L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de la présidence du Conseil et de la Constitution

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de la présidence du Conseil et de la Constitution

Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le jeudi 10 février 1983 - Vol. 26 N° 237

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes sur la situation de Schefferville et les solutions possibles


Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames et messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution se réunit donc à Schefferville, ce matin et demain, pour entendre des personnes ou des organismes afin d'étudier l'ensemble de la situation de Schefferville et d'évaluer les actions qui pourraient être prises en vue d'aider à la solution des problèmes de cette municipalité. C'est l'objet de la commission, c'est le mandat de la commission.

Les membres de notre commission, pour les deux journées, sont, par ordre alphabétique: M. Chevrette (Joliette); M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Dauphin (Marquette); M. Dean (Prévost); M. Duhaime (Saint-Maurice); M. Fallu (Groulx); M. Fortier (Outremont); M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Kehoe (Cha-pleau); M. Lafrenière (Ungava); M. LeMay (Gaspé); M. Marois (Marie-Victorin); M. Middlemiss (Pontiac); M. Perron (Duplessis); M. Rocheleau (Hull); M. Sirros (Laurier).

Avant d'aller plus loin, je recevrai des propositions pour un rapporteur de la commission qui devra faire rapport à l'Assemblée nationale.

Une voix: Je propose M. Denis Perron.

Le Président (M. Bordeleau): Le député de Duplessis est proposé. Cela va?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, le rapporteur de la commission sera donc M. Denis Perron, député de Duplessis.

Avant de commencer nos travaux, comme il s'agit d'une première et que notre exemple d'aujourd'hui, de déplacer une commission parlementaire à l'extérieur des murs de l'Assemblée nationale, sera probablement suivi et servira d'exemple, je voudrais particulièrement demander, à la fois aux membres de la commission et aux personnes qui assistent ou qui vont participer à nos échanges leur meilleure collaboration pour que le tout se fasse dans les meilleures règles possible qui permettront, justement, d'atteindre le but que notre commission s'est fixé, soit celui d'entendre des mémoires, des points de vue de groupes ou d'individus. Dans ce sens-là, ma priorité, pour les deux prochains jours, sera toujours que les personnes qui veulent se faire entendre puissent se faire entendre. À ce moment-là, je demanderai donc la collaboration de tous et de toutes dans la salle - comme la salle est très remplie - pour que l'échange entre les membres de la commission et les intervenants puisse se faire dans tout le calme possible avec le maximum de chances de s'entendre, de se comprendre et de pouvoir échanger.

Comme vous avez pu vous en rendre compte aussi, nous avons un horaire passablement chargé et je devrai sûrement, à l'occasion, faire respecter la règle, la tradition, la coutume, par rapport au dépôt de mémoires et respecter un horaire assez précis. D'abord, les heures où, normalement, la commission siégera - cela peut toujours être modifié à l'occasion, mais je vais tenter quand même d'être assez strict - sont: le matin, ouverture à 10 heures jusqu'à 13 jeures. On suspend pour le dîner de 13 heures à 15 heures. On reprend à 15 heures jusqu'à 18 heures. On suspend de nouveau entre 18 heures et 20 heures pour reprendre à 20 heures et normalement terminer à 22 heures. Par contre, je pense que, avec le consentement des membres, on peut aussi prolonger le soir après 22 heures et qu'il faudra probablement le faire à l'occasion.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: Sur vos propos, M. le Président, est-ce qu'on pourrait se garder une ouverture également quant aux heures des repas dans l'éventualité d'une compression, advenant un consentement de l'Opposition, vu qu'on a un buffet sur place et qu'on voudrait terminer à des heures peut-être plus raisonnables? On pourrait peut-être négocier une heure et quart, ou quelque chose du genre, au lieu de deux heures pour le repas et ainsi entrer à l'intérieur du cadre horaire?

Le Président (M. Bordeleau): Je ne vois pas de problèmes à condition que les membres de la commission s'entendent. C'est très facile de varier les heures. J'ai

simplement statué sur les heures normales de la commission pour que tout le monde sache à quoi s'en tenir.

Pour arriver dans nos horaires qui existent toujours dans nos commissions parlementaires, en termes de temps, on donne une heure par mémoire, répartie comme suit: 20 minutes pour la présentation du mémoire; 20 minutes pour le parti ministériel et 20 minutes pour l'Opposition. Par contre, dans les deux 20 minutes des deux partis, c'est la loi de l'alternance qui joue normalement. Après un intervenant du côté ministériel, on passe à un intervenant du côté de l'Opposition.

Pour qu'on puisse respecter nos horaires, je devrai noter l'heure d'assez près. Après les premières 20 minutes du début du mémoire, je devrai indiquer que les 20 minutes sont écoulées et que le temps pris de ce côté-là est perdu ailleurs.

Ce sont les règles de départ que j'ai voulu expliquer. Avant d'entreprendre la présentation des mémoires, je permettrai de part et d'autre des discours préliminaires en commençant par le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. le ministre.

Remarques préliminaires M. François Gendron

M. Gendron: Citoyens et citoyennes de Schefferville, M. le Président, membres de cette commission, messieurs de la presse, mesdames, mesdemoiselles, messieurs, nous nous apprêtons à vivre ensemble au cours des heures qui suivront une expérience qui constitue un précédent dans l'histoire du parlementarisme québécois.

C'est en effet, à ma connaissance, la première fois qu'une commission parlementaire se tient en dehors de Québec et plus spécialement dans la municipalité même dont elle doit examiner l'ensemble du dossier. Il faut y voir le signe qu'une institution aussi vénérable que l'Assemblée nationale est capable de s'adapter aux exigences de la vie moderne, en tenant compte d'un objectif partagé par un nombre de plus en plus grand de personnes, soit de favoriser le plus possible le rapprochement entre l'État et les citoyens.

À ce titre, je ne crois pas trahir l'opinion de mes collègues en vous disant que nous sommes heureux d'être ici et que les résultats de cette expérience seront sans doute déterminants pour évaluer les mérites d'une semblable initiative. Mais, en même temps, je me dois d'ajouter que nous sommes attristés, car si nous sommes ici, ce n'est pas pour fêter un événement heureux, mais à cause de la décision de la minière IOC de fermer ses installations à Schefferville en juillet 1983, avec toutes les conséquences que cela comporte.

Nous sommes venus écouter la minière IOC sur ses intentions, ses propositions d'action concernant l'avenir de Schefferville et aussi entendre tous ceux qui sont concernés par cette décision aux conséquences très graves et qui ont bien voulu présenter des mémoires devant cette commission.

Cette commission parlementaire sur l'avenir de Schefferville devrait nous amener à développer ensemble de nombreux sujets et c'est tant mieux. On dit que du choc des idées jaillit la lumière. Nous en avons drôlement besoin dans le cas présent, ne serait-ce qu'en raison de la complexité d'une telle situation.

En fait, nous sommes tous conscients des problèmes que vivent présentement les citoyens et les citoyennes de Schefferville à la suite de l'annonce par la compagnie IOC, le 3 novembre 1982, de la fermeture de ses installations ici même à Schefferville. Une telle décision a suscité dans le milieu même et aussi ailleurs des inquiétudes nombreuses et certes justifiées dans les circonstances.

Le gouvernement du Québec a réagi rapidement à cette situation. Le ministre de l'Energie et des Ressources, mon collègue M. Yves Duhaime, est venu à Schefferville avec son équipe pour y rencontrer les personnes ou les groupes intéressés à lui faire part de leurs appréhensions relativement au sort réservé à cette ville et à ses habitants.

La convocation d'une commission parlementaire à Schefferville même s'inscrit dans cette préoccupation du gouvernement de faire tout en son pouvoir pour que les citoyens de l'endroit aient la chance de se faire entendre en priorité. Nous voulons avoir, en sortant d'ici, une vision plus claire de ce qu'il convient de faire concrètement à court terme et aussi, bien sûr, à long terme, pour dissiper le climat d'incertitude qui règne présentement.

Quant à nous, il n'est pas question, comme l'appréhendait M. Clément Godbout des Métallos - et je suis convaincu qu'il en est de même de nos collègues de l'Opposition - de tenir une commission parlementaire qui aurait un peu l'effet d'une opération poudre aux yeux. Au contraire, on veut essayer de regarder ensemble, d'une façon très claire, les possibilités d'avenir et analyser la situation réelle. Car c'est bien de cela, en effet, qu'il s'agit au premier abord puisqu'à partir du moment où on décide de faire vivre Schefferville, il faut prendre les moyens pour y arriver, alors qu'il suffit simplement de laisser aller les choses pour condamner cette collectivité à une agonie plus ou moins rapide. Face à ce choix et aux éventualités qu'il entraîne, le gouvernement du Québec voudrait examiner avec vous un certain nombre de possibilités que nous pourrons explorer davantage mes collègues et

moi au fur et à mesure du déroulement de la commission. Je voudrais, cependant, en premier lieu, faire quelques observations sur ce que représente Schefferville à nos yeux.

Je ne surprendrai sûrement personne, j'en suis sûr, en faisant état de la valeur symbolique de cette ville dans le développement et le peuplement du Nord québécois. Celle-ci, fondée voilà une trentaine d'années, affirme clairement la volonté du Québec d'occuper son territoire. Il est significatif, en effet, que Schefferville ait été implantée à la hauteur du 55e parallèle et à proximité d'une frontière mal définie que notre gouvernement et tous ceux qui l'ont précédé n'ont jamais accepté de reconnaître. En termes purement géographiques, il est évident que Schefferville est le point le plus au nord où une collectivité blanche et francophone a choisi de s'installer pour y vivre pleinement.

D'autre part, l'importance que le gouvernement du Québec accorde à Schefferville au plan géopolitique est également basée sur une réalité bien concrète à savoir que cette ville constitue un point central pour la mise en valeur des ressources minérales de la fosse du Labrador et donc qu'elle demeure par sa position un tremplin de choix dans toute stratégie de développement nordique. Cet aspect de la question mérite d'être prise en compte à plusieurs points de vue, car il explique notamment l'enracinement de bon nombre des habitants de Schefferville surtout ceux qui y sont nés et qui y ont grandi. Le sentiment d'appartenance à un milieu de vie développé au cours des années dans cette ville fait en sorte que plusieurs recherchent davantage aujourd'hui des solutions pour rester que des moyens pour partir. D'ailleurs, le ton de la plupart des mémoires que nous entendrons au cours de ces deux jours l'indiquera.

Déjà, les deux communautés autochtones ont fait savoir qu'elles entendaient demeurer à Schefferville et continuer à s'y développer. Dès l'instant où cette volonté est clairement affirmée, il est certain, surtout dans le contexte des conventions de la Baie-James et du Nord-Est québécois que le gouvernement doit assurer le maintien des services nécessaires à la collectivité. Nous entendons assumer cette responsabilité en tenant compte toutefois de la nécessité d'ajuster les services en question: éducation, santé, loisirs, etc., en fonction, bien sûr, de l'évolution démographique du milieu. Il est en effet impossible d'évaluer, à l'heure actuelle, le nombre de personnes surtout dans la population autre qu'autochtone qui voudront partir ou qui décideront de rester. C'est précisément pour aider à éclaircir ce dernier point que le gouvernement s'est imposé comme critère la règle de l'équité, face à tous les citoyens concernés, de façon que chacun d'entre eux soit en mesure d'effectuer un libre choix entre deux options clairement établies.

Autant il ne nous appartient pas, comme gouvernement, de mettre en place ou de favoriser les mesures qui inciteraient les gens à quitter Schefferville, puisqu'une importante saignée démographique rendrait encore plus difficile le maintien des services dont j'ai parlé tantôt, autant nous ne voulons pas, d'un autre côté, agir de façon à garder de force à Schefferville des personnes qui souhaiteraient s'en aller si une telle démarche leur était possible, mais qui ne peuvent le faire, pour diverses raisons, en bénéficiant de compensations accessibles à d'autres. En toute justice, il convient que chacun des citoyens de cette ville puisse décider par lui-même de son avenir immédiat sans que son choix soit pratiquement déterminé d'avance par des facteurs indépendants de sa volonté. Le gouvernement regardera attentivement toutes les mesures qui pourraient être prises pour respecter dans les faits ce souci d'équité à l'endroit de l'ensemble des habitants de Schefferville. (10 h 30)

Par ailleurs, il va de soi que la mise en application de tout programme conçu à cette fin impliquerait des négociations avec le gouvernement fédéral, avec la minière IOC, avec les élus locaux dans le cadre d'une responsabilité partagée à l'égard de la communauté en cause. D'autant plus que nous partageons, nous, comme gouvernement, la réflexion que faisait le président de la minière IOC, M. Brian Mulroney, et je cite: "Nous avons toujours cru que nos responsabilités vis-à-vis de nos employés et vis-à-vis des citoyens et des citoyennes de Schefferville devaient s'étendre bien au-delà des exigences de toute loi existante ou de toute convention collective." Je ne m'étendrai pas outre mesure sur ce sujet puisque nous aurons l'occasion de parler des différentes formes d'aide retenues ou envisagées pour les diverses catégories de citoyens, qu'il s'agisse du travail du comité de reclassement, des programmes de mobilité ou de formation professionnelle de la main-d'oeuvre, etc. D'ailleurs, mon collègue de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, M. Pierre Marois, pourra sans doute apporter plus de précisions au cours de nos débats de deux jours.

En effet, on peut tenir pour acquis qu'un nombre encore incertain de personnes décideront de demeurer à Schefferville, même si elles peuvent compter sur une aide financière quelconque pour déménager à un autre endroit. De nombreuses mines ont déjà fermé au Québec, ce qui n'a pas empêché les villages miniers de continuer à exister dans plusieurs cas. C'est d'ailleurs une réalité à laquelle celui qui vous parle est assez sensibilisé, en tant que député d'Abitibi-Ouest, puisque j'ai eu à vivre avec

le problème presque identique d'une petite communauté qui s'est vue également devant un fait aussi difficile que celui de la population de Schefferville doit vivre, et ici je parle de la ville de Normétal, en Abitibi-Ouest qui, à un moment donné, a dû, elle aussi, repenser son avenir à la suite de la fermeture de la mine.

On peut affirmer sans se tromper que le choix de demeurer dans une localité après l'épuisement ou la mise en veilleuse de sa principale ressource est, en quelque sorte, un pari sur l'avenir. Il est en effet impossible de déterminer dans l'immédiat, même avec la meilleure volonté du monde, toutes les solutions à ce problème bien particulier et encore moins de prédire avec certitude leur impact réel au plan socio-économique. C'est pourquoi il importe de faire fonctionner au maximum notre imagination collective au cours des heures qui vont suivre de façon que l'option de demeurer à Schefferville, malgré le fait qu'elle recèlera toujours un certain nombre d'inconnues, offre quand même des perspectives suffisantes pour se présenter comme solution valable à sa contrepartie.

L'un des premiers objectifs visés doit être de conserver le maximum d'emplois existants et, évidemment, d'en créer d'autres, tout en sachant bien qu'on ne peut, de manière réaliste, penser à combler immédiatement l'immense vide créé en ce domaine par le départ de la minière IOC. Le succès d'une telle opération passe à la fois par la consolidation et la diversification, puisqu'il faudra trouver des moyens pour exploiter la vocation minière reconnue de Schefferville, tout en se tournant vers d'autres secteurs d'activités pour suppléer au ralentissement actuel. Dans le premier cas, mon collègue de l'Énergie et des Ressources, M. Yves Duhaime, sera en mesure de brosser un portrait assez détaillé de la situation présente et des possibilités futures concernant l'exploration et l'exploitation minières dans la fosse du Labrador de façon à en évaluer les retombées pour Schefferville. En second lieu, il faut reconnaître que d'autres villes monoindustrielles ont su, dans le passé, se relever d'une paralysie temporaire qui aurait pu, malheureusement, devenir définitive, en profitant de l'occasion pour diversifier leur économie, ce qu'elles avaient négligé de faire dans bon nombre de cas. Un être humain qui vient au monde signe en même temps son arrêt de mort. Il en va ainsi pour une mine puisque le gisement même le plus considérable et prometteur vient toujours, de toute façon, à s'épuiser. J'espère d'ailleurs que les expériences malheureuses vécues à divers endroits nous enseigneront désormais à prévoir cette éventualité au début plutôt qu'à la fin de la période d'exploitation d'une ressource qui s'éteint, surtout si elle est non renouvelable.

Quoi qu'il en soit, Schefferville est rendue aujourd'hui à cette étape cruciale de son avenir et nous sommes à même de vérifier la véracité du proverbe ou du dicton selon lequel la nécessité est la mère de l'invention. Les mémoires qui ont été déposés devant cette commission et que nous aurons l'occasion de fouiller davantage tantôt contiennent des propositions fort variées et dans certains cas assez originales pour créer des emplois dans des domaines vers lesquels on n'aurait peut-être jamais pensé à se tourner avant les événements qui nous amènent ici. L'exploitation de la faune, en particulier. Le caribou et le développement d'activités de pourvoirie sont deux des possibilités les plus souvent évoquées par ceux qui se sont penchés sur la question. Il est aisé de constater que la population locale dans son ensemble pourrait, après consultation et concertation, bien sûr, y trouver des débouchés intéressants en termes d'emplois et d'appui à l'économie. Mon collègue du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Guy Chevrette, voudra certainement apporter un éclairage supplémentaire à ce sujet. Il aura alors l'occasion de préciser les mesures susceptibles d'être prises pour adapter les programmes ou règlements existants en fonction des demandes ou des propositions qui nous sont faites, compte tenu, évidemment, des conventions signées avec les autochtones.

D'autre part, les membres de la commission parlementaire et tous ceux qui s'y font entendre ont déjà abordé ou aborderont différents problèmes qui doivent être résolus pour assurer la poursuite d'un niveau de vie normal à Schefferville dont, notamment, le maintien de moyens de transport adéquats et de services municipaux suffisants. Ici encore, la concertation entre la ville, la minière et le gouvernement sera requise. Nous sommes très conscients des attentes des citoyens à cet égard et nous examinerons certainement avec le plus grand soin toutes les possibilités qui s'offrent pour y donner suite, conjointement avec la compagnie IOC et le gouvernement fédéral, dans le cadre de responsabilités partagées. Enfin, comme ministre responsable du développement régional, je regarderai avec beaucoup d'attention tout projet qui pourra m'être soumis par l'entremise de l'Office de planification et de développement du Québec, qui d'ailleurs, je tiens à le souligner, a été très associé à la préparation de toute cette commission tout autant par ses intervenants du milieu que par les intervenants à Québec. C'est avec énormément de parcimonie qu'elle a voulu préparer les interventions nécessaires, l'analyse des mémoires pour essayer, effectivement, de faire ressortir davantage toute la problématique régionale, toute la problématique nordique et toutes les caractéristiques spécifiques que nous nous devons d'analyser.

J'ai évoqué au cours de ces quelques minutes les interventions éventuelles de quelques-uns de mes collègues dans des champs d'activité bien ponctuels parce qu'ils sont plus directement touchés, mais c'est tout l'appareil gouvernemental qui, en fait, sera appelé à travailler en concertation pour le succès de ce que j'appellerais "l'opération Schefferville". Ce but, bien sûr, ne sera atteint que si l'on retrouve chez tous les intervenants, en particulier ceux du milieu concerné, un esprit de concertation aussi développé. J'ai bon espoir, à en juger par le contenu des mémoires et l'intérêt des citoyens de Schefferville pour l'avenir de leur collectivité, que la présente commission parlementaire aura d'heureux résultats. Merci et bons travaux.

J'indique tout de suite qu'après l'alternance, on aimerait avoir la possibilité d'une courte intervention de présentation de mon collègue, M. Denis Perron, député du comté de Duplessis, avant d'entendre le premier mémoire. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.

M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, nous sommes heureux d'être à Schefferville puisque cette visite nous donnera l'occasion, dans les deux jours que nous serons ici, de rencontrer les citoyens de cette ville et de rencontrer les ouvriers qui ont décidé, il y a fort longtemps dans bien des cas, de travailler dans cette ville nordique. Ce sont des gens qui sont fiers de leur métier et qui sont fiers de la contribution qu'ils ont faite à l'économie du Québec. C'est un honneur pour nous d'être ici présents.

Je tenterai, dans quelques remarques, d'être le plus court possible puisque nous sommes venus ici pour entendre les gens de Schefferville. Néanmoins, puisque le ministre a établi une certaine prise de position de la part du gouvernement, je voudrais donner la position du Parti libéral du Québec.

Je dirai tout d'abord que nous avons insisté et nous avons obtenu que la commission parlementaire se tiendrait ici puisque le gouvernement avait décidé qu'elle se tienne à Sept-Îles. Pourquoi l'avons-nous fait? C'est qu'il s'agit de la fermeture d'une ville nordique, pas n'importe quelle. De plus, comme il est question de fermeture de d'autres villes nordiques, je crois qu'il est important pour les parlementaires de voir, par expérience personnelle, de constater et de rencontrer les gens du milieu et de comprendre les problèmes que vivent les gens de Schefferville et, par conséquent, les problèmes des autres villes nordiques qui, malheureusement, pourront être fermées dans l'avenir.

Nous sommes certains que tous feront des contributions extrêmement positives, que ce soit par la présentation de mémoires, que ce soit par des questions et des propositions et que non seulement nous tenterons de dégager des recommandations et des précisions pour assurer la survie de la ville, mais également le développement futur de la région.

Nous, du Parti libéral du Québec, nous sommes bien préparés en étudiant nos dossiers. Nous sommes présents à cette commission parlementaire pour rechercher sérieusement et positivement des solutions aux problèmes auxquels nous faisons face présentement. Nous sommes sûrs que le gouvernement - je l'espère - et la compagnie minière Iron Ore en particulier, auront des recommandations précises à nous faire à court et à long terme.

Nous sommes donc fiers d'être ici et, au nom de la députation libérale, j'ose espérer que les citoyens de Schefferville nous permettront de les rencontrer dans leur intimité afin de nous permettre de mieux comprendre leurs aspirations et leurs problèmes.

Quels sont les genres de problèmes que nous allons discuter durant cette commission parlementaire? Je crois que, dans un premier temps, il y a des problèmes à court terme et ceux-ci sont extrêmement importants; il y a les conditions qui seront faites aux employés et il y a les conditions qui seront faites à tous les autres qui ne sont pas des employés de l'Iron Ore; il y a les conditions et le financement qu'on devra assurer à la ville de Schefferville, si on veut assurer sa survie. M. le Président, je crois que mon collègue de Hull, M. Gilles Rocheleau, qui a été maire et qui est responsable, dans notre parti, de l'aménagement régional et des problèmes municipaux, du moins à cette commission parlementaire, pourra faire des recommandations tout à fait pertinentes dans ce sens.

Mais nous, du Parti libéral du Québec, sommes déjà sensibilisés aux problèmes humains qui sont créés par la fermeture de la mine et nous tenterons de collaborer avec tous les intervenants qui feront des recommandations positives dans ce sens. Cependant, ce que j'aimerais souligner, c'est qu'il est également important d'assurer le développement à long terme de Schefferville, des autres villes nordiques et de la Côte-Nord dans son ensemble. Nous sommes convaincus que la Côte-Nord, les villes nordiques et Schefferville en particulier ont un avenir et un avenir brillant, mais pour l'assurer, il faut que le gouvernement, en collaboration avec tous les intervenants, définisse des stratégies et des politiques, non pas seulement de relance à court terme et non pas seulement de création d'emplois à

court terme, mais des politiques et des stratégies qui vont créer des emplois permanents. C'est réellement ce que les gens de la Côte-Nord veulent et c'est ce que les gens de Schefferville, en particulier désirent.

Les gens de Schefferville, des villes nordiques et de la Côte-Nord veulent vivre dans leur milieu. Ils ont le droit de vivre dans le milieu qu'ils ont choisi et ne désirent pas de cataplasme et d'emplois à court terme.

Contrairement à ce que le gouvernement désire nous faire croire, surtout par le ministère de l'Énergie et des Ressources qui voudrait nous dire que la détérioration de l'industrie du fer, surtout à Schefferville, date d'hier ou d'avant-hier, nous savons tous que déjà, à l'été 1980, il y a eu des indices très révélateurs qui permettaient de voir qu'il y aurait des problèmes à Schefferville. La question qu'on doit se poser est la suivante: Qu'a fait le gouvernement depuis cette date?

J'aimerais souligner un article paru sous la plume de Jean-Didier Fessou dans le Soleil, qui notait justement que M. Robert Anderson, le président du conseil d'administration de l'Iron Ore, et M. Georgio Massobrio, de Québec-Cartier, avaient indiqué que la situation se détériorait rapidement. En particulier, M. Anderson avait dressé un sombre tableau du marché de l'acier aux États-Unis et estimait que les expéditions de l'acier des usines américaines n'attendraient que 80 000 000 à 85 000 000 de tonnes, soit une diminution de 15% à 20% par rapport à 1979.

M. le Président, dans le Devoir du 7 octobre, une intervention de Jean Gérin-Lajoie, qui était le dirigeant des métallos à ce moment, réclamait l'intervention du gouvernement pour examiner notamment la possibilité d'établir, conjointement avec la compagnie et le syndicat, un programme de stabilisation et de planification de la main-d'oeuvre. D'ailleurs cet article, sous la plume de Louis-Gilles Francoeur, fait état des mises à pied temporaires qui ont été de 149 en 1975, pour augmenter à 294 en 1977, pour augmenter à 328 en 1979 et pour atteindre 497 en 1980.

Tout observateur qui s'intéresse au développement de Schefferville et de la Côte-Nord, M. le Président, aurait compris qu'il fallait faire quelque chose dès ce moment. Mais, tout à fait par hasard, lors de la commission parlementaire de SIDBEC, au mois d'octobre ou novembre dernier, si je me souviens bien, le ministère de l'Énergie et des Ressources a sorti, en novembre 1982, une étude qui s'intitule "L'industrie du minerai de fer au Québec-Labrador, état de la situation", justement pour nous faire croire que ce programme était tout à fait récent. Et je cite, à la page un, ce qu'on y dit: "La détérioration qui ressort de la situation de l'industrie du minerai de fer au Québec-Labrador a été très rapide." Or, comme le ministre de l'Energie et des Ressources suit depuis longtemps l'évolution de la situation de ce secteur important pour l'économie minérale du Québec, il est apparu souhaitable, voire essentiel de faire le point sur la situation afin d'éclairer l'orientation des mesures correctives qui devront être envisagées.

L'alerte est donnée au mois de juillet 1980 et le ministre produit l'analyse en novembre 1982. Mais, ce n'est pas à dire, M. le Président, que le gouvernement, dans son ensemble, n'a pas étudié les problèmes. L'OPDQ, en particulier, a fait beaucoup d'études à ce sujet et j'ai ici trois exemplaires d'études qui ont paru depuis 1977 jusqu'à 1980, je crois: "Orientation du développement de la Côte-Nord", document de consultation; "L'industrie minière de la Côte-Nord", dossier d'inventaire et d'analyse et "La problématique de la Côte-Nord".

Des études, on en a fait et on en a fait beaucoup. Et je cite, en particulier, cette analyse: "Le dossier d'inventaire et d'analyse de l'industrie minière de la Côte-Nord" où on disait justement, à la page 74, ceci... Et je dois vous faire remarquer que cette étude, tel qu'indiqué en page préliminaire, a été rédigée au mois d'août 1978 et éditée au cours du deuxième trimestre de 1980. Et que dit-on? Ceci: "Puisque le minerai de fer est la principale ressource de la Côte-Nord, cette dernière devra appuyer son développement économique sur cette matière de base. La transformation du minerai pourrait devenir une éventualité à moyen ou à long terme."

Et, un peu plus loin, on dit: "Un nouvel optimum d'exploitation tenant compte d'un septième facteur qui consiste à élaborer une stratégie de développement dans le secteur du minerai de fer devra être défini. Il devra tenir compte des avantages comparatifs de la Côte-Nord, de ses possibilités de développement à long terme."

Alors déjà en 1978, l'OPDQ avait signalé la nécessité d'établir des politiques et des stratégies de développement pour assurer le développement de la Côte-Nord. Qu'est-ce que le ministère a fait? Je crois que c'est une question à laquelle le ministre devra bien répondre.

Mais, il y a eu une analyse qui a été faite, tout à fait pertinente. J'ai ici un document daté de mars 1981 et qui s'intule: "Stratégie de développement du minerai de fer au Québec et de la Côte-Nord en général", par M. Boucher. Tous, de la CÔte-Nord, connaissent ce rapport. Tous savent que cette personne a fait une étude très pertinente des difficultés et a prévu ce qui nous arrive maintenant. Il a proposé des politiques et des stratégies de développement qui auraient permis au gouvernement d'inter-

venir.

Qu'a fait le gouvernement? Il a mis ce monsieur à la porte en disant qu'il était incompétent. Alors, des études, on en a fait. Des analyses, il y en a eu. Mais je demande au ministre qu'il nous dise, une fois pour toutes, quelles sont les politiques d'intervention et quelles sont les stratégies du gouvernement qu'il a mises en oeuvre dès le moment, en 1980, où on lui a signalé, où on a signalé à son prédécesseur, qu'il y avait des difficultés à ce chapitre.

M. le Président, on ne doit pas se surprendre de cette critique et j'ose espérer que cette critique ne sera pas considérée comme étant partisane puisque, dans un document qui est une analyse d'une réunion du cabinet de M. Landry dont on a fait état il y a quelques mois déjà, M. Landry, dans la réunion du cabinet qui a eu lieu au Lac Delage le 22 août 1980, on dit ceci en parlant de la Côte-Nord: "Serge - je ne sais pas de quel Serge il s'agit - a préparé un document dépeignant la situation. Les ministères n'ont pas fait leur devoir. M. Landry exposera la situation au Conseil des ministres spécial, les 10 et 11 septembre." Et ceci, c'était, au mois d'août 1981, une critique de votre collègue responsable du développement économique.

M. le Président, je crois que le ministre responsable de l'aménagement régional a établi que nous avions des difficultés, a établi qu'il y avait peut-être des solutions à court terme. Nous nous inquiétons du fait que le gouvernement n'a pas de politique, ni de stratégie à long terme pour nous convaincre que l'avenir de la Côte-Nord et des villes minières serait assuré.

Il faudrait aller plus loin. Je crois malheureusement que cette commission parlementaire, qui a été convoquée un jeudi et un vendredi, ne nous permettra pas d'aller dans beaucoup de détails et d'étudier en profondeur tous les mémoires qui nous seront présentés. J'ose espérer que nous aurons l'occasion de le faire. Je peux vous assurer que la députation libérale collaborera avec le gouvernement, soit pour couper nos lunchs, comme le suggère le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, soit pour siéger jusqu'à minuit s'il le faut, mais je doute que, compte tenu de l'importance des mémoires, nous ayons le temps de les étudier en profondeur. Je redoute également que, compte tenu des problèmes à court terme, nous n'ayons pas l'occasion d'aller avec assez de profondeur dans les problèmes à long terme, pour tenter de dégager des politiques et des stratégies de développement à long terme. J'espère que le ministre prendra en considération les politiques minières et énergétiques qui pourraient permettre la transformation de différents minerais - et non seulement du minerai de fer - qui sont présents dans les région.

Motion proposant la convocation

d'une commission pour entendre

tous les intervenants

de la Côte-Nord

En conséquence, M. le Président, j'aimerais faire la motion suivante: Considérant qu'il est urgent de définir des politiques et des stratégies de développement économique à long terme, basées principalement sur les ressources minérales;

Considérant que de nombreuses études ont déjà été faites, permettant de définir très rapidement des stratégies de développement basées sur une diversification de l'exploitation des minéraux, associée à une politique énergétique devant favoriser sur la Côte-Nord et dans les villes nordiques la transformation de ces mêmes minéraux;

Considérant qu'il est urgent de définir des stratégies et des politiques, non seulement pour une ville en particulier, mais pour l'ensemble des villes nordiques et de la Côte-Nord;

Considérant que la présente commission parlementaire se limitera à l'étude des problèmes de Schefferville en particulier, et surtout des problèmes à court terme qui sont extrêmement importants;

Qu'il soit résolu que les membres de cette commission recommandent fortement au gouvernement la convocation dans les meilleurs délais d'une commission parlementaire pour entendre tous les intervenants intéressés à la mise au point d'une politique et d'une stratégie minières devant assurer l'avenir de la Côte-Nord.

Je puis vous assurer que, si le gouvernement convoque une telle commission parlementaire, il nous fera plaisir d'y collaborer et que nous y sommes déjà très bien préparés. Je vous remercie.

J'aimerais tout simplement ajouter que comme nous ne voulons pas prendre le temps de la commission immédiatement pour discuter de cette motion, si les autres membres de la commission le désiraient, nous pourrons discuter de la motion proprement dite à la fin de l'audition de tous les mémoires.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le député d'Outremont. Si effectivement on ne demande pas à la présidence une décision immédiate sur la recevabilité et sur la discussion de la motion, on peut avec l'accord des membres - elle est déjà déposée de toute façon - y revenir au moment où les membres le jugeront opportun.

M. Fortier: M. le Président, je recommande qu'on y revienne une fois que tous les mémoires auront été entendus.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre délégué à l'Aménagement et au

Développement regional.

M. Gendron: M. le Président, au nom de l'équipe ministérielle...

M. Fortier: Est-ce que je dois comprendre que vous prenez le temps de parole du député de Duplessis?

M. Gendron: Non, seulement un mot là-dessus pour dire qu'effectivement, à ce moment-ci, on pourrait la recevoir pour dépôt. C'est déjà fait. Nous aurons l'occasion d'apprécier à la fin de l'audition des mémoires, tel que le souhaite le responsable de l'Opposition. Nous aurons l'occasion de commenter effectivement la recevabilité de cette motion.

Maintenant, je laisse la parole à M. Perron.

Le Président (M. Bordeleau): Tel qu'il avait été entendu, M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, dès le début de mon court exposé, souhaiter la bienvenue à mes collègues ministériels ici même à Schefferville, dans le grand comté de Duplessis, et en même temps, sans partisanerie politique, souhaiter aussi la bienvenue à mes collègues de l'Opposition. Bien entendu, j'ajoute qu'il est important de voir combien la population de Schefferville est intéressée à cette commission parlementaire, puisque ce matin nous avons dans cette salle beaucoup de gens intéressés à discuter et à entendre ce que nous avons à dire sur l'avenir de Schefferville,

Quant à moi, contrairement au député d'Outremont, je ne ferai aucune partisanerie politique dans ce que j'aurai à dire se rapportant à la commission parlementaire sur Schefferville, sinon clarifier un point, lequel d'ailleurs, j'ai clarifié lors de deux assemblées publiques que j'ai tenues ici, à Schefferville, en janvier dernier. C'est au sujet de cette commission parlementaire, quant à sa tenue.

Pour le bénéfice du député d'Outremont et pour les membres de l'Opposition, le 3 novembre 1982, la compagnie IOC annonçait la fermeture de ses installations de Schefferville. Le 4 novembre, à la suite d'une discussion que j'avais eue avec mon collègue, le ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Duhaime, nous décidions d'un commun accord de venir ici à Schefferville. Nous y sommes venus, le 5 novembre, et nous avons rencontré la population de Schefferville à ce moment-là.

Le 10 novembre, soit cinq jours après notre présence ici même, à Schefferville, le Conseil des ministres décidait, par une décision ministérielle, datée le 10 novembre 1982, de tenir une commission parlementaire dans la région de Schefferville. Le 15 décembre 1982, le gouvernement du Québec, par le biais d'une décision ministérielle du Conseil des ministres, déclarait que c'était le ministre Gendron, le ministre responsable de l'Aménagement du territoire, qui avait la responsabilité de cette commission et que c'était la Commission permanente de la présidence du conseil qui avait la responsabilité de son organisation.

M. le Président, je trouve heureux, dans un certain sens, que, pour la première fois, une commission parlementaire se réunisse à l'extérieur des murs de l'Assemblée nationale. Je suis heureux que cela se tienne dans le comté de Duplessis. Cependant, je suis malheureux en même temps de voir que cette population subit des préjudices se rapportant à une décision d'une multinationale qui s'appelle la minière IOC.

Il est à espérer que les membres de cette commission et que le gouvernement du Québec en particulier tiendront compte, lors des décisions qui seront prises éventuellement, de toutes les personnes et de toutes les familles qui sont déjà parties de Schefferville et qu'ils tiendront compte aussi de ceux et celles qui restent, qu'ils tiendront compte aussi de la population syndiquée par le biais des Métallos qui, dans un certain sens, a obtenu une partie des demandes que les Métallos avaient faites, mais il faut aussi tenir compte de toutes ces personnes qui sont dans l'entreprise privée et qui demeurent toujours à Schefferville, mais qui ne sont pas syndiquées.

Tout comme le député d'Outremont, je suis parfaitement d'accord que le gouvernement se doit de regarder attentivement, premièrement, le court terme, deuxièmement, le moyen terme et aussi le long terme. Pour ce faire, il est nécessaire que toutes les parties se concertent, soit la minière IOC, soit le gouvernement du Québec, le gouvernement d'Ottawa, les Métallos et tous les organismes et toutes les personnes qui pourraient contribuer à l'avenir de Schefferville.

Bien sûr, cette commission parlementaire, pour moi, est très importante, puisque j'ai eu l'occasion de vivre, en novembre dernier, la commission parlementaire sur SIDBEC-Normines, mais je crois fermement que la décision de IOC est encore pire que celle qui pourrait être prise en rapport avec SIDBEC-Normines qui touche les villes de Gagnon et de Port-Cartier.

Les recommandations qui sortiront de cette commission seront, je pense, un point d'appui sur le fait que nous devons garder vivante la ville de Schefferville et garder aussi vivante cette population qui veut vraiment, en bonne partie du moins, demeurer à Schefferville puisque plusieurs de

nos jeunes et des personnes qui y demeurent encore sont nés ici même, il y a plusieurs années et même tout dernièrement.

En terminant, M. le Président, mon plus grand souhait, et, encore une fois au risque de me répéter, est que tous les membres de cette commission, que le gouvernement et que toutes les instances se concertent pour faire en sorte que Schefferville vive, qu'elle ne vive pas seulement pour deux jours, mais vive pour le restant des temps. Merci. (11 heures)

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le député de Duplessis. M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, je suis conscient que nous sommes ici pour entendre les mémoires des différents intervenants pour voir les recommandations et essayer de trouver certaines solutions aux problèmes de Schefferville aujourd'hui. Mais je me dois d'établir un fait. Certains points ont été soulevés, soit par le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional ou le député de Duplessis, quant au but de cette commission et à la composition de celle-ci.

Quand le ministre dit que ce n'est pas de la poudre aux yeux, il faudrait s'assurer que ce n'est vraiment pas une mise en scène. Si on considère le mandat de cette commission, on voit qu'il consiste à entendre les personnes et organismes afin d'étudier l'ensemble de la situation de Schefferville et évaluer les actions qui pourraient être prises en vue d'aider à la solution des problèmes de cette municipalité. Conscients de ce mandat, comment pouvons-nous arriver à certaines solutions, à certaines recommandations, si nous n'avons pas les bons interlocuteurs à la commission parlementaire? Je m'explique. Le Parti libéral a choisi les membres de cette commission et la personne qui doit diriger, pour l'Opposition officielle, les travaux de la commission en regard des problèmes qui existent à Schefferville.

