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Étude des projets de loi privés nos 238,
265, 221 et 240
(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Laplante): La commission de la justice
est réunie aujourd'hui pour étudier le projet de loi privé
no 221, Loi concernant la succession de J. Donat Langelier, la loi 238, Loi
concernant un immeuble de la commission scolaire Beauport, la loi 265, Loi
concernant la succession de Tancrède Bienvenu, le projet de loi 240, Loi
concernant Joseph-Gino Gagné.
Les membres de cette commission sont M. Alfred (Papineau), M.
Bédard (Chicoutimi); M. Blank (Saint-Louis) remplacé par M.
Raynauld (Outremont); M. Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond),
M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaillancourt
(Jonquière). Les intervenants sont: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Duhaime (Sainte-Marie), M. Lavigne (Beauharnois), M.
Léger (Lafontaine), M. Marois (Laporte), M. Pagé (Portneuf), M.
Roy (Beauce-Sud) et M. Tardif (Crémazie).
M. Bédard: M. le Président, je...
Le Président (M. Laplante): Avant, j'aimerais nommer un
rapporteur, M. Clair (Drummond). Maintenant, avant de commencer, je demanderais
aux membres de la commission si vous auriez des projets que vous aimeriez
passer.
M. Bédard: M. le Président, avec votre permission,
je proposerais d'étudier les différents projets de loi dans
l'ordre suivant: 238, 265, 221 et 240. La raison est très simple, c'est
que nous prévoyons peut-être plus de discussions à mesure
que nous allons nous avancer dans les différents projets de loi et,
comme il y a des personnes qui se sont déplacées en fonction de
chacun de ces projets de loi, peut-être y a-t-il lieu, avec le
consentement des membres de la commission, de procéder dans cet ordre,
ce qui permettrait peut-être de libérer plus rapidement certaines
personnes ici.
Le Président (M. Laplante): Les membres de la commission
sont-ils d'accord avec 238, 265, 221 et 240 dans cet ordre?
M. Lalonde: À moins, M. le Président, qu'il n'y ait
des représentations de la salle, nous n'avons pas d'objection à
procéder dans l'ordre inversement proportionnel à la
difficulté, qui semble la voie choisie par le ministre.
Projet de loi no 238
Le Président (M. Laplante): Merci. Maintenant, le projet
de loi 238, Loi concernant un immeuble de la Commission scolaire Beauport.
Est-ce qu'il y a des témoins dans la salle?
M. Cantin (Jacques): Mon nom est Jacques Cantin, de
l'étude Bhérer et Bernier. Je suis l'avocat de la Commission
scolaire Beauport.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre sur
cette loi.
M. Bédard: Je vais attendre après les
représentations.
M. Cantin: Je ne suis pas habitué à la
procédure suivie ici; il me semblait que c'était M.
Jean-François Bertrand qui devait faire la présentation.
Le Président (M. Laplante): Vous pouvez vous asseoir.
C'est seulement pour expliquer le but de ce projet de loi, la raison pour
laquelle vous le présentez.
(10 h 15)
M. Cantin: Le 10 décembre 1881, un M. Joseph Binet a
donné à la Commission scolaire Beauport un terrain d'environ 3500
pieds. Ce terrain a été donné à la Commission
scolaire Beauport à la condition qu'elle y maintienne une école.
Lorsque la Commission scolaire Beauport cesserait d'y maintenir une
école, le terrain devait revenir à M. Binet ou à ses
ayants droit. La Commission scolaire Beauport a maintenu une école
à cet endroit pendant 80 ans mais maintenant l'école est devenue
désuète, c'est une vieille bâtisse de bois, c'est une
grange, en fin de compte, et elle ne peut plus rien faire avec cette
bâtisse. Une grosse polyvalente a été construite à
deux tiers de mille de cet endroit et le terrain est situé au centre
d'un autre terrain d'environ 17 000 pieds carrés qui appartient à
la Commission scolaire de Beauport.
Le problème est qu'on ne retrouve pas les héritiers de M.
Binet. On a une offre d'achat pour vendre tout ce qu'il y a sur les lieux pour
$10 000 et il y a le problème des 3500 pieds carrés. Il faut
enlever le droit qu'a la famille Binet d'exiger le retour du terrain. La seule
solution est de vous demander de passer ce projet de loi privé.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Drummond.
M. Clair: J'aimerais simplement demander à notre
invité quelles sont les démarches qui ont été
faites pour retrouver un héritier. Dans le milieu d'où je viens,
dans la région de Drummondville, la Commission scolaire régionale
Saint-François a plusieurs problèmes de cette nature où
effectivement les descendants de ceux qui ont prêté le terrain
sont toujours vivants et des discussions sont actuellement en cours entre la
commission scolaire et les propriétaires, les ayants droit, si on veut,
de ces terrains. Les ayants droit n'ont pas l'intention de laisser aller ni
l'école ni le terrain.
J'aimerais savoir quelles démarches ont été faites
pour retracer d'éventuels héritiers de cette
propriété.
M. Cantin: D'abord, il y a eu des avis dans les journaux, dans le
Soleil, dans le Chronicle Telegraph et personne ne s'est montré,
personne n'a manifesté l'intention de s'opposer. Le notaire Louis
Grenier, qui n'est pas ici ce matin, qui était chargé de ce
travail, du contrat, a fait des recherches sur la généalogie de
ce M. Binet et n'a retrouvé personne de vivant. C'est le travail qui a
été fait.
M. Bédard: II y a une chose importante de
mentionnée dans votre projet de loi, c'est la clause qui réserve
aux héritiers un droit personnel de toucher une somme égale
à la valeur du terrain calculée à la date de la sanction
de ce projet de loi et que ce droit va demeurer jusqu'à l'extinction
normale du droit des héritiers de se prévaloir. Je pense que
c'est un élément important qui doit être
considéré.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Dans l'ensemble, cela semble complet. Sauf que
j'aurais préféré que dans vos attendus, dans
l'introduction, vous fassiez état de l'absence d'héritiers parce
que vous décrivez la situation juridique, c'est-à-dire la
donation sujette à la condition de maintenir une école. Ensuite,
vous développez très éloquemment l'évolution de
l'école, à savoir que cela a existé pendant 80 ans, que
maintenant l'école n'est plus nécessaire, qu'il y a des services
scolaires à côté, mais la condition de maintenir une
école n'est pas une obligation! C'est simplement une condition
suspensive à ce que la propriété revienne aux
héritiers après coup. Je comprends que, dans l'article 2, vous
prenez soin de cette situation, mais j'ai l'impression qu'on a oublié le
but, l'intention du donateur qui est que cela revienne à ses
héritiers quand il n'y a plus d'école. Ensuite on peut dire que,
naturellement, étant donné la difficulté de trouver les
héritiers, et l'intérêt public qui est qu'on ne force pas
une commission scolaire à conserver une école qui est devenue
inutile, d'accord, on peut conclure comme vous le faites. C'est simplement une
suggestion, parce que c'est plus facile d'arriver à la conclusion comme
cela.
M. Cantin: Je n'ai pas d'objection, si on veut amender.
M. Lalonde: Je n'en fais pas un amendement, cela ne me
paraît pas assez important.
M. Bédard: Non, je ne pense pas. M. Cantin:
D'accord.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que je peux appeler
l'article 1 ? Article 1, si vous avez des détails à donner,
monsieur?
M. Cantin: Vous me demandez de le lire?
Le Président (M. Laplante): De le lire ou de le commenter,
si vous avez des commentaires à faire.
M. Bédard: II n'a pas besoin... M. Lalonde: Pas
besoin. M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté?
Article 2.
M. Lalonde: Vous dites: Toute telle réclamation sera
prescrite le même jour que l'aurait été la
réclamation du droit de propriété dont elle tient lieu.
Dans votre esprit, quand commence à courir cette prescription-là?
Est-ce à compter du moment où on cesse de maintenir une
école?
M. Cantin: Oui.
M. Lalonde: C'est cela que je voulais dire.
M. Cantin: Normalement, la prescription, c'est à partir du
moment ou on a cessé de maintenir une école.
M. Lalonde: Est-ce que c'est une prescription trentenaire?
M. Cantin: Oui, en vertu de l'article 2242 du Code civil.
Le Président (M. Laplante): Article 2, adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 3, adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Projet de loi no 238,
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Projet de loi no 265
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le projet
de loi no...
M. Bédard: 265.
Le Président (M. Laplante): 265: Loi concernant la
succession de M. Tancrède Bienvenu.
M. Gagné (Jean-H.): Jean-H. Gagné, du bureau de
Gagné, Letarte et Associés.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que ce monsieur vous
accompagne?
M. Gagné: Oui, Me Donald Roy, du Trust
général du Canada.
Le Président (M. Laplante): Vous pouvez vous asseoir,
Messieurs.
M. Gagné: Depuis le décès de M.
Tancrède Bienvenu, le 5 février 1931, son testament a
été amendé trois fois par la Législature du
Québec, en 1963, 1970, 1974, ce qui a amené le montant des rentes
à être payé aux enfants et petits-enfants comme suit: au
décès, $6000; en 1963, $8000 pour les enfants; en 1970, $10 000
et, en 1974, $15 000. Aux petits-enfants, au décès, $1200; par la
suite, $2400, $3600 et $5000. La formule contenue au projet de loi aura pour
efftet, s'il est adopté, d'éviter désormais de revenir
devant cette Assemblée pour fins d'ajustement desdites rentes et
pensions afin que la volonté du testateur soit respectée en
donnant à ces rentes et pensions leur valeur réelle en tenant
compte de l'augmentation du coût de la vie pour l'avenir suivant une
formule d'indexation qui est soumise à votre assemblée dans le
texte même du projet de loi.
Au surplus, à l'article 29 de ce testament, le testateur
manifeste sa volonté que les rentes ou pensions qu'il accorde à
ses héritiers soient suffisantes pour que tous vivent convenablement et
suivant leur situation sociale. Ces mots nous font présumer qu'il
était de la volonté du testateur je pense que cela fait
plus que présumer que ces rentes et pensions soient
ajustées pour le moins au coût de la vie d'aujourd'hui.
Alors, c'est l'objet principal du projet de loi.
M. Bédard: Effectivement, comme M. le procureur vient de
le dire, ce projet de loi prévoit un ajustement annuel des rentes
suivant l'augmentation de l'indice des prix à la consommation au Canada,
publié par Statistique Canada... C'est ça?
M. Gagné: Exactement.
M. Bédard: ... ayant effet à partir du 1er janvier
1977.
M. Gagné: C'est-à-dire en... M. Bédard:
Pardon? M. Gagné: Excusez-moi.
M. Bédard: Le présent projet de loi aurait effet
à partir du 1er janvier 1977, selon cette formule-là.
M. Gagné: C'est exact. Nous avons soumis à la
commission la formule comptable qui serait appliquée. Évidemment,
il s'agit de prendre les derniers montants accordés par la
Législature, de les indexer au 1er janvier 1977 et, par la suite,
à chaque 1er janvier, à chaque anniversaire, de donner des
augmentations.
M. Bédard: M. le Président, il est exact que cela
fait au moins trois fois qu'il y a des amendements dans le sens de
l'augmentation de la rente et, d'ailleurs, c'est allégué que la
succession a les fonds suffisants pour répondre à une telle
indexation. À moins qu'il n'y ait d'objection majeure, nous serions
prêts à donner suite à la demande d'indexation qui est
faite par le biais de ce projet de loi privé.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'ai une question. Y a-t-il des héritiers
autres que ceux qui sont mentionnés à votre projet? Y a-t-il
d'autres bénéficiaires de rentes ou de legs? Autrement dit, si on
augmente les pensions ici, les rentes, est-ce que cela va diminuer le
bénéfice que d'autres pourraient recevoir?
M. Gagné: D'aucune manière. Tous les legs ont
été, en somme, légués, donnés...
M. Lalonde: Payés.
M. Gagné: ... payés et attribués, si vous
voulez. Des héritiers qui demeurent, tous sont d'accord avec le
présent projet. Il n'y a personne qui peut souffrir de quoi que ce soit
car seulement les revenus de la succession peuvent être distribués
en rentes ou pensions. Lorsque le plus vieux des enfants M. Roméo
Bienvenu, dans les circonstances aura atteint l'âge de 80 ans, il
n'y aura plus de distribution spécifique, si vous voulez. Tous les
revenus seront partagés à part égale par tête et,
à la fin de tout cela, quand l'arrière-petit-enfant aura atteint
l'âge de 30 ans, le capital qui restera sera distribué à
chacun, par tête et non par souche. C'est ce que le testament dit.
Actuellement, il y a amplement de fonds pour répondre aux
exigences de l'augmentation du coût de !a vie ou de l'indice, de
l'indexation et personne ne peut être lésé.
M. Lalonde: C'est un testateur qui voyait loin.
M. Gagné: Je dois vous dire, M. le député,
qu'il voyait très loin. D'ailleurs, son testament est une pièce
de collection et à lire.
M. Lalonde: Mais pas nécessairement à imiter. Tous
les héritiers seraient continuellement devant les commissions
parlementaires.
M. Gagné: Je dis: À lire, parce qu'il est heureux,
je pense, M. le ministre, qu'on puisse voir des gens qui ont pensé aussi
loin et que tout se comporte aussi bien.
M. Lalonde: En général, est-ce que les
héritiers sont d'accord avec cela?
M. Gagné: Ils sont tous d'accord. D'ailleurs, ce ne sont
pas les héritiers. Il y a une clause dans le testament qui dit que les
héritiers ne peuvent pas se présenter à la
Législature, et il avait même prévu cela. De toute
façon, il n'y a aucune contestation quelconque, au contraire, ils nous
appellent, depuis la présentation du projet de loi, pour savoir quand ce
projet de loi va être présenté
devant la Législature. Au point de vue pratique, ce sont les
exécuteurs testamentaires et les fiduciaires qui ont toute la
responsabilité de voir aux affaires de la succession de façon
très précise.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, étant donné
que les indexations coûtent très cher, ce serait peut-être
prudent de mettre: Sujet à l'existence de revenus suffisants pour payer,
à l'avenir, les pensions en question. Je pense que cela va de soi, mais
il aurait peut-être été mieux de le marquer.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous en faites un
amendement?
M. Bédard: II y a une allégation à savoir
que les revenus...
M. Raynauld: ... sont suffisants aujourd'hui. M. Gagné:
Oui.
M. Raynauld: Mais est-ce qu'ils le seront dans 20 ans? L'indice
du coût de la vie, on peut avoir des surprises.
M. Gagné: J'allais dire: M. Raynauld. M. le
député, il n'y a aucun doute, nous avons déposé les
états financiers de la succession depuis 1974 et même 1977, pour
l'année au complet. En fait, malgré qu'il y a eu un écart
de 47% dans l'augmentation de l'indice du coût de la vie pour les
années entre 1974 et 1977, la différence que cela va provoquer
sur les effets de la succession, cela va faire passer les montants de $152 000
à $176 000 et, malgré tout, la succession va encore payer des
impôts.
