est que
l'avocat peut plaider, mais comme on le sait, ce ne sont pas tous les juges à
la Cour du Québec qui ont l'expérience préalable de la plaidoirie, et cela ne
fait pas d'eux pour autant de moins bons juges. En plus, il appert, selon la
législation actuelle, que l'expérience de la plaidoirie ne fasse pas partie des
conditions essentielles à satisfaire pour avoir accès à la magistrature.
• (11 h 50) •
Fait important également, le notaire est un
officier public, le ministre l'a dit d'entrée de jeu. Lorsque le notaire agit à
ce titre, il doit faire preuve d'impartialité et bien conseiller toutes les
parties. La jurisprudence est venue rappeler cette obligation à plusieurs
reprises. La Cour suprême a même reconnu que le devoir d'impartialité auquel le
notaire est tenu le rapproche de celui du juge. Aujourd'hui, c'est notamment
sur ce sens de l'impartialité des juges que repose la confiance du public en
l'administration de la justice. Rappelons aussi que les notaires sont les seuls
professionnels du droit jouissant d'une aussi grande confiance du public, et
ce, depuis des années. Depuis le jour 1 de leur formation et tout au long
de leur pratique, les notaires sont conditionnés à agir avec impartialité dans
l'exercice de leur mandat d'officier public, c'est évident. Ce devoir
d'impartialité, enchâssé dans la Loi sur le notariat et dans le code de
déontologie des notaires, fait donc partie de leur ADN, ça fait partie de notre
ADN.
À ceux qui
objecteraient que les notaires ne peuvent être juges sous prétexte qu'ils ne
sont pas à même de décider de l'issue d'un conflit, on rappelle qu'il est
permis aux notaires d'émettre des opinions juridiques lorsqu'ils agissent comme
conseillers pour le compte d'une seule partie. Dans ce contexte, il est
loisible au notaire de se prononcer sur le bien-fondé des positions respectives
des parties à un litige et même le sort éventuel de celui-ci. Les notaires ne sont donc pas dénués de jugement juridique pour
le seul motif que de trancher les litiges leur est actuellement exclu. Avec l'adoption du PL n° 8, il ne fait
aucun doute que les notaires devenus magistrats continueront à employer
leur réflexe d'impartialité, pour garantir aux justiciables une justice
objective, prévisible et digne de foi. Le notaire est aussi un collaborateur à
l'administration de la justice. Le notaire exerce une charge publique grâce au pouvoir d'authentification que lui a délégué
l'État. Des auteurs considèrent même que l'indépendance notariale suit la même
logique que l'indépendance judiciaire. En plus, quant à cette collaboration à
l'administration de la justice, on peut également penser au pouvoir du notaire
en matière de procédures non contentieuses, entre autres la vérification de
testament et la demande conjointe sur projet d'accord qui règle les
conséquences du divorce, entre autres.
Le notaire est aussi
un auxiliaire de justice. Il est habilité à représenter ses clients devant les
tribunaux, dans l'absence de contestation,
dans plusieurs situations, donc, prévues par la loi. Depuis 1999, le notaire
préside à certaines procédures non contentieuses, que le Code de
procédure civile, au titre III, intitule Les règles applicables devant le
notaire, et non pas Les règles applicables devant le tribunal.
Le notaire a la
capacité également à gérer un litige. La gestion d'un conflit judiciarisé
implique, entre autres, le respect du formalisme procédural et des délais de
rigueur, la gestion des désaccords entre les parties ainsi que l'exercice de
certains choix pour le sain déroulement de l'instance ou de l'acte juridique en
cause.
À
l'instar des juges, les notaires composent chaque jour avec ces considérations.
Parmi ces champs d'expertise propres aux notaires, le formalisme, la procédure
et les délais font partie des réalités d'un bon nombre de notaires.
Dans ses dossiers, le
notaire agit comme gardien du formalisme, notamment en s'assurant de
l'identité, de la qualité et des capacités
des parties, quand il agit comme officier public, en procédant à la rédaction
des actes reflétant les ententes et
le cadre légal ou procédural, selon le cas, de recevoir les sommes en
fidéicommis, les sommes d'argent engagées lors d'une transaction,
respecter, évidemment, toutes les règles de forme de l'acte notarié.
Surnommé,
à juste titre, le «juriste de l'entente», le notaire est habitué à désamorcer
les tensions. Le rôle de maître d'oeuvre qu'il occupe dans
l'instrumentation de l'acte juridique et, plus généralement, la confiance qu'il
inspire auprès du public le placent en bonne position pour concilier les
parties et les aider à trouver un terrain d'entente avant qu'une contestation
réelle ne survienne. Les notaires ayant accès à la magistrature valoriseront
certainement la prévention et le règlement des différends dans les affaires
soumises à la Cour du Québec.
Dans le cadre de son
travail, le notaire, tout comme le juge, est confronté à des imprévus. Ceux-ci
sont amenés à devoir prendre des décisions et faire des choix ayant un impact
sur le déroulement du dossier. Lorsque de tels imprévus surviennent, il revient
au notaire de conseiller les parties ou, du moins, les diriger sur les
correctifs à apporter pour régulariser une problématique.
À la lumière des
aptitudes, donc, comparables des juges et des notaires dans la gestion de leurs
dossiers, l'APNQ est d'avis que le notaire, dans sa rigueur, son côté
conciliateur et son éthique de travail, empreinte de principes de
proportionnalité, a tout en main pour aspirer et faire honneur, effectivement,
à la fonction de juge.
Il faut rappeler
qu'au Québec il y a déjà 15 tribunaux administratifs, et plusieurs
notaires y siègent déjà à titre de juges administratifs en y apportant leurs
compétences spécifiques ainsi que leurs expériences et expertises. Il faut
rappeler qu'en France, Espagne ou Italie, tous les juristes ont accès à la
magistrature. Il n'est pas requis d'être membre d'un ordre professionnel. On
reconnaît la magistrature, même, de carrière, et on y retrouve également des
tribunaux administratifs.
Avant de céder la
parole à mon collègue, Me Bibeau, bien, considérant le délai qui nous est
alloué, bien, je vais laisser les membres de la commission prendre connaissance
de notre mémoire, si ce n'est pas déjà fait, pour connaître les propositions et
les modifications suggérées. Donc, Me Bibeau, je vous laisse la parole.
Le
Président (M. Bachand) : Vous avez un peu
plus de deux minutes de temps restant. Merci.
M.
Bibeau (François) : ...
M. Houle
(Kevin) : Je suis désolé, je n'entends pas, de mon côté. Est-ce que
c'est normal?
Le Président (M. Bachand) : Votre micro, peut-être, Me Bibeau? Non, la connexion s'est perdue.
On va appeler le député d'Orford...
Des voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Il n'y a pas de son. Est-ce que ça va,
Me Bibeau, est-ce qu'on a le son? Alors, écoutez,
on va débuter la période d'échange, le temps que la technologie fasse son
travail, si vous êtes d'accord, Me Houle.
M. Houle
(Kevin) : Oui.
Le
Président (M. Bachand) : OK, pour
continuer, quand même. Alors donc, on va tenter de régler tout ça en attendant,
et puis, maintenant, on va...
M.
Bibeau (François) : Est-ce que vous
m'entendez?
Le
Président (M. Bachand) : On vous entend,
oui. Il vous reste... En une minute, Me Bibeau.
M. Bibeau
(François) : C'est bon. Alors, j'ai tenté
de trouver un autre moyen de communication. Donc, ce que j'allais vous dire, en
accéléré, c'est que, comme je suis moi-même médiateur accrédité, je veux
aborder toute la question de l'enjeu de la médiation. On pense que la médiation
est plus que jamais un champ d'activité naturel pour les notaires.
Historiquement, le notaire a toujours contribué à la prévention et au règlement
des différends. Combien de fois il m'est
arrivé moi-même, à titre de notaire, d'avoir, dans mon cabinet, à désamorcer
des problématiques d'ordre successoral ou même à agir dans le cadre d'un
dossier de transaction immobilière ou commerciale au moment où le vinaigre
allait prendre pour désamorcer les situations?
De ce point de vue là, les amendements apportés
aux articles 1, 2 et 16 du PL n° 8 et 4 et
7 du Code de procédure civile constituent un progrès notable, dans la mesure où
ils reflètent les modifications qui ont été apportées par certains législateurs européens dans leurs codes civils respectifs.
Selon nous,
les clauses de médiation qui sont prévues dans les contrats pourront contribuer
au désengorgement des tribunaux. Dans la mesure où elle réduit le stress
relatif aux conflits et où elle offre un processus de résolution simple et
nettement moins procédural, nous sommes convaincus que la médiation permet de
résoudre une multitude de conflits rapidement, efficacement et à moindre coût,
tant pour le contribuable que pour l'État.
L'APNQ participe, par l'entremise de son Centre
de médiation et d'arbitrage notarial, qu'on appelle le CMAN, à la promotion de
la médiation comme méthode alternative de résolution des conflits, et ce,
autant auprès de la communauté notariale que
du public. Depuis 2015, le CMAN regroupe plusieurs notaires, médiateurs et
notaires arbitres.
Par ailleurs, l'APNQ a publicisé le projet
pilote du ministre de la Justice concernant la prémédiation qui a généré
davantage de demandes en médiation aux petites créances, et les notaires sont
très intéressés de participer au processus. Ainsi, l'APNQ a mis sur pied des
séances de formation destinées à ces derniers, séances qui, chaque fois
qu'elles furent tenues, ont atteint le nombre maximal de participants.
Plusieurs notaires sont déjà, d'ailleurs, inscrits sur la liste d'attente pour
le calendrier 2023.
Donc, avec les orientations données par le
PL n° 8, l'APNQ serait même prête à augmenter
son offre de services afin de satisfaire la demande grandissante des notaires
pour la médiation.
Me Houle, je vous cède la parole pour la
conclusion.
M. Houle (Kevin) : Je ne sais pas
s'il reste quelques secondes, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Allez-y, Me Houle.
M. Houle (Kevin) : Bon, bien...
Donc, tout ce que je voulais simplement... c'est que l'arrivée des notaires comme juges à la Cour du Québec enrichira bien
certainement cette cour d'une complémentarité de différentes expertises.
On vous rappelle qu'effectivement les notaires jouissent d'une grande confiance
du public, et, par ce projet de loi, en plus de l'importance de devoir
désengorger les tribunaux, le législateur semble vouloir assurer une
représentativité de la communauté juridique
au sein de la magistrature québécoise en y donnant accès aux notaires et leurs
compétences.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Donc, la
période d'échange va débuter. Il reste un bloc de 15 minutes du côté
gouvernement. M. le ministre, s'il vous plaît, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Salutations, Me Houle, Me Bibeau. Merci beaucoup de venir
en commission parlementaire et d'avoir
déposé votre mémoire pour l'Association professionnelle des notaires du Québec.
Écoutez,
d'entrée de jeu, j'aimerais ça que vous m'expliquiez qu'est-ce que le notaire
peut faire actuellement en matière de procédures... de dossiers litigieux mais
non contestés à la cour. Quel est le rôle du notaire actuellement?
M. Houle (Kevin) : Donc, si je
comprends bien, c'est, par exemple, le rôle du notaire dans le cadre d'une
procédure non contentieuse devant le tribunal, par exemple, ou...
M. Jolin-Barrette : Oui, d'un
dossier litigieux non contesté, supposons.
M. Houle (Kevin) : OK. Bon, bien,
effectivement, dans un cas où c'est non contentieux, le notaire peut faire les représentations, que ce soit pour, par
exemple, l'acquisition des droits de propriété d'un bien immeuble par
prescription acquisitive, la
nomination d'un tuteur à l'enfant, remplacement d'un tuteur, nomination d'un
liquidateur. Bon, à chaque fois que le Code civil mentionne, par
exemple, que telle nomination peut se faire suivant l'ordonnance du tribunal, bien, le notaire, à partir du moment où il n'y a
pas de contestation, bien, est capable d'aller faire des représentations. On
pense, par exemple, à la nomination d'un fiduciaire, remplacer un fiduciaire,
des éléments comme ceux-là.
M. Jolin-Barrette : Donc,
actuellement, dans les palais de justice du Québec, il y a déjà des notaires
qui vont devant la cour pour faire des représentations sur certains dossiers.
Ça existe, là, des notaires, dans les palais de justice actuellement.
M. Houle (Kevin) : J'en suis un,
oui. Donc, effectivement, que ce soit en requête en prescription ou des
radiations d'éléments, là, sur le registre foncier, de charges quelconques.
Mais effectivement j'en connais un paquet. Mais oui, effectivement, il y en a.
• (12 heures) •
M.
Jolin-Barrette : OK. Puis ça fonctionne bien.
M. Houle (Kevin) : Ça fonctionne
bien parce que je reçois des jugements, mes collègues reçoivent des jugements,
et, avant d'obtenir le jugement, on parle à qui de droit, on fait en sorte
qu'effectivement la personne n'ait pas à se présenter devant le tribunal pour
aller finalement dire : Je n'avais pas compris. Vous comprenez? Donc, on désamorce, c'est ce qu'on disait d'entrée de jeu,
on désamorce, le notaire désamorce les malentendus qu'il peut y avoir pour
qu'au final les gens... bien, on reçoit un jugement, puis voilà.
Et Me Bibeau... bien, effectivement, tu as
peut-être un élément à rajouter.
M. Bibeau (François) : Bien, si je peux ajouter, donc, les notaires sont déjà
aguerris sur les règles de procédure dans ces dossiers-là. Il y en a beaucoup,
de confrères, qui se spécialisent dans ces domaines-là. Qu'on pense aussi au
divorce à l'amiable, tous les dossiers où les gens ne contestent rien, ils sont
d'accord sur le processus de divorce, où le notaire
va avoir accompagné les parties, soit comme médiateur ou soit comme notaire,
pour en venir à des modes de séparation.
Donc, si d'aucuns prétendent que les notaires ne
sont pas aguerris avec les règles de forme et de procédure dans les palais de justice, bien, comme vous
dites, M. le ministre, les palais de justice sont fréquentés par bon nombre de
notaires à tous les jours, là.
M. Jolin-Barrette : OK. Alors là,
c'est intéressant, le point que vous amenez, vous dites que les notaires sont déjà
familiers avec la procédure civile puis déjà avec les règles de pratique devant
les tribunaux, pour certains sujets devant
les tribunaux. Donc, ce n'est pas inusité, là, ça ne sort pas de nulle part,
les notaires travaillent déjà avec les différentes règles de procédure,
avec la procédure civile?
M. Bibeau (François) : Exactement.
M. Houle
(Kevin) : Les notaires consultent le Code de procédure
civile, effectivement, tout comme les confrères avocats.
M. Jolin-Barrette : OK. J'aimerais
ça que vous me parliez du rôle de décideur d'un notaire. Tout à l'heure, vous
avez dit : Il y a des notaires qui sont déjà juges administratifs puis il
y a déjà des notaires qui font de l'arbitrage. Donc, il y a déjà des gens, des
notaires, des membres de la Chambre des notaires qui font ce genre de pratique
là.
M. Houle (Kevin) : Bien, de mon
côté, sans savoir les statistiques, effectivement, précises, des notaires
nommés à ce titre, bien, plusieurs notaires sont déjà juges décideurs ou
décideurs au plan du Tribunal administratif du logement, si je ne me trompe
pas, également, de la CPTAQ, si je ne me trompe pas, mais effectivement, donc,
ces notaires-là sont pourtant capables de présider des séances au sein de
tribunaux administratifs.
M. Jolin-Barrette : Et là, dans le
cadre de... Lorsque les notaires sont juges administratifs ou sont arbitres,
j'imagine qu'ils rédigent des décisions déjà appuyées sur le droit puis sur la
jurisprudence, comme un juge le fait à la Cour
du Québec ou, lorsqu'on a un juge municipal, à la cour municipale. J'imagine
que, les notaires, il y en a certains déjà qui rédigent, là, des
jugements.
M. Houle
(Kevin) : Effectivement, si ces notaires-là ont eu accès à
ce poste-là de décideur administratif, il y a fort à parier qu'ils sont
en mesure et capables de faire la rédaction sur la base de jurisprudence et
d'anciens... bien, effectivement. Puis il ne faut pas se cacher non plus que
ces décideurs-là ou des juges, même, ont des équipes, veux veux pas. Mais effectivement je pense que, de
devoir faire un jugement sans se baser sur la jurisprudence ne serait peut-être
pas un jugement qu'on voudrait nécessairement vivre.
M. Bibeau (François) : Il faut aussi se souvenir que, le notaire, on le considère
à plus d'un titre comme un expert de rédaction de contrats, de rédaction
d'actes, alors, quand vient le temps de faire une rédaction soutenue, au niveau
juridique, il est en mesure de le faire aussi. Et, à ce niveau-là, à chaque
fois qu'il y a eu de nouvelles sphères d'activité qui se sont ajoutées à la
pratique notariale, des formations plus adéquates, plus spécifiques ont été
mises en place. Je me souviens, entre
autres, lorsque le Code de procédure
civile a été modifié pour permettre
aux notaires de présenter des requêtes en divorce, des requêtes en
divorce à l'amiable, bien, on a eu une formation très, très pointue qui était
présentée, à l'époque, par la Chambre des notaires, où il y avait une notaire
et une avocate qui avaient préparé une formation pour mettre les notaires à
niveau, donc, pour pouvoir venir faire les petites nuances dans leur nouveau
travail qui s'ouvrait à eux. Alors, ce genre d'activité là pourrait être repris
ici, bien entendu. Mais j'imagine qu'à la Cour du Québec il y a déjà une
formation qui est donnée aux nouveaux juges qui arrivent en fonction, de toute
façon.
M.
Jolin-Barrette : Je voulais vous demander, voyez-vous un risque
pour la protection du public, un préjudice pour le public à ce que les
notaires deviennent juges à la Cour du Québec ou juges dans une cour
municipale? Est-ce qu'il y a un danger là?
Est-ce que les notaires ont les aptitudes et les qualifications requises pour
accéder à la fonction de juge et, de façon corollaire, est-ce qu'il y a
un risque pour la protection du public?
M. Houle (Kevin) :
Bien, évidemment, nous pensons que non. Et je pense que cette
question-là... je serais curieux d'entendre effectivement cette question-là
adressée à des avocats, par exemple : Est-ce qu'il y a un risque pour la
protection du public si un avocat qui ne fait que du droit bancaire tout au
long de sa vie est nommé juge à la Cour du Québec? Vous comprenez? Est-ce
que... Cet avocat-là a pourtant les compétences pour juger en droit civil, en
droit des obligations... et qu'on pourrait nommer. Donc, si la réponse...
M. Jolin-Barrette : OK.Pouvez-vous
me parler de l'étendue de l'expertise des membres de la Chambre des notaires?
Est-ce que... Parce que, peut-être pour les moins initiés, parfois, l'image du
notaire, c'est, et je ne le dis pas de façon
péjorative, là... mais c'est le notaire de campagne qui fait uniquement de
l'immobilier. Est-ce que vos membres ne
font que des transactions immobilières et des hypothèques ou les sujets qui
sont traités maintenant par les membres de la Chambre des notaires sont extrêmement variés? Est-ce que les
notaires se retrouvent à travailler en collaboration avec les avocats
dans des bureaux conjoints? C'est quoi, la pratique notariale, là, en 2023?
M. Houle (Kevin) : Bien, c'est une
belle question, parce qu'effectivement le droit immobilier est une expertise en soi, mais les notaires font du droit
des affaires, je fais du droit des affaires, du droit corporatif, donc fusions
d'entreprises, relèves d'entreprise. Effectivement, moi, mes vis-à-vis,
souvent, de l'autre côté, ce sont des avocats, donc je fais du droit, principalement, immobilier, commercial, je fais
de l'institutionnel. Donc, les notaires font également des règlements de
successions complexes, moins complexes, successions en faillite, des
successions qui valent des dizaines de
millions de dollars, donc c'est des gros dossiers de longue haleine. Les
notaires font du droit bancaire, du droit international, pour certains,
privé.
Donc, effectivement, souvent, on pense... Et,
moi-même, je fais beaucoup de représentations dans les facultés de droit,
depuis quelques années, et on parle aux étudiants pour leur dire effectivement
que les notaires... quand on pense aux notaires, bien, on pense aux testaments,
transactions immobilières, et moi, je leur dis, un peu à la blague : Je
n'ai jamais fait de testament, et ça ne m'intéresse pas. Donc, ce n'est pas mon
genre de clientèle, ce n'est pas le genre de droit que je pratique, mais
effectivement j'ai un paquet de collègues qui en font.
Donc, tout comme les avocats, les notaires se
spécialisent et d'autres avocats... d'autres notaires, tout comme les avocats, bien, touchent un peu plus à tout,
mais... plus à tout. Mais effectivement, depuis quelques années, moi-même,
là, j'en suis un, donc, un notaire qui
pratique dans un milieu qu'on... un champ qu'on relie beaucoup... souvent moins
traditionnellement aux notaires, effectivement.
M. Bibeau (François) : Si je peux me permettre, en complément, selon les dernières
statistiques que j'ai vues à l'ordre, à l'ordre de la Chambre des notaires, il
y a à peu près un quart de la profession, un petit peu plus qu'un quart de la
profession notariale qui oeuvre dans ce qu'on appelle un milieu non
traditionnel, donc ce sont des juristes, en soi, qui ne font rien de ce qu'un
notaire, traditionnellement, va être appelé à faire. Ce qu'on appelle un notaire traditionnel, là, c'est ce qu'on connaît,
là, le notaire qui fait des testaments, des successions puis des financements
hypothécaires des ventes. Mais là...
Puis moi, à titre de président de l'ordre, à
l'époque, je me souviens avoir déjà remis une distinction à un membre de
l'ordre qui faisait, et tenez-vous bien, du droit spatial. J'ai jasé un petit
peu avec lui pour savoir qu'est-ce que ça
fait, un notaire en droit spatial, mais c'est... Je vous relate ça simplement
pour vous dire qu'à la base le notaire, c'est un juriste, c'est
quelqu'un qui a fait son cours en droit et pour qui les portes sont ouvertes
pour faire tout ce qui touche le droit. Alors, la seule chose qu'il ne peut pas
faire, c'est plaider.
M. Jolin-Barrette : OK. Je voudrais
vous demander : Qu'est-ce que vous pensez de la médiation obligatoire pour les petites créances puis le fait, bon, que
les notaires pourront être, oui, médiateurs, c'est déjà le cas, déjà, arbitres
également, mais le fait qu'on rende la médiation obligatoire selon l'expertise,
là, que les notaires ont dans le cadre de leur pratique?
M. Houle (Kevin) : ...je vais vous
laisser.
M. Bibeau (François) : Oui, si je peux me permettre. Bien, c'est sûr que ça peut
surprendre certains parce que, vous le
savez, il est de la nature même de la médiation qu'elle soit volontaire. Alors,
souvent, quand on vient dire qu'on oblige un processus de médiation, ça
en frustre certains, ça en choque certains. Mais rappelons-nous que, même ici,
au Québec, qu'on demande, dans le cadre d'une médiation familiale, qu'il y ait
au moins une amorce qui soit faite au niveau d'une séance d'information sur la
question et puis pour permettre aux gens de vraiment savoir ce que c'est que la médiation. Alors, il y a une
chose qui demeure, c'est que les gens ne sont pas obligés de s'entendre, là. Ils
doivent entamer le processus de médiation, mais ils n'ont pas une obligation de
résultat, là, c'est une obligation de moyens pour en venir à une entente.
Et ce qu'on vous relatait dans ce qu'on vous a
présenté, c'est que plusieurs pays d'Europe ont adopté cette méthode-là de
venir dire : On oblige la médiation dans certaines sphères de nos activités.
Donc, on pense que c'est un tournant intéressant qui est proposé ici par le PL n° 8 et on est certains que ça va contribuer à désengorger
les tribunaux, parce que tous ces gens-là qui ne sont pas allés à la médiation,
en ne sachant pas trop ce que c'est, bien, en se faisant obliger d'aller vers
cette voie-là, vont sûrement trouver, pour certains en tout cas, un moyen d'en
venir à la conclusion à l'amiable ou raisonnée de leurs différends, sans être
obligés de mobiliser une cour avec un magistrat et tout l'appareil qui en
découle.
M.
Jolin-Barrette : Excellent. Me Houle, Me Bibeau, je vous remercie.
Je vais céder la parole à mes collègues, mais merci beaucoup pour votre
présence en commission parlementaire.
Une voix : Ça fait plaisir.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît. Il vous reste 3 min 50 s.
• (12 h 10) •
Mme Bourassa : Parfait. Merci
beaucoup. Bonjour. D'abord, en page 5 de votre mémoire, vous rappelez que
la formation autant des avocats et des notaires est similaire avec le
baccalauréat en droit et la maîtrise en notariat, mais vous tablez, là, sur une
différence : la confiance du public. Vous dites qu'un lien particulier
s'est créé avec les Québécois, que les
notaires font partie des métiers, là, envers qui la population a le plus
confiance. Ma question : Est-ce
que l'accès au rôle de juge, pour un notaire d'expérience, va contribuer à
renforcer la confiance des usagers envers le système de justice? Parce
que c'est aussi un objectif.
M. Houle
(Kevin) : Bien, à notre avis, effectivement, oui, parce que,
depuis quelques années, je vois ici la statistique, c'est souvent entre
85 %, 87 %, là, où les gens ont confiance aux notaires, là, suivant
les sondages. Mais effectivement on pense qu'à partir du moment où les gens
constatent que des notaires envers qui on a confiance, qu'on a côtoyés ne
serait-ce qu'une seule fois au moins, peut-être, dans une vie... Des fois, on
peut passer une vie sans nécessairement
avoir vu un avocat, mais un notaire, à un moment donné, on y arrive. Bien,
effectivement, de voir que, ces
notaires-là, bien, que le gouvernement, le législateur, bien, permet à ces
notaires-là, envers qui on a confiance, d'avoir accès à la magistrature,
bien, on est totalement d'avis, effectivement, qu'il va y avoir un effet
positif sur la confiance que les gens pouvaient avoir, là, vis-à-vis la
magistrature et la cour dans son ensemble.
17 859
Le Président (M. Bachand) : Merci.
Ça va? Alors, M. le député de Saint-Jean. Il reste deux petites minutes M. le
député.
17 879
M. Lemieux : Merci
beaucoup, M. le Président. Je n'abuserai pas. Bonjour, messieurs. Vous avez
commencé en disant que c'était
courageux et novateur que d'aller vers la nomination de notaires au poste de
juge. Ça fait combien de temps que vous attendez ça?
M. Houle
(Kevin) : Me Bibeau, je dois le dire... Me Bibeau est plus
âgé que moi, il pourrait peut-être répondre.
M. Bibeau
(François) : Je m'en vais sur ma 36e année comme notaire,
j'ai été membre du conseil d'administration de l'ordre pendant
15 ans, et de mémoire je ne me souviens pas de jamais avoir entendu un
président de l'ordre ou des professeurs de
droit, notaires, nous dire que c'est inconcevable, parce qu'on a la même
formation, parce que nous avons
d'éminents confrères. Donc, je peux vous dire que c'est... on parle en termes
de décennies, là, plusieurs décennies.
17 879
M. Lemieux :
De là vos larges sourires depuis qu'on vous entend à cette commission. Je
sais, puis tout le monde le sait, c'est
l'éléphant dans la pièce, qu'il y a un ordre... Là, vous, vous êtes les
notaires. Il va y avoir les avocats qui vont se présenter à nous, qui ne
sont pas aussi enthousiastes que vous. Sans pouvoir encore les entendre, en ce
moment, vous allez leur répondre quoi comme... pas nécessairement ici, mais en
général? Parce que vous connaissez bien leurs appréhensions, là.
M. Houle (Kevin) : Bien, ce
qu'on va leur répondre... Suite à la lecture de notre mémoire et de nos
collègues notaires, j'imagine, bien, leur répondre qu'effectivement, depuis des
centaines d'années, les notaires sont près de la population, les notaires ont
une formation juridique, les notaires se spécialisent, sont des experts dans le
secteur du... dans certains secteurs du
droit, tout comme les avocats sont des experts dans d'autres secteurs du droit,
mais qu'au final c'est important qu'au Québec, en Amérique du Nord, que les
notaires qui sont uniquement ici ou présents au Québec, bien, que ces
notaires-là qui sont des juristes, conseillers juridiques, aient accès à la
magistrature pour apporter leur expertise,
leur point de vue. On l'a dit tantôt, l'ADN des notaires, bien, on est formé à
être impartial, à titre d'officier public. Donc, effectivement, je pense que c'est ce qu'on va leur répondre. On
l'a dit tantôt, là, c'est un anachronisme, dans un sens, le fait que les
notaires, aussi compétents qu'on le soit, n'aient pas encore accès, là, à la
magistrature.
17 859
Le Président (M. Bachand) : Merci.
Merci beaucoup. Alors je me tourne maintenant vers l'opposition officielle pour
un bloc de 9 min 54 s. M. le député de l'Acadie, s'il vous
plaît.
19 253
M. Morin :
Merci, M. le Président. Merci, Me Houle et Me Bibeau, pour votre
mémoire et votre exposé ce matin, mémoire
que j'ai lu avec avec beaucoup d'attention. Je comprends que vous représentez
l'APNQ, une association de notaires, et non pas la Chambre des notaires.
Et est-ce que vous représentez tous les notaires qui sont inscrits à la
chambre? Ou comment, en fait, se dégage votre membership puis quelle est la
distinction entre les deux?
M. Bibeau
(François) : Si je peux répondre, on est
en pleine période de recrutement, c'est-à-dire de renouvellement d'adhésion, à
l'heure actuelle, on a quelque 1 500 notaires qui ont adhéré
volontairement. Il faut dire que l'APNQ, c'est le plus important regroupement de notaires à adhésion
volontaire. Alors, l'ordre, on n'a pas le choix, hein, il faut être membre,
mais l'APNQ, bien, on peut choisir de ne pas en être. L'année dernière, là, au
31 décembre, on avait fini l'année avec 1 850 notaires.
Donc, pratiquement 50 % de la population notariale sont membres à l'APNQ.
Et là, bien, comme je l'ai dit tout à l'heure, sur à peu près
4 000 notaires, il faut comprendre qu'il y a à peu près
1 000 notaires qui sont soit dans les ministères, dans les
municipalités, donc, qui n'oeuvrent pas en cabinet privé. Donc, on a la prétention de penser qu'on a la
grande majorité des notaires en cabinet privé qui sont membres de l'APNQ.
M. Houle (Kevin) : Si je peux
me permettre, je veux simplement préciser qu'effectivement on parle au nom de nos membres, mais effectivement notre mandat
est, entre autres, de faire rayonner le notariat. Donc, on parle au nom
du notariat, à titre d'acteurs dans le système de justice et dans le système
judiciaire, oui.
19 253
M. Morin :
Donc, je comprends. Alors, si je comprends bien votre réponse, donc, le but
de votre association, c'est de faire,
finalement, le rayonnement, la promotion; la chambre, elle, comme ordre
professionnel, vise notamment à encadrer la profession et la protection
du public.
M. Houle (Kevin) : Effectivement.
19 253
M. Morin :
Ce qui est plus le mandat de la chambre.
M. Houle
(Kevin) : Effectivement. Et l'APNQ a eu 25 ans l'an
passé, donc ça fait des années qu'on travaille sur cet aspect.
19 253
M. Morin :
Parfait.
M. Bibeau
(François) : Si je peux me permettre, M. le député, une des grandes
parties des travaux de l'APNQ vont
vers la... va vers la formation des membres. Alors, on est en relation avec
l'ordre à ce niveau-là parce qu'on pense que certaines formations relèvent beaucoup plus de l'association. Et à
ce niveau-là les formations que l'association met sur pied sont
accessibles par tous les notaires, qu'ils soient membres ou non.
19 253
M. Morin :
Très bien. Je vous remercie. Dans le projet de loi, on parle évidemment
beaucoup de médiation. Vous avez fait état des compétences que vous avez en
médiation. Mais je comprends qu'avec la médiation qui va devenir obligatoire,
puis que l'idée c'est évidemment d'enlever des dossiers litigieux devant les
tribunaux, les envoyer en médiation, est-ce
que vous allez être capables de faire face à cette demande? Parce que,
forcément, il va y avoir beaucoup plus de médiation, on veut que ce soit
obligatoire. Comment vous entrevoyez ça? Comment vous allez être capables, avec ce que vous avez présentement comme
effectifs, de remplir, finalement, ce mandat qui vous serait confié par
la loi?
M. Bibeau (François) : Bien, Il faut se souvenir que les notaires sont des
médiateurs qui peuvent participer à l'effort à ce niveau-là. Mais ce ne sont
pas les seuls, hein, il ne faut pas oublier que nos confrères avocats sont
aussi médiateurs, pour certains, et participent aussi. Donc, on vient ajouter
l'épaule à la roue à l'effort des juristes pour pouvoir aider à désengorger les
tribunaux. Et comme je l'ai mentionné dans mon exposé, lorsque la prémédiation
a été lancée, on a déjà publicisé cet élément-là et on a ressenti un très grand
enthousiasme de la part des notaires pour devenir médiateurs aux petites
créances. On a déjà dispensé deux formations à ce niveau-là, et c'était plein à
chaque fois. Et déjà on a des gens
d'inscrits sur notre liste. Alors, ce que je mentionnais tout à l'heure, pour
pouvoir faire face à la demande, on serait même prêts à augmenter le
nombre de formations à ce niveau-là pour permettre d'accélérer le processus et
permettre une plus grande formation de médiateurs notaires.
M. Houle (Kevin) : Bien, je pense
que ce n'est pas inutile de préciser qu'effectivement... que le CMAN, on en
parlait tantôt, le centre d'expertise et médiation notariale, donc, relié à
l'APNQ, bien, se penche exclusivement sur cet aspect-là, là, et ce, depuis
quelques années déjà, là.
M. Bibeau (François) : Effectivement.
M. Morin : Bien, je vous remercie.
Parmi le sommaire de vos recommandations, il y en a une qui vise
particulièrement la composition du Conseil de la magistrature. Le projet de loi
permet la place pour un notaire, vous en
voulez deux. Pourquoi deux? Pourquoi pas trois? Un, ce n'est pas suffisant?
Enfin, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
M. Houle
(Kevin) : Bien, c'était simplement pour faire en sorte que,
nécessairement, au niveau de la représentativité... que tant les
notaires que les avocats aient le même droit de parole et le même poids au
niveau du conseil lui-même.
M. Morin : Je
vous remercie. Dans votre mémoire, à la page 14, quand vous parlez...
parce qu'on a parlé beaucoup de
l'accessibilité possible, éventuellement, si le projet de loi est adopté, à ce
que les notaires puissent devenir membres de la magistrature. Vous faites
une distinction, vous décrivez ce qu'est un notaire en droit civil puis vous...
il y a aussi une référence aux autres provinces
canadiennes. Mais on s'entend que, dans les autres provinces canadiennes,
l'institution du notariat comme on la connaît au Québec n'existe pas. Donc, il
est normal que dans les autres provinces, à un moment donné, ils puissent
devenir membres de la magistrature, parce que, ce que je comprends, c'est que
c'est des avocats qui peuvent aussi être ce qu'on appelle des «notary public»,
mais qui n'ont rien à voir avec un notaire au Québec. Donc au fond, quand vous
dites : Au Québec, c'est le seul endroit où le notaire diplômé en droit
n'a pas accès à la fonction de juge, bien, forcément, on ne peut pas faire
autrement. On se comprend?
