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Commission permanente de la justice
Etude du projet de loi no 41
Séance du mercredi 11 août 1976
(Quinze heures quinze minutes)
M. Cornellier (président de la commission permanente de la
justice): A l'ordre, messieurs! La commission parlementaire de la justice
est réunie, aujourd'hui, pour l'étude du projet de loi no 41, Loi
modifiant la Loi de police, la Loi des commissions d'enquête et d'autres
dispositions législatives, dont le principe a été
adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture. Le
but, l'objectif de la commission serait normalement d'étudier maintenant
le projet de loi article par article. Il y a eu cependant des ententes de
faites. Le ministre pourra expliquer, tout à l'heure, les ententes qui
ont été agréées.
Avant d'entamer le dialogue, j'aimerais mentionner certains changements
à la liste des membres permanents de la commission. M. Côté
(Matane) remplace M. Bienvenue (Crémazie), M. Brown (Brome-Missisquoi)
remplace M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Lachance (Mille-Iles) remplace M. Levesque
(Bonaventure), M. Denis (Berthier) qui doit se joindre à nous
tantôt remplacera M. Sylvain (Beauce-Nord). Il y aurait lieu maintenant
de nommer un rapporteur de la commission.
M. Lachance: Le député d'Anjou.
Le Président (M. Cornellier): C'est
agréé?
Des Voix: Agréé.
Le Président (M. Cornellier): Le député
d'Anjou agira comme rapporteur de la commission. Je cède
immédiatement la parole au Solliciteur général.
Préliminaires
M. Lalonde: M. le Président, comme vous le disiez au
début de cette réunion, la commission parlementaire de la justice
s'est réunie pour l'étude article par article de la loi no 41.
Cette loi a déjà été adoptée en principe par
l'Assemblée nationale, l'étape de la deuxième lecture a
été franchie. Cette loi contient une multitude de dispositions
tout à fait particulières qui s'adressent a des clientèles
spécifiques dans le domaine de l'administration de la justice et plus
particulièrement dans le domaine policier. Avant d'étudier
article par article chaque disposition de cette loi, il nous est apparu
désirable à la suite de représentations qui ont
été faites par divers groupements, de les entendre, non pas comme
on le fait lors de l'étude d'un projet de loi ou d'un document d'une
question ouverte à tout le public ayant donné lieu, par exemple,
à la publication d'un avis dans la Gazette officielle, comme le
règlement le prévoit quand on examine un projet de loi
après la première lecture, mais de façon exceptionnelle et
dans le but d'ob- tenir, de représentants de groupes, de
clientèles tout à fait spécifiques, des points de vue qui
pourraient éclairer la commission et ses membres dans le but de
légiférer de la façon la plus réaliste et la plus
efficace possible.
Nous avions eu, déjà, des échos de divers groupes
au moment de l'examen du projet de loi, lors du débat de deuxième
lecture. Nous avons aussi reçu quant à moi j'en ai
reçu des remarques, des suggestions de divers autres groupes,
certains qui ont demandé à être entendus, d'autre non, de
sorte que j'aimerais aussi ajouter, naturellement, que cette procédure
est exceptionnelle et demande le consentement unanime des membres de la
commission pour qu'on puisse le faire. C'est ce que je vais proposer aux
membres de cette commission tantôt, d'entendre des représentants
de l'Union des conseils de comté, de l'Association des policiers
provinciaux du Québec, de la Fédération des policiers, de
l'Association des chefs de police et pompiers de la province de Québec,
de l'ABRPM, l'Association de bienfaisance et de retraite de la police de
Montréal, de la CUM, la Communauté urbaine de Montréal, et
du Barreau du Québec.
Il est possible, M. le Président, qu'à la suite de
l'audition de l'un ou de l'autre des représentants des groupements, il
apparaisse désirable à la commission d'entendre quelqu'un
d'autre. Je pense qu'on peut laisser au jugement de la commission de
décider dans chaque cas. Par exemple, en ce qui concerne le Barreau,
j'ai demandé à la CECO de déléguer un
représentant qui pourrait, à titre non pas de représentant
du public mais de conseiller expert, je dirais, en matière
d'enquête sur le crime organisé, puisque, d'après les
représentations du Barreau faites publiquement, jusqu'à
maintenant, il s'agit de la question dont le Barreau veut traiter plus
spécifiquement... Donc, j'ai demandé à la CECO d'envoyer
un représentant. Je pense que Me Dagenais, le procureur chef de la CECO,
est ici, à la disposition de la commission.
A la suite de représentants de la CUM, y aurait-il lieu, aussi,
d'entendre des représentations ou des remarques de la part du conseil de
sécurité? C'est fort possible. Mais, essentiellement, j'aimerais
qu'on s'en tienne à ces groupements qui représentent des
clientèles et des groupes de personnes, surtout de policiers dans le
cadre de l'APPQ, de la Fédération des policiers, de l'Association
des chefs et la BRPM, qu'on s'en tienne à ceux-là puisqu'au fond
il ne s'agit que de discuter de modalités après l'adoption en
principe du projet de loi en deuxième lecture.
C'est ce que je propose à la commission à ce stade-ci.
J'aimerais savoir ce que les membres de la commission en pensent.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Maisonneuve.
M. Burns: M. le Président, je serais, je crois,
très malvenu de m'opposer à la suggestion qui est faite par le
Solliciteur général puisque, sans vou-
loir me péter les bretelles outre mesure, c'est à la
demande de l'Opposition officielle qu'actuellement cette commission se tient et
on n'a qu'à se référer aux débats du 29 et du 30
juin dernier pour se rendre compte que l'Opposition était même
prête, si le gouvernement n'acceptait pas d'entendre un certain nombre de
parties intéressées par ce type de projet de loi, et, dans des
conversations in camera avec les représentants du gouvernement, je
l'avais annoncé, à faire une obstruction systématique au
projet de loi.
Jusqu'à maintenant, on s'est rendu, et j'en remercie le
Solliciteur général, à notre demande d'entendre des
parties, sauf que je ne voudrais pas, à ce stade-ci qu'on soit trop
restrictif quant aux personnes et aux groupements intéressés qui
pourraient vouloir se faire entendre. Je m'explique là-dessus. Il n'y a
aucun doute, M. le Président, qu'en vertu des dispositions de notre
règlement et plus particulièrement de l'article 154 de notre
règlement, nous en sommes rendus au stade de l'examen en commission
parlementaire du projet de loi article par article. Il n'y a aucun doute
qu'à ce stade on fait tout simplement franchir au projet de loi une
étape additionnelle vers son adoption définitive qui se conclura
par la troisième lecture et par la sanction du
lieutenant-gouverneur.
Mais comme il s'agit dans notre esprit d'un projet de loi qui est
tellement intimement lié aux droits fondamentaux, aux libertés
civiles des gens du Québec, il me paraît qu'on ne devrait pas, de
façon très rapide et de façon un peu sommaire, mettre de
côté les opinions de personnes qui, à l'intérieur de
la société québécoise, auraient des choses à
nous dire relativement au projet de loi no 41. Je m'explique là-dessus.
Je n'ai pas à élaborer sur le fait que plusieurs des articles,
peut-être pas plusieurs, mais, en tout cas, quelques-uns des articles de
ce projet de loi, mettent carrément de côté les
dispositions de la charte des droits de l'homme du Québec ou, si vous
voulez, la charte des libertés civiles ou des libertés de la
personne.
Mis à part ce fait, il y a aussi le fait que, si on arrivait, en
plus du groupe d'organismes intéressés que le Solliciteur
général vient de nous mentionner, si, en plus de ce groupe, il y
avait dans la salle aujourd'hui des gens qui manifestaient l'intention
d'être entendus ou encore qui auraient, à l'endroit du Solliciteur
général, sollicité par voie de correspondance le
désir d'être entendus, il me semble qu'on devrait les entendre.
J'ajoute à cela le fait que la session, en principe, ne doit pas
reprendre avant le 19 octobre à moins qu'encore une fois, on nous
appelle pour une loi spéciale comme cela a été le cas dans
le conflit des infirmières et des établissements hospitaliers, de
sorte qu'il n'y a pas véritablement d'urgence à passer les
étapes de ce projet de loi.
Dans ces circonstances, tout en appuyant la suggestion du Solliciteur
général qu'on entende, de façon exceptionnelle, en vertu
de notre règlement, mais non pas de façon exceptionnelle dans le
cadre d'une certaine logique de l'adoption d'un projet de loi de cette
nature-ci, tout en me montrant d'accord avec cette suggestion, je ne vou- drais
pas qu'on ferme carrément et complètement la porte à
l'audition de parties qui ne sont pas mentionnées dans la liste, soit le
Barreau, l'Association des chefs de police et pompiers, la
Fédération des policiers municipaux, l'APPQ, l'Union des conseils
de comté, la CECO et la CUM. En dehors de cela, s'il y avait des gens
qui étaient ici, qui voulaient se faire entendre et qui en manifestaient
le désir, moi, je serais de ceux qui croiraient qu'il est non seulement
normal, mais qu'il est essentiel qu'on les entende.
Il s'agit quand même et je le rappelle d'un projet
de loi qui chambarde toutes les règles de droit commun en matière
d'audition et d'enquête. A ce titre, je pense qu'on doit mettre toute la
prudence voulue, comme préliminaire, avant d'adopter un tel projet de
loi. Cela ne me répugne pas du tout de siéger une journée
de plus, pour entendre une couple de groupements additionnels, si c'est
nécessaire. C'est dans ce sens, sans faire un amendement à la
proposition du Solliciteur général, que je laisse planer cette
idée, parce que j'aimerais bien, moi, que, sans qu'on fasse des
auditions que malheureusement... Après la première lecture, le
gouvernement n'a pas choisi de faire des auditions publiques; c'est là
qu'il aurait dû le faire plutôt que d'attendre à la
dernière semaine de la session et de se voir littéralement
intimider par l'Opposition pour accepter notre demande de commission
parlementaire.
Je pense qu'il aurait dû, dès après la
première lecture, faire des séances publiques, mais de
façon généralisée à travers le
Québec, en invitant toute partie intéressée, tout
groupement intéressé à venir se faire entendre. Ces
brèves remarques étant faites, M. le Président, je suis
prêt, dès maintenant, à donner mon consentement pour
créer l'unanimité de la commission en vue d'entendre les parties
qui sont déjà mentionnées par le Solliciteur
général, mais aussi pour entendre toute autre partie qui pourrait
éventuellement se manifester aujourd'hui à la commission. A moins
que le Solliciteur général me dise qu'il n'a pas reçu de
demande directement de cette nature, moi, je n'en ai pas reçu en tout
cas comme critique officiel de l'Opposition ou comme critique de l'Opposition
officielle en matière de justice; je n'ai pas reçu de telle
demande ou de copie de telle demande, je ne suis donc pas en mesure de vous
dire s'il y a d'autres personnes qui voudraient se faire entendre. Mais si le
Solliciteur général pouvait me répondre qu'il a
reçu d'autres demandes de la part de parties ou de groupements autres
que ceux qui sont mentionnés, cela pourrait peut-être nous
éclairer dès le départ. Je ne veux cependant pas, à
ce stade-ci, priver de son droit de réplique le chef de l'Union
Nationale.
M. Choquette: Ah, ah, ah! du chef du Parti national
populaire.
M. Burns: Je m'excuse, parce que là on ne le sait
plus.
M. Choquette: Je tiens à être bien clair, le Parti
national populaire.
M. Burns: Bon! Le Parti national populaire. En tout cas, je ne
veux pas commencer une bataille politique entre le chef du Parti national
populaire et le Solliciteur général. En tout cas, j'aimerais bien
tout au moins qu'au cours de cette discussion préliminaire le
Solliciteur général nous donne une réponse relativement au
fait que peut-être d'autres groupements ou d'autres parties
intéressés auraient pu lui faire une demande pour être
entendue à ce stade-ci.
M. Lalonde: Si le député d'Outremont désire
parler maintenant, je pourrai répondre après.
M. Choquette: M. le Président, au moment de la discussion,
en deuxième lecture, de ce projet de loi, j'avais indiqué que
j'étais d'accord avec le et les principes qui y sont contenus. Le
gouvernement a invité, à ce moment-là, deux organismes qui
se sont manifestés au mois de juin et qui voulaient être entendus,
soit le Barreau et la Fédération des policiers du Québec.
Depuis l'époque de la discussion en deuxième lecture, il s'est
ajouté d'autres organismes; je conçois très bien que le
Solliciteur général ait ouvert les portes pour qu'ils soient
entendus devant cette commission, ce à quoi je n'ai aucune espèce
d'objection. Maintenant, il est évident, je pense bien, que dans cet
esprit nous serions très malvenus de fermer la porte à d'autres
organismes qui pourraient manifester leur intention d'apporter leur concours
à l'étude de ce projet de loi.
Alors, M. le Président, il devrait y avoir unanimité sur
cette façon de procéder, sans évidemment que cela ne
constitue, en aucune façon, une intention d'éterniser la
discussion de cette loi qui, d'ailleurs, ne pourrait être adoptée
qu'à la reprise des travaux parlementaires.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable Solliciteur
général.
M. Lalonde: M. le Président, il n'y a pas de formalisme,
à ce stade-ci, dans ce genre de procédure. Alors, à savoir
s'il y en a qui se sont manifestés, oui; j'ai eu, des lettres, par
exemple, de la ville de Montréal, mais sans demande de comparaître
à la commission parlementaire. Je viens d'apprendre que la
Fraternité des policiers de la CUM vient de nous faire parvenir un
mémoire. Si les membres désirent être entendus,
naturellement, je n'ai aucune objection, parce qu'il s'agit justement du
critère que je mentionnais, soit d'une clientèle tout à
fait spécifique qui est touchée directement par des dispositions
de la loi.
Un parti politique municipal s'est manifesté au départ et
a fait des représentations sur deux points particuliers de...
M. Burns: De Montréal? Le RCM?
M. Lalonde: De Montréal. Il n'y en a pas beaucoup en
dehors de Montréal.
M. Burns: Le RCM ou l'Action civique?
M. Lalonde: Pas l'Action civique, le RCM. M. Burns: Ah
bon!
M. Lalonde: Est-ce qu'on a reçu une demande formelle sur
cette question? C'est difficile à dire; je présume que oui; je
présume que les membres seraient intéressés à se
faire entendre. Mais, étant donné qu'il ne s'agit pas d'un groupe
qui représente ou de représentants d'un groupe spécifique
touché par la loi, je ne serais pas tenté d'ouvrir la porte
jusque-là; simplement, parce qu'il faut, à un moment
donné, arrêter quelque part.
Maintenant, si en demandant à ceux qui sont présents ici,
quoique je n'aime pas tellement le critère du député de
Maisonneuve, à savoir ceux qui sont présents ici pourraient
être entendus et ceux qui pourraient venir demain ne le seraient pas.
C'est pour cela.
M. Burns: Je n'ai pas dit cela, j'ai laissé cela ouvert.
Je pense que, tout au cours de nos travaux, la commission pourra toujours
donner son consentement à quelqu'un qui pourra se présenter ici,
mais je ne veux surtout pas qu'on ferme la porte à toute audition autre
que celles qui ont été mentionnées par le Solliciteur
général. C'est ce que je veux dire. En tout cas, si j'ai mal fait
mon message, s'il a été mal véhiculé, je pourrais
le capsuler en disant que je ne veux pas que la commission, tout en donnant son
consentement et je suis d'accord à entendre les organismes
que suggère d'entendre le Solliciteur général, ferme la
porte à toute autre audition parce qu'en cours de route, à ce
moment-là, on pourrait devenir très formaliste et commencer
à dire: Ecoutez, cela n'a aucun sens qu'on déborde ce cadre. Je
conçois d'avance et je le dis, je l'ai d'ailleurs fait comme
préalable tout à l'heure, je dis que je reconnais qu'il s'agit
là d'une procédure exceptionnelle en vertu de nos
règlements, pas exceptionnelle en vertu d'une idéologie de
participation de la population à l'élaboration de nos lois. Cela
n'est pas exceptionnel du tout, même après la deuxième
lecture, mais selon nos règlements actuels, c'est sûr que c'est
exceptionnel que d'entendre les gens après la deuxième lecture,
mais c'est déjà moins pire, si vous me passez l'expression, que
de ne pas les entendre du tout.
Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure. Je
considère que c'est après la première lecture que ces gens
auraient dû être entendus et l'ouverture aurait pu être faite
à ce moment-là à l'endroit de tout le monde, surtout que
le projet de loi ne sera pas adopté demain. Il va être
adopté au mois d'octobre, en principe.
M. Lalonde: Pour revenir aux remarques du député de
Maisonneuve, c'est peut-être excellent pour son métabolisme
politique que de se sentir aussi puissant que d'avoir intimidé le
gouvernement. S'il veut en rester sur cette impression, je suis prêt
à le faire.
M. Burns: D'accord. De toute façon, cela ne
m'empêchera pas de dormir si vous me disiez le contraire.
M. Lalonde: Quand on est un si petit nombre, il faut quand
même compter sur d'autre chose, mais il reste que c'est une
décision du gouvernement de faire ce qu'on fait actuellement,
appuyé par le caucus et ici par tous les autres membres de la
commission. Il n'y a pas de doute que c'est beaucoup plus impressionnant pour
un gouvernement que pour l'Opposition, même fut-elle officielle.
Maintenant, ce que je suggérerais à ce stade-ci c'est de
commencer par ces groupes. On en a sûrement pour au moins la
journée, peut-être si on peut siéger ce soir, la
soirée et demain, mais une bonne partie de la journée aussi et de
considérer à son mérite chaque autre demande qui pourrait
nous être faite par la suite.
Comme je l'ai dit d'ailleurs, j'ai même suggéré pour
deux autres organismes, le Conseil de sécurité ou la CECO, que ce
soit un peu laissé au désir de la commission, si les membres
veulent être éclairés davantage.
M. Burns: En somme, si je comprends bien, on accepte d'entendre
les groupes que vous avez mentionnés, mais on ne ferme pas la porte, si
on trouve utile ou nécessaire, en cours de route, d'entendre tel ou tel
groupe, telle ou telle partie, de les entendre.
M. Lalonde: Oui. Exactement.
M. Burns: C'est de cela que je voulais qu'on s'assure entre nous,
de ne pas fermer la porte sur une demande d'audition qui nous paraîtrait
valable.
M. Lalonde: J'aimerais tout de même qu'on invite tout le
monde à être bref. Le temps de la commission est précieux,
mais la commission se met à la disposition de la population pour
l'écouter aussi longtemps qu'il faudra le faire.
M. Burns: II faudrait aussi dire aux gens que, comme les
règles des commissions, après la première lecture, ne
s'appliquent pas, il n'y a pas véritablement de limite.
M. Lalonde: Non, cela, la commission le fait. C'est une
invitation tout simplement générale.
Le Président (M. Cornellier): Messieurs les membres de la
commission, acceptez-vous cette motion ou cette recommandation du Solliciteur
général afin qu'on puisse entendre des représentants des
sept organismes dont il a donné la liste précédemment?
Des Voix: D'accord. M. Burns: Adopté.
Le Président (M. Cornellier): Adopté à
l'unanimité. J'inviterais donc l'Union des conseils de comté, et
j'inviterais aussi les groupes et les organismes qui viendront se faire
entendre, s'ils ont des mémoires à distribuer, à bien
vouloir en remettre des copies au secrétaire de la commission.
Union des conseils de comté
M. Viau (Pierre): M. le Président, MM. les membres de la
commission, mon nom est Pierre Viau, je suis avocat et je représente
l'Union des conseils de comté du Québec. Je suis
accompagné du président de l'union, M. Jean-Marie Mo-reau. Nous
avons appris, au cours des derniers jours, l'étude en commission
parlementaire du projet de loi no 41.
Ce qui nous a étonnés plus particulièrement
à la lecture de ce projet concerne l'article 25. Cet article modifie
substantiellement les dispositions actuelles de la Loi de police qui
prévoient que toute municipalité de cité ou de ville est
tenue d'établir, par règlement, et de maintenir un corps de
police. Si nous comprenons bien le texte du nouvel article 25, ce nouvel
article aurait pour but de couvrir maintenant toutes les municipalités,
c'est-à-dire que ce qui se limitait autrefois aux villes va maintenant
s'appliquer à toutes les municipalités ayant une population de
plus de 5000 habitants. Nous avons un mandat pour représenter les
municipalités rurales devant vous et nous avons étudié
cette question plus particulièrement samedi dernier au cours d'une
réunion de tous les préfets de la province qui nous ont
donné mandat, à ce moment, de faire les représentations
que nous allons faire ici.