Maintenant, quant à moi, le testament ne le permettrait pas, de
toute façon. Il faudrait le relire devant la Chambre pour vous demander
si vous nous permettez d'entamer le capital.
M. Lalonde: La question du député d'Outremont est
très pertinente parce que les députés avaient, il y a
quelques années, eu la même tentation que vous avez et on avait
à peu près employé les mêmes termes. J'ai
noté que vous avez dit tantôt: Pour éviter de revenir
devant cette Assemblée, on avait indexé les salaires des
députés, mais cela a été enlevé il y a un
an. L'indexation, c'est beau d'en arriére, mais ensuite, quand on
regarde cela dans l'avenir, cela peut être un piège. C'est pour
cela que, quand vous m'avez dit qu'à un moment donné il va y
avoir quelqu'un qui va avoir 80 ans ou 30 ans, cela va arrêter ces
choses. Là, cela va être les revenus qui vont être
distribués ou le capital.
M. Gagné: C'est tout.
Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 1.
M. Clair: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 2?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 3?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 4?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 5?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 6?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Projet de loi no 265,
adopté?
M. Bédard: Six, sept?
Le Président (M. Laplante): Adopté, projet de loi
no 265?
M. Bédard: Excusez, c'est parce que j'avais les articles 7
et 8.
Le Président (M. Laplante): J'ai 6 et 7.
M. Bédard: D'accord. Il y a eu tellement de projets de
loi, comme vous l'avez dit.
Le Président (M. Laplante): Adopté, M. le
ministre?
M. Bédard: Oui, adopté. (10 h 30)
Projet de loi no 221
Le Président (M. Laplante): Adopté. J'appelle le
projet de loi no 221, projet de loi privé, Loi concernant la succession
de J. Donat Langelier.
M. Gagné: M. le Président, M. le ministre et MM.
les députés, je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Merci.
Des voix: Bienvenue à cette commission.
M. Lalonde: Ce n'est pas au revoir cette fois.
M. Gagné: Peut-être dans une autre succession ou
autre chose.
Le Président (M. Laplante): Maintenant, on me dit dans ce
projet de loi no 221 qu'il y a un groupe qui fait des représentations et
qu'il y a un groupe qui veut contester le projet de loi aussi. On m'a
avisé.
M. Bédard: On pourrait peut-être entendre les
représentations.
Le Président (M. Laplante): Pardon?
Une voix: II y a un groupe qui fait la demande au Parlement. Il y
a, à ma connaissance, trois procureurs qui représentent quatre
groupes qui ont aussi des représentations à faire sur le projet,
en opposition. Je représente un de ces groupes.
M. Bédard: Je pense que nous allons entendre,
premièrement, ceux qui présentent le projet de loi. Ensuite, ceux
qui s'y opposent.
M. Lalonde: M. le Président, je vous inviterais à
entendre le député d'Outremont, qui aurait des remarques
préliminaires.
Le Président (M. Laplante): Je vais d'abord faire
s'asseoir les témoins, les messieurs qui présentent le projet de
loi pour commencer. Veuillez vous présenter et les personnes qui vous
accompagnent, s'il vous plaît.
M. Tremblay (Charles): Je suis Charles Tremblay, du bureau
Tremblay, Pinsonnault. Je représente les trois héritiers et,
à ma gauche, M. Paul-Émile Blain, représentant du Trust
général du Canada. M. Pierre Favreau, du Trust
général également, qui est la compagnie fiduciaire qui
administre actuellement la succession. M. le Président, si vous me
permettez de résumer...
Le Président (M. Laplante): Avant de procéder
à cela, M. le député d'Outremont avait des remarques.
M. Raynauld: M. le Président, je suis la parrain de ce
projet de loi no 221. Si je suis disposé à proposer
l'étude de ce projet de loi, je voudrais aussi déclarer que je
suis dans les circonstances le proposeur de service, parce que je ne suis pas
en mesure d'exprimer une opinion sur le fond de ce projet de loi. Je voudrais,
avant de supposer que mon appui irait dans un sens ou dans un autre, entendre
les parties et nous verrons par la suite.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député d'Outremont.
Monsieur, si vous voulez faire votre exposé.
M. Tremblay (Charles): M. le Président, je vais d'abord
faire un bref résumé du testament, dire un mot des biens qui le
composent et un mot des héritiers qui présentent le projet de
loi. J. Donat Langelier était un industriel de Montréal. Il est
décédé le 27 juin 1964, il y a donc maintenant près
de 20 ans. Il a laissé un testament, dans lequel il crée une
fiducie en faveur d'un certain nombre de crédirentiers dont les trois
enfants du testateur, qui sont les requérants, Françoise, Jeanne
et Maurice. Le testament a cette particularité qu'il donne instructions
aux fiduciaires de payer d'abord les rentes des crédirentiers et, par
préférence, avec même le droit d'emprunter sur le capital
si les revenus n'étaient pas suffisants. On dit: S'il y a un surplus
et je pense que ceci est extrême- ment important dans
l'interprétation que la commission pourra faire de notre demande
alors, ces revenus devront aller à trois oeuvres de charité. Ces
oeuvres de charité sont la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, à la condition que les montants qu'elle reçoit
servent à l'enseignement du français au Canada, en dehors de la
province de Québec. Les deux autres oeuvres sont des oeuvres de
charité dans le plein sens du mot: le Foyer de la charité du
Cardinal Léger, les Associés de Notre-Dame-de-la-Protection,
oeuvre fondée par Mlle de Maisonneuve. Le montant qu'il y a actuellement
dans la succession est d'environ $2 millions. Le testateur a laissé
environ $4 millions et après le paiement des différents droits et
après le paiement, je dois dire, d'une somme de $730 000 aux oeuvres que
je viens de mentionner, il reste environ $2 millions. Au dernier bilan, que le
Trust nous fournit ce matin, les revenus de la succession sont de $151 894. Il
y a les dépenses de frais d'administration d'environ $10 500 et ensuite,
le service du paiement des rentes.
J'aimerais ici dire enfin un mot des requérants, des trois
enfants de J. Donat Langelier. Je dois dire, en résumé, qu'ils
vivent d'une façon extrêmement misérable depuis
spécialement quelques années. Il y a d'abord Maurice qui est
âgé d'environ 58 ans, qui doit vivre sur la côte du
Pacifique parce que sa condition physique ne lui permet pas de supporter
l'hiver. C'est un grand cardiaque, qui a toutes sortes de troubles
cardio-vasculaires, ulcères d'estomac, tout ce que vous voudrez. Il perd
connaissance un peu partout. Il est absolument incapable de travailler. Il
reçoit de la succession de son père $300 ou $350 par mois. C'est
la plus grande pauvreté. Il vit dans un sous-sol à Vancouver et
il partage ce taudis avec un autre parce qu'il ne peut pas en acquitter le
prix. Il fait une vie absolument misérable. Il a dû s'endetter,
dans la mesure de sa capacité, en engageant plus ou moins le
résultat du présent bill pour arriver à vivre
décemment. Il a un enfant. Le testateur, je dois dire, a prévu
là-dessus que les rentes qu'il donne à ses enfants passeront
à ses petits-enfants et à ses arrière-petits-enfants.
Il y a également Jeanne, une autre fille du testateur, qui est
également très malade, qui est mariée, divorcée,
qui a encore la charge d'un enfant et à qui on verse par mois la somme
actuelle c'est indiqué dans le bill de $7200 par
année. C'est la même chose, sauf que dans le cas de Jeanne le
testateur a prévu, à cause de son état mental instable
elle doit faire régulièrement des séjours à
la clinique qu'aucun bien ne pourra lui être dévolu
directement. Le Trust général administre pour elle et lui fait
remise au fur et à mesure de ses besoins.
La troisième requérante est Françoise.
Françoise est dans la même situation; elle n'a aucun autre revenu
que les $7000 que lui accordait son père en 1964; elle est
également dans un état de grande pauvreté parce qu'elle a
dû s'endetter d'une façon considérable pour arriver
à joindre les deux bouts. On reprochera possiblement tout à
l'heure à cette héritière le fait qu'elle a reçu,
par
un legs particulier, un montant d'environ $400 000 au moment où
son père est mort. Il ne lui reste strictement rien de ce montant. On
pourra probablement lui reprocher de l'avoir mal administré ou je
vous le soumets respectueusement d'avoir été mal
conseillée; quoi qu'il en soit, ce montant n'existe plus et elle n'a
aucun autre revenu que les $7000 en question. Elle a, à ma connaissance,
plus de $25 000 de dettes, ses biens sont saisis, elle vit également
dans une chambre à Montréal et elle fait l'objet de nombreux
jugements contre elle.
Je prévois, sans en avoir la certitude, que les oeuvres de
charité contesteront ce matin le droit que je demande que cette
charité aille d'abord aux enfants de leur propre bienfaiteur; cela me
paraît une situation assez paradoxale. Je ne veux pas anticiper sur ce
que mes confrères auront à dire, mais je souligne encore une fois
que les héritiers qui s'opposent sont des héritiers
résiduaires; ils ne sont pas sur le même pied que la famille et
c'est uniquement dans la mesure où il y aura une résidu, un
excédent qu'ils viennent dans la succession.
Je signale, de plus, que ces héritiers sont, sauf la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, des oeuvres de
charité. Je soumets respectueusement qu'il m'apparaît que ces
oeuvres devraient collaborer afin de permettre que la première
charité élémentaire aille aux enfants du testateur qui
sont dans une pure indigence.
Messieurs, je n'ai pas d'autres remarques à faire à ce
stade-ci. Je vais, comme vous, écouter les objections et je me ferai un
plaisir de compléter les informations.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Bédard: Vous comprendrez que nous sommes à
même de compatir avec la situation qui est celle de certains des
héritiers. Je pense que vous comprendrez aussi l'obligation du
législateur de respecter la volonté qui a été
exprimée par le testateur. C'est une obligation fondamentale que nous
avons tous, au niveau des membres de cette commission.
M. Tremblay (Charles): M. le ministre, je soumets
respectueusement que les tribunaux sont liés par la volonté du
testateur, mais que la Législature est toute puissante et qu'elle n'est
nullement liée par la volonté du testateur. D'ailleurs, si tel
n'était pas le cas, nous aurions pu nous adresser aux tribunaux pour
demander que certaines dispositions du testament soient
réalisées. Cependant, il ne nous est pas possible, dans
l'état actuel du testament, de faire quoi que ce soit. C'est pourquoi
les héritiers s'adressent à la Législature pour demander
la réparation d'une très grave injustice à l'égard
des enfants, d'une part, et d'autre part, l'ajustement pur et simple des rentes
qui datent maintenant de 20 ans. Mais il est important que cette commission
sache que la Législature est toute-puissante et qu'elle n'est nullement
liée par la volonté du testateur.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je ne pense pas que ce soit le moment de faire une
discussion philosophique sur l'intervention de la Législature. Dans
l'ensemble, je pense que vous avez raison quand vous dites que le tribunal est
lié par la volonté du testateur, tant de l'interpréter que
de l'appliquer. Mais quant au législateur, je pense que ce serait
seulement dans le cas d'injustices qu'il devrait rétablir une situation
qui paraîtrait réellement injuste, soit par l'évolution de
la situation, soit par, peut-être, les détours inattendus de
l'esprit déformé d'un testateur. Mais dans le cas contraire, je
pense que, quant à nous, nous éviterions d'intervenir. J'aurais
quelques questions. Quelles sont les clauses du testament pour la disposition
des biens, du capital?
M. Tremblay (Charles): II n'y en a aucune. Le capital est
suspendu indéfiniment et il faut s'attendre à ce qu'un
débat judiciaire se fasse au moment de la mort du dernier crédit
rentier pour savoir ce qu'il advient du capital. Nos théories
s'affrontent là-dessus, celles de mon confrère et de
moi-même, sur ce qui adviendra du capital. Mais je dois signaler qu'il
n'est pas prévu quelques dispositions que ce soit pour la remise du
capital à un moment ou à un autre. Je pourrais exposer ici les
théories juridiques que je crois applicables, mais je ne pense pas
vraiment que cela aide au débat. Si vous le voulez, je peux le
faire.
M. Lalonde: Je ne pense pas que ce soit notre rôle, ici, de
trancher mais je voulais savoir si c'était clairement
déterminé que, dans dix ans, le capital va aux enfants ou quelque
chose comme cela. Il s'agit de passer une période temporaire de
difficultés mais qui peut se corriger en hypothéquant le capital
éventuel. Il ne semble pas que ce soit le cas ici. Je comprends par
votre réponse que ce n'est pas clair et qu'il va y avoir un
débat?
M. Tremblay (Charles): Non. C'est tout à fait clair. Il
n'y a pas de dispositions concernant le capital. Étant donné
qu'il n'y en a pas, ce qu'il y a de moins clair, c'est de savoir ce qu'on
fait.
M. Lalonde: Ce qui va arriver. C'est ce que je voulais dire, ce
n'est pas clair.
M. Tremblay (Charles): Je pense que la solution est d'ordre
judiciaire. Mes confrères prétendront probablement tantôt
qu'elle devrait faire l'objet d'une nouvelle intervention de la
Législature. Ce qui est également possible.
M. Lalonde: Quels sont les revenus moyens, depuis quelques
années, de cette succession? Les revenus nets après les
dépenses d'administration et tout cela?
M. Tremblay (Charles): C'est ce que j'ai signalé tout
à l'heure, environ $150 000 par année.
M. Lalonde: Cela veut dire que l'an dernier, sur un revenu moyen
de $150 000, deux rentes à $7200, cela fait $14 400, une à $3600,
alors que vous avez un peu moins de $20 000 de rentes. (10 h 45)
M. Tremblay (Charles): $18 000.
M. Lalonde: $18 000. La différence a toujours
pendant ces 14 ans été versée aux institutions
mentionnées.
M. Tremblay (Charles): Elle n'a pas été
versée année par année, parce que les montants de
succession avaient été gelés par ententes avec le
gouvernement fédéral pour le paiement des taxes. On a
accumulé les revenus et on a versé en deux versements un montant
de $600 000 aux oeuvres pour tenir compte de ces revenus accumulés et un
autre montant d'environ $130 000, de sorte que les oeuvres ont reçu
jusqu'à maintenant $730 000 environ, par opposition à la rente
des enfants.
M. Bédard: II n'y a pas seulement ces rentes dont vous
avez parlé, il y a d'autres rentes dans le testament?
M. Tremblay (Charles): Oui, mais elles sont minimes. Aux cousins,
neveux et nièces, et qui sont tout à fait minimes.
M. Lalonde: Combien à peu près en tout par
année?
