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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 9 juin 1976 - Vol. 17 N° 84

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Etude des crédits du ministère de la Justice

Séance du mercredi 9 juin 1976 (Dix heures dix-sept minutes)

M. Brisson (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs! La commission se réunit à nouveau afin de continuer l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Education.

Une Voix: De la Justice.

Le Président (M. Brisson): Je m'excuse, de la Justice.

M. Lalonde: Vous faites un remaniement vite!

Le Président (M. Brisson): II n'y a pas d'éducation sans justice!

M. Lalonde: On serait polyvalent!

Le Président (M. Brisson): Les membres de la commission sont les suivants: M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare (Johnson), M. Bienvenue (Crémazie), M. Burns (Maisonneuve), M. Déom (Laporte) remplace M. Ciaccia (Mont-Royal; M. Choquette (Outremont), M. Desjardins (Louis-Hébert), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Faucher (Nicolet) remplace M. Levesque (Bonaventure); M. Pagé (Portneuf), M. Perreault (L'Assomption), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Springate (Sainte-Anne), M. Sylvain (Beauce-Nord) et M.Tremblay (Iberville) remplace M. Tardif (Anjou).

M. Burns: On a trois remplacements. Le Président (M. Brisson): C'est exact.

M. Burns: M. Déom à la place de M. Ciaccia, M. Faucher à la place de M. Levesque et M. Tremblay à la place de M. Tardif.

Je dois dire que dans le cas de M. Tremblay, c'est une amélioration. Vraiment, on améliore la qualité de la commission en remplaçant M. Tardif par M. Tremblay.

M. Tremblay: Je ne suis même pas avocat.

M. Burns: Je tiens à ce que ce soit noté.

M. Sylvain: Vous pourrez dire cela à M. Tardif.

M. Burns: Je le dis à M. Tremblay pour qu'il le dise à M. Tardif.

Une Voix: Cela, c'est gentil pour nous autres!

Le Président (M. Brisson): Espérons que la qualité des discussions va être améliorée d'autant.

M. Burns: Je n'ai pas dit autre chose sur les autres.

M. Tremblay: On se complète tellement, Yves et moi, que l'un ou l'autre à la commission, cela va aller.

Une Voix: Cela, c'est gentil pour nous autres! M. Burns: Dans votre cas, ce n'est pas...

M. Sylvain: Surtout sur la police, c'est moins pire.

Une Voix: On commence à connaître cela!

Le Président (M. Brisson): Messieurs, nous en sommes à l'étude du programme 15, normalisation et surveillance de l'exercice des fonctions de police.

Crédits à adopter, $2 026 900.

Le député de Maisonneuve.

Normalisation et surveillance dans l'exercice des fonctions de police

M. Burns: Merci. M. le Président, dans son dernier rapport annuel, la Commission de police du Québec recommandait au gouvernement de doter son service des enquêtes d'effectifs additionnels afin de pouvoir répondre efficacement aux plaintes reçues de la part du grand public. Est-ce que le ministre peut nous dire ce qui a été fait en vue de donner suite à cette recommandation de la Commission de police?

La Commission de police

M. Lalonde: Justement, on en discutait encore hier avec le président de la Commission de police.

Nous voulons maintenir l'efficacité de la Commission de police à un niveau constant, au plus haut niveau possible. C'est un fait que la commission est en retard de plus de 100 dossiers dans les enquêtes. Nous examinons, avec le président de la commission, les dispositions qu'on doit prendre. Malheureusement, nous sommes en plein milieu d'une période d'austérité budgétaire. Dans quelle mesure nous pourrons dépanner au moins temporairement, par des aménagements, la Commission de police, c'est examiné actuellement.

M. Burns: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire quelle est la portée de cette recommandation dans le sens de doter son service des enquêtes d'effectifs additionnels? Est-ce que c'est dans un domaine particulier ou ...?

M. Lalonde: Lorsque le... M. Burns: Je veux dire...

M. Lalonde: ... citoyen demande une enquête sur une activité, le comportement d'un policier ou d'un cosps policier, la Commission de police exa-

mine la plainte. Si la plainte n'est pas, à sa face même, futile, il doit y avoir une enquête. Il s'agit, pour la Commission de police, lorsqu'elle a trop de plaintes, un nombre plus grand quelle puisse examiner immédiatement, de choisir; il y en a qui en souffrent. Lorsque, par exemple, je fais la demande d'une enquête, à la suite d'un fait qui m'est rapporté en Chambre ou autrement, la commission fait enquête et il y a peut-être d'autres enquêtes qui attendent. C'est justement le problème constant du service au public; lorsqu'on crée un besoin ou lorsqu'on identifie un besoin et qu'on veut y apporter la solution, quelles sont les ressources qu'on doit mettre? Jusqu'à maintenant on a...

Sur cinq postes, il y en a seulement trois qui sont comblés. On a une certaine difficulté à combler les deux autres.

M. Burns: Quelle sorte de postes? M. Lalonde: Des postes d'enquêteur.

M. Burns: D'enquêteur. Ce sont des policiers, normalement?

M. Lalonde: D'anciens policiers généralement ou des gens ayant une expérience analogue. Mais il n'y a pas beaucoup de candidats qui ont l'expérience analogue qui n'ont pas été policiers. On a souvent, quand on fait les concours, des candidatures d'estimateurs, de gens qui ont fait un genre de recherche, d'enquête. Mais ils n'ont pas, d'après la commission, d'après nous, l'expérience suffisante pour traiter le genre d'enquête dont on a besoin.

M. Burns: Actuellement, ces postes additionnels réclamés par la CPQ, ce sont des postes d'enquêteurs?

M. Lalonde: Des postes d'enquêteurs. Il y a cinq postes, actuellement; il y en a trois de comblés, deux de vacants et on en aurait besoin de sept, en fait, pour traiter les enquêtes qui sont en cours pour, surtout, faire un certain rattrapage. Il est possible qu'on puisse trouver, au moins pour rattraper le temps perdu ou le surcroît de travail qu'il y a à faire sur les enquêtes qui sont déjà en retard, une façon de prêter des enquêteurs à la Commission de police.

C'est le problème qu'on a partout. On a vu, par exemple, les enquêtes que la Commission de police fait sur les corps policiers à Laval; on a vu ce qui s'est passé à Longueuil, entre autres. Les corps policiers en voie de croissance ont comme principale faiblesse un retard dans les enquêtes et, donc, dans la solution des crimes. Un des problèmes majeurs du service policier, de plusieurs corps policiers, c'est de trouver le monde. C'est de trouver les sommes d'argent et le monde pour faire les enquêtes.

Amendements à la Loi de police

M. Burns: Si mes informations sont bonnes, la Loi de police sera révisée d'ici la fin de la session.

M. Lalonde: Oui, en effet.

M. Burns: La loi 41, je crois, n'est-ce pas? En tout cas, vous n'avez peut-être pas le numéro approprié.

M. Lalonde: Je ne sais pas quel est le numéro encore. Elle est en préparation. J'ai l'intention de la déposer, si c'est possible, cette semaine ou au début de la semaine prochaine. La Commission de police va, dans cette loi, trouver aussi des réponses à certaines questions.

M. Burns: Est-ce que le ministre peut nous dire, dès maintenant, quels seront les grandes lignes de cet amendement à la Loi de police?

M. Lalonde: C'est assez difficile pour moi d'en parler librement parce que les décisions finales n'ont pas été prises concernant certains sujets, certains aspects et je ne voudrais pas induire cette commission en erreur. Fondamentalement, cela touche la réorganisation de la CECO et aussi certaines fonctions que la Commission de police a été appelée à remplir dans le passé, pour des raisons.

M. Burns: ... ou diviserait...

M. Lalonde: ... qui feraient plutôt clarifier... On a demandé beaucoup à la Commission de police parce qu'il n'y avait pas d'autre organisme expert pour faire certains travaux. Depuis lors, nous avons vu certains autres organismes nouveaux qui ont grandi, comme, par exemple, la Direction générale de la sécurité publique qui a, au niveau des opérations, sûrement une mission, une vocation beaucoup plus importante ou, enfin, plus directe que la Commission de police qui se tient plutôt au niveau normatif et au niveau de l'enquête.

Alors, il s'agit de déterminer, j'en ai parlé d'ailleurs, la semaine dernière, à cette commission parlementaire. Il y a certains aménagements aussi qu'on a apportés relativement au conseil de sécurité à Montréal, et sa vocation, ses fonctions, pour tenter de lui redonner encore plus de vigueur.

M. Burns: Est-ce que vous avez l'intention de faire adopter cette loi avant la fin de la présente session ou de l'ajournement d'été?

M. Lalonde: Ce serait mon intention, oui. Maintenant, on dépend des travaux de la Chambre. Il y a toutes sortes de contraintes qui sont indépendantes de ma volonté, mais idéalement ce serait mon intention.

M. Burns: C'est pour aider à mes négociations avec le leader du gouvernement.

M. Lalonde: Si cela peut vous aider, si vous pouvez faire...

M. Burns: Ce n'était pas le critique du Parti québécois en matière de justice qui vous parlait, c'était le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Si vous pouvez vous faire mon porte-parole auprès du leader, pour aider ma loi à être adoptée, naturellement.

M. Burns: Je suis bien prêt à tout adopter ce qu'il me présente, mais j'en ai beaucoup, j'en ai pour deux feuilles.

Le Président (M. Brisson): Adopté?

M. Burns: Non, juste une dernière question. Le ministre a sans doute hier, comme moi, lu dans à peu près tous les journaux, le cas du policier de la CUM, dont j'oublie le nom, je pense que c'était un officier, en tout cas je pense que c'était un sergent, si je ne me trompe pas, qui était accusé devant les tribunaux de voies de faits graves sur la personne de deux infirmières, à l'hôpital Notre-Dame. Il semble que cela se soit déroulé au printemps, dans le cadre d'une manifestation qui est devenue un peu turbulente et on a appelé les policiers de la CUM. Le journal rapportait que le policier en question avait plaidé coupable à cette accusation.

La sentence a été une libération inconditionnelle, comme vous le savez. J'aimerais savoir, dans un cas comme celui-là, lorsque cela se présente devant les tribunaux, et avant que les tribunaux en soient saisis, si la CPQ s'en occupe ou si elle en est saisie automatiquement. Dans ce cas, est-ce qu'elle en a été saisie?

M. Lalonde: Non, le président de la Commission de police m'informe que la Commission de police n'a pas du tout été impliquée dans ce cas en particulier.

Il y a beaucoup d'incidents, naturellement, qui peuvent arriver avec les milliers de policiers qui travaillent tous les jours. Un certain nombre de plaintes sont apportées à la Commission de police, mais un autre grand nombre ne vient jamais à sa connaissance. Je ne connais pas le cas, sauf pour l'avoir lu dans les journaux. C'est un autre cas parmi des dizaines ou des centaines de dossiers qui sont traités quotidiennement. Je présume qu'il y a eu une plainte directement au ministère de la Justice ou peut-être...

M. Burns: Vous ne savez pas si, dans ce cas-là, c'est votre...

M. Lalonde: ... est-ce un flagrant délit. Je ne sais pas qui a entrepris la poursuite.

M. Burns: Vous ne savez pas si c'est votre ministère qui a intenté les plaintes ou si c'est par voie de plainte privée.

M. Lalonde: Non, j'aimerais prendre avis, quoique je pourrais peut-être m'informer très rapidement, avant la fin de la commission, pour informer la commission sur ce cas en particulier. Je ne vois pas que le ministère de la Justice, par ses procureurs ou par les substituts du procureur général, n'ait pas été intéressé dans la cause depuis la prise de la plainte. Normalement, il aurait dû l'être.

M. Burns: Pourriez-vous, d'ici à la fin de la commission, tenter de me donner une réponse à cette question?

M. Lalonde: D'ici cet après-midi.

M. Burns: Parce que je vous avoue que j'ai trouvé cela un peu troublant. Si je soulève le cas — je veux que ce soit bien clair — ce n'est pas parce que je ne pense aucun bien des policiers en général. Je pense que ce sont des cas exceptionnels qui, malheureusement, font du tort à l'ensemble des policiers qui, dans la quasi-totalité, font un travail merveilleux. Ce n'est surtout pas dans le but de discréditer le travail des policiers dans l'ensemble, je tiens à le dire. Par contre, ces cas-là sont des cas individuels et, quand un policier fait son boulot de façon fantastique, évidemment cela ne fait pas la première page des journaux. Mais, quand il y en a un qui commet une incartade, on en parle et c'est malheureux.

Une fois cette précaution prise, quand même, dans ce cas-là, j'ai été assez étonné — maintenant, on peut en parler, le jugement est rendu, la sentence est rendue — que, devant deux accusations de voies de fait graves, un juge — il a le droit d'exercer sa discrétion — ait décidé, tout simplement, qu'étant donné que le policier en question n'avait pas de casier judiciaire il devait être libéré inconditionnellement. Or, il faudrait bien se souvenir que tous les policiers n'ont pas de casier judiciaire. C'est ce que je trouve bebête, un peu, dans ce jugement.

M. Lalonde: Je crois que l'absence de casier judiciaire est un des éléments, mais il y en a sûrement d'autres. Je pense bien qu'un policier, sans casier judiciaire, qui serait pris pour meurtre, par exemple, n'aurait pas nécessairement une libération inconditionnelle.

M. Burns: Non, mais quand même, on parle de voies de fait graves. Des voies de fait graves, c'est là où il y a eu blessures; c'est plus que pousser quelqu'un cela. En tout cas, moi, je ne le sais pas, mais j'aimerais avoir...

M. Lalonde: J aime bien entendre le député de Maisonneuve me souligner le fait que ce sont seulement des cas négatifs dont on entend parler dans les journaux qui malheureusement jettent une lumière peut-être un peu négative sur le travail des policiers en général. Souvent même nous avons des plaintes futiles qu'on regarde. J'ai déposé en Chambre il y a deux semaines un rapport de la commission, qui avait fait enquête sur un cas soi-disant pénible de brutalité policière. La personne qui a formulé la plainte, par voie de lettre à un journal, s'il vous plaît, qui est très élaborée, n'a même pas cru bon de répondre à la demande des policiers de se faire entendre. Je crois que c'est ici, entre autres, qu'il est bon de rappeler que les

policiers, dans la très grande majorité, accomplissent un travail difficile et ils le font de façon honnête et loyale.

M. Burns: Là-dessus, je suis d'accord avec le Solliciteur général entièrement.

M. Lalonde: Alors, j'ai pris note des demandes, des questions et d'ici 16 heures cet après-midi normalement nous devrions continuer les délibérations de cette commission j'aurai les détails qui pourront peut-être éclairer la commission.

M. Burns: D'accord. Le programme 15, adopté.

Le Président (M. Brisson): Le programme 15 est adopté. Le programme 16, Protection civile.

Protection civile

M. Burns: Au programme 16, je me demande vraiment si je discute avec la bonne personne de la Protection civile. Je relève un article qui a paru dans le Soleil du mercredi 22 octobre 1975 sous le titre "Protection civile, Bourassa remplace Choquette". C'est un article de M. Fernando Lemieux où, à toutes fins pratiques, on nous dit que le premier ministre prenait charge, à compter de cette date et par voie d'arrêté ministériel. Je vous cite la partie de cet article qui est pertinente à la question que je vous pose: "Un arrêté ministériel a d'ailleurs été signé en ce sens", c'est-à-dire dans le sens que le premier ministre prenait charge de la Protection civile. M. Bourassa, qui avait les pouvoirs d'assumer la responsabilité des décisions en cas de désastres locaux, régionaux et provinciaux, à titre de président du Conseil exécutif, devient effectivement le grand patron de la Protection civile. J'aimerais savoir si c'est aussi exact aujourd'hui qu'à ce moment.

M. Lalonde: C'est-à-dire que c'était exact à ce moment. En effet, lorsque M. Choquette avait démissionné du gouvernement, il s agissait de le remplacer comme coordonnateur parce que le coordonnateur de la Protection civile est nommé par arrêté en conseil.

M. Burns: Mais M. Choquette a démissionné comme ministre de l'Education; donc, déjà il y a eu le transfert des responsabilités.

M. Lalonde: Je ne sais pas si le transfert des responsabilités du coordonnateur se faisait automatiquement, je n'en suis pas sûr, parce qu'il est nommé par arrêté en conseil. Il fallait le remplacer formellement.

M. Burns: Sauf que vous, à ce moment, vous étiez déjà désigné comme Solliciteur général.

M. Lalonde: Quelle est la date?

M. Burns: Le 22 octobre 1975 Le remaniement s'est fait au mois d'août 1975.

M. Lalonde: Oui, je le sais. M. Choquette a démissionné au début d'octobre, je pense.

M. Burns: C'est probablement durant cette période.

M. Lalonde: Oui, je me souviens. Avant de désigner qui serait coordonnateur, le premier ministre, M. Bourassa, a pris cela à sa charge et ce n est qu'en novembre ou décembre qu'il a été décidé de me confier cette fonction. L'arrêté en conseil a été adopté dans ce temps, me nommant coordonnateur de la Protection civile.

M. Burns: Comme cela, cette nouvelle... M. Lalonde: Elle était vraie.

M. Burns: ... était vraie, mais elle n'est plus exacte aujourd'hui. C'est ce dont je voulais m'as-surer. Je n'ai pas d'autres questions là-dessus. Je trouvais cela bizarre qu'en plus de la division...

Indemnisations aux victimes d'inondations

Le Président (M. Brisson): L'honorable député de l'Assomption.

M. Perreault: Je ne sais pas si je suis hors du sujet, mais au sujet de la Protection civile, qu'est-ce que vous allez maintenant faire pour les inondations? Le programme est-il en marche?

M. Lalonde: Non seulement, à moins que le président ne me corrige, vous n'êtes pas hors du sujet, mais c'est très pertinent, c'est très d'actualité. Nous devons considérer, au Conseil des ministres ce matin — il commence actuellement: je vais les rejoindre plus tard — la décision, que j'ai décrite d'ailleurs lorsque j'ai rendu publique la formation du Bureau d'aide financière, concernant les normes.

Lorsque ces normes seront déterminées, nous pourrons envoyer à toutes les municipalités concernées les formulaires nécessaires pour qu'ils soient distribués à ceux qui ont des réclamations à faire. Ces réclamations seront ensuite acheminées directement au Bureau d'aide financière qui est actuellement en formation. A ce moment, tout le processus d'examen des réclamations de paiements sera entrepris. Je rendrai public probablement demain, suivant la décision du Conseil des ministres, tout ce processus pour que nos nombreuses municipalités, dans chacun de nos comtés, les citoyens qui ont été frappés par les inondations sachent à quoi s'en tenir.

M. Perreault: J'aurais une remarque a vous faire Dans mon comté, il y a eu beaucoup de sinistrés. La plupart des municipalités ont ouvert un dossier pour chacune des personnes sinistrées. Serait-il possible que les municipalités puissent contrôler les formules retournées pour en prendre connaissance au moins? C'est pour qu il y ait coordination et pour que les municipalités sachent

qu'il y a eu retour, parce qu'un dossier est ouvert pour chacun des sinistrés. Si les gens envoient leur formule directement, la municipalité ne sera pas ce qui se passe dans ce cas.

M. Lalonde: II y aurait un inconvénient; cela ralentirait de beaucoup le processus.

M. Perreault: Sans l'envoyer directement, au moins mettre la municipalité au courant des demandes reçues pour ces dossiers.

M. Lalonde: Oui.

M. Perreault: Dans mon comté, où il y a eu beaucoup de sinistrés, la ville de Lachenaie a ouvert un dossier pour chacun d'eux. Il serait bon, dans le dossier, qu'elle sache qu'une formule est rendue.

M. Lalonde: Je prends note de la suggestion du député. C'est une excellente suggestion. Sans ralentir le processus, je pense qu'on peut trouver une façon d'aviser la municipalité qu'une réclamation est entrée. A ce moment-là, la municipalité n'aurait pas le contrôle de cette réclamation, de son approbation, car il faut quand même conserver le contrôle de cette approbation chez nous...

M. Perreault: Oui, d'accord.

M. Lalonde: ...étant donné que nous sommes responsables des paiements. Mais il n'y a aucun doute que nous n'avons aucune objection à informer, au contraire, les municipalités, qui forment un élément essentiel de toute la Protection civile. Elles sont le réseau, en fait, de la Protection civile. Nous demandons constamment la collaboration, la coopération des municipalités quand il s'agit tout d'abord de maintenir constamment nos services de Protection civile, et quand il y a des désastres, nous mettons à l'épreuve, c'est le cas de le dire, les autorités municipales. Il n'y a aucun doute que nous n'avons aucune objection, au contraire, à collaborer avec elles soit de façon générale, soit dans les cas qui nous sont suggérés.

