Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
vendredi 25 avril 2025
-
Vol. 47 N° 108
Interpellation du député de Jean-Talon au ministre responsable des Relations
canadiennes sur le sujet suivant : L’impasse de la troisième voie caquiste face
aux refus du Canada de donner suite aux demandes historiques du Québec
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9 h 30 (version non révisée)
(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Sainte-Croix) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation
du député de Jean-Talon au ministre responsable des Relations canadiennes sur
le sujet suivant : L'impasse de la troisième voie caquiste face aux refus
du Canada de donner suite aux demandes historiques du Québec.
M. le secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bachand (Richmond) est remplacé par M. Sainte-Croix
(Gaspé); Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel) est remplacée par M. Lévesque
(Chapleau); Mme Bourassa
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par M. Simard
(Montmorency); Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) est remplacée par Mme McGraw
(Notre-Dame-de-Grâce).
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci
beaucoup, M. le secrétaire. Compte tenu que nous avons commencé avec quelques
minutes de retard, y a-t-il consentement pour aller au-delà de l'heure prévue?
Merci.
Sur ce, nous allons débuter avec les
déclarations d'ouverture. M. le député de Jean-Talon, vous avez la parole pour
une durée de 10 minutes.
M. Paradis : Merci, M. le
Président. Salutations à mes collègues de la banquette gouvernementale.
Salutations à ma collègue de l'opposition officielle. Merci à toutes les
personnes présentes.
Trois jours avant le scrutin fédéral de
lundi prochain, et les périodes électorales...
10 h (version non révisée)
M. Paradis : ...sont...
peuvent être des moments où le Québec fait valoir de nouveau sa voix auprès des
candidats au poste de premier ministre et auprès de l'ensemble des candidats à
l'élection fédérale pour faire valoir sa voix autonomiste, pour dire... c'est
un moment où on peut croire qu'on aurait l'oreille attentive des candidats,
notamment du premier ministre du Canada, une écoute, disons, proactive et une
volonté de répondre positivement, hein, parce qu'on dit : Bien, si vous
voulez avoir les votes des Québécois, il faut répondre de manière positive aux
demandes du Québec.
Eh bien, c'est intéressant parce que l'Assemblée
nationale a fait valoir deux fois sa voix unanime dans les derniers jours, d'une
part par une motion que nous avons présentée et qui est simplement une motion
qui vise une certaine équité dans la fédération, parce que maintenant tout le
monde est au courant, la taxe carbone a été suspendue par le premier ministre
du Canada, Mark Carney. Est-ce que c'est une mesure électoraliste? On ne le
sait pas. Est-ce que ça va durer dans le temps? On ne le sait pas. Mais il y a
un mécanisme qui faisait en sorte que cette taxe-là, elle était remboursée aux
citoyens avant qu'ils aient à la payer. Et là, ce qu'on sait, c'est qu'il va
quand même y avoir des chèques pour 3,75 milliards de dollars qui
vont être envoyés partout au reste... dans le reste du Canada, mais pas au
Québec, parce que nous, on a un autre régime. Et donc l'Assemblée nationale,
unanimement, a demandé à ce que, bien, le Québec ait sa juste part de ces
montants-là, disons, grosso modo, 800 millions de dollars. Première
demande.
La deuxième, c'est un mécanisme que le
ministre de la Justice a déclenché, dit-il, un mécanisme original pour des
modifications bilatérales de la Constitution pour que le Québec ait une voix
minimale à faire valoir dans la nomination des juges des cours supérieures du
Québec, une fonction extrêmement importante, notamment parce que ce sont
souvent les arbitres des disputes constitutionnelles entre le Canada et le
Québec, puis il y a un long historique de disputes constitutionnelles. Donc là,
la résolution de l'Assemblée nationale vise à ce que les juges soient choisis
sur la base d'une liste fournie par le gouvernement du Québec, pas qu'on décide
nous-mêmes ce qui devrait arriver. C'est encore le fédéral qui décide. Pour l'instant,
l'ensemble du processus est fédéral. Donc, on a juste demandé à ce qu'on ait un
pouvoir d'envoyer une liste. Et ce qui est intéressant, c'est que le premier
ministre du Canada a réagi très promptement. Alors, c'est dans les journaux,
dans les médias du mercredi 23 avril : «Carney ferme la porte aux deux
demandes de l'Assemblée nationale formulées aujourd'hui», en pleine campagne
électorale.
Donc, déjà, le mécanisme que le ministre
de la Justice veut mettre en marche, la réponse, c'est non. Une part équitable
de la... des chèques qui ont été envoyés partout au Canada, la réponse, c'est
non. Et ça, c'est l'historique, c'est le long historique des refus du
gouvernement fédéral d'accepter des demandes légitimes, minimales. Peu importe
le qualificatif qu'on donnera à ces demandes-là, ça a toujours été non.
Et c'est d'ailleurs ce que conclut le
rapport qui vient d'être produit par le comité mis en place par le gouvernement
de la CAQ pour... qui s'appelle Ambition, affirmation et action, donc le
rapport du Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein
de la Fédération canadienne, qui rappelle que toutes les tentatives de réforme
ont été vaines entre 1927 et 1980, puis, quand il y a eu une réelle réforme, ça
a été au désavantage du Québec, à l'encontre de la volonté du Québec, c'est le
rapatriement unilatéral de la Constitution en 1982. Donc, c'est : non
seulement on se fait de dire non à nos demandes, mais en plus on se fait
imposer la volonté du gouvernement fédéral.
Et ça, ça nous ramène, donc, à la raison d'être
de la CAQ, du gouvernement de la Coalition avenir Québec. C'est intéressant
parce que je discutais... je discutais avec une collègue juste en descendant
ici, au salon rouge, puis on disait : Bien, il y a... En tout cas, ici, il
y a deux partis qui s'assument. Il y a un parti qui est fédéraliste puis qui
accepte le Canada tel qu'il est puis il y a un parti qui est indépendantiste,
qui veut que le Québec assume son destin et devienne un pays, parce que c'est
ça qui va arriver. On a besoin de ça pour être capable d'exercer l'ensemble...
l'ensemble de nos... l'ensemble de nos pouvoirs. Bien, il y a un parti qui
est... Bon, peu importe. Mais il y a un gouvernement, lui, qui ne s'assume pas,
parce que la raison d'être de sa fondation ne fonctionne pas. C'est pour ça qu'ils
ne peuvent pas s'assumer. La CAQ est fondée sur un document qui s'appelle Un
nouveau projet pour les nationalistes du Québec. Et ça aussi, là, j'écoutais ça
ce matin à la radio de Québec, là, il y avait un... il y avait un auditeur qui
parlait à une radio puis qui disait : Bien...
M. Paradis : ...on ne
comprend pas ce gouvernement-là. C'est quoi leur philosophie? Qu'est-ce qu'ils
veulent pour le Québec? Les gens ne sont pas capables de savoir. Mais il y a
une chose qu'on sait, c'est que c'était la troisième voie qu'on tentait, là, de
manière officielle. Puis là, dans leur document, ce qui est intéressant, c'est
qu'il y a cette fois le mot résultat, l'importance des résultats. Il y a cinq
fois le mot gain. On va faire des gains à l'intérieur du Canada. Hein, c'est ça
qui est dit, faire des gains et s'affirmer au sein du Canada. Je cite le
document. Un nouveau projet nationaliste axé sur les résultats. Nous voulons
des résultats, c'est-à-dire promouvoir les intérêts du Québec et obtenir des
gains. La finalité de la CAQ est d'obtenir des résultats concrets à l'intérieur
de la Fédération. Je continue. C'est le même tout le long. Et ce qui est
intéressant, c'est qu'il y a un tableau à la fin qui résume les
21 recommandations, les gains que la CAQ veut faire à l'intérieur du
régime fédéral.
Et c'est de ça dont je veux qu'on parle
aujourd'hui, parce que c'est une promesse, c'est la promesse du gouvernement de
la CAQ. On va livrer ça. Et la promesse, c'est zéro jusqu'à maintenant. Il n'y
a rien qui fonctionne. Et c'est pour ça que le premier ministre du Québec et le
ministre de la Justice sont toujours obligés de diminuer les attentes, puis
d'arriver avec le plan B, puis le plan C, puis le plan D, puis le plan E et
puis le plan F, parce que leur promesse aux Québécois n'est pas satisfaite. Il
n'y a aucun des pouvoirs qui sont nommés. Des ententes administratives au
départ. On dit : Bien ça, on n'a même pas besoin de réforme constitutionnelle.
• (10 h 10) •
Le point d'impôt. Le gouvernement de la
CAQ réclame un point d'impôt. Zéro. On ne l'a jamais eu. Ils n'en parlent même
plus. Des transferts fédéraux en tenant compte du vieillissement. À chaque fois
que le gouvernement de la CAQ envoie une facture, on va le voir plus tard, les
services pour l'immigration, la santé, etc. On demande ça puis on obtient ça.
On envoie 82 milliards de nos impôts à chaque année au fédéral pour à peu
près pas de services. Puis, quand vient le temps de réclamer notre juste part,
on ne l'a pas.
Rapport d'impôt unique? Zéro.
L'élimination du déséquilibre dans les investissements d'Ottawa en recherche et
développement, toujours pas réglée. Le fédéral vient dépenser dans nos champs
de compétences. Transfert en bloc des fonds des infrastructures? Ça fait des
semaines depuis le budget qu'on entend les ministres du gouvernement de la CAQ
se plaindre que le gouvernement fédéral n'envoie pas sa part, puis que c'est à
cause du gouvernement fédéral. Rien. Rapatriement des budgets fédéraux en
culture. Ah! Non, non. Ça, on va le voir tout à l'heure aussi. Rien.
La loi 101 appliquée aux entreprises à
charte fédérale? Rien. Le libre-échange interprovincial? Ça a été un sujet dans
les dernières semaines. Toujours pas de véritable libre-échange. Langue,
culture et immigration, les pleins pouvoirs. Zéro. On est toujours... Là, on
est rendus à demander des miettes du gouvernement fédéral en matière
d'immigration. Contrôle des infrastructures portuaires? Non. Toujours au
fédéral. Les frontières du nord du Québec? Jamais entendu parler de ça.
Reconnaissance constitutionnelle pleine et entière du Québec en tant que
nation? Rien. Développement énergétique et réglementation environnementale?
Toujours dépendant de ce qui se passe au fédéral. Pouvoir fédéral de dépenser?
Pire que jamais. Non seulement on ne l'a pas limité, c'est pire que jamais.
C'était jugé comme une menace pour le Québec par Maurice Duplessis, par Daniel
Johnson, par tout le monde. Pire que jamais.
Bilinguisme obligatoire pour siéger comme
juge à la Cour suprême? Non. Droit de veto du Québec sur les modifications
constitutionnelles? Non. Abolir ou réformer le Sénat? Non. Abolition de la
fonction de lieutenant-gouverneur? Non. Puis là on arrive même des propositions
pouvant être mises de l'avant par le gouvernement du Québec ou voté par
l'Assemblée nationale. Effort majeur de francisation pour les personnes
immigrantes. On a vu le chaos qui a été créé par le gouvernement de la CAQ dans
les services de francisation. Donc, non seulement le gouvernement de la CAQ a
complètement perdu le contrôle de l'immigration, sabotant un régime
d'immigration qui fonctionnait. Donc, on a dépassé les seuils qui permettent un
accueil digne des personnes immigrantes, mais en plus, on a sabré dans les
programmes de francisation.
Projet Saint-Laurent. Qui a entendu parler
de ça dernièrement, le projet Saint-Laurent du gouvernement de la CAQ? Aux
oubliettes dans les filières B. Juge québécois à la Cour suprême nommé sur
proposition de l'Assemblée nationale. Je termine par ça parce qu'aujourd'hui on
est rendus, comme je le disais, là, le plan B, C, D, E, F. Là, on est rendus à
réclamer un pouvoir de participation à la nomination des juges des cours supérieures,
et on s'est fait dire non. Alors, c'est ça, le bilan du programme de la CAQ en
matière de réforme à l'intérieur du régime fédéraliste.
Le Président
(M. Sainte-Croix) : Merci beaucoup, M. le député de Jean-Talon.
Je cède maintenant la parole au ministre.
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. Chers collègues, vous me permettrez de saluer le député
de Chapleau, adjoint gouvernemental en matière de justice et de relations
canadiennes, de souligner la présence également et de saluer le député de
Montmorency en compagnie de son équipe et saluer les gens du cabinet qui nous
accompagnent, également la fonction publique du Secrétariat québécois aux
relations canadiennes qui nous accompagnent...
M. Jolin-Barrette : ...saluer M.
le député de Jean-Talon, M. Blanchette, qui l'accompagne, Mme la députée de
Notre-Dame-de-Grâce, ainsi que son recherchiste, et j'ai une omission... M. le
Président, vous m'excuserez sur votre nom. Alors, M. le secrétaire également,
M. le Président.
Alors, écoutez, bien, je trouve ça
intéressant aujourd'hui que le député de Jean-Talon nous invite à discuter de
la posture de notre gouvernement en matière de relations intergouvernementales
et d'affirmation du Québec au sein de la fédération canadienne. Il s'agit d'une
posture que nous avons formulée il y a maintenant plus d'une décennie et qui
vise à offrir une troisième voie aux Québécoises et aux Québécois. Il importe
de rappeler, M. le Président, que cette option, à la fois ambitieuse et
pragmatique, a été élaborée pour réagir à certains constats qui demeurent
encore aujourd'hui d'actualité.
Le premier constat est sans doute le plus
important, une nette majorité de Québécoises et de Québécois souhaite que leur
nation, la nation québécoise, dispose de plus de pouvoirs et d'autonomie au
sein de la fédération canadienne. Deuxième constat : la polarisation entre
les indépendantistes et les partisans du statu quo a maintenu trop longtemps
les Québécois dans une position d'impasse constitutionnelle. Notre approche de
notre gouvernement cherche donc à nous affranchir collectivement de cette
logique du tout ou rien dans laquelle le Parti québécois et le Parti libéral
nous ont maintenus pendant des décennies. Et aujourd'hui, je suis heureux de
voir encore une fois qu'ils sont côte à côte. Elle consiste à utiliser
pleinement la multitude d'outils à notre disposition afin de sortir le Québec
d'un paradigme constitutionnel paralysant. Nous devons occuper tout l'espace
qui nous revient. Nous avons la conviction qu'il est ainsi possible d'obtenir
des résultats pour la nation québécoise au sein de la fédération canadienne. Ce
avec quoi mes deux collègues et leur formation politique devraient être
d'accord. Alors, fort de cette conviction, notre gouvernement a jusqu'à présent
réalisé des actions concrètes et réalistes qui nous ont permis de renforcer
notre autonomie et notre capacité à défendre nos intérêts, nos valeurs et nos
choix collectifs, mais j'y reviendrai un petit peu plus tard, M. le Président.
La troisième fois... voie que nous offrons
aujourd'hui aux Québécoises est novatrice par son caractère assumé, sans
compromis et par la variété d'outils qu'elle met à notre disposition pour
affirmer notre autonomie. Elle est cependant profondément ancrée dans l'ADN constitutionnel
du Québec par des racines historiques et transpartisanes. Il en va même de la
nature même du pacte fédératif. Ce pacte a été conclu pour permettre à deux
nations de coexister dans le respect de l'autonomie de chacun et du principe de
la non-subordination entre les ordres de gouvernement. Comme le disait la
professeure Johanne Poirier : «Le respect de l'autonomie est l'un des
fondements du système fédéral.» Ces propos font d'ailleurs écho à ceux de
Benoît Pelletier, qui affirmait pour sa part que «la fédération est fondée sur
la reconnaissance du droit à la différence et sur l'asymétrie dans les rapports
entre les partenaires fédératifs».