M. Tremblay (Charles): Environ $10 000.
M. Lalonde: $10 000.
M. Bédard: Pour chacun des héritiers?
M. Tremblay (Charles): Non, c'est l'ensemble.
M. Bédard: Pour l'ensemble?
M. Tremblay (Charles): Pour l'ensemble du groupe qui n'est pas
les trois enfants. Vous avez d'abord les trois enfants, par priorité, et
vous avez ces neveux et nièces; au total cela forme environ $10 000, de
sorte que la succession, actuellement, pour la famille est engagée pour
environ $30 000 sur un total de $150 000.
M. Fontaine: Si la situation restait telle quelle, cela voudrait
dire que, dans les années à venir, les organismes de
chanté recevraient environ $132 000, en augmentant avec les
intérêts de chaque année?
M. Tremblay (Charles): Oui.
M. Lalonde: Quant à moi, cela me donne une bonne
idée du cadre du débat. Peut-être que M. le ministre et les
autres membres sont d'accord pour entendre les autres intervenants.
M. Fontaine: Est-ce que vous pouvez nous dire quel sera l'effet
de l'augmentation des rentes aux enfants sur le montant d'argent qui est
versé aux organismes de charité advenant le cas où l'on
accepterait l'augmentation que vous demandez?
M. Tremblay (Charles): Le calcul est assez simple. Il faudrait
faire la différence entre ce qu'ils reçoivent maintenant et ce
que l'on demande. On reçoit actuellement $18 000 au total et on demande
$60 000, en sorte que c'est $60 000 moins $18 000 qui est l'objet de la
demande. Je vous ferai remarquer que les héritiers ne sont pas de jeunes
enfants, ils sont tous dans la soixantaine ou à peu près. Ils
sont assez malades.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Bédard: Vous parlez des enfants qui sont en
priorité par rapport à d'autres. Vous me corrigerez si je fais
erreur, mais concernant le testament les enfants ne sont pas en
priorité. Ils sont sur le même pied que les frères.
M. Tremblay (Charles): Le groupe numéro un, M. le
ministre.
M. Bédard: Non, mais vous me permettez de continuer.
M. Tremblay (Charles): Je vous en prie.
M. Bédard: Vous me donnerez l'explication, parce que je
pense que le groupe un est suffisamment détaillé pour voir que
tous les gens à l'intérieur du groupe un sont sur un pied
d'égalité. Vous me corrigerez si ce n'est pas cela. On y retrouve
non seulement les enfants mais également ses frères: Arthur
Langelier, la somme de $100; Jean-Baptiste Langelier, la somme de $100; sa
ménagère, Mme Blanche Bélanger, la somme de $100;
également une demoiselle Marguerite Bourgeois, qui était
employée au Conservatoire de musique de Québec, qui a
également la somme de $100.
M. Lalonde: Marguerite Bourgeois, ce n'est pas...
M. Bédard: Vous êtes d'accord que ces gens sont sur
un pied d'égalité à l'intérieur du groupe un.
M. Tremblay (Charles): Tout à fait, M. le ministre. Et,
lorsque je parle de priorité, c'est vis-à-vis des oeuvres. Ils
ont priorité vis-à-vis des oeuvres qui, elles, sont
légataires résiduaires, mais le groupe numéro un est en
priorité et a même droit d'entamer le capital. Je pense que c'est
très important de voir, dans la mesure où c'est le désir
de cette commission de respecter les volontés du testateur, que la
philosophie du testament donne une priorité aux enfants.
M. Lalonde: Est-ce que l'exécuteur testamentaire s'est
penché sur l'état des autres personnes,
le frère, la ménagère, à savoir si elles
auraient besoin, elles aussi, d'une augmentation?
M. Tremblay (Charles): Le projet de loi n'est pas
présenté par le fiduciaire. Il est présenté par les
trois enfants du testateur et, en conséquence, cela pourrait faire
possiblement l'objet d'une demande, mais il n'y a pas eu de démarches
à cet effet.
M. Lalonde: Vous allez m'éclairer. Le Trust
général est ici au nom de quel...
M. Tremblay (Charles): Des fiduciaires. M. Lalonde: Des
fiduciaires.
M. Tremblay (Charles): Oui, il y a deux fiduciaires. L'un est
Françoise, l'une des trois enfants de J. Donat Langelier, et l'autre
fiduciaire est le Trust général. Ce présent projet de loi
est présenté par les enfants et non pas par le fiduciaire.
M. Lalonde: Vous représentez les enfants, vous?
M. Tremblay: Oui.
M. Lalonde: Le Trust général aurait-il des...
M. Blain (Paul-Émile): Je suis Paul-Émile Blain et
je représente le Trust général. C'est très simple.
L'attitude prise par le fiduciaire dans cette affaire est la suivante. Le
fiduciaire a considéré que son obligation de fiduciaire
était de veiller à l'application complète du testament,
tel que rédigé par le testateur. Si la Législature,
après avoir entendu les débats qui pourront se développer,
croit qu'il y a lieu d'intervenir et de faire adopter une loi privée
pour modifier certaines dispositions du testament, le fiduciaire continuera
à se conformer à la loi qui pourra amender le testament. En
d'autres termes, messieurs, je voudrais préciser ici une situation
peut-être particulière. Comme on a pu le constater, aux termes du
testament, il y a deux fiduciaires exécuteurs testamentaires. Le projet
de loi de ce matin vous est présenté par les héritiers,
les enfants, dont un se trouve à être, en même temps,
co-fiduciaire exécutrice testamentaire en la personne de Mme
Françoise Langelier. Quant au fiduciaire, le Trust général
du Canada, il n'entend faire aucune représentation quelconque ce matin
sur l'opportunité d'accueillir, de rejeter ou de modifier le projet de
loi tel que soumis.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Bédard: On a parlé tout à l'heure de
revenus nets de l'ordre de $150 000. De ce montant, faut-il déduire les
frais d'administration du Trust général?
M. Blain: Voici, M. le ministre, si vous me le permettez. J'ai
devant moi les états financiers de la succession préparés
et certifiés par la maison comptable Samson, Bélair et
Associés en date du 31 mai 1978. Cela correspond à l'exercice
financier de la succession qui va du 1er juin au 31 mai. Ces états
financiers arrêtés en date du 31 mai 1978 établissent les
montants suivants. Les revenus nets de l'exercice se chiffrent à $116
889. De cette somme, il faut déduire le montant des rentes
versées, toujours suivant les dispositions actuelles du testament, qui
s'établissent à $29 400; ce qui laisse la différence comme
revenu net, c'est-à-dire $87 489. C'est pour l'exercice terminé
le 31 mai 1978.
Je ne sais pas si nous avons ce matin en notre possession les
états financiers des années antérieures, soit 1977 ou
1976, mais je pense que, globalement, je puis affirmer au nom du fiduciaire, le
Trust général, que ces revenus ont été assez
constants, parce qu'ils proviennent de placements.
M. Bédard: II y a eu des revenus assez constants que vous
pouvez identifier. Ce que je voudrais savoir, c'est ceci: Quels sont les
revenus bruts de cette succession avant que le Trust général ne
prenne la part qui lui est dévolue pour l'administration?
M. Tremblay (Charles): M. le ministre, j'ai ici les chiffres, qui
nous ont été fournis au 30 septembre, qui indiquent...
M. Blain: Je m'excuse.
M. Bédard: Non, s'il vous plaît!
M. Blain: Je me réfère aux mêmes états
financiers arrêtés au 31 mai. Les revenus bruts de la succession
étaient de $132 764. De ces revenus bruts, il y a lieu de déduire
les frais d'administration, certains honoraires payés au
vérificateur et autres déboursés encourus qui totalisent
$13 753; ce qui laisse un revenu net de l'exercice de $116 889.
Également, il faut souligner qu'on constate aux états de
revenus de location qu'ils accusent une perte... Ce qui arrive, c'est que, aux
termes du testament, Jeanne Langelier a un droit d'habitation.
Évidemment, on ne perçoit pas de loyer au rez-de-chaussée
et on continue d'assumer les dépenses générales
d'entretien de la maison, chauffage, etc., c'est ce qui explique qu'au bilan on
constate, à revenus de location, une perte de $2122.
Pour répondre à votre question, M. le ministre, au 31 mai
1978, encore une fois selon les états financiers vérifiés,
le revenu brut est de $132 764; les dépenses globales, incluant les
honoraires d'administration et les autres honoraires payés, sont de $13
753, ce qui laisse un revenu net de $116 889.
M. Bédard: D'accord.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions,
messieurs?
M. Fontaine: Comment se fait-il que le procureur des
héritiers nous a dit tout à l'heure qu'il y avait des revenus
annuels de $150 000?
M. Tremblay (Charles): Je vous remercie de la question, c'est
très aimable à vous. Cela va me permettre de faire une
correction; je me demandais si je devais la faire. Les revenus de la succession
proviennent, en partie, de certains placements d'environ $900 000 que l'on fait
en obligations et en choses comme cela et d'une somme d'environ $1 million qui
est une hypothèque, qui rapporte, elle, un très bas pourcentage
de revenu, environ 6%, de sorte qu'il y a, chaque année, une somme de
$50 000 de cette hypothèque qui revient en capital. Les revenus de la
succession ont augmenté par ce mécanisme, d'une part, et par le
fait que, pendant longtemps, pendant la plus grande période de
l'administration de la succession, il y avait des compagnies qui faisaient des
prêts et des choses comme cela avec évidemment plus ou moins de
bonheur. Maintenant, tout est liquidé depuis environ deux ans et la
situation s'est améliorée, de sorte que les derniers chiffres que
je vous ai signalés de $151 000 sont ceux fournis par le Trust en date
du 30 septembre. Alors, je les exhibe à mon confrère. Je pense
qu'il ne les contestera pas, c'est lui qui me les a remis ce matin; $151 884 en
date du 30 septembre.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions? M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Comment avez-vous établi votre demande de
$1650 mensuellement? Autrement dit, vous passez de $600 à $1600 pour
Françoise et Jeanne et de $300 à $1650 pour Maurice.
M. Tremblay (Charles): Cela représente à peu
près $20 000 par année. On ne pouvait pas diviser exactement $20
000 en douze. Alors, c'est le chiffre qui se rapproche le plus de $20 000. Cela
m'apparaissait être un montant raisonnable dans les circonstances,
étant donné que c'est leur père qui a laissé cette
fortune, et qui comporterait également une espèce de rattrapage
étant donné l'âge des héritiers et étant
donné le fait qu'ils ont dû s'endetter pendant les 20 ans ou
presque qui se sont écoulés. Alors, $20 000, dans les
circonstances, serviraient de rattrapage pour permettre de liquider les dettes,
de rembourser les dettes qu'ils ont été obligés d'encourir
et également pour leur permettre de faire une vie décente.
M. Lalonde: Les 20 ans ou presque... Mon petit calcul mental
donne 14 ans, de 1964 à 1978.
M. Tremblay (Charles): C'est vrai, de 1964 à 1978, oui, 15
ans.
M. Lalonde: Vous réclamez aussi l'indexation. M.
Tremblay (Charles): Oui.
M. Lalonde: Vous suggérez l'indexation. Je me demandais si
vous vous étiez servi du même principe pour arriver à
$1650. Je ne sais pas si vous avez fait le calcul; moi, je n'ai pas les
éléments pour le faire. Si cette rente de $600 par mois avait
été indexée en partant de 1964 à 1978, quel montant
cela ferait-il?
M. Tremblay: Je n'ai pas fait le calcul, M. Lalonde.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions, M. le
ministre?
M. Bédard: Vous savez que le testament prévoit,
pour le dénommé Maurice, une rente qui est égale à
la moitié de celle qui est prévue pour Jeanne et
Françoise. Votre demande vise à égaliser les rentes.
Pourquoi ne gardez-vous pas la même volonté très clairement
exprimée par le testateur?
M. Tremblay (Charles): M. le ministre, au moment du
décès de J. Donat Langelier, Maurice était encore capable
de travailler et son père ne voulait pas encourager chez lui une
certaine paresse. C'était un homme de grande discipline. Je l'ai connu
personnellement pendant de nombreuses années et c'était
également un ami de la famille. C'est la raison pour laquelle il lui
avait donné $300 par mois. (11 heures)
Maintenant, et depuis plusieurs années, Maurice est dans
l'incapacité absolue de faire le moindre travail. Il a de la
difficulté même à faire une promenade actuellement et c'est
la raison pourquoi je dis que c'est là une injustice, qui
m'apparaît, je le soumets respectueusement, très grave à
l'égard des propres enfants, n'est-ce pas, des bienfaiteurs des oeuvres
de charité.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Bédard: Me permettez-vous? Le Président (M.
Laplante): Oui.
M. Bédard: II y avait des distinctions bien
précises d'un testament qui étaient faites entre le groupe un et
le groupe quatre. On ne retrouve pas ces distinctions dans les amendements, le
projet de loi que vous présentez. Est-ce que vous pouvez nous
expliquer?
M. Tremblay (Charles): Par rapport au capital? Il n'y a rien du
capital. Le testament ne parle pas du capital.
M. Blain: Je m'excuse d'intervenir. Dans un cas, le testateur
prévoit qu'on peut...
M. Bédard: II indique la rente.
M. Blain: ... diriger le capital pour payer la rente alors que
dans le groupe quatre, le capital est inaccessible.
M. Bédard: C'est cela. Je pense que c'est une
différence fondamentale. Pourquoi on ne la retrouve pas?
M. Tremblay (Charles): C'est qu'on a prévu dans le groupe
un un montant moindre qui fait qu'on pourra emprunter sur le capital. Ensuite
on nomme d'autres personnes et on revient un peu plus loin pour ajouter, mais
ce sont les mêmes héritiers et cette partie n'est pas sujette
à emprunt sur le total. Mais encore une fois, M. le ministre, ceci est
tout à fait théorique étant donné que le testateur
a laissé plus que suffisamment d'argent pour ne pas avoir à
toucher au capital.
M. Bédard: Si c'est indexé, c'est moins
théorique. Cela peut avoir à venir à toucher au
capital.
M. Tremblay (Charles): Peut-être. Je n'ai pas fait le
calcul. À cela, on pourra peut-être ajouter: Pour autant que
l'argent suffisant sera là.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Est-ce que vous avez eu un représentant des
héritiers, des discussions avec les trois organismes de charité
en vue d'en venir à une entente sur le partage des rentes qui devrait
être fait?
