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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le lundi 28 juin 1976 - Vol. 17 N° 111

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Etude des crédits du ministère de la Justice

Séance du lundi 28 juin 1976 (Vingt heures vingt-six minutes)

M. Pilote (Président de la commission permanente de la justice):A l'ordre, messieurs!

La commission de la Justice s'est réunie aujourd'hui pour l'étude des crédits du ministère de la Justice. Sont membres de cette commission M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare (Johnson); M. Bienvenue (Crémazie) est remplacé par M. Beau-regard (Gouin); M. Burns (Maisonneuve); M. Ciaccia (Mont-Royal) est remplacé par M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue); M. Choquette (Outremont), M. Desjardins (Louis-Hébert); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par M. Fortier (Gaspé); M. Levesque (Bonaventure); M. Pagé (Portneuf) est remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Perreault (L'Assomption), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Springate (Sainte-Anne), M. Sylvain (Beauce-Nord), M. Tardif (Anjou).

Il faudrait nommer un rapporteur de cette commission. M. Tardif d'Anjou.

M. Tardif: II va voter contre.

M. Burns: Je demande le vote.

M. Levesque: II y a déjà un rapporteur.

Le Président (M. Pilote): II y a déjà un rapporteur.

Une Voix: Si vous voulez en nommer un autre, cela m'est bien égal.

M. Burns: Je propose le député de Sainte-Anne.

M. Springate: Je suis déjà rapporteur.

Le Président (M. Pilote): II est déjà rapporteur.

M. Burns: II est déjà rapporteur.

M. Levesque: On a déjà neuf heures de fait avec lui. C'est d'accord.

M. Burns: C'est bien mieux d'ailleurs. Bien mieux.

Le Président (M. Pilote): La parole est au ministre de la Justice.

Remarques préliminaires

M. Levesque: Monsieur le Président, dans un premier temps, j'aimerais préciser les programmes qui relèvent de mon autorité à titre de ministre de la Justice. Ces programmes se répartissent en sept secteurs et douze programmes tels qu'indiqués aux pages 16.1 et 16.2 du livre des crédits pour l'année financière 1976/77. Le programme 1, Fonctionnement du système judiciaire, comprend le salaire des juges, c'est à l'ordre du jour, et les dépenses de fonctionnement des cours de justice telles que Cour supérieure, Cour des sessions de la paix, Cour provinciale, Cour de bien-être social et les Cours d'accès à la justice ainsi que les budgets du Tribunal des transports et du Tribunal de l'expropriation.

Le programme 3, Gestion interne et soutien, comprend les budgets de fonctionnement de mon cabinet et celui du sous-ministre, les services de la recherche et de l'information, du comité de la protection de la jeunesse, du bureau d'administration de la Loi des huissiers et du service de consultation et d'assistance en toxicomanie. Ces budgets de fonctionnement sont regroupés à l'intérieur de l'élément 1, Direction du programme 3, Gestion interne et soutien.

Les autres éléments du programme contiennent la gestion du personnel, la Direction de l'équipement, la gestion financière, la Direction des systèmes de gestion et l'Office de révision du Code civil.

Le programme 4, Garde des prévenus et des détenus, comprend les budgets de fonctionnement de nos établissements de détention.

Le programme 6, Aide juridique et financière, comprend le budget de fonctionnement de l'aide juridique et du Service d'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le programme 8, Contrôle des jeux de hasard et des courses, est sous la responsabilité du président de la Régie des loteries et courses du Québec.

Le programme 9, Contrôle des permis d'alcool, est sous la responsabilité du président de la Commission de contrôle des permis d'alcool.

Le programme 11, Conciliation entre locataires et propriétaires, est sous la responsabilité du président de la Commission des loyers.

Les programmes 10 et 12 comprennent le contentieux général du gouvernement et le contentieux pénal qui sont sous la responsabilité du sous-ministre associé à la Direction générale des affaires civiles et pénales.

Lors de l'étude des crédits, au niveau des programmes, il me fera plaisir de vous fournir de plus amples renseignements concernant les fonctions et attributions des responsables de ces programmes.

Les crédits des programmes 1 à 12 s'établissent à $144 513 600. Les crédits du secteur des institutions judiciaires, qui comprend les programmes 1, 2 et 3, et le secteur des institutions pénales, le programme 4, se totalisent à $87 968 100, soit 60,9% du total des crédits des programmes qui relèvent de ma juridiction. Les crédits du secteur de la réadaptation sociale, qui comprend le programme 5, Réinsertion sociale des délinquants, et le programme 6, Aide juridique et financière, se totalisent à $29 474 900, soit

20,4% du total des crédits des programmes 1 à 12.

En fait, à l'examen du livre des crédits, on constate que les programmes de ces trois secteurs, soit les institutions judiciaires, les institutions pénales et la réadaptation sociale, représentent 81,3% des crédits des programmes 1 à 12 inclusivement et 75,9% des effectifs. Le poste Traitements se totalise à $96 263 100, soit 66,6% du total des crédits. Les effectifs inscrits au livre des crédits de 1976/77, pour les programmes 1 à 12, s'établissent à 7907 postes. Des effectifs additionnels de 238 postes ont été obtenus pour la mise en application de nouvelles lois ou la création de nouveaux services tels le Comité de la protection de la jeunesse, le Bureau d'administration de la Loi des huissiers, la mise en application des titres II et III de la Loi du Tribunal de l'expropriation, le personnel de soutien des juges. Des postes additionnels ont été obtenus en vue de répondre à l'augmentation du volume des services au sein des cours de justice à la Direction des affaires civiles et pénales, à la Direction des établissements de détention et les services de soutien à l'administration.

Les crédits de $144 513 600 pour l'année 1976/77, pour ces programmes 1 à 12, qui sont soumis à l'approbation de cette commission parlementaire représentent une augmentation de $13 189 900 ou 10% du budget modifié de $131 323 700 pour l'année 1975/76.

Au chapitre des augmentations budgétaires, les crédits du programme Aide juridique passent de $18 057 100 à $21 414 800, soit une augmentation de $3 357 700, ce qui représente un taux de croissance de 19%.

Les crédits du programme 11, Conciliation entre locataires et propriétaires passe de $3 794 500 à $4 914 500, soit une augmentation de $1 120 000. Les autres augmentations au niveau des programmes du secteur des institutions judiciaires, des institutions pénales et du secteur de la gestion juridique du cadre socio-économique résultent de l'application des conventions collectives. Nous avons pu maintenir le taux de croissance de nos dépenses à 10% par une révision des activités de certains programmes et par une utilisation maximale de notre personnel.

Les revenus pour l'année financière 1976/77 sont estimés à $62 324 400, les droits des permis imposés aux détaillants de vente de bière et de spiritueux sont estimés à $20 650 000 et représentent 33 1/3% des revenus. Les autres postes de revenu sont $9 040 000 provenant des infractions au Code de la route, $7 650 000 de l'enregistrement des droits et $7 millions provenant des actes judiciaires. Les contributions du gouvernement du Canada pour les programmes à frais partagés, soit le programme d'aide juridique, le programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels et la Protection civile, sont évalués à $3 783 200.

Dans ce bref tour d'horizon, j'ai voulu indiquer aux membres de cette commission parlementaire les principaux secteurs d'activité de mon ministère.

Au cours de l'étude des crédits au niveau des programmes, il me fera plaisir de vous fournir de plus amples renseignements concernant les services que le ministère rend à la population afin d'assurer un bon soutien administratif à nos cours de justice et d'assurer l'application des différentes lois qui relèvent du ministère de la Justice.

Le Président (M. Pilote): Le député de Maisonneuve.

Administration publique

M. Burns: M. le Président, contrairement au ministre de la Justice, j'ai eu l'occasion, moi, de commencer les travaux du ministère de la Justice ou l'étude des crédits du ministère avec le Solliciteur général, de sorte que toutes les remarques que j'ai faites à ce moment, je pense, seraient superflues à ce niveau-ci.

D'autre part, le ministre de la Justice me permettra quand même de poser un certain nombre de questions ayant déjà fait l'objet de discussions avec le Solliciteur général qui, évidemment, dans les crédits du ministère de la Justice, doit défendre les programmes 13 à 19, je crois.

Cependant, avant d'entrer dans le détail de chacun des programmes et sans faire de baratin de départ, j'aimerais, quand même, me référer à une conférence qu'a donnée le sous-ministre de la Justice, M. Robert Normand, qui a été rapportée dans le Soleil du 4 septembre 1975.

M. Levesque: La Presse.

M. Burns: Vous étiez déjà prêt, M. le ministre?

M. Levesque: Oui, je suis toujours prêt.

M. Burns: Donc, c'était dans la Presse, sous le titre: "L'appareil gouvernemental québécois, un monstre compliqué et inefficace." Cela m'avait, à l'époque, un peu surpris d'entendre cela de la part du sous-ministre, surtout qu'un nouveau ministre de la Justice venait à peine d'être nommé. En septembre dernier, une telle affirmation, comme le dit d'ailleurs, M. Claude Gravel, le journaliste, nous paraissait un peu sombre pour l'avenir.

J'aimerais savoir, de la part du ministre actuel, quels sont les commentaires qu'il a l'intention de nous faire, dès le départ de l'examen de ses crédits, relativement à une telle affirmation. J'irais même plus loin, une des affirmations qui m'ont fait sursauter venant d'un sous-ministre était la suivante: "L'appareil gouvernemental québécois des années soixante, dominé par "une minorité de gauche très active", a engendré aujourd'hui un monstre bureaucratique qui existe davantage pour se perpétuer que pour répondre aux besoins concrets de la population."

Cela m'étonne de la part d'un sous-ministre pour qui j'ai beaucoup d'estime, d'ailleurs, et cela me fait me poser la question: Qu'en est-il de cette affirmation? Où va-t-on avec cela? Est-ce que l'appareil gouvernemental québécois est véritablement "un monstre compliqué et inefficace "?

En particulier en matière de justice, est-ce qu'il s'agit d'un monstre qui ne permettrait pas d'entrevoir des solutions éventuellement? Comme question générale, le ministre pourrait nous donner une réponse.

M. Levesque: Je dirais tout d'abord au député de Maisonneuve que le sujet qu'il aborde ne devrait pas, à mon sens, avoir pignon sur rue à l'intérieur des crédits du ministère de la Justice. La seule justification est qu'il s'agirait d'un haut fonctionnaire du ministère de la Justice. Mais il faut bien comprendre qu'au moment où M. Robert Normand s'adressait à des administrateurs, il le faisait à titre de conférencier, de personne-ressource, et il faut dire qu'il le faisait également dans un contexte en dehors de ses fonctions comme telles de sous-ministre de la Justice.

Il donnait, à ce moment-là, ses vues personnelles sur une administration et non pas sur des faits tellement récents. J'essaie de parler pour lui, parce qu'il pourrait le faire beaucoup mieux que moi, avec beaucoup plus d'autorité, mais afin de répondre assez brièvement à la question du député de Maisonneuve, je lui dirai qu'il jugeait, à ce moment-là, une quinzaine d'années d'administration récente un peu dans tous les secteurs, et il portait un jugement comme gestionnaire.

Lorsque le député de Maisonneuve cite le titre en question, cela ne correspond pas du tout, d'après mes renseignements, au contenu de la conférence du sous-ministre. Mettant cela de côté, il faut bien comprendre que, comme gestionnaire, j'aurais souvent les mêmes réactions que mon sous-ministre. Il faut bien comprendre qu'au début des années soixante, on a voulu purifier et sublimer le plus possible.

M. Burns: Vous avez fait quoi depuis ce temps-là?

M. Levesque: ...au point tel, laissez-moi finir, au point tel qu'aujourd'hui, avec toute cette virginité dont on s'entoure, l'efficacité souvent s'en ressent. C'est ce sentiment qu'a voulu rendre, j'imagine, je ne voudrais pas parler en son nom, le sous-ministre de la Justice. Comme gestionnaires, à certains moments, on devient impatient, et cela se comprend, avec les "enfarges" qu'on s'est créés, de toutes sortes, dans l'administration publique. Voilà ce que j'avais à dire là-dessus.

M. Burns: Mais quand même, lorsqu'on nous dit, M. le ministre, qu'une minorité de gauche très active durant les années soixante, a engendré, aujourd'hui, un monstre bureaucratique.

C'est une opinion que je considère comme très éclairée, parce que c'est quelqu'un qui, non seulement actuellement est sous-ministre de la Justice, mais aussi a été bien placé à l'époque où il agissait comme officier légiste — j'oublie son titre de l'époque, avant d'être sous-ministre — comme greffier en loi, si je ne me trompe pas. Je me dis qu'à ce moment, peut-être a-t-il décelé un symptôme assez important dans l'administration, sinon de la justice, du moins de l'administration gouvernementale et, comme tel, je me demande ce que le ministre de la Justice actuel propose comme modification, comme réforme qui pourrait éventuellement, non pas empêcher d'autorité, mais empêcher dans les faits son sous-ministre de dire ou de répéter une telle chose.

Pas que je blâme le sous-ministre d'avoir dit cela. Si c'est sa constatation, je le félicite de l'avoir fait, au contraire. Mais je voudrais savoir ce que le ministre de la Justice a l'impression qu'on devrait changer dans l'administration de la justice ou dans l'appareil gouvernemental pour en arriver à ce que le sous-ministre de la Justice n'ait plus, à l'avenir, à dire qu'une minorité de gauche très active a engendré aujourd'hui un monstre tel que celui que vous subissez.

M. Levesque: Premièrement, il ne faudrait pas sortir certaines phrases d'un contexte donné; je pense que c'est injuste envers celui qui a prononcé les paroles en question. Deuxièmement, le sous-ministre de la Justice ne parlait pas, à ce moment-là, dans sa fonction de sous-ministre de la Justice, mais comme un gestionnaire d'expérience qui faisait part de ses vues. D'ailleurs, il en faisait part à l'intérieur d'une réunion où il ne s'attendait pas à ce que ses paroles aient la répercussion qu'elles ont eue.

M. Burns: Savez-vous lors de quelle réunion? Vous savez à quelle réunion?

M. Levesque: A Ottawa, devant l'Institut d'administration publique.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Troisièmement, je crois que toute cette question pourrait être discutée dans un autre contexte, où la personne qui a prononcé ces paroles aurait l'occasion elle-même de s'expliquer, et je ne crois pas que ce soit à ce moment-ci.

M. Burns: Je veux être bien clair, M. le Président; il ne s'agit pas de contester les paroles prononcées par le sous-ministre en question, encore une fois, pour qui j'ai beaucoup de respect et d'estime. Ce n'est pas du tout dans cet ordre d'idées que j'ai l'intention d'intervenir. Je pose la question uniquement au niveau de l'administration publique sachant qu'une des personnes, je ne dis pas que c'est la seule, autorisées au Québec à parler en matière de justice s'adonne à être le sous-ministre de la Justice. Je m'étonne que le ministre de la Justice n'ait pas la possibilité de me répondre relativement à une affirmation comme celle-là, ou bien il me dit: Ecoutez, c'est une opinion personnelle que je ne partage pas, ce que je regretterais d'ailleurs, parce que cela démontrerait, de la part du ministre de la Justice, une méconnaissance de la situation, ce que je ne suis pas prêt à accepter de sa part.

M. Levesque: Voici, je dirais...

M. Burns: Mais cela démontrerait aussi, je pense, une façon de mettre de côté un problème qui, à mon avis, est très important. Ou bien l'administration actuelle est prête à fonctionner avec la structure qui existe ou bien la structure qui existe n'est absolument plus adéquate et doit être changée; à ce moment-là, cela demande des réformes. Je demande au ministre de la Justice quelles sont ces réformes qu'il entend nous proposer éventuellement, mises à part les lois de l'organisation judiciaire, etc.

M. Levesque: S'il y avait des réformes, elles seraient proposées par le ministre des Finances, par exemple, dans la question de l'administration de la question financière. D'ailleurs, le ministre des Finances a proposé des réformes et les a même réalisées récemment. Il faut se rappeler que le sous-ministre avait également rendu hommage à la qualité des hommes qui y étaient présentement; le député n'a pas mentionné cela. C'est sorti du contexte, j'ai dit qu'une partie c'était dangereux. Il avait même mentionné, si ma mémoire est fidèle, qu'il avait confiance en ces hommes et qu'il était optimiste quant à l'avenir; cela n'a pas été mentionné par le député de Maisonneuve.

On sort d'un contexte certaines phrases et on les place dans la bouche de quelqu'un qui ne peut pas s'expliquer à ce moment-ci; c'est normal, on n'est pas à l'endroit qu'il faut pour en parler. Mais disons que pour revenir...

M. Burns: Où devons-nous en parler?

M. Levesque: Ce n'est pas comme sous-ministre de la Justice qu'il parlait mais comme gestionnaire et comme conférencier...

M. Burns: Oui, oui.

M. Levesque: ...comme personne ressource. D'ailleurs, ce qu'il a dit, je ne crains pas de dire que cela a eu un écho très favorable chez moi, parce qu'également, comme gestionnaire, à un moment donné, je me pose des questions. C'est bien beau de vouloir avoir un Conseil du trésor. C'est parfait. L'institution est nécessaire. C'est très bon. Il faut avoir une Commission de la fonction publique, c'est très bon. Ce sont des institutions essentielles, nécessaires. Il y a des mesures qui sont prises comme la question des soumissions publiques. Tout cela, c'est nécessaire. Quand on a connu ce que c'était autrefois, toutes ces institutions sont devenues nécessaires. Mais, cela ne veut pas dire que, parce que ces institutions sont en place, elles ne peuvent pas être améliorées et permettre aux gestionnaires, qui ont comme principal objectif l'efficacité, de pouvoir opérer d'une façon meilleure et qui correspond mieux aux objectifs qu'ils poursuivent. C'est cela que je dis, c'est cela qu'il a dit.

M. Burns: M. le ministre, j'ai nettement l'impression qu'on ne se comprend pas, au départ. D'une part, que ce soit bien clair que je ne conteste pas le droit du sous-ministre en question d'avoir dit ce que j'ai cité tout à l'heure. Ce que je veux savoir c'est: ou bien le ministre de la Justice endosse ces propos ou bien il ne les endosse pas. S'il les endosse, j'ai des questions à lui poser par la suite. S'il ne les endosse pas, je n'ai pas d autres questions à lui poser.

M. Levesque: Je n'ai pas à les endosser, parce qu'il ne parlait pas comme sous-ministre de la Justice. Comme ministre de la Justice, je n'ai pas à endosser l'avis d'un citoyen, même d'un citoyen aussi eminent que le sous-ministre de la Justice, sur ses vues qu'il a données comme conférencier à une réunion d'administrateurs publics. Je suis allé aussi loin, cependant, que de dire que ceci avait fait chez moi une excellente impression.

M. Burns: Est-ce que les mots suivants ont fait une excellente impression chez vous? Je cite: "J'ai parfois — c'est le sous-ministre qui parle — l'impression que la moitié du gouvernement sécrète des normes dont l'autre moitié surveille l'application". "Le haut fonctionnaire a soutenu — c'est le journaliste Claude Gravel qui parle — que la multiplication des commissions et des comités de tous genres ainsi que les pouvoirs de plus en plus larges que se donnent les ministères compliquent la prise des décisions ". Il a cité le cas du livre blanc qui n'est pas de votre cru, M. le ministre, qui est du cru de votre prédécesseur dont on déplore ce soir l'absence.

M. Levesque: Déplorez-le tout seul.

M. Burns: Oui. Remarquez que ce n'est pas moi qui dis cela. Il a cité le cas du livre blanc sur la Justice, publié en juin, dont l'avenir — écoutez bien cela — "est compromis parce qu'il devra être défendu devant trop de ministères et de commissions". Je ne blâme pas...

M. Levesque: Le livre blanc devra être défendu?

M. Burns: ...le sous-ministre d'avoir dit cela, au contraire, je pense que si j'avais participé à cette conférence, j'aurais probablement dit la même chose. J'espère que je ne coule pas définitivement le sous-ministre en question, parce que ce n'est pas mon but.

M. Levesque: Vous le rehaussez davantage dans l'estime de ses concitoyens.

M. Burns: En tout cas, cela dépend des points de vue.

M. Levesque: C'est un instrument très positif...

M. Burns: C'est très délicat, je le reconnais et je m'en excuse d'avance auprès de Me Normand qui n'a pas à subir ce genre de tests et de ques-

tions. Ce n'est pas à son endroit que je pose ces questions, sauf que...

M. Levesque: Continue2.

M. Burns: ... si Me Normand a dit ces choses, avec le sens des responsabilités qu'on lui connaît, avec le poste qu'il détenait, à l'époque, comme sous-ministre en titre de la Justice il m'apparaît très clair que cela devait faire partie d'un certain nombre de politiques de son ministère. Autrement...

Je vais vous donner un exemple. Je ne me sentirais pas, moi, même comme simple député du Parti québécois qui préconise l'indépendance du Québec, la possibilité d'aller devant une tribune, qu'elle soit aussi simple, comme l'a dit le ministre de la Justice, que la conférence annuel de l'Institut d'administration publique du Canada, et de dire à titre personnel: L'indépendance, vous savez, c'est une chose qu'on va mettre de côté lors de la prochaine campagne électorale. Je ne me sentirais pas cette capacité, pour une raison bien simple que je serais en dehors de la ligne de mon parti et il me resterait...

M. Levesque: En rupture de ban.

M. Burns: Non, non.

M. Springate: Un dissident.

M. Burns: Si vous voulez faire des farces, faites-en! Surtout pas vous, le député de Sainte-Anne. Ne faites pas de farces là-dessus.

M. Springate: Comment?

M. Burns: Vous n'avez pas de farces à faire sur les choses qui ne cadrent pas avec les idées de son parti.

M. Springate: On est libre dans notre parti.

M. Burns: Ah oui! ah oui! On est libre de se faire suspendre, de se faire mettre dehors et...

M. Springate: On est libre.

M. Burns: ... de revenir, de faire des "talk shows" et tout ce que vous voulez à CFCF. En tout cas...

Je vous donne cet exemple un peu gros, je l'admets. Je sais fort bien que le sous-ministre de la Justice n'est pas dans le même cas que moi par rapport à mon parti, mais cela m'apparaît que quelqu'un en autorité dans le ministère, quel que soit l'endroit où il fasse une telle déclaration, exprime jusqu'à un certain point la position du ministère. A ce moment-là, je voudrais savoir quelle est l'attitude du ministère quant aux réformes envisagées pour changer cette minorité de gauche très active qui empêche véritablement l'appareil gouvernemental québécois de se débarrasser de ce monstre compliqué et inefficace.

J'aimerais savoir, de la part du ministre de la Justice, si lui aussi a parfois l'impression que la moitié du gouvernement sécrète des normes dont l'autre moitié surveille l'application. J'aimerais savoir, de la part du ministre de la Justice, si les comités de tout genre, ainsi que les pouvoirs de plus en plus larges que se donnent les ministères compliquent la prise des décisions.

Je m'adresse non seulement au ministre de la Justice, mais également, je pense, au leader du gouvernement qui est très bien placé pour me donner des réponses concrètes, précises relativement à ces questions qui sont soulevées non pas par moi — remarquez que j'aurais pu les soulever, mais ce n'est pas moi qui l'ai fait, donc je n'en prends pas le crédit — mais par le sous-ministre de la Justice.

M. Levesque: Je vais vous donner un exemple pour répondre à votre question. Lorsque j'étais ministre des Affaires intergouvernementales, j'ai présenté un projet de loi qui a été adopté d'emblée, avec enthousiasme par, en particulier, l'Opposition officielle. Je me donnais des pouvoirs de contrôle, de revue et de vue sur les accords, les ententes qui intervenaient entre l'un ou l'autre des ministères du gouvernement et même des organismes gouvernementaux et paragouvernementaux et le gouvernement fédéral ou autres institutions étrangères au Québec. A ce moment, je traduisais la volonté du ministère des Affaires intergouvernementales. C'était dans un but de coordination, un but réellement louable quant à moi, à ce moment. Lorsque je suis arrivé au ministère de la Justice et que j'ai vu ce que j'avais fait au ministère des Affaires intergouvernementales, je me suis dit: Je me suis créé des "enfarges" au ministère de la Justice. Non seulement suis-je obligé maintenant d'aller au Trésor, au cabinet des ministres, puis passer par telle et telle chose, maintenant avant de signer une entente qui me semble bien raisonnable avec le gouvernement fédéral, mais je suis obligé d'aller au ministère des Affaires intergouvernementales. Ma réaction à moi, comme ministre de la Justice, c'est une autre "enfarge", mais c'est moi-même qui l'ai créée. Ce ne sont pas tellement les gens de gauche; peut-être qu'ils m'ont inspiré, mais je l'avais accepté. C'est dire qu'à force de vouloir bien faire on multiplie les "enfarges". A un moment donné, un gestionnaire devient un peu tanné, écoeuré même, et c'est un sentiment normal de quelqu'un qui veut être efficace. Par contre, il faut bien comprendre que chacun des gestes posés et des mesures adoptées l'ont été en vue du bien commun, l'ont été en vue d'une meilleure coordination, d'une meilleure efficacité. Efficacité pour l'un n'est pas nécessairement efficacité pour l'autre.

Ce que le sous-ministre de la Justice a dit, il l'a dit dans un contexte donné. Si on l'analyse ici ce soir durant l'étude des crédits on ne rendra pas justice au sous-ministre, on ne rendra pas justice au texte qu'il a livré et je pense qu'on se fourvoierait d'aller davantage là-dedans.

M. Burns: Bon, alors...

M. Levesque: Autant que si on commençait à parler du député de Maisonneuve, de ses problèmes avec le conseil national du parti, commencer à en discuter. Mais est-ce que le député de Maisonneuve, qui est le critique officiel du ministre de la Justice à l'intérieur de ses crédits, traduisait la pensée du parti dans la querelle avec le journal Le Jour? C'est intéressant, c'est intéressant. Est-ce que le député de Maisonneuve, lorsqu'il a été question, par exemple, du salaire des députés, on parle des juges aujourd'hui...

M. Burns: Pourquoi n'en parlerait-on pas? On va en parler des juges tout à l'heure.

M. Levesque: On parle des députés. Apparemment le vote était de 46 contre 47, quelque chose comme cela dans le temps. Est-ce qu'il traduisait réellement la volonté...

M. Burns: Est-ce que vous avez des délégués à notre conseil national?

M. Levesque: On pense toujours que le ministre de la Justice est bien au courant, non. Je reçois simplement des confidences de part et d'autre...

M. Burns: Ah bon!

M. Levesque: ...de gens qui sont des bons citoyens même s'ils sont du Parti québécois.

M. Burns: Bon. Vous ne savez pas la porte que vous m'ouvrez, ce n'est pas croyable.

M. Levesque: J'aime ouvrir des portes, parce que je suis très à l'aise et je voudrais que la lumière se fasse.

M. Burns: Mais je n'entrerai pas par cette grande porte que vous m'ouvrez...

M. Levesque: Je le savais.

M. Burns: ...parce que cela peut allonger nos débats de quelques jours et ce n'est pas mon intention. Maintenant que j'ai établi les prémisses, je vous prie d'exclure le sous-ministre de la Justice de notre discussion, parce que j'ai beaucoup trop de respect pour les hauts fonctionnaires et pour le travail qu'ils font, je n'ai pas l'intention de les mêler à une discussion politique.

D'accord? On s'entend là-dessus. Je ne parle plus de Me Normand à compter de maintenant.

M. Levesque: On me permettra, à ce moment-ci, puisque le député de Maisonneuve l'a fait, de rendre hommages à Me Normand...

M. Burns: Sûrement.

M. Levesque: ... et à ses collaborateurs...

M. Burns: Sûrement.

M. Levesque: ... qui font un travail extraordinaire.

M. Burns: Si vous voulez les nommer, d'ailleurs, cela me ferait plaisir de vous les entendre nommer.

M. Levesque: Je dois dire, en toute humilité mais en toute objectivité également, que je suis au ministère de la Justice depuis à peine dix mois. C'est une fonction que j'ai acceptée avec beaucoup de réticences, avec beaucoup de réserves, connaissant mes limitations et connaissant également l'énormité de la tâche. C'est grâce à Me Normand et à ses collaborateurs et collaboratrices que j'ai pu tenir le coup et j'espère avoir bien servi la province.

M. Burns: Voulez-vous nous présenter vos collègues, à part Me Normand? Je n'ai pas d'objection.

M. Levesque: II y en a plusieurs, II y en a tellement qu'on pourrait peut-être commencer en demandant à chacun de donner leurs nom et fonction. MM. René Langevin, sous-ministre associé; Pierre Dorion, directeur général des greffes; Gilles Tremblay, adjoint; Jean-Claude Dubois, directeur du budget; Mme Elizabeth Lavoie, attachée de presse; MM. Georges Gendron, directeur du bureau de l'administration de la loi des huissiers; René Hurtubise, président de la Commission des droits de la personne; René Morin, trésorier de la Commission des services juridiques; Yves Lafontaine, vice-président de la Commission des services juridiques; Bernard Desjarlais, président de la Commission des loyers.

M. Levesque: II y a des juges aussi.

M. Burns: Oui, il y en a qui devraient dire M. le juge.

M. Levesque: MM. Maurice Gauthier, sous-ministre associé; Paul Périard, vice-président du Comité pour la protection de la jeunesse; Mlle Lyse Lemieux, sous-ministre associé; MM. Guy Dorion, président du Tribunal de l'expropriation; juge Jacques Trahan, président de la Commission de contrôle des permis d'alcool du Québec; Conrad Prénoveau, président de la Régie des loteries et courses du Québec; André Boudreau, directeur du Service de consultation et expert en toxicomanie; Paul Crépeau, président de l'Office de révision du Code civil; Clément Ménard, directeur général du personnel.

M. Burns: Maintenant que ces présentations ont été faites, je reviens à la question de base. Qu'est-ce que vous avez l'intention de faire ou encore qu'est-ce que vous avez fait pour réformer la situation qui était décrite et qui, semble-t-il, est acceptée par vous comme un monstre compliqué et inefficace comme appareil gouvernemental?

Qu'est-ce que vous envisagez comme réforme de la loi?

M. Levesque: En attendant que le monstre reprenne des proportions humaines, nous avons voulu prendre un peu des proportions de monstre. Nous avons travaillé plus fort, nous avons fait des pieds et des mains auprès de ces institutions afin de pouvoir faire valoir notre point de vue et nous avons été assez chanceux, en général. Par exemple, dans les mesures anti-inflationnistes il y a eu des gels d'effectifs, mais il y a eu des exceptions dans certains domaines du ministère de la Justice, en particulier du côté de la sécurité publique et du côté de la détention et de la probation, surtout de la détention.

Nous avons réussi de ce côté-là. Nous avons également fait accepter certaines augmentations, dans nos budgets, qui étaient, à notre point de vue, essentielles malgré une norme générale. Nous avons, dans certains domaines, dépassé ou fait accepter de dépasser certaines normes à cause des plaidoyers "monstrueux" que nous avons pu faire.

M. Burns: Parlant de monstruosité, est-ce que vous vous êtes enquis relativement à cette minorité de gauche très active qui engendrerait le monstre bureaucratique qui avait été si "hitch-cockiennement" décrit par votre sous-ministre?

M. Levesque: Le député de Maisonneuve est toujours ou semble, du moins, être impressionné, affecté défavorablement, curieux ou inquiet lorsqu'on parle de la gauche.

M. Burns: Oui, cela m'intéresse beaucoup. M. Levesque: Oui.

M. Burns: Oui, énormément à part cela, je vais vous le dire. Si vous avez des problèmes là-dessus, moi je suis prêt à répondre à vos questions.

M. Levesque: Le seul problème que j'ai avec la gauche, c'est la question de la définition. Quant à moi, je peux être de gauche tous les jours; surtout quand il s'agit des questions gaspésiennes, je me trouve très à gauche. A un moment donné, je suis à droite quand il s'agit de Montréal. Tout est relatif.

M. Burns: Oui, mais, même ne faisant cette aparté, est-ce que cela vous tenterait de répondre à ma question?

M. Levesque: Bien moi, je ne sais pas quelle est la définition que le sous-ministre a de la gauche.

M. Burns: Bien, moi, non plus.

M. Levesque: Si j'avais su qu'on poserait la question ce soir, j'aurais invité mon sous-ministre à luncher et je lui aurais demandé: Qu'est-ce que tu penses de la gauche au Québec ou quelle gauchie avais-tu à l'esprit quand tu as parlé de cela? Moi, je m'imagine que ce qu'il voulait dire par la gauche — je vous prie de m'excuser si je le traduis mal — c'étaient ceux qui inventent des patentes pour diminuer l'efficacité. Probablement que c'est ce qu'il voulait dire. Il ne parlait pas des péquistes en particulier.

M. Burns: Moi, je ne visais pas les péquistes non plus, mais je voulais savoir ce que c'était que la gauche très active.

M. Levesque: Pour vous, si vous ne visiez pas les péquistes, c'est que vous ne pensez pas que les péquistes sont des gauchistes.

M. Burns: Non, non. Je n'ai jamais pensé cela. De toute façon, la gauche c'est très relatif...

M. Levesque: C'est cela.

M. Burns: Bon! Cela dépend de l'endroit où on se trouve. A ce moment-là, je voudrais savoir, moi, ce que le ministre lui-même— je ne parle pas du sous-ministre— a eu comme réaction, lorsqu'il a vu cela.

M. Levesque: Lorsque j'ai vu le texte? M. Burns: Oui.

M. Levesque: Bien, je l'ai dit tout à l'heure. M. Burns: Non, vous ne l'avez pas dit.

M. Levesque: J'ai eu une réaction assez favorable.

M. Burns: Donc, il y avait des gauchistes...

M. Levesque: Bien, pour moi, pour moi cela représentait...

M. Burns: ...qui empêtraient...

M. Levesque: D'ailleurs, quand le mot "gauchiste" vient, moi, quelquefois j'identifie cela à un groupe politique. Je ne suis peut-être pas assez objectif. Alors, les sentiments personnels que j'ai pu avoir à ce moment-là ne correspondaient peut-être pas à ce qu'a voulu rendre le sous-ministre, lorsqu'il a parlé à ce groupe en particulier. Comme on ne parle plus du sous-ministre, il faudrait que la question me vienne en dehors du contexte de cette conférence. Je suis prêt à répondre directement comme l'a souhaité lui-même le député de Maisonneuve, mettant de côté la conférence en question.

M. Burns: On y reviendra. On y reviendra. Je vais quitter ce sujet en m'excusant très très sincèrement à l'endroit de Me Normand d'avoir parlé trop longtemps de cette conférence, parce que ce

n'est pas mon habitude de rattacher les problèmes politiques — on est là, M. le ministre, pour parler de politiques du ministère — avec des attitudes de hauts fonctionnaires. Ce n'était que pour des fins reliées à nos propos, je pense, à caractère politique.

Ce n'était que pour savoir si ce néophyte de ministre de la Justice avait quand même réussi à jauger les appuis qu'il a autour de lui, qui sont, je pense, très solides. Ce n'est pas du tout à ce niveau-là que j'ai fait cette critique, mais je voulais savoir si le ministre, lui, se posait des questions sur l'administration de la justice comme telle au Québec.

Je ne reviendrai pas sur les problèmes que nous avons déjà discutés avec le Solliciteur général aux programmes 13 à 19 inclusivement, mais je rappellerai, cependant, les très sérieuses réticences que j'ai exprimées à l'occasion de l'examen de ses crédits relativement à la division qu'on a faite des pouvoirs entre le ministre de la Justice et le Solliciteur général.

Partage des juridictions en matière de tribunaux

M. Burns: Je le mentionne au tout départ de l'étude des crédits, cela complique énormément l'étude des crédits, parce que, et je vais vous en citer un exemple dans quelques minutes, on est obligé de reposer, à certaines occasions, des questions au ministre de la Justice qui ont déjà été posées au Solliciteur général. En particulier, quant à la réforme du partage des compétences entre le gouvernement du Québec et les municipalités, une des questions que j'ai déjà posées au Solliciteur général m'apparaît comme devant être de nouveau posée au ministre de la Justice.

Cette dualité des juridictions en matière de tribunaux et de corps policiers, qui a fait l'objet, depuis un an, de deux études qui recommandaient une réforme, m'incite à poser à nouveau cette question que j'ai déjà posée au Solliciteur général. D'autre part, le livre blanc sur la justice proposait, au chapitre de la réorganisation des tribunaux, la disparition progressive des Cours municipales au profit de la Cour des sessions de la paix, en matière criminelle, et de la Cour provinciale, en matière civile.

