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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mardi 26 avril 1977 - Vol. 19 N° 38

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude de certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec


Journal des débats

 

Etude de certaines questions relatives

à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec

(Dix heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, messieurs! Nous nous excusons du retard à commencer cette séance. Je pense que chacun s'en tient un peu responsable à sa façon, sauf ceux qui étaient là à dix heures pile.

La commission permanente de la justice poursuit ses travaux afin d'étudier certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec, notamment l'opportunité d'avoir, pour chaque véhicule automobile de patrouille, deux policiers pour chaque période de relève.

Les membres de cette commission sont M. Alfred (Papineau), M. Bédard (Chicoutimi), M. Pagé (Portneuf) en remplacement de M. Blank (Saint-Louis); M. Burns (Maisonneuve), M. Charbonneau (Verchères), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Johnson (Anjou), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Marois (Laporte), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Bellemare (Johnson) en remplacement de M. Shaw (Pointe-Claire); M. Springate (Westmount), M. Tardif (Crémazie) et M. Vaillancourt (Jonquière). Et le rapporteur de la commission est toujours M. Alfred (Papineau).

Alors, nous en étions à la période des questions que nous poursuivons avec l'Association des policiers provinciaux et, à ce moment-ci, j'avais sur ma feuille le député de Nicolet-Yamaska qui avait demandé de poursuivre ses questions.

M. Fontaine: Etant donné que je viens juste d'arriver, s'il y a quelqu'un d'autre qui veut poser des questions, j'y reviendrai dans quelques minutes.

Le Président (M. Bertrand): D'accord. Alors, le député de Jonquière.

Interrogatoire des témoins

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le Président. J'aurais deux questions et je les poserais à M. Richard et, possiblement, à d'autres personnes qui seront désignées par lui. Ce qu'on remarque, en lisant votre mémoire — je pense qu'ici, je dois vous féliciter pour le travail que vous avez fait — et ce qui frappe, c'est que tout le monde est d'accord pour dire que le but de la patrouille à deux hommes, en tout cas, c'est votre prétention, a pour effet d'assurer la sécurité des policiers, la sécurité du public de même que la prévention du crime. Je pense qu'on peut partir du principe que tous ceux qui s'occupent d'activités policières en Amérique du Nord ont également les mêmes buts, c'est-à- dire assurer la sécurité du public, la sécurité des policiers et la prévention du crime. Or, la question que je me pose et que je vous pose, c'est: Comment se fait-il que des personnes qui, toutes, ont ces trois mêmes buts ne s'entendent pas, si on prend les témoignages que nous avons entendus à d'autres moments, sur les moyens pour atteindre trois objectifs sur lesquels tout le monde est d'accord?

Nous avons entendu M. Lidstone, M. Sostkowski et je suis sûr également que ces messieurs ont à coeur les trois objectifs que vous poursuivez. Il y a une question que je me pose. Comment se fait-il que, sur trois objectifs bien précis sur lesquels tout le monde s'entend, on ne s'entend pas par contre sur les moyens à utiliser pour les atteindre et surtout de jour? C'est ma première question.

M. Richard (Raymond): M. le Président, en fin de compte, je pense que tous les gens de l'association et ceux qui ont témoigné ici, ceux qui vont venir témoigner un peu plus tard, les représentants de la Sûreté du Québec, comme vous dites, poursuivent assurément le même objectif; on ne s'entend pas, c'est peut-être un mal du siècle. Je pense que c'est un manque de dialogue qu'il y a eu dans les années passées mais il y a des solutions à tous les problèmes, à tous les litiges qui peuvent arriver dans la vie. Faut-il encore s'asseoir ensemble à une même table et en discuter.

En ce qui nous concerne, c'est le gouvernement du Québec, c'est la Sûreté du Québec qui sont en cause, si on s'asseoit à la même table et qu'on en discute seulement pour le plaisir de discuter de ce qui est arrivé avec deux hommes par véhicule et sur d'autres sujets. A ce moment-là, on n'arrive pas à une entente et il y a des situations où les solutions aux problèmes ne peuvent plus être adéquates. C'est ce qui s'est passé, on arrive avec un conflit, deux hommes par auto et on sait ce que cela a fait.

Maintenant, je pense que les objectifs poursuivis sont les mêmes, il faudra en tirer une leçon, je parle des parties en cause, que ce soit le gouvernement, la Sûreté du Québec et l'association, et les erreurs du passé ne devraient pas se reproduire à l'avenir. Qu'on s'asseoie à une même table et pour ne pas se cacher derrière un droit de gérance dire: Cela, ça ne vous regarde pas l'Association, qu'on en discute plus franchement. Cela peut être une des solutions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question supplémentaire, M. le Président. Si tout le monde s'entend sur les mêmes objectifs, comment se fait-il que des corps policiers comme ceux de l'Ontario et certains aux Etats-Unis, pour atteindre les mêmes objectifs, emploient le moyen contraire, c'est-à-dire une patrouille à un homme? J'aimerais avoir une réponse à cette question précise, parce qu'on est d'accord qu'on poursuit tous les mêmes buts.

M. Richard (Raymond): Je vais laisser ça pour un peu plus tard, je vais répondre partiellement à votre question. On parlera de statistiques. Aux Etats-Unis ou ailleurs, il y a des corps policiers qui choisissent la patrouille à un homme et il y a aussi des autos jumelées, de la patrouille à deux hommes. La tendance est à la négociation. Le syndicalisme américain n'est pas aussi avancé que le canadien. Dans ce domaine, les conditions de travail sont inférieures. C'est une question de négociation. Sur certains points, ils sont en avance, sur d'autres, nous sommes en avance.

Concernant les statistiques, pour compléter la question, M. Bouchard ou M. Girard pourra répondre à votre question.

M. Girard (Paul): Les critères qui sont respectés par les différents corps policiers américains et, dans certains cas, par l'Ontario Provincial Police, sont tout différents, au moment où ils décident de faire patrouiller un seul par véhicule. A ce moment-là, on n'a pas le cas du poste de Tadoussac et d'à peu près 39 ou 40 autres, où il n'y a qu'un homme sur la relève. C'est beau de vouloir patrouiller seul et de dire: Tu demanderas de l'aide si tu as des problèmes, ou, tu peux compter sur une assistance de tous les instants. Mais, à tout le moins, il faut l'avoir, cette assistance.

La nuance, on doit la trouver là. Il faut absolument s'arrêter et mesurer les proportions, quand on compare. Si vous vous en allez dans une grande ville américaine et que vous avez 150 véhicules pour 100 milles carrés ou 100 véhicules pour 100 milles carrés, à ce moment-là, lorsque vous demandez de l'assistance, vous l'avez immédiatement.

Le public, également, connaît le processus, la façon de procéder de la police, la rapidité à venir en aide. Les gars ne posent pas les mêmes gestes sur les policiers. Mais les citoyens marginaux de la région isolée, soit de Tadoussac ou d'une autre région, savent fort bien que s'il y a une voiture de police qui les arrête, et qu'il n'y a qu'un policier à bord, ce gars ne compte que sur ses propres moyens; il ne peut pas compter sur du secours. S'il est dans un rang, qu'il soit n'importe où, ils savent très bien que ce n'est pas possible. Ce n'est vraiment pas réaliste qu'il puisse avoir de l'aide.

Si ce policier, dans les faits, dans les circonstances pratiques, a à fouiller le véhicule, par exemple, il faut s'imaginer la situation qui peut se produire. Vous avez un policier qui... Mettons l'aide de côté, parce qu'il n'en aura pas. Ce n'est pas possible, il ne peut pas demander au poste voisin de venir l'aider. Dans les faits, cela ne se peut pas. Il ne peut pas retenir un citoyen pendant deux heures.

A ce moment-là, imaginons notre policier qui est seul, à quatre pattes dans le fond de l'auto, en train de regarder en-dessous du siège pour savoir s'il y a de la drogue ou des armes à feu, en train de fouiller le fond de la valise, en-dessous du tapis, pour voir s'il n'y aurait pas encore des objets qu'on recherche.

C'est à ce moment que la situation se présente, qu'on ne peut pas tolérer, un seul homme par véhicule. C'est la proportion qu'on doit garder. On ne peut vraiment pas comparer les endroits où on peut avoir de l'assistance en l'espace d'une minute, chez nous, où cela prend... Peu importe si on est porté à contester nos statistiques, ce sont des faits. A ce moment-là, on sait qu'on n'aura pas d'aide.

J'en ai fait, de la patrouille, et je savais que je ne pouvais pas compter sur de l'aide. Je ne m'en plaignais pas. Je tiens compte, de par ma fonction policière, qu'il soit normal qu'on ait à prendre certains risques. Mais on connaît la réalité et dans notre travail, on ne compte pas sur l'assistance d'un autre véhicule. S'il n'y a qu'un homme et qu'il est seul, il doit s'arranger avec ses problèmes.

M. Vaillancourt (Jonquière): Dans votre mémoire, également, vous ne semblez pas faire la distinction entre la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et les régions métropolitaines. Tout le monde sait que, pour les appels qu'on appellerait appels criminels, dans la plupart des cas, les crimes sont commis et ont été commis et les criminels ont fui lorsque les policiers arrivent sur les lieux.

D'autre part, vous semblez assimiler une région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean ou l'Abi-tibi à une région métropolitaine, comme Québec ou Montréal. Est-il concevable de comparer, au niveau du degré de danger du travail du policier, une région comme celle du Saguenay-Lac-Saint-Jean? On n'a pas eu de statistiques précises. Bien sûr, vous nous avez fourni une grille de cent cas que vous avez pris. Je serais curieux de connaître les statistiques de voies de fait ou d'assauts ou de cas de policiers qui ont été tirés dans une région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean au cours des vingt dernières années par rapport à une région peut-être comme les alentours de Montréal. Je ne comprends pas que vous ne fassiez pas une distinction à mon avis extrêmement importante entre ces régions. C'est bien sûr que le policier du Saguenay-Lac-Saint-Jean va avoir également à arrêter quelqu'un qui zigzague dans la rue, comme cela va arriver en Abitibi et sur la Côte-Nord, mais, en ce qui concerne le danger du travail du policier, les risques inhérents à la fonction, n'est-il pas exact de dire que, dans de nombreuses régions du Québec, à part les régions métropolitaines, les risques que court le policier, relativement aux actes criminels eux-mêmes, sont beaucoup moins importants dans ces régions du Québec?

Je pense parler en connaissance de cause, puisque je viens de cette région et, travaillant un peu dans ce milieu, je n'ai pas en ma mémoire de cas où des policiers de notre région auraient été attaqués physiquement par des voyous ou tirés pas des voleurs, ce qui peut peut-être arriver dans des régions comme Montréal.

M. Richard (Raymond): M. le Président, à l'association, nous n'avons pas fait de distinction dans notre mémoire, puisque, peu importe le poste de la Sûreté du Québec, il y en a 107 postes, il y a des situations dangereuses un peu partout. C'est évident qu'à Grande-Vallée ou Tadoussac, ce

n'est pas tout à fait le même travail policier, étant donné la région, comme l'a expliqué Paul Girard.

Par contre, quand on regarde le travail des policiers, le travail de nos patrouilleurs, puisqu'on parle des patrouilleurs, et qu'on parle d'un poste comme Québec-Métro ou Montréal-Métro, à ce moment, même pour couvrir un accident sur le boulevard Métropolitain, pour l'efficacité et la protection autant du citoyen que du policier, il est nécessaire aujourd'hui d'être deux par véhicule. C'est pour cela que l'association n'a pas fait de distinction.

Il ne faut pas non plus se fier seulement, parce qu'il n'y pas eu de décès dans telle ou telle région, que ce n'est pas dangereux.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non seulement les décès, je parle également d'assauts physiques, des coups de poing, par exemple, dans le visage d'un policier, qui sont certainement beaucoup moins nombreux dans notre coin qu'ailleurs.

M. Richard (Raymond): Nous n'avons pas fait de distinction parce que, peu importe l'endroit où notre membre est situé, nous prétendons que les patrouilleurs devraient être deux en tout temps. Le mémoire et les témoins sont venus le dire ici, à la commission, devant les membres de la commission; par les témoignages, vous vous en êtes rendu compte. C'est la simple raison.

M. Bédard: Avec la permission du député de Jonquière, seulement sur ce point, une question plus particulière concernant un point important que vous avez apporté, à savoir le délai d'assistance qui pouvait se situer aux alentours de 17 minutes. Je crois que vous pouvez admettre que, dans une région comme la région métropolitaine, où vous avez, à proximité, l'aide possible qui peut être apportée par la police de la CUM ou encore même dans un centre comme Québec ou différents centres, au niveau du Québec, plus populeux, où il y a une police municipale très bien structurée, capable d'apporter de l'aide, le problème du délai d'assistance ne se pose pas avec la même acuité, en ce qui a trait à ces grands centres, qu'en ce qui a trait, par exemple, à une région éloignée, et on est capable de l'imaginer facilement, où les distances jouent pour beaucoup dans le délai d'assistance.

M. Richard (Raymond): Si vous permettez, M. le Président, M. Bouchard va répondre à ces questions.

M. Bouchard (Jean-Marie): M. le Président, quand on fait des comparaisons... J'écoutais tout à l'heure M. le ministre dire que Montréal, Québec ou différentes régions... Le délai d'assistance n'est pas aussi important à-Montréal ou à Québec. Nous autres, à notre point de vue, cela n'a pas tellement d'importance. Les policiers, par rapport au nombre de milles, la densité de la population, sont moins nombreux dans la région de Chicoutimi. On prend, par exemple, à Montréal. Si vous demandez de l'aide au quartier général de la rue Parthenais et que vous êtes sur la rive sud — actuellement, la voie du pont Jacques-Cartier est en réparation — je vous jure que cela va prendre plus de vingt minutes. Ce qu'on essaie de démontrer, c'est que, lorsqu'on est pris dans une situation, le policier, ce dont il a besoin, ce n'est pas du téléphone. Le téléphone est là, on l'a actuellement, on a l'automobile. Ce dont on a besoin, ce sont des ressources humaines. Quand on est en activité, le patrouilleur, c'est un bureau pour lui. C'est un bureau. Comme je voyais au début de la commission, M. le ministre, lorsque vous avez demandé à quelqu'un des photocopies pour qu'on continue à discuter; cela a marché. Le policier ne sait jamais quand cette situation va se produire. Quand cela se produit, son bureau est en activité, c'est vrai. A ce moment, de quoi a-t-il besoin? Ce sont des ressources humaines. C'est quelqu'un à côté de lui pour faire tout le travail qui est nécessaire. C'est dans ce sens qu'on dit dans notre mémoire que la population est certainement mieux protégée. Au lieu de faire un "U-turn", de retourner ou de se cacher, parce qu'on a peur, parce qu'ils sont quatre individus, là, on fait notre travail et c'est certain... Lorsqu'on parle aux Etats-Unis, des objectifs, tantôt, j'écoutais la question... Egalement, il faudrait prévoir aussi que les objectifs sont les mêmes, mais que le crime augmente continuellement et il n'y a pas trop de personnes qui trouvent des moyens pour diminuer cela actuellement.

Pourquoi? Parce qu'on parle surtout d'économie. On parle de baisser les coûts de la police. Cela coûte bien cher de se promener dans une voiture de police. C'est toujours dans ce sens et ce sont toujours des administrateurs qui vont dire ça, ou les syndicats... Des policiers qui sont autant policiers que tous les autres policiers, peut-être un peu plus, nous voulons, nous également, la protection du public. Quand on vient ici, c'est pour expliquer, voyez-vous, le danger de notre situation. C'est seulement dans ce but qu'on vient vous démontrer ça. Je ne fais pas de différence entre Montréal ou Québec. Parce qu'un gars qui est au 25e étage à Montréal, cela lui prend autant de temps pour avoir la police, qu'un autre en milieu urbain à Chicoutimi, parce que le policier, avant de trouver une place pour stationner sa voiture et monter au 25e, ça va lui prendre 15 minutes, je pense bien.

M. Bédard: Oui, mais sauf que, lorsque vous parlez de 24 heures sur 24, de toujours avoir deux hommes dans une auto, j'espère que vous faites la distinction entre certains travaux qui peuvent présenter des risques certains, qu'on essaie d'évaluer le mieux possible, qu'on essaie de prévenir le mieux possible. Cela, c'est votre fonction au niveau de la négociation et, disons, le travail d'un policier qui a à signifier un subpoena, certaines procédures à des individus qui n'ont pas un caractère criminel connu. C'est évident que, lorsqu'il s'agit de, peut-être même, aller signifier un subpoena — je fais la distinction — à un individu reconnu comme un criminel qui peut être dange-

reux, il y a quand même une distinction à faire entre celui-là et celui à qui, selon les fiches que vous pouvez avoir, on signifie un subpoena pour la première fois. Est-ce que vous faites cette distinction?

M. Bouchard: Oui, M. le Président. Au début de notre mémoire, vous avez vu que le débat se limite essentiellement au problème de deux patrouilleurs par voiture-patrouille. Evidemment, on ne parle pas seulement de patrouilleurs, de voitures de patrouille comme telles. Tout à l'heure, on mentionnait des régions où il y avait eu des études sur les mêmes objectifs. Je voudrais répéter à la commission qu'en Ontario, ils sont 13 174 policiers municipaux, 4200 provinciaux répartis sur 212 postes, alors que, chez nous, on a 107 postes. Je pense qu'on peut dire qu'en Ontario, le délai d'intervention est certainement meilleur que le nôtre pour avoir du secours parce que la province est moins grande et qu'il y a 212 postes au lieu de 107. C'est le double, autrement dit. Cela veut dire que les distances sont moindres en Ontario pour avoir de l'aide qu'ici, au Québec.

M. Bédard: Sauf que... Une dernière question. Je comprends mal un argument que vous nous avez apporté, qui était le fait d'un réaménagement possible qui aurait comme effet de diminuer le nombre de postes. Vous me faites le raisonnement suivant, qu'en Ontario, ils sont sûrement mieux couverts. Le délai d'assistance est sûrement plus restreint, du fait qu'ils ont plusieurs postes, il y a plus de postes qui sont sur le territoire. D'autre part, vous nous avez présenté un plan de réaménagement qui aurait non pas pour but d'augmenter le nombre de postes qui est déjà inférieur à celui de l'Ontario, mais qui aurait pour but de le diminuer et, au bout de la ligne, vous arrivez à la conclusion d'une meilleure protection policière. Je vous avoue que c'est un point d'interrogation.

M. Bouchard: Nous savons actuellement qu'il y a onze postes de la Sûreté du Québec, des petits postes où le membre de nuit, qui est seul, demeure dans le poste. Quand on parle de projets de réaménagement, on parle de grossir des unités pour faire des secteurs de patrouille. Même si on a cinq ou six postes de moins au Québec, en faisant des secteurs de patrouille, on assure une sécurité au public qui est aussi bonne à cause du chevauchement des relèves; il y a un chevauchement des relèves, et le secteur de patrouille existe comme tel.

Imaginez-vous! Sur onze postes, vous n'avez qu'un homme, et il ne sort pas du bureau parce qu'il est seul actuellement la nuit. Cela se produit au Québec. Je ne pense pas que cela soit le genre de sécurité à laquelle la population s'attende de la Sûreté du Québec; c'est que, lorsqu'on parle de réaménagement, le nombre n'a pas d'importance. Ce qui compte, c'est de créer des secteurs de patrouille et de devenir plus efficaces avec nos secteurs de patrouille.

M. Bédard: Mais, lorsque vous parlez de ces onze postes où il n'y a qu'un homme, vous tenez compte de certains postes éloignés où il y a des difficultés particulières, je crois?

M. Bouchard: Evidemment. Ce sont des postes de moins de dix hommes.

M. Vaillancourt (Jonquière): Une dernière question. Une chose m'a frappé en entendant les autres témoins. On semblait dire que la prévention du crime était mieux assurée, avec plus de patrouilles à un homme que moins de patrouilles à deux hommes, en disant que la population voyait plus souvent des automobiles de police circuler et qu'en conséquence, cela avait pour effet de diminuer les activités des criminels.

Je vous avoue qu'objectivement parlant, tout le monde étant d'accord sur la prévention du crime, je suis un peu confus entre ces deux arguments contraires. Evidemment, il est facile de répondre à cette question en disant: On pense que la prévention du crime est mieux assurée par deux policiers, mais que c'est interpréter l'opinion que les gens peuvent avoir en voyant plusieurs automobiles à un seul policier ou moins de patrouilles, mais à deux policiers.

En fait, dans la réponse que vous avez donnée — et je suis au courant de la réponse — vous semblez vous mettre à la place du citoyen québécois et vous semblez lui faire dire: Je risque moins de commettre un crime si je vois de temps en temps une automobile qui transporte deux policiers et je risque plus de commettre des crimes si je vois plusieurs automobiles, mais avec seulement un policier. Vous semblez déduire cela de façon presque automatique. Je pense que ce n'est pas aussi automatique que cela. J'aimerais avoir une réponse là-dessus.

M. Richard (Raymond): Premièrement, ce n'est pas l'association qui a affirmé cette théorie. Ce sont les membres qui sont venus témoigner pour la Sûreté du Québec. Je vais laisser la parole à M. Masse, qui a explicité ce point et je pense qu'il vous a donné un exemple.

M. Masse (Gilles): A la suite d'une recherche très précise — je pense que ce ne sont pas des affirmations gratuites que l'on a faites — il a été démontré clairement qu'il n'y avait pas eu de changement, au niveau de la criminalité, en comparant, pendant un an, cinq districts de patrouille où on avait complètement enlevé les autos-radios qui circulaient comparativement à un autre district à côté où on les avait doublées, où on avait mis deux fois plus d'autos-radios. Ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas l'auto-radio qui fait de la prévention, ce sont les policiers qui sont à l'intérieur. Si vous avez une auto qui est stationnée sur le bord d'une autoroute, pour faire de la prévention au niveau de la vitesse, et que jamais cette auto ne bouge, c'est clair qu'à un moment donné, les citoyens ne s'occuperont plus de l'auto et vont rouler plus vite. C'est quand les policiers vont enquêter que la prévention commence, parce qu'effectivement, la prévention, c'est une menace. Les gens

ont peur de faire quelque chose, un acte dérogatoire aux lois, parce qu'ils ont peur que les policiers interviennent. Ce que nous disons, c'est que les policiers interviennent plus souvent à deux que quand ils sont seuls, pour un tas de raisons. C'est cela. Ce n'est pas l'auto. On pourrait faire une blague en disant: On va essayer de trouver des autos-radios avec des pilotes automatiques, on ne mettra pas de policier dedans et la prévention va se faire. C'est faux. Ce sont les policiers qui font la prévention en intervenant. S'ils n'interviennent pas, il y a moins de prévention qui se fait.

M. Vaillancourt (Jonquière): Comment se fait-il que dans une ville comme Détroit, laquelle, je pense, est l'une des villes où le taux de criminalité est le plus élevé aux Etats-Unis, on fasse, dans ce coin-là, la distinction entre certains quartiers de la ville où on met même plus de deux patrouilleurs et que, dans d'autres quartiers de la ville, qui sont considérés comme moins dangereux... Mais la ville de Détroit étant l'une des villes dangereuses aux Etats-Unis, comment se fait-il qu'il n'y ait qu'un patrouilleur?

M. Masse: Historiquement parlant, c'est une façon traditionnelle. Je vous ferai remarquer que, si on regarde l'évolution sociale et le rôle de la police dans la société, avec la hausse de la criminalité, cela fait à peu près une quinzaine d'années qu'on s'occupe de la police. On n'a pas fait tellement de recherche sérieuse il y a quinze ou vingt ans sur la police et on a toujours eu, dans certains endroits, des autos à un homme et on continue parce que cela coûte moins cher. Mais, à un moment donné, on réalise que cela en prend plus d'un et, dans certains quartiers, on en met plus d'un. Je dois vous dire que les recherches sérieuses sur la police, on commence à en faire depuis une dizaine d'années. On a toujours négligé la police; or, ce qui se passe, je vous le dis bien sincèrement, depuis cinquante ans aux Etats-Unis, nous nous en foutons pas mal. Cela ne veut pas dire que ces gens ont raison. On essaie de regarder objectivement le problème et on est obligé de constater qu'une auto à un homme, c'est moins efficace qu'une auto à deux hommes. Pas exclusivement pour la protection des policiers, mais pour la protection des citoyens. Je peux vous donner des exemples. Dans notre système judiciaire, à maintes reprises, à beaucoup d'endroits, on demande la corroboration quand on porte des accusations contre un criminel. Comment voulez-vous avoir la corroboration d'un fait, à un moment donné, si le policier est seul? C'est un autre handicap. On donne toujours le bénéfice du doute à l'accusé. Il y a aussi d'autres exemples qu'on pourrait donner.

C'est bien moins tentant d'essayer de corrompre deux policiers qui sont ensemble qu'un seul, parce qu'il y a un témoin. Ce sont toutes des questions d'efficacité qu'on considère comme étant très importantes, qui font que la protection de la population est augmentée. Aux Etats-Unis, que, dans plusieurs villes, il y ait des autos avec un seul homme, cela ne nous impressionne pas plus que ça. Cela ne veut pas dire qu'ils ont raison.

M. Vaillancourt (Jonquière): En terminant, M. le Président, ce n'est pas une question, c'est un commentaire qui rejoint partiellement ce que M. Masse vient de dire. Vendredi dernier, il y a certains membres de cette commission qui ont semblé, en fait, comprendre le problème des policiers, qui l'ont dit, qui ont semblé dire qu'ils comprenaient la frustration des policiers. Je dois dire également que ces gens ne sont pas seuls à penser ainsi. Ce que je voudrais dire, c'est qu'au cours des dernières années, ils auraient certainement eu l'occasion de démontrer qu'ils comprenaient très bien ce problème et ils auraient pu, en conséquence, aborder le problème de façon aussi détaillée qu'on le fait actuellement.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, selon un résumé du rapport des témoignages des policiers de la Sûreté du Québec, on semble dire que le travail des policiers de la Sûreté du Québec n'est pas semblable à celui des autres provinces ou encore au travail des policiers américains ou des policiers des villes.

En fin de compte, est-ce que les policiers de la Sûreté du Québec, les membres de l'association, demandent une espèce de statut particulier pour les policiers du Québec à cause des distances, des délais à intervenir? Et que dire du policier de Montréal-Métro où les délais d'intervention sont beaucoup plus rapides et pourquoi y a-t-il deux policiers par auto à Montréal?

M. Richard (Raymond): Me Barré va vous répondre.

M. Barré: Ce qui est demandé, M. le Président, et je pense que les membres de la commission l'auront compris, ce n'est pas pour les membres de la Sûreté du Québec un statut particulier. On demande de tenir compte de la situation géographique et territoriale applicable à la province de Québec, comme nous l'avons expliqué dans notre mémoire tantôt. J'entendais un député mentionner qu'on n'avait pas établi de distinction dans nos représentations entre, d'une part, le patrouilleur en province et le patrouilleur dans une région métropolitaine comme Montréal. Je pense qu'il faut reconnaître, au point de départ, que chaque région de la province de Québec a ses particularités et que c'est en fonction des particularités de chacune des régions que nous vous avons soumis nos représentations.

D'ailleurs, si vous vous référez au tout début de notre mémoire, nous vous avons fait entendre et déposer certains documents établissant le particularisme de la patrouille, tant en milieu urbain, semi-urbain, que rural, qu'isolé, justement pour faire ressortir les implications des différents types de patrouille. Je pense que c'est quand même un

élément important et qui doit être retenu si on dit, au point de départ, qu'il existe une distinction entre les régions urbaines, semi-urbaines et rurales. Il y a quand même des difficultés et des problèmes qui se posent à un niveau ou à l'autre.

En région métropolitaine, vous avez par exemple certains problèmes qui vont découler de la concentration ou de la densité de la population, qui vont découler de la présence d'éléments cri-minogènes plus accentués qu'en province, alors qu'en province, vous allez avoir des problèmes de communication, d'intervention. A un niveau ou à l'autre, quel que soit le niveau où on se place, vous allez sûrement rencontrer des difficultés d'application qui font que la demande pour la patrouille à deux hommes est essentielle.

Si on me permet de revenir, pour terminer, lorsqu'on parle de postulat voulant que la prévention pourrait être le résultat de plus de présences policières que le citoyen noterait, je crois qu'il y a quand même lieu de souligner que ce postulat provient du document qui a été soumis par le ministère de la Justice.

Par ailleurs, lorsque nous avons répondu à ce document, nous vous avons quand même référés à un autre document, un document qui a été préparé et soumis par un ancien ministre de la Justice. Vous me direz que c'est un ancien ministre de la Justice, mais quand même, cela demeure un ministre de la Justice, qui, dans un livre blanc intitulé justement "La police et la sécurité des citoyens", mentionnait que ce postulat n'était pas fondé et qu'il ne fallait plus se contenter de la seule présence physique du policier pour prévenir le crime. C'est quand même un élément qui doit être retenu quand nous sommes à apprécier une demande comme celle qui vous est faite par l'association des policiers, à cette commission.

M. Fontaine: Concernant le problème du regroupement des corps policiers de différentes régions, c'est votre argument de dire qu'on n'a pas besoin d'augmenter nécessairement l'effectif policier au Québec, pour pouvoir réussir à maintenir deux policiers par auto.

Je considère les renseignements que vous nous avez donnés et je les applique dans mon comté, Nicolet-Yamaska. Vous dites: On devrait faire le regroupement de Bécancour et de Nicolet. Je demeure dans cette région, et je me demande, concernant les délais d'intervention et vous mentionnez qu'ils sont déjà trop longs... Si vous installez le poste à Nicolet, par exemple, comment allez-vous faire pour avoir un délai d'intervention meilleur s'il y a un incident qui se passe à l'autre bout du comté qui a 70 milles de long? Je me demande quel sera votre argument pour dire que cela va être plus efficace.

M. Richard (Raymond): M. le Président, l'association tient à mentionner que ce sont des études de regroupement. Ce sont des études qui ont été faites par la Sûreté du Québec. Ce serait une solution à court terme, peut-être même à long terme. Il faudrait l'examiner.

Pour répondre à votre question: De quelle façon va-t-on obtenir plus d'efficacité? C'est assez simple. A ce moment-là, en ayant des postes un peu plus gros, on a plus de personnel. Il s'agit de diviser des secteurs de patrouille. Un véhicule, dans un rayon donné, reste dans son secteur de patrouille, ce qui donne une efficacité et une protection immédiates ou plus rapides aux citoyens.

M. Fontaine: Est-ce que vous ne seriez pas d'accord pour dire qu'au lieu d'employer cet argument, on serait mieux de demander à la Sûreté du Québec d'augmenter l'effectif de ses policiers, graduellement, pour en arriver à avoir deux policiers par auto, mais en gardant quand même les postes actuels?

M. Richard (Raymond): Nous arrivons avec... Ce serait une des solutions...

M. Fontaine: En essayant de les augmenter.

M. Richard (Raymond): M. le député, il y a peut-être d'autres solutions, c'est fort possible. L'association ne dit pas qu'en regroupant certaines unités, la Sûreté du Québec doive stabiliser son effectif et demeurer avec 4300. On sait qu'il n'y a déjà pas assez de policiers. Dans certains domaines où la Sûreté veut 'aller plus en profondeur, il faudra, éventuellement, avoir plus de policiers. Cela ne peut pas se faire dans une année ou deux. Vous savez que le recrutement est à la baisse, ces temps-ci.

M. Barré: II y a quand même, M. le Président, des solutions à court, moyen et long termes. Ce que nous avons principalement envisagé, dans l'immédiat, pourrait être qualifié de solution à court terme, c'est-à-dire quelles seraient les possibilités ou les solutions à envisager, compte tenu des effectifs actuels. On s'est rendu compte, de par la carte géographique qui vous a été présentée, que, par exemple, plusieurs postes étaient concentrés dans certaines régions et que, à ce moment, on pourrait facilement entrevoir la possibilité de réaménager la situation de certains postes pour permettre la couverture plus adéquate d'un territoire donné. Considérons que, dans d'autres territoires ou d'autres régions de la province de Québec, vous avez, par exemple, un poste qui dessert un territoire beaucoup plus considérable; enfin, essayons d'avoir ou d'établir une norme de base qui puisse permettre une meilleure utilisation des effectifs actuels et une meilleure redistribution du personnel.

M. Fontaine: M. Masse, pouvez-vous me dire depuis combien de temps la Communauté urbaine de Montréal a deux policiers par auto?

M. Masse: Je pense qu'il y en a toujours eu, M. le Président.

M. Fontaine: Toujours?

M. Masse: A ma connaissance, on a toujours travaillé à deux hommes par auto.

M. Fontaine: Vous avez mentionné tout à l'heure que cela coûte moins cher d'avoir un policier par auto. Pour deux policiers par auto et moins d'automobiles, est-ce que vous avez des statistiques?

M. Masse: Je n'ai pas de statistique précise... M. Fontaine: C'est évident.

M. Masse: ... mais j'ai l'impression que cela coûte moins cher une auto avec un policier qu'une auto avec deux policiers, tout simplement.

M. Fontaine: Au cours des témoignages, on a mentionné, à un certain moment, que la Sûreté du Québec, assez souvent, dans certains postes, n'a pas de dispatcher. Il y aurait peut-être également, lieu d'améliorer ce point. Avec cela, je fais référence à la technique. Dans son témoignage, M. Duval mentionnait également qu'il avait eu l'expérience de faire une course avec un casque à l'intérieur duquel il y avait un appareil de télécommunication. Je ne sais pas si ces moyens techniques ne seraient pas des améliorations à apporter aux effectifs de la Sûreté du Québec. Je voudrais connaître votre opinion là-dessus.

M. Richard (Raymond): Vous parlez de quoi? Du casque?

M. Fontaine: Oui. Ce sont des améliorations techniques qu'on a mentionnées. Il y en aurait peut-être d'autres aussi. Pensez-vous, en fin de compte, que des améliorations techniques pourraient remplacer à certains endroits un second policier?

M. Richard (Raymond): Nous croyons qu'il n'y a pas d'améliorations assez techniques pour remplacer le policier, le deuxième homme. Toutefois, avec certaines études qui pourraient être faites, il y aurait probablement possibilité d'améliorer l'équipement d'un véhicule de patrouille, mais jamais au point de remplacer un homme.

M. Barré: On a d'ailleurs insisté, à certains égards, dans le document déposé par le ministère de la Justice, sur les développements technologiques en matière policière. Ce que nous avons voulu faire ressortir, c'est que, d'une part, s'il y a eu des développements technologiques, c'est que certaines lacunes sont quand même apparues au niveau des communications. Les communications peuvent être accélérées, mais la réponse ou l'intervention à la suite de cette communication ne l'est pas pour autant, parce que le patrouilleur continue de disposer d'autos-patrouilles et non pas d'avions, si on peut me permettre cette comparaison.

Par ailleurs, il convient également de préciser que le travail du patrouilleur est quand même un travail qui comporte énormément d'implications et de responsabilités.

Si on veut que le patrouilleur soit en mesure de faire face à toutes ces implications, à toutes ces responsabilités, enfin, à toutes les contingences de son travail, il faut quand même lui donner, à ce moment, les outils dont il peut avoir besoin pour y faire face.

M. Fontaine: Au cours du témoignage d'un des policiers qui est venu raconter un fait qui s'est passé, il mentionnait qu'il avait arrêté une automobile et que, lorsqu'il est descendu pour aller rencontrer la personne qu'il arrêtait, la personne a fait feu sur lui. Si on dit que les bandits, les criminels agissent soudainement, sans avertissement, comment, dans un tel cas, pourrait-on dire que les policiers qui sont deux dans une automobile seraient mieux protégés?

M. Girard: Là-dessus, ce qu'il y a de bien important, je pense que cela prend, en fait, de l'expérience policière pour savoir que l'attitude des gens qu'on arrête, que ce soient des contrevenants au Code de la route ou des personnes qui seraient suspectes d'actes criminels, ont une attitude toute différente, lorsque vous êtes deux ou lorsque vous êtes seul. Je pense que c'est la pure logique. Ce n'est que mathématique. On a moins peur d'un homme que de deux hommes. Ce n'est pas difficile à comprendre. Je pense aussi qu'un type qui serait seul dans un véhicule et qui aurait l'intention de décharger une arme à feu en direction du policier ne le fera pas s'il voit qu'il y en a un autre qui va le tirer. Ecoutez, en fait, la raison qui peut le motiver,— sauf si c'est un malade mental et on ne voudrait surtout pas faire de comparaisons avec les malades mentaux — ils peuvent en tirer dix de suite, des policiers, et on n'aura jamais de mesure à garder — s'il s'agit d'une personne qui agit pour protéger sa liberté, pour se sauver, elle ne prendra pas de chance inutile, elle va aimer mieux être arrêtée que d'être tuée. Par contre, si l'individu a une chance de blesser ou de tuer pour se sauver, il va le faire. C'est de cette façon qu'il faut considérer l'affaire. Tout à l'heure, vous parliez d'un répartiteur d'appels. C'est important de revenir là-dessus. Ce qu'il faut comprendre dans cela, c'est qu'au téléphone, lorsqu'on reçoit un appel, il faut absolument se rappeler que le citoyen qui appelle, donne son message et, bien souvent, il nous raccroche au nez. C'est tellement vrai qu'on a de la difficulté à savoir, lors d'un appel pour accident, si c'est un appel pour accident avec dommages matériels ou, si c'est un appel pour accident avec blessés. Souvent, le gars dit: II y a un accident. Il dit à quelle place et il raccroche. C'est pour cela que c'est difficile pour un répartiteur d'appels, quel qu'il soit, de juger ces situations.

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, M. le député de Johnson, il y a d'autres personnes inscrites sur la liste.

M. Bellemare: ...

Le Président (M. Bertrand): Non, c'était déjà fini, cette période. On a fait le tour de chacun des partis. A ce moment, on est dans la période où on poursuit... chacun des intervenants s'étant inscrit... Pardon?

M. Bellemare: Je vais pouvoir revenir tout à l'heure?

Le Président (M. Bertrand): Ah! Je comprends. Le député de Drummond.

M. Clair: M. le Président, la question qui nous intéresse dans le moment, et je pense, celle qui est au coeur du débat, c'est vraiment la sécurité du policier comme travailleur. Dans le même sens que le député de Jonquière tantôt, quant à moi, je me suis interrogé sérieusement sur les raisons qui peuvent motiver la différence de position prise par certains intervenants qu'on a entendus ici, et par d'autres, quant aux moyens d'assurer cette sécurité des policiers. Je me demande si on ne peut trouver une amorce de réponse à ces interrogations du député de Jonquière, qui sont également miennes, de voir, par exemple, qu'on prend des positions nettement contradictoires quant à la façon d'assurer la sécurité du patrouilleur. Dans un cas, on nous dit que c'est plus sécuritaire; on tente de démontrer que c'est plus sécuritaire à deux hommes qu'à un homme. J'ai essayé de trouver des raisons qui pouvaient justifier cette différence en territoire américain, nord-américain. J'ai été amené à me poser six ou sept questions précises, par exemple, avant d'en venir à la patrouille à deux hommes tout le temps — la question, chacun des membres de cette commission se la posera, le moment venu — au lieu d'accorder ou d'avoir deux hommes tout le temps, à toutes les heures du jour, si on ne devrait pas se poser d'abord les questions suivantes: Est-ce qu'il ne serait pas temps, est-ce qu'il ne serait pas plus opportun d'essayer de mieux définir le rôle, la mission de la Sûreté du Québec comme telle? J'entends par là, est-ce que le rôle de la Sûreté du Québec en est un uniquement de patrouille et d'enquêtes ou est-ce que c'est également son rôle d'assigner des subpoenas? Est-ce que ce travail ne devrait pas être fait par d'autres individus, officiers de justice?

Est-ce que ce ne serait pas une première question importante qu'on doit se poser? Quel est le véritable rôle de la SQ, sa mission? De la même façon, on peut se poser la question: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de mieux définir le rôle et la mission de la patrouille? Le point de vue soulevé par M. Masse, particulièrement, m'ébranle sur ce point. Quand on dit qu'il y a des statistiques qui semblent être sérieuses, qui démontreraient que d'avoir un certain nombre de patrouilles à un ou à deux hommes... Finalement, la prévention que pourrait constituer le fait d'avoir des voitures-patrouilles qui se promènent, ça peut avoir un effet très secondaire. Ce qui importe le plus, ce sont les deux bonshommes qu'il y a dedans et le travail qu'ils font.

Dans ce sens, est-ce qu'on ne devrait pas également se poser la question de mieux définir le rôle de la patrouille, la mission de la patrouille, avant de penser à avoir deux hommes tout le temps?

Un troisième point de vue, une troisième question que je me pose — cela a été soulevé par l'association — c'est qu'on a parlé de mieux répartir les effectifs déjà existants. Cela m'apparaît, après en avoir discuté pendant la fin de semaine avec des policiers de ma région de façon informelle, être une mesure qui devrait au moins être étudiée à son mérite. On me soulignait, par exemple, le fait qu'il existe, pour la région dont je fais partie — je wuis député de Drummond — pour la région de Drummond, on m'expliquait qu'il existe ce qu'on appelle une unité d'urgence, qui serait cantonnée à Trois-Rivières, une unité qui comprendrait une trentaine d'hommes. De la façon que les policiers qui travaillent au poste de Drummondville me parlaient de cette unité d'urgence, il m'est apparu, moi, que le rôle qu'ils jouaient, finalement, ce n'en était pas un véritablement d'unité d'urgence, parce que, dans un cas d'urgence, justement, cette unité spéciale de Trois-Rivières mettait un temps beaucoup trop grand à intervenir à Drummondville.