Comprenez-moi bien, M. le Président, ce
système politique n'est pas parfait. En revanche, le Québec a tout intérêt à
tirer pleinement profit des mécanismes qu'il nous offre et à le faire évoluer
de manière à accroître notre autonomie nationale. Alors, j'aimerais ça savoir
si le député de Jean-Talon est en désaccord avec ça.
D'ailleurs, M. le Président, les expériences
du passé démontrent que le Québec ne gagne jamais autant que lorsqu'il occupe
tout l'espace qui lui revient dans la fédération canadienne. Dès la fin du XIXᵉ
siècle, à peine 20 ans après la conclusion de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, Honoré Mercier est élu premier ministre du Québec. Grand défenseur
de l'autonomie des États fédérés et déjà critique des tendances
centralisatrices du gouvernement fédéral, Honoré Mercier occupe les champs de
compétence du Québec afin d'y affirmer sa pleine souveraineté. Il crée
notamment un bureau d'immigration qui témoigne des responsabilités que doit
pouvoir assumer le Québec en la matière.
Quelques années plus tard, Maurice
Duplessis se bat pour l'autonomie fiscale, indissociable d'un... d'une véritable
autonomie législative. Il parvient à créer un impôt québécois pour les
particuliers, et ce, malgré un refus initial du premier ministre fédéral de
l'époque, Louis Saint-Laurent. Il ne lâchait pas, lui. On ne pourrait par
ailleurs passer sous silence l'apport de Jean Lesage et de René Lévesque, qui
ont, entre autres, affirmé l'autonomie énergétique du Québec par la
nationalisation de l'hydroélectricité, celui de Paul... de M. Gérin-Lajoie pour
son affirmation de la personnalité internationale du Québec.
Tous ces gestes d'affirmation
s'inscrivent, M. le Président, dans ce qu'on définit aujourd'hui comme la
troisième voie. Et permettez-moi à cet effet de citer M. Gérin-Lajoie qui
disait déjà ceci en 1965 devant le corps consulaire de Montréal : «Le Québec
ne fait qu'utiliser des pouvoirs qu'il détient. J'irai jusqu'à dire que le
Québec commence seulement à utiliser pleinement les pouvoirs qu'il détient. Ce
n'est pas parce qu'il a négligé dans le passé d'utiliser ces pouvoirs qu'ils
ont cessé d'exister. Dans tous les domaines qui sont de... qui sont
compléments... les domaines qui sont complémentaires ou partiellement de sa
compétence, le Québec entend désormais jouer un rôle direct, conforme à sa
personnalité, à la mesure de ses droits.» Ce sont des propos qui sont encore
aujourd'hui d'actualité. Ces gestes d'affirmation, qui ont marqué notre
histoire, constituent l'héritage sur lequel...
M. Jolin-Barrette : ...sur
lequel nous bâtissons la nouvelle posture constitutionnelle du Québec. Le
mandat que nous avons confié au comité Proulx-Rousseau était de recommander des
outils pour incarner cette nouvelle posture. Ce comité est présidé par
Messieurs Sébastien Proulx et Guillaume Rousseau et composé d'experts
indépendants provenant de divers différents horizons : Catherine Mathieu,
Amélie Binette, Luc Godbout et Martine Tremblay, enjoint le gouvernement du
Québec d'adopter une posture d'affirmation et d'action et à faire preuve
d'audace. Cette proposition rompt avec les échecs et l'immobilisme des dernières
décennies, avec des suggestions novatrices, créatrices et modernes.
Et vous me permettrez de lire un passage
très éloquent de ce rapport fort étoffé, M. le Président. La vision proposée
n'est ni caquiste, ni libérale, ni péquiste, ni solidaire, ni conservatrice,
mais québécoise. Elle a pour dénominateur commun les caractéristiques
fondamentales du Québec et s'appuie sur le fait que, de tout temps et peu
importe leur allégeance, les acteurs politiques québécois ont voulu permettre
au Québec d'assumer sa spécificité. Elle met de l'avant un pacte fédératif
égalitaire où chaque État fédéré est dépositaire de sa propre liberté
constitutionnelle. Elle table sur la souveraineté parlementaire du Québec et
sur l'existence d'institutions démocratiques fortes et enracinées par
l'histoire, en plus de miser sur les possibilités offertes par le droit
conventionnel canadien et le fait que certaines des dispositions existantes
n'ont, jusqu'à présent, pas été utilisées à leur pleine capacité dans une
perspective d'affirmation et d'action.
• (10 h 20) •
Nous faisons nôtre la posture du rapport
Proulx-Rousseau et saisissons toutes les opportunités, tous les moyens qui nous
sont présentés pour accroître notre autonomie et assurer l'épanouissement de
notre nation suivant nos valeurs collectives et nos priorités et, je dirais
même, nos valeurs individuelles propres à chaque citoyen québécois qui vit au
Québec.
Vous l'aurez compris, M. le Président, l'inaction
n'est pas une option. Le Québec a cessé d'attendre, d'attendre le grand soir de
l'indépendance, d'attendre la reconnaissance du fédéral et des autres
partenaires de la fédération. Désormais, nous agissons, et c'est payant pour
notre nation.
Grâce à cette troisième voie, nous avons
réussi là où le Parti québécois, le Parti libéral ont échoué par le passé. Nous
avons réussi à bâtir des consensus autour de nos caractéristiques
fondamentales. En 2019, sous l'impulsion de notre gouvernement, le Québec a
enfin inscrit le principe de laïcité dans notre corpus législatif grâce à
l'adoption de la Loi sur la laïcité de l'État. Après des décennies de débats,
ce geste audacieux nous a permis de franchir un pas longtemps attendu par les
Québécoises et les Québécois. Par cette loi, nous avons aussi inscrit la
laïcité dans notre Charte des droits et libertés de la personne, cet outil
supralégislatif qui contribue à définir le Québec par sa consécration d'une
vision collective des droits et libertés.
Nous avons également réussi à renforcer de
manière historique la Charte de la langue française, en proposant la plus
importante réforme de cette loi fondamentale depuis son adoption en 1977.
D'ailleurs, le Parti québécois était aux abonnés absents, ils ont voté contre.
Nous n'avons pas hésité, M. le Président, à utiliser la disposition de
souveraineté parlementaire dans ces deux lois pour garantir le respect des
choix des Québécois. Nous avons aussi déchiffé une nouvelle voie pour... de
modification constitutionnelle qui nous a permis d'inscrire par nous-mêmes et
pour nous-mêmes que les Québécoises et les Québécois forment une nation, que le
français est la seule langue officielle et commune du Québec. Par le même
chemin, nous sommes venus abolir l'obligation pour les députés de l'Assemblée
nationale de prêter serment au roi. À ces initiatives s'ajoute la récente
proposition de mon collègue ministre de la Langue française d'un projet de loi
sur l'intégration nationale qui reconnaît un modèle d'intégration proprement
québécois puis même de préserver la vitalité et la pérennité de notre langue
commune.
Madame... M. le Président, le temps file.
Vous me permettrez donc de conclure en rappelant à cette Assemblée que nous
avons un devoir, le devoir de mettre à profit tous les outils à notre
disposition pour accroître notre autonomie et prendre la place qui nous revient
au sein de la fédération. Il en va de la préservation de notre identité
distincte, de nos valeurs collectives et de la pérennité de notre culture et de
notre langue. Nous sommes entrés, depuis 2018, dans une nouvelle ère d'affirmation
constitutionnelle, mue par un nationalisme renouvelé et décomplexé. Et c'est en
suivant cette troisième voie que nous allons continuer à faire respecter les
choix des Québécoises et des Québécois. M. le Président, je tends la main à mes
collègues du Parti québécois, du Parti libéral et, s'ils étaient présents, de
Québec solidaire, mais on comprend qu'ils ne travaillent pas le vendredi,
Québec solidaire, M. le Président. Ils ne se présentent pas aux
interpellations, Québec solidaire. Ils ne sont pas là pour défendre les
intérêts québécois. Ils ont toujours été absents, Québec solidaire. Alors, ils
ne sont pas là aujourd'hui. Mais nous, on est là pour défendre le Québec. Et
j'espère que mes collègues, tout comme moi, vont se joindre à moi pour faire
des gains pour le Québec. Parce que, lorsque le Québec gagne, c'est tous les
Québécois et toutes les Québécoises qui gagnent, qui assurent l'autonomie du
Québec, et on va continuer dans ce sens-là.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le ministre. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le
député de Jean-Talon, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.
M. Paradis : Merci. C'est
intéressant parce que le ministre revient sur le fait qu'il y a une
polarisation. Alors, oui, c'est vrai, ici, il y a deux partis qui ont des
visions opposées, le Parti libéral du Québec qui accepte...
M. Paradis : ...tel qu'il est,
mais on peut comprendre parce que c'est une... c'est un parti qui a vécu de
l'intérieur les échecs des revendications des pouvoirs légitimes du Québec,
puis qui s'est fait dire non, et qui aujourd'hui, bien, est obligé de se
résigner à accepter le Québec... le Canada tel qu'il est. Puis le Québec, c'est
la place minoritaire avec Ottawa qui décide de plus en plus à sa place.
C'est ce qui est en train de se passer
avec le gouvernement de la CAQ, parce que j'écoutais le ministre nous rappeler,
là, les efforts qu'il est en train de faire dans certains domaines mais
d'oublier l'éléphant dans la pièce, c'est-à-dire toutes les autres demandes
qu'il a inscrites comme étant essentielles à la survie de la nation québécoise,
les 21 demandes du programme de la CAQ, où il n'y a aucun gain, aucun progrès.
Donc là, de plus en plus, le gouvernement de la CAQ va faire comme les autres
qui ont essayé avant lui, depuis un siècle et demi, puis il va se résigner à
dire : Bien, on ne peut pas faire grand-chose, ça fait qu'on va se limiter
des miettes que le régime fédéral nous offre. C'est ça qui est en train de se
passer.
Puis, quand on me dit la polarisation...
Bien, en tout cas, nous, on s'assume puis nous, on est dans l'action. Puis
l'action, c'est de continuer à travailler pour que le Québec assume son destin
et devienne indépendant puis qu'il se défasse de cette vieille structure, qui
date de 1867, dans laquelle on est encore pognés puis que le ministre essaie
d'éviter, là, pour ne pas rentrer dans les formules de modification de ce pacte
conclu en 1867, avec lequel on est encore pognés. Mais Meech, par exemple, là,
les débats sur l'accord du lac Meech, là, ça, c'est encore la troisième voie.
Qu'on ne vienne pas me dire qu'il n'y a pas eu de polarisation. Juste pour
parler du minimum que le Québec demandait à l'époque, il y a eu de la
polarisation, puis on s'est fait dire non par le reste du Canada, alors qu'au
Québec on a dit : Ce n'est même pas assez.
Après ça, le ministre nous dit :
L'inaction n'est pas une option. C'est intéressant parce que nous après...
année après année, on demande, à l'époque des crédits, puis ça s'en vient,
qu'est-ce que le gouvernement fait sur ses demandes, le programme de la CAQ, la
promesse de la CAQ, le programme nationaliste, la troisième voie de la CAQ,
qu'est-ce qu'ils font. Par exemple, déclaration de revenus unique. Alors, on
demande : Quelles sont les rencontres qui ont été tenues? Quelles ont été
les démarches entreprises auprès du gouvernement fédéral? Aucune démarche n'a
été conduite en 2023-2024. Même chose l'année d'avant. Là, je pourrais vous les
nommer, là, j'en ai une pile comme ça de : Aucune démarche, aucune
demande. Transfert d'un point d'impôt : Aucune rencontre n'a eu lieu,
aucune démarche, aucune correspondance. Les... Le transfert des budgets
fédéraux en matière d'infrastructures : Aucune démarche. Les normes
pancanadiennes qu'on veut éliminer qui s'appliquent dans les champs de
compétence du Québec, quelles démarches le gouvernement de la CAQ a faites pour
éliminer ça? Rien, aucune rencontre, aucune démarche. Sur l'ensemble, c'est la
même chose. Je les ai. Transfert des... Transfert des budgets en culture, année
après année on demande : Qu'est-ce que le gouvernement de la CAQ a fait?
Aucune démarche, aucune correspondance, rien.
Le gouvernement de la CAQ a lui-même
abandonné parce qu'il sait qu'il va se faire dire non. Je n'ai pas entendu un
seul mot de la part du ministre sur le refus qu'il a déjà essuyé. Avant même
qu'on puisse en débattre à la Chambre des communes ou au Sénat, il a dit non à
sa demande... à sa demande sur le pouvoir de nomination des juges. Et il nous
le parle du rapport Proulx-Rousseau, il nous a cité des parties, mais moi, je
le réfère aux pages 25 et 26, où le rapport Proulx-Rousseau fait le constat de
l'échec monumental de toutes les tentatives de réforme depuis 1927. Il n'y a
rien qui a marché. Et je le réitère, comme je l'ai dit au début, ça a donné la
réforme de 1982 adoptée par les premiers ministres et le premier ministre du
Canada et le premier ministre des provinces pendant que René Lévesque dormait
dans sa chambre d'hôtel. On nous l'a enfoncé dans la gorge, cette réforme-là.
Et ce qui est triste, c'est que ce rapport fait exactement comme tous les
autres. Après ça, ils disent : On va recommencer à faire la même chose. Il
n'y a rien qui a marché depuis des décennies, mais on va recommencer à faire la
même chose.
Le ministre de la Justice puis le
gouvernement de la CAQ est pris au même endroit où Daniel Johnson était en
1965. Lisez Égalité ou indépendance, c'est la même chose qu'aujourd'hui, il n'y
a rien qui a changé. Il dit : Les contrôles... Le contrôle des pouvoirs en
immigration, les... la nomination des juges, etc., le pouvoir fédéral de
dépenser, si on n'a pas ça, si ce n'est pas réformé, il faut sortir. C'est en
1965. Même promesse aujourd'hui, même cul-de-sac pour la CAQ.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député. Je cède maintenant la parole au ministre pour cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : Mme la...
M. le Président, excusez-moi, M. le Président. Quand on est ici, c'est...
normalement, c'est la présidente, M. le Président. Je suis un peu déçu, M. le
Président, de l'attitude de mon collègue...
M. Jolin-Barrette : ...honnêtement,
je sais que c'est un parlementaire vigoureux. Il veut, à travers son action
politique, le mieux pour le Québec. Il propose une option qui est la
souveraineté du Québec. C'est le leitmotiv du Parti québécois. C'est
l'article 1 du Parti québécois. Cette option-là, elle est légitime, et je
respecte l'engagement des gens du Parti québécois en faveur de leur option, la
souveraineté du Québec. Le problème, c'est que le Parti québécois dit ça, mais
quand vient le temps d'agir, bien, ils cachent leur option un peu. Puis ils ont
déjà commencé, là. Avec la guerre tarifaire, là, ils ont déjà commencé, là,
avec M. Trump, là. On l'a vu avec la candidate de Terrebonne, là, qui
dit : Bien, oui. Finalement, malgré ce que le député de Camille-Laurin
puis le chef du troisième groupe d'opposition dit, là, que c'est la première
option du pays. Bien, écoutez, finalement, finalement, ce n'est plus si
prioritaire que ça. Là, vous allez voir, là, au cours des semaines, mois qui
s'en viennent, là, le chef de Camille-Laurin, député de Camille-Laurin, il va
dire : Bien, oui. Finalement on va régler les tarifs avant puis on verra
tout ça. Alors, pour gagner la chefferie du Parti québécois, il a promis ça,
mais ensuite, bien, finalement, ils ne vont pas jusqu'au bout de leur option.
• (10 h 30) •
Cela étant, M. le Président, elle est
légitime, l'option. Et je ne la critique pas. Mais aujourd'hui, ce qui me
déçoit, ce qui me déçoit en général, c'est la posture du Parti québécois. Parce
qu'on devrait se rallier tous ensemble sous notre drapeau, sous le fleurdelisé.