Si nous comprenons bien le texte de la Loi de police, on a
défini, dans la loi, le mot "municipalité". Ce mot couvre toute
corporation municipale, c'est-à-dire qu'un conseil de comté, qui
est une corporation municipale au sens de la loi, de ce fait, serait couvert
par l'amendement. D'autant plus qu'un conseil de comté comme celui de
l'Abitibi, qui doit régir des territoires non organisés, serait
sujet à cette loi et devrait organiser des corps de police dans des
secteurs comme des territoires non organisés où on retrouve des
populations de 20 000 ou de 25 000 habitants.
Ajoutons à ceci que dans les municipalités rurales ou les
municipalités où on retrouve présentement un
développement touristique, la population ou le nombre d'habitants
fluctue considérablement et, de ce fait, si, encore là, nous
comprenons bien le sens de l'amendement, certaines municipalités
pourraient être appelées à organiser un corps de police sur
une base permanente payé par les contribuables fonciers, avec une
population qui fluctue.
Le recensement de 1976 servira certainement de base dans les prochaines
années, ou dans l'année qui vient peut-être même,
pour établir le nombre de 5000 de population, ce qui met en cause non
seulement la politique de fusion villages-paroisses préconisée
par les municipalités rurales.
mais aussi le nombre de municipalités rurales impliquées
par cette loi.
Suivant les vérifications préliminaires que nous avons
faites, à notre connaissance, ni le ministère de la Justice, ni
le Solliciteur général, ni le ministère des Affaires
municipales ne possèdent exactement le nombre de municipalités
directement ou indirectement impliquées par cet amendement, non plus que
le budget qui sera requis pour administrer ce service. Nous estimons que 25
municipalités seront affectées dans un délai
rapproché et que le budget irait chercher dans les $3 millions.
A cet égard, nous suggérons que si on constate que le
nombre de policiers provinciaux affectés à la protection des
petites municipalités est insuffisant, il est bien évident que
nous ne voulons en aucune façon négliger la protection des
populations et de leurs biens, mais nous pensons que le gouvernement devrait
voir à augmenter le nombre de cadres dans ces effectifs et, à ce
moment-là, toute la population qui bénéficie de ce service
serait appelée à en défrayer le coût, non seulement
le propriétaire foncier.
Un seul point en terminant. Je pense qu'on doit aussi considérer,
quand on parle de municipalités à faible population, qu'on parle
généralement de municipalités qui ont un vaste territoire.
Quand on parle d'une population de 5000 dans un quartier urbain, c'est tout
à fait différent que de protéger une population de 5000
dans un territoire rural qui peut être vaste. Dès qu'on
crée ce service, comme vous le savez fort bien, la municipalité
encourt une responsabilité de bien protéger tous ses citoyens sur
le budget du propriétaire foncier.
Ce que nous disons à ce moment-ci, c'est qu'à moins que
l'on veuille aider les petites villes de moins de 5000, qu'on l'indique, sinon,
il nous semble que c'est une disposition qui devrait faire l'objet
d'études beaucoup plus sérieuses, études qui n'ont jamais
été soulevées ni en commission, au niveau des affaires
municipales, ni devant les municipalités avant que le bill ne soit
déposé.
Maintenant, le président de l'Union a deux mots à ajouter
là-dessus et ensuite, je pense que nous pourrons répondre aux
questions que vous aurez sur cet article. Notre intervention se limite à
cet article 25.
M. Moreau (Jean-Marie): Tout ce que j'aurais à ajouter, M.
le Président, c'est que samedi dernier, il y a eu une assemblée
des préfets de tous les comtés municipaux du Québec et il
y a eu une résolution dans ce sens. Je pense bien que Me Viau a bien
expliqué, très clairement, la position des municipalités
rurales face à ce projet de loi, en ce qui concerne les
municipalités de 5000 habitants et plus.
Il n'est pas question, dans ce domaine, que nous voulions que les
municipalités soient mal protégées au point de vue
policier. Il n'est pas question de cela. Si le gouvernement croit que les
populations rurales sont mal protégées présentement et
qu'il est nécessaire, qu'il est impératif d'augmenter les
effectifs de la Sûreté du Québec, je pense bien qu'il n'y a
personne qui aura d'objection à cela. C'est la responsabilité du
gouvernement de le faire. Je pense bien que cela doit être
défrayé, en ce qui concerne les municipalités de faible
population, par les fonds généraux de la province.
On s'entend bien que tout citoyen a le droit d'être
protégé. Du fait qu'il est citoyen du Québec, il a droit
à une protection policière. Mais il reste qu'il y a des
municipalités, comme M. Viau l'a expliqué tout à l'heure,
qui, l'hiver, ont une population d'environ 125 ou 200 personnes, à
vocation particulièrement touristique, mais qui, l'été,
ont 10 000 de population.
Alors, est-ce qu'on va obliger les propriétaires de biens-fonds
de défrayer un coût minimal pour un corps de police de $125 000
par année pour une population qui est flottante l'été de
7000, 8000 à 10 000 de population. Je pense que c'est très
important, il faudrait qu'un moment donné on regarde cela de près
avant de se prêter à cela.
Maintenant, il y a aussi les conseils de comté, parce qu'on parle
de municipalités. Bien, une municipalité de comté, tous
les comtés, à ce moment, si on accepte la loi au pied de la
lettre, seraient tenus d'avoir des corps de police parce que des comtés
de 15 000 habitants, ce n'est pas rare.
M. Lalonde: Merci MM. Viau et Moreau. J'aurais peut-être
quelques éclaircissements à apporter et aussi quelques questions.
Je vais commencer par les questions. De combien de municipalités
parlez-vous, quand vous mentionnez: Un certain nombre de municipalités
qui seraient touchées par cet article tel qu'il est rédigé
et dont la population... Je présume qu'il s'agit de municipalités
ayant une population de 5000 habitants au moins, mais qui seraient
disséminés sur un grand territoire, enfin, pour prendre un des
exemples que vous mentionnez là. Est-ce que vous avez une idée du
nombre?
M. Moreau: II n'y a pas eu d'énumération de faite,
d'étude sérieuse mais je suis persuadé que c'est au moins
20 à 25 municipalités, si on exclut les comtés.
M. Lalonde: Oui.
M. Moreau: Si on n'exclut pas les comtés dans la loi,
c'est 71 municipalités tout de suite en partant.
M. Lalonde: Qui ont 5000 habitants.
M. Viau: C'est-à-dire qu'un comté constitue une
municipalité d'après la loi, il y en a 71. Or, si on laisse le
texte tel qu'il est là, cela couvre les 71, plus 25 municipalités
environ, et 25 municipalités de 5000 et plus, ou soit juste sur la marge
de 5000, et qui, après la prochaine énumération, ou
après une fusion en village paroisse, vont automatiquement monter
au-dessus de 5000. Alors, on est dedans, à ce moment.
M. Lalonde: Maintenant, au niveau des éclaircissements, je
veux mentionner quand même que le droit à la dispense qui existe
actuellement dans la loi existe aussi dans le projet de loi à l'article
25, c'est-à-dire qu'une municipalité qui aurait un
problème à organiser son corps de police, soit à cause de
la démographie, de l'étendue de son territoire ou pour toutes
sortes de raisons, pourrait s'adresser, comme les municipalités de
cité ou de ville peuvent le faire et le font actuellement, de
façon régulière, au lieutenant-gouverneur en conseil pour
être dispensée. Comme dans le passé, c'est la Commission de
police qui examinequoique cela ne soit pas une procédure
formellement prévue par la loi les cas, cas par cas, et fait ses
recommandations au gouvernement. Donc, cette soupape existe encore.
Maintenant, le gouvernement, en déposant ce projet de loi, a
décidé de choisir un critère, le critère de
population, et fait naturellement changement sur le passé. Avant le
critère, c'était la nature de l'organisation municipale, et
c'était quoi? C'était une municipalité de cité ou
de ville. Or, on a des municipalités de cité ou de ville de moins
de 5000 habitants comme on a des municipalités de plus de 5000
habitants. Par exemple, vous avez actuellement 37 municipalités de
cités et villes qui ne maintiennent pas de corps de police, cinq d'entre
elles seulement ont une population de plus de 5000 habitants, ce sont
Percé, Gaspé, Sainte-Anne-des-Monts, Val-Bélair et
Bécancour. Vous avez aussi cinq municipalités, au sens du code
municipal, de 5000 habitants ou plus, qui ne maintiennent pas de corps de
police. Alors, il nous semble que le critère, jusqu'à maintenant,
tenait peu compte des besoins de la population et des capacités de la
population de s'organiser. C'est pour cela que nous avons proposé un
critère de population plutôt qu'un critère de
l'organisation municipale.
Maintenant, pourquoi 5000? On pourra en discuter, ce n'est pas sur le
nombre lui-même que vous vous posez des questions, quoiqu'il va falloir
en discuter ici lorsqu'on arrivera à cet article.
Alors, ce sont les réponses que j'ai à vous apporter
maintenant. Je prends note naturellement de votre question à savoir:
Est-ce que cela comprend toute municipalité de comté? Il n'est
pas défini ici le terme "municipalité".
M. Viau: C'est-à-dire qu'il est défini dans la Loi
de police, mais comme c'est un amendement à la Loi de police, il faut
prendre les termes de la Loi de police.
M. Lalonde: Dans la Loi de police, oui. Oui, mais le projet de
loi n'a pas une définition différente.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Maisonneuve.
M. Burns: Si je vous comprends bien, Me Viau et M. Moreau, votre
réticence à l'endroit de l'article 25, qui amende l'article 52,
qui remplace, à toutes fins pratiques, l'article 52 de la Loi de police,
se situe à deux niveaux. Si j'ai tort, j'aimerais que vous me corrigiez.
Elle se situe d'abord à l'endroit des municipalités qui,
actuellement, n'ont pas de corps de police et qui sont au-dessus de la norme de
5000, qui, par la loi, seraient normalement forcées, à moins de
dispense du lieutenant-gouverneur en conseil, d'en établir un, et elle
se situe également, de façon négative, je pense, à
l'endroit des corps de police de moins de 5000 qui, craignez-vous...
M.Viau: Non.
M. Burns: ... là, peut-être que je vous
interprète, c'est ce que je veux que vous me précisiez,
peut-être que je vous interprète, craignez-vous que les
municipalités de moins de 5000, qui sont autorisées à en
avoir, se voient peut-être privées des services de la
Sûreté du Québec? Est-ce cela votre inquiétude ou
non?
M. Viau: Non. Nous n'avons pas de mandat pour représenter
les villes devant vous, à tout événement. Les villes de
moins de 5000 feront les représentations qu'elles jugeront à
propos. Ce que nous disons, c'est que, si on part avec un barème comme
celui-là, il nous semble, nous, qu'il n'y a pas d'étude assez
poussée maintenant pour savoir quel sera l'impact budgétaire de
cela. Qu'on laisse aux villes de moins de 5000 le choix de s'organiser un corps
de police, cela va, si elles veulent le faire.
M. Burns: Pas de problème.
M. Viau: Nous disons que, présentement, si on
établit ce barème, il n'y a pas d'étude, à notre
connaissance, qui aurait été faite pour voir l'impact
budgétaire de cette disposition auprès de chacune des
municipalités. Deuxièmement, nous pensons aussi, suivant les
chiffres que nous possédons, qu'un corps de police, dans une
municipalité de 5000, 6000 ou 7000 de population, c'est en partant un
budget de $125 000 par année. Peut-être qu'il y aurait d'autres
moyens de solutionner cela. Nous avions proposé des fusions
village-paroisse pour créer des unités peut-être un peu
plus importantes. Peut-être aussi pourrions-nous parler des effectifs de
la Sûreté du Québec et peut-être aussi parler d'un
mécanisme plus facile d'entente entre les municipalités pour
régler ces cas, mais nous ne connaissons pas d'étude
gouvernementale précise là-dessus.
Avant de prendre position, et, à première vue, nous
pensons qu'il y va là d'un budget, qui se chiffrerait annuellement
autour de $3 millions pour les municipalités rurales.
Quant aux municipalités de moins de 5000, si elles veulent
organiser un corps de police, tant mieux. Si elles ne veulent pas, il me semble
qu'on ne devrait pas les forcer.
M. Burns: D'ailleurs, c'est ce que le texte de l'article 25 nous
dit. Elles ne sont pas forcées, en bas de 5000...
M. Viau: Exactement.
M. Burns: ... mais elles sont autorisées à le
faire. Si je vous comprends bien, je répète encore ma question,
mais avec la précision que vous venez de me donner, vous n'êtes
pas prêt à nous suggérer un amendement à l'article
52 ou à l'article 25 qui remplace l'article 52, mais vous êtes
plutôt favorable à mettre de côté cette disposition
jusqu'à ce qu'on ait des réponses précises.
M. Viau: C'est-à-dire que si on veut aider les petites
villes de moins de 5000, qu'on laisse le texte comme il était avant en
parlant de villes et qu'on ajoute le barème de 5000 si on veut aider les
villes de moins de 5000, mais qu'on ne force pas les municipalités de
moins de 5000. Pourquoi utiliser ce barème de 5000 avant, à
moins, que, dans les ministères provinciaux, on ait une idée de
l'impact réel?
M. Burns: Est-ce que vous avez une suggestion?
M. Viau: Que le texte actuel reste tel quel et qu'on
étudie de façon un peu plus sérieuse cette question pour
voir quel sera l'impact budgétaire d'une telle décision.
M. Burns: Vous suggérez de maintenir le texte actuel de
l'article 52?
M. Viau: Oui. M. Burns: Et...
M. Viau: Si vous voulez ajouter une population...
M. Burns: ... tant et aussi longtemps que l'impact
budgétaire n'aura pas été véritablement
jaugé et établi.
M. Viau: Certainement. Je ne pense pas même qu'au
ministère des Affaires municipales on ait une idée bien
précise de l'impact budgétaire. Je me demande si dans d'autres
ministères on a une idée précise de l'impact
budgétaire d'une telle disposition pour les municipalités. C'est
ce qui nous inquiète.
M. Moreau: Est-ce qu'il y a eu de la part des
municipalités de 5000 et plus régies par le Code municipal des
demandes pour avoir des corps de police ou est-ce qu'il est prouvé que
dans la population il y a un manque d'ordre et de discipline parce que dans ces
municipalités il n'y a pas de corps policier?
Je pense qu'il y a des choses qu'il faut savoir, il faut absolument
qu'il y ait des études, des données qui soient établies en
ce qui concerne l'obligation d'avoir un corps policier. C'est bien beau d'avoir
un budget de $3 millions puis de dire: On va dépenser cela pour
protéger le citoyen. Je suis entièrement d'accord avec cela, mais
il faut avoir la preuve que cela va être dépensé à
bon escient, que ce service est nécessaire.
M. Lalonde: Pour vous donner un certain nombre de données
qui correspondent assez peu à celles que vous me donniez tantôt,
je voudrais revenir là-dessus. En excluant les municipalités de
comté, en admettant qu'on pourrait les exclure, on resterait avec cinq
municipalités au sens du Code municipal de 5000 habitants ou plus qui ne
maintiennent pas de corps de police. Vous avez Ascott, Notre-Dame-des-Prairies
près de Joliette, Saint-Louis-de-Terrebonne, Témiscamingue qui
fait partie du Nord-Ouest, un immense territoire et Côte-Nord du golfe
Saint-Laurent, aussi un immense territoire. Ces municipalités ont 5000
habitants ou plus.
M. Viau: Et Contrecoeur, Verchères?
M. Moreau: II y a aussi Contrecoeur qui a 5000 habitants.
Verchères...
M. Lalonde: Pas d'après le recensement auquel il faut
se... non mais, quand même, la loi prévoit qu'on doive s'en
reporter au recensement.
M. Moreau: C'est la preuve, M. le Président, qu'il n'y a
pas eu d'étude profonde de faite, parce que je vais vous nommer des
municipalités autour de Montréal et on dépassera largement
le nombre de cinq. Vous avez dans la province de Québec, à
l'exception des conseils de comté, au moins vingt municipalités
qui dépassent 5000 habitants, d'autre part, vous avez des
municipalités qui, au cours de l'hiver, n'ont pas 5000.
M. Lalonde: Là on ne parle que de la population
résidente naturellement.
M. Moreau: II y en a plusieurs. Qu'est-ce que vous allez faire de
ces municipalités, on ne le sait pas présentement, les
municipalités qui vont tripler de population durant
l'été?
M. Lalonde: II s'agit, dans cette disposition, de forcer les
municipalités à avoir des corps de police. Alors quand vous nous
demandez: Qu'est-ce que vous allez faire? on ne les forcera pas, parce que si,
pour prendre votre exemple, vous avez une municipalité de 200 ou de 225
habitants et durant l'été cela remonte à 10 000, on ne
peut pas prendre la population touristique comme fondement. Naturellement,
peut-être que la municipalité va penser qu'il serait bon d'avoir
un certain nombre de policiers pour maintenir l'ordre, mais la loi ne
prétend pas régler ce problème. Quant aux
municipalités de moins de 5000 habitants, ici, on doit s'en rapporter au
dernier recensement, on voit qu'il y a 75 municipalités de cités
et de villes qui maintiennent un corps de police, naturellement parce que dans
le passé, la loi prévoyait que ces municipalités, quel que
soit le nombre d'habitants, devaient maintenir un corps de police à
moins qu'elles aient des dispenses. Il y en a eu des dispenses.
II y a 23 municipalités au sens du Code municipal, donc de moins
de 5000 habitants, qui maintiennent aussi un corps de police.
M. Moreau: M. le Président, on n'a pas d'objection
à ce qu'une municipalité qui a moins de 5000 habitants ait un
corps de police. Si une municipalité, si un conseil municipal juge
à propos que dans les limites de cette municipalité il est
nécessaire d'avoir un corps de police, on n'a aucune objection à
cela. Mais qu'on n'aille pas traiter tout le monde selon ce même dossier.
Il y a des endroits, moi je suis persuadé que... D'ailleurs dans la
municipalité qui a un corps de police, cela n'empêchera pas les
petits gars d'aller sonner aux portes, puis d'aller cogner contre les
vitres.
Il y a des municipalités qui ont besoin de policiers. On est
d'accord avec cela, mais il y en a d'autres qui n'en ont pas besoin. Alors je
ne vois pas pourquoi... je pense bien qu'au niveau des municipalités,
les conseils municipaux savent très bien que dans certains milieux,
c'est nécessaire d'avoir un corps de police, puis ils en ont
effectivement. D'ailleurs vous dites vous-même que vous avez des
municipalités qui ont moins de 5000 et qui ont des corps de police.
C'est donc dire qu'à ce moment-là, sans l'obligation, le conseil
municipal de l'endroit dit: Je pense bien que c'est nécessaire d'avoir
un corps de police chez nous; mais il y a d'autres municipalités pour
lesquelles ce n'est pas nécessaire.
M. Lalonde: Cela défait un peu votre argument. Les
chiffres que j'ai montrent que ce n'est pas tellement contraignant si nous
n'avons que cinq municipalités au sens du Code municipal qui ont plus de
5000 habitants qui seraient assujetties à ce genre de disposition, dont
deux ont un territoire immense qui me semblent présenter des
caractères démographiques et géographiques qui pourraient
facilement justifier une dispense par exemple. Je sais que toutes les
municipalités ne présentent pas les mêmes
caractères, c'est pour cela que la dispense qui est laissée au
lieutenant-gouverneur en conseil vient justement rendre justice là
où il n'y en a pas, où un traitement différent est
justifié.
Il faut bien comprendre que l'article 25 ne prétend faire qu'une
chose: c'est de changer le critère. Ce qu'on dit, nous, d'après
les études qui ont été faites naturellement, il n'y
a pas eu d'étude publique, c'est une étude faite à la
direction générale de la sécurité publique au
ministère de la Justice et aussi par des échanges avec le
ministère des Affaires municipales ces études
démontrent que le critère de la population est beaucoup plus
acceptable que le critère de l'organisation municipale elle-même.
Il me semble que, fondamentalement, cela a du sens.
A savoir est-ce que c'est 5000, 10 000, 8000 ou si c'est 4000, c'est une
autre question, mais ce n'est pas la question que vous soulevez et on en
discutera ici à un autre moment. Votre doute à savoir si cela
touche aux municipalités de comté me semble valide et,
d'après la définition qu'on retrouve, cela toucherait
probablement les munici- palités de comté; ce n'est pas
l'intention, il me semble, et c'est possible qu'on ait un amendement à
apporter à la commission parlementaire à ce propos.
M. Burns: Est-ce que vous annoncez un amendement?
M. Lalonde: Non, mais nous discutons, nous échangeons des
propos.
M. Burns: Mais cela pourrait peut-être répondre
à...
M. Lalonde: Oui, c'est pas mal cela, mais, quand même, il y
a un processus à suivre.
M. Burns: Vous voulez dire qu'il y a de bonnes chances qu'il y
ait un amendement.
