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(Douze heures quatre minutes)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux, soit
l'étude article par article du projet de loi no 89, Loi instituant un
nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille.
Les membres de la commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M.
Blank (Saint-Louis), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M.
Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Forget
(Saint-Laurent), M. Guay (Taschereau), Mme LeBlanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine) remplacée par M. Gosselin (Sherbrooke), M.
Marquis (Matapédia).
Sont inscrits à titre d'intervenants: M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Desbiens (Dubuc), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys) remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski) et M.
Pagé (Portneuf) remplacé par M. Marx (D'Arcy McGee). Le
rapporteur est Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine).
Mme Lavoie-Roux: Elle va avoir de la misère à
rapporter!
Etude des articles suspendus (suite)
Le Président (M. Laberge): Lorsque nous avons suspendu nos
travaux, quelques articles étaient restés en suspens. Si vous
êtes d'accord, nous pourrions commencer par l'article 412 qui avait
été ouvert pour un complément de rédaction.
M. Bédard: M. le Président, comme vous vous en
rappelez, nous nous étions entendus sur un point, à savoir que
lors de la publication ou de la demande de dispense les époux doivent
être informés de l'opportunité d'un examen médical
prénuptial. Nous nous demandions à quel article le greffer. Je
crois que c'est à l'article 412 que ce point aurait sa place.
Le Président (M. Laberge): À l'article 412 on nous
demande d'ajouter l'alinéa suivant: "Au moment de la publication ou de
la demande de dispense les époux doivent être informés de
l'opportunité d'un examen médical prénuptial". Est-ce que
cet amendement à l'article 412 sera adopté?
M. Bédard: Adopté. M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'amendement est adopté.
L'article 412 est adopté avec amendement. Cela va. J'attends une
suggestion pour passer au prochain article.
M. Bédard: II y a une question, je pense, à
l'article 632 ou 633.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: J'avais eu un consentement ou une approbation du
président pour qu'on puisse, même s'il a été
adopté, revenir à l'article 631. À moins que le ministre
ait des objections majeures...
M. Bédard: Je pense qu'on s'entend, on n'est pas pour
recommencer toute la discussion.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est juste un point que j'avais
déjà soulevé et je pense que j'ai peut-être ici une
réponse qui aura plus de poids que mes propres impressions. "Le tribunal
ordonne, même d'office... Vous vous rappelez que nous avions eu une assez
longue discussion à savoir si ça obligeait le tribunal ou si
ça laissait une latitude au tribunal d'ordonner ou pas.
J'ai ici, dans "Les nouvelles du Barreau" de la section du
Québec, octobre 1980, un avis qui est le suivant: - si vous me le
permettez, M. le Président, je le lirai - "Certaines personnes - c'est
une partie parce que la première partie de l'avis de M. Sirois fait
allusion justement au jugement du juge Chevalier et nous en avions parlé
à ce moment; alors, je vais lire uniquement ce qui s'applique à
"le tribunal ordonne, même d'office..." - interprètent les mots
"le tribunal ordonne, même d'office" comme étant mandatoires pour
le tribunal et octroyant, après le 1er août 1980, à
toute
pension qui est accordée le droit automatique à
l'indexation selon l'indice établi par la Régie des rentes du
Québec. Cette interprétation est mise en doute par plusieurs
juristes et les avocats n'ont pas d'autre choix que d'agir avec grande
prudence. "Si l'on se réfère aux articles 49 et suivants de la
loi d'interprétation, nous pouvons constater qu'une loi peut, dans son
texte, employer un temps présent sous différentes formes. Elle
peut employer le présent ou déterminer par un verbe le pouvoir ou
le devoir de faire une chose. Le texte ne dit pas: "Le tribunal doit ordonner,
même d'office, que les aliments payables sous forme de pension soient
indexés", le texte de loi ne dit pas non plus que "le tribunal ordonne
d'office que les aliments...", le texte de loi dit que "le tribunal ordonne,
même d'office...". Plusieurs sont portés à croire que le
tribunal, dans ce cas, ordonne l'indexation quand on le lui demande. De plus,
si on ne lui demande pas, s'il le juge à propos, il peut prendre la
décision d'office d'indexer. Ce "même d'office" lui laisse une
discrétion d'application."
C'était en fait le problème que j'avais soulevé,
à savoir que, selon certaines interprétations, ceci ne
créait pas une obligation pour le tribunal d'indexer. Alors, est-ce
qu'il y aurait lieu de faire une correction? Évidemment, il y a toujours
la restriction "... à moins que la situation des parties ne justifie la
fixation d'un autre indice", ce qui, je pense, est une sécurité
pour justement tenir compte des situations. Dire que, d'une façon
générale, le tribunal doit ordonner que les aliments payables...
Enfin, je ne voudrais pas faire la correction, parce que je pense que ça
revient aux juristes d'en proposer une, s'il y a lieu.
Le Président (M. Laberge): Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. Bédard: Peut-être une explication technique, dans
un premier temps. Il est clair que l'intention qu'on recherche c'est une
obligation du tribunal d'ordonner et dans tous les articles - parce qu'il faut
quand même y aller avec prudence - où on emploie la formule "le
tribunal ordonne", c'est une formule impérative. Même si on
arrivait à faire un changement, il ne faudrait pas que cela ait pour
effet de changer l'appréciation qui pourrait être faite de la
formule que nous utilisons dans les autres articles. Maintenant, nos
juristes...
Peut-être au moins pour que ce soit une chose inscrite au
débat et claire, c'est une opinion. Il y en a une autre qui a
été émise à savoir que le caractère
impératif découle de la formulation de l'article 631 ou de
l'article 169.1 du Code civil découlant du projet de loi no 183. Je
pense que là-dessus, quant à nous, nous maintenons le
caractère impératif de l'article 169.1 sous la réserve:
À moins que le tribunal n'en décide autrement. Il n'y a pas,
d'autre part, non plus de connaissance de jugements qui sont venus
établir que cela n'avait pas un caractère impératif. Par
ailleurs, s'il y a discussion entre juristes et que les choses
paraîtraient plus claires en mettant "doit ordonner", M. le ministre
pourrait peut-être... Je n'ai pas d'objection, mais à condition
qu'on m'assure que ceci n'aura pas un effet d'interprétation sur les
articles où on emploie l'expression "le juge ordonne" si, à un
moment donné, on change la formule et dans d'autres articles du Code
civil des juristes commencent à soulever le fait que, lorsqu'on emploie
l'expression "le juge ordonne", ce n'est pas impératif en prenant comme
référence et comme appui à leur argumentation que c'est
impératif lorsqu'on le dit expressément "doit ordonner".
Là pour corriger une chose, on peut, à un moment donné,
insécuriser. Je veux être sûr qu'on n'insécurise pas
d'autres articles qu'on pourrait avoir intérêt à
contester.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, encore une fois je
demande l'opinion des juristes là-dessus. Est-ce que la confusion
possible ou la latitude d'interprétation possible ne vient pas des mots
"même d'office" et non pas des mots "le tribunal ordonne"? D'après
l'opinion qui est émise là, la confusion ne peut-elle pas se
créer à partir du terme "ordonne même d'office"?
M. Bédard: J'ai peut-être une autre solution qui
pourrait concilier les craintes du ministre et vos préoccupations, ce
serait de dire: Le tribunal ordonne à la demande du créancier ou
d'office. À ce moment, je pense que le tribunal n'a plus le choix. De
deux choses l'une, ou il y a une demande du créancier, ou il doit le
faire d'office. Comme ça on garderait le caractère
impératif du présent de l'indicatif.
Je pense que cela clarifie et cela sécurise.
Le Président (M. Laberge): Après le mot "ordonne",
on laisse la virgule. Il faudrait d'abord commencer par dire que l'article 631,
malgré son adoption, est ouvert. Je vais l'écrire si on me le
répète, si vous en faites une motion.
M. Bédard: Le tribunal ordonne, à la demande du
créancier ou d'office...
Avant d'y aller avec la formulation, moi j'ai une interrogation. Est-ce
que, si on emploie cette expression, ceci pourrait créer la situation
suivante? Si le créancier ne le demande pas, le juge peut d'office ne
pas l'ordonner. Il peut d'office l'ordonner, mais il peut d'office ne pas
l'ordonner.
Je pense qu'il n'a pas le choix.
(12 h 15)
M. Forget: M. le Président, est-ce que la formulation
pourrait se faire de la façon suivante: Le tribunal ordonne, à la
demande d'un des conjoints ou d'une des parties, ou à défaut
d'une telle demande, d'office.
M. Bédard: L'indexation sera demandée par le
créancier...
M. Forget: Oui, c'est ça, par le créancier ou par
une des parties. Enfin, ça revient au même, de toute
manière. Mais c'est plutôt que de dire simplement "ou", de dire
"à défaut de ".
M. Bédard: C'est l'interroqation que je me posais
aussi.
M. Forget: Ah bon!
M. Bédard: Si on emploie cette expression-là,
est-ce qu'on peut se retrouver dans la situation que lorsque le
créancier ne le demande pas, on donne l'impression qu'on laisse une
discrétion au juge sur le fait.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça.
M. Forget: En disant "à défaut" ça tend
à suggérer que si ce n'est pas demandé c'est d'office.
M. Bédard: Alors on serait peut-être aussi bien de
dire: Le tribunal ordonne que les aliments payables sous forme de.
M. Forget: Oui, peut-être.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Forget: On peut le supprimer.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ça, enlever même
"d'office."
M. Bédard: On va se donner un petit peu de temps. C'est
là qu'on voit jusqu'à quel point il faut y aller avec beaucoup de
prudence...
Mme Lavoie-Roux: Alors on le laisse en suspens. D'accord.
M. Bédard: Nous avons une formule un peu plus longue. Ce
serait: À la demande du créancier, ou à défaut
d'une telle demande ou d'office à défaut d'une telle demande. On
ferait le dessin complet. Ce sera un peu plus long, mais je crois que si on dit
"À défaut d'une telle demande, d'office, ou d'office à
défaut d'une telle demande..."
Mme Lavoie-Roux: Ordonne...
M. Bédard: Ordonne. Oui, enfin ordonne est avant.
Suspendons quelques minutes et nous reviendrons tout à l'heure.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laberge): J'ai considéré
ces propositions comme étant des suggestions. L'article 631 est ouvert
pour le moment à la demande des membres de la commission. Est-ce qu'on
passe aux articles 632 ou 633?
M. Bédard: II y avait les articles 632 et 633. À
l'article 632, une explication supplémentaire avait été
demandée et nous allons la fournir. En fait, on nous avait
demandé de quelle manière cela s'exécutait pour le
créancier, soit sur les meubles ou sur les immeubles. L'article 572 du
Code de procédure civile laisse le choix au créancier
d'exécuter soit sur les meubles soit sur les immeubles. Mais la
règle que ça pose c'est de dire que s'il exécute à
la fois sur les meubles et les immeubles, il doit d'abord discuter les meubles
avant d'agir sur l'immeuble.
M. Forget: Quel genre de sûreté envisage-t-on
au-delà de l'hypothèque judiciaire?
M. Bédard: Ça dépend de quelle autre
sûreté on vise. Ici, je pense que le concept qui est visé
est très large. Si c'est par voie d'assurance, par exemple, ça se
fera par voie d'indication dans l'assurance d'un bénéficiaire
qu'on appelle un bénéficiaire un peu contre valeur, selon son
intérêt, c'est-à-dire dans la mesure de
l'intérêt qu'il a. Un peu comme dans le genre d'assurances qui
couvre la dette hypothécaire en faveur d'un créancier, donc, il y
a une possibilité de désignation si on pense aux modes
d'assurances. Il faut presque les prendre un par un. Je n'ose pas penser au
gage tel qu'on le connaît, avec des possessions, qui pourrait être
une de ces formes. Cela peut être des garanties constituées entre
les mains d'un fiduciaire par voie, par exemple, des obligations ou des actions
de compagnies qui seraient, selon une entente, évidemment,
déposées entre les mains des bénéficiaires pour le
bénéfice éventuel du créancier. Donc, on tombe dans
les modes très diversifiés qui permettent d'assurer la protection
du créancier des aliments. Ce sont des modes qui sont, dans le monde des
affaires, très développés et très connus. Il y a
beaucoup de modes de sûreté qui sont applicables, qui peuvent
l'être. Cela va?
M. Forget: Oui, pas de problème.
Le Président (M. Laberge): C'est l'article 632.
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 632 est adopté
sans aucun amendement.
M. Bédard: À l'article 633, nous avons un petit
amendement.
Le Président (M. Laberge): À l'article 633, on nous
suggère, on nous demande d'insérer entre le mot "peut" et les
mots "être dispensé", ce qui suit: ", si les circonstances s'y
prêtent,".
Mme Lavoie-Roux: M. le Président..
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ...la discussion qu'on avait eue sur cet article
- on me corrigera si je fais erreur - n'était-elle pas de le limiter en
cas d'enfants...
M. Forget: En ligne directe.
Mme Lavoie-Roux: ...en ligne directe?
M. Forget: Si je comprends bien, cela vise les pensions
alimentaires entre conjoints même dans des cas autres que le divorce et
la séparation de corps.
M. Bédard: Ce sont tous les aliments possibles.
M. Forget: Même entre époux non
séparés et non divorcés?
M. Bédard: Oui, cela pourrait même s'appliquer en
ligne directe.
M. Blank: ...up and down. C'est plus plausible dans le cas d'une
mère ou d'un père que d'une femme.
M. Forget: Oui, c'est sûr que c'est plus plausible.
M. Bédard: II faut quand même garder cela ouvert
parce que...
M. Blank: Non, non, je dis que cela couvre tout le territoire,
pas seulement la femme et les enfants.
M. Bédard: Oui, d'accord.
M. Blank: Normalement, je ne trouverais pas cela pratique quant
aux femmes et aux enfants parfois, mais pour la mère, la
belle-mère, le grand-père ou guelque chose comme cela, cela peut
être raisonnable.
M. Forget: Mais serait-ce raisonnable au point d'exclure entre
conjoints? Je ne le pense pas.
M. Blank: Non, non. C'est ouvert ici. Cela couvre tous les
cas.
M. Forget: Oui, mais c'était le problème qui
était soulevé.
M. Blank: Mais si je le lis bien, "le juge peut". Il pense selon
la séparation, la circonstance qu'il y aura des chicanes si la femme
vient avec les enfants à la maison du mari. Il ne faudrait pas. C'est
pour cette raison qu'il y a le mot "peut".
M. Forget: Dans le fond, M. le Président, on se retrouve,
par le biais de cet article, à avoir une espèce de
séparation judiciaire qui n'en est pas une. Prenons le cas de conjoints
entre lesquels se pose un problème de pension alimentaire, alors qu'ils
ne sont ni divorcés ni séparés judiciairement. Ils sont
séparés de fait. Le créancier de la pension alimentaire
demande judiciairement une pension alimentaire. Le débiteur oppose
à cette demande: Qu'il revienne vivre avec moi. Et en jugeant si les
circonstances s'y prêtent ou non, le tribunal...
M. Bédard: Peut décider.
M. Forget: ...en jugeant sur la pension alimentaire, va
effectivement créer une espèce de tiers régime qui n'est
ni le divorce ni la séparation de corps, mais qui est le refus
d'accepter ce moyen de défense pour s'opposer au versement d'une pension
alimentaire. Il y a un troisième régime en quelque sorte, ce qui
est la mise en échec de la défense de cohabitation lorsqu'on fait
une demande d'un créancier possible pour pension alimentaire, on fait la
demande.
On n'en fait pas nécessairement découler les
conséquences du chapitre sur la séparation de corps. Est-ce qu'il
ne devrait pas y avoir un renvoi dans ce cas-là? Dans ce cas-là,
on a exactement une séparation de corps, sauf que c'est implicite.
Est-ce que ce n'est pas source de confusion?
M. Bédard: On peut poursuivre la discussion. On avait
présent à l'esprit un autre cas en ligne directe, à un
moment donné.
M. Forget: En ligne directe, on n'a pas d'objection.
M. Bédard: L'enfant peut être marié, mais
avoir le droit de réclamer des aliments. Le débiteur des aliments
ne peut quand même pas offrir, comme moyen de compenser les aliments, que
la personne retourne au domicile.
M. Forget: En ligne directe, je pense que l'article est bien
rédigé. Avec l'amendement, il l'est encore mieux. Mais disons que
le problème ne se pose pas là. Le problème se pose lorsque
cela intervient entre conjoints. Dans le fond, la façon dont le tribunal
va trancher l'application de l'article 633 va être l'équivalent de
prononcer un jugement en séparation de corps, mais sans le dire.
M. Bédard: C'est-à-dire que ce ne sera pas
l'équivalent du prononcé d'un jugement. Cela va être le
respect d'une situation de fait qui, lorsqu'on analyse les circonstances,
amène nécessairement à conclure que... On ne peut quand
même pas donner suite.
Il y a une jurisprudence récente, un jugement tout récent
de l'année, des deux dernières années, dans le cas
d'époux séparés de fait, donc non judiciairement,
où des aliments ont été accordés, dans la mesure
où ces époux, étant séparés de fait, avaient
des motifs qu'ils auraient pu invoquer, mais qu'ils n'avaient pas
invoqués pour obtenir effectivement une séparation de corps.
M. Forget: Mais sans en prononcer les conséquences.
M. Bédard: Mais sans en prononcer, comme vous l'avez
indiqué, les conséquences. Dans un cas semblable, il y a quelques
jugements. Il y en a un encore tout récent des deux dernières
années que j'ai vu, en faisant le texte. Ce sont des situations
extrêmement particulières où les circonstances de fait
jouent un rôle déterminant.
M. Blank: ... cela veut dire que la cour a déjà
rendu des jugements semblables. Est-ce que c'est nécessaire d'avoir cet
article? Il n'y a rien dans l'ancien code.
M. Bédard: Les aliments ne sont pas dus qu'entre
époux. Le problème, c'est que l'obligation alimentaire existe
aussi, on l'a dit, en ligne directe. Il y a peut-être plus d'application
à l'article 633 en ligne directe, encore qu'on ne puisse pas appliquer
non plus l'article 633 dans tous les cas en ligne directe, parce que, là
aussi, il y a des circonstances, comme on vient d'en évoquer une. Un
père doit peut-être des aliments à son fils, mais son fils
est déjà marié, a cinq enfants et il n'est pas question
que son fils vienne habiter avec les cinq enfants dans la maison paternelle. Il
n'y aurait pas d'application dans cette hypothèse peut-être...
On peut peut-être ajouter que... Cela reconduit un peu le principe
de l'article 171 actuel du Code civil, en le modernisant. Mais aussi, en
matière de séparation de corps et de divorce, il reste quand
même qu'au niveau des mesures provisoires, on a l'article 543 qui
délie l'obligation de vie commune et qui ordonne à des parties de
quitter la résidence familiale. Donc, à ce moment-là, cela
rend complètement inapplicable l'article 633, dans cette
hypothèse, sans qu'on ait besoin de le préciser.
M. Forget: Oui. C'est sûr que, s'il y a déjà
une séparation de corps, la défense qui est
suggérée à l'article 633 ne s'applique pas. Mais c'est
plutôt dans le cas inverse où il n'y a pas de séparation de
corps. Et le fait même de décider de l'application de l'article
633 met les parties dans une situation, après jugement, comme si elles
étaient judiciairement séparées de corps, mais elles ne le
sont pas, en même temps. C'est un régime très particulier
qui illustre, dans le fond, tout le problème du nouveau contexte de la
séparation de corps, peut-être aussi dans un régime
où le divorce est accepté et légalisé. Il y a
déjà ce moyen de se séparer de corps. (12 h 30)
Dans le fond, à l'article 633, c'est une séparation de
corps d'un type particulier, sans toutes les conséquences, avec
seulement une partie des conséquences de la séparation de corps.
Il y a le régime complet de la séparation de corps sur lequel on
a tout un chapitre et il y a le divorce, qui est maintenant plus accessible,
dans un certain sens.
Alors, on peut se demander si la séparation de corps classique,
avec tous les articles, cela demeure un régime pertinent, parce qu'il y
a ce moyen beaucoup plus facile de l'article 633. Les conjoints cessent de
faire vie commune. Celui qui est en situation de requérir des aliments
les requiert et on se borne à faire cela.
M. Bédard: Sauf qu'on n'a pas les effets d'une
séparation de corps.
M. Forget: Mais ceux qui veulent les effets, dans le fond...
M. Bédard: Et il y a tellement de différence...
M. Forget: Étant donné les clauses qui enclenchent
le divorce, dans le fond, cela devient un régime mitoyen, la
séparation de corps, pour lequel il n'y aurait peut-être plus
beaucoup de justification. Je n'ai rien d'autre à ajouter, M. le
Président. Je fais simplement ressortir les implications de ce que nous
adoptons ici. Je pense que si on avait à se poser des questions...
M. Bédard: Est-ce qu'on peut se donner un délai? Il
est 12 heures 30. On peut donner à nos juristes le délai
nécessaire pour évaluer ces représentations.
M. Forget: Oui, sûrement.
Le Président (M. Laberge): Alors, on le laisse ouvert?
M. Forget: Oui, c'est cela. Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 633, on le laisse
ouvert. L'article 633 demeure suspendu. Ensuite, on avait l'article 637.
M. Blank: Avant qu'on arrive là, à l'article 634,
la version anglaise, au deuxième alinéa, dit: "The debtor is
prosecuted or impleaded". Le mot "prosecuted", en anglais, est plus criminel
que civil.
M. Bédard: Ils pourront le remplacer par "sued".
M. Blank: "Sued".
Le Président (M. Laberge): C'est inscrit au journal des
Débats.
M. Bédard: D'accord. Avant de suspendre nos travaux, il y
aurait peut-être lieu de faire la correction à l'article 637.
Le Président (M. Laberge): À l'article 637,
mesdames, messieurs, qu'on avait laissé ouvert, on nous suggère
de remplacer le deuxième alinéa par le suivant: "Cependant, ces
aliments ne peuvent être alors accordés, pour une période
d'au plus douze mois, que si le créancier s'est trouvé, en fait,
dans l'impossibilité d'agir plus tôt ou qu'à compter du
jour où le débiteur avait été mis en demeure."
M. Bédard: Cela va, M. le Président. Le
Président (M. Laberge): Cela va?
M. Forget: Cela va, je pense gu'on a fait assez de discussions
là.
Le Président (M. Laberge): Deuxième alinéa
nouveau de l'article 637, adopté? Adopté. L'article 637,
modifié ou amendé, sera-t-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendement.
M. Bédard: À l'article 633, il me semble qu'il n'y
a pas d'autres amendements à apporter et que cela couvre les
situations.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est bon.
M. Forget: Non, il n'y a pas d'autres amendements à
apporter. C'était simplement...
M. Bédard: Alors, on pourrait peut-être
l'adopter.
M. Forget: C'est cela. Comme je l'ai indiqué,
c'était simplement pour nous faire réaliser les
conséquences de ce que nous étions en train d'adopter. Je n'ai
pas d'objection.
M. Bédard: Les conséquences ayant été
analysées, l'article couvre...
Le Président (M. Laberge): À l'article 633, la
modification consiste à insérer, entre le mot "peut" et les mots
"être dispensé", ce qui suit: "si les circonstances s'y
prêtent,". Est-ce que cet amendement sera adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 633
amendé, adopté.
M. Bédard: De consentement mutuel, il semble que nous
serions d'accord pour suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.
M. Forget: 14 heures. Mme Lavoie-Roux: 15 heures. M.
Forget: Enfin, 14 h 30. M. Bédard: 14 h 30.
M. Forget: On n'a pas été dans nos bureaux
beaucoup.
M. Bédard: Je m'excuse, c'est parce que c'est jeudi. On
perd la notion du temps. Est-ce que c'est 15 heures normalement?
Mme Lavoie-Roux: D'habitude, on finit à 13 heures et on
recommence à 15 heures.
M. Forget: Là, on finirait à 12 h 30 et on
recommencerait à 15 heures.
Mme Lavoie-Roux: 15 heures.
Le Président (M. Laberge): Sur consentement des membres de
la commission, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 35)
(Reprise de la séance à 15 h 15)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de la justice reprend ses travaux sur
l'étude article par article du projet de loi no 89.
Avant la suspension des travaux, nous avions adopté l'article
637. 631 de l'article no 1 du projet de loi est suspendu et, si vous le voulez,
nous allons passer à l'article 641.
M. Bédard: Ne reste-t-il pas quelque chose à
532?
C'est le 531 qui est resté ouvert.
Le Président (M. Laberge): Ce sont les articles 631 et 641
qui sont ouverts. Oui, 647. J'appelle l'article 631.
M. Bédard: Ah bon. À l'article 631 nous aurions une
formulation...
Bien la plus sûre et la plus longue. Elle est très
inélégante, mais au moins elle ferme toutes les portes,
c'est-à-dire "à la demande du créancier ou, à
défaut d'une telle demande, d'office,". Cela fait beaucoup de virgules,
mais...
Pour le journal des Débats, tout en maintenant la position de
fond telle que libellée, quand on emploie l'expression "ordonne",
à ce moment-là c'est impératif.
Le Président (M. Laberge): J'aimerais qu'on porte à
mon attention...
M. Forget: D'accord. Peut-être qu'on peut la relire pour
que tous nos collègues l'entendent bien.
M. Bédard: L'article 631 se lirait comme suit...
Mme Lavoie-Roux: L'article 631 m'intéresse.
M. Bédard: Tous les articles vous intéressent.
Mme Lavoie-Roux: Je veux voir ce que c'est.
M. Bédard: "Le tribunal ordonne, à la demande du
créancier ou, à défaut d'une telle demande, d'office,";
c'est lourd, mais le dessein est entier, je pense qu'il n'y a plus aucune
possibilité...
C'est une suggestion, mais si on disait: À la demande du
créancier ou d'office, si ce dernier n'en fait pas la demande.
"...d'office, à défaut d'une telle demande,".
Oui. Il me semble que ça se rattache au dernier point.
On va l'écrire, pour ensuite en discuter.
Mme Lavoie-Roux: J'ai bien compris ce qu'il a dit parce qu'il
nous l'avait déjà dit ce matin.
M. Bédard: Je vais suggérer: "À la demande
du créancier ou d'office, à défaut d'une telle demande,"
etc.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce n'est pas sur les
virgules que j'en ai.
M. Bédard: Nous non plus.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends qu'elles sont fort importantes
quand on met ces deux membres de phrase. Je voudrais qu'on m'explique pourquoi
on ne peut pas simplement dire: "Le tribunal ordonne que les aliments payables
sous forme de pension soient indexés"? Pourquoi faut-il amener "la
créancière" et "à défaut du créancier"?
M. Bédard: La crainte qu'on a, si elle est fondée,
est la suivante. Le tribunal généralement n'ordonne de choses que
sur demande; autrement, il est ultra petita, au-delà de la demande. Pour
éviter qu'il ne soit pris dans cette situation, on prévoit qu'il
peut d'office lui-même décider, même en l'absence de
demande. C'est pour prévoir ce cas. Ce n'est pas que le mot "ordonne"
n'a pas toute sa force quand il y a une demande, c'est quand il n'y a pas de
demande de la part du créancier.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si j'ai bien entendu les
explications de Me Guy, il a dit que même en l'absence d'une demande le
tribunal peut indexer. C'est cela que vous avez dit? Vous avez dit le mot
"peut".
M. Bédard: Je n'ai pas dit le mot "peut", j'ai dit
"ordonne d'office".
Mme Lavoie-Roux: Vous avez dit "peut". On lira...
M. Bédard: Si j'ai dit "peut", c'est "ordonne
d'office".
Mme Lavoie-Roux: Ce que je veux savoir c'est ceci. Si le
créancier ne le demande pas, est-ce que cela va être automatique,
sauf la réserve qui est en fin d'alinéa, que le tribunal va
indexer les aliments payables?
M. Blank: Pas nécessairement.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Je ne peux pas discuter tout cela si c'est
la même chose.
M. Bédard: Dans la rédaction qu'on a
proposée, il n'y a pas de problème.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, j'admets la réserve.
M. Blank: Mais prenons le cas d'un créancier qui ne le
demande pas. Si le juge l'oublie ou ne pense pas de le donner, dans le
jugement, ce n'est pas mentionné, c'est fini.
M. Bédard: Je veux faire remarquer que j'ai justement
souligné ce point ce matin, c'est pour cela que nous avons suspendu,
pour trouver une formulation qui puisse corriger cela.
M. Blank: Oui, mais cette formulation n'est pas meilleure.
M. Bédard: C'est votre opinion.
M. Forget: Oui, mais à ce moment-là, c'est une
cause d'appel.
M. Bédard: Mais le fait est que si on met "doit", il peut
l'oublier quand même.
M. Forget: Même si on dit qu'il est obligé, s'il
l'oublie, qu'est-ce qui arrive?
M. Bédard: Inscrivons: Ne doit pas oublier de.
M. Forget: Bien oui!
M. Bédard: Encore là, s'il l'oublie, on n'est pas
protégé.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec vous sur l'oubli, mais
très sérieusement, ma préoccupation est que...
M. Bédard: On a la même.
Mme Lavoie-Roux: Si on a la même, on devrait arriver au
même résultat. Je ne veux pas que ça demeure... Mettons de
côté l'oubli; quant à cela, le juge peut bien oublier de se
rendre au tribunal, aussi: Sérieusement, je ne veux pas laisser
d'ouverture pour que le tribunal n'ordonne pas l'indexation des aliments,
à moins que le monsieur soit sans emploi ou que l'autre conjoint soit
sans emploi et qu'il ne puisse pas les indexer.