Et d'ailleurs, M. le Président, je tiens à remercier les collègues de
l'ensemble des partis en cette Chambre, cette semaine, de m'avoir donné le
mandat d'aller négocier, malgré leur grand scepticisme, malgré les critiques
que j'ai entendues, de dire : Ah! Vous ne réussirez pas à aller faire en
sorte que le gouvernement du Québec procède à la sélection des juges des
tribunaux québécois, la Cour supérieure et la Cour d'appel. Déjà on part, M. le
Président, là, du côté de l'opposition, du troisième groupe d'opposition, en se
disant : Ouais, on ne réussira pas, on ne sera pas capable, ça ne marchera
pas, c'est trop dur, c'est trop lourd. Pourquoi? Pourquoi faire ça, M. le
Président? C'est sûr que je ne l'aurai pas.
Bien, voyons donc, M. le Président. On est
des gens vigoureux, des travaillants. Les Québécois, qu'est ce qu'ils font? Ils
se crachent dans les mains, ils vont travailler à la sueur de leur front, ils
vont dans le champ, ils se levaient le matin dans le temps pour couper les
arbres, pour bûcher, pour aller érocher le sol, M. le Président, le matin avant
que le soleil se lève. Puis c'est comme ça qu'ils ont bâti le Québec, hein,
dans toutes les régions du Québec. On est un peuple fier, on est une nation
unique. On survit depuis 400 ans en Amérique du Nord. En français, M. le
Président. Puis on va continuer de le faire. Puis à chaque fois que l'État
québécois, peu importe le gouvernement, veut faire des gains, bien, il faut y
aller, M. le Président. Puis c'est ça qu'on fait. Puis il ne faut jamais
arrêter de travailler. Il ne faut jamais arrêter, M. le Président, de se
dire : Comment est ce que je peux faire pour que le Québec fasse des gains
au sein de la fédération canadienne?
Si jamais les Québécois et Québécoises,
ils veulent se prononcer sur leur avenir, ils sont libres de le faire. Puis, si
jamais ils décident de devenir un pays, bien, ce sera la décision de la nation
québécoise. Actuellement, M. le Président, notre approche, notre troisième voie
nationaliste, c'est de faire en sorte de sortir du statu quo où le Parti
québécois dit : Bien, on ne fera rien, on va critiquer l'action gouvernementale
qui cherche à faire des gains, qui cherchent à faire en sorte que la nation
québécoise puisse s'épanouir, d'avoir davantage de leviers, davantage
d'épanouissement. Et là, de l'autre côté, on a le Parti libéral qui dit :
Bien, nous, on va rester dans le Canada, puis on veut être sûr de pas brasser
les affaires pour ne pas que le Québec ait davantage de pouvoir. Ce n'est pas
notre approche. Nous, on a une approche où on va faire toujours des gains à
tous les jours. Puis l'innovation constitutionnelle que je vous ai proposée
cette semaine, qui a été acceptée, bien, ça va nous permettre de participer au
processus de sélection des juges. Même chose, M. le Président, quand on est
venu inscrire que les Québécois et Québécoises forment une nation dans la Constitution
pour que ça ait un impact juridique dans les décisions des tribunaux, M. le
Président.
Que c'est que vous voulez que je vous
dise? Le Parti québécois, il a voté contre ça. Il a voté contre la loi n° 96,
une reconnaissance formelle de la nation québécoise dans un texte
constitutionnel de 1867. Le PQ a voté contre. J'étais déçu, M. le Président.
Le Président
(M. Sainte-Croix) : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la
parole au député de Chapleau pour une durée équivalente de cinq minutes.
M. Lévesque (Chapleau) :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Moi aussi, je vais en profiter pour
saluer...
10 h 30 (version non révisée)
M. Lévesque (Chapleau) : ...les
collègues. Merci, M. le ministre. Également, M. le député de Montmorency, M. le
député de Jean-Talon, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, vraiment un
bonheur de parler, justement, de la troisième voie, la troisième voie caquiste
nationaliste et peut-être parler également des principes, des principes qui
nous... qui nous guident ici, le gouvernement. Je vais évidemment m'inscrire
dans la lignée... dans la lignée du ministre.
Et, d'abord, il y a un volet de fierté
nationale, et, vous le savez, là, les Québécois, évidemment, ferment... forment
une nation distincte et doivent être fiers de leur identité, doivent pouvoir l'exprimer
en toute circonstance. Puis la fierté québécoise peut aussi et doit s'exprimer
sans aucun complexe. Et elle peut s'exprimer également au sein de la
fédération, là, canadienne.
Il y a également le volet de l'unilatéralisme.
Il faut arrêter d'attendre, évidemment, après un signal du fédéral, qui n'a pas
retenti depuis les tentatives de réforme de la constitution dans les années 90.
Ça fait longtemps. Puis il ne faut pas non plus attendre le grand soir comme
certains veulent le faire. Il faut agir, puis c'est ce qu'on fait, en fait,
nous agissons au quotidien au gouvernement. Nous sommes des gens d'action.
Il y a également une doctrine
gouvernementale. Puis je citerais, là, Paul Journet a qualifié, évidemment, la
doctrine du nom du ministre. Le Québec utilise tous les moyens à sa disposition
pour préserver ses caractéristiques fondamentales, développer ses compétences
et agir en fonction de ses besoins constitutionnels. Puis c'est ça, la nouvelle
approche du Québec. On agit, puis c'est payant. Depuis 2018, là, on a établi
une nouvelle ère constitutionnelle. Puis c'est ce qu'on fait, jour après jour,
c'est ce à quoi on s'attarde. C'est un nouvel élan nationaliste, puis c'est
entrer dans une nouvelle ère constitutionnelle. Donc, on est venu briser, en
2018, M. le Président, le cycle, hein, de l'immobilisme des vieux partis. On se
souviendra, là, il y avait une alternance entre le Parti libéral, entre le
Parti québécois, puis il n'y a rien qui avançait du côté nationaliste puis il n'y
a rien qui avançait non plus au niveau constitutionnel. Eh bien, nous, on est
venu modifier ça. On est venu changer ça pour que les choses avancent au
Québec. Puis d'ailleurs c'est un peu le principe de notre parti. On voulait
mettre ensemble les forces vives du Québec, de plusieurs tendances politiques,
pour faire avancer le Québec et cesser justement cet immobilisme, cette
paralysie que nous connaissions. Puis c'est ce qu'on fait, depuis 2008, avec
des gens de cœur, de bonne volonté. Donc, voilà, c'est très positif.
Et, pour le volet de l'affirmation, bien,
le Québec n'attend après personne, M. le Président, puis on n'a pas besoin d'attendre
après personne, parce qu'on a tous les leviers nécessaires puis on les utilise,
on les utilise à bon escient. On prend tous les moyens à notre disposition pour
accroître notre autonomie puis assurer notre développement selon nos valeurs
qui nous sont propres et nos aspirations collectives. Donc, on fait valoir les
droits et les besoins de la nation québécoise. On fait ce qu'il faut, en fait,
là, pour que les choix des Québécois soient respectés.
Puis l'approche fonctionne, parce qu'on a
fait plusieurs gains. Puis j'aurai l'occasion, dans mes... dans mes prochains
blocs, d'en parler, de ses... de ses gains qu'on a faits, de ces avancées qu'on
a faites. Le ministre en parlait. Il en a mentionné quelques... quelques-uns,
mais j'aurai l'occasion d'y revenir un peu plus tard dans d'autres blocs. Puis
on utilise, évidemment, comme je le disais, les outils à notre disposition. Ça
veut aussi dire, lorsque c'est nécessaire, puis on a eu l'occasion, cette
semaine, de le faire, de recourir à la procédure de modification bilatérale. D'ailleurs,
on a eu l'occasion d'en débattre, cette semaine, sur la résolution
constitutionnelle pour pouvoir nommer les juges, et ce qu'on a fait, dans le...
dans le débat. Puis on a utilisé justement l'article 43 et qui va nous
permettre, justement, de négocier avec le fédéral pour pouvoir s'inscrire dans
la nomination des juges au niveau des cours supérieures et de la Cour d'appel.
Puis on est également venu se baser sur le principe du renvoi de la Cour
suprême sur la sécession du Québec. Et donc on a utilisé ça pour procéder à la
négociation. Puis c'est ce que recommandait, d'ailleurs, le Comité consultatif
des enjeux constitutionnels du Québec au sein de la Fédération canadienne dans
le rapport qui avait été déposé le 26 novembre 2024. Puis le comité,
justement, M. le Président, là, a fait valoir qu'une modification à l'article 98
de la Loi constitutionnelle de 1867 va permettre au Québec de prendre part au
processus de nomination des juges, donc, de la Cour supérieure et de la Cour d'appel.
Ça fait qu'il y a un... il y a un vraiment
un espace pour le Québec, puis on vient pleinement l'occuper. Il y a évidemment
les juges, mais il y a plein d'autres espaces qui sont occupés actuellement,
puis qu'on veut occuper, et qu'on va occuper dans les... dans les prochains...
prochains jours, prochaines semaines, prochains mois, justement, pour faire
valoir ce que... qui nous sommes, ce que nous faisons puis ce que nous voulons
faire, là, pour le Québec. Donc, on n'attend pas, on fait valoir la fierté
québécoise puis on a une doctrine gouvernementale, justement, sur le fait qu'on
peut vraiment investir l'ensemble de nos champs de compétence et aller de l'avant
avec ça. Merci.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député. Je cède maintenant la parole à la députée de
Notre-Dame-de-Grâce...
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...Notre-Dame-de-Grâce
pour une durée de cinq minutes.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Alors, salutations à mes collègues de la banquette... ministre et de
la banquette ministérielle, ainsi que mon collègue le député de Jean-Talon, qui
mène cette interpellation aujourd'hui. Il me fait plaisir de prendre la parole
en cette Chambre aujourd'hui au nom de l'opposition officielle, dans le cadre
de cette interpellation.
Alors, vous me permettrez de remarquer
qu'alors que le Québec vient de subir une baisse de cote... de sa cote de
crédit, que nos services publics sont malmenés, que les finances publiques
affichent un déficit historique et que les projets d'infrastructures si
nécessaires aux Québécois sont sur la glace, nous sommes réunis ce matin à
l'invitation du Parti québécois pour débattre du fédéralisme canadien. C'est un
choix qui leur appartient et, en tant qu'opposition officielle, nous avons
l'obligation de répondre présent, et on s'assume.
• (10 h 40) •
Le titre de cette interpellation ne nous
apparaît pas comme surprenant, autant en ce qu'il révèle de la part du Parti
québécois que de l'actuel gouvernement caquiste. On le sait, pour le Parti
québécois, le Canada et le fédéralisme canadien ne seront jamais assez. Le
Parti québécois ne peut pas reconnaître les avancées pour le Québec au sein de
la fédération canadienne, et ces avancées ne se produisent pas sous sa
gouverne, car, fondamentalement, le Parti québécois rejette la fédération
canadienne comme véhicule politique pour le futur de la nation québécoise.
C'est son option, elle est bien connue, c'est l'option d'attendre le grand
soir, de faire la promotion de la séparation du Canada au beau milieu d'une
guerre tarifaire avec les États-Unis, au beau milieu des finances précaires qui
ne seraient qu'alourdies par la souveraineté.
Du côté du gouvernement caquiste,
l'interpellation aujourd'hui nous permet d'évaluer la très grande distance qui
existe entre leurs promesses et leurs réalisations. J'aurai l'occasion de
revenir sur le document intitulé Un nouveau projet pour les nationalistes du
Québec, mis de l'avant par la CAQ dès 2015, qui contenait les engagements de sa
formation politique en matière de relations canadiennes, mais force est de
constater que les avancées obtenues par le gouvernement caquiste depuis 2018
sont bien minces.
Il ne faut pas chercher bien loin pour
comprendre pourquoi. Ramenons-nous en septembre 2021. Le Canada était alors
plongé dans une campagne électorale fédérale, et c'est à ce moment que le
premier ministre du Québec a enfilé les habits du Parti conservateur du Canada
et a invité les Québécois à appuyer la campagne du chef conservateur. C'était
une prise de position qui détonnait, M. le Président, et surtout un risque
important, soit celui de placer le Québec fermement sur les bancs de
l'opposition en cas de résultat électoral défavorable aux conservateurs. Et,
comme de fait, c'est ce qui s'est produit. On connaît la suite. Le gouvernement
libéral fédéral a été réélu, et le rapport de force dont aurait pu bénéficier
le Québec a été affaibli par la conduite du premier ministre.
C'est aussi la nature même de la CAQ qui
rend la tâche si ardue en matière de relations canadiennes, car il s'agit d'une
coalition arc-en-ciel, si on se souvient de son premier logo, qui réunit des
fédéralistes ainsi que des souverainistes déçus. De par sa nature même, la CAQ
est incapable de s'engager dans une réforme du fédéralisme canadien parce que,
foncièrement, elle ne croit pas, elle non plus, au modèle fédératif, ses
éléments souverainistes l'en empêchent. Pour la CAQ, le fédéralisme n'est pas
un véhicule qui peut être adapté pour permettre la réussite socioéconomique du
Québec et l'atteinte de ses aspirations nationales, mais c'est plutôt une
fatalité avec laquelle il faut se composer. C'est aussi pourquoi, pour
satisfaire sa base souverainiste, la CAQ doit multiplier les chocs et les
conflits avec le gouvernement fédéral, comme nous l'avons vu lors des dernières
années. Il faudrait ensuite ne pas s'étonner du peu de gains réalisés.
Alors, M. le Président, nous allons voir,
suite à... on va décortiquer ce document de la CAQ et nous allons voir ensuite
que les promesses n'ont pas été tenues. Par conséquent, la troisième voie
caquiste est un échec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
Mme la députée. M. le ministre, pour cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, de se faire dire que la troisième voie caquiste est un échec, c'est
un peu insultant, c'est un peu blessant, M. le Président. Avec tous les gains
qu'on a obtenus pour le Québec, M. le Président...
M. Jolin-Barrette : ...me
voilà subjugué, M. le Président. Écoutez, nous, on fait des gains à l'intérieur
du Canada. Ça devrait faire plaisir à la députée de Notre-Dame-de-Grâce, M. le
Président. Écoutez, quand on a fait la loi n° 96,
là... je suis d'ailleurs convaincu que c'est une des raisons pourquoi la
députée de Notre-Dame-de-Grâce a décidé de s'impliquer en politique, pour venir
s'assurer que le Parti libéral protège et fasse la promotion de la langue
française... mais lorsqu'il y a eu le vote, en juin 2022, sur la loi n° 96, le Parti libéral du Québec a voté contre, voté
contre un élément fondamental cher à la nation québécoise, la protection du
français.
Puis savez-vous quoi? Dans la loi n° 96, on a indiqué également que les Québécois et
Québécoises forment une nation inscrite dans la Constitution de 1867.
Savez-vous ce qu'a fait le Parti libéral du Québec? Ils ont nié ça, ils ont
voté contre le fait d'inscrire, dans la Constitution canadienne, dans la
Constitution de 1867, que les Québécois et Québécoises forment une nation.
Comment voulez-vous avoir un parti plus anti-québécois que le Parti libéral du
Québec, M. le Président?
Puis j'entendais la députée de
Notre-Dame-de-Grâce nous dire : Écoutez, le gouvernement de la CAQ s'est
retrouvé sans rapport de force par rapport au Parti libéral du Canada quand ils
ont été élus. M. le Président, le fait de demander de faire des gains,
d'avancer, ça, ça nous donne un rapport de force. Le fait d'être le club-école
du grand frère à Ottawa, ça, ça ne nous donne certainement pas un rapport de
force.
