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Version finale

31e législature, 6e session
(5 novembre 1980 au 12 mars 1981)

Le mercredi 17 décembre 1980 - Vol. 23 N° 25

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 89 - Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille


Journal des débats

 

(Quatorze heures trente minutes)

Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames, messieurs.

La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux concernant le projet de loi no 89, Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille.

Les membres de la commission pour aujourd'hui sont: M. Bédard (Chicoutimi), M. Blank (Saint-Louis), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Forget (Saint-Laurent), M. Guay (Taschereau); Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine) remplacée par M. Gosselin (Sherbrooke); M. Marquis (Matapédia). Sont inscrits à titre d'intervenants: M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Desbiens (Dubuc), M. Lacoste (Sainte-Anne); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplacé par M. Marx (D'Arcy McGee); M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski) et M. Pagé (Portneuf) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie). Le rapporteur de la commission a déjà été désigné, c'est Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine).

Ce matin, contrairement à l'ordre du leader de la Chambre, nous n'avons pu siéger de 11 h 30 à 13 heures à cause d'une panne d'électricité qui empêchait la transcription des débats. Nous avons décidé de commencer à siéger à 14 h 30. C'est pourquoi nous nous apprêtons à commencer nos travaux jusqu'à 18 heures et nous reprendrons de 20 heures à 24 heures, selon les ordres de la Chambre.

Hier, nous avions fait une discussion sur l'article 551 que nous avions suspendu à la fin de nos travaux pour compléter les documents.

Chapitre troisième Des effets du divorce (suite)

M. Bédard: II s'agissait, suite à certaines représentations qui avaient été faites, de se poser la question ou de donner les explications nécessaires suite à la décision prise de le supprimer. Effectivement, l'article proposé ne conserve pas le jugement conditionnel de divorce et soumet le jugement de divorce à la règle de principe du Code de procédure civile en matière de jugement. Il paraît, d'ailleurs, préférable de laisser au Code de procédure civile le soin de dire quand les jugements produisent leur effet et de supprimer l'article 551. Je demanderais que M. Guy ajoute quelques propos pour compléter les explications.

Peut-être une première explication: c'est la règle générale de tous les jugements qui sont sujets à appel, qu'ils ne seront pas sujets à exécution dans les 30 jours. Chez nous, nous avons l'habitude de nous procurer le certificat de non-appel dans le cas de tous les jugements appelables de façon à avoir la certitude que le comportement qu'on aura à l'égard de ces jugements sera un comportement qui tiendra le jugement pour définitif. C'est l'habitude qu'on a chez nous. C'est la règle générale du Code de procédure civile aux articles 494 et suivants. Il n'y a rien de nouveau là en ce qui concerne la règle générale.

Je comprends que pour les gens qui sont à l'étranger et qui voudraient savoir si le jugement est définitif, c'est comme dans tous les cas, il faut s'assurer de l'état du droit qui a permis l'émission de ce jugement.

Pour ce qui est de l'autre point qui a été soulevé, puisqu'on a dit que ce jugement remplacera le jugement conditionnel et le jugement définitif - à l'heure actuelle on sait qu'en matière de divorce il y a d'abord un jugement conditionnel et que, quelques mois après, trois mois après, il y a un jugement définitif - mais, là, c'est une autre question qui appelle peut-être certaines explications que M. Bisson pourrait fournir.

C'est une autre question, c'est surtout une autre technique. Je pense que, sans vouloir diminuer les mérites de ces techniques, c'est une technique extrêmement complexe et, ce qui est en usage surtout, ce sont ce qu'on appelle les décrets nisi de l'accommodement. Je pense que c'est une technique extrêmement compliquée et qui n'apporte pas d'avantages très décisifs. Je dois dire que, dans la pratique de la Loi sur le divorce actuelle, cette règle a soulevé beaucoup plus de questions qu'elle n'en a résolu. Il y a toute une jurisprudence extrêmement complexe à ce sujet. Et, dans la mesure où nous avons cette procédure de certificat de non-appel qui, je pense, permet d'assurer le sérieux de la question, je ne vois pas tellement l'intérêt de maintenir dans

notre droit cette procédure qui, tout en ayant certainement ses mérites à l'intérieur d'un autre système de droit, est plutôt perturbatrice dans le système de droit civil du Québec. Le Code de procédure civile, peut, encore une fois, régler de façon précise et détaillée certaines mentions que devrait contenir le jugement et préciser les modalités d'application et de mise en oeuvre du jugement.

M. Marx: M. le Président...

Le Président (M. Laberge): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: ...j'ai toujours pensé que l'idée d'avoir un jugement conditionnel et un jugement final, c'est pour donner aux parties une période de trois mois pour se reprendre, le cas échéant. Il y a un jugement, mais ce n'est pas final, ils ont encore trois mois pour repenser à leur affaire. Je sais qu'il y a une jurisprudence en ce qui concerne les décrets nisi. Cela a causé peut-être un certain nombre de problèmes, mais peut-être peut-on contourner cette jurisprudence par une disposition plus claire, le cas échéant. Est-ce que ce ne serait pas utile de garder la disposition du droit fédéral en matière de divorce pour donner aux gens une période de réflexion avant que tout soit final et qu'on ne puisse plus se reprendre?

M. Bédard: Oui, mais je dois dire à ce sujet que la pratique n'a pas révélé que cette période de refroidissement - pour faire une traduction littérale - avait servi à grand-chose. Vraiment, je pense que cela n'a pas eu un succès pratique très considérable, à ma connaissance. J'ai quand même lu plusieurs centaines de jugements en matière de divorce et rien n'a révélé dans la pratique que cela ait servi à grand-chose.

M. Marx: C'est bien sûr que ce n'est pas dans les jugements qu'on voit cela. On voit cela dans les faits. Il faut relever combien - je pense que c'est un travail difficile - d'époux ont repris entre le jugement conditionnel et le jugement final. Mais c'est une décision que le ministre doit prendre s'il veut bien continuer la disposition qui se trouve dans la loi fédérale sur le divorce ou s'il veut changer...

M. Bédard: II y a quand même un délai d'un mois par la force des choses. Les explications que nous donne...

M. Marx: II n'y a pas de délai d'un mois, maintenant. Il y a un délai d'un mois pour faire appel. Mais le mariage est terminé dès qu'on reçoit le jugement. On ne peut pas revenir en arrière. On ne peut pas se reprendre, parce qu'il n'y a pas de "cooling off period", comme dans la loi fédérale; ce n'est pas la même chose.

M. Bédard: C'est l'exécution qui est suspendue.

M. Marx: C'est cela, mais on ne peut pas revenir après un mois et dire: On aimerait encore que le mariage continue, ce qu'on peut faire maintenant en vertu de la loi fédérale. Il y a une différence importante. Je trouve qu'il ne serait pas mauvais d'avoir un jugement conditionnel et un jugement final, mais c'est à vous de décider, M. le ministre.

M. Bédard: Je vais plutôt y aller à l'article 551, dans le sens de ce qui m'est conseillé. D'accord?

M. Marx: Juste une autre question. Dans d'autres juridictions, surtout aux États-Unis, est-ce qu'on a des jugements conditionnels et finals?

M. Bédard: Je ne saurais le dire.

M. Marx: Aux États-Unis, on a beaucoup d'expérience avec le divorce, étant donné qu'il y a 50 juridictions et 50 lois sur le divorce.

M. Bédard: II faut rappeler qu'aussi bien à l'article 539 qu'aux articles 547 et suivants du projet il y a beaucoup d'ouvertures pour ce qui est des ajournements possibles pendant toute la durée d'une instance. Dès que le tribunal voit la possibilité d'une réconciliation des époux ou évalue quelque chance de réconciliation, les ajournements sont rendus très souples et assez faciles, de façon qu'ils s'assurent jusqu'à la fin de la réalité du consentement de divorce jusqu'à l'extrême limite, de sorte que le délai de réflexion est peut-être en partie inclus dans ces possibilités d'ajournement aussi. On indique même que cela peut-être un motif pour le tribunal d'ajourner.

M. Marx: Je l'ai remarqué. Si on supprime l'idée d'avoir un jugement final, il n'y a pas de période de réflexion entre le jugement qui déclare que les personnes sont divorcées et l'événement final, si on peut dire. D'accord.

M. Bédard: Je n'ai pas d'autres représentations.

Le Président (M. Laberge): L'idée de l'article 551, je n'ai plus de papillon, c'est enlevé. On nous proposait de biffer l'article 551. Est-ce que cette proposition sera adoptée?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Donc, l'article 551 est biffé. Article 552?

Des effets du divorce à l'égard des époux

M. Forget: M. le Président, avant d'aborder l'article 552, me serait-il permis de faire une remarque relativement à l'intitulé de la section I, très brièvement? Je pense que, pour des raisons qui deviendront évidentes - parce que je n'ai pas l'intention de faire tout le débat - relativement à ces articles seulement, il y aurait avantage, pour lui donner plus de clarté, à ce que la section I porte un titre analogue à - peut-être pas nécessairement celui-là - Des effets du divorce à l'égard des conséquences patrimoniales du mariage ou quelque chose comme ça et que cette section englobe les trois articles subséquents, 552, 553 et 554, ainsi que 555; qu'il y ait une section II qui soit intitulée Des effets du divorce à l'égard des époux et qu'il y ait finalement une section...

M. Bédard: À l'égard des tiers ou des enfants?

M. Forget: ... Ill qui serait Des effets du divorce à l'égard des enfants et des tiers ou quelque chose de ce genre. Le but de cette distinction, c'est de souligner que les quatre prochains articles, 552, 553, 554 et 555 sont vraiment complémentaires et traitent essentiellement du même sujet et de démarquer ces articles par rapport à ceux qui suivent. Encore une fois, je ne veux pas anticiper plus qu'il ne le faut sur le fond du débat portant sur chacun des articles, mais je pense que ce que je vais dire sur les quatre autres articles prendra plus de sens si je fais cette mise au point ou cette suggestion à ce moment. Je ne demande pas au ministre de réagir immédiatement, mais c'est simplement un rappel en quelque sorte.

M. Bédard: Pour nous permettre de l'évaluer.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 552 sera adopté?

M. Bédard: À l'article 552, il n'a pas paru utile de rappeler que les époux divorcés peuvent se remarier, parce que les articles 404 et 436 combinés y pourvoient déjà. Pour ce qui est des effets de la dissolution du régime entre les époux, la règle reprend celle qui est prévue aux articles 495 et 496.

M. Forget: D'accord. Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 552, adopté. J'appelle l'article 553.

M. Bédard: II y avait un amendement?

Le Président (M. Laberge): À l'article 552?

M. Bédard: C'était de changer les mots "reporte", dans la troisième ligne du deuxième alinéa, par les mots "fasse remonter". Il s'agissait d'un amendement visant à améliorer la forme.

Le Président (M. Laberge): Oui, il se peut que j'aie égaré ma feuille ici. Je vais vérifier. Alors, à la troisième ligne, changer "reporte" par "fasse remonter". À l'article 552, l'amendement consistant à changer le mot "reporte" par les mots "fasse remonter", est adopté. L'article 552 amendé est adopté. Article 553? (14 h 45)

M. Bédard: Cet article s'écarte de la solution du Code civil et de celle qui est proposée par l'Office de révision du Code civil. En effet, la qualité d'époux prenant fin avant le décès qui donne effet aux donations à cause de mort, il a paru plus cohérent de déclarer caduques, sans discrétion pour le tribunal, ces donations. Il est à noter que cet article ne frappe de caducité que les donations à cause de mort que les époux se sont consenties, non les autres dont le sort est réglé par l'article 554. En effet, la condition n'est pas nécessairement défaillie dans le cas d'une donation d'un père à son fils, encore que les donations consenties aux époux par des tiers en considération du mariage soient plutôt rares de nos jours.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ...comme le ministre vient de le souligner, il y a ici des différences entre à la fois le Code civil actuel, les recommandations de l'office et le texte qui nous est présenté. J'aimerais qu'on nous explique plus complètement la nature de ces différences. Il semble que la caducité des donations à cause de mort repose sur une distinction entre les donations à cause de mort qui seraient - c'est la catégorie la plus générale - inscrites sur le contrat de mariage, mais dont certaines seulement seraient caduques lorsqu'elles ont été consenties en considération du mariage. Est-ce que c'est vraiment la distinction qui est faite? Si oui, pourrait-on nous en donner le sens concret?

M. Bédard: Pour ce qui est des donations à cause de mort, il y a bien sûr, celles que les époux se font entre eux, lorsqu'un époux fait donation à cause de mort à l'autre. Il y a aussi - encore que,

comme cela a été mentionné, c'est plutôt d'application rare - le cas où un tiers intervient au contrat pour faire donation à l'un des époux. On voyait cela autrefois, un père intervenait au contrat de mariage pour faire donation de sa ferme à son fils pour son établissement. Ce n'est pas tellement la pratique nouvelle.

En ce qui concerne les donations à cause de mort entre époux, il y a des choses qui sont un peu gênantes parce que, si on se reporte à l'article 830 du Code civil actuel, on se rend compte que ce concept de donation à cause de mort comporte toute forme de donations au décès, c'est-à-dire dans le cas où l'un des deux époux survit à l'autre. Ces donations à cause de mort, en vertu de l'article 830, prennent toutes sortes de formes, notamment celle plus connue de l'institution contractuelle ou de la donation un peu universelle des biens - c'est connu un peu par tout le monde - la clause au dernier vivant les biens. Il ne s'agit pas d'une clause aussi générale et aussi universelle, mais d'une donation qui peut être substantielle aussi; ça peut être une donation de $50,000, ça peut être une donation beaucoup plus modeste en termes d'importance quantitative.

À cet égard, on peut avoir deux raisonnements. Si on a le raisonnement strictement juridique, il est certain que ces donations sont faites pour protéger l'un des conjoints au décès contre l'exercice de cette faculté illimitée de tester qu'a l'autre époux. Cela permet donc une certaine protection au décès de l'un parce que, évidemment, encore une fois, la liberté illimitée de tester peut permettre de le déshériter de façon complète et totale. Mais si le mariage ne dure pas jusqu'au décès, cette condition n'est pas réalisée, somme toute. Dans une sorte de logique juridique, on pourrait plaider que c'est normal que la donation, en principe, ne survive pas, si je peux dire, au divorce, s'il n'y a pas eu la condition du décès.

Par ailleurs, il peut être extrêmement gênant pour quelqu'un qui s'est marié une première fois, qui a peut-être fait une donation à cause de mort fort importante, une donation universelle par voie d'institution contractuelle, et ce de façon irrévocable, de savoir que, en se remariant, il ne lui reste plus rien à offrir comme protection à son deuxième conjoint et à ses enfants, c'est bien sûr. S'il se remarie, dans un système où le divorce met fin au mariage et permet le remariage, cela peut être une limite ou une contrainte extrêmement gênante sur le pouvoir, par la suite, de disposer et aussi d'offrir d'autres protections à un deuxième conjoint.

Évidemment, je comprends que l'article 208, à l'heure actuelle, soumet tout cela à la discrétion du tribunal. C'est une des solutions. Celle qui est proposée par le projet de loi no 89 voit plutôt à dire que c'est caduc, ce qui n'empêche pas, comme chacun le sait, les époux, malgré tout, de se faire un testament par lequel ils pourraient, s'ils le désirent absolument, avantager le conjoint divorcé, l'ex-conjoint. Mais il retrouve une sorte de liberté pour ce qui est de la disposition à cause de mort.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Forget: Mais, si vous me le permettez...

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

M. Forget: ... On a peut-être répondu à ma question, mais, si on l'a fait, on l'a fait fort subtilement. Je suis reconnaissant de cette explication à laquelle je souscris de façon générale, mais n'y a-t-il pas, dans la façon dont c'est rédigé, une distinction que l'on établit entre les donations inscrites, contenues au contrat de mariage, qui appartiendraient à deux catégories, une catégorie étant les donations consenties en considération du mariage et l'autre les donations qui ne sont pas en considération du mariage? Est-ce qu'il y a une preuve d'intention qui est susceptible d'être faite pour décider de l'application de l'article 553?

M. Bédard: Dans tous les cas - peut-être que ma réponse n'était pas complète -les donations à cause de mort ne peuvent être faites que par contrat de mariage ou par testament. Donc, celles qui sont faites par contrat de mariage le sont toujours par le jeu du contrat de mariage en considération du mariage. Il n'y a pas d'autres donations à cause de mort possibles que celles qui sont en considération du mariage. Parce qu'elles ne peuvent se faire que sous cette forme ou alors par testament. Je me suis référé tout à l'heure à l'article 830, c'est un article par là aussi qui le précise.

M. Forget: Alors, l'expression "en considération du mariage" est équivalente à l'expression "contenue au contrat de mariage".

M. Bédard: Quand les tiers viennent faire des donations par contrat de mariage, ils les font à l'un ou l'autre des époux ou à des enfants à naître, mais c'est parce qu'ils se marient pour les fins de leur établissement.

M. Forget: Ah, je vois:

M. Bédard: Encore une fois, j'avoue que, dans la pratique d'aujourd'hui, je n'ai pas encore vu, pour ma part, souvent, ou peut-être pas une seule fois, des tiers venir faire des donations dans les contrats de

mariage. C'est possible, le droit le permet.

M. Forget: Et celles-là ne seraient pas caduques.

M. Bédard: Et celles-là ne seraient pas caduques. Pour prendre un exemple, il y a une relation qui s'établit entre un père et son fils et qui est un peu le fondement de la donation. Ce n'est pas parce qu'il décide de divorcer qu'il tient à retirer ou qu'on présume qu'il voudrait retirer la donation qu'il a faite à son fils.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien l'article 553, les donations qui ont été accordées par contrat de mariage sont rendues caduques lorsqu'un nouveau mariage est contracté.

M. Bédard: Même s'il n'y en a pas, par le simple prononcé du divorce.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais s'il y avait eu des donations. Par exemple, un conjoint avantage l'autre avec une police d'assurance. Je comprends votre raisonnement que les gens ne peuvent pas garder cela à perpétuité et qu'il y a de nouvelles obligations qui proviennent du nouveau mariage, etc., mais j'ai eu des expériences assez récentes à mon bureau de comté, deux cas où les gens sont divorcés. Le premier conjoint meurt, c'est-à-dire celui qui est remarié, ils avaient des polices d'assurance minimes; dans un cas, $20,000; dans l'autre cas, $30,000, et la première épouse avec, dans un cas, un enfant et, dans l'autre, deux - ce sont des détails, enfin il y avait des enfants dans les deux cas - élève avec peine les enfants avec l'aide sociale. La mort est survenue deux ans après le divorce ou le nouveau mariage. Je ne suis pas sûre, alors qu'il avait été marié dix ans dans le premier cas, que la nouvelle épouse soit celle qui profite de la police d'assurance qu'il avait accordée par un premier contrat à la première épouse. Je comprends qu'on ne peut pas prévoir tous les cas, tout le monde ne mourra pas deux ans après son remariage, mais il reste que, du point de vue de la stricte justice, il n'y a même pas d'enfant du deuxième mariage et l'autre continue d'élever son enfant ou ses deux enfants qui sont encore mineurs. Cela me pose des problèmes, en tout cas. Si j'ai bien compris ce que vous voulez dire...

M. Bédard: Oui, vous avez parlé d'assurance. Je veux bien comprendre qu'il s'agissait de désignation de bénéficiaire d'assurance dans le cadre du contrat de mariage parce que la désignation de bénéficiaire d'assurance peut se faire en dehors du contrat de mariage; donc, ce n'est pas strictement ce qu'on appelle une donation à cause de mort, dans le sens où c'est strict, dont parle 553. Quand c'est fait en dehors du contrat de mariage, c'est la pratique des assurances sur la vie qui fait qu'on peut désigner sur...

Mme Lavoie-Roux: Dans un cas, ce n'était pas nécessairement une police d'assurance, il l'avantageait d'une somme de $20,000.

M. Bédard: Dans le contrat de mariage.

Mme Lavoie-Roux: Dans le contrat de mariage et à son décès il laissait une police d'assurance qui - là, je ne le sais pas -pouvait être de $30,000, qui aurait pu couvrir les $20,000.

M. Bédard: Qui acquittait la donation.

La question dépasse l'aspect plus technique pour savoir si les donations à cause de mort doivent être irrévocables à l'égard du premier conjoint. Là, c'est une question que...

M. Forget: Je pense que - si on me le permet, M. le Président - dans un cas comme celui-là, il est important de lire tous les nouveaux articles les uns à la lumière des autres. Je pense qu'il serait possible de répondre à ce problème en invoquant à l'avenir 555. Parce que 555 permet la prestation compensatoire et permet de recréer, dans le fond, une obligation même supérieure pour le conjoint divorcé à celle à laquelle il s'était engagé de faire...

Mme Lavoie-Roux: Au moment du mariage.

M. Forget: ...au moment du mariage. Il peut être plus approprié... Maintenant, on ne peut pas à la fois vouloir les remettre en question et ne pas les remettre en question. Je pense qu'il y a une option qui a été faite ici de réécrire le contrat de mariage par le jeu de 555. C'est replacer les parties dans l'état où elles auraient dû se trouver, indépendamment de l'absence même de donation ou d'une donation insuffisante par contrat de mariage.

M. Bédard: À ce moment-là, lorsque la remise en question se fait au-delà du montant de la donation stipulée et qu'il y a eu, par exemple, un accroissement assez spectaculaire, non attendu...

Mme Lavoie-Roux: Si, justement, l'accroissement...

M. Bédard: S'il n'y en a pas eu, à ce

moment-là, il n'y a que l'actif qui...

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais l'actif...

M. Bédard: C'est bien beau de faire des donations à cause de la mort, mais ce sont des montants s'il n'y a pas d'actif, souvent...

Il y a peut-être à se rappeler, parce que vous l'évoquez, l'attribution éventuelle des meubles ou de la résidence au cas de décès, dans la mesure où il y a meubles et résidence. II y a également le régime matrimonial s'il y a société d'acquêts. Il y a aussi un partage des acquêts de 50% en faveur du conjoint. C'est cet ensemble de mesures qui...

Mme Lavoie-Roux: Comme vous le signaliez - encore une fois, si je comprends bien - si l'accroissement, compte tenu des avoirs, se résume à peu près à rien, la personne était davantage couverte par...

M. Forget: Non, c'est l'enrichissement dans le sens où c'est à partir de zéro qu'on compte l'enrichissement. Ce n'est pas à partir de la valeur historique des actifs au moment du mariage. Donc, ce sont tous les actifs qui servent à combler ce... selon l'esprit, à supposer toujours que l'interprétation que vous nous avez donnée sera celle qui sera à l'avenir maintenue.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais les actifs au moment du mariage, la police d'assurance, est-ce que c'est un bien propre ou...? (15 heures)

M. Bédard: Ce qu'on veut dire, et je pense que c'est juste en droit, peu importe ce qu'on possédait au début du mariage, la prestation compensatoire sera payée à partir de tout l'actif tel qu'il se présente au décès. En d'autres termes, peu importe la provenance ou l'origine des biens, la masse totale, si vous voulez, du patrimoine sera la garantie du paiement des dettes qui en découleront, donc la prestation compensatoire. Cela ne s'exercera pas que sur des acquêts, en d'autre termes. Cela pourrait s'exercer tout aussi bien sur les propres et les acquêts, enfin, la masse totale des biens et, en séparation de biens, comme il n'y a pas de distinction...

Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 553 sera adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 554. À l'article 554, on nous demande, à la troisième ligne du premier paragraphe, après le mot "mariage", de remplacer la virgule par un point et d'enlever les mots qui suivent, "sauf stipulation contraire du contrat".

M. Bédard: Cet article, sur réserve de... Je pense que l'amendement est adopté.

Le Président (M. Laberge): Oui, à moins que...

M. Bédard: C'est à la suite des représentations déjà faites au niveau de la commission parlementaire.

Le Président (M. Laberge): Ah bon!

M. Bédard: Ceux qui n'aimaient pas cette clause, qui se permettent toujours globalement d'aller à l'encontre...

Le Président (M. Laberge): L'amendement consistant à biffer les mots "sauf stipulation contraire du contrat" est adopté.

M. Bédard: Cet article, sous réserve de l'article 553, reprend substantiellement les dispositions des premier et deuxième alinéas de l'article 208 du Code civil, de préférence aux dispositions proposées par l'Office de révision du Code civil, qui établissent une nette distinction entre les donations entre vifs et les donations irrévocables faites à cause de la mort. Cette solution plus souple permet au tribunal de tenir compte des circonstances, notamment de la durée plus ou moins longue du mariage. Ce n'était pas le cas auparavant.

M. Forget: II y avait une distinction dans le droit actuel et, me semble-t-il aussi, dans la recommandation de l'office - mais je ne suis pas absolument sûr, je vais vérifier -entre la validité des dons devenus exigibles ou déjà consentis et ceux qui ne sont pas déjà exigibles. Si je comprends bien, on fait sauter cette distinction. Donc, des donations qui seraient faites sans indication de date, essentiellement, et qui n'ont pas été exécutées au moment où intervient un divorce, continueraient indéfiniment d'être exigibles dans les mêmes circonstances où la date n'est pas précisée. Est-ce que cela ne constitue pas une situation assez paradoxale, où une donation, disons, d'un montant d'une somme d'argent donnée qui n'a pas été versée, pour lequel le contrat de mariage n'institue aucune espèce de délai ou de terme fixe, continuerait d'être due, sans autre indication?

M. Bédard: Oui, dans le cas des donations entre vifs, il est exact de dire que la date d'exigibilité de certaines peut être déterminée dans le contrat. Si elle ne l'est pas, il y a une date limite. C'est le décès qui en entraîne à tout le moins l'exigibilité. On dit que même dans le cas où elle pourrait être exigible à une date ultérieure au divorce, mais, du vivant des époux, le

tribunal pourrait différer le temps de paiement ou modifier l'échéancier de paiement, de façon à tenir compte de la situation des époux.

Nous avions mentionné à propos de la nullité du mariage - si vous vous souvenez bien - ce que nous pensions que la caducité avait comme effet, plutôt que la nullité. Nous ne croyons pas que la caducité, veuille ici avoir un effet rétroactif, mais veuille dire que ce qui n'a pas encore été payé, par exemple... On voulait dire ici que les donations entre vifs qui n'avaient pas été exécutées, bien sûr, ne sont pas caduques. Les donations à cause de vente non plus, sauf que le tribunal les appréciera et pourra refaire un échéancier quant aux paiements qui deviendront exigibles après le divorce.

Il est dit dans le deuxième alinéa qu'il peut d'ailleurs les réduire aussi ou même les déclarer caducs.

M. Forget: Compte tenu de ce qu'ils décident au titre de l'article 555, de toute façon.

M. Bédard: J'ai l'impression qu'il y avait une sorte d'évaluation d'ensemble de la situation.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article "554 sera adopté avec la modification?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté, avec la modification. À l'article 555, on nous demande de remplacer les mots "à l'accroissement de l'actif" par "à l'enrichissement du patrimoine"; ceci, à la troisième ligne du premier alinéa. Est-ce que cet amendement sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Je pense que c'est suite...

M. Bédard: C'est une concordance par rapport à ce dont on a discuté déjà dans l'annexe...

M. Forget: M. le Président, il y a eu des recommandation du Conseil du statut de la femme, de l'AFEAS et de plusieurs autres groupes, à l'article 555, afin qu'on tienne compte plus explicitement de la possibilité que les mots "apport d'un conjoint à l'accroissement ou à l'enrichissement de l'actif de l'autre conjoint" ne soient pas interprétés trop étroitement comme signifiant exclusivement un apport de type financier. Par exemple, le Conseil du statut de la femme - pour ne citer que son rapport -suggère que l'on ajoute: "par son activité au foyer, sa collaboration à l'entreprise ou à la carrière de son conjoint", essentiellement cela et on ajoute aussi "son apport financier à la résidence familiale". Il est bien évident que la résidence familiale est un actif et si c'est un apport financier, c'est au moins un apport financier. Je pense que cette partie est peut-être pléonasmique, mais, pour ce qui est du reste, c'est peut-être une précision qui est nécessaire.

M. Bédard: C'est une assurance, je pense, qui a été demandée par les groupes pour que les services soient une notion retenue. Effectivement, le but de l'article est de sanctionner la contribution d'un époux - pour le journal des Débats, j'aimerais aussi le mentionner - en services ou en argent à l'accroissement de l'actif de son conjoint. Déjà les tribunaux développaient la notion ambiguë de société de fait pour régler les cas les plus patents. Évidemment, dans l'établissement de cette prestations compensatoire, le tribunal devra tenir compte notamment du régime matrimonial et du contrat de mariage.

Ainsi, si le patrimoine enrichi grâce à la contribution des époux est constitué d'acquêts partageables, il n'est pas question que l'époux titulaire du patrimoine soit exposé à perdre sa part des acquêts pour payer la prestation compensatoire. En effet, il est de l'essence du régime de société d'acquêts que les acquêts des époux se partagent par moitié entre eux en nature ou en valeurs.

De même, si l'époux créancier d'une prestation compensatoire a déjà reçu par contrat de mariage une donation de son conjoint, il en sera tenu compte. On a déjà eu une discussion là-dessus. Le mot "notamment" a été introduit dans l'article 555 afin que le tribunal puisse tenir compte aussi, s'il y a lieu, de tous autres avantages par voie de donation, d'assurance sur la vie, etc.

Enfin, la prestation compensatoire est payable, en principe, en argent, mais l'époux créancier de la prestation pourra demander que le paiement soit effectué par l'attribution de la propriété ou de l'usage des meubles de la résidence familiale ou encore d'un droit de propriété ou d'habitation de la résidence principale.

Dans l'esprit du législateur, c'est bien clair qu'on voulait que soit rencontrée la préoccupation qui est évoquée par les remarques que nous avons eues des différents groupes. Il y aurait peut-être lieu de préciser un peu plus...

Mme Lavoie-Roux: Je le crois.

M. Bédard: ... pour être bien sûr que le but est atteint et que des interprétations de tribunaux n'aillent pas dans le sens contraire.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je préférerais, peut-être dans le sens de la suggestion du Conseil du statut de la femme, comme vient de le dire le député de Saint-Laurent, qu'on spécifie les termes un peu plus, parce que c'est quand même assez nouveau qu'il y ait une reconnaissance de la part de la femme au foyer. Ceci est déjà assez vague à évaluer, de toute façon; à partir de quoi on commence à l'évaluer, c'est déjà difficile. Si on veut que cela ait un sens et que vraiment ceci entre dans la pratique, moi, j'aimerais bien qu'il soit inclus. Je trouve que la formulation du Conseil du Statut de la femme, comme le signalait le député de Saint-Laurent, moins l'apport financier à la résidence, les deux premiers éléments me semblent importants, et la collaboration à l'entreprise est une préoccupation particulière des femmes collaboratrices, par le truchement de l'AFEAS.

M. Bédard: On me dit - je pense que chacun y va de ses suggestions, en termes d'amendements - qu'à partir du moment où on préciserait l'accroissement en biens et en services, on atteindrait, selon ce que nous disent nos juristes...

Mme Lavoie-Roux: L'accroissement en bien et en services, cela veut dire quoi?

M. Forget: Je suis d'accord avec le ministre que cela peut vouloir dire tout ce que l'autre veut dire. Mais il y a aussi le risque d'une interprétation restrictive. C'est-à-dire que personne ne peut garantir d'avance que les tribunaux ne diraient pas: II s'agit de la collaboration, de type professionnel ou de type commercial, à une entreprise ou quelque chose. Mais est-ce qu'ils iraient au point de consacrer l'activité au foyer, par exemple? Je pense qu'on ne peut pas, comme législateurs, être absolument sûrs que cette interprétation prévaudrait. On peut le souhaiter, mais on ne peut pas en être sûr.

M. Bédard: II y a peut-être l'autre danger qu'à vouloir commencer à énumérer, on devienne limitatif, sans le vouloir. En tout cas, on sait quel but on veut atteindre. On est pleinement d'accord là-dessus et on est d'accord avec la préoccupation du Conseil du statut de la femme. Mais le danger qui existe, c'est que si on commence une énumération, on peut obtenir l'effet contraire que nous voulons obtenir et ne pas atteindre cet objectif, parce que des tribunaux pourraient, à partir d'une énumération, interpréter restrictivement et, après cela, en venir à la conclusion qu'il n'y a que ce qui est indiqué dans l'article dont il doit être tenu compte.

M. Forget: Quoique ce sont des mots très larges.

M. Bédard: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Mais il n'y aurait pas une autre formulation?

M. Bédard: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Je ne voudrais pas faire semblant de tenter de formuler des articles juridiques, mais quand vous parlez de l'enrichissement du patrimoine, notamment de l'activité à ceci et à cela, cela n'exclut pas d'autres possibilités que le juge voudrait inclure.

M. Bédard: Peut-être qu'on pourrait le suspendre, mais je pense que la discussion et l'objectif sont bien définis.

C'est que l'apport, non plus, n'est pas un mot nouveau, on le retrouve à l'article 1839, sur la société, du Code civil, et où il est bien entendu que ce qu'on appelait un apport en industrie, c'est-à-dire un apport en activité, n'est pas seulement un apport d'ordre pécuniaire. Ce n'est pas un mot neuf dans notre Code civil. Il a déjà une acception très large dans le...

M. Forget: Sans doute, sauf que je suis à peu près persuadé que dans l'interprétation qu'on en fait dans le cadre des articles sur la société, on ne l'a jamais appliqué à l'activité de la femme au foyer.

M. Bédard: Mais, si on y ajoute la notion de service, à ce moment-là... Je pense, en tout cas, que l'apport en services permet d'aller chercher tout apport en services dans la mesure où cet apport en services a un lien avec l'enrichissement du patrimoine. Au moins, on peut dire que l'expression n'est pas limitative, elle est ouverte. Il s'agit de lui donner un contenu. Il est certain que dans le cas du droit nouveau, les tribunaux auront à faire preuve d'une certaine imagination pour développer le potentiel illimité de la règle, quand même. Mais, dans le risque qu'on voit toujours à accrocher de façon trop particulière l'apport, c'est qu'on finit par lui donner un sens un peu restrictif et limitatif. Si l'exemple que vous donnez est un exemple très précis, on se repliera volontiers à cet exemple. Ici, c'est un domaine un peu neuf où le tribunal aura à faire oeuvre de concrétisation de l'application. (15 h 15)

Mme Lavoie-Roux: Je peux me tromper là-dessus, M. le Président, mais j'ai l'impression que, jusqu'à maintenant, les tribunaux ont toujours pris des décisions ou statué en fonction de certains éléments qui étaient devenus des éléments traditionnels,

ce qui impliquait les frais de garde des enfants, la pension alimentaire de l'épouse. Si on veut que, justement, les mentalités évoluent dans le sens d'un élargissement, enfin, dans une conception beaucoup plus large que ce qui avait été retenu traditionnellement, je pense qu'il faut l'indiquer quelque part. Cela prendra peut-être encore quinze ans avant que certains juges s'éloignent de l'interprétation traditionnelle qu'on a toujours donnée jusqu'à maintenant.

M. Bédard: Si je me réfère aux récentes décisions de la Cour d'appel qui ont été évoquées devant la commission, je pense que, déjà au moins une fois, le tribunal de la Cour d'appel disait qu'en dehors d'un texte qui permettrait d'aller chercher un apport qui pourrait être compensé par une prestation comme celle que prévoit l'article 555, il était bien difficile, en séparation de biens particulièrement, d'y arriver. Les exemples que le tribunal avait sous les yeux étaient justement des exemples... Dans un cas, par exemple, il s'agissait de la femme d'un cultivateur qui apportait une contribution qui dépassait largement son activité au foyer. C'était vraiment une activité...

Mme Lavoïe-Roux: Les deux, on met le foyer et l'entreprise aussi.

M. Bédard: C'est cela, le foyer, la ferme et tout cela. Enfin, cela prenait différents visages. Il disait: Si nous avions un texte qui nous permette de compenser un apport, nous pourrions, dans ce cas en particulier... C'est toute l'affaire Murdock, d'ailleurs, dans l'Ouest canadien, qui n'a pas été compensée à l'époque. On y est en "common law", c'étaient d'autres raisons qui étaient invoquées à l'époque, mais, chez nous, c'était le défaut d'un texte. En droit civil, il arrive que... C'est vrai que le droit civil procède par des principes, mais je crois devoir dire quand même que plus les principes sont larges, dans le Code civil, plus ils permettent aux tribunaux de les appliquer à des situations tout à fait inédites et même imprévisibles dans le temps. Je voudrais ne rappeler que l'article 1053 qu'on a appliqué à la responsabilité découlant du transport par avion, par exemple, à l'époque où on était loin même de l'automobile, simplement parce que le texte lui-même est général et ouvert. Le plus essentiel, c'est peut-être cela, d'avoir un texte qui n'est pas restrictif au départ, qui est bien ouvert et qui permet toutes sortes d'applications que voudra bien appliquer le tribunal lorsqu'il sera saisi. Il aura les faits sous les yeux.

Les explications sont données.

Mme Lavoie-Roux: Je comprends l'esprit dans lequel on nous dit de quelle façon un terme beaucoup plus large permet des interprétations qui s'adaptent aux besoins, etc. Je ne le veux pas restrictif dans le sens de deux choses, mais ce sont deux éléments qui peuvent également laisser la porte ouverte à des interprétations plus larges, selon la volonté du juge ou selon les circonstances.

M. Bédard: M. le Président, peut-être pourrait-on lire également l'article 1830 du Code civil qui parle des sociétaires et qui dit qu'ils apportent des biens, leur crédit, leur habileté ou leur industrie. On voit le contexte par rapport auquel s'apprécie l'apport. C'est très large, je pense, comme notion.

Autre chose, dans la mesure où nous sommes dans le Code civil, il m'apparaît dangereux, vu les réflexes que nos juges ont en matière de droit dit statutaire, de leur fournir une énumération qui les amènerait, comme ils le font souvent, à dire: Toute notre activité va se limiter aux choses qui sont exprimées. C'est une liste fermée. Je pense que le risque est moins grand, finalement, d'avoir quelque chose de très large qui permet tous les développements possibles, que d'avoir une énumération qui pourrait apporter des interprétations, je crois, plus restrictives qu'extensives. C'est un risque à courir, mais je pense que, vu l'évolution des mentalités, il vaut d'être couru, dans la mesure où nous sommes dans le Code civil et que les méthodes d'interprétation naturelles du Code civil sont beaucoup plus larges que celles du droit dit statutaire.

Mme Lavoie-Roux: J'ai toujours peur de l'interprétation restrictive, dans le sens que le mari a quand même contribué au maintien de sa femme, à l'habiller, etc., pendant qu'elle s'occupait des enfants. Ce qui est beaucoup plus difficile et ce dont on tient compte beaucoup moins souvent, c'est le fait que les dix ans qu'elle a passés à la maison, cela a eu des répercussions considérables du point de vue non seulement de son entrée sur le marché du travail, mais parfois de sa sortie et parfois de sa progression au plan professionnel ou au plan du marché du travail. Je ne suis pas sûre que ce soit pris en considération. Il peut y avoir des juges qui en tiennent compte, mais...

M. Bédard: Cela va probablement se réfléter dans l'enrichissement. Ce sont des facteurs qui se doivent d'être considérés.

Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas sûre que, jusqu'à maintenant, les juges lui aient donné cette interprétation.

M. Bédard: Le Code civil évolue. Il

faut...

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas une question de parler du Code civil, c'est une question de mentalité, M. le Président.

M. Bédard: Espérons que cela répond à une évolution aussi des mentalités.

Mme Lavoie-Roux: On va avoir encore dix ans à attendre.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'amendement à la troisième ligne du premier alinéa de l'article 555 consistant à remplacer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du patrimoine" sera adopté? C'est adopté. L'article 555 amendé est-il adopté?