M. Bédard: Ce que nous disent nos juristes, c'est que la
formulation qu'ils viennent de nous soumettre, selon leurs convictions,
répond à ce besoin de sécurité que vous avez et que
nous avons tous, comme membres de la commission parlementaire, qu'il soit
très clair pour le tribunal qu'il doit ordonner.
Mme Lavoie-Roux: Alors, on peut interpréter que si le
créancier ne demande pas une indexation, le tribunal doit indexer les
aliments sauf, évidemment, si la situation financière a
été modifiée à la baisse.
M. Bédard: Qu'il y ait demande ou pas. C'est ce que
ça veut dire, l'expression qu'il y ait demande ou pas. C'est notre point
de vue, qu'il y ait demande ou pas. Qu'il y ait demande ou pas, le juge sera
obligé.
Mme Lavoie-Roux: Qu'il y ait demande ou pas.
M. Bédard: Qu'il y ait demande ou pas.
Mme Lavoie-Roux: C'est automatique, sauf avec la réserve
de la fin.
M. Bédard: Avec la réserve de la fin et sous
réserve que le juge oublie.. Comme vous l'avez mentionné. On
pourrait l'inscrire à tous les articles.
Si le juge oublie, je pense que ce n'est pas tout à fait sans
remède à cause de l'article 475.
Ou sous réserve qu'il se trompe dans l'interprétation.
À cause de l'article 475 du Code de procédure où on
dit qu'un jugement peut être rectifié par le juge ou par le
protonotaire qui l'a rendu et qui, par suite d'une inadvertance manifeste,
accorde plus qu'il n'était demandé - c'est l'ultra petita - ou
omet de prononcer sur une partie de la demande. Dès lors que le juge a
une obligation de se prononcer d'office, cela fait partie implicitement de la
demande. Donc, s'il a oublié, je pense que cela pourra être
rectifié par la suite. Ce n'est pas sans remède.
Le Président (M. Laberge): Je vous reviens avec la
rédaction de l'article 631; pour la bonne compréhension, je vais
le lire une dernière fois. "Article 631. Le tribunal ordonne, à
la demande du créancier, ou, à défaut d'une telle demande,
d'office, que les aliments payables sous forme de pension soient indexés
suivant l'indice annuel des rentes établi conformément à
l'article 119 de la Loi sur le Régime de rentes du Québec,
chapitre R-9, à moins que la situation des parties ne justifie la
fixation d'un autre indice". Ce serait la rédaction finale.
Est-ce que le dernier amendement sera adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 631
tel qu'amendé est-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Maintenant,
l'article 641.
M. Bédard: M. le Président, à l'article 641,
nos conseillers croient qu'on devrait maintenir le texte du projet tel
qu'il
est.
Je sais qu'on avait eu une discussion en vue d'ajouter un article qui se
retrouve au niveau de la Loi sur la protection de la jeunesse. Les motifs
militant en faveur de garder le texte tel qu'il apparaît au projet sont,
premièrement, les notions de sécurité et de
développement de l'enfant sont nécessairement incluses dans les
droits et devoirs de garde. Deuxièmement, l'autorité parentale
n'est pas un privilège, mais une fonction; dès lors, la
déchéance peut survenir s'il y a abus dans l'exercice.
Troisièmement, les faits décrits à l'article 38 de la Loi
sur la protection de la jeunesse, s'ils sont établis à
l'égard du titulaire de l'autorité parentale, pourraient
entraîner déchéance.
Il en serait ainsi si les parents ne s'occupent plus de l'enfant ou
cherchent à s'en défaire, si les parents le maintiennent dans un
isolement néfaste à son développement mental ou
émotif, s'il est victime d'abus sexuels ou soumis à de mauvais
traitements physiques, etc., tel qu'on peut le voir à l'article 38 de la
Loi sur la protection de la jeunesse.
On peut peut-être en discuter encore; si ça ne
répond pas à la préoccupation, il y a peut-être des
questions. Mais il me semble que ça va de soi.
M. Forget: M. le Président, je ne veux pas faire le
même débat pour la troisième fois. J'ai déjà
soulevé toute cette question à l'occasion du débat sur cet
article et sur d'autres articles. Je crois qu'il aurait dû entrer dans
les objectifs d'une révision du Code civil, vis-à-vis de cet
élément particulièrement important du droit statutaire qui
affecte les parents, les enfants et leurs relations réciproques, il
aurait dû être dans l'objectif de la révision
d'intégrer cette partie du droit statutaire soit dans le Code civil,
soit dans le Code de procédure civile, au moins dans une très
large mesure.
Je pense qu'on l'a fait pour la Loi sur l'adoption, bravo. Je crois que
c'est une question de philosophie ou d'approche générale dans la
révision des lois et dans l'intégration au Code civil du droit
statutaire.
Le ministre a indiqué, pour sa part, qu'il n'acceptait pas ce
principe de façon générale, quoiqu'il puisse faire des
exceptions. Les arguments particuliers qu'il vient de nous donner, à mon
avis, pourraient également être interprétés comme
autant d'arguments en faveur d'une intégration plutôt que des
arguments en faveur d'un traitement séparé. Mais je pense que,
là-dessus, j'ai fait abondamment part de mes propres convictions. Le
ministre aussi a eu l'occasion de développer ses arguments.
Je pense qu'à ce moment-ci, on n'ajoutera pas grand chose au
débat, à moins que le ministre n'indique qu'il est encore en
train d'y réfléchir et pourrait être susceptible de
modifier son attitude là-dessus. C'est peut-être aussi bien, si ce
n'est pas le cas, de trancher tout simplement.
M. Bédard: Je suis d'accord avec certains propos du
député de Saint-Laurent; je ne veux pas recommencer
l'argumentation non plus. Je pense que j'ai eu l'occasion de dire que si nous
n'avons pas reproduit textuellement tous les articles qui sont contenus dans le
rapport de l'Office de révision du Code civil, sous ce chapitre, nous
avons reproduit tous les grands principes de ces articles à travers
d'autres et je pense que l'essentiel de tous les grands principes se retrouve
à l'intérieur de ce projet, même si on n'y retrouve pas,
textuellement, un chapitre précis, comme c'était le cas dans le
rapport de l'Office de révision du Code civil. (15 h 30)
Le Président (M. Laberge): C'est 641.
M. Bédard: Je ne veux pas recommencer l'argumentation.
Comme le député de Saint-Laurent l'a dit...
M. Forget: Le ministre a développé son
argumentation. Je pense qu'il l'a étalée, moi aussi.
Écoutez, nous sommes prêts à adopter sur division l'article
en question.
Le Président (M. Laberge): Article 641, sans modification,
adopté sur division.
Article 647. On porte à votre attention un amendement. Je porte
à votre attention que l'article 647 avait été
modifié à deux reprises, c'est-à-dire qu'il y avait eu des
amendements suggérés, mais là, il y a une nouvelle
rédaction qui est portée à notre attention; donc, nous
oublions l'ancien article et les amendements et nous prenons le suivant.
Remplacer l'article par le suivant. "647: En cas de difficulté relative
à l'exercice de l'autorité parentale, le titulaire de
l'autorité parentale peut saisir le tribunal qui statuera dans
l'intérêt de l'enfant, après avoir favorisé la
conciliation des parties".
M. Bédard: C'est tout simplement que dans un premier texte
on référait seulement à l'autorité parentale,
père et mère, or cela peut être une autre personne et c'est
pour cela que je crois qu'il est nécessaire d'employer l'expression
"titulaire de l'autorité parentale". Il faut que ce soit bien clair que
ce n'est pas réservé seulement au père ou à la
mère, mais d'une façon générale au titulaire de
l'autorité parentale.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 647 avec
sa nouvelle rédaction sera adopté?
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, c'est une
bonne rédaction, mais cela laisse de côté la
possibilité qu'une utilisation abusive de l'autorité parentale du
point de vue de l'enfant ne puisse être mise en question.
Évidemment, là on me dira que c'est seulement les recours
prévus à la Loi sur la protection de la jeunesse. On doit donc
mettre en jeu le directeur de la protection de la jeunesse et c'est seulement
de cette façon qu'un tiers peut invoquer. D'accord. Je me réponds
à moi-même, mais c'est...
M. Bédard: Parce qu'il y a d'autres recours. On a
élargi, au lieu de parler de différend, on parle de
difficulté. Cela permet peut-être une plus grande souplesse
d'intervention, au moins parmi ceux qui peuvent intervenir.
M. Forget: Oui et malgré tout un certain filtrage
d'interventions externes qui pourraient être faites dans un but purement
vexatoire. D'accord, adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Le nouvelle article 647,
adopté. Cela va. On oublie les anciennes rédactions. Maintenant,
je pense...
M. Forget: Est-ce que nous allons entreprendre tout de suite les
articles suspendus en séparation de corps ou si le ministre veut
continuer jusqu'à la fin?
M. Bédard: On a des articles... Voulez-vous me donner un
instant?
M. Forget: Oui, je vous en prie.
Dispositions relatives aux enfants (suite)
M. Bédard: ... 31,à l'article 2.
Le Président (M. Laberge): On peut reprendre. À
l'article 2, le paragraphe 31.
M. Forget: Si je comprends bien, nous recommençons pour
jusqu'à la fin?
M. Bédard: C'est ça.
M. Forget: On reviendra après coup dans les 500...
Le Président (M. Laberge): ... 524 à 566...
M. Bédard: À moins que, vers la fin, il n'y ait un
ou deux articles qu'il nous faille garder.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): À l'article 2, on nous
demande de remplacer le paragraphe 31 par le suivant: "31. Le tribunal peut,
chaque fois qu'il est saisi d'une demande mettant en jeu l'intérêt
de l'enfant, donner à cet enfant l'occasion d'être entendu."
M. Bédard: C'est à la suite d'une demande des
membres de la commission. On avait eu une discussion là-dessus. La seule
chose que je voudrais mentionner peut-être, pour les fins du journal des
Débats, c'est que lorsqu'on emploie cette expression-là je ne
pense pas qu'on donne le feu vert pour employer tout le rigorisme de la
procédure qui consiste à signifier à l'enfant ou à
son tuteur, etc. Je pense que le but poursuivi est le même de part et
d'autre.
M. Forget: J'imagine, M. le Président, que si on veut
créer un tribunal de la famille, on ne veut pas simplement donner le nom
de "Tribunal de la famille" à la Cour d'assises ou l'équivalent.
Je crois qu'il y aura, au niveau de la procédure, au niveau du
formalisme, etc., des choses à faire qui valent non seulement pour les
enfants, d'ailleurs, mais qui valent également pour... S'il y a un
différend entre deux conjoints, quant à la résidence
familiale par exemple, je pense que dans ces circonstances-là aussi il
faudra imaginer des formules qui ne soient pas trop intimidantes.
M. Bédard: On se rejoint là-dessus, c'est pour
ça que je voulais le mentionner pour les fins du journal des
Débats. Ça va?
Le Président (M. Laberge): Le paragraphe 31 est-il
adopté?
M. Bédard: Adopté. M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Ce qui nous
permettrait de... L'article 5 est ouvert.
M. Bédard: II y a l'article 5.
Le Président (M. Laberge): À l'article 5, on nous
demande d'ajouter au début de l'article 55.1 proposé ce qui suit:
"dans les bornes fixées par les dispositions de la loi,".
M. Bédard: Pour que ce soit rappelé qu'on a fait
référence à tous les articles où,
déjà, ce n'est pas le ministre qui a statué, mais
où c'est ordonné en fonction de la loi que ce soit le nom qui est
donné...
M. Forget: M. le Président...
M. Bédard: Je m'excuse. Ma mémoire peut faire
défaut, mais c'est parce que j'essaie de ne pas reprendre
l'argumentation qu'on avait évoquée à ce
moment-là.
M. Forget: La non-discrimination entre enfants naturels et
enfants légitimes est probablement la contrainte principale que la loi
pose sur la façon dont l'acte est dressé, mais, M. le
Président, il demeure que cet amendement n'ajoute rien. Jamais un texte
réglementaire ne peut aller au-delà des bornes fixées dans
les dispositions de la loi qui crée le pouvoir réglementaire. Ce
n'est pas du tout le sens de l'intervention de ce côté-ci de la
commission relativement à un pouvoir réglementaire permettant au
ministre de décréter les conditions de la tenue des actes de
naissance des enfants adoptés.
M. Bédard: On va suspendre parce que je pense aussi qu'il
va de soi que c'est toujours dans les bornes...
M. Forget: C'est cela.
M. Bédard: ...édictées par la loi. C'est en
soi implicite à toute réglementation et on va le garder comme
cela. Peut-être par décret. Si on spécifiait que cela doit
se faire par décret, à ce moment-là, cela
répondrait-il à vos préoccupations?
M. Forget: Non plus. M. Bédard: Non?
M. Forget: Non plus. M. le Président, je persiste à
croire que si le Code civil détermine des conditions pour dresser des
actes de naissance, il incombe au législateur en rédigeant le
Code civil de décrire complètement ces exigences. Le renvoi de
plus en plus fréquent au pouvoir réglementaire au sein du Code
civil est un précédent regrettable qui est en train de se
généraliser et je ne peux pas y souscrire.
M. Marx: M. le Président, pourquoi ne pas simplement
prévoir dans cet article que l'acte de naissance comporte tel et tel
élément? Quant à ce qu'on va avoir comme
éléments dans l'acte de naissance, ce sera bien sûr au
ministère d'adopter des formules, le cas échéant, mais les
éléments constitutifs de l'acte de naissance seront
décrits dans le Code civil.
M. Forget: Ou, si on veut, même énumérer des
inscriptions prohibées, dire qu'il est interdit dans l'acte de naissance
d'un enfant adopté de faire mention du fait qu'il est adopté ou
de faire mention que les parents qui lui sont attribués dans l'acte de
naissance ne sont pas ses parents légitimes ou Dieu sait quoi. Si on
veut interdire des inscriptions ou si on veut en prescrire, on peut les
préciser dans le Code civil, quitte, comme mon collègue de D'Arcy
McGee le dit, à ce que la formule elle-même... La formule
elle-même n'a même pas besoin d'être mentionnée au
Code civil. Cela va de soi. Si on veut la mentionner à tout prix, qu'on
la mentionne.
M. Bédard: Je pense qu'il n'y a personne qui
soupçonne le ministre de la
Justice de vouloir augmenter des pouvoirs de quelque façon que ce
soit.
M. Forget: C'est une suggestion.
M. Bédard: C'est une question de principe. C'est pour
cette raison que je préférerais qu'on suspende...
M. Forget: D'accord.
M. Bédard: ... à la lumière des suggestions
qui viennent d'être-faites, pour voir si on peut en arriver à une
solution acceptable pour tout le monde.
Le Président (M. Laberge): L'article 5 du projet de loi
amendant l'article 55.1 est suspendu. Je pense que cela nous reporte
à...
M. Bédard: À l'article 52, je crois, M. le
Président.
Radiation de l'enregistrement des droits
réels
Le Président (M. Laberge): L'article 51 est adopté.
Après l'article 51, on avait la demande d'ajouter un article, l'article
51.1. Je vous en donne lecture. Après l'article 51, ajouter les
suivants: 51.1: "Ledit code est modifié par l'addition, à la
suite de l'intitulé du chapitre 5 du titre dix-huitième du livre
troisième, de ce qui suit: "et de la déclaration de
résidence". (15 h 45)
Est-ce que cet article 51.1...
M. Bédard: II s'agit ici du chapitre 5 qui est relatif,
dans le Code civil, aux articles 2148 et suivants relatifs actuellement
à la radiation de l'enregistrement des droits réels. Comme ce qui
s'enregistre sur l'immeuble, qui comporte droits réels, doit être
radié dans certaines circonstances, il a fallu, parce que la
déclaration de résidence, dans la mesure où elle comporte
également, elle aussi, un enregistrement contre l'immeuble,
compléter la section pour qu'il n'y soit plus question simplement
d'enregistrement de droit réel. Cela n'en fait pas un droit réel
au sens strict. Cela en fait certainement un élément distinct de
la notion classique ou traditionnelle de droit réel. Il paraissait utile
d'intituler tout le chapitre de la radiation des droits réels et de la
déclaration de résidence. Il est bien important que les
mécanismes de radiation puissent fonctionner pour deux cas au moins,
quand les enregistrements se seront faits
irrégulièrement ou sans droit, comme dans le cas des
droits réels, et également quand ils n'auront plus leur raison de
subsister ou d'être, soit parce que la résidence est
désaffectée, si je puis dire, ou soit parce que les parties
consentent à lever l'enregistrement. Il faudrait prévoir le
mécanisme habituel de radiation.
M. Forget: Adopté. M. Bédard:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 51.1 est
adopté. J'appelle l'article 51.2 qui est le suivant: "Ledit code est
modifié par l'addition, après l'article 2148, du suivant:
"2148.1. L'enregistrement d'une déclaration de résidence
familiale n'est radié, a la demande de tout intéressé, que
dans les cas suivants, sous réserve de l'article 2150: lo, les
époux y consentent; 2o, l'un des époux est
décédé; 3o, les époux sont séparés de
corps ou divorcés; 4o, le mariage a été annulé; 5o,
l'immeuble a été aliéné du consentement des
époux ou avec l'autorisation du tribunal. "Dans les cas prévus
par les paragraphes 2o à 5o, la demande doit être
accompagnée d'un certificat de décès ou d'une copie du
jugement, selon le cas."
M. Bédard: Ce n'est pas un article nouveau.
L'article est nouveau. Il énumère les circonstances qui
peuvent donner lieu à la radiation d'une déclaration de
résidence qui peut être faite.
Ce n'est pas un article nouveau par rapport au projet de loi 89, sauf
qu'il a été déplacé... C'est ce que je veux dire,
on ne fait que le déplacer pour que ce soit plus cohérent,
étant donné que cela concerne la résidence.
Ce n'est pas un article nouveau par rapport au projet de loi 89.
C'est cela.
Le Président (M. Laberge): Un moment.
M. Bédard: ... avec les articles 453 et 454 que nous avons
adoptés, qui sont édictés par l'article 1.
Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il y a des questions
sur cet article 51.2?
Est-ce que l'article 51.2 sera adopté?
M. Forget: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): On nous demande, à la
suite de cette renumérotation... On va passer par l'article 52 en
premier. L'article 52...
M. Bédard: C'est un article de concordance avec les
nouveaux articles 453 et 454, édictés par l'article 1.
Le Président (M. Laberge): L'article 52 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): On nous demande de supprimer
l'article 53.
M. Bédard: Parce qu'on l'a repris tout à
l'heure.
Le Président (M. Laberge): On vient de l'adopter.
M. Bédard: C'est celui dont je disais qu'il n'était
pas de droit nouveau, par rapport à ce qui existe dans le nouveau
code.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Suppression de l'article 53,
adopté. J'appelle l'article 54. Tout en l'appelant, j'ai une mention
ici: Remplacer, à l'article 54, le texte de l'article 2261.1
proposé par le suivant. Article 2261.1. "L'action en nullité d'un
acte accompli par un époux, sans le consentement de son conjoint, se
prescrit par deux ans, à compter de la connaissance de l'acte, si ce
consentement était requis. Cependant, en aucun cas, l'action ne peut
être intentée plus de deux ans après la cessation de la vie
commune ou, s'il s'agit d'actes accomplis dans l'exercice des droits et
pouvoirs résultant du régime matrimonial, plus de deux ans
après la dissolution du régime." Est-ce que ce nouvel article 54
sera adopté?
M. Bédard: L'article établit la prescription qui
s'attache aux actions en nullité d'actes pour lesquelles le consentement
de l'autre conjoint était requis, notamment dans le cas des articles
découlant des articles 451, 452, 453 et 478 édictés par
l'article 1. Le nouvel amendement proposé tient compte que l'action en
nullité n'est pas dirigée contre l'autre conjoint, mais bien
contre le tiers locataire acquéreur, de sorte que l'article 2233 du Code
civil qui établit que la prescription ne court point entre époux
ne gêne pas l'application de cet article.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 54,
nouvelle rédaction adoptée. Avant l'article 55, on nous demande
d'ajouter, après l'article 54, le suivant: l'article "54.1. Les articles
2540, 2541, 2544, 2545, 2546, 2550 et 2551 dudit code sont modifiés en
y
remplaçant, partout où elle se trouve, l'expression
"propriétaire(s) subrogées), qu'elle soit au singulier ou au
pluriel, par l'expression "propriétaire(s) subsidiaire(s)", au singulier
ou au pluriel, selon le contexte."
M. Bédard: C'est seulement de concordance. On a
déjà eu la discussion pour expliquer la substitution.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 54.1, adopté.
À l'article 55, on demande de remplacer le texte de l'article 2555
proposé par le suivant...
M. Bédard: On l'avait donné. C'est une concordance
également.
Le Président (M. Laberge): "La séparation de corps
ne porte point atteinte aux droits du conjoint qu'il soit
bénéficiaire ou propriétaire subsidiaire. Toutefois, le
tribunal peut, au moment où il prononce la séparation, les
déclarer révocables ou caducs." Paragraphe. "Le divorce et la
nullité de mariage rendent caduque toute désignation du conjoint
à titre de bénéficiaire ou de propriétaire
subsidiaire." Cette nouvelle rédaction de l'article 55...
M. Bédard: Ce nouvel article est de concordance. L'article
2555 est de concordance avec les règles applicables aux donations pour
cause de mort, en matière de séparation de corps, article 531, et
en matière de nullité de mariage et de divorce, les articles 437
et 553.
M. Forget: C'est de concordance, en quelque sorte.
M. Bédard: Uniquement.
Il ne distinguait pas la séparation de corps du divorce. Le sort
des donations en matière de séparation de corps n'étant
pas le même que celui du divorce, c'était normal qu'il y ait un
alignement des conséquences.
M. Forget: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Le nouvel article 2555,
adopté. Article 56?
M. Bédard: C'est un article de concordance avec l'article
1 qui édicte les articles 591 à 625 du Code civil du
Québec.
M. Forget: Sous réserve des dispositions non substantives
de la Loi sur l'adoption qui devront être reprises dans le Code de
procédure civile, si je comprends bien.
M. Bédard: C'est cela.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 56, adopté.
Article 57?
M. Bédard: L'article précise la rédaction de
l'article 39 de la Charte des droits et libertés de la personne. On a
employé le texte.
M. Forget: Est-ce qu'on pourrait nous lire l'article qui est
abrogé?
Je m'excuse, mais je n'ai pas la concordance ici.
M. Bédard: Au niveau du Code civil... Une seconde.
L'ancien texte... Non, ce n'est pas cela. J'avais celui de l'Office de
révision du Code civil. Je ne l'ai pas sous les yeux. C'est celui de
l'Office de révision du Code civil: "Tout enfant a droit à
l'affection et à la sécurité...". C'est de celui-là
que vous voulez?
M. Forget: Celui de la charte... M. Bédard: Celui
de la charte.
M. Forget: On dit qu'on remplace un article par un autre et je
voudrais être bien sûr de savoir lequel.
M. Bédard: Oui. Si vous me permettez, je l'ai ici. Je
pensais qu'il était inscrit au cahier.
M. Forget: On a les mêmes problèmes.
M. Bédard: M. le Président, l'article 39 de la
Charte des droits et libertés de la personne disait ceci: "Tout enfant a
droit à la protection, à la sécurité et à
l'attention que doit lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent
lieu."
Étant donné que la différence entre les deux n'est
pas très évidente, je pourrais peut-être ajouter...
M. Forget: Non. Elle est imperceptible, sauf pour un lecteur
très attentif.
M. Bédard: Celle du projet s'inspire davantage de celle de
l'Office de révision du Code civil et un des points qui ont
été notés, c'est que celle de l'article 39 dit qu'on doit
à l'enfant la sécurité qui lui est due. C'est un petit peu
pléonastique, c'est peut-être plus près de la
réalité d'exprimer que l'enfant a droit à la protection,
à la sécurité et à l'attention que ses parents
peuvent lui donner. C'est une question plus collée à la
réalité. Il n'y a pas de mesure objective là-dedans, il y
a une mesure subjective dans la relation parent-enfant. Il y a des
degrés différents puisque c'est davantage fonction des parents
eux-mêmes.
M. Forget: Je suis tout à fait d'accord.
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 57, adopté. Pour
le journal des Débats, je dois dire que, tout en fonctionnant
très rapidement, les articles 54 et 55 ont été
adoptés tels qu'amendés puisque c'était une partie de
l'article qui était modifiée.
J'appelle l'article 58.
M. Bédard: Article 58. C'est un article de concordance
avec l'article 1 qui institue un nouveau Code civil du Québec.
M. Forget: Oui, d'accord.
Le Président (M. Laberge): Article 58...
M. Forget: Nous aurons donc deux Codes civils pour un certain
temps.
M. Bédard: Mais il y en aura toujours un seul en
application.
Articles de droit transitoire
Le Président (M. Laberge): Article 58, adopté.
À l'article 59, il y a une modification. Ajouter à la fin de
l'article 59 après le mot "accomplies", ce qui suit: "pourvu que les
consentements requis en vertu des anciens articles 119 à 121 du Code
civil du Bas-Canada soient obtenus". M. le ministre. (16 heures)
M. Bédard: C'est un article de droit transitoire. Il
résulte des nouvelles règles relatives à l'âge pour
se marier et à l'autorisation judiciaire requise dans certains cas.
L'amendement proposé vise à préciser que les anciens
articles relatifs au consentement des parents s'appliquent si on ne recourt pas
à l'autorisation judiciaire.
Le Président (M. Laberge): Cet amendement est-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 59,
adopté avec amendement. Article 60.
M. Bédard: Cet article est également de droit
transitoire. Il résulte des nouvelles règles relatives à
l'âge requis pour se marier, aux empêchements au mariage et aux
effets du jugement prononçant la nullité du mariage.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 60 sera
adopté?
M. Bédard: Cela concerne tous les mariages
célébrés antérieurement.
M. Forget: II y a malgré tout des mariages qui pourront
être déclarés nuls, en vertu de l'ancien Code civil, dans
certains cas, postérieurement à l'entrée en vigueur du
nouveau Code civil. C'est le deuxième paragraphe.
M. Bédard: Oui. Je pense qu'il ne faut pas changer la
situation des parties parce qu'il y a eu un changement et qu'elles se sont
mariées selon certaines règles établies à ce
moment-là, de manière qu'il n'y ait pas de préjudice.
M. Forget: D'accord, adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 60, adopté.
Article 61.
M. Bédard: Cet article est de droit transitoire. Il vise
à assurer l'application immédiate des nouvelles règles
régissant les droits, libertés et devoirs des époux et la
résidence familiale.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 61, adopté.
Article 62.
M. Bédard: C'est également un article de droit
transitoire. Il maintient les anciennes règles qui régissent la
communauté de meubles et acquêts à l'égard des
personnes mariées sous ce régime matrimonial.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Le Conseil du statut de la femme a proposé de
rendre applicables aux unions qui sont réqies par la communauté
de biens, sans qu'il soit nécessaire de demander une modification du
régime matrimonial, des dispositions nouvelles qui auraient pour
conséquences que les unions en question, les unions régies par la
communauté de biens... Pardon, je m'excuse. Il demande que les personnes
qui demeurent régies par la communauté de meubles et
acquêts puissent obtenir la cogestion administrative. Cette demande du
Conseil du statut de la femme est appuyée par l'AFEAS. C'est le
régime de la communauté.
M. Bédard: Oui, c'est la communauté de biens, sans
doute.
M. Forget: Oui, d'accord. C'est la communauté de biens. On
demande que ces personnes puissent obtenir la cogestion administrative,
autrement dit, de faire cesser le caractère exclusif de la gestion du
mari sur les biens de la communauté.
M. Bédard: II convient peut-être de faire quelques
observations brèves là-dessus. II est possible, pour les
époux qui le désirent tous deux, de faire le changement de
régime en adoptant un nouveau contrat de mariage, les formalités
étant assez simplifiées, les coûts aussi, dans une large
mesure. Il est donc possible, lorsque les époux sont consentants, de
faire le changement par eux-mêmes.
Par ailleurs, quant à modifier impérativement les
règles du régime sous lequel ces gens sont mariés, il faut
se rappeler que c'est un régime dont l'administration des biens communs
est confiée actuellement au mari seul.
D'autre part, en contrepartie de cette administration qui est faite
uniquement par le mari, il y a un certain nombre d'avantages qui
découlent du régime en faveur de la femme. Par exemple, celle-ci
a droit à ses biens réservés, les biens
réservés n'étant pas évidemment une
catégorie de biens possibles pour le mari, c'est pour la femme.
Deuxièmement, parce que ce n'est pas la femme qui administrait la
communauté de biens, il y a pour elle un pouvoir de renonciation aux
avantages qui découlent, lors d'une dissolution, de partaqer les biens
communs, parce qu'il peut arriver que les biens communs soient insolvables et
que, pour elle, renoncer représente, somme toute, un moins grand mal que
de l'accepter. L'administrateur de la communauté, lui, évidemment
- et c'est assez normal - est tenu, au-delà de toutes les forces des
biens communs, donc, même sur ses biens propres en totalité.
Il y a là, de façon un peu générale, une
sorte d'équilibre que l'histoire a fait dans ce régime,
équilibre qui n'est peut-être pas parfait - je ne veux pas prendre
la défense de cet équilibre - mais qui a été fait
historiquement et on sait comment ce fut laborieux, pendant des dizaines
d'années, pour en arriver à bâtir, décennie
après décennie, certains de ces avantages ou de ces droits.