M. Tremblay (Charles): Voici, oui. Il y a eu des discussions, je
dirais, pendant quelques années, de façon à envisager un
partage entre les oeuvres de charité et nous-mêmes. Ces
discussions n'ont pas abouti à cause des répercussions fiscales
qu'on nous a représentées, que ce partage aurait et à
l'époque des discussions du partage, il n'était pas
nécessaire de présenter un bill immédiatement parce que,
comme je l'ai souligné tantôt, il y avait dans cette succession de
nombreuses compagnies. Alors, on faisait en sorte que les compagnies paient
certains salaires pour compenser l'injustice, je pense qu'il faut employer les
mots, faite aux enfants. De sorte que les enfants pouvaient plus facilement
attendre un dénouement qui serait soit le partage, soit le bill. Mais
aujourd'hui, ces compagnies sont disparues. Il n'est plus possible de payer aux
enfants, par le Trust général, autre chose que ce qui a
été prévu en 1964, d'où l'extrême urgence de
s'adresser à la Législature, maintenant, depuis la disparition
des compagnies.
M. Fontaine: Mais cela n'avait pas été prévu
dans le testament que les héritiers recevraient des salaires des
compagnies.
M. Tremblay (Charles): C'est un mouvement qui avait
été fait, de consentement de tout le monde, pour remédier
à cette situation qui est extrêmement pénible.
M. Blain: Avec la permission des membres de la commission, je
voudrais juste apporter une précision ici, il y a eu un lapsus de commis
tantôt. Je voudrais signaler que jamais le Trust général,
comme fiduciaire n'a payé quelque salaire que ce soit. On s'est toujours
limité à verser des rentes. On n'avait aucune mesure de
contrôle sur les compagnies qui faisaient partie de la succession. Les
compagnies, elles, ont peut-être payé des salaires. Mais je
voudrais simplement signaler qu'en aucun moment il n'y a eu autre chose de
versé par le Trust général que les rentes prévues
au testament.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'aurais seulement une autre question, parce que vous
répétez le mot "injustice" depuis tantôt. Vous avez eu une
bonne parole pour le testateur tantôt, que c'est un homme de grande
discipline. Croyez-vous qu'au moment de l'ouverture de la succession, en 1964,
il y avait une situation d'injustice?
M. Tremblay (Charles): Certainement beaucoup moindre, parce que
la situation était bien différente. Les deux filles
étaient mariées, n'étaient pas divorcées. L'argent
de 1964 valait plus, substantiellement, que l'argent de 1978. Aujourd'hui, ces
deux jeunes dames de l'époque sont divorcées et n'ont aucun
revenu, aucune rente provenant des maris et l'argent de 1978,
évidemment, a beaucoup moins de valeur. Il y avait certainement une
injustice, si vous demandez le fond de ma pensée.
M. Lalonde: Sauf pour les $400 000 qui réparaient une
bonne partie de l'injustice pour une personne.
M. Tremblay (Charles): Certainement. Je m'excuse de l'avoir omis.
Mais pour un seul des héritiers. Ce n'était pas donné aux
trois.
M. Lalonde: Oui, cela fait déjà un tiers. M.
Tremblay (Charles): Oui, tout à fait.
M. Lalonde: Une des héritières a eu $400 000,
d'après ce que je comprends.
M. Tremblay (Charles): Oui, en legs particulier, mais il ne reste
rien de cet argent.
M. Lalonde: Maintenant, pouvez-vous éclairer les membres
de la commission, en tout cas moi personnellement? Dans quelle mesure le
législateur devrait-il intervenir pour réparer une injustice qui,
d'après ce que vous me dites, s'est créée par
l'écoulement du temps et l'évolution de la situation, la
détérioration de la santé des héritiers? Dans
quelle mesure devrions-nous intervenir dans une situation comme
celle-là?
M. Tremblay (Charles): Dans la mesure où vous jugerez que
mes représentations sont vala-
bles. Vous êtes absolument tout-puissants comme
législateurs.
M. Lalonde: Non, ce n'est pas cela. Je le sais, mais donnez-nous
des justifications pour intervenir.
M. Bédard: On n'est pas tout-puissants à ce
point-là.
M. Lalonde: II faut s'accrocher à des principes, quand
même.
M. Tremblay (Charles): La justification, c'est que ces gens sont
dans une misère profonde, qu'ils sont assez âgés et que les
légataires qui seront les bénéficiaires de ce qu'on n'aura
pas sont également des oeuvres de charité. Alors, il y a
là une logique assez simple, il me semble, pour que l'on
considère que, peut-être, les enfants devraient avoir une vie
décente, avant que les oeuvres de charité ne redonnent ce
même argent à d'autres bénéficiaires de la
charité. Il ne faut pas oublier qu'on est en présence de deux
groupes de charité, de toute façon. Ou la charité est
faite à ces enfants, dans la mesure où vous déciderez, ou
elle est faite à d'autres, à des étrangers, parce que ce
sont des oeuvres de charité qui sont légataires
résiduaires, de sorte que ce n'est pas comme s'il y avait une
concurrence entre des héritiers privés qui devaient en faire leur
propre bénéfice.
M. Lalonde: Il me semble que ces étrangers ont quand
même reçu un caractère quasi familial par la volonté
du testateur, étant donné qu'il les a inclus dans la
dévolution de ses biens. Ils ne sont plus des étrangers, il me
semble.
M. Tremblay (Charles): Non, je ne parle pas des
légataires, quand je dis les étrangers. C'est que, les
légataires étant des oeuvres de charité, elles devraient,
normalement, toutes choses étant égales, remettre cet argent
reçu de la succession à des étrangers, à d'autres
pauvres, si vous voulez. Elles ne le gardent pas pour elles-mêmes. C'est
ce que je veux dire. Le qualificatif d'étrangers n'est pas
adressé aux oeuvres de charité, mais aux
bénéficiaires de ces oeuvres.
Le Président (M. Laplante): D'autres questions?
M. Bédard: Je crois que, quand vous parlez d'injustice, il
reste que le testament est un tout. Dans le cas de Françoise, il y a eu
quand même un legs de $400 000.
M. Tremblay (Charles): Oui, mais, M. le ministre, il s'agit
là de primo vivere. On est aujourd'hui au niveau...
M. Bédard: II s'agit d'oublier le passé. C'est la
seule façon.
M. Tremblay (Charles): C'est qu'il ne lui reste rien. Je ne suis
pas prêt à dire qu'il n'y a pas de blâme qui pourrait lui
être adressé, mais je dis qu'elle a quand même le droit de
vivre, quelles que soient les erreurs qu'elle a pu faire dans le passé.
Elle n'a actuellement aucun autre revenu. Je pense que c'est ce qui importe. Si
on veut lui faire le reproche d'avoir dilapidé des biens,
là-dessus, il y aurait beaucoup à dire.
M. Bédard: Écoutez, ce n'est pas ce reproche qu'on
lui fait. Je vous dis qu'un testament se prend dans un tout et qu'elle a eu,
effectivement, $400 000. C'est ce que je vous dis. Vous parliez d'injustice
tout à l'heure. Il y a quand même des éléments qu'il
faut porter à la connaissance des membres de la commission ici.
M. Tremblay (Charles): Je l'ai signalé, M. le
ministre.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Au moment de l'ouverture de la succession, est-ce
que vous pouvez nous dire combien il y avait d'argent disponible pour verser
des rentes aux enfants et combien cela leur aurait donné à chacun
si le de cujus avait décidé de leur remettre le tout?
M. Tremblay (Charles): II a laissé environ $4 millions,
mais les droits successoraux et autres ont pris près de $2 millions.
Cela aurait été le revenu de $2 millions, à peu
près $150 000.
M. Fontaine: Pouvez-vous m'expliquer pourquoi le testateur a
décidé de ne donner que les montants prévus dans le
testament?
M. Tremblay (Charles): À ses enfants? M. Fontaine:
Oui.
M. Tremblay (Charles): II faudrait entrer dans le for
intérieur du testateur, je ne peux pas le faire.
M. Fontaine: Ne pensez-vous pas que c'est cette opinion du
testateur qu'on devrait respecter?
M. Tremblay (Charles): Ce serait vrai d'un tribunal, mais pas de
la Législature, je le soumets respectueusement. Un tribunal serait
lié par cela, mais pas la Législature.
M. Fontaine: Vous avez parlé de salaire, tantôt;
pouvez-vous nous dire approximativement combien a été
versé en salaire par les différentes compagnies?
M. Tremblay (Charles): Je n'ai pas ces chiffres.
M. Fontaine: Ne pensez-vous pas également que si on donne
l'augmentation que vous réclamez il pourrait y avoir possiblement, de la
part des
deux maris divorcés, s'ils sont encore vivants, des
réclamations pour pension alimentaire?
M. Tremblay (Charles): Je ne le pense pas, mais tout est
possible.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, nous aimerions
entendre le groupe des opposants, s'il vous plaît.
M. Viau (Pierre): Mon nom est Pierre Viau, je suis avocat et je
représente un des héritiers du groupe six que mon confrère
a décrit tantôt, le Foyer de charité. Je représente
le groupe qui s'appelle le Foyer de charité, un des héritiers du
groupe six.
M. Paquette (André): André Raquette, avocat. Je
représente deux des oeuvres. Je représente les Associés de
Notre-Dame-de-la-Protection qui sont maintenant connus sous le nom Le
Chaînon et je représente également la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal.
M. Barakett (Frank): Frank Barakett, avocat. Je représente
les enfants d'une des filles de Donat Langelier, Jeanne, qui ont
l'intérêt né et actuel dès le moment de son
décès en vertu du paragraphe 28 du testament.
Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'on peut vous
entendre?
M. Barakett: Je préférerais attendre, si vous
n'avez pas d'objection.
Le Président (M. Laplante): Oui.
M. Viau: Dans le cas qui nous occupe, quant à nous, il
faut quand même signaler quelle était précisément
l'intention du testateur. Le testateur est décédé le 27
juin et la veille, le 26, apparaît le deuxième codicille qui
cède tout le coffret de sûreté à Françoise
Langelier. Les $400 000 dont on vous a fait état ici, je suis convaincu
que c'est un minimum, cela a pu être plus que cela.
Deuxièmement, quand le testateur un peu avant, en janvier 1964, a
fait un autre codicille, j'aimerais qu'on note ce qu'il avait inscrit au cas de
disparition des oeuvres: "Au cas de disparition, d'extinction ou de cessation
d'existence de l'une quelconque des fondations ci-dessus mentionnées, il
y aura accroissement en faveur de celles qui subsisteront, mais si les trois
venaient à ne plus exister, là et alors tous les revenus de ma
succession non absorbés par les rentes prévues au groupe
précédent seront versés à l'Archevêché
de Montréal pour être utilisés à des oeuvres de
charité canadiennes-françaises et au Canada seulement; ces
oeuvres de charité devront être approuvées au
préalable par mes exécuteurs testamentaires".
Quelle était l'intention du testateur quant aux oeuvres? C'est
bien clair. Même si on venait à disparaître demain matin,
nous, les revenus ne remonteraient pas dans les groupes au-dessus, ils iraient
à l'Archevêque de Montréal pour servir à d'autres
oeuvres. C'était l'intention du testateur. D'accord? Il faut
établir cela bien clairement.
Comment ces oeuvres vont-elles disposer des biens? Pour notre part, le
Foyer de charité comprend présentement 100 personnes dont 45
environ sont soit alitées soit en chaise roulante et ne sont
acceptées dans aucun hôpital. Cet organisme existe depuis 1951 et
ne vit que de dons, de biens ou de sommes d'argent et de legs. Il ne
reçoit aucune subvention gouvernementale, aucune aide autre que ces
dons. Depuis 1951, 4419 personnes ont trouvé refuge a Foyer de
charité et toujours suivant la même formule. Les personnes qui
travaillent là le font d'une façon tout à fait
bénévole, gratuitement. Cela a toujours fonctionné comme
cela. (11 h 15)
À ma connaissance, il n'existe que deux oeuvres de cette nature
dans le monde, une à Montréal et une à Turin. Cela avait
été fondé, à l'époque, par le cardinal
Léger, en 1951, et cela a toujours continué à exister de
cette façon. Les coûts d'entretien de ces personnes, qui ne
relèvent pas de l'État, s'élèvent à $138 000
pour l'année dernière. Toutes ces dépenses ont
été payées uniquement à même ce genre de
revenus et de dons tant en nature qu'en argent. Là-dessus, je pense
qu'il faut considérer que le testateur connaissait à ce
moment-là l'oeuvre qui existait depuis 1951 et que, quand il a fait son
testament, il le savait. Ce qu'on demande aujourd'hui, en somme, c'est de
refaire un autre testament, mais à l'avantage de trois héritiers
dont l'un, malheureusement, a reçu une part assez substantielle de
l'héritage du testateur. Qu'est-il advenu de ces fonds-là? On ne
le sait pas. Mais il a reçu une part substantielle.
Pour notre part, M. le Président, nous avons appris ce matin, de
la bouche d'un de nos confrères, qu'il y avait eu des revenus constants
de plus de $100 000. Jamais on ne nous a dit, dans le passé, qu'il y
avait eu des revenus constants. Les premiers revenus qu'on a eu à
partager, c'était en 1976, je crois. Avant cela, il y a eu un montant
global donné aux oeuvres afin de régler des discussions qui
étaient rendues au point de se retrouver devant les tribunaux sur ce qui
avait été fait, comment on avait dépensé les fonds
et comment on avait utilisé les fonds depuis 1964. C'est en 1976 qu'il y
a eu un paiement pour régler le passé, de $200 000 à
chacune des deux oeuvres. Si les revenus de $100 000 ont été
constants depuis 15 ans, peut-être bien qu'on vous demande de couvrir des
contestations éventuelles parce que c'est ce matin qu'on vient
d'apprendre qu'il y avait eu des revenus constants! Voyez-vous?
Quel est l'effet de ce projet de loi? Si vous calculez rapidement
mon confrère Paquette donnera plus de détails là-dessus
c'est d'éliminer, à toutes fins utiles, dans un certain
nombre d'années, par le jeu des indexations et tout cela, les trois
oeuvres, à la fin. Si c'était cela l'intention du testateur, il
aurait au moins prévu que, si les
oeuvres disparaissaient, les montants reviendraient à ses enfants
ou à d'autres héritiers! L'effet pratique de ce qu'on vous
demande avec ce projet de loi, c'est de nous éliminer.
Qu'avons-nous proposé depuis de nombreuses années à
nos amis qui font la demande devant vous ce matin? C'est de régler le
partage une fois pour toutes. Nous n'avons pas d'objection à nous
asseoir et nous n'avons jamais eu d'objection. Au contraire, nous l'avons
offert à plusieurs reprises, mais on nous a toujours refusé de
décider de partager le capital! Qu'on règle par une
procédure devant la Législature un partage du capital, soit, nous
sommes d'accord là-dessus. Mais qu'on ne vienne pas vous demander, par
exemple, de les établir dans une espèce de position de force en
se créant des pensions supplémentaires pour, ensuite, vous
admettre, ici à la barre, que le capital semble gelé
indéfiniment et que cela relèvera peut-être des tribunaux
un jour. Si on est pour régler la question, réglons-la une fois
pour toutes et qu'on ne vienne pas vous demander d'augmenter des pensions, ce
qui a pour effet de nous sortir éventuellement du testament, pour que,
plus tard, nous nous retrouvions devant les tribunaux pour régler la
question du capital. À ce niveau-là, nous avons toujours offert
cette proposition et nous l'offrons encore ce matin.