On me donnait, par exemple, les faits suivants: La patrouille du soir commence à 5 heures, je pense, et, au moins en été, ces patrouilleurs viennent dans le district de Drummond. Si le policier est en poste à 5 heures, avant d'être parti, je pense — je ne veux pas dire que le policier branle; c'est simplement une procédure normale — on me dit que ça prend environ une demi-heure. Le temps que le policier s'en vient patrouiller dans le district de Drummond, il faut compter une heure de voyage. Le policier a une heure de repas, qui est comprise et que je ne conteste pas, et, bien entendu, une heure de retour et une heure qu'il doit prendre, environ, pour faire son rapport, une fois revenu à son poste. Finalement, oe qui lui reste, c'est à peu près deux heures, trois heures de travail utile, de travail d'appoint qu'il peut apporter aux policiers de la région de Drummondville.

Je mets en cause cette... Je pose la question: Est-ce qu'une unité comme celle-là joue vraiment son rôle? Est-ce qu'une meilleure répartition de l'effectif policier de cette manière ne serait pas de nature à faire porter une moins grande importance à la question de la patrouille à deux hommes tout le temps?

Egalement — cela a été soulevé par d'autres députés — je pense que, malgré que je sente que vous n'êtes pas d'accord pour accepter cette unique mesure, vous êtes quand même d'accord pour accepter le fait qu'il y a moyen d'améliorer le réseau de communication. Encore une fois, pour prendre un exemple concret, dans ma région, il y a trois corps de police, Sûreté de Drummondville, Sûreté de Drummondville-Sud, Sûreté du Québec, et les policiers avec qui je discutais en fin de se-

maine me disaient qu'ils n'avaient pas le même système de communication, de sorte qu'un policier de la Sûreté du Québec pourrait fort bien faire face à un problème en banlieue de Drummondville, à moins de trois milles, et, avant de pouvoir rejoindre par téléphone un assistant de la Sûreté de Drummondville, par exemple, cela pouvait prendre un délai inutile, uniquement à cause d'un problème de communication.

Encore là, est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de résoudre véritablement ce problème?

Egalement, on n'a pas tellement soulevé cette question, si ce n'est le député de Nicolet-Yamaska, mais il y a tout le problème que moi, j'appelle l'arsenal ou l'artillerie, l'équipement des policiers. Dans tous les métiers et dans toutes les circonstances de la vie humaine, quand un individu, quand une personne humaine a peur — je pense qu'il faut reconnaître que, dans certaines circonstances, c'est très légitime pour le policier d'avoir peur — c'est certain que la première solution qu'on trouve à notre portée, c'est d'avoir une présence humaine à côté de nous.

Si on prend le monteur de structures, le fait d'avoir quelqu'un au bout de la poutre sur laquelle il marche, il est certain que cela va le rassurer. Pourtant, ce n'est d'aucune utilité. Ce qui importe est d'avoir une ceinture qui le relie à la poutre sur laquelle il marche. Etre deux pour combattre un incendie, c'est important, mais il faut de l'équipement, il faut d'abord avoir un bon boyau d'arrosage. On peut multiplier les exemples.

La question de l'arsenal policier ou de l'équipement policier, n'est-elle pas aussi une question très importante qu'on devrait résoudre avant de penser en fonction du jour ou de la nuit, d'être deux par patrouille toujours et tout le temps? Et, là-dessus, seulement un petit point.

On me demandait également en fin de semaine si c'était exact qu'avec les armes à feu dont les policiers sont équipés à la Sûreté du Québec, cela ne donnait rien de tirer à travers une vitre en voiture quand la voiture-patrouille circule, et on disait que cela ne donne rien de faire feu vis-à-vis de la voiture parce que, de toute façon, à une distance de 20 ou de 25 pieds, la balle était inefficace pour perforer la vitre du véhicule automobile ou la portière.

Enfin, on a également soulevé la possibilité de mieux filtrer les appels. Cela m'apparaît particulièrement important et encore en en discutant avec des policiers en fin de semaine, on me disait qu'on reconnaissait que même si, dans la région, les gens étaient satisfaits du travail fait par ce qu'on a convenu d'appeler les dispatchers ou les régulateurs, les policiers prétendaient que lorsqu'ils avaient travaillé dans tel ou tel poste, ce n'était pas le cas.

Une autre mesure concrète qui m'apparaît de nature à pouvoir sécuriser le policier serait de pouvoir mieux connaître la situation. On a déjà parlé de cet élément, mais si on prend les six éléments ensemble, ces six éléments comme tels ne pourraient-ils pas, par une amélioration ou par une étude sur la possibilité d'améliorer ces six points, aider à sécuriser le policier au travail? Il y a également un tout dernier point, je pense, car il y aurait également lieu de tenir compte du régionalisme, des situations propres à chacune des régions.

Cela fait beaucoup de questions. Je peux résumer en peu de mots. Il s'agit de mieux définir le rôle de la SQ, de mieux définir le rôle et la mission de la patrouille, de mieux répartir les effectifs existants, d'améliorer le réseau de communications, l'arsenal policier et le filtrage des appels.

M. Richard (Raymond): II est évident, pour répondre à l'ensemble de vos questions, que s'il y a des études poussées dans chaque domaine que vous venez de mentionner, on va certainement mieux outiller le policier et on va probablement avoir plus de solutions aux différents points qui n'ont pas été étudiés depuis quelques années.

Vous parlez d'essayer de mieux définir le rôle, la mission de la Sûreté du Québec, je pense que, depuis quelques années, il y a des efforts dans ce sens. On dit qu'on veut définir davantage le rôle de la Sûreté du Québec, mais est-on tellement plus avancé?

De toute façon, le ministre de la Justice en a parlé également et on ne sait pas ce qui va se produire au Québec d'ici quelques années. Selon les événements, on sera obligé de définir le rôle de la Sûreté et avec la régionalisation, avec tout ce qui s'est passé au Québec, cela sera, d'ici quelques années, une priorité.

Ce que l'association a tenté de prouver dans son mémoire est que, même si on définit le rôle de la Sûreté du Québec, même si on lui donne encore plus d'équipement, il reste tout de même que nous côtoyons tous les jours les policiers municipaux, les policiers de la Sûreté du Québec...

A l'association, nous avons des policiers de carrière et des témoignages de ces personnes. Même avec le meilleur équipement, même avec le meilleur rôle à la Sûreté du Québec, il reste tout de même que, pour le patrouilleur — et on parle du patrouilleur — qu'un confrère pour l'assister, c'est nécessaire.

Ce n'est pas parce que vous allez augmenter l'équipement dans un véhicule de la Sûreté ou améliorer le réseau de communications que le patrouilleur n'aura pas besoin d'un confrère. Loin de là.

Plus on mettra de l'équipement, plus cela sera peut-être une autre raison d'avoir quelqu'un pour s'occuper de cet équipement. On parle d'améliorer le réseau de communications, il est évident qu'il faudrait essayer d'améliorer le réseau de communications. Dans l'exemple que vous donniez — on prend le poste de Drummondville — à ce moment, si les réseaux de communications sont intégrés, s'il y a un appel d'un VA de la Sûreté du Québec à deux ou trois milles du territoire, des limites de la ville, cela sera plus facile d'avoir du secours.

Mais qu'est-ce qui arrivera au policier de la Sûreté du Québec qui est dans le quatrième rang, à Saint-Cyrille? A ce moment, même avec le meilleur réseau de communications, il faudra tout de

même, si le policier de Drummondville sort de son territoire, qui est à dix ou quinze milles, qu'il prenne le temps de se rendre. Cela ne règle pas le problème.

Est-ce qu'il y aurait lieu de mieux définir le rôle, la mission de la patrouille? On l'a démontré dans notre mémoire. Même en changeant le rôle d'un patrouilleur, il reste tout de même que la patrouille, c'est la patrouille. Il reste tout de même que la présence d'un confrère policier est nécessaire, et nous l'avons, à notre point de vue, démontré dans le rapport que nous avons soumis.

C'est évident que l'association ne demande pas au patrouilleur de distribuer des subpoenas accompagné d'un autre membre, dans son véhicule. Parce que c'est dans une patrouille normale, à ce moment-là, les patrouilleurs devraient être deux... A la Sûreté du Québec, et c'est important de le mentionner, il y a des personnes, des agents de police, on les appelle des divers, qui se chargent des sommations, normalement. Concernant les subpoenas, les enlèvements de permis, les enlèvements de plaques, ce qu'on appelle communément la tôle, dans le métier, des policiers font ce travail. Normalement, ces policiers sont en civil, dans des autos-fantômes. Mais il arrive quelquefois qu'un patrouilleur a une "pièce de procédure" qui arrive à la toute dernière minute, ou un surcroît de travail; il a à livrer quelques sommations ou subpoenas. Mais ce n'est pas le travail courant du patrouilleur.

Mieux répartir l'effectif de la Sûreté, par exemple l'unité d'urgence, c'est une suggestion de l'association. On l'a dit à plusieurs reprises au cours des dernières semaines. L'unité d'urgence, d'après les renseignements que vous avez eus des policiers de votre région et les renseignements sont exacts... Il reste tout de même que le temps de partir, même si le policier, comme vous le dites, ne "branle" pas, de se rendre dans un territoire donné, de prendre son 1025, son heure de repas, de revenir pour arriver une demi-heure ou trois quarts d'heure avant son heure de travail, faire le rapport, assurer la relève, à ce moment-là, il a donné deux ou trois heures, réellement, de travail. Est-ce qu'il y aurait moyen d'utiliser davantage cette unité d'urgence? C'est une des suggestions de l'association. Nous disons: Oui, tenant compte du rôle qui est joué actuellement par l'unité d'urgence, parce qu'on sait qu'au moment où on l'a créée, le rôle de l'unité d'urgence ne visait pas les mêmes buts. Aujourd'hui, il y a moins de problèmes au Québec. La suggestion de l'association, ce serait de prendre une partie de cette unité d'urgence — on ne parle pas de l'unité d'urgence de Québec, Montréal ou Baie-Comeau, où ces unités d'urgence, actuellement, ont beaucoup d'appels et sortent régulièrement — mais on pourrait prendre quelques membres parmi les autres et les envoyer aux différents postes.

Donc, au lieu d'assurer une protection ou un travail deux ou trois heures par relève, on pourrait récupérer des membres qui deviendraient plus efficaces et qui feraient leurs huit ou neuf heures — parce que nous avons la semaine de quatre jours, neuf heures par jour.—

J'ai parlé un peu des réseaux de communication. Il y a certainement possibilité d'intégrer et d'améliorer ces réseaux de communication. Je vous ai mentionné les cas où, malgré tout, le policier ne pourra pas avoir d'aide ou quand le policier aura reçu son aide, il sera probablement trop tard.

L'équipement, il ne faut pas prétendre que, parce que les patrouilleurs, on l'espère, pourront travailler à deux à l'avenir, qu'ils auront toute la sécurité maximale au travail... Loin de là, comme tous les travailleurs des corps de métiers, des corps de professions, il reste que nous avons des dossiers à l'étude depuis plusieurs années et, cela prendra encore des études un peu plus poussées et éventuellement, il faudra améliorer l'équipement du policier. Mais encore là, cela n'enlèvera pas le compagnon de travail qui est nécessaire, et à ce moment-là, le patrouilleur sera mieux protégé et aura quelqu'un qui pourra se servir de l'équipement au besoin, parce que dans le travail du patrouilleur, il y a toujours des informations, on l'a dit, à transmettre à la centrale, il y a toujours des détails, et notre dossier a démontré que les patrouilleurs devaient être deux. C'est la prétention de l'association.

Filtrer les appels, Paul Girard l'a mentionné tout à l'heure, c'est extrêmement difficile parce que souvent la personne qui nous appelle est énervée, et dans la majorité des cas ne donne pas trop d'information. Elle va nous dire: II y a un vol à main armée à tel endroit et elle raccroche immédiatement. Alors, on est obligé d'envoyer un véhicule et à ce moment-là, on ne sait pas vers quoi on s'en va.

Tenir compte des situations particulières. On en a tenu compte dans notre mémoire et dans les exposés de nos témoins. On a dit que Grande-Vallée, Tadoussac, Québec-Métro ou Montréal-Métro, pour diverses raisons, ont des situations particulières. Malgré tout cela, ce qu'on a tenté de démontrer dans notre mémoire, c'est que le patrouilleur devrait, en 1977, à la Sûreté du Québec, puisqu'on représente la Sûreté du Québec, travailler jumelé en tout temps.

M. Clair: M. le Président, tenant compte du fait que, finalement, si on tombait d'accord à peu près sur le fait d'améliorer les différents points que j'ai mentionnés, ce serait de nature à améliorer également la sécurité du policier au travail. Tenant compte de ce fait d'une part, et tenant compte, d'autre part, du fait que, personnellement, sans nullement mettre en doute l'honnêteté intellectuelle de la démarche de ceux qui ont compilé des statistiques pour votre compte, quand je compare les statistiques et la documentation du ministère de la Justice, les statistiques que vous nous avez fournies, et, un peu dans le même sens, celles du député d'Anjou, l'autre jour, je pense que, sur la question de fiabilité et de sûreté des statistiques, le mémoire que vous présentez, à ce point de vue statistique n'est peut-être pas assez serré.

A ce moment-là, sur le plan statistique toujours, je suis porté à me rattacher davantage aux

statistiques des Etats-Unis et d'autres endroits dans le monde. Etant donné que les Etats qui fournissent ces statistiques nous disent que le travail d'un patrouilleur seul, finalement, est peut-être tout aussi sécuritaire que le travail à deux hommes, pour nous, dans la conception où je me place, est-ce qu'on ne peut pas et qu'on ne doit pas en venir à la conclusion qu'avant de passer à la patrouille à deux hommes, quand on a un bon lot de statistiques, qui m'apparaissent sûres, est-ce qu'avant de passer à la patrouille à deux hommes, en fonction du jour ou de la nuit, il n'y aurait pas lieu d'envisager d'améliorer les points susmentionnés, avant d'en arriver immédiatement à la conclusion qu'il faudrait deux hommes tout le temps?

Autrement dit, est-ce qu'on ne met pas un peu la charrue devant les boeufs, est-ce qu'on ne peut pas apporter d'autres améliorations avant d'en arriver à ce point?

M. Richard (Raymond): M. le Président, nous prétendons que non. Même en améliorant tous les points que vous avez mentionnés, il reste qu'il sera de plus en plus nécessaire de travailler à deux sur un véhicule de patrouille. Quand on compare les statistiques, et nous avons mis en garde les membres de la commission parlementaire, au tout début de notre exposé, nous n'avons pas fait une preuve ou un dossier de statistiques, mais quand on regarde les dangers d'homicides, on a pris ça dans Statistique Canada, 6,1%, c'est à peu près la seule statistique, quand on parle des experts qui sont venus témoigner devant la commission, même l'expert a mentionné que le travail à un homme, pour lui, c'est plus efficace, ce sont simplement des impressions. Il ne s'était basé sur aucune statistique, il faut bien s'en rendre compte et c'est important.

M. Clair: Sur les statistiques, je ne veux pas faire une guerre. C'est toujours ennuyeux une guerre de statistiques et ne mène nulle part. Je tiens simplement a vous souligner que l'immense majorité des statistiques fournies par le ministère de la Justice provenaient elles aussi de Statistique Canada d'une part. D'autre part, quand on met en cause le haut taux d'homicides chez les policiers par rapport à l'ensemble de la population, cet argument est loin de me convaincre. Aussi cruelle et inacceptable que soit, jusqu'à un certain point, la mort d'un policier abattu par un bandit, on doit considérer ça comme un accident de travail. Cela ne me convainc pas de dire qu'il y a plus de policiers qui se font tuer à leur travail qu'une autre catégorie d'individus. A ce moment-là, les ouvriers de la Celanese de Drummondville pourraient fort bien produire des statistiques disant qu'ils sont ceux qui souffrent davantage de maladies pulmonaires causées par l'odeur de vinaigre qu'ils ont un taux six fois plus élevé que l'ensemble des citoyens et ils auraient raison.

Jusqu'à un certain point, je pense qu'on doit considérer ça. Encore une fois, pas de problème à me convaincre que c'est cruel, plus inacceptable que la mort de n'importe quel autre individu, j'en suis convaincu d'avance. Mais je pense qu'on doit considérer que ça fait quand même partie des risques du métier, aussi cruel que ça puisse être.

M. Richard (Raymond): M. le Président, si vous permettez, je pense qu'on ne parle pas de la même chose ou on ne s'est pas compris depuis quelques jours. Quand on parle de sécurité, je pense que l'association, les policiers et toutes les personnes interrogées croient que ce n'est pas normal d'envoyer quelqu'un seul, et qu'advenant une situation où on arrête un criminel, le gars se fasse descendre. Ce ne sont pas les risques du métier, ce n'est pas un accident de travail, c'est un meurtre et c'est inacceptable. C'est inacceptable qu'en 1977, on continue à envoyer des policiers, ne serait-ce qu'il n'en tomberait qu'un ou deux par année, c'est inacceptable.

Quand on nous dit qu'un gars poursuit un automobiliste sur la route, à Grande-Vallée, qu'il manque son tournant, tombe à l'eau et se tue, à ce moment-là, ce sont les risques du métier. Le gars a perdu le contrôle de son véhicule, c'est acceptable.

Il y a des dossiers de sécurité. Vous avez mentionné le travailleur qui monte sur une poutre et vous dites que c'est dangereux. C'est évident, c'est le risque du métier. Il n'y a personne qui le garroche en bas. Envoyer un policier pour se faire tuer, c'est cela qui est inacceptable. Ce n'est pas le risque du métier et ce n'est pas un accident de travail. C'est un meurtre, et il faudrait que les membres de la commission parlementaire le réalisent. C'est pour cela que le séjour s'est prolongé à Drummondville et c'est pour cela qu'on est devant la commission parlementaire. C'est parce que c'est important.

M. Clair: Toujours sur le même point, il y a certes plus de policiers qui sont tués au travail à la suite d'un homicide, mais je pense qu'on pourrait également tenir compte, dans un métier comme celui de la construction... Je n'ai pas de statistiques, mais je serais curieux de savoir, si on enquêtait à fond, quelle serait la proportion des travailleurs dans la construction qui décèdent à la suite d'actes de négligence criminelle de la part de tel ou tel entrepreneur ou de la part de tel ou tel employeur. Je pense qu'on pourrait avoir des surprises de ce côté.

Je suis d'accord avec vous que c'est inacceptable qu'on envoie un policier seul pour un vol de banque, par exemple. Je suis convaincu de cela d'avance. Là où j'en suis, c'est le fait que, dans certaines circonstances — et on le voit par les statistiques qui nous sont fournies — il y a même plus de policiers qui se font tuer lorsqu'ils sont deux que lorsqu'ils sont seuls.

Le fait d'être deux tout le temps, à mon sens, ce n'est pas cela qui va assurer la sécurité du travailleur policier. Ce sont beaucoup plus des mesures concrètes qui pourraient l'améliorer.

M. Richard (Raymond): M. le Président, le fait

qu'il y ait plus de policiers... Il faudrait regarder de près les statistiques. C'est peut-être qu'il y a plus de policiers — même si ce n'est pas dans la convention collective — qui, plus souvent qu'autrement, travaillent à deux.

Dans une dizaine ou une quinzaine d'années, alors que tous les corps policiers auront la patrouille à deux hommes, on pourra faire dire aux statistiques que tous, lorsqu'ils se sont tués, travaillaient à deux. C'est évident, parce que, partout, on travaillera à deux.

Il faudrait étudier les statistiques. C'est évident, mais ce n'est pas une conclusion que ce n'est pas dangereux. C'est parce qu'ils se trouvaient à travailler à deux. J'ai posé la question. Il faudrait faire une étude pour savoir combien de vies on a épargné du fait qu'on a travaillé à deux. Il n'y a personne jusqu'ici qui s'est penché sur ce dossier.

M. Clair: Vous auriez pu, à mon sens, sur ce point, nous produire des statistiques sérieuses.

M. Richard (Raymond): On n'a pas eu le temps.

M. Clair: Là où j'en étais, je reconnais la faiblesse de mon argument dans le sens que vous le soulevez. Mais si on est tous les deux d'accord sur le fait qu'envoyer un policier seul, dans tel genre de situation... Là où on ne s'entend pas, c'est sur les moyens à prendre pour assurer la sécurité de ce travailleur. Je suis d'accord avec vous qu'on ne doit pas envoyer un policier seul dans un cas dangereux. Mais si le policier ne peut pas compter d'abord sur un bon équipement de communication, sur un arsenal policier important, sur un filtrage d'appels intelligent, à mon sens, quand bien même on enverrait toujours les policiers deux par deux ou trois par trois, je pense que la sécurité n'en sera pas pour autant améliorée. C'est dans ce sens-là que je dis qu'être deux policiers ne résout pas tous les problèmes. Cela semble même ne pas en résoudre beaucoup puisque les statistiques démontrent que, en comparant l'un à l'autre, il y a autant de morts à deux qu'à un seul.

M. Richard (Raymond): C'est pour cette raison, M. le Président, que nous prétendons, dans le mémoire que nous avons soumis, que c'est une nécessité de travailler à deux. Par la suite, comme nous l'avons mentionné, nous allons continuer à travailler à nos dossiers de sécurité — nous avons plusieurs dossiers en marche actuellement — pour essayer d'améliorer — il y aura encore de l'amélioration dans l'équipement et dans d'autres domaines — les conditions de travail du policier, les conditions de sécurité, comme les compagnies le font pour les travailleurs dans l'industrie.

M. Clair: Une question bien particulière et ce sera ma dernière, M. le Président. Les fameuses vestes antiballes; est-ce que ces vestes sont disponibles en assez grand nombre pour les patrouilleurs ou si c'est à peu près inexistant? Là où elles sont disponibles, est-ce que les travailleurs policiers les portent?

M. Richard (Raymond): Si vous le permettez, M. le Président, ce n'est pas distribué aux policiers comme tels, le nombre est limité; ce sont surtout les membres du crime contre la personne, ceux qui travaillent sur les vols à main armée, ces situations dangereuses, ceux qui vont faire une descente, c'est spécialement où il y a l'escouade tactique d'intervention. Il y a peut-être cinquante ou soixante vestes en tout et partout à la Sûreté du Québec; c'est peut-être un peu plus, mais je ne verrais pas un policier, un patrouilleur patrouiller avec cela.

M. Clair: A votre connaissance, est-ce exact que c'est très dispendieux, que cela coûterait près de $4000?

M. Richard (Raymond): Je n'ai pas les chiffres, mais cela ne devrait certainement pas être aussi dispendieux.

M. Clair: Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Verchères.

M. Charbonneau: Si on pouvait résumer un peu le travail de la commission, il y a trois points qui s'en dégagent. On a d'abord discuté de la question de principe. Est-ce préférable d'avoir deux policiers par patrouille ou un policier par patrouille? Par la suite, on s'est finalement demandé si c'est applicable autant le jour que la nuit et partout de la même façon.

Si on faisait l'hypothèse que c'était non, il faudrait, dans ce cas, envisager un certain nombre d'options. On en a discuté avec vous et, chaque fois, vous avez rejeté ces options comme ne présentant pas suffisamment d'avantages.

Par ailleurs, si on faisait l'hypothèse que vous avez raison sur toute la ligne — c'est ce que vous avez prévu en nous présentant une analyse de l'effectif policier en vous disant: Certainement, ils vont nous essayer et nous poser des questions sur les conséquences éventuelles de l'application globale de ce principe et sur les coûts que cela pour-raît entraîner, sur différentes conséquences d'ordre social et économique, et c'est à ce sujet que je voudrais essayer d'approfondir avec vous cette analyse que vous avez faite de l'effectif policier à la Sûreté du Québec.

Vous avez d'abord parlé d'un regroupement de personnel et d'un mouvement possible d'effectifs qui entraîneraient une récupération et une nouvelle redistribution du personnel en fonction d'une charge de travail qui, à votre avis, selon vos chiffres, est plus grande le jour que la nuit. Dans ce sens, vous avez parlé, en premier lieu, d'un regroupement de postes de la Sûreté du Québec et non pas d'un regroupement des forces policières d'une région. Est-ce que vous avez évalué les ef-

fets sociaux et économiques, tant chez vos membres que dans la population que toucherait un regroupement des postes de police, de certains postes de police de la Sûreté du Québec? C'est ma première question.

M. Bouchard: M. le Président, à la Sûreté du Québec, quand on parle de regroupement, c'est qu'il y a en moyenne entre 400 et 500 transferts qui se font continuellement depuis — d'après les statistiques qu'on a ici — 1974. Ce réaménagement peut se faire à l'intérieur de ces structures, des transferts normaux qui se font chaque année.

Concernant les coûts, une question d'économie, pour l'aménagement des locaux, c'est une question politique comme telle, parce qu'on a des locaux, à un moment donné, qu'on a été obligé de fermer, à Wakefield où des loyers sont parfois payés un an d'avance. C'est donc difficile d'évaluer les coûts, ce que peut coûter la location d'un local en particulier, parce que là on entre dans le jeu de la politique. Est-ce plus rentable de laisser onze gars à Percé pour laisser la population bénéficier des avantages de ces montants d'argent, pour n'en pas faire une zone isolée? Toutes ces choses entrent en ligne de compte. C'est complètement politique, alors que nous en faisons une question de sécurité.

Je pense, quand on aborde l'économie comme telle, qu'on déborde complètement le mandat qu'on a ici, à savoir si c'est essentiel d'être deux membres par auto en tout temps. Si vous optez pour l'aspect de l'économie, on va vous sortir des choses dans le sens que, quand on parle de fermer un poste, on dit toujours que la jeune Chambre de commerce ne veut pas le voir fermer parce que cela amène de l'argent, ceci et cela. Je pense qu'il y a justement d'autres prérogatives qui entrent en ligne de compte lorsqu'on prend cette décision.

M. Charbonneau: Dans ce cas, je ne vois pas très bien l'utilité que vous ayez présenté une analyse de l'effectif si, dès le départ, vous dites que l'argumentation qu'on pourrait faire ou que la discussion qu'on pourrait avoir sur cet aspect n'est pas valable. Je pense qu'on peut parler longtemps de la question de sécurité et qu'on pourrait en arriver à une conclusion, soit selon votre opinion ou selon d'autres opinions. Ce serait très bien ainsi, mais on ne peut pas isoler la question de la sécurité au travail, la sécurité publique, les effets autant pour les travailleurs policiers que pour la population et sa sécurité, et les conséquences de certaines applications de certaines mesures.

Si un Etat décidait de se doter d'une armée plus ou moins équipée en termes de sécurité, il doit évaluer aussi autant ses besoins en termes de sécurité que la possibilité de se payer à peu près n'importe quelle sécurité superparfaite. On pourrait dire que la sécurité idéale d'une société et des travailleurs, c'est cela.

Est-ce que vous et moi sommes capables de nous donner cela rapidement, du jour au lendemain? C'est une question qu'on est en droit de se poser, et que vous avez d'ailleurs considérée, parce que vous nous avez présenté une analyse basée sur le raisonnement suivant: Nous autres, on pense — et je vous cite — qu'on pourrait réaménager les effectifs et que cela ne vous coûterait pas plus cher, à l'Etat et au gouvernement qui a la responsabilité de diriger cet Etat. Finalement, on adopterait, en plus, le principe que nous, en parlant de vous, croyons valable, une sécurité accrue. Je pense que, dans ce sens, je m'excuse, mais c'est justifié d'essayer d'approfondir cette approche. Quand vous parlez de transfert... Oui, allez-y donc!

M. Richard (Raymond): Est-ce que vous voulez que je complète votre question? Nous avons parlé de répartir les effectifs et de la possibilité, comme solution, d'aménager ou de changer des postes. Nous le prétendons, mais nous n'avons pas fait toutes les études, parce que le temps ne nous l'a pas permis. Il y a à la Sûreté du Québec plusieurs centaines de transferts par année, si on parle de 400 ou 500 transferts par année. Paul Girard va vous donner un peu plus tard les chiffres exacts, et cela coûte de l'argent. Cela coûte peut-être, et on va vous donner les chiffres, entre $2000 et $2500 pour transférer un membre. Dans la répartition des effectifs, nous parlons de 157 membres transférés. On a quand même des transferts à la Sûreté du Québec, mais il s'agirait de prendre les bons gars et de les envoyer aux postes concernés. Quand on parle aussi de fusion de postes et de la possibilité d'aménager de nouveaux postes, suivant les études faites par la Sûreté du Québec, cela coûte de l'argent pour construire un autre poste ou le réaménager pour avoir un peu plus d'effectifs; mais les postes qui ont fait partie de l'étude, ce sont des postes qui, dans 90% des cas, ne sont pas adéquats pour la force policière, ce sont des postes qu'on devra quitter éventuellement, à court terme. Pour le gouvernement, il s'agit de construire ou d'aménager ailleurs, de toute façon. Dans ce sens, cela ne coûte pas d'argent additionnel. Ce sont déjà des postes... On parle de Saint-Raymond, c'est un poste que les membres de la Sûreté du Québec auraient dû quitter depuis plusieurs années. Ils sont encore là. Pourquoi? Parce que l'on manque de locaux ou d'argent au gouvernement. C'est pour cela que cela ne coûterait pas plus d'argent. Maintenant, j'aimerais que M. Girard, si vous permettez, donne un exemple de ce qui s'est fait dernièrement et apporte un peu plus de précisions sur les statistiques, sur les coûts.

M. Girard: En fait, notre poste de Saint-Siméon, à un moment donné, était, selon la population, et, au dire de tous, un poste essentiel. S'il partait, cela devait être un drame dans la région, du fait qu'il y aurait moins de couverture policière. Tout le monde est d'accord maintenant pour dire que, depuis qu'il est déménagé à La Malbaie, il y a deux fois plus de couverture policière tout simplement parce que cela fait partie maintenant d'un secteur de patrouille et qu'au lieu de quitter le vil-

lage pour aller patrouiller, les patrouilleurs passent là, dans le secteur, et la couverture est d'autant meilleure.

Du côté des postes à fermer, je ne voudrais quand même pas interpréter les intentions de la Sûreté du Québec, mais, pour les postes que nous avons cités, il est bon de mentionner que c'était le souhait de la Sûreté du Québec de fusionner tous les postes qu'on avait mentionnés. Le but de ce mouvement qu'on voulait tenter, c'était tout simplement que la situation pouvait être changée, par exemple par la nouvelle disposition des routes. On parlait de Nicolet et de Bécancour tout à l'heure. La route 30 a changé beaucoup dans le contexte; maintenant, de l'autoroute 55 à Gentilly, cela ne prend pas plus de dix minutes, et, de la route 55 à Nicolet, c'est à peu près cinq minutes. C'est maintenant changé à cause du contexte routier. Ce sont tous des aménagements comme ceux-là. Dans la région de Chicoutimi, c'est le même cas. On parle de Saint-Ambroise, je pense, qui est à neuf milles de son voisin. C'est inconcevable d'avoir un poste si près du poste voisin, Saint-Ambroise ou Alma, en tout cas, il faudra que je vérifie sur la carte, si jamais je me suis trompé, M. le ministre, mais j'ai l'exemple en main. Ce sont des cas semblables dont on voudrait être bien sûr que l'aménagement n'est pas un problème. Cela donne des ressources humaines possibles pour travailler. Si vous avez seulement un homme sur la relève, c'est bien beau de vouloir le jumeler, de vouloir lui donner de l'assistance, mais il n'en aura pas parce qu'il est seul, il reste toujours seul.

M. Charbonneau: II y a une question que je voudrais vous poser pour essayer d'approfondir cette suggestion que vous nous faites. Est-ce qu'il y a déjà eu des projets de regroupement de postes ou de disparition de certains postes? Est-ce qu'à votre avis, il y a eu des réactions dans la population?

M. Girard: La réaction qu'on a connue, c'est celle de Saint-Siméon, pour ma part, que je peux citer parce que j'ai pris les informations nécessaires. On avait dit que ce serait grave et que la sécurité... On n'avait pas dit que, dans le village, il y avait peut-être sept ou huit personnes avec un salaire de $15 000 par année qui s'en iraient. On n'a jamais cité cet exemple, mais on avait dit que la sécurité du public serait diminuée parce que le poste disparaissait et, dans les faits, ce n'est pas ça qui se produit.

M. Charbonneau: Finalement, si, dans les faits, ce n'est pas ça qui se produit, on considère que, malgré tout, cela a pris un certain temps avant que les gens acceptent et se rendent compte que, finalement, c'était peut-être plus sécuritaire. Donc, ce n'est pas une chose qu'on peut faire comme ça, du jour au lendemain. Il va peut-être falloir habituer un certain nombre de gens à...

M. Girard: M. Barré parlait, tout à l'heure, de solutions à court, à moyen et à long terme. C'est ça qu'il faut envisager. C'est bien évident qu'on sait que, demain matin, même si on dit: Je veux un poste à tel endroit, il ne poussera pas comme un champignon. Je pense qu'il faut poser des gestes, à un moment donné, qui vont permettre d'améliorer notre situation.

M. Charbonneau: Sur un autre sujet, est-ce que vous êtes au courant, en termes de résultat ou d'impact sur les effectifs disponibles et sur une même charge de travail, des nouveaux gains syndicaux que vous avez obtenus en termes d'horaire de travail? Est-ce qu'il n'est pas exact de dire que, maintenant, pour la même charge de travail, on a besoin de plus de policiers, parce que les relèves sont plus... Il y a plus de gens, des gens qui travaillent quatre jours au lieu de cinq.

M. Richard (Raymond): M. le Président, si vous permettez, j'inviterais Jacques Tessier à dire quelques mots, parce qu'on parle de semaines de quatre jours. M. Tessier va répondre à votre question de façon plus précise.

M. Tessier (Jacques): ... M. le Président, suite à un réaménagement, si vous voulez, des calendriers de travail, maintenant, on travaille quatre jours de neuf heures au lieu de faire cinq jours de huit heures. Il serait très compliqué ici de commencer à faire le calcul, mais je pourrais vous dire qu'on fait le même nombre d'heures qu'on faisait avant, dans le système de cinq jours à huit heures par jour.

Maintenant, il a été prévu que — vous allez comprendre — si les policiers font neuf heures par jour, on fait 27 heures-temps pour 24 heures-homme, si vous voulez. Il y a des... On a aussi parlé de chevauchement. A un moment donné, vous avez, à certaines heures creuses, peut-être un homme de moins. Vous avez, disons, un homme additionnel aux heures de pointe. On pourrait peut-être parler des postes comme Québec-Métro et Montréal-Métro ou même Charny, ou Sorel, des gros postes où, eux, aux heures de pointe, ont un personnel accru. Anciennement, ce n'était pas le cas.

M. Charbonneau: Vos statistiques où vous nous indiquez que, dans certains postes, il n'y a pas assez d'effectifs, est-ce que ce sont des statistiques qui ont été compilées avant que vous obteniez ces avantages ou après?

M. Tessier: Cela a été obtenu après, parce qu'il était prouvé également que, dans l'ancien système, il manquait peut-être déjà de personnel, mais là, écoutez, les statistiques ont été compilées après.

M. Charbonneau: Donc, il en manque plus à cause de ça?

M. Tessier: Non, monsieur.

M. Charbonneau: Je ne comprends pas, dans ce cas-là.

M. Tessier: C'est qu'actuellement, avec le même personnel qu'il y avait aux postes, il y a eu des possibilités, dans un livre qui a été publié... Il y avait trois, quatre possibilités, disons, selon le nombre de patrouilleurs qu'il y avait au poste, mais, pour vous faire comprendre très bien le système de la semaine de quatre jours, il faudrait que je me lance dans un long exposé et ça, ça va être assez long.

M. Charbonneau: On s'occupera de ça avec les dirigeants de la Sûreté du Québec.

Il n'y a qu'une autre chose que je voudrais peut-être signaler. C'est un peu à la suite des questions du député de Drummond et c'est peut-être plus un commentaire qui appellerait peut-être une réaction de votre part qu'une question. J'ai l'impression que, fondamentalement, ce que vous demandez... Si on voulait augmenter l'efficacité policière, pas uniquement à la Sûreté du Québec, mais sur l'ensemble du territoire québécois, pour faire en sorte que les six millions de Québécois en aient plus pour leur argent et, en termes d'efficacité, une meilleure protection publique, ça supposerait un certain nombre de réaménagements en profondeur qui, à mon sens, supposent une certaine analyse de la situation et qui ne doivent pas être réalisés et obtenus rapidement avec toutes sortes de façons. Si on parle en termes économiques et là, je pense qu'il faut peut-être s'en rendre compte...

Dans mon comté, j'ai 23 municipalités parmi lesquelles certaines — se paient actuellement des services policiers. Si jamais, à tort ou à raison, j'espère, éventuellement, que ce sera à raison, mais en disant à tort, c'est si on considère les chiffres ou les évaluations de la patrouille à deux hommes et à un homme, certains disent que c'est avantageux et certains disent que non. Mais si jamais malgré tout, on acceptait ces certaines demandes, le gouvernement et le ministre de la Justice — les décisions seront prises à ce niveau — ... Cela aurait, malgré tout, des conséquences sur le plan policier et sur le plan des municipalités qui elles, naturellement, verraient leur corps policier faire des demandes semblables pour tous les endroits au Québec où ils n'en ont pas.

Donc, de deux choses, l'une. Ou cela augmente considérablement le fardeau fiscal des Québécois ou cela suppose encore plus rapidement l'urgence de redéfinir et de réorganiser toute la structure policière au Québec, ce qui ne peut pas se faire du jour au lendemain.

M. Richard (Raymond): II faudra, éventuellement, réorganiser la structure policière au Québec. On sait que ce sont les intentions de plusieurs personnes. Mais il ne faut pas considérer le problème qui est aujourd'hui soumis à la commission parlementaire seulement en raison des coûts.

A la sûreté du Québec, nous disons et nous l'avons dit dans notre mémoire, c'est faisable, c'est nécessaire et cela devrait être ainsi: Deux gars en tout temps par véhicule-automobile. Qu'est-ce qui se produira chez les autres corps po- liciers? On verra. Les années à venir nous le diront. Mais doit-on empêcher de donner à des travailleurs la sécurité dont ils ont besoin seulement pour une question de sous et si on la leur donne, qu'est-ce qui se passera chez tel ou tel corps policier? Je pense qu'il ne faudrait pas baser les recommandations simplement sur ce fait.

M. Charbonneau: J'aurais peut-être une autre remarque à faire. Je suis bien d'accord qu'on donne le maximum de sécurité au travail des policiers, bien que dans chaque métier, il y ait des imprévus. J'en sais quelque chose! J'étais censé avoir un métier où il n'y avait pas trop de risques!

Malgré cela, je pense qu'on doit, outre l'évaluation des risques, évaluer aussi les coûts possibles pour une société et un Etat même si ces derniers disposent, finalement, d'une certaine marge financière, d'un certain pot d'argent pour essayer d'accroître ou de réaliser une sécurité accrue, maximale ou idéale pour toutes les catégories de travailleurs. Je me pose des questions quand je regarde et c'est dans ce sens que je considère que les statistiques de comparaison du métier de policier ou des dangers du métier de policier par rapport aux autres sont valables, parce que...

D'une autre façon, c'est un peu odieux de comparer votre métier ou les risques avec d'autres. Les caractéristiques sont différentes. Malgré tout, même si on a un certain pouvoir de manoeuvre plus ou moins limité, certaines possibilités financières pour essayer d'accroître la sécurité de toutes les catégories de travailleurs, vous admettrez avec nous que si on fait un certain nombre d'efforts pour accroître une certaine sécurité au travail des policiers, il faudra peut-être aussi prendre une partie de l'argent et la répartir équitablement pour d'autres catégories de travailleurs qui sont peut-être encore moins en sécurité actuellement que vous, vous pouvez l'être.

M. Richard (Raymond): En fin de compte, ce n'est pas une question de coût, parce que nous avons les solutions et nous prétendons qu'il n'y aura pas de coût additionnel, premièrement, par rapport à ce qui se faisait dans le passé c'est-à-dire un seul par voiture. Deuxièmement, il reste qu'il ne faut pas penser parce qu'il y aura deux policiers dans la voiture-patrouille, qu'on vient d'atteindre le sommet et que le policier aura une sécurité à 100%. Loin de là. Cela vaut pour aujourd'hui, en 1977.

Nous prétendons, et avec preuves à l'appui, que c'est le minimum de sécurité que le policier devrait avoir. L'excédent de sécurité que le policier devrait avoir au point de vue de l'équipement, des communications, on verra cela dans les mois, dans les années à venir. Mais actuellement, on parle du minimum de sécurité.

M. Charbonneau: II y a une autre chose. Quand vous parlez des transferts, encore là, en termes humains pour les propres membres de la Sûreté du Québec, je pense qu'à court terme, cela serait déjà une mesure qui serait peut-être déjà à

moyen terme parce qu'on ne peut pas faire cela dans un délai d'une, deux ou trois semaines. Je pense qu'il y a un certain nombre de problèmes, chaque fois qu'on fait le transfert d'un policier ou d'un travailleur d'une région à une autre. Dans un territoire, dans un Etat aussi grand que le Québec, cela crée un certain nombre de problèmes et on doit attendre un certain moment de l'année pour effectuer ces transferts.

M. Richard (Raymond): C'est évident. Il y a la convention collective, et on parle de 60 jours pour les transferts. C'est évident qu'on ne prétend pas que, demain matin, les postes de la Sûreté devraient fusionner. Loin de là. On est pas mal plus raissonnable que cela. Il faudra laisser le temps de construire ces postes ou d'approfondir un peu plus le dossier, mais il reste tout de même que les solutions sont là. Il s'agit de savoir si on prend les solutions et qu'on donne aux policiers la sécurité dont ils ont besoin ou si on dit: On ne prend pas les solutions et on ne regarde pas plus loin. C'est la question qu'il va falloir se poser ensemble et qu'on essaie de démêler.

M. Charbonneau: C'est un peu dans ce sens que j'ai essayé d'approfondir cette question et on l'approfondira également avec les dirigeants de la Sûreté et on en fera le bilan.