Je vous réfère, tout simplement, au livre blanc de votre prédécesseur, Me Jérôme Choquette, aux pages 108, 109 et 110. Ce regroupement judiciaire s'accompagnerait, selon le livre blanc, d'une uniformisation des règlements municipaux de circulation, sous l'autorité législative provinciale. D'autre part, le groupe de travail sur l'urbanisation au Québec, dirigé par M. Claude Castonguay, vient de recommander que les corps policiers municipaux abandonnent, au profit de la Sûreté du Québec, le secteur Sûreté de leurs activités pour se limiter à l'aspect gendarmerie, c'est-à-dire l'application pure et simple des règlements municipaux, à la fois généraux et de circulation.

Ces deux recommandations, et c'est ma sou- mission, M. le ministre, compte tenu de l'augmentation des responsabilités et des effectifs des patrouilles du ministère des Transports sur les autoroutes du Québec et sur la route no 20, laissent entrevoir des réformes majeures dans le partage des responsabilités policières au Québec. C'est une question que j'ai posée, mot pour mot au Solliciteur général. Je n'ai pu qu'avoir une réponse partielle, parce que, justement, il me disait: Vous savez, il y a des choses qui concernent le ministre de la Justice et il y a des choses qui me concernent; l'aspect policier, nous l'examinons; l'aspect administratif de la justice, cela concerne peut-être plus le ministre de la Justice.

Alors, je vous pose la question d'emblée: Est-ce que vous avez des remarques à nous faire relativement à cette question globale, cette réforme envisagée, relativement à la division du côté de la gendarmerie et de la sûreté? Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter aux déclarations que le Solliciteur général — j'imagine que vous avez pris connaissance de ses déclarations — nous a faites, lors de l'examen des crédits des programmes 13 à 19 inclusivement?

M. Levesque: J'étais retenu en Chambre à ce moment-là; je n'ai pas pu suivre les discussions qui ont eu lieu. Je suis convaincu que le Solliciteur général a donné une réponse complète au député de Maisonneuve...

M. Burns: Non, justement, c'est pour cela que je vous repose la question.

M. Levesque: J'allais dire: mais sûrement pas satisfaisante...

M. Burns: Non.

M. Levesque: ... connaissant les exigences du député de Maisonneuve et connaissant également le côté de la table où il s'assoit. Ceci étant dit, je crois que...

M. Burns: Vous avez été là longtemps, vous!

M. Levesque: Oui, j'ai passé huit ans de ce côté-là, je sais exactement ce qu'on pense.

M. Burns: Bon, alors, je suis à la veille de passer de l'autre bord!

M. Levesque: Attendez qu'on vous invite! Si le député de Maisonneuve parle des Cours municipales comme telles, à travers la province, je pense qu'il y en a environ 140.

On est rendu à 141. Il est vrai que le livre blanc parlait de l'intégration des cours municipales. Il faut comprendre que, bien que cet objectif soit louable, il faut aussi tenir compte de l'existence et de la volonté des édiles municipaux, et il y a des gens qui sont d'accord pour cette intégration. D'ailleurs, nous avons une expérience pilote que nous avons poursuivie dans le secteur de Longueuil, je crois, Greenfield Park, Saint-Hubert.

Nous sommes en train avec cette expérience d'arriver à des...

M. Burns: Je peux vous en parler.

M. Levesque: Les échos qui arrivent à mes oreilles, c'est que la situation est satisfaisante, à moins que le député de Maisonneuve me fasse part du contraire.

M. Burns: Non.

M. Levesque: Sur le plan financier d'abord, nous avons l'impression que c'est satisfaisant; enfin, du moins, ce que j'ai comme écho.

M. Burns: L'expérience de Longueuil actuellement, à mon avis, est véritablement désastreuse.

M. Levesque: J'aimerais bien entendre le député parler de ce sujet.

M. Burns: Oui, je vais vous en parler parce que c'est une expérience que j'ai suivie moi-même.

M. Levesque: J'aurai un autre son de cloche que celui que je reçois de l'extérieur.

M. Burns: Oui, sûrement. A Longueuil, l'expérience pilote, sauf erreur, remonte à deux ans.

M. Levesque: A peu près deux ans, oui.

M. Burns: A peu près deux ans. Dans ce cas, on a véritablement considéré Longueuil comme le cousin pauvre de Montréal à tout point de vue, véritablement à tout point de vue. Je ne vous parle pas des quelque trois ou quatre derniers mois, où cela s'améliore, et cela va vous faire plaisir que je vous le dise; cela s'améliore depuis trois ou quatre mois. Je suis bien placé pour connaître le cas de Longueuil parce que j'ai eu l'occasion de suivre un certain nombre de dossiers qui se présentaient à Longueuil. Je n'ai pas de cachettes à vous faire, ce sont les cas de United Aircraft, par exemple.

J'ai d'autres raisons de connaître aussi le cas de Longueuil que je n'ai pas à discuter ici, mais je sais fort bien que ce cas, aux yeux du ministère de la Justice, a été considéré longtemps comme le cousin pauvre et vraiment le cousin pauvre de l'administration de la justice à Montréal, tant au point de vue des juges que des procureurs de la couronne. Je ne parle pas de la qualité des juges, je ne parle pas de la qualité des procureurs de la couronne et des sténographes, non plus des fonctionnaires de soutien. Mais à chaque fois qu'à Longueuil dans ce projet pilote que tout le monde... J'avais félicité le ministre de la Justice à l'époque lorsqu'il avait lancé cette idée parce que Me Choquette, à ce moment-là, voulait, dans une banlieue importante de Montréal, faire véritablement le test de décentralisation qui était le grand projet amené dans son livre blanc; en tout cas, c'était un des grands projets. A ce moment-là, je l'avais félicité.

Il est normal que les gens de la rive sud de Montréal se retrouvent dans un palais de justice qui est accueillant, si on peut dire. Je ne parle pas de l'aspect des sessions de la paix ou quoi que ce soit; ce n'est jamais très accueillant pour un justiciable. Je parle d'un palais de justice qui est quand même accueillant pour des gens qui demeurent à Boucherville, à Saint-Bruno, à Longueuil ou à Saint-Lambert; je pense que c'était déjà une façon de décentraliser la justice. Si vous amenez ces gens de l'autre côté des ponts qui nous conduisent à Montréal, déjà, vous êtes dans cette grande Babylone qui s'appelle Montréal. Surtout que déjà, à Montréal, vous aviez une autre réforme qui était amorcée. Je trouvais, à ce moment-là, l'idée très bonne, je trouvais qu'on pouvait peut-être à Longueuil faire des preuves précises de ce que peut être une justice décentralisée, surtout en prenant un centre près de Montréal, mais quand même éloigné de Montréal.

Si vous me comprenez, près de Montréal mais loin dans le sens qu'on ne demande pas facilement à quelqu'un de Boucherville de venir comparaître devant une cour qui est située au coin de Saint-Laurent et Craig, à Montréal, ou Saint-Laurent et Notre-Dame. J'avais trouvé que l'idée était bonne, sauf qu'il faut, si on fait une expérience pilote de cette nature, vraiment y mettre tous les moyens. Il faut même aller plus loin — c'est mon point de vue — que l'organisme déjà constitué où déjà il y a des rouages d'institués et il ne faut pas décourager — j'insiste là-dessus, M. le ministre — les gens, que ce soient des cadres, des procureurs de la couronne, des juges, que ce soit le personnel de soutien; il ne faut pas décourager ces gens de faire un bon boulot à l'intérieur d'une expérience pilote. Une expérience pilote doit, à mon avis, recevoir plus de moyens qu'on est normalement en droit de s'attendre dans une cour déjà bien établie. Je pense que dans le cas de Longueuil, du côté du ministère de la Justice, on a véritablement manqué le bateau. On a laissé ces gens avec des moyens encore inférieurs à ce qu'une cour déjà constituée, avec des rouages déjà bien rodés, est en droit de s'attendre. Dans le cas de Longueuil, ce sont les remarques que j'ai à faire. Je vous avoue que, personnellement, je suis déçu de l'opération pilote de Longueuil. Non pas à cause des efforts déployés par les personnes qui y sont impliquées, parce qu'elles font des efforts absolument extraordinaires — je vous avoue que je suis là pour en témoigner, je le sais — mais uniquement à cause du soutien qui n'est pas là de la part du ministère de la Justice si on veut véritablement faire une expérience pilote et arriver ensuite avec un résultat qui cadrerait avec ce qu'on projetait.

M. Levesque: Est-ce que le député veut parler de l'équipement en place?

M. Burns: Je parle de l'équipement, je parle des locaux, je parle également de l'attention — cela n'a l'air de rien, ce que je dis là — du ministère de la Justice à l'endroit des gens qui se fendent en quatorze pour essayer de faire quelque

chose avec une cour qui est véritablement le premier projet décentralisé.

M. Levesque: Je pourrais peut-être dire immédiatement au député que je le remercie d'abord de l'information qu'il apporte. C'est une contribution. Il n'attaque pas l'expérience elle-même.

M. Burns: Non, pas du tout, elle est bonne.

M. Levesque: II déplore certaines lacunes, particulièrement du côté de l'équipement. Là où je crois qu'il fait erreur, s'il me le permet, c'est qu'il attribue cela au manque d'attention soutenue de la part du ministère à l'endroit de cette expérience. On m'informe que l'édifice qui s'appelle l'édifice Monval...

M. Burns: Monval, c'est cela.

M. Levesque: ...ne serait pas adéquat, on l'admet. Manque de salles, manque de cellules, manque de personnel, surtout parce que l'on a choisi cela, apparemment, dans le temps, sans avoir prévu le volume des affaires qui pouvaient se transiger à cet endroit ou se poursuivre, si vous voulez, plutôt que se transiger, à cet endroit. Nous avons pris déjà certaines dispositions pour ajouter, d'ici février prochain — ce sont les renseignements qu'on me fournit — trois salles d'audience pour les sessions, plus un espace nouveau pour les cellules.

Evidemment, ceci est préliminaire à un projet qu'on caresse au ministère. Je ne veux pas le cacher, nous songeons à un district judiciaire sur la rive-sud, avec l'équipement qui correspond à cette volonté de desservir cette population de 330 000 personnes, je pense, si je ne m'abuse. Nous croyons qu'un district judiciaire pourrait fort bien être justifié. Ceci veut dire, par exemple, des équipements beaucoup plus considérables, c'est-à-dire un palais de justice, etc., avec tout ce que cela comporte. Dans le contexte actuel, nous ne pouvons pas y songer pour cette année.

Peut-être que nous pourrions commencer à y songer l'an prochain, je ne le sais pas, selon les disponibilités budgétaires.

Mais, en attendant, pour être juste envers les officiers du ministère, ils se préoccupent grandement d'apporter le soutien dont parle le député de Maisonneuve, qui n'est pas encore là, je l'admets, mais qui devrait l'être dans les mois qui suivront.

M. Burns: Ce que je veux vendre comme idée au ministre de la Justice, c'est ceci. Lorsqu'on se lance dans un projet pilote, il faut véritablement motiver les personnes qui participent à l'élaboration de ce projet pilote. Il ne faut pas les décourager. C'est cela qui est particulièrement important.

M. Levesque: Je pense que votre message a été entendu ce soir.

M. Burns: Je l'espère parce qu'il n'y a rien de plus...

M. Levesque: Je dois dire que, déjà, les officiers du ministère étaient sensibilisés à la situation, mais je crois que le message que vous apportez ce soir aura peut-être pour effet de les sensibiliser davantage. Même celui qui vous parle en est heureux. A un moment donné, on est pris avec 20 millions de problèmes. Peut-être que certains problèmes qui sont apportés lors de l'étude des crédits peuvent changer de degré de priorité. C'est une contribution positive.

M. Burns: M. le ministre, c'est la dernière remarque que je fais là-dessus, pour vous donner un indice important, à mon avis, de cette affaire. Simplement, sans vous donner de réponse, je vais vous lancer la perche sur le nombre d'employés, et pas les moindres — je pense à des employés de direction — qui, successivement, ont été considérés comme des intérimaires. Cela n'est pas, à mon avis, de nature à promouvoir une véritable expérience pilote. Je vous lance cela et vous en ferez ce que vous voudrez. Je n'ai pas l'intention d'en discuter davantage.

M. Levesque: Merci.

M. Burns: M. le Président, je dois dire que, pendant tout ce temps, je ne parlais pas du député du Lac-Saint-Jean, en parlant des expériences pilotes!

Le Président (M. Pilote): Je vais faire enregistrer mon nom bientôt pour garder l'exclusivité!

M. Burns: Je ne sais pas, M. le Président, quelle latitude vous allez me donner quant à mon autre question. C'est, évidemment, relatif au projet de loi no 53.

M. Levesque: Sur?

M. Burns: Projet de loi qui s'intitule Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires. J'espère que les juges qui sont ici ne quitteront pas la place avant que nous ayons terminé cette discussion.

M. Levesque: Le député de Maisonneuve sait fort bien qu'on n'en discutera pas ce soir. Ce serait enfreindre le règlement.

M. Burns: Non, je le sais bien. Je n'ai pas l'intention de discuter du fond du projet de loi. Mais j'aimerais avancer le débat ou lui permettre d'être beaucoup plus mûr lorsque nous en discuterons en Chambre, peut-être demain — je ne le sais pas — ou après-demain. Là-dessus, M. le Président, je vous demanderais et je demanderais au ministre de la Justice une certaine latitude pour permettre une certaine discussion franche, qui n'a rien à faire avec quelque attitude parlementaire que nous devrons avoir éventuellement.

Je vous dis que cela ne fait pas partie de quelque attitude parlementaire que nous pourrions avoir éventuellement, même si cette attitude parlementaire pouvait aller jusqu'à un "filibuster".

Je demande simplement au ministre de la Justice, à cause des compétences qui l'entourent, à cause de la connaissance qu'il a du dossier, de peut-être nous chiffrer l'article 7, ou si vous voulez, l'article 7 du projet de loi no 53 qui, pour le bénéfice de tout le monde, se lit comme suit, qui est fort compréhensible à première vue. Cela fait plusieurs fois que je lis le premier paragraphe, et je demande à tous les juristes qui vous entourent de nous éclairer...

M. Levesque: M. le Président, je suis obligé de m'opposer, sur une question de règlement, à discuter un projet de loi ici dans le cadre de l'étude des crédits du ministère de la Justice alors que les députés ont été saisis cet après-midi de ce projet de loi. Le député de Maisonneuve, avec son expérience parlementaire, ne m'en voudra pas de lui rappeler que ce projet de loi, devant être étudié prochainement à l'étape de la deuxième lecture, recevra, à ce moment, toute l'attention qui lui revient. Je ne crois pas que cela doive être discuté à ce moment-ci, sans que nous ayons demandé à l'Assemblée nationale d'en discuter. Cependant, je puis, pour répondre au voeu du leader de l'Opposition, le député de Maisonneuve, faire un bref exposé, mais je ne parlerai pas après cela. Je ferai un bref exposé de la situation...

M. Burns: M. le ministre, avec la permission du président...

M. Levesque: Avec le consentement unanime.

M. Burns: Oui, moi je vais donner sûrement mon consentement parce que...

M. Levesque: Je ferai seulement un exposé, je vais écouter toutes les questions que posera d'abord le député de Maisonneuve, je suis prêt à faire cela, avec mon consentement, écouter les questions qu'il a à poser et j'en prendrai note.

M. Burns: Regardez, M. le ministre, je vous pose des questions simplement et sans aucune arrière-pensée, mais je ne suis pas satisfait de votre réponse comme telle. Vous me dites: Cela va se discuter en Chambre. Sur le plan réglementaire, c'est possible que cela puisse se défendre. Mais lorsque je sais qu'éventuellement ces crédits, même s'ils sont chargés pour l'année en cours aux crédits consolidés...

M. Levesque: ...

M. Burns: ...au fonds consolidé, je sais fort bien qu'ils ne font pas partie de vos crédits actuellement, sauf qu'ils font partie d'une politique que vous défendez, n'est-ce pas? Et comme tels...

M. Levesque: C'est pour cela que je voulais faire un bref exposé.

M. Burns: Non, je n'ai pas l'intention de faire le débat ici que nous aurons à faire en deuxième lecture ou encore que nous aurons à faire en commission parlementaire lorsque la deuxième lecture aura été adoptée. Sauf que j'aimerais bien savoir de quoi je vais parler et j'avoue mon ignorance, j'avoue ma faiblesse devant la rédaction du texte suivant. Permettez-moi de vous le lire et vous allez sans aucun doute...

M. Levesque: Je le sais par coeur.

M. Burns: ...être capable de me le décortiquer. C'est l'article 7 de la loi qui se lit comme suit: "Le niveau de rémunération établi en vertu de ladite loi pour chacun des juges en chef, juge en chef adjoint et juge puînés de la Cour provinciale, de la Cour des sessions de la paix, de la Cour du bien-être social, ainsi que le niveau de rémunération des juges des Cours municipales de Laval, Montréal et Québec est, à compter du 1er janvier 1976 — je comprends qu'il y a rétroactivité là, et cela, vous n'avez pas besoin de me l'expliquer, je viens de me rendre compte de cela — modifié en y intégrant le produit du calcul effectué en multipliant ledit niveau par le pourcentage de l'augmentation applicable à la classe d'emploi "administrateur I", intervenue entre le 1er janvier 1974 et le 1er janvier 1976, et calculée en soustrayant le taux maximum établi en vertu du C.T. no 77,159 du 9 janvier 1974 du taux maximum établi par le C.T. no 98,980 du 21 avril 1976".

Moi, je veux savoir combien ça coûte, ça. Cela donne quoi comme salaire, ça? C'est tout ce que je veux savoir.

M. Levesque: Ah bon! vous auriez pu le dire tout de suite.

M. Burns: Quand j'ai lu cela, je me suis dis: Moi, je suis un bon avocat. J'ai regardé toutes les dispositions légales...

Des Voix: Ah!

M. Burns: Oui. Si je ne pensais pas que je suis un bon avocat, j'aurais des problèmes. En tout cas, je pense que je suis un bon avocat et je suis habitué à interpréter des textes. Celui-là, j'ai eu de la difficulté à l'interpréter parce que je ne sais pas exactement à quoi on se réfère. Je voudrais, en chiffres, que vous nous disiez que le juge en chef va recevoir tant, que le juge en chef adjoint va recevoir tant, que les juges puînés vont recevoir tant. C'est ce que je voudrais savoir.

M. Levesque: Avez-vous d'autres questions? Parce que je ferai seulement un bref exposé et ce sera fini.

M. Burns: Le reste est une chose qui va se faire en haut, en Chambre, et je n'ai pas l'intention d'aller plus loin à ce niveau. Je veux tout simplement que vous nous situiez par rapport au projet de loi.

M. Levesque: Je demanderais le consente-

ment unanime pour répondre d'une façon brève par un exposé sur cette question.

Le Président (M. Pilote): D'accord? Allez.

M. Levesque: En effet, j'ai déposé aujourd'hui le projet de loi no 53, Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires. Ce projet de loi a pour effet d'augmenter le nombre de juges dans diverses cours du Québec pour des raisons que j'aurai à expliciter lorsque viendra la discussion du projet de loi. Il y a un sujet qui semble intéresser davantage le député de Maisonneuve et c'est celui de la rémunération des juges. Je voudrais simplement et très brièvement...

M. Burns: Si vous permettez, M. le ministre...

M. Levesque: C'est-à-dire que ce qui l'intéresse c'est de savoir le montant exact...

M. Burns: Le reste du projet de loi m'intéresse beaucoup aussi, mais la partie du projet de loi que je comprends moins que les autres, c'est celle-là. Alors, je vous demande...

M. Levesque: Celle-là qui a été décrite de façon si intéressante.

M. Burns: Oui. Parce que la nomination des juges fera l'objet également de nos remarques en deuxième lecture, je comprends très bien cela. Je pourrai tirer mes propres conclusions quant au nombre de juges que vous...

M. Levesque: D'accord. Si le député ne veut pas m'interrompre pour que je ne perde pas le fil de mes petites idées...

M. Burns: Non, mais je ne veux pas que vous partiez sur une mauvaise "shire".

M. Levesque: Scire, en latin, cela veut dire savoir, n'est-ce pas? Scire.

M. Burns: C'est cela. Alors, j'aimerais savoir...

M. Levesque: Vu que le député ne le sait pas, je vais essayer de l'éclairer. Ceci étant dit, je voudrais rappeler à cette commission l'importance, d'abord, dans notre système constitutionnel, de ce pouvoir qui s'appelle le pouvoir judiciaire. Comme on le sait, nous attachons bien de l'importance à notre système quant au pouvoir législatif, dont nous faisons partie; nous attachons également de l'importance au pouvoir exécutif, mais je crois que le public, lui, attache encore une plus grande importance, pour la protection de ses droits, à l'institution qui s'appelle le pouvoir judiciaire.

Dans le système où nous vivons, d'après notre constitution et d'après nos lois, nous devons, au législatif, nous occuper du pouvoir judiciaire. Nous devons établir les règles du jeu, nous devons établir les cours de justice, nous devons voter les budgets et nous devons, entre autres choses, nous occuper de la rémunération des juges. Nous devons le faire, nous n'avons pas le choix. Si nous avions un autre choix, une alternative, probablement que nous n'accepterions pas ce fardeau, cette responsabilité, mais, dans le système actuel, nous avons cette responsabilité et nous devons l'assumer pleinement. Nous devons l'assumer en pensant à ce qu'il y a de plus important pour le public du Québec en particulier, l'indépendance de la magistrature.

Il ne faut, en aucun cas, que la magistrature se sente liée ou dépendante et qu'en aucune façon un juge sente que l'une ou l'autre de ses décisions puisse être affectée ou influencée par une décision ou une suggestion de l'exécutif ou une décision du législatif.

Ces pouvoirs doivent être séparés. On a toujours parlé de la séparation des pouvoirs et il faut s'assurer qu'il en soit ainsi. Il faut que nous ayons l'indépendance de la magistrature. Je pose cela comme prémisse et je pense bien que tout le monde est d'accord ici autour de cette table.

M. Burns: D'accord.

M. Levesque: Le livre blanc de la justice...

M. Burns: Sauf que vous êtes en train de faire votre discours de deuxième lecture.

M. Levesque: Non, non, j'ai dit que je ferais un bref exposé, il va être bref.

M. Burns: D'accord.

Rémunération des juges

M. Levesque: Je dis, M. le Président, que dans le livre blanc de la justice, qui a été le fruit d'une collaboration extrêmement importante et intense de la part de mon prédécesseur, de ses collaborateurs et même de personnes-ressources appelées à apporter une contribution dans sa confection, il y avait différentes recommandations, que j'ai étudiées pendant plusieurs séances depuis que je suis au ministère de la Justice.

A la suite de ces séances d'étude, d'information, d'échanges de vues, etc., nous avons préparé un projet de loi et je dois, dans les semaines qui suivent, procéder à des consultations — qui sont d'ailleurs commencées — à ce sujet. Cela va toucher à différents sujets comme l'organisation elle-même des tribunaux judiciaires pour assurer une meilleure cohérence, une meilleure coordination, une meilleure mobilité, une charge de travail mieux distribuée, etc., etc., la création possible d'un conseil de la magistrature, d'un comité de surveillance, et différents aspects de la vie quotidienne des tribunaux.

Parmi ces recommandations il y avait également aussi pour assurer une indépendance à la magistrature, des recommandations quant à la rémunération des juges et un plan de retraite pour ces mêmes juges. Dès l'automne, j'ai l'intention de déposer un projet de loi qui va couvrir tous ces

sujets. Dans l'intervalle, cependant, je ne suis pas demeuré insensible à la situation des juges nommés par le Québec. Contrairement aux autres juges nommés par le fédéral, contrairement aux fonctionnaires, particulièrement aux hauts fonctionnaires que l'on peut considérer à peu près au même niveau de rémunération, les juges nommés par le Québec ont été laissés pour compte depuis trois ans, sans avoir participé, sauf à un moment donné, mais sans lendemain...

M. Burns: Ils ont été indexés.

M. Levesque: Non, seulement pour une année, et au lieu de 15% ou de 17%, c'est 8% et seulement pour cette année-là. Cela n'a pas été intégré dans leur salaire de base. Ils sont donc aujourd'hui dans la même situation...

M. Burns: Comme les gens du front commun.

M. Levesque: Pardon? Voulez-vous me laisser le front commun, j'ai dit que je ferais un bref exposé...

M. Burns: Oui, oui.

M. Levesque: ...et garder vos arguments pour plus tard.

M. Burns: Non, non, mais écoutez, je suis obligé de vous ramener dans la bonne ligne.

M. Levesque: Je dis que depuis 1973, ces juges sont demeurés au même niveau de rémunération, à $33 000. Rappelons-nous pour un instant qu'en 1970, ou aux environs de 1970, 1969/70, les juges de la Cour d'appel du Québec, nommés par le fédéral, les juges de la Cour supérieure du Québec, nommés par le fédéral, et les juges nommés par le Québec, Cour des sessions, Cour provinciale, Cour du bien-être, Cour municipale, avaient tous $28 000 de salaire annuel. C'était la parité, c'était le principe auquel en étaient arrivés les législateurs du temps.

J'étais moi-même en Chambre à ce moment-là et je me rappelle que nous avions consacré la parité.

De plus, les hauts fonctionnaires, sous-ministres, seniors, si vous voulez, avaient également, à ce moment-là, à peu près la même rémunération, soit environ $28 000. Donc, cette catégorie de grands serviteurs de l'Etat était sur un même pied. Depuis six ans — je n'ai pas à juger ce qui s'est passé chez quiconque, mais je tiens simplement à relater des faits — depuis 1969 et 1970, la situation est devenue différente pour les juges nommés par le Québec, contrairement aux deux autres catégories, c'est-à-dire les juges nommés par le gouvernement fédéral et les hauts fonctionnaires du gouvernement du Québec. On peut en dire autant des hauts fonctionnaires d'Ottawa, puisque c'est encore plus visible.

Ces hauts fonctionnaires, ces juges de la cour nommés par Ottawa ont dépassé les $50 000 de rémunération annuelle et les juges, nommés par le Québec, sont demeurés à $33 000 de salaire de base. Je dis, et j'en prends la responsabilité, que je n'ai pas le droit — ce n'est pas un caprice de ma part — de laisser se perpétuer une situation comme celle-là, et cela pour plusieurs raisons. Je n'ai pas le droit de laisser les juges nommés par le Québec dans une situation aussi distante des juges nommés par le gouvernement fédéral, parce que le ministre de la Justice à Ottawa vient au Québec nommer ses juges dans le même bassin d'avocats où il m'est permis de le faire. On ne peut pas demander à un avocat de choisir la situation offerte par le gouvernement du Québec plutôt que celle offerte par le gouvernement fédéral, par je ne sais pas quel patriotisme ou je ne sais quoi.

Si on voulait faire de la démagogie, on pourrait dire: Mon Dieu, ils sont payés plus que tel ou tel groupe de la société, mais il arrive que ce groupe est dans cette catégorie. Il y a des avocats, comme le député le sait, qui font beaucoup plus que cela annuellement. Le député de Maisonneuve le premier, s'il allait en pratique privée, j'en suis sûr, pourrait facilement dépasser de beaucoup l'un ou l'autre de ces salaires.

Je veux être dans une situation où je puis inviter quelqu'un à accéder à la magistrature et avoir le même choix que le gouvernement fédéral peut avoir. Je ne veux pas être dans une situation inférieure où je suis obligé d'accepter comme candidat, soit quelqu'un qui est malade, fatigué ou assez riche pour se le permettre. Je veux être dans une situation où je puis inviter un membre du Barreau et je veux, parmi les meilleurs membres du Barreau, pouvoir choisir quelqu'un pour lui demander d'accéder à la magistrature. Je ne veux pas être dans une situation impossible comme celle-ci. Premièrement, c'est peut-être un peu égoïste, mais je pense également à ces gens qui ont accepté d'être juges et qui ont pensé, lorsqu'ils ont accepté, qu'ils pourraient, comme n'importe quel fonctionnaire du gouvernement, comme leurs collègues au gouvernement fédéral, avoir une augmentation annuelle. C'est normal pour toutes les catégories de la société. Tout le monde le réclame, que ce soit le front commun, partout, on réclame une augmentation annuelle.

M. Burns: Vous avez...

M. Levesque: J'ai dit que je ferais un bref exposé, on aura l'occasion d'y revenir. Je dis que depuis 1973, à part les 8% en question qui ont été annuels et qui sont disparus depuis, il n'y a eu aucune augmentation pour les juges nommés par le Québec. Ils sont encore au même point où ils étaient en 1973. En 1970, on avait consacré la parité et, aujourd'hui, ces mêmes juges... D'ailleurs, prenez deux juges qui ont été nommés en même temps et qui avaient $28 000 en 1969-1970; aujourd'hui, six ou sept ans après, ces mêmes juges, ayant accepté les mêmes conditions, se retrouvent, parce qu'un est nommé au fédéral, à $53 000, le minimum payé par Ottawa, et à $33 000, s'il est nommé par le Québec.

D'ailleurs, qu'on regarde simplement ce qu'il s'est écrit ou dit récemment. Prenons, par exemple, le Jour, un journal qu'on peut citer; regardez ce que disait M. Laurent Laplante récemment...

M. Burns: Maintenant, cela...

M. Levesque: M. Laplante disait: II est plus avantageux d'être juge fédéral à sa retraite que d'être un juge nommé par le Québec et en pleine activité. C'est beaucoup plus payant d'être à sa retraite pour un juge nommé par le fédéral que pour un juge nommé par le Québec. Je trouve que c'est une situation impossible, qui n'est plus vivable. Je dois dire que j'ai fait des efforts considérables personnellement auprès de l'ensemble de la magistrature pour faire comprendre qu'à un moment donné les choses se rétabliraient. D'ailleurs, je l'ai fait publiquement. Je l'ai dit à la fin de décembre 1975, en Chambre, au vu et au su de toute la population du Québec, et particulièrement des membres de l'Assemblée nationale, qu'un projet de loi serait déposé qui tiendrait compte de la rémunération des juges. J'ai dit, à ce moment-là, que mon objectif— j'aurais peut-être dû aller plus loin, j'aurais peut-être dû consacrer la parité —

M. Burns: Vous auriez dû nous écouter aussi en 1973.

M. Levesque: Un instant, là.

M. Burns: Oui, quand nous vous avons proposé l'indexation et que vous l'avez refusée.

M. Levesque: Ecoutez, si je peux retrouver cela au Journal des débats, je serai le premier à dire que votre proposition valait la peine d'être étudiée.

M. Burns: Oui. Lorsqu'on vous a dit: Si vous voulez maintenant fixer le salaire des juges à tel montant et le salaire des députés à tel montant, pourquoi, une fois pour toutes, ne pas régler la question simplement et l'indexer...

M. Levesque: Si le député de Maisonneuve...

M. Burns: ... selon un critère acceptable pour toutes les parties?

M. Levesque: Si le député de Maisonneuve peut me fournir...

M. Burns: Nous n'aurions même pas, et cela...

M. Levesque: ... d'ici l'automne — je recherche justement ce mécanisme — s'il peut me fournir de bonnes idées là-dessus, je serai le premier à les étudier d'une façon très attentive parce qu'il faudrait absolument en arriver, si possible, à un mécanisme où on n'ait pas, nous, à faire ce travail qui nous incombe, cependant, à ce moment-ci, dans le système actuel. Mais si nous avions un mécanisme où nous pourrions détacher encore plus la magistrature de ce genre de soumission que les juges n'aiment pas — ils n'aiment pas cela et c'est normal, ils veulent garder leur indépendance qui est leur privilège et qui est presque essentielle à la bonne administration de la justice — je suis ouvert à des suggestions de cette nature. Si, en 1973, une telle suggestion...

M. Burns: Ou en 1974, soit l'une ou l'autre.

M. Levesque: Non, c'est 1973. Si, en 1973, cette suggestion n'a pas été retenue, je ne sais pas pourquoi elle n'a pas été retenue. Peut-être était-ce parce que le mécanisme n'était pas suffisamment explicité.

Je termine mon exposé. Nous avons fait ceci en attendant, et j'ai l'intention de revenir à l'automne. M. le Président, j'ai l'intention de revenir à l'automne et c'est la raison pour laquelle je suggère cela au député de Maisonneuve. Nous pourrions nous en reparler quant au point de vue de mécanismes dans la loi générale qui sera déposée.

Mais, en attendant, j'ai pensé qu'il serait juste et raisonnable que nous indexions, depuis le 1er janvier 1974 jusqu'au 1er janvier 1976, ce salaire de base. Indexé par quel mécanisme? Là encore, on peut en choisir mille, mais j'ai pensé qu'en prenant un haut fonctionnaire administrateur 1 de la fonction publique, dont les augmentations ressemblent étrangèrement à celles qui sont accordées dans la fonction publique aux divers niveaux et échelons, en prenant le cas de l'administrateur 1 du 1er janvier 1974, en prenant son cas le 1er janvier 1976, en établissant cette proportion et en l'appliquant à la situation de juge, on ne faisait pas fausse route.

Cela, je l'ai fait après consultation avec divers organismes du gouvernement et afin d'avoir l'avis des experts là-dessus, ceux qui s'intéressent aux relations de travail, etc. C'est à la suite de ces consultations que j'ai pris cette méthode qui me semble la plus objective possible. Peut-être que le texte qu'a lu tout à l'heure le député de Maisonneuve n'est pas aussi clair qu'un chiffre donné, mais je n'ai pas voulu mettre de chiffre, j'ai voulu mettre le mécanisme plutôt...

M. Burns: Maintenant, je voudrais avoir le chiffre.

M. Levesque: Le chiffre est le suivant: Le taux maximum du CT 98 980, du 21 avril 1976, est $44 950 et celui du 9 janvier 1974, le CT 77 159, est $35 000, ce qui fait une augmentation pour ces administrateurs de la fonction publique de $9950, soit un pourcentage de 28,42%. D'accord? Autrement dit, je prends le salaire versé d'après le CT 77 159, en 1974, à un administrateur dans la fonction publique, de $35 000; si je laisse courir ces augmentations jusqu'au CT de 1976, soit 98 980, on est rendu à $44 950. Il a donc profité d'une augmentation de $9950 durant ces années, soit un pourcentage de 28,42%. Je suis conservateur, je prends le chiffre le plus près; je prends 28%.

M. Burns: Vous laissez tomber ,42%.

M. Levesque: ,42%.

M. Burns: Vous êtes bien gentil.

M. Levesque: Appliqué au salaire actuel de $33 000 plus les 28% qui représentent $9240, cela me donne comme produit de cette opération $42 240. Pour les juges en chef...

M. Burns: Ce qui veut dire, par rapport à $33 000 que les juges reçoivent actuellement, la différence entre $42 240 et $33 000.

M. Levesque: Pour les juges en chef, $37 000, on fait le même calcul et on arrive à $47 360. Je demanderais la collaboration du député de Maisonneuve pour remettre peut-être à plus tard la discussion là-dessus, parce que j'ai accepté de répondre malgré que je n'étais pas obligé en vertu du règlement.

M. Burns: Non, mais avec le consentement que vous avez demandé à la commission, c'est bien évident que vous m'avez invité à vous suivre dans les mêmes sentiers et à vous dire...

M. Levesque: J'ai été très prudent. M. Burns: Oui.

M. Levesque: Autrement, je ne pourrai pas me fier...

M. Burns: Oui, mais j'ai non seulement le droit, mais le devoir de dire jusqu'à quel point moi aussi et mes collègues de l'Opposition considérons comme essentiel le travail que les juges exercent, n'est-ce pas? Vous avez...

M. Levesque: Je vais retirer mon...

M. Burns: Non, mais vous vous rendez compte que vous avez dit cela? C'est là que je vous ai dit: Vous faites un discours de deuxième lecture. C'est également dans notre opinion une des fonctions essentielles et, sans vouloir faire de pathos, sans aucun doute, un des éléments de la colonne vertébrale de notre société que les membres de la magistrature exercent à l'intérieur de notre société. Que ce soit bien clair dans l'esprit de tout le monde que l'Opposition pense cela; il est essentiel de le dire à ce moment-ci. Quant au reste, je n'ai pas du tout l'intention d'entrer dans les détails, sauf pour une question que je pose immédiatement au ministre de la Justice. Est-ce que le ministre de la Justice acceptera éventuellement ou accepte l'idée, dès maintenant, que la Régie des mesures anti-inflationnistes soit appelée à se pencher sur l'augmentation que nous avons l'intention de proposer à l'endroit des juges?

M. Levesque: Sachant, évidemment, la situation un peu différente qui a été faite aux juges, il n'y a pas eu... L'arrêté en conseil qui a touché les députés et qui a touché certaines autres catégo- ries n'a pas touché les juges. Cette catégorie n'est pas, en vertu des décrets, touchée par les mesures anti-inflationnistes.