Ceci veut donc dire qu'il ne serait pas prudent, pour la femme en tout
cas, nous semble-t-il, que soit instauré impérativement un
régime de cogestion pure et simple sans qu'on procède d'abord
à la liquidation complète du régime, de façon que
la femme puisse aller d'abord et avant tout chercher tous les avantages de ce
régime auxquels elle a droit, puisqu'elle n'a pas participé
directement à son administration. Ce n'est qu'une fois qu'on aurait
procédé à la liquidation complète qu'il serait
possible de repenser une formule de cogestion. Mais, dans une formule de
cogestion, sans doute aussi faudrait-il faire disparaître les biens
réservés pour un seul, il faudrait les étendre à
d'autres. Somme toute, c'est une sorte de réaménagement
fondamental du régime que ça prendrait.
Cependant, les époux peuvent décider par eux-mêmes
de faire le changement de régime s'ils le désirent. Il y a ceux
aussi qui peut-être ne le désirent pas; ça fait partie des
choix que nous avons déjà nous-mêmes de nous marier sous
l'un ou l'autre des régimes, y compris celui d'un contrat de mariage en
communauté de biens, si on le désire.
C'est l'explication un peu résumée que je peux fournir
là-dessus.
M. Forget: Comme la réponse repose sur la
nécessité d'établir un bilan de la communauté, de
faire un partage, et aussi sur l'obligation d'avoir recours à la
procédure formelle d'un changement de régime, donc
l'établissement d'un régime conventionnel essentiellement, avec
tous les frais que cela implique, on peut conclure des remarques qu'on vient
d'entendre qu'on ne doit probablement pas s'attendre qu'il y ait une conversion
massive de ces régimes en régimes, soit de séparation de
biens, soit de communauté d'acquêts.
Je comprends le bien-fondé de l'argumentation puisque, comme il y
avait un administrateur unique, il serait normal qu'il rende compte avant que
l'autre, qui peut être la victime de son administration, n'ait pu se
compenser pour les pertes infligées à la communauté par
une mauvaise administration.
Cependant, dans les cas où les conjoints sauraient et seraient
dans la position où ce problème ne se pose pas, mais
souhaiteraient, pour d'autres motifs, assumer conjointement l'administration
des biens de la communauté qui, dans bien des cas, peut se
résumer à une chose relativement simple, est-ce qu'il ne serait
pas opportun de prévoir une procédure simplifiée non pas
de changement de régime, mais de maintien du régime de
communauté avec simplement modification, pour l'avenir, du mode
administratif d'un régime de communauté malgré tout
maintenu?
M. Bédard: Au niveau de la direction. Je pense que vous
touchez un point qui me permet de préciser. Les époux pourraient
vouloir simplement, au lieu d'un changement complet de régime avec tout
ce que comportent les conséquences de la liquidation, les coûts,
enfin, des éléments donc assez majeurs, ils pourraient s'adresser
au notaire et apporter seulement certaines modifications dont celles relatives
à la direction, s'ils la désiraient et la souhaitaient, de
façon à éviter tous les frais majeurs d'une liquidation.
Cela pourrait faire l'objet d'un contrat de modifications de certaines des
conventions du régime matrimonial sans qu'il n'y aille d'un
coût
autre que celui d'un contrat notarié qui prendrait soin de
certains de ces changements. Cela va assez bien dans le sens où cela
procède d'un choix ou d'une liberté de la part des
époux.
Du côté impératif, évidemment, imposer
peut-être une cogestion stricte et obligatoire, une liquidation
obligatoire à tout le monde en société d'acquêts,
pardon, en communauté de biens aussi. Alors que tous les autres
citoyens, eux, choisissent librement leur régime, eux l'ont choisi aussi
dans le temps. C'est peut-être un choix qui, aujourd'hui, n'a pas les
mêmes... Enfin, ils choisiraient peut-être autrement aujourd'hui,
mais ils peuvent le faire s'ils sont d'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 62 sera-t-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 63. M.
le ministre.
M. Bédard: L'article est toujours de droit transitoire et
vise à préciser que les accords amiables déjà
intervenus et les décisions judiciaires passées en force de chose
jugée échappent quant à leur effet à l'application
de l'article 501 édicté par l'article 1.
M. Blank: Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi l'accord doit
être amiable? Pas seulement un accord? Pourquoi le mot amiable? Il y a
des accords qui sont des accords, mais qui ne sont pas tellement amiables. Vous
ne pouvez pas dire actuellement des accords dits gré à
gré?
M. Bédard: Vous me prenez par surprise, mais l'expression
est courante. L'accord amiable par rapport à celui forcé en
justice ou enfin ce qui est arrêté ou entendu en justice. Je pense
que le mot n'y serait pas que les accords déjà intervenus, cela
rendrait peut-être l'idée. C'est peut-être un peu ancien
comme formule. C'est peut-être une expression un peu consacrée.
C'est la terminologie traditionnelle de la doctrine de droit civil, on peut
effectivement enlever le mot.
M. Blank: Quand on en vient au document anglais on parle de
"amicable covenant". Je n'ai jamais entendu ce mot. Pour commencer, covenant,
votre traducteur a changé "agreement" en "covenant", mais covenant, en
anglais, ce n'est pas la même chose. C'est normalement une petite partie
d'un accord. Le mot "agreement" est meilleur que le mot "covenant". Mais
"amicable covenant", cela doit vouloir dire "private agreement" peut-être
ou un accord de gré à gré. C'est cela que vous voulez
dire. Parce qu'une personne peut venir contester, ce n'était pas
"friendly" ou...
M. Bédard: Peut-être que dans la version anglaise
cela a un sens différent, mais c'est une expression qui est assez
courante, une composition amiable, c'est un accord...
M. Blank: En anglais, je suggérerais "private
agreement".
M. Bédard: Cela n'a rien d'amical, nécessairement,
mais c'est affaire.
Le Président (M. Laberge): L'article 63 sera-t-il
adopté?
Des voix: Adopté. Article 64.
M. Bédard: L'article 64 est de droit transitoire et
précise que les divorces et séparations de corps prononcés
antérieurement à l'entrée en vigueur des articles 523
à 568 édictés par l'article 1 demeurent régis par
les anciennes dispositions de la loi. (16 h 15)
Le Président (M. Laberge): L'article 64 sera-t-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle
l'article 65.
M. Bédard: C'est un article de droit transitoire. Il
maintient les anciennes dispositions à l'égard des demandes en
séparation de corps pendantes lors de l'entrée en vigueur des
articles 524 à 536 édictés par l'article 1, mais
prévoit l'application immédiate des nouveaux articles 527
à 535 édictés par l'article 1. Ce sont ceux concernant la
résidence familiale, 527 à 535.
Mme Lavoie-Roux: ... demandé de la mettre...
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Non, je me parle toute seule.
Le Président (M. Laberge): Avez-vous des commentaires?
M. Forget: Ici, M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ... il y a une opposition catégorique
exprimée par le Barreau, je
pense, à l'égard de l'article 65 qui est en
désaccord avec l'effet rétroactif de certaines mesures
relativement à des demandes présentées après
l'entrée en vigueur du nouveau code. Est-ce qu'on ne s'écarte pas
ici de la règle générale de ne pas donner d'effet
rétroactif? Est-ce qu'il y a vraiment une considération d'ordre
public qui inspire le gouvernement à...
M. Bédard: Oui, j'avais une note ici. On pense qu'au
moment où le jugement interviendra, le droit nouveau sera en vigueur, ce
sont ces cas-là qu'on vise. On se demande: Pourquoi appliquer l'ancien
droit pour liquider une situation si le droit nouveau est remédiateur,
favorise mieux les parties? À ce moment-là, on laisse un peu
subsister deux régimes de droit.
M. Forget: Oui. Il reste que je pense bien qu'il y a
peut-être un souci professionnel et on peut imaginer...
M. Bédard: Oui.
M. Forget: ... qu'un avocat qui a préparé une
demande en vertu de l'ancien code va se voir forcé de reformuler sa
déclaration dans certains cas pour s'accrocher aux nouvelles
dispositions. II y a peut-être simplement des concordances à
établir. Il se peut que la base même de son action soit
modifiée et, dans le fond, son client pourra l'accuser de l'avoir
incité à se présenter devant les tribunaux sur la base
d'un droit qui n'existe plus. C'est peut-être cette
considération-là.
M. Bédard: Probablement, si c'est à l'avantage de
son client, ça dépend...
M. Forget: Oui, mais ce sera toujours à l'avantage d'un
client et au désavantage de l'autre. Dans le fond, on change les
règles du jeu alors que les parties ont déjà
décidé d'un recours sur la base d'un droit existant. Alors
qu'elles ont déjà amorcé les procédures, le droit
change et elles peuvent se rendre compte tout à coup que la
décision qu'elles ont prise est erronée maintenant.
Peut-être se sont-elles placées dans des situations
irrémédiables sur le plan de leurs relations réciproques,
par exemple, en disant: J'ai un droit de poursuite ou j'ai le droit de
m'opposer à une poursuite, donc je prends telle et telle disposition
pratique, je suis sûr de mon droit. Alors que le jugement n'est pas
rendu, mais que les procédures sont déjà devant les
tribunaux, on lui tire le tapis sous les pieds.
M. Bédard: Je pense que c'est un sujet difficile. On peut
plaider facilement dans les deux sens. Le jugement n'est pas rendu, donc tout
n'est pas établi au niveau des effets.
Dans certains cas, il est possible que, selon la partie, selon
l'époux qui est défendeur ou demandeur, il
préférerait les anciens effets qu'on ne lui a pas encore
appliqués, parce que la séparation n'est pas prononcée; il
préférerait qu'on lui applique les anciens effets plutôt
que les nouveaux, mais l'autre voudrait qu'on lui applique plutôt les
nouveaux. Donc, il faut que ce soit l'un ou l'autre. Ou c'est l'ancien
régime qui - quant aux effets, j'entends - va subsister ou survivre
jusqu'à ce que jugement soit rendu et produise ses effets, ou alors
c'est le nouveau régime quant aux effets.
C'est sûr que les parties peuvent amender, peuvent se
désister devant la nature ou l'étendue des effets nouveaux. Je ne
sais pas s'il y a une solution qu'on pourrait appeler idéale au point de
vue technique. Il n'y a peut-être pas de solution idéale, mais il
est apparu que les effets de la séparation de corps tels
qu'énoncés dans le projet de loi no 89 marquaient une sorte de
progrès quant aux avantages qu'ils peuvent procurer à la famille
et c'est dans ce sens que cela a penché d'un côté
plutôt que de l'autre.
M. Forget: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 65 est adopté.
Article 66.
M. Bédard: Cet article est de droit transitoire. Il est au
même effet que l'article précédent à l'égard
des demandes en divorce pendantes lors de l'entrée en vigueur des
articles 537 à 568 édictés par l'article 1. Je pense que
c'est le même raisonnement, les nouvelles procédures sont de
nature à constituer une amélioration.
Le Président (M. Laberge): Article 66, adopté.
J'appelle l'article 67.
M. Bédard: C'est un article de droit transitoire
également. Il vise à permettre d'invoquer des causes de
séparation de corps ou de divorce antérieures à
l'entrée en vigueur des articles 523 à 568 édictés
par l'article 1.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 67, adopté.
À l'article 68, nous avons une demande de modification.
M. Bédard: C'est cela. Nous l'avions déjà
déposée.
Le Président (M. Laberge): Au troisième
alinéa, ajouter un "s" au mot "fait". C'est le troisième mot du
troisième alinéa, je crois, "les actes faits".
M. Bédard: C'est le quatrième mot du
deuxième alinéa.
Mme Lavoie-Roux: C'est...
Le Président (M. Laberge): Non, c'est le troisième
alinéa, je pense. Troisième parce que l'autre, c'est un
verbe.
M. Bédard: Remplacer dans le troisième
alinéa?
Le Président (M. Laberge): "Les actes faits". C'est un
adjectif. Cela va. Cela est bon. À ce moment-ci, remplacer le
quatrième alinéa par le suivant: " Les droits
héréditaires résultant de l'article 590 du Code civil du
Québec ne peuvent cependant être exercés dans les
successions ouvertes avant son entrée en vigueur sauf dans le cas d'une
substitution non encore ouverte au profit des appelés."
M. Bédard: L'article est de droit transitoire. Il
prévoit l'application des articles 569 à 590 aux enfants
nés avant leur entrée en vigueur. Il fait exception toutefois
dans le cas de successions ouvertes avant l'entrée en vigueur de
l'article 590. En effet, les héritiers sont déjà saisis au
moment du décès du de cujus, mais, en matière de
substitution, l'appelé n'est saisi de la propriété des
biens qu'à l'ouverture de la substitution. C'est en vue de tenir compte
de cette particularité qu'une modification a été
apportée à l'article 68.
Le Président (M. Laberge): Ce nouveau quatrième
alinéa sera-t-il adopté?
M. Forget: Oui, oui.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 68
modifié, adopté? Oui.
M. Bédard: Adopté? M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
Article 69.
M. Bédard: À l'article 69, il s'agit de droit
transitoire, toujours. Il maintient la procédure ancienne à
l'égard de demandes en adoption pendantes lors de l'entrée en
vigueur des articles 593 à 625 édictés par l'article 1,
sauf à appliquer les articles 616 et 618, alinéa 2,
édictés par l'article 1.
M. Forget: Quand on fait allusion aux demandes en adoption, M. le
Président, on fait allusion aux demandes en adoption dans le sens
formel, les demandes présentées à la cour. Il ne s'agit
pas des requêtes faites à des organismes de placement pour
être considérés comme parents adoptifs. Il s'agit des
demandes formelles devant la Cour supérieure.
M. Bédard: Dans le cas du premier alinéa, c'est
exact.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 69, adopté.
Article 70.
M. Bédard: L'article de droit transitoire maintient les
anciennes règles relatives à l'obligation alimentaire à
l'égard des personnes qui reçoivent une telle pension ou qui
auront agi en justice avant l'entrée en vigueur des articles 626
à 638 édictés par l'article 1. C'est le cas des
alliés, évidemment, qui ne bénéficient plus d'un
droit alimentaire.
Le Président (M. Laberge): L'article 70 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Est-ce qu'on va avoir des émeutes à ce
sujet, M. le Président, comme l'on supprime les pensions alimentaires
pour les belles-mères? Est-ce qu'on peut s'attendre à des
manifestations devant le parlement?
M. Bédard: Je ne crois pas parce que je n'ai pas
l'impression...
M. Forget: Elles ne sont pas encore regroupées. C'est
peut-être la seule raison.
M. Bédard: Je ne crois pas que c'étaient des
dispositions qui jouaient un grand rôle dans notre Code civil.
Le Président (M. Laberge): L'article 70 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Adopté. M. Bédard:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 71. M.
le ministre.
M. Bédard: M. le Président, cet article est de
droit transitoire. Il prévoit l'application immédiate de la
règle édictée par l'article 652 édicté par
l'article 1.
Il s'agit du rétablissement de l'autorité parentale.
Depuis 1977, depuis que la loi est en vigueur, il y a possiblement eu, il y a
certainement eu des déchéances d'autorité parentale. Il ne
faudrait pas qu'elles soient tout à fait définitives, mais si
elles ont été faites selon les circonstances de l'article 652,
qu'on puisse l'invoquer, même si la déchéance a
été prononcée avant l'entrée en vigueur de la
loi.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 71 est adopté.
Article 72.
M. Bédard: L'article prévoit l'application
immédiate des articles 603 et 735.1 du Code civil du Bas-Canada
édictés par les articles 25 et 31 aux successions ouvertes et non
encore liquidées.
Le Président (M. Laberge): L'article 72 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Un instant.
Le Président (M. Laberge): Parfait, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Les articles en question, 603 et 735, on dit que c'est
relatif à des successions non ouvertes. L'interdiction...
M. Bédard: Non ouvertes et non encore
liquidées.
M. Forget: Est-ce que c'est la bonne référence?
M. Bédard: Ce sont les articles 603 et 735.
M. Forget: L'article 603 du Code civil du Bas-Canada.
D'accord.
M. Bédard: C'est cela, ainsi que l'article 735.1.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 72 est adopté.
Article 73.
M. Forget: Je remarque encore une fois qu'il y a ici une
recommandation du Barreau de supprimer cet article 72 à cause des
nombreux problèmes qu'engendrerait la mise en vigueur de cet article sur
les successions non encore réglées et qui peuvent être
ouvertes depuis, vu le principe établi de la
non-rétroactivité des lois.
M. Bédard: II s'agit de l'article 73. Je m'excuse d'un
moment de distraction, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): C'est l'article 73.
M. Bédard: L'article 73, oui. Les donations qui n'ont pas
été exécutées avant le décès et qui
n'étaient pas...
M. Forget: Je m'excuse, ma remarque s'applique à l'article
72 et non pas à l'article 73. On a dit "adopté", mais avec un
certain retard, j'ai réagi à l'appel de l'article.
Le Président (M. Laberge): Parfait. C'était
à l'article 72.
M. Bédard: C'est un peu l'explication qu'on a
déjà donnée. Une demande de rétroactivité a
pour effet de faire profiter... La préférence est donnée
au droit nouveau qui peut être remédiateur, qui peut être
plus avantaqeux. C'est ce que nous croyons; nous ne l'adopterions pas
autrement.
M. Forget: Dans la mesure où on parlait des effets de la
séparation de corps et où ces mesures sont inspirées d'une
philosophie sociale nouvelle, je me suis rangé à l'opinion du
ministre sans difficulté. (16 h 301
Ici on interdit, dans les nouvelles dispositions, la renonciation par
contrat de mariage à des successions non ouvertes. L'objection du
Barreau se situe, si je comprends bien, dans les circonstances où il y a
eu un décès. La succession s'est ouverte et elle n'est pas
réglée; un des légataires a renoncé par contrat de
mariage, antérieurement au décès, il y a des
années, à cette succession qui, à ce moment,
évidemment, n'était pas ouverte. Dans le processus de
règlement, on a dû tenir compte de ce fait. On est peut-être
avancé très loin dans les procédures de règlement
de la succession, basées sur la renonciation d'un des légataires
et voici que, tout à coup, à la onzième heure, ses ayants
droit ou peut-être lui-même entrent dans le tableau et la
renonciation qu'il avait faite de cette succession est soudainement
caduque...
M. Bédard: Contrairement à ce qui était le
cas par son contrat de mariage.
M. Forget: ...contrairement à ce que tout le monde a
présumé et les autres légataires et le notaire,
l'exécuteur testamentaire, peut-être même certains jugements
intérimaires ou Dieu sait quoi. Enfin, c'est peut-être un cas qui
se présentera, mais comme on se donne la peine de prévoir une
disposition transitoire, est-ce que c'est sage? Parce que, dans le fond, on
réflète, bien sûr, une nouvelle philosophie sociale
où il n'est plus coutumier ni recommandable de renoncer par contrat de
mariage à des successions non ouvertes pour les raisons qu'on
connaît bien. Il y a l'évolution des mentalités. On ne
règle pas des problèmes de patrimoines familiaux, de transmission
d'une génération à l'autre, par des contrats de mariage,
contrairement à ce qu'on faisait au XIXe siècle. Il reste que
ceux qui l'ont fait peuvent se trouver dans une situation extrêmement
délicate.
M. Bédard: Dans le cas de l'article 72, auquel vous vous
référez sans doute...
M. Forget: Oui.
M. Bédard: ...je voudrais que ce soit certain que nous en
comprenions tous ensemble en même temps la portée. Il s'agit
uniquement des dispositions de l'article 603 qui concerne les comourants et de
l'article 735.1 qui concerne la prestation compensatoire.
M. Forget: Alors, l'indication qu'on nous a donnée tout
à l'heure n'était pas...
M. Bédard: Elle se rapporterait peut-être à
un autre article. Est-ce que c'est possible de vérifier cela? Elle ne se
rapporterait probablement pas à celui-ci.
M. Forget: Je n'ai pas eu le temps de faire la
référence, je m'excuse.
M. Bédard: Je crois que j'avais la même
référence moi aussi.
M. Forget: On nous avait parlé de la renonciation à
la succession non ouverte.
M. Bédard: Oui, alors, ici, ce que cela pourrait amener
c'est l'application de l'article 735.1, c'est-à-dire que le conjoint
puisse faire valoir une prestation compensatoire pour l'exiger en paiement, si
la succession est ouverte. Mais on suppose qu'elle n'est pas encore
liquidée. Là, il y a un article aussi que je voulais trouver.
J'avais la même remarque du Barreau indiquée à
l'article 72, comme le député de Saint-Laurent, mais cela ne
semble pas concorder.
M. Forget: L'article 603 du nouveau Code civil du Bas-Canada,
c'est la présomption des comourants.
M. Bédard: C'est la présomption des comourants.
C'est par rapport au partage. Il est certain que s'il y a eu des acceptations
-c'est un problème assez complexe, au fond -déjà sans
qu'il y ait une liquidation de la succession et que là, à cause
de l'application de la règle des comourants, ce sont d'autres qui
prennent la succession, je pense aussi que les héritiers, en vertu de
l'application d'un article concernant la succession, vont pouvoir invoquer
"fait nouveau lésionnaire". Ils vont dire: Nous avions accepté...
C'est l'article 650 que je cherchais justement. On dit: "Le majeur ne peut
attaquer l'acceptation expresse ou tacite qu'il a faite d'une succession que
dans le cas où cette acceptation a été la suite du dol, de
la crainte ou de la violence; il ne peut jamais réclamer sous
prétexte de lésion seulement; il en est autrement dans le cas
où la succession se trouverait absorbée ou notablement
diminuée par la découverte d'un testament inconnu au moment de
l'acceptation."
Évidemment, ici, ce n'est peut-être pas un testament
inconnu, mais c'est une disposition qui n'était pas en vigueur et qui
est sûrement inconnue. Il pourrait invoquer lésion. Je ne sais pas
si l'article 650 aurait besoin d'être touché pour élargir
cette ouverture à la lésion. On pourrait regarder s'il y a lieu
de proposer un amendement à 650, parce qu'au fond l'héritier qui
a accepté se retrouvera devant une situation possible, par l'application
de 735.1, où le conjoint, en supposant que ce n'est pas lui qui est
l'héritier, bien sûr, présente une preuve suffisante au
tribunal d'un apport à l'enrichissement de l'actif et que si on ajoute
cette dette à celles qui sont déjà connues de
l'héritier, cela a pour effet d'entraîner une insolvabilité
de la succession au point que s'il avait connu cette dette nouvelle, il aurait
renoncé; alors il faut qu'il puisse revenir sur son acceptation. Je
pense qu'il y a là quand même une précision à
apporter dans le sens plutôt de...
M. Forget: Oui. Sous cette réserve, je pense qu'on peut
l'adopter. J'imagine qu'on va veiller à ce que...
M. Bédard: Oui, on va y réfléchir un
moment.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Article 72, adopté.
Article 73?
M. Bédard: L'article 73 vise tout simplement à
donner effet immédiatement à l'article 33.
C'est l'abrogation de 768. Il faudra aller voir 768. À l'article
768, c'est la prohibition ou l'interdit, si vous voulez, qui frappait les
concubins ou certaines catégories d'enfants naturels qui ne pouvaient
pas recevoir autre chose que des aliments. Cet interdit étant
levé, ils deviennent des citoyens à part entière qui
peuvent, comme tous les autres, faire les contrats qui ne sont pas contraire
à l'ordre public, bien sûr, mais ils peuvent faire toutes les
conventions qui sont dans les limites permises.
Le Président (M. Laberge): L'article 73 est-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 73, adopté.
J'appelle l'article 74. Il y a des modifications qui nous ont été
suggérées à l'article 74.
Mme Lavoie-Roux: À l'article 74, il y avait une petite
remarque qui avait été faite.
M. Bédard: À l'article 74, M. le Président,
j'aurais une remarque à faire. On parlait d'un délai de six mois,
mais je crois qu'il y aurait avantage à prolonger ce délai
jusqu'à facilement un an parce que cela peut quand même prendre du
temps avant qu'on connaisse la loi. Afin de ne prendre personne par surprise,
autrement dit, être sûr que chacun...
M. Blank: II s'agit des gens... C'est maintenant $50 pour changer
de nom. Est-ce qu'ils vont les charger aussi?
Une voix: Avec le déficit, je pense qu'il ne sera pas bon
de les charger.
M. Bédard: Mais non, ce sont uniquement des avis.
M. Blank: L'exemption des avis. Je ne parle pas des exemptions
des honoraires.
M. Bédard: Non, cela va être dans la
réglementation. Avant, cela se faisait par une requête. Ce n'est
pas du tout la même procédure.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense que l'allonger
à un an c'est déjà très bien. Je me demandais si
cela ne devrait peut-être pas... Sans aller à trois ans comme
quelqu'un avait suggéré, est-ce que...
M. Bédard: Cela va être la même chose. Disons
deux ans.
Mme Lavoie-Roux: Deux ans, parce qu'il peut y avoir des querelles
entre les parents et avant que... Ils peuvent être...
M. Bédard: Cela va être la même chose. Deux
ans au lieu de six mois.
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas sur le nom. Il peut y avoir
d'autres conflits qui sont à se liquider et que cela soit mis un peu de
côté. Deux ans.
M. Bédard: J'étais disposé à le
prolonger à deux ans. On est sûr qu'on ne prend personne par
surprise.
Le Président (M. Laberge): C'est à la
deuxième ligne...
M. Forget: M. le Président, est-ce que le ministre ne nous
suggérerait pas aussi une correction pour enlever "patronymique".
Mme Lavoie-Roux: Ah oui!
M. Bédard: On l'a ici. Cela va de soi.
Le Président (M. Laberge): On a au moins quatre
amendements. Au premier amendement, le ministre nous suggère de changer,
à la deuxième ligne du premier alinéa, les mots "six mois"
par "deux ans". Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Forget: Adopté. Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Laberge): Je marque bien "deux ans".
Adopté. Le deuxième amendement: supprimer, aux quatrième
et cinquième lignes, le mot "patronymique". Est-ce que c'est
adopté?
M. Bédard: Tout le monde est d'accord.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
Le troisième amendement: remplacer, à la fin du premier
alinéa, les mots "des noms de chacun d'eux" par les mots "des noms de
ses père et mère".
M. Forget: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): C'est à la fin du
premier alinéa. C'était marqué "des noms de chacun d'eux",
mais c'est "du nom de chacun d'eux".
M. Bédard: Non, c'est "des noms de ses père et
mère".
Le Président (M. Laberge): Je veux dire...
M. Bédard: Ah! "Du nom de chacun d'eux" par "des noms de
ses père et mère".
Le Président (M. Laberge): Cela veut dire provenant des
noms de ses père et mère. Alors, on remplace les mots, à
la fin du premier alinéa, "du nom de chacun d'eux" par "des noms de ses
père et mère". Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Quatrième
amendement: remplacer, à la troisième ligne du deuxième
alinéa, le mot "exemptés" par le mot "dispensés". Dans la
phrase, les requérants sont...
M. Bédard: Ce n'est pas à la quatrième
ligne?
Le Président (M. Laberge): ... exemptés, cela
devient sont dispensés.
M. Bédard: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Bédard: Adopté. M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 74
amendé sera-t-il adopté? Il compte quatre amendements, sera-t-il
adopté? Les amendements consistant...
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): ... à changer "six mois"
par "deux ans", enlever le mot "patronymique", remplacer "du nom de chacun
d'eux" par "des noms de ses père et mère" et le mot
"exemptés" remplacé par "dispensés". L'article 74 est
adopté avec les amendements. Après l'article 74, on nous demande
d'ajouter l'article 74.1.
M. Bédard: C'est cela.
Le Président (M. Laberge): II se lit comme suit: "Les
époux mariés, avant l'entrée en vigueur de la
présente loi, peuvent, s'ils le désirent, conserver l'usage du
nom de leur conjoint".
M. Bédard: C'est de manière à suivre la
philosophie générale qu'on a adoptée jusqu'à
maintenant, celle d'éviter que toute personne puisse être
lésée par les changements édictés dans le Code
civil par rapport à des situations déjà existantes. Cela
va?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 74.1 est
adopté. J'appelle l'article 75.
M. Bédard: Avant l'article 75, M. le
Président...
Le Président (M. Laberge): Oui, c'est vrai, il faudrait
revenir.
M. Bédard: C'est le dernier article.
M. Marx: M. le Président, l'article 75 nous indique que la
loi est constitutionnelle. C'est cela, la portée de l'article 75.
Mme Lavoie-Roux: On te laisse la discussion. On laisse la
discussion au député de D'Arcy McGee.
M. Bédard: Cela a le mérite d'être
correct.
M. Marx: Cela veut dire...
M. Bédard: Avant de commencer...
M. Marx: ...pour faire une prédiction, pour le journal des
Débats...
M. Bédard: Vous allez avoir l'occasion...
M. Marx: ... je ne sais pas si cette loi sera jamais mise en
vigueur.
M. Bédard: Je ne suis pas inquiet, elle sera mise en
vigueur.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président... M. Bédard:
Cela prend un peu...
M. Marx: Vous ne savez même pas quels articles sont
constitutionnels et lesquels sont inconstitutionnels.
M. Bédard: Cela, le député ne le sait
peut-être pas, mais je peux l'assurer que l'étude, avec toutes les
précautions nécessaires, en sera faite. Il y a peut-être
une manière de régler rapidement l'adoption de cette loi
dès demain matin, c'est que le fédéral nous donne
simplement les pouvoirs demandés depuis moult années non
seulement par le gouvernement actuel, mais par les autres gouvernements.
