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Commission permanente de la justice
Etude des crédits du ministère de la
Justice
Séance du lundi 28 juin 1976 (Vingt heures vingt-six minutes)
M. Pilote (Président de la commission permanente de la
justice):A l'ordre, messieurs!
La commission de la Justice s'est réunie aujourd'hui pour
l'étude des crédits du ministère de la Justice. Sont
membres de cette commission M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare
(Johnson); M. Bienvenue (Crémazie) est remplacé par M.
Beau-regard (Gouin); M. Burns (Maisonneuve); M. Ciaccia (Mont-Royal) est
remplacé par M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue); M.
Choquette (Outremont), M. Desjardins (Louis-Hébert); M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par M. Fortier (Gaspé); M.
Levesque (Bonaventure); M. Pagé (Portneuf) est remplacé par M.
Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Perreault (L'Assomption), M. Samson
(Rouyn-Noranda), M. Springate (Sainte-Anne), M. Sylvain (Beauce-Nord), M.
Tardif (Anjou).
Il faudrait nommer un rapporteur de cette commission. M. Tardif
d'Anjou.
M. Tardif: II va voter contre.
M. Burns: Je demande le vote.
M. Levesque: II y a déjà un rapporteur.
Le Président (M. Pilote): II y a déjà un
rapporteur.
Une Voix: Si vous voulez en nommer un autre, cela m'est bien
égal.
M. Burns: Je propose le député de Sainte-Anne.
M. Springate: Je suis déjà rapporteur.
Le Président (M. Pilote): II est déjà
rapporteur.
M. Burns: II est déjà rapporteur.
M. Levesque: On a déjà neuf heures de fait avec
lui. C'est d'accord.
M. Burns: C'est bien mieux d'ailleurs. Bien mieux.
Le Président (M. Pilote): La parole est au ministre de la
Justice.
Remarques préliminaires
M. Levesque: Monsieur le Président, dans un premier temps,
j'aimerais préciser les programmes qui relèvent de mon
autorité à titre de ministre de la Justice. Ces programmes se
répartissent en sept secteurs et douze programmes tels
qu'indiqués aux pages 16.1 et 16.2 du livre des crédits pour
l'année financière 1976/77. Le programme 1, Fonctionnement du
système judiciaire, comprend le salaire des juges, c'est à
l'ordre du jour, et les dépenses de fonctionnement des cours de justice
telles que Cour supérieure, Cour des sessions de la paix, Cour
provinciale, Cour de bien-être social et les Cours d'accès
à la justice ainsi que les budgets du Tribunal des transports et du
Tribunal de l'expropriation.
Le programme 3, Gestion interne et soutien, comprend les budgets de
fonctionnement de mon cabinet et celui du sous-ministre, les services de la
recherche et de l'information, du comité de la protection de la
jeunesse, du bureau d'administration de la Loi des huissiers et du service de
consultation et d'assistance en toxicomanie. Ces budgets de fonctionnement sont
regroupés à l'intérieur de l'élément 1,
Direction du programme 3, Gestion interne et soutien.
Les autres éléments du programme contiennent la gestion du
personnel, la Direction de l'équipement, la gestion financière,
la Direction des systèmes de gestion et l'Office de révision du
Code civil.
Le programme 4, Garde des prévenus et des détenus,
comprend les budgets de fonctionnement de nos établissements de
détention.
Le programme 6, Aide juridique et financière, comprend le budget
de fonctionnement de l'aide juridique et du Service d'indemnisation des
victimes d'actes criminels.
Le programme 8, Contrôle des jeux de hasard et des courses, est
sous la responsabilité du président de la Régie des
loteries et courses du Québec.
Le programme 9, Contrôle des permis d'alcool, est sous la
responsabilité du président de la Commission de contrôle
des permis d'alcool.
Le programme 11, Conciliation entre locataires et propriétaires,
est sous la responsabilité du président de la Commission des
loyers.
Les programmes 10 et 12 comprennent le contentieux général
du gouvernement et le contentieux pénal qui sont sous la
responsabilité du sous-ministre associé à la Direction
générale des affaires civiles et pénales.
Lors de l'étude des crédits, au niveau des programmes, il
me fera plaisir de vous fournir de plus amples renseignements concernant les
fonctions et attributions des responsables de ces programmes.
Les crédits des programmes 1 à 12 s'établissent
à $144 513 600. Les crédits du secteur des institutions
judiciaires, qui comprend les programmes 1, 2 et 3, et le secteur des
institutions pénales, le programme 4, se totalisent à $87 968
100, soit 60,9% du total des crédits des programmes qui relèvent
de ma juridiction. Les crédits du secteur de la réadaptation
sociale, qui comprend le programme 5, Réinsertion sociale des
délinquants, et le programme 6, Aide juridique et financière, se
totalisent à $29 474 900, soit
20,4% du total des crédits des programmes 1 à 12.
En fait, à l'examen du livre des crédits, on constate que
les programmes de ces trois secteurs, soit les institutions judiciaires, les
institutions pénales et la réadaptation sociale,
représentent 81,3% des crédits des programmes 1 à 12
inclusivement et 75,9% des effectifs. Le poste Traitements se totalise à
$96 263 100, soit 66,6% du total des crédits. Les effectifs inscrits au
livre des crédits de 1976/77, pour les programmes 1 à 12,
s'établissent à 7907 postes. Des effectifs additionnels de 238
postes ont été obtenus pour la mise en application de nouvelles
lois ou la création de nouveaux services tels le Comité de la
protection de la jeunesse, le Bureau d'administration de la Loi des huissiers,
la mise en application des titres II et III de la Loi du Tribunal de
l'expropriation, le personnel de soutien des juges. Des postes additionnels ont
été obtenus en vue de répondre à l'augmentation du
volume des services au sein des cours de justice à la Direction des
affaires civiles et pénales, à la Direction des
établissements de détention et les services de soutien à
l'administration.
Les crédits de $144 513 600 pour l'année 1976/77, pour ces
programmes 1 à 12, qui sont soumis à l'approbation de cette
commission parlementaire représentent une augmentation de $13 189 900 ou
10% du budget modifié de $131 323 700 pour l'année 1975/76.
Au chapitre des augmentations budgétaires, les crédits du
programme Aide juridique passent de $18 057 100 à $21 414 800, soit une
augmentation de $3 357 700, ce qui représente un taux de croissance de
19%.
Les crédits du programme 11, Conciliation entre locataires et
propriétaires passe de $3 794 500 à $4 914 500, soit une
augmentation de $1 120 000. Les autres augmentations au niveau des programmes
du secteur des institutions judiciaires, des institutions pénales et du
secteur de la gestion juridique du cadre socio-économique
résultent de l'application des conventions collectives. Nous avons pu
maintenir le taux de croissance de nos dépenses à 10% par une
révision des activités de certains programmes et par une
utilisation maximale de notre personnel.
Les revenus pour l'année financière 1976/77 sont
estimés à $62 324 400, les droits des permis imposés aux
détaillants de vente de bière et de spiritueux sont
estimés à $20 650 000 et représentent 33 1/3% des revenus.
Les autres postes de revenu sont $9 040 000 provenant des infractions au Code
de la route, $7 650 000 de l'enregistrement des droits et $7 millions provenant
des actes judiciaires. Les contributions du gouvernement du Canada pour les
programmes à frais partagés, soit le programme d'aide juridique,
le programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels et la Protection
civile, sont évalués à $3 783 200.
Dans ce bref tour d'horizon, j'ai voulu indiquer aux membres de cette
commission parlementaire les principaux secteurs d'activité de mon
ministère.
Au cours de l'étude des crédits au niveau des programmes,
il me fera plaisir de vous fournir de plus amples renseignements concernant les
services que le ministère rend à la population afin d'assurer un
bon soutien administratif à nos cours de justice et d'assurer
l'application des différentes lois qui relèvent du
ministère de la Justice.
Le Président (M. Pilote): Le député de
Maisonneuve.
Administration publique
M. Burns: M. le Président, contrairement au ministre de la
Justice, j'ai eu l'occasion, moi, de commencer les travaux du ministère
de la Justice ou l'étude des crédits du ministère avec le
Solliciteur général, de sorte que toutes les remarques que j'ai
faites à ce moment, je pense, seraient superflues à ce
niveau-ci.
D'autre part, le ministre de la Justice me permettra quand même de
poser un certain nombre de questions ayant déjà fait l'objet de
discussions avec le Solliciteur général qui, évidemment,
dans les crédits du ministère de la Justice, doit défendre
les programmes 13 à 19, je crois.
Cependant, avant d'entrer dans le détail de chacun des programmes
et sans faire de baratin de départ, j'aimerais, quand même, me
référer à une conférence qu'a donnée le
sous-ministre de la Justice, M. Robert Normand, qui a été
rapportée dans le Soleil du 4 septembre 1975.
M. Levesque: La Presse.
M. Burns: Vous étiez déjà prêt, M. le
ministre?
M. Levesque: Oui, je suis toujours prêt.
M. Burns: Donc, c'était dans la Presse, sous le titre:
"L'appareil gouvernemental québécois, un monstre compliqué
et inefficace." Cela m'avait, à l'époque, un peu surpris
d'entendre cela de la part du sous-ministre, surtout qu'un nouveau ministre de
la Justice venait à peine d'être nommé. En septembre
dernier, une telle affirmation, comme le dit d'ailleurs, M. Claude Gravel, le
journaliste, nous paraissait un peu sombre pour l'avenir.
J'aimerais savoir, de la part du ministre actuel, quels sont les
commentaires qu'il a l'intention de nous faire, dès le départ de
l'examen de ses crédits, relativement à une telle affirmation.
J'irais même plus loin, une des affirmations qui m'ont fait sursauter
venant d'un sous-ministre était la suivante: "L'appareil gouvernemental
québécois des années soixante, dominé par "une
minorité de gauche très active", a engendré aujourd'hui un
monstre bureaucratique qui existe davantage pour se perpétuer que pour
répondre aux besoins concrets de la population."
Cela m'étonne de la part d'un sous-ministre pour qui j'ai
beaucoup d'estime, d'ailleurs, et cela me fait me poser la question: Qu'en
est-il de cette affirmation? Où va-t-on avec cela? Est-ce que l'appareil
gouvernemental québécois est véritablement "un monstre
compliqué et inefficace "?
En particulier en matière de justice, est-ce qu'il s'agit d'un
monstre qui ne permettrait pas d'entrevoir des solutions éventuellement?
Comme question générale, le ministre pourrait nous donner une
réponse.
M. Levesque: Je dirais tout d'abord au député de
Maisonneuve que le sujet qu'il aborde ne devrait pas, à mon sens, avoir
pignon sur rue à l'intérieur des crédits du
ministère de la Justice. La seule justification est qu'il s'agirait d'un
haut fonctionnaire du ministère de la Justice. Mais il faut bien
comprendre qu'au moment où M. Robert Normand s'adressait à des
administrateurs, il le faisait à titre de conférencier, de
personne-ressource, et il faut dire qu'il le faisait également dans un
contexte en dehors de ses fonctions comme telles de sous-ministre de la
Justice.
Il donnait, à ce moment-là, ses vues personnelles sur une
administration et non pas sur des faits tellement récents. J'essaie de
parler pour lui, parce qu'il pourrait le faire beaucoup mieux que moi, avec
beaucoup plus d'autorité, mais afin de répondre assez
brièvement à la question du député de Maisonneuve,
je lui dirai qu'il jugeait, à ce moment-là, une quinzaine
d'années d'administration récente un peu dans tous les secteurs,
et il portait un jugement comme gestionnaire.
Lorsque le député de Maisonneuve cite le titre en
question, cela ne correspond pas du tout, d'après mes renseignements, au
contenu de la conférence du sous-ministre. Mettant cela de
côté, il faut bien comprendre que, comme gestionnaire, j'aurais
souvent les mêmes réactions que mon sous-ministre. Il faut bien
comprendre qu'au début des années soixante, on a voulu purifier
et sublimer le plus possible.
M. Burns: Vous avez fait quoi depuis ce temps-là?
M. Levesque: ...au point tel, laissez-moi finir, au point tel
qu'aujourd'hui, avec toute cette virginité dont on s'entoure,
l'efficacité souvent s'en ressent. C'est ce sentiment qu'a voulu rendre,
j'imagine, je ne voudrais pas parler en son nom, le sous-ministre de la
Justice. Comme gestionnaires, à certains moments, on devient impatient,
et cela se comprend, avec les "enfarges" qu'on s'est créés, de
toutes sortes, dans l'administration publique. Voilà ce que j'avais
à dire là-dessus.
M. Burns: Mais quand même, lorsqu'on nous dit, M. le
ministre, qu'une minorité de gauche très active durant les
années soixante, a engendré, aujourd'hui, un monstre
bureaucratique.
C'est une opinion que je considère comme très
éclairée, parce que c'est quelqu'un qui, non seulement
actuellement est sous-ministre de la Justice, mais aussi a été
bien placé à l'époque où il agissait comme officier
légiste j'oublie son titre de l'époque, avant d'être
sous-ministre comme greffier en loi, si je ne me trompe pas. Je me dis
qu'à ce moment, peut-être a-t-il décelé un
symptôme assez important dans l'administration, sinon de la justice, du
moins de l'administration gouvernementale et, comme tel, je me demande ce que
le ministre de la Justice actuel propose comme modification, comme
réforme qui pourrait éventuellement, non pas empêcher
d'autorité, mais empêcher dans les faits son sous-ministre de dire
ou de répéter une telle chose.
Pas que je blâme le sous-ministre d'avoir dit cela. Si c'est sa
constatation, je le félicite de l'avoir fait, au contraire. Mais je
voudrais savoir ce que le ministre de la Justice a l'impression qu'on devrait
changer dans l'administration de la justice ou dans l'appareil gouvernemental
pour en arriver à ce que le sous-ministre de la Justice n'ait plus,
à l'avenir, à dire qu'une minorité de gauche très
active a engendré aujourd'hui un monstre tel que celui que vous
subissez.
M. Levesque: Premièrement, il ne faudrait pas sortir
certaines phrases d'un contexte donné; je pense que c'est injuste envers
celui qui a prononcé les paroles en question. Deuxièmement, le
sous-ministre de la Justice ne parlait pas, à ce moment-là, dans
sa fonction de sous-ministre de la Justice, mais comme un gestionnaire
d'expérience qui faisait part de ses vues. D'ailleurs, il en faisait
part à l'intérieur d'une réunion où il ne
s'attendait pas à ce que ses paroles aient la répercussion
qu'elles ont eue.
M. Burns: Savez-vous lors de quelle réunion? Vous savez
à quelle réunion?
M. Levesque: A Ottawa, devant l'Institut d'administration
publique.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Troisièmement, je crois que toute cette
question pourrait être discutée dans un autre contexte, où
la personne qui a prononcé ces paroles aurait l'occasion elle-même
de s'expliquer, et je ne crois pas que ce soit à ce moment-ci.
M. Burns: Je veux être bien clair, M. le Président;
il ne s'agit pas de contester les paroles prononcées par le
sous-ministre en question, encore une fois, pour qui j'ai beaucoup de respect
et d'estime. Ce n'est pas du tout dans cet ordre d'idées que j'ai
l'intention d'intervenir. Je pose la question uniquement au niveau de
l'administration publique sachant qu'une des personnes, je ne dis pas que c'est
la seule, autorisées au Québec à parler en matière
de justice s'adonne à être le sous-ministre de la Justice. Je
m'étonne que le ministre de la Justice n'ait pas la possibilité
de me répondre relativement à une affirmation comme
celle-là, ou bien il me dit: Ecoutez, c'est une opinion personnelle que
je ne partage pas, ce que je regretterais d'ailleurs, parce que cela
démontrerait, de la part du ministre de la Justice, une
méconnaissance de la situation, ce que je ne suis pas prêt
à accepter de sa part.
M. Levesque: Voici, je dirais...
M. Burns: Mais cela démontrerait aussi, je pense, une
façon de mettre de côté un problème qui, à
mon avis, est très important. Ou bien l'administration actuelle est
prête à fonctionner avec la structure qui existe ou bien la
structure qui existe n'est absolument plus adéquate et doit être
changée; à ce moment-là, cela demande des réformes.
Je demande au ministre de la Justice quelles sont ces réformes qu'il
entend nous proposer éventuellement, mises à part les lois de
l'organisation judiciaire, etc.
M. Levesque: S'il y avait des réformes, elles seraient
proposées par le ministre des Finances, par exemple, dans la question de
l'administration de la question financière. D'ailleurs, le ministre des
Finances a proposé des réformes et les a même
réalisées récemment. Il faut se rappeler que le
sous-ministre avait également rendu hommage à la qualité
des hommes qui y étaient présentement; le député
n'a pas mentionné cela. C'est sorti du contexte, j'ai dit qu'une partie
c'était dangereux. Il avait même mentionné, si ma
mémoire est fidèle, qu'il avait confiance en ces hommes et qu'il
était optimiste quant à l'avenir; cela n'a pas été
mentionné par le député de Maisonneuve.
On sort d'un contexte certaines phrases et on les place dans la bouche
de quelqu'un qui ne peut pas s'expliquer à ce moment-ci; c'est normal,
on n'est pas à l'endroit qu'il faut pour en parler. Mais disons que pour
revenir...
M. Burns: Où devons-nous en parler?
M. Levesque: Ce n'est pas comme sous-ministre de la Justice qu'il
parlait mais comme gestionnaire et comme conférencier...
M. Burns: Oui, oui.
M. Levesque: ...comme personne ressource. D'ailleurs, ce qu'il a
dit, je ne crains pas de dire que cela a eu un écho très
favorable chez moi, parce qu'également, comme gestionnaire, à un
moment donné, je me pose des questions. C'est bien beau de vouloir avoir
un Conseil du trésor. C'est parfait. L'institution est
nécessaire. C'est très bon. Il faut avoir une Commission de la
fonction publique, c'est très bon. Ce sont des institutions
essentielles, nécessaires. Il y a des mesures qui sont prises comme la
question des soumissions publiques. Tout cela, c'est nécessaire. Quand
on a connu ce que c'était autrefois, toutes ces institutions sont
devenues nécessaires. Mais, cela ne veut pas dire que, parce que ces
institutions sont en place, elles ne peuvent pas être
améliorées et permettre aux gestionnaires, qui ont comme
principal objectif l'efficacité, de pouvoir opérer d'une
façon meilleure et qui correspond mieux aux objectifs qu'ils
poursuivent. C'est cela que je dis, c'est cela qu'il a dit.
M. Burns: M. le ministre, j'ai nettement l'impression qu'on ne se
comprend pas, au départ. D'une part, que ce soit bien clair que je ne
conteste pas le droit du sous-ministre en question d'avoir dit ce que j'ai
cité tout à l'heure. Ce que je veux savoir c'est: ou bien le
ministre de la Justice endosse ces propos ou bien il ne les endosse pas. S'il
les endosse, j'ai des questions à lui poser par la suite. S'il ne les
endosse pas, je n'ai pas d autres questions à lui poser.
M. Levesque: Je n'ai pas à les endosser, parce qu'il ne
parlait pas comme sous-ministre de la Justice. Comme ministre de la Justice, je
n'ai pas à endosser l'avis d'un citoyen, même d'un citoyen aussi
eminent que le sous-ministre de la Justice, sur ses vues qu'il a données
comme conférencier à une réunion d'administrateurs
publics. Je suis allé aussi loin, cependant, que de dire que ceci avait
fait chez moi une excellente impression.
M. Burns: Est-ce que les mots suivants ont fait une excellente
impression chez vous? Je cite: "J'ai parfois c'est le sous-ministre qui
parle l'impression que la moitié du gouvernement
sécrète des normes dont l'autre moitié surveille
l'application". "Le haut fonctionnaire a soutenu c'est le journaliste
Claude Gravel qui parle que la multiplication des commissions et des
comités de tous genres ainsi que les pouvoirs de plus en plus larges que
se donnent les ministères compliquent la prise des décisions ".
Il a cité le cas du livre blanc qui n'est pas de votre cru, M. le
ministre, qui est du cru de votre prédécesseur dont on
déplore ce soir l'absence.
M. Levesque: Déplorez-le tout seul.
M. Burns: Oui. Remarquez que ce n'est pas moi qui dis cela. Il a
cité le cas du livre blanc sur la Justice, publié en juin, dont
l'avenir écoutez bien cela "est compromis parce qu'il
devra être défendu devant trop de ministères et de
commissions". Je ne blâme pas...
M. Levesque: Le livre blanc devra être défendu?
M. Burns: ...le sous-ministre d'avoir dit cela, au contraire, je
pense que si j'avais participé à cette conférence,
j'aurais probablement dit la même chose. J'espère que je ne coule
pas définitivement le sous-ministre en question, parce que ce n'est pas
mon but.
M. Levesque: Vous le rehaussez davantage dans l'estime de ses
concitoyens.
M. Burns: En tout cas, cela dépend des points de vue.
M. Levesque: C'est un instrument très positif...
M. Burns: C'est très délicat, je le reconnais et je
m'en excuse d'avance auprès de Me Normand qui n'a pas à subir ce
genre de tests et de ques-
tions. Ce n'est pas à son endroit que je pose ces questions, sauf
que...
M. Levesque: Continue2.
M. Burns: ... si Me Normand a dit ces choses, avec le sens des
responsabilités qu'on lui connaît, avec le poste qu'il
détenait, à l'époque, comme sous-ministre en titre de la
Justice il m'apparaît très clair que cela devait faire partie d'un
certain nombre de politiques de son ministère. Autrement...
Je vais vous donner un exemple. Je ne me sentirais pas, moi, même
comme simple député du Parti québécois qui
préconise l'indépendance du Québec, la possibilité
d'aller devant une tribune, qu'elle soit aussi simple, comme l'a dit le
ministre de la Justice, que la conférence annuel de l'Institut
d'administration publique du Canada, et de dire à titre personnel:
L'indépendance, vous savez, c'est une chose qu'on va mettre de
côté lors de la prochaine campagne électorale. Je ne me
sentirais pas cette capacité, pour une raison bien simple que je serais
en dehors de la ligne de mon parti et il me resterait...
M. Levesque: En rupture de ban.
M. Burns: Non, non.
M. Springate: Un dissident.
M. Burns: Si vous voulez faire des farces, faites-en! Surtout pas
vous, le député de Sainte-Anne. Ne faites pas de farces
là-dessus.
M. Springate: Comment?
M. Burns: Vous n'avez pas de farces à faire sur les choses
qui ne cadrent pas avec les idées de son parti.
M. Springate: On est libre dans notre parti.
M. Burns: Ah oui! ah oui! On est libre de se faire suspendre, de
se faire mettre dehors et...
M. Springate: On est libre.
M. Burns: ... de revenir, de faire des "talk shows" et tout ce
que vous voulez à CFCF. En tout cas...
Je vous donne cet exemple un peu gros, je l'admets. Je sais fort bien
que le sous-ministre de la Justice n'est pas dans le même cas que moi par
rapport à mon parti, mais cela m'apparaît que quelqu'un en
autorité dans le ministère, quel que soit l'endroit où il
fasse une telle déclaration, exprime jusqu'à un certain point la
position du ministère. A ce moment-là, je voudrais savoir quelle
est l'attitude du ministère quant aux réformes envisagées
pour changer cette minorité de gauche très active qui
empêche véritablement l'appareil gouvernemental
québécois de se débarrasser de ce monstre compliqué
et inefficace.
J'aimerais savoir, de la part du ministre de la Justice, si lui aussi a
parfois l'impression que la moitié du gouvernement sécrète
des normes dont l'autre moitié surveille l'application. J'aimerais
savoir, de la part du ministre de la Justice, si les comités de tout
genre, ainsi que les pouvoirs de plus en plus larges que se donnent les
ministères compliquent la prise des décisions.
Je m'adresse non seulement au ministre de la Justice, mais
également, je pense, au leader du gouvernement qui est très bien
placé pour me donner des réponses concrètes,
précises relativement à ces questions qui sont soulevées
non pas par moi remarquez que j'aurais pu les soulever, mais ce n'est
pas moi qui l'ai fait, donc je n'en prends pas le crédit mais par
le sous-ministre de la Justice.
M. Levesque: Je vais vous donner un exemple pour répondre
à votre question. Lorsque j'étais ministre des Affaires
intergouvernementales, j'ai présenté un projet de loi qui a
été adopté d'emblée, avec enthousiasme par, en
particulier, l'Opposition officielle. Je me donnais des pouvoirs de
contrôle, de revue et de vue sur les accords, les ententes qui
intervenaient entre l'un ou l'autre des ministères du gouvernement et
même des organismes gouvernementaux et paragouvernementaux et le
gouvernement fédéral ou autres institutions
étrangères au Québec. A ce moment, je traduisais la
volonté du ministère des Affaires intergouvernementales.
C'était dans un but de coordination, un but réellement louable
quant à moi, à ce moment. Lorsque je suis arrivé au
ministère de la Justice et que j'ai vu ce que j'avais fait au
ministère des Affaires intergouvernementales, je me suis dit: Je me suis
créé des "enfarges" au ministère de la Justice. Non
seulement suis-je obligé maintenant d'aller au Trésor, au cabinet
des ministres, puis passer par telle et telle chose, maintenant avant de signer
une entente qui me semble bien raisonnable avec le gouvernement
fédéral, mais je suis obligé d'aller au ministère
des Affaires intergouvernementales. Ma réaction à moi, comme
ministre de la Justice, c'est une autre "enfarge", mais c'est moi-même
qui l'ai créée. Ce ne sont pas tellement les gens de gauche;
peut-être qu'ils m'ont inspiré, mais je l'avais accepté.
C'est dire qu'à force de vouloir bien faire on multiplie les "enfarges".
A un moment donné, un gestionnaire devient un peu tanné,
écoeuré même, et c'est un sentiment normal de quelqu'un qui
veut être efficace. Par contre, il faut bien comprendre que chacun des
gestes posés et des mesures adoptées l'ont été en
vue du bien commun, l'ont été en vue d'une meilleure
coordination, d'une meilleure efficacité. Efficacité pour l'un
n'est pas nécessairement efficacité pour l'autre.
Ce que le sous-ministre de la Justice a dit, il l'a dit dans un contexte
donné. Si on l'analyse ici ce soir durant l'étude des
crédits on ne rendra pas justice au sous-ministre, on ne rendra pas
justice au texte qu'il a livré et je pense qu'on se fourvoierait d'aller
davantage là-dedans.
M. Burns: Bon, alors...
M. Levesque: Autant que si on commençait à parler
du député de Maisonneuve, de ses problèmes avec le conseil
national du parti, commencer à en discuter. Mais est-ce que le
député de Maisonneuve, qui est le critique officiel du ministre
de la Justice à l'intérieur de ses crédits, traduisait la
pensée du parti dans la querelle avec le journal Le Jour? C'est
intéressant, c'est intéressant. Est-ce que le
député de Maisonneuve, lorsqu'il a été question,
par exemple, du salaire des députés, on parle des juges
aujourd'hui...
M. Burns: Pourquoi n'en parlerait-on pas? On va en parler des
juges tout à l'heure.
M. Levesque: On parle des députés. Apparemment le
vote était de 46 contre 47, quelque chose comme cela dans le temps.
Est-ce qu'il traduisait réellement la volonté...
M. Burns: Est-ce que vous avez des délégués
à notre conseil national?
M. Levesque: On pense toujours que le ministre de la Justice est
bien au courant, non. Je reçois simplement des confidences de part et
d'autre...
M. Burns: Ah bon!
M. Levesque: ...de gens qui sont des bons citoyens même
s'ils sont du Parti québécois.
M. Burns: Bon. Vous ne savez pas la porte que vous m'ouvrez, ce
n'est pas croyable.
M. Levesque: J'aime ouvrir des portes, parce que je suis
très à l'aise et je voudrais que la lumière se fasse.
M. Burns: Mais je n'entrerai pas par cette grande porte que vous
m'ouvrez...
M. Levesque: Je le savais.
M. Burns: ...parce que cela peut allonger nos débats de
quelques jours et ce n'est pas mon intention. Maintenant que j'ai établi
les prémisses, je vous prie d'exclure le sous-ministre de la Justice de
notre discussion, parce que j'ai beaucoup trop de respect pour les hauts
fonctionnaires et pour le travail qu'ils font, je n'ai pas l'intention de les
mêler à une discussion politique.
D'accord? On s'entend là-dessus. Je ne parle plus de Me Normand
à compter de maintenant.
M. Levesque: On me permettra, à ce moment-ci, puisque le
député de Maisonneuve l'a fait, de rendre hommages à Me
Normand...
M. Burns: Sûrement.
M. Levesque: ... et à ses collaborateurs...
M. Burns: Sûrement.
M. Levesque: ... qui font un travail extraordinaire.
M. Burns: Si vous voulez les nommer, d'ailleurs, cela me ferait
plaisir de vous les entendre nommer.
M. Levesque: Je dois dire, en toute humilité mais en toute
objectivité également, que je suis au ministère de la
Justice depuis à peine dix mois. C'est une fonction que j'ai
acceptée avec beaucoup de réticences, avec beaucoup de
réserves, connaissant mes limitations et connaissant également
l'énormité de la tâche. C'est grâce à Me
Normand et à ses collaborateurs et collaboratrices que j'ai pu tenir le
coup et j'espère avoir bien servi la province.
M. Burns: Voulez-vous nous présenter vos collègues,
à part Me Normand? Je n'ai pas d'objection.
M. Levesque: II y en a plusieurs, II y en a tellement qu'on
pourrait peut-être commencer en demandant à chacun de donner leurs
nom et fonction. MM. René Langevin, sous-ministre associé; Pierre
Dorion, directeur général des greffes; Gilles Tremblay, adjoint;
Jean-Claude Dubois, directeur du budget; Mme Elizabeth Lavoie, attachée
de presse; MM. Georges Gendron, directeur du bureau de l'administration de la
loi des huissiers; René Hurtubise, président de la Commission des
droits de la personne; René Morin, trésorier de la Commission des
services juridiques; Yves Lafontaine, vice-président de la Commission
des services juridiques; Bernard Desjarlais, président de la Commission
des loyers.
M. Levesque: II y a des juges aussi.
M. Burns: Oui, il y en a qui devraient dire M. le juge.
M. Levesque: MM. Maurice Gauthier, sous-ministre associé;
Paul Périard, vice-président du Comité pour la protection
de la jeunesse; Mlle Lyse Lemieux, sous-ministre associé; MM. Guy
Dorion, président du Tribunal de l'expropriation; juge Jacques Trahan,
président de la Commission de contrôle des permis d'alcool du
Québec; Conrad Prénoveau, président de la Régie des
loteries et courses du Québec; André Boudreau, directeur du
Service de consultation et expert en toxicomanie; Paul Crépeau,
président de l'Office de révision du Code civil; Clément
Ménard, directeur général du personnel.
M. Burns: Maintenant que ces présentations ont
été faites, je reviens à la question de base. Qu'est-ce
que vous avez l'intention de faire ou encore qu'est-ce que vous avez fait pour
réformer la situation qui était décrite et qui,
semble-t-il, est acceptée par vous comme un monstre compliqué et
inefficace comme appareil gouvernemental?
Qu'est-ce que vous envisagez comme réforme de la loi?
M. Levesque: En attendant que le monstre reprenne des proportions
humaines, nous avons voulu prendre un peu des proportions de monstre. Nous
avons travaillé plus fort, nous avons fait des pieds et des mains
auprès de ces institutions afin de pouvoir faire valoir notre point de
vue et nous avons été assez chanceux, en général.
Par exemple, dans les mesures anti-inflationnistes il y a eu des gels
d'effectifs, mais il y a eu des exceptions dans certains domaines du
ministère de la Justice, en particulier du côté de la
sécurité publique et du côté de la détention
et de la probation, surtout de la détention.
Nous avons réussi de ce côté-là. Nous avons
également fait accepter certaines augmentations, dans nos budgets, qui
étaient, à notre point de vue, essentielles malgré une
norme générale. Nous avons, dans certains domaines,
dépassé ou fait accepter de dépasser certaines normes
à cause des plaidoyers "monstrueux" que nous avons pu faire.
M. Burns: Parlant de monstruosité, est-ce que vous vous
êtes enquis relativement à cette minorité de gauche
très active qui engendrerait le monstre bureaucratique qui avait
été si "hitch-cockiennement" décrit par votre
sous-ministre?
M. Levesque: Le député de Maisonneuve est toujours
ou semble, du moins, être impressionné, affecté
défavorablement, curieux ou inquiet lorsqu'on parle de la gauche.
M. Burns: Oui, cela m'intéresse beaucoup. M. Levesque:
Oui.
M. Burns: Oui, énormément à part cela, je
vais vous le dire. Si vous avez des problèmes là-dessus, moi je
suis prêt à répondre à vos questions.
M. Levesque: Le seul problème que j'ai avec la gauche,
c'est la question de la définition. Quant à moi, je peux
être de gauche tous les jours; surtout quand il s'agit des questions
gaspésiennes, je me trouve très à gauche. A un moment
donné, je suis à droite quand il s'agit de Montréal. Tout
est relatif.
M. Burns: Oui, mais, même ne faisant cette aparté,
est-ce que cela vous tenterait de répondre à ma question?
M. Levesque: Bien moi, je ne sais pas quelle est la
définition que le sous-ministre a de la gauche.
M. Burns: Bien, moi, non plus.
M. Levesque: Si j'avais su qu'on poserait la question ce soir,
j'aurais invité mon sous-ministre à luncher et je lui aurais
demandé: Qu'est-ce que tu penses de la gauche au Québec ou quelle
gauchie avais-tu à l'esprit quand tu as parlé de cela? Moi, je
m'imagine que ce qu'il voulait dire par la gauche je vous prie de
m'excuser si je le traduis mal c'étaient ceux qui inventent des
patentes pour diminuer l'efficacité. Probablement que c'est ce qu'il
voulait dire. Il ne parlait pas des péquistes en particulier.
M. Burns: Moi, je ne visais pas les péquistes non plus,
mais je voulais savoir ce que c'était que la gauche très
active.
M. Levesque: Pour vous, si vous ne visiez pas les
péquistes, c'est que vous ne pensez pas que les péquistes sont
des gauchistes.
M. Burns: Non, non. Je n'ai jamais pensé cela. De toute
façon, la gauche c'est très relatif...
M. Levesque: C'est cela.
M. Burns: Bon! Cela dépend de l'endroit où on se
trouve. A ce moment-là, je voudrais savoir, moi, ce que le ministre
lui-même je ne parle pas du sous-ministre a eu comme
réaction, lorsqu'il a vu cela.
M. Levesque: Lorsque j'ai vu le texte? M. Burns: Oui.
M. Levesque: Bien, je l'ai dit tout à l'heure. M.
Burns: Non, vous ne l'avez pas dit.
M. Levesque: J'ai eu une réaction assez favorable.
M. Burns: Donc, il y avait des gauchistes...
M. Levesque: Bien, pour moi, pour moi cela
représentait...
M. Burns: ...qui empêtraient...
M. Levesque: D'ailleurs, quand le mot "gauchiste" vient, moi,
quelquefois j'identifie cela à un groupe politique. Je ne suis
peut-être pas assez objectif. Alors, les sentiments personnels que j'ai
pu avoir à ce moment-là ne correspondaient peut-être pas
à ce qu'a voulu rendre le sous-ministre, lorsqu'il a parlé
à ce groupe en particulier. Comme on ne parle plus du sous-ministre, il
faudrait que la question me vienne en dehors du contexte de cette
conférence. Je suis prêt à répondre directement
comme l'a souhaité lui-même le député de
Maisonneuve, mettant de côté la conférence en question.
M. Burns: On y reviendra. On y reviendra. Je vais quitter ce
sujet en m'excusant très très sincèrement à
l'endroit de Me Normand d'avoir parlé trop longtemps de cette
conférence, parce que ce
n'est pas mon habitude de rattacher les problèmes politiques
on est là, M. le ministre, pour parler de politiques du
ministère avec des attitudes de hauts fonctionnaires. Ce
n'était que pour des fins reliées à nos propos, je pense,
à caractère politique.
Ce n'était que pour savoir si ce néophyte de ministre de
la Justice avait quand même réussi à jauger les appuis
qu'il a autour de lui, qui sont, je pense, très solides. Ce n'est pas du
tout à ce niveau-là que j'ai fait cette critique, mais je voulais
savoir si le ministre, lui, se posait des questions sur l'administration de la
justice comme telle au Québec.
Je ne reviendrai pas sur les problèmes que nous avons
déjà discutés avec le Solliciteur général
aux programmes 13 à 19 inclusivement, mais je rappellerai, cependant,
les très sérieuses réticences que j'ai exprimées
à l'occasion de l'examen de ses crédits relativement à la
division qu'on a faite des pouvoirs entre le ministre de la Justice et le
Solliciteur général.
Partage des juridictions en matière de
tribunaux
M. Burns: Je le mentionne au tout départ de l'étude
des crédits, cela complique énormément l'étude des
crédits, parce que, et je vais vous en citer un exemple dans quelques
minutes, on est obligé de reposer, à certaines occasions, des
questions au ministre de la Justice qui ont déjà
été posées au Solliciteur général. En
particulier, quant à la réforme du partage des compétences
entre le gouvernement du Québec et les municipalités, une des
questions que j'ai déjà posées au Solliciteur
général m'apparaît comme devant être de nouveau
posée au ministre de la Justice.
Cette dualité des juridictions en matière de tribunaux et
de corps policiers, qui a fait l'objet, depuis un an, de deux études qui
recommandaient une réforme, m'incite à poser à nouveau
cette question que j'ai déjà posée au Solliciteur
général. D'autre part, le livre blanc sur la justice proposait,
au chapitre de la réorganisation des tribunaux, la disparition
progressive des Cours municipales au profit de la Cour des sessions de la paix,
en matière criminelle, et de la Cour provinciale, en matière
civile.