M. Burns: Est-ce à dire, M. le ministre, que vous décidez pour la Régie des mesures antiinflationnistes de la recommandation qu'elle devrait normalement être portée à faire ou bien si vous acceptez que le projet de loi, peu importe le montant qui sera accordé aux juges, puisse être soumis — et cela on pourrait le faire par voie d'amendement au projet de loi, éventuellement — à la recommandation...

M. Levesque: Libre au député de présenter des amendements en commission.

M. Burns: Je vous dis tout de suite que je vais proposer un amendement dans ce sens, mais...

M. Levesque: On verra.

M. Burns: ... il m'apparaît clair que vous devrez vous brancher — si vous me passez l'expression — sur une affaire aussi simple que celle-là.

M. Levesque: Je dois dire immédiatement au député que les juges ne sont pas soumis présentement, d'après la réglementation, à la Régie des mesures anti-inflationnistes. Cela se comprend, pour des raisons historiques, également. Il en a été question dans la loi fédérale, d'ailleurs, où on mentionnait que dans certains cas où il y a des raisons historiques... Je viens très brièvement de faire un petit résumé historique et on voit fort bien, cela saute aux yeux, que sur le plan historique, ils n'ont pas suivi la même courbe que les autres.

M. Burns: Remarquez que vous m'incitez presque à ouvrir le débat de deuxième lecture...

M. Levesque: Non, non.

M. Burns: ...mais j'y résiste, actuellement. Je n'ai pas du tout l'intention...

M. Levesque: Je remercie le député de Maisonneuve de m'avoir donné l'occasion de...

M. Burns: Vous allez faire les journaux avec cela demain!

M. Levesque: Pensez-vous?

M. Burns: Ah oui! j'en suis convaincu.

Une Voix: II n'y en a pas un qui a pris des notes!

M. Burns: Ah non! mais tout le monde a compris ce qui se passait.

Je voudrais simplement faire une césure. On reviendra là-dessus, mais je vous avoue tout de suite que, dans le fond, je vous dévoile un peu

quelle sera l'attitude de l'Opposition relativement à ce salaire des juges. Je n'ai pas l'intention d'y aller plus profondément.

Avant de revenir — parce que ce n'est pas fini, en ce qui me concerne, le programme 1, élément 1, viendra par la suite...

M. Levesque: M. le Président, puis-je demander au député de Maisonneuve et aux membres de la commission s'ils ont beaucoup de questions à poser sur la Commission de contrôle? On pourrait libérer...

M. Burns: La Commission de contrôle des permis d'alcool?

M. Levesque: Oui. On pourrait libérer le juge Trahan qui m'avait... Il est trop tard maintenant? D'accord.

M. Burns: Cela va?

M. Levesque: II a manqué son rendez-vous.

M. Burns: On va le garder avec nous. On vous aime bien, M. le juge. Restez avec nous.

Le problème des transsexués

M. Burns: Avant de revenir de façon précise au programme 1, élément 1, c'est-à-dire là où je vous parlerai à nouveau des juges, mais pas sous l'aspect général comme on vient d'en traiter, j'aimerais vous soumettre un problème qui est beaucoup plus général et qui touche à la législation. Je profite de l'occasion de voir Me Crépeau, qui est présent avec nous ce soir, dont une des sous-commissions nous a déjà fait rapport. C'est le problème des transsexués. Vous allez dire que c'est une transition un peu spéciale, passer des juges aux transsexués, mais ce n'est pas avec mauvaise volonté et avec des arrière-pensées que je fais cela. Au contraire, je considère le problème des juges et le problème des transsexués comme des problèmes très importants. Dans l'un et l'autre cas, je trouve que cela mérite qu'on s'y arrête très sérieusement.

J'ai, depuis un certain temps, été amené à prendre connaissance d'un cas qui, comme simple citoyen, me paraissait inexistant. C'est peut-être quelque chose, d'ailleurs, qui pourrait éventuellement intéresser les membres de la Commission' des droits et libertés de la personne. Il arrive que, depuis un certain nombre d'années, il y a des personnes, soit mâles ou femelles, qui, à cause de leur caractère bisexuel, se retrouvent dans une situation où elles sont obligées de faire un choix et ce choix est habituellement très judicieusement exprimé. Je ne connais pas, en tout cas, de cas où cela se fasse simplement par un caprice. Cela se fait à la suite d'examens psychiatriques et physiologiques très importants. On en arrive à la conclusion qu'une personne qui est carrément bisexuée, c'est-à-dire qui a, très souvent, très sérieusement toutes les caractéristiques physiologiques du mâle et de la femelle — je parle des hommes et des femmes — se trouve à être obligée de faire ce choix. Le ministre n'a pas l'air de m'écouter, là.

M. Levesque: Oui, religieusement.

M. Burns: Oui, bon, d'accord, parce que je trouve cela très important. Vous allez voir que j'y arrive très rapidement. Je connais actuellement au moins une dizaine de cas au Québec — il y en a sans doute plus que cela — de personnes qui ont été obligées de faire ce choix et même de subir des interventions chirurgicales qui les plaçaient carrément dans la catégorie soit des femmes ou soit des hommes. Je connais plus de cas où il s'agit de personnes qui étaient autrefois connues comme des hommes, c'est-à-dire du sexe masculin, et qui sont devenues, à la suite d'une opération, d'une intervention chirurgicale, de sexe féminin. Aujourd'hui, elles sont en mesure de démontrer, certificat médical à l'appui, qu'elles sont, physiologiquement parlant, des femmes, sauf qu'il y a un tout petit problème qui peut nous apparaître simple au départ, mais qui est très grave pour les personnes concernées, c'est qu'on se retrouve avec des personnes qui sont considérées, au niveau des registres de l'état civil, comme étant du sexe masculin, alors que ce sont effectivement des femmes. Ces personnes ont sûrement un certain nombre d'embêtements et doivent en supporter les conséquences, par exemple, continuer à s'appeler Joseph quand on voudrait s'appeler Denise ou, encore une fois, ne pas être capable de se marier avec une personne du sexe masculin, parce qu'on est du sexe masculin au point de vue des registres de l'état civil, ou encore subir — et c'est peut-être là que la Commission des droits et libertés de la personne pourrait être intéressée à cela — de la descrimination tant au niveau de l'emploi qu'au niveau du logement ou de toute autre façon dont on peut subir une certaine discrimination. Par exemple, si je m'appelais aujourd'hui Thérèse, je pense qu'il y a beaucoup de gens qui me poseraient un certain nombre de questions si j'allais louer un appartement sous le nom de Thérèse Burns à tel endroit. Aussi bizarre que cela puisse paraître, c'est le genre...

M. Levesque: II y a la moustache d'abord.

M. Burns: Oui, en tout cas, moustache en moins, c'est le genre...

M. Levesque: II y a de l'ouvrage à faire pour être une Thérèse.

M. Burns: Je veux que tout le monde soit sérieux là-dessus. Il est essentiel de se rendre compte que c'est le genre de problème qu'ont à subir un certain nombre de personnes. Ce n'est peut-être pas de cent mille personnes que je vous parle, mais je vous parle quand même de cas de plus en plus nombreux dans notre société qui doivent faire face à cela.

Il y a déjà, dans le rapport de la Commission

de révision du Code civil, des suggestions qui sont faites quant aux amendements qui pourraient être apportés au Code civil et, en particulier, au niveau de la reconnaissance de ce changement de sexe et au niveau, particulièrement du changement de nom.

J'aimerais savoir l'intention du ministre de la Justice relativement aux suggestions qui sont faites par la Commission de révision du Code civil même si, sauf erreur, la recommandation qui a été faite jusqu'à maintenant est une recommandation préliminaire qui, sans doute, n'est pas finale, donc, qui pourrait peut-être être révisée éventuellement quant aux textes mêmes qui doivent être changés au Code civil. Mais à cause de l'acuité du problème, et du nombre de plus en plus grand de cas qui seront portés à notre connaissance, je me demande ce que le ministre de la Justice a l'intention de faire au point de vue de la législation pour tenter de corriger cette situation.

Je m'excuse d'avoir été un peu long dans l'exposé du problème, mais cela me paraît un problème très important. Quand vous avez des personnes, dans la société, qui ne se retrouvent pas dans les catégories, aussi bête et aussi "plate" que cela puisse paraître, dans les cadres qui sont déjà préfabriqués par la société pour un certain nombre de personnes, il n'y a rien de pire, il n'y a pas de discrimination pire à l'endroit d'un certain nombre de personnes. Si on est en droit de dire, médicalement parlant, que M. Untel est effectivement devenu une femme, il faut placer la loi à sa disposition pour que cette personne puisse faire reconnaître ses droits comme femme et non pas comme M. Untel, alors qu'effectivement ce M. Un-tel est devenu une femme. C'est le problème de base avec tout ce que cela comporte.

J'aimerais savoir ce que le ministre de la Justice a l'intention de faire en égard à ce problème.

M. Levesque: Le député de Maisonneuve s'excuse, jusqu'à un certain point, d'avoir été long. Libre à lui de prendre le temps qu'il veut, en commission, pour traiter d'un sujet qu'il affectionne. J'ai simplement noté...

M. Burns: Que je trouve très important.

M. Levesque: ... qu'il semblait plaider plus en faveur des transsexués qu'en faveur des juges.

NI. Burns: Non. Ecoutez! Un instant!

M. Levesque: Non, non, je voulais simplement...

M. Burns: On m'a dit clairement tout à l'heure... Vous allez voir qu'en Chambre je vais plaider pas mal plus longtemps sur l'affaire des juges que sur l'affaire des transsexués, pas parce que je considère l'un plus important que l'autre, je considère qu'il s'agit de deux domaines tout à fait différents. En Chambre, on m'a restreint, et je pense m'être restreint moi-même parce que je ne voulais p.as faire un discours de deuxième lecture sur l'augmentation de salaire des juges. Je vous dis que vous allez en entendre parler, de l'augmentation de salaire des juges. Je vous le dis tout de suite.

M. Levesque: Je m'attends bien à cela.

M. Burns: Sauf que c'est tout à fait dans l'ordre, d'autre part, de vous poser une question sur vos intentions relativement à la modification de la loi en matière de transsexualité. C'est bien différent.

M. Levesque: Je respecte...

M. Burns: C'est le genre de petites farces qui peuvent nous faire durer jusqu'à 4 h 30 demain matin. Je vous le dis tout de suite.

M. Levesque: C'est le genre de chantage que l'on a vers la fin de chacune des sessions. J'ai cité le député de Maisonneuve, il n'y a pas si longtemps, lorsqu'il me demandait: Pourquoi apporter une motion comme celle-là? Il sait fort bien que nous sommes très objectifs, mais à un moment donné, quelqu'un fait une petite blague qui n'est pas acceptée, comme celle que je viens de faire... Je sais fort bien qu'il n'y a aucune relation entre le sujet ou l'autre, mais je ne pouvais pas m'empêcher...

M. Burns: C'est parce que je conçois les deux comme très importants.

M. Levesque: Je ne pouvais pas m'empêcher, à un moment donné, de taquiner un peu le député de Maisonneuve.

M. Burns: Vous avez le droit de me taquiner, mais pas sur des affaires importantes comme celle-là.

M. Levesque: Oui, mais je vous ai taquiné sur une autre affaire importante.

M. Burns: Vous êtes bien chanceux, je suis bien de bonne humeur, ce soir.

M. Levesque: Bon. Je vais répondre d'une façon très objective au député de Maisonneuve. D'ailleurs, il m'a parlé de ce sujet avant aujourd'hui et je lui avais répondu d'une façon également objective. Je m'étais intéressé à la question qu'il m'avait soumise. Je ne peux pas dire que je rejette cela du revers de la main même si, à l'occasion, on peut faire une blague. Mais je ne la regrette pas encore! Je veux que le député de Maisonneuve...

M. Burns: Vous recommencez!

M. Levesque: ... sache qu'on a le droit de part et d'autre de faire les remarques...

M. Burns: Oui, oui.

M. Levesque: ... qu'on juge à propos de faire. M. Burns: J'admets cela.

M. Levesque: Pour ces personnes, je dois dire qu'elles sont, à ma connaissance, assez peu nombreuses dans la société québécoise et elles pourraient demander un changement de nom. Je pense bien que, selon la législation que nous avons aujourd'hui et les pouvoirs que nous avons au niveau du lieutenant-gouverneur en conseil, nous pourrions changer le nom de la personne en question, le nom. Je ne me rappelle pas tellement mes cours de droit mais, à un moment donné, il me semble qu'on avait dit que la législation pouvait faire n'importe quoi...

M. Burns: La législation peut faire n'importe quoi...

M. Levesque: ... sauf changer un homme en femme.

M. Burns: C'est vrai.

M. Levesque: Peut-être que c'est changé aujourd'hui. Cela fait déjà quelques années que j'ai passé les examens du Barreau.

M. Burns: Cela c'était avant l'époque où un certain premier ministre a dit: Jamais, sous mon règne, il n'y aura un ministère de l'Education. Un an plus tard il y en avait un.

M. Levesque: Vous allez tomber dans...

M. Burns: Vous vous rappelez c'était votre chef.

M. Levesque: Vous allez tomber exactement dans le genre de choses que vous me reprochiez il y a deux ou trois minutes.

M. Burns: Oui, oui. Je me rappelle également le même premier ministre, qui disait: Jamais la reine ne négociera avec ses sujets. Cela fait exactement...

M. Levesque: II aurait dû rester avec cela lui. Cela ferait bien.

M. Burns: Cela fait exactement trois fois que la reine négocie avec ses sujets.

M. Levesque: II n'aurait pas dû changer d'idée.

M. Burns: C'est arrivé quand même.

M. Levesque: Quant à la question de l'état civil cependant, pour parler de ces personnes, à un moment donné elles désirent se marier ou postuler un emploi, et cela leur cause sûrement un préjudice réel. Quoi faire dans une situation assez nouvelle pour nous, une situation comme celle-là?

Premièrement, et je pense que j'en ai déjà parlé avec le député de Maisonneuve, nous avons consulté l'Office de révision du Code civil. Me Crépeau est ici, il doit sûrement se rappeler cette demande que nous avions faite. D'ailleurs l'office nous a transmis un avant-projet de rapport au début de l'année, que nous avons remis à divers juristes pour consultation, justement avant que l'office donne un rapport définitif sur cette question. J'espère bien que nous pourrons, avec le rapport définitif, demander à la Législature ce qu'elle entend faire, quel sort elle réserve à cette recommandation de l'office.

En attendant, qu'est-ce que l'on fait? Eh bien...

M. Burns: C'est ce que je vous posais comme question.

M. Levesque: ... tout ce que je m'imagine que l'on pourrait faire, ce serait de légiférer dans un bill public, mais je pense bien que cela ne se ferait qu'à la suite du rapport de l'office. C'est normal que nous attendions le rapport. Une autre façon de légiférer, c'est par bill privé. D'ailleurs, je pense que quelques députés ont eu des demandes, mais aucun député n'a accepté jusqu'ici de déposer un bill privé pour répondre à l'une ou l'autre de ces demandes.

M. Burns: Parce que, j'imagine, tous les députés sont dans l'attente de la législation générale...

M. Levesque: Peut-être, mais moi je ne prévois pas...

M. Burns: ... qui pourrait s'appliquer à tous.

M. Levesque: ... cela dans un avenir prochain, c'est-à-dire que je ne prévois pas cela d'ici un an ou deux. Dans l'intervalle, est-ce qu'il y aurait lieu de procéder par bill privé? Je ne suis pas en mesure de dire quel sort serait réservé à un tel projet. Il faudrait bien avoir l'occasion d'entendre les parties.

M. Burns: Même avant...

M. Levesque: J'imagine bien que la commission de la justice, à qui ce serait déféré, la commission que nous sommes présentement, aurait à se prononcer là-dessus, mais c'est tout ce que je puis dire.

M. Burns: Mais vous vous rendez compte du coût que cela comporte pour les personnes concernées? C'est cela, dans le fond, que je pose comme problème. La plupart des personnes concernées, à cause justement de leur statut, passez-moi l'expression, ambigu, sont dans l'impossibilité, dans de nombreux cas, de se trouver du travail. Alors, vous demandez à quelqu'un de proposer un projet de loi privé, qui va lui coûter, disons, grosso modo, environ $2000. Or, ce sont des personnes qui, justement à cause de leur sta-

tut "ambigu", — je le répète entre guillemets — sont drôlement placées pour présenter un tel projet de loi. C'est la raison pour laquelle je vous pose cette question. Parce que ce qu'on a réussi à faire, uniquement avec nos normes conventionnelles, à l'endroit de ces personnes, c'est de faire d'elles des individus qui sont des équations de personne dans la société. C'est très grave.

On vient de décider que, même en changeant de nom, Jean-Pierre Dutremplin qui devient Lise Dutremplin va continuer à être le fils de... C'est ce que cela veut dire, si on ne change pas leur qualité de...

M. Levesque: Mais le député ne croit-il pas qu'il faudrait attendre le rapport définitif de l'office, avant de modifier le Code civil?

M. Burns: J'ajoute simplement que... Le ministre de la Justice, tout à l'heure, tout en disant qu'il ne rejetait pas le problème du revers de la main et qu'il le considérait comme important, ajoutait qu'il s'agit quand même d'un très petit nombre de personnes concernées. Jusqu'à maintenant, je suis prêt à dire, comme lui, qu'il s'agit fort probablement d'un nombre de personnes inférieur à une centaine.

M. Levesque: Peut-être inférieur à dix!

M. Burns: Non, je puis vous assurer qu'il s'agit de plus de dix personnes. Mais, pour ma part, cela m'apparaît comme particulièrement important, parce que — et cela est peut-être le premier indice — déjà la Commission de révision du Code civil s'est penchée là-dessus. Alors, c'est déjà quand même beaucoup plus d'une dizaine de personnes; on envisage des changements d'une loi à caractère public à cause de ces personnes. Cela m'apparaît doublement important, parce qu'il y a des personnes qu'on ne situe pas— c'est plate à dire — à l'intérieur de la société, qu'on ballotte littéralement à l'intérieur de la société.

Si Me Crépeau a des choses à ajouter à cela, je n'ai aucune espèce d'objection à ce qu'il vienne nous en parler puisqu'il est ici. Mais, en ce qui me concerne, je trouve qu'on ne doit pas mettre de côté un problème comme celui-là, comme étant quelque chose qui ne concerne qu'une dizaine ou une vingtaine de personnes à travers le Québec.

M. Blank: Pour ma part, je ne vois pas pourquoi on ne peut pas le faire, en attendant les changements de la commission, avec les lois actuelles. Je pense qu'il y a assez, dans les lois actuelles, pour faire exactement ce que vous voulez. Pour commencer, cela ne coûte pas tellement cher de faire un changement de nom. On commence avec le changement de nom. Si on fait une requête à l'Exécutif pour faire un changement de nom, avec tous les faits qu'on donne, je suis certain que le cabinet peut donner ce changement de nom. Après, il y a le certificat de naissance. Or, ce ne sont pas tous les certificats de nais- sance— cela dépend de l'église, de la synagogue ou de la personne qui a fait l'enregistrement — qui parlent d'un fils ou d'une fille de... Il y en a qui disent qu'un enfant est né de tel ou tel nom. Cela veut dire qu'on ne mentionne pas le sexe; le sexe n'est pas nécessairement mentionné dans le certificat de naissance et il n'y a pas d'obligation de le mentionner. Le seul endroit où on mentionne le sexe, c'est au département de démographie, avec les hôpitaux.

Je dois dire que si, par hasard, il est mentionné dans le certificat de naissance que c'est un fils ou une fille, après avoir obtenu une décision du Cabinet disant que Jean-Paul est changé en Lise, si on fait une requête pour rectification du registre au juge de la Cour supérieure...

M. Burns: Jamais!

M. Blank: ...donnant tous les faits, je pense qu'il accorderait cela.

M. Burns: Jamais!

M. Blank: Cela serait fait avec nos lois actuelles. C'est une opinion, mais si vous avez des juges libéraux...

M. Burns: On ne se lancera pas des avis juridiques, mais je ne suis pas du tout d'accord avec le député de Saint-Louis.

M. Blank: Mais je pense qu'avec les mécanismes actuels nous pouvons faire quelque chose dans les cas d'espèce jusqu'à ce qu'il y ait une loi générale.

M. Levesque: Me Crépeau m'indique que, peut-être, nous pourrions accélérer de ce côté, mais cela fait toujours partie de l'ensemble des recommandations de l'office.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Quant à la question de rectification, il n'y a pas eu erreur au début. Ce n'est pas le nom qu'on veut rectifier.

M. Burns: Non, c'est cela. On ne peut pas demander de rectifier quelque chose qui était exact.

M. Levesque: Me Crépeau m'indiquait également que ce sera un critère médical qui sera retenu.

M. Burns: D'accord. D'ailleurs, là-dessus, je peux dire à Me Crépeau, en ayant bien pris soin de lire les suggestions que son sous-comité nous a faites— en tout cas, j'irais un peu plus loin, d'accord— que je les trouve dans l'ensemble satisfaisantes ces recommandations, ayant pris connaissance du problème de ces gens. Mais cela m'apparaît une partie de législation qui pourrait être autonome, qui pourrait être amenée de façon autonome devant l'Assemblée nationale, sans déran-

ger l'ensemble ou la vision globale qu'on se fait de la révision du Code civil, parce que...

M. Levesque: Je suis prêt à le revoir.

M. Burns: II s'agit là d'un problème nouveau. Il s'agit quand même d'un problème qui...

M. Levesque: C'est-à-dire qu'il ne trouve pas de solution...

M. Burns: Ailleurs.

M. Levesque: ... dans le Code civil actuel.

M. Burns: C'est cela, exactement. Ce que le député de Saint-Louis disait tout à l'heure, je suis bien prêt à l'écouter de façon bien sympathique, mais je ne trouve pas qu'actuellement nous soyons en mesure de dire: II y a lieu à rectification après changement de nom parce que ce n'est pas exact. A l'époque, cette personne était soit mâle ou femelle, était fille de, ou fils de. Alors, il s'agit de changer cela.

M. Levesque: Disons, pour répondre, que nous avons fait du progrès durant la discussion. Ce qui me frappe dans l'argumentation du député de Maisonneuve, c'est que justement on n'a pas présentement de réponse, malgré que je tienne compte également de ce que dit le député de Saint-Louis, soit qu'il a une réponse dans ce que nous avons présentement, mais je n'en suis pas sûr.

M. Blank: Une forme pratique.

M. Levesque: Une forme pratique peut-être.

M. Blank: Peut-être pas légale, mais pratique.

M. Levesque: C'est cela, mais, sur le plan légal, je dois dire que nous n'avons pas de réponse, pour le cas précis que soumet le député de Maisonneuve, dans notre législation actuelle. Peut-être que ceci nous permettrait de faire diligence de façon particulière. Le président de l'office me dit que c'est éventuellement possible d'accorder à cela une attention particulière.

M. Burns: Je me souviens que l'office nous avait recommandé de modifier certaines dispositions relativement aux enfants naturels et nous avons accepté de le faire, parce qu'encore une fois il n'y avait rien à cet effet dans le Code civil. En tout cas, s'il y avait quelque chose, c'étaient des choses inverses à la position que l'office nous recommandait relativement à la successibilité des enfants naturels. Nous avons donc adopté de façon autonome cette partie du Code civil, quitte à ce que j'admette dès maintenant qu'il n'est pas normal que, dans une grande révision du Code civil, on prenne des morceaux ici et là. J'admets que la technique est mauvaise, mais, il s'agit de problèmes particuliers et, si on l'a fait pour des en- fants naturels, j'imagine que cela devrait peut-être se faire pour des transsexués.

M. Levesque: J'attendrai le rapport que me fera, dans un avenir prochain, le président de l'office. Quand je recevrai le rapport, j'en ferai part au député de Maisonneuve et on pourra partir de là, à ce moment.

M. Burns: Cela me satisfait surtout d'avoir entendu le ministre de la Justice, appuyé du président de l'office nous dire que nous pouvons peut-être accélérer de ce côté, parce que nous sommes dans un "no man's land" légal pour ces personnes et il faut absolument trouver une solution.

Quand vous avez des personnes dans une société qui se retrouvent dans un état tel que celui-là, je trouve cela aberrant si le législateur n'est pas capable d'en arriver à une solution concrète, immédiate, rapide pour régler leur problème. Je vous avoue personnellement que je ne voudrais pas me trouver dans la situation de beaucoup de ces personnes qui véritablement se retrouvent légalement — j'insiste là-dessus — comme absolument personne ou en tout cas comme quelqu'un qui ne l'est pas.

M. Blank: Je ne peux argumenter sur vos théories, mais je veux dire au ministre de la Justice que c'est vraiment une rectification, parce que c'est par erreur que l'enfant a été nommé un fils quand en fait — peut-être pas en apparence — médicalement c'est une fille.

M. Levesque: Apparemment, aujourd'hui, ils font des changements assez extraordinaires du point de vue médical.

M. Blank: On doit voir quelque chose de caché avant de faire les changements. Ce mot "caché", c'est l'erreur qu'on a faite à l'enregistrement. C'est pour cela qu'on peut le rectifier par une requête en rectification.

M. Sylvain: Elle ne passe pas.

M. Blank: Vous avez des juges qui sont un peu trop conservateurs par rapport à d'autres.

M. Levesque: Mais l'état civil, comme dit Me Crépeau, se fie aux apparences.

M. Sylvain: Sur la même question de la transsexualité dans l'état civil, n'y a-t-il pas eu une pratique où on acceptait des changements de nom par arrêté en conseil depuis deux, trois ou quatre ans? Il aurait pu...

M. Levesque: Au contraire, j'en ai chaque semaine et j'ai à étudier chaque semaine des rapports de mes officiers sur...

M. Burns: Des changements de nom.

M. Levesque: ... des changements de nom.

M. Burns: De femme à homme, d'homme à femme.

M. Levesque: Non.

M. Sylvain: Par rapport aux transsexuels?

M. Levesque: Excusez. Non, je n'en ai pas eu de... Je n'en ai pas vu depuis que je suis au ministère.

M. Burns: Je pense qu'il y a eu quelques cas d'acceptation de changements de nom. Disons, de Louise à Jean-Pierre ou de Jean-Pierre à Louise.

M. Sylvain: ... à Louisette.

M. Burns: Ou Louisette à Louis ou en tout cas...

M. Levesque: Je pense que le député de Beauce-Nord a raison, il y a eu quelques cas, me dit-on.

M. Burns: II y a eu quelques cas.

M. Levesque: Mais, il y a déjà au-delà de...

M. Burns: Mais, par la suite, cela a été bloqué.

M. Levesque: Cela a été bloqué en attendant une solution d'ensemble.

M. Sylvain: C'est cela que l'Association des transsexuels, ceux qui la représentent nous font part que...

M. Levesque: A vous aussi?

M. Sylvain: Oui, on les a tous rencontrés. C'est du monde comme les autres.

M. Burns: Oui et c'est normal. Je suis très heureux d'entendre le député de Beauce-Nord vous livrer ses impressions également à ce sujet, parce que cela vous démontre que je ne suis pas le seul à avoir été pressenti par l'association...

M. Sylvain: ...

M. Burns: Cela veut dire que c'est quelque chose qui est rendu beaucoup plus loin qu'une espèce de dada d'un député de l'Opposition. On pourrait nommer d'autres députés ministériels qui ont été vus, je ne les nomme pas parce qu'ils ne sont pas ici, mais il y a d'autres députés ministériels qui ont été vus; peut-être qu'il y en a qui sont ici, qui ont été rencontrés par ces personnes. Je trouve qu'ils ont— comme on dit régulièrement— une bonne cause et cela vaut la peine de la défendre.

Je tiens à vous dire, M. le ministre de la Justice, que ce n'est pas parce que vous nous dites que la possibilité de changement de nom est là que le cas est réglé; au contraire.

M. Levesque: Je l'ai dit cela. J'ai dit que cela ne réglait rien.

M. Burns: Vous admettez cela. Bon. D'accord. M. Levesque: Sur l'état civil...

M. Burns: Cela règle temporairement le problème.

M. Levesque: Oui, c'est cela. M. Burns: D'accord.

M. Sylvain: J'ai tout simplement une question. Je ne sais pas si c'est une règle qui a été abandonnée, mais pour quels motifs? Savez-vous les motifs pour lesquels les arrêtés en conseil, depuis quelques années, sont disparus pour faire ces modifications au nom civil?

M. Levesque: J'ai dit qu'on attendait une solution d'ensemble dont on vient de parler, mais j'ai bon espoir que dans un avenir pas trop éloigné on pourra régler le cas de façon plus globale et plus définitive.

M. Sylvain: Parce que la question avait été abordée déjà à l'étude des crédits de l'an dernier avec votre prédécesseur. Il avait, semble-t-il, donné la même réponse, il attendait le dépôt du rapport qui traite de ce sujet de l'Office de révision du Code civil.

M. Levesque: On l'a reçue depuis et ce rapport est soumis à la consultation.

Dès qu'on aura le rapport définitif, on pourra peut-être procéder avec un peu plus de diligence.

M. Burns: M. le Président, au programme 1, élément 1, je reviens aux juges et particulièrement à une citation du livre blanc sur la justice qui recommandait la création d'un centre de perfectionnement des juges. J'aimerais savoir, de la part du ministre, où en est rendu ce projet et ce qu'en pense le ministre actuel. Il s'agissait là d'un projet chéri par la ministre de la Justice antérieur, mais peut-être que le ministre actuel ne partage pas ce point de vue.

M. Levesque: Je dois dire qu'en général... M. Burns: II s'agit de la page 169.

M. Levesque: 169. Je dois dire qu'en général, le livre blanc de la justice contenait énormément de recommandations très valables, à mon point de vue. Bien que dans le cas de certaines modalités, je n'ai pas été d'accord, sur l'ensemble, je dois dire qu'il y a une continuité et que je suis d'accord, comme dans ce cas-ci pour le recyclage et le perfectionnement des juges.

On retrouvera sans doute, lors du dépôt du projet de loi dont j'ai parlé tout à l'heure sur l'organisation des tribunaux judiciaires, projet de loi

qui est en avis au feuilleton, une réponse à la question du député.

M. Burns: Vous allez nous donner une réponse à quel endroit, m'avez-vous dit?

M. Levesque: Dans le projet de loi sur l'organisation, on trouvera une réponse, sans doute, à ceci et à plusieurs autres sujets qui sont trouvés et abordés dans le livre blanc.

M. Burns: Je vous signale, M. le ministre, que je ne me hâte pas inutilement lorsque je vous pose cette question. Il s'agissait là d'un argument qui nous avait été servi bien avant le livre blanc, c'est-à-dire à l'époque où on plaidait, du côté du ministère de la Justice, en faveur de l'augmentation de salaire des juges, en 1973.

Si je vous rappelle historiquement la situation, non seulement on a augmenté le salaire par voie de législation, err 1973, mais on avait, à deux reprises antérieures, tenté de l'augmenter et on avait écarté le projet de loi, je ne sais pas pourquoi, en juin 1973 et en décembre 1972.

Je vous signale — je fais une parenthèse — que je trouve un peu bizarre qu'à toutes les fois qu'on parle d'augmentation de salaire des juges, on nous amène le projet de loi dans une fin de session. J'aimerais, une fois pour toutes, que les projets comme ceux-là nous soient amenés dans une période normale de session.

M. Levesque: C'est ce que j'ai l'intention de faire.

M. Burns: Dès l'automne.

M. Levesque: Je n'ai pas voulu présenter ce projet de loi — d'ailleurs, je voudrais terminer mes consultations — à ce moment-ci justement parce que c'est la fin de la session. Je voudrais le présenter au début de la reprise, au mois d'octobre, je ne sais pas...

M. Burns: Septembre, j'espère.

M. Levesque: Septembre ou octobre et, à ce moment-là, avoir le temps nécessaire pour bien l'étudier et prendre le temps d'apporter des critiques constructives.

M. Burns: Comment se fait-il, M. le ministre, que le cas actuel soit déposé aujourd'hui, le 28 juin? Comment se fait-il que la dernière fois, c'était, je pense, le 15 décembre, pour discussion aux environs du 21, 22 ou 23 décembre 1973? Comment se fait-il que la fois précédente, c'était en juin 1972? Comment se fait-il que la fois précédente, c'était en décembre 1971? On a toujours eu cela en fin de session, l'augmentation de salaire des juges.

Moi, je trouve cela important et je trouve important qu'on le règle une fois pour toutes. Je partage votre avis. On l'avait suggéré, éventuellement, qu'on pourrait tout simplement cesser de revenir à toutes les fins de session.

M. Levesque: Je suis bien d'accord avec le député de Maisonneuve, bien d'accord.

M. Burns: Mais il fallait trouver, à ce moment-là, une méthode sur laquelle on ne s'entendait pas.

M. Levesque: Pas plus que je n'aime être en train de discuter des crédits du ministère de la Justice le 28 juin au soir.

M. Burns: M. le ministre, je sais que vous n'aimez pas cela. Qu'est-ce que vous voulez, c'est votre devoir, c'est notre devoir à tous...

M. Levesque: On a commencé à la fin de mars l'étude des crédits; on s'attendait de finir dans les 45 jours prévus par le règlement et on est encore ici.

M. Burns: Vous ne pouvez pas dire que j'ai ambitionné là-dessus.

M. Levesque: Que voulez-vous? Je ne mets cela sur le dos de personne.

M. Burns: On a discuté les crédits de votre collègue, le Solliciteur général, pendant à peine neuf heures et quelques minutes puis là...

M. Sylvain: C'est le monstre.

M. Levesque: Cela doit être le monstre, comme le député de Beauce-Nord, c'est le monstre du sous-ministre.

M. Burns: Toujours, M. le Président, relativement à la nomination des juges, programme 1, élément 1...

M. Levesque: Excusez-moi.

Nomination des juges

M. Burns: Toujours relativement à la nomination des juges, je vous limite à ce moment à la Côte-Nord et vous rappelle simplement que depuis deux ans le Barreau de la Côte-Nord demande la nomination de deux juges permanents pour le district judiciaire du Mingan. Je vous rappelle également que l'année dernière, lors de l'examen des crédits, le ministre du temps, Me Choquette, avait promis qu'au moins un juge permanent serait nommé en cours d'année pour le district judiciaire de Mingan, de façon permanente, ce qui n'a pas été fait. J'aimerais savoir exactement comment il se fait que la promesse du ministre n'a pas été respectée. Ai-je besoin d'ajouter la deuxième question? Est-ce que le ministre actuel a l'intention, lui, au moins de le respecter, non pas rétroactivement mais avec un retard de deux ans?

M. Levesque: C'est-à-dire qu'on peut dire qu'on a donné suite à ce voeu de mon prédécesseur en nommant le juge Raymond Boucher, qui était vice-doyen de la faculté de droit de l'univer-

sité Laval, et qui habite présentement Sept-lles; par contre, il y avait un juge résident, le juge Denis Gobeil, qui y habitait, lui, et qui est déménagé à Québec, à sa demande. Peut-être qu'on a réalisé la promesse mais, en même temps, le nombre n'est pas plus considérable. Cela est pour la Cour provinciale.

Pour ce qui regarde la Cour des sessions de la paix et la Cour du bien-être social, ce sont des juges itinérants qui se rendent à Sept-lles et aux endroits le long de la Côte-Nord suivant les besoins.

M. Burns: Quelle est la raison? Est-ce que vous avez de la difficulté à trouver des juges qui sont prêts à s'établir dans ce coin ou encore des avocats du lieu qui n'acceptent pas d'être nommés juges et d'y résider?

M. Levesque: Non, dans la question des juges à la Cour des sessions de la paix, par exemple, en particulier, on aime bien qu'il y ait une rotation, de plus en plus. Cela ne veut pas dire qu'on n'est pas pour qu'il y ait au moins un juge résident dans un endroit aussi important.

C'est également une politique du ministère d'encourager la rotation des juges de façon que les avocats n'aient pas toujours à plaider devant les mêmes juges. Vu qu'à un moment donné il peut se créer des amitiés ou des inimitiés, etc., nous croyons qu'il est assez important de permettre aux justiciables de même qu'aux avocats de ne pas toujours passer devant le même juge.

Le Barreau local nous avait demandé la nomination d'un juge résident.

M. Burns: De deux juges résidents.

M. Levesque: D'un juge de plus. Il y en avait un.

M. Burns: Oui, à ce moment-là, il y avait le juge Gobeil.

M. Levesque: Oui. Dès que la Loi sur l'organisation judiciaire aura été adoptée, j'ai l'intention de répondre à cette demande du Barreau, de sorte que le juge qui résidera à cet endroit pourra s'occuper de l'ensemble des besoins de la justice.

M. Burns: Je vous rappellerai également que le député de Saguenay, M. Lucien Lessard, vous avait écrit, en date du 6 novembre 1975, pour vous demander de donner suite à cette recommandation du Barreau.