M. Marx: Maintenant que vous avez fait votre "speach", que vous
avez fait votre discours politique, c'est le discours juridique.
M. Bédard: Pourquoi le député m'en
donne-t-il la chance?
Le Président (M. Laberge): On va revenir en
arrière? Avez-vous un commentaire?
Mme Lavoie-Roux: Je veux poser une question et ça pourrait
être à la toute fin. Je comprends qu'il y a des articles qui ne
pourraient pas s'appliquer; par contre, un chapitre comme celui de la filiation
et de l'adoption, est-ce que cela pourrait être proclamé sans
attendre de modifications à la constitution?
M. Bédard: Avant d'y aller, je
préférerais...
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas encore eu votre avis sur la
constitutionnalité de votre vote?
M. Bédard: Nous y sommes quand même allés de
pas mal d'amendements et je préférerais - et je pense que
personne ne m'en fera reproche ici - comme ministre de la Justice, prendre
toutes les précautions juridiques avant de répondre seulement
avec mon coeur, qui voudrait que dès demain ce
soit tout appliqué. (16 h 45)
Mme Lavoie-Roux: Absolument pas, M. le ministre, loin de nous une
telle pensée!
M. Bédard: Je pense que c'est le désir de tous les
membres de la commission; alors j'essaierai d'y aller, lors du discours de
troisième lecture, de remarques très précises.
Mme Lavoie-Roux: Cela vous donnera le temps de vérifier
ça.
M. Bédard: Je pense que tout le monde est d'accord que les
problèmes que nous allons rencontrer sont des problèmes que
rencontrerait n'importe quel gouvernement.
M. Marx: Le problème c'est que les dispositions valides
sont entremêlées avec les dispositions non valides; c'est
là le problème et ce sera très difficile à
résoudre.
M. Bédard: Ce n'est pas le seul problème parce
qu'il y a bien des chapitres où il peut y avoir déjà des
doutes. Je partage la même préoccupation que le
député, il peut y avoir des doutes. Alors, je pense qu'on ne me
reprochera pas, avant d'y aller d'assertions, du point de vue juridique, de
prendre toutes les précautions nécessaires.
Je voudrais revenir à...
Le Président (M. Laberge): À l'article 424?
M. Bédard: On serait peut-être mieux d'aller
à... Nous allons déposer tous les amendements concernant et la
séparation de corps et le divorce.
Le Président (M. Laberge): Tout ce qui a été
préparé.
Des causes de divorce
M. Bédard: Je pense que nous aurions avantage à
commencer l'étude par l'article 538, puisque le chapitre concernant la
séparation de corps y fait référence.
Le Président (M. Laberge): L'article 538, ce sont les
causes.
M. Bédard: La nouvelle formulation de 538, M. le
Président, c'était pour répondre, nous l'espérons,
à l'essentiel de la discussion et des conclusions que nous avons
énoncées autour de la table, à l'occasion des
interventions que nous ne reprendrons pas.
Le Président (M. Laberge): Ce que nous avions
laissé en suspens, les articles 538, 538.1 et 538.2, qui ont
été lus à la commission, je déclare qu'ils sont
remplacés par de nouveaux articles dont je donnerai lecture.
Nous allons d'abord commencer par 538; j'en donne lecture, je pense
qu'ils ont été portés à votre attention. 538. "Les
époux mariés depuis au moins un an qui soumettent à
l'approbation du tribunal un projet d'accord qui règle les
conséquences de leur divorce peuvent le demander sans avoir à en
faire connaître la cause. "Le tribunal prononce alors le divorce s'il
considère, après avoir entendu les époux et
vérifié la réalité des consentements, que l'accord
préserve suffisamment les intérêts de chacun d'eux et des
enfants."
Est-ce que ce nouvel article 538 sera adopté?
M. Bédard: On voulait faire référence aux
enfants aussi.
Le Président (M. Laberge): On n'a pas à
vérifier la réalité aussi.
M. Forget: Juste pour être sûr que l'on comprend bien
le sens de cet amendement à 538, la réalité des
consentements amène ou amènerait le tribunal à faire quel
genre de vérification, par rapport à d'autres cas où la
qualité des consentements peut être mise en doute? Est-ce que l'on
veut simplement vérifier l'existence d'une déclaration formelle
ou si on va au-delà de l'expression...
M. Bédard: Le mot "réalité" va plus loin que
le mot "existence", c'est-à-dire qu'il faut que ce soient des
consentements, non pas seulement formellement existants, mais substantiellement
existants, par conséquent qui n'ont pas fait l'objet de crainte, de dol
ou de violence.
M. Forget: Je vois. C'était l'intention que nous
poursuivions; nous sommes d'accord avec cet amendement, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 538 est
adopté. Article 538.1. 538.1 "La volonté de maintenir le lien du
mariage est présumée irrémédiablement atteinte
lorsque les époux ont vécu séparés pendant au moins
deux ans immédiatement avant la demande. "Cependant, lorsque la
séparation résulte de la décision d'un époux de ne
plus faire vie commune, de son absence ou de son emprissonnement,
l'époux à qui la séparation est imputable ne peut demander
le divorce qu'après trois ans de séparation. Néanmoins,
les époux peuvent toujours avant l'expiration des délais
prévus au présent article invoquer la présomption qui
découle de l'article 538.2."
M. Bédard: Concernant les délais, en ce qui me
regarde, je n'avais aucune objection à ce que les deux ans soient
réduits à un an.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, je dois d'abord saluer les
efforts de rédaction des conseillers du ministre et dire que même
si nous avons quelques réserves à exprimer -que nous pensons
sérieuses, d'ailleurs - il reste que nous nous acheminons vers quelque
chose de valable. Mais il y a, me semble-t-il, une confusion entre deux
éléments. À l'article 538.1, la présomption
réfutable, qui est un moyen de preuve - non pas irréfragable -
est la base même de la demande du divorce et le deuxième
alinéa de l'article 538.1 transforme la présomption de fait en
une cause, semble-t-il, du moins, péremptoire de divorce même pour
la partie qui est fautive. Cela va au-delà de ce que nous visions. Sous
réserve évidemment des difficultés de s'exprimer, de se
faire comprendre là-dessus, nous visions, à l'article 538, le cas
du consentement étant mis de côté...
M. Bédard: M. le Président, est-ce que je pourrais
demander la suspension pour cinq minutes?
M. Forget: Sûrement.
Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses
travaux pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 53)
(Reprise de la séance à 17 h 11)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames,
messieurs!
La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux. Nous
étudions l'article 538.1 qui a été lu tout à
l'heure.
M. Bédard: Nous aurions une petite...
Le Président (M. Laberge): Un petit amendement... Une
petite correction.
M. Bédard: Un amendement de conséquence parce que
je pense que dans la rédaction, sans le vouloir, ce serait à
l'article 538, au deuxième alinéa...
Le Président (M. Laberge): L'article 538.1
M. Bédard: À l'article 538.1, au deuxième
alinéa, à la quatrième ligne...
Le Président (M. Laberge): Oui.
M. Bédard: Après le mot "peut", changer les mots
"demander le divorce" par les mots "invoquer la présomption".
Le Président (M. Laberge): C'est noté. À la
quatrième ligne du deuxième alinéa, après le mot
"peut", enlever les mots "demander le divorce" et remplacer par "invoquer la
présomption..."
M. Bédard: "...qu'après trois ans de la
séparation."
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cet amendement sera
adopté?
M. Forget: La présomption ou la présomption de
l'alinéa précédent?
M. Bédard: On est en train de dire qu'il serait
peut-être prudent de faire... Alors, allons-y.
M. Forget: Oui, parce qu'il y a plusieurs présomptions
dans plusieurs articles.
M. Bédard: La présomption de l'alinéa
précédent.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): La présomption de...
M. Bédard: ... de l'alinéa précédent,
ça va comme ça. On ne peut pas se tromper.
Le Président (M. Laberge): L'amendement se lit donc comme
suit: "Invoquer la présomption de l'alinéa
précédent." Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 538.1
amendé sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
J'appelle l'article 538.2.
M. Bédard: 538.2 est-il adopté? M. Forget:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 538.2 est
adopté. J'appelle l'article 538.3.
M. Bédard: II n'y a pas de remarques spéciales.
M. Forget: Adopté.
M. Bédard: Peut-être conviendrait-il de mettre un
trait d'union entre non et consommation. Ce n'est pas une modification
d'un adjectif, c'est une modification d'un nom et, par
conséquent, il faudrait un trait d'union entre non et consommation.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Le trait d'union est
ajouté et l'article amendé est adopté.
M. Forget: II est remarquable, M. le Président, que nous
adoptions unanimement un trait d'union dans les articles relatifs au
divorce.
M. Bédard: C'est qu'au-delà des sujets difficiles
on trouve le moyen de ...
Le Président (M. Laberge): C'est noté.
M. Bédard: ... s'unir pour trouver la meilleure
manière.
M. Forget: Oui, 545, 556.
Le Président (M. Laberge): Un moment, s'il vous
plaît:
Mme Lavoie-Roux: C'est un vote en Chambre.
M. Blank: C'est un vote ou un quorum?
M. Bédard: Si c'est un vote ça va sonner plus
longtemps, on va attendre un peu.
Le Président (M. Laberge): Ça
complète...
M. Bédard: On peut s'informer.
Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses
travaux pour l'appel de la Chambre, et ce n'est pas l'appel de la race.
(Suspension de la séance à 17 h 151
(Reprise de la séance à 17 h 38)
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, mesdames et
messieurs! La commission parlementaire de la justice reprend ses travaux.
M. Bédard: Avec votre permission, M. le Président,
j'aimerais qu'on puisse retourner à l'article 72 pour y ajouter un
alinéa qui tiendrait compte de certaines remarques qui ont
été faites cet après-midi.
Le Président (M. Laberge): L'article 72 ayant
été adopté, avec le consentement unanime des membres, il
est ouvert pour ajouter...
M. Bédard: L'alinéa suivant qui se lirait comme
suit: "Toutefois, l'héritier qui a déjà accepté la
succession peut néanmoins y renoncer dans l'année qui suit
l'entrée en vigueur des articles 603 ou 735.1 du Code civil si ces
articles trouvent application quant à la succession qu'il a
acceptée."
M. Forget: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Cela va. Cet amendement est
adopté et l'article 72 se trouve donc adopté tel
qu'amendé.
M. Bédard: Nous allons continuer où nous
étions...
Le Président (M. Laberge): Nous étions à
72.
M. Forget: 524, 525.
M. Bédard: Nous avions trois articles en suspens. C'est
cela?
Le Président (M. Laberge): L'article 72 ayant
été adopté, nous revenons à l'article 524 du
nouveau Code civil, donc à l'article 1 du projet de loi.
L'article 524 a été suspendu; on nous demande de le
remplacer par l'article qui suit: "II est réputé en être
ainsi notamment dans les cas prévus par les articles 538.1 à
538.3 ou lorsque les époux ou l'un d'eux rapportent la preuve d'un
ensemble de faits rendant intolérable le maintien de la vie
commune."
Est-ce que ce nouvel article...
M. Bédard: Excusez-moi, M. le Président. Avant de
revenir à la séparation de corps, je voulais fermer tous les
articles concernant le divorce parce qu'il y a des
références...
Le Président (M. Laberge): Je m'excuse. Oui, je sais qu'on
a...
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Nous suspendons l'article 524
que je viens de lire pour retourner à l'article 545, je crois. Oui,
l'article 538 ayant été adopté, et 538.1, 538.2 et 538.3,
l'article 545 est ouvert.
M. Bédard: Est-ce que c'est pour les frais de justice?
Le Président (M. Laberge): Oui. La question sur les frais
de justice.
M. Bédard: Nous proposerons peut-être "frais de
l'instance". C'est une précision qui
avait été demandée. M. Forget: Oui.
Le Président (M. Laberge): Je fais donc la correction.
M. Bédard: Au lieu de frais de justice...
Le Président (M. Laberge): Le mot "justice" est
changé par "l'instance".
M. Bédard: II faudra mettre "les" devant "frais"
maintenant, "pour les frais de l'instance".
Le Président (M. Laberge): Cela va. L'article 545 se lira
comme suit: "Le tribunal peut ordonner à l'un des époux de verser
à l'autre une pension alimentaire provisoire ou une provision pour les
frais de l'instance." Est-ce que cet article...
M. Bédard: C'est bien "et", "et une provision"?
Le Président (M. Laberge): Oui, j'espère que je
l'ai dit, "provisoire et une provision". Cet article 545 amendé
sera-t-il adopté?
M. Bédard: Adopté.
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec amendement.
Nous passons donc à l'article 556.
M. Bédard: Nous avions un amendement à cet article
que nous avons communiqué.
Le Président (M. Laberge): 556. Je ne l'ai pas.
M. Bédard: Vous l'avez là.
Le Président (M. Laberge): Je ne l'ai pas, moi.
M. Bédard: Je peux vous le donner, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): Oh, je l'ai! Pardon. D'accord.
Il était avec l'article 545. 556, remplacer l'article par le suivant:
"Le divorce éteint le droit qu'avaient les époux de se
réclamer des aliments, à moins que, sur demande, le tribunal, au
moment où il prononce le divorce, n'ordonne à l'un des
époux de verser les aliments à l'autre ou ne réserve le
droit d'en réclamer." Ce nouvel article 556 sera-t-il adopté?
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ...nous aimons mieux cette formulation sur le plan
d'une intelligence des intentions de mettre fin à la relation de
dépendance entre les époux au moment du divorce, sauf pour ce qui
est des mesures transitoires; mais, précisément au niveau du
langage ici et aussi au niveau des objectifs visés par le maintien de
cette obligation alimentaire, puisque c'est le terme qui est retenu, pour
l'instant, du moins, on ne va pas dans le sens que nous avions indiqué
et qui avait été réclamé, je pense, par un bon
nombre de groupes féminins. Je pense, encore une fois, qu'il ne s'agit
plus d'une obligation alimentaire. Il s'agit de quelque chose d'autre
déterminé en fonction d'autres critères et il eût
été souhaitable, pour bien faire la démarcation, que ce
nouveau type d'obligation soit désigné sous un autre nom, quitte
à ce que certaines des dispositions relatives aux obligations
alimentaires lui soient appliquées. Je pense que, dans la mesure
où c'est versé sous forme de pension, l'indexation pourrait
être appliquée, certaines règles, sélectivement
pourraient être appliquées. Mais il faudrait bien remarquer qu'il
s'agit là de quelque chose d'autre et d'une nouvelle relation
financière entre les exconjoints. (17 h 45)
En outre, nous avions suggéré que les intitulés des
sections qui traitent des effets du divorce fassent une meilleure distinction
entre les effets sur le patrimoine, consignés à cinq articles au
début du chapitre troisième, les effets à l'égard
des époux, et finalement, les effets à l'égard des tiers
et des enfants, l'avantage de ceci étant de bien montrer que les
articles 552, 553, 554 et 555 appartiennent à une catégorie de
considérations, ce que nous avons appelé globalement le
redressement des actifs, le redressement des patrimoines; les autres, à
partir de l'article 556, qui traitent des obligations dites alimentaires, pour
se comprendre, il faut dire qu'il s'agit là de considérations
différentes, basées sur des critères différents.
Autrement, j'ai l'impression que, s'il n'y a pas cette démarcation, il y
aura toujours une certaine confusion entre ce qui est versé au titre de
la prestation compensatoire de l'article 555 et ce qui est versé au
titre de la pension alimentaire de l'article 556 ou de ce qui prendrait la
place de la pension alimentaire. Je pense qu'il y a là une confusion qui
ne devrait pas s'établir. Ce sont deux séries de
considérations bien différentes.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai rien à ajouter. Je l'avais
déjà soulevé la semaine dernière, je pense. Je l'ai
soulevé dans mon discours de deuxième lecture. Je rejoins
l'argumentation du député de Saint-Laurent, que, dans le
cas du divorce, on modifie le terme "aliments".
M. Bédard: On a modifié... de simplement modifier
le terme, d'accord.
Il est vrai qu'il y a certaines différences entre ce qu'on
pourrait appeler le règlement des intérêts financiers des
époux et la question qui concerne les aliments. Néanmoins, je
pense que dans tous les cas, on a affaire tout de même à des
dispositions financières ou des dispositions qui vont se traduire de
façon financière. C'est pour cela qu'il nous a semblé tout
de même que cette distinction, qui effectivement peut être faite
à certains égards, ne méritait peut-être pas de
passer exactement dans la section I, ne méritait peut-être pas
deux paragraphes qui sépareraient ces questions. Tout de même, je
crois que cela se traduit toujours par des évaluations
financières.
M. Forget: Pour préciser ma pensée, M. le
Président, lorsque nous parlons de prestations compensatoires, à
l'article 555, quand le tribunal est amené à
réévaluer la contribution qu'un conjoint a pu apporter
financièrement ou par ses services, il regarde essentiellement le
passé. Le mariage vient à son terme et il se dit: Étant .
donné la contribution respective des deux conjoints à
l'accroissement, à l'enrichissement du patrimoine, quelles dispositions
doivent être prises pour placer, au moment de la dissolution et compte
tenu de ce qui s'est passé avant la dissolution, les deux parties dans
une situation équitable, compte tenu de leur contribution, compte tenu
de l'enrichissement et compte tenu de ce qu'ils ont pu anticiper au niveau des
donations entre vifs qu'ils se sont consenties au moment du mariage? On corrige
tout cela et on dit: Compte tenu de leur contribution respective, compte tenu
de l'enrichissement du passif, voici comment ils devraient se partager l'actif
qui existe à la date où le mariage vient à dissolution par
divorce. C'est une chose. Il est important que ce soit fait. On corrige, en
quelque sorte, le passé en fonction de ce qui s'est passé avant
la dissolution. Mais il y a aussi tout l'avenir. Relativement au futur, nous
disons - c'est plus clair - dans l'article 556: que les conjoints n'ont plus
l'obligation de se faire vivre l'un l'autre, selon leurs capacités et
selon leurs besoins. Cette solidarité entre les conjoints cesse, ils ne
sont plus mariés. Cependant, la situation de fait de l'un des conjoints,
au moment du mariage, peut être telle que ce conjoint est incapable
d'assumer seul, sans aide, les responsabilités qui lui incombent
désormais seul, comme indidividu indépendant. Ceci peut
être fonction du fait que l'un des conjoints n'a pas une capacité
de gain autonome à cause du mariage, etc.
Mais il reste qu'au moment où on porte le jugement, on constate
un défaut de capacité de subvenir à ses besoins. Les
mesures qui sont prises à ce moment-là pour l'avenir visent
à corriger ce défaut. Il s'agit de mesures qui cherchent à
corriger ce défaut dans la capacité de gain, qui cherchent
à rendre autonome le plus rapidement possible cet autre conjoint et qui,
dans l'intérim, lui permettant de subvenir à ses besoins. Mais il
ne s'agit plus du même genre d'obligation. Il ne s'agit plus du
même genre de besoins. Il ne s'agit plus du même genre de
problème à résoudre.
En disant: Ce sont toutes des considérations financières,
oui, je veux bien, comme l'ensemble du code est un ensemble de
considérations juridiques. Ce n'est pas pour cette raison-là
qu'on supprime tous les intitulés en disant: C'est du droit. II n'y a
pas plus d'homogénéité dans les conditions
financières qu'il n'y en a dans les conditions juridiques. Certaines
dispositions sont prises pour atteindre un but. Certaines autres dispositions
sont prises pour atteindre un autre but. Elles sont toutes aussi distinctes,
que toutes les distinctions juridiques qu'on voudra faire, même si, du
point de vue du droit, ce ne sont que des considérations
financières; de la même façon, vis-à-vis des
considérations financières, toutes les considérations
juridiques tombent dans le même panier. Mais je pense qu'on ne s'aide pas
en faisant cette confusion-là. D'autant plus que je crois qu'on attire,
à juste titre, l'attention du législateur sur le besoin. Par
exemple, si l'un des conjoints veut régler son problème
d'indépendance retrouvée en demandant une assistance
financière temporaire pour permettre le recyclage, la formation
professionnelle, retourner aux études, par exemple, il ne s'agit pas
d'une obligation alimentaire à proprement parler. Il s'agit de quelque
chose qui va être déterminé en fonction d'un besoin bien
précis de retrouver l'autonomie et de retrouver ou augmenter une
capacité de gain. Il n'est pas du tout sûr que cela tombe sous la
définition normale, surtout après divorce, de l'obligation
alimentaire. C'est une chose qui va devoir être payée à un
rythme différent pour une période différente de
l'obligation permanente de subvenir aux besoins du conjoint, qui sont les
besoins ordinaires de la vie courante.
Il me semble que ce serait plus clair si on faisait cette distinction.
Cela correspondrait, je pense, à ce qu'un grand nombre de femmes, en
particulier, se posent comme question au moment de la dissolution du
mariage.
M. Bédard: M. le Président, nous allons nous
accorder quelques moments de réflexion. Peut-être qu'il y a
possibilité de sous-sections. Pour ce qui est du mot
"alimentaire", je pense qu'on ne doit pas simplement chercher à
changer les mots pour les changer. Ce n'est pas cela qui change
nécessairement les réalités. Je pense que justement avec
le contenu du code tel qu'il est, même en gardant l'appellation
d'aliments, à ce moment-là, il peut prendre une signification, il
va prendre nécessairement une signification différente. Cela fait
partie de l'évolution de la signification des mots.
Pour ce qui est de diviser en deux sections pour que ce soit plus
intelligible, nous avons fait part de nos réserves. Il y a,
peut-être, néanmoins, une possibilité d'avoir un paragraphe
premier qui s'appellerait "Du règlement des intérêts
financiers des époux" et un second qui pourrait s'appeler "Des effets du
divorce quant aux aliments". Il resterait à déterminer l'endroit
où nous mettrions "Du règlement des intérêts
financiers", car l'article 552 mêle un peu les effets personnels du
divorce et certains effets patrimoniaux avec la dissolution du régime
matrimonial.
M. Forget: Oui, cela pourrait être placé directement
après le 552, après l'intitulé du chapitre. Les effets du
divorce et les effets patrimoniaux comme tels commenceraient à 553, si
c'est là une source de problèmes.
M. Bédard: D'accord.
M. Forget: Effectivement, c'est à 553 que commencent les
dispositions proprement patrimoniales.
M. Bédard: C'est cela. Il est dix-huit heures, M. le
Président. On pourra commencer avec cela.
Le Président (M. Laberge): Sur ce, mesdames et messieurs,
la commission parlementaire de la justice ajourne ses travaux à 20
heures.
M. Bédard: À 20 heures. (Suspension de la
séance à 17h 55)
(Reprise de la séance à 20h22)
Le Président (M. Laberge): La commission permanente de la
justice reprend ses travaux qui consistent à étudier article par
article le projet de loi no 89.
Nous en sommes à l'étude de l'article 556 pour lequel on
nous propose de remplacer l'article par le suivant: "Le divorce éteint
le droit qu'avaient les époux de se réclamer des aliments,
à moins que, sur demande, le tribunal, au moment où il prononce
le divorce, n'ordonne à l'un des époux de verser des aliments
à l'autre ou ne réserve le droit d'en réclamer."
Je pense qu'il y a déjà eu un bout de discussion
là-dessus.
Est-ce que cet article 556 sera adopté?
M. Forget: Je n'ai rien d'autre à ajouter, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Article 556?
Le Président (M. Laberge): Article 556. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, si vous n'avez pas
d'objection, il y aurait deux sous-sections...
Le Président (M. Laberge): Vous voulez dire des... Ah oui,
à intercaler.
Si vous voulez bien, on va fermer 556. Est-ce que vous fermez l'article
556, pendant qu'on y est?
M. Bédard: Au niveau de l'Opposition, on a parlé
beaucoup de la prestation compensatoire ou de mesure compensatoire aux fins de
remplacer ce qui est à définir, ce qu'on appelle "aliments", en
language juridique. Il me semble, M. le Président, qu'il ne faudrait pas
donner à la notion d"'aliments" la signification négative qu'on
peut avoir. Que ce soit de prestation ou de mesure compensatoire, je crois
qu'on parle d'un concept qui n'est pas précis. On peut parler d'une
énumération possible qui risque d'être limitative et
incomplète, alors que le terme "aliments" est un terme dont la
signification est connue non seulement du point de vue juridigue, mais
également connue, je dirais même, du point de vue populaire. Je
ferai remarquer en passant que toutes les provinces canadiennes utilisent des
nations correspondantes en parlant de "maintenance", d"'alimony". Autrement
dit, c'est un terme qui a une signification non seulement juridique et
populaire, mais qui est étendu à l'ensemble des provinces
canadiennes. En France, on a fait, en 1975, la révision du Code civil;
ça ne remonte quand même pas si loin que cela. On emploie
très expressément la notion d'aliment, de pension alimentaire.
Cela n'a absolument aucune connotation négative comme certains
essaieraient de le faire croire.
J'aime autant dire ce que je pense, il y a un bout à charrier de
ce côté-là. On a essayé de faire des innovations.
Quand on regarde l'ensemble de la philosophie du nouveau Code civil du
Québec, à un moment donné, les mêmes mots peuvent
peut-être, dans le passé, avoir eu une connotation moins positive
mais ils peuvent, en fonction de l'avenir, avec une nouvelle philosophie,
prendre une connotation beaucoup plus positive.
En France, je l'ai dit tout à l'heure... Peut-être que nos
experts pourront ajouter quelques mots par rapport aux recherches qu'ils ont eu
à faire avant de déterminer les mots employés pour que ces
mots veuillent bien dire quelque chose. On a souvent demandé, au niveau
du débat, d'essayer d'employer, pour autant que c'est possible, des mots
qui ont une connotation populaire et juridique bien précise. S'il y en a
un qui a cette connotation, c'est bien le mot "aliment". Ce n'est pas parce
qu'on n'aime pas un mot, à mon avis, qu'on doive penser que n'importe
quelle autre notion ou n'importe quel mot peut le remplacer avec
succès.
Par exemple, s'il fallait employer l'expression "prestations
compensatoires" ou encore "mesures compensatoires", je l'ai dit tantôt,
cela pourrait vouloir dire une énumération de mesures possibles
qui risquent d'être limitatives et incomplètes.
Deuxièmement, cela peut engendrer des débats juridiques
pendant des années sur la portée même de ce concept. On
pourrait se poser des questions à l'effet de savoir quel sera le sort
des garanties liées à la notion d'aliment. Je pense, par exemple,
aux hypothèques, aux sûretés, toutes ces notions juridiques
bien connues qui sont liées, au niveau du projet de loi, à la
notion d'aliment et qui, peut-être, ne peuvent pas aussi facilement
être liées à d'autres notions, pour le moins qu'on puisse
dire, qui ne sont pas encore définies comme celle de la prestation
compensatoire ou de la mesure compensatoire.
Le mot "aliment" est consacré dans plusieurs autres lois. On fait
dire à la notion que cela pourrait comporter une signification qui
serait dans le sens de l'évaluation d'une perte sur le marché du
travail, sur le plan professionnel. Au bout du compte, on se demande si c'est
une indemnité. Si cela devait être le cas, qu'est-ce qui
arriverait de toute la notion d'indexation par rapport à une
indemnité si cela venait à être interprété
juridiquement comme cela?
Je devais le dire, ne serait-ce que pour le journal des Débats,
et pour ne pas avoir l'air de passer à côté d'une notion de
remplacement qui est véhiculée avec bonne foi, de ça je
suis convaincu, mais on doit reconnaître que c'est un concept non
précis, en tout cas au moment où on se parle. Ce sont les
remarques que je voulais faire sur les raisons pour lesquelles je crois que,
toute proportion gardée, toute évaluation faite, il est
préférable de garder la notion d'aliments,
préférable de garder la notion d'aliments.
Le Président (M. Laberge): Le whip adjoint du gouvernement
m'a demandé de remplacer comme membre à la commission, ce soir,
M. Charbonneau (Verchères) par M. Marcoux (Rimouski), M. Charbonneau
étant retenu à une autre commission.
Je donne la parole à Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: II m'apparaît extrêmement important
que nous fassions le remplacement, M. le Président, et nous sommes
d'accord.
Le Président (M. Laberge): Parfait. Vous avez la
parole.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je viens d'entendre le
ministre de la Justice qui nous a dit qu'il y avait un bout à charrier,
au moins dans la première partie de son intervention.
M. Bédard: Je ne m'adressais pas à vos propos,
madame. Vous l'avez évoqué.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, faites attention à ce que
vous dites.
M. Bédard: Je fais toujours attention!
Mme Lavoie-Roux: Non, parce que quand nous avons fait la
proposition ou que mon collègue de Saint-Laurent a fait la proposition,
c'est que nous croyions qu'il y aurait lieu, en 1980, alors qu'on est à
moderniser le Code civil, de penser qu'un terme puisse avoir
évolué et qu'il puisse même être remplacé au
besoin. Je ne vois aucun charriage là-dedans de quelque nature que ce
soit.
Evidemment, l'évolution du terme "aliments", je ne la connais
pas. Il y a assez de juristes ici qui doivent la connaître, mais il me
semble que peut-être, au point de départ, il avait probablement
assez strictement le sens d'aliments, dans le sens que c'était pour
empêcher que son conjoint ne soit dans la misère, quand les
revenus des gens étaient moindre. À l'usage, avec
l'évolution, il recouvre probablement un plus grand nombre de choses que
strictement les aliments. C'est pour ça qu'aujourd'hui, avec une
évolution encore plus grande où on parle de compensations de
toutes sortes et, comme le signalait le député de Saint-Laurent,
le fait que le divorce ait établi un autre ordre de relations entre les
conjoints, on croyait, nous, que ça valait au moins la peine de se
pencher là-dessus.