Je vais vous donner la liste des membres de l'Opposition officielle et leur fonction pour cette commission. Il y a M. Gilles Rocheleau, qui s'occupe des affaires municipales et de l'aménagement du territoire; il y a M. Christos Sirros, député de Laurier, qui s'occupe de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu; il y a M. Caude Dauphin, qui s'occupe du dossier de la jeunesse, et, pour cette commission, du dossier du loisir, de la chasse et de la pêche; M. Robert Middlemiss, qui s'occupe du dossier des terres et forêts - parce que nous nous sommes arrêtés à Port-Cartier pour voir l'ensemble du problème de Rayonier - et aussi du dossier des transports; M. John Kehoe, qui s'occupe du dossier des mines; en charge de la commission, pour l'Opposition officielle, c'est le député d'Outremont, qui s'occupe du dossier de l'énergie et des ressources. Le principal problème qui nous préoccupe aujourd'hui, c'est le développement de l'énergie et des ressources de la région de Schefferville.

Sans vouloir faire de critiques personnelles contre le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, si vraiment le gouvernement veut mettre ses priorités où elles doivent l'être, ce n'est pas un problème d'aménagement du territoire auquel nous faisons face aujourd'hui, ce n'est pas une question de zonage agricole ou résidentiel, de MRC ou de planification au point de vue de l'aménagement. Le problème que nous avons aujourd'hui, c'est le développement des ressources, les investissements qui doivent se faire à Schefferville. Je me demande pourquoi le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme n'est pas présent à cette commission parlementaire. Est-ce que le gouvernement a vraiment les véritables priorités? Ou est-ce que c'est vraiment une mise en scène parce que la ville de Schefferville, les citoyens de Schefferville, l'Opposition officielle ont exigé que la commission parlementaire ait lieu à Schefferville? Le gouvernement n'avait alors vraiment pas le choix et il s'est vu obligé d'instituer cette commission. Mais il le fait de telle façon que les vrais interlocuteurs ne sont pas ici pour répondre à toutes les questions et écouter les représentations des citoyens de Schefferville.

Pourquoi est-il important que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme soit ici? Dans plusieurs de vos mémoires, vous faites des recommandations concernant le tourisme. Le ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Il n'est pas ici pour vous donner sa réaction aux propositions qui seront faites. Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est responsable de la SDI. C'est cette société qui peut rendre disponibles les fonds nécessaires pour investir dans la région, pour investir à Schefferville, pour attirer des investissements des compagnies, des sociétés privées qui peuvent développer la région. C'est un de ses dossiers. Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est responsable de la SGF, la Société générale de fiancement. Eux aussi ont des fonds qui seraient disponibles. Quelle serait leur politique? Quelle serait la réaction de la SGF et du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme quant aux représentations et quant aux solutions qui pourraient être apportées à Schefferville?

Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est aussi responsable de SIDBEC. On a mentionné - et là je com-

prends que des paroles ont peut-être dépassé un peu la pensée du député de Duplessis quand il a dit que si Iron Ore ferme à Schefferville, c'est pire que SIDBEC-Normines. Pour les individus...

M. Perron: Vous interprétez cela de la façon que vous voulez.

M. Ciaccia: D'accord, si ce n'est pas cela que vous avez dit...

Pour les individus concernés, je pense que la fermeture d'une usine, c'est une tragédie au point de vue économique mais, ce qui est encore plus important, c'est une tragédie au point de vue humain et social.

On aurait bien voulu voir la réaction du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, qui dirigeait, pour le gouvernement, la commission parlementaire sur SIDBEC. Il a vu les représentations qui ont été faites par des gens de la Côte-Nord, Action-Côte-Nord qui a été formée pour répondre à certains problèmes qui existent. Je pense qu'on aurait pu au moins s'attendre du gouvernement d'avoir les vrais interlocuteurs présents à cette commission. On doit insister parce que si on n'a pas les vrais interlocuteurs, vous n'aurez pas les vraies réponses.

Des fois, M. le Président, j'ai l'impression qu'on regarde un film à reculons. Dans les années soixante et soixante-dix, il y avait du développement sur la Côte-Nord, il y avait Iron Ore et SIDBEC, mais il y avait l'implication du gouvernement, soit par des politiques, soit par de l'aide financière, soit par toutes sortes de moyens et d'aide technique. Qu'est-ce qui se produit aujourd'hui? On parle de fermer SIDBEC-Normines et on annonce la fermeture de IOC à Schefferville. Où est le gouvernement? C'est comme si on prenait ce film du développement du Québec à reculons. Le dynamisme, l'initiative, l'innovation qui existaient avec la participation des élus, des hommes politiques, toutes ces choses-là disparaissent. Où est le gouvernement?

Mon collègue le député d'Outremont a souligné les recommandations, les documents et tout ce qui avait été fait pour donner au gouvernement les outils nécessaires. On a l'impression que ce gouvernement n'a pas agi. Il regarde le bateau passer.

Le point qu'on doit souligner, c'est qu'il faut avoir du sérieux à cette commission parlementaire et pour cela le gouvernement doit démontrer, non seulement par de belles paroles d'accueil aux citoyens de Schefferville, mais par des gestes concrets, par la présence des vrais interlocuteurs, qu'il a la volonté politique de prendre les décisions pour résoudre, dans l'immédiat et aussi à long terme, les problèmes de Schefferville. Ceci ne peut être fait qu'en posant les questions aux personnes responsables.

Ce n'est pas seulement le gouvernement, ce sont les politiques pour attirer les investissements. Il faut attirer les investissements ici. Plutôt que d'aller à Terre-Neuve ou en d'autres endroits, pourquoi ne viennent-ils pas ici?

Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a dit en conférence de presse qu'il veut attirer la "big business", les grosses entreprises au Québec. Comment fera-t-il? Est-ce que les politiques actuelles découragent les investissements? C'est à ces questions que nous devons obtenir des réponses.

M. le Président, nous exigerons que cette commission parlementaire ne soit pas une mise en scène pour donner l'impression qu'on fait quelque chose. Nous exigerons que le gouvernement démontre le sérieux de ses intentions et qu'il démontre la volonté politique de trouver vraiment les solutions nécessaires pour les citoyens de Schefferville.

M. Gendron: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Avant de vous donner la parole, M. le ministre, j'avais cru comprendre au début qu'on s'était entendu pour ouvrir avec, de chaque côté, deux intervenants à raison de 20 minutes chacun, pour permettre le plus d'échanges possible avec les intervenants qui viennent déposer des mémoires. Si les gens de chaque côté me demandent la parole, je vous avoue que je n'ai pas le choix et que je devrai la leur donner en pratiquant la loi de l'alternance.

Réponse du ministre

M. Gendron: Rapidement, M. le Président, je voudrais juste...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Gendron: Effectivement, moi aussi, je croyais avoir été passablement précis et objectif dans la présentation que j'ai faite au tout début. Lorsque le député de Mont-Royal commence à faire un discours sur le caractère de représentativité de l'équipe ministérielle, je vous avoue que c'est pour le moins saugrenu et inapproprié; d'autant plus qu'on jugerait qu'il n'a jamais lu les mémoires parce que, fondamentalement, dans la plupart des mémoires qui nous ont été soumis, on parle de problèmes de loisirs. Mon collègue aura l'occasion d'en parler longuement des problèmes qui sont strictement de la responsabilité du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Quand on parle de chasse et quand on parle de problème de caribou, ou quand on parle de prolonger la période et la couverture et quand on connaît effectivement ce qu'est la population de

Schefferville à ce niveau, je pense que c'est sûrement un représentant qui se devait d'être ici. Également, lorsque je vois mon collègue de l'Énergie et des Ressources qui est ici et qu'on sait que, fondamentalement, c'est un problème qui concerne l'exploitation d'une ressource qui ne sera plus exploitée. Compte tenu des problèmes qu'on connaît, quand on fait face à une fermeture d'usine, on a également la présence de mon collègue le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. De toute façon, c'est inconciliable qu'on dise à une population: On vient ici entendre les gens, les mémoires et que le député de Mont-Royal exige qu'on soit en séance du Conseil des ministres plutôt qu'en commission parlementaire.

C'est une commission parlementaire et non une réunion du Conseil des ministres. Nous devrons, nous, comme ministres responsables, faire rapport au Conseil des ministres. Pourquoi la responsabilité a-t-elle été dévolue à celui qui vous parle? C'est justement exposé dans le premier mémoire que nous allons entendre. Si M. Ciaccia, le député de Mont-Royal, avait eu l'occasion de le lire, il verrait qu'un des problèmes fondamentaux auquel on fait face aujourd'hui, c'est que Schefferville est une ville monoindustrielle où le développement n'a pas été diversifié et quand le développement n'est pas diversifié, il arrive qu'on a des problèmes comme celui-là. Je tiens à vous dire, effectivement, que ma responsabilité est également axée sur le développement des régions du Québec, de l'ensemble des régions du Québec. Nous sommes à travailler sur une politique de développement régional.

Actuellement, l'Office de planification et de développement du Québec analyse justement une politique de développement du Nord et des villes économiques, particulièrement dans un contexte nordique. Dans ce sens, je pense que l'équipe qui est venue entendre les citoyens et les mémoires sera sûrement en mesure de faire les recommandations qui s'imposent au gouvernement du Québec et nous, nous tenions à venir écouter les citoyens, à venir écouter ceux qui ont eu la délicatesse, le souci de préparer une réflexion fouillée et qui veulent nous en faire part, qui veulent qu'on discute avec certains porte-parole gouvernementaux de ces positions. Nous sommes quatre ministres à cette commission parlementaire. Je tiens à vous dire que de toute l'histoire du parlementarisme, c'est probablement une des premières commissions où quatre ministres siègent à une même commission parce que, règle générale, il y a un répondant ministériel et il y a des collègues du gouvernement de même que de l'Opposition.

Nous sommes ici quatre pour regarder cela dans quatre secteurs d'activité prépondérants qui avaient été signalés par vous-mêmes dans vos mémoires et dans ce sens je n'accepterai pas du tout qu'on commence à s'interroger sur la représentativité parce qu'à ce moment, cela ne nous mène nulle part de toute façon. Cela ne rejoint aucun des objectifs qu'on a définis au départ et dans ce sens, je trouve que le député de Mont-Royal avait une remarque tout à fait inappropriée que je me devais de relever. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je voudrais tout simplement confirmer que la convention que nous avions était qu'il n'y aurait que deux intervenants. Ce serait tellement facile de soulever un tas de questions. Comment se fait-il que le ministre de l'Énergie et des Ressources qui est venu ici pour annoncer une commission ministérielle ne soit pas le porte-parole du gouvernement aujourd'hui et que le cabinet ait décidé de nommer quelqu'un d'autre. Je crois qu'on doit donner la parole à la ville de Schefferville et procéder dans les meilleurs délais.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie. Avant de procéder immédiatement avec la présentation de mémoires, je voudrais rappeler et ce, à tous les intervenants, pour une meilleure discussion, je pense, qu'il n'est pas nécessaire de lire tous les mémoires, particulièrement les mémoires qui sont volumineux et qu'il peut même être mieux, à l'occasion, de résumer un mémoire pour permettre un meilleur échange entre les membres de la commission et les intervenants. C'est une suggestion que je veux faire à tous les intervenants avant de commencer.

J'appellerai immédiatement, donc, le premier groupe d'intervenants qui est la ville de Schefferville. Je demanderais à M. le maire de Schefferville ainsi qu'aux personnes qui l'accompagnent de se présenter à la table en avant.

Auditions

Ville de Schefferville

M. Bégin (Charles): M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Avant de vous laisser la parole, M. Bégin, j'aimerais que vous nous présentiez les personnes qui sont avec vous pour l'enregistrement des débats.

M. Bégin: Vous avez, à ma gauche, le conseiller Jean-Pierre Lefebvre. Ensuite, Alain Dumont, qui est conseiller lui aussi. À ma droite, le conseiller Alva Cummings, le gérant de notre ville, Jean-Yves Truchon, qui est aussi greffier et trésorier ainsi que juge

de paix, et moi-même, Charles Bégin. (11 h 15)

M. le Président, MM. les ministres et députés, c'est au nom de la population en général et de mon conseil en particulier que je tiens à remercier les parlementaires et les hauts fonctionnaires présents pour avoir créé un précédent en venant constater sur place la situation qui prévaut à Schefferville, recevoir les différents mémoires et écouter les interventions de tous ceux et celles qui vont intervenir pour la survie et le nouveau dynamisme d'une ville frontalière que l'on peut identifier comme le tremplin du Nouveau-Québec. Ce mot de bienvenue s'adresse également aux représentants du monde de l'industrie, de la recherche et de l'information comme aux différents autres observateurs intéressés par nos problèmes temporaires.

Préambule. C'est au début des années cinquante, dans une vision basée sur le développement monoindustriel que le premier ministre Duplessis et son gouvernement répondirent à l'appel pressant des investisseurs américains. Au dire du gouvernement, il ne fallait rien ménager afin de créer une ville modèle dans le but évident d'attirer rapidement la main-d'oeuvre nécessaire à l'exploitation du site minier de Schefferville. C'est ainsi que plusieurs citoyens et citoyennes du Québec délaissèrent leur milieu d'appartenance, attirés par l'aventure du fer dans le Nord québécois. Pour la majorité de ces gens, cela signifiait, un déracinement brutal, compte tenu des conditions d'adaptation très difficiles pour l'épouse et les enfants du travailleur minier dans un milieu nordique et isolé. En effet, la réalité nordique, le choc du déracinement, le rude climat et l'isolement créèrent rapidement un effet démobilisant pour la famille, l'abondance des équipements socioculturels et sportifs ayant peu d'effets sur l'impact de cette psychose. Malgré tout, les gouvernements, le clergé et les investisseurs américains n'y voyaient à l'époque que l'aspect de la rentabilité du projet. Cette vision quasi euphorique du développement minier au Québec n'avait pas la dimension d'un développement diversifié. Elle était basée uniquement sur l'exploitation en plus d'être centrée sur une seule ressource, alors que l'on avait déjà un aperçu de l'immensité des richesses du sous-sol québécois de la fosse du Labrador. C'est donc dans une démarche de développement trop limité, compte tenu des valeurs du territoire environnant qu'a démarré l'aventure du fer à Schefferville. Ce manque de planification diversifiée au départ nous a conduits au désastre que nous connaissons en 1983, soit l'arrêt des activités de la minière IOC.

Objectifs. Pour la ville de Schefferville, qui est présentement dans l'incertitude la plus totale, nous anticipons, à la suite de la tenue de cette commission parlementaire, que le gouvernement prenne immédiatement les décisions qui s'imposent pour garantir une continuité de vie économique, sociale et culturelle afin d'assurer le maintien de la municipalité. La ville s'attend que le gouvernement, d'une part, amène la minière IQC à préciser immédiatement les modalités de son retrait du milieu, particulièrement en regard de l'ensemble de ses immobilisations, de ses obligations envers la ville, les citoyens et les commerçants. D'autre part, la ville exige que le gouvernement analyse rapidement et se prononce sur les avenues explorées par les intervenants à cette commission parlementaire sans oublier de préciser ses propres choix de développement qu'il réserve à la ville de Schefferville, tout cela dans le but de ne pas laisser plus longtemps les citoyens aux prises avec un stress qui devient de plus en plus collectif et une municipalité qui se voit démunie dans un tel contexte.

Problématique: Le retrait de la IOC. Afin d'exploiter son gisement minier, la compagnie se devait d'avoir en disponibilité une main-d'oeuvre adéquate sur place. Son "lobbying" a amené le gouvernement à accélérer la mise sur pied d'une municipalité pouvant offrir les services qui sont normalement offerts par ce genre de structure. C'est donc à ce moment que la compagnie a mis en chantier la presque totalité des infrastructures et équipements de toutes catégories permettant de répondre aux besoins sociaux ou culturels de cette nouvelle population de travailleurs miniers, de professionnels et de commerçants, répondant ainsi en totalité aux exigences du développement de cette époque.

Nous n'avons pas à discourir sur la relation de force et de contrôle de la compagnie sur l'administration municipale. Que l'on pense à la position dominante que la compagnie exerçait comme principal employeur. Toutefois, il faut reconnaître qu'avec les années la compagnie remettait de plus en plus de pouvoirs et d'équipements à la municipalité et que ces transferts demeurent une charge risquée lorsque le cycle budgétaire d'une municipalité est relié au revenu provenant d'une exploitation monoindustrielle. C'est pourquoi les édiles municipaux se demandent encore à l'heure actuelle si cette façon de faire de la compagnie n'était pas une stratégie de retrait graduel en prévision de la fin des opérations minières à Schefferville, tout comme le conseil de ville peut s'interroger sur le suivi qu'un gouvernement applique ou exerce en s'associant à des multinationales par le biais de l'émission de lettres patentes, de toutes catégories de décrets qui sont nécessaires à l'"opérationnalisation" ou à la mise en chantier d'une ville champignon de ce genre. Il suffit d'avoir été associé de près à l'administration municipale pour compren-

dre l'ensemble des problèmes auxquels nous avons eu à faire face au cours des années et, particulièrement, au moment où l'on vous parle.

Comme vous pouvez le constater, et cela malgré une perte de population de près 75%, la municipalité doit maintenir la même qualité de services que dans les bonnes années en plus d'assumer de nouvelles charges très onéreuses posées par le désengagement de la compagnie; je cite, par exemple, le transfert du centre récréatif. Les infrastructures, étant ce qu'elles sont, ne peuvent être réduites au rythme des départs; comme nous venons de le mentionner, nous devons y maintenir le même degré d'entretien qu'avant afin d'éviter d'avoir à subir des travaux majeurs de réparation causés par un laisser-aller. Comme gouvernement local, nous avons la responsabilité du service de la dette. Nous avons réussi à refouler une situation budgétaire précaire que nous ne voulons pas revoir de sitôt. Cela a été évidemment possible grâce à la collaboration du ministère des Affaires municipales et, aussi, de la compagnie minière. Mais, avec le spectre de l'abandon des opérations minières, nous sommes vraiment inquiets et désireux aussi, de connaître quand, comment et par qui les redevances seront assumées dans l'avenir. Le travailleur en chômage et le commerçant au bord de la faillite ne peuvent sûrement pas se porter garants de l'enveloppe de taxes que payait la compagnie minière en pleine activité. L'assurance-chômage, le bien-être social, le revenu des emplois temporaires ne permettent même pas à une famille de survivre en attendant mieux, le coût de la vie étant ce qu'il est ici. Comme la situation se détériore de jour en jour, il en coûtera de plus en plus cher pour s'approvisionner à tout point de vue. Prenons, par exemple, un article banal: le Journal de Montréal se vendait, au début de janvier, 1,10 $ et le commerçant le vendait à perte. Le consommateur de nouvelles écrites doit aussi subir les avaries du transport et accepter de lire son journal avec plusieurs jours de retard. Notre municipalité constate avec une grande inquiétude que la démobilisation s'accentue à tous les niveaux et que l'ensemble de nos concitoyens est soumis à un harcèlement de plus en plus ardu qui se répercute dans tous les secteurs d'activité.

Les assurances. Depuis l'annonce bien orchestrée de l'arrêt des activités de la compagnie minière, même si la ville continue d'offrir tous les services de protection publique, les compagnies d'assurances refusent de couvrir les citoyens, même pour leur renouvellement et, quand elles le font, c'est à des prix prohibitifs.

Les institutions d'épargne et de crédit bancaire. Plusieurs travailleurs, qui se fient sur la prime de séparation de la compagnie minière pour organiser leur relocalisation, vont avoir la surprise de leur vie quand ils sauront qu'il y a déjà des centaines de saisies par jugement, pour défaut de paiement, prêtes à être exécutées sur le montant que la compagnie veut remettre comme prime de séparation. Cette situation est due au nouveau statut de chômeur qui empêche l'ex-travailleur de respecter toutes les obligations contractées avant l'annonce de la fermeture de la compagnie minière.

Les caisses d'entraide économique. Après les pertes subies auprès de certaines sociétés qui ont cessé leurs activités, comme Champion Savings, voilà maintenant que plusieurs milliers de travailleurs du Nouveau-Québec, tant à Gagnon qu'à Fermont et Schefferville, ayant placé toutes leurs économies dans les caisses économiques de Sept-Îles et de Manicouagan, se retrouvent encore une fois dans une situation précaire. Éloignés, isolés et coupés de l'information, ils n'ont pu se présenter aux comptoirs et réclamer leurs biens comme ceux du Sud ont pu le faire en 1981. Ils ont donc subi le gel total en plus de ne recevoir aucun intérêt sur certaines catégories de placements. Qui plus est, lorsqu'on examine le nouveau règlement proposé dans la foulée du vote sur la loi 60, parrainée par M. Parizeau en mai 1982, en vue de transformer les caisses d'entraide économique en sociétés d'entraide, les épargnants devront attendre encore au moins cinq autres années avant de voir la couleur de 75% de leurs placements, si tout va bien pour les caisses d'entraide.

Le travailleur du Nouveau-Québec, réduit au chômage ou à l'incertitude de l'emploi permanent, ne peut même pas toucher ses économies, qu'il a durement acquises, pour se réorganiser une vie par ses propres moyens.

M. le Président, mes collègues des villes de Gagnon et de Fermont qui sont présents ici et moi-même croyons qu'un amendement doit être apporté à la loi 60, obligeant ainsi les sociétés d'entraide à rembourser immédiatement 100% des avoirs des gens du Nouveau-Québec qui en feront la demande. Voilà une décision qui peut se prendre immédiatement afin de réparer les torts causés involontairement aux travailleurs et ex-travailleurs du Nouveau-Québec.

Les personnes forcées de subir une déportation ou un nouveau déracinement devront le faire alors dans des conditions un peu plus humaines, parce que le gouvernement aura compris qu'une loi peut comporter des exceptions quand le contexte économique l'oblige, surtout lorsque les travailleurs sont concernés.

Les commerces. Le commerçant établi en fonction d'une activité économique florissante subit maintenant le contrecoup du départ de 75% des consommateurs. Plusieurs

ont déjà fermé leur porte et d'autres n'auront plus le choix bientôt. Pourtant, plusieurs devraient être considérés comme services essentiels.

Le revenu des travailleurs miniers. La municipalité est consciente que les travailleurs du Nouveau-Québec ont été identifiés comme étant les plus hauts salariés au Canada. Nous reconnaissons cette affirmation, mais nous tenons à préciser que cette information n'est valable que pour le salaire brut. Lorsqu'un travailleur avait déduit tous les coûts inhérents à une ville nordique, il n'est pas faux d'affirmer qu'à ce moment il avait un des revenus nets les plus bas au Canada. Est-il nécessaire d'ajouter que ces travailleurs nordiques portent toujours les séquelles des conditions de travail insupportables reliées aux conditions climatiques difficilement tolérables?

Services sociaux et de santé. Il est inconcevable de voir diminuer le nombre et la qualité de ces services au moment où la population en a le plus besoin. La situation est très alarmante, surtout lorsqu'on voit des familles déchirées par l'obligation de quitter ou de rester dans l'inconnu. Par exemple, la présence permanente de travailleurs sociaux s'avère une urgence et, d'autre part, il importe d'être prêts à répondre à toute éventualité par des services présents et disponibles. Il est donc très important que, dans ce domaine, l'on prévilégie sans réserve la condition qui prévaut. (11 h 30)

Les communautés amérindiennes.

Présentement, il existe à Schefferville deux communautés indiennes distinctes qui résident dans deux sites différents à l'intérieur même du périmètre d'urbanisation de la municipalité. Afin de répondre aux demandes d'une de ces communautés, le fédéral est en voie de réaliser une troisième municipalité amérindienne des plus modernes, à une dizaine de kilomètres de Schefferville. La ville et le provincial ont également accepté d'offrir des services à ces communautés. Malgré tout, un fait demeure: Les Montagnais et les Naskapis considèrent l'abandon des opérations minières de la compagnie IOC comme un danger actuellement présent, précurseur de l'abandon et de la désuétude des services considérés comme essentiels. Ces services sont: le chemin de fer, l'avion, les services sociaux et de santé, l'éducation et l'approvisionnement.

Voici quelques remarques, recommandations et suggestions que la ville soumet au gouvernement. 1° Nous recommandons que le gouvernement du Québec adopte une politique de ne plus favoriser la construction de villes-champianons monoindustrielles. 2° Nous recommandons que, face au développement d'une ressource non renouvenable, un fonds minier soit établi pour pallier toute éventualité au terme du projet. 3° Nous recommandons que le gouvernement du Québec, et cela vaut aussi pour le fédéral, qu'il y ait d'établie une stratégie de développement diversifié pour le Nouveau-Québec. 4° Nous recommandons que les gouvernements soient à l'origine d'activités nouvelles pour garantir la continuité de Schefferville. 5° Nous exigeons que la compagnie minière IOC précise immédiatement, et dans les moindres détails, les modalités de son retrait de Schefferville. 6° Nous demandons que le gouvernement du Québec analyse rapidement les propositions des intervenants à cette commission et qu'il agisse en conséquence. 7° Nous exigeons que le gouvernement du Québec fasse connaître à la population ses propres choix de développement qu'il envisage réalisables pour la continuité de Schefferville. 8° Nous recommandons que le gouvernement du Québec tienne la compagnie minière IOC responsable du service de la dette de la ville de Schefferville et qu'il en exige le paiement entier. 9° Nous recommandons que, dû à l'abandon des opérations de la compagnie minière, les gouvernements haussent ou ajoutent une prime d'isolement aux allocations d'assurance-chômage et de bien-être social, tant et aussi longtemps que les ex-travailleurs seront sur place. 10° Nous croyons que le citoyen n'a pas à subir les contrecoups du tapage publicitaire autour de l'annonce de l'arrêt des opérations de la compagnie minière et que le gouvernement du Québec doit prendre les mesures nécessaires qui s'imposent pour corriger la situation de non-sens, la non-protection - assurance - des biens de la population. 11° Nous recommandons que le gouvernement du Québec modifie immédiatement la loi 60 concernant la transformation des caisses d'entraide économique en sociétés d'entraide. Cette modification comporterait une clause de remboursement intégral et immédiat des économies que les travailleurs de Schefferville, Fermont et Gagnon ont placées dans ces institutions d'épargne et de crédit, rendant ainsi accessibles leurs économies en réserve pour une réorganisation de leur vie. 12° Nous recommandons que le gouvernement du Québec amène la compagnie minière IOC à considérer le commerçant et ses employés comme faisant partie du groupe des travailleurs miniers et, ainsi, prévoir une prime de séparation adéquate pour ces derniers. Il en est de même pour tous ceux et celles reliés aux services sociaux et

éducationnels. 13° Nous recommandons que le gouvernement du Québec prenne les dispositions nécessaires au remplacement immédiat de professionnels de la santé, des services sociaux et de l'éducation qui auraient à nous quitter à court et moyen terme. 14° Nous recommandons que le gouvernement du Québec, par le biais d'un protocole d'entente ou par l'intégration des effectifs policiers, prenne en charge la sécurité publique à Schefferville. 15° Nous recommandons que le gouvernement du Québec prenne les mesures qui s'imposent afin que le service de transport ferroviaire soit maintenu de façon régulière et permanente par la société d'État qu'est le Canadien National ou dans des normes minimales acceptables par la Commission des transports du Canada. 16° Compte tenu que des gisements de syénite à néphéline desquels on peut extraire l'aluminium sont situés à proximité de Schefferville, compte tenu qu'ils peuvent être atteints par une voie d'accès déjà existante, compte tenu que leurs exploitations peuvent nous conduire à la mise en place d'une nouvelle aluminerie comme première phase d'un développement diversifié, nous recommandons que le gouvernement du Québec, avec le gouvernement fédéral et divers promoteurs, accélère l'étude de ce dossier.

Suggestions: Premièrement, la municipalité de Schefferville endosse la position du chef, Joseph Guanish, qui demande au nom de sa propre communauté, que le gouvernement du Québec revoie le projet de réalisation d'un centre de formation amérindien au lac Hélène afin de l'intégrer à même les équipements disponibles en ville.

Deuxièmement, la municipalité souhaite obtenir les crédits nécessaires à la construction d'un parc industriel et commercial capable d'attirer les grossistes intéressés par l'approvisionnement de Schefferville et des municipalités du Nouveau-Québec.

Troisièmement, la municipalité souhaite que le gouvernement autorise la construction immédiate d'un entrepôt frigorifique adéquat pour l'entreposage temporaire et l'emballage afin que le produit de la chasse et de la pêche puisse se rendre à destination sans danger de surchauffage ou tout simplement de contamination, confirmant ainsi la renommée du caribou comme mets exceptionnel. Tous les chasseurs et pêcheurs de l'extérieur devraient être soumis à cette règle.

Quatrièmement, afin d'assurer une certaine continuité aux voyages touristiques, nous demandons que le gouvernement ouvre et organise la pêche d'hiver et aussi qu'il prolonge la période de chasse au caribou tout en augmentant le nombre de prises par chasseur.

Cinquièmement, à cause d'une disponibilité exceptionnelle de logements, la municipalité croit que les gouvernements peuvent revoir la vocation première de Schefferville pour y établir, à titre d'exemple, une base militaire permanente ou une base d'entraînement au service civil volontaire.

Conclusion: Voilà ce que nous, de Schefferville, avions à vous transmettre en vue de corriger la situation présente et d'aborder quelques avenues de solutions pour maintenir en activité une ville équipée pour desservir une population de quelque 5000 habitants. Nous avons confiance en l'avenir. La cause du Labrador est là pour nous le rappeler constamment. Nous sommes prêts à relever encore une fois des défis et d'autres sont prêts à venir pour nous y rejoindre à la condition que tous prennent leur responsabilité, gouvernement et compagnies.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, M. Bégin.

Avant de donner la parole aux membres de la commission, je voudrais rappeler à l'assemblée qu'on demande généralement de ne pas intervenir par des applaudissements pour ne pas déranger les travaux. Remarquez que je comprends qu'on puisse, à l'occasion, soulever une certaine émotion et un certain enthousiasme, mais autant que possible, je demanderais aux gens de réserver leurs applaudissements, ce qui permettra d'enchaîner plus rapidement les travaux de la commission.

M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: M. le maire, M. Bégin, je voudrais d'abord dans un premier temps, au nom de l'équipe ministérielle, vous remercier de la présentation de ce mémoire. On sent que vous et toute votre équipe avez mis beaucoup de coeur dans la défense de certains droits, de certaines situations que vous trouvez nécessaire de clarifier, afin que dans les meilleurs délais, on puisse rassurer vos commettants.

Vous y êtes allé de plusieurs recommandations. Il va être difficile à ce moment-ci de toutes les commenter, d'y apporter toutes les réponses que vous souhaitez, même si je peux tout de suite vous rassurer au nom du gouvernement que vous êtes en droit, vous et vos citoyens, d'exiger effectivement que nous puissions, si on n'a pas le temps de le faire immédiatement aujourd'hui, dans d'autres moments et à d'autres paliers et dans les meilleurs délais, bien sûr, apprécier

l'ensemble de vos recommandations.

Je voudrais, puisque j'ai des collègues qui veulent effectivement intervenir sur votre mémoire, apporter uniquement quelques commentaires et finir avec une ou deux questions, et par la suite, il y a deux autres collègues qui interviendront sur votre mémoire.

Lorsque, d'une façon assez claire, vous faites ressortir toute la problématique d'une ville monoindustrielle, je pense que vous balisez bien ce que j'ai soulevé rapidement tantôt, à la suite des commentaires du député de Mont-Royal. Il sera important dans l'avenir, pour quelque gouvernement que ce soit, d'avoir une vue passablement diversifiée sur le développement global de la société québécoise, mais particulièrement de villes où il sera intenable d'envisager l'avenir uniquement sur la base d'un seul employeur important, quelle que soit sa taille, ou d'une seule activité économique importante.

Dans ce sens-là, lorsque vous recommandez précisément que le gouvernement du Québec adopte une politique de ne plus favoriser la construction de "villes champignons" - c'est votre appellation - ou de villes monoindustrielles, je pense, comme équipe ministérielle, que nous sommes conscients de cela. Vous savez que je vis en Abitibi-Témiscamingue, et, au-delà de l'Abitibi, il y a tout le territoire de la Baie-James; effectivement, nous avons dû, à quelques reprises, faire les représentations d'usage pour éviter la création d'autres petites communautés qui auraient eu peut-être le goût d'aller s'installer dans des territoires très éloignés avec peu d'assurance quant à l'avenir. Il me semble que cela est tout à fait requis et souhaitable ce que vous nous dites, de prendre toutes les mesures qui s'imposent et, dans les meilleurs délais également, essayer d'avoir une réflexion beaucoup plus précise, beaucoup plus détaillée quant à la façon dont le gouvernement du Québec veut entrevoir l'avenir de ces communautés éloignées. Dans ce sens-là, tout ce que je peux vous dire, en réponse à votre recommandation, c'est que, bien sûr, nous l'endossons, sauf qu'après avoir dit cela il faut convenir qu'il va falloir préciser davantage et faire connaître à toutes et à tous les citoyens du Québec quelles sont précisément nos orientations quant aux nouvelles communautés qui iraient s'installer dans des développements à survenir. On sait que le Québec est, demeure et demeurera, quant à moi, un immense territoire plein de richesses et, dans ce sens, on peut être obligé, à court terme, à prendre des décisions quant à l'implantation de services communautaires dans d'autres endroits du Québec. Cela, il faut savoir comment nous le ferons et aussi quelles conséquences cela pourrait avoir par rapport à l'avenir.

Vous disiez également dans votre mémoire qu'il serait urgent, dès aujourd'hui, de vous donner les garanties nécessaires quant à la continuité des services, tant éducatifs que sociaux, des services de santé et des services de loisirs. Bien sûr, je n'ai peut-être pas eu l'occasion, dans l'exposé d'introduction, d'être très volubile là-dessus, mais d'ores et déjà je pense qu'on peut vous donner la confirmation qu'il n'est pas dans l'intention du gouvernement du Québec de restreindre et de ne pas vous donner ces garanties fondamentales en termes d'avenir. Ce sera toujours important, à partir du moment où déjà on sait que les autochtones vont demeurer. Il y a deux communautés autochtones importantes ici. Il y a sûrement des citoyens et des citoyennes de Scheffer-ville qui vont faire le choix d'y demeurer et, dans ce sens-là, c'est une responsabilité minimale, pour le gouvernement du Québec, de vous donner la garantie dès aujourd'hui qu'il devra toujours y avoir une vie sociale, éducative, une vie entourant les conditions de santé qui vous permettent à vous aussi, comme citoyens et citoyennes du Québec, comme contribuables, d'avoir un minimum de services en ce sens.

Quant aux autres recommandations précises, je vous rappelle que d'autres collègues auront l'occasion d'intervenir. D'une façon précise, vous recommandez que le gouvernement du Québec tienne la compagnie minière IOC responsable du service de la dette de la ville de Schefferville et qu'il en exige le paiement entier. Nous aurons l'occasion d'entendre les représentants de la minière IOC tantôt, dans la présentation de son mémoire. Mais, dès maintenant, je peux vous dire qu'à partir de l'ouverture qui avait été faite dans le communiqué de M. Brian Mulroney, président de la compagnie, d'assumer effectivement une responsabilité qui dépasse les travailleurs qui sont uniquement sur la feuille de paie de la compagnie, nous croyons que vous êtes en droit d'exiger que la compagnie minière regarde cela d'une façon tout à fait particulière. Cela correspond en tous points également au point de vue du gouvernement du Québec d'avoir des exigences très précises. (11 h 45)

C'est ce que nous allons poser comme question tantôt, à savoir comment la minière IOC entend précisément assumer les responsabilités qui sont siennes eu égard à tous les citoyens et citoyennes qui ont fait le choix de venir offrir et donner des services à leurs travailleurs, ici même, à Schefferville. Cela veut dire les commerçants et toutes les autres personnes qui ont vécu à Schefferville, qui ont appris en même temps que les travailleurs de la mine la nouvelle difficile de cette fermeture avec les conséquences que cela comporte.

D'une façon très précise, j'aimerais -j'aurais une couple de questions - que vous expliquiez peut-être davantage, en dehors du mémoire, comment concrètement la compagnie assume le service de la dette, compte tenu qu'elle a toujours, considérant ses valeurs d'immobilisation, constitué à peu près 85%, selon les renseignements que nous avons. J'aimerais que vous puissiez nous donner des précisions sur la façon dont la minière IOC devrait assumer cette responsabilité.

Le Président (M. Bordeleau): M. Bégin.

M. Bégin: Pour bien établir le contexte dans lequel on vit, notre municipalité a été créée, en fait, pour l'exploitation du minerai de fer. Lorsqu'on parle du service de la dette, c'est en fonction des propriétés qu'elle possède ou de sa valeur immobilière sur le territoire de la municipalité qui est d'environ 85%. Ensuite, comme vous avez pu le constater, Schefferville est située au 55e parallèle et nous sommes entourés par la province de Terre-Neuve sur trois côtés. Contrairement aux villes de Fermont et de Gagnon, qui ont pu agrandir leur territoire à même l'exploitation des mines, que ce soit Mont-Wright pour Fermont ou Fire-Lake pour Gagnon, Schefferville n'a jamais pu le faire parce que - particulièrement dans les dernières années et avec la loi 57 sur le financement des municipalités, sur la fiscalité, c'est ce qui est arrivé dans les deux autres ville nordiques - c'est à peu près impossible, la plus grande partie de l'exploitation n'était pas du côté du Québec et, naturellement, la municipalité n'a pas le pouvoir d'exproprier Terre-Neuve, que je sache.

Je voudrais toutefois éclaircir la question de la taxation. Jusqu'à maintenant, j'ai eu l'occasion de rencontrer M. Jacques Léonard, ministre des Affaires municipales. On nous a indiqué de faire le budget pour l'année 1983 de la façon habituelle avec comme conclusion la commission parlementaire. Je peux vous assurer que, en ce qui concerne la taxation, nos rapports avec la compagnie, dans les dernières années, ont été très bons puisque les factures de taxes ont toujours été acquittées promptement. Alors, lorsque je parle d'élargir le territoire ou de revenus que nous ne pouvions pas avoir, c'est en fonction de la frontière et non pas en fonction de la responsabilité de la compagnie.

Je ne sais pas si cela éclaire la commission, mais c'est notre position face au service de la dette.

M. Gendron: Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris un aspect. Est-ce que, quant au pourcentage de l'évaluation, vous avez dit 86%?

M. Bégin: 85% de 37 000 000 $ d'évaluation.

M. Gendron: On aura l'avantage d'approfondir davantage d'autres aspects, mais j'en ai une couple d'autres à toucher avant de passer la parole à mes collègues.