Je vous réfère, tout simplement, au livre blanc de votre
prédécesseur, Me Jérôme Choquette, aux pages 108,
109 et 110. Ce regroupement judiciaire s'accompagnerait, selon le livre blanc,
d'une uniformisation des règlements municipaux de circulation, sous
l'autorité législative provinciale. D'autre part, le groupe de
travail sur l'urbanisation au Québec, dirigé par M. Claude
Castonguay, vient de recommander que les corps policiers municipaux
abandonnent, au profit de la Sûreté du Québec, le secteur
Sûreté de leurs activités pour se limiter à l'aspect
gendarmerie, c'est-à-dire l'application pure et simple des
règlements municipaux, à la fois généraux et de
circulation.
Ces deux recommandations, et c'est ma sou- mission, M. le ministre,
compte tenu de l'augmentation des responsabilités et des effectifs des
patrouilles du ministère des Transports sur les autoroutes du
Québec et sur la route no 20, laissent entrevoir des réformes
majeures dans le partage des responsabilités policières au
Québec. C'est une question que j'ai posée, mot pour mot au
Solliciteur général. Je n'ai pu qu'avoir une réponse
partielle, parce que, justement, il me disait: Vous savez, il y a des choses
qui concernent le ministre de la Justice et il y a des choses qui me
concernent; l'aspect policier, nous l'examinons; l'aspect administratif de la
justice, cela concerne peut-être plus le ministre de la Justice.
Alors, je vous pose la question d'emblée: Est-ce que vous avez
des remarques à nous faire relativement à cette question globale,
cette réforme envisagée, relativement à la division du
côté de la gendarmerie et de la sûreté? Est-ce que
vous avez quelque chose à ajouter aux déclarations que le
Solliciteur général j'imagine que vous avez pris
connaissance de ses déclarations nous a faites, lors de l'examen
des crédits des programmes 13 à 19 inclusivement?
M. Levesque: J'étais retenu en Chambre à ce
moment-là; je n'ai pas pu suivre les discussions qui ont eu lieu. Je
suis convaincu que le Solliciteur général a donné une
réponse complète au député de Maisonneuve...
M. Burns: Non, justement, c'est pour cela que je vous repose la
question.
M. Levesque: J'allais dire: mais sûrement pas
satisfaisante...
M. Burns: Non.
M. Levesque: ... connaissant les exigences du
député de Maisonneuve et connaissant également le
côté de la table où il s'assoit. Ceci étant dit, je
crois que...
M. Burns: Vous avez été là longtemps,
vous!
M. Levesque: Oui, j'ai passé huit ans de ce
côté-là, je sais exactement ce qu'on pense.
M. Burns: Bon, alors, je suis à la veille de passer de
l'autre bord!
M. Levesque: Attendez qu'on vous invite! Si le
député de Maisonneuve parle des Cours municipales comme telles,
à travers la province, je pense qu'il y en a environ 140.
On est rendu à 141. Il est vrai que le livre blanc parlait de
l'intégration des cours municipales. Il faut comprendre que, bien que
cet objectif soit louable, il faut aussi tenir compte de l'existence et de la
volonté des édiles municipaux, et il y a des gens qui sont
d'accord pour cette intégration. D'ailleurs, nous avons une
expérience pilote que nous avons poursuivie dans le secteur de
Longueuil, je crois, Greenfield Park, Saint-Hubert.
Nous sommes en train avec cette expérience d'arriver à
des...
M. Burns: Je peux vous en parler.
M. Levesque: Les échos qui arrivent à mes oreilles,
c'est que la situation est satisfaisante, à moins que le
député de Maisonneuve me fasse part du contraire.
M. Burns: Non.
M. Levesque: Sur le plan financier d'abord, nous avons
l'impression que c'est satisfaisant; enfin, du moins, ce que j'ai comme
écho.
M. Burns: L'expérience de Longueuil actuellement, à
mon avis, est véritablement désastreuse.
M. Levesque: J'aimerais bien entendre le député
parler de ce sujet.
M. Burns: Oui, je vais vous en parler parce que c'est une
expérience que j'ai suivie moi-même.
M. Levesque: J'aurai un autre son de cloche que celui que je
reçois de l'extérieur.
M. Burns: Oui, sûrement. A Longueuil, l'expérience
pilote, sauf erreur, remonte à deux ans.
M. Levesque: A peu près deux ans, oui.
M. Burns: A peu près deux ans. Dans ce cas, on a
véritablement considéré Longueuil comme le cousin pauvre
de Montréal à tout point de vue, véritablement à
tout point de vue. Je ne vous parle pas des quelque trois ou quatre derniers
mois, où cela s'améliore, et cela va vous faire plaisir que je
vous le dise; cela s'améliore depuis trois ou quatre mois. Je suis bien
placé pour connaître le cas de Longueuil parce que j'ai eu
l'occasion de suivre un certain nombre de dossiers qui se présentaient
à Longueuil. Je n'ai pas de cachettes à vous faire, ce sont les
cas de United Aircraft, par exemple.
J'ai d'autres raisons de connaître aussi le cas de Longueuil que
je n'ai pas à discuter ici, mais je sais fort bien que ce cas, aux yeux
du ministère de la Justice, a été considéré
longtemps comme le cousin pauvre et vraiment le cousin pauvre de
l'administration de la justice à Montréal, tant au point de vue
des juges que des procureurs de la couronne. Je ne parle pas de la
qualité des juges, je ne parle pas de la qualité des procureurs
de la couronne et des sténographes, non plus des fonctionnaires de
soutien. Mais à chaque fois qu'à Longueuil dans ce projet pilote
que tout le monde... J'avais félicité le ministre de la Justice
à l'époque lorsqu'il avait lancé cette idée parce
que Me Choquette, à ce moment-là, voulait, dans une banlieue
importante de Montréal, faire véritablement le test de
décentralisation qui était le grand projet amené dans son
livre blanc; en tout cas, c'était un des grands projets. A ce
moment-là, je l'avais félicité.
Il est normal que les gens de la rive sud de Montréal se
retrouvent dans un palais de justice qui est accueillant, si on peut dire. Je
ne parle pas de l'aspect des sessions de la paix ou quoi que ce soit; ce n'est
jamais très accueillant pour un justiciable. Je parle d'un palais de
justice qui est quand même accueillant pour des gens qui demeurent
à Boucherville, à Saint-Bruno, à Longueuil ou à
Saint-Lambert; je pense que c'était déjà une façon
de décentraliser la justice. Si vous amenez ces gens de l'autre
côté des ponts qui nous conduisent à Montréal,
déjà, vous êtes dans cette grande Babylone qui s'appelle
Montréal. Surtout que déjà, à Montréal, vous
aviez une autre réforme qui était amorcée. Je trouvais,
à ce moment-là, l'idée très bonne, je trouvais
qu'on pouvait peut-être à Longueuil faire des preuves
précises de ce que peut être une justice
décentralisée, surtout en prenant un centre près de
Montréal, mais quand même éloigné de
Montréal.
Si vous me comprenez, près de Montréal mais loin dans le
sens qu'on ne demande pas facilement à quelqu'un de Boucherville de
venir comparaître devant une cour qui est située au coin de
Saint-Laurent et Craig, à Montréal, ou Saint-Laurent et
Notre-Dame. J'avais trouvé que l'idée était bonne, sauf
qu'il faut, si on fait une expérience pilote de cette nature, vraiment y
mettre tous les moyens. Il faut même aller plus loin c'est mon
point de vue que l'organisme déjà constitué
où déjà il y a des rouages d'institués et il ne
faut pas décourager j'insiste là-dessus, M. le ministre
les gens, que ce soient des cadres, des procureurs de la couronne, des
juges, que ce soit le personnel de soutien; il ne faut pas décourager
ces gens de faire un bon boulot à l'intérieur d'une
expérience pilote. Une expérience pilote doit, à mon avis,
recevoir plus de moyens qu'on est normalement en droit de s'attendre dans une
cour déjà bien établie. Je pense que dans le cas de
Longueuil, du côté du ministère de la Justice, on a
véritablement manqué le bateau. On a laissé ces gens avec
des moyens encore inférieurs à ce qu'une cour déjà
constituée, avec des rouages déjà bien rodés, est
en droit de s'attendre. Dans le cas de Longueuil, ce sont les remarques que
j'ai à faire. Je vous avoue que, personnellement, je suis
déçu de l'opération pilote de Longueuil. Non pas à
cause des efforts déployés par les personnes qui y sont
impliquées, parce qu'elles font des efforts absolument extraordinaires
je vous avoue que je suis là pour en témoigner, je le sais
mais uniquement à cause du soutien qui n'est pas là de la
part du ministère de la Justice si on veut véritablement faire
une expérience pilote et arriver ensuite avec un résultat qui
cadrerait avec ce qu'on projetait.
M. Levesque: Est-ce que le député veut parler de
l'équipement en place?
M. Burns: Je parle de l'équipement, je parle des locaux,
je parle également de l'attention cela n'a l'air de rien, ce que
je dis là du ministère de la Justice à l'endroit
des gens qui se fendent en quatorze pour essayer de faire quelque
chose avec une cour qui est véritablement le premier projet
décentralisé.
M. Levesque: Je pourrais peut-être dire
immédiatement au député que je le remercie d'abord de
l'information qu'il apporte. C'est une contribution. Il n'attaque pas
l'expérience elle-même.
M. Burns: Non, pas du tout, elle est bonne.
M. Levesque: II déplore certaines lacunes,
particulièrement du côté de l'équipement. Là
où je crois qu'il fait erreur, s'il me le permet, c'est qu'il attribue
cela au manque d'attention soutenue de la part du ministère à
l'endroit de cette expérience. On m'informe que l'édifice qui
s'appelle l'édifice Monval...
M. Burns: Monval, c'est cela.
M. Levesque: ...ne serait pas adéquat, on l'admet. Manque
de salles, manque de cellules, manque de personnel, surtout parce que l'on a
choisi cela, apparemment, dans le temps, sans avoir prévu le volume des
affaires qui pouvaient se transiger à cet endroit ou se poursuivre, si
vous voulez, plutôt que se transiger, à cet endroit. Nous avons
pris déjà certaines dispositions pour ajouter, d'ici
février prochain ce sont les renseignements qu'on me fournit
trois salles d'audience pour les sessions, plus un espace nouveau pour
les cellules.
Evidemment, ceci est préliminaire à un projet qu'on
caresse au ministère. Je ne veux pas le cacher, nous songeons à
un district judiciaire sur la rive-sud, avec l'équipement qui correspond
à cette volonté de desservir cette population de 330 000
personnes, je pense, si je ne m'abuse. Nous croyons qu'un district judiciaire
pourrait fort bien être justifié. Ceci veut dire, par exemple, des
équipements beaucoup plus considérables, c'est-à-dire un
palais de justice, etc., avec tout ce que cela comporte. Dans le contexte
actuel, nous ne pouvons pas y songer pour cette année.
Peut-être que nous pourrions commencer à y songer l'an
prochain, je ne le sais pas, selon les disponibilités
budgétaires.
Mais, en attendant, pour être juste envers les officiers du
ministère, ils se préoccupent grandement d'apporter le soutien
dont parle le député de Maisonneuve, qui n'est pas encore
là, je l'admets, mais qui devrait l'être dans les mois qui
suivront.
M. Burns: Ce que je veux vendre comme idée au ministre de
la Justice, c'est ceci. Lorsqu'on se lance dans un projet pilote, il faut
véritablement motiver les personnes qui participent à
l'élaboration de ce projet pilote. Il ne faut pas les décourager.
C'est cela qui est particulièrement important.
M. Levesque: Je pense que votre message a été
entendu ce soir.
M. Burns: Je l'espère parce qu'il n'y a rien de
plus...
M. Levesque: Je dois dire que, déjà, les officiers
du ministère étaient sensibilisés à la situation,
mais je crois que le message que vous apportez ce soir aura peut-être
pour effet de les sensibiliser davantage. Même celui qui vous parle en
est heureux. A un moment donné, on est pris avec 20 millions de
problèmes. Peut-être que certains problèmes qui sont
apportés lors de l'étude des crédits peuvent changer de
degré de priorité. C'est une contribution positive.
M. Burns: M. le ministre, c'est la dernière remarque que
je fais là-dessus, pour vous donner un indice important, à mon
avis, de cette affaire. Simplement, sans vous donner de réponse, je vais
vous lancer la perche sur le nombre d'employés, et pas les moindres
je pense à des employés de direction qui,
successivement, ont été considérés comme des
intérimaires. Cela n'est pas, à mon avis, de nature à
promouvoir une véritable expérience pilote. Je vous lance cela et
vous en ferez ce que vous voudrez. Je n'ai pas l'intention d'en discuter
davantage.
M. Levesque: Merci.
M. Burns: M. le Président, je dois dire que, pendant tout
ce temps, je ne parlais pas du député du Lac-Saint-Jean, en
parlant des expériences pilotes!
Le Président (M. Pilote): Je vais faire enregistrer mon
nom bientôt pour garder l'exclusivité!
M. Burns: Je ne sais pas, M. le Président, quelle latitude
vous allez me donner quant à mon autre question. C'est,
évidemment, relatif au projet de loi no 53.
M. Levesque: Sur?
M. Burns: Projet de loi qui s'intitule Loi modifiant la Loi des
tribunaux judiciaires. J'espère que les juges qui sont ici ne quitteront
pas la place avant que nous ayons terminé cette discussion.
M. Levesque: Le député de Maisonneuve sait fort
bien qu'on n'en discutera pas ce soir. Ce serait enfreindre le
règlement.
M. Burns: Non, je le sais bien. Je n'ai pas l'intention de
discuter du fond du projet de loi. Mais j'aimerais avancer le débat ou
lui permettre d'être beaucoup plus mûr lorsque nous en discuterons
en Chambre, peut-être demain je ne le sais pas ou
après-demain. Là-dessus, M. le Président, je vous
demanderais et je demanderais au ministre de la Justice une certaine latitude
pour permettre une certaine discussion franche, qui n'a rien à faire
avec quelque attitude parlementaire que nous devrons avoir
éventuellement.
Je vous dis que cela ne fait pas partie de quelque attitude
parlementaire que nous pourrions avoir éventuellement, même si
cette attitude parlementaire pouvait aller jusqu'à un "filibuster".
Je demande simplement au ministre de la Justice, à cause des
compétences qui l'entourent, à cause de la connaissance qu'il a
du dossier, de peut-être nous chiffrer l'article 7, ou si vous voulez,
l'article 7 du projet de loi no 53 qui, pour le bénéfice de tout
le monde, se lit comme suit, qui est fort compréhensible à
première vue. Cela fait plusieurs fois que je lis le premier paragraphe,
et je demande à tous les juristes qui vous entourent de nous
éclairer...
M. Levesque: M. le Président, je suis obligé de
m'opposer, sur une question de règlement, à discuter un projet de
loi ici dans le cadre de l'étude des crédits du ministère
de la Justice alors que les députés ont été saisis
cet après-midi de ce projet de loi. Le député de
Maisonneuve, avec son expérience parlementaire, ne m'en voudra pas de
lui rappeler que ce projet de loi, devant être étudié
prochainement à l'étape de la deuxième lecture, recevra,
à ce moment, toute l'attention qui lui revient. Je ne crois pas que cela
doive être discuté à ce moment-ci, sans que nous ayons
demandé à l'Assemblée nationale d'en discuter. Cependant,
je puis, pour répondre au voeu du leader de l'Opposition, le
député de Maisonneuve, faire un bref exposé, mais je ne
parlerai pas après cela. Je ferai un bref exposé de la
situation...
M. Burns: M. le ministre, avec la permission du
président...
M. Levesque: Avec le consentement unanime.
M. Burns: Oui, moi je vais donner sûrement mon consentement
parce que...
M. Levesque: Je ferai seulement un exposé, je vais
écouter toutes les questions que posera d'abord le député
de Maisonneuve, je suis prêt à faire cela, avec mon consentement,
écouter les questions qu'il a à poser et j'en prendrai note.
M. Burns: Regardez, M. le ministre, je vous pose des questions
simplement et sans aucune arrière-pensée, mais je ne suis pas
satisfait de votre réponse comme telle. Vous me dites: Cela va se
discuter en Chambre. Sur le plan réglementaire, c'est possible que cela
puisse se défendre. Mais lorsque je sais qu'éventuellement ces
crédits, même s'ils sont chargés pour l'année en
cours aux crédits consolidés...
M. Levesque: ...
M. Burns: ...au fonds consolidé, je sais fort bien qu'ils
ne font pas partie de vos crédits actuellement, sauf qu'ils font partie
d'une politique que vous défendez, n'est-ce pas? Et comme tels...
M. Levesque: C'est pour cela que je voulais faire un bref
exposé.
M. Burns: Non, je n'ai pas l'intention de faire le débat
ici que nous aurons à faire en deuxième lecture ou encore que
nous aurons à faire en commission parlementaire lorsque la
deuxième lecture aura été adoptée. Sauf que
j'aimerais bien savoir de quoi je vais parler et j'avoue mon ignorance, j'avoue
ma faiblesse devant la rédaction du texte suivant. Permettez-moi de vous
le lire et vous allez sans aucun doute...
M. Levesque: Je le sais par coeur.
M. Burns: ...être capable de me le décortiquer.
C'est l'article 7 de la loi qui se lit comme suit: "Le niveau de
rémunération établi en vertu de ladite loi pour chacun des
juges en chef, juge en chef adjoint et juge puînés de la Cour
provinciale, de la Cour des sessions de la paix, de la Cour du bien-être
social, ainsi que le niveau de rémunération des juges des Cours
municipales de Laval, Montréal et Québec est, à compter du
1er janvier 1976 je comprends qu'il y a rétroactivité
là, et cela, vous n'avez pas besoin de me l'expliquer, je viens de me
rendre compte de cela modifié en y intégrant le produit du
calcul effectué en multipliant ledit niveau par le pourcentage de
l'augmentation applicable à la classe d'emploi "administrateur I",
intervenue entre le 1er janvier 1974 et le 1er janvier 1976, et calculée
en soustrayant le taux maximum établi en vertu du C.T. no 77,159 du 9
janvier 1974 du taux maximum établi par le C.T. no 98,980 du 21 avril
1976".
Moi, je veux savoir combien ça coûte, ça. Cela donne
quoi comme salaire, ça? C'est tout ce que je veux savoir.
M. Levesque: Ah bon! vous auriez pu le dire tout de suite.
M. Burns: Quand j'ai lu cela, je me suis dis: Moi, je suis un bon
avocat. J'ai regardé toutes les dispositions légales...
Des Voix: Ah!
M. Burns: Oui. Si je ne pensais pas que je suis un bon avocat,
j'aurais des problèmes. En tout cas, je pense que je suis un bon avocat
et je suis habitué à interpréter des textes.
Celui-là, j'ai eu de la difficulté à l'interpréter
parce que je ne sais pas exactement à quoi on se réfère.
Je voudrais, en chiffres, que vous nous disiez que le juge en chef va recevoir
tant, que le juge en chef adjoint va recevoir tant, que les juges
puînés vont recevoir tant. C'est ce que je voudrais savoir.
M. Levesque: Avez-vous d'autres questions? Parce que je ferai
seulement un bref exposé et ce sera fini.
M. Burns: Le reste est une chose qui va se faire en haut, en
Chambre, et je n'ai pas l'intention d'aller plus loin à ce niveau. Je
veux tout simplement que vous nous situiez par rapport au projet de loi.
M. Levesque: Je demanderais le consente-
ment unanime pour répondre d'une façon brève par un
exposé sur cette question.
Le Président (M. Pilote): D'accord? Allez.
M. Levesque: En effet, j'ai déposé aujourd'hui le
projet de loi no 53, Loi modifiant la Loi des tribunaux judiciaires. Ce projet
de loi a pour effet d'augmenter le nombre de juges dans diverses cours du
Québec pour des raisons que j'aurai à expliciter lorsque viendra
la discussion du projet de loi. Il y a un sujet qui semble intéresser
davantage le député de Maisonneuve et c'est celui de la
rémunération des juges. Je voudrais simplement et très
brièvement...
M. Burns: Si vous permettez, M. le ministre...
M. Levesque: C'est-à-dire que ce qui l'intéresse
c'est de savoir le montant exact...
M. Burns: Le reste du projet de loi m'intéresse beaucoup
aussi, mais la partie du projet de loi que je comprends moins que les autres,
c'est celle-là. Alors, je vous demande...
M. Levesque: Celle-là qui a été
décrite de façon si intéressante.
M. Burns: Oui. Parce que la nomination des juges fera l'objet
également de nos remarques en deuxième lecture, je comprends
très bien cela. Je pourrai tirer mes propres conclusions quant au nombre
de juges que vous...
M. Levesque: D'accord. Si le député ne veut pas
m'interrompre pour que je ne perde pas le fil de mes petites
idées...
M. Burns: Non, mais je ne veux pas que vous partiez sur une
mauvaise "shire".
M. Levesque: Scire, en latin, cela veut dire savoir, n'est-ce
pas? Scire.
M. Burns: C'est cela. Alors, j'aimerais savoir...
M. Levesque: Vu que le député ne le sait pas, je
vais essayer de l'éclairer. Ceci étant dit, je voudrais rappeler
à cette commission l'importance, d'abord, dans notre système
constitutionnel, de ce pouvoir qui s'appelle le pouvoir judiciaire. Comme on le
sait, nous attachons bien de l'importance à notre système quant
au pouvoir législatif, dont nous faisons partie; nous attachons
également de l'importance au pouvoir exécutif, mais je crois que
le public, lui, attache encore une plus grande importance, pour la protection
de ses droits, à l'institution qui s'appelle le pouvoir judiciaire.
Dans le système où nous vivons, d'après notre
constitution et d'après nos lois, nous devons, au législatif,
nous occuper du pouvoir judiciaire. Nous devons établir les
règles du jeu, nous devons établir les cours de justice, nous
devons voter les budgets et nous devons, entre autres choses, nous occuper de
la rémunération des juges. Nous devons le faire, nous n'avons pas
le choix. Si nous avions un autre choix, une alternative, probablement que nous
n'accepterions pas ce fardeau, cette responsabilité, mais, dans le
système actuel, nous avons cette responsabilité et nous devons
l'assumer pleinement. Nous devons l'assumer en pensant à ce qu'il y a de
plus important pour le public du Québec en particulier,
l'indépendance de la magistrature.
Il ne faut, en aucun cas, que la magistrature se sente liée ou
dépendante et qu'en aucune façon un juge sente que l'une ou
l'autre de ses décisions puisse être affectée ou
influencée par une décision ou une suggestion de
l'exécutif ou une décision du législatif.
Ces pouvoirs doivent être séparés. On a toujours
parlé de la séparation des pouvoirs et il faut s'assurer qu'il en
soit ainsi. Il faut que nous ayons l'indépendance de la magistrature. Je
pose cela comme prémisse et je pense bien que tout le monde est d'accord
ici autour de cette table.
M. Burns: D'accord.
M. Levesque: Le livre blanc de la justice...
M. Burns: Sauf que vous êtes en train de faire votre
discours de deuxième lecture.
M. Levesque: Non, non, j'ai dit que je ferais un bref
exposé, il va être bref.
M. Burns: D'accord.
Rémunération des juges
M. Levesque: Je dis, M. le Président, que dans le livre
blanc de la justice, qui a été le fruit d'une collaboration
extrêmement importante et intense de la part de mon
prédécesseur, de ses collaborateurs et même de
personnes-ressources appelées à apporter une contribution dans sa
confection, il y avait différentes recommandations, que j'ai
étudiées pendant plusieurs séances depuis que je suis au
ministère de la Justice.
A la suite de ces séances d'étude, d'information,
d'échanges de vues, etc., nous avons préparé un projet de
loi et je dois, dans les semaines qui suivent, procéder à des
consultations qui sont d'ailleurs commencées à ce
sujet. Cela va toucher à différents sujets comme l'organisation
elle-même des tribunaux judiciaires pour assurer une meilleure
cohérence, une meilleure coordination, une meilleure mobilité,
une charge de travail mieux distribuée, etc., etc., la création
possible d'un conseil de la magistrature, d'un comité de surveillance,
et différents aspects de la vie quotidienne des tribunaux.
Parmi ces recommandations il y avait également aussi pour assurer
une indépendance à la magistrature, des recommandations quant
à la rémunération des juges et un plan de retraite pour
ces mêmes juges. Dès l'automne, j'ai l'intention de déposer
un projet de loi qui va couvrir tous ces
sujets. Dans l'intervalle, cependant, je ne suis pas demeuré
insensible à la situation des juges nommés par le Québec.
Contrairement aux autres juges nommés par le fédéral,
contrairement aux fonctionnaires, particulièrement aux hauts
fonctionnaires que l'on peut considérer à peu près au
même niveau de rémunération, les juges nommés par le
Québec ont été laissés pour compte depuis trois
ans, sans avoir participé, sauf à un moment donné, mais
sans lendemain...
M. Burns: Ils ont été indexés.
M. Levesque: Non, seulement pour une année, et au lieu de
15% ou de 17%, c'est 8% et seulement pour cette année-là. Cela
n'a pas été intégré dans leur salaire de base. Ils
sont donc aujourd'hui dans la même situation...
M. Burns: Comme les gens du front commun.
M. Levesque: Pardon? Voulez-vous me laisser le front commun, j'ai
dit que je ferais un bref exposé...
M. Burns: Oui, oui.
M. Levesque: ...et garder vos arguments pour plus tard.
M. Burns: Non, non, mais écoutez, je suis obligé de
vous ramener dans la bonne ligne.
M. Levesque: Je dis que depuis 1973, ces juges sont
demeurés au même niveau de rémunération, à
$33 000. Rappelons-nous pour un instant qu'en 1970, ou aux environs de 1970,
1969/70, les juges de la Cour d'appel du Québec, nommés par le
fédéral, les juges de la Cour supérieure du Québec,
nommés par le fédéral, et les juges nommés par le
Québec, Cour des sessions, Cour provinciale, Cour du bien-être,
Cour municipale, avaient tous $28 000 de salaire annuel. C'était la
parité, c'était le principe auquel en étaient
arrivés les législateurs du temps.
J'étais moi-même en Chambre à ce moment-là et
je me rappelle que nous avions consacré la parité.
De plus, les hauts fonctionnaires, sous-ministres, seniors, si vous
voulez, avaient également, à ce moment-là, à peu
près la même rémunération, soit environ $28 000.
Donc, cette catégorie de grands serviteurs de l'Etat était sur un
même pied. Depuis six ans je n'ai pas à juger ce qui s'est
passé chez quiconque, mais je tiens simplement à relater des
faits depuis 1969 et 1970, la situation est devenue différente
pour les juges nommés par le Québec, contrairement aux deux
autres catégories, c'est-à-dire les juges nommés par le
gouvernement fédéral et les hauts fonctionnaires du gouvernement
du Québec. On peut en dire autant des hauts fonctionnaires d'Ottawa,
puisque c'est encore plus visible.
Ces hauts fonctionnaires, ces juges de la cour nommés par Ottawa
ont dépassé les $50 000 de rémunération annuelle et
les juges, nommés par le Québec, sont demeurés à
$33 000 de salaire de base. Je dis, et j'en prends la responsabilité,
que je n'ai pas le droit ce n'est pas un caprice de ma part de
laisser se perpétuer une situation comme celle-là, et cela pour
plusieurs raisons. Je n'ai pas le droit de laisser les juges nommés par
le Québec dans une situation aussi distante des juges nommés par
le gouvernement fédéral, parce que le ministre de la Justice
à Ottawa vient au Québec nommer ses juges dans le même
bassin d'avocats où il m'est permis de le faire. On ne peut pas demander
à un avocat de choisir la situation offerte par le gouvernement du
Québec plutôt que celle offerte par le gouvernement
fédéral, par je ne sais pas quel patriotisme ou je ne sais
quoi.
Si on voulait faire de la démagogie, on pourrait dire: Mon Dieu,
ils sont payés plus que tel ou tel groupe de la société,
mais il arrive que ce groupe est dans cette catégorie. Il y a des
avocats, comme le député le sait, qui font beaucoup plus que cela
annuellement. Le député de Maisonneuve le premier, s'il allait en
pratique privée, j'en suis sûr, pourrait facilement
dépasser de beaucoup l'un ou l'autre de ces salaires.
Je veux être dans une situation où je puis inviter
quelqu'un à accéder à la magistrature et avoir le
même choix que le gouvernement fédéral peut avoir. Je ne
veux pas être dans une situation inférieure où je suis
obligé d'accepter comme candidat, soit quelqu'un qui est malade,
fatigué ou assez riche pour se le permettre. Je veux être dans une
situation où je puis inviter un membre du Barreau et je veux, parmi les
meilleurs membres du Barreau, pouvoir choisir quelqu'un pour lui demander
d'accéder à la magistrature. Je ne veux pas être dans une
situation impossible comme celle-ci. Premièrement, c'est peut-être
un peu égoïste, mais je pense également à ces gens
qui ont accepté d'être juges et qui ont pensé, lorsqu'ils
ont accepté, qu'ils pourraient, comme n'importe quel fonctionnaire du
gouvernement, comme leurs collègues au gouvernement
fédéral, avoir une augmentation annuelle. C'est normal pour
toutes les catégories de la société. Tout le monde le
réclame, que ce soit le front commun, partout, on réclame une
augmentation annuelle.
M. Burns: Vous avez...
M. Levesque: J'ai dit que je ferais un bref exposé, on
aura l'occasion d'y revenir. Je dis que depuis 1973, à part les 8% en
question qui ont été annuels et qui sont disparus depuis, il n'y
a eu aucune augmentation pour les juges nommés par le Québec. Ils
sont encore au même point où ils étaient en 1973. En 1970,
on avait consacré la parité et, aujourd'hui, ces mêmes
juges... D'ailleurs, prenez deux juges qui ont été nommés
en même temps et qui avaient $28 000 en 1969-1970; aujourd'hui, six ou
sept ans après, ces mêmes juges, ayant accepté les
mêmes conditions, se retrouvent, parce qu'un est nommé au
fédéral, à $53 000, le minimum payé par Ottawa, et
à $33 000, s'il est nommé par le Québec.
D'ailleurs, qu'on regarde simplement ce qu'il s'est écrit ou dit
récemment. Prenons, par exemple, le Jour, un journal qu'on peut citer;
regardez ce que disait M. Laurent Laplante récemment...
M. Burns: Maintenant, cela...
M. Levesque: M. Laplante disait: II est plus avantageux
d'être juge fédéral à sa retraite que d'être
un juge nommé par le Québec et en pleine activité. C'est
beaucoup plus payant d'être à sa retraite pour un juge
nommé par le fédéral que pour un juge nommé par le
Québec. Je trouve que c'est une situation impossible, qui n'est plus
vivable. Je dois dire que j'ai fait des efforts considérables
personnellement auprès de l'ensemble de la magistrature pour faire
comprendre qu'à un moment donné les choses se
rétabliraient. D'ailleurs, je l'ai fait publiquement. Je l'ai dit
à la fin de décembre 1975, en Chambre, au vu et au su de toute la
population du Québec, et particulièrement des membres de
l'Assemblée nationale, qu'un projet de loi serait déposé
qui tiendrait compte de la rémunération des juges. J'ai dit,
à ce moment-là, que mon objectif j'aurais peut-être
dû aller plus loin, j'aurais peut-être dû consacrer la
parité
M. Burns: Vous auriez dû nous écouter aussi en
1973.
M. Levesque: Un instant, là.
M. Burns: Oui, quand nous vous avons proposé l'indexation
et que vous l'avez refusée.
M. Levesque: Ecoutez, si je peux retrouver cela au Journal des
débats, je serai le premier à dire que votre proposition valait
la peine d'être étudiée.
M. Burns: Oui. Lorsqu'on vous a dit: Si vous voulez maintenant
fixer le salaire des juges à tel montant et le salaire des
députés à tel montant, pourquoi, une fois pour toutes, ne
pas régler la question simplement et l'indexer...
M. Levesque: Si le député de Maisonneuve...
M. Burns: ... selon un critère acceptable pour toutes les
parties?
M. Levesque: Si le député de Maisonneuve peut me
fournir...
M. Burns: Nous n'aurions même pas, et cela...
M. Levesque: ... d'ici l'automne je recherche justement ce
mécanisme s'il peut me fournir de bonnes idées
là-dessus, je serai le premier à les étudier d'une
façon très attentive parce qu'il faudrait absolument en arriver,
si possible, à un mécanisme où on n'ait pas, nous,
à faire ce travail qui nous incombe, cependant, à ce moment-ci,
dans le système actuel. Mais si nous avions un mécanisme
où nous pourrions détacher encore plus la magistrature de ce
genre de soumission que les juges n'aiment pas ils n'aiment pas cela et
c'est normal, ils veulent garder leur indépendance qui est leur
privilège et qui est presque essentielle à la bonne
administration de la justice je suis ouvert à des suggestions de
cette nature. Si, en 1973, une telle suggestion...
M. Burns: Ou en 1974, soit l'une ou l'autre.
M. Levesque: Non, c'est 1973. Si, en 1973, cette suggestion n'a
pas été retenue, je ne sais pas pourquoi elle n'a pas
été retenue. Peut-être était-ce parce que le
mécanisme n'était pas suffisamment explicité.
Je termine mon exposé. Nous avons fait ceci en attendant, et j'ai
l'intention de revenir à l'automne. M. le Président, j'ai
l'intention de revenir à l'automne et c'est la raison pour laquelle je
suggère cela au député de Maisonneuve. Nous pourrions nous
en reparler quant au point de vue de mécanismes dans la loi
générale qui sera déposée.
Mais, en attendant, j'ai pensé qu'il serait juste et raisonnable
que nous indexions, depuis le 1er janvier 1974 jusqu'au 1er janvier 1976, ce
salaire de base. Indexé par quel mécanisme? Là encore, on
peut en choisir mille, mais j'ai pensé qu'en prenant un haut
fonctionnaire administrateur 1 de la fonction publique, dont les augmentations
ressemblent étrangèrement à celles qui sont
accordées dans la fonction publique aux divers niveaux et
échelons, en prenant le cas de l'administrateur 1 du 1er janvier 1974,
en prenant son cas le 1er janvier 1976, en établissant cette proportion
et en l'appliquant à la situation de juge, on ne faisait pas fausse
route.
Cela, je l'ai fait après consultation avec divers organismes du
gouvernement et afin d'avoir l'avis des experts là-dessus, ceux qui
s'intéressent aux relations de travail, etc. C'est à la suite de
ces consultations que j'ai pris cette méthode qui me semble la plus
objective possible. Peut-être que le texte qu'a lu tout à l'heure
le député de Maisonneuve n'est pas aussi clair qu'un chiffre
donné, mais je n'ai pas voulu mettre de chiffre, j'ai voulu mettre le
mécanisme plutôt...
M. Burns: Maintenant, je voudrais avoir le chiffre.
M. Levesque: Le chiffre est le suivant: Le taux maximum du CT 98
980, du 21 avril 1976, est $44 950 et celui du 9 janvier 1974, le CT 77 159,
est $35 000, ce qui fait une augmentation pour ces administrateurs de la
fonction publique de $9950, soit un pourcentage de 28,42%. D'accord? Autrement
dit, je prends le salaire versé d'après le CT 77 159, en 1974,
à un administrateur dans la fonction publique, de $35 000; si je laisse
courir ces augmentations jusqu'au CT de 1976, soit 98 980, on est rendu
à $44 950. Il a donc profité d'une augmentation de $9950 durant
ces années, soit un pourcentage de 28,42%. Je suis conservateur, je
prends le chiffre le plus près; je prends 28%.
M. Burns: Vous laissez tomber ,42%.
M. Levesque: ,42%.
M. Burns: Vous êtes bien gentil.
M. Levesque: Appliqué au salaire actuel de $33 000 plus
les 28% qui représentent $9240, cela me donne comme produit de cette
opération $42 240. Pour les juges en chef...
M. Burns: Ce qui veut dire, par rapport à $33 000 que les
juges reçoivent actuellement, la différence entre $42 240 et $33
000.
M. Levesque: Pour les juges en chef, $37 000, on fait le
même calcul et on arrive à $47 360. Je demanderais la
collaboration du député de Maisonneuve pour remettre
peut-être à plus tard la discussion là-dessus, parce que
j'ai accepté de répondre malgré que je n'étais pas
obligé en vertu du règlement.
M. Burns: Non, mais avec le consentement que vous avez
demandé à la commission, c'est bien évident que vous
m'avez invité à vous suivre dans les mêmes sentiers et
à vous dire...
M. Levesque: J'ai été très prudent. M.
Burns: Oui.
M. Levesque: Autrement, je ne pourrai pas me fier...
M. Burns: Oui, mais j'ai non seulement le droit, mais le devoir
de dire jusqu'à quel point moi aussi et mes collègues de
l'Opposition considérons comme essentiel le travail que les juges
exercent, n'est-ce pas? Vous avez...
M. Levesque: Je vais retirer mon...
M. Burns: Non, mais vous vous rendez compte que vous avez dit
cela? C'est là que je vous ai dit: Vous faites un discours de
deuxième lecture. C'est également dans notre opinion une des
fonctions essentielles et, sans vouloir faire de pathos, sans aucun doute, un
des éléments de la colonne vertébrale de notre
société que les membres de la magistrature exercent à
l'intérieur de notre société. Que ce soit bien clair dans
l'esprit de tout le monde que l'Opposition pense cela; il est essentiel de le
dire à ce moment-ci. Quant au reste, je n'ai pas du tout l'intention
d'entrer dans les détails, sauf pour une question que je pose
immédiatement au ministre de la Justice. Est-ce que le ministre de la
Justice acceptera éventuellement ou accepte l'idée, dès
maintenant, que la Régie des mesures anti-inflationnistes soit
appelée à se pencher sur l'augmentation que nous avons
l'intention de proposer à l'endroit des juges?
M. Levesque: Sachant, évidemment, la situation un peu
différente qui a été faite aux juges, il n'y a pas eu...
L'arrêté en conseil qui a touché les députés
et qui a touché certaines autres catégo- ries n'a pas
touché les juges. Cette catégorie n'est pas, en vertu des
décrets, touchée par les mesures anti-inflationnistes.
