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Commission permanente de la justice
Etude des crédits du ministère de la
Justice
Séance du jeudi 3 juin 1976 (Seize heures trente minutes)
M. Brisson (président de la commission de la justice): A
l'ordre, messieurs!
La commission se réunit afin d'étudier les crédits
du ministère de la Justice. M. Séguin (Pointe-Claire) remplace M.
Bienvenue (Crémazie); M. Cornellier (Saint-Hyacinthe) remplace M.
Ciaccia (Mont-Royal). Ce sont les seuls changements qui m'ont été
fournis.
M. Burns: Voulez-vous me donner les autres membres, M. le
Président?
Le Président (M. Brisson): M. Bédard (Chicoutimi),
M. Bellemare (Johnson), évidemment M. Séguin (Pointe-Claire), M.
Burns (Maisonneuve), M. Cornellier (Saint-Hyacinthe), M. Choquette
(Outremont).
M. Burns: II ne peut pas être à deux places, M.
Cornellier, il remplace déjà quelqu'un.
Le Président (M. Brisson): M. Cornellier, c'est ça
que je dis. Excusez, M. Ciaccia...
M. Burns: Oui.
Le Président (M. Brisson)': M. Ciaccia n'est pas ici, il
est remplacé par M. Cornellier.
M. Burns: M. Cornellier, d'accord.
Le Président (M. Brisson): M. Choquette (Outremont), M.
Desjardins, est-ce que c'est trop vite?
M. Burns: Oui.
Le Président (M. Brisson): Alors, dites-le moi. Dites oui,
après chaque nom.
M. Burns: Desjardins, ça va.
Le Président (M. Brisson): M. Desjardins
(Louis-Hébert), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Levesque
(Bonaventure).
M. Burns: Cela va.
Le Président (M. Brisson): M. Pagé (Portneuf).
M. Burns: Cela va.
Le Président (M. Brisson): M...
M. Caron: ...Assad...
M. Burns: C'est le temps, là.
Le Président (M. Brisson): C'est le temps de le dire.
M. Caron: Oui, oui, M. Assad.
Le Président (M. Brisson): M. Assad...
M. Burns: M. Pagé n'est pas membre, c'est M. Assad.
M. Caron: Oui.
M. Burns: D'accord.
M. Caron: II remplace M. Levesque.
M. Burns: Ah bon!
Le Président (M. Brisson): M. Assad remplace M.
Levesque.
M. Burns: Assad à la place de M. Levesque. Et M.
Pagé est membre?
M. Caron: Oui. Il est à Vancouver.
Le Président (M. Brisson): Comté de Papineau, hein,
c'est ça?
M. Burns: M. Pagé. M. Caron: Oui.
Le Président (M. Brisson): M. Pagé... M. Assad
(Papineau) remplace M. Levesque (Bonaventure).
M. Burns: M. Pagé (Portneuf)...
Le Président (M. Brisson): M. Pagé (Portneuf), M.
Perreault (L'Assomption), M. Samson (Rouyn-Noranda).
M. Burns: Samson, oui.
Le Président (M. Brisson): M. Springate (Sainte-Anne).
M. Burns: Springate, ça va.
Le Président (M. Brisson): M. Sylvain (Beauce-Nord).
M. Burns: Cela va.
Le Président (M. Brisson): M. Tardif, du comté
d'Anjou.
M. Burns: Tardif.
Le Président (M. Brisson): Oui.
M. Burns: C'est lui qui va faire des méchantes choses
à M. Auguste Choquette.
M. Tardif: ...
M. Burns: C'est tout ça, M. le Président,
d'accord?
Le Président (M. Brisson): D'accord.
M. Burns: M. Séguin, M. Cornellier, M. Bédard, M.
Bellemare, M. Burns, M. Choquette, M. Desjardins, M. Assad, M. Pagé, M.
Perreault, M. Samson, M. Lalonde, M. Springate, M. Sylvain, M. Tardif.
Le Président (M. Brisson): Quinze en tout, c'est ça
que vous avez?
M. Burns: Cela va.
Le Président (M. Brisson): Alors...
M. Burns: Le quorum est de 9.
Le Président (M. Brisson): Le quorum est de 9 incluant le
président.
M. Lalonde: Incluant...
Le Président (M. Brisson): Le président. Le
président est compté dans le quorum.
M. Lalonde: Alors on est 9.
Le Président (M. Brisson): On me suggère de nommer,
comme rapporteur de cette commission, M. Springate.
M. Burns: Est-ce que vous allez rapporter cela en anglais ou en
français?
M. Springate: Les deux.
Le Président (M. Brisson): Alors, messieurs...
M. Burns: Dans la langue officielle?
Le Président (M. Brisson): Nous commençons
l'étude des crédits par le programme...
M. Springate: Dans les langues officielles de notre pays.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre!
M. Burns: C'est une question qui se pose. Est-ce que cela va
être dans la langue officielle ou si cela ne sera pas dans la langue
officielle?
M. Springate: Dans les langues officielles de notre pays. Si vous
n'aimez pas cela, nommez-vous un autre rapporteur. C'est aussi simple que
cela.
M. Burns: Je propose le député de Saint-Hyacinthe,
M. le Président, à la place du député de
Sainte-Anne.
Une Voix: II n'a pas le physique pour être dans la
police.
M. Lalonde: Ecoute, il a le droit de rapporter dans les deux
langues. Ce sont les délibérations de la...
M. Burns: Je veux savoir ce que c'est. Et si je ne suis pas
content de la réponse qui m'est donnée par le
député de Sainte-Anne...
Le Président (M. Brisson): Pour être sérieux,
j'ai deux propositions. J'ai M. Springate et M. Cornellier, du comté de
Saint-Hyacinthe. Est-ce qu'on demande le vote sur ces deux propositions? Vote
à main levée?
M. Burns: Non, je demande tout simplement l'appel des
députés membres de la commission, M. le Président. Quant
à moi, je propose le député de Saint-Hyacinthe comme
rapporteur.
M. Lalonde: La première proposition doit être mise
aux voix d'abord, celle suggérant M. Springate.
M. Caron: M. Cornellier est seulement de passage aujourd'hui;
alors, il faut prendre un membre de la commission, de
préférence.
M. Burns: Ce n'est pas mon problème à moi.
Le Président (M. Brisson): Messieurs, à l'ordre! On
a perdu assez de temps, on n'est pas pour niaiser tout l'après-midi.
M. Burns: II n'est pas question de niaiser, M. le
Président. J'ai fait une proposition pour nommer le député
de Saint-Hyacinthe.
Le Président (M. Brisson): Je m'excuse, je ne m'adresse
pas à vous.
M. Burns: Merci.
Le Président (M. Brisson): De toute façon, je mets
aux voix le choix de M. Springate, en premier lieu. Pour ou contre M. Springate
comme rapporteur. M. Bédard (Chicoutimi), absent.
M. Burns: S'il avait été ici, il aurait voté
contre.
Le Président (M. Brisson): M. Bellemare (Johnson), absent.
M. Séguin?
M. Séguin: Pour.
Le Président (M. Brisson): M. Burns.
M. Burns: Contre.
Le Président (M. Brisson): M. Cornellier?
M. Corneillier: Pour.
Le Président (M. Brisson): M. Choquette?
M. Choquette: Je m'abstiens.
Le Président (M. Brisson): M. Desjardins?
M. Desjardins: Pour.
Le Président (M. Brisson): M. Lalonde?
M. Lalonde: Pour.
Le Président (M. Brisson): M. Levesque. M. Assad n'est pas
ici. M. Pagé non plus. M. Perreault n'est pas ici. M. Samson n'est pas
ici.
Le Président (M. Brisson): M. Springate? M. Springate:
Pour.
Le Président (M. Brisson): M. Sylvain n'est pas ici. M.
Tardif?
M. Tardif: Pour.
Le Président (M. Brisson): Six pour, un contre et une
abstention. M. Springate, vous êtes élu rapporteur de cette
commission.
Messieurs, nous commençons par le programme 13, contentieux
criminel. Crédits à voter, $6 133 400. L'honorable ministre.
Exposé du Solliciteur général M.
Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, avant d'entrer en
détail dans le programme 13, j'aimerais, au début de
l'étude de ces crédits, donner une indication des
responsabilités qui m'incombent à titre de Solliciteur
général et qui ont été définies dans
l'arrêté en conseil 3473, approuvé par le
lieutenant-gouverneur en conseil le 31 juillet 1975.
Ces responsabilités couvrent le secteur du contentieux criminel,
de la sécurité publique et le programme des enquêtes et
expertises scientifiques pour fins judiciaires. Le secteur de la
sécurité publique comprend le programme de la coordination des
activités de la sécurité publique, le programme de la
normalisation et de la surveillance de l'excercice des fonctions de police,
celui de la protection civile et également celui de la.pro-tection de la
société, des citoyens et de leurs biens.
Le programme de la protection de la société, des citoyens
et de leurs biens, qui relève de la Sûreté du
Québec, représente 87,5% des crédits du Solliciteur
général, soit $121 049 500.
Comme vous pouvez le voir à la page 16-2 du livre des
crédits pour l'année financière se terminant le 31 mars
1977, les crédits des programmes 13 à 19, inclusivement, se
totalisent à $138 328 200, comparativement au budget de $125 091 100
pour l'année 1975/76, soit une augmentation de l'ordre de 10,6%.
Au cours d'un bref exposé général, j'aimerais
fournir, concernant les ressources financières, des explications
additionnelles. D'abord, le contentieux criminel. Me François Tremblay,
a été appelé à assumer les responsabilités
de la direction générale aux affaires criminelles. La direction
générale comprend les bureaux des procureurs de la couronne et le
service des fraudes et faillites.
Au cours de l'année 1975/76, la direction générale
a poursuivi son programme de régionalisation des bureaux des procureurs
de la couronne. Nous avons nommé des procureurs-chefs responsables de
ces bureaux régionaux.
Afin d'assurer une plus grande disponibilité et
d'améliorer la qualité des services de la couronne, nous
prévoyons poursuivre notre programme de nomination de procureurs de la
couronne permanents en vue de remplacer graduellement les procureurs de la
couronne à temps partiel:
La direction générale comprend donc un effectif
autorisé de 290 postes qui se répartit comme suit:
Personnel-cadre, 6; professionnels, 152; techniciens, 5; employés de
bureau, 123. L'effectif occasionnel est évalué à 24
personnes-année et, au 26 février 1976, il n'y avait que 7
procureurs à temps partiel.
Le programme de la coordination des activités de la
sécurité publique comprend la direction recherche et
programmation de la sécurité publique; la formation des
policiers, l'Institut de police à Ni-colet et la sécurité
interne. La direction recherche et programmation, qui est sous la
responsabilité du sous-ministre associé, M. Paul Benoît, a
poursuivi ses études dans le domaine des modalités de financement
des corps de police municipaux en ce qui concerne les activités
policières du secteur criminel, du financement des corps policiers des
réserves indiennes.
L'Institut de police du Québec a poursuivi ses programmes de
formation adaptés à sa clientèle. Ils comprennent des
cours de formation de base, des cours de formation au parapolicier, des cours
de recyclage, des cours de spécialisation et, enfin, de formation des
cadres.
De plus, dans le cadre de son service d'examen de promotion à
l'intention des différents corps policiers du Québec, l'Institut
de police du Québec a tenu 40 examens de promotion dans 25 villes
différentes. Durant l'année en cours, l'Institut de police du
Québec développera des cours spécialisés qui
s'adresseront à un groupe bien spécifique de policiers
préoccupés par la lutte aux incendies criminels ainsi que par la
lutte au crime économique.
Le service de sécurité interne, qui est sous la
responsabilité de M. Roger Jobin, voit à la
sécurité des membres du Conseil exécutif. L'effectif
autorisé du service de sécurité interne est de 46 postes.
Il y a actuellement environ 7 postes d'agents de la paix à combler.
La normalisation des fonctions policières. Sous cette rubrique,
nous avons connu, au cours de l'année précédente, la
modification au règlement no 7, qui réunit les normes d'embauche
des agents et cadets de la Sûreté du Québec et des
corps policiers municipaux. Les exigences nouvelles, entre autres, dans
ces normes sont les tests psychométriques et concernent la
scolarité.
Le développement du professionnalisme policier. Des programmes de
formation dans les CEGEP et les 1736 policiers inscrits à la session de
l'automne de 1975 sont les points majeurs à considérer sous cette
rubrique.
Concernant la déontologie policière, en décembre
1975, la commission a constitué un comité pour étudier
cette question. Au cours de l'année dernière, 1975/76, la
Commission de police a été saisie de 141 demandes
d'enquête. Ce sont quelques statistiques que je donne pour bien situer
dans quel contexte l'étude des crédits se fait concernant ces
différents organismes ou directions.
Les effectifs policiers au 1er janvier 1975 étaient, à la
Sûreté du Québec, de 4019, dans les cités et villes
de 9240, dans les municipalités, de 162, pour un total de 13 421,
accompagnés d'effectifs civils totalisant 3017, de sorte que le taux
d'encadrement moyen par mille de population desservie par les corps municipaux
de police était de 1,98%.
Concernant le service le plus important, en nombre au moins, le service
de police de la Communauté urbaine de Montréal, nous avons vu
l'étude qui a été faite par la Commission de police du
plan Daigneault concernant l'implantation du plan des ressources physiques et
humaines. Ce rapport de la Commission de police qui a été rendu
public en décembre ou en janvier dernier a fait l'objet d'une
consultation assez vaste et devrait très prochainement faire l'objet
d'une décision du gouvernement en vertu des lois.
Une des responsabilités qui m'a été dévolue
à l'intérieur de la Commission de police, c'est-à-dire qui
avait été dévolue à la Commission de police, mais
qui concernait plus généralement le Solliciteur
général, est la Commission d'enquête sur le crime
organisé. On a vu, durant l'année qui s'est terminée le 31
mars, les efforts redoublés qui ont été faits par la
Commission de police via la CECO pour lutter contre ce phénomène
de criminalité qui est un de ceux qui sont les plus difficiles à
combattre.
Nous avons vu avec quelle efficacité la Commission
d'enquête sur le crime organisé s'est attaquée aux
réseaux importants des criminels organisés. Nous pourrons
discuter de cette question plus en détail, lorsque nous arriverons au
programme concernant la Commission de police.
A la protection civile, M. Paul Brown, ancien sous-ministre du Tourisme,
a été nommé coor-donnateur des activités de la
protection civile à mon cabinet.
Au cours de l'année 1975/76, ce service a développé
des plans de fonctionnement, a réalisé des programmes de
formation et a procédé à l'implantation de treize nouveaux
postes et à la liaison de quatre bureaux régionaux au bureau
central. De plus, il a amélioré ses moyens de communication avec
le complément des réseaux de radio provinciaux et
régionaux et de l'équipement électronique.
La protection civile a été responsable de la coordination
des opérations des mesures d'urgence à l'occasion de la tornade
de Saint-Bonaventure le 24 juillet 1975 et plus récemment lors des
inondations qui ont frappé plusieurs régions de la province. M.
Brown dirige le bureau d'aide financière qui a été mis sur
pied il y a quelques semaines.
Concernant la Sûreté du Québec, on peut mentionner,
à part naturellement les opérations normales et quotidiennes,
quelques réformes qui ont été complétées
durant l'année 1975/76: la fusion du poste de Saint-Siméon au
poste de La Malbaie, par exemple, et du poste de Rivière-au-Tonnerre au
poste de Havre Saint-Pierre et le partage du territoire avec le poste de
Sept-lles, afin d'assurer une meilleure présence policière aux
populations concernées; la formation d'unités
spécialisées en crime économique ainsi que d'unités
spécialisées en localisation d'individus d'intérêt
policier, à Montréal et à Québec; la
création d'une équipe en plongée sous-marine à
Québec; l'organisation et la participation à l'organisation de la
sécurité des Jeux olympiques 1976, en collaboration avec le
service de police de la Communauté urbaine de Montréal, de la
Gendarmerie royale du Canada, des Forces armées canadiennes et des corps
policiers municipaux concernés; l'organisation de corps policiers
autochtones pour les réserves indiennes de Bersimis, Nanouane,
Natashquan et j'en passe; le rattrapage dans la régionalisation des
activités suivantes: soit la création d'une équipe
régionale alcool et moralité à Saint-Hyacinthe et
l'augmentation de l'effectif de dépistage des stupéfiants.
Actuellement, nous comptons 17 équipes régionales alcool et
moralité.
Les objectifs et principaux projets pour l'exercice financier 1976/77
concernant la Sûreté du Québec sont la création du
district no 9 sur la Côte-Nord, la régionalisation des
renseignements spéciaux et généraux dans certains
districts, l'évaluation du rôle de technicien en scènes de
crime en explorant la possibilité de remplacer les policiers par des
policiers auxiliaires, la création de trois équipes
régionales alcool et moralité à Drummondville, Val-d'Or et
Mont-Laurier, compte tenu de la disponibilité d'embauche, la
sécurité olympique, naturellement... Pardon?
M. Choquette: L'insécurité olympique.
M. Lalonde: La sécurité olympique. Vous ne faites
pas confiance à nos corps de policiers?
M. Choquette: Non, l'insécurité
financière.
M. Lalonde: Bon! L'augmentation de 43 policiers et de 10
fonctionnaires pour améliorer la présence policière,
compte tenu du contrat de travail et de son implication dans le domaine des
crimes économiques. Au niveau de la gestion interne et au niveau du
soutien à la Sûreté du Québec, les
réalisations pour l'année 1975/76 ont été la
modification et la normalisation des uniformes,
des équipements policiers pour les rendre plus fonctionnels, la
construction des postes de Co-wansville, Saint-Ambroise, Shawinigan et
Valley-field, l'aménagement des postes de Baie-Comeau, Berthierville,
Gaspé et Notre-Dame-du-Lac, la modification et l'agrandissement du
système radio de dix ou douze canaux et l'achat de 300 appareils
"walkie-talkie " pour satisfaire leurs besoins actuels et en prévision
des Jeux olympiques, la mise sur pied d'équipes de techniciens en
explosifs dans les districts de l'Estrie, de la Mauricie et de l'Outaouais,
l'organisation d'une campagne publicitaire afin de s'assurer l'embauche de
personnel qualifié, et j'en passe.
Il ne faudrait pas non plus oublier, dans les deux périodes, soit
l'ancienne, la dernière, et la période courante, les efforts
additionnels et très efficaces de la Sûreté du
Québec au niveau de la surveillance routière, ce qui fait partie
d'un ensemble plus général de la politique du gouvernement
concernant la sécurité routière, mais qui est aussi un
élément essentiel pour atteindre nos fins sur cette question.
Alors, comme je l'ai indiqué au début de l'exposé,
j'ai passé quelques articles que l'on pourra regarder plus en
détail, M. le Président, au cours de l'étude.
Les ressources financières requises s'établissent donc
à $138 328 200 et le poste Traitements représente près de
80% de l'ensemble de ces crédits. L'augmentation de $13 237 100 est
attribuée principalement à l'augmentation de traitements à
la Sûreté du Québec, à la suite de la mise en
application des conventions collectives. Les effectifs de ces programmes
s'établissent à 6224 postes, dont 5792 pour la
Sûreté du Québec. Il en résulte une augmentation des
effectifs de 79 postes, soit 1,3% de l'effectif total de 1975/76.
Alors, au cours de notre discussion, M. le Président, il me fera
plaisir de fournir de plus amples renseignements sur tous les sujets qui
pourront intéresser les membres de cette commission.
Le Président (M. Brisson): Est-ce que le
député de Maisonneuve a des remarques?
Remarques de M. Robert Burns
M. Burns: M. le Président, très brèves. Je
m'en voudrais de passer outre à la réaffectation des
responsabilités à l'intérieur du ministère de la
Justice, en particulier par les responsabilités accordées au
ministre qui est notre vis-à-vis, le Solliciteur général
par rapport à ce qui existait auparavant. Je pense que, sans vouloir
présumer des remarques du député d'Outremont, je me
rappelle qu'il s'était lui-même, avec l'expérience qu'il
avait, opposé à cette façon de réexaminer le
partage des responsabilités à l'intérieur du
ministère de la Justice.
Je dois dire, en tout cas, s'il est encore d'accord avec ça, que
je partage entièrement son avis. Plus particulièrement ce qui
m'inquiète énormément, c'est le fait que vous retrouviez
sous la même responsabilité, c'est-à-dire celle du Sollici-
teur général, le programme 13, qui vise à assurer
l'application du code criminel et le programme 14, qui vise à informer
le ministère sur l'évolution de la criminalité au
Québec, à suggérer les politiques et les programmes au
ministère dans le domaine de la police et à assurer la
coordination de l'activité policière. En même temps, on
retrouve également sous l'autorité de ce même ministre le
programme 15 qui s'appelle "Normalisation et surveillance de l'exercice des
fonctions de police", qui vise à assurer la préparation des
politiques et des normes concernant les activités des corps de police du
Québec, leur surveillance et leur coordination.
Je m'explique, M. le Président, c'est vraiment là le sujet
de mon inquiétude. Si je me rappelle bien le livre blanc qui avait
été présenté par l'ex-ministre de la Justice, nous
avions de façon très détendue et je dirais très
au-dessus d'une situation conflictuelle, examiné la possibilité
de scinder les responsabilités du ministère de la Justice qui
sont, d'une part, judiciaires et, d'autre part, policières.
C'est peut-être comme ça qu'on peut facilement
résumer la situation. Je m'étais, à ce moment-là,
posé ouvertement et publiquement des questions sur le bien-fondé
d'une telle scission de ces deux types de pouvoir, me disant que ce
n'était pas, à toutes fins pratiques, le type de division de ces
responsabilités qui faisait qu'à un moment donné, on se
retrouvait dans un état policier ou dans un état où les
policiers avaient plus ou moins d'importance.
C'était beaucoup plus la mentalité qui présidait
à ce type de scission entre les deux responsabilités qui nous
amenait à penser qu'un Etat où vous aviez un ministère de
l'intérieur, à toutes fins pratiques, un ministère de la
police, pouvait être très facilement acceptable par l'ensemble de
la population.
Je donnais, à titre d'exemple, à ce moment-là, la
Grande-Bretagne où vous avez, à toutes fins pratiques, un
ministère de l'Intérieur. Mais c'est beaucoup plus la
mentalité de l'autorité politique et de l'ensemble des citoyens
qui donne à ce ministère de l'Intérieur son
caractère. Je citais, comme étant une façon assez
différente d'aborder le problème, le ministère de
l'Intérieur, en France, avec les CRS et tout ce que vous voulez, et qui
est orienté vers un cadre policier beaucoup plus qu'on peut le sentir en
Grande-Bretagne.