M. Richard (Raymond): D'accord sur cela.

M. Clair: M. le Président, une question supplémentaire. En relation avec ce que le député de Verchères vient de mentionner, est-ce que des études ont été faites par vous-mêmes ou à votre connaissance, pour comparer ce qu'on peut appeler généralement l'équipement de la Sûreté du Québec à l'équipement des endroits où il y a des patrouilles à un homme?

M. Richard (Raymond): A l'association, nous n'avons pas eu le temps, nous n'avons pas de telles études. Je ne sais pas, du côté de Montréal, si M. Masse peut donner plus de détails, mais nous, nous n'avons pas ces détails.

M. Clair: Pour poser la question, est-ce le bon moyen à prendre actuellement pour mieux assurer la sécurité des policiers que d'être deux tout le temps, toujours dans cet aspect?

M. Richard (Raymond): C'est certainement le bon moyen. C'est le minimum. Je pense que par la preuve démontrée par l'association, vous allez être convaincus d'ici quelques minutes que c'est le bon moyen.

Le Président (M. Bertrand): C'est à votre tour de parler, M. le député de Sainte-Anne.

M. Lacoste: La question accessoire, l'élément principal après. Dans votre rapport, page 5, vous parlez de l'agent Bédard et vous dites que son équipement, que son fusil n'était pas adéquat. Ils étaient deux dans la voiture à ce moment-là, et son équipement n'était pas adéquat. Il est décédé quand même.

M. Richard (Raymond): Cela prouve une chose, c'est que le métier de policier est dangereux, et même avec deux gars par auto, on va en perdre encore. On est prêt à faire cela pour protéger le citoyen. Cela prouve seulement la thèse que c'est dangereux, mais cela prouve aussi que c'est une question de sécurité. On n'a pas fait d'émeute avec cela, mais c'est une question de sécurité. Avec la perte d'un homme, on a réussi, non pas à changer les revolvers, mais au moins à avoir de meilleures munitions, un peu plus abondantes. C'est déjà un pas de l'avant, comme ce qui se fait dans les professions au niveau des métiers des travailleurs. Cela vous prouve que ce n'est pas le maximum, que c'est le minimum qu'on demande.

M. Lacoste: Question principale. A la page 10 de votre rapport, on se reporte à une rétrospective des événements d'avant la grève des policiers, au moment où le ministre de la Justice est intervenu au dossier, le mardi 5 avril, en convoquant les représentants de l'association à son bureau. Il leur a alors soumis certaines offres qui ont été rejetées par les membres de la Sûreté réunis en assemblée. J'aimerais savoir quelle est la position des dirigeants de l'association au sujet des offres du ministre de la Justice, à ce moment-là. On n'en parle pas dans le rapport. L'association devait avoir pris une position pour soumettre cela à l'assemblée générale des policiers.

M. Richard (Raymond): La position des membres de l'association à ce moment-là...

M. Lacoste: De l'exécutif ou de l'association comme telle.

M. Richard (Raymond): ... est telle que je l'avais mentionnée au ministre au cours de conversations téléphoniques. Les dirigeants de l'association s'en allaient présenter à l'assemblée générale — présenter, je dis bien — les dernières offres, parce qu'il y en a eu deux, du ministre de la Justice. Nous les avons présentées, et même si j'avais mentionné au ministre que j'allais seulement les présenter, j'ai décidé, au cours de l'assemblée, au cours de ma présentation, de recommander ces offres, et même en les recommandant, les offres n'ont pas été acceptées par les membres et on connaît la suite.

M. Lacoste: D'accord! Mais votre position personnelle, lorsque vous avez présenté votre position, aux policiers...

M. Richard (Raymond): La position initiale était que ce n'était pas suffisant que l'association allait seulement les présenter, et cela a été un changement de la onzième heure, en tant que président de l'association, et j'ai décidé, à ce moment-là, de les recommander.

M. Lacoste: Quelle est la raison pour laquelle vous avez recommandé ces offres?

M. Richard (Raymond): Quelle est la raison pour laquelle j'ai recommandé...

M. Lacoste: Oui.

M. Richard (Raymond): Parce que, d'après les conversations que j'avais eues avec le ministre, je croyais qu'il y aurait eu possibilité de régler et d'en voir plus un peu plus tard au comité paritaire et conjoint. Maintenant, quand je vois les deux dernières séances du comité paritaire et conjoint, je pense qu'on est loin d'avancer. Je reconnais qu'on a fait une erreur à ce moment-là.

M. Lacoste: Dans votre rapport "Analyse de l'effectif policier de la Sûreté du Québec", j'ai numéroté mes pages, ça tombe à la page 7, vous parlez justement des postes isolés, comportant de 1 à 7 patrouilleurs, et vous recommandez deux membres en tout temps, 24 heures sur 24. A ces postes dits isolés, il y aurait de 1 à 7 patrouilleurs, toujours à deux policiers par voiture.

M. Richard (Raymond): Vous parlez de quelle page?

M. Lacoste: A la page 7: "Analyse de l'effectif policier de la Sûreté du Québec".

D'accord! Vous parlez de deux membres en tout temps, 24 heures sur 24. Je vais seulement prendre les six postes dits isolés, comportant de 1 à 7 patrouilleurs. Je comprends, dans mon esprit, qu'il y aurait de 1 à 7 voitures de police avec deux personnes dedans.

M. Girard: En fait, quand vous voulez savoir combien d'hommes il y a sur une relève de police, il faut prendre l'effectif du poste et le diviser par cinq, pour avoir le nombre de personnes qui travaillent sur chacune des relèves, parce que, assurer un service continu, 24 heures par jour, vous devez avoir cinq équipes. Si vous prenez en considération que vous avez généralement un responsable d'unité qui n'est pas affecté à la patrouille, et possiblement une autre personne qui est son adjoint, que l'on affecte à d'autres tâches, signification de subpoenas, etc., il va rester 5 hommes pour s'occuper de la patrouille, donc un par relève.

M. Lacoste: C'est-à-dire qu'il y aurait une voiture à chaque relève seulement, c'est ça?

M. Girard: II y a une voiture à chaque relève avec un homme, quelles que soient les circonstances.

Dans la situation actuelle, par exemple à Cap-aux-Meules, le membre doit patrouiller le territoire et, s'il a besoin d'aide, il n'y a personne sur les ondes, parce que s'il est de soir ou de nuit, avant la situation nouvelle, maintenant, il reste au poste, ça peut être la même chose le jour, alors que, le samedi ou dimanche, il n'y a tout simplement personne à qui téléphoner par la voie normale, il faut qu'il utilise son système de radio, qui est pilote, il peut téléphoner, il peut signaler dans son auto, demander de l'aide à quelqu'un qui, pense-t-il, peut l'aider.

M. Charbonneau: Est-ce que les appels entrent directement?

M. Girard: A ce moment-là, dans certains cas, les appels vont entrer directement sur l'auto-patrouille.

M. Lacoste: Dans le document du ministère de la Justice, je reviens aux statistiques, toujours au sujet de la mortalité, au sujet d'un mineur, à 135,72, d'un employé de transport public, 37,24, d'un travailleur de la construction, 31,7, d'un policier, 10,5, des accidents de la route, article no 3, 24, 93, lorsque je tente de me mettre à votre place, la question a été posée, quelle est votre réaction au sujet de ce genre de statistiques?

M. Girard: En fait, on déplore énormément qu'il n'y ait pas plus de sécurité au travail dans la construction et où que ce soit, mais, ce qu'on vous rappelle, c'est qu'il ne s'agit pas de mort criminelle. Chez le policier, lorsqu'il s'agit de mort criminelle, on peut vous dire que le taux de mortalité criminelle, le taux d'homicide chez les policiers est 6,1 fois plus élevé que chez tous les autres citoyens. Il est bien évident que s'il arrive un accident de construction, c'est sûrement un manque de sécurité au travail. Mais, de notre côté, lorsqu'un de nos membres a un accident de voiture en poursuite, on le considère comme accident de travail, il y en a eu plusieurs. Je prenais connaissance la semaine dernière d'un document qui était annexé au mémoire de la Sûreté. Plusieurs de nos policiers sont morts sur la route; l'agent Brassard est décédé au mois de mars dernier, à Grande-Vallée, on n'en a pas fait état parce que sont les risques du métier, de façon normale.

Mais lorsqu'on parle de meurtre, c'est inconcevable. Il n'y a pas un policier, à aucun temps, dans sa mission, dans son objectif de vie personnelle, qui ait envie de se faire tuer lorsqu'il entre dans la police. S'il avait ça comme objectif, à ce moment là, il ne deviendrait sûrement pas policier.

M. Lacoste: C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Chicoutimi, ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, on a fait état tout à l'heure des coûts additionnels. Loin de nous la pensée de vouloir faire de la sécurité des policiers au travail une question de coûts. Je pense que vous saurez gré à tous les membres de cette commission d'avoir mentionné ce problème des coûts qui peut en être un, mais de ne pas avoir insisté outre mesure sur ce point particulier, quoique ce soit quand même un élément dont on doit tenir compte, en termes de gouvernement qui a à administrer les deniers publics en tenant compte aussi que ce sont quand même les citoyens qui ont à payer pour leurs services policiers.

Lorsque vous nous dites qu'il n'y a pas de

coût additionnel, il faudrait que vous m'expliquiez la situation qui se présenterait dans un poste où le nombre des hommes est impair, dans un poste où il y a trois policiers, où on fonctionnait, jusqu'à maintenant, avec un policier qui reste au poste et deux patrouilles à un policier. A partir du moment où on emploie la formule de deux policiers par véhicule, si on examine la situation, il peut y en avoir un qui reste au poste et, au lieu de deux véhicules qui sillonnent les routes ou qui font de la patrouille, il n'y en aura qu'un avec deux policiers à l'intérieur.

Je reviendrai tout à l'heure sur la valeur de prévention que peut avoir le seul fait d'avoir un véhicule de police sur les routes, mais, dans le cas d'un poste où le nombre des hommes est impair, où il y a trois policiers, pouvez-vous nous expliquer comment on peut assurer la même présence policière, avec le même nombre de policiers?

M. Bouchard: M. le Président, nous sommes partis du principe qui est démontré dans notre mémoire que, la nuit, il y a 22% du travail policier qui se fait, 33% le soir et 44% le jour. Avec ce principe, c'est sûr que, la nuit, il reste un homme additionnel. Dans la négociation d'une convention collective, avec l'homme de nuit, vu que le travail est diminué d'autant, il y a certainement possibilité d'avoir des mécanismes où la relève de nuit, une fois par 35 jours, est assurée par le membre qui serait affecté à la relève de jour pour faire équipe avec l'autre homme de jour, ce qui en ferait quatre de jour, au lieu d'être trois.

Evidemment, il y a le facteur des vacances qu'il faut remettre, il y a les congés fériés. Il faut absolument y regarder de près. On prend les statistiques qu'on a de la Sûreté du Québec, ce sont des statistiques concrètes, à la Sûreté du Québec, dans la province de Québec, 22%, 33% et 44%. La nuit, s'il y a moins de travail policier, pourquoi avoir une perte d'un policier la nuit, alors que c'est facile pour lui, une fois par 35 jours, d'une façon équitable pour tout le monde, de travailler de jour, pour combler le nombre requis dans le véhicule. Ils travailleraient à deux véhicules de deux hommes par jour.

C'est cette optique qu'on a envisagée, avec les données qu'on avait, pour mieux répartir le personnel.

M. Bédard: Je dois vous dire honnêtement que cela ne répond pas à ma question sur les deux points des coûts additionnels que cela peut représenter, qu'il faut évaluer, en fonction et en relation avec le service et la présence policière qu'on doit assurer. Comme vous me dites, peut-être dans un poste où il y en a trois, si on veut assurer la même présence policière, mathématiquement, en tout cas, cela voudrait dire qu'il y en a un au poste. Si on veut avoir deux véhicules sur la route, au lieu de deux hommes, il va falloir quatre hommes.

J'essaie de voir, au bout de la ligne, comment cela peut se traduire autrement qu'en coûts additionnels...

M. Richard (Raymond): M. le Président...

M. Bédard: ... avec le même service donné aux citoyens qui y ont droit, parce qu'ils paient pour cela. Je voudrais bien avoir des explications mathématiques.

M. Richard (Raymond): Nous allons vous les fournir immédiatement, M. le Président.

M. Girard: Ce qui se produit, on tient pour acquis, chez nous, à l'association, que lorsqu'un appel est couvert, surtout un appel d'accident ou un appel de plainte, s'il est couvert par un véhicule à deux hommes, l'efficacité du travail est deux fois plus grande, cela prend deux fois moins de temps, pour la bonne raison qu'on connaît. Si un homme prend les rapports à l'intérieur du véhicule lors d'un accident, que l'autre fait la circulation, on dégage deux fois plus rapidement les lieux.

Il est commun de dire qu'un véhicule de patrouille à deux hommes parcourt beaucoup plus de milles, généralement, dans une relève qu'un véhicule de patrouille à un seul homme. On le sait par expérience. Je pense que lorsqu'on a fait de la patrouille, on sait que notre résistance est différente. Lorsqu'on a fait 150 milles, c'est le gros maximum, si on est seul, tandis que s'il y a deux patrouilleurs et qu'il n'y a pas tellement d'appels, cela va aller au-delà de 200 milles, facilement. Le territoire parcouru sera beaucoup plus vaste.

Ensuite si vous avez une relève impaire — je pense que cela rejoint votre question — il faut tenir pour acquis que ce n'est peut-être pas la façon la plus souhaitable, mais il faut quand même utiliser notre effectif... Tout d'abord, pour la relève impaire, si vous avez trois hommes, il y aura trois mois de vacances par année sur cette relève. Si vous avez cinq hommes, cinq mois, sept hommes, sept mois. A ce moment, l'impair va servir. Et puis, surtout sur la relève de jour, vous avez à aller à la cour. Régulièrement, c'est connu, vous avez presque tous les jours, des membres qui vont à la cour. Il nous faut du jeu pour avoir encore des patrouilleurs en double. C'est une des raisons.

Avant le 5 avril, la patrouille de soir et de nuit se faisait selon la possibilité ou la disponibilité du service à deux hommes, quand c'était possible, et le chiffre impair patrouillait seul. Depuis ce temps, depuis le 12, il y a seulement les chiffres pairs qui sortent en double et le membre qui se trouve être impair, le cinquième membre ou le septième membre sur la relève, reste au bureau. Je pense qu'il y aurait d'autres façons d'arranger les relèves, afin que ces membres soient en mesure d'effectuer d'autres tâches, de jour possiblement, pour combler d'autres relèves etc.

Nous avons parlé aussi de la répartition de l'effectif. L'exemple qui a été cité par le député de Drummond était très pertinent, en ce sens que l'unité d'urgence qui doit apporter son aide au poste qui a des problèmes particuliers — Drummondville en est un de ces problèmes particuliers, il y a beaucoup de travail à ce poste — si l'unité d'urgence du Cap-de-la-Madeleine doit quitter le Cap-de-la-Madeleine tous les jours pour aller travailler au poste de Drummondville, à ce moment, il ne se perd pas moins de quatre heures en trans-

port, en repas, etc. Si ces membres, tel que nous l'avons préconisé, étaient assignés à un poste donné, on pourrait arriver, premièrement, si on le désire et si on pense que c'est la meilleure répartition, à faire des relèves paires pour que chacun sorte en double et, sinon, à ce moment-là, ils iraient au moins faire leurs huit ou neuf heures de travail complet sur le territoire de ce poste, au lieu de passer leur temps à se promener.

Bien souvent, en plus de cela, on n'a pas à être disponible lorsqu'on aura besoin. Si vous pouvez compter sur l'unité d'urgence, vous vous dites, si on en a besoin, on va l'avoir, mais si votre unité d'urgence qui devait être à Drummondville est à La Tuque ce matin-là et qu'un besoin, une nécessité survient, vous ne l'aurez pas. Je pense que c'est mieux de pouvoir compter sur quatre hommes sûrs que de pouvoir compter sur une possibilité de sept ou huit, sans savoir si on va les avoir à temps ou si, tel que le député de Drummond le disait, on les a une demi-heure ou trois quarts d'heure plus tard, cela répondra à notre besoin d'être présent.

M. Bédard: Oui, mais, si je considère l'ensemble de votre raisonnement, il reste, quand même, que cela contribue à enlever des hommes sur certaines relèves, par rapport à ce qui existait, relèves du soir et de la nuit où ce sont, normalement, selon les statistiques, les périodes les plus dangereuses. En fonction peut-être des coûts, cela peut ne pas coûter plus cher, mais en fonction de la sécurité à donner aux citoyens, à ce moment-là, par exemple, je pense qu'on peut se poser des questions. Le but de la présence des policiers est toujours, on l'a dit tout à l'heure, fondamentalement en fonction de la sécurité des citoyens.

Ensuite, vous dites: A un moment donné, ce sera peut-être plus efficace que des policiers qui se promènent seuls sur la route. A partir de ce moment, ce avec quoi je ne suis pas d'accord, je vous le dis bien honnêtement, c'est que vous enlevez toute force de prévention, toute valeur de prévention à la seule présence de véhicules de la police, qu'ils soient un ou deux sur la route. Je vous le dis bien honnêtement, je ne suis pas capable de partager cette opinion, si on fait la discussion en fonction de la sécurité des citoyens. C'est à eux qu'il faut penser.

Prenez, par exemple, ce sur quoi j'étais en désaccord avec M. Masse qui a tout à l'heure affirmé que la prévention commence à partir du moment où l'intervention se fait ou où commence l'intervention. Je ne suis pas d'accord sur cette manière d'évaluer la présence policière comme force de prévention. Je vous donne simplement un exemple: J'ai à parcourir le boulevard Talbot maintes et maintes fois au cours de l'année. Je vous assure que le seul fait qu'il y ait des policiers qui se promènent seuls durant le jour, même s'ils n'interceptent personne, je me rends compte facilement — ce n'est pas par magie que cela se fait — que dès que le policier est sur la route et qu'il va à une vitesse qui est celle permise, c'est bien de valeur, il y a toute une file d'automobiles qui s'enlignent derrière lui.

Cela contribue à quoi, au bout de la ligne? Cela contribue sûrement, d'abord à éviter les excès de vitesse, à diminuer, normalement, le nombre d'accidents, et de ce fait, à assurer une sécurité plus grande aux citoyens, au moins sur ce problème précis qui est la prévention quand il s'agit de la couverture des routes, de la présence policière au niveau des routes. C'est dans ce sens.

Tous les réaménagements, on peut les faire, cela se fait sur papier. Mais je pense que, quelque réaménagement qu'on fasse, on doit toujours le faire en fonction d'un critère qui est la sécurité des citoyens. Je ne veux pas m'étendre là-dessus, mais quand j'ai lu dans votre document, où vous faisiez allusion à la possibilité de centralisation dans la région que j'habite — je me reconnais le droit de la connaître pas mal bien — quand je vous vois régler le problème en centralisant les postes qui peuvent être à Alma, à Saint-Ambroise, dans un seul poste qui pourrait être à Chicoutimi, à Alma ou à Saint-Ambroise — on ne commencera pas les batailles de clochers — je vous assure que je ne suis pas capable de comprendre au bout de la ligne que cela puisse se traduire en termes d'efficacité, en termes d'amélioration, même concernant la période de 17 minutes dont vous parlez pour porter secours à quelqu'un qui est mal pris, parce que, si un policier peut être mal pris, deux policiers peuvent être mal pris aussi. Quand on parle de sécurité, on parle quand même d'un ensemble, surtout quand on considère cette région, de tout un ensemble de territoire à couvrir.

Dans ce sens, j'aimerais avoir plus d'explications. Comment, d'une part, arrivez-vous à un réaménagement qui va, selon vous, régler bien des problèmes de coûts, d'autre part, vous reliez cela à un besoin essentiel, soit celui d'assurer la sécurité des citoyens, d'assurer la sécurité aussi des policiers.

M. Richard (Raymond): M. le Président, dans notre mémoire, nous parlons de sécurité pour le patrouilleur, le policier. Nous parlons également d'efficacité. Nous maintenons, qu'avec les solutions proposées, il y aura peut-être d'autres solutions qui seront proposées. Les solutions que nous proposons, le citoyen sera assuré de la même efficacité, je pense que l'association l'a démontré, un policier qui travaille seul n'est pas efficace... Deuxièmement, il y a plusieurs postes actuellement de la Sûreté du Québec...

M. Bédard: Excusez-moi, quand vous dites qu'un policier qui travaille seul, n'est pas efficace, vous faites des distinctions que vous m'avez faites, quand même lors des séances antérieures...

M. Richard (Raymond): Pour les membres, les divers, oui.

M. Bédard: ... sur certains travaux...

M. Richard (Raymond): ... là, je ne parle pas des enlèvements de permis...

M. Bédard: ...où deux policiers sont inefficaces.

M. Richard (Raymond): ... je ne parle pas de nos membres qui travaillent sur le divers, les enlèvements de permis. Je parle des patrouilleurs quand je parle de cela. Donc, on voudrait permettre aux policiers de donner une meilleure efficacité en ayant une personne additionnelle dans le véhicule. Cela va offrir une meilleure efficacité, une meilleure protection aux citoyens. Nous avons de nombreux postes à la Sûreté du Québec qui, à toute heure du jour ou de la nuit, n'ont qu'un VA dans le territoire... On en aurait peut-être besoin de deux, mais on n'en a qu'un, parce que l'effectif de la sûreté actuellement ne nous permet pas d'en avoir deux. Avec les solutions que nous proposons, l'efficacité sera accrue, parce que le policier, dans le même véhicule, aura un gars à côté de lui qui pourra l'aider et ainsi plus de travail pourra se faire. Donc, c'est dans de nombreux postes de la Sûreté que cela se produit.

En plus de cela, et je vous donne un exemple: Dans Montréal-Métro, au poste de Sainte-Julie, c'est beau, le jour ou le soir, d'avoir quatre ou cinq véhicules qui couvrent le territoire et de dire: On a une bonne prévention, on a une bonne efficacité. Le citoyen est bien protégé, parce qu'on a cinq véhicules dans le territoire. Quand on sait que le mercredi, le jeudi, le vendredi, le samedi, il y a des accidents, il y a des plaintes et que tous les véhicules... Un accident, cela ne se couvre pas par une auto; il y a une, deux et trois autos, et le policier est tout seul, alors cela prend deux gars pour la route 20, un minimum de deux hommes pour couvrir un accident... Donc, si on jumelle dans un même véhicule, la meilleure efficacité, en fin de compte... C'est faux de dire qu'on a une meilleure prévention parce qu'on a des autos sur la route, mais qui sont toujours rendues, pour quelque raison que ce soit, au même endroit. Alors là, on jumelle les autos. Quinze ou dix minutes après, on envoie une autre auto. Alors, ce n'est pas quatre autos dans le territoire, si cela prend une demi-heure ou trois quarts d'heure pour couvrir un accident, on se rend à un autre accident, à ce moment-là, les heures se passent, et les gars sont jumelés... Ce n'est pas ie meilleur...

M. Bédard: S'il y a des améliorations opérationnelles à faire sur l'utilisation des voitures, c'est une autre affaire. Cela ne rejoint pas la question de deux par voiture.

M. Richard (Raymond): Non, mais la solution qu'on propose, M. le Président, va donner une meilleure efficacité, une meilleure protection, une meilleure sécurité. On augmente le rendement. Et on diminue les coûts, parce que le deuxième véhicule coûte de l'argent pour rien. C'est ça. Mais encore faut-il analyser en profondeur cette solution avant de la rejeter.

M. Bédard: Remarquez, M. Richard, que je ne crois pas avoir affirmé que la prévention était la seule manière de contrer le crime. Il reste que la prévention est un élément extrêmement important et qu'à partir de cela la présence policière en soi, à partir du moment où on a la conviction que ça peut constituer non pas tout l'ensemble de la lutte ou de la prévention contre le crime, mais un élément important, il faut en tenir compte. Je pense qu'on est d'accord sur ce point.

M. Richard (Raymond): Oui, c'est pour ça que, dans les solutions proposées, on parle de sécurité, d'efficacité, de protection du citoyen. Cela va de pair. On n'aurait jamais proposé des solutions qui auraient enlevé aux citoyens la protection nécessaire. On n'aurait jamais fait ça. C'est pour ça que, dans notre mémoire, on a des solutions qui rejoignent la sécurité de notre patrouilleur, ainsi que l'efficacité policière et la protection du citoyen.

M. Bédard: II s'agira d'évaluer ces moyens. Est-ce que M. Masse est sorti?

M. Richard (Raymond): Pour des besoins personnels.

M. Bédard: Quand il sera de retour, j'aurai quelques questions à lui poser.

Le Président (M. Bertrand): Brièvement, le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. Richard, je ne sais pas si le policier seul n'est pas efficace, mais je dois vous dire que celui qui m'a arrêté vendredi dernier était drôlement efficace et il était seul.

M. Richard (Raymond): Ils sont encore plus efficaces à deux.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... dans le parc des Laurentides.

Je vous ai posé une question tout à l'heure. Comment se fait-il que vous n'ayez pas fait de distinction entre les régions éloignées où le taux de criminalité est assez bas, comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean, et les régions métropolitaines? Vous m'avez répondu que le travail du policier était différent d'une région à l'autre, et c'est M. Barré qui a répondu cela.

J'ai ici des statistiques qui démontrent qu'au cours de l'année 1976, justement pour appuyer la question que je vous posais, 84 policiers ont subi des voies de fait; 80 de ces 84 cas représentaient des blessures superficielles, ce qui veut dire 90%, et 4 ont donné lieu à l'hospitalisation du policier. Ce qui est important à souligner, c'est que, dans les 80 cas de blessures superficielles, 87% provenaient des régions métropolitaines, de là l'importance de ma question et que les quatre cas d'hospitalisation, 100% provenaient des régions de Québec et de Montréal.

Je répète encore ma question: N'est-il pas exact de dire que ces statistiques démontrent que, dans votre mémoire, il y aurait eu à faire des distinctions importantes et pertinentes entre le danger du travail policier dans des régions dites éloignées ou non hautement criminalisées et des ré-

gions comme, par exemple, Québec et Montréal? Dans les 80 cas où les policiers ont subi des blessures superficielles, 57 proviennent de Montréal et 12 proviennent de Québec. Des 4 cas d'hospitalisation — je ne parle pas des homicides, évidemment, je parle des voies de fait — 3 sont de Montréal, l'autre de Québec; il n'y en a aucun d'autres régions du Québec.

M. Barré: M. le Président, je pense que si on regarde le mémoire qui vous a été soumis par l'association, il n'est pas exact de dire que nous n'avons pas fait cette distinction au départ. Comme j'ai eu l'occasion de le préciser tantôt, justement en réponse à la question du député, effectivement, dans notre mémoire, lorsque nous vous avons présenté la partie du mémoire relative aux opérations et au travail de patrouille, nous avons voulu faire ressortir, à l'aide des mémoires qui ont été déposés, des représentations verbales faites, entre autres, par M. Michaud, que le travail du patrouilleur pouvait être différent suivant qu'il s'effectuait en milieu urbain, rural ou en milieu d'un poste isolé. Je pense qu'on a fait ressortir à ce moment que chaque patrouilleur, quel que soit son milieu d'affectation, faisait face a des exigences peut-être particulières au milieu qu'il desservait, mais quand même des exigences. Ainsi, par exemple, au niveau du boulevard Métropolitain, on a fait ressortir que le policier patrouillant ce boulevard pouvait être confronté à l'aspect accidents. On vous a fait mention du nombre d'accidents qui pouvaient survenir au cours d'une journée sur le boulevard Métropolitain, du nombre de véhicules qui circulaient quotidiennement sur le boulevard Métropolitain et sur l'autoroute Décarie.

Tout cela pour faire ressortir que le policier affecté à la patrouille sur le boulevard Métropolitain, sur Décarie ou dans des secteurs connexes, affrontant certains problèmes justifiait la présence de deux policiers en raison des implications.

Par ailleurs, en province, nous avons également fait ressortir, à partir encore une fois du travail qui s'y effectue, les exigences que les patrouilleurs sont appelés à assumer et qui se produisent notamment au niveau des communications, au niveau des délais d'intervention et au niveau des conséquences qui peuvent se produire lorsque cette intervention ne se matérialise pas.

Quand on fait référence, par exemple, à certaines données statistiques pour dire: II y a eu tant de policiers qui ont été blessés ou tant de policiers qui ont été tués, je pense que c'est fausser le problème que de dire qu'il faudrait peut-être attendre qu'il y en ait 50 de tués avant de se décider à agir.

Ce serait mal concevoir le problème que d'attendre ou de considérer uniquement le nombre des blessés ou des tués pour dire: II y a peut-être lieu d'agir à ce moment, la situation devient cruciale.

On a fait ressortir — et vous pouvez d'ailleurs le voir dans l'annexe de notre mémoire — une centaine de cas qui ne comportaient pas de cas de blessures, mais on a voulu faire ressortir, par exemple, qu'il aurait très bien pu s'en produire.

Parmi les trois patrouilleurs entendus, à la section sur l'analyse des faits et incidents, vous en avez au moins un qui n'a subi aucune espèce de blessure, mais il a bien mentionné, cependant, que s'ils avaient été deux, vous auriez eu possiblement une arrestation au lieu d'avoir un policier qui s'est enfui en courant dans le bois. Mais cela n'entre dans aucune espèce de statistiques parce que le policier n'a pas été blessé, et je pense que si on devait restreindre ou ramener toute cette question à une stricte question de statistiques sur le nombre des blessés, à ce moment, on n'a pas une vue d'ensemble du problème parce que le problème comporte diverses facettes. Or, c'est ce que nous avons voulu faire ressortir, nommément en faisant état des blessés ou des mortalités qui ont pu survenir, mais également des incidents qui ont pu survenir, qui auraient pu avoir des conséquences néfastes, et je pense que c'est également un point très important à retenir.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. Barré, je comprends très bien votre réponse que le travail policier peut être différent d'une région à l'autre, mais vous admettrez avec moi que vous nous avez embarqués drôlement sur ce terrain, à partir même de votre slogan au centre de Drummondville qui était "Mourir à un ou vivre à deux".

M. Barré: Vivre à deux.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous comprendrez au moins que le député de Jonquière, si ce ne sont pas les autres, insiste sur la signification de ces statistiques car, depuis le début, même avant d'arriver en commission parlementaire, on entend parler de sécurité au travail des policiers.

On nous disait, tout à l'heure, qu'on ne va pas dans la police pour mourir. Je pense que vous avez beaucoup insisté sur cet aspect du problème, beaucoup plus que sur la prévention du crime. Je pense qu'il est normal de faire ressortir ces statistiques pour démontrer...

M. Barré: C'est un fait qu'une certaine insistance a été apportée sur cet aspect. On fait état du slogan véhiculé depuis notamment le 5 avril sur la question, mais je pense qu'il faut quand même le situer dans son contexte. Cela devient l'aboutissement ultime d'une situation que nous avons voulu dénoncer et que nous avons voulu faire corriger en disant qu'il ne faudrait peut-être pas attendre qu'on arrive à cette constatation, à des mortalités, à des meurtres pour décider d'agir.

Il faudrait peut-être voir et comprendre qu'il y a un problème et tenter de le résoudre à partir des éléments qu'on connaît, à partir de l'analyse des faits que nous avons voulu offrir à cette commission pour donner à cette dernière tous les éléments lui permettant d'apprécier exactement le contexte du travail policier, compte tenu de ses implications, des dangers et des risques que cela peut présenter.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aurais peut-être

un commentaire pour corroborer les propos du député de Drummond lorsqu'il dit que la statistique qui veut qu'il y ait plus de policiers qui soient tués par homicide que d'autres travailleurs ne le convainc nullement. Même si mon exemple est boîteux, on pourrait dire qu'il y a plus d'avocats qui perdent leurs causes que des médecins, mais on sait que les médecins ne perdent pas de cause parce qu'ils ne pratiquent pas le droit. Il y a plus de médecins qui ne réussissent pas leurs opérations médicales que d'avocats. Je comprends. Ces statistiques, envisagées de cette façon, sont fausses parce qu'il est bien évident qu'il n'y a pas d'homicide dans le domaine de la construction, mais il y a des homicides par négligence, comme le disait le député de Drummond, quand les employeurs ne respectent pas les normes de sécurité au travail, et, à ce compte, je pense que c'est envisager d'un mauvais oeil les statistiques.

M. Barré: Si vous me permettez de compléter votre analogie, on dit souvent que les erreurs des médecins, on les enterre! Je ne voudrais pas que les erreurs au niveau de l'administration policière, on les enterre également.

Je pense que cela ne serait pas la façon de régler le problème et c'est ce que nous avons voulu démontrer en insistant sur les divers aspects du travail du patrouilleur, quel que soit son lieu d'affectation, quelles que soient les tâches qu'il a à remplir parce que, justement, il fait face à certains problèmes. Je pense que l'ensemble des faits que nous avons voulu vous démontrer — encore une fois, on nous permettra de revenir là-dessus, même si certains députés ont émis certains doutes, je dirais, sur l'analyse que nous avons faite de l'ensemble de faits et incidents sur une période ou sur un nombre d'années donné — représente quand même un échantillonnage très représentatif de la situation qui a pu exister. Ce n'est pas un échantillonnage ou ce n'est pas un compte rendu d'opinions ou d'impressions qui peuvent se dégager; c'est un échantillonnage de faits qui nous amènent à faire certaines constatations basées sur des faits, desquelles constatations découlent certaines solutions à envisager, comme nous avons voulu le faire dans les solutions qui vous ont été présentées.

Le Président (M. Bertrand): M. le ministre.

M. Bédard: Me Barré disait qu'il faut comprendre qu'il y a un problème. Je pense bien qu'on n'a pas à argumenter longtemps pour vous souligner qu'on comprend qu'il y a un problème. Notre présence en commission parlementaire en est un exemple tout comme la tenue de cette commission parlementaire à laquelle nous assistons tous. Il y a également le fait qu'il ne faut jamais oublier que la situation, à l'heure actuelle, à propos de laquelle nous parlons, est la suivante, à savoir qu'il y a deux hommes par jour sur les relèves de nuit, les relèves de soir, sur deux relèves, qu'il y a deux hommes par véhicule. Il ne faut quand même pas oublier cela, au moment où on se parle. Il ne faut pas oublier non plus que, quand il s'agit de la relève de jour, dans tous les cas où il y a un danger précis, évaluable également, l'esprit de ce qui a été offert est qu'il y ait également deux hommes par véhicule.

Je crois que, tenant compte des circonstances dans lesquelles chacune des parties était placée, il y a eu une réaction, à mon sens extrêmement rapide, si on tient compte du fait que, tout à l'heure, au début de vos exposés en commission parlementaire, vous avez quand même parlé de certaines frustrations qui s'accumulaient depuis plusieurs années. Là, nous essayons, au niveau de cette commission parlementaire, d'envisager, le plus globalement possible, l'ensemble du problème de la sécurité au travail des policiers afin que nous puissions, à l'issue de cette commission, faire les recommandations, tenant compte des éléments qui ont été exposés, que les membres de la commission jugeront à propos de faire. C'est une mise au point, je pense, qu'il est important de se rappeler tout le temps, parce que, quand on parle de deux hommes par véhicule, il y a quand même un bout de chemin extrêmement appréciable qui est fait. Puisque M. Masse est arrivé, j'avais fait une observation selon laquelle, sur un point, nous n'étions pas d'accord — je pense que c'est la place pour se le dire — c'était au sujet de l'importance de la présence policière comme valeur de prévention du crime qui se situe au niveau de la présence même et non pas seulement à compter de l'intervention. D'autre part, M. Masse nous a dit, tout à l'heure, que ce qui se passe aux Etats-Unis, il s'en foutait.

M. Masse: Pas nécessairement.

M. Bédard: Je prends un peu, si vous permettez...

M. Masse: C'est un argument CKACiste. Tout le monde le fait, fais-le donc. Ce n'est pas nécessairement bon toujours.

M. Bédard: Vous ajoutiez du même souffle que le fait que ce soit cette situation aux Etats-Unis, cela ne voulait pas dire que ces gens-là avaient raison. Je pense que, connaissant votre sens de l'objectivité, on peut en déduire que votre idée n'était pas de conclure que, du fait que cette situation existait aux Etats-Unis, cela ne voulait pas dire non plus que ces gens ont complètement tort. Vous avez mentionné, entre autres — cela, je vous en sais gré — le fait que, 24 heures par jour, deux hommes par véhicule, cela existe à Montréal depuis bien longtemps. Je vous en sais gré pour une raison, c'est que, dans l'esprit de bien des gens, il y en a qui avaient l'impression que le fait d'avoir deux hommes par véhicule, la situation qui existe à Montréal, avait été consentie à la suite des événements de janvier, alors que, nous le savons, ce n'est pas le cas du tout.

Par exemple, même si la situation à Montréal est de deux hommes par voiture, pouvez-vous me dire combien de véhicules circulent à deux hommes, approximativement, on s'entend, et combien de véhicules circulent à un homme?

M. Masse: Je pourrais vous donner ça, mais avant, je voudrais simplement faire une petite remarque. Quand on parle de prévention, il y a une distinction très importante à faire, c'est la différence entre un honnête citoyen et un criminel. Quand il y a une intervention où les policiers vont fouiller le véhicule d'un honnête citoyen, il n'y a pas de problème pour l'honnête citoyen que de faire fouiller son véhicule, parce qu'il n'y a rien à cacher. Mais le criminel qui fait fouiller son véhicule, c'est de la prévention, il craint ça. La prévention, on fait ça contre les criminels, on ne fait pas ça contre les honnêtes citoyens.

Les criminels se foutent pas mal de voir passer une auto-radio. Ce qui les intéresse, c'est de ne pas se faire fouiller et de ne pas se faire enquêter. Je n'ai pas de statistiques précises sur ça, mais on a à la CUM une unité mobile d'une vingtaine d'autos, qui circulent, qui changent de quartier continuellement et je serai en mesure de donner dans quelques jours à la commission des statistiques qui seront peut-être très significatives, où les policiers s'en vont et ne font que des interventions dans un quartier, et le taux de criminalité baisse.

Si vous faites une intervention et que vous fouillez un véhicule, que vous trouvez une arme à feu cachée sous le siège, c'est ça la prévention. Ce n'est pas en voyant une auto-radio passer qu'on va faire de la prévention. C'est dans ce sens que je dis que les interventions policières font la véritable prévention efficace contre les criminels. La prévention contre les honnêtes citoyens, on n'a pas besoin d'en faire, ils se conduisent bien.

Je pourrais essayer de vous donner des statistiques. A Montréal, dans le territoire de la CUM, il y a 129 autos à deux hommes, et selon les heures de la journée, il y a des autos à un homme, qui font des enquêtes sur les accidents. Ils ne font que ça, ils ne répondent jamais à un appel. Il y a aussi une dizaine d'autos avec radar, qui ne font que ça, qui ne répondent jamais à des appels.

A la minute où les policiers de la CUM sont appelés, où il y a la possibilité qu'ils soient dépêchés sur un appel, ils sont toujours deux.

M. Charbonneau: Si le ministre de la Justice me le permettait, juste une remarque sur le point que vient de souligner M. Masse, vous oubliez une chose, c'est que les statistiques et l'évaluation de la criminologie nous permettent également de dire que la criminalité n'est pas uniquement conçue aujourd'hui en fonction de la criminalité des professionnels du crime. Parce que, dans les faits, un certain nombre d'études assez rigoureuses ont été faites aux Etats-Unis et ailleurs pour démontrer qu'en fait, la majorité des gens, plusieurs fois dans la vie, commettent ou ont commis des actes criminels, et que, s'ils avaient été interceptés au moment où ils les commettaient, ils auraient été emprisonnés et embarqués dans tout le processus judiciaire.

Je pourrais donner l'exemple de jeunes qui, parce qu'une auto-patrouille circule sur la rue, ne vont pas piquer de journaux dans une boîte aux lettres et se conduisent donc mieux. Finalement, la notion d'honnête citoyen, en criminologie, on la réévalue et pas mal, de ce temps-ci. Je pense qu'il y a des gens qui sont plus respectueux des lois que d'autres, mais il n'y a pas beaucoup de gens parfaits finalement, dans notre société.

M. Masse: Je suis complètement d'accord avec vous. Vous avez peut-être une vision plus pessimiste que moi de la société.

M. Charbonneau: Peut-être plus réaliste.

M. Masse: Mais, justement, ça confirme un peu ce que je disais. S'il y a plus de gens, dans notre société, qui commettent plus de crimes, ça prend donc plus de prévention et la prévention, c'est l'intervention. Quand vous dites que le jeune homme, le gamin ne va pas voler un journal dans une boîte aux lettres, parce qu'il y a une autoradio qui passe, je suis complètement d'accord avec vous, mais, quand elle est passée, il prend le journal et s'en va.

C'est ce qu'ils font.

M. Charbonneau: De deux choses l'une, ou ils sont...

M. Masse: Les gars font le guet. Quand les gars veulent faire une introduction par effraction, qu'ils veulent commettre un crime, qu'est-ce qu'ils font? Il y en a un qui fait le guet, surveille s'il y a une auto-radio et, quand il y a une auto-radio, il leur envoie la main. Quand elle est partie, ils font l'introduction par effraction.

M. Charbonneau: Vous parlez du petit gamin qui est déjà un peu plus criminalise. Mais je pourrais donner un exemple. Je me rappelle, quand on était jeune — ce ne sont pas des aveux — comment les collégiens se conduisaient à la sortie de l'autobus. Le simple fait qu'on voyait une auto-patrouille — on ne mettait pas des gens pour faire le guet — on s'en allait à l'école et on avait peur. On ne faisait pas ce qu'on avait peut-être fait la veille, lorsque l'auto-patrouille ne circulait pas.

M. Alfred: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand): Le député de Papineau.

M. Alfred: J'aurais une question. Je pense, M. Masse, qu'il faut s'entendre sur les mots quand on parle de cette affaire. Quand vous parlez de prévention, vous définissez prévention comme intervention. On ne s'entend plus.