M.
Bibeau (François) : Et c'est un peu ça
dont Me Houle voulais parler, quand on parle d'anachronisme, c'est qu'on croit
que tout ça découle de ce fait-là. C'est-à-dire que, quand il a été question
d'établir les règles et, dans la
constitution, de prévoir que les candidats à la magistrature doivent être
membres du Barreau, selon nous, ce qui est arrivé, c'est qu'on a tout
simplement reproduit ça mutatis mutandis pour le Québec, en oubliant qu'il y
avait deux chambres professionnelles au Québec, et à ce moment-là on a continué
sur cet erre d'aller là depuis des décennies, des siècles. Mais
techniquement on parle de juristes à part entière, là, le notaire en droit, le
notaire typique de droit latin, n'est pas un «notary public», comme vous avez
dit, ce n'est pas un simple commissaire à l'assermentation. Alors, il faut le
comprendre, là, à ce niveau-là.
• (12 h 20) •
M. Morin : Absolument.
Puis c'est absolument deux choses qui sont totalement, totalement différentes.
Donc, vous n'avez pas peur que le fait qu'éventuellement des notaires puissent
accéder à la magistrature, ça dilue l'importance
de son rôle comme officier public qui peut être capable de conseiller
l'ensemble des parties dans le cadre d'un problème juridique quelconque?
M. Houle
(Kevin) : Bien, à ce stade-là, je pense que le notaire qui agit comme
officier public, donc, pendant sa carrière, conserve son titre d'officier
public impartial. À partir du moment où d'autres collègues notaires ont accès à
la magistrature, ces notaires-là ne seront plus des officiers publics, mais
deviendront des juges. Un n'empêchera pas l'autre, pour le reste de la
communauté notariale, là.
M.
Bibeau (François) : Et d'ailleurs, si je
peux me permettre, ce changement de chapeau et de rôle là, on le connaît déjà.
On voit que des juges qui prennent leur retraite retournent souvent à la
pratique à titre d'avocats dans de grands cabinets d'avocats-conseils. On ne
les appelle plus «M. le juge», ils deviennent et reprennent leur statut
d'avocat et ils continuent à agir avec partialité pour leurs clients.
M. Morin : Et,
dans votre exposé, quand vous avez parlé, vous avez cité des exemples de
l'Espagne, de la France, de l'Italie, et, quand on parle de l'accession à la
magistrature, dans ces pays-là, on s'entend que le système est complètement
différent et qu'au fond, au fond, dans ces pays-là, quand quelqu'un veut
accéder à la magistrature, c'est avant même qu'il devienne avocat ou notaire.
M.
Bibeau (François) : Tout à fait. Il y a
même une école de la magistrature, hein? Il s'agit d'avoir son baccalauréat en
droit pour accéder à l'école de magistrature. Donc, ce n'est pas un prérequis
que de faire partie d'un ordre professionnel pour en être. Donc, c'est vrai que
c'est différent. Mais on a soulevé ce point-là simplement pour bien faire
comprendre, en fait, que le notaire est un juriste à part entière, au même
titre que l'avocat. On ne veut rien enlever aux avocats, là, on ne vient pas
dire... on ne va pas dire que ce n'est pas des bons juges, ce n'est pas ça du tout.
On vient simplement dire qu'on a certains des membres de notre profession qui
pourraient facilement accéder à la magistrature et être de très bons juges.
M. Morin : Et,
pour vous, le fait, par exemple, qu'un notaire n'ait pas nécessairement d'expérience
en litige et en rédaction de procédures dans la vue d'un litige, ça ne pose pas
de problème pour qu'éventuellement un notaire puisse accéder à la magistrature?
M. Houle (Kevin) : Effectivement, pas du
tout, ça ne cause pas de problème, considérant qu'actuellement il y a déjà
des avocats qui ont accès à la magistrature, qui n'étaient pas non plus des
spécialistes dans cette matière-là.
Le
Président (M. Bachand) : ...
M. Morin : C'est
terminé. Je vous remercie, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
députée de Sherbrooke pour 3 min 18 s. Mme la députée, s'il vous
plaît.
Mme Labrie : Merci,
M. le Président. Vous avez mentionné tout à l'heure que, quand un avocat accède
à la magistrature, il a des formations à suivre lui-même, vraisemblablement.
Est-ce que vous estimez qu'un notaire qui accéderait à la magistrature aurait
besoin de formation spécifique, par exemple, en matière de règles de preuve
ou...
M. Houle
(Kevin) : À partir de là, je pense que ça dépend du profil.
Donc, je ne pense pas qu'on puisse répondre de manière globale et générale, là,
ça dépend du notaire qui... ou comme ça dépend de l'avocat qui est nommé juge.
Mme
Labrie : Il n'y a pas de besoin spécifique, là, pour une personne qui
proviendrait du notariat, qui accéderait à la magistrature, de votre point de
vue?
M. Houle
(Kevin) : À ma connaissance, non, de manière globale, ce serait selon
le profil.
M.
Bibeau (François) : Par exemple, on
parlait tout à l'heure de certains notaires qui ont déjà accès aux palais de
justice pour représenter leurs clients, bien, les règles de preuve, ils les
connaissent bien, ils savent quels sont les documents qu'ils doivent présenter,
alors on ne pense pas... Et d'ailleurs, à titre, il faut le mentionner... à
titre d'officier public, lorsque le notaire
prépare des actes authentiques, il contribue à tout le processus de preuve.
C'est-à-dire que, lorsqu'un avocat
présente en cour un acte notarié, qui est un acte authentique, bien, tu n'as
pas de meilleure preuve que ça parce que ça peut difficilement être
contesté.
Alors, ce sont des
règles qui sont connues et qui font partie du cheminement, hein, du cursus
universitaire pour avoir un bac en droit. Il
s'agira, pour le notaire qui n'a pas pratiqué dans ces matières-là, de se les
remettre en tête, là, tout simplement.
Mme Labrie : Donc, il faudrait que ce soit peut-être un peu
plus à la carte. J'ai une question pour vous, M. Bibeau, plus spécifiquement, parce que vous avez dit que
vous êtes médiateur vous-même. D'habitude, l'approche en médiation repose sur le volontariat, donc vous êtes
probablement plus habitué de travailler avec des gens qui ont de l'intérêt pour
aller en médiation sur leur dossier. Ça doit
être une tout autre histoire de faire affaire avec des gens qui se font imposer
la médiation. Est-ce que vous estimez que la
formation offerte actuellement aux médiateurs est adéquate pour préparer
les gens à faire affaire à des gens qui se font imposer la médiation?
M.
Bibeau (François) : En fait, oui, parce
que, vous savez, dans le monde de la médiation, il n'y a pas juste les juristes qui interviennent, hein, il y a aussi
les travailleurs sociaux, les psychologues et les conseillers en orientation,
et ils ont une approche qui est différente. Alors, on n'y va pas sur l'approche
adversariale, mais plus sur les besoins des gens. On va travailler là-dessus en
médiation. Alors, par exemple, il m'est arrivé à plus d'une reprise, avec des
gens qui étaient en médiation familiale, de faire face à quelqu'un qui était
complètement fermé, là, tout le long du processus. Puis ton but, là, en tant
que médiateur, c'est de lui faire décroiser les bras tranquillement, pas vite,
en lui faisant comprendre qu'il a tout intérêt à participer à la solution,
plutôt que de se la faire imposer. Et souvent c'est comme ça qu'on va
apporter... amener les gens à collaborer, à contribuer.
Ce n'est pas toujours
facile, mais il y a des techniques, il y a des techniques qui existent, comme,
par exemple, la médiation par caucus, un peu ce que les juges font dans les
conférences de règlements à l'amiable, là. Quand c'est trop difficile, que les
gens soient en présence l'un de l'autre, on peut y aller par caucus pour
dénouer les impasses. Moi-même, lorsque
j'étais président de l'ordre, j'ai eu à faire ce qu'on appelle des médiations
présidentielles. C'est le seul ordre professionnel, la Chambre des
notaires, où existe ce processus-là. Quand deux notaires ont des contentieux
entre eux, ils doivent soumettre leur dossier à la médiation présidentielle. Et
je peux vous dire que souvent, là, mes collègues arrivaient, là, ils n'étaient
pas trop, trop ouverts, ça ne leur tentait pas, là, ils avaient juste hâte
d'aller confier leur dossier à un avocat. Mais, vous savez que le taux de
réussite est très bon, hein : à plus 60 %, les gens sortent de notre
bureau avec une entente où ils se sont entendus. Donc, je suis très, très
confiant. C'est un autre processus. On n'a jamais l'obligation de s'entendre,
on leur dit en partant, ils se sentent libres par rapport à ça, mais ils ont
tout intérêt à le faire, puis là on leur explique comment on va procéder pour
le faire.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Me Bibeau. Mme la députée de Sherbrooke, merci beaucoup.
Mme la députée de
Vaudreuil, s'il vous plaît, pour 3 min 18 s.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Est-ce que je dois comprendre que l'APNQ donne de
la formation à ses membres pour devenir médiateur?
M.
Bibeau (François) : Oui, tout à fait. La
médiation, au niveau des petites créances, on a déjà des formations qui sont
dispensées à ce niveau-là. Comme je le disais tout à l'heure, elles sont
toujours à salle comble. On en a une, là, qui devrait être annoncée dans notre
calendrier de formation pour l'automne prochain.
Mme Nichols :
Parfait. Merci. Vous avez parlé, puis là j'y vais... des questions en
rafale, j'ai un petit peu moins de temps, vous avez parlé qu'il y a certains
notaires qui siègent déjà comme juges administratifs ou, en fait, comme arbitres. Est-ce que vous avez répertorié,
là, il y en a combien, de juges administratifs qui sont notaires qui siègent
présentement?
M. Houle
(Kevin) : Non, c'est ce que je soulignais tantôt, c'est qu'on n'a pas
les statistiques officielles en ce sens, c'est plutôt de la reconnaissance, là.
Mme Nichols :
Puis vous avez dit aussi tantôt, là, que vous allez souvent à la cour,
évidemment, là, pas nécessairement pour plaider, mais, j'imagine, à titre de
témoins experts, experts dans un dossier. Vous dites que vous croisez souvent, là, des notaires à la cour. Moi,
j'en croise rarement. Vous en croisez combien quand vous allez à la cour?
M. Houle (Kevin) : Bien,
ce que j'ai dit tantôt, moi, c'est que ce n'est pas moi... je ne croise pas des
notaires, je connais des notaires qui
vont à la cour pour présenter des demandes, donc ce n'est pas moi qui les
croise nécessairement. Puis je vais vous avouer que je ne parle pas non
plus à tous ceux qui m'entourent, à la cour, bien franchement. Mais il n'en
demeure pas moins que, oui, je vais à la cour pour certaines causes, surtout en
prescription, mais mes collègues, justement,
à mes bureaux, bien, font tout ce que j'ai nommé tantôt, là, nomination de
tuteur à l'enfant, des parents décédés, etc., remplacement de
liquidateur, etc.
M.
Bibeau (François) : Mme la députée, juste
pour préciser, ce n'est pas nécessairement à titre d'expert dans un dossier,
mais vraiment comme porteur du dossier, pour aller, par exemple, faire une
demande en prescription trentenaire, ou autres, alors c'est vraiment...
M. Houle
(Kevin) : Le procureur des demandeurs.
M.
Bibeau (François) : C'est ça, vraiment.
Mme Nichols :
...de médiateur, est-ce que vous allez faire entériner des divorces à
l'amiable ou des...
M.
Bibeau (François) : C'est possible aussi,
tout à fait.
Mme Nichols :
Parfait. Vous aviez parlé, là,
l'APNQ avait 1 500 membres sur 4 000 notaires puis vous
avez dit que ça représentait à peu près la moitié?
M. Houle
(Kevin) : Bien, c'est parce que...
M.
Bibeau (François) : Tout à fait.
M. Houle
(Kevin) : Bien, vas-y. C'est en début d'année, là.
M.
Bibeau (François) : Oui, c'est ça. On est
en période de renouvellement. L'année dernière, si on veut prendre le vrai
chiffre, là, nous avions 1 850 membres, et il y a un petit peu moins
que 4 000 membres au notariat. Puis,
comme je vous disais, mettons, sur les 3 900 membres, il y en a
peut-être 1 000 qui sont en pratique non traditionnelle dans les
ministères. Donc, c'est pour ça qu'on disait qu'on a à peu près la moitié des
membres en pratique active à titre de notaires praticiens privés, oui, c'est
ça.
Mme Nichols :
Parfait. Vous avez piqué un peu ma curiosité quand vous aviez dit que...
Quelqu'un vous posait la question : Pensez-vous que la population a plus
confiance qu'aux avocats? Donc, vous pensez vraiment que les notaires vont
redorer l'image de la magistrature?
M. Houle
(Kevin) : Bien, je pense que ce n'est pas le rôle des notaires...
Mme Nichols :
Question piège, là!
M. Houle
(Kevin) : Bien non, je pense que ce n'est pas le rôle des notaires
exclusivement, là. Je ne pense pas que législateur ait en tête tout cet
espoir-là, ne serait-ce que... J'ai bien beau être notaire et d'aimer la
profession, mais je ne pense pas que les notaires à eux seuls vont sauver le
monde, là, donc, bien franchement. Je pense que la confiance des juges provient
de différentes choses, mais, entre autres, souvent, on entend des... c'est
surtout l'effet de médias, hein, bien
franchement. Des fois, il y a des jugements x, y, z, qui font en sorte que la
population, tout d'un coup, s'insurge contre des jugements plus que contre le
système de la justice. Mais, bien franchement, c'est la lenteur, on le
sait, c'est la lenteur du système qui fait que les gens mettent tout ça dans le
même panier. Puis finalement le système en soi n'est pas fiable, entre
guillemets. Mais les notaires participeront, comme leurs collègues avocats vont
participer à cet aspect-là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Sur ce, Me Houle, Me Bibeau, merci beaucoup d'avoir été avec nous ce
matin.
Je suspends les
travaux quelques instants pour que le prochain groupe prenne place. Merci.
(Suspension de la séance à
12 h 30)
(Reprise à 12 h 32)
Le
Président (M. Bachand) :
À l'ordre,
s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Avant d'aller à notre
prochain groupe, on a commencé avec un petit peu de retard ce matin, donc
j'aurais besoin d'un consentement pour ajouter 15 minutes à la rencontre,
à la séance. Il y a consentement? Merci beaucoup.
Alors, il me fait plaisir...
Des voix : ...
Le Président (M.
Bachand) : S'il vous plaît! Il me fait plaisir d'accueillir les
représentantes du Centre de justice de
proximité de Québec. Alors, mesdames, bienvenue. Merci beaucoup d'être avec
nous. Vous avez 10 minutes de présentation. Moi, je vous inviterais
d'abord à vous présenter. La parole est à vous.
Centres de justice de
proximité du Québec
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bonjour.
C'est là? C'est notre première présence en commission.
Le Président (M.
Bachand) : Vous êtes les bienvenues. On
espère vous voir régulièrement, d'ailleurs.
Mme
Fafard-Marconi (Jennifer) : Oui, absolument. Je me présente : je suis
Jennifer Fafard-Marconi. Je suis la directrice générale du Centre de
justice de proximité du Grand Montréal, accompagnée...
Mme Néron (Sara) : Donc, de sa
collègue, effectivement. Donc, Sara Néron. Je suis du Centre de justice de proximité de Laval-Laurentides-Lanaudière, mais
aujourd'hui on représente tous les centres de justice du Québec. Voilà.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Donc,
merci de nous accueillir et nous permettre d'exposer notre vision.
On tenait d'abord à saluer le projet de loi pour
un meilleur accès à la justice. L'aspect simplification de la procédure est
souvent négligé au profit du droit substantif. Donc, toute initiative visant à
simplifier le processus à la cour nous apparaît plus que nécessaire avant... afin
de remettre le justiciable au coeur du système et éviter son sentiment de subir
le système plutôt que d'y contribuer.
Aujourd'hui, nous voulons vous apporter la
lunette du citoyen, puisqu'il ne faut pas oublier sa perception, qui devrait être, à notre sens, l'élément
fondamental à tenir en compte lors d'élaborations de mesures d'accès à la
justice. Donc, on vous propose
aujourd'hui de se concentrer sur deux aspects, là, l'enjeu de la partie non
représentée puis ensuite la médiation obligatoire, l'arbitrage
automatique.
Mais d'abord,
un petit mot sur nous, qui nous sommes, pour les gens qui nous connaissent
moins. Nous sommes des acteurs de première ligne depuis plus de
10 ans qui oeuvrent, là, dans le système de justice québécois. On est la
référence en justice de proximité. On est déployés sur tout le territoire du
Québec. À l'heure actuelle, il y a 11 CJP, et, avec l'annonce récente, on aura plusieurs autres centres qui... et
nous allons couvrir, là, le Québec en entier. Notre ADN, c'est simple, c'est la justice participative, en ce
sens qu'on comprend qu'une situation juridique n'appelle pas uniquement
à une solution juridique, mais... et que la participation active du citoyen
accompagné d'un professionnel est la clé
pour augmenter sa confiance dans le système juridique. Derrière un problème, il
y a une personne, il y a un vécu, il y a ses besoins et il y a surtout
ses perceptions.
Chaque jour,
nos professionnels du droit... Donc, on est un réseau de
70 professionnels, dont la majorité, c'est des avocats, mais on a aussi des notaires. On salue
les notaires. Donc, nos professionnels rencontrent des dizaines de citoyens
par jour, des citoyens qui ont besoin d'un éclairage, d'une orientation ou
d'une prise en charge, mais surtout d'être rassurés sur les prochaines étapes,
d'être guidés sur ses priorités en fonction de ses besoins. Ce qui nous
distingue en fait, c'est qu'on est... on ne prend pas parti. On est neutres. On
ne juge pas. Puis, on est bien ancrés dans nos régions respectives, on connaît
bien l'écosystème propre à chaque région. On est même présents, certains, dans
certains palais de justice. On a des
partenariats avec des organismes communautaires. Et, dans la dernière année, en
fait, 2021‑2022, c'est plus de
25 000 rencontres qu'on a faites annuellement. Voilà.
Donc, si je me concentre un peu plus sur l'enjeu
des personnes non représentées, en fait, pour ce qui est de la compétence
partagée, Cour du Québec, Cour supérieure, maintenant, et la simplification de
la procédure, on est bien évidemment favorables au fait que le demandeur
puisse... pourrait choisir, dans le fond, la Cour du Québec pour pouvoir
bénéficier, là, d'une simplification de la procédure.
Toutefois, on voudrait vraiment mettre en
lumière qu'il faut d'abord s'assurer de la compréhension de cette option pour
la personne qui est non représentée. Il ne faut pas prendre pour acquis que,
parce que ça existe, que les gens vont aller
chercher cette option-là. Il faut donc que ça soit clair dès le premier moment,
là, que cette option existe et
surtout son impact. Le réflexe du citoyen, c'est d'aller au palais de justice,
d'aller au greffe, aller sur le site Internet pour savoir comment
déposer une demande. Donc là, l'information devrait être mise immédiatement à
sa disposition. Puis également, si on veut que la simplification de la
procédure ait un réel impact, il faut vraiment penser soutenir la partie non
représentée dans sa compréhension du nouveau processus.
Donc, évidemment, les organismes communautaires,
dont les CJP, on va être mis à contribution, les outils de vulgarisation, on va
être là pour soutenir la partie non représentée. Toutefois, nous, ce qu'on
souhaite et ce qu'on vous soumet, c'est d'aller plus loin encore, puis... en
s'assurant d'inclure, donc, un avis à la demande qui indiquerait, dans un
langage clair, les délais. Il pourrait aussi y avoir un outil de calcul pour...
qui serait mis à la disposition sur le site
du ministère de la Justice. Donc, plutôt que de multiplier toutes sortes de
documents de vulgarisation en parallèle, bien, on pourrait, là, penser, à même, là, les formulaires du ministère
de la Justice, là, inclure les... dans le fond, de penser à ces citoyens
qui doivent comprendre, parce qu'ils ne comprendront pas si l'information n'est
pas... n'est pas disponible dès le moment où
ils vont rentrer dans le système. Donc, on vous demanderait de nous aider à
mieux aider les personnes non représentées. Un formulaire facile à compléter,
facile à trouver pour le justiciable. Et c'est un peu les mêmes commentaires pour le protocole
préjudiciaire, là, mais on ne pourra pas élaborer, là, parce qu'on a... le
temps file.
Juste
un petit mot également sur la CRA automatique, ce qui est une... Pour nous,
c'est superintéressant. Le mot «automatique», pour nous, c'est intéressant, là.
Plus, dans le fond... Moins il y a de démarches administratives pour le citoyen
non représenté, mieux c'est pour son expérience dans le système. Toutefois, il
y a encore beaucoup de mauvaise compréhension de qu'est-ce qu'une CRA, c'est
quoi, son impact, etc. Donc, pour assurer le succès d'une CRA, évidemment, il
faudrait considérer créer un avis qui serait uniforme, qui serait dans tous
les... En fait, je comprends que c'est la cour, là, qui va... qui va convoquer
les parties. Donc, il faudrait que l'avis qui vient... qui accompagne, dans le
fond, la convocation soit développé en pensant à cette partie non représentée,
en adaptant le langage, évidemment. Puis ça
pourrait aussi éviter les enjeux de déséquilibre, parce qu'il y a des gens qui,
eux, vont être accompagnés d'avocats et qui vont pouvoir avoir... qui vont
bénéficier de l'information avant de rentrer dans une CRA.
Donc, je céderais la
parole à Sara, qui va parler plus, là, de PRD et de médiation.
Mme Néron
(Sara) : Alors, oui. Alors, parlons du programme de prémédiation. On a
été vraiment plongés, au coeur des deux
dernières années, dans les PRD. Donc, on a mis, en fait, sur pied le programme
de prémédiation, là, qui est encore là actuellement. Donc, on a vraiment
développé une approche unique, vraiment, en collaboration avec la Direction
développement d'accès justice, les greffes, les médiateurs aux petites
créances. Donc, tout le monde a contribué,
et je dis un... un gros chapeau et un gros merci aujourd'hui à tous ces
acteurs-là. Le but : bien sûr, sensibiliser à la médiation. Donc, on a
développé des techniques pour y arriver. En chiffres, avant le programme, on
parlait de 18 % de dossiers qui allaient en médiation. Aujourd'hui,
on parle de 46 %, actuellement, dans nos chiffres à nous, OK? On est fiers de jouer un rôle important qui a un
impact sur les changements de culture auprès de la population concernant
le recours au PRD, on veut continuer à contribuer,
puis le projet de loi n° 8, bien, il nous donne vraiment les moyens de le
faire.
• (12 h 40) •
Donc,
on peut peut-être parler un peu de la priorisation des dossiers pour les
parties, là, qui ont recours au PRD. Donc, on applaudit cette mesure. Ça
va vraiment inviter les citoyens à aller vers ces approches-là. Par contre, il
faut s'assurer qu'il y ait une offre intéressante sur le terrain. Donc, on peut
parler d'une offre dans le communautaire, par exemple, donc une offre qui
continue à être subventionnée.
Donc,
maintenant, on va parler des petites créances. Donc, la médiation obligatoire,
l'arbitrage qui vient ensuite, oui,
on est en faveur de cette... de cette mesure-là. Ça va vraiment aider au
changement de culture. Ça va augmenter le nombre de médiations.
Peut-être
un petit aparté de ce qu'on a constaté au cours, là, du programme de
prémédiation. Avec étonnement, on a vu qu'il y a plusieurs acteurs, comme les
institutions financières, les grandes entreprises, qui disaient non à la
médiation. Alors, ça, ça va... De façon automatique, ils vont y aller,
donc ils vont savoir c'est quoi. Donc, ça va aussi, peut-être, inciter ces
entreprises-là à aller en avant régler le dossier avant que ça soit déposé aux
petites créances.
Petit
avertissement : c'est sûr qu'on parle de la médiation obligatoire au
niveau... il y a certains... il faut faire attention,
on est aux petites créances, mais on peut penser aux victimes de violence
conjugale, on a quand même des cas où est-ce qu'il y a des dossiers entre ex-conjoints,
des cas de harcèlement, des interdits de contact. Donc, il faut vraiment
prévoir soit une extension ou, si ce n'est pas une exemption, vraiment
d'adopter des mesures qui pourraient leur donner
confiance dans le processus. Donc, on peut rendre à l'aise les participants en
mettant des mesures. On en a parlé tantôt, là, l'utilisation des caucus,
la médiation à distance, d'offrir la possibilité d'être accompagné, donc c'est
des mesures, là, qui peuvent être mises en place.
Un autre enjeu qui
est hyperimportant, qu'il ne faut pas négliger également, c'est les attentes du
citoyen par rapport à la médiation. Donc, le citoyen, lui, quand il va en
médiation, il s'attend à pouvoir discuter de ses options possibles. Donc, il faut s'assurer que le processus,
c'est bien respecté et qu'il n'a pas l'impression qu'il y a un règlement, là,
qui est à tout prix, là, conclu, là, au détriment de ses besoins. Donc, on
parle, à ce moment-là, de formation, on en a
parlé tantôt, donc de bien former les médiateurs. Donc, ça vient vraiment avec
une valorisation de cette profession-là, du support, de l'encadrement,
de la formation permanente. Donc, c'est ce qu'on espère.
On peut parler aussi
du choix du médiateur et de l'arbitre. On a une petite préoccupation concernant
le choix du médiateur. Il faut que ça soit
rapide, efficace, considérant les enjeux actuels. On veut éviter le ping-pong
du citoyen, hein? On veut s'assurer
que ça se fasse bien, vite. Donc, on a constaté, nous, sur le terrain, au
niveau de la logistique de la prémédiation, de bien assigner avec le bon
profil de médiateur avec les besoins du dossier. Donc, ça va être quelque chose à considérer. La souplesse pourrait être de
mise, puis on serait contents de faire partie des discussions, eu égard à
notre expérience, pour aider toutes les parties prenantes dans ce projet de loi
là.
Un petit mot sur
l'offre d'arbitrage. Donc, c'est hyperintéressant. C'est une idée porteuse.
Juste un aparté : ça va être important
de bien renseigner le citoyen là-dessus. Le citoyen, quand il vient dans nos
bureaux, là... ce qu'ils nous disent constamment, là : Je vais le
dire au juge, je vais être entendu. Donc, ça va être important de bien informer
c'est quoi, l'arbitrage, c'est quoi, les conséquences, qu'est-ce qui en est.
Donc, ça, ça va être important.
Donc, je vais laisser
ma consoeur terminer.
Le
Président (M. Bachand) : En terminant,
oui, rapidement, s'il vous plaît.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Oui, rapidement. Juste un petit mot, là, sur le jugement
vu sur dossiers en bas de 3 000 $. On comprend, là, que c'est du
consentement des parties, mais, attention, il y a peut-être des gens qui vont cocher oui puis finalement ne pas
comprendre. Donc, ça, c'est vraiment à bien... Il faut réaliser ça parce que ça
peut avoir un impact, là, dans la confiance
du citoyen, là, envers la justice. On craint, là, qu'il peut y avoir un
déséquilibre, là, parce que la
majorité des dossiers qui sont complets aux petites créances, bien, c'est
des... ils sont déjà accompagnés par des avocats. Donc, voilà, il faut
faire attention.
Le Président (M. Bachand) : Merci.
Merci beaucoup. Le temps va très... On va débuter la période d'échange. M.
le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui, Me Néron,
Me Fafard-Marconi, bonjour. Merci beaucoup d'être en commission parlementaire
aujourd'hui puis de venir témoigner sur le projet de loi n° 8.
D'entrée de
jeu, je tiens à vous rassurer relativement à la médiation pour des dossiers qui
seraient incompatibles, ils ne seront pas référés automatiquement à la
médiation. Exemple, des dossiers de violence conjugale, bien entendu, on va exclure ce genre de situation là par voie
réglementaire. Dans le cadre de la loi, on a la disposition générale, mais,
par voie réglementaire, on va venir enlever certains dossiers qui ne seraient
pas compatibles avec cette obligation de médiation là.
Vous avez
dit, dans votre propos : La médiation contribue au changement de culture
dans le système de justice. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?
Mme Néron (Sara) : Bien, en fait,
nous, on l'a vu sur le terrain, là. En fait, quand on approche les gens puis
qu'on leur parle de médiation, de un, c'est un peu méconnu. Il y a des gens qui
ne le savent pas. Des fois, ils cochent oui
à la médiation puis ils ne savent même pas c'est quoi, ce processus-là. Donc,
on se rend compte qu'une fois qu'ils connaissent ça ils reviennent,
donc, parce qu'on a deux services : on a le service de la médiation
petites créances, on a le service aussi en info-séparation. Donc, les gens, ils
reviennent, ils veulent être informés sur leurs droits quand ils se séparent,
mais ils vont penser à la médiation.
Donc, c'est
ça, le changement de culture. C'est-à-dire que, quand il va y avoir un
problème, bien, on va penser : Ah! on peut régler autrement. On n'est pas
obligés de recourir aux tribunaux parce que je peux régler ça autrement.
Donc, c'est ça. C'est ça, le changement de culture, bien, en tout cas, pour
moi.
M.
Jolin-Barrette : Puis,
lorsque les justiciables, là, vont en médiation... Parce que je sais que vous
recevez des milliers de personnes. D'ailleurs, Me Fafard, j'ai eu le
plaisir d'aller vous voir puis je vais avoir une sous-question. Bien, en
fait, je souhaiterais que vous en informiez la commission, comment ça se passe
dans le quotidien. Mais, lorsque les gens
participent à la solution en médiation, est-ce que vous voyez un taux de
satisfaction plus élevé de la part des gens versus si les gens reçoivent un jugement, ils ont été à la cour, puis
après ça ils viennent vous voir? Votre expérience terrain, là, c'est
quoi par rapport à la médiation?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien,
en fait, ce que je peux dire par rapport au citoyen, là, le citoyen qui a un problème juridique, qui a un conflit, là,
lui, sa préoccupation, c'est d'être entendu. Oui, c'est son «day in court», mais
ce qu'il veut, c'est qu'on règle son problème puis qu'il est entendu. En
médiation, ça permet beaucoup plus une souplesse, donc c'est beaucoup plus
approprié pour la personne.
Mais c'est sûr qu'il faut changer la perception,
parce que les gens sont quand même convaincus que c'est le juge qui va régler
et non la médiation. Mais, après avoir fait confiance au processus, avoir passé
à travers, avoir eu le sentiment d'être entendus, bien là ils sont beaucoup
plus satisfaits, puis c'est beaucoup moins traumatisant que d'arriver en cour,
de ne rien comprendre, de voir que c'est beaucoup trop protocolaire pour lui puis
de recevoir un jugement qu'il ne comprend pas, qu'il n'est pas capable de lire,
etc. Il y a des gens qui viennent dans nos bureaux avec des jugements qui sont
en leur faveur, mais, parce qu'il y a quelque chose qui... tu sais, qu'ils ne
comprennent pas, bien là ils ne sont pas satisfaits. Tandis qu'en médiation on
a une entente qui a été... que le citoyen a participé activement, là, à la résolution.
M. Jolin-Barrette : C'est un peu un
des objectifs pourquoi on dit, dans la procédure simplifiée à la Cour du Québec,
d'aller davantage vers un mode alternatif de règlement, et, par la suite, ils
seront fixés par préférence pour le dossier, mais, dans un premier temps, ils
auront eu la médiation.
J'aimerais ça qu'on revienne sur la conférence
de règlement à l'amiable. Tout à l'heure, vous avez dit, bon : C'est
important de bien aviser, j'ai pris note, là, sur le site du ministère de la
Justice, mais pensez-vous que le fait d'imposer une conférence de règlement à
l'amiable, ça va permettre de régler davantage de dossiers avant le procès?
Comme... C'est quoi, la plus-value d'une conférence de règlement à l'amiable?
Mme Néron (Sara) : Bien, je pense
que ça va permettre au citoyen d'être entendu, hein, devant le juge, mais dans un cadre où est-ce qu'on peut régler. Donc,
il va participer, en plus, à la solution. Ça fait que la CRA automatique,
c'est vraiment hyperintéressant. Peut-être
juste au niveau des non-représentés, donc, peut-être important de penser à ce
qu'ils soient accompagnés pour que le processus, là, se fasse davantage, là.
Les CJP, c'est une option.
M.
Jolin-Barrette : Là, actuellement, dans les Centres de justice de
proximité, vous donnez de l'information juridique. On a adopté une loi ici l'an
passé qui va permettre aux OBNL de donner des conseils, des avis juridiques.
Pouvez-vous nous décrire sommairement, là,
votre réalité, comment ça se passe puis comment sont organisés vos services
pour les justiciables?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Mon
Dieu! Quelle grande question! On pourrait en parler pendant...
M. Jolin-Barrette : Rapidement,
parce qu'on a plein d'autres questions.
Mme
Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien oui. En fait, on est des cliniques
d'information juridique sans rendez-vous. Les gens peuvent se présenter dans
nos locaux. Il y a des points de service, là, partout au Québec. Et sinon, au
téléphone, donc les gens peuvent nous appeler, puis on peut les... on peut leur
faire un retour d'appel.
Et
on est des généralistes. Donc, à l'heure actuelle, l'information juridique est
pas mal dans tous les domaines. C'est sûr qu'il y a certaines exceptions
parce qu'on reste des généralistes, mais, par exemple, quelqu'un qui a un
problème de trouble de voisinage ou avec son propriétaire, etc., il peut venir,
puis l'avocat ou le notaire va prendre le temps de l'écouter, de répondre à ses
questions, de regarder c'est quoi, ses besoins. Nous, on a le temps, en fait,
c'est vraiment ça, la plus-value, on a le
temps de l'écouter puis d'amoindrir, là, son... en fait, de participer à une
expérience plus agréable, là, pour le justiciable. Donc, je ne sais pas
si ça répond, là, à votre question.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Puis vous avez du sans rendez-vous?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Oui, on a du sans rendez-vous, M. le ministre, oui.
M.
Jolin-Barrette : Je voulais vous poser peut-être une dernière question
avant de céder la parole à mes collègues.
Sur le citoyen, là, que vous voyez, là, la longueur des délais judiciaires, là,
quel est l'impact sur eux par rapport à la confiance mais aussi par
rapport à comment ils se sentent par rapport au système de justice ou par
rapport aux problèmes qui les taraudent, là? C'est quoi que vous voyez,
pratico-pratique, quand les gens, ils viennent, par rapport à la question des
délais?