D'ailleurs, j'avais pensé, avant que nous nous quittions pour le
souper, qu'il y avait une certaine ouverture, qu'on pouvait sentir une certaine
ouverture de la part des conseillers du ministre. J'aimerais mieux que le
ministre nous donne une réponse - à moins que ce ne soit
là ses convictions profondes que c'est un terme qui est fixé dans
le béton pour l'éternité - qu'il nous donne comme
explication que c'est une chose à explorer. Mais au moment où
nous en
sommes, évidemment, ça n'implique pas que tel article -
disons l'article 555, je ne sais pas exactement où ça se retrouve
- ça impliquerait peut-être, dis-je, des modifications à
plusieurs articles, ça amènerait à réviser
peut-être une section en entier pour l'adapter à cette nouvelle
notion.
Il m'apparaît qu'avant le dîner, on n'avait pas senti une
fermeture absolue de la part des conseillers du ministre. Ceci serait
peut-être une explication plus plausible que de dire: Écoutez,
c'est une innovation qui n'est pas justifiée, on veut remplacer des mots
presque pour le plaisir de les remplacer.
Je pense que c'était un effort de la part de l'Opposition. C'est
vrai que c'est une suggestion qui nous est venue non seulement d'un groupe,
mais de quelques groupes. Si on avait eu plus de temps... Peut-être
n'est-ce pas peine perdue non plus. Il y aura peut-être encore du temps
pour qu'on puisse y songer plus longuement et qu'on apporte des modifications
dans ce sens.
Pour ma part, je n'ai pas autre chose à ajouter. Il reste que
c'est mon point de vue. Évidemment, cette suggestion venant de notre
côté, ça peut être jugé comme n'étant
pas très objectif. C'est un concept qui valait quand même la peine
d'être examiné, de la même façon qu'on a introduit
des notions nouvelles dans la révision du Code civil pour s'adapter aux
besoins d'aujourd'hui et, dans une certaine mesure, pour prévoir aussi
comment seront les choses dans une ou deux générations à
venir. On aurait pu, à l'égard de ces termes, avoir le même
souci et exercer un jugement plus favorable que celui que le ministre a
exercé en l'occurrence. Merci, M. le Président.
M. Bédard: M. le Président, je pense avoir fait
preuve, tout au cours de l'étude de ce projet, d'ouverture d'esprit -
sans être nécessairement toujours d'accord. On se comprend. Cela a
été la même attitude de l'autre côté, de la
part de tous les membres de la commission parlementaire. Les propos que je
viens de tenir ne doivent en aucune façon être
interprétés comme une fermeture de l'esprit par rapport à
une notion qu'on a évoquée ici et qui a été
évoquée par un groupe. Je n'ai pas dit que le mot "aliment"
était fixé dans le code pour l'éternité, je ne veux
pas voir aussi loin que cela. Je comprends qu'on est en train de moderniser le
code, mais en le modernisant on doit penser aussi - et on l'a
évoqué souvent au cours des débats - à la
compréhension populaire qui est faite déjà de certains
termes.
Par exemple, si on prenait seulement le prétexte qu'on est en
train de moderniser, donc, qu'il faudrait changer, je pense bien qu'on aurait
de la difficulté. Il y a des mots qui jusqu'à maintenant sont
là, ont une signification et qu'on a réemployés. Je pense,
par exemple, à la notion d'hypothèque. Ce n'est pas parce qu'on
est en train de moderniser que quelque chose qui a une connotation juridique
précise doit nécessairement changer d'appellation. La même
chose pour ce qui est de sûreté. Je pourrais en ajouter. Tout ce
que j'ai voulu dire, je pense que c'est un peu la même chose concernant
la notion d'aliment. Comme Mme la députée de L'Acadie l'a
évoqué tout à l'heure, il y a quelques années, le
mot aliment évoquait simplement une chose. Avec le temps, cela a pris
une dimension nouvelle, soit à la suite de jugements ou à la
suite d'autres réflexions. Je crois qu'il faut laisser évoluer le
terme et peut-être qu'à ce moment son contenu rejoindra... C'est
cela qui est important, le contenu exact de la notion d'aliment.
Je tiens à rassurer non seulement Mme la députée de
L'Acadie, mais également le groupe et sa représentante principale
qui ont évoqué cette notion. Non seulement nous l'avons
explorée, mais à un point tel que je croyais nécessaire
d'y aller de quelques propos sur les motivations qui nous amenaient, au moment
où on se parlait, à avoir beaucoup de réticences à
employer ce terme pour en remplacer un qui veut dire quelque chose de
très précis. Ce sont des réticences qu'on pourrait avoir
à changer un mot qui a un contenu très précis par une
notion qui, à mon sens, est imprécise. Cela ne lui enlève
pas sa valeur. Il y en a toujours des fois qui font oeuvre de
précurseurs. L'avenir le dira.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Bédard: Si vous me permettez, Mme la
députée de L'Acadie, vous vous êtes un peu
référée aux experts. Peut-être qu'ils pourraient
évoquer un peu, je dirais, la tradition du mot aliment dont on parle et
son évolution.
Ce que je puis dire en tout cas, comme juriste ayant travaillé
dans ce dossier, c'est que nous avons travaillé dans un certain contexte
- je parle toujours au plan juridique et d'abord dans le contexte suivant:
l'Office de révision du Code civil, après avoir soumis son
rapport, a proposé de maintenir ce concept d'aliment, même
à la suite d'un divorce ou d'une séparation de corps, en le
réglementant. C'est un premier contexte quand même dans lequel
nous avons travaillé. Un deuxième contexte aussi est celui du
droit étranger, canadien comme français, pour prendre des
exemples, où la notion de pension alimentaire ou d'aliment, à la
suite d'un divorce ou d'une séparation de corps, continue d'être
le concept utilisé. Pour nous, juristes, quand on travaille, ce genre de
contexte-là détermine parfois nos comportements.
Je dois dire aussi que nous avons, pendant les deux dernières
années, donc c'est quelque chose de très récent,
été appelés à travailler sur les textes de ce qui
pourrait être un amendement à la constitution canadienne, donc,
ayant les textes anglais et les textes français, pour ce qui est de ce
dossier, qui est toujours ouvert, du transfert éventuel de la
juridiction du fédéral aux provinces en matière de mariage
et de divorce. Les amendements qui étaient proposés aux articles
91 et 92, tous les textes - on était vraiment dans le cas des
nullités de mariage et de divorce parce que c'est là que la
juridiction fédérale s'exerce -parlaient de "maintenance alimony"
etc., qui se traduisent chez nous en termes d'aliments. Je vous donne donc ce
contexte dans lequel nous avons travaillé. Peut-être aurions-nous
pu avoir plus d'imagination aussi, mais c'est celle dans laquelle nous avons
travaillé.
D'autre part, il est certain qu'il y a une très longue tradition,
non seulement jurisprudentielle mais doctrinale, sur toute cette question
d'aliments et les évaluations des aliments, des besoins, des
facultés, etc. Il y a tout cet apport important qui est là, qui
est sécurisant et qui rassure et que nous avons utilisé.
Pour ma part, ce n'est pas un rejet a priori de cette notion-là,
sauf que je n'ai pas trouvé d'étude actuellement - il faudrait
peut-être en faire - définissant de façon importante et
complète ce que c'est, ce nouveau concept, quel est son contenu,
l'évaluation, les conséquences qui vont en découler,
quelle sorte de réaménagement ça peut entraîner
également dans les rapports entre les époux, une fois qu'ils sont
divorcés. Ce n'est pas qu'il ne faille pas la faire mais ce
n'était pas fait. On n'a pas trouvé d'ouvrage ou de travaux
importants sur la question. Un juriste, c'est peut-être un peu
conservateur, c'est peut-être un peu prudent aussi. Avant d'accepter
volontiers des institutions nouvelles, j'aime bien les peser, les
évaluer, voir si ça fonctionne. Je vous dis donc qu'il n'y a pas
de littérature bien importante sur la question. Je dis
qu'intellectuellement j'ai de l'ouverture, on peut l'examiner, mais pour le
moment on en est pas là. C'est à peu près tout ce que je
peux ajouter.
Le Président (M. Laberge): Avant d'adopter le nouvel
article 556, on nous a suggéré deux petites retouches.
Après le mot "tribunal", ajouter une virgule et remplacer, à la
cinquième ligne, après le mot "verser", l'expression "les" par
"des". Pour préciser ce qui a déjà été fait
dans d'autres articles.
M. Bédard: Et une virgule après le mot
"tribunal".
Le Président (M. Laberge): Oui, c'est fait, je viens de le
noter.
M. Bédard: Elle semble importante.
Le Président (M. Laberge): Oui, c'est fait, je viens de le
noter. Oui, autrement ce n'est pas lisible. Je suppose que vous acceptez ces
modifications.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. La nouvelle
rédaction de l'article 556 amendé sera-t-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté avec
amendement.
M. Bédard: II y avait aussi les deux... Ah bon!
Le Président (M. Laberge): Oui, j'y reviens tout de suite.
(20 h 45)
Pour distinguer des paragraphes, dans la section I, on nous recommande
de remplacer l'article 552 par ce qui suit, c'est-à-dire qu'on va avoir
à le diviser. Je vous en donne lecture. Le nouvel article 552 se lira:
"Le divorce rompt le lien du mariage." Ensuite, paragraphe 1, "du
règlement des intérêts financiers des époux". 552.1:
"Le divorce emporte la dissolution du régime matrimonial." Un autre
paragraphe: "Les effets de la dissolution du régime remontent, entre les
époux, au jour de la demande, à moins que le tribunal ne les
fasse remonter à une date antérieure par application de l'article
496." Ce nouvel article 552 sera-t-il adopté à la place de
l'ancien?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Ensuite, on nous
demande après l'article 555 d'ajouter ce qui suit, au deuxième
paragraphe: "Des effets du divorce quant aux aliments." avant l'article 556.
Cette numérotation et ce paragraphe seront-ils adoptés?
M. Bédard: II n'y a pas de point.
Le Président (M. Laberge): Ahl Après
"aliments"?
M. Bédard: Oui.
Le Président (M. Laberge): Parfait. De la
précision. Merci.
Mme Lavoie-Roux: ... intérêts financiers. C'est la
question dont vous aviez parlé avant souper.
M. Bédard: Oui, qu'a invoquée le
député de Saint-Laurent pour que...
M. Forget: Ne devrait-il pas, M. le Président, y avoir une
troisième section après l'article 564? Non?
M. Bédard: Non, parce qu'on a gardé la section I
sauf qu'on l'a subdivisée en deux sous-sections.
Le Président (M. Laberge): Cette sous-section II
sera-t-elle adoptée?
M. Forget: Adopté. M. Bédard:
Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Nous ferons les
corrections en conséquence. Nous pouvons donc revenir à 557.
À 557, on nous fait remarquer sur les papillons que vous avez entre les
mains qu'il n'y aucun amendement de suggéré, mais on nous demande
de rouvrir l'article 560 pour ajouter au début, avant les mots "le
droit", ce qui suit: "...sauf le cas de fraude,". Voulez-vous rouvrir d'abord
l'article 560 en premier et, après cela, on reviendra à l'article
557, si vous le voulez? L'article 560 était adopté.
C'était ouvert et...
M. Forget: D'accord. Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Alors, "sauf le cas de
fraude,". Adopté.
M. Forget: C'est plus sage que de prolonger le délai. Je
crois que c'est une très bonne solution.
Le Président (M. Laberge): L'article 560 se trouve...
M. Forget: La fraude aurait probablement eu cet effet de toute
façon, mais ce n'est pas sûr.
M. Bédard: Ce n'est pas sûr. On y a
réfléchi. Je pense qu'il est prudent de le dire.
M. Forget: Oui, il vaut mieux. Je crois que oui.
Le Président (M. Laberge): À l'article 560,
l'amendement est adopté. L'article 560 amendé, adopté avec
amendement. Je reviens donc a l'article 557. L'article 557 sera-t-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
M. Bédard: II y avait l'article 561 qui était
resté ouvert, M. le Président, je crois.
Le Président (M. Laberge): Oui, il est ouvert. Article
561. M. le ministre.
M. Bédard: II n'y a pas de...
Le Président (M. Laberge): Correction.
M. Bédard: ...correction. C'est parce qu'on attendait la
réponse à l'article 556, je crois.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 561 est
adopté. Article 566. C'est la même chose.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Laberge): L'article 566 sera-t-il
adopté?
M. Bédard: C'est parce que c'était relié
à la résidence familiale que nous l'avions gardé. Il
s'agissait du chapitre des enfants, mais c'était relié à
la résidence familiale.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 566 sera
adopté?
M. Forget: Dans le chapitre sur la résidence familiale, on
traite de l'attribution, par le tribunal, d'un droit de propriété
éventuel ou d'un droit d'occupation.
M. Bédard: C'est cela.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 566 est
adopté. Cela ferme ces quatre articles. Maintenant, ce qu'il nous reste,
ce sont les articles 524, 525 et 526, de même que l'article 5.
De la séparation de corps
On revient à l'article 524. M. le ministre.
M. Bédard: II s'agit de remplacer l'article comme suit:
"II est réputé en être ainsi notamment dans les cas
prévus par les articles 538.1 à 538.3 ou lorsque les époux
ou l'un d'eux rapporte la preuve d'un ensemble de faits rendant
intolérable le maintien de la vie commune".
M. Blank: Je pense que c'est très bon. Ici, on met un peu
de différence entre les raisons du divorce et de la séparation.
J'avais peur, à un moment donné, que si les raisons pour le
divorce et la séparation
étaient les mêmes... D'après mon expérience
devant les tribunaux, avec n'importe quelle raison on avait une
séparation, et je ne voulais pas que la jurisprudence pour la
séparation agisse pour celle du divorce. Avec cet amendement, je pense
qu'on a amélioré la situation, parce que les juges peuvent donner
une séparation pour la deuxième partie, après le mot "ou",
et cela ne s'applique pas nécessairement aux articles 538.1 à
538.3. On a besoin de cette différence. On est rendu aujourd'hui qu'une
séparation, devant les tribunaux, c'est sur demande. Si on ne veut pas
qu'un divorce soit obtenu sur demande, on doit avoir cette différence
entre les deux. Je pense qu'il y a une amélioration à 100% avec
cet amendement. Je félicite le gouvernement.
M. Bédard: Merci.
M. Blank: Et les experts. Je ne sais pas si c'est le
gouvernement, mais au moins les experts.
Mme Lavoie-Roux: Ce sont certainement les experts.
M. Bédard: Soyons corrects jusqu'à la fin.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que l'article 524,
nouvelle rédaction, sera adopté?
M. Forget: Adopté.
M. Bédard: Une chose qui est certaine c'est que le travail
est...
Le Président (M. Laberge): Adopté. Article 525.
M. Bédard: J'avais préparé une fleur pour le
député de Saint-Louis, mais...
Mme Lavoie-Roux: Je peux lui envoyer le bouquet si vous
voulez.
M. Blank: Un Dom Pérignon serait assez.
M. Bédard: Je pense que lorsque nous sommes passés
à cet article le député de Saint-Louis y a attaché
un intérêt tout à fait spécial, à savoir
qu'il y ait une différence entre la séparation de corps et le
divorce. Comme bon plaideur...
M. Blank: Franchement, dans la pratique, on peut voir la
différence. On voit des gens qui veulent une séparation. On peut
voir une différence, sinon, on va détruire des mariages et le but
de notre affaire est au moins d'essayer de sauver des mariages.
M. Bédard: C'est clair.
M. Blank: Mais si on ne fait pas cette différence...
M. Bédard: On avait la même préoccupation.
Votre bon plaidoyer a donné de bons... Je vais vous envoyer une
plaque!
Le Président (M. Laberge): À l'article 525, au
premier alinéa, on nous demande de remplacer, après le mot
"avoir" dans la troisième ligne, les mots "à rapporter d'autres
preuves d'une atteinte grave à leur volonté de vie commune" par
"en faire connaître la cause". Est-ce que cet amendement sera
adopté? C'est la dernière ligne du premier alinéa de
l'article 525.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Amendement adopté.
Deuxièmement, on nous demande au deuxième alinéa, à
la deuxième ligne, d'ajouter après le mot "époux" ce qui
suit: "et vérifié la réalité des consentements,".
Est-ce que cet amendement sera adopté?
M. Bédard: Je pense qu'on a déjà
employé l'expression, en s'entendant...
Mme Lavoie-Roux: Cet après-midi, pour le divorce.
M. Bédard: ...sur la signification de ce que nous ont dit
les experts, que cela voulait vraiment dire de vérifier la
validité du consentement.
Le Président (M. Laberge): Amendement adopté.
À l'article 526, il y a une rédaction nouvelle. Cela se lit comme
suit: "À tout moment de l'instance en séparation de corps, il
entre dans la mission du tribunal de conseiller les époux, de favoriser
leur conciliation et de veiller aux intérêts de l'enfant."
Paragraphe suivant: "Les autres règles relatives à l'instance en
divorce s'appliquent aussi à la demande en séparation de corps."
Est-ce que ce nouvel article 526 sera adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Maintenant, nous
nous reportons à l'article 5. L'article 5...
M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait adopter l'article 1? Je
voudrais être sûr qu'on ne recommence pas.
Le Président (M. Laberge): Du fait, tous les articles ont
été adoptés. Tous les alinéas...
M. Forget: C'est une motion débattable, on avait 20
minutes de droit de parole
chacun, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 1 est appelé.
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Article 1, adopté.
M. Bédard: II y a l'article 75.
Le Président (M. Laberge): Non, il y a l'article 5.
M. Bédard: M. le Président, ce qu'on me fait
remarquer, c'est technique; je pense même que c'est usuel concernant
l'article 1, parce que cela ne s'applique qu'à l'article 1. On doit
faire la motion, à la suite de l'étude de l'article 1, de
renuméroter les articles du livre deuxième du Code civil du
Québec, en partant du numéro d'article 400 et corriger la table
des matières du livre deuxième en conséquence. Cela
va?
M. Forget: Adopté. Si on me permet une question, M. le
Président, on retient 400 comme le numéro du premier article.
Évidemment, c'est une estimation du nombre d'articles qu'il sera
nécessaire d'avoir pour traiter des sujets qui viennent avant. C'est,
évidemment, une hypothèse de travail, à ce moment-ci, rien
d'autre que cela. Il faut donc envisager que, lorsque la première partie
du Code civil sera adoptée, il faudra que tout le monde
réapprenne une nouvelle numérotation de tous ces articles que
nous venons d'adopter.
M. Bédard: Sûrement. Il en sera de même pour
tous les autres articles.
M. Forget: Ce sera un recyclage permanent.
M. Bédard: Puis-je ajouter que l'idée est de garder
la numérotation, que nous allons reprendre à la suite de la
motion, aussi stable que possible. Même si, dans le Livre premier, il n'y
avait place, quant au contenu, que pour 350 articles, il restera des
numéros, bien sûr, inoccupés. Il est important de penser
que le Code civil a des chances d'être amendé plus
fréquemment et, par conséquent, que la numérotation n'a
peut-être pas tout à fait le même sens qu'elle pouvait avoir
il y a un siècle et que, d'autre part, il est important aussi d'assurer
une certaine stabilité aux numéros pour permettre la citation des
articles dans les ouvrages de doctrine, dans la jurisprudence, je dirais aussi
dans la mémorisation du contenu du code; on s'y habitue plus facilement.
On a prévu une souplesse dans les espaces à conserver. Le
système aussi de numérotation avec décimales, par exemple
l'article 400.1, permet d'introduire aussi, sans chambarder toute la
numérotation, des amendements qui viennent s'insérer entre les
articles.
M. Forget: M. le Président, je pense que cette
préoccupation au sujet des numéros des articles est importante
puisqu'ils finissent par devenir un langage codé pour les professionnels
qui sont chargés de l'application de tout cela.
M. Bédard: Quand on parlait de 1053, tous les juristes
savaient ce que cela voulait dire.
M. Forget: C'est cela. Exactement. Je pense qu'il est importante
de maintenir les possibilités d'un dialogue intelligible entre les
praticiens d'une même discipline; que ce soit le droit ou le
génie, c'est la même situation. À cet égard, je me
demande si, étant donné que le Code civil est divisé en
livres, que les livres sont divisés en titres, les titres en chapitres,
et les chapitres en sections, il ne serait pas souhaitable d'adopter d'une
façon intégrale la désignation décimale qui
permettrait de faire précéder de 2 tout ce qui est dans le livre
2e, une deuxième position serait, pour le titre premier, 1, pour le
titre deuxième, 2, etc., de manière qu'on ait une
numérotation absolument permanente et d'une grande flexibilité.
Evidemment, cela oblige à des désignations comme l'article 2, 5,
4, 3, 1 ou quelque chose du genre, mais cela finit par devenir aussi familier
que l'article 2247, paragraphe a), sous-paragraphe 1, et finalement on peut s'y
retrouver. Cela permettrait, lors de cette modification du Code civil, de
donner des numéros absolument permanents.
M. Bédard: On peut en prendre note, au moment de nos
travaux; prendre note de la suggestion positive faite par le
député de Saint-Laurent, mais il faut que ce soit analysé
un petit peu préalablement.
M. Forget: Oui, bien sûr.
Le Président (M. Laberge): Cette motion de...
M. Forget: Je m'excuse, M. le Président. Je comprends
qu'on veuille y réfléchir, mais au-delà d'un certain
point... videmment, tant qu'on n'est pas rendu en troisième lecture,
cela peut être modifié, j'imagine.
Le Président (M. Laberge): Cette motion de
renumérotation et de correction de la table des matières
sera-t-elle adoptée?
M. Bédard: Je pourrais peut-être
ajouter que je comprends effectivement ce qui vient d'être dit,
mais cela implique peut-être une modification assez forte de cette longue
habitude de technique législative et...
M. Forget: On menace de les modifier rapidement et à
plusieurs reprises, si on procède autrement.
M. Bédard: Nous avons déjà introduit la
numérotation décimale, mais nous essayons tout de même de
faire en sorte que cette numérotation décimale soit aussi
modérée que possible.
M. Forget: Oui.
M. Bédard: L'idéal demeurera tout de même que
nous ayons une numérotation séquentielle ordinaire.
Personnellement, en tant que directeur général des affaires
législatives, si je puis me permettre de le dire... Est-ce que c'est
permis?
M. Forget: Oui, c'est permis.
M. Bédard: C'est fait.
Je préférerais que nous soyons encore assez prudents un
certain temps. Je comprends qu'effectivement c'est une suggestion à
étudier, mais actuellement nous demeurons très prudents, nous
essayons de ne pas avoir des décimalisations trop importantes, nous
essayons d'en rester à la première décimalisation, nous
évitons autant que possible les secondes décimalisations et nous
avons en horreur les troisièmes décimalisations qui
entraînent, comme vous l'avez dit vous-même, une certaine
complexité de la numérotation.
M. Forget: Oui, une très grande stabilité est aussi
une qualité de plus en plus recherchée dans le domaine de
l'information juridique. On l'a appris à nos dépens avec les
nouvelles lois refondues du Québec.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cette motion de
renumérotation sera adoptée?
M. Forget: Oui, adopté. Le Président (M.
Laberge): Adopté. Modifications diverses
M. Bédard: II y avait l'article 5. On a essayé de
trouver... On fait état de certaines règles prévues par
arrêté du ministre de la Justice. Je sais que ça ne
satisfera peut-être pas suffisamment par rapport aux suggestions faites;
j'aimerais qu'on fasse un amendement en indiquant que c'est par décret.
Au moins, cela a le mérite d'être rendu public.
Le Président (M. Laberge): Où cela? À
l'article 5 ou à 55.1?
M. Forget: C'est un pis-aller, à notre point de vue.
Le Président (M. Laberge): On avait déjà un
amendement ici, est-ce qu'on en tient compte?
M. Bédard: Lequel?
Le Président (M. Laberge): On avait un papillon. On n'en
tient plus compte? Un instant. L'article 5, c'est à 55.1.
M. Forget: On va l'adopter sur division, M. le Président.
Vous prenez vos responsabilités, on prend les nôtres.
Le Président (M. Laberge): L'article 5, sans amendement,
est adopté sur division.
M. Forget: II est déjà amendé, je pense,
non?
Le Président (M. Laberge): Oui, on avait proposé un
amendement, j'avais raturé mon texte et on m'a dit de revenir à
l'original.
M. Forget: L'original, bon.
Le Président (M. Laberge): C'est pour cela que je dis bien
sans amendement.
M. Forget: Sans amendement, d'accord.
Le Président (M. Laberge): Adopté sur division.
M. Forget: Adopté sur division.
Le Président (M. Laberge): Dans mon cahier, on recollera
une page!
M. Bédard: Nos conseillers juridiques nous demandent, de
rouvrir l'article 13 et d'ajouter à la fin ce qui suit: "Dans la mesure
indiquée par les proclamations faites suivant l'article 75".
Le Président (M. Laberge): Parfait. Les articles 113
à 245j.
M. Bédard: En fait, c'est dans l'hypothèse
où il y a des proclamations successives et partielles, compte tenu que
les articles 113 à 245j couvrent à peu près 90% de la
matière ici et qu'évidemment il y a des chapitres qui pourront
être mis en vigueur rapidement, comme la filiation et l'autorité
parentale. Alors, il s'agirait de permettre de scinder, dans l'abrogation, pour
éviter une double...
Autrement on pourrait toujours, sauf
que ça voudrait dire qu'on le ferait par interprétation,
et il resterait quand même une certaine incertitude juridique possible,
le droit nouveau rendant possiblement inopérant le droit ancien,
mais...
C'est-à-dire que l'article 13 prévoyait une abrogation en
bloc, donc dès la proclamation de l'article 13, tout se trouvait
abrogé en bloc. Ou bien on pouvait, comme on le disait il y a un
instant, le maintenir en vigueur en se fiant à la présomption
classique selon laquelle la loi nouvelle l'emporte sur la loi ancienne, bien
entendu, mais il y aurait là des conflits d'interprétation
possibles et des nuances possibles qui auraient entraîné des
inconvénients pratiques assez considérables.
Le Président (M. Laberge): L'article 13 se lira maintenant
comme suit:
Les articles 113 à 245j dudit code sont abrogés dans la
mesure indiquée par les proclamations faites suivant l'article 75."
Cet amendement à l'article 13 est-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 13 est
adopté avec amendement. Est-ce qu'il y a autre chose?
M. Bédard: II y a l'article 75.
Le Président (M. Laberge): Oui, mais il n'y a rien entre
les deux? Vous n'en voyez pas?
M. Bédard: Une revue très minutieuse a
été faite par les...
Le Président (M. Laberge): Après le travail de
bénédictins de tous les membres de la commission et des
conseillers techniques, j'appelle l'article 75.
M. Bédard: II n'y a aucun amendement à cet article,
M. le Président.
Le Président (M. Laberge): L'article 75 sera-t-il
adopté?
M. Forget: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent.
Pouvoir de l'Assemblée nationale
M. Forget: Nous devons quand même revenir, pendant quelques
instants, sur une question dont, tel que promis, nous n'avons pas abusé,
puisque nous ne l'avons mentionnée que pendant cinq minutes, je pense,
au début de nos travaux en commission parlementaire, mais qui,
même si nous choisissions de n'en pas parler, ne s'évanouit pas
pour autant. C'est la question du pouvoir de l'Assemblée nationale, dans
l'état actuel des choses, d'adopter ce projet de loi.
C'est une question qui se pose sans aucune espèce de
dissimulation puisque, à sa face même, étant donné
l'inscription de cet article 75, l'Assemblée nationale admet, s'avoue
à elle-même, en quelque sorte, et proclame qu'elle sait ne pas
avoir la juridiction ou la compétence nécessaire pour adopter en
totalité ce projet de loi.
Le projet de loi comme tel reprend, bien sûr, les rapports du
comité de révision du Code civil et s'inspire aussi, dans sa
forme finale, dans une certaine mesure au moins, des représentations
faites par différents groupes qui, tous, ont choisi de mettre entre
parenthèses la question constitutionnelle. Mais, à la
différence de l'Office de révision du Code civil ou d'un
organisme quelconque intéressé à tel ou tel aspect du
droit familial, l'Assemblée nationale ne peut vraiment pas se payer le
luxe d'ignorer cette question et d'en ignorer les conséquences
possibles. (21 h 151
Déjà, comme nous l'avons indiqué, le fait que,
à sa face même, à cause de l'article 75, le projet de loi
est ultra vires de l'Assemblée nationale, du moins en partie, peut poser
la question, théoriquement pour l'instant, mais de façon pratique
un peu plus tard, savoir que ce vice déjà perceptible au moment
du dépôt en deuxième lecture, et même en
première lecture, et aurait dû entraîner de la part de
l'Assemblée nationale une attitude différente de celle qu'elle a
eue. C'est là une hypothèse qui risque d'être testée
devant les tribunaux pour attaquer de façon globale la validité
du travail que nous avons fait.
À supposer même que la question de validité ne
s'applique pas globalement même aux articles qui tombent sous la
compétence de l'Assemblée nationale si on les traitait
séparément, à supposer que ce ne soit pas une question
globale, que ce soit une question de validité qui ne porte que sur
certains des articles, ceux qui sont directement de la compétence
fédérale, on n'est pas tellement plus avancés parce qu'on
ne sait pas exactement à quel article on a affaire. La zone qui
sépare la compétence provinciale de la compétence
fédérale en matière de divorce, de mariage est
malgré tout une zone un peu grise, un peu confuse.
