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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le vendredi 22 avril 1977 - Vol. 19 N° 36

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude de certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec


Journal des débats

 

Etude de certaines questions relatives

à la sécurité au travail des policiers

de la Sûreté du Québec

(Onze heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, messieurs! A l'ordre, madame et messieurs!

La commission parlementaire de la justice poursuit ses travaux, afin d'étudier certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec, notamment, l'opportunité d'avoir pour chaque véhicule automobile de patrouille deux policiers à chaque période de relève.

Les membres de la commission aujourd'hui sont M. Alfred (Papineau), M. Bédard (Chicoutimi), M. Raynauld (Outremont) en remplacement de M. Blank (Saint-Louis); M. Burns (Maisonneuve), M. Charbonneau (Verchères), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Johnson (Anjou), M, La-berge (Jeanne-Mance), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Marois (Laporte), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Bellemare (Johnson) en remplacement de M. Shaw (Pointe-Claire), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie) en remplacement de M. Springate (Westmount), M. Tardif (Crémazie) et M. Vaillancourt (Jonquière).

Pour procéder, tel que nous en avions convenu hier, nous allons maintenant laisser la parole aux membres de la commission parlementaire pour leur permettre de poser, d'ici 1 heure, toutes les questions aux différents témoins qui se sont présentés au nom de l'Association des policiers provinciaux, mais, auparavant, je voudrais permettre au ministre de la Justice de faire quelques commentaires.

Commentaires du ministre, M. Marc-André Bédard

M. Bédard: Seulement quelques mots, M. le Président, pour remercier et féliciter les représentants de l'Association des policiers provinciaux du Québec pour la présentation de leur mémoire très détaillé, très sérieux, et également remercier tous ceux qui ont témoigné devant cette commission parlementaire sur le sujet qui est à l'étude.

Je crois que cette commission parlementaire, dans un premier temps, au moment où nous nous parlons, donne au moins l'occasion, pour une première fois, à l'Association des policiers et également à d'autres organismes à caractère policier de pouvoir porter à l'attention non seulement de la commission, des parlementaires, mais à l'attention de l'ensemble de la population, l'ensemble du tableau et des éléments, qu'ils veulent présenter à l'appui de leurs revendications.

Puisqu'il s'agit d'une période de questions, vous avez pu remarquer que, depuis le début de cette commission, je n'en ai pas posé beaucoup. La raison en est très simple, c'est que de par mes responsabilités, j'ai été mêlé d'une façon assez proche à ce conflit, à l'ensemble de l'étude de ce problème. Pour le moment, je préférerais continuer d'adopter cette attitude. Je demanderais la permission, à la période des questions, de céder mon droit au député de Verchères.

Le Président (M. Bertrand): Alors, je voudrais que les membres de la commission parlementaire posent toutes les questions qu'ils veulent poser, lorsque ce sera leur tour. On évitera ainsi qu'il y ait trop de questions accessoires qui fassent, qu'à un moment donné, tout le monde, en même temps, débatte une question et finalement, les tours de parole tels que demandés au président, ne sont pas respectés. S'il vous plaît, aussi, bien comprendre que chacun ne peut quand même pas monopoliser l'ensemble de la période des questions, alors, si vous voulez être assez brefs et limités dans le temps. M. le député de Verchères, au nom du gouvernement.

M. Fontaine: M. le Président, j'ai une question pour savoir comment on doit procéder. Est-ce que je dois comprendre qu'on doit poser toutes les questions en même temps et qu'on ne pourra pas revenir après si...

Le Président (M. Bertrand): Je serai assez large. Je comprendrai quelquefois qu'il y a des questions accessoires portant très directement sur un point soulevé par la question principale. Si nous élargissions trop cette possibilité des questions accessoires, à ce moment, les gens qui sont inscrits, il y en a plusieurs sur la liste, ne pourraient peut-être pas poser leurs questions lorsque viendra leur tour.

M. Fontaine: Ce que je veux dire, c'est que si, par exemple, vous me donnez le droit de parole, est-ce que je dois poser toutes mes questions et que je n'aurai pas le droit de revenir après?

Le Président (M. Bertrand): Oui, vous aurez le droit de revenir. Le député de Verchères.

Interrogatoire des témoins

M. Charbonneau: M. le Président, hier, on a procédé un peu à ce que j'ai appelé l'analyse du métier de policier, ce qui nous a amenés à conclure que c'était un métier qui comportait plusieurs risques, à bien des égards, imprévisibles. La notion d'imprévu a été soulignée par plusieurs témoins. Il faut peut-être se rendre compte, toutefois, que ce n'est pas le seul métier qui comporte des risques imprévisibles, mais on pourrait discuter longuement, à savoir quel est le métier qui comporte le plus de risques imprévisibles. Quand on compare le danger de ce métier par rapport à d'autres métiers pouvant comporter plus ou moins de risques potentiels ou effectifs, cela n'a pas sa place dans le sens d'un équilibre à rechercher dans la distribution des fonds publics pour la protection et la sécurité des différentes catégories de travailleurs.

On pourra revenir un petit peu plus tard sur ce point qui concerne, à mon sens, toute la question de l'économie des coûts. Une fois qu'on a effectué l'analyse du métier de policier et qu'on l'a bien compris, il faut se demander comment on doit faire ce métier — un peu comme je l'ai indiqué hier — afin qu'il soit le plus sécuritaire possible tant pour ceux qui le pratiquent, c'est-à-dire les travailleurs policiers que pour ceux qui en bénéficient, afin qu'il ait le plus possible sa raison d'être.

A ce stade-ci, on pourrait peut-être isoler les deux thèses qui s'affrontent. D'une part, un certain nombre de personnes prétendent que la patrouille à un homme est plus sécuritaire et efficace, tant pour les policiers travailleurs, que pour les citoyens, de l'autre côté, on a la thèse contraire, et on a des arguments valables dans certains cas et dans d'autres cas fort contestables.

Mais je pense que, compte tenu du mandat et de la situation de fait qui existe, il nous faut savoir si l'une ou l'autre thèse est valable de façon globale et continue ou si elles peuvent varier en fonction de certains moments de la journée. Je pense que c'est là la question qui est devant nous aujourd'hui. En somme, peut-on déterminer s'il y a des moments de la journée potentiellement plus dangereux, où les risques sont plus grands? Là, je me réfère à certains témoignages entendus hier, et je voudrais demander aux différents témoins qui ont comparu pour l'Association des policiers comment ils en sont venus à affirmer qu'il n'y a pas plus ou moins de danger le soir que le jour. Si on se réfère à votre étude comparative, en page 5, vous avez dit, notamment: Ayant établi le grand danger de la profession, il est normal de vouloir déterminer l'heure la plus dangereuse pour la vie de nos membres. D'après vous, le tableau 2 démontre qu'il n'y a pratiquement aucune différence entre le nombre de policiers tués au cours des deux périodes allant de minuit à midi et de midi à minuit, où l'on compte respectivement 23 et 22 victimes.

Je voudrais vous demander comment vous en êtes arrivés à établir ce tableau, d'une part, et, deuxièmement, si à votre avis, le facteur hommes tués est le seul à étayer le caractère dangereux de votre métier? C'est la première question. J'en aurai peut-être d'autres, selon les réponses que vous avez à apporter sur ce point.

M. Richard (Raymond): M. le Président, j'inviterais M. Paul Girard à donner une réponse.

M. Girard (Paul): Relativement aux statistiques concernant les heures où les policiers ont été tués, il ne s'agit évidemment là que d'un élément, mais il en faut des éléments pour faire prendre une décision. La mort de nos policiers, je pense, est assez importante. Cette statistique provient de Statistique Canada et a été compilée dans ses documents. Nous l'avons présentée de façon globale. Je pense que cela a pour but, tout simplement, de dire que si on savait à l'avance quand les policiers seront tués, il serait tellement facile d'en mettre même pas deux, mais quatre. Mais ce n'est pas ça, la chose. On peut vous dire, tout simplement, qu'on ne peut pas prévoir. On a eu, jusqu'à maintenant, des mauvaises expériences de nuit, on en a eu de soir, pour la mort. On en a eu de très graves le jour, pour les blessures. On a étalé 100 cas de blessures subies par balles, subies par voies de fait à main nue. Je pense qu'il ne faudrait pas prendre seulement la statistique du tableau 2 pour dire: Ecoutez! Vous n'avez que des statistiques nous disant qu'il y a des policiers tués...

M. Charbonneau: Vous avez présenté un autre tableau où vous infirmiez un peu la thèse du premier tableau, parce que, dans le premier cas, vous disiez qu'il n'y avait pas plus de danger le soir que le jour, et, dans l'autre cas, vous tendiez à démontrer qu'il y avait plus de danger le jour. Puis vous nous avez présenté une grille d'un certain nombres de cas.

Je voudrais savoir, de la part de ceux qui ont préparé ce document, quelle est la méthodologie que vous avez utilisée, surtout de quelle façon vous avez constitué votre échantillonnage pour en arriver à la conclusion que, le jour, il y a plus d'incidents dangereux que la nuit ou le soir?

M. Girard: L'échantillonnage a été préparé de la meilleure façon, je pense. Nous avons pris tous les cas à notre disposition, compte tenu des accidents qui sont survenus et des mauvaises expériences qui sont survenues. Il y a près de 100 cas cités, si c'est ce à quoi vous faites allusion...

M. Charbonneau: Oui.

M. Girard: ...soit les 100 cas cités dans notre mémoire. Il y a 100 cas présentés, nous en avions près de 200 autres à présenter. C'était tout simplement dans le but de rendre...

M. Charbonneau: Ce bassin de 100 cas, où êtes-vous allé les chercher? Les avez-vous sélectionnés pour soutenir votre thèse ou y a-t-il eu un peu plus de rigueur?

M. Girard: Tous les délégués de notre association ont été contactés la semaine dernière. Nous leur avons demandé de contacter chacun de leurs membres afin qu'ils nous relatent les expériences de violence qu'ils avaient connues. Les 100 choisis ne sont pas nécessairement les plus graves, mais probablement les plus récents, ou les plus faciles à démontrer. Dans notre échantillonnage, nous avons essayé de ne pas démontrer seulement le danger d'un gars en état d'ébriété qui était arrêté, mais on est plutôt allé vers le cas de balles, de voies de fait à main nue, de voies de fait lors d'arrestations pour ivresse, de voies de fait ou de blessures à cause d'automobiles en fuite.

