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(Quatorze heures trente minutes)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames,
messieurs.
La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux concernant
le projet de loi no 89, Loi instituant un nouveau Code civil et portant
réforme du droit de la famille.
Les membres de la commission pour aujourd'hui sont: M. Bédard
(Chicoutimi), M. Blank (Saint-Louis), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M.
Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Forget
(Saint-Laurent), M. Guay (Taschereau); Mme LeBlanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine) remplacée par M. Gosselin (Sherbrooke); M.
Marquis (Matapédia). Sont inscrits à titre d'intervenants: M.
Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Desbiens (Dubuc), M. Lacoste (Sainte-Anne); M.
Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplacé par M. Marx (D'Arcy McGee); M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski) et M.
Pagé (Portneuf) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie). Le
rapporteur de la commission a déjà été
désigné, c'est Mme LeBlanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine).
Ce matin, contrairement à l'ordre du leader de la Chambre, nous
n'avons pu siéger de 11 h 30 à 13 heures à cause d'une
panne d'électricité qui empêchait la transcription des
débats. Nous avons décidé de commencer à
siéger à 14 h 30. C'est pourquoi nous nous apprêtons
à commencer nos travaux jusqu'à 18 heures et nous reprendrons de
20 heures à 24 heures, selon les ordres de la Chambre.
Hier, nous avions fait une discussion sur l'article 551 que nous avions
suspendu à la fin de nos travaux pour compléter les
documents.
Chapitre troisième Des effets du divorce
(suite)
M. Bédard: II s'agissait, suite à certaines
représentations qui avaient été faites, de se poser la
question ou de donner les explications nécessaires suite à la
décision prise de le supprimer. Effectivement, l'article proposé
ne conserve pas le jugement conditionnel de divorce et soumet le jugement de
divorce à la règle de principe du Code de procédure civile
en matière de jugement. Il paraît, d'ailleurs,
préférable de laisser au Code de procédure civile le soin
de dire quand les jugements produisent leur effet et de supprimer l'article
551. Je demanderais que M. Guy ajoute quelques propos pour compléter les
explications.
Peut-être une première explication: c'est la règle
générale de tous les jugements qui sont sujets à appel,
qu'ils ne seront pas sujets à exécution dans les 30 jours. Chez
nous, nous avons l'habitude de nous procurer le certificat de non-appel dans le
cas de tous les jugements appelables de façon à avoir la
certitude que le comportement qu'on aura à l'égard de ces
jugements sera un comportement qui tiendra le jugement pour définitif.
C'est l'habitude qu'on a chez nous. C'est la règle
générale du Code de procédure civile aux articles 494 et
suivants. Il n'y a rien de nouveau là en ce qui concerne la règle
générale.
Je comprends que pour les gens qui sont à l'étranger et
qui voudraient savoir si le jugement est définitif, c'est comme dans
tous les cas, il faut s'assurer de l'état du droit qui a permis
l'émission de ce jugement.
Pour ce qui est de l'autre point qui a été soulevé,
puisqu'on a dit que ce jugement remplacera le jugement conditionnel et le
jugement définitif - à l'heure actuelle on sait qu'en
matière de divorce il y a d'abord un jugement conditionnel et que,
quelques mois après, trois mois après, il y a un jugement
définitif - mais, là, c'est une autre question qui appelle
peut-être certaines explications que M. Bisson pourrait fournir.
C'est une autre question, c'est surtout une autre technique. Je pense
que, sans vouloir diminuer les mérites de ces techniques, c'est une
technique extrêmement complexe et, ce qui est en usage surtout, ce sont
ce qu'on appelle les décrets nisi de l'accommodement. Je pense que c'est
une technique extrêmement compliquée et qui n'apporte pas
d'avantages très décisifs. Je dois dire que, dans la pratique de
la Loi sur le divorce actuelle, cette règle a soulevé beaucoup
plus de questions qu'elle n'en a résolu. Il y a toute une jurisprudence
extrêmement complexe à ce sujet. Et, dans la mesure où nous
avons cette procédure de certificat de non-appel qui, je pense, permet
d'assurer le sérieux de la question, je ne vois pas tellement
l'intérêt de maintenir dans
notre droit cette procédure qui, tout en ayant certainement ses
mérites à l'intérieur d'un autre système de droit,
est plutôt perturbatrice dans le système de droit civil du
Québec. Le Code de procédure civile, peut, encore une fois,
régler de façon précise et détaillée
certaines mentions que devrait contenir le jugement et préciser les
modalités d'application et de mise en oeuvre du jugement.
M. Marx: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: ...j'ai toujours pensé que l'idée d'avoir
un jugement conditionnel et un jugement final, c'est pour donner aux parties
une période de trois mois pour se reprendre, le cas
échéant. Il y a un jugement, mais ce n'est pas final, ils ont
encore trois mois pour repenser à leur affaire. Je sais qu'il y a une
jurisprudence en ce qui concerne les décrets nisi. Cela a causé
peut-être un certain nombre de problèmes, mais peut-être
peut-on contourner cette jurisprudence par une disposition plus claire, le cas
échéant. Est-ce que ce ne serait pas utile de garder la
disposition du droit fédéral en matière de divorce pour
donner aux gens une période de réflexion avant que tout soit
final et qu'on ne puisse plus se reprendre?
M. Bédard: Oui, mais je dois dire à ce sujet que la
pratique n'a pas révélé que cette période de
refroidissement - pour faire une traduction littérale - avait servi
à grand-chose. Vraiment, je pense que cela n'a pas eu un succès
pratique très considérable, à ma connaissance. J'ai quand
même lu plusieurs centaines de jugements en matière de divorce et
rien n'a révélé dans la pratique que cela ait servi
à grand-chose.
M. Marx: C'est bien sûr que ce n'est pas dans les jugements
qu'on voit cela. On voit cela dans les faits. Il faut relever combien - je
pense que c'est un travail difficile - d'époux ont repris entre le
jugement conditionnel et le jugement final. Mais c'est une décision que
le ministre doit prendre s'il veut bien continuer la disposition qui se trouve
dans la loi fédérale sur le divorce ou s'il veut changer...
M. Bédard: II y a quand même un délai d'un
mois par la force des choses. Les explications que nous donne...
M. Marx: II n'y a pas de délai d'un mois, maintenant. Il y
a un délai d'un mois pour faire appel. Mais le mariage est
terminé dès qu'on reçoit le jugement. On ne peut pas
revenir en arrière. On ne peut pas se reprendre, parce qu'il n'y a pas
de "cooling off period", comme dans la loi fédérale; ce n'est pas
la même chose.
M. Bédard: C'est l'exécution qui est suspendue.
M. Marx: C'est cela, mais on ne peut pas revenir après un
mois et dire: On aimerait encore que le mariage continue, ce qu'on peut faire
maintenant en vertu de la loi fédérale. Il y a une
différence importante. Je trouve qu'il ne serait pas mauvais d'avoir un
jugement conditionnel et un jugement final, mais c'est à vous de
décider, M. le ministre.
M. Bédard: Je vais plutôt y aller à l'article
551, dans le sens de ce qui m'est conseillé. D'accord?
M. Marx: Juste une autre question. Dans d'autres juridictions,
surtout aux États-Unis, est-ce qu'on a des jugements conditionnels et
finals?
M. Bédard: Je ne saurais le dire.
M. Marx: Aux États-Unis, on a beaucoup d'expérience
avec le divorce, étant donné qu'il y a 50 juridictions et 50 lois
sur le divorce.
M. Bédard: II faut rappeler qu'aussi bien à
l'article 539 qu'aux articles 547 et suivants du projet il y a beaucoup
d'ouvertures pour ce qui est des ajournements possibles pendant toute la
durée d'une instance. Dès que le tribunal voit la
possibilité d'une réconciliation des époux ou
évalue quelque chance de réconciliation, les ajournements sont
rendus très souples et assez faciles, de façon qu'ils s'assurent
jusqu'à la fin de la réalité du consentement de divorce
jusqu'à l'extrême limite, de sorte que le délai de
réflexion est peut-être en partie inclus dans ces
possibilités d'ajournement aussi. On indique même que cela
peut-être un motif pour le tribunal d'ajourner.
M. Marx: Je l'ai remarqué. Si on supprime l'idée
d'avoir un jugement final, il n'y a pas de période de réflexion
entre le jugement qui déclare que les personnes sont divorcées et
l'événement final, si on peut dire. D'accord.
M. Bédard: Je n'ai pas d'autres
représentations.
Le Président (M. Laberge): L'idée de l'article 551,
je n'ai plus de papillon, c'est enlevé. On nous proposait de biffer
l'article 551. Est-ce que cette proposition sera adoptée?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Donc, l'article
551 est biffé. Article 552?
Des effets du divorce à l'égard des
époux
M. Forget: M. le Président, avant d'aborder l'article 552,
me serait-il permis de faire une remarque relativement à
l'intitulé de la section I, très brièvement? Je pense que,
pour des raisons qui deviendront évidentes - parce que je n'ai pas
l'intention de faire tout le débat - relativement à ces articles
seulement, il y aurait avantage, pour lui donner plus de clarté,
à ce que la section I porte un titre analogue à - peut-être
pas nécessairement celui-là - Des effets du divorce à
l'égard des conséquences patrimoniales du mariage ou quelque
chose comme ça et que cette section englobe les trois articles
subséquents, 552, 553 et 554, ainsi que 555; qu'il y ait une section II
qui soit intitulée Des effets du divorce à l'égard des
époux et qu'il y ait finalement une section...
M. Bédard: À l'égard des tiers ou des
enfants?
M. Forget: ... Ill qui serait Des effets du divorce à
l'égard des enfants et des tiers ou quelque chose de ce genre. Le but de
cette distinction, c'est de souligner que les quatre prochains articles, 552,
553, 554 et 555 sont vraiment complémentaires et traitent
essentiellement du même sujet et de démarquer ces articles par
rapport à ceux qui suivent. Encore une fois, je ne veux pas anticiper
plus qu'il ne le faut sur le fond du débat portant sur chacun des
articles, mais je pense que ce que je vais dire sur les quatre autres articles
prendra plus de sens si je fais cette mise au point ou cette suggestion
à ce moment. Je ne demande pas au ministre de réagir
immédiatement, mais c'est simplement un rappel en quelque sorte.
M. Bédard: Pour nous permettre de l'évaluer.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 552 sera
adopté?
M. Bédard: À l'article 552, il n'a pas paru utile
de rappeler que les époux divorcés peuvent se remarier, parce que
les articles 404 et 436 combinés y pourvoient déjà. Pour
ce qui est des effets de la dissolution du régime entre les
époux, la règle reprend celle qui est prévue aux articles
495 et 496.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 552,
adopté. J'appelle l'article 553.
M. Bédard: II y avait un amendement?
Le Président (M. Laberge): À l'article 552?
M. Bédard: C'était de changer les mots "reporte",
dans la troisième ligne du deuxième alinéa, par les mots
"fasse remonter". Il s'agissait d'un amendement visant à
améliorer la forme.
Le Président (M. Laberge): Oui, il se peut que j'aie
égaré ma feuille ici. Je vais vérifier. Alors, à la
troisième ligne, changer "reporte" par "fasse remonter". À
l'article 552, l'amendement consistant à changer le mot "reporte" par
les mots "fasse remonter", est adopté. L'article 552 amendé est
adopté. Article 553? (14 h 45)
M. Bédard: Cet article s'écarte de la solution du
Code civil et de celle qui est proposée par l'Office de révision
du Code civil. En effet, la qualité d'époux prenant fin avant le
décès qui donne effet aux donations à cause de mort, il a
paru plus cohérent de déclarer caduques, sans discrétion
pour le tribunal, ces donations. Il est à noter que cet article ne
frappe de caducité que les donations à cause de mort que les
époux se sont consenties, non les autres dont le sort est
réglé par l'article 554. En effet, la condition n'est pas
nécessairement défaillie dans le cas d'une donation d'un
père à son fils, encore que les donations consenties aux
époux par des tiers en considération du mariage soient
plutôt rares de nos jours.
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ...comme le ministre vient de le souligner, il y a ici
des différences entre à la fois le Code civil actuel, les
recommandations de l'office et le texte qui nous est présenté.
J'aimerais qu'on nous explique plus complètement la nature de ces
différences. Il semble que la caducité des donations à
cause de mort repose sur une distinction entre les donations à cause de
mort qui seraient - c'est la catégorie la plus générale -
inscrites sur le contrat de mariage, mais dont certaines seulement seraient
caduques lorsqu'elles ont été consenties en considération
du mariage. Est-ce que c'est vraiment la distinction qui est faite? Si oui,
pourrait-on nous en donner le sens concret?
M. Bédard: Pour ce qui est des donations à cause de
mort, il y a bien sûr, celles que les époux se font entre eux,
lorsqu'un époux fait donation à cause de mort à l'autre.
Il y a aussi - encore que,
comme cela a été mentionné, c'est plutôt
d'application rare - le cas où un tiers intervient au contrat pour faire
donation à l'un des époux. On voyait cela autrefois, un
père intervenait au contrat de mariage pour faire donation de sa ferme
à son fils pour son établissement. Ce n'est pas tellement la
pratique nouvelle.
En ce qui concerne les donations à cause de mort entre
époux, il y a des choses qui sont un peu gênantes parce que, si on
se reporte à l'article 830 du Code civil actuel, on se rend compte que
ce concept de donation à cause de mort comporte toute forme de donations
au décès, c'est-à-dire dans le cas où l'un des deux
époux survit à l'autre. Ces donations à cause de mort, en
vertu de l'article 830, prennent toutes sortes de formes, notamment celle plus
connue de l'institution contractuelle ou de la donation un peu universelle des
biens - c'est connu un peu par tout le monde - la clause au dernier vivant les
biens. Il ne s'agit pas d'une clause aussi générale et aussi
universelle, mais d'une donation qui peut être substantielle aussi;
ça peut être une donation de $50,000, ça peut être
une donation beaucoup plus modeste en termes d'importance quantitative.
À cet égard, on peut avoir deux raisonnements. Si on a le
raisonnement strictement juridique, il est certain que ces donations sont
faites pour protéger l'un des conjoints au décès contre
l'exercice de cette faculté illimitée de tester qu'a l'autre
époux. Cela permet donc une certaine protection au décès
de l'un parce que, évidemment, encore une fois, la liberté
illimitée de tester peut permettre de le déshériter de
façon complète et totale. Mais si le mariage ne dure pas jusqu'au
décès, cette condition n'est pas réalisée, somme
toute. Dans une sorte de logique juridique, on pourrait plaider que c'est
normal que la donation, en principe, ne survive pas, si je peux dire, au
divorce, s'il n'y a pas eu la condition du décès.
Par ailleurs, il peut être extrêmement gênant pour
quelqu'un qui s'est marié une première fois, qui a
peut-être fait une donation à cause de mort fort importante, une
donation universelle par voie d'institution contractuelle, et ce de
façon irrévocable, de savoir que, en se remariant, il ne lui
reste plus rien à offrir comme protection à son deuxième
conjoint et à ses enfants, c'est bien sûr. S'il se remarie, dans
un système où le divorce met fin au mariage et permet le
remariage, cela peut être une limite ou une contrainte extrêmement
gênante sur le pouvoir, par la suite, de disposer et aussi d'offrir
d'autres protections à un deuxième conjoint.
Évidemment, je comprends que l'article 208, à l'heure
actuelle, soumet tout cela à la discrétion du tribunal. C'est une
des solutions. Celle qui est proposée par le projet de loi no 89 voit
plutôt à dire que c'est caduc, ce qui n'empêche pas, comme
chacun le sait, les époux, malgré tout, de se faire un testament
par lequel ils pourraient, s'ils le désirent absolument, avantager le
conjoint divorcé, l'ex-conjoint. Mais il retrouve une sorte de
liberté pour ce qui est de la disposition à cause de mort.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Forget: Mais, si vous me le permettez...
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
M. Forget: ... On a peut-être répondu à ma
question, mais, si on l'a fait, on l'a fait fort subtilement. Je suis
reconnaissant de cette explication à laquelle je souscris de
façon générale, mais n'y a-t-il pas, dans la façon
dont c'est rédigé, une distinction que l'on établit entre
les donations inscrites, contenues au contrat de mariage, qui appartiendraient
à deux catégories, une catégorie étant les
donations consenties en considération du mariage et l'autre les
donations qui ne sont pas en considération du mariage? Est-ce qu'il y a
une preuve d'intention qui est susceptible d'être faite pour
décider de l'application de l'article 553?
M. Bédard: Dans tous les cas - peut-être que ma
réponse n'était pas complète -les donations à cause
de mort ne peuvent être faites que par contrat de mariage ou par
testament. Donc, celles qui sont faites par contrat de mariage le sont toujours
par le jeu du contrat de mariage en considération du mariage. Il n'y a
pas d'autres donations à cause de mort possibles que celles qui sont en
considération du mariage. Parce qu'elles ne peuvent se faire que sous
cette forme ou alors par testament. Je me suis référé tout
à l'heure à l'article 830, c'est un article par là aussi
qui le précise.
M. Forget: Alors, l'expression "en considération du
mariage" est équivalente à l'expression "contenue au contrat de
mariage".
M. Bédard: Quand les tiers viennent faire des donations
par contrat de mariage, ils les font à l'un ou l'autre des époux
ou à des enfants à naître, mais c'est parce qu'ils se
marient pour les fins de leur établissement.
M. Forget: Ah, je vois:
M. Bédard: Encore une fois, j'avoue que, dans la pratique
d'aujourd'hui, je n'ai pas encore vu, pour ma part, souvent, ou peut-être
pas une seule fois, des tiers venir faire des donations dans les contrats
de
mariage. C'est possible, le droit le permet.
M. Forget: Et celles-là ne seraient pas caduques.
M. Bédard: Et celles-là ne seraient pas caduques.
Pour prendre un exemple, il y a une relation qui s'établit entre un
père et son fils et qui est un peu le fondement de la donation. Ce n'est
pas parce qu'il décide de divorcer qu'il tient à retirer ou qu'on
présume qu'il voudrait retirer la donation qu'il a faite à son
fils.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien l'article 553, les
donations qui ont été accordées par contrat de mariage
sont rendues caduques lorsqu'un nouveau mariage est contracté.
M. Bédard: Même s'il n'y en a pas, par le simple
prononcé du divorce.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais s'il y avait eu des donations. Par
exemple, un conjoint avantage l'autre avec une police d'assurance. Je comprends
votre raisonnement que les gens ne peuvent pas garder cela à
perpétuité et qu'il y a de nouvelles obligations qui proviennent
du nouveau mariage, etc., mais j'ai eu des expériences assez
récentes à mon bureau de comté, deux cas où les
gens sont divorcés. Le premier conjoint meurt, c'est-à-dire celui
qui est remarié, ils avaient des polices d'assurance minimes; dans un
cas, $20,000; dans l'autre cas, $30,000, et la première épouse
avec, dans un cas, un enfant et, dans l'autre, deux - ce sont des
détails, enfin il y avait des enfants dans les deux cas -
élève avec peine les enfants avec l'aide sociale. La mort est
survenue deux ans après le divorce ou le nouveau mariage. Je ne suis pas
sûre, alors qu'il avait été marié dix ans dans le
premier cas, que la nouvelle épouse soit celle qui profite de la police
d'assurance qu'il avait accordée par un premier contrat à la
première épouse. Je comprends qu'on ne peut pas prévoir
tous les cas, tout le monde ne mourra pas deux ans après son remariage,
mais il reste que, du point de vue de la stricte justice, il n'y a même
pas d'enfant du deuxième mariage et l'autre continue d'élever son
enfant ou ses deux enfants qui sont encore mineurs. Cela me pose des
problèmes, en tout cas. Si j'ai bien compris ce que vous voulez
dire...
M. Bédard: Oui, vous avez parlé d'assurance. Je
veux bien comprendre qu'il s'agissait de désignation de
bénéficiaire d'assurance dans le cadre du contrat de mariage
parce que la désignation de bénéficiaire d'assurance peut
se faire en dehors du contrat de mariage; donc, ce n'est pas strictement ce
qu'on appelle une donation à cause de mort, dans le sens où c'est
strict, dont parle 553. Quand c'est fait en dehors du contrat de mariage, c'est
la pratique des assurances sur la vie qui fait qu'on peut désigner
sur...
Mme Lavoie-Roux: Dans un cas, ce n'était pas
nécessairement une police d'assurance, il l'avantageait d'une somme de
$20,000.
M. Bédard: Dans le contrat de mariage.
Mme Lavoie-Roux: Dans le contrat de mariage et à son
décès il laissait une police d'assurance qui - là, je ne
le sais pas -pouvait être de $30,000, qui aurait pu couvrir les
$20,000.
M. Bédard: Qui acquittait la donation.
La question dépasse l'aspect plus technique pour savoir si les
donations à cause de mort doivent être irrévocables
à l'égard du premier conjoint. Là, c'est une question
que...
M. Forget: Je pense que - si on me le permet, M. le
Président - dans un cas comme celui-là, il est important de lire
tous les nouveaux articles les uns à la lumière des autres. Je
pense qu'il serait possible de répondre à ce problème en
invoquant à l'avenir 555. Parce que 555 permet la prestation
compensatoire et permet de recréer, dans le fond, une obligation
même supérieure pour le conjoint divorcé à celle
à laquelle il s'était engagé de faire...
Mme Lavoie-Roux: Au moment du mariage.
M. Forget: ...au moment du mariage. Il peut être plus
approprié... Maintenant, on ne peut pas à la fois vouloir les
remettre en question et ne pas les remettre en question. Je pense qu'il y a une
option qui a été faite ici de réécrire le contrat
de mariage par le jeu de 555. C'est replacer les parties dans l'état
où elles auraient dû se trouver, indépendamment de
l'absence même de donation ou d'une donation insuffisante par contrat de
mariage.
M. Bédard: À ce moment-là, lorsque la remise
en question se fait au-delà du montant de la donation stipulée et
qu'il y a eu, par exemple, un accroissement assez spectaculaire, non
attendu...
Mme Lavoie-Roux: Si, justement, l'accroissement...
M. Bédard: S'il n'y en a pas eu, à ce
moment-là, il n'y a que l'actif qui...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais l'actif...
M. Bédard: C'est bien beau de faire des donations à
cause de la mort, mais ce sont des montants s'il n'y a pas d'actif,
souvent...
Il y a peut-être à se rappeler, parce que vous
l'évoquez, l'attribution éventuelle des meubles ou de la
résidence au cas de décès, dans la mesure où il y a
meubles et résidence. II y a également le régime
matrimonial s'il y a société d'acquêts. Il y a aussi un
partage des acquêts de 50% en faveur du conjoint. C'est cet ensemble de
mesures qui...
Mme Lavoie-Roux: Comme vous le signaliez - encore une fois, si je
comprends bien - si l'accroissement, compte tenu des avoirs, se résume
à peu près à rien, la personne était davantage
couverte par...
M. Forget: Non, c'est l'enrichissement dans le sens où
c'est à partir de zéro qu'on compte l'enrichissement. Ce n'est
pas à partir de la valeur historique des actifs au moment du mariage.
Donc, ce sont tous les actifs qui servent à combler ce... selon
l'esprit, à supposer toujours que l'interprétation que vous nous
avez donnée sera celle qui sera à l'avenir maintenue.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais les actifs au moment du mariage, la
police d'assurance, est-ce que c'est un bien propre ou...? (15 heures)
M. Bédard: Ce qu'on veut dire, et je pense que c'est juste
en droit, peu importe ce qu'on possédait au début du mariage, la
prestation compensatoire sera payée à partir de tout l'actif tel
qu'il se présente au décès. En d'autres termes, peu
importe la provenance ou l'origine des biens, la masse totale, si vous voulez,
du patrimoine sera la garantie du paiement des dettes qui en
découleront, donc la prestation compensatoire. Cela ne s'exercera pas
que sur des acquêts, en d'autre termes. Cela pourrait s'exercer tout
aussi bien sur les propres et les acquêts, enfin, la masse totale des
biens et, en séparation de biens, comme il n'y a pas de
distinction...
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 553 sera
adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 554.
À l'article 554, on nous demande, à la troisième ligne du
premier paragraphe, après le mot "mariage", de remplacer la virgule par
un point et d'enlever les mots qui suivent, "sauf stipulation contraire du
contrat".
M. Bédard: Cet article, sur réserve de... Je pense
que l'amendement est adopté.
Le Président (M. Laberge): Oui, à moins que...
M. Bédard: C'est à la suite des
représentations déjà faites au niveau de la commission
parlementaire.
Le Président (M. Laberge): Ah bon!
M. Bédard: Ceux qui n'aimaient pas cette clause, qui se
permettent toujours globalement d'aller à l'encontre...
Le Président (M. Laberge): L'amendement consistant
à biffer les mots "sauf stipulation contraire du contrat" est
adopté.
M. Bédard: Cet article, sous réserve de l'article
553, reprend substantiellement les dispositions des premier et deuxième
alinéas de l'article 208 du Code civil, de préférence aux
dispositions proposées par l'Office de révision du Code civil,
qui établissent une nette distinction entre les donations entre vifs et
les donations irrévocables faites à cause de la mort. Cette
solution plus souple permet au tribunal de tenir compte des circonstances,
notamment de la durée plus ou moins longue du mariage. Ce n'était
pas le cas auparavant.
M. Forget: II y avait une distinction dans le droit actuel et, me
semble-t-il aussi, dans la recommandation de l'office - mais je ne suis pas
absolument sûr, je vais vérifier -entre la validité des
dons devenus exigibles ou déjà consentis et ceux qui ne sont pas
déjà exigibles. Si je comprends bien, on fait sauter cette
distinction. Donc, des donations qui seraient faites sans indication de date,
essentiellement, et qui n'ont pas été exécutées au
moment où intervient un divorce, continueraient indéfiniment
d'être exigibles dans les mêmes circonstances où la date
n'est pas précisée. Est-ce que cela ne constitue pas une
situation assez paradoxale, où une donation, disons, d'un montant d'une
somme d'argent donnée qui n'a pas été versée, pour
lequel le contrat de mariage n'institue aucune espèce de délai ou
de terme fixe, continuerait d'être due, sans autre indication?
M. Bédard: Oui, dans le cas des donations entre vifs, il
est exact de dire que la date d'exigibilité de certaines peut être
déterminée dans le contrat. Si elle ne l'est pas, il y a une date
limite. C'est le décès qui en entraîne à tout le
moins l'exigibilité. On dit que même dans le cas où elle
pourrait être exigible à une date ultérieure au divorce,
mais, du vivant des époux, le
tribunal pourrait différer le temps de paiement ou modifier
l'échéancier de paiement, de façon à tenir compte
de la situation des époux.
Nous avions mentionné à propos de la nullité du
mariage - si vous vous souvenez bien - ce que nous pensions que la
caducité avait comme effet, plutôt que la nullité. Nous ne
croyons pas que la caducité, veuille ici avoir un effet
rétroactif, mais veuille dire que ce qui n'a pas encore
été payé, par exemple... On voulait dire ici que les
donations entre vifs qui n'avaient pas été
exécutées, bien sûr, ne sont pas caduques. Les donations
à cause de vente non plus, sauf que le tribunal les appréciera et
pourra refaire un échéancier quant aux paiements qui deviendront
exigibles après le divorce.
Il est dit dans le deuxième alinéa qu'il peut d'ailleurs
les réduire aussi ou même les déclarer caducs.
M. Forget: Compte tenu de ce qu'ils décident au titre de
l'article 555, de toute façon.
M. Bédard: J'ai l'impression qu'il y avait une sorte
d'évaluation d'ensemble de la situation.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article "554
sera adopté avec la modification?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté, avec la
modification. À l'article 555, on nous demande de remplacer les mots
"à l'accroissement de l'actif" par "à l'enrichissement du
patrimoine"; ceci, à la troisième ligne du premier alinéa.
Est-ce que cet amendement sera adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Je pense que c'est suite...
M. Bédard: C'est une concordance par rapport à ce
dont on a discuté déjà dans l'annexe...
M. Forget: M. le Président, il y a eu des recommandation
du Conseil du statut de la femme, de l'AFEAS et de plusieurs autres groupes,
à l'article 555, afin qu'on tienne compte plus explicitement de la
possibilité que les mots "apport d'un conjoint à l'accroissement
ou à l'enrichissement de l'actif de l'autre conjoint" ne soient pas
interprétés trop étroitement comme signifiant
exclusivement un apport de type financier. Par exemple, le Conseil du statut de
la femme - pour ne citer que son rapport -suggère que l'on ajoute: "par
son activité au foyer, sa collaboration à l'entreprise ou
à la carrière de son conjoint", essentiellement cela et on ajoute
aussi "son apport financier à la résidence familiale". Il est
bien évident que la résidence familiale est un actif et si c'est
un apport financier, c'est au moins un apport financier. Je pense que cette
partie est peut-être pléonasmique, mais, pour ce qui est du reste,
c'est peut-être une précision qui est nécessaire.
M. Bédard: C'est une assurance, je pense, qui a
été demandée par les groupes pour que les services soient
une notion retenue. Effectivement, le but de l'article est de sanctionner la
contribution d'un époux - pour le journal des Débats, j'aimerais
aussi le mentionner - en services ou en argent à l'accroissement de
l'actif de son conjoint. Déjà les tribunaux développaient
la notion ambiguë de société de fait pour régler les
cas les plus patents. Évidemment, dans l'établissement de cette
prestations compensatoire, le tribunal devra tenir compte notamment du
régime matrimonial et du contrat de mariage.
Ainsi, si le patrimoine enrichi grâce à la contribution des
époux est constitué d'acquêts partageables, il n'est pas
question que l'époux titulaire du patrimoine soit exposé à
perdre sa part des acquêts pour payer la prestation compensatoire. En
effet, il est de l'essence du régime de société
d'acquêts que les acquêts des époux se partagent par
moitié entre eux en nature ou en valeurs.
De même, si l'époux créancier d'une prestation
compensatoire a déjà reçu par contrat de mariage une
donation de son conjoint, il en sera tenu compte. On a déjà eu
une discussion là-dessus. Le mot "notamment" a été
introduit dans l'article 555 afin que le tribunal puisse tenir compte aussi,
s'il y a lieu, de tous autres avantages par voie de donation, d'assurance sur
la vie, etc.
Enfin, la prestation compensatoire est payable, en principe, en argent,
mais l'époux créancier de la prestation pourra demander que le
paiement soit effectué par l'attribution de la propriété
ou de l'usage des meubles de la résidence familiale ou encore d'un droit
de propriété ou d'habitation de la résidence
principale.
Dans l'esprit du législateur, c'est bien clair qu'on voulait que
soit rencontrée la préoccupation qui est évoquée
par les remarques que nous avons eues des différents groupes. Il y
aurait peut-être lieu de préciser un peu plus...
Mme Lavoie-Roux: Je le crois.
M. Bédard: ... pour être bien sûr que le but
est atteint et que des interprétations de tribunaux n'aillent pas dans
le sens contraire.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je
préférerais, peut-être dans le sens de la suggestion du
Conseil du statut de la femme, comme vient de le dire le député
de Saint-Laurent, qu'on spécifie les termes un peu plus, parce que c'est
quand même assez nouveau qu'il y ait une reconnaissance de la part de la
femme au foyer. Ceci est déjà assez vague à
évaluer, de toute façon; à partir de quoi on commence
à l'évaluer, c'est déjà difficile. Si on veut que
cela ait un sens et que vraiment ceci entre dans la pratique, moi, j'aimerais
bien qu'il soit inclus. Je trouve que la formulation du Conseil du Statut de la
femme, comme le signalait le député de Saint-Laurent, moins
l'apport financier à la résidence, les deux premiers
éléments me semblent importants, et la collaboration à
l'entreprise est une préoccupation particulière des femmes
collaboratrices, par le truchement de l'AFEAS.
M. Bédard: On me dit - je pense que chacun y va de ses
suggestions, en termes d'amendements - qu'à partir du moment où
on préciserait l'accroissement en biens et en services, on atteindrait,
selon ce que nous disent nos juristes...
Mme Lavoie-Roux: L'accroissement en bien et en services, cela
veut dire quoi?
M. Forget: Je suis d'accord avec le ministre que cela peut
vouloir dire tout ce que l'autre veut dire. Mais il y a aussi le risque d'une
interprétation restrictive. C'est-à-dire que personne ne peut
garantir d'avance que les tribunaux ne diraient pas: II s'agit de la
collaboration, de type professionnel ou de type commercial, à une
entreprise ou quelque chose. Mais est-ce qu'ils iraient au point de consacrer
l'activité au foyer, par exemple? Je pense qu'on ne peut pas, comme
législateurs, être absolument sûrs que cette
interprétation prévaudrait. On peut le souhaiter, mais on ne peut
pas en être sûr.
M. Bédard: II y a peut-être l'autre danger
qu'à vouloir commencer à énumérer, on devienne
limitatif, sans le vouloir. En tout cas, on sait quel but on veut atteindre. On
est pleinement d'accord là-dessus et on est d'accord avec la
préoccupation du Conseil du statut de la femme. Mais le danger qui
existe, c'est que si on commence une énumération, on peut obtenir
l'effet contraire que nous voulons obtenir et ne pas atteindre cet objectif,
parce que des tribunaux pourraient, à partir d'une
énumération, interpréter restrictivement et, après
cela, en venir à la conclusion qu'il n'y a que ce qui est indiqué
dans l'article dont il doit être tenu compte.
M. Forget: Quoique ce sont des mots très larges.
M. Bédard: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Mais il n'y aurait pas une autre
formulation?
M. Bédard: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je ne voudrais pas faire semblant de tenter de
formuler des articles juridiques, mais quand vous parlez de l'enrichissement du
patrimoine, notamment de l'activité à ceci et à cela, cela
n'exclut pas d'autres possibilités que le juge voudrait inclure.
M. Bédard: Peut-être qu'on pourrait le suspendre,
mais je pense que la discussion et l'objectif sont bien définis.
C'est que l'apport, non plus, n'est pas un mot nouveau, on le retrouve
à l'article 1839, sur la société, du Code civil, et
où il est bien entendu que ce qu'on appelait un apport en industrie,
c'est-à-dire un apport en activité, n'est pas seulement un apport
d'ordre pécuniaire. Ce n'est pas un mot neuf dans notre Code civil. Il a
déjà une acception très large dans le...
M. Forget: Sans doute, sauf que je suis à peu près
persuadé que dans l'interprétation qu'on en fait dans le cadre
des articles sur la société, on ne l'a jamais appliqué
à l'activité de la femme au foyer.
M. Bédard: Mais, si on y ajoute la notion de service,
à ce moment-là... Je pense, en tout cas, que l'apport en services
permet d'aller chercher tout apport en services dans la mesure où cet
apport en services a un lien avec l'enrichissement du patrimoine. Au moins, on
peut dire que l'expression n'est pas limitative, elle est ouverte. Il s'agit de
lui donner un contenu. Il est certain que dans le cas du droit nouveau, les
tribunaux auront à faire preuve d'une certaine imagination pour
développer le potentiel illimité de la règle, quand
même. Mais, dans le risque qu'on voit toujours à accrocher de
façon trop particulière l'apport, c'est qu'on finit par lui
donner un sens un peu restrictif et limitatif. Si l'exemple que vous donnez est
un exemple très précis, on se repliera volontiers à cet
exemple. Ici, c'est un domaine un peu neuf où le tribunal aura à
faire oeuvre de concrétisation de l'application. (15 h 15)
Mme Lavoie-Roux: Je peux me tromper là-dessus, M. le
Président, mais j'ai l'impression que, jusqu'à maintenant, les
tribunaux ont toujours pris des décisions ou statué en fonction
de certains éléments qui étaient devenus des
éléments traditionnels,
ce qui impliquait les frais de garde des enfants, la pension alimentaire
de l'épouse. Si on veut que, justement, les mentalités
évoluent dans le sens d'un élargissement, enfin, dans une
conception beaucoup plus large que ce qui avait été retenu
traditionnellement, je pense qu'il faut l'indiquer quelque part. Cela prendra
peut-être encore quinze ans avant que certains juges s'éloignent
de l'interprétation traditionnelle qu'on a toujours donnée
jusqu'à maintenant.
M. Bédard: Si je me réfère aux
récentes décisions de la Cour d'appel qui ont été
évoquées devant la commission, je pense que, déjà
au moins une fois, le tribunal de la Cour d'appel disait qu'en dehors d'un
texte qui permettrait d'aller chercher un apport qui pourrait être
compensé par une prestation comme celle que prévoit l'article
555, il était bien difficile, en séparation de biens
particulièrement, d'y arriver. Les exemples que le tribunal avait sous
les yeux étaient justement des exemples... Dans un cas, par exemple, il
s'agissait de la femme d'un cultivateur qui apportait une contribution qui
dépassait largement son activité au foyer. C'était
vraiment une activité...
Mme Lavoïe-Roux: Les deux, on met le foyer et l'entreprise
aussi.
M. Bédard: C'est cela, le foyer, la ferme et tout cela.
Enfin, cela prenait différents visages. Il disait: Si nous avions un
texte qui nous permette de compenser un apport, nous pourrions, dans ce cas en
particulier... C'est toute l'affaire Murdock, d'ailleurs, dans l'Ouest
canadien, qui n'a pas été compensée à
l'époque. On y est en "common law", c'étaient d'autres raisons
qui étaient invoquées à l'époque, mais, chez nous,
c'était le défaut d'un texte. En droit civil, il arrive que...
C'est vrai que le droit civil procède par des principes, mais je crois
devoir dire quand même que plus les principes sont larges, dans le Code
civil, plus ils permettent aux tribunaux de les appliquer à des
situations tout à fait inédites et même
imprévisibles dans le temps. Je voudrais ne rappeler que l'article 1053
qu'on a appliqué à la responsabilité découlant du
transport par avion, par exemple, à l'époque où on
était loin même de l'automobile, simplement parce que le texte
lui-même est général et ouvert. Le plus essentiel, c'est
peut-être cela, d'avoir un texte qui n'est pas restrictif au
départ, qui est bien ouvert et qui permet toutes sortes d'applications
que voudra bien appliquer le tribunal lorsqu'il sera saisi. Il aura les faits
sous les yeux.
Les explications sont données.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends l'esprit dans lequel on nous dit de
quelle façon un terme beaucoup plus large permet des
interprétations qui s'adaptent aux besoins, etc. Je ne le veux pas
restrictif dans le sens de deux choses, mais ce sont deux
éléments qui peuvent également laisser la porte ouverte
à des interprétations plus larges, selon la volonté du
juge ou selon les circonstances.
M. Bédard: M. le Président, peut-être
pourrait-on lire également l'article 1830 du Code civil qui parle des
sociétaires et qui dit qu'ils apportent des biens, leur crédit,
leur habileté ou leur industrie. On voit le contexte par rapport auquel
s'apprécie l'apport. C'est très large, je pense, comme
notion.
Autre chose, dans la mesure où nous sommes dans le Code civil, il
m'apparaît dangereux, vu les réflexes que nos juges ont en
matière de droit dit statutaire, de leur fournir une
énumération qui les amènerait, comme ils le font souvent,
à dire: Toute notre activité va se limiter aux choses qui sont
exprimées. C'est une liste fermée. Je pense que le risque est
moins grand, finalement, d'avoir quelque chose de très large qui permet
tous les développements possibles, que d'avoir une
énumération qui pourrait apporter des interprétations, je
crois, plus restrictives qu'extensives. C'est un risque à courir, mais
je pense que, vu l'évolution des mentalités, il vaut d'être
couru, dans la mesure où nous sommes dans le Code civil et que les
méthodes d'interprétation naturelles du Code civil sont beaucoup
plus larges que celles du droit dit statutaire.
Mme Lavoie-Roux: J'ai toujours peur de l'interprétation
restrictive, dans le sens que le mari a quand même contribué au
maintien de sa femme, à l'habiller, etc., pendant qu'elle s'occupait des
enfants. Ce qui est beaucoup plus difficile et ce dont on tient compte beaucoup
moins souvent, c'est le fait que les dix ans qu'elle a passés à
la maison, cela a eu des répercussions considérables du point de
vue non seulement de son entrée sur le marché du travail, mais
parfois de sa sortie et parfois de sa progression au plan professionnel ou au
plan du marché du travail. Je ne suis pas sûre que ce soit pris en
considération. Il peut y avoir des juges qui en tiennent compte,
mais...
M. Bédard: Cela va probablement se réfléter
dans l'enrichissement. Ce sont des facteurs qui se doivent d'être
considérés.
Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas sûre que, jusqu'à
maintenant, les juges lui aient donné cette interprétation.
M. Bédard: Le Code civil évolue. Il
faut...
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas une question de parler du Code
civil, c'est une question de mentalité, M. le Président.
M. Bédard: Espérons que cela répond à
une évolution aussi des mentalités.
Mme Lavoie-Roux: On va avoir encore dix ans à
attendre.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'amendement
à la troisième ligne du premier alinéa de l'article 555
consistant à remplacer les mots "accroissement de l'actif" par
"enrichissement du patrimoine" sera adopté? C'est adopté.
L'article 555 amendé est-il adopté?
M. Bédard: On ajoute "l'apport en biens ou en services".
Il faut que ce soit bien clair.
Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous nous le lire au complet?
M. Bédard: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Laberge): Après le mot
"enrichissement"? "...en biens ou en services de ce dernier à..."
M. Bédard: À partir du moment où le
"spécifie" équivaut à "nécessairement" à
l'indication d'un changement qui doit être fait au niveau de la
considération, sinon, on devrait conclure que le législateur
aurait parlé pour ne rien dire. Ce qui n'est pas le cas.
Le Président (M. Laberge): Après le mot "apport",
troisième ligne?
M. Bédard: Oui.
Le Président (M. Laberge): Un autre amendement pour
ajouter, après le mot "apport", à la troisième ligne du
premier alinéa, ",en biens ou services,"...
M. Bédard: Entre virgules.
Le Président (M. Laberge): Entre virgules. Je relis le
premier alinéa, pour que ce soit très clair. "Au moment où
il prononce le divorce, le tribunal peut ordonner à l'un des
époux de verser à l'autre, en compensation de l'apport, en biens
ou services, de ce dernier à l'enrichissement du patrimoine de son
conjoint," et le reste du paragraphe continue dans le même sens, "...en
biens ou services...", adopté? Est-ce que l'article 555, avec deux
amendements, sera adopté? Est-ce que cela va?
M. Bédard: On a spécifié "en biens...
Le Président (M. Laberge): "... son apport, en biens ou
services, à l'enrichissement du patrimoine...". Adopté, avec
amendement. Article 556? Il y a une petite correction, c'est typographique,
nous dit-on, au deuxième alinéa. L'erreur de typographie dans
l'expression "à moins que". On va retrouver cela. Il faut enlever le "n"
tout simplement.
M. Bédard: Cet article doit se lire avec l'article 626,
qui indique une obligation alimentaire entre époux, contrairement
à l'Office de révision du Code civil, qui recommande que cette
obligation alimentaire survive au divorce, à moins d'une décision
contraire du tribunal. Le projet de loi propose plutôt que cette
obligation prenne fin lorsque le tribunal prononce le divorce, à moins
qu'il ne réserve le droit d'en réclamer pour une période
d'au plus deux ans, conformément à l'article 557 ci-après
ou qu'il n'ordonne à l'un des époux de verser les aliments
à l'autre si les besoins de l'un et les facultés de l'autre sont
démontrés. Notons que, dans la détermination de ces
besoins et facultés, le tribunal doit tenir compte des critères
fixés par l'article 563. Ainsi, le droit d'un époux
divorcé à des aliments ne peut plus être
réservé à vie, si ses besoins ne sont pas continus. Il
peut être déclaré éteint lors du prononcé du
divorce ou postérieurement. Le droit des époux à des
aliments devient donc... ...strictement encadré. Il s'agit là
d'un renversement important du droit actuel et cet article s'applique
également en matière de nullité du mariage. Il y avait la
petite correction.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, c'est à cet article-ci,
je pense, que deviennent pertinentes - comme en font foi les nombreux
commentaires dont il a fait l'objet - la question de la survie de l'obligation
alimentaire entre conjoints, qui, par ailleurs, ne sont plus liés par le
mariage et la demande qui, je pense, est bien fondée, du RAIF de
supprimer cette notion d'obligation alimentaire, non pas pour se borner
à cette suppression pure et simple, mais pour lui substituer une autre
notion qui serait basée sur des facteurs différents de la pension
alimentaire comme telle. La pension alimentaire est l'expression d'une
solidarité des membres d'une famille et, tant que les liens familiaux
qui lient ces personnes dure, que ce soit entre générations
différentes ou entre conjoints, je pense qu'il est tout à fait
normal de prendre en compte les besoins, les ressources, etc. C'est une
façon juridique de dire que, dans le fond, les membres d'une
même famille font une seule unité économique,
partagent pour les besoins de la vie de tous les jours tous les revenus et
assument d'une façon égale toutes les obligations et les besoins
de chacun des membres.
Ce n'est plus le cas après le divorce et je pense qu'on a raison
de souligner que le maintien du concept perpétue la notion d'une
relation de dépendance à laquelle, précisément,
c'est un des buts du divorce de mettre fin. Je pense qu'on devrait donner une
considération beaucoup plus sérieuse à ceci. Je pense
qu'on reconnaît déjà ceci au niveau patrimonial en disant:
Les donations à cause de mort que les époux se sont faites sont
caduques. On établit, au niveau du patrimoine, par les articles 552,
553, 554 et 555, une espèce de règlement de compte sur le plan
patrimonial.
Sur le plan de cette situation de solidarité, je crois qu'il y a
un règlement qui s'impose également dans bien des cas, mais qui
devrait s'inspirer d'autres considérations par exemple, le fait que l'un
des conjoints peut être dans la situation où, même si,
à partir du divorce, il doit assumer complètement l'obligation de
suffire à ses propres besoins, il est quand même objectivement
dans la situation où il ne l'a peut-être pas fait pendant
plusieurs années, il s'est absenté du marché du travail -
c'est le cas de nombreuses femmes mariées qui sont divorcées -
et, dans la mesure où un apport financier devrait lui être
accordé par le tribunal et imposé à l'autre conjoint, il
s'agit de le mettre en état de subvenir à ses propres besoins, de
compenser par une période d'entraînement professionnel ou de
recyclage et de permettre à la personne en question d'assumer au bout
d'un certain temps la responsabilité entière de son sort.
Bien sûr, tenant compte de l'état de santé et de
l'âge de la personne divorcée, on peut aussi traiter cette
obligation comme une obligation permanente de subvenir aux besoins. Il s'agit
à ce moment-là d'un cas particulier, si l'on veut; le principe
est quand même différent, le principe général
étant de permettre aux deux conjoints divorcés de vivre dans un
état d'autonomie le plus rapidement possible. Il me semble que ce serait
plus clair puisque ceux qui s'engagent dans une procédure de divorce
sauraient que de façon très claire ceci met fin à une
situation de dépendance, non sans solution de continuité, mais
malgré tout le principe serait clairement affirmé qu'il n'y a
plus de solidarité économique entre les conjoints; il y a des
mesures de transition, en quelque sorte, vers l'autonomie complète des
deux personnes. Ce n'est pas, encore une fois, les mêmes critères
qui jouent pour déterminer cette allocation de transition que ceux qui
jouent pour déterminer l'obligation alimentaire. Encore une fois, tenant
compte de l'âge et des conditions de santé puisque, bien
sûr, on ne peut changer le droit du jour au lendemain de façon
permanente sans tenir compte d'un facteur comme celui-là. (15 h 30)
C'est la remarque de caractère général. Les autres
remarques sont, pour autant que je puisse voir, plutôt relatives à
l'article 557. C'est la question de la réserve; on y reviendra tout
à l'heure. Je pense que c'est la question de principe essentiellement.
Ne serait-il pas approprié, puisqu'on reconnaît qu'il peut y avoir
déchéance, parce que là on se démarque du droit
actuel à ce sujet... On dit bien qu'il y a déchéance
à moins que... sauf que, dans la pratique, on ne sait pas ce que cela va
donner.
Le législateur ne se donne pas la peine d'affirmer le principe.
Comme le ministre l'a dit, il en fait un droit prétorien, un droit qui
est déterminé par le tribunal, mais on ne donne vraiment pas au
tribunal une orientation nouvelle. On ne dit pas: Vous devez prendre vos
décisions à la lumière du principe que c'est la
règle de l'autonomie des parties qui doit entrer en vigueur,
après le divorce, sous réserve d'une période de
transition.
M. Bédard: On pourrait indiquer que le droit est
éteint pour ce qui est de la question de principe, à moins que,
sur demande... On pourrait au niveau du principe, le formuler autrement, disant
que le droit est éteint, à moins que sur demande, etc..
M. Forget: Oui, mais il y a un peu plus que cela quand même
que je recommandais dans mes remarques.
M. Bédard: Oui, je sais.
On va le laisser ouvert. Je crois qu'il faut y penser deux fois avant de
rompre avec des habitudes presque millénaires. Au niveau du principe, on
peut l'évoquer mais laisser quand même... C'est vers cela que je
vais m'orienter. Le droit est éteint d'accord - à moins que le
tribunal, sur demande, etc...
Le Président (M. Laberge): Alors, l'article 556...
M. Bédard: On pourrait faire une autre formulation.
Le Président (M. Laberge): L'article 556 demeure ouvert,
il est suspendu. J'appelle l'article 557.
À l'article 557, on nous demande, au premier alinéa,
quatrième ligne, de changer le mot "est", le troisième mot avant
la fin de la ligne, pour "ait été".
M. Forget: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Pour l'amendement, adopté.
Le Président (M. Laberge): Cela va, adopté.
Maintenant, à l'article 557, est-ce qu'il y a autre chose?
M. Bédard: À l'article 557, plusieurs remarques ont
été faites par les groupes concernant le droit de réserve.
Nous sommes prêts à évaluer la solution qui pourrait
être de nature à donner suite à ces remarques. Le Barreau
parlait de trois ans, d'un droit de réserve qui soit automatique pour
trois ans au maximum.
M. Forget: Oui, j'aurais peut-être une suggestion à
faire, si vous me permettez, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Oui, M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: L'objection qui a été formulée,
si je la comprends bien, vise à empêcher que le débiteur de
l'obligation alimentaire, puisque c'est de cela dont on parle, ne se
dérobe frauduleusement à son obligation en se mettant
lui-même dans une situation d'insolvabilité, tant et aussi
longtemps que dure le droit de réserve. C'est une difficulté qui
a été soulevée bien à propos. Dans une certaine
mesure, peu importe le délai, dans le fond, le problème peut
toujours se soulever. Je comprends que personne ne va se mettre dans une
situation d'insolvabilité à jamais, de façon à
échapper à cette règle, mais il reste que ce n'est pas
vraiment une question de deux ans, de deux ans et demi ou de trois ans et
quart. Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent de le formuler en donnant un
effet suspensif à cette caducité de la réserve, en le
formulant à peu près comme ceci: Si la réserve est
prononcée à cause de l'absence ou de l'insolvabilité du
débiteur alimentaire, ce délai ne compte qu'à partir du
moment où son absence ou son insolvabilité cesse.
M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait avoir le libellé
de ce qui est proposé?
M. Forget: Je ne l'ai pas...
M. Bédard: On pourrait le suspendre temporairement.
M. Forget: Oui, d'accord.
M. Bédard: Si vous voulez le relire, on pourrait
peut-être le noter.
M. Forget: Oui, je vais le relire lentement.
M. Bédard: Avant d'engager la discussion, on pourrait voir
jusqu'à quel point cela pourrait se concilier.
M. Forget: Si la réserve est prononcée à
cause de l'absence ou de l'insolvabilité du débiteur alimentaire,
ce délai ne compte ou ne court qu'à partir du moment où
son absence ou son insolvabilité cesse, ou, pour un meilleur
français, du moment où cesse son absence ou son
insolvabilité. Enfin, peu importe. Peut-être qu'on y verra des
difficultés, je ne sais pas si on connaît un moment où
l'insolvabilité cesse ou l'absence cesse. Ce sont peut-être des
questions de fait, tout simplement.
M. Bédard: Oui, mais si ce sont des questions de fait, je
pense qu'on revient peut-être à la situation que l'on veut
éviter, justement, cette situation d'épée de
Damoclès. Ce que nous avons essayé de faire à l'article
557, c'était de codifier de la façon la plus serrée
possible une jurisprudence extrêmement abondante de la Cour
suprême. On s'aperçoit ici que les situations de fait
révélées par cette jurisprudence étaient
extêmement compliquées et extrêmement diverses. C'est pour
cela que nous l'avons rédigé comme cela.
On va réserver...
Le Président (M. Laberge): Les remarques du
député de Saint-Laurent sont consignées et ont
été notées. On va laisser l'article ouvert pour le moment
pour voir si cela sera ajustable.
Mme Lavoie-Roux: II y a une chose qui est certaine, c'est que le
ministre est prêt à laisser cela plus ouvert que ce ne l'est dans
le moment. D'accord.
Le Président (M. Laberge): Article 558? Il n'y a pas
d'amendement suggéré jusqu'à maintenant.
M. Bédard: Non, il n'y a pas de remarque
spéciale.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article est
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 559?
M. Bédard: Non plus. L'ordonnance accordant une pension
alimentaire peut être révisée par le tribunal si des faits
nouveaux le justifient.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que c'était le Barreau qui avait
fait une remarque sur la pertinence du délai? Je m'excuse, M. le
Président, si l'article...
Le Président (M. Laberge): À l'article 558?
Parfait.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes allé vite -vous savez
qu'on ne va pas vite - sur la pertinence du maximum...
Le Président (M. Laberge): On comprend que vous avez
beaucoup de documents.
Mme Lavoie-Roux: ...de trois ans, il restreindrait la
capacité à payer. Si un conjoint peut échelonner ses
paiements sur plus de trois ans, il paiera au total un montant beaucoup plus
élevé que si ses versements étaient limités
à une période de trois ans.
M. Bédard: Oui. Il me semble qu'il faut fixer un
délai, de manière que la pension ne soit pas assimilée
à la somme forfaitaire, qui doit trouver sa satisfaction dans un
délai qui nous semble raisonnable.
M. Forget: On peut voir la difficulté. Si on transforme
une pension en somme forfaitaire, à ce moment, on renonce en quelque
sorte à la révision périodique de la pension alimentaire
que la somme forfaitaire a en place. Si on étale le paiement de la somme
forfaitaire de façon presque équivalente, on se trouverait
à pouvoir indirectement vicier les dispositions d'indexation qui sont
contenues ailleurs aux pensions alimentaires, parce qu'il s'agirait de
transformer en un paiement en capital la totalité de la pension
alimentaire sur les prochains vingt ans et dire qu'on va la payer à un
vingtième par année. On n'a plus besoin de s'occuper de
l'indexation. C'est effectivement d'ordre public que ce ne soit pas
étendu trop longtemps. Est-ce que trois ans, c'est le meilleur chiffre?
Je n'en sais rien.
M. Bédard: En plus de cela, on expose le créancier
à l'insolvabilité du débiteur si on s'embarque dans des
délais qui sont trop longs. On sait qu'il y en a qui ont beaucoup
d'ingéniosité. D'autre part, il peut arriver des changements de
situation au point de vue du créancier.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cela répond
à votre question à l'article 558? Je rappelle l'article 559.
M. Bédard: On n'a pas de remarque.
M. Forget: M. le Président, je m'excuse auprès du
ministre, je ne sais pas si vous me permettriez, je sais que l'article est
suspendu, mais pour ajouter un élément de réflexion
à l'article 556.
M. Bédard: Oui, à l'article 556.
M. Forget: Cela va peut-être de soi, mais je n'en suis pas
entièrement convaincu. Lorsqu'il y a extinction de la créance
alimentaire entre les conjoints, pour des raisons qui sont propres à la
situation des deux conjoints, je pense qu'il serait peut-être essentiel
de noter que cette extinction ne vaut que pour la créance alimentaire
d'un conjoint vis-à-vis de l'autre, mais n'a pas d'effet sur la
créance alimentaire des enfants. Cela va de soi, je pense.
M. Bédard: Aucune difficulté.
Le Président (M. Laberge): Cette remarque étant
faite, j'appelle l'article 559 de nouveau. Est-ce que l'article 559...
M. Bédard: Cela va à l'article 559.
Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle
l'article 560.
M. Bédard: À l'article 560...
Mme Lavoie-Roux: Avec l'article 559, à ce moment, on
élimine pour de bon l'indexation automatique?
M. Forget: Non, on en traite dans un autre chapitre, à la
pension alimentaire.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Blank: À l'article 559, je ne comprends pas pourquoi,
dans le montant fixe de la somme forfaitaire, il y aurait même une
possibilité de révision. Cela a été fixé, en
tenant compte des faits ce jour-là. S'il y a une erreur, il y a la Cour
d'appel, la révision ou la révocation de jugement, si c'est par
défaut, etc. Je ne comprends pas pourquoi...
M. Bédard: Sauf si l'absence - si vous lisez tout
l'article - de révision devait avoir pour l'un des époux des
conséquences d'une exceptionnelle gravité.
M. Blank: Oui, cela doit être exceptionnel au moment du
jugement, et c'est exceptionnel au moment du jugement, cela donne lieu à
un appel ou à une révocation de jugement. La révision,
c'est comme pour la pension alimentaire, quand la situation des parties change
après trois ou quatre mois, mais la somme forfaitaire, c'est basé
sur les biens des personnes au moment du jugement.
M. Bédard: Au moment.
M. Blank: S'il y a des conséquences graves, cela veut dire
que le juge a fait une erreur au moment du jugement. Ce ne sont pas des faits
qui sont arrivés après.
M. Bédard: Nous sommes ici dans un contexte très
différent de celui de la prestation compensatoire. Nous sommes quand
même dans le contexte "alimentaire". Il ne faut pas oublier le grand
principe du projet de loi sur lequel il faut que l'autre époux
acquière son automonie. C'est pour cela qu'il y a également les
mots "changements imprévus". Il est évident que tout se juge au
moment où le jugement est prononcé. Mais supposons que
l'époux auquel on avait versé une somme forfaitaire en arrive
vraiment à un état de fortune très considérable
subitement ou, à l'inverse, que l'autre tombe dans un état de
dénuement très considérable, on peut se demander - c'est
pour cela que nous avons mis une formule très large, des
conséquences d'une exceptionnelle gravité -si cette somme
forfaitaire ne devrait pas être révisée, alors qu'une
pension alimentaire ordinaire peut toujours être révisée en
fonction des besoins et des facultés de chacun. (15 h 45)
M. Blank: Oui, je comprends. Si, par exemple, le gars gagne
$1,000,000 à la Loto, ça va changer la pension alimentaire parce
que, maintenant, il est en situation de payer plus. Le montant forfaitaire,
c'est ce qu'on donne à un conjoint pour ce qu'il ou qu'elle a
contribué à apporter durant la vie.
M. Bédard: Vous oubliez deux choses. Premièrement,
c'est un choix à faire; deuxièmement, il y a un délai de
trois ans, je pense, qui s'applique. Après trois ans, si la
situation...
M. Forget: Je pense que l'intervention de mon collègue
illustre bien que les articles 552 à 555 appartiennent à une
catégorie différente des articles suivants.
M. Blank: Excusez-moi, mais si vous êtes limités
à trois ans... je ne suis pas certain que l'article 559 est
limité à trois ans. Les trois ans, c'est pour le paiement du
montant du jugement. Si le jugement est changé
ultérieurement...
M. Bédard: Cela a été exécuté
dans les trois ans, tel que prévu.
M. Blank: Cela ne fait rien, on change le montant
après.
M. Bédard: Est-ce qu'on peut laisser terminer
l'explication? Allez-y.
M. Blank: Même si, pour le montant à payer en trois
ans, le monsieur paie comptant le jour du jugement... S'il paie comptant,
l'article 559 ne s'applique jamais; s'il paie par versements, ça peut
être changé. Sinon, il n'y a aucune limite à l'article
559.
M. Lalande: Trente ans?
Le Président (M. Laberge): Alors, l'article...
M. Bédard: II faudrait faire une distinction entre une
somme forfaitaire versée par versements et celle qui est versée
tout d'un coup.
M. Blank: Je ne vois pas l'utilité du deuxième
alinéa de l'article 559. C'est une forme d'appel du jugement de
première instance.
M. Bédard: C'est une forme de révision.
M. Blank: D'accord, mais ce n'est pas cela. On a des
révisions pour d'autres raisons. Dans le Code civil, on a toute une
série de raisons pour la révocation des jugements ou pour un
appel. Ici, on ajoute quelque chose encore... Qu'est-ce que c'est, de graves
conséquences? Cela veut dire quoi?
M. Bédard: C'est sujet à l'évaluation. Quand
on parle d'une "exceptionnelle gravité", c'est sujet à
l'évaluation du tribunal. Il est évident qu'on ne peut pas le
prévoir.
M. Blank: Je vous donne un exemple peut-être un peu
illusoire. Monsieur et madame divorcent, il y a une pension de tel montant et
un montant forfaitaire de $100,000.
Mme Lavoie-Roux: II me semblait que ce serait cela.
M. Blank: Cela peut arriver. Le monsieur, après un an ou
deux ans, fait un placement à la bourse qui lui rapporte $2,000,000 ou
$3,000,000. Est-ce que la femme a le droit de revenir en disant: Je veux une
partie de cela?
M. Bédard: Non, parce que ce ne serait pas pour elle une
conséquence d'une exceptionnelle gravité.
M. Blank: Mais qu'est-ce que c'est, une conséquence d'une
exceptionnelle gravité?
M. Bédard: Je pense le tribunal...
M. Blank: De quoi est-ce qu'on parle? On doit avoir quelque chose
en tête pour mettre cela dans la loi.
M. Forget: À supposer que le débiteur ait à
faire face à des obligations considérables, ou alors que les
circonstances dans lesquelles le créancier alimentaire se trouve sont
tout à fait changées, est-ce que d'autres créanciers du
débiteur pourraient le forcer à se prévaloir de cet
article, pour faire réviser à la baisse le montant forfaitaire ou
se faire rembourser une partie du montant forfaitaire?
Le Président (M. Laberge): L'article 559 est ouvert et
nous discutons sur cet article.
M. Bédard: Je comprends ce qui préoccupe le
député de Saint-Louis, c'est le "sauf si l'absence de
révision devait avoir pour l'un..."
M. Blank: Parce que la personne... M. Bédard: Vous
l'enlèveriez, quoi?
M. Blank: C'est parce que l'autre personne va vivre comme un
suspense pour jusqu'à quand? On essaie de terminer la version même
pécuniaire, le plus vite possible. Si on ouvre la porte...
M. Bédard: Est-ce que je vous interprète bien en
disant que votre opinion est de fermer la porte?
M. Blank: Oui, c'est cela. Le juge au procès va
décider une fois pour toutes la pension alimentaire, le montant
forfaitaire basé sur les faits, à ce moment-là. La pension
alimentaire peut changer selon les besoins ou la possibilité de payer
d'une des deux parties.
M. Bédard: D'accord, on est prêt à
l'enlever.
Alors, l'article se terminerait par: "ne peut être
révisée même en cas de changements imprévus dans les
facultés ou les besoins des parties."
Le Président (M. Laberge): Alors, il y aurait un point
après le mot "parties" à la troisième ligne du
deuxième alinéa et le reste du paragraphe est biffé. C'est
la volonté de la commission.
M. Bédard: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Alors, cet amendement est
adopté.
L'article 559, qui était ouvert, se trouve donc adopté
avec amendement.
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Article 560.
M. Bédard: M. le Président, on dit: "Le droit d'un
époux de réclamer des aliments est éteint de plein droit
par l'expiration de la période pour laquelle il a été
réservé, s'il n'est pas exercé."
La rigueur de l'article trouve son fondement dans le principe nouveau
que le droit aux aliments ne survit pas au divorce, sauf lorsque le tribunal en
accorde au prononcé du divorce ou lorsqu'il réserve le droit d'en
réclamer pour une période d'au plus deux ans. On reviendra
là-dessus, c'est en évaluation. Il s'agit donc d'un droit
essentiellement relatif et temporaire, sauf dans le cas de besoins continus du
conjoint.
Le Président (M. Laberge): L'article 560 est-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 560 adopté.
Article 561.
M. Bédard: L'article proposé laisse au tribunal une
discrétion pour déclarer éteint le droit à des
aliments. C'est en relation avec l'article 556. Comme l'article 561 est en
relation avec l'article 556, on va attendre de se brancher
là-dessus.
Le Président (M. Laberge): Article 561 suspendu. Article
562.
M. Bédard: C'est un principe, à l'article 562.
M. Forget: Étant donné...
Le Président (M. Laberge): À l'article 562, on nous
avait demandé quand même de supprimer l'article.
M. Bédard: De supprimer l'article, oui.
Le Président (M. Laberge): Vous nous avez demandé
de le supprimer.
M. Forget: Bon!
M. Bédard: Je pense que là, c'est trop
général.
Le Président (M. Laberge): L'article 562 est
supprimé. J'appelle l'article 563. À l'article 563, il y a une
modification. On en fait lecture.
On nous demande de remplacer les mots "dans la détermination des
besoins et des facultés, le tribunal prend en considération
notamment, les accords conclus entre les époux," ce qui veut dire les
deux premières lignes et les trois premiers mots de la deuxième,
pour les remplacer par ce qui suit: "Dans les décisions relatives aux
effets du divorce à l'égard des époux, le
tribunal tient compte des circonstances dans lesquelles ils se trouvent;
il prend en considération, notamment, leurs besoins et leurs
facultés, les accords qu'ils ont conclus entre eux, et leur âge,
etc."
M. Bédard: Cela va?
M. Forget: Comme d'habitude, M. le Président, quand on
arrive avec rénumération de tout ce dont le tribunal doit tenir
compte, on peut difficilement s'opposer parce qu'on a oublié quelque
chose, mais il y a bien des façons de tenir compte de tout cela, tout
dépend de l'objectif qu'on vise. Dans le fond, je pense que
l'objectif...
M. Bédard: On va préciser un peu les objectifs dans
les autres articles.
M. Forget: ...devrait être précisé ailleurs,
si on ne le précise pas là. Il est évident que, dans la
détermination d'un objectif, il faut tenir compte du plus grand nombre
de choses possible, mais il reste que c'est l'objectif qui est important
par-dessus tout.
Le Président (M. Laberge): Cet article 563 amendé
sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle
l'article 564.
M. Bédard: "Sous réserve des articles qui
précèdent, les dispositions..." Cela va.
Le Président (M. Laberge): Article 564, adopté.
J'appelle l'article 565.
Des effets du divorce à l'égard des
enfants
M. Bédard: L'article 565, c'est le principe. "Le divorce
ne prive pas les enfants des avantages qui leur sont assurés par la loi
ou par le contrat de mariage. Il laisse subsister les droits et les devoirs des
père et mère à l'égard de leurs enfants, sous
réserve de ce qui suit." L'article parle par lui-même.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet article 565 sera
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 566?
M. Bédard: L'article 566 reprend substantiellement le
droit actuel. La question de joindre la demande d'aliments pour un enfant
majeur à celle du conjoint pour éviter des procédures
inutiles, selon la proposition de l'Office de révision du Code civil,
sera examinée dans le cadre des amendements au Code de procédure
civile.
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): Oui, M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: ...nous avons ici une suggestion de l'Association des
centres de services sociaux pour ajouter à l'alinéa suivant: "Le
tribunal peut ajourner l'instruction s'il estime nécessaire de faire
appel à un expert avant de statuer sur la garde des enfants". Il a
déjà ce pouvoir et le ministre croit qu'il n'est pas utile ou, du
moins, qu'il n'est pas nécessaire de faire le rappel de l'expertise
quant à la garde des enfants, à ce moment-ci.
M. Bédard: On a même indiqué "toute
personne." Il y a un amendement qui s'en vient: "II peut consulter...
M. Forget: "...toute personne".
M. Bédard: On y reviendra un peu plus tard.
M. Forget: M. le Président, sur un autre point, ne
semble-t-il pas approprié que l'article 566 qui parle de la garde des
enfants établisse un lien et détermine aussi la question de la
résidence familiale? Sauf erreur, la résidence familiale est
mentionnée de deux façons. Premièrement, comme mesure
provisoire, à l'article 544: "Le tribunal peut statuer sur la garde et
l'éducation des enfants." Non, ce n'est pas là; c'est à
l'article 543, dans un certain sens.
M. Bédard: C'est cela, la résidence.
M. Forget: Sauf erreur, il ne semble pas qu'il y ait d'article
qui fasse référence à la résidence familiale, sauf
dans un endroit où on parle des mesures compensatoires. Il me semble,
encore une fois, que l'on confond deux choses. La mesure compensatoire, c'est
une correction des bilans, en quelque sorte, des deux conjoints au moment du
divorce, un redressement de bilans en fonction de l'apport de chacun, etc. Cela
intéresse les questions patrimoniales. La résidence familiale,
bien sûr, dans la mesure où il est approprié, pour d'autres
raisons, de la confier ou de l'attribuer à un des conjoints qui, par
exemple, a la garde des enfants, peut faire partie du paiement compensatoire.
Mais ce n'est pas le paiement compensatoire qui détermine l'attribution
de la résidence familiale. Ce sont des considérations qui
devraient émarger au chapitre ou à la section qui traite de la
garde des enfants. Je pense qu'au moment de prononcer le divorce
on attribue la garde des enfants et c'est à la lumière de
cette décision que le tribunal devrait déterminer qui devrait
pouvoir réclamer la possession de la résidence familiale. S'il
s'adonne que c'est la même partie, le même conjoint ou le
même exconjoint qui doit également bénéficier d'une
mesure compensatoire, tant mieux. Sinon, ce sont les considérations de
maintien de la stabilité du cadre physique, encore une fois, de la
famille, eu égard à la présence des enfants, qui devraient
être déterminantes.
Il me semble que c'est au moment de l'article 566 qu'on devrait avoir,
dans les effets permanents du jugement de divorce, la mention principale de la
résidence familiale et pas ailleurs. Encore une fois, elle peut
être mentionnée ailleurs aussi à titre accessoire, mais
c'est là que la mention principale devrait se trouver. (16 heures)
M. Bédard: Nous sommes peut-être ici devant des
questions d'opportunité; enfin, je vais quand même les aborder
sous l'angle juridique. Il me paraît quand même inquiétant,
alors que nous sommes devant un divorce et que le choix de la résidence
familiale n'est plus l'affaire conjointe des époux, que le tribunal
puisse, en quelque sorte, s'immiscer dans la conduite future de l'époux
qui a la garde des enfants. Sans doute si, à l'avenir, il choisit pour
les enfants une "résidence familiale", entre guillemets, qui
présente des dangers pour eux, ce sera peut-être une circonstance
que l'autre époux pourra évoquer pour demander la révision
de la garde.
Je me demande s'il n'y aurait pas quelque danger, ici, que ce soit une
véritable ingérence du tribunal dans l'autonomie, en quelque
sorte, de chacun des époux.
M. Forget: Je me suis peut-être mal exprimé, M. le
Président. Je ne suggère pas que le tribunal attribue d'office
une résidence familiale à celui des conjoints qui a la garde des
enfants à partir de zéro. Mais, au moment où la demande de
divorce est présentée, il y a une résidence familiale;
c'est la maison où se trouve celui des deux conjoints qui,
effectivement, s'occupe des enfants et qui a probablement
bénéficié d'une mesure provisoire du tribunal lui
permettant de conserver l'utilisation de la résidence familiale.
Je pense que, à ce moment-là, le tribunal, après
avoir entendu les arguments des deux parties - à moins que les deux
parties, dans leur entente, en aient disposé, c'est bien sûr;
c'est une considération générale qui s'applique à
toutes les conséquences du divorce - s'il n'y a pas entente entre les
deux parties, pas à jamais, mais à ce moment-là, il doit
dire si l'occupation de la résidence familiale doit être
continuée. À supposer qu'il l'attribue à la mère
qui garde les enfants, mais que, par ailleurs, au titre du redressement des
actifs, il estime que cette résidence ne devrait pas lui être
donnée en propriété, il peut quand même lui
consentir un droit d'habitation peut-être pendant une période
déterminée, peut-être indéfiniment, ou
jusqu'à la majorité des enfants, ou Dieu sait quoi.
Encore une fois, la question patrimoniale et la question de la
continuité, ce sont deux questions. Autrement, on s'expose à ce
que le jugement final de divorce soit impuissant à permettre à
celui des deux conjoints qui a la garde des enfants de rester dans la maison
qui était la maison familiale jusque-là et de n'en traiter
qu'incidemment à la question du redressement des actifs. Ce n'est pas
l'endroit. Non seulement ce n'est pas l'endroit dans le code, mais ce n'est pas
le genre de considération qui devrait être
déterminante.
M. Bédard: On va suspendre.
Le Président (M. Laberge): L'article 566 est suspendu.
L'article 567 est appelé.
M. Blank: Je me demande pourquoi on a mis le mot "seul": "La
garde des enfants est confiée à un seul des époux."
Pourquoi le mot "seul"? Si ce n'est pas un seul, ce sont les deux époux.
Il n'y en a pas plus de deux. En anglais, c'est "have only one". Je ne sais pas
pourquoi...
M. Bédard: Je pense que c'est à un des
époux, pas à une tierce personne. C'est dur d'être un
plusieurs!
Le Président (M. Laberge): Le mot "seul" est biffé.
Adopté. L'article 567 sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté, avec amendement.
Article 568.
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): II n'y a pas de
commentaires?
M. Bédard: Je dis adopté, parce qu'il n'y a pas de
commentaires. Les décisions qui concernent l'ensemble peuvent être
révisées à tout moment par le tribunal si les
circonstances le justifient. Cela me semble aller de soi.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 568, adopté.
Article 569.
M. Bédard: On ne réadoptera pas l'article 569.
Le Président (M. Laberge): Non, parfait. Je n'avais pas
encore tourné la page.
M. Bédard: On pourrait revenir...
Le Président (M. Laberge): On va revenir plutôt en
arrière.
M. Bédard: ...à la séparation de corps.
Le Président (M. Laberge): Donc, c'est
antérieur.
M. Forget: ...article 523.
M. Bédard: L'article 523, M. le Président.
Chapitre huitième De la séparation de
corps
Le Président (M. Laberge): Parfait. Chapitre
huitième, De la séparation de corps, section I, Des causes et de
la procédure de séparation de corps.
M. Bédard: Je ne pense pas qu'on ait besoin de reprendre
certaines discussions.
M. Forgets À l'article 523, non, d'accord.
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 523, adopté.
Article 524.
M. Forget: M. le Président, à l'article 524...
M. Bédard: II s'agira de faire la concordance.
Peut-être qu'on pourrait attendre qu'on ait approuvé le texte de
l'article 538, qui peut...
M. Blank: C'est sur cette question que je désire attirer
l'attention du député de Saint-Laurent. Je vais vous donner mon
expérience pratique. Souvent, des couples, ou une des personnes -
normalement, c'est une des personnes - vient à mon bureau pour une
séparation. Elle veut une séparation. Je lui explique les effets
d'une séparation et elle dit: Après, si j'ai besoin d'un divorce,
qu'est-ce qui arrive? Je lui dit: Ce sont les raisons d'un divorce, si vous
avez des raisons d'avoir un divorce. Mais, combien cela va-t-il me
coûter? Je dis: Cela va coûter tant pour une séparation. Si
vous revenez pour un divorce, cela va coûter tel montant. C'est mieux de
prendre un divorce maintenant, je vais économiser de l'argent,
répond cette personne.
Je vais vous dire que, franchement, dans 75% des cas, c'est comme
ça. Si on doit inciter les gens à préférer une
séparation, parce qu'avec une séparation, il y a une chance de
sauver le mariage, et si on a la même raison ou les mêmes motifs
pour avoir un divorce qu'une séparation, c'est seulement pour des motifs
du côté religieux qu'on choisit l'un plutôt que l'autre, et
c'est bien qu'on ait cela. Si le but de cette affaire, ce n'est pas de
faciliter le divorce, mais d'essayer de sauver le mariage, on doit faire la
distinction entre les deux.
M. Bédard: J'ai eu l'occasion déjà de
m'exprimer là-dessus. Il reste qu'un des éléments de la
fin du processus, que ce soit la séparation de corps ou le divorce,
c'est la cessation de vie commune. Je pense qu'on est d'accord
là-dessus. Là où se retrouve la différence, c'est
dans les effets. Je remarquais que le député de Saint-Louis,
dès le début de son intervention, a dit: Lorsque je reçois
des gens, je leur explique les effets. Quand on vient de voir les effets du
divorce, quand ils sont bien expliqués par rapport aux effets de la
séparation de corps, c'est surtout là que doit se prendre la
décision ou qu'on doit tirer des conclusions.
M. Blank: Mais les gens disent: Cela me coûtera moins cher
de me remarier.
M. Bédard: Si on évalue cela en termes de
coût, je ne pense pas qu'on est sur la bonne ligne. Alors qu'un des
éléments principaux, c'est la cessation de vie commune. Pourquoi
rendre cela plus facile dans un cas plutôt que dans l'autre? Je pense
qu'il faut plutôt y aller au niveau des effets, pour faire bien
comprendre à ceux qui sont concernés par la décision
à prendre qu'il y a toute une différence entre les effets d'un
divorce et les effets d'une séparation.
M. Blank: Mais je pense qu'il y a un danger.
M. Bédard: L'irrévocabilité, par
exemple.
M. Blank: II y a un danger dans ce sens-ci: vous avez les raisons
pour un divorce aux articles 538.1, 538.2 et aussi 539, je pense.
M. Bédard: On va voir. C'est parce que...
M. Blank: C'est cela. C'est le "catch all clause". Aujourd'hui,
cela remplace la cruauté mentale et physique, l'adultère,
l'alcoolisme, etc., dans les raisons de divorce. Mais en ce qui concerne la
séparation, aujourd'hui, on peut avoir une séparation devant
n'importe quel tribunal
dans la province pour presque n'importe quelle raison, d'accord? Si les
juges sont d'accord que la séparation, aujourd'hui, c'est la même
chose qu'un divorce, ils vont prendre l'article 539 comme donnant les raisons
de la séparation et on va voir des divorces pour n'importe quelle
raison. "If you snore out of line", vous aurez un divorce. C'est comme cela que
ça marche maintenant quand il s'agit d'une séparation. Une
séparation, on peut en avoir pour n'importe quelle raison.
M. Bédard: Avec l'article 523, on va pouvoir poursuivre la
tradition, s'il y a lieu, parce qu'il s'agit d'une évaluation de ce
qu'est une volonté de vie commune qui est gravement atteinte. Il y a
quand même une latitude...
M. Blank: Mais il y a l'article 524. Le juge va aller à
l'article 524 pour trouver des raisons pour l'article 523.
M. Bédard: Non, c'est différent. "Il est
réputé en être ainsi dans les cas..." Je pense bien, on a
prévu des cas assez exceptionnels. Un juge, à mon sens, qui a le
début du commencement d'interprétation ou d'interrelation entre
deux articles... Il y a une différence entre l'article 523 et l'article
524. On dit: "II en réputé ainsi". Ce n'est pas limitatif, parce
que la règle générale, c'est que la séparation de
corps est prononcée lorsque la volonté de vie commune est
gravement atteinte. Plutôt que de revenir à tous les
critères que vous évoquiez tout à l'heure, je pense qu'on
est tous d'accord qu'une évaluation peut être faite.
M. Blank: Je pense que parce qu'on rattache la séparation
au divorce et le divorce à la séparation, on peut avoir le
divorce sur demande.
M. Bédard: Je ne dis pas que j'ai raison comme tout le
monde. Je pense que c'est une question d'appréciation ou
d'évaluation. Mais il me semble, personnellement, que c'est surtout au
niveau des effets que doit se prendre la décision. C'est joliment
différent dans les deux cas. Quand c'est irrévocable et quand
c'est non irrévocable, il me semble, pour autant que je suis
concerné, qu'il y a une différence fondamentale.
Deuxièmement, quand on regarde l'ensemble des effets du divorce
et ceux de la séparation de corps, encore là, pourvu que ces
effets soient expliqués et comme je sais que le député de
Saint-Louis...
M. Blank: Cela était bon pour les années quand une
personne avait honte de dire qu'elle était divorcée. Aujourd'hui,
c'est changé. La différence entre dire qu'on est divorcé
ou séparé est inexistante.
M. Bédard: En tout cas, j'ai exprimé ma
manière de voir les choses.
Le Président (M. Laberge): L'article demeure ouvert
à cause des concordances?
M. Bédard: C'est cela et on verra la concordance.
Le Président (M. Laberge): L'article 524 est suspendu.
J'appelle l'article 525.
M. Bédard: On l'a presque discuté lors du... Non
seulement presque.
M. Forget: Évidemment, celui-ci aussi devrait être
suspendu parce que, dans le fond, maintenant qu'il est repris substantiellement
dans les motifs du divorce on pourrait en traiter par renvoi de la même
façon.
M. Bédard: Je préférerais qu'il y soit quand
même.
M. Forget: On peut reproduire les autres aussi.
M. Bédard: Oui.
M. Forget: Mais il n'y a pas véritablement de raison,
puisqu'il est repris mot pour mot.
M. Bédard: II y a une concordance à faire, c'est
sûr.
On avait laissé l'article 538 ouvert pour la question des
délais. On pourrait peut-être faire preuve de cohérence en
le laissant ouvert, parce que cela va se refermer en même temps, par la
force des choses.
Le Président (M. Laberge): L'article 525 est suspendu.
Article 526.
M. Bédard: II n'y a pas trop de problèmes.
M. Blank: À l'article 538, on a les délais. Au
premier paragraphe, on parle du mari ou du conjoint qui est absent pour au
moins trois ans. Aujourd'hui, on donne une séparation au moment
où le conjoint part de la maison. Le lendemain qu'il part, on peut avoir
une séparation.
M. Bédard: Oui, mais...
M. Blank: Est-ce que c'est couvert par l'article 523 ou est-ce
qu'on va le faire attendre trois ans maintenant?
M. Bédard: Non, c'est couvert par l'autre article qui
était 538.2. L'article 526 ne pose pas de problèmes?