Dans ces conditions, nous ne pouvons faire autrement que de nous opposer
pour toutes les personnes que nous représentons. Le directeur du foyer
de charité, l'abbé Bélanger, est ici ce matin. Si vous
voulez avoir des détails sur le fonctionnement de son oeuvre, sur ce que
je viens d'affirmer, soit que personne, là, n'est
rémunéré et que cela fonctionne de la façon que je
viens d'expliquer, il vous les fournira. Nous ne voulons pas que le Parlement
endosse une intention aussi opposée à celle du testateur, mais
nous sommes prêts en tout temps, si votre commission consent à
suspendre ce projet, à nous asseoir avec les représentants des
dames Langelier, à négocier un partage et à revenir devant
vous en disant: Voici, nous nous sommes entendus là-dessus et,
même si nous ne nous entendons pas là-dessus, il sera encore temps
de trancher le débat. À ce moment-là, si les
héritiers reçoivent $100 000, $200 000, $300 000 qu'ils veulent
dépenser en dedans de cinq ans ou de deux ans, cela ne nous regardera
pas. On prendra la part qui nous reviendra en vertu de ce partage et on la
placera pour nous occuper des gens dont nous devons nous occuper.
Dans ce cas-là, j'ai fouillé jusqu'en 1965 les projets de
loi sur les successions. Je n'en ai pas vu qui prenaient l'argent dans un
plateau pour le mettre dans un autre plateau, sauf si tout le monde
était d'accord. Ce que j'ai vu, c'est qu'il y a eu des clauses qui
permettent certains partages ou qui peuvent hâter un partage.
Je me demande si c'est la façon présentement que de jouer
sur une clause de rentes, dans l'ensemble du testament qui a pour effet,
à un moment donné, de nous faire disparaître du portrait,
tandis qu'on pourrait le régler, le partage.
Le Président (M. Laplante): Monsieur.
M. Paquette (André): M. André Paquette. Voici, j'ai
un certain nombre de remarques par rapport à certaines affirmations qui
ont été faites. Je demanderais s'il y avait un moyen qu'on dise
à l'assemblée la somme exacte que Mlle Langelier a reçue,
et de quelle façon elle l'a reçue, parce que je crois que c'est
une somme exempte d'impôt. Ce qui augmente immédiatement la valeur
du legs. Pour le compte de Le Chaînon qui a été connu sous
d'autres noms auparavant, dont Les Associés de Notre-Dame de la
Protection, et antérieurement sous le nom, je crois, de L'oeuvre de la
protection de la jeune fille, qui avait une institution sur la rue
Vitrée dans le quartier chinois, que les avocats montréalais
connaissent parce que l'on passe souvent devant cela, et qui maintenant est
plutôt au coin de Mont-Royal. C'est une oeuvre d'hébergement
temporaire de femmes éjectées du foyer et d'enfants. Il y a deux
représentantes qui sont ici, Mlle Viens et Mlle Morissette, qui pourront
vous donner les détails. Mais très rapidement, il y a eu 127
personnes d'hébergées l'an dernier. C'est une oeuvre qui n'est
secourue ni par le ministère des Affaires sociales, ni par Centraide, ni
par personne. Il y a 30 bénévoles qui travaillent sans salaire
à temps plein pour s'occuper des enfants qui sont hébergés
là, sur Sainte-Famille.
Quant à la Société Saint-Jean-Baptiste, le don ou
le legs qui lui est fait c'est pour les francophones hors du Québec. Je
pense bien que tout le monde dira que si ce n'est pas aujourd'hui qu'on les
aide, ce n'est pas dans 50 ans qu'il sera temps de les aider. Les remarques
assez dures que j'ai à faire au sujet du projet de loi qui vous est
présenté ce matin, c'est que je ne trouve pas décent qu'on
vous présente un projet de loi comme cela sans vous donner toute
l'information que vous avez le droit d'avoir dans vos dossiers. Il ne semble
pas que vous ayez quelque état financier que ce soit. C'est un premier
reproche.
Je dois vous dire qu'avant 1975 il n'y avait que peu ou pas de revenus
dans la succession, parce que tous les revenus étaient conservés
dans des compagnies où les revenus étaient accumulés, de
telle sorte que, de 1964 jusqu'à 1976, les trois oeuvres n'ont rien
reçu. On a dit tantôt qu'il y avait $4 millions et qu'il restait
$2 millions et que, dans la diminution du capital, il y avait $700 000 qui
étaient allés aux oeuvres. Ce n'est pas exact, ce n'est pas ce
qui est arrivé. Ce qui est arrivé, c'est qu'à même
le capital et les revenus accumulés, les revenus accumulés dans
les compagnies ont été versés à la succession
après paiement d'impôts assez importants et ce sont ces revenus
accumulés qui ont été distribués. Il ne faut pas
jouer sur deux tableaux.
On a reçu, en 1976, environ $700 000 provenant de revenus
accumulés dans des compagnies. Quand nous avons reçu cela, c'est
au moins dix ans après avoir demandé des comptes. Je ne veux pas
mettre le Trust général du Canada en cause, à ce
moment-là, c'était un autre trust qui s'en occupait. Il n'y a pas
eu moyen d'avoir quelque information que ce soit. C'est seulement quand M.
Jussaume est entré dans le dossier, vers 1973, je crois, qu'on a
pu avoir les premiers états financiers et savoir ce qu'il y avait dans
cette succession. Nous n'avons pas encore tous les détails. Nous ne
savons pas combien mademoiselle a reçu. Nous ne savons pas quels sont
les impôts qui ont été payés. On sait qu'il y a des
impôts qui ont été payés. On sait que mademoiselle a
eu un legs. On sait que des salaires ont été payés dans
les compagnies, mais ces informations, nous ne les avons pas, même si
cela fait près de quinze ans qu'on se chicane dans ce dossier. On a eu
beaucoup de patience.
Quand nous avons reçu les $300 000, l'histoire est très
simple. On essayait de nous jouer les uns contre les autres pour nous
provoquer, les uns et les autres; c'est à ce moment-là que nous
avons fait front commun et qu'on a envoyé des lettres de mise en demeure
très dures conjointement. À ce moment-là, on a pu avoir
des états financiers. M. Belzile, qui ne peut pas être ici ce
matin parce qu'il n'a pas été prévenu à temps
il est parti à Paris; je pense qu'il est revenu, mais il n'est
pas ici a pu étudier ce dossier après 1974. Nous avons
fait un règlement pour $200 000 par an; c'est un règlement. Il
avait été formellement envisagé de procéder par
action en dommages. Il y a pour au moins de $600 000 à $700 000
d'impôt de trop qui ont été payés. Si ces
compagnies-là avaient été dissoutes peu après le
décès, il y aurait eu une économie d'impôt
formidable.
Ce n'est pas une histoire si simple que l'histoire de la succession
Langelier et je crois que cela n'est pas correct pour vous que de vous donner
si peu de détails. Il y a autre chose qu'on ne vous a pas dit. Au
début, il y avait un montant de $4 millions dans la succession; je ne
peux vous le dire; je ne le sais pas. On dit qu'il en reste $2 millions. Les
chiffres au 31 mai montrent $1 613 000. Ce reliquat est, en partie, permis par
le fait que les trois oeuvres ont permis à la succession Langelier de ne
pas être taxée parce qu'il y avait l'impôt sur les
successions, à ce moment-là, au fédéral comme c'est
encore le cas au provincial. Il y a eu une économie d'impôt
formidable là-dessus.
Vous n'avez aucun chiffre dans vos dossiers; cela n'est pas correct.
Nous autres non plus, vous savez. Jeudi dernier, nous nous rassemblons; nous
avons, à ce moment-là, les états financiers au 31 mai
1977; on part sur une base de $100 000 par année. Deux jours
après je ne blâme personne on reçoit les
états financiers au 31 mai 1978: $116 000 par année. C'est vrai
qu'on m'a dit qu'il y aurait du nouveau dans les revenus. On m'a dit qu'il y
aurait du nouveau dans les revenus hier à 13 h 30. Ces chiffres sont des
chiffres de dernière minute; ce ne sont pas des chiffres
certifiés que les $151 000; c'est un budget. Les seuls chiffres
certifiés que vous avez dans le dossier sont $116 000 dont Me Blain vous
a parlé tantôt et ils sont signés par Samson, Bélair
et Associés. Les autres chiffres sont des budgets dont on a
été mis au courant hier à 13 h 30. On n'a pas pu faire
d'études là-dessus. Les études qu'on a pu faire sur
l'effet de la loi et de l'indexation sont basées sur les $110 000 ou les
$116 000. S'il y a une indexation à 8%, on ne reçoit rien sur la
base de $116 000 approximativement vers 1986. Si on prend une indexation
d'augmentation du coût de la vie de 10%, c'est en 1983. Aucun chiffre
dans vos dossiers ne vous démontre ce qui va arriver dans l'avenir
prochain au sujet de cette succession et de l'indexation.
Je pense que, quand il y a divers ordres d'héritiers en cause,
l'effet des changements dans la loi, l'un par rapport aux autres, devrait
être démontré à votre commission. Il me semble que
c'est de la décence. Il n'y a rien de cela. La raison est
peut-être que les chiffres n'étaient pas disponibles. Les chiffres
qu'on cite ce matin, on les a eus hier midi. Je ne pouvais pas les avoir. Cela
ne permet pas non plus de faire une étude intelligente d'un
problème. (11 h 30)
Si les dossiers devaient être complétés, je
suggérerais que le dossier des impôts successoraux payés
par la succession soient versés là-dedans pour qu'on ait une
idée de ce qui s'est passé et des mouvements successoraux
là-dedans: l'impôt sur les legs particuliers, qui a sûrement
été payé à même la masse pour le compte de
Mlle Langelier, le montant de ce legs particulier, le montant des impôts
épargnés par le fait que, quand nous nous sommes
présentés, c'est-à-dire quand le bureau de Stikeman s'est
présenté devant le ministère du Revenu provincial, il a
présenté, pour le compte de la succession et des
héritiers, et des exécuteurs testamentaires, en tout cas, que les
héritiers sur le capital, c'étaient les sociétés.
C'est comme cela qu'ils ont eu des exemptions au provincial et au
fédéral. Cet aspect doit être dans votre dossier.
Ce testament a tout de même été accepté
depuis quinze ans. Les héritiers ont tous reçu leurs rentes et
celle qui demande des modifications actuellement était tout de
même exécutrice testamentaire. Pour ces raisons, on vous demande
de suspendre l'étude de ce projet de loi. Nous avons tenté
d'avoir des négociations sur le capital. On vous a dit qu'il y avait eu
deux ans de négociation. Il y a eu des lettres de mise en demeure, des
redditions de compte partielles, des tentatives d'entente de paiement de rentes
en retard. Une fois ces rentes en retard, je pense qu'on a eu une
réunion pour discuter de la disposition du capital, à proprement
parler. Cela a fini là, après le paiement des revenus dus.
Une autre raison, évidemment, pour demander la suspension de
cela, comme je vous l'ai dit tantôt, c'est que les chiffres tout
récents, on ne les a pas, on vient de les avoir sous forme de budget.
S'il faut parler sur le fond, je demanderais d'être entendu mais, pour le
moment, d'accord avec mon confrère, je demande la suspension pour que
nous puissions discuter avec les héritiers et leurs représentants
d'une disposition globale du testament, et pas d'une disposition partielle qui
aura purement et simplement pour effet de mettre une partie en position de
force par rapport à l'autre. Merci.
Le Président (M. Laplante): Me...? Votre nom, s'il vous
plaît.
M. Barakett: Barakett.
Le Président (M. Laplante): Si vous voulez prendre un
micro, s'il vous plaît!
M. Barakett: Je répète que je représente les
trois petits-enfants du testateur, tous d'âge majeur aujourd'hui, en
vertu du paragraphe 28 du testament. En vertu de ce paragraphe, il y avait une
clause spéciale qui prévoyait que, dans la souche de Jeanne
Langelier, il soit prévu d'abord et avant tout, de payer les frais
d'instruction et d'éducation des enfants au premier degré de
cette fille, ce qui faisait que, contrairement aux autres petits-enfants, dans
les deux autres souches, dès le décès du testateur, ils
avaient un intérêt au testament. Il est bien évident que,
un peu entre l'arbre et l'écorce, un héritier présent et
tantôt éventuel, pour une souche au complet, pourrait venir
s'opposer à un tel projet de loi. C'est effectivement la position que
nous adoptons ce matin. Maintenant, je vais tenter de répondre à
certaines des questions qui ont été posées par les membres
de la commission, entre autres, par le député de Nicolet. Vous
avez demandé si on savait pourquoi le testateur avait laissé des
legs à trois enfants dans des proportions différentes. Il s'agit
tout simplement de regarder le nombre de petits-enfants existants à ce
moment-là pour se rendre compte, car il y a une représentation,
que le fils, Maurice, qui avait $300, n'avait qu'un enfant et que, dans les
deux autres souches, il y en avait trois. C'est tout de suite un bon indice.
Or, on vient fausser cela dans le présent projet de loi.
Je veux bien croire que, pour la souche que j'intitule Maurice, ce
monsieur est bien malade aujourd'hui, mais il est déjà rendu dans
la soixantaine et votre bill aurait pour effet de remédier à
autre chose dans l'avenir qui dépasse la vie de celui qu'on tente de
soulager présentement. Vous changez complètement la base du
testament et l'intention du testateur en ce faisant. Deuxièmement, en
tant que procureur pour ces trois enfants, on n'a pas pu avoir beaucoup de
renseignements. On a fait des demandes pour que ces trois enfants puissent
poursuivre leur éducation et leur instruction et, à ce jour, ces
demandes n'ont pas été acceptées par les exécuteurs
testamentaires dont Françoise qui est une des requérantes devant
vous aujourd'hui.
Pendant tout ce temps, elle était la seule
héritière à jouir du titre du directorat comme
administrateur d'une des compagnies et avait de plus quelques mille dollars de
revenus. Je trouve que c'est injuste. Je trouve que le dossier
présentement est dans une situation de litige. Je ne pense pas que ce
soit le devoir ou le but de votre commission d'ajouter du poids en faveur de
l'une ou l'autre des parties dans un litige éventuel. Le grand souhait
de mes clients aurait été que toutes les parties ensemble se
retrouvent autour d'une table pour vous présenter d'un commun accord le
règlement de cette succession. Une des raisons qui font que les trois
enfants sont particulièrement intéressés à ce qui
peut se passer ici aujourd'hui, c'est que l'article 28 créait une sorte
de fiducie à l'intérieur de la fiducie pour veiller à la
façon dont l'héritière Jeanne dépensait son
argent.