M. Burns: Est-ce à dire, M. le ministre, que vous
décidez pour la Régie des mesures antiinflationnistes de la
recommandation qu'elle devrait normalement être portée à
faire ou bien si vous acceptez que le projet de loi, peu importe le montant qui
sera accordé aux juges, puisse être soumis et cela on
pourrait le faire par voie d'amendement au projet de loi, éventuellement
à la recommandation...
M. Levesque: Libre au député de présenter
des amendements en commission.
M. Burns: Je vous dis tout de suite que je vais proposer un
amendement dans ce sens, mais...
M. Levesque: On verra.
M. Burns: ... il m'apparaît clair que vous devrez vous
brancher si vous me passez l'expression sur une affaire aussi
simple que celle-là.
M. Levesque: Je dois dire immédiatement au
député que les juges ne sont pas soumis présentement,
d'après la réglementation, à la Régie des mesures
anti-inflationnistes. Cela se comprend, pour des raisons historiques,
également. Il en a été question dans la loi
fédérale, d'ailleurs, où on mentionnait que dans certains
cas où il y a des raisons historiques... Je viens très
brièvement de faire un petit résumé historique et on voit
fort bien, cela saute aux yeux, que sur le plan historique, ils n'ont pas suivi
la même courbe que les autres.
M. Burns: Remarquez que vous m'incitez presque à ouvrir le
débat de deuxième lecture...
M. Levesque: Non, non.
M. Burns: ...mais j'y résiste, actuellement. Je n'ai pas
du tout l'intention...
M. Levesque: Je remercie le député de Maisonneuve
de m'avoir donné l'occasion de...
M. Burns: Vous allez faire les journaux avec cela demain!
M. Levesque: Pensez-vous?
M. Burns: Ah oui! j'en suis convaincu.
Une Voix: II n'y en a pas un qui a pris des notes!
M. Burns: Ah non! mais tout le monde a compris ce qui se
passait.
Je voudrais simplement faire une césure. On reviendra
là-dessus, mais je vous avoue tout de suite que, dans le fond, je vous
dévoile un peu
quelle sera l'attitude de l'Opposition relativement à ce salaire
des juges. Je n'ai pas l'intention d'y aller plus profondément.
Avant de revenir parce que ce n'est pas fini, en ce qui me
concerne, le programme 1, élément 1, viendra par la suite...
M. Levesque: M. le Président, puis-je demander au
député de Maisonneuve et aux membres de la commission s'ils ont
beaucoup de questions à poser sur la Commission de contrôle? On
pourrait libérer...
M. Burns: La Commission de contrôle des permis
d'alcool?
M. Levesque: Oui. On pourrait libérer le juge Trahan qui
m'avait... Il est trop tard maintenant? D'accord.
M. Burns: Cela va?
M. Levesque: II a manqué son rendez-vous.
M. Burns: On va le garder avec nous. On vous aime bien, M. le
juge. Restez avec nous.
Le problème des transsexués
M. Burns: Avant de revenir de façon précise au
programme 1, élément 1, c'est-à-dire là où
je vous parlerai à nouveau des juges, mais pas sous l'aspect
général comme on vient d'en traiter, j'aimerais vous soumettre un
problème qui est beaucoup plus général et qui touche
à la législation. Je profite de l'occasion de voir Me
Crépeau, qui est présent avec nous ce soir, dont une des
sous-commissions nous a déjà fait rapport. C'est le
problème des transsexués. Vous allez dire que c'est une
transition un peu spéciale, passer des juges aux transsexués,
mais ce n'est pas avec mauvaise volonté et avec des
arrière-pensées que je fais cela. Au contraire, je
considère le problème des juges et le problème des
transsexués comme des problèmes très importants. Dans l'un
et l'autre cas, je trouve que cela mérite qu'on s'y arrête
très sérieusement.
J'ai, depuis un certain temps, été amené à
prendre connaissance d'un cas qui, comme simple citoyen, me paraissait
inexistant. C'est peut-être quelque chose, d'ailleurs, qui pourrait
éventuellement intéresser les membres de la Commission' des
droits et libertés de la personne. Il arrive que, depuis un certain
nombre d'années, il y a des personnes, soit mâles ou femelles,
qui, à cause de leur caractère bisexuel, se retrouvent dans une
situation où elles sont obligées de faire un choix et ce choix
est habituellement très judicieusement exprimé. Je ne connais
pas, en tout cas, de cas où cela se fasse simplement par un caprice.
Cela se fait à la suite d'examens psychiatriques et physiologiques
très importants. On en arrive à la conclusion qu'une personne qui
est carrément bisexuée, c'est-à-dire qui a, très
souvent, très sérieusement toutes les caractéristiques
physiologiques du mâle et de la femelle je parle des hommes et des
femmes se trouve à être obligée de faire ce choix.
Le ministre n'a pas l'air de m'écouter, là.
M. Levesque: Oui, religieusement.
M. Burns: Oui, bon, d'accord, parce que je trouve cela
très important. Vous allez voir que j'y arrive très rapidement.
Je connais actuellement au moins une dizaine de cas au Québec il
y en a sans doute plus que cela de personnes qui ont été
obligées de faire ce choix et même de subir des interventions
chirurgicales qui les plaçaient carrément dans la
catégorie soit des femmes ou soit des hommes. Je connais plus de cas
où il s'agit de personnes qui étaient autrefois connues comme des
hommes, c'est-à-dire du sexe masculin, et qui sont devenues, à la
suite d'une opération, d'une intervention chirurgicale, de sexe
féminin. Aujourd'hui, elles sont en mesure de démontrer,
certificat médical à l'appui, qu'elles sont, physiologiquement
parlant, des femmes, sauf qu'il y a un tout petit problème qui peut nous
apparaître simple au départ, mais qui est très grave pour
les personnes concernées, c'est qu'on se retrouve avec des personnes qui
sont considérées, au niveau des registres de l'état civil,
comme étant du sexe masculin, alors que ce sont effectivement des
femmes. Ces personnes ont sûrement un certain nombre d'embêtements
et doivent en supporter les conséquences, par exemple, continuer
à s'appeler Joseph quand on voudrait s'appeler Denise ou, encore une
fois, ne pas être capable de se marier avec une personne du sexe
masculin, parce qu'on est du sexe masculin au point de vue des registres de
l'état civil, ou encore subir et c'est peut-être là
que la Commission des droits et libertés de la personne pourrait
être intéressée à cela de la descrimination
tant au niveau de l'emploi qu'au niveau du logement ou de toute autre
façon dont on peut subir une certaine discrimination. Par exemple, si je
m'appelais aujourd'hui Thérèse, je pense qu'il y a beaucoup de
gens qui me poseraient un certain nombre de questions si j'allais louer un
appartement sous le nom de Thérèse Burns à tel endroit.
Aussi bizarre que cela puisse paraître, c'est le genre...
M. Levesque: II y a la moustache d'abord.
M. Burns: Oui, en tout cas, moustache en moins, c'est le
genre...
M. Levesque: II y a de l'ouvrage à faire pour être
une Thérèse.
M. Burns: Je veux que tout le monde soit sérieux
là-dessus. Il est essentiel de se rendre compte que c'est le genre de
problème qu'ont à subir un certain nombre de personnes. Ce n'est
peut-être pas de cent mille personnes que je vous parle, mais je vous
parle quand même de cas de plus en plus nombreux dans notre
société qui doivent faire face à cela.
Il y a déjà, dans le rapport de la Commission
de révision du Code civil, des suggestions qui sont faites quant
aux amendements qui pourraient être apportés au Code civil et, en
particulier, au niveau de la reconnaissance de ce changement de sexe et au
niveau, particulièrement du changement de nom.
J'aimerais savoir l'intention du ministre de la Justice relativement aux
suggestions qui sont faites par la Commission de révision du Code civil
même si, sauf erreur, la recommandation qui a été faite
jusqu'à maintenant est une recommandation préliminaire qui, sans
doute, n'est pas finale, donc, qui pourrait peut-être être
révisée éventuellement quant aux textes mêmes qui
doivent être changés au Code civil. Mais à cause de
l'acuité du problème, et du nombre de plus en plus grand de cas
qui seront portés à notre connaissance, je me demande ce que le
ministre de la Justice a l'intention de faire au point de vue de la
législation pour tenter de corriger cette situation.
Je m'excuse d'avoir été un peu long dans l'exposé
du problème, mais cela me paraît un problème très
important. Quand vous avez des personnes, dans la société, qui ne
se retrouvent pas dans les catégories, aussi bête et aussi "plate"
que cela puisse paraître, dans les cadres qui sont déjà
préfabriqués par la société pour un certain nombre
de personnes, il n'y a rien de pire, il n'y a pas de discrimination pire
à l'endroit d'un certain nombre de personnes. Si on est en droit de
dire, médicalement parlant, que M. Untel est effectivement devenu une
femme, il faut placer la loi à sa disposition pour que cette personne
puisse faire reconnaître ses droits comme femme et non pas comme M.
Untel, alors qu'effectivement ce M. Un-tel est devenu une femme. C'est le
problème de base avec tout ce que cela comporte.
J'aimerais savoir ce que le ministre de la Justice a l'intention de
faire en égard à ce problème.
M. Levesque: Le député de Maisonneuve s'excuse,
jusqu'à un certain point, d'avoir été long. Libre à
lui de prendre le temps qu'il veut, en commission, pour traiter d'un sujet
qu'il affectionne. J'ai simplement noté...
M. Burns: Que je trouve très important.
M. Levesque: ... qu'il semblait plaider plus en faveur des
transsexués qu'en faveur des juges.
NI. Burns: Non. Ecoutez! Un instant!
M. Levesque: Non, non, je voulais simplement...
M. Burns: On m'a dit clairement tout à l'heure... Vous
allez voir qu'en Chambre je vais plaider pas mal plus longtemps sur l'affaire
des juges que sur l'affaire des transsexués, pas parce que je
considère l'un plus important que l'autre, je considère qu'il
s'agit de deux domaines tout à fait différents. En Chambre, on
m'a restreint, et je pense m'être restreint moi-même parce que je
ne voulais p.as faire un discours de deuxième lecture sur l'augmentation
de salaire des juges. Je vous dis que vous allez en entendre parler, de
l'augmentation de salaire des juges. Je vous le dis tout de suite.
M. Levesque: Je m'attends bien à cela.
M. Burns: Sauf que c'est tout à fait dans l'ordre, d'autre
part, de vous poser une question sur vos intentions relativement à la
modification de la loi en matière de transsexualité. C'est bien
différent.
M. Levesque: Je respecte...
M. Burns: C'est le genre de petites farces qui peuvent nous faire
durer jusqu'à 4 h 30 demain matin. Je vous le dis tout de suite.
M. Levesque: C'est le genre de chantage que l'on a vers la fin de
chacune des sessions. J'ai cité le député de Maisonneuve,
il n'y a pas si longtemps, lorsqu'il me demandait: Pourquoi apporter une motion
comme celle-là? Il sait fort bien que nous sommes très objectifs,
mais à un moment donné, quelqu'un fait une petite blague qui
n'est pas acceptée, comme celle que je viens de faire... Je sais fort
bien qu'il n'y a aucune relation entre le sujet ou l'autre, mais je ne pouvais
pas m'empêcher...
M. Burns: C'est parce que je conçois les deux comme
très importants.
M. Levesque: Je ne pouvais pas m'empêcher, à un
moment donné, de taquiner un peu le député de
Maisonneuve.
M. Burns: Vous avez le droit de me taquiner, mais pas sur des
affaires importantes comme celle-là.
M. Levesque: Oui, mais je vous ai taquiné sur une autre
affaire importante.
M. Burns: Vous êtes bien chanceux, je suis bien de bonne
humeur, ce soir.
M. Levesque: Bon. Je vais répondre d'une façon
très objective au député de Maisonneuve. D'ailleurs, il
m'a parlé de ce sujet avant aujourd'hui et je lui avais répondu
d'une façon également objective. Je m'étais
intéressé à la question qu'il m'avait soumise. Je ne peux
pas dire que je rejette cela du revers de la main même si, à
l'occasion, on peut faire une blague. Mais je ne la regrette pas encore! Je
veux que le député de Maisonneuve...
M. Burns: Vous recommencez!
M. Levesque: ... sache qu'on a le droit de part et d'autre de
faire les remarques...
M. Burns: Oui, oui.
M. Levesque: ... qu'on juge à propos de faire. M.
Burns: J'admets cela.
M. Levesque: Pour ces personnes, je dois dire qu'elles sont,
à ma connaissance, assez peu nombreuses dans la société
québécoise et elles pourraient demander un changement de nom. Je
pense bien que, selon la législation que nous avons aujourd'hui et les
pouvoirs que nous avons au niveau du lieutenant-gouverneur en conseil, nous
pourrions changer le nom de la personne en question, le nom. Je ne me rappelle
pas tellement mes cours de droit mais, à un moment donné, il me
semble qu'on avait dit que la législation pouvait faire n'importe
quoi...
M. Burns: La législation peut faire n'importe quoi...
M. Levesque: ... sauf changer un homme en femme.
M. Burns: C'est vrai.
M. Levesque: Peut-être que c'est changé aujourd'hui.
Cela fait déjà quelques années que j'ai passé les
examens du Barreau.
M. Burns: Cela c'était avant l'époque où un
certain premier ministre a dit: Jamais, sous mon règne, il n'y aura un
ministère de l'Education. Un an plus tard il y en avait un.
M. Levesque: Vous allez tomber dans...
M. Burns: Vous vous rappelez c'était votre chef.
M. Levesque: Vous allez tomber exactement dans le genre de choses
que vous me reprochiez il y a deux ou trois minutes.
M. Burns: Oui, oui. Je me rappelle également le même
premier ministre, qui disait: Jamais la reine ne négociera avec ses
sujets. Cela fait exactement...
M. Levesque: II aurait dû rester avec cela lui. Cela ferait
bien.
M. Burns: Cela fait exactement trois fois que la reine
négocie avec ses sujets.
M. Levesque: II n'aurait pas dû changer d'idée.
M. Burns: C'est arrivé quand même.
M. Levesque: Quant à la question de l'état civil
cependant, pour parler de ces personnes, à un moment donné elles
désirent se marier ou postuler un emploi, et cela leur cause
sûrement un préjudice réel. Quoi faire dans une situation
assez nouvelle pour nous, une situation comme celle-là?
Premièrement, et je pense que j'en ai déjà
parlé avec le député de Maisonneuve, nous avons
consulté l'Office de révision du Code civil. Me Crépeau
est ici, il doit sûrement se rappeler cette demande que nous avions
faite. D'ailleurs l'office nous a transmis un avant-projet de rapport au
début de l'année, que nous avons remis à divers juristes
pour consultation, justement avant que l'office donne un rapport
définitif sur cette question. J'espère bien que nous pourrons,
avec le rapport définitif, demander à la Législature ce
qu'elle entend faire, quel sort elle réserve à cette
recommandation de l'office.
En attendant, qu'est-ce que l'on fait? Eh bien...
M. Burns: C'est ce que je vous posais comme question.
M. Levesque: ... tout ce que je m'imagine que l'on pourrait
faire, ce serait de légiférer dans un bill public, mais je pense
bien que cela ne se ferait qu'à la suite du rapport de l'office. C'est
normal que nous attendions le rapport. Une autre façon de
légiférer, c'est par bill privé. D'ailleurs, je pense que
quelques députés ont eu des demandes, mais aucun
député n'a accepté jusqu'ici de déposer un bill
privé pour répondre à l'une ou l'autre de ces
demandes.
M. Burns: Parce que, j'imagine, tous les députés
sont dans l'attente de la législation générale...
M. Levesque: Peut-être, mais moi je ne prévois
pas...
M. Burns: ... qui pourrait s'appliquer à tous.
M. Levesque: ... cela dans un avenir prochain,
c'est-à-dire que je ne prévois pas cela d'ici un an ou deux. Dans
l'intervalle, est-ce qu'il y aurait lieu de procéder par bill
privé? Je ne suis pas en mesure de dire quel sort serait
réservé à un tel projet. Il faudrait bien avoir l'occasion
d'entendre les parties.
M. Burns: Même avant...
M. Levesque: J'imagine bien que la commission de la justice,
à qui ce serait déféré, la commission que nous
sommes présentement, aurait à se prononcer là-dessus, mais
c'est tout ce que je puis dire.
M. Burns: Mais vous vous rendez compte du coût que cela
comporte pour les personnes concernées? C'est cela, dans le fond, que je
pose comme problème. La plupart des personnes concernées,
à cause justement de leur statut, passez-moi l'expression, ambigu, sont
dans l'impossibilité, dans de nombreux cas, de se trouver du travail.
Alors, vous demandez à quelqu'un de proposer un projet de loi
privé, qui va lui coûter, disons, grosso modo, environ $2000. Or,
ce sont des personnes qui, justement à cause de leur sta-
tut "ambigu", je le répète entre guillemets
sont drôlement placées pour présenter un tel projet de loi.
C'est la raison pour laquelle je vous pose cette question. Parce que ce qu'on a
réussi à faire, uniquement avec nos normes conventionnelles,
à l'endroit de ces personnes, c'est de faire d'elles des individus qui
sont des équations de personne dans la société. C'est
très grave.
On vient de décider que, même en changeant de nom,
Jean-Pierre Dutremplin qui devient Lise Dutremplin va continuer à
être le fils de... C'est ce que cela veut dire, si on ne change pas leur
qualité de...
M. Levesque: Mais le député ne croit-il pas qu'il
faudrait attendre le rapport définitif de l'office, avant de modifier le
Code civil?
M. Burns: J'ajoute simplement que... Le ministre de la Justice,
tout à l'heure, tout en disant qu'il ne rejetait pas le problème
du revers de la main et qu'il le considérait comme important, ajoutait
qu'il s'agit quand même d'un très petit nombre de personnes
concernées. Jusqu'à maintenant, je suis prêt à dire,
comme lui, qu'il s'agit fort probablement d'un nombre de personnes
inférieur à une centaine.
M. Levesque: Peut-être inférieur à dix!
M. Burns: Non, je puis vous assurer qu'il s'agit de plus de dix
personnes. Mais, pour ma part, cela m'apparaît comme
particulièrement important, parce que et cela est peut-être
le premier indice déjà la Commission de révision du
Code civil s'est penchée là-dessus. Alors, c'est
déjà quand même beaucoup plus d'une dizaine de personnes;
on envisage des changements d'une loi à caractère public à
cause de ces personnes. Cela m'apparaît doublement important, parce qu'il
y a des personnes qu'on ne situe pas c'est plate à dire
à l'intérieur de la société, qu'on ballotte
littéralement à l'intérieur de la
société.
Si Me Crépeau a des choses à ajouter à cela, je
n'ai aucune espèce d'objection à ce qu'il vienne nous en parler
puisqu'il est ici. Mais, en ce qui me concerne, je trouve qu'on ne doit pas
mettre de côté un problème comme celui-là, comme
étant quelque chose qui ne concerne qu'une dizaine ou une vingtaine de
personnes à travers le Québec.
M. Blank: Pour ma part, je ne vois pas pourquoi on ne peut pas le
faire, en attendant les changements de la commission, avec les lois actuelles.
Je pense qu'il y a assez, dans les lois actuelles, pour faire exactement ce que
vous voulez. Pour commencer, cela ne coûte pas tellement cher de faire un
changement de nom. On commence avec le changement de nom. Si on fait une
requête à l'Exécutif pour faire un changement de nom, avec
tous les faits qu'on donne, je suis certain que le cabinet peut donner ce
changement de nom. Après, il y a le certificat de naissance. Or, ce ne
sont pas tous les certificats de nais- sance cela dépend de
l'église, de la synagogue ou de la personne qui a fait l'enregistrement
qui parlent d'un fils ou d'une fille de... Il y en a qui disent qu'un
enfant est né de tel ou tel nom. Cela veut dire qu'on ne mentionne pas
le sexe; le sexe n'est pas nécessairement mentionné dans le
certificat de naissance et il n'y a pas d'obligation de le mentionner. Le seul
endroit où on mentionne le sexe, c'est au département de
démographie, avec les hôpitaux.
Je dois dire que si, par hasard, il est mentionné dans le
certificat de naissance que c'est un fils ou une fille, après avoir
obtenu une décision du Cabinet disant que Jean-Paul est changé en
Lise, si on fait une requête pour rectification du registre au juge de la
Cour supérieure...
M. Burns: Jamais!
M. Blank: ...donnant tous les faits, je pense qu'il accorderait
cela.
M. Burns: Jamais!
M. Blank: Cela serait fait avec nos lois actuelles. C'est une
opinion, mais si vous avez des juges libéraux...
M. Burns: On ne se lancera pas des avis juridiques, mais je ne
suis pas du tout d'accord avec le député de Saint-Louis.
M. Blank: Mais je pense qu'avec les mécanismes actuels
nous pouvons faire quelque chose dans les cas d'espèce jusqu'à ce
qu'il y ait une loi générale.
M. Levesque: Me Crépeau m'indique que, peut-être,
nous pourrions accélérer de ce côté, mais cela fait
toujours partie de l'ensemble des recommandations de l'office.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Quant à la question de rectification, il n'y
a pas eu erreur au début. Ce n'est pas le nom qu'on veut rectifier.
M. Burns: Non, c'est cela. On ne peut pas demander de rectifier
quelque chose qui était exact.
M. Levesque: Me Crépeau m'indiquait également que
ce sera un critère médical qui sera retenu.
M. Burns: D'accord. D'ailleurs, là-dessus, je peux dire
à Me Crépeau, en ayant bien pris soin de lire les suggestions que
son sous-comité nous a faites en tout cas, j'irais un peu plus
loin, d'accord que je les trouve dans l'ensemble satisfaisantes ces
recommandations, ayant pris connaissance du problème de ces gens. Mais
cela m'apparaît une partie de législation qui pourrait être
autonome, qui pourrait être amenée de façon autonome devant
l'Assemblée nationale, sans déran-
ger l'ensemble ou la vision globale qu'on se fait de la révision
du Code civil, parce que...
M. Levesque: Je suis prêt à le revoir.
M. Burns: II s'agit là d'un problème nouveau. Il
s'agit quand même d'un problème qui...
M. Levesque: C'est-à-dire qu'il ne trouve pas de
solution...
M. Burns: Ailleurs.
M. Levesque: ... dans le Code civil actuel.
M. Burns: C'est cela, exactement. Ce que le député
de Saint-Louis disait tout à l'heure, je suis bien prêt à
l'écouter de façon bien sympathique, mais je ne trouve pas
qu'actuellement nous soyons en mesure de dire: II y a lieu à
rectification après changement de nom parce que ce n'est pas exact. A
l'époque, cette personne était soit mâle ou femelle,
était fille de, ou fils de. Alors, il s'agit de changer cela.
M. Levesque: Disons, pour répondre, que nous avons fait du
progrès durant la discussion. Ce qui me frappe dans l'argumentation du
député de Maisonneuve, c'est que justement on n'a pas
présentement de réponse, malgré que je tienne compte
également de ce que dit le député de Saint-Louis, soit
qu'il a une réponse dans ce que nous avons présentement, mais je
n'en suis pas sûr.
M. Blank: Une forme pratique.
M. Levesque: Une forme pratique peut-être.
M. Blank: Peut-être pas légale, mais pratique.
M. Levesque: C'est cela, mais, sur le plan légal, je dois
dire que nous n'avons pas de réponse, pour le cas précis que
soumet le député de Maisonneuve, dans notre législation
actuelle. Peut-être que ceci nous permettrait de faire diligence de
façon particulière. Le président de l'office me dit que
c'est éventuellement possible d'accorder à cela une attention
particulière.
M. Burns: Je me souviens que l'office nous avait
recommandé de modifier certaines dispositions relativement aux enfants
naturels et nous avons accepté de le faire, parce qu'encore une fois il
n'y avait rien à cet effet dans le Code civil. En tout cas, s'il y avait
quelque chose, c'étaient des choses inverses à la position que
l'office nous recommandait relativement à la successibilité des
enfants naturels. Nous avons donc adopté de façon autonome cette
partie du Code civil, quitte à ce que j'admette dès maintenant
qu'il n'est pas normal que, dans une grande révision du Code civil, on
prenne des morceaux ici et là. J'admets que la technique est mauvaise,
mais, il s'agit de problèmes particuliers et, si on l'a fait pour des
en- fants naturels, j'imagine que cela devrait peut-être se faire pour
des transsexués.
M. Levesque: J'attendrai le rapport que me fera, dans un avenir
prochain, le président de l'office. Quand je recevrai le rapport, j'en
ferai part au député de Maisonneuve et on pourra partir de
là, à ce moment.
M. Burns: Cela me satisfait surtout d'avoir entendu le ministre
de la Justice, appuyé du président de l'office nous dire que nous
pouvons peut-être accélérer de ce côté, parce
que nous sommes dans un "no man's land" légal pour ces personnes et il
faut absolument trouver une solution.
Quand vous avez des personnes dans une société qui se
retrouvent dans un état tel que celui-là, je trouve cela aberrant
si le législateur n'est pas capable d'en arriver à une solution
concrète, immédiate, rapide pour régler leur
problème. Je vous avoue personnellement que je ne voudrais pas me
trouver dans la situation de beaucoup de ces personnes qui véritablement
se retrouvent légalement j'insiste là-dessus comme
absolument personne ou en tout cas comme quelqu'un qui ne l'est pas.
M. Blank: Je ne peux argumenter sur vos théories, mais je
veux dire au ministre de la Justice que c'est vraiment une rectification, parce
que c'est par erreur que l'enfant a été nommé un fils
quand en fait peut-être pas en apparence
médicalement c'est une fille.
M. Levesque: Apparemment, aujourd'hui, ils font des changements
assez extraordinaires du point de vue médical.
M. Blank: On doit voir quelque chose de caché avant de
faire les changements. Ce mot "caché", c'est l'erreur qu'on a faite
à l'enregistrement. C'est pour cela qu'on peut le rectifier par une
requête en rectification.
M. Sylvain: Elle ne passe pas.
M. Blank: Vous avez des juges qui sont un peu trop conservateurs
par rapport à d'autres.
M. Levesque: Mais l'état civil, comme dit Me
Crépeau, se fie aux apparences.
M. Sylvain: Sur la même question de la
transsexualité dans l'état civil, n'y a-t-il pas eu une pratique
où on acceptait des changements de nom par arrêté en
conseil depuis deux, trois ou quatre ans? Il aurait pu...
M. Levesque: Au contraire, j'en ai chaque semaine et j'ai
à étudier chaque semaine des rapports de mes officiers sur...
M. Burns: Des changements de nom.
M. Levesque: ... des changements de nom.
M. Burns: De femme à homme, d'homme à femme.
M. Levesque: Non.
M. Sylvain: Par rapport aux transsexuels?
M. Levesque: Excusez. Non, je n'en ai pas eu de... Je n'en ai pas
vu depuis que je suis au ministère.
M. Burns: Je pense qu'il y a eu quelques cas d'acceptation de
changements de nom. Disons, de Louise à Jean-Pierre ou de Jean-Pierre
à Louise.
M. Sylvain: ... à Louisette.
M. Burns: Ou Louisette à Louis ou en tout cas...
M. Levesque: Je pense que le député de Beauce-Nord
a raison, il y a eu quelques cas, me dit-on.
M. Burns: II y a eu quelques cas.
M. Levesque: Mais, il y a déjà au-delà
de...
M. Burns: Mais, par la suite, cela a été
bloqué.
M. Levesque: Cela a été bloqué en attendant
une solution d'ensemble.
M. Sylvain: C'est cela que l'Association des transsexuels, ceux
qui la représentent nous font part que...
M. Levesque: A vous aussi?
M. Sylvain: Oui, on les a tous rencontrés. C'est du monde
comme les autres.
M. Burns: Oui et c'est normal. Je suis très heureux
d'entendre le député de Beauce-Nord vous livrer ses impressions
également à ce sujet, parce que cela vous démontre que je
ne suis pas le seul à avoir été pressenti par
l'association...
M. Sylvain: ...
M. Burns: Cela veut dire que c'est quelque chose qui est rendu
beaucoup plus loin qu'une espèce de dada d'un député de
l'Opposition. On pourrait nommer d'autres députés
ministériels qui ont été vus, je ne les nomme pas parce
qu'ils ne sont pas ici, mais il y a d'autres députés
ministériels qui ont été vus; peut-être qu'il y en a
qui sont ici, qui ont été rencontrés par ces personnes. Je
trouve qu'ils ont comme on dit régulièrement une
bonne cause et cela vaut la peine de la défendre.
Je tiens à vous dire, M. le ministre de la Justice, que ce n'est
pas parce que vous nous dites que la possibilité de changement de nom
est là que le cas est réglé; au contraire.
M. Levesque: Je l'ai dit cela. J'ai dit que cela ne
réglait rien.
M. Burns: Vous admettez cela. Bon. D'accord. M. Levesque:
Sur l'état civil...
M. Burns: Cela règle temporairement le
problème.
M. Levesque: Oui, c'est cela. M. Burns: D'accord.
M. Sylvain: J'ai tout simplement une question. Je ne sais pas si
c'est une règle qui a été abandonnée, mais pour
quels motifs? Savez-vous les motifs pour lesquels les arrêtés en
conseil, depuis quelques années, sont disparus pour faire ces
modifications au nom civil?
M. Levesque: J'ai dit qu'on attendait une solution d'ensemble
dont on vient de parler, mais j'ai bon espoir que dans un avenir pas trop
éloigné on pourra régler le cas de façon plus
globale et plus définitive.
M. Sylvain: Parce que la question avait été
abordée déjà à l'étude des crédits de
l'an dernier avec votre prédécesseur. Il avait, semble-t-il,
donné la même réponse, il attendait le dépôt
du rapport qui traite de ce sujet de l'Office de révision du Code
civil.
M. Levesque: On l'a reçue depuis et ce rapport est soumis
à la consultation.
Dès qu'on aura le rapport définitif, on pourra
peut-être procéder avec un peu plus de diligence.
M. Burns: M. le Président, au programme 1,
élément 1, je reviens aux juges et particulièrement
à une citation du livre blanc sur la justice qui recommandait la
création d'un centre de perfectionnement des juges. J'aimerais savoir,
de la part du ministre, où en est rendu ce projet et ce qu'en pense le
ministre actuel. Il s'agissait là d'un projet chéri par la
ministre de la Justice antérieur, mais peut-être que le ministre
actuel ne partage pas ce point de vue.
M. Levesque: Je dois dire qu'en général... M.
Burns: II s'agit de la page 169.
M. Levesque: 169. Je dois dire qu'en général, le
livre blanc de la justice contenait énormément de recommandations
très valables, à mon point de vue. Bien que dans le cas de
certaines modalités, je n'ai pas été d'accord, sur
l'ensemble, je dois dire qu'il y a une continuité et que je suis
d'accord, comme dans ce cas-ci pour le recyclage et le perfectionnement des
juges.
On retrouvera sans doute, lors du dépôt du projet de loi
dont j'ai parlé tout à l'heure sur l'organisation des tribunaux
judiciaires, projet de loi
qui est en avis au feuilleton, une réponse à la question
du député.
M. Burns: Vous allez nous donner une réponse à quel
endroit, m'avez-vous dit?
M. Levesque: Dans le projet de loi sur l'organisation, on
trouvera une réponse, sans doute, à ceci et à plusieurs
autres sujets qui sont trouvés et abordés dans le livre
blanc.
M. Burns: Je vous signale, M. le ministre, que je ne me
hâte pas inutilement lorsque je vous pose cette question. Il s'agissait
là d'un argument qui nous avait été servi bien avant le
livre blanc, c'est-à-dire à l'époque où on
plaidait, du côté du ministère de la Justice, en faveur de
l'augmentation de salaire des juges, en 1973.
Si je vous rappelle historiquement la situation, non seulement on a
augmenté le salaire par voie de législation, err 1973, mais on
avait, à deux reprises antérieures, tenté de l'augmenter
et on avait écarté le projet de loi, je ne sais pas pourquoi, en
juin 1973 et en décembre 1972.
Je vous signale je fais une parenthèse que je
trouve un peu bizarre qu'à toutes les fois qu'on parle d'augmentation de
salaire des juges, on nous amène le projet de loi dans une fin de
session. J'aimerais, une fois pour toutes, que les projets comme ceux-là
nous soient amenés dans une période normale de session.
M. Levesque: C'est ce que j'ai l'intention de faire.
M. Burns: Dès l'automne.
M. Levesque: Je n'ai pas voulu présenter ce projet de loi
d'ailleurs, je voudrais terminer mes consultations à ce
moment-ci justement parce que c'est la fin de la session. Je voudrais le
présenter au début de la reprise, au mois d'octobre, je ne sais
pas...
M. Burns: Septembre, j'espère.
M. Levesque: Septembre ou octobre et, à ce
moment-là, avoir le temps nécessaire pour bien l'étudier
et prendre le temps d'apporter des critiques constructives.
M. Burns: Comment se fait-il, M. le ministre, que le cas actuel
soit déposé aujourd'hui, le 28 juin? Comment se fait-il que la
dernière fois, c'était, je pense, le 15 décembre, pour
discussion aux environs du 21, 22 ou 23 décembre 1973? Comment se
fait-il que la fois précédente, c'était en juin 1972?
Comment se fait-il que la fois précédente, c'était en
décembre 1971? On a toujours eu cela en fin de session, l'augmentation
de salaire des juges.
Moi, je trouve cela important et je trouve important qu'on le
règle une fois pour toutes. Je partage votre avis. On l'avait
suggéré, éventuellement, qu'on pourrait tout simplement
cesser de revenir à toutes les fins de session.
M. Levesque: Je suis bien d'accord avec le député
de Maisonneuve, bien d'accord.
M. Burns: Mais il fallait trouver, à ce moment-là,
une méthode sur laquelle on ne s'entendait pas.
M. Levesque: Pas plus que je n'aime être en train de
discuter des crédits du ministère de la Justice le 28 juin au
soir.
M. Burns: M. le ministre, je sais que vous n'aimez pas cela.
Qu'est-ce que vous voulez, c'est votre devoir, c'est notre devoir à
tous...
M. Levesque: On a commencé à la fin de mars
l'étude des crédits; on s'attendait de finir dans les 45 jours
prévus par le règlement et on est encore ici.
M. Burns: Vous ne pouvez pas dire que j'ai ambitionné
là-dessus.
M. Levesque: Que voulez-vous? Je ne mets cela sur le dos de
personne.
M. Burns: On a discuté les crédits de votre
collègue, le Solliciteur général, pendant à peine
neuf heures et quelques minutes puis là...
M. Sylvain: C'est le monstre.
M. Levesque: Cela doit être le monstre, comme le
député de Beauce-Nord, c'est le monstre du sous-ministre.
M. Burns: Toujours, M. le Président, relativement à
la nomination des juges, programme 1, élément 1...
M. Levesque: Excusez-moi.
Nomination des juges
M. Burns: Toujours relativement à la nomination des juges,
je vous limite à ce moment à la Côte-Nord et vous rappelle
simplement que depuis deux ans le Barreau de la Côte-Nord demande la
nomination de deux juges permanents pour le district judiciaire du Mingan. Je
vous rappelle également que l'année dernière, lors de
l'examen des crédits, le ministre du temps, Me Choquette, avait promis
qu'au moins un juge permanent serait nommé en cours d'année pour
le district judiciaire de Mingan, de façon permanente, ce qui n'a pas
été fait. J'aimerais savoir exactement comment il se fait que la
promesse du ministre n'a pas été respectée. Ai-je besoin
d'ajouter la deuxième question? Est-ce que le ministre actuel a
l'intention, lui, au moins de le respecter, non pas rétroactivement mais
avec un retard de deux ans?
M. Levesque: C'est-à-dire qu'on peut dire qu'on a
donné suite à ce voeu de mon prédécesseur en
nommant le juge Raymond Boucher, qui était vice-doyen de la
faculté de droit de l'univer-
sité Laval, et qui habite présentement Sept-lles; par
contre, il y avait un juge résident, le juge Denis Gobeil, qui y
habitait, lui, et qui est déménagé à Québec,
à sa demande. Peut-être qu'on a réalisé la promesse
mais, en même temps, le nombre n'est pas plus considérable. Cela
est pour la Cour provinciale.
Pour ce qui regarde la Cour des sessions de la paix et la Cour du
bien-être social, ce sont des juges itinérants qui se rendent
à Sept-lles et aux endroits le long de la Côte-Nord suivant les
besoins.
M. Burns: Quelle est la raison? Est-ce que vous avez de la
difficulté à trouver des juges qui sont prêts à
s'établir dans ce coin ou encore des avocats du lieu qui n'acceptent pas
d'être nommés juges et d'y résider?
M. Levesque: Non, dans la question des juges à la Cour des
sessions de la paix, par exemple, en particulier, on aime bien qu'il y ait une
rotation, de plus en plus. Cela ne veut pas dire qu'on n'est pas pour qu'il y
ait au moins un juge résident dans un endroit aussi important.
C'est également une politique du ministère d'encourager la
rotation des juges de façon que les avocats n'aient pas toujours
à plaider devant les mêmes juges. Vu qu'à un moment
donné il peut se créer des amitiés ou des
inimitiés, etc., nous croyons qu'il est assez important de permettre aux
justiciables de même qu'aux avocats de ne pas toujours passer devant le
même juge.
Le Barreau local nous avait demandé la nomination d'un juge
résident.
M. Burns: De deux juges résidents.
M. Levesque: D'un juge de plus. Il y en avait un.
M. Burns: Oui, à ce moment-là, il y avait le juge
Gobeil.
M. Levesque: Oui. Dès que la Loi sur l'organisation
judiciaire aura été adoptée, j'ai l'intention de
répondre à cette demande du Barreau, de sorte que le juge qui
résidera à cet endroit pourra s'occuper de l'ensemble des besoins
de la justice.
M. Burns: Je vous rappellerai également que le
député de Saguenay, M. Lucien Lessard, vous avait écrit,
en date du 6 novembre 1975, pour vous demander de donner suite à cette
recommandation du Barreau.