M. Forget: Sous réserve de la question posée par le
député de Saint-Louis, je pense qu'effectivement si on
légifère par renvoi, à l'article 524, il faudrait se poser
des questions sur les délais. Je pense que la question de simplement
légiférer en séparation de corps par renvoi avec le
divorce, en dépit de l'argument qu'a présenté le ministre
que les effets sont différents, certes, on est d'accord. Les effets sont
différents, mais les délais et les causes peuvent-elles
être identiques? A priori, je dirais non, pas nécessairement.
M. Bédard: Au départ, elles ne sont pas identiques,
parce que le libellé général, lorsqu'il s'agit d'une
séparation de corps et lorsqu'il s'agit d'un divorce, est
différent. Quand on parle de volonté de vie commune gravement
atteinte et que, dans l'autre, on parle de volonté de vie commune
irrémédiablement atteinte, ce sont deux choses
différentes. (16 h 15)
M. Blank: Parce qu'il y a des échecs en effet. Un mari qui
abandonne sa famille, après une semaine, madame a besoin de certaines
choses pour les enfants. La seule façon pour qu'elle puisse les avoir,
c'est de prendre une action en séparation pour demander une pension
alimentaire provisoire, d'accord. Si une semaine n'est pas assez, si ce n'est
pas gravement atteint, jusqu'à quel point madame peut-elle aller
à la cour pour avoir une pension provisoire? À quel point?
M. Bédard: Si son mari est en faute, elle n'a pas besoin
de la séparation de corps pour obtenir des aliments.
M. Blank: Oui, je sais ça aussi, mais si elle ne veut pas
vivre avec ce monsieur?
M. Bédard: Cela paraît frapper, le cas que donne le
député de Saint-Louis, mais... Elle fait une demande en
séparation de corps, quoi.
M. Blank: Oui, elle fait une demande, mais il faut avoir des
raisons.
M. Bédard: II me semble que ça va de soi. Quand on
fait une demande de séparation de corps, on est rendu aux
procédures, il faut avoir des raisons.
M. Blank: Mais si on ne donne pas les raisons de la loi, si on
prend la séparation de corps sachant que dans deux ans la cour va la
rejeter, en attendant on va avoir tous un peu...
M. Bédard: Non, là, je reviens à ce que je
vous disais tout à l'heure. Ce n'est pas vrai qu'on limite les raisons
de la séparation de corps à celles qui sont
énoncées au niveau du divorce parce que ce serait
interpréter l'article 524 comme voulant tout dire. Il y a un article 523
aussi qui existe.
M. Blank: Moi, dans tout ça, je vois que les causes de
divorce maintenant sont plus faciles et les causes de séparation sont
plus dures. Vous allez dans la direction avec la séparation où il
est peut-être plus difficile d'avoir une séparation et plus facile
d'avoir un divorce. Je parle de la loi d'aujourd'hui. Je ne parle pas de
l'autre. Aujourd'hui, c'est plus facile d'avoir une séparation qu'un
divorce. Avec votre loi c'est exactement plus facile d'avoir un divorce qu'une
séparation.
M. Bédard: Faites-en la démonstration. Je suis loin
d'être convaincu. Je comprends que cela puisse s'affirmer mais ce n'est
pas la conviction que j'ai. En tout cas, on va avoir à revenir sur les
causes du divorce et à ce moment-là ça nous permettra de
voir jusqu'à quel point il est opportun d'ajouter quelque chose au
niveau de la séparation de corps.
Le Président (M. Laberge): 526 est relié à
525, donc suspendu. J'appelle 527.
M. Bédard: 527, est-ce que ça va?
Le Président (M. Laberge): 527, adopté?
M. Bédard: II est simplement supprimé pour les
mêmes raisons que pour... il s'agit de le reporter au Code de
procédure civile parce qu'il s'agit de l'effet du jugement.
Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il y a entre 527 et
536 des amendements à suggérer? Je n'ai pas de papillons ici.
M. Bédard: Je vais vous l'indiquer rapidement. Oui.
Le Président (M. Laberge): Mais, je ne les ai pas. Alors,
si on peut les porter à ma connaissance.
M. Bédard: Oui, on va essayer de...
Le Président (M. Laberge): II y a peut-être
quelqu'un qui les a en main.
M. Bédard: Alors, 527 c'est plutôt...
M. Blank: Sur le même sujet. Je sais que dans les provinces
de droit commun, il n'y a pas de séparation de corps. Cela veut dire que
c'est un contrat privé qu'on signe, si on veut signer, ou qu'on ne signe
pas. Ici au Québec, avec la loi actuelle, si un couple décide de
vivre séparément, comme le ministre l'a dit, une des parties a le
droit d'aller à la cour pour demander une pension alimentaire pour la
garde des enfants
nonobstant le fait qu'il n'y ait pas d'action en divorce
d'intentée. Pour quelle raison a-ton besoin d'avoir ce système de
séparation si c'est couvert par l'autre? Quel est le
bénéfice, quel est la raison d'être de la séparation
de corps actuellement dans notre loi? Quand on n'avait pas le divorce dans la
province de Québec, il y avait une raison pour avoir la
séparation de corps. Maintenant, avec le divorce, qu'est-ce que cela
ajoute aux obligations des personnes?
Mme Lavoie-Roux: Quand on regarde l'article 538,3°, je vous
assure que c'est bien proche de la séparation de corps, ou la
séparation de corps est bien proche de ce motif, de cette provision, de
cette disposition qu'on trouve pour un divorce éventuel.
M. Bédard: Cela ne peut pas faire autrement que de se
ressembler d'une certaine façon. Après tout, on est à la
fin... Soyons réalistes...
Mme Lavoie-Roux: C'est presque la même chose.
M. Bédard: ... on est dans la situation de gens qui ne
veulent plus faire vie commune ensemble. On ne peut pas imaginer...
M. Blank: D'accord. Ils ne vivent plus ensemble. Est-ce qu'on a
besoin d'un jugement de la cour pour dire qu'ils ne vivent pas ensemble? Ils
ont besoin d'un jugement de la cour pour la garde des enfants et la pension
alimentaire. Ils ont ce droit dans la loi actuelle, sans séparation.
M. Bédard: Non, mais, s'ils veulent une séparation,
elle est là. Franchement...
M. Blank: Pourquoi? Ils sont séparés, qu'est-ce que
le jugement donne de plus?
M. Bédard: II y a des conséquences
pécuniaires, on va le voir au niveau des effets de la séparation
de corps.
M. Blank: Quelles sont les conséquences qu'on ne peut pas
avoir avec la loi actuelle?
M. Bédard: II y aura la prestation compensatoire qui est
déjà indiquée. Il y a les donations, enfin, tout ce qui
est patrimonial, le contrat de mariage lui-même. Il y a la dissolution du
régime matrimonial, s'ils sont en communauté ou en
société d'acquêts. Je ne fais qu'énumérer...
J'en oublierai sans doute, mais il y a certaines de ces
conséquences...
M. Blank: Qu'est-ce que cela change?
M. Forget: Comment imaginer que des gens qui sont
séparés en vertu d'un jugement veuillent continuer à vivre
en société d'acquêts? C'est invraisemblable. Ils vont
vouloir se séparer, mais... Donc, ce n'est pas une différence
entre le divorce et la séparation de corps.
M. Bédard: Non. Nous étions plutôt à
parler de la différence entre une séparation de fait non
judiciaire et une séparation de corps judiciaire. Il y a tout l'aspect
patrimonial qui reçoit une solution.
Il demandait pourquoi une séparation de biens, je pense qu'on va
le voir dans...
M. Blank: Oui, je demande pourquoi. Je voudrais une
réponse, parce que, dans toutes les autres provinces, il y a la
séparation de biens par la loi.
M. Bédard: On va le voir dans les effets de la
séparation de corps.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je me demande si ce qui
apparaît un peu comme une particularité pour le Québec
n'est pas relié à la question religieuse, historiquement. Le
divorce n'est pas permis par l'Église, du moins, je le pense encore;
c'est pour cela que c'était le compromis humain, si on veut, le
compromis juridique qu'on avait trouvé de la séparation de corps.
C'est peut-être ce qui explique qu'il ne l'était pas dans les
autres provinces.
M. Bédard: Vous avez en grande partie touché au
point.
M. Blank: Le fait que M. Guay m'ait répondu... Le fait
qu'on ait un système d'acquêts ou de communauté des biens
nous rend un peu différents des autres provinces. C'est notre
problème.
M. Bédard: Ou notre richesse.
M. Blank: Notre richesse? Je ne sais pas. Je ne suis pas 100%
d'accord.
M. Bédard: À ma connaissance, il y a au moins deux
provinces de l'Ouest qui connaissent la séparation judiciaire, le
Manitoba et...
M. Blank: Le Manitoba, pour les mêmes raisons.
M. Bédard: C'est sans doute pour les mêmes
raisons.
C'est notre société.
M. Blank: La Cour suprême a dit que
c'est le même...
M. Bédard: À l'article 527, nous avions un papillon
pour le supprimer.
Le Président (M. Laberge): L'article 527 sera-t-il
supprimé?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 527 est
supprimé. Article 528?
M. Bédard: À l'article 528, c'est le principe
général. La séparation de corps délie les
époux de l'obligation de faire vie commune. Ils n'auront pas le lien du
mariage.
Le Président (M. Laberge): Article 528, adopté.
À l'article 529, il y a un amendement pour remplacer, à la
troisième ligne du deuxième alinéa, le mot "reporte" par
"fasse remonter". C'est déjà une concordance avec ce qui a
déjà été fait à plusieurs endroits.
Amendement adopté. L'article 529 amendé est-il adopté?
M. Bédard: Je ne sais pas s'il y a des remarques. Non, je
n'ai pas de remarques spéciales.
Le Président (M. Laberge): Avez-vous des questions sur
l'article 529? Article 529, adopté. J'appelle l'article 530.
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 530, adopté.
À l'article 531, il y a une modification qui m'est
suggérée: Ajouter, a la fin du deuxième alinéa, ce
qui suit: Après le mot "détermine", ajouter une virgule et les
mots: "en tenant compte des circonstances dans lesquelles se trouvent les
parties." Je répète: " en tenant compte des circonstances dans
lesquelles...
M. Bédard: On a adopté... C'est dans le même
sens que l'autre.
Le Président (M. Laberge): Oui, il y a déjà
eu une concordance, il y a déjà eu quelque chose comme ça.
" ... se trouvent les parties."
M. Bédard: Adopté?
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement est
adopté?
Adopté. L'article 531 amendé est adopté.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
J'appelle l'article 532.
M. Bédard: II y aura sûrement un petit amendement
sur l'accroissement par enrichissement. C'est un amendement de concordance
avec...
Le Président (M. Laberge): Attendez! Il faudra...
Après le mot...
M. Blank: Disons qu'un couple se sépare et le juge rend
son jugement en se basant sur la prestation compensatoire. Après deux ou
trois ans, l'une des parties demande le divorce. Est-ce que le juge, au moment
du divorce, a le droit de changer ça?
M. Bédard: La prestation? Elle a été
accordée. C'est peu probable, une fois la séparation de corps
prononcée, la prestation établie, que pendant le laps de temps de
vie en séparation de corps jusqu'au divorce il y ait eu un nouvel apport
d'un époux à l'autre, mais, s'il y avait un nouvel apport d'un
époux à l'autre, sans doute qu'il pourrait être pris en
considération au moment du divorce, mais comme la séparation de
corps...
M. Blank: S'ils vivent séparément, comment peut-il
y avoir un nouvel apport d'un époux à l'autre?
M. Bédard: C'est pour ça que je dis que
probablement...
M. Blank: Oui, mais si le juge en deuxième instance de
divorce pense que le premier juge a fait erreur et dit j'ai le droit de changer
cela, j'ai le droit de fixer un montant forfaitaire cette fois-ci?
M. Bédard: Ce qu'on vient de dire, ce n'est pas une
révision, c'est si, dans l'intervalle...
M. Blank: Oui, mais ne pensez-vous pas qu'on doit mettre quelque
chose ici à l'effet qu'on ne peut pas le réviser, même au
moment du divorce?
M. Bédard: II n'y a pas de révision.
Peut-être que le jugement ne sera pas porté en appel, il va
être passé en force de chose jugée selon sans doute la
règle générale. Il n'y a pas de révision, ce n'est
pas une mesure provisoire. C'est de la nature d'une dette qui est due comme
tout jugement et une fois que le jugement a été rendu...
À l'article 532 il y avait...
Le Président (M. Laberge): A l'article 532 on nous demande
de changer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du
patrimoine". C'est de concordance avec ce dont on a discuté tout
à l'heure.
L'article 532 amendé sera-t-il adopté? M. Bédard:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
J'appelle l'article 533.
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 533 est
adopté. J'appelle l'article 534.
M. Bédard: "À l'égard des enfants, la
séparation de corps produit les mêmes effets que le divorce", cela
va de soi.
Le Président (M. Laberge): L'article 534 est
adopté. J'appelle l'article 535.
M. Bédard: " La reprise volontaire de la vie commune met
fin à la séparation de corps. "La séparation de biens
subsiste, sauf si les époux choisissent, par contrat de mariage, un
régime matrimonial différent."
Mme Lavoie-Roux: M. le Président... Vas-yl
M. Blank: M. le ministre, je vois beaucoup de
références ici dans cette section de la séparation... Le
divorce...
M. Bédard: C'est la cessation de la vie commune. Bon!
M. Blank: Oui, d'accord, je suis d'accord avec vous, mais du
côté pratique, à un moment donné, vous devrez
proclamer cette loi-ci. Les articles concernant le divorce... Jusqu'au moment
où vous ne proclamerez pas les articles concernant le divorce, je ne
sais pas si ces articles-ci seront en vigueur. (16 h 30)
M. Bédard: C'est justement, le mariage et le divorce... On
sait qu'on a un problème.
M. Blank: Cela veut dire que vous ne pouvez pas proclamer les
articles sur la séparation avant de...
M. Bédard: Ne me le faites pas dire d'une façon
très catégorique, mais il est évident que chacun des
articles sera analysé et suranalysé avant quelque mise en vigueur
que ce soit et on sait que le mariage et le divorce sont de
compétence...
M. Blank: Oui, mais je veux dire qu'en fait, vous ne pouvez pas
proclamer les articles sur la séparation avant de proclamer ceux sur le
divorce parce que vous avez trop de références à...
M. Bédard: Non, non. Ce n'est pas à cause des
références. C'est à cause du problème
constitutionnel lui-même qui fait que le mariage...
M. Blank: ... la séparation.
M. Bédard: ...dans une grande partie relève...
M. Blank: Mais les effets de la séparation...
M. Bédard: ...du fédéral sauf tout ce qui
regarde - et là, je ne voudrais pas affirmer des choses sans avoir
l'opinion - la célébration, etc. Ensuite, il y a...
M. Blank: Ici, on a les effets de la séparation. Je pense
qu'il n'y a pas de problème. C'est notre domaine.
M. Bédard: Merci, je vais le noter.
M. Blank: Oui. D'accord. Mais ici, quand vous faites allusion aux
articles sur le divorce, vous ne pouvez pas les appliquer avant de proclamer
les autres. Ne pensez-vous pas que ce serait mieux de faire l'inverse, dans la
loi ici et, dans le divorce, de référer à la
séparation?
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais soulever un
point sur toute la section touchant la séparation.
M. Blank: Je voulais seulement faire une mise en garde. Vous
prendrez vos responsabilités.
M. Bédard: J'en prends bonne note, M. le
député de Saint-Louis.
Mme Lavoie-Roux: Touchant la séparation de corps, c'est
vrai qu'on dit à l'article 526: "Sous réserve des règles
particulières à la demande prévue par l'article 525, les
règles relatives à l'instance en divorce sont applicables
à la demande de séparation de corps." Il reste que le chapitre
sur le divorce suit celui sur la séparation de corps et, à part
le motif religieux dont j'ai parlé tout à l'heure, il y a
peut-être, en tout cas, dans notre esprit ou dans notre tradition -
appelez-le comme vous voudrez -un élément à savoir que la
séparation de corps était quelque chose de moins
irrévocable et où, possiblement, la réconciliation
était encore possible, mais à aucun moment dans aucun article on
ne fait appel à des mécanismes de conciliation que le tribunal
pourrait recommander. Je regardais peut-être à l'article...
M. Bédard: Ce sont les mêmes qu'en matière de
divorce.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais je me demande s'ils ne pourraient pas
être inclus quelque part dans la séparation de corps. Finalement,
le modèle pour la séparation de corps, c'est le divorce.
M. Bédard: Je ne sais pas. Ils sont inclus. On y fait
allusion.
Mme Lavoie-Roux: Je sais bien qu'ils sont inclus, mais dans une
logique... Parce que, dans le fond, je vous assure que la séparation de
corps ne tient plus à grand-chose comme mécanisme ou comme
procédure.
M. Bédard: On peut donner cette impression parce qu'on
fait des références.
Mme Lavoie-Roux: Tout le monde dans son discours a dit que la
séparation de corps était moins permanente que le divorce. Cela
suppose des possibilités de réconciliation. Cela suppose un geste
moins irrémédiable ou irrévocable, mais il me semble que
si on veut être logique avec ça il y aurait peut-être moyen,
à un article au moins, de parler de ces procédures. Je comprends
que vous les prévoyiez pour le divorce, mais il semblerait que...
M. Bédard: II y a déjà...
Mme Lavoie-Roux: Peut-être seulement à un article
parce que...
M. Bédard: ...une référence... Mme
Lavoie-Roux: Oui.
M. Bédard: ...à l'obligation de favoriser la
conciliation, etc.
Mme Lavoie-Roux: Mais il me semble qu'on devrait le mettre dans
la séparation de corps si ce n'est pas autre chose.
M. Bédard: Mais ça y est. C'est peut-être
juridiquement ça n'y est pas visuellement, mais ça y est
légalement. On s'entend là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Oui, ça y est juridiquement. Je suis
d'accord avec vous. En tout cas, dans l'esprit où on a maintenu la
séparation de corps, il me semble que l'un des motifs qu'on a
invoqués c'était le fait d'une étape normalement
antérieure au divorce, moins finale, avec plus de possibilités de
réconciliation.
M. Bédard: D'ailleurs...
Mme Lavoie-Roux: II faut se référer au chapitre sur
le divorce pour retrouver ces éléments.
M. Bédard: C'était pour ne pas... Je pense qu'on se
comprend. C'était pour ne pas répéter.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, je le fais comme suggestion.
M. Bédard: II y a un effet de différent. De la fin
de la séparation de corps. "La reprise volontaire - article 535 - de la
vie commune met fin à la séparation de corps. "La
séparation de biens subsiste, sauf si les époux choisissent, par
"contrat de mariage, un régime matrimonial différent".
Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être à l'article 533 que
vous pourriez ajouter quelque chose.
M. Bédard: Est-ce qu'il y a besoin d'explication? Vous
voudriez que cela se répète.
Le Président (M. Laberge): Je vais vous demander la
permission de rouvrir l'article 531 qu'on avait adopté avec un
amendement. On a porté à ma connaissance, parce qu'on vient d'y
mettre la main, qu'on a oublié de changer certains mots.
À l'article 531, on nous demandait de supprimer, a la fin du
premier alinéa, les mots "sauf stipulation contraire du contrat".
M. Bédard: Ah, oui.
Le Président (M. Laberge): Et de terminer l'alinéa
par le mot "mariage" avec un point. Est-ce que cela est adopté? Et
l'autre c'était d'ajouter à la fin du deuxième, on l'a
fait déjà, "en tenant compte des circonstances dans lesquelles se
trouvent les parties". Cela va?
À l'article 532, la correction a été faite. Il y
avait juste ces mots à biffer. Je vous remercie, c'est
adopté.
M. Bédard: À l'article 535, est-ce qu'il y a des
remarques?
M. Forget: Je vais vous laisser faire le reste tout seul, comme
cela, M. le Président. Vous avez l'air de faire cela très
efficacement.
M. Bédard: Article 535.
M. Forget: Vous faites les propositions et les votes de
façon fort efficace.
Le Président (M. Laberge): Je savais que la discussion
avait été faite.
M. Forget: Je sais.
M. Bédard: Ce n'est pas un reproche que fait le
député de Saint-Laurent au président, au contraire.
M. Forget: Touche d'humour peut-être pas très
réussie, mais...
Le Président (M. Laberge): Non, non, c'est parfait.
A l'article 535, est-ce qu'il y a...
M. Bédard: Y a-t-il des questions? "La reprise volontaire
de la vie commune met fin à la séparation de corps". Je pense que
cela va de soi.
M. Forget: Dans les chapitres relatifs au divorce, la disposition
équivalente est un peu différente. On dit: "La seule reprise de
la cohabitation pendant moins de quatre-vingt-dix jours ne fait pas
présumer la réconciliation". Il y a les articles 549 et 550 dans
le divorce. "La réconciliation des époux survenue depuis la
demande met fin à l'instance". C'est cela qu'on reproduit.
Maintenant, la présomption de l'article 550 n'est pas
reproduite.
M. Bédard: Non.
M. Forget: Cela donne force à l'argumentation de la
députée de L'Acadie qui disait qu'il semble que la
réconciliation a moins de poids dans la séparation de corps que
dans le divorce.
Mme Lavoie-Roux: Ah, oui.
M. Bédard: Peut-être qu'on pourrait...
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce qu'on voulait.
M. Forget: Non, pas dans l'esprit, mais, apparemment,
d'après la rédaction. Je ne fais de procès d'intention
à personne.
M. Bédard: Non, je suis convaincu de cela.
M. Forget: Cela nous arrive, mais pas cette fois-ci.
Le Président (M. Laberge): Article 535.
M. Bédard: Je vous fais confiance quand vous en avez
l'intention.
Ce qu'on veut, c'est une reprise volontaire de la vie commune,
c'est-à-dire l'intention liée au fait matériel d'une
communauté de vie et non pas en exigeant une simple réunion ou
une simple cohabitation. Il faut qu'ils aient le désir de vivre vraiment
ensemble.
Excusez, je pense que Mme la députée de L'Acadie avait une
question.
Le Président (M. Laberge): Oui, mais elle m'a parlé
de l'article 533. Je m'excuse, j'ai peut-être eu un moment de
distraction.
Mme Lavoie-Roux: Non, je pense que cela a été
adopté avec tout le reste.
M. Bédard: À l'article 535, est-ce qu'il y a
d'autres questions?
Le Président (M. Laberge): Est-ce que tout est complet
pour l'article 535?
Mme Lavoie-Roux: Ma question demeure...
M. Forget: Pertinente.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si elle est pertinente, je
laisserai aux autres le soin de juger, mais j'ai exprimé au moins un
souhait. C'est que quelque part dans le chapitre de la séparation de
corps on trouve un recours à des mécanismes de conciliation.
Là, on a adopté tous les articles...
M. Bédard: Ce que vous voulez, c'est qu'on reproduise
l'article qui était au niveau du divorce comme à l'article...
L'obligation de concilier à tout moment de l'instance, autrement dit.
À tout moment de l'instance en séparation de corps, il entre dans
la mission du tribunal de conseiller, de favoriser la conciliation des parties
et l'intérêt des enfants; je crois qu'on l'avait
évoqué aussi.
Le Président (M. Laberge): Et de veiller aux
intérêts de l'enfant.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Pourquoi ne le
répéterait-on pas une fois de plus?
Le Président (M. Laberge): Et de veiller aux
intérêts de l'enfant. C'est l'article 539.
M. Bédard: Je n'ai pas objection.
Le Président (M. Laberge): L'article 535, on n'y a pas
touché encore. Les articles 533 et 534 sont adoptés. L'article
535, on n'en a pas parlé encore.
M. Bédard: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Ce sera 539.
M. Bédard: Cela existait déjà, ce sera
visuellement...
Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il faudra le reporter
après l'article 526.
M. Bédard: Je ne voudrais pas apporter
des complications à nos juristes plus qu'il ne le faut, mais je
pense que c'est possible.
Mme Lavoie-Roux: Je sais que les juristes veulent être
très concis, je les admire depuis le début, mais... C'est un
chapitre qui vient avant le chapitre du divorce, de toute façon.
M. Bédard: Cela pourrait être après l'article
525.
Le Président (M. Laberge): Oui, parce que c'est avant de
prononcer ou après.
M. Bédard: Ah! Oui.
Le Président (M. Laberge): La prononciation,
l'énoncé.
M. Bédard: On va donner un moment de réflexion.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela, réfléchissez.
Le Président (M. Laberge): Cela va prendre cinq
minutes.
Mme Lavoie-Roux: Vous devez passer tous vos loisirs à
réfléchir.
M. Bédard: On s'entend tous. À moins de raisons
péremptoires...
Le Président (M. Laberge): Les articles 525 et 526
étant suspendus, cela peut être placé là.
M. Bédard: On va se solidariser pour le
répéter dans la séparation de corps. L'article 535, cela
va.
Le Président (M. Laberge): Si cela va, ça peut
être adopté.
M. Forget: Cela va, oui. Si je comprends bien, il y aurait quand
même, à cause de la différence entre l'article 535 et
l'article 550, la possibilité qu'une cohabitation de moins de 90 jours
fasse présumer de la réconciliation dans le cas d'une
séparation de corps.
M. Bédard: Oui, si on joint à
l'élément de cohabitation l'intention de reprise. C'est tout le
problème de la réunion des deux éléments, de
l'intention, d'une part, et du fait plus matériel de la
cohabitation.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 535, adopté.
Article 536.
M. Bédard: À moins qu'on ne trouve une autre cause
qui dissout le mariage, le mariage se dissout par le décès de
l'un des conjoints ou par le divorce.
Mme Lavoie-Roux: Ou s'il y en a un qui s'en va sur une autre
planète!
Le Président (M. Laberge): Article 536, adopté. Un
moment. La commission suspend ses travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 43)
(Reprise de la séance à 16 h 55)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
Étude des articles suspendus
La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux. Nous
avons a retoucher certains articles que nous avons laissés en suspens au
cours de notre étude. Si vous le voulez bien, je commencerai par
l'article 403 où on nous demande, au premier alinéa, d'ajouter,
après le mot "tribunal", les mots "pour motif sérieux".
M. Forget: M. le Président, j'aurais quelques remarques
préliminaires à faire au moment du début de l'étude
des articles suspendus. Il s'agit en quelque sorte d'un dernier regard pour la
commission parlementaire...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ... sur l'ensemble des articles. Je voudrais souligner
à ce moment-ci le rythme assez soutenu auquel nous avons
procédé; nous avons accumulé plus de trente heures de
travail en commission parlementaire au rythme de dix heures par jour pendant
quatre jours et demi. Ceci a laissé bien peu de temps pour la
réflexion, la maturation et les nouvelles rédactions. Donc, il y
a déjà une difficulté de prendre un certain recul sur le
travail de chaque journée, de manière à voir si on ne fait
pas d'erreur, si on n'a pas omis les concordances, etc. Donc, nous sommes
déjà en certain désavantage, et je parle des deux
côtés de la commission.
En plus de cela, il y a une difficulté additionnelle.
Nous-mêmes et nos recherchistes aurions aimé pouvoir nous
préparer à l'étude de ce second regard, les articles
suspendus, à la lumière de la transcription des
délibérations de la commission, parce qu'on ne peut pas tout
noter, on ne peut pas se souvenir de tout pour les journées
antérieures. Or, à ce moment-ci, ou, du moins, à la date
de ce
midi, nous n'avions reçu que la transcription des
délibérations de la commission pour mercredi dernier. Nous
n'avions aucune nouvelle de jeudi, vendredi, lundi et, à plus forte
raison, hier. On va revenir sur des discussions que nous avons
déjà eues. Je sais que le ministre est désireux, et nous
aussi d'ailleurs, de ne pas rouvrir le débat qui a déjà
été fait, mais, d'un autre côté, on aurait bien
aimé pouvoir retrouver les éléments principaux de ce
débat pour voir quels étaient les consensus, s'il y en avait, les
indications données par les uns et par les autres pour voir si les
amendements qu'on se prépare à nous soumettre et qu'on nous a
déjà communiqués ce matin ou hier soir étaient
conformes à ce qui avait été plus ou moins entendu au
niveau d'une nouvelle rédaction. Ceci est d'autant plus important, comme
vous l'avez remarqué, que nous nous sommes abstenus de préparer
des amendements formels. Il n'est pas coutumier pour le travail d'une
commission parlementaire de procéder aussi informellement, mais ceci a
été fait délibérément de notre
côté pour éviter -d'ailleurs, nous en avions parlé,
le ministre et moi - que chacun y aille de sa petite motion
préférée. Nous voulions plutôt demander à
ceux qui sont les experts, qui ont aidé et présidé
à la rédaction du projet de veiller au libellé de
manière à respecter l'unité de style, etc. du projet.
C'était la meilleure façon. Évidemment, si nous avions
voulu faire de l'obstruction, ce n'est certainement pas la méthode que
nous aurions prise, parce qu'elle nous privait, en quelque sorte, de notre
droit de parole. De toute manière, cela a été
interprété très libéralement par le ministre et par
vous-même, M. le Président, je ne dis pas ça pour me
plaindre mais pour souligner justement que comme nous n'avons pas de motion
formelle, nous nous en remettions en totalité au consensus qui se
dégageait, il était d'autant plus nécessaire de relire, de
pouvoir prendre connaissance du compte rendu des débats. (17 heures)
Sans la transcription des débats - le travail est
déjà difficile - disponible, je pense qu'on a vraiment une
situation telle qu'on doive vraiment se poser la question: Est-ce qu'il est
raisonnable d'aller au-delà du travail qui est déjà fait?
La réponse qu'on devrait apporter à cette question, si nous
étions entièrement responsables et raisonnables dans la conduite
de nos travaux, ce serait: Non, il vaut mieux regarder ce qui a
été fait, regarder les discussions qui ont eu lieu, voir quels
sont les points qui ont été soulevés et profiter vraiment
de cette dernière révision pour s'assurer vraiment qu'il y a une
cohérence et qu'on a tenu compte de toutes les
représentations.
Autrement, M. le Président, je pense qu'on va y aller de
façon doublement aveugle. On a déjà des problèmes
avec un travail aussi monumental, je pense que nous nous doutions tous, avant
de commencer l'étude du projet de réforme du Code civil, que
c'était quelque chose de compliqué, qu'il y avait
énormément d'implications. Après quatre jours et demi de
travaux on est encore plus persuadé qu'avant qu'on est à faire
quelque chose d'extrêmement important et extrêmement complexe
aussi. On n'a tout simplement pas le recul actuellement pour assurer nos
collègues de l'Assemblée nationale, qui ne sont pas membres de la
commission, qu'en quelques heures on leur présenterait le rapport de nos
travaux, qu'on a véritablement fait un travail impeccable dont on peut
se sentir fier et responsable.
Dans mon propre esprit il y a énormément de questions que
je n'ai pas eu le temps de regarder, des réponses qui ont
été faites ou des rédactions qui ont été
adoptées, même de bonne foi, bien sûr, de la part de tout le
monde, et on n'a aucun recul. On va livrer un produit qui va un peu sentir
l'improvisation. Je ne le dis pas de façon péjorative; je pense
que tout le monde fait de son mieux dans les circonstances, mais ce sont
plutôt les circonstances elles-mêmes qui sont difficiles et
peut-être même impossibles pour faire un bon travail.
Il y a un nombre très considérable de changements.
J'espère que vous en avez tenu compte complètement, mais ce n'est
certainement pas le cas de votre humble serviteur qui les a notés au
passage, qui a fait des annotations sur son texte, etc., mais il reste qu'on
est loin d'être sûr d'avoir un tableau complet, parce qu'en
même temps qu'on fait un amendement, on essaie de prendre connaissance
des notes qu'on a faites sur l'article qui s'en vient et de voir si on n'a rien
oublié.
J'hésite vraiment, M. le Président, à me
prêter à un exercice comme celui-là. Je ne veux pas donner
l'impression, par ces remarques, que nous voulons gêner en quoi que ce
soit l'adoption d'un nouveau Code civil. C'est la raison pour laquelle je
m'exprime avec un peu d'hésitation, mais autant je souscris au
désir de modifier le Code civil, autant je m'inquiète de la
façon dont je le fais avec les autres membres de l'Assemblée. Je
n'ai pas l'impression d'avoir tout ce qu'il faut pour faire un bon travail.
Encore une fois on va nous présenter des choses... On va
être porté presque infailliblement à rouvrir le
débat sur certaines choses simplement ne serait-ce que par oubli de
certaines discussions qu'on a eues et on ne sait pas si on a couvert tel ou tel
point. Enfin, on peut bien se prêter à ça si c'est la seule
solution et la seule façon de procéder que le ministre est
capable d'envisager à ce moment-ci, étant donné les
contraintes qui sont siennes, mais je voudrais
tout de suite le mettre en garde contre ce qui peut sembler aussi, de la
part des observateurs de l'extérieur, comme une précipitation
indue dans la façon de faire une tâche qui est extrêmement
importante. Ce sont les remarques que je voulais faire à ce moment-ci,
M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais appuyer les
remarques de mon collègue de Saint-Laurent. Je vais le faire
brièvement. L'intervention du député de Saint-Laurent
ainsi que la mienne ne sont pas une tentative de faire de l'obstruction aux
travaux jusqu'à 18 heures.
Évidemment, on pourrait se dire: Vous, Mme la
députée de L'Acadie, comme certains autres qui sont de l'autre
côté de la table, ce n'est pas vraiment votre domaine, non plus.
Que vous vous sentiez un peu mêlés et que vous ne fassiez pas
automatiquement, sur le champ, la concordance entre la section 4 et la section
3 ou le chapitre 2 et le chapitre 8, il ne faut pas trop s'en inquiéter
parce que, nous les juristes, on comprend tout cela et, dès qu'il y a un
amendement qui a été fait à tel point, dans notre esprit,
automatiquement, on peut se référer à l'autre modification
qui a été faite à une autre partie de la loi. Mais il
reste, si mes collègues de l'autre côté n'ont pas
d'objection à s'associer à nous sur ce point, qu'on aura
tenté de traduire, ici, ce que peut-être le monde ordinaire qui va
devoir vivre avec cette loi, va rencontrer comme obstacles à des
interprétations, à ce qui peut leur apparaître ou à
ce qui m'apparaissait des incohérences ou des incompréhensions et
toujours, compte tenu de ma non-spécialisation, dans un domaine
juridique aussi complexe que celui-là. Je dois vous dire qu'on a mis
à l'oeuvre nos deux recherchistes, une s'étant même
ajoutée par surcroît, compte tenu de la complexité de
l'affaire. On a travaillé ici de 22 heures à 24 heures. Je dois
vous avouer, bien humblement, qu'après 24 heures, je ne m'en allais pas
toujours pour relire ce qu'on avait discuté l'après-midi,
d'autant plus qu'on ne pouvait pas le relire et qu'on ne peut même pas le
relire plusieurs jours après. Je me sens assez mal à l'aise. On
va peut-être reprendre chacun des articles, d'une façon beaucoup
plus rapide, même ceux auxquels on n'a pas apporté de
modifications, pour s'assurer qu'il y a une certaine cohérence dans
l'ensemble du projet de loi.
Ce sont des remarques que j'ai eues de l'extérieur et je pense
qu'une bonne illustration de ceci - je n'ai pas l'habitude de critiquer les
journalistes, je pense qu'ils essaient de faire leur boulot le mieux possible -
mais si vous référez, par exemple, à un article qui a paru
dans la Gazette de ce matin... Vous ne l'avez peut-être pas lu, je ne
l'aurais pas lu si quelqu'un ne me l'avait pas signalé. Vous savez, on
n'a pas eu souvent de journalistes qui nous ont honoré de leur
présence. Hier, tout à coup, on en a vu un groupe fort
impressionnant; je pense qu'ils étaient trois. C'était la
première fois qu'on voyait ça, trois sont venus! Cela a
donné comme résultat qu'il y a eu, dans la Gazette, un long
article - peut-être y en a-t-il eu dans le Devoir, je l'ai mais je ne
l'ai pas encore lu - qui à mon point de vue, ne rapportait pas, pour le
moins d'une façon très fidèle, ce qui s'était
passé à la commission. On m'a même rapporté que
-c'est rendu dans le Globe and Mail -l'intervention du député de
Saint-Laurent sur le fameux...
M. Forget: ...sur l'intervention du député de
Saint-Laurent.
Mme Lavoie-Roux: Oui, et de ça, on a fait un long article.
Je ne veux pas ridiculer personne, mais c'est pour montrer la complexité
de la chose. Même, quand les gens viennent s'asseoir ici et, je
pense...
M. Forget: ...
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ça, vous pourrez m'en parler
après.
M. Forget: ...
Mme Lavoie-Roux: Toutes ces remarques ayant été
faites et, regrettant d'être obligée de travailler avec ce qui
semble une certaine précipitation, je voudrais, au moment où on
va aborder les amendements et peut-être, possiblement, faire une
révision un peu globale de tout le projet avant d'arriver à
l'Assemblée nationale, demander au ministre de la Justice de nous dire
quel est son calendrier, à compter de ce moment, alors qu'on recommence
d'une certaine façon, et les échéances qu'il veut
respecter d'ici à la fin de nos travaux et d'ici la fin des travaux de
l'Assemblée nationale. Je pense que cela peut nous rassurer ou nous
inquiéter, selon la réponse.
M. Bédard: Mon calendrier dépend en grande partie,
comme vous le savez, du travail non seulement des membres de la commission
parlementaire du point de vue gouvernemental, mais également du point de
vue de l'Opposition. Nous avons fait, d'une façon
générale, un travail très responsable. Même s'il y a
une complexité au niveau du projet de loi, je ne pense pas qu'on puisse
parler de bousculade, parce qu'à chacun des articles j'ai bien pris soin
de ne poser aucun geste qui soit de nature à arrêter une
discussion, sauf lorsque la discussion, étant assez
avancée et ne débouchant pas sur une position précise ou
unanime de la part de la commission parlementaire, j'en venais à la
conclusion qu'il valait mieux suspendre et continuer la réflexion avant
de revenir sur cet article.
Je comprends très bien les préoccupations du
député de Saint-Laurent et de la députée de
L'Acadie; moi-même et mes collègues avons les mêmes
préoccupations, soit celles de faire le travail le plus responsable
possible, tout en sachant la limite de nos moyens. Nous n'avons pas, je pense,
ici essayé, ni les uns ni les autres, de nous poser en experts. Tous les
membres de la commission parlementaire avaient la possibilité d'avoir
à leur disposition - je peux le dire - des experts en la matière
puisque, chacune des questions posées a obtenu sa réponse ou les
explications demandées, que je sache.
Dans ce sens-là, vous me permettrez certainement - chacun des
membres de la commission parlementaire - de souligner le travail très
professionnel accompli par M. Guy.
Mme Lavoie-Roux: Nos remarques n'ont pas voulu impliquer quoi que
ce soit d'autre.
M. Bédard: Non, je sais; je me fait l'écho de ce
que vous auriez pu dire. M. Guy, dis-je, a travaillé durant dix ans avec
l'Office de révision du Code civil; depuis deux ans, il est
plongé à fond dans l'ensemble du contenu du projet de loi que
nous avons à étudier, alors que nous avions peut-être
d'autres préoccupations. Il ne faut quand même jamais oublier que
du point de vue gouvernemental, constamment, depuis deux ans, des juristes et
des spécialistes se sont penchés sur le projet de loi, en ont
analysé toutes les implications et ont livré, avec les
décisions politiques qui s'imposaient, le travail qui est, à mon
sens - d'ailleurs, cela a été souligné - de façon
générale, d'une rare qualité.
Je veux souligner aussi le travail de M. Bisson qui est avec nous et qui
n'en est pas à ses premières armes dans ce secteur; de même
que celui d'une autre personne du ministère de la Justice, Mlle
Marie-Josée Longtin, qui a fait un travail de tous les instants avec ses
collègues concernant l'ensemble du projet. À cela, il faudrait
ajouter toutes les consultations, mais là, ce serait trop long. Je pense
que M. Guy et M. Bisson, en fait, les membres de l'équipe en auraient
d'ici à la fin de la session s'il fallait qu'ils commencent à
nous énumérer l'ensemble des consultations, des études,
des recherches qui ont précédé la rédaction finale
de ce que nous avons à étudier. Dans ce sens, je ne crois pas
qu'on puisse parler d'improvisation.
(17 h 15)
II y a aussi - nous en avons fait état tout au long de
l'étude de ce projet de loi -toutes les représentations faites
par des groupes. On ne peut pas dire qu'on est toujours d'accord sur ces
représentations. Je pense que c'est bien difficile de l'être,
surtout que des groupes différents arrivent avec des solutions
différentes. À un moment donné, il faut bien prendre une
décision. Même si on retardait d'un an, on serait toujours dans la
même position. Entre deux positions différentes, à un
moment donné, il y a une décision un peu politique qui doit se
prendre; si ce n'en est pas une politique, c'en est une de
responsabilité que, de toute façon, nous aurions eu à
prendre comme membres de la commission parlementaire.