M. Bédard: On ajoute "l'apport en biens ou en services". Il faut que ce soit bien clair.

Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous nous le lire au complet?

M. Bédard: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Laberge): Après le mot "enrichissement"? "...en biens ou en services de ce dernier à..."

M. Bédard: À partir du moment où le "spécifie" équivaut à "nécessairement" à l'indication d'un changement qui doit être fait au niveau de la considération, sinon, on devrait conclure que le législateur aurait parlé pour ne rien dire. Ce qui n'est pas le cas.

Le Président (M. Laberge): Après le mot "apport", troisième ligne?

M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Laberge): Un autre amendement pour ajouter, après le mot "apport", à la troisième ligne du premier alinéa, ",en biens ou services,"...

M. Bédard: Entre virgules.

Le Président (M. Laberge): Entre virgules. Je relis le premier alinéa, pour que ce soit très clair. "Au moment où il prononce le divorce, le tribunal peut ordonner à l'un des époux de verser à l'autre, en compensation de l'apport, en biens ou services, de ce dernier à l'enrichissement du patrimoine de son conjoint," et le reste du paragraphe continue dans le même sens, "...en biens ou services...", adopté? Est-ce que l'article 555, avec deux amendements, sera adopté? Est-ce que cela va?

M. Bédard: On a spécifié "en biens...

Le Président (M. Laberge): "... son apport, en biens ou services, à l'enrichissement du patrimoine...". Adopté, avec amendement. Article 556? Il y a une petite correction, c'est typographique, nous dit-on, au deuxième alinéa. L'erreur de typographie dans l'expression "à moins que". On va retrouver cela. Il faut enlever le "n" tout simplement.

M. Bédard: Cet article doit se lire avec l'article 626, qui indique une obligation alimentaire entre époux, contrairement à l'Office de révision du Code civil, qui recommande que cette obligation alimentaire survive au divorce, à moins d'une décision contraire du tribunal. Le projet de loi propose plutôt que cette obligation prenne fin lorsque le tribunal prononce le divorce, à moins qu'il ne réserve le droit d'en réclamer pour une période d'au plus deux ans, conformément à l'article 557 ci-après ou qu'il n'ordonne à l'un des époux de verser les aliments à l'autre si les besoins de l'un et les facultés de l'autre sont démontrés. Notons que, dans la détermination de ces besoins et facultés, le tribunal doit tenir compte des critères fixés par l'article 563. Ainsi, le droit d'un époux divorcé à des aliments ne peut plus être réservé à vie, si ses besoins ne sont pas continus. Il peut être déclaré éteint lors du prononcé du divorce ou postérieurement. Le droit des époux à des aliments devient donc... ...strictement encadré. Il s'agit là d'un renversement important du droit actuel et cet article s'applique également en matière de nullité du mariage. Il y avait la petite correction.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, c'est à cet article-ci, je pense, que deviennent pertinentes - comme en font foi les nombreux commentaires dont il a fait l'objet - la question de la survie de l'obligation alimentaire entre conjoints, qui, par ailleurs, ne sont plus liés par le mariage et la demande qui, je pense, est bien fondée, du RAIF de supprimer cette notion d'obligation alimentaire, non pas pour se borner à cette suppression pure et simple, mais pour lui substituer une autre notion qui serait basée sur des facteurs différents de la pension alimentaire comme telle. La pension alimentaire est l'expression d'une solidarité des membres d'une famille et, tant que les liens familiaux qui lient ces personnes dure, que ce soit entre générations différentes ou entre conjoints, je pense qu'il est tout à fait normal de prendre en compte les besoins, les ressources, etc. C'est une façon juridique de dire que, dans le fond, les membres d'une

même famille font une seule unité économique, partagent pour les besoins de la vie de tous les jours tous les revenus et assument d'une façon égale toutes les obligations et les besoins de chacun des membres.

Ce n'est plus le cas après le divorce et je pense qu'on a raison de souligner que le maintien du concept perpétue la notion d'une relation de dépendance à laquelle, précisément, c'est un des buts du divorce de mettre fin. Je pense qu'on devrait donner une considération beaucoup plus sérieuse à ceci. Je pense qu'on reconnaît déjà ceci au niveau patrimonial en disant: Les donations à cause de mort que les époux se sont faites sont caduques. On établit, au niveau du patrimoine, par les articles 552, 553, 554 et 555, une espèce de règlement de compte sur le plan patrimonial.

Sur le plan de cette situation de solidarité, je crois qu'il y a un règlement qui s'impose également dans bien des cas, mais qui devrait s'inspirer d'autres considérations par exemple, le fait que l'un des conjoints peut être dans la situation où, même si, à partir du divorce, il doit assumer complètement l'obligation de suffire à ses propres besoins, il est quand même objectivement dans la situation où il ne l'a peut-être pas fait pendant plusieurs années, il s'est absenté du marché du travail - c'est le cas de nombreuses femmes mariées qui sont divorcées - et, dans la mesure où un apport financier devrait lui être accordé par le tribunal et imposé à l'autre conjoint, il s'agit de le mettre en état de subvenir à ses propres besoins, de compenser par une période d'entraînement professionnel ou de recyclage et de permettre à la personne en question d'assumer au bout d'un certain temps la responsabilité entière de son sort.

Bien sûr, tenant compte de l'état de santé et de l'âge de la personne divorcée, on peut aussi traiter cette obligation comme une obligation permanente de subvenir aux besoins. Il s'agit à ce moment-là d'un cas particulier, si l'on veut; le principe est quand même différent, le principe général étant de permettre aux deux conjoints divorcés de vivre dans un état d'autonomie le plus rapidement possible. Il me semble que ce serait plus clair puisque ceux qui s'engagent dans une procédure de divorce sauraient que de façon très claire ceci met fin à une situation de dépendance, non sans solution de continuité, mais malgré tout le principe serait clairement affirmé qu'il n'y a plus de solidarité économique entre les conjoints; il y a des mesures de transition, en quelque sorte, vers l'autonomie complète des deux personnes. Ce n'est pas, encore une fois, les mêmes critères qui jouent pour déterminer cette allocation de transition que ceux qui jouent pour déterminer l'obligation alimentaire. Encore une fois, tenant compte de l'âge et des conditions de santé puisque, bien sûr, on ne peut changer le droit du jour au lendemain de façon permanente sans tenir compte d'un facteur comme celui-là. (15 h 30)

C'est la remarque de caractère général. Les autres remarques sont, pour autant que je puisse voir, plutôt relatives à l'article 557. C'est la question de la réserve; on y reviendra tout à l'heure. Je pense que c'est la question de principe essentiellement. Ne serait-il pas approprié, puisqu'on reconnaît qu'il peut y avoir déchéance, parce que là on se démarque du droit actuel à ce sujet... On dit bien qu'il y a déchéance à moins que... sauf que, dans la pratique, on ne sait pas ce que cela va donner.

Le législateur ne se donne pas la peine d'affirmer le principe. Comme le ministre l'a dit, il en fait un droit prétorien, un droit qui est déterminé par le tribunal, mais on ne donne vraiment pas au tribunal une orientation nouvelle. On ne dit pas: Vous devez prendre vos décisions à la lumière du principe que c'est la règle de l'autonomie des parties qui doit entrer en vigueur, après le divorce, sous réserve d'une période de transition.

M. Bédard: On pourrait indiquer que le droit est éteint pour ce qui est de la question de principe, à moins que, sur demande... On pourrait au niveau du principe, le formuler autrement, disant que le droit est éteint, à moins que sur demande, etc..

M. Forget: Oui, mais il y a un peu plus que cela quand même que je recommandais dans mes remarques.

M. Bédard: Oui, je sais.

On va le laisser ouvert. Je crois qu'il faut y penser deux fois avant de rompre avec des habitudes presque millénaires. Au niveau du principe, on peut l'évoquer mais laisser quand même... C'est vers cela que je vais m'orienter. Le droit est éteint d'accord - à moins que le tribunal, sur demande, etc...

Le Président (M. Laberge): Alors, l'article 556...

M. Bédard: On pourrait faire une autre formulation.

Le Président (M. Laberge): L'article 556 demeure ouvert, il est suspendu. J'appelle l'article 557.

À l'article 557, on nous demande, au premier alinéa, quatrième ligne, de changer le mot "est", le troisième mot avant la fin de la ligne, pour "ait été".

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pour l'amendement, adopté.

Le Président (M. Laberge): Cela va, adopté. Maintenant, à l'article 557, est-ce qu'il y a autre chose?

M. Bédard: À l'article 557, plusieurs remarques ont été faites par les groupes concernant le droit de réserve. Nous sommes prêts à évaluer la solution qui pourrait être de nature à donner suite à ces remarques. Le Barreau parlait de trois ans, d'un droit de réserve qui soit automatique pour trois ans au maximum.

M. Forget: Oui, j'aurais peut-être une suggestion à faire, si vous me permettez, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: L'objection qui a été formulée, si je la comprends bien, vise à empêcher que le débiteur de l'obligation alimentaire, puisque c'est de cela dont on parle, ne se dérobe frauduleusement à son obligation en se mettant lui-même dans une situation d'insolvabilité, tant et aussi longtemps que dure le droit de réserve. C'est une difficulté qui a été soulevée bien à propos. Dans une certaine mesure, peu importe le délai, dans le fond, le problème peut toujours se soulever. Je comprends que personne ne va se mettre dans une situation d'insolvabilité à jamais, de façon à échapper à cette règle, mais il reste que ce n'est pas vraiment une question de deux ans, de deux ans et demi ou de trois ans et quart. Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent de le formuler en donnant un effet suspensif à cette caducité de la réserve, en le formulant à peu près comme ceci: Si la réserve est prononcée à cause de l'absence ou de l'insolvabilité du débiteur alimentaire, ce délai ne compte qu'à partir du moment où son absence ou son insolvabilité cesse.

M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait avoir le libellé de ce qui est proposé?

M. Forget: Je ne l'ai pas...

M. Bédard: On pourrait le suspendre temporairement.

M. Forget: Oui, d'accord.

M. Bédard: Si vous voulez le relire, on pourrait peut-être le noter.

M. Forget: Oui, je vais le relire lentement.

M. Bédard: Avant d'engager la discussion, on pourrait voir jusqu'à quel point cela pourrait se concilier.

M. Forget: Si la réserve est prononcée à cause de l'absence ou de l'insolvabilité du débiteur alimentaire, ce délai ne compte ou ne court qu'à partir du moment où son absence ou son insolvabilité cesse, ou, pour un meilleur français, du moment où cesse son absence ou son insolvabilité. Enfin, peu importe. Peut-être qu'on y verra des difficultés, je ne sais pas si on connaît un moment où l'insolvabilité cesse ou l'absence cesse. Ce sont peut-être des questions de fait, tout simplement.

M. Bédard: Oui, mais si ce sont des questions de fait, je pense qu'on revient peut-être à la situation que l'on veut éviter, justement, cette situation d'épée de Damoclès. Ce que nous avons essayé de faire à l'article 557, c'était de codifier de la façon la plus serrée possible une jurisprudence extrêmement abondante de la Cour suprême. On s'aperçoit ici que les situations de fait révélées par cette jurisprudence étaient extêmement compliquées et extrêmement diverses. C'est pour cela que nous l'avons rédigé comme cela.

On va réserver...

Le Président (M. Laberge): Les remarques du député de Saint-Laurent sont consignées et ont été notées. On va laisser l'article ouvert pour le moment pour voir si cela sera ajustable.

Mme Lavoie-Roux: II y a une chose qui est certaine, c'est que le ministre est prêt à laisser cela plus ouvert que ce ne l'est dans le moment. D'accord.

Le Président (M. Laberge): Article 558? Il n'y a pas d'amendement suggéré jusqu'à maintenant.

M. Bédard: Non, il n'y a pas de remarque spéciale.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 559?

M. Bédard: Non plus. L'ordonnance accordant une pension alimentaire peut être révisée par le tribunal si des faits nouveaux le justifient.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que c'était le Barreau qui avait fait une remarque sur la pertinence du délai? Je m'excuse, M. le

Président, si l'article...

Le Président (M. Laberge): À l'article 558? Parfait.

Mme Lavoie-Roux: Vous êtes allé vite -vous savez qu'on ne va pas vite - sur la pertinence du maximum...

Le Président (M. Laberge): On comprend que vous avez beaucoup de documents.

Mme Lavoie-Roux: ...de trois ans, il restreindrait la capacité à payer. Si un conjoint peut échelonner ses paiements sur plus de trois ans, il paiera au total un montant beaucoup plus élevé que si ses versements étaient limités à une période de trois ans.

M. Bédard: Oui. Il me semble qu'il faut fixer un délai, de manière que la pension ne soit pas assimilée à la somme forfaitaire, qui doit trouver sa satisfaction dans un délai qui nous semble raisonnable.

M. Forget: On peut voir la difficulté. Si on transforme une pension en somme forfaitaire, à ce moment, on renonce en quelque sorte à la révision périodique de la pension alimentaire que la somme forfaitaire a en place. Si on étale le paiement de la somme forfaitaire de façon presque équivalente, on se trouverait à pouvoir indirectement vicier les dispositions d'indexation qui sont contenues ailleurs aux pensions alimentaires, parce qu'il s'agirait de transformer en un paiement en capital la totalité de la pension alimentaire sur les prochains vingt ans et dire qu'on va la payer à un vingtième par année. On n'a plus besoin de s'occuper de l'indexation. C'est effectivement d'ordre public que ce ne soit pas étendu trop longtemps. Est-ce que trois ans, c'est le meilleur chiffre? Je n'en sais rien.

M. Bédard: En plus de cela, on expose le créancier à l'insolvabilité du débiteur si on s'embarque dans des délais qui sont trop longs. On sait qu'il y en a qui ont beaucoup d'ingéniosité. D'autre part, il peut arriver des changements de situation au point de vue du créancier.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cela répond à votre question à l'article 558? Je rappelle l'article 559.

M. Bédard: On n'a pas de remarque.

M. Forget: M. le Président, je m'excuse auprès du ministre, je ne sais pas si vous me permettriez, je sais que l'article est suspendu, mais pour ajouter un élément de réflexion à l'article 556.

M. Bédard: Oui, à l'article 556.

M. Forget: Cela va peut-être de soi, mais je n'en suis pas entièrement convaincu. Lorsqu'il y a extinction de la créance alimentaire entre les conjoints, pour des raisons qui sont propres à la situation des deux conjoints, je pense qu'il serait peut-être essentiel de noter que cette extinction ne vaut que pour la créance alimentaire d'un conjoint vis-à-vis de l'autre, mais n'a pas d'effet sur la créance alimentaire des enfants. Cela va de soi, je pense.

M. Bédard: Aucune difficulté.

Le Président (M. Laberge): Cette remarque étant faite, j'appelle l'article 559 de nouveau. Est-ce que l'article 559...

M. Bédard: Cela va à l'article 559.

Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle l'article 560.

M. Bédard: À l'article 560...

Mme Lavoie-Roux: Avec l'article 559, à ce moment, on élimine pour de bon l'indexation automatique?

M. Forget: Non, on en traite dans un autre chapitre, à la pension alimentaire.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Blank: À l'article 559, je ne comprends pas pourquoi, dans le montant fixe de la somme forfaitaire, il y aurait même une possibilité de révision. Cela a été fixé, en tenant compte des faits ce jour-là. S'il y a une erreur, il y a la Cour d'appel, la révision ou la révocation de jugement, si c'est par défaut, etc. Je ne comprends pas pourquoi...

M. Bédard: Sauf si l'absence - si vous lisez tout l'article - de révision devait avoir pour l'un des époux des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

M. Blank: Oui, cela doit être exceptionnel au moment du jugement, et c'est exceptionnel au moment du jugement, cela donne lieu à un appel ou à une révocation de jugement. La révision, c'est comme pour la pension alimentaire, quand la situation des parties change après trois ou quatre mois, mais la somme forfaitaire, c'est basé sur les biens des personnes au moment du jugement.

M. Bédard: Au moment.

M. Blank: S'il y a des conséquences graves, cela veut dire que le juge a fait une erreur au moment du jugement. Ce ne sont pas des faits qui sont arrivés après.

M. Bédard: Nous sommes ici dans un contexte très différent de celui de la prestation compensatoire. Nous sommes quand même dans le contexte "alimentaire". Il ne faut pas oublier le grand principe du projet de loi sur lequel il faut que l'autre époux acquière son automonie. C'est pour cela qu'il y a également les mots "changements imprévus". Il est évident que tout se juge au moment où le jugement est prononcé. Mais supposons que l'époux auquel on avait versé une somme forfaitaire en arrive vraiment à un état de fortune très considérable subitement ou, à l'inverse, que l'autre tombe dans un état de dénuement très considérable, on peut se demander - c'est pour cela que nous avons mis une formule très large, des conséquences d'une exceptionnelle gravité -si cette somme forfaitaire ne devrait pas être révisée, alors qu'une pension alimentaire ordinaire peut toujours être révisée en fonction des besoins et des facultés de chacun. (15 h 45)

M. Blank: Oui, je comprends. Si, par exemple, le gars gagne $1,000,000 à la Loto, ça va changer la pension alimentaire parce que, maintenant, il est en situation de payer plus. Le montant forfaitaire, c'est ce qu'on donne à un conjoint pour ce qu'il ou qu'elle a contribué à apporter durant la vie.

M. Bédard: Vous oubliez deux choses. Premièrement, c'est un choix à faire; deuxièmement, il y a un délai de trois ans, je pense, qui s'applique. Après trois ans, si la situation...

M. Forget: Je pense que l'intervention de mon collègue illustre bien que les articles 552 à 555 appartiennent à une catégorie différente des articles suivants.

M. Blank: Excusez-moi, mais si vous êtes limités à trois ans... je ne suis pas certain que l'article 559 est limité à trois ans. Les trois ans, c'est pour le paiement du montant du jugement. Si le jugement est changé ultérieurement...

M. Bédard: Cela a été exécuté dans les trois ans, tel que prévu.

M. Blank: Cela ne fait rien, on change le montant après.

M. Bédard: Est-ce qu'on peut laisser terminer l'explication? Allez-y.

M. Blank: Même si, pour le montant à payer en trois ans, le monsieur paie comptant le jour du jugement... S'il paie comptant, l'article 559 ne s'applique jamais; s'il paie par versements, ça peut être changé. Sinon, il n'y a aucune limite à l'article 559.

M. Lalande: Trente ans?

Le Président (M. Laberge): Alors, l'article...

M. Bédard: II faudrait faire une distinction entre une somme forfaitaire versée par versements et celle qui est versée tout d'un coup.

M. Blank: Je ne vois pas l'utilité du deuxième alinéa de l'article 559. C'est une forme d'appel du jugement de première instance.

M. Bédard: C'est une forme de révision.

M. Blank: D'accord, mais ce n'est pas cela. On a des révisions pour d'autres raisons. Dans le Code civil, on a toute une série de raisons pour la révocation des jugements ou pour un appel. Ici, on ajoute quelque chose encore... Qu'est-ce que c'est, de graves conséquences? Cela veut dire quoi?

M. Bédard: C'est sujet à l'évaluation. Quand on parle d'une "exceptionnelle gravité", c'est sujet à l'évaluation du tribunal. Il est évident qu'on ne peut pas le prévoir.

M. Blank: Je vous donne un exemple peut-être un peu illusoire. Monsieur et madame divorcent, il y a une pension de tel montant et un montant forfaitaire de $100,000.

Mme Lavoie-Roux: II me semblait que ce serait cela.

M. Blank: Cela peut arriver. Le monsieur, après un an ou deux ans, fait un placement à la bourse qui lui rapporte $2,000,000 ou $3,000,000. Est-ce que la femme a le droit de revenir en disant: Je veux une partie de cela?

M. Bédard: Non, parce que ce ne serait pas pour elle une conséquence d'une exceptionnelle gravité.

M. Blank: Mais qu'est-ce que c'est, une conséquence d'une exceptionnelle gravité?

M. Bédard: Je pense le tribunal...

M. Blank: De quoi est-ce qu'on parle? On doit avoir quelque chose en tête pour mettre cela dans la loi.

M. Forget: À supposer que le débiteur ait à faire face à des obligations considérables, ou alors que les circonstances dans lesquelles le créancier alimentaire se trouve sont tout à fait changées, est-ce que d'autres créanciers du débiteur pourraient le forcer à se prévaloir de cet article, pour faire réviser à la baisse le montant forfaitaire ou se faire rembourser une partie du montant forfaitaire?

Le Président (M. Laberge): L'article 559 est ouvert et nous discutons sur cet article.

M. Bédard: Je comprends ce qui préoccupe le député de Saint-Louis, c'est le "sauf si l'absence de révision devait avoir pour l'un..."

M. Blank: Parce que la personne... M. Bédard: Vous l'enlèveriez, quoi?

M. Blank: C'est parce que l'autre personne va vivre comme un suspense pour jusqu'à quand? On essaie de terminer la version même pécuniaire, le plus vite possible. Si on ouvre la porte...

M. Bédard: Est-ce que je vous interprète bien en disant que votre opinion est de fermer la porte?

M. Blank: Oui, c'est cela. Le juge au procès va décider une fois pour toutes la pension alimentaire, le montant forfaitaire basé sur les faits, à ce moment-là. La pension alimentaire peut changer selon les besoins ou la possibilité de payer d'une des deux parties.

M. Bédard: D'accord, on est prêt à l'enlever.

Alors, l'article se terminerait par: "ne peut être révisée même en cas de changements imprévus dans les facultés ou les besoins des parties."

Le Président (M. Laberge): Alors, il y aurait un point après le mot "parties" à la troisième ligne du deuxième alinéa et le reste du paragraphe est biffé. C'est la volonté de la commission.

M. Bédard: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Alors, cet amendement est adopté.

L'article 559, qui était ouvert, se trouve donc adopté avec amendement.

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): Article 560.

M. Bédard: M. le Président, on dit: "Le droit d'un époux de réclamer des aliments est éteint de plein droit par l'expiration de la période pour laquelle il a été réservé, s'il n'est pas exercé."

La rigueur de l'article trouve son fondement dans le principe nouveau que le droit aux aliments ne survit pas au divorce, sauf lorsque le tribunal en accorde au prononcé du divorce ou lorsqu'il réserve le droit d'en réclamer pour une période d'au plus deux ans. On reviendra là-dessus, c'est en évaluation. Il s'agit donc d'un droit essentiellement relatif et temporaire, sauf dans le cas de besoins continus du conjoint.

Le Président (M. Laberge): L'article 560 est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 560 adopté. Article 561.

M. Bédard: L'article proposé laisse au tribunal une discrétion pour déclarer éteint le droit à des aliments. C'est en relation avec l'article 556. Comme l'article 561 est en relation avec l'article 556, on va attendre de se brancher là-dessus.

Le Président (M. Laberge): Article 561 suspendu. Article 562.

M. Bédard: C'est un principe, à l'article 562.

M. Forget: Étant donné...

Le Président (M. Laberge): À l'article 562, on nous avait demandé quand même de supprimer l'article.

M. Bédard: De supprimer l'article, oui.

Le Président (M. Laberge): Vous nous avez demandé de le supprimer.

M. Forget: Bon!

M. Bédard: Je pense que là, c'est trop général.

Le Président (M. Laberge): L'article 562 est supprimé. J'appelle l'article 563. À l'article 563, il y a une modification. On en fait lecture.

On nous demande de remplacer les mots "dans la détermination des besoins et des facultés, le tribunal prend en considération notamment, les accords conclus entre les époux," ce qui veut dire les deux premières lignes et les trois premiers mots de la deuxième, pour les remplacer par ce qui suit: "Dans les décisions relatives aux effets du divorce à l'égard des époux, le

tribunal tient compte des circonstances dans lesquelles ils se trouvent; il prend en considération, notamment, leurs besoins et leurs facultés, les accords qu'ils ont conclus entre eux, et leur âge, etc."

M. Bédard: Cela va?

M. Forget: Comme d'habitude, M. le Président, quand on arrive avec rénumération de tout ce dont le tribunal doit tenir compte, on peut difficilement s'opposer parce qu'on a oublié quelque chose, mais il y a bien des façons de tenir compte de tout cela, tout dépend de l'objectif qu'on vise. Dans le fond, je pense que l'objectif...

M. Bédard: On va préciser un peu les objectifs dans les autres articles.

M. Forget: ...devrait être précisé ailleurs, si on ne le précise pas là. Il est évident que, dans la détermination d'un objectif, il faut tenir compte du plus grand nombre de choses possible, mais il reste que c'est l'objectif qui est important par-dessus tout.

Le Président (M. Laberge): Cet article 563 amendé sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle l'article 564.

M. Bédard: "Sous réserve des articles qui précèdent, les dispositions..." Cela va.

Le Président (M. Laberge): Article 564, adopté. J'appelle l'article 565.

Des effets du divorce à l'égard des enfants

M. Bédard: L'article 565, c'est le principe. "Le divorce ne prive pas les enfants des avantages qui leur sont assurés par la loi ou par le contrat de mariage. Il laisse subsister les droits et les devoirs des père et mère à l'égard de leurs enfants, sous réserve de ce qui suit." L'article parle par lui-même.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article 565 sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 566?

M. Bédard: L'article 566 reprend substantiellement le droit actuel. La question de joindre la demande d'aliments pour un enfant majeur à celle du conjoint pour éviter des procédures inutiles, selon la proposition de l'Office de révision du Code civil, sera examinée dans le cadre des amendements au Code de procédure civile.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Laberge): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ...nous avons ici une suggestion de l'Association des centres de services sociaux pour ajouter à l'alinéa suivant: "Le tribunal peut ajourner l'instruction s'il estime nécessaire de faire appel à un expert avant de statuer sur la garde des enfants". Il a déjà ce pouvoir et le ministre croit qu'il n'est pas utile ou, du moins, qu'il n'est pas nécessaire de faire le rappel de l'expertise quant à la garde des enfants, à ce moment-ci.

M. Bédard: On a même indiqué "toute personne." Il y a un amendement qui s'en vient: "II peut consulter...

M. Forget: "...toute personne".

M. Bédard: On y reviendra un peu plus tard.

M. Forget: M. le Président, sur un autre point, ne semble-t-il pas approprié que l'article 566 qui parle de la garde des enfants établisse un lien et détermine aussi la question de la résidence familiale? Sauf erreur, la résidence familiale est mentionnée de deux façons. Premièrement, comme mesure provisoire, à l'article 544: "Le tribunal peut statuer sur la garde et l'éducation des enfants." Non, ce n'est pas là; c'est à l'article 543, dans un certain sens.

M. Bédard: C'est cela, la résidence.

M. Forget: Sauf erreur, il ne semble pas qu'il y ait d'article qui fasse référence à la résidence familiale, sauf dans un endroit où on parle des mesures compensatoires. Il me semble, encore une fois, que l'on confond deux choses. La mesure compensatoire, c'est une correction des bilans, en quelque sorte, des deux conjoints au moment du divorce, un redressement de bilans en fonction de l'apport de chacun, etc. Cela intéresse les questions patrimoniales. La résidence familiale, bien sûr, dans la mesure où il est approprié, pour d'autres raisons, de la confier ou de l'attribuer à un des conjoints qui, par exemple, a la garde des enfants, peut faire partie du paiement compensatoire. Mais ce n'est pas le paiement compensatoire qui détermine l'attribution de la résidence familiale. Ce sont des considérations qui devraient émarger au chapitre ou à la section qui traite de la garde des enfants. Je pense qu'au moment de prononcer le divorce

on attribue la garde des enfants et c'est à la lumière de cette décision que le tribunal devrait déterminer qui devrait pouvoir réclamer la possession de la résidence familiale. S'il s'adonne que c'est la même partie, le même conjoint ou le même exconjoint qui doit également bénéficier d'une mesure compensatoire, tant mieux. Sinon, ce sont les considérations de maintien de la stabilité du cadre physique, encore une fois, de la famille, eu égard à la présence des enfants, qui devraient être déterminantes.

Il me semble que c'est au moment de l'article 566 qu'on devrait avoir, dans les effets permanents du jugement de divorce, la mention principale de la résidence familiale et pas ailleurs. Encore une fois, elle peut être mentionnée ailleurs aussi à titre accessoire, mais c'est là que la mention principale devrait se trouver. (16 heures)

M. Bédard: Nous sommes peut-être ici devant des questions d'opportunité; enfin, je vais quand même les aborder sous l'angle juridique. Il me paraît quand même inquiétant, alors que nous sommes devant un divorce et que le choix de la résidence familiale n'est plus l'affaire conjointe des époux, que le tribunal puisse, en quelque sorte, s'immiscer dans la conduite future de l'époux qui a la garde des enfants. Sans doute si, à l'avenir, il choisit pour les enfants une "résidence familiale", entre guillemets, qui présente des dangers pour eux, ce sera peut-être une circonstance que l'autre époux pourra évoquer pour demander la révision de la garde.

Je me demande s'il n'y aurait pas quelque danger, ici, que ce soit une véritable ingérence du tribunal dans l'autonomie, en quelque sorte, de chacun des époux.

M. Forget: Je me suis peut-être mal exprimé, M. le Président. Je ne suggère pas que le tribunal attribue d'office une résidence familiale à celui des conjoints qui a la garde des enfants à partir de zéro. Mais, au moment où la demande de divorce est présentée, il y a une résidence familiale; c'est la maison où se trouve celui des deux conjoints qui, effectivement, s'occupe des enfants et qui a probablement bénéficié d'une mesure provisoire du tribunal lui permettant de conserver l'utilisation de la résidence familiale.

Je pense que, à ce moment-là, le tribunal, après avoir entendu les arguments des deux parties - à moins que les deux parties, dans leur entente, en aient disposé, c'est bien sûr; c'est une considération générale qui s'applique à toutes les conséquences du divorce - s'il n'y a pas entente entre les deux parties, pas à jamais, mais à ce moment-là, il doit dire si l'occupation de la résidence familiale doit être continuée. À supposer qu'il l'attribue à la mère qui garde les enfants, mais que, par ailleurs, au titre du redressement des actifs, il estime que cette résidence ne devrait pas lui être donnée en propriété, il peut quand même lui consentir un droit d'habitation peut-être pendant une période déterminée, peut-être indéfiniment, ou jusqu'à la majorité des enfants, ou Dieu sait quoi.

Encore une fois, la question patrimoniale et la question de la continuité, ce sont deux questions. Autrement, on s'expose à ce que le jugement final de divorce soit impuissant à permettre à celui des deux conjoints qui a la garde des enfants de rester dans la maison qui était la maison familiale jusque-là et de n'en traiter qu'incidemment à la question du redressement des actifs. Ce n'est pas l'endroit. Non seulement ce n'est pas l'endroit dans le code, mais ce n'est pas le genre de considération qui devrait être déterminante.

M. Bédard: On va suspendre.

Le Président (M. Laberge): L'article 566 est suspendu. L'article 567 est appelé.

M. Blank: Je me demande pourquoi on a mis le mot "seul": "La garde des enfants est confiée à un seul des époux." Pourquoi le mot "seul"? Si ce n'est pas un seul, ce sont les deux époux. Il n'y en a pas plus de deux. En anglais, c'est "have only one". Je ne sais pas pourquoi...

M. Bédard: Je pense que c'est à un des époux, pas à une tierce personne. C'est dur d'être un plusieurs!

Le Président (M. Laberge): Le mot "seul" est biffé. Adopté. L'article 567 sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté, avec amendement. Article 568.

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): II n'y a pas de commentaires?

M. Bédard: Je dis adopté, parce qu'il n'y a pas de commentaires. Les décisions qui concernent l'ensemble peuvent être révisées à tout moment par le tribunal si les circonstances le justifient. Cela me semble aller de soi.

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 568, adopté. Article 569.

M. Bédard: On ne réadoptera pas l'article 569.

Le Président (M. Laberge): Non, parfait. Je n'avais pas encore tourné la page.

M. Bédard: On pourrait revenir...

Le Président (M. Laberge): On va revenir plutôt en arrière.

M. Bédard: ...à la séparation de corps.

Le Président (M. Laberge): Donc, c'est antérieur.

M. Forget: ...article 523.

M. Bédard: L'article 523, M. le Président.

Chapitre huitième De la séparation de corps

Le Président (M. Laberge): Parfait. Chapitre huitième, De la séparation de corps, section I, Des causes et de la procédure de séparation de corps.

M. Bédard: Je ne pense pas qu'on ait besoin de reprendre certaines discussions.

M. Forgets À l'article 523, non, d'accord. Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 523, adopté. Article 524.

M. Forget: M. le Président, à l'article 524...

M. Bédard: II s'agira de faire la concordance. Peut-être qu'on pourrait attendre qu'on ait approuvé le texte de l'article 538, qui peut...

M. Blank: C'est sur cette question que je désire attirer l'attention du député de Saint-Laurent. Je vais vous donner mon expérience pratique. Souvent, des couples, ou une des personnes - normalement, c'est une des personnes - vient à mon bureau pour une séparation. Elle veut une séparation. Je lui explique les effets d'une séparation et elle dit: Après, si j'ai besoin d'un divorce, qu'est-ce qui arrive? Je lui dit: Ce sont les raisons d'un divorce, si vous avez des raisons d'avoir un divorce. Mais, combien cela va-t-il me coûter? Je dis: Cela va coûter tant pour une séparation. Si vous revenez pour un divorce, cela va coûter tel montant. C'est mieux de prendre un divorce maintenant, je vais économiser de l'argent, répond cette personne.

Je vais vous dire que, franchement, dans 75% des cas, c'est comme ça. Si on doit inciter les gens à préférer une séparation, parce qu'avec une séparation, il y a une chance de sauver le mariage, et si on a la même raison ou les mêmes motifs pour avoir un divorce qu'une séparation, c'est seulement pour des motifs du côté religieux qu'on choisit l'un plutôt que l'autre, et c'est bien qu'on ait cela. Si le but de cette affaire, ce n'est pas de faciliter le divorce, mais d'essayer de sauver le mariage, on doit faire la distinction entre les deux.

M. Bédard: J'ai eu l'occasion déjà de m'exprimer là-dessus. Il reste qu'un des éléments de la fin du processus, que ce soit la séparation de corps ou le divorce, c'est la cessation de vie commune. Je pense qu'on est d'accord là-dessus. Là où se retrouve la différence, c'est dans les effets. Je remarquais que le député de Saint-Louis, dès le début de son intervention, a dit: Lorsque je reçois des gens, je leur explique les effets. Quand on vient de voir les effets du divorce, quand ils sont bien expliqués par rapport aux effets de la séparation de corps, c'est surtout là que doit se prendre la décision ou qu'on doit tirer des conclusions.

M. Blank: Mais les gens disent: Cela me coûtera moins cher de me remarier.

M. Bédard: Si on évalue cela en termes de coût, je ne pense pas qu'on est sur la bonne ligne. Alors qu'un des éléments principaux, c'est la cessation de vie commune. Pourquoi rendre cela plus facile dans un cas plutôt que dans l'autre? Je pense qu'il faut plutôt y aller au niveau des effets, pour faire bien comprendre à ceux qui sont concernés par la décision à prendre qu'il y a toute une différence entre les effets d'un divorce et les effets d'une séparation.

M. Blank: Mais je pense qu'il y a un danger.

M. Bédard: L'irrévocabilité, par exemple.

M. Blank: II y a un danger dans ce sens-ci: vous avez les raisons pour un divorce aux articles 538.1, 538.2 et aussi 539, je pense.

M. Bédard: On va voir. C'est parce que...

M. Blank: C'est cela. C'est le "catch all clause". Aujourd'hui, cela remplace la cruauté mentale et physique, l'adultère, l'alcoolisme, etc., dans les raisons de divorce. Mais en ce qui concerne la séparation, aujourd'hui, on peut avoir une séparation devant n'importe quel tribunal

dans la province pour presque n'importe quelle raison, d'accord? Si les juges sont d'accord que la séparation, aujourd'hui, c'est la même chose qu'un divorce, ils vont prendre l'article 539 comme donnant les raisons de la séparation et on va voir des divorces pour n'importe quelle raison. "If you snore out of line", vous aurez un divorce. C'est comme cela que ça marche maintenant quand il s'agit d'une séparation. Une séparation, on peut en avoir pour n'importe quelle raison.

M. Bédard: Avec l'article 523, on va pouvoir poursuivre la tradition, s'il y a lieu, parce qu'il s'agit d'une évaluation de ce qu'est une volonté de vie commune qui est gravement atteinte. Il y a quand même une latitude...

M. Blank: Mais il y a l'article 524. Le juge va aller à l'article 524 pour trouver des raisons pour l'article 523.

M. Bédard: Non, c'est différent. "Il est réputé en être ainsi dans les cas..." Je pense bien, on a prévu des cas assez exceptionnels. Un juge, à mon sens, qui a le début du commencement d'interprétation ou d'interrelation entre deux articles... Il y a une différence entre l'article 523 et l'article 524. On dit: "II en réputé ainsi". Ce n'est pas limitatif, parce que la règle générale, c'est que la séparation de corps est prononcée lorsque la volonté de vie commune est gravement atteinte. Plutôt que de revenir à tous les critères que vous évoquiez tout à l'heure, je pense qu'on est tous d'accord qu'une évaluation peut être faite.

M. Blank: Je pense que parce qu'on rattache la séparation au divorce et le divorce à la séparation, on peut avoir le divorce sur demande.

M. Bédard: Je ne dis pas que j'ai raison comme tout le monde. Je pense que c'est une question d'appréciation ou d'évaluation. Mais il me semble, personnellement, que c'est surtout au niveau des effets que doit se prendre la décision. C'est joliment différent dans les deux cas. Quand c'est irrévocable et quand c'est non irrévocable, il me semble, pour autant que je suis concerné, qu'il y a une différence fondamentale.

Deuxièmement, quand on regarde l'ensemble des effets du divorce et ceux de la séparation de corps, encore là, pourvu que ces effets soient expliqués et comme je sais que le député de Saint-Louis...

M. Blank: Cela était bon pour les années quand une personne avait honte de dire qu'elle était divorcée. Aujourd'hui, c'est changé. La différence entre dire qu'on est divorcé ou séparé est inexistante.

M. Bédard: En tout cas, j'ai exprimé ma manière de voir les choses.

Le Président (M. Laberge): L'article demeure ouvert à cause des concordances?

M. Bédard: C'est cela et on verra la concordance.

Le Président (M. Laberge): L'article 524 est suspendu. J'appelle l'article 525.

M. Bédard: On l'a presque discuté lors du... Non seulement presque.

M. Forget: Évidemment, celui-ci aussi devrait être suspendu parce que, dans le fond, maintenant qu'il est repris substantiellement dans les motifs du divorce on pourrait en traiter par renvoi de la même façon.

M. Bédard: Je préférerais qu'il y soit quand même.

M. Forget: On peut reproduire les autres aussi.

M. Bédard: Oui.

M. Forget: Mais il n'y a pas véritablement de raison, puisqu'il est repris mot pour mot.

M. Bédard: II y a une concordance à faire, c'est sûr.

On avait laissé l'article 538 ouvert pour la question des délais. On pourrait peut-être faire preuve de cohérence en le laissant ouvert, parce que cela va se refermer en même temps, par la force des choses.

Le Président (M. Laberge): L'article 525 est suspendu. Article 526.

M. Bédard: II n'y a pas trop de problèmes.

M. Blank: À l'article 538, on a les délais. Au premier paragraphe, on parle du mari ou du conjoint qui est absent pour au moins trois ans. Aujourd'hui, on donne une séparation au moment où le conjoint part de la maison. Le lendemain qu'il part, on peut avoir une séparation.