M. Perreault: La raison pour laquelle je demande ceci, c'est qu'en 1974 il y a eu manque un peu de coordination avec les maires. Les maires sont venus me rencontrer pour demander que la Protection civile les tienne au courant des réclamations qui sont faites pour pouvoir ajouter cela dans le dossier de chacun des sinistrés qu'ils ont en main.

M. Lalonde: Je pense qu'il y a un moyen de le faire. Naturellement, je n'ai peut-être pas encore le tableau complet des difficultés des inconvénients ou des problèmes que cela peut créer, mais on m'assure qu'on va regarder cette question de façon positive pour trouver une façon d'informer les municipalités.

M. Perreault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): L'honorable député de Nicolet.

M. Faucher: M. le Président, est-ce que chaque municipalité doit faire une demande spécifique pour être déclarée zone sinistrée, comme en 1974?

M. Lalonde: Oui et non. C'est-à-dire qu'au départ, la Protection civile, qui est le conseiller privilégié du gouvernement dans ces cas, connaît, lors du désastre et par sa participation dans les opérations d'urgence, les municipalités qui ont été frappées.

Il est possible toutefois, comme en 1974, que nous en ayons oublié, que nous n'ayons pas eu connaissance, par exemple, que telle municipalité avait eu des dommages parce qu'on n'a pas été appelé à intervenir. Comme en 1974, à ce moment-là, on peut ajouter ces municipalités, à leur demande, à la liste des municipalités sinistrées. Cela ne fera aucune difficulté, sauf que je ne veux pas laisser entendre que toutes les municipalités frappées doivent faire une demande. La très grande majorité, sinon toutes, sont déjà contenues sur la liste des municipalités sinistrées.

Le Président (M. Brisson): L'honorable député de Beauce-Nord.

M. Sylvain: Une première question, M. le ministre. Un communiqué de presse émis de votre bureau, il y a quelques semaines, laissait entendre que les équipements privés collectifs municipaux et provinciaux pourraient être indemnisés. Quand vous parlez d'équipements provinciaux, je vous soumets le cas, par exemple, de 25 milles de route ou de chemin de terre qui sont inondés et endommagés. Est-ce que cela voudrait dire que le ministère des Transports, qui a la juridiction sur l'entretien de la route, pourrait soumettre une demande au Bureau d'aide financière en 1976?

M. Lalonde: En effet. Le député de Beauce-Nord mentionne, par exemple, des routes, mais les écoles et tout équipement provincial qui auraient été affectés par les inondations peuvent être indemnisés. Il y a, à ce moment, non pas un conflit, mais peut-être un dédoublement de responsabilité. Ce serait probablement le ministère des Transports qui réparerait la route mais c'est le bureau d'indemnisation qui se trouverait à fournir les fonds.

M. Sylvain: Si, par exemple, le ministère, dans une zone sinistrée comme la vallée de la Chaudière, quatre ou cinq municipalités en particulier, avait payé $150 000 ou $200 000 pour l'entretien, la réfection des ponceaux et des ponceaux privés qui mènent aux maisons, les gros ponceaux, avait déjà assumé un entretien, la réfection, cela voudrait dire qu'il pourrait y avoir demande de remboursement au Bureau d'aide financière.

M. Lalonde: S'il s'agit de ponceaux privés, je

ne sais pas exactement ce que le député de Beauce-Nord décrit.

M. Sylvain: Ecoutez...

M. Lalonde: C'est la responsabilité, si ce sont les...

M. Sylvain: Non, sans trop aller dans les détails, il y a certaines ententes, au ministère des Transports, au sujet de la réfection des routes ou des ponceaux pour les entrées de maisons. De toute façon, il y a tout cet ensemble de réseaux routiers secondaires qui appartient au provincial. Cela voudrait dire que si le ministère des Transports, dans la Beauce, a dépensé $200 000 à cause de l'inondation de ces routes de la vallée de la Chaudière, il pourrait valablement soumettre une demande?

M. Lalonde: Ah oui! En 1974, la dépense totale du ministère des Transports concernant les inondations a été de $1 668 000 remboursés par le Bureau d'aide financière. Aux Affaires municipales, cela a été de $2 800 000. C'est la façon de procéder. C'est le ministère des Transports qui le ferait et une réclamation serait envoyée au bureau d'aide.

M. Sylvain: On sait que déjà le Bureau d'aide financière, qui est nouvellement formé, a convenu de désigner certaines municipalités comme ayant été des zones sinistrées, en particulier selon, j'ose estimer, des enquêtes du ministère des Richesses naturelles. Je sais que le ministère des Richesses naturelles a constaté de lourds dégâts, je prends l'exemple de la rivière Chaudière, cela pourrait être toute autre rivière qui a fait subir des inondations aux revirains, ce qui a causé principalement les dommages. Mais quand une municipalité est désignée, est-ce que cela peut vouloir dire que le propriétaire ou le bonhomme qui demeure, je prends un rang fictif, dans le rang no 3, riverain d'une branche du cours d'eau de la rivière Chaudière, qui a subi des inondations par la branche du cours d'eau et non pas par la rivière elle-même, et qui n'ont pas été constatées en termes de dommages par le ministère des Richesses naturelles, est-ce que cette personne va pouvoir aussi soumettre une demande d'indemnisation?

M. Lalonde: Oui, que ce soit par le cours d'eau principal ou par un tributaire secondaire, il n'y a pas de différence si les dommages ont été causés par un désastre naturel. Que cette personne soit située, en fait, dans le territoire municipal voisin, cela n'a rien à voir. Autrement dit, nous ne limitons pas, nous ne définissons pas les dommages par territoire. La raison pour laquelle nous donnons la liste des municipalités qui ont subi des dommages, c'est pour savoir exactement où sont les personnes à indemniser, où sont les équipements à indemniser aussi. Si cette liste n'est pas exhaustive, si elle n'est pas complète, on la complète simplement.

Si on reçoit l'information, par exemple, qu'un de vos citoyens, sur le rang no 3, a subi des inondations de façon indirecte, il a autant le droit de se faire indemniser que celui qui en a subi par le déversement de la Chaudière.

M. Sylvain: Ma question est peut-être prématurée, vous en discuterez au cours de la journée. Est-ce qu'on peut présumer que les modalités de 1974 seront appliquées, au moins?

M. Lalonde: C'est le modèle que nous prenons. Maintenant, c'est possible qu'il y ait des aménagements différents.

Le Président (M. Brisson): Programme 16, adopté?

M. Tremblay: M. le Président...

Le Président (M. Brisson): L'honorable député d'Iberville.

M. Tremblay: ... avant de passer à un autre programme, est-ce que vous croyez que les formulaires parviendront aux municipalités dans un avenir prochain?

M. Lalonde: Très prochain. Il y a des révisions mineures à faire sur le formulaire de 1974. En fait, nous allons nous servir de ces modèles. Aussitôt que les normes seront adoptées, ce qui devrait se faire aujourd'hui, nous allons compléter cette révision et en imprimer un nombre suffisant pour les envoyer. J'imagine dans quelques semaines.

M. Tremblay: Est-ce qu'on peut dire à nos gens, par exemple, que dans un mois ou quatre semaines les formulaires arriveront aux municipalités?

M. Lalonde: Oui, nous allons faire la publicité nécessaire, y compris la liste des municipalités visées actuellement, pour que les gens sachent où s'adresser pour aller chercher leur formulaire.

M. Tremblay: Si vous faites une publicité pertinente, est-ce que vous vous proposez d'envoyer ces communiqués de presse ou des annonces payées à des hebdomadaires régionaux dans des endroits comme mon coin, par exemple, sur la Richelieu: Henryville, Sabrevois, la ville d'Iberville, la municipalité de paroisse d'Iberville, etc.? Il y a des journaux, dans ce coin-là, que les gens lisent plus que la Presse, la Gazette ou le Star, par exemple.

M. Lalonde: Oui, sûrement. C'est un réseau d'information qu'on utilise régulièrement.

M. Tremblay: C'est régional, finalement, n'est-ce pas?

M. Lalonde: Oui.

M. Tremblay: Les gens de Montréal ne sont

pas intéressés à connaître ce qui se passe dans la Beauce et à Henryville.

M. Burns: Au contraire, cela nous intéresse beaucoup.

Une Voix: Politiquement!

M. Burns: On suit cela de près.

Le Président (M. Brisson): Programme 16, adopté?

M. Sylvain: Sans éterniser...

M. Tremblay: M. le Président, vous êtes donc bien pressé, vous!

Le Président (M. Brisson): Non, c'est parce que...

M. Tremblay: Quand c'est l'Opposition, vous semblez moins pressé.

M. Lalonde: C'est parce qu'il est inondé de questions.

M. Burns: Ils n'ont pas abusé, je pense, du temps de la commission depuis le début; alors, laissez-leur...

Le Président (M. Brisson): C'est parce que la justice ne fait pas place aux calembours.

M. Tremblay: Nous autres c'est terre à terre. Là, c'est terre à eau, je pense bien. Une dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): L'honorable député d'Iberville.

M. Tremblay: Lorsque les formulaires et les directives seront prêts à être publiés, à qui de droit, je pense bien que vous verrez que nous, les députés de ces régions, en recevions des exemplaires. Des gens peuvent nous en demander, les conseils municipaux peuvent nous en demander. Il nous faudrait les directives également afin que, lorsque les gens nous appellent, on puisse savoir quoi leur répondre.

M. Lalonde: Oui. Tout d'abord, les députés seront sûrement les premiers informés. Lorsque j'ai fait le communiqué, je l'ai fait distribuer sur le pupitre de chaque député en Chambre. Ensuite, sur demande, peut-être...

M. Tremblay: Un exemplaire du formulaire avec les directives.

M. Lalonde: Oui, sûrement. Maintenant, pour en avoir un certain nombre...

M. Tremblay: Un exemplaire du formulaire.

M. Lalonde: ... il faudrait probablement s'adresser, à ce moment-là, au bureau d'aide.

M. Tremblay: Non, je veux dire un exemplaire du formulaire avec les directives que les municipalités vont recevoir.

M. Lalonde: Oui, aucun problème.

M. Tremblay: Juste cela.

M. Lalonde: Aucun problème.

M. Tremblay: Cela va se faire automatiquement?

M. Lalonde: Automatiquement, j'en prends note et mes assistants en prennent note aussi.

M. Tremblay: Merci beaucoup.

Le Président (M. Brisson): L'honorable député de Beauce-Nord.

M. Sylvain: Une dernière remarque que je voudrais faire à la commission puisqu'on traite du sujet ce matin.

En 1974 il a été dit, non pas par le Bureau d'aide financière, mais par le ministère des Richesses naturelles, que pour certains équipements, comme les murs de soutènement en particulier qui n'étaient pas inclus dans la liste des équipements à indemniser, la chose serait corrigée. On s'est aperçu après deux ans, puisqu'on est en 1976, que certains de ces murs de soutènement n'empêchent pas seulement les inondations en tant que telles, mais bien des dangers ou des dommages causés par les glaces. Est-ce que, dans le programme — en tout cas je vous le mentionne peut-être pour la discussion que vous aurez au cours de la journée— on ne pourrait pas inclure aussi les coûts d'indemnisation pour la réfection des murs de soutènement?

Je m'explique. En particulier, le long de certaines zones commerciales, dans trois ou quatre municipalités, il y a des murs de soutènement qui sont à la veille de céder, et le jour où ces murs de soutènement... je peux vous parler en particulier, même si ce n'est pas dans mon comté, de la ville de Saint-Georges, de la ville de Sainte-Marie et de la ville de Beauceville, dans certains endroits commerciaux...

M. Burns: ...il ne sera pas content de vous entendre dire que vous parlez de son comté comme cela.

M. Sylvain: Non, non, moi je ne suis pas un député provincial, je suis un député local, puis je suis pas mal dans mes localités. Est-ce qu'il serait possible de prévoir une indemnisation ou des coûts de réfection pour ces murs de soutènement, puisqu'il y a certains édifices commerciaux qui sont vraisemblablement touchés ou qui le seront à la prochaine inondation? Je sais qu'en 1974 les

agents de réclamation, ou deux qui ont fait l'enquête pour établir les coûts, n'ont voulu d'aucune façon inclure dans les estimations ces réfections aux quais qui sont des quais municipaux, qui sont des quais privés.

Evidemment, le coût en est assez élevé, mais il me semble qu'on ne peut pas avoir dans une formule d'indemnisation sans prévoir des réfections à des quais qui causeront, dans un an ou deux, des dommages fort considérables aux municipalités.

M. Lalonde: Non, les réfections de terrassement de propriétés privées, cela n'est pas compris dans les normes. On indemnise les équipements essentiels ou qui nous apparaissent essentiels suivant des normes, pour des montants déterminés d'avance, comme en 1974. En ce qui concerne les murs de soutènement qui pourraient être à la charge du ministère des Richesses naturelles, si de tels murs ont été endommagés par les inondations, comme pour les équipements, par exemple, municipaux ou scolaires, ou les équipements de transport, les routes, le ministère des Richesses naturelles peut les réparer et faire parvenir la note au Bureau d'aide financière des inondations 1976.

Il y a deux ans, au niveau des mesures d'urgence, les Richesses naturelles ont reçu $295 000. Au niveau des mesures correctives, ce ministère a reçu $334 969. Est-ce que des murs de soutènement sont touchés par les mesures correctives qui sont mentionnées? Il faudrait que j'aie plus de détails.

M. Sylvain: Je veux soulever un cas en particulier. En 1974, dans la municipalité de BreakeyviIle, il y a un cours d'eau qui s'appelle Samson, qui passe sous la rue principale et qui se jette dans la Chaudière. Un mur de soutènement a cédé et cause à l'heure actuelle, après en avoir causé ce printemps encore, des dommages à deux ou trois riverains, deux ou trois propriétaires. Sans blâmer le ministère des Richesses naturelles et ses fonctionnaires, bien que les propriétaires, la municipalité et le député aient fait des démarches, il y a eu beaucoup de difficultés à un moment donné à trouver de l'argent pour la réfection. C'est pour cela que cette année, je veux vous poser la question, parce que je veux indiquer moi-même aux municipalités, dans les cas de murs de soutènement qui se sont affaissés, qui sont sur le point de s'affaisser ou qui sont penchés au point qu'on ne peut plus avoir de sécurité, de faire les demandes aux Richesses naturelles. Il faudrait bien que le Bureau d'aide financière aussi ait une coordination ou avise les Richesses naturelles, de telle sorte que les Richesses naturelles ne prétextent pas leur manque de moyens financiers pour faire la réfection.

M. Lalonde: Mais le Bureau d'aide financière ne connaît que les réclamations qui lui sont faites. Le Bureau d'aide financière n'a pas d'expertise dans le champ. Ce serait au ministère des Richesses naturelles que ceux qui sont assujettis à ce genre de conditions d'insécurité soit des murs de soutènement démolis ou en train de l'être, doivent faire parvenir leurs réclamations ou leur demande de réparations.

Quant à savoir, maintenant, si ces réparations pourraient être remboursées par le Bureau d'aide financière, il s'agit de déterminer entre les Richesses naturelles et le Bureau d'aide financière si c'est le résultat d'un désastre naturel comme une inondation.

M. Sylvain: Ce n'est probablement pas une inondation, dans le cas des murs de soutènement; c'est probablement la série d'inondations qu'il y a eu depuis quelques années.

M. Lalonde: C'est possible.

M. Sylvain: Là-dessus,il ne faut pas trop s'attacher à une inondation. Si cela a été causé, notamment, par une crue supérieure des eaux, il faudrait bien avoir assez de largesse.

M. Lalonde: J'avoue que je ne sais pas si le Bureau d'aide financière serait autorisé — parce que nous avons des ententes avec le fédéral là-dessus — à rembourser des dommages survenus à la suite de trois, quatre, cinq ou six inondations depuis une dizaine d'années, surtout dans des régions où cela arrive quasiment annuellement. Je ne le pense pas. Maintenant, c'est quand même aux Richesses naturelles qu'il faut faire valoir la réclamation et, le cas échéant, si nous pouvons le rembourser — nous sommes concernés seulement par les inondations 76, quand on parle du nouveau Bureau d'aide financière — on va le faire. Si on ne peut pas le rembourser, les Richesses naturelles trouveront un autre moyen de le financer.

Le Président (M. Brisson): D'autres questions? Programme 16, adopté. Programme 17, protection de la société, des citoyens et de leurs biens. L'honorable député de Maisonneuve.

Protection des biens; opération Volcan

M. Burns: Merci, M. le Président. J'aimerais savoir, de la part du ministre, s'il est en mesure de nous donner les résultats de l'opération Volcan qui, tout le monde le sait, visait — elle remonte, je pense, à un peu plus d'un an — à réduire le plus possible la criminalité sous l'angle des vols d'objets particuliers. A l'aide d'un burin électrique, si je comprends bien, on peut, via les services de la Sûreté du Québec et de certaines polices locales, entre autres celle Longueuil, identifier des objets personnels pour pouvoir les reconnaître, en cas de recel, afin qu'ils puissent être retrouvés par la police.

J'aimerais savoir s'il est en mesure de nous donner, après un peu plus d'un an, les résultats de cette opération volcan.

M. Lalonde: Je n'ai pas en ma possession les statistiques précises sur la diminution des vols, par exemple, dans les régions ou les municipalités

où l'opération Volcan a été complétée depuis un certain temps.

On me dit, toutefois, qu'il y a une réduction impressionnante des vols à domicile, des vols de bicyclettes ou d'objets qui font souvent l'objet, justement, de vols. On a donc étendu cette opération et on l'a appelée maintenant, je pense, opération proteck. Elle consiste à impliquer, en fait, le citoyen dans sa propre protection, en lui offrant des moyens qu'il n'a pas nécessairement sous la main, comme le burin en question, et en lui indiquant comment identifier les objets qui sont souvent volés.

Alors, si on prend les statistiques d'opérations semblables, par exemple, aux Etats-Unis, à Monterey Park en Californie où on avait fait cette opération dans le cadre d'un projet pilote, d'un essai, les vols à domicile auraient diminué de 75% après coup.

M. Burns: Pourriez vous nous déposer éventuellement — je vois que vous ne les avez pas ce matin — d'ici à la fin des travaux de cette commission ou encore en Chambre, je n'ai pas d'objection...

M. Lalonde: Je ne sais pas si il y a des statistiques, mais, je me souviens d'en avoir mentionné lors d'une conférence.

M. Déom: Cela existe pour Longueuil.

M. Lalonde: Cela existe pour Longueuil et cela existe pour certaines municipalités.

M. Déom: 50%, je pense pour Longueuil, de mémoire.

M. Burns: C'était mon autre question, justement, quant à Longueuil.

M. Déom: 50%.

M. Burns: On a parlé des régions des députés ruraux; nous allons parler de notre région après, M. le député de Laporte.

M. Déom: Merci.

M. Lalonde: Cela a aussi aidé à identifier des objets volés.

Lorsque, par exemple, une automobile suspecte est arrêtée et que des objets sont trouvés, le fait que ces objets sont identifiés, immédiatement, dans les vingt-quatre heures, nous pouvons trouver à qui appartient l'objet et retracer plus facilement les auteurs. C'est le but de l'exercice. Cela a un effet de dissuasion énorme. Mais même quand cela ne dissuade pas ceux qui veulent quand même les commettre, cela nous permet de trouver plus facilement les auteurs et aussi les objets volés.

M. Burns: Avez-vous des statistiques sur les arrestations ou les condamnations, même à la suite de cette opération?

M. Lalonde: Nous pouvons naturellement penser à 50 cas en particulier. Je ne pense pas que cela donne justice à l'ampleur et à l'efficacité de cette opération, mais on m'apporte 50 cas où des objets ont été identifiés par suite de l'opération volcan, et dans ces cas, des plaintes ont été portées.

M. Burns: Vous allez tenter de nous donner un rapport sur les résultats.

M. Lalonde: Oui.

M. Burns: Je le mentionne délibérément, si les résultats ont été aussi efficaces qu'on le dit, tant mieux; j'ai l'impression que cela peut inciter, si vous publicisez ces résultats, des citoyens à s'en prévaloir davantage. Il y a beaucoup de gens qui ne connaissent même pas l'existence de cette opération volcan.