Il y avait une raison très particulière pour cela. Cette
dame a toujours été instable mentalement. Elle est entrée
et sortie de plusieurs institutions mentales, de Royal Douglas, etc. Sa
condition se détériore. C'est pour cette raison que nous jugeons,
étant donné qu'elle jouit de cet argent et la façon dont
elle le dépense, qu'il ne serait pas tellement opportun ni dans
l'intérêt de qui que ce soit que la rente soit augmentée
d'une telle façon et qu'elle puisse davantage dilapider ses biens. Il
devrait y avoir des mesures conservatoires dans ces cas. Il est bien clair que
le testateur prévoyait dès le début que ses enfants ne
pouvaient pas gérer l'argent et tout ce que les événements
ont prouvé depuis, c'est qu'il avait bel et bien raison.
On vous demanderait, de la part de ces trois petits-enfants, d'ajourner
ou de rejeter le bill tel que présenté devant vous et de
souhaiter, probablement dans l'intérêt de tout le monde, que les
parties se présentent à une date ultérieure avec un bill
qui a l'assentiment de tous les intéressés au testament.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, est-ce qu'il y a
des questions?
M. Bédard: On nous a parlé des difficultés
d'obtenir des renseignements sur le portrait financier de l'ensemble de la
succession. Je m'adresse au représentant du Trust général.
Est-ce qu'il n'y a pas une règle de droit qui oblige quand même le
fiduciaire à donner ces informations au niveau des héritiers ou
des légataires?
M. Blain: M. le ministre, il est très évident qu'il
y a une règle de droit qui impose cette obligation aux fiduciaires et
même j'irais au-delà de cette règle de droit, le simple
devoir naturel jouerait dans ce cas. Me Paquette, dans les
représentations qu'il a faites, vous a signalé qu'à
l'ouverture de la succession les fiduciaires en place n'étaient pas le
Trust général du Canada. On vous a indiqué
également qu'il y a eu une espèce de déblocage qui s'est
effectué à compter du jour où, depuis 1973, le
président, défunt aujourd'hui, du Trust général du
Canada, M. Jussaume est intervenu comme on dit dans le portrait. Il ne faut pas
perdre de vue qu'il y a eu une multiplicité de complications dans le
cheminement des différentes compagnies avec les études qui ont
été faites pour essayer d'éviter au maximum les impacts
fiscaux, etc.
Je ne veux absolument pas faire de représentations pour ce qui
s'est produit avant l'instant où ma cliente et moi-même avons
été immédiatement responsables du dossier comme
fiduciaires. Pour répondre à votre question, M. le ministre, on a
semblé nous faire grief d'avoir produit des états financiers un
peu tardivement. Je ne nie pas les
dates, mais je voudrais préciser que ces états financiers,
dans le cas des bilans vérifiés au 31 mai 1978, vous avez tous,
messieurs, l'expérience et vous connaissez ce que sont les délais
quand on doit attendre après des firmes de comptables. Bref, nous
n'avons eu ces états financiers en notre possession que la semaine
dernière. Dès que nous les avons eus, nous les avons fait
parvenir à ceux à qui nous devions les faire parvenir. On vous a
fait état des tentatives d'accord et des rencontres. Effectivement, je
peux affirmer parce que j'ai assisté à chacune de ces
rencontres qu'il y a eu plusieurs rencontres. À plusieurs
occasions, nous avons eu la possibilité de soumettre des chiffres, aux
représentants, en particulier, des sociétés de
charité, des bénéficiaires du sixième groupe. Ces
chiffres ont été examinés plus spécialement par M.
Belzile. Je ne crois pas qu'on puisse, franchement je parle pour le
Trust général accuser le Trust général de
quelque incurie ou de quelque négligence que ce soit dans ce dossier.
C'est une affaire délicate, compliquée. J'attire l'attention des
membres de la commission sur le fait que, dès l'ouverture de la
succession, il y avait le co-fiduciaire à l'exécutrice
testamentaire qui était Mme Langelier également.
M. Tremblay (Charles): Je m'excuse, mais c'est tout à fait
inexact.
M. Blain: Je m'excuse, je retire ce que j'ai dit, mais je sais
que Mme Langelier est devenue exécutrice testamentaire par la suite.
M. Tremblay (Charles): C'est beaucoup plus tard. Dix ans plus
tard.
M. Blain: Ce qui s'est passé, dans les premières
années qui ont suivi immédiatement l'ouverture de la succession,
je ne suis absolument pas en mesure d'éclairer les membres de la
commission là-dessus. Ce que je peux vous dire, c'est que depuis deux
ans, à ma connaissance personnelle et je pense que mes
confrères seront d'accord avec cette affirmation nous nous sommes
employés à faciliter le déblocage, à
procéder à la liquidation des compagnies et à fournir,
dans la mesure du possible, les chiffres qu'on était en état de
fournir. Nous avons fait intervenir une firme de comptables
indépendants, Samson, Bélair et Associés, et c'est
après avoir produit ces chiffres et après avoir entamé des
pourparlers en vue d'un accord global que nous avons fait le premier versement
de $200 000 à chacune des sociétés.
Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'il y a d'autres
groupes qui auraient aimé se faire entendre concernant cette loi?
Maintenant, j'appelle l'article 1.
M. Bédard: Je ne sais s'il y a des membres de la
commission qui ont des représentations globales avant que nous
n'entrions dans le projet de loi, article par article.
M. Lalonde: M. le ministre invite à des
représentations globales. Je ne sais pas dans quelle mesure cela va
correspondre à son point de vue, mais avant de s'employer à
prouver, désapprouver ou modifier les articles, j'aimerais que les
membres de la commission examinent la possibilité de renoncer simplement
à l'adopter, actuellement, il y a sûrement un conflit
évident sur une situation qui a une base juridique très claire,
un testament qui crée des droits, que les tribunaux peuvent être
appelés, éventuellement, à appliquer. Ce n'est pas notre
rôle de le faire. Toute intervention, à ce stade-ci, pourrait
préjudicier, d'un côté comme de l'autre,
c'est-à-dire en faveur ou en défaveur d'une partie, et ce n'est
sûrement pas le but de cette institution dont nous faisons partie.
Une voix: On pourrait ajourner sine die. (11 h 45)
M. Lalonde: II y aurait le caractère d'injustice qui a
été invoqué par Me Tremblay qui représente les
trois enfants. J'ai tenté d'obtenir plus d'éléments qui
pourraient me convaincre, qui m'auraient persuadé qu'on devrait
intervenir; je n'ai malheureusement pas, quant à moi,
d'éléments suffisants pour suggérer à mes
collègues de la commission d'intervenir dans le sens du projet de loi.
Je me demande si d'autres membres auraient d'autres suggestions à faire
dans ce sens. Je ne suis pas complètement contre ni pour, c'est
évident; je me demande si on ne pourrait pas nous donner d'autres
éléments qui pourraient me convaincre que je dois appuyer ce
projet de loi. Actuellement, je n'en ai pas assez.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Je pense également que les dépositions
qui ont été faites devant nous nous éclairent sur la
situation des deux parties, des deux sortes d'héritiers, mais je pense
qu'il y a là un conflit véritable qui pourrait
éventuellement déboucher sur des actions judiciaires. Je ne pense
pas qu'il soit du rôle des membres d'une commission parlementaire, des
membres de l'Assemblée nationale d'intervenir dans une telle chose. Les
représentants, entre autres le dernier, Me Bara-kett, quand il nous
parlait de la situation des petits-enfants, ce qu'il nous a dit est exact et
les changements qu'on pourrait apporter ici affecteraient également
d'autres personnes.
Je ne veux pas me prononcer sur le fond de la question, mais nous sommes
actuellement dans une situation sans issue pour l'instant. Peut-être que
la solution qui a été proposée, de discuter de la
liquidation du capital, serait la solution idéale pour tout le monde.
Dans ces circonstances, je serais de l'avis du député de
Marguerite-Bourgeoys de ne pas continuer à étudier ce projet de
loi.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Bédard: Je pense que nous avons eu l'illustration
très claire qu'il y a un conflit entre les différentes parties
concernées par ce testament, conflit qui peut déboucher sur des
poursuites judiciaires. On nous a proposé la formule d'un ajournement
possible; je ne crois pas qu'on puisse retenir cette suggestion parce que je ne
crois pas qu'il appartienne à la commission de devenir un instrument de
pression de quelque façon que ce soit au niveau d'un problème
à régler entre les héritiers de la succession. En ce sens,
je crois qu'il nous faut écarter cette possibilité.
On a parlé de la toute-puissance du législateur. Il ne
faut quand même pas oublier que cette "toute-puissance" doit s'exercer
à l'intérieur du respect d'une volonté qui est quand
même exprimée assez clairement et très explicitement dans
le testament soumis à notre attention.
Si nous devions en tout cas, c'est mon humble opinion pour le
moment procéder aux changements qui nous sont demandés,
à l'adoption du projet de loi qui nous est proposé, je crois que
nous viendrions carrément en opposition avec certaines des
volontés exprimées par le testateur. Entre autres, le testament
prévoit une rente on en a parlé tout à l'heure
au dénommé Maurice qui est égale à la
moitié de celles de Françoise et de Jeanne; or, ce principe n'est
pas respecté dans la demande qui nous est faite par les
requérants.
Si nous donnions suite à la demande qui vous est faite, nous nous
trouverions à privilégier un certain groupe d'héritiers
par rapport à d'autres héritiers qui sont dans les mêmes
groupes que ces trois personnes dont on nous a décrit la situation,
à l'heure actuelle pénible, mais qui sont quand même des
personnes qui sont héritières au même titre que d'autres
qui sont mentionnées dans le testament. Je pense si les membres
de la commission sont d'accord que nous ne pouvons tout simplement pas
adopter ce projet de loi. Je verrais très mal qu'on procède
à l'étude article par article.
Le Président (M. Laplante): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: La seule chose qui m'inquiète dans ce
processus qu'on semble vouloir adopter, c'est la possibilité qu'on
renvoie les parties devant les tribunaux. Est-ce qu'on va se retrouver ici dans
deux ans avec une succession qui aura complètement fondu de toutes parts
parce qu'elle aura été complètement utilisée
simplement à des poursuites judiciaires de part et d'autre et à
des contestations? C'est un aspect qui me fatigue étant donné que
je ne suis pas un avocat.
M. Lalonde: II est le seul à ne pas être avocat ici,
c'est évident!
M. Raynauld: Cela m'inquiète quand même un peu.
J'aimerais être rassuré et savoir s'il n'y a pas d'autres
façons de procéder que celle-là. Je pense bien que ce
serait regrettable pour tout le monde, pour toutes les parties
concernées, si on entamait simplement un long processus de contestation
devant les tribunaux, où on assiste à cela et on dit: Bon, si
vous n'êtes pas capables de vous entendre, très bien, vous n'aurez
plus d'argent personne! Est-ce là le résultat de notre inaction
dans le domaine ou s'il y a d'autres choses?
M. Bédard: D'abord, le député est-il
d'accord que, malgré les droits qui sont dévolus au
législateur, nous pouvons difficilement intervenir sans changer
expressément les volontés exprimées par le testateur?
M. Raynauld: Oui, mais, M. le ministre, mon
problème...
M. Bédard: On reviendra à votre problème,
mais sur cet aspect-là.
M. Raynauld: Sur cet aspect, je voudrais vous répondre. Si
nous n'avons pas le droit de changer les volontés du testateur, les
parties non plus n'ont pas le droit de les changer! On arrive à quoi? On
parle de partage du capital. Ce n'est pas du tout mentionné dans le
testament. Eux, ils ont le droit de changer la volonté du testateur et
nous n'en avons pas le droit!
M. Bédard: Je crois que, globalement, cette commission
aura peut-être eu pour effet de faire ressortir la situation que vous
évoquez à savoir que, si on ne prend pas garde, on peut arriver
simplement à l'extinction des biens qui sont dans la succession faute
d'entente entre les parties. Peut-être que l'effet nous
l'espérons profitable de cette commission sera d'allumer une
lumière rouge qui indique que, dans leur intérêt personnel,
l'ensemble des héritiers doivent faire un effort particulier pour
s'entendre, nous le souhaitons, autrement que devant les tribunaux.
M. Raynauld: Ce serait le message de la commission, que les gens
s'asseoient autour d'une table et s'entendent et qu'ils viennent ensuite,
qu'ils proposent un autre projet de loi qui serait plus acceptable à
l'ensemble des parties.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, j'appelle
l'article...
M. Tremblay (Charles): Est-ce qu'on me permettrait de
suggérer un amendement? Si le projet de loi est remis ou renvoyé,
c'est une véritable tragédie pour les héritiers actuels.
Pourrait-on, au moins, tenir compte de la valeur du dollar depuis 1964? Nous
serions prêts à renoncer à n'importe quoi dans la situation
où on est, à l'indexation, mais les pourparlers avec mes
confrères durent depuis des années. Cela veut dire que ces gens
vont mourir dans leur indigence. Jamais on ne pourra s'entendre avec eux. Cela
fait des années que cela dure. Si on ne nous permet pas aujourd'hui
d'avoir au moins un strict minimum vital, je dis que le jugement rendu par la
commission aura un effet absolument dévastateur sur ces trois
personnes. On a fait descendre sur nos têtes le ciel, la terre et
l'enfer. Mais pour des choses qui ne regardent en rien ces trois personnes.
Elles n'étaient pas exécuteurs testamentaires. C'est
dirigé vers les compagnies de fiducie. Ils n'ont jamais rien reçu
d'autre, malgré ce qu'on a laissé entendre, que la petite rente
fixée. Jamais ils n'ont reçu autre chose que cela, sauf les
petits compléments qu'on essayait de leur donner dans des compagnies. Si
le projet de loi est renvoyé purement et simplement, c'est une
tragédie. Il faut absolument sortir ces gens-là de la
misère noire où ils se trouvent actuellement.
M. Blain: Je voudrais ici apporter une légère
précision, quand même, au nom du fiduciaire, Trust
général; c'est que, compte tenu de la situation qui est
décrite par Me Tremblay et que j'ai vérifiée, le trust a
été amené à consentir des avances sur les rentes
mensuelles prévues au testament pour permettre de faire face à
certaines situations. Je ne sais pas présentement à quelle date
nous sommes rendus dans le paiement des avances, mais je peux globalement
assurer les membres de la commission que nous avons devancé les
échéances d'au moins six mois.
M. Paquette (André): Par ailleurs, je dois vous dire que,
de la part des associés de Notre-Dame-de-la-Protection, il y a eu un don
de $10 000 qui a été fait l'an dernier, hors de la connaissance
du trust. Je ne peux pas en parler.
M. Blain: Cela, je l'ignorais.
M. Paquette (André): Écoutez, directement, à
même l'argent qu'on a reçu, on a remis $10 000.