M. Bédard: Oui, mais...

M. Blank: Est-ce que c'est couvert par l'article 523 ou est-ce qu'on va le faire attendre trois ans maintenant?

M. Bédard: Non, c'est couvert par l'autre article qui était 538.2. L'article 526 ne pose pas de problèmes?

M. Forget: Sous réserve de la question posée par le député de Saint-Louis, je pense qu'effectivement si on légifère par renvoi, à l'article 524, il faudrait se poser des questions sur les délais. Je pense que la question de simplement légiférer en séparation de corps par renvoi avec le divorce, en dépit de l'argument qu'a présenté le ministre que les effets sont différents, certes, on est d'accord. Les effets sont différents, mais les délais et les causes peuvent-elles être identiques? A priori, je dirais non, pas nécessairement.

M. Bédard: Au départ, elles ne sont pas identiques, parce que le libellé général, lorsqu'il s'agit d'une séparation de corps et lorsqu'il s'agit d'un divorce, est différent. Quand on parle de volonté de vie commune gravement atteinte et que, dans l'autre, on parle de volonté de vie commune irrémédiablement atteinte, ce sont deux choses différentes. (16 h 15)

M. Blank: Parce qu'il y a des échecs en effet. Un mari qui abandonne sa famille, après une semaine, madame a besoin de certaines choses pour les enfants. La seule façon pour qu'elle puisse les avoir, c'est de prendre une action en séparation pour demander une pension alimentaire provisoire, d'accord. Si une semaine n'est pas assez, si ce n'est pas gravement atteint, jusqu'à quel point madame peut-elle aller à la cour pour avoir une pension provisoire? À quel point?

M. Bédard: Si son mari est en faute, elle n'a pas besoin de la séparation de corps pour obtenir des aliments.

M. Blank: Oui, je sais ça aussi, mais si elle ne veut pas vivre avec ce monsieur?

M. Bédard: Cela paraît frapper, le cas que donne le député de Saint-Louis, mais... Elle fait une demande en séparation de corps, quoi.

M. Blank: Oui, elle fait une demande, mais il faut avoir des raisons.

M. Bédard: II me semble que ça va de soi. Quand on fait une demande de séparation de corps, on est rendu aux procédures, il faut avoir des raisons.

M. Blank: Mais si on ne donne pas les raisons de la loi, si on prend la séparation de corps sachant que dans deux ans la cour va la rejeter, en attendant on va avoir tous un peu...

M. Bédard: Non, là, je reviens à ce que je vous disais tout à l'heure. Ce n'est pas vrai qu'on limite les raisons de la séparation de corps à celles qui sont énoncées au niveau du divorce parce que ce serait interpréter l'article 524 comme voulant tout dire. Il y a un article 523 aussi qui existe.

M. Blank: Moi, dans tout ça, je vois que les causes de divorce maintenant sont plus faciles et les causes de séparation sont plus dures. Vous allez dans la direction avec la séparation où il est peut-être plus difficile d'avoir une séparation et plus facile d'avoir un divorce. Je parle de la loi d'aujourd'hui. Je ne parle pas de l'autre. Aujourd'hui, c'est plus facile d'avoir une séparation qu'un divorce. Avec votre loi c'est exactement plus facile d'avoir un divorce qu'une séparation.

M. Bédard: Faites-en la démonstration. Je suis loin d'être convaincu. Je comprends que cela puisse s'affirmer mais ce n'est pas la conviction que j'ai. En tout cas, on va avoir à revenir sur les causes du divorce et à ce moment-là ça nous permettra de voir jusqu'à quel point il est opportun d'ajouter quelque chose au niveau de la séparation de corps.

Le Président (M. Laberge): 526 est relié à 525, donc suspendu. J'appelle 527.

M. Bédard: 527, est-ce que ça va?

Le Président (M. Laberge): 527, adopté?

M. Bédard: II est simplement supprimé pour les mêmes raisons que pour... il s'agit de le reporter au Code de procédure civile parce qu'il s'agit de l'effet du jugement.

Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il y a entre 527 et 536 des amendements à suggérer? Je n'ai pas de papillons ici.

M. Bédard: Je vais vous l'indiquer rapidement. Oui.

Le Président (M. Laberge): Mais, je ne les ai pas. Alors, si on peut les porter à ma connaissance.

M. Bédard: Oui, on va essayer de...

Le Président (M. Laberge): II y a peut-être quelqu'un qui les a en main.

M. Bédard: Alors, 527 c'est plutôt...

M. Blank: Sur le même sujet. Je sais que dans les provinces de droit commun, il n'y a pas de séparation de corps. Cela veut dire que c'est un contrat privé qu'on signe, si on veut signer, ou qu'on ne signe pas. Ici au Québec, avec la loi actuelle, si un couple décide de vivre séparément, comme le ministre l'a dit, une des parties a le droit d'aller à la cour pour demander une pension alimentaire pour la garde des enfants

nonobstant le fait qu'il n'y ait pas d'action en divorce d'intentée. Pour quelle raison a-ton besoin d'avoir ce système de séparation si c'est couvert par l'autre? Quel est le bénéfice, quel est la raison d'être de la séparation de corps actuellement dans notre loi? Quand on n'avait pas le divorce dans la province de Québec, il y avait une raison pour avoir la séparation de corps. Maintenant, avec le divorce, qu'est-ce que cela ajoute aux obligations des personnes?

Mme Lavoie-Roux: Quand on regarde l'article 538,3°, je vous assure que c'est bien proche de la séparation de corps, ou la séparation de corps est bien proche de ce motif, de cette provision, de cette disposition qu'on trouve pour un divorce éventuel.

M. Bédard: Cela ne peut pas faire autrement que de se ressembler d'une certaine façon. Après tout, on est à la fin... Soyons réalistes...

Mme Lavoie-Roux: C'est presque la même chose.

M. Bédard: ... on est dans la situation de gens qui ne veulent plus faire vie commune ensemble. On ne peut pas imaginer...

M. Blank: D'accord. Ils ne vivent plus ensemble. Est-ce qu'on a besoin d'un jugement de la cour pour dire qu'ils ne vivent pas ensemble? Ils ont besoin d'un jugement de la cour pour la garde des enfants et la pension alimentaire. Ils ont ce droit dans la loi actuelle, sans séparation.

M. Bédard: Non, mais, s'ils veulent une séparation, elle est là. Franchement...

M. Blank: Pourquoi? Ils sont séparés, qu'est-ce que le jugement donne de plus?

M. Bédard: II y a des conséquences pécuniaires, on va le voir au niveau des effets de la séparation de corps.

M. Blank: Quelles sont les conséquences qu'on ne peut pas avoir avec la loi actuelle?

M. Bédard: II y aura la prestation compensatoire qui est déjà indiquée. Il y a les donations, enfin, tout ce qui est patrimonial, le contrat de mariage lui-même. Il y a la dissolution du régime matrimonial, s'ils sont en communauté ou en société d'acquêts. Je ne fais qu'énumérer... J'en oublierai sans doute, mais il y a certaines de ces conséquences...

M. Blank: Qu'est-ce que cela change?

M. Forget: Comment imaginer que des gens qui sont séparés en vertu d'un jugement veuillent continuer à vivre en société d'acquêts? C'est invraisemblable. Ils vont vouloir se séparer, mais... Donc, ce n'est pas une différence entre le divorce et la séparation de corps.

M. Bédard: Non. Nous étions plutôt à parler de la différence entre une séparation de fait non judiciaire et une séparation de corps judiciaire. Il y a tout l'aspect patrimonial qui reçoit une solution.

Il demandait pourquoi une séparation de biens, je pense qu'on va le voir dans...

M. Blank: Oui, je demande pourquoi. Je voudrais une réponse, parce que, dans toutes les autres provinces, il y a la séparation de biens par la loi.

M. Bédard: On va le voir dans les effets de la séparation de corps.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je me demande si ce qui apparaît un peu comme une particularité pour le Québec n'est pas relié à la question religieuse, historiquement. Le divorce n'est pas permis par l'Église, du moins, je le pense encore; c'est pour cela que c'était le compromis humain, si on veut, le compromis juridique qu'on avait trouvé de la séparation de corps. C'est peut-être ce qui explique qu'il ne l'était pas dans les autres provinces.

M. Bédard: Vous avez en grande partie touché au point.

M. Blank: Le fait que M. Guay m'ait répondu... Le fait qu'on ait un système d'acquêts ou de communauté des biens nous rend un peu différents des autres provinces. C'est notre problème.

M. Bédard: Ou notre richesse.

M. Blank: Notre richesse? Je ne sais pas. Je ne suis pas 100% d'accord.

M. Bédard: À ma connaissance, il y a au moins deux provinces de l'Ouest qui connaissent la séparation judiciaire, le Manitoba et...

M. Blank: Le Manitoba, pour les mêmes raisons.

M. Bédard: C'est sans doute pour les mêmes raisons.

C'est notre société.

M. Blank: La Cour suprême a dit que

c'est le même...

M. Bédard: À l'article 527, nous avions un papillon pour le supprimer.

Le Président (M. Laberge): L'article 527 sera-t-il supprimé?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 527 est supprimé. Article 528?

M. Bédard: À l'article 528, c'est le principe général. La séparation de corps délie les époux de l'obligation de faire vie commune. Ils n'auront pas le lien du mariage.

Le Président (M. Laberge): Article 528, adopté. À l'article 529, il y a un amendement pour remplacer, à la troisième ligne du deuxième alinéa, le mot "reporte" par "fasse remonter". C'est déjà une concordance avec ce qui a déjà été fait à plusieurs endroits. Amendement adopté. L'article 529 amendé est-il adopté?

M. Bédard: Je ne sais pas s'il y a des remarques. Non, je n'ai pas de remarques spéciales.

Le Président (M. Laberge): Avez-vous des questions sur l'article 529? Article 529, adopté. J'appelle l'article 530.

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 530, adopté. À l'article 531, il y a une modification qui m'est suggérée: Ajouter, a la fin du deuxième alinéa, ce qui suit: Après le mot "détermine", ajouter une virgule et les mots: "en tenant compte des circonstances dans lesquelles se trouvent les parties." Je répète: " en tenant compte des circonstances dans lesquelles...

M. Bédard: On a adopté... C'est dans le même sens que l'autre.

Le Président (M. Laberge): Oui, il y a déjà eu une concordance, il y a déjà eu quelque chose comme ça. " ... se trouvent les parties."

M. Bédard: Adopté?

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement est adopté?

Adopté. L'article 531 amendé est adopté.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement. J'appelle l'article 532.

M. Bédard: II y aura sûrement un petit amendement sur l'accroissement par enrichissement. C'est un amendement de concordance avec...

Le Président (M. Laberge): Attendez! Il faudra... Après le mot...

M. Blank: Disons qu'un couple se sépare et le juge rend son jugement en se basant sur la prestation compensatoire. Après deux ou trois ans, l'une des parties demande le divorce. Est-ce que le juge, au moment du divorce, a le droit de changer ça?

M. Bédard: La prestation? Elle a été accordée. C'est peu probable, une fois la séparation de corps prononcée, la prestation établie, que pendant le laps de temps de vie en séparation de corps jusqu'au divorce il y ait eu un nouvel apport d'un époux à l'autre, mais, s'il y avait un nouvel apport d'un époux à l'autre, sans doute qu'il pourrait être pris en considération au moment du divorce, mais comme la séparation de corps...

M. Blank: S'ils vivent séparément, comment peut-il y avoir un nouvel apport d'un époux à l'autre?

M. Bédard: C'est pour ça que je dis que probablement...

M. Blank: Oui, mais si le juge en deuxième instance de divorce pense que le premier juge a fait erreur et dit j'ai le droit de changer cela, j'ai le droit de fixer un montant forfaitaire cette fois-ci?

M. Bédard: Ce qu'on vient de dire, ce n'est pas une révision, c'est si, dans l'intervalle...

M. Blank: Oui, mais ne pensez-vous pas qu'on doit mettre quelque chose ici à l'effet qu'on ne peut pas le réviser, même au moment du divorce?

M. Bédard: II n'y a pas de révision. Peut-être que le jugement ne sera pas porté en appel, il va être passé en force de chose jugée selon sans doute la règle générale. Il n'y a pas de révision, ce n'est pas une mesure provisoire. C'est de la nature d'une dette qui est due comme tout jugement et une fois que le jugement a été rendu...

À l'article 532 il y avait...

Le Président (M. Laberge): A l'article 532 on nous demande de changer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du patrimoine". C'est de concordance avec ce dont on a discuté tout à l'heure.

L'article 532 amendé sera-t-il adopté? M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement. J'appelle l'article 533.

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 533 est adopté. J'appelle l'article 534.

M. Bédard: "À l'égard des enfants, la séparation de corps produit les mêmes effets que le divorce", cela va de soi.

Le Président (M. Laberge): L'article 534 est adopté. J'appelle l'article 535.

M. Bédard: " La reprise volontaire de la vie commune met fin à la séparation de corps. "La séparation de biens subsiste, sauf si les époux choisissent, par contrat de mariage, un régime matrimonial différent."

Mme Lavoie-Roux: M. le Président... Vas-yl

M. Blank: M. le ministre, je vois beaucoup de références ici dans cette section de la séparation... Le divorce...

M. Bédard: C'est la cessation de la vie commune. Bon!

M. Blank: Oui, d'accord, je suis d'accord avec vous, mais du côté pratique, à un moment donné, vous devrez proclamer cette loi-ci. Les articles concernant le divorce... Jusqu'au moment où vous ne proclamerez pas les articles concernant le divorce, je ne sais pas si ces articles-ci seront en vigueur. (16 h 30)

M. Bédard: C'est justement, le mariage et le divorce... On sait qu'on a un problème.

M. Blank: Cela veut dire que vous ne pouvez pas proclamer les articles sur la séparation avant de...

M. Bédard: Ne me le faites pas dire d'une façon très catégorique, mais il est évident que chacun des articles sera analysé et suranalysé avant quelque mise en vigueur que ce soit et on sait que le mariage et le divorce sont de compétence...

M. Blank: Oui, mais je veux dire qu'en fait, vous ne pouvez pas proclamer les articles sur la séparation avant de proclamer ceux sur le divorce parce que vous avez trop de références à...

M. Bédard: Non, non. Ce n'est pas à cause des références. C'est à cause du problème constitutionnel lui-même qui fait que le mariage...

M. Blank: ... la séparation.

M. Bédard: ...dans une grande partie relève...

M. Blank: Mais les effets de la séparation...

M. Bédard: ...du fédéral sauf tout ce qui regarde - et là, je ne voudrais pas affirmer des choses sans avoir l'opinion - la célébration, etc. Ensuite, il y a...

M. Blank: Ici, on a les effets de la séparation. Je pense qu'il n'y a pas de problème. C'est notre domaine.

M. Bédard: Merci, je vais le noter.

M. Blank: Oui. D'accord. Mais ici, quand vous faites allusion aux articles sur le divorce, vous ne pouvez pas les appliquer avant de proclamer les autres. Ne pensez-vous pas que ce serait mieux de faire l'inverse, dans la loi ici et, dans le divorce, de référer à la séparation?

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais soulever un point sur toute la section touchant la séparation.

M. Blank: Je voulais seulement faire une mise en garde. Vous prendrez vos responsabilités.

M. Bédard: J'en prends bonne note, M. le député de Saint-Louis.

Mme Lavoie-Roux: Touchant la séparation de corps, c'est vrai qu'on dit à l'article 526: "Sous réserve des règles particulières à la demande prévue par l'article 525, les règles relatives à l'instance en divorce sont applicables à la demande de séparation de corps." Il reste que le chapitre sur le divorce suit celui sur la séparation de corps et, à part le motif religieux dont j'ai parlé tout à l'heure, il y a peut-être, en tout cas, dans notre esprit ou dans notre tradition - appelez-le comme vous voudrez -un élément à savoir que la séparation de corps était quelque chose de moins irrévocable et où, possiblement, la réconciliation était encore possible, mais à aucun moment dans aucun article on ne fait appel à des mécanismes de conciliation que le tribunal pourrait recommander. Je regardais peut-être à l'article...

M. Bédard: Ce sont les mêmes qu'en matière de divorce.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais je me demande s'ils ne pourraient pas être inclus quelque part dans la séparation de corps. Finalement, le modèle pour la séparation de corps, c'est le divorce.

M. Bédard: Je ne sais pas. Ils sont inclus. On y fait allusion.

Mme Lavoie-Roux: Je sais bien qu'ils sont inclus, mais dans une logique... Parce que, dans le fond, je vous assure que la séparation de corps ne tient plus à grand-chose comme mécanisme ou comme procédure.

M. Bédard: On peut donner cette impression parce qu'on fait des références.

Mme Lavoie-Roux: Tout le monde dans son discours a dit que la séparation de corps était moins permanente que le divorce. Cela suppose des possibilités de réconciliation. Cela suppose un geste moins irrémédiable ou irrévocable, mais il me semble que si on veut être logique avec ça il y aurait peut-être moyen, à un article au moins, de parler de ces procédures. Je comprends que vous les prévoyiez pour le divorce, mais il semblerait que...

M. Bédard: II y a déjà...

Mme Lavoie-Roux: Peut-être seulement à un article parce que...

M. Bédard: ...une référence... Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: ...à l'obligation de favoriser la conciliation, etc.

Mme Lavoie-Roux: Mais il me semble qu'on devrait le mettre dans la séparation de corps si ce n'est pas autre chose.

M. Bédard: Mais ça y est. C'est peut-être juridiquement ça n'y est pas visuellement, mais ça y est légalement. On s'entend là-dessus.

Mme Lavoie-Roux: Oui, ça y est juridiquement. Je suis d'accord avec vous. En tout cas, dans l'esprit où on a maintenu la séparation de corps, il me semble que l'un des motifs qu'on a invoqués c'était le fait d'une étape normalement antérieure au divorce, moins finale, avec plus de possibilités de réconciliation.

M. Bédard: D'ailleurs...

Mme Lavoie-Roux: II faut se référer au chapitre sur le divorce pour retrouver ces éléments.

M. Bédard: C'était pour ne pas... Je pense qu'on se comprend. C'était pour ne pas répéter.

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, je le fais comme suggestion.

M. Bédard: II y a un effet de différent. De la fin de la séparation de corps. "La reprise volontaire - article 535 - de la vie commune met fin à la séparation de corps. "La séparation de biens subsiste, sauf si les époux choisissent, par "contrat de mariage, un régime matrimonial différent".

Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être à l'article 533 que vous pourriez ajouter quelque chose.

M. Bédard: Est-ce qu'il y a besoin d'explication? Vous voudriez que cela se répète.

Le Président (M. Laberge): Je vais vous demander la permission de rouvrir l'article 531 qu'on avait adopté avec un amendement. On a porté à ma connaissance, parce qu'on vient d'y mettre la main, qu'on a oublié de changer certains mots.

À l'article 531, on nous demandait de supprimer, a la fin du premier alinéa, les mots "sauf stipulation contraire du contrat".

M. Bédard: Ah, oui.

Le Président (M. Laberge): Et de terminer l'alinéa par le mot "mariage" avec un point. Est-ce que cela est adopté? Et l'autre c'était d'ajouter à la fin du deuxième, on l'a fait déjà, "en tenant compte des circonstances dans lesquelles se trouvent les parties". Cela va?

À l'article 532, la correction a été faite. Il y avait juste ces mots à biffer. Je vous remercie, c'est adopté.

M. Bédard: À l'article 535, est-ce qu'il y a des remarques?

M. Forget: Je vais vous laisser faire le reste tout seul, comme cela, M. le Président. Vous avez l'air de faire cela très efficacement.

M. Bédard: Article 535.

M. Forget: Vous faites les propositions et les votes de façon fort efficace.

Le Président (M. Laberge): Je savais que la discussion avait été faite.

M. Forget: Je sais.

M. Bédard: Ce n'est pas un reproche que fait le député de Saint-Laurent au président, au contraire.

M. Forget: Touche d'humour peut-être pas très réussie, mais...

Le Président (M. Laberge): Non, non, c'est parfait.

A l'article 535, est-ce qu'il y a...

M. Bédard: Y a-t-il des questions? "La reprise volontaire de la vie commune met fin à la séparation de corps". Je pense que cela va de soi.

M. Forget: Dans les chapitres relatifs au divorce, la disposition équivalente est un peu différente. On dit: "La seule reprise de la cohabitation pendant moins de quatre-vingt-dix jours ne fait pas présumer la réconciliation". Il y a les articles 549 et 550 dans le divorce. "La réconciliation des époux survenue depuis la demande met fin à l'instance". C'est cela qu'on reproduit.

Maintenant, la présomption de l'article 550 n'est pas reproduite.

M. Bédard: Non.

M. Forget: Cela donne force à l'argumentation de la députée de L'Acadie qui disait qu'il semble que la réconciliation a moins de poids dans la séparation de corps que dans le divorce.

Mme Lavoie-Roux: Ah, oui.

M. Bédard: Peut-être qu'on pourrait...

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce qu'on voulait.

M. Forget: Non, pas dans l'esprit, mais, apparemment, d'après la rédaction. Je ne fais de procès d'intention à personne.

M. Bédard: Non, je suis convaincu de cela.

M. Forget: Cela nous arrive, mais pas cette fois-ci.

Le Président (M. Laberge): Article 535.

M. Bédard: Je vous fais confiance quand vous en avez l'intention.

Ce qu'on veut, c'est une reprise volontaire de la vie commune, c'est-à-dire l'intention liée au fait matériel d'une communauté de vie et non pas en exigeant une simple réunion ou une simple cohabitation. Il faut qu'ils aient le désir de vivre vraiment ensemble.

Excusez, je pense que Mme la députée de L'Acadie avait une question.

Le Président (M. Laberge): Oui, mais elle m'a parlé de l'article 533. Je m'excuse, j'ai peut-être eu un moment de distraction.

Mme Lavoie-Roux: Non, je pense que cela a été adopté avec tout le reste.

M. Bédard: À l'article 535, est-ce qu'il y a d'autres questions?

Le Président (M. Laberge): Est-ce que tout est complet pour l'article 535?

Mme Lavoie-Roux: Ma question demeure...

M. Forget: Pertinente.

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si elle est pertinente, je laisserai aux autres le soin de juger, mais j'ai exprimé au moins un souhait. C'est que quelque part dans le chapitre de la séparation de corps on trouve un recours à des mécanismes de conciliation. Là, on a adopté tous les articles...

M. Bédard: Ce que vous voulez, c'est qu'on reproduise l'article qui était au niveau du divorce comme à l'article... L'obligation de concilier à tout moment de l'instance, autrement dit. À tout moment de l'instance en séparation de corps, il entre dans la mission du tribunal de conseiller, de favoriser la conciliation des parties et l'intérêt des enfants; je crois qu'on l'avait évoqué aussi.

Le Président (M. Laberge): Et de veiller aux intérêts de l'enfant.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Pourquoi ne le répéterait-on pas une fois de plus?

Le Président (M. Laberge): Et de veiller aux intérêts de l'enfant. C'est l'article 539.

M. Bédard: Je n'ai pas objection.

Le Président (M. Laberge): L'article 535, on n'y a pas touché encore. Les articles 533 et 534 sont adoptés. L'article 535, on n'en a pas parlé encore.

M. Bédard: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Ce sera 539.

M. Bédard: Cela existait déjà, ce sera visuellement...

Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il faudra le reporter après l'article 526.

M. Bédard: Je ne voudrais pas apporter

des complications à nos juristes plus qu'il ne le faut, mais je pense que c'est possible.

Mme Lavoie-Roux: Je sais que les juristes veulent être très concis, je les admire depuis le début, mais... C'est un chapitre qui vient avant le chapitre du divorce, de toute façon.

M. Bédard: Cela pourrait être après l'article 525.

Le Président (M. Laberge): Oui, parce que c'est avant de prononcer ou après.

M. Bédard: Ah! Oui.

Le Président (M. Laberge): La prononciation, l'énoncé.

M. Bédard: On va donner un moment de réflexion.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela, réfléchissez.

Le Président (M. Laberge): Cela va prendre cinq minutes.

Mme Lavoie-Roux: Vous devez passer tous vos loisirs à réfléchir.

M. Bédard: On s'entend tous. À moins de raisons péremptoires...

Le Président (M. Laberge): Les articles 525 et 526 étant suspendus, cela peut être placé là.

M. Bédard: On va se solidariser pour le répéter dans la séparation de corps. L'article 535, cela va.

Le Président (M. Laberge): Si cela va, ça peut être adopté.

M. Forget: Cela va, oui. Si je comprends bien, il y aurait quand même, à cause de la différence entre l'article 535 et l'article 550, la possibilité qu'une cohabitation de moins de 90 jours fasse présumer de la réconciliation dans le cas d'une séparation de corps.

M. Bédard: Oui, si on joint à l'élément de cohabitation l'intention de reprise. C'est tout le problème de la réunion des deux éléments, de l'intention, d'une part, et du fait plus matériel de la cohabitation.

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 535, adopté. Article 536.

M. Bédard: À moins qu'on ne trouve une autre cause qui dissout le mariage, le mariage se dissout par le décès de l'un des conjoints ou par le divorce.

Mme Lavoie-Roux: Ou s'il y en a un qui s'en va sur une autre planète!

Le Président (M. Laberge): Article 536, adopté. Un moment. La commission suspend ses travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 43)

(Reprise de la séance à 16 h 55)

Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames et messieurs!

Étude des articles suspendus

La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux. Nous avons a retoucher certains articles que nous avons laissés en suspens au cours de notre étude. Si vous le voulez bien, je commencerai par l'article 403 où on nous demande, au premier alinéa, d'ajouter, après le mot "tribunal", les mots "pour motif sérieux".

M. Forget: M. le Président, j'aurais quelques remarques préliminaires à faire au moment du début de l'étude des articles suspendus. Il s'agit en quelque sorte d'un dernier regard pour la commission parlementaire...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... sur l'ensemble des articles. Je voudrais souligner à ce moment-ci le rythme assez soutenu auquel nous avons procédé; nous avons accumulé plus de trente heures de travail en commission parlementaire au rythme de dix heures par jour pendant quatre jours et demi. Ceci a laissé bien peu de temps pour la réflexion, la maturation et les nouvelles rédactions. Donc, il y a déjà une difficulté de prendre un certain recul sur le travail de chaque journée, de manière à voir si on ne fait pas d'erreur, si on n'a pas omis les concordances, etc. Donc, nous sommes déjà en certain désavantage, et je parle des deux côtés de la commission.

En plus de cela, il y a une difficulté additionnelle. Nous-mêmes et nos recherchistes aurions aimé pouvoir nous préparer à l'étude de ce second regard, les articles suspendus, à la lumière de la transcription des délibérations de la commission, parce qu'on ne peut pas tout noter, on ne peut pas se souvenir de tout pour les journées antérieures. Or, à ce moment-ci, ou, du moins, à la date de ce

midi, nous n'avions reçu que la transcription des délibérations de la commission pour mercredi dernier. Nous n'avions aucune nouvelle de jeudi, vendredi, lundi et, à plus forte raison, hier. On va revenir sur des discussions que nous avons déjà eues. Je sais que le ministre est désireux, et nous aussi d'ailleurs, de ne pas rouvrir le débat qui a déjà été fait, mais, d'un autre côté, on aurait bien aimé pouvoir retrouver les éléments principaux de ce débat pour voir quels étaient les consensus, s'il y en avait, les indications données par les uns et par les autres pour voir si les amendements qu'on se prépare à nous soumettre et qu'on nous a déjà communiqués ce matin ou hier soir étaient conformes à ce qui avait été plus ou moins entendu au niveau d'une nouvelle rédaction. Ceci est d'autant plus important, comme vous l'avez remarqué, que nous nous sommes abstenus de préparer des amendements formels. Il n'est pas coutumier pour le travail d'une commission parlementaire de procéder aussi informellement, mais ceci a été fait délibérément de notre côté pour éviter -d'ailleurs, nous en avions parlé, le ministre et moi - que chacun y aille de sa petite motion préférée. Nous voulions plutôt demander à ceux qui sont les experts, qui ont aidé et présidé à la rédaction du projet de veiller au libellé de manière à respecter l'unité de style, etc. du projet. C'était la meilleure façon. Évidemment, si nous avions voulu faire de l'obstruction, ce n'est certainement pas la méthode que nous aurions prise, parce qu'elle nous privait, en quelque sorte, de notre droit de parole. De toute manière, cela a été interprété très libéralement par le ministre et par vous-même, M. le Président, je ne dis pas ça pour me plaindre mais pour souligner justement que comme nous n'avons pas de motion formelle, nous nous en remettions en totalité au consensus qui se dégageait, il était d'autant plus nécessaire de relire, de pouvoir prendre connaissance du compte rendu des débats. (17 heures)

Sans la transcription des débats - le travail est déjà difficile - disponible, je pense qu'on a vraiment une situation telle qu'on doive vraiment se poser la question: Est-ce qu'il est raisonnable d'aller au-delà du travail qui est déjà fait? La réponse qu'on devrait apporter à cette question, si nous étions entièrement responsables et raisonnables dans la conduite de nos travaux, ce serait: Non, il vaut mieux regarder ce qui a été fait, regarder les discussions qui ont eu lieu, voir quels sont les points qui ont été soulevés et profiter vraiment de cette dernière révision pour s'assurer vraiment qu'il y a une cohérence et qu'on a tenu compte de toutes les représentations.

Autrement, M. le Président, je pense qu'on va y aller de façon doublement aveugle. On a déjà des problèmes avec un travail aussi monumental, je pense que nous nous doutions tous, avant de commencer l'étude du projet de réforme du Code civil, que c'était quelque chose de compliqué, qu'il y avait énormément d'implications. Après quatre jours et demi de travaux on est encore plus persuadé qu'avant qu'on est à faire quelque chose d'extrêmement important et extrêmement complexe aussi. On n'a tout simplement pas le recul actuellement pour assurer nos collègues de l'Assemblée nationale, qui ne sont pas membres de la commission, qu'en quelques heures on leur présenterait le rapport de nos travaux, qu'on a véritablement fait un travail impeccable dont on peut se sentir fier et responsable.

Dans mon propre esprit il y a énormément de questions que je n'ai pas eu le temps de regarder, des réponses qui ont été faites ou des rédactions qui ont été adoptées, même de bonne foi, bien sûr, de la part de tout le monde, et on n'a aucun recul. On va livrer un produit qui va un peu sentir l'improvisation. Je ne le dis pas de façon péjorative; je pense que tout le monde fait de son mieux dans les circonstances, mais ce sont plutôt les circonstances elles-mêmes qui sont difficiles et peut-être même impossibles pour faire un bon travail.

Il y a un nombre très considérable de changements. J'espère que vous en avez tenu compte complètement, mais ce n'est certainement pas le cas de votre humble serviteur qui les a notés au passage, qui a fait des annotations sur son texte, etc., mais il reste qu'on est loin d'être sûr d'avoir un tableau complet, parce qu'en même temps qu'on fait un amendement, on essaie de prendre connaissance des notes qu'on a faites sur l'article qui s'en vient et de voir si on n'a rien oublié.

J'hésite vraiment, M. le Président, à me prêter à un exercice comme celui-là. Je ne veux pas donner l'impression, par ces remarques, que nous voulons gêner en quoi que ce soit l'adoption d'un nouveau Code civil. C'est la raison pour laquelle je m'exprime avec un peu d'hésitation, mais autant je souscris au désir de modifier le Code civil, autant je m'inquiète de la façon dont je le fais avec les autres membres de l'Assemblée. Je n'ai pas l'impression d'avoir tout ce qu'il faut pour faire un bon travail.

Encore une fois on va nous présenter des choses... On va être porté presque infailliblement à rouvrir le débat sur certaines choses simplement ne serait-ce que par oubli de certaines discussions qu'on a eues et on ne sait pas si on a couvert tel ou tel point. Enfin, on peut bien se prêter à ça si c'est la seule solution et la seule façon de procéder que le ministre est capable d'envisager à ce moment-ci, étant donné les contraintes qui sont siennes, mais je voudrais

tout de suite le mettre en garde contre ce qui peut sembler aussi, de la part des observateurs de l'extérieur, comme une précipitation indue dans la façon de faire une tâche qui est extrêmement importante. Ce sont les remarques que je voulais faire à ce moment-ci, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais appuyer les remarques de mon collègue de Saint-Laurent. Je vais le faire brièvement. L'intervention du député de Saint-Laurent ainsi que la mienne ne sont pas une tentative de faire de l'obstruction aux travaux jusqu'à 18 heures.

Évidemment, on pourrait se dire: Vous, Mme la députée de L'Acadie, comme certains autres qui sont de l'autre côté de la table, ce n'est pas vraiment votre domaine, non plus. Que vous vous sentiez un peu mêlés et que vous ne fassiez pas automatiquement, sur le champ, la concordance entre la section 4 et la section 3 ou le chapitre 2 et le chapitre 8, il ne faut pas trop s'en inquiéter parce que, nous les juristes, on comprend tout cela et, dès qu'il y a un amendement qui a été fait à tel point, dans notre esprit, automatiquement, on peut se référer à l'autre modification qui a été faite à une autre partie de la loi. Mais il reste, si mes collègues de l'autre côté n'ont pas d'objection à s'associer à nous sur ce point, qu'on aura tenté de traduire, ici, ce que peut-être le monde ordinaire qui va devoir vivre avec cette loi, va rencontrer comme obstacles à des interprétations, à ce qui peut leur apparaître ou à ce qui m'apparaissait des incohérences ou des incompréhensions et toujours, compte tenu de ma non-spécialisation, dans un domaine juridique aussi complexe que celui-là. Je dois vous dire qu'on a mis à l'oeuvre nos deux recherchistes, une s'étant même ajoutée par surcroît, compte tenu de la complexité de l'affaire. On a travaillé ici de 22 heures à 24 heures. Je dois vous avouer, bien humblement, qu'après 24 heures, je ne m'en allais pas toujours pour relire ce qu'on avait discuté l'après-midi, d'autant plus qu'on ne pouvait pas le relire et qu'on ne peut même pas le relire plusieurs jours après. Je me sens assez mal à l'aise. On va peut-être reprendre chacun des articles, d'une façon beaucoup plus rapide, même ceux auxquels on n'a pas apporté de modifications, pour s'assurer qu'il y a une certaine cohérence dans l'ensemble du projet de loi.

Ce sont des remarques que j'ai eues de l'extérieur et je pense qu'une bonne illustration de ceci - je n'ai pas l'habitude de critiquer les journalistes, je pense qu'ils essaient de faire leur boulot le mieux possible - mais si vous référez, par exemple, à un article qui a paru dans la Gazette de ce matin... Vous ne l'avez peut-être pas lu, je ne l'aurais pas lu si quelqu'un ne me l'avait pas signalé. Vous savez, on n'a pas eu souvent de journalistes qui nous ont honoré de leur présence. Hier, tout à coup, on en a vu un groupe fort impressionnant; je pense qu'ils étaient trois. C'était la première fois qu'on voyait ça, trois sont venus! Cela a donné comme résultat qu'il y a eu, dans la Gazette, un long article - peut-être y en a-t-il eu dans le Devoir, je l'ai mais je ne l'ai pas encore lu - qui à mon point de vue, ne rapportait pas, pour le moins d'une façon très fidèle, ce qui s'était passé à la commission. On m'a même rapporté que -c'est rendu dans le Globe and Mail -l'intervention du député de Saint-Laurent sur le fameux...

M. Forget: ...sur l'intervention du député de Saint-Laurent.

Mme Lavoie-Roux: Oui, et de ça, on a fait un long article. Je ne veux pas ridiculer personne, mais c'est pour montrer la complexité de la chose. Même, quand les gens viennent s'asseoir ici et, je pense...

M. Forget: ...

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ça, vous pourrez m'en parler après.

M. Forget: ...

Mme Lavoie-Roux: Toutes ces remarques ayant été faites et, regrettant d'être obligée de travailler avec ce qui semble une certaine précipitation, je voudrais, au moment où on va aborder les amendements et peut-être, possiblement, faire une révision un peu globale de tout le projet avant d'arriver à l'Assemblée nationale, demander au ministre de la Justice de nous dire quel est son calendrier, à compter de ce moment, alors qu'on recommence d'une certaine façon, et les échéances qu'il veut respecter d'ici à la fin de nos travaux et d'ici la fin des travaux de l'Assemblée nationale. Je pense que cela peut nous rassurer ou nous inquiéter, selon la réponse.

M. Bédard: Mon calendrier dépend en grande partie, comme vous le savez, du travail non seulement des membres de la commission parlementaire du point de vue gouvernemental, mais également du point de vue de l'Opposition. Nous avons fait, d'une façon générale, un travail très responsable. Même s'il y a une complexité au niveau du projet de loi, je ne pense pas qu'on puisse parler de bousculade, parce qu'à chacun des articles j'ai bien pris soin de ne poser aucun geste qui soit de nature à arrêter une

discussion, sauf lorsque la discussion, étant assez avancée et ne débouchant pas sur une position précise ou unanime de la part de la commission parlementaire, j'en venais à la conclusion qu'il valait mieux suspendre et continuer la réflexion avant de revenir sur cet article.

Je comprends très bien les préoccupations du député de Saint-Laurent et de la députée de L'Acadie; moi-même et mes collègues avons les mêmes préoccupations, soit celles de faire le travail le plus responsable possible, tout en sachant la limite de nos moyens. Nous n'avons pas, je pense, ici essayé, ni les uns ni les autres, de nous poser en experts. Tous les membres de la commission parlementaire avaient la possibilité d'avoir à leur disposition - je peux le dire - des experts en la matière puisque, chacune des questions posées a obtenu sa réponse ou les explications demandées, que je sache.

Dans ce sens-là, vous me permettrez certainement - chacun des membres de la commission parlementaire - de souligner le travail très professionnel accompli par M. Guy.

Mme Lavoie-Roux: Nos remarques n'ont pas voulu impliquer quoi que ce soit d'autre.

M. Bédard: Non, je sais; je me fait l'écho de ce que vous auriez pu dire. M. Guy, dis-je, a travaillé durant dix ans avec l'Office de révision du Code civil; depuis deux ans, il est plongé à fond dans l'ensemble du contenu du projet de loi que nous avons à étudier, alors que nous avions peut-être d'autres préoccupations. Il ne faut quand même jamais oublier que du point de vue gouvernemental, constamment, depuis deux ans, des juristes et des spécialistes se sont penchés sur le projet de loi, en ont analysé toutes les implications et ont livré, avec les décisions politiques qui s'imposaient, le travail qui est, à mon sens - d'ailleurs, cela a été souligné - de façon générale, d'une rare qualité.

Je veux souligner aussi le travail de M. Bisson qui est avec nous et qui n'en est pas à ses premières armes dans ce secteur; de même que celui d'une autre personne du ministère de la Justice, Mlle Marie-Josée Longtin, qui a fait un travail de tous les instants avec ses collègues concernant l'ensemble du projet. À cela, il faudrait ajouter toutes les consultations, mais là, ce serait trop long. Je pense que M. Guy et M. Bisson, en fait, les membres de l'équipe en auraient d'ici à la fin de la session s'il fallait qu'ils commencent à nous énumérer l'ensemble des consultations, des études, des recherches qui ont précédé la rédaction finale de ce que nous avons à étudier. Dans ce sens, je ne crois pas qu'on puisse parler d'improvisation.

(17 h 15)

II y a aussi - nous en avons fait état tout au long de l'étude de ce projet de loi -toutes les représentations faites par des groupes. On ne peut pas dire qu'on est toujours d'accord sur ces représentations. Je pense que c'est bien difficile de l'être, surtout que des groupes différents arrivent avec des solutions différentes. À un moment donné, il faut bien prendre une décision. Même si on retardait d'un an, on serait toujours dans la même position. Entre deux positions différentes, à un moment donné, il y a une décision un peu politique qui doit se prendre; si ce n'en est pas une politique, c'en est une de responsabilité que, de toute façon, nous aurions eu à prendre comme membres de la commission parlementaire.