Le pire, M. le Président, là-dedans, c'est
que je crois que la députée de Notre-Dame-de-Grâce appuie, en plus, Pablo
Rodriguez comme chef du Parti libéral du Québec, M. le Président. Écoutez, la
maison mère, elle envoie son lieutenant à la succursale pour faire en sorte
d'avoir un parti Canadian. Comment est-ce qu'on peut rigoureusement venir à
l'Assemblée nationale puis se dire : Moi, je vais défendre les intérêts du
Québec avec un des pires gouvernements centralisateurs qu'il n'y ait pas eu à
Ottawa depuis les 50 dernières années, M. le Président? Puis ils veulent
s'élire un chef qui faisait en sorte, justement, d'enlever des pouvoirs au
Québec, de centraliser tout à Ottawa, au mépris de l'identité québécoise, au
mépris de la langue française, au mépris de la reconnaissance de la nation
québécoise. Puis c'est ce que vous allez nous proposer comme chef. Vous me
voyez un peu interloqué.
Autre point, M. le Président. Le Parti
libéral du Québec a voté contre le fait de dire que la seule langue officielle
et commune au Québec, c'est le français. Le Parti libéral a même voté contre le
fait, finalement... parce qu'il était mélangé pas mal dans le temps, M. le
Président, il voulait trois cours de français pour tout le monde au cégep. Là,
finalement, ils sont retournés dans leur comté puis ils ont vu que, finalement,
il fallait satisfaire les intérêts de... je vous dirais, d'une certaine
catégorie uniquement de la population, au détriment de l'ensemble de la
collectivité. Là, finalement, ils ont changé leur chapeau de bord.
L'ancienne cheffe, Dominique Anglade, a
complètement désavoué Mme David, qui était députée de Marguerite-Bourgeoys,
complètement, le député, aussi, Birnbaum, hein, de D'Arcy-McGee, complètement.
Je peux vous le dire, là, j'ai vécu ça, là. J'avais beaucoup d'empathie pour
eux, vraiment beaucoup. Mais une chose qui est sûre, au fond, là, ce que les
Québécois doivent retenir, là, c'est que, pour défendre les intérêts du Québec,
ils ne peuvent pas se fier sur le Parti libéral du Québec, M. le Président,
parce qu'ils seront toujours inféodés au Parti libéral du Canada. Puis je les
aime bien, là, je les aime bien, mais, pour vrai, qui pensez-vous, M. le
Président, qui est mieux pour faire des gains pour l'autonomie du Québec à
l'intérieur du Canada? Ce n'est certainement pas le Parti libéral du Québec,
surtout avec un chef qui vient de la filière canadienne.
M. le Président, le rapport de force, on
le construit, on le construit ici, à l'Assemblée nationale, en défendant les
valeurs québécoises, en défendant la laïcité. Est-ce que la députée de
Notre-Dame-de-Grâce est d'accord avec le Parti libéral du Canada, qu'ils
veulent attaquer l'utilisation, la disposition de souveraineté parlementaire?
Elle qui a été élue par les gens de son comté, elle qui est mandatée ici pour
faire des lois pour les Québécoises et les Québécois, est-ce qu'elle veut
enlever des pouvoirs à l'Assemblée nationale du Québec? Est-ce qu'elle veut
faire en sorte que son rôle en tant qu'élue des représentants de sa communauté,
lui soit usurpé? C'est comme ça qu'on se bat à tous les jours et pour faire des
gains pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...M.
le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Montmorency pour cinq
minutes.
M. Simard : Alors, M. le
Président, très, très heureux de me retrouver parmi vous ce matin. J'aimerais,
bien sûr, saluer les collègues et, bien entendu, saluer...
M. Simard : ...saluer les
membres du secrétariat qui accompagnent le ministre. Je suis particulièrement
heureux de me retrouver avec le député de Jean-Talon, avec qui je partage une
longue histoire politique. Je me souviens qu'ici il y a quelques années
maintenant, peut-être même plusieurs années, on se retrouvait à la commission
Bélanger-Campeau dans ce même salon rouge, autour d'une table ovale, et nous
avions été, à l'époque, invités par Robert Bourassa pour représenter un peu la
voix des jeunes. Et je tiens, avant de continuer cette intervention, à rappeler
à mon collègue toute l'estime que j'ai pour lui. Et je sais qu'il y a déjà beaucoup
de gens qui le voient à la chefferie du Parti québécois au lendemain de la
prochaine élection générale perdue par le Parti québécois, et je lui souhaite
de devenir un jour le remplacement de l'actuel député de Camille-Laurin, il en
a le potentiel.
Je cite mon collègue, tout à l'heure, qui
se... qui nous reprochait de ne pas parler de l'éléphant dans la pièce. Et moi,
M. le Président, je voudrais surtout vous parler, donc, de l'éléphant dont on
ne parle pas. Et l'éléphant dont on ne parle pas, c'est le pays réel. Et j'ai
bien connu le Parti québécois. Moi, j'ai été député du Parti québécois. Avant
d'être député du Parti québécois, j'étais président de mon association de
comté. J'ai eu la chance de servir Lucien Bouchard comme député. J'ai même eu la
chance de servir Bernard Landry comme plus jeune ministre de son cabinet. Et le
Parti québécois d'aujourd'hui, que j'ai en face de moi, n'a plus rien à voir
avec le Parti québécois de l'époque parce qu'à l'époque on se souciait du pays
réel.
• (10 h 50) •
Ce matin, là, on est convoqués dans une
interpellation par le Parti québécois pour parler de l'impasse de la soi-disant
impasse de la troisième voie. Est-ce que... Puis là je vous amène ça sur un
plateau d'argent, M. le député de Jean-Talon. Est-ce qu'on a parlé du déficit
qu'on vient de connaître ou de la décote? Non, parce que le Parti québécois est
dans une obsession indépendantiste. Ils ont le syndrome du vendeur de chars de
Honda. Quand tu vas chez Honda, M. le Président, qu'est-ce qui arrive? Le gars,
il n'essaie pas de te vendre une Toyota ou bien une Nissan, il ne fait que te
vendre ta Honda. Est-ce qu'on va attendre du Parti québécois qu'il trouve des
vertus à la troisième voie? Jamais de la vie. Alors... Mais, en parallèle de
ça, on a un parti qui oublie le pays réel. Est-ce que... Nous qui connaissons,
en ce moment, la pire crise inflationniste qu'on n'a pas connu depuis le choc
pétrolier, est-ce qu'il nous parle des moyens de juguler l'inflation? On sait
qu'ils étaient contre le chèque qu'on a envoyé aux Québécois. On sait qu'ils
sont contre les baisses d'impôts. «Over My Dead Body», avait dit le chef du
Parti québécois tout récemment. Mais on ne connaît pas leur position pour
combattre l'inflation. On se fout du pays réel parce qu'on est dans l'obsession
de l'indépendance. Donald Trump vient d'être élu président des États-Unis. Il
veut faire du Québec et du Canada le 51e État américain. Est-ce qu'on se
préoccupe de ça, au Parti Québécois? Bien non, parce qu'on veut faire
l'indépendance puis on s'obstine à vouloir trouver... (Interruption) ...pardon,
la meilleure date pour tenir un référendum gagnant. On a oublié le pays réel.
M. le Président, moi, je regarde un peu
l'histoire de ce parti et je vois un parti qui n'est plus ce qu'il était. Je vois
un chef qui s'appelait René Lévesque, d'abord fondateur du Mouvement
Souveraineté-Association. On ne pouvait pas penser la souveraineté sans
l'association. Plus tard, avec Lucien Bouchard, on ne pouvait pas penser la
souveraineté sans partenariat. C'étaient deux réalités consubstantielles. René
Lévesque, lui, après l'échec du référendum de 80, il a eu le courage de parler
du beau risque. On voit ce qui lui est arrivé. Les radicaux ont pris le pouvoir
puis ils l'ont chassé dehors. Pierre-Marc Johnson, qui n'est plus
souverainiste, soit dit en passant, a parlé d'affirmation nationale. Plus tard,
au lendemain de la défaite référendaire de 1995, les grands Lucien Bouchard et
Bernard Landry ont parlé des conditions gagnantes parce qu'ils se souciaient du
pays réel tel qu'il est. On ne peut pas aimer juste le Québec qu'on veut à
temps partiel, juste la partie qui fait notre affaire. Il faut aimer le Québec
dans sa globalité. C'est ça, la force de la CAQ. Et c'est ça, la faiblesse du
PQ. Ils aiment juste le Québec. Imaginez, le pays réel passe en deuxième. Même,
même Pauline Marois parlait de gouvernance souverainiste en ayant toujours en
arrière-fond l'idée souverainiste, mais avec la suggestion de l'ancien
président de la CSN. On sait à quel point nos amis du PQ sont proches de la
CSN, on n'est pas à une grève près. Bien, imaginez-vous donc qu'au moins eux
autres, même Pauline Marois, avaient le souci du pays réel.
Alors, c'est ce que je nous souhaite, moi,
c'est qu'un jour ou l'autre, le Parti québécois puisse revenir à la raison et
se préoccuper du Québec dans ce qu'il a, dans ses plus belles réalités.
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...M.
le député. M. le député de Jean-Talon, pour cinq minutes.
M. Paradis : ...c'est
intéressant. Le collègue de Montmorency parle de politique fiction, mais
lui-même commence en faisant de la politique fiction sur ce qu'il voit aux
prochaines élections. On s'en reparlera en octobre 2026. Mais je le remercie de
nous rappeler le contexte dans lequel on se trouve actuellement en raison de
l'incurie de ce gouvernement. Il nous parle des déficits, des problèmes
d'inflation et c'est malheureusement la mauvaise gestion de ce gouvernement qui
nous a placés dans cette situation là et son incapacité à faire deux choses, ce
que nous, on est capable de faire au Parti québécois, c'est-à-dire de
travailler sur les problèmes actuels, mais d'avoir une vision d'avenir, de
planifier l'avenir, de trouver les meilleures solutions pour qu'on puisse
régler ces problèmes-là. Et la meilleure solution pour qu'on ait tous les
outils, qu'on ne soit pas dépendant de ce qui se passe à Ottawa et de décisions
qui sont très souvent, très souvent à l'encontre des intérêts du Québec, c'est
de faire l'indépendance du Québec. C'est ça, de penser à long terme. Le
gouvernement de la CAQ, il est poigné dans ses... dans sa vision à court terme
électoraliste, alors que le déficit, dont parle le député de Montmorency,
trouve une grande source dans le déséquilibre fiscal que leur propre collègue
ministre des Finances continue à dénoncer, l'absence d'investissements en
infrastructures parce qu'on n'a pas les pouvoirs en infrastructures, parce
qu'ils dépensent plein d'argent ailleurs qu'au Québec. 82 milliards de notre
argent qu'on envoie à Ottawa, puis le député de Montmorency, lui, il dit :
Ah! on a problème de déficits, causé par leur mauvaise gestion, mais aussi par
le fait qu'on ne contrôle pas l'ensemble de nos finances publiques.
Puis après ça, ils nous parlent
d'inflation. Bien, on n'a pas la moitié du quart des leviers qu'on devrait
avoir pour être capables d'avoir une influence sur l'inflation. C'est ça, le
problème du gouvernement de la CAQ, un gouvernement qui est incapable de voir
dans l'avenir du Québec d'avoir confiance au fait que le Québec, on est capable
et on devrait avoir tous les leviers pour régler ces problèmes-là. On parle de
guerre commerciale. Là, la députée, la collègue de Notre-Dame-de-Grâce,
dit : Bien oui, on est en train de parler de ça, alors qu'on vit une
guerre commerciale puis le problème de la décote. C'est la même chose.
Qu'est-ce que fait le fédéralisme pour le Québec dans la situation actuelle?
Pas grand-chose. Est-ce qu'on a vu une unité canadienne dans la réponse? Aucune
unité canadienne. Notre premier ministre doit passer plus de temps à lutter
avec ses autres collègues pour protéger les intérêts du Québec que de faire
face au gouvernement américain, comme un Québec indépendant serait capable de
le faire. Notre premier ministre a été obligé de payer une boîte de lobby pour
avoir un rendez-vous à Washington avec des assistants de conseillers du bureau
de la présidence. Puis, après ça, on va nous faire croire que le Canada,
c'était, hein, le tapis rouge vers le bureau du président américain. Pas du
tout. Le Québec indépendant, non seulement s'en tirerait aussi bien, mais s'en
tirerait mieux dans le contexte actuel de guerre commerciale.
Mais tout ça nous fait dévier du problème
principal, qui est l'absence de résultat face à la politique qui nous a été
présentée, la grande promesse caquiste, l'immigration en est le principal
exemple. Dans le programme de 2015, le gouvernement nous dit... après l'échec
de Meech... Meech, c'était le minimum des pouvoirs accrus en immigration, on
s'est fait dire non. Le gouvernement de la CAQ, lui, demande que le Québec
puisse sélectionner tous ces immigrants, à l'exception des réfugiés, selon ses
propres critères, ses propres intérêts, ses propres conditions, les pleins
pouvoirs en matière de sélection des immigrants. C'est ça que la CAQ nous
promet. Puis là, au fil des ans... il l'a réitéré, là, en 2021 : Ça prend
les pleins pouvoirs. Puis, après ça, en mai 2022 : C'est une question de
survie pour la nation d'avoir les pleins pouvoirs. Puis là, en 2022, plus tard,
on envoie une facture des coûts pour les demandeurs d'asile. Puis, après ça, en
2023, au mois de juin : C'est essentiel à la survie du français d'avoir
les pleins pouvoirs en immigration. Puis là, après ça, en novembre 2023, on
envoie une nouvelle facture. En février 2024 encore puis on nous dit que ça
nous prend les pleins pouvoirs sinon c'est la Louisianisation.
Qu'est-ce que le Québec a obtenu de cette
doctrine caquiste, de la troisième voie caquiste qui est supposée nous sauver,
l'affirmation ultime? Rien. C'est toujours : Non. Ce n'est pas le
gouvernement de la CAQ qui décide. Il n'a pas les pleins leviers. Le député de
Chapleau, là, je comprends, là, lui aussi, il dit : Oui, on est en action,
tout ça, mais ce n'est pas lui qui décide, ce n'est pas le gouvernement, ce
n'est... ce n'est pas le gouvernement du Québec, c'est le gouvernement fédéral.
Et là on est rendus en 2025? Notre premier ministre quémande une réduction
substantielle du nombre d'immigrants temporaires présents sur le territoire du
Québec. C'est ça, on en est rendus là, à quémander le minimum alors qu'on avait
promis aux Québécois d'aller chercher les pleins pouvoirs en l'immigration.
C'est ça, l'échec de la troisième voie caquiste.
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...M.
le député. M. le ministre, pour cinq minutes...
M. Jolin-Barrette : ...merci,
M. le Président. Je ne comprends pas le Parti québécois, M. le Président, leur
approche. Il devrait avoir la même approche que nous, il devrait adhérer à
notre nouvelle doctrine constitutionnelle : que le Québec n'attend pas
après personne avant de faire des gains, M. le Président. Quand c'est bon pour
le Québec, il devrait l'appuyer.
Encore aujourd'hui, je ne comprends pas
pourquoi le Parti québécois n'a pas appuyé la loi no 96, la plus grande réforme,
la plus ambitieuse depuis la loi 101, qui affectait la langue commune, la
langue d'usage, la langue publique, la langue de l'éducation, la langue de la
recherche, la langue du travail, le fait qu'on vienne modifier la loi
constitutionnelle de 1867 pour donner une assise juridique à l'existence de la
nation québécoise.
M. le Président, on fonctionne
actuellement dans un système politique, une fédération. On peut-tu prendre tous
les outils à notre portée pour que le Québec ait plus d'autonomie? Il me semble
que, quand c'est bon pour le Québec, on devrait l'appuyer, mais là, c'est vrai
que j'oublie que je suis assis à Québec puis je ne suis pas à Ottawa. Ce que je
dis, c'est un peu ce que le Bloc québécois nous dit : Si c'est bon pour le
Québec, on va l'appuyer. Normalement, ça, c'est le Bloc, ça.