M. Charbonneau: Si je comprends votre façon de procéder et si je l'interprète bien, c'est que, finalement, avec toute la bonne volonté du monde, vous avez demandé à des gens, un peu partout dans vos postes, de vous sortir un certain nombre d'incidents qui vous amèneraient à étayer votre

preuve; ceci, à mon sens, réduit un peu la valeur de cette approche. Cela n'a pas été une approche carrément scientifique, où vous auriez sélectionné par hasard. Vous avez dit à des gens: II y a telle et telle chose qu'on voudrait essayer d'établir.

M. Richard (Raymond): M. le Président si vous permettez, M. Eddy Bertrand n'a pas semblé satisfait...

M. Bertrand (Eddy): Messieurs de la commission, je voudrais d'abord attirer votre attention, sur le fait que ce n'est pas une sélection que nous avons faite, nous avons pris des cas de chaque district, que nous avons regroupés; nous aurions pu en avoir 500 ici. Mais nous voulions avoir quelque chose de concis. Nous ne voulions pas présenter une brique de statistiques que personne n'aurait comprises. En plus de cela...

M. Charbonneau: Je suis d'accord, mais est-ce qu'on s'entend pour dire, par exemple, lorsqu'on présente des chiffres... Ou on dit que les chiffres n'ont pas de valeur parce qu'on ne peut pas présenter des tonnes de statistiques, ou on présente des chiffres qui ont une certaine valeur parce qu'on les a utilisés, présentés et compilés avec une certaine méthodologie.

M. Bertrand (Eddy): Est-ce qu'on pourrait me laisser terminer, M. le Président, s'il vous plaît?

M. Charbonneau: Oui, allez-y.

M. Bertrand (Eddy): On a fait l'échantillonnage et c'est un échantillonnage québécois. Ce n'est pas un truc de Kansas City ou d'autres endroits. C'est un fait vécu par nos membres à la Sûreté du Québec, qui est de ce jour.

M. Charbonneau: D'accord.

M. Bertrand (Eddy): Ce ne sont pas des faits qu'on cueille ici et là pour essayer de démontrer quelque chose. On voulait quelque chose de concis et on a fait un pourcentage brut de faits que nous avons, un échantillonnage qui, d'après moi est valable.

M. Charbonneau: Est-ce que c'est vous qui vous êtes chargé de la compilation et de la cueillette des informations ou de la coordination, de la préparation des documents?

M. Bertrand (Eddy): J'étais responsable au comité.

M. Charbonneau: Est-ce que les faits que vous avez recueillis se situent dans une période de temps délimitée, entre telle date et telle date?

M. Bertrand (Eddy): Le temps prévu a été de 1966 à 1977, parce qu'on voulait avoir une idée générale et on s'aperçoit qu'il y a une recrudescence d'attaques de 1966 à 1977; plus on appro- che de 1977, plus les attaques sont marquées sur le policier seul.

M. Charbonneau: Est-ce que, par ailleurs, vous avez pu prendre connaissance des statistiques, des documents fournis à la commission par la Commission de police qui indiquent, à un moment donné, que, si on regarde les heures où les voies de fait sur les policiers sont les plus graves, il semble que cela se concentre plutôt dans les relèves de nuit et de soir et que le jour, toute proportion gardée, il semble qu'il y ait peu de voies de fait graves à l'endroit des policiers. Est-ce que vous avez pu prendre connaissance de ces documents?

M. Bertrand (Eddy): Personnellement, je ne faisais pas partie de ce comité. Par contre, j'ai travaillé — c'est M. Paul Girard qui faisait partie du comité en question — avec le comité des statistiques qui regardait le personnel de la Sûreté à la Sûreté. L'échantillonnage se situe sur les trois relèves et l'on s'aperçoit que, sur la relève de jour, l'incidence était plus élevée que sur la relève du soir et de nuit. On l'a ici. On avait 22 cas de nuit, 52 de jour et 26 de soir.

M. Charbonneau: Mais est-ce que vous admettez que, si on considère votre tableau, d'une certaine façon, il vient en contradiction avec celui fourni par la Commission de police.

M. Richard (Raymond): M. le Président, le tableau vient peut-être en contradiction avec celui de la Commission de police. La raison est bien simple, comme l'a mentionné M. Bertrand. Nous, c'est un échantillonnage du contexte québécois. Qu'est-ce qui se passe chez nous en 1977? Qu'est-ce qui s'est passé chez nous en 1966, à la Sûreté du Québec.

C'est un échantillonnage réel de ce que nos membres ont à vivre. A ce moment-là, c'est ce qu'on vit actuellement et qu'on a vécu.

M. Charbonneau: Si vous me permettez de vous interrompre...

M. Richard (Raymond): Allez-y.

M. Charbonneau: Justement, la Commission de police nous a fourni deux documents, un concernant effectivement le travail des policiers de la Sûreté du Québec et un autre concernant sans doute un document qui nous vient d'une force de police américaine, parce qu'il s'agit d'un document intitulé Law and Enforcement: officers killed by hours of day, de 1966 à 1975, alors que l'autre document est une étude des voies de fait commises en 1976 contre les policiers de la Sûreté du Québec. Dans le premier cas que je vous citais, c'étaient effectivement les mêmes policiers, c'est-à-dire nos policiers.

M. Richard (Raymond): Le deuxième cas, M. Girard va le commenter. Dans le premier cas, ce

qu'on a relevé, c'est notre contexte québécois, ce qui se passe chez nous. A ce moment-là, ce sont des chiffres réels, des informations que nous avons eues au niveau de chacun des postes, des membres qui ont vécu ces incidents, et ça ne peut pas mentir, parce que ce sont des faits.

Il se peut que, dans certaines villes américaines ou dans l'Ouest du pays, les policiers soient plus attaqués le soir ou la nuit, je n'ai pas de statistiques sur ça. Ce qui est important pour les membres de cette Commission, c'est de savoir si c'est dangereux, le métier de policier au Québec, et dans quelle proportion, et ce qui se passe à chacune des relèves; à ce moment-là, notre échantillonnage est valable. On pourrait prendre un mois ou deux mois et faire un échantillonnage plus précis, mais on ne pourrait se tromper de plus de 1% ou 2%. Cela a été prouvé dans tous les échantillonnages ou dans tous les sondages qui ont été faits, même au Canada ou aux Etats-Unis; quand un échantillonnnage est valable, la proportion d'erreurs peut varier à peu près de 2%.

M. Charbonneau: Je n'insisterai pas sur cette question. Je peux simplement vous signaler cependant que les conclusions que semblent tirer les études américaines et l'étude qui a été faite en 1976 pour des policiers de la Sûreté du Québec arrivent finalement aux mêmes données que le jour, toutes proportions gardées, il semble y avoir moins de risques ou moins d'incidents graves qui sont arrivés, soit d'officiers tués, d'une part, aux Etats-Unis, ou de voies de fait graves sur les policiers de la Sûreté du Québec.

M. Richard (Raymond): En fin de compte, notre étude est propre à la Sûreté du Québec, les chiffres qui sont là ne peuvent pas être contredits, ce sont des faits réels.

M. Charbonneau: Sur un autre point, je voudrais m'adresser à M. Masse, qui est président de la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal. Vous avez parlé du filtrage des appels comme étant une démarche essentielle dans un contexte, d'une part, d'efficacité policière et de bonne gestion policière. La première chose qui me vient à l'esprit, c'est que cette affirmation semble, d'une certaine façon, rejeter la thèse de l'association qui, en voulant mettre de côté la grille, indique qu'on ne peut pas l'accepter, justement parce que cela obligerait à filtrer les appels.

Dans ce sens, M. Masse, je voudrais vous demander ce que vous entendez particulièrement par le filtrage des appels? Dans quel sens cela peut-il être efficace? Est-ce que c'est efficace uniquement pour mieux répartir la charge de travail policier ou réduire la charge ou, éventuellement, pour une question de sécurité, réduire les risques d'imprévus?

M. Masse (Gilles): Quand je parlais de filtrage des appels, je parlais de sélection des appels. La question qu'on doit se poser c'est: Est-ce que les policiers doivent aller sur tous les appels? Quels sont les besoins réels de la population? Quels sont les services que les policiers doivent rendre à la population?

Les statistiques nous démontrent et notre expérience nous démontre qu'on pourrait diminuer de 50% les appels. En diminuant les appels, on va augmenter la présence policière efficace. Quand les policiers sont en train de discuter avec des citoyens d'une chose qui ne nous regarde pas, ils ne sont pas là. Dans ce sens-là, je dis qu'il faudrait qu'on filtre les appels, qu'on les sélectionne et qu'on arrête de répondre à tous les appels. J'ai donné quelques exemples hier, il y en a des...

M. Charbonneau: Ce que vous dites, c'est que finalement, la sélection ou le filtrage nous permettrait d'avoir une charge de travail diminuée et le travail qui serait fait serait peut-être plus efficace?

M. Masse: Effectivement.

M. Charbonneau: Mais est-ce que vous ne considérez pas également le fait que la sélection pourrait avoir un autre avantage, c'est-à-dire de réduire le caractère imprévu d'un nombre considérable d'incidents ou d'appels qui sont transmis aux policiers?

M. Masse: Non, je ne vois pas. L'imprévisibilité va toujours être là, on ne le sait jamais. On ne peut pas éliminer les appels imprévisibles, on le sait quand on en est là.

M. Charbonneau: Je suis d'accord qu'on ne peut pas éliminer les appels imprévisibles.

M. Masse: Je ne comprends pas le sens de votre question.

M. Charbonneau: Ce que je veux dire c'est que, malgré tout, vous pourriez permettre, par une meilleure sélection, non seulement de diminuer la charge, mais, éventuellement, permettre au policier de savoir un peu plus ce à quoi il s'attend, à quoi il doit s'attendre, lorsqu'il va se présenter sur les lieux d'un incident pour lequel il est appelé. Vous n'êtes pas d'accord avec cette...

M. Masse: Non.

M. Charbonneau: Non?

M. Masse: Les appels imprévisibles sont imprévisibles. Si vous vez un appel pour un vol à main armée, ce n'est pas tellement dangereux, parce que le vol à main armée est terminé.

Ce qui est dangereux, c'est quand vous n'avez pas d'appel et que, par hasard, vous passez devant la banque et qu'il en sort deux gars avec des fusils. Là, on n'a pas eu d'appel; là, c'est dangereux et c'est là qu'ont lieu les fusillades.

Si on a un appel, à un moment donné, parce qu'il y a une soirée bruyante, on y va. Des fois, c'est parce que des gens tiraient des coups de feu dans la maison que c'était bruyant. On le sait quand on arrive là, pas avant.

M. Charbonneau: Le système de filtrage ou de sélection des appels a existé à la police de la communauté seulement pendant un certain temps. C'est exact. Vous me disiez hier que cela a été une expérience qui a été tentée avec assez de succès à Montréal-Nord, lorsqu'il n'y avait pas l'intégration.