M. Levesque: Cette recommandation était faite par
Baie-Comeau, par le district judiciaire de Hauterive. Je viens de
répondre que nous avons l'intention d'y donner suite, mais après
l'adoption de notre projet de loi, en automne.
M. Burns: Comme cela, je ne peux pas dire au député
de Saguenay que sa demande a été satisfaite.
M. Levesque: Elle n'est pas encore satisfaite; nous avons
l'intention de la satisfaire.
M. Burns: Quand?
M. Levesque: J'ai dit dès que nous aurons adopté la
Loi sur l'organisation...
M. Burns: La Loi sur l'organisation judiciaire.
M. Levesque: ... judiciaire.
M. Burns: Cela veut dire pas avant l'automne.
M. Levesque: C'est-à-dire que, sur le prochain exercice
financier, il sera possible, probablement, de le faire. Peut-être avant
cela. Je ne sais pas si on va réussir avant.
M. Burns: Cela veut dire, si vous parlez du prochain exercice
financier, pas avant 1977.
M. Levesque: Le volume à Baie-Comeau est un peu moindre
que celui de Sept-lles, d'après les renseignements que l'on me fournit.
Une fois que la Loi sur l'organisation judiciaire aura été
adoptée, si elle l'est, par l'Assemblée nationale, nous pourrons,
avec les dispositions qui sont contenues dans la loi, avoir une plus grande
mobilité et ce serait mieux justifié, le juge résident
pouvant évoluer d'une façon plus large. C'est pourquoi nous
trouvons que cela pourrait trouver sa justification.
M. Burns: Je ne veux pas quitter ce sujet sans vous dire,
après vous avoir écouté tout à l'heure et en
admettant qu'il soit exact qu'il n'est pas toujours bon que le même juge
mais je parle du même juge, c'est-à-dire un seul
soit sur les lieux et que, nécessairement, cela peut être utile
d'avoir un juge qui apparaisse à l'occasion dans le décor, dans
un district judiciaire plus éloigné, qu'il reste, quand
même, un autre point de vue qui mérite d'être
soulevé, c'est-à-dire celui qui favorise la résidence d'un
certain nombre de juges.
Je ne parle pas d'un seul juge, mais d'un certain nombre de juges qui
viennent à connaître le contexte social d'une certaine
région. Là-dessus je pense que l'utilité de la nomination
de deux ou de trois...
M. Levesque: On peut avoir un système mixte comme dans
plusieurs endroits, un juge résident plus des juges itinérants.
C'est ce que nous avons dans ma propre région et je trouve que c'est
excellent.
M. Burns: Alors on peut s'imaginer que ce système pourrait
nous arriver sur la Côte-Nord d'ici un an?
M. Levesque: Oui. Je l'espère bien.
M. Burns: Vous ne m'en faites pas la promesse formelle?
M. Levesque: Je ne fais jamais de promesse, mais je note
sérieusement...
M. Burns: J'aimerais bien que vous me fassiez une promesse, parce
que l'année prochaine, je pourrais vous dire que vous l'avez suivie ou
que vous ne l'avez pas suivie.
M. Levesque: Ah oui! c'est cela.
M. Burns: Ou encore, l'année prochaine, si je ne vous en
parle pas, vous pourriez me dire: Vous ne me parlez pas de ma promesse que j'ai
réalisée.
M. Levesque: Oui. Disons que si je n'étais pas d'accord,
je vous le dirais, mais...
M. Burns: Vous êtes d'accord avec le principe.
M. Levesque: ...mais la promesse, pour le principe oui.
M. Burns: Toujours, M. le Président, concernant une
recommandation du livre blanc, laquelle apparaît à la page 167,
recommandation 4,4: "que soit mise sur pied, afin de contrôler je
cite directement le livre blanc les aptitudes des juges à tous les
points de vue, y compris leur état de santé..." Je me demande ce
qui a été fait, ou ce qui va être fait, à cet
égard. Je vous réfère au journal Le Soleil qui reprenait
un article du New York Times, au début de janvier dernier. Et, l'un et
l'autre, Le Soleil et le New York Times, émettaient l'opinion qu'il
serait hautement souhaitable que les futurs juges soient soumis à des
tests psychiatriques, afin de s'assurer de leur tempérament, lors de
l'exercice de leurs fonctions.
Je n'ai pas l'intention de faire de démagogie à ce sujet,
mais je sais que, dans le passé, et sans vouloir citer de cas
précis, et je ne parle surtout pas de juges qui sont actuellement en
exercice, il y a eu des problèmes de cet ordre qui ont dû
être réglés par des voies assez spéciales. Ils sont
assez rares, mais d'autre part, comme le ministre lui-même disait: II
vaut mieux prévenir que guérir. Est-ce que le ministre a
l'intention de mettre en application des mesures pour prévenir ce type
de situations?
M. Levesque: C'est la première fois qu'on me parle de
cela.
M. Burns: Ah bien! vous n'avez pas lu cela? M. Levesque:
Non.
M. Burns: Vous n'avez pas lu le Soleil du vendredi 16 janvier
1976, je vous réfère à cela: "Des tests psychiatriques
pour les futurs juges". C'est un article qui est tiré du New York Times,
contribution spéciale par Seymour Kurvin et David Saxe. C'est tout
à fait en accord, en tout cas, sans que ce soit clairement
spécifié, avec le livre blanc, à la recommandation 4.4
page 167; Que la fonction de ce comité soit de contrôler les
aptitudes des juges et cela à tout point de vue y compris leur
état de santé. Il entendra et décidera du
bien-fondé de toute plainte portée à l'égard des
juges dans l'exercice de leurs fonctions, la plainte et le fardeau de la preuve
incomberont au Procureur général.
M. Blank: II y a un grand nombre de juges américains qui
sont élus. Est-ce qu'on aura des tests psychologiques des
députés avant qu'ils se présentent?
M. Burns: Ce n'est pas mauvais, cela! Cela viderait la Chambre
bien vite!
M. Levesque: Je n'ai pas de réponse là-dessus,
sinon...
M. Burns: La proportion serait plus forte chez nous que chez
vous, de gars qui restent!
M. Levesque: ... j'improviserais une réponse. Je prends
note de la suggestion. Je prends cela comme une suggestion du
député de Maisonneuve. Je ne suis pas à même de
réagir. Vous savez que, lorsque nous nommons un juge, nous prenons des
informations de diverses sources. Quelquefois la nomination d'un juge peut
paraître retardée, mais pendant ce temps-là, quant à
moi, je me donne beaucoup de peine à prendre le plus de renseignements
possible sur tous les aspects d'une candidature, non seulement que...
M. Burns: ... non plus s'il est classé A, B, C ou D!
M. Levesque: Vous direz à votre recherchiste que ce n'est
pas dans mon "bag", à ce moment-ci. Je dis ce que je fais; je fais
beaucoup de recherches et de consultation. Non seulement je prends l'avis du
Barreau cela c'est essentiel; je considère cela essentiel
mais, en plus, je prends des avis des gens du milieu. Je consulte les
députés, par exemple, je consulte... Ne sursautez pas, je
consulte les députés; ce sont probablement les gens qui
connaissent mieux le milieu donné et qui...
M. Burns: C'est drôle, les députés de
l'Opposition ne sont pas consulté souvent!
M. Levesque: Certainement et j'ai consulté d'ailleurs le
député de Maisonneuve et je dois encore le consulter.
M. Burns: Oui?
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Dans quel cas?
M. Levesque: Je le lui rappellerai.
M. Burns: Dans la nomination d'un juge?
M. Levesque: Oui et je le lui rappellerai.
M. Burns: Ah bien! Ecoutez...
M. Levesque: Au contraire, je n'ai pas d'objection à
consulter le député de Maisonneuve, parce que j'ai bien confiance
en son jugement, quant aux qualifications d'un avocat pour accéder
à la magistrature.
M. Blank: ... une nomination péquiste, si vous
consultez...
M. Levesque: Non, je sais qu'il fera abstraction de ses
appartenances politiques si je le consulte sur une nomination d'un avocat.
M. Sylvain: Oui?
M. Levesque: Et je sais que...
M. Burns: Pourquoi pas? Je considère l'appareil judiciaire
assez important pour qu'on puisse faire abstraction des origines politiques des
avocats.
M. Levesque: Je prends avis, également, de la magistrature
elle-même. Il m'est permis de demander à un juge ce qu'il
pense.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Je prends avis également de certaines
personnes que je connais de la région, pour avoir peut-être un
autre son de cloche. Finalement, évidemment, de mes collaborateurs au
ministère qui, eux-mêmes, ont leur propre source. C'est afin
d'éviter le plus possible, humainement, tout ce qui peut être de
nature à faire une nomination médiocre ou mauvaise.
M. Burns: En somme, vous changez le système qui avait
été établi par votre prédécesseur?
M. Levesque: Non. M. Burns: Non?
M. Levesque: Mon prédécesseur avait pris
l'habitude, lui aussi, de consulter le Barreau et il avait
sûrement...
M. Burns: Y compris pour les anciens ministres et tout cela?
M. Levesque: ... d'autres sources de renseignements. Ah! Je ne
sais pas si...
M. Burns: Ah!
M. Levesque: Les anciens ministres qui ont été
nommés juges?
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Probablement qu'il s'est enquis au Barreau, mais il
faudrait le lui demander.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Je sais que c'était son habitude et je n'ai
fait que continuer une excellente tradition. Quant à moi, en plus de
l'opinion du Barreau, j'essaie d'avoir l'opinion la plus complète
possible et lorsque nous revenons à la question de l'état de
santé physique ou mental du candidat, j'imagine qu'il ne peut pas avoir
un état qui serait complètement caché à toutes les
personnes qui sont ainsi consultées.
M. Burns: Non, non, d'accord.
M. Levesque: Cela serait difficile.
M. Burns: Non, non, je comprends cela.
M. Levesque: Mais il peut arriver un accident.
Heures d'ouverture des cours
M. Burns: Laissons cela ainsi pour le moment. Toujours sur le
problème du fonctionnement du système judiciaire, le juge Charles
Cliche proposait en septembre dernier de rendre possible la comparution en
soirée afin de faciliter la tâche, particulièrement de
certains témoins ou même encore de certains accusés; sa
proposition visait également à décongestionner les
rôles. Dans une nouvelle qui paraissait dans le Montréal-Matin du
11 septembre 1975, on lit ceci: "A tout événement, le juge Cliche
entend bien pousser son idée jusqu'à sa réalisation. Il
croit qu'il s'est déjà assuré l'oreille sympathique du
juge en chef André Fabien et des juges en chef des autres juridictions
qui ont tous, lors de la récente cérémonie d'ouverture
officielle des tribunaux, manifesté le désir de rendre la justice
plus accessible à tous.
J'aimerais savoir ce que le ministre de la Justice en pense, comment
lui-même envisage de donner un coup de main, si je puis dire, à
ces juges qui veulent rendre la justice plus accessible à tous.
M. Levesque: Disons tout d'abord que ceci nous a
préoccupés d'une façon particulière. Pour se
référer encore au livre blanc, on voit qu'il y a là des
suggestions d'avoir un rôle le matin et un rôle
d'après-midi, plutôt que d'avoir un seul rôle.
On sait, par exemple, que lorsqu'un rôle est établi pour la
journée, il arrive que des causes sont remises ou que d'autres sont
réglées et qu'à un moment donné la cour cesse vers
treize heures alors que le juge aurait pu continuer dans l'après-midi.
En scindant le rôle, en ayant un rôle pour le matin et un autre
rôle pour l'après-midi, on éviterait cette situation et je
pense qu'il y aurait une meilleure utilisation du temps de la cour.
Nous avons l'intention je n'ai pas terminé mes
consultations à ce sujet de proposer cela dans la Loi sur
l'organisation judiciaire et c'est déjà dans le projet de loi tel
qu'il existe à l'heure actuelle.
Pour le soir, j'aurais plus d'hésitation à cause
des conventions collectives, à cause du personnel, etc. Il y
aurait peut-être des difficultés de ce côté. Je sais
que, du côté de la Cour supérieure, si mes renseignements
sont exacts, le juge Deschênes, juge en chef de la Cour
supérieure, entend commencer dès le mois de septembre, je crois,
cette question d'avoir deux rôles, un rôle le matin et un
rôle l'après-midi.
Cela répondrait, je pense, au voeu que vient d'exprimer le
député de Maisonneuve.
M. Burns: Mais on ne prévoirait pas de rôle pour le
soir comme tel.
M. Levesque: Je crois qu'à cause du personnel...
M. Burns: Du personnel de soutien?
M. Levesque: ... oui, du personnel de soutien, on aurait des
problèmes. On devrait avoir toute une équipe du soir à
ajouter encore. Il y a des questions de coûts également. Ensuite,
qu'on pense, par exemple, aux employés des magasins; ils ont
réussi à avoir des heures de fermeture. Ce sont des gens qui
voulaient avoir leurs soirées libres à un moment donné et,
par la loi provinciale, on a réduit le nombre d'heures d'ouverture des
établissements commerciaux. Si je veux faire un parallèle avec
cela...
M. Blank: Je pense que le juge Cliche, dans son article, a
parlé plutôt du côté pénal, des comparutions
pour des offenses mineures. Je veux vous dire qu'à Montréal on a
essayé cela à la Cour municipale pour des offenses ayant trait
à la circulation. On donnait le choix, à un moment donné,
à une personne qui avait une contravention relative à la
circulation de comparaître à dix heures, à trois heures ou
à sept heures. Ils ont fait l'essai pour un an. Cela n'a pas
marché du tout. Le soir, il n'y avait presque personne. D'un autre
côté aussi, c'était très bon durant la
période où on n'avait pas la Loi des cautionnements comme
aujourd'nui. Une personne qui était arrêtée à la fin
de l'après-midi devait attendre jusqu'au matin pour avoir son
cautionnement. On a parlé alors d'une cour de nuit. Maintenant, avec la
Loi des cautionnements, presque 90% des gens sortent avec leur propre
signature. Je pense que le juge Cliche veut plutôt parler du
côté pénal que du côté civil.
M. Burns: Le juge Cliche parle surtout de causes de moindre
importance. Selon ses dires c'est fort probablement...
M. Blank: Des infractions aux lois de la circulation.
M. Burns: ... des histoires...
M. Levesque: Des petites créances peut-être.
M. Burns: Selon le journal que je cite, qui est le
Montréal-Matin du 11 septembre 1975: "Voulant faire d'une pierre deux
coups, le juge Cliche croit que sa suggestion serait à la fois de nature
à réduire certains délais, ainsi qu'à faciliter la
tâche de certains témoins et justiciables. Il propose que
certaines salles de cour soient ouvertes en soirée, de sorte que les
personnes appelées à déposer il n'y a pas seulement
le cas de personnes accusées, parce qu'on parle de personnes
appelées à déposer dans des causes de moindre
importance n'aient pas à sacrifier des journées de travail pour
se présenter à la cour. Si elles étaient convoquées
en soirée, elles pourraient s'acquitter de leur devoir de citoyen
à moindre frais. '
Chose assez intéressante, par rapport à ce que le ministre
disait tout à l'heure, la fin de l'article se lit comme suit: "Les
fonctionnaires administratifs: greffiers, sténographes,
secrétaires judiciaires, etc., pour leur part, y voient
déjà un avantage, puisque leur travail en soirée leur
vaudrait un congé le lendemain matin, ce qui leur permettrait de vaquer
à certaines tâches domestiques, comme le magasinage et autres
démarches personnelles". Remarquez que je ne sais pas si c'est l'opinion
du juge Cliche, mais, de toute façon, il ne semble pas y avoir un
tollé de protestation du côté des fonctionnaires de
soutien.
M. Perreault: Vous y croyez? M. Burns: Pardon?
M. Perreault: Vous croyez qu'il n'y aurait pas de
difficultés?
M. Burns: Si c'est normalement discuté avec les personnes,
je pense bien qu'il n'y a pas de problèmes. Si on le leur impose, c'est
bien sûr qu'il va y avoir des grincements de dents.
M. Levesque: Si on pouvait réussir au moins à avoir
ce que j'ai suggéré tout à l'heure et ce que
suggère le livre blanc, un rôle le matin et un rôle
l'après-midi, je pense qu'on accélérerait beaucoup les
travaux.
Le cas du juge Lamarche
M. Burns: D'accord.
Autre question, M. le Président, au programme 1,
élément 1. C'est le problème qui concerne le juge Jacques
Lamarche. Je n'aime pas faire des cas très particuliers mais les
journaux, malheureusement ou heureusement vous jugerez ont fait
état d'un certain conflit opposant ce juge de la Cour du bien-être
social avec son juge en chef. Ceci remonte à septembre 1975.
Apparemment, le motif du conflit était à l'effet que le juge
Lamarche était trop progressiste dans sa façon d'entrevoir la
délinquance juvénile. Les réactions des milieux
intéressés ont été très évidentes et
le débat a été porté, à cause de cela, sur
la place publique.
Sans intervenir directement dans ce qui relève du pouvoir
judiciaire, je pense que le cas du juge
Lamarche soulève des questions très importantes et on
pourrait peut-être les dénombrer à deux:
La première: Que fait le ministère de la Justice pour
empêcher qu'à chaque année un juge soit
dénoncé soit par son juge en chef, comme c'est le présent
cas, ou soit par les avocats, comme cela a été le cas tristement
célèbre du juge Anctil? Est-ce que, par exemple, on envisage un
code de déontologie, un comité de discipline, un conseil de la
magistrature ou quoi que ce soit dans cette ligne?
La deuxième à moins que vous ne veuillez
répondre à celle-ci immédiatement c'est que dans le
cas du juge Lamarche, si on se fie aux journaux, le conflit originerait d'une
divergence fondamentale d'opinion entre le juge Lamarche et son juge en chef.
Cette divergence d'opinion touche un problème d'actualité puisque
c'est la philosophie même du traitement de la délinquance
juvénile qui est mise en cause.
J'aimerais savoir, à ce moment-là, quels sont les pouvoirs
du ministère en matière d'orientation de cette philosophie du
traitement de la délinquance juvénile, quelles ont
été les actions du ministère sur ce sujet depuis
l'arrivée de l'actuel ministre et à la lumière de la
recommandation particulièrement 4.3 du livre blanc sur la justice qu'on
retrouve également à la page 167.
M. Levesque: En effet, le livre blanc, sous le titre Le
contrôle et la révocation des juges, a comme recommandation 4.3
qu'un comité de contrôle de la compétence professionnelle
des juges soit créé et qu'il soit composé de cinq membres
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, etc., que la fonction de
ce comité soit de contrôler les aptitudes des juges et cela
à tout point de vue, y compris leur état de santé.
M. Burns: C'est la recommandation 4.4 que je vous citais tout
à l'heure, cela.
M. Levesque: Ah oui!
M. Burns: Celle que je vous cite actuellement
précède l'autre: Que ce comité de cinq membres,
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, soit deux juges
désignés après consultation avec le Conseil de la
magistrature, un juge après consultation avec les Conférences des
juges du Québec, un avocat après consultation avec le Barreau et
un non-avocat après consultation avec le Conseil consultatif de la
justice.
M. Levesque: Ceci était parti de ce que nous
considérons pour encore une fois dans la loi de l'organisation
judiciaire. Quant au juge Lamarche. pour le cas précis qui a
été cité par le député, il est encore
à la Cour du bien-être social. Il avait été
affecté par le juge en chef de cette cour sur la rive sud de
Montréal. Le juge en chef, et c'est là son droit exclusif en
vertu de la Loi des tribunaux judiciaires, a décidé de l'affecter
à Montréal. Je sais que, comme l'a mentionné le
député de Maisonneuve, cette décision a été
contestée dans certains milieux...
M. Burns: Par des citoyens.
M. Levesque: Oui. D'ailleurs, j'ai reçu beaucoup de
correspondance...
M. Burns: Qui se préoccupaient de la délinquance
juvénile.
M. Levesque: Oui, j'ai reçu beaucoup de correspondance
à cet effet. J'ai vu évidemment, comme le député,
les articles dans les journaux. Quant à la décision du juge en
chef, je préfère évidemment, on me comprendra, ne pas la
commenter, de façon à maintenir l'indépendance de la
magistrature, réserver l'autorité du juge en chef. A ce moment,
nous nous situons à la limite de l'exercice des pouvoirs
judiciaires...
M. Burns: J'ai d'ailleurs, je pense, pris cette précaution
que je ne voulais pas m'immiscer dans le processus judiciaire non plus.
M. Levesque: C'est exact. M. Burns: Mais...
M. Levesque: Le juge Lamarche, d'ailleurs, je peux le dire, m'a
écrit, il y a quelque temps, et j'ai demandé à mon
sous-ministre, M. Normand, de rencontrer le juge et discuter de la situation
avec lui. C'est pour cela, encore une fois, que je dis que c'est à la
limite de mes pouvoirs et de ceux du judiciaire; je n'ai pas voulu trop
m'immiscer, mais une rencontre, à mon sens, pouvait être
justifiée. L'entrevue a d'ailleurs été positive. Je pense
que, si on interrogeait le juge Lamarche aujourd'hui, il dirait qu'il a
été satisfait de cette entrevue. A sa demande, d'ailleurs, nous
avons accepté de le faire bénéficier d'un programme de
perfectionnement et cela doit se faire très prochainement, je crois, si
ce n'est pas déjà en marche. J'aimerais autant ne pas ajouter
d'autres détails de façon à me mêler de mes
oignons.
M. Burns: M. le Président, l'élément 1, je
suis prêt à l'adopter.
Le Président (M. Pilote): Elément 1, adopté.
Elément 2, soutien administratif aux cours de justice.
Jurés et témoins
M. Burns: A l'élément 2, M. le Président,
soutien administratif, d'abord une première question concernant
l'augmentation des tarifs des témoins et, encore une fois, je me
réfère au livre blanc.
M. Levesque: J'ai répondu au député il n'y a
pas longtemps là-dessus, je pense qu'on a discuté cela.
M. Burns: On a parlé des jurés.
M. Levesque: C'est à peu près dans le même
sens.
M. Burns: C'est cela, j'aimerais que vous me le disiez quant aux
témoins. Parce que...
M. Levesque: Je pense que j'ai les chiffres ici.
M. Burns: D'accord.
Je vous rappelle que vous proposiez que les frais des témoins
soient portés de $10 à $20 par jour.
M. Levesque: Les jurés, cela.
M. Burns: Non, le cas des témoins.
M. Levesque: Est-ce qu'on a parlé des témoins,
l'autre soir? Non.
M. Burns: Non, vous n'avez pas parlé des témoins,
c'est pour cela que je vous rappelle le cas des témoins, aujourd'hui. Je
vous parle du livre blanc qui, lui...
M. Levesque: Oui, mais l'autre soir, quand on a
parlé...
M. Burns: On a parlé des jurés.
M. Levesque: On a parlé des jurés, on n'a pas
parlé des témoins.
M. Burns: Non. Moi, je vous parle des témoins,
là.
M. Levesque: D'accord.
M. Burns: C'est pour cela que je vous dis qu'on n'en a pas
parlé. J'aimerais savoir...
M. Levesque: Pour les jurés, c'était $10 par jour;
pour les témoins, c'est $10 par jour.
M. Burns: Oui. Vous avez l'intention de faire varier cela dans
les mêmes proportions?
M. Levesque: C'est la même chose que pour les jurés,
selon la recommandation que j'ai devant moi, mais à laquelle je n'ai pas
donné suite encore. Elle est dans le même sens.
M. Burns: Dans le cas des experts, avez-vous l'intention de faire
des ajustements également, les témoins experts, les psychiatres,
les médecins en général?
M. Levesque: Toutes les augmentations qui m'ont été
soumises sont proportionnelles, pour les témoins, témoins
ordinaires, témoins experts, jurés, etc.
M. Burns: C'est dans la même proportion?
M. Levesque: C'est dans la même proportion.
M. Burns: Cela veut dire le double?
M. Levesque: Cela veut dire le double. De $10 à $20, c'est
le double. Je ne peux pas dire que c'est le double pour les experts. Je vais
essayer de l'obtenir. C'est la même chose, c'est la même
proportion.
La ville de Chambly
M. Burns: C'est la même proportion? D'accord. Toujours
à l'élément 2, je présume que le ministre de la
Justice a reçu, en même temps que le chef de l'Opposition,
c'est-à-dire vers le 24 mars, une lettre de la ville de Chambly
datée du 19 mars, qui contenait une résolution portant le no 4298
et qui était, à toutes fins pratiques, une protestation contre le
rattachement du territoire de la ville de Chambly au district judiciaire de
Saint-Jean. Est-ce que le ministre a donné suite à cette
résolution?
Cela semble être un cas très particulier, mais comme la
ville de Chambly a pris la peine de faire une résolution et de nous en
faire parvenir une copie, il me paraît que cela ait pu faire l'objet de
discussions au ministère de la Justice, surtout qu'on ne peut pas dire
qu'on le prenne par surprise puisque cela remonte déjà au mois de
mars dernier. Est-ce que le ministre de la Justice a pris une décision
relativement à cela?
M. Levesque: II faut se rappeler que cela a été
changé au mois de décembre 1975, mais n'a pas encore
été proclamé. Nous avons reçu, comme le dit le
député de Maisonneuve, des représentations de la ville de
Chambly et nous avons l'intention de donner suite au voeu exprimé par
Chambly.
M. Burns: Par la ville de Chambly. M. Levesque: Oui.
M. Burns: Est-ce que vous le leur avez annoncé?
M. Levesque: J'ai reçu cette lettre en date du 19 mars qui
était adressée au sous-ministre. Je pense que la même
lettre a été envoyée au premier ministre et probablement
au chef de l'Opposition.
M. Burns: Oui, j'ai devant moi une copie qui a été
adressée directement au chef de l'Opposition.
M. Levesque: Le sous-ministre a répondu le 1er avril 1976
au greffier de la cité de Chambly.
M. Burns: Lui disant?
M. Levesque: Qu'il étudiait cette question et, le 31 mai,
il donnait suite à cette chose en disant à Mme Mongrain, qui est
le greffier de la cité de Chambly: "Nous examinons donc
présentement la possibilité de retourner à l'ancienne
situation à la plus brève convenance, comme vous nous le
suggérez".
Je pense que nous avons un projet de loi présentement, si ma
mémoire est fidèle je ne l'ai pas ici le projet de
loi no 16.
M. Burns: II vise Laval; je ne pense pas que cela vise
Chambly.
M. Levesque: On ne l'a pas ici devant nous, mais je pourrai
vérifier, de toute façon, ce sera peut-être une occasion,
si ce n'est pas inclus dans le bill, de le mettre ou de faire un amendement en
commission.
M. Burns: De toute façon, vous êtes d'accord avec
cette position prise par la ville de Chambly?
M. Levesque: Oui, je vais demander à mes collaborateurs
ici de vérifier si c'est dans le bill no 16; sinon on en fera un
amendement à la prochaine occasion pour qu'on donne suite à
ceci.
Transcription des plaidoiries et
témoignages
M. Burns: D'accord. Dernière question, M. le
Président, à ce programme 1. Tout le monde sait qu'il y a
quelques années, à la suite d'une recommandation qui apparaissait
dans le rapport annuel du ministère de la Justice, on mécanisait
simplement les systèmes de sténographie à
l'intérieur des diverses cours relevant de la compétence du
gouvernement du Québec. A ce moment-là, on sait que les
sténographes judiciaires, en grande partie, se sont confier d'autres
fonctions ou d'autres postes dans d'autres districts judiciaires. On avait
commencé par un projet pilote à Saint-Jérôme et,
lentement, on avait installé le système de l'enregistrement
mécanique à Montréal. J'aimerais savoir aujourd'hui
je ne sais pas si le ministre a en main tous ces chiffres combien a
coûté ce programme de transfert, quels en sont les
résultats, comment actuellement on décide de l'endroit où
le système d'enregistrement mécanique est mis en application,
plutôt que le système de prise en sténographie par des
sténographes ou sténotypistes judiciaires.
J'aimerais avoir, quoi, un portrait général de cette
situation.
Je lui signale, entre autres, qu'à Montréal actuellement,
à la Cour criminelle, il y a encore et heureusement un
nombre, que je ne peux pas déterminer, de sténographes
judiciaires, soit de sténotypistes ou de sténographes, qui ne
sont pas affectés à une cour directement, mais qui servent
à dépanner régulièrement les cours qui, pour des
raisons ou d'autres, doivent se servir d'eux. Entre autres, les commissions
d'enquête; je pense, par exemple, à la commission d'enquête
qui avait été, de façon spéciale,
désignée dans le cas de l'incendie du métro de
Montréal où on avait utilisé des sténographes;
partiellement, à la Commission d'enquête sur le crime
organisé où on avait utilisé des sténographes,
jusqu'au moment où on a décidé de donner un contrat
à l'extérieur à un pigiste et non pas à un
employé du gouvernement. Je pense également à certains cas
d'enquêtes de la part du commissaire aux incendies qui ont
été, si vous voulez, assistés par des sténographes
plutôt que par un enregistrement mécanique.
J'aimerais surtout savoir, de la part du ministre peut-être
n'est-il pas en mesure de nous donner des statistiques là-dessus, mais
c'est pour juger de l'efficacité de ce qui a été fait, de
cette correction qui a été faite, c'est-à-dire de passer
du sténographe ou du sténotypiste judiciaire au système de
l'enregistrement mécanique quels sont les avantages, maintenant
qu'on connaît le système depuis un certain nombre de mois et, dans
certains cas, d'années? J'aimerais savoir si, véritablement, cela
a amélioré la situation. Par exemple, est-ce qu'une cause qui est
prise par voie d'enregistrement mécanique voit la transcription remise
aux parties dans un délai meilleur que celui qui était
imposé par l'utilisation des sténographes ou des
sténotypistes judiciaires?
M. le Président, et ce n'est pas une critique directe à
l'endroit des personnes qui s'occupent de l'enregistrement mécanique,
mais je me rappelle que dans une des dernières causes que j'ai eu
à plaider et qui était, en ce qui me concerne, très
importante c'était un cas d'injonction j'ai
retrouvé, par voie d'enregistrement mécanique, les arguments que
je faisais valoir en faveur de l'émission de l'injonction je
représentais le demandeur ou le requérant dans la bouche
de mon adversaire. Je me suis trouvé un peu bête de dire des
choses que mon adversaire disait et qu'on mettait dans ma bouche. Je me disais:
Vraiment, ce matin-là, je n'étais pas en très
sérieuse forme, parce que je plaidais contre ma cause. Je vous avoue que
je ne suis pas le seul avocat qui a eu l'occasion d'affronter ce
problème.
J'aimerais savoir quelles ont été les constatations
physiques, si on peut dire, de ce changement qui devait, aux dires du rapport
de 1972 du ministère de la Justice, révolutionner le
système de l'administration de la justice?
M. Levesque: Disons, premièrement, que j'ai eu l'occasion
de visiter ce nouveau système au palais de justice de Montréal,
système que l'on retrouve d'ailleurs à
Saint-Jérôme...
M. Burns: C'est là qu'il a commencé d'ailleurs.
M. Levesque: Oui, depuis plusieurs années et maintenant
qui est en train de s'installer à Québec. Deuxièmement, je
dirai que, quant aux sténotypistes, nous n'avons pas mis à pied
qui que ce soit.
M. Burns: Non, ce n'est pas de cette nature, sauf que...
M. Levesque: Au contraire, ceci est venu aider grandement...
M. Burns: Je m'excuse, sauf qu'il y a des sténographes
judiciaires qui ont été obligés de déménager
de Montréal à Sherbrooke ou à Saint-Hyacinthe et
même sur la Côte-Nord.
M. Levesque: Oui, oui, mais personne n'a perdu son emploi.
M. Burns: Non.
M. Levesque: Evidemment, je ne suis pas un expert dans ce
domaine, mais on me dit que, sans cet enregistrement mécanique, nous
aurions eu de sérieuses difficultés et que ceci a
été un complément extrêmement important. Quant au
délai, il y a des délais de transcription...
M. Burns: Beaucoup plus grands qu'avant.
M. Levesque: II y a des délais de transcription.
M. Burns: Beaucoup plus grands qu'avant.
M. Levesque: A cause du volume qu'il y a là, de la
difficulté que nous avons de trouver du personnel qualifié dans
ce domaine et à cause aussi des restrictions que nous avons, il y a un
délai de transcription, mais nous mettons à la disposition des
parties un double de l'enregistrement, une bobine qui, cependant, est
utilisée.
M. Burns: Ecoutez, j'ai connu le système devant le
commissaire-enquêteur, en vertu du Code de travail, où nous avons
la possibilité, lorsque nous allons en appel devant le Tribunal du
travail, d'avoir une copie de la bande. Je ne sais pas si vous savez ce que
cela veut dire pour un avocat de réécouter une journée de
plaidoirie complète parce que cela dure le même temps, remarquez;
on n'essaiera pas de me faire dire que cela prend moins de temps
d'écouter la bande enregistrée...
M. Levesque: Sur le plan technique, c'est beaucoup
inférieur lorsque c'est devant le commissaire-enquêteur du palais
de justice.
M. Burns: Je me balance que ce soit inférieur, sauf que
vous allez avoir de la difficulté à me contredire
là-dessus. Si on met à ma disposition la bande qui a
été enregistrée, à moins que vous me disiez qu'il y
a quelque chose de nouveau d'inventé, cela dure exactement le même
temps qu'a duré le procès ou qu'ont duré les
témoignages.
Je regrette, mais si je dois me préparer pour le lendemain et que
j'ai passé la journée en cour, je ne peux pas repasser une autre
journée en cour, c'est-à-dire une nuit pour écouter la
journée en cour, et cela est très grave.
M. Levesque: On me dit que les avocats ne demandent qu'une
partie, un moment donné...
M. Burns: Oui, oui, mais, si un moment donné vous voulez
revoir l'ensemble de l'affaire, cela sera fait beaucoup plus vite par voie de
lecture; c'est bien sûr qu'il n'y a pas un sténographe qui est
capable de nous donner dans les heures qui suivent la transcription. Mais il
n'y a pas de mécanographie ou il n'y a pas d'enregistrement
mécanique non plus qui soit en mesure de nous donner une transcription
dans le délai qu'un sténographe est capable de le donner. J'irai
plus loin: Est-il exact qu'au ministère de la Justice actuellement on
envisage de revenir au système du sténographe judiciaire?
M. Levesque: Mes renseignements sont à l'effet que
non.
M. Burns: Vous ne voulez pas admettre vos erreurs.
M. Levesque: Les erreurs de mon prédécesseur.
M. Burns: Les erreurs comme les bonnes actions se
perpétuent dans l'institution gouvernementale.
M. Levesque: Je dis cela sans être trop sérieux; il
y a une continuité et ce sont les mêmes officiers aujourd'hui qui
étaient là du temps de mon prédécesseur. La
réaction que j'ai d'eux, c'est que ce n'est pas désirable de
retourner à ce que c'était.
M. Burns: Cette décision de ne pas retourner à ce
qui existait est-elle basée sur une étude statistique tant au
point de vue de la quantité, de la qualité et de la
rapidité avec laquelle on est en mesure de mettre la main sur une
transcription des témoignages et des plaidoiries qui sont portées
devant les tribunaux? Est-ce basé sur des faits? Est-ce qu'il y a un
examen? A-t-on fait une espèce passez-moi l'expression
maoïste d'autocritique de tout ce qu'on a imposé depuis
quelques années?
M. Levesque: On m'indique justement qu'on a fait une
autocritique.
M. Dorion me dit qu'il vient de terminer cette autocritique.
M. Burns: Est-ce qu'on a eu...
M. Levesque: On m'indique également deux choses, c'est
que...
M. Burns: Y a-t-il moyen d'avoir une copie de cette
autocritique?
M. Levesque: C'est interne.
M. Burns: Oui, mais nous, nous sommes quand même des
citoyens, des justiciables.
M. Levesque: J'essaie de vous traduire aussi fidèlement
que possible la réaction que l'on a sur cet enregistrement
mécanique. Premièrement, fidélité plus grande, me
dit-on; deuxièmement, l'intention d'essayer d'augmenter le recrutement
de ceux qui ont à transcrire. On me dit que la difficulté
principale, c'est une difficulté de recrutement.
M. Burns: Je comprends, au prix que vous les payez. Savez-vous
combien vous les payez vos dictaphonistes?
M. Levesque: Comment les paie-t-on? Le savez-vous?
M. Burns: Je le sais. Je vais vous laisser chercher, par
exemple.
M. Levesque: II y a différentes classes et
échelons. On me parle d'un maximum de $11 000.
M. Burns: Depuis quand? Combien d'années faut-il pour
arriver à $11 000?
M. Levesque: On ne l'a pas ici, malheureusement.
M. Burns: Je comprends que vous ayez de la difficulté.
Vous les engagez à $5200. Actuellement, c'est peut-être rendu
à $6200. Mais, l'année dernière, au moment où on se
parlait, on les engageait à $5200. $100 par semaine pour des
dicta-phonistes, cela n'est pas énorme, surtout quand on sait le travail
qu'on leur imposait. C'est bien sûr qu'on n'avait pas les moyens d'en
recruter tellement. Actuellement, à cause des augmentations que je n'ai
pas vérifiées, c'est probablement aux alentours de $6200,
peut-être même $7000. Mais combien d'années cela prend-il
pour arriver à $11 000? J'aimerais bien le savoir.
M. Levesque: On pourrait sortir le texte du sous-ministre, dont
on a parlé au début de l'étude des crédits.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Le texte qu'il avait donné à Ottawa,
à un moment donné; peut-être qu'il a parlé de cela
aussi.
M. Burns: Oui, voulez-vous que je le rappelle? Là-dessus,
en tout cas, M. le ministre, en quittant l'élément 1, je pense
que cela nous prendrait plus que des affirmations. Ce n'est pas que je ne
prenne pas votre parole ou que je ne prenne pas la parole de vos officiers
supérieurs relativement à l'efficacité du nouveau
système, mais j'aimerais bien, à un moment donné, le
savoir une fois pour toutes, tant pour les justiciables que pour les avocats.