M. Levesque: Cette recommandation était faite par Baie-Comeau, par le district judiciaire de Hauterive. Je viens de répondre que nous avons l'intention d'y donner suite, mais après l'adoption de notre projet de loi, en automne.

M. Burns: Comme cela, je ne peux pas dire au député de Saguenay que sa demande a été satisfaite.

M. Levesque: Elle n'est pas encore satisfaite; nous avons l'intention de la satisfaire.

M. Burns: Quand?

M. Levesque: J'ai dit dès que nous aurons adopté la Loi sur l'organisation...

M. Burns: La Loi sur l'organisation judiciaire.

M. Levesque: ... judiciaire.

M. Burns: Cela veut dire pas avant l'automne.

M. Levesque: C'est-à-dire que, sur le prochain exercice financier, il sera possible, probablement, de le faire. Peut-être avant cela. Je ne sais pas si on va réussir avant.

M. Burns: Cela veut dire, si vous parlez du prochain exercice financier, pas avant 1977.

M. Levesque: Le volume à Baie-Comeau est un peu moindre que celui de Sept-lles, d'après les renseignements que l'on me fournit. Une fois que la Loi sur l'organisation judiciaire aura été adoptée, si elle l'est, par l'Assemblée nationale, nous pourrons, avec les dispositions qui sont contenues dans la loi, avoir une plus grande mobilité et ce serait mieux justifié, le juge résident pouvant évoluer d'une façon plus large. C'est pourquoi nous trouvons que cela pourrait trouver sa justification.

M. Burns: Je ne veux pas quitter ce sujet sans vous dire, après vous avoir écouté tout à l'heure et en admettant qu'il soit exact qu'il n'est pas toujours bon que le même juge — mais je parle du même juge, c'est-à-dire un seul — soit sur les lieux et que, nécessairement, cela peut être utile d'avoir un juge qui apparaisse à l'occasion dans le décor, dans un district judiciaire plus éloigné, qu'il reste, quand même, un autre point de vue qui mérite d'être soulevé, c'est-à-dire celui qui favorise la résidence d'un certain nombre de juges.

Je ne parle pas d'un seul juge, mais d'un certain nombre de juges qui viennent à connaître le contexte social d'une certaine région. Là-dessus je pense que l'utilité de la nomination de deux ou de trois...

M. Levesque: On peut avoir un système mixte comme dans plusieurs endroits, un juge résident plus des juges itinérants. C'est ce que nous avons dans ma propre région et je trouve que c'est excellent.

M. Burns: Alors on peut s'imaginer que ce système pourrait nous arriver sur la Côte-Nord d'ici un an?

M. Levesque: Oui. Je l'espère bien.

M. Burns: Vous ne m'en faites pas la promesse formelle?

M. Levesque: Je ne fais jamais de promesse, mais je note sérieusement...

M. Burns: J'aimerais bien que vous me fassiez une promesse, parce que l'année prochaine, je pourrais vous dire que vous l'avez suivie ou que vous ne l'avez pas suivie.

M. Levesque: Ah oui! c'est cela.

M. Burns: Ou encore, l'année prochaine, si je ne vous en parle pas, vous pourriez me dire: Vous ne me parlez pas de ma promesse que j'ai réalisée.

M. Levesque: Oui. Disons que si je n'étais pas d'accord, je vous le dirais, mais...

M. Burns: Vous êtes d'accord avec le principe.

M. Levesque: ...mais la promesse, pour le principe oui.

M. Burns: Toujours, M. le Président, concernant une recommandation du livre blanc, laquelle apparaît à la page 167, recommandation 4,4: "que soit mise sur pied, afin de contrôler— je cite directement le livre blanc— les aptitudes des juges à tous les points de vue, y compris leur état de santé..." Je me demande ce qui a été fait, ou ce qui va être fait, à cet égard. Je vous réfère au journal Le Soleil qui reprenait un article du New York Times, au début de janvier dernier. Et, l'un et l'autre, Le Soleil et le New York Times, émettaient l'opinion qu'il serait hautement souhaitable que les futurs juges soient soumis à des tests psychiatriques, afin de s'assurer de leur tempérament, lors de l'exercice de leurs fonctions.

Je n'ai pas l'intention de faire de démagogie à ce sujet, mais je sais que, dans le passé, et sans vouloir citer de cas précis, et je ne parle surtout pas de juges qui sont actuellement en exercice, il y a eu des problèmes de cet ordre qui ont dû être réglés par des voies assez spéciales. Ils sont assez rares, mais d'autre part, comme le ministre lui-même disait: II vaut mieux prévenir que guérir. Est-ce que le ministre a l'intention de mettre en application des mesures pour prévenir ce type de situations?

M. Levesque: C'est la première fois qu'on me parle de cela.

M. Burns: Ah bien! vous n'avez pas lu cela? M. Levesque: Non.

M. Burns: Vous n'avez pas lu le Soleil du vendredi 16 janvier 1976, je vous réfère à cela: "Des tests psychiatriques pour les futurs juges". C'est un article qui est tiré du New York Times, contribution spéciale par Seymour Kurvin et David Saxe. C'est tout à fait en accord, en tout cas, sans que ce soit clairement spécifié, avec le livre blanc, à la recommandation 4.4 page 167; Que la fonction de ce comité soit de contrôler les aptitudes des juges et cela à tout point de vue y compris leur état de santé. Il entendra et décidera du bien-fondé de toute plainte portée à l'égard des juges dans l'exercice de leurs fonctions, la plainte et le fardeau de la preuve incomberont au Procureur général.

M. Blank: II y a un grand nombre de juges américains qui sont élus. Est-ce qu'on aura des tests psychologiques des députés avant qu'ils se présentent?

M. Burns: Ce n'est pas mauvais, cela! Cela viderait la Chambre bien vite!

M. Levesque: Je n'ai pas de réponse là-dessus, sinon...

M. Burns: La proportion serait plus forte chez nous que chez vous, de gars qui restent!

M. Levesque: ... j'improviserais une réponse. Je prends note de la suggestion. Je prends cela comme une suggestion du député de Maisonneuve. Je ne suis pas à même de réagir. Vous savez que, lorsque nous nommons un juge, nous prenons des informations de diverses sources. Quelquefois la nomination d'un juge peut paraître retardée, mais pendant ce temps-là, quant à moi, je me donne beaucoup de peine à prendre le plus de renseignements possible sur tous les aspects d'une candidature, non seulement que...

M. Burns: ... non plus s'il est classé A, B, C ou D!

M. Levesque: Vous direz à votre recherchiste que ce n'est pas dans mon "bag", à ce moment-ci. Je dis ce que je fais; je fais beaucoup de recherches et de consultation. Non seulement je prends l'avis du Barreau — cela c'est essentiel; je considère cela essentiel — mais, en plus, je prends des avis des gens du milieu. Je consulte les députés, par exemple, je consulte... Ne sursautez pas, je consulte les députés; ce sont probablement les gens qui connaissent mieux le milieu donné et qui...

M. Burns: C'est drôle, les députés de l'Opposition ne sont pas consulté souvent!

M. Levesque: Certainement et j'ai consulté d'ailleurs le député de Maisonneuve et je dois encore le consulter.

M. Burns: Oui?

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Dans quel cas?

M. Levesque: Je le lui rappellerai.

M. Burns: Dans la nomination d'un juge?

M. Levesque: Oui et je le lui rappellerai.

M. Burns: Ah bien! Ecoutez...

M. Levesque: Au contraire, je n'ai pas d'objection à consulter le député de Maisonneuve, parce que j'ai bien confiance en son jugement, quant aux qualifications d'un avocat pour accéder à la magistrature.

M. Blank: ... une nomination péquiste, si vous consultez...

M. Levesque: Non, je sais qu'il fera abstraction de ses appartenances politiques si je le consulte sur une nomination d'un avocat.

M. Sylvain: Oui?

M. Levesque: Et je sais que...

M. Burns: Pourquoi pas? Je considère l'appareil judiciaire assez important pour qu'on puisse faire abstraction des origines politiques des avocats.

M. Levesque: Je prends avis, également, de la magistrature elle-même. Il m'est permis de demander à un juge ce qu'il pense.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Je prends avis également de certaines personnes que je connais de la région, pour avoir peut-être un autre son de cloche. Finalement, évidemment, de mes collaborateurs au ministère qui, eux-mêmes, ont leur propre source. C'est afin d'éviter le plus possible, humainement, tout ce qui peut être de nature à faire une nomination médiocre ou mauvaise.

M. Burns: En somme, vous changez le système qui avait été établi par votre prédécesseur?

M. Levesque: Non. M. Burns: Non?

M. Levesque: Mon prédécesseur avait pris l'habitude, lui aussi, de consulter le Barreau et il avait sûrement...

M. Burns: Y compris pour les anciens ministres et tout cela?

M. Levesque: ... d'autres sources de renseignements. Ah! Je ne sais pas si...

M. Burns: Ah!

M. Levesque: Les anciens ministres qui ont été nommés juges?

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Probablement qu'il s'est enquis au Barreau, mais il faudrait le lui demander.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Je sais que c'était son habitude et je n'ai fait que continuer une excellente tradition. Quant à moi, en plus de l'opinion du Barreau, j'essaie d'avoir l'opinion la plus complète possible et lorsque nous revenons à la question de l'état de santé physique ou mental du candidat, j'imagine qu'il ne peut pas avoir un état qui serait complètement caché à toutes les personnes qui sont ainsi consultées.

M. Burns: Non, non, d'accord.

M. Levesque: Cela serait difficile.

M. Burns: Non, non, je comprends cela.

M. Levesque: Mais il peut arriver un accident.

Heures d'ouverture des cours

M. Burns: Laissons cela ainsi pour le moment. Toujours sur le problème du fonctionnement du système judiciaire, le juge Charles Cliche proposait en septembre dernier de rendre possible la comparution en soirée afin de faciliter la tâche, particulièrement de certains témoins ou même encore de certains accusés; sa proposition visait également à décongestionner les rôles. Dans une nouvelle qui paraissait dans le Montréal-Matin du 11 septembre 1975, on lit ceci: "A tout événement, le juge Cliche entend bien pousser son idée jusqu'à sa réalisation. Il croit qu'il s'est déjà assuré l'oreille sympathique du juge en chef André Fabien et des juges en chef des autres juridictions qui ont tous, lors de la récente cérémonie d'ouverture officielle des tribunaux, manifesté le désir de rendre la justice plus accessible à tous.

J'aimerais savoir ce que le ministre de la Justice en pense, comment lui-même envisage de donner un coup de main, si je puis dire, à ces juges qui veulent rendre la justice plus accessible à tous.

M. Levesque: Disons tout d'abord que ceci nous a préoccupés d'une façon particulière. Pour se référer encore au livre blanc, on voit qu'il y a là des suggestions d'avoir un rôle le matin et un rôle d'après-midi, plutôt que d'avoir un seul rôle.

On sait, par exemple, que lorsqu'un rôle est établi pour la journée, il arrive que des causes sont remises ou que d'autres sont réglées et qu'à un moment donné la cour cesse vers treize heures alors que le juge aurait pu continuer dans l'après-midi. En scindant le rôle, en ayant un rôle pour le matin et un autre rôle pour l'après-midi, on éviterait cette situation et je pense qu'il y aurait une meilleure utilisation du temps de la cour.

Nous avons l'intention — je n'ai pas terminé mes consultations à ce sujet — de proposer cela dans la Loi sur l'organisation judiciaire et c'est déjà dans le projet de loi tel qu'il existe à l'heure actuelle.

Pour le soir, j'aurais plus d'hésitation à cause

des conventions collectives, à cause du personnel, etc. Il y aurait peut-être des difficultés de ce côté. Je sais que, du côté de la Cour supérieure, si mes renseignements sont exacts, le juge Deschênes, juge en chef de la Cour supérieure, entend commencer dès le mois de septembre, je crois, cette question d'avoir deux rôles, un rôle le matin et un rôle l'après-midi.

Cela répondrait, je pense, au voeu que vient d'exprimer le député de Maisonneuve.

M. Burns: Mais on ne prévoirait pas de rôle pour le soir comme tel.

M. Levesque: Je crois qu'à cause du personnel...

M. Burns: Du personnel de soutien?

M. Levesque: ... oui, du personnel de soutien, on aurait des problèmes. On devrait avoir toute une équipe du soir à ajouter encore. Il y a des questions de coûts également. Ensuite, qu'on pense, par exemple, aux employés des magasins; ils ont réussi à avoir des heures de fermeture. Ce sont des gens qui voulaient avoir leurs soirées libres à un moment donné et, par la loi provinciale, on a réduit le nombre d'heures d'ouverture des établissements commerciaux. Si je veux faire un parallèle avec cela...

M. Blank: Je pense que le juge Cliche, dans son article, a parlé plutôt du côté pénal, des comparutions pour des offenses mineures. Je veux vous dire qu'à Montréal on a essayé cela à la Cour municipale pour des offenses ayant trait à la circulation. On donnait le choix, à un moment donné, à une personne qui avait une contravention relative à la circulation de comparaître à dix heures, à trois heures ou à sept heures. Ils ont fait l'essai pour un an. Cela n'a pas marché du tout. Le soir, il n'y avait presque personne. D'un autre côté aussi, c'était très bon durant la période où on n'avait pas la Loi des cautionnements comme aujourd'nui. Une personne qui était arrêtée à la fin de l'après-midi devait attendre jusqu'au matin pour avoir son cautionnement. On a parlé alors d'une cour de nuit. Maintenant, avec la Loi des cautionnements, presque 90% des gens sortent avec leur propre signature. Je pense que le juge Cliche veut plutôt parler du côté pénal que du côté civil.

M. Burns: Le juge Cliche parle surtout de causes de moindre importance. Selon ses dires c'est fort probablement...

M. Blank: Des infractions aux lois de la circulation.

M. Burns: ... des histoires...

M. Levesque: Des petites créances peut-être.

M. Burns: Selon le journal que je cite, qui est le Montréal-Matin du 11 septembre 1975: "Voulant faire d'une pierre deux coups, le juge Cliche croit que sa suggestion serait à la fois de nature à réduire certains délais, ainsi qu'à faciliter la tâche de certains témoins et justiciables. Il propose que certaines salles de cour soient ouvertes en soirée, de sorte que les personnes appelées à déposer — il n'y a pas seulement le cas de personnes accusées, parce qu'on parle de personnes appelées à déposer — dans des causes de moindre importance n'aient pas à sacrifier des journées de travail pour se présenter à la cour. Si elles étaient convoquées en soirée, elles pourraient s'acquitter de leur devoir de citoyen à moindre frais. '

Chose assez intéressante, par rapport à ce que le ministre disait tout à l'heure, la fin de l'article se lit comme suit: "Les fonctionnaires administratifs: greffiers, sténographes, secrétaires judiciaires, etc., pour leur part, y voient déjà un avantage, puisque leur travail en soirée leur vaudrait un congé le lendemain matin, ce qui leur permettrait de vaquer à certaines tâches domestiques, comme le magasinage et autres démarches personnelles". Remarquez que je ne sais pas si c'est l'opinion du juge Cliche, mais, de toute façon, il ne semble pas y avoir un tollé de protestation du côté des fonctionnaires de soutien.

M. Perreault: Vous y croyez? M. Burns: Pardon?

M. Perreault: Vous croyez qu'il n'y aurait pas de difficultés?

M. Burns: Si c'est normalement discuté avec les personnes, je pense bien qu'il n'y a pas de problèmes. Si on le leur impose, c'est bien sûr qu'il va y avoir des grincements de dents.

M. Levesque: Si on pouvait réussir au moins à avoir ce que j'ai suggéré tout à l'heure et ce que suggère le livre blanc, un rôle le matin et un rôle l'après-midi, je pense qu'on accélérerait beaucoup les travaux.

Le cas du juge Lamarche

M. Burns: D'accord.

Autre question, M. le Président, au programme 1, élément 1. C'est le problème qui concerne le juge Jacques Lamarche. Je n'aime pas faire des cas très particuliers mais les journaux, malheureusement ou heureusement — vous jugerez — ont fait état d'un certain conflit opposant ce juge de la Cour du bien-être social avec son juge en chef. Ceci remonte à septembre 1975. Apparemment, le motif du conflit était à l'effet que le juge Lamarche était trop progressiste dans sa façon d'entrevoir la délinquance juvénile. Les réactions des milieux intéressés ont été très évidentes et le débat a été porté, à cause de cela, sur la place publique.

Sans intervenir directement dans ce qui relève du pouvoir judiciaire, je pense que le cas du juge

Lamarche soulève des questions très importantes et on pourrait peut-être les dénombrer à deux:

La première: Que fait le ministère de la Justice pour empêcher qu'à chaque année un juge soit dénoncé soit par son juge en chef, comme c'est le présent cas, ou soit par les avocats, comme cela a été le cas tristement célèbre du juge Anctil? Est-ce que, par exemple, on envisage un code de déontologie, un comité de discipline, un conseil de la magistrature ou quoi que ce soit dans cette ligne?

La deuxième — à moins que vous ne veuillez répondre à celle-ci immédiatement — c'est que dans le cas du juge Lamarche, si on se fie aux journaux, le conflit originerait d'une divergence fondamentale d'opinion entre le juge Lamarche et son juge en chef. Cette divergence d'opinion touche un problème d'actualité puisque c'est la philosophie même du traitement de la délinquance juvénile qui est mise en cause.

J'aimerais savoir, à ce moment-là, quels sont les pouvoirs du ministère en matière d'orientation de cette philosophie du traitement de la délinquance juvénile, quelles ont été les actions du ministère sur ce sujet depuis l'arrivée de l'actuel ministre et à la lumière de la recommandation particulièrement 4.3 du livre blanc sur la justice qu'on retrouve également à la page 167.

M. Levesque: En effet, le livre blanc, sous le titre Le contrôle et la révocation des juges, a comme recommandation 4.3 qu'un comité de contrôle de la compétence professionnelle des juges soit créé et qu'il soit composé de cinq membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, etc., que la fonction de ce comité soit de contrôler les aptitudes des juges et cela à tout point de vue, y compris leur état de santé.

M. Burns: C'est la recommandation 4.4 que je vous citais tout à l'heure, cela.

M. Levesque: Ah oui!

M. Burns: Celle que je vous cite actuellement précède l'autre: Que ce comité de cinq membres, nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, soit deux juges désignés après consultation avec le Conseil de la magistrature, un juge après consultation avec les Conférences des juges du Québec, un avocat après consultation avec le Barreau et un non-avocat après consultation avec le Conseil consultatif de la justice.

M. Levesque: Ceci était parti de ce que nous considérons pour encore une fois dans la loi de l'organisation judiciaire. Quant au juge Lamarche. pour le cas précis qui a été cité par le député, il est encore à la Cour du bien-être social. Il avait été affecté par le juge en chef de cette cour sur la rive sud de Montréal. Le juge en chef, et c'est là son droit exclusif en vertu de la Loi des tribunaux judiciaires, a décidé de l'affecter à Montréal. Je sais que, comme l'a mentionné le député de Maisonneuve, cette décision a été contestée dans certains milieux...

M. Burns: Par des citoyens.

M. Levesque: Oui. D'ailleurs, j'ai reçu beaucoup de correspondance...

M. Burns: Qui se préoccupaient de la délinquance juvénile.

M. Levesque: Oui, j'ai reçu beaucoup de correspondance à cet effet. J'ai vu évidemment, comme le député, les articles dans les journaux. Quant à la décision du juge en chef, je préfère évidemment, on me comprendra, ne pas la commenter, de façon à maintenir l'indépendance de la magistrature, réserver l'autorité du juge en chef. A ce moment, nous nous situons à la limite de l'exercice des pouvoirs judiciaires...

M. Burns: J'ai d'ailleurs, je pense, pris cette précaution que je ne voulais pas m'immiscer dans le processus judiciaire non plus.

M. Levesque: C'est exact. M. Burns: Mais...

M. Levesque: Le juge Lamarche, d'ailleurs, je peux le dire, m'a écrit, il y a quelque temps, et j'ai demandé à mon sous-ministre, M. Normand, de rencontrer le juge et discuter de la situation avec lui. C'est pour cela, encore une fois, que je dis que c'est à la limite de mes pouvoirs et de ceux du judiciaire; je n'ai pas voulu trop m'immiscer, mais une rencontre, à mon sens, pouvait être justifiée. L'entrevue a d'ailleurs été positive. Je pense que, si on interrogeait le juge Lamarche aujourd'hui, il dirait qu'il a été satisfait de cette entrevue. A sa demande, d'ailleurs, nous avons accepté de le faire bénéficier d'un programme de perfectionnement et cela doit se faire très prochainement, je crois, si ce n'est pas déjà en marche. J'aimerais autant ne pas ajouter d'autres détails de façon à me mêler de mes oignons.

M. Burns: M. le Président, l'élément 1, je suis prêt à l'adopter.

Le Président (M. Pilote): Elément 1, adopté. Elément 2, soutien administratif aux cours de justice.

Jurés et témoins

M. Burns: A l'élément 2, M. le Président, soutien administratif, d'abord une première question concernant l'augmentation des tarifs des témoins et, encore une fois, je me réfère au livre blanc.

M. Levesque: J'ai répondu au député il n'y a pas longtemps là-dessus, je pense qu'on a discuté cela.

M. Burns: On a parlé des jurés.

M. Levesque: C'est à peu près dans le même sens.

M. Burns: C'est cela, j'aimerais que vous me le disiez quant aux témoins. Parce que...

M. Levesque: Je pense que j'ai les chiffres ici.

M. Burns: D'accord.

Je vous rappelle que vous proposiez que les frais des témoins soient portés de $10 à $20 par jour.

M. Levesque: Les jurés, cela.

M. Burns: Non, le cas des témoins.

M. Levesque: Est-ce qu'on a parlé des témoins, l'autre soir? Non.

M. Burns: Non, vous n'avez pas parlé des témoins, c'est pour cela que je vous rappelle le cas des témoins, aujourd'hui. Je vous parle du livre blanc qui, lui...

M. Levesque: Oui, mais l'autre soir, quand on a parlé...

M. Burns: On a parlé des jurés.

M. Levesque: On a parlé des jurés, on n'a pas parlé des témoins.

M. Burns: Non. Moi, je vous parle des témoins, là.

M. Levesque: D'accord.

M. Burns: C'est pour cela que je vous dis qu'on n'en a pas parlé. J'aimerais savoir...

M. Levesque: Pour les jurés, c'était $10 par jour; pour les témoins, c'est $10 par jour.

M. Burns: Oui. Vous avez l'intention de faire varier cela dans les mêmes proportions?

M. Levesque: C'est la même chose que pour les jurés, selon la recommandation que j'ai devant moi, mais à laquelle je n'ai pas donné suite encore. Elle est dans le même sens.

M. Burns: Dans le cas des experts, avez-vous l'intention de faire des ajustements également, les témoins experts, les psychiatres, les médecins en général?

M. Levesque: Toutes les augmentations qui m'ont été soumises sont proportionnelles, pour les témoins, témoins ordinaires, témoins experts, jurés, etc.

M. Burns: C'est dans la même proportion?

M. Levesque: C'est dans la même proportion.

M. Burns: Cela veut dire le double?

M. Levesque: Cela veut dire le double. De $10 à $20, c'est le double. Je ne peux pas dire que c'est le double pour les experts. Je vais essayer de l'obtenir. C'est la même chose, c'est la même proportion.

La ville de Chambly

M. Burns: C'est la même proportion? D'accord. Toujours à l'élément 2, je présume que le ministre de la Justice a reçu, en même temps que le chef de l'Opposition, c'est-à-dire vers le 24 mars, une lettre de la ville de Chambly datée du 19 mars, qui contenait une résolution portant le no 4298 et qui était, à toutes fins pratiques, une protestation contre le rattachement du territoire de la ville de Chambly au district judiciaire de Saint-Jean. Est-ce que le ministre a donné suite à cette résolution?

Cela semble être un cas très particulier, mais comme la ville de Chambly a pris la peine de faire une résolution et de nous en faire parvenir une copie, il me paraît que cela ait pu faire l'objet de discussions au ministère de la Justice, surtout qu'on ne peut pas dire qu'on le prenne par surprise puisque cela remonte déjà au mois de mars dernier. Est-ce que le ministre de la Justice a pris une décision relativement à cela?

M. Levesque: II faut se rappeler que cela a été changé au mois de décembre 1975, mais n'a pas encore été proclamé. Nous avons reçu, comme le dit le député de Maisonneuve, des représentations de la ville de Chambly et nous avons l'intention de donner suite au voeu exprimé par Chambly.

M. Burns: Par la ville de Chambly. M. Levesque: Oui.

M. Burns: Est-ce que vous le leur avez annoncé?

M. Levesque: J'ai reçu cette lettre en date du 19 mars qui était adressée au sous-ministre. Je pense que la même lettre a été envoyée au premier ministre et probablement au chef de l'Opposition.

M. Burns: Oui, j'ai devant moi une copie qui a été adressée directement au chef de l'Opposition.

M. Levesque: Le sous-ministre a répondu le 1er avril 1976 au greffier de la cité de Chambly.

M. Burns: Lui disant?

M. Levesque: Qu'il étudiait cette question et, le 31 mai, il donnait suite à cette chose en disant à Mme Mongrain, qui est le greffier de la cité de Chambly: "Nous examinons donc présentement la possibilité de retourner à l'ancienne situation à la plus brève convenance, comme vous nous le suggérez".

Je pense que nous avons un projet de loi présentement, si ma mémoire est fidèle — je ne l'ai pas ici — le projet de loi no 16.

M. Burns: II vise Laval; je ne pense pas que cela vise Chambly.

M. Levesque: On ne l'a pas ici devant nous, mais je pourrai vérifier, de toute façon, ce sera peut-être une occasion, si ce n'est pas inclus dans le bill, de le mettre ou de faire un amendement en commission.

M. Burns: De toute façon, vous êtes d'accord avec cette position prise par la ville de Chambly?

M. Levesque: Oui, je vais demander à mes collaborateurs ici de vérifier si c'est dans le bill no 16; sinon on en fera un amendement à la prochaine occasion pour qu'on donne suite à ceci.

Transcription des plaidoiries et témoignages

M. Burns: D'accord. Dernière question, M. le Président, à ce programme 1. Tout le monde sait qu'il y a quelques années, à la suite d'une recommandation qui apparaissait dans le rapport annuel du ministère de la Justice, on mécanisait simplement les systèmes de sténographie à l'intérieur des diverses cours relevant de la compétence du gouvernement du Québec. A ce moment-là, on sait que les sténographes judiciaires, en grande partie, se sont confier d'autres fonctions ou d'autres postes dans d'autres districts judiciaires. On avait commencé par un projet pilote à Saint-Jérôme et, lentement, on avait installé le système de l'enregistrement mécanique à Montréal. J'aimerais savoir aujourd'hui — je ne sais pas si le ministre a en main tous ces chiffres — combien a coûté ce programme de transfert, quels en sont les résultats, comment actuellement on décide de l'endroit où le système d'enregistrement mécanique est mis en application, plutôt que le système de prise en sténographie par des sténographes ou sténotypistes judiciaires.

J'aimerais avoir, quoi, un portrait général de cette situation.

Je lui signale, entre autres, qu'à Montréal actuellement, à la Cour criminelle, il y a encore — et heureusement — un nombre, que je ne peux pas déterminer, de sténographes judiciaires, soit de sténotypistes ou de sténographes, qui ne sont pas affectés à une cour directement, mais qui servent à dépanner régulièrement les cours qui, pour des raisons ou d'autres, doivent se servir d'eux. Entre autres, les commissions d'enquête; je pense, par exemple, à la commission d'enquête qui avait été, de façon spéciale, désignée dans le cas de l'incendie du métro de Montréal où on avait utilisé des sténographes; partiellement, à la Commission d'enquête sur le crime organisé où on avait utilisé des sténographes, jusqu'au moment où on a décidé de donner un contrat à l'extérieur à un pigiste et non pas à un employé du gouvernement. Je pense également à certains cas d'enquêtes de la part du commissaire aux incendies qui ont été, si vous voulez, assistés par des sténographes plutôt que par un enregistrement mécanique.

J'aimerais surtout savoir, de la part du ministre — peut-être n'est-il pas en mesure de nous donner des statistiques là-dessus, mais c'est pour juger de l'efficacité de ce qui a été fait, de cette correction qui a été faite, c'est-à-dire de passer du sténographe ou du sténotypiste judiciaire au système de l'enregistrement mécanique — quels sont les avantages, maintenant qu'on connaît le système depuis un certain nombre de mois et, dans certains cas, d'années? J'aimerais savoir si, véritablement, cela a amélioré la situation. Par exemple, est-ce qu'une cause qui est prise par voie d'enregistrement mécanique voit la transcription remise aux parties dans un délai meilleur que celui qui était imposé par l'utilisation des sténographes ou des sténotypistes judiciaires?

M. le Président, et ce n'est pas une critique directe à l'endroit des personnes qui s'occupent de l'enregistrement mécanique, mais je me rappelle que dans une des dernières causes que j'ai eu à plaider et qui était, en ce qui me concerne, très importante — c'était un cas d'injonction — j'ai retrouvé, par voie d'enregistrement mécanique, les arguments que je faisais valoir en faveur de l'émission de l'injonction —je représentais le demandeur ou le requérant — dans la bouche de mon adversaire. Je me suis trouvé un peu bête de dire des choses que mon adversaire disait et qu'on mettait dans ma bouche. Je me disais: Vraiment, ce matin-là, je n'étais pas en très sérieuse forme, parce que je plaidais contre ma cause. Je vous avoue que je ne suis pas le seul avocat qui a eu l'occasion d'affronter ce problème.

J'aimerais savoir quelles ont été les constatations physiques, si on peut dire, de ce changement qui devait, aux dires du rapport de 1972 du ministère de la Justice, révolutionner le système de l'administration de la justice?

M. Levesque: Disons, premièrement, que j'ai eu l'occasion de visiter ce nouveau système au palais de justice de Montréal, système que l'on retrouve d'ailleurs à Saint-Jérôme...

M. Burns: C'est là qu'il a commencé d'ailleurs.

M. Levesque: Oui, depuis plusieurs années et maintenant qui est en train de s'installer à Québec. Deuxièmement, je dirai que, quant aux sténotypistes, nous n'avons pas mis à pied qui que ce soit.

M. Burns: Non, ce n'est pas de cette nature, sauf que...

M. Levesque: Au contraire, ceci est venu aider grandement...

M. Burns: Je m'excuse, sauf qu'il y a des sténographes judiciaires qui ont été obligés de déménager de Montréal à Sherbrooke ou à Saint-Hyacinthe et même sur la Côte-Nord.

M. Levesque: Oui, oui, mais personne n'a perdu son emploi.

M. Burns: Non.

M. Levesque: Evidemment, je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais on me dit que, sans cet enregistrement mécanique, nous aurions eu de sérieuses difficultés et que ceci a été un complément extrêmement important. Quant au délai, il y a des délais de transcription...

M. Burns: Beaucoup plus grands qu'avant.

M. Levesque: II y a des délais de transcription.

M. Burns: Beaucoup plus grands qu'avant.

M. Levesque: A cause du volume qu'il y a là, de la difficulté que nous avons de trouver du personnel qualifié dans ce domaine et à cause aussi des restrictions que nous avons, il y a un délai de transcription, mais nous mettons à la disposition des parties un double de l'enregistrement, une bobine qui, cependant, est utilisée.

M. Burns: Ecoutez, j'ai connu le système devant le commissaire-enquêteur, en vertu du Code de travail, où nous avons la possibilité, lorsque nous allons en appel devant le Tribunal du travail, d'avoir une copie de la bande. Je ne sais pas si vous savez ce que cela veut dire pour un avocat de réécouter une journée de plaidoirie complète parce que cela dure le même temps, remarquez; on n'essaiera pas de me faire dire que cela prend moins de temps d'écouter la bande enregistrée...

M. Levesque: Sur le plan technique, c'est beaucoup inférieur lorsque c'est devant le commissaire-enquêteur du palais de justice.

M. Burns: Je me balance que ce soit inférieur, sauf que vous allez avoir de la difficulté à me contredire là-dessus. Si on met à ma disposition la bande qui a été enregistrée, à moins que vous me disiez qu'il y a quelque chose de nouveau d'inventé, cela dure exactement le même temps qu'a duré le procès ou qu'ont duré les témoignages.

Je regrette, mais si je dois me préparer pour le lendemain et que j'ai passé la journée en cour, je ne peux pas repasser une autre journée en cour, c'est-à-dire une nuit pour écouter la journée en cour, et cela est très grave.

M. Levesque: On me dit que les avocats ne demandent qu'une partie, un moment donné...

M. Burns: Oui, oui, mais, si un moment donné vous voulez revoir l'ensemble de l'affaire, cela sera fait beaucoup plus vite par voie de lecture; c'est bien sûr qu'il n'y a pas un sténographe qui est capable de nous donner dans les heures qui suivent la transcription. Mais il n'y a pas de mécanographie ou il n'y a pas d'enregistrement mécanique non plus qui soit en mesure de nous donner une transcription dans le délai qu'un sténographe est capable de le donner. J'irai plus loin: Est-il exact qu'au ministère de la Justice actuellement on envisage de revenir au système du sténographe judiciaire?

M. Levesque: Mes renseignements sont à l'effet que non.

M. Burns: Vous ne voulez pas admettre vos erreurs.

M. Levesque: Les erreurs de mon prédécesseur.

M. Burns: Les erreurs comme les bonnes actions se perpétuent dans l'institution gouvernementale.

M. Levesque: Je dis cela sans être trop sérieux; il y a une continuité et ce sont les mêmes officiers aujourd'hui qui étaient là du temps de mon prédécesseur. La réaction que j'ai d'eux, c'est que ce n'est pas désirable de retourner à ce que c'était.

M. Burns: Cette décision de ne pas retourner à ce qui existait est-elle basée sur une étude statistique tant au point de vue de la quantité, de la qualité et de la rapidité avec laquelle on est en mesure de mettre la main sur une transcription des témoignages et des plaidoiries qui sont portées devant les tribunaux? Est-ce basé sur des faits? Est-ce qu'il y a un examen? A-t-on fait une espèce — passez-moi l'expression maoïste — d'autocritique de tout ce qu'on a imposé depuis quelques années?

M. Levesque: On m'indique justement qu'on a fait une autocritique.

M. Dorion me dit qu'il vient de terminer cette autocritique.

M. Burns: Est-ce qu'on a eu...

M. Levesque: On m'indique également deux choses, c'est que...

M. Burns: Y a-t-il moyen d'avoir une copie de cette autocritique?

M. Levesque: C'est interne.

M. Burns: Oui, mais nous, nous sommes quand même des citoyens, des justiciables.

M. Levesque: J'essaie de vous traduire aussi fidèlement que possible la réaction que l'on a sur cet enregistrement mécanique. Premièrement, fidélité plus grande, me dit-on; deuxièmement, l'intention d'essayer d'augmenter le recrutement de ceux qui ont à transcrire. On me dit que la difficulté principale, c'est une difficulté de recrutement.

M. Burns: Je comprends, au prix que vous les payez. Savez-vous combien vous les payez vos dictaphonistes?

M. Levesque: Comment les paie-t-on? Le savez-vous?

M. Burns: Je le sais. Je vais vous laisser chercher, par exemple.

M. Levesque: II y a différentes classes et échelons. On me parle d'un maximum de $11 000.

M. Burns: Depuis quand? Combien d'années faut-il pour arriver à $11 000?

M. Levesque: On ne l'a pas ici, malheureusement.

M. Burns: Je comprends que vous ayez de la difficulté. Vous les engagez à $5200. Actuellement, c'est peut-être rendu à $6200. Mais, l'année dernière, au moment où on se parlait, on les engageait à $5200. $100 par semaine pour des dicta-phonistes, cela n'est pas énorme, surtout quand on sait le travail qu'on leur imposait. C'est bien sûr qu'on n'avait pas les moyens d'en recruter tellement. Actuellement, à cause des augmentations que je n'ai pas vérifiées, c'est probablement aux alentours de $6200, peut-être même $7000. Mais combien d'années cela prend-il pour arriver à $11 000? J'aimerais bien le savoir.

M. Levesque: On pourrait sortir le texte du sous-ministre, dont on a parlé au début de l'étude des crédits.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Le texte qu'il avait donné à Ottawa, à un moment donné; peut-être qu'il a parlé de cela aussi.