Peu importe, M. le Président, ce n'est pas l'objet de mon propos.
Ce qui m'a étonné, c'est qu'après cette discussion,
à savoir diviser les responsabilités policières, d'une
part, et les mettre sous la responsabilité du Solliciteur
général, et garder, en principe, selon le livre blanc, sous
l'autorité du ministre de la Justice, les responsabilités
judiciaires, je me rends compte qu'on mêle les deux, actuellement, avec
la division qu'on a faite. C'est pourquoi je me référais aux
programmes 13, 14 et 15.
Je trouve personnellement, et il me semble que le Solliciteur
général devrait lui-même trouver absolument inacceptable de
retrouver, sous son
autorité, l'application du Code criminel et, à toutes fins
pratiques, l'administration de la police.
Je n'ai pas à faire de longues diatribes contre le travail des
policiers. Au contraire, je pense même que les policiers que ce
soient les policiers provinciaux ou que ce soient encore les policiers de
grandes municipalités, comme celle de la CUM, celle de la CUQ
font leur travail avec les moyens qu'on leur donne et avec la plus grande
sincérité possible. Ce n'est pas du tout l'objet de mon
propos.
Je trouve cependant absolument anormal que la partie qui enquête,
la partie qui doit appliquer la loi, qui doit amener des criminels devant les
tribunaux, puisqu'on parle, entre autres, du contentieux criminel au programme
13, soit également sujette à la même autorité que
celle qui décide de procéder à des actions devant les
tribunaux. Pour moi, c'est absolument incompatible.
Nous avions, à l'époque, je pense, assez
généralement applaudi à la nomination d'un directeur
général ou d'un sous-ministre adjoint en l'occurrence, il
s'agit actuellement d'un sous-ministre adjoint de qui relevaient les
affaires policières à l'intérieur du ministère de
la Justice.
A ce moment-là, vous aviez le chapeau total ou, si vous voulez,
la possibilité qu'à l'intérieur d'un grand
ministère de la Justice, vous retrouviez les deux mêmes
fonctions.
Mais lorsqu'on prend la peine d'exclure des responsabilités du
ministère de la Justice certaines responsabilités, à ce
moment-là, je pense qu'on aurait dû, tout au moins, se
référer au livre blanc qui, en 1972 ou 1973, avait
été présenté...
M. Choquette: 1971.
M. Burns: ... en 1971, avait été
présenté par l'ex-ministre de la Justice. A ce moment-là,
je trouvais cela convenable parce que là, on faisait vraiment la
division, mais sur une base tout autre que celle qu'on utilise
actuellement.
Personnellement, je regrette et je trouve inacceptable la division des
responsabilités qui a été faite à la suite du
remaniement ministériel de la fin de l'été dernier ou au
début de l'automne dernier.
Je ne crois pas que, si on fait un tel type de division de
responsabilités, on puisse retrouver, sous une même
autorité, des administrations de la police et des affaires judiciaires
en matière criminelle. Je ne crois pas que ce soit viable. Je crois, au
contraire, que cela ne peut qu'inciter les citoyens à être
méfiants.
Personnellement, je pense que la police n'est pas là pour
créer de la méfiance à l'endroit des citoyens, bien au
contraire, elle est là pour protéger les citoyens et créer
une atmosphère de sécurité à l'endroit de
l'ensemble des citoyens. Mais si, sous une même autorité, cela
peut paraître, M. le Président, comme vouloir fendre les cheveux
en quatre, ce que je dis, je pense que, fondamentalement et à la longue,
on s'en rendra compte.
C'est dans l'intérêt de l'administration de la justice
elle-même que je soulève ce problème. Je pense qu'on a
vraiment fait fausse route, lorsqu'on a remis, sous une même
autorité ces deux responsabilités.
C'est, M. le Président, la seule remarque que j'ai à faire
à ce stade-ci. Je trouve que le gouvernement du Québec, avant
qu'il ne soit trop tard, avant qu'on ait gâté l'atmosphère,
tant du côté des policiers eux-mêmes que du
côté des citoyens, avant qu'on ait causé des dommages
sérieux à l'ensemble des citoyens québécois, je
demande au ministre s'il n'y aurait pas lieu de réviser cette attitude
et de revoir si on doit diviser les deux types de responsabilités sous
deux autorités différentes, si on ne devrait pas revoir cela,
selon les thèmes ou les orientations qui nous avaient été
indiqués par le livre blanc de 1971 du ministère de la
Justice.
Le Président (M. Brisson): L'honorable ministre.
Le partage des responsabilités
M. Lalonde: M. le Président, j'ai entendu, comme le
député de Maisonneuve, l'ancien ministre de la Justice exprimer
son désaccord il y a quelques mois sur cette question, quoique je ne me
souviens pas l'avoir entendu exprimer son désaccord au moment où
cela a été fait.
De toute façon, c'est académique. Ce qui me frappe
là-dedans, c'est que le désaccord, relativement à cette
question, ou même ce désaccord exprimé par le
député de Maisonneuve semble être fait un peu dans
l'abstrait. Regardez abstraitement cette question, parce que, avant cette
division des responsabilités entre deux ministres, on avait les
mêmes responsabilités pour le même ministre qui, lui, en
plus, avait d'autres responsabilités.
Je ne vois pas comment on aurait pu dénaturer la
responsabilité commune ou jointe des affaires criminelles et des
affaires policières, quand c'est encore un seul ministre qui s'occupe de
ces deux responsabilités, alors qu'auparavant, c'était un seul
ministre qui s'en occupait.
M. Burns: Sauf, M. le ministre, permettez-moi de vous dire, si
c'est cela qui vous fait accrocher, que, dans le cadre cela je l'ai bien
dit d'un ministre de la Justice qui a des responsabilités larges,
de qui relèvent un certain nombre de responsabilités comme celles
des policiers et celles des affaires criminelles, c'est bien différent,
a partir du moment où vous dites: On en fait une responsabilité
particulière.
On sort de l'administration de la justice ou, si vous voulez, du
ministère de la Justice certaines choses. On les réunit sous
l'autorité d'un seul ministre et ces responsabilités
m'apparaissent comme absolument incompatibles, là, c'est bien
différent que sous le grand chapeau d'une responsabilité globale
du ministère de la Justice. C'est cela que je dis.
M. Lalonde: C'est cela que j'appelle abstrait un peu comme
approche, parce que...
M. Burns: Ce n'est pas du tout abstrait. Vous allez voir avec le
temps que vous allez le regretter. C'est cela qui va arriver.
M. Lalonde: Concrètement, c'était la même
chose avant, sauf que le ministre de la Justice avait encore d'autres
responsabilités, en plus de celles qui sont dévolues au
Solliciteur général actuellement. La crainte exprimée ou
la possibilité qu'un Etat policier s'installe petit à petit, je
pense, est aussi encore injustifiée de par le fait qu'on ait
divisé entre deux ministres la responsabilité qui, autrefois,
était celle d'un seul ministre.
L'Etat policier, au fond, qu'est-ce que c'est? C'est lorsque les
décisions affectant la population sont prises par des policiers, non
plus sur des affaires policières, mais sur des affaires qui devraient
relever des autorités civiles. Je pense ainsi au moins depuis que j'ai
la responsabilité de cette partie du ministère de la Justice.
Parce qu'il faut quand même souligner que le ministère de la
Justice n'a pas été divisé. Les mêmes structures
demeurent. Le même sous-ministre répond aux deux ministres et
toute la structure est restée la même. Donc, depuis que j'ai cette
responsabilité, je ne pense pas qu'on puisse me reprocher d'avoir
manqué de vigilance en ce qui concerne la responsabilité
policière comme telle.
Ne mentionnons qu'un cas, par exemple, celui de Sky Shops.
M. Burns: L'APLQ...
M. Lalonde: L'APLQ, c'est une chose qui est arrivée avant
moi, mais...
M. Burns: ...vous allez voir comment vous réagissez, par
la suite, à ça.
M. Lalonde: En prenant Sky Shops, par exemple, on a vu de quelle
vigilance nous avons fait preuve pour bien nous assurer que l'administration de
la Justice, que l'aspect policier soit fait, naturellement, par des policiers,
mais que l'aspect examen de la preuve et ensuite introduction de la cause en
cour soit faite par des procureurs de la couronne; cela a été
fait publiquement. D'ailleurs, je n'ai pas besoin de donner d'autres
détails là-dessus. C'est cette vigilance, cet esprit alerte dont
il faut faire constamment preuve pour être bien sûr que chacun fait
son métier, et la population n'aura aucune crainte de voir s'installer
un régime policier chez nous.
M. Choquette: M. le Président, puis-je avoir la parole sur
ce sujet?
Le Président (M. Brlsson): Le député
d'Outremont.
M. Choquette: M. le Président, étant donné
que j'ai été mis en cause par l'intervention de mon
collègue...
M. Burns: Bien involontairement.
M. Choquette: ...le député de Maisonneuve, ainsi
que par le Solliciteur général, j'aimerais...
M. Lalonde: Bien volontairement. M. Choquette: Pardon?
M. Lalonde: Lui dit: Bien involontairement; moi, je dis: Bien
volontairement.
M. Choquette: D'une façon ou de l'autre, M. le
Président, j'aimerais quand même intervenir, à ce
moment-ci, pour clarifier la discussion si possible.
Tout d'abord, je dois dire que je n'ai pas été
consulté sur cette division du ministère de la Justice. Je l'ai
apprise par les journaux subséquemment à d'adoption de
l'arrêté en conseil auquel a fait référence le
Solliciteur général. Par conséquent, je ne pouvais pas,
dans les circonstances où je me trouvais, étant devenu ministre
de l'Education, m'ériger contre une décision qui avait
été prise par le premier ministre et, probablement, par quelques
ministres qui étaient à Québec, ici, à ce
moment-là, et qui avaient entériné l'arrêté
en conseil en question. Mais qu'il soit bien clair et bien compris que je n'ai
jamais approuvé et que je n'approuverai jamais cette division
très artificielle, sinon absolument néfaste, pour la bonne
administration de la justice.
Comment se fait-il que dans aucun pays démocratique et
civilisé à ma connaissance, on n'ait adopté une telle
division? C'est une question qu'on peut se poser. A Ottawa, le Solliciteur
général a la responsabilité de la police, mais il n'a
aucune responsabilité en matière de poursuites criminelles. Il
n'a aucune responsabilité en matière de poursuites statutaires.
En France, c'est exactement la même situation qui prévaut. En
Angleterre, le Home Secretary est responsable de la police, mais il y a le
Procureur général qui est responsable des poursuites
criminelles.
Alors, dans aucun régime occidental n'a-t-on fait une salade
comme celle qui a été faite sous l'autorité du premier
ministre actuel. Donc, je pense que c'est suffisant, M. le Président,
pour nous mettre la puce à l'oreille. Lorsqu'on décide de
fractionner les responsabilités de la Justice, il faut le faire d'une
façon qui soit compatible avec une justice objective et qui cherche
à donner aux ministres intéressés les fonctions qui leur
reviennent.
Il est vrai que dans le libre blanc que nous avions publié au
ministère de la Justice, en 1971, nous annoncions la possibilité
d'une division du ministère de la Justice étant donné la
multiplicité de ses fonctions.
Je serais le dernier à m'opposer, sur le fond de la question,
à ce qu'on partage les responsabilités en matière de
police et en matière de poursuite criminelle entre deux ministres
conformément au modèle qui existe dans beaucoup de pays, comme je
l'ai mentionné tout à l'heure.
Mais encore faut-il le faire de la bonne façon et ne pas le faire
en donnant au Solliciteur général une responsabilité qui
porte à la fois sur la police
et sur les poursuites criminelles. A ce moment, on n'a pas du tout
réussi à faire le partage de responsabilités qui sont
certainement très larges entre deux ministres qui peuvent avoir une
responsabilité sur ce sujet.
Donc, je dis qu'en fait le partage qui a été fait a
correspondu, purement et simplement, à un expédient temporaire,
qu'il est de nature à mettre en cause la bonne administration de la
justice et je pèse mes mots quand je dis cela qu'il est
certainement de nature à poser des interrogations extrêmement
sérieuses sur les intentions de ceux qui ont procédé
à un tel partage des responsabilités, d'autant plus que
l'infrastructure est restée exactement la même, car le
sous-ministre actuel de la Justice, M. Robert Normand, qui assiste notre
Solliciteur général, est resté le sous-ministre des deux
ministres en question. C'est ce qui fait que, même sur le plan
administratif, le partage qui a été fait est éminemment
criticable, car les fonctions actuelles du sous-ministre de la Justice, qui
doit se partager entre deux ministres, font que la tâche, pour lui, doit
naturellement devenir extrêmement difficile à supporter.
Mon expérience au ministère de la Justice m'a appris que
la tâche du sous-ministre de la Justice, dans un ministère comme
il existait, est nécessairement lourde, mais maintenant qu'il doit
répondre à deux ministres qui se sont partagé la
tâche, suivant une règle de conduite qui est discutable, sinon
criticable, je dis qu'à ce moment, on rend la fonction de ce premier
fonctionnaire du ministère de la Justice absolument impossible et que
l'administration de la justice en souffrira.
J'ajouterai aussi que si on creuse le problème, on se rend compte
jusqu'à quel point il y a des anomalies dans le partage qui a
été fait. Prenons, par exemple, les poursuites statutaires. Elles
sont restées sous la juridiction du ministre de la Justice. Elles ne
tombent pas sous l'autorité du Solliciteur général
à ce moment-ci.
Donc, c'est le ministre de la Justice qui décide des poursuites
statutaires; pour prendre un cas qui est très contemporain, des
poursuites à instituer contre les dirigeants syndicaux dans le monde
hospitalier ou dans le monde de l'enseignement, mais cela n'est pas le
Solliciteur général.
Or, il peut très bien se faire... Et j'aimerais aussi en
profiter, entre parenthèses, pour demander au Solliciteur
général s'il s'est posé des questions sur
l'opportunité de certaines poursuites criminelles à
l'égard d'actions syndicales qui ont été posées ces
mois derniers à l'occasion de ce conflit syndical qui se prolonge dans
le domaine de l'enseignement et dans le domaine hospitalier, et s'il ne s'est
pas posé des questions, je dis qu'à ce moment, le Solliciteur
général a vraiment vu lui échapper une dimension
extrêmement importante de ses responsabilités.
De toute façon il pourra répondre plus tard,
à la fin de mon intervention est-ce qu'on ne voit pas l'anomalie
qui résulte de la situation actuelle? Le ministre de la Justice, M.
Gérard-D. Levesque, doit s'interroger en conscience sur les poursuites
à instituer pour obtenir des amendes extrêmement
élevées qu'on sait contre les syndicats et, pendant ce temps, le
Solliciteur général, de son côté, devrait
possiblement se poser des questions sur l'opportunité de poursuites
criminelles à l'occasion des mêmes actions.
Ceci nous montre jusqu'à quel point cette situation qui existe au
ministère de la Justice et qui a été créée
à l'occasion du remaniement auquel le député de
Maisonneuve a fait allusion tout à l'heure, jusqu'à quel point,
dis-je, cette situation est inacceptable, bâtarde et n'est pas claire
quant à l'attribution des responsabilités. Elle est un
mélange de responsabilités, d'un ministre de l'Intérieur
et d'un Procureur général qui, à mon sens, ne pourrait pas
être acceptable.
Je donne un autre exemple pour illustrer ma pensée. Qu'on prenne,
par exemple, le cas des coroners et des commissaires aux incendies. A ce que je
sache, les commissaires aux incendies et les coroners relèvent de
l'autorité du Procureur général et non pas de
l'autorité du Solliciteur général.
Alors, s'il s'agit, par exemple, d'un incendie criminel ou, en fait,
d'une enquête du coroner à tenir...
M. Lalonde: Vous permettrez que je vous interrompe. Cela
relève du Solliciteur général.
M. Choquette: A-t-on creusé juridiquement parlant et
avez-vous eu une opinion juridique qu'on pouvait attribuer les fonctions qui
appartiennent au Procureur général, en vertu de la Loi des
coroners et des commissaires des incendies qu'on pouvait les attribuer à
un autre qu'au Procureur général. Je pose aussi la question.
M. Lalonde: La réponse, c'est oui.
M. Choquette: Vous avez une opinion juridique?
M. Lalonde: On a les officiers du ministère qui ont
donné leur opinion là-dessus selon laquelle c'était
possible.
M. Choquette: Que c'était possible.
M. Lalonde: Et que cela a été fait
correctement.
M. Choquette: Et est-ce que l'arrêté en conseil le
dit?
M. Lalonde: L'arrêté en conseil le mentionne.
M. Choquette: J'aimerais bien voir une copie de
l'arrêté en conseil en question.
M. Lalonde: Je ne sais pas si je l'ai ici.
M. Burns: Y a-t-il moyen de l'avoir éventuellement?
M. Lalonde: II y a sûrement moyen de I avoir.
M. Burns: Au courant de la journée, s'il a
été publié au début...
M. Lalonde: II a été publié dans la Gazette
officielle de la fin du mois de juillet ou au début du mois d'août
1975. Je n'ai aucune objection à vous en remettre une copie lorsque je
l'aurai. Il s'agit de retrouver la Gazette officielle en question.
M. Choquette: D'accord. J'ignorais la situation au point de vue
des coroners et des commissaires aux incendies, mais j'aimerais beaucoup qu'on
creuse cette question, car je ne suis pas sûr du tout, je n'ai pas la
même assurance que le Solliciteur général lorsqu'il parle
de ce sujet.
M. Lalonde: De même que...
M. Choquette: D'autant plus que j'ai même constaté
des flottements à la Chambre lorsque j'ai soulevé des questions
qui concernaient des enquêtes à être faites par des
coroners, on ne savait pas, qui du ministère de la Justice, qui du
Solliciteur général devait répondre à la question
et chacun se lançait des regards...
M. Lalonde: Pas du tout, le flottement était dans l'esprit
du député d'Outremont.
M. Choquette: ... pour savoir lequel répondrait à
la question.
M. Lalonde: C'est un flottement qui était dans votre
esprit.
M. Burns: ... très facile à dire.
M. Choquette: Le député de Maisonneuve est un
témoin impartial et il l'a constaté.
M. Lalonde: Je ne conteste pas l'impartialité du
député de Maisonneuve. Mais cela a toujours été
très clair dans mon esprit et dans l'esprit du... D'ailleurs, c'est
verbatim dans l'arrêté en conseil qui a été
publié que la responsabilité des coroners et des commissaires aux
incendies relève du solliciteur général. Il n'y a aucun
doute là-dessus, sauf que je me souviens de l'incident. Le
député d'Outremont adressa la question au ministre de la Justice
faisant preuve du flottement qu'il y avait dans son esprit, celui du
député d'Outremont, non pas celui du ministre de la Justice.
Poliment le ministre de la Justice m'a passé la parole pour
répondre.
M. Choquette: Oui, parce que moi j'ai les idées claires.
C'est la différence entre vous et moi. Moi, je vous dirai ceci: C'est
qu'à un moment donné, j'ai envoyé un
télégramme à votre collègue, le ministre de la
Justice, M. Gérard-D. Leves-que, lui demandant la nomination d'un
coroner spécial pour enquêter sur le décès des
quatre ouvriers au lieu de travail des Jeux olympiques et j'ai reçu une
réponse de votre collègue le ministre de la Justice, me disant
que, l'après-midi même, il avait nommé un coroner
spécial.
M. Lalonde: Bravo! Il vous a donné l'information et la
nomination a été faite par moi.
M. Choquette: Alors, on ne sait plus du tout à qui
s'adresser dans ces conditions, puisque votre propre confrère ne sait
même pas que c'est vous qui en êtes responsable.
M. Lalonde: Encore là, je regrette que cela ait pu
augmenter le flottement dans l'esprit du député d'Outremont, mais
je crois qu'à ce moment-là, dû à une absence de ma
part, du territoire de la province, le ministre de la Justice agissait aussi
comme Solliciteur général, temporairement, comme il arrive quand
un ministre prend des vacances ou est absent, il se fait remplacer pour que ses
fonctions continuent à être remplies.
M. Choquette: De toute façon, je pense que ce sujet
méritera d'être clarifié au cours de nos débats.
Pour le moment, je pense que nous n'ayons peut-être pas assez de
renseignements pour trancher, mais il n'en reste pas moins que le
problème reste entier en ce qui concerne les poursuites statutaires et
les poursuites criminelles. Là je pense que le solliciteur
général ne peut m'offrir une réponse aussi
catégorique qu'il m'en offre une dans le domaine des coroners et des
commissaires des incendies. Car, les poursuites statutaires, de toutes natures
à ce que je sache, appartiennent encore au ministre de la Justice et non
pas au Solliciteur général.
M. Lalonde: C'est exact.
M. Choquette: Le problème, en somme de l'action judiciaire
à faire dans le domaine des poursuites statutaires ou du droit criminel
pour des incidents identiques, remarquez bien, comme, par exemple, dans le cas
de ces grèves qui ont lieu, reste complet. Si on s'en rapporte à
toute la jurisprudence et à toute la doctrine en matière de droit
constitutionnel, le Procureur général, c'est-à-dire, au
fond, l'ancêtre du ministre de la Justice actuel et du Solliciteur
général actuel dans le gouvernement québécois,
lorsqu'il décide d'instituer des poursuites, qu'elles soient de nature
criminelle ou statutaire, doit s'interroger en conscience sur les effets
sociaux, sur la bonne administration de la Justice de poursuites qu'il
décide d'entreprendre.
Or, lorsqu'on a divisé la tâche entre deux individus, je
dis, à ce moment-là, qu'on est devant une situation qui est d'une
absurdité qui saute aux yeux, car la conscience du Solliciteur
général peut être toute différente de celle du
ministre de la Justice et inversement. L'opportunité de prendre des
poursuites, l'étendue de ces poursuites, la gravité des
poursuites à être entreprises, tout cela mérite
d'être pesé dans certaines occasions. Je ne dis pas dans toutes
les occasions, car je sais qu'il y a nombre de poursuites qui se prennent sans
une intervention d'un ministre quelconque, mais, dans des occasions comme
celles qui intéressent la paix sociale, par exemple, comme celles qui
prévalent actuellement au Québec, à ce moment-là,
le
fractionnement qui a été fait entre les fonctions des deux
ministres en question est absolument contraire, en somme, à une
direction de la justice qui correspond aux meilleurs intérêts de
la société.