Je ne veux pas passer de remarques concernant le fait que les
journalistes aient couvert ou pas les travaux de la commission. Je pense que
là-dessus, les commentaires ont déjà été
faits. Je comprends que le projet est complexe. On est à même,
nous, de constater que, malgré tous les efforts qu'on pourrait faire, il
ne peut être autrement que complexe. Nous aurons à vivre avec
cette réalité. Je pense que chacun y a mis de la bonne
volonté jusqu'à maintenant.
Cette bonne volonté m'amène à faire quelques
remarques alors que nous recommençons le projet de loi en revenant aux
articles qui ont été laissés en suspens. Ce fut fait, soit
parce que la discussion était terminée ou que nous nous
étions mis d'accord et à ce moment, il s'agissait de faire une
rédaction. J'ai toujours souligné, je pense que nous
étions d'accord là-dessus, qu'il ne s'agissait pas d'y aller
d'amendements faits sur le bout d'une table. On a laissé le temps aux
juristes de faire la réflexion nécessaire pour qu'au niveau de la
rédaction des articles, des concordances qu'il pouvait y avoir à
faire, ils aient le temps de le faire. Dans ce sens, je suis convaincu au
départ que c'est du travail très sérieux - et je me fais
l'écho de tous les membres de la commission parlementaire
là-dessus - qui a été fait par nos spécialistes et
tous les membres de la commission parlementaire.
On a souligné tout à l'heure la question des concordances
et je pense qu'il y en avait une qui était chargée, d'une
façon tout à fait spéciale, d'assurer que le travail soit
bien fait. Je pense que de ce côté, qu'on le veuille ou non, on ne
se convertira pas en techniciens et en experts, demain matin, même
après l'étude du projet de loi. Ce travail de concordance a
toujours été un travail technique qui est fait par ceux qui nous
entourent.
M. Blank: C'est l'affaire du ministre de faire des amendements
dans le Code de procédure. Je ne pensais pas qu'il les proclamerait en
même temps que cette loi-
ci.
M. Bédard: Puis il les fait. À l'heure actuelle, il
y a un travail qui se fait de ce côté, et je pense que là
il y aura des décisions à prendre qui viendront dans le
temps.
M. Blank: Est-ce qu'on va avoir une nouvelle impression du projet
de loi avec tous les changements qu'on a faits ici?
M. Bédard: Quand on va avoir fait le tour, on va
être à même de prendre ces décisions. Je ne crois pas
qu'il y ait nécessité de réimpression du projet de loi,
parce que au-delà de toutes les remarques qui ont été
faites, de tous les articles suspendus, il faut faire la différence
entre les amendements de substance que nous avons apportés et les
amendements qui ne sont de substance prioritaire. On ne peut quand même
pas parler d'amendements substantiels lorsqu'il s'agit de la concordance, non
plus lorsqu'il s'agit, on le verra dans plusieurs des articles, je n'ai pas
besoin de donner d'exemple, on s'en rendra compte à mesure qu'on va les
repasser, d'amendements qui ne sont pas très substantiels. On n'a pas
à s'inquiéter que cela change la philosophie, ni le droit d'une
façon fondamentale.
Je pense qu'après avoir fait déjà un travail
sérieux - le député de Saint-Laurent faisait état
du fait que la transcription n'est pas à notre disposition - ce serait
peut-être plus difficile, soit de se remémorer ou de reconstituer
un peu les arguments ou les interrogations soulevés. Je dois dire que,
personnellement, et du point de vue de ceux qui m'entourent au niveau de
l'équipe d'experts, j'ai tenu à ce que ce soit noté le
plus possible et, lorsque nécessaire, lorsqu'on pense avoir un trou de
mémoire ou quoi que ce soit, il est toujours possible de poser les
questions appropriées. La discussion ne date pas de si loin que nous
ayons oublié l'essentiel des remarques faites.
Jusqu'à maintenant, je dois dire qu'un travail de collaboration a
été fourni. Je l'avais dit au début de cette commission
parlementaire et je le répète: Je n'avais pas la
prétention que cela dépendrait de moi uniquement si le projet de
loi était mené à terme, mais que cela dépendrait,
en grande partie, de la collaboration de tous les membres de la commission
parlementaire.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Seulement pour clarifier un point qu'a soulevé
le député de Saint-Louis. On a eu, à plusieurs reprises,
des indications montrant que, même dans le cas de certaines lois qui sont
abrogées par le projet de loi actuel, on retrouverait dans les
amendements au Code de procédure civile des dispositions qui, autrement,
deviendront périmées par l'abrogation des lois. La loi de
l'adoption en est un exemple. Il y a eu d'autres références. Par
exemple, chaque fois qu'on mentionne le tribunal, le Code de procédure
civile va décider si c'est le tribunal ou le juge en Chambre qui peut
prendre la décision, ou le protonotaire, etc. Donc, il y a plusieurs
dispositions qui ne sauraient s'appliquer sans des modifications au Code de
procédure civile. On doit donc comprendre qu'il n'est pas question de
mettre en vigueur le Code civil avant que le Code de procédure civile
n'ait subit des amendements, enfin, au même moment.
M. Bédard: Je puis dire que le travail, à cet
égard, est non seulement très avancé, mais il est presque
terminé. En ce qui a trait aux amendements à apporter au Code de
procédure, il est évident que dans la mise en application, ce
seront toutes des considérations qui doivent être prises...
M. Forget: Prises dans le sens que cela pourrait s'appliquer
seulement au même moment où le Code de procédure
civile...
M. Bédard: Si certains articles ont besoin d'amendements
au niveau du Code de procédure civile, il faudra en tenir compte. Je
peux assurer les membres de la commission qu'avant de procéder à
la mise en application de chacun des articles, une étude a
déjà été faite et elle sera refaite à la
lumière de certains amendements que nous avons apportés de
manière que nous puissions procéder avec sécurité
par rapport à l'ensemble des citoyens.
M. Forget: Cela veut dire, en pratique, que pour certains
articles il faut absolument que le Code de procédure civile soit
amendé.
M. Bédard: II y a certains articles pour lesquels c'est
nécessaire. Le cas échéant, nous prendrons les
décisions.
M. Forget: Est-ce que le ministre prévoit pouvoir
déposer ces amendements au Code de procédure civile avant la fin
de la session, avant la suspension des travaux de la Chambre pour
Noël?
M. Bédard: Non, mais dès la reprise de la session,
nous serons en mesure de le faire pour ce qui est des articles
déjà... Parce qu'il y a beaucoup d'articles qui n'ont pas besoin
de concordance au niveau du Code de procédure civile. Après avoir
fait et l'étude du problème constitutionnel, qui a
été évoqué, et l'étude de toutes les
implications, nous irons progressivement, mais avec le plus de
célérité possible au niveau de la mise en application.
Le Président (M. Laberge): Cela va? M. Bédard:
Article 403.
Le Président (M. Laberge): J'appelle donc l'article 403.
À l'article 403, on nous suggère d'ajouter, après le mot
"tribunal", une virgule et les mots "pour motifs sérieux".
M. Bédard: Ceci fait suite à des
représentations faites par le député de Nicolet-Yamaska
parce qu'on retrouvait effectivement cette formulation au niveau de l'Office de
révision du Code civil et nous n'avons aucune objection à ce
qu'elle soit répétée dans l'article.
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ... bien sûr que nous acceptons l'amendement
dans la mesure où il indique que ces dispenses ne seraient pas
accordées pour des motifs frivoles. Il demeure que, quant à
nous...
M. Bédard: Si vous me permettez simplement un
détail technique, nous accepterions l'amendement et je sais que le
problème de fond demeure, à savoir s'il y a dispense ou non.
M. Forget: C'est ça.
M. Bédard: Nous pourrions y revenir tout de suite
après.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'amendement
consistant à ajouter une virgule et les mots: "pour motif
sérieux" sera adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
M. Bédard: Concernant cet article, le député
de Saint-Laurent avait soulevé l'opportunité de garder le fait
qu'une dispense puisse être accordée par le tribunal pour le
mineur de seize à dix-huit ans. Nous avons bien réfléchi
à la question, M. le Président, et je pense que nous devons
garder cette disposition. La raison en est que ça me semble
nécessaire, en termes de transition prudente, comme on le sait, de
l'âge de douze à quatorze ans à seize à dix-huit
ans.
M. Forget: Effectivement, nous avions soulevé la question
de fond et, sept jours plus tard, elle nous apparaît toujours bien
fondée. Parler d'une période de transition, à mon avis,
fausse un peu le débat. Je ne pense pas qu'on soit vraiment à
changer quoi que ce soit relativement au mariage des jeunes filles de douze ans
ou des jeunes garçons de quatorze ans, parce que c'est la situation sur
le plan légal. Je pense bien qu'effectivement il n'y avait pas beaucoup
de mariages en bas de seize ans et que le véritable problème
d'une modification en termes pratiques de l'âge minimal du mariage se
pose pour les seize à dix-huit ans, encore qu'il a pu y avoir des
mariages qui ont été célébrés impliquant des
conjoints d'un âge inférieur à seize ans; c'est une
situation plutôt théorique dans l'ensemble. Or, si on regarde
l'expérience vécue au Québec relativement au divorce, il
demeure qu'un très grand nombre de divorces parmi ceux qui ont
été accordés de 1969 à 1975 l'ont été
pour des mariages qui sont survenus entre des conjoints relativement
jeunes.
Je cite ici une étude publiée par le ministère des
Affaires sociales en mars 1978, dont l'auteur est Laurent Roy,
démographe, intitulé: "Le divorce au Québec,
évolution récente", qui démontre que, de 1969 à
1975, près de 70% du nombre total des divorces accordés l'ont
été relativement à des mariages où l'âge, au
moment du mariage du conjoint de sexe féminin, était de quinze
à dix-neuf ans, c'est-à-dire inférieur à vingt ans.
Je crois qu'on peut bien mesurer là la fragilité de ces unions et
je suis sûr que si on pouvait distinguer dans ce groupe d'âge, ce
que, évidemment, les statistiques démographiques ne permettent
pas de faire, les mariages où l'âge du conjoint féminin au
moment du mariage était inférieur à dix-huit ans, on
aurait un nombre plus que proportionnel de ce chiffre qui leur serait
imputable. Cette fragilité relative mais très
élevée des mariages des jeunes est démontrée par le
groupe d'âge subséquent où les mariages entre vingt et
vingt-quatre ans, pour ce qui est de l'âge au mariage du partenaire de
sexe féminin, représentaient 32% du total. Donc, la presque
totalité des divorces, au moins ceux qui sont survenus de 1969 à
1975, se retrouvaient dans les catégories de mariages où
l'âge du conjoint de sexe féminin, lors du mariage, était
inférieur à 25 ans. C'est une situation qui, certainement,
appelle beaucoup de prudence de la part du législateur. Je crois que
nous sommes dans la situation de ne pas, en somme, permettre que, pour des
motifs qui n'ont probablement rien à voir avec les objectifs
visés par le législateur dans le chapitre sur le mariage l'on
puisse perpétuer une situation comme celle-là. (17 h 30)
Enfin, des observations analogues peuvent être faites, lorsque
l'on considère que les mariages - et ceci vaut, soit dit en passant,
pour plusieurs catégories de mariages, indépendamment de leur
durée -
qui échouent le plus fréquemment sont ceux où les
conjoints étaient jeunes. Je crois que ceci est un facteur que le
léqislateur doit mesurer avec soin. C'est pour cela que nous ne pouvons
pas être d'accord avec la décision du ministre de permettre la
continuation d'une situation juridique qui n'a plus de justification
sociologique.
Je comprends qu'on pourra nous dire que, dans certains groupes ethniques
arrivés plus récemment au Canada, on a des traditions culturelles
différentes des nôtres et les mariages en bas âge y sont
traditionnels, mais je pense que ce n'est pas une raison suffisante. Je crois
que ces familles néo-canadiennes ou immigrantes doivent
là-dessus, et, de toute façon, inévitablement se
conformeront dans leur comportement aux règles du milieu dans lequel ils
vivent désormais. Le législateur du Québec, en particulier
dans d'autres domaines là où cela lui est apparu d'ordre public,
je pense en particulier au domaine linguistique, n'a pas hésité
à imposer ses conceptions de l'ordre public.
Je pense que le mariage est un domaine également valable à
ce titre. Quelles que soient les traditions familiales de ces groupes, de toute
manière, il n'y a aucune assurance que ces unions seront plus durables
lorsqu'elles interviennent dans des milieux sociologiques de souches
différentes.
Autrement dit, je présume d'avance que le ministre se basera sur
ce raisonnement, en partie au moins, pour justifier le maintien d'une telle
règle et nous ne pouvons pas en voir le bien-fondé.
M. Charbonneau: M. le Président, le député
de Saint-Laurent a cité des statistiques. Je pense qu'on est tous
d'accord avec ces statistiques. Je ne suis pas un juriste; un peu à
l'instar de Mme la députée de L'Acadie, on est parmi ceux qui ne
sont pas dans cette gang-là, mais est-ce qu'on a des statistiques, des
données pour savoir dans quelle mesure, actuellement, les tribunaux sont
appelés, s'ils le sont, cela est prévu selon la loi, à
accorder une dispense? Actuellement, cela n'est pas prévu.
Donc, c'est un élément nouveau.
M. Bédard: C'est un peu là-dessus, si le
député de Verchères me le permet. Je n'ai pas voulu
être long tout à l'heure, mais...
M. Charbonneau: J'ai l'impression, je ne sais pas, je n'ai pas
parlé au ministre avant, que, si cela est nouveau, cela donne le cran de
sécurité que le député de Saint-Laurent exigeait.
Je pense qu'il a raison de souligner le problème social qui est
mentionné par l'étude en question, mais là on ajoute un
cran de sécurité. Par ailleurs, quand vous avez parlé des
données culturelles, on a beau dire que même dans les
communautés où, pour toutes sortes de raisons, il y a des
mariages qui sont contractés plus jeunes, le taux de succès n'est
peut-être pas plus grand dans ces cas que dans la communauté
francophone, mais néanmoins, je pense qu'il y a des
considérations culturelles qui doivent être prises en
considération.
J'ai vécu, par exemple, une douzaine d'années dans la
colonie italienne de Montréal, et il y a des choses qui ne s'acceptent
pas. Il y a des situations qui sont culturellement aussi dramatiques que
l'échec d'un mariage. Ce serait un peu imposer à ces gens nos
propres comportements ou nos propres valeurs, d'autant plus que maintenant, de
la façon dont le texte est rédigé, un tribunal pourrait
faire venir les gens et essayer de voir avec eux d'une façon moins
agressive qu'une loi qui interdirait; un juge pourrait leur faire comprendre
finalement, peut-être en intervenant directement auprès des
personnes concernées. J'ai l'impression que de cette façon, on
couvre la situation qui est déplorée par le député
de Saint-Laurent.
M. Blank: Quand on parle de la question des nouveaux
arrivés, des immigrants, des autres cultures, je veux seulement dire
qu'on a déjà ce problème dans la Loi de l'immigration. La
Loi de l'immigration est très stricte. Même si un couple s'est
marié à 16 ans ou à 15 ans ou à 17 ans, la Loi de
l'immigration interdit de parrainner le mari ou la femme... à moins
qu'ils n'aient 18 ans. Déjà, notre culture s'impose à leur
culture, dans le sens qu'ils sont ici et qu'ils doivent suivre nos
règles. Je donne des exemples pratiques, parce que comme vous le savez,
j'ai des causes d'immigration...
M. Charbonneau: Pour d'autre chose.
M. Blank: II y a certains pays où les gens ont plus d'une
femme. J'ai déjà eu des cas de gens qui sont venus au Canada et
qui disaient: J'ai trois femmes. Le mari est venu à mon bureau et m'a
dit: Je veux mes trois femmes ici. La Loi de l'immigration ne permet pas
d'amener trois femmes ici au Canada, comme cela. On leur impose notre culture.
Ce monsieur a réglé son affaire. II a divorcé deux fois,
il s'est remarié et il a ses trois femmes ici, mais il en a
légalement épousé une. Il habite avec les trois.
M. Bédard: C'est avant d'arriver?
M. Blank: II a arrangé son affaire. Il a divorcé
d'avec la première, il a épousé la deuxième, il l'a
fait venir au Canada, il a divorcé d'avec celle-ci, puis il a fait venir
la troisième; maintenant, la troisième, c'est sa femme
légale, mais la première et la deuxième habitent avec lui.
Il y a un paquet
d'enfants dans la maison. Le monsieur a 40 ans, il en a l'air de 60,
mais c'est une autre affaire.
La règle qui dit qu'on doit respecter la culture des autres, ce
n'est pas tellement nouveau qu'on impose notre culture, nos idées
à ces gens qui viennent des autres pays quand leur culture ne correspond
pas à la nôtre.
L'exemple parfait, c'est la Loi de l'immigration et la Loi du mariage.
Le monsieur marié avec trois femmes qui vient ici ne peut pas en avoir
plus d'une. Notre loi dit: Une femme.
M. Bédard: On ne peut quand même pas leur imposer
cette culture dans le temps de le dire, au moment même où ils
arrivent.
M. Blank: Ils ont choisi notre pays, il faut suivre nos
règles.
M. Bédard: Si je peux employer l'expression, il y faut
l'épreuve du temps. Je ne crois pas qu'on puisse mêler le
parrainnage avec la question des moeurs qui peuvent être
différentes d'une communauté ethnique à une autre. Je
n'avais pas élaboré longtemps tout à l'heure, en
évoquant simplement l'argument de transition prudente. Auparavant,
c'était 12 et 14 ans; là, on va de 16 et 18 ans. Il me semble
qu'il y a une logique quand même là-dedans. J'aurais pu amener cet
argument, parce que j'ai eu des représentations à cet
égard, concernant des habitudes culturelles qui ne sont pas les
mêmes que les nôtres au niveau de certaines communautés
ethniques. Je crois qu'on doit en tenir compte. Même si le nombre n'est
pas très grand, ça nous crée quand même une
responsabilité, comme législateurs, d'en tenir compte.
Je voudrais ajouter également que les chiffres qu'a
évoqués le député de Saint-Laurent... je suis
d'accord avec le contenu de ces chiffres; d'ailleurs, nous les avions
donnés aux membres de la commission parlementaire. Cependant, il ne
faudrait peut-être pas tirer des conclusions qui ne sont pas celles tout
à fait où je suis entièrement d'accord avec le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, je ne tire aucune conclusion,
je ne fais qu'observer que, pendant une période de quelques
années, sept mariages sur dix qui impliquaient un conjoint
féminin qui, au moment du mariage, avait moins de 20 ans se sont
terminés par un divorce, sur une période de seulement cinq ans.
Peut-être que si on regardait sur une période de dix ans, on se
rendrait compte que c'est huit ou neuf mariages sur dix qui sont dans cette
catégorie, qui se sont terminés par un divorce. On a
observé ce qui s'était passé pour ces mariages seulement
pendant une période de cinq ans. Cela démontre le
caractère du problème.
M. Bédard: D'accord, mais ce qu'on oublie de mentionner au
niveau du projet de loi, c'est qu'il y a un encadrement qu'on a donné
qui n'existait pas auparavant et qui a son importance. Lorsqu'on dit que le
tribunal aura à évaluer cette demande, qu'il aura à
demander le consentement et l'avis de ceux qui ont la garde de l'enfant, je
pense qu'on y met un mécanisme qui sera de nature à bien baliser
l'exercice de ce droit de dispense qui est accordé à partir de
l'article 403. Je ne dis pas que - d'ailleurs, je pense qu'on se comprend - les
arguments évoqués par l'Opposition sont sans fondement. Je crois
qu'ils en ont. À partir des éléments que j'ai
évoqués, entre autres, une certaine prudence de transition, le
fait de devoir tenir compte de certaines habitudes culturelles des
communautés du Québec et de trouver le moyen d'encadrer cet
exercice d'une manière très précise, je crois que nous
pouvons être sûrs qu'une meilleure analyse que dans le passé
sera faite par rapport aux mariages de jeunes de moins de 18 ans.
M. Blank: Au point de vue de la procédure, si les parents
refusent d'aller à la cour pour demander la dispense, le mineur
lui-même peut, seul, demander la dispense. Est-ce qu'on parle d'un mineur
seul ou avec un tuteur? Est-ce qu'il a le droit d'aller seul devant le
tribunal?
M. Bédard: II peut présenter la requête, mais
le tribunal entend les personnes qu'il devra entendre.
M. Blank: Est-ce que le mineur a le droit d'aller devant le
tribunal sans tuteur?
M. Bédard: Dans ce cas-ci, puisqu'il s'agit
évidemment d'un mineur qui croit qu'il a la maturité
nécessaire pour se marier et qui demande au tribunal une autorisation,
il présente lui-même, seul, sa demande. Ce n'est pas un
précédent, ce n'est pas le seul cas en droit où le mineur
de 16 à 18 ans exerce seul certains recours.
M. Blank: Où dans la loi donne-t-on ce droit?
M. Bédard: II faudrait peut-être voir...
M. Blank: N'a-t-on pas besoin de concordance avec les autres
articles qui disent... Est-ce qu'on n'a pas besoin d'amender les articles du
code de procédure ou d'autres articles qui disent qu'il est
émancipé pour faire ces choses?
M. Bédard: Vous avez déjà l'article 304 du
Code civil qui dit qu'un mineur âgé de 14
ans peut intenter seul des actions en recouvrement de gages.
On n'innove pas là-dedans.
M. Blank: On dit que l'enfant de 14 ans peut seul. Ici, on n'a
pas le mot "seul". On dit "le mineur peut". Est-ce que le mineur... (17 h
45)
M. Bédard: Mais oui, mais, mon Dieu, le mineur peut
demander seul la dispense d'âge.
M. Blank: Je pense que le mot "seul" doit être
marqué après le mot "mineur".
M. Bédard: Non, ce n'est pas le seul mineur, il peut le
demander seul.
M. Blank: Non, mais moi je dis que, si le parent refuse, le
mineur peut le demander seul. Cela ne dit pas que le mineur seul peut le
demander. Il y a une différence.
M. Bédard: C'est la différence que nous voulons
évoquer.
M. Blank: Je pense que le mot "seul" doit être inscrit. Je
pense qu'on doit indiquer clairement que c'est sans tuteur.
M. Bédard: Oui, mais c'est cela. Le mineur peut demander
seul. C'est clair que c'est sans ses parents ou sans tuteur, la dispense...
À un moment donné, il faut quand même...
M. Blank: Pour moi, cela dit qu'il peut le faire sans ses
parents, mais cela ne dit pas sans tuteur. Si on met le mot "seul"
après...
M. Bédard: S'il le fait seul, cela veut dire sans
l'autorité parentale qui peut être exercée, tantôt
par les parents, les père et mère, tantôt elle peut
être exercée, on l'a vu au niveau du projet de loi, par une tierce
personne à qui le tribunal a confié l'autorité
parentale.
M. Blank: Je suis d'accord, mais simplement sur la
rédaction de l'article, je pense que le mot "seul" est à la
mauvaise place. C'est seulement cela que je dis.
M. Bédard: Alors...
M. Gosselin: Seulement une question à l'attention du
député de Saint-Louis. Est-ce qu'il est à tout prix
nécessaire de préciser au-delà de cela,
c'est-à-dire: Le mineur seul peut? C'est implicite, à mon point
de vue, sur le fait qu'il peut effectivement.
M. Blank: Je suis d'accord. Si vous dites: Le mineur seul peut,
d'accord. Mais si c'est: Le mineur peut demander seul...
M. Gosselin: Demander seul, oui.
M. Blank: C'est cela, le mot "seul"; comme c'est inscrit dans
l'article, cela veut dire qu'il peut le faire sans le consentement de ses
parents. Cela ne dit pas...
M. Bédard: Je suis convaincu que, si on disait le
contraire de ce qu'on veut dire, il y aurait eu des remarques au niveau du
Barreau. L'office a exactement la même formule que nous. Ils l'ont
étudiée durant plusieurs années.
M. Blank: Ce n'est pas la première fois qu'on changerait
l'opinion de l'office.
M. Bédard: Non, mais...
M. Charbonneau: Le point le plus important..
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: ...demeure néanmoins le mécanisme
que le projet de loi ajoute, qui n'existait pas et qu'il vaudrait
peut-être la peine d'expérimenter. Le mécanisme qui va
s'expérimenter avec en plus un âge minimal qui est plus
élevé qu'il l'était auparavant.
Je pense que, finalement, si jamais, dans quelques années, une
évaluation du succès de l'utilisation de ce mécanisme nous
amène à changer d'idée, on pourrait changer d'idée,
mais je pense que cela vaudrait la peine néanmoins de l'essayer. Il y
aurait moins de traumatismes probablement, et j'ai l'impression que dans bien
des cas - ne vous en faites pas, j'ai passé l'âge d'utiliser le
mécanisme, Mme la députée de L'Acadie, malheureusement
peut-être...
Finalement, moi, je pense que ce mécanisme mérite
d'être utilisé et qu'il va être moins traumatisant pour des
gens, qu'il va moins "braker" des jeunes quij pour toutes sortes de raisons,
voudraient se marier plutôt qu'une interdiction formelle.
M. Blank: Quand ils viennent d'une communauté de culture
différente de la nôtre, ici, on pense que par tradition... Dans
leur tradition, il y a quelque chose qui va un peu plus loin, pour les jeunes
de cet âge, pour des immigrants, puisqu'on parle des immigrants; ils font
tous des mariages arrangés. Je me demande comment on peut dire que la
partie au mariage donne son libre consentement si ce n'est pas lui ou elle qui
a vraiment consenti à ce mariage.
M. Charbonneau: M. le député de Saint-Louis...
M. Blank: Les moeurs de ces gens...
M. Charbonneau: Je pense que cela pouvait être vrai
à l'époque. Si ce cas se produisait maintenant, le tribunal
pourrait justement, en entendant les parties, se rendre compte de la situation
et refuser. Ce n'est pas un tampon automatique. Le tribunal entend les
différentes personnes qui sont concernées et décide si oui
ou non il y a une dispense d'accordée. Il va y avoir des cas où
on va refuser la dispense pour des raisons comme celle que vous venez de
mentionner. Le tribunal aura constaté que, finalement, tout cela ce sont
les parents qui ont arrangé l'affaire, ou encore qu'il n'y aura pas de
maturité suffisante qui aura été établie, ou encore
d'autres explications.
M. Forget: On entre plus dans les affaires de famille,
là.
Mme Lavoie-Roux: C'est plus compliqué.
M. Bédard: II y a un mécanisme additionnel.
M. Charbonneau: Sur quoi pensez-vous que le juge va se
prononcer?
M. Blank: En fait, si les deux parents font une requête
devant le tribunal, je ne vois pas un juge qui va même aller
au-delà de la requête. Si les parents sont d'accord, c'est
d'accord. On donne un peu trop de...
M. Bédard: Le mécanisme me semble une balise assez
intéressante.
M. Blank: On ne dit pas que la cour peut ou doit
s'enquérir d'une affaire. Dans les autres articles, on dit: "La cour
peut".
M. Bédard: Je l'ai dit au départ, ça ne veut
pas dire que, parce qu'on prend une certaine décision, il n'y a pas
d'argument sérieux de l'autre côté, mais, à un
moment donné...
M. Blank: Quand la famille vient devant le juge, il n'y a pas
d'autre côté. Je suis certain qu'un cas qu'on va envoyer devant le
protonotaire spécial... Même si vous demandez le code de
procédure pour cet article, vous mettrez cette section devant le
protonotaire spécial, c'est une affaire de routine, comme une motion
pour détails...
M. Bédard: Ce n'est pas à cela que je
référais. Je sais qu'il y a des arguments sérieux d'un
côté comme de l'autre. Il est arrivé sur certains articles
qu'on arrivait avec un certain projet de rédaction que l'Opposition a
trouvé le moyen d'améliorer. Je pense que ça peut se faire
vice versa, mais, à un moment donné, sur certains articles, une
décision doit être prise. Je vous en explique les motifs. Je ne
pars pas avec l'impression de vouloir laisser entendre que, si j'en viens
à cette conclusion, ça veut dire qu'il n'y a pas de motif
sérieux de l'autre côté de penser le contraire. À un
moment donné, il faut en arriver à une décision.
M. Blank: Mon argument sur le mot "seul" ne tient pas debout.
Dans l'article cité par M. Brisson, le mot "seul" vient
immédiatement après "l'enfant de 14 ans peut".
M. Bédard: Non, c'est "intenter seul". M. Blank:
Intenter seul.
M. Bédard: Je pense que vous avez la réponse.
Le Président (M. Laberge): Alors...
M. Forget: Mme la députée de L'Acadie a
demandé le droit de parole depuis je ne sais pas combien de temps.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai entendu le ministre
nous dire que c'était par prudence qu'il avait pris cette
décision. J'aimerais qu'il explique un peu cette prudence. À mon
point de vue, les statistiques qu'a fait valoir le député de
Saint-Laurent à savoir que les risques de brisure du mariage sont
beaucoup plus élevé... Cela, c'est prouvé par les
statistiques du Québec et certainement les statistiques
nord-américaines, sinon occidentales. On prendra des statistiques
ailleurs et on retrouvera la même chose.
On a fait valoir la question des traits culturels. Cela me fait un peu
sourire, parce que je trouve qu'on ne les a pas beaucoup utilisés dans
certaines autres lois où ils auraient été au moins tout
aussi importants, sinon plus. D'ailleurs, quand vous regardez les immigrants...
Ah bonjour!
M. Forget: À quel âge va-t-il se marier?
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si ce sera enregistré.
Quand on pense aux immigrants de 16 ans, que ce soient des
garçons ou des filles, qu'ils soient nés au pays ou qu'ils soient
arrivés ici avec leurs parents, ils ont, à cet âge,
peut-être plus que tout autre groupe de jeunes... D'ailleurs,
là-aussi, il y a des statistiques intéressantes sur les
problèmes d'adaptation des immigrants de première
génération, au moment de l'adolescence. Je ne pense pas qu'on
puisse, même s'il y avait des traditions, évoquer que pour la
tradition
on doit leur faire prendre des risques plus grands qu'aux jeunes qui
habitent ici depuis toujours, si je puis dire.
L'autre point qui m'inquiète un peu, c'est quand on parle de
motifs sérieux. D'ailleurs, on vient même de nous le faire
ajouter, dit-on, à la suite d'une recommandation du député
de Nicolet-Yamaska, il est plus chanceux que nous!
M. Bédard: ...sur le dos de l'article.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est évidemment pas le temps qu'on
passe à la commission. Ce n'est pas un reproche que je veux faire.
M. Bédard: J'aurais peut-être dû commencer par
les articles où je vous donne raison.
Mme Lavoie-Roux: Je retire ce que j'ai dit, parce que je ne
voudrais surtout pas leur faire de reproches. Ils sont quatre et ils sont
même deux aujourd'hui. Je ne peux pas leur demander de faire des
miracles. Plus sérieusement, j'aimerais que le ministre
m'énumère au moins un ou deux motifs sérieux. Pour ma
part, le seul qui me vient à l'esprit est celui d'une grossesse non
souhaitée par les parents, peut-être pas par les enfants, mais
moins encore par les parents ...
Une voix: Par les grands-parents!
Mme Lavoie-Roux: ... les grands parents. Souvent, sous l'effet de
la panique et sous l'effet de la désapprobation sociale, on
considère que le mariage va peut-être à court terme - parce
qu'on ne s'interroge pas trop longtemps dans ces situations, sur le moyen et le
long terme - apparaître comme une réprobation sociale.
Personnellement, c'est le seul que je puisse identifier à ce
moment. L'autre argument que j'aimerais faire valoir, c'est qu'il est vrai
qu'il va venir devant la cour et que les juges va entendre ces jeunes gens. Il
va essayer de juger du libre consentement des futurs époux ou de ceux
qui veulent contracter mariage. Quand vous avez déjà une jeune
fille ou deux jeunes de 16 ans ou de 17 ans, ou un de 16 ans et de 18 ans, qui
vivent une situation extrêmement difficile pour eux, d'une grossesse
qu'ils n'ont pas voulue, il n'est pas aisé d'évaluer le type
d'intimidation, peut-être de bonne foi, que les parents exercent à
ce moment sur des jeunes en état de panique. Je veux bien croire que
tous nos juges sont d'excellents psychologues; souvent, il y en a certains
d'entre eux qui pourront même s'identifier à la situation que
vivent les grands-parents -pour reprendre la bonne génération,
comme disait le député de Saint-Laurent - c'est difficile de
prévoir dans quel sens ils porteront jugement.
La dernière remarque que je voudrais faire valoir - je regrette
de ne pas avoir devant moi une pièce à l'appui, mais mes
collègues savent que je ne soulèverais pas une chose qui est
fondée sur mon imagination d'une façon absolue, il y en a
peut-être d'autres qui pourront le confirmer à cette table - c'est
que la tendance, même dans l'Église catholique, tant aux
États-Unis qu'au Canada, est justement de ne pas encourager le mariage
des 16 à 18 ans, même dans un cas de grossesse non voulue,
à cause de l'immaturité des sujets et des problèmes
à moyen et à long terme, des problèmes encore plus graves
qu'un mariage pourrait occasionner, parce qu'une fois qu'on est marié,
on peut peut-être se dire: On va le dissoudre, mais cela aussi
crée des problèmes qui ne sont pas moindres que le mariage qui va
être prononcé.
Je reviens peut-être à la question fondamentale. Il y a
d'autres arguments qu'on pourrait faire valoir. Je suis sûre que le
ministre va être très condescendant et me dira: Je sais bien que,
de votre côté aussi, il y a de bons arguments. Ce n'est pas cela
que je mets en question. Je me permets bien simplement de lui demander...
M. Blank: J'ai promis à ma femme de l'appeler. (18
heures)
Mme Lavoie-Roux: ... ce qu'il pense qui sera invoqué comme
étant des motifs sérieux. J'en ai identifié un. Le
ministre va reconnaître que c'est un motif qui pourrait être
invoqué; s'il le met de côté parce que cela ne jouera
pas... Si cela devait jouer, je crois que c'est très mauvais pour tout
le monde. Quels sont les autres motifs sérieux qu'il serait prêt
à invoquer? Je fais une digression sur la question de respecter les
habitudes culturelles. On a passablement, peut-être moins dans les
dernières années, d'immigration de l'Afrique du Nord où il
n'est pas rare, même encore aujourd'hui, qu'une jeune fille de 12 ans
contracte mariage. J'espère que cela arrive un petit peu moins souvent
qu'à la génération précédente, mais c'est
encore une chose courante. Pourtant, on ne respecte pas cela, parce que, de
toute façon, on les amène à 16 ans. Si j'apporte cet
argument à la dernière minute, c'est que je le trouve moins
sérieux que les autres parce que je pense que je ne serais pas en faveur
du mariage à 16 ans, encore moins à 12 ans. Tout ceci pour dire
que même l'argument culturel a une valeur très relative.
Je reviens à ma question. Le ministre peut-il au moins me donner
ce qu'il considère un, deux ou trois arguments de nature
sérieuse?
Est-ce qu'on ajourne les travaux?
Le Président (M. Laberge): Après le souper?
À 20 heures?
M. Bédard: Je suis prêt à les donner tout de
suite.
Le Président (M. Laberge): De consentement, si vous
voulez.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Bédard: D'accord.
M. le Président, je pense que l'Office de révision du code
civil avait pris le soin d'indiquer, c'est-à-dire de parler de motifs
sérieux, probablement pour faire en sorte que soit mis de
côté tout motif futile ou peu sérieux qui pourrait
être invoqué et pris en considération. Je ne veux pas
prendre la place du tribunal parce que le tribunal... J'écoutais la
députée de L'Acadie... On ne commencera pas à faire une
discussion partisane. Je me disais qu'on tient compte des communautés
ethniques; on semble beaucoup en tenir compte dans ce projet de loi.
Mme Lavoie-Roux: Pas dans le projet de loi, à cet article
particulier.
M. Bédard: Dans le projet de loi, je pense. En tout cas,
à cet article, comme vous voudrez, alors qu'on pourrait plus en tenir
compte dans d'autres lois. Ce n'est pas parce qu'on n'en tient pas assez compte
dans d'autres lois que ça nous permet de ne pas en tenir compte dans
celle-là.
Mme Lavoie-Roux: C'est une amélioration, on devrait s'en
réjouir.
M. Bédard: C'est comme l'indépendance judiciaire.
On parle du respect des tribunaux, etc., dans un cas. À un moment
donné, on semble les suspecter à un point tel qu'on pense qu'ils
ne sont pas capables d'évaluer ce qui est un motif sérieux. Moi,
je crois...
M. Forget: Non. M. le Président... Mme Lavoie-Roux:
Nommez-en un.
M. Bédard: Laissez-moi répondre un petit peu.
Mme Lavoie-Roux:...
M. Bédard: Je vais essayer.
M. Forget: On a avoué que ces causes seraient probablement
entendues par le protonotaire. C'est ex parte.
M. Bédard: Je vais vous donner d'autres motifs
sérieux, mais peut-être... On sera tous plus sérieux quand
on reviendra après le souper.
Le Président (M. Laberge): Alors, en vous souhaitant bon
appétit, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 4)
(Reprise de la séance à 20 h 15)
Le Président (M. Laberge): A l'ordre, mesdames, messieurs!
La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux concernant
l'étude article par article du projet de loi no 89. Pour la suite de la
présente séance, le député de
Rivière-du-Loup, M. Boucher, sera remplacé par M. Ouellette
(Beauce-Nord) et M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M.
Bertrand (Vanier).
Nous en étions, à 18 heures, à la discussion sur
l'article 403. À l'article 403, il y avait un amendement que nous avions
adopté et qui consiste à ajouter, après le mot "tribubal",
une virgule et les mots "pour motif sérieux" et on m'a souligné
d'ajouter une virgule, après "sérieux", pour le journal des
Débats. Cela a été adopté. Il y a aussi le
remplacement du deuxième alinéa que nous avions dans nos
papillons l'autre jour. C'est une question de rédaction, je crois. On
demande de remplacer le deuxième alinéa de l'article 403 par le
suivant: "Le titulaire de l'autorité parentale et, le cas
échéant, le tuteur et les personnes qui ont la garde du mineur
doivent être appelés à donner leur avis." C'est une
question de formulation. Cet amendement remplaçant le deuxième
alinéa sera-t-il adopté?
M. Bédard: On l'avait souligné à ce
moment-là.
Le Président (M. Laberge): Oui. Sera-t-il
adopté?
M. Bédard: Adopté? Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 403
avec amendement sera-t-il adopté?
Mme Lavoie-Roux: Non, M. le Président. J'avais posé
une question au ministre.
Le Président (M. Laberge): Justement.
M. Bédard: M. le Président, je m'excuse
auprès de ceux et celles qui auront à lire le journal des
Débats, parce que je pense bien qu'ils seront à même de
constater que, depuis un bon bout de temps, on revient
avec les mêmes arguments de part et d'autre. II faut quand
même reprendre, le plus succinctement possible, certaines
considérations qui m'amènent à garder la disposition dont
il est fait état dans l'article 403, à savoir de permettre
qu'entre 16 et 18 ans, il puisse y avoir une dispense pour que le mariage ait
lieu, mais à condition que le tribunal ait à se prononcer
à la suite d'une requête qui lui est faite et que le tribunal ait
l'occasion d'entendre les parties et de pouvoir évaluer s'il y a des
motifs sérieux de donner la dispense demandée.
Premièrement, comme on le sait, le code permettait jusqu'à
maintenant le mariage à douze ans et quatorze ans respectivement, pour
la fille et le garçon. Maintenant, le fait de l'amendement est de
reporter et de fixer l'âge du mariage à 18 ans, avec une souplesse
qui me semble nécessaire, c'est-à-dire la possibilité
qu'entre 16 et 18 ans, il y ait une dispense pour permettre le mariage,
après avoir suivi le mécanisme dont je viens de parler.
Premièrement, c'est ma conviction que, devant un tel changement, on peut
penser à assortir ce changement d'une certaine souplesse au niveau de la
transition qu'évoque l'article 403.
Deuxièmement, je pense - ce n'est pas la considération
principale - qu'il y a lieu de tenir compte de certaines représentations
qui font qu'il y a des habitudes culturelles au niveau de certains groupes, qui
ne sont pas nécessairement les mêmes que celles que nous avons,
où l'habitude de l'âge du mariage est à un âge plus
jeune et plus usuel que dans l'ensemble de la société
québécoise. Je comprends qu'à un moment donné, ces
groupes, ces communautés peuvent en venir à être
influencés par le mode de vie de la majorité de la
société québécoise, mais il reste que cette
transformation ne se fait quand même pas du jour au lendemain.
J'ai également indiqué que nous avions prévu un
mécanisme qui n'existait pas auparavant, qui est de nature à
permettre d'évaluer jusqu'à quel point une décision de
dispense peut être opportune ou même nécessaire dans
certains cas.
Le député de Saint-Laurent fait état de certains
chiffres que je ne conteste pas pour la bonne et simple raison que nous les
avions remis nous-mêmes aux membres de la commission. Je pense que cela
permet de...
M. Forget: On ne les a jamais reçus, M. le
Président. On les avait trouvés par nos propres moyens, cela ne
nous a jamais été distribué.