M. Lalonde: Normalement, quand une opération comme cela est lancée, il y a un programme de publicité qui est fait. J'ai vu, par exemple, une publicité très bien faite concernant l'opération proteck, qui est exactement la même chose. Je ne sais pas pourquoi on lui a donné un autre nom, probablement parce que c'est à la CUM que cela se passe. Il faut faire connaître le moyen qu'on met à la disposition des gens et publier aussi les statistiques, les résultats. Je l'ai fait récemment, à l'occasion de quelques conférences parce que, de plus en plus, je crois qu'on doit mettre l'accent sur l'aspect préventif dans la lutte à la criminalité, alors qu'on s'est donné, jusq'à maintenant, des moyens quand même assez impressionnants sur l'aspect répressif. Mais par la répression seulement, on ne pourra pas régler le problème de la criminalité.

M. Burns: D'accord, nous allons attendre vos réponses à ce sujet.

Toujours dans le domaine des vols à domicile et en particulier celui — cela va faire plaisir au député de Laporte — de la région de Longueuil, même de la ville de Longueuil, on avait, semble-t-il, un problème particulier. D'ailleurs, à la fin de décembre dernier, vous avez probablement reçu une copie parce que je vois, au bas du document qui nous a été adressé le 15 décembre 1975, qu'on en a envoyé une copie à M. Fernand Lalonde, Solliciteur général, en plus de M. Guy Leduc et de M. André Déom. Deux secteurs particuliers de la ville de Longueuil, les quadrilatères Bromontcalm, La-vallée, Laurier, de même que les résidents des rues Plaisance, Plessis, Pasteur et Plamondon, de Longueuil, se plaignaient en particulier d'un taux de vols à domicile absolument élevé. Dans le document en question, on cite, pour une période allant de 1969 à 1975, dans ce secteur seulement, 63 vols et cinq tentatives de vols, à toutes les heures du jour, du soir et de la nuit, d'une valeur estimée à $35 422 et avec 18 cas non précisés, les objets volés se situant dans la catégorie: argent liquide, bijoux, fourrures, instruments de musique, magnétophones, caméras, cinécaméras, bicyclettes, téléviseurs, collections d'argent, cigarettes, boissons, appareils à reproduction musicale, etc.

Je sais que la ville de Longueuil a participé à cette opération volcan; j'aimerais savoir ce que le ministre a fait à la suite de ces plaintes et s'il y a eu des correctifs, à sa connaissance. J'entendais le député de Laporte nous dire tout à l'heure que les vols dans ce secteur avaient diminué de 50%.

M. Deom: C'est peut-être plus que cela, mais à peu près cela.

M. Lalonde: II y a un problème qui est plus global à Longueuil. C'est un problème d'organisation policière. L'an dernier, au mois d'août, la Sûreté du Québec prêtait à la municipalité de Longueuil les services du lieutenant Gendron qui, éventuellement, a accepté d'assumer la direction du service de police de Longueuil. C'est un problème de croissance, d'organisation qui a amené, à un moment donné, un manque de communication complet entre les citoyens et leur service de police, dans ce cas en particulier, où une fusion avait préparé ce genre de situation. C'était peut-être une fusion pas assez bien préparée; une intégration peut-être pas assez bien préparée et qui a généré des problèmes d'organisation. Je pense que les autorités de Longueuil ont pris le problème par le bon bout et qu'il est en train de se régler. On le suit, naturellement, car étant donné que le lieutenant Gendron était de la Sûreté du Québec, le ministère s'était intéressé de façon tout à fait particulière à cette question de l'organisation policière à Longueuil. Nous avons pu voir quel travail le lieutenant Gendron et son équipe ont fait. C'est d'abord un travail d'examen de la situation, d'inventaire de ce qui devait être fait et de ce qui n'avait pas été fait. Je pense qu'on est sur la bonne voie dans l'implantation des mesures de contrôle, des mesures de structure et d'organisation pour le service policier.

En ce qui concerne le groupe de citoyens plus particulièrement, il y a eu des rencontres, justement, entre ce groupe de citoyens et les autorités policières, qui ont probablement crevé le genre de barrage de méconnaissance et de silence qu'il y avait entre le service policier et ces citoyens.

Depuis ce temps, on a vu une plus grande collaboration des citoyens dans l'opération volcan, pas parce que auparavant ils ne voulaient pas collaborer, mais parce qu'ils ne savaient pas comment faire. Depuis ce temps, on m'informe que la situation se serait beaucoup améliorée. C'est un problème de communication. Cette réorganisation est dirigée aussi dans une certaine mesure, ou épaulée par un mini-conseil de sécurité qu'on a appelé le comité de sécurité où M. Maurice Saint-Pierre, l'ancier directeur de la Sûreté du Québec, siège, entre autres. Je pense que la réorganisation des services policiers de Longueuil est en bonne voie. Il était très important de prendre des mesures vigoureuses dans ce secteur. On sait que la criminalité sur la rive sud a augmenté. La rive sud hérite naturellement des problèmes de la grande ville de Montréal et il fallait prendre les correctifs qui, je pense, sont en bonne voie de réalisation. Merci.

M. Burns: Dans ce cas, y a-t-il moyen de nous donner des statistiques précises?

M. Lalonde: En ce qui concerne l'opération volcan plus particulièrement? Pour les résultats sur la solution des crimes, cela va vous prendre sûrement une autre année avant de pouvoir comparer... Le taux de solution de la criminalité à Longueuil, comme c'était le cas à Laval, démontrait qu'il y avait un problème. Avant de retourner la roue, cela peut prendre assez de temps avant qu'on ait des statistiques probantes.

En ce qui concerne l'opération volcan, je peux apporter des chiffres, par exemple, sur le nombre de domiciles qui se sont joints à l'opération depuis un certain temps.

Surveillance routière

M. Burns: D'accord. Toujours à l'élément 1, M. le Président, je pense que c'est là qu'on peut parler de surveillance routière, puisqu'il s'agit de la présence policière en général. Comme tout le monde le sait, le Québec a un très haut taux d'accidents sur la route, probablement le plus élevé au Canada par 100 véhicules.

En 1971, cette fréquence était de 11,58 par 100 véhicules et de 10,24 par 100 véhicules en 1975.

Parallèlement à cela, la moyenne canadienne était respectivement, pour ces deux années, de 9,70 et 8,42. On sait, actuellement, qu'il y a des efforts du côté du ministère des Transports pour réduire cette fréquence d'accidents sur la route. Je présume que, sous la juridiction du Solliciteur général, la Sûreté du Québec a aussi des efforts à déployer. Le ministre peut-il nous dire quels sont les efforts envisagés, quelles mesures précises on envisage du côté de la Sûreté du Québec?

M. Lalonde: II y a un programme de surveillance sélective qui a été développé à la Sûreté du Québec. Il existe depuis plusieurs années mais c'est seulement depuis deux ans qu'on lui a donné une place plus considérable.

J'ai eu l'occasion d'en parler mais je ne voudrais pas non plus simplement m'en reporter à ce discours de deuxième lecture que j'avais fait concernant le projet de loi de notre collègue des Transports sur le Code de la route, il y a quelques semaines. J'avais donné d'amples statistiques du service de la Sûreté du Québec pour démontrer qu'il y a une conscience complètement acquise, une collaboration complètement acquise de la part de la Sûreté du Québec dans la sécurité routière. La sécurité routière ne dépend pas seulement de la surveillance mais la surveillance a quelque chose à faire avec la sécurité routière.

Par quelques statistiques, j'ai démontré de quelle façon la Sûreté du Québec conçoit son rôle dans la surveillance sélective. On se base sur les statistiques. C'est une question, d'abord, de temps de la journée où on doit faire cette surveillance et les endroits des routes où on doit la faire, suivant les accidents qui arrivent à ces endroits.

Par exemple — c'est une parenthèse, je continuerai après — sur l'autoroute Décarie, boulevard métropolitain, en mars, il y a eu une opération particulière, mais pas pour prendre les gens en défaut parce qu'elle a été largement annoncée avant. On a dit au monde: Voici, entre telle date et telle date, nous allons faire une opération particulière pour réduire la vitesse qui est de 45 milles à l'heure, là-bas, mais on sait très bien que les gens vont à 65, 70, 75 milles à l'heure. C'est une route qui n'est pas propice à la vitesse étant donné qu'elle n'a pas — Décarie — les accotements, les espaces nécessaires pour prévenir les mortalités ou les blessures graves lors d'accidents. Le nombre de décès dans ce mois a été réduit de, je pense, 50%, à comparer au mois de mars de l'an dernier.

J'avoue que ce n'est pas tellement probant comme statistique, prendre seulement un mois, mais quand même, c'est assez impressionnant.

Donc, la surveillance de la vitesse à des endroits et, aussi, des opérations billets. Il y a des billets qui comportent une amende sur la vitesse dans des zones à vitesse déterminée. La vitesse est toujours déterminée mais c'est lorsqu'on dépasse la vitesse maximale. Aussi, les billets de 48 heures, comme on les appelle dans le milieu, constituent une opération préventive où on donne 48 heures au propriétaire du véhicule pour apporter des corrections sur des phares, des choses comme cela.

Entre 1974 et 1975, les billets de vitesse émis par la Sûreté du Québec ont augmenté de 25,4%, pour passer de 229 000 à 287 000. Pour les billets de 48 heures, les avertissements, ils ont augmenté de 11,4%, de 287 000 à 319 000, sur le territoire qui est surveillé par la Sûreté du Québec. Cela veut dire que toutes les municipalités régionales et autres ne sont pas touchées directement par cela.

Le total des accidents mortels a augmenté de 7.4% durant cette période. Le total d'accidents avec blessés a diminué de 1,7%. Le total des accidents avec dommages matériels a augmenté de 0,5%, soit une augmentation globale de ces accidents de 0,3%. C'est quand même une diminution quand on compare l'augmentation du nombre d'automobiles sur les routes du Québec, qui est de 9% par année, pour ces années là.

La Sûreté du Québec couvre 50% des accidents au Québec. Je mentionnais tantôt les autres territoires où on n'a rien à faire. Cela donne une idée que les autres 50% doivent aussi être couverts par la surveillance des municipalités.

M. Burns: Des municipalités.

M. Lalonde: Ce sont les statistiques que nous avons. Nous avons l'intention de continuer ce programme de surveillance routière. La Sûreté du Québec est parfaitement consciente de son rôle à jouer dans la sécurité routière en général. Sans s'étendre sur le sujet de la ceinture de sécurité, la Sûreté du Québec est tout à fait consciente des charges additionnelles que la surveillance pour l'application d'une telle loi va constituer pour elle. Déjà, j'ai eu, il y a deux semaines, je pense, une réunion avec le ministre des Transports, le DGA,

Turpin, je crois, qui était accompagné du responsable de la sécurité routière, le capitaine Germain, ici à Québec, pour commencer à planifier la coordination, la coopération avec le ministère des Transports. Il y a déjà une coordination et une coopération parce que la Sûreté du Québec est représentée sur des comités de travail depuis longtemps. Mais je parle de l'application du Code de la route advenant son adoption et son entrée en vigueur dans un avenir rapproché.

On est parfaitement conscient que la sécurité routière dépend, dans une certaine partie, de la surveillance que la police peut faire. Nous devons le faire. On a vu que l'opération de mars sur Décarie a laissé quand même des traces, a laissé des retombées. Encore, une bonne partie de la population circule à une vitesse réduite, elle semble avoir compris que c'est dans son intérêt. Il aura lieu de recommencer. C'est une question d'éducation, au fond. On est habitué, ici au Québec, à voler sur les routes littéralement, alors qu'on arrive en Ontario et qu'on trouve cela normal de devoir se surveiller davantage, parce que là-bas, c'est une autre règle. Il s'agit simplement d'habituer les gens à cela.

M. Burns: Aux Etats-Unis.

M. Lalonde: Ou aux Etats-Unis surtout depuis quelques années.

M. Burns: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire si les effectifs de la Sûreté du Québec affectés à la surveillance routière ont varié de façon importante depuis quelques années?

M. Lalonde: Oui. On m'assure que ce n'est pas une question d'effectifs; les effectifs augmentent normalement dans ce secteur comme ailleurs. Il s'agit simplement de l'utilisation des effectifs à meilleur escient, qui a été faite justement dans le cas du programme de surveillance sélective, et aussi de faire coordonner les deux missions fondamentales de la Sûreté du Québec, soit la prévention ou la solution du crime, avec la surveillance routière. Il n'y a pas de doute qu'une plus grande surveillance aussi va amener ceux qui veulent utiliser les routes pour transporter des marchandises volées, pour aller ou revenir d'une opération, soit de hold-up ou autre, vont se voir surveiller davantage comme les autres. Ils peuvent être l'objet d'une arrestation simplement parce qu'il y a un feu qui ne fonctionne pas sur l'automobile. Alors, ces deux choses marchent de pair.

M. Burns: Une dernière question dans le domaine de la surveillance routière. Vous avez parlé de l'opération Décarie pour le boulevard Décarie à Montréal. Il y avait aussi, je pense, récemment, sur la Transcanadienne — j'ai été à même de le constater moi-même — ...

M. Lalonde: Sur la 20, oui.

M. Burns: Sur la Transcanadienne, entre Montréal et Québec.

M. Déom: C'est cela, sur la 20.

M. Burns: Je suis un citoyen comme les autres et si je commets des infractions à la route, je pense que je dois les payer comme les autres. Là-dessus, je suis entièrement d'accord. J'ai remarqué qu'à une certaine époque on surveillait davantage la Transcanadienne. Entre autres, une certaine journée, j'ai pu voir une auto-radar plus cinq véhicules de la police qui étaient concentrés dans la région de Sainte-Rosalie. Par contre, ce n'est pas constant. Est-ce la technique utilisée? Je ne demande pas cela pour l'avenir non plus, pour m'en prémunir, je ne vous demande pas les dates où cela va se faire.

M. Perreault: II va y avoir une cédule.

M. Burns: Je veux simplement savoir si on le fait à l'occasion, comme cela, pour rappeler aux gens qu'on surveille toujours la Transcanadienne.

M. Lalonde: On peut le faire à l'occasion. Je pense que la surveillance à laquelle fait allusion le député de Maisonneuve a été un programme particulier, annoncé d'avance comme celui de l'autoroute Décarie à Montréal, qui est basé naturellement sur l'étude des probabilités, compte tenu de la fréquence des accidents à certains endroits de la route et à certaines heures du jour. C'est en fonction de ces éléments qu'on va retrouver une automobile qui n'est pas identifiée pour porter le radar, mais des intercepteurs qui sont identifiés pour, lorsque la vitesse est enregistrée, intercepter le contrevenant.

Cela faisait partie d'un programme, pour ce cas, bien préparé et annoncé d'avance. Cela ne veut pas dire qu'on reste toujours à ces endroits. Il y a plusieurs endroits identifiés et on ne peut pas être à tous les endroits en même temps. Il y a des déplacements qui ne sont pas annoncés d'avance, où exactement cela va se faire. Cela ne veut pas dire que, le programme terminé, on n'y retournera pas de temps à autre. Dans ce cas-ci, c'en était un.

M. Burns: C'était un programme bien concentré. Bon. Quant à l'élément 1, je n'ai pas d'autre question.

Enquêtes policières spécialisées

Le Président (M. Brisson): Elément 1, adopté. Elément 2.

M. Burns: A l'élément 2, j'ai eu l'occasion de parler, hier, mais très brièvement, surtout que le ministre n'a pas eu l'occasion de me répondre, du fameux problème impliquant le caporal Tremblay, de la Sûreté du Québec, et le journaliste Robert Goyette, du Montreal Star. Tout le monde sait qu'il s'agit là d'une offre faite par le caporal Tremblay au journaliste Robert Goyette de fournir des renseignements à la Sûreté du Québec moyennant rémunération, ceci dans l'exécution normale des fonctions du journaliste en question.

Le ministre aura sûrement pris connaissance, comme moi, de l'attitude du Congrès américain qui s'est prononcé ouvertement contre de telles utilisations d'organisations extérieures à la police et, en particulier, par la CIA, de ce type, appelons-les, selon l'élément 2, d'enquêtes policières spécialisées. Je sais, d'autre part, que le directeur Beaudoin, si la nouvelle que j'ai lue est exacte, devait faire enquête là-dessus. Est-ce que cette enquête est terminée et, si oui, quels sont les résultats?

M. Lalonde: II n'y a pas eu d enquête comme telle, il y a eu simplement des renseignements qui m'ont été transmis à la demande du directeur Beaudoin lorsque ce fait est devenu public. Ces renseignements confirment le fait qu'il y a eu des conversations entre le journaliste en question et un ou deux représentants de la Sûreté du Québec pour la cueillette de renseignements. La deuxième question — je me souviens de la question du député de Maisonneuve — est: Est-ce une habitude, un usage...

M. Burns: Une pratique courante.

M. Lalonde: ...une pratique courante? La réponse est, dans le cas des journalistes, non. Je ne pense pas dans le cas d'aucun corps de métier, d'aucune profession. Il s'agit simplement de citoyens, en fait à titre de citoyens, qui veulent bien transmettre à la police des renseignements de nature à prévenir le crime, à assurer l'ordre public.

M. Burns: Remarquez que si je suis témoin de la commission d'un acte criminel, c'est mon devoir, comme citoyen, d'en informer les services policiers. On ne fera pas de chicane là-dessus. Ce qu il y a de grave dans cela, à mon avis, c'est l'aspect systématisé de la chose. Lorsqu'on offre une rétribution à quelqu'un pour donner des renseignements, on systématise quelque chose. C'est ce qui est grave.

Ce qui est particulièrement plus grave, c'est le fait que ce soit à un journaliste qu'on offre cela. Le jour où les journalistes n'auront pas la crédibilité requise pour faire leur métier, c'est l'ensemble de l'information qui va en souffir. C'est dans ce sens que je trouve un cas comme celui-là, Tremblay-Goyette, particulièrement grave.

M. Lalonde: Mais dans le cas des journalistes, comme je le disais tantôt, il n'y a pas de pratique courante, loin de là.

M. Burns: Est-ce qu'il y aura quand même...

M. Lalonde: J'aimerais quand même expliquer dans quel cadre cela se passe, cette chose. Tout le monde sait que des services policiers pour la prévention et la solution du crime, pour lesquelles fonctions les citoyens payent cher des corps policiers qui sont mieux organisés maintenant, doivent recourir à des renseignements. Le renseignement est la connaissance et la moitié de la solution, dit-on. C'est vrai aussi pour la solution du crime et aussi la prévention.

Qu'à l'occasion de cette opération de cueillette de renseignements, il y ait des rétributions, cela aussi arrive, surtout généralement des gens du milieu, mais qui sont naturellement tenues confidentielles.

M. Burns: Ces rétributions vont-elles dans le programme 17, élément 2, enquête policière spécialisée? Est-ce que c'est sous ce budget de $12 214 700?

M. Lalonde: Oui et c'est la supercatégorie, non, c'est la sous-catégorie 11, dans autres dépenses.

M. Burns: D'accord, excusez-moi c'est une incidence...

M. Lalonde: Non, c'est très pertinent. Maintenant, comme la commission le reconnaîtra, il s'agit quand même de dépenses confidentielles dont l'usage est confidentiel et dont l'autorisation est soumise à seulement un système d'autorisation de la part du directeur lui-même, mais qui ne répond pas aux mesures de contrôle conventionel-les, mais directement assujetties à l'autorisation du directeur et, le cas échéant, du sous-ministre en titre.

Mais ce que je veux bien mentionner et démontrer, c'est que ce n'est pas un système de délation organisée de la part de professionnels, que ce soit de l'information ou d'autres, à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Il s'agit simplement d'organiser le service policier pour recueillir des renseignements de nature à prévenir le crime et à résoudre le crime. C'est pratique courante dans tous les corps policiers que d'obtenir des renseignements, souvent contre rétribution, de la part de personnes du milieu. Cela arrive. De toute évidence, on ne peut pas élaborer cela publiquement, mais c'est fait sous la surveillance directe du directeur.

M. Burns: Mais quand vous me dites que ce n'est pas de pratique courante...

M. Lalonde: Je ne parle pas des journalistes.

M. Burns: ... pas des journalistes, est-ce que je ne peux pas vous poser la question à l'inverse? Est-ce que cela ne devrait pas être strictement défendu, d'autorité, de mêler les journalistes à cela? Je reviens à cette question, parce que c'est ce que je trouve particulièrement important dans un cas comme celui-là. Si on en est rendu aujourd'hui, vous et moi et M. Tout-le-Monde, à douter que le journaliste à qui on parle puisse être un informateur de la police, je dis que vous empêchez l'ensemble des journalistes de faire le boulot qu'ils doivent faire, c'est-à-dire informer la population. Souvent, à l'occasion de conversations avec des journalistes, ils obtiennent les informations sous le couvert de la confidence; c'est ce qu'on appelle selon une expression anglaise, en tout cas peu importe, le fameux "off record', avec les journalistes.