M. Bégin: Voici un détail qui est très important, en ce qui touche notre municipalité. En ce qui a trait à la taxation et à la valeur foncière, si on prend des chiffres comparatifs pour Fermont, Gagnon et Schefferville, voici le phénomène que vous avez - je tiens à le préciser à la commission parce que cela a des conséquences - c'est que, au départ, l'imposition totale de la ville de Gagnon, avant d'annexer le territoire de la mine de Fire Lake, était de 31 000 000 $. Avec l'addition de l'exploitation minière de Fire-Lake, le total de 31 000 000 $ est monté à 111 000 000 $. Ensuite, pour la ville de Fermont, au début il y avait 54 000 000 $ d'évaluation et avec l'addition de l'exploitation du Mont Wright, le tout a monté à 280 000 000 $, alors qu'à Schefferville on est toujours demeuré à 37 000 000 $. C'est un point très important et lorsque vous aurez à décider sur Schefferville, je pense que vous comprendrez que l'effort fiscal de tous était plus grand par rapport aux autres villes nordiques.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Gendron: D'accord. Vous avez une autre recommandation que j'aimerais commenter parce que j'ai eu l'occasion d'en discuter avec le ministre responsable. Vous suggériez de modifier la loi 60 pour permettre aux sociétaires de rembourser les fonds qu'ils ont mis dans les caisses d'entraide qui sont devenues les sociétés d'entraide.

Je suis obligé de vous dire honnêtement que c'est sûr que c'est quelque chose qu'on se devra d'analyser plus en profondeur. Mais, à prime abord, je suis en mesure de vous dire quand même que, parce qu'il y a de vos travailleurs qui étaient membres de la Société d'entraide de Sept-Îles et, également, de celle de Manicouagan, pour ce qui est de la Société d'entraide de Sept-îles, dès le début de janvier 1983, il est possible de retirer les intérêts sur les fonds - je ne parle pas du capital - et selon les informations qu'on a eues après vérification, il sera également passible, pour tous les sociétaires, de retirer les sommes de leur capital. Dès le mois de janvier 1984 on commencera à autoriser les retraits par tranches. Pour tout de suite, c'est juste une précision que je veux vous donner pour éviter que tout le monde reste avec la crainte du

cinq ans. Vous disiez dans votre mémoire que d'ici cinq ans il est absolument impossible de retirer quoi que ce soit. Ce n'est pas exact parce que la loi comme telle permet, dépendamment des fonds de chacune des caisses, de la situation particulière de chacune des caisses, d'avoir un échéancier différent pour chacune des caisses. Dans ce sens-là il est difficile d'envisager tout de suite une modification à la loi 60 sans vérifier d'une façon fort précise et fort exacte, quelles seront les possibilités pour les deux caisses qui touchent vos travailleurs. Je tenais à vous dire cela pour ce qui concerne celle de Schefferville.

Quant à vos travailleurs ou les citoyens et les citoyennes qui auraient des fonds dans la caisse de Manicouagan, on est obligé encore là d'être francs parce que, comme je l'ai mentionné tantôt, on se dira ici les choses telles qu'elles sont, la situation est un peu plus difficile, pour ne pas dire passablement plus pénible, parce qu'il y a des difficultés financières à la Société d'entraide de Manicouagan et dans ce sens-là il faudra regarder jusqu'à quel point la Fédération des caisses d'entraide est en mesure d'aider ou de soutenir ces difficultés à la Caisse d'entraide de Manicouagan.

Je tiens quand même à vous dire que l'analyse détaillée de votre demande, particulièrement sur cet aspect-là, sera faite par le ministère des Finances et le responsable, et nous aurons l'occasion de vous communiquer une réponse définitive à ce sujet-là.

Vous aviez également une autre recommandation que je voudrais commenter et finir par une question. Vous avez dit dans votre mémoire, et je le partage - le gouvernement du Québec le partage aussi -qu'il faut absolument envisager des mesures de compensation pour ce qu'on pourrait appeler les activités commerciales de Schefferville. Tout le monde sait que dans une décision comme celle qui a été prise, qui a les conséquences que tout le monde connaît, il y a ce qu'on appelle des pertes de commerce importantes. J'aimerais que vous puissiez nous donner des précisions: dans votre réflexion et celle de vos collaborateurs qui ont travaillé à la rédaction de votre mémoire, comment voyez-vous l'espèce de critère de base qu'on devrait essayer de trouver ensemble pour, en termes d'équité, essayer de savoir quel type de compensation il y aurait lieu de donner ou d'envisager de distribuer à vos commettants qui étaient en situation commerciale ou industrielle, sans être nécessairement des travailleurs comme tels de IOC, mais qui étaient ici assurément pour dispenser des services à ces travailleurs?

Le Président (M. Bordeleau): M. le maire.

M. Bégin: Voici! En ce qui concerne les commerces, je pense que ce qu'il est important de se rappeler c'est que dans le contexte isolé dans lequel se trouve la municipalité, les gens qui sont dans le milieu de Schefferville qui donnent des services, que ce soit à la buanderie, à la tabagie ou ailleurs à l'hôtel, c'est sûr qu'ils n'ont aucune protection. On souhaiterait une formule pour que les différents responsables et intervenants se rejoignent pour, justement, égaliser la possibilité de compenser les pertes énormes que ces gens ont à subir. Parce que, comme vous avez pu le constater par la teneur de notre mémoire, à Schefferville, cela devient très difficile de continuer à vivre et la raison pour laquelle on exige des délais immédiats, c'est parce que, après enquête auprès des commerçants, on réalise que pour maintenir les services actuels en place, cela prend au moins 3000 de population pour que cela soit valable.

Je pense que c'est une réalité; d'une part, si on veut garder les commerces sur place il faut agir très rapidement et, d'autre part, pour ceux qui veulent partir, eh bien, qu'ils soient au moins compensés sur la même base que les autres.

M. Gendron: Cela ne fait aucun doute que sur le fond on se comprend. Ce que j'aurais aimé savoir de votre part c'est si vous avez fait une réflexion peut-être un petit plus poussée, non sur la nécessité de rejoindre mutuellement ceux qui sont concernés pour faire une évaluation mais si vous avez abordé la formule ou les quelques critères sur lesquels on pourrait apprécier une forme de compensation équitable pour ces commerces en termes d'évaluation chiffrée. Est-ce que vous êtes rendus là ou si cette étape n'est pas franchie?

M. Bégin: J'ai une réponse à ce sujet qui devrait vous guider. C'est que le comité de citoyens de Schefferville, dans son mémoire, a justement ces données et peut élaborer beaucoup plus qu'on ne pourrait le faire. À l'intérieur de ce comité, il y a au-delà de quatorze intervenants qui viennent de différentes sections de notre population.

Ensuite, si vous me permettez, pour la caisse d'entraide, vous ne croyez pas que le gouvernement pourrait au moins prêter l'argent aux travailleurs qui ne peuvent pas le retirer de la caisse d'entraide? Parce que, comme vous avez pu le constater tout à l'heure, dans le mémoire, on a bien mentionné que ceux qui ont cessé de travailler pour la compagnie se réveillent aujourd'hui avec un fait très brutal. C'est que la compensation qui va être payée par la compagnie ou la prime de séparation sera immédiatement saisie en fonction des prêts qui ont été accordés antérieurement, au moment où le travailleur avait son statut de

travailleur.

M. Bordeleau: M. le ministre.

M. Gendron: Oui, je pense que de toute façon, avec... Je voudrais juste donner une précision sur le dernier commentaire que vous venez de faire. Vous dites: Est-ce que vous ne croyez pas qu'on devrait envisager la possibilité sous forme de prêt ou permettre, par une modification législative, d'avoir une réponse un petit peu plus ad hoc et particulière pour les sociétaires qui sont concernés par ce que vous dites, c'est-à-dire qui sont dans une situation d'endettement qui fait qu'immédiatement en touchant leur prime de départ ou de séparation, peu importe le nom, elle sera engloutie à d'autres fins que ce pour quoi elle devrait servir? Oui, je pense que cela fera partie de l'analyse que le ministère des Finances devrait faire. Mais, je ne suis pas sûr qu'automatiquement, tout de suite, la solution c'est de modifier la loi 60 et dire que tous ceux qui avaient des fonds ont l'autorisation de les retirer. Parce que ce ne sont pas tous les mêmes travailleurs qui sont exactement dans la même situation. On voudrait regarder une application plus concrète de ce que cela va donner et c'est un peu l'évaluation que le ministère des Finances voudrait faire avant d'être capable de dire: Oui, il n'y a pas de problème, on va modifier la loi 60.

L'autre aspect et je pense que tout le monde va en convenir, vous le savez, c'est que lorsqu'on a lancé les caisses d'entraide, tout le monde était heureux de cela et particulièrement celui qui vous parle, au nom du régionalisme et au nom d'une espèce de capital local qui permettrait à nos communautés de se financer. Mais, à la suite des difficultés vécues par la fédération, il y a eu un premier coup dur. Il y a eu un deuxième coup dur quand on a été obligé de prendre les votes par rapport à la question: Est-ce qu'on reste société d'entraide ou si on se regroupe avec d'autres mouvements? Et il est dangereux, avec une troisième modification, de créer encore un climat d'instabilité pour celles qui fonctionnent. Parce qu'il ne faut pas penser... Je sais qu'ici, à Schefferville, il y a un problème bien spécifique, c'est pourquoi on est ici. Mais il y a également, dans les autres régions du Québec, avec la crise économique que nous vivons, des situations pénibles et on est loin d'être certain qu'on n'aurait pas passablement d'autres demandes de même type venant d'autres régions du Québec où, effectivement, les fonds sont également gelés. Alors, il faut regarder le rythme de progression du "dégel" pour être en mesure d'évaluer quelles sommes sont touchées par cela et, s'il ne reste que quelques caisses où, d'après nos indications, cela va prendre des années avant d'entrevoir la possibilité de retirer les fonds. Il me semble qu'il va falloir avoir un souci particulier pour celles-là. C'est pour cela que cela mérite une analyse plus en profondeur. (1Z heures)

Le Président (M. Bordeleau): M. Bégin.

M. Bégin: Dans une de nos recommandations, on parle de minerai possible à extraire pour former l'aluminium. J'ai ici une note indiquant clairement qu'un projet est à la veille d'aboutir avec Pechiney et le gouvernement, ce serait à Bécancour. Ne serait-il pas possible, dans les projets futurs, de penser en fonction, non pas de diminuer nos terres arables dans le Québec, mais penser en fonction du Nord et en fonction du Nouveau-Québec? Je pense qu'on a la possibilité d'épargner nos terres arables, justement en pensant que ces choses peuvent se faire sur place, avec le minerai sur place, dans le Nouveau-Québec.

M. Gendron: M. le Président, comme on me dit que le temps file et que je veux donner l'occasion à au moins deux autres de mes collègues de vous poser des questions sur votre mémoire, je vais laisser la parole à l'Opposition.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je vais demander au député de Hull, Gilles Rocheleau, qui a été maire de Hull, de représenter notre formation politique et d'intervenir à ce moment-ci.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je tiens premièrement à saluer le maire Bégin ainsi que les membres du conseil municipal et le secrétaire-trésorier de la municipalité. Je tiens aussi à souligner que l'Opposition est très soucieuse des problèmes que connaît actuellement Schefferville, mais aussi de l'ensemble des préoccupations que vit actuellement la Côte-Nord.

Je pense qu'il est important de souligner que l'Opposition, depuis déjà plusieurs années, est préoccupée par les problèmes que connaît la Côte-Nord. Nous sommes d'autant plus préoccupés aujourd'hui que les propos qui sont tenus... Je relève un propos tenu par le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional il y a quelques instants, alors qu'il dit qu'il est important dans l'avenir de prévoir. Je trouve très malheureux qu'on pense prévoir dans l'avenir, alors que les citoyens de Schefferville ont pensé à l'avenir la journée où ils sont arrivés ici. Que pour le gouvernement, aujourd'hui, on pense à

l'avenir ne plus répéter ce qui se produit actuellement ou ce qui peut se répéter dans d'autres villes nordiques. Ce que je trouve de très surprenant et de très malheureux du même coup, c'est que plusieurs études ont été faites dans le passé, entre autres, des études de l'Office de planification et de développement du Québec, études qui ont été déposées au cours des années 1978 et 1979 et dans lesquelles on avait fait des recommandations pertinentes au ministre, tenant compte des orientations de développement que devait prendre la Côte-Nord. On parle d'études qui ont été faites il y a plus de quatre ans et, aujourd'hui, le gouvernement semble se réveiller à la réalité, c'est-à-dire qu'une population qui a déjà connu un départ - il y a quelque 75% de votre population qui est déjà partie - et qu'on semble aujourd'hui s'arrêter pour penser à l'avenir, alors qu'il faut effectivement penser au présent. Il faut penser non seulement à Schefferville, qui connaît des préoccupations immédiates, mais l'Opposition a eu l'occasion de visiter, hier, à Port-Cartier, Rayonier, qui est fermé depuis trois ans et qui employait 1500 travailleurs et travailleuses. À Port-Cartier également on a visité SIDBEC-Normines, qui connaît actuellement des problèmes très sérieux. Et, aujourd'hui, on se retrouve avec la population de Schefferville, en présence de son conseil municipal qui fait des recommandations très intéressantes et dont l'Opposition devra tenir compte au cours des débats futurs. Ce qui me préoccupe davantage, M. le maire, aujourd'hui, c'est la situation dans laquelle est placée Schefferville, tenant compte d'un endettement qui comprend environ 31% de votre dette obligataire. Si on tient compte des municipalités ou des villes ou municipalités de Gagnon et de Fermont, le pourcentage d'endettement est de beaucoup inférieur; entre autres, Fermont, je crois, à moins de faire erreur, a 0,5% d'endettement par rapport à la dette ou à l'évaluation actuelle. Ce qui me préoccupe aussi, M. le maire, c'est la situation dans laquelle on se retrouve. J'aimerais peut-être que vous puissiez répondre à certaines des questions qui nous préoccupent. Malheureusement, je regrette l'absence du ministre des Affaires municipales, car il est le patron des municipalités. Vous êtes directement impliqué dans un problème très particulier. Je comprends que son adjoint, le député de Groulx, est ici présent et j'ose souhaiter qu'il lui fera part des inconvénients que vous subissez. Il n'en demeure pas moins que le père de la loi 125, le ministre des Affaires municipales actuel, a été un des artisans du développement à venir au Québec. Du même coup, M. le Président, j'aimerais que le maire puisse nous éclairer, tenant compte du fait que l'on parle des villes nordiques et qu'une MRC a été créée ici dans la région, la MRC de Caniapiscau dont vous êtes le préfet. J'aimerais savoir, tenant compte que la MRC comprend les villes de Gagnon et de Fermont - comme premier mandat, vous aviez la préparation d'un schéma d'aménagement - si le gouvernement comme tel vous a inscrit des délais afin de déposer votre schéma d'aménagement, tenant compte de votre MRC. J'aimerais savoir aussi, d'autre part, les sommes d'argent qu'on a mises à votre disposition pour tenir compte de la préparation de votre schéma d'aménagement. Dans une première question peut-être...

Le Président (M. Bordeleau): M. le maire Bégin.

M. Bégin: Merci. Je peux vous dire en peu de mots que, pour les travaux que nous avons eus, il a été possible de manoeuvrer avec les sommes que nous avons. Lorsqu'on parle de tout le territoire, il est impossible de le faire parce que, à l'intérieur de notre territoire, de la municipalité régionale de comté Caniapiscau, vous avez des espaces immenses où il n'y a pas de cantons, pas d'organisation. Alors, c'est une tâche à peu près impossible. Ce qu'on fait, on se propose, dans les réunions à venir, de répartir les responsabilités entre les trois villes avec des personnes clés sur place pour l'émission des permis dans les alentours. Imaginez, on part du 52e parallèle et nous nous rendons jusqu'au 55e parallèle et, ensuite, le méridien 70 jusqu'à la frontière de Terre-Neuve. C'est impossible, avec les moyens que nous avons, de tout déceler dans le territoire. Ce qu'on fait, qu'actuellement: il y a une firme qui travaille à cette chose et nous attendons les recommandations. Probablement que nous aurons à statuer dans la semaine qui vient.

M. Rocheleau: Merci, M. le maire. Un commentaire que j'aimerais faire, M. le Président, c'est que je considère, d'une part, qu'actuellement nous sommes en train de créer une nouvelle bureaucratie au Québec, soit par la mise en place des MRC. D'avoir établi une MRC, tenant compte du territoire, des distances et des problèmes particuliers que les villes nordiques vivent actuellement, je considère que c'est tout simplement de la folie furieuse du gouvernement d'avoir créé cette MRC qui semble être un faux-fuyant aux problèmes que vous vivez et connaissez actuellement. D'autre part, j'ose souhaiter que le gouvernement, dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois, tiendra compte davantage des problèmes que vivent les municipalités nordiques, telle Schefferville, entre autres, qui connaît des problèmes tout à fait particuliers. D'autres points, M. le...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Hull, j'ai reconnu M. le maire...

M. Bégin: Simplement pour clarifier la situation de la municipalité de Caniapiscau. Au départ, les trois villes nordiques étaient d'accord pour la formation de la municipalité dans sa forme actuelle. Où les jeux ont été changés, c'est avec le retrait de la minière et les diminutions, aussi, de production au niveau des villes de Gagnon et de Fermont. C'est sûr qu'il va falloir réévaluer cette chose car cela devient très difficile pour nous.

M. Rocheleau: Je comprends, M. le maire, votre préoccupation, sûrement de la survie et de l'aménagement du territoire. Je comprends aussi que le gouvernement du Québec a pressé les municipalités à définir, sinon imposer des MRC au Québec, mais il y a un point relativement important, tenant compte du fait que la MRC de Caniapiscau a été créée. J'aimerais peut-être vous entendre sur les responsabilités éventuellement dévolues aux MRC à l'exception du schéma d'aménagement. J'aimerais savoir si votre MRC, avec l'aide de l'Union des conseils de comté ou l'Union des municipalités, dépendamment des... Je pense que vous appartenez à l'Union des conseils de comté, si...

M. Bégin: Nous chevauchons les deux. M. Rocheleau: ...en somme les deux.

M. Bégin: Je veux dire que ce n'est pas clarifié.

M. Rocheleau: J'aimerais savoir si vous avez fait des représentations auprès du gouvernement, à savoir les responsabilités qui éventuellement seraient dévolues aux MRC, tenant compte du schéma d'aménagement que vous devriez implanter dans les mois qui suivent.

M. Bégin: Pour nous, on essaie de maintenir à l'intérieur de la loi 125 ce qui a été prévu. Assurément, pour ce qui est de cette formule, avant de prendre des responsabilités additionnelles, il faudra que les montants soient disponibles, parce que de plus en plus on s'en va vers une situation où on sera de moins en moins capable de prendre ces responsabilités additionnelles, à moins que des montants d'argent soient disponibles.

M. Rocheleau: Maintenant, M. le maire, tenant compte du fait que dans votre mémoire vous avez plusieurs recommandations et suggestions et que vous demandez, entre autres, dans une de vos recommandations de tenir responsable la compagnie minière de l'endettement que connaît actuellement la ville de Scheffervil-le, avez-vous eu des rencontres avec la compagnie, et depuis combien de temps, tenant compte du fait que le problème que vous vivez aujourd'hui n'est quand même pas d'hier? Cela fait déjà un bout de temps...

M. Bégin: Si vous me permettez, je vais parler des dernières années d'exploitation. À la suite d'une consultation avec la minière IOC, les autorités de la ville et les Affaires municipales, on a finalement réussi à appliquer une formule de financement à Schefferville où on a fonctionné sans déficit et avec des surplus, particulièrement dans les trois dernières années. Tout cela a pu se faire au préalable en ayant des discussions avec la minière. C'est sûr que, la minière IOC étant impliquée directement dans l'évaluation foncière, il était impossible pour la municipalité de statuer sur le budget sans la consulter. De ce point de vue, on a toujours consulté la minière IOC. Aujourd'hui, en fonction du budget 1983 - on a été aussi en consultation lors des derniers budgets - on est toujours en consultation. Tous ont reconnu que notre administration est une bonne administration. Pour le service de la dette, vu l'implication de l'évaluation foncière à 85% de la part de la minière IOC et l'impossibilité pour nous autres d'aller chercher d'autres revenus à même les activités des mines, c'est pour cela qu'on fait cette recommandation.

S'il y a des responsabilités autres que celles dévolues à la minière IOC, je crois que les instances gouvernementales avec la commission parlementaire devraient ajuster ces choses.

M. Rocheleau: Maintenant, M. le maire, vous avez perdu une partie importante de vos citoyens; tantôt, vous avez mentionné que vous aviez préparé votre budget pour l'année 1983 étalé sur douze mois comme si rien n'était et que vous aviez rencontré le ministre des Affaires municipales pour en discuter avec lui.

Tenant compte du fait que vous devez maintenir les services essentiels, l'aqueduc, l'égout, la police et tous les services culturels et d'aménagement, y a-t-il eu une entente de conclue avec le ministère des Affaires municipales, à savoir s'il allait combler le déficit possible ou le déficit qui pourrait être encouru, tenant compte du fait que votre population a terriblement diminué et que les services exigent quand même les mêmes dépenses? (12 h 15)

M. Bégin: Au moment de la commission parlementaire sur SIDBEC-Normines à laquelle j'ai assisté, je me suis rendu rencontrer le ministre des Affaires

municipales. Je lui ai exposé nos problèmes. D'abord, la question des départs, en ce qui concerne le conseil de ville, être autorisé à faire des nominations s'il y a trop de départs au conseil de ville, en supposant qu'on se réveille sans quorum. Ensuite, j'ai abordé la question des commerçants qui ne sont plus en mesure de payer leurs factures de services municipaux et de taxes. On m'a dit à ce moment-là qu'il appartiendrait à la commission parlementaire, justement, de régler ces problèmes. C'est cela qui est notre réponse. On en est rendu là.

M. Rocheleau: C'est une façon de passer la balle à quelqu'un d'autre, disons.

M. Bégin: Oui, d'accord, mais dans les faits je crois que la commission parlementaire est là, justement, pour recevoir ces problèmes auxquels nous aurons à faire face ou auxquels nous faisons face actuellement.

M. Rocheleau: Mais, je pense, M. le maire, qu'il y a quand même un problème qui existe actuellement; vous avez des fermetures, des gens ont fait des investissements, des gens y ont mis leurs économies et, actuellement, ces mêmes citoyens font face à des pertes énormes qui sont évidentes et qui sont actuelles. Est-ce que le ministre vous a donné, quand même, des indications à savoir qu'il allait recommander au Conseil des ministres de prendre des mesures immédiates et aussi rapides que possible pour, justement, enlever cette préoccupation? Parce que vos citoyens sont sûrement préoccupés par la situation qui existe.

M. Bégin: Ils sont très préoccupés. Si vous me le permettez, M. le Président, disons que nous avons parlé du service de la dette et du service municipal de police. Ces deux postes étant entièrement éliminés au point de vue des coûts, déjà on améliore nos finances municipales. Ce qu'il faut trouver pour l'avenir, c'est un nouveau mode de financement pour que Schefferville reste en vie. Je pense que c'est cela la réponse. La minière n'étant plus là, d'accord, cette année, on va pouvoir compléter nos choses. Demain, de quelle façon cela va être fait? On veut le savoir et, d'ailleurs, on l'exige dans le mémoire. On en parle de cette chose-là. C'est le prochain problème que nous aurons à affronter. À ce jour, on n'a pas de problèmes financiers, mais nous sommes toujours sous le coup de la loi municipale. Étant sous cette loi, on est obligé, comme corps public, de l'appliquer et cela devient très injuste pour les commerçants qui ne sont plus en mesure d'absorber leurs factures. Je pense qu'il va falloir se dépêcher de regarder et d'analyser cette situation.

M. Rocheleau: M. le maire, tantôt, vous avez mentionné que, lors de votre rencontre avec le ministre des Affaires municipales, il vous avait dit, à toutes fins utiles, d'attendre la commission parlementaire, qui prendrait une décision là-dessus.

M. Bégin: Que cela se réglerait au moment de la commission parlementaire.

M. Rocheleau: II faudrait peut-être penser à rajouter à la résolution que nous avons déjà déposée certains éléments nouveaux, à savoir que la commission parlementaire devra prendre une décision pour le ministre des Affaires municipales étant donné qu'il n'a pas semblé en mesure de la prendre lui-même, tenant compte des problèmes que vous aviez. Si vous le permettez, M. le Président, je me réserverai quelques instants, tantôt, parce que j'aurais une autre question à poser à M. le maire, étant donné que je n'ai pas pris mes 20 minutes et que d'autres membres de la commission, du côté ministériel, seraient sûrement intéressés à prendre la parole.

Le Président (M. Bordeleau):

Effectivement, M. le député de Hull, vous n'avez pas pris vos 20 minutes, mais vous en avez pris 18.

M. Rocheleau: J'en ai gardé deux.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Groulx et adjoint parlementaire aux Affaires municipales.

M. Fallu: M. le maire, j'ai été vraiment étonné de votre mémoire parce que, de la part d'une municipalité, de la part d'une ville, il indique des préoccupations de nature sociale, économique, culturelle, fiscale, de sorte que, comme vous le dites vous-même dans votre mémoire, vous vous comportez comme un gouvernement local. J'aimerais vous en féliciter parce que vous répondez à l'ensemble des préoccupations de vos concitoyens et de vos concitoyennes.

On sait que la municipalité, par le passé, a connu certains problèmes fiscaux -notamment en 1976-77 - qui ont été réglés par une très bonne gestion. On sait que vous avez été extrêmement prudent, d'abord, dans la négociation que vous avez entreprise avec le gouvernement dans les années passées à propos du service de police où vous avez fait des acquis, d'ailleurs; ensuite, dans la préparation du budget de cette année où vous avez pris certaines garanties et vous avez même - c'est une des seules municipalités au Québec qui l'a fait, d'un point de vue comptable - diminué votre budget. Donc, vous avez géré d'une façon

extrêmement prudente. Vous avez également pris des décisions de diminution de services qui ont également allégé les imputations budgétaires.

J'ai des questions de deux natures. La première porte sur le niveau de service qui serait à maintenir dans la municipalité dans l'hypothèse - qui doit être celle qu'on doit envisager en premier lieu - du maintien de ce qu'on pourrait appeler les services minimums. Certes, il y a, au départ, du point de vue budgétaire, le service de la dette et le service de la police, ceci exclu parce que nous y reviendrons. Quels sont les services, pour la municipalité, que vous jugez minimums ou services essentiels, compte tenu de la particularité même de la ville de Schefferville, dans les coûts que ces services-là amènent et quel serait également le niveau budgétaire que vous voudriez maintenir notamment dans le domaine de l'approvisionnement en eau, le secrétariat de la municipalité, l'entretien général, la protection publique, le service d'incendie, le service des loisirs?

M. Bégin: Depuis cinq à six ans nous avons restreint les dépenses à un maximum en ce qui concerne le fonctionnement de la municipalité. Cela a donné le résultat que vous venez de mentionner. Les deux dernières années, 1981-1982 ont été des années de surplus, au-delà de 583 000 $, et pour l'année 1983, nous avons un budget équilibré aussi. Quant aux services qu'on pourrait maintenir avec un minimum de coût, il y a le service d'eau, des pompiers, l'entretien des rues, des lumières, les services à donner à la réserve indienne Matimekosh qui sont reliés avec les services municipaux. Nous avons à maintenir un personnel en place pour desservir les services qu'on donne soit au lac John qui est la deuxième réserve, ou la troisième réserve au lac Matemace à environ 10 kilomètres de Schefferville. Il y a une entente à cet effet pour les six prochains mois.

Tout cela ensemble, nous considérons actuellement que ce que nous avons en structures à la municipalité, ce sont des minimums. Comme vous l'avez mentionné nous avons été très prudents parce qu'on voulait justement et on avait à coeur de relever nos finances afin de s'en sortir.

Ensuite, il y a la question du centre récréatif avec sa vie sociale et culturelle qui est très importante pour les gens qui sont ici. Au début des exploitations, dans les années soixante, la minière IOC avait installé le centre récréatif avec une aréna justement pour essayer de maintenir des services qui intéresseraient le mineur et sa famille à rester sur place. Ces services sont toujours là et je peux vous affirmer que c'est impossible pour la municipalité de les exploiter, parce que c'est trop onéreux. On ne peut tout de même pas exploiter un quart de piscine ou un quart d'aréna ou un quart d'allées de quilles. Ou on exploite ou on le ferme. C'est cela la situation de Schefferville.

On croit qu'avec la disparition du service de la dette comme obligation et ensuite la disparition du coût pour maintenir le corps de police, toutes les structures sont en place et on devrait certainement avoir des formules pour nous permettre de maintenir les services que nous avons actuellement. Je pense que c'est l'optique qu'il faut. Ce sont des services essentiels.

M. Fallu: Merci. Ma deuxième question porte donc sur le service de la dette et ce qui est relatif à l'évaluation imposable. On sait trop - on est justement ici pour le savoir - qu'il y a un certain nombre de maisons, dit-on, qui risquent d'être démolies. On ne sait plus vraiment ce qui se passera à Schefferville.

Depuis le dépôt de votre mémoire, est-ce que vous avez eu des contacts avec la minière pour savoir ce qui resterait propriété de la minière notamment et ce qu'elle entend faire avec l'ensemble de ses équipements parce que la fiscalité municipale repose précisément sur ses équipements, d'une part. D'autre part, quant au service de la dette, vous faites une proposition - no 8 -à savoir de rendre responsable la minière du service de la dette. J'imagine bien que c'est à 100%. Est-ce qu'il y a eu des contacts auprès de la minière à ce propos?

M. Bégin: Sur cela particulièrement, non. Nous avons négocié, par exemple, en fonction du budget ou du service de la dette actuelle pour l'année, comme nous avons négocié le rachat par anticipation d'obligations sur le parc de roulottes. Cela est prévu à l'intérieur du budget actuel. Nous avons été jusque là, mais sur le fait d'impliquer directement la minière IOC concernant le service de la dette nous n'en avons pas eu la possibilité jusqu'à maintenant. Je veux dire que depuis l'annonce jusqu'à nos jours, les circonstances ne nous l'ont pas permis. Nous avons négocié par exemple le budget 1983.

M. Fallu: Quant à la destruction éventuelle d'équipements sur lesquels repose la fiscalité...

M. Bégin: Nous avons des bribes d'information dans le sens que les maisons ont été offertes à 1 $. Évidemment, cela implique toute la taxation municipale et scolaire et des services à maintenir pour celui se trouvant en charge. Évidemment, là encore, votre commission parlementaire aura à analyser cela parce que pour nous, on ne peut pas affirmer qu'on connaît l'avenir. On

sait qu'il y a des choses qui s'en viennent. On a des bribes d'information comme la minière qui a décidé de garder un certain nombre de maisons, mais dans les autres détails, on ne peut pas aller plus loin que cela.

M. Fallu: Donc, ce sont des questions que vous télégraphiez via la commission à la minière IOC.

M. Bégin: D'ailleurs, on le demande aussi dans notre mémoire, comme vous avez pu le constater, que ces choses soient définies. Cela représente pour nous une inquiétude et le temps est très limité comme vous le savez et on a fait la même demande aussi au gouvernement de considérer la situation tragique que nous connaissons et qu'enfin on prenne des décisions.

M. Fallu: En ce qui a trait au service de police vous avez déjà eu l'appui du ministère de la Justice.

M. Bégin: Oui, apparemment, il y a eu un accord de principe et disons que nous n'avons pas les choses officielles, mais je sais pertinemment que nous serons appelés à aller signer le prochain contrat, les services d'entente avec le ministère dans les jours à venir.

M. Fallu: Merci, M. le maire.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Laurier.

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. Bégin, j'aimerais profiter des deux minutes qui nous restent peut-être pour vous apporter en tout cas mon appui et notre appui concernant au moins deux recommandations spécifiques que vous faites au gouvernement, la neuvième et la treizième. Vous recommandez qu'on ajoute une prime d'isolement aux allocations d'aide sociale. Est-ce que vous êtes, d'une part, en mesure de nous indiquer un peu le pourcentage de la population à l'heure actuelle qui dépend ou qui dépendra bientôt de l'aide sociale?

M. Bégin: Malheureusement, dans les chiffres, je ne sais pas, mais je crois que dans les comités qui vont présenter les mémoires qui vont suivre, vous pourriez poser la question comme, par exemple, au comité de citoyens. Nous à la ville, on n'a pas les détails au complet du nombre de personnes. Je peux vous dire, par exemple, qu'il reste environ 25 employés à la compagnie actuellement. Ce qui veut dire qu'à peu près tout le monde est en chômage. Vous avez ceux qui ont été mis à pied il y a deux ans qui sont sur l'aide sociale et vous avez ceux qui sont avec l'assurance chômage et vous avez les gens pour qui dans le moment cela se règle par la minière IOC avec leur pension anticipée et une pension directement et les primes de séparation. C'est à peu près la situation que nous avons actuellement. Évidemment, sur le coût de la vie, je pense que l'exemple du journal de Montréal à 1,10 $ et que le monsieur qui le vend ne rencontre même pas ses coûts, c'est une réalité. Nous, quand on reçoit le Soleil de Québec, on le reçoit trois ou quatre jours après sa sortie. C'est comme cela. C'est un contexte comme cela. On peut aller jusqu'à 30% à 40% plus cher qu'à Montréal, c'est sûr. D'ailleurs, j'ai entendu dire que la commission parlementaire en se déplaçant à Schefferville a trouvé que c'est très onéreux de venir à Schefferville. Cela l'est aussi pour les citoyens, je peux vous l'accorder.

M. Sirros: La troisième recommandation dont vous parlez, les professionnels de la santé et services sociaux qui auraient à quitter à court et moyen termes. Est-ce que vous pouvez dresser rapidement le tableau de la situation actuelle et est-ce que vous avez identifié les besoins minimaux en termes de personnel professionnel?

M. Bégin: Ce que nous voulons, c'est maintenir les services que nous avons toujours eus et combler les postes qui peuvent être libres. On se réfère particulièrement, mettons, à une personne sur le service social parce que les problèmes actuellement sont des problèmes difficiles, ce sont des problèmes de gens qui étaient habitués d'avoir une vie régulière et de pouvoir s'occuper. Actuellement, le problème, c'est que ces services, il faut qu'ils restent en place même si la population diminue. On ne veut pas surtout que Schefferville soit traitée à même des normes. C'est cela qui est important dans les différents ministères et on souhaite surtout qu'une personne clé, qu'une personne avec pouvoirs multiples soit sur place pour travailler avec nous autres pour aller ouvrir les portes dans les différents ministères. C'est ce dont on a besoin actuellement.

M. Sirros: Si je comprends bien, ces gens auront à quitter à cause de l'application des mêmes normes en termes de... (12 h 30)

M. Bégin: C'est-à-dire que la population diminuant, les normes ne sont plus rencontrées. C'est ce que je veux dire.

M. Sirros: Et on ne tient pas compte de la situation particulière qui fait qu'il n'y a plus d'emplois qui existent. Il y a quand même une population...

M. Bégin: Par exemple, ici on a besoin d'un corps policier. Nous sommes en milieu

entièrement isolé. Si on réduit notre corps policier à la réalité de Schefferville, on aurait un seul policier, selon la tendance de la province de Québec. Je pense que c'est un exemple à savoir dans quelle situation on se trouve. Si les différents ministères appliquent des normes rigoureuses alors que les populations ne sont plus là, bien sûr qu'on perd des services.

M. Sirros: J'ai une dernière question. J'ai vu, je pense, dans des documents que le coût minimal de l'électricité en termes de chauffage se chiffre à peu près à 150 $ par mois. Donc, on peut dire tout de suite qu'il y a là un pourcentage immense du budget -surtout pour quelqu'un qui vit de l'aide sociale - qui est grugé immédiatement au départ par des besoins qui ne sont pas sous son contrôle.

M. Bégin: Vous avez parfaitement raison et, lorsque le comité de citoyens se présentera devant vous, il aura des détails. Ils ont fait des recherches dans ce sens et je crois que vous allez rester surpris.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. J'ai une autre demande, en indiquant à tous les membres de la commission que le temps alloué est déjà dépassé de quelques minutes. M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Très brièvement, j'aurais trois ou quatre questions à poser. Je pense que les réponses peuvent aussi être brèves. À la page 4 de votre mémoire, vous mentionnez que la ville s'attend que le gouvernement, d'une part, amène la Compagnie minière IOC à préciser immédiatement les modalités de son retrait du milieu, particulièrement dans l'ensemble de ses immobilisations. Vous avez expliqué une bonne partie de cela, mais moi, ce que je voudrais toucher, c'est la dernière partie: "et de ses obligations envers la ville, les citoyens et commerçants". Pourriez-vous expliquer davantage? C'est la première question. La deuxième: Je sais, pour avoir travaillé au dossier à quelques reprises, que le gouvernement du Québec subventionne votre service de police pour la troisième année, je crois. Est-ce que vous pourriez donner pour 1981, 1982 et 1983 les chiffres de la subvention que vous avez reçue là-dessus et combien coûte le corps de police? Vous pouvez peut-être répondre à ces deux questions et j'en aurais deux autres par la suite.

Le Président (M. Bordeleau): M. Bégin.

M. Perron: La deuxième, c'est le corps de police.

M. Bégin: Voici ce qui arrive. Si vous me permettez, je vais répondre en fonction du corps de police. C'est que la formule est une formule de 50/50. À la suite des mises à pied que nous avons eues en mai 1981, nous avons recommencé de nouvelles négociations avec le ministère de la Justice afin d'augmenter la subvention, vu la diminution de la population. Nous avons revendiqué le coût complet, vu que nous étions moins de 5000 de population et qu'en plus nous avions une population diminuée. Une formule a été préconisée de réduire le corps policier et de subventionner à environ 80%. Nous en sommes rendus là. Les montants, ce sont les coûts directs et indirects. Nous avons eu environ 225 000 $ l'an passé. L'année antérieure, au-delà de 200 000 $. Ce sont des chiffres assez réels. Les subventions, en 1980, 198 000 $, en 1981, 224 000 $ - c'est toujours la moitié du coût - et, pour 1982, 256 000 $. Ce sont les coûts directs et indirects, équipement et salaires, etc.

M. Perron: 1983, ce n'est pas encore réglé avec le ministère en question.

M. Bégin: Non, mais on est appelé à négocier. On nous a avisés.

M. Perron: Parfait, merci. Maintenant, à ma première question que j'avais posée en rapport avec les obligations de la minière IOC, que vous mentionnez à la page...