M. Lalonde: Oui, il y a de bonnes chances qu'il y ait un
amendement là-dessus.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député d'Outremont.
M. Choquette: M. le Président, sous un autre aspect
pas celui soulevé par le groupe qui est devant nous combien de
municipalités, en vertu du changement de critère qui serait
maintenant adopté, sont maintenant exonérées de
l'obligation de maintenir un corps de police, alors qu'elles en maintiennent
un? Et là, je me situe au niveau des critères, pas
nécessairement au niveau de la situation de fait.
M. Lalonde: II y aurait les 75 municipalités de
cités et villes que j'ai mentionnées tantôt...
M. Choquette: Oui.
M. Lalonde: ... qui ont moins de 5000 habitants.
M. Choquette: Plus les 23 municipalités, en vertu du Code
municipal.
M. Lalonde: Plus les 23, en vertu du Code municipal; cela ferait
98 dont plusieurs corps sont composés d'un ou de deux policiers.
M. Choquette: Ces 75 municipalités, en vertu de la Loi des
cités et villes, et ces 23 municipalités, en vertu du Code
municipal, sont toutes des municipalités de moins de...
M. Lalonde: De moins de 5000 habitants, c'est pour cela qu'elles
sont dispensées.
M. Choquette: De moins de 5000 habitants et c'est en vertu de
cela qu'elles seraient dispensées de leur obligation.
M. Lalonde: D'ailleurs, il y a des représentations qui
nous ont été faites à ce propos. Je suis sûr que M.
Marcil de la fédération ne manquera
pas de nous entretenir là-dessus, lorsque son tour sera venu.
M. Choquette: Les corps de police des 75 municipalités, en
vertu de la Loi des cités et villes, ce sont des corps de police de
combien de membres, à peu près?
M. Lalonde: Dans beaucoup de cas, ce sont de petits corps de
police, naturellement, il n'y a pas de corps de police très
considérable dans aucun de ces cas, puisqu'il s'agit de population de
moins de 5000 habitants. Mais, je n'ai pas le nombre total de policiers que
cela peut toucher; certains parlent de 400, à peu près. Un calcul
que je vois ici, justement, totalise 399 policiers.
M. Choquette: Comprenant les 75 municipalités et les
23.
M. Lalonde: Oui. Dans les 75 municipalités de cités
et villes totalisant 260 000 habitants, à peu près, il y aurait
337 policiers, d'après le calcul que nous avons cela a pu
être changé dernièrement et, dans les 23
municipalités du Code municipal totalisant 48 000 habitants, il y aurait
62 policiers, pour un grand total d'environ 400 policiers.
M. Choquette: Merci.
Le Président (M. Cornellier): Y a-t-il d'autres questions
à poser aux représentants de l'Union des conseils de
comté? Alors, M. Moreau, Me Viau, nous vous remercions.
M. Moreau: Me permettez-vous d'ajouter ceci?
Le Président (M. Cornellier): Certainement, M. Moreau.
M. Moreau: Je pense qu'une loi comme celle-là ralentirait
certainement les processus de fusion de villages et de paroisses, parce que la
municipalité qui se verrait c'est un motif valable dans
l'obligation, une fois fusionnée, d'avoir un corps de police, cela
enlèvera pas mal d'"incentive" de fusion pour les municipalités
de villages et de paroisses. Cela, c'est un fait.
Maintenant, comme conclusion, je vous remercie de nous avoir entendus
et, personnellement, si j'étais le gouvernement, je pense que je ferais
confiance aux municipalités qui savent certainement, très
certainement, si elles ont besoin d'un corps de police, si c'est une
nécessité ou si ce n'en est pas une. Chaque fois qu'on
décide au niveau du lieutenant-gouverneur, c'est de la centralisation de
pouvoirs; je fais confiance aux municipalités qui sont capables de
prendre des décisions dans ce domaine. C'est ce que je voulais
ajouter.
M. Lalonde: M. Moreau, avant de terminer, j'aimerais vous
remercier d'être venu nous adresser vos propos; par le biais de ces
remerciements, je voudrais en profiter pour remercier tous ceux qui sont venus,
qui se sont déplacés. Quant à l'effet de dissuasion que
vous mentionniez, je pense que votre argument est très valide et qu'il y
aurait peut-être lieu de penser à un processus de transition lors
d'une fusion qui dispenserait pour une période de temps. Ce n'est pas
non plus un amendement que j'annonce, mais je veux simplement dire que je vous
remercie d'avoir soulevé ce point, que ce n'est sûrement pas le
but de cette disposition que de décourager les fusions qui souvent sont
faites dans la totalité des cas dans l'intérêt et pour le
bénéfice des populations qui résident dans ces
municipalités, et il y aurait peut-être lieu de penser à
une disposition qui empêcherait cet effet de dissuasion de se
réaliser dans la vérité.
Le Président (M. Cornellier): Messieurs, je vous remercie.
J'inviterais maintenant les représentants de l'APPQ, l'Association des
policiers provinciaux du Québec. Alors, messieurs, si vous voulez bien
vous identifier?
Association des policiers provinciaux du
Québec
M. Richard: Raymond Richard, président de l'Association
des policiers provinciaux du Québec. A ma gauche, le
vice-président, M. Jean-Marie Bouchard, et, à ma droite, notre
procureur, Me Laurian Barré.
Le Président (M. Cornellier): Messieurs, pourriez-vous
vous déplacer d'une couple de chaises, s'il vous plaît?
M. Richard: Nous avons soumis un mémoire qui est en voie
d'être distribué. Le projet de loi no 41, par les divers
amendements qu'il apporte à la Loi de police, concerne d'une
façon particulière les diverses structures policières au
Québec, dont celles de la Sûreté du Québec.
C'est ainsi que l'Association des policiers provinciaux du
Québec, qui regroupe 4000 membres à travers la province, entend
vous soumettre ses représentations notamment sur certains aspects de
régie interne à la Sûreté du Québec et sur le
rôle de ce corps de police dans le contexte envisagé par ce projet
de loi.
Enquête et procédure disciplinaire. Les membres de la
Sûreté du Québec, comme ceux de la plupart des corps de
police, sont régis par un code de discipline ou de déontologie.
Le nouveau code régissant les membres de la Sûreté, connu
sous le nom de "Dispositions relatives à la conduite des membres de la
Sûreté du Québec," doit incessamment entrer en vigueur,
soit dès qu'il aura reçu l'approbation du lieutenant-gouverneur
en conseil.
Ce code édicte les différentes infractions de nature
disciplinaire, la procédure à suivre à l'égard des
membres concernés et énumère les sanctions applicables aux
divers cas d'infraction. Une procédure spéciale y est d'ailleurs
prévue concernant les plaintes provenant de l'extérieur des
cadres de la Sûreté.
Article 18. L'article 18 du projet de loi qui mo-
difie l'article 24 de la Loi de police prévoit diverses
catégories de sanctions pouvant être recommandées par la
Commission de police. Ceci pose plusieurs difficultés.
La commission pourrait-elle recommander des sanctions autres que celles
prévues au code de discipline puisque le nouveau paragraphe de l'article
24 prévoit des sanctions qui n'existent pas dans le code de discipline:
la mutation, la réduction de traitement, la suspension avec
réduction de traitement. Comme, par ailleurs, il s'agit de sanctions
recommandées à la suite d'une enquête tenue par un
organisme distinct de la Sûreté, ceci a-t-i. pour effet de rendre
inopérantes tes dispositions du code de discipline?
Nous croyons que l'application de la discipline devrait être du
ressort du service de police dont fait partie le membre concerné. Les
recommandations pouvant être faites à la suite d'une enquête
de la Commission de police sur la conduite d'un membre devraient être
à l'effet que ledit membre soit traité conformément aux
dispositions du code de discipline qui le régissent et que lui soient
imposées les sanctions qui y sont prévues. b) Article 21 :
L'article 21 du projet de loi modifie l'actuel article 46 de la Loi de police,
pour tenir compte du règlement disciplinaire en matière de
congédiement.
Nous soumettons que la même modification devrait être
apportée à l'article 45 de la Loi de police, prévoyant les
autres sanctions applicables. Cet article 45 permet au directeur
général de suspendre un cadet ou un membre de la
Sûreté ou de lui imposer les sanctions prévues au
règlement disciplinaire. Comme le nouveau code de discipline
précise que les infractions doivent être traitées suivant
les dispositions de ce code, nous voyons mal que le directeur
général puisse imposer les suspensions autrement qu'en vertu du
code de discipline.
C'est pourquoi nous suggérons qu'un amendement soit
également apporté à l'article 45 prévoyant que le
directeur général puisse imposer les sanctions prévues au
règlement disciplinaire dans le cas d'un manquement audit
règlement, étant donné que la suspension est l'une des
sanctions prévues au code de discipline.
Article 22 du projet de loi. Les membres de la Sûreté qui
font partie de l'Association sont régis par la loi du régime
syndical applicable à la Sûreté du Québec. Cette loi
institue un comité paritaire et conjoint chargé de poursuivre des
négociations en vue de la conclusion d'une convention collective.
L'article 19 précise que les recommandations du comité, une fois
approuvées par le lieutenant-gouverneur en conseil, ont l'effet d'un
contrat de travail signé par les parties.
Dans les circonstances, nous trouvons inconcevable que l'article 47 de
la Loi de police soit amendé de telle façon que le
lieutenant-gouverneur en conseil puisse déterminer par règlement
les conditions de travail des membres de la Sûreté. Une telle
disposition vient à rencontre du processus des négociations
établies dans la loi du régime syndical de la
Sûreté, puisqu'elle permet en quelque sorte au
lieutenant-gouverneur en conseil de se substituer aux parties dans la
négociation d'une convention collective.
Nous suggérons une formulation qui tienne compte de la situation
existante et des dispositions de la loi du régime syndical de la
Sûreté, comme suit: "Pourvoir à la classification,
approuver l'échelle de traitement et les autres conditions de travail
convenues entre les parties, aux termes de la loi du régime syndical
applicable à la Sûreté du Québec à
l'égard des membres de la Sûreté mentionnés aux
paragraphes 5 et 6 de l'article 33 ainsi que des cadets et déterminer la
classification, l'échelle de traitement, de même que les autres
conditions de travail des membres de la Sûreté mentionnés
aux paragraphes 2 et 4 de l'article 33."
Article 19 du projet de loi. Cet article établit une direction
générale de la sécurité publique du
ministère de la Justice. Nous croyons qu'il y aurait avantage à
ce que la composition et le mode de formation d'un tel organisme y soient
prévus, de façon à assurer à cette direction une
certaine continuité et à favoriser la poursuite de ses
objectifs.
Par ailleurs, il ne serait pas sans intérêt de
préciser, ou du moins d'indiquer le mode de fonctionnement ou
d'opération de cet organisme pour lui permettre une meilleure
efficacité dans le mise en application de ses objectifs.
Rôle et fonctions de la Sûreté du Québec. Les
amendements prévus au projet de loi no 41, notamment aux articles 1, 2,
25, 36 et 45, nous amènent à nous interroger sur le rôle et
l'orientation que l'on entend donner à la Sûreté du
Québec.
Dans un premier temps, nous constatons que ce projet de loi
établit un nouveau corps de police devant avoir juridiction sur les
autoroutes de la province. Bien que nous soyons d'accord pour que la
surveillance des autoroutes soit confiée à des policiers, nous
nous demandons toutefois s'il est opportun de créer un nouveau corps de
police pour remplir ces fonctions. Considérant le territoire que ces
policiers sont appelés à desservir et les pouvoirs de constable
et d'agent de la paix qu'on leur accorde sur tout le territoire du
Québec, article 2, force nous est de constater qu'il s'agit là
d'un corps de police paraprovincial. S'agit-il là d'une nouvelle
étape dans la prolifération de corps policiers? Assisterons-nous
à la création d'autres corps de police, soit pour desservir
d'autres routes importantes au Québec, soit pour effectuer des
tâches du ressort de certains ministères comme, par exemple, les
inspecteurs au transport du ministère de la Voirie qui remplissent des
fonctions policières?
Quand on considère qu'il s'agit là de fonctions
actuellement dévolues aux membres de la Sûreté ou de leur
ressort, il faut, à notre avis, connaître les implications de
telles mesures qui restreignent le champ d'activités territoriales et
matérielles de la Sûreté.
Dans un second temps, nous constatons, à l'article 25 du projet
de loi que les municipalités
de plus de 5000 habitants sont désormais tenues d'établir
un corps de police et que les municipalités de moins de 5000 habitants
sont autorisées à le faire. Comme, dans plusieurs cas, cette
juridiction est actuellement exercée par la Sûreté du
Québec, il s'agit encore là d'une mesure visant à
réduire le champ d'activité de la Sûreté.
Nous ne disposons d'aucun élément nous permettant de dire
que la sécurité, la paix et l'ordre public seront mieux servis de
cette façon, que l'efficacité policière en sera accrue et
que ceci répond à quelque impératif.
Plutôt que de laisser aux municipalités de moins de 5000
habitants la discrétion d'établir un corps de police, il nous
semble que la Sûreté pourrait y effectuer le service policier,
assurant par là une meilleure uniformité d'organisation et,
conséquemment, une amélioration du rendement.
On pourrait être tenté de nous servir l'argument que la
Sûreté du Québec, en tant que police provinciale, devrait
se spécialiser dans certaines sphères et se consacrer davantage
à certains aspects de la prévention du crime ou de la
criminalité, laissant à d'autres corps de police le soin de
veiller à la sécurité routière ou d'assurer la
protection de petites municipalités. A ceci, nous pourrions d'abord
répondre que la Sûreté n'en continuera pas moins de venir
en aide et d'assister ces corps de police, avec toutes les implications
administratives ou financières qui en découleront.
Mais ce sur quoi nous pourrions principalement insister, c'est la
portée de l'article 36 du projet de loi no 41, établissant un
bureau de recherche sur le crime organisé. On note, en effet, à
l'article 73a et à l'article 73b, que ce bureau sera formé de
policiers du Québec et de l'extérieur, parmi les corps policiers,
les agences gouvernementales et les agences privées, dans le but bien
précis de lutter contre le crime organisé. Dès lors, si on
entend faire de la Sûreté du Québec un corps de police
spécialisé, comment expliquer qu'un tel bureau ne soit pas
formé parmi les cadres de la Sûreté? Comment expliquer que
les fonctions d'un tel bureau ne soient pas dévolues à la
Sûreté du Québec? Il nous semble y avoir là un
contresens dans le rôle de la Sûreté face à ces
mesures législatives.
D'ailleurs, on s'interroge à savoir pourquoi l'article 38 du
projet de loi n'a pas modifié l'article 79 de la Loi de police, de
façon à placer l'ensemble ou partie du territoire du
Québec sous la seule autorité du directeur de la
Sûreté et non "toute autre personne désignée", vu la
juridiction de la Sûreté du Québec.
Le problème soulevé par l'adoption de ces mesures
législatives est d'une nature telle qu'il mérite qu'on s'y
arrête plus longuement. Plutôt que de placer la Sûreté
du Québec devant le fait accompli et de tenter par la suite d'apporter
les modifications ou les correctifs qui pourraient s'avérer
nécessaires, nous croyons fermement qu'il y aurait tout avantage
à retarder l'adoption de ces mesures législatives dans le but de
permettre une étude plus approfondie des implications et des
conséquences de telles mesures. En ce qui nous concerne, nous ne
disposons malheureusement pas de toutes les données ou informations nous
permettant d'apprécier ou d'évaluer la portée de ces
amendements proposés dans le projet de loi no 41.
Nous croyons qu'il serait dans l'intérêt de toutes les
parties concernées, tant au niveau gouvernemental, municipal que
policier, qu'une étude soit faite en vue d'identifier les
problèmes et de trouver les solutions à envisager.
Alors que, par le processus de la régionalisation, on tend
à réduire les corps de police exemples: CUM, Gatineau,
Charlesbourg comment concevoir que, par ce projet de loi, on veuille en
créer un nouveau? Il nous apparaît difficile de concilier ces deux
tendances et de comprendre l'opinion que l'on se fait de l'efficacité
policière.
C'est d'ailleurs dans cette optique que devra s'apprécier le
rôle de la Sûreté du Québec. La
spécialisation, si elle s'impose, doit également tenir compte du
rendement et de l'efficacité, absolument essentiels au bon
fonctionnement d'un corps de police. Nous entendons procéder
incessamment à une étude sur la régionalisation, la
prolifération des corps policiers ou parapoliciers, sur le rôle de
la Sûreté, bref, une étude englobant les implications
soulevées par les présentes mesures législatives.
Nous soumettons qu'il y aurait tout avantage à ce que l'adoption
de ces mesures soit retardée pour permettre aux autres organismes ou
groupements concernés de faire de même et d'échanger les
informations pertinentes pour trouver les solutions qui répondent
véritablement aux besoins de toutes les parties.
M. Lalonde: Merci, M. Richard. Est-ce que vos collègues
veulent ajouter à cela ou intervenir plus tard?
M. Richard: Non. Si vous avez des questions, cela nous fera
plaisir d'essayer d'y répondre.
M. Lalonde: Au début, j'aurais des réponses et,
à la fin, j'aurais des questions.
En ce qui concerne les articles 18, 21, 22 du projet de loi,
c'est-à-dire en ce qui concerne vos remarques à propos de ces
articles, j'ai l'intention de proposer à cette commission parlementaire,
au moment de l'étude article par article, des amendements dans le sens
de ce que vous suggérez. Donc, je pense que vos représentations
sont valides.
Pour l'article 19, je ne comprends pas tout à fait ce que les
deux paragraphes de votre mémoire prétendent expliquer. Oui,
c'est vrai qu'on établit une direction générale de
sécurité publique qui était d'ailleurs établie de
facto, mais on le fait de façon plus formelle dans le projet de loi.
Naturellement, cette direction générale voit aussi ses fonctions
déterminées d'une façon assez précise, le tout
conformément à des études qui ont été faites
au ministère depuis quand même un bon nombre d'années. Pour
le reste, quant au mode de
formation, la composition, cela reste une décision
gouvernementale à mesure que les besoins se présentent, à
mesure que les budgets sont discutés, que les budgets deviennent
disponibles, le tout assujetti aux dispositions des lois applicables, que ce
soit la Loi de la fonction publique, la Loi de l'administration
financière. J'aimerais que vous me précisiez dans quel sens vous
suggérez que des dispositions de la loi disent ou que le
législateur dise au gouvernement comment le faire.
M. Barré (Laurian): Alors, voici, M. le Président,
par le nouvel article 27a de la Loi de police, nous voyons dans ce texte ce que
la direction générale va faire effectivement. Ce que nous
aimerions voir préciser davantage dans ce texte, c'est qui va accomplir
les pouvoirs ou les fonctions qui sont mentionnés dans cet article et de
quelle façon on va les accomplir. Ceci, pour deux raisons, c'est que
nous croyons, par exemple, que, dans un organisme du genre de la direction
générale, une représentation de personnes ayant certaines
connaissances ou ayant certaines expériences de nature policière
serait tout à fait souhaitable. Nous verrions bien que l'article
précise une certaine continuité au niveau des personnes pouvant
faire partie ou pouvant prendre la direction de cet organisme, ceci dans un
premier temps.
Dans un second temps, ce que nous aimerions savoir, c'est comment la
direction générale entend fonctionner. Est-ce par le moyen de
consultations? Est-ce par le moyen de recommandations? Est-ce par le moyen
d'études, d'analyses? Enfin, il nous semble qu'il y aurait
peut-être avantage à préciser davantage afin que l'on sache
exactement de quelle façon ces politiques en matière
policière peuvent être appliquées dans la province.
M. Lalonde: Je pense, Me Barré, qu'il faut distinguer tout
d'abord entre un organisme qui pourrait être créé par une
loi et un service administratif. La direction générale de la
sécurité publique ne prétend pas lui donner ce
caractère, et c'est simplement un service administratif comme il y a
beaucoup de services administratifs au sein du ministère de la Justice
et comme il y en a beaucoup au sein d'autres ministères.
Il faut aussi distinguer entre ce que le législateur doit dire et
ce qu'un gouvernement ou un ministre ou un ministère peut dire dans un
rapport annuel, dans un mémoire de programme, à savoir comment il
entend s'acquitter de ses fonctions.
Je pense que ce que vous venez de me décrire appartient davantage
à l'énoncé de politique par exemple qu'on verrait soit
dans un rapport annuel, soit dans un mémoire de programme, mais
très peu dans une loi. Déjà, dans la loi on
précise, on donne l'ordre, le législateur donne l'ordre à
la direction générale de collaborer dans le domaine de sa
compétence avec les organismes oeuvrant en matière
policière, par exemple. C'est déjà beaucoup, on le fait un
peu pour démontrer jusqu'à quel point ce service administratif ne
devra pas oeuvrer en vase clos, tout seul. Même là on va un peu
loin en disant, qu'il devra consulter, je n'en vois pas la pertinence dans une
loi.