• (11 heures) •
Vous me permettrez un aparté. Pour le
Parti libéral, c'est clair, tu sais, le Parti libéral du Québec, eux autres,
prend ses ordres d'Ottawa, du Parti libéral du Canada, puis ils appliquent ça.
Justement, ils vont chercher un chef à Ottawa pour être bien certains que le
message centralisateur passe très bien puis qu'il soit sur le téléphone rouge,
la ligne directe, tu sais. Il n'y aura pas d'ambiguïté, on est comme le Parti
libéral du Canada, on est le parti frère, le parti frère, c'est bien clair.
Pour le PQ, là, ça nous mélange. Écoutez,
moi, je pensais que le PQ puis le Bloc, là, travaillaient ensemble dans
l'intérêt des Québécois, mais là, oh boboy! Écoutez, M. le Président, j'ai pris
connaissance du texte du chef du Parti québécois, là, sur une publication qu'il
a faite sur Internet, puis là, à quatre jours du vote pour les élections
fédérales. C'est supposé être deux partis souverainistes, M. le Président.
Seulement à quatre jours du vote, là. Ça fait cinq semaines que la campagne
électorale a été lancée au fédéral, il y a... Le chef du PQ n'a pas appuyé le
chef du Bloc avant hier, M. le Président. Puis, quand vous lisez son texte, là,
pas clair que c'est un gros appui, hein, parce que... une page, deux pages,
trois pages, quatre pages, à la fin, complètement, bien : Voilà pourquoi
je vais appuyer le Bloc. Moi, je l'ai lu au complet.
Écoutez, le problème du Parti québécois,
M. le Président, c'est que, historiquement, au lieu de se rallier, ils amènent
une certaine division entre eux au lieu de rallier tous les nationalistes comme
nous faisons. Et c'est l'option de la troisième voie, un ralliement pour tous
les nationalistes, tout le monde est bienvenu sous la grande tente des nationalistes,
M. le Président. On a des gens qui étaient nationalistes, qui étaient au PLQ,
qui étaient au PQ, qui étaient chez Québec solidaire, qui étaient au Parti
vert, qui étaient au Parti conservateur. Pourquoi? Parce que nous, comme le
disait le député de Montmorency, on vise le pays réel, ce qui est concret pour
les Québécois et le fait d'amener au quotidien des changements.
À titre d'exemple, on utilise nos outils
constitutionnels. Le fait d'aller chercher le pouvoir de nomination des juges à
Ottawa, ça, M. le Président, c'est un gain réel. Le fait de dire que les
Québécoises et les Québécois forment une nation puis que ça va nous aider dans
les litiges, ça, c'est réel. Le fait d'aller chercher 750 millions de
dollars pour les demandeurs d'asile, ça, c'est un gain réel. Le fait d'avoir
des ententes sur les garderies, ça, c'est un gain réel. M. le Président,
peut-être que le Parti québécois devrait s'inspirer un peu plus de son
ex-cousin, le Bloc québécois, puis dire : Bien, écoutez, si c'est bon pour
le Québec, on va l'appuyer. Pas être dans une position attentiste, d'être dans
une position réelle. Et je l'ai dit, leur option, M. le Président, elle est
légitime, et je la respecte. Cela étant, on peut-tu travailler, on peut-tu
travailler ensemble pour faire des gains pour le Québec?
Je suis même prêt à travailler avec le
Parti libéral du Québec, M. le Président. Pourquoi? Parce que ce qui est
important, c'est la patrie, M. le Président. C'est ça, qui est important, puis
notre patrie, ici, à nous, c'est le Québec. Alors, plus le Québec pourra faire
ses choix, plus le Québec aura de l'autonomie, plus le Québec va utiliser les
leviers à sa disposition, bien ce sera les Québécois qui vont gagner. Alors, je
dis à mes collègues : Joignez-vous à nous et appréciez le fait qu'on
fasse...
11 h (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...preuve
d'innovation.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le ministre. M. le député Chapleau. Cinq minutes.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci,
M. le Président. Parlons-en, justement, des gains réels, comme le ministre
faisait justement référence. Parlons-en, du quotidien des gens. Puis je vais
vous le démontrer, justement, là, l'approche fonctionne. On en a fait, des
gains constitutionnels, on en a fait, des gains pour le Québec puis pour les
Québécois.
D'abord, prenons l'adoption de la Loi sur
la laïcité de l'État. On se souvient, c'était un débat, c'était un dossier qui
ne cessait de s'éterniser. On a attendu longtemps avec les libéraux qui n'ont
pas agi sur cette... sur cette question-là. Comme on le dit, en bon Québécois :
Tout ce qui traîne, ramasse de la poussière. Et donc, effectivement, c'est ça
qui s'est passé. Puis il y a eu la tentative avec le gouvernement du Parti
québécois, qui n'a pas... qui n'a pas fonctionné, mais nous, on l'a fait, on l'a
adopté, la Loi sur la laïcité de l'État. Puis, justement, on a réglé cet
enjeu-là. Ça, c'est un gain réel. C'est un gain concret qui affecte le
quotidien des Québécois. Puis on n'a pas hésité non plus à utiliser les outils
constitutionnels à notre disposition. On a utilisé la disposition de
dérogation, M. le Président, pour justement s'assurer que les droits collectifs
de la nation québécoise étaient respectés et on pouvait bien protéger,
évidemment, notre loi.
Un autre gain réel, un gain, hein, pour
les Québécois puis pour notre belle langue française, le renforcement... le
renforcement, pardon, historique de la Charte de la langue française avec la
loi no 96. Ça aussi, c'est un gain très, très important qu'on a fait pour
les Québécois, pour le Québec, pour préserver notre langue, s'assurer que... de
la pérennité, en fait, dans le temps.
Sur ces deux-lois-là, bien, prenons la
laïcité de l'État, bien, le PLQ a voté contre, la loi no 96, le PLQ a voté
contre. Le le PQ a voté contre également sur la loi no 96, alors que,
justement, c'était le premier pas important sur le... pour la... pour la langue
française, comme les collègues... les collègues le disent. Je vais reprendre
les propos de mon collègue. C'est vrai, c'est épouvantable. C'était tellement
important et fondamental de protéger notre langue française. Puis QS, bon, là,
était abonné absent. Il l'était aussi pour la laïcité de l'État.
M. Simard : ...
M. Lévesque (Chapleau) : Oui,
encore, exactement, M. le député de Montmorency. Parlant également d'un geste
fort qu'on a fait aussi, l'abolition de l'obligation pour les députés de l'Assemblée
nationale du Québec de prêter serment au roi. On l'a fait. On a déposé la loi
et on l'a... on l'a abolie. Fantastique, ça, M. le Président, hein?
Des voix : ...
M. Lévesque (Chapleau) : Exact.
Une chance... une chance qu'on l'a fait. Exact, exact, le député... les
collègues m'en parlent, mais les députés se... certains collègues seraient
encore à l'extérieur, ils cogneraient à la porte, ils ne seraient pas sûrs s'ils
auraient... s'ils avaient envie de rentrer. Bien, on a... on a fait ce
changement.-là.
Évidemment, il y a aussi la modification
unilatérale. Le ministre de la Justice en a parlé, de la Constitution, pour
consacrer notre caractère national et le statut, évidemment, du français comme
seule langue officielle et commune du Québec, consacrer la nation du Québec au
sein même, dans le fond, de notre Constitution interne. Puis on n'a pas attendu
après personne. Donc, ça aussi, c'est des gains réels, des gains concrets pour
démontrer, justement, que la troisième voie fonctionne.
Donc, la réalité, là, c'est la suivante, M.
le Président, là, c'est : Aucun autre gouvernement, depuis le premier
gouvernement Lévesque, ne possède un bilan aussi reluisant que le nôtre et
impressionnant en faveur du nationalisme québécois. Vraiment, là, il n'y en a
pas d'autres, j'ai regardé, mais c'est le nôtre. Puis, au cours des dernières
années, là, le gouvernement du Québec a présenté les projets de loi dont je
viens de... dont je viens de faire mention. Puis ça vient, dans le fond,
établir le caractère distinct du Québec. Puis je vais même ajouter le projet de
loi sur l'intégration nationale. Ça aussi, c'est important, parce que ça vient,
justement, camper le modèle d'accueil, parce que la société québécoise, la
nation québécoise, c'est une société d'accueil accueillante. Ce sont des gens
de bonne volonté qui apprécient les nouveaux arrivants, mais ça doit se faire,
évidemment, en respectant nos valeurs, en respectant qui nous sommes et aussi
dans l'apprentissage de notre langue, de notre culture. Parce qu'on accueille
les gens, on le fait, évidemment, de bon cœur et à bras ouverts, les Québécois
le sont, très accueillants, mais on apprécie également qu'ils puissent être
avec nous dans la langue française, dans la culture, avec leur rapport... leur
apport aussi, parce qu'on le ne nie pas. Il y a des... il y a de très beaux
apports des gens des différentes communautés, mais l'intégration nationale vient
justement cerner ça puis assurer justement la possibilité que les nouveaux
arrivants, là, puissent parler français et également partager notre culture. Et
donc ce sont des éléments, là, qui sont... qui sont très, très importants.
Puis on continue également l'approche
décomplexée, M. le Président, qu'on a, pour construire une nation québécoise
encore plus forte et encore plus fière. D'ailleurs, tout récemment, puis je
lève mon chapeau au ministre responsable des Relations canadiennes, à mes
côtés. Il a réussi à rallier l'Alberta pour... mais pour justement défendre les
principes forts d'autonomie des différents États fédérés du Canada, notamment
la défense de la disposition de dérogation, qui est essentielle, justement,
dans le corpus législatif et le corpus constitutionnel du Canada. Et Mme Smith
s'est jointe à nous dans ça. Il y a plusieurs autres provinces qui vont le
faire également. Et le ministre de la Justice a d'ailleurs rencontré...
M. Lévesque (Chapleau) : ...la
première ministre. Et donc qu'on travaille fort en ce sens-là. Puis c'est tout
en son honneur. Merci beaucoup.
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...députée...
Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce pour cinq minutes.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Alors, en 2018, la CAQ se présentait devant les Québécois et les
Québécoises avec un document intitulé Un Québec ambitieux, promettant un
nouveau projet pour les nationalistes du Québec. Ce texte était censé marquer
une rupture avec les précédents gouvernements, une rupture qui devait permettre
au Québec de retrouver sa pleine autonomie dans plusieurs secteurs clés...
domaines clés. Mais, après sept ans, le bilan de ce gouvernement montre...
démontre un fossé important entre leurs promesses et leurs réalisations.
Comme gouvernement, la CAQ n'a pas pu
démontrer que leur proposition de troisième voie de négociation avec le
gouvernement fédéral s'est avérée plus bénéfique pour les Québécois. Et, au
contraire, elle s'est avérée contre-productive.
Regardons maintenant chaque aspect proposé
dans ce document écrit en 2015 pour justifier cette affirmation.
• (11 h 10) •
Prenons tout d'abord l'enjeu économique.
Sur le plan interprovincial, le gouvernement caquiste avait promis de faire du
Québec un acteur clé dans l'établissement d'un véritable libre-échange
canadien. Mais là, très peu de progrès concrets ont été accomplis. Et, sept ans
plus tard, la CAQ est encore au stade d'étude de barrières telles que la course
de chevaux et les pompes funèbres. On ne peut pas dire que ces priorités vont
fracasser de manière importante dont est régi le commerce canadien. Dans tous
les cas, cette étude inachevée ne répond pas au plan d'un véritable
libre-échange au moment où il y a clairement urgence d'agir.
Plus largement, en matière
d'infrastructures, la CAQ avait proposé le transfert en... le transfert en bloc
de budgets fédéraux, notamment pour gérer de manière autonome les
infrastructures liées au fleuve Saint-Laurent. La CAQ n'a pas réussi encore à
obtenir d'Ottawa les transferts nécessaires. Tout cela sans nommer le fameux
projet Saint-Laurent qui est venu couper l'erre d'aller qu'avait connue la
toute première stratégie maritime du Québec sous le gouvernement libéral
précédent.
Sur le plan fiscal, le rapport d'impôt
unique était l'une des propositions majeures de la CAQ. Ce projet avait été
présenté comme une mesure phare capable de générer des économies substantielles
pour le Québec. Pourtant, après plusieurs années au pouvoir, ce gouvernement
n'a toujours pas réussi à négocier avec Ottawa la mise en place de ce rapport
unique. Une autre promesse rompue.
En matière d'immigration, le parti avait
alors l'intention de rapatrier tous les pouvoirs en matière d'immigration, à
l'exception des réfugiés. Sans avoir pu obtenir gain de cause lors de son
premier mandat, la CAQ a demandé à la population, lors de l'élection de 2022,
un mandat fort afin de pouvoir négocier avec Ottawa le rapatriement des
pouvoirs en immigration. Presque trois ans plus tard, le Québec sélectionne la
même proportion de ses immigrants. Mme... M. le Président, est-ce que le mandat
attribué à la CAQ n'était pas suffisamment fort pour négocier adéquatement?
Sur le plan culturel, la CAQ prévoyait le
rapatriement des budgets fédéraux destinés au secteur culturel afin que le
Québec puisse mieux promouvoir sa culture, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Compte tenu du cri de cœur du monde culturel québécois, nous aurions pu nous
attendre à des avancées notoires dans ce dossier. Mais la CAQ promettait aussi
de corriger des déséquilibres historiques dans les investissements fédéraux en
recherche et développement. Cependant, rien n'a changé depuis leur arrivée au
pouvoir.
La reconnaissance constitutionnelle pleine
et entière du Québec en tant que nation est un engagement central du projet
nationaliste québécois. Mais, malgré le rapport du... le dépôt du rapport du
Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la
fédération canadienne, il n'en demeure pas moins qu'aucune démarche sérieuse, concrète
avec le gouvernement fédéral n'a été entreprise.
En conclusion, M. le Président, ce bilan
démontre... démontre clairement que le gouvernement caquiste a échoué à
traduire ses paroles de 2015, promulguées ensuite dans les campagnes de 2018,
2022, en tangibles résultats. Ce n'est pas avec des promesses brisées dans tous
les aspects mis de l'avant par la CAQ que le Québec peut défendre son autonomie
au sein du Canada ou contribuer au succès de la fédération canadienne comme
véhicule politique pour le futur de la nation québécoise.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
Mme la...
Le Président (M. Sainte-Croix) : ...M.
le ministre, pour cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : Bien, M.
le Président, en toute amitié, qu'est-ce que le Parti libéral du Québec
propose? Quand il était au pouvoir entre 2014 puis 2018, ils ont fermé le
Bureau du Québec à Ottawa. On l'a réouvert, parce que, quand vient le temps
d'aller négocier, ça prend des gens sur le terrain, à proximité. C'était ça, votre
stratégie, de faire en sorte de couper dans les relations canadiennes. On a
ouvert un bureau à Calgary, à Vancouver pour notamment augmenter les échanges
commerciaux avec nos partenaires canadiens. Et les augmentations sont en forte
hausse, là, 33,5 % en cinq ans, M. le Président. Pourquoi le Parti libéral
ne faisait pas ça?
Est-ce que vous pensez réellement que les
Québécoises et Québécois se disent : Oui, c'est vrai que c'est le Parti
libéral qui va défendre l'identité québécoise, c'est avec le Parti libéral
qu'on va faire des gains, quand le Parti libéral est contre la laïcité? Il ne
faut pas oublier, là, le Parti libéral est contre la laïcité. Puis là M. Carney
avec M. Trudeau ont annoncé qu'ils contestaient la loi sur la laïcité. Ça fait
que vous êtes d'accord avec le fait que la maison-mère du Parti libéral du
Québec prenne un recours judiciaire contre une loi qui a été adoptée à
l'Assemblée nationale. Moi, j'aimerais ça savoir si vous êtes d'accord avec ça.