Actuellement, il n'y a pas de sélection à Montréal, à la communauté urbaine?

M. Masse: Non.

M. Charbonneau: On pourrait peut-être demander à un policier de la Sûreté du Québec de nous indiquer s'il existe un filtrage.

M. Richard (Raymond): En fait, à la Sûreté du Québec, il n'existe pas de filtrage comme tel. L'opérateur de radio, qui est un fonctionnaire, reçoit un appel téléphonique disant qu'il y a un incident à tel endroit. A ce moment, dans l'immédiat, qu'est-ce qu'il fait? Il transmet immédiatement l'information à l'auto-patrouille qui est dans le secteur donné — cela peut être Tadoussac — et le policier qui est dans son véhicule se dirige vers l'endroit. En cours de route, à ce moment, le fonctionnaire essaie d'avoir d'autres informations qu'il transmet au policier au fur et à mesure ou dès que c'est complété.

Souvent, le policier est rendu sur les lieux avant qu'il ne puisse avoir d'autres informations, parce que les appels qui entrent normalement à la centrale sont ceux de gens qui ont été victimes d'un vol avec violence ou autre chose. Ce sont des gens qui sont énervés, ou c'est un appel d'un voisin et, à ce moment, rares sont les cas où le policier peut se rendre sur les lieux sachant d'avance à quoi s'en tenir.

Dans certains cas, le soir, c'est un véhicule pilote. Cela veut dire que le policier reçoit immédiatement son appel, dans certains cas, dans le véhicule de patrouille et, à ce moment, tout en conduisant son véhicule, il se rend vers l'endroit. A 90%, ce sont des appels de la centrale et on ne sait jamais, ou on le sait au moment où on se rend à l'endroit, ce qui nous arrive exactement. C'est le problème.

M. Charbonneau: A votre connaissance — remarquez que ce serait peut-être une question qu'on pourrait plus facilement poser aux dirigeants de la Sûreté du Québec — à votre connaissance, y a-t-il déjà eu des expériences pilotes, à la Sûreté du Québec, pour tenter d'utiliser justement une méthode de sélection d'appels?

M. Richard (Raymond): A ma connaissance — je ne suis pas ici depuis seize ans — j'ai côtoyé depuis seize ans tous les policiers et, d'après mon expérience au syndicat, il n'y a pas eu d'expérience de tentée dans ce sens.

M. Charbonneau: Je vous remercie. J'aurais d'autres questions sur d'autres sujets, mais je pense que je vais laisser aux autres membres de la commission...

M. Barré (Laurian): Si M. le Président le permet, il y a lieu de souligner ici qu'il ne faudrait pas ramener le travail du patrouilleur à une simple question d'appel. Quand même, il faut reconnaître, à la base, que le travail du patrouilleur ne consiste pas uniquement et exclusivement à répondre à des appels qui pourraient lui être lancés. Cela fait partie de son travail, mais il y a également une forte partie de son travail qui consiste à faire un travail qu'on peut appeler de prévention et le patrouilleur, à la base même, suivant les explications qui ont pu vous être données sur la nature de son travail, c'est un policier qui patrouille.

C'est la notion de patrouille, c'est-à-dire que c'est une personne qui contrôle, qui vérifie et qui effectue de la surveillance et qui, à ce moment, peut être amenée à être confrontée à des situations imprévues, comme on a tenu à le souligner. Je pense que c'est dans ce contexte qu'il faut quand même apprécier le travail du patrouilleur qui nous concerne.

M. Charbonneau: D'accord, mais c'est aussi en termes d'efficacité.

C'est-à-dire que si on peut se permettre, éventuellement, de réduire la patrouifle et de faire en sorte que les gens ne passent pas, par exemple, dans le cas qui nous a été signalé hier, qui est un peu farfelu, mais finalement qui peut arriver, parce qu'il y a beaucoup de choses farfelues qui arrivent dans ce métier,... d'obliger deux policiers à passer une demi-heure à discuter avec un citoyen pour un vol de bicyclette, les gens seraient peut-être plus protégés, si pendant cette demi-heure, la patrouille, effectivement, faisait son travail d'observation, de prévention dans la rue.

M. Barré: Remarquez que ce que nous avons voulu faire ressortir, notamment, dans la section de notre mémoire se rapportant à l'analyse des faits, nous avons voulu faire ressortir, de cette façon, que justement le patrouilleur est confronté à des situations imprévisibles ou imprévues, et que souvent, des événements malheureux se produisent à l'occasion de vérifications de routine, à l'occasion, simplement, d'une vérification d'un véhicule. Vous avez pu constater, je pense, par les témoignages qui vous ont été donnés hier, que c'est souvent dans ces circonstances que se produisent les accidents ou les attentats dont les policiers sont victimes.

M. Charbonneau: Je voudrais seulement ajouter une chose, en terminant, sur cette question. Eventuellement, si vous aviez plus d'autos-patrouilles sur la route, parce que les gens seraient moins dans les maisons, le temps d'intervention pour aider les confrères serait peut-être plus rapide.

M. Barré: Je pense qu'on ne peut pas dire que les policiers de la Sûreté du Québec ont comme habitude, dans leur travail, si vous voulez, d'aller ou de répondre et de se rendre à la maison pour des vérifications de vols de bicyclettes ou autres choses du même genre. Je pense qu'il faut quand

même considérer le travail du policier à la Sûreté du Québec dans son contexte de sûreté du Québec, et éventuellement, comme on en a déjà parlé, de sûreté nationale du Québec.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président, avant de poser quelques questions sur les documents qui nous ont été présentés, je voudrais, au nom de l'Opposition officielle, féliciter l'Association des policiers pour la présentation qu'ils nous ont faite. Je veux les remercier pour leur coopération en restreignant le nombre des témoins et en coopérant avec nous afin que nous puissions procéder aux travaux de la commission. Je veux aussi féliciter les témoins qui ont rendu témoignage hier. Je veux les remercier pour avoir porté à notre attention, à l'attention de la commission, ainsi qu'à l'attention du public, certains faits que peut-être nous ne savions pas, et dont la population ne se rendait pas compte.

Nous avons reçu certains documents du gouvernement. Je voudrais, puisque les membres du côté ministériel vous ont questionnés sur les témoignages que vous avez apportés, je voudrais vous poser certaines questions sur certaines réactions que vous pourriez avoir concernant les documents qui nous ont été présentés, parce que j'ai l'impression que, naturellement, la "machinerie" gouvernementale a tous les moyens de préparer toutes sortes de données, toutes sortes de documents... Alors, c'est notre rôle d'essayer de faire ressortir la vérité, les opinions ou les réactions de votre association aux documents qui nous ont été présentés. J'ai l'impression que le gouvernement a voulu passer un message à la presse par l'entremise de ces documents. Alors, je voudrais lui donner l'occasion de faire certains commentaires sur les déclarations citées dans ces documents. Alors, vous pourriez, M. le Président de l'association, répondre vous-même ou demander à un de vos associés de répondre aux questions.

Premièrement, il y a des statistiques du gouvernement, dans un des volumes, et j'avais posé la question hier ou avant-hier, mais on m'a dit que...

M. Bédard: Question de règlement... M. Ciaccia: Oui, monsieur...

M. Bédard: Pourriez-vous préciser si ce sont des statistiques fédérales quand vous posez vos questions ou des statistiques...? Parce que je vous vois vous référer à des statistiques. Ce sont des statistiques fédérales? Je voudrais bien vous dire...

M. Ciaccia: Non...

M. Bédard: Ce n'est pas le message du gouvernement du Québec.

M. Ciaccia: Non, je ne mets pas en doute nécessairement les statistiques. C'est la façon dont on se sert des statistiques.

M. Bédard: Vous ne vous en servez pas?

M. Ciaccia: Ce n'est pas seulement ce qui est dans le livre, dans ces documents. C'est ce qui a été omis.

M. Bellemare: ... du fédéral...

M. Ciaccia: Comprenez-vous? Je ne mets pas en doute, par exemple, le taux de mortalité dans le domaine des mines, 135,72 mineurs sur 100 000 personnes. Ce n'est pas ça que je mets en doute. Mais je porte à votre attention — je l'ai déjà fait hier ou avant-hier je crois — ces statistiques sur le taux de mortalité dans différentes industries. Je vous demande si c'est relatif à quelque chose, si ça prouve quelque chose ici, ces statistiques. Quelle est votre réaction sur les statistiques, et pourquoi de telles statistiques auraient-elles été soulevées? Quand on parle de l'efficacité, on parle de la sécurité d'un individu, est-ce que ces statistiques ont une relation avec nos travaux?

M. Richard (Raymond): M. le Président, nous avons donné un chiffre hier sur ces statistiques. J'inviterais M. Jean-Marie Bouchard à répondre à la question du député.

M. Bouchard (Jean-Marie): Quand on nous réfère aux statistiques, quand on dit qu'il y a moins de danger à travailler dans la police que dans l'industrie privée, je pense qu'on ne regarde pas le problème comme il doit se poser. C'est sûr qu'il y a des accidents du travail dans l'industrie privée. Il y a des industries où la sécurité prévisible n'est pas mise en application et il y a plus de gens qui se font tuer.

Dans le tableau que nous avons soumis, nous avons fait une comparaison avec le taux d'homicides. Un policier, au Canada, court six fois plus de risques de se faire tuer à coups de fusil qu'un citoyen ordinaire. Dans ce sens, je pense qu'il faut faire dire aux statistiques ce qu'elles doivent dire, mais c'est sur le taux d'homicides, non pas sur le taux... Le policier qui patrouille avec sa voiture et qui a un accident de la circulation est considéré comme un citoyen qui meurt à son travail. On ne trouve rien d'extraordinaire à cela. C'est un manque de sécurité, mais c'est un manque de sécurité prévisible souvent. Mais les statistiques qu'on a démontrées, c'était l'homicide du policier. Je pense que cela démontre le caractère dangereux de travailler dans la police. Un policier, c'est six fois plus certain qu'il va se faire tuer par des balles qu'un citoyen ordinaire au Canada.

M. Ciaccia: Pour répondre au ministre, ces statistiques proviennent d'après le document que vous avez présenté, de Statistique Canada. Je voudrais souligner que ce ne sont pas les chiffres que je conteste, comme l'utilisation qu'on semble faire de ces statistiques.

Je suis étonné, personnellement, de voir qu'on va dire qu'il y a moins de personnes qui vont être blessées, qu'il y aurait un taux de mortalité moindre parmi les policiers que dans une in-

dustrie. Je serais quasiment scandalisé qu'on porte ça à votre attention, parce que ce n'est pas là, il me semble, le noeud du problème. Si on a un respect pour les droits individuels, la famille du blessé ou du défunt, c'est très peu consolant pour ces gens de savoir que, dans les statistiques, ils font partie d'un groupe moins nombreux qu'une industrie.