M. Bégin: Là aussi, il faut se reporter au début des activités ici à Schefferville. Il y avait, au moment où les gens demeuraient en blockhaus, une buanderie dirigée par la compagnie. Aujourd'hui, nous avons une buanderie dans le centre-ville qui est dirigée par un particulier. Ce sont des services comme celui-là qui, à un moment donné, ont été transférés. Je peux donner comme deuxième exemple une maison d'appartements qui a été construite au moment où on avait une rareté de logements à Schefferville. C'était en fonction des possibilités de production pour les années à venir. Ces gens s'étaient basés sur ces choses pour se lancer en affaires. La réalité d'aujourd'hui, avec le retrait complet et la cessation, bien sûr que c'est une chose qui est assez difficile à avaler et c'est pour cela qu'on dit qu'il y a une responsabilité dans ce sens. Il y a eu certains services qui ont été directement transférés aux particuliers et c'étaient d'anciens employés de la compagnie.

M. Perron: Donc, même si je considère que la compagnie IOC n'a pas traité assez bien ses employés syndiqués en rapport avec les décisions qui ont été prises antérieurement, soit il y a une quinzaine de jours ou trois semaines, si je comprends bien, vous voudriez que la minière IOC prenne aussi ses responsabilités - et je pense que

cela pourrait être conjoint à ce moment-là -face aux autres personnes qui sont non syndiquées et qui sont dans l'entreprise privée actuellement, incluant, bien entendu, les commerçants.

M. Bégin: On souhaite fortement que tous les intervenants s'assoient à la même table, parce qu'il y a aussi ceux qui sont dans le "socio" - je pense que je n'ai pas besoin de les définir - dans l'éducation, ces choses-là. Tout ce monde n'est pas rattaché directement à l'opération minière. C'est ce qu'il faut rejoindre et aider.

M. Perron: J'ai une courte question maintenant. C'est ma dernière, d'ailleurs. Savez-vous combien de personnes, ici à Schefferville, sont liées à la société d'entraide de Sept-Îles et combien sont liées à la société d'entraide de Manicouagan?

M. Bégin: Je regrette, je ne peux pas répondre à cette question, mais je sais pertinemment que, dans les bonnes années, plusieurs vendeurs venaient nous visiter régulièrement et c'était très populaire. Dans l'histoire de Schefferville, antérieurement à la venue des caisses d'entraide, nous avions des gens qui venaient vendre des fonds mutuels, comme Champion Savings qui, comme vous le savez, a fait faillite. Pour la population de Schefferville, c'est la deuxième expérience que nous avons dans ce sens. C'est sûr que, quand un travailleur vient ici, après quelques années, il ramasse de l'argent, il accumule de l'argent. Il essaie de le faire fructifier pour ses jours futurs, mais, actuellement, je pense que cette chose est complètement faussée.

M. Perron: Je voudrais vous remercier, M. le maire...

M. Bégin: Merci.

M. Perron: ...ainsi que votre administration pour avoir préparé un mémoire qui, pour moi, en tout cas, est vraiment terre à terre et concerne assurément - et c'est très important - la population de Schefferville elle-même, dans l'ensemble. Je vous remercie.

M. Bégin: Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Bégin: Maintenant, M. le Président, si vous le permettez...

Le Président (M. Bordeleau): M. le maire.

M. Bégin: ...nous voudrions savoir, comme question - peut-être que ce sera le point final, je ne le sais pas quand le gouvernement va nous remettre un rapport sur cette commission parlementaire, parce que, pour nous, je pense que cela va être crucial de le savoir assez vite.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je vais laisser la réponse à mon collègue, M. Gendron. Je pense devoir dire à mes collègues que je n'ai pas abusé beaucoup du temps de la commission depuis le début, puisque c'est la première fois que je prends la parole. Je voudrais, cependant, poser une question qui m'apparaît importante pour la bonne compréhension de ce dossier. M. le maire, vous siégez au conseil de ville depuis quelques années et, suivant mes informations, en 1979, alors que le niveau des expéditions de la Compagnie minière IOC, à cette époque, était, bien sûr, supérieur au niveau des expéditions pour la moyenne de 1975- 1978 - l'année 1979 a vu 4 000 000 de tonnes d'expéditions - pourtant, votre conseil municipal, dans une résolution du 11 juin 1979 qui porte le numéro 79-625 - qu'on pourrait, bien sûr, déposer devant cette commission - faisait part au gouvernement et à la Compagnie minière IOC, à la suite d'articles de presse, de votre inquiétude quant à l'avenir de la compagnie et surtout de ses activités et l'avenir de Schefferville. Vous vous souvenez de cette période? À la suite de cette résolution - et je le dis pour le bénéfice de la commission - il y a eu des entretiens et des rencontres. Il serait trop long d'élaborer là-dessus. Ma question est la suivante: Après ces événements de juin 1979, au cours de l'année 1980, 1981 ou 1982, à un moment, avez-vous eu à prendre une résolution semblable qui reflétait à nouveau votre état d'inquiétude ou de préoccupation ou si, d'une manière ou d'une autre, vous auriez été prévenu comme maire, comme premier citoyen, au cours des années 1980, 1981 ou 1982, des intentions de la Compagnie minière IOC telles qu'elles ont été annoncées en conférence de presse le 9 novembre 1982?

M. Bégin: Alors, voici. Étant travailleur moi-même, au moment où on a senti qu'il y avait une restriction dans le marché du fer et qu'on nous a assujettis à de petites productions, alors pour l'information de la commission, lorsqu'il y a 10 000 000 de tonnes de production brute, pour nous, c'est la prospérité, mais lorsqu'il y a 3 000 000 ou 3 500 000 de production, c'est juste pour le maintien des activités. Alors, d'une façon assez régulière, les employés de la minière IOC et les intervenants locaux de la compagnie se rencontraient. On nous rappelait que pour maintenir Schefferville en vie, il fallait diminuer les coûts de la

production de la tonne. Alors, c'est dans cet esprit que nous avons travaillé durant les dernières années. Pourquoi cela a-t-il été un choc aussi difficile à avaler au mois de novembre? C'est que, justement, nous nous étions conditionnés en fonction d'une petite production.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Duhaime: Vous n'avez pas saisi le sens de ma question.

M. Bégin: Alors, je m'excuse, M. le ministre.

M. Duhaime: Vous dites qu'à un niveau de 3 000 000 à 3 500 000 tonnes d'expédition...

M. Bégin: C'est cela notre vie aussi.

M. Duhaime: ...on maintient à peu près les activités. On aura l'occasion de revenir sur ces points. Ma question est simple: En 1980, 1981 ou en 1982, est-ce que vous-même, comme maire et votre conseil municipal avez été prévenus de façon officielle, directement ou indirectement, des intentions de la Compagnie minière IOC, qui ont été effectivement annoncées le 9 novembre 1982, c'est-à-dire la cessation des activités pour juillet 1983?

M. Bégin: Nous avons été avisés de la même façon que tout le monde: par les journaux.

M. Duhaime: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Hull.

M, Rocheleau: Merci, M. le Président. Simplement en conclusion, je voudrais remercier M. le maire ainsi que les membres du conseil, le secrétaire-trésorier, pour la présentation de leur mémoire. Je pense que cela nous aidera sûrement à tenir compte des revendications qui sont faites par la ville de Schefferville. Mais je tiens à rappeler aussi, M. le maire, que les services que vous avez offerts à vos citoyens ont été de première qualité et je tiens à vous féliciter pour l'administration que vous avez donnée à votre municipalité. Tenant compte de la grande responsabilité que le gouvernement aurait dû prendre à la suite du rapport qu'ils ont eu en 1978-1979, responsabilités qu'il n'a pas prises, on fait face à la situation dans laquelle on vit aujourd'hui. Je trouve cela déplorable. D'autre part, je tiens simplement à vous souligner que nous ferons simplement notre travail et nous sommes à votre entière disposition pour traiter de n'importe quel des sujets que vous souhaiteriez, tenant compte que le gouvernement est souvent là pour refuser, alors que l'Opposition est là pour fouetter ce gouvernement à prendre action vis-à-vis de la population de Schefferville.

M. Bégin: Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Bégin: Et M. le Président.

M. Gendron: Une simple phrase...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre du Développement régional.

M. Gendron: ...M. le maire, je pense que votre demande est légitime. Quant à moi, au nom du gouvernement, je suis obligé de vous dire que je sais bien que ce n'est pas le rapport ou la transcription du procès-verbal, la tenue de la commission qui vous intéresse, c'est un rapport plus détaillé quant aux intentions du gouvernement pour donner suite aux décisions et, également, aux éléments de solution qui se dégageront. Je ne peux pas vous dire: lundi prochain, vous aurez une réponse détaillée sur l'ensemble des questions qui seront soulevées ici. Alors, en conclusion, tout ce que je vous dis, au nom du gouvernement, c'est qu'on fera rapport. Le Conseil des ministres sera obligé de prendre des décisions concernant des éléments de recommandations qui nous seront faites par moult citoyens ou intervenants intéressés par la question difficile qu'on discute et, dans les meilleurs délais, on informera les premières autorités de la ville de Schefferville.

M. Bégin: Je vous remercie et je remercie pour les bonnes paroles de la part du côté gouvernemental et de l'Opposition. Je vous remercie, messieurs. À présent, en ce qui concerne notre muncipalité, Schefferville étant au Québec la plaque tournante pour le Nouveau-Québec, je pense qu'il est important de vous dire, messieurs, que tout ce qu'on veut, c'est que le drapeau du Québec reste planté à Schefferville et nous voulons non pas pleurer, comme on l'a fait sur le Labrador avec le Nouveau Québec, on veut que cela marche. Ensuite, avec Action Côte-Nord, nous vous disons qu'on ne veut pas perdre le nord. Je vous remercie. (12 h 45)

Le Président (M. Bordeleau): Merci à vous et aux personnes qui vous ont accompagné au cours de cet entretien. J'appellerais immédiatement le groupe suivant, qui est celui de la Compagnie minière Iron Ore, à se présenter à la table.

M. Chevrette: M. le Président, le temps de leur présentation, est-ce que je peux

soulever un élément?

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: Je pense qu'on pourrait permettre l'exposé complet des représentants de la compagnie avant d'aller prendre le lunch. Le lunch pourrait être limité à 1 h 30. Je voudrais aussi dire, pour le bénéfice de la salle, que, si on n'a pas touché à l'ensemble des propositions à cause du temps limité, on pourra revenir à ces recommandations lors de la présentation d'autres mémoires. En particulier, je pense à l'aspect loisirs, où le critique de l'Opposition et moi-même ne sommes pas intervenus. Cela ne nous empêchera pas, quant aux autres mémoires, d'intervenir sur le mémoire de la ville. Il faut bien comprendre que, si on n'a pas parlé, c'est précisément parce qu'il y avait trop de sujets.

Le Président (M. Bordeleau): Avec le nombre des intervenants et le nombre des membres de la commission, il est tout à fait normal que chaque membre ne puisse pas intervenir sur chacun des mémoires. Justement, comme vous l'avez mentionné, M. le ministre, si j'ai le consentement des membres, on permettrait l'exposé du mémoire et aussi peut-être de continuer un petit peu après 13 heures. Comme il ne reste que 10 ou 12 minutes avant 13 heures, on pourrait permettre immédiatement l'énoncé du mémoire avant de suspendre pour aller dîner, quitte à aller dîner vers 13 h 15 ou quelque chose comme cela. On verra, selon l'heure, à quelle heure nous pourrons reprendre. On pourrait peut-être même reprendre à 14 h 30. Cela pourrait aller. Alors, M. Mulroney, à vous la parole.

Compagnie minière Iron Ore

M. Mulroney: M. le Président, MM. les ministres, MM. les députés. J'espère, M. le Président, que nous aurons l'occasion de présenter rapidement un mémoire qui a été sensiblement abrégé.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Mulroney, pourriez-vous approcher votre microphone? Ou augmenter le volume?

M. Mulroney: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va mieux.

M. Mulroney: C'est mieux? Très bien. J'ai abrégé très sérieusement le mémoire. J'aimerais, évidemment, qu'il soit déposé devant vous, avec les documents connexes.

Avant de procéder, j'aimerais vous présenter mes collègues du comité exécutif et de l'administration senior. D'abord, à ma droite, M. Richard Geren, notre vice-président exécutif, qui est arrivé ici comme géologue pour la première fois en 1945. Il a été gérant de nos installations et résident de Schefferville de 1952 à 1961. M. Valmont Grégoire, vice-président des opérations de la Compagnie minière IOC. Il a commencé, ici à Schefferville, avec la compagnie en 1948, à sa sortie de l'Université Laval, et il est resté jusqu'en 1965. Entre-temps, il était gérant de nos installations. Il y aussi M. Avit Ouellet, directeur général des finances et de l'administration. Il a commencé ici à Schefferville, en 1966, comme analyste financier. M. Claude Falardeau est le directeur des opérations et gérant des mines. Il a commencé à Schefferville en 1961, jusqu'en 1983. Il est maintenant affecté, par le président de la compagnie, à la responsabilité du développement de Strange Lake, dont il sera question tantôt. M. Jack Galligan, qui est le vice-président des relations humaines, est avec nous, ici dans le Grand-Nord, depuis au-delà de 30 ans.

De façon très abrégée, M. le Président, MM. les députés, voici notre mémoire. Au cours des trois dernières décennies, la Compagnie minière IOC a développé et mis en valeur une région du Canada qui, auparavant, n'avait pas connu de croissance économique. L'historique sera très bref mais je pense qu'il est important. M. le Président, j'espère que vous allez me permettre de conclure la présentation du mémoire, quitte à m'interroger, si vous le voulez bien, après le lunch, n'est-ce-pas?

Le Président (M. Bordeleau): ...des membres de la commission.

M. Mulroney: Très bien. La compagnie a été une pionnière de ce nouveau territoire et, plus particulièrement, elle a procuré du travail à des milliers d'employés qui, pendant un quart de siècle, ont été parmi les mieux payés au Canada. Mais, fait plus important encore, cette initiative de la compagnie a permis à deux générations d'employés, et à leurs familles, d'acquérir une formation très solide et une expérience tout en jouissant d'une vie fort agréable. Nous sommes très fiers de ces vrais pionniers. Plusieurs sont ici avec nous aujourd'hui. Nous sommes très fiers de ce que nous avons accompli ensemble. IOC reconnaît que les entreprises, en commençant par nous-mêmes, ont une responsabilité sociale très spéciale envers leurs employés et les communautés où elles ont leurs installations. Cette responsabilité nous nous en sommes toujours acquittés avec fierté. Cependant, elle devient encore plus lourde et elle a une plus grande portée lorsque notre environnement économique national connaît de graves difficultés. La

reconnaissance de notre responsabilité sociale a été - et demeure - l'une des préoccupations majeures de notre compagnie et nous nous sommes toujours acquittés de cette responsabilité envers nos employés -mon ami, le maire, vous en parlera amplement et bien de ses collègues - ainsi qu'envers les communautés et les provinces où nous avions des installations. On a toujours essayé de le faire d'une façon raisonnable et honorable.

Ce mémoire dépeint, de façon embryonnaire, peut-être, les origines de la compagnie et décrit la manière dont elle s'est acquittée de ses responsabilités, mais il propose également - c'est peut-être plus important - pour l'avenir les éléments d'un programme de relance économique pour Schefferville. C'est le but de cette commission parlementaire et le but principal de notre présence ici aujourd'hui. Sans aucune subvention des gouvernements et sans aucune disposition particulière d'une loi fiscale, la compagnie a fourni le total des capitaux requis, soit environ 313 000 000 $ US, afin d'expédier le minerai brut de Schefferville vers les marchés. Par son action, la compagnie a créé des milliers d'emplois pour les Québécois et les Terre-Neuviens et a facilité l'accès à tout le monde à la péninsule de l'Ungava, jetant ainsi les bases de la prospérité économique sans précédent qu'ont connue le Nouveau-Québec et le Labrador au cours des 25 dernières années. La contribution faite par notre compagnie présente encore de nombreuses possibilités et pour de nombreuses années, même si les installations minières de Schefferville ont du être fermées.

En 1958, après Schefferville, on a procédé à une expansion au Labrador -c'étaient presque 400 000 000 $ - et, ensuite, à une expansion massive au coût de 250 000 000 $ à Sept-Îles. Donc, en 1970, la compagnie avait établi qu'il était possible de produire du concentré de boulettes à partir des réserves de minerai à basse teneur situées dans cette région. La décision fut donc prise d'utiliser ce produit et d'accroître les capacités d'enrichissement du minerai de la compagnie afin de diversifier ses opérations et d'assurer la rentabilité future du minerai de Schefferville. Il est important de noter que, si cette décision n'avait pas été prise, à savoir la décision de procéder à une expansion des usines à Sept-îles, l'IOC aurait dû fermer ses installations ici, à Schefferville, vers la fin des années soixante-dix. Un nouveau complexe d'enrichissement du minerai de fer a été effectivement construit avec les conséquences que l'on connaît, des conséquences qui ont affligé notre compagnie, SIDBEC-Normines, SIDBEC et j'en passe.

Au 31 décembre 1981, afin de vous donner, en deux mots, un portrait des investissements, ainsi que la dette à long terme de la compagnie, la compagnie avait investi un total de 1 256 000 000 $ US dans des installations minières et des usines, ainsi que pour d'autres immobilisations. De ce montant, 592 000 000 $ US ou 47% de la totalité ont été directement reliés à l'extraction et à l'enrichissement du minerai en provenance de Schefferville. Au cours des douze dernières années, c'étaient des lendemains qui se succédaient de façon très pénible et le marché de l'acier international s'effritait avec un taux de croissance qui était assez pénible pour tout le monde, mais très peu d'événements ont été aussi néfastes que l'action concertée des pays membres de l'OPEP, le 1er janvier 1974, pour contrôler la demande et les prix du pétrole brut, lequel a eu pour effet une escalable dramatique ou énergétique à travers le monde. De 1973 jusqu'à l'heure actuelle, par exemple, les prix ont grimpé chez nous de 425%. Le prix du combustible "bunker see" a augmenté de 5,57 $ le baril à la fin de 1973 - cela se passe ici - jusqu'à 29,25 $ à l'heure actuelle, avec une augmentation qui est prévue de 4,20 $ qui s'en vient en vertu de la politique fédérale négociée il y a quelque temps. Donc, le coût total de cette dimension de l'activité, pour nous, a passé de 18 000 000 $ annuellement, en 1973, à 82 000 000 $ en 1981. Cela vous donne une petite idée de l'escalade des coûts ici, dans le Grand-Nord.

Il ne fait nul doute que le facteur qui a contribué le plus à la saturation du marché des boulettes est l'échec de l'industrie sidérurgique mondiale qui n'a pas réussi à poursuivre sa croissance afin d'atteindre les taux de production prévus par l'Institut international du fer et de l'acier dans son manifeste publié en 1972. Dans cette étude, il était estimé que la consommation apparente d'acier dans le monde augmenterait jusqu'à 939 000 000 de tonnes métriques en 1980 et, malheureusement, la consommation d'acier à travers le monde a monté à 720 000 000 de tonnes, donc un "short fall" de l'ordre de 23%. Tout le monde s'est garroché là-dedans, y compris nous-mêmes avec nos installations à Sept-îles, le gouvernement du Québec à Sidbec, une foule d'autres compagnies et États, avec les conséquences d'un surplus de produits sur le marché. Lorsque British Steel Corporation, qui est un actionnaire, ici sur la Côte-Nord a mis la hache dans ses activités le 12 décembre 1980 et, d'un seul coup, a éliminé 20 000 jobs, c'était un son d'alarme au niveau européen et international. On le savait déjà. Tout le monde savait. C'était un secret de polichinelle sur la Côte-Nord. C'était un secret de polichinelle pour mon ami, le maire, également que lorsque la production du minerai brut en provenance de Schefferville baisse de 7 000 000 de tonnes

en 1979 à 2 500 000 de tonnes, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.

D'autre part, lorsqu'en 1980-1981, on ferme des installations ou on suspend l'activité des installations à Sept-Îles et que ces mêmes usines sont alimentées à même le minerai de Schefferville, il va sans dire que le marché international et notre marché national sont dans un état extrêmement périlleux; ce qui était notre cas. Les signes ont été là pour tout le monde qui voulait écouter et tout le monde qui voulait lire. Que ce soit sur le plan gouvernemental, sur le plan de l'industrie, sur le plan syndical, on vit tous d'espoir bien sûr, on a tous vécu d'espoir, parce qu'il le faut. C'est une dimension humaine très importante, mais les réalités dures et quotidiennes étaient devant nous et nous avons diffusé à qui voulait s'arrêter pour nous écouter et nous croire. J'ai mentionné moi-même dans un discours important à Sept-Îles, le 6 novembre 1980, que le marché pour Sept-Îles ainsi que Schefferville était extrêmement fragile.

Quel exemple plus remarquable que de fermer les récipiendaires du produit en provenance de Schefferville? Tout cela a eu pour résultat une demande beaucoup moins élevée pour les boulettes sur le marché européen. Un marché s'est développé dans lequel les ventes ne peuvent être faites qu'à des prix réduits. Vous savez de quoi je parle. Un de nos concurrents, ici sur la Côte-Nord, subventionné par tous les contribuables, est en train de vendre ses boulettes à perte, des pertes de 12 $, 18 $ et 20 $ la tonne sur le marché de l'Europe. Ce n'est pas une critique, c'est une constatation. Sauf que moi, M. le Président, mon problème, c'est que je ne peux pas me tourner vers M. Parizeau; je me tourne vers les banquiers qui aiment un "bottom line" et qui connaissent cela. C'est une responsabilité lourde, c'est une responsabilité particulière que l'on rencontre dans l'entreprise privée. Je ne mets nullement en doute le droit d'un gouvernement quelconque de se donner une vocation dans un domaine quelconque et de le soutenir, mais je vous demande de reconnaître que, comme président et chef de la direction de cette entreprise, je n'ai peut-être pas les mêmes atouts que d'autres. (13 heures)

En 1979, par exemple, pour vous citer un chiffre, la compagnie a produit presque 15 000 000 de tonnes de boulettes, on a employé presque 7000 personnes, on a payé des salaires de 183 000 000 $ à nos employés. Et, par coïncidence, nos achats, cette année-là, étaient effectivement de 183 000 000 $ aussi. En 1979, on avait des dépenses de capital d'environ 30 000 000 $ et on a payé 44 400 000 $ en impôts, y compris les taxes de vente, les impôts miniers, ainsi que les taxes municipales et scolaires. Aucun dividende n'a été payé en 1979 et aucun dividende n'avait été payé depuis 1971. Cela faisait presque une décennie que les actionnaires de cette compagnie n'avaient pas reçu une "tôle" de l'investissement de 1 200 000 000 $.

Avec votre permission, j'y reviendrai dans quelques minutes, mais il y a des questions à démystifier. Ou bien nous allons transiger avec des chiffres à l'appui, des chiffres que les autorités gouvernementales peuvent examiner à loisir, examiner attentivement et nous contre-interroger là-dessus, ou bien nous allons traiter avec des faits ou avec des mythes.

Avec votre collaboration, messieurs, dans quelques minutes, j'aimerais participer à une petite opération afin de démystifier certaines des notions profondément erronées qui ont été colportées à gauche et à droite au sujet d'une question que soulève mon ami, avec qui j'ai toujours eu des relations fort amicales et civilisées, M. Perron, lorsqu'on parle des multinationales; on va parler tantôt des multinationales.

Les actionnaires de HOC ont reçu, en fonds canadiens, au cours de 28 années, 498 000 000 $ sur un investissement de 1 200 000 000 $. Par contraste, on a payé en impôts, aux municipalités, aux autorités scolaires, aux provinces et au gouvernement fédéral, un total d'environ 640 000 000 $ depuis 1955. De plus, au cours des quinze dernières années - pas depuis le début de l'exploitation, on va prendre simplement les quinze dernières années - les impôts sur les revenus retenus à la source, à même les salaires des employés, se sont chiffrés à 445 000 000 $. Ces chiffres, bien qu'ils n'incluent pas toutes les années d'exploitation, totalisent 1 100 000 000 $ qui sont partis de cette compagnie et de ses employés pour aller directement dans les fonds publics à Ottawa et à Québec. Alors, j'aurai des questions à vous poser tout à l'heure: Est-ce que vous pouvez maintenant nous aider, compte tenu du fait qu'il y a des montants si énormes qui ont été générés par la compagnie et par nos employés depuis 25 ans? Et je vais vous demander si ce ne serait pas le temps peut-être, pour le gouvernement du Québec et pour le gouvernement canadien, de penser non pas à nous, mais à cette région et aux pionniers de cette région. Le gouvernement du Québec, par exemple, a reçu 84 000 000 $ en paiements directs et 134 000 000 $ en impôts retenus sur les salaires des employés simplement depuis 1967, tandis que les profits en provenance de notre exploitation au Québec sont extrêmement modestes en comparaison et je vous en donnerai une illustration tantôt.

Et de plus, MM. les députés, parce que c'est important pour vous, plusieurs d'entre vous venez, comme moi, comme M. le ministre Gendron, d'une région éloignée - on

sait ce que c'est, ce n'est pas du nouveau quand tu es né dans un coin comme celui-ci - outre les montants que j'ai mentionnés, la compagnie a payé des montants substantiels à la Commission d'assurance-chômage. On n'a jamais retiré; les bénéfices n'ont jamais été touchés par la population locale sur la Côte-Nord. Grosso modo, on paie durant 30 ans -et on ne retire rien - collectivement, aux régies des accidents du travail, des programmes de santé et de bien-être, des régimes de retraite du gouvernement. La compagnie a construit elle-même et a fait don aux municipalités de nombreuses institutions sociales, sinon la totalité, dans toutes les régions où nous fonctionnons. Des hôpitaux, des centres récréatifs, des hôtels de ville, des écoles, des systèmes d'égout, des installations de distribution d'énergie, des pentes de ski, des clubs de golf, et j'en passe.

Et, comme il se doit, à l'Université Laval, à l'Université de Montréal, à l'Université du Québec, etc., nous avons fait des dons de millions de dollars au nom de nos employés à des universités, des organisations culturelles et des oeuvres de charité.

Les années-hommes de travail directement engendrées au cours des 20 dernières années ont fourni des traitements d'environ 1 100 000 000 $ aux employés du Québec, soit à peu près 60% du total des salaires payés par la compagnie durant cette même période. Je vous demande de retenir ce chiffre. Il a une importance capitale pour le gouvernement du Québec. Lui aussi a reçu, a été directement bénéficiaire d'un nombre substantiel d'années-hommes dans l'industrie de la construction, grâce aux chemins de fer, aux installations minières, etc.

Seulement au cours des dix dernières années, la compagnie a acheté, par le truchement de notre bureau d'achat à Sept-Îles, sous la responsabilité de mon ami Ouellet, des marchandises et des services d'une valeur de 2 900 000 000 $. De ce montant, 1 700 000 000 $, soit 57% du total, ont été dépensés ici au Québec.

Je vous demande également de considérer qu'il y a des produits très importants, comme le "bunker C" et le bentonite, qu'on ne peut pas acheter au Québec. Nonobstant ces produits très importants, 57% de tout notre argent a été dépensés ici. Il va sans dire que toutes ces dépenses ont contribué à créer des centaines et des centaines d'autres emplois dans la petite et moyenne entreprise au Québec et nous en sommes fiers.

Nous croyons que nous avons effectivement - M. le Président, je m'excuse, M. le ministre Gendron a cité certaines de mes paroles au début avec raison - cette responsabilité sociale très définie envers nos employés ainsi qu'envers une ville comme Schefferville.

La plupart des industries minières possèdent des installations dans des régions éloignées du Canada. Vous mentionnez Normétal. J'ai eu le plaisir, M. le ministre, de plaider une cause une fois à Normétal -cause que j'ai d'ailleurs perdue - et, effectivement, c'est dans une région extrêmement éloignée. Alors, la plupart des compagnies se trouvent dans des régions semblables avec une seule industrie; telle est notre situation, comme vous le savez, à Schefferville.

Par conséquent, nous sommes d'avis que nos responsabilités vis-à-vis de nos employés et de la ville de Schefferville doivent s'étendre bien au-delà des exigences de toute loi existante et de toute convention collective. On s'acquitte de nos responsabilités. Le programme suivant - je n'irai pas dans les détails - d'abord pour nos employés, que j'ai eu l'honneur de mettre de l'avant le 26 janvier, a reçu des commentaires très favorables de la part de M. Clément Godbout, directeur pour le Québec du Syndicat des métallos, ainsi que de plusieurs quotidiens importants du Québec. Et j'en suis fier également. Parce que c'est une indication du climat et des saines relations du travail qui, de peine et de misère, sont loin d'être parfaites et qu'on est en train de développer et qui feront en sorte que nous sommes en train d'entrer, messieurs les ministres, messieurs les députés, nous entrons dans notre sixième année sans avoir perdu une minute de production pour quelque raison que ce soit dans le domaine des relations du travail. Nous avons avec nos employés, avec nos syndicats, fait des pas de géant pour civiliser nos relations du travail.

Ce qui est arrivé, c'est que le 3 novembre, nous avions au total sur la liste de paie 5549 employés. On va mettre cela dans son contexte. Le même jour, il y avait 167 employés de la compagnie au travail à Schefferville. Un "payroll" de 5 500 employés et 167 ici à Schefferville. De plus, il y avait 449 employés saisonniers qui avaient été mis à pied depuis 1979, 1980 ou 1981 et, de ce nombre, 254 avaient été mis à pied durant cette période. Effectivement, comme M. le maire pourrait vous le dire très facilement, plusieurs de nos employés saisonniers ont, depuis belle lurette, élu domicile dans des régions autres que Schefferville mais, nonobstant cela et nonobstant le fait qu'ils ne travaillaient pas depuis des années, ils avaient des droits de rappel en vertu de nos conventions collectives. Dans certains cas, ils ont eu droit à des bénéfices en vertu de notre programme global d'indemnité en faveur de tous nos employés.

Ce qu'on a fait d'abord pour les employés: prime de séparation. 151 employés

qui travaillaient ont reçu une prime en moyenne de 16 400 $, les autres, jusqu'à concurrence de 6000 $, ont reçu en plus, en moyenne 2200 $ qui représentaient des bonis de service, etc. Les rentes de retraite, un programme de logement que vous connaissez parce que c'était un problème sérieux pour nos employés qui voulaient rester ici. Que fait-on avec les maisons, avec les logements? Des logements qu'on louait, disons 50 $ par mois. On a donné les maisons à nos employés pour 1 $. Des frais de déménagement: un autre problème sérieux. On s'est entendu avec le gouvernement fédéral pour ceux qui voulaient, quoi qu'il en soit, quitter Schef-ferville. Cela a été organisé. L'assurance, les frais d'hospitalisation et médicaux, les subventions pour l'huile à chauffage, le transport par l'avion de la compagnie - qui a toujours été gratuit pour nos employés, selon certains critères - maintenu jusqu'à la fin de nos activités, l'assistance à l'emploi.

J'aimerais juste vous mentionner un fait. Retenez donc le montant que je vous ai mentionné, le chiffre de 167. Mon ami, M. Marois, qui est responsable pour ce programme, et qui est au courant du prochain point, va en être fier. Concernant le programme d'assistance d'emploi pour nos employés, voici ce qui est arrivé: on a fait l'annonce le 3 novembre, n'est-ce-pas? Le 4 février - on n'est pas des lâcheux, on marche - le 4 février 1983, ici à Scheffer-ville, 417 curriculum vitae avaient été soumis au nom des employés de Schefferville; 40 entrevues avaient été fixées et déjà, 27 offres d'emploi avaient été reçues et 25 formellement acceptées. Dans l'espace de trois ou quatre semaines! C'est une indication de la grande qualité de notre main-d'oeuvre et c'est le résultat d'un travail soutenu de la part et du syndicat et de la compagnie. (13 h 15)

II y a également le comité de reclassement. Il y a des gens au Québec qui ont tendance à passer sur ces choses bien rapidement, pour qui des comités de reclassement, ce n'est pas tellement important. Lorsque nous étions appelés à subir le même problème à Sept-Îles, le gouvernement du Québec a consenti à la nomination d'un homme superbe, M. Angelo Forte, qui est un des grands manitous dans le domaine au Canada; c'est lui qui a présidé notre comité à Sept-Îles. On a les résultats. Ce n'était pas nécessairement une bonne année. Le comité a trouvé des emplois pour 323 employés, sur un total de 476. Avant la fin de l'année 1981, 32 autres employés ont pu profiter des programmes du comité et sont retournés aux études afin de parfaire leur éducation technique ou professionnelle.

Il me semble qu'avec les comités qui sont en place et avec certaines idées nous avons énormément de travail à faire. Il est à noter que, même en 1980-1981, M. Forte disait que les mesures financières, ainsi que la collaboration syndicale et patronale étaient les meilleures qu'il ait jamais vues et que les mesures financières qu'on avait proposées à Sept-Îles pour ces employés mis à pied - c'est une citation - "figurent de loin parmi les plus avantageuses jamais connues au Canada". C'est comme cela qu'on s'acquitte de notre responsabilité sociale, en l'absence totale d'une exigence d'une convention collective, d'une part, ou d'une loi provinciale ou fédérale.

MM. du gouvernement, mes chers amis, nous sommes tous des Québécois. On sait de plus en plus et depuis quelque temps qu'il est extrêmement difficile, sinon impossible, de plaire à tous en tout temps dans notre chère province, de nos jours. Cette compagnie a essayé, d'une façon responsable, de mettre de l'avant pour ses employés un programme global d'avantages sociaux que nous croyons être utile, généreux et équitable.

Je vous souligne en passant un problème très sérieux où vous pouvez nous être d'une utilité remarquable. C'est la décision par le gouvernement fédéral, le 2 décembre, d'imposer les bénéfices dans les régions nordiques - M. le maire en a parlé -les différents bénéfices que cela prend pour attirer du bon monde ici et le garder ici. Le gouvernement fédéral se propose de les taxer. Il y a un mémoire que nous allons vous distribuer après, mais on a besoin de votre aide. Je le dis sur une base strictement non partisane. On a besoin de l'aide de tout le monde parce que c'est un instrument absolument indispensable pour nous tous afin de continuer le programme de relance parce qu'il y a des éléments importants qui s'en viennent là-dedans.

Je vous demande de lire notre mémoire supplémentaire que nous allons vous soumettre sur cette question et d'intervenir au plus sacrant avec nous et le Syndicat des métallos, avec qui nous avons toujours collaboré là-dedans à cette fin.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Mulroney, je veux vous indiquer que vous avez dépassé les 20 minutes. Je ne voulais pas vous interrompre au cours de votre mémoire, mais je vous demanderais de conclure.

M. Mulroney: Mon Dieu! je m'enlignais pour les recommandations, mais, si vous permettez, on va faire un règlement là-dedans. J'ai quelques petits graphiques à vous montrer et je tombe directement dans les conclusions. Est-ce que cela vous convient?

Le Président (M. Bordeleau): Y a-t-il consentement?

M. Mulroney: Ce sont des

recommandations importantes. Je vais passer rapidement sur cela, mais c'est important pour tout le monde. Je vous demande de l'examiner et on va également vous montrer... Avec votre permission, on va le disposer en arrière pour que tout le monde puisse le voir. C'est le rendement sur un investissement... de la compagnie pris le 31 décembre 1953.

Les investissements directs des actionnaires de la compagnie, c'est 427 000 000 $. La moyenne a toujours été, depuis le début, de 250 000 000 $. Les investissements des actionnaires, c'est le capital-actions, les surplus versés, les bénéfices non répartis, les débentures et avances de fonds au 31 décembre de chaque année. Le rendement, d'après la définition généralement acceptée, c'est les dividendes et intérêts payés durant l'année, et le taux de rendement, c'est le facteur normal.

Alors, le rendement sur l'investissement direct, l'avoir des actionnaires de la compagnie, c'est le taux de rendement: 1%, 1%, 8%, 8%, 8%, 10%, moins que 1% en 1971, moins que 1%, 1%, 1%, 1%, 1%, 1%, 19% - c'est à peu près à ce moment que je suis arrivé dans le portrait - et 21%. On passe immédiatement à un autre tableau. Jean-Pierre, si tu veux bien. J'aimerais vous le montrer. Nous avons les feuilles dans le mémoire.

M. Fortier: Oui, merci.

Le Président (M. Bordeleau): L'annexe a déjà été distribuée.

M. Mulroney: Maintenant, M. le Président, nous avons un tableau qui indique le rendement sur l'ensemble des actifs. C'est non seulement l'avoir des actionnaires, mais la dette à long terme qui a été contractée. Quand on a bâti, par exemple, à Sept-Îles, les 225 000 000 $ ou 250 000 000 $, c'était une dette à long terme à part une fusion de capital. C'est ce qui est arrivé dans la compagnie quant au rendement sur l'ensemble des actifs. Vous voyez 9%, 4%, 1%, - 0,5%, - 0,1%, 2,2%, 4,9%, 0%, 10,3%, 9%, 11%. Donc, le rendement moyen sur l'ensemble des actifs depuis 1954 est de 4,1%. Maintenant, tout le monde ici sait fort bien qu'un tel rendement n'a jamais rejoint même le taux d'inflation. Rares sont ceux, ici, qui auraient gardé leur argent dans une compagnie avec un rendement si modeste. Les actionnaires l'ont fait. Et ils ont fait bien plus que cela, comme nous allons le voir avec le prochain tableau.

M. le Président, tout le monde aime cela parler des dividendes, parce que les dividendes, c'est à ce moment-là que les actionnaires retirent. M. le maire a parlé avec raison, tantôt, de son inquiétude devant les avoirs de nos employés investis dans la

Fédération des caisses d'entraide économique. C'est important, pour quelqu'un qui travaille fort, que son argent puisse avoir un retour; alors que le taux d'intérêt est de 12%, 13% ou 14%, qu'il retire au moins cela dans un placement, ou des dividendes.

Voici les dividendes qui ont été payés aux actionnaires de la compagnie. En 1954, 0; en 1955, 0; en 1956, 0; en 1957, 0; en 1958, 0; en 1959, 0; zéro, zéro. On arrive en 1972, vous avez une période de neuf ans où c'est zéro, zéro, et un gros zéro. Or, cela fait 16 ans, dans l'histoire de la compagnie, que les actionnaires n'ont pas reçu un cent de dividende.

Prenons l'exemple suivant: nous avons, ici, des amis qui, supposons, ont 5 actions de Provigo et 20 actions de la Banque Nationale; il me semble qu'après une certaine période on dise: On aime bien Provigo, mais Provigo ne paie pas. On va vendre nos actions. Cela, messieurs, c'est sur un investissement de 1 200 000 000 $. On a commencé à faire de l'argent - et M. le maire en sait quelque chose - lorsqu'on a commencé à civiliser les relations du travail dans la compagnie qui avaient été arrêtées 59 fois dans les neuf ans qui ont précédé 1978.

Or, cela représente un retour d'à peu près 10% ou 11%. Vous voyez un portrait très peu reluisant. Je vous demande une faveur, messieurs. Lorsque vous retournerez à Québec, au Parlement et que vos collègues vous parleront des multinationales qui ont saigné la Côte-Nord, demandez-leur donc si c'est un fait ou si c'est un autre mythe qu'ils sont en train de propager. Si le gouvernement du Québec veut attirer l'industrie et la création d'emplois il n'y a qu'une façon de le faire, c'est d'être au courant des faits et de créer un climat qui nous permettra à tous d'en profiter.