Souvent le fait d'obtenir des informations privilégiées sous le sceau de la confidence, cela leur permet de connaître peut-être un ensemble de faits et de les examiner, à la lueur de ces informations privilégiées. C'est pour cela que je pense que...

M. Lalonde: Ce n'est pas une pratique courante; d'après ce que je comprends c'est un cas assez...

M. Burns: N'iriez-vous pas jusqu'à dire que vous, comme autorité politique de la Sûreté du Québec, vous allez donner instruction pour que de telles approches ne se fassent pas? C'est le contraire que j'aimerais vous entendre dire.

M. Lalonde: Vous voulez dire la pratique d'acheter les informations?

M. Burns: Je suis d'accord avec vous que la police aura toujours besoin d'informateurs.

M. Lalonde: Oui.

M. Burns: Elle a toujours besoin de s'infiltrer dans certains milieux, etc. On n'a pas besoin de jouer au pur, c'est bien sûr que c'est une partie de l'efficacité des enquêtes policières. Là où je suis moins d'accord c'est qu'une catégorie, en particulier, de personnes puissent être utilisées, entre autres je pense aux journalistes. Je dirais la même chose si j'avais entendu dire que c'est à un médecin à qui on s'adressait pour faire cela, ou à un avocat. Je veux dire qu'il y a un certain nombre de gens occupant des fonctions dans la société auxquels on ne pense pas devoir recourir comme à des informateurs systématiques, en dehors du fait que, quelqu'un, comme je le disais tout à l'heure, qui a connaissance de la commission d'un acte criminel a un devoir civique de le dénoncer à la police.

M. Laionde: Mais je poserais la question d'une autre façon. Etant donné que tout cela est fait sur une base volontaire et personnelle, de la part d'un individu, de dire...

M. Burns: Mais, il semble que, dans ce cas-là, ce se soit fait via une sollicitation.

M. Lalonde: Je ne sais pas qui a sollicité, dans ce cas-là. Je sais qu'il y a eu des conversations. Est-ce qu'une certaine confiance avait été établie entre le policier et le journaliste? Est-ce que c'est le journaliste qui l'a suggéré ou est-ce que c'est le policier? Je ne le sais pas. De toute façon...

M. Burns: Est-ce que l'enquête du directeur n'a pas révélé qui l'avait sollicité? Ou comment c'est venu?

M. Lalonde: On n'est pas allé dans le détail, parce que...

M. Burns: C'est important!

M. Lalonde: ... on n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe! On ne suggère pas...

M. Burns: C'est important! Cela fait déjà près d'un mois que cela court dans le décor. J'ai sous les yeux un article du 21 mai...

M. Lalonde: On m'informe que l'individu avait démontré une certaine propension à la collaboration. De là à dire que c'est lui qui l'a suggéré, je ne veux quand même pas l'accuser de l'avoir suggéré au corps policier ou au représentant. Cela se fait sur une base absolument volontaire et personnelle.

M. Burns: Je suis porté à croire que c'est l'inverse parce que, si cela avait été le monsieur en question...

M. Lalonde: C'était peut-être un piège!

M. Burns: ... qui l'avait suggéré, je le comprendrais mal d'avoir dévoilé cela par la suite.

M. Lalonde: C'était peut-être un piège, pour voir jusqu'à quel point il pourrait obtenir ce que c'est, justement pour avoir le résultat qu'on a maintenant. C'était peut-être un piège dans lequel le...

M. Burns: Mais l'enquête que vous avez tenue ne révèle pas cela?

M. Lalonde: C'est ce que cela révèle, c'est que l'individu avait une certaine propension à l'information, à la collaboration avec la police et cela semblait un cas susceptible de donner lieu, éventuellement, à une collaboration plus systématique.

M. Burns: Alors, si je vous comprends bien, c'est le caporal Tremblay qui a fait les approches, croyant que le monsieur en question avait une certaine propension à la collaboration...

M. Lalonde: C'est possible que ce soit lui qui en ait parlé le premier. Alors, il y aurait eu, justement, cette attitude très collaboratrice de la part du journaliste qui, ensuite, a provoqué naturellement la suggestion de la part du policier. C'est classique, c'est comme cela...

M. Burns: Alors, la suggestion est venue du policier?

M. Lalonde: Oui, étant donné, quand même, que l'individu semblait un candidat tout à fait propice à ce genre d'affaire. Mais ce que je veux dire c'est que la question d'éthique demeure la responsabilité de l'informateur et appartient à un corps organisé.

Devrait-on empêcher, par exemple, un policier — parce que c'est un peu la suggestion, je ne veux pas l'interpréter — qui se verrait approcher par un journaliste qui aurait un renseignement de nature jugée importante par le policier et qui demanderait un montant d'argent. Mettons $500, pour trouver les auteurs de tel vol et le butin, parce que c'est un journaliste et parce que j'aurais donné des instructions ou que le directeur aurait donné des instructions aux policiers de ne pas faire d'arrangements financiers avec les journalistes, devrait-on l'empêcher, dis-je, d'accepter? Je ne le pense pas, c'est pour cela que c'est assez...

M. Burns: Ce que je vous demande, au fond, c'est de donner des instructions de ne pas les solliciter comme tels, autant que je pourrais vous le demander pour des avocats ou pour des médecins...

M. Lalonde: Jusqu'à ce jour, je ne pense pas qu'il y ait de sollicitation, sauf que lorsqu'il y en a un qui suggère, c'est difficile de savoir lequel a suggéré, parce que quand un homme démontre une disposition tellement ouverte à collaborer, qui fait la suggestion à ce moment?

M. Burns: Mais vous savez que c'est relatif.

M. Lalonde: Est-ce l'homme ou la femme qui provoque?

M. Burns: C'est très relatif, M. le ministre, de déterminer que telle personne a une propension vers la délation ou pas, vous savez...

M. Lalonde: C'est une question d'appréciation personnelle.

M. Burns: C'est cela, alors c'est pour cela que je vous demanderais de nous rassurer...

M. Lalonde: Que même...

M. Burns: ... et de nous assurer que ce n'est pas dans les vues du Solliciteur général.

M. Lalonde: D'élargir ce genre d'affaires-là, non.

M. Burns: II y a un certain nombre de catégories de personnes, je n'ai pas besoin de les désigner toutes, mais il y a des catégories de personnes qu'on ne peut pas littéralement et décemment tenter d'utiliser...

M. Lalonde: Je pense qu'il n'y a aucune catégorie qui, simplement par le fait de la nature de l'activité, fasse l'objet d'un programme pour tenter d'obtenir des renseignements contre paiement. C'est strictement sur une base individuelle et volontaire pour chacun des individus qui peut être en possession de renseignements utiles pour la solution d'un crime ou la prévention d'autres crimes.

On voit, par exemple, dans les journaux — je ne veux pas parler d'un cas particulier que pour tel vol de banque, la police était sur les lieux après avoir reçu les informations. Cela arrive. Cela arrive; là, nous essayons de prévenir un crime.

J'aimerais, si le député le permet, parce qu'on devra ajourner...

M. Burns: Je sais que vous nous aviez demandé d'ajourner vers onze heures trente et je vous signale que cette heure est dépassée. Je n'ai pas d'objection...

M. Lalonde: J'aurais des informations à transmettre concernant le cas de Lamoureux, le policier de la CUM qui aurait porté des coups de bâton à certains endroits de deux infirmières.

M. Burns: Quels endroits? Nommez-les.

M. Lalonde: La Couronne a été saisie des faits et a porté plainte.

M. Burns: La Couronne elle-même?

M. Lalonde: Oui, le policier a plaidé coupable. Son avocat, Me Jean-Guy Boilard, a suggéré au juge de recourir à l'article 662, 1er alinéa, et le juge Chaloult a acquiescé. On me rapporte qu'il y a de 20 à 25 cas par jour qui sont traités de cette façon dans le district de Montréal et tous à l'occasion d'une première offense. Cela ne veut pas dire que tous les premiers délits donnent ouverture à l'application de cet article.

Dans un premier délit il arrive couramment que des personnes trouvées coupables ou qui ont plaidé coupables à un premier délit soient traitées ainsi par la justice.

M. Burns: Dans ce cas, alors qu'il s'agit de voies de fait graves et non de voies de fait simples — encore une fois, pour ceux qui ne sont pas familiers avec la distinction, il s'agit de cas qui causent des blessures, dans les cas de voies de fait graves pour simplifier — y a-t-il une raison particulière pour laquelle on a procédé par voie de poursuite sommaire au lieu de procéder par voie de mise en accusation par acte criminel?

M. Lalonde: Je ne connais pas de raison particulière pour ce cas, à savoir pourquoi on a procédé par voie de poursuite sommaire au lieu de mise en accusation. Dans le quotidien, c'est une décision de la couronne fondée sur l'appréciation des faits. La gravité du cas peut aussi être un élément. Dans ce cas, pour quelle raison a-t-il procédé de cette façon? Je ne saurais le dire.

Il y a aussi des questions... Voulez-vous qu'on passe à un autre sujet?

M. Burns: Non, j'étais toujours dans ce secteur.

M. Lalonde: J'avais d'autres recommandations concernant les demandes qui avaient été faites hier soir. Non, c'est dans ce programme-là.

M. Burns: Sur l'APLQ?

M. Lalonde: Non, sur les personnes qui seraient visitées par des policiers.

M. Burns: C'est parce que l'APLQ va bien là aussi.

M. Lalonde: Oui, mais je n'ai pas eu de nouvelles encore.

M. Burns: Ah bon!

M. Lalonde: J'ai quand même eu des informations de la part du directeur de la Sûreté du Québec concernant ces visites. En effet, les policiers, non seulement de la GRC— hier nous avions l'impression que c'était seulement la GRC— mais aussi de la CUM et de la Sûreté du Québec, les trois corps policiers les plus impliqués dans la sécurité olympique, ont visité des personnes qui seraient susceptibles peut-être de créer des problèmes.

M. Burns: Combien de personnes ont été visitées comme cela?

M. Lalonde: Le nombre, je pourrais le demander. Je ne le sais pas, mais ils en ont visité plusieurs. Ce sont...

M. Burns: De quel ordre, à peu près? Est-ce que c'est deux, trois, ou si c'est dans les centaines de personnes?

M. Lalonde: Environ 75 personnes. Cela pourrait être 200 personnes. Cela dépend des besoins, de l'appréciation.

M. Burns: Y a-t-il moyen de vérifier cela?

M. Lalonde: Oui, mais actuellement c'est environ 75 personnes. Je ne veux pas dire qu'on va arrêter à 75 personnes, cela pourrait aller plus loin. Au moment où on se parle, il y en a peut-être 25 autres qui ont été vues hier ou avant-hier, je ne le sais pas.

Je veux quand même dire de quel genre d'opération il s'agit. Il ne s'agit pas d'intimider les gens. Il s'agit simplement soit de personnes qui sont des ressortissants étrangers en conflit avec les autorités de leur pays et qui seraient ici à ce moment-là, soit de personnes qui sont reconnues comme participantes actives à des mouvements de contestation ou qui ont déjà été arrêtées pour des activités telles que troubler la paix ou usage d'explosifs. C'est possible que, parmi ces personnes, on en trouve qui ont été mêlées à la crise d'octobre, sûrement.

M. Burns: Et contre qui aucune condamnation n'a été prononcée.

M. Lalonde: Contre qui aucune condamnation n'a été prononcée. Les personnes qui pourraient être soupçonnées, aussi, de conspirer pour des activités de sédition, de terrorisme. Ces gens sont tout simplement approchés par des policiers qui s'identifient. On dit dans quel contexte on veut les voir. Si les personnes ne veulent pas parler, elles ne sont pas forcées, naturellement. La porte est refermée sur eux et on en reste là.

M. Burns: Mais quel est l'objet de la visite comme telle?

M. Lalonde: C'est pour les mettre au courant...

M. Burns: Qu'ils ne doivent pas commettre d'actes criminels.

M. Lalonde: C'est de la prévention.

M. Burns: Ne trouvez-vous pas cela étonnant un peu?

M. Lalonde: On m'a dit qu'à Munich on ne l'a pas fait et qu'on l'a regretté. On s'est dit qu'on aurait dû le faire, se tenir au courant des allées et venues...

M. Burns: Des allées et venues, oui.

M. Lalonde: ...de ces gens pendant la période où il va y avoir des centaines de milliers de personnes ici.

M. Burns: Est-ce qu'on n'a pas même conseillé, dans ces visites, à de telles personnes de quitter les lieux pendant les Jeux olympiques?

M. Lalonde: On leur a conseillé de ne pas poser de gestes illégaux et criminels.

M. Burns: C'est ce que tout citoyen doit faire.

M. Lalonde: Je le sais, mais, dans certains cas, il y a certains caractères qui demandent des avertissements un peu plus sérieux que d'autres, d'après l'expérience passée. On ne peut quand même pas être aveugle. Il y en a qui sont de toutes les manifestations, de toutes les contestations. Il y a des professionnels de cela. C'est possible qu'ici, étant donné qu'on veut que tout se passe dans l'ordre, il y ait des provocations. C'est assez normal. On pourrait même m'accuser de paternalisme. J'accepterais l'accusation. Est-ce que c'est naïf? J'espère que non. Je pense que c'est quand même de la part de la police, de la part des corps policiers, faire un geste auquel ils ne sont pas obligés, qui n'est pas plus intéressant pour eux, mais qui, peut-être, va amener des résultats positifs.

M. Burns: Mais si je vous disais que les cas qui ont été portés à ma connaissance sont des cas de citoyens qui n'ont jamais été condamnés, des citoyens qui, en principe, même s'ils ont été arrêtés pendant la crise d'octobre, ne devraient pas avoir de dossier judiciaire, parce que même si on avait utilisé le bertillonnage dans leur cas, pendant la crise d'octobre, c'est-à-dire la prise des empreintes digitales et de la photographie, chose qui était, à l'époque, absolument étonnante, parce que dans bien des cas il n'y a pas eu d'accusation, on est censé ne pas avoir de dossier sur ces personnes. On est censé avoir détruit les photographies et les empreintes digitales de ces personnes.

M. Lalonde: II y a deux sortes de dossiers: il y a le dossier judiciaire et le dossier avec empreintes...

M. Burns: Si je vous disais entre autres...

M. Lalonde: Mais il y a aussi le dossier policier qui contient des renseignements. On ne peut pas empêcher le policier qui est responsable des services policiers, qui est responsable du maintien de l'ordre et de la sécurité des citoyens de connaître les gens qui sont susceptibles de par leurs agissements passés d'affecter justement cette sécurité des citoyens. On serait aveugle et les corps policiers n'assumeraient pas leur responsabilité s'ils restaient assis simplement en attendant que les problèmes arrivent. C'est une prévention de bon aloi.

M. Burns: Cela veut dire, M. le ministre, que vous contredisez actuellement votre prédécesseur, M. Choquette, lorsqu'il nous avait affirmé en Chambre que les personnes qui avaient été arrêtées pendant la crise d'octobre redevenaient des citoyens comme les autres sous deux conditions. C'est-à-dire qu'ils n'avaient pas de dossier policier s'il n'y avait pas d'accusation portée contre elles et si, dans le cas où il y avait une accusation, une nolle prosequi avait été inscrit dans le dossier. Cela veut dire que vous venez de contredire cela.

M. Lalonde: Je ne suis pas sûr de cela.

M. Burns: Ces personnes qui n'ont jamais été trouvées coupables de quoi que ce soit ont des dossiers policiers; elles sont surveillées, font l'objet d'une attention particulière de la police.

M. Lalonde: Sûrement que ce n'est pas seulement ceux qui sont accusés qui ont des renseignements à leur égard dans les services policiers, parce qu'il y a beaucoup de renseignements qui parviennent aux policiers et qui ne donnent pas ouverture à des accusations. Il serait étonnant de penser que les policiers ne connaissent que ceux qui sont rendus en prison.

M. Burns: Et en quoi cela est-il compatible avec les libertés fondamentales de la personne?

M. Lalonde: Leur liberté n'est pas affectée. M. Burns: Non?

M. Lalonde: Leur liberté n'est pas affectée du tout.

M. Burns: Non? De se sentir surveillé comme ça...

M. Lalonde: Tout le monde...

M. Burns: De se sentir l'objet d'une préoccupation et d'une attention particulière de la part des corps policiers...

M. Lalonde: Tout le monde est susceptible d'être surveillé. Quiconque a l'intention ou manifeste l'intention ou commet un acte criminel...

M. Burns: Oui, ou commet un acte criminel; tout est là.

M. Lalonde: Oui, mais ce n'est pas une science exacte. Il y a des cas bien clairs de flagrant délit.

M. Burns: M. le ministre...

M. Lalonde: Laissez-moi terminer. Je n'aime pas me faire...

M. Burns: Ecoutez! Vous dites des énormités, actuellement, c'est pas possible!

M. Lalonde: C'est un cas qui est sérieux et je veux qu'on me laisse répondre. Il y a des cas de flagrant délit. Il y a des cas où les dossiers sont terminés, les gens sont rendus en prison. Mais il y a tous les cas de renseignements sur des actes criminels qui ne sont pas solutionnés. Les crimes qui ne sont pas solutionnés, il y en a plusieurs. Le taux de solution des crimes connus est à peu près de 30%. Il y a plusieurs crimes qui sont rapportés à la police avec certains renseignements suspects. On n'est pas sûr; alors, on recueille des informations. Les enquêtes continuent et ce sera peut-être dans cinq ans qu'on va trouver quelqu'un qui va dire: En fait, j'étais témoin, je vous le dis. Il y a sûrement des dossiers. Ce serait être angélique de penser qu'il n'y en a pas. De là à dire qu'il y a des dossiers judiciaires, c'est autre chose.

Un dossier judiciaire, c'est quelqu'un qui a été arrêté; une accusation a été portée contre lui, avec les empreintes et tout le reste.

M. Burns: Si je mène une vie honorable et que je gagne honorablement ma vie, je n'ai pas l'impression de vivre dans l'illégalité; il me semble que la société me doit, et surtout la partie protectrice de la société, un respect à mon intimité, à ma vie privée. J'ai droit à cela. Dans les cas de personnes qui ont été arrêtées, apparemment faussement puisqu'elles n'ont jamais été condamnées, elles n'ont jamais été poursuivies dans certains cas, il me semble qu'elles ont droit à l'intimité de leur vie privée.

M. Lalonde: Oui, de là l'importance de garder sous le sceau de la confidentialité tous ces dossiers.

M. Burns: Cela commence à ne plus être confidentiel quand c'est rendu que trois policiers viennent sonner à la porte chez vous et disent: Ce serait bon pour ta santé de ne pas être là pendant...

M. Lalonde: Malgré les demandes des députés de l'Opposition souvent en Chambre, on doit les traiter avec beaucoup de circonspection parce que, justement, ces renseignements sont confi- dentiels. De là, par exemple, à dire que les gens qui ont été arrêtés lors de la crise d'octobre... C'est fort possible qu'il n'y ait pas eu de dossiers du tout, mais si, depuis octobre 1975 — on est quand même presque cinq ans après — il y a eu d'autres événements qui ont amené ces gens à faire examiner leur comportement, leurs actions, soit dans des cas de manifestations violentes, dans des cas de crimes, à ce moment-là, parce qu'elle les a libérés ou les a lavés en 1970, cela ne veut pas dire que la police ne devra plus les garder du tout.

M. Burns: Je vous dis que ce n'est pas le cas du tout.

M. Lalonde: II ne faut pas dramatiser.

M. Burns: Ce sont des personnes qui n'ont rien à voir avec la justice depuis ce temps. Mais qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Je vous dis cela. Je pourrais vous citer des noms.

M. Lalonde: Là on parle de personnes, on ne veut pas citer de noms, je ne les cite pas non plus.

M. Burns: Non, je ne veux pas les citer, parce qu'ils subissent assez de dommages comme cela.

M. Lalonde: Bien oui, vous n'avez pas à les citer, mais remarquez que cela rend la discussion assez difficile. S'il y a deux ou trois personnes sur les 75 qui n'auraient peut-être pas dû être visitées, cela ferait un taux d'erreurs, je pense, acceptable. D'un autre côté, je ne vois pas de dommages à ce que des gens soient visités comme cela, très poliment, gentiment et avec toutes les règles de la politesse, pour savoir simplement quelles sont leurs intentions puisqu'elles auraient donné des preuves ou des indications à la police d'après leurs agissements antérieurs d'être susceptibles de créer des désordres. C'est cela le contexte. Je voulais le dire et même si vous voulez revenir cet après-midi, on va revenir là-dessus, parce que c'est important...