D'après moi, ce n'est pas le genre d'arguments à apporter dans le contexte actuel. Il faut essayer d'apporter une juste mesure entre l'efficacité et la sécurité des policiers seuls, et la sécurité du public.

M. Bédard: M. le Président, c'est quand même une question qui s'adresse au ministre, quant à savoir pourquoi certaines statistiques ont été portées à l'attention de la commission...

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.

M. Bédard: Vous avez peur de la réponse? Vous aimez mieux continuer votre démagogie?

M. Ciaccia: Non, ce n'est pas de la démagogie, ce sont des réactions humaines, des réactions à des statistiques qu'on trouve dans Statistique Canada. On utilise souvent Statistique Canada pour certaines questions. Je ne vous pose pas de questions, M. le ministre.

M. le Président, s'il vous plaît, je voudrais continuer. Après, si le ministre a des éclaircissements à apporter, il aura toute liberté de le faire. Je voudrais poser mes questions au témoin.

Le Président (M. Bertrand): Oui.

M. Richard (Raymond): M. le Président, si vous permettez, pour répondre, je pense que l'utilisation des statistiques fausse le problème. Comme le disait Jean-Marie Bouchard, il y a 6,1% plus de chances pour un policier qu'il soit victime d'un homicide. Ce sont des statistiques qui disent... C'est le côté dangereux. Il y a un autre aspect que nous n'avons pas tellement considéré, c'est l'aspect stress. J'aimerais que M. Yvon Bergeron donne un peu de statistiques et de chiffres à l'appui. Que cause au policier le stress? Cela ne paraît pas dans les 6,1%. Mais l'autre facette c'est: Qu'est-ce que cela nous fait, à nous? En sommes-nous victimes et de quelle façon?

Le Président (M. Bertrand): M. Bergeron. M. Bergeron: On a parlé, hier...

M. Bédard: Avec votre permission, M. le Président, s'il fallait faire le raisonnement qui est fait par le représentant de l'Opposition, disant que les statistiques ou les renseignements qui sont consignés, que nous avons voulu porter à l'attention de cette commission, sont inefficaces, à ce moment-là, il faudrait faire le raisonnement suivant: les statistiques qui nous viennent de l'association ne sont pas à prendre en considération. Je sais très bien que le problème ne se résoudra pas à partir d'une question de statistiques. Mais je crois que, si, d'une part, ce sont des informations qui sont soumises à l'attention des membres de la commission, à l'attention aussi des membres de l'Association des policiers provinciaux qui peuvent porter des jugements de valeur sur les statistiques que nous avons produites, de la même manière je suis convaincu que l'Association des policiers provinciaux s'attend à ce que nous considérions, avec beaucoup d'attention, les statistiques, qu'eux aussi, croient bon de porter à l'attention des membres de cette commission. Je peux vous dire, qu'en termes de raisonnement, je ne baserai pas mon jugement seulement sur des statistiques que nous avons, au nom du gouvernement, portées à l'attention des membres de la commission, pas plus que je ne le baserai, complètement, sur les statistiques qui peuvent être apportées par d'autres policiers, que ce soit l'Association des policiers provinciaux, ou les autorités de la Sûreté du Québec. Je pense qu'il faut situer les statistiques dans leur vrai contexte. Ce sont des statistiques, des points de référence qu'on peut analyser, qu'on doit analyser en termes de comparaison et ne pas réduire — cela n'a jamais été notre intention — tout l'ensemble de la question à une question de statistiques. Mais je tiens à dire, que nous, de la commission, si de l'autre côté on rejette complètement les statistiques, nous, du point de vue gouvernemental, nous allons tenir compte de ces statistiques que l'Association des policiers provinciaux va croire bon de porter à notre attention. C'est le minimum de respect que nous devons avoir...

M. Ciaccia: M. le Président, je n'ai pas voulu interrompre le ministre...

M. Bédard: Je ne ferai pas de démagogie sur les...

M. Ciaccia: Je n'ai pas voulu interrompre le ministre sur une question de règlement. Je crois que j'ai le droit de parole. J'ai des questions à poser au témoin. Je demanderais...

M. Bédard: Posez vos questions et cessez de faire de la démagogie.

M. Ciassia: J'ai le droit de parole et de faire des commentaires, d'avoir des réactions au document que le gouvernement a porté à l'attention du public. Je crois que les règlements de la commission prévoient que si j'ai le droit de parole, si le ministre veut faire des commentaires, il aura tout le droit de faire tous les commentaires qu'il voudra, après que j'aurai terminé mon exposé, après que j'aurai terminé mes questions. M. le Président, je demanderais qu'on me permette de continuer mon exposé, de continuer mes questions à l'association et de ne pas m'interrompre chaque fois que j'ai une question que le gouvernement n'approuve pas, n'aime pas ou ne veut pas que je pose. Qu'il prenne l'occasion après...

Une Voix: ...la question!

M. Ciaccia: J'ai le droit, à la commission, non seulement de poser des questions, s'il vous plaît, mais de parler. N'oubliez pas que j'ai le droit de parole. Ces gens-ci...

M. Charbonneau: Arrêtez donc de vous montrer comme étant une pauvre victime qui n'a pas droit de parole...

M. Ciaccia: Le grand scénario que vous faites de la commission parlementaire avec vos documents tous préjugés, quand vous avez retiré les plaintes dans 7300 causes relatives à la loi 253, vous ne nous avez pas convoqués en commission parlementaire. C'est un geste administratif. Vous l'avez fait.

M. Vaillancourt (Jonquière): Une question de règlement, M. le Président.

M. Ciaccia: Alors, s'il vous plaît, donnez-moi le droit de poser des questions et donnez le droit à ces gens de répondre.

M. Charbonneau: Posez des questions.

Le Président (M. Bertrand): S'il vous plaît! Je pense que, tantôt, pendant que le député de Verchères a posé ses questions, l'ensemble des membres de la commission a respecté son droit de parole. J'ai compris que le ministre veuille peut-être replacer dans leur contexte les statistiques qui ont été présentées devant la commission, maintenant, j'aimerais bien qu'on permette au député de Mont-Royal de terminer et de poser toutes ses questions à l'Association des policiers.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je ne m'arrêterai pas plus longtemps aux statistiques. Je vais soulever seulement un autre point, puisque le ministre a fait son exposé. Il n'est pas question de douter des statistiques. C'est l'interprétation et l'utilisation que nous faisons de ces statistiques. C'est une approche que je n'approuve pas personnellement. On pense à la collectivité. Vous avez seulement 10%, vous pouvez subir 20% de pertes, 15% ou 25%. Je n'accepte pas cette approche d'un gouvernement. Je regarde les droits individuels, l'individu, le policier individuel, qui fait partie de ces statistiques, il est touché, sa famille est touchée. C'est seulement ce point que je veux soulever, la question des statistiques des taux de mortalité.

A la page 5 du rapport, la traduction, je...

M. Barré: En ce qui nous concerne, M. le Président, nous n'avons pas l'intention de faire devant cette commission une guerre de statistiques, de baser uniquement la présentation de notre mémoire sur une comparaison de nature statistique. Nous avons apporté, en ce qui nous concerne, certaines statistiques pour justifier certaines parties de nos demandes. Ceci étant dit, comme M.

Richard, le président de l'association, a eu l'occasion de le mentionner tantôt, nous croyons, par exemple, si on se réfère aux documents de la Sûreté du Québec, que l'utilisation de certaines statistiques, comme, par exemple, le taux de mortalité au travail de 1961 à 1973, au Canada, risque peut-être de fausser le problème. Autrement dit, il faut quand même se reporter au contexte bien précis qui nous occupe, c'est-à-dire le contexte du travail policier. Les statistiques que nous avons amenées se sont voulues des statistiques dans le domaine policier, en prenant en considération ce que vous retrouvez d'ailleurs dans la dernière partie de notre mémoire, les conclusions de notre mémoire. Si on doit effectuer certaines comparaisons, il faut quand même comparer la même chose avec la même chose. Si nous reconnaissons, d'une part, qu'il puisse exister des problèmes de sécurité pour d'autres travailleurs ou d'autres corps de métier, nous voulons quand même faire comprendre ou insister sur le fait que le policier a quand même une tâche bien particulière. Sa tâche à lui, c'est d'assurer la protection du citoyen et d'assurer la sécurité et la proteotion des biens de ces citoyens. A cet égard, le policier est quand même confronté à certains éléments, à l'élément humain, ce qu'on a appelé l'élément humain, certains marginaux de la société. Ceci n'est évidemment pas le cas des travailleurs d'autres secteurs de l'industrie ou d'autres corps de métier et, en ce sens, nous croyons que l'utilisation des statistiques peut s'avérer non utilisable dans les circonstances.

M. Ciaccia: Est-ce que vous étiez en train de donner une réponse à la question de stress? Est-ce que...

M. Richard (Raymond): M. le Président, M. Bergeron va vous donner la réponse.

M. Bergeron (Yvon): Le problème du stress se pose lorsque vous avez parlé des statistiques de la Sûreté du Québec. Je pense au niveau des statistiques et je parle ici d'accidents du travail, l'histoire du danger, de travailler à la Sûreté du Québec, ce que nous n'avons pas touché dans nos statistiques, c'est que probablement, nous n'avons pas de chiffres et nous n'avons pas d'études faites là-dessus, sur le stress du travail policier face à son insécurité.

Nous avons examiné les documents, les études faites par la firme Dubois dans le cas de la police de Montréal, dans le cas des agents de la paix, une étude qui vient de se terminer. Malheureusement, l'Association n'a pas encore commandé d'étude sur le stress, peut-être que ça va venir. Pour les besoins de cette commission, nous n'avions malheureusement pas d'études à présenter à cette commission. Par contre, il y a une chose que nous savons et que la Sûreté du Québec sait, c'est qu'on parle d'accidents du travail. Il y a une chose dont on n'a pas parlé dans les statistiques, selon nous, c'est un accident du travail. On parle de dépression nerveuse, de stress.

Je n'ai pas ici la banque de maladie, le pourcentage de membres qui prennent des journées dans la banque de maladie et qui sont dues au stress.

Nous avons avec la Sûreté du Québec un programme conjoint d'assurance-vie-maladie et je peux vous affirmer une chose, il y a des statistiques, chez nous, depuis 1973—on n'a pas remonté à 1966 et à 1961, je peux affirmer, nous avons les chiffres à l'appui — que, depuis 1973, nous avons neuf suicides à la Sûreté du Québec. Nous ne voulons pas faire, excusez l'expression, de "show" avec ça, parce que c'est malheureux pour les familles. Mais nous savons que nous avons neuf suicides, nous avons là un problème. Je pense que la Sûreté du Québec a commencé un peu à se pencher sur le sujet. Le bureau du personnel nous a dit qu'il avait engagé un médecin qui va vérifier peut-être de plus près les problèmes qui concernent le stress.