Les allusions qu'on trouve dans l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique sur cette question sont très globales et doivent être
interprétées. Comment exactement seraient-elles
interprétées pour déterminer que tel article est valide et
que tel autre ne l'est pas? C'est une chose qui ne peut pas être
déterminée facilement a priori. Donc, il y a
non seulement une incertitude quant à la validité globale,
il y a aussi une deuxième incertitude qui s'attache à la
validité de tel ou tel article, à supposer que la loi ne soit pas
globalement entachée d'un vice fatal.
Dans la décision que nous devons prendre, je dois remarquer, M.
le Président, que nous n'avons été saisi d'aucun avis
circonstancié. La commission parlementaire aurait pu - c'est du moins
imaginable - être saisie d'un avis juridique circonstancié nous
permettant de voir quelle était la base sur laquelle le gouvernement
allait se fonder pour procéder, par exemple, à une proclamation
sélective de certaines sections et quelles en seraient les implications
sur la façon dont l'ensemble du projet est rédigé.
Un exemple de ceci a été fourni au cours de la discussion
par notre collègue de Saint-Louis qui a dit, à juste titre je
pense: La partie relative à la séparation de biens contient de
nombreux renvois a la partie relative au divorce. Si la partie relative au
divorce - et ça, je pense que cela ne fait guère de doute - est
ultra vires de l'Assemblée nationale dans le moment, cela veut dire que
les renvois se feront à des textes inexistants ce qui entraînera,
par voie de conséquence, l'inapplicabilité des dispositions
relatives à la séparation de corps. Il est possible que si nous
avions bénéficié d'un avis circonstancié ta
commission eût jugé préférable de modifier, de
remanier la rédaction de manière à minimiser autant que
possible l'impact d'une invalidité quand même probable de
certaines dispositions. Comme c'est là, nous sommes dans une incertitude
à plusieurs niveaux, si je puis dire, et rien ne vient nous
éclairer, rien ne vient nous permettre de rassurer qui que ce soit quant
à l'effet des dispositions que nous avons adoptées.
Je sais bien que le ministre peut répondre qu'il est important
d'avoir un texte complètement développé,
complètement accepté de manière que, lorsque nous
renouvellerons la demande au nom du Québec d'une modification des
compétences constitutionnelles, tout ceci revêt un
caractère beaucoup plus concret et que, s'il est donné suite
à cette modification de compétence, on puisse
littéralement, dans les semaines qui suivent, même dans les jours
qui suivent, donner effet au transfert de compétences. Malheureusement,
M. le Président, je crois que ce désir d'anticiper sur les
événements ne pourrait pas être efficace, de toute
manière. On dit que, même s'il y avait demain transfert des
compétences en faveur du Québec, nous serions forcés de
reconvoquer l'Assemblée nationale pour adopter à nouveau le texte
que nous avons étudié depuis une semaine. Il ne sera pas
suffisant, par arrêté en conseil, comme c'est l'habitude, de
proclamer, de promulguer que telle ou telle loi ou tels articles de telle loi,
désormais de la compétence du Québec, peuvent être
mis en vigueur. Il faut que cette loi ait été adoptée par
l'Assemblée nationale alors qu'elle en avait le pouvoir. Je ne pense pas
qu'il soit possible de remédier à ce défaut par un
arrêté en conseil. On pourrait peut-être le faire
rétroactivement, mais par une loi. Donc, il faudrait adopter non pas
peut-être la même loi article par article dans tous les
détails, mais, malgré tout, une loi de l'Assemblée
nationale qui, en annexe, contiendrait la loi que nous avons adoptée ce
soir ou, du moins, ceux des articles de la loi que nous avons adoptée ce
soir, dont la validité dépend d'un transfert de
compétences.
On se rend compte combien tout cela est compliqué. Et à
cause de cette complication-là, il sera impossible de sortir d'ici, dans
une journée ou deux, et de dire: Nous avons adopté un nouveau
Code civil, un nouveau droit de la famille pour le Québec. Nous en avons
probablement adopté une certaine partie, nous ne savons pas exactement
laquelle, et elle s'appliquera à un moment dont nous ne pouvons pas
être absolument certains non plus, pour des raisons sur lesquelles il
sera possible de revenir éventuellement, mais qui n'ont rien à
voir avec les questions constitutionnelles.
Pour ce qui est de la partie que nous n'avons pas effectivement
adoptée en dépit de l'impression qu'on a qu'on l'a
adoptée, celle-là on ne sait absolument pas quand elle entrera en
vigueur.
On ne sait pas enfin si, à supposer qu'on veuille
procéder, du côté gouvernemental, à l'adoption
sélective de certaines dispositions, l'espèce de pot-pourri qui
en résultera, c'est-à-dire certaines parties nouvelles et
certaines parties anciennes des lois actuelles qui demeureraient en vigueur
parallèlement, constitueraient une situation du droit de la famille plus
acceptable ou moins acceptable que celle que nous connaissons aujourd'hui.
Encore une fois parce que nous ne savons pas lesquelles des dispositions
actuelles demeureront en vigueur et lesquelles seront exactement
remplacées par les nouvelles. Est-ce que le résultat d'ensemble
serait cohérent ou pas? Bien malin celui qui pourrait l'affirmer en
toute certitude. Je pense que personne ne peut effectivement l'affirmer.
Le résultat total de ça, c'est que, pour l'instant - nous
regrettons d'avoir à le dire, mais je pense qu'il faut dire aussi les
choses comme elles sont - nous nous sommes livrés à un exercice
fort intéressant, même s'il a été un peu
exténuant pour ceux qui y ont participé, mais qui demeure un
exercice académique. Nous espérons certainement, avec la
même intensité que le ministre, que nous n'en resterons pas
là et que, dans un avenir
le plus rapproché possible, on pourra faire un progrès
réel.
Il reste que, pour l'instant, on a un nouveau projet de réforme
du droit de la famille. Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'on a un nouveau
droit de la famille. On a un nouveau projet qui recevra éventuellement
une sanction formelle de l'Assemblée nationale, mais qui demeurera un
projet, même - et cela est paradoxal - s'il est devenu une loi. Je pense
qu'il faut en être conscient. Si on l'est, bien mon Dieu, on pourra
ensuite se poser la question à savoir: Est-ce qu'il était si
urgent de l'étudier à un tel rythme, dans les circonstances.
Je ne veux pas insister là-dessus, je le ferai tout à
l'heure, mais on a découvert, a supposer qu'on ne s'en doute pas
déjà, durant l'étude du projet de loi, qu'il y avait
beaucoup de mesures de concordance en plus de celles qu'on a apportées.
Dans le corps du Code civil lui-même il y a beaucoup de mesures
complémentaires disons, plutôt que de mesures de concordance qui
doivent intervenir avant qu'on puisse, mis à part les questions de
constitutionnalité, songer à promulguer ce code de la famille, si
l'on veut. Il y a des modifications nombreuses dans le Code de procédure
civile. On y a fait allusion sous plusieurs rubriques, ceci sans mentionner les
autres dispositions du Code civil dans d'autres chapitres qui ont un impact
certain sur l'ensemble du droit de la famille, les dispositions relatives aux
personnes. On a parlé souvent de la tutelle, de la curatelle et de la
capacité des personnes. C'est sûr que cela a un impact. On a
parlé aussi assez souvent des dispositions relatives au droit
successoral qui ont un impact certain au moins quant à plusieurs de
leurs dispositions sur le droit de la famille.
Dans certains cas, on pourrait promulguer et attendre, mais dans
d'autres -et je pense en particulier au Code de procédure civile - il
sera rigoureusement impossible de promulguer certains articles parce que,
à ce moment-là, on ampute notre droit d'éléments
essentiels qui existent actuellement; et je pense à l'adoption; c'est
peut-être l'exemple qui me vient le plus facilement à l'esprit,
mais il y en a sûrement d'autres où il faut absolument être
saisi d'un projet de révision du Code de procédure civile. Il y
aura plusieurs articles, plusieurs dizaines d'articles dans un tel projet.
Avant même de songer à adopter le projet de loi actuel, il faudra
pouvoir mettre un à côté de l'autre le nouveau projet de
Code civil et le nouveau projet de Code de procédure civile.
M. le Président, on est dans la situation de gens qui ont
écrit une grande oeuvre et qui ne savent pas s'ils vont trouver un
éditeur. En attendant, on peut espérer pour le mieux, envoyer
notre oeuvre à des concours littéraires en espérant qu'ils
résoudront le problème pour nous, mais c'est une situation
agréable; on a quand même un certain soulagement après
avoir pondu une grande oeuvre, même si on a encore cette
inquiétude de trouver un éditeur. On sait que la véritable
satisfaction d'un écrivain, M. le Président, vient lorsque
l'ouvrage imprimé apparaît dans les devantures des libraires. On
est encore loin de voir cela. On ne connaît pas encore d'ailleurs la
couleur de la couverture.
Le Président (M. Laberge): D'autres commentaires?
M. Forget: Oui, en effet, je pense que c'était implicite
dans mes remarques, M. le Président. J'ai parlé de l'absence,
pour l'instant, d'un avis juridique. Vous faites bien de me le rappeler. Y
a-t-il un remède à cette interrogation ou s'il n'y en a pas? Je
pense que c'est une question qui se dégage très certainement de
mes remarques.
M. Bédard: Après avoir entendu les propos du
député de Saint-laurent, je serais porté à...
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Bédard: ...croire que le député de
Saint-Laurent craint qu'il y ait des remèdes à apporter qui
permettraient de résoudre certaines difficultés
constitutionnelles auxquelles nous avons déjà fait allusion.
J'irai de quelques propos seulement, M. le Président, parce que
je pense que les propos du député de Saint-Laurent ne sont que
préliminaires à une stratégie qui ferait en sorte que nous
ne pourrions livrer à la population du Québec pour les
Fêtes un nouveau Code civil portant réforme du droit de la
famille. Je suis convaincu que ce n'est pas l'amertume de n'être pas,
selon son expression, le maître de cette oeuvre que le
député de Saint-Laurent s'est acharné presque à
minimiser les pouvoirs du Québec. Qu'il y ait certaines
difficultés constitutionnelles, il y a quand même un bout à
vouloir limiter les pouvoirs constitutionnels du Québec pour essayer
d'en arriver à dire que nous ne pourrons dire que nous avons un nouveau
Code de la famille, à la suite du travail qui a été fait
avec la collaboration de tous les membres de cette commission parlementaire, je
tiens à le souligner. (21 h 30}
Peut-être que les motifs ne sont pas les mêmes de part et
d'autre, mais je suis loin de minimiser les pouvoirs constitutionnels du
Québec pour essayer de caricaturer en disant que tout le travail que
nous avons fait n'est qu'un travail
académique. Peut-être que, politiquement, c'est
intéressant de le dire, du point de vue de l'Opposition, mais cela ne
traduit pas la réalité du travail sérieux qui a
été fait par tous les membres de cette commission parlementaire.
Je pense que nous pouvons dire que nous avons adopté en commission
parlementaire un nouveau Code civil du Québec, portant réforme
sur le droit de la famille.
Si on tient compte des pouvoirs constitutionnels du Québec, il y
a quand même une très grande partie de ce projet de loi qui peut
être mise en vigueur à la lumière même de ces
pouvoirs. Je prends tout ce qui regarde le domaine de la filiation, de
l'adoption, de l'obligation alimentaire, de l'autorité parentale, de la
théorie des comourants, de tout le chapitre concernant
l'hypothèque judiciaire, le nom des enfants. J'irais même plus
loin. À un moment donné - je n'ai pas à déterminer
les motifs - certains exprimaient des doutes sur une réforme qui s'est
faite en 1964 concernant les effets du mariage et la capacité des
époux. Malgré tous ces doutes qui ont été
exprimés à ce moment-là, on aurait bien pu dire: On a fait
tout ce travail pour rien, on n'a pas compétence, c'est douteux du point
de vue juridique, etc. Sauf que la réalité, c'est quoi? C'est que
toute cette réforme a été faite en 1964 et qu'il n'y a
jamais eu une seule contestation.
Il y a un bout à vouloir limiter les pouvoirs du Québec
pour en arriver à essayer de conclure, pour des motifs que je n'ai pas
à évaluer ici, que tout l'exercice et le travail que nous avons
fait n'ont qu'une valeur académique. Au contraire. Je pense que
l'objectif global poursuivi par le dépôt de ce projet de loi
était et demeure l'avènement au Québec d'une
législation de la famille, intégrée et cohérente.
De fait, nous avons été à même de le constater, le
projet couvre l'ensemble du sujet, concernant une réforme du droit de la
famille, et toutes les parties de ce projet de loi que nous avons eu à
étudier sont étroitement reliées les unes aux autres.
Je suis convaincu, d'autre part, que si nous ne sommes pas en mesure de
dire, d'ici une journée - je l'espère d'ici demain - que nous
pouvons mettre en vigueur dès maintenant l'ensemble de ce qu'est le
projet de loi 89, à savoir une réforme globale du droit de la
famille, l'obstacle majeur, on le sait - je pense que ce n'est pas nous qui
l'avons inventé, il a été évoqué des deux
côtés de la Chambre - cet obstacle, c'est tout simplement le
retard que je crois inacceptable qui fait que le gouvernement
fédéral n'a pas encore transféré aux provinces
cette juridiction dans le domaine de la famille.
S'il y a un droit - c'est ma conviction profonde - qui doit relever
exclusivement de la juridiction et de la compétence des provinces, c'est
bien le droit familial, parce que le droit familial - on le sait, on n'a pas
besoin de faire un discours là-dessus - rejoint l'essentiel de ce qu'est
une société. On a été à même de
constater lors de l'étude de ce projet de loi, jusqu'à quel point
chacun des articles touche les fibres les plus sensibles des citoyens et des
citoyennnes d'une communauté, quelle qu'elle soit. Je suis convaincu
qu'au moment où on se parle - on parle du Québec - cela ne prend
pas une grande expérience des relations
fédérales-provinciales, des rencontres entre les
différents gouvernements des provinces, ou encore tout simplement la
connaissance de ce que sont les sociétés des autres provinces,
pour se rendre compte que chacune des provinces du Canada représente
vraiment une société qui a des particularités qui font que
c'est une exigence que le droit de la famille soit donné le plus
rapidement possible, en exclusivité, en termes de compétence, aux
provinces.
Nous ne sommes pas les seuls à être différents.
C'est clair que le Québec, comme société, est
différent, que ce soit à cause de ses traditions de droit civil
ou encore à cause de ce que nous sommes: un peuple francophone. Quand
vous allez en Colombie-Britannique et que vous comparez avec Terre-Neuve,
même si on y parle le même langage, ce n'est pas une question de
langage. On se rend vite compte que ce sont deux sociétés
différentes. C'est cette réalité sociale qui exige que le
droit de la famille soit au plus vite rapatrié ou concédé
- on emploiera l'expression qu'on voudra - à la compétence
exclusive des provinces.
Le travail que nous avons fait, je pense, constitue et constituera
peut-être le meilleur argument politique, quel que soit le gouvernement
en place, pour que les autorités fédérales bougent dans ce
domaine. Je crois que le fait d'être capable - je le dis sans
partisanerie, quel que soit le gouvernement - comme gouvernement de dire avec
fierté que nous sommes prêts, que nous avons mis au point
sérieusement une réforme globale du droit de la famille et que
nous sommes prêts, par conséquent, à exercer toutes les
juridictions constitue et constituera, pour quelque gouvernement que ce soit,
le meilleur élément de pression auprès des
autorités fédérales et peut-être auprès des
autres provinces. Il y en a peut-être une ou deux qui ont encore des
hésitations, de sorte que l'entente ne se conclut pas, mais je pense que
c'est un élément important. Si on y ajoutait - et on le verra en
termes d'avenir - toutes les pressions des groupes qui se sont fait entendre au
niveau de la commission parlementaire, les pressions de tous les citoyens et
citoyennes qui sont à même de constater le changement très
positif que
cette réforme globale du droit de la famille
représenterait pour eux si elle était appliquée, si ces
pressions-là s'ajoutaient à celles des gouvernements, cela
bougerait sûrement plus vite que cela n'a bougé jusqu'à
maintenant. Ma conviction de la nécessité qu'au plus vite ces
compétences dans le droit de la famille soient données au plus
tôt aux provinces n'est pas née avec le commencement de
l'étude du projet de loi no 89, en ce qui me concerne. Depuis quatre ans
- presque et demi - que nous avons assumé la responsabilité, en
tout cas en ce qui me concerne, du ministère de la Justice, je suis
capable de dire que, dès les premières réunions
fédérales-provinciales, je n'ai jamais manqué une seule
occasion de sensibiliser mes collègues des autres provinces à
cette nécessité d'en arriver à une entente concernant le
droit de la famille.
Je ne serai pas plus long que cela sur les efforts qui ont
été faits, non seulement par moi, mais aussi par ceux qui m'ont
précédé. Je sais que, dans le temps, M. Choquette - et
dans ce sens-là, j'ajoutais mes efforts à ceux qui m'ont
précédé - a également fait des pressions sur les
autorités fédérales et auprès de ses
collègues des autres provinces. Je pense que cela ne fait que mettre en
lumière, je dirais, le tragique de la situation. Le tragique, ce n'est
pas, une fois adopté ce projet de loi - j'espère demain soir,
pour l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec - essentiellement,
de dire que nous ne pouvons appliquer tout le Code. Le tragique, à mon
sens, c'est le retard incroyable à amener le transfert de ces
juridictions aux provinces qui est attendu depuis trop longtemps.
Je pense que ce n'est pas seulement le ministre, le député
de Saint-Laurent l'a indiqué tout à l'heure, je tiens à le
dire, il ne s'agit pas de gloriole personnelle, j'ai dit, je dis et je redis
que l'adoption de ce projet de loi n'a été possible qu'avec le
concours et la collaboration de tous les membres de la commission
parlementaire; ce n'est donc pas le travail d'un seul homme. Je sais - je ne
commencerai pas à nommer qui que ce soit -jusqu'à quel point j'ai
été épaulé dans ce travail, même avant le
dépôt du projet, par plusieurs de mes collègues et, en
particulier, par le ministre d'Etat à la Condition féminine et
celui qui l'avait précédée, M. Marois. En fait, c'est une
oeuvre d'équipe comme présentement, au niveau de l'adoption, cela
a été aussi, je pense, un travail d'équipe, un travail
sérieux.
Je ne crois que ce soit uniquement le ministre qui souhaite que ce soit
adopté rapidement; ce sont tous les groupes qui se sont fait entendre et
je dirais que c'est toute la population. Je ne dis pas que le projet de loi est
parfait, mais il est clair. Il a de nombreux aspects positifs, on le sait, pour
le mieux-être de l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec.
Si ce n'était qu'une oeuvre académique, comme l'a laissé
entendre le député de Saint-Laurent, je m'expliquerais mal que le
barreau du Québec qui a non seulement le sens du réalisme, mais
le sens juridique, ait insisté à ce point dans certains
télégrammes pour demander une adoption, et je cite: "Une adoption
rapide de ce Livre deuxième tel qu'amendé parce qu'il s'impose,
compte tenu de la situation actuelle du droit matrimonial qui contribue
à entretenir de nombreuses injustices." Je pense qu'on ne peut pas
accuser le barreau de sentimentalité. On ne peut pas l'accuser de ne
rien "connaître au niveau juridique. Le barreau s'est rendu compte - je
pense qu'on s'en rendra compte tous ensemble - que, malgré les obstacles
constitutionnels, une grande partie des dispositions que nous avons
adoptées peut rapidement être mise en application et ce, pour le
mieux-être de l'ensemble de la population du Québec. (21 h 45)
II y a eu aussi de nombreux groupes. Je pourrais reprendre tous les
groupes et associations qui se sont fait entendre à la commission
parlementaire, qui ont demandé une adoption rapide de ce projet de loi,
tout en sachant comme nous qu'il n'est pas parfait, mais sachant aussi qu'il
représente une amélioration majeure par rapport à ce qui
existait auparavant. Je pense que ces gens et ces associations sont quand
même collés à la réalité de tous les jours
autant que chacun des membres de cette auguste commission parlementaire. Ce
n'est pas pour nous que nous avons fait le projet de loi; c'est pour l'ensemble
de la population, c'est pour ces groupes, pour ceux et celles qu'ils
représentent que nous avons mené à terme un travail
sérieux.
Il me reste simplement à souhaiter que d'ici à demain soir
on ait pu procéder à la troisième lecture, qu'on puisse,
quand c'est possible, avec toute la sécurité juridique
nécessaire, avec toutes les précautions qu'on prendra de ce
côté-là, mettre en application rapidement plusieurs des
dispositions. J'ai ici devant les yeux une lettre qui m'a été
adressée par le front commun qui regroupe quelque 70,000 femmes des
diverses régions du Québec et qui demande au gouvernement d'agir
rapidement afin que le Québec soit doté d'un code moderne sur le
droit de la famille. On n'a pas demandé un code parfait et, à
moins de se prendre pour d'autres, ce n'est jamais parfait.
Je continue, en terminant, à compter sur la collaboration de
l'Opposition pour que, d'ici la fin de nos travaux, avant Noël, ce projet
de loi soit adopté.
Mme Lavoie-Roux: Pour la messe de minuit!
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: M. le Président, je ne veux pas...
M. Bédard: Mme la députée parle de la messe
de minuit. S'il était adopté, peut-être que cela en
réjouirait quelques-unes pour la messe de minuit, comme vous le
dites.
M. Marx: Je ne veux pas répéter ce qu'on a dit
pendant deux semaines, ceux qui vont lire le journal des Débats vont
faire leur propre résumé. J'aimerais résumer ma
pensée en cinq points assez concis.
Premièrement, historiquement, c'est le Québec, c'est le
Bas-Canada qui a voulu donner la compétence sur le mariage et le divorce
au gouvernement fédéral; à la Confédération,
c'était voulu, on a donné cette compétence au
fédéral pour toutes sortes de raisons qu'il n'est pas
nécessaire de décrire aujourd'hui. C'est un fait historique.
Deuxièmement, le Parti libéral du Québec est pour
le rapatriement de cette compétence sur le mariage et le divorce, c'est
bien clair, c'est dans notre livre beige. Je dirais aussi que le Parti
québécois, depuis qu'il est au pouvoir, n'a pas fait beaucoup
pour négocier un fédéralisme renouvelé, pour
rapatrier cette compétence ou d'autres compétences.
M. Bédard: Je sais que je ne peux pas soulever de question
de privilège, mais ce que vous dites est contraire à la
réalité. Je pourrais parler de tous nos efforts et j'en aurais
pour plusieurs heures.
M. Marx: M. le Président, je vois encore que le ministre
ne peut pas...
M. Bédard: Souffrir l'injustice!
M. Marx: ... n'a pas de retenue ministérielle. Il ne peut
s'empêcher de m'interrompre. Je pense qu'il est évident -tout le
monde est au courant - que le Parti québécois vise un autre
régime politique que le fédéralisme renouvelé et,
dans ce sens, le Parti québécois n'a pas vraiment
travaillé pour renouveler le fédéralisme canadien et pour
rapatrier cette compétence.
Troisièmement, le Parti libéral est tout à fait
d'accord pour que la femme, dans notre société, soit sur un pied
d'égalité avec l'homme. C'est évident, c'est-à-dire
qu'on a pensé à cela avant que le Parti québécois
ne vienne au pouvoir parce que, dans la Charte des droits et libertés de
la personne, on a effectivement mis la femme sur un pied
d'égalité avec l'homme et on a mis la discrimination basée
sur le sexe hors la loi. Donc, le Parti québécois n'a pas
innové dans ce domaine. En effet, l'Assemblée nationale est tenue
de ne pas faire de discrimination dans un nouveau Code civil à cause de
la Charte des droits et libertés de la personne qui empêche qu'on
fasse une telle discrimination, sauf si on décide de passer outre la
charte.
Le quatrième point, c'est qu'adopter une loi inconstitutionnelle
hors de notre compétence parce qu'on veut un jour rapatrier cette
compétence, ce n'est pas une raison, c'est un non-sens. Parce que le
Parti libéral du Québec veut rapatrier plus de pouvoirs et plus
de compétence que la compétence sur le mariage et le divorce, par
exemple, rapatrier un certain pouvoir sur les communications, est-ce qu'on va
adopter, d'ici quelques semaines, une loi sur les communications, qui ne sont
pas de notre compétence, en disant qu'on va mettre la pression sur le
gouvernement fédéral et que si, un jour, il y a un transfert de
cette compétence aux provinces, notre loi sera valide et en vigueur?
Si on pense ainsi, il faudrait adopter des lois dans plusieurs domaines
d'ici quelques années, même si elles sont hors de notre
compétence.
Mon dernier point, c'est que le gouvernement actuel a en main le rapport
de l'Office de révision du Code civil depuis deux ans et demi. Si le
gouvernement péquiste avait vraiment voulu donner un cadeau pour les
Fêtes de 1980 aux Québécois, il aurait dû commencer
par faire adopter cette loi il y a au moins deux ans. Ce n'est pas une loi
qu'il faut adopter à la vapeur, à la dernière minute avant
les Fêtes, en siégeant jusqu'à minuit. Souvent on ne sait
plus ce qu'on a fait et je pense que ce serait une bonne idée...
M. Marcoux: Vous parlez pour vous-même!
M. Marx: Bon, en voilà un autre...
M. Blank: ... pour la première fois aujourd'hui.
Mme Lavoie-Roux: On vous a fait remplacer ce soir, on peut
changer d'avis!
M. Blank: Un dernier venu, à la dernière minute et
il prend la parole!
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee, vous avez la parole.
M. Marx: Je pense que je vais arrêter maintenant, avant que
je ne sois interrompu une autre fois, mais je promets de laisser le ministre
répondre encore pendant 20 minutes, pour corriger les erreurs, le cas
échéant.
Le Président (M. Laberge): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. J'éviterai
d'entrer dans le débat constitutionnel, il y a assez de
spécialistes autour de la table sur ce sujet, spécialistes que je
respecte d'ailleurs beaucoup. Ils ont beaucoup plus de compétence que je
ne puis en avoir.
Je dois vous dire que j'ai trouvé extrêmement
intéressant de participer à ce débat sur la
révision du Code civil. Je dois quand même noter que le
débat s'est fait dans une atmosphère d'ouverture. Le ministre,
sauf quand il prenait peur, a essayé de permettre qu'une bonne
collaboration s'établisse entre les membres de la commission
parlementaire.
Le ministre évoquait tout à l'heure ce court
mémoire, qui est un résumé qu'un groupe d'associations
féminines nous a envoyé cet après-midi, pour faire
certaines dernières remarques. Il mentionnait que ce groupe
d'associations féminines espère que le gouvernement va agir
promptement à la faveur des intérêts des groupes de femmes.
Évidemment, c'est exact mais il a quand même omis de lire les
quatre premières lignes qui disaient: En conclusion, nous
déplorons la façon expéditive avec laquelle le
gouvernement s'apprête à faire adopter cette loi. Nous comprenons
mal qu'une réforme en profondeur n'ait pas fait l'objet d'une plus
grande information auprès des groupes concernés. Et là,
c'est la dernière phrase à laquelle le ministre a fait
référence. C'est évident que quand ces gens nous voient
assis ici, en commission parlementaire, les dés sont jetés, d'une
certaine façon. Le gouvernement a décidé de ne pas tenir
de commission parlementaire, a décidé que c'était une
question de vie ou de mort que ceci soit adopté avant Noël, alors
ils se sont dit: Au moins, essayez de faire le mieux possible et travaillez
dans nos intérêts. Je pense que je ne fais pas
d'exagération en interprétant ce dernier paraqraphe de cette
façon.
À tout événement, M. le Président, ce
n'était pas le point principal sur lequel je voulais revenir. C'est
simplement parce que le ministre l'avait mentionné. Nous avons
essayé, du côté de l'Opposition officielle, de faire la
contribution la plus valable possible et je pense en particulier à mon
collègue de Saint-Laurent. Je ne veux pas minimiser le travail des deux
autres, mais c'est quand même le chef ou le porte-parole de notre groupe.
Il reste qu'en dépit des efforts que nous avons déployés,
il y a des inquiétudes qui, à mon point de vue, demeurent et qui
sont réelles et qu'on a retrouvées, à un endroit ou
l'autre, dans les mémoires, particulièrement de ceux qui sont
venus des associations féminines. Entre parenthèses, je tiens
à souligner - et c'était peut-être normal dans les
circonstances puisque, finalement, la journée où tout sera mis en
oeuvre, ce sont les femmes qui seront davantage touchées; les hommes
aussi, mais je pense que c'est à l'égard du statut des femmes
à l'intérieur de la famille qu'on aura apporté le plus
d'améliorations.
Je pense que, sauf pour la Chambre des notaires, le Barreau et le
Conseil des services sociaux - je m'excuse si j'en omets d'autres - ce sont
toutes des associations féminines qui ont présenté des
mémoires, qui en bien des occasions ont fait des représentations
fort pertinentes et je salue en passant la représentante du Conseil du
statut de la femme et celle du RAIF. Je pense que leur
persévérance à assister aux débats mérite
d'être inscrite au journal des Débats. Malgré la longueur,
la sécheresse du sujet elles ont fait valoir leurs idées de temps
à autre, puisqu'on n'avait pas permis qu'elles soient entendues de
nouveau en commission parlementaire. Enfin, je souligne les suggestions
qu'elles ont faites et leur apport à ce travail, c'est-à-dire
à l'amélioration de ce projet de loi.