Un dernier point, avec votre permission. "Last ticket again". C'est important surtout pour certains d'entre vous parce que nous sommes ici en commission parlementaire, mais le problème est bien plus profond que cela, il est extrêmement profond. Est-ce qu'on veut une politique de cataplasme ou est-ce qu'on veut regarder le problème de façon sérieuse?

Prenons notre meilleure année, 1981. Quand je suis arrivé, j'avais fixé comme objectif pour la compagnie un retour de 10% sur l'actif et pour la première fois, après trois ou quatre ans de travail, on l'a rejoint en 1981 si je ne m'abuse. C'est ce que cela voulait dire un profit net réel de l'IOC, des boulettes vendues au prix du Lake Erie 104 000 000 $. Qu'est-ce qu'on a fait avec? D'abord on a réussi l'objectif de 10% qui n'est pas abusif. J'ai pris un montant important là-dessus pour le distribuer aux employés d'une foule de façons, y compris des contributions directes parce que c'était le première fois dans l'histoire de la

compagnie qu'on avait atteint cet objectif.

Ceci étant dit, messieurs les députés, voici les faits. C'est une bonne année, je ne chiâle pas, je pense que tout le monde était heureux. Mais d'où est réellement venu le problème au Canada et au Québec? C'est d'une productivité décroissante qui est en train de miner notre structure de base économique. Chez nous aussi. Voici la dimension artificielle de nos propres opérations.

On aura subi une perte nette pour cette même année, si on n'avait pas été favorisé par le "lower Lake Erie price". Si on avait été dans la même situation que SIDBEC-Normines dans cette bonne année, on aurait perdu presque 12 000 000 $ au lieu de cela.

Cela veut dire qu'en Amérique du Nord ils veulent payer le "lower Lake Erie price", ce n'est pas moi qui leur dira de garder leur argent. On a pris l'argent pour nos boulettes. La perte nette de la compagnie, dans notre meilleure année, calculée sur les boulettes vendues au prix mondial, avec le dollar canadien au pair, aurait été de 76 000 000 $.

Qu'est-ce qu'on fait ici, dans le Grand-Nord, si demain ou dans six mois le dollar canadien monte à 100 cents la piastre? On est cuit parce que nous vivons dans un monde artificiel où il n'y a aucun lien entre la productivité accrue. C'est cela, M. le Président, je ne blâme personne, tout le monde a travaillé fort, tout le monde a pédalé là-dedans et cela a donné un bon résultat. Mais le résultat réel était cela. Nous avons une obligation collective, nous tous ici au Québec, en commençant ici au Québec, de hausser notre productivité. Sans cela, on en arrive où nous en sommes. (13 h 30)

Je ne veux pas, M. le Président, abuser de votre hospitalilté. Mais vous me permettrez un commentaire, en terminant, sur un "last shot". J'ai juste un petit diagramme à vous donner et je veux vous le montrer. Écoutez, j'ai des gars qui ont travaillé sur cela et, si je ne le montre pas, ils vont chiâler.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, ce sera donc le deuxième dernier, M. Mulroney.

M. Mulroney: Non, pas celui-là. Donnez-moi le dernier. Vous voyez, on en enlève un. Mais celui-là va être le dernier.

Je vous ai mentionné, M. le Président, que nous sommes une compagnie qui fait affaires au Québec et au Labrador. Nous avons relevé pour vous les chiffres et j'ai donné des directives à notre service financier de faire la ségrégation des profits par province. J'ai commencé en 1962 parce que c'est là où le Labrador a commencé. Vous avez le portrait global et précis des revenus de la Compagnie minière IOC: 515 000 000 $ qu'on a faits en 20 ans. On a fait 515 000 000 $; de ce montant, 493 000 000 $ ont été faits au Labrador, 22 650 000 $ ont été faits ici au Québec. "There is a lesson for somebody somewhere." Il y a quelque chose qui ne marche pas dans notre patente, n'est-ce-pas? C'est cela qui est arrivé. J'attire votre attention juste sur une chose. Ajoutez, M. le Président, au montant de 22 000 000 $ que vous voyez, un autre montant de 24 000 000 $ juste ici; cela représente les profits au Québec de 1954 à 1962 et vous avez un montant inférieur à 50 000 000 $ de profits à même nos opérations québécoises où nous avons investi 575 000 000 $, où 60% de nos achats sont faits et où 70% de nos employés restent. Maintenant - je pense que c'est important - est-ce que, d'après vous, c'est le comportement d'une soi-disant multinationale qui a abusé de qui que ce soit ou d'un territoire quelconque ou de ses employés ou de ses régions? J'espère que vous conviendrez avec moi, M. le Président, que c'est un retour non seulement modeste -parce que cela représente 4,7% depuis le début - c'est non seulement modeste, mais c'est parfois gênant. Je n'ai pas... C'est la dernière diapositive. J'aurai tout simplement quelques commentaires de conclusion, si vous me le permettez.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, des recommandations? Conclusions-recommandations?

M. Mulroney: Seulement des recommandations.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Est-ce que vous pouvez faire cela en quelques minutes?

M. Mulroney: Est-ce que vous me donnez cinq minutes et je termine?

Le Président (M. Bordeleau): D'accord pour cinq minutes.

M. Mulroney: D'accord. D'abord on vous signale qu'on a entrepris un programme d'exploration de minerai non ferreux dans la région avec un succès très impressionnant. Ce sont des possibilités importantes et M. Geren pourra vous en faire part de façon plus précise. C'est à Strange Lake et ces gisements sont ceux qui présentent le plus de promesses dans toutes nos opérations. Depuis ce temps, on a dépensé 3,5 millions de dollars dans la région de Strange Lake, y compris les forages, etc. De vastes quantités de minerai à basse teneur ont été identifiées et une très grande partie reste à explorer.

Les métaux d'intérêt économique que

nous croyons pouvoir récupérer dans cette région sont le columbium, le tantale, le zirconium, le béryllium, l'yttrium et les terres rares. On les appelle généralement les métaux stratégiques. Nous croyons que le gisement du lac Strange est probablement l'une des plus vastes sources possibles d'yttrium et de zirconium au monde. C'est de plus en plus important.

Nous allons dépenser cette année, M. le Président, 1 700 000 $ de plus pour finir le "firm up" de tout ce projet. Il y a deux autres projets conjoints, non loin d'ici, avec la collaboration, très généreuse d'ailleurs, du ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec. J'en parle dans le mémoire et je pense que cela mérite votre attention.

Nous avons des recommandations précises et, dans tous les cas, il y a un "back up" où je vous ai donné les communications écrites avec Lalonde, MacEachen et tout le monde. Cela entre en ligne de compte ici. Nous proposons l'établissement d'un centre d'entraînement militaire pour les Forces armées canadiennes ou les troupes de l'OTAN. On demande au ministère de la Justice du Québec et au Solliciteur général d'examiner l'établissement d'un centre de correction. On vous invite à analyser la possibilité d'un centre de recherche nordique. C'est bien important. J'ai communiqué avec l'ambassadeur russe et on a rencontré des Russes. Ils ont des villes dans le nord de la Russie avec 250 000 et 300 000 habitants et toutes sortes de recherches et de développements. Avec le virage technologique qui a été mentionné, dans le volume de Bernard Landry, il me semble que ce serait une possibilité extraordinaire pour nous d'avoir ce genre d'instrument ici.

On voudrait que vous examiniez, chers amis, l'établissement d'un institut de recherches sur les mines et métaux ici au Québec. Et pour le tourisme, quelles opportunités extraordinairesl Tout le monde à Montréal est en train de chialer parce qu'il n'y a pas de neige au mont Tremblant. Les Américains sont rendus sur la rue Sherbrooke avec leurs skis. Il n'y a pas de neige et nous avons de la neige qui nous sort par les oreilles. Tout ce dont on a besoin, c'est de la collaboration fédérale et provinciale, une grosse campagne de publicité et les gens de Schefferville vont faire la passe, je vous le garantis. Des skieurs, ça dépense de l'argent, comme les chasseurs. Il y a une possibilité remarquable, ici, dans ce domaine.

M. Marois a signé avec son collègue, M. Axworthy, un programme très important pour la formation de la main-d'oeuvre. Vous êtes sur la bonne voie, M. le ministre. C'est cela, à mon avis, le défi des années quatre-vingts. On vous demande ceci: Dans ce vaste programme de formation de la main-d'oeuvre serait-il possible - on va vous donner toutes les installations que nous avons ici; nous avons des instructeurs qualifiés; on vous donne l'infrastructure - de créer, pour les régions nordiques et toute cette vaste région de la Côte-Nord, un centre de formation, ici, à Schefferville? Il me semble que cela mérite peut-être votre attention.

J'ai rencontré M. Mackenzie, le chef des Montagnais. Je l'ai vu encore en arrière; on s'est parlé tantôt. M. Mackenzie a des idées très intéressantes pour le développement dans son domaine, qu'on vous demande d'examiner. Un parc national, mais c'est de toute beauté comme possibilité! Vous allez convaincre vos collègues à Ottawa de faire une désignation. Maintenant, on appelle cela un "wilderness area" ou un parc national. Il y a des possibilités vraiment attrayantes dans ce domaine.

Alors, je conclus de la façon suivante, M. le Président, et je vous laisse là-dessus. Je pense que, pour cette commission, il y a des principes de base qui devraient nous gouverner, nous les compagnies, et tout le monde, et je m'explique. Les régions nordiques, ce n'est pas facile. Le maire en a parlé avec sympathie, avec compréhension. Voici certaines propositions que je vous demanderais d'examiner. À l'avenir, il faudrait que l'employeur principal - parce qu'il y a des programmes à moyen et à court termes qu'on peut régler ensemble -s'engage envers le gouvernement à un certain degré de diversification continue dès le début d'une exploitation. Deuxièmement, il faudrait que les gouvernements s'engagent à rendre à ces communautés un modeste pourcentage des revenus d'impôts qu'ils en retirent, lequel serait utilisé pour promouvoir le développement. Les sommes dépensées par le gouvernement du Canada et celui du Québec dans la région de Schefferville au cours du dernier quart de siècle sont absolument minimes, pour ne pas dire dérisoires et ne semblent pas refléter un engagement sérieux envers la région ou une compréhension des problèmes des habitants.

Il nous faut des politiques fiscales humaines. On demande qu'elles soient instituées envers des individus mais surtout envers également la petite et moyenne entreprise qui est tout de même l'épine dorsale d'une économie régionale diversifiée, afin d'inciter des gars, des employés de talent à venir et y demeurer.

Le point que je vous ai mentionné sur la fiscalité tantôt, avec le budget qui s'en vient, vous pourriez encore nous être d'une grande utilité là-dedans. Pour les questions fondamentales de politique publique, telles que le transport, l'éducation supérieure et les télécommunications, on est toujours oublié, dans le Grand-Nord. Cela coûte 391 $, Montréal-Schefferville, 1400 milles et cela coûte 60 $ de plus pour faire l'aller et retour à Vancouver, 4700 milles. C'est cela

le problème. Le gouvernement prend l'argent. On est effectivement oublié comme groupe ici. On demande votre compréhension. Je pense que cela fera une loi de base, une loi qui permettra à tous les employés, qui assurera que tous les employés soient traités équitablement et qu'un avis soit exigé longtemps à l'avance afin de minimiser les effets d'une fermeture.

Messieurs, j'ai été un peu trop long, je m'en excuse. Il y a d'autres idées qui sont contenues dans les documents connexes. Je vous remercie bien sincèrement de votre attention et soyez assurés de la collaboration active de notre compagnie dans toutes vos initiatives. Merci de votre présence et merci à vous tous.

Le Président (M. Bordeleau): Merci M. Mulroney. La commission va suspendre ses travaux pour l'heure du dîner en continuant avec une période de questions, un échange entre les parlementaires. On suspendra donc jusqu'à 15 heures et j'espère que vous pourrez de nouveau être avec nous à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 43)

(Reprise de la séance à 15 h 03)

Le Président (M. Bordeleau): Mesdames, messieurs, la commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution reprend ses travaux. À la suspension, nous avions commencé la période de questions, d'échanges avec les représentants de l'Iron Ore et les parlementaires. Je voudrais rappeler ceci à tous les gens; ce matin, il semble qu'on a eu des petits problèmes d'audition vers le fond de la salle. Tous les gens qui veulent prendre la parole voudront bien parler dans le micro, ce qui va faciliter la tâche. Je rappelle aussi que le temps est toujours précieux. Alors je demanderais à tout le monde d'être le plus concis possible dans les questions et réponses. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, mes premiers mots seront pour remercier le président de l'IOC pour j'allais dire la courte présentation qui a été faite ce matin. Je vais, bien sûr, avoir quelques questions à poser. Je voudrais faire, cependant, quelques remarques préliminaires.

La première chose que je devrais dire, M. le Président, c'est que nous avons entendu un long exposé, bien documenté c'est certain, par quelqu'un qui très certainement a des talents évidents pour devenir parlementaire.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Duhaime: Si cela peut en rassurer quelques-uns, peut-être même le premier intéressé, j'ai une réaction bien personnelle. Je dois ajouter, M. le Président, que vous avez manifesté une complaisance, je dirais, quant au nombre de minutes utilisées par le président de l'IOC, ce qui est contraire aux règles normales de fonctionnement de notre commission.

Je voudrais, M. le Président...

M. Fortier: Sans faire de politique.

M. Duhaime: ...très brièvement dire que j'ai personnellement écouté avec énormément d'attention et beaucoup d'intérêt les chiffres qui ont été avancés et, plus particulièrement, les tableaux. Je voudrais peut-être, non pas que je sois mieux placé pour faire état des niveaux d'expéditions de l'IOC des années passées, mais peut-être, à partir d'une affirmation qui a été faite par M. Mulroney ce matin, il se dégage de ma compréhension, et de façon très claire, que de 1972 à 1978 inclusivement il n'y a pas eu de dividendes ou de retour aux actionnaires d'IOC.

Par ailleurs, si on jette un bref regard sur les niveaux d'expéditions pour les années 1975 à 1978 en moyenne, on est autour de 3 500 000 tonnes de minerai. En 1979, un peu plus, 4 000 000. Je ne parle pas de la production, bien sûr, je parle des expéditions. On se situe ensuite, en 1980 et 1981, autour de 3 300 000, 3 200 000 respectivement.

C'est là-dessus que portera ma question à M. Mulroney. Vous avez dit, dans votre intervention, que vous avez fait un effort sur le plan de l'administration et de la gestion de votre compagnie; que vous étiez, bien sûr, aussi satisfait de la réaction qui a été constatée de la part des travailleurs de votre compagnie, puisque sur des niveaux d'expéditions bien inférieurs à ce qui avait été constaté dans les années cinquante, soixante ou même au début de la décennie soixante-dix, des profits se sont dégagés. Et, dans le même temps, sur le plan nord-américain et sur le plan mondial, nous vivions une détérioration du marché.

Votre production ayant été ralentie en 1979, 1980, 1981 et, bien sûr, 1982, mais, durant ces trois années, 1979, 1980 et 1981, il y a eu un retour sur l'investissement, il y a eu des profits, des dividendes. Je dois avouer que c'est avec surprise que la décision de votre compagnie a été reçue et avec surprise également qu'elle a été annoncée, je crois. Je voudrais vous entendre là-dessus de façon un peu plus explicite.

Comme deuxième chose, je voudrais peut-être situer, M. le Président, le cadre de travail que nous nous sommes fixé, du moins de ce côté-ci, dans la poursuite des travaux de cette commission parlementaire. Nous ne sommes pas ici pour faire le procès de quiconque, nous ne sommes pas ici pour

tenter de porter un jugement. Je pense que nous sommes ici, dans un premier temps - et c'était la première démarche que j'ai faite moi-même en proposant au Conseil des ministres de tenir cette commission parlementaire dès l'année dernière - pour recevoir les points de vue de chacun. C'est très important pour nous.

Je dirai que ce matin - je ne peux pas faire autrement que revenir là-dessus - à l'ouverture des travaux de notre commission, nous avons eu droit à ce que j'appellerais une charge de cavalerie du côté libéral. J'aurais souhaité, bien sûr, intervenir tout de suite. Mais je voudrais dire essentiellement ceci. Le Parti libéral du Québec voudrait que l'on agisse très rapidement, peut-être même avant les événements. Je voudrais mettre deux dossiers sur la table pour sa propre réflexion. Hier après-midi, nous étions à Port-Cartier, devant ce que j'appellerais, le désastre national de ITT-Rayonier. Cela fait partie du bilan libéral des années 1970.

Je pense aussi que, indirectement, M. Mulroney a touché à ce problème, ce matin. Car on ne peut pas parler de la situation du minerai de fer au Québec, du boulettage, sans parler de SIDBEC-Normines et des décisions du Parti libéral d'engager des fonds publics dans SIDBEC-Normines, pour un montant d'environ 300 000 000 $ et qui nous coûte aujourd'hui, bon an mal an, en pure perte, avec des contrats mal faits, mal foutus, n'importe quoi autour de 50 000 000 $ à 60 000 000 $ par année.

Ces gestes, derrière nous, au cours des années récentes, nous ont amenés à être prudents dans nos interventions. D'autant plus que notre gouvernement a été le premier à écrire, noir sur blanc, dans un document qui était un énoncé de politique économique. Malgré tout ce qu'on pourra dire à l'Assemblée nationale ou ailleurs, prétendant que nous sommes des lecteurs assidus de Karl Marx ou autres disciples, c'est avec fierté, M. le Président, que je m'identifie, moi-même, comme étant peut-être d'avant-garde mais modestement social-démocrate.

Notre parti et notre gouvernement n'ont jamais eu l'intention de mettre la main sur les moyens de production nationale. Quand des libéraux, qui souscrivent à la thèse du libéralisme économique sur ce continent, nous harcèlent et poussent notre gouvernement et notre parti à intervenir dans les mines, à intervenir dans le secteur manufacturier, à intervenir un peu partout, je me dis, ou bien je n'ai pas lu le bon programme du côté libéral, ou bien il y a des virages qui se font de l'autre côté.

Nous avons, comme attitude générale, et je la répète aujourd'hui parce que cela pourrait être utile pour la bonne compréhension de nos travaux, le soutien aux entreprises, le soutien au développement économique, cela ne signifie pas "le faire à la place de". La Papeterie d'Amos n'aurait jamais produit une seule tonne de papier journal sans une association avec une de nos sociétés d'État. Il est évident aussi que le groupe de la Société générale de financement, qui fait des profits, n'aurait pas pu aider les entreprises et beaucoup de nos régions du Québec sans une décision politique.

Ce qui me frappe, M. le Président, puisqu'on en parle, la seule société d'État, qui fait actuellement de lourdes pertes, est SIDBEC. Les pertes de SIDBEC seraient beaucoup moins lourdes si nous n'étions pas liés de la même manière que les actionnaires d'IOC sont liés entre eux, sur un prix artificiel pour payer le prix de la tonne de boulettes. Je pense que n'importe qui, qui connaît l'ABC du dossier du fer au Québec, et de la boulette et de SIDBEC, va être d'accord là-dessus.

Cela dit, M. le Président, ce sera peut-être le deuxième volet d'une question que je voudrais adresser à M. Mulroney. Je ne veux pas revenir, parce que cela m'est absolument impossible, sur l'heure qui a été consacrée, ce matin, à l'exposé, mais vous me permettrez, M. le président, de vous dire que vous avez beaucoup parlé du passé. Vous avez brossé un tableau financier qui fait état d'une situation de votre groupe. Je serais très intéressé, et la population de Scheffer-ville aussi, à vous entendre davantage nous parler de l'avenir. Vous avez évoqué le développement de Strange Lake. Et là, je vais répondre à l'appel du... Des projets de développement auxquels notre gouvernement pourrait s'associer, mais dans une perspective de développement et de création d'emplois.

Nous avons développé cette attitude de calculer nos risques et d'investir aussi. Quand nous avons pris cette décision d'aller de l'avant avec le groupe Pechiney Ugine Kuhlman pour implanter au Québec une grande aluminerie de taille mondiale, nous sommes aussi, dans ce dossier, en train d'évaluer les risques. Il est bien certain que nous ne refuserons pas, je dirais, d'innover, ou encore, de briser avec certaines traditions, comme nous l'avons fait dans le secteur de l'aluminium entre autres, après de longues et de dures discussions avec le groupe Reynolds, en venir à une entente qui, sur le plan d'une tarification hydroélectrique et des garanties d'approvisionnements à long terme et quant au prix, à inciter cette compagnie à décider d'investir 500 000 000 $ à Baie-Comeau. C'est peut-être sur ces actes que j'aimerais recevoir, de votre côté, un éclairage portant essentiellement, non pas sur l'avenir, en parlant de juin 1983, mais en parlant de l'avenir à moyen et à long terme.

Et, enfin, une dernière question, M. le Président, si vous me le permettez. Si mes

chiffres sont exacts, la production, ou plutôt le total des expéditions de votre groupe en 1982, est descendu à un échelon inférieur à 2 000 000 de tonnes: 1 700 000 pour 1982. Est-ce qu'il serait possible d'envisager et, est-ce que c'est réaliste d'espérer encore, qu'un palier d'expédition de 3 000 000 de tonnes pourrait éventuellement être recouvré d'ici un, deux, ou trois ans, en fonction de l'évolution du marché? Parce que, si tel était le cas, à partir du moment où les expéditions ont atteint 3 000 000 de tonnes - si je me réfère aux chiffres de 1979, 1980 et 1981 - il y a un retour sur l'investissement, toutes choses étant égales, bien sûr, il y a des profits pour les actionnaires, etc. Et il y a de l'emploi pour tout le monde. Cela serait ma dernière question.

Le Président (M. Bordeleau) Merci M. le ministre. M. Mulroney.

M. Mulroney: M. le ministre, d'abord, je me dois de vous dire avec respect que vous me placez dans une situation un peu délicate, n'est-ce-pas? Il y a dans votre question des implications politiques et Dieu sait que cela me gêne, des questions politiques. Mais, avec cette réserve, en prenant votre dernière question en premier, oui, il y a un avenir. Il y a des ventes très modestes, possiblement, pour le minerai de Schefferville, surtout dans le bout de Sparrows Point aux États-Unis et de la côte est des États-Unis. Très modestes. Mais nous, on ne peut pas fonctionner et cela c'est une situation dans un état de déclin constant.

Il se peut que ce qu'on appelle un "contract minor", un "jobbeur" dans le domaine minier, qui prendrait les concessions sans nécessairement les conventions collectives, parce qu'elles sont extrêmement lourdes, puisse opérer "kif-kif". Mais nous ou n'importe quelle autre compagnie, on croit sincèrement ne pas être en mesure de le faire. Et ceci, M. le ministre, à cause d'un développement comme vous savez - parce que je pense que vous connaissez ce phénomène - c'est le minerai en provenance du Brésil. Le phénomène de 1965 à 1975, c'était la venue sur les marchés internationaux du Brésil où, comme vous le savez, le gouvernement du Brésil qui a maintenant une dette extérieure de 93 000 000 000 $ américains, se sert de ses richesses naturelles comme d'un instrument de taux d'échance sur le marché international. Le gouvernement brésilien peut développer et développe des gisements absolument énormes à n'importe quel coût pour vendre le minerai en Europe, en Chine, en Amérique du Nord, à travers le monde pour obtenir des dollars américains coûte que coûte, pour les réintégrer au pays pour ensuite payer pour une importation pétrolière qui est à peu près 70% de ses importations.

Face à une vocation gouvernementale brésilienne, c'est là que Schefferville est directement frappée et terrassée, par une concurrence... Lorsque nous étions étudiants en droit, on nous soulignait des causes de ce qu'on appelait la concurrence déloyale. C'est un peu cela en ce qui concerne ce point. Possiblement, un "contract miner" pourrait sortir un million de tonnes et le "pedler" quelque part, mais comme projet à long terme, je préfère retenir votre première question, Strange Lake, ainsi que les deux autres points que nous avons mentionnés comme possibilité directe dans notre mémoire.

J'aime bien l'idée que vous mentionnez, d'examiner ensemble un degré de collaboration entre le gouvernement et nous, ou d'autres, dans cette région ici. Il y a trois points que nous avons soumis dans notre mémoire. J'entrerais dans les détails, mais pourquoi le faire, alors que j'ai à mes côtés Richard Geren, qui est un grand géologue canadien, qui est avec la compagnie depuis ses débuts, qui a commencé ici et qui a fait lui-même dans ses premières années l'exploration, dans ce coin.

Avec votre permission, je demanderais à M. Geren de faire un tour d'horizon sur les trois dimensions de ces possibilités de développement minier, ainsi que les produits qui en découlent.

Le Président (M. Bordeleau): M. Geren, en approchant le micro.

M. Geren (Richard): Mr. Minister, to be sure I say things correctly, I will have to speak in English.

Strange Lake is the manifestation of our company's preview or what was going to happen at Schefferville back in 1979. At that time, we had done enough other studies on the future of Schefferville to realize that it was a very tenuous situation. Because we did not wish to walk away from any further potential in the area, simply because of the vast amount of infrastructure that had been invested to develop and exploit the Iron Ore deposits, we got the company's permission to embark on an exploration program preferable to the railway and preferable to Schefferville in hopes that that infrastructure would serve some other projects. We were very fortunate that at same time, there were certain works had been done by the Government of of New Foundland which encouraged us to go into this area, 155 miles north-east of Schefferville and look at the rocks in that area. We found a very unique assemblage of rocks which there is nothing like it anywhere in the world. These rocks are generally described as alkali intrusive rocks. They contained a great variety of metals, many of which are assuming very great importance in

today's economy, particularly with respect to high technology and with respect to defence. Beryllium in particular is one of the minerals that is in extreme short supply and we are fortunate enough to have in Strange Lake a mineral that has been only once discovered elsewhere in the world and identified. Fortunately, that mineral is soluble in acid and we can recover the beryllium from that mineral quite successfully today, at a concentration that would allow us to sell that at 40 $ a pound.

Our work at Strange Lake, all of the money that Brian said we had spent there, the 3 500 000 $ were spent in the field to prod up an ore reserve which we estimate is adequate for 50 years of mining. What we have yet to do and determine is the metallurgical results; we have to demonstrate what recoveries we can obtain and what purity of the various outsides we can recover. But on a conservative basis, we think that this deposit has a recoverable value. Just the higher grade portion of it that we have out lined is in the order of 6 000 000 000 $. Naturally, we are anxious to complete our work and get on with it because we think it has every chance of being a viable operation.

The other metals there, that are recoverable, are the zirconium - undoubtedly, this is the largest known deposit of zirconium in the world - yttrium, which is what they use a lot of in the phosphors in the fluorescent lights. It is also probably on an order as large as anything in the world. So this is a tremendous find and, more importantly, it shows the potential for some of the areas out there that have not been adequately explored to date. In our continued efforts to explore, we came up, on the West side of the trough, with the discovery of three large masses of nepheline cyanite. Nepheline cyanite, probably 50 years from now, will undoubtedly be the source of most of the aluminium that Canada and any industrial nation would need.

Today, 100% of the aluminium that is manufactured, produced in Russia, the Soviet Union, is produced from nepheline cyanite and it is produced because they had the combination of cheap power and a lot of people and they have a big industrial demand for the other products that they can produce as they produce the aluminium. They can produce potash, which they need for their agriculture; they can produce cement and they can produce soda ash. And all these have very great and constant industrial use.

We have asked the Québec Government to look at this jointly with us; we are quite willing to look at it because today there is a nepheline cyanite deposit being worked above the Arctic Circle, in Norway, and it is a viable proposition. I would question that this would be something that would be viable today but with Bay James and the tremendous power potential there, I think someone should at least sharpen the pencil and take a look at it. (15 h 30)

The third initiative that we are concerned with is also one that we have been collaborating with the Québec Department of Mines, at the centre de recherche, and this is the recovery of manganese. It is probably the most strategic of metals that North America is void of. Virtually all the manganese that is required for the steel industry is imported into the United States, about 98%, from South Africa, Turkey and South America. We have vast quantities of material here - we have known about it for years - that have probably, if we are doing it selectively, in the range of 8% manganese along with the iron, and we believe that under the conditions that exist now - this being such a strategic metal from the standpoint of defense - we can work with the provincial Government here to look at the possibility of discovering possibly better grade manganese deposits or process the material that we have and recover selectively the manganese in a form in which it can be used.

Now, we are carrying out our geological work in the area and there is no question in my mind that there is a lot of potential out there. I believe you people last year completed a very comprehensive geochemical reconnaissance type survey extending from East of Schefferville right North to the Strange Lake ore deposit and we are going to be very interested in seeing the results of that work.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: Merci, M. Geren. Je ne veux pas revenir sur les détails de chacun des trois projets. Je voudrais peut-être revenir, cependant, sur la première ou la deuxième question que j'adressais tantôt à M. Mulroney. J'ai retenu - si vous me permettez quelques instants - de l'exposé général, du moins de ce qui s'en dégageait ce matin, M. le président, dans votre présentation, que de 1972 à 1978 vous avez vécu la situation que vous avez décrite et vous avez fait un effort remarquable de redressement durant les années 1979, 1980 et 1981. Pour ceux que votre entreprise intéressait, il y avait lieu de croire, puisque la production, même à un niveau inférieur à ce que votre entreprise avait connu dix ans auparavant, était à un niveau profitable et que les actionnaires, j'imagine, devaient être plus contents de la performance de 1979 à 1981 que de 1972 à 1978... Que s'est-il passé? Est-ce le marché qui est tombé tout d'un coup? Est-ce un actionnaire, deux actionnaires ou trois

actionnaires du groupe qui ont décidé de ne pas suivre - c'est là que j'avoue avoir de la difficulté à faire le joint - ou est-ce essentiellement une question de détérioration des prix sur les marchés?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Mulroney.

M. Mulroney: Ce qui s'est passé, M. le ministre, c'est que le 4 mars 1978 les marxistes-léninistes ont pris le contrôle du local 5569 à Sept-Îles. C'est un fait reconnu. M. Lawrence McBrearty qui est probablement ici l'a admis sur un "hot line" à Sept-Îles. Nous avions un groupe de fauteurs de trouble, de voyous intellectuels - une poignée au local 5569, dont le but était la destruction de la compagnie et d'autres compagnies de la Côte-Nord, avec le dossier que vous connaissez. Le 4 mars 1978, à 4 heures du matin, alors que nous négociions de bonne foi avec les métallos, les marxistes-léninistes du local 5569 ont dressé une ligne de piquetage et déclenché une grève qui a frappé toute l'industrie de la Côte-Nord, comme ça, illégalement et à l'insu des dirigeants des métallos et, bien sûr, à notre insu.

Le lendemain de cette grève illégale, une grève sauvage déclenchée par une "gang" de pas bons qu'on connaît et que j'ai identifiés moi-même au local 5569 - qui ne sont plus avec nous, incidemment, M. le ministre - M. Geren, moi et d'autres que vous voyez ici, avons dit: Nous allons d'abord civiliser au plus haut point nos relations du travail pour la simple raison qu'il ne sera plus question de permettre à une petite "gang" d'interrompre la vie de milliers et de milliers de travailleurs honorables et honnêtes. Nous allons nous comporter, nous comme gérants, avec des changements d'attitude, pour être dignes du respect et de l'appui de nos employés. Nous allons essayer de civiliser nos relations afin que le syndicat comprenne que nous méritons également une transaction honorable. Et, primo, c'est ce qui est arrivé.

En deuxième lieu, le comité exécutif de la compagnie que je préside a entrepris une série de programmes, que ce soit dans le domaine des coûts, que ce soit dans le domaine de l'éducation, dans le domaine des communications, dans le domaine des relations humaines, le tout basé sur le principe extrêmement simple: "if you do not produce any iron ore, you do not make any money". C'est ce qui est arrivé dans le passé, n'est-ce pas? Notre problème est un problème foncièrement humain. Notre réputation nous a précédés sur la Côte-Nord; nous avons essayé collectivement de la corriger. Vers le milieu de 1979, il faut bien l'avouer, nous étions favorisés dans une certaine mesure par un marché qui semblait être en pleine expansion et nous étions prêts à en profiter. Or, nous avons, il est vrai, de 1971 à 1979, commencé à faire de l'argent le lendemain de cette grève. J'ai dit à nos gars, qui sont ici: II n'y aura plus d'arrêts de travail dans la compagnie Iron Ore. Cela vient de s'éteindre, il n'y en aura plus. Nous n'avons jamais eu une minute d'arrêt de travail depuis parce que, de part et d'autre, grâce à une excellente collaboration syndicale, à une compréhension de nos employés et, je pense, à une espèce de direction peut-être plus apte à reconnaître les exigences légitimes des employés, nous avons corrigé notre attitude et nous nous sommes embarqués dans une ère nouvelle. Or, nous avons pris avantage d'un marché qui montait, notre productivité s'est améliorée, même si elle était très basse, les coûts ont été comprimés, l'affaire a été administrée comme il se doit et nous avons connu des bonnes années. De 1971 à 1979, pas un dollar à nos actionnaires. Finalement, on a fait de l'argent et, pour la première fois en neuf ans, on a distribué de l'argent a nos actionnaires et, en 1981, M. le ministre, lorsque nous avons atteint l'objectif no 1 qu'on s'était fixé, soit l'élimination de tout arrêt de travail à la compagnie, la conséquence, c'est que, à la fin de la troisième année de la mise en application de cette politique constante que nous avons surveillée jour et nuit, de même que les fins de semaine, nous avons obtenu un rendement de 10% sur notre avoir. Nous avons distribué un certain pourcentage au-delà des salaires à nos employés afin de les remercier pour cet accomplissement et nous avons distribué, bien sûr, un montant à nos actionnaires qui n'avaient pas eu un cent de dividendes pendant une décennie.

Si vous me demandez les raisons qui ont fait en sorte que depuis six ans cela fonctionne bien, c'est un concours de circonstances, une excellente équipe, une nouvelle perception de la vie, une collaboration de nos syndicats et la compréhension profonde de nos employés. Cela a fonctionné au bénéfice de tous. C'est un peu ce qui est arrivé. Et pas de marxistes dans la place, à 5569!

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre.

M. Duhaime: Une dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Duhaime: Je vous dirai, M. le président - quand je m'adresse au président de ce côté, je parle au président d'IOC -que je ne suis pas tout à fait satisfait de la réponse que vous formulez. Je vais essayer de me reprendre.

Je vais partir des chiffres que vous avez mentionnés ce matin sur les tableaux. D'abord, disons une chose: II n'y a personne qui remet en cause le fait qu'une compagnie, qu'elle soit multinationale ou transnationale -Bombardier est devenue une multinationale -ait un rendement sur l'ensemble des actifs de 10,3%, alors que le rendement sur l'avoir propre à Hydro-Québec est au-dessus de 14% et qu'on paie 22% à nos caisses populaires. Il n'y a personne qui blâmera quelqu'un d'envisager qu'un niveau de 10,3% en 1979, 9% en 1980 et 11,8% en 1981, n'est pas excessif.

Cela étant dit, vous avez très bien expliqué les raisons, sur un passé récent quand même. Mais ce qui me frappe, c'est qu'à partir des événements que vous avez décrits - chacun a sa perception d'un dossier - 1979, 1980, 1981, dans mon esprit, j'appellerais cela un rétablissement sur le plan financier des activités de l'IOC, ici. Dans le même temps, et suivant vos propres dires, la situation s'est "civilisée" et il n'y a pas eu une minute de perdue en heures de travail. Si j'étais un actionnaire, je serais content, mais je serais plutôt tenté de dire: je veux poursuivre mes activités. C'est là-dessus que j'aimerais vous entendre. Qu'est-ce qui a fait qu'un jour au conseil d'administration, à IOC, alors qu'en 1979 - je crois que c'était en juin - votre conseil avait décidé de poursuivre les activités pour une période indéfinie, c'était l'époque où il y avait eu de l'incertitude... mais qu'est-ce qui s'est produit, parmi les actionnaires ou à l'intérieur de l'IOC - même M. le maire était surpris, et il reste et travaille ici; il l'a appris dans le journal - mais qu'est-ce qui s'est passé?

M. Mulroney: Ce qui s'est passé, c'est ceci: le conseil d'administration de la compagnie - M. Geren est membre du conseil ainsi que votre humble serviteur - nous avons la responsabilité de gérer la boîte directement. Or, vers la fin de 1980 ou au courant de 1980, on voyait venir de façon inquiétante, mais pas certaine, cet effritement du marché international. Exemple: je me rends moi-même pour essayer de trouver de nouvelles possibilités pour le minerai de Schefferville et de Labrador City, à Bucarest et je rencontre M. Ceausescu, le président. Je suis invité chez lui et on se parle. Il nous aime bien, il nous trouve bien fins, à Schefferville, et il aime bien notre minerai, mais il n'a pas de comptant, comprenez-vous? Il veut faire du "carter trade". Deux minutes après, les Brésiliens sont là, disant: On est à 15%-20% de moins des prix de l'Iron Ore.

L'effritement commence, M. Geren, moi-même et deux autres collègues du comité exécutif présentons un plan de redressement qui prend effet le 9 janvier 1981. Le premier article, c'était à Sept-Îles. Durant cette période, comme vous avez vu, M. le ministre, la quasi-totalité de nos profits provenaient du Labrador. Cela fonctionnait bien, mais pour des raisons énumérées ici, les boulettes de Sept-Îles étaient énormément plus dispendieuses, telles que les boulettes de Port-Cartier. Alors, le plan redressement qu'on voyait s'en venait. Quand je suis entré là-dedans, M. le ministre, comme avocat, je pensais qu'il n'y avait rien de plus certain et de plus sûr que le marché de l'acier. Je n'aurais jamais cru que c'était si fragile. En 1982, cette compagnie, ici, a effectué durant l'année exactement 24 "forecasts" financiers différents. De mois en mois, de semaines en semaines, des clients nous disaient non, coupaient des contrats; des usines d'acier fermaient leurs portes parce qu'en 1981, nous sommes tombés dans le creux de la pire récession économique depuis 50 ans. Or, d'un côté, les coûts concurrentiels, d'un autre côté, une récession historique. On a pris les mesures qui s'imposaient, et rapidement, afin de sauver la barque. (15 h 45)

Si, par exemple, M. le ministre, on n'avait pas, le 9 janvier 1981, annoncé la fermeture, la suspension des activités à Sept-îles qui a pris effet le 15 mai 1981, vous avez vu les résultats de 1980, cela aurait été transformé, après impôt, en une perte de 77 000 000 $. Nous étions en chute libre dans le marché. On le voyait peut-être venir un peu plus que d'autres, peut-être avions-nous plus peur de certaines réalités et on a agi rapidement. Les conséquences sont que, au moins, nous sommes encore en vie aujourd'hui et c'est là la réponse.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Cela va?