Je pense qu'il faudrait aller plus loin que ça; la Sûreté a tenté de s'engager des professionnels et, selon les dires du directeur de la Sûreté du Québec, il n'y a pas eu de budget pour l'engagement de psychologues et l'engagement de personnel professionnel pour mener à bien ces études et ces analyses. Le 5 avril, lorsque les 2300 membres de la Sûreté du Québec, le premier soir où ils sont allés à Drummondville pour l'assemblée générale où on parlait de sécurité au travail, c'est tout ça: le problème qu'ils travaillent seuls aux petits postes.

Je vous ai parlé hier des postes où il y avait moins de 10 patrouilleurs. Lorsque le gars est au poste de Grande-Vallée, qui couvre un territoire de 120 milles ou 200 milles carrés et qu'il est seul, il y a là du stress. Hier, un criminologue nous a parlé de stress. Je pense que ça se ressent à la Sûreté du Québec et les statistiques, malheureusement, nous ne les avons pas à cette commission. Cela prend une étude, ça ne paraît pas dans les statistiques de la Sûreté du Québec, au point de vue des accidents du travail. On n'a pas les statistiques.

M. Bédard: Vous vous êtes référé, seulement pour information, à la firme Dubois.

M. Bergeron: C'est ça. La firme Dubois, de Montréal, a fait deux études, une étude à la Communauté urbaine de Montréal, je pense que M. Masse pourrait peut-être en parler, et nous avons eu le résultat d'une étude qui avait été commandée par le Syndicat des agents de la paix. C'est un document très complet avec questionnaire. Nous avons jeté un coup d'oeil là-dessus, parce que nous l'avons reçu à nos bureaux, et je pense que si la Sûreté du Québec ne prend pas ses responsabilités concernant l'étude de nos dépressifs, si je peux m'exprimer ainsi, l'Association prendra encore ses responsabilités et commandera cette étude sur le stress. C'est important pour nos membres.

M. Ciaccia: Je vous réfère au document produit par le ministère de la Justice, le bureau du sous-ministre. C'est une traduction qui s'intitule: "La patrouille en voiture à un homme". A la page 5 de ce document, on propose une thèse en ce sens que la surveillance est plus efficace quand il y a un policier que quand il y en a deux.

Je demanderais vos brefs commentaires, vos réactions à cette déclaration du document produit par le gouvernement: L'utilisation de la voiture à un homme stimule, en quelque sorte, le policier, en développant chez lui l'esprit d'émulation. Voulez-vous que je répète? Page 5.

M. Richard (Raymond): Non, non. M. Bouchard pourra répondre à cela.

M. Bouchard: Sur la patrouille à un homme, cette étude, cette réponse qui a été donnée ne tiennent pas compte de la réalité qu'on a, à la Sûreté du Québec. Nous avons quatre genres de patrouilles qui ne sont pas décrites du tout dans ce document, quand on parle de surveiller les trottoirs, les ruelles et les choses comme cela.

A la Sûreté, nous avons des patrouilles isolées, des secteurs isolés, ruraux, semi-urbains et urbains. Il est évident que, lorsqu'on dit que l'utilisation de la voiture à un homme stimule le policier, je pense que cela ne s'applique pas chez nous, parce que le policier qui est seul est plus craintif et n'est certainement pas plus brave que s'il est accompagné d'un autre. C'est certain. Il faut tenir compte également du territoire desservi.

M. Ciaccia: A la page 6 du même document, on nous donne d'autres renseignements. Les thèses et les faits: On dit: La valeur de la patrouille motorisée à un homme a été prouvée dans l'application moderne de la loi. Il se trouve néanmoins des opinions partagées par des personnes bien intentionnées qui n'acceptent pas ce mode de patrouille. Ces arguments ne manquent sans doute pas de sincérité, mais leur valeur est plus souvent basée sur l'émotivité que sur les faits.

Est-ce que vous pourriez commenter cette déclaration du même document?

M. Bouchard: Cet énoncé est vrai, à la condition que l'on veuille des policiers touristes à la Sûreté du Québec, mais, si on recherche l'efficacité, cela ne cadre pas avec les besoins de la population qui, elle, s'attend à beaucoup plus.

Ce principe est reconnu dans le livre blanc et cela nous amène au prochain texte qui dit que le citoyen qui fait appel à la police est en droit de s'attendre à une réaction rapide et efficace.

Chez nous, nous sommes bloqués par cette réaction rapide et efficace, parce qu'on parle de grille. Si on a une grille, il faut attendre le monsieur pour qu'il vienne nous aider. On dit que cela prend au moins 17 minutes avant d'avoir de l'aide.

Il y a une contradiction assez importante lorsqu'on dit que le citoyen a besoin d'une intervention rapide et efficace. Nous, nous ne pourrons pas bouger parce qu'on va être seul dans la voiture et qu'on va attendre d'avoir un deuxième homme, dans 17 minutes. Cela ne correspond certainement pas à la protection qu'attend le citoyen.

M. Ciaccia: A la page 12 du même document...

M. Richard (Raymond): Pour compléter l'exposé de M. Bouchard, si vous le permettez, nous avons fait une étude en profondeur de ce document. Ce qui ressort de l'étude qui a été faite par l'association et d'autres personnes, c'est que les personnes qui ont travaillé à ce document, ce sont des gestionnaires. Ce sont des administrateurs qui ont pris une chose en considération, un programme de gestion par objectif où on dit aux membres: Allez, produisez, faites des billets et cela va bien aller, parce que nos statistiques, nos 48 heures, nos infractions, cela va aller.

C'est une étude faite par des administrateurs, des gestionnaires. En parcourant ce document, il en ressort que jamais, en aucun moment, on n'a regardé le côté de la sécurité, le côté du patrouilleur, le côté de sa famille. On dit: Allez, faites des billets, au détriment de votre sécurité. C'est ce dont on tient compte.

Ce document aurait eu une tout autre tournure si les personnes qui y ont travaillé avaient pris comme objectif, comme point de départ, la sécurité du policier. Mais on a fait l'inverse, on a pris cela comme un programme par objectifs. Qu'est-ce qui donnerait le plus de 48 heures ou de billets d'infraction? C'est presque un piège, ce document.

M. Ciaccia: Dans le même document, à la page 12, on propose certaines thèses et on les contredit en essayant de détruire les thèses qui sembleraient être les positions de votre association, de ceux qui veulent avoir la patrouille à deux policiers.

Sous la rubrique "Impossibilité de conduire et d'observer à la fois", on dit: Le fait de conduire un véhicule l'oblige déjà à être vigilant. Il semble que la position de cette partie du document est qu'un policier va êtrre plus vigilant s'il est accompagné d'un autre policier. Quelle est votre réaction à cette partie de ce document?

M. Bouchard: On a entendu les trois policiers témoins qui ont eu des expériences. Hier, ils sont venus raconter à la commission dans quelle circonstance les choses s'étaient passées. On a eu également l'expert Jacques Duval, qui s'est basé sur la statistique de la Société canadienne de la sécurité routière, qui dit qu'en tout temps on doit avoir les deux mains sur le volant. Je me demande, dans la police, comment on peut faire pour avoir les deux mains sur le volant, répondre à la radio, prendre des messages et écrire des notes.

Dans le document, on dit que si tu poursuis un véhicule, tu inscris le numéro d'immatriculation, au cas où tu te ferais tuer, pour permettre d'éclaircir l'enquête après. Je pense que c'est demander beaucoup plus à un homme qu'on est capable de le faire à 75 ou 80 milles à l'heure.

M. Ciaccia: Je n'ai que quelques autres brèves questions. Ce n'est pas une question de continuer, je crois que le côté ministériel a posé des ques- tions sur les propos que les policiers, que l'association a tenus et je crois que c'est son rôle. Je crois bien, M. le ministre, que vous n'avez pas oublié si brièvement, dans un temps assez court, le rôle de l'Opposition officielle de faire ressortir tous les points de vue. Vous en avez fait ressortir un et, je crois, en toute honnêteté, que c'est le rôle de la démocratie. Ces gens sont venus pour répondre et faire ce qu'ils pouvaient pour faire connaître leur point de vue au public et à cette commission. C'est seulement cela que je fais ressortir.

M. Bédard: Sur la question de règlement, M. le Président, je voudrais simplement dire que, puisque le représentant de l'Opposition fait appel à l'honnêteté, il doit avoir l'honnêteté de dire que ce document n'est pas la position du gouvernement. C'est un document qui a été déposé pour l'information de la commission, un document qui est la traduction d'études faites non pas par le gouvernement, mais par la Commission de police, qui se réfère aussi à d'autres études.

Si vous croyez à l'honnêteté et à un débat qui soit vraiment fructueux, à ce moment, je pense qu'il faut faire état de cette nuance de taille.

M. Ciaccia: M. le Président, je crois que j'ai dit, à partir du début, que ces documents avaient été déposés par le gouvernement. Je n'ai pas accusé le gouvernement, je n'ai pas dit que c'était la position du gouvernement, quoique, quand le gouvernement me donne un document et ne m'en donne pas d'autres, peut-être que je peux présumer, mais je ne l'accuse pas, que c'est sa position. Je présume que s'il m'a donné ce document, c'est pour une raison. Je ne veux que faire ressortir ce que le gouvernement nous a soumis. Il n'a pas écrit lui-même tout ce document, c'est vrai que c'est une traduction d'un rapport et de différentes statistiques.

A la page 19, à la fin de la page, on dit: Ceux qui opposent la résistance la plus farouche au système de patrouille à un homme sont sans doute les agents de patrouille eux-mêmes. Avez-vous un commentaire?

M. Richard (Raymond): C'est assez simple, M. le Président, c'est parce que ce sont eux qui vivent le problème tous les jours et c'est tout à fait normal, parce que, à ce moment, vous parlez à des personnes qui connaissent le problème et qui le vivent.

Si vous permettez, M. le Président, M. Masse et M. Côté aimeraient ajouter à l'exposé de M. Bouchard, pour répondre à votre question.

M. Côté (Gilbert): Concernant le problème de la patrouille, il faut considérer dans tout cela le facteur de la prévention. Je pense que tout ce dont on a discuté depuis un bout de temps concerne la prévention. Qu'est-ce que la Prévention? Je pense que personne ne l'a dit encore. Qu'est-ce que cela veut dire, la prévention?