M. Burns: Est-ce que le ministre me permet une question?
M. Barré: Si M. le Président me permet...
M. Burns: Excusez-moi, Me Barré, deux secondes. Juste une
petite parenthèse. Est-ce que le ministre ne conçoit pas que la
remarque, en regard de l'article 19 du mémoire de l'APPQ, se tient, en
ce sens qu'elle vous demande, comme parrain du projet de loi, ou elle nous
demande, comme commission parlementaire, s'il n'y aurait pas lieu et s'il n'y
aurait pas avantage à préciser la composition et le mode de
formation de la direction générale de la sécurité
publique du ministère de la Justice? Est-ce dans les intentions du
Solliciteur général de donner une réponse à
cela?
M. Lalonde: C'est justement ce que j'ai dit. Non, ce n'est pas
mon intention.
M. Burns: Vous ne voulez pas donner de réponse à
cela.
M. Lalonde: C'est le genre d'information qui appartient au
mémoire de programme, au budget. On peut, suivant les besoins, suivant
nos disponibilités, augmenter, par exemple, l'importance des effectifs
une année, les réduire, les maintenir, les geler et c'est
difficile de prévoir dans une loi la façon dont ce service
administratif va ainsi se comporter. La raison d'être de cet article, en
fait, on la voit, c'est évident, c'est de préciser quel est son
rôle vis-à-vis d'un autre organisme qui existe, vis-à-vis
de la Commission de police, pour être bien sûr que chacun, de
l'organisme d'un côté et du service administratif de l'autre,
sache comment se comporter, quel est son champ d'action, le tout suivant des
études qui ont été faites au ministère de la
Justice et qui ont même pris la forme d'un livre blanc.
M. Burns: Est-ce que cela ne devrait pas être un amendement
à la Loi du ministère de la Justice plutôt qu'un amendement
à la Loi de police? Cela semble être une modification de structure
du ministère de la Justice. C'est dans ce sens que je vous pose la
question. A moins que je fasse erreur. Je conçois l'inquiétude
des représentants de l'APPQ; non seulement dans les premières
lignes du projet de loi, même si vous nous annoncez des amendements
reste à voir si les amendements seront satisfaisants aux
représentants de l'APPQ ou pas non seulement vous leur annoncez
que déjà un certain processus de négociation qui existait
et de comité paritaire qui existait entre le gouvernement et les
représentants des policiers provinciaux, non seulement vous leur dites
que cela n'est pas tout à fait sûr donc, si vous êtes
prêt à faire des amendements, cela veut dire que votre loi est un
peu hâtive, c'est-à-dire que vous n'avez pas tenu compte du fait
qu'il y avait, entre autres,
un cas de discipline qui était négocié et qu'il y
avait déjà tout un processus de relations du travail qui existait
entre les policiers provinciaux et le gouvernement, le ministère de la
Justice, disons mais vous leur amenez des précisions à un
certain nombre de pouvoirs accordés à la direction
générale de la sécurité publique du
ministère de la Justice, lesquels pouvoirs vont certainement avoir un
effet sur le rôle que les policiers provinciaux ou les membres de la
Sûreté du Québec, dis-je, ont à jouer.
Que ces gens aient des inquiétudes relativement à ce
processus hâtif de législation, je ne m'en surprends pas du tout,
c'est le contraire qui m'aurait énormément surpris. Je me dis que
si vous amenez des précisions de cette nature, vous calculez strictement
d'ordre administratif, sans vouloir être plus technique qu'il le faut, je
verrais cela davantage dans une restructuration du ministère de la
Justice, donc, dans un amendement à la Loi du ministère
plutôt que dans une Loi de police qui a des fins très
spécifiques, qui vise, entre autres, un certain nombre d'organismes mais
qui ne vise pas comme tel le ministère de la Justice, sinon les pouvoirs
que le ministère de la Justice a à exercer dans le cadre de cette
loi et dans la mise en application de cette loi.
C'est dans ce sens que je partage très sérieusement les
inquiétudes énoncées par les représentants de
l'APPQ, surtout à partir du moment où vous nous dites, dans le
cas des articles 18, 21 et 22: On est prêt à envisager des
amendements; mais, dans ce cas-là, on ne comprend pas vos remarques.
M. Lalonde: Le député de Maisonneuve ne me
reprochera quand même pas une certaine ouverture d'esprit et d'accepter
d'apporter des amendements quand il me paraît utile de le faire.
M. Burns: Non, non.
M. Lalonde: Mais cela ne veut pas dire, parce qu'on accepte des
propositions dans un cas, dans des cas qui nous apparaissent tout à fait
justifiables, qu'on doive le faire dans ceux qui ne nous apparaissent pas
justifiables. Il m'apparait aussi, moi, qu'il y a une certaine
incompréhension. J'espère que ce ne sont pas mes propos qui vous
ont induit en erreur ou qui ont induit le député de Maisonneuve
en erreur. La direction générale de la sécurité
publique n'est pas créée par cette loi. Elle existe...
M. Burns: Je sais qu'elle existe par ['article 27.
M. Lalonde: Elle a été créée par un
arrêté en conseil en 1974.
M. Burns: Oui; d'ailleurs, la loi actuelle en parle.
M. Lalonde: Mais on nous reproche souvent, on reproche souvent au
législateur ou au gouvernement de mettre dans différentes lois
des dispo- sitions, de traiter dans différentes lois des questions qui
sont tellement apparentées qu'elles devraient être traitées
dans la même loi. C'est ce qu'on fait dans la Loi de police comme, par
exemple, l'Institut de police.
M. Burns: Est-ce que vous me permettez... M. Lalonde:
Laissez-moi terminer.
M. Burns: ... simplement sur ce point-là, M. le ministre.
Je veux simplement vous dire ceci, c'est que cela va peut-être vous
paraître bizarre, tout au long de la discussion de ce projet de loi,
qu'on semble remettre en question des choses qui étaient dans la Loi de
police originale, c'est-à-dire la loi 51 qui a été
adoptée, je crois, en 1972, en 1971.
M. Lalonde: La loi de police date d'avant 1970.
M. Burns: Non, mais les amendements de la Loi de police
qui...
M. Lalonde: Les amendements, oui.
M. Burns: ... excusez, les amendements de la Loi de police...
M. Lalonde: Oui, cela va me paraître étrange, comme
vous le suggérez.
M. Burns: Cela va vous paraître étrange, c'est parce
que vous n'avez pas écouté mon discours de deuxième
lecture.
M. Lalonde: Ah oui, je l'ai écouté.
M. Burns: Oui, mais, à ce moment-là, il faudrait
peut-être le relire.
M. Lalonde: Cela ne veut pas dire que je l'ai admis.
M. Burns: II faudrait peut-être le relire.
M. Lalonde: En réponse à votre discours, j'ai dit
qu'on ne répare pas une erreur en faisant une autre erreur.
M. Burns: Non...
M. Lalonde: C'est ce que vous avez fait en votant contre en
deuxième lecture.
M. Burns: Chose certaine, c'est qu'aux yeux de tout le monde, et
je suis convaincu qu'il y a un tas de gens et cela, je peux presque dire... en
tout cas, je ne veux pas impliquer d'autres personnes que le groupement
politique que je représente, mais je suis convaincu qu'il y a des gens
qui ne sont pas des groupements politiques qui ont eu la même
réaction que nous à cause de la date à laquelle les
amendements de la Loi de police ont été
faits, à cause de la façon dont cela a été
fait, c'est-à-dire en fin de session, également, encore une
fois... Je ne sais pas pourquoi, des lois importantes nous sont toujours
amenées en fin de session, des lois importantes qui touchent les
libertés civiles; cela, je ne le comprends pas; en tout cas,
peut-être que le Solliciteur général, à un moment
donné, trouvera un plus bas commun dénominateur à toutes
ces réactions gouvernementales.
Mais je ne veux pas entrer là-dedans. Je vous dis simplement
ceci: En ce qui me concerne, il s'agit d'une nouvelle loi, parce que, pour une
fois, et cela, je l'ai dit dans mon discours de deuxième lecture, pour
une fois, on le discute, ce projet de loi ou, en tout cas, les amendements
essentiels, des amendements qui ont une très grande importance. On le
voit par la nature des interventions que nous recevons déjà et
par l'éventail des interventions que nous avons. On a déjà
des gens du niveau municipal qui se posent des questions sur la loi. On a des
corps policiers, on aura tout à l'heure le Barreau, on aura des gens qui
sont des chefs de police et de pompiers et il y aurait même,
possiblement, d'autres groupements qui, si cela avait été
davantage connu, viendraient nous dire que, pour eux, il s'agit là d'un
projet de loi qu'on regarde avec des yeux neufs, parce qu'on le regarde en
dehors d'un cadre, au sortir de la crise d'octobre 1970. C'est ce qui est bien
différent. Tout au long du projet de loi, M. le ministre, vous allez
être obligé de vous rendre compte de cela. Et cela, tant du
côté policier que du côté politique ou du
côté des libertés civiles ou du côté de
quelque groupement que ce soit.
On regarde cela avec des yeux neufs, un peu plus détendu, parce
qu'on est dans un cadre un peu plus normal et, justement, le cadre normal est
le fait que, même en dehors d'une session précise, on soit en
train d'examiner le projet de loi dans ses détails.
Alors, il ne faudrait pas vous surprendre que, tout au cours de ces
discussions, des parties intéressées et des groupements
intervenants viennent nous dire que même ce qu'on avait adopté en
1971/72, cela devrait être modifié. Moi, je me ferai fort de vous
le rappeler régulièrement tout au long de la discussion article
par article.
M. Lalonde: Le député de Maisonneuve se fait un
devoir de me le rappeler, parce que je vais quand même...
M. Burns: En tout cas, c'est juste pour que vous ne preniez pas
les nerfs quand cela viendra. Je vous le dis d'avance.
M. Lalonde: Je vais quand même faire appel à mon
droit strict et fondamental d'être surpris chaque fois que...
M. Burns: Là vous ne le serez pas.
M. Lalonde: ...chaque fois que le député de
Maisonneuve va me surprendre et de le lui dire. Maintenant, cela fait deux fois
que le député de
Maisonneuve me parle d'un projet de loi qui chambarde tous les principes
fondamentaux d'administration de la justice. La première fois, j'ai
passé, j'ai laissé passer sans répondre, parce que j'aurai
d'autres occasions, mais, cette fois-ci, je pense qu'il faut quand même
remettre... Je ne veux pas non plus...
M. Burns: Gardez donc cela après avoir entendu le
mémoire du Barreau. Ces gens ont des petites choses à vous dire
là-dessus. Si vous avez lu leur mémoire, en tout cas, je pense
qu'ils ont quelques affaires à vous dire là-dessus.
M. Lalonde: J'ai lu tous les mémoires. Il faut quand
même remarquer qu'il s'agit d'un projet de loi qui est important parce
qu'il réunit plusieurs dispositions, en fait une multitude de
dispositions qui ont, dans beaucoup de cas, je dirais dans la très
grande majorité des cas, été demandées depuis
longtemps par divers organismes. Maintenant, dans la modalité
elle-même, il est bon qu'on se parle et c'est pour cela que les
organismes ont été invités à nous faire part de
leurs remarques. On ne peut pas non plus se surprendre du fait qu'on ait une
ouverture quand même assez large aux suggestions, par exemple, de l'APPQ
et d'autres, du premier groupe qui est venu, parce que justement nous croyons
à la consultation et aussi parce que le projet de loi, dans sa presque
totalité, est le résultat de cette consultation qui est
très régulière, non pas quotidienne, mais qui est quand
même régulière, avec les organismes représentatifs
des policiers ou des chefs ou des municipalités.
Enfin, pour revenir à la question qui nous occupe, l'article 19,
il s'agit donc d'un organisme qui existe depuis quelques années. C'est
dans la Loi de police depuis quand même un bon moment et je ne me
surprendrai pas que le député de Maisonneuve puisse ne pas
partager cet avis, que le législateur a voulu réunir, dans la
mesure du possible, les dispositions qui concernent la chose policière
au Québec. L'Institut de police, par exemple, est un organisme qui
existe au ministère de la Justice, mais c'est dans la Loi de police
qu'on lui donne sa fonction.
M. Burns: Comme la Loi de l'aide juridique, par exemple, c'est
bien sûr.
M. Lalonde: Alors, il ne faut pas se surprendre que ce soit dans
la Loi de police qu'on désigne, qu'on détermine à la
direction générale qui existe d'autre part sa fonction, son
rôle, et c'est le but de cet article. Maintenant, de là à
dire qu'il y aura des effectifs de tant, qu'ils seront choisis de telle
façon, qu'ils auront telle formation, cela peut changer suivant les
besoins. C'est pour cela que je trouve difficile non pas que je sois, en
principe, contre d'accommoder votre suggestion avec le genre d'exercice
que nous sommes obligés de faire comme législateurs.
M. Choquette: La technique législative est
peut-être discutable, c'est ce que vous dites, de part et
d'autre.
M. Burns: C'est cela.
M. Choquette: On pourrait certainement prétendre qu'il
aurait été plus utile de présenter une loi créant
la direction générale de la sécurité publique, une
loi distincte, différente de ce projet de loi.
M. Burns: Ou une amendant la Loi du ministère.
M. Latonde: On pourrait discuter longtemps sur cela.
M. Choquette: Voici, ou une loi amendant la Loi du
ministère de la Justice, ou une loi distincte. Parce que la loi, par
exemple, qui a créé la direction générale de la
probation et des établissements de détention est une loi qui est
distincte de celle du ministère de la Justice. Or là, nous sommes
sur une question de technique législative; est-ce qu'il est
préférable d'adopter cette formule plutôt que la formule
suggérée par le député de Maisonneuve ou d'autres
formules utilisées en d'autres circonstances, comme dans le cas de la
loi créant la direction de la probation et des établissements de
détention?
Mais, au-delà de la question de technique législative,
j'aimerais pouvoir comprendre quels sont les points d'interrogation ou les
critiques formulées par l'Association des policiers provinciaux du
Québec à l'égard de la création de cette direction
ou de la rédaction des articles qui sont pertinents à cette
section administrative nouvelle du ministère de la Justice.
M. Lalonde: Si le député d'Outremont le permet, je
vais le demander à Me Barré. Justement, dans son mémoire,
on nous dit: "Nous croyons qu'il y aurait avantage à ce que la
composition et le mode de formation y soient prévus". Je trouve
difficile, dans une loi, de dire: II sera composé de directeurs, de deux
adjoints, de...
M. Choquette: Non, est-ce qu'ils veulent dire par des policiers
ou s'ils veulent dire par des non-policiers, c'est cela, je pense, la question
que nous nous sommes posée.
M. Lalonde: C'est une autre question.
M. Choquette: Est-ce cela que vous avez en vue ou si c'est autre
chose?
M. Barré: Effectivement, M. le Président. En
revenant un peu en arrière aux remarques que le Solliciteur
général m'adressait, c'est que ce qui nous a amenés
à nous poser certaines questions sur l'acticle 27a c'est, comme je le
disais tantôt, qu'on voit un peu les fonctions ou les attributions de
cette direction générale. Mais ce qu'on voudrait voir
déterminer et préciser davantage, c'est l'iden- tité des
personnes qui auront à remplir ces fonctions ou à exercer ces
attributions.
Je soulignais tantôt: II nous apparaît, je pense, normal,
par exemple, que cette direction soit sous les directives d'un policier ou
d'une personne ayant une expérience ou une connaissance policière
comme c'est le cas à l'heure actuelle avec l'ancien directeur de la
Sûreté, M. Benoît. Maintenant, il n'y a rien dans des
dispositions qui nous assurent Une certaine continuité de ce
côté-là. Il n'y a rien qui nous assure, par exemple, que,
dans six mois ou dans un an, ce sera une autre personne qui n'est pas
familière avec les problèmes ou les techniques policières
que peut soulever la direction générale de la
Sûreté. Quand on regarde de façon plus particulière
le paragraphe b) du nouvel article 27a, on remarque, par exemple, que cette
direction générale va être chargée de favoriser et
promouvoir la coordination des activités policières et
parapolicières. Or, ceci nous amène à nous poser la
question: Comment cette direction générale pourra-t-elle en
arriver à favoriser et à promouvoir la coordination si cette
personne n'a pas une certaine expérience du domaine, si elle ne sait pas
comment cela fonctionne et si elle n'a pas pris, par exemple, certaines
informations au niveau de la consultation, au niveau de certaines demandes
d'information ou certaines enquêtes. C'est le point particulier que nous
voulons souligner.
M. Lalonde: Je comprends vos préoccupations Me
Barré et M. Richard, mais je trouve difficile de les concilier avec
l'exercice qu'on fait ici. Il n'y a pas de doute que l'histoire de
démontrer naturellement qu'à la direction générale
de la sécurité publique, compte tenu des fonctions
confiées à ce service, une connaissance du milieu est
nécessaire et on l'a vu; vous avez mentionné la présence
de M. Benoît à la tête de cette direction. Par exemple,
quand on a formé on exclut la personne qui parle quand la
Commission de police a été formée, on n'a pas exigé
dans la loi que les membres de la Commission de police devaient avoir une
connaissance de la chose policière ou devaient être d'anciens
policiers. Ainsi, par exemple, même à la Sûreté du
Québec, la loi n'exige pas que le directeur soit un policier, mais
l'expérience a prouvé qu'à la Commission de police, il y a
une présence soit d'anciens policiers ou de connaissances
policières.
M. Barré: Sauf qu'il faut peut-être
reconnaître ici que vous avez, dans un texte de loi qui est nouveau,
toujours de l'article 27a, une nouvelle disposition qui précise, de
façon concrète et claire, les attributions et les fonctions de
cet organisme ou de ce service administratif parce que nous sommes d'accord
pour reconnaître qu'il s'agit bien d'un service administratif. Etant
donné les attributions de ce service, nous voyons difficilement qu'elles
puissent se faire en dehors ou par des personnes autres que des personnes ayant
une certaine connaissance du milieu.
M. Lalonde: II faut quand même voir cet article-là,
à l'intérieur de tout l'appareil législatif existant au
gouvernement, parce qu'il s'agit quand même d'un service du gouvernement.
L'on sait que les lois applicables concernant la fonction publique, le
recrutement, prévoient tout un processus qui rattache la
compétence à Ja fonction qu'on est appelé à faire
remplir à ceux qu'on recrute. Par exemple, la description de
tâches dans les concours qu'on fait, naturellement, elle est faite de
façon très intimement reliée à la fonction que la
personne est appelée à remplir. Quand on va arriver à la
direction générale, naturellement, une première chose
qu'on va faire, ce sera d'aller voir quelle est la fonction qui lui est
dévolue par la loi et ce ne seront pas nécessairement d'anciens
policiers non plus, il peut y avoir des statisticiens, des sociologues; il y a
déjà des membres d'un groupe plus ou moins disciplinaire, ce qui
est aussi fort prévisible. Alors, je ne pense pas qu'on puisse aller
beaucoup plus loin que ce qu'on fait actuellement, c'est-à-dire dans la
loi de décrire ses devoirs, parce qu'il ne s'agit pas de pouvoirs, il
s'agit surtout de devoirs, et ensuite de laisser tout l'appareil
législatif applicable, à amener, en fait, le gouvernement
à remplir ces postes par des personnes compétentes, en
l'occurrence.
M. Barré: En fait, si cela peut schématiser notre
optique vis-à-vis de cette disposition, c'est qu'on aimerait voir
consacré, dans le texte, ce que vous décrivez comme étant
des pratiques ou des normes habituelles au ministère de la Justice, de
faire remplir des fonctions par des personnes évidemment
qualifiées.
Tantôt, vous donniez l'exemple de la Commission de police. Il faut
quand même reconnaître qu'au niveau de la Commission de police, les
intéressés sont entourés d'un groupe d'enquêteurs
qui ont une formation policière, puisque ce sont, pour la plupart sinon
tous, d'anciens policiers. Donc ces personnes savent exactement comment se
comporter au niveau des enquêtes, puisqu'elles viennent du milieu.
M. Lalonde: Je vous ai dit ma réaction. Je pense qu'il y a
aussi une règle de rédaction législative qui veut que le
législateur me dise que ce qui est nécessaire. Aller
au-delà, ce serait sûrement superflu, étant donné,
comme je vous ai dit, que tout l'appareil va faire en sorte qu'on va atteindre
les mêmes fins. Ce n'est donc pas nécessaire de le dire dans la
loi.
M. Barré: On est d'accord sur ce principe que le
législateur ne doive dire que ce qui est nécessaire. Il nous
apparaît nécessaire, dans les circonstances, de le
préciser.