Mme Néron
(Sara) : Bien, le stress. Les citoyens sont stressés face à cette
situation-là. Puis là ils voient encore que leur problème ne sera pas réglé
rapidement. Donc, ça crée du stress, ça crée des angoisses, et on doit, à ce moment-là, les rassurer puis dire que ça s'en
vient et qu'il y a peut-être les PRD, donc qu'il faut penser à ça puis s'en
aller, peut-être, en médiation parce
que ça va être plus rapide. Donc, c'est déjà quelque chose qu'on fait. On
essaie de trouver des moyens pour tenter de régler la situation.
Je vais prendre un
exemple concret. L'autre fois, on avait une madame qui s'est présentée, elle
avait un problème avec son déneigeur. Le
problème, il va se répéter l'année prochaine. Il se répète actuellement, là. Ce
n'est pas réglé, cette situation-là.
Il faut que ça soit réglé, il faut que ça soit déneigé. Tu sais, c'est un
exemple aussi concret que ça, là. Donc, ça a des incidences directes sur
leur vie. C'est ça.
• (12 h 50) •
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : C'est un sentiment de découragement qui se rajoute à tout
le reste dans leur vie.
M.
Jolin-Barrette : Excellent. Je vous remercie.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît.
Mme Bourassa : Oui. Merci beaucoup pour votre présence. Je vous
cite. Vous dites : Moins il y a de démarches et mieux c'est, dans
le fond, pour les usagers. Donc, j'aimerais ça, que vous nous expliquiez
comment les procédures simplifiées qui ont
été proposées dans le projet de loi seront bénéfiques pour les citoyens, puis
j'insiste sur ceux qui se représentent seuls, notamment.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien,
ça diminue le nombre de présences en cour, ça diminue le protocolaire. C'est sûr que ça va être plus
efficient. C'est... Je veux dire, tout ça ensemble, là, c'est sûr que c'est
positif, là, sur le citoyen, mais il ne faut pas oublier, par contre,
qu'il faut bien accompagner. Parce que, même si on diminue le nombre de
procédures, il reste que ça reste compliqué, là, à comprendre. Il y a quand
même un Code de procédure civile. Mais je ne sais pas si...
Mme Néron
(Sara) : Non. Je pense que tu as bien répondu. Effectivement, oui.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. D'autres
questions? M. le député de Saint-Jean?
Une voix : ...
Le
Président (M. Bachand) : Excusez. M. le
député de... Excusez...
Une voix : ...
Le Président (M. Bachand) : Exactement. Alors, vas-y, Mario. Excuse-moi. C'est plus facile comme ça.
Désolé. On est en début de mandat.
M. Asselin : Merci,
M. le Président. Me Néron, Me Fafard-Marconi, merci pour votre
présentation.
Vous
vous êtes présentées comme étant les spécialistes, je mets ça entre guillemets,
de la justice participative. Est-ce que le projet de loi n° 8,
vous considérez que c'est une avancée? Puis en quoi est-ce que ça pourrait être
une avancée pour la justice participative?
Mme Néron (Sara) : Bien,
moi, je vois une avancée, clairement, parce qu'on voit les PRD qui s'intègrent
partout dans le processus judiciaire. Donc, pour moi, c'est...
M. Asselin : Les
PRD?
Mme Néron
(Sara) : Oui, les PRD, les préventions de... règlements des
différends...
M. Asselin : Excusez-moi,
je ne viens pas du domaine, donc...
Mme Néron
(Sara) : Donc, les PRD, en fait, c'est toute façon pour essayer de
régler le dossier autrement. On va le
résumer comme ça. Donc, on parle de la médiation, on peut parler de la
négociation assistée, des rencontres entre les avocats, les non-représentés pour tenter de trouver une solution,
donc de régler ça autrement que d'attendre et de se faire entendre
devant le juge, là. Donc, la CRA fait partie d'un règlement de différends, là.
M. Asselin : Les
CJP, c'est nouveau ou c'est un organisme qui existe depuis longtemps?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Ça fait 10 ans, en fait, là, à peu près, un peu plus
que 10 ans, que le projet-pilote, à
l'époque, a été mis en place. Il y avait trois centres de justice à l'époque,
et maintenant on est rendus 11. Dans
les dernières années, il y en a plusieurs, là, dont ma collègue, là, qui est la
toute dernière, là, qui est arrivée dans le paysage, donc ça fait
environ 10 ans. Donc, on est jeunes quand même, mais on est bien ancrés,
là, dans la... dans la communauté.
M. Asselin : Parfait.
Merci beaucoup.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
députée d'Anjou—Louis-Riel?
M. Lemieux : ...désolé, je ne suis pas assez près pour être
capable de parler sans vous déranger. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Bachand) : OK. Juste à m'envoyer la main comme ça, là, puis c'est bien, comme une
parade.
M. Lemieux : Oui.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de
Saint-Jean.
M. Lemieux : Bonjour,
madame. D'abord, ça m'a frappé quand vous avez dit : Je veux le dire au
juge. C'est important, ça. Et ça me fait
penser que, dans le fond, le processus, dans la tête de ceux qui ne se seront
jamais rendus là, est tellement mystérieux que tout ce qui compte pour
eux autres, c'est d'être entendus, même pas de gagner, à la limite, là. Mais jusqu'à quel point est-ce qu'on
ne devrait pas apprendre de ça pour l'ensemble du processus? Parce que, vous,
vos... les gens qui viennent vous voir, c'est parce que, souvent, en tout cas,
ils ne doivent pas avoir les moyens d'aller voir un avocat, là.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Exactement.
M. Lemieux : Mais ceux qui peuvent aller voir un avocat, ils
auraient peut-être intérêt à subir... pas subir, mais suivre le même
processus que vous.
Mme Néron
(Sara) : Oui, effectivement. En fait, je pourrais ramener ça... Tu
sais, le fait d'être entendu, je pense que
le processus de médiation, le processus d'arbitrage automatique, est quand même
intéressant parce qu'il va... le citoyen va être quand même entendu,
donc, par des juristes qui sont compétents — hein, on s'entend qu'ils vont
être formés — mais ça va être de bien les accueillir, de bien
pouvoir les entendre. Donc, ça, je pense que c'est hyperimportant.
Mais je suis
d'accord, là, effectivement, actuellement, les centres de justice, on
représente les citoyens. On ne représente pas d'entreprises, on représente les
gens qui ont moins les moyens, effectivement, on ne va pas se le dire. Par contre, c'est quand même des services, là, qui
sont ouverts, là, pas juste aux bien moins nantis, donc on a quand même des gens de la classe moyenne, là, qui viennent
nous voir. Donc, c'est une possibilité aussi. Donc, je ne sais pas si ça répond
à votre question.
M. Lemieux : Oui,
oui, mais j'explorais parce que c'est le principe derrière tout ça ou, en tout
cas, le processus derrière tout ça qui vient satisfaire ce besoin des gens de
vouloir le dire au juge, qui est, dans le fond, un peu utopique, à la limite.
Ce n'est pas ça, leur vrai besoin, mais c'est ce qu'ils ressentent. C'est ça?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Puis c'est pour ça que les organismes comme le nôtre
prend tout son sens, parce que nous, on est là pour aider la personne à
faire... tu sais, à prioriser ses besoins. Souvent, il voit juste le problème
juridique puis il pense que c'est ça, la réponse, alors que... Mais ils ont
besoin de quelqu'un pour les aider à faire le ménage là-dedans puis les
inciter. Puis la médiation automatique est obligatoire... en tout cas,
obligatoire, là elle va aider les entreprises ou ceux qui sont plus
réfractaires à rentrer dans le... dans le système de médiation.
M. Lemieux : Les petites créances,
même si on a l'impression que c'est pour M. et Mme Tout-le-Monde, ça reste...
puis vous avez dit tantôt : On va au greffe, puis bon, mais ça reste un
processus, si on n'est pas accompagnés, si on fait tout ça seul en parlant au
beau-frère qui est déjà allé il y a 10 ans, là, c'est souvent comme ça que
ça se passe, ça reste... pas un traquenard, mais ça reste difficile et pas
nécessairement un gage de succès si on ne sait pas ce qu'on fait, là.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Tout
à fait.
Mme Néron
(Sara) : Ah non! Ça prend de la préparation. Puis ça, c'est
quelque chose qu'on remarque, hein?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien
oui. Puis nous, on voudrait même soumettre que les organismes comme le nôtre
devraient être encore plus en amont, ou, pour réellement réduire les délais,
bien, il faudrait donner un avis juridique en amont avant, avant même qu'ils
déposent. C'est là que les gens en ont besoin, effectivement.
M. Lemieux : Et l'idée de devoir
discuter avec quelqu'un d'autre qu'un juge avant et donc d'aller en médiation
ou en arbitrage, je le comprends quand vous le dites, mais j'aimerais
l'entendre encore, jusqu'à quel point c'est magique, parce qu'il y a de la
magie là-dedans, là, si j'ai bien compris, là.
Mme Néron (Sara) : ...il y a de la
magie. Je vais essayer de faire un parallèle terrain que j'ai constaté, que je
trouve intéressant. Les gens, quand qu'ils venaient nous rencontrer pour parler
de médiation, pour les préparer, souvent,
ils étaient même déçus qu'on ne soit pas le médiateur nommé parce qu'ils
avaient... Il y a un lien de confiance qui
se créait. Puis là, à ce moment-là, tu sais, ils disaient : Bon, bien, ce
n'est pas si pire que ça, là, puis on a conté notre histoire, vous le savez. Puis ils avaient
l'impression, justement, d'avoir été écoutés, entendus puis d'avoir des
solutions. Ça fait que, c'est... oui, c'est intéressant.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : C'est
souvent ça, le commentaire qu'on entend, c'est qu'on n'est pas entendus. Puis
on est souvent la seule... le visage humain, là, du système, là.
M. Lemieux : Et je regarde du côté
de la banquette, au cas où quelqu'un d'autre voulait poser une question, il reste à peine deux minutes. Sur le reste du PL n° 8, je suis curieux de voir... Parce qu'on comprend votre intérêt pour le
bout du PL n° 8 qui vous intéresse, là, mais, puisque vous nagez
là-dedans, vous en pensez quoi, du reste du PL n° 8?
Mme Néron (Sara) : On parle des
notaires qui peuvent devenir juges. Bien, en fait, on est un organisme qui... on a des notaires, là, on a quatre notaires
actuellement, là, qui oeuvreront puis on espère en recruter davantage, là, pour
les prochaines années. Donc, nous, on croit dans le processus, hein? Le
processus de la nomination des juges, il y a
quand même un comité, hein, qui regarde ça. Il y a des gens qui sont nommés
pour nommer des juges, donc il faut faire
confiance en ces gens-là, en ce processus-là. On croit que s'il y a des
candidats notaires qui sont intéressants, qui peuvent passer une
entrevue, pourquoi pas?
Je pense que les notaires, effectivement, en
tout cas, nos notaires, par exemple, qui oeuvrent au sein du centre de justice, ce sont des notaires qui
donnent... qui font la même job que les avocats. Donc, ils donnent... ils
donnent de l'information. Donc, c'est quelque chose... À ce moment-là,
je vous le dis, on fait confiance au processus. S'il y a un notaire intéressant
qui... qui se présente puis que le comité juge qu'il devrait être nommé juge,
pourquoi pas?
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Il reste une
minute pour la question et la réponse. Mme la députée de Vimont, s'il
vous plaît.
Mme
Schmaltz : Oui, merci. Bonjour. Excusez mon ignorance, là, dès
le début, mais, petite question pratico-pratique,
lorsque vous accueillez un citoyen, est-ce qu'il y a un nombre maximal de
visites ou d'appels téléphoniques, ou vous pouvez l'accompagner sur une
très longue période? Et jusqu'où va aller l'accompagnement?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien,
à l'heure actuelle, notre mission, elle est... nos services, c'est de
l'information juridique, donc tout ce qui est chance de succès ou préparation
vraiment à l'interrogatoire, ça, on ne peut
pas faire ça, ça rentre dans le domaine de l'avis juridique. Toutefois, avec la
loi n° 26, bien là on va pouvoir explorer, élargir,
là, nos services.
À l'heure actuelle, on n'a pas de limites comme
telles. C'est sûr que quand la personne revient... tu sais, on peut mettre nos
propres limites, là, comme services, là, on s'entend, là, quand il y a des
personnes qui sont plus quérulentes, etc.,
mais il n'y a pas... ce n'est pas... il n'y a pas de limite. Ce n'est pas un
«one-shot deal». Donc, la personne, par exemple, qui est non représentée,
souvent, bien, on va l'inviter à revenir au moment clé. Donc là, on va l'aider
à voir sa ligne du temps, ils vont pouvoir revenir à des
moments clés comme ça. Donc, ce n'est pas un «une fois», il ressort, pas du
tout.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.
• (13 heures) •
M. Morin : Merci. Merci, M. le
Président. Bonjour, Me Néron, Me Fafard-Marconi. Bien heureux de vous
entendre. Merci d'être là et de partager votre expérience avec nous.
On a parlé
beaucoup de médiation, médiation obligatoire, etc. Est-ce que ça se peut, de la
médiation obligatoire, ou s'il ne faut pas le consentement, finalement,
des parties pour avoir un résultat qui va être optimal? Si je vous écoutais,
puis que vous dites qu'il y a des fois des citoyens qui disent : Bien,
moi, je voudrais aller m'expliquer, là, devant le juge, puis il ou elle va me
régler ça une fois pour toutes, alors comment vous voyez ça? Puis, s'il y a des
gens qui sont réfractaires ou qui ne veulent pas y aller, comment vous allez
être capables de les amener, finalement, à faire une séance de médiation qui va
être profitable?
Mme Néron (Sara) : Tout à fait. Oui,
c'est des très belles questions. Étant moi-même médiatrice, c'est sûr que c'était
une préoccupation au projet de loi. Par contre, l'expérience terrain qu'on vit,
ce qu'on voit, c'est que les gens, quand ils cognaient... en fait, quand on les
invitait en prémédiation, ils étaient déçus de voir que ce n'était pas la
médiation, alors qu'ils avaient coché qu'ils n'étaient pas intéressés à la
médiation. Ça fait que, ça, je trouve ça hyperintéressant, que finalement ils
étaient prêts, ils auraient été prêts. Donc là, on le préparait, puis, après
ça, il s'en allait en médiation. Donc, moi, ça me fait penser... ça me fait
dire que ce n'est pas fou d'y aller avec la médiation obligatoire. Au
contraire, je pense que ça va permettre au citoyen de rentrer directement dans
le processus. Et là je fais confiance aux professionnels. Donc, les professionnels,
les médiateurs vont être capables de mettre en confiance les gens, de les
préparer et d'arriver à faire la médiation, là.
Donc, moi, c'est comme ça... Je pense que la
formation... Tu sais, je parlais d'accompagnement tantôt, de... l'encadrement des
médiateurs va être important... puis on en a déjà des très bonnes qui sont
offertes. Je pense qu'il faut explorer
davantage, là, peut-être, cette avenue-là, puis je pense que les médiateurs
vont être capables de trouver, là, leur solution, là, face à une
situation comme ça, où est-ce qu'on va avoir des gens un peu plus réfractaires.
Déjà, je vous dirais qu'avec le programme de prémédiation les médiateurs l'ont
vue, la différence. Avant, les médiations qui étaient assignées, c'étaient des
gens qui étaient prêts à aller en médiation, ils disaient oui à la médiation.
Par notre programme, on a envoyé des gens qui n'étaient pas d'accord à aller en
médiation, donc, déjà, c'était plus difficile, les médiations qu'on leur
envoyait. Donc, il y a cet aspect-là que je pense qu'il ne faut pas perdre de
vue.
M.
Morin : Non, puis, effectivement... puis il y a une
différence entre, bien sûr, une séance d'information sur ce que va être le
processus, et la médiation, et la séance de médiation comme telle. Alors,
comment est-ce que vous êtes formés?
Quand il y a des gens qui ne veulent carrément pas aller en médiation, est-ce
que vous allez devoir adapter votre formation à cette nouvelle réalité?
Mme Néron (Sara) : Oui.
M. Morin : Et, compte tenu des
objectifs du projet de loi, forcément, il va y avoir beaucoup plus de gens qui vont se présenter, à tout le moins, à une séance
d'information ou, après, en médiation. Est-ce que vous êtes équipés pour
ça? Est-ce que vous avez suffisamment de ressources pour faire face à cette
demande qui, forcément, va vous arriver éventuellement?
Mme
Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien, ça faisait partie de nos préoccupations, là,
qui... Pour nous, en fait, là, si on se fait le porte-parole, là, du
citoyen, il faut absolument qu'il y ait une offre qui est accessible, là, dans
le communautaire, pour les personnes qui ne sont pas en moyen de... Donc, il
faut développer... il faut absolument le développer. Je pense qu'il y a
beaucoup de professionnels qui sont intéressés, des organismes comme les CJP,
mais il faut absolument le développer. Il va
falloir y penser, là, effectivement, parce qu'à l'heure actuelle les médiateurs
sont... Il y a beaucoup de
médiateurs, mais ils sont... Il manque, là, peut-être, un peu d'encadrement,
d'organisation, là, pour vraiment valoriser cette profession-là qui
est... la profession de devenir médiateur aux petites créances ou médiateur tout court soit valorisée. Donc, ça, il y a un
travail à faire. C'est notre préoccupation, là, pour le porte-parole du
citoyen.
M.
Morin : Bien, écoutez, je suis heureux d'entendre votre
préoccupation. Je la partage, parce qu'évidemment, bon, le gouvernement veut
qu'on adopte ça rapidement, là. Donc, à un moment donné, ça va se déplacer chez
vous aussi très rapidement et, évidemment, quand on parlait de la confiance du
citoyen envers le système de justice, si vous
n'êtes pas équipés ou si vous avez des problèmes de financement, en fait, on va
juste déplacer le problème. Ça fait que j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Avez-vous des problèmes de financement, est-ce que vos... à ce niveau-là ou
tout va bien, puis vous avez trop d'argent?
Mme Néron (Sara) : On veut toujours
avoir plus de financement pour pouvoir davantage développer nos services puis bien servir les citoyens. Sans aucun
doute, pour répondre à toute la demande, on aimerait ça... Le monde des
licornes, c'est de pouvoir aider tous les gens du Québec, là, les citoyens qui
se représentent seuls, mais ce n'est pas la... ce n'est pas réaliste,
là. Donc, je vous dirais, pour répondre à cette question-là, oui, il va falloir
peut-être développer et avoir, tu sais... mais on est
déjà bien équipés. On va dire ça comme ça. On a déjà du financement qui provient... puis ce qui est intéressant dans le
projet de loi, c'est déjà prévu, hein? Donc, c'est-à-dire qu'on y va par
région, par district. Donc, ça, c'est vraiment... Je salue, là, cette
initiative-là parce qu'on va y aller tranquillement, mais sûrement.
Donc, c'est comme ça que je le vois.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie. M. le Président, il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Bachand) :
4 min 40 s.
M. Morin : Quatre minutes? Parfait.
Merci beaucoup. J'aimerais... J'ai une question pour vous, mais qui fait référence plus directement aux dispositions du
projet de loi. Évidemment, on veut une procédure qui est simplifiée, et, quand
on regarde les modifications, notamment à l'article 3 et même 7, plutôt 7,
l'article 7 du projet de loi, qui va modifier les articles 535.1 et
suivants du Code de procédure civile, on dit que, bon, évidemment, le demandeur
va déposer son avis. Après ça, il peut
encore, dans les 30 jours, à 535.4, de la signification de l'avis, donc
après, continuer de compléter sa
demande, communiquer au défendeur des pièces. Puis, après, à 535.6, on
dit : «Le défendeur doit, dans les 85 jours de la
signification de l'avis d'assignation, déposer au greffe un exposé sommaire des
éléments...»
Donc, théoriquement, si ma compréhension est
bonne, un demandeur pourrait laisser courir 30 jours et déposer d'autres documents. Évidemment, le
demandeur, lui, il sait très bien ce qu'il fait avec sa demande, sa poursuite.
Le défendeur, lui, il attend. Donc, à moins que je fasse erreur, au fond, ce ne
serait pas 85 jours que le défendeur pourrait
avoir, mais 85 moins 30, donc 55. Est-ce que vous pensez que c'est
suffisant, avec les cas que vous voyez, pour qu'un défendeur puisse
produire un document qui a du bon sens pour se défendre adéquatement?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien,
c'est sûr que, quand c'est plus long, des fois, ça prend... c'est à l'avantage de la personne non représentée parce
qu'il peut prendre plus son temps pour comprendre, puis, souvent, bien,
il arrive à la dernière minute dans nos bureaux. Il est comme minuit moins une,
souvent, quand il vient au bureau. Toutefois, je pense que c'est une bonne idée
pour l'efficience du système, pour les avocats qui ont tendance à faire... à
multiplier les procédures pour, bon... Donc, moi, je pense qu'il y a les deux,
là. Il faudrait juste, en fait, qu'il y ait de l'accompagnement pour ces
personnes-là dès la première minute, dès le premier instant, parce que, quand
ils sont laissés tout seuls, ils arrivent toujours à la dernière minute, ça
les... donc, puis que ça soit plus long ou plus court, je veux dire, à l'heure
actuelle, ça ne change pas grand-chose. Quand c'est plus long, bien, ça les
aide, eux, à apprendre à faire leurs devoirs, mais, si c'est plus court, c'est
bon pour l'efficience du système, pour donner un message clair aux avocats
d'être plus rapides, et, pour les personnes non représentées, bien, il faut
juste avoir les services qui viennent avec ces... pour ces parties-là.
19 253
M. Morin :
Parfait. Je vous remercie. J'aimerais ça aussi vous entendre en lien avec
l'article 14 du projet de loi, qui va
modifier l'article 561.1, qui dit : «À tout moment d'une instance
portant sur le recouvrement d'une créance d'au plus 3 000 $,
le tribunal peut, du consentement des parties, rendre jugement sur le vu du
dossier.» On parle du consentement des parties, puis imaginons... J'imagine,
des fois, ça doit être des litiges avec des consommateurs qui se sont fait...
qui se sont fait flouer, tu sais, on parle beaucoup d'obsolescence avec
plusieurs appareils, etc. Est-ce qu'on veut vraiment, d'après vous, le
consentement des parties ou si ça devrait être de l'avis d'une seule des
parties? Tu sais, on pense, par exemple, au consommateur qui, lui, se sent
floué, la compagnie ne veut pas régler, etc. On le laisse comme ça ou on
devrait le modifier puis enlever le consentement des deux parties, d'après
vous?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Bien,
je n'ai pas réfléchi à cette option-là. Nous...
Mme Néron (Sara) : Bien, moi...
bien, en tout cas, «du consentement des parties», je pense qu'on doit le
laisser comme ça parce que, pour la préparation... parce que vous faites
référence à des entreprises, mais, des fois, c'est quand même des... on peut
penser à des petites entreprises. Donc, ça veut dire que leurs dossiers ne
seront pas nécessairement préparés pour que ça soit ordonné à la vue du
dossier. Donc, tu sais, on le voit, là, nous, avec la prémédiation, aux petites
créances, on voyait des dossiers, là, vraiment incomplets, puis on le savait,
là, quand ils avaient été voir un avocat, puis on le savait, ceux qui n'en
avaient pas. Donc, c'est important, là, ça fait que c'est pour ça qu'à la vue
du dossier il y a un danger, donc, c'est de donner un jugement qui ne serait
pas... qui serait fait sur quelque chose qui n'est pas complété. Donc, ça
prend, à mon avis, le consentement des parties.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : ...s'assurer du consentement éclairé parce qu'à l'heure
actuelle je ne pense pas que les
citoyens comprendraient l'impact de cette mesure-là, puis, après ça, bien, ils
sont pris avec un jugement qui n'est pas en appel. Donc, c'est sûr que
c'est une préoccupation, oui.
19 253
M. Morin :
Parfait. Merci, M. le Président.
17 859
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup. Mme la députée de Sherbrooke, merci.
17 889
Mme Labrie : Merci,
M. le Président. On a peu de temps ensemble. Je vais avoir deux questions. Je
vais les poser tout de suite, puis, après ça, vous pourrez peut-être
prendre le temps pour répondre.
La première, c'est... On a discuté,
tout à l'heure, d'exclure certaines choses qui sont incompatibles à la
médiation. On a nommé la violence conjugale. Vous avez nommé le harcèlement
également. J'aimerais savoir si vous avez d'autres situations que vous pensez
qu'on devrait exclure de... parce que c'est incompatible avec la médiation.
Ensuite, l'autre
question que je veux vous poser, c'est que, là, on a une opportunité, avec ce
projet de loi là, de discuter d'accès à la
justice. Bon, on a discuté des choses qui sont dans le projet de loi.
J'aimerais savoir si vous avez des idées de choses qui n'y sont pas et
qu'on devrait faire pour faciliter l'accès à la justice. Est-ce que les centres
de justice de proximité ont tous les
pouvoirs nécessaires? Est-ce qu'il y a des choses que vous pensez pouvoir
faire, mais que, légalement, vous
n'en avez pas la capacité en ce moment, par exemple, puis qu'on devrait penser
à intégrer dans le projet de loi?
• (13 h 10) •
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Encore
une fois, c'est une grande question qui pourrait prendre des heures...
En fait, toute initiative pour remettre le citoyen aussi dans le... au coeur du
système, là, est bonne, de simplifier par des formulaires, de penser la
multidisciplinarité. Ça, c'est vraiment quelque chose qu'on veut développer,
qu'on commence à développer, mais je pense qu'il faut davantage le développer.
Là, on pourrait y aller pendant des heures et des heures.
17 889
Mme Labrie : ...législatif.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : D'un point de vue législatif...
17 889
Mme Labrie : Est-ce qu'il y a des
choses... des droits que vous aimeriez avoir pour pouvoir agir sur plus de
situations, par exemple, dans vos centres?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Bien, vous voulez dire par rapport à nos services. En
fait, la loi... bien, la loi n° 26 va, en fait,
répondre assez à ces préoccupations-là de pouvoir agir comme professionnels,
comme donner des services juridiques d'avocats, de notaires, dans le cadre de
nos services juridiques, mais ça, ça va devoir venir avec une enveloppe budgétaire, avec du financement, parce qu'à l'heure
actuelle, encore une fois, on n'a pas les moyens de nos ambitions. On
est... Comme par exemple, à Montréal, on est six avocats pour un territoire de
2, 3 millions de personnes. Donc, c'est
sûr qu'on ne pourra pas, du jour au lendemain, donner des avis juridiques dans
tout. Là, je m'adresse à M. le ministre, qui est bien au courant de nos
enjeux à cet aspect-là. Donc, oui, la loi n° 26 vient
répondre à ces préoccupations-là, où on va pouvoir avoir un impact plus grand
dans les dossiers, mais il faut que ça vienne avec un financement.
Mme Labrie : Donc,
l'enjeu, actuellement, pour vous, ce n'est pas le temps législatif d'élargir ce
que vous pouvez faire, mais bien d'avoir les moyens de le faire, bien entendu?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Oui.
Mme Labrie : Il
y a un budget qui s'en vient, j'imagine.
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Oui, on l'attend.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols :
Oui, bonjour. Merci, maîtres, de votre présence aujourd'hui. Quelques
petites questions. Je ne suis pas familière avec les centres de justice de
proximité. Au niveau du fonctionnement, là, je sais... je connais un peu la
bibitte, là, mais je ne comprends pas nécessairement tout à fait le
fonctionnement. Vous accompagnez les citoyens, mais vous les accompagnez quand
ils sont en demande et quand ils sont en défense aussi?
Mme Fafard-Marconi
(Jennifer) : Nous, on est neutre. Donc, tous les gens peuvent venir à
nos bureaux, même les... On parle souvent
des victimes, de service des victimes, mais on donne aussi des services aux
agresseurs. Donc, on est vraiment,
là... Tous les gens peuvent venir au centre de justice tant s'ils ont une
question en prévention que pendant, qu'après le processus. On est à tous
les moments.
Mme Nichols :
Parfait. Vous avez beaucoup parlé
que vous les orientez ou vous les amenez vers la médiation. Quand vous
dites que vous les orientez, là, vers la médiation, comment vous fonctionnez?
Puis dans quel délai ça se fait quand vous les orientez?
Mme Néron
(Sara) : Bien, ça dépend des services, là, parce que, dans le fond,
les gens qui viennent cogner directement à notre porte puis qui ont besoin de
notre service, on va prendre l'exemple... là, les gens qui se séparent, par
exemple, bien, à ce moment-là, ils viennent... on les rencontre. Donc là, on va
faire l'inventaire de l'information juridique à donner au niveau de la
séparation et on va tout de suite parler de l'option de la médiation. Donc, on
va évaluer ça. On évalue aussi... Dans ces
cas-là, on a... Nos juristes ont été formés au niveau de la... Il y a
un protocole de violence conjugale.
Donc, on est capables de détecter, et là c'est là qu'on fait affaire avec
Rebâtir ou encore SOS Violence conjugale.
Mme
Nichols : Qui va l'offrir, le service de médiation? Est-ce
que c'est vous qui offrez le service de médiation?
Mme Néron (Sara) : Pour le moment,
on n'offre pas... pas en ce moment, mais c'est quelque chose... On pourrait
être reconnus, par exemple, par le règlement puis pouvoir offrir ce genre de
service là pour compléter, si jamais il y a un manque.
Mme Nichols : Quand vous les dirigez
vers le service de médiation, ça prend combien de temps avant d'avoir accès au
service de médiation?
Mme Néron (Sara) : Ça dépend des
services. Là, si on parle des services de médiation familiale, les gens
appellent, puis ça peut prendre plusieurs appels, dépendamment des régions,
dépendamment des disponibilités des médiateurs. Si on parle des petites
créances, bien là on assigne, là... c'est toute une procédure qui est comprise
dans les règlements présentement, on assigne, et c'est du cas par cas. Des
fois, on a rapidement le retour des médiateurs. Des fois, ça peut prendre
plusieurs jours avant de trouver un médiateur.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : ...notre
préoccupation, c'est par rapport à la logistique à... En ce moment, il y a des
problèmes pour assigner les bons profils aux bons médiateurs. Donc, ça, il faut
tout le réfléchir, parce que ça peut alourdir le... et donner un sentiment de
ping-pong, là, pour le citoyen.
Mme Néron
(Sara) : Oui, puis c'est important que tous les acteurs
soient à la table pour trouver les meilleures solutions possibles.
Mme Nichols : Est-ce qu'on doit
comprendre qu'il n'y a pas nécessairement assez de médiateurs?
Mme Néron
(Sara) : Bien, pas... Aux petites créances, présentement,
je dirais que ce n'est pas nécessairement ça, le problème, comme je vous
disais, c'est de trouver le bon médiateur avec le dossier. Ils sont là, les
médiateurs. Je pense qu'aussi, avec ce projet de loi, c'est intéressant... les
formations qui vont sembler aussi intéressantes, et valoriser, je pense, cette
profession-là, c'est important.
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : Par
exemple, pour un choix de langue, un choix de territoire, virtuel, pas virtuel, c'est tous des petits éléments, là, qu'on
a de besoin, parce que, sinon, on multiplie... parce qu'on appelle un médiateur
qui, lui, n'a pas nécessairement ce profil-là. Donc, c'est ça qu'on veut dire
par...
Mme Nichols : Puis, quand vous
référez au médiateur, c'est parce que vous avez les banques de médiateurs par
région puis par champ de compétence?
Mme Fafard-Marconi (Jennifer) : C'est
une liste qui est gérée par le ministère.
Mme Néron (Sara) : C'est une liste,
dans le fond, qui est au greffe. Oui, c'est ça, les greffes aussi ont accès à
cette liste-là. Ils ont toujours fonctionné avec cette liste-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Me Néron,
Me Fafard-Marconi, merci beaucoup d'avoir été avec nous aujourd'hui. C'est
très, très, très apprécié.
Sur ce, la commission suspend ses travaux
jusqu'à 15 heures. Merci. À tantôt.
(Suspension de la séance à 13 h 15)
(Reprise à 15 h 02)
Le
Président (M. Bachand) :
Bon après-midi à tout le
monde. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions
publiques sur le projet de loi n° 8, Loi visant à améliorer l'efficacité
et l'accessibilité de la justice, notamment en favorisant la médiation et
l'arbitrage tout en simplifiant la procédure civile de la Cour du Québec.
Cet
après-midi, nous entendrons les organismes suivants : Éducaloi, et je
m'étais trompé, j'avais dit Éduc'alcool, mais ça n'a rien à voir avec la Commission des institutions, rien à voir, Me Michel Beauchamp, Option
Consommateurs. Mais d'abord nous accueillons les représentants de l'Association
des jeunes notaires du Québec.
Alors, merci d'être avec nous cet après-midi.
Comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation au total. Alors, je vous invite à prendre la parole,
d'abord en vous identifiant, et à débuter votre exposé. Puis, encore une
fois, merci d'être avec nous cet après-midi.
Association des jeunes
notaires du Québec (AJNQ)
Mme
Labrecque (Jessie) : Tout d'abord, un gros merci de l'invitation. Ça
nous fait très plaisir d'être présents. Donc, mon nom à moi, c'est Jessie
Labrecque. Je suis notaire, présidente de l'Association des jeunes notaires du Québec. J'ai
avec moi deux membres de mon conseil d'administration, donc, on a
Me Marie Pier Thivierge et Me George Dolhan, là, qui vont
m'accompagner.
Donc, tout d'abord, au niveau de l'Association
des jeunes notaires du Québec, nous existons depuis 2017. En fait, il faut
savoir que les jeunes notaires représentent environ 50 %, si ce n'est pas
plus, de la communauté notariale au Québec. Donc, nous sommes très présents.
La mission de l'association, c'est vraiment,
justement, de protéger l'intérêt des jeunes notaires. Donc, nous, les notaires
qui sont membres de l'association doivent avoir 15 ans et moins de
pratique, et on est vraiment, là, diversifiés dans nos champs d'expertise. On a
des notaires qui sont en pratique qu'on appelle traditionnelle, donc qui
travaillent dans des études de notaire, et il y en a beaucoup également qui
sont en pratique non traditionnelle, donc qu'on va retrouver au niveau du
gouvernement, des institutions financières et en entreprise.
Donc, on est
vraiment un petit peu partout. On est très impliqués aussi dans différents
comités, dans différents projets avec la Chambre des notaires du Québec.
Donc, pour la
suite, je vais céder la parole à ma collègue Marie Pier Thivierge, qui va
vous parler, dans le fond, de notre point de vue par rapport au projet
de loi n° 8.
Mme
Thivierge (Marie Pier) : Merci, Me Labrecque. Bonjour, chers membres
de la Commission des institutions. L'AJNQ accueille favorablement le projet
de loi n° 8, intitulé Loi visant à améliorer l'efficacité et
l'accessibilité de la justice, notamment en favorisant la médiation et
l'arbitrage en simplifiant la procédure civile à la Cour du Québec, présenté
par le ministre Jolin-Barrette.
Nous remercions le notaire général, et le
ministre de la Justice, et les membres de l'Assemblée nationale pour leur
ouverture d'esprit et leur audace à faire les choses autrement, pour favoriser
l'efficacité et l'accessibilité à la justice à nos concitoyens. Par ce projet
de loi, vous participez concrètement à l'avancement de l'accès à la justice.