J'ai pris quelques notes et simplement pour vous souligner, en termes de temps, que nous en sommes à 40 minutes pour le côté ministériel, j'accorderai donc le même temps du côté de l'Opposition et, question de complaisance, M. le ministre, je vous souligne que votre première question a duré quinze minutes. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je comprends la nervosité du ministre. Il essaie de faire dire des choses à un vieux routier -j'allais dire de la politique - choses qu'il ne veut pas dire. Mais il ne lit certainement pas les mêmes journaux que nous, parce que, ce matin justement, j'ai cité M. Anderson -M. Mulroney me corrigera si... - président du conseil d'administration de l'IOC, et c'est très clair, c'était au mois d'août 1980. Justement, il disait que l'American Iron Ore Association prévoit que la production nord-américaine de tous les types de minerai de fer sera, cette année, d'environ 118 000 000

de tonnes, soit une baisse de 20% par rapport à 1979. M. Jean-Didier Fessou posait la question: "Que pensez-vous de l'Amérique du Nord en général?" et M. Anderson a répondu: En ce qui concerne plus spécifiquement les activités de l'Iron Ore of Canada, je ne témoigne guère d'optimisme. Je peux vous faire parvenir toutes les coupures de presse. C'est rendu maintenant que le ministre demande aux maires des villes nordiques de suivre le marché du fer en Amérique du Nord pour lui dire s'il y a des problèmes, alors qu'il a tous les ingénieurs, tous les économistes et tous les spécialistes, il attend que les maires de la Côte-Nord l'informent sur les problèmes du minerai de fer sur la Côte-Nord. Franchement, on est rendu à un point où M. le ministre suggérerait peut-être que vous vouliez venir en politique; il y a peut-être des gens qui devraient en sortir.

M. Mulroney: Moi, je ne tombe pas là-dedans!

M. Fortier: Non, je sais, M. Muironey, que vous ne voulez pas faire de politique!

Mais ce qui est le pire, c'est que le ministre revient en arrière et cite les projets que les libéraux ont mis de l'avant: 5IDBEC-Normines; ITT-Rayonier. C'est vrai, M. le Président, nous, nous avons eu confiance dans la Côte-Nord et dans le développement du Grand-Nord et si nous sommes coupables de quelque chose, je confesse que nous sommes coupables et si nous reprenons le pouvoir, nous serons encore coupables de lancer des projets pour créer de l'emploi sur la Côte-Nord et dans le Grand-Nord québécois. Nous sommes coupables d'avoir voulu faire la transformation du bois de la Côte-Nord sur la Côte-Nord, nous sommes coupables d'avoir créé SIDBEC-Normines. Nous avons visité l'usine, hier, c'est une usine qui marche bien, mais ces gens se sentent délaissés complètement, le ministre responsable de SIDBEC passe son temps à dire qu'on devrait fermer la boîte, M. le ministre des Finances, lui, dit qu'il faudrait dégraisser l'affaire. J'ai l'impression qu'il aurait avantage à visiter l'usine comme nous l'avons fait.

En plus de cela, le ministre dit: Les libéraux nous poussent à intervenir dans le domaine des mines; alors que nous lui disons depuis trois ans: N'achetez pas Asbestos Corporation, ce sera un fiasco. Il a investi 100 000 000 $ là-dedans et maintenant il s'aperçoit que le chômage est complet, que plus personne ne veut acheter d'amiante. Maintenant, il nous dit que c'est nous qui l'avons incité à faire cela.

De toute façon, ce qui m'intéressait, c'est que je me suis demandé, M. Muironey, pour quelle raison vous faisiez cette illustration, que vous nous donniez des éclaircissements sur la performance financière de l'Iron Ore; je me suis dit: Mais qu'est-ce qu'il veut prouver exactement? J'imagine que vous vouliez informer la commission parlementaire, mais il m'est tombé sous la main une déclaration - je ne sais pas si vous l'avez lue, mon recherchiste m'a remis cette déclaration - du premier ministre du Québec, déclaration datant du 28 décembre 1982, où il disait ceci: "Tout le monde célébrait leur arrivée - il parlait de vous autres - seulement on a un peu oublié que c'était des apatrides, des gens qui n'ont pas de racines, qui s'en sacrent éventuellement et qui sacrent leur camp aussi". Un peu plus loin il dit: "On va fermer après avoir siphonné et exporté le plus de profits possible, c'est ce que l'Iron Ore vient de faire récemment, d'exporter. Ils disent -c'est peut-être vrai - qu'ils n'ont pas eu tellement de profits au cours des années, mais depuis deux ou trois ans, ils ont exporté tout ce qu'ils pouvaient."

La question que j'aimerais poser en deux temps deux mouvements, c'est: Est-ce que ce jugement, vous l'acceptez et que votre présentation est un peu pour donner un autre son de cloche sur ce jugement du premier ministre? Compte tenu du fait que vous avez parlé des richesses qui existent de l'autre côté - on va l'appeler la frontière pour meilleure référence - d'une ligne qui est acceptée par certaines personnes comme étant la frontière et par d'autres personnes comme n'étant pas encore définitive, mais que, bien sûr, d'autres multinationales ou d'autres compagnies voudraient venir ici dans la région pour investir, j'aimerais vous demander, M. le président de l'Iron Ore, si ce genre de déclaration peut inciter des compagnies à venir investir sur la Côte-Nord?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Muironey.

M. Muironey: En ce qui concerne la déclaration à laquelle vous faites allusion, je pourrais peut-être vous répondre de la façon suivante: libre à n'importe qui, y compris le premier ministre du Québec, d'avoir ses opinions. Si ses opinions sont basées sur des faits et si je ne partage pas son point de vue, je les respecte. Lorsque des opinions mériteraient d'être replacées dans un certain contexte, je pense que c'est important pour tout le monde, en commençant par le premier ministre, d'être prudent dans nos déclarations et je m'explique. La seule façon dans la vie de se faire juger, c'est selon nos gestes.

On parle de l'Iron Ore comme étant, par exemple, une multinationale. Les seules activités de la compagnie sont ici au Canada. On n'oeuvre pas ailleurs, la compagnie Iron Ore produit ici. Nous sommes une compagnie nationale ici au Canada et

nous ne produisons nulle part ailleurs au monde. Donc, nous ne sommes pas une multinationale, quoique cela ne me gênerait pas de l'être, cela ne m'effraie pas d'être une multinationale.

Il faut que nous soyons jugés selon nos gestes. Par exemple, j'ai annoncé un programme dans un domaine. Vous avez tous nos chiffres, il n'y a rien de secret. Je pense que je vous ai fourni honorablement et honnêtement toute la documentation possible. Cependant, nous n'étions tenus en vertu d'aucune loi ou d'aucune convention collective de poser certains gestes, comme vous l'avez vu, qui nous ont coûté près de 10 000 000 $ à 15 000 000 $ en faveur de nos employés à Schefferville. C'est ce que nous avons fait. Ce n'est pas un discours, c'est un fait.

Or, d'un côté vous avez ce geste. Prenons le cas ensemble d'une bonne petite compagnie canadienne française catholique de chez nous, la Fédération des caisses d'entraide économique d'Alma. Qu'est-ce qu'ils ont fait avec leurs employés? Ils les ont plantés sur un banc de neige à minuit, ils ont fait venir un U-Haul et ils ont transporté le siège social à Québec. Ce n'est pas une compagnie multinationale, c'est une bonne société catholique de Baie-Comeau et d'Alma. J'ai connu cela en grandissant à Baie-Comeau. Ce n'est pas une méchante General Motors, c'est une compagnie avec des racines profondes au Québec. Et on est fier de cela.

Qu'est-ce qu'ils ont fait à minuit lorsqu'ils ont dit aux employés: Aie! les gars, vous voulez travailler? Allez vous ramasser à 450 kilomètres d'ici, à Québec, demain matin. Ce n'est pas un argument que j'emploie. Je dis simplement ceci: Vous êtes en mesure, et je vous invite à poser un jugement de valeur sur notre comportement, d'un côté, et je vous invite à poser un jugement de valeur sur d'autres comportements. C'est votre responsabilité et j'accepte volontiers la décision impartiale que vous rendrez.

Donc, M. le député d'Outremont, ce ne sont pas les racines d'une société qui sont importantes. C'est de savoir si cette compagnie peut contribuer honorablement à la création d'emplois et la possibilité d'offrir un avenir à des douzaines, des centaines ou des milliers de Québécois. Si cette compagnie le fait et après un certain temps se trouve dans l'impossibilité de continuer, comment doit-elle se comporter lorsqu'elle dit à ses employés qui ont si bien travaillé pour elle: Merci.

Le dossier de la compagnie minière IOC est devant vous en toutes lettres. Je pense que ma réponse est que j'accepterai la décision de cette commission ou de n'importe quel homme impartial au Québec en ce qui concerne notre comportement. De façon générale, attirer des investissements... Personne au monde ne peut obliger quiconque à investir 1 $ et venir s'installer ici au lieu d'ailleurs. Un investissement est attiré par un climat de confiance, un climat de "fair play", un sens de respect pour le voisin, un sentiment que vous êtes les bienvenus et que vous faites partie d'une communauté et vous pouvez contribuer.

C'est la responsabilité de tout gouvernement, soit au niveau provincial ou fédéral, surtout dans le climat économique que nous connaissons, de créer un esprit de confiance pour investisseurs étrangers, et canadiens et québécois, pour justement s'assurer que des emplois se créent et que des occasions sont offertes à nos travailleurs.

M. Fortier: Merci, M. le Président. J'aimerais avoir votre opinion maintenant. J'ai parlé tout à l'heure de la nécessité d'avoir des stratégies à long terme. J'ai dit, bien sûr, qu'il y a des problèmes à court terme et il faudrait avoir des politiques et des stratégies à long terme.

M. Geren faisait allusion au fait qu'en Russie, en particulier, ils ont à peu près le même genre de minerai et ils l'exploitent à cause du fait qu'ils ont des ressources énergétiques à bon marché. Nous savons qu'ici à Schefferville nous sommes à la frontière, ce qu'il est convenu d'appeler la frontière. On n'est pas pour entrer dans un débat de juristes même s'il y en a peut-être beaucoup autour de la table, mais pour les gens qui veulent avoir des jobs et pour les gens qui pensent au développement économique, il y a un problème, à mon avis, qui me vient à l'esprit, c'est le fait que Terre-Neuve ou le Labrador, comme le Québec, ont des richesses naturelles du genre de celles auxquelles vous avez fait allusion et peut-être même que le dépôt dont vous parlez est en grande partie au Labrador plutôt qu'au Québec. Par ailleurs, le Labrador ou Terre-Neuve aussi ont des ressources hydroélectriques. Donc, nous ne sommes pas les seuls au Québec, malheureusement peut-être, à avoir ce genre de possibilité de stratégie. Encore là je ne veux pas entrer dans le débat avec mon collègue le ministre de l'Énergie et des Ressources à savoir quel jugement la Cour suprême pourrait rendre sur l'affaire de Churchill Falls - je sais que c'est peut-être difficile à faire - mais mettant ce problème de côté ou le litige qui existe présentement entre Québec et Terre-Neuve, est-ce que dans l'avenir une meilleure stratégie pour le Québec ne serait pas de travailler en collaboration avec Terre-Neuve puisqu'on a, dans un sens, les mêmes richesses naturelles, on a à peu près le même genre de ressources hydroélectriques et que l'on pourrait mieux travailler ensemble plutôt que d'entrer dans une concurrence où, peut-être,

l'une ou l'autre pourrait y perdre grandement?

M. Mulroney: M. le député d'Outremont, c'est une question très importante. Je peux vous dire que je suis devant vous aujourd'hui comme un Canadien et un Québécois et je fais cette affirmation sans aucune hésitation et sans gêne. Je ne me sens nullement appauvri, je me sens enrichi d'avoir connu cette expérience québécoise et canadienne.

Je m'entends avec mes collègues du gouvernement du Québec comme le gouvernement de Terre-Neuve. Je respecte l'autorité en place, l'autorité élue. Nous ferons ce que nous avons toujours fait, c'est-à-dire collaborer loyalement avec les deux gouvernements. J'ai déjà exprimé l'espoir, dans un discours que j'ai prononcé dans ma ville natale de Baie-Comeau, devant la Fédération des associations SERV-COM de la Côte-Nord, que les deux gouvernements essaient de trouver une formule quelconque qui débloquerait, si possible, une expansion énorme ici dans la région nordique. (16 heures)

C'est une question politique. Je respecte intimement le dossier politique et du gouvernement du Québec et du gouvernement de Terre-Neuve, mais je vois ici... Je vous parle comme quelqu'un qui est né ici. Mon père est venu ici il y a 47 ans. Il est un de ceux qui ont bâti un nouveau pays, comme journalier et comme électricien. J'ai vu, en grandissant, des possibilités merveilleuses pour la Côte-Nord. J'en vois encore, tant de ce côté de la frontière que de l'autre. Je souhaite qu'on trouve une formule ultime qui va nous permettre de mettre en valeur toutes ces possibilités énormes.

M. Fortier: M. le Président, est-ce que je pourrais passer la parole à mon collègue de Mont-Royal pour le temps qui reste à notre disposition?

Le Président (M. Bordeleau): Oui. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. M. Mulroney, comme vous le voyez bien, d'après les mémoires qui sont présentés devant cette commission et d'après certains commentaires que nous faisons, fondamentalement, nous cherchons des solutions et des contributions de toutes les parties, les deux paliers de gouvernement, les compagnies impliquées; nous cherchons des solutions et des contributions à apporter au problème très réel des citoyens de Schefferville, aujourd'hui. C'est pour cela que nous demandons, que nous essayons de prendre des dispositions pour que le gouvernement s'engage dans les problèmes immédiats afin d'essayer d'apporter certaines solutions aux problèmes vécus aujourd'hui. Cela concerne non seulement les problèmes à long terme -parce qu'à long terme, cela présente certains problèmes - mais il y a des problèmes immédiats auxquels les citoyens de Schefferville doivent faire face aujourd'hui.

Dans votre communiqué de presse, vous avez parlé d'un programme d'indemnités de déplacement que vous avez qualifié de généreux et complet pour les employés concernés. Vous avez fait référence au directeur, pour le Québec, du Syndicat des métallurgistes, M. Clément Godbout, ainsi qu'au député fédéral. Est-ce que vous pourriez nous dire si le gouvernement du Québec a apporté ou a fait une contribution financière à un aspect de ce programme d'indemnités, que ce soit au plan des déplacements ou autres?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Mulroney.

M. Mulroney: II y a deux choses: d'abord, contribution directe, peut-être que non, dans le sens que le gouvernement... M. Duhaime m'avait prévenu que le gouvernement voulait attendre les séances de la commission, ce que je trouvais tout à fait normal, avant d'analyser la situation en profondeur. Le gouvernement du Québec, par une de ses régies, la Régie des rentes du Québec, est intervenu pour favoriser sensiblement nos travailleurs en vertu d'une décision qui nous a permis, nonobstant certaines dispositions de la loi, de hausser de 25% les pensions pour les gens de Schefferville. Pour nous, pour les gens de Schefferville, c'est très important parce qu'à partir de ce moment-là un grand nombre de ces individus ont pu procéder immédiatement à l'intégration des pensions. Dans notre mémoire, lorsque vous voyez un employé syndiqué qui va recevoir 700 $, 800 $ ou 900 $ par mois, il a plus que cela. Il devient immédiatement admissible à un plan fédéral qui fonctionne pendant des années et qui fait en sorte que le total lui donne 75% ou 80% de ses revenus antérieurs. Alors, le gouvernement du Québec, par sa régie, a été extrêmement utile pour nous permettre de rehausser les niveaux. Mais je voudrais bien, si quelqu'un a une aide à nous offrir, nous l'apprécierions énormément.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Quant à la question de taxation que vous avez soulevée ce matin...

M. Mulroney: Oui.

M. Ciaccia: ...vous avez donné la possibilité, à ceux qui veulent demeurer à Schefferville, d'acheter leur maison pour 1 $.

Est-ce que vous avez discuté - en plus de cet aspect, il y a aussi la prime de séparation - spécifiquement pour ceux qui vont demeurer à Schefferville, avec les deux paliers de gouvernement, de la possibilité ou de l'engagement par ces gouvernements de ne pas imposer les avantages sociaux? Parce que si un individu achète une maison pour 1 $ et qu'elle vaut 30 000 $ ou plus, juridiquement il y a un bénéfice de conféré à cet individu. Est-ce que vous avez pu obtenir un engagement des deux niveaux de gouvernement que cet aspect, au moins, ne sera pas taxé pour ceux qui vont rester à Schefferville?

M. Mulroney: Ce que vous mentionnez, M. Ciaccia - c'est un peu le thème du ministre Duhaime - est d'une importance tellement capitale. Je sais que les questions fiscales ne sont pas tellement "glamorous" pour certains. Je vais demander à mon collègue, M. Maltais, de vous remettre, si vous me le permettez, un mémoire que j'ai présenté au gouvernement fédéral ainsi qu'à tous les parlementaires à Ottawa, l'année dernière, à peu près à cette période-ci. C'était un mémoire - nous avons travaillé étroitement avec Lawrence McBrearty et Clément Godbout ainsi qu'avec les métallos -pour essayer de convaincre le gouvernement fédéral, où l'impact est plus direct. Il y a quelque chose de foncièrement incompréhensible lorsque, d'un côté, on nous encourage à procéder avec un programme de redressement économique à Schefferville et que, d'autre part, on impose des taxes de nature à empêcher la venue de nouvelles sociétés, primo, et, en deuxième lieu, à empêcher ceux qui sont ici de rester.

Un des services les plus utiles que vous tous, comme Québécois, puissiez rendre dans tout le nord canadien, non seulement à nous de Schefferville, serait de faire front commun - je m'excuse du lapsus - sans aucune politique, et convaincre notre ami, M. Lalonde, de changer ses intentions dans le domaine de la fiscalité pour les villes et les régions nordiques. Ce faisant, vous apporteriez, M. Ciaccia, ainsi que vos collègues et M. Duhaime, qui s'intéresse à cela, un atout extraordinaire. Simplement le maintien du statu quo. Si vous pouviez nous aider a obtenir cela, seulement cela, votre visite dans le Grand-Nord aurait été payée des centaines et des centaines de fois.

M. Ciaccia: M. Mulroney, je peux vous assurer, pour ma part, que je ferai les représentations nécessaires - je crois que mes collègues de l'Opposition feront de même - auprès du gouvernement fédéral pour qu'il vienne en aide, justement, aux gens qui sont affectés, spécialement à Schefferville. Mais est-ce que vous avez un engagement? Là, on parle du gouvernement fédéral qui n'est pas autour de cette table. Nous allons faire ces représentations, nous sommes entièrement d'accord avec vous. Je crois que c'est le moins, en termes d'aide, que nous puissions faire aujourd'hui. Je parle spécialement des gens de Schefferville parce que nous discutons ce problème aujourd'hui. Mais est-ce que vous avez un engagement du gouvernement du Québec de ne pas taxer ces montants? On est prêt à faire un front commun vis-à-vis du gouvernement fédéral là-dessus, mais est-ce que le gouvernement du Québec s'est engagé à ne pas taxer? Parce que, hier, nous étions à Port-Cartier et concernant les primes de séparation pour les gens de Port-Cartier le ministère du Revenu du Québec leur court après pour aller chercher cet argent. Alors, il ne faudrait pas que la même chose se produise à Schefferville. Je pense que ce serait l'occasion idéale. C'est cela le but de cette commission parlementaire: avoir un engagement, au moins, du gouvernement du Québec et je me demande si vous l'avez eu. Vous semblez être en discussion avec le ministre Duhaime. Est-ce que vous avez eu cet engagement?

M. Mulroney: Non. Il n'y a personne qui nous a promis quoi que ce soit, je veux être bien clair là-dessus, sauf que je peux vous dire que cette idée, M. Ciaccia, que j'exprime encore aujourd'hui, j'en ai discuté avec M. Duhaime à quelques occasions. Il voit, je pense, d'un oeil sympathique le problème. Il nous a aidés, par le passé, dans le dossier et j'espère qu'il va pouvoir nous aider à l'avenir, parce que, là, c'est devenu un dossier d'actualité. Et peut-être, M. Ciaccia, que le "timing" n'est pas mauvais. Je m'explique. On nous dit que M. Lalonde prépare un budget pour le mois de mars et... J'ai oublié, j'ai devant moi le député provincial d'Outremont, et le ministre des Finances, c'est fédéral, si je ne m'abuse. Après la messe dimanche prochain, accroche-le et tu lui donneras cela. S'il fait cela pour nous, je ne te dis pas que je vais voter libéral, mais je vais y penser.

M. Ciaccia: Je voudrais bien faire la même chose...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais bien faire la même chose vis-à-vis du député fédéral de Mont-Royal, mais je ne pense pas qu'il vienne à la messe à Mont-Royal.

M. Fortier: On va aller à la messe dimanche prochain tous les deux.

M. Ciaccia: J'espère qu'avant la fin de cette commission on pourra avoir...

Franchement, c'est vrai qu'en commission parlementaire, on ne peut pas toujours éviter la partisanerie et on en fait un peu. On est politiciens, il faut faire de temps en temps de la partisanerie, mais je crois, en toute objectivité, j'ose espérer qu'avant la fin de la commission parlementaire, nous aurons -je le dis pour le bénéfice des gens qui sont affectés à Schefferville - une indication du gouvernement du Québec quant à son intention sur ce point et, si le gouvernement du Québec est prêt à se prononcer, je pense que cela va rendre notre tâche à nous, députés d'Outremont et de Mont-Royal, et à tous les autres collègues beaucoup plus facile vis-à-vis de nos homologues fédéraux. Deux autres petites questions, M. le Président. Est-ce que le service ferroviaire entre Schefferville et Sept-Îles sera maintenu? Est-ce qu'il y a un engagement de maintenu?

M. Mulroney: Un engagement formel que j'ai donné à mon ami, M. le maire Bégin, et à d'autres. C'est une filiale à part entière et nous allons la maintenir pour une période de temps, bien sûr, indéfinie. Peut-être pas au même rythme de croisière, mais on va la maintenir.

M. Ciaccia: Et une question finale, M. le Président. Je sais que d'autres vous ont posé la question aussi. M. Mulroney, vous avez fait des recommandations quant à l'avenir de Schefferville, vous avez donné des exemples dans différents domaines: le domaine touristique, les forces armées, le centre de recherche, le centre nordique. Je voudrais vous poser cette question: Est-ce que ce sont vraiment - et je ne veux pas minimiser, comprenez-moi, je ne veux pas minimiser les possibilités de ces recommandations, l'impact sur la population, les possibilités qu'elles puissent être mises en application - mais est-ce que c'est la vraie solution pour Schefferville, ce genre de solution que vous avez suggérée ou est-ce que ce ne serait pas plutôt... Qu'est-ce que les gens de Schefferville aujourd'hui, ceux qui restent ici, ceux qui ont décidé de ne pas partir, qu'est-ce qu'ils vont faire? Est-ce que la solution serait plus d'engagement, soit de la part de la SGF, soit de la part de la SDI, soit de la part du secteur privé, dans le domaine industriel, le domaine minier? Vous avez parlé de climat d'investissement. Vous y avez fait référence à plusieurs reprises, et je crois que c'est un point très important. Est-ce que vous avez quelques recommandations, quelques réflexions spécifiques? Comment améliorer ce climat d'investissement pour nous assurer qu'on va pouvoir attirer les investissements nécessaires, ici, à Schefferville, dans la région de la Côte-Nord?

M. Mulroney: Votre question est excellente parce que vous avez raison.

N'importe quelle des variables mentionnées dans mon document en soi ne constitue pas une solution au problème. Elle constitue un complément de solution. Je pense, je persiste à croire que l'épine dorsale de toute expansion économique régionale valable doit être l'entreprise privée. C'est le secteur privé qui est le seul secteur créateur de richesses au Québec. Il n'y en a pas deux. Il n'y a pas le gouvernement qui crée des emplois. Le gouvernement n'a pas d'argent. C'est notre argent. C'est l'argent des contribuables. Le gouvernement n'a pas une "tôle". Cela vient de nous. La seule richesse qu'on puisse créer, comme collectivité, c'est par une application à l'entreprise privée, quoique je reconnaisse volontiers qu'un secteur mixte, une économie mixte, peut et doit exister de façon générale, mais pour le faire fonctionner, l'épine dorsale, le coeur, le moteur, c'est l'entreprise privée. (16 h 15)

Donc, si j'étais dans la politique, j'aurais tendance à croire que les hommes politiques auraient toutes les raisons au monde de créer un climat de confiance qui rendrait cela de plus en plus attrayant, par des commentaires, par des législations, par des gestes positifs, par des lois qui reconnaissent, par exemple, la vocation internationale d'une province comme celle de Québec, avec ses responsabilités particulières dans le domaine de la francophonie et j'en passe. Mais, à l'intérieur de tout cela, il faut que l'entreprise privée se sente bienvenue; sans cela, elle ne viendra pas. Ce que je verrais, M. Ciaccia, et surtout - je m'excuse, il ne viendra pas - lorsqu'on est en pleine période de crise et là où il y a un investissement, il y a peut-être quinze options, on peut cogner à cette porte ou à cette autre... Je ne demande à personne de trahir ses principes ou de changer sa philosophie politique, mais il me semble que c'est clair comme de l'eau de roche que si vous voulez des jobs, ce n'est pas en créant des postes de professeurs, nécessairement, que vous les aurez. La seule richesse mise entre les mains de l'État provient des contribuables qui travaillent et des compagnies qui prennent des risques pour créer des jobs pour que des gars travaillent. Il n'y a pas deux façons.

Si vous permettez, je conclus, M. le ministre. Or, quelques idées; exemple: - je ne le propose pas en priorité, mais en exemple - un centre de correction. Les gouvernements de différentes sortes ont pris 250 000 000 $ ou 300 000 000 $ de Schefferville, de la région nordique, depuis 25 ans. Est-ce que c'est trop demander que de dire: Pour l'instant, cela va mal, on a besoin d'une période de "bridge financing" qui nous permettra de voir dans quelques années si Strange Lake fonctionnera? Pourquoi ne pas installer un pénitencier dans la région,

quelque part, qui créera 200 ou 300 emplois permanents? Il me semble que ce n'est pas déraisonnable que de demander cela au gouvernement canadien ou au gouvernement du Québec. Après tout, c'est le gouvernement qui a bénéficié des initiatives de tous les citoyens nordiques et les compagnies qui ont versé l'argent.

M. Ciaccia: Monsieur, j'ai juste une autre...

M. Mulroney: Oui.

M. Ciaccia: ...question très brève sur une usine spécifique. Je voudrais demander à M. Mulroney si ceci est réaliste pour Schef-ferville. Je ne suis pas un spécialiste dans le domaine minier, je peux me tromper, alors vous pouriez me corriger. Un des spécialistes dans les rapports que nous avons vus parle d'un produit, carbure de silicium, et il parle d'une usine, un des gros producteurs, qui se trouve à Niagara Falls, en Ontario. Cette usine a été installée à Niagara Falls dans les années quanrante quand l'électricité était à très bas prix en Ontario. Maintenant, l'usine commence à être un peu vieille et l'endroit commence à changer; cela devient un endroit touristique, ce n'est vraiment pas un genre d'usine pour cet endroit. On parle de meules abrasives, de papier sablé... Les produits de cette usine sont tous importés, par exemple, le bauxite, qu'il serait plus facile d'apporter à Sept-Îles qu'à Niagara Falls; l'électricité est moins chère sur la Côte-Nord. Est-ce que ce genre de proposition est réaliste? Est-ce que c'est réaliste de dire: Voici quelque chose qui pourrait être implanté à Scheffer-ville? Une usine qui peut prendre avantage de la main-d'oeuvre de Schefferville, qui peut prendre avantage de l'énergie à meilleur prix que dans les autres endroits, est-ce que c'est réaliste ou bien s'il ne faut pas y penser?

M. Mulroney: Je pense que c'est réaliste. Aux grands maux, les grands moyens. Le gouvernement a le pouvoir de créer une assiette fiscale. La fiscalité, c'est un instrument de développement économique. Pourquoi être lié par une loi fiscale tout simplement parce que c'est un fonctionnaire qui a pensé à cela il y a quinze ans? Si le gouvernement du Québec ou le gouvernement canadien... M. le ministre de l'Énergie l'a dit, dans son domaine, on se sert de l'énergie dorénavant pour la création d'emplois et l'attrait des emplois. Je suis parfaitement d'accord. La Reynolds de Baie-Comeau est un exemple classique. Cela a bien de l'allure, cette affaire. Pourquoi ne pas changer, créer une espèce de zone, si vous permettez, pour une période de temps, une zone fiscale favorisée. Vous allez en attirer de ce genre d'industries, M. Ciaccia.

Vous allez voir que les entrepreneurs sont bel et bien vivants et intéressés à un climat, à une population stable, honnête et honorable qu'on retrouve dans cette région-ci.

M. Ciaccia: Merci, M. Mulroney.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Marois: M. le Président, je n'ai certainement pas abusé du temps de cette commission depuis le début de nos travaux. Ce n'est pas mon intention de le faire à ce moment-ci. J'apprécie beaucoup les commentaires des uns et des autres sur des déclarations, sur des climats, mais je crois fondamentalement qu'il nous faut revenir au mandat de base de notre commission.

Si nous sommes réunis ici, c'est parce qu'il y a des faits qui se sont produits, des réalités qui sont là et des humains qui sont concernés. Nous avons comme mandat d'entendre les personnes, les organismes pour étudier l'ensemble de la situation de Schefferville et d'évaluer les actions qui pourraient être prises en vue d'aider à la solution des problèmes de cette municipalité, municipalité voulant dire l'ensemble de la communauté et l'ensemble non seulement des faits, mais des problèmes accrochés aux citoyens corporatifs comme aux citoyens et aux citoyennes, au monde en vie, qui sont ici.

Je ne vous cacherai pas que je partage les commentaires de mon collègue, M. Duhaime, le ministre de l'Énergie et des Ressources. J'aurais apprécié - bien des personnes qui témoignent devant nous le font de bonne foi, au meilleur de leurs connaissances, du mieux qu'elles le peuvent -comme mon collègue l'avait suggéré, une réponse peut-être plus précise à la question qu'il a posée et qui, me semble-t-il, demeure entière. J'avoue personnellement - encore une fois, ce n'est pas un jugement que je porte, je le dis simplement, franchement, le plus clairement possible et le plus rapidement que je peux le faire - ce que je pense. Je crois effectivement que la question reste entière quant aux faits de ces trois années de production à la baisse, de 1979 à 1981, correspondant par ailleurs à des années de meilleure rentabilité, bien que ce ne soit pas encore là une rentabilité - quand on parle de 10%, je suis prêt à admettre cela... Enfin, il me semble que l'annonce qui est survenue - on peut bien nous citer des journaux, nous citer des textes, nous citer tout cela... Vous vous souviendrez très bien, M. le président de la minière IOC, que nous avons eu l'occasion de nous rencontrer à mon bureau en 1980 ou 1981, si ma mémoire est bonne, en janvier 1981, au moment où il s'agissait d'un bloc de mises à pied,

concernant particulièrement les travailleurs de Sept-Îles. Je ne me souviens pas - je crois avoir une assez bonne mémoire - qu'à ce moment, il ait été question certainement pas, j'en aurais pris plus que bonne note, vous pouvez en être sûr - d'une fermeture quelconque envisagée sur une courte période.

Donc, pour moi, cette question demeure entière. Cependant, ceci étant dit, M. Mulroney, vous avez dit - je vous en remercie, ce n'est pas tous les jours qu'on se le fait dire, je vais le prendre pendant que cela passe - que j'étais sur une bonne voie en ce qui concerne la formation professionnelle des adultes, la nouvelle entente négociée avec le gouvernement canadien et j'ai déjà dit qu'on était fiers de cette entente et qu'elle nous permettait d'ouvrir des possibilités nouvelles qu'on n'avait pas eues par le passé. Je voudrais dire tout de suite pour que ce soit très clair, en partant - d'ailleurs, cela revient dans des recommandations, des suggestions et des demandes qui nous sont faites - je veux dire très clairement, très simplement ceci: Dans le cadre de l'accord, ce que j'ai appelé le traité convenu avec mon collègue, M. Axworthy, sur la formation professionnelle des adultes, je puis assurer la population que tout sera fait pour répondre aux besoins nouveaux de formation de la main-d'oeuvre, ici, que les administrateurs de cette entente ont prévu, c'est déjà prévu dans l'entente, une réserve, et quand je dis une réserve je veux dire des dollars pour pouvoir répondre rapidement à des besoins spéciaux, extraordinaires et non prévus de formation et c'est le cas, bien sûr, je pense bien, de Schefferville.

En tant que ministre responsable de l'administration de cette entente au Québec, j'ai déjà demandé aux représentants du Québec qui siègent au comité conjoint Québec-Canada, de prendre immédiatement les mesures qui s'imposaient pour que cette réserve budgétaire serve d'abord à Scheffer-ville. Mais une fois que j'ai dit cela et que nous allons faire cela, vous me dites que c'est une bonne voie. Vous me dites également: C'est une bonne voie que l'entente conjointe avec le gouvernement canadien pour la mise au point d'un nouveau programme de création d'emplois, je prends bonne note de cela.

J'ai pris bonne note aussi de vos commentaires concernant un cadre général et vous avez donné des indications concrètes sur une loi sur les licenciements collectifs. Je me permets de rappeler - c'est sûrement un personnage que vous connaissez, M. le président de la Compagnie minière IOC - ce que M. Peter Drucker - dans un jargon plus sain, on me dit qu'il est comme une espèce de gourou américain du management - disait dans un article du Wall Street Journal, le 25 septembre 1979, qu'il y avait un certain nombre d'approches en ce qui concerne ce que les Américains appellent le "redundancy planning", cela veut dire les perspectives qui impliquent éventuellement des mises à pied, qui impliquent éventuellement des fermetures, des licenciements, la nécessité absolue de prévoir les coûts et la possibilité de prévoir ces coûts par rapport à des approches plus traditionnelles. Il en citait trois. Il disait: Il y a l'approche de l'assurance-chômage, cela en est une. Ce n'est pas suffisant. Il y a d'autres types d'approches. Et il disait, à l'époque, aux entreprises - ce qui était assez étonnant venant d'une personne comme M. Drucker -qui s'opposaient à une législation qui allait être présentée au Congrès américain: Vous faites une erreur si vous vous opposez à une législation qui permettrait d'ouvrir une perspective, même pas de protection d'emploi, qui vise à ouvrir une perspective recherchant le plein emploi, de prévoir les coûts, les coûts humains, les coûts sociaux et de s'asseoir ensemble comme des gens responsables, bien intentionnés, les citoyens corporatifs, ceux qui ont des mandats démocratiques de représenter les travailleurs, ceux qui sont des élus du peuple au niveau municipal, au niveau des gouvernements, qu'ils soient provinciaux, qu'ils soient fédéraux, peu importe, avec les groupes de citoyens concernés pour être à même d'évaluer les morceaux prévoyant les coûts.

M. Drucker disait dans les cas des grandes entreprises. Ces activités sont généralement planifiées sur une période de deux ans. Il citait des cas très précis. Il donnait le cas de la Suède où, entre 1950 et 1970, sur 20 ans, 50% des travailleurs ont changé d'emploi tout en maintenant un indice de chômage de 2%, qui n'a jamais excédé 3%. II y a eu un taux de chômage qui est passé de 2% à 2,5% et le gouvernement a été renversé parce qu'il s'était donné une politique de plein emploi qui est une approche fondamentalement différente. Mais déjà, vous ouvrez des perspectives dans ce sens et je ne vous cacherai pas que je les reçois favorablement. Vous pourrez sûrement nous donner un bon coup de main en en parlant à vos collègues de l'Association des mines de métaux et à vos collègues de l'Association des manufacturiers canadiens. Peut-être aussi auriez-vous le temps de donner un coup de téléphone à M. Ghislain Dufour du Conseil du patronat, cela pourra toujours aider en plus. (16 h 30)

Je prends bonne note et je suis prêt à prendre les blâmes qui nous reviennent, au gouvernement, c'est vrai que nous sommes en retard, nous aurions dû agir plus vite. Mais ce n'est pas facile, ce sera une première nord-américaine quand nous réussirons à aboutir sur un projet qui va tenir compte des

réalités qui sont forcément différentes, quand on parle d'une entreprise de grande taille, de secteur économique, que d'entreprises de moyenne ou de petite taille. Drucker disait qu'en général les opérations de ce genre se planifient sur une période de deux ans dans les grandes entreprises.

Vous nous dites - et je le prends comme tel, parce que je considère que c'est une ouverture extrêmement importante que vous faites, dans le contexte de nos travaux; je voudrais la fouiller, la pousser et vous poser un certain nombre de questions très précises et très concrètes - que vous êtes prêts à prendre et à assumer l'ensemble de vos responsabilités - je reprends votre expression - sociales et morales. Dans le texte de votre mémoire - je pense que ce sont les derniers mots de votre mémoire -vous nous dites: II pourra souffler sur Schef-ferville un second souffle ou un nouveau souffle, mais encore faut-il savoir quelle sera l'ampleur du souffle, quelle sera la direction que prendra le souffle. En d'autres termes, quels sont les projets concrets, possibles, à long terme, à moyen terme et, forcément, les mesures à court terme aussi? Parce que c'est à cette condition seulement que l'inquiétude des hommes et des femmes pourra disparaître et qu'en toute équité et en toute justice des choix pourront être faits, pour les uns et les unes, de décider de quitter et pour les autres de décider de rester.

Je pense que vous l'admettez, pour faire cela, vous nous soumettez vous-mêmes il y a peut-être une centaine de propositions, de recommandations et de suggestions dans les mémoires qui nous sont soumis - qu'il faut que ce soit évalué, regardé et serré. Dans cette perspective, il est normal qu'il y ait des inquiétudes. Il y a des gens qui, pour l'instant, ne savent pas ce qui va leur arriver. Vous avez formulé des propositions d'avantages, de primes pour vos travailleurs. Est-ce qu'ils sont tous couverts ou pas, tous traités équitablement ou pas? Je n'ai pas eu le temps de regarder et d'analyser, mais j'espère et je suis convaincu - je vous indique tout de suite que c'est une question que je vous pose - compte tenu de l'attitude que vous nous avez expliquée, que vous avez développée, de relations du travail dans les dernières années, avec les efforts que vous nous avez dit y avoir mis, je ne doute pas - c'est en même temps une question que je me permets de formuler de façon positive - deux minutes que vous accepteriez, si le syndicat vous en formulait la demande, de vous asseoir avec lui pour regarder concrètement chacune de ces mesures qui concernent les membres et les évaluer pour voir les ajustements possibles.