M. Lalonde: Y a-t-il d'autres questions sur l'article 19? Quant
au rôle et aux fonctions de la Sûreté du Québec, je
comprends aussi les préoccupations de l'APPQ. On a eu l'occasion, M.
Richard et son prédécesseur, d'en discuter d'une façon
générale. Je pense, toutefois, que la loi 41 ne pré- tend
pas déterminer l'avenir de la Sûreté du Québec. Il y
a sûrement lieu de se pencher sur cette question. Non seulement de la
Sûreté du Québec, mais aussi de toute la fonction
policière. Jusqu'à maintenant, les orientations qui ont
été suivies ont été de confier, dans la mesure du
possible, aux autorités locales, le soin d'assurer la protection
policière. De là, dans l'article actuel qui, confiant aux
municipalités des cités et villes, le devoir de former, de
maintenir des corps policiers suivant certaines conditions, le nouvel article
qui crée un critère nouveau, mais qui, au fond, garde, conserve
la même approche, à savoir que la fonction policière, la
fonction de protection du citoyen, de ses droits, de ses
propriétés, soit confiée aux autorités locales.
Je comprends que par ricochet, cela affecte la fonction de la
Sûreté du Québec qui, dans ces territoires, jusqu'à
la création de corps policiers locaux, effectue, remplit le rôle
de protecteur du citoyen. Sans vouloir refuser ici un échange de propos,
je ne pense pas que ce soit la tribune appropriée. Je ne pense pas que
je sois en mesure de répondre à votre demande, à savoir,
de retarder l'adoption de la loi 41, jusqu'à ce que cette question ait
été décidée. Tout d'abord, parce que je ne pense
pas que la loi 41, en soi, affecte d'une façon fondamentale le
rôle de la Sûreté. Il y a sûrement des dispositions
qui déterminent peut-être des rôles un peu ponctuels. On
parle du BRQCO comme vous l'avez mentionné. Essentiellement, la
Sûreté du Québec, par la loi 41, ne voit pas son rôle
changé, modifié. Vous parlez des policiers d'autoroute, ce n'est
pas la Sûreté qui le fait actuellement. On forme un corps policier
séparé. On n'enlève rien à la Sûreté,
mais on ne le lui donne pas. Mais ce n'est pas en ce faisant qu'on
enlève quelque chose à la Sûreté comme telle.
M. Choquette: D'ailleurs, peut-on poser la question au
Solliciteur général? Est-ce que, généralement, les
agents de la paix actuels au service de la commission des autoroutes, si c'est
bien le nom...
M. Burns: L'office.
M. Choquette: ... l'Office des autoroutes merci se
qualifieraient comme policiers de la Sûreté du Québec?
M. Lalonde: Pour une partie, peut-être, parce que la
formation a été commencée.
M. Choquette: Exactement. M. Lalonde: Mais pas tous. M.
Choquette: Pas tous, certainement.
M. Burns: Puis-je ajouter un mot à cela, M. Richard, Me
Barré ou votre autre collègue? Je trouve la question très
intéressante, de la façon que vous la soulevez. Est-ce que l'APPQ
comme on n'a malheureusement pas souvent l'occasion de vous
rencontrer en commission parlementaire et que c'est une des occasions
privilégiées de le faire s'est penchée sur
l'ensemble du problème que sous-tend la question que vous posez,
c'est-à-dire l'idée qui a cours, qui est favorable, dans certains
milieux, et défavorable, dans d'autres milieux, a ce que les fonctions
de gendarmerie devraient de moins en moins relever d'un corps de police comme
la Sûreté du Québec et que, plutôt... Je vois le
député d'Outremont qui me rappelle que ce sont des choses dont
nous avons déjà discuté lui, moi et d'autres, alors qu'il
était ministre de la Justice. Vous êtes-vous vraiment
penchés sur l'impact à court, moyen et long termes que pourrait
avoir une décision gouvernementale de vraiment faire de la
Sûreté du Québec un corps policier très
spécialisé, qui aurait comme principale fonction, sauf ces
fonctions supplétives dans certaines municipalités où
évidemment, nécessairement, il y aura de la gendarmerie à
faire, que l'aspect gendarmerie soit mis de côté? Est-ce que
l'APPQ a une position là-dessus? Parce que cette question sous-tend
cela.
M. Richard: Actuellement, l'association, tel que mentionné
dans le mémoire qu'on présente, a, depuis un mois, un
comité de formé qui a justement pour effet d'étudier cette
question et d'essayer, avec d'autres organisations, de trouver la solution
juste des problèmes.
Avec le projet de loi no 41, la Sûreté, il faut le dire,
perd encore du territoire. Il y a des villes de 5000 de population,
actuellement, qui sont desservies par la Sûreté du Québec;
il y a une obligation d'avoir un corps policier mais c'est évidemment du
territoire perdu. Au sujet des enquêtes criminelles, serait-il
préférable que toutes les enquêtes soient remises à
la Sûreté du Québec? Nous n'avons pas d'études et je
pense qu'il n'y a actuellement personne qui a fait des études assez
poussées pour donner des réponses à cela. C'est la raison
pour laquelle nous mentionnons que le projet devrait être retardé,
du moins pour permettre peut-être à un comité conjoint,
avec différentes organisations, de trouver la réponse à
cela.
M. Burns: Cette discussion n'a pas eu lieu, si je comprends bien,
jusqu'à maintenant entre vos représentants de l'APPQ et les
représentants du gouvernement...
M. Richard: Non.
M. Burns: ... ou du ministère de la Justice.
M. Richard: Cela a eu lieu avec l'association, cela n'a pas eu
lieu comme tel avec les représentants du gouvernement. Depuis plusieurs
années, on dit: Quel sera le rôle de la Sûreté? Je
pense que personne ne peut dire, dans dix ans, que le rôle de la
Sûreté sera seulement dans les enquêtes ou seulement dans la
gendarmerie. On n'a pas les réponses à cela. On a essayé,
on essaie, je pense, avec le projet de loi no 41, en donnant les enquêtes
de la CECO à une autre organisation. En fin de compte, cela devient des
personnes qui ne sont plus des policiers même si on recrute quelques
policiers. On perd encore un champ d'activité que sont les
enquêtes.
Je pense que les enquêtes nos membres et les personnes
contactées le croient doivent rester à la
Sûreté du Québec. On a des exemples de cela. On a
essayé de nous faire accroire, il y a un an ou deux, que les
enquêtes de fraude et faillite devraient être faites par des
membres de l'extérieur, avec une autre organisation. On a essayé
de nous servir cette salade. Cela a duré deux ou trois ans. On a
réussi à convaincre ou, avec des chiffres, à
démontrer au gouvernement que ce n'était pas la formule
idéale et actuellement, nous avons à la Sûreté du
Québec, depuis un an, deux escouades qui se spécialisent dans le
domaine qu'on appelle les escouades sur le crime économique. A ce
moment-là, je pense que le travail est plus efficace, les enquêtes
sont mieux menées.
On va chercher à l'extérieur, nous, des
spécialistes tels que les comptables dont on a besoin à
l'occasion, mais, encore une fois, on a prouvé qu'une enquête est
une enquête et je pense que les personnes qualifiées, ce sont les
policiers. Qu'on arrête peu importe le projet de loi, que ce soit
41, 42 ou 45 d'essayer de créer des organismes pour donner encore
d'autres champs d'activités à d'autres.
M. Burns: Votre position dans le fond, c'est que, tant et aussi
longtemps qu'il n'y aura pas, de part et d'autre...
M. Richard: Toutes les données.
M. Burns: ...du côté ministériel comme du
côté de votre groupe concerné...
M. Richard: Au moins qu'on laisse à la
Sûreté...
M. Burns: ...qu'on remette les dispositions à plus
tard.
M. Richard: Qu'on laisse à la Sûreté du
Québec ses champs d'activités, son territoire et, quand on aura
les données nécessaires, à ce moment, on pourra
recommander tous ensemble les changements appropriés.
M. Lalonde: Là-dessus, M. Richard, je dois avouer que je
ne vois pas de communes mesures entre l'adoption de ce projet de loi,
l'adoption normale, je ne veux pas dire l'adoption hâtive ou
précipitée, normale, d'une part, et, d'autre part, la
définition de la vocation à moyen et à long termes de la
Sûreté. C'est pour cela que je peux difficilement accepter
d'emblée qu'on remette à plus tard l'adoption du projet de loi no
41, jusqu'à ce que ce soit déterminé.
Toutefois, nous avons récemment convenu, à mon bureau,
justement sur cette question, qu'aussitôt que votre association sera
prête à discuter de ce problème, vous trouveriez au
ministère de la
Justice une oreille tout à fait je n'ose pas dire
sympathique, cela a l'air...
M. Burns: Attentive. M. Lalonde: Attentive, merci. M. Choquette:
Complaisante. M. Lalonde: Attentive.
M. Burns: C'est un mot que vous ne devriez pas utiliser de ce
temps-là, le député d'Outremont.
M. Lalonde: Non, non, je laisse la complaisance à ceux qui
cherchent le pouvoir.
Une oreille tout à fait attentive puis, plus que cela, une
collaboration désirée.
M. Choquette: Cela porte. M. Lalonde; Oui, cela porte.
M. Richard: M. le Président, si vous me permettez, ce
n'est pas tout le projet de loi que nous voulons retarder, mais ce sont les
articles mentionnés dans notre mémoire. C'est un point que je
dois rectifier.
Maintenant, je pense qu'il est plus facile de créer d'autres
organisations, mais, si nous n'avons pas toutes les recettes, toutes les
données nécessaires, je pense qu'il ne faut pas adopter des
mesures alors qu'on n'a pas toutes les données. Au moment où on
se parle, je pense que, peu importe l'organisation, que ce soit le
gouvernement, même le gouvernement n'a pas les données en main ou
n'a pas fait les études nécessaires, à moins qu'on nous
prouve le contraire et qu'on nous prouve que, quant à ce qui est
suggéré là, les études ont été faites
et ce sera plus efficace.
M. Lalonde: C'est-à-dire que nous n'avons peut-être
pas toutes les données sur la définition de la vocation, comme je
le disais tantôt, à moyen terme de la Sûreté, quoique
je pense que son développement, son évolution, depuis dix ou
quinze ans, sont un message très clair sur le désir du
gouvernement de contribuer à faire de ce corps de police le meilleur
possible et de lui confier un rôle de toute première ligne. Mais
nous avons quand même les données suffisantes, je crois, pour
adopter certaines dispositions qui vous apparaissent, à vous,
peut-être créer un certain nombre d'accrocs. Parlons, par exemple,
des policiers d'autoroutes, je pense que nous avons au ministère de la
Justice depuis un bon moment examiné cela de part et d'autre, à
l'endroit et à l'envers et suffisamment pour arriver à la
conclusion que cela devienne maintenant un corps de police. La BRQCO, c'est un
organisme qui existe actuellement mais qui n'a pas d'existence légale,
oui légale parce que c'est une espèce de contrat, mais qui n'est
quand même pas institutionnalisé et on pense qu'il a rendu des
services valables.
Mais ce service, de par la nature même du rôle qu'on lui
confie, doit faire appel à tout ce qu'il y a de sources d'information.
Dire qu'on ne le confierait qu'à un corps de police, à ce
moment-là, je pense que ce serait déjà lui lier les deux
mains. C'est pour cela qu'on le crée, on l'institutionnalise dans la
loi, pour montrer notre volonté de réellement recourir encore
à ce genre de services pour lutter contre le crime organisé, mais
il faut quand même lui laisser les éléments essentiels qui
existent actuellement déjà, c'est-à-dire une composition
qui vient de différents corps policiers, même d'organismes hors
des corps policiers qui sont de nature à lui permettre de rendre des
services.
Je mentionne ces deux-là parce que vous les avez
mentionnés dans votre mémoire et plus spécifiquement dans
votre présentation.
M. Richard: Ce que nous voyons, c'est qu'on veut faire de la
Sûreté du Québec un corps de police hautement
spécialisé, au moins, qu'on lui donne la chance d'être
spécialisé. Quand on a des enquêtes plus "touchy", plus
spécialisées à faire, au moins, que ce soient les membres
de la Sûreté qui puissent faire ces enquêtes.
M. Lalonde: M. Richard, on confie à la Sûreté
du Québec des enquêtes très "touchy" pour employer...
M. Richard: Oui, mais on devrait les confier toutes à la
Sûreté du Québec C'est le message que l'on donne
aujourd'hui.
M. Lalonde: Vous voulez dire qu'on devrait enlever, par
exemple...
M. Richard: Non.
M. Lalonde: ... au corps de police de la CUM les enquêtes
"touchy".
M. Richard: Non, absolument pas. Non. M. Lalonde: Non?
NI. Richard: Non, vous me citez très mal. On devrait...
Actuellement, en ce qui concerne le Bureau de recherche sur le crime
organisé, les enquêtes devraient être faites par les membres
de la Sûreté du Québec si on veut aller à la
spécialisation de la Sûreté du Québec dans le
domaine.
M. Lalonde: Le bureau de recherche, vous voulez dire.
M. Richard: Oui. C'est mentionné dans le mémoire.
Je pense qu'il ne serait pas de bon augure et nous ne pourrions pas, demain
matin, prendre toutes les enquêtes criminelles au niveau de la province,
loin de là notre intention. Cela ne sera peut-être jamais la
meilleure façon, la bonne formule, mais ce qu'on dit, c'est que tous les
organismes concernés s'asseoient à une même ta-
ble, avec un ou deux comités, et qu'on puisse faire des
recherches pour trouver des solutions. C'est le message qui est passé
dans notre mémoire d'aujourd'hui.
M. Lalonde: Et vous reconnaissez que le BRQCO est quand
même rattaché à la Sûreté du Québec de
façon formelle par la loi, quoique sa composition devra faire appel
à différents corps policiers.
M. Choquette: D'ailleurs, je me permets de soulever un point,
à ce moment-ci. Je ne suis pas sûr que le Bureau de recherche du
Québec sur le crime organisé fasse des enquêtes
lui-même. Je pense que ce sont les corps de police qui sont
affiliés à ce bureau, les principaux corps de police
contractants, c'est-à-dire la Sûreté du Québec, la
police de la CUM et la GRC, qui font les enquêtes, et le Bureau de
recherche du Québec sur le crime organisé ne sert que d'endroit
d'échanges de renseignements, de plaque tournante. Evidemment, sa
composition est diversifiée pour obtenir la collaboration de tous les
corps de police intéressés ainsi que des autres organismes.
M. Richard: Si on regarde le texte de la loi, est-ce que cette
même formule sera en application après...?
M. Lalonde: Ce n'était pas du tout l'intention du
gouvernement, je ne pense pas non plus que ce soit l'intention de l'article tel
qu'il est rédigé de changer essentiellement. C'est notre
intention de l'institutionnaliser, de le perpétuer, de lui donner une
existence encore plus formelle, mais je pense qu'il y a sûrement des
améliorations à apporter au jour le jour. Je pense
qu'essentiellement un bureau de recherche comme cela devrait pouvoir continuer
de faire appel aux connaissances des divers corps policiers parce que chaque
corps policier, de par les accidents historiques ou enfin son expérience
ou sa compétence, les situations devant lesquelles chacun a
été mis, a développé une certaine expertise souvent
qu'un autre n'a pas ou, enfin, a emmagasiné un certain nombre de
connaissances qu'un autre n'a pas.
Si on fait en sorte que chaque corps policier doive agir en vase clos,
je ne pense pas qu'on assure à la population du Québec la
meilleure protection. C'est pour cela que le BRQCO est un endroit
privilégié d'échange d'informations.
Le Président (M. Cornellier): L'honorable
député de Maisonneuve.
M. Burns: Simplement un dernier point sur le rôle et la
fonction, tel que je vous posais la question. Je comprends que vous ne pourrez
sûrement pas me donner de réponse définitive aujourd'hui,
parce que vous m'avez dit tout à l'heure, puisque vous avez
déjà mis en marche un comité qui va étudier le
rôle, en fait, l'éventuel retrait de l'aspect gendarmerie à
la Sûreté et la spécialisation ou la
surspécialisation de cela. Je me pose simplement tout haut la question,
sans vous demander de réponse immédiate, savoir si dans vos
cogitations vous n'aurez pas à tenir compte que si jamais la
Sûreté du Québec devient très
spécialisée et de moins en moins préoccupée par
l'aspect gendarmerie du fonctionnement d'un corps de police, ce n'est pas
très valorisant pour un corps de police comme le vôtre.
En tout cas, c'est une question que je me pose tout haut. Je vous la
donne si vous voulez vous en servir. Ce serait, au départ, un peu une
réaction que j'aurais en disant que si le corps policier, si l'aspect
tellement bien vu du corps de police de la CUM actuellement est tel qu'il est,
n'est-ce pas à cause d'une très grande spécialisation d'un
certain nombre de ses escouades? C'est ce genre de question. Mais
n'étant pas policier, puis n'étant pas un spécialiste de
matières policières, je me dis que c'est une affaire que des
policiers pourront traiter entre eux, puis brasser. En tout cas, je le dis pour
ce que cela vaut.
Mais là où je vous suis de très près, c'est
dans vos remarques concernant le BRQCO. A la page 11 de votre mémoire en
particulier, vous semblez vous inquiéter c'est ce que j'aimerais
savoir de vous non pas de l'existence ou de la participation d'autres
corps policiers au BRQCO mais, est-ce que je vous ai bien compris en entendant
que c'était par exemple des organismes, des agences gouvernementales,
des agences privées engagées dans la lutte sur le crime
organisé que vous voyiez mal dans la participation au BRQCO?
Si c'est cela, est-ce que vous pourriez expliquer davantage cet
aspect?
M. Barré: M. le Président, peut-être que la
dernière question du député de Maisonneuve peut rejoindre
jusqu'à un certain point la réflexion sous forme de question
qu'il se posait précédemment. Quand on s'interroge sur le
rôle de la Sûreté du Québec, la première chose
qui va nous frapper dans le projet de loi 41 c'est peut-être l'article
36. Comme on le mentionne également à la page 11 de notre
mémoire, on dit bien: On pourrait être tenté de nous servir
l'argument que la Sûreté du Québec, en tant que police
provinciale, devrait se spécialiser dans certaines sphères et se
consacrer davantage à certains aspects de la prévention du crime
ou de la criminalité, laissant à d'autres corps, le soin de
veiller à la sécurité routière ou de petites
municipalités... Alors c'est là, d'après nous, que peut se
poser véritablement le problème. Si effectivement on entend faire
de la Sûreté du Québec un corps de police
spécialisé, ultraspéçia-lisé ou
supraspécialisé, comme on veut, il nous semble que
déjà, dans un premier temps, ce n'est pas ce qu'on veut
faire.
On enlève à la Sûreté du Québec, un
domaine sur lequel la Sûreté du Québec pourrait ou devrait
prendre le contrôle ou assumer la principale responsabilité. Alors
c'est pour cela qu'on est amené à se poser la question d'ordre
général qu'on a voulu soumettre dans la seconde partie de notre
mémoire: Quel est le rôle de la Sûreté du
Québec, où s'en va la Sûreté du Québec dans
tout cela?
Si, d'une part, on dit que certaines activités ou certaines
fonctions devraient être dévolues à certains autres
organismes, qu'est-ce que la Sûreté du Québec vient faire
dans tout cela? Si on enlève cela de la Sûreté du
Québec, qu'est-ce qu'on va lui donner en retour à la
Sûreté du Québec, puisqu'on remarque que dans le même
projet de loi, par une autre disposition, on semble dire que la
Sûreté du Québec, pour toutes sortes de raisons qu'on ne
connaît pas, n'est pas en mesure de prendre le contrôle d'un
organisme comme le Bureau de recherche du Québec sur le crime
organisé.
M. Lalonde: Bien oui, mais je pense que c'est, respectueusement
soumis, mal interpréter en fait la disposition elle-même. Le BRQCO
est composé de membres qui peuvent apporter, donner un rapport au niveau
de l'information, et cela peut être aussi bien un ministère du
gouvernement, cela peut être un organisme privé qui, à
cause de la nature de ses fonctions, que ce soit par exemple une association de
banquiers, une association, par la nature de ses fonctions, est en mesure de
contribuer à la banque de renseignements qui a été
instituée au BRQCO.
Ce n'est pas une fonction qui est enlevée à la
Sûreté ou à un corps policier. Ce n'est pas confier
à une agence privée, par exemple, ou à un organisme non
policier, une fonction policière. Je pense qu'il faut que ce soit bien
clairement dit.
M. Barré: Sauf que, à ce moment-là, il faut
quand même voir les fonctions que ce bureau aura de par l'article 73b.