Vous empruntez une voie innovante avec ce projet de loi n° 8.
Vous permettez aux notaires, acteurs indispensables de notre système juridique,
de contribuer à la société en mettant à profit leur expertise.
L'AJNQ s'enthousiasme de deux volets qui
interpellent particulièrement nos membres, soit la médiation et l'arbitrage
ainsi que l'accès à la magistrature. Les jeunes notaires représentent 50 %
des notaires du Québec. Sachez que les
jeunes notaires répondront présents dès que ces nouvelles possibilités leur
seront offertes. Ils sont enthousiastes à l'idée de participer
activement à la diminution des délais, chose à laquelle la population sourira,
considérant que les notaires jouissent d'une dose de confiance indéniable de la
part de la population.
D'abord, concernant le volet de la médiation et
de l'arbitrage, les notaires comptent parmi les médiateurs autorisés à agir à
la Cour des petites créances. La médiation gratuite obligatoire et l'arbitrage
automatique pour les demandes de 5 000 $ et moins à la Cour des
petites créances augmentera le nombre de dossiers que les notaires, médiateurs
et arbitres se verront attribuer, ce qui pourrait leur permettre de se consacrer
davantage à ce champ de pratique.
Actuellement, le nombre de dossiers est insuffisant pour en faire une activité
à temps complet, malgré l'intérêt de
nos membres pour ce faire. L'AJNQ voit positivement cette avenue pour la
réduction des délais de la Cour des petites créances.
Le projet de loi prévoit également que les
dossiers déposés en Cour du Québec, qui auront passé par une médiation
préalable, mais qui ne seront pas parvenus à une entente, bénéficieront d'un
traitement accéléré. C'est une démonstration et application concrète de la place favorable que
prend les modes alternatifs de règlement des différends au Québec. Nous
sommes d'avis que le nombre de dossiers devant se rendre devant la cour
diminuera. Nous sommes également d'avis que le nombre de jours d'audition
requis par dossier seront réduits puisque des questions auront été réglées en médiation ou en arbitrage. Vous
augmentez directement la qualité des dossiers présentés à la Cour du Québec
puisqu'ils porteront davantage sur des points de droit qui feront avancer le
Québec. Ces dossiers seront à la hauteur des expertises de nos juges en Cour du
Québec.
En ce qui concerne le volet de l'accès à la
magistrature aux notaires, l'AJNQ souhaite souligner en gras que les membres de
l'Assemblée nationale sont innovateurs, et nous vous en remercions. Votre
vision permet au système de justice de se
moderniser et de suivre la population. La société d'aujourd'hui, en 2023, est
une société douée d'expertises variées et d'expériences diversifiées.
Les notaires ajouteront leur expertise réputée
en droit des successions et de la famille et en droit immobilier, mais aussi les autres domaines où ils excellent.
L'expérience multidisciplinaire du droit quotidienne... au quotidien permet
aux notaires de résoudre des problèmes juridiques complexes dans un monde en
évolution.
Je vous rappelle que les notaires sont des
officiers publics, ils ont un devoir d'impartialité, ce qui nous place dans une
situation de devoir peser le pour et le contre dans notre quotidien et de
trancher. D'ailleurs, le Québec bénéficie actuellement de l'expertise de
plusieurs notaires agissant à titre de juges administratifs. Le prochain pas
naturel est de permettre à la population de bénéficier des expertises variées
des notaires pour leurs causes présentées à la Cour du Québec.
En permettant aux notaires de se qualifier comme
candidats à la magistrature, vous augmentez le bassin de candidatures
potentielles pour les postes de juges. Le Québec se dote ainsi d'un bassin
additionnel de candidatures exceptionnelles. Pensons notamment aux professeurs
de droit, aux éminents chercheurs en droit, aux notaires en droit commercial, aux notaires qui sont
conseillers juridiques internes dans les entreprises, les banques, les ministères,
les municipalités, et qui conseillent quotidiennement des entrepreneurs ou des
organisations publiques ou privées de toutes tailles dans des domaines
d'expertise qui les distinguent. Les jeunes notaires sont motivés par les
possibilités que ce volet leur apporte.
Je remets la parole à mon confrère
Me Dolhan pour la clôture de notre allocution.
M.
Dolhan (George Andrei) : Merci beaucoup, Me Thivierge. Bonjour, chers
membres... les députés et membres de la commission. Merci beaucoup pour
votre écoute.
Comme mentionné par ma collègue, les membres de
l'AJNQ sont ravis du projet de loi n° 8 et voient tous ces changements
d'un très bon oeil à l'effet que le législateur veut résoudre un problème
actuel, qui est l'accessibilité du public à la justice, et de la moderniser en
même temps.
Que ce soit
dans l'amélioration des services de médiation ou bien dans l'accès à la
magistrature, nous sommes convaincus que les notaires seront au rendez-vous,
tel que mentionné par ma collègue. Le public ne sera pas déçu et sera
très ravi et bien servi.
Pour
conclure, je vous laisse là-dessus, nous sommes tous les... que ce soient les
avocats ou notaires, les deux, des juristes. Ne nous limitons pas au mot
«avocat» ou «notaire» après notre signature. N'oublions pas que le plus important, les deux, on a un titre de «maître»
avant notre nom. Rendons la justice meilleure et plus accessible là-dessus.
Nous vous remercions pour votre écoute et nous
sommes prêts pour répondre à vos questions.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Alors, M. le
ministre, vous avez la parole.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Labrecque,
Me Thivierge, Me Dolhan, merci de participer aux auditions de
la Commission des institutions sur le projet de loi n° 8.
Écoutez, d'entrée de jeu, vous avez dit,
bon : Le gouvernement décide d'y aller avec une approche innovante en matière de justice, de moderniser d'une façon
innovante. J'aimerais que vous me parliez davantage du rôle du notaire
en matière de médiation, la pratique qui est faite.
Tout à l'heure, vous avez dit : Écoutez,
actuellement, la médiation ne... il n'y a pas assez de dossiers en médiation
pour faire en sorte que les notaires, supposons, fassent une pratique
uniquement, exclusivement basée sur la médiation. Mais avec le fait de rendre
la médiation obligatoire, ça pourrait intéresser des médiateurs... des notaires
à devenir médiateurs, notamment dans toutes les régions du Québec. Donc, vous
pensez que le bassin de médiateurs va encore augmenter parce que ça va devenir
une pratique qui va être intéressante dans les quatre coins du Québec.
• (15 h 10) •
Mme
Labrecque (Jessie) : Tout à fait. Tout à fait. En fait, ce qu'on voit
actuellement quand même beaucoup chez
nos membres... on connaît tous la médiation familiale. Donc, la médiation
familiale, c'est quand même un créneau qui est exercé, là, par nos membres.
Toutefois, au niveau de la médiation aux petites créances, moi, j'ai certains
confrères, consoeurs qui en font. Toutefois, la demande n'est pas très, très
élevée. Donc, le projet de loi va justement permettre d'accentuer la demande,
et donc c'est certain que ça va intéresser nos membres. Donc, on a beaucoup de
nos membres qui font également de la médiation civile. Donc, c'est juste un
champ d'expertise supplémentaire qui va s'ajouter. Et les jeunes notaires sont
très réceptifs à tout ce qui est nouveauté, se spécialiser dans divers
domaines, donc c'est certain que ça va donner un gros coup de main à la justice
québécoise.
M.
Jolin-Barrette : OK. Sur le fait d'inclure, là, la médiation
obligatoire, là, vous pensez que ça va avoir un réel impact sur la question des
délais et sur le nombre de causes qui vont se retrouver devant la cour, selon
votre expertise.
Mme Labrecque (Jessie) : Tout à
fait. Tout à fait. On sait que les délais pour aller en petites créances
peuvent prendre de 18 mois à deux ans. Donc, le fait d'aller en
médiation, d'avoir des règlements hors cour, puis que ce soit obligatoire,
c'est certain que ça va désengorger le système judiciaire. Donc, les notaires
ont toujours été neutres de par leur titre
d'officier public, donc on est très présent, on a vraiment une belle capacité
pour le règlement, là, des conflits. Donc, on accompagne bien nos
clients, on est là à tous les stades de leur vie. Donc, c'est sûr que ça va
apporter un gros, gros plus, là, pour le règlement des différends alternatif.
M. Jolin-Barrette : OK. Parlons du
fait, comme vous venez de le dire, que les notaires sont habitués de régler des
différends puis d'agir déjà à titre de médiateur, vous l'avez souligné tout à
l'heure, il y a certains notaires qui sont déjà des juges administratifs, des
décideurs administratifs, il y a déjà des notaires qui sont arbitres. Que
dites-vous à certaines personnes dans la société qui prétendent que le fait de
permettre aux notaires d'accéder à la fonction de juge, d'accéder à la
magistrature, bien, c'est dangereux, il va y avoir un enjeu pour la protection
du public, les notaires ne disposent pas de l'expertise requise pour être un
bon juge à la Cour du Québec ou comme juge à
la Cour municipale, qu'ils ne sont pas habitués de faire de la représentation
devant les tribunaux, que les notaires ne pratiquent pas dans les domaines de droit suffisants, puis qu'ils sont
encarcanés dans... uniquement dans l'immobilier? Qu'est-ce que vous
répondez à tous ces arguments-là qu'on a entendus?
M. Dolhan (George Andrei) : Bien, si
je peux... si je peux prendre la parole là-dessus, bien, vous avez un très bon exemple devant vous de personnes qui ne
sont pas en droit dit traditionnel, entre guillemets, en droit immobilier
ou dans un bureau privé, vous avez
Me Jessie Labrecque, qui est dans le droit dans une institution
financière, Me Thivierge, qui est en droit des successions
également dans une institution financière, et moi qui est du côté municipal,
droit des contrats municipaux, je suis même juge de la paix fonctionnaire.
Alors, le
droit notarial n'amène pas juste à des transactions immobilières, loin de là.
Je pense que l'expertise... on ne demande pas de diminuer l'expertise
nécessaire pour devenir juge, au contraire, on veut qu'on garde les mêmes
procédures, mais juste d'augmenter le bassin. Ce n'est pas le type de notaire
ou d'avocat qui va faire en sorte d'avoir l'expertise, mais bien les
années d'expérience derrière la cravate, comme on dit, et le fait de pratiquer
dans des différents domaines, que ce soit traditionnel,
d'un non traditionnel, ça fait en sorte qu'on va avoir une plus grande
expertise dans des domaines plus spécifiques, mais également dans des domaines
plus larges, que ce soit immobilier, municipal, ou autre.
M.
Jolin-Barrette : Qu'est-ce que vous dites... qu'est-ce que vous
répondez sur l'argument, là, les notaires ne vont pas à la cour ou ils
ne plaident pas? Est-ce que ça va faire, de la part des notaires, des mauvais
juges?
Mme Labrecque (Jessie) : Pas du
tout. En fait, dans le cadre de notre profession, en fait, ce que George mentionnait, c'est qu'on est tous les trois, là,
nous, en pratique non traditionnelle. Par contre, moi, j'ai été 11 ans,
quand même, en pratique privée, et on
en fait à tous les jours, du règlement de différends puis de la négociation
avec des parties. On n'est peut-être pas avec le juge à tous les jours,
par contre, on doit... on se doit de négocier et on se doit de parvenir à des
ententes dans le cadre de nos dossiers.
Et il ne faut pas oublier non plus que les
notaires font déjà de la procédure, notamment dans le cadre des procédures non contentieuses,
donc des ouvertures de régime de protection, des homologations de mandat et,
depuis quelques années, des divorces à l'amiable aussi, quelque chose que je
faisais énormément quand j'étais en pratique privée. Oui, on va à la cour de
temps à autre, mais, même quand on est dans notre bureau avec nos clients, on
en fait, de la négociation. Donc, on est bon
pour maîtriser le droit, on est bon pour amener les parties à argumenter. Donc,
c'est quelque chose qu'on maîtrise
déjà dans le cadre de nos activités, même si ça ne se fait pas devant un juge à
tous les jours.
M. Jolin-Barrette : OK. Sur le
critère d'officier public, là, des fois, je crois que la cour vous confie le
rôle de liquidateur pour liquider des successions, vous êtes mandaté parfois
par le tribunal, je ne me trompe pas?
Une voix : Oui.
M.
Jolin-Barrette : OK. Plus largement, là, la simplification de la
procédure civile à la Cour du Québec, le fait d'instaurer des conférences de règlement à l'amiable, pensez-vous que ça
va avoir un impact sur les délais mais aussi sur le règlement du nombre
de dossiers avant d'aller à procès?
Mme Thivierge (Marie Pier) : Oui,
absolument, parce que les parties vont être incitées fortement à régler ou au
moins à essayer la médiation, l'arbitrage. Peut-être qu'ils vont être surpris,
parce qu'ils ne connaissent pas tout le potentiel de ça. Puis, rendus devant la
cour, les dossiers vont être d'une qualité exceptionnelle. Ça va permettre de
faire avancer le Québec. Tout ce qui a pu être réglé va être réglé, puis il va
rester des questions de droit plus litigieuses, plus corsées, qui vont nous
permettre d'avancer tous ensemble, faire avancer notre société.
M. Jolin-Barrette : Donc, vous voyez
ça véritablement comme un... le fait d'être davantage efficace dans le système
de justice. Quand les jeunes notaires rencontrent des justiciables, là, dans
leurs bureaux, là, qu'est-ce qui est recherché par les justiciables par rapport
à une situation juridique? Ils veulent que leur dossier soit réglé? Ils veulent
être accompagnés? Ils veulent être
conseillés? J'imagine que c'est tous des éléments que les notaires font
actuellement.
Mme Thivierge (Marie Pier) : Oui.
C'est difficile de dire que c'est une seule de ces voies-là, parce que ça dépend
des clients, ça dépend des besoins aussi. Les notaires sont dans toutes les
régions, dans presque toutes les municipalités au Québec. C'est des gens de
proximité qui permettent de régler des petits conflits, mais des plus gros
aussi avec la médiation, avec la négociation. Et en étant dans des régions, ils
savent que leurs voisins, tu sais, ils n'ont
pas le choix de les aider le mieux qu'ils peuvent. Ils sont beaucoup dans
l'information aussi, informer, conseiller. Donc, le conseil juridique,
c'est... le notaire est conseiller juridique aussi, on l'oublie parfois, mais
ça fait partie aussi d'un de ses chapeaux qu'il porte, pas seulement le chapeau
d'officier public.
M. Jolin-Barrette : Juste avant de
céder la parole à mes collègues, l'Association professionnelle des notaires
nous a dit, dans leur mémoire : Vous devriez mettre deux membres sur le
Conseil de la magistrature. Est-ce que vous
partagez également les recommandations de l'Association professionnelle des
notaires relativement au nombre de membres notaires sur le conseil?
Mme Thivierge (Marie Pier) : Oui,
absolument.
M. Jolin-Barrette : OK. Je vous
remercie grandement d'être venus en commission parlementaire.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Question du côté
gouvernemental? Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel,
s'il vous plaît.
Mme Boivin Roy : Merci beaucoup, M.
le Président. Merci pour la présentation. Le Barreau du Québec propose qu'il
conviendrait de scinder le projet de loi en deux et de reporter, là, dans un
deuxième temps, la question des notaires à la magistrature. Alors, comment vous
réagissez à cette proposition en deux temps?
Mme Labrecque (Jessie) : Je vais
laisser Me Dolhan répondre à la question.
M.
Dolhan (George Andrei) : Pourquoi retarder à une date ultérieure ce
qu'on peut faire aujourd'hui? On n'est pas le premier gouvernement à le faire.
Il y en a d'autres, pays où les notaires peuvent aller à la magistrature pour
x raisons. Actuellement, du côté du Québec, on peut aller, que ce soit du
côté des juges administratifs, alors il n'y
aurait pas un avantage de le scinder en deux et de le retarder. Je trouve qu'on
ne servira pas les citoyens et on servira juste les avantages du
Barreau.
Mme Thivierge (Marie
Pier) : Pourquoi vouloir repousser la possibilité de pouvoir
bénéficier de l'expertise supplémentaire ou différente, complémentaire des
juges actuels? Ce n'est pas au bénéfice de la société, à mon avis, de repousser
l'intégration d'une expertise complémentaire.
Mme Boivin
Roy : Très bien. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de
Saint-Jean.
• (15 h 20) •
M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président. On va en parler,
d'expertise, mais d'abord je note à grands traits votre enthousiasme. Non seulement vous aviez dit,
comme l'a noté le ministre, que c'était innovateur, vous avez aussi dit
que c'était moderne.
C'est clair qu'avec
les notaires qu'on a entendus ce matin, d'avoir accès à la magistrature, pour
eux, c'était... et je pense que celui qui nous a dit ça, il dit : Moi, je
suis là depuis 36 ans puis je ne me souviens pas d'un président qui ne l'a pas réclamé depuis que je suis là. J'ai
noté que vous disiez que vous seriez prêts. Est-ce que ça fait partie... parce
que j'ai remarqué aussi que vous aviez un grand nombre de notaires qui étaient,
entre guillemets, jeunes, parmi tous les notaires du Québec, est-ce que ça fait
partie de l'idée, c'est-à-dire, est-ce que vous n'aviez pas juste envie de ça, mais vous continuiez de croire que ça s'en venait
parce que ça fait partie d'un plan de carrière? Parce que vous allez être
prêts, nous dites-vous, au moment où ça va être possible de passer, après les
10 ans de profession.
Mme Labrecque (Jessie) : Bien, en fait, comme je
le mentionnais au tout début, en fait, là, ce qu'on a pu remarquer vraiment
dans les dernières années, c'est que, oui, on a un grand bassin de jeunes
notaires, mais également, c'est qu'on est...
nos champs d'expertise sont extrêmement diversifiés. Les notaires se
spécialisent de plus en plus, travaillent à peu près partout maintenant dans la
société. Avant, on voyait beaucoup les notaires dans les études de notaire
traditionnelles. Maintenant, on est partout
dans ce qu'on appelle le non traditionnel. Donc, la magistrature n'est qu'une
continuité de ce qu'on est capables de
faire, des expertises qu'on est capables d'aller chercher. Les jeunes notaires
sont intéressés à ça. Donc, c'est quelque chose pour un plan de
carrière, pour une spécialité, qui intéresse grandement nos membres. Donc, oui, les jeunes notaires seront au
rendez-vous, là, quand le projet de loi sera adopté, et il y en a beaucoup, là,
qui vont être prêts et intéressés à y accéder.
M. Lemieux :
Justement, l'expertise, vous me le ramenez, et c'est là où je voulais
aller, ça n'a rien à voir, mais ça a tout à voir parce que tout est dans tout,
je me souviens, dans la dernière législature, on a élargi le rôle des coroners
pour permettre à toutes sortes de corps de métier et de professions de devenir
coroner, et pas seulement le bon vieux docteur de l'époque, parce que,
justement, on avait besoin d'architectes, d'ingénieurs, de ci, de ça. Depuis ce matin que j'entends parler de l'expertise,
c'est... Je comprends que vous, vous vous comprenez, quand vous nous dites
que vous avez l'expertise, mais M. et Mme Tout-le-monde, à la maison, qui
vont juste régler des affaires, comme on disait
tantôt, d'immobilier, dans vos cabinets, une fois de temps en temps, des fois
juste deux ou trois fois dans une vie, qu'est-ce que vous avez comme
expertise qu'on n'a pas déjà pour les tribunaux?
Mme Labrecque (Jessie) : En
fait, les notaires, on accompagne les gens vraiment à toutes les étapes de leur
vie. Donc, comme vous le dites, oui, il y a certains clients qu'on va
voir... qui vont aller chez le notaire deux à trois fois dans une vie. Par contre, notre rôle ne se limite
pas au droit immobilier. Souvent, le droit immobilier, un jeune couple qui va faire l'achat d'une première maison, on va
être là pour leur parler de, bon : Est-ce que vous avez vos
testaments-mandats? Donc, le droit de la personne, les gens mariés :
Est-ce que vous avez un contrat de mariage? On va même faire, dans certains cas, de la planification financière fiscale
avec les clients. Donc, on a Marie Pier, là, qui est ma consoeur ici, là,
qui est justement fiscaliste. Donc, on a aussi une très grande responsabilité
professionnelle. Donc, on se doit
d'informer nos clients, de leur parler de tous les impacts possibles de chaque
geste qu'ils vont poser, que ce soit
au niveau de l'acquisition, que ce soit au niveau de leur testament-mandat, en
cas de mariage. On a une responsabilité vis-à-vis la fiscalité, même si
on n'est pas fiscaliste, donc, au niveau du droit des affaires également. Donc,
on les accompagne dans toutes sortes
d'étapes de leur vie. Donc... Et, quand je dis qu'on est très diversifiés,
c'est qu'on est présent à peu près
partout. Donc, la majorité des gens qu'on va rencontrer, on développe vraiment
un lien personnel avec eux puis on va les accompagner pour chaque grande
étape de leur vie.
M. Lemieux : D'accord, je comprends
que vous avez beaucoup à offrir à la magistrature de l'avenir. Et je note, parce
que vous l'avez dit, monsieur, en vous saluant, mesdames, monsieur, que nous ne
serons pas déçus.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jean. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît.
Mme Bourassa : Oui.
Merci beaucoup, maîtres, de vous prêter à l'exercice. J'aimerais qu'on parle de
la formation parce que, bon, les avocats, c'est une profession peut-être
plus connue, on connaît tous l'examen du Barreau, on en entend parler. Quelle est la formation des notaires? C'est quoi, la
similitude aussi avec celle que reçoivent les avocats?
M. Dolhan (George Andrei) : Si
je peux aller là-dessus, il ne faut pas oublier que les deux, avant de choisir vers le Barreau ou vers la Chambre des notaires, d'aller dans une direction ou dans l'autre, on est tous obligés de
faire un bac en droit, trois ans
d'études où on touche à toutes les sphères du droit, que ce soit le droit
pénal, le droit criminel, droit des sociétés, famille, et autres, soit
il y a des branches plus spécifiques, par exemple le droit immobilier, où les
cours au bac ne sont pas très avancés. C'est pour ça que, comme notaires, nous,
avant de pouvoir déposer notre candidature à
la Chambre des notaires, nous devons aller chercher une maîtrise. Avant, c'était
un diplôme de deuxième cycle, maintenant, c'est une maîtrise, depuis
2007, une maîtrise qui comporte ces cours plus spécifiques en fiscalité,
comptabilité, finance, droit immobilier, succession, famille. Et par la suite
on va pouvoir aller passer les examens, les évaluations de la Chambre des
notaires, qui sont, entre autres, une opinion juridique. Je vais vous parler de
2016 et non de 2022, possiblement que ça a
changé, mais, depuis 2016, il y avait l'évaluation, les trois gros projets dans
chacun des domaines, que ce soit immobilier, succession et tout ce qui
est droit des sociétés. À ce moment-là, on nous évalue dans chacun des domaines
afin de s'assurer qu'on a toutes les compétences pour occuper le titre de
notaire.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.
M. Morin : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour. Merci. Merci de participer aux travaux de la
commission, Mes Labrecque, Thivierge et Dolhan.
Je vous le dis d'emblée, moi, j'appartiens au
Barreau. Alors, écoutez...
Mme Thivierge (Marie Pier) : On vous
aime quand même.
M. Morin : ...à entendre parler des
notaires depuis ce matin, on ne peut pas être tous parfaits, moi, je suis
avocat, mais, quand même, quand même, on travaille tous pour un accès à la
justice, n'est-ce pas?
M. Dolhan (George
Andrei) :
Exactement.
M. Morin : J'ai quelques questions
pour vous, parce qu'on va entendre la Chambre des notaires... Ce matin, on a entendu l'Association professionnelle des
notaires. Vous, vous êtes l'Association des jeunes notaires. Donc, il y a beaucoup
d'associations chez les notaires. Je comprends que vous n'êtes pas la
chambre... l'ordre professionnel, qui est la Chambre des notaires, donc vous
n'avez pas le même mandat. Qu'est-ce qui vous distingue de l'association
professionnelle? Vous militez seulement pour les jeunes notaires ou y a-tu
d'autres choses qui vous distinguent?
Mme Labrecque (Jessie) : Bien, en
fait, c'est sûr que nous, on est vraiment pour la protection des jeunes
notaires, donc des 15 ans et moins de pratique. Puis l'association a été
créée il y a quelques années parce qu'en fait, vu le bassin grandissant des jeunes notaires, donc, dans la proportion
de la communauté notariale, on s'est vraiment rendu compte qu'il y avait
un manque à gagner au niveau de la formation, de l'encadrement des plus jeunes
notaires. Donc, c'est pour ça, là,
notamment, que l'association a été créée, donc vaiment pour répondre à un
besoin qui était existant, là, de prendre en charge un peu plus les
jeunes membres de l'ordre professionnel.
Mme Thivierge (Marie Pier) : Je
voudrais juste ajouter. En fait, les jeunes notaires cherchaient beaucoup de la collaboration avec leurs pairs, de pouvoir
aider de nouvelle façon puis innover ensemble avec le droit puis de pouvoir
collaborer, s'entraider. C'est des
professions qui sont réparties au Québec. Donc, les réseaux professionnels
d'entraide, c'est un besoin, là, des jeunes notaires, justement, pour
connaître les confrères, les consoeurs qui sont spécialisés puis qui ont des expertises vraiment différentes
puis qui peuvent les aider dans leurs dossiers ou intervenir au besoin pour
leurs clients.
M. Morin : Merci. Depuis ce matin,
on a discuté bien sûr du projet de loi, et je vous dirais qu'il y a une partie
importante du temps qui a été consacrée à l'accès potentiel à la magistrature
pour les notaires, alors, ça semble être un volet hyperimportant d'améliorer
l'accès à la justice au Québec.
Néanmoins, moi, j'aurais des questions à vous
poser sur le projet de loi, parce que j'aimerais avoir votre opinion pour
éventuellement peut-être bonifier le projet de loi. J'attire votre attention
sur l'article... c'est 7 du projet de loi,
qui réfère à l'article 535.6 et qui dit que le défendeur a 85 jours,
de la signification de l'avis, pour compléter son dossier. Est-ce que
vous pensez que 85 jours, c'est suffisant, dans les circonstances, pour
permettre à un défendeur de bien se défendre
et bien préparer sa cause, compte tenu que le demandeur, lui, a habituellement
plus de temps pour se préparer?
• (15 h 30) •
M. Dolhan (George Andrei) : Du côté
du 85 jours, le délai, il est, selon moi, sans avoir analysé l'ensemble
des délais ou des reports de dossiers, parce qu'on se rend compte qu'il y a
plusieurs... même si le dossier n'est pas préparé
à 100 %, on peut reporter un dossier à une date ultérieure. Est-ce que le
délai est juste ou non? C'est très difficile à dire, vite de même, sans
une analyse. Mais il ne faut pas oublier que 85 jours, c'est pas mal, là,
deux mois et demi. Alors,
en sachant très bien qu'il y a une situation problématique dans un ou l'autre,
qu'on soit défendeur au demandeur, je pense qu'un deux mois et demi pour
préparer un dossier, sauf cas de force majeure ou dans des dossiers importants,
je pense qu'un délai de 85 jours, ça pourrait être raisonnable.
M.
Morin : OK. Je vous remercie. Autre question que j'ai pour
vous... et là je ne veux pas vous induire en erreur, donc c'est toujours à l'article 7, mais qui
va apporter une modification à l'article 535.14 du Code de procédure civile, qui se lit comme suit : «Une partie
peut, pour tenir lieu [de] témoignage de l'un de ses témoins sur les faits du
litige, produire une déclaration écrite de
ce dernier, pourvu que cette déclaration ait été préalablement notifiée aux
autres parties.» Elle ne peut excéder cinq pages.
Or, on sait que, si je comprends bien le projet
de loi, donc, une partie pourrait déposer une déclaration écrite qui, éventuellement, va faire la preuve de quelque
chose, mais il ne semble pas y avoir de contre-interrogatoire de prévu.
Est-ce que c'est quelque chose qui vous inquiète, compte tenu du fait que le
contre-interrogatoire est une façon de vérifier la véracité, ou l'authenticité,
ou l'exactitude de ce qu'un témoin peut rapporter à la cour?
M. Dolhan (George Andrei) : Oui, ça
peut être problématique dans le cas où on a des doutes sur la véracité de ces
documents-là, en effet, ça peut être problématique.
Mme Labrecque (Jessie) : C'est sûr
qu'il ne faut pas oublier non plus que la bonne foi se présume. Donc, si je peux faire le parallèle, par exemple, avec les
demandes conjointes de divorce, quand c'est déposé, c'est déposé avec une déclaration solennelle, dans le fond, par
laquelle les parties vont faire certaines déclarations et déclarer également
que ce qu'on va retrouver dans la demande conjointe, c'est véridique. Donc, à
moins vraiment d'éléments probants, il n'y a pas lieu de douter, dans le fond,
par rapport aux déclarations qui sont faites, donc on se doit toujours de
présumer la bonne foi.
M. Morin : Je vous remercie.
J'aimerais aussi vous entendre, parce qu'avec beaucoup d'enthousiasme, c'est tout à votre honneur, vous parlez beaucoup de la
magistrature et la possibilité pour les notaires d'accéder à la magistrature.
Or, évidemment, dans une société où prime la
primauté du droit, l'indépendance de la magistrature est fondamentale, on
s'entend là-dessus.
Il y a une disposition du projet de loi,
l'article 36, qui pourrait permettre dorénavant au Vérificateur général
d'aller vérifier les comptes du Conseil de la magistrature et qui va forcer le
conseil à publier sur son site Internet différentes informations, dont les
«sommes requises dans l'exercice de ses fonctions, [...], notamment celles
requises pour la conclusion de contrats de services ou d'approvisionnement ou
le paiement [d'autres] charges». Est-ce que ça, pour vous, ça pose un problème? Est-ce que ça soulève une inquiétude quant
à l'indépendance du Conseil de la magistrature?
M. Dolhan (George Andrei) : Pour
répondre là-dessus, je ne pense pas. Il faut être... Il ne faut pas oublier que
les salaires, que ce soit des conseillers de la magistrature ou autres, c'est
les citoyens qui le paient avec des fonds publics. À ce moment-là, il faut être
le plus transparent possible envers le public. Le fait de l'afficher et que le
public puisse en prendre connaissance, ça ne veut pas dire automatiquement
qu'il va y avoir des problèmes. Je pense que les fonds sont très bien gérés
actuellement. À ce moment-là, je ne verrais pas pourquoi les rendre publics
serait un problème là-dessus.
M. Morin : D'accord. Je vous
remercie. Pour revenir à la possibilité pour les notaires d'accéder à la
magistrature, vous avez mentionné, si j'ai bien compris, que, dans d'autres
pays, des notaires peuvent accéder à la magistrature. Est-ce que vous avez des
exemples qui pourraient nous servir de précédents?
M. Dolhan (George Andrei) : Je sais
que la Chambre des notaires va faire des représentations là-dessus, alors je
vais laisser la chambre en parler plus en détail.
M.
Morin : Très bien. Je vous remercie. Vous avez également
mentionné qu'il y avait des notaires qui occupaient, présentement, des
fonctions de juge administratif, je crois. Est-ce que vous avez une idée de
leur nombre, de leurs fonctions, des tribunaux où ils sont nommés et de la
formation qu'ils reçoivent?
M. Dolhan
(George Andrei) : Je n'ai pas de liste, mais c'est sûr et certain
que, dans le mémoire que nous voulons déposer, du côté de l'AJNQ, on va
pouvoir vous mentionner ce type d'information là sans problème.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :
Merci beaucoup. Mme la
députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.
Mme Labrie : Merci, M. le Président.
Moi, je ne suis pas membre du Barreau, contrairement à beaucoup de gens ici.
J'entends vos arguments à l'effet que vous êtes prêts à accéder à la
magistrature, mais, de toute évidence, il semble que le Barreau n'est pas
convaincu, pour sa part, de ces arguments-là. C'est assez tendu, puis ça me
fait craindre des tensions internes au sein de la magistrature, éventuellement,
si le projet de loi va de l'avant puis que les notaires accèdent à la
magistrature. Il semble que vous avez une bonne expertise dans le règlement des
différends. Qu'est-ce que vous pensez qu'on peut faire
pour éviter ces tensions-là? Est-ce qu'il y a déjà un dialogue d'amorcé, quand
même, pour faire avancer un peu cette tension-là avec le Barreau?
Mme Labrecque
(Jessie) : Bien, en fait, il ne faut pas oublier que le Barreau doit
défendre l'intérêt de ses membres, donc c'est sûr que de voir arriver d'autres
professionnels, possiblement, dans des fonctions qui leur étaient exclusives, c'est sûr que ce n'est pas quelque
chose qui leur plaît. Sauf que, dans l'exercice de notre profession, de dire
qu'il y a des tensions avec les avocats... En fait, on collabore déjà beaucoup
avec des avocats, donc je ne pense pas qu'il
va y avoir de tension palpable. Je pense que le Barreau répond simplement à sa
mission en protégeant l'intérêt de ses membres.
Mais personnellement,
compte tenu que... Si on regarde nos membres, nos membres à nous, il y en a plusieurs, il y a beaucoup d'esprit de
collaboration, quand même, avec les avocats. Donc, tu sais, comme on expliquait,
il y a des champs d'expertise différents,
donc ça va vraiment se compléter, je ne pense pas que ça va impacter le système
judiciaire. Donc, ce n'est pas une crainte que, pour ma part... que moi, j'ai
face aux notaires qui pourraient accéder à la magistrature.
Mme Thivierge
(Marie Pier) : Juste rappeler des statistiques, là : on est à peu
près 4 000 quelques notaires, il y a je ne sais pas exactement combien
d'avocats, mais c'est... Est-ce qu'on est une si grande menace que ça versus
les bénéfices que la société va en retirer? Je vous laisse peser le pour et le
contre là-dessus, là, mais, pour moi, c'est une évidence, là.
Mme Labrie :
Mais il semble...
M. Dolhan (George
Andrei) : Mais, pour rajouter...
Mme Labrie :
Allez-y.
M. Dolhan (George Andrei) : Excusez-moi. Pour rajouter là-dessus, il ne faut
pas oublier qu'il y a un règlement qui s'appelle le Règlement sur les
procédures de sélection des candidats à la fonction de juge de la Cour du
Québec, de juge d'une cour municipale et de
juge de paix magistrat. On ne demande pas la modification des critères d'admission
des juges, on demande seulement qu'on augmente le bassin et d'appliquer les
mêmes critères qui sont spécifiés dans un règlement. Alors, ce n'est pas tous
les notaires qui vont devenir juges, ce n'est pas tous les avocats qui
deviennent juges, mais bien ils sont sélectionnés en vertu de leur expertise,
de leur expérience, du bagage qu'ils détiennent et non juste du fait qu'ils
sont avocats ou notaires.
Mme Labrie : Donc,
ça ne vous inquiète pas qu'une fois le changement effectif, votre
reconnaissance, la diversité de votre bagage,
ça va être reconnu par vos collègues qui auraient accédé à la magistrature par
un autre chemin?