M. Lalonde: M. le Président, le plaidoyer du
député d'Outremont m'étonne. D'un côté, il
s'oppose à ce que les responsabilités des affaires criminelles et
des affaires policières aient été confiées à
un ministre alors que, dans le temps où le député
d'Outremont était ministre de la Justice, il avait non seulement ces
deux responsabilités, mais il en avait d'autres. Du même souffle,
il nous reproche de ne pas avoir ajouté aux responsabilités du
Solliciteur général les affaires pénales statutaires.
Alors, on voit jusqu'à quel point son argumentation manque de
netteté. Ce qu'il convient de se poser, c'est la question suivante:
Est-ce que l'administration de la justice est bien faite? Je comprends que cet
état de choses n'existe que depuis un peu moins d'un an, mais l'examen
de l'administration de la Justice depuis ce temps est, je pense, tout à
fait évident et concluant. L'administration de la justice au
Québec, je pense, ne s'est jamais aussi bien portée, que ce soit
au niveau de la lutte au crime organisé, que ce soit au niveau des
enquêtes, des activités policières, que ce soit au niveau
de la surveillance routière, tout tend à prouver que cette
division des responsabilités non seulement n'est pas néfaste,
mais a ajouté un dynamisme nouveau dans ces activités...
M. Choquette: ... expression.
M. Lalonde: ... qui sont extrêmement importantes pour que
nous protégions la société et aussi nos libertés.
Je pense que c'est dans les faits que nous devons juger et non pas
abstraitement, à savoir: Est-ce qu'on devrait faire comme la France?
Est-ce qu'on devrait faire comme l'Angleterre? Nous allons prouver, dans les
faits, que nous l'avons fait, mais le peu de temps peut nous donner un tableau
qui n'est pas aussi clair. Mais je suis sûr que nous allons prouver que
cette formule va améliorer l'administration de la justice criminelle au
Québec, que ce soit au niveau du travail des policiers ou de celui des
procureurs de la couronne, c'est-à-dire du programme 13 sur lequel nous
sommes actuellement.
Le député d'Outremont parlait du sous-ministre.
Naturellement, le sous-ministre avait les mêmes charges avant, sauf qu'il
y avait un seul ministre.
M. Choquette: II y a une grosse différence.
M. Lalonde: Ce n'est pas tellement sérieux, je pense,
cette question-là.
M. Burns: Ah! Non, voyons donc.
M. Lalonde: Non. Je vois beaucoup de méfiance...
M. Burns: C'est parce que vous ne voulez pas comprendre.
M. Lalonde: ... mais je pense qu'on doit juger dans les faits
seulement, et je ne vois pas de formule magique, à savoir que c'est
seulement d'une façon que cela doit se faire. Je pense qu'on va juger de
l'efficacité de cette formule dans les faits. Alors, M. le
Président, je n'ai plus rien à dire là-dessus.
M. Burns: C'est là-dessus que le Solliciteur
général ne veut pas comprendre apparemment. C'est, à
partir du moment où vous faites une division à l'intérieur
du ministère de la Justice, qu'on est apte à juger de la
qualité de la division. Si on garde ça sous une même
autorité à l'intérieur du ministère de la Justice
et que vous retrouvez un grand nombre de responsabilités comme cela
existait auparavant, le problème ne se pose pas, sinon comme il avait
été posé dans le libre blanc de 1971.
Mais, à partir du moment où vous faites cette division,
c'est là qu'on est en mesure de dire que vous faites une division qui
est absolument hybride, qui ne correspond à rien au point de vue de la
façon d'envisager la division entre, par exemple, le contentieux
criminel et les affaires policières. C'est là que la question se
pose et que le Solliciteur général dise que le
député d'Outremont et moi-même posons de faux
problèmes quand nous soulevons ça, je pense qu'il joue à
l'autruche tout simplement. Il refuse d'examiner ce problème que son
gouvernement a lui-même mis devant l'opinion publique en faisant cette
division. C'est ça qu'on est en train de lui dire.
A partir du moment où la division est faite, c'est là
qu'on se met à poser des questions.
M. Choquette: Nous posons la question sur le plan des principes.
Si ces questions ne sont pas résolues correctement sur le plan des
principes, les situations qui en découlent sont de nature à
donner ouverture à toutes sortes d'interprétations, d'abus, enfin
de critiques. Et cela n'est pas...
M. Lalonde: Qu'on me nomme un abus, je pense que les
résultats, jusqu'à maintenant, sont concluants. Il y a des
activités encore accrues au niveau de l'administration de la justice
criminelle au Québec.
Les coûts de la police
M. Choquette: Là, j'aurai autre chose à dire sur
ça. Parce que, d'après l'exposé que vous avez fait tout
à l'heure, j'ai noté qu'il n'y a eu aucune initiative nouvelle
prise dans le secteur de l'administration de la justice depuis que j'ai
quitté ce ministère. Je ne vois absolument rien dans vos
activités qui ne soit pas le prolongement immédiat de tout ce qui
a été fait antérieurement. Je ne vois absolument rien dans
votre exposé qui démontre que vous avez lu et même compris
les proposi-
tions qui étaient contenues dans le livre blanc, La Justice
contemporaine. Je dis simplement qu'on a la preuve que, à ce que vous
nous dites, vous avez bien géré votre secteur d'activités,
mais il n'y a absolument rien, dans ce que vous nous avez dit, qui
représente le moindre élément de nouveauté pour
parfaire l'administration de la justice.
Je ne dis pas que ça ne viendra pas, je le souhaite, mais c'est
la conclusion que je dois tirer des propos au cours desquels vous avez
exposé ce que vous avez fait depuis que vous êtes là.
M. Lalonde: Là encore, le député d'Outremont
m'étonne. Il dit que la division en fait, ce n'est pas une
division, c'est le même ministère est néfaste et, du
même souffle, il dit que ça va aussi bien qu'avant. Alors que, si
j'avais tout chambardé...
M. Choquette: Non, non, non, écoutez...
M. Lalonde: ...à l'encontre de tous les livres de toutes
les couleurs qu'il a pu faire auparavant, peut-être qu'on pourrait voir
dans ses gestes des indications d'intentions ombrageuses, mais non, c'est
l'intensification du service à la population au niveau policier et
criminel, c'est ça qui est ma fonction. Il y a aussi naturellement des
réformes à faire. Je ne pense pas, puisque le
député d'Outremont parle de son temps, qu'il a quand même
fait ses livres blancs dans les trois premiers mois ou dans les six premiers
mois de son règne. Il faut quand même prendre contact et prendre
contrôle des dossiers et, éventuellement, des réformes
nécessaires, seulement celles qui seront nécessaires pour la
meilleure administration de la justice, un meilleur service à la
population, seront apportés.
D'ailleurs, j'ai indiqué récemment qu'un projet de loi
serait apporté pour améliorer, par exemple, la lutte au crime
organisé, pour amener des réformes qui nous sont apparues
nécessaires actuellement, qui auraient probablement été
non seulement non nécessaires, mais non désirables il y a
quelques années. Mais ça, c'est dans l'évolution normale
des choses.
M. Choquette: Si on me permet, sur un autre sujet. Le ministre ne
nous a absolument rien dit de ses relations avec Ottawa au sujet de la
réclamation que j'avais faite, à l'époque, au plan de la
police et des coûts de la police. J'aimerais beaucoup que le ministre
nous expose les démarches qu'il a faites dans ce domaine pour que le
Québec obtienne les mêmes avantages financiers que huit autres
provinces canadiennes.
M. Lalonde: Naturellement, M. le Président, le dossier que
l'ancien ministre a laissé était dans un état pas
tellement gai lorsque je l'ai pris. Je pense qu'on peut appeler cela un
échec, jusqu'à un certain point. Le refus était froid et
catégorique de la part d Ottawa. Je ne m'adresse pas au
bien-fondé...
M. Choquette: Peut-être justement à cause de la
faiblesse de votre premier ministre.
M. Lalonde: Je ne m'adresse pas au bien-fondé du... On
peut toujours chercher des coupables ailleurs que chez soi.
M. Burns: Quant à moi, comme observateur impartial, je ne
suis pas porté à le croire.
M. Lalonde: Encore là, je demanderais au
député de Maisonneuve de ne pas invoquer son impartialité
trop souvent. Peut-être qu'à un moment donné...
M. Burns: Je suis absolument impartial dans cette affaire.
M. Lalonde: ... je ne pourrai pas me ranger de son
côté.
M. Burns: Je ne sors pas de ce cabinet-là et je n'y entre
pas, alors...
M. Lalonde: Reste que le dossier est bien fondé.
M. Choquette: S'il y a quelqu'un qui est neutre, c'est bien le
député de Maisonneuve.
M. Burns: Bien oui. Je regarde cela comme arbitre.
M. Lalonde: Politic makes friends of bad fellows.
Le dossier, naturellement, est valable, très bien fondé et
nous l'avons représenté, mais...
M. Choquette: Quand?
M. Lalonde: Lors de la conférence
fédérale-provinciale... Enfin, immédiatement après
mon entrée en fonction, à la première conférence
fédérale-provinciale qui a eu lieu. Je crois qu'elle avait eu
lieu à Ottawa. C'est avant celle de Halifax du mois d'octobre 1975.
J'avais représenté la demande telle qu'elle avait
d'ailleurs été faite par l'ancien ministre de la Justice et nous
avons eu à peu près la même mesure de succès
jusqu'à maintenant. Mais le dossier n'est pas mort. Il s'agit de
développer une stratégie différente et de créer un
climat qui va faire que la volonté du fédéral
vis-à-vis de cette question sera plus positive.
Les attitudes que nous avons eues concernant l'administration de la
justice, l'intégrité de l'administration de la justice criminelle
au Québec, entre autres, je reviens encore une fois à l'affaire
Sky Shops, a démontré clairement j'ai été
naturellement bien appuyé par le jugement de la Cour suprême du
1er avril je ne veux pas donner au député d'Outremont plus
de crédit qu'il n'en mérite, que ces procédures avaient
été prises lors de sa présence au ministère de la
Justice.
En occupant de plus en plus intégralement le champ qui nous est
dévolu par la constitution, nos réclamations sur la question,
entre autres, soulevées par le député d'Outremont, seront
prises plus sérieusement en considération.
Je pense que je dois d'abord m'employer à occuper
intégralement le champ de l'administration de la justice criminelle et,
je le répète, le jugement de la Cour suprême du 1er avril a
rendu les choses très claires à ce point de vue-là.
Après coup, je pense que ce sera beaucoup plus facile. Nous
aurons des arguments d'autant plus lourds, plus pesants, lorsque nous
réclamerons d'Ottawa l'indemnisation pour les services policiers.
M. Choquette: M. le Président, il y a une affirmation du
Solliciteur général que je ne peux pas laisser passer sans
commentaires. Le dossier au sujet de la réclamation pour les coûts
du service de la police, au Québec, est un dossier qui a
été extrêmement bien préparé et
monté.
A l'époque, nous avons sensibilisé vraiment la population
québécoise, surtout les conseils municipaux, les organismes
socio-économiques à cette réclamation qui a toute sa
valeur, qui la conserve d'ailleurs à ce moment-ci, et nous avons aussi
multiplié les démarches auprès des autorités
fédérales, que ce soit le Solliciteur général, que
ce soit d'autres représentants du pouvoir central.
Si nous n'avons pas eu gain de cause, ce n'était pas parce que la
réclamation n'était pas bien fondée. C'est que nous avons
rencontré, chez l'interlocuteur, un manque de compréhension du
problème. Mais, comme le dit...
M. Lalonde: La situation est à peu près la
même.
M. Choquette: ... le Solliciteur général, je pense
que le jugement de la Cour suprême dans l'affaire du crime
organisé, c est-à-dire sur la requête de Diorio, je pense,
et Fontaine, établit, avec une certitude absolue sur le plan juridique,
la position provinciale en matière d'administration de la justice C'est
donc un excellent tremplin d'où partir pour insister de nouveau
auprès des autorités fédérales pour obtenir raison;
d'autant plus que je vois dans ce jugement de la Cour suprême un
véritable tournant sur le plan constitutionnel, car on se rappellera
qu'on a eu de nombreuses conférences interprovinciales et des
conférences également avec les autorités
fédérales où toutes ces questions de l'autorité
fédérale en matière d'administration de la justice ont
fait l'objet de discussions avec le ministre de la Justice
fédéral et le Solliciteur général.
Nous avions énormément de difficultés, au cours de
ces conférences, à faire admettre aux autorités
fédérales que l'administration de la justice est une
matière qui appartient en propre aux provinces et nous avions beaucoup
de difficultés à leur faire admettre de faire les reculs
nécessaires sur les initiatives qui ont été prises depuis
une dizaine d'années par les autorités fédérales
dans le domaine de l'administration de la justice sous différents
ministres de la Justice fédéraux qui se sont
succédé.
Mais voilà que le jugement de la Cour suprême tranche le
débat, une fois pour toutes, et reconnaît que le secteur de
l'administration de la justice ne peut pas subir d'empiétement de la
part des autorités fédérales. A mon sens, c'est un des
jugements les plus prometteurs pour l'avenir des droits provinciaux, qu'il
s'agisse d'administration de la justice ou de domaines qui peuvent être
connexes.
Je voudrais, à ce moment-ci, faisant abstraction de toute
partisanerie et de ma situation actuelle qui fait que je siège dans
l'Opposition, insister auprès du Solliciteur général pour
qu'il utilise à sa pleine valeur et qu'il réitère, d'une
façon énergique, les positions antérieurement prises. Pour
ma part, je ne vois pas que les autorités fédérales
pourront résister éternellement au bien-fondé de la
position qui a été établie, étayée, je
pense, autant par le jugement de la Cour suprême que par la
documentation, le dossier qui avait été préparé
antérieurement dans le domaine des coûts de la police.
A mon sens, il devrait obtenir gain de cause dans ce dossier, à
condition d'y mettre la conviction et l'ardeur que j'aimerais lire sur sa
figure aujourd'hui.
M. Lalonde: Naturellement. Merci, M. le Président. Je
remercie le député d'Outremont pour son encouragement. Le dossier
n'est pas mort, loin de là. Je m'accorde totalement avec le
député d'Outremont pour dire que cette réclamation doit
continuer de faire l'objet de nos démarches les plus vigoureuses.
J'aimerais avoir son optimisme quand il dit qu'éventuellement, le
fédéral va accepter notre position, parce qu'il a vu la position
du fédéral par la réponse qu'il a eue de M. Allmand, je
pense. C'est presque une décision catégorique et sans retour.
Rien n'empêche que cela a été à peu près la
première chose que j'ai faite en arrivant au ministère,
même avant le jugement de la Cour suprême. Mais le jugement de la
Cour suprême, avec les notes extrêmement limpides, par exemple, du
juge Dickson, détermine, une fois pour toutes et de façon
définitive je m'accorde entièrement avec le
député d'Outremont la juridiction exclusive des provinces
sur l'administration de la justice criminelle.
Nous allons utiliser cette situation qui est en notre faveur pour tenter
de trouver une ouverture et une stratégie qui nous permettront d'avoir
gain de cause.
M. Choquette: Puis-je attirer l'attention du Solliciteur
général sur le fait qu'à I'époque où la
réclamation dans le domaine des coûts de la police a
été présentée, le Québec a
bénéficié, cette année-là ou ces
années-là, d'avantages financiers résultant de la
péréquation par suite de la fixation du prix de l'huile qui
donnait certainement des avantages financiers assez considérables au
Québec, et que ceci a pu être un facteur dans la fin de
non-recevoir que nous avons essuyée à I'époque sur la
question des coûts de la police.
Je me rappelle avoir conversé avec un ministre
fédéral qui m'a dit: Ecoutez! En gros, vous en avez assez cette
année, en voulant dire: Vous avez beaucoup d argent qui résulte
de la péréquation
de l'huile. Pourquoi insister sur la réclamation des coûts
de la police? Voilà que la réclamation dans le domaine des
coûts de la police posait une question de principe. Pour moi, je ne l'ai
jamais abandonnée. Mais la situation n'est plus la même non plus
sur le plan de la péréquation par suite de la fixation du prix du
baril d'huile à la grandeur du pays, etc., de telle sorte qu'à ce
point de vue, cet obstacle n'existe plus à ce moment-ci.
Est-ce que le Solliciteur général pourrait nous dire
où en sont les autorités fédérales quant à
la signature de conventions avec les huit autres provinces et quelle est la
base de la contribution fédérale au maintien de la GRC agissant
comme force provinciale dans les autres provinces canadiennes? Est-ce que ces
contrats sont signés, à ce moment-ci?
M. Lalonde: Je ne pense pas qu'ils soient signés de
façon définitive. Cela a fait l'objet de conservations, de
discussions lors de la dernière réunion que nous avons eue
à Halifax, et l'état du dossier n'apparaissait pas très
clair à ce moment-là. Je crois que des arrangements... Parce que
l'échéance était soit toute proche, soit
arrivée...
M. Choquette: L'échéance est le 30 avril ou le 30
mars 1976.
M. Lalonde: C'est 1976. Alors, l'échéance est
arrivée maintenant et, depuis lors, des arrangements temporaires
auraient été déterminés pendant que, d'autre part,
le fédéral étudie en profondeur cette question pour offrir
une autre formule aux huit provinces qui, actuellement, recourent aux services
de la GRC pour leurs services policiers.
M. Choquette: Alors, je soumets au Solliciteur
général que c'est le moment...
M. Lalonde: Ah oui!
M. Choquette: S'il y a un moment, c'est le moment
stratégique où il faut intervenir avec force, car, une fois les
conventions signées avec les huit autres provinces, vous serez
obligés d'attendre peut-être encore dix ans avant de faire
renaître le problème et lui donner une certaine
actualité.
M. Lalonde: Oui. Nous l'avons fait d'ailleurs... L'Ontario, je
pense, a exprimé son intérêt aussi dans cette question.
L'Ontario et le Québec voient dans cette situation, un avantage ou une
occasion propice pour discuter la question de la réclamation du
Québec.
Nous allons, à la prochaine conférence
fédérale-provinciale, dans quelques jours, à Vancouver,
soulever cette question, c'est-à-dire qu'elle sera soulevée. Nous
allons participer tout d'abord à la conférence interprovinciale,
pendant la demi-journée qui précède la conférence
fédérale-provinciale, et cela fera l'objet de discussions. Mais
c'est un élément de stratégie qu'il ne faut pas
oublier.
M. Choquette: Je trouve que la réponse du ministre est
fort peu encourageante pour moi qui ai été un peu à
l'origine de cette initiative. Que cela serve d'élément de
stratégie, je comprends qu'un gouvernement a des stratégies, a
différents dossiers à faire valoir. J'ai fait partie d'un
gouvernement assez longtemps pour le savoir, mais je pense que le ministre ne
gagnera rien avec les autorités fédérales pour une
attitude empreinte de mollesse. Si le ministre réussit à avoir
gain de cause, cela sera parce qu'il se sera affirmé avec vigueur et
qu'il se rappelle que, sur ce plan, il aura l'opinion publique
québécoise derrière lui.
Je suis très désintéressé sur le plan
politique au moment où je lui fais ces...
M. Burns: Lorsque le député d'Outremont avait
annoncé cette attitude, il n'y a aucun parti en Chambre, que cela soit
de l'Opposition ou du côté ministériel, qui était en
désaccord avec le ministre de la Justice du temps. Bien au
contraire.
M. Choquette: C'est tout à fait exact. M. Lalonde:
Sûrement.
M. Burns: Et on a encouragé le ministre du temps à
multiplier ses efforts...
M. Lalonde: Je ne sais pas ce qui fait dire au
député d'Outremont que nous ferions preuve de mollesse
actuellement.
M. Burns: On a l'impression que vous êtes
désintéressé.
M. Lalonde: Pas du tout. Il reste toutefois qu'en frappant du
poing sur la table et en envoyant des lettres percutantes, cela ne produit pas
nécessairement des résultats proportionnellement conformes au ton
de la voix. Il y a toute la question de la stratégie et,
là-dessus, je pense que chacun a son style.
M. Burns: On va en reparler dans quinze ans.
M. Lalonde: On en reparlera...
M. Burns: Dans quinze ans.
M. Lalonde: Non. J'espère...
M. Burns: C'est ce qui va arriver.
M. Lalonde: Cela a pris combien d'années, cette situation,
jusqu'à maintenant? Cela a pris quand même quelques années,
depuis que le député d'Outremont a fait sa
réclamation.
M. Choquette: Je pense que cela a commencé il y a à
peu près deux ans.
M. Lalonde: Deux ans.
M. Choquette: Mais je dis au Solliciteur géné-
ral que, d'un autre côté, une attitude faiblarde ne le
mènera pas très loin.
M. Lalonde: Cela ne sera pas notre attitude.
M. Choquette: Je suis content de vous l'entendre dire.
Le cas de l'APLQ
M. Burns: Avant qu'on quitte le sujet général de
cette division des responsabilités entre les deux ministères,
j'aimerais soulever un problème qui a été amené en
Chambre et qui, pour moi, est peut-être une indication justement,
c'est peut-être une des premières indications de
l'incompatibilité des responsabilités qui sont sous son
autorité et, entre autres, c'est l'affaire de l'Agence de presse libre
du Québec.
Nous avons à de nombreuses reprises sans exagérer,
je pourrais dire à trois reprises soulevé le
problème de l'Agence de presse libre du Québec ou de l'APLQ. Vous
avez actuellement, de votre côté, du côté du
Solliciteur général, un piétinement absolument incroyable.
On n'a pas de réponse. Le ministre fait enquête. D'autre part, il
est possible qu'éventuellement, à la suite d'une telle
enquête, des plaintes puissent être portées devant les
tribunaux; actuellement, l'enquête est une enquête maison, qui est
faite par les policiers.
Tout le monde se rappelle de cette effraction appelons-la
exactement par son nom commise par des policiers de la Gendarmerie
royale du Canada, par des policiers de la Sûreté du Québec
et par des policiers de la Communauté urbaine de Montréal. Chaque
fois que nous avons posé ces questions au Solliciteur
général, depuis qu'il est en poste, on s'est toujours fait dire:
On est en train d'enquêter. On n'a pas de résultats de cette
enquête. On examine l'affaire. Chaque fois, nous avons demandé:
Est-ce fait par des policiers? Est-ce une enquête maison? Possiblement
que pourrait sortir de cela une recommandation qui relève du contentieux
criminel selon laquelle des plaintes soient portées devant les tribunaux
contre certains individus qui s'adonnent à être dans les corps
policiers concernés. Je ne veux pas présumer cela, mais je vous
signale, parce que vous me demandiez tout à l'heure et vous demandiez au
député d'Outremont de nous donner des exemples
d'incompatibilité entre ces deux fonctions, du contentieux criminel et
de l'administration des affaires policières. Je vous en donne une et,
entre autres, je vous demande encore aujourd'hui de nous donner des nouvelles
de cette affaire.