M. Burns: Je trouve cela important.

M. Lalonde: ... que la population cesse d'être traumatisée par certains agitateurs. Je ne suis pas le député de Maisonneuve, mais j'ai lu des choses dans les journaux, alors qu'on a dit qu'il y avait des centaines de clochards dans les prisons, qu'on allait construire des ailes additionnelles aux prisons pour mettre les clochards. La dénégation la plus formelle, la plus complète a été faite, même avec les remerciements de la population, par mon collègue le ministre de la Justice. Dans les journaux, le lendemain et dans les semaines suivantes, on voyait encore des gens qui disaient: Nos pauvres clochards vont tous être en prison.

C'est faux et il faut que cela se sache. La sécurité olympique va se faire dans le respect des lois puis il n'y aura pas de gens qui vont être pris puis, je ne sais pas moi, avec l'emprisonnement préventif, que ce soient des clochards ou d'autres.

Maintenant l'opération qui se fait actuellement se fait je pense...

M. Burns: Maintenant s'il n'y a plus moyen d'être robineux à Montréal maintenant.

M. Lalonde: Oui, puis c'est un état auquel, en fait, je ne sais pas si on y aspire, mais quand même, c'est la liberté totale.

M. Burns: Non, je n'aspire pas.

Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 11 h 54)

Reprise de la séance à 16 h 30

M. Brisson (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

La commission de la justice se réunit à nouveau afin de continuer l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Justice. Les membres de la commission sont les suivants: M. Bédard (Chicoutimi); M. Bellemare (Johnson); M. Houde (Abitibi-Est) remplace M. Bienvenue (Crémazie); M. Burns (Maisonneuve); M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Choquette (Outremont); M. Desjardins (Louis-Hébert); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Pépin (Sherbrooke) remplace M.Levesque (Bonaventure); M. Dionne (Mégantic-Compton) remplace M.Pagé (Portneuf); M. Perreault (L'Assomption); M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Springate (Sainte-Anne); M. Sylvain (Beauce-Nord); M. Tremblay (Iberville) remplace M. Tardif (Anjou).

Nous en étions au programme 17: Protection de la société, des citoyens et de leurs biens. Elément 2: Enquêtes policières spécialisées. D'autres questions?

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais peut-être quelques réponses à apporter à des questions qui ont été posées par le député de Maisonneuve ce matin.

Le Président (M. Brisson): D'accord. Opération Volcan (suite)

M. Lalonde: Concernant l'opération Volcan, j'ai quelques statistiques, peut-être pas toutes celles qu'on m'a demandées. On verra. On sait que l'opération Volcan vise à sensibiliser le public en général aux avantages d'identifier clairement leurs biens de façon positive à l'aide d'un burin électrique. L'opération comme telle a été lancée par la Sûreté du Québec au printemps 1974 et, depuis ce temps, un grand nombre de municipalités ont emboîté le pas dans le même sens. Jusqu'à maintenant, on peut dire qu'au niveau de la province, près de 200 000 personnes ont participé au plan opération Volcan.

M. Burns: 200 000?

M. Lalonde: 200 000. Il est assez difficile, actuellement, d'évaluer globalement, au niveau de la province, l'influence que cela a pu avoir sur la criminalité en général. Toutefois, si on prend le district de Québec, où l'opération a été menée d'une façon plus intensive, on retrouve 71 municipalités qui ont participé au plan dans une proportion de 75% à 95%. En plus, 129 autres municipalités participent au plan et atteindront bientôt le même taux de participation; du moins, c'est ce qu'on espère. Or, dans la région de Québec, l'année dernière, la criminalité a baissé dans l'ensemble de 4,5% et on réussissait à maintenir stable le taux des vols par effraction alors que, dans I ensemble de la province, on connaissait une augmentation de 24% dans la catégorie des vols

par effraction. Alors, cela peut donner une idée de l'importance, tout d'abord, de cette opération, du sérieux avec lequel la Sûreté et la population l'ont appliquée.

Des chiffres plus probants vont sûrement être disponibles lorsque nous aurons complété une période d'application un peu plus longue.

S'il y a d'autres questions ou des statistiques qu'on m'a demandées, que je n'ai pas encore...

M. Burns: II y avait l'aspect des arrestations et des mises en accusation, est-ce que vous avez... je m'excuse, on m'a parlé pendant ce temps, je ne sais pas si vous l'avez dit, est-ce que vous avez des statistiques relativement aux arrestations et aux condamnations à la suite de l'opération Volcan?

M. Lalonde: A part des 50 cas que j'ai mentionnés globalement ce matin, je n'ai pas d'autres statistiques. Si on parle de l'opération Alpin, qui est un peu semblable pour les paires de ski, ce sera peut-être intéressant aussi de dire...

M. Burns: Pour les motoneiges aussi, je pense?

M. Lalonde: Pour les skis. Il y avait des vols de skis assez considérables dans les années précédentes...

M. Burns: Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose pour les motoneiges aussi?

M. Lalonde: C'est avec l'opération Volcan. M. Burns: C'est avec l'opération Volcan.

M. Lalonde: II y a eu l'opération Alpin spécifiquement pour les skis. Au cours de l'année 1974, on avait rapporté, peut-être y en avait-il eu plus, sur l'ensemble du territoire couvert par la Sûreté seulement, un total de 700 vols de skis et il en était survenu 1000 sur le territoire desservi par les corps policiers municipaux. Au cours de l'hiver 1975/76, 88 500 amateurs de ski se sont prévalus du plan de l'opération en acceptant de se munir d'un chaînon. C'est un moyen technique, un chaînon en plastique sur lequel on indique le numéro de série. Par contre, près de 22 000 autres personnes ont fait buriner leurs skis au cours de la même période.

C'est la méthode utilisée dans l'opération Volcan. A la fin de la saison de ski, sur le territoire de la Sûreté du Québec, on connaissait une baisse de ces vols, par rapport à l'année précédente, de 46%, soit 378 vols seulement comparativement à 700. Les policiers municipaux, de leur côté, ont connu seulement 415 vols par rapport à 1000 crimes similaires l'année précédente. Donc, au total, au niveau de la province, il y a eu une baisse de 53,3% de vols de skis et il y a eu 42 paires qui ont été retrouvées et remises à leurs propriétaires.

M. Burns: M. le Président, en ce qui me concerne, relativement à l'élément 1, je n'ai pas d'autres questions, mais, comme le député d'Outremont n'était pas là, peut-être qu'il a d'autres, questions ou d'autres députés de la commission; en tout cas, je n'ai pas d'autres questions relativement à l'élément 1.

M. Choquette: M. le Président, si on me permet de prendre la parole...

Le Président (M. Brisson): L'élément 1 a été adopté, ça prendrait le consentement de la commission.

M. Burns: M. le Président, l'élément 1 a été adopté, mais avec l'entente qu'on devait obtenir cette réponse.

Le Président (M. Brisson): D'accord. L'honorable député d'Outremont.

Rapport annuel de la Sûreté

M. Choquette: M. le Président, vous comprendrez que je ne veux pas revenir sur des sujets qui ont déjà fait l'objet de discussions devant cette commission. Je voudrais demander au Solliciteur général comment il se fait que nous n'ayons pas, au moment de l'étude des crédits, le rapport annuel de la Sûreté. On sait que la Sûreté, tous les ans, publie un rapport sur ses activités. Ce rapport aide les députés à interroger le ministre lorsque vient le temps d'étudier les crédits.

Je m'étonne que, contrairement à l'usage qui prévalait à une autre époque, époque que je ne soulignerai pas, époque sur laquelle je n'ai pas l'intention de m'étendre indûment pour féliciter le ministre d'alors sur la qualité de l'administration de la justice qui prévalait à ce moment-là, parce qu'il y en a qui pourraient trouver que je manque de modestie.

Je voudrais demander au ministre, pour revenir au point particulier, comment il se fait que cette année, le directeur général adjoint Racine, n'a pas su préparer l'ensemble des données statistiques qui nous permettaient de constater le travail effectué par la Sûreté, et ainsi, prendre connaissance des développements administratifs et des développements dans l'organisation de ce corps de police.

M. Lalonde: On m'informe que le retard apporté cette année, comparativement aux années précédentes, dans la publication du rapport annuel, vient d'un problème d'impression. Des priorités ont dû être données au texte de différents documents qui étaient nécessaires aux services policiers, relativement à la sécurité olympique, de sorte que le texte du rapport qui est actuellement prêt est à l'impression et devrait paraître incessamment.

Je suis fort conscient de l'utilité qu'un rapport annuel peut avoir, lors de la discussion en commission parlementaire. Mais je n'ai pas pu, étant donné les autres contraintes, la date à la-

quelle je devais me présenter devant la commission parlementaire et aussi les priorités que le directeur général de la Sûreté me décrit concernant l'impression du rapport. Je m'excuse, ce n'est ni la faute de la Sûreté, ni la mienne, mais la distribution dudit rapport n'a pu avoir lieu à temps cette année.

M. Choquette: Bon!

M. Lalonde: De toute façon, toute question peut quand même recevoir une réponse, parce que toutes les données qui sont publiées dans le rapport annuel, naturellement, on en a ou on peut les retrouver.

M. Choquette: Je suis d'accord, mais cela aurait été quand même pratique d'avoir le rapport devant nous.

M. Lalonde: Je le déplore autant que le député d'Outremont, parce que cela aurait aussi été pratique pour moi.

La Sûreté du Québec

M. Choquette: Je le sais. Quant aux effectifs de la Sûreté, je constate que, dans les crédits, on nous donne le chiffre de la croissance des effectifs. Evidemment, cela comprend l'effectif policier ainsi que l'effectif civil. Je sais qu'il faut prendre en considération les programmes 17 et 18 ensemble, pour obtenir la totalité des effectifs de la Sûreté.

Puis-je demander au Solliciteur général, sur le plan policier même, quelle est la croissance de l'effectif de la Sûreté, au cours de l'année dernière, et quelle est la croissance prévue au cours de l'année qui va venir?

M. Lalonde: Au cours de l'année qui va venir, la croissance prévue est de 43 policiers. Ce nombre tient compte des restrictions budgétaires qu'on a dû s'imposer un peu partout dans la fonction publique, mais cela démontre quand même que, pour le service policier lui-même, on a pu obtenir un nombre tout à fait minime, comparativement au nombre total de la force, mais qui pourrait satisfaire aux besoins de la Sûreté actuellement.

Il y a aussi le problème de recrutement, les effectifs autorisés ne correspondent pas nécessairement et immédiatement au nombre de candidats engagés, recrutés. De toute façon, au cours de l'année courante, si des besoins additionnels devaient — mais cela c'est toujours une possibilité, pour tous les ministères, au fond — se dessiner, il n'y a rien qui nous empêche de présenter des demandes additionnelles par voie de budget supplémentaire.

M. Choquette: Dans ces conditions, il y a 43 postes additionnels de prévus pour l'année qui va venir. Y a-t-il des postes vacants dans les effectifs actuels et quel en est le chiffre?

M. Lalonde: II y aurait 200 postes autorisés non comblés.

M. Choquette: II y a 200 postes autorisés non comblés. L'année dernière, combien avez-vous comblé de postes?

M. Lalonde: 143.

M. Choquette: Bon. Cela ferait 243...

M. Lalonde: II faut tenir compte des départs aussi.

M. Choquette: Ah oui! Combien y a-t-il eu de départs, justement, en soustraction du nombre de postes comblés?

M. Lalonde: 67. 67 plus 143, cela nous fait 210 nouveaux policiers, mais pas nécessairement 210 de plus qu'avant. C'est 143 de plus qu'avant, d'augmentation.

M. Choquette: Bien.

M. Lalonde: Je dis ce chiffre pour montrer jusqu'à quel point quand même il y a une contrainte au niveau du recrutement.

M. Choquette: Est-ce qu'il a été question avec le député de Maisonneuve du recrutement?

M. Burns: Non, le recrutement, non. Recrutement

M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général pourrait nous dire quelles sont les difficultés actuelles du recrutement au point de vue des policiers?

M. Lalonde: On semble trouver, depuis 1972 — c'est quelques années avant que j'arrive au ministère — une situation différente comparativement à celle d'autrefois où on a plus de difficultés à recruter, malgré les salaires qui sont quand même fort appréciables, acceptables comparativement aussi à d'autres métiers, à un point tel que, l'an dernier et même cette année, la Sûreté a dû même faire une campagne de publicité pour rechercher les candidats. Il faut dire aussi que les exigences sont plus élevées qu'autrefois au niveau de la formation.

M. Burns: Sur cette question, il y a une vaste campagne qui a été préparée par la firme Pierre Tremblay; vous connaissez?

M. Lalonde: J'en ai entendu parler, oui.

M. Burns: II faut aller aux engagements financiers pour se rendre compte que c'est une firme très fortement teintée libérale. Pardon?

M. Lalonde: Cela a dû être efficace.

M. Burns: C'est cela que je vais vous demander, de nous prouver l'efficacité. Non, attendez, je vais vous poser la question. Le député d'Outremont vous pose la question relativement au résultat des campagnes de publicité, au recrutement, etc. Je vous demande combien d'efforts ont été déployés par cette firme Pierre Tremblay & Associés Inc. et qu'est-ce que cela a donné depuis que vous avez fait cette campagne. Parce que c'est une question, je ne veux pas vous dire, M. le ministre, que c'est une question piégée ou non, mais je vous avertis d'avance que nous avons discuté de cela récemment à une séance des engagements financiers. J'aimerais savoir combien cela a coûté, quant à la partie de la Sûreté du Québec et, deuxièmement, quels ont été les résultats.

M. Lalonde: Alors, on peut mentionner des chiffres d'engagements, par exemple, pour les quatre dernières années. En 1972, il y a eu 353 engagements; en 1973, il y en a eu 184. De 353 à 184, c'est presque divisé de moitié.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: En 1974, il y en a eu 93. Encore là, diminution d'à peu près 50%. En 1975, augmentation à 141. La campagne de publicité de l'an dernier a coûté $50 000. Enfin, un montant de $50 000 y a été appliqué. Calculé d'une façon méthodique, pour analyser le rapport de cause à effet...

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: ... cela nous a amené 75 sujets qui auraient choisi de se porter candidats à la fonction de policier à la Sûreté du Québec, à la suite de cette campagne de publicité.

Actuellement, pour l'année courante, c'est un montant de $63 000 qui est affecté à cette campagne. Le directeur de la Sûreté du Québec m'assure que le choix de la maison responsable de cette campagne de publicité a été fait par la Sûreté du Québec elle-même parmi trois maisons différentes qui se sont...

M. Burns: Quelles sont les deux autres? Si je comprends bien, c'est le directeur de la Sûreté du Québec qui a recommandé la maison en question?

M. Lalonde: C'est la direction de la Sûreté du Québec.

M. Burns: Evidemment, le directeur parle au nom de la Sûreté du Québec.

M. Lalonde: Une des maisons s'appellerait Cossette, je ne la connais pas. Je ne sais pas si c'est le nom véritable de la maison; l'autre, on ne se souvient pas de son nom.

Chaque maison a fait trois présentations sur la manière dont chacune se proposait d'aborder le problème, et celle qui a été choisie abordait le problème de la façon la plus dynamique et la plus conforme aux besoins que la Sûreté du Québec jugeait les siens.

M. Burns: Est-ce que vous avez des résultats de cette campagne jusqu'à maintenant? Est-ce que les demandes d'emploi à la Sûreté du Québec se sont mises à affluer depuis...

M. Lalonde: C'est ça, pour 1976— pour 1976, il est trop tôt— il y aurait justement 75 sujets qui, sur les 141 qui ont été engagés, auraient choisi, à la suite d'une analyse, apparemment scientifique, de se porter candidats à la Sûreté du Québec, à la suite de cette campagne. On me dit que même un des deux auteurs du programme ou de la publicité s'est joint à la Sûreté du Québec depuis ce temps.

M. Burns: Ah bon!

M. Lalonde: C'est dire jusqu'à quel point il était convaincu.

M. Choquette: Une perte pour le théâtre et pour la télévision. Un gain pour la police.

M. Burns: Un gain pour la loi et l'ordre et la sécurité.

M. Lalonde: Un autre élément pour le choix de la maison Tremblay est que cette maison donnait plus de couverture pour la somme d'argent investie.

M. Burns: Mais ce n'est pas elle qui décide cela?

M. Lalonde: Oui. C'est un programme, par exemple, avec un budget qui est présenté et le programme de publicité comporte le nombre de messages à la télévision et il en comptait plus.

M. Burns: Avez-vous procédé par voie de soumissions publiques dans ce cas ou...?

M. Lalonde: Non. Dans les cas de campagne de publicité, c'est assez rare qu'on procède par... Mais je ne reviendrai pas là-dessus.

M. Burns: Mais cela arrive. On en parle à la commission aux engagements financiers.

M. Lalonde: Oui, à la commission des engagements financiers.

M. Burns: Mais cela arrive qu'on fasse, même dans des cas de publicité, des soumissions publiques.

M. Lalonde: C'est possible. Jusqu'à maintenant, cela a bien été. Les résultats semblent probants, même évidents et la publicité a été bien faite.

M. Burns: C'étaient des soumissions négociées ou encore des soumissions en circuit fermé dans ce cas?

M. Lalonde: C'est cela. C'est la Sûreté du Québec qui, par son service du personnel, a approché trois maisons différentes et a demandé quel produit fini on pouvait remettre à la Sûreté du Québec pour le montant d'argent disponible, qui était de $50 000, et la maison Pierre Tremblay et Associés a, comme je le disais tantôt, présenté le produit qui semblait le plus favorable, le plus positif, le plus dynamique et le plus conforme aux besoins de la Sûreté du Québec et qui présentait aussi un autre avantage, le plus de temps de couverture pour les messages à la télévision ou à la radio et dans les journaux.

C'était fondé sur trois media, les journaux, la radio et la télévision et, dans le projet de Pierre Tremblay et Associés, on donnait à la Sûreté du Québec du temps préférentiel, du "prime time "...

M. Burns: Plus favorable.

M. Lalonde: ... du temps préférentiel à la télévision comparé au projet des autres, pour supporter, en support. En fait, c'était essentiellement dans les journaux, mais avec un support à la télévision et à la radio. Le support à la télévision employait un temps préférentiel en comparaison avec les autres projets.

Cette année, ce sont les mêmes qui ont été choisis pour l'année courante, étant donné que toute la documentation est préparée, cela coûtait moins cher à la Sûreté de continuer avec le même.

M. Choquette: Est-ce que la police municipale éprouve les mêmes difficultés quant au recrutement d'agents que celles ressenties au niveau de la Sûreté du Québec?

M. Lalonde: II me semble que oui, ainsi que la GRC et l'armée. On voit toute la publicité que l'armée fait pour obtenir des candidats. La Gendarmerie Royale consacre $100 000 seulement pour le Québec, dans les campagnes de publicité pour le recrutement.

M. Choquette: Est-ce que cette campagne de recrutement prend d'autres formes que des annonces dans les media d'information? Est-ce qu'il y a d'autres mesures qui sont prises pour mousser le recrutement de nouveaux candidats?

M. Lalonde: II y a les moyens classiques, conventionnels, comme lors d'expositions; il y a des conférences dans les écoles par les conseillers en orientation professionnelle. Ce sont des moyens qui atteignent des publics beaucoup plus spécifiques, donc qui sont destinés, qui sont préparés de façon différentes que la publicité à la radio ou à la télévision; mais il s'agit de moyens conventionnels qui, en temps normal, pourraient éviter de faire des dépenses de cette nature et qui avaient été utilisés d'ailleurs dans le passé.

M. Choquette: Actuellement, quel est le total de l'effectif policier au Québec comprenant la Sûreté du Québec, les corps de police municipaux et, possiblement, la Gendarmerie Royale du Canada? Si le Solliciteur général est assez au fait de la situation qui prévaut à la GRC pour autant qu'il s'agisse de la division C, c'est-à-dire celle qui est le détachement de la Gendarmerie Royale au Québec.

M. Burns: Est-ce que le député d'Outremont, dans le temps qu'il était ministre, était en mesure de répondre à une telle question?

M. Choquette: Oui... M. Lalonde: Voici...

M. Burns: Cela m'intéresse beaucoup, parce que je sais qu'il était capable de répondre à une telle question.

M. Lalonde: ... la GRC aurait...

M. Burns: ... que le Solliciteur général du Québec, actuellement, ne soit pas capable de...

M. Lalonde: Est-ce qu'on me permet de répondre, parce qu'il se peut qu'on vérifie...

M. Burns: D'accord.

M. Lalonde: Je pense bien que le député de Maisonneuve comprend qu'il faut avoir une certaine prudence quand on demande de tels chiffres. Il faut vérifier.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: Des déclarations en l'air peuvent entrainer des répercussions.