Dans mon esprit, quand on parle de prévention, c'est un avertissement à faire quelque chose, pour empêcher de faire quelque chose. Prenez un exemple de prévention. Le policier qui circule sur la grand-route, quand je le vois, je ne vais pas vite, parce qu'il est toujours présent et que je le vois. C'est une présence qui est répressive pour moi,

mais elle est à la fois éducative et répressive, parce que si, en vous voyant, je vais très vite, là, vous allez intervenir.

A ce moment-là, il faut faire cette distinction entre prévention et intervention.

M. Masse: Si vous considérez la prévention comme une menace, je vous dis que la menace est plus grande quand les policiers interviennent. L'enquête très scientifique qu'on a faite démontre qu'il n'y a pas eu de différence, que la présence policière, c'est bon pour les citoyens honnêtes. Les criminels, ils s'en foutent, ils font leurs crimes quand il n'y a pas de policiers. Ils sont malchanceux, ils surveillent cela. C'est bien clair. Même pour les petits crimes, les petites infractions, s'il y a un policier qui est là, les gens ne la font pas. C'est très rare, Cela fait seize ans que je suis policier et je dois vous dire que, dans toute mon existence, j'ai peut-être entendu une fois, à la cour, un policier qui avait été témoin d'un acte criminel. Les policiers ne sont pas là quand l'acte criminel se produit. Les citoyens sont là, ce sont eux qui viennent témoigner.

M. Bédard: C'est évident sur ce point-là.

M. Masse: Mais les policiers ne sont pas là. La prévention n'est pas là. La prévention est quand les policiers interviennent. Là, on fait de la prévention. Je pense qu'on...

M. Bédard: Je pense que je serais porté à vous dire que si, dans 99% des cas, lorsqu'il se commet des crimes, le policier n'est pas là, ce n'est pas si dangereux que cela. Je ne prendrai pas des arguments comme cela. A ce moment-là, on prendrait les arguments pour soutenir d'autres thèses.

Quand vous me dites: On a fait des expériences dans certains quartiers de Montréal où on n'a fait que de la présence policière et, dans d'autres quartiers, que de l'intervention, même au niveau de la statistique, il faudrait faire certaines pondérations pour en arriver à des conclusions certaines. Il y a aussi le taux de criminalité d'un quartier à l'autre qu'il faut examiner. Il y a bien des considérations qui font que les statistiques — on dit toujours qu'on leur fait dire un peu ce qu'on veut; ce n'est peut-être pas si faux que cela — je pense qu'il ne faut pas sen tenir seulement à cet élément, en ce qui me regarde, pour évaluer une situation, quoiqu'il faille en tenir compte. Il n'y a pas de doute là-dedans.

Quand vous prenez Montréal... Je ne m'étendrai pas plus longtemps sur notre différence de perception concernant la force de prévention de la présence policière. Je pense que le fond de la différence, c'est que moi, je reconnais qu'une grande partie du travail des policiers est de nature sociale, pas seulement de nature criminelle. Dans ma perception, le gros pourcentage du travail des policiers est plutôt de nature sociale que de nature criminelle, en fonction du criminel, travailler en fonction du criminel aguerri, du récidiviste sur le- quel on ne peut, en aucune façon, compter, en termes de récupération sociale. On aura sûrement l'occasion de continuer la discussion sur ce point.

A Montréal, la situation fait qu'il y a, 24 heures sur 24, deux hommes par auto. Vous nous avez parlé d'un cas que je trouve très intéressant, celui du citoyen qui perd son porte-monnaie. Dans le système actuel de deux hommes ou de deux patrouilleurs par véhicule, lorsque les patrouilleurs vont le voir, vont faire enquête pour respecter la situation qui existe, lorsqu'ils font enquête, ils sont deux pour aller prendre les informations. Vous avez très bien dit, dans votre exposé, que vous aviez de la difficulté à accepter une telle situation, que cela ne donnait absolument rien en termes d'efficacité, qu'un homme pouvait très bien le faire et peut-être mieux le faire, en tout cas, pour prendre une déclaration, poser des questions; peut-être que c'est mieux deux qu'un seul, mais on a le droit de différer d'opinion.

Vous avez dit qu'une situation comme celle de deux policiers qui vont voir un citoyen qui a perdu son porte-monnaie, vous acceptiez cela difficilement, que ce n'était pas, à proprement parler, pour la sécurité du policier au travail qu'on agissait comme cela. Vous allez plus loin. Vous avez même dit que c'était même, à votre avis, une utilisation des deniers publics qui ne vous semblait pas tellement appropriée et que, si on utilise bien les deniers publics, il serait de beaucoup préférable, dans un tel cas, qu'un seul policier y aille et qu'on trouve le moyen d'affecter l'autre policier à un travail beaucoup plus important en termes de prévention du crime et pour contrecarrer le crime.

Pourtant, dans la situation actuelle, on fait cela à deux. Dois-je tirer de vos propos la conclusion que ce système de deux hommes travaillant 24 heures sur 24, dans un effort de réévaluation honnête, en fonction non seulement de la sécurité du policier, mais aussi du citoyen, et aussi du fait qu'on doit penser à dépenser ces deniers le plus efficacement possible, dois-je comprendre, dis-je, que votre exemple fait que vous êtes dans une période de réflexion et que vous croyez que deux hommes tout le temps, le jour, dans des situations comme celle-là, il faudrait peut-être réévaluer cela?

M. Masse: Je me suis probablement mal exprimé, M. le ministre. Vous n'avez pas perçu exactement ce que je voulais dire, quand j'ai parlé du porte-monnaie. En fait, ce que je voulais dire, c'est qu'il y a des possibilités. Je vous ai donné cet exemple quand j'ai dit qu'une auto à deux hommes coûte plus cher qu'une auto à un homme. C'est un problème réel, et je serais curieux d'avoir les statistiques des hommes politiques et de tous les corps de police aux Etats-Unis qui invoquent cet argument comme le seul ou le meilleur pour avoir une auto à un homme.

Dans ce sens, pour économiser et mieux dépenser l'argent des citoyens, ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait des opérations policières inutiles et qu'il y aurait possibilité d'améliorer la situation. Je vous ai donné l'exemple d'un citoyen qui perd son

porte-monnaie. Ce qu'on dit, ce n'est pas qu'un homme doive aller là, on dit: Pas de policier là. On peut faire cela par appel téléphonique. Cela va être une éducation à faire, parce qu'on a été des hommes à tout faire depuis passablement longtemps.

Que le citoyen passe au poste de police, c'est lui qui a perdu son porte-monnaie, et qu'il fasse sa plainte et dise: J'ai perdu mon porte-monnaie. On va prendre cela en note. Si on le retrouve, par hasard, parce que, comme je vous disais, on ne cherche pas les porte-monnaie perdus, on n'a pas le temps, si jamais on le retrouve, par hasard, on le lui renverra et vous aurez deux hommes par autoradio. Quand vous avez une auto-radio avec un homme ou avec deux hommes en train de prendre un rapport qui va durer quinze ou vingt minutes, pour un porte-monnaie perdu, pendant ce temps, l'auto ne fait pas de prévention, elle ne fait pas d'intervention. Elle n'est pas là, parce que les gars perdent leur temps. Il y a bien des possibilités. Si, à un moment donné, au lieu de consacrer vingt minutes à un appel, pour une bicyclette volée — c'est un crime — les policiers allaient sur les lieux avec un dépliant ou une fiche qu'on donnerait au citoyen en lui disant: Remplissez cette formule, mettez-y un timbre et envoyer cela au poste de police, on serait là une minute, à deux hommes, on reprendrait la route et on ferait de la prévention, c'est-à-dire de l'intervention. C'est dans ce sens que j'ai parlé de la sélection des appels. Je vous ai donné un exemple. A Montréal-Nord, avant l'intégration, on sélectionnait les appels. Quand on a intégré la ville de Montréal-Nord à notre réseau de communications — je ne parlerai pas du réseau de communications à la CUM, parce qu'on est encore des adolescents dans ce domaine — au réseau de la CUM, le système ne faisait aucune sélection des appels. Depuis ce temps, il y a trois fois plus d'appels à Montréal-Nord qu'avant. On manque d'autos-radios à Montréal-Nord. Les gars sont débordés, parce qu'on va là où on ne devrait pas aller. C'est dans ce sens que je dis que la sélection des appels est très importante, mais il n'y a pas possibilité, à notre avis, d'éliminer chez nous l'auto à deux hommes quand les policiers font une enquête ou répondent à un appel.

M. Bédard: J'aime bien votre manière de raisonner. Si on pousse au bout votre argumentation, on se pose une autre question. Vous nous dites, autrement dit, en prenant l'exemple du porte-monnaie ou d'autres exemples que vous avez mentionnés, qu'il faudrait une sorte d'éducation populaire du citoyen, qu'il faudrait poser certains gestes de nature à ce que le citoyen aide à ce que ses deniers soient dépensés le plus efficacement possible. Je suis d'accord avec vous mais parce qu'on n'en est pas rendu là en éducation populaire, je ne pense pas qu'on doive partir du principe: Tombons deux par auto. Il y a des exemples que vous nous donnez, non seulement dans mon esprit, mais dans le vôtre aussi. Non seulement il ne faut pas être deux par auto pour de telles choses, mais il ne faudrait peut-être même pas les couvrir, mais plutôt inciter le citoyen à venir, au poste à poser un geste qui empêche qu'on soit obligé de couvrir de telles choses. Je me dis qu'il y a des cas où il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs. Procédons peut-être à une certaine éducation dans le sens que vous dites, mais ce n'est pas facile. La contrepartie du fait que l'éducation populaire n'est pas à son apogée n'est pas nécessairement le fait de deux policiers par auto.

Mon idée fondamentale, c'est que je me demande jusqu'à quel point l'angle sous lequel on est porté, parfois, à étudier le problème, qui est de dire, d'une façon mathématique: deux par automobile, trois relèves, jusqu'à quel point c'est la manière de voir véritablement le problème. Je me demande si ce n'est pas plutôt quand on parle de la sécurité du policier, de la sécurité du citoyen, d'emploi des deniers publics, si la meilleure manière n'est pas, justement, ce qu'on fait aujourd'hui, une sorte d'approfondissement du problème qui fait qu'en fin de compte, on peut penser qu'il faudrait peut-être non pas étudier le problème en termes de slogan, l'étudier seulement en termes de revendications, mais en termes de situations qui présentent des risques et qui font que, dans des situations comme celles-là, et c'est mieux qu'on les mette plus nombreuses que moins nombreuses, en fonction de la sécurité du policier et en fonction de toutes les choses qu'on ne peut pas prévoir, à ce moment-là, il serait peut-être mieux de l'aborder sous cet angle que sous l'angle d'une demande mathématique.

M. Masse: Je pense, M. le Président, que, même en remettant en question et en éduquant la population concernant un certain nombre de sujets, cela ne remettra pas en question le fait que l'auto à deux hommes soit indispensable quand ils donnent suite à des appels.

M. Bédard: Cela va remettre en question, par exemple, l'usage de deux hommes par véhicule.

Une Voix: C'est cela!

M. Masse: Cela pourra diminuer les coûts, ce qui permettra de payer ces deux hommes s'ils font moins de travail, et cela améliorera la protection du citoyen.

M. Bédard: Cela met en question l'usage qu'on fait, à l'heure actuelle, de deux hommes par véhicule à propos de n'importe quelle situation. Ce qui fait qu'en fin de compte, la sécurité du citoyen n'est pas plus assurée, l'efficacité du travail du policier n'est pas améliorée et il y a une dépense de deniers qu'un gouvernement responsable ne peut pas faire autrement que d'évaluer globalement avant d'y consentir.

M. Girard: M. le Président, pour donner un peu le point de vue de l'association sur les derniers énoncés, je pense que, lorsque les membres de l'association et de la Sûreté du Québec qui

sont les mêmes ont voulu aller en commission parlementaire pour déterminer le bien-fondé de la patrouille à deux hommes le jour, on avait tenu pour acquis que le gouvernement avait compris le danger du soir et de la nuit. On avait tenu pour acquis que c'était bien clair. D'ailleurs, on s'est bien entendu là-dessus, tout le monde sait maintenant que cela prend deux hommes de soir et de nuit. Dans une même suite d'idées, on s'est dit: Tout ce qu'il nous reste à démontrer pour avoir deux hommes de jour et assurer vraiment notre sécurité, c'est que c'est aussi dangereux de jour. On a apporté les éléments qui prouvaient que c'était dangereux de jour, on a vraiment prouvé qu'il y avait des vols à main armée et, effectivement, tout le monde connaît les heures d'ouverture des banques. On a également démontré qu'il y avait des assauts sur les policiers autant le jour que le soir ou la nuit. A ce moment, dans une suite logique d'idées, je pense qu'il n'y a plus lieu de remettre en question le danger de la fonction policière. Si on dit que c'est dangereux le soir et la nuit, si tous sont prêts à tenir pour acquis que c'est dangereux le soir et la nuit, il faudra également tenir pour acquis que, si on prouve que, de jour, c'est aussi dangereux, cela prendra deux hommes. Je pense que cela est l'optique des membres de la Sûreté du Québec, qu'il ne faut pas perdre cela de vue. Je pense qu'on n'a jamais discuté sur cette question de soir et de nuit. Il ne faut absolument pas retourner en arrière là-dessus.

M. Bédard: Mais il ne faudrait pas perdre de vue non plus l'optique de la situation dans laquelle toutes les parties étaient placées, quelques heures avant votre réunion à Drummondville. Il ne faudrait quand même pas perdre de vue non plus le climat dans lequel étaient placés non seulement les membres de votre association, mais également les autorités gouvernementales.

Je pense que c'était une situation quand même très spécifique à laquelle il fallait faire face. Peut-être ceux qui nous ont précédés ne l'ont-ils pas fait pour des raisons qui les regardent, mais je pense qu'une discussion comme celle qu'on vient d'avoir et qu'on continue d'avoir en commission parlementaire aura été d'une grande utilité.

Remarquez que je ne veux pas dire par là qu'on retire des choses déjà acquises, mais, quoiqu'il arrive, il ne faut jamais fermer la porte à une étude d'ensemble et, en définitive, si l'addition comporte plus de générosité qu'il n'en aurait fallu, ce n'est pas plus grave que cela.

Ce qui est important est de s'astreindre à étudier l'ensemble du problème tel que nous le faisons aujourd'hui.

M. Charbonneau: Je veux ajouter une chose avant que vous ne répondiez. Finalement, la discussion que nous venons d'avoir nous démontre une chose. Eventuellement, si on acceptait le principe tel que vient de nous l'expliquer M. Masse et que vous nous remettez sur le nez qu'on l'a déjà accepté pour deux relèves, à un certain moment, on peut peut-être accepter le principe, mais on peut également être confronté à une situation où on se dit: On voudrait bien l'accepter. Il faudrait diminuer des choses à un secteur parce que là on en fait trop pour pouvoir le donner ailleurs, mais tant qu'on ne fera pas cela, on n'est plus capable de payer ou de se permettre, matériellement, d'aller plus loin.

C'est là qu'on est peut-être rendu et c'est ce que le ministre vient d'indiquer, j'ai l'impression. A cause des événements passés, on est peut-être bloqué et se retrouver dans une situation où, si on accepte de réviser l'ensemble, on peut le faire assez rapidement, parce qu'il y a un certain nombre...

Je pense qu'on ne doit pas nécessairement envisager d'attendre que le citoyen soit prêt par habitude à aller téléphoner au poste de police pour commencer à ne plus envoyer des autos-patrouilles dans un certain nombre de cas.

Il y a peut-être des attitudes que les forces policières pourraient prendre assez rapidement, qui nous permettraient éventuellement de faire dans des délais assez rapides des économies de personnel et d'argent pour peut-être aller plus loin dans la troisième relève parce que c'est finalement tout cela. On ne se cachera pas des choses.

M. Richard (Raymond): Pour compléter, il est évident que si les structures de la Sûreté du Québec ou des corps policiers doivent être changées pour permettre au citoyen de participer plus et d'aller porter sa plainte en certaines occasions au bureau, si cela peut être fait, il est évident qu'il n'y aura personne qui s'y opposera.

Il reste que nous avons démontré la nécessité de deux hommes par voiture, selon nous, car c'est aussi dangereux, sinon plus dangereux le jour.

Et quand le ministre dit qu'il faut regarder le contexte des offres, les offres ont été faites alors que les membres de la Sûreté du Québec étaient dans la légalité, les offres — et ce sont les termes du ministre — étaient des offres raisonnables, des offres justes. Je n'ai jamais entendu le ministre dire que c'étaient des offres exagérées. Mais peut-être aussi que concernant la relève de jour, les membres ou la décision qui a été prise par l'assemblée souveraine n'a pas permis au ministre de la donner, mais c'est pour cela que nous sommes ici en commission parlementaire. Je n'ai jamais entendu dire, en aucune circonstance, de la part du ministre, que ces offres étaient exagérées. Non, c'est, il l'a dit à plusieurs reprises, juste et raisonnable. Quand on parle également...

M. Bédard: Je voudrais...

M. Richard (Raymond): ... juste pour ajouter, si vous le permettez...

M. Bédard: ... ajouter, textuellement, j'ai dit: Plus qu'avantageuses, par rapport... plus que raisonnables.

M. Richard (Raymond): Plus qu'avantageuses, mais pas exagérées. J'avais bien compris. Quand on parle d'économie, il faudrait aussi pousser l'étude. Est-ce que c'est plus économique deux

autos à un homme ou deux hommes dans une même auto? On sait qu'un véhicule de la Sûreté du Québec — je n'ai pas les chiffres précis, mais je ne me tromperai pas de plus de deux ou trois cents — cela coûte $0.30 du mille. A 60 000 milles par année, le minimum qu'une auto va coûter, c'est $18 000. C'est le salaire d'un membre de la Sûreté. Il faut considérer l'économie aussi. Est-ce que deux véhicules sur la route, ce n'est pas plus économique? Il faudrait faire des études de ce côté-là. Mais est-ce que c'est plus efficace? Est-ce que c'est plus sécuritaire et efficace pour la protection du public? Nous disons: Oui. Nous disons: Oui, non seulement avec des statistiques, mais avec les témoignages des policiers d'expérience, de carrière qui ont été interrogés.

M. Charbonneau: Dans le document que le ministère a présenté, il y a des économies qui s'annulent. Même si, à un moment donné il y a des choses qui s'annulent, il y en a d'autres qui ne s'annulent pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): II faut garder le même service, il ne faut pas oublier cela.

M. Richard (Raymond): Oui, on parle d'efficacité. J'ai bien dit: sécurité, efficacité, protection du citoyen.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je vais tenter d'être bref.

Le Président (M. Bertrand): M. Masse a demandé la parole. Je m'excuse.

M. Masse: Simplement une petite remarque. J'écoute l'argumentation concernant l'auto à un homme le jour et l'auto à deux hommes la nuit. Lors de ma première intervention, j'avais dit que les policiers avaient peur. Je me demande si j'ai été bien compris. J'ai dit que les policiers avaient peur de faire des interventions quand ils étaient seuls. Je n'ai pas dit qu'ils avaient peur de la noirceur.

M. Bédard: Non.

M. Masse: Si les policiers ont peur, ce n'est pas de la noirceur. Ils ont peur de faire des interventions seuls. C'est cela qui est dangereux: les interventions seules qui doivent être faites, autant de jour que de nuit.

M. Bédard: J'avais compris votre intervention dans ce sens-là.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je pense qu'il reste quelques intervenants. Alors, si vous voulez me donner mon droit de parole à seize heures, je demanderais l'ajournement.

Le Président (M. Bertrand): Bien. Alors, les travaux de la commission de la justice sont suspendus jusqu'à seize heures après la période des questions.

(Suspension de la séance à 12 h 8)

Reprise de la séance à 16 h 43

Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire de la justice poursuit ses travaux pour étudier certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec, notamment l'opportunité d'avoir pour chaque véhicule automobile de patrouille, deux policiers pour chaque période de relève.

Les membres de la commission cet après-midi sont: MM. Alfred (Papineau), Bédard (Chicoutimi), Pagé (Portneuf) en remplacement de Blank (Saint-Louis); Burns (Maisonneuve), Charbonneau (Verchères), Ciaccia (Mont-Royal), Clair (Drummond), Fontaine (Nicolet-Yamaska), Johnson (Anjou), Laberge (Jeanne-Mance), Lacoste (Sainte-Anne), Lavoie (Laval) en remplacement de Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Marois (Laporte), Samson (Rouyn-Noranda), Shaw (Pointe-Claire), Springate (Westmount), Tardif (Crémazie) et Vaillancourt (Jonquière).

M. Fontaine: Le député de Johnson à la place de M. Shaw.

Le Président (M. Bertrand): M. Bellemare (Johnson) à la place de M. Shaw (Pointe-Claire).

Avant que nous poursuivions la période des questions, je demanderais si c'est possible au président de l'association, pour les fins de la presse parlementaire qui a l'habitude de s'accorder les quelques places en bout de table qui peuvent demeurer disponibles lorsqu'une commission siège, s'il y aurait possibilité de libérer quatre ou cinq, trois ou quatre espaces de chaque côté pour que ces gens puissent s'asseoir.

S'il y a d'autres places qui sont nécessaires, je demanderais aux membres de la presse de nous le signaler. Je pense que tout le monde acceptera, avec la meilleure volonté du monde, de vous laisser le plus de place possible pour effectuer votre travail.

Nous en étions à la période des questions et c'est le député de Portneuf qui avait la parole.

M. Pagé: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais m'excuser au nom du député de Mont-Royal qui est absent parce qu'il y a une commission parlementaire des communications qui siégera ce soir pour l'étude des crédits du ministère des Communications.

J'avais seulement quelques questions à adresser à M. Richard et c'est au sujet des propositions ou des requêtes qui ont été formulées par l'association dans le cadre de la négociation de votre comité paritaire.

Suite au litige qui est intervenu, la Sûreté du Québec vous proposait une grille de moments ou de circonstances, d'événements qui vous permettaient d'être deux membres sur la relève du jour. D'abord, je tiens pour acquis que la relève de soir et que la relève de nuit, ce sont deux membres et c'est acquis pour l'association.

J'espère que cela sera confirmé par la Sûreté du Québec en soirée.

Pour ce qui est de la relève du jour, on vous a proposé une série de circonstances dont on a d'ailleurs déjà fait état, que ce soit le contrôle de foules, des descentes ou perquisitions, points de blocage et de ratissage au cours d'une opération 100. Je ne veux pas en faire toute l'énumération.

Vous avez eu à vous prononcer sur cette proposition qui vous a été formulée et vous avez d'ailleurs, le 19 avril, soit la veille du début de la commission parlementaire, proposé à votre tour, une grille pour deux policiers par auto-patrouille, dans le cadre de la relève de jour, avec quelques petites distinctions, des distinctions d'interprétation relatives aux circonstances ou aux événements prévus dans la grille en question.

A la page 30 de votre mémoire, cependant, vous énoncez ceci: "L'établissement d'une grille de cas spéciaux pour lesquels les patrouilleurs devront être deux ne saurait constituer une solution réaliste au problème de sécurité des patrouilleurs et de la population."

J'en suis venu à me poser certaines questions. D'une part, je pense qu'il est acquis et que vous acceptez le fait que, dans certaines circonstances, le policier puisse être seul, que ce soit pour des fonctions administratives, que ce soit pour délivrer des subpoeans, on en a fait état à plusieurs reprises, que ce soit pour aller témoigner lors de l'audition d'une cause où il est appelé comme témoin, etc. J'ai semblé en déduire que vous acceptiez ce principe que, dans certains cas particuliers, le policier pouvait être seul dans son véhicule.

Si on accepte ce postulat, il faut, par corollaire, en déduire que, dans certains autres cas prévus lors de la relève de jour, il faudra, selon votre requête, dans des circonstances précises autres que celles de fonctions administratives et autres, que vous soyez deux policiers, suite à la requête que vous formulez. Vous l'avez très bien énoncé dans la grille que vous avez formulée à la Sûreté du Québec.

Est-ce que vous remettez totalement en cause cette question qui a été débattue au comité paritaire et que vous dites: Ce sont deux policiers par automobile tout le temps, dans la relève de jour, en toute circonstance et en tout moment, ou si vous acceptez, d'une part — et c'est ma question — le fait que, dans certains cas, le policier puisse être seul? Si vous l'acceptez, à quel endroit se reporte le débat par la suite?

Est-ce que le débat ne revient pas à l'interprétation qu'on doit donner à ces deux questions, la question de la grille proposée par la Sûreté du Québec et celle proposée par votre association?

M. Richard (Raymond): M. le Président, Me Barré va répondre à cette question

M. Barré: M. le Président, nous avons déjà eu l'occasion, lors d'une séance antérieure de cette commission, d'aborder la question de la grille et nous avions mentionné, à ce moment, que la grille en question ne nous apparaissait pas comme étant

une solution adéquate au problème de la présence de deux patrouilleurs sur la relève de jour. En d'autres termes, c'est que l'établissement d'une telle grille pouvait s'avérer, et dans les faits, s'avérait effectivement trop restrictive et pouvait impliquer, à ce moment, pouvait signifier que la notion du travail de patrouilleur ne se restreignait qu'à répondre aux appels.

Or, on sait pertinemment que tel n'est pas le cas. Le patrouilleur n'a pas, de par ses fonctions, uniquement à répondre aux appels. C'est une partie de son travail, mais il reste qu'il a quand même d'autres fonctions à exercer, un autre rôle qui n'est pas nécessairement relié à répondre à tel ou tel genre d'appel. A ce moment, nous disions et nous maintenons que l'établissement d'une telle grille ne peut constituer une solution au problème.

Par ailleurs, si on veut situer la question de la grille dans le contexte du problème qui nous occupe, on se rappellera que, lors de la rencontre avec le ministre de la Justice le 5 avril, celui-ci nous avait offert, à ce moment, l'établissement d'une grille. Cette offre, ainsi que nous l'avons déjà mentionné, a d'abord été rejetée unanimement par les membres, mais, comme nous l'avons mentionné également, l'offre a été maintenue et l'établissement de la grille a quand même fait partie de l'offre finale du gouvernement.

Je pense, dans les circonstances, que nous aurions peut-être été malvenus de nous présenter devant cette commission, sans même nous donner la peine de discuter de la question de la grille, puisque cette question de grille avait été soumise et présentée par le ministre de la Justice. C'est pour cela que certaines discussions ont eu lieu au niveau du comité paritaire, discussions qui, comme nous l'avons souligné dès le début de cette commission, n'ont donné aucun résultat. Nous pensions qu'il était nécessaire de discuter de cette question même avec la conviction, comme nous l'avons réitéré, que cela ne pouvait pas constituer une solution au problème, afin d'être en mesure de donner aux membres de cette commission une idée ou de communiquer aux membres de cette commission tous les éléments du problème.

S'il y avait eu établissement d'une grille, on aurait été en mesure de vous dire: Voici, il nous a été proposé tel genre de grille avec tel cas. Nous croyons et nous estimons que cette grille, pour telle et telle raisons, n'est pas applicable ou n'est pas une solution acceptable.

Or, il n'y a même pas eu de grille qui a pu être établie. Donc, nous disons aux membres de cette commission, à partir du principe que cette solution, quant à l'établissement d'une grille, n'est pas une solution, qu'il n'y en a même pas qui a pu être établie pour pouvoir constituer une amorce quelconque de solution.

M. Pagé: Oui, mais Me Barré, si vous le permettez, vous dites que vous avez discuté de la question de la grille. Quant à moi, c'est un commentaire, c'est une opinion, mais je pense que vous avez fait plus qu'en discuter puisque vous en avez proposé une. Je ne veux pas discuter ici de ce qu'on a préalablement abordé, à savoir si c'était trop restrictif ou si c'était préférable que les énoncés soient plus généraux, laissant une certaine discrétion ou une certaine latitude, mais est-ce que vous acceptez le fait que dans certains cas, il est possible que le policier soit seul dans son véhicule pour remplir des fonctions strictement administratives? J'ai fait état tantôt, par exemple, du fait qu'un policier se rend témoigner dans une cause où il est appelé comme témoin. Est-ce que l'association a établie, au départ, qu'il y a certaines fonctions qui sont purement administratives, qui ne sont pas directement reliées aux fonctions de prévention, de vérification et tout cela et où le policier peut être seul dans son véhicule?

M. Barré: Voici, peut-être pour compléter ce que je mentionnais tantôt. C'est que, si on regarde également la grille, la grille avait pour objet de viser non seulement le patrouilleur, mais également d'autres catégories de policiers qui n'étaient pas nécessairement des patrouilleurs et qui, eux, auraient pu être affectés par l'établissement d'une grille lorsqu'ils ont à répondre à certains appels. Par ailleurs, le problème qui nous amène ici devant cette commission est un problème qui concerne les patrouilleurs, les patrouilleurs sur les trois relèves. La seule partie du problème qui reste encore en litige, c'est la relève de jour, c'est-à-dire la présence de deux patrouilleurs à la relève de jour.

Maintenant, quant à la question que vous posez sur le travail policier, je pense que M. Richard a eu l'occasion de le mentionner lors de la dernière séance de la commission parlementaire. C'est qu'un comité de travail sur les fonctions policières a été formé et que certaines questions plus ou moins reliées à cet aspect du travail policier y seront discutées, mais, en ce qui nous concerne, ce n'est pas un problème qui est soulevé et qui devrait se régler au niveau de la commission parlementaire.

M. Pagé: Alors, vous excluez ces questions de l'étude qui doit être faite par la commission parlementaire présentement. Vous considérez que l'étude qui doit être faite doit se limiter à la patrouille comme telle et ne pas toucher les fonctions administratives ou ces choses.

M. Barré: Effectivement, nous sommes confrontés à un problème, c'est le problème qui vous est soumis en tant que membres de cette commission parlementaire. C'est la question que nous avons à discuter et à laquelle nous devons tenter de trouver une solution.

Je pense que l'autre aspect que vous soulevez, à ce moment-là, si on s'entend sur le mandat qui avait été confié à cette commission, c'est que le mandat était pour régler le problème soulevé par la présence de deux patrouilleurs à la relève de jour et pas d'autres aspects de cette question.

M. Pagé: Mais vous allez quand même accepter avec moi que c'est une question que la

commission veut quand même étudier et considérer dans son ensemble.

M. Barré: Tout dépend, je veux dire, de l'approche que vous avez du problème. Si on considère que le gouvernement a accepté, dans ses offres, d'établir la relève à deux hommes pour le soir et la nuit, il convient, à ce moment-là, de compléter et de pousser le raisonnement jusqu'au bout et de dire: Est-ce que cela devrait s'appliquer également à la relève de jour? Notre position, ainsi que nous l'avons présentée depuis le début des travaux de cette commission a été d'établir que cela se justifiait autant pour la relève de jour que cela pouvait se justifier pour la relève du soir ou de nuit, indépendamment de l'appréciation qui pourra être faite à un autre niveau ou par un autre organisme des fonctions policières comme telles, puisque, en fait, votre question se rapporte à traiter des fonctions policières. Et, suivant les informations qu'on nous a transmises, il y a un comité de travail de formé qui doit se pencher sur cette question.

M. Pagé: D'accord.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand): Pas d'autres questions? Oui.

M. Bédard: ...sur ce point, comme le député de Portneuf le fait remarquer, il reste que, même si le travail de la commission n'est pas de régler le problème de la négociation concernant la grille, vous avez cru bon, dans votre exposé du départ des travaux de cette commission, d'en faire état quand même, non sur l'aspect de négociation, mais afin de permettre aux membres de la commission de pouvoir savoir de quoi on parle quand on parle de cas précis où il peut y avoir des risques spéciaux qui se doivent d'être, â ce moment-la, couverts par l'obligation d'être deux hommes par véhicule.

Je me permets seulement une remarque, parce que non seulement ce n'est pas le rôle de la commission de mener à terme des négociations qui sont entreprises, ce n'est pas le rôle, non plus, du ministre de la Justice de le faire, je pense bien que vous avez des organismes, de part et d'autre... En fait, il y a des représentants qui peuvent faire ce travail, même si nous pouvons nous permettre peut-être d'exprimer que, quand on regarde ce qui est proposé, d'une part, par la Sûreté et ce qui est proposé, d'autre part, par l'Association des policiers, c'est plus qu'une amorce. On retrouve plusieurs points, en tout cas, où il semble y avoir des similarités, mais sûrement certaines distinctions au niveau de l'application.

Je voudrais seulement faire remarquer un point de cette grille, entre autres, celle proposée par la Sûreté, et poser une question à Me Barré. Je ne voudrais pas revenir sur le sujet, mais, à un certain moment, vous m'avez donné l'impression d'interpréter le paragraphe 4 qui commence par: "Dans d'autres circonstances, le policier qui ren- contre...", etc., comme ayant pour effet de diminuer ce qui est auparavant explicité dans le paragraphe 3, alors que mon humble opinion est que ce paragraphe, en aucune façon, ne semble diminuer ce qui est accordé dans le paragraphe 3, mais fait état d'autres circonstances où il y a nécessité, comme vous le souligniez tout à l'heure, qu'il y ait deux policiers par véhicule oe qui fait qu'en définitive la marge entre les deux parties s'amenuise d'autant.

M. Barré: Comme je l'ai souligné tantôt, et je tiens à préciser à nouveau ce point, il faut quand même se situer dans le contexte bien précis des offres du ministre de la Justice, l'établissement d'une grille. Cela faisait partie des offres du ministre de la Justice et, encore une fois, je pense qu'on aurait été malvenu de ne pas en discuter, compte tenu des réserves que nous avions exprimées quant au rôle d'une telle liste et quant à l'amorce d'une solution pouvant donner lieu à l'application d'une telle liste.

Quant à la deuxième partie de la question du ministre de la Justice, nous disons que, avec la liste ou la grille proposée par la Sûreté, si on considère le deuxième paragraphe de cette liste, on se retrouve dans une situation où vous risquez d'avoir ce que nous avons appelé des policiers "touristes" qui vont se promener, mais qui ne répondront pas aux appels. Autrement dit, quand on dit: "Dans certaines circonstances..." — et je reprends le texte du paragraphe 4 auquel vous faites référence —"...le policier qui rencontre une situation susceptible de dégénérer en violence ou qui s'amène à un endroit où un crime est en train de se commettre doit agir avec une extrême prudence et requérir la présence de ses confrères ou l'aide de citoyens avant d'agir."

Je pense que si vous appliquez un tel texte à la lettre, vous risquez d'avoir des interprétations qui seront aussi diversifiées que le nombre de postes que vous aurez en province et vous risquez d'avoir plus de problèmes que vous pouvez en avoir à l'heure actuelle à cause, justement, des divers éléments qui peuvent entrer en ligne de compte et sans tenir compte du fait qu'à ce moment-là, vous amenez pratiquement les policiers à s'abstenir d'intervenir ou à requérir l'assistance ou l'intervention des citoyens. Je pense que tous réalisent que les citoyens ne sont peut-être pas ceux qui sont le plus disposés à s'impliquer dans un événement de nature criminelle ou autre pour prêter assistance à un policier et si on exige du policier qu'il requière une telle assistance ou une telle aide avant d'intervenir, où se trouve l'efficacité de la police à ce moment-là?

M. Bédard: J'ai de la difficulté quand même, à être d'accord jusqu'au bout avec votre argument qu'une telle disposition équivaut à faire des policiers touristes. Je ne le crois pas. Si on prend la clause telle qu'elle est, qui dit textuellement ceci: "Dans d'autres circonstances, le policier qui rencontre une situation susceptible de dégénérer en violence ou qui s'amène à un endroit où un crime est en train de se commettre, doit agir avec une

extrême prudence et requérir la présence de confrères ou l'aide de citoyens avant d'agir". Une situation comme celle-là peut se présenter pas seulement pour un véhicule où il n'y a qu'un policier. Cela peut se présenter également, je crois, dans des situations où il y a un véhicule et deux policiers. Il peut y avoir, en termes de sécurité et de prudence, des situations où même deux policiers doivent, s'ils appliquent les règles de prudence, requérir l'aide d'un compagnon avant d'intervenir. C'est dans ce sens que je ne trouve pas qu'on puisse...

M. Barré: C'est justement là le problème, M. le Président. Si on regarde la première partie de cette grille, on se rend compte que l'énumération qui y apparaît est trop restrictive. Je donnais comme exemple, et je me permets d'y revenir, lorsqu'on dit "exécution d'un mandat d'arrestation pour un acte criminel". C'est restrictif à un acte criminel. Lorsqu'on parle "de chicane de famille, lorsque l'intervention se fait alors que l'événement est en cours", on vous a précisé ce matin que lorsque la Sûreté reçoit des appels, on reçoit le minimum d'information avant d'intervenir. Est-ce qu'on va être en mesure de déterminer, à ce moment-là, si l'événement est en cours, s'il est terminé, s'il est sur le point de se produire exactement? Vous avez également "vol qualifié, incluant tentative, lorsque les suspects sont encore sur les lieux." Est-ce qu'on va être en mesure, encore une fois, en recevant l'appel, de dire: Les suspects sont encore sur les lieux, les suspects sont partis, ou exactement ce qui se produit? C'est en ce sens qu'à ce moment-là, si on regarde la première partie de la grille qui, à notre point de vue, est beaucoup trop restrictive et peut s'avérer très difficile d'application et même dans certains cas inapplicable, la deuxième partie qui se veut une espèce de clause omnibus pour régler les imprécisions de la première partie de cette liste, ne répond pas justement aux objectifs, parce que la deuxième partie de cette liste prévoit qu'à ce moment-là le policier, avant d'agir, doit requérir l'intervention d'un confrère. C'est donc dire que si vous avez un véhicule d'un seul patrouilleur qui constate un événement, à ce moment-là, avant d'agir, avant de faire quoi que ce soit, il va requérir l'aide d'autres policiers ou de citoyens, s'il le peut.

Je pense que si des citoyens constatent cette situation, ils vont sûrement être en mesure de vous dire, comme ministre de la Justice, que l'efficacité policière n'est sûrement pas celle à laquelle ils sont en droit de s'attendre dans les circonstances.

M. Bédard: Je pense qu'on peut s'accorder sur un point, sur le fait que quand on demande à un policier, dans une clause, dans certaines circonstances, de ne pas intervenir sans faire appel à l'aide de confrères, peut être facilement... cela n'est pas interprété comme étant un manque de bravoure ou quoi que ce soit. Cela peut être interprété simplement comme une prudence élémentaire, face à l'évaluation d'un danger, auquel est en mesure de faire face un policier seul et auquel sont en mesure de faire face deux policiers qui sont ensemble, de telle façon que, non seulement, il y a des occasions où un policier, s'il applique les règles de prudence élémentaire, ne doit pas intervenir, mais demander de l'aide. Il y a aussi des occasions où deux policiers ne peuvent pas intervenir s'ils appliquent les règles intégrales de la prudence, face à un danger qu'ils ont évalué. S'ils savent qu'ils ont à faire face à six ou sept bandits, peut-être que deux policiers, avant de s'embarquer dans un échange de coups de feu, vont penser que la prudence élémentaire exige qu'ils demandent de l'aide, même s'ils sont deux.

Quand vous dites — sur ce point, c'est mon interprétation — je ne prends qu'un point que vous avez mentionné, "l'exécution d'un mandat d'arrestation pour un acte criminel" et vous concluez, à partir de ça, que c'est trop restrictif. Il me semble que j'essaie de voir toutes les situations dans lesquelles un policier peut être placé, que des autorités responsables se doivent d'évaluer avant d'établir des règles bien précises ou de s'entendre sur une grille. Il reste que l'exécution d'un mandat d'arrestation, pour un acte criminel, peut ne pas être si restrictif que ça. Est-ce que vous voulez me dire que lorsqu'il s'agit d'un mandat d'arrestation, pour une offense mineure, qu'à ce moment-là, nécessairement, il faudrait qu'il y ait deux policiers?

Vous savez, une offense au Code de la route, par exemple.

M. Richard (Raymond): M. le Président, ce qu'on voulait dire, c'est que la grille faisait partie des offres du ministre. Ce qu'on essaie de démontrer à la commission depuis quelques jours, c'est que la grille ne règle pas le problème. Ce n'est pas suffisant. Ce qu'on a tenté de démontrer dans notre mémoire, c'est assez simple, c'est que même sur la relève de jour, vu les imprévus du travail policier, c'est nécessaire d'avoir deux hommes par véhicule.

M. Bédard: Cela, je pense...

M. Richard (Raymond): Mais est-ce que la grille règle le problème? C'est non.

M. Bédard: J'ai très bien compris votre message, de ce côté, il n'y a pas de doute que vous nous avez dit très clairement, on discute de la grille... Maintenant, c'est parce qu'on n'a pas deux hommes par véhicule, 24 heures par jour... Faites-moi confiance, j'ai très bien compris ce point auquel vous tenez, vous avez le droit d'y tenir avec les arguments que vous apportez, des arguments sérieux, il faut en convenir, comme il peut y avoir des arguments sérieux qui peuvent faire voir les choses d'une autre manière.

On peut admettre au départ, que lorsque je fais des remarques concernant la grille, je tiens toujours pour acquis votre position de principe. Même si quelquefois on n'est pas d'accord, il faut quand même respecter les positions de principe de chacun. C'est dans ce sens que je voudrais bien vous dire que je discute de certains cas précis au niveau de la grille ou de l'interprétation de certaines clauses.

M. Barré: Ce que d'ailleurs nous avons fait ressortir, M. le Président, à partir de la grille préconisée par la Sûreté du Québec, si elle devait être appliquée suivant la formulation, telle qu'elle nous a été remise, il nous est apparu qu'à ce moment-là, le paragraphe 4, auquel le ministre de la Justice se réfère, constitue, dans les circonstances, ou est censé constituer l'exception. A notre point de vue, étant donné la nature de cette grille, l'exception risque de devenir la règle générale, avec toutes les implications que cela va apporter, c'est-à-dire la non-intervention des policiers au moment où ils se devraient d'intervenir.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Bertrand): Sur la grille seulement?