On a eu des policiers qui sont venus ici, des gens des Etats-Unis et de l'Ontario, qui nous ont

dit: Cela prend un homme par auto, parce qu'on couvre plus de territoire avec une auto. Nous, hier, on à amené une expérience qui a été vécue à Kansas City où, pendant un an, dans un secteur donné, on a enlevé tous les véhicules de patrouille dans ce secteur. Après un an, on s'est aperçu que cela ne change rien dans la criminalité. Cela veut dire que ce n'est pas la question de voir passer une auto, aujourd'hui, en 1977, qui empêche de commettre un délit. Tout ce qu'on dit, c'est que si on réussit à faire rouler des autos sans qu'il n'y ait personne dedans, cela ne change rien, ce n'est pas de la prévention.

La prévention, c'est l'action ou la position ou les enquêtes ou ce que les deux gars qui sont dans l'auto vont faire; c'est ce facteur qui est un facteur de prévention. Le fait qu'il y ait deux policiers, parce que, s'ils sont deux, il y a beaucoup de choses qu'ils vont faire et qu'un gars seul ne fera pas. On considère que deux policiers dans une auto, cela va effectuer un travail passablement différent de celui d'un seul policier. Deux policiers vont s'impliquer, vont faire des vérifications qu'un seul policier ne fera pas.

On doit considérer la prévention comme étant l'action des policiers qui sont dans le véhicule et non pas la simple vue d'une auto de patrouille. Lorsqu'on dit: A un homme, on va couvrir plus de terrain, cela ne donne absolument rien. Ce n'est pas cela, la prévention. La prévention, c'est avoir des gars qui vont être efficaces, qui vont faire un travail d'enquête, de vérification, qui vont prévenir le crime, qui vont identifier des suspects à des endroits donnés, à un moment donné de la journée; ce ne sont pas des policiers qui vont aller après le fait, qui vont répondre à des appels.

Il y a deux questions dans tout cela. Il y a la question de répondre à des appels après que le crime a été commis, et il y a la question de faire des vérifications afin d'empêcher que le crime soit commis. Si on considère que c'est plus important de faire des vérifications pour empêcher que les crimes soient commis, de connaître la criminalité dans son secteur, de connaître les endroits où des criminels se rencontrent, de les suivre, de les observer, de les surveiller, de les connaître, c'est de cette façon qu'on fait de la prévention. Si on part de ce principe, la question de dire que la vue d'une auto de patrouille à un homme, c'est bon, je considère, et c'est l'opinion de la fraternité, qu'en suivant l'expérience de Kansas City, la vue d'une auto de patrouille, le principe de dire que la prévention, c'est de voir une auto, cela n'existe plus en 1977. Il y a vingt ans, possiblement que la vue d'une auto, c'était un facteur important, mais, aujourd'hui, lorsqu'un criminel a quelque chose à faire, il va laisser passer le véhicule et il va attendre que la voie soit libre. On retarde tout simplement l'échéance et c'est dans ce sens qu'on dit: Deux policiers dans une auto vont faire un travail beaucoup plus important, beaucoup plus efficace qu'un seul policier qui va, lui, éviter les affrontements.

M. Ciaccia: A la page 22...

Le Président (M. Bertrand): Dernière question, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... on lit ce qui suit: "Toutes les études effectuées sur les systèmes transformés en vue d'utiliser un seul agent démontrent un gain sur les points suivants: 1) arrestation; 2) citation; 3) interrogatoire sur place; 4) autre unité mesurable de travail". Alors, je voudrais vous demander, comme question finale, deux choses sur cette question: Premièrement, quels sont vos commentaires sur cette déclaration, ces propos? Deuxièmement, si le gouvernement acceptait votre grille, est-ce que vous pourriez nous dire quel coût cela pourrait entraîner?

M. Richard (Raymond): Si vous permettez, sur la deuxième partie de la question, le coût, on pourra y revenir. Cela pourra être complété par M. Yvon Bergeron. Le coût est le même. Il n'y a pas de coût additionnel. Il s'agit de répartition d'effectif. C'est le même coût. Concernant l'efficacité, on mentionne qu'il y a plus d'arrestations, de citations, d'interrogatoires sur place, etc. Ceci n'est pas prouvé. Comme je l'ai dit au tout début, ce document est basé simplement sur un programme par objectifs, mais cela n'est pas prouvé. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est l'expert hier. On pourrait conclure en disant que l'étude de ce document provient, comme on l'a vu hier, de l'Association internationale des chefs de police. Selon le témoignage rendu par le témoin expert qui est membre de cette association, hier, il a déclaré, et cela est extrêmement important, qu'aucune statistique n'appuyait ces allégations et qu'elles n'étaient que des opinions d'administrateurs, opinions exprimées par cette association internationale. Ceci fut donné en réponse à une question du député de Westmount. Ces opinions portent sur la patrouille urbaine, les opinions de ce document, et prennent en considération les possibilités d'assistance presque immédiates. De plus, ces opinions ne portent en aucun cas sur la patrouille d'un territoire moyen tel que celui de la Sûreté du Québec, c'est-à-dire de 400 milles carrés et emportant en moyenne douze municipalités comme c'est le cas à la Sûreté du Québec.

Je pense que la conclusion qu'on peut en reteni — c'est le témoin expert qui a été amené par la Sûreté du Québec qui l'a dit hier — il n'y a pas de statistiques sur ça. C'est simplement l'opinion de certains administrateurs.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Bertrand): M. le député d'Anjou.

M. Johnson: Oui. J'aimerais remercier le député de Nicolet-Yamaska, qui m'a cédé son droit de parole ou, enfin, qui me permet de parler avant lui.

Je vais essayer d'être bref. D'abord, je voudrais faire quelques commentaires généraux. Je pense qu'il faut quand même replacer tout ça dans

une certaine perspective, qui est celle de cette commission et de ce qu'on y a entendu, mais également d'une situation de fait. La situation de fait veut, en ce moment, que le ministère ait effectivement accordé à la Sûreté du Québec qu'il y ait deux patrouilleurs sur deux des relèves, à savoir celle du soir et celle de nuit, en pratique, si on veut, les patrouilles de noirceur. Je pense qu'il ne faut pas oublier cela. Parfois, quand on est dans le débat, ici, on a l'impression que ces espèces de méchants ogres, qui ne pensent qu'aux sous et qui ne sont que des administrateurs, qui ne vivent pas les problèmes, envoient les policiers seuls braver les dangers. On parle spécifiquement de la relève de jour, et on parle spécifiquement de la notion d'accorder, pour la relève de jour, les deux patrouilleurs par voiture, par opposition à l'application d'une grille qui tiendrait compte d'un tas de situations et qui laisserait au jugement de l'officier responsable d'un poste donné la responsabilité d'accorder, oui ou non, deux patrouilleurs dans des territoires précis, pour des situations précises, etc. Je pense qu'il faut quand même mettre les choses dans leur perspective.

La deuxième chose que je voulais souligner, c'est ce qui m'a frappé comme étant un immense travail, messieurs, que vous avez accompli, l'Association des policiers provinciaux, ainsi que votre conseiller juridique, Me Barré, et les experts, ainsi que les gens de la Sûreté que vous avez fait témoigner. Cela m'impressionne quand les gens font leur boulot comme ça, et ça justifie, je pense, qu'une commission y consacre les heures que nous y avons passées et que nous y passerons.

Pour en arriver finalement à un point fondamental qui m'a ébranlé, au-delà de cette notion qu'évoquait M. Masse ainsi qu'un autre témoin expert avant concernant la peur. C'est un phénomène humain, normal, et je pourrais peut-être vous relater mon expérience personnelle, comme médecin. La première fois que j'ai eu à aller dans l'aile psychiatrique d'un hôpital comme stagiaire, et que j'ai eu affaire à un malade psychiatrique extrêmement agité, qui pouvait présenter une menace à ma sécurité corporelle, j'ai trouvé ça difficile, mais ça faisait partie de mon métier. Loin de moi de comparer les risques d'une salle d'urgence à ceux que les policiers affrontent quotidiennement. Mais l'élément d'incertitude, je pense, vaut pour le médecin dans une salle d'urgence, le monteur en structures qui marche sur des poutres de six pouces de large à 200 pieds du sol, et ça vaut pour un tas de métiers. Je pense qu'il faut aussi garder ça en perspective.

Cela était un des éléments que vous avez apporté et démontré, je dois vous dire que j'y suis sensible. On est obligé d'en tenir compte, sauf que ça n'implique pas nécessairement la patrouille à deux. Cela peut impliquer la nécessité, premièrement, d'une grille adéquate et, deuxièmement, d'une capacité de bien définir les situations dans lesquelles les policiers peuvent être à deux.

L'élément de fait m'a ébranlé au-delà des statistiques sur lesquelles je ne reviendrai pas, parce que je pense que ça risque de créer plus de confusion qu'autre chose. Mais je dois vous dire que, personnellement, je suis convaincu que les statistiques contenues dans ce qui est un document de travail — pour rassurer le député de Mont-Royal — me semblent adéquates. Je me permets toutefois de mettre en doute la valeur statistique proprement dite du document soumis sur les 100 cas, d'abord, parce que l'échantillonnage n'est pas défini. Deuxièmement, la méthode du calcul de la moyenne n'est pas adéquate, parce que ce n'est pas le khi carré. Troisièmement, il y a une question très concrète, qui est celle de la différence fondamentale entre, je pense, le secteur no 1, qui est le Bas-du-Fleuve, et un secteur comme la Mauricie, où il y a peut-être des éléments de concentration plus importants.

Comme le tableau ne tient pas compte de ces variables, au départ, personnellement, je préfère pour le moment ne pas y prêter foi, tout en me disant qu'il est fort possible que les conclusions auxquelles il arrive soient exactes. Je voudrais surtout référer à la notion du 17 minutes et 34 secon-des.que vous avez établie à partir de cette méthode statistique que, personnellement, je mets en doute. Je voudrais, ce sera ma question, je voudrais savoir si, en général, au-delà de ce tableau de 100 cas, l'expérience de certains d'entre vous, empiriquement, démontre qu'il y a un problème de communications — je ne parle pas des relations patronales-ouvrières — je parle d'un problème de radio, un problème de radio à la Sûreté du Québec qui, sur le plan technique, pourrait être réglé de deux façons. Ou par un équipement plus adéquat si celui qui est là était désuet ou inefficace, ou par l'augmentation du nombre d'autos-patrouilles. Je veux savoir s'il y a une porte ouverte à ce niveau, si votre appréciation générale du problème des communications pour les autos-patrouilles, c'est qu'il y a des améliorations qui pourraient être apportées.