La GRC, dans la division C, au Québec, aurait un effectif d'environ 800; la Sûreté du Québec, 4 002, les autres, environ 7000. On peut faire le total, s Je 12 000 à peu près, comme effectif.

M. Choquette: C'est drôle, ce chiffre me paraît extrê Tient bas.

M. Lalonde: Oui, il y a une correction à apporter.

M. Burns: Oui, il manque quelque chose là-dedans. Vous comprenez prenez pourquoi je dis que je m'ennuie du député d'Outremont comme ministre de la Justice.

M. Lalonde: Je vous le laisse.

M. Burns: Oui, mais ce n'est pas moi qui décide...

M. Lalonde: Le 1er janvier 1975 — il faut ajouter les recrutements ou les augmentations durant l'année 1975 — il y en avait dans les cités et villes 9240, la Sûreté du Québec un peu plus de 4000, dans les autres petites municipalités 162, pour un total de 13 400, accompagnés d'un effectif civil

d'un peu plus de 3000; si on ajoute les 800 de la GRC, pour l'effectif policier directement, on a un total d'un peu plus de 14 000. Le député de Maisonneuve comprendra pourquoi je consulte avant de répondre; même en consultant, tantôt, j'ai failli induire la commission en erreur.

M. Burns: Oui, même après 11 mois.

M. Lalonde: Vous savez, on peut apprendre ça par coeur éventuellement.

Lutte contre le crime

M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général peut nous donner une idée de l'évolution de la criminalité au Québec actuellement et depuis quelque temps déjà? Je veux dire quelle est la situation en regard du genre de crime, quels sont les problèmes qu'il entrevoit être les plus aigus dans le domaine de la criminalité?

M. Lalonde: Le domaine de la criminalité a sûrement évolué défavorablement dans une certaine mesure durant l'année dernière, enfin en 1975. On a vu une augmentation de certains crimes comme les vols de banque, entre autres. Le taux de solution augmente très lentement. Actuellement...

On ne peut pas dire qu'il augmente sensiblement, mais, étant donné qu'il se tient à peu près au niveau d'un peu plus de 30%, c'est naturellement le taux de solution des crimes connus. C'est pour ça que les statistiques sont difficiles à comparer avec des chiffres qu'on pouvait obtenir dans le passé, par exemple, de quelle façon on tient compte de la connaissance du crime, comment on le décrit, quels sont les chiffres, comment on le décrit dans les statistiques, comment on le rapporte. On le rapporte souvent de façon différente d'une municipalité à l'autre. Il y a un bon travail de préparation des différentes sources d'information concernant l'intrant dans les statistiques là-dessus. On a vu toutefois que certaines dispositions sont prises et, surtout en ce qui concerne le crime organisé, par exemple, la lutte au crime organisé l'année dernière a sûrement marqué des points.

Cela ne se reflète pas de façon directe sur le taux de solution, mais quand même cela a pour effet justement de...

M. Burns: Simplement une question incidente. Quand vous parlez de taux de criminalité et de lutte au crime organisé en particulier, est-ce que vous avez autre chose que la Commission d'enquête sur le crime organisé à nous démontrer comme moyen de lutte contre le crime organisé?

M. Lalonde: Naturellement, la Commission d'enquête sur le crime organisé est le moyen, je dirais, le plus efficace jusqu'à maintenant, mais, ce qui est intéressant, c'est qu'au niveau des corps policiers qui ont collaboré avec la CECO à la lutte contre le crime organisé, une meilleure préparation se voit maintenant. D'ailleurs, à la CUM, on a mis sur pied l'escouade "antigang" dont les méthodes de lutte contre le crime s'apparentent beaucoup aux méthodes dont on...

M. Burns: II y a autre chose que la CECO dans le fond.

M. Lalonde: Oui, il faut qu'il y ait autre chose qu'une enquête spéciale, il faut qu'on puisse trouver le moyen de faire la lutte contre le crime organisé par les moyens conventionnels.

M. Burns: Quand vous parlez de crime organisé, vous parlez de gang organisé ou de système organisé? Parce que vous avez des gens qui n'ont pas de dossier judiciaire et qui, dans mon esprit, font partie du crime organisé.

Par exemple, ceux qui peuvent avoir posé des problèmes et qui ont été soumis — éventuellement, on vous demandera de nous donner des réponses là-dessus — à huis clos à la CECO, le problème de la Société des alcools du Québec, le problème des loteries, de la Loto-Québec, etc. On attend toujours vos réponses là-dessus. Non? Pour vous, ce n'est pas du crime organisé?

M. Lalonde: Ce n'est pas cela. En ce qui concerne la SAQ, c'est la commission elle-même qui a déterminé qu'il ne s'agissait pas de crime organisé.

M. Burns: II ne s'agit pas de crime organisé? M. Lalonde: D'après la définition qu'on en a.

M. Burns: Votre définition du crime organisé, c'est quoi?

M. Lalonde: Ma définition du crime organisé, cela implique des éléments...

M. Burns: Et des noms.

M. Lalonde: Ce sont des éléments de réseaux, d'organisations. Cela n'implique pas nécessairement, comme le disait le député de Maisonneuve, des personnes qui ont des dossiers judiciaires, parce qu'il y en a qui...

M. Burns: Non, mais si vous, le député d'Outremont et moi-même décidons, à un moment donné, de bâtir une société parallèle, par exemple — et que nous n'ayons aucun casier judiciaire, ni l'un ni l'autre — qui fait qu'on fonctionne dans l'illégalité la plus totale, on ne fait pas de crime organisé. Est-ce que c'est cela?

M. Lalonde: C'est possible. Si nous recourons, dans votre exemple, à des méthodes criminelles, à la commission de crimes, à l'intimidation, à la violence, au meurtre et...

M. Burns: Et tout le crime organisé.

M. Lalonde: Ce serait du crime organisé.

M. Burns: Si on fait de la fraude systématisée, si on fait de l'extorsion systématisée, est-ce que c'est du crime organisé?

M. Lalonde: Si vous êtes seul à le faire, non. M. Burns: Non, nous sommes trois. M. Lalonde: Cela peut facilement...

M. Burns: Vous, le député d'Outremont et moi-même, on part et on décide qu'on fait...

M. Sylvain: C'est "une belle gang".

M. Lalonde: II y en a qui veulent se joindre à nous.

M. Burns: On peut ajouter le député de Beauce-Nord, s'il le veut, mais...

M. Sylvain: Je viens de la campagne, moi. Je n'ai pas vos tuyaux.

M. Burns: Je vous parle de personnes qui n'ont pas de dossier judiciaire, qui ne sont pas reconnues comme étant des membres de ce qu'on appelle la pègre ou la mafia et qui décident, à un moment donné, d'avoir un système d'extorsion, un système de versements, etc.

Est-ce que, de l'avis du Solliciteur général, selon ses définitions, c'est du crime organisé?

M. Lalonde: Si on regarde, par exemple, la loi de police actuellement, c'est assez difficile de trouver... Il y en a. Mais dans le vol de banque, un crime totalement solitaire, il faut que vous mettiez deux personnes pour l'organiser, une troisième pour fournir l'automobile et des armes...

M. Burns: Ça, c'est un crime; ce n'est pas du crime organisé. Je vous parle d'un système parallèle à la société actuelle. C'est ce dont je vous parle. Si, par exemple, je trouve une méthode qui a trait aux pouvoirs que je détiens ou non, qui fait que je puisse extorquer de l'argent d'un certain nombre de personnes, est-ce que cela, c'est du crime organisé?

M. Lalonde: Si on se reporte, par exemple, à l'article 19 de la Loi de police, où on donne le pouvoir à la Commission de police de faire enquête sur une organisation, on dit: "La commission doit aussi faire enquête sur les activités d'une organisation ou d'un réseau, ses ramifications et les personnes qui y concourent, lorsque le lieutenant-gouverneur en conseil a des raisons de croire que, dans la lutte contre le crime organisé ou le terrorisme et la subversion, il est de l'intérêt public d'ordonner la tenue d'une telle enquête".

Ce qu'on a voulu définir du crime organisé, ce n'est pas une définition comme telle. Mais cela donne les éléments de ce que c'est que le crime organisé. C'est sûrement un réseau de personnes, une organisation de personnes qui, pour des fins illégitimes, à des fins illicites et illégales, emploient des méthodes qui le sont aussi, qui, de façon classique ou plus conventionnelle, recourent à l'intimidation, le meurtre, mais qui pourraient aussi, derrière une façade légitime, recourir à de telles méthodes pour obtenir des profits.

M. Burns: Je veux vous l'entendre dire. Il est possible — et je ne lance pas d'accusations — que, dans le domaine des loteries au Québec, entre autres — et on verra avec le temps, s'il y a lieu d'aller plus loin là-dessus — et dans le domaine de la Société des Alcools, il y ait, dans le fond, des éléments qui répondent à votre définition.

M. Lalonde: Je dois m'en remettre à l'opinion de la Commisson d'enquête sur le crime organisé, suivant laquelle, dans l'enquête à laquelle se réfère le député de Maisonneuve...

M. Burns: Mais vous...

M. Lalonde: ...elle ne voyait pas de... Je partage l'opinion du juge Dutil là-dessus et, si on en découvrait...

M. Burns: ...

M. Lalonde: ...parce que l'enquête a été continuée...

M. Burns: C'est cela que je veux savoir. Qu'est-ce que vous faites?

M. Lalonde: ...il n'y a aucun doute qu'on pourrait confier une enquête à la CECO.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: Dans ce domaine, comme dans tout autre domaine...

M. Burns: ...

M. Lalonde: ...dans le domaine de la subversion, dans le domaine...

M. Burns: Vous ne retireriez pas des dossiers de la CECO. Vous ne diriez pas à la CECO: Ce n'est pas de vos affaires, ne vous occupez pas de cela.

M. Lalonde: Je ne pense pas que ce soit jamais arrivé dans le passé.

M. Burns: Non, je ne vous demande pas si c'est arrivé, je vous demande...

M. Lalonde: Que des dossiers aient été retirés de la CECO.

M. Burns: C'est la place où je peux vous poser des questions hypothétiques, parce que ce sont des questions hypothétiques.

M. Lalonde: Je réponds et j'aimerais avoir le temps de finir mes réponses.

M. Burns: D'accord.

M. Lalonde: Non, la CECO prend connaissance des dossiers qu'elle désire. Dans le passé, cela a été comme cela, c'est comme cela actuellement. Elle peut, par exemple, mettre un terme à une enquête en s'apercevant qu'il n'y a rien là-dedans ou que cela ne relève pas de son domaine. A ce moment, elle remet le dossier au ministère de la Justice. C'est une chose normale qu'elle puisse déterminer, à un moment donné, si c'est sous sa juridiction ou non.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: Mais ce n'est pas retirer un dossier de la CECO.

M. Burns: Bon. Donc, dans votre cas, vous ne considérez pas qu'il soit de votre devoir de retirer un dossier de la CECO.

M. Lalonde: Non, la CECO opère avec une autonomie quand même assez complète. Elle peut entreprendre les enquêtes qu'elle désire, suivant les informations qui lui parviennent. Comment pourrais-je retirer des dossiers, alors que souvent je ne sais pas exactement ce qu'elle fait? C'est la confidentialité qui existe, surtout au niveau des enquêtes ou des...

M. Burns: On a déjà vu des procureurs généraux qui ne s'avisent pas du tout — je tiens à le laver de cela, malgré que je ne peux pas le laver indéfiniment, on ne le sait pas, mais, en tout cas, je n'ai pas d'indication que cela vise le député d'Outremont — qui sont intervenus directement dans des causes, dans le passé. Il y en a qui sont rendus au fédéral, comme députés.

M. Choquette: Parmi les organismes qui ont pour mission de combattre le crime organisé pour s'intéresser plus profondément à ce sujet, il y a un organisme que le Solliciteur général n'a pas mentionné et qu'il semble ignorer, c'est le BRQCO.

M. Lalonde: On ne l'ignore pas.

M. Choquette: Mais vous ne l'avez pas mentionné.

M. Lalonde: D'ailleurs, je pense qu'on va s'apercevoir bientôt que, non seulement on ne l'ignore pas, mais on a même l'intention de l'institutionnaliser.

M. Choquette: D'après vous, le BRQCO n'est pas institutionnalisé?

M. Lalonde: II existe par une entente. Sa constitution est sui generis. J'aimerais qu'on consacre dans la loi l'existence du BRQCO.

M. Choquette: Mais...

M. Lalonde: Ce n'est pas un reproche que je fais pour le passé, il a fallu commencer quelque part. Maintenant qu'il est là, il faudrait lui donner plus de...

M. Choquette: Mais le BRQCO existe depuis sept ans. Vous n'avez pas l'intention de dire que vous allez faire une innovation en lui donnant...

M. Lalonde: Le député d'Outremont...

M. Burns: Une minute! Vous allez mettre cela dans vos réalisations.

M. Lalonde: On dirait que le député d'Outremont craint que je m'approprie le crédit de quelques décisions.

M. Choquette: Pas du tout.

M. Lalonde: Non, je dis simplement que le BRQCO est là pour rester, même avec une existence plus concrète; en fait, il sera consacré par la loi.

M. Choquette: Bon. Est-ce que cela fera l'objet justement d'une des parties de la loi que le Solliciteur général a l'intention de nous présenter pour aviser la lutte contre le crime organisé?

M. Lalonde: Cela peut être un des éléments. Seulement, ce n'est pas l'endroit ici, parce que les décisions finales ne sont pas prises.

M. Choquette: Mais, vous savez, nous ne serons pas pris au dépourvu par la poudre aux yeux qu'on voudrait peut-être nous lancer à ce point de vue; je veux dire que le BRQCO a été fondé même avant que je sois devenu ministre de la Justice. Donc, je ne cherche pas à m'approprier un mérite que je n'ai pas. Le BRQCO a été fondé vers 1968, 1969. Il a une existence qui est...

M. Burns: II s'appelait autrement à ce moment.

M. Choquette: II s'est toujours appelé le Bureau de recherche, d'enquête sur le crime organisé. Il est composé de policiers provenant des trois corps de police principaux...

M. Lalonde: ...

M. Choquette: ...la GRC, la Sûreté du Québec et la police de la CUM, plus d'autres corps de police qui y sont associés ou d'autres organismes qui y sont associés.

M. Lalonde: Cela a été fondé en 1969.

M. Choquette: Bon! Pour revenir à la criminalité en général, je ne peux pas me déclarer satisfait des réponses du Solliciteur général. Je lui ai de-

mandé quelle était l'évolution de la criminalité au Québec. Il tombe dans le taux de solution. C'est bien intéressant, le taux de solution. On pourrait en parler. Il nous parle du crime organisé, c'est très intéressant, le crime organisé, on en parle. Il nous parle des statistiques noires de la criminalité, c'est-à-dire celles qui ne sont pas rapportées dans les statistiques criminelles, tout le monde sait cela. Je veux demander au Solliciteur général s'il a une idée de l'évolution de la criminalité avec plus de détails. Est-ce qu'il y a plus de fraude? Est-ce qu'il y a plus de criminalité de nature économique? Est-ce qu'il y a plus de vols de banque? Est-ce qu'il y a plus de cas d'extorsion? Est-ce qu'il y a plus d'intimidation, comme par exemple, dans le domaine de la construction, comme on l'a constaté à certaines époques? Je veux savoir, en somme, si le Solliciteur général peut nous dire quelle est l'évolution de la criminalité au Québec, car c'est la matière première sur laquelle il travaille avec les corps de police et aussi avec la collaboration des substituts du Procureur général. Donc, il faut savoir où le ministère va diriger ses énergies, compte tenu de l'évolution de cette criminalité. Alors, c'est ce qui m'intéresse.

M. Lalonde: J'ai répondu de façon globale que la criminalité n'est pas en régression. Dans certaines formes de criminalité, on a vu, par exemple, des initiatives telles que la prise d'otages, par exemple de gérants de banque ou de caisse populaire, pour fins d'extorsion. Sur cette forme de criminalité, je crois que la Sûreté du Québec et les autres corps de police, mais à l'initiative de la Sûreté du Québec, ont atteint des résultats très positifs. Entre autres, je pense que le taux de solution de cette forme de crime, jusqu'en janvier ou février 1976, était au-dessus de 80%. Donc, cela a été une nouvelle forme de criminalité. Le meurtre, surtout au niveau du territoire de la Communauté urbaine de Montréal, a connu des sommets en 1975. Malheureusement, c'est une situation où des dispositions devront être prises. On connaît surtout une augmentation du nombre des meurtres de la nature du règlement de compte, surtout parmi des jeunes, des groupes de jeunes qui, présumément, se disputent des marchés, pour la drogue, en particulier. Nous sommes fort conscients, et à la CUM et à la Sûreté, que la lutte contre cette forme de criminalité doit apporter des résultats probants relativement au meurtre.

Pour le crime économique, il est difficile de faire des comparaisons avec le passé...

Le Président (M. Brisson): Je pense que le député d'Abitibi-Est avait une question à poser en attendant.

M. Houde (Abitibi-Est): En ce qui concerne les difficultés de recrutement des différents corps policiers, je sais qu'on a fait plusieurs observations dans les régions éloignées, Matagami, Chapais, Chibougamau, entre autres; la police de la municipalité de la baie James faisait du maraudage, en fait, auprès de ces corps policiers. Comme chaque corps policier municipal est obligé d'envoyer former ses policiers à Nicolet, cela représente, pour des villes à petit budget, des déboursés assez considérables. Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité qu'éventuellement, on oblige le corps policier maraudeur à rembourser à une municipalité les frais encourus par ces stages à l'Institut de police de Nicolet avant d'aller marauder?

M. Lalonde: C'est un problème réel et qui n'est pas facile à résoudre. En effet, il y a une concurrence sur la disponibilité des candidats quand ils sortent de l'Institut de police. Certaines municipalités mieux nanties peuvent offrir davantage. Comment pourrait-on empêcher, par exemple, un policier qui sort de l'Institut de police d'accepter une offre dans un autre corps de police?

On cherche les moyens, mais ce n'est pas facile, parce qu'il y a quand même la liberté d'offrir ses services à d'autres endroits. Mais...

M. Houde (Abitibi-Est): Je suis d'accord, mais c'est la municipalité qui a payé quand même la formation du policier.

M. Lalonde: Le député suggère que la municipalité qui a payé pour la formation soit remboursée par la municipalité qui l'a recruté.

M. Houde (Abitibi-Est): Oui.

M. Lalonde: J'en prends note. Je ne sais pas si c'est facile d'application, mais je prends note de la suggestion.

M. Houde (Abitibi-Est): D'accord!

Le Président (M. Brisson): Le député d'Outremont.

M. Choquette: Oui, M. le Président, j'aimerais que le Solliciteur général...

M. Lalonde: J'aimerais terminer. M. Choquette: Oui.

M. Lalonde: Parce qu'il y a le crime économique, c'est très difficile de faire des comparaisons avec le passé. Un meurtre laisse un cadavre, même si, souvent, dans quelques cas, dans le passé, on a vu qu'on essayait de le faire disparaître; un vol de banque est tout de suite résolu. Il n'y a aucun problème de dépistage, de définition du crime et du genre de crime qui est commis.

Tandis que dans le cas du crime économique, c'est différent. On commence à peine, depuis quelques années, à se munir contre ce genre de crime. La constitution, par exemple, au ministère de la Justice, du service de faillite et fraude, est une indication justement au niveau de la Sûreté du Québec, au niveau de la CUM, des escouades contre le crime économique sont mises sur pied, sont bâties, voient une croissance plus grande.

Les inconvénients, les dommages créés à la

société, par ce genre de crime économique, fraude, sont considérables, mais ils sont plus difficiles à mesurer. C'est dans cette direction, entre autres, que je pense que nous devons diriger nos efforts. Nous allons, pour 1976/77, continuer les efforts qui ont été faits dans le passé et les augmenter.

M. Choquette: Où trouve-t-on les principales statistiques sur la criminalité?

M. Lalonde: Où cherche le député d'Outremont?

M. Choquette: Pour se baser sur l'évolution de la criminalité. Sur quelles statistiques se fonde le Solliciteur général?

M. Lalonde: Sur les statistiques recueillies par la Commission de police et la direction générale de la sécurité publique qui sont disponibles de temps à autre. Nous les suivons régulièrement. J'aurais aimé les avoir ici, mais je peux les fournir, les déposer en Chambre.