C'est qu'on lui donne quand même certaines fonctions bien
spécifiques, à cet organisme qu'est le Bureau de recherche sur le
crime organisé. C'est que cet organisme, à la base, sera
formé de policiers autant du Québec que de l'extérieur du
Québec, autant des agences gouvernementales que des agences
privées, engagés dans un but bien spécifique qui est la
lutte contre le crime organisé, avec certaines fonctions prévues
à l'article 73b; à ce moment-là, pourquoi cela ne
devrait-il pas incomber à la Sûreté, à toutes fins
pratiques, au point de vue du contrôle de ces fonctions?
M. Choquette: M. le Président, si on me permet une
intervention, non pas pour venir à la rescousse du Solliciteur
général qui est très capable de se défendre
lui-même, mais pour attirer l'attention du procureur de l'Association des
policiers provinciaux du Québec sur le fait que le Bureau de recherche
du Québec sur le crime organisé a toujours été sous
l'autorité du Procureur général et, par voie de
conséquence, de la Sûreté du Québec et que, en fait,
même s'il y a une collaboration extérieure venant d'autres corps
de police ou d'autres organismes qui est apportée à cet
organisme, au fond, la gestion du bureau de recherche a toujours
été entre les mains de la Sûreté du
Québec.
Je pense que, quand on regarde la rédaction de l'article 73a,
c'est assez clair que l'on veut continuer cette façon de
procéder. Alors, je ne sais pas... Je pense que c'est l'inspecteur
Gendron qui est actuellement le responsable du Bureau de recherche du
Québec sur le crime organisé, c'est un officier de la
Sûreté du Québec et il a succédé à M.
Patenaude, je pense, à ce poste. De toute façon, je crois que
vous avez ici de quoi, en fait, satisfaire votre point de vue, puisque c'est
composé de représentants désignés par le Procureur
général, sur la recommandation du directeur général
de la Sûreté du Québec. Remarquez que le siège du
bureau est à la Sûreté du Québec et que le bureau
travaille en étroite collaboration avec les services d'enquête de
la Sûreté du Québec.
Je voudrais aussi ajouter ceci. C'est que, dans les années
récentes lors des enquêtes qui ont été faites, soit
dans le domaine du crime organisé ou dans le domaine de la construction,
par exemple, la plus grande partie de ce travail, ou enfin une grande partie de
ce travail a été effectuée par des policiers de la
Sûreté du Québec et par les services d'enquête de la
Sûreté du Québec. Alors, je crois que, du point de vue
professionnel, le corps de police qu'est la Sûreté du
Québec a bénéficié de l'expérience acquise
dans les années récentes pour devenir un corps de plus en plus
spécialisé dans un type d'enquête qui demande,
évidemment, beaucoup de compétence.
M. Barré: Si M. le Président me le permet, en
réponse aux remarques du député d'Outremont,
effectivement, dans mon intervention précédente, il y avait deux
points. D'une part, le contrôle, si vous voulez, ou la direction de ce
bureau de recherche à la Sûreté, mais, d'autre part, la
composition aussi de ce bureau de recherche. A qui vont incomber les fonctions
prévues à l'article 73b? Le député d'Outremont nous
fait référence à la pratique qu'il établissait et
que nous connaissons, avec, évidemment, les problèmes qui ont pu
se poser et dont le député d'Outremont est également au
courant.
Alors, ce serait peut-être une façon de régler
certains problèmes.
M. Lalonde: Voici, Me Barré, pour faire suite à vos
remarques et à celles du député d'Outremont, l'article 73a
dit très clairement qu'i! est "composé de représentants
désignés par le Procureur général, sur
recommandation du directeur général de la
Sûreté".
M. Burns: Où sont choisis ces gens?
M. Lalonde: Ils sont choisis où on peut les trouver.
M. Burns: Sont-ils choisis au Québec ou à
l'extérieur?
M. Lalonde: Ah oui...
M. Burns: Ce sont des membres composant le bureau.
M. Lalonde: Choisis par...
M. Burns: Parmi les corps policiers et les agences
gouvernementales.
M. Lalonde: Oui.
M. Burns: Ce que je comprends, c'est que les gens de l'APDQ nous
disent: Nous n'avons pas d'objection à collaborer avec la GRC ou qui que
ce soit à l'extérieur et avec des agences privées, si on a
besoin de gens très spécialisés, par exemple, dans des
enquêtes en matière d'incendie criminel ou quoi que ce soit. Je
pense bien que vous n'avez pas d'objection à cela. Ce qu'ils disent,
cependant, c'est que le bureau lui-même devrait être
composé, tout au moins, de membres de la Sûreté du
Québec.
Ce n'est pas tout de dire que, sur recommandation du directeur de la
Sûreté, ces gens vont être choisis à gauche et
à droite, même si c'est le directeur de la Sûreté qui
fait la recommandation et que c'est le procureur général qui fait
le choix, si vous laissez une ouverture pour aller choisir les membres du
bureau à l'extérieur, je pense que c'est ce contre quoi on peut
en avoir.
M. Choquette: II y avait même quelque chose qui m'avait
échappé ici, à l'article 73b, dernier alinéa. "A la
demande du lieutenant-gouverneur en conseil, il dirige et coordonne les
enquêtes policières menées dans le corps d'une
enquête visée dans l'article 20 de la Loi des commissions
d'enquête". Je pense qu'on se référait, à ce moment,
exclusivement au crime organisé...
M. Lalonde: Au crime organisé.
M. Choquette: ...aux enquêtes qui seraient faites visant le
crime organisé, suivant des dispositions qui sont, par ailleurs,
prévues dans le même projet de loi. Alors, c'est un aspect qu'il
faut considérer.
M. Burns: Surtout, puis-je ajouter simplement que cela
m'apparaît comme une retraite très incompréhensible eu
égard aux faits que vous ve-nez, que nous venons tout récemment
de nous faire confirmer, le gouvernement du Québec, notre juridiction
dans cette matière par la Cour su-prême. Alors, je ne vois pas
pourquoi on serait obligé de se mettre à genoux devant quiconque
à l'extérieur et lui dire: Vous allez collaborer et soyez bien
gentil avec nous autres, on est tellement fin avec vous autres, on va vous
nommer quelques-uns de vos membres au bureau de recherche. Voyons donc!
M. Lalonde: Cela n'est pas incompatible d'une Dart d'avoir la
juridiction exclusive et tout à fait précise.
M. Burns: Pourquoi ne pas collaborer avec les îutres
groupes?
M. Lalonde: Mais je pense qu'il faut quand même être
réaliste si on veut avoir la collaboration d'autres groupes qui sont
susceptibles de contribuer au travail d'un tel bureau de recherche de par leur
banque d'informations, leurs connaissances particulières, leurs
expertises particulières. Il faut quand même reconnaître
qu'on doive aussi les accueillir à l'intérieur d'un bureau. Le
fait, par exemple, qu'il soit composé de représentants
désignés, que ces représentants soient
désignés par le procureur général sur
recommandation du directeur général de la Sûreté,
constitue, je pense, un élément de contrôle tout à
fait valable.
Deuxièmement, c'est le directeur général de la
Sûreté qui est responsable de l'administration du bureau. C'est le
cas jusqu'à maintenant, mais cela s'est perpétué
formellement dans la loi et le bureau peut adopter les règles de
pratique pour sa régie interne et la conduite de ses affaires aussi.
M. Choquette: Si vous permettez, je voudrais avoir des
explications sur l'alinéa que j'ai lu il y a quelques instants et qui me
paraît tout à fait insolite, du moins, de prime abord. Je ne vois
pas pourquoi ce serait le lieutenant-gouverneur en conseil qui
déterminerait quelle section de la police, en l'occurrence le bureau de
recherche sur le crime organisé, qui dirigerait et coordonnerait les
enquêtes policières menées dans le cadre d'une
enquête visée dans l'article 20, c'est-à-dire une
enquête sur le crime organisé, premièrement parce que cela
ne m'apparaît pas une prérogative normale pour le gouvernement
dans son ensemble et le Conseil des ministres dans son ensemble que de
déterminer quels policiers vont faire des enquêtes, quels
policiers vont être mandatés pour diriger l'enquête qui est,
par ailleurs, instruite par des commissaires nommés en vertu de la Loi
des commissions d'enquête dans le domaine du crime organisé. Je
pense, et ceci est ma première observation, que s'il devait y avoir une
attribution de responsabilités quant à la désignation des
policiers chargés de faire une enquête, cela devrait être la
responsabilité du procureur général, en vertu de ses
pouvoirs généraux, de diriger les affaires policières et
ceci sans intervention extérieure de nature politique. Alors, c'est une
première observation que je voudrais faire.
Deuxièmement, je ne vois pas pourquoi on détermine une
espèce de carcan ici qui fait que les commissaires chargés
d'instruire une enquête sur le crime organisé doivent, en somme,
avoir recours exclusivement à des enquêtes faites sous
l'égide ou sous l'autorité de ce bureau parce qu'il est
d'expérience récente que, dans le cas des enquêtes sur le
crime organisé et de l'enquête sur la construction, on a eu non
seulement recours à la documentation qui pouvait se trouver au bureau de
recherche du Québec sur le crime organisé, mais on a eu recours
aux services des policiers de certaines escouades spécialisées de
la Sûreté, comme de certaines escouades de policiers de la
Communauté urbaine de Montréal, comme aussi de certains policiers
de la GRC.
Alors, je voudrais bien avoir des explications sur l'inspiration de cet
article.
M. Lalonde: Je pense qu'en ce qui concerne la deuxième
partie, c'est une interprétation qui est fausse. Le fait de dire
qu'à la demande du lieutenant-gouverneur en conseil il dirige et
coordonne les enquêtes policières, cela ne veut pas dire que
l'enquête sur le crime organisé, en l'occurrence, qui serait
formée, doive se restreindre à cet organisme pour faire ses
enquêtes policières. Donc, ce n'est pas restrictif. Ce serait
fautif, je pense, de l'interpréter comme cela.
Deuxièmement, on sait que, d'après les dispositions de la
même loi, les commissions d'enquête sur le crime organisé
seraient formées par un arrêté en conseil, donc par un acte
du Conseil des ministres, du lieutenant-gouverneur en conseil, qui, dans le
même geste, je suppose, ferait en sorte que le BRQCO collabore pleinement
avec la Commission d'enquête sur le crime organisé pour
éviter certains problèmes qu'on a connus dans le passé,
pour qu'il y ait une coordination parfaite, que chacun tire sur le même
côte de la couverture.
M. Choquette: Le Bureau de recherche sur le crime organisé
n'a jamais été un organisme coor-donnateur dans le domaine soit
des enquêtes du crime organisé ou dans le domaine de la
construction, dans le passé. Le Bureau de recherche a sans doute
donné des renseignements. On a puisé dans sa documentation, mais
jamais il n'a joué de fonction active dans la préparation de la
preuve disponible dans ces enquêtes. Je m'étonne qu'on vienne tout
d'un coup lui faire jouer ce rôle de préparer la preuve pour les
fins d'une telle enquête. Je pose des questions à ce moment, je
voudrais avoir des éclaircissements, parce que cela chicote.
M. Lalonde: C'est fort possible que ce soit un pas en avant sur
ce qui s'est fait dans le passé. On remarque que le BRQCO est permanent
de par la nature même de la disposition. Il est créé par la
loi. Qu'il y ait enquête spécifique ou non en vertu des autres
dispositions de la Loi des commissions d'enquête sur le crime
organisé, il continue de fonctionner. Si le gouvernement, dans sa
responsabilité de combattre la criminalité en
général, décide qu'il y a lieu de faire une enquête
sur le crime organisé de façon spécifique, sur des cas de
criminalité bien spécifique, à ce moment, il donne en
quelque sorte des instructions au BRQCO, pour être bien sûr que la
collaboration sera entière, de diriger et de coordonner les
enquêtes policières qui seraient faites à
l'intérieur par cette commission d'enquête. C'est possible que ce
soit un peu plus que ce que le BRQCO a fait jusqu'à maintenant. Je pense
que, devenant adulte, cet organisme est sûrement habilité à
contribuer davantage, dans la lutte au crime organisé, au travail des
commissions spécifiques qui pourraient être
créées.
M. Choquette: C'est parce que cela peut peut-être poser des
problèmes en rapport avec les corps de la police eux-mêmes, je ne
dis pas spécifiquement la Sûreté, mais peut-être la
GRC ou la police de la CUM, que d'être soumis à l'organisme comme
tel dans son rôle de coordination. C'est une question sur laquelle on
peut s'interroger.
M. Lalonde: Oui, mais, à partir de là, je reviens
à la remarque du député de Maisonneuve, c'est très
clair que la responsabilité de l'administration de la justice
relève de l'autorité provinciale. Je ne vois pas qu'un corps
policier qui fait partie de ce BRQCO, même s'il devait relever d'une
autorité autre que l'autorité provinciale dans sa constitution,
puisse refuser de collaborer à une lutte particulière contre le
crime organisé. Voilà le canal tout à fait
idéal.
M. Choquette: C'est très clair en droit, mais ce n'est pas
aussi clair en fait.
M. Lalonde: Est-ce que vous pensez que ce sera plus clair avec
une disposition...
M. Choquette: En droit, il n'y a évidemment pas de
controverse sur cela, mais, en fait, c'est que, souvent, il y a des
problèmes entre corps de police.
De toute façon, je pense que j'ai peut-être fait
dévier la discussion qui portait sur un autre sujet. On pourra continuer
à discuter de cela en d'autres circonstances.
M. Burns: D'ailleurs, au moment où on discutera de ce
texte, lorsqu'on viendra article par article, moi aussi j'ai
énormément de réticence. Cela ne sert à rien de les
élaborer dès maintenant. Je pense qu'on est surtout là
pour entendre les gens.
M. Lalonde: Oui. Je ne voulais pas refuser la discussion
maintenant.
M. Burns: Oui, d'accord.
M. Lalonde: Messieurs...
M. Richard: S'il n'y a pas de questions...
M. Lalonde: Je vous remercie infiniment de votre contribution aux
travaux de la commission parlementaire, merci de vous être
présentés et de nous avoir donné votre point de vue.
M. Richard: Merci, messieurs.
Le Président (M. Cornellier): J'inviterais maintenant les
représentants de la Fédération des policiers.
Est-ce que les représentants de la Fédératior des
policiers sont présents?
Fédération des policiers
M. Marcil (Guy): M. le Président, mon nom est Guy Marcil.
Je suis directeur exécutif de la fédération. Avec votre
permission et celle de la commission, nous aimerions peut-être attendre
à la findans le but évident de ne pas faire de
dédoublement de ce qui s'est dit.
En fait, nous étions peut-être les premiers, avec le
Barreau, à demander cette commission. On a certainement des commentaires
à faire. Cependant, avec votre permission, nous aimerions attendre
à la fin pour ne pas faire de dédoublement sur certaines
représentations.
M. Lalonde: M. Marcil, vous faites bien peu de cas de
l'enthousiasme que nous avions, de l'attente que la commission a de vous
entendre!
M. Marcil: Je pourrai peut-être vous permettre le
même enthousiasme si vous me donnez la permission, soit à la fin
ou un peu plus tard...
M. Lalonde: En principe, je n'ai pas d'objection, si cela vous
accommode davantage.
M. Burns: Cela va. Parfait.
Le Président (M. Cornellier): Très bien, M. Marcil.
On vous remercie. J'inviterais alors les représentants de l'Association
des chefs de police et pompiers de la province de Québec. Est-ce qu'ils
sont présents? Oui.
Assoyez-vous, de préférence, en face de la table
centrale.
Messieurs, si vous voulez bien vous identifier.
Association des chefs de police et pompiers
M. Pothier (Roger): M. le Président, mon nom est Me Roger
Pothier. Je suis le conseiller juridique de l'Association des chefs de police
et pompiers de la province de Québec. J'ai ici, à ma droite, M.
François Magier, qui est président. Il y a un mémoire qui
est en train de vous être distribué, qui représente en
détail le point de vue de l'association sur certains aspects
soulevés par le projet de loi no 41, qui intéressent
particulièrement l'association.
Je signalerai que ce mémoire a été
entériné par l'exécutif de l'association, qu'il ne sera
pas lu en détail par le président. Celui-ci vous donnera
succinctement ou insistera succinctement sur les aspects qui paraissent les
plus importants à l'association et ensuite, évidemment, nous
serons disponibles pour répondre aux questions qui pourront être
adressées par votre commission parlementaire soit au président ou
à un des membres.
Je signalerai également que plusieurs membres de
l'exécutif, qui sont ici présents, pourront aussi répondre
à certaines questions s'il y a lieu.
Le Président (M. Cornellier): M. Magier, vous avez la
parole.
M. Magier (François): M. le Président, messieurs
les membres de la commission parlementaire, comme Me Pothier l'a
mentionné, le mémoire du projet a été
déposé hier au bureau du secrétaire des commissions
parlementaires. Je me bornerai ici à en souligner quelques-uns des
points essentiels.
Les articles 16 et 19 du projet expriment en termes législatifs
un des voeux exprimés dans le livre blanc sur la justice, soit
départager clairement entre certaines fonctions qui étaient en
général attribuées à la Commission de police...
Selon les objectifs exprimés, la Commission de police conservera sa
fonction normative et sa fonction d'enquête alors que la Direction
générale de la sécurité publique devra s'occuper de
la prévention de la criminalité et de la coordination de l'action
des forces policières.
Notre mémoire signale au législateur ce qui nous parait
être un chevauchement de juridictions. Nous nous demandons comment
devront agir les chefs de police dans les cas où les conseiols
prodigués par la Commission de police ne convergeront pas dans les
directions des politiques, programmes et directives préconisés
par la direction générale.
J'attire également l'attention de votre commission sur les
recommandations contenues dans notre mémoire à l'égard des
enquêtes tenues par la Commission de police lorsque la conduite d'un
membre d'un corps policier et plus particulièrement lorsqu'un chef de
police est mis en cause. Nous vous signalons que la plupart de ces demandes
d'enquêtes proviennent de citoyens mécontents ou d'associations de
policiers. Ces enquêtes servent bien souvent à tenir
indûment la réputation des chefs de police et à handicaper
leur carrière de façon injuste en raison de la publicité
dont les enquêtes profitent.
Or, les articles 14 et 41 du projet de loi nous paraissent poser, sans
aucun doute, le principe du caractère public des enquêtes de la
Commission de police à l'exception des cas où
l'intérêt public commande le huis clos.
Nous croyons que la consécration de ce principe sans nuance sera
préjudiciable. Notre association préconise que lorsqu'une
enquête de la Commission de police met directement en cause un membre du
corps de police, que l'enquête soit tenue sans publicité. Le
contenu de l'enquête pourrait être rendu public par contre sans
difficulté en même temps que le rapport de la commission.
Alternativement, notre association suggère que la commission puisse
procéder en public si elle le désire à la condition
toutefois qu'elle puisse émettre pendant la tenue de l'enquête une
ordonnance de non-divulgation valable jusqu'à la publication de son
rapport. Une telle ordonnance devrait être assortie des sanctions
prévues dans la loi.
D'autre part, dans notre mémoire, nous désirons que les
demandes d'enquête frivoles ou malicieuses soient sanctionnées
comme cela est déjà prévu à l'article 26 de la Loi
de police dans les cas d'enquêtes demandées par les
municipalités. Nous ne voyons pas pourquoi les demandes d'enquête
frivoles ou malicieuses manifestement mal fondées, émanant de
citoyens ou d'autres sources ne feraient pas l'objet de sanctions semblables
à ce qui est déjà prévu pour les
municipalités. Notre association estime que les cadres d'une
enquête tenue par la Commission de police devraient à chaque fois
être exprimés par écrit afin que l'objet
de l'enquête soit déterminé nettement aux yeux de
ceux qui sont sujets à enquête.
Par ailleurs, les membres de notre association ont constaté la
naissance et la prolifération d'une pratique syndicale policière
nouvelle à l'échelle du Québec, qui est celle des
ralentissements du travail ou tactiques assimilables à celles des
ralentissements de travail, bien que l'article 96 du Code du travail prohibe
jusqu'à un certain point les ralentissements d'activité sans
toutefois interdire clairement la participation aux ralentissements de
travail.
Nous croyons que la loi devrait définir clairement comme une
infraction de telles pratiques et prévoir des pénalités
sévères et même d'envisager, dans certains cas, la perte de
l'accréditation.
Notre mémoire signale le changement important qui est
apporté à l'article 52 de la Loi de police. Désormais,
toutes les municipalités ayant une population de 5000 habitants et plus,
quel que soit leur statut, seront obligées de maintenir un corps de
police. Nous soumettons que les municipalités qui ont déjà
opté pour mettre sur pied un corps de police et qui possèdent
maintenant la liberté d'abolir ce corps de police devraient être
obligées de le maintenir.