Je ne veux pas passer de remarques concernant le fait que les journalistes aient couvert ou pas les travaux de la commission. Je pense que là-dessus, les commentaires ont déjà été faits. Je comprends que le projet est complexe. On est à même, nous, de constater que, malgré tous les efforts qu'on pourrait faire, il ne peut être autrement que complexe. Nous aurons à vivre avec cette réalité. Je pense que chacun y a mis de la bonne volonté jusqu'à maintenant.

Cette bonne volonté m'amène à faire quelques remarques alors que nous recommençons le projet de loi en revenant aux articles qui ont été laissés en suspens. Ce fut fait, soit parce que la discussion était terminée ou que nous nous étions mis d'accord et à ce moment, il s'agissait de faire une rédaction. J'ai toujours souligné, je pense que nous étions d'accord là-dessus, qu'il ne s'agissait pas d'y aller d'amendements faits sur le bout d'une table. On a laissé le temps aux juristes de faire la réflexion nécessaire pour qu'au niveau de la rédaction des articles, des concordances qu'il pouvait y avoir à faire, ils aient le temps de le faire. Dans ce sens, je suis convaincu au départ que c'est du travail très sérieux - et je me fais l'écho de tous les membres de la commission parlementaire là-dessus - qui a été fait par nos spécialistes et tous les membres de la commission parlementaire.

On a souligné tout à l'heure la question des concordances et je pense qu'il y en avait une qui était chargée, d'une façon tout à fait spéciale, d'assurer que le travail soit bien fait. Je pense que de ce côté, qu'on le veuille ou non, on ne se convertira pas en techniciens et en experts, demain matin, même après l'étude du projet de loi. Ce travail de concordance a toujours été un travail technique qui est fait par ceux qui nous entourent.

M. Blank: C'est l'affaire du ministre de faire des amendements dans le Code de procédure. Je ne pensais pas qu'il les proclamerait en même temps que cette loi-

ci.

M. Bédard: Puis il les fait. À l'heure actuelle, il y a un travail qui se fait de ce côté, et je pense que là il y aura des décisions à prendre qui viendront dans le temps.

M. Blank: Est-ce qu'on va avoir une nouvelle impression du projet de loi avec tous les changements qu'on a faits ici?

M. Bédard: Quand on va avoir fait le tour, on va être à même de prendre ces décisions. Je ne crois pas qu'il y ait nécessité de réimpression du projet de loi, parce que au-delà de toutes les remarques qui ont été faites, de tous les articles suspendus, il faut faire la différence entre les amendements de substance que nous avons apportés et les amendements qui ne sont de substance prioritaire. On ne peut quand même pas parler d'amendements substantiels lorsqu'il s'agit de la concordance, non plus lorsqu'il s'agit, on le verra dans plusieurs des articles, je n'ai pas besoin de donner d'exemple, on s'en rendra compte à mesure qu'on va les repasser, d'amendements qui ne sont pas très substantiels. On n'a pas à s'inquiéter que cela change la philosophie, ni le droit d'une façon fondamentale.

Je pense qu'après avoir fait déjà un travail sérieux - le député de Saint-Laurent faisait état du fait que la transcription n'est pas à notre disposition - ce serait peut-être plus difficile, soit de se remémorer ou de reconstituer un peu les arguments ou les interrogations soulevés. Je dois dire que, personnellement, et du point de vue de ceux qui m'entourent au niveau de l'équipe d'experts, j'ai tenu à ce que ce soit noté le plus possible et, lorsque nécessaire, lorsqu'on pense avoir un trou de mémoire ou quoi que ce soit, il est toujours possible de poser les questions appropriées. La discussion ne date pas de si loin que nous ayons oublié l'essentiel des remarques faites.

Jusqu'à maintenant, je dois dire qu'un travail de collaboration a été fourni. Je l'avais dit au début de cette commission parlementaire et je le répète: Je n'avais pas la prétention que cela dépendrait de moi uniquement si le projet de loi était mené à terme, mais que cela dépendrait, en grande partie, de la collaboration de tous les membres de la commission parlementaire.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Seulement pour clarifier un point qu'a soulevé le député de Saint-Louis. On a eu, à plusieurs reprises, des indications montrant que, même dans le cas de certaines lois qui sont abrogées par le projet de loi actuel, on retrouverait dans les amendements au Code de procédure civile des dispositions qui, autrement, deviendront périmées par l'abrogation des lois. La loi de l'adoption en est un exemple. Il y a eu d'autres références. Par exemple, chaque fois qu'on mentionne le tribunal, le Code de procédure civile va décider si c'est le tribunal ou le juge en Chambre qui peut prendre la décision, ou le protonotaire, etc. Donc, il y a plusieurs dispositions qui ne sauraient s'appliquer sans des modifications au Code de procédure civile. On doit donc comprendre qu'il n'est pas question de mettre en vigueur le Code civil avant que le Code de procédure civile n'ait subit des amendements, enfin, au même moment.

M. Bédard: Je puis dire que le travail, à cet égard, est non seulement très avancé, mais il est presque terminé. En ce qui a trait aux amendements à apporter au Code de procédure, il est évident que dans la mise en application, ce seront toutes des considérations qui doivent être prises...

M. Forget: Prises dans le sens que cela pourrait s'appliquer seulement au même moment où le Code de procédure civile...

M. Bédard: Si certains articles ont besoin d'amendements au niveau du Code de procédure civile, il faudra en tenir compte. Je peux assurer les membres de la commission qu'avant de procéder à la mise en application de chacun des articles, une étude a déjà été faite et elle sera refaite à la lumière de certains amendements que nous avons apportés de manière que nous puissions procéder avec sécurité par rapport à l'ensemble des citoyens.

M. Forget: Cela veut dire, en pratique, que pour certains articles il faut absolument que le Code de procédure civile soit amendé.

M. Bédard: II y a certains articles pour lesquels c'est nécessaire. Le cas échéant, nous prendrons les décisions.

M. Forget: Est-ce que le ministre prévoit pouvoir déposer ces amendements au Code de procédure civile avant la fin de la session, avant la suspension des travaux de la Chambre pour Noël?

M. Bédard: Non, mais dès la reprise de la session, nous serons en mesure de le faire pour ce qui est des articles déjà... Parce qu'il y a beaucoup d'articles qui n'ont pas besoin de concordance au niveau du Code de procédure civile. Après avoir fait et l'étude du problème constitutionnel, qui a été évoqué, et l'étude de toutes les implications, nous irons progressivement, mais avec le plus de célérité possible au niveau de la mise en application.

Le Président (M. Laberge): Cela va? M. Bédard: Article 403.

Le Président (M. Laberge): J'appelle donc l'article 403. À l'article 403, on nous suggère d'ajouter, après le mot "tribunal", une virgule et les mots "pour motifs sérieux".

M. Bédard: Ceci fait suite à des représentations faites par le député de Nicolet-Yamaska parce qu'on retrouvait effectivement cette formulation au niveau de l'Office de révision du Code civil et nous n'avons aucune objection à ce qu'elle soit répétée dans l'article.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... bien sûr que nous acceptons l'amendement dans la mesure où il indique que ces dispenses ne seraient pas accordées pour des motifs frivoles. Il demeure que, quant à nous...

M. Bédard: Si vous me permettez simplement un détail technique, nous accepterions l'amendement et je sais que le problème de fond demeure, à savoir s'il y a dispense ou non.

M. Forget: C'est ça.

M. Bédard: Nous pourrions y revenir tout de suite après.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'amendement consistant à ajouter une virgule et les mots: "pour motif sérieux" sera adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté.

M. Bédard: Concernant cet article, le député de Saint-Laurent avait soulevé l'opportunité de garder le fait qu'une dispense puisse être accordée par le tribunal pour le mineur de seize à dix-huit ans. Nous avons bien réfléchi à la question, M. le Président, et je pense que nous devons garder cette disposition. La raison en est que ça me semble nécessaire, en termes de transition prudente, comme on le sait, de l'âge de douze à quatorze ans à seize à dix-huit ans.

M. Forget: Effectivement, nous avions soulevé la question de fond et, sept jours plus tard, elle nous apparaît toujours bien fondée. Parler d'une période de transition, à mon avis, fausse un peu le débat. Je ne pense pas qu'on soit vraiment à changer quoi que ce soit relativement au mariage des jeunes filles de douze ans ou des jeunes garçons de quatorze ans, parce que c'est la situation sur le plan légal. Je pense bien qu'effectivement il n'y avait pas beaucoup de mariages en bas de seize ans et que le véritable problème d'une modification en termes pratiques de l'âge minimal du mariage se pose pour les seize à dix-huit ans, encore qu'il a pu y avoir des mariages qui ont été célébrés impliquant des conjoints d'un âge inférieur à seize ans; c'est une situation plutôt théorique dans l'ensemble. Or, si on regarde l'expérience vécue au Québec relativement au divorce, il demeure qu'un très grand nombre de divorces parmi ceux qui ont été accordés de 1969 à 1975 l'ont été pour des mariages qui sont survenus entre des conjoints relativement jeunes.

Je cite ici une étude publiée par le ministère des Affaires sociales en mars 1978, dont l'auteur est Laurent Roy, démographe, intitulé: "Le divorce au Québec, évolution récente", qui démontre que, de 1969 à 1975, près de 70% du nombre total des divorces accordés l'ont été relativement à des mariages où l'âge, au moment du mariage du conjoint de sexe féminin, était de quinze à dix-neuf ans, c'est-à-dire inférieur à vingt ans. Je crois qu'on peut bien mesurer là la fragilité de ces unions et je suis sûr que si on pouvait distinguer dans ce groupe d'âge, ce que, évidemment, les statistiques démographiques ne permettent pas de faire, les mariages où l'âge du conjoint féminin au moment du mariage était inférieur à dix-huit ans, on aurait un nombre plus que proportionnel de ce chiffre qui leur serait imputable. Cette fragilité relative mais très élevée des mariages des jeunes est démontrée par le groupe d'âge subséquent où les mariages entre vingt et vingt-quatre ans, pour ce qui est de l'âge au mariage du partenaire de sexe féminin, représentaient 32% du total. Donc, la presque totalité des divorces, au moins ceux qui sont survenus de 1969 à 1975, se retrouvaient dans les catégories de mariages où l'âge du conjoint de sexe féminin, lors du mariage, était inférieur à 25 ans. C'est une situation qui, certainement, appelle beaucoup de prudence de la part du législateur. Je crois que nous sommes dans la situation de ne pas, en somme, permettre que, pour des motifs qui n'ont probablement rien à voir avec les objectifs visés par le législateur dans le chapitre sur le mariage l'on puisse perpétuer une situation comme celle-là. (17 h 30)

Enfin, des observations analogues peuvent être faites, lorsque l'on considère que les mariages - et ceci vaut, soit dit en passant, pour plusieurs catégories de mariages, indépendamment de leur durée -

qui échouent le plus fréquemment sont ceux où les conjoints étaient jeunes. Je crois que ceci est un facteur que le léqislateur doit mesurer avec soin. C'est pour cela que nous ne pouvons pas être d'accord avec la décision du ministre de permettre la continuation d'une situation juridique qui n'a plus de justification sociologique.

Je comprends qu'on pourra nous dire que, dans certains groupes ethniques arrivés plus récemment au Canada, on a des traditions culturelles différentes des nôtres et les mariages en bas âge y sont traditionnels, mais je pense que ce n'est pas une raison suffisante. Je crois que ces familles néo-canadiennes ou immigrantes doivent là-dessus, et, de toute façon, inévitablement se conformeront dans leur comportement aux règles du milieu dans lequel ils vivent désormais. Le législateur du Québec, en particulier dans d'autres domaines là où cela lui est apparu d'ordre public, je pense en particulier au domaine linguistique, n'a pas hésité à imposer ses conceptions de l'ordre public.

Je pense que le mariage est un domaine également valable à ce titre. Quelles que soient les traditions familiales de ces groupes, de toute manière, il n'y a aucune assurance que ces unions seront plus durables lorsqu'elles interviennent dans des milieux sociologiques de souches différentes.

Autrement dit, je présume d'avance que le ministre se basera sur ce raisonnement, en partie au moins, pour justifier le maintien d'une telle règle et nous ne pouvons pas en voir le bien-fondé.

M. Charbonneau: M. le Président, le député de Saint-Laurent a cité des statistiques. Je pense qu'on est tous d'accord avec ces statistiques. Je ne suis pas un juriste; un peu à l'instar de Mme la députée de L'Acadie, on est parmi ceux qui ne sont pas dans cette gang-là, mais est-ce qu'on a des statistiques, des données pour savoir dans quelle mesure, actuellement, les tribunaux sont appelés, s'ils le sont, cela est prévu selon la loi, à accorder une dispense? Actuellement, cela n'est pas prévu.

Donc, c'est un élément nouveau.

M. Bédard: C'est un peu là-dessus, si le député de Verchères me le permet. Je n'ai pas voulu être long tout à l'heure, mais...

M. Charbonneau: J'ai l'impression, je ne sais pas, je n'ai pas parlé au ministre avant, que, si cela est nouveau, cela donne le cran de sécurité que le député de Saint-Laurent exigeait. Je pense qu'il a raison de souligner le problème social qui est mentionné par l'étude en question, mais là on ajoute un cran de sécurité. Par ailleurs, quand vous avez parlé des données culturelles, on a beau dire que même dans les communautés où, pour toutes sortes de raisons, il y a des mariages qui sont contractés plus jeunes, le taux de succès n'est peut-être pas plus grand dans ces cas que dans la communauté francophone, mais néanmoins, je pense qu'il y a des considérations culturelles qui doivent être prises en considération.

J'ai vécu, par exemple, une douzaine d'années dans la colonie italienne de Montréal, et il y a des choses qui ne s'acceptent pas. Il y a des situations qui sont culturellement aussi dramatiques que l'échec d'un mariage. Ce serait un peu imposer à ces gens nos propres comportements ou nos propres valeurs, d'autant plus que maintenant, de la façon dont le texte est rédigé, un tribunal pourrait faire venir les gens et essayer de voir avec eux d'une façon moins agressive qu'une loi qui interdirait; un juge pourrait leur faire comprendre finalement, peut-être en intervenant directement auprès des personnes concernées. J'ai l'impression que de cette façon, on couvre la situation qui est déplorée par le député de Saint-Laurent.

M. Blank: Quand on parle de la question des nouveaux arrivés, des immigrants, des autres cultures, je veux seulement dire qu'on a déjà ce problème dans la Loi de l'immigration. La Loi de l'immigration est très stricte. Même si un couple s'est marié à 16 ans ou à 15 ans ou à 17 ans, la Loi de l'immigration interdit de parrainner le mari ou la femme... à moins qu'ils n'aient 18 ans. Déjà, notre culture s'impose à leur culture, dans le sens qu'ils sont ici et qu'ils doivent suivre nos règles. Je donne des exemples pratiques, parce que comme vous le savez, j'ai des causes d'immigration...

M. Charbonneau: Pour d'autre chose.

M. Blank: II y a certains pays où les gens ont plus d'une femme. J'ai déjà eu des cas de gens qui sont venus au Canada et qui disaient: J'ai trois femmes. Le mari est venu à mon bureau et m'a dit: Je veux mes trois femmes ici. La Loi de l'immigration ne permet pas d'amener trois femmes ici au Canada, comme cela. On leur impose notre culture. Ce monsieur a réglé son affaire. II a divorcé deux fois, il s'est remarié et il a ses trois femmes ici, mais il en a légalement épousé une. Il habite avec les trois.

M. Bédard: C'est avant d'arriver?

M. Blank: II a arrangé son affaire. Il a divorcé d'avec la première, il a épousé la deuxième, il l'a fait venir au Canada, il a divorcé d'avec celle-ci, puis il a fait venir la troisième; maintenant, la troisième, c'est sa femme légale, mais la première et la deuxième habitent avec lui. Il y a un paquet

d'enfants dans la maison. Le monsieur a 40 ans, il en a l'air de 60, mais c'est une autre affaire.

La règle qui dit qu'on doit respecter la culture des autres, ce n'est pas tellement nouveau qu'on impose notre culture, nos idées à ces gens qui viennent des autres pays quand leur culture ne correspond pas à la nôtre.

L'exemple parfait, c'est la Loi de l'immigration et la Loi du mariage. Le monsieur marié avec trois femmes qui vient ici ne peut pas en avoir plus d'une. Notre loi dit: Une femme.

M. Bédard: On ne peut quand même pas leur imposer cette culture dans le temps de le dire, au moment même où ils arrivent.

M. Blank: Ils ont choisi notre pays, il faut suivre nos règles.

M. Bédard: Si je peux employer l'expression, il y faut l'épreuve du temps. Je ne crois pas qu'on puisse mêler le parrainnage avec la question des moeurs qui peuvent être différentes d'une communauté ethnique à une autre. Je n'avais pas élaboré longtemps tout à l'heure, en évoquant simplement l'argument de transition prudente. Auparavant, c'était 12 et 14 ans; là, on va de 16 et 18 ans. Il me semble qu'il y a une logique quand même là-dedans. J'aurais pu amener cet argument, parce que j'ai eu des représentations à cet égard, concernant des habitudes culturelles qui ne sont pas les mêmes que les nôtres au niveau de certaines communautés ethniques. Je crois qu'on doit en tenir compte. Même si le nombre n'est pas très grand, ça nous crée quand même une responsabilité, comme législateurs, d'en tenir compte.

Je voudrais ajouter également que les chiffres qu'a évoqués le député de Saint-Laurent... je suis d'accord avec le contenu de ces chiffres; d'ailleurs, nous les avions donnés aux membres de la commission parlementaire. Cependant, il ne faudrait peut-être pas tirer des conclusions qui ne sont pas celles tout à fait où je suis entièrement d'accord avec le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je ne tire aucune conclusion, je ne fais qu'observer que, pendant une période de quelques années, sept mariages sur dix qui impliquaient un conjoint féminin qui, au moment du mariage, avait moins de 20 ans se sont terminés par un divorce, sur une période de seulement cinq ans. Peut-être que si on regardait sur une période de dix ans, on se rendrait compte que c'est huit ou neuf mariages sur dix qui sont dans cette catégorie, qui se sont terminés par un divorce. On a observé ce qui s'était passé pour ces mariages seulement pendant une période de cinq ans. Cela démontre le caractère du problème.

M. Bédard: D'accord, mais ce qu'on oublie de mentionner au niveau du projet de loi, c'est qu'il y a un encadrement qu'on a donné qui n'existait pas auparavant et qui a son importance. Lorsqu'on dit que le tribunal aura à évaluer cette demande, qu'il aura à demander le consentement et l'avis de ceux qui ont la garde de l'enfant, je pense qu'on y met un mécanisme qui sera de nature à bien baliser l'exercice de ce droit de dispense qui est accordé à partir de l'article 403. Je ne dis pas que - d'ailleurs, je pense qu'on se comprend - les arguments évoqués par l'Opposition sont sans fondement. Je crois qu'ils en ont. À partir des éléments que j'ai évoqués, entre autres, une certaine prudence de transition, le fait de devoir tenir compte de certaines habitudes culturelles des communautés du Québec et de trouver le moyen d'encadrer cet exercice d'une manière très précise, je crois que nous pouvons être sûrs qu'une meilleure analyse que dans le passé sera faite par rapport aux mariages de jeunes de moins de 18 ans.

M. Blank: Au point de vue de la procédure, si les parents refusent d'aller à la cour pour demander la dispense, le mineur lui-même peut, seul, demander la dispense. Est-ce qu'on parle d'un mineur seul ou avec un tuteur? Est-ce qu'il a le droit d'aller seul devant le tribunal?

M. Bédard: II peut présenter la requête, mais le tribunal entend les personnes qu'il devra entendre.

M. Blank: Est-ce que le mineur a le droit d'aller devant le tribunal sans tuteur?

M. Bédard: Dans ce cas-ci, puisqu'il s'agit évidemment d'un mineur qui croit qu'il a la maturité nécessaire pour se marier et qui demande au tribunal une autorisation, il présente lui-même, seul, sa demande. Ce n'est pas un précédent, ce n'est pas le seul cas en droit où le mineur de 16 à 18 ans exerce seul certains recours.

M. Blank: Où dans la loi donne-t-on ce droit?

M. Bédard: II faudrait peut-être voir...

M. Blank: N'a-t-on pas besoin de concordance avec les autres articles qui disent... Est-ce qu'on n'a pas besoin d'amender les articles du code de procédure ou d'autres articles qui disent qu'il est émancipé pour faire ces choses?

M. Bédard: Vous avez déjà l'article 304 du Code civil qui dit qu'un mineur âgé de 14

ans peut intenter seul des actions en recouvrement de gages.

On n'innove pas là-dedans.

M. Blank: On dit que l'enfant de 14 ans peut seul. Ici, on n'a pas le mot "seul". On dit "le mineur peut". Est-ce que le mineur... (17 h 45)

M. Bédard: Mais oui, mais, mon Dieu, le mineur peut demander seul la dispense d'âge.

M. Blank: Je pense que le mot "seul" doit être marqué après le mot "mineur".

M. Bédard: Non, ce n'est pas le seul mineur, il peut le demander seul.

M. Blank: Non, mais moi je dis que, si le parent refuse, le mineur peut le demander seul. Cela ne dit pas que le mineur seul peut le demander. Il y a une différence.

M. Bédard: C'est la différence que nous voulons évoquer.

M. Blank: Je pense que le mot "seul" doit être inscrit. Je pense qu'on doit indiquer clairement que c'est sans tuteur.

M. Bédard: Oui, mais c'est cela. Le mineur peut demander seul. C'est clair que c'est sans ses parents ou sans tuteur, la dispense... À un moment donné, il faut quand même...

M. Blank: Pour moi, cela dit qu'il peut le faire sans ses parents, mais cela ne dit pas sans tuteur. Si on met le mot "seul" après...

M. Bédard: S'il le fait seul, cela veut dire sans l'autorité parentale qui peut être exercée, tantôt par les parents, les père et mère, tantôt elle peut être exercée, on l'a vu au niveau du projet de loi, par une tierce personne à qui le tribunal a confié l'autorité parentale.

M. Blank: Je suis d'accord, mais simplement sur la rédaction de l'article, je pense que le mot "seul" est à la mauvaise place. C'est seulement cela que je dis.

M. Bédard: Alors...

M. Gosselin: Seulement une question à l'attention du député de Saint-Louis. Est-ce qu'il est à tout prix nécessaire de préciser au-delà de cela, c'est-à-dire: Le mineur seul peut? C'est implicite, à mon point de vue, sur le fait qu'il peut effectivement.

M. Blank: Je suis d'accord. Si vous dites: Le mineur seul peut, d'accord. Mais si c'est: Le mineur peut demander seul...

M. Gosselin: Demander seul, oui.

M. Blank: C'est cela, le mot "seul"; comme c'est inscrit dans l'article, cela veut dire qu'il peut le faire sans le consentement de ses parents. Cela ne dit pas...

M. Bédard: Je suis convaincu que, si on disait le contraire de ce qu'on veut dire, il y aurait eu des remarques au niveau du Barreau. L'office a exactement la même formule que nous. Ils l'ont étudiée durant plusieurs années.

M. Blank: Ce n'est pas la première fois qu'on changerait l'opinion de l'office.

M. Bédard: Non, mais...

M. Charbonneau: Le point le plus important..

Le Président (M. Laberge): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: ...demeure néanmoins le mécanisme que le projet de loi ajoute, qui n'existait pas et qu'il vaudrait peut-être la peine d'expérimenter. Le mécanisme qui va s'expérimenter avec en plus un âge minimal qui est plus élevé qu'il l'était auparavant.

Je pense que, finalement, si jamais, dans quelques années, une évaluation du succès de l'utilisation de ce mécanisme nous amène à changer d'idée, on pourrait changer d'idée, mais je pense que cela vaudrait la peine néanmoins de l'essayer. Il y aurait moins de traumatismes probablement, et j'ai l'impression que dans bien des cas - ne vous en faites pas, j'ai passé l'âge d'utiliser le mécanisme, Mme la députée de L'Acadie, malheureusement peut-être...

Finalement, moi, je pense que ce mécanisme mérite d'être utilisé et qu'il va être moins traumatisant pour des gens, qu'il va moins "braker" des jeunes quij pour toutes sortes de raisons, voudraient se marier plutôt qu'une interdiction formelle.

M. Blank: Quand ils viennent d'une communauté de culture différente de la nôtre, ici, on pense que par tradition... Dans leur tradition, il y a quelque chose qui va un peu plus loin, pour les jeunes de cet âge, pour des immigrants, puisqu'on parle des immigrants; ils font tous des mariages arrangés. Je me demande comment on peut dire que la partie au mariage donne son libre consentement si ce n'est pas lui ou elle qui a vraiment consenti à ce mariage.

M. Charbonneau: M. le député de Saint-Louis...

M. Blank: Les moeurs de ces gens...

M. Charbonneau: Je pense que cela pouvait être vrai à l'époque. Si ce cas se produisait maintenant, le tribunal pourrait justement, en entendant les parties, se rendre compte de la situation et refuser. Ce n'est pas un tampon automatique. Le tribunal entend les différentes personnes qui sont concernées et décide si oui ou non il y a une dispense d'accordée. Il va y avoir des cas où on va refuser la dispense pour des raisons comme celle que vous venez de mentionner. Le tribunal aura constaté que, finalement, tout cela ce sont les parents qui ont arrangé l'affaire, ou encore qu'il n'y aura pas de maturité suffisante qui aura été établie, ou encore d'autres explications.

M. Forget: On entre plus dans les affaires de famille, là.

Mme Lavoie-Roux: C'est plus compliqué.

M. Bédard: II y a un mécanisme additionnel.

M. Charbonneau: Sur quoi pensez-vous que le juge va se prononcer?

M. Blank: En fait, si les deux parents font une requête devant le tribunal, je ne vois pas un juge qui va même aller au-delà de la requête. Si les parents sont d'accord, c'est d'accord. On donne un peu trop de...

M. Bédard: Le mécanisme me semble une balise assez intéressante.

M. Blank: On ne dit pas que la cour peut ou doit s'enquérir d'une affaire. Dans les autres articles, on dit: "La cour peut".

M. Bédard: Je l'ai dit au départ, ça ne veut pas dire que, parce qu'on prend une certaine décision, il n'y a pas d'argument sérieux de l'autre côté, mais, à un moment donné...

M. Blank: Quand la famille vient devant le juge, il n'y a pas d'autre côté. Je suis certain qu'un cas qu'on va envoyer devant le protonotaire spécial... Même si vous demandez le code de procédure pour cet article, vous mettrez cette section devant le protonotaire spécial, c'est une affaire de routine, comme une motion pour détails...

M. Bédard: Ce n'est pas à cela que je référais. Je sais qu'il y a des arguments sérieux d'un côté comme de l'autre. Il est arrivé sur certains articles qu'on arrivait avec un certain projet de rédaction que l'Opposition a trouvé le moyen d'améliorer. Je pense que ça peut se faire vice versa, mais, à un moment donné, sur certains articles, une décision doit être prise. Je vous en explique les motifs. Je ne pars pas avec l'impression de vouloir laisser entendre que, si j'en viens à cette conclusion, ça veut dire qu'il n'y a pas de motif sérieux de l'autre côté de penser le contraire. À un moment donné, il faut en arriver à une décision.

M. Blank: Mon argument sur le mot "seul" ne tient pas debout. Dans l'article cité par M. Brisson, le mot "seul" vient immédiatement après "l'enfant de 14 ans peut".

M. Bédard: Non, c'est "intenter seul". M. Blank: Intenter seul.

M. Bédard: Je pense que vous avez la réponse.

Le Président (M. Laberge): Alors...

M. Forget: Mme la députée de L'Acadie a demandé le droit de parole depuis je ne sais pas combien de temps.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai entendu le ministre nous dire que c'était par prudence qu'il avait pris cette décision. J'aimerais qu'il explique un peu cette prudence. À mon point de vue, les statistiques qu'a fait valoir le député de Saint-Laurent à savoir que les risques de brisure du mariage sont beaucoup plus élevé... Cela, c'est prouvé par les statistiques du Québec et certainement les statistiques nord-américaines, sinon occidentales. On prendra des statistiques ailleurs et on retrouvera la même chose.

On a fait valoir la question des traits culturels. Cela me fait un peu sourire, parce que je trouve qu'on ne les a pas beaucoup utilisés dans certaines autres lois où ils auraient été au moins tout aussi importants, sinon plus. D'ailleurs, quand vous regardez les immigrants... Ah bonjour!

M. Forget: À quel âge va-t-il se marier?

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si ce sera enregistré.

Quand on pense aux immigrants de 16 ans, que ce soient des garçons ou des filles, qu'ils soient nés au pays ou qu'ils soient arrivés ici avec leurs parents, ils ont, à cet âge, peut-être plus que tout autre groupe de jeunes... D'ailleurs, là-aussi, il y a des statistiques intéressantes sur les problèmes d'adaptation des immigrants de première génération, au moment de l'adolescence. Je ne pense pas qu'on puisse, même s'il y avait des traditions, évoquer que pour la tradition

on doit leur faire prendre des risques plus grands qu'aux jeunes qui habitent ici depuis toujours, si je puis dire.

L'autre point qui m'inquiète un peu, c'est quand on parle de motifs sérieux. D'ailleurs, on vient même de nous le faire ajouter, dit-on, à la suite d'une recommandation du député de Nicolet-Yamaska, il est plus chanceux que nous!

M. Bédard: ...sur le dos de l'article.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est évidemment pas le temps qu'on passe à la commission. Ce n'est pas un reproche que je veux faire.

M. Bédard: J'aurais peut-être dû commencer par les articles où je vous donne raison.

Mme Lavoie-Roux: Je retire ce que j'ai dit, parce que je ne voudrais surtout pas leur faire de reproches. Ils sont quatre et ils sont même deux aujourd'hui. Je ne peux pas leur demander de faire des miracles. Plus sérieusement, j'aimerais que le ministre m'énumère au moins un ou deux motifs sérieux. Pour ma part, le seul qui me vient à l'esprit est celui d'une grossesse non souhaitée par les parents, peut-être pas par les enfants, mais moins encore par les parents ...

Une voix: Par les grands-parents!

Mme Lavoie-Roux: ... les grands parents. Souvent, sous l'effet de la panique et sous l'effet de la désapprobation sociale, on considère que le mariage va peut-être à court terme - parce qu'on ne s'interroge pas trop longtemps dans ces situations, sur le moyen et le long terme - apparaître comme une réprobation sociale.

Personnellement, c'est le seul que je puisse identifier à ce moment. L'autre argument que j'aimerais faire valoir, c'est qu'il est vrai qu'il va venir devant la cour et que les juges va entendre ces jeunes gens. Il va essayer de juger du libre consentement des futurs époux ou de ceux qui veulent contracter mariage. Quand vous avez déjà une jeune fille ou deux jeunes de 16 ans ou de 17 ans, ou un de 16 ans et de 18 ans, qui vivent une situation extrêmement difficile pour eux, d'une grossesse qu'ils n'ont pas voulue, il n'est pas aisé d'évaluer le type d'intimidation, peut-être de bonne foi, que les parents exercent à ce moment sur des jeunes en état de panique. Je veux bien croire que tous nos juges sont d'excellents psychologues; souvent, il y en a certains d'entre eux qui pourront même s'identifier à la situation que vivent les grands-parents -pour reprendre la bonne génération, comme disait le député de Saint-Laurent - c'est difficile de prévoir dans quel sens ils porteront jugement.

La dernière remarque que je voudrais faire valoir - je regrette de ne pas avoir devant moi une pièce à l'appui, mais mes collègues savent que je ne soulèverais pas une chose qui est fondée sur mon imagination d'une façon absolue, il y en a peut-être d'autres qui pourront le confirmer à cette table - c'est que la tendance, même dans l'Église catholique, tant aux États-Unis qu'au Canada, est justement de ne pas encourager le mariage des 16 à 18 ans, même dans un cas de grossesse non voulue, à cause de l'immaturité des sujets et des problèmes à moyen et à long terme, des problèmes encore plus graves qu'un mariage pourrait occasionner, parce qu'une fois qu'on est marié, on peut peut-être se dire: On va le dissoudre, mais cela aussi crée des problèmes qui ne sont pas moindres que le mariage qui va être prononcé.

Je reviens peut-être à la question fondamentale. Il y a d'autres arguments qu'on pourrait faire valoir. Je suis sûre que le ministre va être très condescendant et me dira: Je sais bien que, de votre côté aussi, il y a de bons arguments. Ce n'est pas cela que je mets en question. Je me permets bien simplement de lui demander...

M. Blank: J'ai promis à ma femme de l'appeler. (18 heures)

Mme Lavoie-Roux: ... ce qu'il pense qui sera invoqué comme étant des motifs sérieux. J'en ai identifié un. Le ministre va reconnaître que c'est un motif qui pourrait être invoqué; s'il le met de côté parce que cela ne jouera pas... Si cela devait jouer, je crois que c'est très mauvais pour tout le monde. Quels sont les autres motifs sérieux qu'il serait prêt à invoquer? Je fais une digression sur la question de respecter les habitudes culturelles. On a passablement, peut-être moins dans les dernières années, d'immigration de l'Afrique du Nord où il n'est pas rare, même encore aujourd'hui, qu'une jeune fille de 12 ans contracte mariage. J'espère que cela arrive un petit peu moins souvent qu'à la génération précédente, mais c'est encore une chose courante. Pourtant, on ne respecte pas cela, parce que, de toute façon, on les amène à 16 ans. Si j'apporte cet argument à la dernière minute, c'est que je le trouve moins sérieux que les autres parce que je pense que je ne serais pas en faveur du mariage à 16 ans, encore moins à 12 ans. Tout ceci pour dire que même l'argument culturel a une valeur très relative.

Je reviens à ma question. Le ministre peut-il au moins me donner ce qu'il considère un, deux ou trois arguments de nature sérieuse?

Est-ce qu'on ajourne les travaux?

Le Président (M. Laberge): Après le souper? À 20 heures?

M. Bédard: Je suis prêt à les donner tout de suite.

Le Président (M. Laberge): De consentement, si vous voulez.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Bédard: D'accord.

M. le Président, je pense que l'Office de révision du code civil avait pris le soin d'indiquer, c'est-à-dire de parler de motifs sérieux, probablement pour faire en sorte que soit mis de côté tout motif futile ou peu sérieux qui pourrait être invoqué et pris en considération. Je ne veux pas prendre la place du tribunal parce que le tribunal... J'écoutais la députée de L'Acadie... On ne commencera pas à faire une discussion partisane. Je me disais qu'on tient compte des communautés ethniques; on semble beaucoup en tenir compte dans ce projet de loi.

Mme Lavoie-Roux: Pas dans le projet de loi, à cet article particulier.

M. Bédard: Dans le projet de loi, je pense. En tout cas, à cet article, comme vous voudrez, alors qu'on pourrait plus en tenir compte dans d'autres lois. Ce n'est pas parce qu'on n'en tient pas assez compte dans d'autres lois que ça nous permet de ne pas en tenir compte dans celle-là.

Mme Lavoie-Roux: C'est une amélioration, on devrait s'en réjouir.

M. Bédard: C'est comme l'indépendance judiciaire. On parle du respect des tribunaux, etc., dans un cas. À un moment donné, on semble les suspecter à un point tel qu'on pense qu'ils ne sont pas capables d'évaluer ce qui est un motif sérieux. Moi, je crois...

M. Forget: Non. M. le Président... Mme Lavoie-Roux: Nommez-en un.

M. Bédard: Laissez-moi répondre un petit peu.

Mme Lavoie-Roux:...

M. Bédard: Je vais essayer.

M. Forget: On a avoué que ces causes seraient probablement entendues par le protonotaire. C'est ex parte.

M. Bédard: Je vais vous donner d'autres motifs sérieux, mais peut-être... On sera tous plus sérieux quand on reviendra après le souper.

Le Président (M. Laberge): Alors, en vous souhaitant bon appétit, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

(Reprise de la séance à 20 h 15)

Le Président (M. Laberge): A l'ordre, mesdames, messieurs! La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux concernant l'étude article par article du projet de loi no 89. Pour la suite de la présente séance, le député de Rivière-du-Loup, M. Boucher, sera remplacé par M. Ouellette (Beauce-Nord) et M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M. Bertrand (Vanier).

Nous en étions, à 18 heures, à la discussion sur l'article 403. À l'article 403, il y avait un amendement que nous avions adopté et qui consiste à ajouter, après le mot "tribubal", une virgule et les mots "pour motif sérieux" et on m'a souligné d'ajouter une virgule, après "sérieux", pour le journal des Débats. Cela a été adopté. Il y a aussi le remplacement du deuxième alinéa que nous avions dans nos papillons l'autre jour. C'est une question de rédaction, je crois. On demande de remplacer le deuxième alinéa de l'article 403 par le suivant: "Le titulaire de l'autorité parentale et, le cas échéant, le tuteur et les personnes qui ont la garde du mineur doivent être appelés à donner leur avis." C'est une question de formulation. Cet amendement remplaçant le deuxième alinéa sera-t-il adopté?

M. Bédard: On l'avait souligné à ce moment-là.

Le Président (M. Laberge): Oui. Sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté? Une voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 403 avec amendement sera-t-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non, M. le Président. J'avais posé une question au ministre.

Le Président (M. Laberge): Justement.

M. Bédard: M. le Président, je m'excuse auprès de ceux et celles qui auront à lire le journal des Débats, parce que je pense bien qu'ils seront à même de constater que, depuis un bon bout de temps, on revient

avec les mêmes arguments de part et d'autre. II faut quand même reprendre, le plus succinctement possible, certaines considérations qui m'amènent à garder la disposition dont il est fait état dans l'article 403, à savoir de permettre qu'entre 16 et 18 ans, il puisse y avoir une dispense pour que le mariage ait lieu, mais à condition que le tribunal ait à se prononcer à la suite d'une requête qui lui est faite et que le tribunal ait l'occasion d'entendre les parties et de pouvoir évaluer s'il y a des motifs sérieux de donner la dispense demandée.

Premièrement, comme on le sait, le code permettait jusqu'à maintenant le mariage à douze ans et quatorze ans respectivement, pour la fille et le garçon. Maintenant, le fait de l'amendement est de reporter et de fixer l'âge du mariage à 18 ans, avec une souplesse qui me semble nécessaire, c'est-à-dire la possibilité qu'entre 16 et 18 ans, il y ait une dispense pour permettre le mariage, après avoir suivi le mécanisme dont je viens de parler. Premièrement, c'est ma conviction que, devant un tel changement, on peut penser à assortir ce changement d'une certaine souplesse au niveau de la transition qu'évoque l'article 403.

Deuxièmement, je pense - ce n'est pas la considération principale - qu'il y a lieu de tenir compte de certaines représentations qui font qu'il y a des habitudes culturelles au niveau de certains groupes, qui ne sont pas nécessairement les mêmes que celles que nous avons, où l'habitude de l'âge du mariage est à un âge plus jeune et plus usuel que dans l'ensemble de la société québécoise. Je comprends qu'à un moment donné, ces groupes, ces communautés peuvent en venir à être influencés par le mode de vie de la majorité de la société québécoise, mais il reste que cette transformation ne se fait quand même pas du jour au lendemain.

J'ai également indiqué que nous avions prévu un mécanisme qui n'existait pas auparavant, qui est de nature à permettre d'évaluer jusqu'à quel point une décision de dispense peut être opportune ou même nécessaire dans certains cas.