Je connais de nombreux confrères, à Montréal, qui ont
à se plaindre du système et qui regrettent la période
où on avait la possibilité, soit avec le chef des
sténographes ou encore avec le ou la sténographe concerné
de négocier le fait que telle transcription avait une importance plus
qu'une autre et qu'à ce moment-là il était peut-être
nécessaire que, dans un délai un peu exceptionnel, la
transcription soit faite.
J'aimerais aussi avoir des statistiques concernant l'efficacité
du système actuel tant au point de vue du coût du système
cela comporte le coût des machines, le coût de l'utilisation
du personnel que du rendement que cela donne par rapport au
système antérieur.
Je vous avoue bien honnêtement je m'excuse auprès
des fonctionnaires qui ont fait cette recommandation, je sais qu'elle vient,
à l'origine, de hauts fonctionnaires de votre ministère qui sont
encore là, que je pense qu'on a agi, je ne leur prête même
pas de mauvaises intentions, dans un esprit technocratique qui ne tenait pas
compte d'une certaine pratique. Ces personnes qui, sans doute, sont membres du
Barreau, n'ont peut-être pas déjà vécu de visu
dois-je dire de au-ditu? le problème qui concerne l'avocat
de pratique privée de tous les jours.
M. Levesque: Ces fonctionnaires sont souvent en contact avec le
palais de justice de Montréal et d'autres palais de justice. Je sais
pertinemment qu'ils sont là assez souvent pour savoir ce qui se passe.
Mais il faut aussi se rappeler... Je serais peut-être prêt à
admettre que le service donné aux avocats était supérieur
autrefois à ce qu'il est aujourd'hui. Mais il faut tenir compte que le
volume a augmenté considérablement.
M. Burns: II faudrait peut-être augmenter le volume du
personnel pour servir.
M. Levesque: Lorsque le service en question était tel, il
correspondait; il y avait une correspondance entre les sténotypistes et
le volume de travail. Présentement, le volume a tellement
augmenté que les sténotypistes, l'enregistrement mécanique
et les personnes que nous avons pour la transcription, ce n'est pas suffisant
pour le volume qu'il y a. C'est cela qui me semble être le
problème.
M. Burns: Mais comment se fait-il qu'une commission comme la
Commission d'enquête sur le crime organisé, jusqu'à
maintenant, n'ait pas eu recours à l'enregistrement mécanique des
témoignages? Comment se fait-il que la Commission d'enquête sur le
crime organisé, qui a besoin de fonctionner avec une certaine
célérité, a toujours eu recours, depuis le début de
ses travaux, que ce soit à huis clos ou en audition publique, à
des sténographes? Comment se fait-il que cette commission, qui se veut
très efficace, qui veut fonctionner avec célérité,
n'ait pas eu encore recours à l'enregistrement mécanique? Vous
allez me dire, peut-être, qu'elle siège à un endroit
où l'enregistrement mécanique n'est pas encore utilisé.
C'est possible. Mais comment se fait-il que depuis le début des travaux
de cette commission, on n'ait pas recours à l'enregistrement
mécanique? Comment se fait-il également que dans ce cas, on donne
cela à contrat à l'extérieur? C'est une compagnie de
pigistes qui enregistre les témoignages... Cela n'a pas toujours
été vrai pour les enquêtes à huis clos, mais c'est
vrai pour les auditions publiques.
M. Levesque: Apparemment, c'est parce qu'il fallait avoir la
transcription quotidienne.
M. Burns: Ah bon! Donc, c'est plus efficace. M. Levesque:
Cela va coûter plus cher.
M. Burns: Oui. Est-ce que ce n'était pas possible avec les
employés permanents du ministère?
M. Levesque: Apparemment, on a essayé, au début,
mais il fallait siéger le soir, il fallait siéger à des
heures souvent impossibles.
M. Burns: Et puis vous avez eu des refus?
M. Levesque: II y avait un manque de disponibilité.
M. Burns: Ah! mon Dieu! J'aurais des choses à vous
raconter là-dessus.
M. Levesque: C'est ce qu'on me dit. Je n'étais pas
là personnellement.
M. Burns: Je vous demande simplement de revoir tout ce
système, de nous faire un bilan comparatif, tant au point de vue
efficacité qu'au point de vue coût des deux systèmes. Il
serait peut-être temps qu'on le fasse. Il est en vigueur.
M. Levesque: Je pense que cela rendrait service à tout le
monde.
M. Burns: Je pense que oui. Programme 1 adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Pilote): Le programme 1 est
adopté, ainsi que tous les éléments.
M. Burns: Elément 2, programme 1, programme 1
adopté.
M. Levesque: D'accord.
Le Président (M. Pilote): Programme 2.
Droits et libertés de la personne
M. Burns: Au programme 2, concernant la Commission des droits et
libertés de la personne. On pourrait...
M. Levesque: Ce n'est pas long.
M. Burns: Ce n'est pas long.
Je sais, M. le Président, qu'actuellement, il y a un projet de
loi qui est devant l'Assemblée nationale, alors je n'entrerai pas dans
ce détail. Je voudrais quand même savoir clairement quelle est la
partie de la loi, qu'on appelait, l'été dernier, le bill 50, qui
est en application, qui est mise en vigueur par voie de proclamation, et quelle
est la partie qui ne l'est pas?
M. Levesque: Tout le projet de loi, sauf l'article dont il est
question dans le projet de loi que nous avons à étudier
demain.
M. Burns: C'est la seule partie qui n'est pas en vigueur?
M. Levesque: Seul l'article 97 dont il est question.
M. Burns: Depuis quand? M. Levesque: Aujourd'hui.
M. Burns: Ah!... Je tombe pile.
Maintenant les droits et libertés fondamentales de la personne au
Québec sont maintenant, outre l'article qui paraît par le projet
de loi déposé aujourd'hui, en vigueur.
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Depuis aujourd'hui?
M. Levesque: Depuis le 28 juin 1976, aujourd'hui. Les
arrêtés en conseil 1988 et 2070 de 1976.
M. Burns: Qu'est-ce qui a pris autant de temps, parce que si je
me rappelle bien, c'est dans le courant du mois de juin 1975 que nous
avons...
M. Levesque: Le 27 juin que nous avons sanctionné,
1975.
M. Burns: Je pense que c'est l'anniversaire justement.
Qu'est-ce qui a pris autant de temps? Si je comprends bien, au
départ, nous avons ou vous avez, par voie de proclamation du
lieutenant-gouverneur en conseil, mis en application les dispositions
législatives qui concernaient uniquement la commission elle-même,
c'est-à-dire l'existence de la commission, la nomination des
membres...
M. Levesque: C'est justement cela qui a pris du temps, c'est que
nous avons donné à la commission ce dont elle avait besoin pour
s'organiser. Il faut dire que nous avons nommé, à
l'Assemblée nationale, le 27 juin 1975, six des premiers membres, dont
un a quitté je pense qu'il a été nommé juge,
c'est ça il en est resté cinq et nous avons
complété la commission de onze membres au mois de décembre
1975. Ils ont été assermentés en janvier 1976 à
Montréal. J'ai eu l'occasion d'assister à cette assermentation au
palais de justice.
Le temps qui a été mis à ça, ç'a
été de s'organiser. Une fois le président nommé, il
a dû faire son plan d'organisation et de développement de la
Commission des droits de la personne, il a dû s'occuper du recrutement du
personnel, de l'organisation des locaux, de mille et une choses qu'une nouvelle
commission doit mettre en place avant de pouvoir commencer à dire
qu'elle est prête à agir.
C'était quelque chose d'absolument neuf, nouveau, inédit
et le président, le vice-président et leurs collaborateurs ont
fait l'impossible pour être prêts et je suis très heureux de
voir que le 28 juin était la date qu'on s'était fixée
comme date d'en-
trée en fonction. Ils ont atteint l'objectif qu'ils
s'étaient fixé.
M. Burns: Sauf que, maintenant, la définition des droits
et libertés de la personne est l'objet de dispositions
législatives au Québec.
M. Levesque: Exactement. A partir d'aujourd'hui.
M. Burns: A partir d'aujourd'hui. Je vous en félicite,
même si cela a pris beaucoup de temps, je pense que cela a pris beaucoup
trop de temps. Si j'ai une critique à faire valoir, c'est qu'on n'a
pas...
M. Levesque: Je ne pense pas que cela aurait été
bon pour la commission de partir sur un mauvais pied et les commissaires ont
bien insisté là-dessus; c'est trop important pour partir un peu
en broche à foin, sans être prêt à recevoir les
appels.
M. Burns: Actuellement, donc, la commission est prête
à recevoir les réclamations des citoyens ou les plaintes des
citoyens à cet égard. Par exemple, combien y a-t-il de bureaux
ouverts dans tout le Québec?
M. Levesque: Montréal et Québec
présentement.
M. Burns: Montréal et Québec seulement. Combien y
a-t-il... Est-ce que vous envisagez d'en ouvrir d'autres que Montréal et
Québec, dans l'année qui vient?
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Quel endroit?
M. Levesque: L'intention de la commission est d'être
présente éventuellement dans les dix régions
administratives du Québec. Tout dépend, évidemment, quant
à l'échéancier, de la période de rodage dont ils
ont besoin présentement pour voir si Montréal et Québec,
c'est suffisant pour le moment; ça comprend la moitié de la
population du Québec, plus de la moitié, et surtout une
population urbaine qui est peut-être plus susceptible d'avoir certains
problèmes de la nature de ceux qui peuvent intéresser cette loi
ou qui peuvent être solutionnés en vertu de cette loi. Quant
à l'échéancier, il n'est pas encore
déterminé, parce que ça doit tenir compte également
des disponibilités budgétaires.
M. Burns: Vous n'avez pas de prospectives relativement à
de nouveaux bureaux...
M. Levesque: Pas encore.
M. Burns: ...à de nouveaux pied-à-terre de la part
de la commission?
M. Levesque: Pas encore.
M. Burns: Pour l'année qui vient.
M. Levesque: Pas encore.
M. Burns: Les dépenses de la commission depuis qu'elle est
en place, comment ont-elles été réglées, par
l'entremise du fonds consolidé, je présume?
M. Levesque: Pour l'exercice en cours, les sommes
demandées au Conseil du trésor sont de l'ordre de $1,5
million.
M. Burns: $1,5 million. C'est pour l'année qui vient de se
terminer, ça.
M. Levesque: Pour l'exercice financier qui commençait le
1er avril 1976.
M. Burns: 1976. Pour ce qui précède le 1er avril
1976... Parce que, sauf erreur, vous avez un demi-million de dollars...
M. Levesque: Pas loin de $500 000. Le chiffre se situe
plutôt aux environs de $400 000.
M. Burns: Pour l'année 1976/77, pour établir
l'exercice financier officiel?
M. Levesque: 1975/76?
M. Burns: J'ai devant moi la ventilation des crédits de
votre ministère et on ne voit que $500 000.
M. Levesque: C'est simplement indicatif, comme on le voit. C'est
statutaire. On a $500 000, on enlève $500 000, on a rien à voter,
parce que c'est statutaire. C'est simplement une indication d'un chiffre. Cela
aurait pu être $1 million, cela aurait pu être $500 000, parce que
cela a été imprimé il y a déjà longtemps et,
à ce moment-là, on n'était pas en mesure...
M. Burns: Mais votre estimation, ce n'est pas $500 000, c'est
$1,5 million.
M. Levesque: C'est-à-dire la demande formulée par
la commission. Cela ne veut pas dire que ce sera le montant qui lui sera
alloué. Le montant qui a été demandé par la
commission et que j'ai entériné auprès du Conseil du
trésor, est de l'ordre de $1,5 million.
M. Burns: Pour la période qui précède, je
n'ai pas de point de comparaison en 1975/76...
M. Levesque: Sauf qu'on a dépensé environ $400
000.
M. Burns: $400 000. Est-ce qu'il y a moyen d'avoir le rapport de
cela? Est-ce que vous pouvez nous le déposer?
M. Levesque: Certainement. On peut avoir rapport
là-dessus. Aucune objection. Cela va être dans les comptes publics
de toute façon.
M. Burns: Cela a été pris à même le
fonds consolidé, je présume?
M. Levesque: Oui, comme pour cette année. M. Burns:
Comme pour cette année.
M. Levesque: Sauf que c'était simplement au point de vue
de l'administration et de l'organisation de départ. A ce
moment-là, il y a eu deux sommes, si je me rappelle bien, une au mois
d'août et une autre au mois de février. Selon les besoins qui se
faisaient sentir au mois de février, à ce moment-là, on a
accordé la somme nécessaire pour se rendre au 31 mars. Depuis ce
temps-là, nous sommes à même le crédit qui est
demandé présentement.
M. Burns: En plus des commissaires qui sont déjà
désignés, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire
combien il y a d'employés actuellement, qui travaillent pour la
commission?
M. Levesque: Un effectif de 60 est prévu. Il y en a entre
30 et 35 recrutés à l'heure actuelle.
M. Burns: Comment se répartissent-ils par rapport au
bureau de Montréal et au bureau de Québec?
M. Levesque: Les chiffres les plus approximatifs qu'on peut
donner présentement, c'est Montréal, 50 et Québec, 10.
M. Burns: C'est ce qui est prévu; mais actuellement?
M. Levesque: II y a des services, comme le service de la
recherche, par exemple, qui est situé à Montréal...
M. Burns: Oui, mais vous avez 60 postes prévus et vous en
avez 35 actuellement. Vous dites 50 et 10, donc, c'est...
M. Levesque: Sur les effectifs prévus.
M. Burns: Prévus. Actuellement, il y a combien de
personnes qui travaillent à l'un et l'autre des endroits?
M. Levesque: Environ 6 à Québec
présentement.
M. Burns: Est-ce qu'il y a des commissaires qui sont en
permanence à Québec, à part du va-et-vient du
président de la commission ou d'une autre personne de la commission?
M. Levesque: II y a seulement trois commissaires permanents,
c'est-à-dire à temps plein, les autres étant à
temps partiel. Les trois à temps plein sont à
Montréal.
M. Burns: Comment opère le bureau de Québec, sans
la présence semi-permanente d'un des commissaires ou du
président? Qui est-ce qui est en autorité au bureau de
Québec?
M. Levesque: II y a un directeur, M. Maurice Marquis.
M. Burns: Est-ce que les commissaires permanents ont à
faire la navette entre Montréal et Québec, à cause de
cette situation-là?
M. Levesque: M. Marquis se rend souvent à Montréal,
à chaque semaine.
M. Burns: C'est-à-dire qu'un citoyen, à
Québec, qui voudrait avoir une entrevue avec quelqu'un en
autorité, c'est-à-dire un des commissaires, ne pourrait pas
l'obtenir à Québec?
M. Levesque: Le directeur est là pour cela. Il faut bien
comprendre que, lorsque la commission sera dans dix régions
administratives, on ne peut pas penser que les gens vont rencontrer le
président dans les dix régions.
M. Burns: Je présume que...
M. Levesque: Ce qu'il faut, c'est un directeur qui puisse
examiner la situation et, ensuite, communiquer avec la commission, à
Montréal.
M. Burns: Est-ce qu'à Montréal, les commissaires
ont l'occason de rencontrer les citoyens qui viennent se plaindre directement
ou si c'est encore un directeur général qui les
reçoit?
M. Levesque: Les commissaires, évidemment, se trouvent
à Montréal, mais, par contre, ce sont les divers directeurs du
service d'accueil, du service d'enquête, etc., qui reçoivent les
gens. Mais s'il y avait un groupe particulier qui voulait rencontrer la
commission, que ce soit n'importe où dans la province, à ce
moment, la demande peut être faite et, déjà, on me dit
qu'on l'a faite.
M. Burns: Est-ce que cela s'est fait dans le passé?
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Même si la partie mécanique de la loi ou
la partie... je ne dirai pas mécanique, mais la partie, appelons-la la
partie concernant les droits des personnes n'est en vigueur qu'à compter
d'aujourd'hui et que, depuis aujourd'hui...
M. Levesque: II faut attendre un peu pour une jurisprudence, mais
une jurisprudence se crée...
M. Burns: Je présume.
M. Levesque: ... et certains modes de vie...
M. Burns: Malgré cela, M. le ministre, est-ce que vous
pouvez me dire si, déjà il y a eu un certain nombre de plaintes
adressées à la commission, parce que je présume que
beaucoup de ci-
toyens ne savaient pas que la charte des droits, comme on se plaît
à l'appeler, et des libertés de la personne au Québec
n'était pas en vigueur avant aujourd'hui? Est-ce qu'il y a eu des
plaintes formelles, soit par voie de lettres...
M. Levesque: Le président m'indique que, comme elle
n'était pas en vigueur, on n'a pas traité ces cas encore. Mais il
estime qu'environ une centaine de cas sont déjà rendus à
la commission.
M. Burns: Qui vont être traités par la commission
maintenant ou qui sont mis de côté parce qu'ils étaient
soumis avant la mise en application de la loi?
M. Levesque: Au point de vue légal, ils ne devraient pas.
Ce n'est pas rétroactif. Probablement qu'en entrant en communication
avec ces gens, peut-être...
M. Burns: II faudrait qu'ils recommencent leurs lettres. Vous
voyez ce que le retard de votre ministère cause aux citoyens. Ils vont
être obligés de recommencer les mêmes procédures.
Vous allez les décourager, dès le départ, ces cent
personnes, de recourir aux services de la commission.
M. Levesque: S'il s'agit d'un cas de discrimination qui perdure,
on pourra s'en occuper. Si c'est une affaire qui est dans le passé, qui
est réglée et finie, on ne peut pas, parce qu'il faut commencer
quelque part.
M. Burns: M. le Président, le programme 2 est
adopté. J'en profite, M. le Président, pour souhaiter bonne
fête à ia commission, à son président qui est
là et lui souhaiter également la meilleure chance possible. Je
pense qu'il entreprend une tâche qui n'est pas facile. Je peux lui dire
qu'il pourra compter sur l'appui de l'Opposition. En tout cas, je n'ai pas
l'intention de mettre les mots dans la bouche du ministre de la Justice, mais
je présume que le ministre de la Justice, lui aussi, voudra donner son
appui total et entier à la commission, qui n'a pas une tâche
très facile à accomplir, surtout qu'elle se lance dans un sentier
non battu.
En ce qui nous concerne, soyez assuré que nous croyons
énormément au travail que la commission pourra faire. C'est dans
ce sens que nous souhaitons la meilleure chance possible au président et
à ses collègues commissaires.
M. Levesque: La commission est au courant, évidemment, de
l'appui que je lui ai accordé depuis que je suis ministre de la Justice.
J'ai eu l'occasion de rencontrer les commissaires à différentes
reprises et de formuler également des voeux et non pas seulement des
voeux mais également notre intention ferme, notre volonté
politique d'apporter notre meilleur appui à la commission et à
ses travaux. Bonne fête!
M. Burns: Bonne fête!
Le Président (M. Pilote): Le programme 2, adopté?
Adopté. Programme 3, Gestion interne et soutien.
M. Burns: Les éléments 1, 2, 3, 4, 5, quant
à moi, sont adoptés.
Le Président (M. Pilote): Adopté, avec
révision du Code civil.
Révision du Code civil
M. Burns: Oui, M. le Président. J'aimerais connaître
du ministre la date à laquelle l'Office de révision du Code civil
prévoit avoir terminé ses travaux et remis ses derniers rapports.
J'aimerais, de toute façon, s'il était possible... je n'ai pas
d'objection à ce que Me Crépeau fasse le rapport lui-même
au nom du ministre, si jamais cela devient trop technique, parce que je
comprendrais que le ministre n'est pas au fait de tous les détails des
travaux de la commission. Je ne l'en blâme pas, loin de là.
M. Levesque: D'ailleurs, quand je suis arrivé ici, il y a
vingt ans, comme député excusez-moi, M. le
Président M. Duplessis nous parlait de l'Office de révision
du Code civil. A ce moment, on était loin de s'attendre que cela prenne
autant de temps. Je n'en blâme pas M. Crépeau qui a
été très actif, ainsi que ses collaborateurs. C'est une
entreprise de taille. L'office a été créé le 10
février 1955... Ce n'est pas facile de créer un Code civil;
surtout, c'est une responsabilité extrêmement sérieuse que
de toucher quelque chose qui a été basé sur le droit
romain et le Code Napoléon. C'est toujours une opération
extrêmement délicate que de toucher à ce chef-d'oeuvre
millénaire. Il y a eu, cependant, une production extrêmement
importante durant ces dernières années, particulièrement
ces derniers mois. Il y a eu 47 rapports qui étaient prévus pour
couvrir la matière du nouveau code. Jusqu'à maintenant, je pense
que nous en avons 42. Le 43e va sortir bientôt, me dit M. Crépeau.
Le 43e était sur la personnalité juridique et les quatre autres
sont sur la fiducie, l'assurance maritime, l'affrètement...
M. Burns: I! en reste combien à venir?
M. Levesque: ... et l'enregistrement des biens. Il en reste
quatre.
M. Burns: Est-ce que ce serait le total des travaux de la
commission? On aurait une espèce de somme de la pensée, des
recommandations, si on peut dire, de l'office.
M. Levesque: En 1976, pour ce qui en reste, après que ces
quatre autres rapports seront publiés, c'est la coordination des travaux
des comités. C'est ce qu'on fait présentement. C'est l'oeuvre du
comité de coordination. Il y a des
consultants qui nous promettent cela pour... On avait pensé au
mois de juin 1976, l'an dernier. On parlait d'une possibilité, mais je
pense bien qu'on est plus réaliste à songer à la fin de
l'année 1976 pour terminer le travail de coordination. C'est beaucoup.
Je dois admettre qu'il y a là un travail considérable, parce que
ces différents rapports ont été faits par
différents comités.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Plus de 120 personnes ont été mises
à contribution. Je trouve le président assez optimiste, mais
comme on a exigé qu'il en soit ainsi, j'espère bien que le tout
pourra se faire dans ce nouveau délai...
M. Burns: Est-ce que Me Crépeau est prêt à
recommencer ses cours de droit à notre endroit lorsque le nouveau code
sera adopté?
M. Levesque: Oui...
M. Burns: Est-ce qu'il est prêt à se mettre à
notre disposition, parce qu'on va être complètement perdu, si je
comprends bien. Ceux de nous qui avons bénéficié des cours
de Me Crépeau, alors qu'il était professeur, on va devoir tout
oublier ce qu'il nous a dit et de lui demander de recommencer dans une autre
optique.
M. Levesque: C'est un problème pour tous les avocats qui
sont au Barreau présentement. Je m'imagine...
M. Burns: Est-ce que...
M. Levesque: ...que ce n'est pas facile.
M. Burns: ...l'on peut prévoir que, dans le courant de
l'année prochaine... Je comprends que le rapport, même en
étant très optimiste, ne pourrait pas être
déposé avant la fin de l'année 1976, l'année
civile, est-ce qu'on peut prévoir qu'à la suite du rapport de
l'office, on puisse se retrouver avec un projet de législation globale
au cours de l'année 1977, ou bien est-ce que, déjà, c'est
trop espérer?
M. Levesque: Le président m'indique qu'il y aurait sans
doute des difficultés avant de pouvoir répondre d'une
façon affirmative et absolue à la question du
député. Le président songe en particulier à des
problèmes d'ordre constitutionnel, un mariage dans la famille, etc., et
peut-être dans les mécanismes et également dans
l'enregistrement des personnes et des biens. Enfin, il prévoit des
difficultés, c'est inévitable.
M. Burns: Outre le cas des transsexués dont nous avons
parlé tout à l'heure et qui, possiblement, pourrait faire l'objet
d'un projet de loi autonome, peut-être dans le courant de la session
actuelle, peut-être à l'automne, est-ce qu'il y a d'autres projets
que le ministre de la Justice envisage tirer des différents rapports de
l'office ou de ses comités, en vue de les faire adopter comme projets de
loi autonomes avant la fin de l'année?
M. Levesque: Nous sommes rendus trop près de
l'échéance, présentement, et on ne croit pas qu'il
serait... A moins d'avoir des motifs comme ceux, peut-être,
invoqués tout à l'heure, dans le cas soumis par le
député de Maisonneuve, nous essayons d'éviter de
légiférer à ce moment-ci, avant que l'intégration
ne soit complétée.
Il y a un projet de loi que j'ai sur mon bureau présentement
touchant la puissance parentale à substituer à la puissance
paternelle. Je pense bien que c'est assez avancé. Peut-être
qu'à l'automne on pourrait toucher ça. Mais le projet est
prêt. Je ne l'ai pas apporté, parce que c'est simplement une
question de temps. Nous n'avions pas le temps physique de l'étudier.
M. Burns: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire
combien de personnes, de façon permanente, sont affectées
à l'Office de révision du Code civil actuellement?
M. Levesque: Une quinzaine de personnes.
M. Burns: Une quinzaine de personnes à temps plein.
M. Levesque: Les effectifs ont été réduits,
parce que nous arrivons à la fin du mandat, et on le voit, d'ailleurs,
dans les sommes qui sont demandées dans nos estimations. En 1975/76, les
sommes demandées étaient de $577 000, et elles sont pour 1976/77
de $287 800. C'est donc que le budget demandé a été
réduit considérablement. On a dû penser aussi que ça
se terminerait peut-être le 30 juin? Je ne sais pas si on va pouvoir
arriver avec les chiffres demandés, mais on verra.
M. Burns: Bon!
Le Président (M. Pilote): Elément 6,
adopté?
M. Burns: Elément 6, adopté.
Le Président (M. Pilote): Adopté. Programme 3.
Adopté. Programme 4: Garde des prévenus et détenus.
Les agents de la paix
M. Burns: Là-dessus, le problème soulevé par
le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique a une certaine
actualité.
J'apprends à l'instant même que demain on est en droit de
s'attendre à une manifestation devant le parlement je ne sais pas
si mes informations sont exactes ou non des représentants de
cette association ou de ceux qu'on appelle communément les gardiens de
prison, mais qui sont, en titre, des surveillants, qui posent et qui ont
posé à l'endroit du ministre une question très pertinente,
relativement, entre autres, à leur affectation, à leurs
effectifs.
J'ai pris connaissance d'un communiqué qui avait
été adressé le 9 avril dernier à tous les media et
dont, je pense, la majorité des députés, sinon tous les
députés, ont reçu copie. Il était publié par
le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique, sous la signature de
leur président, M. Laurent Caplet. J'ai eu l'occasion de rencontrer ce
dernier d'ailleurs, parce que le mémoire en question
m'intéressait beaucoup et je croyais que j'avais besoin d'avoir un
certain nombre de renseignements à ce sujet.
Le ministre de la Justice a répondu à ce mémoire du
30 avril. Je pense que ce dernier s'est, à de nombreux endroits,
fourvoyé sur les statistiques qui étaient données par le
Syndicat des agents de la paix.
Ce qui, plus particulièrement, semble inquiéter les agents
de la paix, est la réduction des crédits qu'on affecte, toute
proportion gardée, à ce secteur qu'on appelle la garde des
prévenus et des détenus alors que dans les autres secteurs, il y
a eu une augmentation quand même, en pourcentage, dans à peu
près tous les budgets.
Je cite tout simplement les chiffres je n'ai pas fait les calculs
moi-même mais si on regarde simplement le programme 4: Garde des
prévenus et des détenus, par rapport aux $30 302 100 de
l'année 1975/76, nous nous retrouvons cette année avec $32 042
200. C'est une augmentation de 5,74%. Le programme précédent, au
niveau de la gestion interne, prévoit une augmentation de 7,19%. Quant
à l'autre programme, évidemment, il n'y a pas de comparaison
possible, celui de la Commission des droits et libertés de la personne,
de sorte qu'on ne peut examiner le pourcentage, mais le pourcentage quant au
fonctionnement du système judiciaire lui-même connaît une
augmentation de 6,75%, de $41 millions à $44 millions. C'est ainsi un
peu partout, sauf à quelques endroits où l'augmentation du
pourcentage affecté aux programmes est inférieure, dans quelques
rares cas, mais il y en a. Par exemple, réinsertion sociale des
délinquants, vous avez une augmentation de 14,30%, à l'aide
juridique, une augmentation de 22,75%, à la conciliation entre locataire
et locateur, une augmentation de 29,51%, dans les budgets d'une année
à l'autre, au contentieux pénal, une augmentation de $2 293 900
à $3 370 600, c'est-à-dire une augmentation de 46,93%. On peut
retrouver...
M. Levesque: Je pourrais peut-être dire au
député que je suis d'accord avec lui sauf qu'on m'indique qu'il y
a eu erreur de la part de ceux qui ont préparé ceci.
M. Burns: Le pourcentage?
M. Levesque: Non. A la page 16-12 de notre livre des
crédits, on trouvera que le montant de $32 042 200 devrait plutôt
se lire $36 millions.
M. Burns: Une augmentation plus substantielle que celle...
M. Levesque: Oui, beaucoup plus substantielle.
M. Burns: Remarquez que je ne faisais pas...
M. Levesque: Nous avons fait une entente avec le Conseil du
trésor pour que ces $4 millions qui n'apparaissent pas ici soient
compensés autrement.
M. Burns: Comment ce montant va-t-il être
compensé?
M. Levesque: Par un budget supplémentaire, je pense bien.
C'est la seule façon qu'ils peuvent... Ou le fonds de suppléance.
De toute façon, il y a $4 millions de plus qui vont être
attribués, ce qui apparaît présentement...
M. Burns: A ce programme. M. Levesque: A ce programme.
M. Burns: Déjà, c'est une amélioration
sensible.
M. Levesque: L'augmentation serait de plus de 20%.
M. Burns: Cela cadrerait avec certaines des augmentations
importantes, comme à l'aide juridique. Je suis d'accord. C'était
uniquement à titre d'introduction que je citais ces chiffres qui
apparaissent je le dis en toute humilité, ce n'est pas moi qui ai
fait ces calculs dans l'annexe du mémoire du Syndicat des agents
de la paix. Cependant, ce qui m'a frappé, M. le Président, et
là-dessus j'aimerais avoir les commentaires du ministre, c'est
semble-t-il une diminution constante. Peut-être me dira-t-il qu'avec ces
$4 millions additionnels qu'il vient de nous annoncer, il est en mesure de
contrer ce decrecendo absolument évident chez les surveillants, et,
même je dirais chez les surveillants et gérance, qui
apparaît à la page 2 du communiqué, dont sans doute le
ministre a copie. On voit que pour les années 1972 à 1975, il y a
une diminution constante du nombre de surveillants. Par exemple, en 1972, il y
avait 1500 postes ces chiffres sont tirés du rapport annuel du
ministère de la Justice de 1975 diminuant à 1479 en 1973,
1400 en 1974, pour finalement se retrouver à 1381 en 1975. Le programme
4, quant aux années 1976/77 laisse entendre que la garde des
détenus et des prévenus, employés permanents, passerait de
2148 à 2162, c'est-à-dire une augmentation d'à peine 14
gardes.
Je pense qu'il est important, dans la réponse que le ministre
s'apprête à me donner, de tenir compte du fait que tous ces
chiffres contiennent non seulement les surveillants globalement, qui sont
affectés à la garde des détenus et des prévenus,
mais contiennent aussi les employés de soutien, comme les ouvriers, les
nettoyeurs, les fonctionnaires. J'aimerais que le ministre nous donne les
détails de l'augmentation prévue pour 1976/77 du nombre
d'employés permanents qui sont spécifiquement affectés
à la surveillance, à la garde des détenus et des
prévenus.
M. Levesque: M. le Président, il s'agit là d'une
excellente question et une question d'actualité. Il y a eu la
déclaration du Syndicat des agents de la paix, représenté
par M. Laurent Caplet, je pense.
M. Burns: Laurent Caplet, oui.
M. Levesque: II a fait une déclaration à la suite
de laquelle il y a eu une rencontre entre la partie syndicale et le
gouvernement, qui était représenté par la Direction
générale des relations de travail et par le ministère de
la Justice. Cette rencontre a eu lieu le 12 mai dernier.
Les éléments suivants ont été couverts,
c'est-à-dire, premièrement, alors que, dans les années
précédentes, on avait une population carcérale qui
diminuait ou qui se maintenait, il y avait soit une diminution ou encore
simplement un maintien... Le phénomène actuel, c'est une
augmentation de la population carcérale. Je parle des détenus et
des prévenus.
M. Burns: Si on lit les chiffres cités, à moins
qu'ils ne soient pas exacts, à la page 2 par le Syndicat des agents de
la paix, on lit ceci: En 1972, il y avait 1500 surveillants dans le service de
détention pour 26 589 entrées. Donc, on parle de prévenus
et de détenus, quand on parle d'entrées, je présume. En
1975, il y en a donc eu 37% de plus. En 1972, il y avait une population moyenne
mensuelle de 1259, il y a eu, de 1972 à 1975, 28,2% d'augmentation. Les
chiffres sont cités ailleurs dans ce texte. J'ajoute le facteur suivant,
depuis 1972 d'autres fonctions que la pure et simple garde des détenus
ou, si vous voulez, la surveillance des détenus au sens large du mot, a
été modifiée. Le poste lui-même, la fonction ou la
tâche elle-même a été modifiée. On lit
à la page 3 de ce même communiqué, de la part du Syndicat
des agents de la paix, que de plus, en 1972, le transport des prévenus
et détenus était fait en grande partie par la Sûreté
du Québec. Cette nouvelle responsabilité, qui s'est
complétée en 1975, occupe au moins 100 surveillants. Lors de
l'ouverture, dans les années 1972/73, du palais de justice de
Montréal, le service de la détention a pris charge de faire
comparaître les contrevenants, ce qui était fait auparavant par la
Sûreté du Québec. Cela a entraîné
jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire au mois d'avril, l'affectation
de 103 surveillants à ce poste.
On a augmenté les charges des surveillants, c'est-à-dire
le transport des détenus, l'accompagnement, si je puis dire, des
détenus qui doivent aller comparaître et il semble qu'on ait pas
augmenté de façon sensible les postes, alors que la population
carcérale n'a pas diminué de façon majeure.
M. Levesque: Justement, si on prend, par exemple, le rapport
annuel 1975, la direction générale de la probation et le service
d'établissements dé détention, on s'aperçcoit que
les chiffres que j'ai ici, dans ce rapport annuel, ne correspondent pas
à ce que vient de dire le député. Par exemple, en 1971,
donnez-moi le mois que vous voulez. Disons que...
M. Burns: Je n'ai pas les chiffres de 1971, je vous ai
parlé de 1972.
M. Levesque: Prenons un mois, n'importe lequel, que désire
le député. Disons, par exemple, le mois d'octobre. Le total en
1971 était de 1785 prévenus et détenus. En 1972, c'est
baissé à 1291. En 1973, c'est baissé à 1158. En
1974, à 1331.
M. Burns: C'est remonté.
M. Levesque: En 1975, à 1833.
M. Burns: Oui. Donc, il y a eu une espèce de diminution
dans les années 1972/73, peut-être même un peu 1974, mais on
a commencé à sentir une augmentation dès 1974 et surtout
en 1975.
M. Levesque: Cela a commencé à augmenter en
septembre 1975 pour la moyenne. Avant cela, il y avait une diminution presque
constante depuis 1971. Ce qui est arrivé, c'est que justement pour
utiliser les effectifs qu'on avait, on a transféré certains de
ces postes à la probation, plutôt que de les perdre. Ce qui est
arrivé, de 1975 à 1976, cela n'a pas été une
diminution, cela a été une augmentation de 35% qui n'était
pas du tout prévue.
D'ailleurs, c'est un phénomène qui n'existe pas seulement
au Québec, c'est un phénomène mondial qui a pris tout le
monde par surprise. A un moment donné, pourquoi y a-t-il tant de
prévenus et de détenus? A la suite d'une diminution, à
partir de 1971, assez constante, ou un maintien, à partir de septembre
1975, on arrive à une augmentation et des prévenus et des
détenus qui s'élève à 35%. C'est une augmentation
assez spectaculaire.
Nous avons fait ceci: A l'automne 1975, nous avons fait des
représentations auprès du Conseil du trésor. Je pense que
je l'ai mentionné au début de mes remarques, lorsqu'on a
parlé du monstre, nous avons réussi à faire en sorte que
le gel des effectifs ne touche pas les postes qui étaient
affectés à la détention.
Au cours de janvier et février 1976, le problème est
arrivé au centre Parthenais, le centre de prévention de
Montréal, et on a fait d'autres représentations auprès du
Conseil du trésor. Comme résultat, 42 postes ont
été ajoutés, ce qui nous a permis d'occuper 70 cellules
additionnelles au quatrième étage. Ceci augmentait la
capacité de 370 à 440. J'ai les chiffres ici de la population du
centre de prévention, cela a continué de grimper. En janvier
1975, 311; en février, 334; en mars, 345; en avril, 349; en mai, 367; en
janvier 1976, 382; en février, 447; en mars, 472; en avril 483; en mai,
490. Cela prend de la place et cela force. Le total des 440 cellules qu'on
venait d'obtenir ne suffisait déjà plus.
Au début d'avril 1976, nous avons été forcés
d'effectuer des transferts dans tous les centres environnants: Valleyfield,
Saint-Hyacinthe, Sherbrooke, on est même venu jusqu'à
Québec.
M. Burns: Orsainville.
M. Levesque: Oui. Il y a eu près de 90 transferts.
M. Burns: Entre parenthèses, c'est sans doute l'objet de
la nouvelle qui paraissait dans les journaux récemment, et qui est
expliquée, je pense, par le Dr Gauthier comme n'étant pas une
manoeuvre en vue des Jeux olympiques à Montréal.
M. Levesque: C'est cela.
M. Burns: S'agissait-il de cette activité?
M. Levesque: II y avait eu près de 90 transferts à
Orsainville, en mars, avril et mai.
M. Burns: C'était à cause de l'exiguïté
des locaux à Parthenais. On parlera de Parthenais après, de
façon vraiment spéciale.