M. Burns: Oui, voulez-vous que je le rappelle? Là-dessus, en tout cas, M. le ministre, en quittant l'élément 1, je pense que cela nous prendrait plus que des affirmations. Ce n'est pas que je ne prenne pas votre parole ou que je ne prenne pas la parole de vos officiers supérieurs relativement à l'efficacité du nouveau système, mais j'aimerais bien, à un moment donné, le savoir une fois pour toutes, tant pour les justiciables que pour les avocats. Je connais de nombreux confrères, à Montréal, qui ont à se plaindre du système et qui regrettent la période où on avait la possibilité, soit avec le chef des sténographes ou encore avec le ou la sténographe concerné de négocier le fait que telle transcription avait une importance plus qu'une autre et qu'à ce moment-là il était peut-être nécessaire que, dans un délai un peu exceptionnel, la transcription soit faite.

J'aimerais aussi avoir des statistiques concernant l'efficacité du système actuel tant au point de vue du coût du système — cela comporte le coût des machines, le coût de l'utilisation du personnel — que du rendement que cela donne par rapport au système antérieur.

Je vous avoue bien honnêtement — je m'excuse auprès des fonctionnaires qui ont fait cette recommandation, je sais qu'elle vient, à l'origine, de hauts fonctionnaires de votre ministère qui sont encore là, que je pense qu'on a agi, je ne leur prête même pas de mauvaises intentions, dans un esprit technocratique qui ne tenait pas compte d'une certaine pratique. Ces personnes qui, sans doute, sont membres du Barreau, n'ont peut-être pas déjà vécu de visu — dois-je dire de au-ditu? — le problème qui concerne l'avocat de pratique privée de tous les jours.

M. Levesque: Ces fonctionnaires sont souvent en contact avec le palais de justice de Montréal et d'autres palais de justice. Je sais pertinemment qu'ils sont là assez souvent pour savoir ce qui se passe. Mais il faut aussi se rappeler... Je serais peut-être prêt à admettre que le service donné aux avocats était supérieur autrefois à ce qu'il est aujourd'hui. Mais il faut tenir compte que le volume a augmenté considérablement.

M. Burns: II faudrait peut-être augmenter le volume du personnel pour servir.

M. Levesque: Lorsque le service en question était tel, il correspondait; il y avait une correspondance entre les sténotypistes et le volume de travail. Présentement, le volume a tellement augmenté que les sténotypistes, l'enregistrement mécanique et les personnes que nous avons pour la transcription, ce n'est pas suffisant pour le volume qu'il y a. C'est cela qui me semble être le problème.

M. Burns: Mais comment se fait-il qu'une commission comme la Commission d'enquête sur le crime organisé, jusqu'à maintenant, n'ait pas eu recours à l'enregistrement mécanique des témoignages? Comment se fait-il que la Commission d'enquête sur le crime organisé, qui a besoin de fonctionner avec une certaine célérité, a toujours eu recours, depuis le début de ses travaux, que ce soit à huis clos ou en audition publique, à des sténographes? Comment se fait-il que cette commission, qui se veut très efficace, qui veut fonctionner avec célérité, n'ait pas eu encore recours à l'enregistrement mécanique? Vous allez me dire, peut-être, qu'elle siège à un endroit où l'enregistrement mécanique n'est pas encore utilisé. C'est possible. Mais comment se fait-il que depuis le début des travaux de cette commission, on n'ait pas recours à l'enregistrement mécanique? Comment se fait-il également que dans ce cas, on donne cela à contrat à l'extérieur? C'est une compagnie de pigistes qui enregistre les témoignages... Cela n'a pas toujours été vrai pour les enquêtes à huis clos, mais c'est vrai pour les auditions publiques.

M. Levesque: Apparemment, c'est parce qu'il fallait avoir la transcription quotidienne.

M. Burns: Ah bon! Donc, c'est plus efficace. M. Levesque: Cela va coûter plus cher.

M. Burns: Oui. Est-ce que ce n'était pas possible avec les employés permanents du ministère?

M. Levesque: Apparemment, on a essayé, au début, mais il fallait siéger le soir, il fallait siéger à des heures souvent impossibles.

M. Burns: Et puis vous avez eu des refus?

M. Levesque: II y avait un manque de disponibilité.

M. Burns: Ah! mon Dieu! J'aurais des choses à vous raconter là-dessus.

M. Levesque: C'est ce qu'on me dit. Je n'étais pas là personnellement.

M. Burns: Je vous demande simplement de revoir tout ce système, de nous faire un bilan comparatif, tant au point de vue efficacité qu'au point de vue coût des deux systèmes. Il serait peut-être temps qu'on le fasse. Il est en vigueur.

M. Levesque: Je pense que cela rendrait service à tout le monde.

M. Burns: Je pense que oui. Programme 1 adopté, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Le programme 1 est adopté, ainsi que tous les éléments.

M. Burns: Elément 2, programme 1, programme 1 adopté.

M. Levesque: D'accord.

Le Président (M. Pilote): Programme 2.

Droits et libertés de la personne

M. Burns: Au programme 2, concernant la Commission des droits et libertés de la personne. On pourrait...

M. Levesque: Ce n'est pas long.

M. Burns: Ce n'est pas long.

Je sais, M. le Président, qu'actuellement, il y a un projet de loi qui est devant l'Assemblée nationale, alors je n'entrerai pas dans ce détail. Je voudrais quand même savoir clairement quelle est la partie de la loi, qu'on appelait, l'été dernier, le bill 50, qui est en application, qui est mise en vigueur par voie de proclamation, et quelle est la partie qui ne l'est pas?

M. Levesque: Tout le projet de loi, sauf l'article dont il est question dans le projet de loi que nous avons à étudier demain.

M. Burns: C'est la seule partie qui n'est pas en vigueur?

M. Levesque: Seul l'article 97 dont il est question.

M. Burns: Depuis quand? M. Levesque: Aujourd'hui.

M. Burns: Ah!... Je tombe pile.

Maintenant les droits et libertés fondamentales de la personne au Québec sont maintenant, outre l'article qui paraît par le projet de loi déposé aujourd'hui, en vigueur.

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Depuis aujourd'hui?

M. Levesque: Depuis le 28 juin 1976, aujourd'hui. Les arrêtés en conseil 1988 et 2070 de 1976.

M. Burns: Qu'est-ce qui a pris autant de temps, parce que si je me rappelle bien, c'est dans le courant du mois de juin 1975 que nous avons...

M. Levesque: Le 27 juin que nous avons sanctionné, 1975.

M. Burns: Je pense que c'est l'anniversaire justement.

Qu'est-ce qui a pris autant de temps? Si je comprends bien, au départ, nous avons ou vous avez, par voie de proclamation du lieutenant-gouverneur en conseil, mis en application les dispositions législatives qui concernaient uniquement la commission elle-même, c'est-à-dire l'existence de la commission, la nomination des membres...

M. Levesque: C'est justement cela qui a pris du temps, c'est que nous avons donné à la commission ce dont elle avait besoin pour s'organiser. Il faut dire que nous avons nommé, à l'Assemblée nationale, le 27 juin 1975, six des premiers membres, dont un a quitté — je pense qu'il a été nommé juge, c'est ça — il en est resté cinq et nous avons complété la commission de onze membres au mois de décembre 1975. Ils ont été assermentés en janvier 1976 à Montréal. J'ai eu l'occasion d'assister à cette assermentation au palais de justice.

Le temps qui a été mis à ça, ç'a été de s'organiser. Une fois le président nommé, il a dû faire son plan d'organisation et de développement de la Commission des droits de la personne, il a dû s'occuper du recrutement du personnel, de l'organisation des locaux, de mille et une choses qu'une nouvelle commission doit mettre en place avant de pouvoir commencer à dire qu'elle est prête à agir.

C'était quelque chose d'absolument neuf, nouveau, inédit et le président, le vice-président et leurs collaborateurs ont fait l'impossible pour être prêts et je suis très heureux de voir que le 28 juin était la date qu'on s'était fixée comme date d'en-

trée en fonction. Ils ont atteint l'objectif qu'ils s'étaient fixé.

M. Burns: Sauf que, maintenant, la définition des droits et libertés de la personne est l'objet de dispositions législatives au Québec.

M. Levesque: Exactement. A partir d'aujourd'hui.

M. Burns: A partir d'aujourd'hui. Je vous en félicite, même si cela a pris beaucoup de temps, je pense que cela a pris beaucoup trop de temps. Si j'ai une critique à faire valoir, c'est qu'on n'a pas...

M. Levesque: Je ne pense pas que cela aurait été bon pour la commission de partir sur un mauvais pied et les commissaires ont bien insisté là-dessus; c'est trop important pour partir un peu en broche à foin, sans être prêt à recevoir les appels.

M. Burns: Actuellement, donc, la commission est prête à recevoir les réclamations des citoyens ou les plaintes des citoyens à cet égard. Par exemple, combien y a-t-il de bureaux ouverts dans tout le Québec?

M. Levesque: Montréal et Québec présentement.

M. Burns: Montréal et Québec seulement. Combien y a-t-il... Est-ce que vous envisagez d'en ouvrir d'autres que Montréal et Québec, dans l'année qui vient?

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Quel endroit?

M. Levesque: L'intention de la commission est d'être présente éventuellement dans les dix régions administratives du Québec. Tout dépend, évidemment, quant à l'échéancier, de la période de rodage dont ils ont besoin présentement pour voir si Montréal et Québec, c'est suffisant pour le moment; ça comprend la moitié de la population du Québec, plus de la moitié, et surtout une population urbaine qui est peut-être plus susceptible d'avoir certains problèmes de la nature de ceux qui peuvent intéresser cette loi ou qui peuvent être solutionnés en vertu de cette loi. Quant à l'échéancier, il n'est pas encore déterminé, parce que ça doit tenir compte également des disponibilités budgétaires.

M. Burns: Vous n'avez pas de prospectives relativement à de nouveaux bureaux...

M. Levesque: Pas encore.

M. Burns: ...à de nouveaux pied-à-terre de la part de la commission?

M. Levesque: Pas encore.

M. Burns: Pour l'année qui vient.

M. Levesque: Pas encore.

M. Burns: Les dépenses de la commission depuis qu'elle est en place, comment ont-elles été réglées, par l'entremise du fonds consolidé, je présume?

M. Levesque: Pour l'exercice en cours, les sommes demandées au Conseil du trésor sont de l'ordre de $1,5 million.

M. Burns: $1,5 million. C'est pour l'année qui vient de se terminer, ça.

M. Levesque: Pour l'exercice financier qui commençait le 1er avril 1976.

M. Burns: 1976. Pour ce qui précède le 1er avril 1976... Parce que, sauf erreur, vous avez un demi-million de dollars...

M. Levesque: Pas loin de $500 000. Le chiffre se situe plutôt aux environs de $400 000.

M. Burns: Pour l'année 1976/77, pour établir l'exercice financier officiel?

M. Levesque: 1975/76?

M. Burns: J'ai devant moi la ventilation des crédits de votre ministère et on ne voit que $500 000.

M. Levesque: C'est simplement indicatif, comme on le voit. C'est statutaire. On a $500 000, on enlève $500 000, on a rien à voter, parce que c'est statutaire. C'est simplement une indication d'un chiffre. Cela aurait pu être $1 million, cela aurait pu être $500 000, parce que cela a été imprimé il y a déjà longtemps et, à ce moment-là, on n'était pas en mesure...

M. Burns: Mais votre estimation, ce n'est pas $500 000, c'est $1,5 million.

M. Levesque: C'est-à-dire la demande formulée par la commission. Cela ne veut pas dire que ce sera le montant qui lui sera alloué. Le montant qui a été demandé par la commission et que j'ai entériné auprès du Conseil du trésor, est de l'ordre de $1,5 million.

M. Burns: Pour la période qui précède, je n'ai pas de point de comparaison en 1975/76...

M. Levesque: Sauf qu'on a dépensé environ $400 000.

M. Burns: $400 000. Est-ce qu'il y a moyen d'avoir le rapport de cela? Est-ce que vous pouvez nous le déposer?

M. Levesque: Certainement. On peut avoir rapport là-dessus. Aucune objection. Cela va être dans les comptes publics de toute façon.

M. Burns: Cela a été pris à même le fonds consolidé, je présume?

M. Levesque: Oui, comme pour cette année. M. Burns: Comme pour cette année.

M. Levesque: Sauf que c'était simplement au point de vue de l'administration et de l'organisation de départ. A ce moment-là, il y a eu deux sommes, si je me rappelle bien, une au mois d'août et une autre au mois de février. Selon les besoins qui se faisaient sentir au mois de février, à ce moment-là, on a accordé la somme nécessaire pour se rendre au 31 mars. Depuis ce temps-là, nous sommes à même le crédit qui est demandé présentement.

M. Burns: En plus des commissaires qui sont déjà désignés, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire combien il y a d'employés actuellement, qui travaillent pour la commission?

M. Levesque: Un effectif de 60 est prévu. Il y en a entre 30 et 35 recrutés à l'heure actuelle.

M. Burns: Comment se répartissent-ils par rapport au bureau de Montréal et au bureau de Québec?

M. Levesque: Les chiffres les plus approximatifs qu'on peut donner présentement, c'est Montréal, 50 et Québec, 10.

M. Burns: C'est ce qui est prévu; mais actuellement?

M. Levesque: II y a des services, comme le service de la recherche, par exemple, qui est situé à Montréal...

M. Burns: Oui, mais vous avez 60 postes prévus et vous en avez 35 actuellement. Vous dites 50 et 10, donc, c'est...

M. Levesque: Sur les effectifs prévus.

M. Burns: Prévus. Actuellement, il y a combien de personnes qui travaillent à l'un et l'autre des endroits?

M. Levesque: Environ 6 à Québec présentement.

M. Burns: Est-ce qu'il y a des commissaires qui sont en permanence à Québec, à part du va-et-vient du président de la commission ou d'une autre personne de la commission?

M. Levesque: II y a seulement trois commissaires permanents, c'est-à-dire à temps plein, les autres étant à temps partiel. Les trois à temps plein sont à Montréal.

M. Burns: Comment opère le bureau de Québec, sans la présence semi-permanente d'un des commissaires ou du président? Qui est-ce qui est en autorité au bureau de Québec?

M. Levesque: II y a un directeur, M. Maurice Marquis.

M. Burns: Est-ce que les commissaires permanents ont à faire la navette entre Montréal et Québec, à cause de cette situation-là?

M. Levesque: M. Marquis se rend souvent à Montréal, à chaque semaine.

M. Burns: C'est-à-dire qu'un citoyen, à Québec, qui voudrait avoir une entrevue avec quelqu'un en autorité, c'est-à-dire un des commissaires, ne pourrait pas l'obtenir à Québec?

M. Levesque: Le directeur est là pour cela. Il faut bien comprendre que, lorsque la commission sera dans dix régions administratives, on ne peut pas penser que les gens vont rencontrer le président dans les dix régions.

M. Burns: Je présume que...

M. Levesque: Ce qu'il faut, c'est un directeur qui puisse examiner la situation et, ensuite, communiquer avec la commission, à Montréal.

M. Burns: Est-ce qu'à Montréal, les commissaires ont l'occason de rencontrer les citoyens qui viennent se plaindre directement ou si c'est encore un directeur général qui les reçoit?

M. Levesque: Les commissaires, évidemment, se trouvent à Montréal, mais, par contre, ce sont les divers directeurs du service d'accueil, du service d'enquête, etc., qui reçoivent les gens. Mais s'il y avait un groupe particulier qui voulait rencontrer la commission, que ce soit n'importe où dans la province, à ce moment, la demande peut être faite et, déjà, on me dit qu'on l'a faite.

M. Burns: Est-ce que cela s'est fait dans le passé?

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Même si la partie mécanique de la loi ou la partie... je ne dirai pas mécanique, mais la partie, appelons-la la partie concernant les droits des personnes n'est en vigueur qu'à compter d'aujourd'hui et que, depuis aujourd'hui...

M. Levesque: II faut attendre un peu pour une jurisprudence, mais une jurisprudence se crée...

M. Burns: Je présume.

M. Levesque: ... et certains modes de vie...

M. Burns: Malgré cela, M. le ministre, est-ce que vous pouvez me dire si, déjà il y a eu un certain nombre de plaintes adressées à la commission, parce que je présume que beaucoup de ci-

toyens ne savaient pas que la charte des droits, comme on se plaît à l'appeler, et des libertés de la personne au Québec n'était pas en vigueur avant aujourd'hui? Est-ce qu'il y a eu des plaintes formelles, soit par voie de lettres...

M. Levesque: Le président m'indique que, comme elle n'était pas en vigueur, on n'a pas traité ces cas encore. Mais il estime qu'environ une centaine de cas sont déjà rendus à la commission.

M. Burns: Qui vont être traités par la commission maintenant ou qui sont mis de côté parce qu'ils étaient soumis avant la mise en application de la loi?

M. Levesque: Au point de vue légal, ils ne devraient pas. Ce n'est pas rétroactif. Probablement qu'en entrant en communication avec ces gens, peut-être...

M. Burns: II faudrait qu'ils recommencent leurs lettres. Vous voyez ce que le retard de votre ministère cause aux citoyens. Ils vont être obligés de recommencer les mêmes procédures. Vous allez les décourager, dès le départ, ces cent personnes, de recourir aux services de la commission.

M. Levesque: S'il s'agit d'un cas de discrimination qui perdure, on pourra s'en occuper. Si c'est une affaire qui est dans le passé, qui est réglée et finie, on ne peut pas, parce qu'il faut commencer quelque part.

M. Burns: M. le Président, le programme 2 est adopté. J'en profite, M. le Président, pour souhaiter bonne fête à ia commission, à son président qui est là et lui souhaiter également la meilleure chance possible. Je pense qu'il entreprend une tâche qui n'est pas facile. Je peux lui dire qu'il pourra compter sur l'appui de l'Opposition. En tout cas, je n'ai pas l'intention de mettre les mots dans la bouche du ministre de la Justice, mais je présume que le ministre de la Justice, lui aussi, voudra donner son appui total et entier à la commission, qui n'a pas une tâche très facile à accomplir, surtout qu'elle se lance dans un sentier non battu.

En ce qui nous concerne, soyez assuré que nous croyons énormément au travail que la commission pourra faire. C'est dans ce sens que nous souhaitons la meilleure chance possible au président et à ses collègues commissaires.

M. Levesque: La commission est au courant, évidemment, de l'appui que je lui ai accordé depuis que je suis ministre de la Justice. J'ai eu l'occasion de rencontrer les commissaires à différentes reprises et de formuler également des voeux et non pas seulement des voeux mais également notre intention ferme, notre volonté politique d'apporter notre meilleur appui à la commission et à ses travaux. Bonne fête!

M. Burns: Bonne fête!

Le Président (M. Pilote): Le programme 2, adopté? Adopté. Programme 3, Gestion interne et soutien.

M. Burns: Les éléments 1, 2, 3, 4, 5, quant à moi, sont adoptés.

Le Président (M. Pilote): Adopté, avec révision du Code civil.

Révision du Code civil

M. Burns: Oui, M. le Président. J'aimerais connaître du ministre la date à laquelle l'Office de révision du Code civil prévoit avoir terminé ses travaux et remis ses derniers rapports. J'aimerais, de toute façon, s'il était possible... je n'ai pas d'objection à ce que Me Crépeau fasse le rapport lui-même au nom du ministre, si jamais cela devient trop technique, parce que je comprendrais que le ministre n'est pas au fait de tous les détails des travaux de la commission. Je ne l'en blâme pas, loin de là.

M. Levesque: D'ailleurs, quand je suis arrivé ici, il y a vingt ans, comme député— excusez-moi, M. le Président— M. Duplessis nous parlait de l'Office de révision du Code civil. A ce moment, on était loin de s'attendre que cela prenne autant de temps. Je n'en blâme pas M. Crépeau qui a été très actif, ainsi que ses collaborateurs. C'est une entreprise de taille. L'office a été créé le 10 février 1955... Ce n'est pas facile de créer un Code civil; surtout, c'est une responsabilité extrêmement sérieuse que de toucher quelque chose qui a été basé sur le droit romain et le Code Napoléon. C'est toujours une opération extrêmement délicate que de toucher à ce chef-d'oeuvre millénaire. Il y a eu, cependant, une production extrêmement importante durant ces dernières années, particulièrement ces derniers mois. Il y a eu 47 rapports qui étaient prévus pour couvrir la matière du nouveau code. Jusqu'à maintenant, je pense que nous en avons 42. Le 43e va sortir bientôt, me dit M. Crépeau. Le 43e était sur la personnalité juridique et les quatre autres sont sur la fiducie, l'assurance maritime, l'affrètement...

M. Burns: I! en reste combien à venir?

M. Levesque: ... et l'enregistrement des biens. Il en reste quatre.

M. Burns: Est-ce que ce serait le total des travaux de la commission? On aurait une espèce de somme de la pensée, des recommandations, si on peut dire, de l'office.

M. Levesque: En 1976, pour ce qui en reste, après que ces quatre autres rapports seront publiés, c'est la coordination des travaux des comités. C'est ce qu'on fait présentement. C'est l'oeuvre du comité de coordination. Il y a des

consultants qui nous promettent cela pour... On avait pensé au mois de juin 1976, l'an dernier. On parlait d'une possibilité, mais je pense bien qu'on est plus réaliste à songer à la fin de l'année 1976 pour terminer le travail de coordination. C'est beaucoup. Je dois admettre qu'il y a là un travail considérable, parce que ces différents rapports ont été faits par différents comités.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Plus de 120 personnes ont été mises à contribution. Je trouve le président assez optimiste, mais comme on a exigé qu'il en soit ainsi, j'espère bien que le tout pourra se faire dans ce nouveau délai...

M. Burns: Est-ce que Me Crépeau est prêt à recommencer ses cours de droit à notre endroit lorsque le nouveau code sera adopté?

M. Levesque: Oui...

M. Burns: Est-ce qu'il est prêt à se mettre à notre disposition, parce qu'on va être complètement perdu, si je comprends bien. Ceux de nous qui avons bénéficié des cours de Me Crépeau, alors qu'il était professeur, on va devoir tout oublier ce qu'il nous a dit et de lui demander de recommencer dans une autre optique.

M. Levesque: C'est un problème pour tous les avocats qui sont au Barreau présentement. Je m'imagine...

M. Burns: Est-ce que...

M. Levesque: ...que ce n'est pas facile.

M. Burns: ...l'on peut prévoir que, dans le courant de l'année prochaine... Je comprends que le rapport, même en étant très optimiste, ne pourrait pas être déposé avant la fin de l'année 1976, l'année civile, est-ce qu'on peut prévoir qu'à la suite du rapport de l'office, on puisse se retrouver avec un projet de législation globale au cours de l'année 1977, ou bien est-ce que, déjà, c'est trop espérer?

M. Levesque: Le président m'indique qu'il y aurait sans doute des difficultés avant de pouvoir répondre d'une façon affirmative et absolue à la question du député. Le président songe en particulier à des problèmes d'ordre constitutionnel, un mariage dans la famille, etc., et peut-être dans les mécanismes et également dans l'enregistrement des personnes et des biens. Enfin, il prévoit des difficultés, c'est inévitable.

M. Burns: Outre le cas des transsexués dont nous avons parlé tout à l'heure et qui, possiblement, pourrait faire l'objet d'un projet de loi autonome, peut-être dans le courant de la session actuelle, peut-être à l'automne, est-ce qu'il y a d'autres projets que le ministre de la Justice envisage tirer des différents rapports de l'office ou de ses comités, en vue de les faire adopter comme projets de loi autonomes avant la fin de l'année?

M. Levesque: Nous sommes rendus trop près de l'échéance, présentement, et on ne croit pas qu'il serait... A moins d'avoir des motifs comme ceux, peut-être, invoqués tout à l'heure, dans le cas soumis par le député de Maisonneuve, nous essayons d'éviter de légiférer à ce moment-ci, avant que l'intégration ne soit complétée.

Il y a un projet de loi que j'ai sur mon bureau présentement touchant la puissance parentale à substituer à la puissance paternelle. Je pense bien que c'est assez avancé. Peut-être qu'à l'automne on pourrait toucher ça. Mais le projet est prêt. Je ne l'ai pas apporté, parce que c'est simplement une question de temps. Nous n'avions pas le temps physique de l'étudier.

M. Burns: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire combien de personnes, de façon permanente, sont affectées à l'Office de révision du Code civil actuellement?

M. Levesque: Une quinzaine de personnes.

M. Burns: Une quinzaine de personnes à temps plein.

M. Levesque: Les effectifs ont été réduits, parce que nous arrivons à la fin du mandat, et on le voit, d'ailleurs, dans les sommes qui sont demandées dans nos estimations. En 1975/76, les sommes demandées étaient de $577 000, et elles sont pour 1976/77 de $287 800. C'est donc que le budget demandé a été réduit considérablement. On a dû penser aussi que ça se terminerait peut-être le 30 juin? Je ne sais pas si on va pouvoir arriver avec les chiffres demandés, mais on verra.

M. Burns: Bon!

Le Président (M. Pilote): Elément 6, adopté?

M. Burns: Elément 6, adopté.

Le Président (M. Pilote): Adopté. Programme 3. Adopté. Programme 4: Garde des prévenus et détenus.

Les agents de la paix

M. Burns: Là-dessus, le problème soulevé par le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique a une certaine actualité.

J'apprends à l'instant même que demain on est en droit de s'attendre à une manifestation devant le parlement — je ne sais pas si mes informations sont exactes ou non — des représentants de cette association ou de ceux qu'on appelle communément les gardiens de prison, mais qui sont, en titre, des surveillants, qui posent et qui ont posé à l'endroit du ministre une question très pertinente, relativement, entre autres, à leur affectation, à leurs effectifs.

J'ai pris connaissance d'un communiqué qui avait été adressé le 9 avril dernier à tous les media et dont, je pense, la majorité des députés, sinon tous les députés, ont reçu copie. Il était publié par le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique, sous la signature de leur président, M. Laurent Caplet. J'ai eu l'occasion de rencontrer ce dernier d'ailleurs, parce que le mémoire en question m'intéressait beaucoup et je croyais que j'avais besoin d'avoir un certain nombre de renseignements à ce sujet.

Le ministre de la Justice a répondu à ce mémoire du 30 avril. Je pense que ce dernier s'est, à de nombreux endroits, fourvoyé sur les statistiques qui étaient données par le Syndicat des agents de la paix.

Ce qui, plus particulièrement, semble inquiéter les agents de la paix, est la réduction des crédits qu'on affecte, toute proportion gardée, à ce secteur qu'on appelle la garde des prévenus et des détenus alors que dans les autres secteurs, il y a eu une augmentation quand même, en pourcentage, dans à peu près tous les budgets.

Je cite tout simplement les chiffres — je n'ai pas fait les calculs moi-même — mais si on regarde simplement le programme 4: Garde des prévenus et des détenus, par rapport aux $30 302 100 de l'année 1975/76, nous nous retrouvons cette année avec $32 042 200. C'est une augmentation de 5,74%. Le programme précédent, au niveau de la gestion interne, prévoit une augmentation de 7,19%. Quant à l'autre programme, évidemment, il n'y a pas de comparaison possible, celui de la Commission des droits et libertés de la personne, de sorte qu'on ne peut examiner le pourcentage, mais le pourcentage quant au fonctionnement du système judiciaire lui-même connaît une augmentation de 6,75%, de $41 millions à $44 millions. C'est ainsi un peu partout, sauf à quelques endroits où l'augmentation du pourcentage affecté aux programmes est inférieure, dans quelques rares cas, mais il y en a. Par exemple, réinsertion sociale des délinquants, vous avez une augmentation de 14,30%, à l'aide juridique, une augmentation de 22,75%, à la conciliation entre locataire et locateur, une augmentation de 29,51%, dans les budgets d'une année à l'autre, au contentieux pénal, une augmentation de $2 293 900 à $3 370 600, c'est-à-dire une augmentation de 46,93%. On peut retrouver...

M. Levesque: Je pourrais peut-être dire au député que je suis d'accord avec lui sauf qu'on m'indique qu'il y a eu erreur de la part de ceux qui ont préparé ceci.

M. Burns: Le pourcentage?

M. Levesque: Non. A la page 16-12 de notre livre des crédits, on trouvera que le montant de $32 042 200 devrait plutôt se lire $36 millions.

M. Burns: Une augmentation plus substantielle que celle...

M. Levesque: Oui, beaucoup plus substantielle.

M. Burns: Remarquez que je ne faisais pas...

M. Levesque: Nous avons fait une entente avec le Conseil du trésor pour que ces $4 millions qui n'apparaissent pas ici soient compensés autrement.

M. Burns: Comment ce montant va-t-il être compensé?

M. Levesque: Par un budget supplémentaire, je pense bien. C'est la seule façon qu'ils peuvent... Ou le fonds de suppléance. De toute façon, il y a $4 millions de plus qui vont être attribués, ce qui apparaît présentement...

M. Burns: A ce programme. M. Levesque: A ce programme.

M. Burns: Déjà, c'est une amélioration sensible.

M. Levesque: L'augmentation serait de plus de 20%.

M. Burns: Cela cadrerait avec certaines des augmentations importantes, comme à l'aide juridique. Je suis d'accord. C'était uniquement à titre d'introduction que je citais ces chiffres qui apparaissent — je le dis en toute humilité, ce n'est pas moi qui ai fait ces calculs — dans l'annexe du mémoire du Syndicat des agents de la paix. Cependant, ce qui m'a frappé, M. le Président, et là-dessus j'aimerais avoir les commentaires du ministre, c'est semble-t-il une diminution constante. Peut-être me dira-t-il qu'avec ces $4 millions additionnels qu'il vient de nous annoncer, il est en mesure de contrer ce decrecendo absolument évident chez les surveillants, et, même je dirais chez les surveillants et gérance, qui apparaît à la page 2 du communiqué, dont sans doute le ministre a copie. On voit que pour les années 1972 à 1975, il y a une diminution constante du nombre de surveillants. Par exemple, en 1972, il y avait 1500 postes — ces chiffres sont tirés du rapport annuel du ministère de la Justice de 1975 — diminuant à 1479 en 1973, 1400 en 1974, pour finalement se retrouver à 1381 en 1975. Le programme 4, quant aux années 1976/77 laisse entendre que la garde des détenus et des prévenus, employés permanents, passerait de 2148 à 2162, c'est-à-dire une augmentation d'à peine 14 gardes.

Je pense qu'il est important, dans la réponse que le ministre s'apprête à me donner, de tenir compte du fait que tous ces chiffres contiennent non seulement les surveillants globalement, qui sont affectés à la garde des détenus et des prévenus, mais contiennent aussi les employés de soutien, comme les ouvriers, les nettoyeurs, les fonctionnaires. J'aimerais que le ministre nous donne les détails de l'augmentation prévue pour 1976/77 du nombre d'employés permanents qui sont spécifiquement affectés à la surveillance, à la garde des détenus et des prévenus.

M. Levesque: M. le Président, il s'agit là d'une excellente question et une question d'actualité. Il y a eu la déclaration du Syndicat des agents de la paix, représenté par M. Laurent Caplet, je pense.

M. Burns: Laurent Caplet, oui.

M. Levesque: II a fait une déclaration à la suite de laquelle il y a eu une rencontre entre la partie syndicale et le gouvernement, qui était représenté par la Direction générale des relations de travail et par le ministère de la Justice. Cette rencontre a eu lieu le 12 mai dernier.

Les éléments suivants ont été couverts, c'est-à-dire, premièrement, alors que, dans les années précédentes, on avait une population carcérale qui diminuait ou qui se maintenait, il y avait soit une diminution ou encore simplement un maintien... Le phénomène actuel, c'est une augmentation de la population carcérale. Je parle des détenus et des prévenus.

M. Burns: Si on lit les chiffres cités, à moins qu'ils ne soient pas exacts, à la page 2 par le Syndicat des agents de la paix, on lit ceci: En 1972, il y avait 1500 surveillants dans le service de détention pour 26 589 entrées. Donc, on parle de prévenus et de détenus, quand on parle d'entrées, je présume. En 1975, il y en a donc eu 37% de plus. En 1972, il y avait une population moyenne mensuelle de 1259, il y a eu, de 1972 à 1975, 28,2% d'augmentation. Les chiffres sont cités ailleurs dans ce texte. J'ajoute le facteur suivant, depuis 1972 d'autres fonctions que la pure et simple garde des détenus ou, si vous voulez, la surveillance des détenus au sens large du mot, a été modifiée. Le poste lui-même, la fonction ou la tâche elle-même a été modifiée. On lit à la page 3 de ce même communiqué, de la part du Syndicat des agents de la paix, que de plus, en 1972, le transport des prévenus et détenus était fait en grande partie par la Sûreté du Québec. Cette nouvelle responsabilité, qui s'est complétée en 1975, occupe au moins 100 surveillants. Lors de l'ouverture, dans les années 1972/73, du palais de justice de Montréal, le service de la détention a pris charge de faire comparaître les contrevenants, ce qui était fait auparavant par la Sûreté du Québec. Cela a entraîné jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire au mois d'avril, l'affectation de 103 surveillants à ce poste.

On a augmenté les charges des surveillants, c'est-à-dire le transport des détenus, l'accompagnement, si je puis dire, des détenus qui doivent aller comparaître et il semble qu'on ait pas augmenté de façon sensible les postes, alors que la population carcérale n'a pas diminué de façon majeure.

M. Levesque: Justement, si on prend, par exemple, le rapport annuel 1975, la direction générale de la probation et le service d'établissements dé détention, on s'aperçcoit que les chiffres que j'ai ici, dans ce rapport annuel, ne correspondent pas à ce que vient de dire le député. Par exemple, en 1971, donnez-moi le mois que vous voulez. Disons que...

M. Burns: Je n'ai pas les chiffres de 1971, je vous ai parlé de 1972.

M. Levesque: Prenons un mois, n'importe lequel, que désire le député. Disons, par exemple, le mois d'octobre. Le total en 1971 était de 1785 prévenus et détenus. En 1972, c'est baissé à 1291. En 1973, c'est baissé à 1158. En 1974, à 1331.

M. Burns: C'est remonté.

M. Levesque: En 1975, à 1833.

M. Burns: Oui. Donc, il y a eu une espèce de diminution dans les années 1972/73, peut-être même un peu 1974, mais on a commencé à sentir une augmentation dès 1974 et surtout en 1975.

M. Levesque: Cela a commencé à augmenter en septembre 1975 pour la moyenne. Avant cela, il y avait une diminution presque constante depuis 1971. Ce qui est arrivé, c'est que justement pour utiliser les effectifs qu'on avait, on a transféré certains de ces postes à la probation, plutôt que de les perdre. Ce qui est arrivé, de 1975 à 1976, cela n'a pas été une diminution, cela a été une augmentation de 35% qui n'était pas du tout prévue.

D'ailleurs, c'est un phénomène qui n'existe pas seulement au Québec, c'est un phénomène mondial qui a pris tout le monde par surprise. A un moment donné, pourquoi y a-t-il tant de prévenus et de détenus? A la suite d'une diminution, à partir de 1971, assez constante, ou un maintien, à partir de septembre 1975, on arrive à une augmentation et des prévenus et des détenus qui s'élève à 35%. C'est une augmentation assez spectaculaire.

Nous avons fait ceci: A l'automne 1975, nous avons fait des représentations auprès du Conseil du trésor. Je pense que je l'ai mentionné au début de mes remarques, lorsqu'on a parlé du monstre, nous avons réussi à faire en sorte que le gel des effectifs ne touche pas les postes qui étaient affectés à la détention.

Au cours de janvier et février 1976, le problème est arrivé au centre Parthenais, le centre de prévention de Montréal, et on a fait d'autres représentations auprès du Conseil du trésor. Comme résultat, 42 postes ont été ajoutés, ce qui nous a permis d'occuper 70 cellules additionnelles au quatrième étage. Ceci augmentait la capacité de 370 à 440. J'ai les chiffres ici de la population du centre de prévention, cela a continué de grimper. En janvier 1975, 311; en février, 334; en mars, 345; en avril, 349; en mai, 367; en janvier 1976, 382; en février, 447; en mars, 472; en avril 483; en mai, 490. Cela prend de la place et cela force. Le total des 440 cellules qu'on venait d'obtenir ne suffisait déjà plus.

Au début d'avril 1976, nous avons été forcés d'effectuer des transferts dans tous les centres environnants: Valleyfield, Saint-Hyacinthe, Sherbrooke, on est même venu jusqu'à Québec.

M. Burns: Orsainville.

M. Levesque: Oui. Il y a eu près de 90 transferts.

M. Burns: Entre parenthèses, c'est sans doute l'objet de la nouvelle qui paraissait dans les journaux récemment, et qui est expliquée, je pense, par le Dr Gauthier comme n'étant pas une manoeuvre en vue des Jeux olympiques à Montréal.

M. Levesque: C'est cela.

M. Burns: S'agissait-il de cette activité?

M. Levesque: II y avait eu près de 90 transferts à Orsainville, en mars, avril et mai.

M. Burns: C'était à cause de l'exiguïté des locaux à Parthenais. On parlera de Parthenais après, de façon vraiment spéciale.