Le député de Saint-Laurent fait état de certains chiffres que je ne conteste pas pour la bonne et simple raison que nous les avions remis nous-mêmes aux membres de la commission. Je pense que cela permet de...

M. Forget: On ne les a jamais reçus, M. le Président. On les avait trouvés par nos propres moyens, cela ne nous a jamais été distribué.

M. Bédard: Peut-être. Ce sont les mêmes tableaux. Les sources sont sûrement les mêmes. Je ne les conteste pas. Mais il faut quand même prendre en considération qu'il y a un nouveau mécanisme qui n'existait pas auparavant, qui est prévu à l'article 403.

Mme la députée de L'Acadie m'a demandé d'évoquer ce que je croirais être des cas sérieux, susceptibles d'analyse. Je ne voudrais pas que ces exemples soient pris comme étant des directives à qui que ce soit, au cas où un tribunal aurait à évaluer. Je voudrais simplement faire part de certains cas. Personnellement, il me semble qu'il y aurait lieu - il y en a certainement d'autres qu'on peut imaginer - de procéder au moins à une évaluation avant d'en arriver à un refus total, ce qui serait le cas si la dispense n'existe pas.

Par exemple, le cas d'un jeune homme de 25 ans qui, depuis un an, vit avec une jeune fille de 17 ans. Les deux cohabitent, vivent en commun. À un moment donné, le jeune homme de 25 ans obtient un emploi qui l'obligerait à partir pour quelques années dans un autre pays. À ce moment-là, il me semble que c'est un cas qui pourrait être évalué. Le tribunal peut voir jusqu'à quel point, d'une part, la sécurité, d'autre part, le sérieux des relations, la solidité des relations sont présentés. À ce moment-là, il pourrait évaluer - au lieu de 17 ans, disons 17 ans et demi - jusqu'à quel point il est opportun d'accorder une dispense dans un cas comme celui-là, pour ne pas obliger quelqu'un à perdre son emploi, s'il ne veut pas y aller seul, ou encore à revenir, s'il décide de prendre l'emploi, pour procéder à un mariage, alors qu'il peut y avoir un délai de six mois. On peut même imaginer moins.

Je prends, par exemple, le cas d'un individu qui vit depuis un an ou un an et demi avec une jeune fille qui a peut-être dix-sept ans et demi et qui, à un moment donné, a un accident, a des indications que cet accident est d'une gravité telle qu'il peut penser devoir quitter cette terre. On peut ajouter par exemple que la relation avec cette jeune fille, qui dure depuis un an, un an et demi, a donné un enfant. On peut imaginer le cas de cet individu qui désire régulariser la situation que ce soit pour des questions de succession ou autres. Je n'ai pas à juger des motifs. Je soumets le cas de quelqu'un qui peut vouloir régulariser l'ensemble d'une situation de fait qui existe déjà. Encore une fois, je ne veux pas que ce soient des cas limitatifs, je l'ai bien dit auparavant. Je pourrais en évoquer encore trois ou quatre que j'ai présents à l'esprit, mais ces deux cas me semblent évoquer qu'il y a des circonstances où il y a lieu non pas nécessairement de donner la dispense, mais de penser que humainement on doit au moins permettre qu'une analyse de la situation soit faite le plus objectivement possible, de manière à déboucher sur une décision qui puisse être la plus humaine possible. Dans ce sens, je pense qu'on doit, humainement et en termes de transition,

penser à une certaine souplesse qui, en fin de compte ne touchera peut-être pas beaucoup de cas, mais comme chaque cas humainement est un cas global qui mérite d'être analysé, à ce moment-là, on aura le mécanisme nécessaire. Ce sont les représentations... Je sais que, d'autre part, du côté de l'Opposition... Je ne dis pas qu'on n'a pas évoqué des arguments sérieux - ce serait contraire à ce que je crois - mais j'essaie d'expliciter le mieux possible aux membres de la commission quels sont les motifs qui m'amènent à croire qu'il y a lieu de penser humainement à un peu de souplesse de ce côté-là.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de l'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie le ministre...

M. Bédard: Est-ce que vous permettez deux secondes?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: On a demandé de l'information sur la situation canadienne en cette matière où l'âge aussi a été élevé généralement à 18 et 19 ans pour le mariage. Dans toutes les provinces, il faut encore le consentement des père et mère pour le mariage en dessous de cet âge fixé à 18 ou 19 ans et, dans tous les cas, il y a un recours devant un juge ou le tribunal en cas de refus injustifié des parents. Dans certain cas, c'est à la discrétion du tribunal; dans certains cas, l'appel est passible devant le tribunal lorsqu'il y a un refus déraisonnable ou injustifié des parents d'autoriser le mariage. C'est la situation canadienne en général. Concernant certaines demandes qui ont été faites, dans un cas, ici, on a refusé le mariage à une jeune fille de 16 ans, enceinte, avec un garçon de 19 ans. La requête de la jeune fille a été rejetée, la grossesse n'étant pas en soi une raison suffisante d'y accéder et le juge n'ayant pas à se substituer à la décision du père, etc.. Dans un autre cas, où il s'agissait d'un garçon de 27 ans et d'une jeune fille de 16 ans, cela a été autorisé. Il s'agissait d'une jeune fille particulièrement mûre pour son âge, dit-on, avec un homme de 27 ans ayant adopté à sa sortie de l'université un style de vie "retour à la nature". Dispense accordée malgré l'opposition des parents, la question devant se décider "on the basis of facts". Cela donne un peu l'image de la situation canadienne, où il y a un recours devant le tribunal dans toutes les provinces.

Mme Lavoie-Roux: Le juge avait dû penser qu'ils iraient vivre dans la brousse, de toute façon.

M. Bédard: Le critère de la grossesse peut être rejeté par le tribunal s'il ne répond pas à une situation de fait.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie M. le ministre et M. Guy. Il est évident qu'on ne convaincra pas le ministre de changer d'idée. Je ne suis pas sûre que la décision du dernier cas qu'on vient de nous présenter soit juste - on n'y était pas de toute façon - mais je voudrais rappeler que ce n'est pas une idée fixe de l'Opposition officielle. Je pense que le Conseil du statut de la femme a parlé dans le même sens. "Compte tenu que le mariage - je le cite -constitue un engagement qui exige une grande maturité, il devrait s'agir là d'un âge minimum dans tous les cas. La possibilité de l'obtention d'une dispense lorsque le futur époux est âgé d'au moins 16 ans devrait être supprimée. La discrétion accordée au juge pourrait être source d'injustice et de discrimination." (20 h 30)

M. Bédard: II y a d'autres groupes qui n'en ont pas parlé. Je comprends très bien les représentations faites.

Mme Lavoie-Roux: II reste qu'actuellement on sait que la famille, le mariage, est une institution fragile parce qu'elle est soumise à une foule de pressions. Je ne suis pas pour faire un discours là-dessus, mais je pense qu'on doit lui assurer les bases les plus solides possible et une de celles-là, c'est quand même la maturité des conjoints. On a cité des statistiques avant le souper; j'en ai trouvé d'autres dans un document préparé par la Conférence des évêques catholiques du Canada pour le synode qui s'est tenu à Rome aux mois d'octobre et novembre. On fait allusion à des statistiques sur le taux de divorce. On dit que le rapport entre l'âge au mariage et les probabilités de divorce montre qu'en 1971, parmi l'ensemble des femmes âgées de 25 à 34 ans, celles qui avaient contracté mariage à l'âge de l'adolescence étaient trois fois plus susceptibles de demander le divorce que celles qui s'étaient mariées à 23 ans ou 24 ans. De toute façon, ce n'est pas une preuve qu'on a à établir; je pense que c'est évident. On n'est pas pour passer la veillée à essayer de convaincre le ministre qui, de toute évidence, ne se laissera pas convaincre.

M. Bédard: Tout ce que je voudrais obtenir de la députée de L'Acadie, c'est... Je sais fort bien que ce n'est pas une idée fixe. Mme la députée de L'Acadie ne défend pas ce point comme une idée fixe et je pense qu'elle peut me retourner la pareille. Ce n'est pas en termes d'idée fixe que je le défends. Je peux avoir tort...

Mme Lavoie-Roux: Excusez, je ne

voulais pas...

M. Bédard: ...mais j'essaie d'évoquer des choses. On me dit qu'on a rencontré les principaux représentants de l'assemblée des évêques, qui n'ont pas fait de remarques spéciales sur cette partie de l'article. C'est la souplesse de transition.

Mme Lavoie-Roux: Quand j'ai parlé d'idée fixe...

M. Bédard: Je comprends.

Mme Lavoie-Roux: ... je l'appliquais à nous et non pas au ministre, de toute façon. Je n'ai pas de paroles à retirer.

M. Bédard: Non, je ne vous ne l'ai pas demandé, non plus.

Le Président (M. Laberge): L'article 403, avec les deux modifications, sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

M. Forget: Adopté sur division, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendements et sur division.

M. Bédard: II y avait l'article 405.

Le Président (M. Laberge): Oui, j'ai des notes à cet effet. L'article 405 était suspendu. Maintenant, on a adopté, à l'article 405, un amendement qui ajoutait un deuxième alinéa qui se lisait: "On ne peut également contracter mariage entre alliés en ligne directe". Cependant, pour le bon français, on nous demande d'inscrire: "On ne peut non plus contracter mariage entre alliés en ligne directe".

M. Bédard: D'accord, adopté.

Le Président (M. Laberge): Avec la négation, je pense qu'il faut ajouter "non plus".

M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Laberge): Adopté.

M. Bédard: Pour cet article, l'Opposition, le député de Saint-Laurent, entre autres, avait fait remarquer qu'il serait mieux de prévoir la possibilité, dans le cas d'adoption, qu'il y ait une évaluation du cas de telle manière qu'on ne défende pas d'une façon rigide et inconsidérée le mariage dans de telles circonstances, lorsqu'il y a un tel lien de parenté ou de filiation. Nous nous étions déclarés d'accord et l'amendement est dans ce sens.

Le Président (M. Laberge): Après l'article 405, nous ajoutons l'article 405.1 qui se lit: "En cas d'adoption, le tribunal peut, suivant les circonstances, permettre un mariage en ligne collatérale". Est-ce que ce nouvel article 405.1 sera adopté?

M. Bédard: Adopté. M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Ensuite, on avait laissé en suspens l'article 410.

M. Bédard: À l'article 410, on voulait s'assurer que cette formule rejoigne tout le monde et qu'il n'y ait pas de discrimination, quand on emploie le terme "célébrants", concernant l'aspect religieux. On m'indique que ça ne représente aucune discrimination. Nous voulions quand même le vérifier.

Le Président (M. Laberge): L'article 410 adopté sans aucune modification.

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): L'article 410 est adopté tel quel. J'appelle l'article 411.

M. Bédard: L'article 411, nous l'avions laissé ouvert parce qu'il y avait eu des représentations de l'Opposition aux fins de s'enquérir si l'emploi du mot Église se rapportait d'une façon tout à fait spéciale à l'Église catholique romaine.

M. Forget: À l'Église chrétienne.

M. Bédard: À l'Église chrétienne. Là-dessus, la vérification a été faite et je demanderais peut-être à M. Guy d'ajouter des explications.

On était avec le Petit Larousse et on est allé voir le Petit Robert. Il semble qu'il n'y aurait pas de problème avec le Petit Robert dans le sens que nous pouvons voir.

M. Forget: On l'a ici, oui.

M. Blank: II faudrait prendre le même dictionnaire.

Mme Lavoie-Roux: La même édition.

M. Bédard: II dit: (Avec un É majuscule) - je dis cela parce qu'il y a différents sens - c'était originairement la société réunissant les premiers chrétiens, l'Église primitive, etc. Par analogie, ensemble de personnes professant une même doctrine animée d'une même foi. Le parti communiste est à la fois une Église, une

religion, une communauté et un ordre. C'est tiré des auteurs français comme Pierre Gaxotte. Dans le sens plus récent, plus moderne, par analogie, le mot Église avec É majuscule est employé pour une communauté professant la même doctrine et la même foi. Dans le Code civil actuel, à l'article 129, le mot Église également est dans le texte et il n'a pas été porté à notre connaissance par aucune décision que je connaisse qu'il y ait quelque difficulté d'application quant à ce sens.

M. Forget: Oui, mais, M. le Président...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... je pense que les raisonnements qu'on vient de tenir, quoiqu'ils se basent sur une des définitions données du mot Église, montrent clairement par le contexte duquel l'exemple est extrait qu'Église peut signifier cela quand le mot Église est utilisé comme attribut. Le Parti communiste est une Église. C'est l'exemple qu'on nous a cité. Je pense qu'il ne viendrait à l'esprit de personne, quand on utilise le mot Église, de prétendre que cela couvre également un parti politique. Cela montre très clairement qu'on peut dire de n'importe quoi que c'est une Église, comme on peut dire de n'importe quoi que c'est un cheval. C'est une question d'opinion. Utilisé comme attribut, c'est une figure de style. On peut dire bien des choses, on peut donner bien des qualifications à une personne, a une chose ou à un ensemble d'individus, mais on ne pourrait jamais affirmer que si on a dans une énumération les Églises, cela couvre toutes les dénominations politiques. On dirait: Non, cela couvre toutes les fois peut-être, à la limite, mais cela ne couvre certainement pas les partis politiques ou les associations de bienfaisance, etc.

Donc, c'est une chose. Deuxièmement, on utilise Église avec un É majuscule. Or, Église, avec un É majuscule, c'est la communauté des chrétiens. J'ajouterais un troisième argument, c'est que, pour les non-chrétiens, Église désigne une foi à laquelle ils n'appartiennent pas. Pour un mahométan, pour un juif, une Église, c'est une Église autre que la religion à laquelle il appartient, c'est une foi autre que la foi à laquelle il appartient. Donc, on ne peut certainement pas dire que c'est un usage non discriminatoire puisqu'on a à la fois la manière dont c'est perçu dans les groupes qui ne sont pas parties de l'Église chrétienne. On a l'utilisation du É majuscule et finalement cette définition illustre très bien qu'on peut utiliser n'importe quel mot comme attribut, mais cela ne prouve pas que cette façon de l'utiliser corresponde à une définition. C'est une figure de style.

M. Bédard: On pensait honnêtement arriver avec la solution.

M. Blank: J'ai une suggestion ici: communauté religieuse et la discipline de la communauté religieuse à laquelle il appartient. Cela couvre tout.

M. Bédard: C'est que les mots "communauté religieuse" englobent des Églises, peut-être, mais beaucoup plus que ça aussi.

M. Blank: Oui, mais ce sont les mots eux-mêmes qui causent le problème. Même si les définitions incluent des synogogues et des mosquées; en anglais, on dit...

M. Bédard: Le député de Saint-Louis doit s'imaginer qu'on a pensé aussi à "communauté religieuse"...

M. Blank: J'ai trouvé ce mot avec...

M. Bédard: ... j'ai essayé de me faire convaincre que ça pourrait être le meilleur terme.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais le ministre du culte, pour répondre à l'objection de Me Guy, ça exclut les communautés religieuses de femmes ou...

M. Bédard: J'étais convaincu d'arriver avec la solution et vous faites tomber toutes les réticences maintenant...

M. Forget: J'ajouterais peut-être un autre argument, très brièvement, c'est que la traduction anglaise d'Église, la seule traduction possible, est "church" et, dans ce cas, on m'assure que "church" ne peut vouloir désigner qu'une Église chrétienne.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Taschereau.

M. Guay: Pourquoi faut-il mettre la discipline de l'Église? Si on se bornait à dire "selon la religion à laquelle il appartient", puisque finalement, c'est ce dont il s'agit, ce sont des religions.

M. Forget: On peut faire sauter tout simplement le bout de phrase. Cela n'ajoute rien.

M. Bédard: "... selon sa religion et la discipline à laquelle il appartient."

Non, on ne peut pas appartenir à une discipline. D'abord, on n'appartient pas à une religion, on pratique une religion, on appartient à une Église qui pratique une religion - je me sers toujours du mot Église dans le sens large - on appartient à un groupe, à une Église et on pratique une

religion.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous marquez...

M. Guay: Pourquoi ne pas marquer "selon sa religion", comme c'est marqué là, et enlever tout le reste de la phrase? "Célébrer un mariage contre lequel il existe quelque empêchement selon sa religion".

M. Bédard: Oui, mais chacun peut avoir sa religion. Je vous avoue que, si on a un autre mot qui peut remplacer... Je voudrais bien que chacun n'essaie pas de courir après le mot qui ferait époque, mais, d'un autre côté, ce mot déjà employé dans le Code civil n'a jamais amené de discrimination de quelque manière que ce soit, n'a jamais été interprété dans le sens de...

M. Blank: Non, mais on change le Code civil...

M. Bédard: On change le code, mais, en même temps, on tient compte de ce qui existe déjà, ça n'a jamais créé un problème. Est-ce qu'on veut trouver un autre mot qui aurait peut-être des risques de créer un problème par rapport à un autre qui n'en a jamais créé?

M. Forget: Je comprends, M. le Président, mais on adapte le langage du XIXe siècle dans bien des endroits où il n'y a pas eu de procès. Je pense que, dans ce cas-ci, on a une belle occasion de le faire dans l'esprit de la Charte des droits et libertés de la personne, on peut utiliser un langage plus neutre.

M. Bédard: Regroupement religieux? Le mot "communauté" semble créer des problèmes; maintenant, si vous avez des suggestions, je... On avait pensé à regroupement religieux.

Mme Lavoie-Roux: Le groupe religieux auquel il appartient?

Le Président (M. Laberge): II faut que ce soit plus large que ça. M. le député de Taschereau.

M. Guay: C'est une suggestion, ça vaut ce que ça vaut. Puisqu'on veut absolument introduire la notion de discipline, pourquoi ne pas mettre, plutôt que "selon sa religion", selon "sa ou la discipline religieuse"? Est-ce qu'on ne peut pas mettre "selon sa discipline religieuse"? (20 h 45)

M. Bédard: Non, je l'ai essayé; parfois le droit, vous savez! Pas le droit comme les mots! C'est ce qu'on nous dit du côté des experts. Peut-être le mot viendra-t-il au cours de la soirée mais je pense qu'on y est allé quand même de quelques suggestions. Il y aurait communauté de foi aussi, puisque c'est la base.

Mais ça pose des problèmes, une communauté de foi, ça n'a pas de discipline, ça n'a pas de structure, c'est une communauté de foi parce que c'est lié justement au niveau de...

M. Forget: Mais il y avait ... pour déterminer de façon précise, ou alors le Code de procédure civile, qui sont ces célébrants et il va falloir énoncer beaucoup plus de règles qu'il y en a là de toute manière. Je pense qu'on a fait référence à l'existence d'une loi d'ailleurs.

M. Bédard: C'est le premier chapitre...

M. Forget: Oui, mais le principe général, c'est que celui qui officie ou qui est le ministre d'une foi, quoique le mot "ministre" a peut-être aussi une connotation, mais celui qui officie au nom d'une communauté de foi a le pouvoir d'être un officier de l'état civil.

M. Bédard: On pourrait peut-être parler de la discipline d'une société religieuse. Ce serait déjà plus proche.

Mme Lavoie-Roux: Quelle est l'objection au terme "communauté religieuse" de toute façon?

M. Bédard: Ce peut être une communauté d'hommes ou de femmes...

Mme Lavoie-Roux: Non, ça, ce sont des ordres religieux.

M. Bédard: C'est le dictionnaire ... des communautés religieuses, de moines ou de... Enfin ça se réfère vraiment là aussi... De moines et de moniales...

Je crois qu'il y a peut-être quelque chose d'intéressant dans ce... Société religieuse... Société, ce serait une discipline.

Mme Lavoie-Roux: La discipline de la société religieuse...

M. Bédard: La société, c'est un groupe social organisé... Donc, la société religieuse avec un grand "S"? Non? Non, un petit "s". Est-ce que ça va?

On dirait: "et la discipline de la société religieuse à laquelle il appartient".

Mme Lavoie-Roux: Une société religieuse, c'est l'ensemble du Québec.

M. Bédard: II peut...

Mme Lavoie-Roux: Une société

religieuse, c'est très large.

M. Bédard: C'est tout groupe social important. Ce peut être un groupe organisé.

C'est un groupe social organisé, alors, ça répond à...

Mme Lavoie-Roux: Si les juristes sont d'accord.

M. Bédard: Pour le moment, en tout cas, c'est peut-être ce qu'il y a de plus précis.

Je sais que les juristes seraient plus d'accord avec le mot "église" mais... Parce qu'il est important de...

M. Forget: Bon! Pourvu que l'on remédie au... Nous représentons à cette table des comtés où le problème du pluralisme religieux est réel. Il ne s'agit pas d'un problème purement théorique. Nous avons dans nos trois comtés des mahométans, des bouddhistes, des hindous et pas simplement quelques dizaines, il y en a quelques milliers. Je pense que nous sommes dans une société qui, à juste titre, se fait un honneur de respecter la foi religieuse de tous ses membres. Donc, il n'y a pas de raison, à l'occasion de la modernisation du Code civil, de ne pas le reconnaître, même dans le langage. On comprend que l'esprit dans lequel cela a été administré...

M. Bédard: Je suis bien d'accord.

M. Forget: ... est identique d'ailleurs à l'intention qui nous anime, mais, pourvu qu'on modernise le langage, il nous semblait que c'était un signe d'acceptation et de respect de ce pluralisme qui est réel. C'est une réalité sociologique que nous vivons tous les jours.

M. Bédard: Cela fait partie du pluralisme qui caractérise la société québécoise, et pourvu qu'on trouve le mot qui, tout en modernisant, tienne compte de la réalité. Alors: société religieuse.

Mme Lavoie-Roux: Le mot" congrégation"...

M. Bédard: Ça fait Rome un peu.

Mme Lavoie-Roux: Ça fait Congrégation Notre-Dame. C'est rattaché à toutes sortes de...

M. Guay: Je reviens à l'idée de "quelque empêchement selon sa religion". On pourrait dire aussi " selon les principes de sa religion ou selon les principes et la discipline de sa religion". Mais, au fond, ce qui est visé par cet article-ci, c'est que le ministre du culte qui n'est pas d'accord pour célébrer un mariage ne le célébrera pas et la personne devra s'adresser à quelqu'un d'autre. Je ne pense pas qu'on soit dans une situation au Québec où ça pose un problème de rareté de personnes pour célébrer un mariage et, à supposer que le mariage ne soit pas religieux, ça peut être le protonotaire, qui, lui, va le célébrer sans considérations religieuses.

Est-ce que le député se rallie à "société religieuse"? Il n'y a pas de problème?

M. Guay: Ça ne me semble pas la formulation la plus élégante, mais, enfin...

M. Bédard: Enfin. Est-ce que ça va? Est-ce que vous êtes d'accord?

Cela se lirait: " et la discipline de la société religieuse à laquelle il appartient."

M. Forget: Oui.

Le Président (M. Laberge): À la troisième ligne de l'article 411 nous remplaçons "l'Église" par "la société religieuse".

M. Blank: Disons qu'on adopte cet article avec le changement. L'article va dire que, maintenant, on peut forcer un ministre à célébrer un mariage...

M. Bédard: Mais non!

M. Blank: ...laissez-moi finir... à moins qu'il ne prouve que son refus est basé sur sa religion et la discipline de son Église. Cela veut dire qu'il doit maintenant donner la raison de son refus.

M. Bédard: Cela a toujours été le cas. M. Blank: D'accord, c'est ce que je dis. M. Bédard: Cela va s'étendre...

M. Blank: Cela veut dire qu'en fait, on peut maintenant forcer un ministre du culte à célébrer un mariage qu'il ne veut pas célébrer pour toute autre raison. Il doit prouver que sa raison est basée sur sa religion et la discipline... C'est ce qu'on veut faire.

M. Bédard: Oui, c'est l'état actuel du droit.

M. Blank: Oui, je sais, la fameuse cause de...

M. Bédard: Cela va?

Le Président (M. Laberge): "Société religieuse" est adopté et l'article 411...

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): ...est adopté avec amendement.

M. Bédard: Ensuite, on tombait à 413? Vous avez un amendement.

Le Président (M. Laberge): J'en ai même deux. À l'article 413, on nous demandait originalement de remplacer l'article par le suivant. Est-ce encore valable...

M. Bédard: Ah, oui!

Le Président (M. Laberge): ...le remplacement de l'article par le suivant ou si on doit simplement remplacer une série de mots par une autre? C'est devenu déchu?

M. Bédard: On faisait disparaître les noms et prénoms de leurs pères et mères". C'est ça?

Le Président (M. Laberge): Parfait! Je donne lecture d'abord de l'amendement, c'est-à-dire qu'on nous suggérait de remplacer l'article 413 par le suivant: "La publication de mariage énonce les nom, prénoms, profession et domicile de chacun des futurs époux, leur qualité de majeur ou de mineur et les noms et prénoms de leurs pères et mères. L'exactitude de ces énonciations est attestée par un témoin majeur." Maintenant, ici, on nous dit de remplacer dans ce texte, après les mots "époux, leur qualité de majeur ou de mineur, "les mots" et les prénoms et noms de leurs pères et mères" par "ainsi que le jour et le lieu de leur naissance." On va vous donner cela.

M. Bédard: Excellent. Cela fait suite aux remarques qui avaient été faites par les membres de la commission parlementaire, entre autres, l'Opposition, à savoir qu'il n'était peut-être pas nécessaire d'indiquer le nom et le prénom.

Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait d'accord avec cela.

Le Président (M. Laberge): L'amendement...

M. Bédard: Vous voyez, j'ai commencé par le mauvais article tantôt. Je ne vous donnais pas raison. J'ai pensé stratégiquement à commencer par les autres.

Le Président (M. Laberge): Le sous-amendement est amendé. Le nouvel article 413 est adopté avec amendements.

On va faire cela au fur et à mesure parce qu'on ne se retrouvera jamais. Voilà!

M. Bédard: À l'article 416, nous avions eu une discussion qui a duré assez longtemps, où le député de Saint-Laurent, entre autres, avait discouru sur la possibilité, avant de procéder au mariage, d'informer les futurs époux de l'opportunité d'un examen médical prénuptial. Il y avait également une autre formule. Certains groupes avaient parlé aussi de l'opportunité d'indiquer à ces futurs époux les ressources communautaires. Comme c'est un terme qui n'est quand même pas assez défini, nous avons retenu une partie de l'argumentation. Il s'agirait d'ajouter l'alinéa suivant: "En outre, il informe les futurs époux de l'opportunité d'un examen médical prénuptial." Vous n'êtes pas d'accord, M. le député de Saint-Louis?

M. Blank: Non, non, ça ne me dérange pas.

Le Président (M. Laberge):, M. le député de Taschereau.

M. Guay: Est-ce que je dois comprendre que c'est au moment où le protonotaire s'apprête à célébrer le mariage ou lorsque la personne fait sa demande?

M. Bédard: C'est cela.

M. Guay: Cela va. D'accord.

M. Forget: Pourrais-je me permettre, M. le Président, étant donné la remarquable harmonie qui règne sur ces articles, de faire une suggestion inspirée simplement par le moment où cette suggestion se fait? Il me semble que ce serait peut-être encore mieux si c'était à l'article 412, plutôt qu'à l'article 416, cette mention, au moment où on sollicite la publication des bans ou la publication du mariage, je pense que c'est le terme le plus approprié, plutôt qu'au moment de la célébration. C'est une suggestion qui vient sur le tard.

M. Bédard: Cela me semblait aller de soi que c'était au moment de la publication des bans. On ne retardera sûrement pas le mariage.

M. Forget: Oui, ce serait approprié à ce moment-là.

Le Président (M. Laberge): Au lieu d'apporter cet amendement à l'article ...

M. Bédard: Plutôt que de faire cela sur le coin de la table, on va se donner quelques minutes. On sait ce qu'il en est.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Taschereau.

M. Guay: C'est le député de Saint-

Laurent qui a proposé l'idée. Est-ce qu'il ne serait pas plus opportun, sans le mettre dans le projet de loi, que le ministère des Affaires sociales, dans toute la publicité qu'il fait pour les jeunes, les moins jeunes, sur toutes les catégories de population, fasse un dépliant qui serait accessible à la population? Mais l'idée d'intégrer cela, sans doute pas à la cérémonie, mais même la demande de publication des bans, me paraît un peu curieuse. D'après ce qu'on me dit - je comprends l'idée du député de Saint-Laurent est-ce que cela ne devrait pas être plutôt une responsabilité du ministère des Affaires sociales, ce rôle, sans qu'il soit obligé de le faire par la loi, ou sans qu'on ne l'insère dans la loi?

M. Forget: On pourrait dire la même chose de l'obligation qui est faite au célébrant de faire la lecture de certains articles du Code civil. On pourrait dire que ce devrait être le ministère de la Justice qui fasse de la publicité à la télévision.

M. Guay: Pas nécessairement.

M. Forget: II ne faut pas tout régler par les dépliants et par les programmes publicitaires. Il reste que nous avons là des fonctionnaires de l'Etat, en tant que célébrants, qui sont fonctionnaires de l'État. Il est normal qu'ils rappellent des choses qui ont une importance même au point de vue des causes de nullité du mariage. Malgré tout, ce rappel étant fait, on verra plus tard qu'on peut éviter certaines causes de nullité du mariage. C'est d'intérêt public et cela n'empêche pas le ministère des Affaires sociales de publier des brochures et d'inviter les médecins à prendre certaines précautions lorsqu'ils savent que l'examen en question est un examen prénuptial. Je pense qu'il faudrait exiger une prise de sang à ce moment-là. Tout cela peut se faire par les lois de la santé publique.

M. Bédard: Comme on le place à un autre endroit qui est plus indiqué dans le texte, il y a un petit problème de formulation. On va le laisser comme... (21 heures)

Le Président (M. Laberge): L'article 412, qui a été adopté, je l'ouvre d'office pour permettre de le placer à l'un ou l'autre endroit. L'article 416 demeure ouvert.

M. Bédard: On pourrait fermer l'article 416, parce que ça ne va vraiment pas là.

Le Président (M. Laberge): Vous allez le mettre à 412?

M. Bédard: Je ne sais pas si ce sera à 412, mais on le retient.

M. Forget: Adoptons 416, étant compris que vous allez trouver une façon de l'intégrer ailleurs.

M. Bédard: Étant donné qu'on revient, mais on en ouvrira un pour le greffer là.

M. Forget: Oui.

Le Président (M. Laberge): Article 416, adopté sans amendement. Article 417?

M. Bédard: II y a un amendement à la fin du premier alinéa: remplacer "de l'article 441" par "des articles 441 à 446". Cela rejoint ce qui avait été demandé. On n'a pas cru bon d'ajouter l'article 450 et les suivants.

M. Forget: Si on se met à faire la lecture, il s'agit de savoir où s'arrêter.

M. Bédard: Bien oui.

M. Forget: Ce sont là les plus significatifs. Il reste qu'il faudrait tenir compte de la concordance puisqu'il y a un des articles de 441 à 446 qui a été supprimé et cela va modifier - je le dis pour le bénéfice des rédacteurs - l'énumération.

M. Bédard: On va avoir une motion de renumérotation à la fin. On est vraiment dans la concordance.

Le Président (M. Laberge): L'amendement à l'article 417 est adopté. Article 417, adopté tel qu'amendé.

M. Blank: II pense qu'on doit retourner pour quelques minutes ici, à côté, après 9 heures, pour la sanction du lieutenant-gouverneur.

M. Bédard: Consolons-nous à l'idée qu'on travaille pour nos concitoyennes et nos concitoyens.

M. Blank: Oui, mais Sa Majesté nous attend.

M. Bédard: On aura toujours le temps de prendre... Article 423?

Le Président (M. Laberge): II n'y avait pas d'amendement à l'article 423, mais on l'avait laissé ouvert.

M. Bédard: Ah oui! Je crois qu'on peut fermer l'article 423, M. le Président. On l'avait laissé ouvert parce que c'était relié à la discussion sur la dispense d'âge de l'article 403. À partir du moment où on en a disposé, cela va.

Le Président (M. Laberge): L'article 423

sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté sur division.

Le Président (M. Laberge): Adopté sur division. Nous passons à l'article 429. À l'article 429, on avait déjà adopté un amendement afin de changer le dernier mot de l'article qui était "satisfaite" par "remplie". Cela avait été laissé en suspens aussi.

M. Bédard: Oui, c'est pour cela.

Le Président (M. Laberge): Ce n'était pas adopté, c'était en suspens.

M. Bédard: II n'y a rien d'autre, M. le Président, on peut l'adopter.

M. Forget: Adopté sur division.

Le Président (M. Laberge): Le mot "remplie" est adopté, c'est-à-dire que l'amendement est adopté sur division.

M. Bédard: C'est parce que cela fait référence à la dispense d'âge.

Le Président (M. Laberge): L'article 429 est adopté tel qu'amendé sur division. À l'article 430, nous avions...

M. Forget: ...posé une question sur "publiquement".

M. Bédard: Oui. C'est le terme employé depuis toujours. C'est le droit existant et, encore une fois, je pense que ce qu'on appelle positivement la publicité du mariage est une question qui n'est pas épuisée par la seule présence d'un célébrant compétent et par la présence de deux témoins, mais que s'y ajoute, dans l'interprétation traditionnelle qui a été donnée par cet article depuis un siècle, l'élément publication, étant entendu, comme on le disait l'autre jour, que le défaut de publication à lui seul n'a jamais été considéré comme un élément de clandestinité suffisant. Mais lorsque s'y ajoutaient d'autres éléments comme l'incompétence du fonctionnaire ou l'absence de deux témoins, à ce moment-là l'absence de publication venait jouer négativement comme circonstance aggravante. C'est la raison pour laquelle, je pense, nous serions un peu inquiets d'enlever le mot "publiquement", même s'il est vrai que cela peut constituer, à la première lecture, une certaine redondance. On ne sait pas trop ce qu'on changerait dans l'interprétation jurisprudentielle si on modifiait ce point.

En termes de concordance, si on relit l'article 409 qu'on a adopté, on y stipule que le mariage doit être contracté publiquement, devant un célébrant compétent et en présence de deux témoins.

Il est certain, en tout cas - je pense que c'était l'inquiétude du député de Saint-Louis l'autre jour - que cela n'a jamais empêché certaines coutumes de célébration un peu plus discrètes que d'autres. Cette interprétation n'a même jamais été avancée si peu que ce soit par quiconque.

M. Forget: Ces explications sont - je me permets de le dire en tout respect -assez peu éclairantes, puisqu'on dit que le défaut de publication n'est pas, en soi, suffisant pour qu'on invoque la nullité; lorsqu'on a jugé qu'un mariage n'avait pas été célébré publiquement, c'est à cause d'un défaut d'un célébrant compétent ou de l'absence des témoins; donc, il semble impossible d'imaginer des circonstances, lorsqu'il y a eu publication, lorsqu'il y a eu un célébrant compétent et la présence de deux témoins, jugées comme étant non publiques.

Malgré tout, un doute subsiste dans l'esprit. Le doute est peut-être plus gênant aujourd'hui qu'il ne pouvait l'être il y a un siècle, étant donné que les moeurs actuelles font que des mariages se célèbrent en privé, du moins dans des maisons privées, dans des lieux privés, qui ne sont pas accessibles au public à moins d'invitation spéciale, et il serait fâcheux qu'à cause de cela, quelqu'un, un jour, réussisse à démontrer que "publiquement" constitue une contrainte additionnelle dont on n'avait pas soupçonné l'existence. J'hésite toujours à avoir des mots qui sont redondants; celui-ci, je pense, en dépit des explications qu'on nous a données, est un mot redondant. Si le ministre insiste pour l'adopter comme cela, adoptons-le sur division, mais je ne suis carrément pas convaincu.

Le Président (M. Laberge): Article 430, adopté sur division.

M. Bédard: Pour redondance. Ce n'est pas la division qui est redondante, c'est le mot "publiquement".

Le Président (M. Laberge): Article 437. On a des amendements ici. Je lis ce qu'on porte à notre attention. Remplacer les mots "consenties aux époux", à la deuxième ligne, par les mots "que les époux se sont consenties". Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Forget: Un instant.

M. Bédard: C'est plus clair comme cela, vous l'aviez demandé.

M. Forget: D'accord, c'est pour vérifier. Parfait, adopté.

Le Président (M. Laberge): L'amendement est adopté. En conséquence, on peut rouvrir l'article 435 pour le modifier comme suit. Au premier alinéa, avant le premier mot "l'époux", ajouter "sous réserve de l'article 437,". C'est-à-dire "435. Sous réserve de l'article 437, l'époux est de bonne foi..." Sans changer la fin.

Au premier alinéa, sous réserve de l'article 437, il faut supprimer aussi les mots "entre vifs". Cela se lit comme suit: Sous réserve de l'article 437, l'époux de bonne foi a droit aux donations qui lui ont été consenties en considération du mariage. Alors supprimer les deux mots "entre vifs". Est-ce que c'est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté.

M. Forgét: Pourriez-vous relire cela, M. le Président. Je ne suis pas sûr de vous avoir suivi.

Le Président (M. Laberge): Moi non plus parce que je m'aperçois qu'il y en a encore. Je vais vous donner lecture de l'article 435. Sous réserve de l'article 437, l'époux de bonne foi a droit aux donations qui lui ont été consenties en considération du mariage. Cela règle le premier alinéa. Au deuxième alinéa, à la deuxième ligne, on nous demande de remplacer la virgule après le mot "caduques" par "ou" et ajouter une virgule après "réduire", ce qui se lira: les déclarer caduques ou les réduire, ordonner que le paiement en soit, etc. C'est bien cela?

M. Bédard: "Ou ordonner". Le "ou" d'ordonner reste là.

Le Président (M. Laberge): II y en a deux?

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): Enlever la virgule à "caduques", remplacer par "ou" et ajouter une virgule après réduire. Cela va. À la troisième ligne du deuxième alinéa, remplacer le "en" dans "en soit différé", mais quel "en"? Est-ce que c'est "en tenant compte" ou le premier? Il y en a un ici aussi.

M. Bédard: Après le mot "paiement".

Le Président (M. Laberge): Après le mot "paiement". Je vais faire la correction, je vais vous relire le texte. Je vous le relis. Deuxième alinéa: "Toutefois, le tribunal peut, au moment où il prononce la nullité du mariage, les déclarer caduques ou les réduire, ou ordonner que le paiement des donations entre vifs soient différé pour un temps qu'il détermine, en tenant compte des circonstances dans lesquelles se trouvent les parties". Est-ce que ces amendements seront adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 435 fortement amendé sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendements.

M. Bédard: Ce n'est que de la concordance, mais je pense, non seulement je pense, mais à 439 on parle d'accroissement de l'actif, à la page 13, à la fin de l'article. On parle des aliments! "Sur l'apport de celui-ci à l'accroissement". Comme on employait un terme, l'enrichissement du patrimoine.

Le Président (M. Laberge): À la fin du

paragraphe.

M. Bédard: À la fin de l'article 439.

Le Président (M. Laberge): Amendement à l'article 439 qui avait été adopté, mais qui est rouvert pour changer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du patrimoine".

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): Je l'écris. Cet amendement qui consiste à remplacer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du patrimoine" sera-t-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 439, adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.

M. Bédard: On avait laissé l'article ouvert parce qu'on employait le mot patronymique et on avait eu une discussion là-dessus, une concordance. On l'a déjà enlevé ailleurs. C'est cela.

M. Forget: II y a une concordance. Ses nom et prénom.

Le Président (M. Laberge): Dans l'article 443, on dit ici d'enlever simplement le mot patronymique à la deuxième ligne. C'est tout.

Cet amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté. (21 h 15)

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 443 sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement. L'article 444 est en suspens. Il y a autre chose. A l'article 444, il y a un nouveau texte.