M. Dolhan (George Andrei) :
Non.
Mme
Thivierge (Marie Pier) : Non, pas du tout.
Mme Labrie : C'est
beau.
Le
Président (M. Bachand) : ...
Mme Nichols :
Merci. Peut-être pour rester sur la même thématique, on comprend que les
notaires sont emballés, que c'est une belle
surprise, que ça ne faisait définitivement pas partie d'un plan de carrière,
pour les notaires, de devenir juges un jour. Et d'ailleurs, les jeunes
notaires, vos études, quand vous avez fait vos études, vous le saviez parce
que... Bon, je l'avoue, moi aussi je ne suis pas du bon bord, je suis avocate,
je suis membre du Barreau puis, quand j'ai fait mon choix, je le savais que, si
je choisissais le notariat, que je ne pouvais pas aller à la magistrature, je
savais qu'en étant avocate ça me permettait aussi de plaider, que, si je m'en
allais notaire, je ne pourrais pas plaider. Donc, vous étiez au courant de tout
ça aussi quand vous avez fait vos choix de carrière.
Mme Thivierge
(Marie Pier) : Oui, mais pour...
Mme Nichols :
Tout comme Me Bibeau ce matin, là.
Mme Thivierge
(Marie Pier) : Oui. Si je peux répondre pour moi-même, quand j'ai fait
le choix entre devenir avocate ou notaire, moi, ce que je voulais, c'est faire
du conseil juridique, donc ce n'est pas nécessairement de plaider ou non,
c'était le conseil, accompagner mon concitoyen, mon voisin, l'entrepreneur dans
toute sa... dans tout son cheminement de vie, donc, du début jusqu'à la fin.
Donc, je ne pense pas qu'il n'y ait personne qui décide de devenir avocat parce
qu'il a le plan de devenir juge.
Mme
Nichols : Ah! C'est encore drôle, mais...
M. Dolhan (George
Andrei) : C'est une heureuse conclusion pour plusieurs, mais le nombre
de juges...
Mme Nichols :
C'est encore drôle, mais... Bien, j'ai juste une question, là, au niveau de la
formation. Parce qu'on sait que, oui, ils ont la même formation, tout le monde,
ils ont un bac en droit, puis après ça on décide, on va au Barreau ou on fait
le notariat. C'est là où la formation devient un peu différente. Qu'est-ce
qu'ils manqueraient, selon vous, les notaires, comme formation? Parce que ça va
prendre, mettons, une formation d'appoint ou une... Qu'est-ce que, selon vous,
ça prendrait comme formation supplémentaire ou d'appoint?
• (15 h 40) •
Mme Labrecque
(Jessie) : En fait, aucune. On est tout à fait habilités, avec les
connaissances qu'on a déjà et la spécialisation qu'on va prendre dans
l'exercice de la profession, avec l'accompagnement client, on a déjà toutes les
habiletés nécessaires pour avoir accès. Donc, ça ne prend pas de formation
d'appoint, on la connaît, la procédure, on maîtrise le droit, on est déjà
aptes.
Mme Nichols :
Même ceux qui n'ont jamais plaidé en chambre? Puis là c'est parce que je ne
veux pas être juste là-dessus, je voulais vous parler de médiation aussi, mais
même ceux qui n'ont jamais plaidé en chambre, qui ne connaissent pas nécessairement les interros, les contre-interros, de
la procédure pure, là, en tant que telle? Ça va, tout est beau, les...
Mme Thivierge (Marie Pier) : Ce
n'est pas dans les conditions d'accès, dans le règlement. Donc, tu sais, si
vous questionnez le règlement qui est déjà en place, c'est une chose,
là, mais je pense qu'on se qualifie déjà là-dessus.
M. Dolhan (George
Andrei) : Puis, si je peux renchérir là-dessus, il y en a plusieurs,
avocats, qui ne sont... Excusez.
Mme Nichols :
Non, non, c'est parce que j'aurais aimé ça vous entendre vite, vite, vite
sur la médiation, puis M. le président m'indique qu'il reste 20 secondes.
M. Dolhan (George
Andrei) : Je vous écoute.
Mme Nichols :
Sur la médiation, votre avis? Les
notaires, la médiation, ça va bien? Le temps, c'est trop long. Qu'est-ce
qu'on fait, on en rajoute beaucoup?
M. Dolhan (George
Andrei) : ...pas compris la question.
Mme Nichols :
Bien, les médiateurs, la médiation, vous faites beaucoup de médiation. On
devrait ajouter beaucoup de notaires comme médiateurs?
M. Dolhan (George
Andrei) : En fait, ce n'est pas une question de rajouter beaucoup de
notaires comme médiateurs ou non...
Mme Nichols :
Bien, il en manque, il en manque dans le milieu.
M. Dolhan (George
Andrei) : C'est ça, il en manque, des médiateurs. Il y en a de plus en
plus, d'avocats, qui sont occupés à d'autres tâches, puis ils ne veulent pas se
spécialiser, par exemple, en médiation. À ce moment-là, pourquoi ne pas
utiliser un autre juriste qui peut faire de la médiation, qui est formé en
médiation? Pourquoi ne pas l'utiliser quand on en a besoin, de médiation? Je
pense que c'est un problème à diminuer l'attente.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup,
Me Labrecque, Me Thivierge, Me Dolhan, merci beaucoup d'avoir été avec
nous aujourd'hui, c'est très, très, très apprécié.
Et, sur ce, je
suspends les travaux quelques instants. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
15 h 42)
(Reprise à 15 h 45)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Il nous fait plaisir
d'accueillir les représentants d'Option Consommateurs. Alors, bienvenue à vous
deux. Très, très, très honorés de vous avoir aujourd'hui avec nous.
Alors,
comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation. Après ça, on aura
un échange avec les membres de la commission. Alors, je vous cède la
parole et je vous demande d'abord de vous présenter, s'il vous plaît.
Option Consommateurs (OC)
M. Corbeil
(Christian) : Oui. Bonjour. Christian Corbeil, directeur général
d'Option Consommateurs. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les
députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos
observations aujourd'hui.
Créé en 1983, Option
Consommateurs est une association à but non lucratif qui a pour mission d'aider
les consommateurs et de défendre leurs
droits. Depuis près de 40 ans, la question de l'accès à la justice des
consommateurs a toujours été au coeur de nos préoccupations. À travers
les années, nous avons accompagné des consommateurs qui avaient besoin de
soutien, à travers différents projets, notamment ceux s'adressant aux aînés.
Notre expérience sur le terrain nous a permis d'être témoins des obstacles
auxquels peuvent faire face les consommateurs lorsque vient le temps de faire
valoir leurs droits.
Nous avons réfléchi à
ces questions dans le cadre de plusieurs projets de recherche. Nous sommes
ainsi en mesure d'affirmer que certains d'entre eux auraient abandonné leur
recours s'ils n'avaient pas bénéficié d'un certain accompagnement. Nous sommes
donc bien placés pour analyser les pratiques susceptibles d'affecter
positivement ou négativement les consommateurs quand vient le temps d'obtenir
justice.
En tant
qu'association de consommateurs, notre préoccupation est que les consommateurs
aient un sentiment de justice à l'issue des recours qui leur sont proposés pour
obtenir justice. On le sait, les consommateurs sont des justiciables
hétérogènes, ils ne font pas tous face aux mêmes barrières, devant le système
de justice, il est donc nécessaire d'adapter
les solutions qui leur sont proposées afin de répondre à leurs besoins. C'est
dans cette perspective que nous accueillons favorablement les
différentes options d'accès à la justice présentées par le projet de loi
n° 8. Il s'agit, pour nous, d'un pas
dans la bonne direction. Aussi, nous espérons que les ressources nécessaires
seront disponibles au moment de l'entrée en vigueur de ces mesures pour
faciliter ce virage.
Je
vous laisse ma collègue, Clarisse N'Kaa, avocate et analyste, vous exposer
l'essentiel de nos commentaires. Merci.
Mme N'Kaa (Clarisse) :
Bonjour et merci à tous. Merci pour l'invitation. Alors, comme l'a
mentionné M. Corbeil, nous considérons
que le projet de loi n° 8 est un pas dans la bonne direction, sous
réserve, évidemment, de certaines observations que je vais vous présenter
tantôt.
Mais, tout d'abord,
nous apprécions la possibilité pour les tribunaux de rendre des jugements sur
le vu du dossier, la limitation des interrogatoires préalables aux réclamations
de 50 000 $ et plus. Nous apprécions aussi la limitation à cinq du nombre
de pages des énoncés des demandes introductives d'instance pour les
réclamations de 100 000 $ et
moins, la possibilité aussi de revendiquer un bien aux petites créances lorsque
cette demande est accessoire à une demande de la compétence de cette cour,
et finalement le fait d'encourager le recours à la médiation, l'arbitrage et la
conférence de règlement à l'amiable comme modes pour régler les différends.
Cependant, nous considérons que des améliorations pourraient être apportées au
projet de loi pour atteindre les objectifs qui sont visés d'améliorer
l'efficacité, l'accessibilité à la justice et de simplifier les procédures.
Nos observations
s'articulent en six points et se rapportent principalement aux mesures prévues
à la Cour des petites créances parce qu'il s'agit, dans le fond, de la
clientèle avec laquelle nous traitons.
Donc, premièrement,
nous considérons qu'il y a un grand absent, dans ce projet de loi, c'est le
pont entre la médiation préjudiciaire et la Cour des petites créances. Alors,
comme vous le savez, l'article 2 du projet de loi prévoit qu'un dossier accompagné d'une attestation délivrée par un
médiateur accrédité sera instruit en priorité. Sauf que le projet de loi vise les demandes déposées à la
Cour des petites créances. Or, nous savons qu'en matière de consommation il existe
déjà de la médiation à l'étape préjudiciaire. Je pense ici à la plateforme de
règlement de litiges Parle consommation qui est chapeautée par l'Office de la protection du consommateur. Nous
nous demandons, en fait, ce qu'il adviendra des dossiers non réglés à cette
étape. Devront-ils participer à une autre médiation, une fois devant la Cour
des petites créances?
Alors, ce que nous
recommandons, c'est de prévoir un mécanisme de transfert des dossiers qui ont
bénéficié d'une médiation sur la plateforme Parle vers la Cour des petites
créances ou simplement de permettre des médiateurs qui oeuvrent sur cette
plateforme de pouvoir émettre une attestation qui sera jugée valable dans
l'appréciation de la priorité accordée au dossier à la cour.
• (15 h 50) •
Deuxièmement, le
projet de loi introduit le principe selon lequel les dossiers qui passent par
la médiation seront priorisés dans l'instruction à la cour, un peu comme dans
notre première observation, en cas d'absence de règlement. Nous avons quand
même des observations sur le plan pratique. Dans les faits, en rendant la
médiation obligatoire, tous les dossiers seront prioritaires. Quelle serait
alors la valeur ajoutée si, dans le fond, tous les dossiers passent par la
médiation obligatoirement et qu'au final, bien, ces dossiers sont priorisés?
Deux, le projet de
loi prévoit qu'il y aura des exceptions au caractère obligatoire de la
médiation. Les dossiers qui seront exemptés d'aller en médiation seront-ils
instruits en priorité au même titre que les autres? Nous pensons que oui. Nous pensons que la... cet
article devrait être clarifié, évidemment, dans le projet de règlement, là, à
venir.
Troisièmement, nous
désirons souligner la particularité des modes privés de règlement des
différends en droit de la consommation. En matière de consommation, comme vous
le savez, la médiation se déroule dans un contexte
d'une loi d'ordre public et de déséquilibre de pouvoirs entre les parties.
Donc, il y a les commerçants d'un bord, et, de l'autre bord, on a les
consommateurs. Nous considérons qu'un accompagnement est nécessaire,
spécialement en cas de risque de renoncer à un droit, afin que cela se fasse de
façon libre et éclairée.
Si on prend l'exemple en
médiation familiale, il existe une disposition qui invite un médiateur qui
constate qu'un projet d'entente est susceptible de causer un différend futur ou
un préjudice à l'une des parties de remédier à la situation et, le cas échéant, d'inviter les parties à aller prendre
conseil. Nous pensons qu'une disposition similaire pourrait être prévue
en matière de consommation.
Pour nous, l'accompagnement des consommateurs
est une condition importante pour que la médiation soit obligatoire en matière de consommation. Pour les mêmes raisons, et
considérant le caractère final d'une sentence arbitrale, nous
recommandons que, s'il y a arbitrage en matière de consommation, que le
processus soit chapeauté par l'Office de la protection du consommateur et que
les arbitres aient une expertise en droit de la consommation.
Quatrièmement,
la qualification des médiateurs et arbitres. Considérant que les droits des
justiciables sont en jeu, nous souhaitons que l'exigence voulant que la
médiation soit présidée par un avocat ou un notaire accrédité par son ordre
professionnel soit maintenue. Par ailleurs, en matière de formation de nouveaux
arbitres, nous proposons de s'inspirer de ce qui se fait en médiation familiale
en ce qui a trait à la supervision nécessaire entre l'accréditation temporaire
et l'accréditation permanente.
Et, en
cinquième lieu, nous proposons de clarifier l'article 2 du Code de
procédure civile eu égard au caractère volontaire
des modes privés, afin d'éviter toute apparence de contradiction avec
l'article 13 du projet de loi, qui introduit le caractère
obligatoire de ces modes.
Nous accueillons... En sixième lieu, nous
accueillons très favorablement la possibilité, pour les justiciables, d'obtenir des jugements sur le vu du dossier.
Cependant, considérant que, dans les litiges de consommation, il existe un
déséquilibre des pouvoirs entre les commerçants et les consommateurs. Nous
considérons qu'il serait approprié que le jugement soit rendu sur le vu du
dossier, à la demande du consommateur.
En conclusion, pour que le public adhère au
mécanisme de règlement des différends prévu dans le projet de loi, il est
important qu'il en comprenne l'essence et la pertinence. Par conséquent, si le
message qu'on véhicule ne mentionne que la seule finalité de ces modes privés
est de désengorger les tribunaux, le danger est que ces mécanismes soient
perçus comme une justice à rabais où les droits ne sont pas respectés. Il sera
alors difficile de tirer le plein potentiel
de ces processus. La finalité des modes PRD est non seulement de régler un
problème, mais aussi d'aider à
prendre conscience des éléments à la source d'un problème. Cette prise de
conscience est importante. Une meilleure vulgarisation de modes privés
de règlement des différends au sein de la population est nécessaire. Je vous
remercie.
Le Président (M.
Bachand) : Me N'Kaa, M. Corbeil,
merci infiniment. M. le ministre, s'il vous plaît, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Oui.
M. Corbeil, Me N'Kaa, bonjour. Merci beaucoup de participer aux travaux de
la commission parlementaire sur le projet de loi n° 8.
Je vais répondre à une de vos interrogations. Je
comprends que, quand... Vous donnez l'exemple d'un dossier qui n'irait pas en
médiation obligatoire. Exemple : un litige en matière de violence
conjugale, on n'enverrait pas le litige en
médiation obligatoire, justement, on va l'exclure par voie réglementaire. Vous,
vous nous dites : Il ne devrait pas
être... bien, en fait, il ne devrait pas être défavorisé, il ne devrait pas
être pénalisé, pour être fixé par priorités, parce qu'il n'a pas accédé à la médiation. Et donc, là,
supposons, dans le cadre de la procédure simplifiée, là, à la Cour du Québec,
donc, on n'est pas aux petites créances, donc, dans ce cas-là, on ne devrait
pas pénaliser les individus à cause de la nature du dossier, parce qu'on
l'a nommément exclu. Donc, c'est bien ça?
Mme N'Kaa (Clarisse) : C'est
exactement ça. Parce que, voilà, le dossier a été exclu par règlement, et ce
n'était vraiment pas la volonté des parties, dans ce cas-là.
M. Jolin-Barrette : OK. Bien,
on se prend une note par rapport à ça, c'est un très bon commentaire, donc, on
va s'assurer de spécifier le tout dans le cadre du règlement. Donc, en termes
de procédure simplifiée à la Cour du Québec,
je comprends que vous accueillez favorablement le fait, pour les justiciables,
qu'il n'y ait plus d'interrogatoire en bas de 50 000 $, que
les tribunaux peuvent rendre jugement sur le vu du dossier à 3 000 $,
la procédure aussi, qui est maximum cinq pages, puis la défense, maximum deux
pages également, vous êtes d'accord avec ça. Donc, ces éléments-là, vous trouvez que c'est favorable aux justiciables, puis ça
génère moins de coûts pour lui, là. C'est pour ça que vous appuyez ces
mesures-là?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : Oui, en effet, on considère que, pour parler
spécifiquement des cas des consommateurs, tu sais, pour tous... pour
ceux qui ont l'habitude des cours et tribunaux, ce n'est pas... c'est facile
d'y aller, mais, pour un consommateur qui
est à sa première expérience, ça peut être très intimidant. Alors, de pouvoir
faciliter l'accès, je trouve que c'est un bon pas parce que, premièrement, il y
aura moins de travail, ils auront peut être moins tendance à aller voir des avocats, parce qu'on sait que ça
coûte des sous, puis, deuxièmement, ça enlève un stress qui, tu sais, je veux dire,
qui vient avec le fait de présenter une demande en justice. Donc, nous, on
considère que c'est une... ce sont des mesures qui sont... qui sont bonnes.
Et nous, la mesure-phare, c'est vraiment celle
de pouvoir rendre des jugements sur le vu du dossier. Alors, ce que nous, on
demande au ministre, c'est vraiment que cela soit fait à la demande des
consommateurs, parce qu'on ne veut pas que
les consommateurs soient défavorisés parce qu'un commerçant, par exemple,
refuse d'y aller. Donc, il y a tellement... je suis sûre que vous êtes
au courant, il y a tellement la théorie sur les obstacles rencontrés par les
consommateurs pour accéder à la justice, et, même, c'est ce qui amène
beaucoup... beaucoup de consommateurs à ne même pas se
rendre à la cour et à abandonner leur recours. Et on ne veut pas ça. Donc, dans
un cas comme ça, nous pensons qu'il serait préférable qu'à la demande du consommateur
qu'un jugement soit rendu sur le vu du dossier.
M.
Jolin-Barrette : OK. Je comprends très bien. Vous aviez une
préoccupation également avec les dossiers qui sont sur la plateforme Parle,
actuellement.Ça a été développé, dans le fond, par le Laboratoire de
cyberjustice. Là, l'Office de la protection du consommateur en a fait l'acquisition. Donc, ça fait partie des
réflexions. Vous savez, en Colombie-Britannique,
ce qu'ils ont fait, ils ont un tribunal virtuel, maintenant, notamment pour les
litiges en matière de consommation. On a peut-être des enseignements à
tirer de ce qui a été fait en Colombie-Britannique depuis les dernières années, c'est une avenue que je trouve
intéressante. Là, on débute vraiment avec des médiateurs pour les petites
créances de moins de 5 000 $, mais
éventuellement on pourrait se diriger vers une solution informatique de cette
façon-là.
Tout à l'heure, on
nous a dit : Écoutez, il y a un avantage à avoir la médiation obligatoire
aux petites créances. Et là je veux vous
poser une question relativement à votre expertise. Les grandes compagnies, il y
en a certaines qui ont participé à Parle, qui se sont inscrites, mais ça
arrive, des fois, on nous a dit tantôt, il y a des grandes compagnies
qui ne veulent pas aller en médiation puis qui amènent les gens directement à
procès. Donc, le fait d'avoir une médiation
obligatoire, pensez-vous que ça va favoriser les justiciables, les personnes
physiques, justement, pour que, quand il y a des grands groupes, ils
vont pouvoir s'asseoir en médiation puis qu'on va se retrouver avec davantage
de règlements au niveau de la médiation pour les justiciables?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : Merci, M. le ministre. Et le fait que vous soulevez est
tellement important. Puis ce qui se passe actuellement avec les compagnies qui
refusent de régler en médiation, bien, se passait davantage il y a quelques
années. Historiquement, comme vous le savez, il y a eu plusieurs tentatives, à
l'Office de la protection du consommateur, juste pour pouvoir offrir la
médiation en matière de litige, quand il était question de la Loi sur la
protection du consommateur. Sauf qu'historiquement les commerçants... ce sont
les commerçants qui refusaient d'aller en médiation. Et, à une certaine époque,
dans un des rapports rendus publics par l'Office de la protection du consommateur, on recommandait, en fait, que la
médiation soit obligatoire, à la demande du consommateur. Et actuellement,
évidemment, ce qui est suggéré dans... ce
qui est prévu dans le projet de loi n° 8, c'est de rendre
obligatoire la médiation dans tous les cas.
Dans un cas comme
celui-là, ce n'est pas qu'on s'oppose. Nous, ce qu'on dit, c'est que les
consommateurs ont besoin d'accompagnement. Les consommateurs ont souvent besoin
d'informations pour pouvoir être en mesure de bien... de bien défendre leur
situation. Tu sais, vous savez très bien qu'en médiation, oui, c'est vrai qu'il
y a un médiateur qui est là pour équilibrer les pouvoirs, mais les parties ne
sont pas représentées. Donc, ça prend un accompagnement,
de l'information, une préparation, avant d'aller en médiation, tu sais, comment
est-ce qu'on négocie, qu'est-ce que je pourrais aller tirer de la
médiation. Alors, ça, ça met les consommateurs en confiance pour pouvoir être
en mesure de traiter d'égal à égal avec les consommateurs.
• (16 heures) •
Actuellement, par
exemple, si on prend l'exemple de la plateforme Parle, il y a déjà quand même
de l'information qui est offerte aux consommateurs, et quand on va sur le site
de l'office, il y a des résumés de jugements. Donc, les justiciables... bien,
les consommateurs qui vont sur cette plateforme ont quand même des outils. Mais tous les consommateurs qui se rendent à la
Cour des petites créances ne passent pas par l'Office de la protection du consommateur. Certains ne connaissent même pas
l'Office de la protection du consommateur. Donc, dans ce cas-là, ça
prendrait un certain accompagnement. Et qui ferait cet accompagnement-là? Bien,
ce sont les associations de consommateurs.
Alors, je pense que ça vaut la peine, tu sais? Oui, la médiation peut être
obligatoire, mais ça prendrait un accompagnement pour les consommateurs.
M.
Jolin-Barrette : OK. Je comprends très bien votre point. Est-ce que
vous êtes d'accord avec le fait que, si on envoie davantage de dossiers en
médiation, ça risque de désengorger le système de justice?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : En fait, je pense que... Écoutez, normalement, si les
dossiers vont en médiation et qu'ils se règlent en médiation, la conséquence
logique est que ça désengorge les tribunaux.
Maintenant, ce qu'on
dit, c'est qu'il ne faudrait pas que ce soit la seule finalité qu'on attende de
la médiation. Oui, on sait que la médiation a le potentiel de désengorger les
tribunaux s'il y a entente. Maintenant, si on présente cette médiation-là comme
seule possibilité de pouvoir désengorger les tribunaux, bien, la réaction des
gens va être de ne pas y adhérer. Pourquoi?
Parce qu'ils vont avoir l'impression de passer par un système qui est un
système à rabais, ce qui n'est pas tout à fait vrai, parce qu'il y a des
dossiers qui sont bons pour un jugement puis il y a des dossiers qui sont bons
aussi pour la médiation. Ce qu'on va chercher en médiation, bien, on peut très
bien en tirer le plein potentiel en expliquant très bien la différence entre ce
qu'on pourrait retirer en médiation et ce qu'on pourrait retirer devant un juge. La médiation s'adresse à un
conflit, alors qu'un juge va traiter du litige, qui est la traduction juridique
du problème.
Donc, en médiation,
on tient compte de tout ce qui touche, tout ce qui entoure le problème qui est
vécu par les personnes qui sont en médiation, et, justement, les solutions qui
sont créées relèvent des problèmes qui auront été nommés durant la séance de
médiation, ce qui fait de la médiation un processus qui pourrait être très
riche et pour lequel les parties pourraient en sortir très gagnantes.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie. Juste avant de céder la parole à mes collègues, j'aurais une question
pratico-pratique, là. Vous, vous conseillez
beaucoup les consommateurs en matière de litiges en matière de consommation.
Qu'est-ce qui ressort
le plus dans les gens que vous aidez, que vous accompagnez en matière de
litiges en matière de consommation? C'est quels types de contrats de
consommation que vous... que... pour lesquels vous êtes le plus sollicités?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien,
écoutez, on entend un peu de tout, mais, je vous dirais, la grande gagnante parmi les questions, c'est beaucoup la garantie
légale qui revient souvent. Donc, oui, on a une très belle loi sur la protection
du consommateur. Maintenant, dans les faits, comment faire honorer la garantie
légale, ce n'est pas évident. Tu sais, les consommateurs peuvent se rendre chez
un commerçant puis lui expliquer la loi. Des fois, ils ne comprennent tout simplement pas. Alors, c'est pour ça qu'un
accompagnement va permettre, premièrement, au consommateur de comprendre, bon,
premièrement, c'est quoi, la loi, puis, deuxièmement, qu'est-ce que ça signifie
dans sa situation, et comment le consommateur pourrait l'obtenir dans le cas
d'une médiation. C'est un peu ça, là.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie. Merci pour votre participation en commission.
Le Président (M.
Bachand) :
Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré,
s'il vous plaît.
Mme Bourassa : J'ai deux petites
questions pour vous. D'abord, dans votre mémoire, page 7, vous parlez de
la formation des arbitres et des médiateurs. Vous parlez d'une formation qui
est adéquate, d'expérience significative. Donc,
si je comprends bien, pour vous, la formation, elle est bonne, ce n'est pas ça,
un enjeu, mais vous aimeriez un style de mentorat par la suite.
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien, en
fait, pour ce qui est de l'arbitrage, dans le fond, c'est un peu nouveau, OK?
La médiation, c'est quand même un peu plus connu que l'arbitrage. Puis les
gens, quand ils vont en arbitrage, souvent, vont rechercher l'expertise, et on
sait, quand même, qu'en matière de consommation on est dans le cadre d'une loi d'ordre public. Donc, c'est important
que les arbitres puissent connaître bien la loi pour éviter que... bien, pour
s'assurer que les droits vont être
respectés, puis les nouveaux arbitres... Bon, on comprend quand même que
l'arbitrage, c'est un processus qui est quasi judiciaire. Donc, un
nouvel arbitre a peut-être besoin d'un certain mentorat.
D'ailleurs, il se fait de plus... Tu sais, dans
certains domaines, comme en matière sportive, il y a un mentorat. Dans le mémoire, ce dont on parlait, c'était... on
a parlé de l'exemple de la médiation familiale. En médiation familiale, les
médiateurs suivent une formation de 60 heures, obtiennent une
accréditation qui est temporaire et ont l'obligation de pouvoir réaliser
10 mandats sous la supervision d'un médiateur qui a une accréditation
temporaire et qui a déjà réalisé x nombre, mettons, 40 mandats de
médiation. Alors, à l'intérieur de cette période-là, le médiateur qui a une
accréditation temporaire a l'opportunité de pouvoir bénéficier du mentorat de
son superviseur, et d'en apprendre davantage, et d'être plus à l'aise quand il
va s'asseoir puis être en mesure, dans le fond, de pouvoir présider seul.
Mme Bourassa : Ma deuxième
question :On dit toujours qu'un règlement négocié vaut mieux qu'un
règlement imposé; justement, pour le contribuable, pour le citoyen, quels sont
les avantages à être partie prenante des démarches
dans une médiation, de pouvoir apporter aussi son grain de sel puis d'avoir
l'impression d'avoir un certain contrôle sur sa cause, selon vous?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien,
écoutez, c'est sûr que chaque cas est un cas d'espèce. Bon, vous l'avez dit, la
négociation est parfois meilleure parce que ça ne sert à rien d'avoir un
jugement que l'on peut juste encadrer chez nous,
là. Alors, dans le cadre d'un processus qui n'est pas un... qui est un
processus volontaire, l'avantage, c'est que les gens, quand ils
s'engagent, ils sont justement portés à respecter leurs engagements,
contrairement à une décision qui est imposée,
par exemple. Alors, ça, c'en est un, avantage. Puis, deuxièmement, dans les
litiges de consommation, tu sais, des fois, c'est des situations au quotidien,
puis on a besoin d'avoir un règlement rapidement. Mon frigo brise, bien, je veux
avoir une solution rapidement. Est-ce que je veux attendre deux ans avant
d'être entendu par un juge? Non. Alors, quand il y a une possibilité pour les
justiciables de pouvoir essayer... Par exemple, Parle, il y a la possibilité,
d'abord, de négocier avant d'aller en médiation. Donc, les gens peuvent obtenir
des solutions rapidement à leur problème.
Mme Bourassa : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Saint-Jean, 2 min 50 s.
M. Lemieux : Merci, M. le Président.
Bonjour, monsieur, madame. Vous en avez parlé avec le ministre tout à l'heure,
mais je veux revenir là-dessus parce que c'est important pour les consommateurs
et pour la loi. J'espère qu'on va l'adopter, le PL n° 8.
On s'est fait dire ce matin, et je l'avais bien compris, que les compagnies...
je ne peux pas utiliser le mot «abusent» parce que je... En tout cas, les
compagnies faisaient souvent... refusaient souvent de se présenter en
médiation, ce qui forçait un peu le consommateur à courir après, puis qu'au
bout du compte il y avait beaucoup d'abandons. Vous nous avez expliqué ça et la
logique de ça, autour de ce que la médiation obligatoire va forcer le jeu. Je suis curieux. Juste pour que
vous nous donniez des arguments quand on va négocier article par article,
je suis curieux de savoir jusqu'à quel point
c'est commun, jusqu'à quel point il y en a beaucoup. Il y en a-tu beaucoup, des
abandons de recours? Il y en a-tu beaucoup, des cas où on pourrait, si ça
passait à la médiation, forcer la compagnie, minimalement, à commencer à
discuter au moins?
Mme
N'Kaa (Clarisse) : Moi, je vous dirais que c'était vrai. C'était plus
vrai il y a quelques années. Donc, comme on peut... Je pense que le rapport de
l'office date peut-être de 2010, si je ne m'abuse, mais aujourd'hui l'office a
été capable d'aller chercher quand même des commerçants participant à la
plateforme. Donc, il y a quand même une ouverture par rapport à il y a
10 ans ou il y a 15 ans. Les commerçants ont évolué. Les commerçants
souhaitent... Tu sais, je veux dire, ce n'est pas tous les commerçants non plus
qui ne souhaitent pas régler. Quand ils vont obtenir un jugement, ce n'est pas
toujours en leur faveur. Alors, je pense qu'il faut faire comprendre aux gens,
aussi bien aux consommateurs qu'aux commerçants, la valeur ajoutée, tu sais,
d'aller en médiation. Tu sais, il y a, par exemple, toute la question de la
réputation aussi, là.
M. Lemieux : Mon
temps est presque écoulé, mais, une fois que vous m'avez dit ça, vous me posez
la question, alors je vous la pose. Est-ce que ça vaut la peine de pousser la
médiation? Est-ce que ça va faire tomber, entre guillemets, le dernier morceau
des récalcitrants?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien, je pense que ça
vaut la peine quand même d'offrir la médiation parce qu'il y a toujours
une possibilité de régler. Maintenant, je pense qu'il faut quand même qu'il y
ait des approches comme... Je pense que la
réussite de Parle, c'est parce que l'office a fait des démarches en amont pour
pouvoir intéresser les commerçants.
M. Lemieux : C'est
très clair. Merci.
• (16 h 10) •
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.
M. Morin : Merci, M. le Président. Bon après-midi, Me N'Kaa, M. Corbeil.
Très heureux que vous soyez là. Merci. Merci pour votre mémoire
également.
On parle, dans le
projet de loi, et vous le soulevez dans votre mémoire, de toute la question de
la médiation obligatoire, et, en fait, est-ce que ça existe, de la médiation
obligatoire, ou c'est un concept qui, en soi, ne peut pas fonctionner. Puis vous soulevez un élément
intéressant en lien avec l'esprit du Code
de procédure civile, où on favorise
la médiation, mais sur une base volontaire, et vous soulevez qu'il semble y
avoir une contradiction ou, enfin, une incohérence entre le projet de loi et le
Code de procédure civile. On a besoin évidemment de vos lumières, de votre
expertise pour voir comment on pourrait bonifier éventuellement le projet de
loi puis faire des recommandations au gouvernement. Comment vous voyez ça? Si
on avait à modifier quelque chose, qu'est-ce que vous nous suggéreriez?
Mme N'Kaa (Clarisse) : OK, en fait, je pense que
vous référez à la page 8 de notre mémoire. Pour le bénéfice de tout
le monde, en fait, ce qu'on a relevé, c'est que, bon, l'article 2 du Code
de procédure civile prévoit, dans le fond...
en fait, énonce que la médiation... une procédure de prévention et règlement
des différends est volontaire, dans un sens, OK, alors que l'article 13
actuel dit aux... énonce que les parties doivent privilégier la médiation et
l'arbitrage.
Donc, on comprend que
l'idée, ici, c'est de pouvoir mettre en oeuvre l'obligation de considérer les
modes de prévention et règlement des différends prévus à l'article 1, sauf
que, quand on lit l'article 13 et l'article 2, l'article 13 du projet de loi et l'article 2, on a
l'impression qu'il y a une contradiction. La façon de régler ça pourrait tout
simplement être «sauf des cas prévus par règlement», pour pouvoir...
pour que ce soit clair. Je sais qu'à l'article 15 du projet de loi il y a
des... on énonce clairement qu'il va y avoir des exceptions dans le règlement
pour ce qui est de la médiation obligatoire, mais on est loin. Quand une
personne lit la loi, bien, ce qu'il comprend, ce que... bien, le processus de médiation est volontaire dans tous les cas, et il
n'y aura aucune exception. Donc, pour pallier à ça, je pense qu'il faudrait
simplement ajouter un élément comme ça puis ça devrait régler la chose.
M. Morin : Parfait.
Je vous remercie. Maintenant, dans votre expérience de la médiation dans la
protection, l'information que vous faites pour les consommateurs, j'imagine
que, de temps à autre, vous devez aussi transiger avec des commerçants ou des compagnies. Règle générale, en médiation, ça
donne des résultats? Les compagnies ne veulent pas? Le consommateur est pris tout seul? Dans votre pratique, quels sont
les enjeux que vous rencontrez à ce niveau-là?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : Bien, écoutez, moi, je vous dirais, la plupart... dans
mon expérience à moi, la plupart des
commerçants qui participent de façon volontaire à une médiation, ils y vont
parce qu'ils veulent régler, et, généralement, quand un commerçant prend
un engagement, il le respecte. L'enjeu, c'est la... l'enjeu principal, c'est
souvent des commerçants ou des fabricants qui sont situés hors Québec, qui
connaissent peut-être peu la Loi sur la protection
du consommateur, l'application,
qu'ils vont, des fois, interpréter d'une façon erronée la loi et risquer de
faire perdre des droits aux consommateurs. Donc, cela demande peut-être
plus d'explications puis plus de travail, là, pour qu'ils comprennent c'est
quoi qui s'applique au Québec.