Je mentionnais certains points que j'aurais voulu peut-être
améliorer et on ne semble pas - non pas par mauvaise volonté,
c'est parce qu'on n'a pas eu le temps, je pense - on n'a pas trouvé les
bons moyens pour le faire, c'est-à-dire qu'on ne semble pas avoir les
moyens à ce moment-ci pour corriger ce qui me paraît encore des
lacunes. Par exemple, la définition de l'accroissement de l'actif. On
l'a corrigé un petit peu. Même si on m'a dit que dans le Code
civil plus on laisse cela large, plus cela donne une chance au juge de faire
des interprétations plus généreuses, il y a
peut-être l'imprécision qui permet aussi d'agir dans un autre sens
et qui soit restrictif. C'est une réflexion que je fais.
Du côté de la résidence familiale, on a
indiqué ce matin, quant à la protection de la résidence
familiale, à la déclaration de la résidence familiale, en
particulier l'effort que nous avons fait de ce côté-ci,
l'amendement du député de Saint-Laurent sur la protection de la
résidence familiale pour les enfants mineurs issus de conjoints de fait,
ce qui nous apparaissait un point important. Il y a le mariage pour les mineurs
auquel le gouvernement n'a pas voulu souscrire. Je pense que ce sont des points
qu'il serait peut-être souhaitable - je ne sais pas, je me demandais
quelle était l'échéance du ministre. Je lui avais
posé la question il y a trois jours et il ne m'a pas répondu.
Là, il semble laisser entendre que ceci devra être adopté
demain. En tout cas, il aurait peut-être été souhaitable
que ceci mûrisse encore plus et qu'un temps de réflexion
supplémentaire soit accordé parce que même si on peut
s'attribuer l'épithète de sages, il serait peut-être bon
que les sages de l'extérieur aussi puissent réagir au travail qui
a été fait ici en commission parlementaire.
C'est simplement une mention que je fais en passant.
(22 heures)
Le but de tout cet exercice, l'objectif principal, était, je
pense, d'assurer une plus grande égalité aux femmes. Mais, encore
une fois, même avec les progrès réalisés si tout
ceci est mis en oeuvre, il restera encore énormément de
lacunes.
Le dernier point que je voudrais soulever comme exemple de ceci c'est le
problème qui reste quand même, je ne dirais pas entier, mais
très très prononcé de cette question de perception des
pensions alimentaires. On a beaucoup parlé de pensions alimentaires au
cours du débat, mais il reste que dans la réalité des
choses - ne serait-ce que pour signaler un exemple, l'égalité ou
la justice envers le conjoint qui doit percevoir cette pension alimentaire, et
on sait que dans 75% ou 80% des cas, sinon davantage, ce sont des femmes - on
sera encore loin d'une justice aussi complète que tous les membres
autour de la table souhaiteraient voir pour les femmes.
M. le Président, j'arrête ici mes remarques et je fais un
souhait en terminant: qu'on puisse encore avoir une période de
rétroaction de la part des gens que ce projet de loi touche d'une
façon particulière et peut-être aussi des experts qui sont
à l'extérieur de notre groupe de travail. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Laberge): Merci, Mme la
députée. M. le député de Saint-Louis.
M. Blank: Je veux simplement ajouter quelques mots à ce
que ma collègue a dit. Je fais partie du groupe qui, en 1964, a
passé la fameuse loi no 10 à laquelle le ministre a fait
allusion. Au moins, dans la loi no 10, on a tenu pour acquis qu'on avait ce
pouvoir. Les lois nos 16 et 10. Mme Claire Kirkland-Casgrain était
marraine de la loi no 10 et de la loi no 16, en 1964. Au moins, on a tenu pour
acquis qu'on avait ce pouvoir, il n'était pas contesté. On a pris
le boeuf par les cornes et on a dit: On a ce pouvoir et on fait adopter cette
loi. Il y a une grande différence entre les lois de 1964 et la loi
d'aujourd'hui, où, même dans cette loi, on admet qu'on n'a pas de
pouvoir, on le sait depuis le commencement. C'est ce qu'on appelle en anglais
un "charade". Ce n'est pas légal. On adopte une loi en sachant qu'on
n'avait pas le pouvoir de l'adopter. Je me pose la question à savoir
pourquoi on l'a adoptée. La réponse est facile à trouver.
J'aimerais être d'accord avec le ministre pour dire que c'est un moyen de
pression sur le fédéral pour qu'il nous donne le pouvoir
d'adopter une loi semblable. Ici, nous sommes un groupe de politiciens. Nous ne
sommes pas des gens du peuple ordinaire, comme on dit. Nous sommes des
politiciens. On sait pourquoi. Vraiment on doit être honnêtes avec
nous-mêmes.
Si on veut faire une pression, on dépose une loi, on fait du
bruit et on applique les pressions. Mais si on veut adopter une loi, pourquoi?
Ce n'est pas pour faire des pressions auprès du fédéral
parce que déjà il y avait des accords entre les provinces, elles
sont presque toutes unanimes et le fédéral est un peu d'accord.
On était presque d'accord sur tout. Des événements sont
intervenus entre temps mais le fait qu'on ait cette loi ici aujourd'hui...
Quand le ministre a déposé cet projet de loi en Chambre,
j'étais très heureux. C'est après des commissions
parlementaires où des gens ont déposé leur mémoire
et donné leur opinion que le ministre a déposé cette loi
et j'ai pensé: Cette loi est déposée pour faire une
pression sur l'opinion publique et donner la chance à des gens de savoir
ce qu'on peut avoir comme droits. Mais ce n'était pas l'intention du
gouvernement. L'intention du gouvernement est d'essayer de faire adopter cette
loi à la vapeur. Pourquoi? Pour donner l'impression au public qu'on a
une loi, que le gouvernement a fait quelque chose pour lui. Prenez les gens
dans la rue, aux "lignes ouvertes" ou partout au Québec. Ils vont penser
qu'ils ont ces droits. Du moment que le gouvernement adopte le projet de loi,
ils pensent qu'ils ont cela, que le gouvernement leur a donné un cadeau,
qu'il a placé la femme sur un pied d'égalité avec l'homme.
On donne des droits pour protéger la résidence familiale. C'est
tout cela. Mais ce n'est pas vrai du tout et le ministre sait cela. C'est une
façon partisane d'essayer d'adopter cette loi. Je suis
désolé de dire cela, mais c'est la vérité.
Le fait est que le ministre lui-même a dit qu'il espère que
la loi - je ne dis pas qu'il veut - soit adoptée avant demain soir.
Pourquoi? Qu'est-ce que cela va donner de plus? Déjà, le
gouvernement fédéral sait qu'on veut adopter une loi semblable.
Quand c'est déposé en première lecture, il sait cela, mais
on se vante dans les media, à la télévision, dans les
journaux, avec des dépliants payés par les fonds publics partout.
On adopte une loi qui donne une égalité, mais on ne dit pas que
la loi n'est pas en vigueur. Il dit: On a adopté une loi. On fait cela
et cela pour vous. Mais ce n'est pas vrai du tout. C'est une façade
qu'il veut montrer à la population.
Je vais vous dire franchement, s'il n'en était que de moi seul,
cela ne passerait pas. Il faudrait mettre tout cela de côté,
mettre toute la partisanerie de côté, mettre tout de
côté ce que le gouvernement a essayé de passer à la
population comme quelque chose qu'il a fait, mais qui n'est pas vraiment fait.
On a vraiment changé cette loi depuis le dépôt en
première lecture. Comment peut-on avoir - je vais utiliser ce mot -
l'orgueil
d'adopter cela avant que les gens sachent que ça passe?
Franchement, j'ai jasé avec des députés ici au café
du parlement, des députés des deux côtés de la
Chambre et j'ai parlé de quelque chose qui est dans la loi, de certains
articles qui les affectent ou qui affectent leur famille. Ils n'étaient
même pas au courant. Ils n'étaient même pas au courant, les
députés de cette Chambre. Oui, les membres de la commission
parlementaire de la justice sont au courant parce qu'on est impliqué
dans l'affaire, mais demandez aux 100 autres députés ce qu'il y a
dans cette loi. Ils ne sont pas au courant. Comment peut-on adopter quelque
chose qui peut bouleverser tout le système de la famille ici au
Québec sans avoir au moins l'opinion de ces gens?
La meilleure chose qu'on peut faire, c'est - je ne veux pas utiliser le
mot bloquer - arrêter l'adoption de cette loi au moins jusqu'au mois de
mars ou avril. Les gens auront la chance de lire le projet de loi et de
réagir, mais qu'on ait des pétitions à la Chambre des
communes, cela ne m'impressionne pas. C'est très facile d'avoir toutes
ces affaires parce que ces gens pensent que, le moment où on adoptera
cette loi, on va avoir quelque chose de nouveau au Québec. Mais ce n'est
pas vrai. Pourquoi ne dit-on pas à la population du Québec que
c'est seulement un essai et qu'on n'a pas le droit d'adopter cette loi? On n'a
pas le pouvoir d'adopter presque 90% de cette loi. Oui, 10% on a le droit,
mais, si on voulait en adopter 10%, pourquoi ne fait-on pas comme on l'a fait
une dizaine d'années, des amendements au Code civil par une loi
spéciale? On peut changer ces articles pour avoir les mêmes
pouvoirs, mais vous dites au Québec: On a un nouveau Code civil. Ce
n'est pas vrai du tout.
M. Marx: Un gouvernement d'emballage.
M. Blank: Même le titre de la loi induit la population en
erreur. C'est une loi pour instituer un nouveau Code civil et portant
réforme du droit de la famille. C'est peut-être un amendement au
droit de la famille, mais ce n'est pas un nouveau Code civil. C'est seulement
un chapitre du Code civil, mais ils donnent l'impression qu'on donne un nouveau
Code civil à la population.
M. Marx: Emballage.
M. Blank: C'est toute une affaire de publicité et de
propagande. Ce n'est pas vrai du tout, mais qu'on dise au moins la
vérité à la population. Qu'on laisse cette loi en suspens
jusqu'à ce qu'on ait le pouvoir de l'adopter et, après, on dira
à la population: Oui, on vous donne quelque chose. C'est nous de ce
côté-ci qui avons commencé cette réforme. C'est nous
qui voulions adopter cette loi, mais on sait qu'on n'a pas les pouvoirs. Si on
a les pouvoirs, on va l'adopter. On est en faveur de presque tous les
amendements, tous les changements pour moderniser le Code civil, mais on veut
moderniser le code avec tout le reste du code. De faire cela point par point
pour des fins politiques, des fins partisanes, je pense que c'est un peu
malhonnête vis-à-vis de la population. On doit arrêter cela.
On doit dire la vérité à la population. La meilleure
façon est de mettre cela de côté, de faire faire une
réimpression de ce projet de loi et d'envoyer des copies à tous
les groupements intéressés, les laisser l'étudier, voir
les réactions, et, après cela, attendre d'avoir les pouvoirs et
procéder.
M. Bédard: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Bédard: Je vois que la partisanerie a repris rapidement
le dessus une fois le projet de loi adopté. C'est loin d'être la
grande vérité, au contraire.
M. Marx: D'accord. Maintenant vient la vérité.
M. Bédard: Quand je vois le député de
Saint-Louis, après qu'on ait travaillé durant des heures et des
heures pour en arriver à adopter ce projet de loi, se poser la grande
question: Pourquoi a-t-on passé ce projet de loi? en laissant entendre
que ce ne serait qu'une sorte de trompe-l'oeil par rapport à l'ensemble
de la population, il me donne l'impression de ne pas savoir, même
après l'avoir étudié... Je vous ai laissé parler,
laissez-moi parler. Il me donne l'impression de ne pas savoir, même
après l'avoir étudié, ce que représente ce projet
de loi. Je vais lui donner juste un exemple. Prenez tous les réqimes
matrimoniaux, tout le domaine des régimes matrimoniaux qui
représente une amélioration fantastique par rapport à la
réalité, par rapport à ce qui existait jusqu'à
maintenant, tout cela, vous pouvez le mettre en vigueur. Vous avez l'air
d'oublier cela.
M. Blank: Amendez le code. M. Marx: Amendez le code.
M. Bédard: Est-ce que vous nous permettez de discuter?
M. Forget: Ce que vous faites, c'est que vous abrogez les parties
relatives à la communauté de biens. Ce n'est pas
énorme.
M. Bédard: Au contraire, je pense que je pourrais relire
tout le journal des Débats - vous avez la mémoire courte - pour
voir
les témoignages d'appréciation que vous avez
vous-même donnés concernant ces améliorations. Franchement,
vous me renversez!
J'écoutais le député de Saint-Louis essayer, d'une
façon partisane, d'interpréter les intentions du gouvernement, et
sa manière partisane d'interpréter ces intentions me
montrent...
M. Marx: Maintenant, vous êtes au-dessus de la
partisanerie.
M. Bédard: ... quelles seraient les motivations du
député de Saint-Louis ou de l'Opposition, s'ils ne voulaient pas
procéder à l'adoption de ce projet de loi.
Franchement, quand on regarde non seulement tout le domaine des
régimes matrimoniaux, mais - je l'ai mentionné tout à
l'heure - tout le domaine de la filiation, de l'adoption, de l'obligation
alimentaire, de l'autorité des parents, de l'hypothèque
judiciaire, c'est clair que lorsqu'on fait une grande réforme, comme le
disait la députée de L'Acadie, on a toujours, des
inquiétudes sérieuses. C'est normal. Mais je pense que ce qui
devrait nous inquiéter beaucoup plus, ce sont toutes ces injustices,
toutes ces inégalités que nous avons corrigées avec ce
projet de loi et qui continueraient d'exister si nous n'avions pas le minimum
de décence pour faire en sorte que le projet de loi soit adopté
et que, là où c'est possible, avec toute la
sécurité juridique dont il faut entourer l'opération,
là où c'est possible, au moins, on les corrige, les injustices,
en attendant de corriger le reste, lorsque les juridictions constitutionnelles
seront rapatriées. Ce n'est pas parce qu'il y a une partie du code qui
ne peut pas être mise en vigueur, où on corrige beaucoup
d'injustices, à mon sens, qu'on doive s'empêcher, et rapidement,
de se donner les moyens de corriger les autres injustices qu'on peut corriger,
parce que c'est de notre juridiction.
Votre attitude, à mon sens, est une négation même
des pouvoirs qui existent au niveau du Québec et qui nous permettent de
mettre en application de nombreuses dispositions du projet de loi que nous
avons adopté et de corriger de nombreuses inégalités et
injustices.
Le député de Saint-Louis dit que les gens ne savent pas
quels sont leurs droits. Je pense que ce sera notre responsabilité de
leur faire connaître tout le contenu de ce que représentent ces
dispositions que nous avons adoptées. (22 h 15)
M. Blank: C'est exactement cela.
M. Bédard: Est-ce que c'est cela qui vous fatigue? Est-ce
que pour des fins partisanes...
M. Forget: C'est cela qui nous fatigue. Exactement, vous avez
compris. Vous faites des progrès, M. le ministre, vous faites de grands
progrès!
M. Blank: ...qui n'ont pas de pouvoirs.
M. Bédard: D'accord. Je viens de comprendre. Alors, ce que
vous venez de me dire, ce n'est que pour des fins partisanes parce que vous
avez peur qu'on informe la population des améliorations que nous avons
apportées par le projet de loi 89 et que ces améliorations
prennent le dessus, pour l'ensemble de nos citoyens et citoyennes du
Québec, sur l'intérêt politique. Je pense que chacun fera
son choix.
M. Marx: Vous êtes le seul au-dessus de la partisanerie.
Vous ne savez pas cela?
M. Bédard: Je pense que chacun fera son choix de ce
côté-là. On parle du manque de préparation. Je ne
voudrais pas revenir sur tout ce qu'on a dit, on en aura l'occasion lors de la
troisième lecture. On oublie toujours une chose, c'est que ce projet de
loi no 89 est déposé depuis au-delà de neuf mois devant
l'Assemblée nationale. Que l'Opposition ne vienne pas dire qu'elle n'a
pas eu le temps de se préparer.
M. Blank: ...seulement deux semaines avant la fin.
M. Bédard: II y a des choses que j'accepte, mais à
un moment donné il faut arrêter de charrier. Vous avez eu neuf
mois pour vous préparer.
M. Blank: La deuxième semaine de décembre.
M. Bédard: Vous avez eu neuf mois pour vous
préparer. Si vous avez commencé à vous préparer
seulement dans les dernières minutes...
M. Forget: Cela n'a même pas suffi à vous, M. le
ministre.
M. Bédard: ...n'essayez pas de nous rendre responsables de
cela. J'ai même entendu dire, à un moment donné...
M. Blank: C'est nous autres qui améliorons votre loi.
M. Bédard: Tant mieux! Vous l'avez
améliorée. Je suis content et je le dis, encore une fois. Je suis
heureux de le dire. J'en remercie tous les membres de la commission
parlementaire et, d'une façon tout à fait particulière, le
député de Saint-Laurent, du côté de l'Opposition
officielle, et tous les députés qui ont apporté des
améliorations. Mais pourquoi était-on ici? Pour apporter
des améliorations.
M. Blank: On fait notre travail.
M. Bédard: Bon, vous avez fait quoi? Vous n'avez fait que
votre travail.
M. Blank: Oui, mais...
M. Bédard: Je pense que c'est votre devoir maintenant de
faire en sorte, en l'entourant de toutes les précautions
nécessaires, qu'on trouve le moyen d'adopter ce projet de loi le plus
rapidement possible pour en faire bénéficier l'ensemble de la
population. Par exemple, le député de D'Arcy McGee disait: II y a
deux ans que vous auriez dû l'adopter. Or, le ministre d'État
à la Condition féminine n'est peut-être pas à la
table, mais je peux vous dire une chose...
M. Blank: ...invite ici. Ce n'est pas important.
M. Bédard: ...il y en a qui travaillent dans l'ombre. Ce
n'est pas parce qu'on travaille dans l'ombre qu'on travaille d'une façon
moins efficace.
M. Blank: On travaille dans l'ombre et on appelle cela de la
transparence.
M. Bédard: Non, au contraire.
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: Je crois que les nombreuses réunions que
j'ai eues avec le ministre d'État à la Condition féminine,
dont les préoccupations concernant l'amélioration du droit de la
famille ne datent pas d'aujourd'hui, ont été de nature à
améliorer le projet, comme, par exemple, la députée de
L'Acadie par de nombreuses interventions, de nombreuses suggestions. Je le dis,
parce que je le crois.
M. Blank: ... pas avocat!
M. Bédard: Ce n'est pas nécessaire d'être
avocat. Le ministre d'État à la Condition féminine n'est
pas avocat non plus et je pense que...
M. Blank: ...ses lois dans les mains...
M. Bédard: Je pense que la députée de
L'Acadie y est allée de nombreuses suggestions qui ont été
de nature à améliorer le projet de loi, comme le ministre
d'État à la Réforme électorale, à sa
manière. Le député de D'Arcy McGee disait: Cela fait deux
ans et demi que vous auriez dû... Il ne se rend même pas compte
jusqu'à quel point cela ne tient pas debout, ce qu'il dit. Il y a deux
ans et demi, on n'avait même pas encore le rapport de l'Office de
révision du Code civil. C'est là qu'on voit que c'est une
argumentation partisane comme ce n'est pas possible.
Imaginez-vous ce qu'aurait pu dire l'Opposition et les groupes
concernés s'il avait fallu s'engager dans la réforme du droit
civil sans même attendre le rapport de l'Office de révision du
Code civil qui y travaillait depuis 23 ans. Franchement, là, on aurait
eu raison de nous faire des reproches, comme on aurait eu raison de nous faire
des reproches si, ayant déposé le projet de loi au printemps de
1980, nous avions voulu bousculer et faire adopter ce projet de loi à la
fin de l'été 1980. Au contraire, nous l'avons laissé et
nous n'avons fait aucune pression pour essayer de le faire adopter. Nous
l'avons laissé là...
M. Marx: Alors, pourquoi n'avez-vous pas commencé au mois
d'octobre?
M. Bédard: ... pour permettre...
M. Marx: Pourquoi la deuxième semaine de décembre
et pas au début d'octobre? Pourquoi?
M. Bédard: Écoutez...
M. Marx: Pourquoi?
M. Bédard: Vous avez...
M. Marx: Pourquoi?
M. Bédard: La session a commencé...
M. Marx: Pas d'excuses, là!
M. Bédard: M. le Président, j'espère que
j'ai le droit de parler. J'ai laissé le député s'exprimer,
tout à l'heure.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre, vous avez droit
à tous vos commentaires.
M. Guay: La motion que vous avez refusé d'adopter, cela ne
vous dit rien?
M. Bédard: C'est le genre d'argument qui devient...
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: ... tellement partisan qu'à un moment
donné il est complètement coupé de la
réalité. Durant neuf mois, tous les groupes se sont fait entendre
sur le rapport de l'Office de révision du Code civil. J'ai pris la peine
de demander à tous ces
groupes... Je pense que la preuve est faite que nous avons tenu compte
de l'ensemble des représentations faites par ces groupes sans pouvoir
donner suite à toutes les recommandations, naturellement.
M. Marx: Pourquoi n'avoir pas siégé au mois
d'octobre?
M. Bédard: Nous avons également recommuniqué
avec ces groupes pour voir s'il y avait des suggestions supplémentaires,
afin de les mettre à contribution, pour l'ensemble des membres de la
commission parlementaire.
M. Blank: ... communiquer avec les groupes sur cette nouvelle
loi.
M. Bédard: Est-ce que je peux parler, M. le
Président?
Le Président (M. Laberge): Bon! M. Blank:
Excusez-moi. M. Bédard: Franchement...
Le Président (M. Laberge): Un moment, un moment!
M. Bédard: ... je vous ai laissé dire ce que vous
aviez à dire.
Le Président (M. Laberge): Allez-y, M. le ministre.
M. Bédard: Non, je vais arrêter là. Je sais
que le député de Saint-Laurent a à parler. Si j'ai
à ajouter d'autres commentaires, je le ferai. Je pensais que les travaux
de la commission se termineraient simplement par quelques phrases qui, pour
moi, auraient été simplement dans le sens de remercier tous les
membres de la commission de leur collaboration, de remercier aussi d'une
façon tout à fait spéciale les experts qui nous ont
accompagnés tout au long de ces travaux et qui ont répondu
à toutes les questions, toutes les interrogations qui ont
été soulevées par les députés de
l'Opposition et aussi par les députés du côté
gouvernemental, les experts que je félicite, solidairement avec le
député de D'Arcy McGee. Il est clair qu'un travail comme
celui-là ne se fait pas sans le concours d'experts. Ce n'est pas parce
qu'on commence à étudier le Code civil que, du jour au lendemain,
on devient des experts en la matière. Ces experts travaillent depuis de
nombreux mois. Même pendant que certains ne travaillaient pas au Code
civil, un groupe d'experts y travaillait et se préparait à
répondre aux interrogations normales des membres de la commission.
C'est en remerciant tout le monde, et d'une façon - je le dis
encore une fois - spéciale le député de Saint-Laurent, que
je termine mes représentations, à moins que je croie devoir
ajouter quelques mots après l'intervention du député de
Saint-Laurent.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent, vos remerciements au nom de la commission.
M. Forget: Non, ce n'est pas...
M. Bédard: Avant que le député de
Saint-Laurent ne discoure, il y a la motion traditionnelle pour
renuméroter les articles du projet.
Une voix: Après l'adoption de 75.
M. Bédard: Après l'adoption de 75, ça
va.
Le Président (M. Laberge): Parfait.
M. Forget: M. le Président, brièvement,
malgré tout. Je pense que je vais devoir exprimer mon accord avec le
ministre lorsqu'il dit qu'il n'est pas raisonnable de lui reprocher de ne pas
avoir présenté ce projet de loi plus tôt, de ne pas avoir
commencé l'étude plus tôt. Effectivement, peut-être
que mes collègues ont fait une invitation, ont fait une suggestion qui
n'était pas sage. Le ministre a eu raison, effectivement, de retarder
jusqu'à maintenant l'étude du projet de loi et de ne pas l'avoir
commencée en octobre ni même en novembre, au point même que
je serais porté à lui donner raison et à me demander s'il
aurait dû commencer à l'étudier au mois de décembre,
parce que, enfin, commencer à l'étude de ce projet de loi
supposait, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, des
réponses à des questions fort importantes qui sont
déterminantes pour l'application du projet de loi, des réponses
qu'il n'a pas, qu'il ne peut pas nous offrir et qu'il ne peut même pas
nous promettre pour un avenir immédiat.
Je pense que la préparation d'un tel projet doit requérir
un temps très long; un temps d'autant plus long que j'ai eu
l'impression, au cours de l'étude de ce projet de loi, que, si les
experts avaient été diligents - et, ça, aucun doute, ils
l'ont été - leur travail, me semble-t-il, aurait pu être
facilité si certaines orientations, au niveau politique, avaient
été prises de manière plus appropriée.
Il me paraît évident, à la suite de l'étude
du projet de loi, que certaines questions de fond - mon collègue de
L'Acadie en a soulevé quelques-unes - que soulève, à notre
époque, la remise en question d'institutions comme le mariage et tout ce
qui gravite à l'entour de cette question supposent, au-delà de
l'expertise, au-delà de la connaissance des textes et de la
jurisprudence, des décisions politiques -
dans le sens le plus noble possible qu'on puisse donner à ce mot
- des choix entre des modèles d'organisation de cette institution
sociale qu'est la famille.
J'ai très clairement l'impression que le gouvernement n'a pas
été au fond de cette réflexion, qu'il s'est
arrêté sur des formules qui semblaient ménager les uns et
les autres, mais qu'il ne s'est résolu à aller au fond que
parfois, à la toute dernière minute. Je peux comprendre que, dans
ce contexte, les experts qui se sont chargés de la rédaction ont
dû, parfois, être retardés et, parfois, hésiter
même avant de prendre telle ou telle voie.
À tout événement, indépendamment de ce qui
est contenu dans le projet de loi, la préparation pour l'adoption d'un
nouveau Code civil n'est certainement pas complète. On a confiné
à d'autres textes qui ne sont pas encore rédigés, des
éléments déterminants pour son application.
Alors, c'est se payer la tête de tout le monde, y compris les
membres de l'Assemblée nationale, que de dire: qu'on fait un plat de la
question constitutionnelle. La question constitutionnelle ne se posait
absolument pas. Je défie qui que se soit, du côté
gouvernemental, de me dire qu'on pourrait appliquer le nouveau Code civil le
1er janvier. Absolument pas, il faudrait attendre une nouvelle session de
l'Assemblée nationale avant d'avoir les textes capables de nous donner
les moyens de l'appliquer, sur le plan de la procédure, sur le plan des
concordances nécessaires; ce ne sont pas simplement des fantaisies, ce
sont des concordances nécesssaires; on ne peut pas abroger certaines
lois et laisser en l'air certaines dispositions qui doivent les accompagner.
Alors, il est sûr que la préparation n'est pas complète, il
est sûr qu'on adopte une partie de réforme, on n'adopte pas toute
une réforme et que, indépendamment des problèmes de
compétence, c'est un travail qui est incomplet.
Je n'ai pas besoin d'insister sur le caractère absolument
trompeur et mensonger du titre même du projet de loi. Ce n'est pas vrai
que nous adoptons un nouveau Code civil; nous adoptons des
éléments de réforme d'un Code civil ou une réforme
d'une partie du Code civil ou nous adoptons un nouveau chapitre portant sur le
droit de la famille, c'est tout ce que nous faisons.
Cette réforme n'est pas complète, comme je le disais tout
à l'heure, parce qu'elle ne pourrait pas s'appliquer; même si nous
avions aujourd'hui tous les pouvoirs qu'Ottawa détient actuellement dans
le domaine du droit de la famille, il nous serait impossible de l'appliquer le
1er janvier, le 1er février ou le 1er mars, il faudrait revenir à
l'Assemblée nationale et adopter un certain nombre d'autres lois. Alors,
il ne faut pas se faire d'illusions et prendre les protestations de zèle
et d'impatience du ministre pour de l'argent comptant, ce n'est que de la
poudre aux yeux, de ce côté.
Encore une fois, sur le plan de la préparation, je pense que,
pour le répéter, parce qu'il faut le répéter, la
préparation est incomplète. (22 h 30)
Je m'en voudrais aussi, étant donné les remarques qu'a
faites le ministre et les bruits de fond de scène que nous avons
entendus, de ne pas remarquer l'absence à la commission parlementaire de
son collègue dont il a dit beaucoup de bien - il faut prendre sa parole
là-dessus - mais qui ne s'est pas manifesté autrement que par des
commentaires de fond de scène dans l'étude qui a duré cinq
jours d'un projet de loi auquel pourtant, elle veut indirectement attacher son
nom. Je m'en étonne. Si vraiment l'équipe gouvernementale est une
équipe, il me semble...
M. Bédard: C'est injuste à son endroit.
M. Forget: Non, ce n'est pas injuste parce qu'elle aurait pu,
dès le début, apparaître et prendre la parole à la
commission parlementaire. Je pense que ce n'est peut-être pas injuste
à son égard autant que vis-à-vis du ministre. Je pense
qu'il n'y a pas le degré de confiance entre ces membres du Conseil des
ministres pour qu'ils paraissent à deux sur une commission
parlementaire. Ne voulant pas se contredire, on s'est abstenu d'y figurer. M.
le Président, il est évident que nous n'avons pas soulevé
le problème de la constitutionnalité inutilement. Je lis
simplement ce que je retrouve à l'article 75 où on affirme
qu'"aucune proclamation ne pourra être faite qui viserait à mettre
en vigueur une disposition de la présente loi, dans une matière
relevant de la compétence législative du Parlement du Canada en
vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867..."