M. Levesque: C'est à Montréal, évidemment, que la surpopulation carcérale se fait le plus sentir. Dans les autres districts...

M. Burns: Par exemple, si...

M. Levesque: Si on me laisse finir, je vais finir cela. Dans les autres districts de la province, il semble bien qu'il n'y ait pas de problème de ce côté. Le problème principal est à Parthenais. Nous avons fait d'autres représentations encore auprès du Conseil du trésor, cette fois-ci, en vue de la réouverture du Centre de détention de Sorel qui est assez facile d'accès à partir de Montréal. C'est encore mieux que de venir jusqu'à Québec avec les prévenus. Ceci nous donnera un nombre additionnel de 81 cellules, ajoutées aux autres que j'ai mentionnées tout à l'heure, à Parthenais, ceci nous permettra d'avoir 520 cellules pour les prévenus de la région de Montréal.

J'ai mentionné tout à l'heure qu'en mai 1976, on était rendu à 490, et la progression continuait. On est à 29 ou 30 près, malgré tout ce que nous avons fait jusqu'à présent pour faire face à la situation.

C'est un peu cela que nous avons expliqué au syndicat. Le Trésor acceptera en même temps de nous donner 61 postes additionnels à Sorel. Alors, je pense bien que...

M. Burns: Par rapport aux chiffres qui sont cités pour 1975, comme personnel strictement de détention, affecté à la détention, c'est-à-dire les surveillants eux-mêmes, qu'on chiffrait par 1381, quel est le chiffre prévu pour l'année 1976? Les chiffres sont tirés du rapport de la direction générale de la probation et des établissements de détention.

M. Levesque: Si on prend les effectifs tels qu'ils sont mentionnés ici au livre des crédits, nous avions, l'an dernier, 2151. Cette année, nous avions prévu, ici au budget, 2189, soit une augmentation assez légère.

M. Burns: C'est là que je n'arrive pas aux mêmes chiffres que vous par rapport au tableau des effectifs présentés par la direction générale de la probation et des établissements de détention.

M. Levesque: En attendant, ce que je veux dire, c'est que, dans le livre de crédits, nous ajoutons, à cause de ce dégel d'effectifs qui a été fait et pour Parthenais et pour Sorel, 104 personnes à ce qui est déjà demandé ici.

M. Burns: Est-il exact que, l'année dernière, pour l'exercice financier 1975/76, il y a eu environ $2 500 000 payés en temps supplémentaire?

M. Levesque: Ces chiffres ont été pris dans le rapport de la direction générale des établissements de détention, mais on retrouve ici le total des effectifs de ce programme. Le chiffre exact, c'était 2151 l'an dernier. Nous avons obtenu 2189 postes cette année...

M. Burns: Est-ce que cela comprenait...

M. Levesque: ... en plus, cependant, 104 nouveaux postes ont été ajoutés après que le livre des crédits a été imprimé.

M. Burns: Est-ce que cela comprenait, M. le ministre, également les employés de soutien?

M. Levesque: Pardon?

M. Burns: Vos chiffres comprennent-ils les employés de soutien, c'est-à-dire les ouvriers, les nettoyeurs, les fonctionnaires affectés ou assistants à la détention?

M. Levesque: Oui, on l'a à la page 23 du rapport annuel 1975. Cela comprend le directeur général, les cadres supérieurs, les adjoints aux cadres supérieurs, les professionnels, les fonctionnaires, le personnel ouvrier, les agents de la paix. Le plus grand nombre, évidemment, ce sont les agents de la paix.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: II y en a, à la détention, 2209; à la page 23.

M. Burns: Ce sont les surveillants et les effectifs de gérance.

M. Levesque: Oui.

M. Burns: 2209, c'est d'accord, on se retrouve.

M. Levesque: En 1975.

M. Burns: En 1975. Par rapport à ce chiffre, qu'est-ce que cela veut dire l'année prochaine?

M. Levesque: 38 plus 104, cela fait 142, d'après les renseignements que j'ai.

M. Burns: Est-il exact que l'année financière 1975/76 a démontré une dépense en temps et demi de $2 500 000, en temps supplémentaire, c'est-à-dire une moyenne de $1000 par employé, à la détention?

M. Levesque: C'est exact.

M. Burns: C'est-à-dire que c'était nettement insuffisant.

M. Levesque: Mais, je viens de vous donner des chiffres qui indiquent qu'on ne pouvait pas prévoir une augmentation aussi importante de la population carcérale. C'est un phénomène mondial, ce n'est pas seulement au Québec, mais nous avons dû y faire face de cette façon.

M. Burns: Le même rapport de 1975 disait ceci, et je le cite à la page 54: "L'année 1975 a été quelque peu désastreuse quant au nombre d'évasions enregistrées. Cette augmentation ne serait pas étrangère à la hausse assez soudaine de la population carcérale", ce que vous avez déjà dit, M. le ministre, "qui aurait perturbé la routine institutionnelle.

Le nombre accru de détenus a forcé le personnel à réagir à cette nouvelle situation créant un déséquilibre où se sont multipliés les dangers d'évasion, d'émeute et autres incidents latents dans un tel secteur d'activité." Plus loin, à la page 68, on lit ceci: "Par ailleurs, la prise en main des mouvements et transfèrements", cela c'est assez important, parce que c'est là que la tâche du surveillant à la détention est augmentée. "Par ailleurs," dit le rapport à la page 68, "la prise en main des mouvements et transfèrements des prisonniers entre les établissements et vers les cours de justice, lequel transport était totalement assumé il y a quelques années par la Sûreté du Québec, a absorbé une petite partie de ses effectifs tout en provoquant un accroissement du va-et-vient du personnel." Un peu plus loin aux pages 78 et 79 on lit ceci: "De fait, les ressources en personnel, spécialisé ou non, sont orientées vers cet objectif. Les surveillants sont davantage appelés à collaborer avec les équipes interdisciplinaires dans le traitement des individus. Des surveillants sélectionnés participent aux activités des personnes incarcérées. La détection des problèmes provoqués par l'incarcération et leurs règlements entre dans leur préoccupation. A eux aussi revient la responsabilité du contrôle des absences temporaires etc." De sorte que...

M. Levesque: Dans le domaine des évasions, je voudrais tout simplement dire que je ne peux pas souscrire à cette conclusion. Parce que les problèmes...

M. Burns: Celle qui est dans le rapport?

M. Levesque: Oui. Le problème est celui-ci, il se situe plutôt au centre de Parthenais qu'aux centres de prévention et les évasions qui ont eu lieu, ont eu lieu, d'après le rapport que j'ai devant moi — d'ailleurs tous ceux qui se sont évadés ont été repris — cela s'est passé dans des prisons où il n'y a pas tellement de problyemes, comme à Waterloo, Hull, Baie Comeau, Matane, Rimouski, Mont-Laurier, Saint-Hyacinthe c'est surtout dans ces endroits. Il n'y en a pas à Montréal, je ne vois pas d'évasion ici, dans le rapport.

M. Burns: Mais, à Parthenais, c'est bien sûr. M. Levesque: II y en a eu un qui s'est...

M. Burns: Ils sont dans une boîte à conserve les pauvres gars.

M. Levesque: II y en a un qui s'est évadé, en 1975. Je ne peux pas relier le problème en question aux évasions.

M. Burns: Sauf, que si vous avez une diminution du personnel, par rapport aux années précédentes, si vous avez en plus de cela...

M. Levesque: II n'y a pas une diminution de personnel.

M. Burns: Oui, il y a une diminution. M. Levesque: Non.

M. Burns: Ce sont les chiffres mêmes de la DG que je vous cite. Les surveillants eux-mêmes. Je ne parle pas du personnel de gérance, les surveillants sont passés de 1500 en 1972 à 1381. Si ce n'est pas une diminution, je ne sais pas ce que c'est.

M. Levesque: S'il y a eu diminution, c'est plutôt dans les années précédentes.

M. Burns: Je parle du chiffre de 1972 qui est fixé à 1500.

M. Levesque: C'est cela, 1972.

M. Burns: Et du chiffre de 1975. La progression a été constante.

M. Levesque: Comme j'ai mentionné, il y avait une diminution de la population carcérale à partir de 1971.

M. Burns: Oui, mais en 1975, si on a payé $2 500 000, c'est-à-dire une moyenne de $1000 par employé affecté à la détention — j'inclus même les employés de gérance, pour être généreux, pour faire le chiffre rond de $1000 — cela veut dire qu'il y avait quand même un problème dès ce moment. Je pense qu'à ce moment-là, on est en mesure d'examiner paralèllement à cela l'augmentation de la tâche qui est nouvelle...

M. Levesque: II y a eu d'autres facteurs, me dit-on.

M. Burns: ...et là de constater qu'il y a plus

d'évasion. Si vous me dites que ce n'est pas aux endroits où cela se passait cette augmentation de la tâche, je ne le sais pas, mais cela m'apparaît bizarre que ce ne soit qu'à Montréal qu'on ait fait du temps supplémentaire.

M. Levesque: Montréal et Québec, surtout.

M. Burns: Dans les faits, vous me parlez d'une augmentation d'un certain nombre de surveillants prévue pour cette année, vous me parlez également de non-blocage des fonds, si je puis m'exprimer ainsi, concernant les effectifs de détention. Cela fait-il partie d'une politique générale ou si c'est uniquement un replâtrage temporaire? C'est ce que je veux savoir. A-t-on étudié cette situation qui est décrite? Si elle est exacte—je pense qu'elle est exacte, parce que la majorité des autorités sur lesquelles se fonde le mémoire du Syndicat des agents de la paix et le rapport de...

M. Levesque: On s'est aperçu qu'on...

M. Burns: ... la direction générale — est-ce que cela fait partie d'un réexamen de la politique des effectifs pour la détention?

M. Levesque: On s'est aperçu qu'on avait réagi très rapidement. Dès qu'on s'est aperçu que la population carcérale avait augmenté... Cela ne prend pas de temps à s'en apercevoir. Nous allons continuer d'analyser cette population et à mesure qu'il y aura des changements, nous allons prendre immédiatement les dispositions qui s'imposent. C'est très difficile de prévoir quelle sera la situation dans un an ou deux, parce qu'on a eu des phénomènes contraires, où il y a eu des diminutions. Espérons que cela...

M. Burns: Est-ce que cette politique a tenu compte du fait qu'il y avait des charges additionnelles imposées aux agents de la paix? Par exemple, accompagner les détenus à la cour, s'occuper du transport des détenus, participer à l'aspect de probation et d'assistance aux détenus avec d'autres groupes multidisciplinaires, je pense, par exemple, aux psychologues entre autres. Ce ne sont pas les agents de la paix qui disent cela, c'est le rapport de la direction générale. A-t-on tenu compte, par exemple, qu'en 1972 on a commencé à avoir tendance à affecter le surveillant à des tâches plus près du traitement humain de l'incarcéré? A-t-on tenu compte de ce qu'on dit à la page 36 de ce même rapport de 1975: "De fait, toute administration pénitentiaire qui se veut moderne doit manipuler l'apparente dualité que constituent les objectifs de ségrégation (sécurité) et de réinsertion sociale.Csociale. Ces administrations sont conscientes du poids que la tradition a laissé sur l'élément sécuritaire. D'ailleurs, cette tradition se manifeste à tout moment dans l'opinion publique, dans l'architecture des prisons, dans la résistance aux changements au sein du personnel dont le rôle n'a jamais, historiquement, été valorisé et même dans l'institutionnalisation de son administration. Bref, la tendance vers la dominance de l'objectif réinsertion sociale, qui implique une perception du système sécuritaire, doit s'appuyer sur une orientation plutôt empirique, évolutive et surtout sereine".

Ceci laissant croire qu'on l'a décidé — et c'est très bien, remarquez que je ne blâme pas la direction générale de revoir sa façon d'utiliser les surveillants, là où je me pose des questions, c'est quand on impose des tâches additionnelles aux surveillants sans leur donner, d'une part, les effectifs nécessaires pour y faire face et, deuxièmement, sans prévoir l'augmentation qui, à elle seule, en 1975, selon les chiffres du ministre, aurait justifié une augmentation très importante des effectifs qui existaient à ce moment-là. Ce n'est pas sur une question de philosophie de l'utilisation et même, je dirais, de la revalorisation de la fonction du surveillant que j'en ai. C'est bien au contraire en étant tout à fait d'accord avec cette position que je me dis d'autre part qu'il faut absolument mettre à la disposition des agents de la paix affectés à ce travail de détention, à ce travail de surveillance, les effectifs requis pour qu'ils puissent faire un bon travail, pour qu'eux-mêmes puissent se sentir revalorisés dans leur travail et non pas en se fatiguant à faire du temps supplémentaire à hue et à dia qu'on va arriver à avoir un personnel équipé pour faire face aux problèmes que comporte l'augmentation, entre autres, de la population carcérale qui a été dénotée depuis une couple d'années.

M. Levesque: Voici quelle est la situation. Vous savez qu'on avait eu une baisse de 500 par jour de 1967 à 1972, de sorte que notre population était descendue à peu près à 1200 par jour.

Cette population est demeurée stable en 1972, 1973 et 1974. Ce qui est arrivé à ce moment, c'est que nous avons fermé certaines prisons. De cette façon, sans nuire à l'ensemble du service, nous avons mis à d'autres tâches le personnel récupéré.

C'est là que nous avons commencé à donner d'autres responsabilités, telles que les palais de justice, la sûreté, etc.

Soudainement, au cours de l'année 1975, nous commençons à monter. Nous sommes revenus à 35%. D'ailleurs, l'augmentation s'est effectuée de façon soudaine et pas simplement ici au Québec, mais dans le monde entier, à un tel point qu'aux Etats-Unis, par exemple, actuellement, on est à 1000 du chiffre que l'on prédisait pour 1986. En Europe, c'est exactement la même chose.

M. Burns: C'est 1000 en moins ou en plus?

M. Levesque: C'est 1000 en moins pour 1986. De sorte que, ici, comme tout le monde, nous avons été pris par surprise. A ce moment, nous commencions déjà... Vous parlez du temps supplémentaire, il faut dire qu'il y a d'autres facteurs qui jouent. Personne ne peut prédire les conventions collectives.

En 1974, on a donné dans la convention collective quatre semaines de vacances à ceux qui avaient dix ans de service. On s'est réveillé et on

s'est aperçu qu'il y avait plus de 600 surveillants qui avaient plus de dix ans de service, de sorte que naturellement les effets ont commencé à se faire sentir en 19...

M. Burns: Vous ne vous étiez pas aperçus de cela en négociation.

M. Levesque: Non. Nous ne nous en étions pas aperçus en négociation, parce que nous ne pensions jamais qu'il y avait autant de personnes qui avaient dix ans de service. De toute façon, à partir de 1975, nous avons commencé à...

M. Burns: D'habitude, du côté patronal, on calcule cela avant d'accorder un point. Je ne vous blâme pas de l'avoir accordé, remarquez.

Centre Parthenais

M. Levesque: D'autres avantages aussi ont été accordés, de sorte qu'on a commencé à avoir les effets de la convention collective à partir de 1975, qui a été accompagnée d'une hausse de population. Cette année, lorsque nous nous sommes aperçus que cela augmentait, natuellement nous avons commencé à faire des représentations au trésor et tout de même, en dedans de cinq mois, nous avons obtenu plus de 100 postes.

Ce qui compte actuellement, c'est de régler le problème du centre de prévention, parce que c'est là surtout que cela déborde. En réglant le problème du centre de prévention Parthenais, nous réglons en même temps le problème de la surpopulation de toutes les petites prisons autour, nous réglons aussi le problème de la prison d'Orsainville. Vous allez admettre qu'avec des prévenus dangereux, il faut les soumettre à une surveillance et cela nous prend beaucoup plus de monde. Si vous commencez à faire des transferts, cela veut dire qu'il y a du temps supplémentaire qui s'accumule. C'est la situation à laquelle nous faisons face actuellement, tout simplement.

Je crois que nous prenons les mesures pour faire face à la situation.

M. Burns: A ce sujet, cela fait des années qu'on soulève le cas de Parthenais comme étant une boîte que je n'ose même pas qualifier. J'y suis allé moi-même à plusieurs reprises, non pas comme détenu, mais comme représentant de détenus. J'ai été personnellement assez atterré par la façon dont les détenus se retrouvent pour des périodes souvent assez longues, dans une boîte assez spéciale qui ne permet même pas la survie normale d'un prévenu. Surtout quand on parle d'un prévenu, on parle d'une personne qui n'a pas encore été trouvée coupable, qui est là en attendant son procès et qui est en droit de s'attendre d'avoir un minimum — je ne dirais pas de confort — de vie humaine.

Par exemple, j'étais étonné de voir des gens qui pâlissaient, qui blêmissaient de façon régulière, parce qu'ils étaient détenus à Parthenais. J'ai compris pourquoi lorsque je me suis rendu compte que leurs activités extérieures, au point de vue du grand air, même en été, étaient réduites au strict minimum. A la suite des nombreuses plaintes qui ont été faites, tant par des détenus que par des groupes s'occupant de faire valoir les droits et libertés des personnes, y a-t-il eu des modifications faites à la façon de concevoir Parthenais? Pour une fois, a-t-on admis que Parthenais était peut-être une erreur dans sa conception?

Est-ce que Parthenais aussi ne doit pas être considéré, comme tout le monde le pense, comme un pur et simple endroit de transit pour les déténus ou les prévenus? Est-ce qu'il y a eu quelque chose qui a été changé dans la conception qu'on se fait, à la direction générale, de la détention ou des établissements de détention, concernant ce fameux établissement de Parthenais?

M. Levesque: Voici, je crois qu'il faut accepter, en ce qui nous concerne, le centre de prévention tel qu'il est. Nous sommes pris avec notre centre de prévention et il faut y faire face. Vous avez dû vous apercevoir qu'il y a quelques années, il y avait beaucoup de problèmes. Depuis quelque temps, même si le centre de prévention est rempli à pleine capacité, vous ne sentez pas trop de remous, parce que, naturellement, nous avons pris les dispositions qui s'imposaient. Une des premières initiatives que nous avons prises a été d'engager des préposés en service social. Actuellement, nous avons quatre préposés en service social qui rencontrent tous les prévenus dès leur entrée, de sorte qu'immédiatement, il y a une prise de contact. Nous essayons de régler les problèmes les plus urgents. Par la suite, nous suivons le cas. Déjà, on s'est aperçu, à ce moment, d'une baisse de la tension. La deuxième initiative que nous avons prise a été de transformer la chapelle en salle de récréation, de sorte qu'aujourd'hui, cela nous a donné une autre salle, parce que vous savez comment est fait le centre de prévention. Le centre de prévention est fait par étages. Pour amener les gens à la salle de récréation en haut, il faut absolument aller prendre l'ascenseur, de sorte que, comme la chapelle est située au onzième étage, la salle de récréation au treizième, le douxième et le treizième vont à une salle de récréation, et le dixième et le onzième vont à une autre. Cela a été divisé, ce qui nous permet de donner beaucoup plus de récréation. Ce qui s'est passé, c'est qu'on s'est aperçu qu'il fallait s'occuper plus des besoins individuels des gens. On s'est occupé surtout du contact humain. On n'est pas capable de changer la bâtisse, mais, tout de même, on est capable de mieux s'occuper des gens et de rendre la bâtisse plus habitable.

M. Burns: Actuellement, est-ce que vous avez des statistiques sur la durée de détention des prévenus à Parthenais?

M. Levesque: Oui, la durée de séjour est de seize jours.

M. Burns: Seize jours?

M. Levesque: Seize jours par détenu.

M. Burns: Alors, c'est la moyenne. M. Levesque: C'est cela.

M. Burns: Au plus bas et au plus haut, cela donne quoi?

M. Levesque: D'une journée à un an.

M. Burns: II y a encore des personnes qui restent un an là.

M. Levesque: Oui, c'est pour cela que, ce que nous faisons à ce moment, nous leur offrons tout de même d'aller soit à Orsainville ou bien dans les petites prisons environnantes. D'ailleurs, une fois que nous allons avoir Sorel, cela va nous donner une chance, une institution de plus pour...

M. Burns: Est-ce qu'il n'était pas question, docteur, l'année passée, de voir fusionner les services de ce qu'on appelle la prison de Montréal, c'est-à-dire Bordeaux et Parthenais? Il n'était pas question de cela l'année dernière à l'étude des crédits de la Justice?

M. Levesque: II a été question, je crois, dans le livre blanc de la construction d'une institution éventuelle, d'un complexe.

M. Burns: Cela me rappelle de grandes promesses du ministre du temps, qui nous disait que vraiment la détention des prévenus à Parthenais devait se faire dans un terme de quelques jours et même pas se rendre jusqu'à quinze jours. Est-ce que c'est toujours un projet qui est envisagé par la direction?

M. Levesque: Voici. Je crois que la meilleure façon de répondre à cette question, c'est toujours au moyen du rapport annuel. Il faut comprendre ceci, c'est que le nombre de causes devant les cours de justice a presque doublé depuis 1970. Si vous regardez en 1970...

M. Burns: Oui, mais les cautionnements se sont libéralisés depuis ce temps.

M. Levesque: Non, c'est justement... M. Burns: Ah non?

M. Levesque: ... qu'il y a eu un ressac. Nous avons joui de la libéralisation des cautionnements jusqu'au milieu de 1975. Mais là...

M. Burns: C'est ce qui a fait l'augmentation de la population à Parthenais.

M. Levesque: C'est cela. Actuellement, vous avez un tournage vers la droite. Disons que le tournage vers la droite se fait non pas seulement ici. Là, on demande beaucoup de temps de punition.

M. Burns: Je suis content de vous l'entendre dire. Il y a des juges qui rigolent. C'est intéressant à voir comme point de vue. Evidemment, on n'a pas à dire aux juges comment se comporter, mais c'est sans doute un des éléments qui font varier les choses. Non, j'apprécie la franchise avec laquelle le Dr Gauthier nous a expliqué la chose.

Mais le projet de Bordeaux et Parthenais, ce n'est pas encore pour demain?

M. Levesque: C'est-à-dire que nous avons cela comme...

M. Burns: Préoccupation.

M. Levesque: Oui, mais il faut aussi attendre que les Travaux publics aient de l'argent à nous consacrer.

M. Burns: En attendant, il y a du vrai monde... M. Levesque: Oui, je sais.

M. Burns: ... qui est acquitté après ça. C'est ça qui est grave.

M. Levesque: Nous insistons encore fortement, nous avons insisté fortement pour augmenter le budget capital d'immobilisation au ministère de la Justice. J'ai fait la représentation personnellement. Nous espérons être un peu plus chanceux au prochain budget.

M. Burns: Combien avez-vous de surveillants affectés strictement à Parthenais?

M. Levesque: Nous avons 221 surveillants. M. Burns: Pardon?

M. Levesque: Nous avons 221 surveillants, sur le total des effectifs de 342 à Parthenais. Il y a, en plus de ça, des professionnels, des fonctionnaires, du personnel ouvrier, etc. Vous avez ces réponses dans le rapport annuel.

Congédiements à Orsainville

M. Burns: Avant de quitter ce sujet, M. le Président, j'aimerais simplement soulever... J'imagine que vous reconnaissez le dossier noir du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec concernant deux personnes à Orsainville qui étaient des professionnels, Mlle Odette Pouliot et l'abbé Raymond Tardif qui, tous deux, ont été congédiés à la suite d'interventions de leur part, qu'ils croyaient normal de faire, à la suite d'une visite chez le Protecteur du citoyen en faveur des détenus et, à la suite également d'une lettre qui ne faisait, à toutes fins pratiques, qu'exprimer aux détenus ce que le Protecteur du citoyen leur avait donné comme opinion.

Dans un cas, si je ne me trompe, il y a déjà eu une décision arbitrale qu'on pourrait critiquer ouvertement ici sur la façon obtuse avec laquelle on a pris l'approche d'un grief, contrairement, d'ailleurs, à toute la jurisprudence arbitrale dans ce

domaine. En tout cas, ce n'est pas mon propos actuellement- J'aimerais savoir où en sont rendus, du côté du ministère de la Justice, les échanges avec ces personnes? Est-ce que ce dossier est considéré comme classé, réglé définitivement de la part du ministère de la Justice, ou bien s'il y a encore des choses qui se font?

M. Levesque: Non, le dossier est classé?

M. Burns: Classé, dans quel sens? Vous êtes satisfait de la situation, d'avoir congédié l'abbé Tardif et Mlle Pouliot?

M. Levesque: On va vous donner des détails.

L'abbé Tardif et Mlle Pouliot n'ont pas été remerciés de leurs services parce qu'ils étaient allés voir le Protecteur du citoyen.

Je sais que cela a été une des clauses qui avaient été indiquées dans la lettre expédiée par des fonctionnaires du ministère à Mlle Pouliot, entre autres, mais j'avais discuté, personnellement, le cas avec le Protecteur du citoyen et j'avais convenu avec lui que si l'affaire se rendait au fond, en arbitrage, nous n'invoquerions pas ce motif à l'encontre de Mlle Pouliot, en aucune façon, de façon à protéger la liberté d'accyes du Protecteur du citoyen aux fonctionnaires qui voudraient venir le voir.

Si Mlle Pouliot et l'abbé Tardif ont été remerciés de leurs services, c'est à cause de leur attitude, comme employés, à l'intérieur d'une institution, la prison d'Orsainville. En ce qui concerne l'abbé Tardif, ses services avaient été retenus par arrêté en conseil. Il n'était pas membre de la fonction publique et comme nous avons estimé que son attitude à l'intérieur de l'institution ne correspondait plus aux besoins que nous avions, nous l'avons remercié comme nous croyons en avoir le droit.

En ce qui concerne Mlle Pouliot, elle a logé un grief avant de recevoir son avis de congédiement. Nous avons invoqué une jurisprudence qui existe, sur laquelle je ne me prononce pas, mais qui existe...

M. Burns: ... prononcer là-dessus, c'est épeu-rant.

M. Levesque: ... en matière de droit ouvrier et à ce moment, l'arbitre a donné raison aux prétentions que nous avons fait valoir à ce moment et a trouvé le grief de Mlle Pouliot non fondé.

En ce qui concerne l'abbé Tardif, il a été remplacé depuis à la prison d'Orsainville par Mgr Lavoie qui était auparavant curé à Saint-Roch.

M. Burns: Dans le cas de Mlle Pouliot, n'avez-vous pas l'intention de réviser la situation en tenant compte de certaines obligations morales et non pas d'obligations juridiques puisque, maintenant, vous pouvez vous reposer en paix derrière une sentence arbitrale? Ne trouvez-vous pas, M. le ministre, injuste, vous le ministre de la Justice, que quelqu'un se fasse nier le droit de soumettre son cas à l'arbitrage pour une pure et simple ques- tion de formalité? Ne trouvez-vous pas qu'il y a lieu de réexaminer ce cas, dans le cas de Mlle Pouliot, de toute façon, très clair, parce que là il s'agit d'une syndiquée du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec? N'y a-t-il pas lieu, dans un geste gratuit — cela serait nouveau de la part du ministère de la Justice, mais cela serait très rafraîchissant — de réexaminer ce cas et de voir s'il ne s'agit pas là d'une injustice morale à l'endroit de la personne concernée?

M. Levesque: Je vais répondre de cette façon-ci au député de Maisonneuve. Ce n'est pas une question pour moi d'être rafraîchissant. C'est une question qui a été expliquée par le sous-ministre. La personne en question, premièrement, n'était pas à sa place là où elle exerçait ses fonctions.

M. Burns: Vous parlez de Mlle Pouliot?

M. Levesque: Elle ne remplissait pas, d'après les renseignements et les rapports qui m'ont été faits, les fonctions pour lesquelles ses services avaient été retenus. Il faut bien comprendre que nous sommes, dans ce cas, dans une institution carcérale, une institution de détention et où on a certaines exigences et cette personne ne répondait pas aux exigences qui étaient celles de ses supérieurs. Et elle est partie et voilà. Le dossier est fermé.

M. Burns: Le dossier est fermé et vous ne trouvez pas qu'il y a lieu de réexaminer ce dossier?

M. Levesque: Je pourrais sur le plan personnel avoir toute la sympathie possible pour cette personne que je ne connais pas, que je n'ai pas rencontrée d'ailleurs...

M. Burns: Moi non plus.

M. Levesque: ... simplement comme personne humaine. Je peux avoir beaucoup de sympathie pour cette personne, mais les rapports que je reçois sont à l'effet qu'elle ne pouvait pas continuer à exercer les fonctions qui étaient celles qu'on lui avait attribuées. Dans les circonstances, ma responsabilité, comme ministre responsable de ce lieu de détention, est de voir à ce que tout fonctionne d'une façon efficace et que les buts pour lesquels cette institution est fondée soient atteints.

M. Burns: Est-ce que vous ne croyez pas, M. le ministre, que le cas de Mlle Pouliot n'a véritablement jamais été jugé? C'est-à-dire que, mandaté par, je présume, votre ministère, le procureur du gouvernement a tout simplement allégué une question de forme et c'est uniquement sur cette base que le problème a été réglé. Est-ce que vous trouvez cela satisfaisant comme ministre de la Justice?

M. Levesque: C'est justement ce qui arrive souvent devant les tribunaux. Je peux parler, par

exemple, des procédures que j'ai prises moi-même contre certaines personnes et où ces personnes ont été libérées sur des questions techniques.

M. Burns: Mais vous êtes en droit pénal à ce moment-là, vous n'êtes pas en droit du travaii, vous n'êtes pas en relations du travail.

M. Levesque: S'il fallait que j'intervienne chaque fois dans ce domaine, on pourrait me reprocher une immixtion qui ne serait pas légitime ou justifiée.

M. Burns: Est-ce que je ne pourrais pas vous suggérer, dans les meilleurs intérêts de la justice et en tout cas dans les meilleurs intérêts d'un cas comme celui-là, d'accepter un arbitrage, peu importe la décision qui a été rendue sur la question de forme jusqu'à maintenant? C'est-à-dire que les problèmes que vous-même vous soulevez actuellement, je pense que je ne peux pas les discuter, je ne suis pas procureur de Mlle Pouliot, je ne connais pas Mlle Pouliot, mais cela ne me satisfait pas tellement de voir une personne qui, théoriquement, avait des droits en vertu d'une convention collective, tout au moins celui de faire juger sa conduite, se faire tout simplement renvoyer du revers de la main en disant: Vous avez fait un grief avant même d'être congédiée; vous n'aviez même pas le droit de faire un grief au moment où vous l'avez fait parce que vous n'étiez pas officiellement congédiée. Est-ce que ce ne serait pas dans les meilleurs intérêts de la justice et surtout du ministère qui en porte le nom de soumettre le cas à un arbitre? Cela pourrait très facilement, j'en suis convaincu, être arrangé avec les intéressés, tant du côté du ministère que du côté de la personne congédiée ou encore du syndicat qui la représente, et de trouver une personne impartiale à qui on dirait: On vous soumet le cas, mais, au fond, au mérite du congédiement, et, à ce moment-là que le ministère — cela serait l'aspect que je décrivais tout à l'heure comme rafraîchissant — dise tout simplement: J'accepterai de me plier à l'opinion d'une tierce partie qui examinera objectivement ce cas, et je ne m'imposerai pas, comme ministère de la Justice, comme une autorité féodale imposant ma décision sur l'appréciation des services que Mlle Pouliot rendait à la direction générale des établissements de détention.

M. Levesque: J'ai dit qu'il n'était pas dans l'intérêt public et dans l'intérêt de la justice que cette personne soit dans les fonctions qu'elle occupait. Je n'ai pas d'intérêt...

M. Burns: Pourquoi ne pas soumettre cela à une tierce partie? Il y a peut-être une personne qui subit une injustice actuellement et...

M. Levesque: Elle a eu les recours que lui permet la loi. Elle les a exercés et elle a tenté de les exercer d'autre façon également.

M. Burns: Elle a tenté de les exercer.

M. Levesque: Quant à moi, le dossier est clos. Si je puis rendre service à cette personne d'autre part, je serai très heureux de le faire, mais il n'y a pas d'intérêt pour nous, dans l'administration de ce centre de détention, à faire en sorte de voir cette personne revenir occuper des fonctions comme celles-là. Si, par contre, je puis lui rendre service d'une autre façon, je n'ai rien de personnel dans ce cas.

M. Burns: Est-ce à ce point, M. le ministre, que vous craignez qu'elle ait gain de cause devant un arbitre impartial...

M. Levesque: L'affaire, pour moi, est réglée.

M. Burns: ...que vous craignez même le fait de soumettre?

M. Levesque: C'est elle-même qui a porté sa cause en grief et son grief au tribunal, à l'arbitrage...

M. Burns: Oui, mais c'est sur une question de forme qu'elle a été déboutée, voyons!

M. Levesque: Quant à moi, c'est réglé.

M. Burns: Franchement, je vous avoue que je ne comprends pas du tout...

M. Levesque: On m'informe que cette personne travaille d'ailleurs pour une agence de service social qui est financé par le ministère de la Justice. Je trouve qu'on n'est pas trop mauvais.

M. Burns: Je vous avoue que cela ne me satisfait pas. Si j'étais à la place de Mlle Pouliot, cela ne me satisferait pas de me faire dire que j'ai perdu mon grief parce que je ne l'ai pas présenté au bon moment.

M. Levesque: Je comprends que c'est décevant, mais d'un autre côté.

M. Burns: Et comme ministre de la Justice, j'accepterais, je vous le dis tout de suite... surtout, j'aurais donné instruction au procureur du gouvernement de na pas soulever une question de forme lorsqu'il s'agit de questions aussi fondamentales que celles-là à savoir si Mlle Pouliot — malheureusement dans le cas de l'abbé Tardif, s'il était un contractuel peut-être que ça ne visait pas le système d'arbitrage, mais je pense qu'il y aurait eu une pression morale dans l'un et l'autre cas si les deux étaient congédiés pour les mêmes raisons — avait eu l'occasion de faire valoir son point de vue.

Si la cause étant jugée au mérite, Mlle Pouliot avait été déboutée, je vous dirais, comme ministre de la Justice, le cas est réglé, le dossier est fermé. Mais le dossier n'est pas fermé actuellement, le dossier est grand ouvert. Si vous me permettez l'expression, j'ai l'impression que le ministère de la Justice, on peut lui dire que son jupon dépasse dans cette affaire. Il dépasse très sérieusement.

M. le ministre, je sais bien que je ne bloquerai pas l'adoption de vos crédits avec un cas comme celui-là et je n'ai pas l'intention de le faire non plus, mais il me semble que ce serait l'occasion rêvée pour le ministre de la Justice de dire: Je crois en ce que je prêche, j'y crois tellement que dans un cas comme celui de Mlle Pouliot, même si un défaut de forme a fait qu'elle a été déboutée avant même que sa cause ait été examinée au mérite, je suis prêt à le soumettre à une tierce partie impartiale, à soumettre le fond de la question, le mérite de la question.

Si on n'y va pas à ce point, j'ai nettement l'impression qu'à ce moment, le ministère de la Justice craint très sérieusement de ne pas être capable de faire valoir son point de vue au mérite. C'est grave, c'est très grave. Cela m'inquiète beaucoup. Je me serais attendu de la part de l'actuel ministre de la Justice à beaucoup moins d'autoritarisme, beaucoup moins de partialité à l'endroit d'une personne qui a peut-être fait des choses qui ne plaisent pas à la direction générale des établissements pénitentiaires mais qui, sans aucun doute, croyait agir de bonne foi. Il me semble en tout cas que vous avez l'occasion rêvée de vous refaire. Je vous le suggère.

Je n'ai rien à ajouter.

Le Président (M. Pilote): Le programme 4 est adopté?

M. Burns: Adopté avec regret concernant ce dernier point.

Le Président (M. Pilote): Programme 5.

Réinsertion sociale des délinquants

M. Burns: Programme 5. Dans le domaine de la réinsertion sociale des délinquants, M. le Président, le livre blanc de la justice recommandait huit actions bien précises que l'on retrouve aux recommandations 723, 724, 729, 730, 731, 732 et 733. Est-ce que le ministre peut nous dire ce ce qui a été fait pour chacune de ces recommandations? Est-ce que j'ai besoin de les lire? Je pense que ça peut raccourcir nos travaux, si je m'abstiens de lire les recommandations en question, mais si vous voulez, je vous réfère entre autres à la page 250 du livre blanc concernant les recommandations susnommées.

M. Levesque: Autant le livre blanc de la justice que les rapports de la commission de réforme du droit préconisent les mêmes objectifs, c'est-à-dire mettre l'accent de plus en plus sur des mesures autres que l'emprisonnement. En fait, au Québec, en accord avec les recommandations que vous retrouvez au livre blanc, nous tendons exactement vers le même idéal. Premièrement, dans le secteur de la probation, nous possédons 29 bureaux qui sont répartis dans tous lesdistrictsjudiciaires. Cette année, nous avons complété la bouche au niveau de la probation.