M. Morin : Je
vous remercie. À la page 9 de votre mémoire, vous soulevez un point
important, et vous devez le vivre, le rencontrer dans votre pratique,
j'imagine, à l'effet qu'il serait bénéfique que les consommateurs qui
participent à des séances soient bien accompagnés, considérant le risque de renoncer
à des droits, puis évidemment on veut qu'une
renonciation soit éclairée. Est-ce que vous avez des suggestions que l'on
pourrait insérer dans le projet de loi pour s'assurer que, quand le
consommateur... ou bien il est accompagné, ou bien, s'il y a renonciation, il y
a un mécanisme qui fait qu'il comprend clairement ce à quoi il va s'engager,
pour protéger le consommateur?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : Bon, alors, bon, premièrement, pour ce qui est de
l'accompagnement, comme je l'ai dit au départ, je pense qu'il y a des
associations de consommateurs qui peuvent très bien accompagner les
consommateurs qui s'en vont en médiation. Puis, deuxièmement, il peut être
possible, pour un médiateur qui fait le constat qu'il y a risque de perte des
droits, de simplement l'indiquer, parce qu'on comprend que la médiation, tu
sais, c'est un espace où est-ce que les gens, normalement, sont supposés être
égaux, mais, dans un cas où est-ce qu'il y a un déséquilibre de pouvoir, le
médiateur doit agir, et donc il doit être directif et... pour s'assurer qu'il
n'y a pas de perte de droits, ne serait-ce que pour l'expliquer aux parties,
et, s'il y a vraiment un risque, je pense que le médiateur pourrait simplement
se retirer ou demander aux parties d'aller... tu sais, d'aller s'informer,
d'aller s'informer avant et revenir, par la suite, en médiation pour prendre
une décision sur une base d'une information qui est juste. Je ne sais pas si ça
répond à votre question.
M. Morin : Oui, je vous remercie. À
la page 11 de votre mémoire, en lien avec le jugement sur le vu, le projet de loi, présentement, indique que le
jugement peut être rendu sur le consentement des parties. Vous, vous suggérez que
le jugement soit rendu à la demande du consommateur et non pas des parties.
Pouvez-vous expliquer davantage?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien, comme
je l'ai dit au ministre de la Justice tantôt... puis on a évoqué toutes les difficultés, OK, historiquement, qu'on avait à
tenter de régler, mettons, d'aller... d'amener les commerçants en médiation,
ce que les consommateurs disaient, ce que, bon, eux autres, ils étaient
ouverts... mais, quand venait le temps d'aller en médiation, les commerçants ne
le souhaitaient pas, ce qui fait qu'il y avait moins de médiation qui se
faisait. Nous ne voulons pas que la même situation se reproduise dans le cas de
ce mécanisme. Nous considérons que c'est un bon mécanisme et nous souhaitons
que les consommateurs puissent en bénéficier.
Pourquoi que c'est un bon mécanisme? Parce que,
premièrement, ça fait gagner du temps, puis, deuxièmement, il y a tellement des
barrières, là, d'accès à la justice, et le consommateur... que de pouvoir... de
ne pas être obligé de se rendre en cour,
bien, c'est déjà, en soi, une façon de pouvoir pallier à ces obstacles-là.
Donc, nous souhaitons que ce soit fait à la demande du consommateur
parce que, premièrement, on est dans un cas d'ordre public, et la Loi sur la protection du consommateur est là pour pouvoir
équilibrer les pouvoirs, normalement. Alors, c'est un peu, pour nous,
une façon d'équilibrer les pouvoirs.
M. Morin : Je vous remercie. Dans
votre expérience, parce qu'évidemment avec le projet de loi tel qu'il est on
met beaucoup l'accent sur tous les modes alternatifs de règlement des conflits,
médiation, conciliation, selon vous, est-ce
qu'il y a suffisamment de médiateurs? Parce qu'évidemment l'idée, c'est de
désengorger les tribunaux, mais, si on envoie des dossiers ailleurs,
puis qu'il n'y a pas assez de monde pour traiter, ça ne va pas avancer l'accès
à la justice. Alors, dans votre expérience,
pensez-vous qu'il y a une chose qui devrait être faite de ce côté-là? Puis,
vous, comme organisme, est-ce que
vous pensez que vous allez avoir un surcroît de demandes de conseils, compte
tenu de l'objectif visé par le projet de loi?
Mme N'Kaa (Clarisse) : C'est clair
que c'est un bon projet de loi, mais c'est clair que, quand il va être mis en
application, bien, il va y avoir des ressources à mettre parce que les... Pour
ce qui est des médiateurs, il y a quand même... Et je ne sais pas combien de
médiateurs il y a au Québec, tu sais, je vais être transparente avec vous, mais
par contre on sait... Par exemple, au niveau de l'arbitrage, il suffit d'aller
sur le site de l'Institut de médiation et d'arbitrage
du Québec pour constater qu'il y a 14 % seulement d'arbitres parmi les
membres de l'Institut de médiation et d'arbitrage du Québec. Donc, il y
a peu... Je pense qu'il y a encore plus de besoins en matière d'arbitrage qu'en
matière de médiation parce que la médiation est un peu plus connue. Il y a
beaucoup plus d'avocats et de notaires qui sont sensibilisés à la médiation
puis qui sont formés à la médiation.
Il y a quand même plusieurs projets, au niveau
de la médiation, qui impliquent les médiateurs et les notaires. Je pense aux médiations le jour de l'audience. Je
pense aux médiations en gestion d'instance. Je pense... En fait, il y a
tellement eu de projets pour faire connaître la médiation qu'il y a eu... je
pense qu'il y a eu plus de formation depuis ce temps-là, mais, pour ce qui est
de l'arbitrage, ce n'est pas la même... ce n'est pas le cas. Et, pour nous, en
tant qu'association de consommateurs, c'est sûr que, premièrement, avec
l'indexation, là, de la Cour du Québec... de la Cour des petites créances,
c'est bien, mais sauf que ça va générer des besoins. Nous, c'est sûr que ça va
augmenter nos... les demandes, et
donc on va être... tu sais, on va avoir besoin d'augmenter nos ressources aussi
pour être en mesure de répondre à la demande. C'est exactement ça. Donc,
voilà.
M. Morin : Merci beaucoup. Merci, M.
le Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée
de Sherbrooke, s'il vous plaît.
• (16 h 20) •
Mme Labrie : Merci, M. le Président.
J'ai accroché en particulier... Dans votre présentation, quand vous avez dit qu'il y avait un danger que ce soit perçu
comme une justice à rabais parce qu'on évite d'aller devant les tribunaux, ça
fait écho, quand même, à ce qui a été nommé par les Centres de justice de
proximité, là, qui nous disaient que les gens
voulaient être entendus par un juge. Donc, c'est une préoccupation qui est
importante, puis, dans votre mémoire, vous dites qu'il faut mieux
vulgariser les modes de règlement des différends. J'aimerais ça, peut-être, que
vous soyez un peu plus clairs sur vos
attentes envers le ministre à cet égard-là. Est-ce que vous souhaitez,
vous-même, par exemple, comme
organisation, et les autres organisations similaires à la vôtre, être mieux
financés pour pouvoir faire vous-même cette
vulgarisation? Est-ce que vous vous attendez à ce que le ministère prenne en
charge une campagne d'information nationale? Est-ce que vous vous
attendez à ce que le ministère produise de la documentation? Quelle forme ça
peut prendre, pour vous, ces actions-là, concrètes, là, pour éviter que les
gens aient une impression de justice à rabais, par exemple?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Oui, je pense
que c'est un ensemble de toutes ces choses, là, parce qu'il faut... oui, la
médiation, pour beaucoup... Pour les professionnels, bon, on connaît la
médiation, mais, dans la population, il y a beaucoup de gens qui pensent qu'on
n'a que la médiation, mais qui ne savent pas c'est quoi, la médiation, en
réalité. Donc, je pense que c'est la somme de toutes ces actions qui va faire
en sorte que les gens vont mieux comprendre de quoi il est question. Oui, ça prendrait, effectivement, un financement
pour des organismes comme les nôtres, qui vont pouvoir être en mesure de bien
vulgariser la médiation aussi bien par des pistes d'information que par des
rencontres.
Tu sais, je veux dire, nous, on a réalisé...
Comme vous l'avez vu, en 2018, on a déposé un projet de recherche au Fonds
Accès Justice sur le modèle idéal en médiation de consommation. Alors, on a
réfléchi. On a préparé des fiches, par exemple, de préparation pour les
consommateurs qui se préparent à aller en médiation afin justement de leur permettre, premièrement, de
comprendre de quoi il est question, puis, deuxièmement, d'être à l'aise. Alors,
on peut... tu sais, je veux dire, on pourrait très bien, si on est financés,
être en mesure d'offrir ça. Maintenant, on
n'est pas... Tu sais, je veux dire, ça prend plusieurs actions. Le ministère de
la Justice devrait aussi mieux vulgariser.
Pourquoi est-ce que j'ai mentionné ce point?
Parce que, quand l'annonce du projet de loi est arrivée, ce qu'on a vu, ce qui
a été véhiculé dans les médias, c'est : Bon, le Québec propose de
désengorger les tribunaux par la médiation et l'arbitrage. Alors, on voit très
bien que, même dans les médias, ce qui est compris, c'est que c'est uniquement
une solution technique à un problème technique, mais ce n'est pas ça, la
médiation. On peut obtenir, effectivement, une autre justice par la médiation,
puis il faut que les gens comprennent ça. Il y a des dossiers... tu sais, il y a des collègues médiateurs, tu sais,
qui ont pu régler des dossiers qui étaient prescrits, donc ce qui signifie
qu'on perd le droit par l'écoulement du temps.
Donc, si on y va avec la norme juridique, ce
dossier-là ne sera jamais entendu par le juge, et la personne n'aurait même pas
eu la possibilité d'obtenir ce qu'elle souhaite, mais, parce que ça s'est fait
en médiation, les parties ont décidé de
pouvoir discuter, donc, de pouvoir régler leur situation à partir d'une autre
norme, qui est peut-être une norme morale. Donc, ils ont décidé : OK,
parfait, c'est prescrit, mais, quand même, ça traite... pour toutes sortes
de raisons, et cela ne signifie pas que, parce qu'on est en médiation, la loi
ne s'applique pas. Non. La loi s'applique, mais les autres normes aussi
s'appliquent, et on respecte l'ordre public. Donc, je pense que c'est très
important que les gens comprennent ça puis que les gens comprennent ce que ça
signifie, justement, dans leur dossier spécifique.
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup. Merci
infiniment. Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Merci
beaucoup. Merci de votre participation. Vos réponses sont très, très
éclairantes. Deux petites questions,
la première concernant les preuves authentiques. Dans votre mémoire, là, vous
faites la suggestion à l'effet que l'article 535.10 ne soit pas
introduit au Code de procédure civile du Québec. Ce qu'on en comprend, c'est
que l'intégrité va être présumée reconnue, puis ça, ça pourrait être un point
embêtant?
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien, en
fait, on cherchait de l'information, OK, nous, et notre compréhension, c'est
que, oui, on veut simplifier. On comprend qu'on veut simplifier la procédure,
mais il ne faut pas que ce soit fait au détriment des gens, au détriment de
l'authenticité des documents. Alors, on est à l'ère Internet. C'est très facile
de falsifier les documents. Alors, c'est quoi, l'intérêt de mettre cet article
dans le code? C'est ça, notre question, parce que, s'il n'y a pas d'intérêt,
même si les gens ne... tu sais, il n'y a pas de contestation en lien avec
l'authenticité des documents, tu sais, ce n'est pas nécessaire. À notre avis,
selon notre compréhension à ce jour, cet article-là n'est pas nécessaire pour
la protection des gens.
Mme Nichols : Ça
fait que la solution en tant que telle, c'est de reconnaître le document, là,
dans le cadre de la médiation, mais...
Mme N'Kaa (Clarisse) : Bien,
c'est de le laisser tel qu'il est, c'est de laisser le Code de procédure civile
tel qu'il est.
Mme Nichols : OK,
parfait. Une autre petite question, c'est parce qu'on a parlé beaucoup d'accompagnement.
On disait que vous appuyez, entre autres, la
médiation obligatoire, à condition d'un accompagnement... d'un accompagnement. On
parle d'accompagnement, puis je comprends que vous pouvez aussi accompagner les
gens. L'accompagnement, c'est quoi, c'est l'avis juridique, c'est
l'accompagnement à tous les niveaux, l'accompagnement vers la médiation? Je ne
suis juste pas sûre du type d'accompagnement que vous parlez.
Mme N'Kaa (Clarisse) : Oui,
bien sûr. Écoutez, bon, premièrement, chaque cas est un cas d'espèce, mais,
quand on parle d'accompagnement, ce qu'on a dit dans notre mémoire, c'est que,
premièrement, il y a beaucoup de... il peut... il y a risque de renonciation à
des droits, donc c'est de pouvoir expliquer très clairement le droit applicable
à la situation de la personne, dans un premier temps, puis comment il
s'applique dans sa situation, parce que c'est beau d'avoir... de référer une
personne à l'article 37, sur la garantie légale, mais c'est quoi pour lui?
Est-ce que c'est une réparation? Est-ce que c'est un
remboursement? Puis c'est un remboursement de quel ordre? Donc, ça prend quand même des... Tu sais, je veux dire, il y a des
jugements. Tu sais, il faut aller chercher des jugements pour être en mesure
de le lui expliquer. Il y a cette information-là.
Mme Nichols :
Donc, l'accompagnement, ça va
être une personne-ressource à qui il peut se référer pour avoir
l'information légale, juridique?
Mme N'Kaa
(Clarisse) : Oui, il y a ça, puis il y a aussi la possibilité de
pouvoir préparer la personne à la médiation pour que l'on puisse en tirer le
plein potentiel. Tu sais, un exemple, tu sais, on avait préparé des petites
fiches, OK? Donc, on explique... On l'aide un peu à préparer son dossier, mais
aussi à comment est-ce qu'on peut atteindre un objectif qui est beaucoup plus
de l'ordre sociétal, OK? Si je prends un exemple simple, là, en matière de
consommation, les gens vont souvent se plaindre du service à la clientèle. Bon,
on sait très bien que, dans la Loi sur la protection du consommateur, il n'y a
pas vraiment une loi qui demande aux commerçants d'être supergentils, là, avec
les gens, mais, ça, si on l'adresse en médiation, les gens... tu sais, le
commerçant, il va... tu sais, il va l'entendre, puis, s'il l'entend souvent, bien, ça peut l'amener peut-être à modifier
ses pratiques. Donc, ça, ça va bénéficier... à qui ça va bénéficier? À la communauté, en plus du
consommateur qui va en retirer quelque chose. Donc, c'est un peu comme
ça qu'on voit les choses.
Mme Nichols :
Merci.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Sur ce, Me N'Kaa, M. Corbeil, merci beaucoup
d'avoir été avec nous. C'est extrêmement apprécié.
Et, sur ce, je
suspends les travaux quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à
16 h 28)
(Reprise à 16 h 30)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Il me fait plaisir
d'accueillir Me Michel Beauchamp, notaire émérite. Alors, Me Beauchamp,
merci beaucoup encore une fois d'être avec nous aujourd'hui. C'est très
apprécié.
Alors,
je vous cède la parole. Vous avez 10 minutes de présentation, et après on
aura un échange avec les membres de la commission. Alors, la parole est
à vous, Me Beauchamp.
M. Michel Beauchamp
M. Beauchamp (Michel) : Merci beaucoup, M. le
Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés membres de la commission, je
voudrais tout d'abord remercier la commission de m'avoir invité à faire part de
mes commentaires sur le projet de loi n° 8.
Je
me présente, Michel Beauchamp, notaire de pratique privée depuis 33 ans.
Je suis également chargé de cours au baccalauréat en droit à la Faculté
de droit de l'Université de Montréal depuis 30 ans. Je suis également
auteur et co-auteur de plusieurs ouvrages dans divers domaines de droit civil
québécois et en procédure civile, notamment le Précis de procédure civile,
du Pr Ferland et du juge Emery, et du Grand collectif, qui regroupe
l'expertise de 28 auteurs, juges, professeurs et avocats.
Mon propos,
aujourd'hui, sera divisé en deux parties. Une première partie brève concernera
les articles du projet de loi sur la médiation et l'arbitrage, et la seconde
sera sur l'article 30, qui modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires
afin d'ajouter les notaires comme possibles candidats à la magistrature.
J'aimerais, avant de vous exposer mon point de vue, féliciter le ministre de la
Justice pour cette initiative de changement. En lisant attentivement le projet
de loi, on peut y constater de belles avancées... pour l'amélioration, pardon,
et l'accessibilité à la justice.
Commençons, tout
d'abord, par la médiation et l'arbitrage. D'emblée, je souligne la proposition
du projet de loi de simplifier certaines
procédures à la Cour du Québec afin d'accélérer le traitement des dossiers. De plus,
le projet de loi réitère l'importance des modes alternatifs de
résolution des conflits. Lors de la réforme de la procédure civile, à laquelle
j'ai participé à partir de 2009, il était clair qu'il fallait, autant que faire
se peut, favoriser et encourager la résolution des conflits par des modes
alternatifs. Un citoyen qui participe activement à la résolution de son conflit
en sort toujours gagnant. La médiation permet aux citoyens de pouvoir
s'exprimer pleinement que dans un cadre plus formel.
De plus, comme la médiation obligatoire a fait ses preuves en matière familiale
depuis de nombreuses années, nous pouvons penser que les effets en
matière civile seront les mêmes.
J'arrive maintenant
au deuxième sujet de ma présentation, les notaires candidats à la magistrature.
L'article 30 du projet de loi propose d'ajouter à l'article 87 de la
Loi sur les tribunaux judiciaires le mot «notaire». Par cet ajout, un notaire pourrait déposer sa candidature afin d'occuper
un poste de juge à la Cour du Québec. Je crois qu'il est important, ici, de
préciser que cette modification ne constitue pas une deuxième voie pour l'accès
à la magistrature. Un notaire qui désire devenir juge à la Cour du Québec
devra, comme l'avocat, déposer sa candidature. Cette candidature sera évoluée... évaluée, pardon, au mérite, suivant
les règles prévues au Règlement sur la procédure de sélection des
candidats à la fonction de juge de la Cour du Québec.
Les critères de sélection
se trouvent à l'article 25 du règlement. Je me permets, ici, de vous faire
lecture de ces articles :
«Pour évaluer la candidature d'un candidat, le
comité tient compte des critères suivants :
«les compétences du candidat, comprenant :
«ses qualités personnelles et intellectuelles,
son intégrité, ses connaissances, qui ne peuvent comprendre sa connaissance d'une langue autre que la langue
officielle, si cette exigence est prévue dans l'avis, et son expérience
générale;
«le degré de ses connaissances juridiques et son
expérience dans les domaines du droit dans lesquels il serait appelé à exercer
ses fonctions;
«sa capacité de jugement, sa perspicacité, sa
pondération, sa capacité d'établir des priorités et de rendre une décision dans un délai raisonnable ainsi que la
qualité de son expression dans la langue de la justice au Québec [qu'est]
le français;
«la conception que le candidat se fait de la
fonction de juge;
«la motivation du candidat pour exercer cette
fonction;
«les expériences humaines, professionnelles,
sociales et communautaires du candidat;
«le degré de conscience du candidat à l'égard
des réalités sociales; et finalement
«la reconnaissance par la communauté juridique
des qualités et des compétences du candidat.»
Depuis deux
semaines, j'ai entendu plusieurs commentaires sur le fait que, comme le notaire
n'a jamais plaidé devant un tribunal
dans le cadre de litiges, il ne pourrait pas être juge à la Cour du Québec. Ces commentaires m'ont fait réfléchir à la situation suivante.
Prenons l'exemple d'une avocate qui fait son
stage dans un cabinet qui oeuvre exclusivement dans un domaine de pratique qui
ne requiert jamais d'aller devant le tribunal. Cette même avocate pratique dans
ce domaine depuis son assermentation il y a 15 ans. Elle a développé une
expertise particulière et est reconnue comme une sommité dans son domaine. Elle
est invitée à plusieurs tribunes pour donner des conférences et des formations.
Elle a écrit plusieurs textes sur le sujet et est même citée par les tribunaux.
Sa pratique ne l'a jamais amenée à plaider devant les tribunaux. Elle
s'implique aussi dans son milieu communautaire. Si cette avocate au parcours
d'exception dépose sa candidature comme juge, va-t-on lui imposer une fin de
non-recevoir parce qu'elle n'a jamais participé à des procès? Bien sûr que non. Sa candidature sera évaluée au mérite, et
la question sera plutôt : Est-ce que cette candidate possède les
qualités professionnelles et personnelles requises pour occuper la fonction de
juge? Et que pourra-t-elle apporter comme expertise additionnelle et
particulière à la cour?
La force d'un tribunal, comme tout organisme,
vient essentiellement de la diversité d'expériences et de parcours de ses membres. Les juges proviennent de
plusieurs horizons. Certains juges proviennent du milieu communautaire, d'autres, d'institutions publiques
ou d'entreprises privées, certains, de la pratique privée, et d'autres,
d'anciens professeurs d'université. Ils ont en commun leur capacité à remplir
la mission d'un juge, leur dévouement envers
le système de justice et les justiciables, et une connaissance approfondie du
droit, en général. Le notaire pourrait justement contribuer à cette
diversité par son expérience et son expertise.
Lorsqu'on lit les critères de sélection de
l'article 25 du règlement, à aucun endroit, comme nous l'avons vu, il est
précisé que le candidat doit avoir participé à un procès. Depuis plusieurs
années, un notaire peut être nommé comme décideur au tribunal administratif.
Les notaires exerçant comme décideurs administratifs appliquent avec rigueur
les règles de preuve et de procédure civile et sont en mesure de promouvoir
l'administration de la justice.
Je tiens à souligner que la notion
d'impartialité attendue d'un juge a toujours été dans l'ADN du notaire. Depuis
toujours, le notaire se doit d'agir avec impartialité en présence de plusieurs
parties et il ne peut prendre fait et cause pour l'une des parties. Il doit
concilier les intérêts de tous. Ces éléments se trouvent d'ailleurs dans la Loi
sur le notariat. Les articles 10 et 11
de la Loi sur le notariat sont clairs à cet égard. Le notaire collabore à
l'administration de la justice et il est également un conseiller
juridique. Le notaire doit toujours agir avec impartialité.
On a aussi entendu certains intervenants
affirmer que la formation d'accession à la profession des notaires et des avocats diffère au point qu'un notaire ne
puisse exercer la fonction de juge. J'ai pris connaissance des activités de
formation de l'École du Barreau et je vous
soumets que, selon mon expérience passée de chargé de cours à la maîtrise
en droit notarial à l'Université de Montréal et de maître de stage, les objectifs de formation
de la Chambre des notaires sont particulièrement alignés sur celles du
Barreau.
On pourrait aussi invoquer qu'un notaire n'est
pas habitué d'être confronté aux litiges. La majeure partie de ma pratique est
dédiée au droit successoral et à la liquidation des successions, et je peux
vous dire que je suis quotidiennement confronté à des situations conflictuelles
entre justiciables, où je dois naviguer toutes sortes de négociations en lien
avec la résolution de conflit. Le rôle du notaire est d'ailleurs souvent de
trouver des solutions pour que le dossier ne se judiciarise pas. Le notaire n'a
aucun intérêt à ce que le dossier se judiciarise et jouit d'une place
privilégiée de par son impartialité pour favoriser le règlement des différends.
Vous savez, la pratique notariale a beaucoup
évolué dans les 30 dernières années. Depuis 1999, le notaire exerce déjà
des fonctions quasi judiciaires par les procédures devant notaire sans qu'il
n'y ait eu aucun problème à ma connaissance.
Le travail du notaire a d'ailleurs été reconnu par le Code de procédure civile de 2016 en prévoyant de nouvelles matières dans
lesquelles le notaire peut exercer ses fonctions quasi judiciaires. Le notaire
peut également déposer devant le tribunal des projets d'accord dans le
cadre d'une procédure en séparation de corps ou en divorce. À mon sens, le
notaire peut agir dans tous les domaines du droit civil ou presque, ce qui en
fait un expert du droit civil devant les tribunaux.
Vous savez, le notariat est un fondement du
droit civil au Québec et dans les juridictions de droit civil à l'échelle
internationale. Ce projet de loi constitue une excellente occasion de créer un
précédent qui pourrait être suivi par d'autres juridictions de droit civil. D'ailleurs, notre droit
civil est quelque chose qui nous distingue des autres juridictions
canadiennes. Permettre aux notaires d'accéder à la magistrature serait un
signal fort de l'importance de cette institution et du droit civil québécois,
en général. Selon moi, il n'existe aucune objection à ce qu'un notaire puisse
accéder à la magistrature, évidemment, si le candidat notaire possède les
qualités requises pour être juge telles que décrites, comme nous l'avons vu, à
l'article 25 du règlement.
En terminant, lorsque j'ai pris connaissance du
projet de loi, je ne me suis jamais demandé : Est-ce qu'un notaire
pourrait être juge? Je me suis plutôt dit : Bien, pourquoi pas?
• (16 h 40) •
Le Président (M.
Bachand) :
Merci beaucoup, Me
Beauchamp. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Bonjour, Me
Beauchamp. Merci beaucoup de participer aux travaux de la commission. C'est
apprécié.
J'aimerais
qu'on revienne sur le début de votre introduction. Vous disiez... vous, vous
avez contribué notamment à l'ouvrage Précis
de procédure civile du Québec, sous la direction de Denis Ferland et du
juge Benoît Emery. C'est bien ça?
M. Beauchamp (Michel) : C'est bien
ça.
M.
Jolin-Barrette : Donc, dans cet ouvrage-là... Pouvez-vous nous dire
qu'est-ce qu'il y a dans cet ouvrage-là? C'est quoi, un précis de
procédure civile?
M. Beauchamp (Michel) : Un précis de
procédure civile, c'est un outil autant pour enseigner à l'université que pour
un praticien, pour démystifier la procédure civile. Alors, ce sont des auteurs
qui analysent chaque article du Code de procédure civile et qui donnent leur
avis sur l'interprétation par rapport, évidemment, à la jurisprudence et la
doctrine.
M. Jolin-Barrette : Donc, je
comprends que les juges, qu'on soit à la Cour du Québec, qu'on soit à la Cour
supérieure, utilisent le Code de procédure civile sur des questions pour trancher
parfois des objections, parfois des jugements interlocutoires, ils se servent
de la procédure, ou les avocats, également, se servent du Code de procédure civile.
Puis vous, vous avez analysé le Code
de procédure civile, puis, dans le
fond, les praticiens et les juges peuvent se servir de l'ouvrage avec
lequel vous avez contribué pour rendre des jugements.
M.
Beauchamp (Michel) : Effectivement, le Précis de procédure civile
du professeur Ferland et du juge Emery est un des volumes les plus cités en
procédure civile.
M. Jolin-Barrette : Donc, ça veut
dire que, vous, comme notaire, vous avez rédigé de la doctrine, donc un ouvrage de référence que beaucoup de membres du
Barreau... en fait, que, je vous dirais, pratiquement tous les avocats
en litige civil se sont sûrement référés au moins une fois dans leur carrière,
lorsqu'ils avaient une interrogation par rapport à la procédure civile, se sont
référés à un ouvrage que vous avez coécrit.
M. Beauchamp (Michel) : Effectivement.
Bien, ça fait prétentieux de dire ça, là, mais je crois que oui.
M. Jolin-Barrette : OK. Donc, quand
j'entends des commentaires à l'effet que ça serait compliqué pour les notaires
de comprendre la procédure civile, puis qu'ils n'ont pas touché à la procédure
civile, trouvez-vous que c'est un argument qui est solide?
M.
Beauchamp (Michel) : Bien, respectueusement, je ne crois pas que c'est
un argument solide. Vous savez, on a
parlé, aujourd'hui, que les notaires faisaient des procédures non
contentieuses, mais ça reste une procédure civile. On doit évaluer la preuve,
on doit préparer une demande au tribunal. Pourquoi cette demande-là? Bien, pour
obtenir du tribunal une décision favorable pour notre client. Et, même
en procédure non contentieuse, ce sont des procédures où on doit aller faire
des représentations devant le tribunal. Et même le nouveau Code de procédure
civile de 2016 permet à ce que, sans que ça soit contesté, les parties soient
représentées quand même par avocats dans un dossier où il n'y a pas de litige,
mais qu'une partie voudrait faire une représentation.
Il m'est
arrivé souvent de faire des représentations à la Cour supérieure devant un
juge, et une des parties était représentée par avocat, et on échangeait
des éléments pour que le juge puisse trancher. Mais il n'y avait pas de litige.
C'est juste que chaque partie voulait faire part de son point.
M.
Jolin-Barrette : OK. Je comprends très bien. Écoutez, l'Association
professionnelle des avocates et avocats du Québec a émis un mémoire, et même un
communiqué, commentaire, puis je vais vous citer deux paragraphes. Vous me permettrez de le citer puis vous me direz vos
commentaires, ce que vous en pensez : «Le notaire, qui n'a pour ainsi dire
jamais mis les pieds dans un palais de justice, devra être en mesure de faire
ce travail et de rendre des décisions conformes à la jurisprudence, et ce, bien
souvent face à des avocats aguerris qui, eux, maîtrisent les règles de preuve et de procédure, règles qui, doit-on le souligner,
servent à s'assurer que les auditions soient équitables, que les décisions
soient rendues sur la base de preuves crédibles et que la justice serve les
justiciables et ne compromette pas leur confiance dans le système.
«Selon le ministre — en
l'occurrence, moi — les
notaires peuvent apprendre une fois sur le banc», je ne me souviens pas avoir
dit ça, mais on rapporte ça, «mais aux frais et sur le compte de qui? Encore
une fois, ce sera sur le compte du
justiciable et du système, qui deviendront des cobayes. Notre société est en
droit d'exiger une justice de grande qualité, avec des juges
d'expérience et de grandes compétences dès leur nomination. Ces exigences sont
garantes de l'efficacité du système et de la satisfaction des citoyens. Les
droits judiciaires ne sont-ils pas des droits garantis par la Charte des droits
et libertés de la personne?»
Alors, ma question, Me Beauchamp :
Est-ce que le fait de nommer des notaires comme juges va affecter la qualité de
la justice? Est-ce que les notaires ne sont pas de grandes compétences dès le
moment de leur nomination? Parce que l'Association professionnelle des avocats
nous laisse prétendre ça par la voix de sa présidente. Qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Beauchamp (Michel) : Malheureusement,
je crois que c'est mal connaître la procédure pour désigner un juge à la Cour
du Québec. J'ai lu tantôt
l'article 25 du règlement qui prévoit des critères. Donc, il y a un comité
de sélection qui analyse chaque candidature, notaires, avocats, pour
s'assurer d'avoir le bon candidat, qui possède les habiletés nécessaires pour
devenir juge. Alors, pas parce qu'un notaire serait désigné juge à la Cour du
Québec qu'il n'aurait pas les compétences. C'est comme de présumer que le
comité n'aurait pas fait son travail.
M. Jolin-Barrette : OK. Un autre des
arguments de l'Association professionnelle des avocats est le fait de dire que
ce n'est pas possible, en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, de nommer
un notaire à la magistrature. Est-ce que c'est votre lecture?
M. Beauchamp (Michel) : Non, ce
n'est pas ma lecture du tout.
M.
Jolin-Barrette : OK. Pensez-vous que votre lecture est partagée par
d'autres personnes dans le milieu juridique?
M. Beauchamp (Michel) : Oui. Je me
souviens, lorsqu'on a adopté les procédures devant notaire en 1999, il y avait
eu, encore une fois, cette objection constitutionnelle là. Parce que vous savez
que, par les procédures devant notaire, le notaire, son procès-verbal est
souvent exécutoire en matière de vérification de testament, en matière de
constitution de conseil de tutelle et même de nomination d'un tuteur à un
enfant mineur, le procès-verbal du notaire est exécutoire. Et il y avait eu l'argument
constitutionnel, et, je me souviens, à l'époque, le professeur Frémont avait
émis un avis à l'effet qu'il n'y avait pas de problème constitutionnel.
M. Jolin-Barrette : Donc, le
professeur Frémont qui a été à l'Université de Montréal et qui a été président
de la Commission des droits de la personne.
M. Beauchamp (Michel) : Et qui est
recteur à l'Université d'Ottawa.
M. Jolin-Barrette : OK. Donc, je
pense que, par votre témoignage aujourd'hui, on a fait la démonstration que
vous connaissez la procédure civile et que vous êtes un notaire, donc que ce
n'est pas incompatible, les deux, de connaître la procédure civile et d'être un
notaire.
J'aimerais vous poser des questions sur la
médiation. Le fait de rendre la médiation obligatoire, pensez-vous que ça va aider le système de justice à être plus
efficace et à permettre aux justiciables d'avoir une meilleure expérience
avec le système de justice?
M.
Beauchamp (Michel) : Je vais faire une analogie avec ma pratique en
droit successoral, qui malheureusement relève de la Cour supérieure,
donc ce n'est pas applicable à la Cour du Québec, mais je pense que ça
s'applique également à l'exemple. Lorsque les parties s'assoient pour discuter,
ça évite un litige dans la majorité des cas. Vous savez qu'en matière successorale, là, 80 % de psychologie,
20 % de droit, tout le monde est braqué, il y a des émotions. Mais
le fait de s'asseoir et de discuter, souvent, va nous empêcher d'aller en
litige, qui... de toute façon, le litige, va décevoir tout le monde, en bout de
piste.
M.
Jolin-Barrette : Même question sur la conférence de règlement à
l'amiable, parce qu'on rend la médiation obligatoire aux petites créances,
ensuite avec arbitrage. Là, les notaires sont déjà médiateurs, sont déjà arbitres.
Pour vous, il n'y a pas d'enjeu à continuer dans cette direction-là?
M. Beauchamp (Michel) : Le notaire,
de par sa formation, essaie toujours de médier entre les parties, tout le temps, tout le temps. Donc, en médiation, en
conférence de règlement à l'amiable, le notaire ou le notaire devenu juge va exercer la même chose, c'est-à-dire de trouver
une solution. Parce que, je l'ai dit dans mon exposé, lorsque le citoyen
participe à la solution, il en sort gagnant et il en sort surtout satisfait.
M. Jolin-Barrette : Un des enjeux
qui sont soulevés, là je reviens sur l'accession des notaires à la profession
de juge, là, c'est le fait de dire que le juge doit trancher des litiges.
Pensez-vous que les notaires sont aptes à trancher des litiges? Parce que supposons, là, qu'on rend l'arbitrage
automatique, et même le fait qu'ils seraient sur le banc pour trancher
des litiges, pensez-vous que les notaires ont cette aptitude-là?
M. Beauchamp (Michel) : Que
doit faire un juriste pour trancher un litige? Le juriste analyse la loi, la
jurisprudence, la doctrine et donne son conseil ou tranche pour son
client.