M. Richard (Raymond): M. le Président, si vous me permettez, MM. Boulanger et Bergeron vont répondre à cette question.

M. Bergeron: M. le Président, MM. les membres de la commission. Nous allons situer le débat avec la présence de la Sûreté du Québec, dans la perspective d'une situation géographique d'un poste et du personnel de ce poste. M. Boulanger a déjà été en charge du poste de Tadoussac. Présentement, si nous étudions le relevé de ce poste, nous voyons que nous avons sur ce territoire du poste de Tadoussac, un seul membre par relève. Malgré, comme le député d'Anjou le dit, malgré une amélioration du système de communications, il reste, M. le Président, que ce poste est à 60 ou 62 milles du poste voisin en direction est, je parle du poste de Forestville, et en direction nord, du poste de Chicoutimi. Advenant un événement ou un besoin d'aide pour le membre du poste de Tadoussac, nous nous rendons compte que 60 milles, et ce n'est pas la route 20, les routes qui viennent de 'Chicoutimi ou de Forestville, selon la situation du membre, je pense qu'avant que le secours n'arrive, cela peut prendre entre 20, 30 minutes ou 1 h 30, ce qui est difficile à évaluer, selon

l'endroit. Nous croyons que dans les postes de la région montréalaise, où nous avons une concentration plus dense de nos postes et où il y a des corps de police organisés, naturellement, le temps d'appel pour le secours va être plus court.

Mais je crois qu'il faut penser que nos membres se répartissent dans 107 postes sur une étendue de deux ou trois fois la France et c'est le stress. C'est pourquoi la présence, même avec les meilleures communications, de deux membres est nécessaire, car un membre seul dans plusieurs de ces territoires, comme vous pouvez le constater sur la carte, cela peut être tragique et c'est stressant et le gars ne fera pas son travail ou ne répondra pas et ne sera pas efficace pour servir la population. Je pense que c'est la situation dans plusieurs postes. On pourrait parler de Chibougamau. Si M. Boulanger peut indiquer le poste de Chibougamau, comme vous pouvez le constater, le membre qui est seul à cet endroit et qui attend du secours, avant que le membre du poste de Senne-terre se rende lui aider ou que le membre du poste de Roberval intervienne, je pense qu'il y a des problèmes, parce qu'il y a à peu près 160 à 200 milles entre les deux endroits.

Je pense que nous pourrions appliquer ce principe à plusieurs postes de la Sûreté du Québec. Je pense qu'en jetant un coup d'oeil sur la carte, cela s'explique. On a parlé aussi du problème — je parle du problème depuis le 12 avril — de postes où il n'y a pas le personnel suffisant pour appliquer la norme de deux membres par véhicule de soir et de nuit. Qu'est-ce qui arrive? On en parle dans le document de l'OPP que la Sûreté du Québec a apporté hier celui d'un spécialiste qui parlait d'un membre en charge, qui pouvait prendre la responsabilité d'attitrer deux hommes. Depuis le 12 avril, nous avons plusieurs rapports à cet effet, dans plusieurs postes, et je parle de onze postes, il n'y a pas le personnel suffisant, lorsque le membre est seul le soir et la nuit. Je prends pour exemple, et le fait est réel, le poste de Grande-Vallée. Si vous voulez indiquer, M. Boulanger, le poste de Grande-Vallée. Ce poste, M. le Président, jusqu'à maintenant, n'a pas le personnel suffisant pour la relève du soir et de nuit pour deux membres. Qu'est-ce qui arrive? Le membre demeure au bureau et ne répond à aucun appel, il ne patrouille pas. Ce sont alors les postes de Sainte-Anne-des-Monts et de Gaspé, qui ont un personnel de deux membres, qui répondent aux appels du poste de Grande-Vallée. Je demande où est la protection de la population. Nous pourrions indiquer onze ou douze postes, jusqu'à maintenant, où nous pouvons vous assurer que ceci se fait. Imaginez-vous le taux d'appels sur un territoire entre Gaspé et Sainte-Anne-des-Monts? Il y a peut-être 200 milles entre ces deux postes.

M. Raynauld: Simplement pour poser une question accessoire sur ce sujet, pour fins d'information, est-ce que cela aurait un certain sens qu'une grille soit définie suivant la proposition du gouvernement et tienne compte de la distance entre les postes plutôt que de simplement tenir compte des différents autres facteurs, puisque cela a l'air d'être très important?

M. Bergeron (Yvon): Dans la grille des postes dont je vous ai parlé, où ils sont éloignés les uns des autres, le patrouilleur part seul. Pour répondre à un appel de vol à main armée, le membre est à peu près à cinq milles d'un village et l'autre voiture où il y a un poste est à 40 milles. Cela prend 40 minutes avant que deux membres, comme la grille le permet, se rendent sur les lieux de l'infraction ou du crime commis.

M. Raynauld: Ce qui voudrait dire que, lorsque les postes sont très éloignés, cela pourrait être une raison pour avoir deux personnes par patrouille, puisque, à ce moment-là, ce serait trop long pour attendre d'autres personnes qui viendraient de 40 milles plus loin.

M. Bergeron (Yvon): M. le Président, c'est un des arguments que l'Association des policiers provinciaux, je pense, a établis lors des travaux de cette commission.

J'ai même déjà souligné que, jusqu'à maintenant, le soir et la nuit, ces gens ne peuvent pas, à cause du personnel; alors, c'est nécessaire aussi le jour, vu les distances et l'insécurité des membres et l'inefficacité à protéger la population sur ses territoires.

M. Raynauld: Je voulais simplement soulever ça pour savoir s'il y avait une possibilité de compromis où on dirait que, dans les cas de postes très éloignés, il pourrait y avoir deux personnes, mais que, dans d'autres endroits où les postes seraient moins éloignés, à ce moment-là, on pourrait se rabattre sur une mesure plus proche de la proposition gouvernementale. C'est ça que j'avais à l'esprit.

M. Barré: Nous avons mentionné hier, M. le Président, lorsque certaines discussions sont survenues au niveau de cette commission concernant la grille des cas spéciaux, que cette grille n'était pas applicable, ne pouvait pas constituer une solution au problème, entre autres pour une des raisons qui était la question de communication. Par ailleurs, comme vous avez pu le constater dans les mémoires et les explications qui vous ont été fournies hier en soirée, il y avait d'autres éléments qui entraient également en ligne de compte et qui établissaient que cette grille ne pouvait pas être applicable, même pour d'autres motifs que simplement un motif de communication, en raison, fondamentalement, du problème ou de la nature des fonctions du patrouilleur, ce qu'il a à faire exactement, ce à quoi il est appelé à faire face.

C'est dans cette optique que vous a été soumis un échantillonnage de faits que nous avons intitulé, dans notre mémoire, Analyse des faits, et que nous avons annexé, à la fin de notre mémoire, une série d'échantillonnages. Là-dessus, je me permets de revenir sur ce que disait le député d'Anjou tantôt. Il a dit qu'il mettait en doute la

méthode de statistiques utilisée. Je tiens à préciser que ce que nous avons voulu par là, c'est établir un échantillonnage représentatif au niveau de la province, c'est-à-dire en tenant compte de tous les districts, en tenant compte de toutes les relèves et en basant nos données ou nos conclusions à partir non pas d'interprétations, mais à partir des faits. Ce sont des faits que nous vous avons livrés et des faits sur lesquels nous nous fondons pour justifier les représentations qui vous sont faites, comme vous avez pu le constater depuis le début des représentations que nous vous faisons en commission parlementaire.

M. Johnson: En fait, ce sont des exemples et c'est comme ça que je les prends. Je pense qu'ils ont valeur d'exemple effectivement, que, dans un cas, on parle de 35 minutes avant qu'un véhicule arrive, dans le cas d'une voie de fait à poings nus, etc. Je les prends à titre d'exemple et je ne nie pas que des situations comme ça puissent exister; bien au contraire.

M. Barré: A titre d'exemples factuels, et j'insiste sur le mot. Parce que ce ne sont quand même pas des faits hypothétiques ou des hypothèses que nous avons émises; ce sont des faits.

M. Johnson: Non, non, des choses qui sont arrivées.

M. Barré: Vous en avez une centaine, nous vous avons mentionné qu'il y en a énormément plus; nous vous en avons fait entendre trois hier en vous indiquant, encore là, qu'il ne faudrait pas tenir pour acquis que ce sont les trois seuls faits que nous sommes en mesure de vous présenter, mais que nous avons voulu établir, à partir de ces trois cas détaillés ou explicités de façon encore plus précise, ce que pouvait représenter le travail du patrouilleur dans l'imprévu.

Nous avons voulu faire ressortir, par exemple, ce qui pouvait se produire à un moment où le policier pouvait s'y attendre le moins, lors d'une vérification de routine ou lorsqu'il s'agissait simplement d'arrêter un conducteur sur le bord de la route pour obtenir certaines informations. Vous avez pu constater ce qui en est résulté.

M. Charbonneau: Est-ce que le député de Nicolet-Yamaska me permettrait une question accessoire sur la grille?

M. Fontaine: Je ne le permets pas, M. le Président, parce qu'il ne reste que cinq minutes.

M. Charbonneau: D'accord.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, à l'instar des autres membres de la commission qui ont pris la parole avant moi, je tiens à féliciter l'Association des policiers provinciaux pour la présentation de son mémoire. Je pense que tenant compte du temps qui a été unis à sa disposition pour préparer ce mémoire, elle a réussi à produire un mémoire considérable qui, dans l'ensemble, était passablement bien documenté.

Je vais aller immédiatement aux questions. Je pense qu'on a fait un inventaire des travaux qui doivent s'effectuer journellement par les policiers. Ma première question s'adresse au ministre et à l'association, en même temps. Le travail de distribution de subpoenas, de sommations, de citations à comparaître, de même que certains interrogatoires ne pourrait-il pas être fait par un simple officier de justice qui serait rattaché au palais de justice, et non pas par les agents de la Sûreté du Québec?

On sait sûrement que cela comporte des dépenses considérables et parfois exorbitantes, surtout si on décidait, à la suite de cette commission, d'envoyer deux policiers par véhicule porter des sommations ou des choses comme cela.

Dans les cas dont on a parlé, aller chercher un chat qui est pris dans un arbre, ou dans le cas d'un vol mineur, comme un vol de bicyclette, ne pourrait-il pas y avoir un mode d'enquête qui ne nécessiterait pas l'intervention du policier, soit d'un policier ou de deux policiers?

J'aimerais que le ministre de la Justice, de même que l'association puissent apporter leurs commentaires là-dessus.

M. Bédard: Dans l'échantillonnage des choses dont vous avez parlé, subpoenas, signification de subpoenas, est-ce que vous seriez prêts à inclure aussi les billets d'infraction pour le stationnement et la circulation?