M. Bédard: Peut-être. Ce sont les mêmes
tableaux. Les sources sont sûrement les mêmes. Je ne les conteste
pas. Mais il faut quand même prendre en considération qu'il y a un
nouveau mécanisme qui n'existait pas auparavant, qui est prévu
à l'article 403.
Mme la députée de L'Acadie m'a demandé
d'évoquer ce que je croirais être des cas sérieux,
susceptibles d'analyse. Je ne voudrais pas que ces exemples soient pris comme
étant des directives à qui que ce soit, au cas où un
tribunal aurait à évaluer. Je voudrais simplement faire part de
certains cas. Personnellement, il me semble qu'il y aurait lieu - il y en a
certainement d'autres qu'on peut imaginer - de procéder au moins
à une évaluation avant d'en arriver à un refus total, ce
qui serait le cas si la dispense n'existe pas.
Par exemple, le cas d'un jeune homme de 25 ans qui, depuis un an, vit
avec une jeune fille de 17 ans. Les deux cohabitent, vivent en commun. À
un moment donné, le jeune homme de 25 ans obtient un emploi qui
l'obligerait à partir pour quelques années dans un autre pays.
À ce moment-là, il me semble que c'est un cas qui pourrait
être évalué. Le tribunal peut voir jusqu'à quel
point, d'une part, la sécurité, d'autre part, le sérieux
des relations, la solidité des relations sont présentés.
À ce moment-là, il pourrait évaluer - au lieu de 17 ans,
disons 17 ans et demi - jusqu'à quel point il est opportun d'accorder
une dispense dans un cas comme celui-là, pour ne pas obliger quelqu'un
à perdre son emploi, s'il ne veut pas y aller seul, ou encore à
revenir, s'il décide de prendre l'emploi, pour procéder à
un mariage, alors qu'il peut y avoir un délai de six mois. On peut
même imaginer moins.
Je prends, par exemple, le cas d'un individu qui vit depuis un an ou un
an et demi avec une jeune fille qui a peut-être dix-sept ans et demi et
qui, à un moment donné, a un accident, a des indications que cet
accident est d'une gravité telle qu'il peut penser devoir quitter cette
terre. On peut ajouter par exemple que la relation avec cette jeune fille, qui
dure depuis un an, un an et demi, a donné un enfant. On peut imaginer le
cas de cet individu qui désire régulariser la situation que ce
soit pour des questions de succession ou autres. Je n'ai pas à juger des
motifs. Je soumets le cas de quelqu'un qui peut vouloir régulariser
l'ensemble d'une situation de fait qui existe déjà. Encore une
fois, je ne veux pas que ce soient des cas limitatifs, je l'ai bien dit
auparavant. Je pourrais en évoquer encore trois ou quatre que j'ai
présents à l'esprit, mais ces deux cas me semblent évoquer
qu'il y a des circonstances où il y a lieu non pas nécessairement
de donner la dispense, mais de penser que humainement on doit au moins
permettre qu'une analyse de la situation soit faite le plus objectivement
possible, de manière à déboucher sur une décision
qui puisse être la plus humaine possible. Dans ce sens, je pense qu'on
doit, humainement et en termes de transition,
penser à une certaine souplesse qui, en fin de compte ne touchera
peut-être pas beaucoup de cas, mais comme chaque cas humainement est un
cas global qui mérite d'être analysé, à ce
moment-là, on aura le mécanisme nécessaire. Ce sont les
représentations... Je sais que, d'autre part, du côté de
l'Opposition... Je ne dis pas qu'on n'a pas évoqué des arguments
sérieux - ce serait contraire à ce que je crois - mais j'essaie
d'expliciter le mieux possible aux membres de la commission quels sont les
motifs qui m'amènent à croire qu'il y a lieu de penser
humainement à un peu de souplesse de ce côté-là.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
l'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie le
ministre...
M. Bédard: Est-ce que vous permettez deux secondes?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Bédard: On a demandé de l'information sur la
situation canadienne en cette matière où l'âge aussi a
été élevé généralement à 18 et
19 ans pour le mariage. Dans toutes les provinces, il faut encore le
consentement des père et mère pour le mariage en dessous de cet
âge fixé à 18 ou 19 ans et, dans tous les cas, il y a un
recours devant un juge ou le tribunal en cas de refus injustifié des
parents. Dans certain cas, c'est à la discrétion du tribunal;
dans certains cas, l'appel est passible devant le tribunal lorsqu'il y a un
refus déraisonnable ou injustifié des parents d'autoriser le
mariage. C'est la situation canadienne en général. Concernant
certaines demandes qui ont été faites, dans un cas, ici, on a
refusé le mariage à une jeune fille de 16 ans, enceinte, avec un
garçon de 19 ans. La requête de la jeune fille a été
rejetée, la grossesse n'étant pas en soi une raison suffisante
d'y accéder et le juge n'ayant pas à se substituer à la
décision du père, etc.. Dans un autre cas, où il
s'agissait d'un garçon de 27 ans et d'une jeune fille de 16 ans, cela a
été autorisé. Il s'agissait d'une jeune fille
particulièrement mûre pour son âge, dit-on, avec un homme de
27 ans ayant adopté à sa sortie de l'université un style
de vie "retour à la nature". Dispense accordée malgré
l'opposition des parents, la question devant se décider "on the basis of
facts". Cela donne un peu l'image de la situation canadienne, où il y a
un recours devant le tribunal dans toutes les provinces.
Mme Lavoie-Roux: Le juge avait dû penser qu'ils iraient
vivre dans la brousse, de toute façon.
M. Bédard: Le critère de la grossesse peut
être rejeté par le tribunal s'il ne répond pas à une
situation de fait.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie M. le
ministre et M. Guy. Il est évident qu'on ne convaincra pas le ministre
de changer d'idée. Je ne suis pas sûre que la décision du
dernier cas qu'on vient de nous présenter soit juste - on n'y
était pas de toute façon - mais je voudrais rappeler que ce n'est
pas une idée fixe de l'Opposition officielle. Je pense que le Conseil du
statut de la femme a parlé dans le même sens. "Compte tenu que le
mariage - je le cite -constitue un engagement qui exige une grande
maturité, il devrait s'agir là d'un âge minimum dans tous
les cas. La possibilité de l'obtention d'une dispense lorsque le futur
époux est âgé d'au moins 16 ans devrait être
supprimée. La discrétion accordée au juge pourrait
être source d'injustice et de discrimination." (20 h 30)
M. Bédard: II y a d'autres groupes qui n'en ont pas
parlé. Je comprends très bien les représentations
faites.
Mme Lavoie-Roux: II reste qu'actuellement on sait que la famille,
le mariage, est une institution fragile parce qu'elle est soumise à une
foule de pressions. Je ne suis pas pour faire un discours là-dessus,
mais je pense qu'on doit lui assurer les bases les plus solides possible et une
de celles-là, c'est quand même la maturité des conjoints.
On a cité des statistiques avant le souper; j'en ai trouvé
d'autres dans un document préparé par la Conférence des
évêques catholiques du Canada pour le synode qui s'est tenu
à Rome aux mois d'octobre et novembre. On fait allusion à des
statistiques sur le taux de divorce. On dit que le rapport entre l'âge au
mariage et les probabilités de divorce montre qu'en 1971, parmi
l'ensemble des femmes âgées de 25 à 34 ans, celles qui
avaient contracté mariage à l'âge de l'adolescence
étaient trois fois plus susceptibles de demander le divorce que celles
qui s'étaient mariées à 23 ans ou 24 ans. De toute
façon, ce n'est pas une preuve qu'on a à établir; je pense
que c'est évident. On n'est pas pour passer la veillée à
essayer de convaincre le ministre qui, de toute évidence, ne se laissera
pas convaincre.
M. Bédard: Tout ce que je voudrais obtenir de la
députée de L'Acadie, c'est... Je sais fort bien que ce n'est pas
une idée fixe. Mme la députée de L'Acadie ne défend
pas ce point comme une idée fixe et je pense qu'elle peut me retourner
la pareille. Ce n'est pas en termes d'idée fixe que je le
défends. Je peux avoir tort...
Mme Lavoie-Roux: Excusez, je ne
voulais pas...
M. Bédard: ...mais j'essaie d'évoquer des choses.
On me dit qu'on a rencontré les principaux représentants de
l'assemblée des évêques, qui n'ont pas fait de remarques
spéciales sur cette partie de l'article. C'est la souplesse de
transition.
Mme Lavoie-Roux: Quand j'ai parlé d'idée
fixe...
M. Bédard: Je comprends.
Mme Lavoie-Roux: ... je l'appliquais à nous et non pas au
ministre, de toute façon. Je n'ai pas de paroles à retirer.
M. Bédard: Non, je ne vous ne l'ai pas demandé, non
plus.
Le Président (M. Laberge): L'article 403, avec les deux
modifications, sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
M. Forget: Adopté sur division, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendements
et sur division.
M. Bédard: II y avait l'article 405.
Le Président (M. Laberge): Oui, j'ai des notes à
cet effet. L'article 405 était suspendu. Maintenant, on a adopté,
à l'article 405, un amendement qui ajoutait un deuxième
alinéa qui se lisait: "On ne peut également contracter mariage
entre alliés en ligne directe". Cependant, pour le bon français,
on nous demande d'inscrire: "On ne peut non plus contracter mariage entre
alliés en ligne directe".
M. Bédard: D'accord, adopté.
Le Président (M. Laberge): Avec la négation, je
pense qu'il faut ajouter "non plus".
M. Bédard: Oui.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
M. Bédard: Pour cet article, l'Opposition, le
député de Saint-Laurent, entre autres, avait fait remarquer qu'il
serait mieux de prévoir la possibilité, dans le cas d'adoption,
qu'il y ait une évaluation du cas de telle manière qu'on ne
défende pas d'une façon rigide et inconsidérée le
mariage dans de telles circonstances, lorsqu'il y a un tel lien de
parenté ou de filiation. Nous nous étions déclarés
d'accord et l'amendement est dans ce sens.
Le Président (M. Laberge): Après l'article 405,
nous ajoutons l'article 405.1 qui se lit: "En cas d'adoption, le tribunal peut,
suivant les circonstances, permettre un mariage en ligne collatérale".
Est-ce que ce nouvel article 405.1 sera adopté?
M. Bédard: Adopté. M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Ensuite, on
avait laissé en suspens l'article 410.
M. Bédard: À l'article 410, on voulait s'assurer
que cette formule rejoigne tout le monde et qu'il n'y ait pas de
discrimination, quand on emploie le terme "célébrants",
concernant l'aspect religieux. On m'indique que ça ne représente
aucune discrimination. Nous voulions quand même le vérifier.
Le Président (M. Laberge): L'article 410 adopté
sans aucune modification.
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): L'article 410 est adopté
tel quel. J'appelle l'article 411.
M. Bédard: L'article 411, nous l'avions laissé
ouvert parce qu'il y avait eu des représentations de l'Opposition aux
fins de s'enquérir si l'emploi du mot Église se rapportait d'une
façon tout à fait spéciale à l'Église
catholique romaine.
M. Forget: À l'Église chrétienne.
M. Bédard: À l'Église chrétienne.
Là-dessus, la vérification a été faite et je
demanderais peut-être à M. Guy d'ajouter des explications.
On était avec le Petit Larousse et on est allé voir le
Petit Robert. Il semble qu'il n'y aurait pas de problème avec le Petit
Robert dans le sens que nous pouvons voir.
M. Forget: On l'a ici, oui.
M. Blank: II faudrait prendre le même dictionnaire.
Mme Lavoie-Roux: La même édition.
M. Bédard: II dit: (Avec un É majuscule) - je dis
cela parce qu'il y a différents sens - c'était originairement la
société réunissant les premiers chrétiens,
l'Église primitive, etc. Par analogie, ensemble de personnes professant
une même doctrine animée d'une même foi. Le parti communiste
est à la fois une Église, une
religion, une communauté et un ordre. C'est tiré des
auteurs français comme Pierre Gaxotte. Dans le sens plus récent,
plus moderne, par analogie, le mot Église avec É majuscule est
employé pour une communauté professant la même doctrine et
la même foi. Dans le Code civil actuel, à l'article 129, le mot
Église également est dans le texte et il n'a pas
été porté à notre connaissance par aucune
décision que je connaisse qu'il y ait quelque difficulté
d'application quant à ce sens.
M. Forget: Oui, mais, M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ... je pense que les raisonnements qu'on vient de
tenir, quoiqu'ils se basent sur une des définitions données du
mot Église, montrent clairement par le contexte duquel l'exemple est
extrait qu'Église peut signifier cela quand le mot Église est
utilisé comme attribut. Le Parti communiste est une Église. C'est
l'exemple qu'on nous a cité. Je pense qu'il ne viendrait à
l'esprit de personne, quand on utilise le mot Église, de
prétendre que cela couvre également un parti politique. Cela
montre très clairement qu'on peut dire de n'importe quoi que c'est une
Église, comme on peut dire de n'importe quoi que c'est un cheval. C'est
une question d'opinion. Utilisé comme attribut, c'est une figure de
style. On peut dire bien des choses, on peut donner bien des qualifications
à une personne, a une chose ou à un ensemble d'individus, mais on
ne pourrait jamais affirmer que si on a dans une énumération les
Églises, cela couvre toutes les dénominations politiques. On
dirait: Non, cela couvre toutes les fois peut-être, à la limite,
mais cela ne couvre certainement pas les partis politiques ou les associations
de bienfaisance, etc.
Donc, c'est une chose. Deuxièmement, on utilise Église
avec un É majuscule. Or, Église, avec un É majuscule,
c'est la communauté des chrétiens. J'ajouterais un
troisième argument, c'est que, pour les non-chrétiens,
Église désigne une foi à laquelle ils n'appartiennent pas.
Pour un mahométan, pour un juif, une Église, c'est une
Église autre que la religion à laquelle il appartient, c'est une
foi autre que la foi à laquelle il appartient. Donc, on ne peut
certainement pas dire que c'est un usage non discriminatoire puisqu'on a
à la fois la manière dont c'est perçu dans les groupes qui
ne sont pas parties de l'Église chrétienne. On a l'utilisation du
É majuscule et finalement cette définition illustre très
bien qu'on peut utiliser n'importe quel mot comme attribut, mais cela ne prouve
pas que cette façon de l'utiliser corresponde à une
définition. C'est une figure de style.
M. Bédard: On pensait honnêtement arriver avec la
solution.
M. Blank: J'ai une suggestion ici: communauté religieuse
et la discipline de la communauté religieuse à laquelle il
appartient. Cela couvre tout.
M. Bédard: C'est que les mots "communauté
religieuse" englobent des Églises, peut-être, mais beaucoup plus
que ça aussi.
M. Blank: Oui, mais ce sont les mots eux-mêmes qui causent
le problème. Même si les définitions incluent des
synogogues et des mosquées; en anglais, on dit...
M. Bédard: Le député de Saint-Louis doit
s'imaginer qu'on a pensé aussi à "communauté
religieuse"...
M. Blank: J'ai trouvé ce mot avec...
M. Bédard: ... j'ai essayé de me faire convaincre
que ça pourrait être le meilleur terme.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais le ministre du culte, pour
répondre à l'objection de Me Guy, ça exclut les
communautés religieuses de femmes ou...
M. Bédard: J'étais convaincu d'arriver avec la
solution et vous faites tomber toutes les réticences maintenant...
M. Forget: J'ajouterais peut-être un autre argument,
très brièvement, c'est que la traduction anglaise
d'Église, la seule traduction possible, est "church" et, dans ce cas, on
m'assure que "church" ne peut vouloir désigner qu'une Église
chrétienne.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Pourquoi faut-il mettre la discipline de
l'Église? Si on se bornait à dire "selon la religion à
laquelle il appartient", puisque finalement, c'est ce dont il s'agit, ce sont
des religions.
M. Forget: On peut faire sauter tout simplement le bout de
phrase. Cela n'ajoute rien.
M. Bédard: "... selon sa religion et la discipline
à laquelle il appartient."
Non, on ne peut pas appartenir à une discipline. D'abord, on
n'appartient pas à une religion, on pratique une religion, on appartient
à une Église qui pratique une religion - je me sers toujours du
mot Église dans le sens large - on appartient à un groupe,
à une Église et on pratique une
religion.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous marquez...
M. Guay: Pourquoi ne pas marquer "selon sa religion", comme c'est
marqué là, et enlever tout le reste de la phrase?
"Célébrer un mariage contre lequel il existe quelque
empêchement selon sa religion".
M. Bédard: Oui, mais chacun peut avoir sa religion. Je
vous avoue que, si on a un autre mot qui peut remplacer... Je voudrais bien que
chacun n'essaie pas de courir après le mot qui ferait époque,
mais, d'un autre côté, ce mot déjà employé
dans le Code civil n'a jamais amené de discrimination de quelque
manière que ce soit, n'a jamais été
interprété dans le sens de...
M. Blank: Non, mais on change le Code civil...
M. Bédard: On change le code, mais, en même temps,
on tient compte de ce qui existe déjà, ça n'a jamais
créé un problème. Est-ce qu'on veut trouver un autre mot
qui aurait peut-être des risques de créer un problème par
rapport à un autre qui n'en a jamais créé?
M. Forget: Je comprends, M. le Président, mais on adapte
le langage du XIXe siècle dans bien des endroits où il n'y a pas
eu de procès. Je pense que, dans ce cas-ci, on a une belle occasion de
le faire dans l'esprit de la Charte des droits et libertés de la
personne, on peut utiliser un langage plus neutre.
M. Bédard: Regroupement religieux? Le mot
"communauté" semble créer des problèmes; maintenant, si
vous avez des suggestions, je... On avait pensé à regroupement
religieux.
Mme Lavoie-Roux: Le groupe religieux auquel il appartient?
Le Président (M. Laberge): II faut que ce soit plus large
que ça. M. le député de Taschereau.
M. Guay: C'est une suggestion, ça vaut ce que ça
vaut. Puisqu'on veut absolument introduire la notion de discipline, pourquoi ne
pas mettre, plutôt que "selon sa religion", selon "sa ou la discipline
religieuse"? Est-ce qu'on ne peut pas mettre "selon sa discipline religieuse"?
(20 h 45)
M. Bédard: Non, je l'ai essayé; parfois le droit,
vous savez! Pas le droit comme les mots! C'est ce qu'on nous dit du
côté des experts. Peut-être le mot viendra-t-il au cours de
la soirée mais je pense qu'on y est allé quand même de
quelques suggestions. Il y aurait communauté de foi aussi, puisque c'est
la base.
Mais ça pose des problèmes, une communauté de foi,
ça n'a pas de discipline, ça n'a pas de structure, c'est une
communauté de foi parce que c'est lié justement au niveau
de...
M. Forget: Mais il y avait ... pour déterminer de
façon précise, ou alors le Code de procédure civile, qui
sont ces célébrants et il va falloir énoncer beaucoup plus
de règles qu'il y en a là de toute manière. Je pense qu'on
a fait référence à l'existence d'une loi d'ailleurs.
M. Bédard: C'est le premier chapitre...
M. Forget: Oui, mais le principe général, c'est que
celui qui officie ou qui est le ministre d'une foi, quoique le mot "ministre" a
peut-être aussi une connotation, mais celui qui officie au nom d'une
communauté de foi a le pouvoir d'être un officier de l'état
civil.
M. Bédard: On pourrait peut-être parler de la
discipline d'une société religieuse. Ce serait déjà
plus proche.
Mme Lavoie-Roux: Quelle est l'objection au terme
"communauté religieuse" de toute façon?
M. Bédard: Ce peut être une communauté
d'hommes ou de femmes...
Mme Lavoie-Roux: Non, ça, ce sont des ordres
religieux.
M. Bédard: C'est le dictionnaire ... des
communautés religieuses, de moines ou de... Enfin ça se
réfère vraiment là aussi... De moines et de
moniales...
Je crois qu'il y a peut-être quelque chose d'intéressant
dans ce... Société religieuse... Société, ce serait
une discipline.
Mme Lavoie-Roux: La discipline de la société
religieuse...
M. Bédard: La société, c'est un groupe
social organisé... Donc, la société religieuse avec un
grand "S"? Non? Non, un petit "s". Est-ce que ça va?
On dirait: "et la discipline de la société religieuse
à laquelle il appartient".
Mme Lavoie-Roux: Une société religieuse, c'est
l'ensemble du Québec.
M. Bédard: II peut...
Mme Lavoie-Roux: Une société
religieuse, c'est très large.
M. Bédard: C'est tout groupe social important. Ce peut
être un groupe organisé.
C'est un groupe social organisé, alors, ça répond
à...
Mme Lavoie-Roux: Si les juristes sont d'accord.
M. Bédard: Pour le moment, en tout cas, c'est
peut-être ce qu'il y a de plus précis.
Je sais que les juristes seraient plus d'accord avec le mot
"église" mais... Parce qu'il est important de...
M. Forget: Bon! Pourvu que l'on remédie au... Nous
représentons à cette table des comtés où le
problème du pluralisme religieux est réel. Il ne s'agit pas d'un
problème purement théorique. Nous avons dans nos trois
comtés des mahométans, des bouddhistes, des hindous et pas
simplement quelques dizaines, il y en a quelques milliers. Je pense que nous
sommes dans une société qui, à juste titre, se fait un
honneur de respecter la foi religieuse de tous ses membres. Donc, il n'y a pas
de raison, à l'occasion de la modernisation du Code civil, de ne pas le
reconnaître, même dans le langage. On comprend que l'esprit dans
lequel cela a été administré...
M. Bédard: Je suis bien d'accord.
M. Forget: ... est identique d'ailleurs à l'intention qui
nous anime, mais, pourvu qu'on modernise le langage, il nous semblait que
c'était un signe d'acceptation et de respect de ce pluralisme qui est
réel. C'est une réalité sociologique que nous vivons tous
les jours.
M. Bédard: Cela fait partie du pluralisme qui
caractérise la société québécoise, et pourvu
qu'on trouve le mot qui, tout en modernisant, tienne compte de la
réalité. Alors: société religieuse.
Mme Lavoie-Roux: Le mot" congrégation"...
M. Bédard: Ça fait Rome un peu.
Mme Lavoie-Roux: Ça fait Congrégation Notre-Dame.
C'est rattaché à toutes sortes de...
M. Guay: Je reviens à l'idée de "quelque
empêchement selon sa religion". On pourrait dire aussi " selon les
principes de sa religion ou selon les principes et la discipline de sa
religion". Mais, au fond, ce qui est visé par cet article-ci, c'est que
le ministre du culte qui n'est pas d'accord pour célébrer un
mariage ne le célébrera pas et la personne devra s'adresser
à quelqu'un d'autre. Je ne pense pas qu'on soit dans une situation au
Québec où ça pose un problème de rareté de
personnes pour célébrer un mariage et, à supposer que le
mariage ne soit pas religieux, ça peut être le protonotaire, qui,
lui, va le célébrer sans considérations religieuses.
Est-ce que le député se rallie à
"société religieuse"? Il n'y a pas de problème?
M. Guay: Ça ne me semble pas la formulation la plus
élégante, mais, enfin...
M. Bédard: Enfin. Est-ce que ça va? Est-ce que vous
êtes d'accord?
Cela se lirait: " et la discipline de la société
religieuse à laquelle il appartient."
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Laberge): À la troisième
ligne de l'article 411 nous remplaçons "l'Église" par "la
société religieuse".
M. Blank: Disons qu'on adopte cet article avec le changement.
L'article va dire que, maintenant, on peut forcer un ministre à
célébrer un mariage...
M. Bédard: Mais non!
M. Blank: ...laissez-moi finir... à moins qu'il ne prouve
que son refus est basé sur sa religion et la discipline de son
Église. Cela veut dire qu'il doit maintenant donner la raison de son
refus.
M. Bédard: Cela a toujours été le cas. M.
Blank: D'accord, c'est ce que je dis. M. Bédard: Cela va
s'étendre...
M. Blank: Cela veut dire qu'en fait, on peut maintenant forcer un
ministre du culte à célébrer un mariage qu'il ne veut pas
célébrer pour toute autre raison. Il doit prouver que sa raison
est basée sur sa religion et la discipline... C'est ce qu'on veut
faire.
M. Bédard: Oui, c'est l'état actuel du droit.
M. Blank: Oui, je sais, la fameuse cause de...
M. Bédard: Cela va?
Le Président (M. Laberge): "Société
religieuse" est adopté et l'article 411...
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): ...est adopté avec
amendement.
M. Bédard: Ensuite, on tombait à 413? Vous avez un
amendement.
Le Président (M. Laberge): J'en ai même deux.
À l'article 413, on nous demandait originalement de remplacer l'article
par le suivant. Est-ce encore valable...
M. Bédard: Ah, oui!
Le Président (M. Laberge): ...le remplacement de l'article
par le suivant ou si on doit simplement remplacer une série de mots par
une autre? C'est devenu déchu?
M. Bédard: On faisait disparaître les noms et
prénoms de leurs pères et mères". C'est ça?
Le Président (M. Laberge): Parfait! Je donne lecture
d'abord de l'amendement, c'est-à-dire qu'on nous suggérait de
remplacer l'article 413 par le suivant: "La publication de mariage
énonce les nom, prénoms, profession et domicile de chacun des
futurs époux, leur qualité de majeur ou de mineur et les noms et
prénoms de leurs pères et mères. L'exactitude de ces
énonciations est attestée par un témoin majeur."
Maintenant, ici, on nous dit de remplacer dans ce texte, après les mots
"époux, leur qualité de majeur ou de mineur, "les mots" et les
prénoms et noms de leurs pères et mères" par "ainsi que le
jour et le lieu de leur naissance." On va vous donner cela.
M. Bédard: Excellent. Cela fait suite aux remarques qui
avaient été faites par les membres de la commission
parlementaire, entre autres, l'Opposition, à savoir qu'il n'était
peut-être pas nécessaire d'indiquer le nom et le
prénom.
Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait d'accord avec
cela.
Le Président (M. Laberge): L'amendement...
M. Bédard: Vous voyez, j'ai commencé par le mauvais
article tantôt. Je ne vous donnais pas raison. J'ai pensé
stratégiquement à commencer par les autres.
Le Président (M. Laberge): Le sous-amendement est
amendé. Le nouvel article 413 est adopté avec amendements.
On va faire cela au fur et à mesure parce qu'on ne se retrouvera
jamais. Voilà!
M. Bédard: À l'article 416, nous avions eu une
discussion qui a duré assez longtemps, où le député
de Saint-Laurent, entre autres, avait discouru sur la possibilité, avant
de procéder au mariage, d'informer les futurs époux de
l'opportunité d'un examen médical prénuptial. Il y avait
également une autre formule. Certains groupes avaient parlé aussi
de l'opportunité d'indiquer à ces futurs époux les
ressources communautaires. Comme c'est un terme qui n'est quand même pas
assez défini, nous avons retenu une partie de l'argumentation. Il
s'agirait d'ajouter l'alinéa suivant: "En outre, il informe les futurs
époux de l'opportunité d'un examen médical
prénuptial." Vous n'êtes pas d'accord, M. le député
de Saint-Louis?
M. Blank: Non, non, ça ne me dérange pas.
Le Président (M. Laberge):, M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Est-ce que je dois comprendre que c'est au moment
où le protonotaire s'apprête à célébrer le
mariage ou lorsque la personne fait sa demande?
M. Bédard: C'est cela.
M. Guay: Cela va. D'accord.
M. Forget: Pourrais-je me permettre, M. le Président,
étant donné la remarquable harmonie qui règne sur ces
articles, de faire une suggestion inspirée simplement par le moment
où cette suggestion se fait? Il me semble que ce serait peut-être
encore mieux si c'était à l'article 412, plutôt qu'à
l'article 416, cette mention, au moment où on sollicite la publication
des bans ou la publication du mariage, je pense que c'est le terme le plus
approprié, plutôt qu'au moment de la célébration.
C'est une suggestion qui vient sur le tard.
M. Bédard: Cela me semblait aller de soi que
c'était au moment de la publication des bans. On ne retardera
sûrement pas le mariage.
M. Forget: Oui, ce serait approprié à ce
moment-là.
Le Président (M. Laberge): Au lieu d'apporter cet
amendement à l'article ...
M. Bédard: Plutôt que de faire cela sur le coin de
la table, on va se donner quelques minutes. On sait ce qu'il en est.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: C'est le député de Saint-
Laurent qui a proposé l'idée. Est-ce qu'il ne serait pas
plus opportun, sans le mettre dans le projet de loi, que le ministère
des Affaires sociales, dans toute la publicité qu'il fait pour les
jeunes, les moins jeunes, sur toutes les catégories de population, fasse
un dépliant qui serait accessible à la population? Mais
l'idée d'intégrer cela, sans doute pas à la
cérémonie, mais même la demande de publication des bans, me
paraît un peu curieuse. D'après ce qu'on me dit - je comprends
l'idée du député de Saint-Laurent est-ce que cela ne
devrait pas être plutôt une responsabilité du
ministère des Affaires sociales, ce rôle, sans qu'il soit
obligé de le faire par la loi, ou sans qu'on ne l'insère dans la
loi?
M. Forget: On pourrait dire la même chose de l'obligation
qui est faite au célébrant de faire la lecture de certains
articles du Code civil. On pourrait dire que ce devrait être le
ministère de la Justice qui fasse de la publicité à la
télévision.
M. Guay: Pas nécessairement.
M. Forget: II ne faut pas tout régler par les
dépliants et par les programmes publicitaires. Il reste que nous avons
là des fonctionnaires de l'Etat, en tant que célébrants,
qui sont fonctionnaires de l'État. Il est normal qu'ils rappellent des
choses qui ont une importance même au point de vue des causes de
nullité du mariage. Malgré tout, ce rappel étant fait, on
verra plus tard qu'on peut éviter certaines causes de nullité du
mariage. C'est d'intérêt public et cela n'empêche pas le
ministère des Affaires sociales de publier des brochures et d'inviter
les médecins à prendre certaines précautions lorsqu'ils
savent que l'examen en question est un examen prénuptial. Je pense qu'il
faudrait exiger une prise de sang à ce moment-là. Tout cela peut
se faire par les lois de la santé publique.
M. Bédard: Comme on le place à un autre endroit qui
est plus indiqué dans le texte, il y a un petit problème de
formulation. On va le laisser comme... (21 heures)
Le Président (M. Laberge): L'article 412, qui a
été adopté, je l'ouvre d'office pour permettre de le
placer à l'un ou l'autre endroit. L'article 416 demeure ouvert.
M. Bédard: On pourrait fermer l'article 416, parce que
ça ne va vraiment pas là.
Le Président (M. Laberge): Vous allez le mettre à
412?
M. Bédard: Je ne sais pas si ce sera à 412, mais on
le retient.
M. Forget: Adoptons 416, étant compris que vous allez
trouver une façon de l'intégrer ailleurs.
M. Bédard: Étant donné qu'on revient, mais
on en ouvrira un pour le greffer là.
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Laberge): Article 416, adopté sans
amendement. Article 417?
M. Bédard: II y a un amendement à la fin du premier
alinéa: remplacer "de l'article 441" par "des articles 441 à
446". Cela rejoint ce qui avait été demandé. On n'a pas
cru bon d'ajouter l'article 450 et les suivants.
M. Forget: Si on se met à faire la lecture, il s'agit de
savoir où s'arrêter.
M. Bédard: Bien oui.
M. Forget: Ce sont là les plus significatifs. Il reste
qu'il faudrait tenir compte de la concordance puisqu'il y a un des articles de
441 à 446 qui a été supprimé et cela va modifier -
je le dis pour le bénéfice des rédacteurs -
l'énumération.
M. Bédard: On va avoir une motion de renumérotation
à la fin. On est vraiment dans la concordance.
Le Président (M. Laberge): L'amendement à l'article
417 est adopté. Article 417, adopté tel qu'amendé.
M. Blank: II pense qu'on doit retourner pour quelques minutes
ici, à côté, après 9 heures, pour la sanction du
lieutenant-gouverneur.
M. Bédard: Consolons-nous à l'idée qu'on
travaille pour nos concitoyennes et nos concitoyens.
M. Blank: Oui, mais Sa Majesté nous attend.
M. Bédard: On aura toujours le temps de prendre... Article
423?
Le Président (M. Laberge): II n'y avait pas d'amendement
à l'article 423, mais on l'avait laissé ouvert.
M. Bédard: Ah oui! Je crois qu'on peut fermer l'article
423, M. le Président. On l'avait laissé ouvert parce que
c'était relié à la discussion sur la dispense d'âge
de l'article 403. À partir du moment où on en a disposé,
cela va.
Le Président (M. Laberge): L'article 423
sera-t-il adopté?
M. Forget: Adopté sur division.
Le Président (M. Laberge): Adopté sur division.
Nous passons à l'article 429. À l'article 429, on avait
déjà adopté un amendement afin de changer le dernier mot
de l'article qui était "satisfaite" par "remplie". Cela avait
été laissé en suspens aussi.
M. Bédard: Oui, c'est pour cela.
Le Président (M. Laberge): Ce n'était pas
adopté, c'était en suspens.
M. Bédard: II n'y a rien d'autre, M. le Président,
on peut l'adopter.
M. Forget: Adopté sur division.
Le Président (M. Laberge): Le mot "remplie" est
adopté, c'est-à-dire que l'amendement est adopté sur
division.
M. Bédard: C'est parce que cela fait
référence à la dispense d'âge.
Le Président (M. Laberge): L'article 429 est adopté
tel qu'amendé sur division. À l'article 430, nous avions...
M. Forget: ...posé une question sur "publiquement".
M. Bédard: Oui. C'est le terme employé depuis
toujours. C'est le droit existant et, encore une fois, je pense que ce qu'on
appelle positivement la publicité du mariage est une question qui n'est
pas épuisée par la seule présence d'un
célébrant compétent et par la présence de deux
témoins, mais que s'y ajoute, dans l'interprétation
traditionnelle qui a été donnée par cet article depuis un
siècle, l'élément publication, étant entendu, comme
on le disait l'autre jour, que le défaut de publication à lui
seul n'a jamais été considéré comme un
élément de clandestinité suffisant. Mais lorsque s'y
ajoutaient d'autres éléments comme l'incompétence du
fonctionnaire ou l'absence de deux témoins, à ce moment-là
l'absence de publication venait jouer négativement comme circonstance
aggravante. C'est la raison pour laquelle, je pense, nous serions un peu
inquiets d'enlever le mot "publiquement", même s'il est vrai que cela
peut constituer, à la première lecture, une certaine redondance.
On ne sait pas trop ce qu'on changerait dans l'interprétation
jurisprudentielle si on modifiait ce point.
En termes de concordance, si on relit l'article 409 qu'on a
adopté, on y stipule que le mariage doit être contracté
publiquement, devant un célébrant compétent et en
présence de deux témoins.
Il est certain, en tout cas - je pense que c'était
l'inquiétude du député de Saint-Louis l'autre jour - que
cela n'a jamais empêché certaines coutumes de
célébration un peu plus discrètes que d'autres. Cette
interprétation n'a même jamais été avancée si
peu que ce soit par quiconque.
M. Forget: Ces explications sont - je me permets de le dire en
tout respect -assez peu éclairantes, puisqu'on dit que le défaut
de publication n'est pas, en soi, suffisant pour qu'on invoque la
nullité; lorsqu'on a jugé qu'un mariage n'avait pas
été célébré publiquement, c'est à
cause d'un défaut d'un célébrant compétent ou de
l'absence des témoins; donc, il semble impossible d'imaginer des
circonstances, lorsqu'il y a eu publication, lorsqu'il y a eu un
célébrant compétent et la présence de deux
témoins, jugées comme étant non publiques.
Malgré tout, un doute subsiste dans l'esprit. Le doute est
peut-être plus gênant aujourd'hui qu'il ne pouvait l'être il
y a un siècle, étant donné que les moeurs actuelles font
que des mariages se célèbrent en privé, du moins dans des
maisons privées, dans des lieux privés, qui ne sont pas
accessibles au public à moins d'invitation spéciale, et il serait
fâcheux qu'à cause de cela, quelqu'un, un jour, réussisse
à démontrer que "publiquement" constitue une contrainte
additionnelle dont on n'avait pas soupçonné l'existence.
J'hésite toujours à avoir des mots qui sont redondants; celui-ci,
je pense, en dépit des explications qu'on nous a données, est un
mot redondant. Si le ministre insiste pour l'adopter comme cela, adoptons-le
sur division, mais je ne suis carrément pas convaincu.
Le Président (M. Laberge): Article 430, adopté sur
division.
M. Bédard: Pour redondance. Ce n'est pas la division qui
est redondante, c'est le mot "publiquement".
Le Président (M. Laberge): Article 437. On a des
amendements ici. Je lis ce qu'on porte à notre attention. Remplacer les
mots "consenties aux époux", à la deuxième ligne, par les
mots "que les époux se sont consenties". Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Forget: Un instant.
M. Bédard: C'est plus clair comme cela, vous l'aviez
demandé.
M. Forget: D'accord, c'est pour vérifier. Parfait,
adopté.
Le Président (M. Laberge): L'amendement est adopté.
En conséquence, on peut rouvrir l'article 435 pour le modifier comme
suit. Au premier alinéa, avant le premier mot "l'époux", ajouter
"sous réserve de l'article 437,". C'est-à-dire "435. Sous
réserve de l'article 437, l'époux est de bonne foi..." Sans
changer la fin.
Au premier alinéa, sous réserve de l'article 437, il faut
supprimer aussi les mots "entre vifs". Cela se lit comme suit: Sous
réserve de l'article 437, l'époux de bonne foi a droit aux
donations qui lui ont été consenties en considération du
mariage. Alors supprimer les deux mots "entre vifs". Est-ce que c'est
adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
M. Forgét: Pourriez-vous relire cela, M. le
Président. Je ne suis pas sûr de vous avoir suivi.
Le Président (M. Laberge): Moi non plus parce que je
m'aperçois qu'il y en a encore. Je vais vous donner lecture de l'article
435. Sous réserve de l'article 437, l'époux de bonne foi a droit
aux donations qui lui ont été consenties en considération
du mariage. Cela règle le premier alinéa. Au deuxième
alinéa, à la deuxième ligne, on nous demande de remplacer
la virgule après le mot "caduques" par "ou" et ajouter une virgule
après "réduire", ce qui se lira: les déclarer caduques ou
les réduire, ordonner que le paiement en soit, etc. C'est bien cela?
M. Bédard: "Ou ordonner". Le "ou" d'ordonner reste
là.
Le Président (M. Laberge): II y en a deux?
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Enlever la virgule à
"caduques", remplacer par "ou" et ajouter une virgule après
réduire. Cela va. À la troisième ligne du deuxième
alinéa, remplacer le "en" dans "en soit différé", mais
quel "en"? Est-ce que c'est "en tenant compte" ou le premier? Il y en a un ici
aussi.
M. Bédard: Après le mot "paiement".
Le Président (M. Laberge): Après le mot "paiement".
Je vais faire la correction, je vais vous relire le texte. Je vous le relis.
Deuxième alinéa: "Toutefois, le tribunal peut, au moment
où il prononce la nullité du mariage, les déclarer
caduques ou les réduire, ou ordonner que le paiement des donations entre
vifs soient différé pour un temps qu'il détermine, en
tenant compte des circonstances dans lesquelles se trouvent les parties".
Est-ce que ces amendements seront adoptés?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 435
fortement amendé sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendements.
M. Bédard: Ce n'est que de la concordance, mais je pense,
non seulement je pense, mais à 439 on parle d'accroissement de l'actif,
à la page 13, à la fin de l'article. On parle des aliments! "Sur
l'apport de celui-ci à l'accroissement". Comme on employait un terme,
l'enrichissement du patrimoine.
Le Président (M. Laberge): À la fin du
paragraphe.
M. Bédard: À la fin de l'article 439.
Le Président (M. Laberge): Amendement à l'article
439 qui avait été adopté, mais qui est rouvert pour
changer les mots "accroissement de l'actif" par "enrichissement du
patrimoine".
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Je l'écris. Cet
amendement qui consiste à remplacer les mots "accroissement de l'actif"
par "enrichissement du patrimoine" sera-t-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 439,
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendement.
M. Bédard: On avait laissé l'article ouvert parce
qu'on employait le mot patronymique et on avait eu une discussion
là-dessus, une concordance. On l'a déjà enlevé
ailleurs. C'est cela.
M. Forget: II y a une concordance. Ses nom et prénom.
Le Président (M. Laberge): Dans l'article 443, on dit ici
d'enlever simplement le mot patronymique à la deuxième ligne.
C'est tout.
Cet amendement est-il adopté?
Une voix: Adopté. (21 h 15)
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 443
sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
L'article 444 est en suspens. Il y a autre chose. A l'article 444, il y a un
nouveau texte.
M. Bédard: Oui. On nous demandait d'y ajouter la dimension
de parents, de l'autorité parentale.
M. Forget: Ce n'est pas le souvenir que nous en avons
conservé. Il y avait le problème d'insister sur le fait que ce
qui se fait en commun dépasse la simple notion de direction. Il y a,
bien sûr, la question de l'autorité parentale, mais il y a
également toute la notion que toutes les charges du ménage sont
conjointes. Notre suggestion allait dans le sens de supprimer l'article
plutôt que d'essayer par une périphrase de reproduire à
toutes fins pratiques le premier alinéa de l'article 441.