Lorsqu'on rend un
avis juridique, et ça m'arrive souvent en matière successorale, les parties me
demandent de rendre un avis juridique pour connaître l'état du droit et de
trancher sur l'interprétation d'une clause pour savoir si après ça fait leur
affaire ou ça ne fait pas leur affaire. Et souvent les parties se disent :
Bien, nous, on est satisfaits parce que vous
avez fait le tour du dossier au complet, vous avez analysé la loi, la doctrine,
la jurisprudence pour arriver à cette conclusion.
Donc, je ne vois pas
d'objection pour que le notaire, qui est un juriste, fasse comme
l'avocat-juriste, puisse rendre une décision lorsqu'il deviendra juge.
M.
Jolin-Barrette : OK. Sur la simplification de la procédure à la Cour
du Québec, le fait d'instaurer les conférences de règlement à l'amiable d'une
façon obligatoire, avez-vous un enjeu à ce qu'on diminue le nombre de vacations
à la cour, qu'on oblige à avoir une conférence de règlement à l'amiable avant
d'arriver à procès?
• (16 h 50) •
M. Beauchamp
(Michel) : Ça participe de ce que le Code de procédure civile prévoit
à l'article 1. Il faut essayer de s'entendre avant d'aller dans un procès.
Puis, nous connaissons tous les conséquences, les dommages collatéraux à un
long procès pour les parties. Donc, le fait de favoriser la médiation,
favoriser des conférences de règlement à l'amiable, je pense que, pour le
justiciable, c'est la meilleure chose qui pourrait lui arriver.
M.
Jolin-Barrette : Excellent. Je vous remercie beaucoup,
Me Beauchamp. Je vais céder la parole à mes collègues. Merci beaucoup pour
votre passage en commission parlementaire. C'est apprécié.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît.
Mme
Bourassa : Bonjour. Vous savez que tout ce qu'on dit ici peut être
écouté par les gens à la maison, les gens dans les gradins. Et, si j'étais un
citoyen chez nous, je me poserais la question : Quels sont les avantages à
ce qu'un notaire accède à la fonction de juge pour moi, là? Quels sont... Je ne
sais pas, une vision différente, l'expertise plus
poussée, la compréhension des dossiers? Qu'est-ce que les notaires qui
deviendraient juges pourraient apporter de plus à la magistrature?
M. Beauchamp
(Michel) : Bien, tout d'abord, le notaire a toujours comme objectif
d'essayer de solutionner un problème, hein, de solutionner le conflit.
Deuxièmement, est-ce
qu'on ne pourrait pas plutôt dire : Qu'est-ce qui désavantagerait le
système judiciaire d'avoir un notaire comme juge? Parce qu'à la base un notaire
est un juriste. Donc, est-ce que le tribunal ne devrait pas plutôt choisir les
meilleurs juristes pour devenir juges, qu'ils soient notaires ou qu'ils soient
avocats?
Mme
Bourassa : Parfait. Merci.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de
Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci
beaucoup, M. le Président. Pour quatre, cinq minutes?
Le
Président (M. Bachand) : Cinq minutes, M.
le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci.
Mon chronomètre fonctionne. Bonjour, Me Beauchamp. Vous nous avez beaucoup
parlé des notaires. Ça se comprend, on
l'entend. Mais je veux revenir à la base, parce qu'il y a quatre volets
fondamentaux au projet de loi n° 8, je voudrais les regarder rapidement avec vous. Vous y avez déjà
touché par rapport à la médiation et
arbitrage, mais il y a les règlements des différends de manière efficace,
réduction des délais judiciaires. Est-ce que, ça, par rapport à ce que vous savez, connaissez de
notre système, ce qu'on propose dans le projet de loi n° 8
pour accomplir médiation et arbitrage, ça vous convient, ou on a manqué
un détour quelque part, ou on en a pris un de trop?
M. Beauchamp
(Michel) : C'est un excellent pas en avant.
M. Lemieux : D'accord.
M. Beauchamp (Michel) :
Je pense que c'est un message clair qu'il faut solutionner nos conflits.
M. Lemieux : J'aime
ça, parce que je voulais faire le tour des quatre. Vous m'avez vu venir, hein?
Je voulais le tour des quatre volets avec
vous, et vous avez des réponses courtes. Merci beaucoup. Ça me gêne, elles sont
plus courtes que mes questions. En tout cas.
Simplification
de la procédure civile à la Cour du
Québec. Ça, je vous avoue que, pour
le commun des mortels, 50 000, 75 000, 100 000, on y perd
un petit peu de notre latin et puis on espère ne pas avoir à aller là de toute
façon. Mais quelqu'un qui connaît ça, il voit ça comment?
M. Beauchamp
(Michel) : Quelqu'un qui connaît ça, qui regarde... Évidemment, ça
prend un niveau parce que, ça, c'est une question constitutionnelle. Et
d'ailleurs il y a eu une décision de la Cour suprême, comme vous le savez,
récemment sur ce sujet-là. Ça prend des niveaux : Cour du Québec, Cour
supérieure, et tout ça.
Deuxièmement, le citoyen, lui, essentiellement,
ce qu'il veut, c'est une solution à son litige. Alors, que ce soit la Cour
supérieure, la Cour du Québec, c'est sûr et certain qu'il y a des niveaux. Et
les organismes qu'on a vus avant moi font un excellent travail pour donner des
conseils. Et même, à l'université, il y a la clinique juridique qui conseille
adéquatement les gens, justement, qui les informent... non pas conseiller, ce
n'est pas encore le cas, mais ils les informent sur les niveaux. Donc, si tu as
une réclamation de 25 000 $, c'est la Cour du Québec, si tu as une
réclamation entre 75 000 $ et 100 000 $, tu as le choix, et
plus de 100 000 $, c'est la Cour supérieure. Mais ce que les gens
retiennent surtout, c'est qu'en bas de 15 000 $ ils peuvent eux-mêmes
aller à la division des petites créances.
M. Lemieux : C'est clair. On
continue le résumé parce que c'est ce que je voulais faire avec vous. Conseil
de la magistrature. Tiens, tiens. Plus grande représentativité des personnes
victimes au sein du Conseil de la magistrature, diffusion chaque année d'un
rapport sur ses activités, vérification des livres et des comptes au moins une
fois tous les cinq ans, amélioration de l'accès à l'information pour le public.
On avance? On recule?
M. Beauchamp (Michel) : On avance.
On est dans l'ère de l'imputabilité, et je ne pense pas que ça va toucher à
l'indépendance requise pour le Conseil de la magistrature. Qu'est-ce qu'on va
faire comme rapport annuel? Bien, comme les ordres professionnels font un
rapport annuel de leur gestion de sommes, du nombre de plaintes, comment ça
fonctionne, moi, je ne vois pas de problème au niveau de l'indépendance. On ne
dit pas, ici, que... on ne devra pas traiter pourquoi qu'on a accepté tel
dossier puis pourquoi qu'on l'a refusé, puis pourquoi tel juge n'a pas été
invité devant le conseil de discipline puis pourquoi tel juge l'a été, et tout
ça. Ce n'est pas ça. Lorsqu'on lit le projet de loi, on parle de la finance et
on parle d'un rapport d'activité global sur combien de plaintes qu'on a eues,
combien qu'on en a traité, et tout ça. Je pense que, dans un souci d'efficacité
et de transparence pour les citoyens, c'est excellent.
M. Lemieux : Ma question à moi par
rapport aux notaires qui auraient donc l'accès à la magistrature... Vous êtes enseignant, en tout cas, à temps partiel,
sinon, à temps plein, je ne sais pas, là. On n'est jamais enseignants à temps
partiel. On l'est toujours... Est-ce que le cursus... Tu sais, on se l'est fait
dire trois fois aujourd'hui, minimum : Oui, on fait tous la même chose puis après ça on part chacun notre bord,
notaires d'un côté, avocats de l'autre. Mais est-ce que ce tronc commun
là est assez gros, assez fort pour que ça vaille la peine de dire que c'est la
même chose?
M. Beauchamp (Michel) : Ça me fait
sourire parce que... Je vais vous donner l'exemple de l'Université de Montréal,
que je connais bien. Tous les étudiants qui terminent leur bac en droit à l'Université de Montréal ont suivi les mêmes cours de procédure
civile obligatoires, hein? On commence par ça. Et tous les étudiants
choisissent des cours à option selon leurs
intérêts. C'est sûr qu'autant le Barreau que la Chambre des notaires suggèrent
un tronc commun, mais ce n'est pas
obligatoire. Et, si je prends mon propre exemple à moi, j'ai suivi tous mes
cours de pénal, de conditionnel et d'administratif à l'université et je suis
notaire aujourd'hui. Donc, cet argument-là, je ne suis pas sûr qu'il tienne
la route beaucoup.
M. Lemieux : D'accord.
J'ai fini. Le président me regarde avec des gros yeux. Mais vous avez fini,
vous, en disant : Pourquoi pas, n'est-ce pas?
M. Beauchamp (Michel) : Exactement.
M. Lemieux : Pourquoi ça a pris tout
ce temps-là, M. Beauchamp... Me Beauchamp?
M. Beauchamp (Michel) : Ah! je pense
que c'est une question... c'est une question historique, pourquoi ça a pris tout ce temps-là. Vous savez que,
malheureusement, avant le XXe siècle, pour devenir notaire, on n'avait
qu'à suivre des examens de la Chambre
des notaires et on devenait notaires. Alors, c'est comme ça qu'est devenue
l'histoire que le notaire ne fait pas
de cours de droit. Mais ça fait plus de 120 ans que c'est fini, ça, cette
histoire-là, et je pense qu'il y a eu quatre notaires au Québec
seulement qui sont devenus notaires seulement par des examens.
M. Lemieux : Merci, Me Beauchamp.
Le Président (M.
Bachand) : Me Beauchamp, merci beaucoup.
M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.
M. Morin : Merci, M. le Président.
Bonjour, Me Beauchamp. Merci d'être avec nous cet après-midi. J'ai écouté avec beaucoup d'attention. Je comprends que
vous êtes un notaire émérite, donc qui avez évidemment transcendé
d'autres notaires, pleins d'autres notaires dans votre profession, compte tenu
de votre parcours et de vos réalisations. Est-ce qu'on peut dire que vous êtes
une sommité en procédure civile au Québec?
M.
Beauchamp (Michel) : Tellement gênant, ce type de question là, puis de
répondre : Oui, oui, je suis une sommité, ça a l'air prétentieux,
mais, oui, je suis... mes écrits en procédure civile sont souvent cités devant
les tribunaux, encore récemment. Sur la question de la
possibilité de demander une copie d'un testament, j'ai écrit sur les règles à
suivre, et ça a été cité par les tribunaux.
M. Morin : Parfait.
Je vous remercie. Parce qu'en fait, compte tenu de votre expertise avec le Code
de procédure civile, puis toujours dans le but, évidemment, de bonifier des
projets de loi, c'est pour ça qu'on est ici, le projet de loi n° 8 accorde une importance particulière à
l'arbitrage, à la médiation, la rendant parfois obligatoire ou, en tout cas,
l'encourageant très fortement, alors que, comme vous le savez, le principe,
dans le Code de procédure civile, c'est de favoriser une médiation
volontaire, n'y voyez-vous pas là une contradiction ou une incohérence? Et
comment pourrait-on, finalement, bonifier le
projet de loi pour qu'il soit peut-être plus conforme aux principes énoncés par
le Code de procédure civile?
M. Beauchamp
(Michel) : La médiation familiale est mandatoire. On n'a pas le choix,
en matière familiale, de passer par la
médiation. On est tous au courant de cas où est-ce que la médiation ne
s'applique pas, hein? Le ministre parlait
en début de journée de la violence conjugale, et tout ça, et que tout le monde
avait peur de la médiation obligatoire. Il y a des mécanismes qui existent, des conférences de coparentalité qui
existent pour pallier au fait que, malheureusement, on ne pourra pas aller en médiation. Alors, je
crois qu'effectivement ces mêmes mécanismes-là devraient exister en matière
de médiation.
Mais, quand on parle
d'obligation de la médiation, on parle surtout de l'obligation de s'asseoir
puis d'essayer de discuter. La médiation, ce
n'est pas qu'on est obligés de passer à travers plusieurs séances puis de
trouver une solution à tout prix, c'est d'au moins commencer par
s'asseoir et de discuter ensemble.
M. Morin : Parfait. Justement, vous parliez de la violence
conjugale, et le ministre, un peu plus tôt aujourd'hui, parce qu'on lui a posé
la question, évidemment, faire une médiation dans un cas de litige entre deux
ex-conjoints, ce n'est pas quelque chose qui est souhaitable, et le
ministre nous disait qu'il allait y voir éventuellement par règlement. Mais,
compte tenu de l'importance, vous ne pensez pas que ce ne serait pas mieux de
l'inclure directement dans le projet de loi et de prévoir ça immédiatement pour
lancer un message clair à la population?
• (17 heures) •
M. Beauchamp (Michel) : Effectivement,
mais aussi, l'important, c'est que quelque part se trouve, dans notre corpus
législatif, de prévoir que, dans certaines circonstances, bien, il n'y en aura
pas, de médiation, pour toutes sortes de raisons, mais il pourrait y
avoir une conférence sur les modes de règlement alternatifs, et tout ça.
M. Morin : Parfait. J'aimerais avoir vos commentaires en lien
avec l'article 7 du projet de loi, qui va apporter une modification à
l'article 535.14 du... et qui dit qu'une partie, pour tenir lieu du
témoignage, peut produire une déclaration écrite de ce dernier. Il faut
que la déclaration ait été notifiée. Sauf que le projet de loi ne semble pas
prévoir aucune garantie quant à l'authenticité de la déclaration. Si on produit
une déclaration écrite, il n'y a pas de possibilité de contre-interroger
l'auteur. Est-ce que vous n'y voyez pas un danger? Et comment pourrait-on
améliorer cette façon de faire?
Je comprends qu'on veut aller vite, là, mais il y a quand même l'importance que
l'adjudicateur puisse évaluer correctement la véracité des faits qui
sont devant lui.
M. Beauchamp
(Michel) : Ça existe déjà en matière de procédure non contentieuse. La
preuve en matière non contentieuse, c'est
une preuve documentaire. Exemple, un témoin à un testament ne vient pas
témoigner au tribunal en personne, il signe une déclaration sous
serment. Cette déclaration sous serment là pourra toujours être contestée par une partie. Alors, je crois que l'esprit ici,
c'est de limiter le nombre de témoignages et, si une partie peut témoigner
par écrit et le déposer, je n'ai pas vu nulle part d'empêchement de contester
cette déclaration écrite.
M. Morin : Je
vous remercie. Il y a d'autres groupes qui nous ont dit, et j'aimerais vous
entendre là-dessus, que parfois il y a des parties qui veulent aller à la cour
et que parfois l'arbitrage ou la médiation, ce n'est finalement pas la panacée. On a même entendu des gens qui
nous ont dit : Ça pourrait même être une justice à rabais. Donc, vous
n'êtes pas inquiet de l'impact que ça pourrait avoir sur la crédibilité du
système de justice?
M. Beauchamp
(Michel) : L'intervention juste avant moi parlait de la
méconnaissance, justement, de la médiation,
la méconnaissance de l'arbitrage. Souvent, quand on parle de médiation, mes
clients me disent : Ah! c'est ça, il va falloir que je mette de
l'eau dans mon vin, ça n'a pas d'allure, puis ce n'est pas ça, puis moi, j'ai
des principes, et tout ça. C'est n'est pas ça, la médiation. La médiation,
c'est de s'asseoir puis de discuter, puis d'essayer de trouver un terrain
d'entente. Il n'y a personne qui entre en médiation avec l'idée d'aller en
chercher le plus possible de l'autre côté. C'est surtout de l'idée d'arriver à
une solution pour éviter d'aller s'entredéchirer devant le tribunal.
Je
pense que lorsque les gens se parlent et discutent entre eux, bien, ça va être
une solution. Puis je ne peux pas... je ne peux pas penser qu'on parle de
justice à rabais, parce que ça n'exclut pas du tout de recourir aux tribunaux.
Et, lorsque le citoyen sera au courant de tous ces modes alternatifs de
résolution de conflit, je pense qu'il va de plus en plus les utiliser.
Voilà une vingtaine
d'années, la médiation familiale... une trentaine d'années, c'était nouveau,
tout le monde disait : Ça n'a pas d'allure. Qu'est-ce que c'est ça? Et on
voit les succès aujourd'hui de la médiation familiale.
M. Morin : On nous a dit également
qu'il faudrait plusieurs arbitres ou médiateurs parce qu'évidemment, si on
envoie des dossiers devant un autre forum, bien, il va falloir des personnes
pour les traiter. Selon vous, est-ce qu'on a assez
d'arbitres au Québec ou assez de médiateurs pour être capable de remplir à la
demande? Parce qu'on ne veut pas non plus décevoir les citoyens et citoyennes
en adoptant ce projet de loi là.
M. Beauchamp
(Michel) : Je pense que présentement il y a beaucoup de médiateurs et
d'arbitres qui n'exercent pas. La raison est bien simple, c'est que le volume
n'est pas là. Et comme le volume n'est pas là, bien, à un moment donné... Moi,
je connais des médiateurs qui sont médiateur familial et qui n'exercent pas
là-dedans parce que, malheureusement, les volumes ne sont pas là. Et, quand les
volumes ne sont pas là, bien, nous sommes tous praticiens en pratique privée,
vous comprenez qu'il faut qu'il y ait un lien avec le volume et un lien aussi
avec tous les frais qu'on a à payer.
M. Morin : Tout
à l'heure, quand vous parliez de la médiation en matière familiale, si je vous
ai bien compris, est-ce que c'est la médiation qui est obligatoire ou la
session d'information pour les parties?
M. Beauchamp
(Michel) : Bon, ce qui est obligatoire, c'est la médiation, mais on
peut se soustraire de la médiation, d'aller faire un... pardon, une rencontre
sur la coparentalité.
M. Morin : Vous
avez parlé beaucoup de la possible accession, si le projet de loi est adopté,
des notaires à la magistrature et vous nous avez parlé de votre expérience en
droit civil. Les juges de la Cour du Québec, lorsqu'ils ont à siéger, ne
siègent pas uniquement en droit civil. Je vous pose la question, compte tenu de
votre expertise : Un notaire qui serait appelé, trois jours après sa
nomination, à présider un procès en matière criminelle, est-ce qu'il aurait
besoin de formation particulière ou s'il peut y aller puis il n'y a pas de
souci?
M. Beauchamp
(Michel) : Un avocat qui a fait du droit civil toute sa vie puis qui
est désigné juge à la Cour du Québec, il lui arrive le même scénario. Que
fait-il? Est-ce que... Pour lui, ça fait 30 ans qu'il n'a jamais fait de
criminel ou 20 ans qu'il n'a jamais fait de droit pénal, est-ce que le
juge en chef va lui attribuer cette cause-là, sachant très bien qu'il n'a pas
l'expertise? Je ne crois pas.
M. Morin : D'accord.
Je vous remercie.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci
beaucoup. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.
Mme Labrie : Merci,
M. le Président. Bon, vous n'êtes pas membre du Barreau, M. Beauchamp,
mais, de toute évidence, vous êtes un habile plaideur. Pour être bien honnête
avec vous, je ne veux pas vous manquer de respect, mais je trouve que vous avez
bien défendu vos arguments et je n'ai pas de question, moi, à vous poser. Votre
démonstration, elle est claire. Vous avez répondu à d'abondantes questions de
mes collègues avec efficacité. Je vous laisse mon temps, si jamais il y avait
des éléments que vous n'avez pas eu le temps de mentionner encore et que vous
jugez pertinent de porter à notre attention pour le projet de loi. Donc je vous
invite à le faire maintenant.
M. Beauchamp
(Michel) : Merci beaucoup, Mme la députée, mais vous l'avez dit, je
pense que tout était là et je pense que c'était clair au niveau de plusieurs
articles : médiation, arbitrage et surtout la nomination potentielle.
Parce que je pense, je vais le répéter, merci de me le permettre, ce n'est pas
demain matin que les 4 000 notaires du Québec vont devenir juges. C'est demain matin que les
4 000 notaires du Québec vont pouvoir déposer leur candidature,
comme les 29 000 avocats peuvent déposer leur candidature, et ce sera
au comité qui jugera au mérite pour avoir les meilleurs juristes comme juges à
la Cour du Québec.
Mme Labrie : Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Merci, Me Beauchamp. En effet, on comprend...
on comprend clairement la position des
notaires. On entendra bientôt le Barreau, là, mais c'est unanime, là, les
notaires. Vous plaidez très, très
bien votre cause, ça, ça ressort beaucoup des prestations que vous faites
devant nous. Puis je trouve ça dommage parce
j'ai l'impression qu'on fait la Chambre
des notaires contre le Barreau, un
est plus compétent ou... Ça fait que je trouve ça... je trouve ça, à la
limite, là, dommage qu'on se rende là. Mais, d'un autre côté, je me dis, c'est
comme si on demandait aux chargés de cours
de devenir professeur, j'imagine que ça ferait pas mal le même débat. Donc,
j'imagine que c'est comme ça dans pas mal... pas mal tous les domaines.
Je ne suis pas sûre que, comme professeur, vous apprécieriez qu'un chargé de cours puisse avoir le titre aussi de
professeur, puis ça amènerait, de part et d'autre, certains arguments.
Mais je ne veux pas aller sur cette partie-là, là, je pense qu'on a pas mal
entendu tous les mêmes commentaires de la part des groupes précédents.
Moi,
j'ai seulement qu'une question. Le groupe Option Consommateurs, entre autres,
là, qui a passé juste avant vous, nous recommandait, entre autres, que
l'article 535.10, puis il est à l'article 7 du projet de loi, il
recommandait, en fait, que cet article-là ne soit pas codifié dans le Code
de procédure civile. Puis ça a un lien avec... parce que, là, je pense que vous cherchez dans le Code de procédure civile, mais
ça a un lien, entre autres, avec les preuves authentiques, comme quoi,
là, on reconnaît, là, ou on présume l'intégrité du document qui est déposé.
Avez-vous un avis, étant expert en procédure civile?
M. Beauchamp (Michel) : On
parle ici de présomption simple, ça veut dire qu'on pourrait contester
l'intégrité de ce document. Deuxièmement, ça se fait déjà devant les
tribunaux. On dépose des copies de documents, et c'est seulement lorsque les
parties contestent qu'on va sortir l'original du document. Donc,
l'article 535.10 ne fait pas que demain matin on n'aura que des
photocopies puis on n'est pas sûr si c'est vrai ou pas vrai, ce sera toujours
possible de contester l'authenticité d'un document. Mais je pense que... je pense
juste à une demande en reconnaissance judiciaire d'un droit de propriété, c'est
à la Cour supérieure, bien sûr, mais l'analogie se fait, où on doit déposer
27 titres de propriété... c'est-à-dire 27 actes notariés, à un coût
de 200 $ la copie, pour démontrer que la personne est propriétaire. Bien, souvent, on demande au bureau
de la publicité des droits de nous émettre des copies à 1 $ la copie,
et je pense que ce serait suffisant pour le justiciable, mais c'est toujours
possible de le contester si jamais on doute de l'authenticité du document.
Mme Nichols :
Un peu comme à 535.10, si une des
parties s'y oppose, il y aura... il n'y aura pas... la présomption ne
s'appliquera pas.
M. Beauchamp
(Michel) : Exactement.
Mme Nichols :
Très bien.
M. Beauchamp
(Michel) : On parle de présomption simple ici.
Mme Nichols :
Simple.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Me Beauchamp, merci beaucoup de votre participation cet après-midi. Ce fut
très intéressant.
Sur ce, je suspends
les travaux quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 10)
(Reprise à 17 h 16)
Le
Président (M. Bachand) :
À l'ordre,
s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Il nous fait plaisir
de recevoir les représentants et représentantes d'Éducaloi. Alors, merci d'être
ici cet après-midi, c'est très apprécié.
Alors,
comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation, et après il y aura
une période d'échange avec les
membres de la commission. Donc, d'emblée, je vous demanderais de vous
identifier et de débuter votre présentation, s'il vous plaît.
Éducaloi
Mme Charbonneau
(Ariane) : Très bien. Merci, M. le Président. En fait, on est très
heureux d'être avec vous aujourd'hui. On sait que ça a été une longue journée
pour vous. Alors, on a l'intention de vous faire finir ça en beauté avec
l'équipe d'Éducaloi.
Je suis Ariane
Charbonneau, je suis la directrice générale de l'organisation, puis je suis
accompagnée de deux des 37 magnifiques
personnes qui composent notre équipe, Me Guillaume Rondeau, qui est expert
en communication claire, et notre pédagogue en résidence,
Mme Isabelle Bourgeois, qui est conseillère en éducation.
Donc, déjà ici, vous
avez représenté ce qui est notre double mission. On est là, nous, concrètement,
en accès à la justice depuis déjà 23 ans, et c'est pour vulgariser,
clarifier, simplifier le droit, d'un côté, et, de l'autre, de développer les
compétences puis les réflexes juridiques des gens au Québec.
Alors, c'est quoi, la
bibitte Éducaloi? Bien, je pense qu'on nous connaît beaucoup à cause de notre
site Web, qui attire aujourd'hui plus de 8 millions de visites par an.
Donc, au Québec, c'est presque une personne sur deux qui utilise nos contenus. Alors, vous dire qu'on est
incontournable dans le paysage québécois, ça va de soi, je dirais. Mais on
est surtout un organisme de bienfaisance enregistré, indépendant, c'est-à-dire
qu'on est non gouvernemental. Par exemple, on nous compare à la structure des
CJP, qui sont venus vous voir plus tôt aujourd'hui. Ce n'est pas tout à fait la
même chose.
On est un organisme
neutre aussi, donc ce n'est pas vraiment notre rôle à nous de commenter ou de
critiquer une loi, un projet de loi ou même une décision de la cour. Mais ce
qu'on fait, par exemple, c'est de rendre le droit accessible, à la portée des femmes et des hommes du Québec. Donc, c'est
une phrase que j'aime dire, là, mais «le droit, ça appartient aux gens».
Ce serait normal qu'ils le comprennent puis qu'ils puissent agir en pleine
connaissance de cause, puis idéalement plus en prévention que quand on a des
problèmes puis des situations conflictuelles.
Alors, nous, on salue
l'intention du PL n° 8 qui vise à modifier la
loi, la procédure, pour la rendre, la justice, là, plus efficace, plus
accessible. Puis on a vraiment en tête les deux premiers volets du projet de
loi. On ne portera pas de commentaire sur le Conseil de la magistrature ou
l'accession des notaires à la magistrature.
Donc, le projet de loi, c'est clairement un
point de départ qui est intéressant, mais ce n'est certainement pas le point
d'arrivée, parce que, pour que le public bénéficie de l'efficacité puis de
l'accessibilité qui est souhaitée par le projet de loi,
il faut absolument, Mmes et MM. les députés, M. le ministre, il faut absolument
travailler d'autres aspects de l'accès à la justice. C'est le Pr Roderick
Macdonald qui l'exprimait bien dans son rapport, qui fait toujours autorité en
matière d'accès à la justice au Québec, 30 ans plus tard : il faut
que ce soit aussi associé à des actions qui sont porteuses en information puis
en éducation juridique. Puis c'est ça, notre mission, en fait.
Donc,
d'abord, pour commenter davantage, là, sur la question de l'accès à
l'information claire, fiable, accessible, je vais laisser mon collègue
Guillaume poursuivre dans notre présentation.
M. Rondeau
(Guillaume) : Merci beaucoup, Ariane. Bonjour, tout le monde. Merci de
nous avoir invités. Alors, simplifier la
procédure civile, offrir des services juridiques plus efficaces, c'est
nécessaire, c'est souhaitable, mais, peu importent les mesures qui vont
être mises de l'avant, c'est essentiel que les communications juridiques qui
vont accompagner les mesures soient, elles aussi, simples, claires et
efficaces.
Pourquoi? Bien, avoir
accès à la justice, c'est aussi avoir accès à l'information. Et, pour avoir un
véritable accès à l'information, il faut que
l'information permette aux gens de prendre des décisions de manière éclairée
pour que les gens puissent ultimement agir. Il faut donc que
l'information mène à l'action.
• (17 h 20) •
Je vous propose un
exemple de madame, monsieur qui pense intenter un recours devant les tribunaux
sans avocat, sans avocate. Donc, à
différents moments de son parcours, madame, monsieur va devoir traiter de
l'information juridique. Madame, monsieur va trouver des dizaines de
sites Web qui offrent de l'information sur les procédures judiciaires. On peut penser au site de Services Québec, la Cour du Québec, Éducaloi, SOQUIJ, Barreau... la liste est très
longue. Madame, monsieur peut se rendre dans un palais de justice, un centre de
justice de proximité, un organisme communautaire ou ailleurs. Il va se faire offrir
des dépliants, des guides, des aide-mémoire et d'autres outils pratiques.
Éventuellement, madame, monsieur va devoir consulter le Code de procédure
civile, va devoir consulter les règlements qui l'accompagnent, remplir des
formulaires, des demandes, des protocoles, pleins de documents officiels comme
ceux-là. Monsieur, madame va devoir parler avec le greffe, tenter de comprendre
les lettres, les avis, les autres
communications que la cour va lui envoyer dans son dossier. Et tout ça, je
parle uniquement des informations en lien avec la procédure civile. Je
ne vous parle même pas des notions juridiques liées à son conflit sur le fond.
Donc, c'est très complexe. Je ne vous parle pas non plus de l'état d'esprit et
de la situation de vie de madame, monsieur, qui vit peut-être du stress au
travail, des difficultés familiales, des problèmes de santé, plein d'éléments
qui vont certainement diminuer sa capacité à traiter toutes ces
informations-là.
Donc, l'exemple que
je viens de vous donner, ça démontre bien que les justiciables font face à un
défi extrêmement exigeant pour traiter et utiliser toute l'information
juridique qui se dresse sur leur parcours, même si la procédure est simplifiée. Donc, même si c'est plus simple, ça demeure
très complexe quand on considère tout le reste.
Alors, pour que les
intentions du projet de loi n° 8 se concrétisent,
c'est essentiel que l'information qui va être offerte au public soit
suffisamment simple, claire et vulgarisée pour que les gens puissent
l'utiliser.
Maintenant, pour que
les gens puissent utiliser l'information, l'information doit être adaptée aux
réalités et aux enjeux du grand public. Et, comme le grand public est composé
de profils qui sont très variés, bien, il faut aussi varier les initiatives et
les différentes approches qu'on va utiliser pour les informer.
On peut, par exemple,
consulter directement les personnes, donc la consultation, c'est un excellent
moyen pour produire des outils qui sont plus
clairs, qui sont plus efficaces. On peut aussi tester les outils auprès des
différents publics avant de publier les outils pour savoir si c'est
vraiment efficace dans les faits, est-ce que les gens sont capables de les utiliser. On peut prévoir aussi,
de manière explicite, dans la loi, dans la réglementation, que l'information qui
accompagne la procédure soit offerte aux gens de manière claire, de manière
vulgarisée et plus uniforme. Par exemple, la réglementation pourrait prévoir
que toute convocation en médiation obligatoire soit formulée de manière claire et accompagnée d'outils d'information qui
sont vulgarisés. Le même principe s'applique au reste de la procédure
civile qui sera simplifiée.
On peut aussi
diversifier la manière d'offrir de l'information, ne pas se contenter de
l'écrit, surtout quand on pense au fait qu'il y a beaucoup de gens qui ont des
limitations fonctionnelles, ne serait-ce qu'en termes de littératie. On peut aussi créer des outils pratiques qui vont
aider les gens à prendre des décisions, des listes de ressources, des listes
de vérification, des aide-mémoire, des parcours guidés. Donc, c'est ce genre
d'initiatives là qu'on peut produire, qu'on peut utiliser pour, donc, offrir
une information qui est plus facile à trouver, à comprendre et à utiliser.
Mais, malgré tout ça,
même si on a des outils qui sont en théorie faciles à utiliser, ça ne veut pas
dire que les gens vont être en mesure de le
faire parce que, pour agir, ça prend plus que de l'information. Et là je vais
céder la parole à ma collègue Isabelle pour vous en parler un peu plus.
Mme Bourgeois (Isabelle) : Merci,
Guillaume. Donc, de mon côté, je vais vous parler un peu de l'importance
d'intégrer l'éducation juridique dans le développement et la mise en oeuvre du
projet de loi n° 8. Comme conseillère en éducation chez Éducaloi, je ne suis pas
juriste, puis on me donne souvent comme rôle d'être la gardienne des profanes
chez Éducaloi. Donc, c'est un peu vers ça que je vais vous amener pour ramener
le citoyen, la citoyenne au centre de notre conversation aujourd'hui.
Donc, par exemple,
une personne engage un paysagiste pour refaire sa cour arrière. Le paysagiste
exige un paiement complet, bien que les services ne sont pas complétés, l'hiver
est arrivé ou une autre raison quelconque. Madame, monsieur n'est pas d'accord,
se sent un peu frustré, ne veut pas payer, est surtout très stressé et très
perdu par rapport à tout ce qu'elle peut
faire avec la situation. Cette personne-là, dans la vie de tous les jours, ne
sait peut-être pas reconnaître les dimensions juridiques de son problème,
encore moins savoir qu'elle a des droits dans la situation. Elle ne sait
peut-être pas c'est quoi, les mots-clés qu'elle peut utiliser pour trouver
l'information sur Internet.
Personnellement, avant de
travailler chez Éducaloi, «petites créances» et «médiation» étaient des mots
qui m'étaient complètement inconnus, oui, oui. Et cette personne-là, elle ne
sait peut-être pas comment se préparer à la médiation, comment... Est-ce qu'il
faut un avocat? Est-ce que ça va coûter cher? Est-ce qu'il y a 472 formulaires
à remplir? Elle ne le sait pas et, surtout, elle n'a peut-être pas confiance en
elle. Elle veut peut-être éviter la chicane, ce qui va l'amener à juste vouloir
payer, au risque de ne pas faire respecter ses droits.
Ça fait que,
là, vous vous dites peut-être : Bien, c'est quoi, le lien entre cet
exemple-là et le projet de loi n° 8? En fait, pour que les gens puissent
agir, juridiquement, ils doivent être en mesure de développer des compétences, des attitudes. Il faut aller au-delà de
l'information qui est simplement... qui est simplifiée, puis c'est là qu'entre
en rôle l'éducation juridique, qui est une des expériences clés
d'Éducaloi.
L'éducation juridique, ce n'est pas juste sur
les bancs d'école, ça n'a pas d'âge, ça n'a pas de genre, ça n'a pas de
nationalité. Toute personne ne peut développer des réflexes juridiques et
développer la confiance qui est nécessaire pour faire valoir ses droits.
Quelques exemples concrets dans le cadre du
projet de loi n° 8. Par exemple, il pourrait y avoir
une formation en ligne très interactive, où les personnes se familiarisent avec
le processus de médiation, font des mises en situation pour se préparer, se
préparer à écouter, à dialoguer, à faire des compromis, bref des attitudes qui
sont essentielles dans un processus de médiation. Ça pourrait être une
formation qui est préalable au dépôt d'une demande de médiation, qui pourrait
être complémentaire aux rencontres de prémédiation que vous parlez, les centres
de justice de proximité.