M. Lalonde: J'ai répondu à quelques reprises que
les corps policiers devaient nous faire rapport de cette situation. Nous avons
reçu des renseignements. J'ai demandé au Solliciteur
général du Canada de me faire parvenir, de la part de la GRC, un
rapport sur la participation de ce corps de police à l'opération.
On m'informe justement que nous devrions recevoir ce rapport incessamment. Il
faut bien se rendre compte quand même que c'est une opération
tripartite où il y avait la participation je pense que c'est
clair je l'ai indiqué qu'il y avait eu justement cette...
M. Burns: Puis-je vous rappeler que, quant à la GRC, le
rapport a été déposé en Chambre il y a
déjà deux semaines, sinon plus?
M. Lalonde: Pas à ma connaissance le rapport comme tel. Le
Solliciteur général du Canada a donné des informations en
Chambre.
M. Burns: Oui, il a dit d'ailleurs que c'était votre
responsabilité.
M. Lalonde: Oui. M. Burns: C'est cela.
M. Lalonde: Je n'ai pas connaissance qu'il y ait eu un rapport
comme tel que j'aurais pu me procurer à la Chambre des Communes. J'ai
demandé à la GRC, je pense que c'est tout à fait normal
qu'on commence par là et, lorsque tous les faits nous seront connus,
à ce moment-là, nous... J'allais dire...
M. Burns: II faut savoir cela.
M. Lalonde: Naturellement...
M. Burns: Cela n'a pas de bon sens...
M. Lalonde: ... le plus tôt possible.
M. Burns: cela fait exactement un mois et demi qu'on pose des
questions là-dessus.
M. Lalonde: Oui, mais c'est une opération qui a eu
lieu...
M. Burns: Bien voyons donc! Bonguienne, c'est une affaire qui
remonte à 1971!
M. Lalonde: ... il y a quelques années. M. Burns:
C'est bien sûr. Bien oui.
M. Lalonde: II n'y a pas du tout de piétinement, au
contraire, nous avons indiqué, je pense, très clairement que nous
voulions voir exactement ce qui s'était passé, pour prendre
ensuite les dispositions pour établir les responsabilités. C'est
ce que nous allons faire.
M. Burns: Je trouve cela absolument inconcevable, M. le
ministre.
M. Lalonde: Cela peut ne pas plaire au député de
Maisonneuve...
M. Burns: Entre vous et moi.
M. Lalonde: ... mais, c'est cela.
M. Burns: Ce n'est pas que cela ne me plaît
pas, c'est que ce sont des choses que, si elles existent, sont
très graves, qui, si elles existent, doivent recevoir une réponse
rapidement de la part du Solliciteur général, qui possiblement
peuvent amener à des plaintes criminelles. De là, je tire la
conclusion de l'ambiguïté de vos deux responsabilités. C'est
là-dessus... Moi, actuellement...
M. Lalonde: Si cela avait été sous l'ancien
régime d'un seul ministre de la Justice, il aurait eu les mêmes
responsabilités...
M. Burns: Non.
M. Lalonde: Bien oui.
M. Burns: Non, peut-être pas.
M. Lalonde: Vis-à-vis de la police et vis-à-vis des
affaires criminelles.
M. Burns: Non, parce qu'une chose que vous ne semblez pas vouloir
comprendre c'est qu'à l'intérieur d'un grand ministère de
la Justice où les deux responsabilités relèvent,
entré autres, des responsabilités du ministère de la
Justice, on n'a pas pris la peine de poser un geste précis pour sortir
de l'autorité du ministère de la Justice un certain nombre de
choses.
Vous connaissez autant que moi le vieil adage qu'on n'amende pas une
loi, on ne pose pas des gestes précis sans normalement, à moins
qu'on soit complètement fou, avoir une intention particulière
derrière... On n'amende pas une loi sans vouloir que cette loi
amendée dise quelque chose.
M. Lalonde: Au niveau des responsabilités...
M. Burns: On ne divise pas, à l'intérieur d'un
ministère, un certain nombre de responsabilités sans vouloir
changer quelque chose de précis.
M. Lalonde: Au niveau des responsabilités.
M. Burns: C'est ce que je vous demande: Qu'est-ce que vous avez
voulu changer? Et entre autres, dans le cas de l'APLQ, est-ce que je ne suis
pas en droit de me poser justement cette question, de dire que cela
piétine, parce que véritablement cela relève de la
même autorité?
M. Lalonde: Non. Au niveau des responsabilités
ministérielles, je pense qu'on ne peut pas appliquer le même
principe que le député de Maisonneuve vient de décrire
pour les lois. Ce n'est pas un amendement législatif. On peut nommer, et
on l'a vu, cela arrive souvent...
M. Burns: Non, mais c'est un arrêté en conseil.
M. Lalonde: ... on nomme, par exemple, un ministre d'Etat, on lui
donne des responsabilités particulières. On l'a vu au
ministère de l'Education, par exemple, où il y a un ministre
d'Etat qu'on n'avait pas auparavant. Est-ce que cela veut dire qu'on avait des
intentions inavouées de faire des choses inavouables? Pas du tout, c'est
simplement...
M. Burns: Ce n'est pas du tout la même chose.
M. Lalonde: ... lorsque le besoin se fait sentir, pour imprimer
à l'action de ce ministère une plus grande efficacité
parce que, naturellement, deux têtes cela vaut mieux qu'une. C'est
relativement simple à comprendre.
M. Choquette: M. le Président, je ne peux tout simplement
pas laisser passer des propos comme ceux du Solliciteur-général
qui, au nom d'une espèce d'efficacité superficielle factice, qui
ne correspond à rien, qui est une espèce de slogan émis
par son chef, il y a quelques années, un slogan complètement
usé qui ne correspond pas du tout aux records ou aux dossiers du
gouvernement actuel, je ne peux pas accepter qu'on laisse passer des phrases
aussi creuses que cela sans y répondre. Au fond, soit que le Solliciteur
général comprend et ne veut pas comprendre, soit qu'il ne
comprend pas. Si le Solliciteur général n'est pas capable de se
rendre compte de l'ambiguïté de la situation actuelle,
ambiguïté qui résulte, n'est-ce-pas, de
responsabilités qui, traditionnellement, n'appartiennent pas au
même ministre, à partir du moment où on a fait une division
du ministère de la Justice, ou ambiguïté qui résulte
de la situation que j'ai mentionnée tout à l'heure, qu'il y a un
ministre qui est responsable des poursuites pénales et l'autre est
responsable de l'application du code criminel, s'il n'est pas capable de se
rendre compte que c'est une situation absurde, je dis qu'il n'est tout
simplement pas à la hauteur d'être Solliciteur
général et d'être ministre dans un gouvernement.
Quand on vient nous servir des analogies comme celles qu'on a faites au
ministère de l'Education avec des ministres d'Etat responsables de
l'enseignement secondaire et d'autres responsables de l'enseignement
élémentaire, ça n'a pas du tout la même importance.
Si le ministre avait lu un peu les auteurs sur l'exercice de ses fonctions et
les impératifs sur le plan de la conscience que ça importe, il ne
nous répondrait pas ainsi. Il ne nous donnerait pas ce genre de
réponse tout à fait superficielle qui ne va pas du tout au fond
des questions, qui ne correcpond pas du tout aux principes en cause.
C'est ce qui est absolument incroyable et c'est ce qui explique
actuellement que le gouvernement dont vous faites partie a justement ce
caractère très superficiel qui ne correspond plus, qui ne colle
plus à la réalité. Ce qui fait qu'aujourd'hui, vous avez
tellement de gens déçus de l'administration gouvernementale.
M. Lalonde: Beaucoup moins que vous pensez, beaucoup moins.
M. Choquette: Je pense que je ne dénature
pas du tout la réalité lorsqu'on a l'impression d'avoir un
gouvernement fantôme.
M. Lalonde: Naturellement, je ne m'attends pas à pouvoir
convaincre l'ancien ministre de la Justice.
M. Choquette: Est-ce qu'on pourrait me permettre de continuer mon
intervention, M. le Président?
M. Lalonde: Continuez.
M. Choquette: Je comprends qu'elle n'est pas agréable aux
oreilles du Solliciteur général, un charmant garçon pour
qui, par ailleurs, j'ai de l'estime. Mais d'un autre côté, je
pense...
M. Burns: Ce n'est pas avec des charmants garçons qu'on
fait des ministres.
M. Choquette: Ce n'est pas nécessairement avec eux. On
peut en faire peut-être des ministres d'Etat à l'Education, mais
on n'en fait pas des ministres de la Justice ou des gens responsables des
poursuites criminelles.
M. Lalonde: On en fait des chefs de parti peut-être?
M. Choquette: Cela, peut-être, peut-être. M.
Lalonde: Des chefs de particule.
M. Choquette: Peut-être. Mais je ne veux pas me mettre en
cause dans cette discussion, je suis ici pour...
M. Lalonde: II ne veut pas se mettre en cause, mais il essaie
depuis tantôt.
M. Choquette: Mais je dois critiquer, c'est mon rôle.
M. Lalonde: Certain, surtout que vous n'avez pas deux chapeaux du
tout, ah non. Comme ancien ministre de la Justice, ah non.
M. Choquette: Mais mon rôle n'est pas de vous...
M. Lalonde: Mais je vous écoute quand même
très patiemment.
M. Choquette: Oui d'accord.
M. Burns: Je dois vous dire que je me sentais plus en
sécurité avec l'ancien ministre de la Justice qu'avec les deux
actuels.
M. Lalonde: Cela veut dire peut-être qu'il y a une
meilleure administration de la justice. Si vous vous sentez moins en
sécurité, ce n'est pas mon problème, c'est le
vôtre.
M. Burns: Très bien...
M. Lalonde: C'est votre problème, ce n'est pas le
mien.
M. Burns: Même des fois trop protégé, mais en
tout cas.
M. Lalonde: Comptez sur nous autres.
M. Choquette: Mais si on me permet de revenir sur la question de
fond, sans en faire du tout une question qui pourrait hérisser le
Solliciteur général à ce moment-ci, malgré que je
lui dois bien la vérité. Je l'invite fortement à se
pencher sur les incompatibilités, les ambiguïtés actuelles
qui ont été créées maintenant depuis presque un an
dans sa situation et celle du ministre de la Justice actuel. Je dis que ce
n'est certainement pas une situation qui peut se poursuivre. Elle va
certainement avoir des conséquences, si elle n'en a pas
déjà eu. Parce que, n'oubliez pas une chose, nous ne sommes pas
dans les dossiers du ministère de la Justice. Je ne suis pas là
pour aller voir ce qu'il s'y passe; le député de Maisonneuve n'a
pas accès aux dossiers du ministère de la Justice pour voir ce
qu'il s'y fabrique.
Donc, nos critiques, à ce moment-ci, elles sont au plan des
principes, je l'admets. Mais il peut surgir des situations où on verra
justement les enfants qui vont naître de ce mariage du Solliciteur
général avec le ministre de la Justice. A ce moment-là,
peut-être que le ministre actuel regrettera amèrement de
s'être mis dans cette situation remplie d'équivoques et
d'ambiguïtés.
M. Lalonde: M. le Président, je ne m'attends pas de
pouvoir convaincre le député d'Outremont. Mais quand même,
si cela peut le rassurer, disons que je suis fort conscient des
responsabilités qui m'ont été confiées. Je pense
qu'on se rejoint en disant que c'est aux fruits qu'on va juger et je suis tout
à fait tranquille à ce point de vue là.
Qu'on juge aux faits, d'accord. Cela fait seulement dix ou onze mois;
c'est assez difficile de faire un bilan, mais, quand même, je suis
totalement optimiste et tranquille là-dessus. On jugera aux faits, aux
résultats.
M. le Président, que voulez-vous que je vous dise en plus de
cela? Je suis sûr que le député d'Outremont ne l'acceptera
jamais.
M. Burns: Ce que je pourrais vous dire, c'est que je propose la
suspension des travaux de la commission jusqu'à la date ou l'heure
où cela plaira à la commission de siéger, mais je pense
que c'est à 8 h 15.
Le Président (M. Brisson): C'est à 8 heures, pour 8
h 15.
M. Lalonde: Cela va. Merci.
M. Burns: Si, du côté ministériel, le quorum
est protégé, je vais être là.
Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses
travaux jusqu'à 8 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 25
M. Brisson (président de la commission permanente de la
justice): A l'ordre, messieurs!
Nous avons quorum, étant donné que M. André Harvey
(Charlesbourg) remplace M. Pagé (Portneuf).
M. Harvey (Charlesbourg): J'ai une correction, M. le
Président, à vous apporter dès le départ. C'est que
M. Gérard-D. Levesque, leader du gouvernement, m'a demandé de le
représenter ce soir et c'est lui que je remplace ce soir.
Le Président (M. Brisson): Messieurs, étant
donné la gloire, la gloriole et l'orgueil de l'honorable
député de Charlesbourg...
M. Burns: On n'a pas quorum...
Le Président (M. Brisson): ... M. Assad (Papineau) pourra
peut-être remplacer M. Pagé (Portneuf) ou vice versa. De toute
façon, cela revient au même.
M. Harvey (Charlesbourg): Vous ferez bien ce que vous voudrez,
mais, moi, M. Gérard-D. Levesque m'a demandé...
Le Président (M. Brisson): Donc, selon les volontés
de M. André Harvey (Charlesbourg), il remplace M. Levesque (Bonaventure)
et M. Assad (Papineau), par contre, remplace M. Pagé (Portneuf). Il y a
dix présences. Le quorum est de neuf. Donc, il est constaté
que...
M. Burns: M. Lacroix remplace qui? Une Voix: II ne sait
pas compter.
Le Président (M. Brisson): Le quorum est de neuf.
M. Lacroix: Je remplace le député du Parti
québécois qui n'est pas présent.
Le Président (M. Brisson): Nous allons passer
immédiatement au programme no 13 qui s'appelle contentieux criminel. Le
programme vise à assurer l'application du Code criminel.
M. Choquette: M. le Président, si vous me permettez, avant
de passer à l'étude spécifique de ce programme, j'aimerais
continuer la discussion avec le ministre sur des questions de portée
générale qu'il a abordées au cours de son brillant
exposé de cet après-midi.
Le Président (M. Brisson): A une condition, c'est qu'on ne
revienne pas sur le même sujet que cet après-midi, parce que j'ai
remarqué, en me remémorant le débat, que, à trois
reprises, l'honorable ministre avait répondu aux mêmes questions
sous des formes différentes, mais c'étaient les mêmes
questions. Il faudra que ce soient des questions différentes de celles
qui ont été posées cet après-midi.
M. Burns: M. le Président, quand même, il y a une
chose qu'il faut se dire ici. C'est que s'il y a un endroit où on peut
avoir une discussion libre, beaucoup plus facile qu'en Chambre, c'est lors de
l'étude des crédits...
M. Lalonde: Je n'ai pas d'objection pour ma part.
Le Président (M. Brisson): Je suis convaincu que le
député de Maisonneuve ne veut pas allonger les débats.
M. Burns: M. le Président, je vous demande... Non, pas du
tout.
Le Président (M. Brisson): II a sûrement compris ce
à quoi je...
M. Burns: Je vous demande simplement ceci, M. le
Président, avec l'accord du ministre. Je pense que c'est au niveau des
crédits qu'on peut avoir cette discussion franche, ouverte, même
si elle est embêtante, si cela déplaît au ministre ou si
cela déplaît au président.
Je pense que c'est le moment où l'Opposition peut vraiment
soumettre un certain nombre de questions et revenir sur la question lorsqu'elle
n'est pas satisfaite. Le ministre peut nous dire carrément qu'on est
dans les patates les plus totales. Moi, je l'accepte comme règle du jeu,
cet...
M. Lalonde: M. le Président, je suis totalement d'accord.
Je ne veux pas du tout limiter, imposer une camisole de force. Je comprends que
votre travail de président a pour but d'assurer la cohérence des
débats. D'un autre côté, je partage l'avis que c'est un
endroit où, de façon assez privilégiée, on peut
repasser toutes les questions, se livrer à tous les défoulements.
En fait, c'est à notre avantage, quant à moi, d'avoir cette
occasion de démontrer notre volonté, au gouvernement,
d'administrer les biens publics de la meilleure façon possible. Je suis
prêt à répondre à toutes les questions. Nous n'avons
rien à cacher.
Le Président (M. Brisson): D'accord. D'ailleurs, cela ne
va pas selon le bon plaisir ou la complaisance du président. C'est selon
la volonté des membres. Je voulais simplement signaler le fait.
M. Burns: Non, vous avez raison, M. le Président, de le
faire et de nous rappeler à l'ordre.
Le Président (M. Brisson): L'honorable
député de Rosemont.
M. Choquette: C'est le député d'Outremont. Le
Président (M. Brisson): Ah! d'Outremont.
M. Choquette: S'il vous plaît! Je regrette, M. le
Président, que le député de Rosemont ne soit pas ici ce
soir pour nous éclairer.
Le Président (M. Brisson): II serait sûrement
insulté. Je retire mes paroles.
M. Choquette: II devrait être assis à
côté de vous, M. le Président...
Le Président (M. Brisson): Le député
d'Outremont.
M. Choquette: ...pour vous guider dans les questions de
procédure les plus délicates que vous aurez à
déceler ce soir.
M. Harvey (Charlesbourg): ...
M. Choquette: Si, à un moment donné, vous voulez
avoir ses lumières, je serai prêt à ajourner les travaux de
la commission pour...
Le Président (M. Brisson): Connaissant votre sagesse, je
suis sûr que je n'aurai à rendre aucune décision
difficile.
Le corps policier de la CUM
M. Choquette: D'accord. Le ministre a fait allusion, au cours de
son exposé, au rapport sur l'allocation des ressources humaines et
physiques, rapport présenté par le directeur de la police de la
CUM, M. Daigneault. Ce rapport a fait l'objet d'une étude par la
Commission de police et de certaines recommandations qui ont été
rendues publiques.
On sait, à ce sujet-là, que le rapport Daigneault, suivi
des recommandations de la Commission de police, doit faire l'objet d'une
approbation par le Conseil des ministres. Il y a déjà plusieurs
mois que la Commission de police a donné son avis sur l'allocation des
ressources humaines et physiques quant à l'organisation de la police de
la Communauté urbaine de Montréal.
Je voudrais donc demander au ministre où en est cette affaire?
Quel est l'état de la situation en ce qui concerne l'organisation du
corps de police de la Communauté urbaine de Montréal?
M. Lalonde: En effet, j'en ai parlé cet après-midi
parce que cela fait l'objet d'une étude poussée actuellement au
ministère, étude qui est tout près de sa conclusion.
La loi prévoit que les recommandations de la Loi de police
doivent être approuvées, avec ou sans modalités par le
Conseil des ministres. Tout de suite après que le rapport eut
été rendu public par la Commission de police, en janvier, j'ai
consulté, largement, tous les organismes impliqués et l'on sait
qu'il y en a plusieurs.
On peut parler de la fraternité, de la direction de la police, du
Conseil de sécurité, de la Commission de police, de l'Association
des fonctionnaires municipaux. Enfin, je les ai tous vus. Il y a eu aussi la
Conférence des maires, le conseil consultatif des maires de banlieue et
maintenant, après cette ronde de négociations qui a pris
plusieurs semaines, nous avons étudié le rapport de la Commission
de police, à la lumière aussi du rapport Daigneault et nous
sommes, actuellement, au Conseil des ministres, à examiner les
dispositions que nous allons prendre là-dessus.
Alors, je pense qu'on devrait avoir des nouvelles d'ici une semaine ou
deux semaines parce que je suis fort conscient, comme le député
d'Outremont peut l'être aussi, qu'il s'agit d'une question qui est
devenue urgente.
On a fait l'intégration de la police de la Communauté
urbaine de Montréal et la loi prévoyait que le directeur devait
faire, sans délai... Je ne me souviens plus de la terminologie de la
loi.
M. Choquette: ...
M. Lalonde: Et quand je vois le temps... Je n'ai aucun reproche
à faire, naturellement, parce que c'était quand même un
problème complexe, ni à la Commission de police, ni au directeur,
mais on a vu quand même que cela a pris plusieurs mois, sinon plusieurs
années pour le directeur pour faire le tour de la question et
l'opposition de certaines municipalités de banlieue au rapport
Daigneault a donné lieu à l'appel devant la Commission de
police.
C'est le rapport de la Commission de police qui a réussi dans une
bonne mesure à concilier certains intérêts qu'on croyait au
départ difficiles à concilier. Cela va sûrement aider le
gouvernement à énoncer, par son approbation, une politique qui
va, je pense, faire faire un pas en avant à l'intégration de la
police de la Communauté urbaine, dans la voie d'une meilleure
intégration, pas nécessairement une plus grande, et aussi dans la
voie, peut-être, d'une augmentation de la déconcentration au
niveau de la décision du district, de façon à rendre plus
acceptable et plus humaine l'action de la police au niveau des banlieues,
surtout. D'ici une dizaine de jours, je pense qu'on aura une conclusion.
M. Choquette: Ai-je bien compris le ministre lorsqu'il dit que
déjà les recommandations de la Commission de police, avec les
recommandations du Solliciteur général ou des autorités du
ministère de la Justice, sont présentées devant le conseil
des ministres?
M. Lalonde: Déjà, il y a une recommandation que
j'ai faite au conseil des ministres pour traiter les recommandations de la
Commission de police, c'est-à-dire savoir de quelle façon les
recommandations de la Commission de police devront être
approuvées, avec ou sans modalité.
M. Choquette: Peut-on dire que la question a déjà
fait l'objet d'une discussion au conseil des ministres?
M. Lalonde: Oui, cela a déjà fait l'objet d'une
discussion au conseil des ministres, discussion dont évidemment je ne
peux révéler la teneur.
M. Choquette: On devrait avoir une décision,
d'après ce que vous dites, dans une semaine ou deux?
M. Lalonde: A peu près, oui.
M. Choquette: Quant à la Commission d'enquête sur le
crime organisé...
M. Séguin: Un instant, M. le Président, je ne
voudrais pas interrompre le député d'Outremont sur sa question
précédente, ni sur les réponses du ministre. Il y a deux
ou trois petits points qui ne me paraissent pas très clairs. Dans le
groupe ou les groupements que vous avez mentionnés comme ayant
été consultés, je n'ai pas entendu mentionner, par
exemple, la députation gouvernementale, la députation de
l'île de Montréal, soit les députés des
différents comtés. Y a-t-il eu, oui ou non, consultation avec ce
groupe, individuellement ou en groupe? Je n'ai pas eu connaissance qu'il y en
ait eu.