M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général pourrait le faire à brève échéance?

M. Lalonde: Oui. Celles qui sont disponibles.

M. Choquette: Lors d'une prochaine séance de la commission.

M. Lalonde: Celles qui sont disponibles, naturellement, je pourrais les...

M. Choquette: On ne demanderait pas au Solliciteur général de les produire à la Chambre, mais lors d'une prochaine session de la commission peut-être?

M. Lalonde: De la commission?

M. Choquette: De la Justice. M. Lalonde: S'il y en a une.

M. Burns: II va y en avoir d'autres nécessairement. Après vous, il y a encore la Justice.

M. Lalonde: Oui, mais la prochaine, je suis sûr qu'il va y avoir des...

M. Burns: Ces choses ne sont pas dites méchamment.

M. Lalonde: ... prochaines séances de la Chambre plus rapidement que des réunions de la commission peut-être.

M. Burns: II y en a une de prévue pour demain matin.

M. Lalonde: De la Justice?

M. Burns: Oui, si on terminait avec vous, on pourrait, demain, commencer la Justice.

M. Lalonde: Ah bon! Cela pourrait être produit, justement, oui. Je m'excuse. J'avais oublié cet aspect.

Industrie de la construction

M. Choquette: Dans le domaine de la construction, domaine qui a donné lieu à la commission d'enquête sur l'exercice des libertés syndicales, présidée par le juge Robert Cliche, est-ce que le Solliciteur général pourrait nous donner une idée de l'évolution des choses en ce qui a trait à l'activité criminelle?

M. Lalonde: Toutes les plaintes qui devaient être portées ont été portées en ce qui concerne naturellement les suites de l'enquête Cliche. Pour ce qui concerne la criminalité ou les activités criminelles dans le domaine de la construction, je pense que les suites de la commission Cliche ont été favorables. On n'a pas décelé de situations aussi pourries qu'elles existaient il y a deux ans, et qui ont amené justement l'institution de la commission Cliche.

Naturellement, tout le monde avait les yeux tournés vers le chantier olympique et le chantier olympique a été pris en otage dans une certaine mesure. Donc, en jugeant de la situation au chantier olympique, on avait une bonne idée de l'état de la situation en ce qui concerne...

M. Burns: Je m'excuse, M. le Président, on n'a pas quorum.

M. Lalonde: Tiens, le "quorum " s'en vient. Le Président (M. Brlsson): Alors, continuez.

M. Lalonde: Naturellement, ce n'est pas encore la situation idéale. Lorsque le décret a été étendu, on a vu le recommencement de certaines manoeuvres de sabotage. On a vu du sabotage. Il est très difficile — le député d'Outremont peut en témoigner — d'obtenir des preuves dans chaque cas. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles la commission Cliche a été instituée, étant donné que les moyens conventionnels ne semblaient pas pouvoir remédier à la situation, mais celle-ci semble meilleure qu'avant la commission Cliche.

M. Choquette: II y a eu un certain nombre de personnages qui ont été mentionnés dans le rapport de la commission Cliche. Le Solliciteur général pourrait-il nous dire si ces personnages ont disparu complètement du domaine de la construction? Je parle, entre autres, d'André Desjardins et d'autres personnes qui travaillaient avec lui ou en collaboration avec lui et dont le cas a été discuté spécifiquement par la commission Cliche. Leur présence est-elle encore ressentie dans le domaine du syndicalisme de la construction? Ont-ils encore de l'influence et quel est le jugement du Solliciteur général sur la présence de ces gens?

M. Lalonde: II y en a encore plusieurs qui sont

autour... non pas de façon formelle qui nous permettrait, par l'application des lois qui ont été adoptées après la commission Cliche, de les exclure de certaines fonctions. Le député d'Outremont mentionne André Desjardins. Sa présence se fait sentir au sein même du local 144, même s'il n'occupe pas formellement une fonction, un poste qui pourrait lui être enlevé de par l'application de la loi.

M. Burns: M. le Président, je m'excuse. On n'a pas quorum. On a deux membres qui ne sont pas membres de la commission.

Pouvez-vous me dire, M. le Président, qui sont les membres de la commission?

Le Président (M. Brisson): Oui. M. Burns est membre. M. Choquette...

M. Burns: M. Choquette est membre.

Le Président (M. Brisson): ... est membre.

M. Burns: Cela fait deux.

Le Président (M. Brisson): M. Tremblay est membre.

M. Burns: Cela fait trois.

Le Président (M. Brisson): M. Pépin est membre.

M. Burns: M. Pépin est membre?

Le Président (M. Brisson): Oui, M. Pépin a remplacé M. Levesque.

M. Burns: Quand ça?

Le Président (M. Brisson): Cet après-midi.

M. Burns: Ah oui?

Le Président (M. Brisson): Oui. Nous avions ajourné nos travaux sine die. Donc, c'est une nouvelle séance.

M. Burns: Oui, mais quand? Je n'ai pas entendu cela.

Le Président (M. Brisson): Je l'ai dit au début quand j'ai donné la liste des membres.

M. Burns: Etes-vous sûr?

Le Président (M. Brisson): Oui. A 16 h 31 exactement.

M. Burns: M. Brown est-il membre?

Le Président (M. Brisson): M. Brown n'est pas membre.

M. Burns: Alors, on n'a pas quorum.

Le Président (M. Brisson): Je ne sais pas. On n'a pas été à la même école.

M. Burns: M. Houde (Abitibi-Est) est-il membre?

Le Président (M. Brisson): M. Houde (Abitibi-Est) est membre. M. Springate est membre. M. Faucher est membre. M. Desjardins est membre. Le ministre est membre.

M. Burns: M. Houde (Abitibi-Est) remplace qui?

Le Président (M. Brisson): M. Houde (Abitibi-Est) remplace M. Bienvenue.

M. Burns: M. Bienvenue. D'accord.

Le Président (M. Brisson): Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix et le quorum est de neuf.

M. Burns: D'accord, M. le Président. On va suivre cela.

Le Président (M. Brisson): Le ministre. M. Lalonde: Alors, j'avais...

M. Choquette: Y a-t-il d'autres personnes qui ont été nommément mentionnées par la commission Cliche, qui ont fait l'objet de commentaires et qui sont toujours impliquées dans le milieu de la construction?

M. Lalonde: II y en a plusieurs.

M. Choquette: Le ministre peut-il en nommer?

M. Lalonde: Les nommer... Je voudrais quand même... Je ne suis pas leur activité quotidiennement, à savoir s'ils sont à un chantier aujourd'hui. Je pense qu'on considérera que la question demanderait un examen précis, pour savoir si monsieur X ou Y est actuellement à un chantier et occupe actuellement une fonction au sein du syndicalisme dans la construction.

M. Choquette: Pas directement.

M. Lalonde: S'il a des noms, qu'il me les donne et je ferai vérifier.

M. Choquette: Je ne veux pas dire au sein du syndicalisme, parce qu'on sait que la loi 29 ou 30 a exclu un certain nombre de ces gens de situations syndicales, mais je veux dire qu'ils ont une influence dans ce milieu de travail et font I objet de surveillance par la sûreté.

M. Lalonde: Naturellement, la Sûreté et les autres corps de police effectuent... Par exemple, sur le chantier olympique, il y a un système de sécurité assez élaboré, mais on aimerait avoir des

noms pour savoir si M. Untel est sur le chantier, ce qu'il fait là, si son influence est néfaste. Une dernière question qu'il serait quand même assez difficile de circonscrire, à savoir ce qu'est une influence néfaste.

M. Choquette: Juste une petite question, avant que le député de Maisonneuve ne pose des questions pertinentes sur ce sujet. Quel est l'effectif de la Sûreté qui est affecté à la surveillance de ce type de criminalité qu'on a constaté dans le domaine de la construction?

M. Lalonde: C'est le rôle de chaque policier de surveiller, dans sa fonction de prévention et de solution des crimes, de voir à faire ce genre de surveillance, mais est-ce qu'il serait d'intérêt public de donner le nombre, par exemple, de l'effectif qui spédifiquement s'occupe de surveillance, je ne le pense pas. C'est un peu comme durant la guerre, on renonce à déclarer à l'ennemi le nombre de nos forces.

M. Burns: Justement, c'est relié à la question du député d'Outremont. Ce matin, je pense qu'on en était rendu là, on est revenu là, on parlait des enquêtes policières spécialisées au programme 17; élément 2. Avec la réponse que m'a donnée le ministre ce matin, je retrouve, dans la ventilation de ces crédits, à la supercatégorie 11, $295 300 affectés à ce type de dépense. On en a parlé, ce matin, relativement aux approches qui ont été faites par le caporal Tremblay auprès d'un journaliste du Star. Si j'ai bien compris la réponse du ministre, cela veut dire que ce budget se retrouve au programme 17, élément 3, catégorie 11. N'est-ce pas?

M. Lalonde: Oui.

M. Burns: Donc, je ne me trompe pas en disant que ce type d'enquête est utilisé à raison de $295 300 à l'intérieur...

M. Lalonde: Pas nécessairement. Cela comprend...

Infiltration d'organismes

M. Burns: C'est ce que je veux entendre du ministre. A quoi est utilisée cette somme de $295 300, première question. La deuxième, c'est: Est-ce que, effectivement, comme on en avait discuté avec une certaine véhémence d'ailleurs, le ministre de la Justice du temps et moi-même, il y a une partie de ce budget qui va à l'infiltration d'organismes syndicaux tels que, par exemple, les organismes syndicaux à la baie James, les organismes syndicaux aux Jeux olympiques, dans le domaine de la construction?

M. Lalonde: La nature même des activités, qui sont nécessaires par les forces policières pour les enquêtes policières spécialisées, exige une certaine confidentialité quant à l'emploi de certains fonds. Naturellement, c'est clair que ces enquêtes policières spécialisées impliquent des dépenses de $295 000 pour 1976/77. C'est inscrit. Maintenant, combien de cette somme est affecté à la filature, combien est affecté à d'autres activités, qui, de par la nature même des activités...

M. Burns: Ou à des informateurs.

M. Lalonde: Ou à des informateurs. Je pense que cela n'est pas conforme à l'ordre public qu'on le révèle ici, par exemple, ou publiquement d'une autre façon.

C'est justement la raison pour laquelle ces dépenses sont autorisées de façon différente, de fayon spéciale par la direction de la Sûreté et par le sous-ministre...

M. Burns: Je ne vous demande pas de me donner les noms des personnes qui font de la filature ou qui s'infiltrent dans des organismes. Vraiment, vous auriez raison.

M. Lalonde: Même donner des montants serait une indication des sources...

M. Burns: J'ai le droit, comme député de l'Opposition, de savoir ce que vous faites avec ces $295 300.

M. Lalonde: Oui, dans la mesure où c'est conforme à l'intérêt public, que ça devienne une information...

M. Burns: Je ne veux pas que le monde se mette à penser que vous mettez ça dans vos poches.

M. Lalonde: Non. M. Burns: Bon.

M. Lalonde: Je peux assurer le député d'Outremont que des...

M. Burns: Pas d'Outremont, de Maisonneuve.

M. Lalonde: ...le député de Maisonneuve, excusez-moi.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: Je ne veux pas insulter personne. M. Burns: Cela ne m'insulte pas, remarquez. M. Lalonde: Non, non, j'ai dit personne.

M. Burns: Cela peut peut-être insulter le député d'Outremont...

M. Choquette: Non, non, c'est un lapsus.

M. Lalonde: Non, je peux assurer le député de Maisonneuve que des dispositions sont prises pour que chaque dépense soit remboursée sur

preuve de dépenses et qu'elles sont remboursées sur autorisation de la haute direction de la Sûreté et globalement sur l'autorisation du sous-ministre de la Justice.

M. Burns: Les policiers — je vais vous poser une question plus directe alors — qui infiltrent des organismes syndicaux, qui se déguisent en travailleurs à toutes fins pratiques...

M. Lalonde: Je n'ai pas dit qu'il y avait des policiers...

M. Burns: Je vous dis qu'il y en a, vous le savez, à part ça, qu'il y en a.

M. Lalonde: Ce n'est pas ce que j'ai dit, je n'ai pas dit qu'il y en avait.

M. Burns: II n'y en a pas. C'est ce que vous me dites, qu'il n'y en a pas?

M. Lalonde: Je n'ai pas dit qu'il y en avait. M. Burns: Est-ce qu'il y en a? M. Lalonde: Maintenant... M. Burns: Est-ce qu'il y en a?

M. Lalonde: ...c'est fort possible que, dans des activités d'enquête, qu'il y ait...

M. Burns: M. le ministre, c'est la place où vous devez...

M. Lalonde: La période d'information...

M. Burns: Bien oui, c'est ça.

M. Lalonde: ...et de renseignement...

M. Burns: Laissez-moi terminer ma question et vous allez savoir si vous devez répondre ou non.

M. Lalonde: ...sur des mouvements qui peuvent affecter la sécurité publique. Mais quand même...

M. Burns: Je vous pose cette question-ci, les policiers qui infiltrent les organismes syndicaux, d'accord? Est-ce qu'ils sont inscrits à ce budget ou aux salaires tout simplement qui sont affectés aux traitements qui relèvent de la Sûreté du Québec?

M. Lalonde: Je ne réponds pas à la question tel que posée, mais je vais dire simplement que ces sommes ne couvrent pas les salaires des effectifs qui pourraient être affectés à des enquêtes policières spécialisées.

M. Burns: Moi, je suis policier provincial... M. Lalonde: Ce sont des dépenses...

M. Burns: ...et on m'affecte à infiltrer le syndicat de la construction à telle place, devenir membre. Je suis particulièrement bon comme menuisier, je rentre là, j'obtiens ma carte avec toutes les contorsions que ça présente dans les circonstances actuelles, mon salaire n'est pas à "Autres dépenses". C'est ça?

M. Lalonde: Je pense que le député de Maisonneuve fait de la spéculation.

M. Burns: Non.

M. Lalonde: Ce que je vais lui dire, c'est que...

M. Burns: Je ne pense pas.

M. Lalonde: ...dans les $295 000, si vous êtes policier à la Sûreté du Québec, affecté à une filature lors d'une enquête sur un crime, et que vous devez utiliser une automobile ou bien faire le plein, au lieu de montrer votre carte de la Sûreté du Québec, pour conserver votre anonymat, vous allez payer comptant et on va vous rembourser à même ces fonds, c'est ce genre de dépenses. Ce ne sont pas les effectifs.

M. Burns: Si à la baie James, par exemple, d'accord?

M. Lalonde: Hum, hum!

M. Burns: ...si à la baie James ou sur les chantiers olympiques, il y a des policiers qui sont là apparemment à titre de travailleurs...

M. Lalonde: C'est une question hypothétique.

M. Burns: Je vais vous la poser directement. Il y a des policiers sur les chantiers olympiques et il y a des policiers sur les chantiers de la baie James...

M. Lalonde: A titre de policiers.

M. Burns: ...qui sont déguisés en travailleurs.

M. Lalonde: Je ne pense pas.

M. Burns: Vous ne pensez pas? Non? M. Lalonde: S'il y en a...

M. Burns: II n'y en avait pas.

M. Lalonde: ...ce n'est pas de la Sûreté.

M. Burns: II n'y en a pas. Vous me dites qu'il n'y a pas de policier...

M. Lalonde: S'il y en a, ce n'est pas de la Sûreté...

M. Burns: ... à la baie James...

M. Lalonde: ...à ce moment-ci, pas que je sache.

M. Burns: II n'y en a pas. Est-ce qu'il y en a déjà eu?

M. Lalonde: Je ne pense pas, mais je ne le sais pas.

M. Burns: Dans le temps du fameux désastre LG 2, est-ce qu'il y en avait?

M. Lalonde: Peut-être que s'il y en avait eu, l'événement de LG 2 ne serait pas survenu.

M. Burns: Non. Imaginez-vous donc que non.

M. Lalonde: Dans le système syndical actuel, c'est à peu près impossible d'infiltrer, à titre de policier...

M. Burns: Impossible?

M. Lalonde: C'est extrêmement difficile.

M. Burns: II n'y a pas de policiers sur les lieux, à la baie James, en tant que travailleurs et il n'y a pas de policiers sur les chantiers olympiques, en tant que travailleurs. C'est cela que vous me dites? Mettez-vous votre siège en jeu là-dessus?

M. Lalonde: Les informations que j'ai sont à l'effet que...

M. Burns: Mettez-vous votre siège en jeu là-dessus?

M. Lalonde: Selon les renseignements que je possède, la réponse est négative.

M. Burns: Vous ne mettez pas votre siège en jeu là-dessus?

M. Lalonde: Ecoutez. Il faut quand même que je me fie...

M. Burns: Si je vous prouve le contraire, est-ce que vous démissionnez, comme député?

M. Lalonde: Non.

M. Burns: Non, hein?

M. Lalonde: Ecoutez, il faut quand même...

M. Burns: Vous faites bien en maudit, à part cela.

M. Lalonde: II faut quand même que je me fie aux informations qu'on me donne.

M. Burns: Vous faites bien, parce que vous ne seriez pas capable de maintenir une telle promesse ici. Je vous la pose avec le plus grand calme possible. Je veux savoir si les policiers...

M. Lalonde: II y a peut-être des anciens policiers qui sont...

M. Burns: Je ne vous parle pas d'anciens policiers. Je vous parle des gens qui sont des policiers actuels.

M. Lalonde: Des policiers de la Sûreté?

M. Burns: Des policiers de la Sûreté du Québec.

M. Choquette: Des policiers avec une barbe, par exemple.

M. Burns: Des policiers avec barbe, des policiers gauchistes, des policiers en jeans, des policiers avec des chandails déchirés et...

M. Tremblay: Des policiers avec une carte de membre du PQ.

M. Burns: Oui, c'est vrai. Des policiers secrétaires d'une association du PQ.

M. Lalonde: Je laisse aller le député de Maisonneuve...

M. Burns: Non, non.

M. Lalonde: II nous a fait un beau roman.

M. Burns: Ce n'est pas un roman.

M. Lalonde: Quelle est la conclusion du roman. C'est de la littérature. Vous lisez trop de journaux.

M. Burns: Non. M. Lalonde: Oui.

M. Burns: Je ne lis même pas les journaux pour vous dire cela.

M. Lalonde: Je ne sais pas quels livres vous lisez.

M. Burns: J'ai des oreilles.

M. Lalonde: Ce ne sont pas les mêmes que les miens.

M. Burns: D'accord.

M. Choquette: Savez-vous ce que les gens vont conclure de vos propos? Ils vont conclure qu'on est mal protégé par le Solliciteur général actuel.

M. Lalonde: Est-ce que le député d Outremont veut suggérer qu'il y en avait dans son temps?

M. Choquette: Je n'ai rien dit Mais ils vont conclure de vos propos qu'on est très mal protégé actuellement.

M. Lalonde: Je ne dis pas qu'il n'y aurait pas lieu d'en faire éventuellement.

M. Choquette: Ah bon! M. Burns: Ah!

M. Lalonde: Au besoin. Il ne faut pas fermer les portes...

M. Burns: Ce n'est pas cela. Je veux savoir, de la part du ministre, si oui ou non, cela se fait ces choses-là?

M. Lalonde: Les informations que j'ai, au moment où on se parle, cela ne se fait pas.

M. Burns: Les représentations qui ont été faites, récemment, par le Conseil central des syndicats nationaux, à Montréal, c'était inexact, qu'on ait découvert, à un moment donné, un policier de la GRC? Je sais bien que cela ne relève pas de vous.

M. Lalonde: Ah bon!

M. Burns: Non, je sais bien que cela ne relève pas de vous. C'était inexact ou...

M. Lalonde: Je ne sais pas. Si on parle de la GRC, je ne l'ai pas sous mon aile.

M. Burns: II n'y a pas de problème là. Dans le cas de la Sûreté du Québec, cela n'existe pas. C'est cela que vous me dites?

M. Lalonde: C'est ce que je vous dis, c'est ce qu'on me dit, c'est ce que je vous rapporte.

M. Burns: Cela n'existe pas?

M. Lalonde: Au moment où on se parle...

M. Burns: II n'y avait pas de policiers déguisés en travailleurs à LG 2 lorsque les troubles ont eu lieu?

M. Lalonde: Vous parlez d'un temps où je n'étais pas ici.

M. Burns: Ecoutez, je vous pose des questions comme celles-là. Il n'y a pas, actuellement, sur les chantiers olympiques, à Montréal, et dans le beau comté de Maisonneuve, il n'y avait pas, à ce moment-là, et il n'y a pas, actuellement, de policiers déguisés en travailleurs? Il n'y en a pas?