M. Johnson: Oui.

M. Bédard: Chacun a droit à son opinion.

Le Président (M. Bertrand): Question accessoire sur la grille.

M. Johnson: M. le Président... Est-ce que j'ai la parole, M. le Président? Sur la grille...

Le Président (M. Bertrand): Sur la grille, le député de Johnson a demandé la parole avant vous.

M. Bellemare: ... la première intervention, vous m'avez dit: Je reviendrai à vous.

Le Président (M. Bertrand): Je pensais que c'était votre intervention principale, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: C'est sur cela.

Le Président (M. Bertrand): Sur la grille?

M. Bellemare: C'est sûr.

Le Président (M. Bertrand): D'accord.

M. Johnson: Le député de Johnson ou le député Johnson?

Le Président (M. Bertrand): Le député de... Ah! Ah! Je ne me mêle plus. Maintenant, je ne me mêle plus, C'est bien le député de Johnson.

M. Bellemare: II y a assez de fois que c'est mêlé dans le journal des Débats!

M. Johnson: Merci, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Bellemare: Je pense, depuis quelque temps qu'on assiste aux délibérations, aux échanges de points de vue, qu'il s'est dégagé, à mon sens, énormément de choses qui sont bénéfiques pour l'association et aussi pour ceux qui ont pris part à ces discussions.

Moi, j'ai appris énormément de choses qui m'ont rendu énormément service, mais aussi, qui ont développé chez moi, une certaine prudence. Je rends témoignage à la vérité que les policiers, aujourd'hui, en 1977, ont un rôle à jouer bien différent de celui qu'ils avaient il y a cinq ans, même il y a dix ans.

C'est complètement changé au point de vue de la méthode, de la stratégie, de l'organisation et, particulièrement, de principe fondamental. On n'applique plus la justice de la même manière, comme on n'applique plus non plus les mêmes méthodes au point de vue des vols, des rapts, des viols ou ces choses-là.

On agit, à cause des media d'information, avec une dextérité beaucoup plus grande. Parce que les méthodes se sont développées de part et d'autre, on exige, je pense, beaucoup plus de protection.

J'ai quelques questions à poser. Je le fais, dans un sens, pour remplir d'abord mon rôle comme parlementaire, mais aussi pour tâcher de trouver la solution qui serait la solution miracle, dans les circonstances, parce que, depuis les débuts...

Je voudrais d'abord vous poser une question. Est-ce que c'est du droit nouveau? J'ai posé la question l'autre matin; on m'a dit: Je vous répondrai lorsqu'on sera dans le deuxième paragraphe. J'ai fait du droit, non pas du droit clérical, mais j'ai fait du droit ouvrier pas mal, des relations patronales-ouvrières, j'en ai brassé quelques-unes et j'ai appris énormément. J'ai appris qu'il y avait, dans ce droit ouvrier, quelquefois, du droit nouveau, qui faisait que cela créait des nouvelles obligations au patron et aux employés.

Ma question, la première, c'est: Est-ce que c'est véritablement du droit nouveau? Est-ce que cela existe ailleurs? Est-ce que cela aurait raison d'exister ailleurs? Pourquoi cela n'existe-t-il pas ailleurs? Est-ce que les témoignages qu'on a entendus, que j'ai lus, parce que je n'ai pas pu être ici tout le temps, est-ce que c'est vrai ce qu'on a dit? Est-ce que cela peut être réfuté, dans un bon sens? Est-ce que c'est plus pour protéger le capital argent ou si c'est plus pour protéger le capital humain?

Cela aussi, c'est une bonne question; parce que si c'est du droit nouveau, dans quoi est-ce que cela s'inscrit, dans la définition que nous a donnée un de vos membres, strictement au sujet du rôle qu'un policier, qu'un patrouilleur doit accomplir?

Celui qui est venu nous dire ce que c'est qu'un patrouilleur, il m'a impressionné, parce qu'il nous a défini quel était son rôle, mais aussi quelles étaient ses inquiétudes. On n'est pas capable de remédier à cela, mais on est capable de penser, par exemple, que dans son for intérieur, quand il agit au nom de la loi, il possède un certain degré d'inquiétudes qui le rend, des fois, moins efficace que s'il était réellement bien protégé.

A partir de là, est-ce que l'efficacité de son

travail doit être conditionnée à certaines phases pécuniaires ou à certains degrés de paiement? A partir de là, je me demande si c'est du droit nouveau, si c'est nous autres qui le faisons dans la province de Québec, parce que j'ai entendu, ce matin, une intervention de votre président qui m'a surpris. M. Richard a dit: Vous savez, dans la province de Québec, on a un droit ouvrier qui est bien plus avancé que le droit ouvrier des gens des Etats-Unis. M. Richard, M. le Président, je peux respecter votre syndicalisation, votre méthode de syndicalisation ou l'apprécier, mais si on a des droits aujourd'hui qui nous sont reconnus en vertu de certaines lois, on les doit en grande partie à la syndicalisation américaine qui nous est venue d'outre-frontière. Je conçois que, sur certains points, on a évolué plus rapidement.

Vous nous avez dit ce matin: On peut donner des exemples montrant qu'on est bien plus avancé. C'est peut-être cela, le droit nouveau dont vous voulez parler; on prêche par un droit nouveau en demandant deux patrouilleurs 24 heures par jour. Je voudrais le savoir.

La deuxième chose que je voudrais aussi savoir c'est cela: Si le gouvernement ne vous accordait pas votre requête, quel est le second temps, qu'est-ce que vous allez faire après? Je voudrais que vous soyez aussi francs que nous autres. Allez-vous recommencer la grève? En avez-vous l'autorisation? La loi vous le permet-elle? Dites-le-nous donc, sans menace...

M. Richard (Raymond): Je vais vous le dire.

M. Bellemare: ... simplement, parce que vous êtes... Quelqu'un ici dans la salle m'a dit: Si, "ta-bernac", on ne l'a pas, vous allez voir, on va en faire une autre. Ce n'est pas de cette façon qu'on raisonne. C'est clair. Si vous faites des relations patronales-ouvrières dans ce sens, je ne joue pas à cela. J'essaie de trouver avec tous mes collègues autour de la table, sans parti pris... Je ne suis pas PQ, moi, et je ne le pense pas. Il y en a trop qui seraient contents, mais une chose qui reste...

M. Charbonneau: Cela va finir par arriver.

M. Bellemare: A part cela, je suis encore bien moins libéral. Cela, c'est sûr.

Je suis à cette table, comme un homme qui a été élu dans un comté, pour, avec ses collègues, trouver les solutions les meilleures pour donner à l'administration provinciale, véritablement, une performance où il fait bon vivre en société. C'est mon idée.

Si, demain, le gouvernement ne se rendait pas à deux hommes, à deux patrouilleurs, allez-vous faire la grève? Allez-vous arrêter, allez-vous faire un autre sit-in de six jours à Drummondville?

Les manufacturiers, les restaurateurs étaient bien contents, eux, mais il y en a d'autres qui n'étaient pas si contents que cela. C'est un bien mauvais exemple pour la police. Je suis un vieux, vous savez. Vous allez dire: Le vieux radote. D'accord. Ils disent cela de Diefenbaker, aussi, mais, quand ils ont besoin de conseils sages, ils vont voir le bonhomme. C'est un peu comme dans mon genre. Je vous dis que ce n'est pas beau d'avoir fait ce que vous avez fait. Je n'aime pas cela. Même si vous me disiez des bêtises, je suis habitué, j'ai l'écorce épaisse, cela fait 32 ans que je suis député. Je n'aime pas que la police donne un mauvais exemple comme cela à tout le monde. Vous n'êtes pas au-dessus de la loi. Vous êtes là pour la faire respecter, et vous autres plus que d'autres. Vous avez été assermentés et vous prêtez des serments: Je jure. C'est "dret" comme cela. Ecoutez, c'était vrai. Pour moi, c'était vrai. Le lendemain matin, on dit: La loi, ce n'est pas pour nous autres. Nous autres, on va faire cela: la sirène, des échelles, la ville de Montréal, courir partout et barrer les rues. Je n'aime pas bien cela. En temps normal, vous n'êtes pas faits pour cela. Ecoutez, je ne vous fais pas de reproche, je ne fais que...

M. Bédard: Non, non. Vous êtes certain que vous ne faites pas de reproche?

M. Bellemare: Non, je constate un fait pour leur demander ce qui va arriver après. Ils vont me le dire. Ils sont assez francs, ils vont me le dire. Pas tout de suite. Une minute!

M. Richard (Raymond): Oui, je peux vous le dire.

M. Bellemare: Vous avez dû remarquer que nous, de l'Union Nationale, on a inscrit une motion spéciale ce matin au feuilleton de l'Assemblée nationale. Mon collègue de Nicolet, Me Serge Fontaine... Oui, c'est vrai, je vieillis. La mémoire me reste fidèle pour bien d'autres choses. Oui, on a inscrit ce matin au feuilleton une motion spéciale. Vous n'avez pas dû voir cela. On y dit dans cette motion: "Que cette Assemblée, conformément à l'article 152 de notre règlement, donne des instructions à la commission permanente de la justice — nous qui siégeons ici — réunie présentement afin d'étudier certaines questions relatives à la sécurité au travail des policiers de la Sûreté du Québec, de faire des recommandations à ladite Assemblée, notamment sur l'opportunité d'avoir pour chaque véhicule automobile de patrouille deux policiers pour chaque période de relève". On a fait cela. On veut que le gouvernement prenne ses responsabilités et fasse des recommandations, dans ce sens ou dans un autre, pourvu qu'il fasse des recommandations, mais on a demandé dans une motion qui est à l'ordre du jour, que...

Le Président (M. Bertrand): Le député de Johnson, je dois vous interrompre dans votre intervention sur la grille pour permettre au ministre de la Justice de faire sa question de règlement.

M. Bellemare: Bon!

M. Bédard: Le député de Johnson m'avait bien mentionné, d'abord, dans un premier temps qu'il ne ferait pas allusion, lorsque nous nous en sommes parlés ce matin, à ce projet d'amendement.

M. Bellemare: J'ai dit que je le dirais, mais je n'ai pas dit que je le commenterais.

M. Bédard: Non, mais laissez-moi finir ma question.

M. Bellemare: Oui, mais vous allez me déranger dans le reste de mon discours.

M. Bédard: Si vous saviez comment vous nous dérangez parfois.

M. Bellemare: Qui? Moi?

M. Bédard: Comme vous l'avez dit tout à l'heure, vous n'avez pas été...

M. Bellemare: Vous pensez que je ne vous ai pas aidé tout à l'heure?

M. Bédard: Dans le sens suivant, vous avez dit tout à l'heure que vous n'avez pas été ici tout le temps du débat et cela paraît.

M. Bellemare: Presque tout le temps.

M. Bédard: Parce qu'il y a bien des questions sur lesquelles, et je ne vous en fais pas grief, je n'ai pas fait d'intervention.

M. Bellemare: Vous pensez que j'ai été m'amuser ailleurs?

M. Bédard: Ecoutez! Vous connaissez assez les droits du parlementaire. J'ai la parole. Est-ce que vous me la laissez ou si vous voulez continuer...

M. Bellemare: Oui, je vous la laisse...

M. Bédard: ... ou si vous voulez continuer à m'interrompre?

M. Bellemare: ... mais ne dites pas de bêtises, par exemple.

M. Bédard: Non, mais, écoutez...

M. Bellemare: J'ai été travailler à d'autres commissions...

M. Bédard: ... s'il fallait que je vous interrompe à chaque fois que je pense que vous dites des bêtises... Je pense que, si on commence à jouer ce jeu, on va changer l'atmosphère...

M. Bellemare: Vous, vous allez m'interrompre chaque fois que ça ne fera pas votre affaire.

M. Bédard: Non, mais on va changer l'atmosphère de cette commission, qui est d'essayer de faire un travail sérieux, et c'est ce à quoi nous arrivons jusqu'à maintenant. On va essayer de faire en sorte que ça ne change pas. Mais quand vous commencez à faire allusion aux policiers, à la recommandation dont vous parlez, dont vous voulez faire état à l'Assemblée nationale, quand vous êtes en train de leur dire: C'est ça, messieurs les policiers, que nous voulons faire pour vous, je voudrais vous dire une chose: Dès le début de cette commission, il a été clair — je l'ai dit clairement — que je voulais que cette commission-là finisse avec des recommandations.

M. Bellemare: D'accord!

M. Bédard: J'ai soutenu le point de règlement selon lequel il n'était pas nécessaire que ce soit Inscrit dans le mandat...

M. Bellemare: Cela, c'est votre avis.

M. Bédard: ... pour que la commission parlementaire puisse en arriver à faire des recommandations...

M. Bellemare: Cela, c'est votre avis.

M. Bédard: ...mais que c'était inhérent à un pouvoir d'une commission parlementaire et je vous ai cité des articles là-dessus selon lesquels la commission parlementaire avait le droit de faire des amendements. Des recommandations, c'est moins que des amendements. Donc, une commission parlementaire, ayant le droit, selon l'article que je vous ai cité, de faire des amendements, a nécessairement aussi le droit de faire des recommandations. Je ne veux pas revenir et refaire tout ce débat sur la question de règlement, parce que je pense qu'on peut perdre du temps. Je ne voudrais pas que vous induisiez en erreur les policiers en leur disant: Voilà ce qu'on a fait pour vous! On a demandé que la commission fasse des recommandations. Je tiens à vous rappeler que c'est moi-même, au début des séances de la commission parlementaire, et avant même la commission parlementaire, à l'Assemblée nationale, qui ai exprimé très clairement ma demande selon laquelle cette commission parlementaire se devait de faire des recommandations.

M. Bellemare: Bon! D'abord, ma présence pendant les séances de la commission parlementaire de la justice, j'espère qu'elle a été positive jusqu'aujourd'hui. Je ne mérite des reproches de personne autour de cette table.

Deuxièmement, quand je me suis absenté, il y a toujours eu un membre de l'Union Nationale qui a été ici, parce que j'ai été pris à d'autres commissions ou parce qu'on a voulu, avec une certaine stratégie, me sortir de la commission. Ah oui! Le bill 27, je l'ai dans la mémoire pour longtemps.

M. Bédard: Je pense qu'on se comprend bien. Je ne veux pas vous faire reproche d'avoir été dans l'obligation de vous absenter de la commission.

M. Bellemare: Non, mais j'ai...

M. Bédard: Ce n'est pas ça que j'ai dit tout à l'heure.

M. Bellemare: Bon!

M. Bédard: J'ai clarifié un point de règlement et j'espère que c'est fini, la discussion, sur ce point.

M. Bellemare: Alors, messieurs, la première des choses, est-ce que c'est du droit nouveau? Deuxième chose, si le gouvernement ne se rendait pas à votre requête, qu'est-ce que serait le second geste demain ou après-demain? Troisième chose, est-ce que vous pourriez me dire... C'est peut-être poser trop de questions en même temps. Vous aimeriez peut-être mieux y répondre au fur et à mesure. J'ai noté mes questions. Si vous n'y répondez pas, j'y reviendrai.

M. Barré: Voici, M. le Président, pour commencer à répondre aux premières questions posées par le député de Johnson.

D'abord, à la question de savoir si c'est du droit nouveau, je pense qu'on est en mesure de vous répondre que ce n'est pas du droit nouveau. D'ailleurs, je pense que le député de Johnson, en tant que spécialiste des relations du travail ou du droit ouvrier, sait que le droit du travail, c'est un droit qui est en perpétuelle évolution. Cette phrase m'a d'ailleurs, si on me permet de faire un bref retour en arrière, été mentionnée à quelques reprises, lorsque j'ai commencé à pratiquer le droit, par celui qui est devenu depuis le député de Maisonneuve et le leader parlementaire. Enfin, je ne sais pas si c'est une référence. On en jugera.

M. Bellemare: Au point de vue de droit ouvrier, c'est excellent.

M. Barré: De toute façon, je pense qu'on conçoit tous que le droit du travail est un droit en évolution, mais il reste que le problème qui nous occupe actuellement n'est pas une question de droit nouveau.

Nous avons mentionné dans notre mémoire que, notamment au Québec, sur, par exemple, un peu plus de 9000 policiers, il y en a au-delà de 6000 qui ont déjà la formule de deux hommes par auto-patrouille 24 heures par jour.

En ce qui nous concerne, à la Sûreté, cela fait environ une dizaine d'années que la demande est faite pour améliorer les normes de sécurité au travail des policiers, dont la présence de deux policiers par auto-patrouille. Cela a fait l'objet de discussions, notamment, lors des dernières négociations de la convention collective en 1973 et c'est revenu à nouveau sur le tapis à l'occasion du renouvellement de la présente convention collective.

Ce n'est pas non plus une question d'économie. D'ailleurs, là-dessus, je me permets de me référer au document déposé par le ministère de la Justice, qui a quand même ceci d'assez paradoxal. On se fonde, en particulier, sur ce document et, justement, on constate que l'une des conclusions de ce document est que la présence d'un seul patrouilleur par auto-patrouille ne devrait pas être une question d'économie, que c'est à ce moment un faux principe que de parler d'économie en cette matière.

Donc, lorsqu'on parle d'économie dans ce domaine, je pense qu'on fausse peut-être un peu le débat qui nous confronte, débat que nous avons ramené à une question de sécurité et à une question d'efficacité policière, tout en tenant évidemment compte de la protection et de la sécurité du citoyen. C'est dans ce contexte et je pense qu'on ne peut pas parler de droit nouveau en ce qui concerne cet aspect de la sécurité au travail.

M. Bellemare: Vais-je avoir une réponse à ma deuxième question?

M. Richard (Raymond): Immédiatement.

M. Bellemare: Qu'est-ce qui arrivera si le gouvernement n'agrée pas votre requête d'avoir deux patrouilleurs 24 heures par jour? Qu'est-ce que vous faites par la suite?

M. Richard (Raymond): Je vais vous répondre, et quand vous dites: Pourrait-on avoir une réponse honnête? Cela sera la chose la plus facile pour l'association, parce qu'on n'a seulement qu'un défaut, et c'est d'être trop francs et trop honnêtes. On dit souvent que l'honnêteté ne paie pas. Nous croyons à l'honnêteté.

Nous nous sommes présentés à la commission parlementaire avec un dossier et nous avons comme politique à l'association d'essayer d'aller en profondeur, et lorsqu'on fait l'étude d'une clause, on présente quelque chose de complet.

Je pense que l'association a présenté un dossier complet aux membres de la commission parlementaire.

Qu'est-ce qui va arriver? Il n'y a pas de cachette dans cela. On l'a dit un peu partout et je le répète. L'assemblée générale spéciale est ajournée jusqu'au moment où nous allons voir les recommandations de la commission parlementaire de la justice. A ce moment, nous allons retourner devant nos membres en assemblée générale et les décisions viendront de la base, de nos membres. C'est ce que notre constitution nous permet de faire.

On n'a jamais négocié le couteau sous la gorge. On n'aime pas non plus qu'une autre partie négocie en essayant de mettre le couteau sous la gorge des représentants de l'association, et il n'y a aucun problème de ce côté.

A une question à laquelle nous avons répondu ce matin: Quelle a été l'attitude des représentants de l'association au cours de l'assemblée générale spéciale? J'ai répondu — et je pense que c'est bon de le répéter — que nous avions informé le ministre de la Justice que l'association ne s'engageait à aucun moment, étant donné que les offres pour les représentants n'étaient pas suffisantes, à recommander à l'assemblée les dernières offres du ministre de la Justice.

Par contre, par souci d'honnêteté et pour vouloir également éviter la grève, parce qu'on pouvait s'attendre au pire. En tant que président de l'asso-

ciation, après avoir pris des informations auprès de mes conseillers, auprès des membres du conseil de direction, nous avons tout de même recommandé ces dernières offres aux membres, les offres qui ont été refusées. Cela, c'est pour vous montrer la position des représentants de l'association face à l'assemblée générale des membres et cette position, ce revirement de dernière heure... Et je le dis même si je n'avais jamais, en aucun temps, informé le ministre que je recommanderais ces offres; afin d'éviter le conflit qui a duré sept jours, on les a tout de même recommandées à l'assemblée générale. Je ne sais pas si cela peut répondre à votre deuxième question.

M. Bellemare: Pas tout à fait. En vertu du Code du travail, aviez-vous le droit de grève?

M. Richard (Raymond): Non, nous n'avons pas de droit de grève. Les membres ont été informés de leurs droits par notre conseiller juridique, mais malgré que les membres n'avaient pas le droit de grève, vous avez vu la décision: ils ont décidé de demeurer à Drummondville, parce que c'était une question extrêmement importante et qu'ils voulaient avoir un règlement dans les plus brefs délais.

M. Bellemare: Est-ce que vous approuvez cela?

M. Richard (Raymond): Non, je viens de vous dire que l'exécutif de l'association en aucun moment n'a approuvé la grève et on a même poussé jusqu'à recommander les dernières offres du ministre afin d'éviter cette grève et de laisser à la population la protection de sa police dont elle a besoin.

M. Bellemare: Et si votre assemblée générale n'était pas satisfaite de la décision que va prendre le gouvernement à la suite des journées d'étude qui sont faites à la commission parlementaire, est-ce que vous seriez prêt à recommander les recommandations du gouvernement?

M. Richard (Raymond): Ce que nous allons faire, nous allons continuer d'être honnêtes, nous allons continuer de dire à nos membres la vérité. Nous allons leur dire de quelle façon on a travaillé à la commission parlementaire, quels dossiers on a présentés devant cette commission, de quelle façon les membres de la commission nous ont reçus — avec attention, beaucoup de questions et qu'ils ont étudié en profondeur la question — et à ce moment-là, c'est a eux de décider.

M. Bellemare: Alors là on arrive, maintenant que cela est tranché, à la question de la grille. Il fallait toujours que j'aie un préambule. Mon préambule étant fait, je voudrais savoir de Me Barré, qui a présenté la grille de l'association.

M. Barré: C'est-à-dire, pour replacer la grille encore une fois...

M. Bellemare: Je le sais. Je l'ai entendu quelquefois. Vous allez me répéter que ce sont les patrons qui vous ont soumis une grille.

M. Barré: C'est cela.

M. Bellemare: De cela, vous en avez établi une autre. Qui a établi l'autre et qui l'a présentée?

M. Richard (Raymond): C'est l'association, si vous me permettez.

M. Bellemare: C'est l'association qui l'a étudiée.

M. Richard (Raymond): Les neuf points que vous avez sur notre grille, c'est l'association qui a présenté cela au comité paritaire et conjoint, suite aux démarches avec le ministre de la Justice.

M. Bellemare: Si c'est l'association qui l'a présentée, c'est parce qu'il y a eu quelqu'un qui l'a pensée, qui l'a écrite et qui l'a comparée.

M. Richard (Raymond): Oui, suite aux négociations avec le ministre de la Justice; à ce moment-là, on est allé dans le sens de nos discussions.

M. Bellemare: Qui l'a pensée, qui l'a écrite, qui l'a discutée.

M. Richard (Raymond): C'est l'association.

M. Bellemare: D'accord. Alors, je vous ai fait dire, l'autre jour, que c'était simplement sur une question d'interprétation que vous ne vous entendiez pas.

M. Richard (Raymond): C'est plus que cela, d'après les...

M. Bellemare: Vous m'avez dit, quand je vous ai interrogé sur la grille... Je vous ai cité les articles du patron, de la Sûreté du Québec, point par point, je les ai comparés un par un, et c'est exactement la même pensée, c'est exactement la même proposition, seulement interprétée par vous différemment. C'est l'interprétation qui est différente.

M. Richard (Raymond): D'après les textes, la grille présentée au comité paritaire et conjoint par la Sûreté du Québec est plus restrictive et les explications vous ont été données en plus par notre conseiller juridique.

M. Bellemare: J'admets cela, et vous admettez cela.

M. Richard (Raymond): Que la grille est plus restrictive? Oui.

M. Bellemare: Plus restrictive. Cela veut dire que si le gouvernement ne vous accordait pas ce

que vous demandez, vous pourriez continuer à discuter avec la Sûreté du Québec pour qu'elle soit moins restrictive.

M. Richard (Raymond): De toute façon, actuellement...

M. Bellemare: Non, est-ce que c'est ça?

M. Richard (Raymond): Oui, on continue les démarches auprès de la Sûreté du Québec pour...

M. Bellemare: Pour vous entendre.

M. Richard (Raymond): ... la négociation de la grille, c'est évident, que ça continue, indépendamment des recommandations de la commission parlementaire.

M. Bellemare: Bon, bon d'accord. C'est ça que je voulais vous faire dire. Très bien, très bien.

M. Richard (Raymond): Sans hésitation.

M. Bellemare: Vous continueriez vos discussions pour en arriver à une entente d'interprétation. D'accord?

M. Richard (Raymond): On continue actuellement, d'accord.

M. Bellemare: C'est parfait, vous allez finir par vous entendre, vous n'êtes pas loin.

Alors je dis une autre chose: que dans la grille, il y a de l'interprétation, comme dans toutes les conventions collectives de travail. Vous ne serez pas capables d'avoir le consensus général à 100%, c'est impossible. Me Barré, qui avez fait du droit ouvrier, vous qui êtes président de l'association, vous savez qu'on ne peut pas tout gagner dans une convention collective, c'est impossible. On fait souvent un pas, pour en faire deux en arrière, mais pour en gagner un pour l'autre convention. C'est de même que ça fonctionne, je pense bien, j'imagine que c'est ça. En tout cas.

Il y a une chose qui reste sûre, c'est que vous avez gagné beaucoup depuis quelques années, vous autres, l'association, n'est-ce pas?

Vous avez gagné beaucoup parce que vous avez restructuré l'association qui est aujourd'hui une force, indépendamment de ce que peut en penser Pierre, Jean, Jacques? L'association, vous n'auriez pas fait venir les gars pendant six ou sept jours à Drummondville, il y a quelques années... Parce qu'ils n'étaient pas aguerris...

M. Richard (Raymond): Trois jours en 1971.

M. Bellemare: ... à la syndicalisation comme ils le sont. C'est un gain. Il y a une espèce de syndicalisation qui s'est faite, un consensus entre les membres, qui se tiennent. A partir de là, vous avez une force. Mais il ne faudrait pas outrepasser le droit qui vous est donné en vertu de cette force. Il y a une chose qui reste sûre, c'est qu'il y a aussi des devoirs. A chaque droit que vous obtenez correspond un devoir vis-à-vis de la société en général. Ce devoir, nous qui avons peur de la police, on regarde ça, quelle sorte de devoir faites-vous? Des fois, quand vous ne le faites pas, on est porté à vous critiquer. Il ne faut pas penser que parmi la population, je vais vous dire quelque chose que vous n'aimerez pas, que Dieu me protège contre la police, mais le geste qu'a posé le ministre de tenir fermement, je l'ai approuvé... Je l'ai approuvé, que ça vous déplaise ou non, je l'ai approuvé.

Parce que si le ministre, qui est l'autorité, commence à céder, même avec des arrangements en-dessous de la table, ça n'ira pas loin. Parce qu'il est obligé, demain, d'être le ministre de la Justice pour tout le monde. Comme il est le ministre de la Justice pour tout le monde, il est surtout le ministre de la police. Je ne dis pas ça parce que je veux en faire, comme en France, un ministre...

M. Barré: Un ministre de l'Intérieur.

M. Bellemare:... de l'Intérieur, parce que c'est trop dangereux.

Mais je dis qu'il doit avoir un oeil bienveillant, mais assez juste sur vos activités et le respect que vous apportez à l'exercice de vos droits, mais particulièrement à l'exercice de vos obligations et de vos devoirs. Je pense que c'est ici qu'il faut se dire ça. Je trouve que vous êtes allés un peu loin. C'est forcer un peu la note, parce que parmi la population, je peux vous dire, comme vieux politicien, il y a des gens que vous avez perdus, que vous aviez pour vous autres.

La philosophie du trottoir, je connais cela. J'écoute, et vous avez perdu des notes. Il ne vous faudrait pas perdre des notes. Il faudrait que la police reste toujours un ostensoir, comme le disait la police, l'ostensoir vivant. Il ne faudrait pas que vous déméritiez vis-à-vis du peuple. Que la convention collective vous accorde certains privilèges, droits, prérogatives, d'accord. Pour vous protéger, protéger vos familles, individuellement, sécurité au travail, bénéfices marginaux qu'on accorde dans toutes les conventions collectives, vous y avez droit.

Mais, par exemple, que celui qui a la responsabilité de faire respecter la loi, qui arrive avec un gros livre et qui dit: Monsieur, c'est la loi. Le gars dit: Monsieur, vous ne la pratiquez pas, vous. Il ne faut pas vous exposer à cela. Qu'est-ce que cela va valoir demain matin, dans l'ensemble de la population, si tout le monde se met à rire d'une police?

Vous savez que vous êtes costumés, cela protège énormément. Je l'ai dit au président de l'Assemblée nationale, quand il s'est déshabillé et qu'il s'est mis en queue de chemise, je lui ai dit: Cela n'a pas de bon sens. Les policiers ne font pas cela. Les "brakesmen", comme moi, on ne se déshabille pas. On garde notre uniforme, c'est un signe d'autorité. Hein?

Quand on voit arriver dans une maison un policier avec une casquette, on ne lui demande pas combien il pèse. On dit: Où est-ce qu'il va? A partir

de là, l'autorité que vous possédez, d'une manière légale, il ne faudrait pas que vous la miniez par des sorties tumultueuses, par des gestes contre nature. Quand vous faites des démonstrations publiques dans la ville de Montréal et que la police sort tout ce qu'elle a de sirènes et d'échelles, ce n'est pas bien beau. Quand, pendant sept jours de temps, vous bravez la loi et que vous dites: Le ministre, viens ici, le ministre! Viens ici, devant nous autres! C'est nous autres qui allons... Attends un peu, toi, une minute!

Vous n'avez pas à demander cela à un ministre élu... Qu'il soit de la couleur qu'il voudra, que vous l'aimiez ou que vous ne l'aimiez pas, il est ministre. Il est assermenté pour faire respecter la loi et vous faire reconnaître vos droits, mais aussi, vos devoirs. Sur cela, je le félicite. Que vous l'aimiez ou que vous ne l'aimiez pas, que vous aimiez cela ou que vous n'aimiez pas cela, je vais le dire. Il a bien fait de faire respecter la loi et vous n'avez pas fait avancer votre cause d'un pouce. Non. Vous aviez bien des occasions de faire valoir votre...

Il y a un tribunal du travail, à Montréal, où il y a des juges spécialisés en droit ouvrier. Ils sont à votre disposition, bien plus que le gouvernement, pour prendre une décision. Vous avez le droit de vous adresser au tribunal du travail pour faire juger votre cause. Ils sont des spécialistes, ils ne font que du droit ouvrier. Ils n'ont pas autre chose à faire que de s'occuper des relations patronales-ouvrières et des griefs et de tout ce que peut comprendre le Code du travail.

Vous êtes allés... Non, non, je n'aime pas cela et je vous le dis. Que vous m'aimiez ou que vous ne m'aimiez pas, je vais sortir tout à l'heure et j'aimerais bien que personne ne m'accroche. S'il y en a un qui m'accroche, je vous le dirai, M. le Président.

Je termine en vous disant ceci...

M. Richard (Raymond): Vous n'avez pas à être inquiet. J'ai pris bonne note qu'on peut vous consulter au besoin pour avoir des conseils.

M. Bellemare: Oui. Si vous m'aviez invité à Drummondville au lieu d'inviter le ministre, j'y serais allé et je vous aurais dit que vous faisiez mal. J'aurais dit! Vous faites mal, ce n'est pas comme cela qu'on doit le régler.

M. Richard (Raymond): J'espère que vous ne nous incitez pas à faire une autre grève pour avoir l'occasion de venir à Drummondville.

M. Bellemare: Non, je ne suis pas masochiste.

M. Richard (Raymond): M. le Président, ce qu'on peut ajouter, c'est que, pour l'association, c'est assez simple. Ce que nous désirons, c'est que, quand on négocie au comité paritaire et conjoint, on nous entende, qu'on nous écoute et qu'on essaie vraiment de chercher les solutions aux problèmes. Il y a toujours des solutions. Il s'agit de ne pas laisser pourrir les conflits et j'es- père — nous avons eu, j'appelle cela un bingo en 1971; le deuxième a été en 1977 — que cela va être une leçon pour les parties en cause et qu'on va en tirer profit.

L'association ne s'attend pas à avoir gain de cause sur tout. Nous connaissons ce qu'est la négociation. Nous ne pouvons pas obtenir 100%. Ce que nous désirons obtenir, c'est une entente raisonnable. Sur la clause de sécurité, deux membres sur la relève de jour nous apparaît et apparaît aux yeux de nos membres une entente raisonnable.

M. Bellemare: M. le Président, je me raisonne, comme j'ai essayé de raisonner tous les gens qui sont venus devant moi dans des conflits patrons-ouvriers. Eux autres aussi avaient les mêmes bonnes dispositions. Ils disaient: On va se rendre à votre décision, M. le ministre. Quand la décision était rendue, je vous garantis que, quand on fermait la porte, j'entendais une bouillabaisse pas ordinaire.

M. Richard (Raymond): C'est peut-être normal un peu dans les...

M. Bellemare: Normal, oui.

M. Richard (Raymond): ... minutes qui vont...

M. Bellemare: Cela va être normal aussi chez vous.

M. Richard (Raymond): On verra. M. Bellemare: On l'a déjà vu. M. Richard (Raymond): On verra.

M. Bellemare: C'est pour cela que je veux prévenir, pour qu'il n'y ait pas une autre grève. Vous m'avez dit: Non, il n'y en aura pas.

M. Richard (Raymond): J'informerai mes membres que vous n'aimez pas cela.

M. Bellemare: Non, mais, s'ils veulent me voir, je vais y aller. Le ministre n'a pas d'affaire à cela.

M. Richard (Raymond): Je vous enverrai une invitation pour l'assemblée générale.

M. Bellemare: Le ministre n'est pas un négociateur. Nous autres, vous ne nous avez pas invités; lui, il est allé jusque dans la cour pour essayer de trouver quelqu'un qui l'invite et personne ne l'a invité.

Une Voix: Personne ne l'a reconnu!

M. Bellemare: Peut-être. Je n'ai pas osé me montrer, ils m'auraient reconnu tout de suite. Bref, c'est pour vous dire ceci: II y a des choses.

Le Président (M. Bertrand): La grille.

M. Bellemare: Comment? La grille, ah oui!

Le Président (M. Bertrand): La grille.

M. Bellemare: Je voulais vous prévenir que celui qui a apporté l'argument, ce matin, qu'il faut être deux, parce qu'on peut corrompre l'autre, ce n'est pas bien bon dans la police. Il y a quelqu'un qui a amené cela ce matin. Il y a quelqu'un qui a dit: Je trouve que deux, cela va être plus difficile à corrompre qu'un. La police ne mérite pas cela. On n'a pas le droit de dire que le policier pourrait être corrompu s'il était tout seul. Ce n'est pas un argument. Ecoutez-moi. Il y a un monsieur, ce matin, qui a apporté cela comme argument. Il faut qu'il y en ait deux, parce que cela va être plus difficile a corrompre. Ne m'apportez pas cela ici, cela n'a pas de bon sens. Ce n'est pas un argument. On n'en demande pas deux, parce qu'ils seront plus difficiles à corrompre. Les policiers doivent être choqués d'avoir entendu cela ce matin. Ils doivent commencer à se demander: Qui a dit cela?

A partir de là, ne m'apportez pas cela comme argument, ce n'est pas bon. Les policiers méritent une certaine protection, d'accord, pour leur famille, pour assurer une certaine efficacité, mais il y a une chose qui reste sûre, c'est qu'il y a, dans la police... Je pense que le ministre est bien disposé à apporter une réorganisation des cadres de la police. Je pense que, sur cela, il va avoir raison, parce qu'il y a un grand mal qui se produit depuis quelques années. Il y a une multiplication de cadres, de gens qui ont des médailles. C'est trop; c'est clair?

Il y a une restructuration à faire dans la police pour que les vraies responsabilités soient véritablement décernées à ceux qui sont capables de les porter, pas ceux qui chaussent des sept et un quart, des sept et trois quarts, et qui prendraient des six, sept ou huit, parce qu'il y en a qui marchent avec des talons hauts dans la police, vous savez.

Ce n'est pas du droit nouveau, vous ne ferez pas de grève nouvelle. Vous allez demander à vos membres, même si le gouvernement vous le refusait, et si les recommandations ne faisaient pas votre affaire, vous allez recommencer avec bonne foi à renégocier la grille. Vous êtes à deux pas de vous entendre. Il n'y a presque rien, sauf qu'on aurait été privé de votre visite. On n'aurait pas eu votre visite, c'est sûr. On aime bien mieux vous avoir, parce qu'on s'est instruit et on a appris beaucoup de choses. Maintenant que votre visite est faite, et si les recommandations ne sont pas ce que vous pensez, je vous encourage fortement à renégocier la grille. Il ne manque pas grand-chose, quelques petites interprétations, pas grand-chose. Aux neuf conditions que vous avez mises, la Sûreté du Québec en a ajouté une supplémentaire que vous n'avez pas et qui est bien plus large que la vôtre, quand elle dit dans le quatrièmement: "Dans d'autres circonstances, le policier..." etc., c'est bien plus large, c'est une clause qui peut couvrir bien des... Oui, cela peut être omnibus et cela peut être autobus.

M. Barré: Si M. le Président me permet, je pense que le député de Johnson vient de faire une analyse du conflit. Evidemment, nous n'étions pas venus ici dans l'intention de faire une analyse du conflit qui a pu précéder notre venue à la commission parlementaire. Nous avons voulu, devant cette commission parlementaire, faire un exposé du problème qui a donné lieu au conflit. Le problème sur lequel cette commission est appelée à se prononcer, consiste donc à savoir si deux patrouilleurs doivent patrouiller ensemble dans le même véhicule sur la relève de jour. C'est la demande de l'association. C'est ce que nous avons tenté tout au cours des différents mémoires de justifier. Par ailleurs, quand le député de Johnson mentionne que nous aurions pu faire appel au tribunal du travail ou au mécanisme prévu dans le Code du travail pour régler le problème, je me permets, à titre bien amical, de souligner au député de Johnson que l'association ou que les membres de la Sûreté du Québec ne sont pas régis par le Code du travail. Ils sont régis par une loi spéciale et, donc, les mécanismes prévus par le ministère du Travail ne sont pas d'application dans le cas qui nous occupe. Par ailleurs, il ne faut également pas perdre de vue que, le 5 avril, au moment où les négociations se déroulaient au comité paritaire, les représentants de l'association ont été convoqués au bureau du ministre pour en discuter avec le ministre de la Justice, à Québec, ici même, à ses bureaux. C'est ce que nous avons fait. Les événements ont pris la tournure que vous connaissez, par la suite. Maintenant, une fois qu'on a fait l'analyse de cette situation, des événements, il faut tenter de trouver la solution. Quand vous dites qu'à partir de la grille, les deux parties sont près d'un règlement, je pense que vous oubliez peut-être un point essentiel de toute l'affaire, c'est que la fameuse grille ne couvre qu'une partie du travail du patrouilleur. Nous avons voulu faire ressortir qu'effectivement, le patrouilleur ne se bornait pas uniquement à répondre aux appels. Cela constituait peut-être une partie de son travail, mais il y a quand même une autre partie qui est un travail de vérification, qui est un travail de surveillance, qui est un travail de prévention, qui n'est pas couverte par la liste en question. C'est l'une des raisons pour lesquelles cette liste nous est toujours apparue et nous apparaît encore comme une solution non adéquate dans les circonstances, parce qu'elle ne règle pas le problème.

Le Président (M. Bertrand): M. Masse a demandé de répondre.

M. Masse: M. le Président, je veux simplement faire une remarque suite aux propos du député de Johnson. C'est moi, ce matin, qui ai parlé de corruption. Je constate, une fois de plus, que je me suis mal exprimé. Je vais essayer de vous expliquer de nouveau ce que je voulais dire ce matin.

J'ai parlé de corroboration à la cour et de corruption. Or, j'ai dit qu'il était très important pour les policiers, quand ils sont deux, de corroborer à la cour les événements dont ils ont été témoins, dont ils ont eu connaissance. Quand j'ai parlé de corruption, je n'ai pas parlé de corruption dans le

sens que c'était plus facile de corrompre un policier quand il était seul. J'ai parlé dans le sens qu'il y a un crime dans le Code criminel qui s'appelle la tentative de corruption d'un agent de la paix, et quand un policier est seul, il ne peut pas arrêter les personnes qui tentent de le corrompre, tandis que, quand ils sont deux, ils le peuvent, parce qu'il y a corroboration. C'est dans ce sens que j'ai parlé de corruption et non pas dans le sens où les policiers sont plus corruptibles que d'autres. C'est une simple remarque que je voulais faire.

M. Bellemare: Peut-être que votre remarque de cet après-midi complète plus votre idée, parce que, ce matin, on a des copies, à la commission parlementaire, de votre propos, et ce n'est pas tout à fait dans ce sens.

M. Masse: C'était possible que je me sois mal exprimé. Cela m'arrive assez souvent.

M. Bellemare: Bien, nous autres aussi, ça peut nous arriver.

M. Bédard: C'est pas mal propre à nous.

Le Président (M. Bertrand): A l'ordre! M. le député d'Anjou, sur la grille, toujours.