Parce que, lorsqu'on se retrouve en cette Assemblée, même dans l'éventualité où
on vote contre une loi, un coup que la loi, elle est là, on a tous le devoir de
défendre les lois québécoises ici. Mais là votre maison-mère, elle, se
disent : Nous, on va attaquer les pouvoirs, les privilèges de l'Assemblée
nationale du Québec. C'est grave, ce qui est en train d'être fait, là, c'est
grave. On dit aux Québécoises et aux Québécois, par le biais de leurs
représentants élus : On ne veut plus que vous utilisez les outils
constitutionnels de la loi constitutionnelle de 1982, qui ont été mis là pour
protéger les États fédérés, pour respecter la volonté des collectivités, de la
nation québécoise, pour attaquer l'Alberta, pour attaquer la Saskatchewan, pour
attaquer le Manitoba, pour attaquer le Nouveau-Brunswick, pour attaquer la
Nouvelle-Écosse.
Savez-vous ce qu'on est en train de faire?
On est en train de bâtir un consensus avec nos partenaires... les autres États
fédérés, nos partenaires de la fédération. L'Alberta va être de notre côté à la
Cour suprême. L'Ontario va être de notre côté à la Cour suprême sur la loi sur
la laïcité. Pouvez-vous croire ça? L'Ontario va plaider du même bord que le
Québec sur le fait que les États fédérés ont le droit, en leurs assemblées,
d'utiliser les outils constitutionnels de la loi constitutionnelle de 1982.
Pouvez-vous croire ça? Mais le Parti libéral du Québec, lui, a voté contre la
loi sur la laïcité, ont voté contre la loi 96 pour faire en sorte qu'on puisse
préserver l'autonomie, les valeurs québécoises.
Est-ce que le Parti libéral du Québec est
encore du mauvais côté de l'histoire, comme il l'a été en 1977? C'est-tu ça? Il
faut-tu être antinationaliste pour être au Parti libéral du Québec? Qu'est-ce
qui est arrivé au chef par intérim du Parti libéral du Québec? Il a-tu été
séquestré? Parce qu'avant il était au Parti québécois. Qu'est-ce qui lui est
arrivé? Il faut qu'il trace la voie, parce que moi, je le sais qu'au fond de
son cœur le député de LaFontaine, là, il est fidèle au Québec, puis ça doit
être un...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : ...oui,
un déchirement interne au quotidien. Moi, je pense même que c'est peut-être un
agent infiltrateur. Il faudra voir. Vous saurez nous le dire.
Une chose est sûre... pas normal, là, M.
le Président, que l'Ontario vienne davantage défendre le nationalisme québécois
que le Parti libéral du Québec lui-même, que l'Alberta le fasse, M. le
Président. C'est quand la dernière fois que le Parti libéral du Québec a fait
des alliances avec d'autres provinces comme ça? Bien, nous, on bâtit une
nouvelle doctrine constitutionnelle, une troisième voie, puis tous ceux qui ont
les intérêts du Québec à cœur sont les bienvenus...
M. Jolin-Barrette : ...puis
on va livrer M. le Président, comme on a fait depuis les dernières années.
Le Président
(M. Sainte-Croix) : ...député de Montmorency...
M. Simard : Alors,
imaginez-vous donc, en ce 25 avril, qu'on est ici, ce vendredi matin,
réunis pour parler de la soi-disant impasse de la troisième voie. Alors que le
Québec connaît une crise inflationniste, que nous connaissons une crise
politique suite à l'arrivée de Donald Trump, je veux dire, la véritable
impasse, M. le Président, c'est la négation du pays réel que nous impose le
Parti québécois. Et cette négation du pays réel, je n'ai que quelques minutes
devant moi, et c'est très frustrant, je ne pourrais pas développer au maximum
ma pensée, mais elle se manifeste à tellement de niveaux. Le PQ que j'ai devant
moi ne ressemble plus au PQ de l'époque.
Une caractéristique fondamentale qui
sépare le PQ d'aujourd'hui de celui d'hier dans lequel je militais fin
vingtaine, début trentaine, c'est que le Parti québécois, aujourd'hui, propose
de créer, au lendemain de l'indépendance, une devise québécoise, un dollar
québécois, ce qui a surpris beaucoup les militants parce qu'ils ne voyaient pas
venir ça. C'est arrivé, là, «top down», tout droit du ciel. Les militants du PQ
ont appris que désormais, il fallait, si on est indépendantiste, être pour un
dollar québécois, ce qui vient contredire 40 ans de pédagogie
souverainiste. Même le grand Jacques Parizeau disait : Tant qu'à changer
de devise, soyons brillants, prenons la devise américaine. Mais lui, dans le
fond, ce qu'il voulait, puis il l'a démontré, notamment lors d'une fameuse
entrevue avec Stéphane Bureau au lendemain du référendum, le plan qu'il avait
prévu pour faire l'indépendance prévoyait le maintien du dollar canadien parce
qu'à cette époque-là le PQ était réaliste.
• (11 h 20) •
Il s'occupait du pays réel. Il
disait : Nous, on va assumer notre partie de la dette en la payant en
dollar québécois. Nous, on va... En dollars canadiens, pardon. Nous, on va...
On s'occupe du pays réel. On va racheter les infrastructures fédérales en
dollars canadiens. Il avait prévu tout un plan d'intervention, on s'en
souviendra, très brillant, avec la Caisse de dépôt, avec le Mouvement
Desjardins, avec la Banque Nationale pour, au lendemain d'un vote oui, assurer
la stabilité de la devise canadienne parce qu'il savait très bien, Jacques
Parizeau, parce qu'il le voyait, que le Canada était une espèce de marché
économique commun et que, pour faciliter un marché économique commun, ça nous
prenait une devise canadienne, que les vertus d'opter pour un dollar québécois
n'étaient pas si évidentes que ça. Quand un grand économiste comme Jacques
Parizeau dit ce n'est pas une bonne idée, j'ai tendance à le croire, M. le
Président. Et comme le disait tout récemment Régis Labeaume en parlant de
l'actuel chef du PQ : N'est pas Jacques Parizeau qui veut. N'est pas
Jacques Parizeau qui veut.
Il y a un changement de culture majeur
dans ce parti-là. Et dans les quelques instants qui me sont donnés, j'aimerais
revenir sur une lettre que la députée de Terrebonne a envoyée, parce que je
vous parlais à l'instant de Régis Labeaume, une lettre publique envoyée tout
récemment à Régis Labeaume : M. Labeaume, ne pas tenir de référendum
revient à le perdre. Imaginez-vous donc! Une nouvelle élue qui n'est même pas
là depuis deux semaines, qui est quand même... qui fut la présidente nationale
du Parti québécois, arrive avec toute son aura. La première sortie publique
qu'elle fait, c'est pour s'en prendre à un ancien souverainiste, un gars qui a
milité activement au PQ, qui était attaché politique de Jean-François Bertrand
dans le cabinet de René Lévesque, qui a servi Lucien Bouchard, qui faisait la
campagne de financement de Lucien Bouchard lorsqu'il était député de Jonquière,
qui a fait la campagne référendaire de 1995. Elle s'en prend à ce gars-là et, à
travers lui, à tous les militants de cette génération-là en disant : Aïe!
Vous autres, là, les vieux boomers, là, vous n'avez pas réussi à faire le pays.
Tassez-vous! Nous autres, on va le faire. Vous autres qui avez travaillé avec
René Lévesque, vous autres qui avez travaillé avec Parizeau, vous en qui avez
travaillé avec les Landry et les Bouchard, vous n'avez pas su faire le pays.
Nous autres, là, on a la vérité infuse. On va... Tassez-vous! Coûte que coûte,
on va faire l'indépendance, peu importe le prix. Ah! puis si, par hasard, on
perd le troisième référendum, il n'y a pas de problème. On va en faire un
quatrième. C'est ça le type de pays réel dans lequel est le Parti québécois. Et
visiblement, M. le Président, on n'est pas dans le même type de pays. Un pays,
ça se bâtit dans l'unité. Ça, se pays... Ça se bâtit dans la mobilisation. Ça
se bâtit dans le respect des gens qui ont milité dans un parti. La première
affaire que la nouvelle députée fait, ancienne présidente du PQ, c'est de
s'attaquer à un gars comme Régis Labeaume. Pourquoi? Parce qu'il...
M. Simard : ...a dit que ce
serait kamikaze que de tenir un prochain référendum et... parce qu'on ne tient
pas compte du pays réel. Bien, moi, j'écoute Régis Labeaume.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député. M. le député de Jean-Talon, pour cinq minutes.
M. Paradis : Mon collègue de
Montmorency sait aussi l'amitié que je lui porte et le respect que je lui
porte. Il a raison. Nous avons cheminé ensemble en politique quand on était
plus jeunes, on est encore très jeunes, mais quand on était plus jeunes. Et ce
qui est intéressant, c'est de... ou ce qui est triste... en fait, cette envolée
qu'il vient de nous servir, c'est triste. C'est l'illustration... en fait, il
faut le garder, ce cinq minutes là, parce que c'est l'illustration, là, du
renoncement de ceux qui avaient l'ambition de la véritable action dont on a
besoin au Québec, les indépendantistes qui renoncent puis qui, tranquillement,
deviennent exactement l'image du Parti libéral du Québec, en disant : Aïe!
on n'est pas capables de ça, on n'est pas capables d'être encore avec ceux qui
portent l'ambition réelle, pour le Québec, de faire un pays.
Ça fait que là, on va se contenter du
petit peu, puis du petit peu, puis du petit peu, puis, un jour, on va être dans
l'acceptation que la place du Québec, c'est de se faire mener par Ottawa, comme
peuple minoritaire, dans un pays qui est dirigé par d'autres. C'est la
conviction puis la force des nouveaux convertis, qui ridiculisent le rêve
qu'ils ont déjà poursuivi. Parce que c'est quand même intéressant de voir que
des débats banquettes ministérielles, là, il y en a deux sur trois qui sont des
indépendantistes connus qui nous parlent aujourd'hui pour argumenter contre
cette option qui est la leur.
Puis là on m'a ouvert la porte, on a parlé
du Bloc québécois. Bien oui, le Parti québécois appelle au vote pour le Bloc
québécois, évidemment, évidemment. Mais moi, je veux savoir, je veux
savoir : Le député de Chapleau, il vote pour qui, lui, puis il appelle à
voter pour qui? Parce que là, il nous vante le régime fédéral, donc il vote
pour qui? Le ministre, lui, il vote pour qui, il appelle à voter pour qui? Je
veux le savoir. Est-ce qu'il va nous le dire aujourd'hui? Je veux le savoir. Le
député de Montmorency, lui, il vote pour qui lundi prochain? On ne le sait pas
trop. Je voudrais le savoir. Les députés de Québec, moi, je voudrais savoir
pour qui ils votent, je voudrais savoir où sont leurs convictions. Nous, nos
convictions sont pour celles et ceux qui défendent les intérêts du Québec à
Ottawa puis qui sont pris dans un carcan qui rend leur travail presque
impossible.
C'est intéressant, on est sur le bilan du
nouveau projet pour les nationalistes du Québec, puis personne n'en parle du
côté des banquettes ministérielles. Pourquoi? Parce que c'est honteux, leur...
C'est zéro, il n'y en a aucune, des 21... des 21 demandes, qui fonctionne. Là,
ils sont pris à nous parler, depuis le début, en nous disant : les gros
gains qu'ils font, c'est la loi 21 sur la laïcité puis la loi 96 sur la langue
française. Puis ils nous vantent ça, là, comme les grandes avancées de la CAQ.
Mais ces deux avancées là sont contestées par le gouvernement fédéral. Le
gouvernement fédéral est profondément contre. Peu importe le parti qui va
diriger à Ottawa, ils sont contre. Le Parti conservateur, contre. Le Parti
libéral, contre. Le Nouveau Parti démocratique, contre. Et la seule... le seul
élément qui fait tenir ces deux lois là, actuellement, c'est la clause
dérogatoire. Le gouvernement de la CAQ en est pris pour, dans ses derniers
retranchements, à dire : Aïe! les seuls gains qu'on a, on est obligés de
les protéger par le bouclier de la clause dérogatoire. Une chance qu'on l'a,
celle-là, parce que les seules choses qu'on a réussi à mettre de l'avant, c'est
ça qui les protège.
Donc, les seuls gains, entre guillemets,
dont le gouvernement de la CAQ est capable de se vanter aujourd'hui, toujours
entre guillemets, c'est des potentiels reculs, puis c'est des illustrations
profondes de l'incapacité du Québec à faire valoir sa différence à l'intérieur
du régime fédératif. Le reste du Canada a sa façon de voir les choses, puis
c'est légitime. Le Québec a sa façon de voir les choses, qu'on voudrait voir
affirmée, mais on n'a pas les outils pour le faire. La moitié de notre argent
est contrôlée par nos voisins, puis ça, le gouvernement de la CAQ accepte ça.
Puis non seulement il gère mal la moitié qui nous appartient, puis, après ça,
il fait juste chialer sur... Ah! on n'a pas le reste, puis c'est plate, ce
qu'ils font avec le reste. Bien oui, mais la solution, c'est de dire : Je
vais arrêter d'envoyer la moitié de mon argent chez mes voisins. Je les aime
bien, moi, les voisins, dans ma rue, chez nous, mais jamais me viendrait à
l'idée... l'idée à l'esprit de dire : Bien, contrôle donc la moitié de mes
affaires, ah! puis aussi, viens contrôler le reste qui m'appartient.
C'est ça, le problème de la CAQ, se
contenter non seulement de miettes, mais, en plus, de vanter des potentiels
reculs puis des reculs effectifs comme étant des gains...
M. Paradis : ...On en est
rendus là. Il y avait une certaine ambition ici. On est rendus, aujourd'hui, à
plaider pour des gains puis des pertes.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. M. le ministre, pour cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, la députée de Jean-Talon, là, qu'est-ce qu'il veut au fond,
qu'est-ce qu'il veut dans le fond de son cœur? Il veut plus d'autonomie pour le
Québec. Lui, il dit : Je me refuse à plus d'autonomie si ce n'est pas la
souveraineté. Ultimement, c'est ça qu'il nous dit. Moi, je lui offre autre
chose, mais je lui offre de l'autonomie. Je lui offre de l'espace pour le
Québec. Est-ce que c'est mieux, M. le Président, de se dire : Je veux une
crème glacée à trois boules, mais il reste juste une boule, ça fait que je n'en
mangerai pas? C'est ça qu'il nous dit. Moi, ce que je lui dis, c'est de
travailler avec nous à avoir plus d'autonomie pour le Québec. Puis ce qu'il
dit, ce n'est pas exact, M. le Président. Il y en a, des gains pour le Québec,
concrètement. On a donné un coup de barre en francisation, on a donné un coup
de barre sur la langue française. Bien oui, M. le Président, quand on a créé
Francisation Québec, l'investissement qu'on a mis... C'est tellement populaire,
M. le Président, que vous nous demandez de rajouter de l'argent, puis on en a
rajouté, on a rendu tout le monde admissible à la francisation. Parce que la
langue française, pour nous, c'est important. On agit.
• (11 h 30) •
Alors, vous avez deux choix en politique.