M. Lalonde: Certains députés m'ont exprimé
leur intérêt dans la question. J'en ai discuté avec eux,
mais il faut dire que le fait que nous ayons discuté assez
intensément de la question avec les autorités municipales des
banlieues a sûrement enlevé une certaine pression à
l'égard des députés représentant ces
municipalités. Parce que les municipalités de banlieue, la
conférence des maires de banlieue en général ont bien
accueilli le rapport de la commission de police, en ce sens que tout en
maintenant l'intégration, on recommanderait une certaine
décentralisation de la décision, ce qui était de nature
à satisfaire à leurs désirs. C'est peut-être pour
cela que j'ai eu beaucoup moins de demandes de la part des
députés.
M. Choquette: Cela m'étonne que le Solliciteur
général n'ait pas consulté le député de
Pointe-Claire, parce que tous ceux qui sont à la Chambre depuis bien des
années savent que le député de Pointe-Claire est un des
députés qui s'est le plus intéressé à toutes
les questions qui se rapportent à la Communauté urbaine de
Montréal et, en particulier, le service policier.
M. Burns: C'est vrai.
M. Choquette: Alors, je me demande quelle sorte de consultation
vous avez pu poursuivre si, en plus de ne pas consulter des
députés de l'île de Montréal, y compris certains
députés de l'Opposition comme le député de
Maisonneuve et le député d'Outremont, vous n'avez même pas
consulté un de vos députés qui est le plus au fait de la
situation.
M. Lalonde: Tout le monde sait, M. le Président, que je
suis extrêmement ouvert à la consultation, je l'ai prouvé
relativement à plusieurs dossiers, y compris le dossier de la langue
officielle et le dossier dont on parle actuellement.
M. Burns: N'abordez pas le sujet de la langue.
M. Lalonde: N'importe quand. Quand vous voudrez.
M. Burns: Cela va durer longtemps.
M. Lalonde: Naturellement, l'intérêt le plus direct,
quant à l'application du rapport de la Commission de police, est
représenté par les autorités municipales des banlieues.
Alors, j'ai largement consulté les banlieues, la conférence des
maires de banlieue pourra en être témoin; c'est pour cette raison,
je crois, que je n'ai eu aucun problème relativement à la
consultation vis-à-vis des députés.
M. Choquette: Vous semblez avoir un problème avec le
député de Pointe-Claire qui n'a pas été
consulté.
M. Séguin: Non, voici...
M. Harvey (Charlesbourg): II est capable de répondre pour
lui-même.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Le
député de Pointe-Claire a la parole.
M. Séguin: Ce n'est pas la question d'avoir
été consulté ou non. Mais, dans la nomenclature que vous
avez faite des corps et des organisations que vous auriez consultés,
vous ou quelqu'un de votre ministère, je n'avais pas entendu mentionner
les noms ou le groupement, par exemple, parlementaire. J'ai raison de croire
que même l'exécutif ou le comité spécialisé
dans l'étude de certains rapports de police, que je ne nommerai pas, ou
d'autres commentaires sur la police, ne représenteraient peut-être
pas très clairement la position des municipalités.
C'est dire que si j'ai accès à des consultations sur ce
problème, ça me place comme représentant de 10 ou 11
municipalités, dans une position beaucoup plus favorable pour discuter
avec eux, non pas pour ou contre, je ne mentionne pas ce fait. Il est vrai,
comme a mentionné le député d'Outremont, que le hasard a
voulu que j'aie été très souvent contre une proposition en
faveur d'une autre. Je me suis plié chaque fois et j'ai l'intention de
me plier encore au désir de la majorité, puisque nous sommes en
démocratie, et il faut reconnaître cette voix de la
majorité. Mais encore faut-il, je pense, qu'il y ait possibilité
de se faire entendre et peut-être dans quelques minutes tomber
entièrement d'accord avec ce qui peut être
suggéré.
Cela m'amène à poser la deuxième question. Suite
à l'approbation que pourrait donner le Conseil des ministres à
toute cette chose, est-ce qu'on a l'intention d'aller devant une commission
parlementaire? Si oui, fin de la question, sinon, quelle sera la façon
donnée aux députés représentant les secteurs de la
région concernée pour se faire entendre?
M. Lalonde: C'est la façon normale, ordinaire.
Peut-être que la consultation intense que j'ai eue,
comme je l'ai dit tantôt, je ne veux pas me répéter,
avec le milieu et les autorités municipales a été la cause
que les députés n'ont pas eu tellement de pression de la part de
leur municipalité pour faire valoir leurs représentations
auprès de l'exécutif. Si j'avais eu une seule demande, une seule
suggestion d'un député, je sais que j'aurais été
très heureux de réunir les députés concernés
et de les consulter là-dessus.
M. Séguin: II ne s'agissait pas, je pense encore
là vous me rappellerez à l'ordre, M. le Président
pour moi de me faire entendre, parce que j'avais été amené
à croire que toute cette chose serait mise à l'étude et
que, pendant cette étude, soit en commission parlementaire ou autrement,
nous aurions l'occasion de nous exprimer.
Inutile, naturellement, de faire une espèce de lobbying
professionnel à l'intérieur du groupe gouvernemental, si on
avait, en réalité, fixé une période à plus
tard, pour que je puisse être entendu.
Ma question est...
M. Lalonde: Je suis prêt à entendre le
député de Pointe-Claire demain matin, s'il le faut.
M. Séguin: Ecoutez! Un instant!
M. Lalonde: L'idée, c'est que cette question a fait
l'objet de plusieurs études dont, tout d'abord, l'étude du chef
Daigneault. Deuxièmement, il y a un appel qui a été
entendu publiquement par la Commission de police, qui a été
longuement étudié. Celle-ci a reçu officiellement les
représentations des maires de banlieues et, formellement, de la
Conférence des maires de banlieues, par son président qui
était représenté, à ce moment-là, par le
maire de ville La Salle, M. Raymond, dans mon comté.
C'est peut-être le fait que cette consultation a eu lieu qui fait
que je n'ai pas eu une seule demande de la part d'un des députés.
Dieu sait si je sais que des députés représentant de
telles municipalités ont exprimé leur intérêt,
depuis plusieurs années et cela inclut naturellement le
député de Pointe-Claire. Mais je vous dis bien franchement que
c'est peut-être pour cela que je n'ai pas eu une seule demande. Mais, si
j'en ai une dans les jours qui suivent, je...
M. Choquette: M. le Président, on a vraiment l'impression
d'assister à une discussion au caucus libéral entre...
M. Harvey (Charlesbourg): Ah!
M. Choquette: Oui, c'est vrai, je le dis en toute...
M. Lalonde: Ce n'est pas l'habitude que vous aviez d'y assister,
M. le Président.
M. Choquette: J'ai assisté à plus de...
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, mes- sieurs! S'il
n'y a plus d'autres questions générales, je vais passer aux
questions du programme 13.
M. Choquette: Non, mais...
Une Voix: Cela a l'air à faire nouveau pour vous.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, s il vous
plaît!
M. Choquette: M. le Président, je demande la parole.
M. Séguin: Le député d'Outremont
m'étonne.
Le Président (M. Brisson): L'honorable
député d'Outremont.
M. Harvey (Charlesbourg): ... libéraux.
Le Président (M. Brisson): L'honorable
député d'Outremont concernant les crédits du
ministère de la Justice.
M. Choquette: Toujours, M. le Président, mais je voulais
simplement dire...
Le Président (M. Brisson): Questions?
M. Choquette: Oui. Questions? Interventions, plutôt. Il n'y
a pas juste des questions, il y a des interventions.
Le Président (M. Brisson): Intelligentes.
M. Choquette: Parce que c'est vous qui êtes le juge de
l'intelligence?
Le Président (M. Brisson): Non, non. Je vous demande des
interventions intelligentes.
M. Choquette: Je vous remercie beaucoup. M. Harvey
(Charlesbourg): ...
M. Choquette: Si on commence à juger les interventions
intelligentes à l'Assemblée nationale...
M. Harvey (Charlesbourg): On pourrait vous envoyer des
lettres...
M. Choquette: Cela pourrait réduire le nombre...
M. Harvey (Charlesbourg): ... pour vous convoquer au caucus.
Le Président (M. Brisson): ... commission
parlementaire.
M. Choquette: Je voulais simplement dire... M. Harvey
(Charlesbourg): ... vous écrire.
M. Choquette: Je voulais simplement dire que le principe
général...
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs!
M. Harvey (Charlesbourg): II n'y a pas "à l'ordre
messieurs!"
M. Choquette: ... il y a d'autres députés sur
l'île de Montréal que des députés qui appartiennent
au caucus du Parti libéral.
M. Harvey (Charlesbourg): Nommez-les.
M. Choquette: II y en a assez, quand même. Si on donne un
privilège de consultation à certains députés, je
pense qu'on devrait l'avoir aussi. Est-ce que le ministre s'opposerait?
M. Lalonde: J'aimerais que le député d'Outremont
relise la transcription. Je pense avoir fait attention, avoir été
extrêmement prudent, dans ma réponse au député de
Pointe-Claire, pour ne pas dire que je serais prêt à rencontrer la
députation libérale. J'ai dit: Tous les députés
intéressés.
M. Choquette: Ah! Je suis content que vous le
spécifiiez.
M. Lalonde: Si je vois que la question est sérieuse et
n'est pas dilatoire...
M. Choquette: Non.
M. Lalonde: ... cela me fera plaisir de consulter les
députés. C'est peut-être un certain changement au
ministère de la Justice, mais je le fais.
M. Choquette: Un changement qui serait certainement bienvenu, M.
le Président. En fait, le ministre n'est pas susceptible, à ce
moment-ci, de nous dire s'il a l'intention de procéder à une
consultation parmi les députés de l'île de Montréal
sur le plan d'intégration?
M. Lalonde: Si j'en ai...
M. Harvey (Charlesbourg): C'est...
M. Choquette: M. le Président, je m'oppose aux
interventions du député de Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): C'est déjà fait. M.
Lalonde: II y a eu une large consultation.
M. Harvey (Charlesbourg): II y a eu une large consultation, il
l'a dit tout à l'heure.
M. Lalonde: Si, plus spécifiquement plus
particulièrement...
M. Choquette: Parmi les députés...
M. Lalonde: ... les députés me faisaient des
représentations qui étaient pertinentes, mais sans retarder quand
même le processus d'un mécanisme qui a pris beaucoup plus de temps
que désiré au départ et qui est devenu urgent. Je suis
fort conscient que c'est devenu maintenant urgent de doter le service de police
de la Communauté urbaine de Montréal d'un plan bien pensé
d'allocation de ces ressources humaines et physiques.
C'est pour cela que, sans vouloir précipiter le débat, je
pense qu'il est maintenant temps pour le gouvernement, avec toutes les
consultations que nous avons eues, le rapport Daigneault, le rapport de la
Commission de police, d'autres consultations que j'ai faites en janvier et
même encore plus récemment, qu'on prenne position maintenant.
M. Choquette: Non seulement vous n'allez rien précipiter,
mais je suis prêt à parier qu'on n'aura pas de décision du
Conseil des ministres avant le mois de septembre prochain.
M. Lalonde: Que pariez-vous? La CECO
M. Choquette: Je serais prêt à parier hors de cour.
M. le Président, si on me permet de changer de sujet, je voudrais
demander au ministre certains éclaircissements sur une
déclaration qu'il a faite récemment quant à l'avenir de la
Commission d'enquête sur le crime organisé. J'ai lu dans les
journaux le compte rendu d'une conférence de presse ou d'une
déclaration que le ministre a faite à ce sujet. Il promet une
législation qui ferait que l'enquête sur le crime organisé
serait retirée à la Commission de police. C'est, en gros, ce que
j'ai retenu de sa déclaration. Je comprends qu'il peut y avoir d'autres
aspects que le ministre ait en vue.
Je vais lui demander si la loi qu'il envisage d'introduire devant
l'Assemblée nationale, ce serait fait avant l'ajournement des travaux,
au mois de juin ou enfin, avant la fin de la session actuelle.
M. Lalonde: Mon intention est de le faire avant l'ajournement des
travaux de la session actuelle. Naturellement, je suis assujetti, comme tous
les membres du gouvernement, aux travaux, aux priorités, aux autres
contraintes qui entourent naturellement tous les travaux de la Chambre, mais
c'est évident que j'ai l'intention de présenter cette loi avant
l'ajournement.
M. Choquette: Est-ce que le Conseil des ministres a
approuvé les grands principes de la loi que le ministre entend
apporter?
M. Lalonde: Lorsque la loi sera prête, je vais la
déposer en Chambre.
M. Choquette: ... mais je ne dis pas le contraire, à ce
moment-ci.
M. Lalonde: Ce n'est pas à moi à dire à la
commission ce que le Conseil des ministres a fait.
Mais, s'il approuve un projet de loi et s'il autorise le Solliciteur
général à le déposer en Chambre, après
approbation, il sera déposé en Chambre. A ce moment-là, le
député d'Outremont sera informé des décisions du
gouvernement.
M. Choquette: Je ne demande pas au Solliciteur
général de me faire part des décisions prises. Je demande
simplement au Solliciteur général si les travaux sont
suffisamment avancés pour qu'il soit prêt à déposer
un tel projet de loi d'ici quelques semaines, c'est-à-dire d'ici la fin
des travaux parlementaires précédant la tenue des Jeux
olympiques.
M. Lalonde: M. le Président, comme je l'ai dit
tantôt, sous réserve de toutes les contraintes qui s'imposent, si
je suis en mesure de déposer un projet de loi, je le ferai avant
l'ajournement et, à ce moment-là, cela prouvera que le conseil
des ministres s'est prononcé.
M. Choquette: Non, mais là, le ministre veut jouer
à cache-cache avec moi. Je veux savoir, moi, si le gouvernement a pris
des décisions quant à l'orientation de ce projet de loi.
M. Lalonde: Quotidiennement, le gouvernement prend des
décisions.
M. Choquette: Bien oui, mais arrêtez donc de me servir des
phrases creuses comme ça!
M. Lalonde: Oui, mais si ça ne me tente pas de vous dire
ce que le gouvernement a fait hier.
M. Choquette: Ah oui! Je vous demande si les orientations sont
déterminées à ce moment-ci. C'est tout. Je ne vous demande
pas quelles . Je vous demande si c'est déterminé à ce
moment-ci.
Une Voix: Oui.
M. Choquette: Si vous me dites oui, vous me dites oui. Si vous me
dites non, c'est non.
M. Lalonde: Bien, écoutez! Je ne vois pas comment
ça peut intéresser la commission parlementaire sur l'étude
des crédits que l'orientation ait été
déterminée hier ou va être déterminée demain.
J'ai dit, lors d'une séance de la commission parlementaire, très
franchement et très librement, que nous sommes actuellement au point de
conclure... Parce que, pour déposer un projet de loi avant
l'ajournement... Nous sommes au début de juin. Tout porte à
croire que la session pourrait être ajournée soit à la fin
de juin, soit en juillet, comme on le fait généralement. Si j'ai
un projet de loi à présenter avant la fin de juin, avant
l'ajournement, des orientations ont naturellement été prises.
Mais lesquelles, et tout ça, ça sera déterminé,
ça sera rendu public lorsque le projet de loi sera
déposé.
M. Choquette: Mais supposons, par exemple, que le projet ne soit
pas déposé avant l'ajournement des travaux parlementaires,
ça reporte les choses à l'automne prochain. Donc, qu'advient-il
de l'enquête sur le crime organisé?
M. Lalonde: C'est hypothétique, savoir. M. Choquette:
C'est hypothétique, mais...
M. Lalonde: Quand même, je peux rassurer le
député d'Outremont. On a montré notre volonté,
depuis que je suis au ministère de la Justice, de faire face au crime
organisé par une lutte intensifiée, et nous n'avons pas du tout
l'intention d'arrêter.
M. Choquette: En somme, à ce moment-ci, on ne sait
absolument pas à quoi s'en tenir sur le dépôt d'un tel
projet de loi et l'adoption d'un tel projet de loi avant...
M. Lalonde: J'ai dit que j'ai l'intention de déposer un
projet de loi avant l'ajournement. Maintenant, il faut quand même que je
fasse quelques réserves. Je ne suis pas tout seul dans le gouvernement.
Il y a un programme législatif et si, par hasard, par accident,
malgré ma volonté, ce n'était pas présenté,
je ne veux quand même pas tromper cette commission. Mais toutes choses
étant normales, un projet de loi sera déposé avant
l'ajournement.
M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général a
l'intention de faire adopter ce projet de loi avant l'ajournement?
M. Lalonde: Oui, M. le Président, toutes choses
étant normales. J'espérerais qu'il soit adopté justement
pour procéder à la transition de la commission actuelle à
la nouvelle commission.
M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général
considère impératif non seulement de déposer un tel projet
de loi, mais de le faire adopter avant l'ajournement des travaux, compte tenu
que l'enquête actuelle expire au début de septembre?
M. Lalonde: L'enquête actuelle... C'est-à-dire qu'on
a renouvelé le mandat du banc actuel jusqu'au 30 septembre, d'abord pour
compléter les audiences qu'on a vues la semaine dernière et pour
préparer son rapport. On m'avait demandé trois mois. J'ai
pensé que quatre mois, ce serait un peu plus sûr. Nous l'avons
prolongé jusqu'à la fin de septembre. Si, par hasard, il
était impossible, pour toutes sortes de raisons, d'adopter ce projet de
loi, naturellement, il n'y a aucun doute que le mandat de la Commission
d'enquête sur le crime organisé serait prolongé, parce que
nous croyons que la commission d'enquête a fait un excellent travail et
nous ne voulons pas que son travail souffre d'une interruption qui,
d'après moi, serait mauvaise et serait sûrement malvenue.
M. Choquette: Dans ces conditions, ça vou-
drait dire que l'enquête sur le crime organisé continuerait
dans sa forme actuelle et que ce que nous promet le ministre comme
améliorations à la lutte au crime organisé ne veut pas
dire grand-chose, compte tenu qu'il est prêt à reconduire le
mandat de la commission.
M. Lalonde: Cela a voulu dire passablement de choses depuis le
mois d'août de l'an dernier. Vous avez été témoin de
la lutte qu'on a faite aux grandes familles?
M. Choquette: La lutte que vous avez faites vous personnellement,
cela voulait...
M. Lalonde: Je pense que la population, en grande
majorité, est d'accord avec le gouvernement là-dessus.
M. Choquette: Je pense que l'immense majorité de la
population est d'accord avec ce que l'ancien ministre de la Justice a fait.
C'est bien différent.
M. Lalonde: Les tentatives de l'ancien ministre de la Justice de
s'approprier le crédit sont très farfelues...
M. Choquette: Mais c'est l'ancien ministre...
M. Lalonde: ...parce qu'il était membre d'un gouvernement
qui l'a quand même soutenu là-dessus.
M. Choquette: ...de la justice.
M. Lalonde: Alors, qu'il n'essaie pas de prendre le
mérite.
M. Choquette: Je pense que je devrais prendre la part normale qui
me revient, parce que c'est l'ancien ministre de la Justice qui a
soutenu...
M. Harvey (Charlesbourg): Vous étiez dans un bon
gouvernement.
M. Choquette: M. le Président, je m'oppose...
M. Harvey (Charlesbourg): Vous étiez dans un bon
gouvernement, à ce moment.
M. Choquette: ...à ce qu'un imbécile nous
interrompe.
M. Harvey (Charlesbourg): Un instant.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre! Je pense que ces
paroles sont antiparlementaires.
M. Harvey (Charlesbourg): M. Choquette, s'il vous
plaît...
Le Président (M. Brisson): Je pense que vos paroles ont
sûrement dépassé votre pensée.
M. Harvey (Charlesbourg): J'aimerais que, lui, le dise.
M. Choquette: Etant donné que c'est la
vérité, je pense que cela se pardonne.
M. Harvey (Charlesbourg): J'aimerais que cela soit vous qui le
disiez.
Le Président (M. Brisson): Je fais appel à votre
calme, à votre sérénité.
M. Harvey (Charlesbourg): Non. Un instant.
Le Président (M. Brisson): Le député de
Rosemont.
M. Harvey (Charlesbourg): Non. Le député de
Rosemont est un bon joueur.
M. Choquette: J'en ai assez d'entendre le député de
Charlesbourg. S'il continue, je vais vous demander de le rappeler à
l'ordre, M. le Président.
M. Harvey (Charlesbourg): Mais le député de
Rosemont, non pas de Rosemont, mais le député d'Outremont est un
bon joueur, habituellement.
M. Burns: Vous le provoquez constamment en l'appelant le
député de Rosemont. Cela n'a pas de bon sens.
M. Harvey (Charlesbourg): Le député d'Outremont est
un bon joueur, habituellement. Je pense que...
M. Choquette: Je suis prêt à l'être
encore.
M. Harvey (Charlesbourg): ...vous avez charrié un peu.
M. Choquette: Je suis prêt à l'être encore, M.
le Président, si le député de Charlesbourg me permet de
continuer mon intervention.
M. Harvey (Charlesbourg): Mais vous ne retirez pas vos
paroles?
Le Président (M. Brisson): Messieurs, je fais appel
à votre sérénité, à votre calme et à
votre intelligence.
M. Choquette: Vers la fin de la séance, si vous
améliorez votre conduite, je le ferai.
Le Président (M. Brisson): S'il vous plaît!
M. Harvey (Charlesbourg): Vous n'êtes pas du tout à
fait correct. De toute façon, si vous négociez ainsi, votre
avenir ne m'inquiète pas. Il est déjà très bien
enterré. Vous êtes un fossoyeur de votre avenir.
Le Président (M. Brisson): Le député
d'Outremont a-t-il d'autres interventions?
M. Harvey (Charlesbourg): Vous êtes un fossoyeur de votre
avenir politique. Vous ne me surprenez pas.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs!
M. Desjardins: M. le Président, je regrette d'intervenir
là-dessus, mais je ne peux pas accepter, selon nos règlements,
qu'un parlementaire taxe un collègue d'imbécile. Je crois que
c'est antiparlementaire.
M. Burns: Non. Ce n'est pas vrai.
M. Desjardins: Le député d'Outremont doit retirer
ses paroles.
M. Burns: Voulez-vous nous donner des
précédents?
M. Harvey (Charlesbourg): II veut se payer la traite un peu.
M. Burns: II n'y a pas de problème.
M. Harvey (Charlesbourg): Quand tu es déçu, quand
tu es fossoyeur...