Au niveau des ordonnances de probation, les juges posent comme conditions, des conditions que vous retrouvez à l'intérieur du livre blanc.

Au niveau des établissements de détention, de plus en plus, on fait l'usage des absences temporaires. Cette année encore, on a dépassé le nombre des autres années. De plus en plus, on recourt à cette méthode.

Vous avez aussi un recours, par les juges, des fameuses sentences intermittentes, c'est-à-dire des sentences de fins de semaine. De fait, actuellement, nous avons, à toutes les fins de semaine, plus de 400 personnes qui entrent dans nos prisons. Comme vous le voyez, les juges ont bien lu le livre blanc.

De plus, au niveau des établissements de détention, on travaille à la mise en place d'un programme institutionnel. En fait, notre priorité pour les années 1975 à 1980 va être axée sur les activités "occupationnelles", les activités éducatives, culturelles, etc. Actuellement, tout tend vers cet objectif; d'autant plus que nous avons maintenant des professionnels dans tous les établissements de détention — au moins dans toutes les régionales — et nous avons fait accepter, au cours de l'année, des agents-conseillers, de telle sorte que de plus en plus, vous allez avoir des surveillants qui vont s'occuper de la périphérie et des surveillants, aussi, qui vont participer au niveau du traitement. D'ailleurs, cela a été souligné dans le rapport de M. Caplet, comme vous le savez.

Troisièmement, nous mettons un accent sur la participation communautaire. De fait, au cours de l'année...

M. Burns: La recommandation 729.

M. Levesque: Pardon?

M. Burns: La recommandation 729.

M. Levesque: Oui. De fait, nous avons créé au cours de l'année, un service de participation communautaire qui s'occupe actuellement de faire un inventaire de tout ce qui existe en fait d'organismes qui oeuvrent de près ou de loin au niveau des contrevenants à l'intérieur de la société.

On a eu aussi le transfert de certaines agences du ministère des Affaires sociales au ministère de la Justice. Il y a des agences qui s'occupent uniquement de la réhabilitation du crime adulte. Vous avez le Service de la réadaptation sociale, à Québec; vous avez les Ateliers Dominique, à Hull; les Etablissements du Gentilhomme; la Maison Painchaud, etc.

Nous mettons l'accent sur des ententes avec d'autres agences spécialisées. Pour le traitement de la toxicomanie, avec Portage, nous avons presque terminé notre programme pour les soins psychiatriques dans toute la province. De plus en plus, comme vous le voyez, nous tendons vers l'atteinte des objectifs du livre blanc. Naturellement, cela va s'étendre sur quelques années; probablement que nous y arriverons vers 1980.

M. Burns: Concernant la recommandation

724, la mise sur pied d'un service d'informatique, afin d'identifier rapidement le type des détenus ou prévenus et de déterminer adéquatement les mesures probatoires ou sécuritaires qui s'imposent, qu'arrive-t-il?

M. Levesque: Je dois vous dire que c'est très avancé. C'est tellement avancé que nous en sommes rendus aux écrans cathodiques actuellement. Nous avons un écran cathodique installé au centre de prévention, au siège social, ainsi qu'ici, à Or-sainville. Nous captons actuellement toutes les données, partout dans la province. Dès l'automne nous nous engagerons au niveau de la probation. Comme vous le voyez, le système est terminé, est mis sur papier, les formules sont toutes terminées. Il reste simplement l'achat des machines et ainsi terminer notre programme.

M. Burns: Actuellement, il est surtout à Montréal?

M. Levesque: Oui. On a commencé, naturellement, avec la détention.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Vous avez Montréal, Québec et le siège social, bien que toutes les autres institutions nous envoient leurs formules. Dès le lendemain, elles sont ingurgitées dans la machine.

M. Burns: C'est ce que j'aimerais avoir comme détail. Comment alimente-t-on cet écran cathodique?

M. Levesque: Au centre de prévention, comme ici, à Orsainville, dès qu'un détenu entre, vous avez des formules spéciales. Vous tapez simplement dans la machine les données nécessaires. Après, vous questionnez l'écran cathodique et cela se reproduit sur l'écran.

M. Burns: J'imagine que c'est beaucoup plus facile pour un détenu qui a déjà une histoire de cas, si vous me passez l'expression?

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Quand vous avez un nouveau détenu, qui n'a jamais passé par les rouages des établissements de détention, quelle est votre méthode d'alimenter l'écran cathodique?

M. Levesque: Nous avons fait une cueillette de données depuis 1970. Toute personne qui est entrée dans une institution, au Québec, depuis 1970, est déjà inscrite dans notre machine. Nous avons commencé par alimenter la machine, et depuis le 1er avril 1976, cela se fait au jour le jour.

M. Burns: Y compris, si on peut dire, les nouveaux prévenus...

M. Levesque: Les nouveaux prévenus, c'est cela.

M. Burns: ... ceux qui n'ont pas d'histoire de cas.

M. Levesque: Parce que nous interrogeons la machine pour savoir s'il y a une histoire dans son cas, et, s'il y a une histoire, vous la faites passer simplement sur la machine et cela épargne beaucoup de temps.

M. Burns: Relativement à la recommandation 7-30, c'est-à-dire que l'Etat appuie financièrement les services des bénévoles qui se consacrent à la réadaptation des détenus et des délinquants. Qu'est-ce qui est fait actuellement de ce côté?

M. Levesque: Ici à Québec, au service de réadaptation sociale qui relève du ministère de la justice, comme vous le savez, nous finançons justement la formation de bénévoles. Graduellement, nous tentons une expérience ici à Québec au niveau des bénévoles. Nous avons aussi des contacts avec...

M. Burns: Mais y a-t-il un appui financier qui est donné?

M. Levesque: Ah oui! certainement. M. Burns: De quel ordre est-il?

M. Levesque: C'est-à-dire que nous finançons le service de réadaptation sociale. Je crois qu'actuellement le budget est rendu à $370 000. Une partie du budget va à la formation des bénévoles. Mais nous avons commencé par Québec, parce que c'était plus facile. Graduellement, nous entendons étendre le bénévolat dans toute la province.

M. Burns: Y a-t-il un appui donné à certains organismes — je sais qu'il n'en existe pas beaucoup, mais il en existe— quant à la réinsertion sociale des détenus ou des personnes qui ont purgé une peine, particulièrement au niveau de leurs possibilités de se trouver un travail? Je sais qu'il y a un groupe d'ex-détenus qui a déjà commencé à tenter de mettre sur pied un organisme de cette nature. Y a-t-il de l'assistance financière donnée à ces groupes?

M. Levesque: Actuellement, nous finançons les Etablissements du Gentilhomme, à Québec et les Ateliers Dominique, à Hull qui s'occupent justement de trouver des emplois. D'une façon générale, on ne finance aucune agence qui s'occupe strictement de trouver des emplois, quoique nous avons un service qui s'occupe de trouver des emplois aux détenus, de sorte qu'actuellement, vous avez par exemple à Waterloo, sur 150 détenus, 100 détenus travaillent à l'extérieur, ils partent le matin, ils vont travailler à l'extérieur et reviennent.

Même à la prison de Montréal, actuellement, nous en avons une cinquantaine qui partent le matin et vont travailler à l'extérieur. Nous avons aussi de l'emploi qui entre à l'intérieur des établissements, de sorte que tout cela est en progrès, parce

que cela fait partie de notre grand programme de réinsertion sociale et d'occupation qui va de notre période de 1975 à 1980, comme je vous l'ai dit tout à l'heure.

Le Président (M. Pilote): Le programme 5, adopté?

M. Burns: Adopté.

Le Président (M. Pilote): Programme 6?

M. Burns: L'aide juridique, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Nous suspendons les travaux de la commission pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 1 h 2)

Reprise de la séance à 1 h 25

M. Pilote (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs! Programme 6, aide juridique et financière.

L'aide juridique

M. Burns: M. le Président, concernant l'aide juridique du programme 6, on peut dire que depuis la création de la Commission des services juridiques, les avocats permanents de l'aide juridique se sont acquis une réputation assez enviable. Je dirais même qu'un grand nombre de personnes éligibles à l'aide juridique ont été défendues par ces avocats avec la plus grande satisfaction, de sorte qu'actuellement il y a, je pense, une commune renommée favorable à l'endroit des avocats permanents de l'aide juridique. Une certaine publicité régulière à l'endroit de ces avocats a également aidé à accroître la popularité, si vous voulez, des avocats permanents de l'aide juridique. Je ne crains pas de dire que, dans certaines régions, cela a pu créer un certain nombre de difficultés entre les avocats de pratique privée et les avocats permanents de l'aide juridique, à un point tel, avons-nous entendu dire, que des pressions ont été exercées par des avocats de pratique privée pour que cesse la publicité écrite et télévisée vantant les mérites de l'aide juridique. Ce qui, à mon avis, m'apparaît comme très déplaisant parce qu'il s'agit là d'un service pour lequel on doit féliciter le prédécesseur de l'actuel ministre, j'espère que j'aurai dans quelques années l'occasion de féliciter l'actuel ministre pour certaines des mesures qu'il a mises en application.

Me Choquette doit être félicité pour avoir été, en tout cas peut-être pas le seul, j'imagine que c'est un travail d'équipe, celui qui a réalisé le plus, possiblement, aux pressions extérieures qui avaient été mises sur lui à l'encontre de la formule actuelle de l'aide juridique, tout au moins de l'ouverture que la formule actuelle de l'aide juridique donne aux citoyens d'aller voir des avocats permanents et d'avoir instauré avec, évidemment, le juge Sauvé, qui en est le président, la formule où il est possible de recourir à des services d'avocats permanents.

La question que j'aurais à poser là-dessus est relative à une entrevue que le juge Sauvé accordait au Soleil en janvier dernier, dans lequel il déclarait que suite aux restrictions budgétaires imposées par le Conseil du trésor, la commission allait devoir considérablement diminuer ses budgets d'information et de publicité. Ces coupures, à mon humble avis, risquent de diminuer justement cet impact de la commission auprès du public, favorisant indirectement les avocats de pratique privée qui, si mes renseignements sont exacts, ne demanderaient pas mieux. J'aimerais savoir s'il y a une relation entre les pressions qu'on nous a rapportées de la part d'un certain nombre d'avocats de pratique privée et, justement, cette réduction des budgets d'information et de publicité de la part de la Commission des services juridiques.

M. Levesque: Nous avions même convenu avec les représentants du Barreau et les représentants de l'aide juridique d'avoir une publicité conjointe qui ferait connaître les avantages de l'aide juridique et, en même temps, donnerait tous les renseignements pertinents à la population.

C'est simplement à cause des restrictions budgétaires que nous n'avons pas encore pu donner suite à cette entente intervenue entre notre ministère, le Barreau et la Commission d'aide juridique.

M. Burns: II n'y a pas de coupure directement prévue comme telle, c'est-à-dire que vous envisagez d'y revenir éventuellement.

M. Levesque: Oui, éventuellement, mais, dans la période présente, nous n'avons pas les fonds nécessaires pour le faire. Mais, dès que nous reprendrons le cours normal des choses, nous allons le faire. J'avais même rencontré, à la suite de représentations que j'avais reçues des avocats de la pratique privée, d'une part, et des discussions que j'avais eues avec le président de la Commission d'aide juridique et, à la suite de ces rencontres, il avait été convenu... Je pense que le sous-ministre a rencontré des représentants et du Barreau et de la Commission d'aide juridique et il avait été convenu d'une publicité conjointe. Nous espérons pouvoir y donner suite dans les meilleurs délais, tenant compte, évidemment, des restrictions budgétaires.

M. Burns: Mais les meilleurs délais, ça veut dire quoi, M. le ministre? C'est quoi, les meilleurs délais?

M. Levesque: Dès que le Conseil du trésor nous...

M. Burns: Mais est-ce qu'on peut s'attendre que la situation soit rétablie très rapidement, étant donné que, de plus en plus, les services vont être appelés, à cause justement du besoin qui est de plus en plus reconnu dans la population...

M. Levesque: On peut dire qu'il y a eu beaucoup de publicité de faite et que la population est passablement au courant des avantages de l'aide juridique présentement.

M. Burns: II y a encore des gens qui s'adressent à nos bureaux de comté...

M. Levesque: Je n'en ai pas...

M. Burns: ...et qui ne savent pas qu'ils sont admissibles à l'aide juridique. Je prends à témoin tous les députés qui sont autour de la table.

M. Levesque: Ce n'est pas parce qu'on a manqué de publicité. La télévision en a été pleine continuellement...

M. Burns: Je sais fort bien, mais vous aurez toujours...

M. Levesque: ...La minute juridique, des publications, des dépliants...

M. Burns: Vous aurez toujours des gens qui devront...

M. Levesque: Nous allons continuer, mais, pour le moment...

M. Burns: ...et qui, souvent, ne sont pas intéressés tant qu'ils ne sont pas dans le bain eux-mêmes. Cela arrive souvent.

M. Levesque: Oui, je comprends.

M. Burns: II n'y a personne qui se préoccupe du problème d'un vendeur d'automobiles qui est moins scrupuleux que d'autres avant que cette personne ait été "organisée" par un vendeur d'automobiles moins scrupuleux que les autres.

M. Levesque: Prenez donc un autre exemple.

M. Burns: C'était sans aucune méchanceté de ma part, parce que je suis convaincu que le ministre ne reconnaissait même pas mes propos quand je parlais de vendeurs d'automobiles non scrupuleux.

J'aimerais que le ministre, simplement sur ce point, nous donne sa version de la situation qui avait été dénoncée l'automne dernier par des responsables de la Corporation de l'aide juridique de Québec qui avaient quitté, en claquant la porte, leur emploi, en dénonçant l'ingérence du juge Sauvé dans le congédiement de six avocats salariés. Je me réfère, entre autres, au journal Le Jour, puisque, maintenant, on peut s'y référer librement, du mardi 2 décembre 1975...

M. Levesque: On m'indique...

M. Burns: ...et du Soleil du 13 novembre 1975.

M. Levesque: ...ici... Mon représentant de la Commission de l'aide juridique indique que cette question est devant les tribunaux présentement et qu'il ne peut pas faire de commentaires sur ce sujet. Autrement, je lui aurais demandé d'en faire; c'est-à-dire que je lui ai demandé, mais il ne peut pas...

M. Burns: C'est devant les tribunaux. J'accepte ça comme réponse.

Toujours au programme 6, M. le Président, relativement à l'aide juridique, j'aimerais savoir, de la part du ministre, quelle recommandation il a faite face à l'abus de procédure de certains avocats de la pratique privée et aux écarts, très importants, entre le coût des dossiers traités par les avocats permanents et celui des dossiers traités par les avocats de pratique privée.

Là-dessus, le livre blanc sur la justice recommandait, à la page 235, et je cite: "... que des mesures administratives et législatives soient prises pour faire obstacle aux abus de procédure et de contestation par certains avocats et qui n'ont d'autre objet que d'augmenter leurs honoraires dans les causes de l'aide juridique."

Ce n'est donc pas moi, M. le Président, qui ai soulevé cette question. C'est le livre blanc qui soulevait cette question. J'aimerais savoir si le ministre a fait suivre cette recommandation de mesures pratiques concrètes. C'est sans compter — et il y a un certain nombre de cas qui ont été portés à mon attention, je pourrais ajouter ces cas, c'est du même ordre parce que c'est un coût additionnel pour l'aide juridique — le fait que dans certains cas, des avocats de pratique privée reçoivent un client et, sachant fort bien que ce client n'est pas admissible à l'aide juridique, suggèrent à ce client d'aller à l'aide juridique et je n'irais pas jusqu'à dire de faire une fausse déclaration, mais peut-être d'omettre un certain nombre de choses dans leur déclaration pour les rendre admissibles pour le voir revenir à leur bureau de façon à être payé. J'ai des cas que je pourrais vous citer. Il y en a même quelques-uns qui sont examinés par le Barreau de Montréal, actuellement.

M. Levesque: Tout ce que je puis dire là-dessus, c'est qu'il y avait un tarif provisoire qui s'appliquait à l'aide juridique et que, pendant ce temps, nous avons constaté des abus, particulièrement, en matière matrimoniale. Nous avons un nouveau tarif maintenant qui a été adopté et qui a corrigé ces abus en partie, c'est-à-dire qu'il y avait un tarif uniforme pour l'ensemble d'une cause matrimoniale et, maintenant, le tarif s'applique à diverses étapes de sorte qu'avec ce nouveau tarif, nous évitons plusieurs abus.

M. Burns: C'est-à-dire que vous avez un tarif pour les mesures provisoires et vous avez, ensuite, un tarif pour la contestation, s'il y en a une et pour le procès s'il y en a un.

M. Levesque: Le tarif a toutefois fait en sorte que certains avocats abusent de procédures au criminel. Cela peut arriver et ils semblent avoir une tendance à développer un profil de pratique qui vise beaucoup plus à exploiter le tarif à leurs fins

qu'à donner satisfaction à leurs clients ou à s'assurer que justice soit rendue.

Ce que nous faisons est que nous prévoyons des correctifs encore au tarif en matière criminelle et la prochaine ronde de négociation doit commencer vers la fin de l'été, la convention expirant en décembre 1976.

Alors, il n'est pas exclu non plus que la Loi de l'aide juridique puisse être amendée pour que, si certains avocats abusent notoirement de l'aide juridique, on puisse songer à les exclure du système.

M. Perreault: Est-ce que ces cas sont rapportés au Barreau pour enquête?

M. Levesque: Oui. La preuve n'est pas toujours facile à faire...

M. Burns: Concernant l'autre aspect...

M. Levesque: ... mais il y a des indices qui nous frappent.

M. Burns: ... de la question, je vous demandais s'il a été porté à votre connaissance des cas d'avocats de pratique privée qui référaient à l'aide juridique pour éventuellement voir revenir des clients qui n'avaient pas le droit, à toutes fins pratiques, de bénéficier des services de l'aide juridique. Y a-t-il des cas qui ont été portés à votre connaissance à cet effet?

M. Levesque: Non. Aucun à ma connaissance personnelle. Aucun à la connaissance du sous-ministre et la commission nous dit que ce sont des choses très difficilement vérifiables.

M. Burns: Une dernière question là-dessus et là c'est beaucoup plus l'aspect de la philosophie du ministère. Le ministère envisage d'en arriver à une espèce d'autosuffisance en matière d'aide juridique, de sorte que tous les services prévus par l'aide juridique pourraient être fournis par des avocats permanents, quitte à ce que des personnes de l'extérieur, des personnes qui veulent avoir des services à l'extérieur les aient de façon beaucoup plus restreinte, est-ce que le ministère...

M. Levesque: Je pars d'un avis contraire. Nous croyons que nous avons un excellent système qui fait souvent l'objet d'admiration des gens de l'extérieur qui trouvent qu'avec le système mixte que nous avons, nous avons un stimulant, un élément de concurrence et nous croyons que jusqu'à maintenant l'expérience nous indique que nous sommes sur la bonne voie.

M. Sylvain: Une question toute courte. Est-ce que vous ne pourriez pas envisager, dans vos négociations en-dehors du tarif, surtout en ce qui concerne les procédures criminelles, comme le stade de la comparution, une certaine forme de compensation pour garder le libre choix des avocats entre l'aide juridique des permanents et la pratique privée, la question des distances que les avocats de pratique privée auraient à parcourir, surtout dans le milieu rural ou dans les districts judiciaires ruraux? Ce qui arrive, c'est que dans un milieu où le palais de justice... Dans ce milieu c'est facile pour le bureau de pratique privée d'aller au palais de justice sans frais, mais pour des districts où il y a plus de 100 milles à parcourir ou 80 milles, est-ce que cela peut être envisagé?

M. Levesque: On m'indique que la commission rembourse les frais de déplacement des avocats de la pratique privée.

M. Sylvain: Sur les simples comparutions? M. Levesque: Sur les simples comparutions.

M. Sylvain: Est-ce que cela avait été amendé ou si cela a toujours été?

M. Levesque: Cela a toujours été le cas, cependant il faut le réclamer.

M. Sylvain: Je sais, mais c'est parce qu'il y avait, à un moment donné... On s'est aperçu qu'une comparution était de $15, ou quelque chose comme cela. Cela m'a été rapporté comme étant autant le tarif que les mesures compensatoires pour la comparution. Les gens qui auraient voulu user de leur liberté de choix quant à un avocat qui restait à 50 ou 60 milles du palais de justice, tous les bureaux de pratique privée disaient: Non. Ce n'est pas assez payant, de telle sorte que c'était confiné simplement dans un ou deux bureaux sur place.

M. Levesque: C'est le libre choix. Ils peuvent refuser, mais la commission ne refuse pas.

Le Président (M. Pilote): Le programme 6 est adopté?

M. Burns: Non, M. le Président.

M. Tardif: A l'intérieur de ces négociations éventuelles, est-ce que vous n'envisagez pas de permettre aux avocats de pouvoir juger de l'admissibilité d'une personne au lieu de forcer les personnes intéressées à recourir à l'aide juridique, à aller au centre d'aide juridique pour pouvoir ensuite renvoyer ces personnes à un avocat de la pratique privée? Je sais que c'est une question qui a été soulevée à plus d'une reprise par les représentants du Barreau. On n'a pas encore réglé à la satisfaction des avocats à ma connaissance, mais est-ce que c'est une question qui va être soulevée dans le cadre de ces négociations éventuelles?

M. Levesque: Nous avons songé à faire une expérience pilote à ce sujet dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Nous n'avons pas eu la collaboration nécessaire. La seule façon d'envisager d'aller plus loin dans cette expérience serait d'amender la loi et de donner les pouvoirs de le faire. Nous y songeons.

M. Tardif: Pour cette année?

M. Levesque: Nous y songeons pour cette année. Nous y songeons. Mon analyse n'est pas terminée là-dessus. Je suis en train d'évaluer la situation.

M. Tardif: D'accord.

Le Président (M. Pilote): D'autres questions au programme 6?

M. Burns: Oui, M. le Président, deux courtes questions. L'une concerne le projet de zone pilote de l'aide juridique au Saguenay-Lac Saint-Jean.

M. Levesque: Je viens d'en parler. M. Burns: Ah! Vous venez d'en parler? M. Levesque: En réponse à une question.

M. Burns: Je m'excuse, je parlais à mon bon ami qui est à ma droite.

M. Levesque: Je faisais part au député d'Anjou que l'expérience...

M. Burns: Je m'excuse je n'ai pas compris la réponse.

M. Levesque: ...n'avait pas été satisfaisante.

M. Burns: Concernant les fonctionnaires de l'aide sociale?

M. Levesque: Certainement, et nous n'avons pas reçu la collaboration nécessaire, c'est-à-dire que nous n'avons pas pu mener l'expérience à terme; la seule façon de le faire, d'après ce que je vois, d'après les renseignements que l'on me fournit, serait d'amender la loi et j'y songe présentement.

M. Burns: Bon, je m'excuse, je n'avais pas compris votre réponse.

M. Levesque: Je présume...

M. Burns: D'accord. Vous présumiez que je vous poserais une question de ce genre.

M. Levesque: Lui, il l'a posée.

M. Burns: C'est le député d'Anjou qui l'a posée, alors, je remercie le député d'Anjou de m'avoir précédé là-dessus.

Dernière question concernant l'aide juridique. C'est le cas des personnes qui, à Mirabal, me dit-on, pourraient bénéficier de l'aide juridique lorsqu'elles ont des problèmes avec l'immigration. Est-ce que tel est le cas? Si oui, j'aimerais savoir de la part du ministre quelle est exactement l'extension de l'aide qu'on accorde aux personnes qui peuvent avoir des problèmes avec l'immigration lorsqu'elles arrivent au Québec.

M. Levesque: On avait ce service à Dorval, me dit-on, et cela a été maintenant porté à Mirabel, il y a eu un changement à ce sujet. En plus de cela, il y a eu des difficultés d'effectif, difficultés qui devraient être résolues au cours de la présente année, espère-t-on, de sorte qu'on pourra...

M. Burns: Utiliser les budgets.

M. Levesque: ...reprendre le service.

M. Burns: Est-ce à dire qu'actuellement le service n'est plus donné?

M. Levesque: Dans le cadre du budget actuel, parce qu'apparemment ça ne prend pas grand-monde pour rétablir la situation à Mirabel.

M. Burns: Vous voulez dire qu'actuellement, ce service n'est plus donné?

M. Levesque: Un avocat y va sur demande. Mais il n'y en a pas sur place, en permanence...

M. Burns: Alors que, toutefois à Dorval, il y avait un avocat sur place.

M. Levesque: C'est ça.

M. Burns: Est-ce que vous ne croyez pas que, comme gouvernement du Québec qui veut, entre autres, prendre ses responsabilités, même si on n'a qu'un petit budget de $10 900 000 en matière d'immigration, parce que j'avais l'impression que c'était un pourboire dans tout le projet budgétaire, à voir le ministère de l'Immigration n'avoir que $10 900 000 à peu près comme budget cette année, est-ce que, tout au moins, ça n'aiderait pas le ministère de l'Immigration du Québec à concrétiser, via le gouvernement de l'Etat du Québec, sa présence auprès des nouveaux immigrants? Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il s'agit là d'un service essentiel, si je peux dire, selon l'expression à la mode, que vous devez rétablir le plus rapidement possible?

M. Levesque: Oui, nous avons l'intention de le rétablir le plus tôt possible.

M. Burns: Quand ça?

M. Levesque: Au cours de l'année, au cours de l'exercice financier actuel.

M. Burns: Au cours de l'exercice actuel. M. Levesque: Oui.

M. Burns: II n'y a pas de danger qu'avec les coupures de budget et tout ça, vous oubliiez de...

M. Levesque: Nous avons un budget suffisant pour répondre à ça.

M. Burns: Vous reviendrez à une certaine permanence d'avocat de l'aide juridique?

M. Levesque: Si la commission juge que ça répond à un besoin.

M. Burns: Combien de cas a-t-on traités dans le passé par l'entremise de ce service?

M. Levesque: 250 cas.

M. Burns: Au cours de l'année dernière, j'imagine?

M. Levesque: Oui. Pas une année entière cependant, neuf mois.

M. Burns: En neuf mois. C'est une bonne moyenne. Cela justifierait un poste en permanence.

M. Levesque: On est d'accord.

M. Burns: D'accord.

Le Président (M. Pilote): Programme 6.

M. Burns: D'accord, si vous êtes d'accord, pour le programme 6.

Le Président (M. Pilote): II est adopté? M. Burns: Adopté.

Le Président (M. Pilote): Programme 7: Enregistrement officiel.

Bureaux d'enregistrement

M. Burns: Quant au programme 7, M. le Président, je réfère le ministre à une lettre du 9 octobre 1975, qu'il adressait lui-même au député de Saguenay, M. Lucien Lessard, en réponse à la sienne du 30 septembre, concernant le bureau d'enregistrement de Baie-Comeau.

Le député de Saguenay portait à l'attention du ministre les nombreuses représentations qu'il avait eues, de la part d'avocats et de notaires, concernant l'ouverture possible d'un second bureau d'enregistrement dans ce qu'ils appallent le haut du comté.

En réponse à cette demande, le ministre avait répondu avoir communiqué à M. René Langevin, le registraire du Québec, cette demande. J'aimerais savoir ce qui est advenu de la demande. Est-ce qu'on y a opposé une fin de non-recevoir ou si, effectivement, on s'apprête à donner suite à la demande du député de Saguenay?

M. Levesque: On me dit qu'il n'y a pas suffisamment de volume, d'après les statistiques que Me Langevin a présentement entre les mains, dans la partie du territoire en question, pour pouvoir maintenir un bureau d'enregistrement.

M. Burns: Est-ce qu'on tient compte également des distances absolument incroyables que les notaires, entre autres, qui pratiquent dans cette partie du comté, sont obligés de parcourir, ou de faire parcourir par des adjoints, pour faire l'enregistrement des actes?

M. Levesque: M. Langevin m'indique que cela se fait par correspondance, en général.

M. Burns: Cela se fait par correspondance? M. Levesque: Oui.

M. Burns: Est-ce que cette réponse a été donnée directement au député de Saguenay, à la suite de sa demande?

M. Levesque: On pourrait le vérifier; le dossier n'est pas ici.

M. Burns: Remarquez que je me charge de l'aviser. Mais peut-être aimerait-il recevoir une réponse.

M. Levesque: Je vais demander immédiatement que l'on vérifie si la réponse a été donnée; elle l'a probablement été. Si elle ne l'était pas, je vais voir à ce que le député reçoive une réponse dans les meilleurs délais.

M. Burns: Concernant le nombre de bureaux d'enregistrement, une autre question qui me vient est la suivante. C'est relativement à une rumeur qui persiste actuellement et selon laquelle le ministère de la Justice envisagerait la diminution des bureaux d'enregistrement dans certains endroits où, traditionnellement, on est habitué à avoir un bureau d'enregistrement, où un certain modus vi-vendi s'est installé autour de l'existence de bureaux d'enregistrement, peut-être dans des endroits où, aujourd'hui, on s'imagine qu'ils ne sont plus utiles, ou moins utiles.

Est-ce que cette rumeur que nous entendons est exacte? Est-ce qu'il est exact, entre autres, que le ministère s'apprêterait à réduire, à peu près de 50%, le nombre des bureaux d'enregistrement dans le Québec?

M. Levesque: Non, ça, c'est fortement exagéré.

M. Burns: Bon. c'est la façon d'avoir une réponse, si on exagère la question.

M. Levesque: Je dois dire qu'il y a eu une étude qui a été faite avant que j'arrive au ministère et qui indiquait la façon dont on pourrait regrouper certains bureaux d'enregistrement en vue d'une meilleure utilisation du personnel et d'une meilleure efficacité.

J'ai eu l'occasion de regarder d'assez près ces suggestions; je ne suis pas d'accord avec l'ensemble de l'étude, personnellement. Je sais qu'un bureau d'enregistrement, c'est une institution extrêmement importante, particulièrement dans les milieux ruraux où on est habitué à avoir ce service...

M. Burns: II y a une espèce de modus vivendi

qui s'établit autour de l'existence d'un bureau d'enregistrement...

M. Levesque: C'est exact.

M. Burns: ... très souvent, dans un endroit qui est maintenant excentrique par rapport au développement de la région.

NI. Levesque: C'est exact.

M. Burns: Mais il y a des habitudes qui se créent. Est-ce qu'on a des projets précis quant à cela?

M. Levesque: Oui, j'ai un projet précis, bien qu'il faille encore que peut-être je le raffine davantage, mais j'ai procédé à de nombreuses consultations du côté des notaires, du côté de la population, par l'entremise des députés, etc., et je suis en train de compléter le dossier à ce sujet.

M. Burns: Les modifications que vous envisagez seraient-elles mises en vigueur à court terme?

M. Levesque: C'était prévu que ce soit mis en vigueur au cours de trois ou quatre années, non pas tout d'un coup, parce qu'il y a là des changements administratifs à faire. On avait envisagé que le processus puisse durer trois ou quatre ans. Mais, j'ai l'intention, si c'est possible, de commencer, d'ici un an, à apporter ces modifications.

M. Burns: Vous avez l'intention de faire cela d'ici un an mais progressivement.

M. Levesque: Progressivement.

M. Burns: De sorte que vous avez l'intention d'en aviser, je pense, les gens concernés, avant le fait et non pas de les mettre devant le fait accompli.

M. Levesque: D'ailleurs, on a commencé les consultations. Les populations locales ont déjà été mises au courant de certains changements à envisager, etc. Comme cela prend une législation, on devrait s'en reparler en temps opportun. Cela ne se fera pas autrement que par législation.

M. Burns: D'accord. Dernière question là-dessus, M. le Président. La Société généalogique canadienne-française — le ministre on son collègue, le Solliciteur général, a sans doute reçu des lettres à ce sujet — s'inquiète à nouveau cette année de la possibilité que les informations qu'on retrouve dans les registres d'état civil soient, pour une fois, mis de façon confidentielle ou, si vous voulez, qu'on attache un élément de confidentialité à cela. Est-ce que cela fait partie des projets du ministère d'en arriver à ce changement concernant les registres d'état civil ou est-ce que c'est une fausse rumeur, une inquiétude inutile de la part de la Société généalogique canadienne-française?

M. Levesque: II s'agit simplement d'une recommandation de l'Office de révision du Code civil, une recommandation selon laquelle le contenu des actes d'état civil ne puisse être divulgué avant l'expiration d'une période de cent ans.

M. Burns: C'est-à-dire que, si, demain, j'ai affaire, dans une cause, par exemple, de divorce, où j'ai besoin des actes d'état civil, moi, comme procureur du requérant ou de la requérante et où j'ai besoin de déposer les registres d'état civil concernant soit le mariage, soit la naissance des conjoints ou encore des enfants qui sont nés de ces conjoints, je n'aurais pas, comme procureur de la partie adverse, la possibilité d'aller obtenir ces renseignements?

M. Levesque: La recommandation n'allait pas aussi loin que cela. Elle ne touche pas les questions judiciaires, mais simplement les questions de recherche. Mais, c'est tout simplement une recommandation. Il n'y a rien d'accepté.

M. Burns: Oui, c'est cela. J'aimerais connaître les vues du ministre là-dessus. Pense-t-il que le ministère va donner suite à cette recommandation ou si on peut s'attendre à ce qu'il va considérer l'utilité, je pense, de sociétés généalogiques, peu importe, je ne les qualifie pas?

M. Levesque: Personnellement, je n'ai pas étudié cette question. Mes plus proches collaborateurs n'ont pas, non plus, eu le temps de fouiller cette recommandation ou de me donner une opinion là-dessus. C'est simplement une recommandation qui est là, qui existe et à laquelle on n'a pas donné suite.

On m'indique que dans plusieurs pays on avait adopté des restrictions semblables en ne permettant d'accessibilité totale qu'aux actes d'état civil vieux de plus de cent ans afin de sauvegarder le caractère confidentiel de certaines informations contenues dans ce registre, l'adoption, le désaveu, la reconnaissance de paternité, et ainsi de suite. Pour nous, on n'a rien décidé.

M. Burns: Vous n'avez pas de politique définie là-dessus.

M. Levesque: Non.

M. Burns: Programme 8, adopté.

Le Président (M. Pilote): Adopté.

M. Burns: C'est le programme 7, oui.

Le Président (M. Pilote): Le programme 7 est adopté. Programme 8?

M. Burns: Excusez-moi.

Le Président (M. Pilote): Contrôle des jeux de hasard et de courses.

M. Levesque: Adopté.

M. Burns: II y aurait bien des questions à poser là-dessus, mais c'est plutôt au Solliciteur général que je poserais ces questions, mais comme le Solliciteur général via sa police fait enquête sur une certaine situation qui existe à Loto-Québec, j'aimerais savoir s'il est dans les vues du ministre, éventuellement, de forcer son collègue à agir plus rapidement dans un dossier qui, à mon avis, nuit fort possiblement à la bonne réputation de l'administration de la Régie des courses et, en particulier, de Loto-Québec actuellement?

M. Levesque: II faut bien comprendre, premièrement...

M. Burns: Ce n'est pas le même dossier, non? Cela se mêle tout dans mon esprit.

M. Levesque: II faut dire que le Solliciteur général fait bien son travail.

M. Burns: Vous savez, avec Loto-Perfecta et tout cela, tout le monde est mêlé dans cette histoire.

M. Levesque: Ici, il s'agit du contrôle des jeux de hasard et des courses, qui émet les permis, mais ce n'est pas l'opération comme telle des loteries...

M. Burns: Ce n'est pas l'opération...

M. Levesque: ... qui relève du ministère des Finances.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Quant au Solliciteur général, je n'ai aucun doute qu'il a répondu à toutes les questions que vous avez eues à lui poser...

M. Burns: A aucune.

M. Levesque: ... et qu'il poursuit son travail avec l'efficacité et l'objectivité qu'on lui connaît. Je ne veux pas ajouter d'autre chose ici.

M. Burns: Adopté.

Le Président (M. Pilote): Adopté.

M. Burns: En demandant, cependant, à votre collègue, membre du Cabinet, au Solliciteur général, s'il est possible qu'il nous donne des réponses le plus rapidement possible, quitte à lui rappeler demain à la période des questions, si nous sommes tous éveillés, qu'il nous doit un certain nombre de réponses sur un certain nombre de choses. D'ailleurs, j'aurais bien le goût de recommencer l'étude des crédits du Solliciteur général.

M. Levesque: Je vais lui dire cela. M. Burns: Vous allez lui dire cela.

Le Président (M. Pilote): Programme 9, contrôle des permis d'alcool.