M. Bédard: Oui. On nous demandait d'y ajouter la dimension de parents, de l'autorité parentale.

M. Forget: Ce n'est pas le souvenir que nous en avons conservé. Il y avait le problème d'insister sur le fait que ce qui se fait en commun dépasse la simple notion de direction. Il y a, bien sûr, la question de l'autorité parentale, mais il y a également toute la notion que toutes les charges du ménage sont conjointes. Notre suggestion allait dans le sens de supprimer l'article plutôt que d'essayer par une périphrase de reproduire à toutes fins pratiques le premier alinéa de l'article 441.

Je me souviens que nous avions dit que lorsque le code affirme que les époux ont, en mariage, les mêmes droits et les mêmes obligations, on a tout dit. Le reste n'est que du superflu, dans le fond, sur le plan de leur égalité et de la prise en charge des obligations.

M. Bédard: Oui, j'ai évoqué cet élément. Mais sur le fait de l'enlever, je pense que nous n'avions pas pris de décision à ce moment-là.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre.

M. Bédard: Pour concrétiser, évidemment... Vous avez raison. À l'article 441, l'énoncé général englobe certainement ces aspects. Les mots "direction morale et matérielle de la famille" - on a cherché -sont utilisés dans d'autres codes. Il ne nous est pas apparu de mots meilleurs. On n'en a pas trouvé. On a tourné autour du mot "responsabilité", mais le mot "responsabilité", dans le Code civil, a une connotation particulière et fait davantage écho à un devoir, à une obligation qui, lorsqu'on l'enfreint, engendre une situation de réparation.

Par ailleurs, c'est un article qui a été inclus dans la lecture de ce qui...

M. Forget: Excusez-moi.

M. Bédard: On pourrait déposer notre amendement pour en discuter.

M. Forget: Oui, d'accord.

Le Président (M. Laberge): L'article 444 demeure ouvert. Nous avions l'article 447 qui est ouvert aussi.

M. Bédard: On va continuer la discussion.

Le Président (M. Laberge): Ah bon! Parfait!

M. Forget: C'est parce qu'il n'a pas été formellement déposé devant la commission.

M. Bédard: C'est parce qu'il n'a pas été formellement déposé.

Le Président (M. Laberge): Parfait. M. le député de Sherbrooke. Je vais simplement donner lecture de ce qu'on nous recommande ici. On nous recommande de remplacer l'article 444 par le suivant: "Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille et exercent l'autorité parentale."

M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Je souscrirais à cette nouvelle formulation. Reprenant un commentaire sur ce qui a été dit tout à l'heure sur l'importance de ce qui est indiqué à l'article 444, la notion de communauté de responsabilités, la notion que les responsabilités matérielles, la direction morale, appartiennent à une unité de vie désormais solidaire, coresponsable, je pense qu'il est important d'affirmer, à tout le moins dans un article, cette notion de responsabilités copartagées.

M. Bédard: II n'y a pas d'autres remarques, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): L'article 444 sera-t-il adopté? Il y avait une rédaction.

M. Bédard: Ça rejoint exactement la rédaction de l'office. On y a ajouté "l'autorité".

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, comme ce n'est pas encore tout à fait adopté...

Le Président (M. Laberge): Non, je n'ai pas eu votre réponse.

Mme Lavoie-Roux: Je le fais à titre de suggestion. L'autre jour, si ma mémoire est bonne, c'est peut-être moi qui avais soulevé - ça n'a pas d'importance que ce soit moi ou un autre - la question d'ajouter...

M. Bédard: Les tâches domestiques...

Mme Lavoie-Roux: Non, pas les tâches domestiques telles quelles, mais ajouter un élément qui compléterait la direction morale et matérielle. J'avais parlé de l'autorité parentale et quelqu'un m'a fait valoir que cette notion d'autorité parentale, de toute façon, se retrouve assez abondamment dans le chapitre sur l'autorité parentale où les deux sont responsables.

La suggestion que j'aimerais faire serait celle-ci: Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille - si on veut garder l'autorité parentale, d'accord - ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent.

M. Bédard: Je pense que ça va de soi que, s'ils font ça ensemble, il va falloir qu'ils fassent ensemble toutes les tâches qui en découlent, que représentent la direction morale ou matérielle d'une famille et l'exercice de l'autorité parentale.

Mme Lavoie-Roux: Oui, vous leur prêtez beaucoup de vertus.

M. Bédard: Je leur prête un peu de bonne volonté.

Mme Lavoie-Roux: On ne va pas faire un tour de table ici. Non, l'exécution des tâches qui en découlent, ça peut être des tâches de garde, ça peut être des tâches de tous ordres.

M. Bédard: Payer les factures. Non, c'est à eux à déterminer ça. Nous tenions à le garder aussi parce que c'est un des articles qui peut être lu. Par rapport à l'amendement que nous avons adopté, il me semble que c'est bon que ce soit lu.

Mme Lavoie-Roux: Je dois vous dire que, lorsqu'on parle de la direction morale et matérielle, s'il y a juste deux directeurs dans la maison...

M. Bédard: II n'y a que des chefs et pas d'Indiens, ça va mal aller.

Mme Lavoie-Roux: S'il n'y a personne pour faire le travail et exécuter les tâches...

M. Bédard: Nous sommes d'accord avec vous, ça va prendre une bonne répartition des tâches et des gens qui seront égaux entre eux.

Mme Lavoie-Roux: Alors, je veux en faire une proposition formelle, M. le Président. Est-ce que l'amendement a été incorporé à la proposition actuelle ou si ça deviendrait un sous-amendement?

M. Forget: Si je comprends bien, le ministre suggère de le substituer à l'article actuel. On n'a pas besoin d'un vote formel. On peut le considérer comme effectivement substitué.

Mme Lavoie-Roux: Alors j'aimerais faire un amendement, soit qu'on retranche les mots " et exercent l'autorité parentale" pour les remplacer par "ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent".

M. Bédard: Je salue votre amendement. M. le Président, je ne suis en aucune façon contre ça, sauf que je crois que cela s'implique de soi-même à partir du libellé même de...

Mme Lavoie-Roux: On a toujours eu le père chef de famille.

M. Bédard: Je ne peux pas toujours être d'accord avec vous, ça fait à peu près sept ou huit articles où je suis d'accord.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais vous essayez de me convaincre que le fait que le mot "direction" soit là ça résout tous les autres problèmes. Depuis une éternité, au Québec, qu'il est chef de famille.

M. Bédard: Je n'ai pas besoin de ça.

Mme Lavoie-Roux: Qu'il assume la direction...

M. Bédard: C'est de la redondance, à mon sens, ou encore...

Mme Lavoie-Roux: Oui, vous, vous êtes un mari modèle.

M. Bédard: Non, je ne suis pas un mari modèle du tout. Je sais qu'à partir du moment où il y a égalité...

Mme Lavoie-Roux: Tiens, on a le député de Lévis, il va nous dire ça, lui.

M. Bédard: ... on va se mettre à table et on fera le partage des tâches qui en découlent.

M. Garon: Quand le père de famille est député, il n'y a pas de problème, le chef de famille, c'est la mère.

M. Bédard: Ça va passer à l'histoire, Ça.

Le Président (M. Laberge): Vous m'avez fait une proposition formelle que je voudrais relire, s'il y a lieu de la discuter.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Qui consiste d'abord à biffer les mots "et exercent

l'autorité parentale " et à ajouter - là, je ne les ai pas.

Mme Lavoie-Roux: Ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent.

M. Gosselin: M. le Président...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Je comprens la...

M. Bédard: Je le dis d'avance. Je ne crois pas cela nécessaire. Je serais en désaccord, mais non pas avec ce que cela représente, d'autant plus que je crois que c'est déjà implicite et que c'est déjà compris dans le libellé déjà exprimé. Je voudrais qu'on comprenne bien le sens de ma dissension.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Je veux simplement dire que je comprends très bien la préoccupation du député de L'Acadie...

M. Bédard: On la comprend et on la partage.

M. Gosselin: ...et on la partage également.

M. Bédard: Je veux que ce soit bien compris. C'est seulement technique, point.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Gosselin: Cependant, est-il nécessaire de définir d'une manière rigoriste, par le texte que vous suggérez, ces choses-là? Les partenaires qui partagent les responsabilités de la direction morale et matérielle de la famille ne sont-ils pas en devoir de participer également aux tâches?

M. Bédard: Cela va de soi. M. Gosselin: Oui.

M. Bédard: On peut tout écrire. On peut bien tout mettre. Si on prenait ce principe-là, on écrirait un roman.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas un grand roman que vous avez. Il est très précis.

M. Bédard: Non, je sais. D'ailleurs, on a été d'accord sur bien des points. On n'est même pas en désaccord sur le fond. Je crois que c'est technique, point.

M. Forget: M. le Président, je pense que le texte qui nous est soumis, dans une certaine mesure, accroît encore davantage les objections qui ont présidé au fait qu'on l'a suspendu. En effet, le rapprochement entre la direction morale et matérielle, le concept de direction et le concept d'autorité parentale, en fait véritablement un article où on se préoccupe du pouvoir de décider soit vis-à-vis des enfants, soit vis-à-vis, justement, des problèmes et des responsabilités morales et matérielles de la famille, mais où, évidemment, il n'est pas du tout question de ce qui en découle.

Je comprends le souci du ministre de ne pas vouloir dicter dans le Code civil de quelle façon chaque ménage va aménager les tâches domestiques, etc., mais je pense que ce serait mal comprendre l'esprit de l'amendement présenté par la députée de L'Acadie. On parle d'assumer ensemble. Je pense qu'on pourrait faire la même description ici; les députés qui sont membres d'une formation politique à l'Assemblée nationale assument ensemble toutes les tâches qui découlent de leur présence à l'Assemblée. Nous ne faisons pas tous la même chose et nous ne faisons pas tous les mêmes choses de la même manière, mais nous décidons ensemble, à l'intérieur de nos caucus respectifs, de la manière dont, justement, ces choses doivent être faites. Personne ne peut dire: Ma participation se borne à décider au caucus comment ma formation politique va se comporter. On s'attend également à ce qu'il assume, en fait, des tâches, mais il les assume avec d'autres de la façon et selon les modalités et dans les proportions qui sont dictées par les circonstances, les capacités et les disponibilités de chacun. Il n'y a pas du tout d'idée d'une égalité arithmétique dans chacune des tâches, qu'il faut laver la vaisselle tous les deux jours ou des histoires de ce genre. Ce serait une caricature de la vie réelle de prétendre faire des règles aussi rigides.

Je pense que la députée de L'Acadie a tout à fait raison de dire que nous voulons contrecarrer une notion qui s'est enracinée dans le Code civil - pas seulement là, peut-être pas surtout là, mais certainement qui était consolidée par le Code civil - à savoir qu'il y en a un qui était le chef et que l'autre était l'exécutant. Nous disons: Les deux sont les chefs. D'accord, cela va très bien. Mais est-ce que, dans le fond, les deux sont les chefs, mais il n'y en a qu'un qui continue d'être l'exécutant? Je pense que c'est une notion contre laquelle il faut réagir et qui ne correspond plus, d'ailleurs, à la mentalité contemporaine, au moins parmi ce que le premier ministre - et je ne me permettrai qu'une seule allusion de ce genre - appelle les forces montantes de la société. (21 h 30)

Si les forces montantes de la société

sont si importantes à certains égards qu'elles permettent d'espérer contre tout espoir, je pense que c'est un bon cas où on peut alléguer ce que les forces montantes de la société pensent. On pourrait peut-être le consigner dans le Code civil. Je pense qu'un bon mouvement... Non seulement sur le plan symbolique, ici à l'Assemblée nationale, mais il ne faut pas oublier que ces textes-là, les cinq ou six articles, seront les seuls qui seront lus à chaque célébration de mariage. Cela a un effet, malgré tout, sur la perception, avec le temps, qu'on ne peut pas négliger. Ce sont des occasions solennelles. Et je pense que, pour avoir assisté à d'autres mariages après le mien, on revit toujours son mariage dans les mariages subséquents auxquels on assiste. Je pense que c'est un exercice fort intéressant que d'adresser de pareilles admonestations à tous ceux qui participent ou assistent à la célébration d'un mariage.

M. le Président, je pense que c'est un très bon amendement. On devrait l'adopter. Si jamais le ministre insistait pour qu'un article traite de l'autorité parentale, justement dans le même but exemplaire, il pourrait le faire à un article séparé. On a enlevé l'article 442. Il pourrait mettre là un paragraphe sur l'autorité parentale. Je pense qu'effectivement, il serait peut-être bon de le souligner puisqu'on parle de la résidence familiale. C'est peut-être encore plus important, dans ces articles, de parler de l'autorité parentale.

M. Bédard: À l'article 446, on dit déjà que les époux contribuent aux charges du mariage. Le député de Saint-Laurent... Je n'en ferai pas une bataille, parce qu'il y a des articles quand même beaucoup plus importants que cela.

Mme Lavoie-Roux: II est très important celui-là, M. le Président.

M. Bédard: Quelque chose qui est compris dans l'autre, vous ne me ferez pas mettre de l'importance là où il n'y en a pas. Ce n'est pas vrai. Mais si cela peut vous faire plaisir.

Mme Lavoie-Roux: Cela reste au journal des Débats, M. le Président.

M. Bédard: Si cela peut vous faire plaisir, oui. Et je le dis pour le journal des Débats. Tout simplement, j'ai dit que j'étais d'accord sur le fond, d'accord sur l'idée, mais que cela se retrouvait à l'intérieur de ce qui existe déjà. Si cela peut vous faire plaisir, je peux le faire en pensant qu'il y a d'autres articles où il est plus important d'arriver, entre autres la résidence familiale. Sinon, on pourrait dire que les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille et les tâches qui en découlent et exercent l'autorité parentale et les tâches qui en découlent. On pourrait dire cela de n'importe quoi, de n'importe quelle responsabilité. C'est pour cela que je dis que c'est compris à l'intérieur de...

Quand le député de Saint-Laurent dit que les députés assurent la direction, on peut dire assurent la direction ...

M. Forget: ... de leur formation politique.

M. Bédard: ... démocratique du fonctionnement de la Chambre. Quand on a dit cela, on pourrait ajouter et des tâches qui en découlent. Mais c'est quoi, la question de principe? C'est sûr que toute responsabilité, toute direction qui s'assume implique nécessairement des tâches qui doivent être exécutées, des tâches qui doivent être remplies. En termes de collaboration et de...

M. Forget: M. le Président, en insistant sur la direction dans un article séparé, vous attirez ce genre de commentaire. Je reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure et à ce que j'avais dit lors de notre discussion initiale. Lorsque vous affirmez que les époux ont dans le mariage les mêmes droits et les mêmes obligations, vous pourriez vous arrêter là aussi. Tout le reste en découle, bien sûr. Quand vous dites après que les époux choisissent ensemble la résidence familiale, vous ne faites que dire que, vis-à-vis de la résidence familiale, ils ont les mêmes droits et les mêmes obligations. Donc, cet article aussi est superflu.

M. Bédard: Vous me dites de le retirer?

M. Forget: Non, mais, puisque vous utilisez l'argument que c'est implicite, je dis que vous n'êtes pas logique parce que, dans d'autres circonstances, vous explicitez ce qui est implicite.

M. Bédard: On ne fera pas une longue discussion, mais je crois au contraire que toute la logique est dans le sens que c'est déjà compris à l'intérieur de... On pourrait parler de secours et assistance et des tâches que cela représente. Autrement dit, toute responsabilité implique nécessairement des tâches à remplir et à assumer.

Pour finir la discussion, M. le Président, je vais être d'accord avec mon propre raisonnement, c'est-à-dire que c'est déjà compris à l'intérieur. Donc, n'en faisons pas une discussion.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux y revenir quand même. Pour moi, ce n'est rien de... Excusez, il y avait le député de Taschereau qui avait demandé la parole.

Je parlerai après lui.

M. Bédard: Je ne dis pas que ce n'est pas important. Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.

M. Guay: Je vais abonder - je l'avoue, au risque de déplaire au ministre - dans le sens de la députée de L'Acadie et du député de Saint-Laurent. Je sais que cela n'arrive pas souvent.

M. Forget: C'est d'autant plus apprécié.

M. Guay: Je pense qu'effectivement, dans un article du Code civil, c'est précisément l'endroit par excellence pour énoncer non seulement le principe de la direction, mais aussi les tâches qui en découlent, c'est certain que le fait de l'énoncer ici dans cet article ne va pas changer... Il n'y a personne qui va pouvoir, à partir de cet article, prendre une poursuite contre qui que ce soit. Cela m'apparaît invraisemblable. Mais, à partir du moment où on définit de nouvelles règles dans bien des cas ou des règles du mariage dans un instrument aussi fondamental qu'est le Code civil, il m'apparaît important de préciser, de dire, d'affirmer ces choses, parce qu'on sait très bien comment cela se passe dans bien des cas. Bien sûr, la direction se fait conjointement, mais les tâches sont loin d'être conjointes et équilibrées dans beaucoup de couples, et c'est peut-être leur choix. C'est peut-être un choix librement consenti. C'est peut-être leur façon à eux de partager les tâches. C'est une façon un peu curieuse, on pourra en convenir. Le mari a un emploi à l'extérieur, ne fait que cela. La femme a un emploi à l'extérieur et, en plus de cela, elle est obligée d'assumer toutes les tâches domestiques parce que le mari n'est pas foutu de lever le petit doigt. Je pense qu'en 1980, au moment où on fait une réforme du Code civil dans ce domaine, c'est une excellente chose que d'affirmer dans le Code civil à tout le moins le principe non seulement au niveau de la direction, mais au niveau aussi du partage des tâches, quitte à ce que chaque couple le conçoive et l'aménage comme bon lui semble.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier le député de Taschereau de son appui. Je pense que tout a à peu près été dit, mais je voudrais revenir simplement sur ce que le député de Saint-Laurent a dit au sujet du partage des tâches. C'est quand même très général, "ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent". À ce moment-là, comme le disait également le député de Taschereau, cela ne veut pas dire que les tâches sont énumérées A, B, C et D d'un côté, mais elles sont partagées chacun selon sa disponibilité, ses aptitudes ou son intérêt.

Je pense que cela rend vraiment plus réelle cette égalité qu'on veut atteindre dans le mariage et cette responsabilité partagée non seulement à l'égard des responsabilités financières, mais à l'égard de tout le fonctionnement de la famille. Il y a des hommes qui n'ont pas eu besoin d'attendre une révision du Code civil pour, justement, partager ces tâches et assumer ces responsabilités et, parfois, mieux même que les femmes à l'intérieur d'un foyer. Mais je pense que la règle générale, jusqu'à maintenant - et je n'en fais reproche à personne, cela fait partie logiquement de notre évolution - ce sont les hommes qui étaient chefs de famille, quoique les femmes, d'une façon plus discrète, ont peut-être dans bien des cas assumé autant la direction que les hommes, mais je pense qu'on veut modifier cet état de choses. Tout le langage qu'on tient au sujet de l'égalité des époux à l'intérieur du foyer, il faut que cela porte sur des choses un peu réelles, un peu concrètes. On ne peut rester exactement avec les formulations qu'on a eues jusqu'à maintenant, quoique là, cela s'étend quand même à assumer ensemble - ce qui n'était pas, je pense, auparavant dans le Code civil - il y a certainement un progrès. Pour que cela se concrétise et que cela se traduise dans la réalité, je pense que l'amendement que nous apportons n'est pas superflu sans être contraignant dans une division arbitraire, discrétionnaire ou même irréaliste des tâches.

J'espère que le ministre va s'attendrir. Je ne devrais même pas faire appel à ce genre de choses.

M. Bédard: Non. J'ai dit et je redis que je suis pleinement d'accord avec les propos tenus par la députée de L'Acadie. J'ai évoqué à ce moment-là ma conviction -parce que cela a toujours été ma manière de voir les choses - que, du point de vue littéraire, c'était inclus à l'intérieur de la formulation qui existait déjà. Je n'ai pas changé d'idée là-dessus, mais je vais succomber avec plaisir aux assauts et nous sommes d'accord pour...

Mme Lavoie-Roux: Vous l'acceptez? M. Bédard: Oui, ça va. Mme Lavoie-Roux: Bravo! M. Forget: Je vous félicite.

M. Bédard: Oui, mais dans les termes que j'ai employés. Avant, ce n'était pas là et je n'ai jamais eu de difficulté à faire le partage des tâches.

Mme Lavoie-Roux: II y a des gens pour qui ça ne changera rien.

M. Bédard: D'autant plus que ce n'est pas contraignant.

Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, on ne pourra pas l'imposer non plus aux autres, mais cela rend les gens plus conscients.

Le Président (M. Laberge): Je voudrais donner la parole au député de Sherbrooke.

M. Bédard: Si vous voulez...

Le Président (M. Laberge): M. le député de Sherbrooke m'a demandé la parole.

M. Bédard: Juste pour se comprendre sur l'amendement, à la fin, "et assument les tâches qui en découlent". C'est cela, surtout. Cela rejoindra également l'idée de l'autorité parentale.

M. Forget: Oui, je pense que c'est bon.

Le Président (M. Laberge): Je vais le reprendre séparément.

M. Bédard: Je m'excuse auprès du député de l'avoir interrompu. Ce serait: "Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale et assument les tâches qui en découlent."

Le Président (M. Laberge): Bon. Comme j'ai une motion formelle devant moi, présentée par la députée de L'Acadie, je me suis posé une petite question en cours de route, à savoir si une personne qui siège à titre d'intervenant avait droit de présenter une motion. Je laisse ma question ouverte.

M. Blank: Je vais la "seconder".

Le Président (M. Laberge): Bon, c'est cela. Je la laisse ouverte pour le moment.

M. Bédard: Je vais la ...

Mme Lavoie-Roux: Vous pouvez peut-être me demander de me retirer?

Le Président (M. Laberge): Non, non, pas du tout.

M. Bédard: Non, non.

Le Président (M. Laberge): C'est justement pourquoi je laisse la question ouverte, à cause du règlement...

M. Blank: Au nom de la députée de L'Acadie, je présente la motion.

Le Président (M. Laberge): Cela va. J'ai pensé séparer en deux la proposition, à savoir, premièrement, biffer les mots "et exercent l'autorité parentale". Il semble que vous...

M. Bédard: Non, non.

Mme Lavoie-Roux: J'ai demandé, par mon amendement, de les retirer.

M. Bédard: Cela rejoint également une préoccupation qui avait été énoncée.

Mme Lavoie-Roux: Relisez le texte au complet, on va voir.

Le Président (M. Laberge): Votre motion était de biffer "et exercent l'autorité parentale".

M. Bédard: Sur cela, on s'entend, vous le retirez.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est juste pour...

Le Président (M. Laberge): Cela est retiré. Bon!

M. Bédard: Ajouter des mots à la fin.

Le Président (M. Laberge): Ajouter à la fin, après "parentale", les mots "ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent"...

M. Bédard: Si la députée de L'Acadie n'a pas d'objection...

Le Président (M. Laberge): "...et assument..."

M. Bédard: ..."et assument les tâches qui en découlent".

Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous le relire au complet?

M. Bédard: En ponctuant.

Le Président (M. Laberge): Je reprends la rédaction complète.

M. Bédard: "Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale et assument les tâches qui en découlent." Cela rejoint l'autre préoccupation du député de Saint-Laurent également sur l'autorité parentale.

M. Forget: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: Cela implique des tâches également.

Mme Lavoie-Roux: Sauf que, du point

de vue du français - les spécialistes vont nous dire que dans "ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale ainsi que l'exécution des tâches qui en découlent", le mot "en" peut se rapporter uniquement a l'autorité parentale.

M. Bédard: Non, ce n'est pas cela. On l'a formulé autrement justement pour que cela ne s'applique pas seulement à l'autorité.

Mme Lavoie-Roux: Bon, j'ai mal compris.

M. Bédard: On ajoute "et assument les tâches qui en découlent".

M. Forget: Oui.

Le Président (M. Laberge): Je vous le relis. Nous considérons, pour la bonne compréhension du journal des Débats et de la procédure, que nous avons discuté sur un projet d'amendement qui, finalement, après rédaction, donne un article qui se lit comme suit: "Ensemble, les époux assurent la direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale, et assument les tâches qui en découlent".

M. Bédard: II n'y a pas de virgule après le mot "parentale", "...et assument les tâches qui en découlent."

Le Président (M. Laberge): Parfait. Avant d'adopter cet article, je cède la parole au député de Sherbrooke.

M. Gosselin: M. le Président, je veux dire que je souscris à cet article, mais avec des réserves, parce que je trouve que le Code civil ne doit pas aller si loin. En tout cas, je trouve un peu malheureux qu'on entre si loin dans le détail des choses. Je m'interroge simplement - évidemment, il y aura une commission permanente de révision du Code civil - à savoir si cet article ne soulève pas des ambiguïtés plus lourdes encore.

Cela dépend de la définition qu'on donne à "assumer ensemble les tâches". Si l'un des conjoints travaille huit mois à l'extérieur du foyer parce qu'il est engagé à la Baie James, par exemple, il pourrait bien, devant un juge, se voir accuser de ne pas avoir assumé équitablement avec l'autre conjoint, les tâches... (21 h 45)

M. Bédard: Faisons un acte de foi sur l'ensemble, d'accord?

M. Forget: L'article 446 règle cela.

Mme Lavoie-Roux: Écoutez donc! De toute façon, s'ils invoquent cela quand le mari est à la Baie James pendant huit mois, c'est que, de toute façon, ils veulent en finir du mariage. C'est aussi simple que cela.

M. Bédard: Disons que la vérité peut être plus compliquée que cela, mais on n'a pas ici à la disséquer.

Le Président (M. Laberge): L'article 444, nouvelle rédaction, sera-t-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 444 est adopté. Nous passons à 447.

M. Bédard: À quelle place?

Le Président (M. Laberge): À l'article 447. Il a été laissé en suspens.

M. Bédard: M. le Président, là-dessus je pense que nous avions fait la discussion globalement.

Le Préaident (M. Laberge): C'est à 448, je pense, qu'on a apporté une réponse.

M. Forget: L'article 447 ne me semble pas poser tellement de problèmes, mais à 448, on n'était pas sûr si la rédaction était suffisamment claire. Selon les notes que nous avons, il semble qu'on veuille dire ici que, par exemple, chacun des deux époux peut permettre à son conjoint de poser un acte relatif à la direction morale et matérielle de la famille, alors que, normalement, le concours des deux aurait été nécessaire.

M. Bédard: Nous avons un amendement là-dessus. L'article 447 est adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 447 est adopté. Article 448.

M. Bédard: À l'article 448, nous avons un amendement.

Le Président (M. Laberge): Oui. On nous suggère, à la deuxième ligne du premier alinéa, de remplacer le mot "les" par le mot "des". C'est ce qui signifiera dans "des actes relatifs".

M. Bédard: Pour éviter ce qu'évoquait le député de Saint-Laurent, la grande délégation générale qui fait que...

M. Forget: Si on employait le singulier, cela voudrait dire la même chose, mais ce serait encore plus clair parce que, quand on parle du singulier, le singulier emporte le pluriel, mais cela montrerait que la délégation vise des choses particulières.

M. Bédard: Oui, c'est sûr. Le "des"

limite également dans le sens en tout cas qu'il s'agit d'actes déterminés. L'idée c'était peut-être de penser à des actes déterminés.

M. Forget: C'était bien l'idée, mais je me dis qu'en utilisant les règles d'interprétation, cela couvre à la fois la possibilité d'une délégation pour un acte et la délégation pour des actes.

M. Bédard: Le "des" ici, disons, a peut-être été retenu après quand même une petite réflexion. On a pensé l'appliquer à ceux qui, en raison parfois de leur travail, quittent leur domicile pour quelques mois, et à ce moment va se poser le problème des actes vraiment, mais quand même des actes dans le sens de plusieurs actes. C'est un petit peu la sensibilité qu'on a eue...

M. Forget: C'est peut-être plus intelligible pour la plupart des gens, oui, à ce point de vue, d'accord.

Le Président (M. Laberge): Le mot "les" est remplacé par "des". C'est adopté. L'article 448 amendé sera-t-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement. J'appelle maintenant l'article 450 qui a été laissé ouvert.

M. Bédard: À l'article 450, il n'y avait pas d'amendement. Nous avions eu une discussion sur l'opportunité de faire en sorte que le consentement soit écrit lorsqu'il s'agit des meubles. Je pense que nous avions évoqué suffisamment les difficultés que ça pouvait entraîner. Nous n'avons pas d'autres remarques à faire sur l'article tel que libellé. Je n'ai pas d'autres remarques à faire.

Mme Lavoîe-Roux: Je voudrais soulever une question. Est-ce que l'article est fini?

M. Forget: Non, il n'est pas fini.

Le Président (M. Laberge): Nous sommes à l'article 450.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais juste soulever une question de règlement. Je m'excuse, M. le Président. Tout à l'heure, vous avez soulevé la possibilité que je ne puisse pas faire d'amendement à titre d'intervenant.

Le Président (M. Laberge): C'est une question que je me posais.

Mme Lavoie-Roux: Là, je me suis rappelé que les intervenants ont le droit de faire des motions, mais ils ne sont pas comptés dans le quorum, s'il y a un vote qui est pris. Alors, je veux garder mien l'amendement que j'ai proposé.

M. Bédard: L'amendement qui en découle.

Le Président (M. Laberge): II est encore à votre nom.

M. Bédard: Et la tâche que vous vous êtes donnée de le faire.

Le Président (M. Laberge): II est inscrit ici à votre nom.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Laberge): II n'y avait pas d'amendement à l'article 450.

M. Forget: Non, il n'y a pas d'amendement.

Le Président (M. Laberge): C'est-à-dire qu'il y a eu juste un amendement qui est déjà adopté; le mot "ou" a été remplacé par le mot "ni". C'est déjà fait. Le reste était resté ouvert.

Mme Lavoie-Roux: C'étaient les meubles.

M. Forget: Nous y avons réfléchi aussi depuis la discussion qui a eu lieu à la commission et nous en venons à la conclusion, qui n'est peut-être pas emballante à première vue, qu'il n'y a probablement rien qu'on puisse faire pour améliorer le texte et le rendre efficace. Mais, dans le même souffle, je pense que la vérité exige que l'on dise à la commission parlementaire qu'il s'agit beaucoup plus d'un voeu pieux que d'une mesure véritablement efficace, parce qu'un conjoint de mauvaise foi qui voudra transgresser cet article pourra le faire pratiquement impunément.

Dans une certaine mesure, on peut conclure que l'avantage principal de l'article sera peut-être de faire d'un tel comportement un des éléments que l'autre conjoint pourrait amener pour demander la séparation de corps ou le divorce. C'est à peu près la seule conséquence pratique, si on peut parler d'une conséquence pratique. On pourrait caractériser le comportement du conjoint qui vide la résidence familiale de ses meubles comme un comportement qui démontre une volonté de ne pas respecter les obligations qui découlent du mariage. C'est à peu près tout ce qu'on peut trouver. Autrement, pour lui donner une plus grande efficacité, il faudrait requérir des écrits, requérir un formalisme dans la vente du moindre article ménager qui rendrait la vie de tous les jours pour énormément de gens

absolument impossible.

M. Bédard: On pourrait noter aussi la pression morale que ça peut représenter.

M. Forget: Bien sûr, pour ceux qui sont soucieux d'observer les lois, ce sera très bien, mais pour ceux qui veulent aller au bout de leurs possibilités, ça ne pourra pas avoir de sanctions immédiates.

M. Bédard: Pour ceux-là, c'est bien difficile de faire des lois.

M. Blank: La seule façon d'éviter ça, c'est une sanction pénale; on ne veut pas de sanctions pénales dans le Code civil, ce qui veut dire que ça reste un voeu pieux.

M. Bédard: D'accord? L'article 450 est adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 450 est adopté avec amendement.

M. Bédard: C'est ça, il y avait un petit amendement.

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement. J'appelle l'article 452.

M. Bédard: 452, il y a un amendement.

Le Président (M. Laberge): II y a un amendement ici. On a une suggestion. Un moment, ça ne sera pas long! On dit à l'article 452: Ajouter à la deuxième ligne du premier alinéa le mot "écrit" après le mot "consentement". Alors, "sans le consentement écrit de son conjoint."

M. Bédard: Après réflexion, étant donné qu'il s'agit de bail, de location, etc., je ne pense pas qu'en aucune façon on rende la vie impossible à qui que ce soit en demandant le consentement écrit et ça représente à ce moment-là une sécurité de plus, je pense.

M. Forget: Nous acceptons l'amendement, M. le Président, mais j'aimerais dire qu'après un examen nouveau que nous avons fait de cette disposition, compte tenu même de l'amendement apporté par le ministre, nous jugeons que cette disposition-là n'est pas adéquate parce qu'elle ne réussira pas, selon nous, à donner la protection recherchée par tous relativement à des locaux qui sont loués par un ménage. Je pense qu'il aurait fallu procéder différemment en permettant... Je crois qu'il y a trois éléments sur lesquels nous voudrions insister.

En premier lieu, le Code civil devait faire reposer la protection de la résidence familiale louée sur l'un ou l'autre de deux mécanismes, soit le bail conjoint des époux qui assument, à ce moment-là, la qualité de locataires conjointement et solidairement; c'est une solution qui, dans le cas où les deux ont un revenu, etc., pourrait être la plus appropriée. C'est une solution possible. C'est évidemment une solution qui est ouverte maintenant, mais qu'il faut mentionner malgré tout dans le contexte.

L'autre solution serait de faire figurer, par une modification à la Loi sur les relations entre locataire et locateur, donc le chapitre sur le louage de choses, de manière obligatoire au bail, une déclaration qui devrait être faite au moment de la location et qui indiquerait qu'il s'agit là de la location d'une résidence familiale, avertissant ainsi le bailleur ou le locateur de l'intention manifeste des conjoints. Ceci devrait être aussi accompagné d'une disposition qui ferait qu'à ce moment-là, la participation du conjoint au bail n'est pas équivalente à une acceptation d'une responsabilité conjointe par les deux époux quand l'un des conjoints se borne à signer une telle déclaration.

Troisièmement, je pense que, si on faisait cela, il serait nécessaire d'envisager une mesure plus grande de souplesse malgré tout, pour éviter qu'il y ait trop de litiges entre conjoints qui puissent être apportés devant les tribunaux en permettant la substitution de bonne foi d'un bail pour un autre. En effet, on peut imaginer, si on n'est pas en face d'un bail conjoint, que le locataire qui assume la responsabilité financière de payer le loyer... On se met dans la situation où il y en a un seul qui a un revenu provenant d'un emploi et ce conjoint perd son emploi, subit une diminution de revenu et doit prendre la décision de se reloger ailleurs parce qu'il ne peut plus assumer cette charge. Dans la mesure où il ne place pas sa famille dans une situation inacceptable, c'est une question de fait, il devrait être possible de substituer de bonne foi une résidence familiale à une autre, parce qu'il peut y avoir malgré tout un désaccord entre les conjoints, sans être obligé de demander au tribunal la permission de le faire.

Enfin, l'esprit général du genre de régime que nous envisageons, c'est de rapprocher plus directement du bail même, plutôt que d'une déclaration qui peut intervenir à un moment quelconque, la qualité de résidence familiale. Autrement, nous avons l'impression que ça va demeurer soit lettre morte parce qu'on négligera de faire la déclaration, ou alors cela va intervenir comme un élément stratégique dans l'amorce de procédures entre les conjoints. Pour obtenir des avantages sur d'autres plans, on va faire une déclaration ou alors on va le faire intervenir comme une mesure accessoire à une procédure de

divorce. Je pense que cela est déjà prévu de toute façon, ce n'est pas nécessaire dans ces cas-là, ou alors ça va, encore une fois, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, tomber rapidement en désuétude parce que les gens ne le sauront pas. Si on le fait au moment du bail, si c'est rapproché du bail... À ce moment-là, je pense que c'est toute l'économie - enfin pas toute l'économie -c'est certainement une partie des dispositions du chapitre relatives au bail, y compris les clauses de droit public, etc., et le formulaire utilisé qui devraient subir des modifications. Nous en sommes venus à la conclusion, quant à nous, que l'approche très facultative qui est utilisée n'est pas la meilleure qu'on puisse imaginer dans les circonstances. (22 heures)

M. Blank: ... même dans la loi, dans la pratique actuelle, on ne va pas assez loin. Le député de Saint-Laurent parle d'une façon d'avoir quelque chose de public, une déclaration de résidence familiale. Ici, même avec l'amendement proposé par le gouvernement, on dit que le consentement de sous-louer c'est par écrit, mais, quand on parle de l'avis au propriétaire, on ne dit pas que ce soit par écrit, on parle d'un avis. Même dans la loi actuelle. Cela veut dire que le propriétaire doit savoir que c'est une résidence familiale. La suggestion du député de Saint-Laurent donnerait une chance au propriétaire. Ce n'est pas dans l'intérêt du propriétaire que ce soit sa résidence familiale; c'est-à-dire qu'on doit prendre toutes les mesures possibles pour éviter que le propriétaire dise: Je ne le savais pas, je ne l'avais pas.

Maintenant, on a une forme de bail avec la loi de la Régie du logement, il y a un bail type. On pourrait ajouter dans cette loi un paragraphe, un article ou une petite boîte carrée où les parties peuvent aviser le propriétaire que c'est une résidence familiale sans nécessairement engager les deux conjoints conjointement et solidairement. Peut-être que ce n'est pas dans son intérêt.

M. Bédard: J'ai pris la peine de le mentionner lorsque nous avons fait l'étude de cet article, mais peut-être que vous ne vous le rappelez pas. À l'heure actuelle, au moment même où on se parle, déjà au niveau des Affaires municipales - ce n'est pas seulement en termes d'idée - on va en venir à une clause type. J'ai même parlé d'une clause type dans le bail type qui, à ce moment-là, fera que tout le monde sera averti en même temps, tout le monde le saura. Cela rejoint exactement l'essentiel des représentations que vous venez de faire, de rapprocher le plus possible l'ensemble du mécanisme de protection du moment où la location elle-même se fait.

M. Blank: Mais, à ce moment-là, l'avis sera par écrit, pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi?

M. Bédard: II sera non seulement par écrit, mais toutes les parties à l'acte de location seront informées en même temps et seront liées en même temps.

M. Blank: Ce sera obligatoire, cette clause?

M. Bédard: Oui, c'est une clause type dans le bail type que nous avons non seulement l'intention d'appliquer, mais qui sera contenue dans la loi du ministre des Affaires municipales. Cela rejoint exactement les préoccupations que vous évoquez et celles que j'avais également.

Le Président (M. Laberge): Autres commentaires sur l'article 452?

M. Bédard: On n'a pas besoin de loi pour la clause type, c'est par réglementation, c'est encore plus facile de pouvoir l'ajuster aux préoccupations que nous évoquons concernant la protection.

M. Blank: Oui, cela va couvrir tous les nouveaux baux signés après l'entrée en vigueur de cette loi, mais il y a des milliers de maisons qui sont déjà louées. Comment va-t-on aviser ces gens?