M. Desjardins: C'est à vous à prendre la
décision, M. le Président. Ce n'est pas au député
de Maisonneuve.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs!
M. Harvey (Charlesbourg): II n'y a rien de trop bas pour
vous.
M. Burns: Vérifiez vos origines avant de parler.
M. Harvey (Charlesbourg): Profitez-en.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs. Je pense
que c'est un à un.
M. Harvey (Charlesbourg): Non. Il n'y a rien de trop bas pour
vous.
Le Président (M. Brisson): Le député
d'Outremont a-t-il d'autres interventions intelligentes à faire?
M. Choquette: Oui.
M. Harvey (Charlesbourg): Oh! C'était très bien, M.
le Président. Je pense qu'il va se payer la traite maintenant.
M. Choquette: En réponse aux propos du Solliciteur
général, je voudrais simplement dire que si cette enquête a
donné des résultats, c'est largement je ne dis pas
exclusivement à cause d'efforts qui ont été mis par
l'ancien ministre de la Justice, même si je dois le dire en ma propre
faveur...
M. Lalonde: Oui. Cela perd un peu de valeur, si vous comptez
seulement sur vous pour recevoir des fleurs.
M. Choquette: C'est cela. Bon.
M. Lalonde: Ecoutez. Je suis prêt à vous donner du
crédit.
M. Harvey (Charlesbourg): Dire qu'il a été ministre
de la Justice!
M. Choquette: C'est moi qui ai pris les problèmes de la
Commission d'enquête sur le crime organisé, dans le temps
où elle avait énormément de difficulté à
vivre, à l'époque où elle était très
critiquée dans l'opinion publique et parmi les media d'information. Je
l'ai soutenue par mes efforts et j'ai pris mes responsabilités à
l'époque. Je ne regrette pas ce que j'ai fait. Aujourd'hui, maintenant
que l'enquête a donné des résultats dont je félicite
ceux qui en ont été les artisans, je n'essaie pas d'en tirer plus
de crédit qu'il ne m'en appartient, mais je ne peux faire autrement que
de dire que la direction que nous avons adoptée à
l'époque, les mesures que nous avons prises, malgré les
difficultés de mise en place, tout cela a fini par donner des
résultats.
Alors, je pense que le Solliciteur général aurait tort de
chercher à minimiser les efforts que j'y ai mis personnellement.
M. Lalonde: Loin de moi l'intention de minimiser les efforts de
l'ancien ministre de la Justice. Je pense que tout le monde reconnaîtra
son mérite, mais il aurait dû me laisser le temps de le dire.
M. Choquette: Que voulez-vous? Il fallait bien que je vous
aiguillonne un peu.
M. Lalonde: C'eût été plus efficace, mais
quand même. Il manque de confiance.
M. Choquette: II fallait bien que je vous aiguillonne un peu pour
vous faire voir les choses dans leur perspective exacte.
Sujets divers
M. Choquette: Je voudrais demander au Solliciteur
général, sur un autre sujet, s'il a considéré,
depuis quelque mois, l'application du Code criminel en rapport avec des actes
posés par des dirigeants syndicaux, en rapport avec certaines
grèves illégales ou certains arrêts de travail
illégaux qui ont eu lieu.
M. Lalonde: Oui.
M. Choquette: Je voudrais savoir ce qu'il a fait pour
considérer ces situations, quelles analyses il a faites de ces
situations et comment il a conclu sur les analyses qu'il a pu faire.
M. Lalonde: II n'y a pas encore de conclusion, mais tous les
faits qui sont portés à notre connais-
sance sont réunis et, le cas échéant, si les faits
donnent ouverture à des poursuites, il n'y a aucun doute qu'elles
pourraient être prises.
M. Choquette: A quel genre de situation le Solliciteur
général se réfère-t-il?
M. Lalonde: II y a tout le Code criminel. C'est très large
comme situation. Il peut y avoir des provocations à commettre des actes
illégaux et toutes sortes de situations qu'on a connues d'ailleurs, au
Québec, dans le passé. Nous n'éliminons aucune
possibilité. Il s'agit quand même de voir si les faits que nous
possédons sont suffisants pour justifier des actions et c'est ce que
nous sommes en train d'examiner actuellement.
M. Choquette: Autre question, M. le Président. Il en a
été question, plutôt dans l'intervention du Solliciteur
général. Qu'est-il advenu du service des coroners et des
commissaires des incendies? Qu'a-t-il été fait dans ce domaine au
point de vue administratif?
M. Lalonde: Quant aux coroners, on connaît l'existence
d'une étude qui a été faite et qui a d'ailleurs fait
l'objet d'une discussion lors de l'étude des crédits pour
l'année précédente. Suite à cette étude,
elle n'a pas été donnée formellement avant que j'arrive au
ministère. Toutefois, l'esprit et même des recommandations dans
cette étude pour qu'on institue la permanence dans ce secteur, comme on
l'a fait dans le secteur des procureurs de la couronne, seraient sûrement
désirables. Nous avons commencé à donner suite à
cette recommandation. Nous nous apprêtons à nommer des coroners
permanents aussitôt que nous pourrons le faire, en fonction,
naturellement, des restrictions budgétaires auxquelles nous faisons face
actuellement et des possibilités dans chaque région.
M. Choquette: Ces mesures ne requerraient-elles pas des
amendements aux lois actuelles?
M. Lalonde: Si on devait faire une réforme
complète, suite à une étude poussée, il est
possible qu'on doive apporter des amendements à la Loi des coroners
entre autres. J'ai parlé d'ailleurs assez récemment, devant
l'Association du barreau canadien, de l'intention du gouvernement de pousser
cette étude et de déterminer quelles seraient les mesures
législatives qu'on devrait apporter. Actuellement, cela ne fait pas
l'objet d'une décision immédiate en ce sens que nous avons
d'autres priorités. Je vois dans un avenir quand même pas trop
éloigné des mesures qui pourraient être prises pour
améliorer le service des coroners et, au besoin, apporter les
aménagements législatifs nécessaires.
M. Choquette: Pour ce qui est des améliorations ou enfin
des amendements législatifs, on ne peut prévoir que de tels
amendements seront apportés avant l'ajournement de nos travaux
parlementaires?
M. Lalonde: Non.
M. Choquette: Quelles sont les priorités
législatives du Solliciteur général?
M. Lalonde: J'ai indiqué tantôt que j'avais un
projet qui est à l'étude actuellement concernant la Commission
d'enquête sur le crime organisé qui va nécessiter des
amendements législatifs. Il y en a un certain nombre d'autres qui
pourront être apportés en même temps dans diverses lois pour
améliorer les services policiers, par exemple, améliorer l'action
du Conseil de sécurité à Montréal, à la
Communauté urbaine de Montréal. Comme je l'ai dit tantôt,
ces mesures seront déposées bientôt et le
député d'Outremont et tous les autres députés,
membres de cette commission, seront en mesure de voir ce que le gouvernement a
l'intention d'offrir à la Chambre.
M. Choquette: Si je comprends bien, d'après la
réponse du Solliciteur général, il aurait deux
priorités législatives à ce moment-ci. Premièrement
des amendements à la Loi de police relativement à l'enquête
sur le crime organisé et deuxièmement des amendements à la
Loi de la communauté urbaine de Montréal.
M. Lalonde: II y a aussi, comme d'ailleurs j'en avais
parlé lors du colloque organisé par la Commission de police, il y
a quelques mois, une définition plus précise de la vocation de la
Commission de police et de la vocation de la direction générale
de la sécurité publique, qui pourraient faire l'objet aussi de
législations au même moment. C'est à peu près,
actuellement, les principales mesures législatives qui devraient
être apportées.
M. Choquette: Et dans quel sens le Solliciteur
général voit-il une meilleure définition des vocations de
la Commission de police et de la direction générale de la
sécurité publique?
M. Lalonde: Dans le bon sens.
M. Choquette: Ecoutez, M. le Président. Si le Solliciteur
général sait ce dont il parle...
M. Lalonde: J'ai dit au député d'Outremont
tantôt qu'on est en train d'étudier cela, que des décisions
vont être prises incessamment, qu'un projet de loi va être
déposé. Il verra à ce moment-là ce qu'on a à
dire. Ce n'est pas ici, à la commission au moment de l'étude des
crédits, le temps d'examiner un projet de loi.
M. Choquette: Non, il ne s'agit pas de cela. Il s'agit simplement
de demander au Solliciteur-général quelles sont ses
orientations...
M. Lalonde: Nous voulons donner à la direction
générale de la sécurité publique un mandat clair,
un mandat précis qui va lui permettre de lever de terre. On a vu, depuis
son organisation, son institution, depuis la nomination du sous-ministre
associé, une période d'implantation, une période
d'organisation. Maintenant, je pense qu'il faut réellement
définir... D'ailleurs, conformément aux recommandations qui ont
été faites dans les écrits qu'on a vus à ce propos
dans le passé, pour que la direction générale sache
réellement quel est exactement son champ d'action, que la Commission de
police aussi le sache et qu'on puisse travailler plus clairement dans des
champs beaucoup plus précis.
M. Choquette: Et quels seront ces champs d'action respectifs?
M. Lalonde: On le verra quand on verra le projet de loi.
M. Choquette: D'après le Solliciteur
général, qui a certainement des vues sur la situation
actuellement, il peut quand même nous dire là ou cela requiert
d'être mieux défini entre la Commission de police et la direction
générale de la sécurité publique?
M. Lalonde: Oui, mais le député d'Outremont sait
très bien que la Commission de police est un organisme autonome à
pouvoirs normatifs surtout, pouvoir d'enquête sur les corps de police, a
aussi une mission relativement à la prévention de la
criminalité. Le député d'Outremont sait mieux que personne
quelle était l'intention du ministère lorsque la direction
générale de la sécurité publique a
été instituée. Elle aussi a une vocation de
prévention du crime. Il faut quand même définir plus
clairement que cela n'a été fait dans le passé pour
permettre à ces deux organismes de remplir pleinement leurs
tâches.
M. Choquette: Est-ce que le ministre dirait qu'il y a des zones
de conflits et que même des conflits se sont élevés entre
la direction générale de la sécurité publique et la
Commission de police?
M. Lalonde: Je ne sais pas si le député d'Outremont
a été témoin de quelque fait qu'il voudrait nous
rapporter?
M. Choquette: Je demande au Solliciteur
général...
M. Lalonde: C'est parce que j'ai vu son clin d'oeil au
député de Maisonneuve. Peut-être que c'est...
M. Burns: Ce n'est pas un clin d'oeil, M. le Président, il
y a eu un signe d'intelligence entre le député d'Outremont et
moi-même.
M. Lalonde: Alors, on peut voir l'intelligence dans les yeux du
député d'Outremont? Point d'interrogation?
Il reste quand même que, lorsque...
M. Burns: C'est une très bonne question...
M. Lalonde: ... on institue une nouvelle direction dans un
ministère comme ça, il faut définir petit à petit
son champ d'action pour éviter un dédoublement d'action qui n'est
pas favorable à une bonne administration de la justice.
M. Choquette: Où est ce dédoublement?
M. Lalonde: II peut être dans tous les secteurs
connexes.
M. Choquette: Connexes à quoi? M. Lalonde:
Connexes...
M. Choquette: Quand c'est connexe, c'est connexe par rapport
à quelque chose.
M. Lalonde: Connexe chacun à leur mission. M.
Choquette: Mais où?
M. Lalonde: Chacun à leur mission. Le député
d'Outremont sait très bien quelle est la mission de chacun...
M. Choquette: Bien non, bien non...
M. Lalonde: C'est lui-même qui a institué la
direction générale. Je suis bien prêt à
éclairer cette commission. Maintenant, si le député
d'Outremont veut jouer un jeu pour essayer de faire disparaître sa
science...
M. Choquette: Le Solliciteur... non, non, non...
M. Lalonde: ... de l'administration de la justice en faisant
appel à son expérience...
M. Choquette: Non, non... pas du tout...
M. Lalonde: ... comme ministre de la Justice pendant cinq
ans...
M. Choquette: ... pas du tout...
M. Lalonde: ...je ne tomberai pas dans le panneau.
M. Choquette: Pas du tout, il ne s'agit pas de ça du tout.
Parce que...
M. Lalonde: Posez des questions intelligentes, je vais donner des
réponses.
M. Choquette: Oui, mais le Solliciteur général
pourrait avoir des vues différentes des miennes. Mais je lui
demande...
M. Lalonde: J'espère.
M. Choquette: ... souhaitons-le.
M. Lalonde: Parce que je m'aperçois que le
député d'Outremont ne s'est pas rendu compte
d'un certain nombre de choses lorsqu'il pose des questions.
M. Choquette: Ah oui! Je me suis rendu compte, mais il y a un
journal des Débats...
M. Lalonde: Alors, s'il a les réponses, qu'il ne pose pas
les questions, qu'il donne les réponses.
M. Choquette: Non, mais il y a un journal des Débats, il y
a un public, il y a des députés...
M. Lalonde: Est-ce que c'est pour le public, pour la galerie que
le député d'Outremont...
M. Choquette: Non, non, M. le Président...
M. Burns: Ce n'est pas ça, c'est qu'il voulait avoir un
tête-à-tête avec le ministre.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Je
n'aimerais pas que ce soient des conflits d'intérêt
personnel...
M. Burns: C'est bien simple.
M. Choquette: Pas du tout, je ne suis pas personnel du tout, je
demande...
Le Président (M. Brisson): ... et je pense que c'est
ça qui se dessine...
M. Choquette: ... au Solliciteur général s'il a les
mêmes idées que moi ou s'il en a des différentes.
M. Harvey (Charlesbourg): II en a des meilleures.
M. Lalonde: J'espère que je n'ai pas les mêmes que
vous.
M. Choquette: Ah bon! Alors, si elles sont différentes,
dites-nous en quoi.
M. Harvey (Charlesbourg): C'est ça. Une Voix: Vous
le verrez en temps et lieu.
M. Choquette: Je parle d'un domaine particulier, les
conflits...
M. Lalonde: Cela dépend...
M. Choquette: ...ou des vocations...
M. Lalonde: Je ne sais pas quelles sont les idées du
député d'Outremont, je ne le sais pas, quelles sont les
idées du député d'Outremont là-dessus.
M. Choquette: Bien voyons!
M. Burns: Ce ne sont pas les idées du député
d'Outremont...
M. Lalonde: ...je pose la question, quelles sont les
idées...
M. Choquette: C'est vous qui m'avez mis en cause, moi, je
suis...
M. Burns: C'est quoi, votre politique à vous, c'est
ça qu'on veut savoir?
M. Lalonde: Ma politique est d'atteindre le degré
d'efficacité le plus grand possible pour l'administration des deniers
publics en ce qui concerne l'administration de la justice.
M. Choquette: Dans le domaine particulier de la direction
générale et de la Commission de police.
M. Lalonde: Dans tous les domaines, y compris ceux de la
direction générale et de la Commission de police.
M. Choquette: Vu qu'on est dans ce domaine particulier, je
demande au ministre quelles sont les zones qui méritent clarification
entre les vocations respectives de ces deux organismes?
M. Lalonde: Le député d'Outremont sait très
bien que la Commission de police, avec son rôle normatif, a rendu
naturellement des services très grands à la
société, dans le domaine policier en particulier. Mais, par la
création de la direction générale de la
sécurité publique, on pouvait trouver des zones où on ne
savait pas exactement lequel devait agir. Ce n'est pas bon, surtout dans le
domaine de la prévention de la criminalité, dans le domaine des
statistiques, que deux organismes fassent la même chose. Alors, il s'agit
de bien définir lequel peut faire le travail et de le faire.
M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général
voudrait donner à la direction générale de la
sécurité publique la responsabilité sur les statistiques
de la criminalité au Québec?
M. Lalonde: M. le Président, je pense que j'ai bien
indiqué quelles sont les zones de préoccupation que nous avons
actuellement pour donner une meilleure efficacité aux organismes dont on
étudie les crédits actuellement. En ce qui concerne exactement la
façon dont nous allons procéder pour déterminer les
tâches de chacun, je crois qu'on devra attendre le projet de loi parce
que j'ai indiqué qu'un projet de loi serait incessamment
déposé en Chambre à ce sujet.
M. Choquette: Tout à l'heure, vous avez mentionné
statistiques et prévention de criminalité. Moi, je veux
savoir...
M. Lalonde: Quel est l'exemple que j'ai donné? On verra au
moment du dépôt de la loi de quelle façon...
M. Choquette: Pour le moment, vous n'êtes pas prêt
à...
M. Lalonde: ...on veut déterminer le rôle de
chacun.
M. Choquette: Pour le moment, vous n'êtes pas prêt
à nous dire comment vous allez clarifier les vocations
respectives...
M. Lalonde: Si le projet de loi était
déposé, naturellement je pourrais vous le dire.
M. Choquette: Alors, ce sont les trois priorités
législatives du Solliciteur général, la CECO et la
Commission de police, enfin le rôle de la CECO dans la Commission de
police; deuxièmement, il nous a mentionné la clarification des
responsabilités de la direction générale de la
sécurité publique et de la Commission de police;
troisièmement, il nous a mentionné un autre champ qu'il
prévoyait pour une loi. Je pense qu'il a mentionné une autre cas
qui m'échappe en ce moment.
M. Lalonde: C'est la CUM, pour...
M. Choquette: Oui. Pour le rôle du Conseil de
sécurité publique.
M. Lalonde: Oui, pour améliorer la position du Conseil de
sécurité dans la tâche qu'il a à faire
vis-à-vis du corps policier de la Communauté urbaine de
Montréal. Dans cette question-là, on verra aussi, au moment du
dépôt de la loi, quels sont les aménagements qui seront
apportés.
M. Choquette: Mais pour le moment, on ne peut pas savoir...
M. Lalonde: Non, on ne peut pas savoir.
M. Choquette: ... comment pense le Solliciteur
général.
M. Lalonde: J'ai sûrement des intentions et des
propositions, mais il n'est que juste que ces propositions trouvent leur forme
dans un projet de loi déposé en Chambre, pour voir quelle est
exactement la volonté du gouvernement.
M. Choquette: Bien. Merci.
Le Président (M. Brisson): L'honorable
député de Maisonneuve a-t-il des questions?
M. Burns: Oui, j'ai quelques questions, M. le
Président.
Le Président (M. Brisson): Interventions...
M. Burns: Oui, j'ai en particulier une question, et j'aimerais
que le ministre nous dise quelle est sa conception de l'utilisation de la
préenquète dans des cas où véritablement et
je ne peux que citer le cas du sénateur Giguère, le cas et
je ne veux même pas en discuter comme tel du député
de Saint-Henri, l'actuel député de Saint-Henri, et le
député fédéral de... M. Yanakis, en tout cas,
j'oublie le nom de son comté...
Le Président (M. Birsson): C'est subjudice. Les
préenquêtes
M. Burns: Oui. Je donne cela uniquement à titre d'exemple.
Je ne veux pas aller au fond, je ne veux pas aller au mérite de ces
causes-là. Je voudrais savoir, de la part du ministre, quelle est sa
conception de l'utilisation de la préenquête dans des cas
où, justement, des personnes qui sont connues sur le plan public et
quelle différence il fait de cette utilisation de la
préenquête, par rapport à l'utilisation habituelle de la
préenquête qui, à toutes fins pratiques, est une
discrétion judiciaire?
J'aimerais que le ministre nous donne sa conception de l'utilisation de
la préenquête là-dessus.
M. Lalonde: II faut tout d'abord bien souligner que la
préenquête est une décision du juge de paix qui
reçoit la dénonciation et qui détermine, s'il y a lieu
d'examiner les témoins avant d'autoriser, d'assermenter la
dénonciation. Du point de vue judiciaire strictement, c'est la
perspective dans laquelle se situe le problème.
Du point de vue de tradition, je pense que, si on regarde en
arrière, depuis le mois d'août l'an dernier, je ne pense pas qu'il
y ait eu beaucoup de préenquêtes au Québec. Je pense
à une préenquête; c'est possible qu'il y en ait eu
d'autres.
On me rapporte que, traditionnellement, depuis quelques années,
il y a une moyenne de 20 à 30 préenquêtes par année.
80% des cas seraient des cas de policiers qui, de par la nature de leurs
fonctions, peuvent être sujets à des dénonciations, soit
malicieuses, soit vengeresses.
Est-ce que c'est ce qui inspire le juge de paix dans chaque cas, de
faire preuve de prudence et d'examiner, ex parte et à huis clos, la
preuve qui soutient la dénonciation possible? Maintenant, ce n'est pas
une politique du Solliciteur général, comme ce n'était
pas, je crois, une politique du ministre de la Justice, auparavant, parce que
c'est une décision du juge de paix qui reçoit la
dénonciation
Ce qu'on peut constater, par exemple, comme je vous l'ai dit
tantôt, c'est que, dans 80% des cas, c'étaient des policiers,
donc, des hommes publics. Il y a eu des avocats, des députés, des
sénateurs. Il y a eu aussi des débardeurs; il y a eu des
ouvriers, mais qui étaient mêlés à des
événements qui ont eu un caractère de
notoriété publique. Ce n'était pas nécessairement
la fonction occupée par les personnes, mais le genre de situation
où elles se trouvaient.
Je vous parle d'une situation qui existe depuis quelques années
et que j'ai demandé à mes fonctionnaires de me décrire
pour savoir exactement dans quelle perspective se situe la
préenquête, lorsqu'on m'a recommandé, dans le cas de Sky
Shops, d'accepter qu'il y ait une préenquête.
M. Burns: Est-ce que le ministre a changé de politique,
depuis un mois à peu près, relativement à cela?
M. Lalonde: Je ne crois pas. Pourquoi?
M. Burns: C'est parce que vous ne m'avez pas répondu la
même chose quand je vous ai posé la question en Chambre.
M. Lalonde: Je ne le sais pas. Est-ce un contre-interrogatoire ou
un...
M. Burns: Non, écoutez...
M. Lalonde: Je n'ai pas la transcription de ce que j'ai
répondu en Chambre.
M. Burns: C'était beaucoup plus difficile pour moi de vous
poser la question.
M. Lalonde: Vous voulez m'accuser de vous mentir ou de...
M. Burns: Non, je veux savoir...
M. Lalonde: C'est possible que la question que vous m'avez
posée en Chambre n'ait pas été posée de la
même façon.
M. Burns: Je veux savoir simplement si vous avez changé
d'attitude, depuis un mois, relativement à cela, parce qu'il y a un
mois, vous m'avez dit que c'était une prérogative du
ministère, que vous vouliez continuer à l'utiliser, etc.