Vous pouvez vous placer dans la posture de voir tout noir, être comme Picsou,
dire : Mon coffre-fort, là, il est à moitié vide. Moi, j'aime mieux le
voir à moitié plein, pas comme Picsou, puis pour... dire : Mon
coffre-fort, là, je vais travailler fort pour le remplir, pour le remplir à ras
bord, M. le Président, puis pour faire en sorte de ne pas attendre après Ottawa
avant d'agir. Parce que c'est un peu ça, la posture du PQ : On attend
après Ottawa. La posture, notre doctrine constitutionnelle, du côté de la CAQ,
la doctrine nationaliste, c'est de faire le maximum de gains à l'intérieur de
la Loi constitutionnelle. Puis, vous savez, ça vaut la peine de rechercher à
l'intérieur du cadre constitutionnel que nous avons présentement, à l'intérieur
de la constitution québécoise, pour assurer plus d'autonomie. Puis, vous savez,
M. le Président, le premier ministre m'a confié le mandat de doter le Québec
d'une constitution. J'espère que le député de Jean-Talon ne dira pas, lorsqu'on
va arriver avec une constitution, il ne me dira pas : Bien, ce n'est pas
la constitution d'un État souverain. J'espère qu'il ne me dira pas ça. Parce
que, si je lui propose un texte qui va faire en sorte que le Québec va encore
pouvoir accroître son autonomie, ne voit-il pas là un gain pour l'État
québécois, pour les Québécoises et Québécois? Ne voit-il pas l'intérêt d'une
liberté constitutionnelle? Ne voit-il pas l'intérêt de faire en sorte de
défendre les dossiers québécois? Ça n'a jamais servi personne, le concept de la
chaise vide. Occupons tout l'espace qui nous revient. Il faut faire en sorte,
M. le Président, de se battre sur tous les fronts, à tous les moments, obtenir
le maximum d'argent, le maximum de pouvoirs, de limiter les interventions
fédérales.
Et d'ailleurs, M. le Président, c'est pour
ça qu'on travaille en collaboration avec les autres États fédérés. Voyez-vous
ça? On a un consensus canadien pour défendre l'autonomie des États fédérés. Le
député de Jean-Talon, ce matin, il devrait nous féliciter pour dire : Aïe!
vous faites donc bien un bon travail, les gens du Secrétariat québécois aux
relations canadiennes, vous faites preuve d'innovation. On a été durant un
hiver de glace pendant 30 ans, puis on réactive les compétences du Québec
constitutionnelles, on réactive le fait que le Québec va faire des gains. On
fait en sorte que, désormais, là, sur la glace, là, il y a une obligation de
négocier de la part du gouvernement fédéral, parce qu'on a utilisé les
outils...
11 h 30 (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...constitutionnelle
à notre portée pour que le Québec ait sa place et son mot à dire dans le
processus de sélection des juges. Le député de Jean-Talon est membre du
Barreau. Il doit être d'accord avec ça.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député... M. le ministre, pardonnez-moi. M. le député de Chapleau pour
cinq minutes.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui,
merci beaucoup, M. le Président. Moi aussi, j'ai envie de faire comme le
ministre puis d'appeler les collègues à se joindre à nous en lien avec l'intérêt
supérieur de la nation québécoise, en lien avec le sens de l'État. Puis là, on
le sait, au PLQ, là, la soumission... on en a parlé, le ministre en a parlé, la
soumission envers Ottawa, là, est complète, c'est devenu le petit frère du
grand frère, du PLC. Il n'y a pas eu, depuis les années 50, un
nationalisme aussi faible, M. le Président, au PLQ que maintenant. Parce que ça
n'a pas toujours été. Ça n'a pas toujours été. Puis je vais vous en parler tout
à l'heure. Puis on le voit d'ailleurs à la course à la chefferie actuelle. C'est
une course à celui qui va être le moins nationaliste, hein? Alors, lutte chaude
entre M. Rodriguez et M. Blackburn. Mais il fut un temps que le Parti libéral
avait un sens du nationalisme québécois. Puis j'en tiens... j'en tiens à témoin
le regretté M. Benoit Pelletier, mon mentor, avec qui j'ai eu le bonheur, le
bonheur de travailler à l'époque. Et lui avait une vision claire, avait une
vision nationaliste du Québec. C'était le Québec d'abord. Et il n'hésitait
jamais à mettre... du moins à faire valoir l'ensemble des outils
constitutionnels ou toutes les modifications qu'il aurait voulu faire en lien
avec la Constitution. Et donc j'en garde d'excellents souvenirs. Mais cette époque
au Parti libéral est révolue. Le nationalisme... Le ministre disait : le
Parti libéral est devenu antinationaliste. Je dirais que le nationalisme a
quitté le Parti libéral. On en retrouve... On n'en retrouve plus.
Et d'ailleurs, au niveau de la Constitution,
c'était aussi un rêve que chérissait M. Pelletier. Et nous allons, le ministre
et moi-même... j'ai le bonheur de travailler en partenariat pour l'élaboration,
justement, de cette constitution québécoise. Puis on souhaite justement que les
collègues, on leur tend la main, qu'ils se joignent... qu'ils se joignent à
nous dans ce dossier.
Maintenant, du côté du Parti québécois, on
préfère faire le pari de l'attentisme afin de se camper derrière notre option.
On attend le grand soir. Mais les gains réels du Québec, M. le Président, sont
minimisés, parfois ignorés au nom du pays imaginaire. On l'a vu avec 96. Et là,
on souhaite que ce ne soit pas le cas avec le projet de loi sur la
constitution. Mais on les comprend, là, Mme la Présidente. La CAQ réussit là où
le PQ a échoué. C'est vrai en matière de langue française, de laïcité, en
matière de nationalisme, et j'en passe.
Puis l'approche caquiste permet au Québec
d'agir sans demander la permission à quiconque, vous le savez, on en a parlé.
Puis là, j'invite le PQ à saisir, là, la main tendue que le ministre a tendue
tout à l'heure. L'approche qui permet de faire des...
(Interruption)... des gains, pardon, au
Québec, ça devrait ravir le PQ. Il devrait être heureux que le Québec fasse des
gains, pas le contraire. Puis j'invite l'ensemble justement du caucus péquiste
à réfléchir à cela, à l'importance de renforcer la nation réelle du Québec, c'est-ce
qu'on fait, nous, à la CAQ, on la renforcit, notre nation. Puis, qu'il soit
favorable à l'indépendance, c'est une position, puis on la comprend, c'est... c'est
une position qui est légitime, M. le Président.
Puis je les invite aussi à s'inspirer de
certains ténors du mouvement souverainiste. Puis j'ai quelques citations, là,
que je vais vous lire. Puis, eux, ils ne craignent pas de s'élever au-dessus de
la mêlée puis de souligner les gains du Québec. Vous allez me permettre de
citer le chef du Bloc québécois, M. Blanchet, qui disait, concernant la loi 96,
dans son journal local : «Personnellement, je suis enchanté. Une
initiative extraordinaire. Ça va susciter une formidable réaction des
Québécois. Je pense que c'est le plus grand pas vers l'avant depuis la version
originale de la loi 101. Ensuite, l'inscription à la Constitution
canadienne affirmant que le Québec est une nation dont la seule langue
officielle et commune est le français, c'est en soi historique, car ce n'est
pas qu'un symbole. La Constitution est le document qui doit régir l'ensemble du
fonctionnement de l'État canadien.» J'inviterais mes collègues du Parti
québécois à s'inspirer de M. Blanchet au Bloc québécois. Je pense que c'est...
c'est... ce sont de bons propos. Ils devraient... faire sien... faire sien ces
propos.
Également, M. Lisée qui parlait de... en
lien avec justement la motion sur la résolution constitutionnelle sur la
nomination des juges qu'on a faite cette semaine, il disait, l'ancien chef du
Parti québécois, M. Lisée, vous en souvenez, M. le Président, il disait, il n'y
a pas très longtemps : «Il y a aussi ce matin une nouvelle qui nous arrive
et qui suscite, vous comprendrez, un extraordinaire enthousiasme de ma part à l'effet
que le gouvernement du Québec a l'intention de faire en sorte que ce soit à
partir de listes fournies par le gouvernement du Québec que le fédéral puisse
choisir les juges qu'il nomme.»
Et donc, j'aimerais peut-être poser la
question. On nous a demandé pour qui... pour qui on votait, mais j'aimerais
plus retourner la question au député de Jean-Talon : En fait, est-ce que
ces gens-là, du mouvement...
M. Lévesque (Chapleau) : ...ce
sont des gens qui ont renoncé, qui ont abandonné. Est-ce que ce ne sont que des
miettes, ce que nous avons fait? Moi, je ne pense pas. Au contraire, ce sont
les gens qui reconnaissent la validité et surtout les résultats de la Coalition
avenir Québec et de notre gouvernement, M. le Président.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci
beaucoup, M. le député de Chapleau. M. le député de Jean-Talon, pour un maximum
de 2min 30s.
M. Paradis : C'est drôle,
parce que je sens de la sincérité, chez Chapleau, le ministre, ils
disent : La main tendue, etc., mais je voudrais réitérer que cette main
tendue, elle a été... Bon. D'abord, je le réitère, le ministre arrive avec un
grand schéma constitutionnel pour sa demande, la résolution unanime de
l'Assemblée nationale pour que le Québec ait une petite participation à la
nomination de juges des tribunaux supérieurs du Québec. Il n'en a parlé à
personne, hein, il est arrivé avec ça, une journée, paf! Un truc au feuilleton,
tiens, on va parler de ça.
La façon dont c'est arrivé démontre très
bien qu'on sait déjà comment ça va finir--en fait, on le sait déjà parce qu'on
a déjà eu la réponse--mais on a quand même accepté de le dire, parce que, non,
la politique du pire, ça ne sert personne, puis la chaise vide, ce n'est pas ça
dont on parle. Mais on s'est déjà fait dire non. On s'est déjà fait dire non.
Mark Carney, le premier ministre au Canada, a dit Non, ça n'arrivera pas, puis
le gouvernement fédéral ne laissera pas aller ce pouvoir-là. Puis c'est
intéressant à quel point tout ce qu'on a entendu aujourd'hui du nouveau
converti, là, qui veut montrer à tout le monde sa nouvelle croyance aux
souverainistes qui se contentent de peu puis au fédéraliste-nationaliste, là, qui
tente tant bien que mal de maintenir la coalition. On a lancé plein de ballons
de toutes sortes de côtés puis on n'a aucune réponse aux véritables questions
qui sont posées aujourd'hui.
Quel est le bilan de la CAQ sur son
programme pour les nationalistes du Québec, les 21 demandes qui ont été
réduites année après année, mois après mois, semaine après semaine? On a des
généralités : Oui, il y en a eu des gains. On occupe tout l'espace, le
verre est à moitié vide. Le verre n'est pas à moitié vide, il y a quelques
petites minuscules gouttes d'eau dedans, puis les Québécois demeurent
assoiffés.
• (11 h 40) •
Parce que, oui, c'est vrai, les Québécois
en veulent plus, d'affirmation nationale, mais il n'y en a pas, à l'intérieur
du cadre fédératif, le bilan de la CAQ sur son véritable programme, c'est zéro.
Il n'y a rien qui a marché véritablement. Quand on regarde leurs mots et leurs
demandes, ça a été non sur toute la ligne ou encore, pour la plupart, aucun
effort pour aller essayer de les chercher. Bien, c'est vrai, parce que, quand
tu sais que ça n'arrivera pas, tu n'essaies pas. Alors, pas de réponse sur le
véritable bilan de la CAQ quant à son programme nationaliste.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. Nous en sommes maintenant aux dernières
interventions. M. le ministre, vous avez la parole pour 10 minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Malgré tout, ce matin, je trouve que ça a été constructif, parce
que moi, je suis convaincu d'avoir convaincu le député de Jean-Talon, que je
voyais incapable de continuer à nous appuyer, comme il a fait cette semaine.
Puis je remercie les collègues de l'ensemble de cette Assemblée, parce qu'ils
ont eu un moment de vérité, hein? C'est qui, déjà, sur le chemin de Damas, là?
Paul? Paul, sur le chemin de Damas, Saint-Paul? Un moment de lucidité, M. le
Président, parce qu'ils ont réalisé que lorsque l'Assemblée se met ensemble, ça
donne des outils à l'État québécois pour faire des gains.
Puis ce n'est pas vrai qu'on va se faire
dire non, parce que M. Carney, ce n'est pas ça qu'il a dit, quand vous lisez
attentivement, puis il a une obligation de négocier. Donc, si d'aventure M.
Carney reste premier ministre, reste premier ministre, bien, il va devenir...
il va devoir venir s'asseoir puis négocier de bonne foi. C'est une obligation.
M. Carney, j'imagine qu'il respecte les décisions de la Cour suprême, alors il
n'aura pas le choix. Puis j'espère que le député de Jean-Talon a confiance en
moi, parce qu'il peut être certain que j'y tiens vraiment beaucoup, à cela.
Alors, je peux lui garantir, au député de Jean-Talon, que l'engagement de notre
gouvernement envers l'autonomie du Québec, envers le nationalisme, envers le
fait de faire faire des gains au Québec, il est sincère.
Ce n'est pas ce que le Parti québécois
souhaite, ultimement, on l'a exprimé au début de l'intervention de ce matin,
ils veulent la souveraineté. Ce n'est pas notre combat. Cela étant, ça ne
signifie pas...
M. Jolin-Barrette : ...que,
comme Québécois puis comme membre de cette Assemblée, on doit arrêter de
travailler. On doit toujours à tous les jours, M. le Président, comme la goutte
qui tombe, continuer sans relâche. Puis, en toute amitié, le député de
Jean-Talon nous disait : Ils vont se faire dire non, ils vont se faire
dire non, ils vont se faire dire non. Bien là, si j'adhérais à ce mantra-là, je
lui dirais : Mais que faites-vous, au Parti québécois? Vous faites… le
Parti québécois s'est fait dire non à deux reprises, mais vous n'avez pas
lâché. Vous n'avez pas continué de travailler pour votre option. Vous demeurez
persuadé que le Québec doit être indépendant. Deux fois. Mais vous croyez que
c'est l'option pour le Québec qui est légitime et qui devrait arriver. J'ai du
respect pour ça, mais au même titre que vous devriez nous encourager à être
positif puis vous joindre à nous, malgré le fait que ce n'est pas votre option,
pour dire : Aie! C'est bon, ça, on a un bon gouvernement qui veut assurer
davantage d'autonomie pour le Québec, qui veut que les Québécoises et les
Québécois en aient pour leur argent, qu'ils fassent des gains constitutionnels
sur leurs champs de compétence, sur le quotidien, sur le pouvoir de nomination
des juges, sur le français, sur la laïcité, sur nos valeurs sociales distinctes
et sur nos valeurs individuelles. Le député de Jean-Talon devrait être d'accord
avec ça, pour dire : Bien oui, c'est vrai, c'est vrai, la CAQ, là, eux
autres, là, ils décident d'agir. Ils devraient se dire, là : Nous, au
Parti québécois, on devrait s'inspirer de la CAQ. Parce qu'ils devraient se
dire : C'est vrai qu'on a des petits problèmes d'opérationnalités au Parti
québécois, pour dire : C'est difficile à conclure, c'est difficile de
faire des gains chez nous.
Mais la CAQ, elle, elle a réussi. Dans le
cadre de leurs propositions politiques, ils ont réussi à faire bouger l'arbre
vivant. Ils ont réussi à mettre de l'engrais tout autour des racines, à
l'arroser. Puis vous savez quoi? À ressusciter puis à faire pousser des
nouvelles branches qui amènent des fruits, mais du côté de la clôture
québécoise. Servons-nous des pommes, hein? On est dedans, on l'a payé. On
peut-tu en manger? Ça nous appartient. Pourquoi? Parce qu'on va s'assurer
d'être plus en forme, on va s'assurer qu'on va prendre les moyens à notre
disposition.