Je me souviens que nous avions dit que lorsque le code affirme que les
époux ont, en mariage, les mêmes droits et les mêmes
obligations, on a tout dit. Le reste n'est que du superflu, dans le fond, sur
le plan de leur égalité et de la prise en charge des
obligations.
M. Bédard: Oui, j'ai évoqué cet
élément. Mais sur le fait de l'enlever, je pense que nous
n'avions pas pris de décision à ce moment-là.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Bédard: Pour concrétiser, évidemment...
Vous avez raison. À l'article 441, l'énoncé
général englobe certainement ces aspects. Les mots "direction
morale et matérielle de la famille" - on a cherché -sont
utilisés dans d'autres codes. Il ne nous est pas apparu de mots
meilleurs. On n'en a pas trouvé. On a tourné autour du mot
"responsabilité", mais le mot "responsabilité", dans le Code
civil, a une connotation particulière et fait davantage écho
à un devoir, à une obligation qui, lorsqu'on l'enfreint, engendre
une situation de réparation.
Par ailleurs, c'est un article qui a été inclus dans la
lecture de ce qui...
M. Forget: Excusez-moi.
M. Bédard: On pourrait déposer notre amendement
pour en discuter.
M. Forget: Oui, d'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 444 demeure ouvert.
Nous avions l'article 447 qui est ouvert aussi.
M. Bédard: On va continuer la discussion.
Le Président (M. Laberge): Ah bon! Parfait!
M. Forget: C'est parce qu'il n'a pas été
formellement déposé devant la commission.
M. Bédard: C'est parce qu'il n'a pas été
formellement déposé.
Le Président (M. Laberge): Parfait. M. le
député de Sherbrooke. Je vais simplement donner lecture de ce
qu'on nous recommande ici. On nous recommande de remplacer l'article 444 par le
suivant: "Ensemble, les époux assurent la direction morale et
matérielle de la famille et exercent l'autorité parentale."
M. le député de Sherbrooke.
M. Gosselin: Je souscrirais à cette nouvelle formulation.
Reprenant un commentaire sur ce qui a été dit tout à
l'heure sur l'importance de ce qui est indiqué à l'article 444,
la notion de communauté de responsabilités, la notion que les
responsabilités matérielles, la direction morale, appartiennent
à une unité de vie désormais solidaire, coresponsable, je
pense qu'il est important d'affirmer, à tout le moins dans un article,
cette notion de responsabilités copartagées.
M. Bédard: II n'y a pas d'autres remarques, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 444 sera-t-il
adopté? Il y avait une rédaction.
M. Bédard: Ça rejoint exactement la
rédaction de l'office. On y a ajouté "l'autorité".
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, comme ce n'est pas
encore tout à fait adopté...
Le Président (M. Laberge): Non, je n'ai pas eu votre
réponse.
Mme Lavoie-Roux: Je le fais à titre de suggestion. L'autre
jour, si ma mémoire est bonne, c'est peut-être moi qui avais
soulevé - ça n'a pas d'importance que ce soit moi ou un autre -
la question d'ajouter...
M. Bédard: Les tâches domestiques...
Mme Lavoie-Roux: Non, pas les tâches domestiques telles
quelles, mais ajouter un élément qui compléterait la
direction morale et matérielle. J'avais parlé de
l'autorité parentale et quelqu'un m'a fait valoir que cette notion
d'autorité parentale, de toute façon, se retrouve assez
abondamment dans le chapitre sur l'autorité parentale où les deux
sont responsables.
La suggestion que j'aimerais faire serait celle-ci: Ensemble, les
époux assurent la direction morale et matérielle de la famille -
si on veut garder l'autorité parentale, d'accord - ainsi que
l'exécution des tâches qui en découlent.
M. Bédard: Je pense que ça va de soi que, s'ils
font ça ensemble, il va falloir qu'ils fassent ensemble toutes les
tâches qui en découlent, que représentent la direction
morale ou matérielle d'une famille et l'exercice de l'autorité
parentale.
Mme Lavoie-Roux: Oui, vous leur prêtez beaucoup de
vertus.
M. Bédard: Je leur prête un peu de bonne
volonté.
Mme Lavoie-Roux: On ne va pas faire un tour de table ici. Non,
l'exécution des tâches qui en découlent, ça peut
être des tâches de garde, ça peut être des
tâches de tous ordres.
M. Bédard: Payer les factures. Non, c'est à eux
à déterminer ça. Nous tenions à le garder aussi
parce que c'est un des articles qui peut être lu. Par rapport à
l'amendement que nous avons adopté, il me semble que c'est bon que ce
soit lu.
Mme Lavoie-Roux: Je dois vous dire que, lorsqu'on parle de la
direction morale et matérielle, s'il y a juste deux directeurs dans la
maison...
M. Bédard: II n'y a que des chefs et pas d'Indiens,
ça va mal aller.
Mme Lavoie-Roux: S'il n'y a personne pour faire le travail et
exécuter les tâches...
M. Bédard: Nous sommes d'accord avec vous, ça va
prendre une bonne répartition des tâches et des gens qui seront
égaux entre eux.
Mme Lavoie-Roux: Alors, je veux en faire une proposition
formelle, M. le Président. Est-ce que l'amendement a été
incorporé à la proposition actuelle ou si ça deviendrait
un sous-amendement?
M. Forget: Si je comprends bien, le ministre suggère de le
substituer à l'article actuel. On n'a pas besoin d'un vote formel. On
peut le considérer comme effectivement substitué.
Mme Lavoie-Roux: Alors j'aimerais faire un amendement, soit qu'on
retranche les mots " et exercent l'autorité parentale" pour les
remplacer par "ainsi que l'exécution des tâches qui en
découlent".
M. Bédard: Je salue votre amendement. M. le
Président, je ne suis en aucune façon contre ça, sauf que
je crois que cela s'implique de soi-même à partir du
libellé même de...
Mme Lavoie-Roux: On a toujours eu le père chef de
famille.
M. Bédard: Je ne peux pas toujours être d'accord
avec vous, ça fait à peu près sept ou huit articles
où je suis d'accord.
Mme Lavoie-Roux: Non, mais vous essayez de me convaincre que le
fait que le mot "direction" soit là ça résout tous les
autres problèmes. Depuis une éternité, au Québec,
qu'il est chef de famille.
M. Bédard: Je n'ai pas besoin de ça.
Mme Lavoie-Roux: Qu'il assume la direction...
M. Bédard: C'est de la redondance, à mon sens, ou
encore...
Mme Lavoie-Roux: Oui, vous, vous êtes un mari
modèle.
M. Bédard: Non, je ne suis pas un mari modèle du
tout. Je sais qu'à partir du moment où il y a
égalité...
Mme Lavoie-Roux: Tiens, on a le député de
Lévis, il va nous dire ça, lui.
M. Bédard: ... on va se mettre à table et on fera
le partage des tâches qui en découlent.
M. Garon: Quand le père de famille est
député, il n'y a pas de problème, le chef de famille,
c'est la mère.
M. Bédard: Ça va passer à l'histoire,
Ça.
Le Président (M. Laberge): Vous m'avez fait une
proposition formelle que je voudrais relire, s'il y a lieu de la discuter.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Qui consiste d'abord à
biffer les mots "et exercent
l'autorité parentale " et à ajouter - là, je ne les
ai pas.
Mme Lavoie-Roux: Ainsi que l'exécution des tâches
qui en découlent.
M. Gosselin: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: Je comprens la...
M. Bédard: Je le dis d'avance. Je ne crois pas cela
nécessaire. Je serais en désaccord, mais non pas avec ce que cela
représente, d'autant plus que je crois que c'est déjà
implicite et que c'est déjà compris dans le libellé
déjà exprimé. Je voudrais qu'on comprenne bien le sens de
ma dissension.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: Je veux simplement dire que je comprends très
bien la préoccupation du député de L'Acadie...
M. Bédard: On la comprend et on la partage.
M. Gosselin: ...et on la partage également.
M. Bédard: Je veux que ce soit bien compris. C'est
seulement technique, point.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Gosselin: Cependant, est-il nécessaire de
définir d'une manière rigoriste, par le texte que vous
suggérez, ces choses-là? Les partenaires qui partagent les
responsabilités de la direction morale et matérielle de la
famille ne sont-ils pas en devoir de participer également aux
tâches?
M. Bédard: Cela va de soi. M. Gosselin: Oui.
M. Bédard: On peut tout écrire. On peut bien tout
mettre. Si on prenait ce principe-là, on écrirait un roman.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas un grand roman que vous avez. Il
est très précis.
M. Bédard: Non, je sais. D'ailleurs, on a
été d'accord sur bien des points. On n'est même pas en
désaccord sur le fond. Je crois que c'est technique, point.
M. Forget: M. le Président, je pense que le texte qui nous
est soumis, dans une certaine mesure, accroît encore davantage les
objections qui ont présidé au fait qu'on l'a suspendu. En effet,
le rapprochement entre la direction morale et matérielle, le concept de
direction et le concept d'autorité parentale, en fait
véritablement un article où on se préoccupe du pouvoir de
décider soit vis-à-vis des enfants, soit vis-à-vis,
justement, des problèmes et des responsabilités morales et
matérielles de la famille, mais où, évidemment, il n'est
pas du tout question de ce qui en découle.
Je comprends le souci du ministre de ne pas vouloir dicter dans le Code
civil de quelle façon chaque ménage va aménager les
tâches domestiques, etc., mais je pense que ce serait mal comprendre
l'esprit de l'amendement présenté par la députée de
L'Acadie. On parle d'assumer ensemble. Je pense qu'on pourrait faire la
même description ici; les députés qui sont membres d'une
formation politique à l'Assemblée nationale assument ensemble
toutes les tâches qui découlent de leur présence à
l'Assemblée. Nous ne faisons pas tous la même chose et nous ne
faisons pas tous les mêmes choses de la même manière, mais
nous décidons ensemble, à l'intérieur de nos caucus
respectifs, de la manière dont, justement, ces choses doivent être
faites. Personne ne peut dire: Ma participation se borne à
décider au caucus comment ma formation politique va se comporter. On
s'attend également à ce qu'il assume, en fait, des tâches,
mais il les assume avec d'autres de la façon et selon les
modalités et dans les proportions qui sont dictées par les
circonstances, les capacités et les disponibilités de chacun. Il
n'y a pas du tout d'idée d'une égalité arithmétique
dans chacune des tâches, qu'il faut laver la vaisselle tous les deux
jours ou des histoires de ce genre. Ce serait une caricature de la vie
réelle de prétendre faire des règles aussi rigides.
Je pense que la députée de L'Acadie a tout à fait
raison de dire que nous voulons contrecarrer une notion qui s'est
enracinée dans le Code civil - pas seulement là, peut-être
pas surtout là, mais certainement qui était consolidée par
le Code civil - à savoir qu'il y en a un qui était le chef et que
l'autre était l'exécutant. Nous disons: Les deux sont les chefs.
D'accord, cela va très bien. Mais est-ce que, dans le fond, les deux
sont les chefs, mais il n'y en a qu'un qui continue d'être
l'exécutant? Je pense que c'est une notion contre laquelle il faut
réagir et qui ne correspond plus, d'ailleurs, à la
mentalité contemporaine, au moins parmi ce que le premier ministre - et
je ne me permettrai qu'une seule allusion de ce genre - appelle les forces
montantes de la société. (21 h 30)
Si les forces montantes de la société
sont si importantes à certains égards qu'elles permettent
d'espérer contre tout espoir, je pense que c'est un bon cas où on
peut alléguer ce que les forces montantes de la société
pensent. On pourrait peut-être le consigner dans le Code civil. Je pense
qu'un bon mouvement... Non seulement sur le plan symbolique, ici à
l'Assemblée nationale, mais il ne faut pas oublier que ces
textes-là, les cinq ou six articles, seront les seuls qui seront lus
à chaque célébration de mariage. Cela a un effet,
malgré tout, sur la perception, avec le temps, qu'on ne peut pas
négliger. Ce sont des occasions solennelles. Et je pense que, pour avoir
assisté à d'autres mariages après le mien, on revit
toujours son mariage dans les mariages subséquents auxquels on assiste.
Je pense que c'est un exercice fort intéressant que d'adresser de
pareilles admonestations à tous ceux qui participent ou assistent
à la célébration d'un mariage.
M. le Président, je pense que c'est un très bon
amendement. On devrait l'adopter. Si jamais le ministre insistait pour qu'un
article traite de l'autorité parentale, justement dans le même but
exemplaire, il pourrait le faire à un article séparé. On a
enlevé l'article 442. Il pourrait mettre là un paragraphe sur
l'autorité parentale. Je pense qu'effectivement, il serait
peut-être bon de le souligner puisqu'on parle de la résidence
familiale. C'est peut-être encore plus important, dans ces articles, de
parler de l'autorité parentale.
M. Bédard: À l'article 446, on dit
déjà que les époux contribuent aux charges du mariage. Le
député de Saint-Laurent... Je n'en ferai pas une bataille, parce
qu'il y a des articles quand même beaucoup plus importants que cela.
Mme Lavoie-Roux: II est très important celui-là, M.
le Président.
M. Bédard: Quelque chose qui est compris dans l'autre,
vous ne me ferez pas mettre de l'importance là où il n'y en a
pas. Ce n'est pas vrai. Mais si cela peut vous faire plaisir.
Mme Lavoie-Roux: Cela reste au journal des Débats, M. le
Président.
M. Bédard: Si cela peut vous faire plaisir, oui. Et je le
dis pour le journal des Débats. Tout simplement, j'ai dit que
j'étais d'accord sur le fond, d'accord sur l'idée, mais que cela
se retrouvait à l'intérieur de ce qui existe déjà.
Si cela peut vous faire plaisir, je peux le faire en pensant qu'il y a d'autres
articles où il est plus important d'arriver, entre autres la
résidence familiale. Sinon, on pourrait dire que les époux
assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille et les
tâches qui en découlent et exercent l'autorité parentale et
les tâches qui en découlent. On pourrait dire cela de n'importe
quoi, de n'importe quelle responsabilité. C'est pour cela que je dis que
c'est compris à l'intérieur de...
Quand le député de Saint-Laurent dit que les
députés assurent la direction, on peut dire assurent la direction
...
M. Forget: ... de leur formation politique.
M. Bédard: ... démocratique du fonctionnement de la
Chambre. Quand on a dit cela, on pourrait ajouter et des tâches qui en
découlent. Mais c'est quoi, la question de principe? C'est sûr que
toute responsabilité, toute direction qui s'assume implique
nécessairement des tâches qui doivent être
exécutées, des tâches qui doivent être remplies. En
termes de collaboration et de...
M. Forget: M. le Président, en insistant sur la direction
dans un article séparé, vous attirez ce genre de commentaire. Je
reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure et à ce que
j'avais dit lors de notre discussion initiale. Lorsque vous affirmez que les
époux ont dans le mariage les mêmes droits et les mêmes
obligations, vous pourriez vous arrêter là aussi. Tout le reste en
découle, bien sûr. Quand vous dites après que les
époux choisissent ensemble la résidence familiale, vous ne faites
que dire que, vis-à-vis de la résidence familiale, ils ont les
mêmes droits et les mêmes obligations. Donc, cet article aussi est
superflu.
M. Bédard: Vous me dites de le retirer?
M. Forget: Non, mais, puisque vous utilisez l'argument que c'est
implicite, je dis que vous n'êtes pas logique parce que, dans d'autres
circonstances, vous explicitez ce qui est implicite.
M. Bédard: On ne fera pas une longue discussion, mais je
crois au contraire que toute la logique est dans le sens que c'est
déjà compris à l'intérieur de... On pourrait parler
de secours et assistance et des tâches que cela représente.
Autrement dit, toute responsabilité implique nécessairement des
tâches à remplir et à assumer.
Pour finir la discussion, M. le Président, je vais être
d'accord avec mon propre raisonnement, c'est-à-dire que c'est
déjà compris à l'intérieur. Donc, n'en faisons pas
une discussion.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux y revenir quand
même. Pour moi, ce n'est rien de... Excusez, il y avait le
député de Taschereau qui avait demandé la parole.
Je parlerai après lui.
M. Bédard: Je ne dis pas que ce n'est pas important. Ce
n'est pas ce que j'ai voulu dire.
M. Guay: Je vais abonder - je l'avoue, au risque de
déplaire au ministre - dans le sens de la députée de
L'Acadie et du député de Saint-Laurent. Je sais que cela n'arrive
pas souvent.
M. Forget: C'est d'autant plus apprécié.
M. Guay: Je pense qu'effectivement, dans un article du Code
civil, c'est précisément l'endroit par excellence pour
énoncer non seulement le principe de la direction, mais aussi les
tâches qui en découlent, c'est certain que le fait de
l'énoncer ici dans cet article ne va pas changer... Il n'y a personne
qui va pouvoir, à partir de cet article, prendre une poursuite contre
qui que ce soit. Cela m'apparaît invraisemblable. Mais, à partir
du moment où on définit de nouvelles règles dans bien des
cas ou des règles du mariage dans un instrument aussi fondamental qu'est
le Code civil, il m'apparaît important de préciser, de dire,
d'affirmer ces choses, parce qu'on sait très bien comment cela se passe
dans bien des cas. Bien sûr, la direction se fait conjointement, mais les
tâches sont loin d'être conjointes et équilibrées
dans beaucoup de couples, et c'est peut-être leur choix. C'est
peut-être un choix librement consenti. C'est peut-être leur
façon à eux de partager les tâches. C'est une façon
un peu curieuse, on pourra en convenir. Le mari a un emploi à
l'extérieur, ne fait que cela. La femme a un emploi à
l'extérieur et, en plus de cela, elle est obligée d'assumer
toutes les tâches domestiques parce que le mari n'est pas foutu de lever
le petit doigt. Je pense qu'en 1980, au moment où on fait une
réforme du Code civil dans ce domaine, c'est une excellente chose que
d'affirmer dans le Code civil à tout le moins le principe non seulement
au niveau de la direction, mais au niveau aussi du partage des tâches,
quitte à ce que chaque couple le conçoive et l'aménage
comme bon lui semble.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier le
député de Taschereau de son appui. Je pense que tout a à
peu près été dit, mais je voudrais revenir simplement sur
ce que le député de Saint-Laurent a dit au sujet du partage des
tâches. C'est quand même très général, "ainsi
que l'exécution des tâches qui en découlent". À ce
moment-là, comme le disait également le député de
Taschereau, cela ne veut pas dire que les tâches sont
énumérées A, B, C et D d'un côté, mais elles
sont partagées chacun selon sa disponibilité, ses aptitudes ou
son intérêt.
Je pense que cela rend vraiment plus réelle cette
égalité qu'on veut atteindre dans le mariage et cette
responsabilité partagée non seulement à l'égard des
responsabilités financières, mais à l'égard de tout
le fonctionnement de la famille. Il y a des hommes qui n'ont pas eu besoin
d'attendre une révision du Code civil pour, justement, partager ces
tâches et assumer ces responsabilités et, parfois, mieux
même que les femmes à l'intérieur d'un foyer. Mais je pense
que la règle générale, jusqu'à maintenant - et je
n'en fais reproche à personne, cela fait partie logiquement de notre
évolution - ce sont les hommes qui étaient chefs de famille,
quoique les femmes, d'une façon plus discrète, ont
peut-être dans bien des cas assumé autant la direction que les
hommes, mais je pense qu'on veut modifier cet état de choses. Tout le
langage qu'on tient au sujet de l'égalité des époux
à l'intérieur du foyer, il faut que cela porte sur des choses un
peu réelles, un peu concrètes. On ne peut rester exactement avec
les formulations qu'on a eues jusqu'à maintenant, quoique là,
cela s'étend quand même à assumer ensemble - ce qui
n'était pas, je pense, auparavant dans le Code civil - il y a
certainement un progrès. Pour que cela se concrétise et que cela
se traduise dans la réalité, je pense que l'amendement que nous
apportons n'est pas superflu sans être contraignant dans une division
arbitraire, discrétionnaire ou même irréaliste des
tâches.
J'espère que le ministre va s'attendrir. Je ne devrais même
pas faire appel à ce genre de choses.
M. Bédard: Non. J'ai dit et je redis que je suis
pleinement d'accord avec les propos tenus par la députée de
L'Acadie. J'ai évoqué à ce moment-là ma conviction
-parce que cela a toujours été ma manière de voir les
choses - que, du point de vue littéraire, c'était inclus à
l'intérieur de la formulation qui existait déjà. Je n'ai
pas changé d'idée là-dessus, mais je vais succomber avec
plaisir aux assauts et nous sommes d'accord pour...
Mme Lavoie-Roux: Vous l'acceptez? M. Bédard: Oui,
ça va. Mme Lavoie-Roux: Bravo! M. Forget: Je vous
félicite.
M. Bédard: Oui, mais dans les termes que j'ai
employés. Avant, ce n'était pas là et je n'ai jamais eu de
difficulté à faire le partage des tâches.
Mme Lavoie-Roux: II y a des gens pour qui ça ne changera
rien.
M. Bédard: D'autant plus que ce n'est pas
contraignant.
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, on ne pourra pas l'imposer non plus
aux autres, mais cela rend les gens plus conscients.
Le Président (M. Laberge): Je voudrais donner la parole au
député de Sherbrooke.
M. Bédard: Si vous voulez...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Sherbrooke m'a demandé la parole.
M. Bédard: Juste pour se comprendre sur l'amendement,
à la fin, "et assument les tâches qui en découlent". C'est
cela, surtout. Cela rejoindra également l'idée de
l'autorité parentale.
M. Forget: Oui, je pense que c'est bon.
Le Président (M. Laberge): Je vais le reprendre
séparément.
M. Bédard: Je m'excuse auprès du
député de l'avoir interrompu. Ce serait: "Ensemble, les
époux assurent la direction morale et matérielle de la famille,
exercent l'autorité parentale et assument les tâches qui en
découlent."
Le Président (M. Laberge): Bon. Comme j'ai une motion
formelle devant moi, présentée par la députée de
L'Acadie, je me suis posé une petite question en cours de route,
à savoir si une personne qui siège à titre d'intervenant
avait droit de présenter une motion. Je laisse ma question ouverte.
M. Blank: Je vais la "seconder".
Le Président (M. Laberge): Bon, c'est cela. Je la laisse
ouverte pour le moment.
M. Bédard: Je vais la ...
Mme Lavoie-Roux: Vous pouvez peut-être me demander de me
retirer?
Le Président (M. Laberge): Non, non, pas du tout.
M. Bédard: Non, non.
Le Président (M. Laberge): C'est justement pourquoi je
laisse la question ouverte, à cause du règlement...
M. Blank: Au nom de la députée de L'Acadie, je
présente la motion.
Le Président (M. Laberge): Cela va. J'ai pensé
séparer en deux la proposition, à savoir, premièrement,
biffer les mots "et exercent l'autorité parentale". Il semble que
vous...
M. Bédard: Non, non.
Mme Lavoie-Roux: J'ai demandé, par mon amendement, de les
retirer.
M. Bédard: Cela rejoint également une
préoccupation qui avait été énoncée.
Mme Lavoie-Roux: Relisez le texte au complet, on va voir.
Le Président (M. Laberge): Votre motion était de
biffer "et exercent l'autorité parentale".
M. Bédard: Sur cela, on s'entend, vous le retirez.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est juste pour...
Le Président (M. Laberge): Cela est retiré.
Bon!
M. Bédard: Ajouter des mots à la fin.
Le Président (M. Laberge): Ajouter à la fin,
après "parentale", les mots "ainsi que l'exécution des
tâches qui en découlent"...
M. Bédard: Si la députée de L'Acadie n'a pas
d'objection...
Le Président (M. Laberge): "...et assument..."
M. Bédard: ..."et assument les tâches qui en
découlent".
Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous le relire au complet?
M. Bédard: En ponctuant.
Le Président (M. Laberge): Je reprends la rédaction
complète.
M. Bédard: "Ensemble, les époux assurent la
direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité
parentale et assument les tâches qui en découlent." Cela rejoint
l'autre préoccupation du député de Saint-Laurent
également sur l'autorité parentale.
M. Forget: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Bédard: Cela implique des tâches
également.
Mme Lavoie-Roux: Sauf que, du point
de vue du français - les spécialistes vont nous dire que
dans "ensemble, les époux assurent la direction morale et
matérielle de la famille, exercent l'autorité parentale ainsi que
l'exécution des tâches qui en découlent", le mot "en" peut
se rapporter uniquement a l'autorité parentale.
M. Bédard: Non, ce n'est pas cela. On l'a formulé
autrement justement pour que cela ne s'applique pas seulement à
l'autorité.
Mme Lavoie-Roux: Bon, j'ai mal compris.
M. Bédard: On ajoute "et assument les tâches qui en
découlent".
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Laberge): Je vous le relis. Nous
considérons, pour la bonne compréhension du journal des
Débats et de la procédure, que nous avons discuté sur un
projet d'amendement qui, finalement, après rédaction, donne un
article qui se lit comme suit: "Ensemble, les époux assurent la
direction morale et matérielle de la famille, exercent l'autorité
parentale, et assument les tâches qui en découlent".
M. Bédard: II n'y a pas de virgule après le mot
"parentale", "...et assument les tâches qui en découlent."
Le Président (M. Laberge): Parfait. Avant d'adopter cet
article, je cède la parole au député de Sherbrooke.
M. Gosselin: M. le Président, je veux dire que je souscris
à cet article, mais avec des réserves, parce que je trouve que le
Code civil ne doit pas aller si loin. En tout cas, je trouve un peu malheureux
qu'on entre si loin dans le détail des choses. Je m'interroge simplement
- évidemment, il y aura une commission permanente de révision du
Code civil - à savoir si cet article ne soulève pas des
ambiguïtés plus lourdes encore.
Cela dépend de la définition qu'on donne à "assumer
ensemble les tâches". Si l'un des conjoints travaille huit mois à
l'extérieur du foyer parce qu'il est engagé à la Baie
James, par exemple, il pourrait bien, devant un juge, se voir accuser de ne pas
avoir assumé équitablement avec l'autre conjoint, les
tâches... (21 h 45)
M. Bédard: Faisons un acte de foi sur l'ensemble,
d'accord?
M. Forget: L'article 446 règle cela.
Mme Lavoie-Roux: Écoutez donc! De toute façon,
s'ils invoquent cela quand le mari est à la Baie James pendant huit
mois, c'est que, de toute façon, ils veulent en finir du mariage. C'est
aussi simple que cela.
M. Bédard: Disons que la vérité peut
être plus compliquée que cela, mais on n'a pas ici à la
disséquer.
Le Président (M. Laberge): L'article 444, nouvelle
rédaction, sera-t-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 444 est
adopté. Nous passons à 447.
M. Bédard: À quelle place?
Le Président (M. Laberge): À l'article 447. Il a
été laissé en suspens.
M. Bédard: M. le Président, là-dessus je
pense que nous avions fait la discussion globalement.
Le Préaident (M. Laberge): C'est à 448, je pense,
qu'on a apporté une réponse.
M. Forget: L'article 447 ne me semble pas poser tellement de
problèmes, mais à 448, on n'était pas sûr si la
rédaction était suffisamment claire. Selon les notes que nous
avons, il semble qu'on veuille dire ici que, par exemple, chacun des deux
époux peut permettre à son conjoint de poser un acte relatif
à la direction morale et matérielle de la famille, alors que,
normalement, le concours des deux aurait été
nécessaire.
M. Bédard: Nous avons un amendement là-dessus.
L'article 447 est adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 447 est
adopté. Article 448.
M. Bédard: À l'article 448, nous avons un
amendement.
Le Président (M. Laberge): Oui. On nous suggère,
à la deuxième ligne du premier alinéa, de remplacer le mot
"les" par le mot "des". C'est ce qui signifiera dans "des actes relatifs".
M. Bédard: Pour éviter ce qu'évoquait le
député de Saint-Laurent, la grande délégation
générale qui fait que...
M. Forget: Si on employait le singulier, cela voudrait dire la
même chose, mais ce serait encore plus clair parce que, quand on parle du
singulier, le singulier emporte le pluriel, mais cela montrerait que la
délégation vise des choses particulières.
M. Bédard: Oui, c'est sûr. Le "des"
limite également dans le sens en tout cas qu'il s'agit d'actes
déterminés. L'idée c'était peut-être de
penser à des actes déterminés.
M. Forget: C'était bien l'idée, mais je me dis
qu'en utilisant les règles d'interprétation, cela couvre à
la fois la possibilité d'une délégation pour un acte et la
délégation pour des actes.
M. Bédard: Le "des" ici, disons, a peut-être
été retenu après quand même une petite
réflexion. On a pensé l'appliquer à ceux qui, en raison
parfois de leur travail, quittent leur domicile pour quelques mois, et à
ce moment va se poser le problème des actes vraiment, mais quand
même des actes dans le sens de plusieurs actes. C'est un petit peu la
sensibilité qu'on a eue...
M. Forget: C'est peut-être plus intelligible pour la
plupart des gens, oui, à ce point de vue, d'accord.
Le Président (M. Laberge): Le mot "les" est
remplacé par "des". C'est adopté. L'article 448 amendé
sera-t-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
J'appelle maintenant l'article 450 qui a été laissé
ouvert.
M. Bédard: À l'article 450, il n'y avait pas
d'amendement. Nous avions eu une discussion sur l'opportunité de faire
en sorte que le consentement soit écrit lorsqu'il s'agit des meubles. Je
pense que nous avions évoqué suffisamment les difficultés
que ça pouvait entraîner. Nous n'avons pas d'autres remarques
à faire sur l'article tel que libellé. Je n'ai pas d'autres
remarques à faire.
Mme Lavoîe-Roux: Je voudrais soulever une question. Est-ce
que l'article est fini?
M. Forget: Non, il n'est pas fini.
Le Président (M. Laberge): Nous sommes à l'article
450.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais juste soulever une question de
règlement. Je m'excuse, M. le Président. Tout à l'heure,
vous avez soulevé la possibilité que je ne puisse pas faire
d'amendement à titre d'intervenant.
Le Président (M. Laberge): C'est une question que je me
posais.
Mme Lavoie-Roux: Là, je me suis rappelé que les
intervenants ont le droit de faire des motions, mais ils ne sont pas
comptés dans le quorum, s'il y a un vote qui est pris. Alors, je veux
garder mien l'amendement que j'ai proposé.
M. Bédard: L'amendement qui en découle.
Le Président (M. Laberge): II est encore à votre
nom.
M. Bédard: Et la tâche que vous vous êtes
donnée de le faire.
Le Président (M. Laberge): II est inscrit ici à
votre nom.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laberge): II n'y avait pas d'amendement
à l'article 450.
M. Forget: Non, il n'y a pas d'amendement.
Le Président (M. Laberge): C'est-à-dire qu'il y a
eu juste un amendement qui est déjà adopté; le mot "ou" a
été remplacé par le mot "ni". C'est déjà
fait. Le reste était resté ouvert.
Mme Lavoie-Roux: C'étaient les meubles.
M. Forget: Nous y avons réfléchi aussi depuis la
discussion qui a eu lieu à la commission et nous en venons à la
conclusion, qui n'est peut-être pas emballante à première
vue, qu'il n'y a probablement rien qu'on puisse faire pour améliorer le
texte et le rendre efficace. Mais, dans le même souffle, je pense que la
vérité exige que l'on dise à la commission parlementaire
qu'il s'agit beaucoup plus d'un voeu pieux que d'une mesure
véritablement efficace, parce qu'un conjoint de mauvaise foi qui voudra
transgresser cet article pourra le faire pratiquement impunément.
Dans une certaine mesure, on peut conclure que l'avantage principal de
l'article sera peut-être de faire d'un tel comportement un des
éléments que l'autre conjoint pourrait amener pour demander la
séparation de corps ou le divorce. C'est à peu près la
seule conséquence pratique, si on peut parler d'une conséquence
pratique. On pourrait caractériser le comportement du conjoint qui vide
la résidence familiale de ses meubles comme un comportement qui
démontre une volonté de ne pas respecter les obligations qui
découlent du mariage. C'est à peu près tout ce qu'on peut
trouver. Autrement, pour lui donner une plus grande efficacité, il
faudrait requérir des écrits, requérir un formalisme dans
la vente du moindre article ménager qui rendrait la vie de tous les
jours pour énormément de gens
absolument impossible.
M. Bédard: On pourrait noter aussi la pression morale que
ça peut représenter.
M. Forget: Bien sûr, pour ceux qui sont soucieux d'observer
les lois, ce sera très bien, mais pour ceux qui veulent aller au bout de
leurs possibilités, ça ne pourra pas avoir de sanctions
immédiates.
M. Bédard: Pour ceux-là, c'est bien difficile de
faire des lois.
M. Blank: La seule façon d'éviter ça, c'est
une sanction pénale; on ne veut pas de sanctions pénales dans le
Code civil, ce qui veut dire que ça reste un voeu pieux.
M. Bédard: D'accord? L'article 450 est adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 450 est adopté
avec amendement.
M. Bédard: C'est ça, il y avait un petit
amendement.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
J'appelle l'article 452.
M. Bédard: 452, il y a un amendement.
Le Président (M. Laberge): II y a un amendement ici. On a
une suggestion. Un moment, ça ne sera pas long! On dit à
l'article 452: Ajouter à la deuxième ligne du premier
alinéa le mot "écrit" après le mot "consentement". Alors,
"sans le consentement écrit de son conjoint."
M. Bédard: Après réflexion, étant
donné qu'il s'agit de bail, de location, etc., je ne pense pas qu'en
aucune façon on rende la vie impossible à qui que ce soit en
demandant le consentement écrit et ça représente à
ce moment-là une sécurité de plus, je pense.
M. Forget: Nous acceptons l'amendement, M. le Président,
mais j'aimerais dire qu'après un examen nouveau que nous avons fait de
cette disposition, compte tenu même de l'amendement apporté par le
ministre, nous jugeons que cette disposition-là n'est pas
adéquate parce qu'elle ne réussira pas, selon nous, à
donner la protection recherchée par tous relativement à des
locaux qui sont loués par un ménage. Je pense qu'il aurait fallu
procéder différemment en permettant... Je crois qu'il y a trois
éléments sur lesquels nous voudrions insister.
En premier lieu, le Code civil devait faire reposer la protection de la
résidence familiale louée sur l'un ou l'autre de deux
mécanismes, soit le bail conjoint des époux qui assument,
à ce moment-là, la qualité de locataires conjointement et
solidairement; c'est une solution qui, dans le cas où les deux ont un
revenu, etc., pourrait être la plus appropriée. C'est une solution
possible. C'est évidemment une solution qui est ouverte maintenant, mais
qu'il faut mentionner malgré tout dans le contexte.
L'autre solution serait de faire figurer, par une modification à
la Loi sur les relations entre locataire et locateur, donc le chapitre sur le
louage de choses, de manière obligatoire au bail, une déclaration
qui devrait être faite au moment de la location et qui indiquerait qu'il
s'agit là de la location d'une résidence familiale, avertissant
ainsi le bailleur ou le locateur de l'intention manifeste des conjoints. Ceci
devrait être aussi accompagné d'une disposition qui ferait
qu'à ce moment-là, la participation du conjoint au bail n'est pas
équivalente à une acceptation d'une responsabilité
conjointe par les deux époux quand l'un des conjoints se borne à
signer une telle déclaration.
Troisièmement, je pense que, si on faisait cela, il serait
nécessaire d'envisager une mesure plus grande de souplesse malgré
tout, pour éviter qu'il y ait trop de litiges entre conjoints qui
puissent être apportés devant les tribunaux en permettant la
substitution de bonne foi d'un bail pour un autre. En effet, on peut imaginer,
si on n'est pas en face d'un bail conjoint, que le locataire qui assume la
responsabilité financière de payer le loyer... On se met dans la
situation où il y en a un seul qui a un revenu provenant d'un emploi et
ce conjoint perd son emploi, subit une diminution de revenu et doit prendre la
décision de se reloger ailleurs parce qu'il ne peut plus assumer cette
charge. Dans la mesure où il ne place pas sa famille dans une situation
inacceptable, c'est une question de fait, il devrait être possible de
substituer de bonne foi une résidence familiale à une autre,
parce qu'il peut y avoir malgré tout un désaccord entre les
conjoints, sans être obligé de demander au tribunal la permission
de le faire.
Enfin, l'esprit général du genre de régime que nous
envisageons, c'est de rapprocher plus directement du bail même,
plutôt que d'une déclaration qui peut intervenir à un
moment quelconque, la qualité de résidence familiale. Autrement,
nous avons l'impression que ça va demeurer soit lettre morte parce qu'on
négligera de faire la déclaration, ou alors cela va intervenir
comme un élément stratégique dans l'amorce de
procédures entre les conjoints. Pour obtenir des avantages sur d'autres
plans, on va faire une déclaration ou alors on va le faire intervenir
comme une mesure accessoire à une procédure de
divorce. Je pense que cela est déjà prévu de toute
façon, ce n'est pas nécessaire dans ces cas-là, ou alors
ça va, encore une fois, comme je l'ai indiqué tout à
l'heure, tomber rapidement en désuétude parce que les gens ne le
sauront pas. Si on le fait au moment du bail, si c'est rapproché du
bail... À ce moment-là, je pense que c'est toute
l'économie - enfin pas toute l'économie -c'est certainement une
partie des dispositions du chapitre relatives au bail, y compris les clauses de
droit public, etc., et le formulaire utilisé qui devraient subir des
modifications. Nous en sommes venus à la conclusion, quant à
nous, que l'approche très facultative qui est utilisée n'est pas
la meilleure qu'on puisse imaginer dans les circonstances. (22 heures)
M. Blank: ... même dans la loi, dans la pratique actuelle,
on ne va pas assez loin. Le député de Saint-Laurent parle d'une
façon d'avoir quelque chose de public, une déclaration de
résidence familiale. Ici, même avec l'amendement proposé
par le gouvernement, on dit que le consentement de sous-louer c'est par
écrit, mais, quand on parle de l'avis au propriétaire, on ne dit
pas que ce soit par écrit, on parle d'un avis. Même dans la loi
actuelle. Cela veut dire que le propriétaire doit savoir que c'est une
résidence familiale. La suggestion du député de
Saint-Laurent donnerait une chance au propriétaire. Ce n'est pas dans
l'intérêt du propriétaire que ce soit sa résidence
familiale; c'est-à-dire qu'on doit prendre toutes les mesures possibles
pour éviter que le propriétaire dise: Je ne le savais pas, je ne
l'avais pas.
Maintenant, on a une forme de bail avec la loi de la Régie du
logement, il y a un bail type. On pourrait ajouter dans cette loi un
paragraphe, un article ou une petite boîte carrée où les
parties peuvent aviser le propriétaire que c'est une résidence
familiale sans nécessairement engager les deux conjoints conjointement
et solidairement. Peut-être que ce n'est pas dans son
intérêt.
M. Bédard: J'ai pris la peine de le mentionner lorsque
nous avons fait l'étude de cet article, mais peut-être que vous ne
vous le rappelez pas. À l'heure actuelle, au moment même où
on se parle, déjà au niveau des Affaires municipales - ce n'est
pas seulement en termes d'idée - on va en venir à une clause
type. J'ai même parlé d'une clause type dans le bail type qui,
à ce moment-là, fera que tout le monde sera averti en même
temps, tout le monde le saura. Cela rejoint exactement l'essentiel des
représentations que vous venez de faire, de rapprocher le plus possible
l'ensemble du mécanisme de protection du moment où la location
elle-même se fait.
M. Blank: Mais, à ce moment-là, l'avis sera par
écrit, pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi?
M. Bédard: II sera non seulement par écrit, mais
toutes les parties à l'acte de location seront informées en
même temps et seront liées en même temps.
M. Blank: Ce sera obligatoire, cette clause?
M. Bédard: Oui, c'est une clause type dans le bail type
que nous avons non seulement l'intention d'appliquer, mais qui sera contenue
dans la loi du ministre des Affaires municipales. Cela rejoint exactement les
préoccupations que vous évoquez et celles que j'avais
également.
Le Président (M. Laberge): Autres commentaires sur
l'article 452?
M. Bédard: On n'a pas besoin de loi pour la clause type,
c'est par réglementation, c'est encore plus facile de pouvoir l'ajuster
aux préoccupations que nous évoquons concernant la
protection.
M. Blank: Oui, cela va couvrir tous les nouveaux baux
signés après l'entrée en vigueur de cette loi, mais il y a
des milliers de maisons qui sont déjà louées. Comment
va-t-on aviser ces gens?
M. Bédard: C'est pour cela qu'il y a l'avis dont on
parlait.
M. Blank: Oui, mais je ne sais pas pourquoi vous ne mettez pas
l'avis par écrit.