Que le ministre de la Justice n'aille pas nous dire que c'est nous qui
voulons diminuer la compétence du Québec. Il a pris soin
d'inscrire cette précaution dans le texte même du projet de loi.
On ne diminue rien du tout. On voudrait tout simplement connaître quelle
est la portée de cette diminution officielle ou officiellement
consacrée dans son projet de loi de la capacité du Québec,
parce que c'est important pour les gens à qui cela s'applique. Ce n'est
pas simplement une question de politique. Ce n'est pas simplement une question
de négociations fédérales-provinciales. C'est important
pour ceux à qui cela s'applique. Il me semble que si
véritablement sa préparation est complète pour la
présentation et l'adoption de ce
projet de loi, il devrait être en mesure de nous donner ces
précisions, de les communiquer à l'Assemblée nationale, de
les communiquer à la commission dont c'est la tâche d'examiner le
projet pour voir s'il est correct.
On ne sort pas de notre compétence quand on pose une question sur
la capacité ou le pouvoir de l'Assemblée nationale d'adopter un
projet de loi ou d'adopter un article en particulier. Nous faisons notre
travail. Cela implique aussi de se poser des questions sur la validité
de ce qu'on est amené à faire. Des réponses de ce
côté, nous n'en avons pas. La disposition qu'on retrouve ici,
à l'article 75, je ne sais pas si on mesure très bien qu'elle
constitue un précédent. Nous n'avons jamais, dans une autre loi
adoptée par l'Assemblée nationale au Québec, inscrit la
précaution de dire qu'une partie de ce qui est fait dans le projet de
loi en question est ultra vires, sans préciser laquelle des parties. On
n'a jamais inscrit une telle disposition dans nos lois. C'est un
précédent. Il me semble que le ministre, plutôt que
d'accuser l'Opposition, de faire de la partisanerie alors que lui-même
reconnaît le bien-fondé de l'objection, aurait dû au
contraire dire: Nous avons mis cet article de façon à ne pas
jeter une discrédit général sur l'ensemble de la loi, de
ne pas créer une incertitude qui s'attache indifféremment
à presque tous les articles, à cause des renvois et à
cause des concordances multiples que le projet comporte; voici notre opinion et
la position de notre gouvernement relativement à l'effet de cette clause
sur telle et telle partie du projet de loi. On saurait ainsi à quoi
s'attendre au niveau de la mise en vigueur sélective, mais le silence a
été complet.
M. le Président, je veux rendre très formelle cette
invitation au ministre de dévoiler ce qu'il sait, ce que le gouvernement
sait quant à la siqnification réelle de l'article 75. Il nous
accuse de l'exagérer. Fort bien. Si nous l'exagérons, c'est parce
qu'il sait, lui, la vérité. S'il ne sait pas la
vérité, il ne peut pas nous accuser d'exagération. Je
pense qu'il conviendra avec moi du bien-fondé d'une position comme
celle-là.
M. Bédard: Je vous en parlerai tout à l'heure.
M. Forget: S'il sait ce qu'est la véritable signification
de l'article 75, il a le devoir comme ministre de la Justice... Ce n'est pas
n'importe quel ministre. C'est le ministre de la Justice responsable de
l'application des lois. Ce n'est pas le ministre - je ne sais pas moi - du
Transport ou des Communications qui pourrait oublier, à un moment
donné, qu'il y a des problèmes de constitutionnalité dans
les lois. C'est le ministre de la Justice. Il nous dit: Attention, une partie
de ceci, nous n'avons pas le pouvoir de le faire. Il nous accuse
d'exagérer. Fort bien. Nous n'avons pas l'expertise dont il dispose.
Alors, qu'il nous dise exactement en quoi nous exagérons et sur quoi il
s'appuie pour affirmer que nous exagérons. Je pense que la seule
façon de le faire, M. le Président, c'est de déposer... ce
n'est pas de dire, tout simplement: Ah, vous savez, l'Opposition a des motifs
partisans. Evidemment, on a des motifs partisans, ce n'est pas le ministre de
la Justice qui a inventé ça, lui aussi en a. Je pense que s'il
veut vraiment faire un dévoilement général des motivations
de tout le monde il pourrait commencer par faire un mea culpa et nous dire
quelles sont ses motivations partisanes, parce que autant que je sache il
n'appartient pas à la magistrature, pas encore du moins.
M. Bédard: Non.
M. Forget: Alors, s'il n'appartient pas à un corps
d'élite si célèbre, peut-être a-t-il lui aussi des
motivations partisanes et s'il ne veut pas en faire l'aveu, on pourrait
peut-être lui en imputer, comme il ne s'est pas privé de nous en
imputer. Mais mettons ça de côté, M. le Président.
À supposer que l'on exagère, est-ce qu'il n'y a pas de meilleure
façon, de plus belle façon d'en faire la démonstration que
de dire: Voici la vraie situation quant à la constitutionnalité,
et d'informer nos collègues de l'Assemblée nationale exactement
de ce qu'ils vont faire qui est illégal dans les prochaines heures ou
qu'est-ce qu'il va les inviter à faire qui est vraiment au-delà
du droit, s'il n'aime pas l'expression illégalité.
Motion pour dépôt de documents
La motion que je veux présenter, M. le Président, dans ce
contexte, se lit de la façon suivante: "La commission parlementaire de
la justice souhaite - je pense que c'est recevable, M. le Président -
que le ministre de la Justice dépose devant l'Assemblée nationale
les études expliquant l'incidence sur les articles du projet de loi 89
du partage actuel des compétences législatives entre le Parlement
canadien et les Législatures des provinces, au même moment
où sera déposé le rapport de cette commission sur
l'étude article par article dudit projet de loi."
À ce moment-là, les parlementaires, nos collègues
qui seront saisis de notre rapport sur un travail auquel j'ai eu un grand
plaisir à participer, malgré les questions que je pose sur son
utilité pratique dans les mois qui vont suivre, mais en même temps
que nos collègues en prendront connaissance, ils prendront
également connaissance de ce que ça signifie, en pratique,
qu'est-ce qu'ils vont pouvoir adopter pour vrai et qu'est-ce qu'ils
vont pouvoir adopter en faisant semblant. Je pense qu'on leur doit au
moins cette vérité élémentaire et ça donnera
en plus, encore une fois et pour terminer, la satisfaction au ministre de faire
la démonstration, par a + b, que l'Opposition exagère, comme
d'habitude.
Le Président (M. Laberge): Sur la... un moment. On a
porté à ma connaissance la motion du député de
Saint-Laurent qui se lit comme suit: "La commission parlementaire de la justice
souhaite que le ministre de la Justice dépose devant l'Assemblée
nationale les études expliquant l'incidence sur les articles du projet
de loi 89 du partage actuel des compétences législatives entre le
Parlement canadien et les Législatures des provinces, au même
moment où sera déposé le rapport de cette commission sur
l'étude article par article dudit projet de loi."
Cette motion semble recevable, si vous voulez en discuter.
M. Bédard: Comme cela arrive sur un bout de papier,
à la dernière minute, est-ce que vous nous donneriez cinq
minutes, M. le Président?
Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses
travaux pour cinq minutes.
M. Bédard: Au moins pour avoir l'occasion de la lire.
(Suspension de la séance à 22 h 39") (Reprise de la
séance à 22 h 52)
Le Président (M. Laberge): La commission reprend ses
travaux. La motion qui a été présentée par le
député de Saint-Laurent a été jugée
recevable et la discussion a d'ailleurs commencé. Je cède la
parole au ministre pour discuter de cette motion.
M. Bédard: M. le Président, je ne serai pas long.
Je veux simplement relever le fait que le député de Saint-Laurent
a évoqué mon côté partisan. Je lui dirai qu'au
moment où on se parle, je ne suis partisan que d'une chose: c'est que
nous prenions tous les moyens nécessaires pour que les citoyens et
citoyennes du Québec puissent profiter de tous les avantages possibles
qui sont contenus à l'intérieur de cette réforme. Je ne
peux que déplorer d'avance, comme je l'espère, l'Opposition, le
fait que certaines améliorations ne pourront être mises à
l'avantage des citoyens et citoyennes du Québec parce qu'il y a la
question constitutionnelle à laquelle nous avons fait allusion tout
à l'heure. Mais je suis en mesure de dire que la grande partie, une
très grande partie de ce projet de loi peut être mise en
application.
Je suis d'accord, M. le Président, sur la motion, de telle
façon que demain, nous déposerons une opinion
énonçant les parties du projet de loi qui manifestement peuvent
être mises en application au-delà de la question
constitutionnelle. Si cela peut faire plaisir à l'Opposition, je pourrai
également déposer une opinion qui m'a été
acheminée en ce qui a trait à une question que nous nous sommes
posée tous ensemble, lors de la deuxième lecture, à savoir
si l'Assemblée nationale avait le pouvoir de discuter, d'accepter le
projet de loi concernant la sécurité du mécanisme qui a
été employé par le biais de l'article 75. J'espère
que cela répondra aux attentes, puisqu'on en a exprimé le
souhait, et que nous serons tous en mesure de nous rendre compte que,
même si on ne peut pas appliquer tous les articles, il serait de notre
devoir de faire en sorte qu'au moins la plus grande partie possible de ces
articles puisse être mise en application pour le mieux-être des
Québécois et des Québécoises.
M. Marx: M. le Président, le ministre dit qu'il va
déposer un rapport demain matin. Est-ce que ce sera un rapport qui va
nous expliquer quels articles sont valides et quels articles ne sont pas
valides...
M. Bédard: Vous l'apprendrez...
M. Marx: ...en ce qui concerne le projet de loi tel que
modifié par cette commission ou s'il va déposer une opinion en ce
qui concerne le projet de loi qu'il a déposé il y a quelques
mois? Je pense qu'il y a une différence parce que lors des travaux de
cette commission, on a proposé beaucoup de modifications.
M. Bédard: Cela ne change pas grand-chose. Mettons de
côté notre esprit partisan.
M. Marx: Je pense que c'est plus difficile que cela, M. le
ministre.
M. Bédard: II y a des amendements qui ont
été adoptés à l'intérieur de chapitres.
À partir du moment où le chapitre est carrément
constitutionnel, il me semble que les amendements que nous avons
apportés n'ont pas été dans le sens d'invalider les
articles.
M. Marx: II me semble qu'il y a des chapitres où il y a
des articles constitutionnels et des articles inconstitutionnels.
M. Bédard: Voulez-vous la donner, l'opinion? Vous la
donnerez. Vous ne
m'apprenez rien en me disant qu'il y a une partie qui est...
M. Marx: Je ne peux pas travailler pour le gouvernement, M. le
ministre. C'est illégal. Vous ne voulez pas que je tombe dans
l'illégalité?
M. Blank: Tu peux travailler, mais tu ne peux pas être
payé.
M. Bédard: J'estime beaucoup le député de
D'Arcy McGee. Je ne veux pas lui donner cette impression.
M. Marx: Mais si le ministre veut qu'on lui suggère des
experts en la matière, on est prêt à le faire. Si le
ministre veut qu'on lui suggère des experts en la matière, on
peut le faire. Je pense que le problème est un peu plus difficile que
vous donnez l'impression de le croire.
M. Bédard: Mais pourquoi me donnez-vous l'impression,
d'avance, sans même avoir vu l'opinion, que vous êtes
déjà...
M. Marx: Je pense que c'est important d'avoir une opinion sur le
projet tel que modifié, pas sur le projet que vous avez
déposé il y a neuf mois.
M. Bédard: J'ai pris votre motion et je dis oui à
cela.
M. Blank: On va vous donner notre opinion par la suite.
M. Bédard: Vous avez l'air de. vouloir discréditer
l'opinion avant même de l'avoir reçue. Ce ne sont quand même
pas des enfants d'école qui ont fait l'étude de ce projet de loi
avec nous. Je pense qu'ils ont été en mesure de répondre
à toutes les questions que nous leur avons posées. Je suis en
mesure de dire également que, sur bien des articles, ils
s'étaient souciés également de la question
constitutionnelle. Je crois que le mieux à faire, puisque cela
répond à un souhait que vous exprimez...
M. Blank: J'espère que cette opinion sera signée
par les auteurs.
M. Bédard: Est-ce que, en vous donnant ces opinions, je
serais en train de vous enlever le dernier argument qui faisait que vous
n'acceptiez pas le projet de loi?
M. Blank: C'est très important de savoir d'où vient
cette opinion. Est-ce que c'est un étudiant en première
année de droit ou si c'est un professeur de droit constitutionnel
à Laval? C'est ce que je veux savoir.
Mme Lavoie-Roux: Normalement, elle devrait être
signée. On ne livre pas des documents quand ils ne sont pas
signés.
Le Président (M. Laberge): À l'ordre, s'il vous
plaît! Est-ce que cette motion souhaitant que le ministre dépose
des documents sera adoptée?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté.
M. Blank: Le projet de loi est adopté tel
qu'amendé.
Le Président (M. Laberge): L'article 75 sera-t-il
adopté?
M. Marx: Adopté.
M. Forget: Adopté, M. le Président.
M. Bédard: Avec mes remerciements à tous les
membres de la commission parlementaire.
Le Président (M. Laberge): Un instant, on a encore
beaucoup de choses à faire. Il y en a encore beaucoup. Je regrette
J'aurais besoin d'une motion de renumérotation pour les articles 1.1
à 75 du projet de loi.
M. Bédard: D'accord.
M. Forget: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): La motion de
renumérotation est adoptée.
Est-ce que le projet de loi no 89...
M. Forget: Est-ce que le titre ne devrait pas être
adopté?
Le Président (M. Laberge): Oui, cela nous prend une motion
pour adopter les titres, sous-titres, paragraphes, etc. Est-ce que cette motion
sera adoptée? (23 heures)
Conclusions
M. Forget: M. le Président, sur ce point, je voudrais
d'abord - en guise de préface, mais ce sera très court; c'est une
brève préface à de brèves remarques, M. le
Président, qu'on se rassure - remercier tous nos collègues, des
deux côtés, qui ont participé durant de longues heures
à l'étude de ce projet de loi. Le climat qui a prévalu
pendant presque toute la durée a été exemplaire;
exemplaire, d'ailleurs, de je ne sais pas trop quoi, parce que ce n'est
peut-être pas exemplaire du travail des commissions parlementaires, mais
exemplaire de ce qu'elles devraient être, plutôt que de ce qu'elles
sont souvent.
Cette appréciation s'adresse non seulement aux collègues
membres de la commission, mais également au personnel du
secrétariat des commissions et de la transcription des débats qui
ont veillé fort tard, avec nous, pendant plusieurs jours, à notre
maigre public, mais fidèle, néanmoins, qui a manifesté un
intérêt soutenu et qui a été notre principal
véhicule de communication avec les autres 6,000,000 de
Québécois que ce projet affectera. Je voudrais adresser une
appréciation toute spéciale aux membres de l'équipe qui
entourent le ministre et qui lui prodiguent leur immense réserve de
connaissances et d'expertise: Me Marcel Guy, M. Bisson et Mlle
Marie-Josée Longtin, dont la patience et la capacité de fournir
des réponses à presque toutes les questions doivent être
soulignées et sont tout à fait remarquables.
J'aimerais d'ailleurs adresser une prière au ministre à ce
sujet, qu'il pourra peut-être prendre en délibéré ce
soir: ce serait d'examiner la possibilité que les interventions de ces
trois personnes à la commission parlementaire apparaissent sous leurs
noms. Je pense que ceci, étant donné qu'il s'agit de
professionnels du droit et en particulier d'experts en droit civil,
étant donné le caractère de cette commission et sa modeste
contribution, mais contribution significative, malgré tout, à
l'étude de ce projet de loi, pourrait être une marque
particulière d'appréciation, quant à la qualité de
leur contribution. Je pense que, même si nous n'avons pas pris cette
précaution au départ, il sera probablement facile au personnel du
secrétariat de partager les remarques qui sont nominalement
attribuées au ministre simplement par le contenu plus technique de
l'intervention. Je le fais très sérieusement. Je pense que ce
n'est pas un précédent absolu et je pense que ce serait un signe
que leur travail s'est vraiment distingué non seulement par leur
disponibilité personnelle, mais par la qualité et
l'impartialité de leur contribution.
Le Président (M. Laberge): Sur ce point, M. le
député de Saint-Laurent, nous ferons les consultations requises
et nous verrons ce qu'il est possible de faire.
M. Forget: Pour ce qui est, M. le Président, de l'ensemble
du projet de loi, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'ajouter à
l'évaluation que nous en avons faite, au fur et à mesure de notre
étude et, de façon générale, aussi peut-être
un peu plus spécifiquement, dans les dernières heures. Il s'agit
d'un projet valable. C'est un pas en avant. Cela ne résout pas tous les
problèmes. Encore une fois, je pense qu'il n'est pas interdit d'imaginer
que ce n'est pas là le dernier mot. C'est en ayant cette
préoccupation à l'esprit que nous allons déterminer notre
attitude relativement à ce projet de loi.
Nous sommes favorables, nous l'avons dit, quant au fond, à
l'ensemble des dispositions de principe qu'il incorpore. Nous l'avons dit en
deuxième lecture et je pense que notre attitude au cours des travaux de
la commission le démontre amplement. Nous sommes également
conscients que le travail que nous avons fait, si consciencieux qu'il ait pu
être, si bien appuyé sur le plan technique qu'il ait pu
être, n'est pas à l'abri de tout défaut. Nous avons
travaillé de longues heures. Il est fort possible qu'avec un recul de
quelques jours, de quelques semaines, des déficiences sautent aux yeux
de l'un ou l'autre d'entre nous et même des conseillers du ministre.
À plus forte raison, il n'est pas impossible, il n'est pas interdit de
penser que, lorsqu'un cercle plus large de nos concitoyens aura eu l'occasion
de consulter le produit fini qui sort de la commission, certains puissent nous
exprimer des points de vue qui nous ont échappé et dont nous
souhaiterions tous tenir compte. C'est pour cela que, lorsque demain, le
ministre joindra son rapport à celui du rapporteur de la commission et
que dépôt sera fait des deux documents à l'Assemblée
nationale, nous n'avons pas l'intention de donner notre consentement pour
procéder au-delà du dépôt. Pourquoi? Pour une raison
très simple que je vais expliquer, qui n'a rien à voir avec les
difficultés constitutionnelles; ça, c'est le problème du
ministre. Il a d'ailleurs déjà entrepris de jeter la
lumière sur le sujet par le dépôt de son rapport. C'est
pour permettre une période d'environ 60 jours, à peu près
deux mois, pour permettre la rétroaction, la réaction, les
conseils, les avis, les expressions d'opinion d'un cercle plus large de nos
concitoyens.
Ce que nous souhaiterions faire dans un monde idéal, je ne sais
pas si le ministre acceptera cette suggestion, c'est que le projet soit
réimprimé et qu'il subisse une diffusion dans son état
quasi définitif à ceux mêmes qui en ont reçu une
première version, les praticiens de droit, les différents groupes
qui ont exprimé des opinions, les media d'information, bien sûr;
ceci permettra au ministre de compléter les préparatifs de la
mise en vigueur qui sont nécessaires de toute façon, la
préparation d'amendements à d'autres lois, la clarification d'un
certain nombre de questions que pose nécessairement la mise en vigueur
d'un projet de loi de cette envergure. On a vu dans d'autres lois, M. le
Président, ce n'est un secret pour personne, des délais entre
l'adoption d'un projet de loi et la mise en vigueur qui se comptaient en mois,
en saisons, en semestres, peut-être même en années dans
certains cas. Il y en a qui ont été mises en application, la Loi
sur les conditions minimales de travail, par exemple, a été
adoptée une année et mise en vigueur bien longtemps... La
loi 9 sur la protection des personnes handicapées a été
mise en vigueur plus d'un an après son adoption.
Ce n'est pas un précédent. Il y a des préparatifs
qui sont nécessaires et, pendant ce temps-là, pourquoi ne pas
faire bénéficier de ce délai nos concitoyens qui ont
manifesté un intérêt au projet de loi en réimprimant
le projet de loi qui est indéchiffrable dans l'état dans lequel
on le trouve actuellement? Il y a, bien sûr, le projet initial. Il y a
probablement une soixantaine à une centaine d'amendements. Je
n'exagère pas. Je pense que, même si on voulait se limiter aux
amendements de substance, en mettant de côté les changements de
virgule et d'orthographe, etc., et les choses de pure concordance, on a
sûrement entre 20 et 30 amendements significatifs dont personne -
rigoureusement personne - n'a entendu parler en dehors de la commission
parlementaire.
Je pense que c'est normal de permette à tous les organismes qui
s'y intéressent de regarder le fruit de nos travaux et de nous exprimer
leur avis là-dessus.
Nous reviendrons, je présume, M. le Président, à la
fin de février, bien reposés, l'esprit clair, l'oeil vif, la mine
réjouie, nous pourrons prendre connaissance de ces commentaires, de ces
rapports, des dernières réflexions des conseillers du ministre.
Il sera possible au ministre de solliciter un retour en commission
plénière du projet qui sera presque adopté, d'y apporter
les modifications qui, j'en suis sûr, lui viendront spontanément
à l'esprit et de l'adopter en troisième lecture le jour suivant.
Personne ne sera retardé en quoi que ce soit et, au contraire, l'esprit
d'ouverture démocratique du gouvernement pourrait devenir pour lui,
d'ailleurs, un argument de poids dans la conquête d'un nouveau mandat,
ayant ainsi fait la démonstration de sa capacité
d'intégrer dans ses projets les apports, les sources les plus diverses
et ayant apporté à l'application et la mise en vigueur de ce
projet de loi un soin tout particulier, qu'il mérite d'ailleurs,
étant donné son importance dans toute la mesure où il peut
être appliqué, encore une fois, mis de côté le
problème constitutionnel.
Pour produire cet effet, c'est-à-dire le délai, la
possibilité d'une réimpression et d'une diffusion et les
dernières mises au point, nous allons nous abstenir de concourir
à une adoption du rapport et à une troisième lecture
demain. Je tenais à préciser ce point parce qu'il n'y a pas de
mystère dans notre attitude, elle est essentiellement motivée par
le désir de donner la possibilité d'un deuxième regard
pour tous les groupes, y compris l'Assemblée nationale, sur un travail
qui est d'une très grande complexité, d'une très grande
importance. J'espère qu'on le comprendra.
Je suis sûr qu'on va nous accuser de tous les maux de la terre,
mais qu'on prenne bien soin, en nous accusant, de démontrer en
même temps en quoi cela retarde de quelque manière que ce soit la
mise en application de la loi. Si le ministre me dit qu'il est prêt
à mettre en vigueur un chapitre quelconque de cette loi le 1er janvier,
il aura fort à faire à persuader qui que ce soit que cela soit
possible, étant donné ce qui est déjà contenu dans
les procès-verbaux de cette commission quant aux nombreuses
concordances, aux nombreuses conditions qui doivent accompagner presque tous
les chapitres. Vous savez, il n'est pas nécessaire, pour avoir la
société d'acquêts, de faire la proclamation de quoi que ce
soit. Il y a plusieurs éléments qui sont repris - et cela, je
pense que le ministre en conviendra - et qui existent déjà dans
notre droit; pour ce qui est des éléments nouveaux, dans la
plupart des cas, il y a des modifications à faire à d'autres
mesures législatives. Il faudra bien attendre, quelle que soit
l'impatience du ministre.
Je termine en remerciant à nouveau nos collègues et nos
collaborateurs. J'espère que le ministre pourra concourir jusqu'à
la fin, de la même façon qu'il l'a fait jusqu'à maintenant,
à un certain nombre de nos propositions.
M. Bédard: Je vais déployer mes efforts
jusqu'à la fin pour que le plus rapidement possible - je pense que ce
devrait être avant la fin de la session - ce projet de loi soit
adopté de manière que, même si ce n'est pas pour l'ensemble
du projet de loi, le plus rapidement possible les citoyens et les citoyennes du
Québec puissent profiter des réformes qui y sont contenues et qui
sont à leur avantage.
Le faux-fuyant qu'emploie le député de Saint-Laurent, au
nom de l'Opposition officielle, pour refuser son consentement -c'est ce qu'il
nous annonce - à la troisième lecture avant la fin de la session
ne me convaincra pas que ce ne serait pas souhaitable, éminemment
souhaitable que nous procédions à l'adoption de ce projet
rapidement. Le projet est important, mais il ne faut pas prendre l'importance
du projet comme prétexte à ne pas poser des gestes pour qu'il
devienne réalité le plus rapidement possible pour le
bénéfice de la population. Le député de
Saint-Laurent a pris la peine de dire que le projet était valable, qu'il
n'était pas à l'abri de tout défaut - et je suis d'accord
là-dessus - mais ce n'est pas parce qu'on peut déceler quelques
défauts dans un projet de loi qu'il faille se priver ou priver la
population des bénéfices de l'ensemble du projet, qui est valable
selon l'expression même du député de Saint-Laurent. (23 h
15)
Dans les propos du député de Saint-Laurent - j'en
reparlerai demain - je ne vois pas de motifs sérieux qui nous
permettraient, en quelque sorte, de dire à une grande partie de la
population: Nous savons qu'il existait des inégalités
inacceptables dans le Code civil; nous avons adopté en commission
parlementaire un projet qui a pour effet de les corriger, mais nous ne vous en
ferons pas bénéficier avant 60 jours, c'est la suggestion du
député de Saint-Laurent. Si inégalité il y a - et
nous avons été à même de le constater et d'en
corriger des dizaines, tout au cours de l'étude de ce projet de loi - je
ne vois vraiment pas, dans les propos du député de Saint-Laurent,
des motifs sérieux de refuser le consentement, comme il nous l'a
annoncé aujourd'hui.
Le projet n'est pas à l'abri de tout défaut et il est
clair que nous ne mettons pas dans le ciment une réforme qui ne devra
subir aucun changement pour les cent prochaines années. Cela me semble
clair pour tout le monde. D'ailleurs, j'ai déjà indiqué
à la commission parlementaire que nous avons l'intention de mettre en
place un mécanisme, qui serait, en quelque sorte, une commission
permanente de réforme du Code civil qui permettrait justement, celle-ci
étant composée d'experts, de conseiller
régulièrement les différents gouvernements sur
l'à-propos d'apporter des correctifs au Code civil. On le sait, depuis
une centaine d'années, il y a eu à peu près deux cents
modifications, il est clair que, s'il y avait eu en place une commission
permanente de réforme du Code civil, beaucoup d'autres modifications
auraient pu être faites à l'avantage de la population du
Québec. Les gouvernements qui nous ont précédés ne
l'ont pas fait, mais je crois que c'est un mécanisme nécessaire,
parce que cela me semble inacceptable, cette situation qui perdurait parce
qu'il y avait une commission de la réforme du Code civil qui y
travaillait depuis 23 ans et que chaque gouvernement était probablement
enclin à ne pas faire de modification parce qu'on attendait
continuellement le rapport de ces experts.
Pour ce qui est de la réimpression, je pense que le
député de Saint-Laurent ne devrait pas laisser entendre que,
parce qu'il y a une adoption en troisième lecture, disparaît la
possibilité que l'ensemble du projet, une fois adopté, soit
réimprimé pour être porté à la connaissance
des citoyens et des groupes concernés. C'est évident, une fois
adopté, il va être réimprimé et, à ce moment,
comme nous l'avons fait lors de son dépôt l'été
passé, nous allons le faire parvenir à tous les groupes, à
tous les organismes qui s'y sont intéressés; nous allons en faire
une diffusion très grande au niveau de la population et de ces groupes.
Si on l'adopte demain soir, ça n'empêche en aucune façon de
faire ce travail de sensibilisation auprès de la population, ça
n'empêche en aucune façon que des citoyens ou des groupes aient
des représentations additionnelles à faire et, à ce
moment, le gouvernement les considérera à leur juste valeur.
Encore une fois - et je termine là-dessus - les motifs
évoqués par le député de Saint-Laurent ne me
semblent pas sérieux par rapport à l'objectif que nous avons eu,
au cours de l'étude de ce projet de loi, c'est-à-dire corriger
des inégalités criantes qui existaient dans le Code civil. Je
termine en remerciant, encore une fois, tous les parlementaires et les membres
de la commission parlementaire et naturellement tout le groupe d'experts qui
m'a aidé et a aidé tous les membres de la commission à
accomplir le travail sérieux que nous avons fait.
Le Président (M. Laberge): Quand ces deux derniers
commentaires ont été apportés, nous en étions
à l'adoption du titre de ce projet de loi, des sous-titres et des titres
de chapitres, de sections, de sous-sections. Est-ce que cette motion d'adoption
du titre et de ce qui a été mentionné est
adoptée?
M. Forget: Sur division.
Le Président (M. Laberge): Adopté sur division.
Dernière motion: est-ce que le projet de loi no 89, Loi instituant un
nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille, sera
adopté avec les amendements qui ont été
apportés?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. Maintenant, je
demande simplement au rapporteur de la commission de faire rapport à
l'Assemblée nationale; une délégation de pouvoir. Je
remercie les membres de la commission de la façon courtoise dont les
travaux se sont déroulés et j'ajourne les travaux de la
commission sine die en souhaitant joyeux Noël à tout le monde.
M. Bédard: M. le Président, je suis sûr de me
faire le porte-parole de tous les membres de la commission en vous votant des
félicitations pour la manière dont vous avez
présidé nos travaux.
M. Forget: J'y concours avec plaisir.
Le Président (M. Laberge): Je vous remercie beaucoup.
(Fin de la séance à 23 h 22)