Puis écoutez, à une certaine époque, là,
le Parti québécois, il utilisait les outils constitutionnels. Lorsque le Parti
québécois, il a utilisé les pouvoirs de l'Assemblée pour adopter la Charte de
la langue française, par M. Camille Laurin, en 1977, ils ont agi. Quand le PQ a
utilisé la constitution, la Loi constitutionnelle de 1867 puis celle de 1982
pour déconfessionnaliser le système scolaire, ils ont agi. Quand, en 1982, il y
a eu le rapatriement de la Constitution, avec l'insertion de la Charte contre
la volonté du Québec, bien, le Parti québécois, il a utilisé, entre 1982 puis
dans 1985, la disposition de souveraineté parlementaire pour dire : Ce
n'est pas vrai que ça va s'appliquer au Québec. Par contre, le gouvernement de
Robert Bourassa a sacrifié ça. La formation de la main-d'œuvre, en 1997-1998,
ils ont été rapatrier ça, puis avec M. Chrétien à part ça.
Mais le PQ, dans ce temps-là, là, ils se
disaient : Je vais faire des gains concrets pour les Québécois au quotidien.
Puis ça devrait être ça, leur mantra, comme c'est le cas chez nous, améliorer
l'état de l'économie québécoise, développer des liens commerciaux, rendre les
Québécois plus riches. Écoutez, le premier ministre, là, l'a dit à de
nombreuses reprises, ce n'est jamais arrivé avant l'arrivée au pouvoir du
gouvernement de la CAQ que le Québec performe mieux que ses voisins au Canada
et que l'Ontario. On a fait un rattrapage économique incroyable depuis les sept
dernières années. On a battu l'Ontario, M. le Président, on augmente le niveau
de richesse des Québécois puis des Québécoises. Ça, le Parti québécois devrait
être fier de ça, devrait dire...
M. Jolin-Barrette : ...dire :
Bravo, M. le premier ministre! Avec votre équipe économique, vous avez réussi à
dynamiser l'économie québécoise. Parce que, si les Québécois sont plus riches,
ils vont avoir une meilleure qualité de vie. Puis on est tous là pour ça. Puis
c'est pour ça que c'est important de défendre nos compétences. Bon, on le sait,
Québec solidaire, ça ne les intéresse pas, de défendre nos compétences, là.
D'ailleurs, ils ne sont pas là aujourd'hui non plus. Mais, M. le Président, au
fond, là, il faut conjuguer la fierté et la prospérité. Puis, quand on
s'adresse aux Québécois, là, bien, c'est, oui, dans le discours, dans la
posture, dans la doctrine qu'on développe, mais c'est aussi pour les actions.
Alors, nous, on est dans l'action, on est dans le concret puis on va aller
chercher les pouvoirs qui nous reviennent. Puis il y a un long historique de
ça, à part l'épisode entre 2014 puis 2018, principalement, où ça n'a pas été
très glorieux pour la place du Québec au sein du Canada. J'espère d'ailleurs
que le Parti libéral va y réfléchir. Mais, M. le Président, je suis très fier
d'être membre d'un gouvernement qui a fait en sorte de quitter l'hiver
constitutionnel dans lequel on était emmurés depuis 30 ans pour recommencer à
prendre notre place, pour recommencer à donner de l'espoir aux Québécoises et
aux Québécois, pour bouger à l'intérieur de la fédération canadienne, M. le
Président, hein, faire des alliances avec l'ensemble des partenaires pour que
les États fédérés aient davantage de pouvoirs.
• (11 h 50) •
Bien, écoutez, notre objectif, là, dans le
projet pour les nationalistes qu'on a proposé, c'était : «Pendant trop
longtemps, le Parti québécois a prétendu avoir le monopole de la fierté, et le
Parti libéral, celui de la prospérité. Cette illusion a volé en éclats alors
que l'un et l'autre ont prouvé leur incapacité respective à sortir le Québec de
l'impasse constitutionnelle, à lui faire rattraper son retard économique.» Mais
nous, M. le Président, avec notre équipe au gouvernement, on a réussi à briser
ça, où est-ce que tout le monde pensait que c'était une fatalité, que, si vous
étiez souverainiste ou si vous étiez nationaliste, vous deviez voter pour le
Parti québécois puis que, si vous étiez en faveur de l'économie, vous deviez
voter pour le Parti libéral du Québec, mais on a offert une troisième voie aux
Québécois, une troisième voie qui est payante pour les Québécois, une troisième
voie qui est payante pour l'État. On ne peut plus, M. le Président, tolérer de
dire : Non, ça ne va pas marcher, d'avoir un discours défaitiste ou
dire : Bien, nous, on ne proposera rien, on va attendre que notre futur
chef arrive, qui va prendre ses instructions d'Ottawa, puis on va attendre,
assis à côté du téléphone, qu'Ottawa nous appelle.
Le Président (M. Sainte-Croix) : Merci,
M. le ministre. M. le député de Jean-Talon, pour une durée de 10 minutes
également.
M. Paradis : Il y a une chose
sur lequel... sur laquelle le ministre, le député de Chapleau, qui en a aussi
parlé, et moi, on est d'accord, c'est : Où en est le Parti libéral du
Québec sur ces questions? Le Parti libéral du Québec a déjà eu des grands
défenseurs de l'autonomie du Québec, Jean Lesage, René Lévesque, Benoît
Pelletier, qu'on a évoqué tout à l'heure, mais on est rendu à la renonciation
complète puis au fait que, bien, Parti libéral fédéral, Parti libéral du
Québec, c'est le même combat, c'est la même vision de la place du Québec dans
le Canada, un Québec restreint à accepter que ça se décide à Ottawa.
Mais ce que je trouve particulièrement
éclairant pour que les Québécoises et les Québécois comprennent où en est le
gouvernement de la CAQ là-dessus, c'est d'entendre les trois députés
aujourd'hui avoir exactement le même discours que le Parti libéral il y a
quelques années, vendre encore l'illusion de la troisième voie, puis essayer de
glorifier les minimes, minuscules miettes que le fédéralisme nous laisse, là,
puis les glorifier, puis dire que ça, c'est fantastique, puis continuer à
croire que le Québec va pouvoir s'épanouir à l'intérieur du Canada. Le
gouvernement de la CAQ puis ce qu'on a entendu aujourd'hui des trois députés,
c'est la voix... la même voix de la renonciation. Donc, ce qu'ils font comme
constat du Parti libéral du Québec, c'est exactement vers là qu'ils nous disent
qu'ils sont en train de s'en aller, parce qu'ils répètent exactement la même
façon de présenter les choses, la même façon de dire les choses et la même
façon de tordre les faits. Parce que c'est drôle, hein, parce que, là, on parle
du grand soir. Ces gens-là attendent encore le grand soir, là, le moment où le
Canada va dire oui à des revendications légitimes du Québec puis va dire oui à
ce que l'Assemblée nationale demande. Ce grand soir là, il n'est jamais arrivé,
il n'arrivera jamais...
M. Paradis : ...le pays réel.
Le pays réel, c'est le pays, c'est le Canada qui décide, puis le Québec qui est
sur la voie de la minorisation qui doit se plier à ce que le Canada veut faire,
y compris dans les champs de compétences du Québec. Daniel Johnson père l'a dit
dans son ouvrage de 1965. Déjà, à l'époque, il faisait le constat que le pacte
fédératif était complètement vicié, qu'on ne respectait plus ce pacte au départ
entre quatre provinces souveraines. C'est ça qui est en train de se passer.
Puis on a un gouvernement de la CAQ qui accepte ça. C'est un gouvernement de
promesses brisées, on le sait, dans tous les domaines économiques, affaires
sociales, santé, éducation, un gouvernement qui promet tant de choses, qui fait
des belles communications et qui ne respecte pas ses promesses. C'est
exactement la même chose en ce qui concerne la place du Québec dans le Canada.
21 promesses de la CAQ. Le ministre vient d'en lire une partie, là, mais c'est
ça, là:
Bilinguisme obligatoire pour siéger à la
Cour suprême; droit de veto du Québec sur les modifications constitutionnelles;
abolition de la réforme du Sénat.. abolition ou réforme du Sénat, pardon,
abolition de la fonction de lieutenant-gouverneur; encadrement du pouvoir
fédéral de dépenser; développement énergétique et réglementation
environnementale du côté du Québec; reconnaissance constitutionnelle pleine et
entière du Québec en tant que nation; prépondérance du Québec en matière de
langue, d'immigration et de culture, les pleins pouvoirs; contrôle des
infrastructures portuaires; frontières Nord-du-Québec; points d'impôt,
transferts fédéraux; rapport d'impôt unique; élimination du déséquilibre en
recherche et développement; transfert des fonds en infrastructures;
rapatriement des budgets fédéraux en culture; libre-échange interprovincial;
Loi 101; juge québécois à la Cour suprême; Projet Saint-Laurent; francisation.
C'est zéro. Promesses brisées complètement.
Il ne faut pas oublier que la troisième
voie, le peuple canadien, il a déjà dit non. C'était le minimum, le lac Meech,
là. Robert Bourassa est arrivé avec le minimum. Il a dit: Ça nous prend ça. La
reconnaissance du droit de veto du Québec, c'était ça, Meech, limitation du
fédéral, du pouvoir fédéral de dépenser, garantie de pouvoirs accrus en matière
d'immigration, participation du Québec à la nomination des juges civiliste de
la Cour suprême puis reconnaissance explicite du Québec dans la Constitution
comme foyer d'une société distincte. Ça, c'étaient les demandes minimales du
lac Meech. Il y a eu un référendum, le Canada a dit non. Puis le Québec a dit
non parce que nous, on pensait que ce n'était pas assez.
Donc, non seulement on est très loin des
demandes du programme de la CAQ, qui est une promesse brisée. C'est la
principale promesse brisée et c'est la plus importante pour l'avenir du Québec.
Parce que nous, on n'est pas comme le député de Montmorency en pensant qu'il
faut juste se concentrer aujourd'hui puis dire: Tout ce qu'on regarde, c'est ce
qu'il se passe aujourd'hui. Il faut voir cinq, 10, 20, 50 ans, 100 ans en
avant. Puis quand on fait ça, on le sait que c'est l'indépendance du Québec que
ça nous prend.
Le premier ministre en a été réduit en
2021, avant les dernières élections générales, à réduire ses demandes. Il a
fait des demandes en transferts en santé, application de la loi 101 aux
entreprises fédérales; n'a pas contesté la loi no 21 sur la laïcité de l'État;
transferts en blocs des budgets fédéraux en infrastructures; respect des
compétences du Québec en matière de logement; souveraineté environnementale et
application de l'évaluation environnementale québécoise uniquement aux projets
du Québec, seulement l'évaluation du Québec; transferts en blocs des fonds
fédéraux de lutte aux changements climatiques, conclusion d'une entente
reconnaissant au Québec un droit de retrait inconditionnel avec pleine
compensation financière, rapport d'impôt unique. Rien de ça n'est arrivé. Rien.
C'est zéro, le bilan. Aïe, conclusion d'une entente reconnaissant au Québec un
droit de retrait inconditionnel. On vient de voir ce qui s'est passé, là, avec
la taxe carbone, qui est un programme fédéral. Nous, on a notre équivalent. On
dit: Versez-nous notre argent pour l'équivalent. Non, c'est zéro.
Encore, dernièrement, un nouveau projet en
plein dans les compétences du Québec avec les soins dentaires. Là, il faut se
battre pour aller chercher notre part. On ne l'aura jamais. Puis là, aux
dernières élections, pour ces élections-ci, quelles sont les demandes?
Regardez, là,à quel point, là, on descend, puis on descend, puis on descend.
Réduction substantielle du nombre d'immigrants temporaires présents sur le
territoire du Québec. On est passé des pleins pouvoirs essentiels à la survie
du Québec à réduction, s'il vous plaît, pourriez-vous réduire substantiellement
le nombre d'immigrants? Des gestes forts pour la prospérité du Québec, un
programme fédéral d'investissements majeurs dans les infrastructures. On n'est
plus... on n'est même plus en train de demander des fonds puis les pleins
pouvoirs, on dit: Pourriez-vous mettre un peu d'argent? Encadrement du pouvoir
fédéral de dépenser. Bonne chance! C'est pire que jamais. Éliminer les doubles
évaluations environnementales. Vous voyez? On va toujours plus bas.
Alors, moi, je dis aux députés du
gouvernement, je dis au ministre, au député de Chapleau, au député de
Montmorency: Joignez-vous à nous...
M. Paradis : ...assez
perdu de temps dans l'illusion, dans la troisième voie qui ne marche à rien,
qui ne marche pas. Joignez-vous à nous. De nouveau, ayez l'ambition du Québec
de demain, celle qui va nous porter. La CAQ aura au moins servi à ça. Tout le monde
le sait. La preuve est faite. La troisième voie, ça ne marche pas. Il reste
celle qui est notre destin puis qu'actuellement seul le Parti québécois est en
train de porter, celle du Québec qui va participer au concert des nations. On
le voit à quel point il faut avoir sa place à la table des nations. En 2025,
comme dans cinq ans, comme dans 10 ans, c'est là que ça se passe. Il faut
qu'on ait notre voix à nous pour défendre nos intérêts, faire valoir notre
culture, notre langue, refonder nos relations avec les peuples autochtones, se
débarrasser de la loi raciste qui est encore celle qui guide des relations avec
les peuples autochtones, décider nous-mêmes de notre avenir énergétique, de
notre avenir environnemental en misant sur nos ressources naturelles, sur nos
ressources humaines, sur nos priorités. Pas être pris à envoyer des milliards
pour financer des pipelines puis des projets qui visent à optimiser encore sur
les énergies fossiles dans l'Ouest.
Actuellement, là, il y en a une, guerre
commerciale. C'est nos intérêts commerciaux qu'on devrait être en train de
défendre, comme d'autres nations de la même taille que le Québec, avec la même
structure, le font puis tirent leur épingle du jeu. Par exemple, les pays
scandinaves, les Norvégiens, les Suédois, les Danois sont parmi les plus riches
au monde, dans des territoires puis dans des structures gouvernementales
similaires à celle du Québec. Le Québec peut aussi le faire. Arrêtez d'envoyer
82 milliards de nos taxes et impôts chez nos voisins pour qu'ils décident
à l'encontre de nos intérêts, pour qu'ils utilisent nos taxes et nos impôts
pour contester nos lois légitimement adoptées par notre gouvernement.
• (12 heures) •
Être capables de faire valoir notre
culture, notre langue à l'échelle internationale, la survie de notre culture et
de notre langue passe par la souveraineté. Tout le monde le sait. Quand un
enfant ouvre un dictionnaire, il voit les drapeaux du monde puis il en apprend
sur les cultures du monde, on ne parle pas des provinces puis des États
fédérés. On parle des pays. Le Canada, c'est un pays tout à fait légitime, mais
avec une culture anglo-saxonne qui est distincte, qui est différente. Il est le
temps de faire valoir la culture, la voix unique du Québec à l'échelle internationale.
Contrôler véritablement l'immigration. On
en a... Moi, j'en ai parlé aujourd'hui, dans les deux dernières heures. Pas un
seul mot du côté des banquettes ministérielles parce que c'est le symbole de
l'échec. Le gouvernement l'a dit, le premier ministre l'a dit. Ça, c'est
essentiel à la survie du Québec. Contrôlons tous les leviers. Avec les
personnes immigrantes qui arrivent, faisons un pays ensemble, assumons notre
destin. C'est ça la solution pour le Québec. Ce n'est pas la troisième voie
illusoire. Ce n'est pas la voie de la renonciation du Parti libéral du Québec,
c'est l'indépendance du Québec.
Le Président
(M. Sainte-Croix) : Merci, M. le député Jean-Talon. Compte tenu
de l'heure, je lève la séance. Et la commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux au mardi 29 avril 2025 à 10 h 30, où
elle entreprendra un nouveau mandat. Merci. Bonne fin de journée.
(Fin de la séance à 12
h
02)