M. Bédard: L'avis par écrit peut être rendu
plus formaliste. Si le conjoint d'un locataire donne devant témoin, de
façon qu'il puisse en faire la preuve, un avis au locateur que
l'immeuble qui est occupé l'est à titre de résidence, cela
lui permettra ensuite de pouvoir aussi invoquer contre le locateur qu'il avait
été avisé et d'en faire la preuve. Malheureusement, s'il
n'a pas envoyé un écrit alors qu'on l'exige, même s'il a
des témoins, il ne pourra pas invoquer que l'avis a été
donné parce qu'il y aura un défaut de formalisme. C'est sûr
que l'avis, sans qu'on distingue qu'il doit être par écrit ou
verbal, pourra être donné par écrit. C'est une certaine
preuve utile quand il s'agit de l'utiliser, mais s'il arrive que cela a
été donné verbalement devant témoin, il pourra
aussi l'invoquer et alors s'en servir pour se protéger. L'idée
était de favoriser davantage la protection du conjoint aussi, enfin, de
la famille, si on veut, en laissant l'avis plus souple. Peut-être qu'il y
a aussi quelques commentaires à faire sur les techniques qui ont
été proposées pour la protection. C'est certain qu'il n'y
en a aucune qui est
complète en elle-même dans la mesure où on en est
conscient. La question du bail conjoint, en pratique, on l'a déjà
mentionné, le tiers... On a évoqué le bail conjoint. Cela
suppose que les deux époux acceptent de devenir cosignataires du bail,
d'une part. Le locateur, lui, ne sait pas évidemment si celui qui vient
louer est marié ou non, de sorte que s'il vient et qu'il signe seul, il
n'y a pas de bail conjoint, mais si le couple vient, que les deux deviennent
cosignataires du bail, j'imagine que le locateur s'en montre assez heureux.
Cela lui donne deux recours. Il ne faut pas oublier qu'en devenant cosignataire
d'un bail, on devient également codébiteur, non seulement
codébiteur de l'occupation paisible, mais de toutes les obligations qui
en découlent, y compris les dommages et intérêts s'il y en
a. Donc, dans la mesure où les deux époux viendront comme
codébiteurs, je pense que ce sera heureux. Cela réglera
déjà un certain problème. Mais cela ne rejoint pas tout le
monde.
Il est possible aussi qu'au moment de la location d'un appartement, la
personne ne soit pas mariée, que ce ne soit que plus tard qu'elle se
marie. Par conséquent, il faudra prévoir aussi, par une technique
d'avis, la possibilité de protéger le couple, puisque le mariage
intervient après le bail. Dans le cas de cette clause type qui peut
être souhaitable, je pense, et insérée dans le bail, il est
déjà prévu que cela peut être possible par voie de
règlement. Il s'agirait que... L'article 108, paragraphe 5, dit que le
gouvernement peut par règlement imposer l'inclusion de mention
obligatoire dans le bail. Cela va aussi très bien si la
déclaration qui est faite est conforme à la réalité
qui est vécue. Si le locateur dit: Ce n'est pas ma résidence
principale, le locateur saura, par l'inclusion dans le bail, que ce n'est pas
la résidence principale et son comportement sera un comportement de plus
grande liberté.
Si la déclaration qui est faite est que l'immeuble loué
sert de résidence familiale, évidemment, son comportement sera
conditionné, restreint par l'avis qu'il vient de recevoir dans le bail.
Donc, de la qualité de la déclaration peut dépendre
l'efficacité aussi d'une semblable clause. Aucun, me semble-t-il, de ces
moyens ne rejoint toute la réalité, de sorte qu'il faut
probablement garder, si on veut aller jusque là, cette technique de la
possibilité de donner un avis en tout temps au locateur parce que le
bail ne résout pas tout, ni la déclaration qu'il y a dans le
bail. Au contraire, je pense que si quelqu'un étant célibataire
loue un appartement, déclare que cela ne sert pas de résidence,
se marie six mois plus tard et que le couple habite cette résidence, il
est important qu'il puisse y avoir une technique d'avis pour que le bail soit
protégé à compter de ce moment. En fait, je pense que
c'est de la conjugaison de toutes ces techniques, bail conjoint, clause incluse
dans le bail, avis possiblement donné postérieurement, que peut
découler une protection plus étendue.
M. Forget: M. le Président, il ne fait pas de doute qu'il
n'y a pas de panacée, cela est certain. Il reste qu'il faut
régler les problèmes un à la fois. Il nous semble que le
seul moyen qui est retenu ici n'est pas le plus efficace parmi ceux qu'on
pourrait considérer. J'ouvre ici une parenthèse pour formuler une
interrogation à l'endroit du ministre. Je fais référence
aux articles du divorce qui accordent une protection à la
résidence familiale et qui, dans certains cas, permettent au tribunal
d'intervenir à titre de mesure provisoire pour attribuer à l'un
des conjoints l'usage exclusif de la résidence familiale.
La résidence familiale n'est pas une expression qui est
définie comme telle autrement que par l'application de l'article 452 et
de l'article 453. Faudrait-il supposer que si, au moment du divorce, il n'y a
pas eu une déclaration préalable qui a été
enregistrée, déposée ou faite, l'article correspondant au
chapitre du divorce ne peut pas trouver d'application?
M. Bédard: Je croirais que le tribunal, sur demande qui
lui en sera faite sans doute, attribuera la résidence ou ne l'attribuera
pas au demandeur dans la requête.
M. Forget: Je vois. Indépendamment d'une
déclaration, même s'il s'agit d'un immeuble et qu'il n'y a rien
d'enregistré, il peut y avoir une déclaration judiciaire qui est
équivalente.
M. Bédard: C'est parce qu'il s'agit des rapports entre les
époux, à ce moment.
Dès qu'il y a une famille, il y a une résidence
familiale.
M. Forget: Je ferme la parenthèse là-dessus, mais,
encore une fois, il me semble qu'il n'y a pas de panacée. Le
raisonnement qu'on nous a tenu relativement au bail conjoint est exact, je
pense que ça peut être une solution adéquate, et quand les
parties y ont recours, le Code civil pourrait préciser que la
résidence qui fait l'objet d'un bail conjoint est, pour les fins de
l'application du Code civil, une résidence familiale, par exemple.
M. Bédard: La seule chose, c'est que ça peut ne pas
couvrir tout le monde, comme on l'a dit.
M. Forget: C'est ce que j'ai dit au départ, alors je le
sais, c'est bien sûr. Mais il reste que, quand on examine toutes les
possibilités, pour certains mariages...
M. Bédard: Ce n'est pas facile.
M. Forget: ... pour certaines familles, ça peut être
la meilleure solution, donc, je pense qu'il ne faut pas non plus l'exclure.
Dans certains cas, ça peut être vraiment la meilleure
solution.
Pour d'autres cas, le problème est de savoir à quel moment
la déclaration devrait intervenir. Il me semble que si elle n'intervient
pas le plus possible au début du bail, l'espoir qu'elle se fera
spontanément, en cours de route, d'abord, c'est un espoir qui sera
souvent déçu et, dans la mesure où il n'est pas
déçu, c'est une déclaration qui se fera à un moment
qui n'est peut-être pas opportun et qui n'est peut-être pas
souhaitable, en ce sens qu'elle se fera, soit au moment où il y a
déjà des difficultés - la déclaration va compliquer
ces difficultés -ou elle se fera trop tard et elle manquera
d'efficacité. Je pense que si elle se faisait par une inscription
obligatoire au bail, ce serait grandement favorable.
S'il y a une clause type dans le bail, n'y a-t-il pas un risque,
à moins que le Code civil ne l'exclue, qu'il y ait une
responsabilité solidaire et conjointe pour les obligations
découlant du bail, à moins qu'un article spécifique du
code dise que cette déclaration, même imposée par la loi,
n'entraîne pas la responsabilité solidaire et conjointe? Si on n'a
pas choisi un bail conjoint, il ne faudrait pas retomber dans la formule du
bail conjoint par inadvertance, en quelque sorte.
Finalement, je reviens sur le dernier point que je soulignais tout
à l'heure, c'est l'idée de ne pas multiplier indûment les
occasions où le tribunal aurait à intervenir. Il me semble que,
dans la substitution de bonne foi d'une résidence à une autre,
alors qu'il n'y a pas d'intention de brimer la famille ou de la priver de son
gîte, il s'agit simplement de donner suite à des
nécessités économiques ou à des convenances, alors
qu'on n'a pas un bail conjoint. Évidemment, s'il y a mauvaise foi, si
c'est l'équivalent de disposer de la résidence principale en
substance, je pense que l'article devrait donner ouverture... Mais ça
rendrait possible, malgré tout, des phénomènes qui sont
d'observation courante et qui peuvent être la source d'un
désaccord mineur, mais auxquels on ne devrait pas permettre de
dégénérer en un désaccord majeur par l'intervention
d'un tribunal. (22 h 15)
M. Bédard: Je pense qu'on l'a évoqué aussi
tout à l'heure, mais que le député a eu sa réponse
sur le fait que le locateur ne soit pas avisé par écrit. Je crois
que c'est dans un souci d'éviter de faire en sorte qu'en mettant trop de
formalisme un citoyen ou une citoyenne n'en vienne à perdre son droit
parce que cet avis-là n'a pas été fait par écrit.
Si on stipule que cela doit nécessairement être fait par
écrit, à ce moment-là on élimine les
possibilités que ce soit fait verbalement. Je ne pense pas qu'on doive
les éliminer, on doit donner toutes les chances possibles que l'avis
soit donné au locateur et qu'il ait une base légale qui ne
crée pas de problèmes. D'accord?
Le Président (M. Laberge): L'amendement, qui consiste
à ajouter le mot "écrit" après le mot "consentement"
à la deuxième ligne, sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté. Nous nous engageons, comme je
l'ai évoqué, pour ce qui est de la clause type - toutes les
représentations sont faites au niveau des Affaires municipales -
à ce que ça puisse devenir réalité rapidement.
Le Président (M. Laberge): L'article 452 tel
qu'amendé sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendement.
Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez adopté de l'autre
côté.
M. Bédard: Non, non. Écoutez, jusqu'à
maintenant, on a...
Mme Lavoie-Roux: L'amendement? Ah bon! D'accord.
Le Président (M. Laberge): L'amendement.
M. Bédard: ... fonctionné très
ouvertement.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'était pas un reproche,
c'était juste une remarque.
Le Président (M. Laberge): Cela va pour l'article 452 ou
est-ce que vous avez d'autres représentations sur l'article 452?
Mme Lavoie-Roux: C'est juste une question d'information. Le
ministre nous dit: Je m'engage à ce que, dans les lois municipales, dans
le code du logement ou je ne sais trop...
M. Bédard: Dans la loi de conciliation
locateurs-locataires, la loi no 107.
Mme Lavoie-Roux: ... soit introduite cette clause
particulière touchant la résidence familiale. Par contre, on ne
la retrouve pas telle quelle ou d'aucune façon au Code civil. Est-ce
qu'il pourrait y avoir inconvénient qu'un puisse avoir
préséance sur
l'autre? C'est vraiment une question d'information.
M. Bédard: Le règlement lui-même est
déjà rattaché aux articles 1651.1, 1651.2, 1658.21 du Code
civil. Je pense que ça ne pose pas de problème; ça indique
déjà un peu l'intention qui était visée à ce
moment-là.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Forget: On n'a pas de réponse à la question de
substitution.
M. Bédard: Si cette clause type existe à la suite
du projet de loi 107 dans un bail type, vous voulez savoir ce qui aurait
préséance s'il y avait une disposition contraire dans le Code
civil.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Cela ne m'apparaît pas aussi
explicite à l'article 452.
M. Bédard: Je pense qu'on peut difficilement y aller de
deux mesures contradictoires. Il n'y a pas de disposition dans le code disant
qu'on ne puisse pas ou qu'on ne doive pas inclure dans le bail une clause
visant cet avis au locateur...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Bédard: ...qui peut se faire de façon
unilatérale après le bail, mais qui peut se faire aussi à
l'intérieur même du bail, ce qui est souhaité ou
peut-être souhaitable. Il n'y a pas de disposition incompatible.
L'article 452 n'est pas incompatible et l'avis dont il est question sera
donné dans le bail, mais il deviendra impératif, si je comprends
bien, par l'adoption d'un règlement qui va exiger que, dans le bail du
logement d'habitation, apparaisse une déclaration suivant laquelle les
lieux d'habitation loués servent ou ne servent pas, évidemment,
selon les situations, de résidence. En d'autres termes, cela deviendra
une application de l'article 452 puisque le locateur aura reçu dans le
bail même l'avis que les lieux servent de résidence familiale. Je
n'ai peut-être pas bien saisi votre pensée, mais...
Mme Lavoie-Roux: Non, non. Oui, vous avez raison de dire que ma
pensée n'est pas très précise. Je vous l'accorde, M. le
Président. Ce qui m'inquiète, c'est que - et mon
inquiétude est peut-être sans fondement vous pouvez bien mettre
une clause semblable dans la loi sur la conciliation entre locataires et
locateurs, mais le conjoint qui signe un bail peut bien aller signer son bail
tout seul et son épouse ou sa conjointe ne sait même pas qu'il y a
une telle disposition puisque cela n'apparaît pas au Code civil,
quoiqu'il ne le saurait peut-être pas plus, même si c'était
au Code civil de toute façon.
M. Bédard: II a plus de chances d'en être
informé.
Mme Lavoie-Roux: Je veux seulement m'assurer que le conjoint soit
vraiment, d'une façon très claire, protégé et qu'il
n'y ait pas d'ambiguïté ou que cela ne puisse pas...
M. Bédard: ...par quelque disposition que ce soit du Code
civil. Vous pouvez en avoir l'assurance. Il n'y a aucune disposition qui
pourrait, de quelque façon...
Mme Lavoie-Roux: L'article 452, dans ce sens-là, vous
semble assez complet?
M. Bédard: Oui, et cela constituerait une application au
premier moment de la location de cet avis-là et cela paraît aller
dans le même sens, justement.
Il est peut-être bon également d'ajouter que la
Régie du logement a une obligation qui lui est faite en vertu de sa loi
de renseigner les locataires et les locateurs sur leurs droits et obligations
qui peuvent résulter du bail d'un logement ou dans toute autre
matière dans la présente loi. Elle a quand même des
programmes d'information qui vont peut-être permettre ou pousser
l'information sur les aspects de droit nouveau du Code civil. Je pense que ce
serait important.
M. Forget: Je pourrais peut-être reformuler un peu...
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
M. Forget: ...l'inquiétude de la députée de
L'Acadie, M. le Président. En lisant l'article 452, on remarque que
l'époux locataire de la résidence principale de la famille a des
obligations quand il sous-loue, cède son droit et met fin au bail, mais
qu'il n'a pas l'obligation, au moment où il signe le bail, d'aviser son
locateur qu'il s'agit de la location d'une résidence familiale. Dans le
fond, le tout repose sur la décision, à un moment donné,
de faire une déclaration et non pas dans la notion que, si une
résidence est utilisée comme résidence familiale, au
moment de conclure le bail, le locataire devrait peut-être - c'est la
question - avoir l'obligation de la déclarer comme telle. On veut
probablement que ce soit sélectif. On veut que ce soit fait par ces
familles qui croient ou dont un des membres croit que la résidence
familiale est en danger. C'est un remède sélectif tel que
formulé ici.
M. Bédard: Je comprends mal le règlement dont il
est question. Si on peut imposer dans le bail une clause type, pour ce
qui est du logement, chaque fois qu'il est question de logement
d'habitation, mais pas simplement celui qui concerne la résidence
familiale, parce qu'on le saura une fois qu'on aura eu une déclaration,
évidemment, une réponse de la part du locataire, c'est lui qui va
indiquer s'il s'agit de la résidence secondaire de la famille. Il est
possible qu'il ait une résidence à l'extérieur de la
ville, qu'il ait un pied-à-terre, comme on dit couramment, dans une
ville, mais que cela constitue une résidence qui n'est pas tellement la
résidence familiale, qui est peut-être la résidence
secondaire. A cause de son travail, il doit avoir un appartement ailleurs
qu'à son lieu de résidence principale, mais, dans son bail, il
devra répondre parce qu'il y aura une clause obligatoire. Ce sera une
clause type dans le bail. Il devra répondre à cette question. Ce
n'est pas ou c'est la résidence familiale, la résidence
principale de la famille. Donc, il ne pourra pas échapper à
l'obligation de répondre à cette clause impérative du
bail.
M. Forget: Je pense que voici ce qui nous dérange.
N'est-il pas extraordinaire que l'on cherche, que l'on vise à
protéger de cette façon, de manière obligatoire, la
résidence familiale louée par la voie d'une inscription qui n'est
imposée que par un règlement?
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Forget: N'est-ce pas un peu paradoxal qu'on ait un chapitre
dans le Code civil qui parle de la résidence familiale, un article qui
traite de la résidence familiale louée et que la clause
déterminante qui rend obligatoire la déclaration de la
résidence familiale louée se trouve dans un formulaire
adopté par règlement? C'est un peu comme si, dans le chapitre sur
la nullité du mariage ou quelque chose dans ce genre-là, on ne
parlait pas des clauses de nullité du mariage, mais qu'il y aurait un
règlement quelque part, adopté en vertu d'une loi
complètement différente, qui décréterait par
règlement les causes de nullité.
Au point de vue de la façon de procéder, c'est un peu
paradoxal. C'est peut-être pour cela qu'on a ce débat parce que,
dans le fond, on crée une obligation et on ne la crée pas
là où on s'attendrait à la voir créée. On la
crée par un véhicule très indirect et qui dépend
d'une volonté qui peut changer du jour au lendemain puisque, selon les
gouvernements ou Dieu sait quoi, on pourra changer l'arrêté en
conseil. On pourra peut-être, à un moment donné, oublier
pourquoi c'est là au niveau de la Régie du logement et l'omettre,
en disant: La formule est devenue très compliquée, on va enlever
cette clause-là. C'est là depuis des années, mais on ne se
rappelle plus trop bien ce que cela fait là. Et cela doit, de toute
façon, être obligatoire en vertu de quelque chose d'autre. On
ferait sauter la formule.
C'est l'idée de mettre des choses dans des lois, surtout dans le
Code civil, plutôt que dans des règlements. C'est peut-être
cela qui nous gêne.
M. Bédard: Oui. Sur certains aspects, le
député de Saint-Laurent peut avoir raison. Il est clair que la
formule du bail type en est une de celles qui sont le plus souvent
présentes non seulement à l'esprit, mais devant les yeux de ceux
qui vont avoir à s'en prévaloir, peut-être plus que les
dispositions au niveau du Code civil. Mais je reconnais qu'il y a un ...
M. Blank: J'ai un autre problème...
M. Bédard: Avec la formule, avec la clause type dans le
bail type, à ce moment-là, c'est une des meilleures informations
qu'on puisse avoir.
L'article 1651.1 donne une autre assurance. "Le locateur doit, dans les
dix jours de la conclusion du bail, remettre au locataire un exemplaire du bail
écrit ou, dans le cas d'un bail verbal, un écrit indiquant le nom
et l'adresse du locateur et reproduisant les mentions, obligatoires prescrites
par règlement, dans la forme qui y est indiquée."
M. Forget: C'est une autorité législative pour le
règlement.
M. Bédard: Mais il y a en plus de cela une obligation de
la part du locateur de les reproduire.
M. Blank: Mais il y a un autre problème qui peut arriver.
Je demande l'avis de vos juristes car c'est peut-être déjà
dans la loi. Serait-il dans l'intérêt du propriétaire de
louer pour une résidence familiale? Il y a certaines choses qui peuvent
arriver, qui ne seraient pas dans l'intérêt du
propriétaire, c'est-à-dire que le propriétaire, s'il a le
choix, ne louerait pas pour une résidence familiale.
Je sais qu'il y a quelque chose dans la charte des droits de l'homme et
dans la loi de la Régie du logement qui dit qu'on ne peut pas refuser un
bail à cause des enfants, etc. Est-ce que ce n'est pas nécessaire
d'ajouter "gens mariés" ou "résidence familiale"? Le
propriétaire, avec cette clause, va dire: Je ne suis pas
intéressé, j'aurai assez de problèmes avec des gens qui
vont divorcer, se séparer. Cela ne m'intéresse pas et je veux
louer seulement à des célibataires. Est-ce qu'il y a quelque
chose actuellement dans la charte des droits de l'homme?
M. Bédard: Dans l'article 10, l'état civil est
visé.
M. Blank: L'état civil est visé. C'est ce que je me
demandais.
M. Bédard: Je n'ai pas d'autres
représentations.
Le Président (M. Laberge): L'article 452 sera-t-il
adopté avec l'amendement qui consiste à ajouter le mot
"écrit" après le mot "consentement"?
M. Bédard: Adopté. (22 h 30)
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement,
sur division. À l'article 453, il y a quelques corrections. Nous avions
d'abord remplacé le mot "ou" par le mot "ni", à la
cinquième ligne du premier alinéa. Cela a été
adopté; je ne pense pas que ce soit à changer.
M. Bédard: Non, cela a été
adopté.
Le Président (M. Laberge): Cela va. Ensuite, au premier
alinéa, on nous demande de supprimer les mots "et contre lequel une
déclaration de résidence a été enregistrée."
C'est aux troisième et quatrième lignes. Après le mot
"famille", biffer les mots "et contre lequel une déclaration de
résidence a été enregistrée." Ensuite, à
moins que vous ne vouliez procéder à l'adoption de cet
amendement-là...
M. Bédard: C'est technique... Allons-y, M. le
Président, dans l'ensemble.
Le Président (M. Laberge): C'est cela. On reviendra sur
les amendements.
M. Bédard: Et vous lirez l'ensemble de l'article.
Le Président (M. Laberge): Parfait. Ensuite, on nous
demande de remplacer, à l'article 453, le deuxième alinéa
par le suivant: "À moins qu'il n'ait ratifié l'acte, le conjoint
qui n'y a pas donné son consentement peut en demander la nullité,
si une déclaration de résidence a été
préalablement enregistrée contre l'immeuble."
Troisièmement, supprimer le troisième alinéa...
M. Bédard: Parce que rendu là, c'est
simplement...
Le Président (M. Laberge): Par la suite, c'est
décalé, cela devient l'article 453.2 et il y a un article 453.1
intercalé qui se lit comme suit: "L'époux propriétaire
d'un immeuble de cinq logements ou plus qui sert, en tout ou en partie, de
résidence principale de la famille ne peut, sans le consentement de son
conjoint, l'aliéner, ni en louer la partie réservée
à la famille." "Si une déclaration de résidence a
été préalablement enregistrée contre l'immeuble, le
conjoint qui n'a pas donné son consentement à l'acte
d'aliénation peut exiger de l'acquéreur qu'il lui consente un
bail des lieux déjà occupés à des fins
résidentielles aux conditions régissant le bail d'un logement;
sous la même condition, celui qui n'a pas donné son consentement
à l'acte de location peut, s'il ne l'a pas ratifié, en demander
la nullité."
J'ai déjà mentionné l'article 453.2. Je peux le
relire. Il devient: "L'usufruitier, l'emphytéote et l'usager sont soumis
aux règles des articles 453 et 453.1." Est-ce qu'il y a discussion
là-dessus?
M. Bédard: C'est un amendement que j'avais soumis
avant-hier aux membres de l'Opposition, à la suite de certaines des
remarques qui avaient été faites lors de la grande discussion que
nous avions eue concernant cette partie.
M. Forget: Oui, je pense que c'étaient des remarques qui
venaient du député de Nicolet-Yamaska. Mes collègues et
moi-même, nous ne pouvons pas nous souvenir d'avoir fait des...
M. Bédard: Oui, vous aviez évoqué, à
ce moment-là, une des solutions qui était celle de la Chambre des
notaires ou une autre.
Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être un endroit où on
aurait aimé avoir la transcription des débats.
M. Forget: Oui, je dois vous avouer, M. le Président, que
nous ne pouvons pas consulter le texte de nos délibérations,
parce qu'il n'est pas disponible pour cette journée-là. Encore
une fois, nous ne nous souvenons pas... C'est sûr qu'il y a eu une longue
discussion. Certains ont mentionné les recommandations venant de divers
groupes. La Chambre des notaires allait plutôt dans un sens
différent de celui-là. Bien sûr, elle voulait un formalisme
encore plus grand. Il y a eu une longue discussion, animée surtout, je
dois dire, sur ce point-là par le député de
Nicolet-Yamaska qui suggérait, si ma mémoire est bonne, de
diminuer le formalisme.
M. Blank: Oui, la présomption, c'est cela?
M. Forget: Oui, la présomption.
M. Bédard: On la retrouve indirectement.
M. Forget: De notre côté, nous n'avons pas
appuyé ses inquiétudes, parce que je pense que c'est un saut dans
l'inconnu que de créer la possibilité d'annuler des transferts
immobiliers sans que l'examen des titres en puisse révéler le
défaut, dans le fond, ce défaut particulier du titre qui est
qu'un vendeur précédent a vendu sans le consentement de son
conjoint et que, par conséquent, le conjoint peut, à tout moment,
demander la nullité.
M. Bédard: Peut-être pour la lecture un peu
difficile des amendements parce qu'ils sont présentés par section
et que cela ne donne pas facilement une vue d'ensemble. Pour ce qui est des
tiers qui désirent acquérir l'immeuble, c'est par les voies
habituelles de l'index aux immeubles qu'ils obtiendront les renseignements,
c'est-à-dire que s'il n'y a pas de déclaration de
résidence enregistrée contre l'immeuble, le tiers ne pourra
jamais se voir opposer la nullité qui pourrait en découler s'il y
avait eu déclaration de résidence. Le déplacement qui est
fait entre le premier alinéa et le deuxième, pour ce qui est du
premier alinéa, visait à renforcer entre les époux
l'obligation de consulter ou d'obtenir le consentement du conjoint. Un peu
comme en matière mobilière - nous l'avions évoqué
tantôt - le fait de savoir que si on cède la
propriété sans le consentement du conjoint, on s'expose, c'est
peut-être un peu théorique, je l'admets, à des dommages et
intérêts pour ne pas avoir obtenu le consentement, je dis bien,
entre les époux. Cela crée une pression morale qui peut amener
les époux à être plus respectueux de ce consentement
à obtenir.
Pour ce qui est du tiers, c'est le remplacement du deuxième
alinéa qui indique "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte, le
conjoint qui n'a pas donné son consentement peut en demander la
nullité". Et la condition pour en demander la nullité est
rappelée, cette fois-ci, si une déclaration de résidence a
été préalablement enregistrée contre l'immeuble.
S'il n'y a pas eu cette déclaration de résidence, dont le tiers
peut prendre connaissance en faisant l'examen des titres au bureau
d'enregistrement, il n'y a pas de nullité possible à son
égard. Il pourrait rester théoriquement, nous l'avons
mentionné, un recours en dommages et intérêts entre les
époux. C'est peut-être d'une efficacité relative entre
époux parce qu'il y aura eu vente sans consentement, mais
vis-à-vis le tiers, je crois devoir rappeler que...
M. Forgets Je m'excuse, M. le Président, je pense que le
jeu des amendements...
M. Bédard: Oui, ce sont des déplacements qui ont
causé...
M. Forget: Bon, d'accord.
Une question. À quoi se réfère l'adverbe
"préalablement" qui est utilisé dans le deuxième
alinéa des deux articles 453 et 453.1? Préalablement à
quoi? Préalablement à la demande en nullité? Non, c'est
préalablement à la vente.
M. Bédard: À l'acte...
M. Forget: À l'acte dont la validité est
attaquée. Cela ne risque pas d'être...
M. Bédard: Peut-être que le début de la
phrase "à moins qu'il n'ait ratifié l'acte" indique que le
"préalablement" cela va être à l'acte. C'est le seul acte
dont on peut demander la nullité. C'est l'acte d'achat, somme toute, ou
l'acte d'hypothèque évidemment parce que, dans cet article 453,
il n'y a pas que la vente ou l'aliénation, il y a également
l'hypothèque parce que le prêteur hypothécaire a besoin,
lui aussi, d'être rassuré sur la qualité de sa
garantie.
Le Président (M. Laberge): D'abord, le premier amendement
à l'article 453 qui consiste à supprimer les mots "et contre
lequel une déclaration de résidence a été
enregistrée", dans le premier alinéa, est-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Le
deuxième alinéa est remplacé, celui que vous avez sur
papillon, commençant par "à moins qu'il n'ait ratifié
l'acte". Cet amendement est-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): On a déjà
discuté de remplacer le deuxième alinéa de l'article 453
par le suivant qui commence par "à moins qu'il n'ait ratifié
l'acte, le conjoint, etc.", est-ce que cet amendement est adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. On nous a
demandé de supprimer le troisième alinéa. Le nouvel
article 453 tel qu'amendé sera-t-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec trois
amendements. L'article 453.1 sur le papillon sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
M. Blank: Je pense que ça ne donnera pas toute la
protection qu'on veut donner.
Pour moi, ce bail, dans un sens, peut être seulement pour une
année parce que le nouveau propriétaire peut demander cette
résidence pour lui-même suivant la loi.
M. Bédard: Oui, c'est un cas général.
M. Blank: Oui, c'est cela. Le maximum est une année, mais
ce peut être même moins d'une année.
M. Bédard: C'est un cas bien spécifique qui est
déjà prévu par une loi générale.
Le Président (M. Laberge): L'article 453.1 sera-t-il
adopté?
M. Bédard: Adopté. M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 453.2
sera-t-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Ceci nous
reporte à l'article 458.
M. Bédard: II a été adopté, l'article
458.
Le Président (M. Laberge): C'est une concordance. On nous
demande d'ouvrir l'article 458. Pardon. En passant, l'article 454 - grâce
aux bons offices de notre secrétaire - avait été
discuté et adopté; ensuite, je ne me souviens plus pour quelle
raison, il a été suspendu.
M. Bédard: On attendait la déclaration de
résidence.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 454 sera
adopté?
M. Bédard: Réadopté.
M. Forget: Nous sommes dans la situation où, ne pouvant,
encore une fois, nous référer à la transcription des
débats, nous sommes un peu dans le vague. Notre mémoire ne nous
sert pas toujours aussi bien qu'on le souhaiterait.
Le Président (M. Laberge): Bon. L'article 454 est
adopté avec un amendement. L'article 458 était adopté.
M. Bédard: C'est une concordance.
Le Président (M. Laberge): C'est une concordance avec
autre chose qu'on a déjà fait; c'est remplacer "à
l'accroissement de l'actif" par "à l'enrichissement du patrimoine".
M. Bédard: C'est remplacer la formule "accroissement" par
"enrichissement de l'actif".
Le Président (M. Laberge): Cela se trouve à la fin
de la troisième ligne et à la quatrième. "À
l'accroissement de l'actif" est remplacé par "à l'enrichissement
du patrimoine". Si vous êtes d'accord, cet amendement de concordance est
adopté.
M. Bédard: C'est la formule qu'on a remplacée.
M. Forget: L'enrichissement.
Le Président (M. Laberge): Oui. On remplace les mots
"à l'accroissement de l'actif" par les mots "à l'enrichissement
du patrimoine". Adopté. L'article 458 est de nouveau adopté avec
amendement. C'était sur division.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce n'est peut-être
pas selon les habitudes, mais est-ce que vous permettriez qu'on suspende trois
minutes?
M. Bédard: Je n'ai pas d'objection, avec plaisir.
Mme Lavoie-Roux: Là, on a précipité les
articles. On s'était posé une question et elle n'a pas
été résolue entre nous. Je vous demande la suspension pour
seulement trois ou quatre minutes.
M. Bédard: On est allé assez tranquillement. Est-ce
sur l'article 454?
Mme Lavoie-Roux: Non. Cela va vous permettre de vous reposer cinq
minutes.
Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses
travaux pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 44)
(Reprise de la séance à 22 h 47)
M. Forget: La raison pour laquelle nous avons demandé une
suspension, c'est qu'il y avait un problème, que nous avons
discuté entre nous et que nous avions soulevé au moment du
débat original, relativement à 454 qui, juste avant la
suspension, venait d'être adopté. C'est la question de la
protection de la résidence familiale pour les époux de fait. Nous
avions soulevé cette question et il nous apparaît que - encore une
fois, je me souviens de ce que nous avions dit à l'époque - il
n'y a pas beaucoup de circonstances où nous voulons traiter les
époux de fait comme les époux légalement
mariés, mais il y a quand même un certain nombre de cas. Le
cas de la protection de la résidence familiale pour les époux de
fait qui ont un ou des enfants, c'est un exemple de ça, je pense qu'il y
a des considérations d'ordre public qui sont de même nature. Il
n'y a pas de raison que les enfants issus d'une union de fait ne
bénéficient pas de la même protection, parce que nous avons
le sentiment que la résidence familiale est protégée
essentiellement pour les familles où il y a des enfants. Il ne nous
semble pas que, de façon générale, dans le cas des adultes
qui sont sans charge familiale, les changements qui pourraient intervenir au
niveau de la résidence puissent créer des occasions ou des causes
de séparation ou de divorce, mais ce ne sont pas en soi des catastrophes
pour des adultes; quand il y a des enfants, ça l'est. Certainement,
quand il y a des enfants, que ce soient des unions de fait ou des unions
légales, à notre avis, c'est la même chose.
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, on le reconnaît dans le reste
de la loi.
M. Forget: On le reconnaît à certains moments et,
relativement aux enfants, on le reconnaît de façon très
ouverte, il n'y a aucune distinction à faire. C'est un cas pratique
où la protection des enfants, de leur cadre de vie, etc., devrait nous
amener, comme législateurs, à offrir une protection.
Évidemment, comme le projet l'omet entièrement, on
pourrait soulever le problème sous n'importe quel article, mais c'est
peut-être au moment de la déclaration de fait de 454, où on
dit que ça peut être produit par les époux ou l'un d'eux;
on pourrait peut-être dire "... pour les fins de cette section - de la
résidence familiale - l'expression "les époux" entend
également les époux de fait, dans la mesure où il y a des
enfants mineurs"; enfin, il y a des définitions qui existent dans le
droit québécois, des époux de fait. Il y a des
éléments qui sont bien définis. Il y a l'idée de
notoriété. Il y a la notion de durée. Il y a ces deux
notions, la durée, la notoriété. Il me semble qu'il y a un
troisième élément, je dois dire qu'à cette heure-ci
je ne me souviens pas du troisième. On pourra se référer,
par exemple, à la Loi sur le régime de rentes du Québec et
à celle de l'aide sociale également où on a des
dispositions analogues. Nous nous permettons d'insister sur ce point. Nous
pensons que c'est un point qui mérite attention et qui d'ailleurs a
été... Nous reprenons ici des recommandations que le ministre a
reçues de la part de certains groupes.
Mme Lavoie-Roux: Je pense d'ailleurs que ceci a été
exprimé au moment du discours de deuxième lecture non pas sur la
reconnaissance des droits juridiques du mariage aux unions de fait, mais que,
les enfants des unions de fait étant une réalité, il
fallait prévoir pour eux compte tenu du fait que, dans le chapitre sur
l'autorité parentale, on leur reconnaît...
M. Forget: La même autorité que les parents
légitimes.
Mme Lavoie-Roux: Oui, ou qu'on leur accorde cette protection.
M. Bédard: Lors de la deuxième lecture, je me
rappelle que le chef de l'Opposition lui-même a abordé ce sujet en
parlant de la prudence qui était de mise. Au niveau du projet de loi, M.
Ryan disait entre autres: Sur l'union de fait, par conséquent, je pense
qu'il faut procéder avec beaucoup de prudence. Si les personnes ne
veulent pas conférer elles-mêmes un caractère juridique ou
légal à leur union, il ne peut être question de le leur
imposer de force non plus. Je pense qu'il faudrait laisser cette situation
évoluer pendant un certain temps. Nous trouverons peut-être des
formes nouvelles d'unions matrimoniales avec le temps, mais je pense qu'on
n'inventera pas non plus la machine à cinq roues. Je pense qu'il y a des
choses de base qui vont rester et ceux qui ne sont pas prêts à les
accepter évolueront progressivement sans doute. Je crois que la prudence
était de mise à ce sujet.
M. Forget: II y a plus sur le sujet. Un peu plus loin...
M. Bédard: II a parlé aussi...
M. Forget: C'est cela. Un peu plus loin il a parlé...
M. Bédard: En aucune façon n'y a-t-il une
ouverture. On est, à l'heure actuelle, sur un des chapitres principaux
qui créent de larges obligations à des couples et à des
conjoints, tout le monde, depuis le début de ce projet de loi,
considère les implications de la résidence familiale comme
étant un chapitre de droit nouveau très important et qui, on le
voit, on vient d'en faire l'étude, représente plusieurs
obligations. J'avais exprimé au niveau du discours de deuxième
lecture le fait que nous n'avions pas réglementé l'union de fait
justement par respect de la liberté de choix du mode de vie qui est
exercé par certaines personnes qu'il faut respecter. Je pense que c'est
un des principes mêmes du projet de loi. Remarquez qu'à l'avenir
je suis convaincu que sûrement l'ensemble de cette question pourra
revenir à la surface. Cela fait partie de l'évolution, mais
j'avais même mentionné, au niveau du discours de deuxième
lecture, pourquoi nous n'avions pas abordé l'idée de
réglementer les unions de fait. J'aurais même l'impression
d'aborder d'une certaine façon à l'encontre d'un des principes du
projet de loi qui a été débattu au niveau de la
deuxième lecture. Je crois qu'on a parlé suffisamment de la
résidence familiale comme étant un des chapitres importants.
Je me rappelle aussi que lors de la commission parlementaire nous avons
eu des représentations, dans le sens de ne pas réglementer
l'union de fait, par des groupes aussi différents que la CSN et
l'Assemblée des évêques du Québec. C'est assez rare
que ces groupes ce rejoignent sur un sujet aussi précis que
celui-là. Ce n'est pas par rejet, loin de là, je pense qu'on se
comprend de ce côté-là. Il me semble que, de part et
d'autre, au niveau de l'Assemblée nationale, s'il y avait eu... Dans ce
sens, il faut quand même se référer aux propos tenus lors
de la deuxième lecture. Ce n'est pas parce qu'à un moment
donné quelqu'un fait une petite ouverture sur quelque possibilité
d'aménagement par rapport aux unions de fait qu'on doive penser que la
personne a nécessairement ouvert une porte très importante. C'est
un des chapitres importants du droit nouveau au niveau du Code civil, on l'a
dit à maintes reprises tous ensemble.
C'est dans cet esprit, M. le Président, que je ne croirais pas
aller dans le sens du principe fondamental du respect de la liberté de
choix des gens d'un certain mode de vie en imposant. Je sais qu'on le fait en
fonction des enfants. Il ne faut pas oublier aussi que c'est du monde adulte
qui décide à un moment donné de vivre dans l'union de
fait. Au départ il faut aussi penser qu'ils ont déjà eu
certaines expériences malheureuses, qu'ils ont aussi non seulement le
respect mais le souci du bien de leurs enfants. C'est un mode de vie qu'il faut
respecter. Comme on l'a dit un peu lors des propos tenus au cours de la
deuxième lecture, il y a sûrement encore de l'évolution
à faire de ce côté-là.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je souscris à une
bonne partie des propos que le ministre vient de tenir. J'étais
moi-même présente aux auditions touchant la révision du
Code civil et je me souviens des représentations qui ont
été faites dans le sens, justement, de respecter l'union de fait,
disant que c'était par choix que les gens choisissaient - je m'excuse de
la redondance - de ne pas faire reconnaître leur union par l'institution
du mariage. Mais quand on propose ici de se préoccuper uniquement des
enfants, je ne crois pas que nous allions contre ce désir des gens pour
l'union de fait. C'est une union libre, ils ne veulent pas la consacrer par un
geste juridique. Ils pourront se prévaloir de cette déclaration -
il me semble en tout cas - de la résidence familiale dans
l'intérêt des enfants mineurs, comme le disait le
député de Saint-Laurent, ou ne pas s'en prévaloir. Je
pense que d'aucune façon ça vient toucher à cet
élément d'union libre de deux personnes qui, justement, ne
veulent pas consacrer leur union par l'institution du mariage. (23 heures)
M. Bédard: Ce n'est pas impossible, dans le sens
théorique du mot. M. Ryan disait, lors de la deuxième lecture:
"II me semble qu'il faudrait au moins..." en parlant des unions de fait... Je
pense qu'on y met des nuances que vous avez mises d'ailleurs aussi, tout
à l'heure.
Mme Lavoie-Roux: On s'entend sur le principe de base.
M. Bédard: II disait ceci: "II me semble qu'il faudrait au
moins prévoir la possibilité d'entente entre ces personnes de
manière que certaines obligations soient reconnues au moment de la
rupture." Ce que je veux dire, c'est que ces ententes qu'évoquait le
chef de l'Opposition sont permises à l'heure actuelle. Il y a des
empêchements que vous vous rappelez que nous avons laissé tomber
qui, à un moment donné, gênaient; entre autres, l'article
768 interdisait certains actes qui, maintenant, seront permis comme à
tout autre citoyen. Nous avons donné aux enfants les mêmes droits
qu'à n'importe quel enfant, sur un pied d'égalité.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Bédard: II me semble qu'au niveau des conventions, il
n'y a rien qui empêche, autrement dit, tout citoyen et toute citoyenne de
se prévaloir, je ne dirais pas d'une sorte de modèle, mais d'une
sorte de convention qui peut être exactement ce que
représente...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lors de ces auditions
parlementaires...