M. Bédard: C'est pour cela qu'il y a l'avis dont on parlait.

M. Blank: Oui, mais je ne sais pas pourquoi vous ne mettez pas l'avis par écrit.

M. Bédard: L'avis par écrit peut être rendu plus formaliste. Si le conjoint d'un locataire donne devant témoin, de façon qu'il puisse en faire la preuve, un avis au locateur que l'immeuble qui est occupé l'est à titre de résidence, cela lui permettra ensuite de pouvoir aussi invoquer contre le locateur qu'il avait été avisé et d'en faire la preuve. Malheureusement, s'il n'a pas envoyé un écrit alors qu'on l'exige, même s'il a des témoins, il ne pourra pas invoquer que l'avis a été donné parce qu'il y aura un défaut de formalisme. C'est sûr que l'avis, sans qu'on distingue qu'il doit être par écrit ou verbal, pourra être donné par écrit. C'est une certaine preuve utile quand il s'agit de l'utiliser, mais s'il arrive que cela a été donné verbalement devant témoin, il pourra aussi l'invoquer et alors s'en servir pour se protéger. L'idée était de favoriser davantage la protection du conjoint aussi, enfin, de la famille, si on veut, en laissant l'avis plus souple. Peut-être qu'il y a aussi quelques commentaires à faire sur les techniques qui ont été proposées pour la protection. C'est certain qu'il n'y en a aucune qui est

complète en elle-même dans la mesure où on en est conscient. La question du bail conjoint, en pratique, on l'a déjà mentionné, le tiers... On a évoqué le bail conjoint. Cela suppose que les deux époux acceptent de devenir cosignataires du bail, d'une part. Le locateur, lui, ne sait pas évidemment si celui qui vient louer est marié ou non, de sorte que s'il vient et qu'il signe seul, il n'y a pas de bail conjoint, mais si le couple vient, que les deux deviennent cosignataires du bail, j'imagine que le locateur s'en montre assez heureux. Cela lui donne deux recours. Il ne faut pas oublier qu'en devenant cosignataire d'un bail, on devient également codébiteur, non seulement codébiteur de l'occupation paisible, mais de toutes les obligations qui en découlent, y compris les dommages et intérêts s'il y en a. Donc, dans la mesure où les deux époux viendront comme codébiteurs, je pense que ce sera heureux. Cela réglera déjà un certain problème. Mais cela ne rejoint pas tout le monde.

Il est possible aussi qu'au moment de la location d'un appartement, la personne ne soit pas mariée, que ce ne soit que plus tard qu'elle se marie. Par conséquent, il faudra prévoir aussi, par une technique d'avis, la possibilité de protéger le couple, puisque le mariage intervient après le bail. Dans le cas de cette clause type qui peut être souhaitable, je pense, et insérée dans le bail, il est déjà prévu que cela peut être possible par voie de règlement. Il s'agirait que... L'article 108, paragraphe 5, dit que le gouvernement peut par règlement imposer l'inclusion de mention obligatoire dans le bail. Cela va aussi très bien si la déclaration qui est faite est conforme à la réalité qui est vécue. Si le locateur dit: Ce n'est pas ma résidence principale, le locateur saura, par l'inclusion dans le bail, que ce n'est pas la résidence principale et son comportement sera un comportement de plus grande liberté.

Si la déclaration qui est faite est que l'immeuble loué sert de résidence familiale, évidemment, son comportement sera conditionné, restreint par l'avis qu'il vient de recevoir dans le bail. Donc, de la qualité de la déclaration peut dépendre l'efficacité aussi d'une semblable clause. Aucun, me semble-t-il, de ces moyens ne rejoint toute la réalité, de sorte qu'il faut probablement garder, si on veut aller jusque là, cette technique de la possibilité de donner un avis en tout temps au locateur parce que le bail ne résout pas tout, ni la déclaration qu'il y a dans le bail. Au contraire, je pense que si quelqu'un étant célibataire loue un appartement, déclare que cela ne sert pas de résidence, se marie six mois plus tard et que le couple habite cette résidence, il est important qu'il puisse y avoir une technique d'avis pour que le bail soit protégé à compter de ce moment. En fait, je pense que c'est de la conjugaison de toutes ces techniques, bail conjoint, clause incluse dans le bail, avis possiblement donné postérieurement, que peut découler une protection plus étendue.

M. Forget: M. le Président, il ne fait pas de doute qu'il n'y a pas de panacée, cela est certain. Il reste qu'il faut régler les problèmes un à la fois. Il nous semble que le seul moyen qui est retenu ici n'est pas le plus efficace parmi ceux qu'on pourrait considérer. J'ouvre ici une parenthèse pour formuler une interrogation à l'endroit du ministre. Je fais référence aux articles du divorce qui accordent une protection à la résidence familiale et qui, dans certains cas, permettent au tribunal d'intervenir à titre de mesure provisoire pour attribuer à l'un des conjoints l'usage exclusif de la résidence familiale.

La résidence familiale n'est pas une expression qui est définie comme telle autrement que par l'application de l'article 452 et de l'article 453. Faudrait-il supposer que si, au moment du divorce, il n'y a pas eu une déclaration préalable qui a été enregistrée, déposée ou faite, l'article correspondant au chapitre du divorce ne peut pas trouver d'application?

M. Bédard: Je croirais que le tribunal, sur demande qui lui en sera faite sans doute, attribuera la résidence ou ne l'attribuera pas au demandeur dans la requête.

M. Forget: Je vois. Indépendamment d'une déclaration, même s'il s'agit d'un immeuble et qu'il n'y a rien d'enregistré, il peut y avoir une déclaration judiciaire qui est équivalente.

M. Bédard: C'est parce qu'il s'agit des rapports entre les époux, à ce moment.

Dès qu'il y a une famille, il y a une résidence familiale.

M. Forget: Je ferme la parenthèse là-dessus, mais, encore une fois, il me semble qu'il n'y a pas de panacée. Le raisonnement qu'on nous a tenu relativement au bail conjoint est exact, je pense que ça peut être une solution adéquate, et quand les parties y ont recours, le Code civil pourrait préciser que la résidence qui fait l'objet d'un bail conjoint est, pour les fins de l'application du Code civil, une résidence familiale, par exemple.

M. Bédard: La seule chose, c'est que ça peut ne pas couvrir tout le monde, comme on l'a dit.

M. Forget: C'est ce que j'ai dit au départ, alors je le sais, c'est bien sûr. Mais il reste que, quand on examine toutes les possibilités, pour certains mariages...

M. Bédard: Ce n'est pas facile.

M. Forget: ... pour certaines familles, ça peut être la meilleure solution, donc, je pense qu'il ne faut pas non plus l'exclure. Dans certains cas, ça peut être vraiment la meilleure solution.

Pour d'autres cas, le problème est de savoir à quel moment la déclaration devrait intervenir. Il me semble que si elle n'intervient pas le plus possible au début du bail, l'espoir qu'elle se fera spontanément, en cours de route, d'abord, c'est un espoir qui sera souvent déçu et, dans la mesure où il n'est pas déçu, c'est une déclaration qui se fera à un moment qui n'est peut-être pas opportun et qui n'est peut-être pas souhaitable, en ce sens qu'elle se fera, soit au moment où il y a déjà des difficultés - la déclaration va compliquer ces difficultés -ou elle se fera trop tard et elle manquera d'efficacité. Je pense que si elle se faisait par une inscription obligatoire au bail, ce serait grandement favorable.

S'il y a une clause type dans le bail, n'y a-t-il pas un risque, à moins que le Code civil ne l'exclue, qu'il y ait une responsabilité solidaire et conjointe pour les obligations découlant du bail, à moins qu'un article spécifique du code dise que cette déclaration, même imposée par la loi, n'entraîne pas la responsabilité solidaire et conjointe? Si on n'a pas choisi un bail conjoint, il ne faudrait pas retomber dans la formule du bail conjoint par inadvertance, en quelque sorte.

Finalement, je reviens sur le dernier point que je soulignais tout à l'heure, c'est l'idée de ne pas multiplier indûment les occasions où le tribunal aurait à intervenir. Il me semble que, dans la substitution de bonne foi d'une résidence à une autre, alors qu'il n'y a pas d'intention de brimer la famille ou de la priver de son gîte, il s'agit simplement de donner suite à des nécessités économiques ou à des convenances, alors qu'on n'a pas un bail conjoint. Évidemment, s'il y a mauvaise foi, si c'est l'équivalent de disposer de la résidence principale en substance, je pense que l'article devrait donner ouverture... Mais ça rendrait possible, malgré tout, des phénomènes qui sont d'observation courante et qui peuvent être la source d'un désaccord mineur, mais auxquels on ne devrait pas permettre de dégénérer en un désaccord majeur par l'intervention d'un tribunal. (22 h 15)

M. Bédard: Je pense qu'on l'a évoqué aussi tout à l'heure, mais que le député a eu sa réponse sur le fait que le locateur ne soit pas avisé par écrit. Je crois que c'est dans un souci d'éviter de faire en sorte qu'en mettant trop de formalisme un citoyen ou une citoyenne n'en vienne à perdre son droit parce que cet avis-là n'a pas été fait par écrit. Si on stipule que cela doit nécessairement être fait par écrit, à ce moment-là on élimine les possibilités que ce soit fait verbalement. Je ne pense pas qu'on doive les éliminer, on doit donner toutes les chances possibles que l'avis soit donné au locateur et qu'il ait une base légale qui ne crée pas de problèmes. D'accord?

Le Président (M. Laberge): L'amendement, qui consiste à ajouter le mot "écrit" après le mot "consentement" à la deuxième ligne, sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté. Nous nous engageons, comme je l'ai évoqué, pour ce qui est de la clause type - toutes les représentations sont faites au niveau des Affaires municipales - à ce que ça puisse devenir réalité rapidement.

Le Président (M. Laberge): L'article 452 tel qu'amendé sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.

Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez adopté de l'autre côté.

M. Bédard: Non, non. Écoutez, jusqu'à maintenant, on a...

Mme Lavoie-Roux: L'amendement? Ah bon! D'accord.

Le Président (M. Laberge): L'amendement.

M. Bédard: ... fonctionné très ouvertement.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'était pas un reproche, c'était juste une remarque.

Le Président (M. Laberge): Cela va pour l'article 452 ou est-ce que vous avez d'autres représentations sur l'article 452?

Mme Lavoie-Roux: C'est juste une question d'information. Le ministre nous dit: Je m'engage à ce que, dans les lois municipales, dans le code du logement ou je ne sais trop...

M. Bédard: Dans la loi de conciliation locateurs-locataires, la loi no 107.

Mme Lavoie-Roux: ... soit introduite cette clause particulière touchant la résidence familiale. Par contre, on ne la retrouve pas telle quelle ou d'aucune façon au Code civil. Est-ce qu'il pourrait y avoir inconvénient qu'un puisse avoir préséance sur

l'autre? C'est vraiment une question d'information.

M. Bédard: Le règlement lui-même est déjà rattaché aux articles 1651.1, 1651.2, 1658.21 du Code civil. Je pense que ça ne pose pas de problème; ça indique déjà un peu l'intention qui était visée à ce moment-là.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Forget: On n'a pas de réponse à la question de substitution.

M. Bédard: Si cette clause type existe à la suite du projet de loi 107 dans un bail type, vous voulez savoir ce qui aurait préséance s'il y avait une disposition contraire dans le Code civil.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Cela ne m'apparaît pas aussi explicite à l'article 452.

M. Bédard: Je pense qu'on peut difficilement y aller de deux mesures contradictoires. Il n'y a pas de disposition dans le code disant qu'on ne puisse pas ou qu'on ne doive pas inclure dans le bail une clause visant cet avis au locateur...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: ...qui peut se faire de façon unilatérale après le bail, mais qui peut se faire aussi à l'intérieur même du bail, ce qui est souhaité ou peut-être souhaitable. Il n'y a pas de disposition incompatible. L'article 452 n'est pas incompatible et l'avis dont il est question sera donné dans le bail, mais il deviendra impératif, si je comprends bien, par l'adoption d'un règlement qui va exiger que, dans le bail du logement d'habitation, apparaisse une déclaration suivant laquelle les lieux d'habitation loués servent ou ne servent pas, évidemment, selon les situations, de résidence. En d'autres termes, cela deviendra une application de l'article 452 puisque le locateur aura reçu dans le bail même l'avis que les lieux servent de résidence familiale. Je n'ai peut-être pas bien saisi votre pensée, mais...

Mme Lavoie-Roux: Non, non. Oui, vous avez raison de dire que ma pensée n'est pas très précise. Je vous l'accorde, M. le Président. Ce qui m'inquiète, c'est que - et mon inquiétude est peut-être sans fondement vous pouvez bien mettre une clause semblable dans la loi sur la conciliation entre locataires et locateurs, mais le conjoint qui signe un bail peut bien aller signer son bail tout seul et son épouse ou sa conjointe ne sait même pas qu'il y a une telle disposition puisque cela n'apparaît pas au Code civil, quoiqu'il ne le saurait peut-être pas plus, même si c'était au Code civil de toute façon.

M. Bédard: II a plus de chances d'en être informé.

Mme Lavoie-Roux: Je veux seulement m'assurer que le conjoint soit vraiment, d'une façon très claire, protégé et qu'il n'y ait pas d'ambiguïté ou que cela ne puisse pas...

M. Bédard: ...par quelque disposition que ce soit du Code civil. Vous pouvez en avoir l'assurance. Il n'y a aucune disposition qui pourrait, de quelque façon...

Mme Lavoie-Roux: L'article 452, dans ce sens-là, vous semble assez complet?

M. Bédard: Oui, et cela constituerait une application au premier moment de la location de cet avis-là et cela paraît aller dans le même sens, justement.

Il est peut-être bon également d'ajouter que la Régie du logement a une obligation qui lui est faite en vertu de sa loi de renseigner les locataires et les locateurs sur leurs droits et obligations qui peuvent résulter du bail d'un logement ou dans toute autre matière dans la présente loi. Elle a quand même des programmes d'information qui vont peut-être permettre ou pousser l'information sur les aspects de droit nouveau du Code civil. Je pense que ce serait important.

M. Forget: Je pourrais peut-être reformuler un peu...

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

M. Forget: ...l'inquiétude de la députée de L'Acadie, M. le Président. En lisant l'article 452, on remarque que l'époux locataire de la résidence principale de la famille a des obligations quand il sous-loue, cède son droit et met fin au bail, mais qu'il n'a pas l'obligation, au moment où il signe le bail, d'aviser son locateur qu'il s'agit de la location d'une résidence familiale. Dans le fond, le tout repose sur la décision, à un moment donné, de faire une déclaration et non pas dans la notion que, si une résidence est utilisée comme résidence familiale, au moment de conclure le bail, le locataire devrait peut-être - c'est la question - avoir l'obligation de la déclarer comme telle. On veut probablement que ce soit sélectif. On veut que ce soit fait par ces familles qui croient ou dont un des membres croit que la résidence familiale est en danger. C'est un remède sélectif tel que formulé ici.

M. Bédard: Je comprends mal le règlement dont il est question. Si on peut imposer dans le bail une clause type, pour ce

qui est du logement, chaque fois qu'il est question de logement d'habitation, mais pas simplement celui qui concerne la résidence familiale, parce qu'on le saura une fois qu'on aura eu une déclaration, évidemment, une réponse de la part du locataire, c'est lui qui va indiquer s'il s'agit de la résidence secondaire de la famille. Il est possible qu'il ait une résidence à l'extérieur de la ville, qu'il ait un pied-à-terre, comme on dit couramment, dans une ville, mais que cela constitue une résidence qui n'est pas tellement la résidence familiale, qui est peut-être la résidence secondaire. A cause de son travail, il doit avoir un appartement ailleurs qu'à son lieu de résidence principale, mais, dans son bail, il devra répondre parce qu'il y aura une clause obligatoire. Ce sera une clause type dans le bail. Il devra répondre à cette question. Ce n'est pas ou c'est la résidence familiale, la résidence principale de la famille. Donc, il ne pourra pas échapper à l'obligation de répondre à cette clause impérative du bail.

M. Forget: Je pense que voici ce qui nous dérange. N'est-il pas extraordinaire que l'on cherche, que l'on vise à protéger de cette façon, de manière obligatoire, la résidence familiale louée par la voie d'une inscription qui n'est imposée que par un règlement?

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Forget: N'est-ce pas un peu paradoxal qu'on ait un chapitre dans le Code civil qui parle de la résidence familiale, un article qui traite de la résidence familiale louée et que la clause déterminante qui rend obligatoire la déclaration de la résidence familiale louée se trouve dans un formulaire adopté par règlement? C'est un peu comme si, dans le chapitre sur la nullité du mariage ou quelque chose dans ce genre-là, on ne parlait pas des clauses de nullité du mariage, mais qu'il y aurait un règlement quelque part, adopté en vertu d'une loi complètement différente, qui décréterait par règlement les causes de nullité.

Au point de vue de la façon de procéder, c'est un peu paradoxal. C'est peut-être pour cela qu'on a ce débat parce que, dans le fond, on crée une obligation et on ne la crée pas là où on s'attendrait à la voir créée. On la crée par un véhicule très indirect et qui dépend d'une volonté qui peut changer du jour au lendemain puisque, selon les gouvernements ou Dieu sait quoi, on pourra changer l'arrêté en conseil. On pourra peut-être, à un moment donné, oublier pourquoi c'est là au niveau de la Régie du logement et l'omettre, en disant: La formule est devenue très compliquée, on va enlever cette clause-là. C'est là depuis des années, mais on ne se rappelle plus trop bien ce que cela fait là. Et cela doit, de toute façon, être obligatoire en vertu de quelque chose d'autre. On ferait sauter la formule.

C'est l'idée de mettre des choses dans des lois, surtout dans le Code civil, plutôt que dans des règlements. C'est peut-être cela qui nous gêne.

M. Bédard: Oui. Sur certains aspects, le député de Saint-Laurent peut avoir raison. Il est clair que la formule du bail type en est une de celles qui sont le plus souvent présentes non seulement à l'esprit, mais devant les yeux de ceux qui vont avoir à s'en prévaloir, peut-être plus que les dispositions au niveau du Code civil. Mais je reconnais qu'il y a un ...

M. Blank: J'ai un autre problème...

M. Bédard: Avec la formule, avec la clause type dans le bail type, à ce moment-là, c'est une des meilleures informations qu'on puisse avoir.

L'article 1651.1 donne une autre assurance. "Le locateur doit, dans les dix jours de la conclusion du bail, remettre au locataire un exemplaire du bail écrit ou, dans le cas d'un bail verbal, un écrit indiquant le nom et l'adresse du locateur et reproduisant les mentions, obligatoires prescrites par règlement, dans la forme qui y est indiquée."

M. Forget: C'est une autorité législative pour le règlement.

M. Bédard: Mais il y a en plus de cela une obligation de la part du locateur de les reproduire.

M. Blank: Mais il y a un autre problème qui peut arriver. Je demande l'avis de vos juristes car c'est peut-être déjà dans la loi. Serait-il dans l'intérêt du propriétaire de louer pour une résidence familiale? Il y a certaines choses qui peuvent arriver, qui ne seraient pas dans l'intérêt du propriétaire, c'est-à-dire que le propriétaire, s'il a le choix, ne louerait pas pour une résidence familiale.

Je sais qu'il y a quelque chose dans la charte des droits de l'homme et dans la loi de la Régie du logement qui dit qu'on ne peut pas refuser un bail à cause des enfants, etc. Est-ce que ce n'est pas nécessaire d'ajouter "gens mariés" ou "résidence familiale"? Le propriétaire, avec cette clause, va dire: Je ne suis pas intéressé, j'aurai assez de problèmes avec des gens qui vont divorcer, se séparer. Cela ne m'intéresse pas et je veux louer seulement à des célibataires. Est-ce qu'il y a quelque chose actuellement dans la charte des droits de l'homme?

M. Bédard: Dans l'article 10, l'état civil est visé.

M. Blank: L'état civil est visé. C'est ce que je me demandais.

M. Bédard: Je n'ai pas d'autres représentations.

Le Président (M. Laberge): L'article 452 sera-t-il adopté avec l'amendement qui consiste à ajouter le mot "écrit" après le mot "consentement"?

M. Bédard: Adopté. (22 h 30)

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement, sur division. À l'article 453, il y a quelques corrections. Nous avions d'abord remplacé le mot "ou" par le mot "ni", à la cinquième ligne du premier alinéa. Cela a été adopté; je ne pense pas que ce soit à changer.

M. Bédard: Non, cela a été adopté.

Le Président (M. Laberge): Cela va. Ensuite, au premier alinéa, on nous demande de supprimer les mots "et contre lequel une déclaration de résidence a été enregistrée." C'est aux troisième et quatrième lignes. Après le mot "famille", biffer les mots "et contre lequel une déclaration de résidence a été enregistrée." Ensuite, à moins que vous ne vouliez procéder à l'adoption de cet amendement-là...

M. Bédard: C'est technique... Allons-y, M. le Président, dans l'ensemble.

Le Président (M. Laberge): C'est cela. On reviendra sur les amendements.

M. Bédard: Et vous lirez l'ensemble de l'article.

Le Président (M. Laberge): Parfait. Ensuite, on nous demande de remplacer, à l'article 453, le deuxième alinéa par le suivant: "À moins qu'il n'ait ratifié l'acte, le conjoint qui n'y a pas donné son consentement peut en demander la nullité, si une déclaration de résidence a été préalablement enregistrée contre l'immeuble." Troisièmement, supprimer le troisième alinéa...

M. Bédard: Parce que rendu là, c'est simplement...

Le Président (M. Laberge): Par la suite, c'est décalé, cela devient l'article 453.2 et il y a un article 453.1 intercalé qui se lit comme suit: "L'époux propriétaire d'un immeuble de cinq logements ou plus qui sert, en tout ou en partie, de résidence principale de la famille ne peut, sans le consentement de son conjoint, l'aliéner, ni en louer la partie réservée à la famille." "Si une déclaration de résidence a été préalablement enregistrée contre l'immeuble, le conjoint qui n'a pas donné son consentement à l'acte d'aliénation peut exiger de l'acquéreur qu'il lui consente un bail des lieux déjà occupés à des fins résidentielles aux conditions régissant le bail d'un logement; sous la même condition, celui qui n'a pas donné son consentement à l'acte de location peut, s'il ne l'a pas ratifié, en demander la nullité."

J'ai déjà mentionné l'article 453.2. Je peux le relire. Il devient: "L'usufruitier, l'emphytéote et l'usager sont soumis aux règles des articles 453 et 453.1." Est-ce qu'il y a discussion là-dessus?

M. Bédard: C'est un amendement que j'avais soumis avant-hier aux membres de l'Opposition, à la suite de certaines des remarques qui avaient été faites lors de la grande discussion que nous avions eue concernant cette partie.

M. Forget: Oui, je pense que c'étaient des remarques qui venaient du député de Nicolet-Yamaska. Mes collègues et moi-même, nous ne pouvons pas nous souvenir d'avoir fait des...

M. Bédard: Oui, vous aviez évoqué, à ce moment-là, une des solutions qui était celle de la Chambre des notaires ou une autre.

Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être un endroit où on aurait aimé avoir la transcription des débats.

M. Forget: Oui, je dois vous avouer, M. le Président, que nous ne pouvons pas consulter le texte de nos délibérations, parce qu'il n'est pas disponible pour cette journée-là. Encore une fois, nous ne nous souvenons pas... C'est sûr qu'il y a eu une longue discussion. Certains ont mentionné les recommandations venant de divers groupes. La Chambre des notaires allait plutôt dans un sens différent de celui-là. Bien sûr, elle voulait un formalisme encore plus grand. Il y a eu une longue discussion, animée surtout, je dois dire, sur ce point-là par le député de Nicolet-Yamaska qui suggérait, si ma mémoire est bonne, de diminuer le formalisme.

M. Blank: Oui, la présomption, c'est cela?

M. Forget: Oui, la présomption.

M. Bédard: On la retrouve indirectement.

M. Forget: De notre côté, nous n'avons pas appuyé ses inquiétudes, parce que je pense que c'est un saut dans l'inconnu que de créer la possibilité d'annuler des transferts immobiliers sans que l'examen des titres en puisse révéler le défaut, dans le fond, ce défaut particulier du titre qui est qu'un vendeur précédent a vendu sans le consentement de son conjoint et que, par conséquent, le conjoint peut, à tout moment, demander la nullité.

M. Bédard: Peut-être pour la lecture un peu difficile des amendements parce qu'ils sont présentés par section et que cela ne donne pas facilement une vue d'ensemble. Pour ce qui est des tiers qui désirent acquérir l'immeuble, c'est par les voies habituelles de l'index aux immeubles qu'ils obtiendront les renseignements, c'est-à-dire que s'il n'y a pas de déclaration de résidence enregistrée contre l'immeuble, le tiers ne pourra jamais se voir opposer la nullité qui pourrait en découler s'il y avait eu déclaration de résidence. Le déplacement qui est fait entre le premier alinéa et le deuxième, pour ce qui est du premier alinéa, visait à renforcer entre les époux l'obligation de consulter ou d'obtenir le consentement du conjoint. Un peu comme en matière mobilière - nous l'avions évoqué tantôt - le fait de savoir que si on cède la propriété sans le consentement du conjoint, on s'expose, c'est peut-être un peu théorique, je l'admets, à des dommages et intérêts pour ne pas avoir obtenu le consentement, je dis bien, entre les époux. Cela crée une pression morale qui peut amener les époux à être plus respectueux de ce consentement à obtenir.

Pour ce qui est du tiers, c'est le remplacement du deuxième alinéa qui indique "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte, le conjoint qui n'a pas donné son consentement peut en demander la nullité". Et la condition pour en demander la nullité est rappelée, cette fois-ci, si une déclaration de résidence a été préalablement enregistrée contre l'immeuble. S'il n'y a pas eu cette déclaration de résidence, dont le tiers peut prendre connaissance en faisant l'examen des titres au bureau d'enregistrement, il n'y a pas de nullité possible à son égard. Il pourrait rester théoriquement, nous l'avons mentionné, un recours en dommages et intérêts entre les époux. C'est peut-être d'une efficacité relative entre époux parce qu'il y aura eu vente sans consentement, mais vis-à-vis le tiers, je crois devoir rappeler que...

M. Forgets Je m'excuse, M. le Président, je pense que le jeu des amendements...

M. Bédard: Oui, ce sont des déplacements qui ont causé...

M. Forget: Bon, d'accord.

Une question. À quoi se réfère l'adverbe "préalablement" qui est utilisé dans le deuxième alinéa des deux articles 453 et 453.1? Préalablement à quoi? Préalablement à la demande en nullité? Non, c'est préalablement à la vente.

M. Bédard: À l'acte...

M. Forget: À l'acte dont la validité est attaquée. Cela ne risque pas d'être...

M. Bédard: Peut-être que le début de la phrase "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte" indique que le "préalablement" cela va être à l'acte. C'est le seul acte dont on peut demander la nullité. C'est l'acte d'achat, somme toute, ou l'acte d'hypothèque évidemment parce que, dans cet article 453, il n'y a pas que la vente ou l'aliénation, il y a également l'hypothèque parce que le prêteur hypothécaire a besoin, lui aussi, d'être rassuré sur la qualité de sa garantie.

Le Président (M. Laberge): D'abord, le premier amendement à l'article 453 qui consiste à supprimer les mots "et contre lequel une déclaration de résidence a été enregistrée", dans le premier alinéa, est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Le deuxième alinéa est remplacé, celui que vous avez sur papillon, commençant par "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte". Cet amendement est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): On a déjà discuté de remplacer le deuxième alinéa de l'article 453 par le suivant qui commence par "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte, le conjoint, etc.", est-ce que cet amendement est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. On nous a demandé de supprimer le troisième alinéa. Le nouvel article 453 tel qu'amendé sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec trois amendements. L'article 453.1 sur le papillon sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

M. Blank: Je pense que ça ne donnera pas toute la protection qu'on veut donner.

Pour moi, ce bail, dans un sens, peut être seulement pour une année parce que le nouveau propriétaire peut demander cette résidence pour lui-même suivant la loi.

M. Bédard: Oui, c'est un cas général.

M. Blank: Oui, c'est cela. Le maximum est une année, mais ce peut être même moins d'une année.

M. Bédard: C'est un cas bien spécifique qui est déjà prévu par une loi générale.

Le Président (M. Laberge): L'article 453.1 sera-t-il adopté?

M. Bédard: Adopté. M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 453.2 sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Ceci nous reporte à l'article 458.

M. Bédard: II a été adopté, l'article 458.

Le Président (M. Laberge): C'est une concordance. On nous demande d'ouvrir l'article 458. Pardon. En passant, l'article 454 - grâce aux bons offices de notre secrétaire - avait été discuté et adopté; ensuite, je ne me souviens plus pour quelle raison, il a été suspendu.

M. Bédard: On attendait la déclaration de résidence.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 454 sera adopté?

M. Bédard: Réadopté.

M. Forget: Nous sommes dans la situation où, ne pouvant, encore une fois, nous référer à la transcription des débats, nous sommes un peu dans le vague. Notre mémoire ne nous sert pas toujours aussi bien qu'on le souhaiterait.

Le Président (M. Laberge): Bon. L'article 454 est adopté avec un amendement. L'article 458 était adopté.

M. Bédard: C'est une concordance.

Le Président (M. Laberge): C'est une concordance avec autre chose qu'on a déjà fait; c'est remplacer "à l'accroissement de l'actif" par "à l'enrichissement du patrimoine".

M. Bédard: C'est remplacer la formule "accroissement" par "enrichissement de l'actif".

Le Président (M. Laberge): Cela se trouve à la fin de la troisième ligne et à la quatrième. "À l'accroissement de l'actif" est remplacé par "à l'enrichissement du patrimoine". Si vous êtes d'accord, cet amendement de concordance est adopté.

M. Bédard: C'est la formule qu'on a remplacée.

M. Forget: L'enrichissement.

Le Président (M. Laberge): Oui. On remplace les mots "à l'accroissement de l'actif" par les mots "à l'enrichissement du patrimoine". Adopté. L'article 458 est de nouveau adopté avec amendement. C'était sur division.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce n'est peut-être pas selon les habitudes, mais est-ce que vous permettriez qu'on suspende trois minutes?

M. Bédard: Je n'ai pas d'objection, avec plaisir.

Mme Lavoie-Roux: Là, on a précipité les articles. On s'était posé une question et elle n'a pas été résolue entre nous. Je vous demande la suspension pour seulement trois ou quatre minutes.

M. Bédard: On est allé assez tranquillement. Est-ce sur l'article 454?

Mme Lavoie-Roux: Non. Cela va vous permettre de vous reposer cinq minutes.

Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 44)

(Reprise de la séance à 22 h 47)

M. Forget: La raison pour laquelle nous avons demandé une suspension, c'est qu'il y avait un problème, que nous avons discuté entre nous et que nous avions soulevé au moment du débat original, relativement à 454 qui, juste avant la suspension, venait d'être adopté. C'est la question de la protection de la résidence familiale pour les époux de fait. Nous avions soulevé cette question et il nous apparaît que - encore une fois, je me souviens de ce que nous avions dit à l'époque - il n'y a pas beaucoup de circonstances où nous voulons traiter les époux de fait comme les époux légalement

mariés, mais il y a quand même un certain nombre de cas. Le cas de la protection de la résidence familiale pour les époux de fait qui ont un ou des enfants, c'est un exemple de ça, je pense qu'il y a des considérations d'ordre public qui sont de même nature. Il n'y a pas de raison que les enfants issus d'une union de fait ne bénéficient pas de la même protection, parce que nous avons le sentiment que la résidence familiale est protégée essentiellement pour les familles où il y a des enfants. Il ne nous semble pas que, de façon générale, dans le cas des adultes qui sont sans charge familiale, les changements qui pourraient intervenir au niveau de la résidence puissent créer des occasions ou des causes de séparation ou de divorce, mais ce ne sont pas en soi des catastrophes pour des adultes; quand il y a des enfants, ça l'est. Certainement, quand il y a des enfants, que ce soient des unions de fait ou des unions légales, à notre avis, c'est la même chose.

Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, on le reconnaît dans le reste de la loi.

M. Forget: On le reconnaît à certains moments et, relativement aux enfants, on le reconnaît de façon très ouverte, il n'y a aucune distinction à faire. C'est un cas pratique où la protection des enfants, de leur cadre de vie, etc., devrait nous amener, comme législateurs, à offrir une protection.

Évidemment, comme le projet l'omet entièrement, on pourrait soulever le problème sous n'importe quel article, mais c'est peut-être au moment de la déclaration de fait de 454, où on dit que ça peut être produit par les époux ou l'un d'eux; on pourrait peut-être dire "... pour les fins de cette section - de la résidence familiale - l'expression "les époux" entend également les époux de fait, dans la mesure où il y a des enfants mineurs"; enfin, il y a des définitions qui existent dans le droit québécois, des époux de fait. Il y a des éléments qui sont bien définis. Il y a l'idée de notoriété. Il y a la notion de durée. Il y a ces deux notions, la durée, la notoriété. Il me semble qu'il y a un troisième élément, je dois dire qu'à cette heure-ci je ne me souviens pas du troisième. On pourra se référer, par exemple, à la Loi sur le régime de rentes du Québec et à celle de l'aide sociale également où on a des dispositions analogues. Nous nous permettons d'insister sur ce point. Nous pensons que c'est un point qui mérite attention et qui d'ailleurs a été... Nous reprenons ici des recommandations que le ministre a reçues de la part de certains groupes.

Mme Lavoie-Roux: Je pense d'ailleurs que ceci a été exprimé au moment du discours de deuxième lecture non pas sur la reconnaissance des droits juridiques du mariage aux unions de fait, mais que, les enfants des unions de fait étant une réalité, il fallait prévoir pour eux compte tenu du fait que, dans le chapitre sur l'autorité parentale, on leur reconnaît...

M. Forget: La même autorité que les parents légitimes.

Mme Lavoie-Roux: Oui, ou qu'on leur accorde cette protection.

M. Bédard: Lors de la deuxième lecture, je me rappelle que le chef de l'Opposition lui-même a abordé ce sujet en parlant de la prudence qui était de mise. Au niveau du projet de loi, M. Ryan disait entre autres: Sur l'union de fait, par conséquent, je pense qu'il faut procéder avec beaucoup de prudence. Si les personnes ne veulent pas conférer elles-mêmes un caractère juridique ou légal à leur union, il ne peut être question de le leur imposer de force non plus. Je pense qu'il faudrait laisser cette situation évoluer pendant un certain temps. Nous trouverons peut-être des formes nouvelles d'unions matrimoniales avec le temps, mais je pense qu'on n'inventera pas non plus la machine à cinq roues. Je pense qu'il y a des choses de base qui vont rester et ceux qui ne sont pas prêts à les accepter évolueront progressivement sans doute. Je crois que la prudence était de mise à ce sujet.

M. Forget: II y a plus sur le sujet. Un peu plus loin...

M. Bédard: II a parlé aussi...

M. Forget: C'est cela. Un peu plus loin il a parlé...

M. Bédard: En aucune façon n'y a-t-il une ouverture. On est, à l'heure actuelle, sur un des chapitres principaux qui créent de larges obligations à des couples et à des conjoints, tout le monde, depuis le début de ce projet de loi, considère les implications de la résidence familiale comme étant un chapitre de droit nouveau très important et qui, on le voit, on vient d'en faire l'étude, représente plusieurs obligations. J'avais exprimé au niveau du discours de deuxième lecture le fait que nous n'avions pas réglementé l'union de fait justement par respect de la liberté de choix du mode de vie qui est exercé par certaines personnes qu'il faut respecter. Je pense que c'est un des principes mêmes du projet de loi. Remarquez qu'à l'avenir je suis convaincu que sûrement l'ensemble de cette question pourra revenir à la surface. Cela fait partie de l'évolution, mais j'avais même mentionné, au niveau du discours de deuxième lecture, pourquoi nous n'avions pas abordé l'idée de

réglementer les unions de fait. J'aurais même l'impression d'aborder d'une certaine façon à l'encontre d'un des principes du projet de loi qui a été débattu au niveau de la deuxième lecture. Je crois qu'on a parlé suffisamment de la résidence familiale comme étant un des chapitres importants.

Je me rappelle aussi que lors de la commission parlementaire nous avons eu des représentations, dans le sens de ne pas réglementer l'union de fait, par des groupes aussi différents que la CSN et l'Assemblée des évêques du Québec. C'est assez rare que ces groupes ce rejoignent sur un sujet aussi précis que celui-là. Ce n'est pas par rejet, loin de là, je pense qu'on se comprend de ce côté-là. Il me semble que, de part et d'autre, au niveau de l'Assemblée nationale, s'il y avait eu... Dans ce sens, il faut quand même se référer aux propos tenus lors de la deuxième lecture. Ce n'est pas parce qu'à un moment donné quelqu'un fait une petite ouverture sur quelque possibilité d'aménagement par rapport aux unions de fait qu'on doive penser que la personne a nécessairement ouvert une porte très importante. C'est un des chapitres importants du droit nouveau au niveau du Code civil, on l'a dit à maintes reprises tous ensemble.

C'est dans cet esprit, M. le Président, que je ne croirais pas aller dans le sens du principe fondamental du respect de la liberté de choix des gens d'un certain mode de vie en imposant. Je sais qu'on le fait en fonction des enfants. Il ne faut pas oublier aussi que c'est du monde adulte qui décide à un moment donné de vivre dans l'union de fait. Au départ il faut aussi penser qu'ils ont déjà eu certaines expériences malheureuses, qu'ils ont aussi non seulement le respect mais le souci du bien de leurs enfants. C'est un mode de vie qu'il faut respecter. Comme on l'a dit un peu lors des propos tenus au cours de la deuxième lecture, il y a sûrement encore de l'évolution à faire de ce côté-là.

Le Président (M. Laberge): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je souscris à une bonne partie des propos que le ministre vient de tenir. J'étais moi-même présente aux auditions touchant la révision du Code civil et je me souviens des représentations qui ont été faites dans le sens, justement, de respecter l'union de fait, disant que c'était par choix que les gens choisissaient - je m'excuse de la redondance - de ne pas faire reconnaître leur union par l'institution du mariage. Mais quand on propose ici de se préoccuper uniquement des enfants, je ne crois pas que nous allions contre ce désir des gens pour l'union de fait. C'est une union libre, ils ne veulent pas la consacrer par un geste juridique. Ils pourront se prévaloir de cette déclaration - il me semble en tout cas - de la résidence familiale dans l'intérêt des enfants mineurs, comme le disait le député de Saint-Laurent, ou ne pas s'en prévaloir. Je pense que d'aucune façon ça vient toucher à cet élément d'union libre de deux personnes qui, justement, ne veulent pas consacrer leur union par l'institution du mariage. (23 heures)

M. Bédard: Ce n'est pas impossible, dans le sens théorique du mot. M. Ryan disait, lors de la deuxième lecture: "II me semble qu'il faudrait au moins..." en parlant des unions de fait... Je pense qu'on y met des nuances que vous avez mises d'ailleurs aussi, tout à l'heure.

Mme Lavoie-Roux: On s'entend sur le principe de base.

M. Bédard: II disait ceci: "II me semble qu'il faudrait au moins prévoir la possibilité d'entente entre ces personnes de manière que certaines obligations soient reconnues au moment de la rupture." Ce que je veux dire, c'est que ces ententes qu'évoquait le chef de l'Opposition sont permises à l'heure actuelle. Il y a des empêchements que vous vous rappelez que nous avons laissé tomber qui, à un moment donné, gênaient; entre autres, l'article 768 interdisait certains actes qui, maintenant, seront permis comme à tout autre citoyen. Nous avons donné aux enfants les mêmes droits qu'à n'importe quel enfant, sur un pied d'égalité.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Bédard: II me semble qu'au niveau des conventions, il n'y a rien qui empêche, autrement dit, tout citoyen et toute citoyenne de se prévaloir, je ne dirais pas d'une sorte de modèle, mais d'une sorte de convention qui peut être exactement ce que représente...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lors de ces auditions parlementaires...