Je pense que M. Godbout, des métallos, a accueilli cela comme une base valable - je crois que c'était à peu près son expression - que je comprends comme voulant dire que cela permette d'ouvrir sur des rencontres, des échanges et d'en arriver à des choses qui paraissent équitables, faisables et responsables à la mesure de la capacité de payer. C'est la réalité des faits et je pense que, plus on vit une crise extrêmement difficile, plus les citoyens et citoyennes sont capables de mesurer de plus en plus ce que le mot "responsables" veut dire. Ce serait un geste extrêmement concret et important. C'est en même temps ma première question, mais l'avenir pour les citoyens dure longtemps. C'est une caractéristique de l'avenir. Pour faire des choix sur l'avenir, encore faut-ii savoir ce qui va se produire et quelles sont les perspectives pour cet avenir à long terme. Vous nous avez indiqué qu'il y avait des travaux d'exploration. Mon collègue a aussi expliqué un certain nombre de choses de ce côté. Vous nous formulez des propositions et des projets susceptibles, possiblement, de créer de l'emploi à court et à moyen terme. D'autres groupes aussi nous en soumettent. Je tiens à vous dire tout de suite que le gouvernement du Québec est prêt à mettre des fonds.

Je voudrais savoir - c'est ma deuxième question très concrète - si la compagnie envisagerait, elle aussi, la possibilité, quitte à ce qu'on "pool" des ressources financières dans un fonds... Mettons l'imagination au pouvoir. Peut-être faut-il ajuster les critères de certains de nos programmes. Peut-être faut-il plutôt "pooler" des ressources financières ensemble dans un fonds permettant de débloquer, dans certains cas, sur des choses qui seront temporaires, mais ouvrant sur de l'avenir permanent dans la mesure où il y a d'autres projets, et on est à même de les évaluer en se donnant le temps de les évaluer comme il faut et de serrer rigoureusement. C'est ma deuxième question.

Ma troisième question est la suivante: Dans cette perspective, la minière accepterait-elle... Il y a des inquiétudes et les délais viennent vite - vous connaissez bien mieux que moi la situation des hommes et des femmes qui vivent ici; certains d'entre eux et d'entre elles sont nés ici - il y a des échéances qui viennent vite dans certaines des propositions que j'ai vues. Concernant le logement, les taux de location vont demeurer en vigueur jusqu'au 31 juillet 1983, mais c'est jusqu'au 1er juin 1983 que les uns et les autres pourront décider s'ils achètent une maison. Cela vient vite, le 1er juin 1983. Les frais de déménagement avant le 1er août 1983, les assurances, la subvention pour l'huile à chauffage jusqu'au 31 juillet 1983... Les anciens employeurs indépendants pourront continuer de voyager jusqu'au 31 juillet 1983. Accepteriez-vous de considérer une prolongation de ce délai de quelque chose qui pourrait paraître

raisonnable? Quelque chose qui pourrait paraître raisonnable, me semble-t-il, peut-être faut-il que cela varie selon ce dont on parle et soit quelque part entre six mois et un an. C'est ma troisième question.

Ma quatrième question est la suivante: Ce même délai additionnel ne vous permettrait-il pas d'évaluer quelles sont les possibilités... Et peut-être l'avez vous déjà regardé, auquel cas je vous demande: Qu'entendez-vous faire? Les questions nous sont posées et vous les avez entendues. Déjà, M. le maire a commencé. Ceux qui ont eu le temps de lire déjà quelques-uns des mémoires voient bien que les questions reviennent. Cela ne sert à rien de les prolonger indéfiniment. Qu'entendez-vous faire, précisément dans le sens d'assumer des responsabilités sociales et morales envers les citoyens, à l'égard des travailleurs qui ne sont pas syndiqués, mais qui, pour bon nombre d'entre eux, vivent accrochés au fait que la minière était là. Comptez-vous leur offrir les mêmes bénéfices? Quoi, exactement? Les gens du milieu des affaires de la communauté de Schefferville sont inquiets, les commerçants, les petits hommes d'affaires. Il y a certains projets qui nous sont soumis dans le cadre de certains programmes qui visent à créer de l'emploi permanent, des programmes de création d'emplois communautaires. Certains hésitent face aux projets qui nous sont soumis en se disant: Oui, mais je ne sais pas si je vais maintenir ma demande, qui pourrait être un petit projet qui n'aurait pas la prétention, dans certains cas, de créer 100 ou 150 emplois, mais qu'ils se disent, est-ce que je maintiens ma demande d'un soutien financier de démarrage pour créer de l'emploi permanent? Est-ce que vous, les commerçants, entendez, d'une façon ou d'une autre, prolonger une partie des bénéfices à ces citoyens corporatifs, aux commerçants du milieu? À l'égard de la ville, qu'est-ce que vous entendez faire sur le plan de la fiscalité de la ville? sur le plan des taxes? sur le plan de la dette? sur le plan de l'électricité?

Une question additionnelle très précise qui concerne le transport. Qu'est-ce qui arrive exactement du transport? Je crois comprendre que dans les jours - c'était peut-être hier, c'était peut-être avant-hier -forcément, nous étions à Port-Cartier et malheureusement, je n'ai pas tous les renseignements de dernière heure, mais on me dit que peut-être - il se peut que je me trompe - une soixantaine de travailleurs sur le chemin de fer auraient reçu un avis de licenciement. Est-ce que ces gens vont bénéficier des mêmes avantages? Qu'est-ce qui va se présenter aussi pour l'ensemble de la population concernant le transport pour les commerçants? Et puis...

Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Vous avez terminé?

M. Marois: Je ne veux pas abuser. J'achève. Est-ce que, dans cette période d'un délai raisonnable, me semble-t-il, il serait possible d'envisager, à votre avis, pour être très concret, à partir des suggestions qui nous sont faites, provenant de vous et de toute une série de groupes, provenant de questions, de remarques, de commentaires et même de suggestions de l'Opposition, peu importe, toutes les suggestions valables doivent être évaluées et examinées à leur mérite, est-ce qu'il serait possible, dans ce délai, qu'on puisse créer un "task force" impliquant la compagnie minière, le syndicat, la ville - en ce qui concerne le gouvernement du Québec, je vous le dis tout de suite, oui, nous serions prêts à embarquer - le gouvernement fédéral, les groupes qui représentent les citoyens pour que, ensemble, avec les équipes et toutes nos ressources humaines - et je vous le dis tout de suite, on est prêt à le faire - prenons toutes nos ressources humaines, pendant ce délai qui se prolongerait, un délai raisonnable pour que, ensemble, on prenne les projets, ceux qui peuvent et qui doivent, sur lesquels il faut prendre des décisions à court terme, les projets concrets et les suggestions sur lesquels il faut que des décisions soient prises, mais qui ne pourront jamais - qu'on ne se raconte pas d'histoire - être prises sauf sur une période impliquant le moyen terme, se laissant raisonnablement, ensemble, le temps aussi de peser à fond le long terme, pour poser les bons gestes, ensemble.

J'aurais eu d'autres questions. Je ne veux pas abuser, M. le Président. J'ai essayé d'être le plus précis, le plus concret possible. Je crois, M. le président de la compagnie minière, au reclassement, bien sûr. Le reclassement, soit dit en passant à des collègues qui posaient des questions sur les fonds, sur les comités de reclassement, bien oui, aussi le gouvernement du Québec prend sa part de financement des travaux et des coûts de reclassement, comme le gouvernement canadien, comme la compagnie minière. Les travailleurs ont leurs représentants et ils y mettent toujours aussi un coût à la mesure de leurs moyens forcément plus limités.

Mais le reclassement, encore là, dans cette perspective, vous nous avez cité des chiffres, M. Mulroney. Il faut mettre tous les faits sur la table, je crois. Quand on regarde l'expérience du reclassement de Sept-Îles, il est vrai, d'un certain côté, que c'est une expérience remarquable. J'ai vu les rapports. Par ailleurs, parmi les - je crois que vous avez dit 328, je ne m'en souviens plus mais peu importent les chiffres - gens qui ont été reclassés, vous savez comme moi qu'il y a un pourcentage relativement important des

gens reclassés qui l'ont été dans des activités de la minière IOC et se trouvent aujourd'hui mis à pied. En d'autres termes, loin de moi l'idée de dire: Mettons de côté le reclassement. Pas du tout. Il faut continuer, pousser au maximum, et vous pouvez compter sur notre collaboration la plus entière de ce côté-là. Mais, le reclassement seul n'est pas suffisant. Je crois, et vous allez être le premier à l'admettre, néanmoins qu'il faut le faire et on va continuer à le faire et à travailler ensemble. (16 h 45)

Voilà, M. le Président, j'espère ne pas avoir abusé, mais il me semble qu'il faut aller au-delà des analyses de climat, de déclarations, partir d'un fait qui est là devant nous, de suggestions plus valables probablement les unes que les autres qui nous sont faites et décider de quelle façon on va se mettre au travail ensemble et est-ce que oui ou non on se donne le délai raisonnable pour le faire. Ce qui implique des coûts. Je vous dis qu'on est prêt à faire notre part. J'ai posé un certain nombre de questions très précises auxquelles, je puis vous le dire tout de suite, il serait extrêmement utile que la minière, aujourd'hui, nous donne des réponses aussi précises que, j'espère, mes questions ont pu l'être.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Il ne m'appartient pas nécessairement de juger s'il y a eu abus ou non. S'il y a abus, il appartient plutôt aux membres de la commission et aux personnes qui veulent présenter leur mémoire à leur tour d'en juger. Maintenant que les questions sont reçues, M. Mulroney.

M. Mulroney: Le ministre a posé huit sous-questions et je peux vous donner des éléments de réponse immédiatement. D'abord, en ce qui concerne le "task force", nous embarquons. Le 3 novembre, quand je suis venu ici, j'ai rencontré le maire Bégin et on avait créé ce qu'on avait appelé à ce moment-là, à défaut d'un meilleur terme, un comité de développement économique dans le but de demander au gouvernement du Québec et au gouvernement fédéral de nous donner un sous-ministre senior de part et d'autre pour, justement, nous aider dans le travail. Mais, un "task force", c'est peut-être mieux et on embarque là-dedans.

Quant au transport, nous allons maintenir en vigueur le service QNSL. Il n'y aura pas de changements majeurs sans consultation préalable. Évidemment, c'est régi par la CCT et on ne peut pas le changer même si on le voulait.

M. Marois: M. Mulroney.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: Est-ce qu'il n'est pas exact qu'il y a présentement une demande devant la Commission canadienne des transports?

M. Mulroney: On a une série de demandes régulièrement devant la commission. Il se peut qu'il y en ait qui...

M. Marois: N'est-il pas exact qu'il y a présentement devant la Commission canadienne des transports une demande provenant de votre entreprise et qui pourrait affecter, notamment, Schefferville dans le domaine de la marchandise?

M. Mulroney: Ah bien, mon dieu! Il y a un temps que...

M. Marois: Et qui pourrait aussi, peut-être éventuellement, affecter le service au point de le faire cesser pour le dernier tronçon?

M. Mulroney: Non. En réponse à la deuxième partie de la question, la réponse est non et je vais vérifier pour savoir où nous en sommes avec une foule de demandes. On est pris avec la CCT où il faut faire des demandes pour une série de choses bien à l'avance. Ce deuxième point-là, je vais le vérifier. Mais, sur le fond, il n'y aura pas de changement. Au lieu de deux voyages, il y en aura peut-être un par semaine mais QNSL va faire la navette sur une base régulière. Je vous donne des réponses au moment où on se parle. On peut se revoir. Je pense, d'ailleurs, que c'est un peu la philosophie de vos observations. Je vous dis que rien n'est coulé dans le béton. Vous mentionnez des dates? On a fixé ces dates-là parce que c'était la fin de l'année scolaire et, en donnant l'avis le 3 novembre, c'était un préavis d'à peu près neuf mois. Alors, on s'est dit: Est-ce que c'est raisonnable? La plupart des individus seront branchés vers le 1er juillet. On a fixé le 1er juillet comme date limite. Le "task force" nous suggère de changer cela à l'intérieur des paramètres que vous nous suggérez. Pas de problème; on s'entendra s'il y a une raison valable de le faire. D'accord. Nous maintiendrons nos responsabilités auprès de la ville, sans problème, compte tenu de l'intervention de M. Rocheleau ce matin; avec une population décroissante, est-ce que vous avez besoin de sept ou huit constables ici à Schefferville? Si vous appliquez les mêmes normes dans la force constabulaire à la population de Sept-Îles, vous auriez 105 policiers à Sept-Îles; avec 50, on prétend qu'il y en a trop. Alors, il y a un travail à faire avec mon ami, M. Bégin, pour regarder les budgets, pour savoir; mais nos obligations vis-à-vis de Schefferville

seront respectées. Il n'y aura pas de décision draconienne ou abrupte de nature à changer notre engagement vis-à-vis de cela.

En ce qui concerne nos obligations envers les entrepreneurs, qu'est-ce que vous avez ici? Vous avez des professeurs, des médecins, des employés du gouvernement et j'en passe, mais vous avez également la petite et moyenne entreprise; c'est un peu cela.

M. Marois: Et forcément leurs employés.

M. Mulroney: Et forcément leurs employés. Or, où s'arrête l'obligation sociale et morale d'un employeur, même d'un employeur dans une région comme celle-ci? Je m'explique. Les entrepreneurs sont des hommes d'affaires, des preneurs de risques. Tous ceux qui sont venus ici, qui ont travaillé avec nous, qui ont signé des contrats avec nous, ont fait affaires avec nous avec une marge de profit des plus confortables. Il est un fait notoire que le très grand nombre des entrepreneurs qui ont fait affaires avec cette compagnie depuis 28 ans, dans cette région, ont sorti leur argent depuis belle lurette et sont, dans une grande majorité des cas, très à l'aise. Il y a peut-être des exceptions. Vous me parliez de certains cas exceptionnels et j'en suis. Je suis prêt à citer un exemple peut-être, après étude, on regardera le tout, mais je voulais vous dire ceci. Un preneur de risques est responsable pour lui-même. C'est un entrepreneur, c'est un employeur; il est venu ici. Il ne voulait pas venir travailler comme employé chez nous et la raison, c'est qu'il pouvait faire plus d'argent et une carrière plus intéressante pour lui, ailleurs. Donc, d'un côté, il n'a pas la sécurité d'emploi et les avantages qui s'y rattachent; d'autre part, les risques amènent des possibilités d'une vie plus prospère. Si vous me permettez juste ce point, M. le ministre...

M. Marois: Je ne voulais pas vous interrompre. Je m'excuse M. Mulroney, mais je pense que vous comprenez très bien. Vous connaissez sûrement le coin beaucoup mieux que moi. Vous savez encore bien mieux que moi qu'un certain nombre - je ne sais pas combien - de commerçants, par exemple, sont d'anciens employés de la minière qui ont investi dans ces petits ou moyens commerces, peu importe, une partie du pécule qu'ils ont pu mettre de côté, avec les problèmes de n'importe quelle petite entreprise ou petit commerce qui démarre, avec les marges de crédit bancaire. Le banquier est ton meilleur "chum" tant que les affaires vont bien, seulement, quand les affaires vont mal, je te jure qu'un de ceux qui te rendent la vie dure, c'est souvent lui.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: S'il vous plaît, M. le ministre, ce que vous dites est très intéressant, mais je pense que vous avez posé une série de questions et le président tentait de nous donner des réponses. Sans vouloir être importun et vous interrompre, je pense bien qu'on aimerait avoir la réponse de l'Iron Ore.

M. Marois: Moi aussi et je prends bonne note. Et je suis très heureux des ouvertures que le président de la minière est en train de faire. Très heureux.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Mulroney, oui, vous pouvez continuer de répondre.

M. Mulroney: Très rapidement. Par exemple, M. le ministre, l'exemple d'un entrepreneur qui a fait - et je vais taire son nom, c'est un homme des plus honorables, qui est bien vu dans cette région - affaires avec nous pendant des années. Il a très bien réussi. Il nous écrit sur une question d'affaires et il nous demande également: Écoutez, quelle est la situation à Scheffer-ville? Là vous me donnez des contrats encore, mais quelle est la situation pour Schefferville? M. Geren lui répond et je vous cite un paragraphe de la réponse, d'accord? D'abord, M. Geren lui dit: Écoutez, vous nous demandez un contrat, on vous donne le contrat avec la marge de profit qui est convenable. Mais écoutez, M. le ministre, celle-là: "The deterioration of business in Schefferville parallels the decrease in the quantity of Schefferville ore which can be sold and the profit which can be realized for such sales. This has dwindled as has the demand for the ore to the point where it is now a very marginal operation. I, personnally - un homme reconnu au Canada comme étant un des grands experts dans le domaine - can see nothing in the near future which would change this picture significantly." M. Geren conclut: "In closing, I would personnally recommend to you that you do not suffer any unnecessary financial loss by hanging on to the slim hope that conditions will somehow improve in the near future." La date de la lettre? Le 30 octobre 1978.

Il s'adonne, M. le ministre, que ce même monsieur est parmi ceux qui vont vous dire aujourd'hui qu'il était dans un état de choc et surpris lorsque la décision a été annoncée le 3 novembre dernier. Je vous remettrai copie à vous tous, copie confidentielle. C'est une lettre pas confidentielle. Je veux taire le nom. Vous savez, cela est un des problèmes, n'est-ce pas? Or, nos responsabilités, on a essayé de les assumer de façon très honorable vis-à-vis

de nos employés. Écoutez, si vous me parlez d'un fonds de dépannage pour un de nos anciens employés ou quelque chose qu'il est lancé en affaires et qu'il est mal pris aujourd'hui, si vous mettez du "cash" là-dedans, moi je vais en mettre du "cash", je vous le dis tout de suite. Si c'est un fonds conjoint de dépannage pour aider les gars qui sont mal pris à Schefferville, soyez sans crainte, on va être de la partie.

Mais, il y a toute une marge entre cela et quelqu'un qui a fait beaucoup plus d'argent que nos travailleurs en étant un entrepreneur dans la petite et moyenne entreprise ici; là il arrive, ayant sorti son argent, et il dit: Je suis surpris, donnez-moi de l'argent davantage. On en reparlera de certains cas qui sont connus de tous. Tout le monde ici, et c'est un secret de polichinelle, on les connaît tous. Je pense que... Maintenant, pour les cas sympathiques et honorables de malchance, un fonds de dépannage, j'embarque avec vous là-dedans. Il reste à voir les modalités.

Vous mentionnez des dates. Ce n'est pas coulé dans le béton. Si le "task force" vient me voir ou vient nous voir et dit: Le 1er juillet, écoute, est-ce qu'on peut remettre cela au 1er décembre pour telle et telle raisons? On va regarder cela ensemble et on va s'entendre, il n'y aura pas de problème là-dessus. (17 heures)

Vous parlez également d'une autre question et, si je ne m'abuse, c'est la dernière, M. le ministre. C'est au sujet des possibilités, - celles-là plus réelles, en mettant ensemble notre paquet pour les employés, qu'il y ait eu des cas d'exception, qu'il y ait peut-être même des erreurs commises par inadvertance, qu'il y a peut-être eu des injustices et vous me demandez si je serais prêt à revoir cela avec Clément Godbout. Bien sûr, on pourra revoir cela. Dans tout programme global, il se glisse toujours des erreurs et on va revoir cela avec Clément pour qu'il soit bien assuré que tout le monde a été traité selon des critères justes et équitables.

Ce que je retiens davantage, M. le ministre, c'est l'esprit de vos questions. Vous abordez le problème comme certains de vos collègues, M. Ciaccia et d'autres. C'est la dimension humaine qui semble vous préoccuper, et avec raison. C'est aussi ma préoccupation. Je ne suis point un gars de virgule. Je ne bloque jamais là-dessus. On a essayé de bien faire vis-à-vis nos employés et la municipalité. Si le "task force" nous propose des gestes raisonnables, on va les regarder avec sympathie, parce que ce qui transpire de vos commentaires, c'est un peu cette dimension humaine qui doit primer sur d'autres considérations. Je prends vos questions et je vous invite à prendre mes éléments de réponse dans le même esprit. On serait de la partie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. Marois: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: ...je voudrais dire, en réponse aux questions... Je comprends parfaitement bien que le président de la minière ne puisse pas donner des réponses détaillées à toutes et chacune des questions que j'ai posées. Je prends bonne note de l'ouverture d'esprit que vous manifestez et, partant de là, je pense qu'il est peut-être possible de faire un bon bout de chemin sur l'ensemble des sujets qui ont été évoqués. Je comprends que cela ouvre aussi sur toute la dimension des travailleurs qui ne sont pas syndiqués et je pense que c'est apprécié grandement.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. Mulroney, dans votre mémoire, vous avez brossé en détail un tableau des différentes suggestions faites après la fermeture de Schefferville, c'est-à-dire vos activités à Schefferville. M. Geren a aussi brossé un tableau concernant Strange Lake et, dans votre mémoire, vous avez aussi brossé un tableau assez intéressant et assez encourageant concernant la possibilité de découvrir certains minéraux qui peuvent, dans les années à venir, relancer l'économie de Schefferville. Vous avez mentionné aussi, à plusieurs reprises, qu'il n'y a rien de coulé dans le ciment. Vous avez dit que les paliers de gouvernement devraient peut-être implanter un centre de correction et différents autres moyens possibles pour garder Schefferville en vie. Je me demande si votre compagnie ne considérerait pas la possibilité de retarder l'arrêt de ses activités ici à Schefferville jusqu'à ce que les possibilités de développement de Strange Lake soient complètement étudiées et de voir s'il est possible, avec l'exploitation des minéraux qui seraient là - d'après M. Geren, il y aurait un volume assez important de minéraux - de retarder votre décision finale en regard de l'arrêt de vos activités ici jusqu'en 1984. Vous prévoyez dans votre mémoire qu'en 1984, vous aurez eu votre "feasibility study", qu'elle sera complète et tout. À ce moment-là, ne sera-t-il pas possible de continuer une activité peut-être moins importante jusque-là pour voir s'il y a une possibilité de garder en marche vos activités ici à Schefferville?

M. Mulroney: Bien à regret, je me dois de vous dire non. La décision a été

longuement étudiée et analysée, prise à contre-coeur par nous tous ici et mise en application, et elle est finale.

M. Kehoe: II y a eu une découverte de minéraux à Strange Lake; c'est très intéressant et très encourageant. À ce moment, quel est l'avenir de Schefferville en ce qui concerne l'exploitation de Strange Lake? Est-ce que ce sera fait au Labrador? Y a-t-il une possibilité de faire la relance de l'économie de Schefferville par ce moyen?

M. Mulroney: Je l'ignore, mais il y a les possibilités que M. Geren a mentionnées au Québec et d'autres au Labrador, dans cette région. Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve. M. Geren et ses collègues, côtés scientifique et géologique, sont très confiants, ils voient cela avec optimisme; pas un optimisme illimité, mais sérieux. On serait en mesure de faire quelque chose.

C'est un peu pour ces raisons que nous avons exposé devant vous des mesures de peut-être "medium and short term considerations", de nature à permettre à cette population qui voudra rester ici de passer cette période d'un an, de deux ans ou de trois ans, parce que la base devra toujours rester une base industrielle. Dans "l'exchange of correspondence documents", vous allez constater que je suis en pourparlers avec tous les ministères, les différents ministres. Je ne vois pas pourquoi, après tout l'argent qui est sorti d'ici, à différents niveaux de gouvernement, on ne serait pas en mesure de se retourner et de dire: D'accord, Schefferville, c'est à ton tour, tu as besoin d'aide, tu l'as mérité, nous allons faire telle et telle chose. Alors, nous, nous procédons avec nos exploitations minières en collaboration avec le ministre, la Société de la Baie-James et peut-être pourra-t-on retrouver ou définir cette nouvelle vocation économique pour Schefferville, vocation que nous souhaitons tous.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Mulroney, ainsi que les personnes qui vous ont accompagné.

M. Fortier: Un instant.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. Mulroney, serez-vous présent avec nous demain?

M. Mulroney: Oui.

M. Fortier: Oui, alors si jamais il y avait des présentations qui suscitaient de nouvelles questions, peut-être pourrait-on...

M. Mulroney: II y en a sans doute une qui s'en vient. Mon ami du comité des citoyens aura sans doute des dimensions intéressantes...

M. Fortier: Nous vous remercions.

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle immédiatement le groupe suivant qui est le Comité des citoyens de Schefferville, dont le porte-parole est M. Denis Larouche. Je demande au groupe de s'approcher. C'est le mémoire no 8M.

S'il vous plaît, j'aimerais bien qu'on puisse continuer, alors est-ce que les gens du comité des citoyens voudraient bien se présenter? M. le député du comté, s'il vous plaît, également, à l'ordre!

M. Larouche, si vous voulez bien nous présenter les personnes qui sont avec vous.

Comité des citoyens de Schefferville

M. Larouche (Denis): À la droite, Mme Dumas, qui représente les gens de l'hôpital; immédiatement à ma droite, M. Robichaud, qui représente les syndicalistes-métallurgistes; immédiatement à ma gauche, Mme Bravo, qui représente les commerçants et, à gauche complètement, Daniel Leblanc qui représente les non-syndiqués. Ce n'est pas le comité des citoyens au complet, il en manque.

Avant de faire la lecture du mémoire que vous avez entre les mains, le comité aimerait, pour le bénéfice des gens qui ne peuvent pas voir Schefferville à cause du climat actuel, présenter certaines images de Schefferville par un diaporama d'environ dix minutes. Cela pose des problèmes techniques d'éclairage, mais j'espère, après le diaporama, qu'on pourra reprendre normalement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Si vous me dites que votre exposé audiovisuel est d'environ dix minutes, je vous demanderais quand même, pour ne pas allonger indûment le temps, de tenter, après, de résumer le plus possible votre mémoire.

Nous suspendons pour quelques minutes, le temps du diaporama.

(Suspension de la séance à 17 h 11)

(Reprise de la séance à 17 h 21)

Le Président (M. Bordeleau): Après ce petit rafraîchissement photographique, sûrement que tout le monde est en forme. On peut donc continuer immédiatement. Alors, M. Larouche, sans vous sentir obligé de répéter ce que je vous ai dit tantôt, je vous laisse nous livrer votre mémoire.

M. Larouche: Je voudrais souligner

d'abord au sujet du diaporama que les images et la musique sont de Schefferville.

Bref historique du Comité des citoyens de Schefferville. Le Comité des citoyens de Schefferville n'existe que depuis quelques mois. De plus, un tel regroupement pour Schefferville constitue une première. Notre mémoire, vous le devinez déjà sans doute, sera donc entaché d'amateurisme. Le peu de temps dont nous avons disposé nous a quand même permis d'identifier la plupart des attentes de la population de Schefferville vis-à-vis de la nouvelle situation socio-économique créée ici par la fermeture des installations minières de l'IOC. Cette commission parlementaire pour notre comité a donc une importance indéniable. Par elle, nous acheminons vers les centres décisionnels les demandes de notre population.

La représentativité du Comité des citoyens de Schefferville. Le comité des citoyens est composé d'un représentant de chacun des principaux groupes de travail de la population. Ont été invités par ailleurs un représentant des Montagnais, un représentant des Naskapis, un membre du Conseil municipal et un assisté social représentant les sans-emploi. Ces représentants nommés par leurs pairs se sont réunis depuis l'annonce de la fermeture de la minière IOC, à peu près une fois par semaine. Ce que vous lisez ici résume les réflexions de ceux qui les ont mandatés.

Le comité des citoyens a de plus travaillé avec le conseil municipal. Cette étroite collaboration a fait ressortir la convergence des opinions de notre population. Certes, tous n'ont pas une réponse identique à chacun des problèmes que nous rencontrons actuellement. La démocratie cependant accepte les dissidences.

L'information. Les informations circulent relativement bien à Schefferville. Encore faut-il cependant qu'elles s'y rendent. Or, le principal intervenant, l'IOC, ne diffuse que ce qu'il veut bien. Il utilisera alors la rumeur, le goutte-à-goutte, la fuite bien orchestrée ou encore l'information biaisée. Les médias, quant à eux, ne connaissent que très superficiellement Schefferville. L'actualité a des exigences de despote fébrile. Il nous est donc apparu nécessaire d'informer la population, celle de Schefferville et celle d'en bas. Ce fut là le premier mandat confié au comité des citoyens. Or, on n'écoute bien que ceux qui peuvent se faire entendre. L'éloignement, l'isolement et l'importance relative de Schefferville en font un interlocuteur presque inaudible. Le silence d'Ottawa, incidemment, illustre bien ce que nous soulignons ici.

Le choix. En mettant fin à ses opérations minières de Schefferville, l'IOC, d'emblée, enfermait la population de cette ville dans un dilemme apparemment anodin: partir ou rester. L'IOC n'annonce alors que la fermeture de ses installations. Les médias sous pression concluent hâtivement à la disparition de la ville. Ailleurs au pays, on téléphone à la parenté d'en haut pour connaître la date de l'arrivée des millionnaires du Nord. Or, le cas de Schefferville n'est malheureusement pas aussi simple. La communauté humaine de Schefferville s'est vue subitement acculée. Elle devait ou partir ou rester. Les implications sous-jacentes à ces deux possibilités sont essentielles. Par elles s'explique le grave malaise social que nous vivons. Tous, en effet, n'ont pas droit aux grasses indemnisations de séparation ou de déménagement annoncées par M. Mulroney. Tous, non plus, ne bénéficieront pas d'une pleine pension. Certains, par ailleurs, ne travaillaient à l'IOC que depuis quelques années. D'autres, les employés non syndiqués, par exemple, se voient littéralement coincés.

Ce choix, et on le constate ici quotidiennement, n'existe pas. Pour celui qui veut rester, la diminution des services engendrée par l'ensemble des départs a son importance. De même, ne part pas qui veut mais qui peut. Les coûts de transport et d'installation font réfléchir. Certains voudraient ainsi voir venir, attendre un peu. D'autres s'étaient installés pour longtemps.

Le dilemme dans lequel nous emprisonne l'IOC a donc eu le résultat attendu, celui de diviser la population. Au sein d'une communauté humaine, les individus dépendent les uns des autres. N'indemniser qu'une catégorie de travailleurs équivaut à insulter les autres. La population de Schefferville étant un ensemble, il convient, pour que s'exerce vraiment le choix de chacun, que tous aient les moyens de choisir. Et, ici, nous parlons de respect humain.

Nos attentes. C'est la partie importante du mémoire. Les problèmes que nous vous présentons dans les pages qui suivent ont un dénominateur commun. Leur solution ne respecte pas les normes existantes. Or, Schefferville, depuis toujours et ce à tous les points de vue, est une ville anormale. Sans nier d'aucune façon l'importance des lois, il nous semble, cependant, primordial, si quelque chose doit être fait pour la population de Schefferville, de remettre en question les divers règlements touchés par nos demandes. C'est là la pierre d'achoppement de tout ce qui pourra être dit ici.

En définitive, il s'agit de normaliser Schefferville. Pour certains, nos demandes apparaîtront extravagantes, irréalistes ou ridicules. Ceux-là, nous les invitons à vivre pendant un an à Schefferville avec leur famille.

Nos attentes immédiates. Pour quelques-uns de nos citoyens, la situation a déjà dépassé le point critique. Ces cas d'urgence sont prioritaires et exigent des

mesures spéciales immédiates dès la fin de cette commission parlementaire, soit: la création d'un fonds d'urgence substantiel, disponible sur place; la venue à Schefferville d'un haut fonctionnaire de type plénipotentiaire dont le mandat serait d'administrer cette enveloppe en collaboration avec le milieu et d'accélérer le règlement des cas critiques; l'engagement d'un travailleur social; le droit de retrait des fonds bloqués dans les Caisses d'entraide économique; la légalisation, pour les Scheffervillois, de la chasse d'hiver au caribou et de la pêche sur la glace; la mise sur pied à Schefferville même d'un comité de concertation chargé d'appliquer les décisions qui suivront cette commission. Ce sont les demandes les plus importantes. Il y a certains détails à ajouter.

Nos attentes à court terme. Sur le plan du logement et de l'immobilier, l'IOC a demandé pour le mois de juin la libération de ses logements. C'est trop vite. Nous demandons, pour ce qui est du logement et de l'immobilier, que le gouvernement obtienne de l'IOC un délai d'au moins six mois, pour ce qui est de l'occupation de ces logements. Nous demandons que le gouvernement, entre-temps, envisage sérieusement les possibilités lui permettant de devenir propriétaire desdits logements ou de les remettre à la municipalité. Nous demandons que le gouvernement étudie la formule de dédommagement annexée et qu'il s'entende avec les propriétaires concernés sur un mode d'indemnisation. Nous demandons que les coûts actuels de logement soient gelés. (17 h 30)

Sur le plan de l'indemnisation de base pour tous, il n'appartient pas à une multinationale étrangère d'hypothéquer le devenir de toute une population québécoise. Il appartient à l'IOC, toutefois, d'indemniser ceux et celles qui, pendant des années lui ont permis d'accumuler et d'exporter des profits que d'aucuns jugent scandaleux. Le gouvernement, sur ce point, a une responsabilité morale et historique indéniable. Nous demandons donc que le gouvernement exige de l'IOC que celle-ci assume le coût total de l'indemnisation de base que nous proposons en annexe. Nous demandons que le gouvernement, en cas de refus de l'IOC, entame les procédures légales ou législatives nécessaires. Nous demandons que les services de placement accordent une attention particulière aux demandes de Schefferville.

Pour ce qui est de la survie, c'est-à-dire, ce qui va rester de Schefferville après le départ de ceux qui veulent partir... Une fois indemnisé, chacun sera alors vraiment en mesure de choisir. Certains partiront et d'autres resteront. Pour ces derniers, la vie ne sera guère facile. Il importe en ce sens de se pencher sérieusement sur les conditions de vie qui prévaudront alors. De nombreux correctifs doivent être envisagés. Des situations de monopoles dont jouissent Provigo et Esso témoignent, à titre d'exemple, de la nécessité d'agir. Nous demandons que les services publics existant actuellement soient maintenus, considérant qu'ils constituent déjà un minimum. Nous demandons que le gouvernement exerce un contrôle relativement au coût et à la qualité de l'alimentation. Nous demandons que le gouvernement exerce un contrôle relativement au coût des produits pétroliers. Nous demandons que la qualité des services aériens et ferroviaires soit haussée d'une façon décente.

Nous demandons que les normes relatives aux salaires des projets de travaux communautaires soient révisés afin d'offrir des salaires adéquats au milieu. Nous demandons que la priorité d'emploi soit accordée aux résidents de Schefferville lors de l'implantation des projets à venir. Les entreprises et les commerces: L'IOC ayant recruté pour au moins 100 ans, des gens sont venus. Les services commerciaux quant à eux ont suivi, encouragés en cela par l'IOC qui y voyait un facteur de stabilisation de sa main-d'oeuvre. La responsabilité de l'IOC est globale. Elle s'étend à l'ensemble de la réalité de Schefferville. La fermeture des installations de l'IOC menace dangereusement les gens d'affaires de Schefferville. Une trop forte baisse de la population entraînerait des faillites et de nouvelles mises à pied. Des mesures spéciales là encore s'imposent. Celles-ci, faut-il le préciser, permettront peut-être aux employeurs locaux d'attendre la reprise de l'activité économique de Schefferville car, nous n'en doutons pas, il y aura reprise.

Nous demandons que soit décrétée une exemption de cinq ans des taxes foncières et municipales pour les immeubles et bâtiments commerciaux. Nous demandons que soient abolies les taxes sur les produits pétroliers utilisés par les commerçants. Nous demandons que les normes permettant aux employeurs locaux de bénéficier de subventions d'emploi soient révisées à leur avantage. Pour ce qui est des employés des secteurs public et parapublic, les nombreux déménagements auxquels nous assistons depuis plusieurs mois ont pour effet une baisse considérable des clientèles hospitalières et scolaires. Cette diminution entraîne à son tour une réduction des postes et par conséquent des services offerts, ce qui cause de nouveaux départs tant chez le personnel que dans la population.

Or, Schefferville n'a déjà pas droit, toujours d'après les normes, à certains services. Notons à ce propos sur le plan éducatif l'absence de la promotion par matière et des cours professionnels. Les services à l'enfance en difficulté

d'apprentissage, et c'est plus grave, sont pour leur part insuffisants. Sur le plan médical, Schefferville n'a plus droit à son travailleur social et encore moins à son anesthésiste. De nombreuses évacuations d'urgence résultent de cette dernière lacune. D'autres exemples pourraient s'ajouter ici. Certains employés du gouvernement ont récemment subi des ponctions salariales. Ceux d'entre eux qui habitent à Schefferville n'échappent pas à ces coupures. On assiste alors à la comédie suivante: Moins de personnel, une tâche plus lourde pour ceux qui restent, des salaires réduits et encore moins de services à la population. Certes, une partie des employés gouvernementaux de Schefferville a droit à des avantages particuliers. Les clauses de diverses conventions collectives n'accordent cependant pas ces compensations à tous. Il y a ici une certaine incohérence. Une comparaison sommaire des conventions en question fait ainsi ressortir certaines absurdités. Les primes nordiques, à titre d'exemple, diffèrent d'un travailleur à l'autre. Ils vivent cependant à la même latitude. Les conditions de logement, quant à elles, relèvent de l'arbitraire et de la discrimination. Le sort que fait subir HOC à la population de Schefferville peut s'apparenter à une prise d'otages. Le chantage socio-économique que cette multinationale exerce ainsi auprès des pouvoirs publics ne doit en aucun cas inspirer ces derniers.

Nous demandons donc, dans l'intérêt de toute notre population, que soient définis, de concert, les services hospitaliers et scolaires essentiels à Schefferville. Nous demandons que lesdits services soient maintenus, et même augmentés si nécessaire. Nous demandons que les clauses des conventions relatives aux avantages nordiques des Schef-fervillois soient renégociées. Nous demandons que des congés sans solde soient accordés pour fins de recherche d'emploi et/ou de logement à l'extérieur de Schefferville. Nous demandons que les clauses relatives aux primes de séparation soient promptement renégociées afin de permettre à tous les Scheffervillois concernés d'en profiter. Nous demandons que s'ajoutent aux conventions actuelles des clauses de relocalisation volontaire afin de permettre aux travailleurs de quitter leurs emplois lors de situations analogues à celles que nous vivons ici.

Les sans-emploi, toujours dans les demandes à court terme - nous entendons par là des demandes pour lesquelles nous attendons des réponses avant au moins trois mois - cette catégorie de la population de Schefferville est celle qui souffre le plus de la nouvelle situation socio-économique que nous vivons. Il n'entre pas dans nos intentions de rédiger une thèse sur le sort réservé à cette fraction de nos concitoyens. Nous nous contenterons de présenter ici le cas de l'individu, célibataire de moins de 30 ans, vivant de l'aide sociale. Ce tableau, sans être exhaustif, est assez révélateur. Les revenus mensuels de la personne âgée de moins de 30 ans qui vit de l'aide sociale sont de 144 $ par mois. Les dépenses mensuelles minimales - je dis bien minimales, les chiffres que nous citons ici sont des moyennes - sont de 350 $. Il est évident que ce résumé n'illustre pas toutes les conditions de vie de tous les sans-emploi. Certains cas, entre autres, ceux des pères de famille ou ceux des propriétaires sans emploi sont plus dramatiques encore. Ajoutez à cette sauce qu'une seule sortie par année à l'extérieur de la ville coûterait, pour notre individu, 50 $ s'il prend le train et un peu moins de 200 $ s'il choisit l'avion, sans compter le retour.