M. Bédard: À qui?
M. Paquette (André): Aux héritiers.
M. Tremblay (Charles): Aux héritiers, et cela a servi
à payer une partie des dettes fantastiques qui les écrasent
actuellement. Ils ont $3000 pour vivre. Mais quelle démonstration
additionnelle avons-nous à faire pour démontrer que ces gens sont
dans la plus grande misère?
M. Paquette (André): Juste une seconde. Nous avons
toujours été prêts à aider ces gens. Nous sommes
encore prêts à les aider, mais pas en consentant une mesure
législative permanente. Nous avons toujours été
prêts à nous asseoir et à discuter. On l'a prouvé.
Quand le trust a fait des avances, c'est tout de même avec notre
consentement. On n'a pas demandé la preuve de quoi que ce soit. Le trust
nous a demandé: Est-ce qu'on peut faire des avances? Je crois même
qu'il y a des salaires qui ont été payés dans des
compagnies à certaines gens. On n'a même pas posé de
questions, comme geste de bonne volonté. Vous savez...
M. Bédard: En réponse à la question qui nous
a été posée de faire un amendement demandant l'indexation,
je crois que, dans un premier temps, on ne peut pas accepter le projet de loi.
Je pense que c'est bien clair du point de vue de l'intention de chacun des
membres de la commission. Si un projet de loi était acheminé, si
un autre projet de loi privé était acheminé pour demander
l'indexation, il faudrait que cela soit l'indexation pour tout le monde. Pour
tout le monde. À ce moment, il pourrait y avoir une attention tout
à fait particulière de la part des membres de la commission. En
tout cas, je me prononce du côté ministériel, parce que
nous avons, tout à l'heure vous avez été à
même de le constater accepté l'indexation concernant une
succession en particulier, mais l'indexation pour tout le monde.
M. Lalonde: Tout le monde était d'accord. M.
Bédard: Et tout le monde était d'accord.
Le Président (M. Laplante): À ce moment-ci, je me
vois dans l'obligation de...
M. Bédard: Je vous donne cette indication, en
espérant que les démarches s'accentuent et que cela puisse amener
plus qu'une indexation, mais un règlement entre les parties, le plus
rapidement possible.
Le Président (M. Laplante): À ce moment-ci, je me
vois dans l'obligation d'appeler l'article 1. J'ai bien cru qu'il était
rejeté. Article 2, rejeté. Article 3, rejeté. Article 4,
rejeté. Le projet de loi 221 est rejeté et je voudrais me
conformer à l'ancien règlement, l'article 138, vu qu'il n'est pas
explicite dans notre règlement actuel, et vous demander la permission de
faire rapport à l'Assemblée nationale, par le rapporteur
officiel, que le projet de loi 221 a été rejeté à
cause du manque de preuves convaincantes à l'appui du préambule
ou du bill privé qui a été présenté.
M. Lalonde: Suffisantes.
Le Président (M. Laplante): Pas de preuves
suffisantes.
M. Lalonde: Est-ce que je peux terminer, M. le Président
par un voeu qui a été... Je voudrais me rapporter à ce que
Me Paquette a dit tantôt. Il a été un peu
étonné et même déçu du fait que les membres
de la commission aient si peu de matériel, de documents pour prendre une
décision. Ce n'est pas un reproche que je veux adresser au ministre; on
sait qu'un projet de loi privé est acheminé et passe par le
ministère de la Justice, tout simplement par les services de
rédaction. Je pense, mais enfin. (12 heures)
Ce n'est pas la décision ministérielle, mais il y aurait
peut-être lieu, lorsque le ministère aura des documents qui
pourraient aider les membres de la commission à étudier un tel
projet de loi, que cela nous soit acheminé également avant
l'étude.
M. Bédard: D'accord.
M. Lalonde: À tous les autres membres
également.
Le Président (M. Laplante): À ce moment-ci, nous
serions dans l'obligation de...
Une voix: Pour le parrain. M. Bédard: ...
Le Président (M. Laplante): ... pour les membres de cette
commission, d'ajourner...
M. Bédard: Dans notre présentation, nous serons
très ouverts.
Le Président (M. Laplante):... les travaux sine die
à cause de la Chambre à 14 heures.
M. Lalonde: Oui, mais son projet de loi, là?
M. Bédard: Non, nous demandons une petite suspension avant
de procéder à l'étude de l'autre projet de loi.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous voulez
procéder à l'étude du projet de loi 240? Il n'en reste
qu'un, le projet de loi 240. Est-ce que vous voulez procédez tout de
suite à son étude?
M. Bédard: Avons-nous, M. le Président, la
possibilité de suspendre les travaux pour quatre à cinq minutes
avant de procéder à l'étude du dernier projet de loi?
Le Président (M. Laplante): Cela veut dire que vous allez
continuer?
M. Bédard: Oui.
Le Président (M. Laplante): On n'ajournera pas tout de
suite.
M. Bédard: Non.
M. Lalonde: On suspend seulement.
M. Bédard: On va suspendre pour quatre à cinq
minutes.
M. Lalonde: D'accord, cela va.
Le Président (M. Laplante): On suspend cinq minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 2)
(Reprise de la séance à 12 h 10)
Projet de loi no 240
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît! Mesdames et messieurs, j'appelle maintenant le projet de loi 240,
Loi concernant Joseph-Gino Gagné. Y a-t-il un procureur pour ce projet
de loi?
M. Simard (Serge): Mon nom est Serge Simard...
Le Président (M. Laplante): Oui, un moment, s'il vous
plaît!
M. Simard: ... de Jonquière, procureur de Mme Linda
Genest, la mère de la personne visée par le projet de loi, de
même que de la famille Genest.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le
député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'allais vous
présenter Me Simard et Mme Genest. Effectivement, j'espère que je
vais avoir plus de chance que mon collègue d'Outremont. On n'a pas
souvent l'occasion de présenter des projets de loi privés. Or, en
quelques mots, c'est un projet de loi qui a pour but de demander à cette
commission parlementaire d'adopter un projet de loi autorisant le tuteur de
Joseph-Gino Gagné, sur autorisation, évidemment, du conseil de
famille et avec l'autorisation du juge de la Cour supérieure, à
demander le changement de nom de Joseph-Gino Gagné en celui de
Joseph-Gino Genest. La raison invoquée dans les allégués
précédant l'article 1, c'est que le jeune Gagné, depuis sa
naissance, vit chez son grand-père maternel et est connu, dans son
entourage, depuis cette date, sous le nom de Genest, effectivement, alors que
son nom est Gagné.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jonquière, je pense que je vais vous arrêter tout de suite. Le
procureur, qui est là, est là pour expliquer...
M. Vaillancourt (Jonquière): Voici, M. le
Président, j'allais vous l'offrir, mais je pense qu'il est d'usage que
le parrain expose les faits au moins succinctement, sinon on va demander tout
simplement que notre nom qui apparaît, selon cette longue tradition qui
veut qu'un projet de loi privé soit parrainé par un
député, soit enlevé tout simplement du projet de loi.
Là-dessus, si vous le voulez bien, vous pouvez interroger les membres,
Me Simard et Mme Genest.
M. Lalonde: Je suis sûr, M. le Président, qu'il n'y
a pas une question d'honoraires, de chicane...
Le Président (M. Laplante): C'est parce que j'avais
presque peur, à un moment donné, que Me Simard n'ait plus rien
à dire sur le projet de loi.
M. Simard: Effectivement, de façon très
brève, en fait, avant de nous présenter devant vous, nous avons
tenté de trouver une méthode pour régler le cas
particulier du jeune Joseph-Gino Gagné, et vous avez les faits
détaillés dans le projet de loi. Nous avons tenté de
trouver une méthode, avec les greffiers en loi, le ministère de
la Justice et ses fonctionnaires, pour permettre à cet enfant,
après consultation d'un conseil de famille et d'un juge, de soumettre
selon la méthode normale, au ministre de la Justice, une demande de
changement de nom. Alors, c'est le projet qui est devant vous.
Pour ne pas abuser de votre temps, compte tenu de l'heure, je
préfère me mettre à votre disposition pour répondre
à des questions.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre? M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le ministre a-t-il une question? Moi, j'ai
seulement une chose. La représentation éloquente du
député de Jonquière est en ce sens qu'on doive autoriser
le tuteur de cet enfant à demander un changement de nom de Gagné
à Genest, mais ce n'est pas ce que l'article 1 dit. L'article 1 dit
simplement qu'on l'autorise à demander un changement de nom. Alors, il
pourra demander le changement de nom qu'il voudra.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, d'accord. La
précision est pertinente, chers collègues et confrères.
Oui, c'est cela.
M. Lalonde: On m'a dit, quoique je n'aie pas étudié
la question, que c'est la seule façon de le faire, autrement le tuteur
ne peut pas demander le changement de nom d'un mineur.
M. Simard: Effectivement.
M. Lalonde: Un mineur ne peut pas lui-même demander un
changement de son nom.
M. Simard: Oui.
M. Bédard: Un mineur ne peut pas demander lui-même
un changement de nom. La loi prévoit que cette demande peut être
faite uniquement par un majeur.
M. Lalonde: Excusez-moi. Est-ce qu'on a étudié la
question des droits du père? Je comprends qu'il y a eu divorce, mais le
lien de paternité demeure quand même. Oui.
M. Simard: En fait, à mon avis, il y a deux aspects
à considérer à l'égard de cette question. Sur le
plan des faits, le père, c'est-à-dire dans le registre de
l'état civil, c'est bien évident qu'on retrouve le nom du
père et si jamais, au lendemain d'une demande faite au ministre de la
Justice, en vertu de la Loi sur le changement de nom, il y avait,
effectivement, un certificat d'émis autorisant le changement de nom,
cela n'aurait pas pour effet de faire disparaître le nom du père
du certificat, d'une part. Cela ne ferait que changer le nom de l'enfant, cela
ne ferait pas disparaître les auteurs.
(12 h 15)
D'autre part, enfin, les faits que nous avons là, un peu pour la
raison que vous disiez tout à l'heure vous sont soumis à titre
d'indices factuels généraux, parce qu'on ne vous demande pas de
donner un autre nom que celui qu'il a, on vous demande la possibilité
que le dossier soit étudié. Mais lorsque nous ferons la demande
au ministre de la Justice, en vertu de la loi, normalement, si le juge nous y
autorise en nommant un tuteur à cet effet, ce sera à nous de
démontrer peut-être, je pense qu'on sera en mesure de le faire et
je veux vous y répondre maintenant, puisque c'est votre question, le
père, dans le fond, est au courant de la démarche qui est faite.
Sa réponse est comme elle a toujours été à un
paquet d'autres égards, c'est que cela fait très longtemps qu'il
a quitté la maison. Le divorce a été prononcé
à la date qui est indiquée dans le projet de loi. Mais il avait
quand même quitté le foyer pas mal longtemps auparavant, de sorte
qu'il est au courant, mais comme il ne subvient pas aux besoins de l'enfant,
comme il ne s'y intéresse pas, comme je vous disais, il n'est pas
là...
M. Lalonde: Je ne veux pas vous mettre dans la position difficile
de témoigner.
M. Simard: Je ne veux pas témoigner.
M. Lalonde: C'est pour cela, la question des faits appartient
peut-être à un autre endroit.
M. Simard: Oui.
M. Lalonde: Je veux simplement savoir la raison pour laquelle la
loi prévoit actuellement que seul un majeur, c'est-à-dire 18 ans,
peut demander le changement de son nom. À compter du moment où il
est majeur, le rapport de droit qui existe entre un père et l'enfant est
changé par la majorité.
M. Simard: Si vous me permettez, en fait, de faire une remarque
à ce sujet. Je trouve quand même un peu... Ce sur quoi on doit
veiller, c'est l'intérêt de l'enfant. Mais quand on regarde la Loi
sur le changement de nom avec ses amendements, on retrouve, par exemple,
à l'article 8, que le changement de mon patronymique effectué par
le décret du lieutenant-gouverneur mais en fait, c'est
modifié, maintenant, c'est le ministre de la Justice
bénéficie aux enfants mineurs non émancipés du
requérant, ses enfants à naître et aux descendants. Ce qui
veut dire qu'à un moment donné, un majeur peut demander que son
nom soit changé et cela a comme effet d'affecter le nom de ses enfants
existants et celui des enfants à venir. À ce point-ci, le
problème vient du fait qu'un enfant ne peut pas le demander.
Ce qui vous est demandé, c'est de permettre à un enfant
autorisé par un tuteur de se servir de la loi et, quant aux effets,
finalement, ils ne seront
pas tellement différents. Ce seront quand même des parents
qui s'adresseront à vous. Parce que je ne vous cache pas que c'est mon
mandat de faire nommer comme tuteur de l'enfant, au lendemain de ce projet de
loi, s'il est adopté, la mère de l'enfant. Écoutez, ce
n'est pas pour le plaisir de la chose.
M. Lalonde: Non.
M. Simard: II reste quand même que ce sera la mère
qui fera la demande. Dans cet esprit, je trouve que l'intérêt de
l'enfant, on se l'assure par l'autorisation d'un juge, la tenue d'un conseil de
famille et des démarches auprès du ministre de la Justice qui,
lui, exercera, fera son travail.
M. Lalonde: Je voudrais tout simplement qu'on conserve cet
échange sur le plan juridique et non pas dans la question des faits. Je
vous l'ai dit, je ne voudrais pas vous mettre dans la position de
témoigner, cela appartient à un autre endroit. Vous vous
êtes sûrement penché sur les effets que cela peut avoir sur
le lien qui existe quand même aussi longtemps qu'il est mineur, avec ses
parents, y compris le père, quoique le divorce ou bien quel que soit le
désintéressement du père, les effets donc de ce changement
sur ces liens...
M. Simard: Cela n'altère...
M. Lalonde: Cela n'altère en rien.
M. Simard: ... en aucune façon les liens père et
fils.
M. Lalonde: Je n'ai pas d'objection.
M. Fontaine: M. le Président, juste une remarque, je ne
sais pas si c'est valide ou non, mais si la Loi sur le changement de nom
n'autorise pas le mineur à faire une telle demande, est-ce qu'en
adoptant ce projet de loi privé, on ne fait pas en sorte de modifier une
loi publique?
M. Vaillancourt (Jonquière): Non.
M. Fontaine: Peut-être que le ministre de la Justice
pourrait me répondre?
Une voix: C'était la question que je me posais moi
aussi.
M. Lalonde: Bonne question.
M. Simard: Je comprends que cette question s'est posée
entre vous, maintenant, je serais tenté de me servir de l'exemple des
règles de preuve en matière civile. C'est-à-dire qu'on n'a
pas le droit de faire une preuve qui est de nature à contredire un
écrit valablement fait. On a le droit de faire une preuve qui est de
nature à le compléter. Je pense que ce que vous feriez ne serait
pas modifier une loi, mais plutôt la compléter et l'adapter
à un cas précis. C'est l'objet visé par un projet de loi
privé, d'ailleurs.