M. Bédard: Qui peut être, autrement dit, une protection de leur résidence familiale, mais avec la possibilité aussi d'y ajouter peut-être certaines innovations qu'ils croient devoir y ajouter ou certains assouplissements qu'ils croient devoir y ajouter, comme cela se fait entre citoyens libres, contractuellement parlant.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lors de ces auditions parlementaires, je me souviens de certaines remarques que j'avais faites et qui, d'ailleurs, je pense, avaient été endossées par la députée des Îles-de-la-Madeleine. Je me souviens d'un groupe en particulier qui disait que les unions de fait

étaient une forme de vie librement choisie. On ne veut pas que l'État s'ingère là-dedans. C'était le grand principe de base. C'est celui que vous avez retenu et que plusieurs ont retenu, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, en disant que le mariage et l'union de fait sont deux choses différentes. On n'y accorde pas, dans l'état actuel des choses, la même reconnaissance. Par contre, moi-même et la députée des Îles-de-la-Madeleine nous étions inquiétées des personnes qui, souvent, sont beaucoup plus démunies et qui vivent en union de fait sans avoir nécessairement fait le cheminement. Je me souviens que c'étaient des femmes professionnelles qui étaient devant nous. Elles disaient: C'est le genre de vie qu'on veut vivre et tout cela. Bien des fois, les gens se trouvent mis dans une situation d'union de fait sans avoir fait ce même cheminement théorique, intellectuel ou appelez-le comme vous le voudrez que certaines femmes professionnelles peuvent faire plus facilement ou d'autres femmes qui ont eu plus de "chance" dans la vie. Il y a bien de ces femmes qui vivent en union de fait et qui, le lendemain matin, se retrouvent sur le pavé avec deux, trois enfants ou peut-être même davantage. Celles-là se trouvent absolument sans protection pour leurs enfants. C'est facile, pour deux jeunes professionnels, de dire: Nous, on vit comme cela, et ensuite de planifier toute leur vie en conséquence. Les préoccupations que nous avions exprimées étaient bien davantage à l'égard de ces femmes qui, comme je le dis, se trouvent, par un hasard de circonstances ou parfois des circonstances très difficiles, dans une union de fait qu'elles n'ont pas voulue dans le même sens que d'autres. C'est davantage pour ces femmes que d'autres qui sont, de toute façon, très autonomes et qui ne rencontreront pas les mêmes problèmes, même si elles doivent continuer de faire vivre des enfants qui seraient issus de cette union de fait.

M. Bédard: Pour ajouter un peu d'information sur le sujet et non pas sur l'opportunité de légiférer dans cette matière ou pas, car c'est une question qui ne relève pas de ma compétence - nous avons fait état de cela il y a déjà quelques jours quand nous avons abordé la résidence familiale - il n'y a pas d'étude faite au Québec sur la situation réelle des personnes vivant en union de fait, ni, non plus, sur les motifs qui amènent les personnes à vivre en union de fait, ni, non plus, une sorte de partage par rapport aux motifs.

On peut se référer, cependant, à des études faites à l'étranger. Nous avions, notamment, fait écho à une étude menée il y a quelques années à l'occasion de la réforme en France. Il y a une étude qui a été menée vers les années 1975, en France, sur les motifs qui amenaient les personnes en France à vivre en union de fait. Il s'agissait d'une étude de caractère scientifique. Cela avait donné une typologie qui avait identifié quatre motifs principaux, dont le principal, qui allait chercher 40% des cas d'unions de fait, c'était un concubinage adultérin ou une union de fait adultérine, l'obstacle étant que l'un des conjoints était encore en mariage. Son mariage n'étant ni annulé, ni dissous, il n'avait pas d'autre choix, jusqu'à ce qu'il soit annulé ou dissous, que de vivre dans un état de concubinage, ce qui était appelé concubinage adultérin.

C'est évident que, si on avait à régler un problème de résidence familiale dans un contexte où il y a une femme ou un conjoint légitime qui peut avoir des droits à la résidence et aussi, en même temps, à aménager les droits d'une autre personne en union de fait, d'un concubin, si vous me permettez le mot, il y aurait un conflit de droit. Il faudrait aménager cette situation. Ce sont des choses qui sont possibles, bien sûr, au point de vue de la technique. On peut dire qu'on peut à peu près toujours réussir à aménager toute chose. Mais l'office ne fait pas état dans ses travaux d'études faites de façon scientifique, menées ici même au Québec.

Je pense que cela fait le tour de la question. Il me semble qu'avant d'aller réglementer des gens qui ont librement choisi un certain mode de vie...

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas cela. Ce n'est absolument pas cela.

M. Bédard: Je peux terminer ma phrase au moins, parce que c'est aussi important pour moi que pour n'importe quel membre de la commission. Avant d'aller réglementer, je crois que cela prend une étude globale beaucoup plus approfondie qu'elle ne l'est jusqu'à maintenant, de manière que si, en fonction de l'avenir, un législateur décide d'aborder ce sujet, il le fasse en ayant vraiment toutes les coordonnées de l'ensemble du problème.

M. Forget: M. le Président, je ne veux pas développer longtemps ce point. Nous avons fait connaître notre position. Je voudrais insister à nouveau que nous n'avons aucune espèce de querelle avec le ministre relativement au principe de base. Nous sommes tout à fait d'accord avec lui que de façon générale nous n'avons pas à marier de force les gens. Les gens qui ne veulent pas se marier peuvent très bien rester non mariés. Quant à nous, nous acceptons les implications de leur choix libre avec la plus grande quiétude d'âme et le plus grand plaisir.

Il demeure que, dans la mesure où il y a des enfants, dans la mesure où on prétend

que les enfants dits naturels ont les mêmes droits que les enfants dits légitimes - il faut quand même utiliser les mots; si on veut reconnaître l'égalité de statut, il faut quand même pouvoir les désigner - dans la mesure où on veut leur donner l'égalité de statut, nous avons ici une disposition de la loi qui est, dans le fond, une possibilité qui est offerte aux ménages, aux familles d'obtenir une certaine sécurité dans le contexte de la continuité du cadre physique donné à une famille pour élever des enfants. Nous ne voyons pas de raison de faire une distinction ici. Nous ne voulons pas généraliser toutes sortes de protections et dire qu'il y a une société d'acquêts entre les conjoints de fait, ou Dieu sait quoi qu'on pourrait imaginer, non. Ce sont des adultes consentants, pour reprendre une expression célèbre, et s'ils ont consenti à vivre ensemble, sans être mariés, cela les regarde. Ils n'ont qu'à lire le Code civil, surtout le nouveau, pour constater les obligations auxquelles ils échappent et aussi les avantages auxquels ils renoncent. Mais, dans la mesure où il y a des enfants, nous pensons que, dans des situations de fait...

La résidence familiale ne s'explique pas beaucoup en termes de principe, si vous voulez. Il y a des principes contradictoires. Mais il y a une situation de fait, une sécurité de fait qu'on veut accorder à une famille, à mon avis, dans une large mesure, parce qu'il y a des enfants. On pourrait différer d'avis là-dessus, mais cette protection pour les conjoints de fait qui ont des enfants devrait leur être accessible, parce que prétendre le contraire, c'est tout de suite faire une distinction entre les enfants dits naturels et les enfants illégitimes sous un aspect important qui peut les toucher et qui, encore une fois, ne serait pas du tout imposé. Il faut une déclaration. Il faut une déclaration pour le bail. Il faut une déclaration également pour le cas de la maison qui est détenue en propriété ou l'appartement qui est détenu en propriété.

Donc, s'ils ne souhaitent pas consacrer, même de cette façon minime, leur union de fait, en faisant appel au Code civil, ils ne sont pas obligés de le faire. Ils peuvent laisser tomber cette protection et dire: On n'en veut pas. Mais ceux qui y tiennent et ceux pour qui la relation de fait est établie depuis longtemps et qui a apporté des fruits en termes d'une famille qui compte plus d'un enfant... Je suis sûr qu'il y a des centaines et probablement des milliers de cas au Québec. S'il y en a seulement des milliers aujourd'hui, à regarder ce qui se passe autour de nous depuis quelques années, il y en aura des dizaines de milliers dans quelques années. Je pense que ce n'est pas aux législateurs de demain à régler ce problème. C'est aux législateurs d'aujourd'hui, quelles que soient les réticences qu'on puisse avoir de forcer les gens, encore une fois, à donner des effets juridiques qu'ils ne souhaitent pas, contre leur gré. Mais ce n'est pas le cas ici. C'est purement facultatif.

Je termine là-dessus. Je pense que notre position est claire. Nous voudrions, pour être bien sûr qu'on se fasse comprendre, formuler l'amendement suivant qui aurait pour effet d'ajouter à l'article 454 un deuxième alinéa qui se lirait comme suit: "Les articles de la présente section s'appliquent également aux époux de fait, lorsqu'il y a des enfants mineurs issus de cette union. Dans ce code, sont époux de fait ceux qui, sans être mariés l'un avec l'autre, vivent ensemble ouvertement, comme époux, d'une façon continue et stable." Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Ce serait un troisième alinéa, si je veux bien croire. Il y en a déjà un deuxième d'adopté...

M. Forget: C'est cela. Il y en a déjà un deuxième d'adopté. Ce sera un troisième, je m'excuse.

Le Président (M. Laberge): ...qui a été porté à ma connaissance. À l'article 454, on nous demande d'ajouter un troisième alinéa qui se lit comme suit: "Les articles de la présente section s'appliquent également aux époux de fait, lorsqu'il y a des enfants mineurs issus de cette union." Paragraphe. "Dans ce code, sont époux de fait ceux qui, sans être mariés l'un avec l'autre, vivent ensemble ouvertement, comme époux, d'une façon continue et stable." (23 h 151

M. Bédard: M. le Président, j'ai fait mes remarques. Le domaine est suffisamment complexe. On vient juste de nous dire effectivement que des études approfondies n'ont même pas été faites sur l'ensemble de la situation de ce qu'on appelle les époux de fait. On nous demanderait de légiférer comme cela pour réglementer des gens qui ont fait un choix de vie, avec une définition de l'union de fait qui, à mon sens, mériterait une étude aussi approfondie que celle qu'on a faite sur le mariage, etc. Je ne crois pas que ce serait très indiqué, pour ne pas dire autre chose, d'y aller d'un amendement sur quelque chose d'aussi important surtout, on l'a mentionné tout à l'heure de l'autre côté, que nous sommes d'accord sur l'essentiel de l'analyse de la situation des époux de fait. Je crois que déjà nous avons bien pris la précaution d'enlever toutes les barrières qui existaient et qui empêchaient des époux de fait - pour employer l'expression - de faire des conventions entre eux. On a indiqué tout à l'heure ces éléments des articles qui ont été touchés. Je crois qu'on est en train d'essayer de régler une situation sociale plus complexe, une situation juridique beaucoup plus complexe d'un seul trait de plume

surtout que je me réfère aussi à des remarques faites au niveau de l'ensemble du principe que nous avons discuté lors de la deuxième lecture.

Le Président (M. Laberge): Au point de vue formalité, la motion qui m'a été présentée par M. le député de Saint-Laurent étant en deux paragraphes ou en deux alinéas, je précise que ce sont les troisième et quatrième alinéas.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste ajouter un mot. C'est peut-être davantage une explication des dernières paroles que le ministre vient de dire quand il dit: Et, de plus, je me réfère à des remarques qui ont été faites au cours de la discussion de deuxième lecture. Est-ce qu'il entend par cela les remarques qui ont été faites par le chef de l'Opposition officielle?

M. Bédard: L'ensemble des remarques qui ont été faites est clair et net. Je pense que, quand on fait le tour de tous les discours faits à l'Assemblée nationale, on voit qu'il n'y a eu aucune pression, aucune indication à l'effet qu'un chapitre aussi important que celui de la résidence familiale devait être imposé aux époux de fait, devrait être appliqué aux époux de fait. Je pense que, tout au long du discours de deuxième lecture de tous les intervenants, tout le monde a souligné l'importance de la résidence familiale; cela ne fait pas de doute. À ce moment-là, à l'Assemblée nationale, s'il y avait eu un désir que puisse s'appliquer un tel chapitre à l'union de fait, ceci aurait été évoqué très directement.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste ajouter...

M. Bédard: On arrive ici à...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste ajouter que pour ma part j'ai au moins fait remarquer qu'on devrait se soucier particulièrement d'accorder le plus de protection possible à tous les enfants.

M. Bédard: J'ai eu...

Mme Lavoie-Roux: C'est le sens de l'amendement qui vient d'être fait par le député de Saint-Laurent.

M. Bédard: II me semble que c'était le chapitre le plus important. Si on voulait le dire, on pouvait le dire à l'Assemblée nationale. C'est quelque chose de fondamental. À ce moment-là, on s'y prépare d'une façon correcte. Pour ce qui est du bien des enfants, j'ai déjà évoqué les dispositions qui ont fait que tous les enfants sont sur un pied d'égalité, mais j'ai également évoqué tout au long du projet de loi ce souci des enfants.

M. Blank: Un des principes de cette loi a été aussi discuté en Chambre. Est-ce que l'égalité des enfants... Le principe de la motion du député de Saint-Laurent, c'est l'égalité des enfants. La question de l'union de fait est secondaire dans cette motion; c'est un accessoire. Le principe de cette motion, c'est l'égalité de tous les enfants de la province. Cela a été discuté en deuxième lecture et tout le monde était d'accord.

Mme Lavoie-Roux: Tout le monde s'en est réjoui.

M. Bédard: ... les enfants ont le droit à une pension alimentaire. Ceux qui vont en union de fait, il ne faut quand même pas les prendre pour des irresponsables non plus! Ils ont choisi un mode de vie et ils ont la liberté de se faire toutes les conventions qu'ils veulent. Cela, nous l'avons spécifié, ce n'était pas le cas auparavant; ils peuvent, s'ils le veulent, se prévaloir de toutes les dispositions concernant la résidence familiale. Je crois que c'est le respect intégral de cette liberté qu'ils ont voulu faire valoir. C'est ce qui est ressorti de certains mémoires très importants présentés à la commission parlementaire.

M. Forget: On peut disposer de l'amendement.

Le Président (M. Laberge): Ces amendements, ajoutant un troisième et un quatrième alinéas, sont-ils adoptés?

M. Forget: Je peux demander un vote enregistré?

M. Bédard: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Oui, vous en avez le droit.

Je répète l'amendement pour plus de clarté. Troisième alinéa: "Les articles de la présente section s'appliquent également aux époux de fait lorsqu'il y a des enfants mineurs issus de cette union."

Quatrième alinéa: "Dans ce code, sont époux de fait ceux qui, sans être mariés l'un avec l'autre, vivent ensemble ouvertement comme époux d'une façon continue et stable."

J'appelle le vote. Que ceux et celles qui sont pour ou contre cette motion me l'indiquent. M. Bédard (Chicoutimi).

M. Bédard: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Blank (Saint-Louis).

M. Blank: Pour.

Le Président (M. Laberge): M. Ouellette (Beauce-Nord). M. Bertrand (Vanier). M. Fontaine (Nicolet-Yamaska). M. Forget (Saint-Laurent).

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Laberge): M. Guay (Taschereau). M. Gosselin.

M. Gosselin: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Marquis (Matapédia).

M. Marquis: Contre.

Le Président (M. Laberge): Cela complète les membres. L'amendement est rejeté trois voix contre deux. Pour, deux; contre, trois.

M. Guay: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Cela va. J'ajoute un vote contre, sans commentaires. Cet amendement est rejeté et l'article 454 étant déjà adopté, il n'y a pas de modification. L'article 454 est adopté avec un amendement.

Maintenant, si on continue, on avait laissé en suspens l'article 473 pour une correction. On nous demande d'ajouter, après le mot "donner", les mots "par le notaire instrumentant". L'amendement est adopté. L'article 473 amendé est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.

Mme Lavoie-Roux: L'article 473?

Le Président (M. Laberge): L'article 473.

Mme Lavoie-Roux: Mon Dieu, ça va vite!

Le Président (M. Laberge): Les autres étaient adoptés déjà. À l'article 477, on avait une suspension.

M. Bédard: C'était "sauf stipulation expresse au contraire". On en est venu à la conclusion de l'enlever, je pense.

Le Président (M. Laberge): Bon. À l'article 477...

M. Bédard: Une seconde, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): L'article 477 était suspendu et on nous demande maintenant de considérer une nouvelle rédaction qui se lit comme suit: "L'époux qui a eu l'administration des biens de son conjoint est comptable même des fruits qui ont été consommés avant qu'il n'ait été mis en demeure de rendre compte."

M. Forget: M. le Président, on s'excuse, mais il y aurait peut-être une concordance à apporter à l'article 458, conformément à ce qui a été fait ce matin ou cet après-midi, je ne me souviens plus trop, dans les effets du divorce quand on parle de l'apport d'un des conjoints à l'enrichissement. Nous avions spécifié cet après-midi l'apport en...

Mme Lavoie-Roux: Biens et services. M. Bédard: Biens et services. M. Forget: ... biens ou services.

M. Bédard: Entre parenthèses, oui, d'accord.

Le Président (M. Laberge): C'est à l'article 477?

M. Forget: Article 458.

M. Bédard: Ici, pour ce qui est de la précision que nous avons apportée, l'apport en biens ou services, si je me souviens bien, doit être rattaché - parce que ce sont tous des articles de référence - à l'article 554 du divorce et à l'article 735.1 du livre sur les successions. Dans les autres cas, c'est toujours par voie de référence.

A 555, nous l'avons inséré, cet après-midi, dans "biens ou services", il faudra le placer aussi à propos du décès, vu que ça n'a pas été fait.

M. Forget: Ah, oui.

M. Bédard: Dans ces deux articles, qui sont les articles de référence, ça va s'y trouver. Dans les autres, c'est simplement de renvoi, de sorte qu'à 458, comme dans le cas de la nullité de mariage, comme aussi dans le cas de la séparation de corps, ça n'a pas besoin d'être repris, c'est par renvoi à l'article principal. En d'autres termes, c'est toujours la même règle qui s'applique, sauf que...

M. Forget: Mais le renvoi n'est pas explicite?

M. Bédard: II l'est par les premières lignes: "En cas de dissolution ou d'annulation de mariage, le tribunal...", donc il faut aller voir à la dissolution ou l'annulation de mariage; cela nous amène au divorce et ça nous amène à la nullité, la nullité nous

renvoie au divorce à ce moment. Pour ce qui est de la séparation de corps également, ça nous renvoie au divorce, de sorte que les trois hypothèses majeures sont retrouvées là. Par ailleurs, il faudra penser, à 735.1 du Code civil, de l'inclure cependant, dans les successions; il ne faudrait pas l'oublier.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Alors, il n'y a pas d'amendement à 458.

L'article 473 ayant été modifié, il y a une nouvelle rédaction à 477 dont j'ai donné lecture. Ce nouvel article 477 sera-t-il adopté?

M. Bédard: Avez-vous le nouvel article? M. Forget: Oui.

Le Président (M. Laberge): II n'y a pas de mot è ajouter?

M. Bédard: Non.

Le Président: (M. Laberge): La nouvelle rédaction de l'article 477 est adoptée.

M. Forget: Cette règle de comptabilité envers l'autre conjoint ou ses ayants droit, c'est la gestion de l'homme prudent et raisonnable, bon père de famille; je pense qu'on va substituer une autre expression ou est-ce déjà fait? Je ne me souviens trop.

M. Bédard: II y aura toujours le cas fortuit, mais, en termes d'administration, c'est la règle courante.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Cela complète cette section. Maintenant je pense qu'on se reporte à 554. Non, c'est déjà fait.

M. Bédard: Je pense qu'on comprendra qu'au chapitre de la séparation de corps et du divorce, comme nous en avons discuté d'une façon spéciale aujourd'hui, pour ce qui est des amendements, ce sera demain...

M. Forget: Oui, ce sera demain, d'accord.

M. Bédard: ... pour qu'on ait le temps de bien approfondir les grandes réflexions que nous avons eues.

Le Président (M. Laberge): À moins que je ne fasse erreur, 524...

M. Forget: Non, c'est ce que le ministre dit, on fera ça demain.

M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Laberge): Bon, parfait.

M. Forget: II faut sauter toute la section du divorce.

M. Bédard: Tous ceux qui sont dans le même ordre à peu près.

M. Forget: À l'article 569, il n'y a rien de suspendu, pour l'instant, du moins. À l'article 580...

M. Bédard: À aller jusqu'à la séparation de corps, c'est réglé. C'est ça?

M. Forget: Oui.

M. Bédard: À aller jusqu'à 523, c'est réglé?

M. Forget: C'est réglé.

M. Bédard: On recommencerait à...

M. Forget: À l'article 569.

M. Bédard: ... l'article 569 concernant la filiation. A la filiation il y avait un article suspendu, je pense, qui était 583. (23 h 30)

Le Président (M. Laberge): L'article 583 est ouvert. Est-ce qu'on a un amendement à l'article 583? Article 583, il n'y avait pas d'amendement.

M. Bédard: II n'y avait pas d'amendement.

Le Président (M. Laberge): C'est simplement qu'il était ouvert. Est-ce que l'article 583 sera adopté?

M. Forget: J'ai des notes ici. On avait soulevé la possibilité que, conformément aux recommandations de l'Office de révision du Code civil, l'article 281 soit retenu, c'est-à-dire que lorsque l'insémination artificielle a lieu des oeuvres d'un tiers, ce dernier ne puisse en aucun cas revendiquer la paternité de l'enfant. Je pense que c'était le problème qui était soulevé.

M. Bédard: C'est en relation avec l'article 585 où on disait: "Toutefois, nul ne peut contester la filiation d'une personne pour le motif qu'elle a été conçue par insémination artificielle." Vous vous rappelez la discussion, on se demandait si, à ce moment, la disposition du deuxième alinéa de l'article 585 suffisait pour couvrir justement le danger éventuel que l'auteur des oeuvres puisse réclamer. Il semble que cela couvre.

Je pense que le seul problème de l'article 585 sans 583, c'est que cela pourrait quand même susciter d'autres types de problèmes. Disons qu'on peut penser au mari

qui n'aurait pas consenti et qui se trouverait dans l'impossibilité de contester sa paternité, parce qu'à ce moment lui aurait la présomption qui jouerait en sa faveur. Il me semble que les deux articles sont quand même étroitement liés, ou du moins se complètent, et qu'en enlever un sans enlever l'autre...

Du consentement des époux. S'il n'y a pas consenti, il faut quand même que le mari garde le droit d'invoquer... Cela va?

M. Forget: C'est cela. C'était l'utilité même de 583 qui avait été mise en doute étant donné 585. D'accord. Adopté.

Le Président (M. Laberge): Article 583, adopté.

M. Forget: À l'article 587, nous avions suggéré que la version anglaise soit vérifiée. Malheureusement, je n'ai pas le texte anglais. C'est cela.

M. Bédard: Là, on s'en va à 591. C'est dans le texte anglais qu'on donnait l'assurance qu'il y aurait...

Le Président (M. Laberge): Que la concordance serait faite.

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): Ou la correction. L'article 597 avait été adopté avec amendement, cependant, on a porté à ma connaissance une demande de rouvrir pour ajouter à la fin du premier alinéa ce qui suit.

M. Forget: Est-ce qu'on les a, ces amendements?

Le Président (M. Laberge): J'en ai une copie additionnelle ici. Je pense que vous les avez eus.

M. Forget: Je les ai peut-être eus, mais je ne les trouve pas.

Le Président (M. Laberge): A la fin du premier alinéa, ce qui veut dire après la correction, on avait biffé tous les mots après "dix ans". Cela a déjà été adopté. Là on nous demande de remplacer le point après le mot "ans" par une virgule et d'ajouter "à moins que ce dernier ne soit dans l'impossibilité de manifester sa volonté." Est-ce que cet amendement sera adopté?

M. Forget: Adopté. M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 597 amendé de nouveau est adopté.

M. Bédard: Adopté.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président...

Le Président (M. Laberge): Oui.

Mme Lavoie-Roux: II me semblait qu'on avait fait exprimer une préoccupation pour l'enfant...

M. Bédard: Oui, c'est à la suite de cette préoccupation que vous aviez évoquée...

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais pour l'enfant de moins de dix ans. Actuellement, vous nous parlez seulement de l'enfant d'au moins dix ans.

M. Bédard: L'article 31 qui vient plus tard. À l'article 2 du projet...

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Après l'adoption de l'article 597, je vous reporte à l'article 603 qui a été laissé en suspens et auquel on a suggéré une série de modifications. D'abord, ajouter après l'article 602 le suivant: " 602.1. Le consentement à l'adoption peut être général ou spécial; s'il est spécial, il ne peut être donné qu'en faveur d'un descendant de l'enfant d'un parent en ligne collatérale jusqu'au troisième degré ou du conjoint de cet ascendant ou parent."

Mme Lavoie-Roux: Dans le journal des Débats, il faudrait dire: En faveur d'un ascendant. Vous avez dit "descendant".

Le Président (M. Laberge): A la fin?

M. Forget: Non, au milieu. En faveur d'un ascendant.

Le Président (M. Laberge): Ah! D'un ascendant de l'enfant. J'avais dit "descendant"?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Laberge): Avec l'heure! Je vous remercie. Est-ce que cet article 602.1 est adopté?

M. Bédard: Adopté.

M. Forget: Si je comprends bien, M. le Président...

M. Bédard: Vous en aviez parlé.

M. Forget: Oui, j'en avais parlé, je suis content qu'on introduise cette notion d'un consentement spécial, mais je veux bien qu'il

soit clair. Le consentement spécial ne peut pas s'adresser à une adoption par un étranger. Ça doit être une personne qui est apparentée ou alors le conjoint. Il n'est pas question de céder pour adoption à une personne X. Est-ce que je le lis bien?" Un ascendant, un parent en ligne collatérale jusqu'au troisième degré, un conjoint de cet ascendant ou parent". C'est ça.

M. Bédard: Ça le lie...

M. Forget: À cette catégorie-là de personnes.

M. Bédard: ... le consanguin.

M. Forget: Est-ce qu'il y a véritablement des raisons d'ordre public qui font qu'un consentement spécial ne peut pas être donné en faveur d'un étranger, en quelque sorte?

M. Bédard: Dans ce cas-là, on a compris que l'adoption passerait par le directeur de la protection.

M. Forget: Enfin, c'est évidemment ce qui va se passer, mais je pose la question. Je ne me souviens pas d'avoir fait cette restriction-là moi-même, mais je serais prêt à accepter un raisonnement qui me démontrerait qu'il n'est pas dans l'ordre public de permettre à des parents de dire: Nous consentons à l'adoption pourvu que l'adoptant soit M. Untel et Mme Unetelle que nous connaissons.

Je suis prêt à être convaincu que ça ne devrait pas être le cas, mais a priori je ne vois pas nécessairement la nécessité de cette restriction à une catégorie déterminée, quoique je me réjouisse que l'on permette un consentement spécial.

Est-ce que le ministre a des réflexions à nous communiquer là-dessus ou si on a mal compris ce que nous avions demandé et qu'on a cherché à se conformer à ce qu'on a cru que nous avions demandé? Je voudrais bien qu'on se comprenne, qu'il n'y ait pas une confusion parce que la communication a été imparfaite.

M. Bédard: La perspective dans laquelle nous nous sommes placés pour formuler l'amendement que vous avez a été de partir des derniers amendements qui ont été apportés à la Loi sur l'adoption l'automne dernier et qui déterminaient quelles sont les personnes, quels sont les consanguins qui peuvent adopter un enfant sans passer par le directeur de la protection de la jeunesse. Il s'agit d'un cercle de consanguins, donc, de la famille.

Cela assure aussi une certaine concordance ou cohérence avec l'article 606.1 qui énumère ces mêmes personnes comme étant celles qui peuvent demander une déclaration judiciaire d'adoptabilité. C'est le cercle familial.

M. Forget: Enfin! J'ai des réserves, mais je ne sais pas si je veux les poursuivre à cette heure-ci. Je dois vous avouer que la fatigue a raison des meilleurs arguments. Bon! D'accord.

Le Président (M. Laberge): L'article 602.1 est-il adopté?

M. Forget: 602.1 adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Deuxièmement, on nous demande à l'article 603 d'ajouter après "de plein droit" les mots ", jusqu'à l'ordonnance de placement,". Oui, c'est cela, c'est à 603.

M. Bédard: Pour qu'il n'y ait pas de vide là.

Le Président (M. Laberge): Oui, cela avait été discuté. Les mots sont après "de plein droit", à la fin de la première ligne. Il faudrait ajouter...

M. Bédard: Pour qu'il n'y ait pas de discontinuité ou de vide concernant l'autorité parentale. On avait évoqué que c'était peut-être mieux d'être encore plus spécifique.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Laberge): L'article 603 se lira, jusque là... Il y aura d'autres mots supprimés. Cet amendement, c'est-à-dire ", jusqu'à l'ordonnance de placement," est adopté. Et ensuite on nous demande à la fin de supprimer les mots "en vue du placement pour adoption". Je vais relire l'article au complet pour une bonne compréhension. L'article 603 se lira: "Le consentement à l'adoption entraîne de plein droit, jusqu'à l'ordonnance de placement, délégation de l'autorité parentale à la personne à qui l'enfant est remis." Est-ce que cela va?

M. Forget: Oui, cela va. Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Cela va. L'article 603 modifié est adopté avec amendement.

Maintenant, nous allons à l'article 606.1. Le papillon que nous avons ici, il y en avait eu un porté à notre attention, mais on nous demande de le corriger pour une nouvelle rédaction. Article 606.1: "La demande en déclaration d'adoptabilité ne peut être présentée que par un ascendant de l'enfant, un parent en ligne collatérale jusqu'au troisième degré, le conjoint de cet ascendant ou parent, par l'enfant lui-même

s'il est âgé de quatorze ans ou par un directeur de la protection de la jeunesse."

M. Bédard: C'est à la requête de l'Opposition qu'on répète textuellement, qu'on prévoit l'enfant de quatorze ans. Cela inclut l'enfant de quatorze ans.

Le Président (M. Laberge): C'est cela. Cela prévoit l'enfant. Cela inclut l'enfant de quatorze ans.

M. Bédard: Cela va?

M. Forget: Oui, je pense que c'est correct.

M. Bédard: Cela va?

Le Président (M. Laberge): L'article 606.1 sera-t-il adopté?

M. Forget: Oui, adopté. (23 h 45)

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 607 était suspendu, ouvert. Nous avons une nouvelle rédaction. Je ne sais pas si elle comprend les mots qu'on a déjà adoptés. De toute façon, c'est ce qui avait été fait, étant donné que cela avait été laissé ouvert. On le remplace par un nouvel article qui se lit comme suit: "L'enfant ne peut être déclaré adoptable que s'il est improbable que son père, sa mère ou son tuteur en reprenne la garde et en assume le soin, l'entretien ou l'éducation. Cette improbabilité est présumée."

M. Forget: Je suis d'accord. La discussion que nous avions eue, c'était que c'était inacceptable d'avoir cette réserve de présomption d'improbabilité, de manière que le fardeau de la preuve soit placé carrément sur ceux qui s'opposent à la libération pour adoption dans les circonstances qui sont mentionnées. Les objections que j'avais formulées à la rédaction demeurent. C'est une espèce de double négatif, s'il est improbable que son père ne s'en occupe pas. Ce que l'on veut dire, c'est que, dans le fond, l'enfant est déclaré adoptable s'il est probable que son...

Le Président (M. Laberge): improbable que son père s'en occupe.

M. Forget: C'est cela. M. le Président, j'implore votre indulgence. Il faudrait vraiment que je le réexamine pour pouvoir reformuler cette difficulté dont je me souviens, mais de façon cohérente.

M. Bédard: Nous implorons aussi votre indulgence. Nous avons retourné la phrase un peu dans tous les sens. Nous avons cru quand même qu'on levait une partie de vos objections en ne disant plus que le tribunal s'assure. C'était un des points que vous aviez soulevés, de voir qu'il était très choquant que le tribunal devait s'assurer de quelque chose et qu'ensuite, on lui disait que, de toute façon, c'était présumé. Je pense que nous avons réussi à lever au moins cette partie de vos objections.

M. Forget: Oui. Vous avez raison. Je pense que cela élimine une des difficultés majeures, effectivement. Cela élimine la difficulté majeure.

Le Président (M. Laberge): L'article 607 est remplacé et...

M. Forget: D'accord. Je pense qu'en enlevant le mot "assurer" qu'une chose existe, alors que le même article dit que c'est présumé, c'est plus acceptable.

Le Président (M. Laberge): La nouvelle rédaction de l'article 607 est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 609. À l'article 609 que nous avons suspendu, on nous demande d'ajouter un alinéa qui se lit comme suit: "Ce délai peut toutefois être réduit d'une période n'excédant pas trois mois, en prenant notamment en considération le temps pendant lequel le mineur aurait déjà vécu avec l'adoptant, antérieurement à l'ordonnance."

M. Bédard: Cela rejoignait la préoccupation des enfants qui sont déjà en famille d'accueil depuis un certain temps. On n'a pas besoin de leur imposer un délai.

Mme Lavoie-Roux: Au lieu de six mois, c'est trois mois?

M. Forget: C'est trois mois quand cela fait déjà des années qu'ils sont dans la même famille.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela. On réduit le délai de six mois à trois mois quand il a déjà vécu avec la famille...

M. Forget: Adoptante.

Mme Lavoie-Roux: Adoptante. D'accord.

M. Bédard: C'est cela, et que la preuve s'est faite d'elle-même de l'acceptabilité.

Le Président (M. Laberge): L'amendement consistant à ajouter un deuxième alinéa est adopté. L'article 609 est adopté avec amendement.

À l'article 611 qui était ouvert, on nous demande de supprimer les mots "vérifie

les qualités et les aptitudes de l'adoptant," après le mot "tribunal", à la deuxième ligne. Est-ce que cet amendement sera adopté?

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux! Comme je n'étais pas ici, que j'avais dû quitter une heure et demie plus tôt ce soir-là, est-ce que c'est parce qu'il est compris dans les mots "s'assure que les conditions d'adoption ont été remplies" et que cela devenait un peu redondant de laisser la vérification des qualités et aptitudes de l'adoptant?

M. Forget: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: C'était cela, l'idée?

M. Forget: Essentiellement, je pense.

Mme Lavoie-Roux: II reste qu'il faut quand même... Il sera prévu dans le...

M. Bédard: Cela n'impose pas l'obligation de refaire une vérification.

Mme Lavoie-Roux: Ce que vous appelez les conditions de l'adoption, on y pourvoira dans la loi administrative sur l'adoption. Est-ce cela qu'il faut que je comprenne? On est à préparer, on m'a dit, une nouvelle loi...

M. Bédard: On voulait éviter, en l'adoptant, d'avoir toujours à remonter dans des clauses...

C'est un peu dans la même perspective, d'éviter que l'adoptant ait toujours à établir que c'est un bon adoptant, qu'il a des qualités, comme s'il ne les avait pas.

Mme Lavoie-Roux: Moi, je veux bien qu'il ne soit pas obligé de le faire trois fois, mais je veux qu'il le fasse au moins une fois.

M. Bédard: Mais positivement. C'est prévu. C'est à suite de représentations.

M. Forget: Ce n'est pas dans un autre esprit. L'esprit dans lequel l'objection avait été formulée, ce n'était pas qu'il ne devait pas y avoir de vérification, essentiellement, des qualités et des aptitudes de l'adoptant, mais, si c'est formulé comme cela, cela suppose presque qu'il y a une présomption que toute demande d'adoption est formulée par des gens qui n'ont pas de qualités et d'aptitudes suffisantes et qu'ils ont, eux, à faire la preuve de leurs aptitudes, alors qu'effectivement ce n'est pas comme cela que ça se passe. Ce sont des évaluations d'experts qui viennent démontrer devant certaines demandes que certaines personnes n'ont pas les qualités et les aptitudes, parce que, bien sûr, on ne peut pas faire la preuve que l'on n'a pas de défauts. On peut simplement répondre à une accusation à l'effet que le mode de vie qu'on a, etc., n'est pas approprié. Alors, le fardeau de la preuve est un peu différent, de cette façon, et il est plus approprié, étant donné que ce sont des professionnels qui doivent susciter des doutes et des questions et non pas les requérants qui doivent faire la preuve de la perfection, ce qui est, par définition, une preuve impossible à faire.

Mme Lavoie-Roux: On fait cela dans la...

M. Forget: Au moment de l'ordonnance de placement.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Forget: Ce qui est le moment où on confie l'enfant à la famille.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement, consistant à supprimer les mots "vérifie les qualités et aptitudes de l'adoptant," est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 611, adopté avec amendement.

M. Bédard: Ensuite, quel article?

Le Président (M. Laberge): Nous allons à l'article 615. L'article 615 était suspendu.

M. Bédard: C'est dans la même ligne de préoccupation. Avez-vous l'amendement?

Le Président (M. Laberge): Oui, je l'ai ici. On remplace l'article au complet, donc il y a une nouvelle rédaction. On nous demande de remplacer l'article 615 par le suivant: Le tribunal prononce l'adoption sur la demande que lui en font les adoptants, à moins qu'un rapport n'indique que l'enfant ne s'est pas adapté à sa famille adoptive; en ce cas ou chaque fois que l'intérêt de l'enfant le commande, le tribunal peut requérir toute autre preuve qu'il estime nécessaire. Est-ce qu'il devrait avoir une virgule après "cas"?

M. Bédard: "en ce cas", virgule? Je ne pense pas.

Le Président (M. Laberge): C'est superflu. Cela va.

M. Bédard: L'amendement à l'article 615, c'est la continuation de la préoccupation qu'on ne demande pas à tous les stades à la famille adoptante de toujours avoir le fardeau de la preuve. Autrement dit...

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec cela. C'est clair.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Laberge): Le nouvel article 615, adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. Cela règle le cas de cette série d'amendements. On nous demande à...

M. Blank: Est-ce qu'on a fini avec cet article?

M. Bédard: Non, il me reste un ou deux articles, je crois.

Le Président (M. Laberge): II en reste un. À l'article 616.1, il y a un papillon qu'on a ajouté avant-hier. On nous demande de biffer le mot "patronymique" à la deuxième ligne.

M. Bédard: Cela ne demande pas une longue discussion.

Le Président (M. Laberge): Je pense que non. Alors, adopté.

M. Bédard: On va mettre "matronymique".

Mme Lavoie-Roux: Non plus.

M. Forget: M. le Président, est-ce qu'on pourrait... À cette heure-ci...

M. Bédard: Oui, je crois, mais on peut voir où cela nous mène. Nous serons rendus...

Le Président (M. Laberge): Je pense qu'on était rendu à l'article 632.

M. Blank: Est-ce que je peux poser une question avant l'ajournement? Juste une question à laquelle on a déjà peut-être répondu.

On parle "de tribunal" dans ce chapitre. De quel tribunal parle-t-on?

M. Bédard: C'est la Loi sur les tribunaux judiciaires qui donne compétence au Tribunal de la jeunesse en matière d'adoption.

M. Blank: Je constate, dans la loi actuelle sur l'adoption, qu'on donne une définition de "tribunal".

M. Bédard: En fait, il y en a une actuellement dans la Loi sur les tribunaux judiciaires, l'ancien article 106 renuméroté qui prévoit spécifiquement que le Tribunal de la jeunesse a la compétence exclusive en matière d'adoption. Or, on n'a pas cru nécessaire de le répéter ici.

M. Blank: Dans la loi actuelle...

M. Bédard: Le code de procédure le mentionne aussi.

Le Président (M. Laberge): 32, 33.

M. Blank: ...ou non.

M. Bédard: Nous avons bien travaillé.

Le Président (M. Laberge): Ceci termine un chapitre. Nous reprendrons nos travaux au chapitre de l'obligation alimentaire, à moins qu'on nous indique de revenir à l'article 524.

M. Bédard: On terminera cela.

Le Président (M. Laberge): C'est cela.

Sur ce, mesdames et messieurs, la commission parlementaire de la justice ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 57)

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