M. Johnson: Oui, toujours sur la grille, mais au sens restreint.

M. Lavoie: Sur le gril.

M. Johnson: Non pas sur le gril, comme je pense qu'on a vu. D'abord, je voudrais vous dire mon appréhension devant la possibilité qu'on en vienne à inclure dans une convention collective des dispositions qui, quelle que soit la façon de les formuler, risquent, par essence, d'être restrictives. A vouloir trop inclure, je pense qu'on exclut également. Evidemment, ce n'est peut-être pas faire un acte de foi, mais ceux qui prennent les décisions concernant la patrouille à deux, au moment où on se parle, c'est-à-dire aux heures de jour, on peut présumer de leur compétence à priori, on peut présumer de leur bonne foi, de leur jugement, de leur intelligence. Moi, j'aime toujours mieux que, dans des circonstances aussi importantes que celles-là, qui touchent la sécurité publique, de la même façon que ça s'applique, à mon avis, dans le secteur de la santé et également dans le secteur de l'éducation, j'aime toujours qu'on s'en remette au bon jugement plutôt qu'à l'intelligence des individus et pas seulement a un texte.

Je vais simplement faire un parallèle rapidement avec ce qu'on retrouve dans le secteur de l'éducation, quand on voit que certaines écoles sont régies par des conventions collectives qui, en plus de la brique de la négociation provinciale, qui a 200 pages comportent jusqu'à 500 et 600 clauses au niveau local. C'est à se demander s'il reste du temps, quand on regarde une convention collective, pour que les gens puissent éternuer. Cela, je dois dire que ça me violente un peu, l'idée que ce vers quoi on se dirige, c'est l'inclusion possible, dans un texte de convention collective, de situations précises où il y aura deux policiers, dans la mesure où je ne veux pas présumer de la décision du ministère suite aux recommandations de cette oommission, et dans la mesure où ne seraient pas accordés les deux policiers 24 heures par jour.

C'est une remarque préliminaire sur la grille. Quant aux éléments spécifiques de cette grille, j'ai compris — et c'est cela, encore une fois, le danger d'un texte plutôt que d'une chose qui relève, par exemple, d'une directive, qui passe par un comité paritaire, etc. — qu'on parle de policiers à deux dans le cas des vols à main armée, dans la mesure où on est encore dans la commission du fait.

On répondait tout à l'heure: Oui, mais comment aura-t-on l'assurance qu'il n'y aura plus là de voleur qui soit armé? Je comprends cela dans le sens que nécessairement dans le cas d'un vol à main armée ou si c'est encore en train de se faire, il y aura deux policiers, ce qui n'exclut aucunement que dans d'autres cas, il puisse y en avoir et c'est comme cela quand on conçoit un texte bien plus comme une espèce de grande balise et non pas comme quelque chose de restrictif.

De la même façon, cela m'apparaîtrait — et je pense que la plupart d'entre vous seriez d'accord là-dessus — un peu inconcevable qu'on dise, chaque fois qu'il y a eu une querelle de ménage... On sait que lors des querelles de ménage, c'est là, aux Etats-Unis en tout cas, qu'un fort nombre de policiers est tué parce que souvent, il y en a un des deux qui est armé, ou qui a une arme offensive quelconque. Chaque fois que madame X de la rue Y a une mauvaise passe avec son mari et que le mari part en claquant la porte et que madame X décide d'appeler les policiers, je ne sais pas si par définition, il faut se dire qu'il faudrait qu'il y ait deux patrouilleurs, mais par définition, je pense que si, effectivement, il y a une querelle en cours, il faudrait qu'il y ait deux patrouilleurs.

Je comprends qu'on ne passera pas les neuf points de la grille plus le paragraphe 4a que vous suggèrent si je comprends bien, le ministère et la Sûreté du Québec, mais je veux seulement évoquer cette difficulté profonde que je ressens à accepter la notion, pour une chose aussi importante qu'est la sécurité du policier dans des circonstances précises où personne ne met en doute la nécessité qu'il y ait deux policiers, qu'à un certain moment, parce que le climat des relations de travail n'est pas très bon, quelqu'un se mette à appliquer, un texte de façon intransigeante.

On a vu ce que cela donnait dans le secteur de l'éducation, récemment. Je l'ai vécu, entre autres, dans mon comté, et je vous mets en garde contre cela, si je peux me permettre de le faire. Je n'ai pas le bonheur d'avoir 32 ans d'expérience, comme le député de Johnson, mais j'essaierais de vous traduire cette volonté, je pense, et celle de la majorité des membres de cette commission, j'en suis sûr, de ne pas voir ce problème, s'il n'est pas réglé dans le sens où vous le demandez, c'est-à-dire deux policiers 24 heures par jour, donc à la relève de jour incluse... Si ce n'est pas réglé dans ce sens, j'espère que la solution ou le compromis auquel vous arriverez avec la Sûreté n'aura pas

une nature trop légaliste, trop juridique avec des rafistolages qui vont faire qu'à un moment donné, cette grille va être un volume de 230 pages.

Je pense que l'exemple des policiers ontariens est peut-être un exemple dans ce sens où cela est conçu sous forme d'une directive mais accepté de façon mutuelle dans un contexte où les gens sont capables de se parler, de s'entendre en gros sur les choses, où il n'y a pas cette notion de conflit constant. J'écoutais l'un d'entre vous tout à l'heure, avant cette séance, évoquer le fait qu'en Ontario — et c'est peut-être typique des Anglo-saxons en général — la notion de ce qu'est une contestation policière est fort différente. On évoquait le fait qu'à Toronto, je crois, ou à l'OPP, il y a eu effectivement un ralentissement de travail qui a duré trois semaines, mais que cette manifestation de ralentissement consistait essentiellement pour les policiers à retirer leur képi à bord des voitures. Je pense qu'ils ont peut-être prouvé ce qu'ils voulaient prouver, qu'ils ne suivaient pas le code qui dit qu'un policier doit porter tout le temps son képi, mais je ne suis pas sûr que cela a mis en branle et menacé la sécurité publique, que cela a cristallisé des positions et que cela a amené des gens à prendre des décisions en dernier recours, avec le couteau sur la gorge, dans un sens ou dans l'autre.

C'est une chose qui n'est pas typique seulement à la Sûreté du Québec, mais à la Sûreté du Québec, ce qui s'est passé — et là-dessus je n'entends pas revenir comme le député de Johnson l'a fait — c'était peut-être un peu un symptôme de ce problème dans nos relations de travail au Québec. Je pense que c'est un symptôme de ce qui se passe dans notre société. Il y a une tendance à cristalliser les positions, à ne jamais accepter à peu près, qu'il y ait de la place pour un compromis. Et un compromis, par définition, c'est un compromis. Cela ne peut jamais être entièrement satisfaisant, mais il faut qu'au-delà de ces compromis on sente qu'il y a une espèce d'entente commune, quant à certains objectifs généraux, que les gens ne s'enfargent pas dans les virgules comme on l'a fait au Québec dans le secteur de l'éducation où toute la négociation est devenue une affaire de virgule et, en toute déférence envers Me Barré, est devenue une affaire d'avocats.

On se demande, à un certain moment, si on n'est pas un peu loin de la réalité. Je vous mets en garde, à la Sûreté du Québec, et j'espère, que vous ne tomberez pas dans ce panneau. J'espère aussi que la Sûreté du Québec, l'organisme qui vous engage, le ministère de la Justice, ne tombera pas non plus dans ce travers.

Je peux vous assurer, pour ma part — je présume que je serai probablement un des derniers à vous questionner aujourd'hui — que je m'engage à questionner longuement les gens de la Sûreté du Québec. Vous m'avez ébranlé quant à certaines choses, je vous l'ai dit la semaine dernière. J'entends obtenir des réponses satisfaisantes, à mes yeux et aux yeux de cette commission, sur ce qui touche la sécurité des policiers le jour et particulièrement sur les hommes qui patrouillent seuls dans certains territoires, particulièrement ceux de vaste étendue, sur la question des communications, sur la question du mode d'appréciation, non seulement des gestes précis à poser, à savoir la signification d'une procédure pour acte criminel, mais également sur la notion: Est-ce qu'il n'y a pas des territoires qui devraient être soumis à un régime particulier? Je m'engage à obtenir ces informations de la Sûreté et je vous invite à rester, d'ailleurs, pour cette soirée, peut-être demain, je ne sais pas, pour voir également comment on procédera avec la Sûreté du Québec.

En terminant, je réitère ce qui était mon propos au début de cette intervention. Pour l'amour du ciel, ne tombez pas dans le panneau du secteur parapublic classique, des affaires de virgules, pas sur une affaire aussi importante, aussi majeure et aussi essentielle que la sécurité de vos collègues et la sécurité publique.

M. Barré: Je pense, M. le Président, que l'association n'a pas fait de ce débat une question d'avocasserie. Je présume que ce n'est pas ce que le député d'Anjou a voulu mentionner. Je pense que nous avons voulu vous étayer, vous présenter un mémoire basé sur des faits, et, lorsque nous vous avons indiqué qu'à notre point de vue, la grille soumise se révélait inadéquate, nous vous avons indiqué les éléments, les raisons pour lesquelles, à notre point de vue, cette grille pouvait être une solution inadéquate. Pas sur une question de points ou de virgules, mais sur une question d'interprétation ou sur une question d'application. Je suis d'accord avec le député de Johnson lorsqu'il dit qu'une liste trop restrictive peut causer des problèmes. C'est justement la raison pour laquelle cette liste nous apparaît inadéquate, parce qu'elle va soulever plus de problèmes qu'elle peut apporter de solutions. Dans la recherche d'un compromis, tous, on réalise qu'il faut peut-être tenter de trouver un compromis, mais pour autant qu'il apporte une solution valable, adéquate au problème qui se pose.

Si le compromis n'est qu'un paliatif qui ne règle absolument rien, je pense qu'on n'est pas plus avancé après, même si on s'est forcé les méninges pour trouver une espèce de compromis. La question d'interprétation m'apparaît quand même une question importante. Si vous avez un texte qui, parce qu'il n'est pas suffisamment précis, parce qu'il n'est pas suffisamment clair, donne lieu à une interprétation différente, suivant l'endroit ou suivant le poste où on se trouve, je dis qu'à ce moment-là, on n'a pas réglé le problème, on a créé de nouveaux problèmes. On fait face à une situation encore pire que celle qu'on a pu connaître, parce que la situation n'est pas la même, suivant l'endroit ou suivant l'unité où on travaille.

Si on me permet d'ajouter un mot, et cela apparaît au document soumis par la Sûreté, que les représentants de la Sûreté auront l'occasion d'étayer ultérieurement, on se rend compte, déjà à ce moment-ci, que les offres faites par le ministre de la Justice, dès le début, le 5 avril précédant la tenue de l'assemblée, ont déjà fait, de la part des représentants de la Sûreté, l'objet d'interprétations qui s'avèrent non conformes aux faits, à un

point tel que les représentants de l'association ont dû, au niveau du comité paritaire, dénoncer le communiqué émis par la Sûreté et qui est reproduit dans le mémoire que la Sûreté a soumis à cette commission.

Ce que je veux faire ressortir par là, c'est que, déjà, on constate que, dans l'application des offres soumises par le ministre de la Justice, en ce qui concerne la relève de soir et de nuit, il y a des problèmes d'interprétation. Vous vous imaginez un peu dans quelle situation on s'engage si on essaie d'établir un texte qui n'est absolument pas précis. A ce moment-là, on va se retrouver devant un problème. Ce qu'on vise, nous, c'est de régler le problème, une fois pour toutes, à partir de solutions qui peuvent vraiment s'appliquer.

Le Président (M. Bertrand): S'il n'y a pas d'autres interventions...

M. Bédard: II est six heures, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Oui. Mais je voudrais surtout qu'on puisse s'entendre avec l'Association des policiers. Cela fait plus de treize heures que l'on discute entre nous. Je ne sais pas si c'est un record — le député de Johnson pourrait nous le dire — de discuter aussi longtemps avec un même groupe.

M. Bellemare: Non, il y a eu la langue, cela a été plus que cela, avec le bill 22.

Le Président (M. Bertrand): La langue, un même groupe?

M. Bellemare: Avec le bill 22, on a dépassé le record.

Le Président (M. Bertrand): Un même groupe?

M. Bellemare: Oui.

Le Président (M. Bertrand): Simplement pour vous dire que, je pense que tout le monde a voulu témoigner par là de l'importance de la question qui nous était soumise, et nous avons été larges dans l'appréciation de la longueur des interventions pour chacun, autant les députés que ceux qui sont venus témoigner devant la commission.

Je pense qu'à ce stade, tout ce que je peux faire comme président, c'est de vous remercier très sincèrement pour votre excellente collaboration auprès des membres de la commission parlementaire.

M. Girard: En terminant, M. le Président, au nom de l'association et au nom des personnes qui ont témoigné devant cette commission, nous tenons à vous remercier, personnellement, et nous tenons à remercier tous les membres de la commission parlementaire pour l'attention que vous avez portée. Vous nous avez facilité la tâche. Il va sans dire que, maintenant, l'APPQ s'attend — on sait que vous allez prendre ces recommandations sérieusement — que des recommandations se dégagent de cette commission. Merci!

Le Président (M. Bertrand): Les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 h 15. Nous entendrons, à ce moment, le mémoire de la Sûreté du Québec.

(Suspension de la séance à 18 h 5)

Reprise de la séance à 20 h 22

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!

Reprise des travaux de la commission parlementaire de la justice. Nous recevons ce soir le groupe et le directeur de la Sûreté du Québec. Si vous voulez vous identifier et identifier les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît

Sûreté du Québec

M. Beaudoin (Jacques): M. le Président, mon nom est Jacques Beaudoin, directeur général de la Sûreté du Québec. Est-ce que vous m'accordez la permission de parler debout?

Le Président (M. Laplante): Non, assis, monsieur.

M. Beaudoin: Assis. J'aimerais vous présenter les personnes-ressources qui vont m'assister dans la présentation de notre mémoire. En partant de ma gauche, ici, j'ai le directeur général adjoint aux opérations, M. Robert Turpin; à sa gauche, Mme Lorraine Gagnon, bachelière en économie, qui a charge des statistiques à la Sûreté du Québec et qui pourra éclairer la commission quant à la rigueur et à la validité, de même que la fidélité des statistiques que nous vous présenterons ce soir. En plus, j'ai le capitaine Robert Therrien qui est conseiller en enquêtes criminelles.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous pourriez avancer un micro?

M. Beaudoin: D'accord.

Le Président (M. Laplante): Vous l'avez? D'accord.

M. Beaudoin: M. Jean Tellier, qui est le directeur général adjoint au service administratif, en plus de M. Lambert qui est chargé de la planification à ma droite, comme personnes-ressources, M. André Leclair, chef du service d'organisation à la Sûreté du Québec; M. Gilles Michaud, contrôleur général du personnel et des communications, M. Yvan Aubin, chef de la direction des renseignements et d'autres personnes-ressources.

M. le Président, MM. les membres de la commission, au cours des prochaines minutes, je vous ferai, au nom de la Sûreté du Québec, une présentation en marge du débat sur la sécurité au travail qui fut porté devant vous par le ministre de la Justice. Il est assez important, au départ, de situer le problème. D'abord, les demandes syndioa-les nous sont parvenues au mois de décembre, au milieu de décembre, demandes dont la partie principale portait sur les deux hommes qui devaient occuper une voiture 24 heures par jour et dans toutes les fonctions.

La position de la Sûreté, à ce moment-là après avoir fait les études en conséquence, nous laissait croire que dans notre rôle de gestionnaire, en ayant en intérêt la sécurité des membres et égale- ment les deniers publics, nous pouvions consentir les heures d'obscurité, c'est-à-dire une heure après le coucher du soleil et une heure avant le lever du soleil, histoire de se garder une certaine flexibilité par rapport à la période d'été et à la période d'hiver. Finalement, avec les récents événements qui sont survenus, nos offres se sont avérées insatisfaisantes et nous vous démontrerons, au cours de cette présentation, de quelle façon nous avons conseillé le ministre de la Justice pour accorder à notre association et à nos membres ce qu'ils ont eu du ministre.

C'est un peu avec mélancolie et tristesse que je m'adresse à vous ce soir, parce que j'ai l'impression d'être un disciple de Thémis qui plaide une cause de divorce, divorce dans lequel on a au centre du débat 4000 enfants qui sont la Sûreté du Québec, le père, qui est la Sûreté du Québec et la mère qui est l'association. Et malheureusement, je pense que personne d'entre nous n'y gagne quoi que ce soit.

Nous vous remettrons, M. le Président et messieurs les membres de la commission, immédiatement, un mémoire en deux volets. Le premier volet, volume bleu, vous sera résumé dans mon exposé. Il traite d'abord de la mission de la Sûreté du Québec, sa description organisationnelle et son fonctionnement, des méthodes et techniques de travail par rapport à la sécurité, des interventions de la Sûreté du Québec, des politiques d'autres corps policiers.

Avant de pousser plus loin, j'aimerais remettre officiellement au président de mon association, un document complet. Malheureusement, je n'ai pas eu celui de l'association. J'ai dû quêter pour l'avoir.

Nous avons encore beaucoup de déférence pour nos représentants du syndicat, parce que ce sont nos membres. Ce sont mes membres et mes policiers.

Le deuxième volet, volume brun, que vous avez en main, comporte une étude exhaustive sur les interventions de la Sûreté du Québec. On y retrouve des graphiques, des schémas et des histogrammes sur lesquels au cours de ma présentation, j'attirerai votre attention, en vous citant la page susceptible de vous intéresser et qui pourra vous illustrer des tableaux que nous vous montrerons, des maquettes que nous vous exposerons en cours de route.

Les personnes qui m'assisteront ont des missions particulières. M. Turpin, à ma gauche, vous parlera, après mon exposé, des techniques opérationnelles et des méthodes de travail.

M. Gilles Michaud, contrôleur général du personnel et des communications, vous parlera de la gestion du personnel à la Sûreté du Québec. Mme Gagnon pourra répondre à toutes vos questions en matière de méthodes quantitatives, quant aux procédés que nous avons utilisés pour tirer les données que nous allons vous illustrer. Il y aura d'autres personnes, au besoin, si la commission le juge à propos.

Depuis le début d'avril, les apparences ont pu laisser croire que la Sûreté du Québec était opposée à ses membres. Vous constaterez, cependant,

dans les textes qui suivent que, pour nous, il s'agit d'une discussion de principe présentée rationnellement et sans émotivité, compte tenu de la mission, des objectifs, des résultats et, par voie de conséquence, invariablement, des coûts que le gouvernement doit assumer.

Le débat relatif à deux policiers par véhicule de patrouille a dégénéré en un arrêt de travail — je ne vous apprends rien de nouveau — immédiatement après la mort de l'agent Brabant.

Règle générale, le recours à la grève est utilisé comme mesure ultime et cette situation résulte de vexations, d'irritation, de ralations de travail déficientes ou encore de lacunes ou de confusion au niveau de l'administration ou de l'organisation.

Je considère essentiel, à ce moment-ci, de souligner que ce n'est pas la situation qui prévaut actuellement à la Sûreté du Québec, à moins que je sois aveugle. Le relations avec l'Association des policiers provinciaux du Québec qui représente maints membres de la Sûreté du Québec se font sur une base professionnelle. On ne couche pas ensemble, mais on dialogue ensemble, dans un contexte sain de relations patronales-ouvrières.

Et je suis assuré que les travaux du comité paritaire et conjoint se sont toujours poursuivis dans un esprit de recherche des meilleures solutions. Dans ce contexte, on aborde donc les problèmes pour les régler et ainsi, des décisions majeures sont venues à terme pendant les douze derniers mois. Mentionnons seulement la première mission que notre syndicat, notre association s'est vu confier; cela a été la négociation de conditions particulières de travail en fonction de la mission olympique et les dispositions relatives à l'application de la semaine de quatre jours modifiée, régime de travail unique au Canada.

Les faits que je vais vous exposer ne sont pas contre l'intérêt de nos membres, c'est pour cela que j'ai tenu à faire la présentation, tout à l'heure au début, mais il y va de ma responsabilité de gestionnaire, d'une part, de continuer à assurer au public une protection valable et, d'autre part, de m'assurer de la sécurité de nos membres. Ce n'est pas seulement la préoccupation d'une des parties. Cela me fait autant de peine sinon plus qu'à n'importe quel autre de voir nos membres tomber sous les balles d'assassins. Ces objectifs ne sont pas incompatibles.

M. le Président, messieurs les députés, je désire ici situer avec précision le débat dans lequel nous sommes tous engagés actuellement, car on oublie trop vite les choses passées. Il y a 20 ans — et ici je ne veux faire aucune allusion aux gouvernements antérieurs — le policier provincial était un individu recevant un salaire équivalant à celui du plus bas niveau des fonctionnaires de l'époque. Quand je me suis joint aux rangs de la Sûreté je gagnais $2000, un commis de bureau gagnait $2000. Notre policier accomplissait sa tâche sans pour autant avoir reçu une formation adéquate. Lors de la réorganisation de la Sûreté du Québec en 1960, que tout le monde se rappelle, parce que c'est à ce moment, je crois, que nous avons commencé à acquérir une crédibilité, les di- rigeants ont insisté sur la revalorisation du policier dans son rôle et dans sa personne. La direction du temps a haussé les salaires des policiers en reconnaissant trois critères: l'intégrité, c'est-à-dire qu'une personne bien payée ne succombe pas à la tentation, n'a pas de double emploi, donc se consacre avec abnégation à sa vocation et à sa tâche; le risque inhérent à sa fonction.

M. Josaphat Brunet, qui fut chargé de la réorganisation de la Sûreté du Québec, dit aux autorités gouvernementales du temps: "Si on veut des policiers responsables, qui accomplissent leur travail, payons-les". Et, en plus la compétence. La compétence, on la lui a donnée. C'est donc dire que, déjà, on a reconnu que la fonction policière comportait certains risques. De part et d'autre, le patronat et l'employé — à ce moment-là, il n'y avait pas de syndicat — ont reconnu, si on peut dire, tacitement, le besoin d'une rémunération en fonction des risques.

Aujourd'hui, ces faits demeurent, on ne doit pas les oublier, même si ça ne plaît pas. En 1977, compte tenu des exigences, le policier, qu'il soit provincial, municipal et même fédéral, reçoit un salaire supérieur à de nombreuses autres professions qui demandent un bagage universitaire qui n'est pas exigé de nos policiers. Par exemple, un procureur de la couronne se verra offrir un salaire de $12 979 annuellement alors que le jeune policier recevra $13 420 et atteindra, trois ans après, $19 000, le salaire actuel.

Si je poursuis mes comparaisons, on verra que le gouvernement du Québec rémunère les comptables agréés à $12 042, les architectes à $12 558 et les ingénieurs à $12 558. On sait que ces professions exigent plusieurs années d'études générales et spécialisées. Par contre, tous savent fort bien qu'elles ne comportent pas de risques. Voilà les faits et la réalité.

Maintenant, passons à l'exposé de la Sûreté.

La Sûreté du Québec est chargée, par l'article 29 de la Loi de police, de couvrir toute la province de Québec — vous retrouvez ce texte en page 1 — maintenir l'ordre, la paix et la sécurité publique. Je vais tenter de vous le résumer le plus possible pour accélérer les travaux de la commission.

Maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, prévenir le crime, rechercher les auteurs des crimes et assister les corps policiers municipaux.

Pour s'acquitter de sa mission, bien entendu, elle possède 107 postes répartis sur tout le territoire du Québec. En regard des corps policiers municipaux existants, en page 2, plusieurs ne peuvent, à cause des contraintes budgétaires, se payer les ressources nécessaires pour avoir la compétence ou développer des enquêteurs spécialisés.

C'est alors que la Sûreté du Québec entre en jeu en les aidant, soit en prenant charge de l'enquête, soit en les assistant dans les crimes majeurs, à assumer leurs fonctions. C'est un peu indirectement ainsi que le gouvernement du Québec contribue à aider les corps policiers municipaux.

De plus, au cours des cinq dernières années, afin de répondre plus adéquatement aux besoins

opérationnels, la Sûreté du Québec a instauré sa structure de mesures d'urgence et d'unités d'urgence. Ceci répond à un besoin de mobilité. Vous savez que, depuis 1970, la plupart d'entre vous ont excessivement frais à la mémoire les événements que nous avons vécus, vous savez qu'on a perturbé la province de Québec, mais que, par la suite, on a vécu des événements tout aussi importants et qu'on ne l'a jamais perturbée par la suite.

Pourquoi? Parce qu'on s'est organisé, en termes de planification, de formation, de groupements d'unités spécialisées, dont la richesse est la composante des ressources humaines qui en font un tout et, en plus, leur entraînement est de nature à les amener à travailler en équipe.

Je fais tout de suite une parenthèse. Ce ne sont pas des unités mobiles. Ce ne sont pas des unités antiémeutes. Ce sont des unités d'urgence dont la mission première est de supporter nos postes sur un plan tactique et je vous expliquerai tout à l'heure comment; d'autre part, c'est pour assumer les missions qui débordent le cadre opérationnel d'un poste. Vous verrez comment un poste est organisé, comment une opération particulière peut venir perturber toutes ces activités. Donc, sans désorganiser le poste, on peut lui fournir, par une mobilité... Je vous dirai pourquoi on a besoin de mobilité au Québec.

D'ailleurs, les derniers Jeux olympiques nous ont permis de vérifier la souplesse de nos mécanismes et du soutien logistique. Ensuite, d'autres unités spécialisées dont je vous parlerai tantôt viennent épauler ces unités.

Il est bien entendu que le volume de travail diffère d'une région à une autre. Je pense qu'à la commission parlementaire, messieurs, vous avez exploré le sujet. C'est entendu que, pour un poste qui couvre 6000 accidents par année par rapport à un poste qui n'en couvre que 300, les risques sont certainement différents, sauf que le volume de personnel est différent aussi.

Si on prend un poste comme Senneterre par rapport à celui de Laprairie, ce sont les mêmes activités, mais en nombre inférieur. Si on prend un poste comme Grande-Vallée par rapport à celui de Rimouski, ce sont les mêmes activités, mais en volume restreint. Si on prend un poste comme Chibougamau en comparaison avec celui de Chicoutimi, c'est encore la même comparaison qui prévaut.

En plus de cela, depuis quelques années, avec la venue de voies rapides périphériques des grandes régions urbaines, à savoir Montréal et Québec, la Sûreté du Québec se voit assumer cette mission de faire la sécurité routière sur les voies rapides dans les périphéries de Montréal et de Québec. Vous avez tous vu l'autoroute Ville-Marie, le boulevard Décarie, le boulevard Métropolitain où nos hommes font un travail de titan. Ils s'acquittent vraiment de leurs fonctions dans des conditions difficiles.

Vous avez également Québec-Métro qui joue le même rôle, sauf qu'avec des voies tout aussi rapides, le volume de travail, compte tenu de la démographie, est beaucoup moins important.

Je pense qu'il est important — on a parlé du temps accordé pour les réponses, du temps accordé pour les interventions — je veux situer le débat dans un contexte réaliste. Il ne faut pas oublier que le Québec, c'est un territoire dix fois plus grand que celui de l'Angleterre, trois fois plus grand que celui de la France; 51 millions de population pour la France; 49,99 millions récemment pour l'Angleterre alors qu'au Québec, on a 6 millions d'habitants répartis sur un territoire dont je vous ai donné les proportions.

Un peu comme disait de Gaulle, toutes choses étant égales, les choses sont ce qu'elles sont. Il faut toujours comparer des pommes avec des pommes et des oranges avec des oranges et non des pamplemousses avec des citrouilles.

La Sûreté du Québec, de façon à bien répondre à la population et aux services qu'elle attend de nous, agit selon des principes directeurs qui guident toutes ses décisions. Ici, cela peut vous paraître un peu idéaliste, mais je m'adresse à vous en tant que gestionnaire responsable d'une mission, mais également avec des deniers que te gouvernement veut bien nous donner.

Il ne m'en donne pas plus qu'il ne m'en demande. Le premier principe directeur, c'est le service au public, en termes d'action versus les besoins de la population. Vous les retrouvez en page 4.

Deuxième principe, l'opération sur une base de 24 heures des postes reliés au réseau routier. Trois et quatre ont une corrélation, l'utilisation du personnel en tenant compte du volume de travail et l'intervention sélective par un processus planifié. Tous et chacun d'entre vous ont remarqué que sur la route 20, vous ne voyez pas souvent d'autos de la Sûreté. Je ne pense pas que vous avez à déplorer tellement de mortalité. Les mortalités surviennent toujours sur les routes secondaires. Donc, nous avons un système de cause à effet, ou à savoir qu'un accident a toujours une cause. Une cause peut être de nature humaine, mécanique, mais dans 90% du temps, ce sont des infractions au Code de la route. Quand on a parlé d'objectifs, l'objectif de la Sûreté... Je ne demande jamais à mes collaborateurs de demander aux agents d'aller faire des infractions, ce n'est pas vrai. C'est le plus grand illogisme qui peut être prononcé. Notre objectif, cette année, c'est de diminuer les accidents et de sauver les vies. Pour faire cela, il y a des infractions qui en sont la cause. On doit rédiger des infractions et faire de la peine à du monde. C'est à peu près la notion de gestion par objectifs.

Nous avons la mobilité pour être en mesure de répondre en tout temps et en tout lieu à la population du Québec, que ce soit un événement sportif, social, ou des manifestations. Vous savez que des conflits ouvriers, on en a vécus pendant les dernières années. J'espère que nous allons continuer cette période de sérénité encore un bon bout de temps, parce que vraiment, c'est peu agréable d'intervenir dans des conflits ouvriers. Vous avez une foule d'événements sportifs au cours desquels nous devons prêter assistance aux corps policiers municipaux. Nous devons aller ai-

der nos postes; en plus de cela, il y a l'unité d'urgence, bien entendu. Je vous ai parlé tout à l'heure d'applications sélectives. Nous avons des études qui se font journellement, de façon à établir la tendance de la prévention du crime. J'ai entendu parler de prévention du crime aujourd'hui. Ce n'était pas tout à fait selon mon concept, c'est vrai que je ne suis pas seul à avoir le pas, par exemple, je vous le dis d'avance. La prévention du crime se fait toujours à partir de tendances qui doivent être identifiées. Ces tendances après que nous les avons identifiées, on prétend qu'une série de vols de chalets qui survient à Saint-Gabriel-de-Brandon, ou dans la région du Lac-Beauport, ou encore à Saint-Ambroise, le poste ne peut pas seul porter une offensive blitz pour l'enrayer. C'est à ce moment que l'unité d'urgence vient prêter son support. Maintenant, le message que je vous livre là est peut-être un message idéal. Je ne suis pas toujours convaincu qu'il est vraiment bien compris en bas, mais on a besoin de faire des ajustements.

Le sixième principe directeur, c'est l'élaboration de plans d'ensemble avec application régionale en tenant compte des particularismes et de l'intensité des problèmes en cause. Qu'est-ce que cela veut dire, cette affaire? Vous avez tous entendu parler de l'opération Alpin. Vous savez qu'il y a eu une recrudescence du sport du ski au Québec et qu'on fait une opération de façon à prévenir les vols de skis. C'est entendu que le poste de Chibougamau, le ski, cela ne le préoccupe pas, ni l'Abitibi. Par contre, le nord des Laurentides, le Lac-Beauport, le mont Sainte-Anne et l'Estrie sont des centres de ski où le particularisme régional joue un grand rôle.

Si je pense à l'opération Auto, qui est une opération où on invite, par une formation intensive, tous nos membres à identifier les autos volées, on sait que le problème d'autos volées dans l'Outaouais est différent, parce que dans l'Outaouais, aller enregistrer une auto volée en Ontario, ça se fait comme ceci, alors qu'au Québec, c'est beaucoup plus compliqué, parce que c'est informatisé. Donc, l'Outaouais, Montréal, Québec sont les centres, et c'est à ce moment-là que le particularisme régional revêt son caractère bien à lui.

Toute la coordination de nos programmes se fait en collaboration avec les corps policiers. Cela ne sert à rien pour nous de courir après des bandits et ne pas le dire aux autres. Je pense que le policier solo a été banni des moeurs depuis déjà plusieurs années et c'est un travail collectif que l'on doit faire. A cet effet, on a beaucoup de collaboration des corps policiers municipaux.

Nous fonctionnons également par objectifs, en respectant les priorités gouvernementales et les contraintes budgétaires. On respecte toujours notre structure fonctionnelle dans toutes les situations. On ne change pas notre structure organisa-tionnelle à cause d'un problème. Il y a une chose qui est assez importante, c'est la conservation de la notion de généralisme chez le patrouilleur en évitant le cloisonnement. Notre patrouilleur, chez nous, on veut que ça soit, si vous me permettez de prendre un terme médical, un médecin généraliste, parce qu'un médecin chirurgien qui n'a jamais fait de médecine générale, quant à moi, va chercher des organes dans lesquels il va se spécialiser. Si on a un policier de médecine généraliste qui ne se concentre pas à distribuer des contraventions et à couvrir des accidents, mais bien à prendre des plaintes du public et à en amorcer son enquête immédiatement, ça, c'est un policier généraliste et on le développe pour devenir spécialiste.

En plus de ça, autre principe directeur, depuis 1970, on a commencé à développer notre personnel en gestion, en formulation d'objectifs et en programmes de travail et dans de multiples autres domaines. Cela couvre un peu la mission de la Sûreté du Québec.

On passe à la page 5, où on a la situation à la Sûreté du Québec. Vous avez ici un graphique que vous retrouverez en annexe 5, où vous avez la structure de la Sûreté.

En 1970, la Sûreté a été réorganisée, et je pense que ça répond assez bien... La Sûreté du Québec a une structure qui est la plus actualiste actuellement, en fonction des désirs gouvernementaux, parce que nous avons une structure superdécentralisée, à savoir que nous avons 107 postes dans le champ et huit régions, bientôt neuf. Cela a été fait en 1970.

Le principe directeur qui prévalait dans ça, c'est que chaque région du Québec a un caractère particulier en termes d'économie, de démographie, de géographie, de volume d'activités policières.

A ce moment-là, c'est de grouper autour du district les postes et les unités spécialisées de façon à permettre au commandant du district, qu'il soit de l'Outaouais, du nord-ouest, de la région métropolitaine ou de Québec, d'avoir à sa disposition tous les outils nécessaires pour prendre l'action là où le problème se pose. Je pense que dans le concept gouvernemental actuel, nous sommes peut-être les premiers à avoir atteint ce stade de décentralisation. Chaque district a son bureau principal dans la capitale régionale.

Maintenant, des 107 postes dont je vous ai parlé tout à l'heure, j'en exclus six qui sont des postes isolés dont on vous a fait mention, les Iles-de-la-Madeleine, Lourdes-de-Blanc-Sablon, Havre-Saint-Pierre, Radisson, La Baleine, Fort-Chimo ainsi que Fermont. Ce sont des postes isolés. Cela ne sert à rien d'y faire des secteurs de patrouille. C'est tout simplement une présence policière que l'on assure.

Nos postes sont organisés pour répondre aux besoins opérationnels d'une région de la province qui a été décortiquée en tenant compte de la population à desservir, du volume de travail, des industries, de la répartition de la population, des voies de communication et des délimitations des districts judiciaires; dans notre opération, les districts judiciaires ont vraiment un rôle important parce qu'un poste qui se ramasse avec deux districts judiciaires, cela cause des problèmes, tant

en temps supplémentaire qu'en déplacement de personnel et cela désorganise tout le fonctionnement harmonieux de nos unités.

Vous ayant donné ce que fait un poste de la Sûreté et c'est par ce moyen qu'on dessert le public, qu'on remplit notre première mission. Ces postes sont divisés en secteurs. On en retrouve 284, 284 secteurs de patrouille dont le nombre varie de un à sept secteurs. Si on prend ces 284 secteurs et qu'avant le 1er avril, on dit: On avait deux hommes par patrouille. On fait l'équation suivante: 284 multiplié par 2 pour la relève, multiplié par 4 à un multiple de 4 pour avoir un homme 24 heures par jour, cela nous donne un certain nombre, sauf que je ne peux plus vous en parler parce qu'actuellement, on est à un multiple de cinq depuis le 1er avril.

Le 1er avril, on avait 284 secteurs de patrouille multiplié par 2 hommes par patrouille, multiplié par 5; 2840 hommes sont requis et, actuellement, on s'acquitte de notre mission avec 2255 hommes.

Ceci ne tient pas compte du fait que notre situation n'est pas idéale. Nous avons des îlots de population, villes dortoirs ou nouvelles agglomérations dortoirs dans la périphérie des banlieues, qui doivent être desservis par nous et on ne peut pas les desservir de façon adéquate parce qu'on devrait avoir dans certains secteurs de patrouille deux ou trois voitures. On n'en a qu'une actuellement.

On a parlé de mobilité d'unités d'urgence. On a parlé également, cet après-midi, du livre blanc.

Le livre blanc nous donnait un rôle, à savoir la mobilité, et je m'en voudrais de ne pas insister. Une province telle que la province de Québec se doit d'avoir des unités tactiques, de façon à assumer les reponsabilités qui débordent du cadre régulier des activités de notre poste.

Si vous avez une course de canots, par exemple la traversée du lac Saint-Jean, cela peut intéresser beaucoup de gens, cela demande environ 150 hommes. Donc, ce n'est pas avec les postes du Saguenay-Lac-Saint-Jean... Si j'envoie les policiers des postes du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il ne me reste plus de monde pour faire la police. Donc, à ce moment-là, je dois piger ailleurs. Il y a la course de canots de La Tuque, là j'en passe, le carnaval de Québec, en plus des conflits ouvriers où, malheureusement, ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on intervient, mais on doit s'en acquitter.

Il est impensable qu'une organisation telle que la Sûreté du Québec ne puisse bénéficier d'une force tactique d'intervention pour pouvoir influencer certaines tendances, tant en matière de sécurité routière que de crimes réguliers. Exemple, le meurtre de notre agent Brabant. Cela a été une activité d'une semaine. Même si on avait fait entrer tous nos gens en temps supplémentaire, ils auraient fait de l'argent en temps supplémentaire, mais auraient-ils donné le service continu, auraient-ils travaillé pendant une semaine constamment et assumé la mission de leur poste? J'en doute. Même si, parfois, on se pose des questions, ces hommes revêtent un caractère important dans la société. Nous avons dédié une revue de la Sûreté uniquement à eux et vous seriez sur- pris de voir les missions humanitaires, parce qu'à la police, nous ne sommes pas là d'abord pour sévir. On est là pour prévenir et pour aider la société. Quand j'ai parlé du premier principe directeur, du service au public, c'est ce que je voulais dire.

Donc, je pense que des réaménagements d'unités d'urgence, tout cela, c'est peut-être de l'économie de bouts de chandelles. Il y a un certain rationnel dans cela, mais je pense que, dans une force déployée comme celle du Québec, après vous avoir fait la comparaison avec des pays où on retrouve un grand nombre de policiers, c'est pas mal difficile d'agir.

Le poste, tel que je vous l'ai dit, est l'unité de base de la Sûreté du Québec et c'est par le poste qu'on remplit notre mandat premier de servir la population, de prévenir le crime, de travailler à la sécurité routière et de répondre aux besoins de la société en général. Ce sont tous les besoins de la société, parce que nous, à la Sûreté du Québec, surtout l'automne ou l'été... Un enfant est perdu, qui appelle-t-on? On appelle la police. Même à des places où il n'y a pas de pompiers, on appelle la police; on dit qu'on n'a pas d'eau et, finalement, on a tellement confiance en nous qu'on nous appelle quand même.

Aux annexes 3 et 4 de votre bouquin bleu, vous verrez, et je me passe de commentaires, la répartition des postes, à savoir le nombre de postes par rapport au nombre de secteurs, etc., pour vous décortiquer un peu les 284 secteurs que je vous ai mentionnés tout à l'heure. A l'annexe 3, vous avez la répartition des patrouilleurs et patrouilleurs-enquêteurs en fonction durant chaque relève. C'est peut-être une charte qui pourra vous servir de réflexion dans vos décisions subséquentes.

On a parlé du rôle de patrouilleur. Des membres de notre association et des membres de la Sûreté sont venus faire des exposés très objectifs sur le rôle de patrouilleur. J'aimerais, à ce stade-ci, vous distribuer un document... que vous avez en main, je crois, qui s'appelle: La fonction de patrouilleur, que vous pourrez parcourir de façon exhaustive. On insiste d'abord sur la tâche à accomplir et on insiste, vous le remarquerez, beaucoup sur les techniques à employer pour bien accomplir la mission. On insiste beaucoup sur la sécurité.

Le district dont je vous ai parlé tout à l'heure, régionalement, aussi, possède des unités spécialisées qui ne débordent pas déjà de ressources policières. Nous avons les bureaux d'enquête criminelle qui assument l'enquête spécialisée et nous avons les équipes régionales, alcool et moralité, qui s'occupent également de la drogue depuis trois ans, parce que c'est un phénomène au Québec. Donc, c'est une mission additionnelle et ces unités n'ont pas tout ce qu'il faut pour opérer.

On a parlé beaucoup du réseau de télécommunications. Je vous réfère à l'annexe 6 du document bleu où on a la description de notre réseau de télécommunications. Notre réseau de télécommunications est l'un des plus modernes au monde. C'est un réseau dont la configuration permet d'allier les lignes téléphoniques à la radio-

phonie. Donc, on peut d'un poste parler à une auto-patrouille; inversement, l'auto-patrouille peut parler du poste à une maison privée, voire même un garage, et elle peut même opérer à partir d'un transfert du poste sans opérateur au poste. Donc, dans certaines régions, c'est le patrouilleur même qui filtre ses appels.

Par contre, le patrouilleur de la Gaspésie, qui est en patrouille ce soir, s'il veut parler à un patrouilleur du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il peut le faire en passant par ce qu'on appelle un appel conférence. Il peut également s'adresser à la région de Montréal. De plus, ce système de télécommunications a été complètement rénové au cours de l'année dernière par Bell Canada, de façon à diminuer, dans 99,9% les points morts, également à améliorer la qualité des ondes et aussi, à éviter le chevauchement. Nous n'avions peut-être pas assez de canaux et à ce moment-là, nous avions des postes parfois dont les ondes débordaient dans le cadre d'un autre poste, ce qui créait de l'interférence, chose qui a été éliminée.