M. Clair: Cela apporterait quand même, d'une certaine
façon, un amendement à une loi publique.
M. Simard: Franchement, vous allez peut-être devoir vous
pencher sur la possibilité d'un amendement sur le plan
général, mais sur le plan particulier, c'est clair et net que
vous ne modifiez pas la loi. Vous permettez à quelqu'un de s'en servir.
Vous y ajoutez. Vous prévoyez un cas additionnel de demande dans ce
cas-là, qui est un cas d'espèce.
M. Clair: La question qu'on peut se poser, c'est jusqu'à
quel point ce n'est pas un amendement à la loi publique qui devrait
être apporté pour ne pas permettre seulement un cas comme le
vôtre, mais que bien d'autres cas puissent être soumis au procureur
général.
M. Simard: Effectivement, la facture même du projet de loi
que vous avez devant vous a été préparée de
façon qu'on n'ait pas, autant que possible, cette réaction. Notre
première démarche a été de demander le changement
de nom de Gagné à Genest. La deuxième démarche,
plus souple, est peut-être celle de vous mettre dans une position, non
pas, par une loi, de contredire une autre loi, mais plutôt de permettre
à quelqu'un de s'en servir, donc, d'y ajouter. C'est exactement la
facture qui a été employée. Cela a été fait
pour une autre raison aussi, celle de l'intérêt de l'enfant,
s'assurer que par des mesures comme le conseil de famille, l'autorisation du
juge et l'intervention du ministre de la Justice, s'il y a une demande... Mais
franchement, la facture même a été... En fait je ne
veux pas vous faire de cachettes avant d'envoyer le projet de loi de
façon formelle, on a voulu s'assurer parce que ce sont quand
même des démarches coûteuses pour une famille; c'est tout de
même un changement de nom, ce n'est pas encore un changement de pays
que c'était possible. Le ministère de la Justice, par
l'intermédiaire de ses fonctionnaires dans notre région,
le ministre de la Justice, c'est tout le ministère, il est si
près de nous les gens du ministère de la Justice, par
l'entremise du greffier en loi...
M. Bédard: Le greffier en loi et le ministère de la
Justice sont deux choses.
M. Simard: II y a eu deux démarches parallèles. On
nous a dit que c'était la facture la plus souple, la plus satisfaisante
au niveau de ce que Me Blais nous indique.
M. Lalonde: En fait, notre question était: Est-ce qu'on ne
fait pas une exception à une loi publique, à un droit d'ordre
public? On fait plus qu'ajouter, on en fait une exception dans ce cas-ci. Dans
ce sens-là, on la contredit dans la mesure où la loi dit que
seulement une personne majeure peut changer son nom. Est-ce qu'il y a ici une
violation de principe de la loi? Je ne sais pas si on pourrait nous
éclairer là-dessus. Ce n'est pas du
tout mon intention de participer à cela. Je vais me fier aux avis
du ministre, il n'y a pas de doute. Mais je suis très sympathique
à votre proposition. C'est strictement une question: Est-ce qu'on peut
le faire? Si le ministre de la Justice nous dit celui qui est si
près de chez vous que, dans sa sagesse juridique, avec la
grâce d'état qu'il a, c'est possible, à ce
moment-là, je suis prêt à me ranger.
On peut se servir d'un scénario où il y aurait une chicane
cela arrive entre mari et femme, mais dans ce cas où les
deux sont très intéressés à leurs enfants. L'un,
ayant la garde de l'enfant, proposerait une telle demande à l'encontre
du désir de l'autre qui est tout aussi dévoué à
l'égard de ses enfants, tout aussi intéressé à leur
avenir, etc., à leur bien-être. Ce serait une façon, dans
une certaine mesure, d'alinéner le père, dans ce cas-ci, parce
que l'enfant porte le nom du père, pour lui enlever son nom contre sa
volonté.
Un conseil de famille. Je ne sais pas comment vous les faites
actuellement; la dernière fois, je l'ai fait il y a plusieurs
annés et c'était parfois folklorique. J'espère que,
maintenant, cela se fait mieux. Un conseil de famille, dans ce temps-là
en tout cas, ce n'était pas très sérieux. Je ne dis pas
que, dans votre cas, ce sera de cette façon; j'imagine que ce sont des
gens intéressés, qui sont près la mère, en
particulier de l'enfant et qui sont intéressés à son
intérêt. Cela pourrait servir d'instrument d'aliénation
entre le père et l'enfant. Dans ce cas-ci, vous dites qu'il n'est pas
intéressé, quoique je ne vous demande pas de
témoigner.
M. Simard: Je ne veux pas témoigner là-dessus.
M. Lalonde: Cela pourrait être dangereux, dans le sens
où cela pourrait servir comme un autre outil de bataille entre mari et
femme sur le dos de l'enfant.
M. Simard: C'est pour cela que je pense que cela doit rester de
la nature d'un bill privé. Dans le fond, cela vous oblige comme cela
nous oblige à vous soumettre un cas et non pas à tirer une
généralité à partir d'un cas. C'est
extrêmement difficile de répondre d'une façon
générale à votre question parce que c'est un cas qui est
différent de celui que je vous présente. J'ai déjà
passablement de difficulté à présenter celui que j'ai.
Indépendamment de cela, à partir du moment où on change le
moindre des faits parmi ceux qui vous sont soumis, on débalance le cas,
ce qui fait que possiblement une décision différente pourrait
intervenir. Je n'ose pas, en fait, tirer de conclusion générale
de votre remarque, mais tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il me semble
que c'est de la nature d'un bill privé de correspondre à un cas
d'espèce. Ce qui vous est soumis, c'est un cas d'espèce et c'est
la demande qui est faite à la Législature.
M. Lalonde: À part ce que vous nous avez dit
d'ailleurs, je ne le prends pas comme un témoignage, vous n'êtes
pas dans cette situation les seuls allégués que nous avons
pour militer en faveur de votre demande, c'est qu'en raison des circonstances,
il est connu par son entourage sous le nom de Gino Genest. C'est la seule
circonstance, en fait, qui est favorable à ce changement de nom et pour
des raisons psychologiques etc., vous dites que c'est mieux.
M. Simard: En fait, tout est en serre chaude dans un milieu comme
le nôtre. L'enfant a grandi sous le nom de Genest parce qu'il vit chez la
famille Genest, sa mère s'appelle Genest et c'est comme cela.
Actuellement, sa mère travaille, subvient à ses besoins, il est
en garderie et on l'appelle Genest. À tort ou à raison. Ce que je
voudrais vous signaler, et je pense que vous pourrez en tirer un argument de
sécurité pour vous, c'est que les publications qui ont
été faites dans les journaux et dans la Gazette officielle ont
été envoyées au moment où on n'avait pas encore
fini de discuter de la facture même du projet de loi, de sorte que je me
permets de vous en lire une parce qu'elle comprend la facture actuelle, mais
elle va beaucoup plus loin. "Avis est donné qu'une demande sera faite
à l'Assemblée nationale du Québec pour effectuer le
changement de nom d'un enfant mineur, Joseph Gino Gagné, en celui de
Joseph Gino Genest." C'était l'objectif à ce moment-là. Je
doute franchement que le monsieur en question je n'ai pas besoin de
témoigner pour cela lise la Gazette officielle, mais en tout cas,
je peux vous dire que cela a été publié quatre fois dans
notre région. On a deux quotidiens, un qui est lu plus que l'autre et
cela a été publié dans celui qui est le plus lu. C'est
sûr que je ne peux pas témoigner sur sa volonté, d'ailleurs
le père n'est pas mon client. Ce que je peux vous dire, c'est que je
n'ai personne à droite et personne à gauche pour contester et je
n'en suis pas surpris.
M. Bédard: Sur le fond de la question, il s'agit vraiment
d'un précédent. Il s'agit également d'un amendement
à une loi si nous acceptons le projet de loi privé
d'ordre public, qui est la Loi régissant les changements de noms.
D'autre part, on nous soumet un cas qui, pour des motifs familiaux, tenant
compte du contexte social, mérite une attention tout à fait
particulière. Les membres de la commission seraient peut-être
d'accord pour ajourner l'étude de ce projet de loi parce que, au niveau
du ministère de la Justice, nous sommes en train d'étudier la
dimension, la possibilité d'en arriver à des changements rapides.
Cela peut se faire d'ici à la fin de la session au niveau de la loi
concernant les changements de noms. Ce serait peut-être la meilleure voie
à suivre. Vous soulevez l'urgence d'agir pour votre cliente.
M. Simard: Écoutez, M. le ministre Bédard, c'est
bien évident que, de toute façon, nous allons nous soumettre
à votre décision, mais je veux vous signaler que...
M. Bédard: Non, ce n'est pas seulement ma décision,
c'est qu'on m'a demandé une opinion à savoir si cela constituait
un amendement...
M. Simard: Je parle de celle de la commission.
M. Bédard: ... à une loi d'ordre public. Je suis
honnêtement obligé de dire que oui.
M. Simard: Ce n'est pas la première fois. On n'est pas
obligé de partager les mêmes idées...
M. Bédard: Dans cela.
M. Simard: Mais, je vous dirai que...
M. Bédard: Cela n'empêche pas le respect.
M. Simard: M. le ministre Bédard, je vous dirai que dans
le cas de cet enfant, s'il y a une décision à prendre, il faut
quand même qu'elle se prenne de façon assez rapide, parce que
l'objectif visé est que l'enfant commence en milieu scolaire avec le nom
sous lequel il est connu. Il ne faudrait quand même pas que cela soit
reporté aux calendes grecques. D'autre part, je voudrais qu'on
m'explique dans ce cas, par la même occasion la question que je
vous pose, puisqu'on vous a posé cette question à quoi
cela sert, la possibilité de faire une demande à la
Législature par projet de loi privé, si ce n'est pas pour couvrir
un cas particulier qui est de nature à correspondre à une
situation non prévue dans une loi, parce que c'est cela. Ce qu'on
demande... (12 h 30)
M. Bédard: Non, c'est prévu dans une loi.
M. Simard: C'est-à-dire que c'est prévu qu'un
majeur puisse le faire.
M. Bédard: Et, qu'un mineur ne puisse pas le faire.
M. Simard: Cela ne veut pas dire cela. Ce n'est pas le silence
qui crée des droits et qui crée des négations de droits.
Il n'y a pas effectivement de droits, j'admets cela, mais je ne veux pas... et
c'est le sens du projet de loi privé. Ce n'est pas de dire que Gino
Genest n'a pas de droit. On vous demande de lui donner le droit. C'est
évident qu'il n'a pas de droit, mais ce n'est pas parce qu'une loi ne
prévoit pas... Pensez-vous qu'avant que vous amendiez la loi, en 1977,
pour des changements de sexe, qu'on connaissait cela? Pourtant, vous l'avez
prévu dans un amendement. Cela correspond probablement à une
réalité marginale dans une société, mais dans ce
cas, c'est un cas d'espèce, c'est cela une réalité
marginale.
M. Bédard: On a procédé par un amendement
à la loi générale, à la Charte des droits et
libertés de la personne. On n'a pas procédé par un projet
de loi privé. Vous êtes en train de nous apporter un argument qui
vraiment prouve le contraire de ce que vous voulez avancer.
M. Simard: C'est possible. En fait, un mauvais plaideur, c'est un
mauvais plaideur. Vous avez sans doute raison. Il reste que c'est un cas
particulier, tandis qu'il...
M. Bédard: Si c'est un cas particulier et je pense
que les discussions que nous avons au niveau de la commission montrent que tous
les membres de la commission sont très sensibles au problème
humain que cela représente je vous indique notre intention
d'essayer d'accélérer l'étude au niveau du
ministère de la Justice sur des situations comme celle-là, qui
pourraient nous amener, par exemple, à faire certains changements au
niveau de la loi générale régissant les changements de
nom.
C'est dans ce sens que je vous dis, en toute collaboration et en
respectant le côté très humain du cas que vous apportez, je
vous évoque la possibilité je l'évoque aux membres
de la commission d'ajourner l'étude du présent projet de
loi pour que vous n'ayez pas à refaire toutes les procédures.
Nous serions peut-être en mesure de répondre assez rapidement
à la demande de madame.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que je dois comprendre,
M. le ministre, que vous proposez que le projet de loi 240 soit ajourné
sine die?
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laplante): C'est cela.
M. Lalonde: Je pense que c'est sage parce que cela soulève
d'ailleurs, je remercie le député de Nicolet-Yamaska de
nous avoir remis sur cette voie-là Cela peut entraîner des
conséquences beaucoup plus exorbitantes qu'on ne s'imagine. Ici,
à cinq personnes, sans la préparation technique, permettre un cas
comme celui-là, sans pouvoir en calculer les conséquences...
Alors, j'acquiescerais à la demande du ministre.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Juste un mot, M. le Président...
M. Bédard: Je pense qu'avant l'automne 1979, il sera
possible de faire les changements que nous verrons indiqués, qui nous
seront proposés et qui, je l'espère, pourront répondre ou
représenter une solution au cas que vous nous présentez.
M. Fontaine: II ne fait pas de doute, M. le Président, que
les membres de la commission sont bien sensibles au cas particulier qui nous
est présenté. Mais, étant donné que le ministre
nous dit que cela équivaut à un amendement à une loi
générale, je pense que nous n'avons pas le choix. Une loi
générale doit être adoptée par l'Assemblée
nationale. Même si on l'adoptait, peut-être serait-elle
illégale.
M. Lalonde: Cela pourrait être attaqué. M.
Fontaine: Alors, malheureusement...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
remarque que je ne suis pas plus chanceux que le député
d'Outremont, mais je dois l'avouer.
M. Lalonde: Ce n'est pas la journée des parrains.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je dois avouer, M. le
Président, que la remarque apportée par le député
de...
M. Bédard: Mais il y a de l'espoir.
M. Vaillancourt (Jonquière):... Nicolet-Yamaska est
effectivement pertinente. Je voudrais tout simplement, en terminant, rassurer
Mme Gagné que le député de Jonquière va faire tous
les efforts au cours des prochains mois et des prochaines semaines pour
convaincre son collègue, le député de Chicoutimi et
ministre de la Justice, d'apporter une solution dans les meilleurs
délais, afin que le cas particulier de Gino se règle et qu'il
puisse entrer à l'école sous le nom désiré. Alors,
soyez assurée de toute ma collaboration à ce niveau-là, de
même que le procureur.
M. Simard: Merci.
Le Président (M. Laplante): Le projet de loi 240 est donc
reporté sine die. Avant de terminer, les projets de loi 238 et 265 ont
été adoptés article par article sans amendement. Le projet
de loi 221 a été rejeté au complet avec tous les articles.
Le projet de loi 240 a été reporté sine die.
Les travaux de cette commission sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 12 h 35)