M. Levesque: C'est à Montréal, évidemment,
que la surpopulation carcérale se fait le plus sentir. Dans les autres
districts...
M. Burns: Par exemple, si...
M. Levesque: Si on me laisse finir, je vais finir cela. Dans les
autres districts de la province, il semble bien qu'il n'y ait pas de
problème de ce côté. Le problème principal est
à Parthenais. Nous avons fait d'autres représentations encore
auprès du Conseil du trésor, cette fois-ci, en vue de la
réouverture du Centre de détention de Sorel qui est assez facile
d'accès à partir de Montréal. C'est encore mieux que de
venir jusqu'à Québec avec les prévenus. Ceci nous donnera
un nombre additionnel de 81 cellules, ajoutées aux autres que j'ai
mentionnées tout à l'heure, à Parthenais, ceci nous
permettra d'avoir 520 cellules pour les prévenus de la région de
Montréal.
J'ai mentionné tout à l'heure qu'en mai 1976, on
était rendu à 490, et la progression continuait. On est à
29 ou 30 près, malgré tout ce que nous avons fait jusqu'à
présent pour faire face à la situation.
C'est un peu cela que nous avons expliqué au syndicat. Le
Trésor acceptera en même temps de nous donner 61 postes
additionnels à Sorel. Alors, je pense bien que...
M. Burns: Par rapport aux chiffres qui sont cités pour
1975, comme personnel strictement de détention, affecté à
la détention, c'est-à-dire les surveillants eux-mêmes,
qu'on chiffrait par 1381, quel est le chiffre prévu pour l'année
1976? Les chiffres sont tirés du rapport de la direction
générale de la probation et des établissements de
détention.
M. Levesque: Si on prend les effectifs tels qu'ils sont
mentionnés ici au livre des crédits, nous avions, l'an dernier,
2151. Cette année, nous avions prévu, ici au budget, 2189, soit
une augmentation assez légère.
M. Burns: C'est là que je n'arrive pas aux mêmes
chiffres que vous par rapport au tableau des effectifs présentés
par la direction générale de la probation et des
établissements de détention.
M. Levesque: En attendant, ce que je veux dire, c'est que, dans
le livre de crédits, nous ajoutons, à cause de ce dégel
d'effectifs qui a été fait et pour Parthenais et pour Sorel, 104
personnes à ce qui est déjà demandé ici.
M. Burns: Est-il exact que, l'année dernière, pour
l'exercice financier 1975/76, il y a eu environ $2 500 000 payés en
temps supplémentaire?
M. Levesque: Ces chiffres ont été pris dans le
rapport de la direction générale des établissements de
détention, mais on retrouve ici le total des effectifs de ce programme.
Le chiffre exact, c'était 2151 l'an dernier. Nous avons obtenu 2189
postes cette année...
M. Burns: Est-ce que cela comprenait...
M. Levesque: ... en plus, cependant, 104 nouveaux postes ont
été ajoutés après que le livre des crédits a
été imprimé.
M. Burns: Est-ce que cela comprenait, M. le ministre,
également les employés de soutien?
M. Levesque: Pardon?
M. Burns: Vos chiffres comprennent-ils les employés de
soutien, c'est-à-dire les ouvriers, les nettoyeurs, les fonctionnaires
affectés ou assistants à la détention?
M. Levesque: Oui, on l'a à la page 23 du rapport annuel
1975. Cela comprend le directeur général, les cadres
supérieurs, les adjoints aux cadres supérieurs, les
professionnels, les fonctionnaires, le personnel ouvrier, les agents de la
paix. Le plus grand nombre, évidemment, ce sont les agents de la
paix.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: II y en a, à la détention, 2209;
à la page 23.
M. Burns: Ce sont les surveillants et les effectifs de
gérance.
M. Levesque: Oui.
M. Burns: 2209, c'est d'accord, on se retrouve.
M. Levesque: En 1975.
M. Burns: En 1975. Par rapport à ce chiffre, qu'est-ce que
cela veut dire l'année prochaine?
M. Levesque: 38 plus 104, cela fait 142, d'après les
renseignements que j'ai.
M. Burns: Est-il exact que l'année financière
1975/76 a démontré une dépense en temps et demi de $2 500
000, en temps supplémentaire, c'est-à-dire une moyenne de $1000
par employé, à la détention?
M. Levesque: C'est exact.
M. Burns: C'est-à-dire que c'était nettement
insuffisant.
M. Levesque: Mais, je viens de vous donner des chiffres qui
indiquent qu'on ne pouvait pas prévoir une augmentation aussi importante
de la population carcérale. C'est un phénomène mondial, ce
n'est pas seulement au Québec, mais nous avons dû y faire face de
cette façon.
M. Burns: Le même rapport de 1975 disait ceci, et je le
cite à la page 54: "L'année 1975 a été quelque peu
désastreuse quant au nombre d'évasions enregistrées. Cette
augmentation ne serait pas étrangère à la hausse assez
soudaine de la population carcérale", ce que vous avez
déjà dit, M. le ministre, "qui aurait perturbé la routine
institutionnelle.
Le nombre accru de détenus a forcé le personnel à
réagir à cette nouvelle situation créant un
déséquilibre où se sont multipliés les dangers
d'évasion, d'émeute et autres incidents latents dans un tel
secteur d'activité." Plus loin, à la page 68, on lit ceci: "Par
ailleurs, la prise en main des mouvements et transfèrements", cela c'est
assez important, parce que c'est là que la tâche du surveillant
à la détention est augmentée. "Par ailleurs," dit le
rapport à la page 68, "la prise en main des mouvements et
transfèrements des prisonniers entre les établissements et vers
les cours de justice, lequel transport était totalement assumé il
y a quelques années par la Sûreté du Québec, a
absorbé une petite partie de ses effectifs tout en provoquant un
accroissement du va-et-vient du personnel." Un peu plus loin aux pages 78 et 79
on lit ceci: "De fait, les ressources en personnel, spécialisé ou
non, sont orientées vers cet objectif. Les surveillants sont davantage
appelés à collaborer avec les équipes interdisciplinaires
dans le traitement des individus. Des surveillants sélectionnés
participent aux activités des personnes incarcérées. La
détection des problèmes provoqués par
l'incarcération et leurs règlements entre dans leur
préoccupation. A eux aussi revient la responsabilité du
contrôle des absences temporaires etc." De sorte que...
M. Levesque: Dans le domaine des évasions, je voudrais
tout simplement dire que je ne peux pas souscrire à cette conclusion.
Parce que les problèmes...
M. Burns: Celle qui est dans le rapport?
M. Levesque: Oui. Le problème est celui-ci, il se situe
plutôt au centre de Parthenais qu'aux centres de prévention et les
évasions qui ont eu lieu, ont eu lieu, d'après le rapport que
j'ai devant moi d'ailleurs tous ceux qui se sont évadés
ont été repris cela s'est passé dans des prisons
où il n'y a pas tellement de problyemes, comme à Waterloo, Hull,
Baie Comeau, Matane, Rimouski, Mont-Laurier, Saint-Hyacinthe c'est surtout dans
ces endroits. Il n'y en a pas à Montréal, je ne vois pas
d'évasion ici, dans le rapport.
M. Burns: Mais, à Parthenais, c'est bien sûr. M.
Levesque: II y en a eu un qui s'est...
M. Burns: Ils sont dans une boîte à conserve les
pauvres gars.
M. Levesque: II y en a un qui s'est évadé, en 1975.
Je ne peux pas relier le problème en question aux évasions.
M. Burns: Sauf, que si vous avez une diminution du personnel, par
rapport aux années précédentes, si vous avez en plus de
cela...
M. Levesque: II n'y a pas une diminution de personnel.
M. Burns: Oui, il y a une diminution. M. Levesque:
Non.
M. Burns: Ce sont les chiffres mêmes de la DG que je vous
cite. Les surveillants eux-mêmes. Je ne parle pas du personnel de
gérance, les surveillants sont passés de 1500 en 1972 à
1381. Si ce n'est pas une diminution, je ne sais pas ce que c'est.
M. Levesque: S'il y a eu diminution, c'est plutôt dans les
années précédentes.
M. Burns: Je parle du chiffre de 1972 qui est fixé
à 1500.
M. Levesque: C'est cela, 1972.
M. Burns: Et du chiffre de 1975. La progression a
été constante.
M. Levesque: Comme j'ai mentionné, il y avait une
diminution de la population carcérale à partir de 1971.
M. Burns: Oui, mais en 1975, si on a payé $2 500 000,
c'est-à-dire une moyenne de $1000 par employé affecté
à la détention j'inclus même les employés de
gérance, pour être généreux, pour faire le chiffre
rond de $1000 cela veut dire qu'il y avait quand même un
problème dès ce moment. Je pense qu'à ce moment-là,
on est en mesure d'examiner paralèllement à cela l'augmentation
de la tâche qui est nouvelle...
M. Levesque: II y a eu d'autres facteurs, me dit-on.
M. Burns: ...et là de constater qu'il y a plus
d'évasion. Si vous me dites que ce n'est pas aux endroits
où cela se passait cette augmentation de la tâche, je ne le sais
pas, mais cela m'apparaît bizarre que ce ne soit qu'à
Montréal qu'on ait fait du temps supplémentaire.
M. Levesque: Montréal et Québec, surtout.
M. Burns: Dans les faits, vous me parlez d'une augmentation d'un
certain nombre de surveillants prévue pour cette année, vous me
parlez également de non-blocage des fonds, si je puis m'exprimer ainsi,
concernant les effectifs de détention. Cela fait-il partie d'une
politique générale ou si c'est uniquement un replâtrage
temporaire? C'est ce que je veux savoir. A-t-on étudié cette
situation qui est décrite? Si elle est exacteje pense qu'elle est
exacte, parce que la majorité des autorités sur lesquelles se
fonde le mémoire du Syndicat des agents de la paix et le rapport
de...
M. Levesque: On s'est aperçu qu'on...
M. Burns: ... la direction générale est-ce
que cela fait partie d'un réexamen de la politique des effectifs pour la
détention?
M. Levesque: On s'est aperçu qu'on avait réagi
très rapidement. Dès qu'on s'est aperçu que la population
carcérale avait augmenté... Cela ne prend pas de temps à
s'en apercevoir. Nous allons continuer d'analyser cette population et à
mesure qu'il y aura des changements, nous allons prendre immédiatement
les dispositions qui s'imposent. C'est très difficile de prévoir
quelle sera la situation dans un an ou deux, parce qu'on a eu des
phénomènes contraires, où il y a eu des diminutions.
Espérons que cela...
M. Burns: Est-ce que cette politique a tenu compte du fait qu'il
y avait des charges additionnelles imposées aux agents de la paix? Par
exemple, accompagner les détenus à la cour, s'occuper du
transport des détenus, participer à l'aspect de probation et
d'assistance aux détenus avec d'autres groupes multidisciplinaires, je
pense, par exemple, aux psychologues entre autres. Ce ne sont pas les agents de
la paix qui disent cela, c'est le rapport de la direction
générale. A-t-on tenu compte, par exemple, qu'en 1972 on a
commencé à avoir tendance à affecter le surveillant
à des tâches plus près du traitement humain de
l'incarcéré? A-t-on tenu compte de ce qu'on dit à la page
36 de ce même rapport de 1975: "De fait, toute administration
pénitentiaire qui se veut moderne doit manipuler l'apparente
dualité que constituent les objectifs de ségrégation
(sécurité) et de réinsertion sociale.Csociale. Ces
administrations sont conscientes du poids que la tradition a laissé sur
l'élément sécuritaire. D'ailleurs, cette tradition se
manifeste à tout moment dans l'opinion publique, dans l'architecture des
prisons, dans la résistance aux changements au sein du personnel dont le
rôle n'a jamais, historiquement, été valorisé et
même dans l'institutionnalisation de son administration. Bref, la
tendance vers la dominance de l'objectif réinsertion sociale, qui
implique une perception du système sécuritaire, doit s'appuyer
sur une orientation plutôt empirique, évolutive et surtout
sereine".
Ceci laissant croire qu'on l'a décidé et c'est
très bien, remarquez que je ne blâme pas la direction
générale de revoir sa façon d'utiliser les surveillants,
là où je me pose des questions, c'est quand on impose des
tâches additionnelles aux surveillants sans leur donner, d'une part, les
effectifs nécessaires pour y faire face et, deuxièmement, sans
prévoir l'augmentation qui, à elle seule, en 1975, selon les
chiffres du ministre, aurait justifié une augmentation très
importante des effectifs qui existaient à ce moment-là. Ce n'est
pas sur une question de philosophie de l'utilisation et même, je dirais,
de la revalorisation de la fonction du surveillant que j'en ai. C'est bien au
contraire en étant tout à fait d'accord avec cette position que
je me dis d'autre part qu'il faut absolument mettre à la disposition des
agents de la paix affectés à ce travail de détention,
à ce travail de surveillance, les effectifs requis pour qu'ils puissent
faire un bon travail, pour qu'eux-mêmes puissent se sentir
revalorisés dans leur travail et non pas en se fatiguant à faire
du temps supplémentaire à hue et à dia qu'on va arriver
à avoir un personnel équipé pour faire face aux
problèmes que comporte l'augmentation, entre autres, de la population
carcérale qui a été dénotée depuis une
couple d'années.
M. Levesque: Voici quelle est la situation. Vous savez qu'on
avait eu une baisse de 500 par jour de 1967 à 1972, de sorte que notre
population était descendue à peu près à 1200 par
jour.
Cette population est demeurée stable en 1972, 1973 et 1974. Ce
qui est arrivé à ce moment, c'est que nous avons fermé
certaines prisons. De cette façon, sans nuire à l'ensemble du
service, nous avons mis à d'autres tâches le personnel
récupéré.
C'est là que nous avons commencé à donner d'autres
responsabilités, telles que les palais de justice, la
sûreté, etc.
Soudainement, au cours de l'année 1975, nous commençons
à monter. Nous sommes revenus à 35%. D'ailleurs, l'augmentation
s'est effectuée de façon soudaine et pas simplement ici au
Québec, mais dans le monde entier, à un tel point qu'aux
Etats-Unis, par exemple, actuellement, on est à 1000 du chiffre que l'on
prédisait pour 1986. En Europe, c'est exactement la même
chose.
M. Burns: C'est 1000 en moins ou en plus?
M. Levesque: C'est 1000 en moins pour 1986. De sorte que, ici,
comme tout le monde, nous avons été pris par surprise. A ce
moment, nous commencions déjà... Vous parlez du temps
supplémentaire, il faut dire qu'il y a d'autres facteurs qui jouent.
Personne ne peut prédire les conventions collectives.
En 1974, on a donné dans la convention collective quatre semaines
de vacances à ceux qui avaient dix ans de service. On s'est
réveillé et on
s'est aperçu qu'il y avait plus de 600 surveillants qui avaient
plus de dix ans de service, de sorte que naturellement les effets ont
commencé à se faire sentir en 19...
M. Burns: Vous ne vous étiez pas aperçus de cela en
négociation.
M. Levesque: Non. Nous ne nous en étions pas
aperçus en négociation, parce que nous ne pensions jamais qu'il y
avait autant de personnes qui avaient dix ans de service. De toute
façon, à partir de 1975, nous avons commencé
à...
M. Burns: D'habitude, du côté patronal, on calcule
cela avant d'accorder un point. Je ne vous blâme pas de l'avoir
accordé, remarquez.
Centre Parthenais
M. Levesque: D'autres avantages aussi ont été
accordés, de sorte qu'on a commencé à avoir les effets de
la convention collective à partir de 1975, qui a été
accompagnée d'une hausse de population. Cette année, lorsque nous
nous sommes aperçus que cela augmentait, natuellement nous avons
commencé à faire des représentations au trésor et
tout de même, en dedans de cinq mois, nous avons obtenu plus de 100
postes.
Ce qui compte actuellement, c'est de régler le problème du
centre de prévention, parce que c'est là surtout que cela
déborde. En réglant le problème du centre de
prévention Parthenais, nous réglons en même temps le
problème de la surpopulation de toutes les petites prisons autour, nous
réglons aussi le problème de la prison d'Orsainville. Vous allez
admettre qu'avec des prévenus dangereux, il faut les soumettre à
une surveillance et cela nous prend beaucoup plus de monde. Si vous commencez
à faire des transferts, cela veut dire qu'il y a du temps
supplémentaire qui s'accumule. C'est la situation à laquelle nous
faisons face actuellement, tout simplement.
Je crois que nous prenons les mesures pour faire face à la
situation.
M. Burns: A ce sujet, cela fait des années qu'on
soulève le cas de Parthenais comme étant une boîte que je
n'ose même pas qualifier. J'y suis allé moi-même à
plusieurs reprises, non pas comme détenu, mais comme représentant
de détenus. J'ai été personnellement assez atterré
par la façon dont les détenus se retrouvent pour des
périodes souvent assez longues, dans une boîte assez
spéciale qui ne permet même pas la survie normale d'un
prévenu. Surtout quand on parle d'un prévenu, on parle d'une
personne qui n'a pas encore été trouvée coupable, qui est
là en attendant son procès et qui est en droit de s'attendre
d'avoir un minimum je ne dirais pas de confort de vie
humaine.
Par exemple, j'étais étonné de voir des gens qui
pâlissaient, qui blêmissaient de façon
régulière, parce qu'ils étaient détenus à
Parthenais. J'ai compris pourquoi lorsque je me suis rendu compte que leurs
activités extérieures, au point de vue du grand air, même
en été, étaient réduites au strict minimum. A la
suite des nombreuses plaintes qui ont été faites, tant par des
détenus que par des groupes s'occupant de faire valoir les droits et
libertés des personnes, y a-t-il eu des modifications faites à la
façon de concevoir Parthenais? Pour une fois, a-t-on admis que
Parthenais était peut-être une erreur dans sa conception?
Est-ce que Parthenais aussi ne doit pas être
considéré, comme tout le monde le pense, comme un pur et simple
endroit de transit pour les déténus ou les prévenus?
Est-ce qu'il y a eu quelque chose qui a été changé dans la
conception qu'on se fait, à la direction générale, de la
détention ou des établissements de détention, concernant
ce fameux établissement de Parthenais?
M. Levesque: Voici, je crois qu'il faut accepter, en ce qui nous
concerne, le centre de prévention tel qu'il est. Nous sommes pris avec
notre centre de prévention et il faut y faire face. Vous avez dû
vous apercevoir qu'il y a quelques années, il y avait beaucoup de
problèmes. Depuis quelque temps, même si le centre de
prévention est rempli à pleine capacité, vous ne sentez
pas trop de remous, parce que, naturellement, nous avons pris les dispositions
qui s'imposaient. Une des premières initiatives que nous avons prises a
été d'engager des préposés en service social.
Actuellement, nous avons quatre préposés en service social qui
rencontrent tous les prévenus dès leur entrée, de sorte
qu'immédiatement, il y a une prise de contact. Nous essayons de
régler les problèmes les plus urgents. Par la suite, nous suivons
le cas. Déjà, on s'est aperçu, à ce moment, d'une
baisse de la tension. La deuxième initiative que nous avons prise a
été de transformer la chapelle en salle de
récréation, de sorte qu'aujourd'hui, cela nous a donné une
autre salle, parce que vous savez comment est fait le centre de
prévention. Le centre de prévention est fait par étages.
Pour amener les gens à la salle de récréation en haut, il
faut absolument aller prendre l'ascenseur, de sorte que, comme la chapelle est
située au onzième étage, la salle de
récréation au treizième, le douxième et le
treizième vont à une salle de récréation, et le
dixième et le onzième vont à une autre. Cela a
été divisé, ce qui nous permet de donner beaucoup plus de
récréation. Ce qui s'est passé, c'est qu'on s'est
aperçu qu'il fallait s'occuper plus des besoins individuels des gens. On
s'est occupé surtout du contact humain. On n'est pas capable de changer
la bâtisse, mais, tout de même, on est capable de mieux s'occuper
des gens et de rendre la bâtisse plus habitable.
M. Burns: Actuellement, est-ce que vous avez des statistiques sur
la durée de détention des prévenus à
Parthenais?
M. Levesque: Oui, la durée de séjour est de seize
jours.
M. Burns: Seize jours?
M. Levesque: Seize jours par détenu.
M. Burns: Alors, c'est la moyenne. M. Levesque: C'est
cela.
M. Burns: Au plus bas et au plus haut, cela donne quoi?
M. Levesque: D'une journée à un an.
M. Burns: II y a encore des personnes qui restent un an
là.
M. Levesque: Oui, c'est pour cela que, ce que nous faisons
à ce moment, nous leur offrons tout de même d'aller soit à
Orsainville ou bien dans les petites prisons environnantes. D'ailleurs, une
fois que nous allons avoir Sorel, cela va nous donner une chance, une
institution de plus pour...
M. Burns: Est-ce qu'il n'était pas question, docteur,
l'année passée, de voir fusionner les services de ce qu'on
appelle la prison de Montréal, c'est-à-dire Bordeaux et
Parthenais? Il n'était pas question de cela l'année
dernière à l'étude des crédits de la Justice?
M. Levesque: II a été question, je crois, dans le
livre blanc de la construction d'une institution éventuelle, d'un
complexe.
M. Burns: Cela me rappelle de grandes promesses du ministre du
temps, qui nous disait que vraiment la détention des prévenus
à Parthenais devait se faire dans un terme de quelques jours et
même pas se rendre jusqu'à quinze jours. Est-ce que c'est toujours
un projet qui est envisagé par la direction?
M. Levesque: Voici. Je crois que la meilleure façon de
répondre à cette question, c'est toujours au moyen du rapport
annuel. Il faut comprendre ceci, c'est que le nombre de causes devant les cours
de justice a presque doublé depuis 1970. Si vous regardez en 1970...
M. Burns: Oui, mais les cautionnements se sont
libéralisés depuis ce temps.
M. Levesque: Non, c'est justement... M. Burns: Ah non?
M. Levesque: ... qu'il y a eu un ressac. Nous avons joui de la
libéralisation des cautionnements jusqu'au milieu de 1975. Mais
là...
M. Burns: C'est ce qui a fait l'augmentation de la population
à Parthenais.
M. Levesque: C'est cela. Actuellement, vous avez un tournage vers
la droite. Disons que le tournage vers la droite se fait non pas seulement ici.
Là, on demande beaucoup de temps de punition.
M. Burns: Je suis content de vous l'entendre dire. Il y a des
juges qui rigolent. C'est intéressant à voir comme point de vue.
Evidemment, on n'a pas à dire aux juges comment se comporter, mais c'est
sans doute un des éléments qui font varier les choses. Non,
j'apprécie la franchise avec laquelle le Dr Gauthier nous a
expliqué la chose.
Mais le projet de Bordeaux et Parthenais, ce n'est pas encore pour
demain?
M. Levesque: C'est-à-dire que nous avons cela comme...
M. Burns: Préoccupation.
M. Levesque: Oui, mais il faut aussi attendre que les Travaux
publics aient de l'argent à nous consacrer.
M. Burns: En attendant, il y a du vrai monde... M. Levesque:
Oui, je sais.
M. Burns: ... qui est acquitté après ça.
C'est ça qui est grave.
M. Levesque: Nous insistons encore fortement, nous avons
insisté fortement pour augmenter le budget capital d'immobilisation au
ministère de la Justice. J'ai fait la représentation
personnellement. Nous espérons être un peu plus chanceux au
prochain budget.
M. Burns: Combien avez-vous de surveillants affectés
strictement à Parthenais?
M. Levesque: Nous avons 221 surveillants. M. Burns:
Pardon?
M. Levesque: Nous avons 221 surveillants, sur le total des
effectifs de 342 à Parthenais. Il y a, en plus de ça, des
professionnels, des fonctionnaires, du personnel ouvrier, etc. Vous avez ces
réponses dans le rapport annuel.
Congédiements à Orsainville
M. Burns: Avant de quitter ce sujet, M. le Président,
j'aimerais simplement soulever... J'imagine que vous reconnaissez le dossier
noir du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec concernant
deux personnes à Orsainville qui étaient des professionnels, Mlle
Odette Pouliot et l'abbé Raymond Tardif qui, tous deux, ont
été congédiés à la suite d'interventions de
leur part, qu'ils croyaient normal de faire, à la suite d'une visite
chez le Protecteur du citoyen en faveur des détenus et, à la
suite également d'une lettre qui ne faisait, à toutes fins
pratiques, qu'exprimer aux détenus ce que le Protecteur du citoyen leur
avait donné comme opinion.
Dans un cas, si je ne me trompe, il y a déjà eu une
décision arbitrale qu'on pourrait critiquer ouvertement ici sur la
façon obtuse avec laquelle on a pris l'approche d'un grief,
contrairement, d'ailleurs, à toute la jurisprudence arbitrale dans
ce
domaine. En tout cas, ce n'est pas mon propos actuellement- J'aimerais
savoir où en sont rendus, du côté du ministère de la
Justice, les échanges avec ces personnes? Est-ce que ce dossier est
considéré comme classé, réglé
définitivement de la part du ministère de la Justice, ou bien
s'il y a encore des choses qui se font?
M. Levesque: Non, le dossier est classé?
M. Burns: Classé, dans quel sens? Vous êtes
satisfait de la situation, d'avoir congédié l'abbé Tardif
et Mlle Pouliot?
M. Levesque: On va vous donner des détails.
L'abbé Tardif et Mlle Pouliot n'ont pas été
remerciés de leurs services parce qu'ils étaient allés
voir le Protecteur du citoyen.
Je sais que cela a été une des clauses qui avaient
été indiquées dans la lettre expédiée par
des fonctionnaires du ministère à Mlle Pouliot, entre autres,
mais j'avais discuté, personnellement, le cas avec le Protecteur du
citoyen et j'avais convenu avec lui que si l'affaire se rendait au fond, en
arbitrage, nous n'invoquerions pas ce motif à l'encontre de Mlle
Pouliot, en aucune façon, de façon à protéger la
liberté d'accyes du Protecteur du citoyen aux fonctionnaires qui
voudraient venir le voir.
Si Mlle Pouliot et l'abbé Tardif ont été
remerciés de leurs services, c'est à cause de leur attitude,
comme employés, à l'intérieur d'une institution, la prison
d'Orsainville. En ce qui concerne l'abbé Tardif, ses services avaient
été retenus par arrêté en conseil. Il n'était
pas membre de la fonction publique et comme nous avons estimé que son
attitude à l'intérieur de l'institution ne correspondait plus aux
besoins que nous avions, nous l'avons remercié comme nous croyons en
avoir le droit.
En ce qui concerne Mlle Pouliot, elle a logé un grief avant de
recevoir son avis de congédiement. Nous avons invoqué une
jurisprudence qui existe, sur laquelle je ne me prononce pas, mais qui
existe...
M. Burns: ... prononcer là-dessus, c'est
épeu-rant.
M. Levesque: ... en matière de droit ouvrier et à
ce moment, l'arbitre a donné raison aux prétentions que nous
avons fait valoir à ce moment et a trouvé le grief de Mlle
Pouliot non fondé.
En ce qui concerne l'abbé Tardif, il a été
remplacé depuis à la prison d'Orsainville par Mgr Lavoie qui
était auparavant curé à Saint-Roch.
M. Burns: Dans le cas de Mlle Pouliot, n'avez-vous pas
l'intention de réviser la situation en tenant compte de certaines
obligations morales et non pas d'obligations juridiques puisque, maintenant,
vous pouvez vous reposer en paix derrière une sentence arbitrale? Ne
trouvez-vous pas, M. le ministre, injuste, vous le ministre de la Justice, que
quelqu'un se fasse nier le droit de soumettre son cas à l'arbitrage pour
une pure et simple ques- tion de formalité? Ne trouvez-vous pas qu'il y
a lieu de réexaminer ce cas, dans le cas de Mlle Pouliot, de toute
façon, très clair, parce que là il s'agit d'une
syndiquée du Syndicat des professionnels du gouvernement du
Québec? N'y a-t-il pas lieu, dans un geste gratuit cela serait
nouveau de la part du ministère de la Justice, mais cela serait
très rafraîchissant de réexaminer ce cas et de voir
s'il ne s'agit pas là d'une injustice morale à l'endroit de la
personne concernée?
M. Levesque: Je vais répondre de cette façon-ci au
député de Maisonneuve. Ce n'est pas une question pour moi
d'être rafraîchissant. C'est une question qui a été
expliquée par le sous-ministre. La personne en question,
premièrement, n'était pas à sa place là où
elle exerçait ses fonctions.
M. Burns: Vous parlez de Mlle Pouliot?
M. Levesque: Elle ne remplissait pas, d'après les
renseignements et les rapports qui m'ont été faits, les fonctions
pour lesquelles ses services avaient été retenus. Il faut bien
comprendre que nous sommes, dans ce cas, dans une institution carcérale,
une institution de détention et où on a certaines exigences et
cette personne ne répondait pas aux exigences qui étaient celles
de ses supérieurs. Et elle est partie et voilà. Le dossier est
fermé.
M. Burns: Le dossier est fermé et vous ne trouvez pas
qu'il y a lieu de réexaminer ce dossier?
M. Levesque: Je pourrais sur le plan personnel avoir toute la
sympathie possible pour cette personne que je ne connais pas, que je n'ai pas
rencontrée d'ailleurs...
M. Burns: Moi non plus.
M. Levesque: ... simplement comme personne humaine. Je peux avoir
beaucoup de sympathie pour cette personne, mais les rapports que je
reçois sont à l'effet qu'elle ne pouvait pas continuer à
exercer les fonctions qui étaient celles qu'on lui avait
attribuées. Dans les circonstances, ma responsabilité, comme
ministre responsable de ce lieu de détention, est de voir à ce
que tout fonctionne d'une façon efficace et que les buts pour lesquels
cette institution est fondée soient atteints.
M. Burns: Est-ce que vous ne croyez pas, M. le ministre, que le
cas de Mlle Pouliot n'a véritablement jamais été
jugé? C'est-à-dire que, mandaté par, je présume,
votre ministère, le procureur du gouvernement a tout simplement
allégué une question de forme et c'est uniquement sur cette base
que le problème a été réglé. Est-ce que vous
trouvez cela satisfaisant comme ministre de la Justice?
M. Levesque: C'est justement ce qui arrive souvent devant les
tribunaux. Je peux parler, par
exemple, des procédures que j'ai prises moi-même contre
certaines personnes et où ces personnes ont été
libérées sur des questions techniques.
M. Burns: Mais vous êtes en droit pénal à ce
moment-là, vous n'êtes pas en droit du travaii, vous n'êtes
pas en relations du travail.
M. Levesque: S'il fallait que j'intervienne chaque fois dans ce
domaine, on pourrait me reprocher une immixtion qui ne serait pas
légitime ou justifiée.
M. Burns: Est-ce que je ne pourrais pas vous suggérer,
dans les meilleurs intérêts de la justice et en tout cas dans les
meilleurs intérêts d'un cas comme celui-là, d'accepter un
arbitrage, peu importe la décision qui a été rendue sur la
question de forme jusqu'à maintenant? C'est-à-dire que les
problèmes que vous-même vous soulevez actuellement, je pense que
je ne peux pas les discuter, je ne suis pas procureur de Mlle Pouliot, je ne
connais pas Mlle Pouliot, mais cela ne me satisfait pas tellement de voir une
personne qui, théoriquement, avait des droits en vertu d'une convention
collective, tout au moins celui de faire juger sa conduite, se faire tout
simplement renvoyer du revers de la main en disant: Vous avez fait un grief
avant même d'être congédiée; vous n'aviez même
pas le droit de faire un grief au moment où vous l'avez fait parce que
vous n'étiez pas officiellement congédiée. Est-ce que ce
ne serait pas dans les meilleurs intérêts de la justice et surtout
du ministère qui en porte le nom de soumettre le cas à un
arbitre? Cela pourrait très facilement, j'en suis convaincu, être
arrangé avec les intéressés, tant du côté du
ministère que du côté de la personne
congédiée ou encore du syndicat qui la représente, et de
trouver une personne impartiale à qui on dirait: On vous soumet le cas,
mais, au fond, au mérite du congédiement, et, à ce
moment-là que le ministère cela serait l'aspect que je
décrivais tout à l'heure comme rafraîchissant dise
tout simplement: J'accepterai de me plier à l'opinion d'une tierce
partie qui examinera objectivement ce cas, et je ne m'imposerai pas, comme
ministère de la Justice, comme une autorité féodale
imposant ma décision sur l'appréciation des services que Mlle
Pouliot rendait à la direction générale des
établissements de détention.
M. Levesque: J'ai dit qu'il n'était pas dans
l'intérêt public et dans l'intérêt de la justice que
cette personne soit dans les fonctions qu'elle occupait. Je n'ai pas
d'intérêt...
M. Burns: Pourquoi ne pas soumettre cela à une tierce
partie? Il y a peut-être une personne qui subit une injustice
actuellement et...
M. Levesque: Elle a eu les recours que lui permet la loi. Elle
les a exercés et elle a tenté de les exercer d'autre façon
également.
M. Burns: Elle a tenté de les exercer.
M. Levesque: Quant à moi, le dossier est clos. Si je puis
rendre service à cette personne d'autre part, je serai très
heureux de le faire, mais il n'y a pas d'intérêt pour nous, dans
l'administration de ce centre de détention, à faire en sorte de
voir cette personne revenir occuper des fonctions comme celles-là. Si,
par contre, je puis lui rendre service d'une autre façon, je n'ai rien
de personnel dans ce cas.
M. Burns: Est-ce à ce point, M. le ministre, que vous
craignez qu'elle ait gain de cause devant un arbitre impartial...
M. Levesque: L'affaire, pour moi, est réglée.
M. Burns: ...que vous craignez même le fait de
soumettre?
M. Levesque: C'est elle-même qui a porté sa cause en
grief et son grief au tribunal, à l'arbitrage...
M. Burns: Oui, mais c'est sur une question de forme qu'elle a
été déboutée, voyons!
M. Levesque: Quant à moi, c'est réglé.
M. Burns: Franchement, je vous avoue que je ne comprends pas du
tout...
M. Levesque: On m'informe que cette personne travaille d'ailleurs
pour une agence de service social qui est financé par le
ministère de la Justice. Je trouve qu'on n'est pas trop mauvais.
M. Burns: Je vous avoue que cela ne me satisfait pas. Si
j'étais à la place de Mlle Pouliot, cela ne me satisferait pas de
me faire dire que j'ai perdu mon grief parce que je ne l'ai pas
présenté au bon moment.
M. Levesque: Je comprends que c'est décevant, mais d'un
autre côté.
M. Burns: Et comme ministre de la Justice, j'accepterais, je vous
le dis tout de suite... surtout, j'aurais donné instruction au procureur
du gouvernement de na pas soulever une question de forme lorsqu'il s'agit de
questions aussi fondamentales que celles-là à savoir si Mlle
Pouliot malheureusement dans le cas de l'abbé Tardif, s'il
était un contractuel peut-être que ça ne visait pas le
système d'arbitrage, mais je pense qu'il y aurait eu une pression morale
dans l'un et l'autre cas si les deux étaient congédiés
pour les mêmes raisons avait eu l'occasion de faire valoir son
point de vue.
Si la cause étant jugée au mérite, Mlle Pouliot
avait été déboutée, je vous dirais, comme ministre
de la Justice, le cas est réglé, le dossier est fermé.
Mais le dossier n'est pas fermé actuellement, le dossier est grand
ouvert. Si vous me permettez l'expression, j'ai l'impression que le
ministère de la Justice, on peut lui dire que son jupon dépasse
dans cette affaire. Il dépasse très sérieusement.
M. le ministre, je sais bien que je ne bloquerai pas l'adoption de vos
crédits avec un cas comme celui-là et je n'ai pas l'intention de
le faire non plus, mais il me semble que ce serait l'occasion
rêvée pour le ministre de la Justice de dire: Je crois en ce que
je prêche, j'y crois tellement que dans un cas comme celui de Mlle
Pouliot, même si un défaut de forme a fait qu'elle a
été déboutée avant même que sa cause ait
été examinée au mérite, je suis prêt à
le soumettre à une tierce partie impartiale, à soumettre le fond
de la question, le mérite de la question.
Si on n'y va pas à ce point, j'ai nettement l'impression
qu'à ce moment, le ministère de la Justice craint très
sérieusement de ne pas être capable de faire valoir son point de
vue au mérite. C'est grave, c'est très grave. Cela
m'inquiète beaucoup. Je me serais attendu de la part de l'actuel
ministre de la Justice à beaucoup moins d'autoritarisme, beaucoup moins
de partialité à l'endroit d'une personne qui a peut-être
fait des choses qui ne plaisent pas à la direction
générale des établissements pénitentiaires mais
qui, sans aucun doute, croyait agir de bonne foi. Il me semble en tout cas que
vous avez l'occasion rêvée de vous refaire. Je vous le
suggère.
Je n'ai rien à ajouter.
Le Président (M. Pilote): Le programme 4 est
adopté?
M. Burns: Adopté avec regret concernant ce dernier
point.
Le Président (M. Pilote): Programme 5.
Réinsertion sociale des
délinquants
M. Burns: Programme 5. Dans le domaine de la réinsertion
sociale des délinquants, M. le Président, le livre blanc de la
justice recommandait huit actions bien précises que l'on retrouve aux
recommandations 723, 724, 729, 730, 731, 732 et 733. Est-ce que le ministre
peut nous dire ce ce qui a été fait pour chacune de ces
recommandations? Est-ce que j'ai besoin de les lire? Je pense que ça
peut raccourcir nos travaux, si je m'abstiens de lire les recommandations en
question, mais si vous voulez, je vous réfère entre autres
à la page 250 du livre blanc concernant les recommandations
susnommées.
M. Levesque: Autant le livre blanc de la justice que les rapports
de la commission de réforme du droit préconisent les mêmes
objectifs, c'est-à-dire mettre l'accent de plus en plus sur des mesures
autres que l'emprisonnement. En fait, au Québec, en accord avec les
recommandations que vous retrouvez au livre blanc, nous tendons exactement vers
le même idéal. Premièrement, dans le secteur de la
probation, nous possédons 29 bureaux qui sont répartis dans tous
lesdistrictsjudiciaires. Cette année, nous avons complété
la bouche au niveau de la probation.