Périodiquement, nous avons quelqu'un qui est chargé de la vérification de la qualité de nos ondes et la compagnie Bell Canada qui est notre locateur, fait des études goniométriques régulières pour mesurer les angles par rapport à la topographie du terrain, de façon à s'assurer que notre système de télécommunications répond à nos besoins.

Cet appareil de télécommunications devient un outil de travail fort important et je vais vous expliquer pourquoi. Avec le Centre de renseignements policiers du Québec, centre de renseignements couplé au centre d'information de la police canadienne qui est couplé au National Crime Information Center de Washington, lorsque nous suivons un véhicule, notre patrouilleur peut demander des informations, établir le statut du véhicule, voir si c'est un véhicule volé; si le propriétaire est un récidiviste, parce qu'on a le dossier judiciaire centralisé au bureau national à Ottawa.

En somme, il peut demander beaucoup d'informations de nature à lui donner des indications, à savoir, quelle sorte de client le précède. Quand vient le moment de l'intervention, ses techniques, ses tactiques et sa prudence peuvent être gouvernés en conséquence, suite aux informations qu'il a pu obtenir. Je crois que ceci couvre assez bien la situation de la Sûreté du Québec.

Nous allons brièvement parler des méthodes et techniques de travail. Dans les méthodes et techniques de travail, il y a eu une évolution énorme depuis quinze ans. Je vous ai dit qu'en 1960, on donnait une arme au policier, un insigne, un code Juneau qui n'était pas à jour et on le lançait dans le champ. En 1961, on a commencé à lui donner un cours accéléré de quatre semaines. En 1968, ça montait à 12 semaines. A l'Institut de police du Québec, à son ouverture en 1969, on lui a donné 16 semaines. Actuellement, en 1977, on lui donne 20 semaines.

Notre membre est recruté selon des critères bien particuliers, en tenant compte du règlement no 7 de la Loi de police, qui nous donne un encadrement de départ, mais nous recherchons surtout l'initiative, le jugement, la maturité et l'intelligence. Je peux vous assurer que tout notre monde possède ces critères.

On les envoie, de plus, à l'Institut de police du Québec, en plus de la formation scolaire, théorique et légale que nous leur donnons, nous avons également des techniques d'arrestation. On commence déjà à armer, notre candidat, à lui armer le cerveau de techniques pour développer chez lui une attitude de façon qu'il puisse remplir sa fonction adéquatement.

On lui montre à fouiller des suspects et dans quelles circonstances. Dès qu'un doute survient à son esprit, il doit le fouiller et ne pas prendre de risque. C'est sa vie qui en dépend. On lui enseigne comment intercepter un véhicule de façon à rester hors d'atteinte, si, parfois, il interceptait un véhicule suspect, susceptible de vouloir attenter à la vie de notre policier.

On lui enseigne la fouille de véhicules, on lui enseigne le combat sans armes. J'aimerais que chacun d'entre vous aille voir une promotion à l'Institut de police du Québec, quand ils "graduent" en combat sans armes; je pense qu'ils pourraient, pour la plupart, faire face à des ceintures noires de judo et de karaté, parce que c'est un ensemble de karaté, de judo, de combat sans armes, de jiu-jitsu, mais pas pour tuer l'adversaire, pour l'immobiliser et le maîtriser, parce que c'est cela le rôle du policier. Et il est drôlement bien équipé quand il sort de là.

On lui enseigne le maniement des armes, l'arme de service, calibre .38, le fusil .12, dont tous nos véhicules sont équipés, à peu d'exception près. En plus, depuis trois ans, on lui enseigne la conduite automobile. Dans notre esprit, c'est intolérable qu'un policier ne puisse pas conduire selon une norme qui excède celle de la société. Quand un de nos véhicules est impliqué dans un accident et que nous sommes en faute, c'est notre image qui en prend pour son rhume. Nos véhicules constituent ce qu'on appelle en marketing un facteur d'exposition élevé. On est noté et quand nos véhicules sont accidentés, on dit: La police a eu un accident, et tout le village en parle.

Toutes ces techniques sont données de façon à guider l'intervention du policier, à l'amener à développer chez lui le flair, le discernement, l'attitude et le comportement. Je m'explique en termes pratiques. Le dimanche après-midi, un homme s'en va avec sa femme et ses enfants, notre policier se sert de son jugement et de son flair. Ce n'est certainement pas un criminel. A deux heures du matin, avec deux individus à bord, dans une région où la tendance des études que je vous ai citées tout à l'heure indique qu'il y a des vols de chalets ou des crimes et que la valise arrière traîne dans le chemin, par le centre de renseignements policiers, il peut obtenir le statut du véhicule, savoir à qui il parle, et même gouverner son action en conséquence. Nous verrons pourquoi, plus tard, en soirée; c'est correct d'être deux.

En plus de cela, quand il est sorti de l'Institut de police, c'était peut-être notre plus grande faiblesse, mais, depuis 1970, on a comblé cette carence, par la formation à service. Nous sommes

peut-être le seul corps policier au Canada à posséder un programme structuré du maniement des armes, programme dans lequel on oblige notre policier à se recycler constamment et à se qualifier. Vous en verrez bientôt avec une étoile, deux étoiles, trois étoiles. Cela veut dire que ces gars-là possèdent une dextérité, selon leur habileté.

On leur enseigne le tir de combat. On a même changé nos techniques. On dit: Pourquoi enseigner le tir dans une salle de tir, alors que lorsque le policier a à intervenir, il intervient dans le champ, le long d'une automobile, dans un banc de neige, finalement, dans des conditions climatiques qui ne sont pas toujours propices, comme dans une salle de tir.

On est rendu dans des bancs de gravier, de façon à actualiser nos méthodes d'enseignement.

On émet constamment des directives en matière de sécurité, des manuels. Je crois qu'on vous a remis un petit manuel portant sur le barrage de routes ou on va vous le passer. Vous verrez tout à l'heure, l'opération 100. C'est cela un barrage de routes. C'est le mot de code qu'on emploie. Vous allez voir que ces manuels sont disponibles pour nos membres, pour les conditionner en termes d'attitudes, de comportements, d'habitudes, de sécurité et de prudence.

On a également la revue de la Sûreté. Tous et chacun d'entre vous se sont vus remettre un exemplaire ou deux de cette revue. La revue de la Sûreté est un organe de communication. Dans une force déployée comme la nôtre, la communication, c'est passablement important. Cela sert deux buts bien précis: d'abord informer nos membres du développement de l'organisation, pour les faire cheminer à travers l'organisation. Par exemple: Si le directeur général s'en va suite à la présentation que je vais vous faire, il risque que dans un mois on lui dise qu'il sera remplacé. Au moins, il le saura, parce que, par le passé, cela pouvait faire un an qu'il était parti et on ne le savait pas.

On parle de conduite préventive, de conditionnement physique, de méthodes de travail et ce sont toujours des sujets de nature à éveiller chez nos policiers le sens de la formation.

Le recyclage en service, j'ai parlé de l'arme de service, la conduite automobile... Je vous ai dit tout à l'heure combien cela nous mettait mal à l'aise de voir "scraper" des véhicules. Bien des fois, nos gens sont dans leur tort; beaucoup de fois aussi, ils ne le sont pas.

Nous sommes fiers, cette année, de constater, en termes de résultats, non pas de quotas, c'était un objectif... L'objectif, c'était de diminuer les accidents de la sûreté de 20%. Nous avons une flotte de 1400 véhicules. Nous avons eu 225 accidents de moins cette année. Je pense que c'est mesurable et que cela fait partie de la sécurité.

Les unités d'urgence sont recyclées constamment, presque toutes les semaines. Ces unités d'urgence sont des unités d'élites, des unités de première ligne appelées à remplir toutes les situations qui peuvent se présenter et qui débordent du cadre des postes. Elles peuvent participer à une recherche en forêt, recherche d'évadés. Elles peuvent participer à une situation qui s'est dé- veloppée suite à une inondation. Je pense à Ma-niwaki; je pense à un endroit où on a eu une tornade; je pense à Saint-Jean-Vianney, je pense à des événements sportifs. En somme, je pense à une foule d'événements où des hommes entraînés, spécialisés ont travaillé ensemble.

La formation du policier l'entraîne à travailler individuellement, à prendre individuellement ses décisions. Quand on l'amène à travailler en groupe, il faut orienter sa formation de façon qu'il puisse travailler en groupe.

M. le Président, MM. les membres de la commission, si parfois sur les sujets que je viens d'effleurer, vous désirez plus d'information, des documents, etc., nous en avons des briques, mais nous n'avons pas voulu vous décourager, en raison du volume de travail que vous avez eu antérieurement, mais nous sommes toujours disponibles pour vous remettre les documents que vous pourrez juger à propos.

Nous allons maintenant passer aux interventions de la Sûreté du Québec. C'est peut-être l'aspect le plus important. En cours de route, ici, nous allons feuilleter, en priorité, le volume brun. Vous allez voir le tableau. Malheureusement, il est assez loin, mais je vais vous le référer comme document de référence de façon que vous puissiez le suivre. On voulait vous donner cela sous forme de cours, mais je m'aperçois qu'une salle de cours trop grande, ce n'est pas adéquat.

Nous avons réparti nos interventions et c'est le volume brun.

M. Beauséjour: Vous pourriez peut-être rapprocher le tableau.

M. Beaudoin: Nous sommes à votre disposition. Tout ce qui peut contribuer à mieux éclairer la commission, cela nous fait plaisir de le faire.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que cela vous nuit actuellement pour l'identification? Je sais que c'était pour cela qu'on l'avait éloigné au début.

M. Bédard: ... on n'a pas d'éclairage adéquat.

M. Beaudoin: Si vous voulez bien, la référence à ce tableau est la dernière page du volume. On n'a peut-être pas cru bon de la numéroter, c'est la page 113.

Nous avons divisé les interventions de la Sûreté en trois grandes catégories. D'abord, le Code criminel, la sécurité routière et les activités diverses. Nous avons des chartes qui vous donnent la nature, l'horaire, la fréquence et, par le fait même, le degré de danger réparti dans le temps et dans l'espace.

Dans la première partie, que vous voyez en haut de votre tableau, ce sont les attentats contre la personne. On a eu 2501 cas, en moyenne, par année, et 98,7% de ces cas se sont déroulés sans problème de sécurité, parce que l'on voit que nous avons eu 33 cas de résistance, donc 1,3%. Je dois vous dire que nous avons pris tout ce que la Sûreté a fait et nous l'avons analysé, parce que cette

année était l'année la plus imposante. Il y a des choses qu'on répartit sur des années, mais cette année était l'année la plus importante; donc, on a pris le plus de volume de travail, ce qui pouvait être le plus représentatif de notre action.

Les vols qualifiés, c'est peut-être l'aspect qui nous fait le plus réfléchir, parce que, quand on pense à vols qualifiés, on pense à fusillade, on pense à vols à main armée, on pense à attentat sur nos policiers et interventions. Sans vouloir minimiser la valeur de ce tableau, on a eu 915 vols qualifiés au cours de l'année et, malheureusement, on a eu un cas, qui s'est déroulé à Sainte-Brigitte-de-Laval, donc un dixième pour cent. Si vous me permettez, on peut dire qu'il y a eu un dossier de 99,9% d'interventions sans violence. Je vous réfère à la page 83 de votre volume brun où, peut-être ensemble, on va regarder une petite analyse de cela.

Vols qualifiés, au centre de la page. En 1976, nos policiers sont intervenus dans 915 dossiers de vols qualifiés. Un seul dossier impliquait de la violence. Il n'en demeure pas moins que ce cas est l'exception pour des vols qualifiés. Ces cas, bien entendu, incluent les assistances de la Sûreté du Québec. C'est 13,9% des assistances de la Sûreté du Québec, de ce nombre, qui s'adressent aux corps policiers municipaux. Nous avons fait l'analyse des vols qualifiés pour l'année 1976, dans le district de Montréal. Savez-vous pourquoi on a pris comme échantillonnage le district de Montréal? D'abord, c'est le plus gros district de la Sûreté.

C'est celui où les facteurs et les variables, en termes du débat que nous avions à exposer ici, répondent peut-être le mieux, parce que vous savez que la région métropolitaine foisonne de criminalité, et le district de Montréal représente 40% des activités de la Sûreté.

Cette dernière analyse, au district de Montréal, porte sur 296 vols qualifiés survenus dans le territoire de 25 postes différents, 135 de ces vols, soit 45,8%, à la page 84, sont survenus de 16 heures à 24 heures, soit sur la troisième relève; 85 de ces vols, soit 28%, sont survenus de minuit à huit heures le matin — le cas de l'agent Brabant en était un — et 75 de ces vols, soit 25,3%, sont survenus au cours de la relève du jour.

Dans 268 cas sur 296, le premier policier sur les lieux était seul. Par contre, dans 289 cas, l'arrivée du policier s'est faite après le départ des bandits. Dans les 7 cas où les policiers sont arrivés alors que le vol qualifié avait lieu, il y avait toujours de très nombreux policiers sur les lieux pour intercepter les suspects. D'ailleurs, lorsque le policier patrouillant seul reçoit un appel de ce genre, il doit immédiatement demander de l'aide avant de se rendre sur les lieux. Par contre, il se retrouve dans une situation telle qu'il arrive inopinément seul sur une scène semblable. Il doit, encore là, obtenir de l'aide avant d'intervenir.

On ne demande pas à nos gars de poser au "desperado". On ne demande pas de devenir des héros morts, mais on leur demande d'avoir le support nécessaire, et ce qui compte pour nous dans notre tactique, les criminels, qu'on les prenne sur les lieux d'un crime, ce n'est pas important, c'est de les encercler dans une région et d'avoir les ressources nécessaires. L'exemple de Joliette est un cas flagrant, on les a encerclés dans la région, on les a trouvés, on les a arrêtés et ils seront traduits devant les tribunaux. C'est ça, le principe. Cela a pris dix jours, mais je pense que le temps est bien plus important que de jouer au "desperado".

L'opération 100, qui s'accole à ça, est un plan de travail policier qui permet de bloquer la majorité des routes d'un secteur donné, et ceci, dans les plus brefs délais. Je vous en ai parlé tout à l'heure. Je vous ai distribué un petit manuel technique. J'aimerais vous référer à la page 86. L'opération 100 est déclenchée lors d'un crime majeur, vol avec violence, meurtre, tentative de meurtre, délit de fuite dans lesquels il y a une personne blessée. Vous regardez à la page 86 de votre manuel brun, la fréquence horaire, son plus bas niveau se situe le matin à 10 heures et le plus haut niveau se situe à 22 heures et 24 heures.

En 1975, vous remarquerez que la constance est peut-être la même, ou à peu près. Dans les vols par effraction, si vous me permettez de vous référer à la page 13 de votre livre bleu, nous avons eu au cours de 1976, à couvrir, 12 154 vols par effraction survenus un peu partout dans la province.

Généralement, le policier prend connaissance de ces crimes suite à l'appel de la victime, qui a elle-même constaté le délit à son arrivée à son chalet, à son commerce ou à sa résidence. C'est normalement commis au cours de la nuit précédente et cela nous est signalé le lendemain. Bien des fois, surtout l'automne, où on a une vague, une épidémie de vols de chalets, cela nous est signalé après une semaine, parce que le propriétaire a quitté les lieux le dimanche soir et qu'il revient le samedi suivant.

A ce moment, ce sont des constats.

Dans 74% des cas qu'on a couverts, il était impossible de déterminer l'heure. On a eu deux cas de résistance sur 12 154 soit 99,99% sans aucune violence. Le vol de véhicules est une plaie au Québec, une plaie au point tel qu'on a dû mettre sur pied un plan qui s'appelle plan Auto dont je vous ai parlé tout à l'heure et qui s'applique selon les particularismes régionaux et l'intensité du problème.

Les vols de véhicules, on en a eu 2148 dans le district de Montréal uniquement. Si vous remarquez notre échantillon, on échantillonne la province globalement et on prend le plus gros district parce que c'est là que sont les gros problèmes. Cela n'exclut pas qu'il y en a d'autres ailleurs, mais on dit: Prenons le plus gros volume de travail, c'est là qu'on va retrouver le plus de problèmes. Parce qu'à mon avis, un individu, un agent de la Sûreté qui arrête 100 personnes dans un an a bien plus de chances de s'accrocher que celui qui va en arrêter en Abitibi, qui va faire le même travail, aussi consciencieux. Il ne va toujours pas arrêter les gens pour le plaisir de le faire. La population n'est pas la même, le volume n'est pas le même. S'il en arrête 25 dans l'année, il a moins de chances.

Nous nous sommes posé la question suivante:

Dans combien de cas a-t-on intercepté l'individu qui s'était emparé d'un véhicule? Et pour faire notre échantillonnage, on a pris les dossiers du district de Montréal, 860 dossiers, ce qui est assez représentatif, c'est plus du tiers du nombre total de vols des véhicules de la Sûreté et nous avons des interceptions, 61 fois sur 860, où on a arrêté des individus en flagrant délit.

A la page quinze, on retrouve les vols simples. Ces vols simples sont en grande quantité. Ce sont toutes sortes d'affaires. Cela peut être aussi bien le vol d'une pelle, le vol d'une tondeuse à gazon qui avait été laissée dehors, une scie mécanique. Ce sont mille et une choses qui sont fréquemment dues un peu à la négligence du propriétaire, et ces appels entrent surtout au cours de la journée et on n'a pas de violence là-dedans.

Les armes offensives au paragraphe 6, toujours à la page 15. Ces armes offensives, habituellement, on les retrouve soit à la suite d'une interception d'un véhicule en fouillant le véhicule ou encore lors de la perquisition d'autres crimes et il y a un article du Code criminel qui dit que ce sont des choses non spécifiées au mandat quand on croit qu'elles peuvent avoir été obtenues par un crime. On saisit cela et dans ces cas, on a eu 99,6% des cas où l'enquête s'est déroulée normalement.

Dans les autres infractions au Code criminel, c'est un peu comme on dirait — excusez le terme anglais — un "melting pot" et tout ce qui n'entre pas dans les premières catégories. Vous avez la fraude, l'inceste, le parjure, en somme, l'évasion où le patrouilleur participe à des recherches, des gens qui négligent de se conformer à la Loi du cautionnement. On a même ceux qui négligent de venir prendre des empreintes digitales, la corruption d'enfants, le tapage, le méfait et les fraudes diverses.

Dans cela, ça requiert assez de travail. On en a eu 8/10 de 1% avec certaines résistances. Si on fait une analyse globale — et je vous ramène à la dernière page de votre document brun — et une révision, ensemble, qui est exactement ce que vous avez au tableau, plus quelques éléments additionnels que je vais vous donner tout à l'heure.

Vous avez 2500 attentats contre la personne, avec 33 cas de résistance, 915 vols qualifiés pour un cas, et cela n'a pas été une résistance, mais un assassinat, 12 154 vols par effraction pour deux cas de résistance, 2148 vols de véhicules pour trois cas de résistance, 619 cas d'armes offensives pour trois cas de résistance, 18 222 autres infractions au Code criminel pour 140 cas de résistance, soit 0,8%.

Excusez-moi si je vous transporte d'un bouquin à un autre. Je pense que cela va bien. On va passer à la page 17 du volume bleu, où on attaque la deuxième partie de l'intervention, qui est la sécurité routière. La sécurité routière, bien entendu, à cause du caractère de notre mission, revêt un grand rôle, et la mission de la Sûreté du Québec, en termes de sécurité routière, je vous le répète, ce n'est pas de relever des infractions, c'est de sauver des vies et de diminuer les accidents. On a, au cours de l'année 1976, couvert 56 329 acci- dents, et je vous réfère à la page 35 de votre volume brun. Vous avez d'abord le premier tableau de la page 35, qui vous donne la courbe des accidents par rapport au nombre et par rapport aux heures. On retrouve la concentration des accidents entre 16 heures et 18 heures et son plus bas niveau entre quatre heures et six heures le matin. Dans la majorité des cas, ces accidents ont été couverts par un agent, sauf des accidents mortels, où notre policier demande de l'aide, ou encore un accident impliquant un carambolage où plusieurs véhicules sont impliqués. Je pense que nous pourrions même avoir un excellent témoignage d'un membre de la commission parlementaire qui, désireux de remplir son mandat, se rendait à Québec en respectant les règles de circulation, a été impliqué dans un carambolage et est même venu m'offrir des félicitations pour la façon dont notre homme s'était comporté. Il y avait trente véhicules impliqués, il y avait une tempête et il était seul. C'était le jour, par exemple.

On s'aperçoit, d'après ma petite expérience personnelle... Je suis un policier de campagne. Je suis né à la campagne, j'ai été élevé à la campagne, j'ai servi sur la Côte-Nord, j'ai servi en Gaspésie, mais je me suis aperçu que pour la police de ville, c'était un peu plus fréquent, mais a peu près pareil, c'est le volume qui diffère. On s'est aperçu que c'est beaucoup plus important d'avoir deux véhicules sur les lieux d'un accident et deux hommes. Savez-vous pourquoi? C'est parce que notre mission première c'est d'abord d'éviter que d'autres bons citoyens viennent se foutre la gueule dans l'accident qui vient de survenir. Il faut d'abord protéger les citoyens pour éviter qu'un autre accident survienne, et, deuxièmement, le plus rapidement possible, traiter les blessés et prendre les constats subséquemment. Donc, on s'aperçoit que deux membres qui travaillent avec deux véhicules peuvent drôlement bien encadrer la scène en plus de tous les "flares" et du matériel qu'on met à leur disposition, fusées de bengale. Vous vous apercevez, à la page 36, que si on veut faire un historique de la constance des accidents, ils ne sont pas plus élevés une année en janvier que l'autre, ou à une heure qu'à l'autre. La constance en 1972, 1973, 1974 et 1975 est continue.

En matière de facultés affaiblies, de billets d'infraction, ce billet d'infraction, je vous ai dit tout à l'heure que c'était une conséquence logique à nos programmes de gestion par objectif. Si on veut diminuer les accidents, il faut donner des infractions de vitesse aux endroits où surviennent les accidents, il faut donner des infractions de dépassement aux endroits où surviennent les accidents et il faut faire des arrestations pour facultés affaiblies.

Nous avons, si vous vous référez à la page 40 de votre volume brun, rédigé, en 1976, 655 411 rapports d'infraction. La courbe vous indique la fréquence entre 16 et 18 heures, la plus basse entre 4 heures et 8 heures le matin. Sur 655 411, on a eu 63 constats de violence ou d'entrave, donc 99,991% se sont déroulés sans incident. Si on se reporte à la page suivante, page 41, vous vous apercevez encore que la constance s'est mainte-

nue en 1972, 1973, 1974 et 1975, sauf que, d'une année à l'autre, vous remarquez que notre volume s'est élevé, mais, en contrepartie, je peux vous dire que, cette année, on a 225 morts de moins.

Quant à moi, c'est la contribution de la Sûreté la plus positive, c'est-à-dire conserver en vie la société québécoise en enlevant les marginaux des routes et en aidant ceux qui ne veulent pas rester en vie à le rester.

Pour les avis de 48 heures, à la page 43, c'est la même chose. Vous remarquez que la constance des avis de 48 heures se situe à son plus bas entre 6 heures et 8 heures le matin et à son plus haut entre 20 heures et 22 heures. Je vais vous expliquer pourquoi.

Notre agent, le matin, bien entendu, va faire des interceptions, ce qu'on appelle des vérifications mécaniques. Il y a deux aspects à ça, un aspect d'éducation et un aspect de prévention. On inspecte les véhicules pour voir si la mécanique est correcte, visuellement, on appose un collant et on distribue un 48 heures s'il y a quelque chose qui n'est pas correct, une lumière, le conducteur a oublié son permis chez lui, quelque chose qui ne fonctionne pas, frein à main défectueux. C'est pour ça que, vers 10 heures le matin, vous retrouvez nos gens à l'oeuvre le long des routes; ils vous interceptent avec courtoisie pour vous apposer un collant.

D'ailleurs, notre collant est fort populaire.

En plus, vous remarquez que, de 20 heures à 22 heures le soir... Pourquoi? Parce qu'en patrouille mobile, sur la route, c'est facile de déceler des lumières défectueuses, soit un phare avant, soit une lumière arrière, un silencieux défectueux. Quoique, le jour ou le soir, on l'entende quand même, ce n'est pas une question de vision. Vous remarquez la façon dont ça se distribue.

J'aimerais passer à un chapitre qui est assez important, les facultés affaiblies. Vous allez retrouver le tableau à la page 45 de votre volume brun. Les facultés affaiblies. A mon avis, selon l'expérience que j'ai vécue personnellement, que beaucoup de policiers ont vécue — je ne crois pas qu'il y ait quelqu'un en désaccord avec moi; d'ailleurs, les chiffres vont le prouver — c'est le genre d'intervention qui nous cause le plus de problème, parce que vous avez là des individus qui sont un excellent actif pour la société. Mais quand un gars a un coup dans le corps, le jugement ne fonctionne plus, il n'est plus un actif pour la société et, quand les capacités sont affaiblies c'est là que les masques sautent en l'air.

Parce que se faire intercepter pour facultés affaiblies, ce n'est pas trop plaisant et l'agressivité est très évidente de la part des gens. C'est peut-être là que nos membres ont le plus grand potentiel d'assauts ou de voies de fait. Par contre, la courbe que nous avons établie, en fonction des tests d'ivressomètre... Premièrement, le gars ne veut pas se soumettre au test de l'ivressomètre, on le somme de venir au bureau pour le faire; il ne veut pas; finalement, on est obligé d'utiliser la force nécessaire pour procéder à l'arrestation par les moyens conventionnels.

Nous avons procédé à l'arrestation de 14 868 personnes au cours de 1976. La concentration se situe entre 24 heures, minuit, et quatre heures du matin. C'est bien compréhensible, on commence à aller à l'hôtel, à neuf heures le soir et l'hôtel ferme ses portes à trois heures le matin. C'est un peu logique qu'on puisse en ramasser encore qui ne soient pas rendus chez eux à quatre heures le matin.

Je peux vous assurer que c'est peut-être l'endroit où il y a le plus de masses en l'air et le plus de désagréments.

Par contre, sur ce nombre assez important, 14 868 arrestations, on a eu 128 cas de résistance, ce qui veut dire que 99,2% se sont réglés normalement. On demeure avec 0,8% de cas de résistance.

En termes de vérification de routine, j'aimerais vous ramener au tableau de la fin. On a parlé de la sécurité routière, on a parlé des facultés affaiblies, on a parlé des infractions au Code de la route. On a parlé de la prévention du crime. La prévention du crime, cela se fait de bien des façons.

On pourrait vous haranguer toute la semaine sur les méthodes de prévention du crime. Point n'est là notre intention, ni celle de réfuter les théories d'autres personnes. Mais la vérification, cela se fait en interceptant des véhicules, en vérifiant le conducteur. La moyenne de vérifications, pour un membre de la Sûreté, est de trois par relève; en multipliant par le nombre de patrouilleurs, 365 jours par année, cela nous amène, outre tous les contacts que nous avons eus dans le cadre d'infractions criminelles, à un million de contacts par année avec le public.

Dans ces cas, il y a eu huit cas de résistance, qui se traduisent invariablement par des arrestations, avec huit dix millièmes de 1% d'arrestations. On a parlé de l'exécution des pièces de procédure, on a même effleuré le sujet de nous les enlever, mais il faudrait penser aussi que, dans les pièces de procédure, il y a des assauts sur cela. Il y a même des assauts à cela, pour signifier des sommations, des subpoenas, des mandats d'emprisonnement, des mandats d'arrestation, des mandats de dépôt ou des défauts-mandats, si on peut les appeler ainsi. 125 579 pièces de procédure ont été exécutées par la Sûreté du Québec, au cours de l'année 1976, et on a eu six cas de résistance, ce qui vous donne une idée assez générale ou assez spécifique de ce que peuvent entraîner nos actions.

J'aimerais attirer votre attention à la maquette qui apparaît; nous avons pris tous nos cas d'entraves, d'interventions ou d'assauts sur les policiers et on les a distribués sur un plan horaire, de façon que, lorsqu'on a conseillé le ministre en disant: Ce n'est pas pire, le jour, il y a de petits accrochages, mais c'est bien pire la nuit et le soir, on n'a pas dit cela dans le vide, on n'en est pas à ce point-là, vous savez. Je pense qu'on tente de remplir notre rôle de gestionnaire avec bon sens et objectivité. Voici le résultat que cela donne.

Le haut, c'est à partir de 0 heure du matin et on descend. Tout à coup, à quatre heures du ma-

tin, vous remarquez les facultés affaiblies; cela accrochait tantôt à quatre heures du matin. Tout à coup, vers le matin, les méchants et les gars chauds ont réussi à atteindre leur demeure et se sont couchés.

Finalement, le jour, il y a d'autres petites affaires, des petites interventions qui surviennent, et des arrestations, en nombre infime. Tout à coup, cela recommence à remonter en soirée. Au cours de la fin de semaine, vous allez sourire, c'est plus actif. Bien entendu, le vendredi, les gens ont la paie. La paie aidant, l'agressivité monte, surtout après un petit arrêt à la taverne.

J'aimerais qu'on refasse ensemble, à la page 103 du volume brun, une brève rétrospective de l'analyse des voies de fait. Au cours de l'année 1976, nos policiers ont été victimes de 169 voies de fait. Ceci comprend les dossiers où les voies de fait contre nos policiers ont été commises au cours d'une assistance à un autre service de police municipal.

La gravité des voies de fait, c'est assez important. Il faut préciser dès maintenant que, dans la moitié des cas, il n'y a eu aucune blessure, même superficielle, parce qu'il faut que notre membre nous soumette un rapport pour qu'on le compile et finalement, il y a des charges de portées. Dans des cas d'accidents du travail, il faut pouvoir remplir les formules en conséquence. Nous n'avons d'ailleurs eu que quatre cas d'hospitalisation, suite à des voies de faits. Il reste donc 80 cas où nos policiers ont subi des blessures superficielles.

Par contre, là encore, une analyse des dossiers d'accidents du travail démontre que, parmi ces 80 blessés, seulement quatre ont rapporté cet incident comme étant assez grave pour nécessiter un rapport à la Commission des accidents du travail.

Quant aux heures, l'analyse graphique qui suit nous indique que la période allant de 6 heures à 16 heures est vraiment inactive au niveau des voies de fait. C'est drôle, la noirceur, cela semble — je ne sais pas, psychologiquement, je n'ai pas la compétence pour l'analyser — hausser le degré d'agressivité.

M. Alfred: ...

M. Bédard: M. Alfred va nous expliquer cela tout à l'heure.

M. Beaudoin: M. Alfred, ce qui est dit est dit, vous ne m'en voudrez pas.

Une Voix: ...

M. Alfred: C'est la vérité.

M. Beaudoin: Au moins, ce sera une raison pour ne pas être accusé de partialité à l'endroit de notre présentation. Sur 169 cas, seulement 14 cas, soit 8,3% sont survenus durant le jour.

Par contre, dès 16 heures, nous voyons la fréquence des voies de fait augmenter pour atteindre son sommet entre minuit et 2 heures où 17,7% des voies de fait sont survenues. Vous voyez la répartition horaire du nombre de voies de fait.

Au moment de ces voies de fait, le policier était-il seul? Question assez importante dans le cadre du litige auquel nous exposons aujourd'hui notre problème. Dans 50 des 169 cas, soit dans 29,6% des cas, le policier qui a été victime de voies de fait, était seul lors de son intervention.

Par contre, pour le reste, soit 70,4% des cas, il y avait au moins deux policiers présents.

Donc, pour un cas où notre policier se fait attaquer ou menacer alors qu'il est seul, il y a plus de deux cas où le policier est accompagné d'un confrère.

Les entraves: Vous savez que le degré d'accusation entre une entrave et une voie de fait est différent. Nous avons étudié tous les dossiers où il y a eu entrave à un de nos policiers au cours de l'année 1976.

Dans aucun de ces cas, il n'y a eu de blessure, même superficielle, de causée à nos policiers.

En 1976, nos policiers ont été entravés 232 fois, au cours de leur travail. Dans 44 cas, soit 18,9% des cas, le policier était seul, lors de l'intervention.

Par contre, dans 81,1% des cas, il était accompagné d'au moins un autre policier. Le graphique des heures qui suit, nous démontre que tout comme les voies de fait contre nos policiers, la majorité des événements se produisent au cours de la soirée, 40,5% et de la nuit, 45,7%. Il ne reste donc que 13,8% des cas qui sont survenus au cours de la journée.

Je pense que nous avons parcouru ce qui pouvait être considéré comme essentiel pour le bénéfice de la commission, de même que pour servir à la réflexion. C'est ce qui a trait à l'intervention de la Sûreté. Maintenant, dans un autre chapitre, nous allons parler des politiques des autres corps policiers. A la page 22, c'est un peu une réflexion sur le sujet: La patrouille à deux est-elle toujours nécessaire? Nous avons entendu un représentant de l'OPP — je pense que nous pouvons nous dispenser de ce chapitre — qui est venu exposer la politique de son corps policier en matière d'interventions, et je ne crois pas qu'il est nécessaire de parler plus longtemps sur le sujet. Fondamentalement, on laisse beaucoup de latitude et de discernement au chargé du poste et au premier niveau de supervision.

Un fait assez intéressant pour le bénéfioe des membres de la commission. Au fait, je crois que tous et chacun ont reçu la copie traduite de l'intervention du commissaire adjoint de l'Ontario, de même que du représentant de l'Association internationale des chefs de police. Je crois que c'était nécessaire parce que la commission nous l'avait demandée. Au départ, nous n'avions pas eu le temps de le faire. Il est assez intéressant dans un litige qui s'apparente à peu près à celui que l'on discute aujourd'hui, de regarder le cas d'arbitrage de Toronto-Métro, l'argumentation utilisée devant le juge arbitre — c'est à la page 24 — en ce qui a trait à la présence de deux policiers par voiture, entre 20 heures et 8 heures, pour le corps de po-

lice de Toronto. Il ne faut pas oublier que Toronto était la deuxième ville au Canada, et on se faisait fort de dire que Montréal était la première. Je n'en suis pas sûr, je pense qu'elle nous a dépassés en volume de travail policier et en population également.

Afin de mieux se situer dans ce débat, voyons les faits. En 1957-1958, à l'exemple des corps policiers de certains Etats américains, le corps de police du Toronto métropolitain expérimente la patrouille à un policier par voiture dans le district de York. Devant les succès obtenus, on implante cette pratique. Finalement, en 1974, on se ramasse devant un arbitrage où le juge Ferguson, stipulant que la sécurité du patrouilleur augmentait de façon importante quand ils étaient deux, accordait la patrouille à deux policiers par voiture, de 20 heures à 8 heures du matin. Cette pratique entre en vigueur en 1975. Ce jugement fut contesté jusqu'à la Cour suprême du Canada qui jugea que c'était une condition de travail, donc négociable.

Finalement, peut-être qu'on pourrait passer à la page 25, et ce qu'il est important de voir, c'est ce que la Commission de police de l'Ontario qui pourrait, pour vous situer dans le problème, être l'équivalent du Conseil de sécurité de la communauté urbaine... On a d'abord insisté sur l'efficacité du système de radio disponible aux policiers; on a démontré que plus de la moitié des appels du service se produisent entre 16 heures et 24 heures, que selon l'analyse des statistiques en 1975 sur le crime, il se dégage que les crimes graves, dont la plupart impliquent la force ou la violence, se produisent sensiblement dans les mêmes heures, 16 heures, 2 heures, 3 heures, 15 heures.

La nécessité pour les policiers de patrouiller à deux entre 20 heures et huit heures ne correspondait pas à la période durant laquelle les activités criminelles étaient les plus fréquentes, donc la plus susceptible d'être dangereuse pour le policier. Là, on a des considérations quant à la diminution de l'efficacité. Je ne voudrais pas m'éten-dre ià-dessus.

Les deux parties semblent avoir accentué leur position, les autorités policières reconnaissant cependant que certaines situations nécessitent, pour la sécurité des membres, la présence de deux policiers ou plus et des méthodes de travail, les directives exigent que les policiers n'interviennent dans de telles circonstances que lorsqu'ils sont adéquatement assistés. On n'a pas besoin de héros morts, je crois, et on ne demande pas à un policier d'intervenir... Ecoutez donc! La première chose, s'est de s'amener sur les lieux et d'obtenir de l'aide. Même si elles ne sont pas fréquentes, ces situations surviennent régulièrement. Il devient alors essentiel que les policiers soient deux.

J'aimerais, par exemple, en toute objectivité, dire que ça s'applique dans un contexte métropolitain, Toronto-Métro, dans un cadre géographique peut-être de dix à douze milles carrés.

J'aimerais peut-être vous ramener à la page 25, à l'élément d), où on dit: Huit mois après l'implantation de la patrouille à deux, on pouvait constater une forte diminution de l'efficacité. Plu- sieurs unités de service importantes ont été décimées ou démantelées à cause des besoins additionnels en personnel. On constatait également une augmentation du temps requis pour répondre aux appels. C'est entendu. Ils répondaient aux appels avec une voiture à un homme, et on a doublé. On a mis deux hommes. C'est entendu que le nombre de voitures dans un secteur a diminué. Les seules voitures laissées à un homme, ce sont les voitures chargées de la circulation, pour couvrir les accidents.

A la page 27, au haut, il y a un point très important. Il est généralement accepté, poursuit le juge, que certaines fonctions sont exécutées de façon plus sécuritaire quand les patrouilleurs sont deux. De telles fonctions doivent donc s'exécuter à deux. Cependant, des patrouilles à deux policiers par voiture ne sont pas nécessaires à chacune des relèves, ni pendant les heures de pointe, et ce, dans chacune des voitures des secteurs. Il ne s'attribue pas non plus la juridiction de décider dans quels secteurs et durant quelle relève les patrouilles doivent se faire à deux, ce même s'il en avait la compétence.

Le juge insiste beaucoup, dans son jugement, pour que l'application soit de telle sorte qu'elle soit reliée à l'application de la période où l'on retrouve l'ensemble des activités criminelles, donc la densité du travail occasionné par la noirceur et une demande accrue des services de police, ce que nous avons tenté de vous démontrer par la situation qui existe à la Sûreté du Québec.

Dans son jugement, le juge exclut les patrouilles effectuées à la surveillance de la circulation. Je vous l'avais précisé précédemment. On n'a pas signalé d'attaques meurtrières chez les patrouilles affectées à la circulation. Il ne semble pas probable que le type d'attaques imprévisibles qui pourraient survenir puissent être empêchées par le fait d'avoir deux patrouilleurs par voiture.

Si on se reporte à la page 28, au paragraphe du centre, paragraphe de conclusion, on dit ceci: La plus importante conclusion de ce jugement pour l'association doit être que, selon la preuve, la patrouille universelle à deux policiers ne peut être considérée comme une réponse complète ni même complètement satisfaisante aux problèmes de la sécurité. D'autre part, la commission doit reconnaître à l'association un "statut" de participer au nom de ses membres aux dispositions des politiques futures concernant l'utilisation des voitures à deux patrouilleurs. Voici pour la situation qu'on retrouve à Toronto, la plus grande ville du Canada.

Nous avons encore un autre cas d'arbitrage — c'est le dernier — et cela concerne la Regional Police Municipality of Waterloo. C'est un corps de police qui recouvre à la fois un territoire urbain et rural dans le concept d'une communauté régionale.

Dans cette étude, à la page 29, on dit que l'efficacité de la patrouille est en fonction de quatre facteurs: Le temps de réponse à un appel; l'intensité d'une patrouille dans un territoire, c'est-à-dire volume, présence policière; la possibilité pour le policier de bien observer tout en conduisant;

jusqu'à quel point un policier peut seul protéger les citoyens et maîtriser un criminel par lui-même.

Une étude scientifique menée à Syracuse, à Troy, a démontré qu' un policier peut mieux observer quand il est seul, à cause de l'absence des faits nuisibles à la conversation et de l'augmentation de confiance en l'autre, quand deux policiers sont assignés au même véhicule.

L'auteur indique également, au paragraphe 4, une jurisprudence, dans un cas similaire, à l'appui de sa conclusion, la décision de l'arbitrage rendue pour la région de Niagara — c'est probablement une région avec laquelle la plupart d'entre vous sont familiers, c'est également rural et urbain — dans laquelle on spécifie huit zones où il doit y avoir patrouille à deux policiers pour des raisons de sécurité et là encore, ce n'est que la nuit et dans les régions bien spécifiques. C'est là qu'on a confirmé, dans cet arbitrage, le principe de dire: D'accord pour la patrouille à deux hommes, mais essayons donc de l'ajuster en termes de volumes d'activités et d'incidences d'activités par rapport à certaines heures, tout cela pour garder toujours à la disposition du public le maximum de déploiement policier pour mieux protéger la population et, le jour, le degré de danger est différent.

Les analyses statistiques permettent de conclure qu'un policier bien entraîné, dans une région où le taux de crime est bas, court peu de danger pour sa vie s'il patrouille seul, pour autant qu'il exerce un minimum de bon sens et demeure alerte à son travail.

L'auteur est d'avis que, là où le crime est peu élevé, on doit patrouiller à un policier, sauf dans les cas où on doit faire preuve de force, enlèvement, manifestation, et dans les régions où les assauts sur les policiers se produisent. Sur la scène d'un crime, il recommande deux policiers, mais il est préférable que le deuxième soit dans un second véhicule, ce qui le rend plus indépendant et, possiblement, lui permet de fournir une meilleure assistance en arrivant par une autre direction.

On a parlé des Etats-Unis et c'est assez drôle. Quand cela fait notre affaire, on parle des Etats-Unis. Quand cela ne fait pas notre affaire, on les répudie. Je ne suis pas si sûr qu'ils soient 25 ans en arrière de nous parce que, dans la ville de Détroit, le concept, ces gens l'ont compris et vous avez des régions comme celle de Ann Arbor où ;'est une cité universitaire et c'est une cité résidentielle, ville dortoir. Les policiers patrouillent à un, mais, dans la région de l'Olympia, par exemple, ils sont quatre dans une voiture parce qu'on a laissé la latitude au chef de police d'être assez fin, de pouvoir grouper assez d'hommes et on ne l'a pas restreint à des écrits qui ne puissent laisser aucune place à l'interprétation.