M. Lalonde: La prérogative du ministère, c'est une
décision judiciaire. Le procureur de la couronne a sûrement un
rôle à jouer là-dedans, de le suggérer, de le
demander ou, enfin, de le proposer. C'est une tradition, enfin, une habitude
qui existe depuis bien avant que j'arrive. Ce n'est pas au procureur de la
couronne, par exemple, de décider. La décision, lorsqu'elle est
prise, elle est prise par un juge, un juge de paix.
Ensuite, la préenquête, elle est conduite par le juge.
Naturellement, le procureur de la couronne, à ce moment, aide, assiste
le juge en question pour présenter les témoins, pour
présenter la preuve.
M. Burns: Je vais vous poser une question directe, M. le
ministre. Est-ce que, vous-même, comme Solliciteur général,
vous donnez mandat à vos substituts ou, si vous voulez, aux substituts
du procureur général c'est un peu bizarre comme situation
de demander une préenquête dans des cas comme celui de Sky
Shops?
M. Lalonde: Non. Ce qui est arrivé, c'est que,
conformément à la tradition, on m'a suggéré, dans
ce cas, le seul cas où j'ai eu la suggestion, qu'il y aurait lieu qu'une
suggestion soit faite, qu'une préenquête soit tenue. La demande,
la suggestion...
M. Burns: Mais en vertu de quels critères?
M. Lalonde: Des critères que je vous ai donnés
tantôt.
M. Burns: Non, mais dans le cas de Sky Shops, par exemple?
M. Lalonde: Ah oui! des hommes publics. C'est un homme
public.
M. Burns: Est-ce qu'il y avait une enquête policière
qui avait été faite dans ce cas?
M. Lalonde: Sûrement.
M. Burns: Bon. Vous savez, M. le ministre... Là, je ne
veux pas vous interrompre, mais je veux tout simplement qu'on reste sur le
même terrain et qu'on discute de la même chose. Vous savez fort
bien, M. le ministre, que, dans les cas où il y a des
préenquêtes, c'est justement pour éviter qu'un citoyen
hurluberlu décide à un moment donné, par exemple, dans
votre cas, de porter une plainte contre vous, qui n'a rien à faire avec
vous, qui n'a rien à faire avec votre vie privée, ni quoi que ce
soit. C'est cela, la préenquête.
Mais lorsque vous avez une enquête policière qui est faite,
je comprends mal que le Solliciteur général utilise cela comme
étant un élément de suggestion, lorsqu'il y a une
enquête policière qui a été faite.
M. Lalonde: Pas nécessairement, j'essaie de me
souvenir.
M. Burns: C'est cela que je voudrais que vous me
déterminiez. Quels sont vos critères, eu égard à
cela?
M. Lalonde: Le critère ne tient pas nécessairement
compte de qui fait la dénonciation, en ce sens que... Si on prend, par
exemple, le cas de Pat De Caen où une enquête avait
été faite au sein du corps de police de la Communauté
urbaine de Montréal. Donc, c'était une enquête
policière.
M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Une préenquête a quand même
été ordonnée par le juge, parce que...
M. Burns: C'est son droit au juge.
M. Lalonde: ...parce que le policier, à ce moment...
M. Burns: Je ne me plains pas que ce soit le juge qui le
fasse.
M. Lalonde: Non, mais le juge... Laissez-moi terminer, parce que
c'est important.
M. Burns: On ne parle plus de la même affaire.
M. Lalonde: Parce que le policier, quand il fait son
enquête, ne doit se rapporter qu'à des témoignages,
même pas pris sous serment, souvent ce ne sont même pas des
déclarations écrites, qu'à des dénonciations de
témoins éventuels. Qu'est-ce
qui assure le juge que tel ou tel témoin va dire la même
chose une fois rendu sous serment? C'est cette précaution qui...
M. Burns: L'enquête préliminaire, elle est faite
pourquoi? Cela sert à quoi?
M. Lalonde: L'enquête préliminaire est faite tout
à fait pour une autre fin.
M. Burns: Pour savoir s'il y a matière à
procès.
M. Lalonde: Pour déterminer s'il y a matière
à procès, oui.
M. Burns: Oui. Je vais vous donner ma conception, M. le
ministre.
M. Lalonde: C'est inscrit dans la loi.
M. Burns: Vous allez me dire si j'ai tort. D'accord? C'est une
discussion qui mérite d'être tenue, à mon avis et je ne
veux pas vous la tenir en chambre.
D'ailleurs, comme je vous ai posé des questions le 27 avril
dernier, c'est bien normal que le président me dise, à un moment
donné: Vous charriez! Vous posez des questions qui laissent croire que
vous êtes en train de contre-interroger le Solliciteur
général.
Mais prenons un exemple vraiment tiré de loin. Je m'appelle Jos
Bleau. Je déteste le Solliciteur général. Je
déteste le député d'Outremont, peu importe, ou je
déteste le député de Chauveau...
M. Choquette: De Charlesbourg.
M. Burns: De Charlesbourg, je m'excuse.
M. Choquette: Ce n'est pas possible de le détester.
M. Burns: Je décide, pour une raison qui m'est
personnelle, à cause, justement, de ce phénomène que je
déteste l'individu en question, moi, Jos Bleau, de me présenter
devant un juge et de dire: Le Solliciteur général ou le
député de Charlesbourg ou le député d'Outremont
sont des receleurs, ce qui est absolument faux, soit dit en passant. Il n'y a
aucune accusation là-dessus, mais ce sont des gens qui font du recel
à temps plein. Bon! D'accord? Le juge qui reçoit la plainte,
à ce moment-là, devant Jos Bleau, dit: Ecoutez! Quand même,
vous y allez un peu fort. Avez-vous quelque chose comme... C'est ça, une
préenquête...
M. Harvey (Charlesbourg): Des éléments de
preuve.
M. Burns: Mais, quand vous avez une enquête
policière, comme dans le cas, par exemple, de Sky Shops, qui est tenue,
en principe, qui doit être crédible, là, vous avez la
poursuite normale. C'est ça le but de la question que je vous posais, le
27 avril dernier. Je vous demandais: Comment le ministre peut-il concevoir la
technique de la préenquête demandée par le Procureur
général et non par un juge avec l'axiome qui veut qu'en
matière de justice criminelle, tous les accusés sont
censés, a priori, être égaux devant la loi, et avec
l'axiome qui veut que la justice soit rendue de façon publique, à
moins que cette façon de procéder soit contraire à l'ordre
public ou à la morale? Parce qu'inévitablement, à partir
du moment où vous avez une préenquête, vous avez
également un drôle de phénomène qui fait que
ça se fait in camera, ces choses, et vous n'avez pas l'aspect public. Ce
sont deux problèmes de base qui se posent, de sorte que je me demande
comment non pas le Procureur général, mais, en l'occurrence, le
Solliciteur général peut se sentir libre de recommander à
ses substituts de demander une préenquête dans un cas comme, par
exemple, l'affaire Sky Shops, et, possiblement, justifier le fait que la
Gendarmerie royale soit tellement écoeurée de la situation
qu'elle porte plainte en Ontario, parce qu'en Ontario, apparemment, le
Solliciteur général est moins prêt à regarder ce
genre de choses avec beaucoup de synpathie?
M. Lalonde: C'est vrai qu'on me dit que, dans les autres
provinces, en Ontario en particulier, on utilise moins cette institution qui
est quand même inscrite dans le Code criminel. C'est une question de
tradition, de mentalité? Je l'ignore. J'ai pris la situation telle
qu'elle était quand je suis arrivé.
Il reste quand même, et je ne pense pas que ce soit ici le forum
pour justifier la décision du juge en question dans le cas de Sky Shops.
Il est vrai quand même que le juge n'avait pas, à ce
moment-là, ni le Procureur de la couronne, les 20 caisses de documents
qui étaient en possession de la GRC et que le juge a ordonné
après coup de les faire venir.
M. Burns: Avant les 20 caisses...
M. Lalonde: Bien oui, mais il ne les avait pas les 20 caisses. Il
n'avait pas la documentation. Peut-être qu'après...
M. Burns: Est-ce que vous avez déjà vu, M. le
Solliciteur général, un juge, lorsqu'une plainte est
portée, à la suite d'une enquête policière, dire:
Amenez-moi vos 20 caisses avant que j'accepte de signer cette plainte?
M. Lalonde: On l'a vu dans le cas de Sky Shops.
M. Burns: Ce n'est pas vous autres qui avez demandé une
préenquête dans ce cas?
M. Lalonde: C'est le Procureur de la couronne...
M. Burns: N'avez-vous pas donné mandat au Procureur de la
couronne de la demander?
M. Lalonde: Demander, On peut le suggérer. Le Procureur de
la couronne peut suggérer.
M. Burns: Je pense que ce n'est pas votre rôle. C'est
ça. C'est toute la philosophie de l'affaire que je vous pose.
M. Lalonde: Je pense que, dans la fonction de Procureur de la
couronne, le substitut du Procureur général, qui est quand
même un officier de justice, protégé par une loi
spéciale, qui lui enlève certains privilèges de citoyens
et qui l'astreint à décider, dans son âme et conscience, de
la meilleure façon de procéder pour une saine administration de
la justice, je pense qu'à ce moment-là, le Procureur
général est sûrement bienvenu d'écouter les
suggestions et, le cas échéant, si elles lui semblent bien
fondées, de les accepter.
Ce n'est pas le Solliciteur général et je serais surpris
que dans le passé cela ait été le ministre de la Justice
qui, proprio motu, parce qu'on fait appel à une tradition, c'est la
première fois...
M. Burns: Dans le cas de Sky Shops...
M. Lalonde: ... dise à ses substituts de demander une
préenquête.
M. Burns: ... qu'est-il arrivé?
M. Lalonde: Je vais l'expliquer. C'est le substitut du Procureur
général, en charge du dossier, avec son patron le procureur chef,
le sous-ministre de la Justice, le sous-ministre associé aux affaires
criminelles qui, après avoir étudié la question, m'ont
suggéré qu'il y aurait lieu de...
M. Burns: Vous avez donné un mandat à vos
substituts.
M. Lalonde: J'ai accepté leur point de vue, après
avoir posé plusieurs questions dans le sens...
M. Burns: Comment se fait-il que cela n'arrive jamais dans le cas
du même Jos. Bleau de tout à l'heure? Lorsque M. Jos. Bleau en
question se fait accuser de conduite dangereuse, comment cela se fait-il que
vous ne le faites pas dans ce cas? Et comment cela se fait-il que le juge ne
demande pas des tonnes de documents avant de dire: M. Jos. Bleau, on vous
accuse de conduite dangereuse. Imaginez-vous que vous faites perdre la job
à ce gars. J'ai des exemples comme ce n'est pas croyable et ce sont des
cas qui arrivent quotidiennement. Y a-t-il deux systèmes de justice? Y
a-t-il deux façons de l'envisager selon le revenu annuel de
l'individu?
M. Lalonde: Non. Ce n'est pas une question de revenu.
M. Burns: Non. mais est-ce que c'est cela? M. Lalonde: Ce
n'est pas une question de ri- chesse. J'ai dit tantôt qu'il y avait des
débardeurs dont la dénonciation avait fait l'objet d'une
préenquête.
M. Burns: Dans quels cas?
M. Lalonde: II faudrait que j'aie les détails ici. On m'a
rapporté un cas qui a eu lieu avant que je n'arrive.
M. Burns: Vous parlez des débardeurs. M. Lalonde:
Un groupe de débardeurs. M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Un événement... Et il y a eu quelques
avocats, non pas parce qu'ils sont riches, mais dont la fonction fait en sorte
que, comme cela pourrait arriver au député de Maisonneuve parce
qu'il est député et non pas parce qu'il s'appelle...
M. Burns: Cela m'est arrivé et il n'y a pas eu de
préenquête dans mon cas, imaginez-vous donc! Je suis allé
plaider ma propre cause. Correct?
M. Lalonde: Je ne sais pas quand c'est arrivé, mais...
M. Burns: Une infrastructure au Code de la route. J'ai
été acquitté d'ailleurs.
M. Lalonde: Une infraction au Code de la route, c'est une autre
chose. Mais les personnes dont la fonction peut provoquer des
dénonciations malicieuses et dans le cas de Sky Shops... Naturellement,
il y avait eu une enquête de la police.
M. Burns: Une enquête policière. M. Lalonde:
Policière.
M. Burns: Je ne parle pas de dénonciations malicieuses. Je
vous parle d'enquête policière.
M. Lalonde: Mais les 20 caisses de documents, par exemple, la
couronne ne les avait pas eues.
M. Burns: Oui. imaginez-vous donc!
M. Lalonde: Normalement, la couronne, sauf quand il s'agit...
M. Burns: Vous pouvez porter une plainte.
M. Lalonde: Voulez-vous me permettre de terminer?
M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Normalement, quand la couronne a l'occasion et la
chance d'examiner la preuve et
de voir à ce que tout soit suffisant, à ce moment, il n'y
a pas autant besoin... Enfin, le juge ne voit le besoin, j'imagine...
M. Burns: Pour vous, une préenquête, c'est pour
examiner la preuve. C'est cela?
M. Lalonde: Non, mais c'est un élément dont on
peut...
M. Burns: A quoi sert une préenquête? M. Lalonde:
... tenir compte.
M. Burns: C'est ce que j'aimerais savoir. Qu'est-ce que c'est une
préenquête? A quoi cela sert-il?
M. Lalonde: C'est pour s'assurer du sérieux de la
plainte.
M. Burns: Bon. Quand la police porte une plainte, ce n'est pas
sérieux, il faut une enquête.
M. Lalonde: Cela peut ne pas être sérieux si la
police ne s'en rapporte qu'à des témoignages de gens qui auraient
intérêt, par exemple, à nuire à une personne
publique, non pas parce que la police est intermédiaire entre les deux,
que cela assure l'authenticité des témoignages. Maintenant, le
juge... Je comprends que cela se fait ex parte, cela se fait in camera
et...
M. Burns: ... sans publicité. M. Lalonde: ... sans
publicité. M. Burns: C'est cela.
M. Lalonde: Mais, il y a une conclusion qui est publique à
un certain moment. Ou bien il y a une plainte, ou il n'y en a pas. Dans le cas
de policiers, il est arrivé à quelques reprises qu'il n'y a pas
eu de plainte. Dans d'autres cas, il y en a eu. Dans un certain cas, une
avocate, dont je me souviens, il y a vait eu une préenquête; il y
a eu une plainte et elle a été acquittée. Donc, la
préenquête ne signifie pas qu'elle est coupable. C'est simplement
afin de prouver le sérieux de la chose. C'était une avocate,
peut-être qu'elle...
M. Burns: Dans le cas des 34 grévistes de la United
Aircraft, y a-t-il eu une préenquête là-dedans?
M. Lalonde: II peut y avoir aussi, naturellement, un conflit.
M. Burns: Non, mais je vous pose la question.
M. Lalonde: J'y répondrai tantôt. Je ne crois pas
qu'il y en ait eu une.
M. Burns: Moi, je vous dis qu'il n'y en a pas eu.
M. Lalonde: II n'y en a pas eu II peut y avoir aussi un conflit
entre les parties en question, soit, comme dans le cas de Sky Shops, pour
savoir si on devrait porter une plainte de conspiration ou de l'acte
"substantif", à ce moment-là, entre les procureurs de la couronne
et la police; c'était le cas dans Sky Shops.
M. Burns: Ce n'est pas fait pour cela, une
préenquête.
M. Choquette: Mais, après l'enquête
préliminaire, le juge peut toujours ajouter des chefs d'accusation.
M. Burns: C'est cela. Il peut ajouter des chefs, il peut
même dire à la personne: je m'excuse...
M. Lalonde: C'est tout cela mis ensemble.
M. Burns: ... on vous a traîné devant les tribunaux
inutilement. Il n'y a pas de matière à procès, allez-vous
en chez vous, monsieur, avec notre bénédiction.
M. Lalonde: Je pense que, dans le cas de personnes...
M. Burns: C'est cela que je veux savoir, c'est quoi, les
critères?
M. Lalonde: ... dont la fonction, pas parce qu'ils sont riches,
pas nécessairement parce qu'ils sont sénateurs ou
députés, mais dont la fonction peut attirer des
témoignages malicieux, vengeurs, à ce moment-là, je pense
que je ne suis pas contre cela, la préenquête. Je pense que cela
fait partie de tout le mécanisme d'une saine administration de la
Justice.
M. Burns: Yvon Dupuis, lorsqu'il a été
traîné devant les tribunaux, il y a quelques années,
à la suite d'un problème de piste de courses dont il a
été acquitté et honorablement, soit dit en passant, c'est
cela qui est grave... Avez-vous fait une préenquête dans ce
cas-là? Je vous pose la question. Non, mais je veux dire, vous nous
parlez de continuité.
M. Lalonde: vous nous parlez d'un fait de dix ans, quoi?
M. Burns: Cela remonte à 1960, je ne sais pas. M.
Lalonde: Seinze ans, donc.
M. Choquette: Je pense que le procureur de la couronne
était l'actuel ministre de l'éducation, il pourrait nous parler
de la cause en connaissance de cause.
M. Lalonde: Je ne connais pas la cause.
M. Burns: Vous me parlez de précédents, on va
remonter aussi loin...
M. Lalonde: Vous pouvez me citer des milliers de causes où
il n'y a pas eu de préenquête. D'accord. Je vous ai dit qu'il y en
avait une trentaine par année sur les milliers de causes qu'on prend
à Montréal.
M. Burns: Oui, je vais vous parler des dommages, entre autres,
qui sont causés aux travailleurs de la United Aircraft, actuellement,
que vous assiégez littéralement à coups d'appels,
même s'il y a des acquittements. C'est drôle que, dans ce cas, vous
n'avez même pas pensé à faire une préenquête.
Il y a du monde là-dedans qui n'est pas capable de travailler à
cause de vous, M. le ministre.
M. Lalonde: Ecoutez, il ne faut pas charrier.
M. Burns: Oui, c'est cela. A cause de votre ministère,
d'accord.
M. Lalonde: Si, à ce moment-là, le procureur de la
couronne...
M. Burns: On va se parler franchement.
M. Lalonde: Le procureur de la couronne, à ce
moment-là, qui n'a quand même pas d'intérêt ni d'un
côté, ni de l'autre, sauf de servir la justice, a cru bon de ne
pas suggérer de préenquête pour toutes sortes de raisons.
Il n'y en a pas eu. L'opinion du procureur de la couronne...
M. Burns: Ce qui à mon avis est tout à fait
normal.
M. Lalonde: ... est très importante là-dedans.
M. Burns: C'est tout à fait normal. C'est une
discrétion judiciaire, l'utilisation de la préenquête. Je
ne comprends pas en vertu de quoi le Solliciteur général ou le
procureur général, mettons cela avant et après la
réforme en question, peu importe, en vertu de quoi, c'est une initiative
qui vient directement du ministère. C'est cela que je ne comprends pas.
Depuis tout à l'heure, je cherche un critère objectif...
M. Lalonde: Ecoutez.
M. Burns: Qui puisse m'assurer qu'il n'y a pas deux
systèmes de justice au Québec.
M. Lalonde: II n'y a rien qui défend à un juge de
paix qui reçoit une dénonciation...
M. Burns: C'est tout à fait sont droit. Je l'admets.
M. Lalonde: ... d'accepter ou de refuser une suggestion ou
même d'inviter une suggestion...
M. Burns: Mais, ce n'est pas l'initiative de votre
ministère.
M. Lalonde: ... ou même de le faire sans suggestion.
M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Mais c'est vrai que, dans certains cas, la suggestion
est faite par le substitut du procureur général. En fait, on me
dit que c'est comme cela que cela se fait depuis longtemps.
M. Choquette: Juste une question, si vous me permettez,
collègue, de vous interrompre. Dans l'affaire de Sky Shops, quels
étaient les motifs de conflits entre la police et !a couronne, parce que
vous nous avez mentionné cela tout à l'heure? Je voudrais savoir
les motifs de conflits.
M. Lalonde: Je les ai donnés tantôt. M.
Choquette: Non, mais pas les motifs.
M. Lalonde: Je vais vous donner des faits. La police avait des
tas de documents et on en a pas eu. On a eu seulement une espèce de
mémoire, des précis plus ou moins complet, qui n'a pas satisfait
notre procureur de la couronne. De là sa conclusion qu'il ne pouvait
conclure d'une façon précise.
Alors, de là, probablement sa conclusion qu'on devrait avoir une
préenquête...
M. Choquette: Pas du tout, parce que la préenquête
qui a été ordonnée est intervenue seulement après
que les plaintes ont été portées en Ontario.
M. Burns: C'est cela.
M. Choquette: C'est complètement faux ce que vous
dites.
M. Lalonde: Un instant là, M. le Président, le
député d'Outremont s'écarte. Il s'égare.
M. Burns: Non.
M. Choquette: Je ne m'écarte pas du tout. C'est que...
M. Lalonde: II parle en ignorance totale. Et, à part cela,
il aurait dû écouter ce que j'ai dit en réponse à
des questions dans des entrevues. Depuis une semaine et je l'ai dit en
Chambre et je vous en donnerai la transcription s'il le faut on
était prêt à porter la dénonciation, et c'est
seulement à partir de ce moment-là que la différence
d'opinion a été exprimée et nous avons attendu,
espérant pouvoir convaincre le corps policier en question du
bien-fondé de notre position. C'est allé jusqu'au
ministère de la Justice à Ottawa, parce qu'il s'agissait d'un
corps policier qui relevait de l'autorité fédérale. Tout
à coup, alors que nous attendions la conclusion de ces rencontres qu'il
y avait au niveau fédéral, où notre point de vue
était expliqué et étudié, hors de la connaissance
même des gens du ministère fédéral de la Justice,
hors de notre connaissance, évidemment, les représentants de la
GRC sont allés déposer une plainte à Ottawa. Alors, ce
n'est pas après. Oui, chronologiquement après, mais nous
étions prêts avant.
M. Choquette: Donc, vous avez...
M. Lalonde: Ce n'est pas parce qu'un corps policier a
décidé de prendre ne main l'administration de la justice que nous
allions nous faire charrier ici. C'est pour cela que...
M. Choquette: Je connais cela et cela ne m'impressionne pas.
M. Lalonde: Laissez faire, moi aussi, je connais cela. C'est pour
cela que nous avons décidé qu'ici au Québec ce
n'était pas comme cela que se faisait la justice.
M. Choquette: Mais ce que je veux savoir et ce que je veux
clarifier avec le ministre, et je n'essaie pas de tendre des pièges ou
quoi que ce soit, ce que je veux savoir, c'est si la divergence à
l'origine portait sur la nature de l'accusation à déposer ou
portait sur la tenue d'une préenquête qui d'ailleurs fut
ordonnée après qu'on eut porté des accusations en province
d'Ontario.