Au niveau des ordonnances de probation, les juges posent comme
conditions, des conditions que vous retrouvez à l'intérieur du
livre blanc.
Au niveau des établissements de détention, de plus en
plus, on fait l'usage des absences temporaires. Cette année encore, on a
dépassé le nombre des autres années. De plus en plus, on
recourt à cette méthode.
Vous avez aussi un recours, par les juges, des fameuses sentences
intermittentes, c'est-à-dire des sentences de fins de semaine. De fait,
actuellement, nous avons, à toutes les fins de semaine, plus de 400
personnes qui entrent dans nos prisons. Comme vous le voyez, les juges ont bien
lu le livre blanc.
De plus, au niveau des établissements de détention, on
travaille à la mise en place d'un programme institutionnel. En fait,
notre priorité pour les années 1975 à 1980 va être
axée sur les activités "occupationnelles", les activités
éducatives, culturelles, etc. Actuellement, tout tend vers cet objectif;
d'autant plus que nous avons maintenant des professionnels dans tous les
établissements de détention au moins dans toutes les
régionales et nous avons fait accepter, au cours de
l'année, des agents-conseillers, de telle sorte que de plus en plus,
vous allez avoir des surveillants qui vont s'occuper de la
périphérie et des surveillants, aussi, qui vont participer au
niveau du traitement. D'ailleurs, cela a été souligné dans
le rapport de M. Caplet, comme vous le savez.
Troisièmement, nous mettons un accent sur la participation
communautaire. De fait, au cours de l'année...
M. Burns: La recommandation 729.
M. Levesque: Pardon?
M. Burns: La recommandation 729.
M. Levesque: Oui. De fait, nous avons créé au cours
de l'année, un service de participation communautaire qui s'occupe
actuellement de faire un inventaire de tout ce qui existe en fait d'organismes
qui oeuvrent de près ou de loin au niveau des contrevenants à
l'intérieur de la société.
On a eu aussi le transfert de certaines agences du ministère des
Affaires sociales au ministère de la Justice. Il y a des agences qui
s'occupent uniquement de la réhabilitation du crime adulte. Vous avez le
Service de la réadaptation sociale, à Québec; vous avez
les Ateliers Dominique, à Hull; les Etablissements du Gentilhomme; la
Maison Painchaud, etc.
Nous mettons l'accent sur des ententes avec d'autres agences
spécialisées. Pour le traitement de la toxicomanie, avec Portage,
nous avons presque terminé notre programme pour les soins psychiatriques
dans toute la province. De plus en plus, comme vous le voyez, nous tendons vers
l'atteinte des objectifs du livre blanc. Naturellement, cela va
s'étendre sur quelques années; probablement que nous y arriverons
vers 1980.
M. Burns: Concernant la recommandation
724, la mise sur pied d'un service d'informatique, afin d'identifier
rapidement le type des détenus ou prévenus et de
déterminer adéquatement les mesures probatoires ou
sécuritaires qui s'imposent, qu'arrive-t-il?
M. Levesque: Je dois vous dire que c'est très
avancé. C'est tellement avancé que nous en sommes rendus aux
écrans cathodiques actuellement. Nous avons un écran cathodique
installé au centre de prévention, au siège social, ainsi
qu'ici, à Or-sainville. Nous captons actuellement toutes les
données, partout dans la province. Dès l'automne nous nous
engagerons au niveau de la probation. Comme vous le voyez, le système
est terminé, est mis sur papier, les formules sont toutes
terminées. Il reste simplement l'achat des machines et ainsi terminer
notre programme.
M. Burns: Actuellement, il est surtout à
Montréal?
M. Levesque: Oui. On a commencé, naturellement, avec la
détention.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Vous avez Montréal, Québec et le
siège social, bien que toutes les autres institutions nous envoient
leurs formules. Dès le lendemain, elles sont ingurgitées dans la
machine.
M. Burns: C'est ce que j'aimerais avoir comme détail.
Comment alimente-t-on cet écran cathodique?
M. Levesque: Au centre de prévention, comme ici, à
Orsainville, dès qu'un détenu entre, vous avez des formules
spéciales. Vous tapez simplement dans la machine les données
nécessaires. Après, vous questionnez l'écran cathodique et
cela se reproduit sur l'écran.
M. Burns: J'imagine que c'est beaucoup plus facile pour un
détenu qui a déjà une histoire de cas, si vous me passez
l'expression?
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Quand vous avez un nouveau détenu, qui n'a
jamais passé par les rouages des établissements de
détention, quelle est votre méthode d'alimenter l'écran
cathodique?
M. Levesque: Nous avons fait une cueillette de données
depuis 1970. Toute personne qui est entrée dans une institution, au
Québec, depuis 1970, est déjà inscrite dans notre machine.
Nous avons commencé par alimenter la machine, et depuis le 1er avril
1976, cela se fait au jour le jour.
M. Burns: Y compris, si on peut dire, les nouveaux
prévenus...
M. Levesque: Les nouveaux prévenus, c'est cela.
M. Burns: ... ceux qui n'ont pas d'histoire de cas.
M. Levesque: Parce que nous interrogeons la machine pour savoir
s'il y a une histoire dans son cas, et, s'il y a une histoire, vous la faites
passer simplement sur la machine et cela épargne beaucoup de temps.
M. Burns: Relativement à la recommandation 7-30,
c'est-à-dire que l'Etat appuie financièrement les services des
bénévoles qui se consacrent à la réadaptation des
détenus et des délinquants. Qu'est-ce qui est fait actuellement
de ce côté?
M. Levesque: Ici à Québec, au service de
réadaptation sociale qui relève du ministère de la
justice, comme vous le savez, nous finançons justement la formation de
bénévoles. Graduellement, nous tentons une expérience ici
à Québec au niveau des bénévoles. Nous avons aussi
des contacts avec...
M. Burns: Mais y a-t-il un appui financier qui est
donné?
M. Levesque: Ah oui! certainement. M. Burns: De quel ordre
est-il?
M. Levesque: C'est-à-dire que nous finançons le
service de réadaptation sociale. Je crois qu'actuellement le budget est
rendu à $370 000. Une partie du budget va à la formation des
bénévoles. Mais nous avons commencé par Québec,
parce que c'était plus facile. Graduellement, nous entendons
étendre le bénévolat dans toute la province.
M. Burns: Y a-t-il un appui donné à certains
organismes je sais qu'il n'en existe pas beaucoup, mais il en
existe quant à la réinsertion sociale des détenus ou
des personnes qui ont purgé une peine, particulièrement au niveau
de leurs possibilités de se trouver un travail? Je sais qu'il y a un
groupe d'ex-détenus qui a déjà commencé à
tenter de mettre sur pied un organisme de cette nature. Y a-t-il de
l'assistance financière donnée à ces groupes?
M. Levesque: Actuellement, nous finançons les
Etablissements du Gentilhomme, à Québec et les Ateliers
Dominique, à Hull qui s'occupent justement de trouver des emplois. D'une
façon générale, on ne finance aucune agence qui s'occupe
strictement de trouver des emplois, quoique nous avons un service qui s'occupe
de trouver des emplois aux détenus, de sorte qu'actuellement, vous avez
par exemple à Waterloo, sur 150 détenus, 100 détenus
travaillent à l'extérieur, ils partent le matin, ils vont
travailler à l'extérieur et reviennent.
Même à la prison de Montréal, actuellement, nous en
avons une cinquantaine qui partent le matin et vont travailler à
l'extérieur. Nous avons aussi de l'emploi qui entre à
l'intérieur des établissements, de sorte que tout cela est en
progrès, parce
que cela fait partie de notre grand programme de réinsertion
sociale et d'occupation qui va de notre période de 1975 à 1980,
comme je vous l'ai dit tout à l'heure.
Le Président (M. Pilote): Le programme 5,
adopté?
M. Burns: Adopté.
Le Président (M. Pilote): Programme 6?
M. Burns: L'aide juridique, M. le Président.
Le Président (M. Pilote): Nous suspendons les travaux de
la commission pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 1 h 2)
Reprise de la séance à 1 h 25
M. Pilote (président de la commission permanente de la
justice): A l'ordre, messieurs! Programme 6, aide juridique et
financière.
L'aide juridique
M. Burns: M. le Président, concernant l'aide juridique du
programme 6, on peut dire que depuis la création de la Commission des
services juridiques, les avocats permanents de l'aide juridique se sont acquis
une réputation assez enviable. Je dirais même qu'un grand nombre
de personnes éligibles à l'aide juridique ont été
défendues par ces avocats avec la plus grande satisfaction, de sorte
qu'actuellement il y a, je pense, une commune renommée favorable
à l'endroit des avocats permanents de l'aide juridique. Une certaine
publicité régulière à l'endroit de ces avocats a
également aidé à accroître la popularité, si
vous voulez, des avocats permanents de l'aide juridique. Je ne crains pas de
dire que, dans certaines régions, cela a pu créer un certain
nombre de difficultés entre les avocats de pratique privée et les
avocats permanents de l'aide juridique, à un point tel, avons-nous
entendu dire, que des pressions ont été exercées par des
avocats de pratique privée pour que cesse la publicité
écrite et télévisée vantant les mérites de
l'aide juridique. Ce qui, à mon avis, m'apparaît comme très
déplaisant parce qu'il s'agit là d'un service pour lequel on doit
féliciter le prédécesseur de l'actuel ministre,
j'espère que j'aurai dans quelques années l'occasion de
féliciter l'actuel ministre pour certaines des mesures qu'il a mises en
application.
Me Choquette doit être félicité pour avoir
été, en tout cas peut-être pas le seul, j'imagine que c'est
un travail d'équipe, celui qui a réalisé le plus,
possiblement, aux pressions extérieures qui avaient été
mises sur lui à l'encontre de la formule actuelle de l'aide juridique,
tout au moins de l'ouverture que la formule actuelle de l'aide juridique donne
aux citoyens d'aller voir des avocats permanents et d'avoir instauré
avec, évidemment, le juge Sauvé, qui en est le président,
la formule où il est possible de recourir à des services
d'avocats permanents.
La question que j'aurais à poser là-dessus est relative
à une entrevue que le juge Sauvé accordait au Soleil en janvier
dernier, dans lequel il déclarait que suite aux restrictions
budgétaires imposées par le Conseil du trésor, la
commission allait devoir considérablement diminuer ses budgets
d'information et de publicité. Ces coupures, à mon humble avis,
risquent de diminuer justement cet impact de la commission auprès du
public, favorisant indirectement les avocats de pratique privée qui, si
mes renseignements sont exacts, ne demanderaient pas mieux. J'aimerais savoir
s'il y a une relation entre les pressions qu'on nous a rapportées de la
part d'un certain nombre d'avocats de pratique privée et, justement,
cette réduction des budgets d'information et de publicité de la
part de la Commission des services juridiques.
M. Levesque: Nous avions même convenu avec les
représentants du Barreau et les représentants de l'aide juridique
d'avoir une publicité conjointe qui ferait connaître les avantages
de l'aide juridique et, en même temps, donnerait tous les renseignements
pertinents à la population.
C'est simplement à cause des restrictions budgétaires que
nous n'avons pas encore pu donner suite à cette entente intervenue entre
notre ministère, le Barreau et la Commission d'aide juridique.
M. Burns: II n'y a pas de coupure directement prévue comme
telle, c'est-à-dire que vous envisagez d'y revenir
éventuellement.
M. Levesque: Oui, éventuellement, mais, dans la
période présente, nous n'avons pas les fonds nécessaires
pour le faire. Mais, dès que nous reprendrons le cours normal des
choses, nous allons le faire. J'avais même rencontré, à la
suite de représentations que j'avais reçues des avocats de la
pratique privée, d'une part, et des discussions que j'avais eues avec le
président de la Commission d'aide juridique et, à la suite de ces
rencontres, il avait été convenu... Je pense que le sous-ministre
a rencontré des représentants et du Barreau et de la Commission
d'aide juridique et il avait été convenu d'une publicité
conjointe. Nous espérons pouvoir y donner suite dans les meilleurs
délais, tenant compte, évidemment, des restrictions
budgétaires.
M. Burns: Mais les meilleurs délais, ça veut dire
quoi, M. le ministre? C'est quoi, les meilleurs délais?
M. Levesque: Dès que le Conseil du trésor
nous...
M. Burns: Mais est-ce qu'on peut s'attendre que la situation soit
rétablie très rapidement, étant donné que, de plus
en plus, les services vont être appelés, à cause justement
du besoin qui est de plus en plus reconnu dans la population...
M. Levesque: On peut dire qu'il y a eu beaucoup de
publicité de faite et que la population est passablement au courant des
avantages de l'aide juridique présentement.
M. Burns: II y a encore des gens qui s'adressent à nos
bureaux de comté...
M. Levesque: Je n'en ai pas...
M. Burns: ...et qui ne savent pas qu'ils sont admissibles
à l'aide juridique. Je prends à témoin tous les
députés qui sont autour de la table.
M. Levesque: Ce n'est pas parce qu'on a manqué de
publicité. La télévision en a été pleine
continuellement...
M. Burns: Je sais fort bien, mais vous aurez toujours...
M. Levesque: ...La minute juridique, des publications, des
dépliants...
M. Burns: Vous aurez toujours des gens qui devront...
M. Levesque: Nous allons continuer, mais, pour le moment...
M. Burns: ...et qui, souvent, ne sont pas
intéressés tant qu'ils ne sont pas dans le bain eux-mêmes.
Cela arrive souvent.
M. Levesque: Oui, je comprends.
M. Burns: II n'y a personne qui se préoccupe du
problème d'un vendeur d'automobiles qui est moins scrupuleux que
d'autres avant que cette personne ait été "organisée" par
un vendeur d'automobiles moins scrupuleux que les autres.
M. Levesque: Prenez donc un autre exemple.
M. Burns: C'était sans aucune méchanceté de
ma part, parce que je suis convaincu que le ministre ne reconnaissait
même pas mes propos quand je parlais de vendeurs d'automobiles non
scrupuleux.
J'aimerais que le ministre, simplement sur ce point, nous donne sa
version de la situation qui avait été dénoncée
l'automne dernier par des responsables de la Corporation de l'aide juridique de
Québec qui avaient quitté, en claquant la porte, leur emploi, en
dénonçant l'ingérence du juge Sauvé dans le
congédiement de six avocats salariés. Je me réfère,
entre autres, au journal Le Jour, puisque, maintenant, on peut s'y
référer librement, du mardi 2 décembre 1975...
M. Levesque: On m'indique...
M. Burns: ...et du Soleil du 13 novembre 1975.
M. Levesque: ...ici... Mon représentant de la Commission
de l'aide juridique indique que cette question est devant les tribunaux
présentement et qu'il ne peut pas faire de commentaires sur ce sujet.
Autrement, je lui aurais demandé d'en faire; c'est-à-dire que je
lui ai demandé, mais il ne peut pas...
M. Burns: C'est devant les tribunaux. J'accepte ça comme
réponse.
Toujours au programme 6, M. le Président, relativement à
l'aide juridique, j'aimerais savoir, de la part du ministre, quelle
recommandation il a faite face à l'abus de procédure de certains
avocats de la pratique privée et aux écarts, très
importants, entre le coût des dossiers traités par les avocats
permanents et celui des dossiers traités par les avocats de pratique
privée.
Là-dessus, le livre blanc sur la justice recommandait, à
la page 235, et je cite: "... que des mesures administratives et
législatives soient prises pour faire obstacle aux abus de
procédure et de contestation par certains avocats et qui n'ont d'autre
objet que d'augmenter leurs honoraires dans les causes de l'aide
juridique."
Ce n'est donc pas moi, M. le Président, qui ai soulevé
cette question. C'est le livre blanc qui soulevait cette question. J'aimerais
savoir si le ministre a fait suivre cette recommandation de mesures pratiques
concrètes. C'est sans compter et il y a un certain nombre de cas
qui ont été portés à mon attention, je pourrais
ajouter ces cas, c'est du même ordre parce que c'est un coût
additionnel pour l'aide juridique le fait que dans certains cas, des
avocats de pratique privée reçoivent un client et, sachant fort
bien que ce client n'est pas admissible à l'aide juridique,
suggèrent à ce client d'aller à l'aide juridique et je
n'irais pas jusqu'à dire de faire une fausse déclaration, mais
peut-être d'omettre un certain nombre de choses dans leur
déclaration pour les rendre admissibles pour le voir revenir à
leur bureau de façon à être payé. J'ai des cas que
je pourrais vous citer. Il y en a même quelques-uns qui sont
examinés par le Barreau de Montréal, actuellement.
M. Levesque: Tout ce que je puis dire là-dessus, c'est
qu'il y avait un tarif provisoire qui s'appliquait à l'aide juridique et
que, pendant ce temps, nous avons constaté des abus,
particulièrement, en matière matrimoniale. Nous avons un nouveau
tarif maintenant qui a été adopté et qui a corrigé
ces abus en partie, c'est-à-dire qu'il y avait un tarif uniforme pour
l'ensemble d'une cause matrimoniale et, maintenant, le tarif s'applique
à diverses étapes de sorte qu'avec ce nouveau tarif, nous
évitons plusieurs abus.
M. Burns: C'est-à-dire que vous avez un tarif pour les
mesures provisoires et vous avez, ensuite, un tarif pour la contestation, s'il
y en a une et pour le procès s'il y en a un.
M. Levesque: Le tarif a toutefois fait en sorte que certains
avocats abusent de procédures au criminel. Cela peut arriver et ils
semblent avoir une tendance à développer un profil de pratique
qui vise beaucoup plus à exploiter le tarif à leurs fins
qu'à donner satisfaction à leurs clients ou à
s'assurer que justice soit rendue.
Ce que nous faisons est que nous prévoyons des correctifs encore
au tarif en matière criminelle et la prochaine ronde de
négociation doit commencer vers la fin de l'été, la
convention expirant en décembre 1976.
Alors, il n'est pas exclu non plus que la Loi de l'aide juridique puisse
être amendée pour que, si certains avocats abusent notoirement de
l'aide juridique, on puisse songer à les exclure du système.
M. Perreault: Est-ce que ces cas sont rapportés au Barreau
pour enquête?
M. Levesque: Oui. La preuve n'est pas toujours facile à
faire...
M. Burns: Concernant l'autre aspect...
M. Levesque: ... mais il y a des indices qui nous frappent.
M. Burns: ... de la question, je vous demandais s'il a
été porté à votre connaissance des cas d'avocats de
pratique privée qui référaient à l'aide juridique
pour éventuellement voir revenir des clients qui n'avaient pas le droit,
à toutes fins pratiques, de bénéficier des services de
l'aide juridique. Y a-t-il des cas qui ont été portés
à votre connaissance à cet effet?
M. Levesque: Non. Aucun à ma connaissance personnelle.
Aucun à la connaissance du sous-ministre et la commission nous dit que
ce sont des choses très difficilement vérifiables.
M. Burns: Une dernière question là-dessus et
là c'est beaucoup plus l'aspect de la philosophie du ministère.
Le ministère envisage d'en arriver à une espèce
d'autosuffisance en matière d'aide juridique, de sorte que tous les
services prévus par l'aide juridique pourraient être fournis par
des avocats permanents, quitte à ce que des personnes de
l'extérieur, des personnes qui veulent avoir des services à
l'extérieur les aient de façon beaucoup plus restreinte, est-ce
que le ministère...
M. Levesque: Je pars d'un avis contraire. Nous croyons que nous
avons un excellent système qui fait souvent l'objet d'admiration des
gens de l'extérieur qui trouvent qu'avec le système mixte que
nous avons, nous avons un stimulant, un élément de concurrence et
nous croyons que jusqu'à maintenant l'expérience nous indique que
nous sommes sur la bonne voie.
M. Sylvain: Une question toute courte. Est-ce que vous ne
pourriez pas envisager, dans vos négociations en-dehors du tarif,
surtout en ce qui concerne les procédures criminelles, comme le stade de
la comparution, une certaine forme de compensation pour garder le libre choix
des avocats entre l'aide juridique des permanents et la pratique privée,
la question des distances que les avocats de pratique privée auraient
à parcourir, surtout dans le milieu rural ou dans les districts
judiciaires ruraux? Ce qui arrive, c'est que dans un milieu où le palais
de justice... Dans ce milieu c'est facile pour le bureau de pratique
privée d'aller au palais de justice sans frais, mais pour des districts
où il y a plus de 100 milles à parcourir ou 80 milles, est-ce que
cela peut être envisagé?
M. Levesque: On m'indique que la commission rembourse les frais
de déplacement des avocats de la pratique privée.
M. Sylvain: Sur les simples comparutions? M. Levesque: Sur
les simples comparutions.
M. Sylvain: Est-ce que cela avait été amendé
ou si cela a toujours été?
M. Levesque: Cela a toujours été le cas, cependant
il faut le réclamer.
M. Sylvain: Je sais, mais c'est parce qu'il y avait, à un
moment donné... On s'est aperçu qu'une comparution était
de $15, ou quelque chose comme cela. Cela m'a été rapporté
comme étant autant le tarif que les mesures compensatoires pour la
comparution. Les gens qui auraient voulu user de leur liberté de choix
quant à un avocat qui restait à 50 ou 60 milles du palais de
justice, tous les bureaux de pratique privée disaient: Non. Ce n'est pas
assez payant, de telle sorte que c'était confiné simplement dans
un ou deux bureaux sur place.
M. Levesque: C'est le libre choix. Ils peuvent refuser, mais la
commission ne refuse pas.
Le Président (M. Pilote): Le programme 6 est
adopté?
M. Burns: Non, M. le Président.
M. Tardif: A l'intérieur de ces négociations
éventuelles, est-ce que vous n'envisagez pas de permettre aux avocats de
pouvoir juger de l'admissibilité d'une personne au lieu de forcer les
personnes intéressées à recourir à l'aide
juridique, à aller au centre d'aide juridique pour pouvoir ensuite
renvoyer ces personnes à un avocat de la pratique privée? Je sais
que c'est une question qui a été soulevée à plus
d'une reprise par les représentants du Barreau. On n'a pas encore
réglé à la satisfaction des avocats à ma
connaissance, mais est-ce que c'est une question qui va être
soulevée dans le cadre de ces négociations
éventuelles?
M. Levesque: Nous avons songé à faire une
expérience pilote à ce sujet dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Nous n'avons pas eu la collaboration nécessaire. La seule façon
d'envisager d'aller plus loin dans cette expérience serait d'amender la
loi et de donner les pouvoirs de le faire. Nous y songeons.
M. Tardif: Pour cette année?
M. Levesque: Nous y songeons pour cette année. Nous y
songeons. Mon analyse n'est pas terminée là-dessus. Je suis en
train d'évaluer la situation.
M. Tardif: D'accord.
Le Président (M. Pilote): D'autres questions au programme
6?
M. Burns: Oui, M. le Président, deux courtes questions.
L'une concerne le projet de zone pilote de l'aide juridique au Saguenay-Lac
Saint-Jean.
M. Levesque: Je viens d'en parler. M. Burns: Ah! Vous
venez d'en parler? M. Levesque: En réponse à une
question.
M. Burns: Je m'excuse, je parlais à mon bon ami qui est
à ma droite.
M. Levesque: Je faisais part au député d'Anjou que
l'expérience...
M. Burns: Je m'excuse je n'ai pas compris la réponse.
M. Levesque: ...n'avait pas été satisfaisante.
M. Burns: Concernant les fonctionnaires de l'aide sociale?
M. Levesque: Certainement, et nous n'avons pas reçu la
collaboration nécessaire, c'est-à-dire que nous n'avons pas pu
mener l'expérience à terme; la seule façon de le faire,
d'après ce que je vois, d'après les renseignements que l'on me
fournit, serait d'amender la loi et j'y songe présentement.
M. Burns: Bon, je m'excuse, je n'avais pas compris votre
réponse.
M. Levesque: Je présume...
M. Burns: D'accord. Vous présumiez que je vous poserais
une question de ce genre.
M. Levesque: Lui, il l'a posée.
M. Burns: C'est le député d'Anjou qui l'a
posée, alors, je remercie le député d'Anjou de m'avoir
précédé là-dessus.
Dernière question concernant l'aide juridique. C'est le cas des
personnes qui, à Mirabal, me dit-on, pourraient bénéficier
de l'aide juridique lorsqu'elles ont des problèmes avec l'immigration.
Est-ce que tel est le cas? Si oui, j'aimerais savoir de la part du ministre
quelle est exactement l'extension de l'aide qu'on accorde aux personnes qui
peuvent avoir des problèmes avec l'immigration lorsqu'elles arrivent au
Québec.
M. Levesque: On avait ce service à Dorval, me dit-on, et
cela a été maintenant porté à Mirabel, il y a eu un
changement à ce sujet. En plus de cela, il y a eu des difficultés
d'effectif, difficultés qui devraient être résolues au
cours de la présente année, espère-t-on, de sorte qu'on
pourra...
M. Burns: Utiliser les budgets.
M. Levesque: ...reprendre le service.
M. Burns: Est-ce à dire qu'actuellement le service n'est
plus donné?
M. Levesque: Dans le cadre du budget actuel, parce qu'apparemment
ça ne prend pas grand-monde pour rétablir la situation à
Mirabel.
M. Burns: Vous voulez dire qu'actuellement, ce service n'est plus
donné?
M. Levesque: Un avocat y va sur demande. Mais il n'y en a pas sur
place, en permanence...
M. Burns: Alors que, toutefois à Dorval, il y avait un
avocat sur place.
M. Levesque: C'est ça.
M. Burns: Est-ce que vous ne croyez pas que, comme gouvernement
du Québec qui veut, entre autres, prendre ses responsabilités,
même si on n'a qu'un petit budget de $10 900 000 en matière
d'immigration, parce que j'avais l'impression que c'était un pourboire
dans tout le projet budgétaire, à voir le ministère de
l'Immigration n'avoir que $10 900 000 à peu près comme budget
cette année, est-ce que, tout au moins, ça n'aiderait pas le
ministère de l'Immigration du Québec à concrétiser,
via le gouvernement de l'Etat du Québec, sa présence
auprès des nouveaux immigrants? Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il
s'agit là d'un service essentiel, si je peux dire, selon l'expression
à la mode, que vous devez rétablir le plus rapidement
possible?
M. Levesque: Oui, nous avons l'intention de le rétablir le
plus tôt possible.
M. Burns: Quand ça?
M. Levesque: Au cours de l'année, au cours de l'exercice
financier actuel.
M. Burns: Au cours de l'exercice actuel. M. Levesque:
Oui.
M. Burns: II n'y a pas de danger qu'avec les coupures de budget
et tout ça, vous oubliiez de...
M. Levesque: Nous avons un budget suffisant pour répondre
à ça.
M. Burns: Vous reviendrez à une certaine permanence
d'avocat de l'aide juridique?
M. Levesque: Si la commission juge que ça répond
à un besoin.
M. Burns: Combien de cas a-t-on traités dans le
passé par l'entremise de ce service?
M. Levesque: 250 cas.
M. Burns: Au cours de l'année dernière,
j'imagine?
M. Levesque: Oui. Pas une année entière cependant,
neuf mois.
M. Burns: En neuf mois. C'est une bonne moyenne. Cela
justifierait un poste en permanence.
M. Levesque: On est d'accord.
M. Burns: D'accord.
Le Président (M. Pilote): Programme 6.
M. Burns: D'accord, si vous êtes d'accord, pour le
programme 6.
Le Président (M. Pilote): II est adopté? M.
Burns: Adopté.
Le Président (M. Pilote): Programme 7: Enregistrement
officiel.
Bureaux d'enregistrement
M. Burns: Quant au programme 7, M. le Président, je
réfère le ministre à une lettre du 9 octobre 1975, qu'il
adressait lui-même au député de Saguenay, M. Lucien
Lessard, en réponse à la sienne du 30 septembre, concernant le
bureau d'enregistrement de Baie-Comeau.
Le député de Saguenay portait à l'attention du
ministre les nombreuses représentations qu'il avait eues, de la part
d'avocats et de notaires, concernant l'ouverture possible d'un second bureau
d'enregistrement dans ce qu'ils appallent le haut du comté.
En réponse à cette demande, le ministre avait
répondu avoir communiqué à M. René Langevin, le
registraire du Québec, cette demande. J'aimerais savoir ce qui est
advenu de la demande. Est-ce qu'on y a opposé une fin de non-recevoir ou
si, effectivement, on s'apprête à donner suite à la demande
du député de Saguenay?
M. Levesque: On me dit qu'il n'y a pas suffisamment de volume,
d'après les statistiques que Me Langevin a présentement entre les
mains, dans la partie du territoire en question, pour pouvoir maintenir un
bureau d'enregistrement.
M. Burns: Est-ce qu'on tient compte également des
distances absolument incroyables que les notaires, entre autres, qui pratiquent
dans cette partie du comté, sont obligés de parcourir, ou de
faire parcourir par des adjoints, pour faire l'enregistrement des actes?
M. Levesque: M. Langevin m'indique que cela se fait par
correspondance, en général.
M. Burns: Cela se fait par correspondance? M. Levesque:
Oui.
M. Burns: Est-ce que cette réponse a été
donnée directement au député de Saguenay, à la
suite de sa demande?
M. Levesque: On pourrait le vérifier; le dossier n'est pas
ici.
M. Burns: Remarquez que je me charge de l'aviser. Mais
peut-être aimerait-il recevoir une réponse.
M. Levesque: Je vais demander immédiatement que l'on
vérifie si la réponse a été donnée; elle l'a
probablement été. Si elle ne l'était pas, je vais voir
à ce que le député reçoive une réponse dans
les meilleurs délais.
M. Burns: Concernant le nombre de bureaux d'enregistrement, une
autre question qui me vient est la suivante. C'est relativement à une
rumeur qui persiste actuellement et selon laquelle le ministère de la
Justice envisagerait la diminution des bureaux d'enregistrement dans certains
endroits où, traditionnellement, on est habitué à avoir un
bureau d'enregistrement, où un certain modus vi-vendi s'est
installé autour de l'existence de bureaux d'enregistrement,
peut-être dans des endroits où, aujourd'hui, on s'imagine qu'ils
ne sont plus utiles, ou moins utiles.
Est-ce que cette rumeur que nous entendons est exacte? Est-ce qu'il est
exact, entre autres, que le ministère s'apprêterait à
réduire, à peu près de 50%, le nombre des bureaux
d'enregistrement dans le Québec?
M. Levesque: Non, ça, c'est fortement
exagéré.
M. Burns: Bon. c'est la façon d'avoir une réponse,
si on exagère la question.
M. Levesque: Je dois dire qu'il y a eu une étude qui a
été faite avant que j'arrive au ministère et qui indiquait
la façon dont on pourrait regrouper certains bureaux d'enregistrement en
vue d'une meilleure utilisation du personnel et d'une meilleure
efficacité.
J'ai eu l'occasion de regarder d'assez près ces suggestions; je
ne suis pas d'accord avec l'ensemble de l'étude, personnellement. Je
sais qu'un bureau d'enregistrement, c'est une institution extrêmement
importante, particulièrement dans les milieux ruraux où on est
habitué à avoir ce service...
M. Burns: II y a une espèce de modus vivendi
qui s'établit autour de l'existence d'un bureau
d'enregistrement...
M. Levesque: C'est exact.
M. Burns: ... très souvent, dans un endroit qui est
maintenant excentrique par rapport au développement de la
région.
NI. Levesque: C'est exact.
M. Burns: Mais il y a des habitudes qui se créent. Est-ce
qu'on a des projets précis quant à cela?
M. Levesque: Oui, j'ai un projet précis, bien qu'il faille
encore que peut-être je le raffine davantage, mais j'ai
procédé à de nombreuses consultations du côté
des notaires, du côté de la population, par l'entremise des
députés, etc., et je suis en train de compléter le dossier
à ce sujet.
M. Burns: Les modifications que vous envisagez seraient-elles
mises en vigueur à court terme?
M. Levesque: C'était prévu que ce soit mis en
vigueur au cours de trois ou quatre années, non pas tout d'un coup,
parce qu'il y a là des changements administratifs à faire. On
avait envisagé que le processus puisse durer trois ou quatre ans. Mais,
j'ai l'intention, si c'est possible, de commencer, d'ici un an, à
apporter ces modifications.
M. Burns: Vous avez l'intention de faire cela d'ici un an mais
progressivement.
M. Levesque: Progressivement.
M. Burns: De sorte que vous avez l'intention d'en aviser, je
pense, les gens concernés, avant le fait et non pas de les mettre devant
le fait accompli.
M. Levesque: D'ailleurs, on a commencé les consultations.
Les populations locales ont déjà été mises au
courant de certains changements à envisager, etc. Comme cela prend une
législation, on devrait s'en reparler en temps opportun. Cela ne se fera
pas autrement que par législation.
M. Burns: D'accord. Dernière question là-dessus, M.
le Président. La Société généalogique
canadienne-française le ministre on son collègue, le
Solliciteur général, a sans doute reçu des lettres
à ce sujet s'inquiète à nouveau cette année
de la possibilité que les informations qu'on retrouve dans les registres
d'état civil soient, pour une fois, mis de façon confidentielle
ou, si vous voulez, qu'on attache un élément de
confidentialité à cela. Est-ce que cela fait partie des projets
du ministère d'en arriver à ce changement concernant les
registres d'état civil ou est-ce que c'est une fausse rumeur, une
inquiétude inutile de la part de la Société
généalogique canadienne-française?
M. Levesque: II s'agit simplement d'une recommandation de
l'Office de révision du Code civil, une recommandation selon laquelle le
contenu des actes d'état civil ne puisse être divulgué
avant l'expiration d'une période de cent ans.
M. Burns: C'est-à-dire que, si, demain, j'ai affaire, dans
une cause, par exemple, de divorce, où j'ai besoin des actes
d'état civil, moi, comme procureur du requérant ou de la
requérante et où j'ai besoin de déposer les registres
d'état civil concernant soit le mariage, soit la naissance des conjoints
ou encore des enfants qui sont nés de ces conjoints, je n'aurais pas,
comme procureur de la partie adverse, la possibilité d'aller obtenir ces
renseignements?
M. Levesque: La recommandation n'allait pas aussi loin que cela.
Elle ne touche pas les questions judiciaires, mais simplement les questions de
recherche. Mais, c'est tout simplement une recommandation. Il n'y a rien
d'accepté.
M. Burns: Oui, c'est cela. J'aimerais connaître les vues du
ministre là-dessus. Pense-t-il que le ministère va donner suite
à cette recommandation ou si on peut s'attendre à ce qu'il va
considérer l'utilité, je pense, de sociétés
généalogiques, peu importe, je ne les qualifie pas?
M. Levesque: Personnellement, je n'ai pas étudié
cette question. Mes plus proches collaborateurs n'ont pas, non plus, eu le
temps de fouiller cette recommandation ou de me donner une opinion
là-dessus. C'est simplement une recommandation qui est là, qui
existe et à laquelle on n'a pas donné suite.
On m'indique que dans plusieurs pays on avait adopté des
restrictions semblables en ne permettant d'accessibilité totale qu'aux
actes d'état civil vieux de plus de cent ans afin de sauvegarder le
caractère confidentiel de certaines informations contenues dans ce
registre, l'adoption, le désaveu, la reconnaissance de paternité,
et ainsi de suite. Pour nous, on n'a rien décidé.
M. Burns: Vous n'avez pas de politique définie
là-dessus.
M. Levesque: Non.
M. Burns: Programme 8, adopté.
Le Président (M. Pilote): Adopté.
M. Burns: C'est le programme 7, oui.
Le Président (M. Pilote): Le programme 7 est
adopté. Programme 8?
M. Burns: Excusez-moi.
Le Président (M. Pilote): Contrôle des jeux de
hasard et de courses.
M. Levesque: Adopté.
M. Burns: II y aurait bien des questions à poser
là-dessus, mais c'est plutôt au Solliciteur général
que je poserais ces questions, mais comme le Solliciteur général
via sa police fait enquête sur une certaine situation qui existe à
Loto-Québec, j'aimerais savoir s'il est dans les vues du ministre,
éventuellement, de forcer son collègue à agir plus
rapidement dans un dossier qui, à mon avis, nuit fort possiblement
à la bonne réputation de l'administration de la Régie des
courses et, en particulier, de Loto-Québec actuellement?
M. Levesque: II faut bien comprendre, premièrement...
M. Burns: Ce n'est pas le même dossier, non? Cela se
mêle tout dans mon esprit.
M. Levesque: II faut dire que le Solliciteur
général fait bien son travail.
M. Burns: Vous savez, avec Loto-Perfecta et tout cela, tout le
monde est mêlé dans cette histoire.
M. Levesque: Ici, il s'agit du contrôle des jeux de hasard
et des courses, qui émet les permis, mais ce n'est pas
l'opération comme telle des loteries...
M. Burns: Ce n'est pas l'opération...
M. Levesque: ... qui relève du ministère des
Finances.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Quant au Solliciteur général, je n'ai
aucun doute qu'il a répondu à toutes les questions que vous avez
eues à lui poser...
M. Burns: A aucune.
M. Levesque: ... et qu'il poursuit son travail avec
l'efficacité et l'objectivité qu'on lui connaît. Je ne veux
pas ajouter d'autre chose ici.
M. Burns: Adopté.
Le Président (M. Pilote): Adopté.
M. Burns: En demandant, cependant, à votre
collègue, membre du Cabinet, au Solliciteur général, s'il
est possible qu'il nous donne des réponses le plus rapidement possible,
quitte à lui rappeler demain à la période des questions,
si nous sommes tous éveillés, qu'il nous doit un certain nombre
de réponses sur un certain nombre de choses. D'ailleurs, j'aurais bien
le goût de recommencer l'étude des crédits du Solliciteur
général.
M. Levesque: Je vais lui dire cela. M. Burns: Vous allez
lui dire cela.