Subsidiairement, si cette suggestion n'était pas retenue, notre
association estime qu'il est du devoir du législateur de pourvoir
à ce que les fonctionnaires dont les postes seront abolis voient leur
sort réglé de façon juste et équitable en
conservant une fonction analogue et des conditions de traitement semblables
à celles qu'ils détiennent actuellement.
En outre, le projet de loi 41 amende à nouveau l'article 63 de la
Loi de police qui traite des appels à la Commission de police dans les
cas de destitution ou de réduction de traitement. L'Association des
chefs de police et pompiers insiste fortement pour que le texte de loi
prévoit que pendant la durée de l'appel une personne, ayant fait
l'objet de mesures de destitution ou de réduction de traitement, ait
droit à son plein traitement. L'Association des chefs de police et
pompiers de la province de Québec possède un intérêt
primordial à ce que les dispositions de la Loi de police
prévoient la mise sur pied de mécanismes et l'instauration des
dispositions qui seront favorables à l'épanouissement d'un
travail policier efficace et harmonieux.
L'association attache une grande importance aux dispositions de la Loi
de police et aux structures policières en général. Elle
espère vivement que le législateur tiendra compte des points de
vue qu'elle émet dans le mémoire qui est soumis à votre
commission parlementaire. Merci.
M. Lalonde: M. Magier, nous venons de recevoir votre
mémoire que vous avez résumé. J'ai essayé de le
parcourir en même temps que vous en faisiez un sommaire. On peut, je
pense, résumer comme ceci. Vous exprimez des inquiétudes quant au
partage des devoirs entre la Commission de police et la Direction
générale de la sécurité publique. Naturellement, il
faudrait être prophète pour affirmer d'une façon ou d'une
autre quel sera le comportement de la commission et de la direction
générale. Je crois qu'on doit présumer, justement à
cause de la précision avec laquelle le législateur tente de
définir leur fonction respective, que chacun des organismes, ou
l'organisme d'un côté et et le serve de l'autre, va s'en tenir
à ses fonctions propres et qu'aucune ambiguïté ne demeurera
dans l'esprit des citoyens, y compris dans l'esprit des membres de votre
association.
C'est un voeu que je peux faire actuellement, je ne pense pas pouvoir
vous l'assurer d'avance, mais je peux vous l'assurer d'avance dans la mesure
où les mécanismes d'administration publique en place tendent
justement à faire en sorte que chacun fasse son métier seulement.
Les cas de confusions qui pourraient exister, à cause de la
période précédente, vont facilement et rapidement se
résorber. Je ne pense pas pouvoir vous dire autre chose que cela, mais
si vous pensez que c'esi la rédaction des articles eux-mêmes qui
crée cette confusion, j'aimerais que vous me disiez en quoi cela peut
créer la confusion. A ce moment-là, or pourra peut-être
apporter des aménagements ou des précisions. C'est justement le
but de cette partie de la loi que vous mentionnez, de préciser la
fonction de chacun pour qu'il n'y ait plus de confusion.
Je ne reviendrai pas sur la démonstration que j'ai eu l'occasion
de faire à quelques reprises, y compris devant votre association,
à savoir que la Commission de police, on lui en a demandé beau
coup depuis sa création. Elle a fait un travail comme je vous ai dit,
très valable. Elle en a fait plus, en fait, que la loi, probablement,
lui en de mandait. Elle l'a fait pour servir la population. De puis la
création de la Direction générale de la
sécurité publique, il y avait lieu de préciser quel
était le rôle de chacun et je compte que les représentants,
les responsables de ces organismes sauront, dans les faits, quotidiennement,
s'en tenir à leurs propres responsabilités.
M. Pothier: M. le Solliciteur général, nou: croyons
effectivement que le projet de loi apporte certainement des clarifications, par
exemple ei matière de coordination d'activités policières.
Je crois que le texte antérieur n'était pas absolumen clair quant
à l'attribution de la responsabilité. L'on retrouve maintenant,
à l'article 27a de la Loi de police, une attribution très claire
à la direction généraie de cette
responsabilité.
Maintenant, si on examine un peu le réaménagement qui se
fait au niveau des pouvoirs de Ia Commission de police, on se rend compte que
jusqu'à l'adoption du projet de loi ou jusqu'à ce que le projet
de loi entre en vigueur, le texte de l'article 16 disait bien que
c'était la commission qui était chargée de favoriser la
prévention du crime et l'efficacité des services de police et
là, on lui donnait certains pouvoirs qui sont
énumérés à l'article 16.
Maintenant, on se rend compte, et je pense bien que c'est l'objectif qui
était visé, que l'article 27a a déplacé la
responsabilité vers la direction
générale et l'article 27a dit maintenant que la di-ection
générale de la sécurité publique est
chargée, justement au paragraphe d), de favoriser et de promouvoir la
prévention de la criminalité et on a enlevé, dans
l'article 16 justement, les mots, l'indication que la commission était
chargée de cette mission ou de cette juridiction-là.
Et, en même temps, on a indiqué, dans l'article 27a
je pense que l'article 27a doit être lu comme un tout que la
direction générale de la sécurité publique du
ministère de la Justice est chargée d'élaborer
également des politiques et des programmes de sécurité
publique et d'en promouvoir l'implantation. Et, en même temps, on a
conservé à la Commission de police une fonc-ion d'agir en vue
c'est toujours dans l'article 16 de la prévention du crime
et de l'efficacité tes services de police, on a préservé
à la Commission de police sa fonction de conseiller les corps le police
municipaux, justement, dans ce secteur l'activité.
De là, on peut quand même penser qu'à un moment
donné, et puis ce n'est pas du tout une critique ni une expression de
méfiance à l'égard de la future direction
générale qui, d'ailleurs, existe déjà dans les
faits, vous l'avez signalé, mais on peut penser, cependant, qu'il
pourrait y avoir des conseils qui ne seront pas tout à fait, qui
n'auront pas tout à fait la même orientation qui seront
donnés à des corps de police municipaux ou à des chefs de
police et, à ce moment-là, il n'y a aucune indication, dans le
texte de loi, de l'a préséance qu'il faut accorder aux conseils
de l'un ou de l'autre organisme. Il est évident que, dans ces
circonstances, les gens qui, au niveau local, auront à répondre
justement à des directives peut-être contradictoires, seront
placés dans une position extrêmement inconfortable.
M. Lalonde: Naturellement, on est dans le domaine de
l'hypothèse, comme j'essayais de le dire tantôt. Je ne peux pas
faire oeuvre de prophète, mais je pense qu'il est raisonnable de penser
que, lorsque la direction générale aura élaboré des
politiques de prévention, par exemple, c'est très clairement son
rôle de le faire. La Commission de police, dans son rôle de
conseil, devra nécessairement tenir compte de cela, des objectifs qui
sont définis dans ces politiques.
Je ne pense pas qu'on puisse présumer que la maison va être
divisée contre elle-même. Au contraire. D'ailleurs, if y a
même un devoir inscrit dans la loi, à l'article 27a,
sous-paragraphe e), p)our la direction générale, de collaborer,
dans les domaines de sa compétence, avec les organismes oeuvrant en
matière policière. Ce devoir de collaboration est inscrit
également en ce qui concerne a commission de police.
Alors là, le désir du législateur est très
claire-nent exprimé, que les deux organismes travaillent
nécessairement dans le même sens. C'est à peu près
tout ce que je peux vous dire actuellement et je ne prévois pas de
difficulté qui ne pourrait pas se résorber à I'usage.
M. Pothier: En tout cas, M. le Solliciteur général,
nous avons constaté que ce devoir existe, en fait, dans l'article 27a;
c'est bien inscrit et c'est inscrit également à l'article 16
qu'il y a une obligation de collaboration entre les deux organismes et la
Commission de police et la direction générale. Maintenant, nous
soulevons le problème, mais nous serons extrêmement attentifs
quant à la façon dont cette collaboration sera faite. Nous
espérons évidemment... Nous faisons confiance aux deux
organismes, cependant, nous soulevons le problème immédiatement
et nous vous demandons également de suivre, d'une manière assez
attentive le déroulement des activités des deux
organisations.
M. Lalonde: Je pense que mentionner le problème, c'est le
régler, et je suis sûr qu'on peut accorder une confiance totale
aux organismes, aux responsables des organismes de voir à ce qu'il n'y
ait pas de confusion qui se crée dans l'esprit des gens.
La deuxième question que vous soulevez ce sont les
enquêtes; c'est surtout l'aspect... Il y a d'autres
éléments, mais c'est surtout l'aspect publicité, je pense,
qui vous concerne. Pour ma part, je pense qu'on peut assimiler dans une bonne
mesure l'enquête que l'on fait sur la conduite d'un policier, qu'il soit
chef ou non, à une enquête qui concerne la discipline, je veux
dire à une enquête qu'un comité de discipline fait à
l'égard d'un membre d'une corporation professionnelle. On sait que, dans
le deuxième cas, cela se passe de façon privée. Il n'y a
pas de publicité. S'il y a lieu de clarifier la loi en ce sens, je suis
prêt, quant à moi, à proposer les clarifications
nécessaires, à la commission parlementaire, lorsque nous
arriverons à l'étude de cet article, pour le clarifier.
Y aurait-il des questions de la part des gens de la commission
là-dessus?
M. Burns: Pas là-dessus.
M. Pothier: Puis-je faire remarquer que notre suggestion sur
cette question est double; elle est alternative. Evidemment, il est inscrit
maintenant dans le projet de loi un principe un peu nouveau à l'effet
que toutes les enquêtes devront être publiques, à moins que
le huis clos puisse être déclaré dans
l'intérêt public justement. Nous signalons un problème,
à l'égard des enquêtes tenues, des enquêtes qui
mettent en cause la conduite de membres de corps de police et nous faisons une
double suggestion. Nous disons: Premièrement, ce devrait être le
principe inverse qui devrait prévaloir dans ces cas; c'est-à-dire
que ces enquêtes devraient plutôt être à
caractère privé, à moins que l'intérêt public
justifie justement de les tenir publiquement. En second lieu, nous faisons une
proposition alternative. Nous disons: Si cette suggestion n'était pas
retenue, pourquoi ne pourrait-on pas envisager, un peu comme dans le cas des
enquêtes préliminaires c'est un amendement récent
qui a été fait dans le Code criminel pourquoi ne
pourrait-on envisager dis-je, de tenir ces enquêtes,
peut-être de façon publique, mais d'interdire la publicité
qui est extrêmement dommageable à la réputation,
jusqu'à ce que le rapport de la Commission de police soit fait.
A ce moment-là, il n'y a absolument aucun problème
à ce qu'il y ait une publicité parce que le rapport vient
rétablir justement les faits, soit que le rapport apporte un blâme
ou encore qu'il exonère de tout soupçon ou de tout doute la
personne qui est visée par la demande d'enquête, qui est souvent
injustifiée. Messieurs les membres de la commission parlementaire, ceci
m'amène à insister sur une deuxième proposition que nous
faisons dans notre mémoire à l'égard des enquêtes,
qui nous paraît extrêmement importante.
Nous avons remarqué que, selon les statistiques qui ont
été colligées en 1975 par la Commission de police, de 1968
à 1975 il y a eu 904 demandes d'enquête. Sur ces demandes
d'enquête, 658 sont provenues de citoyens et 50 ont été
faites seulement par des conseils municipaux, ce qui veut dire que l'immense
majorité des demandes d'enquête à la Commission de police
et des enquêtes tenues par la Commission de police sont faites à
la demande de citoyens ou d'organismes ou de personnes qui ont une position
d'antagonisme, souvent en tout cas, vis-à-vis de la direction des corps
de police.
Or, ce que nous disons, c'est que, lorsque la commission décide
de tenir enquête, elle a fait une pré-enquête dans les cas
de demandes qui viennent des citoyens. Elle a le droit de faire cela et elle le
fait, et elle élimine les choses qui manifestement sont mal
fondées. Cependant, il arrive bien souvent que, face à ces
demandes d'enquête, elle doit justement tenir une enquête pour
déterminer si la demande est malicieuse ou frivole ou manifestement mal
fondée. Cela amène, évidemment, les gens qui sont sujets
à enquête à faire des frais considérables et souvent
aussi à voir leur réputation ternie d'une manière
quasiment irréparable.
Dans ces cas, nous vous suggérons dans notre mémoire de
faire ce que le législateur à déjà fait depuis 1968
à l'égard des demandes malicieuses ou frivoles qui émanent
des conseils municipaux. Vous remarquerez que l'article 26 de la Loi de police
permet à la Commission de police, dans ces cas, de condamner le conseil
municipal à payer les frais de l'enquête. Ce que nous vous
suggérons, c'est que, dans les cas où une enquête
manifestement mal fondée, malicieuse ou frivole serait tenue à la
demande d'une autre source que le conseil municipal, d'inscrire une
règle semblable dans la loi.
M. Lalonde: Ecoutez, je prends note de votre suggestion. Quant
à la question de la publicité, vous avez remarqué que
l'article 14 qui réfère à l'article 20a propose
actuellement qu'une enquête sur un corps de police soit publique; donc,
la règle sera la publicité, mais c'est bien sur un corps de
police. Le projet de loi se trouve être muet en ce qui concerne un membre
d'un corps de police, mais on a attiré mon attention sur le fait que le
silence, à ce moment-là, ne règle peut-être pas la
situation.
M. Pothier: Bien, il me...
M. Lalonde: Parce que, dans le passé, la Commission de
police avait interprété le silence comme l'obligeant à la
publicité. Alors, il y a peut-être lieu de considérer
l'opportunité d'apporter un amendement, au moment de l'étude
article par article, pour confirmer le principe de la publicité dans une
enquête sur un corps de police, mais confirmer aussi le principe de la
non-publicité dans une enquête sur un membre d'un corps de police,
tout en laissant à la commission la discrétion de faire une
exception à cette règle le cas échéant.
M. Pothier: M. le Solliciteur général, j'aimerai:
ajouter une précision. C'est qu'il est exact que l'article 20a ne
mentionne que les corps de police c'est-à-dire que s'il s'agit
d'enquête sur des corp: de police.
Il est certain que c'est inscrit dans la loi de police depuis 1968, que
les pouvoirs que Ia Commission de police a de tenir enquête, sont les
pouvoirs qui se réfèrent à la Loi des commissions
d'enquête, au chapitre 11. Vous avez précisément
amendé, par votre projet de loi 41, le chapitre 11 pour dire que les
enquêtes sont publiques. Cela vise les enquêtes des commissions
d'enquête en général, ce qui pourrait, par la bande, si
vous vous lez, aussi viser les enquêtes sur la conduite des membres d'un
corps de police. Il faut quand même tenir compte du fait qu'il y a deux
articles dans le projet de loi qui inscrivent le caractère de
publicité.
M. Lalonde: Je pense qu'on s'entend, mais je ne vous ai pas
exprimé assez clairement ce que j'avais l'intention de faire. Je voulais
proposer un amendement qui traiterait spécifiquement des enquêtes
sur les membres des corps de police en confirmant la règle selon
laquelle cela se tient à huis clos, sauf décision contraire de la
commission, autrement dit, d'affirmer le principe contraire.
M. Burns: Tout simplement une question. Relativement à ces
fameuses enquêtes et le lien que vous y faites avec la publicité,
vous nous donnez des statistiques qui apparaissent au rapport annuel de la
commission de police pour l'année 1975, c'est-à-dire les 904
demandes d'enquêtes dont 658 sont logées par des citoyens. Ensuite
vous dénombrez ce qui apparaît au rapport de Ia commission de
police. Avez-vous des statistique sur la justification de ces demandes
d'enquête?
M. Pothier: On a toujours quand même le rapport de la
commission de police. Evidemment, les statistiques ne correspondent pas
exactement aux 904 demandes qui ont été faites.
M. Burns: Parce qu'il y en a qui ont pu être instruites
dans une autre année.
M. Pothier: C'est cela. C'est ce qui se produit. Maintenant, on
se rend compte qu'il y a une bonne majorité des enquêtes
demandées qui sont mal fondées. C'est ce que je pourrais dire,
sans m'engager sur des chiffres précis, qui de toute façon sont
contenus dans le rapport de la commission de police que j'ai ici. Il y a une
grande majorité des demandes d'enquête qui sont mal
fondées. Soit qu'elles soient écartées au point de
départ, à la suite de la pré-enquête que tient la
commission de police...
M. Burns: Donc, celles-là ne sont pas visées par
l'aspect de la publicité?
M. Pothier: Non, elles ne sont pas visées par l'aspect de
la pubilcité, mais il y a un problème nouveau qui vient de se
soulever, parce que maintenant les enquêtes de la commission de police
doivent être tenues en public et cela pourrait vouloir dire que
même les pré-enquêtes devront être tenues en public
aussi. On n'est plus tout à fait dans les mêmes contextes
légaux où on était avant l'adoption ou avant les
propositions qui sont contenues dans le projet de loi 41. Il faut tenir compte
de cela aussi, je crois.
M. Lalonde: Peut-être qu'il y aurait des réponses
à apporter au député de Maisonneuve. Sa question
était sur les statistiques.
M. Burns: Oui, oui.
M. Lalonde: Les 904 sont mentionnés ici. Sur les 904
dossiers, il y en avait 199 qui n'étaient pas encore vidés au
moment où ces statistiques ont été faites. Sur la
différence, c'est-à-dire à peu près 705, il y a
seulement 15% des demandes d'enquête qui ont été
acceptées par la Commission de police...
M. Burns: Et où il y a eu effectivement enquête.
M. Lalonde: ... et où il y a eu effectivement
enquête. Cela comprend les demandes d'enquêtes par des corporations
municipales, des conseils municipaux où la commission n'a pas le choix,
où elle doit procéder à l'enquête.
Alors, donc, plus que 85% des demandes sont rejetées après
examen de la plainte et il n'y a pas d'enquête qui suit.
M. Burns: A ce moment-là, je me rallierais partiellement
à la recommandation de l'Association des chefs de police et de pompiers
je m'excuse si je n'ai pas le nom exact à la mémoire
si on disait que ne seront pas publicisées les enquêtes qui
sont, dès le départ, mises de côté mais qu'une fois
que l'enquête... Ce que je crains sérieusement, je vous le dis
tout haut, c'est qu'on soit en train de faire une situation spéciale
à une catégo- rie de gens qui doivent avoir, je pense, comme les
hommes publics aussi, tout au moins l'apparence d'être égaux
devant la loi par rapport à n'importe quel citoyen.
A partir du moment où vous mettez une disposition qui est
exactement à l'inverse du droit commun, c'est-à-dire la
publicité des enquêtes ou des procès, sauf une série
de conditions, les bonnes moeurs et tout ce que vous voulez,
l'intérêt public l'exige, qu'il puisse y avoir huis clos; si vous
inversez exactement la situation, je ne suis pas certain que ce sont aux chefs
de police et de pompiers qu'on rend service. Je pense qu'à long terme et
dans une certaine psychologie collective, on fait de ces gens qui
déjà détiennent un pouvoir à l'intérieur de
notre société qui est assez exceptionnel, vous l'admettrez, un
peu des super-citoyens. Je pense que c'est mauvais, non pas dans
l'intérêt de l'ensemble de la société, c'est mauvais
pour le policier, c'est mauvais pour le chef de police, c'est mauvais pour le
chef de pompiers concerné.
Je me rendrais à la demande de l'association, si elle se limite
aux plaintes qui sont tout simplement remises à la commission et qui
sont, dès avant l'enquête, jugées comme non valables. A ce
moment, cela me paraît tout à fait normal qu'on protège le
chef de police et le policier qui sont l'objet d'une telle plainte qui est
tellement frivole qu'on ne poursuit même pas l'enquête. Mais, une
fois que l'enquête est jugée nécessaire, qu'on inverse la
situation normale du droit, c'est-à-dire de la publicité des
enquêtes, de la publicité des procès et de la
publicité des échanges devant les tribunaux, j'aurais beaucoup de
difficulté à me ranger derrière une telle position.
M. Lalonde: J'aimerais...
M. Burns: Si je faisais la distinction entre une plainte qui
nécessite, au dire de la commission, une enquête et celle qui n'en
nécessite pas.
M. Lalonde: Je me sens obligé d'interrompre le
député de Maisonneuve pour apporter la précision suivante.
C'est que, justement, dans les cas de plaintes qui ne sont pas suivies par une
enquête, la grande majorité des cas, il n'y a pas de
publicité de toute façon.