M. Lalonde: Cela fait combien de fois que je dis non, M. le Président.

M. Burns: Vous me dites non.

M. Lalonde: Je ne sais pas combien de fois il va falloir que je le dise. Peut-être qu'on aurait dû en avoir.

M. Burns: Bon!

M. Lalonde: Mais c'est un autre temps avant moi. Je ne veux pas faire de reproches à mon prédécesseur.

M. Burns: Mais je parle de maintenant.

M. Lalonde: II n'y en avait pas et on a vu ce qui est arrivé.

M. Burns: Actuellement, il n'y en a pas?

M. Lalonde: Cela fait combien de fois que je vous dis non; il n'y en a pas.

M. Burns: II n'y en a pas, actuellement. M. Lalonde: Actuellement, il n'y en a pas.

M. Burns: Je ne vous parle pas des informations que vous avez. Je vous demande de prendre les informations.

M. Lalonde: Mes renseignements sont quand même de bonne source. J'ai le directeur de la Sûreté assis à mes côtés, qui me confirme le fait.

M. Burns: Et vous prenez à votre charge, ce renseignement?

M. Lalonde: M le faut. M. Burns: D'accord.

M. Lalonde: Est-ce que vous préféreriez que je croie le député de Maisonneuve? Je suis bien prêt à le croire, mais il faudrait peut-être mettre en doute ses sources de renseignement.

M. Burns: D'accord. On va laisser cela là pour le moment.

Les autres dépenses à la supercatégorie 11 de l'élément 2. Dans les $295 000, on a découvert, jusqu'à maintenant, des informateurs. Qu'est-ce qu'il y a à part cela?

M. Lalonde: II y a toutes sortes d'activités de surveillance, comme je vous ai dit tantôt, des dépenses qui ne peuvent pas passer par les voies normales de remboursement, des activités de mise en place, de moyens d'écoute électronique qui sont autorisés par les autorités judiciaires, suivant la loi. C'est à peu près ce genre de dépenses.

M. Burns: D'accord.

M. Lalonde: Dans les cas de filature, par exemple, les automobiles...

M. Burns: Filatures spéciales.

M. Lalonde: ... qu'on doit louer à des... Cela coûte assez cher. Des locaux qu'on doit louer pour faire certaines surveillances.

M. Burns: Dans le domaine de l'écoute électronique...

M. Lalonde: Pas seulement dans le cas men-

tionné ou dans le cadre mentionné par le député de Maisonneuve, dans le crime conventionnel.

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: Quand on a une surveillance sur des groupes, des suspects, pour un vol de banque, il faut prendre certains moyens très confidentiels. C'est pour cela que ces dépenses sont remboursées de la même façon.

M. Burns: Tout cela, vous ne pouvez pas nous ventiler cet élément.

M. Lalonde: Je ne pense pas que ce soit conforme à l'intérêt public...

M. Burns: Est-ce que vous ne pourriez pas...

M. Lalonde: ... jque je dise combien exactement... D'ailleurs, on a le montant global. Ce ne sont pas des millions.

Ecoute électronique

M. Burns: L'écoute électronique, par exemple, dans cela, coûte combien?

M. Lalonde: Je ne pense pas que ce soit énorme, mais, encore là, j'aimerais mieux ne pas donner plus de détails. Je pense que le député de Maisonneuve va comprendre que, si ces dépenses sont faites de façon confidentielle, pour la meilleure administration de la justice, on doit, à un moment donné, s'abstenir de donner des chiffres.

M. Burns: D'accord. Si je vous posais une question directe comme celle-ci: Au moment où je vous parle, c'est-à-dire à 17 h 43, le 9 juin 1976, est-ce que vous êtes en mesure de me dire combien de personnes sont sujettes à l'écoute électronique actuellement, sous la juridiction de la Sûreté du Québec? Je ne parle même pas de la CUM et je ne vous parle même pas de la GRC. Est-ce que vous êtes en mesure de me dire cela, actuellement, à cette heure-ci?

M. Lalonde: En fait, je pourrais vous dire le nombre. Je ne suis pas sûr que ce soit encore là une indication...

M. Burns: Pas plus que les personnes qui sont visitées dont je vous parlais ce matin.

M. Lalonde: Qu'il y en ait 75 ou 150...

M. Burns: II va peut-être y en avoir 300 ce soir.

M. Lalonde: ... il va peut-être y en avoir 300 ce soir. Si je vous dis, au moment où on se parle...

M. Burns: Je vous donne une chance, parce que vous ne risquez pas de me mentir. Je vous dis...

M. Lalonde: Quoique...

M. Burns: II y a une minute qui s'est passée depuis ce temps.

M. Lalonde: Non, mais peut-être qu'à 5 heures, il y en a deux qui se sont terminées et qu'il y en a trois autres qui ont commencé.

M. Burns: Mais, actuellement, c'est de quel ordre, les personnes qui sont écoutées? C'est de quel ordre, l'importance de cela?

M. Lalonde: Ce n'est pas énorme.

M. Burns: Pis encore comme disait l'autre, pis encore comme disait mon grand-père?

M. Lalonde: Ce n'est pas énorme. C'est sûrement en-deça de la vingtaine.

M. Burns: En-deça de la vingtaine.

M. Lalonde: Nous n'avons pas de quoi fouetter un chat.

M. Burns: Par la Sûreté du Québec.

M. Lalonde: Par la Sûreté du Québec. Naturellement, il y a d'autres corps policiers.

M. Burns: II y a évidemment les autres corps policiers, en particulier la CUM...

M. Lalonde: La CUM et la GRC.

M. Burns: ... et la GRC. Est-ce que...

M. Choquette: Mais qui tombent sous la juridiction du Solliciteur général. Je tiens à l'affirmer à ce moment-ci, pour les fins d'écoute électronique.

M. Burns: C'est cela.

M. Choquette: II ne faudrait pas que le Solliciteur général trouve une autre façon de se défiler devant les questions de mon collègue.

M. Burns: C'est cela.

M. Lalonde: Je n'ai pas répondu, parce que je n'ai pas simplement la statistique.

M. Choquette: Oui, mais est-ce que les règlements ne sont pas les mêmes que ceux qui avaient été adoptés à l'époque?

M. Lalonde: Ils sont absolument mêmes. M. Choquette: Ils n'ont pas été changés.

M. Lalonde: Les autorisations sont faites par les mêmes personnes, sauf peut-être que c'était M. François Tremblay, je pense, qui les faisait avant que j'arrive. Depuis qu'il est au ministère, il a été remplacé à Québec. A Montréal, c'est la même personne qui est autorisée. Je n'ai pas les statisti-

ques actuellement. Le Code criminel, comme vous le savez, exige le dépôt d'un rapport que j'ai déposé, qui contient des statistiques globales. Alors, cela donne une bonne idée de l'usage qu'on fait de ce moyen d'enquête.

M. Burns: D'accord. Actuellement, c'est une vingtaine de personnes qui font l'objet de l'écoute électronique?

M. Lalonde: Quand je dis les cas, les projets, cela peut être plusieurs personnes pour un projet, parce que, quand même, quand des personnes se parlent, il y en a au moins deux.

M. Burns: Oui, mais je veux dire qu'il y a quand même une ligne chaque fois qui est tapée, ou il y a quand même un bureau qui est tapé. C'est de cela qu'on parle, on ne se contera pas d'histoire.

M. Lalonde: II y en a d'autres cas des résidences, une ligne, un bureau ou une résidence.

M. Burns: C'est cela. C'est dans ce style.

M. Lalonde: C'est dans cet ordre de grandeur.

M. Burns: Quand vous me dites 20, cela veut dire...

M. Lalonde: J'ai dit en deçà de 20.

M. Burns: En deçà de 20, pour la Sûreté du Québec. Pas au delà. Est-ce que vous êtes au courant pour les autres corps policiers?

M. Lalonde: Je pourrais obtenir les chiffres, mais si on fait le simple examen du rapport que j'ai déposé pour l'année dernière, cela donne une idée que ce n'est pas par centaines que chaque corps policier emploie ce moyen, c'est parce que c'est un moyen exceptionnel qui demande une autorisation judiciaire.

M. Choquette: J'ai le rapport du Solliciteur général ici au cas où il ne l'aurait pas. Au cours de l'année dernière, il y a eu 204 demandes de faites et 204 demandes acceptées.

M. Lalonde: Oui. Alors, ce n'est pas par centaines que chaque corps policier le fait.

M. Burns: Dans ces demandes, dans combien de cas a-t-on avisé au bout de 90 jours, les personnes contre qui il n'y avait pas de plainte de portée? Quels avaient été les objets de l'écoute électronique?

M. Lalonde: Les statistiques sont là. Naturellement, lorsque l'avis est donné au bout de 90 jours, il n'y a pas de permission renouvelée; a ce moment, dans chaque cas, l'avis est donné. Dans certains cas, il y a une autorisation de renouvelée.

M. Burns: De renouvelée. A ce moment, l'avis n'est pas donné.

M. Lalonde: A ce moment, l'avis n'est pas donné. L'avis est donné plus tard.

M. Burns: Oui. Est-ce que...

M. Lalonde: II y a des amendements qui sont actuellement à la Chambre des communes qui sont...

M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général a fait des représentations aux autorités fédérales relativement aux amendements qui sont actuellement projetés à la Loi concernant l'écoute électronique?

M. Lalonde: Oui.

M. Choquette: Dans quel sens ont été faites ces représentations?

M. Lalonde: Pour améliorer le système. J aimerais avoir la lettre que j'ai écrite encore tout récemment, appuyant certaines dispositions qui sont proposées à la Chambre des communes à Ottawa, l'avis de 90 jours, par exemple, qui nous apparaît, en fait, inutile dans certains cas.

M. Burns: Inutile? Inutile, qu'il a dit? J'ai bien compris?

M. Laionde: II y avait une restriction dans la preuve qu'on pouvait... Il y avait jusqu'à maintenant — nous avons appuyé ce changement — une restriction quant à l'utilisation de la preuve recueillie qui ne pouvait servir que pour le crime spécifique pour lequel l'autorisation avait été demandée. Cela a été élargi. Nous avons appuyé cet élargissement.

M. Choquette: Dans quel sens avez-vous suggéré...

M. Lalonde: Dans le sens qu'on pourrait se servir de cette preuve pour d'autres crimes qui sont découverts au moment de la cueillette de l'information...

M. Choquette: Pour le crime visé?

M. Lalonde: Pour un crime qui n'a pas été visé lors de la demande, mais qui est découvert par la suite.

M. Choquette: Est-ce que le Solliciteur général pourrait être plus précis? J'ai de la difficulté a saisir sa pensée avec toutes les nuances qu'il y introduit.

M. Lalonde: Admettons qu'on demande une autorisation à loccasion... D'abord, il y a eu un élargissement aussi des crimes pour lesquels

l'écoute électronique pouvait être demandée. Nous avons appuyé ce changement. Il y a aussi...

M. Burns: II n'y a pas encore d'élargissement. Il y a un projet.

M. Lalonde: II y a un projet. M. Burns: D'accord!

M. Lalonde: Mais je veux dire que nous avons appuyé... La question est de savoir quelle représentation nous avions faite. De plus, lorsqu'à l'occasion d'une écoute électronique on recueillait des informations qui pouvaient servir de preuve pour la commission d'un crime autre que celui qui avait servi à l'obtention...

M. Choquette: Cela a toujours été permissible de se servir de cette preuve pour procéder en justice.

M. Lalonde: Non, il y a eu de la jurisprudence dans le sens inverse en Ontario et qui menaçait de faire obstacle à ce genre de tentative devant nos cours, à savoir que si on offrait les renseignements recueillis par l'écoute électronique en preuve d'un autre crime que celui qui avait servi à l'obtention de l'autorisation, cela aurait pu être refusé, comme cela l'a été en Ontario. Cela va être clarifié par les amendements. Nous avons appuyé cette demande.

M. Burns: Est-ce que le ministre...

M. Choquette: Est-ce qu'il y a eu d'autres suggestions faites par le Solliciteur général?

M. Lalonde: C'est un autre amendement qui rétablit la règle de la "common law", c'est-à-dire qu'une preuve qui est recueillie, même illégalement, puisse servir. Jusqu'à maintenant, s'il y avait un vice de forme, par exemple, qui rendait la légalité sujette à des doutes, la légalité de la cueillette d'informations par voie d'écoute électronique, on ne pouvait pas se servir de cette preuve.

M. Burns: C'est un amendement que vous suggérez?

M. Lalonde: Que nous avons appuyé. Bien, c'est-à-dire, nous avons suggéré... Il y a plusieurs suggestions qui ont été faites à différentes étapes lors des conférences fédérales-provinciales, entre autres. Au cours des dernières auxquelles j'ai participé, cette question a été discutée à plusieurs reprises et nous avons suggéré et appuyé un certain nombre — non seulement nous; d'autres provinces l'ont fait — cette...

M. Burns: Vous savez jusqu'où cela peut vous mener, ce genre d amendement...

M. Lalonde: Oui.

M. Burns: ... que vous appuyez?

M. Lalonde: Cela peut nous mener, par exemple, à pouvoir faire la preuve d'un meurtre.

M. Burns: Cela peut vous amener aussi à faire, de façon illégale et en commettant des actes criminels, des preuves.

M. Lalonde: On sait très bien... Comme dans... M. Burns: Exemple: des effractions à l'APLQ.

M. Lalonde: La règle de la "common law" existe depuis toujours...

M. Burns: Oui.

M. Lalonde: ... c'est-à-dire que, quelle que soit la légalité de l'obtention de la preuve, une fois qu'on a la preuve, on puisse s'en servir en cour pour faire condamner un...

M. Burns: Vous voulez nous faire rétrograder là-dessus?

M. Lalonde: Non. Cette règle existe pour toutes sortes de preuves et de quelque façon qu'elle soit obtenue sauf qu'elle n'existait pas et qu'elle n'était pas applicable dans le cas de l'écoute électronique.

M. Burns: Vous savez ce que cela veut dire, M. le Solliciteur général.

M. Lalonde: J'aimerais terminer. M. Burns: C'est effrayant.

M. Lalonde: On établit pour l'écoute électronique la même règle de la "common law" qui existe pour toute autre façon d'obtenir des preuves.

M. Burns: Mais vous savez ce que cela veut dire? Cela veut dire aller "bugger" un bureau d'avocat qui rencontre un client. Cela s'est fait dans le passé. Cela s'est fait. Cela veut dire aller "taper" littéralement un bureau d'avocat qui a quand même droit à des conversations privilégiées, s'il vous plaît, avec ses clients. Autrement, changez tout l'esprit du droit criminel. Changez tout cela. C'est le minimum de confiance qu'un client a le droit d'avoir avec son avocat, d'être en paix pour pouvoir parler strictement à lui.

M. Lalonde: Oui, mais il faut quand même considérer que les nouvelles dispositions qui sont dans le Code criminel pour protéger justement la...

M. Burns: ... confidentialité... M. Lalonde: ... confidentialité...

M. Burns: Bien oui. Cela serait une preuve illégale que vous obtiendriez à ce moment.

M. Lalonde: Oui, mais ces dispositions sont de nature à protéger justement...

M. Burns: Jos. Bleau viendrait me voir comme avocat et me dirait: Oui, c'est moi qui ai tué le gars, sauf que les circonstances, c'est comme cela.

M. Lalonde: Si une preuve...

M. Burns: II n'est pas obligé d'arriver devant la cour et de dire: C'est vrai, c'est moi qui l'ai tué.

M. Lalonde: ...parvient à la police ou au ministère de la Justice, par une voie qui n'est pas légale, pas nécessairement parce que c'est le résultat de la commission d'un crime, la "common law", actuellement, prévoit que le ministère de la Justice peut se servir de cette preuve pour faire condamner quelqu'un. Il s'agit simplement de rétablir cette règle de la "common law " à la preuve recueillie par ce procédé électronique.

M. Choquette: Je ne suis pas sûr que ce point de vue ait été retenu par le législateur fédéral, même dans le projet qui est actuellement étudié par la Chambre des communes. Je pense que le Solliciteur général déforme la portée des amendements proposés par le gouvernement fédéral.

M. Lalonde: Non. On m'a demandé...

M. Choquette: Je ne pense pas que les amendements suggérés au Code criminel actuel vont aussi loin que le Solliciteur général le dit.

M. Lalonde: La question était de savoir quelles suggestions nous avions faites ou appuyées. Ce sont celles-là, de mémoire. J'en oublie peut-être une ou deux moins importantes. Est-ce que, depuis lors, le fédéral s'est ravisé et a changé son projet? Est-ce qu'il a retiré de son projet récemment des éléments qui ne seraient pas de ma connaissance? Naturellement, il faudrait voir ce qui arrive à ce sujet au jour le jour, mais la question était de savoir l'état de la situation, et, en ce qui concerne le Québec, ce que nous avons fait, ce que nous avons appuyé. Et voilà.

M. Burns: Est-ce qu'actuellement, M. le ministre, il y a des organismes politiques ou des hommes politiques qui font l'objet d'une écoute électronique?

M. Lalonde: Les organismes ou les personnes qui font l'objet d'écoute électronique font partie des informations confidentielles, qu'ils soient politiques ou autres.

M. Burns: Est-ce qu'il y a des hommes politiques ou des organismes politiques qui font actuellement l'objet d'écoute électronique?

M. Lalonde: Je viens de répondre que c'est une information confidentielle.

M. Choquette: Dans ces cas-là, est-ce que cela requiert l'autorisation personnelle du Solliciteur général?

M. Lalonde: De la même façon que cela l'exigeait lorsque je suis arrivé au ministère. Je crois que la règle qui avait été édictée à ce moment est une règle administrative. Ce n'est pas requis par la loi. Cela affectait les juges, les avocats, les députés, les sous-ministres.

M. Choquette: Les professionnels aussi.

M. Lalonde: Les avocats, les professionnels.

M. Choquette: Ceux qui bénéficient du secret professionnel.

M. Lalonde: Du secret professionnel aussi.

M. Burns: Est-ce qu'il ne s'agit pas de quelque chose qui échappe à votre contrôle si jamais ça provient du fédéral, le désir de faire de l'écoute électronique auprès de ce type de personnes? Et si oui, qu est-ce que vous avez fait pour parer à ça?

M. Lalonde: Ils doivent passer par nous, sauf dans les cas qui concernent la sécurité d'Etat, les statuts fédéraux et la Loi des secrets officiels.

M. Burns: Est-ce que depuis le 30 juin 1975, votre bureau a été appelé à donner de telles autorisations?

M. Lalonde: Répondre à cette question serait justement faire indirectement ce que je ne peux pas faire directement, c'est-à-dire révéler l'identité des personnes qui sont...

M. Burns: Je ne vous demande pas l'identité, je vous demande si ça existe.

M. Lalonde: En me demandant si ça existe, vous me demandez de révéler justement l'identité, peut-être pas précise, mais par catégorie des personnes qui pourraient faire l'objet d écoute électronique.

M. Burns: Si vous ne voulez pas me répondre, je suis obligé de conclure que cela eut lieu.

M. Lalonde: Pas nécessairement. Il ne faut conclure ni positivement ni négativement...

M. Burns: Non, parce que si vous me disiez carrément que cela n'a pas eu lieu, je dirais, bon, il n'y a pas de problème.

M. Lalonde: II ne faut conclure ni négativement ni positivement du fait que je ne peux pas... je demande au député de Maisonneuve de reconnaître que je suis lié par mon secret, moi aussi.

M. Burns: C'est parce qu'on est encore dans un domaine très très intime. On est dans le domaine de la liberté individuelle, dans le domaine des droits civils des personnes et c'est de ça qu'on parle.

M. Lalonde: Oui, mais...

M. Burns: Ce n'est pas pour faire des farces que je vous parle de ça.

M. Lalonde: Je sais, d'ailleurs nous traitons ça avec beaucoup de sérieux. Toutes les procédures sont établies de façon très claire, elles n'ont pas été changées depuis que je suis arrivé, je le dis au bénéfice du député d'Outremont qui me posait une question en ce sens tantôt. Elles sont appliquées avec beaucoup de sérieux et j'ai raison de croire que les corps policiers qui relèvent directement ou indirectement de l'autorité provinciale dans l'exercice de leurs fonctions se plient aux exigences de la loi en ce qui concerne l'écoute électronique.

M. Burns: Je pense qu'il est six heures, M. le Président.

Le Président (M. Brisson): Est-ce qu'on peut considérer le programme 17 comme adopté?

M. Burns: Non, M. le Président. M. Choquette: Non.

Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)

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