M. Lalonde: Cela portait sur la nature de la plainte à
porter et nos procureurs de la couronne étaient d'avis que, pour toutes
les raisons que j'ai mentionnées tantôt, il était
désirable de tenir une préenquête.
M. Choquette: Cela portait sur les deux là-bas. Sur la
nature de la plainte.
M. Lalonde: Pour déterminer la plainte. Alors, la GRC
n'était pas d'accord avec cette façon de procéder et elle
a refusé de signer la plainte.
M. Choquette: Donc, cela portait sur deux questions, la plainte,
l'accusation, et cela portait sur l'opportunité de tenir une
préenquête. Est-ce que c'est cela?
M. Lalonde: Elles sont reliées toutes les deux.
M. Choquette: Laissez faire que ce soit relié ou non. Je
veux savoir si l'idée de préenquête a surgi seulement
après qu'on eut déposé des plaintes.
M. Lalonde: Non, avant, la semaine précédente.
M. Choquette: Avant.
M. Lalonde: La semaine précédente. C'est justement
ce qui a été un des...
M. Burns: Est-ce que vous avez des dates précises
là-dessus.
M. Lalonde: Je les ai données en Chambre.
M. Burns: Non, vous ne les avez pas données en
Chambre.
M. Lalonde: Je les ai données en Chambre.
M. Burns: Non, je m'excuse. C'est moi qui vous ai posé une
question là-dessus. Justement, je n'étais pas satisfait de votre
réponse. J'ai dit: On reviendra...
M. Lalonde: Je les ai peut-être données à une
conférence de presse. En tout cas, je n'ai pas les dates ici, mais je
pourrais vous les trouver. Je sais que c'était une semaine exactement de
différence.
M. Burns: Est-ce que vous vous souvenez de la date de
i'ordonnance de la préenquête dans le cas de Sky Shops?
M. Lalonde: Nous étions, d'après le calendrier que
je peux voir je peux me tromper, je peux faire erreur d'une
journée ou deux le 13 avril. C'était en avril, le 13, on
était prêt. Même le représentant de la GRC avait
contribué, avait assisté le procureur de la couronne, M.
Tarasofsky, pour rédiger la plainte, la dénonciation, et
là, il a refusé de la signer. On a attendu une semaine. Il faut
dire qu'il y a une grande fin de semaine entre les deux...
M. Choquette: Oui, mais...
M. Lalonde: Laissez-moi terminer. Il y avait un congé, un
lundi et, le vendredi, il a été déterminé que, le
mardi, il serait à Ottawa pour examiner ça avec les
représentants du ministère de la Justice. C'est le mardi
après-midi, je crois, hors de la connaissance de tout le monde, qu'ils
ont déposé sans nous le dire. Le mercredi, nous avons
décidé de continuer les démarches que nous avions
déterminées, dont nous espérions persuader la GRC du
bien-fondé. Mais, n'ayant pu le faire, nous avons simplement
décidé de le faire à ce moment-là, une semaine
après le moment où nous étions prêts à le
faire.
M. Choquette: Quant à la nature de la plainte à
porter, je comprends qu'il y a eu divergence là aussi, en plus de
l'opportunité de tenir une préenquête, à ce que nous
a dit le ministre. La divergence, d'après ce que j'ai compris,
d'après des réponses antérieures du ministre, était
de savoir si on devait porter une accusation de conspiration ou si on devait
porter une accusation d'offense substantive, c'est ça?
M. Lalonde: Oui, et contre... Là, je voudrais quand
même faire appel au jugement des membres de cette commission sur le
danger de s'impliquer davantage dans une cause qui est devant un juge
actuellement. Je ne voudrais pas entrer...
M. Burns: On ne va pas au fond.
M. Choquette: On ne va pas au fond...
M. Lalonde: On touche un peu à la suffisance de la preuve
et des choses comme ça.
M. Choquette: Pas la suffisance, pas la preuve, je demande si la
divergence portait...
M. Lalonde: Si la divergence pouvait porter... M. Choquette:
Bon, défendez-vous sur ça.
Le Président (M. Brisson): II ne faudrait pas que des
questions...
M. Choquette: On connaît ça, connaît
ça.
M. Burns: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Brisson): Le député de
Maisonneuve.
M. Burns: Depuis le début, le député
d'Outremont et moi-même ne posons pas de questions qui puissent
être préjudiciables, je vous le soumets bien humblement et bien
respectueusement, M. le Président, à quelque personne que ce
soit, impliquée dans ces causes-là.
Le Président (M. Brisson): Jusqu'à maintenant,
d'accord.
M. Burns: Ce que nous demandons actuellement au Solliciteur
général, ce sont des comptes sur la façon c'est le
rôle d'une commission parlementaire qui examine les crédits
dans un cas particulier et à cause d'une certaine philosophie qui doit,
à mon avis, présider à une certaine façon de porter
des plaintes et surtout à une certaine conception de l'administration de
la justice. C'est là-dessus uniquement, je pense que le
député d'Outremont n'a pas outrepassé ça, moi non
plus, en tout cas, si je le fais, M. le Président dites-le moi, je vais
marrêter tout de suite, tout de suite, je vais me fier à vous, je
n'ai pas du tout l'intention...
Le Président (M. Brisson): Non, mais c'est parce
que...
M. Burns: ... de causer préjudice à qui que ce
soit.
M. Lalonde: Je suis d'accord avec le député de
Maisonneuve, ses questions ont porté pas mal sur la question de la
philosophie. Mais le député d'Outremont me pose des questions
qui, pour mériter une réponse complète, pourraient
m'amener à parler soit de la suffisance de preuve ou d'un
élément qui est important aussi.
M. Choquette: Non, c'est vous-même qui m'avez dit qu'il y
avait eu divergence sur la nature de la plainte à porter. Ce n'est pas
moi qui ai dit ça. Ne me faites pas porter vos
responsabilités.
M. Lalonde: C'est parce qu'on parle d'un cas spécifique
qui est devant les tribunaux quand même. Le député
d'Outremont doit quand même comprendre qu'on est sur un terrain
délicat.
M. Choquette: Je veux juste...
M. Lalonde: Sur la philosophie générale, le
député de Maisonneuve a posé des questions. Je lui ai
expliqué les vues que j'ai héritées, en grande partie,
d'une certaine tradition. Si le député d'Outremont veut me poser
des questions là-dessus, d'accord.
M. Burns: Le 29 mars, M. le ministre, si vous me permettez, M. le
député d'Outremont, le 29 mars 1976, ça vous dit quelque
chose, dans l'affaire Sky Shops?
Est-ce que ce ne serait pas la date où le dossier de la GRC a
été remis?
M. Lalonde: Peut-être pas la date où il a
été remis, mais la date que portait le premier précis, le
seul en fait, que la GRC a remis à Me Tarasofsky, à sa demande;
il le demandait depuis plusieurs semaines, et c'est quelques jours plus tard,
le 13 avril, c'est ça que j'ai dit?
M. Burns: Oui, tout à l'heure, mais je vous parlerais du
20 avril qui est une autre date importante.
M. Lalonde: Enfin, vous parlerez de cette date, si vous voulez,
mais c'est quelques jours plus tard, pour prouver que nos procureurs de la
couronne ne se sont pas traîné les pieds là-dessus, la
première fois qu'il y avait un précis énonçant ce
que la GRC croyait être les éléments pertinents, et c'est
quelques jours plus tard, au maximum deux semaines, qu'il a été
prêt à procéder là-dessus.
M. Burns: Si je vous partais du 29 mars et que je vous disais
qu'il y a une autre date importante qui s'appelle le 20 avril, est-ce qu'entre
ces deux dates, il y a eu des échanges verbaux ou écrits entre le
Solliciteur général ou ses représentants et la GRC?
M. Lalonde: Représentants, sûrement, parce que le 13
avril, c'est la date où Me Tarasofsky était prêt à
déposer la plainte et où le conflit a éclaté, en
fait, entre le représentant de ia GRC, M. Stamlar et Me Tarasofsky.
Mais avant, je crois que c'est avant cette date, donc avant le 13, que
le procureur de la couronne, Me Girouard et son patron, M. Tremblay, le
sous-ministre de la Justice, sous-ministre associé des affaires
criminelles, m'avaient indiqué que c'était la marche à
suivre désirable, avant le 13, parce que le 13, ils étaient
censés la déposer.
Il y a eu un écart d'une semaine à cause du conflit qu'on
voulait voir résoudre après s'être expliqué, pour
démontrer le bien-fondé de notre point de vue et c'est le 20
avril que la plainte a... Le mardi, est-ce que c'est... C'est soit le 19 ou le
20, en tout cas, que la plainte... C'est un mardi après-midi, si je me
souviens bien, que la plainte a été déposée
à Ottawa. Le lendemain, la plainte était déposée
à Montréal et la préenquêie a été
ordonnée.
M. Choquette: Qui a déposé la plainte à
Montréal?
M. Lalonde: Un officier de la Sûreté du
Québec.
M. Choquette: Comment a-t-il pu jurer de la
véracité?
M. Lalonde: II a pris connaissance des éléments de
la preuve qui lui avaient été...
M. Choquette: Oui, mais vous n'aviez pas de document?
M. Lalonde: A même le précis et tout ce que le
procureur de la couronne connaissait de l'affaire.
M. Choquette: Et il a pu jurer qu'il était croya-blement
informé...
M. Lalonde: II était informé croyablement par le
procureur de la couronne qui avait quand même les documents pas
tous, pas les 20 caisses qui avaient été. jusqu'à
ce moment-là, transmis par la GRC.
M. Choquette: Et cet officier de police, c'était la
première fois qu'il était, en somme, saisi de ces
faits-là, pour pouvoir porter une plainte?
M. Lalonde: Je ne sais pas s'il avait été
informé quelques jours avant, je ne le sais pas.
M. Choquette: Mais est-ce qu'il avait été
impliqué dans l'enquête?
M. Lalonde: Non. !l avait été croyablement
informé par le...
M. Burns: II n'avait pas les caisses de documents?
M. Choquette: II prend un officier de police qui porte une
plainte basée sur ce qu'un procureur de la couronne lui dit?
M. Lalonde: Et les documents qui sont à sa
disposition.
M. Choquette: II n'y avait pas de document à ce
moment-la.
M. Lalonde: Mais les documents que le procureur de la couronne
avait.
M. Choquette: Un certain précis... M. Lalonde: Le
précis.
M. Choquette: ... d'après ce que vous nous avez dit.
M. Lalonde: Oui.
M. Choquette: Vous êtes satisfait de cette façon
d'administrer la justice?
M. Lalonde: Je ne sais pas si... Je ne pense pas que ce soit une
façon courante de procéder. Généralement, c'est le
policier qui est en charge de l'enquête qui fait la
dénonciation.
Dans certaines juridictions, c'est le procureur de la couronne qui,
lui-même est croyablement informé, à l'extérieur du
Québec, par les officiers de police. Là, c'était
l'officier de police qui était croyablement informé par le
procureur de la couronne.
Je ne pense pas que cela devrait être une procédure
courante.
M. Choquette: Je demande une autre question au Solliciteur
général. Qu'est-ce qui arrive si les accusés sont
condamnés ou sont acquittés en Ontario, relativement à la
plainte qui est portée dans le Québec et qui fait double
emploi?
M. Lalonde: Naturellement, il ne peut pas y avoir double emploi.
S'il y a une condamnation en Ontario, à ce moment-là, pour la
même... C'est assez hypothétique. On peut converser comme cela
sur...
M. Choquette: il y a nécessairement double emploi.
M. Lalonde: Pas nécessairement. Le double emploi commence
seulement au moment d'une condamnation.
M. Choquette: Oui, mais il y a nécessairement double
emploi.
M. Lalonde: Pas maintenant.
M. Choquette: Puisqu'ils vont être inévitablement
acquittés ou condamnés.
M. Lalonde: Oui, mais...
M. Choquette: Dans un cas. il y a autrefois acquit ' et une autre
fois il y a autrefois "convict".
M. Lalonde: Oui, mais à ce moment-là, il n'y a pas
double emploi, parce que là, on ne peut pas procéder.
M. Choquette: Mais écoutez. Est-ce que, d après
vous, c'est correct de soumettre des gens, des justiciables, à des
accusations multiples dans différentes juridictions et les faire
répondre pour les mêmes actes que vous présumez coupables?
Est-ce que d'après vous, c'est une bonne administration de la
justice?
M. Burns: Et quels qu'ils soient, ces justiciables.
M. Choquette: Et quels qu'ils soient, ces gens-là?
M. Lalonde: Ce n'est pas une pratique désirable. Mais,
dans ce cas-ci, je pense que c est dû à la conduite de la GRC que
je trouve inacceptable.
Depuis ce temps-là, nous avons eu des conversations avec la
direction de la GRC et je crois que ce genre de situation ne se
représentera pas.
Je sais que c'est exceptionnel et je l'ai déploré. Nous
allons ...
M. Choquette: Oui, mais...
M. Lalonde: ... faire tout le nécessaire pour que cette
situation ne soit pas préjudiciable naturellement aux
accusés.
M. Choquette: Ces gens sont obligés de retenir des avocats
dans les deux juridictions. Ils sont obligés de faire des voyages pour
se rendre dans les deux palais de justice. Ils sont obligés de
répondre aux mêmes accusations, en substance.
M. Lalonde: Le problème, c'est que, encore là, il
faudrait que j'entre dans les détails de la preuve qui est devant les
tribunaux actuellement pour répondre... Je m'excuse. J'aimerais bien une
discussion de juristes. J'ai fait quand même...
M. Choquette: Si le ministre m'a dit qu'il ne veut pas
répondre...
M. Lalonde: Je ne veux pas enlever ma responsabilité
là-dedans; je l'assume entièrement. J'ai eu quand même des
conseillers spéciaux là-dessus. Il faudrait que j'aille dans les
éléments de preuve qui ont eu lieu en Ontario versus
Québec dont il faut aussi tenir compte.
M. Choquette: Compte tenu de ce qu'une accusation avait
été portée en Ontario, avant l'accusation portée
dans le Québec, est-ce que le Solliciteur général n'a pas
considéré, à ce moment, qu'il était peut-être
aussi bien de laisser la justice onta-rienne suivre son cours?
M. Lalonde: Non, je pense qu'il était bon que la justice
québécoise suive son cours, comme nous avions l'intention de le
faire.
M. Choquette: Pourquoi?
M. Lalonde: Nous avions suggéré une
préenquête sur une dénonciation de l"'acte substantif" qui
est différent à tout point de vue de la conspiration qui avait
été déposée à Ottawa. Je comprends que
c'était en relation avec le même acte, mais je crois que lorsqu'on
peut éventuellement je ne veux pas préjuger, soit de la
préenquête ou de tout résultat de procédure
abstraitement, avoir l'"acte substantif", c'est préférable de la
conspiration.
M. Choquette: C'est la même chose.
M. Lalonde: Comme saine administration de la justice, c'est
mieux.
M. Choquette: C'est la même chose, M. le
Président.
M. Lalonde: Les condamnations, c'est différent.
M. Choquette: J'ai des opinions complètement
différentes de celles du Solliciteur général. Que
quelqu'un soit tenu coupable de conspiration...
M. Lalonde: Au niveau de la condamnation, ce n'est pas la
même chose.
M. Choquette:... quelle est la différence? Bien oui, c'est
la même chose.
M. Lalonde: Les éléments de preuve aussi, ce n'est
pas la même chose.
M. Choquette: A part cela, n'oubliez pas une chose. Advenant une
condamnation en Ontario, qu'est-ce qu'il arrive des procédures dans le
Québec? Est-ce que tous ces efforts n'ont pas été
inutiles?
M. Lalonde: C'est une question hypothétique, M. le
Président. On pourrait s'étendre, je ne sais pas combien de temps
là-dessus, advenant ceci, advenant cela. J'ai dit que nous avons pris
nos responsabilités là-dessus et nous allons les prendre en
tenant compte des développements qui peuvent survenir.
M. Choquette: Moi, si vous me demandez mon opinion, je trouve que
vous les avez mal prises, que vous les avez...
M. Lalonde: Je ne vous demande pas votre opinion.
M. Choquette: Je la donne.
M. Lalonde: Probablement que vous auriez pris la même
décision que moi, à ce moment.
M. Choquette: Probablement que non, M. le Président. Mais,
je dis ceci...
M. Lalonde: C'est facile à dire de l'arrière, de
l'arrière-banc.
M. Choquette: Non. M. le Président, j'ai pris d'autres
décisions et j'ai été obligé de les
défendre. Donc, je m'attends que le ministre actuel va être
capable de défendre les siennes.
M. Lalonde: J'ai pris mes responsabilités et je pense que
c'est pour la...
M. Choquette: Mais je demande...
M. Lalonde: ... meilleure administration de la justice, et aussi,
en affirmant très clairement la juridiction du Québec dans
l'administration de la justice.
M. Choquette: Cela a été là le facteur
primordial...
M. Lalonde: Non.
M. Choquette: ... qui vous a amené à faire
déposer...
M. Lalonde: Est-ce que le député d'Outremont trouve
que ce n'est pas important l'administration de la justice?
M. Choquette: Un instant! Cela a été le facteur
primordial...
M. Lalonde: Non.
M. Choquette: ... qui vous a poussé à amener un
officier de police de la Sûreté du Québec, qui
n'était pas familier avec ce dossier, à déposer une
plainte et faire étudier une autre cause dans le Québec, alors
que...
M. Lalonde: Tout...
M. Choquette: ... vous saviez pertinemment bien qu'il y avait une
accusation au même effet, ou à peu près, en Ontario.
M. Lalonde: M. le Président, je trouve le
député d'Outremont... Je cherche un qualificatif pas trop
dur...
M. Choquette: Perspicace.
M. Lalonde: ... parce qu'il sait très bien que je ne peux
pas répondre à ce genre de question sans entrer dans des
éléments...
M. Choquette: ...
M. Lalonde: Non, sans entrer dans certains
éléments. Naturellement, c'est facile de son côté,
il n'a plus de responsabilité. Je fais appel à son sens des
responsabilités pour qu'il voit que je ne veux pas le suivre sur ce
terrain, justement, parce que je prends mes responsabilités. Je ne veux
pas faire de déclarations qui pourraient préjudicier aux choses
qui sont devant le tribunal actuellement, parce qu'il me parle d'un cas
spécifique. S'il avait suivi la même attitude, la même
façon d'aborder la question que celle du député de
Maisonneuve, on aurait pu parler plus largement sur la philosophie, à
savoir si c'est bon ou si ce n'est pas bon, si on devrait rejeter cela.
Là, on est rendu dans une cause qui est quand même... Je
comprends qu'il n'y a pas encore de plainte.
M. Choquette: Vous n'aimez pas parler de choses concrètes,
d'après ce que je vois.
M. Lalonde: Je ne sais pas. Je pense que, dans le concret, M. le
Président, je pourrais me mesurer au député d'Outremont
assez facilement.
M. Choquette: De choses concrètes dans
l'administration...
M. Lalonde: Oui, des choses concrètes, mais ça me
surprend que le député d'Outremont, après avoir
passé cinq ans à la Justice, ne se rende pas compte qu'on peut
faire des déclarations qui peuvent nuire à l'administration de la
justice dans des causes qui sont devant les juges.
M. Choquette: Nous ne parlons pas du tout...
M. Lalonde: Non, mais je fais appel à son sens de la
justice.
M. Choquette: Vous faites appel à la meilleure partie de
moi-même, et je suis prêt à suivre le Solliciteur
général et à lui concéder toutes les occasions de
ne pas répondre à ces questions si ça peut affecter
l'issue de causes qui sont actuellement devant les tribunaux.
M. Lalonde: Je pense que je suis allé au maximum de ce que
je peux dire.
M. Choquette: Donc, je dis simplement qu'actuellement, nous en
sommes restés au processus décisionnel qui a amené le
ministère de la Justice à procéder d'une certaine
façon. C'est tout ce que nous avons cherché à explorer, le
député de Maisonneuve et moi. Je pense que ça n'engage
d'aucune façon le résultat éventuel de ces causes...
M. Lalonde: Jusqu'à maintenant...
M. Choquette: ... sauf que je dis ceci: J'indique au Solliciteur
général qu'il y a actuellement des accusations devant des
tribunaux qui font double emploi, les unes par rapport aux autres.
M. Lalonde: Seulement, le double emploi ça me
surprend que l'ancien ministre de la Justice ne le sache pas n'existe
que lorsqu'il y a une condamnation, et c'est l'opinion des experts en droit
criminel.
M. Choquette: Je pose la question suivante dans un cas
parfaitement hypothétique...
M. Lalonde: Ce doit être considéré seulement
s'il y avait une condamnation ou un acquittement.
M. Choquette: ... au Solliciteur général. Non! Mais
je pose la question suivante au Solliciteur général. Supposons,
par exemple, qu'il serait question de porter une accusation contre un monsieur
accusé dans le district de Québec. Est-ce qu'il tolérerait
que, simultanément, on porte une accusation de conspiration dans le
district de Montréal? Il dirait: C'est absurde! C'est le même
raisonnement qui s'applique dans le cas actuel.
M. Lalonde: Mais dans 10 000 cas sur 10 001, c'est ça qui
se passe, voyons donc!
M. Choquette: II faut que ça...
M. Lalonde: Je sais que c'est une situation
exceptionnelle, indésirable, qu'on n'a pas
recherchée...
M. Choquette: Le Solliciteur général...
M. Lalonde: Non, laissez-moi terminer! ...mais, quand même,
devant cet événement, il fallait prendre nos
responsabilités. Nous avons pris nos responsabilités pour la
meilleure administration de la justice.
M. Choquette: Parce que ce qui vous a préoccupé,
c'était, comme vous nous l'avez dit plus tôt, de montrer que la
justice québécoise ne serait pas en retard sur la justice
ontarienne.
M. Lalonde: Non, ce n'est pas ça du tout. Ce n'est pas ce
que j'ai dit. J'ai dit que c'est notre responsabilité d'administrer la
justice criminelle au Québec, et il 'allait quand même prendre nos
responsabilités. Nous l'avons fait.
Le Président (M. Brisson): Messieurs, je constate que nous
siégeons depuis dix heures ce matin. Il serait peut-être temps de
demander l'ajournement, si les membres sont d'accord?
Des Voix: On est d'accord.
Le Président (M. Brisson): La commission ajournerait ses
travaux sine die?
M. Lalonde: Sine die, oui.
Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 22 h 3)