Commission de contrôle des permis d'alcool

M. Burns: Au programme 9, je n'ai que quelques questions à poser que, sans doute, le ministre, avec les conseils de M. le juge Trahan, va nous donner. Relativement aux amendements récents, et quand je parle d'amendements récents, je parle des amendements qui ont été adoptés depuis un an ou un an et demi, sauf erreur, c'est à peu près à cette période que nous avons adopté un certain nombre d'amendements, peut-être plus, et qui avaient pour but de faciliter l'aspect administratif de l'octroi de permis en matière de contrôle d'alcool.

J'aimerais savoir, soit de la part du juge Trahan ou de la part du ministre, si les amendements qui ont été adoptés, qui ont été longtemps mis en veilleuse avant d'être proclamés, on commence effectivement à en ressentir les effets dans les demandes plus particulièrement de transfert. On sait que c'est l'une des choses qui ont toujours préoccupé les commerçants qui exploitent des épiceries, des bars ou, je ne sais pas, des bars-salons, des restaurants, avec permis d'alcool, un des problèmes qui a toujours retardé un certain nombre de transactions et, très souvent, causé des dommages à des vendeurs. J'ai surtout eu connaissance du cas d'un certain nombre de petits dépanneurs qui étaient obligés de revenir sur des promesses d'achat et des promesses de vente qui étaient retardées quant à leur mise en application à cause du délai dans le transfert du permis de vente de bière. Est-ce qu'effectivement cette situation a été corrigée? Est-ce que maintenant cela prend plus que six, sept ou huit mois pour obtenir un transfert de permis de vente de bière ou de permis de vente d'alcool, même lorsque des problèmes ne se posent pas véritablement dans certains dossiers?

Quand je demande si ça s'est amélioré je veux dire que ça s'est sûrement amélioré par le texte de loi, parce que, comme tel, le transfert de permis n'existait pas auparavant. Je pense que la commission de contrôle, à juste titre, était obligée de refuser des demandes de transfert, malgré une certaine largesse de vue de sa part, mais maintenant que le transfert de permis par l'entremise d'un actionnaire à un autre est possible, je pense que cela a pu faciliter les choses. Est-ce qu'effectivement on sent, à la Commission de contrôle des permis d'alcool, une modification de la situation actuellement? Est-ce que ça s'améliore?

M. Levesque: Je peux vous dire qu'en général, pour les ventes, nous sommes rendus au 25 avril 1976, ça veut dire que les demandes entrées le 25 avril sont en train d'être étudiées, et que pour les ventes d'épiceries, nous sommes rendus au mois de mai. Quand je suis arrivé à la commission, il y avait auparavant des transferts. Ces transferts sont disparus avec la nouvelle loi. Pour ma part,

j'ai suggéré qu'on les ramène. Nous avons discuté avec la Chambre des notaires. Nous essayons de trouver un modus vivendi qui pourrait nous aider à améliorer cette situation. Nous en avons discuté à de nombreuses reprises et nous en discutons encore. Nous ferons très prochainement des suggestions au ministre à ce sujet.

M. Burns: Vous me précédez, M. le juge, sur ma deuxième question.

M. Levesque: J'ai toujours été comme ça.

M. Burns: Est-ce que vous envisagez... Il a toujours été vite, le juge!

Est-ce que vous envisagez des suggestions à l'endroit du ministère de la Justice, en vue d'une éventuelle loi ou d'éventuels amendements à votre loi?

M. Levesque: Encore une fois, on vous précède, parce qu'on a déjà transmis un projet d'amendements qui sont absolument nécessaires pour le moment, et nous en ferons certainement d'autres à l'automne, parce qu'une loi est bonne pour autant qu'on la renouvelle.

Quand on a vécu pendant un certain temps avec une loi, on s'aperçoit des failles qu'il y a dedans. On fait des suggestions. On vous demande de nous aider à trouver des suggestions pour pouvoir régler vos problèmes, parce que vos problèmes, ce sont les nôtres. Si vous nous aidez, on va les régler.

M. Burns: Est-ce que le ministre de la Justice a objection à nous livrer, même si ce n'était qu'en résumé, l'essence des suggestions de la commission de contrôle?

M. Levesque: Non, nous n'avons pas encore terminé l'étude des recommandations faites par la commission, et je préférerais attendre au moment où je déposerai les amendements.

M. Burns: Est-ce que, lorsque les études seront complétées, et même avant l'adoption ou la proposition du projet de loi, le ministre est d'accord à faire part à l'Opposition des suggestions de la commission?

M. Levesque: Avant?

M. Burns: Avant l'adoption et avant le dépôt du projet de loi. Une fois que vous aurez complété votre étude, parce que la réponse que vous venez de me donner indique que vous ne voulez pas nous en faire part, parce que vous n'avez pas...

M. Levesque: Ordinairement, tous les députés reçoivent l'information en même temps et normalement...

M. Burns: Je parle de l'Opposition, mais j'imagine que les députés ministériels aussi. Je n'ai pas d'objection à ce que cela soit à tous les députés.

M. Levesque: ... cela se fait au moment du dépôt du projet de loi en Chambre et quelquefois, on peut en discuter avant aussi. Je n'ai pas d'objection, à un certain moment, à ce que ceux qui sont intéressés à cette question m'en parlent. Je suis très ouvert.

Comme il s'agit simplement d'augmenter l'efficacité de la commission le plus possible, de diminuer les délais et d'enlever les procédures inutiles et taxatoires — c'est ce qu'on veut dans le fond — et s'il y a des embêtements qui sont causés aux citoyens, qu'on essaie de les enlever et que, par contre, où un contrôle est nécessaire, bien, qu'il soit présent. Mais, qu'il y ait le moins d'embêtements inutiles créés à ceux qui demandent d'être entendus. Il n'y a pas de secret là-dedans.

Le Président (M. Pilote): Le député de L'Assomption.

M. Perreault: J'aimerais poser une question relativement à la mainmise de la pègre sur les différents permis de boisson, comme les salons-bars. La situation s'améliore-t-elle sur le contrôle de ceux qu'on appelle les "front men" qui agissent pour la pègre ou la situation se détériore-t-elle?

M. Levesque: Je pense que vous seriez mieux de poser la question au représentant du ministère public parce que nous entendons les preuves qui nous sont présentées par le procureur du ministère public et nous décidons suivant la preuve qui est faite devant nous. Chaque fois qu'une cause nous est apportée et qu'on nous prouve la présence de la pègre, nous travaillons à la faire disparaître, mais, seulement, nous n'allons pas chercher les causes. Nous contrôlons. Il faut que ce soit le ministère public qui nous les amène. Alors, il y a son représentant et lui nous apporte la preuve et quand la preuve est bonne, avec notre conscience et notre intelligence, on essaie de...

M. Perreault: Le ministère public fait-il des enquêtes assez profondes là-dessus?

M. Levesque: Nous pouvons vous dire que nous siégeons tous les jours. Nous avons été une des première cours de justice à siéger à 9 h 30 le matin et nous passons, en moyenne, de sept à huit causes par jour, régulièrement. Le ministère public a introduit un nouveau système. Chaque fois que quelqu'un commet une offense, la copie de l'offense est envoyée à Montréal ainsi qu'à Québec et nous vérifions, c'est-à-dire que le ministère public vérifie avec notre service d'enquêteurs et d'inspecteurs s'il y a lieu de porter une plainte. S'il y a lieu de porter une plainte en vertu de l'article 61, on envoie un avis de convocation et on entend la plainte.

Seulement, c'est encore comme partout ailleurs. Il y a beaucoup de gens qui parlent, mais il y en a peu qui veulent agir. Quand on veut avoir la preuve, ils ne veulent jamais venir devant nous et même lorsqu'ils se présentent, ils ont toujours des faux-fuyants.

M. Perreault: Ce qui m'inquiète surtout lorsque le ministère public présente sa cause est la connaissance du sujet qu'il achète d'un autre pour voir les intérêts qu'il y a en arrière. On a eu la CECO qui a révélé beaucoup de choses, mais il me semble que nous ne sommes pas beaucoup plus avancés que nous ne l'étions.

M. Levesque: Alors, je peux lancer un appel à vous tous. Lorsque vous connaissez quelque chose, appelez M. Luc Gervais qui est le directeur du service d'enquête et d'inspection qui va voir à faire faire une enquête et s'il y a quelque chose, il va faire envoyer un avis de convocation. Souvent, on reçoit des lettres anonymes et on essaie de chercher le fond de l'histoire, mais on n'est jamais capable parce que personne ne veut parler.

M. Perreault: Quand c'est dans nos régions et que c'est un inconnu qui arrive et qui achète l'affaire, on n'a rien à dire.

M. Levesque: Oui. En vertu de la loi, vous pouvez tous et chacun d'entre vous, vous y opposer.

M. Perreault: Pour s'y opposer, il faut avoir des raisons.

M. Levesque: Vous dites que ce sont des gens de la pègre, alors vous devez avoir des informations à cet effet.

M. Perreault: Ecoutez. Entre prouver et...

M. Levesque: Là-dessus, je pense qu'on peut mentionner l'existence de plusieurs escouades régionales, alcool et moralité à la Sûreté du Québec, qui s'occupent particulièrement de la surveillance des établissements qui sont détenteurs de permis de la Commission de contrôle des permis d'alcool, de sorte que si vous aviez des motifs de croire qu'un futur acquéreur d'un établissement pourrait être issu du milieu de la pègre, je pense qu'il serait approprié de s'adresser à ces escouades régionales, alcool et moralité qui verront sûrement à faire enquête.

J'ai déjà reçu un certain nombre de plaintes, à un moment donné, je les ai refilées à ces escouades et, dans les cas dont j'ai eu connaissance, il y a eu un travail efficace qui s'est effectué.

M. Burns: Une dernière question là-dessus, M. le Président. Nous avons adopté une loi enlevant de la juridiction ou extrayant de la juridiction de la Commission de contrôle des permis d'alcool des permis d'alcool à être décernés sur les lieux où se tiendront les jeux de la XXIe Olympiade.

M. Levesque: On ne les a pas enlevés.

M. Burns: Non.

M. Levesque: Non.

M. Burns: C'est à la commission...

M. Levesque: La commission continue. On a permis à la commission de...

M. Burns: D'en décerner pour des fins très spécifiques.

M. Levesque: Nous exigeons, comme c'était pour Terre des Hommes... il y a un contrat qui a été passé par le COJO ou la RIO. S'il n'y a pas de contrat, on ne donne pas de permis. Il faut absolument que la personne soit autorisée.

M. Burns: Mais c'est automatique, ou presque.

M. Levesque: C'est automatique; règle générale, on fait faire une enquête et on demande toujours la fiche signalétique de toute personne qui fait une demande de permis. On fait la même chose pour ces gens-là.

M. Burns: Vous continuez à détenir la juridiction là-dessus, mais c'est sur recommandation du COJO.

M. Levesque: Comme pour Terre des Hommes.

M. Burns: Est-ce qu'il y a moyen de nous déposer, ce n'est peut-être pas possible ce soir, mais les jours qui viennent, la liste des permis qui ont été accordés en vue de la XXIe Olympiade avec le nom du détenteur, le nom des compagnies, s'il y a lieu? Est-ce que c'est possible d'ici quelques jours, d'ici deux jours?

M. Levesque: Certainement. J'ai cela. Demain matin, je peux envoyer cela à M. Normand. D'accord?

M. Burns: D'accord. Programme 9...

Le Président (M. Pilote): Le député de Beauce.

M. Sylvain: J'aurais une question. Avant de la poser, j'aimerais bien ici remercier le juge Trahan de s'être rendu dans la Beauce rencontrer tous les hôteliers, pour avoir humanisé et rendu un peu plus accessibles les services de la commission à des gens éloignés. Quant à moi, je vous incite à le faire dans d'autres régions, parce que cela a eu de très bons effets vis-à-vis des hôteliers.

D'autre part, même si, à cette réunion, vous avez soumis le problème des permis de réunion face aux hôteliers, je reviendrai sur le problème de l'émission des permis de réunion. Il m'avait semblé, avant l'adoption de la loi 21 qui modifiait l'ancienne Loi de la commission de contrôle des permis, que les clubs ou associations qui pouvaient requérir ou faire des demandes de permis de réunions étaient des clubs qu'on appelait bona fide. La réglementation qui a découlé de la loi a rendu très sévère ou moins accessible pour les clubs ou associations le genre de permis de réunion en y

donnant trois fins, je pense à l'éducation, etc., et en demandant que le club ou l'association ait une charte relevant de la troisième partie de la Loi des compagnies. Je voudrais soulever deux cas. Par exemple, un club d'éleveurs de Hereford et des sociétés d'élevage ou des clubs d'éleveurs Ayrshire, qui existent dans des comtés ruraux depuis 80 ans, qui ont toujours été des associations bona fide et qui avaient l'habitude d'avoir, une fois par année, la réunion annuelle de peut-être 100 ou 200 éleveurs, ces permis de réunion... Aujourd'hui, à cause des fins qui sont mentionnées au niveau du règlement, ils ne peuvent, d'aucune façon, le recevoir, même s'ils étaient incorporés... D'après les réponses qu'ils ont eues, ils ne correspondaient pas aux fins même édictées dans le règlement, par exemple éducation, etc. Est-ce que vous ne voyez pas un assouplissement à intervenir au niveau du règlement ou que d'autres fins poursuivies par les clubs ou associations soient mentionnées au règlement découlant de la Loi de la commission de contrôle de permis?

M. Levesque: Nous sommes prêts à accepter tout ce que vous voudrez, c'est vous qui faites notre loi, c'est vous qui faites nos règlements. Nous les appliquons après. Dans ce cas, il faut que ce soient des clubs ou des associations sans but lucratif. Le grand malheur, c'est que les trois quarts de ces associations sont à but lucratif. On se sert de notre permis de réunion pour faire des profits alors que la loi nous dit qu'on ne doit pas avoir de profit avec ces réunions. Je pense bien que, dans des cas spéciaux comme celui-là, un permis ne doit pas être refusé.

M. Sylvain: C'est ce qui me surprenait et je suis intervenu moi-même, ça ne me gêne pas de le dire, au niveau des administrateurs à Québec. Cela me surprenait parce qu'il me semble que des sociétés d'élevage, il y a des fins éducatives, pour les jeunes agriculteurs et cultivateurs...

M. Perreault: ... vaches.

M. Sylvain: ... mais deux fois de suite, à peu près durant le même mois ou la même période, on a refusé, évidemment, il y avait les deux questions mises en cause, il n'y avait pas de charte et ça ne correspondait pas non plus à des frais, ce qui était surprenant. Je le dis à titre de suggestion, ou à titre de commentaire, de regarder cet aspect pour ouvrir un peu plus les fins pour lesquelles un permis pourrait être demandé sans tremper de l'autre côté... Parce que disons qu'on a régularisé une situation vis-à-vis des hôteliers qui trouvaient que les permis étaient délivrés en nombre trop grand.

M. Levesque: Quand des situations comme celles-là se produisent, la meilleure manière de procéder, c'est de nous écrire une lettre et nous expliquer pourquoi vous croyez que le permis aurait dû être accordé, on va l'étudier, on va vous donner une réponse bonne ou mauvaise, mais on va vous en donner une.

Adopté.

Le Président (M. Pilote): Le programme 9 est adopté?

M. Burns: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Programme 10: Contentieux général du gouvernement.

Contentieux général

M. Burns: Là-dessus, M. le Président, j'ai une simple question à laquelle peut-être le ministre ne peut pas me répondre immédiatement. Je lui demanderais de nous déposer la liste cumulative des mandats qui sont confiés à des avocats de pratique privée avec le type de cause, les montants impliqués, tous les honoraires qui en résultent, au cours de l'exercice financier précédent. Je pense qu'il est possible pour le ministre de nous donner ce renseignement. Je comprends qu'il n'est peut-être pas en mesure de nous le donner dès ce soir, mais je comprendrai d'autre part que cette liste puisse nous être déposée dans les heures qui viennent.

M. Levesque: Je ne pense pas que ce soit l'habitude du ministère de déposer les listes des procureurs?

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Je sais bien que la préparation de tels documents serait très longue et exigerait un personnel considérable puisqu'il nous faudrait déterrer chaque mandat civil et pénal. C'est une...

M. Burns: Je vais vous poser la même question au niveau pénal qui arrive au programme 12, au contentieux pénal. Si vous voulez les réunir ensemble, je n'ai pas d'objection, mais apparemment au ministère de la Justice, on fonctionne dans ces cas par ordinateur alors ça ne devrait pas être tellement difficile d'obtenir ces renseignements.

M. Levesque: On ne fonctionne pas par ordinateur pour les mandats.

M. Burns: C'est pourtant ce que l'ex-député de Johnson nous avait dit.

M. Levesque: L'ex-député de Johnson!

M. Burns: M. Boutin, Boutin.

M. Levesque: Pour le Code de la route.

M. Burns: Pour le Code de la route, c'est par ordinateur, parce qu'il continue à en recevoir, pauvre gars.

M. Levesque: Pour le Code de la route.

M. Burns: II disait que ça n'était pas sa faute, c'était la faute de l'ordinateur.

M. Levesque: C'est exact pour le Code de la route.

M. Burns: Alors dans le cas des autres mandats qui ont été confiés, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de nous donner ça à très court terme?

L'année dernière, M. le ministre, pour votre information, on nous a déposé cette liste, c'était une liste mécanographique. A la même question, cela nous avait été déposé. Cela me surprendrait...

M. Levesque: On peut donner le Code de la route.

M. Burns: Les causes du contentieux civil et criminel, ce n'est pas possible?

M. Levesque: On dit que c'est mécanographie depuis 1970, mais par groupes.

M. Burns: Vous voulez dire par groupes de cause, de types de cause?

M. Levesque: De types de cause.

M. Burns: C'est parfait, c'est exactement ce que je vous demande.

M. Levesque: On ne peut pas trouver... M. Burns: Juste pour comparer avec...

M. Levesque: Je ne peux pas, à ce moment-là, déterminer le mandat que chacun des avocats a reçu, sans aller voir dans chacun des dossiers.

M. Burns: Le type de cause va nous donner le type de mandat, si je vous comprends bien. Si, par exemple, il s'agit d'une action en dommages-intérêts contre l'Office des autoroutes, par exemple, et que votre ministère a désigné un avocat pour représenter l'Office des autoroutes, on va le voir à ce moment-là. C'est peut-être des cas plus évidents que cela, parce que là, on parle quand même d'un office...

M. Levesque: ... de termes très généraux, dans ce cas-là.

M. Burns: En fait, cela pourrait nous donner le type de cause, le montant des honoraires impliqués.

M. Levesque: Je vais voir ce qu'on peut faire. Je dois dire au député de Maisonneuve que s'il est intéressé à connaître les sommes gagnées, en honoraires, par avocat, il n'a qu'à prendre les comptes publics.

M. Burns: Je ne peux pas avoir là tous les renseignements. Dans les comptes publics, je n'aurai pas tous ces renseignements. Non.

M. Levesque: Pour les petits montants, ce serait difficile.

M. Burns: C'est cela. Alors, je n'aurai pas les cas de moins de $10 000?

M. Levesque: Non, c'est cela. M. Burns: C'est cela.

M. Levesque: J'ai devant moi les comptes publics 1974/75, par exemple, à la page 1-49, à l'article services professionnels. On a toute la liste des avocats.

M. Burns: Vous n'avez pas les montants, lorsqu'ils sont inférieurs à, je ne sais pas...

M. Levesque: C'est parce qu'ils sont inférieurs à $10 000.

M. Burns: Lorsqu'ils sont inférieurs à $10 000, on ne les a pas. Dieu sait qu'il y en a des mandats, et beaucoup, qui sont inférieurs à $10 000, même le total des mandats.

M. Levesque: Parlant des mandats, j'ai de petites nouvelles pour le député de Maisonneuve. J'ai fait vérifier la liste des gens dont il m'avait parlé.

M. Burns: Oui.

M. Levesque: Pour moi, c'était probablement une liste faite par un parti politique ou je ne sais pas quoi, mais ce qui arrive, c'est qu'il n'a pas été trop chanceux.

M. Burns: Non?

M. Levesque: Non. Il y avait 225 noms donnés par le député, suivant la liste que le député m'a fournie, en Chambre, et il n'y avait que 38 avocats parmi toute cette liste de 225 qui, en 1974, ont eu des mandats.

M. Burns: Mais c'est une liste de 1970 que je vous ai remise.

M. Levesque: Je comprends, mais ces gens-là...

M. Burns: Oui. Il y en a plusieurs d'ailleurs... M. Levesque: Je suis obligé...

M. Burns: Le ministre a remarqué qu'il y a même plusieurs de ces gens-là qui sont maintenant des juges.

M. Levesque: Quelques-uns.

M. Burns: Je ne m'attends pas... Si le ministre veut être honnête, il va faire une comparaison avec l'année 1970/71.

M. Levesque: J'ai obtenu 1974/75. Je n'ai pas eu l'année 1971; je l'attends. J'espère l'avoir également.

M. Burns: Oui. J'aimerais bien l'avoir.

M. Levesque: Je pourrais donner le renseignement prochainement au député.

M. Burns: D'accord.

M. Levesque: J'ai demandé le renseignement et je ne l'ai pas encore reçu. Ensuite, dans une procédure subséquente, le député de Maisonneuve m'avait apporté une lettre qui avait été écrite, à un moment donné, par un M. Bélanger, et adressée à un M. Geoffrion, si je me rappelle bien.

M. Burns: Oui, M. Jean Geoffrion.

M. Levesque: Relativement à Me Lengvari. Or, M. le Président, M. Lengvari n'a jamais eu de mandat du gouvernement du Québec. Je voulais simplement lui dire cela en passant. J'ai fait des recherches.

M. Burns: Est-ce que vous avez fait des recherches sur l'existence de cette liste? Qu'est-ce qu'on voulait dire lorsqu'on disait: Veuillez l'inscrire sur notre liste? Qu'est-ce que cela voulait dire? C'est d'ailleurs dans ce sens-là que j'ai déposé, auprès du ministre, une copie de cette lettre.

M. Levesque: Je ne fais que regarder les résultats. Je ne peux pas dire ce que M...

M. Burns: II ne faudrait quand même pas faire de l'ignorance crasse.

M. Levesque: Non, ce n'est pas de l'ignorance. J'ai vérifié au cas où il y aurait une relation entre ce que fait le ministère, dans son travail quotidien, et cette lettre qui aurait pu provenir de M. Bélanger et parvenir à M. Geoffrion.

Chose sûre, c'est que ce M. Lengvari qu'il soit sur une liste ou sur l'autre, n'a rien reçu comme mandat du gouvernement du Québec.

M. Burns: C'est possible, d'ailleurs je peux vous en citer des cas, je vais vous en citer d'autres si vous voulez.

M. Levesque: Ce n'est pas seulement cela, ce qui est véritablement la situation — je savais que, depuis que je suis au ministère, c'est cela que nous faisions — c'est que nous avons comme critère numéro 1 la compétence. Je le répète encore ce soir. Plusieurs avocats sont choisis pour des causes particulières, en raison de leur spécialité, etc. Toutes les causes importantes, autrement dit, sont prises de cette façon.

M. Burns: Mais, est-ce que...

M. Levesque: Pour des causes où il n'y a pas tellement de compétence particulière, cela prend des gens compétents, mais non pas nécessairement spécialisés dans un domaine particulier, alors, une fois que nous avons déterminé la compétence égale, s'il y a deux, trois ou quatre avocats, à ce moment, on peut avoir d'autres considérations, si bien que...

M. Burns: Comme quoi?

M. Levesque: Par exemple, prenons un jeune avocat qui commence, qui est intelligent, qui est compétent et qui a besoin d'un petit coup de pouce, ce n'est pas mauvais de lui donner cela, de lui confier, ce n'est pas mauvais non plus...

M. Burns: S'il était très actif dans les jeunesses libérales. Cela ne nuit pas.

M. Levesque: De lui confier quelques mandats pour le Code de la route, je n'ai pas d'objection a cela.

M. Burns: Cela veut dire que le critère de la compétence n'est pas exclusivement celui que vous...

M. Levesque: C'est le critère numéro 1, je le répète et je l'ai toujours dit.

M. Burns: Vous allez admettre, M. le ministre de la Justice, vous-même qui êtes avocat, que le critère compétence, mis à part— là, ce n'est pas une question de compétence, c'est une question de spécialisation— le phénomène spécialisation, comme tel ne se pose à peu près pas, sauf dans les cas d'extrême limite, si un avocat a été admis au Barreau, quand je vous dis, sauf dans des cas d'extrême limite.

M. Levesque: Non, il a également l'université.

M. Burns: II y a évidemment des avocats qui sont complètement pourris, comme il y a des avocats superbrillants. C'est bien sûr, comme dans n'importe quelle société, vous avez...

M. Levesque: Je sais que, lorsque j'ai posé des questions à ce sujet au ministère, on m'a dit que cela arrivait souvent, non pas souvent, mais de temps en temps qu'on indiquait un avocat et on disait: Lui, fini. Son rendement n'est pas assez bon, fini.

M. Burns: D'accord. Mais dans une...

M. Levesque: Ils ne se sont pas demandés s'il était un gars, comme dirait le député de Maisonneuve, de la jeunesse libérale. "Out". Le critère numéro 1, partout au ministère, c'est la compétence dans les personnes à qui on confie des mandats.

M. Burns: Je répète ce que je disais tout à l'heure, mis à part le phénomène—je veux bien être compris— spécialisation qui est un autre facteur que la compétence qui est un...

M. Levesque: C'est là où sont les gros montants.

M. Burns: ... facteur assez...

M. Levesque: C'est dans les causes où il y a la

spécialisation, une compétence particulière que se retrouvent les mandats importants au point de vue pécuniaire. Les autres mandats sont des mandats qui sont peut-être de $15 ou $20 la cause, quelque chose comme cela. C'est le volume, à ce moment, qui peut devenir intéressant. C'est sûrement une cause isolée de ce genre.

M. Burns: Le ministre a-t-il fait enquête, en plus de l'enquête qu'il me mentionne, sur le fait qu'une certaine liste existait et circulait peut-être dans un parti politique et que cette liste faisait référence à des travaux qui avaient ou pouvaient être faits ou devraient être faits pour le gouvernement ou un de ses organismes? Est-ce que le ministre a enquêté sur cela?

M. Levesque: Non, je n'ai pas besoin d'enquêteur. Tous les partis politiques tiennent compte des efforts fournis par les militants au cours d'une élection. Je m'imagine bien que le Parti québécois également sait quels avocats l'ont aidé et tout cela. D'autre part, il faut dire que, d'après ce que je sais de la vie politique, ce ne sont pas les avocats qui sont les grands souscripteurs. Je pense que, si on faisait une liste des souscripteurs dans le Parti québécois, probablement qu'on s'apercevrait, comme dans le Parti libéral, qu'ils sont peut-être assez bas dans la liste.

M. Burns: C'est-à-dire qu'on a tellement de souscripteurs que même les avocats y sont perdus dans la foule.

M. Levesque: Mais, ce qu'on évalue...

M. Burns: Quand vous êtes rendus avec 50 000 souscripteurs dans une campagne de financement, on ne remarque pas si c'est un avocat ou pas. On remarque si c'est un individu au lieu d'être une compagnie.

M. Levesque: Je disais que le travail d'un avocat, sans doute, c'est le travail légal qu'il fait au cours d'une élection pour s'assurer que les pé-quistes ne jouent pas trop de tours dans les bureaux de scrutin. C'est cela le travail d'un avocat.

M. Tardif: II y a beaucoup de travail à faire.

M. Levesque: II a à renseigner les gens sur la loi électorale.

M. Burns: Si on savait comme nos avocats, dans une campagne électorale — on a deux expériences très précises, c'est-à-dire deux élections — ont beaucoup plus de travail à surveiller les gens du Parti libéral qu'à indiquer quel travail doit être fait par nos représentants dans les bureaux de scrutin.

M. Levesque: Disons que c'est réciproque.

M. Burns: Mais, je vous signale, M. le ministre, parce que je l'ai envoyé chercher, que l'année dernière, le 8 juillet 1975, nous avions obtenu de la part du ministre de la Justice du temps, les mandats de rapports cumulatifs à jour pour chacun des avocats qui ont agi. Je vais vous la lire, il s'agit d'une liste mécanographique où on voit le numéro du dossier, la nature du dossier, l'organisme qui est basé selon un certain...

M. Levesque: Est-ce que le député voudrait me remettre cela? On va demander la même chose, on voudrait bien comprendre...

M. Burns: Cela s'intitule "Système des mandats, rapports cumulatifs à date", en date du 12 juin 1975, qui a été remis à mon collègue de Chicoutimi en date du 8 juillet 1975, à la suite d'une question qu'il avait posée au ministre.

M. Levesque: Madame ira ensuite regarder ce que vous avez pour en faire une pareille à jour.

M. Burns: A jour, pour cette année. On a pour chacun des districts judiciaires, le nom de l'avocat, le type de la cause.

M. Levesque: Si ces renseignements ont pu être donnés l'an passé, je ne vois pas pourquoi ils ne pourraient pas être donnés cette année.

M. Burns: Cela m'apparaît logique. Je poserais cette question à nouveau cette année, quant au contentieux civil et au contentieux criminel. Cela réglerait ma question concernant le contentieux civil. Je suis prêt à adopter le programme 10.

Le Président (M. Pilote): Le programme 10 est adopté. Le programme 11.

Conciliation entre locataires et propriétaires

M. Burns: Le programme 11. Je n'ai pas de très nombreuses questions. J'en ai une seule. Est-ce que le ministre de la Justice peut nous donner, même si ce n'était qu'en termes de proportion, l'augmentation ou la diminution — je pense bien que c'est plutôt une augmentation — des recours qui ont été, au cours de l'année précédente adressés — ou des requêtes ou des contestations, tant du côté du locataire que du côté du locateur — à la commission. Tant au niveau des pures et simples demandes de prolongation ou, si c'est le cas, des pures et simples demandes d'annulation ou encore...

M. Levesque: L'an dernier 50 000, l'ordre de grandeur; cette année, 65 000, dans toute la province.

M. Burns: Dans toute la province.

M. Levesque: Disons donc que Montréal a surtout le gâteau.

M. Burns: ... à Montréal.

M. Levesque: Je pense que cette année, Mon-

tréal représentera 30% d'augmentation, mais dans le restant de la province, on expérimentera pas plus que probablement 5% ou 10%.

M. Burns: Dans les cas d'appel, M. le juge, peut-on...

M. Levesque: Les cas d'appel représentent à peu près 16% ou 17%. Mais, vu que les causes sont entendues assez tard, je suis pris avant d'entendre des appels beaucoup trop tard. Je pense que c'est une affluence épouvantable, quand on pense qu'on a entendu 50 000 causes, on est mal pris, on sait qu'on aimerait mieux... Je voudrais faire une petite parenthèse. Tantôt j'ai entendu des gens se vanter qu'on siégeait le matin et l'après-midi, je voudrais dire qu'on siège matin, après-midi et soir. J'avais hâte de venir m'asseoir ici pour que le ministre me donne la chance de dire que je siégeais le soir.

M. Burns: C'est pour cela que je ne pouvais pas m'empêcher de vous donner la chance de venir nous dire cela.

M. Levesque: Vous êtes bien aimable. Tout le monde est tellement généreux.

M. Burns: J'ai eu moi-même, avec grande satisfaction, à quelques reprises recours à la Régie des loyers comme locataire. Je l'ai noté d'ailleurs — et je suis convaincu que ce n'était pas un cas spécial, parce que j'étais avec un autre groupe de locataires — je pense qu'on peut admirer l'amélioration qui s'est installée depuis quelques années dans l'administration de la Loi favorisant la conciliation entre le locataire et le locateur.

M. Levesque: C'est de valeur qu'on ne soit qu'un petit groupe ici.

M. Burns: Pardon?

M. Levesque: J'aimerais vous entendre dire cela plus fort et à plus de monde.

M. Burns: Je l'ai dit. Ce n'est pas la première fois que je le dis, d'ailleurs.

M. Levesque: Ce sera certes dans le journal des Débats et 2400...

M. Burns: D'ailleurs, je vous l'ai dit quand je vous ai rencontré au palais de justice.

M. Levesque: Je dois vous dire que je l'ai entendu, mais seulement de personne à personne, et, vous savez, cela se répand tellement peu.

M. Burns: Je n'ai aucune crainte de le dire publiquement. Je l'ai dit, d'ailleurs, en Chambre, lorsque nous avons examiné les amendements à la loi, tout en faisant une critique, non pas à votre endroit, mais à l'endroit du ministre de la Justice qui, d'année en année, nous ressasse la même sauce.

M. Levesque: J'étais présent.

M. Burns: II nous fait changer le millésime et il essaie de nous faire avaler cela avec quelques petites modifications ici et là. Je souhaite toujours le jour où on créera — non pas que je ne suis pas satisfait de ce que nous avons actuellement — un véritable tribunal des loyers, comme c'était d'ailleurs le projet du ministre de la Justice précédent. J'espère que si jamais on crée ce tribunal, il aura autant d'efficacité et au moins aura une permanence claire et nette, bien précise que, malheureusement, actuellement la Régie des loyers ou la Commission des loyers n'a pas. Non, je suis...

Le Président (M. Pilote): Le programme 11 est-il adopté?

M. Burns: Je suis prêt à l'adopter, tout en demandant, avant de l'adopter, au ministre s'il a l'intention, encore une fois, cette année, de nous revenir au mois de décembre avec un changement de millésime de cette fameuse loi.

M. Levesque: Ce n'est sûrement pas désiré de la part de celui qui vous répond à ce moment-ci.

Contentieux pénal

Le Président (M. Pilote): Adopté. Le programme 12. Contentieux pénal.

M. Burns: Pour lecontentieux pénal, je pose la même question de la liste que j'ai posée relativement au programme 10.

M. Levesque: C'est celle-là dont on a parlé.

M. Burns: Est-ce qu'il sera possible d'avoir en termes de pourcentage le nombre de causes confiées à des avocats de pratique privée en matière pénale par des avocats du ministère? Je m'excuse, à cette heure-ci, je commence à me mêler dans mes mots, en termes de pourcentage, le nombre de causes confiées à des avocats de pratique privée par rapport au nombre de causes dans une période donnée confiées à des avocats du ministère. Est-ce possible d'avoir cela en termes de pourcentage? Donc, une espèce d'approximation. Je ne vous demanderai un chiffre très précis, mais est-on capable d'évaluer la proportion de l'un à l'autre?

M. Levesque: C'est seulement au ministère du Revenu que des avocats plaident des causes pénales. En dehors de cela...

M. Burns: Les avocats du contentieux criminel, chez vous, ne plaident pas de cause.

M. Levesque: Je ne parle pas du criminel, on parle du pénal.

M. Burns: Du pénal, oui, excusez. M. Levesque: Non.

M. Burns: C'est criminel.

M. Levesque: C'est la pratique privée.

M. Bums: Cela relève du solliciteur, l'aspect des procureurs de la couronne, c'est ce que vous voulez dire.

M. Levesque: Oui.

M. Burns: Je ne parle pas de cela. Des avocats du contentieux pénal au ministère de la Justice, il n'y en a pas qui plaident.

M. Levesque: Ce sont presque tous des avocats de pratique privée.

M. Burns: Tous de pratique privée.

M. Levesque: On a quelques permanents à la Cour du bien-être social, à Montréal, Québec et Trois-Rivières. En dehors de cela, ce sont des mandats confiés à...

Le Président (M. Pilote): L'article 12 est-il adopté?

M. Burns: L'article 12 est adopté.

Le Président (M. Pilote): Le programme 13, contentieux criminel. Excusez-moi. Pour l'intelligence du journal des Débats, les programmes, éléments, supercatégories et catégories du ministère de la Justice sont-ils adoptés?

M. Levesque: Adopté.

M. Burns: Adopté. Comme tout le monde le sait, on vient d'adopter les programmes 1 à 12, mais les programme 13 à 19 étaient déjà. 19 ou 18?

M. Levesque: De 13 à la fin.

M. Burns:... étaient adoptés avec le Solliciteur général. Je suis prêt, si vous voulez mettre le dossier clair que nous adoptions...

Le Président (M. Pilote): Les programmes du ministère de la Justice, de 1 à 19 inclusivement, sont-ils adoptés?

M. Burns: Adopté.

Le Président (M. Pilote): Je vous remercie, messieurs.

M. Levesque: Je vous remercie M. le Président, je remercie le député de Maisonneuve, tous les membres de la commission d'une façon particulière, ce soir, pour cette veillée qu'on a accepté de faire et tous ceux qui nous accompagnent ce soir, autour de cette table et qui nous ont suivis au cours de notre périple. A tous, un sincère merci.

Le Président (M. Pilote): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 2 h 46)

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