A la page 31, j'aimerais seulement faire une brève rétrospective sur les morts violentes. Cela ne dit pas grand-chose, mais cela dit ce que ça dit.

Une étude effectuée par le FBI aux Etats-Unis a démontré que la patrouille à deux policiers n'était pas nécessairement plus sécuritaire que la patrouille individuelle. Si on revient au Canada, de 1961 à 1970 — cette partie a été traitée par notre personne-ressource de l'Association internatio- nale des chefs de police que vous retrouverez dans les notes qui vous ont été remises — on a un total de 37 policiers qui ont été tués à la suite d'un acte criminel. De ce nombre, il y en quinze qui patrouillaient seuls et vingt-deux avaient reçu une assistance quelconque au moment de leur mort. Dans trois de ces circonstances, deux patrouilleurs ont été tués en même temps.

Il y eut même un cas où trois agents de la Gendarmerie royale ont été descendus simultanément en tentant d'arrêter un meurtrier.

Je ne sais pas si certains d'entre vous se rappellent ce qui est survenu en 1962, en Colombie Britannique. Cela avait fait les manchettes des journaux du temps. Ces incidents démontrent bien que le facteur sécurité n'est pas nécessairement relié au nombre de policiers impliqués. Vous savez, ce n'est pas deux plus deux, quatre. Je ne pense pas que ce soit cela. Il y a des zones grises conditionnées à l'entraînement, à l'attitude, au comportement des policiers. On note que 40,5% des policiers tués en devoir étaient seuls au moment de l'attentat. Par ailleurs, il faut souligner que, durant la période concernée par cette statistique, la majorité des corps de police du Canada suivaient le principe des patrouilles individuelles. On peut certainement conclure à un certain parallélisme entre l'expérience américaine et l'expérience canadienne quant à la question de la sécurité des patrouilleurs à deux ou à un seul policier par voiture. Par ailleurs, on peut aussi conclure que, du point de vue du patrouilleur lui-même, les statistiques démontrent qu'il court plus le risque de mourir en devoir s'il est accompagné que s'il est seul dans la voiture. C'est cela. Je vous laisse cela sec comme cela, mais c'est dit. Il faut cependant admettre que cela est dû partiellement au fait que les patrouilles jumelées sont souvent employées sur des scènes où les crimes sont plus graves. Dans ce sens, il faut se demander sérieusement si, dans plusieurs cas, ces mêmes policiers n'auraient pas eu plus de chance en utilisant un système efficace de patrouille individuelle spécialement coordonné pour les appels plus dangereux quand il y a de fortes chances qu'un policier qui arrive seul sur la scène du crime redoublera de prudence étant donné qu'il n'a personne à qui se fier à cet instant.

Ayant d'abord et avant tout à l'esprit la sécurité du patrouilleur, l'expérience nous permet de conclure qu'un patrouilleur bien formé, bien entraîné et travaillant dans une région où le taux de criminalité est relativement bas, une région rurale, court fort peu le risque d'être blessé ou tué en devoir s'il observe les règles élémentaires de prudence. Bien entendu, je ne dis pas que nos postes isolés, que je vous ai nommés tout à l'heure, n'auront pas d'accrochages, que nos gars ne seront pas victimes d'assauts, qu'ils ne se feront pas frapper, qu'ils ne seront pas victimes de coups de feu tirés dans leur direction, qu'ils ne se feront pas déchirer leur uniforme sur le dos. Non. Mais, comme je vous ai dit tout à l'heure, les probabilités sont peut-être un peu moindres. Dans le cas de l'étude sur la région de Waterloo, des recommandations spécifiques ont été formulées en gardant à

l'esprit la nécessité de maintenir une protection et une efficacité maximales a un coût minimal pour le citoyen. Que la patrouille individuelle soit conservée, puisqu'elle répond adéquatement aux besoins usuels de la région de Waterloo et que les patrouilles à deux policiers puissent être utilisées de façon temporaire et pour répondre à des besoins spécifiques, que la direction, de concert avec les chargés d'unités et après consultation avec les policiers, définissent la façon la plus exacte possible les circonstances où les patrouilles à deux sont requises et qu'une procédure soit établie pour leur permettre de passer à l'action le plus rapidement possible.

On ne demande pas de s'encadrer dans un grand texte juridique, mais dans un texte de bon sens avec la pratique policière, où tout le monde va s'y comprendre en employant le même langage, la même sémantique, je dirais même, sans nous abaisser, la même sous-culture, comme disent parfois certains criminologues en parlant de la police. Que la direction s'engage à réviser annuellement ou bisannuellement les conditions et finalement, on parle de l'augmentation rapide de la criminalité, etc., et d'autres facteurs.

A la page 34, vous avez, à l'article 5, qui est très important, il prescrit que des directives et procédures soient préparées de concert avec les policiers directement impliqués concernant la sécurité et l'efficacité au travail de la patrouille individuelle, et que les aspects sécuritaires soient constamment rappelés aux policiers en fonction. On va le faire de façon encore plus intensive parce qu'on a des cours de technique de patrouille, on a des cours d'entraînement en service qui se donnent à l'Institut de police du Québec pour nos enquêteurs où on remémore constamment les méthodes apprises.

Constamment! Je dois vous dire, en toute candeur et en toute honnêteté, lorsque notre jeune policier sort de l'institut, les cheveux frais coupés, les souliers bien cirés, et qu'il commence à appliquer ces pratiques, nos vieux de la vieille, qui sont dans le métier depuis cinq ou six ans, regardent cela un peu de façon ironique. Finalement, la routine tue. Si on avait eu plus de temps, je vous aurais montré un film qui nous aurait amenés à une réflexion très profonde. Cela s'appelle "Routine Stop" et cela démontre que la routine est le pire ennemi pour notre policier. Il y a deux ennemis pour le policier: sa capacité physique, si, parce qu'il est gros, grand et fort, il manoeuvre n'importe qui et que la crainte est le dernier de ses soucis, et d'autre part, la routine qui constitue le plus grand danger.

A la page 35... On ne parlera pas des corps policiers aux Etats-Unis, cela a été dit.

Donc, si on revient au tableau qui est à votre droite, je pense qu'il est assez important, vous le retrouvez dans le bouquin dont je vous ai parlé tout à l'heure. Vous avez les courbes, les heures des crimes qui ont été commis à l'endroit des membres de la Sûreté. Je dis bien, crimes.

Vous avez également l'autre tableau, que vous retrouvez en dernière page, qui décrit les circons- tances dans lesquelles ils sont survenus, de même que le nombre. En conclusion, M. le Président, MM. les membres de la commission, après avoir exposé la mission de la Sûreté, on constatera les besoins opérationnels causés par le déploiement de notre effectif. Malgré ce déploiement, nos membres ne sont pas isolés, grâce à un système de télécommunications hautement perfectionné.

On a dit tout à l'heure qu'on avait des unités boiteuses. Mais il faut tenir compte que la semaine de quatre jours nous amène à un multiple de cinq et qu'on doit corriger ça. Cela vous sera expliqué par une autre personne-ressource.

Ces membres ont été sélectionnés, formés, dotés d'équipements appropriés pour remplir leurs fonctions en toute sécurité. On leur dicte également des lignes de conduite à suivre. Ils doivent intervenir avec discernement.

Déjà, sur le plan de l'application pratique, la politique de la patrouille jumelée laisse entrevoir des incidents sur de nombreuses dispositions prévues ou à venir dans le contrat de travail qui lie la Sûreté du Québec à l'Association des policiers provinciaux du Québec. De plus, l'analyse de l'ensemble des interventions de nos membres révèle que le risque à leur travail, je vous ai montré nos chiffres, 32 000 infractions, 32 000 crimes survenus, 600 000 infractions, 56 000 accidents, 1 million d'interventions, 125 000 "pièces de procédures"...

C'est ce qu'on a fait au Québec. L'examen des politiques et pratiques suivies par d'autres corps policiers démontre qu'on rencontre occasionnellement des patrouilles de deux policiers, au moment où l'incidence et le volume du crime est élevé, quand il y a probabilité de risques et lorsque la nature des opérations l'exige.

Vous avez remarqué, M. le Président, et MM. les membres de la commission que pendant le cheminement que nous avons fait ensemble, nous avons constamment démontré, à travers les catégories de crimes où nos policiers doivent intervenir, la constance, la courbe, compte tenu de sa répartition, durant les heures de la journée.

A cause de la disparité des territoires et des populations desservis, de la répartition du volume d'interventions au cours de la journée qui diffère d'un endroit à un autre, la politique de la patrouille individuelle ou jumelée doit permettre une certaine flexibilité en fonction de circonstances particulières.

Quelle que soit la décision prise, il ressort avec évidence que le jumelage des policiers, en tout temps ou durant certaines heures, réduit la présence policière et affecte le temps-réponse. Il a été démontré, dans les études sur la criminalité, que le taux de solution du crime est directement proportionnel au temps-réponse et que la présence policière est un effet de dissuasion et de prévention.

De plus, je puis vous dire qu'au cours des cinq dernières années, au Québec nous avons réussi, par le déploiement de notre présence policière, en fonction des tendances de la sécurité routière des accidents, des tendances de la crimi-

nalité, parce que l'un ne se dissocie pas de l'autre, nous avons pu maintenir notre taux du crime à un niveau à peu près stable. En plus de cela, nous avons eu de 25% à 35% d'augmentation de notre taux de solution du crime. Nous sommes parvenus également à baisser nos accidents d'automobiles, à réduire le nombre de blessés, mais ce qui est bien plus important dans le coeur de chacun d'entre nous, c'est que 225 personnes qui représentent, à mon avis, la fleur de la société, parce qu'il ne faut pas oublier que des 2000 morts qui surviennent au Québec, 70% ont 20 ans et moins... Prenez 70% d'environ 200, quant à moi, c'est la société québécoise de demain et vous savez qu'on en a besoin.

Il s'ensuit donc que l'efficacité globale de la Sûreté du Québec sera affectée proportionnellement à la fréquence d'emploi de la patrouille jumelée. C'est entendu qu'on vous a dit oui; en fermant des unités, on est capable d'avoir deux patrouilles de jour. Même au moment où on se parle, on est capable d'avoir deux patrouilles de jour. Mais si je prends le poste de Montréal-Métropolitain, ses quatorze véhicules, et que je les jumelle dans sept, vous allez en voir moins souvent et pour les gens qui vont appeler, cela va peut-être être plus efficace. Peut-être, mais cela va prendre plus de temps.

Quand on a un territoire de 100 milles à couvrir, que j'ai deux patrouilleurs et que l'un part le matin, avec des petites pièces de procédure et qu'il ramasse la plainte d'un cultivateur qui s'est fait voler un veau au cours de la nuit, il fait cela en même temps. Chez nous, le policier n'est pas compartimenté. Quand on décidera de le compartimenter et de syndicaliser sa fonction, je m'en irai, parce que ce n'est pas vivable dans cette situation. On réduit le policier à un rôle de minus. Cela prend dix ans avant qu'il embarque dans une auto-patrouille. Chez nous, le policier, on veut le développer, à compter de la première journée qu'il entre en fonction. Cela nous permet de desservir un territoire de 90 milles de long, avec deux policiers, deux policiers qui s'en vont, avec des probabilités... Je ne vous dis pas que cela n'arrivera pas. Pour ceux qui croient encore, demandez à la divine Providence, si cela n'arrive pas. Cela nous est arrivé le soir. Mais les probabilités sont là, on vous les a montrées, de même que l'expérience passée.

On tient toujours compte du déploiement, du temps-réponse et du service. Maintenant au sujet du temps-réponse, du temps d'intervention, il ne faudrait jamais oublier qu'on est, au Québec, trois fois plus grand que la France, dix fois plus grand que l'Angleterre avec huit fois moins point quelque chose de population. Si on veut donner un temps-réponse comme on donne dans une ville, on va manquer notre coup. Il va falloir avoir peut-être 10 000 policiers à la Sûreté du Québec, pour donner le même temps-réponse, temps d'intervention.

Par contre, on s'aperçoit que cela ne nous handicape pas tant que cela, le fait d'arriver au lieu d'un crime avec violence où les gars n'y sont plus. Tout ce qui compte pour nous, c'est de les encercler dans un périmètre et de les retrouver ensuite.

L'application du régime de deux policiers par véhicule obligera la Sûreté à différer certains programmes déjà autorisés, et nous empêchera de maintenir l'efficacité au taux actuel. La semaine de quatre jours, c'est le plus beau régime qu'on a et cela va enlever du stress à nos membres, cela leur donne plus de jours de congé. Il ne faut pas se faire d'illusion, ils travaillent neuf heures par jour, quatre jours par semaine, plus les jours fériés qu'on récupère.

Finalement, que vous travailliez dix ou neuf heures par jour, il reste une journée dans la semaine où vous n'êtes pas là. Il y a un équilibre à faire. Cela va nous obliger à faire tomber... D'abord, en matière de bureaux d'enquête criminelle, on manque d'enquêteurs spécialisés pour enquêter à fond sur les crimes majeurs au Québec.

On ne fait pas d'enquête sérieuse, on fait de l'enquête par priorité et on n'a pas le temps de fouiller à fond chacune des enquêtes. On a eu une mission de nos policiers qui a été dirigée par M. Turpin et qui est allée en Angleterre. A Scotland Yard, cela faisait trois mois, avec à peu près quinze enquêteurs qui travaillaient sur une cause de meurtre. Nous autres, notre gars travaille trois jours et débarque, parce qu'il s'en va sur autre chose. C'est cette qualité, ce temps.

Si vous vous rappelez le fameux voleur du train postal que l'inspecteur Butler est venu chercher pas loin de Vaudreuil, cela faisait dix ans qu'il travaillait sur la cause. On a même prolongé sa retraite. Voyez-vous? Chez nous, on n'est pas rendu à ce point. On aura le renseignement criminel. Vous savez comme moi qu'il se commet une foule de crimes qui ne parviennent jamais à notre connaissance et que des milliers de citoyens se font frauder dans la société et, finalement, ils ne le disent pas à la police, en matière de crime économique, de fraude immobilière et mobilière. C'est par le renseignement criminel qu'on peut décortiquer des situations semblables. On devra mettre une halte dans ce domaine. On devra mettre une halte dans le crime économique. On aurait besoin de 200 enquêteurs dans le crime économique et on ne peut pas se les permettre.

Dans nos bureaux d'enquêtes criminelles, on prévoyait un membre, un sous-officier consacré uniquement à la communication des informations à tous les corps policiers municipaux, tous les matins, à savoir ce qui était survenu la veille pour leur permettre d'orienter leurs patrouilles en conséquence et à tous les comités de prévention du crime, pour leur fournir — la Sûreté du Québec, c'est un organisme gouvernemental — un secrétariat permanent; je ne suis pas sûr qu'on sera capable de faire cela.

Finalement, vous savez, qui trop embrasse mal étreint. Quand on dépense tout notre argent ou tous nos efforts pour une chose, quand on jette... Cela me fait penser un peu à deux chasseurs qui partant pour la chasse avaient mis $30

dans leur poche. Finalement, II y en a un qui revient et dit: Combien as-tu acheté? Il dit: J'ai acheté $29 de bière et $1 de viande. Il dit: Je pense que tu as acheté trop de viande.

Messieurs, brièvement, j'aimerais terminer, peut-être par une remarque sur les fermetures de postes. Sur les fermetures de postes, nos membres de l'association ont exposé des positions fort logiques, sauf que j'ai vu plusieurs membres de la commission sursauter quand on en a parlé. C'est entendu que pour nous, des unités de quinze hommes, de douze hommes, cela n'opère pas. Si vous prenez un multiple de cinq et que vous divisez un poste de quinze par cinq, cela vous fait trois hommes sur une relève. Vous en avez un de malade, il vous en reste deux et un en vacances, il vous en reste un. Finalement, s'il y a un baptême dans sa famille, ou si sa belle-mère vient le visiter, il n'y en a plus. C'est à peu près cela.

Notre modalité d'opération idéale, c'est un poste de trente hommes. Ils ont effectivement raison, mais je me demande comment je vais vendre cela au ministre de la Justice, de fermer Alma, Saint-Ambroise et Chicoutimi, à moins de commencer par lui pour créer un effet d'entraînement chez les autres.

M. Bédard: Si c'était dans l'intérêt des citoyens.

M. Beaudoin: On est effectivement à faire une étude de la consolidation des postes, pour fermer des petits postes et grouper cela. M. le Président, MM. les membres de la commission, je dois vous dire que M. Turpin et moi-même, parce que cela entre chez moi et que, finalement, je lui ai dit: Réponds comme il le faut à cela, en lui donnant certains points, on commence à être habitués, parce que cela arrive souvent. Dès qu'on parle de la fermeture d'un poste, c'est un "crash" économique pour une région, parce que, quinze hommes à $17 000 par année et peut-être $1500 en temps supplémentaire, avez-vous pensé quel montant d'argent cela injecte dans l'économie de la région? Cela occupe des loyers. A ce moment, les résolutions des conseils, cela entre en photocopie. Il y en a un qui en fait une et il passe la photocopie à l'autre, et cela entre. Je pense également, MM. les députés, que j'ai reçu des lettres de certains d'entre vous qui se préoccupent de cela, mais c'est une situation globale. On a parlé de fermer des postes.

Effectivement, cela a bien du bons sens de fermer des postes, sauf que les retombées socio-politico-économiques sont énormes et je ne sais pas comment on peut les contourner. Seuls les membres du Parlement peuvent nous aider, si on a toujours à l'esprit le souci d'austérité, de rationalisation des effectifs, tout en essayant de donner dans un territoire le même service.

J'aimerais aussi ajouter que nos unités spécialisées, telles que nos unités d'urgence, nous ont permis de sortir de bien des situations. La Côte-Nord foisonnait de conflits ouvriers. Au Mont-Wright on avait toujours des gens, c'est là qu'a été la plus grande pagaille dans les relations du tra- vail. Il ne faut pas s'en faire, c'est encore là. C'est sous-jacent, c'est latent, et cela va revenir, cette affaire. Quand on s'attaque à la grève de la construction à la grandeur de la province, il faut donner une priorité de prévention des "goon squads" qui se promènent un peu partout, ce n'est pas qu'avec nos postes qu'on peut faire cela. Il faut qu'on se garde une mobilité d'opérations pour courir après ces gars, les devancer et les arrêter, de façon à permettre au pauvre ouvrier d'exercer son droit de citoyen de travailler, chose qu'il ne peut pas faire dans une province comme le Québec.

En terminant, messieurs, brièvement, un de mes bons collègues, M. Tessier, qui est le spécialiste de la semaine de quatre jours et qui, est aussi un spécialiste de l'étude de la Bible, vous a fait une remarque sur la patrouille à deux hommes, sauf que, plus loin, si on poursuit notre étude de la Bible, il y a bien des vérités qu'on en tire, et on s'aperçoit que le grand chef a donné des conceptions très idéalistes, parce que, quand ils ont vu le territoire et la mission qu'ils avaient à accomplir, les apôtres ont été obligés de se séparer. C'est pour cela que saint Paul est parti pour Rome, Philippe pour l'Ethiopie et Saint-Jean pour Patmos. Ils se sont séparés. Finalement, le Seigneur leur avait servi une leçon qu'ils se sont rappelée, parce que, la seule fois où le grand chef de police a fait de la police, cela a été quand il a chassé les vendeurs du temple et il l'a fait tout seul.

M. le Président, c'est sur cette note d'humour, tout en ayant été sérieux, parce que c'est une situation fort sérieuse que je termine. C'est un peu et avec beaucoup de mélancolie que je l'ai appris ce soir, j'ai commencé par essayer de me conditionner en cours de route, comme administrateur, du bien-fondé des objectifs et des résultats qu'on poursuit, en tenant compte de la sécurité des membres et des deniers que le gouvernement veut bien mettre à ma disposition. Je pense bien que j'ai vu la commission fonctionner ces jours derniers, et je crois que la période de questions, vous gardez toujours cela après que chacune des personnes s'est fait entendre.

Je vous remercie, M. le Président, et MM. les membres de la commission, de votre attention soutenue et de votre intérêt; je pense que vous avez feuilleté les bouquins avec grande attention, je vous ai même vus plier des pages. J'avais oublié de vous apporter des petits "acco" pour mentionner les points importants. J'aimerais peut-être — vous terminez, M. le Président, à 23 heures?

Le Président (M. Laplante): On termine à 23 heures, M. le directeur.

M. Beaudoin: Oui, il est 22 h 35. J'aurais peut-être une personne-ressource, M. Turpin...

Le Président (M. Laplante): M. le directeur, si on commençait d'ici 23 heures, une période de questions, le moment peut venir pour une question et un de vos membres pourra s'exprimer, à moins que ce soient des choses tout à fait spécia-

les que M. Turpin aurait à nous donner avant la période des questions.

M. Bédard: M. le Président, on m'a informé que M. Turpin, chef des opérations, aurait un exposé à faire, qui pourrait durer pas moins d'une demi-heure ou trois quarts d'heure sur le sujet particulier de sa responsabilité. Peut-être y aurait-il eu lieu, dans la demi-heure qui nous reste, de procéder à quelques questions à l'endroit du directeur de la Sûreté du Québec.

Si certaines questions se rapportent à des choses qui nous seront expliquées plus en profondeur demain, à ce moment-là, on nous l'indiquera tout de suite, de telle façon qu'on puisse réserver ces questions pour demain. Cela nous permettrait de prendre cette demi-heure pour des questions peut-être plus générales à M. le directeur de la Sûreté du Québec.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le directeur. On va commencer et finir par la bible que vous avez mise en relief tout à l'heure en demandant à nos disciples de commencer.

M. le ministre.

M. Pagé: M. le Président, au nom de l'Opposition, nous, on croirait qu'il serait peut-être plus opportun de finir l'audition, ce soir, de toutes les personnes et de ceux qui accompagnent le directeur général.

M. Bédard: C'est parce que ce n'est pas possible...

M. Pagé: Par la suite, procéder demain, après qu'on aura eu quelques moments...

M. Bédard: C'est parce que...

M. Pagé: ... pour regarder ces différents documents et analyser tout ça. Demain, on pourrait commencer la période de questions et de commentaires.

M. Bédard: M. le Président, afin de procéder, je pense, de la manière la plus valable possible, en termes de période de questions, ce n'est peut-être pas possible de fonctionner comme ceci, étant donné que celui qui a à nous faire un exposé et qui vient tout de suite après en a pour au moins trois quarts d'heure. A ce moment-là, on va couper, peut-être, un exposé qui, en soi, est sûrement important. On va le couper en deux et je ne crois pas que ce soit à l'avantage des membres de la commission, alors qu'il y a peut-être quelques questions générales sur lesquelles il n'est pas important de revenir dans le reste du débat et qu'on peut adresser au directeur de la Sûreté du Québec.

Le Président (M. Laplante): Dans ce cas, on va commencer dossier par dossier. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, très rapidement, au début de son exposé, le directeur de la Sûreté du Québec, en parlant de la direction de la Sûreté, également en parlant de l'Association des policiers, a tenu à mentionner que, dans le conflit que nous avions eu à vivre, effectivement, personne n'était sorti gagnant. Je crois qu'il a sûrement raison sur ce point, en ce sens que beaucoup d'efforts ont été faits jusqu'à maintenant. On nous en a relaté un petit peu l'historique, très succinctement. Beaucoup d'efforts ont été faits pour faire de la Sûreté du Québec un corps policier respectable et respecté de la part de la population.

Je dois lui dire que, même si nous avons peut-être pris quelque retard, en termes de respect de la population vis-à-vis de son corps policier, avec les événements de Drummondville, je veux quand même exprimer ma conviction que ce retard, solidairement, la direction, l'Association des policiers et le ministère de la Justice, nous pouvons le reprendre rapidement en nous mettant à la tâche le plus efficacement possible.

Comme je l'ai fait pour l'Association des policiers provinciaux, je tiens à féliciter le directeur de la Sûreté du Québec pour son exposé, un exposé volumineux, un exposé aussi très sérieux qui nous indique qu'il a présumé du sérieux de cette commission parlementaire. Je pense que cet exposé que nous avons eu l'occasion d'entendre exprime à tous ceux qui sont ici, comme cela a été le cas pour l'association qui l'a précédé, que le directeur de la Sûreté du Québec a, en définitive, à coeur, non seulement l'avenir de la Sûreté du Québec, non seulement le sens des responsabilités de gestionnaire qui lui incombent et le bien-être de ses policiers, mais également tout cela est fait... Nous avons eu l'occasion de le constater au cours de l'exposé, sans perdre de vue la sécurité de l'ensemble des citoyens qui est quand même la raison d'être fondamentale d'un corps policier.

Nous avons eu l'occasion d'entendre le directeur de la Sûreté du Québec nous faire part, non seulement d'un rapport assez détaillé, mais également d'une documentation importante, comme cela a été le cas pour l'Association des policiers, et de tableaux qui permettent aux membres de la commission de mieux voir l'ensemble de la situation.

Je pense que cette documentation, l'exposé, les tableaux qui l'accompagnaient constituaient d'une certaine façon des éléments de renseignements qui étaient à ma disposition en partie et sur lesquels j'ai eu l'occasion de me pencher, sur lesquels aussi je me suis basé ou s'est basé le ministère de la Justice pour faire les offres qui ont été communiquées à l'Association des policiers provinciaux du Québec par l'entremise de son président, avant la réunion à Drummondville.

Comme nous avons eu l'occasion, M. le directeur de la Sûreté du Québec et moi-même, de discuter longuement de l'ensemble de ce problème, je vous demanderais la permission, M. le Président, adoptant en cela la ligne que j'ai adoptée vis-à-vis du mémoire de l'Association des policiers provinciaux, étant donné le fait que, par la force des choses, j'ai été mêlé au conflit ou au sujet qui nous intéresse d'une façon tout à fait particulière

ce soir, j'aimerais que vous acceptiez que je passe mon droit de parole et de questions au député d'Anjou.

Le Président (M. Laplante): Le député d'Anjou.

M. Johnson: M. le Président, M. le directeur, je voudrais d'abord faire miens les propos du ministre de la Justice. Je pense que l'important travail qu'a accompli l'Association des policiers a trouvé également un écho à la direction. Votre mémoire, les tableaux, pour ce que j'ai pu en parcourir jusqu'à maintenant, sont d'un sérieux irréfutable, je pense. Il peut y avoir, possiblement, des différences d'interprétation sur certaines choses. Je pense que c'est de cela qu'on discutera demain. J'aurais trois questions qui touchent des problèmes précis que vous avez évoqués. D'abord, concernant ce que vous avez appelé les unités d'urgence, j'avoue que, personnellement, je suis dans le brouillard quant à cela. Qu'est-ce que c'est que les unités d'urgence? Il y a combien d'individus dans les unités d'urgence? Qu'est-ce qu'elles font comme travail? Et l'unité d'urgence, si je comprends bien... Dans le mémoire de l'association, on évoquait qu'un démembrement, partiel tout au moins, de cette unité pourrait permettre d'en arriver à une meilleure répartition, à ses yeux, des effectifs. J'espère avoir une réponse précise quant à cela.

La deuxième question touche à cette notion de rapidité d'intervention. Je me suis permis d'être peut-être un peu sévère dans mon ton avec l'Association des policiers provinciaux quand j'ai critiqué le tableau statistique qu'elle nous avait fourni concernant les fameux 17,4 minutes. De la même façon, je me permettrai d'être assez exigeant face à la Sûreté pour savoir dans quelle mesure...

Vous me semblez avoir passé un peu rapidement sur les situations où effectivement, il peut se passer un bon bout de temps entre le moment où un policier fait appel à l'assistance d'un autre et le moment où cet autre officier de police vient rejoindre le premier, d'autant plus que vous semblez, a priori, endosser cette notion que je partage également, que beaucoup de membres de cette commission partagent, je crois, que les policiers n'ont pas à être des Maverick, des Kojak ou des gens d'Anémone 12, que les policiers ont d'abord et avant tout une responsabilité quant à leur propre sécurité, tout en faisant en sorte qu'avec le minimum de risques, ils puissent atteindre un maximum de sécurité.

Ma troisième question sera relative à la fameuse grille; nous n'avons pas le plaisir d'avoir le député de Johnson avec nous en ce moment, ce qui nous permettrait d'avoir un exposé d'une demi-heure sur les travaux des quatre derniers jours.

Ma question sur la grille se référera de façon précise à la page 13 de votre mémoire. Vous y dites que, dans le cas des vols qualifiés, le policier qui reçoit un appel pour ce genre de crime ne s'y rendra pas seul, a moins d'être certain que les auteurs ont déjà quitté les lieux ou encore, lorsqu'il s'y rend seul et qu'il croit qu'il y a risque de danger, il va demander de l'aide avant d'intervenir. Cela me semble aller dans le sens de l'interprétation que je donnais cet après-midi des deux grilles, celle présentée par la Sûreté et celle présentée par une association où j'interprétais un des paragraphes comme étant... il ne s'agit pas de définir de façon restrictive et limitative l'intervention du policier, mais une formule restrictive et limitative se veut beaucoup plus l'ouverture à la notion qu'on intervient seulement si on est sûr.

Je voudrais que vous me confirmiez la souplesse à laquelle est prête la Sûreté à l'égard d'une ouverture et d'un élargissement de cette grille, éventuellement. Vous vous référez également à la page 32 de votre mémoire au sujet de cette question qui pourrait faire l'objet d'une réponse plus détaillée demain, quand vous citez le cas de la région de Waterloo, Ontario, si je ne me trompe pas. Je me demande si vous endossez les paragraphes que vous citez du rapport, suite à la question qui a été posée aux autorités à Waterloo, aux pages 32 et 33. Cela m'apparaît extrêmement intéressant, et je conseillerais peut-être aux collègues de l'association de jeter un coup d'oeil très attentif sur les pages 32 et 33. Je pense qu'on reviendra là-dessus demain également.

Rapidement, les unités d'urgence, la question de rapidité d'intervention et la grille.

M. Beaudoin: M. le Président, M. Johnson, si vous le permettez, je vais demander au chef des opérations, M. Robert Turpin, de répondre aux trois questions, parce que l'une et l'autre sont en corrélation.

M. Turpin (Robert): M. le Président, MM. les membres de la commission, pour connaître un peu le fonctionnement des unités d'urgence, il faut, je pense, se reporter au déploiement général des policiers de la Sûreté du Québec sur le territoire du Québec.

Cela se rapporte un peu au dernier conflit qui a eu lieu en 1971; j'avais été personnellement chargé de mettre en place une cédule de travail permanente qui prévoyait un cycle de travail de 28 jours et une prévision annuelle du déploiement du policier, c'est-à-dire que le policier affecté à l'unité pouvait prévoir un an d'avance, ou à perpétuité, pour autant qu'il ne changeait pas d'unité ou de travail, ce qu'il ferait dans X temps.

Cela apportait une très grande stabilité à la vie des policiers et une stabilité aussi vis-à-vis de la planification du travail. Evidemment, à ce moment-là, il s'agissait de remanier quelque peu le personnel; en mettant en place cette cédule de travail, nous avions pris à ce moment-là une orientation, celle d'offrir une couverture de 24 heures par jour, pour tous les postes reliés au réseau routier de la province.

Les effectifs des unités de base, les postes, les 101 postes reliés au réseau routier, devaient avoir un minimum pour couvrir leur territoire, c'est-à-dire deux hommes en devoir, 24 heures par jour.

Les effectifs étaient restreints à ce moment-là, puisqu'ils le sont encore. Cela voulait dire que les effectifs des postes construits de façon à pouvoir assumer les fonctions de police sur le territoire de leur unité, des fonctions prévisibles, tout ce qui était prévisible.

Ces postes, ou une très grande majorité, avaient chacun, à ce moment-là, un homme ou deux de plus, pour certaines tâches occasionnelles ou saisonnières ou des choses comme cela. On s'est dit, en faisant ce travail de planification globale, que, possiblement, il serait préférable de prendre tous les policiers que nous avions pour des tâches occasionnelles ou saisonnières et d'en faire des unités qui rayonneraient dans une région donnée.

C'est pourquoi les unités d'urgence ont été bâties, un peu, sur une structure militaire. Nous avons présentement 16 pelotons d'unités d'urgence, 16 pelotons de 25 membres, ce qui fait 400 policiers, plus un certain nombre de spécialités que vous a mentionnées tantôt M. Beaudoin. Les 25 pelotons sont disposés de façon stratégique, c'est-à-dire que, dans les plus petits districts, il y a au moins un peloton par section. Nous avons quatorze sections dans la province. Montréal et Québec sont dotées d'un peloton de plus, à cause de la dimension du district.

Les pelotons d'unités d'urgence rayonnent aussi sur 24 heures, c'est-à-dire qu'à Montréal, par exemple, vous avez un peloton d'unité d'urgence en devoir 24 heures par jour. Vous avez, par exemple, le district de l'Estrie ou le district du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui a aussi un peloton, mais qui est distribué de façon à couvrir 24 heures. Or, ce personnel est "stylé" pour les événements qu'on a mentionnés tantôt: toute perturbation sociale, grève, contrôle de foules, événement culturel, événement sportif, recherche en forêt et des choses comme cela. Le personnel est distribué pour prendre soin de ces occasions, de ces événements particuliers et aussi pour supporter les unités de base dans toute campagne de sécurité, que ce soit au niveau de la sécurité routière ou de la prévention du crime ou de la couverture policière générale.

On peut dire, si on regarde une année, une année régulière, une année normale, comme 1975 par exemple, que 80% du temps a été employé à couvrir une présence policière accrue au niveau des postes. Ce personnel va également suppléer à des besoins temporaires d'une unité. Par exemple, si vous avez un policier malade dans un poste ou une relève donnée ou quelqu'un qui se rend à la cour, ou des vacances, ou un besoin de couverture supplémentaire, ce sont les unités d'urgence qui font ce travail.

Vous avez eu le cas, qui nous a été cité cet après-midi, de Drummondville où on a dit, par exemple: II y a eu une grève à la Celanese. C'est évident que cela prend une demi-heure, peut-être trois quarts d'heure pour se rendre de la Mauricie, du siège social, au Cap-de-la-Madeleine, à Drummondville. Néanmoins, cela veut quand même dire que l'unité d'urgence qui a pris la charge de cet événement, pour assister à la fois le poste local et le corps policier municipal, que le territoire du poste de Drummondville a quand même eu sa couverture policière pendant le temps où l'unité d'urgence couvrait l'événement particulier qui était la grève.

M. Johnson: Une parenthèse à ce sujet. Le schème de commandement, à ce niveau...

M. Turpin: Le schème de commandement est le même, c'est le district, le commandant de district est le commandant de l'unité d'urgence, et il agit comme support au niveau des postes. La planification se fait généralement dans des réunions hebdomadaires entre les chefs surveillants, les responsables des bureaux d'enquêtes criminelles, les responsables des bureaux d'alcool et de moralité, le commandant de districts, le coordonnateur qui, lui, connaît bien l'incidence criminelle et l'incidence des accidents dans le territoire donné.

M. Charbonneau: Est-ce que vous me permettez une question? Est-ce que les groupes tactiques...

Le Président (M. Laplante): Non, monsieur. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: C'est seulement une précision sur les mesures d'urgence, pour être certain de comprendre.

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît! Vous garderez votre question quand on reviendra là-dessus. Le député de Portneuf.

M. Pagé: Vous n'avez pas terminé? Il reste deux autres questions.

M. Johnson: Oui, c'est cela, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Le député de Johnson.

M. Johnson: II me reste, effectivement, deux autres questions. Maintenant, je veux bien accepter que l'Opposition puisse s'exprimer ce soir. J'accepterais que les réponses à mes deux autres questions viennent demain. Il n'y a pas de problème.

M. Pagé: M. le Président, je pense qu'on a accepté tout à l'heure, dans un geste contributoire de l'Opposition, que le ministre cède son droit de parole au député d'Anjou, qui a posé quelques questions. Je crois qu'il reste deux questions qui pourraient impliquer des réponses. Il reste seulement dix minutes à la séance de ce soir. On pourrait terminer avec les questions posées par le représentant des parlementaires qui forment le gouvernement, et, demain, on pourrait amorcer les commentaires de l'Opposition officielle, et, par la suite, les questions qui pourraient être suscitées de notre côté.

Le Président (M. Laplante): Merci de votre collaboration. Si vous voulez répondre...

M. Johnson: Ma deuxième question porte sur le problème de la rapidité d'intervention, dans le cas d'un policier qui demande assistance. Le chiffre de 17,4 minutes a été cité à certaines occasions. A votre connaissance, est-ce que vous considérez que c'est un problème relié essentiellement à la géographie de certains districts? Est-ce que vous considérez que c'est un problème généralisé? Est-ce que vous considérez que les solutions à ce problème, on peut les trouver ailleurs que dans la patrouille à deux?

M. Turpin: Disons qu'en premier lieu, on peut analyser le temps de 17 minutes, 34 secondes, qui a été mentionné dans les 109 cas présentés. Si on prend, de façon générale, le fonctionnement de la Sûreté, le temps-réponse peut être calculé d'une certaine manière, parce que le policier qui se rend sur les lieux d'un événement donné a une première formule à remplir, qui s'appelle la formule 400, et qui fait un appel à la mémoire du policier qui se rend sur les lieux.

La première question, c'est: L'événement est survenu à... j'ai été avisé à... et je me suis rendu sur les lieux à... Cette formule n'est pas une priorité à remplir, je vous l'assure. En temps normal, calculer le temps-réponse de cette façon, ça comporterait certains problèmes de précision.

Si on regarde les 109 cas, on n'a pas pris le temps-réponse à partir des formules que je vous mentionne, mais bien à partir de la mémoire des gens qui ont été mêlés à l'affaire. On sait qu'il y a des cas qui datent même de dix ans. C'est pour ça que le temps-réponse de 17,34 est très peu défendable dans ce sens.

Si on parle de la rapidité d'intervention de façon générale, c'est évident qu'à certains moments, ça peut comporter certains problèmes, à cause de l'étendue du territoire. Mais ce n'est pas souvent qu'on entend des plaintes là-dessus parce que, si on prend le volume de travail en général, c'est plutôt dans le sens de vols par effraction, et vous avez, dans les crimes majeurs, une rapidité d'intervention respectable puisque ces cas surviennent généralement dans des localités où il y a des institutions financières, où il y a des magasins importants ou des choses comme ça. Cela ne survient pas dans le fond du rang de Saint-Arrière, comme disait le policier l'autre jour, mais ça survient surtout dans les plus grosses localités. Or, le temps de réponse ou la rapidité d'intervention est aussi rapide que n'importe où ailleurs, parce que ça survient généralement dans ces localités importantes.

M. Johnson: Une troisième question...

M. Turpin: On pourrait y revenir demain. Dans mon exposé, j'avais justement besoin de toucher à ce point.

M. Johnson: D'accord. La troisième question touche maintenant la grille. C'est une question un peu plus vaste, j'ai l'impression, sur laquelle on va avoir à revenir, peut-être demain, à la fin de tous vos exposés. Est-ce que vous êtes ouverts — vous pourrez peut-être nous donner un préliminaire là-dessus ce soir — aux suggestions dans le cas de l'affaire de Waterloo, qu'on retrouve aux pages 32 et 33, où on va jusqu'à spécifier... Mais là, on ne parle pas en termes de conventions collectives. On parle en terme de directives.

Mais tout étant égal par ailleurs, le mutatis mutandis, est-ce que des notions comme, par exemple, celles qui disent: La direction s'engagerait à réviser annuellement ou bi-annuellement les conditions et circonstances particulières qui pourraient justifier un changement de politique et nécessiter la patrouille à deux policiers dans certains secteurs. Il y a toute une notion géographique qui est impliquée, et à laquelle jusqu'à maintenant, on ne semble pas avoir fait appel dans la grille dont on parlait précédemment.

A vos yeux, la Sûreté est-elle ouverte finalement à ce type de prolongement de la notion de la grille où il ne s'agirait pas non seulement de qualifier certains types d'interventions, mais également de caractériser possiblement certaines régions où il faut envisager la patrouille à deux en tant que telle ou encore une directive générale, mais vraiment diffusée de façon générale, qu'il n'y a pas d'intervention d'un policier dans tel type de circonstance ou tel lieu géographique spécifié sans qu'il n'y ait un appel préalable et que l'assistance soit arrivée sur place avant l'intervention? Vous me suivez? Ça va?

M. Turpin: Oui. En premier lieu, la question de la grille que vous avez en main présentement fait partie d'un communiqué publié le 12 avril 1977. Ce facteur n'avait pas encore été mentionné. On avait même dit à un certain moment que le problème demeurait entier.

Les policiers de la Sûreté du Québec retournant au travail le 12 avril, nous étions conscients des ententes conclues; nous avons pris les devants pour publier cette grille à l'intention de notre personnel, et vous n'avez qu'une partie des normes de sécurité sur lesquelles on rappelle à nos policiers en fonction les directives en vigueur.

Quant à l'autre partie de votre question, nous sommes certainement sensibles à toute question de sécurité au travail qui ne comporte pas nécessairement ou obligatoirement la mise en place de véhicules occupés par deux policiers, mais, sommairement — j'y reviendrai demain — je dirais que, dans certaines parties du territoire du Québec qui sont à haute teneur criminogène, les véhicules devraient être disposés de façon que l'assistance d'un autre véhicule puisse être obtenue dans un temps respectable de dix ou quinze minutes.

Cela serait une autre façon de voir la situation et on sait que la majorité des écrits des spécialistes qui ont traité le sujet s'accordent à dire qu'il est préférable en toute circonstance d'avoir un deuxième véhicule que d'obligatoirement avoir un véhicule occupé par deux policiers.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, la commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 57)

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