M. Bédard: Qui peut être, autrement dit, une
protection de leur résidence familiale, mais avec la possibilité
aussi d'y ajouter peut-être certaines innovations qu'ils croient devoir y
ajouter ou certains assouplissements qu'ils croient devoir y ajouter, comme
cela se fait entre citoyens libres, contractuellement parlant.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lors de ces auditions
parlementaires, je me souviens de certaines remarques que j'avais faites et
qui, d'ailleurs, je pense, avaient été endossées par la
députée des Îles-de-la-Madeleine. Je me souviens d'un
groupe en particulier qui disait que les unions de fait
étaient une forme de vie librement choisie. On ne veut pas que
l'État s'ingère là-dedans. C'était le grand
principe de base. C'est celui que vous avez retenu et que plusieurs ont retenu,
d'un côté ou de l'autre de la Chambre, en disant que le mariage et
l'union de fait sont deux choses différentes. On n'y accorde pas, dans
l'état actuel des choses, la même reconnaissance. Par contre,
moi-même et la députée des Îles-de-la-Madeleine nous
étions inquiétées des personnes qui, souvent, sont
beaucoup plus démunies et qui vivent en union de fait sans avoir
nécessairement fait le cheminement. Je me souviens que c'étaient
des femmes professionnelles qui étaient devant nous. Elles disaient:
C'est le genre de vie qu'on veut vivre et tout cela. Bien des fois, les gens se
trouvent mis dans une situation d'union de fait sans avoir fait ce même
cheminement théorique, intellectuel ou appelez-le comme vous le voudrez
que certaines femmes professionnelles peuvent faire plus facilement ou d'autres
femmes qui ont eu plus de "chance" dans la vie. Il y a bien de ces femmes qui
vivent en union de fait et qui, le lendemain matin, se retrouvent sur le
pavé avec deux, trois enfants ou peut-être même davantage.
Celles-là se trouvent absolument sans protection pour leurs enfants.
C'est facile, pour deux jeunes professionnels, de dire: Nous, on vit comme
cela, et ensuite de planifier toute leur vie en conséquence. Les
préoccupations que nous avions exprimées étaient bien
davantage à l'égard de ces femmes qui, comme je le dis, se
trouvent, par un hasard de circonstances ou parfois des circonstances
très difficiles, dans une union de fait qu'elles n'ont pas voulue dans
le même sens que d'autres. C'est davantage pour ces femmes que d'autres
qui sont, de toute façon, très autonomes et qui ne rencontreront
pas les mêmes problèmes, même si elles doivent continuer de
faire vivre des enfants qui seraient issus de cette union de fait.
M. Bédard: Pour ajouter un peu d'information sur le sujet
et non pas sur l'opportunité de légiférer dans cette
matière ou pas, car c'est une question qui ne relève pas de ma
compétence - nous avons fait état de cela il y a
déjà quelques jours quand nous avons abordé la
résidence familiale - il n'y a pas d'étude faite au Québec
sur la situation réelle des personnes vivant en union de fait, ni, non
plus, sur les motifs qui amènent les personnes à vivre en union
de fait, ni, non plus, une sorte de partage par rapport aux motifs.
On peut se référer, cependant, à des études
faites à l'étranger. Nous avions, notamment, fait écho
à une étude menée il y a quelques années à
l'occasion de la réforme en France. Il y a une étude qui a
été menée vers les années 1975, en France, sur les
motifs qui amenaient les personnes en France à vivre en union de fait.
Il s'agissait d'une étude de caractère scientifique. Cela avait
donné une typologie qui avait identifié quatre motifs principaux,
dont le principal, qui allait chercher 40% des cas d'unions de fait,
c'était un concubinage adultérin ou une union de fait
adultérine, l'obstacle étant que l'un des conjoints était
encore en mariage. Son mariage n'étant ni annulé, ni dissous, il
n'avait pas d'autre choix, jusqu'à ce qu'il soit annulé ou
dissous, que de vivre dans un état de concubinage, ce qui était
appelé concubinage adultérin.
C'est évident que, si on avait à régler un
problème de résidence familiale dans un contexte où il y a
une femme ou un conjoint légitime qui peut avoir des droits à la
résidence et aussi, en même temps, à aménager les
droits d'une autre personne en union de fait, d'un concubin, si vous me
permettez le mot, il y aurait un conflit de droit. Il faudrait aménager
cette situation. Ce sont des choses qui sont possibles, bien sûr, au
point de vue de la technique. On peut dire qu'on peut à peu près
toujours réussir à aménager toute chose. Mais l'office ne
fait pas état dans ses travaux d'études faites de façon
scientifique, menées ici même au Québec.
Je pense que cela fait le tour de la question. Il me semble qu'avant
d'aller réglementer des gens qui ont librement choisi un certain mode de
vie...
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas cela. Ce n'est absolument pas
cela.
M. Bédard: Je peux terminer ma phrase au moins, parce que
c'est aussi important pour moi que pour n'importe quel membre de la commission.
Avant d'aller réglementer, je crois que cela prend une étude
globale beaucoup plus approfondie qu'elle ne l'est jusqu'à maintenant,
de manière que si, en fonction de l'avenir, un législateur
décide d'aborder ce sujet, il le fasse en ayant vraiment toutes les
coordonnées de l'ensemble du problème.
M. Forget: M. le Président, je ne veux pas
développer longtemps ce point. Nous avons fait connaître notre
position. Je voudrais insister à nouveau que nous n'avons aucune
espèce de querelle avec le ministre relativement au principe de base.
Nous sommes tout à fait d'accord avec lui que de façon
générale nous n'avons pas à marier de force les gens. Les
gens qui ne veulent pas se marier peuvent très bien rester non
mariés. Quant à nous, nous acceptons les implications de leur
choix libre avec la plus grande quiétude d'âme et le plus grand
plaisir.
Il demeure que, dans la mesure où il y a des enfants, dans la
mesure où on prétend
que les enfants dits naturels ont les mêmes droits que les enfants
dits légitimes - il faut quand même utiliser les mots; si on veut
reconnaître l'égalité de statut, il faut quand même
pouvoir les désigner - dans la mesure où on veut leur donner
l'égalité de statut, nous avons ici une disposition de la loi qui
est, dans le fond, une possibilité qui est offerte aux ménages,
aux familles d'obtenir une certaine sécurité dans le contexte de
la continuité du cadre physique donné à une famille pour
élever des enfants. Nous ne voyons pas de raison de faire une
distinction ici. Nous ne voulons pas généraliser toutes sortes de
protections et dire qu'il y a une société d'acquêts entre
les conjoints de fait, ou Dieu sait quoi qu'on pourrait imaginer, non. Ce sont
des adultes consentants, pour reprendre une expression célèbre,
et s'ils ont consenti à vivre ensemble, sans être mariés,
cela les regarde. Ils n'ont qu'à lire le Code civil, surtout le nouveau,
pour constater les obligations auxquelles ils échappent et aussi les
avantages auxquels ils renoncent. Mais, dans la mesure où il y a des
enfants, nous pensons que, dans des situations de fait...
La résidence familiale ne s'explique pas beaucoup en termes de
principe, si vous voulez. Il y a des principes contradictoires. Mais il y a une
situation de fait, une sécurité de fait qu'on veut accorder
à une famille, à mon avis, dans une large mesure, parce qu'il y a
des enfants. On pourrait différer d'avis là-dessus, mais cette
protection pour les conjoints de fait qui ont des enfants devrait leur
être accessible, parce que prétendre le contraire, c'est tout de
suite faire une distinction entre les enfants dits naturels et les enfants
illégitimes sous un aspect important qui peut les toucher et qui, encore
une fois, ne serait pas du tout imposé. Il faut une déclaration.
Il faut une déclaration pour le bail. Il faut une déclaration
également pour le cas de la maison qui est détenue en
propriété ou l'appartement qui est détenu en
propriété.
Donc, s'ils ne souhaitent pas consacrer, même de cette
façon minime, leur union de fait, en faisant appel au Code civil, ils ne
sont pas obligés de le faire. Ils peuvent laisser tomber cette
protection et dire: On n'en veut pas. Mais ceux qui y tiennent et ceux pour qui
la relation de fait est établie depuis longtemps et qui a apporté
des fruits en termes d'une famille qui compte plus d'un enfant... Je suis
sûr qu'il y a des centaines et probablement des milliers de cas au
Québec. S'il y en a seulement des milliers aujourd'hui, à
regarder ce qui se passe autour de nous depuis quelques années, il y en
aura des dizaines de milliers dans quelques années. Je pense que ce
n'est pas aux législateurs de demain à régler ce
problème. C'est aux législateurs d'aujourd'hui, quelles que
soient les réticences qu'on puisse avoir de forcer les gens, encore une
fois, à donner des effets juridiques qu'ils ne souhaitent pas, contre
leur gré. Mais ce n'est pas le cas ici. C'est purement facultatif.
Je termine là-dessus. Je pense que notre position est claire.
Nous voudrions, pour être bien sûr qu'on se fasse comprendre,
formuler l'amendement suivant qui aurait pour effet d'ajouter à
l'article 454 un deuxième alinéa qui se lirait comme suit: "Les
articles de la présente section s'appliquent également aux
époux de fait, lorsqu'il y a des enfants mineurs issus de cette union.
Dans ce code, sont époux de fait ceux qui, sans être mariés
l'un avec l'autre, vivent ensemble ouvertement, comme époux, d'une
façon continue et stable." Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Ce serait un troisième
alinéa, si je veux bien croire. Il y en a déjà un
deuxième d'adopté...
M. Forget: C'est cela. Il y en a déjà un
deuxième d'adopté. Ce sera un troisième, je m'excuse.
Le Président (M. Laberge): ...qui a été
porté à ma connaissance. À l'article 454, on nous demande
d'ajouter un troisième alinéa qui se lit comme suit: "Les
articles de la présente section s'appliquent également aux
époux de fait, lorsqu'il y a des enfants mineurs issus de cette union."
Paragraphe. "Dans ce code, sont époux de fait ceux qui, sans être
mariés l'un avec l'autre, vivent ensemble ouvertement, comme
époux, d'une façon continue et stable." (23 h 151
M. Bédard: M. le Président, j'ai fait mes
remarques. Le domaine est suffisamment complexe. On vient juste de nous dire
effectivement que des études approfondies n'ont même pas
été faites sur l'ensemble de la situation de ce qu'on appelle les
époux de fait. On nous demanderait de légiférer comme cela
pour réglementer des gens qui ont fait un choix de vie, avec une
définition de l'union de fait qui, à mon sens, mériterait
une étude aussi approfondie que celle qu'on a faite sur le mariage, etc.
Je ne crois pas que ce serait très indiqué, pour ne pas dire
autre chose, d'y aller d'un amendement sur quelque chose d'aussi important
surtout, on l'a mentionné tout à l'heure de l'autre
côté, que nous sommes d'accord sur l'essentiel de l'analyse de la
situation des époux de fait. Je crois que déjà nous avons
bien pris la précaution d'enlever toutes les barrières qui
existaient et qui empêchaient des époux de fait - pour employer
l'expression - de faire des conventions entre eux. On a indiqué tout
à l'heure ces éléments des articles qui ont
été touchés. Je crois qu'on est en train d'essayer de
régler une situation sociale plus complexe, une situation juridique
beaucoup plus complexe d'un seul trait de plume
surtout que je me réfère aussi à des remarques
faites au niveau de l'ensemble du principe que nous avons discuté lors
de la deuxième lecture.
Le Président (M. Laberge): Au point de vue
formalité, la motion qui m'a été présentée
par M. le député de Saint-Laurent étant en deux
paragraphes ou en deux alinéas, je précise que ce sont les
troisième et quatrième alinéas.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste
ajouter un mot. C'est peut-être davantage une explication des
dernières paroles que le ministre vient de dire quand il dit: Et, de
plus, je me réfère à des remarques qui ont
été faites au cours de la discussion de deuxième lecture.
Est-ce qu'il entend par cela les remarques qui ont été faites par
le chef de l'Opposition officielle?
M. Bédard: L'ensemble des remarques qui ont
été faites est clair et net. Je pense que, quand on fait le tour
de tous les discours faits à l'Assemblée nationale, on voit qu'il
n'y a eu aucune pression, aucune indication à l'effet qu'un chapitre
aussi important que celui de la résidence familiale devait être
imposé aux époux de fait, devrait être appliqué aux
époux de fait. Je pense que, tout au long du discours de deuxième
lecture de tous les intervenants, tout le monde a souligné l'importance
de la résidence familiale; cela ne fait pas de doute. À ce
moment-là, à l'Assemblée nationale, s'il y avait eu un
désir que puisse s'appliquer un tel chapitre à l'union de fait,
ceci aurait été évoqué très directement.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste
ajouter...
M. Bédard: On arrive ici à...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste
ajouter que pour ma part j'ai au moins fait remarquer qu'on devrait se soucier
particulièrement d'accorder le plus de protection possible à tous
les enfants.
M. Bédard: J'ai eu...
Mme Lavoie-Roux: C'est le sens de l'amendement qui vient
d'être fait par le député de Saint-Laurent.
M. Bédard: II me semble que c'était le chapitre le
plus important. Si on voulait le dire, on pouvait le dire à
l'Assemblée nationale. C'est quelque chose de fondamental. À ce
moment-là, on s'y prépare d'une façon correcte. Pour ce
qui est du bien des enfants, j'ai déjà évoqué les
dispositions qui ont fait que tous les enfants sont sur un pied
d'égalité, mais j'ai également évoqué tout
au long du projet de loi ce souci des enfants.
M. Blank: Un des principes de cette loi a été aussi
discuté en Chambre. Est-ce que l'égalité des enfants... Le
principe de la motion du député de Saint-Laurent, c'est
l'égalité des enfants. La question de l'union de fait est
secondaire dans cette motion; c'est un accessoire. Le principe de cette motion,
c'est l'égalité de tous les enfants de la province. Cela a
été discuté en deuxième lecture et tout le monde
était d'accord.
Mme Lavoie-Roux: Tout le monde s'en est réjoui.
M. Bédard: ... les enfants ont le droit à une
pension alimentaire. Ceux qui vont en union de fait, il ne faut quand
même pas les prendre pour des irresponsables non plus! Ils ont choisi un
mode de vie et ils ont la liberté de se faire toutes les conventions
qu'ils veulent. Cela, nous l'avons spécifié, ce n'était
pas le cas auparavant; ils peuvent, s'ils le veulent, se prévaloir de
toutes les dispositions concernant la résidence familiale. Je crois que
c'est le respect intégral de cette liberté qu'ils ont voulu faire
valoir. C'est ce qui est ressorti de certains mémoires très
importants présentés à la commission parlementaire.
M. Forget: On peut disposer de l'amendement.
Le Président (M. Laberge): Ces amendements, ajoutant un
troisième et un quatrième alinéas, sont-ils
adoptés?
M. Forget: Je peux demander un vote enregistré?
M. Bédard: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Oui, vous en avez le droit.
Je répète l'amendement pour plus de clarté.
Troisième alinéa: "Les articles de la présente section
s'appliquent également aux époux de fait lorsqu'il y a des
enfants mineurs issus de cette union."
Quatrième alinéa: "Dans ce code, sont époux de fait
ceux qui, sans être mariés l'un avec l'autre, vivent ensemble
ouvertement comme époux d'une façon continue et stable."
J'appelle le vote. Que ceux et celles qui sont pour ou contre cette
motion me l'indiquent. M. Bédard (Chicoutimi).
M. Bédard: Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Blank (Saint-Louis).
M. Blank: Pour.
Le Président (M. Laberge): M. Ouellette (Beauce-Nord). M.
Bertrand (Vanier). M. Fontaine (Nicolet-Yamaska). M. Forget
(Saint-Laurent).
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Laberge): M. Guay (Taschereau). M.
Gosselin.
M. Gosselin: Contre.
Le Président (M. Laberge): M. Marquis
(Matapédia).
M. Marquis: Contre.
Le Président (M. Laberge): Cela complète les
membres. L'amendement est rejeté trois voix contre deux. Pour, deux;
contre, trois.
M. Guay: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Cela va. J'ajoute un vote
contre, sans commentaires. Cet amendement est rejeté et l'article 454
étant déjà adopté, il n'y a pas de modification.
L'article 454 est adopté avec un amendement.
Maintenant, si on continue, on avait laissé en suspens l'article
473 pour une correction. On nous demande d'ajouter, après le mot
"donner", les mots "par le notaire instrumentant". L'amendement est
adopté. L'article 473 amendé est-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendement.
Mme Lavoie-Roux: L'article 473?
Le Président (M. Laberge): L'article 473.
Mme Lavoie-Roux: Mon Dieu, ça va vite!
Le Président (M. Laberge): Les autres étaient
adoptés déjà. À l'article 477, on avait une
suspension.
M. Bédard: C'était "sauf stipulation expresse au
contraire". On en est venu à la conclusion de l'enlever, je pense.
Le Président (M. Laberge): Bon. À l'article
477...
M. Bédard: Une seconde, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 477 était
suspendu et on nous demande maintenant de considérer une nouvelle
rédaction qui se lit comme suit: "L'époux qui a eu
l'administration des biens de son conjoint est comptable même des fruits
qui ont été consommés avant qu'il n'ait été
mis en demeure de rendre compte."
M. Forget: M. le Président, on s'excuse, mais il y aurait
peut-être une concordance à apporter à l'article 458,
conformément à ce qui a été fait ce matin ou cet
après-midi, je ne me souviens plus trop, dans les effets du divorce
quand on parle de l'apport d'un des conjoints à l'enrichissement. Nous
avions spécifié cet après-midi l'apport en...
Mme Lavoie-Roux: Biens et services. M. Bédard:
Biens et services. M. Forget: ... biens ou services.
M. Bédard: Entre parenthèses, oui, d'accord.
Le Président (M. Laberge): C'est à l'article
477?
M. Forget: Article 458.
M. Bédard: Ici, pour ce qui est de la précision que
nous avons apportée, l'apport en biens ou services, si je me souviens
bien, doit être rattaché - parce que ce sont tous des articles de
référence - à l'article 554 du divorce et à
l'article 735.1 du livre sur les successions. Dans les autres cas, c'est
toujours par voie de référence.
A 555, nous l'avons inséré, cet après-midi, dans
"biens ou services", il faudra le placer aussi à propos du
décès, vu que ça n'a pas été fait.
M. Forget: Ah, oui.
M. Bédard: Dans ces deux articles, qui sont les articles
de référence, ça va s'y trouver. Dans les autres, c'est
simplement de renvoi, de sorte qu'à 458, comme dans le cas de la
nullité de mariage, comme aussi dans le cas de la séparation de
corps, ça n'a pas besoin d'être repris, c'est par renvoi à
l'article principal. En d'autres termes, c'est toujours la même
règle qui s'applique, sauf que...
M. Forget: Mais le renvoi n'est pas explicite?
M. Bédard: II l'est par les premières lignes: "En
cas de dissolution ou d'annulation de mariage, le tribunal...", donc il faut
aller voir à la dissolution ou l'annulation de mariage; cela nous
amène au divorce et ça nous amène à la
nullité, la nullité nous
renvoie au divorce à ce moment. Pour ce qui est de la
séparation de corps également, ça nous renvoie au divorce,
de sorte que les trois hypothèses majeures sont retrouvées
là. Par ailleurs, il faudra penser, à 735.1 du Code civil, de
l'inclure cependant, dans les successions; il ne faudrait pas l'oublier.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Alors, il n'y a pas
d'amendement à 458.
L'article 473 ayant été modifié, il y a une
nouvelle rédaction à 477 dont j'ai donné lecture. Ce
nouvel article 477 sera-t-il adopté?
M. Bédard: Avez-vous le nouvel article? M. Forget:
Oui.
Le Président (M. Laberge): II n'y a pas de mot è
ajouter?
M. Bédard: Non.
Le Président: (M. Laberge): La nouvelle rédaction
de l'article 477 est adoptée.
M. Forget: Cette règle de comptabilité envers
l'autre conjoint ou ses ayants droit, c'est la gestion de l'homme prudent et
raisonnable, bon père de famille; je pense qu'on va substituer une autre
expression ou est-ce déjà fait? Je ne me souviens trop.
M. Bédard: II y aura toujours le cas fortuit, mais, en
termes d'administration, c'est la règle courante.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Cela complète cette
section. Maintenant je pense qu'on se reporte à 554. Non, c'est
déjà fait.
M. Bédard: Je pense qu'on comprendra qu'au chapitre de la
séparation de corps et du divorce, comme nous en avons discuté
d'une façon spéciale aujourd'hui, pour ce qui est des
amendements, ce sera demain...
M. Forget: Oui, ce sera demain, d'accord.
M. Bédard: ... pour qu'on ait le temps de bien approfondir
les grandes réflexions que nous avons eues.
Le Président (M. Laberge): À moins que je ne fasse
erreur, 524...
M. Forget: Non, c'est ce que le ministre dit, on fera ça
demain.
M. Bédard: Oui.
Le Président (M. Laberge): Bon, parfait.
M. Forget: II faut sauter toute la section du divorce.
M. Bédard: Tous ceux qui sont dans le même ordre
à peu près.
M. Forget: À l'article 569, il n'y a rien de suspendu,
pour l'instant, du moins. À l'article 580...
M. Bédard: À aller jusqu'à la
séparation de corps, c'est réglé. C'est ça?
M. Forget: Oui.
M. Bédard: À aller jusqu'à 523, c'est
réglé?
M. Forget: C'est réglé.
M. Bédard: On recommencerait à...
M. Forget: À l'article 569.
M. Bédard: ... l'article 569 concernant la filiation. A la
filiation il y avait un article suspendu, je pense, qui était 583. (23 h
30)
Le Président (M. Laberge): L'article 583 est ouvert.
Est-ce qu'on a un amendement à l'article 583? Article 583, il n'y avait
pas d'amendement.
M. Bédard: II n'y avait pas d'amendement.
Le Président (M. Laberge): C'est simplement qu'il
était ouvert. Est-ce que l'article 583 sera adopté?
M. Forget: J'ai des notes ici. On avait soulevé la
possibilité que, conformément aux recommandations de l'Office de
révision du Code civil, l'article 281 soit retenu, c'est-à-dire
que lorsque l'insémination artificielle a lieu des oeuvres d'un tiers,
ce dernier ne puisse en aucun cas revendiquer la paternité de l'enfant.
Je pense que c'était le problème qui était
soulevé.
M. Bédard: C'est en relation avec l'article 585 où
on disait: "Toutefois, nul ne peut contester la filiation d'une personne pour
le motif qu'elle a été conçue par insémination
artificielle." Vous vous rappelez la discussion, on se demandait si, à
ce moment, la disposition du deuxième alinéa de l'article 585
suffisait pour couvrir justement le danger éventuel que l'auteur des
oeuvres puisse réclamer. Il semble que cela couvre.
Je pense que le seul problème de l'article 585 sans 583, c'est
que cela pourrait quand même susciter d'autres types de problèmes.
Disons qu'on peut penser au mari
qui n'aurait pas consenti et qui se trouverait dans
l'impossibilité de contester sa paternité, parce qu'à ce
moment lui aurait la présomption qui jouerait en sa faveur. Il me semble
que les deux articles sont quand même étroitement liés, ou
du moins se complètent, et qu'en enlever un sans enlever l'autre...
Du consentement des époux. S'il n'y a pas consenti, il faut quand
même que le mari garde le droit d'invoquer... Cela va?
M. Forget: C'est cela. C'était l'utilité même
de 583 qui avait été mise en doute étant donné 585.
D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 583, adopté.
M. Forget: À l'article 587, nous avions
suggéré que la version anglaise soit vérifiée.
Malheureusement, je n'ai pas le texte anglais. C'est cela.
M. Bédard: Là, on s'en va à 591. C'est dans
le texte anglais qu'on donnait l'assurance qu'il y aurait...
Le Président (M. Laberge): Que la concordance serait
faite.
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Ou la correction. L'article 597
avait été adopté avec amendement, cependant, on a
porté à ma connaissance une demande de rouvrir pour ajouter
à la fin du premier alinéa ce qui suit.
M. Forget: Est-ce qu'on les a, ces amendements?
Le Président (M. Laberge): J'en ai une copie additionnelle
ici. Je pense que vous les avez eus.
M. Forget: Je les ai peut-être eus, mais je ne les trouve
pas.
Le Président (M. Laberge): A la fin du premier
alinéa, ce qui veut dire après la correction, on avait
biffé tous les mots après "dix ans". Cela a déjà
été adopté. Là on nous demande de remplacer le
point après le mot "ans" par une virgule et d'ajouter "à moins
que ce dernier ne soit dans l'impossibilité de manifester sa
volonté." Est-ce que cet amendement sera adopté?
M. Forget: Adopté. M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 597
amendé de nouveau est adopté.
M. Bédard: Adopté.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président...
Le Président (M. Laberge): Oui.
Mme Lavoie-Roux: II me semblait qu'on avait fait exprimer une
préoccupation pour l'enfant...
M. Bédard: Oui, c'est à la suite de cette
préoccupation que vous aviez évoquée...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais pour l'enfant de moins de dix ans.
Actuellement, vous nous parlez seulement de l'enfant d'au moins dix ans.
M. Bédard: L'article 31 qui vient plus tard. À
l'article 2 du projet...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Après l'adoption de
l'article 597, je vous reporte à l'article 603 qui a été
laissé en suspens et auquel on a suggéré une série
de modifications. D'abord, ajouter après l'article 602 le suivant: "
602.1. Le consentement à l'adoption peut être
général ou spécial; s'il est spécial, il ne peut
être donné qu'en faveur d'un descendant de l'enfant d'un parent en
ligne collatérale jusqu'au troisième degré ou du conjoint
de cet ascendant ou parent."
Mme Lavoie-Roux: Dans le journal des Débats, il faudrait
dire: En faveur d'un ascendant. Vous avez dit "descendant".
Le Président (M. Laberge): A la fin?
M. Forget: Non, au milieu. En faveur d'un ascendant.
Le Président (M. Laberge): Ah! D'un ascendant de l'enfant.
J'avais dit "descendant"?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Laberge): Avec l'heure! Je vous remercie.
Est-ce que cet article 602.1 est adopté?
M. Bédard: Adopté.
M. Forget: Si je comprends bien, M. le Président...
M. Bédard: Vous en aviez parlé.
M. Forget: Oui, j'en avais parlé, je suis content qu'on
introduise cette notion d'un consentement spécial, mais je veux bien
qu'il
soit clair. Le consentement spécial ne peut pas s'adresser
à une adoption par un étranger. Ça doit être une
personne qui est apparentée ou alors le conjoint. Il n'est pas question
de céder pour adoption à une personne X. Est-ce que je le lis
bien?" Un ascendant, un parent en ligne collatérale jusqu'au
troisième degré, un conjoint de cet ascendant ou parent". C'est
ça.
M. Bédard: Ça le lie...
M. Forget: À cette catégorie-là de
personnes.
M. Bédard: ... le consanguin.
M. Forget: Est-ce qu'il y a véritablement des raisons
d'ordre public qui font qu'un consentement spécial ne peut pas
être donné en faveur d'un étranger, en quelque sorte?
M. Bédard: Dans ce cas-là, on a compris que
l'adoption passerait par le directeur de la protection.
M. Forget: Enfin, c'est évidemment ce qui va se passer,
mais je pose la question. Je ne me souviens pas d'avoir fait cette
restriction-là moi-même, mais je serais prêt à
accepter un raisonnement qui me démontrerait qu'il n'est pas dans
l'ordre public de permettre à des parents de dire: Nous consentons
à l'adoption pourvu que l'adoptant soit M. Untel et Mme Unetelle que
nous connaissons.
Je suis prêt à être convaincu que ça ne
devrait pas être le cas, mais a priori je ne vois pas
nécessairement la nécessité de cette restriction à
une catégorie déterminée, quoique je me réjouisse
que l'on permette un consentement spécial.
Est-ce que le ministre a des réflexions à nous communiquer
là-dessus ou si on a mal compris ce que nous avions demandé et
qu'on a cherché à se conformer à ce qu'on a cru que nous
avions demandé? Je voudrais bien qu'on se comprenne, qu'il n'y ait pas
une confusion parce que la communication a été imparfaite.
M. Bédard: La perspective dans laquelle nous nous sommes
placés pour formuler l'amendement que vous avez a été de
partir des derniers amendements qui ont été apportés
à la Loi sur l'adoption l'automne dernier et qui déterminaient
quelles sont les personnes, quels sont les consanguins qui peuvent adopter un
enfant sans passer par le directeur de la protection de la jeunesse. Il s'agit
d'un cercle de consanguins, donc, de la famille.
Cela assure aussi une certaine concordance ou cohérence avec
l'article 606.1 qui énumère ces mêmes personnes comme
étant celles qui peuvent demander une déclaration judiciaire
d'adoptabilité. C'est le cercle familial.
M. Forget: Enfin! J'ai des réserves, mais je ne sais pas
si je veux les poursuivre à cette heure-ci. Je dois vous avouer que la
fatigue a raison des meilleurs arguments. Bon! D'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 602.1 est-il
adopté?
M. Forget: 602.1 adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
Deuxièmement, on nous demande à l'article 603 d'ajouter
après "de plein droit" les mots ", jusqu'à l'ordonnance de
placement,". Oui, c'est cela, c'est à 603.
M. Bédard: Pour qu'il n'y ait pas de vide là.
Le Président (M. Laberge): Oui, cela avait
été discuté. Les mots sont après "de plein droit",
à la fin de la première ligne. Il faudrait ajouter...
M. Bédard: Pour qu'il n'y ait pas de discontinuité
ou de vide concernant l'autorité parentale. On avait
évoqué que c'était peut-être mieux d'être
encore plus spécifique.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 603 se lira, jusque
là... Il y aura d'autres mots supprimés. Cet amendement,
c'est-à-dire ", jusqu'à l'ordonnance de placement," est
adopté. Et ensuite on nous demande à la fin de supprimer les mots
"en vue du placement pour adoption". Je vais relire l'article au complet pour
une bonne compréhension. L'article 603 se lira: "Le consentement
à l'adoption entraîne de plein droit, jusqu'à l'ordonnance
de placement, délégation de l'autorité parentale à
la personne à qui l'enfant est remis." Est-ce que cela va?
M. Forget: Oui, cela va. Adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): Cela va. L'article 603
modifié est adopté avec amendement.
Maintenant, nous allons à l'article 606.1. Le papillon que nous
avons ici, il y en avait eu un porté à notre attention, mais on
nous demande de le corriger pour une nouvelle rédaction. Article 606.1:
"La demande en déclaration d'adoptabilité ne peut être
présentée que par un ascendant de l'enfant, un parent en ligne
collatérale jusqu'au troisième degré, le conjoint de cet
ascendant ou parent, par l'enfant lui-même
s'il est âgé de quatorze ans ou par un directeur de la
protection de la jeunesse."
M. Bédard: C'est à la requête de l'Opposition
qu'on répète textuellement, qu'on prévoit l'enfant de
quatorze ans. Cela inclut l'enfant de quatorze ans.
Le Président (M. Laberge): C'est cela. Cela prévoit
l'enfant. Cela inclut l'enfant de quatorze ans.
M. Bédard: Cela va?
M. Forget: Oui, je pense que c'est correct.
M. Bédard: Cela va?
Le Président (M. Laberge): L'article 606.1 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Oui, adopté. (23 h 45)
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 607
était suspendu, ouvert. Nous avons une nouvelle rédaction. Je ne
sais pas si elle comprend les mots qu'on a déjà adoptés.
De toute façon, c'est ce qui avait été fait, étant
donné que cela avait été laissé ouvert. On le
remplace par un nouvel article qui se lit comme suit: "L'enfant ne peut
être déclaré adoptable que s'il est improbable que son
père, sa mère ou son tuteur en reprenne la garde et en assume le
soin, l'entretien ou l'éducation. Cette improbabilité est
présumée."
M. Forget: Je suis d'accord. La discussion que nous avions eue,
c'était que c'était inacceptable d'avoir cette réserve de
présomption d'improbabilité, de manière que le fardeau de
la preuve soit placé carrément sur ceux qui s'opposent à
la libération pour adoption dans les circonstances qui sont
mentionnées. Les objections que j'avais formulées à la
rédaction demeurent. C'est une espèce de double négatif,
s'il est improbable que son père ne s'en occupe pas. Ce que l'on veut
dire, c'est que, dans le fond, l'enfant est déclaré adoptable
s'il est probable que son...
Le Président (M. Laberge): improbable que son père
s'en occupe.
M. Forget: C'est cela. M. le Président, j'implore votre
indulgence. Il faudrait vraiment que je le réexamine pour pouvoir
reformuler cette difficulté dont je me souviens, mais de façon
cohérente.
M. Bédard: Nous implorons aussi votre indulgence. Nous
avons retourné la phrase un peu dans tous les sens. Nous avons cru quand
même qu'on levait une partie de vos objections en ne disant plus que le
tribunal s'assure. C'était un des points que vous aviez soulevés,
de voir qu'il était très choquant que le tribunal devait
s'assurer de quelque chose et qu'ensuite, on lui disait que, de toute
façon, c'était présumé. Je pense que nous avons
réussi à lever au moins cette partie de vos objections.
M. Forget: Oui. Vous avez raison. Je pense que cela
élimine une des difficultés majeures, effectivement. Cela
élimine la difficulté majeure.
Le Président (M. Laberge): L'article 607 est
remplacé et...
M. Forget: D'accord. Je pense qu'en enlevant le mot "assurer"
qu'une chose existe, alors que le même article dit que c'est
présumé, c'est plus acceptable.
Le Président (M. Laberge): La nouvelle rédaction de
l'article 607 est adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 609.
À l'article 609 que nous avons suspendu, on nous demande d'ajouter un
alinéa qui se lit comme suit: "Ce délai peut toutefois être
réduit d'une période n'excédant pas trois mois, en prenant
notamment en considération le temps pendant lequel le mineur aurait
déjà vécu avec l'adoptant, antérieurement à
l'ordonnance."
M. Bédard: Cela rejoignait la préoccupation des
enfants qui sont déjà en famille d'accueil depuis un certain
temps. On n'a pas besoin de leur imposer un délai.
Mme Lavoie-Roux: Au lieu de six mois, c'est trois mois?
M. Forget: C'est trois mois quand cela fait déjà
des années qu'ils sont dans la même famille.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. On réduit le délai de
six mois à trois mois quand il a déjà vécu avec la
famille...
M. Forget: Adoptante.
Mme Lavoie-Roux: Adoptante. D'accord.
M. Bédard: C'est cela, et que la preuve s'est faite
d'elle-même de l'acceptabilité.
Le Président (M. Laberge): L'amendement consistant
à ajouter un deuxième alinéa est adopté. L'article
609 est adopté avec amendement.
À l'article 611 qui était ouvert, on nous demande de
supprimer les mots "vérifie
les qualités et les aptitudes de l'adoptant," après le mot
"tribunal", à la deuxième ligne. Est-ce que cet amendement sera
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux! Comme je n'étais pas ici, que j'avais
dû quitter une heure et demie plus tôt ce soir-là, est-ce
que c'est parce qu'il est compris dans les mots "s'assure que les conditions
d'adoption ont été remplies" et que cela devenait un peu
redondant de laisser la vérification des qualités et aptitudes de
l'adoptant?
M. Forget: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: C'était cela, l'idée?
M. Forget: Essentiellement, je pense.
Mme Lavoie-Roux: II reste qu'il faut quand même... Il sera
prévu dans le...
M. Bédard: Cela n'impose pas l'obligation de refaire une
vérification.
Mme Lavoie-Roux: Ce que vous appelez les conditions de
l'adoption, on y pourvoira dans la loi administrative sur l'adoption. Est-ce
cela qu'il faut que je comprenne? On est à préparer, on m'a dit,
une nouvelle loi...
M. Bédard: On voulait éviter, en l'adoptant,
d'avoir toujours à remonter dans des clauses...
C'est un peu dans la même perspective, d'éviter que
l'adoptant ait toujours à établir que c'est un bon adoptant,
qu'il a des qualités, comme s'il ne les avait pas.
Mme Lavoie-Roux: Moi, je veux bien qu'il ne soit pas
obligé de le faire trois fois, mais je veux qu'il le fasse au moins une
fois.
M. Bédard: Mais positivement. C'est prévu. C'est
à suite de représentations.
M. Forget: Ce n'est pas dans un autre esprit. L'esprit dans
lequel l'objection avait été formulée, ce n'était
pas qu'il ne devait pas y avoir de vérification, essentiellement, des
qualités et des aptitudes de l'adoptant, mais, si c'est formulé
comme cela, cela suppose presque qu'il y a une présomption que toute
demande d'adoption est formulée par des gens qui n'ont pas de
qualités et d'aptitudes suffisantes et qu'ils ont, eux, à faire
la preuve de leurs aptitudes, alors qu'effectivement ce n'est pas comme cela
que ça se passe. Ce sont des évaluations d'experts qui viennent
démontrer devant certaines demandes que certaines personnes n'ont pas
les qualités et les aptitudes, parce que, bien sûr, on ne peut pas
faire la preuve que l'on n'a pas de défauts. On peut simplement
répondre à une accusation à l'effet que le mode de vie
qu'on a, etc., n'est pas approprié. Alors, le fardeau de la preuve est
un peu différent, de cette façon, et il est plus
approprié, étant donné que ce sont des professionnels qui
doivent susciter des doutes et des questions et non pas les requérants
qui doivent faire la preuve de la perfection, ce qui est, par
définition, une preuve impossible à faire.
Mme Lavoie-Roux: On fait cela dans la...
M. Forget: Au moment de l'ordonnance de placement.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Forget: Ce qui est le moment où on confie l'enfant
à la famille.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement,
consistant à supprimer les mots "vérifie les qualités et
aptitudes de l'adoptant," est adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 611,
adopté avec amendement.
M. Bédard: Ensuite, quel article?
Le Président (M. Laberge): Nous allons à l'article
615. L'article 615 était suspendu.
M. Bédard: C'est dans la même ligne de
préoccupation. Avez-vous l'amendement?
Le Président (M. Laberge): Oui, je l'ai ici. On remplace
l'article au complet, donc il y a une nouvelle rédaction. On nous
demande de remplacer l'article 615 par le suivant: Le tribunal prononce
l'adoption sur la demande que lui en font les adoptants, à moins qu'un
rapport n'indique que l'enfant ne s'est pas adapté à sa famille
adoptive; en ce cas ou chaque fois que l'intérêt de l'enfant le
commande, le tribunal peut requérir toute autre preuve qu'il estime
nécessaire. Est-ce qu'il devrait avoir une virgule après
"cas"?
M. Bédard: "en ce cas", virgule? Je ne pense pas.
Le Président (M. Laberge): C'est superflu. Cela va.
M. Bédard: L'amendement à l'article 615, c'est la
continuation de la préoccupation qu'on ne demande pas à tous les
stades à la famille adoptante de toujours avoir le fardeau de la preuve.
Autrement dit...
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec cela. C'est clair.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Le nouvel article 615,
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Cela
règle le cas de cette série d'amendements. On nous demande
à...
M. Blank: Est-ce qu'on a fini avec cet article?
M. Bédard: Non, il me reste un ou deux articles, je
crois.
Le Président (M. Laberge): II en reste un. À
l'article 616.1, il y a un papillon qu'on a ajouté avant-hier. On nous
demande de biffer le mot "patronymique" à la deuxième ligne.
M. Bédard: Cela ne demande pas une longue discussion.
Le Président (M. Laberge): Je pense que non. Alors,
adopté.
M. Bédard: On va mettre "matronymique".
Mme Lavoie-Roux: Non plus.
M. Forget: M. le Président, est-ce qu'on pourrait...
À cette heure-ci...
M. Bédard: Oui, je crois, mais on peut voir où cela
nous mène. Nous serons rendus...
Le Président (M. Laberge): Je pense qu'on était
rendu à l'article 632.
M. Blank: Est-ce que je peux poser une question avant
l'ajournement? Juste une question à laquelle on a déjà
peut-être répondu.
On parle "de tribunal" dans ce chapitre. De quel tribunal
parle-t-on?
M. Bédard: C'est la Loi sur les tribunaux judiciaires qui
donne compétence au Tribunal de la jeunesse en matière
d'adoption.
M. Blank: Je constate, dans la loi actuelle sur l'adoption, qu'on
donne une définition de "tribunal".
M. Bédard: En fait, il y en a une actuellement dans la Loi
sur les tribunaux judiciaires, l'ancien article 106 renuméroté
qui prévoit spécifiquement que le Tribunal de la jeunesse a la
compétence exclusive en matière d'adoption. Or, on n'a pas cru
nécessaire de le répéter ici.
M. Blank: Dans la loi actuelle...
M. Bédard: Le code de procédure le mentionne
aussi.
Le Président (M. Laberge): 32, 33.
M. Blank: ...ou non.
M. Bédard: Nous avons bien travaillé.
Le Président (M. Laberge): Ceci termine un chapitre. Nous
reprendrons nos travaux au chapitre de l'obligation alimentaire, à moins
qu'on nous indique de revenir à l'article 524.
M. Bédard: On terminera cela.
Le Président (M. Laberge): C'est cela.
Sur ce, mesdames et messieurs, la commission parlementaire de la justice
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 57)