Un autre exemple pourrait être de développer des
ateliers, des outils pratiques pour les intervenants qui sont sur le terrain,
qui accompagnent au quotidien des personnes dans leur parcours juridique. Par
là, on parle des groupes communautaires, des
juristes, des cliniques juridiques, des travailleurs sociaux, et j'en passe.
Ces personnes-là doivent développer des compétences pour être capables
de relayer les informations juridiques, pour être capables de préparer la personne qui vit des problèmes à différents
scénarios, aider à accueillir des émotions qu'ils peuvent vivre, à animer
des séances d'information.
En résumé, ce que j'essaie de vous dire, c'est
que le projet de loi et la mise en oeuvre, ils doivent prévoir des outils, des
services, des formations qui sont nécessaires pour que les personnes aient les
compétences pour utiliser l'information
simplifiée puis agir de manière éclairée et surtout adaptée à sa situation.
C'est aussi ça, l'accès à la justice.
Le Président (M.
Bachand) : Merci infiniment. Période
d'échange. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Me Charbonneau, Me Rondeau, Mme Bourgeois, bonjour.
Merci beaucoup de venir en commission parlementaire pour nous donner votre
opinion sur le projet de loi n° 8.
Je retiens
bien, avec votre dernière intervention, Mme Bourgeois, que vous nous
dites : C'est bien beau, modifier les lois, c'est bien beau,
améliorer la procédure civile, mais il faut que ça vienne avec des moyens, puis
surtout, ce qui est important, c'est que la population comprenne et que les
informations juridiques soient disponibles.
Et je suis assez d'accord avec vous. Lorsqu'on
parle d'accessibilité à la justice, on peut mettre en place les différentes
balises légales pour simplifier la procédure, mais c'est vrai que c'est
important d'être bien accompagné, d'être bien informé. Vous le faites bien, les
centres de justice de proximité le font bien, on a lancé le site JuridiQC
également, avec la Société québécoise d'information juridique. Désormais, ils
ont lancé un nouveau service pour faire en
sorte que les couples mariés qui souhaitent se divorcer à l'amiable, désormais,
peuvent remplir leurs documents en ligne. Et ça génère... par le biais
de l'intelligence artificielle, ça génère la procédure de consentement avec les
affidavits des époux. Et là, à ce moment-là,
les ex-conjoints peuvent déposer ça au greffe de la cour, ils peuvent faire la
procédure, puis il y a de l'information aussi. Alors, on accompagne les gens dans
leur divorce, là, c'est drôle à dire, là, mais ça permet de donner des
outils.
Alors, écoutez, je voulais vous poser la
question : Le niveau, dans votre expérience, là, dans le cadre de votre
réalité de tous les jours, là, le niveau de connaissance juridique de la
population, les gens que vous renseignez, là, comment vous l'évaluez? Vous
diriez, là, que les gens connaissent un peu le système de justice, pas du tout,
c'est un... Parce qu'on le sait, souvent,
les gens ne vont pas nécessairement au palais de justice, ne fréquentent pas
nécessairement le domaine de la
justice fréquemment, c'est souvent des situations où on se sépare, il nous
arrive un litige avec un voisin. C'est quoi, votre expérience terrain,
là, sur le niveau de connaissance juridique des justiciables puis leur
perception par rapport au système de justice?
Mme Charbonneau (Ariane) : Oui,
Isabelle, est-ce que tu réponds?
Mme Bourgeois (Isabelle) : Oui. Tout
à fait. Ce dont vous nous parlez, c'est de la littératie juridique. Puis, à ce
qu'on peut observer dans le travail qu'on fait dans les écoles, qu'on fait avec
les organismes communautaires, il est très,
très faible. Souvent, amener les personnes à simplement réaliser qu'il y a du
droit dans la situation qu'ils vivent, c'est très difficile, parce
qu'ils sont pris par certaines émotions, parce qu'ils n'ont pas... ils n'ont
pas un niveau d'éducation qui est peut-être suffisant pour être capable
d'analyser les lois qui sont liées à une situation. Et puis là je passe un
petit message en même temps, et il y a, dans... nos écoles ne forment pas
suffisamment, en fait, en matière d'éducation
juridique. Les jeunes sont plus ou moins conscientisés par rapport aux droits
et responsabilités qui les touchent.
Donc, par ce qu'on a observé, c'est quand
même... la première étape, de juste leur faire reconnaître le niveau,
reconnaître la dimension juridique d'une situation, c'est déjà un gros travail.
• (17 h 30) •
M.
Jolin-Barrette : OK. Est-ce que la population connaît les modes
alternatifs de règlement des différends?
Mme Charbonneau (Ariane) : Bien,
je pense que ça va dépendre, ça ou d'autres notions juridiques, d'abord,
d'avoir un intérêt a priori. Moi, ce que je rajouterais à ce qu'Isabelle
vous a dit, M. le ministre, c'est que les gens vont chercher de l'information juridique quand, souvent, ils sont dans
une situation problématique, parce que l'attention des gens, de tout
citoyen est quand même assez limitée. Dédier du temps, de l'énergie et des
ressources à s'informer. Il faut vraiment être très habile au niveau de la
sensibilisation pour aller distiller toute l'information avant que ce soit dans
une situation conflictuelle.
Alors, ça, je vais
vous dire, pour nous, c'est un des défis de toutes les bonnes intentions
derrière le projet de loi, c'est comment on
va arriver, d'abord, au-delà du moment du lancement, où on va indiquer qu'il y
a des nouvelles choses qui s'en viennent. Puis on a le même effet que la
réforme du droit de la famille, là, ça va être la même chose, comment faire en
sorte que, les gens, on va les intéresser à cette matière-là, qu'ils vont
vouloir s'informer puis qu'ils vont, après ça, intégrer puis vraiment
comprendre les nouvelles dispositions législatives qui s'en viennent.
Donc, je ne pense pas
qu'a priori les gens connaissent les PRD. D'ailleurs, plus tôt, il y avait un
membre de la séance qui indiquait ne pas connaître l'expression quand, je pense,
une collègue de CJP l'a mentionné. PRD, c'est notre
jargon, les modes de prévention et de résolution des différends, c'est une
section superbelle... c'est un superbeau concept qui a été instigué il y
a sept ans, avec la réforme du Code de procédure civile, qui est superimportant
pour améliorer l'expérience de justice pour
les citoyens, mais, a priori, ce n'est pas nécessairement... ça ne fait pas
partie du quotidien des gens.
Donc, on a un défi,
je vous dirais, d'intéresser la population à la matière juridique, puis c'est
pour ça que, nous, ce qu'on fait, quand on
va dans les écoles puis qu'on réussit à avoir intégré les cours par nos
trousses pédagogiques, les jeunes,
par nos juristes qui vont dans les écoles, c'est de leur montrer, sans qu'ils
s'en rendent nécessairement compte, qu'il y a du droit dans les situations de
vie de tous les jours, puis c'est ça, développer des réflexes. Tu n'as pas besoin
de nommer que c'est un réflexe juridique. Tu as juste besoin d'avoir le réflexe
puis de savoir que, dans une situation comme
ça, ce serait bien que je pense à m'informer. Je ne sais pas si je réponds à
votre question, là, M. le ministre.
15 359
M. Jolin-Barrette : Oui. On a fait le
choix de rendre la médiation obligatoire aux petites créances dans un objectif,
notamment, que les citoyens puissent s'approprier leur dossier, qu'ils puissent
participer à la solution du dossier, puis que ça ne soit pas uniquement le
système de justice qui l'impose. Éducaloi renseigne beaucoup les gens dans
différents domaines de droit. Par rapport aux petites créances, c'est quoi, les
commentaires que vous recevez du terrain, les demandes d'information? Qu'est-ce
qui... Qu'est-ce qui vous a...
Mme Charbonneau
(Ariane) : Bien, moi, je voudrais que le... La rétroaction que je peux
avoir, la plus directe, là-dessus, M. le
ministre, c'est des capsules qui sont consultées sur notre site. Donc, ça fait
partie des dossiers qui sont
d'intérêt, je vous dirais, puis pourquoi c'est d'intérêt? Bien, habituellement,
c'est parce que tu es pris comme partie
à une situation... Tu es en Cour des
petites créances. Tu ne vas pas aller
t'informer, habituellement, juste parce que ça te tente. Alors, je ne suis pas certaine que les gens ont une
connaissance de la Cour des petites créances. D'ailleurs, Isabelle vous
le disait de façon tout à fait candide tantôt, avant de joindre Éducaloi, ce
n'était même pas un tribunal, hein, je
pense, Isabelle, que tu connaissais dans ton... Pourtant, on a ici une femme
qui a une maîtrise, qui a un haut niveau de littératie. Donc...
Mme Bourgeois
(Isabelle) : J'ai beaucoup de qualités. Si tu peux... Ce que tu peux
ajouter à ça, c'est que, dans le fond, ce qu'on réalise... C'est souvent par
plein de petites thématiques qui... liées aux petites créances qu'on amène le sujet de la médiation qui est possible,
des rencontres d'essai que les CJP font déjà, mais souvent les mots-clés
que les gens vont chercher ne seront pas «petites créances». Ils vont écrire
«problème avec un service», «problème avec
la consommation», «mon voisin ne veut pas me rembourser mon 2 000 $».
Tu sais, ils vont chercher des mots-clés parce que c'est comme un... C'est
comme un travail, en fait, ardu, qu'on fait à Éducaloi, d'à la fois développer
ces réflexes-là de comment trouver la bonne information, quels sont les
bons messages, les bons mots-clés, puis, nous, d'être là au bon moment, lorsque
survient un problème, pour pouvoir, finalement, leur transmettre l'information.
15 359
M. Jolin-Barrette : C'est intéressant,
ce que vous dites relativement aux mots-clés. Vous savez, les lois sont écrites
d'une certaine façon. Je suis entouré de légistes et je les remercie d'être
avec nous. Même chose au niveau de la procédure, c'est des termes quand même
techniques. Si on veut permettre aux gens, là, de s'approprier davantage le
droit, le système de justice, avez-vous des propositions pour qu'on puisse
vulgariser... Vous, vous le faites à votre niveau, mais, nous, là, en tant que
législateurs, avez-vous des suggestions pour nous, en termes de vulgarisation?
Mme Charbonneau
(Ariane) : Je pense que, Guillaume, tu as envie de répondre ici?
M. Rondeau
(Guillaume) : Oui, tout à fait. En fait, ce qui peut être un excellent
point de départ, c'est quand la source première du droit, donc, quand la loi
elle-même, quand la réglementation est rédigée de manière plus claire, et c'est
tout à fait possible. Je sais que la légistique est un domaine extrêmement
complexe. Je ne suis pas un expert là-dedans, mais, s'il y a une chose qui est
sûre, c'est qu'avec l'expérience que j'ai je peux vous dire qu'avoir des
phrases de 70, 80, 90 mots et plus, ce n'est pas nécessaire pour conserver
une rigueur juridique.
Donc, il y a moyen, avec des techniques assez
simples, là, je vous parle juste de la longueur des phrases, là, c'est beaucoup plus complexe que ça, bien, de
rendre les textes de loi plus faciles à comprendre, plus faciles à digérer,
puis ça, c'est autant
pour M. et Mme Tout-le-monde qui ne sont pas assistés par avocat que pour les
juristes eux-mêmes, qui peuvent avoir de la difficulté à comprendre la
loi.
Donc, on peut travailler... Il y a...
D'ailleurs, je vous réfère, là, à un guide qui... le Guide pour la rédaction
de textes législatifs clairs, qui a été publié en 2019 par la Direction
générale des affaires juridiques et de l'accès à la justice du Québec, qui
prévoit différentes manières pour que la loi elle-même soit rédigée plus
clairement. Donc, ce qu'on se rend compte,
c'est qu'en pratique ce n'est pas nécessairement facile à faire, mais il y a
des approches qui existent, et ça a été fait ailleurs aussi. Donc, c'est
une des avenues.
Mme Bourgeois (Isabelle) : Si je
peux... Oups! pardon, désolée, si je peux ajouter en mettant encore mon
chapeau, là, de non-juriste, on avait cette conversation-là tout à l'heure avec
mes collègues, à savoir comment la rédaction de la loi pourrait être plus
simple elle-même. Je me demande s'il y a cette possibilité d'être novateur, en
fait, dans notre façon de rédiger cette loi-là puis se dire : Bien, il va
y avoir des gens qui ne sont pas représentés par un avocat, qui vont utiliser,
qui vont la lire, cette loi-là, est-ce qu'il y a possibilité de faire des
groupes tests avec certaines de ces personnes-là pour qu'ils puissent nous
identifier, bien, des mots qui sont moins accessibles, des phrases qui sont un
petit peu plus complexes pour un peu ramener ces citoyennes puis ces
citoyens-là au coeur, là, de la rédaction de la loi?
M. Jolin-Barrette : Je comprends
très bien. Je vous remercie pour votre présence à la commission parlementaire.
Je vais céder la parole à mes collègues. Puis j'ai été informé également que le
guide provient du ministère de la Justice, donc, sous Me Paradis.
Mme Charbonneau (Ariane) : Du MJQ,
oui.
M. Jolin-Barrette : Alors, je vais
en prendre connaissance.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré,
s'il vous plaît.
Mme Bourassa : Oui, bonjour. Moi, je
suis d'accord avec vous. J'ai aussi un chapeau de non-juriste, et vulgariser,
c'est très important. Je vais faire un peu du pouce sur ce que M. le ministre a
dit. Si on vote des lois, si on présente des projets de loi, mais qu'on ne les
vulgarise pas, et que les gens ne les comprennent pas, on rate la cible. Alors,
dans votre document, vous avez dit : Bien, il existe déjà plusieurs
sources, la Cour du Québec, Éducaloi, le Barreau, après ça, il y a des
dépliants, il y a des guides, il y a des aide-mémoire. Puis là vous, pour
vulgariser, justement, ces nouvelles lois là, vous proposez, bon, des dépliants
tests, qu'il y ait des informations, notamment, en audio, pas juste en écrit,
d'envoyer de la préformation avant la médiation. Vous n'avez pas peur de noyer
le poisson, tu sais, de dire que trop, ce n'est comme pas assez? Comment... Si
vous aviez une mesure à choisir pour tenter de vulgariser, quelque chose qui
aiderait les citoyens, vous qui travaillez avec les citoyens, ce serait quoi?
Mme Charbonneau (Ariane) : Bien,
moi, je dois vous dire, Mme la députée, on ne peut pas en faire trop, là, parce
que le public... On n'a pas 8 millions de Québécois, qui est un gros, gros
public homogène. On a différents publics cibles avec différents... tantôt, mes
collègues l'ont dit, différents niveaux de littératie, de... C'est des horizons
très, très, très différents. Donc, vous allez avoir besoin, je vous le dis,
d'utiliser différentes sortes de façons de vous rendre à ces personnes-là.
Alors, vous avez vu, dans notre mémoire, on vous
indique que ce serait bien de les consulter. C'est d'ailleurs ce qu'Isabelle
disait, même pour écrire la loi, ce ne serait pas mauvais d'avoir comme des
espèces de groupes témoins de ces personnes
non assistées par avocat parce qu'à quelque part on le sait, qu'ils sont
nombreux. Ce n'est pas juste les avocats, les avocates ou les notaires qui vont
lire ce projet de loi là, c'est les gens qui ce ne sont pas assistés.
• (17 h 40) •
Alors, consulter les gens, c'est important,
après ça, faire des documents, puis les CJP vous en ont parlé, des documents
qui vont être en langage clair, puis un langage clair, c'est plus que la
langue, c'est plus que le niveau de vocabulaire, c'est vraiment la structure
des documents. Il faut que l'information soit facile à trouver, il faut qu'elle
soit facile à comprendre puis il faut que ce soit facile ensuite d'agir. C'est
vraiment complexe.
Donc, j'aimerais vous dire : Voici le livre
de recettes, c'est ABC, puis ensuite on a fini. Mais moi, je suis plus portée à
vous dire : Envisageons beaucoup de choses, puis il faut consulter, parce
que, nous, c'est vraiment notre expertise, des 20 plus dernières années,
qui nous dit : Il faut être près des intervenants relayeurs, près des gens
qui travaillent avec ces gens-là. Il faut qu'on ait aussi la possibilité, dans
les appels de projets, à avoir ce soutien-là, financièrement, pour nous
permettre de valider que les outils qu'on développe, bien, ils sont adéquats.
Mme Bourgeois (Isabelle) : Puis, si
je peux me permettre, j'ajouterais aussi...
Le Président (M.
Bachand) : Excusez-moi,
Mme Bourgeois, parce qu'il reste tellement peu de temps, il reste deux
petites minutes pour la députée d'Anjou—Louis-Riel, question, réponse.
Désolé.
Mme Boivin Roy : Merci beaucoup, M.
le Président. Merci pour la présentation. Je vais faire du pouce sur mes deux derniers collègues, là, relativement aux
communications claires, simples et efficaces, là, ce que vous disiez, faire un passage, finalement, là, que le projet de loi soit
un point de départ, mais qu'on doit aller plus loin, là. Si on prend, par
exemple, l'article 35 du Code civil, là, le droit à la vie privée, le
droit à la réputation, quand on le dit en tant que tel, ça semble un concept
bien évident, mais, après ça, comme on le sait, il y a des pages et des pages
de rédaction de la Cour suprême sur les concepts. Donc, le droit, en tant que
tel, là, hormis le langage qui est utilisé, c'est complexe, là. Alors, comment
vous voyez le pont entre le droit tel qu'il est vécu, là, au niveau de
l'analyse jurisprudentielle qu'on en fait, puis l'apport que vous pourriez avoir
dans le projet de loi?
M. Rondeau
(Guillaume) : Bien, si je peux...
Mme Charbonneau
(Ariane) : Vas-y, Guillaume.
M. Rondeau
(Guillaume) : Bien, c'est-à-dire, en fait, en aucun cas la
vulgarisation ne va pouvoir remplacer l'expertise juridique. Donc, si une
personne est dans une situation où les enjeux de vie privée sont complexes et
nécessitent d'analyser de la jurisprudence, de la doctrine, et tout ça, ce
n'est évidemment pas la vulgarisation qui va permettre à la personne de s'en
tirer, donc, et je dirais même que, souvent, un des objectifs de la
vulgarisation, c'est que la personne se rende compte de la complexité de son
enjeu et ait consulté un professionnel. Donc, le but, ce n'est pas de faire en
sorte que tout le monde va être en mesure de s'improviser juriste, loin de là,
mais que la personne ait le réflexe de
dire : OK, il y a des enjeux plus complexes que je pensais dans mon cas,
j'ai des droits, j'ai des obligations, il y a des gens qui peuvent
m'aider à faire ça. Et aussi la vulgarisation peut aider la personne avant de
rencontrer l'avocat ou l'avocate... bien, de se préparer un peu puis de
connaître un peu mieux comment ça fonctionne, ce qui va aussi faciliter le
travail des professionnels du droit.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci
beaucoup. Alors, je passe la parole maintenant au député de l'Acadie...
d'Acadie, pardon.
M. Morin : Merci,
M. le Président. Alors, bonjour, Me Charbonneau, heureux de vous revoir, Me
Rondeau et Mme Bourgeois. On connaît la réputation de votre organisme et
le travail exceptionnel que vous faites pour les gens au Québec, les citoyens,
les citoyennes. C'est particulièrement important de vous entendre parce que
l'essence même de ce projet de loi là, c'est de rendre la justice plus
accessible. Et, M. le ministre en a parlé, les collègues députés également, si vous regardez le document,
parce que je sais que vous avez une expertise en langage clair, est-ce
qu'il y a des mots qu'on devrait utiliser plutôt que d'autres pour permettre
justement aux citoyens qui vont être confrontés à ce document-là... On parle
ici de la Cour des petites créances. Donc, souvent, les gens n'ont pas
d'avocat. Ils doivent comprendre, et, pour bonifier ce projet de loi puis pour
aller à son objectif ultime, évidemment, vos conseils à ce sujet-là sont très
appréciés. Est-ce qu'il y a quelque chose qu'on pourrait changer?
Mme Charbonneau
(Ariane) : Oui. Tantôt, Guillaume vous a parlé de la légistique, mais
c'est sûr que de parler de protocole préjudiciaire ou de parler de... qu'un
dossier va être analysé au vu, qu'on va prendre une décision au vu du dossier,
ça, on se comprend entre nous, là, mais ce n'est pas la personne qui n'est pas
assistée par avocat qui va vraiment être à l'aise avec ça. Alors, il y a des
petites choses qu'on pourrait... Ça nous ferait plaisir de faire peut-être une
étude un peu plus détaillée.
Je
vous donne deux petits exemples. Tantôt, Guillaume vous a aussi mentionné des
phrases de 70 ou 90 mots, il y en a, quelques articles dans le
projet de loi, qui sont comme ça, alors c'est vraiment, en fait, pour faire du
pouce sur ce qu'Isabelle a dit, d'avoir envie ou avoir l'audace d'essayer
d'écrire quelque chose d'un peu différent. Le projet de loi n'est quand même
pas très long. Ça pourrait peut-être être intéressant d'essayer quelque chose
puis de dire : Aïe! Ce projet de loi là, il est vraiment fait pour
améliorer l'efficacité puis l'accès à la justice. Bien, tu sais, il faudrait
peut-être qu'on «walk the talk», là, peut-être qu'on essaie quelque chose d'un
peu plus innovant puis... mais je lance ça comme ça, là, peut-être que la
structure, les contraintes, au sein du gouvernement, ne permettent pas ça, là.
Moi, je lance des idées, puis on pense ensemble, là, mais ça pourrait, si on
rêve, être quelque chose qui serait vraiment inspirant, de dire : Le
projet de loi est à l'image de ce qu'il propose comme intention.
M. Morin : Bien, c'est magnifique parce que moi, j'ai le
privilège de ne pas être au gouvernement. Présentement, je suis le
porte-parole de l'opposition officielle, alors je suis très audacieux. Donc,
tous vos commentaires à ce niveau-là, évidemment, pour être... pour faire en
sorte que l'Assemblée nationale, éventuellement, va être capable d'adopter une
loi qui va permettre aux gens de bien comprendre et de bien saisir, bien,
écoutez, j'accueille ça avec beaucoup, beaucoup d'enthousiasme. Et, pour avoir
lu, évidemment, le projet de loi et certains paragraphes, je vous dirai qu'il y
en a que je n'ai pas été capable de finir. La phrase était tellement longue,
j'étais en train de m'étouffer moi-même. Alors, je comprends que, pour les
justiciables, ça peut être un peu compliqué. Maintenant, un jour, ce
document-là va devenir une loi. Vous avez besoin de quoi? Est-ce que le
gouvernement doit vous aider pour être capable de vulgariser, de produire des
capsules pour faire en sorte que vous allez disséminer l'information auprès de
la population? Avez-vous besoin d'argent, de financement? J'aimerais vous
entendre là-dessus.
Mme Charbonneau
(Ariane) : Il faut savoir, M. le député, qu'on travaille déjà de près
avec le ministère de la Justice à plein de
niveaux. Donc, je pense que M. le ministre est déjà au courant qu'il peut
utiliser Éducaloi. On a... Nous, on n'offre pas juste au gouvernement,
mais à toute entité, qu'elle soit publique, privée, parapublique, OBNL, la
capacité de supporter les organisations dans leurs communications juridiques.
Donc,
on aime aussi beaucoup faire du coaching, de la formation, c'est-à-dire passer
notre savoir à l'interne pour que, de plus
en plus, les gens... Puis c'est un peu la différence avec l'entreprise privée
qui veut garder son expertise, sa
niche et fructifier ce... faire... en fait, monétiser son expertise. Nous,
c'est tout le contraire, nous, c'est du prosélytisme, nous, c'est... Si on peut convertir le maximum de
gens aux habiletés que ça prend pour faire de la communication claire et
de l'éducation juridique, on va être là, au rendez-vous.
Donc, de plus en
plus, nous, ce qu'on fait, c'est apprendre à pêcher plutôt que donner le
poisson, mais on peut être là dans toutes
les étapes, donc, à partir de ce que c'est, les principes de base en
communication claire, jusqu'à appuyer, valider et accompagner les
livrables qui sont faits là-dedans.
M. Morin : Je
vous remercie. Autre chose, parce qu'on parle d'accès à la justice et qu'on
parle du rôle des citoyens, c'est
fondamental, est-ce que vous avez, dans votre documentation, des capsules qui
sont rédigées en anglais et est-ce que vous avez des modules pour les
peuples autochtones, les Premières Nations?
Mme Charbonneau
(Ariane) : Bon, écoutez, nous, c'est à peu près miroir, tout ce qu'on
a, français-anglais. Donc, les communautés anglophones du Québec sont très,
très bien desservies. Maintenant, pour ce qui est des communautés autochtones,
on est dans une tout autre situation. C'est extrêmement complexe, M. le député,
de se rendre à un service d'accès à la justice qui est à la hauteur de ce que
les différentes communautés auraient besoin, ces différentes langues,
différents dialectes.
On a travaillé...
Depuis 20 ans, à quelques reprises, et plus récemment encore, on a fait un
projet qui était particulier, dans ces eaux-là, mais ça, ça prendrait vraiment
un soutien et un financement particuliers pour réussir notre objectif
d'information vulgarisée, accessible. Les modes de communication sont
différents. Les plateformes utilisées sont différentes. On est beaucoup moins
dans l'imprimé. On va utiliser les réseaux communautaires. On est vraiment
ailleurs, là, mais il faut connaître notre persona, comme on dit en
communication, là, il faut bien, bien identifier notre public cible puis
travailler, après ça, adéquatement les outils qui seraient pertinents.
M. Morin :
Et pour faire face...
Mme Charbonneau
(Ariane) : Je ne sais pas si, Guillaume, tu aimerais rajouter quelque
chose, là?
M. Rondeau
(Guillaume) : Non, mais c'est... Bien, tu sais on ne peut pas uniquement
prendre des contenus en français ou en anglais puis les traduire dans des
langues autochtones. Vraiment, l'approche est complètement différente. Il faut
repartir du début, le processus de conception, de consultation, c'est
totalement autre chose.
M. Morin : Et
est-ce que vous avez...
Mme Bourgeois
(Isabelle) : Si je peux ajouter avec une... Oh! pardon.
M. Morin : Oui,
allez-y, je vous en prie.
Mme Bourgeois
(Isabelle) : Si je peux ajouter, avec mon chapeau de pédagogue, ce qui
a prouvé, en fait, certains succès avec les communautés autochtones, c'est de
venir faire de la formation, d'avoir des activités collaboratrices avec des
gens qui sont sur le terrain, avec des personnes autochtones, pour outiller ces
personnes-là à pouvoir simplifier l'information juridique dans leur propre
langue également. Ça fait que ça, c'est une approche, là, qu'on est en train
d'explorer présentement.
• (17 h 50) •
M. Morin : Et,
compte tenu de tout ce dont on parle, est-ce que, votre équipe, vous avez
suffisamment de gens pour faire tout ou si des personnes supplémentaires vous
aideraient, compte tenu de vos budgets?
Mme Charbonneau
(Ariane) : Bien, c'est sûr qu'on prendra tout soutien parce que, pour
nous, c'est additionnel à ce qu'on fait, là.
Il ne faut pas se le cacher, là, je n'ai pas une équipe dédiée aux communautés
autochtones. J'en ai une dédiée aux
communautés anglophones, par ailleurs, qui est financée par Justice Canada,
donc, mais il faudrait probablement l'aide plus précise des ministères
appropriés pour ça, effectivement.
M. Morin : Parfait.
Je vous remercie beaucoup. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. Bon, à vous entendre, je pense que la manière la plus
simple de faciliter l'accès à la justice, c'est d'abord de rédiger des lois de
la bonne manière, là. Le ministre de la Justice vient d'apprendre, devant nos
yeux, qu'il existe un guide de rédaction claire de textes législatifs. Donc, on
peut penser qu'il n'a peut-être pas été
utilisé pour ce projet de loi là ou, en tout cas, de toute évidence, pas assez,
parce que vous nous avez donné des
exemples concrets d'éléments du projet de loi n° 8
qui ne sont pas rédigés de manière suffisamment claire. Là, on est dans
un projet de loi qui vise à améliorer l'accès à la justice. Est-ce que ça vous
semblerait approprié d'ajouter dans ce projet de loi là un article pour obliger
le législateur à utiliser le Guide pour la rédaction de textes législatifs
clairs dans tous les projets de loi qui seront déposés à l'avenir?
Mme
Charbonneau (Ariane) : J'ai peut-être l'impression, Mme la députée,
qu'il y a des considérations ou des contraintes qui me dépassent, là, dans ma
connaissance de l'administration. Juste pour votre information, nous, on fait
partie, au sein de l'IQRDJ, l'Institut québécois de réforme du droit et de la
justice, d'un sous-comité sur l'accès aux lois. On travaille de près avec les
légistes de Justice Québec là-dessus, et je sais qu'ils et elles savent que le guide existe. Donc, moi, je ne lance pas du
tout la pierre à l'équipe des rédacteurs de ce projet de loi là. Je pense que,
parfois, il y a des contraintes de temps. Il y a des contraintes qui sont
peut-être, là...
Mme Labrie : Non,
mais, sans lancer la pierre, en fait, c'est parce que c'est un peu comme
l'analyse différenciée selon les sexes, là,
il y a des guides qui existent pour ça. Après ça, est-ce que les ministères le
font? Rarement. Comme ce guide-là existe, c'est une excellente chose,
mais est-ce qu'on devrait rendre plus systématique le recours à ce guide-là
pour la rédaction des lois? Est-ce qu'on devrait ajouter ça au projet de loi n° 8?
Mme Charbonneau
(Ariane) : Il faudrait évaluer si c'est l'approche la plus efficace
pour le faire. Je ne sais pas si ce serait de cette façon-là, mais c'est sûr
que je vais supporter toute initiative qui fait en sorte qu'on est... on se
resensibilise toujours à se demander si notre public cible est atteint, parce
que, dans le fond, c'est ça aussi, c'est qui, le public cible? Est-ce que,
quand on écrit une loi, le public cible, c'est les avocats ou les notaires qui
vont lire la loi, est-ce que c'est la cour qui aura à interpréter les dispositions
législatives ou est-ce que c'est, comme je le disais tantôt, les citoyennes et
citoyens qui sont censés... à qui c'est censé, théoriquement, être destiné?
Parce que les règles de droit, c'est nos règles de jeu en société. Donc, c'est
pour ça que je vous dis que ce serait normal qu'on les comprenne un peu, nos
règles, là, mais, dans la réalité, je pense que, concrètement, écrire des lois,
ça ne s'adresse bien souvent peut-être pas à
madame, monsieur, pour plein de raisons, qu'elles soient bonnes ou pas, là.
Donc, en ce qui a trait à ajouter une disposition pour obliger qu'on utilise le
guide, il faudrait qu'on analyse un peu plus la proposition.
M. Rondeau
(Guillaume) : Oui, bien, en fait, ce que je dirais, c'est que je ne
sais pas à quel point le guide serait suffisant en soi. C'est-à-dire que, bon,
il y a un certain mouvement... On entend parler de l'accès universel à
l'information, qui fait appel à différentes limitations fonctionnelles que les
gens peuvent avoir. La littératie n'est pas reconnue, par exemple, comme étant
un handicap en ce moment, mais, clairement, les gens qui ont un faible niveau
de littératie, ils vont avoir de la difficulté à consulter l'information, à
traiter l'information.
Donc, vous parliez
d'analyse différenciée. Il y aurait d'autres critères, qui ne sont pas
présentement dans le guide de rédaction législative claire, qui doivent être
pris en considération. Puis là il y a des études sur les différentes facettes
de l'accès à l'information, l'acceptabilité d'une information, l'abordabilité.
Bon, il y a plein d'éléments, et je pense que ça déborde le contenu du guide.
Donc, ça pourrait aller plus loin que ça aussi si on souhaite vraiment un accès plus universel à l'information, le but étant
de fournir une information que le plus grand... la plus grande diversité
de profils vont être en mesure de comprendre, et pas nécessairement le plus
grand nombre.
Mme Labrie : Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Bien, d'abord, merci d'être présents parmi nous.
Merci de... merci, Éducaloi, pour le travail
auprès de la population, auprès des citoyens. Même nous, dans nos bureaux de
comté, souvent, on les réfère au site Internet d'Éducaloi parce qu'il y
a des... vraiment, il y a des capsules pertinentes qui vulgarisent certains
principes. Donc, vous faites vraiment un excellent travail. Donc, je vous
remercie.
Oui,
on comprend, de rendre la justice plus accessible, c'est le défi qu'on a, ici,
les législateurs. Ça passe aussi par l'information, puis c'est... là on
comprend que c'est là où c'est plus difficile, de rendre... de rendre
l'information accessible à tout le monde. J'ai pris connaissance, là, du résumé
de vos interventions. J'ai pris connaissance aussi de l'ensemble des
initiatives, là, que vous faites, que vous offrez. Je ne sais pas quoi dire de
plus. Je pense que tout le monde ici, autour de la table, on cherche les
outils, justement, pour... On a compris... On a bien compris ce que vous avez soulevé puis on est avec vous. On cherche les
outils. Même, je me demande, tu sais, comment qu'on pourrait créer des
multiplicateurs Éducaloi ou faire la promotion d'Éducaloi, où est-ce
qu'Éducaloi pourrait devenir une référence, un lien dans nos différents... dans
nos différents projets de loi, là, quitte à... Tu sais, on va au projet de loi,
il pourrait y avoir une capsule qui s'en va vers Éducaloi, je lance ça comme
ça. Je sais que c'est un peu plus compliqué, puis ce n'est pas un organisme
gouvernemental. Ça fait que je sais qu'il y a plusieurs contraintes autour de
tout ça aussi, mais je pense que notre
objectif, c'est aussi de rendre l'information disponible aux citoyens, au
public. Vous nous aidez beaucoup dans ce sens-là, et je vous en
remercie. Si vous avez d'autres choses à ajouter, on vous écoute.
Mme Charbonneau
(Ariane) : Bien, écoutez, nous, on sera... Moi, ce que j'ai envie de
dire là-dessus, on sera toujours là pour
aider. Que ça soit par une capsule qui est rajoutée dans des documents
officiels, tout est possible, tout est
envisageable. J'ai surtout une équipe très créative. La créativité fait partie
de nos valeurs organisationnelles, comme la neutralité, depuis 23 ans.
Donc, rien n'est impossible, et puis, moi, c'est de la musique à mes oreilles
si on peut faire davantage pour soutenir les parlementaires, le gouvernement et
pour soutenir la population en général.
Mme Nichols :
Merci.
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup. Alors, Mme Bourgeois, Me Charbonneau, Me Rondeau,
merci beaucoup d'avoir été avec nous cet après-midi. C'est très, très
intéressant, puis continuez votre magnifique travail.
Mme Charbonneau (Ariane) : Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Bachand) : Sur
ce, la commission ajourne ses travaux au jeudi 16 février 2023, après les
avis touchant les commissions. Merci, belle soirée.
(Fin de la séance à 17 h 58)