M. Burns: Bien, c'est cela, il n'y en a pas.
M. Lalonde: Mais c'est seulement lorsqu'il y a une enquête
qu'il y a une publicité. Là, on pourra en discuter lorsqu'on
arrivera à cet article. Je pense bien que la recommandation est
très claire. Il reste à savoir: Est-ce qu'on peut assimiler le
cas d'un chef de police qui a subi une enquête de discipline, au fond? Il
n'y a pas d'association professionnelle, de corporation professionnelle de
chefs de police ou de pompiers, enfin, on parle de police ici, est-ce qu'on ne
pourrait pas l'assimiler, justement, à un professionnel dont la conduite
est examinée par ses pairs? Cela se fait sans publicité
jusqu'à ce qu'il y ait...
M. Burns: S'il y a appel, il y en a.
M. Lalonde: Oui, mais jusqu'à ce qu'il y ait une
conclusion.
M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Une décision.
M. Burns: Oui.
M. Lalonde: Lorsqu'il y a une décision,
naturellement...
M. Burns: Mais s'il y a appel... J'apprécie le
rapprochement que Me Pothier faisait entre l'ordonnance de non-publicité
qui a lieu dans des cas d'enquêtes préliminaires lorsque c'est
demandé par l'accusé... Dieu sait que, dans le passé, il y
a des personnes, avant la mise en application de cette loi, qui en ont
souffert. Je pourrais nommer des noms de gens bien connus qui en ont souffert.
Je pense, par exemple, à une enquête d'incendie relativement
à la ville de LaSalle et où un professeur a probablement
brûlé sa carrière alors qu'il a été
libéré à la suite de l'enquête préliminaire.
J'apprécie cette comparaison que vous faites, mais est-ce qu'on ne
pourrait pas faire le parrallèle au complet et dire: L'enquête
préliminaire, à toutes fins pratiques, c'est celle que la
Commission de police fait avant de décider qu'il y ait lieu à
enquête ou pas. Je ne sais pas.
Est-ce que je vais trop loin ou si je ne vais pas trop loin? Je me pose
la question. Dans le fond, en plus de l'intérêt public que je
recherche dans une telle disposition, c'est aussi l'intérêt des
chefs de police eux-mêmes qui doivent, à mon avis, garder patte
blanche devant la population, doivent être respectés par la
population. Si on veut que des gens qui ont des fonctions d'une telle
importance dans une société soient respectés, il ne faut
pas qu'on ait l'air d'en faire des super-ertoyens ou des citoyens un peu
spéciaux en plus déjà des pouvoirs énormes qu'ils
détiennent au sein d'une municipalité.
Dieu sait que, dans des petites municipalités, cela a encore plus
d'importance parce que là, c'est vraiment le chef de police. C'est le
chef de police, ce n'est pas l'être anonyme que peut être le chef
de police d'une grande municipalité où il y a des centaines et
des centaines de policiers.
M. Pothier: Maintenant, vous remarquerez que les propositions que
nous vous formulons ne vont pas du tout dans le sens de la protection ou
d'empêcher, si vous voulez, le public ou même les gens d'avoir
accès à une formule d'enquête et même au public de
connaître les modalités ou la tenue de l'enquête et ce qui
se passe à l'enquête. Ce que nous désirons, cependant,
c'est que les directeurs de police et également les membres des services
des corps de police, qui voient à tout bout de champ des demandes
d'enquête formulées sur eux et des enquêtes tenues
également... C'est vrai aussi dans les cas d'appel, dans les cas de
destitution ou de réduction de traitement.
C'est justement l'inverse de la règle du droit commun qui
s'applique aux directeurs de police à ce moment-là. Ils sont
jugés dans des matières disciplinaires sur la place publique, ils
sont déshabillés sur la place publique avant même qu'on ait
une première étape qui conclut là-dessus. Ce que nous
désirons surtout... Les enquêtes, nous sommes prêts à
ce que le même pouvoir d'enquête existe et même le
caractère public comme tel d'une enquête ne nous gêne pas
tellement, mais ce que nous voudrions, c'est qu'il y ait des mesures de
protection pour la réputation des chefs de police...
M. Burns: Je comprends.
M. Pothier: ... qui n'ont pas à être
protégés. Cela me paraît également jouer dans
l'intérêt du public parce que, vous savez, un directeur de police
qui voit sa réputation ternie, même s'il sont blanchi après
un rapport, a beaucoup de difficulté à faire fonctionner son
service avec efficacité ensuite.
M. Burns: En somme, vous n'avez pas d'objection à ce que
l'enquête soit tenue publiquement, mais vous aimeriez qu'il puisse y
avoir une ordonnance de non-publicité de cette enquête, si c'est
demandé par l'intéressé.
M. Pothier: Justement.
M. Burns: C'est un peu le parallèle total que l'on
pourrait faire avec l'enquête préliminaire en matière
criminelle.
M. Pothier: C'est uniquement au niveau de la technique,
cependant, que nous faisons une comparaison et non pas au niveau des
principes.
M. Burns: Non, d'accord. C'est bien sûr que ce n'est pas du
tout de la même nature. Si cela l'était, ce serait devant les
tribunaux réguliers que cela se passerait.
M. Pothier: Oui, parce que s'il y a des accusations criminelles
à porter, vous savez, je ne crois pas que les directeurs de police aient
un statut particulier devant les tribunaux.
M. Burns: C'est bien évident; cela j'en suis bien
conscient. D'accord, cela répond à ma question. Oui, j'aurais
simplement une question très très brève. En tout cas, en
ce qui me concerne, il n'aurai pas d'autres questions, de sorte que vous ne
serez pas obligé de revenir ce soir, à moins que le ministre ait
d'autres questions. C'est relativement à l'Institut de police.
D'après les remarques que j'ai vues rapidement là,
malheureusement comme le disait le ministre, on n'a pas eu le temps de lire
votre mémoire en profondeur, vous semblez soulever la question des
dispositions nouvelles de l'article 75 et actuelles de l'article 77 de Ia Loi
de police, l'une dans le cas de 75 nous disant que l'institut est
chargé, selon certaines réserves, de concevoir, préparer
et dispenser des cours de
formation policière aux cadets de la Sûreté du
Québec et aux cadets de l'Office des autoroutes.
Vous semblez être inquiet du fait qu'à cet
article-là les corps de police municipaux ne sont pas mentionnés,
bien que l'article 77 existe et donne la possibilité aux policiers
municipaux de suivre de tels cours. Est-ce que, dans le fond, ce que vous
demandez, c'est qu'on inscrive à l'article 75 les corps de police
municipaux? Dans le fond, 75 ne vise que les programmes; je le lis bien,
là: "Concevoir, préparer et dispenser des cours de formation
policière." Est-ce que, dans le fond vous voulez avoir une formation
conçue, préparée, planifiée de façon unique,
tant pour les policiers provinciaux que les membres de l'Office des autoroutes
que pour les policiers municipaux? Est-ce que c'est cela, dans le fond,
l'affaire?
M. Pothier: Bien oui, parce que vqus savez que les policiers
municipaux fréquentent l'Institut de police en très grand
nombre.
M. Burns: Les amendements n'empêcheront pas cela non plus.
Ils vont continuer...
M. Pothier: Oui.
M. Burns: ... à le fréquenter.
M. Pothier: Et nous ne voyons pas pourquoi l'Institut de police
ne serait pas un institut dont l'accès serait ouvert automatiquement de
par la loi et également dont les cours seraient conçus en
fonction des besoins des corps de police municipaux. Ce que les membres de
l'association ont justement déploré, c'est un peu et parfois
d'être traités en parents pauvres par rapport à des corps
de police qui sont peut-être considérés par certains
esprits comme étant plus nobles ou ayant une élévation un
peu particulière, alors qu'en fait les juridictions sont les mêmes
et peut être même un peu plus nombreuses dans le cas des policiers
municipaux parce que ces gens sont non seulement agents de la paix, mais ils
sont aussi constables municipaux.
Alors on ne voit pas pourquoi ils n'auraient pas accès à
l'Institut de police qui est justement destiné à donner une
formation aux gens de la Sûreté du Québec et puis...
M. Burns: Est-ce que vous avez pensé aussi que, dans
certains cas, cela pourrait, si on ne fait pas de distinction, poser des
problèmes très sérieux. Je pense, par exemple, aux
problèmes qui se sont posés. Le Solliciteur
général, ou en tout cas, le sous-ministre qui s'y connaît
dans ce domaine, se souvient du cas qui a été posé pour un
certain nombre d'agents de la paix à l'emploi du gouvernement du
Québec. Dans un but bien honnête et bien franc de recyclage, on a
envoyé des agents à l'institut et on les a insérés
dans le plan habituel de formation des cadets de la Sûreté du
Québec. Certains qu'on recyclait étaient physiquement, dans bien
des cas, absolument incapables de suivre les mêmes cours et, selon les
mê- mes normes, de sorte qu'on s'est tapé une couple de crises
cardiaques dans ces premiers mois. Je vous rappellerai les cas; le ministre ne
semble pas s'en souvenir.
On est obligé, à partir de là, de se rajuster. Je
pense aux agents de la paix à l'emploi du gouvernement, entre autres,
certains qui sont, soit gardiens de prison ou encore qui sont membres du
Syndicat des agents de la paix. Il y a eu, à partir de ce
moment-là, un certain rajustement et c'est peut-être pour cela, je
ne sais pas, peut-être que le ministre...
M. Lalonde: On m'explique que lorsque cette loi avait
été adoptée, l'article 75 prévoyait que l'institut
était chargé de dispenser des cours de formation policière
et de perfectionnement aux cadets et aux membres de la Sûreté.
Là, on ajoute les policiers d'autoroute. L'article 77 prévoyait,
de plus, que les policiers municipaux, ainsi que les constables spéciaux
et les personnes qui sont appelées à le devenir, peuvent aussi
fréquenter l'institut, aux conditions déterminées par le
Procureur général. On m'explique lorsque cela a été
adopté, c'était pour empêcher, ou enfin, contrôler
l'impact budgétaire simplement que pourrait représenter la
fréquentation, par un grand nombre de cadets ou de personnes
appelées ^devenir policiers municipaux ou de policiers municipaux, sur
le budget de l'institut.
Donc, il y avait une espèce de tampon créé par la
loi, où le Procureur général pouvait dire: On en prend
seulement un certain nombre. Il y avait également une charge qui
était quotidienne ou hebdomadaire. Maintenant, la pratique, apparemment,
a changé depuis quelque temps je ne sais pas depuis combien de
temps mais, assez récemment, les policiers municipaux, un nombre
assez élevé de policiers de la CUM ont reçu des cours de
formation sans frais à l'institut. Cela s'est fait du plein consentement
du Procureur général, mais il reste qu'on aimerait conserver un
certain contrôle de l'aspect budgétaire.
M. Pothier: Maintenant, messieurs les membres de la commission,
je m'en voudrais de vous retenir indûment, je comprends que vous avez eu
une patience admirable de nous entendre. J'aimerais simplement signaler
l'importance énorme que les membres de l'association attachent aux
recommandations qu'ils vous font à l'égard de l'article 63 de la
Loi de police qui est encore une fois amendé et qui traite des droits
d'appel à la Commission de police des directeurs de police ou des gens
non syndiqués, dans les cas de destitution ou de réduction de
traitement.
Vous noterez que cet article indique bien que, dans les cas où il
y a appel, les résolutions qui emportent destitution ou réduction
de traitement entrent en vigueur sur approbation par la Commission de police.
C'est ce que dit l'article. Cependant, immédiatement, l'article pose une
règle inverse et il dit que, lorsque c'est une destitution, pendant la
durée de l'appel, le chef de police est suspendu sans traitement. La
commission in-
terprète également, dans les cas de réduction de
traitement, qu'il faut couper le traitement du directeur de police. Or, vous
avez, à ce moment-là, un directeur de police ou quelqu'un qui a
un droit d'appel et dont les moyens financiers sont en général
extrêmement limités, qui se voit privé de son
traitement.
Nous croyons qu'en toute logique, puisque la résolution n'entrera
en vigueur que sur l'approbation par la Commission de police, le contrat
d'engagement du directeur de police devrait s'appliquer puisque la
résolution n'entre pas en vigueur. Il devrait avoir droit à son
plein traitement, quitte à ce qu'il soit obligé de faire les
remboursements, compte tenu de la décision de la Commission de
police.
M. Lalonde: Je vous pose l'hypothèse suivante qu'un chef
de police qui a été destitué se pourvoit en appel à
la Commission de police. Là il y a toutes sortes de procédures
qui sont faites de part et d'autre et c'est seulement au bout de quelques
années que la décision est rendue. On me rapporte que quelques
cas ont pris beaucoup de temps, et entre-temps la municipalité serait
appelée à payer le plein salaire à son directeur
destitué. Si la destitution est confirmée par l'appel, comment
pensez-vous que la municipalité pourra récupérer le
salaire? C'est assez illusoire. D'ailleurs, ce serait assez exceptionnel parce
que n'importe quel gestionnaire, disons, pour employer le terme le plus large
possible, soit dans l'entreprise privée ou au gouvernement, qui serait
destitué verrait son salaire immédiatement suspendu. Ce serait
réellement créer un cas d'exception pour les directeurs de
police. Enfin, c'est ma réaction actuellement.
M. Pothier: Maintenant, je vous signalerai que les cas auxquels
vous faites allusion sont en général des cas assez
célèbres et tout le monde se les rappelle. Ce sont des cas qui
ont été retardés par des procédures dilatoires qui
sont communément utilisées dans des cas semblables. Il y a
peut-être moyen de prévoir une technique dans la loi, et que,
lorsque des procédures de semblable nature sont adoptées, la
résolution pourra avoir effet. Il est possible d'apporter la nuance
maintenant. Normalement, ces appels sont entendus d'une manière assez
expéditive. Je ne crois pas que, dans l'immense majorité des cas,
il y ait quelque difficulté de récupération que ce
soit.
M. Lalonde: A ce moment, cet argument défait votre
argument principal. Si c'est expéditif, à ce moment, le dommage,
le préjudice que subit le directeur devient minime.
Si c'est expéditif, à ce moment, pour les fins de la
discussion, si cela prend... Je ne sais pas dans votre esprit ce que c'est
expéditif? Est-ce que c'est six mois?
M. Pothier: C'est expéditif par rapport à la
procédure devant les tribunaux. C'est quelques mois devant la Commission
de police.
M. Burns: II n'y aurait pas d'objection si on
généralisait le principe au niveau des relations du travail
à travers le Québec. D'ailleurs, j'ai déjà
même tenté de le négocier du côté syndical,
mais c'est incroyable comme du côté patronal on est sourd
lorsqu'on représente que le salaire doit être maintenu
jusqu'à preuve de la valeur du congédiement. Si on
généralisait, vous savez, je n'aurais vraiment aucune
objection.
M. Lalonde: Alors, le député de Maisonneuve
reconnaît que le gouvernement a une approche tout à fait
social-démocrate.
M. Burns: Je n'ai pas dit cela. Vous prenez les tics de votre
chef.
M. Lalonde: Une fois par trois heures.
M. Burns: Je ne vous connaissais pas ce mimétisme.
M. Lalonde: Comme je le disais tantôt, si c'est
expéditif, si cela prend quelques mois, le préjudice qui est
causé au principal intéressé devient minime et cela
défait un peu l'importance de votre argument.
M. Pothier: Cela défait peut-être l'argument en ce
sens que les montants en cause sont peut-être moindres, mais cela
n'invalide, à mon sens en aucune façon l'argument qui veut que le
directeur de police qui est dans cette position soit en fait dans une situation
juridique que je qualifierais de contradictoire. Vous avez dans le texte de
loi, et ce n'est pas le cas dans les relations du travail ordinairement, une
indication que la résolution n'entre pas en vigueur avant l'approbation
de la Commission de police. Logiquement, ce qui devait en découler,
c'est que si la résolution n'entre pas en vigueur, le contrat de travail
devrait être suivi par l'employeur. C'est cela que voudrait la logique
juridique.
C'est également ce qui permettrait, même si c'est une
procédure relativement expéditive par rapport à ce que les
tribunaux connaissent comme vitesse de processus judiciaire, il n'en reste pas
moins que cela prend quelques mois, parfois six mois, bien souvent six mois et,
pendant ce temps, le directeur de police, quand même, est dans une
situation certainement extrêmement inconfortable parce qu'il affronte un
corps public.
M. Lalonde: Mais vous reconnaissez quand même que ce serait
un traitement tout à fait exceptionnel dont les chefs de police
profiteraient à comparer au traitement qu'on fait soit à
l'employé ordinaire, l'ouvrier, soit le gestionnaire dans l'entreprise
privée ou même le gestionnaire d'un gouvernement ou le simple
policier.
M. Pothier: La nuance qu'on doit apporter, il me semble, c'est
que les directeurs de police n'ont pas d'association syndicale qui les
défende et qui les supporte pendant ces procédures. Ce sont
des
gens qui sont des officiers publics. Ifs sont, je pense, dans une
situation un petit peu particulière au moment où ces
procédures sont en cours. Il y a quand même une nuance à
apporter. Je ne pense pas qu'on puisse, de façon juste, relier ce cas
à celui de tout le système des relations du travail.
C'est sûr que cela a un caractère un peu exceptionnel comme
demande.
M. Lalonde: Vous reconnaissez aussi que la loi prévoit
que, si la résolution qui l'a destitué n'était pas
maintenue, on lui rembourse, non seulement on lui remet son salaire mais
même ses dépenses encourues.
M. Pothier: Les dépenses en général, c'est
de l'adjudication quant à certains dépens. C'est ce qui est fait
par la Commission de police. Oui, cela, nous le reconnaissons, c'est dans le
texte de loi.
M. Lalonde: C'est à peu près tout ce que je puis
dire à ce stade-ci, à propos de cet argument.
Je n'aurais pas d'autres questions, à moins que vous ne
préfériez qu'on traite d'un autre point particulier de votre
mémoire.
M. Pothier: II y a peut-être un point qui est
extrêmement bref. Il y a un nouvel amendement, dans le projet de loi, un
amendement à la Loi des cités et villes et au Code municipal, qui
traite du cas des agents spéciaux. Il est possible, maintenant, aux
municipalités d'engager des agents spéciaux qui vont simplement
avoir pour but de poser des billets d'infraction dans le cas d'infractions au
règlement concernant le stationnement. Il s'agit d'une fonction
extrêmement limitée. Nous avons signalé à la
commission parlementaire que l'article 4 du Code du travail prévoit que
ne peuvent faire partie d'une association de policiers qu'exclusivement des
policiers. Nous voudrions qu'il soit indiqué, pour éviter des
difficultés d'application de ces dispositions, que ces gens n'ont pas le
statut de policier parce que s'ils ont le statut de policier, ils seront
régis par les conventions collectives qui régissent les policiers
et il deviendrait extrêmement onéreux pour les
municipalités d'embaucher des agents de stationnement.
On connaît la générosité avec laquelle les
conventions collectives traitent les policiers; nous n'avons rien contre cette
générosité; cependant, nous ne croyons pas qu'il serait
justifié que des gens qui n'auront qu'un mandat extrêmement
limité se voient traités de la même façon que les
policiers.
M. Lalonde: Ce n'est pas l'intention du législateur d'en
faire des policiers. Le projet de loi ne dit pas que ce sont des policiers,
mais je prends note de votre remarque, à savoir que, s'il y a une
obscurité dans la loi, cela pourrait être clarifié d'une
façon ou d'une autre.
Je vous remercie beaucoup, M. Magier, Me Pothier. M. le
Président?
Le Président (M. Cornellier): Oui, la commission suspend
ses travaux jusqu'à vingt heures quinze.
M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait indiquer, M. le
Président, qu'on pourrait inviter la BRPM immédiatement?
Le Président (M. Cornellier): La BRPM sera le premier
organisme invité pour être suivi du Conseil de
sécurité, de la CUM.
M. Lalonde: De la CUM, plutôt.
Le Président (M. Cornellier): Alors, à vingt heures
quinze.
(Suspension de la séance à 18 h 20)
Reprise de la séance à 20 h 50
M. Cornellier (président de la commission permanente de la
justice): A l'ordre, messieurs!
En vertu des règlements de l'Assemblée nationale qui
régissent aussi les commissions parlementaires, il est absolument
nécessaire d'avoir quorum pour ouvrir une séance de commission.
Le quorum faisant défaut, nous ajournons la commission à demain
matin, dix heures.
Je m'excuse, en mon nom personnel et au nom des membres de la
commission, auprès de nos invités, de nos visiteurs, de ce
contretemps. Demain matin, à dix heures, la commission reprendra ses
travaux, et entendra, comme premier intervenant, l'ABRPM, l'Association de
bienfaisance et de retraite de la police de Montréal, qui sera suivie de
la Fraternité des policiers. Par la suite, nous entendrons les
représentants du Barreau, et enfin la Fédération des
policiers.
Messieurs, avec nos excuses, j'ajourne les travaux de la commission
à demain matin, dix heures.
(Ajournement de la séance à 20 h 51)