Le Président (M. Pilote): Programme 9, contrôle des
permis d'alcool.
Commission de contrôle des permis
d'alcool
M. Burns: Au programme 9, je n'ai que quelques questions à
poser que, sans doute, le ministre, avec les conseils de M. le juge Trahan, va
nous donner. Relativement aux amendements récents, et quand je parle
d'amendements récents, je parle des amendements qui ont
été adoptés depuis un an ou un an et demi, sauf erreur,
c'est à peu près à cette période que nous avons
adopté un certain nombre d'amendements, peut-être plus, et qui
avaient pour but de faciliter l'aspect administratif de l'octroi de permis en
matière de contrôle d'alcool.
J'aimerais savoir, soit de la part du juge Trahan ou de la part du
ministre, si les amendements qui ont été adoptés, qui ont
été longtemps mis en veilleuse avant d'être
proclamés, on commence effectivement à en ressentir les effets
dans les demandes plus particulièrement de transfert. On sait que c'est
l'une des choses qui ont toujours préoccupé les
commerçants qui exploitent des épiceries, des bars ou, je ne sais
pas, des bars-salons, des restaurants, avec permis d'alcool, un des
problèmes qui a toujours retardé un certain nombre de
transactions et, très souvent, causé des dommages à des
vendeurs. J'ai surtout eu connaissance du cas d'un certain nombre de petits
dépanneurs qui étaient obligés de revenir sur des
promesses d'achat et des promesses de vente qui étaient retardées
quant à leur mise en application à cause du délai dans le
transfert du permis de vente de bière. Est-ce qu'effectivement cette
situation a été corrigée? Est-ce que maintenant cela prend
plus que six, sept ou huit mois pour obtenir un transfert de permis de vente de
bière ou de permis de vente d'alcool, même lorsque des
problèmes ne se posent pas véritablement dans certains
dossiers?
Quand je demande si ça s'est amélioré je veux dire
que ça s'est sûrement amélioré par le texte de loi,
parce que, comme tel, le transfert de permis n'existait pas auparavant. Je
pense que la commission de contrôle, à juste titre, était
obligée de refuser des demandes de transfert, malgré une certaine
largesse de vue de sa part, mais maintenant que le transfert de permis par
l'entremise d'un actionnaire à un autre est possible, je pense que cela
a pu faciliter les choses. Est-ce qu'effectivement on sent, à la
Commission de contrôle des permis d'alcool, une modification de la
situation actuellement? Est-ce que ça s'améliore?
M. Levesque: Je peux vous dire qu'en général, pour
les ventes, nous sommes rendus au 25 avril 1976, ça veut dire que les
demandes entrées le 25 avril sont en train d'être
étudiées, et que pour les ventes d'épiceries, nous sommes
rendus au mois de mai. Quand je suis arrivé à la commission, il y
avait auparavant des transferts. Ces transferts sont disparus avec la nouvelle
loi. Pour ma part,
j'ai suggéré qu'on les ramène. Nous avons
discuté avec la Chambre des notaires. Nous essayons de trouver un modus
vivendi qui pourrait nous aider à améliorer cette situation. Nous
en avons discuté à de nombreuses reprises et nous en discutons
encore. Nous ferons très prochainement des suggestions au ministre
à ce sujet.
M. Burns: Vous me précédez, M. le juge, sur ma
deuxième question.
M. Levesque: J'ai toujours été comme ça.
M. Burns: Est-ce que vous envisagez... Il a toujours
été vite, le juge!
Est-ce que vous envisagez des suggestions à l'endroit du
ministère de la Justice, en vue d'une éventuelle loi ou
d'éventuels amendements à votre loi?
M. Levesque: Encore une fois, on vous précède,
parce qu'on a déjà transmis un projet d'amendements qui sont
absolument nécessaires pour le moment, et nous en ferons certainement
d'autres à l'automne, parce qu'une loi est bonne pour autant qu'on la
renouvelle.
Quand on a vécu pendant un certain temps avec une loi, on
s'aperçoit des failles qu'il y a dedans. On fait des suggestions. On
vous demande de nous aider à trouver des suggestions pour pouvoir
régler vos problèmes, parce que vos problèmes, ce sont les
nôtres. Si vous nous aidez, on va les régler.
M. Burns: Est-ce que le ministre de la Justice a objection
à nous livrer, même si ce n'était qu'en
résumé, l'essence des suggestions de la commission de
contrôle?
M. Levesque: Non, nous n'avons pas encore terminé
l'étude des recommandations faites par la commission, et je
préférerais attendre au moment où je déposerai les
amendements.
M. Burns: Est-ce que, lorsque les études seront
complétées, et même avant l'adoption ou la proposition du
projet de loi, le ministre est d'accord à faire part à
l'Opposition des suggestions de la commission?
M. Levesque: Avant?
M. Burns: Avant l'adoption et avant le dépôt du
projet de loi. Une fois que vous aurez complété votre
étude, parce que la réponse que vous venez de me donner indique
que vous ne voulez pas nous en faire part, parce que vous n'avez pas...
M. Levesque: Ordinairement, tous les députés
reçoivent l'information en même temps et normalement...
M. Burns: Je parle de l'Opposition, mais j'imagine que les
députés ministériels aussi. Je n'ai pas d'objection
à ce que cela soit à tous les députés.
M. Levesque: ... cela se fait au moment du dépôt du
projet de loi en Chambre et quelquefois, on peut en discuter avant aussi. Je
n'ai pas d'objection, à un certain moment, à ce que ceux qui sont
intéressés à cette question m'en parlent. Je suis
très ouvert.
Comme il s'agit simplement d'augmenter l'efficacité de la
commission le plus possible, de diminuer les délais et d'enlever les
procédures inutiles et taxatoires c'est ce qu'on veut dans le
fond et s'il y a des embêtements qui sont causés aux
citoyens, qu'on essaie de les enlever et que, par contre, où un
contrôle est nécessaire, bien, qu'il soit présent. Mais,
qu'il y ait le moins d'embêtements inutiles créés à
ceux qui demandent d'être entendus. Il n'y a pas de secret
là-dedans.
Le Président (M. Pilote): Le député de
L'Assomption.
M. Perreault: J'aimerais poser une question relativement à
la mainmise de la pègre sur les différents permis de boisson,
comme les salons-bars. La situation s'améliore-t-elle sur le
contrôle de ceux qu'on appelle les "front men" qui agissent pour la
pègre ou la situation se détériore-t-elle?
M. Levesque: Je pense que vous seriez mieux de poser la question
au représentant du ministère public parce que nous entendons les
preuves qui nous sont présentées par le procureur du
ministère public et nous décidons suivant la preuve qui est faite
devant nous. Chaque fois qu'une cause nous est apportée et qu'on nous
prouve la présence de la pègre, nous travaillons à la
faire disparaître, mais, seulement, nous n'allons pas chercher les
causes. Nous contrôlons. Il faut que ce soit le ministère public
qui nous les amène. Alors, il y a son représentant et lui nous
apporte la preuve et quand la preuve est bonne, avec notre conscience et notre
intelligence, on essaie de...
M. Perreault: Le ministère public fait-il des
enquêtes assez profondes là-dessus?
M. Levesque: Nous pouvons vous dire que nous siégeons tous
les jours. Nous avons été une des première cours de
justice à siéger à 9 h 30 le matin et nous passons, en
moyenne, de sept à huit causes par jour, régulièrement. Le
ministère public a introduit un nouveau système. Chaque fois que
quelqu'un commet une offense, la copie de l'offense est envoyée à
Montréal ainsi qu'à Québec et nous vérifions,
c'est-à-dire que le ministère public vérifie avec notre
service d'enquêteurs et d'inspecteurs s'il y a lieu de porter une
plainte. S'il y a lieu de porter une plainte en vertu de l'article 61, on
envoie un avis de convocation et on entend la plainte.
Seulement, c'est encore comme partout ailleurs. Il y a beaucoup de gens
qui parlent, mais il y en a peu qui veulent agir. Quand on veut avoir la
preuve, ils ne veulent jamais venir devant nous et même lorsqu'ils se
présentent, ils ont toujours des faux-fuyants.
M. Perreault: Ce qui m'inquiète surtout lorsque le
ministère public présente sa cause est la connaissance du sujet
qu'il achète d'un autre pour voir les intérêts qu'il y a en
arrière. On a eu la CECO qui a révélé beaucoup de
choses, mais il me semble que nous ne sommes pas beaucoup plus avancés
que nous ne l'étions.
M. Levesque: Alors, je peux lancer un appel à vous tous.
Lorsque vous connaissez quelque chose, appelez M. Luc Gervais qui est le
directeur du service d'enquête et d'inspection qui va voir à faire
faire une enquête et s'il y a quelque chose, il va faire envoyer un avis
de convocation. Souvent, on reçoit des lettres anonymes et on essaie de
chercher le fond de l'histoire, mais on n'est jamais capable parce que personne
ne veut parler.
M. Perreault: Quand c'est dans nos régions et que c'est un
inconnu qui arrive et qui achète l'affaire, on n'a rien à
dire.
M. Levesque: Oui. En vertu de la loi, vous pouvez tous et chacun
d'entre vous, vous y opposer.
M. Perreault: Pour s'y opposer, il faut avoir des raisons.
M. Levesque: Vous dites que ce sont des gens de la pègre,
alors vous devez avoir des informations à cet effet.
M. Perreault: Ecoutez. Entre prouver et...
M. Levesque: Là-dessus, je pense qu'on peut mentionner
l'existence de plusieurs escouades régionales, alcool et moralité
à la Sûreté du Québec, qui s'occupent
particulièrement de la surveillance des établissements qui sont
détenteurs de permis de la Commission de contrôle des permis
d'alcool, de sorte que si vous aviez des motifs de croire qu'un futur
acquéreur d'un établissement pourrait être issu du milieu
de la pègre, je pense qu'il serait approprié de s'adresser
à ces escouades régionales, alcool et moralité qui verront
sûrement à faire enquête.
J'ai déjà reçu un certain nombre de plaintes,
à un moment donné, je les ai refilées à ces
escouades et, dans les cas dont j'ai eu connaissance, il y a eu un travail
efficace qui s'est effectué.
M. Burns: Une dernière question là-dessus, M. le
Président. Nous avons adopté une loi enlevant de la juridiction
ou extrayant de la juridiction de la Commission de contrôle des permis
d'alcool des permis d'alcool à être décernés sur les
lieux où se tiendront les jeux de la XXIe Olympiade.
M. Levesque: On ne les a pas enlevés.
M. Burns: Non.
M. Levesque: Non.
M. Burns: C'est à la commission...
M. Levesque: La commission continue. On a permis à la
commission de...
M. Burns: D'en décerner pour des fins très
spécifiques.
M. Levesque: Nous exigeons, comme c'était pour Terre des
Hommes... il y a un contrat qui a été passé par le COJO ou
la RIO. S'il n'y a pas de contrat, on ne donne pas de permis. Il faut
absolument que la personne soit autorisée.
M. Burns: Mais c'est automatique, ou presque.
M. Levesque: C'est automatique; règle
générale, on fait faire une enquête et on demande toujours
la fiche signalétique de toute personne qui fait une demande de permis.
On fait la même chose pour ces gens-là.
M. Burns: Vous continuez à détenir la juridiction
là-dessus, mais c'est sur recommandation du COJO.
M. Levesque: Comme pour Terre des Hommes.
M. Burns: Est-ce qu'il y a moyen de nous déposer, ce n'est
peut-être pas possible ce soir, mais les jours qui viennent, la liste des
permis qui ont été accordés en vue de la XXIe Olympiade
avec le nom du détenteur, le nom des compagnies, s'il y a lieu? Est-ce
que c'est possible d'ici quelques jours, d'ici deux jours?
M. Levesque: Certainement. J'ai cela. Demain matin, je peux
envoyer cela à M. Normand. D'accord?
M. Burns: D'accord. Programme 9...
Le Président (M. Pilote): Le député de
Beauce.
M. Sylvain: J'aurais une question. Avant de la poser, j'aimerais
bien ici remercier le juge Trahan de s'être rendu dans la Beauce
rencontrer tous les hôteliers, pour avoir humanisé et rendu un peu
plus accessibles les services de la commission à des gens
éloignés. Quant à moi, je vous incite à le faire
dans d'autres régions, parce que cela a eu de très bons effets
vis-à-vis des hôteliers.
D'autre part, même si, à cette réunion, vous avez
soumis le problème des permis de réunion face aux
hôteliers, je reviendrai sur le problème de l'émission des
permis de réunion. Il m'avait semblé, avant l'adoption de la loi
21 qui modifiait l'ancienne Loi de la commission de contrôle des permis,
que les clubs ou associations qui pouvaient requérir ou faire des
demandes de permis de réunions étaient des clubs qu'on appelait
bona fide. La réglementation qui a découlé de la loi a
rendu très sévère ou moins accessible pour les clubs ou
associations le genre de permis de réunion en y
donnant trois fins, je pense à l'éducation, etc., et en
demandant que le club ou l'association ait une charte relevant de la
troisième partie de la Loi des compagnies. Je voudrais soulever deux
cas. Par exemple, un club d'éleveurs de Hereford et des
sociétés d'élevage ou des clubs d'éleveurs
Ayrshire, qui existent dans des comtés ruraux depuis 80 ans, qui ont
toujours été des associations bona fide et qui avaient l'habitude
d'avoir, une fois par année, la réunion annuelle de
peut-être 100 ou 200 éleveurs, ces permis de réunion...
Aujourd'hui, à cause des fins qui sont mentionnées au niveau du
règlement, ils ne peuvent, d'aucune façon, le recevoir,
même s'ils étaient incorporés... D'après les
réponses qu'ils ont eues, ils ne correspondaient pas aux fins même
édictées dans le règlement, par exemple éducation,
etc. Est-ce que vous ne voyez pas un assouplissement à intervenir au
niveau du règlement ou que d'autres fins poursuivies par les clubs ou
associations soient mentionnées au règlement découlant de
la Loi de la commission de contrôle de permis?
M. Levesque: Nous sommes prêts à accepter tout ce
que vous voudrez, c'est vous qui faites notre loi, c'est vous qui faites nos
règlements. Nous les appliquons après. Dans ce cas, il faut que
ce soient des clubs ou des associations sans but lucratif. Le grand malheur,
c'est que les trois quarts de ces associations sont à but lucratif. On
se sert de notre permis de réunion pour faire des profits alors que la
loi nous dit qu'on ne doit pas avoir de profit avec ces réunions. Je
pense bien que, dans des cas spéciaux comme celui-là, un permis
ne doit pas être refusé.
M. Sylvain: C'est ce qui me surprenait et je suis intervenu
moi-même, ça ne me gêne pas de le dire, au niveau des
administrateurs à Québec. Cela me surprenait parce qu'il me
semble que des sociétés d'élevage, il y a des fins
éducatives, pour les jeunes agriculteurs et cultivateurs...
M. Perreault: ... vaches.
M. Sylvain: ... mais deux fois de suite, à peu près
durant le même mois ou la même période, on a refusé,
évidemment, il y avait les deux questions mises en cause, il n'y avait
pas de charte et ça ne correspondait pas non plus à des frais, ce
qui était surprenant. Je le dis à titre de suggestion, ou
à titre de commentaire, de regarder cet aspect pour ouvrir un peu plus
les fins pour lesquelles un permis pourrait être demandé sans
tremper de l'autre côté... Parce que disons qu'on a
régularisé une situation vis-à-vis des hôteliers qui
trouvaient que les permis étaient délivrés en nombre trop
grand.
M. Levesque: Quand des situations comme celles-là se
produisent, la meilleure manière de procéder, c'est de nous
écrire une lettre et nous expliquer pourquoi vous croyez que le permis
aurait dû être accordé, on va l'étudier, on va vous
donner une réponse bonne ou mauvaise, mais on va vous en donner une.
Adopté.
Le Président (M. Pilote): Le programme 9 est
adopté?
M. Burns: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Pilote): Programme 10: Contentieux
général du gouvernement.
Contentieux général
M. Burns: Là-dessus, M. le Président, j'ai une
simple question à laquelle peut-être le ministre ne peut pas me
répondre immédiatement. Je lui demanderais de nous déposer
la liste cumulative des mandats qui sont confiés à des avocats de
pratique privée avec le type de cause, les montants impliqués,
tous les honoraires qui en résultent, au cours de l'exercice financier
précédent. Je pense qu'il est possible pour le ministre de nous
donner ce renseignement. Je comprends qu'il n'est peut-être pas en mesure
de nous le donner dès ce soir, mais je comprendrai d'autre part que
cette liste puisse nous être déposée dans les heures qui
viennent.
M. Levesque: Je ne pense pas que ce soit l'habitude du
ministère de déposer les listes des procureurs?
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Je sais bien que la préparation de tels
documents serait très longue et exigerait un personnel
considérable puisqu'il nous faudrait déterrer chaque mandat civil
et pénal. C'est une...
M. Burns: Je vais vous poser la même question au niveau
pénal qui arrive au programme 12, au contentieux pénal. Si vous
voulez les réunir ensemble, je n'ai pas d'objection, mais apparemment au
ministère de la Justice, on fonctionne dans ces cas par ordinateur alors
ça ne devrait pas être tellement difficile d'obtenir ces
renseignements.
M. Levesque: On ne fonctionne pas par ordinateur pour les
mandats.
M. Burns: C'est pourtant ce que l'ex-député de
Johnson nous avait dit.
M. Levesque: L'ex-député de Johnson!
M. Burns: M. Boutin, Boutin.
M. Levesque: Pour le Code de la route.
M. Burns: Pour le Code de la route, c'est par ordinateur, parce
qu'il continue à en recevoir, pauvre gars.
M. Levesque: Pour le Code de la route.
M. Burns: II disait que ça n'était pas sa faute,
c'était la faute de l'ordinateur.
M. Levesque: C'est exact pour le Code de la route.
M. Burns: Alors dans le cas des autres mandats qui ont
été confiés, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de nous
donner ça à très court terme?
L'année dernière, M. le ministre, pour votre information,
on nous a déposé cette liste, c'était une liste
mécanographique. A la même question, cela nous avait
été déposé. Cela me surprendrait...
M. Levesque: On peut donner le Code de la route.
M. Burns: Les causes du contentieux civil et criminel, ce n'est
pas possible?
M. Levesque: On dit que c'est mécanographie depuis 1970,
mais par groupes.
M. Burns: Vous voulez dire par groupes de cause, de types de
cause?
M. Levesque: De types de cause.
M. Burns: C'est parfait, c'est exactement ce que je vous
demande.
M. Levesque: On ne peut pas trouver... M. Burns: Juste
pour comparer avec...
M. Levesque: Je ne peux pas, à ce moment-là,
déterminer le mandat que chacun des avocats a reçu, sans aller
voir dans chacun des dossiers.
M. Burns: Le type de cause va nous donner le type de mandat, si
je vous comprends bien. Si, par exemple, il s'agit d'une action en
dommages-intérêts contre l'Office des autoroutes, par exemple, et
que votre ministère a désigné un avocat pour
représenter l'Office des autoroutes, on va le voir à ce
moment-là. C'est peut-être des cas plus évidents que cela,
parce que là, on parle quand même d'un office...
M. Levesque: ... de termes très généraux,
dans ce cas-là.
M. Burns: En fait, cela pourrait nous donner le type de cause, le
montant des honoraires impliqués.
M. Levesque: Je vais voir ce qu'on peut faire. Je dois dire au
député de Maisonneuve que s'il est intéressé
à connaître les sommes gagnées, en honoraires, par avocat,
il n'a qu'à prendre les comptes publics.
M. Burns: Je ne peux pas avoir là tous les renseignements.
Dans les comptes publics, je n'aurai pas tous ces renseignements. Non.
M. Levesque: Pour les petits montants, ce serait difficile.
M. Burns: C'est cela. Alors, je n'aurai pas les cas de moins de
$10 000?
M. Levesque: Non, c'est cela. M. Burns: C'est cela.
M. Levesque: J'ai devant moi les comptes publics 1974/75, par
exemple, à la page 1-49, à l'article services professionnels. On
a toute la liste des avocats.
M. Burns: Vous n'avez pas les montants, lorsqu'ils sont
inférieurs à, je ne sais pas...
M. Levesque: C'est parce qu'ils sont inférieurs à
$10 000.
M. Burns: Lorsqu'ils sont inférieurs à $10 000, on
ne les a pas. Dieu sait qu'il y en a des mandats, et beaucoup, qui sont
inférieurs à $10 000, même le total des mandats.
M. Levesque: Parlant des mandats, j'ai de petites nouvelles pour
le député de Maisonneuve. J'ai fait vérifier la liste des
gens dont il m'avait parlé.
M. Burns: Oui.
M. Levesque: Pour moi, c'était probablement une liste
faite par un parti politique ou je ne sais pas quoi, mais ce qui arrive, c'est
qu'il n'a pas été trop chanceux.
M. Burns: Non?
M. Levesque: Non. Il y avait 225 noms donnés par le
député, suivant la liste que le député m'a fournie,
en Chambre, et il n'y avait que 38 avocats parmi toute cette liste de 225 qui,
en 1974, ont eu des mandats.
M. Burns: Mais c'est une liste de 1970 que je vous ai remise.
M. Levesque: Je comprends, mais ces gens-là...
M. Burns: Oui. Il y en a plusieurs d'ailleurs... M. Levesque:
Je suis obligé...
M. Burns: Le ministre a remarqué qu'il y a même
plusieurs de ces gens-là qui sont maintenant des juges.
M. Levesque: Quelques-uns.
M. Burns: Je ne m'attends pas... Si le ministre veut être
honnête, il va faire une comparaison avec l'année 1970/71.
M. Levesque: J'ai obtenu 1974/75. Je n'ai pas eu l'année
1971; je l'attends. J'espère l'avoir également.
M. Burns: Oui. J'aimerais bien l'avoir.
M. Levesque: Je pourrais donner le renseignement prochainement au
député.
M. Burns: D'accord.
M. Levesque: J'ai demandé le renseignement et je ne l'ai
pas encore reçu. Ensuite, dans une procédure subséquente,
le député de Maisonneuve m'avait apporté une lettre qui
avait été écrite, à un moment donné, par un
M. Bélanger, et adressée à un M. Geoffrion, si je me
rappelle bien.
M. Burns: Oui, M. Jean Geoffrion.
M. Levesque: Relativement à Me Lengvari. Or, M. le
Président, M. Lengvari n'a jamais eu de mandat du gouvernement du
Québec. Je voulais simplement lui dire cela en passant. J'ai fait des
recherches.
M. Burns: Est-ce que vous avez fait des recherches sur
l'existence de cette liste? Qu'est-ce qu'on voulait dire lorsqu'on disait:
Veuillez l'inscrire sur notre liste? Qu'est-ce que cela voulait dire? C'est
d'ailleurs dans ce sens-là que j'ai déposé, auprès
du ministre, une copie de cette lettre.
M. Levesque: Je ne fais que regarder les résultats. Je ne
peux pas dire ce que M...
M. Burns: II ne faudrait quand même pas faire de
l'ignorance crasse.
M. Levesque: Non, ce n'est pas de l'ignorance. J'ai
vérifié au cas où il y aurait une relation entre ce que
fait le ministère, dans son travail quotidien, et cette lettre qui
aurait pu provenir de M. Bélanger et parvenir à M. Geoffrion.
Chose sûre, c'est que ce M. Lengvari qu'il soit sur une liste ou
sur l'autre, n'a rien reçu comme mandat du gouvernement du
Québec.
M. Burns: C'est possible, d'ailleurs je peux vous en citer des
cas, je vais vous en citer d'autres si vous voulez.
M. Levesque: Ce n'est pas seulement cela, ce qui est
véritablement la situation je savais que, depuis que je suis au
ministère, c'est cela que nous faisions c'est que nous avons
comme critère numéro 1 la compétence. Je le
répète encore ce soir. Plusieurs avocats sont choisis pour des
causes particulières, en raison de leur spécialité, etc.
Toutes les causes importantes, autrement dit, sont prises de cette
façon.
M. Burns: Mais, est-ce que...
M. Levesque: Pour des causes où il n'y a pas tellement de
compétence particulière, cela prend des gens compétents,
mais non pas nécessairement spécialisés dans un domaine
particulier, alors, une fois que nous avons déterminé la
compétence égale, s'il y a deux, trois ou quatre avocats,
à ce moment, on peut avoir d'autres considérations, si bien
que...
M. Burns: Comme quoi?
M. Levesque: Par exemple, prenons un jeune avocat qui commence,
qui est intelligent, qui est compétent et qui a besoin d'un petit coup
de pouce, ce n'est pas mauvais de lui donner cela, de lui confier, ce n'est pas
mauvais non plus...
M. Burns: S'il était très actif dans les jeunesses
libérales. Cela ne nuit pas.
M. Levesque: De lui confier quelques mandats pour le Code de la
route, je n'ai pas d'objection a cela.
M. Burns: Cela veut dire que le critère de la
compétence n'est pas exclusivement celui que vous...
M. Levesque: C'est le critère numéro 1, je le
répète et je l'ai toujours dit.
M. Burns: Vous allez admettre, M. le ministre de la Justice,
vous-même qui êtes avocat, que le critère compétence,
mis à part là, ce n'est pas une question de
compétence, c'est une question de spécialisation le
phénomène spécialisation, comme tel ne se pose à
peu près pas, sauf dans les cas d'extrême limite, si un avocat a
été admis au Barreau, quand je vous dis, sauf dans des cas
d'extrême limite.
M. Levesque: Non, il a également l'université.
M. Burns: II y a évidemment des avocats qui sont
complètement pourris, comme il y a des avocats superbrillants. C'est
bien sûr, comme dans n'importe quelle société, vous
avez...
M. Levesque: Je sais que, lorsque j'ai posé des questions
à ce sujet au ministère, on m'a dit que cela arrivait souvent,
non pas souvent, mais de temps en temps qu'on indiquait un avocat et on disait:
Lui, fini. Son rendement n'est pas assez bon, fini.
M. Burns: D'accord. Mais dans une...
M. Levesque: Ils ne se sont pas demandés s'il était
un gars, comme dirait le député de Maisonneuve, de la jeunesse
libérale. "Out". Le critère numéro 1, partout au
ministère, c'est la compétence dans les personnes à qui on
confie des mandats.
M. Burns: Je répète ce que je disais tout à
l'heure, mis à part le phénomèneje veux bien
être compris spécialisation qui est un autre facteur que la
compétence qui est un...
M. Levesque: C'est là où sont les gros
montants.
M. Burns: ... facteur assez...
M. Levesque: C'est dans les causes où il y a la
spécialisation, une compétence particulière que se
retrouvent les mandats importants au point de vue pécuniaire. Les autres
mandats sont des mandats qui sont peut-être de $15 ou $20 la cause,
quelque chose comme cela. C'est le volume, à ce moment, qui peut devenir
intéressant. C'est sûrement une cause isolée de ce
genre.
M. Burns: Le ministre a-t-il fait enquête, en plus de
l'enquête qu'il me mentionne, sur le fait qu'une certaine liste existait
et circulait peut-être dans un parti politique et que cette liste faisait
référence à des travaux qui avaient ou pouvaient
être faits ou devraient être faits pour le gouvernement ou un de
ses organismes? Est-ce que le ministre a enquêté sur cela?
M. Levesque: Non, je n'ai pas besoin d'enquêteur. Tous les
partis politiques tiennent compte des efforts fournis par les militants au
cours d'une élection. Je m'imagine bien que le Parti
québécois également sait quels avocats l'ont aidé
et tout cela. D'autre part, il faut dire que, d'après ce que je sais de
la vie politique, ce ne sont pas les avocats qui sont les grands souscripteurs.
Je pense que, si on faisait une liste des souscripteurs dans le Parti
québécois, probablement qu'on s'apercevrait, comme dans le Parti
libéral, qu'ils sont peut-être assez bas dans la liste.
M. Burns: C'est-à-dire qu'on a tellement de souscripteurs
que même les avocats y sont perdus dans la foule.
M. Levesque: Mais, ce qu'on évalue...
M. Burns: Quand vous êtes rendus avec 50 000 souscripteurs
dans une campagne de financement, on ne remarque pas si c'est un avocat ou pas.
On remarque si c'est un individu au lieu d'être une compagnie.
M. Levesque: Je disais que le travail d'un avocat, sans doute,
c'est le travail légal qu'il fait au cours d'une élection pour
s'assurer que les pé-quistes ne jouent pas trop de tours dans les
bureaux de scrutin. C'est cela le travail d'un avocat.
M. Tardif: II y a beaucoup de travail à faire.
M. Levesque: II a à renseigner les gens sur la loi
électorale.
M. Burns: Si on savait comme nos avocats, dans une campagne
électorale on a deux expériences très
précises, c'est-à-dire deux élections ont beaucoup
plus de travail à surveiller les gens du Parti libéral
qu'à indiquer quel travail doit être fait par nos
représentants dans les bureaux de scrutin.
M. Levesque: Disons que c'est réciproque.
M. Burns: Mais, je vous signale, M. le ministre, parce que je
l'ai envoyé chercher, que l'année dernière, le 8 juillet
1975, nous avions obtenu de la part du ministre de la Justice du temps, les
mandats de rapports cumulatifs à jour pour chacun des avocats qui ont
agi. Je vais vous la lire, il s'agit d'une liste mécanographique
où on voit le numéro du dossier, la nature du dossier,
l'organisme qui est basé selon un certain...
M. Levesque: Est-ce que le député voudrait me
remettre cela? On va demander la même chose, on voudrait bien
comprendre...
M. Burns: Cela s'intitule "Système des mandats, rapports
cumulatifs à date", en date du 12 juin 1975, qui a été
remis à mon collègue de Chicoutimi en date du 8 juillet 1975,
à la suite d'une question qu'il avait posée au ministre.
M. Levesque: Madame ira ensuite regarder ce que vous avez pour en
faire une pareille à jour.
M. Burns: A jour, pour cette année. On a pour chacun des
districts judiciaires, le nom de l'avocat, le type de la cause.
M. Levesque: Si ces renseignements ont pu être
donnés l'an passé, je ne vois pas pourquoi ils ne pourraient pas
être donnés cette année.
M. Burns: Cela m'apparaît logique. Je poserais cette
question à nouveau cette année, quant au contentieux civil et au
contentieux criminel. Cela réglerait ma question concernant le
contentieux civil. Je suis prêt à adopter le programme 10.
Le Président (M. Pilote): Le programme 10 est
adopté. Le programme 11.
Conciliation entre locataires et
propriétaires
M. Burns: Le programme 11. Je n'ai pas de très nombreuses
questions. J'en ai une seule. Est-ce que le ministre de la Justice peut nous
donner, même si ce n'était qu'en termes de proportion,
l'augmentation ou la diminution je pense bien que c'est plutôt une
augmentation des recours qui ont été, au cours de
l'année précédente adressés ou des
requêtes ou des contestations, tant du côté du locataire que
du côté du locateur à la commission. Tant au niveau
des pures et simples demandes de prolongation ou, si c'est le cas, des pures et
simples demandes d'annulation ou encore...
M. Levesque: L'an dernier 50 000, l'ordre de grandeur; cette
année, 65 000, dans toute la province.
M. Burns: Dans toute la province.
M. Levesque: Disons donc que Montréal a surtout le
gâteau.
M. Burns: ... à Montréal.
M. Levesque: Je pense que cette année, Mon-
tréal représentera 30% d'augmentation, mais dans le
restant de la province, on expérimentera pas plus que probablement 5% ou
10%.
M. Burns: Dans les cas d'appel, M. le juge, peut-on...
M. Levesque: Les cas d'appel représentent à peu
près 16% ou 17%. Mais, vu que les causes sont entendues assez tard, je
suis pris avant d'entendre des appels beaucoup trop tard. Je pense que c'est
une affluence épouvantable, quand on pense qu'on a entendu 50 000
causes, on est mal pris, on sait qu'on aimerait mieux... Je voudrais faire une
petite parenthèse. Tantôt j'ai entendu des gens se vanter qu'on
siégeait le matin et l'après-midi, je voudrais dire qu'on
siège matin, après-midi et soir. J'avais hâte de venir
m'asseoir ici pour que le ministre me donne la chance de dire que je
siégeais le soir.
M. Burns: C'est pour cela que je ne pouvais pas m'empêcher
de vous donner la chance de venir nous dire cela.
M. Levesque: Vous êtes bien aimable. Tout le monde est
tellement généreux.
M. Burns: J'ai eu moi-même, avec grande satisfaction,
à quelques reprises recours à la Régie des loyers comme
locataire. Je l'ai noté d'ailleurs et je suis convaincu que ce
n'était pas un cas spécial, parce que j'étais avec un
autre groupe de locataires je pense qu'on peut admirer
l'amélioration qui s'est installée depuis quelques années
dans l'administration de la Loi favorisant la conciliation entre le locataire
et le locateur.
M. Levesque: C'est de valeur qu'on ne soit qu'un petit groupe
ici.
M. Burns: Pardon?
M. Levesque: J'aimerais vous entendre dire cela plus fort et
à plus de monde.
M. Burns: Je l'ai dit. Ce n'est pas la première fois que
je le dis, d'ailleurs.
M. Levesque: Ce sera certes dans le journal des Débats et
2400...
M. Burns: D'ailleurs, je vous l'ai dit quand je vous ai
rencontré au palais de justice.
M. Levesque: Je dois vous dire que je l'ai entendu, mais
seulement de personne à personne, et, vous savez, cela se répand
tellement peu.
M. Burns: Je n'ai aucune crainte de le dire publiquement. Je l'ai
dit, d'ailleurs, en Chambre, lorsque nous avons examiné les amendements
à la loi, tout en faisant une critique, non pas à votre endroit,
mais à l'endroit du ministre de la Justice qui, d'année en
année, nous ressasse la même sauce.
M. Levesque: J'étais présent.
M. Burns: II nous fait changer le millésime et il essaie
de nous faire avaler cela avec quelques petites modifications ici et là.
Je souhaite toujours le jour où on créera non pas que je
ne suis pas satisfait de ce que nous avons actuellement un
véritable tribunal des loyers, comme c'était d'ailleurs le projet
du ministre de la Justice précédent. J'espère que si
jamais on crée ce tribunal, il aura autant d'efficacité et au
moins aura une permanence claire et nette, bien précise que,
malheureusement, actuellement la Régie des loyers ou la Commission des
loyers n'a pas. Non, je suis...
Le Président (M. Pilote): Le programme 11 est-il
adopté?
M. Burns: Je suis prêt à l'adopter, tout en
demandant, avant de l'adopter, au ministre s'il a l'intention, encore une fois,
cette année, de nous revenir au mois de décembre avec un
changement de millésime de cette fameuse loi.
M. Levesque: Ce n'est sûrement pas désiré de
la part de celui qui vous répond à ce moment-ci.
Contentieux pénal
Le Président (M. Pilote): Adopté. Le programme 12.
Contentieux pénal.
M. Burns: Pour lecontentieux pénal, je pose la même
question de la liste que j'ai posée relativement au programme 10.
M. Levesque: C'est celle-là dont on a parlé.
M. Burns: Est-ce qu'il sera possible d'avoir en termes de
pourcentage le nombre de causes confiées à des avocats de
pratique privée en matière pénale par des avocats du
ministère? Je m'excuse, à cette heure-ci, je commence à me
mêler dans mes mots, en termes de pourcentage, le nombre de causes
confiées à des avocats de pratique privée par rapport au
nombre de causes dans une période donnée confiées à
des avocats du ministère. Est-ce possible d'avoir cela en termes de
pourcentage? Donc, une espèce d'approximation. Je ne vous demanderai un
chiffre très précis, mais est-on capable d'évaluer la
proportion de l'un à l'autre?
M. Levesque: C'est seulement au ministère du Revenu que
des avocats plaident des causes pénales. En dehors de cela...
M. Burns: Les avocats du contentieux criminel, chez vous, ne
plaident pas de cause.
M. Levesque: Je ne parle pas du criminel, on parle du
pénal.
M. Burns: Du pénal, oui, excusez. M. Levesque:
Non.
M. Burns: C'est criminel.
M. Levesque: C'est la pratique privée.
M. Bums: Cela relève du solliciteur, l'aspect des
procureurs de la couronne, c'est ce que vous voulez dire.
M. Levesque: Oui.
M. Burns: Je ne parle pas de cela. Des avocats du contentieux
pénal au ministère de la Justice, il n'y en a pas qui
plaident.
M. Levesque: Ce sont presque tous des avocats de pratique
privée.
M. Burns: Tous de pratique privée.
M. Levesque: On a quelques permanents à la Cour du
bien-être social, à Montréal, Québec et
Trois-Rivières. En dehors de cela, ce sont des mandats confiés
à...
Le Président (M. Pilote): L'article 12 est-il
adopté?
M. Burns: L'article 12 est adopté.
Le Président (M. Pilote): Le programme 13, contentieux
criminel. Excusez-moi. Pour l'intelligence du journal des Débats, les
programmes, éléments, supercatégories et catégories
du ministère de la Justice sont-ils adoptés?
M. Levesque: Adopté.
M. Burns: Adopté. Comme tout le monde le sait, on vient
d'adopter les programmes 1 à 12, mais les programme 13 à 19
étaient déjà. 19 ou 18?
M. Levesque: De 13 à la fin.
M. Burns:... étaient adoptés avec le Solliciteur
général. Je suis prêt, si vous voulez mettre le dossier
clair que nous adoptions...
Le Président (M. Pilote): Les programmes du
ministère de la Justice, de 1 à 19 inclusivement, sont-ils
adoptés?
M. Burns: Adopté.
Le Président (M. Pilote): Je vous remercie, messieurs.
M. Levesque: Je vous remercie M. le Président, je remercie
le député de Maisonneuve, tous les membres de la commission d'une
façon particulière, ce soir, pour cette veillée qu'on a
accepté de faire et tous ceux qui nous accompagnent ce soir, autour de
cette table et qui nous ont suivis au cours de notre périple. A tous, un
sincère merci.
Le Président (M. Pilote): La commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 2 h 46)