M. Fontaine: On sait que dans certaines villes, cela se fait par des femmes qu'on a engagées pour exécuter seulement ce travail. Je pense que cela pourrait peut-être être inclus, éventuellement.

M. Bédard: A ce moment-là, j'aimerais mieux que l'Association des policiers provinciaux nous exprime son idée là-dessus.

M. Richard (Raymond): M. le Président, il n'y a pas eu, de la part de l'association, d'études de faites à ce sujet. Nous savons qu'actuellement le gouvernement a un groupe de travail qui a pour tâche d'étudier les fonctions policières. Je pense que les organisations concernés et tous les citoyens pourront faire parvenir des mémoires aux membres du groupe de travail, et à ce moment-là, nous verrons ce qui pourra ressortir de leur étude.

Nous avons l'intention, l'association, comme d'autres organisations, de préparer un mémoire à l'intention des membres qui siègent sur ce groupe de travail et à ce moment-là, on verra ce que les représentations pourront donner.

M. Bédard: M. Richard, sur ce point particulier...

M. Richard (Raymond): Je continue.

M. Bédard: ...seriez-vous disposé à ce que la signification de subpoenas ou d'autres tâches puissent être faites par un autre officier de police ou une autre personne qui ne fait même pas partie de la police, pour la distribution de billets? Seriez-vous d'accord que ce soit donné à d'autres que des policiers?

M. Richard (Raymond): Je ne peux pas me prononcer au nom de l'association ni personnellement, à savoir si nous serions d'accord pour que cela soit fait. Le gouvernement a son groupe de travail et je pense qu'il faut laisser à chacun le soin de faire son boulot. A la commission parlementaire ici...

M. Bédard: Cela aiderait le groupe de travail.

M. Richard (Raymond): ...nous avons un point, qui est la sécurité au travail, j'aimerais en rester à cette sécurité au travail.

Ce que j'aimerais mentionner, c'est qu'en aucun temps, nous n'avons demandé que deux policiers se rendent délivrer un subpoena ou faire un enlèvement de permis. Nous avons des agents qui font cela. Souvent, ce sont des personnes qui ont plusieurs années de service et qui ne sont pas, pour diverses raisons, comme la maladie, capables de faire un autre travail policier. Ces personnes, plutôt que d'être à la banque de maladie à ne rien faire, font ces travaux un peu plus légers. Nous avons un personnel affecté à cela.

Concernant les chats dans un arbre, en campagne, nous autres, on ne s'occupe pas de cela, parce que le cultivateur ou la personne impliquée attend que le chat descende de l'arbre. Il n'y pas de problème de notre côté.

M. Fontaine: C'est un exemple que j'ai donné.

M. Richard (Raymond): Je réponds seulement qu'on n'a pas les mêmes problèmes de ce côté.

M. Fontaine: Le ministre de la Justice pourrait-il donner son opinion là-dessus ou s'il aime mieux attendre, sur la question du travail des policiers?

M. Bédard: Sûrement pas sur les chats.

M. Fontaine: Non. Vous ne voulez pas donner votre opinion immédiatement, vous laissez le groupe de travail...

M. Bédard: Je crois que les premiers concernés sont les policiers, puisqu'il s'agit de travail présentement et surtout effectué par des policiers. J'aurais aimé avoir justement, concernant des tâches comme la signification de subpoenas, etc., les infractions au Code de la route ou encore la distribution de billets, l'opinion du président de l'association ou des autres présidents d'associations qui sont ici. Cela aurait peut-être permis de donner des indications au groupe de travail.

Du point de vue gouvernemental, nous avons, comme on l'a mentionné tout à l'heure, mis en branle un groupe de travail qui a pour fonction d'étudier justement les fonctions policières. J'imagine et j'espère que cet aspect particulier que vous soulevé sera analysé.

Je note aussi que le président de l'Association nous dit aujourd'hui qu'il y a, concernant ces tâches, des policiers, non pas à deux, qui sont affectés d'une façon particulière. Je comprends qu'il y a des tâches où on peut ne pas être deux policiers, parce que je me réfère, à un moment donné, à la demande initiale au niveau des négociations. Est-ce que c'est 24 heures par jour pour tout le monde?

M. Richard (Raymond): La demande initiale de l'association était de 24 heures par jour...

M. Bédard: Pour tout le monde?

M. Richard (Raymond): C'était pour tout le monde. Actuellement, ce qu'on a étudié, c'est pour les patrouilleurs le jour. Suite aux diverses discussions que nous avons eues avec vous, M. le ministre, vous m'avez mentionné à plusieurs occasions qu'il ne faut jamais se mêler des affaires des autres. Laissons chaque groupe de travail ou chaque commission faire son boulot. A ce moment, je pense que vous aviez raison, vous m'avez fait entrer cela dans le cerveau.

M. Bédard: C'est dans cet esprit que je vous retournais la question, ne voulant pas me mêler des affaires policières, mais aimant avoir votre opinion sur les questions du député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, étant donné qu'il est 13 heures, je pense que nous pourrons continuer la période des questions mardi prochain, à l'ouverture de la prochaine séance. Dans ce cas, je demanderais l'ajournement des travaux de la commission.

M. Richard (Raymond): M. le Président... Le Président (M. Bertrand): Oui?

M. Richard (Raymond): ... avant l'ajournement, si vous me permettez, est-ce qu'on doit comprendre qu'il y aurait des questions mardi?

Le Président (M. Bertrand): Vous devriez comprendre que, mardi matin, à 10 heures, on en aurait peut-être encore pour une heure, au maximum, peut-être deux heures de questions, et, que s'il était possible, nous pourrions commencer à entendre les représentants de la sûreté, dès mardi matin.

M. Richard (Raymond): M. le Président, avant l'ajournement, j'aimerais vous remercier personnellement. Ce fut très agréable de siéger à cette commission. Vous avez su, à tout instant, faciliter notre travail, notre tâche. J'aimerais également remercier les membres de la commission pour l'attention qu'ils ont apportée tout au long de notre présentation.

M. Bédard: M. le Président, en terminant peut-être cette partie de l'étude de la commission, je voudrais souligner, suite aux paroles qui viennent d'être énoncées par le président de l'Association des policiers provinciaux sur le sérieux dont cette commission a voulu se doter, afin d'étudier un problème qui est important, faire ressortir quand même que, malgré l'attitude de certains membres de l'Opposition officielle qui, dès le départ de cette commission, a tenté de minimiser le sérieux de cette procédure démocratique qu'est la commission parlementaire, j'estime que les travaux auxquels nous nous sommes livrés ensembles, ont été positifs et, j'en suis convaincu, utiles.

On a fait beaucoup état de certains documents qui ont été déposés par le biais du gouvernement, de certaines études qui ont été déposées par le biais du gouvernement, à l'attention des membres de cette commission parlementaire et des membres aussi des parties intéressées, dont l'Association des policiers provinciaux. Je voudrais dire une chose, c'est que nous avons tenu à les déposer dès le début, justement pour que vous puissiez porter un jugement critique sur l'ensemble de ces documents. Nous avons voulu, je pense, avoir — et nous avons eu — une attitude correcte, qui était non pas de procéder par surprise, mais, d'avance, de mettre la documentation à l'attention de toutes les parties, pour que vous puissiez en faire une critique constructive, ce que vous avez fait, d'ailleurs. Je pense que, si nous avions voulu faire une farce de cette commission parlementaire, comme certains ont voulu le laisser croire, ou si nous avions voulu en faire un piège, nous aurions pu adopter comme attitude le fait de garder toute cette documentation pour ne la présenter qu'après que vous auriez eu l'occasion de faire vos représentations.

Je tiens à bien insister sur ce point. Si nous avons tenu, justement, à déposer ces documents, c'est parce que nous voulions que l'Association des policiers provinciaux ait l'occasion — c'est ça, une attitude correcte — de pouvoir faire valoir son point de vue. Jusqu'ici, M. le Président, l'Association des policiers provinciaux du Québec a eu l'occasion d'exposer — nous continuerons encore quelques temps, au début de la reprise des travaux de cette commission — l'évantail de ses arguments, de les discuter, de les faire valoir. Les membres de la commission ont été à même, je crois, d'apprécier l'attitude posée des policiers, qui ont su répondre à notre attente d'un débat basé sur des faits, sur des statistiques qui sont toujours discutables, que ce soit d'un côté ou de l'autre, que ce soit des statistiques fournies par une partie ou par l'autre, mais qui peuvent quand même servir d'éléments de base de comparaison ou de réflexion. Je tiens à souligner, disons, cette attitude posée et constructive qu'a eue l'association des policiers tout au cours de la présentation de son mémoire.

Bien sûr — je termine là-dessus, M. le Président — quand on parle de statistiques, leur mode d'échantillonnage demeure parfois discutable, et ça donne lieu à des opinions divergentes. Sans doute, la Sûreté du Québec aura-t-elle l'occasion aussi de faire état de certaines statistiques, de certaines opinions, de certaines convictions.

C'est pourquoi, pour continuer dans le ton sérieux que nous avons voulu donner à cette commission, je félicite chacun des membres de cette commission qui se sont — qui ont travaillé fort afin d'essayer de comprendre le problème, et surtout de poser, non pas des questions dont on sait d'avance les réponses qu'on a dans certains documents qui ne feraient pas grand poids, au départ, sur la décision à prendre. Je tiens à féliciter les membres de cette commission qui, par le sérieux de leurs questions, ont respecté la commission parlementaire. Je suis convaincu qu'après avoir entendu les membres et la direction de la Sûreté du Québec, nous serons en mesure — l'ensemble des membres de la commission — après avoir pris connaissance d'un échantillonnage sérieux de l'ensemble de la situation qui n'est pas si facile que cela à évaluer et à analyser, on pourra prendre une décision qui sera dans l'intérêt de chacun en tenant compte de ses convictions et de l'analyse que chacun aura faite de ces documents. Merci M. le Président.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais, à mon tour, au nom de l'Opposition officielle, remercier l'Association et tous les témoins. Je voudrais vous souligner que je ne minimise pas le sérieux de la commission. Je veux seulement vous démontrer l'impuissance de cette commission face à une question administrative. Ce n'est pas une question législative. C'est tout ce que je voudrais souligner. J'apprécie beaucoup le témoignage et les mémoires que vous nous avez présentés ainsi que la façon dont vous l'avez fait. Merci.

M. Fontaine: M. le Président, je ne veux pas étirer le débat là-dessus, mais je pense que l'association va revenir mardi matin et on pourra faire des commentaires... On ne fait qu'ajourner le débat. Je ferai mes commentaires à la toute fin.

Le Président (M. Bertrand): Alors les travaux de la commission parlementaire de la justice sont ajournés à mardi matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 13 h 6)

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