Nous demandons donc qu'une étude du coût de la vie soit immédiatement menée et que les montants alloués en aide soient ajustés en conséquence. Nous demandons que l'une des priorités retenues par cette commission soit de sortir les sans-emploi de cette chausse-trappe socio-économique.

Nos attentes à moyen terme. Parmi les suggestions émises lors de cette commission parlementaire, certains projets mériteront peut-être une attention plus approfondie. Il est plausible que, d'ici quelque temps, quelques-uns d'entre eux, après étude, se révèlent rentables. De notre côté, il nous apparaît réaliste pour l'instant de miser sur nos atouts actuels. À Schefferville, le tourisme, à moyen terme, est appelé à succéder au secteur minier comme générateur d'emploi et de revenu. Actuellement, et c'est navrant, cet aspect important de l'avenir de Schefferville est négligé. De graves lacunes, ainsi, nuisent sérieusement à l'expansion de ce secteur lucratif. Les multiples interventions possibles devront être axées, en tout premier lieu, sur l'amélioration de l'infrastructure touristique déjà en place.

Nous demandons la création d'emplois de type communautaire visant la dépollution de l'environnement, visant également l'amélioration des structures d'accueil et visant, de plus, l'expansion du tourisme. Nous demandons un contrôle direct des ministères pour ce qui est de la qualité et des prix des services offerts aux touristes. Nous demandons une vaste campagne nationale et internationale de mise en marché du produit touristique de Schefferville. Nous demandons, dans le cadre de nos attentes à moyen terme, que les travaux d'exploration et d'exploitation de la fosse du Labrador utilisent de la main-d'oeuvre locale.

Nos attentes à long terme. Le triste état des économies québécoises et canadiennes ne laisse guère d'espoir face à ce qu'on appelle couramment un gros chantier. Les mégaprojets ne sont, en effet, plus de mode. Il est permis toutefois d'en

rêver. Pour Schefferville, la prolongation du chemin de fer en direction de Fort Chimo, doublée de la construction d'un gazoduc, résoudrait bien des problèmes tout en ouvrant la voie d'accès au développement du Nord.

Un deuxième projet, moins ambitieux celui-là, pourrait lier Schefferville au réseau routier national par la baie James. Réalistes, nous demandons néanmoins, pour ce qui est du long terme, que le gouvernement du Québec oblige l'IOC à respecter les ententes passées en ce qui a trait au prolongement de la voie ferrée. Nous demandons que les études se poursuivent relativement au trajet québécois du gazoduc et que des pressions politiques s'exercent si nécessaire.

La conclusion de notre mémoire - je ne lirai pas toutes les annexes - la population de Schefferville ne se laissera pas endormir par une averse de petits projets aux salaires dérisoires. Nous n'attendons pas non plus de cadeaux. Ce que la population de Schefferville demande, en fait, c'est réparation. Le mépris affiché de l'IOC est une insulte à toute la collectivité québécoise. La solidarité d'un peuple ne se calcule pas en subventions. Le gouvernement québécois dans ce dossier aura ainsi à mesurer le poids politique de Schefferville. Et ici nous ne parlons pas du poids électoral. Nous parlons de frontière de l'occupation du territoire, du passé et de l'avenir. Le Nouveau-Québec ne doit pas subir le sort du Labrador. La population de Schefferville a droit à une certaine reconnaissance. L'indemnisation de base peut aussi s'appeler prime d'appartenance et cela ne se chiffre pas vraiment en dollars comme ce fut le cas d'Uranium City. Nous vous avons parlé de dignité, ni plus ni moins.

Le Président (M. Bordeleau): Je passerais immédiatement à la période de questions. M. le ministre d'État au Développement régional.

M. Gendron: M. le Président, très rapidement, je voudrais remercier les membres du comité de citoyens de la présentation de leur mémoire. Sans porter un jugement global sur le mémoire, je pense que tout le monde va convenir qu'il s'agit d'un mémoire qui - même si vous-mêmes l'avez qualifié de souffrir d'un peu d'amateurisme -a le mérite d'être très clair, très précis. Il parle un langage très accessible à tous, mais vous en conviendrez avec moi, il fait état d'une multitude de projets, de situations qu'il faut analyser, que ce soit à court, à moyen ou à long terme. Je pense que dans le langage courant chez nous, quelquefois, on parle d'une très longue liste d'épicerie. Et, lorsqu'on a à l'analyser et à la chiffrer, je ne suis pas sûr que le budget du Québec suffirait pour donner suite à l'ensemble des considérations que vous donnez.

L'autre considération, parce que, dans une commission comme celle-ci, il est important que nous nous comportions également en gens responsables, nous reconnaissons que la situation ici à Schefferville est difficile, très difficile. C'est pour cela qu'on y est venu tenir une commission parlementaire. Il ne faut pas perdre de vue l'objectif, non plus, que fondamentalement, il n'y aurait probablement personne ici si nous n'avions pas appris, comme vous tous, la fermeture de la Compagnie minière IOC. Et, fondamentalement, c'est à la suite de cette décision qu'il faut analyser une certaine façon de rendre le plus équitables possible les choix qui s'imposent à vos commettants.

Il ne fait aucun doute qu'on n'aurait pas besoin de discuter longtemps sur au moins une ligne de force qui se dégage de votre mémoire. Vous mentionnez, à un moment donné - et je trouve que c'est important de le rappeler parce que c'est un principe - vous dites: les problèmes que nous vous présentons dans les pages qui suivent ont un dénominateur commun. Leur solution ne respecte pas les normes existantes. S'il y a quelque chose de très clair et que je pense que tout le monde va accepter, c'est bien cela. Cependant, même si vous continuez en disant qu'à tous les points de vue, Schefferville est une ville anormale, compte tenu bien sûr de nos critères d'analyse, on pourrait peut-être convenir qu'il y a d'autres villes du Québec, petites communautés qui vivent des situations pour le moins anormales, parce que ce n'est pas demain qu'on va avoir complètement réduit toutes les inégalités sociales, les inégalités du vécu tout court dans l'ensemble du Québec. Et, je ne suis pas sûr que quels que soient les gouvernements qui se succéderont, même si on doit toujours avoir cet objectif en tête, on puisse réaliser à court terme une garantie fondamentale d'avoir réussi à permettre à tous les citoyens et citoyennes du Québec de bénéficier de tous les mêmes avantages. (17 h 45)

Je pourrais prendre un à un vos points. Bien sûr, on n'a pas le temps de le faire. De toute façon, vous seriez possiblement déçus puisque, à certains égards, on pourrait donner des réponses tout de suite. Vous-même, M. le président du comité des citoyens, m'avez indiqué tantôt que lorsque vous parlez de court terme, cela voudrait dire dans une certaine mesure des réponses d'ici à trois mois. Il y a des choses dans votre mémoire auxquelles, dans la présentation que j'ai faite dès l'ouverture, ce matin, de cette commission parlementaire, on a répondu; entre autres, lorsque vous parlez d'assurer un minimum de services en termes de santé, d'éducation, de loisirs, cela ne fait aucun doute. Si on regarde vos attentes immédiates, lorsque vous parlez de la création d'un fonds d'urgence substantiel, M.

Marois, tantôt, a manifesté au nom du gouvernement, que l'on était très ouvert à ce que l'ensemble des ressources qui peuvent être mises dans un - permettez-moi l'expression - pot commun puisse être fait dans les meilleurs délais.

Je pose une question précise et j'en aurai d'autres avant de passer à mes collègues. Quand vous avez à apprécier un fonds d'urgence, j'aimerais que vous me précisiez quels en seraient les participants et le nombre de personnes visées pour le gérer et l'administrer. Parlez-moi de sa composition et de son ampleur pécuniaire. Quand vous dites dans une phrase que vous voulez un fonds d'urgence substantiel, il nous est très difficile de repartir avec cela et faire des évaluations, parce que si on se met à chiffrer l'ensemble des données, on peut arriver avec des écarts très disproportionnés.

J'aimerais que, dans un premier temps, vous puissiez préciser la composition et évaluer l'ampleur pécuniaire de ce fonds d'urgence.

Le Président (M. Bordclcau): M.

Larouche.

M. Larouche: Je voudrais rappeler, tout d'abord, que le comité des citoyens a voulu présenter les attentes de la population. Après plusieurs consultations, ce que vous avez là est ce qu'on nous a demandé. Maintenant, il est évident que nous aurions pu présenter d'une façon plus précise certaines demandes.

Il y a beaucoup de choses dans ce document qui ont été laissées de côté. Nous n'avons fait qu'un résumé. Il a été discuté au comité au niveau de l'argent que nous demandons -parce que nous sommes dans la position de la personne qui tend la main - de chiffrer ces montants-là. La réponse qui est sortie du comité de citoyens est celle-ci: l'argent qu'on accordera à la population de Scheffer-ville sera égal à la valeur que les élus accordent à la population de Schefferville. C'est notre réponse.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Gendron: Je comprends bien cela en termes de mots, surtout qu'à la fin de votre mémoire vous dites: En fait, fondamentalement, ce dont il faut parler, c'est de dignité. J'ai de sérieux problèmes avec le Conseil du trésor, dont je suis membre, quand j'ai à évaluer en termes pécuniaires les considérations strictement objectives. Le fait que nous ayons donné suite à ce que nous croyons fondamental de venir siéger ici pour entendre les mémoires, c'était déjà une marque de considération envers la population. On va devoir avoir des données plus précises si on veut faire des évaluations chiffrées.

De toute façon, c'est là votre réponse. Voici la deuxième question. Vous avez insisté à plusieurs reprises sur un point. Je partage complètement votre point de vue. Je l'ai indiqué dans mon discours d'introduction. Mes collègues ont eu l'occasion de poser des questions à la minière, IOC. Nous sommes toujours convaincus que lorsque M. Brian Mulroney, président de IOC, mentionnait qu'il était important d'assumer certaines responsabilités en dehors de toutes lois existantes, de toutes conventions collectives, cela voulait dire, dans notre esprit, avoir une attention particulière pour les citoyens et citoyennes qui vivent et qui habitent encore à Schefferville parce que, quand même, ces gens-là sont venus à n'importe quel titre, peu importe, offrir des services aux travailleurs de l'IOC et, dans ce sens-là, par notion d'équité, on pense qu'ils devraient se voir attribuer une certaine compensation.

Vous avez parlé, vous, d'une indemnisation, d'une prime - je m'excuse, je ne me rappelle pas votre terme, c'était une prime de... À la fin, vous parliez d'une prime de quoi? - d'appartenance, peu importe. Alors, je voudrais savoir si vous avez eu l'occasion de réfléchir un peu, entre vous, sur les critères ou les espèces balises, les paramètres dont on devrait se servir pour essayer d'établir, avec le plus d'équité possible, l'espèce d'indemnité qui serait nécessaire entre ceux qui partent, qui feraient éventuellement le choix de partir, par rapport à ceux qui feraient le choix de rester? En termes très clairs, est-ce que vous croyez que la même indemnité devrait être accordée, que les citoyens fassent le choix de partir ou que les citoyens fassent le choix de demeurer? Et, connexe à cela -juste un complément et je termine là-dessus - est-ce que d'après vous ce serait la même indemnité quel que soit le fait que ces gens aient déjà travaillé pour la minière ou n'aient jamais travaillé pour elle? D'après vous, est-ce que ce devrait être la même indemnité?

M. Larouche: Pour la première partie de votre question, relativement aux paramètres, aux critères, nous avons ébauché, à la fin, dans les annexes, deux séries de critères: des critères relatifs à ce qu'on appelle l'indemnisation de base pour tous et des critères relatifs à ce qu'on appelle l'indemnisation pour le logement. Ces deux séries de critères ne sont que des paramètres, comme vous le dites, ce sont des balises. Il reste à définir, pour ces balises, pour ces repères, au sein d'un comité de concertation que nous demandons dans les demandes immédiates, le contenu exact de ces balises. C'est une chose qu'on ne peut pas discuter en détail en commission parlementaire, mais, pour la population de Schefferville, pour les gens qui ont travaillé

au sein du comité de citoyens, ces deux séries de repères constituent, si vous voulez, une base de pourparlers avec les personnes qui viendront travailler.

Pour ce qui est de la deuxième partie de votre dernière question, relativement aux gens qui sont partis ou aux gens qui ont l'intention à plus ou moins court terme de s'en aller, il resterait encore à définir, à l'intérieur du comité de concertation, les modalités d'application des critères que nous allons définir. Si vous voulez, on ne peut pas détailler, actuellement, tout ce que nous demandons, d'autant plus que nous n'avons pas eu de réponse à la première interrogation, notre première demande, pour ce qui est de l'enveloppe substantielle.

M. Gendron: Une dernière petite question. Est-ce que vous avez déjà eu l'occasion, comme comité de citoyens, d'avoir une rencontre officielle ou formelle avec la minière IOC pour discuter de ce que j'appellerais vos revendications pour lesquelles vous avez des références précises quant au niveau de responsabilité, selon vous, pour la minière IOC?

M. Larouche: Comme comité de citoyens, nous représentons l'ensemble de la population. Nous ne sommes pas un regroupement de travailleurs de l'IOC. Les discussions avec l'Iron Ore ont lieu avec les métallos. Nous, nous discutons entre nous face à la situation présente en collaboration avec à peu près tous les intervenants de la ville. Les rencontres avec l'Iron Ore, ce que nous avons de l'IOC c'est de l'information qui est publiée.

M. Gendron: Est-ce que les demandes du comité de citoyens ont été véhiculées auprès des métallos, puisque vous dites que c'est l'interlocuteur qui discute avec les porte-parole de la minière.

M. Larouche: Nous avons, au sein du comité de citoyens, deux représentants des métallos.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Laurier.

M. Sirros: M. le Président, j'aimerais aussi remercier le comité des citoyens pour le rapport. Il est vrai que le langage est accessible à tous. Il y a des fois, peut-être, où la qualité du langage est plus accessible à certains qu'à d'autres, mais, abstraction faite de cela, j'aimerais revenir sur une de vos recommandations précises, la deuxième, où vous parlez de la nomination d'un haut fonctionnaire de type plénipotentiaire dont le mandat serait d'administrer cette enveloppe.

Une chose qui me semble drôle dans cette histoire, c'est que normalement, quand une ville connaît un désastre physique, inondation ou quelque chose d'extraordinaire, une aide directe est apportée par les différents paliers de gouvernement. Ici, on peut dire que c'est un désastre humain dans le sens que, tout d'un coup, la ville voit 75% de sa population partir. Il y en a peut-être qui s'interrogent à savoir s'ils resteront ou s'ils partiront et peut-être que cela diminuera encore.

Je vois, dans ce genre de recommandation, quelque chose que j'aimerais vous entendre développer un peu. Comment voyez-vous ce mandat de ce haut fonctionnaire? Quels seraient les pouvoirs que vous voulez lui voir accorder? Est-ce que ce serait un apport direct que le gouvernement pourrait vous donner en termes de vous soutenir plus concrètement que cela n'a été fait jusqu'à maintenant? Pouvez-vous développer un peu cet aspect-là?

M. Larouche: Ce tout puissant fonctionnaire, cet archange miraculeux qui nous arriverait subitement est demandé en fonction d'une urgence. La première chose importante, c'est qu'il arrive, qu'il descende des nuages de Québec pour arriver à Schef-ferville même. Lorsque nous aurons ce personnage entre les mains, nous travaillerons avec lui de la même façon que nous avons travaillé au comité des citoyens en définissant nos mandats, en fixant nos objectifs prioritaires, etc. C'est de cette façon qu'on travaillerait avec le personnage. Nous demandons cette présence dans le cadre des demandes immédiates. C'est urgent, ce n'est pas quelque chose que les instances décisionnelles mijoteront quelque temps, quelques semaines ou quelques mois, c'est quelque chose qui presse. Il y a des cas d'urgence, j'imagine qu'on a attendu assez longtemps, d'après ce que j'ai entendu en ville. Il serait peut-être temps que, concrètement, il se passe quelque chose pour ce qui est du fameux choix avec lequel on a ouvert l'assemblée ce matin.

Il y a une question de choix, les personnes qui sont intervenues ce matin l'ont mentionné, le choix est revenu dans le courant de la journée. Il est temps que les gens qui ont à choisir puissent le faire. Ensuite, nous regarderons le délai, nous regarderons ce qui se discutera. Le fonctionnaire en question serait là justement pour accélérer les procédures administratives qui découleraient du choix.

M. Sirros: ...j'entends parler. Ai-je tort de dire que le sentiment que vous véhiculez le plus semble être un sentiment de frustration par rapport aux instances que... Vous sentez, en quelque sorte, qu'on vous a laissé tomber dans toute cette affaire-là.

Vous vous débrouillez seuls, il n'y a aucune indication quelque part qu'une autorité vient vous appuyer dans le règlement de ces cas d'urgence ou même les perspectives à moyen terme des individus qui y vivent. Finalement, vous faites appel au gouvernement afin qu'il nomme un type, un archange, comme vous dites, qui descendra des nuages afin de s'occuper des cas individuels des personnes qui sont ici. Il s'agit finalement d'un problème des 900 ou 1000 personnes qui demeurent ici.

Ai-je raison de dire que c'est cela que vous véhiculez finalement?

M. Larouche: Le mot n'est peut-être pas exact. Cela ne recouvre qu'une partie de la population. Ce n'est pas un sentiment exprimé uniquement vis-à-vis du pouvoir, le même sentiment est aussi exprimé vis-à-vis de l'Opposition. Il s'exprime également envers les médias. Depuis le début de la commission parlementaire, depuis l'annonce de l'Iran Ore, on utilise la population de Schefferville à toutes les sauces, on l'utilise pour tous les arguments. Chacun y va de son petit cri d'alarme pour la population de Schefferville, en faveur de la population de Schefferville. Entre-temps, chacun passe son message et, en attendant, la population de Schefferville attend.

M. Sirros: Évidemment, il y a toujours le risque que chacun essaiera de passer son message. Un message que j'aimerais passer ici, c'est qu'il me semble que nous faisons face à une situation extraordinaire et que, finalement, il faudrait agir avec des moyens un peu extraordinaires parce que, même si on s'est déplacé de Québec à ici, cela ne règle pas grand-chose dans l'immédiat.

M. Larouche: ...beaucoup. (18 heures)

M. Sirros: Dans ce sens-là, j'aimerais voir la présence du gouvernement. Nous avons quatre ministres ici aujourd'hui qui pourraient peut-être prendre ce genre d'engagement. On a parlé de la création d'un "task force" ce matin. Tout à l'heure, le ministre Marois a soulevé ce point avec le président de l'IOC. Je crains ce genre de comité. C'est beau en termes de possibilités à long terme et à moyen terme, mais il y a - comme on le remarque ici - des gens qui vivent des situations bien concrètes.

Je vois, dans la deuxième recommandation, un genre de position et j'espère qu'aujourd'hui on pourra entendre le gouvernement dire qu'il y aura quelqu'un qui sera dégagé, avec des pouvoirs extraordinaires, pour faire face à cette situation, pour l'étudier dans l'immédiat. Quand je dis l'immédiat, je veux dire... Vous avez mentionné trois mois, mais à l'intérieur de cette période il faudra pouvoir dire concrètement ce qu'on peut faire et le faire. Dans la première recommandation, ce serait peut-être une des choses que cette personne pourrait établir avec le comité des citoyens, à savoir la somme substantielle réaliste, et par la suite, les gens qui font face à ce problème pourraient avoir au moins le sentiment qu'il y a quelqu'un quelque part qui les appuie.

J'arrête ici. Je pense que c'est là l'essentiel de la démarche que vous faites.

M. Larouche: Ce n'est pas au comité des citoyens à fixer les budgets sociaux du gouvernement.

M. Sirros: Un des éléments du mandat du plénipotentiaire que je verrais, ce serait de venir étudier avec vous la situation et dire au gouvernement qu'on a besoin de tant. Par la suite, il pourra administrer avec la collaboration des gens en place pour faire face à ce genre de situation extraordinaire. Je rappelle à tous ceux qui sont ici qu'encore une fois, quand il s'agit d'un désastre naturel, personne ne se pose la question à savoir si on devrait assumer une responsabilité comme État et comme société face à ces gens-là. On le fait normalement. Pour ma part, il me semble que c'est le même genre de situation qu'on vit avec la seule différence que c'est, semble-t-il, le marché mondial du fer qui a causé un désastre humain à Schefferville. Nous avons une responsabilité comme société, comme État, d'agir de la même façon, comme si c'était un désastre physique naturel.

M. Larouche: Pour ce qui est des perspectives d'avenir relativement au marché du fer, relativement à la population de Schefferville, nous laissons cela à l'Opposition pour l'instant, afin qu'elle prépare les perspectives d'avenir relativement à nos demandes à moyen terme et à long terme. Lorsque l'Opposition sera au pouvoir, elle nous présentera ses projets de relance. Pour l'instant, nos interlocuteurs premiers se situent au niveau des élus. Il y a un choix politique à faire. Ce choix doit se faire dans le gouvernement. D'après les introductions et les apartés de la journée, le gouvernement semblait être disposé à faire ce choix politique, à reconnaître que nous avons aussi un choix à faire. Il importe actuellement que la décision politique se fasse très rapidement face à nos demandes immédiates.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai tenté, avant de me rendre ici, de faire mes devoirs pour pouvoir donner certaines orientations, tout au moins vous donner les

hypothèses sur lesquelles mon ministère travaille présentement et qui correspondent assez bien à votre mémoire, d'une certaine façon.

D'abord, j'ai le plaisir de vous annoncer qu'il y aura un petit fonds spécial dans le domaine du loisir. Il vous sera communiqué puisque votre député et M. Lévesque m'avaient demandé de dégager des fonds à même certains programmes et de faire les transferts nécessaires pour assurer le maintien des équipements et permettre à la population de se récréer, en tout cas, dans les moments difficiles que vous traversez. Ce fonds a été trouvé et il vous sera communiqué très prochainement.

Deuxièmement, mon ministère a été sensible à différentes hypothèses de travail. J'ai même écrit au comité conjoint qui discute des droits de chasse et de pêche pour accorder, dès cet hiver, une chasse d'hiver. Malheureusement, je n'ai pu obtenir la réunion du comité. On m'a dit: Une réunion spéciale, non. La réunion régulière aura lieu les 15 et 16 février prochain et ce sera les 15 et 16 février qu'on discutera de votre demande spécifique de la chasse d'hiver.

Nous avons également étudié des possibilités - j'ai constaté avec plaisir que certains mémoires y touchent - de la commercialisation du caribou. Vous en parlez, puisque vous parlez spécifiquement, dans votre mémoire, dans les annexes, de la mise en conserve de la viande de caribou. C'est vrai qu'on arrive à peu près aux chiffres de la SDBJ. Lorsque les quatre cadres de la SDBJ nous présenteront un mémoire, vous vous rendrez compte que cela correspond à peu près à leurs chiffres. Je n'ose pas avancer le nombre. Ils le sortiront eux-mêmes, mais, en ce qui regarde les études du ministère, on les traitera à leur niveau. Nos chiffres correspondent sensiblement aux chiffres qu'ils avancent. La retombée économique dans le milieu peut être fort intéressante allant d'au-delà de 10 000 000 $ à tout près de 15 000 000 $. Cependant, j'ai des contraintes, vous le savez, à cause de la Convention de la Baie-James; je devrai nécessairement passer par les voies de la négociation à ce niveau avant de donner un accord final. Je peux vous dire que mon ministère est très sensible à cette avenue. Il l'a étudiée et est prêt à soutenir les efforts des négociations pour en arriver à une solution concrète, et cela n'est pas du pelletage de nuage, ce n'est pas de la poudre aux yeux. Si cela se concrétisait, ce serait véritablement de l'injection d'argent sur le plan économique. Ce serait une retombée économique. Ce serait générateur d'emplois également.

Également, j'ai envisagé la possibilité d'ajouter des pourvoiries. Il en existe présentement, mais, encore là, cela fait partie de la négociation de la convention. Je peux vous dire que les pourvoyeurs, ici, génèrent passablement d'activités économiques et que nous avons treize demandes spécifiques en suspens présentement, de sorte qu'on pourrait, dans un avenir pas si éloigné, envisager des possibilités concrètes d'assumer une certaine forme de retombées économiques en ajoutant certaines pourvoiries. Je suis allé même jusqu'à imaginer une coopérative qui utiliserait des logements vacants dans les municipalités, qui gérerait certains établissements et qui permettrait justement des chasses en accordant l'hébergement qu'il faut et les guides, en assumant la fonction de guide, etc., ce qui créerait encore une activité dans le milieu.

Donc, à ce point, mon ministère a travaillé. On a plusieurs hypothèses et nous aurons sans doute à les discuter par le SAGMAI et lors des négociations sur la Convention de la Baie-James, des négociations qui doivent commencer très bientôt d'ailleurs. Au comité conjoint, de toute façon, nous aurons des rencontres dès les 15 et 16 février prochain. C'est un peu, dans un premier temps, ce que je voulais vous dire de la part de mon ministère. Il y en a un qui pourrait vous en parler beaucoup plus longtemps que moi parce qu'il a été à l'origine de la Convention de la Baie-James, M. le député de Mont-Royal. Si nous travaillons ensemble, autant Opposition que gouvernement, dans ce secteur, avec la compréhension des groupes des autochtones, nous pourrons peut-être réaliser quelque chose de concret qui pourrait être une preuve tangible de la volonté gouvernementale de créer dans le milieu une activité économique basée non pas sur une ressource qui s'épuise, mais sur une ressource renouvelable, d'autant plus que notre cheptel de caribou représente entre 35 000 et 50 000 têtes de trop présentement. Ce serait extrêmement bon pour la régénération elle-même de procéder à l'ensemble des activités que je vous ai données dans mon exposé.

Je pourrais parler de chasse d'hiver. On pourrait parler de prolongation de chasse. On pourrait parler de changement de quotas pour les prises. C'est une foule de possibilités théoriques, du moins, qu'on a présentement et j'espère pouvoir les concrétiser dans les négociations avec le comité conjoint et ensuite dans le cadre des négociations de la Convention de la Baie-James. Donc, je voudrais vous rassurer de ce côté et vous dire qu'au moins on fera des efforts soutenus pour poser des gestes concrets et personne ne pourra nous taxer de jeter de la poudre aux yeux. Ce ne sont que des points de vue. C'est-à-dire ce qui nous manque présentement, c'est la compréhension. J'espère qu'on l'aura. Je ne peux pas présumer qu'on ne l'aura pas, mais je peux

vous dire une chose, si on manifeste tous une volonté de voir changer certaines conventions, j'ai l'impression qu'on peut y arriver et dans le meilleur intérêt des gens de Schefferville. Je ne voudrais pas que vous le preniez dans le sens que vous l'exprimiez tantôt, le petit cri d'alarme pour dire: Pour la population de Schefferville, je veux vous défendre. Non, ce sont des gestes théoriques très précis que nous avons établis et qui peuvent se concrétiser très facilement avec la bonne volonté de tout le monde.

M. Larouche: Je voudrais d'abord préciser...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Larouche.

M. Larouche: ...ou corriger peut-être une impression que je laisse d'après ce que vous venez de mentionner quant à une certaine agressivité ou à certaines frustrations. Mettons cela sur le dos de la nervosité.

M. Chevrette: Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, monsieur.

M. Larouche: ...

M. Chevrette: Je m'excuse. Ce n'est pas vous que je visais. Ce sont ceux qui disaient ce matin qu'on s'en venait pour garrocher de la poudre aux "oeufs", aux yeux. Non, excusez-moi, ce n'est pas la poule aux oeufs d'or.

Une voix: C'est parfait.

M. Chevrette: Ils disaient qu'on n'avait rien fait. Je m'excuse, mais on a déjà carrément des études en marche. C'est sérieux et cela s'effectue, en plus.

M. Larouche: Je reviens néanmoins à nos attentes immédiates pour lesquelles vous n'avez apporté qu'une seule réponse. Il y en a six. Celle que vous avez mentionnée concerne le caribou. Il en reste quand même cinq. On les a placées à cet endroit du mémoire, parce qu'elles étaient importantes. J'ai l'impression, dans l'ordre de priorité de ces cinq demandes, que la question du caribou n'est pas la plus importante, même si elle se négocie le 15 février. Nous sommes quand même touchés qu'il y ait des démarches en ce sens.

M. Chevrette: J'ai voulu parler de mon secteur, bien sûr.

M. Larouche: D'accord.

Je voudrais aller à nos attentes à court terme qui sont très importantes, dans lesquelles attentes on mentionne l'idée de choix. Cette idée de choix doit se traduire dans la réalité par des faits concrets. Nous endossons M. Marois lorsqu'il demande à l'IOC de prolonger, pour un certain temps, des discussions valables au sein d'un comité "task force", etc., mais entre-temps, les gens ont à choisir. Il ne faudrait pas prolonger l'attente dans laquelle les gens se trouvent. La situation que nous vivons depuis la fermeture est une situation d'attente. Nous attendions, nous, la commission parlementaire pour pouvoir justement faire notre choix pour permettre à ceux qui veulent partir de s'en aller et à ceux qui veulent rester, de rester. C'est très important dans le sens qu'on ne peut pas diviser la population de la même façon que toute remarque ou toute considération relativement à tel ou tel groupe de la population de Schefferville est une attaque directe à l'ensemble de la population. Attaquer les commerçants, c'est diviser la population. Les commerçants font partie de la population. Attaquer tel ou tel groupe de la population, c'est une attaque. Plus l'attente dure, plus la population est divisée, moins la concertation peut se faire et moins ii y a unanimité. Prolonger encore l'attente de six mois ne donne absolument rien. Les discussions qui pourraient avoir lieu pendant ces six mois concerneront ceux qui auront décidé de rester. C'est pour cette raison qu'il est important d'abord de laisser le choix et ce, très rapidement. Nos attentes à court terme présentent des possibilités et des repères pour permettre ce choix. Il s'agit de les considérer et d'avoir une réponse très rapidement. Le court terme, c'est deux ou trois mois au maximum. Encore deux mois d'attente ici, une fois les retombées de la commission parlementaire effacées ou une fois les souvenirs de la commission parlementaire effacés, on se retrouve exactement dans la même situation qu'avant la commission parlementaire, en état d'attente. Je pense que la population commence à être fatiguée d'attendre, pour toutes sortes de raisons. D'accord?

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président, je vais toucher deux petits points qui, effectivement, se retrouvent dans votre mémoire relativement aux attentes à court terme. J'avais l'intention, un peu comme le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, de toucher au caribou et tout cela, mais j'ai compris votre message et j'en parlerai avec d'autres intervenants un peu plus tard.

Relativement à l'aide sociale pour les jeunes, je pense que c'est une dimension qu'on n'a pas encore touchée ce matin. Ma première question est la suivante: Approximativement, avec la population

restante au moment où on se parle, il y a combien de jeunes à peu près dans la région soit Schefferville ou... On parle plus spécifiquement de Schefferville, évidemment, avec la commission que nous avons.

M. Larouche: Je ne peux pas vous donner le nombre exact de jeunes. Les natifs qui viendront présenter un mémoire ultérieurement pourront vous fournir ce chiffre. Pour ce qui est des sans-emploi en bas de 30 ans - une catégorie de jeunes quand même - il y a un minimum de 100 personnes touchées par cette situation, qui sont dans la majeure partie des jeunes, des natifs qui n'ont pas d'emploi après avoir étudié et être revenus sans emploi ici. La place où ces jeunes reviennent, c'est Schefferville. C'est leur place. Je ne peux pas vous dire exactement le nombre de jeunes. Je peux vous dire, cependant, que durant le quart de siècle d'existence de Schefferville, environ 1075 enfants sont venus au monde ici, sinon plus. (18 h 15)

M. Dauphin: D'accord. Justement, relativement à l'aide sociale pour les célibataires de moins de 30 ans, nous avions la chance d'avoir le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu avec nous, il va revenir un peu plus tard, j'en suis convaincu. Ce serait probablement le temps que nous ayons un engagement voulant qu'effectivement, surtout dans une région comme Schefferville, je pense que c'est utopique de penser qu'un jeune célibataire en bas de 30 ans, surtout s'il est à son compte, puisse vivre avec 144 $ par mois. Vous n'avez pas encore reçu la Presse d'hier, mais il y avait un...

M. Larouche: Nous avons entendu la réponse de M. Marois à ce sujet à la télévision hier.

M. Dauphin: Vous l'avez entendu à la télévision hier? Ah, bon! C'est qu'il y avait également un entrefilet dans la Presse également.

Ensuite, vous parlez de projets communautaires. Vous avez sûrement eu vent ou pris connaissance d'un projet pilote d'un député ministériel relativement à un service civil, ici à Schefferville. Est-ce que le comité de citoyens qui, comme je le remarquais au début, n'est pas constitué depuis fort longtemps, a eu l'occasion de se pencher sur ledit projet, à savoir que des jeunes viendraient à Schefferville avec différentes activités, rémunérés entre 50 $ et 100 $ par semaine, selon ce que j'ai vu dans les journaux? Avez-vous eu l'occasion jusqu'à maintenant de vous pencher là-dessus?

M. Larouche: A priori, nous sommes en faveur de toute initiative pouvant amener à Schefferville une population pour repeupler la ville, rebâtir l'avenir; nous sommes tout à fait d'accord avec tous les projets qui pourront être avancés. Il importe cependant de préciser que cela ne donne pas nécessairement d'ouvrage aux jeunes de Schefferville. Il y a peut-être une priorité dans ce sens, peu importe le projet avancé par qui que ce soit de n'importe où au Québec, avec les plus belles idées et présenté de la meilleure façon, cela ne donne pas d'ouvrage aux gens d'ici et encore moins aux jeunes.

Nous sommes pour tout projet qui apporte quelque chose à Schefferville, mais nous voulons aussi que les gens qui auront décidé de demeurer à Schefferville voient quelque chose s'ouvrir devant eux et aient de l'emploi, du travail et des salaires décents reliés à ces emplois permanents.

M. Dauphin: D'accord.

M. Larouche: Je ne sais pas si vous avez une autre question?

M. Dauphin: Non, c'est tout, continuez.

M. Larouche: Pour ce qui est des projets susceptibles de créer de l'emploi à Schefferville, il y en a plusieurs qui ont été avancés. Il y en a un qui a été avancé de façon partielle par plusieurs intervenants et qui aurait peut-être sa raison d'être, il implique plusieurs personnes. Il s'agirait, puisque le gouvernement reconnaît - comme il l'a mentionné ce matin - sa responsabilité vis-à-vis le développement futur du Nord québécois, il semblerait peut-être important de mettre en place à Schefferville même les appareils administratifs touchés par les dossiers nordiques. C'est une proposition qui circule depuis longtemps chez les fonctionnaires, c'est un ensemble de propositions qui mériterait d'être appliqué concrètement, pratiquement à Schefferville. Cette proposition créerait plusieurs emplois. Je pense qu'il est important de le mentionner ici en commission parlementaire. J'aurais des documents à faire circuler parmi les membres de la commission parlementaire, documents qui peut-être intéresseraient les membres.

Le Président (M. Bordeleau): Si vous pouvez remettre une ou des copies à quelqu'un du secrétariat des commissions, on en fera des copies pour les distribuer aux membres de la commission.

M. Larouche: Les copies sont faites.

Le Président (M. Bordeleau): Vous avez des copies? Alors, on en fera la distribution dans les prochaines minutes.

M. Larouche: II s'agirait, avec ce projet, d'apporter, ici à Schefferville, de nouveaux emplois, en définitive, il s'agirait de donner à Schefferville le rôle, le titre, la fonction de capitale administrative du Nouveau-Québec. Cette proposition est déjà reprise de façon fragmentaire par plusieurs des intervenants. Tous les organismes et ministères impliqués par la gestion du Nouveau-Québec devraient se retrouver physiquement à Schefferville même. Les documents, qui vont circuler entre les mains des gens de la commission, ne sont qu'un résumé du dossier préparé par des fonctionnaires. Ce résumé est déjà connu par certains d'entre vous, mais il importe quand même de globaliser une injection d'emplois à Schefferville, puisque le gouvernement reconnaît sa responsabilité dans le Nord québécois, élément très important. Ce qui ne veut pas dire que notre priorité est d'amener d'autres personnes de l'extérieur pour travailler ici, il y a déjà des gens qui ont pris le train en pensant qu'à Schefferville, il y aurait des emplois. Le nouveau Klondike de la misère est commencé. Ce n'est pas le but de l'intervention du comité des citoyens. Le but premier était d'informer la population; le deuxième mandat était d'obtenir, pour la population, le choix. Nous en sommes à demander, pendant cette commission parlementaire, une décision politique qui pourrait survenir assez rapidement, c'est ce que nous demandons en définitive. Je crois que c'est le message essentiel, à moins que vous n'ayez des questions sur le document en question.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va. Un petit mot que le député de Duplessis m'a demandé. Alors, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Pour le bénéfice des membres de la commission et de la population, j'ai ici, en provenance du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, et datés du 1er février 1983, en ce qui a trait à Schefferville même, les chiffres concernant les personnes qui reçoivent des prestations d'aide sociale. Je ne nommerai pas de noms parce que ce n'est pas normal de nommer des noms dans ces cas. Il y a actuellement 34 dossiers d'aide sociale ici même à Schefferville; sur les 34, il y a 18 chefs de famille masculins, 16 chefs de famille féminins, un dossier où l'homme est conjoint et un dossier où la femme est conjointe. La répartition de ces 34 dossiers se fait comme ceci: 19 personnes aptes et disponibles, de moins de 30 ans; 11 personnes inaptes, non disponibles, de moins de 30 ans; 1 personne inapte non disponible, de plus de 55 ans; 1 personne inapte, non disponible entre 30 et 55 ans et 4 personnes aptes et disponibles entre 30 et 55 ans. Je pense que cela vous donne l'ordre de grandeur de ce qu'il y a ici actuellement pour l'aide sociale. Cependant, je sais très bien, qu'à cause du fait que certaines personnes reçoivent actuellement l'assurance chômage, elles devront éventuellement, à cause des semaines qui s'écoulent, dépendre de l'aide sociale. Je voudrais revenir très brièvement sur deux questions. Pardon?

Le Président (M. Bordeleau): J'ai compris que vous vouliez intervenir seulement pour donner une information.

M. Perron: Non, non. C'est pour clarifier...

Le Président (M. Bordeleau): Si on commence à poser des questions...

M. Perron: Non, non, c'est juste pour clarifier, M. le Président, une question.

Le Président (M. Bordeleau): Très rapidement.

M. Perron: Oui, très rapidement, si je peux parler, M. le Président. Lorsque vous parlez de la création d'un fonds d'urgence substantiel disponible sur place, est-ce que vous pourriez donner aux membres de cette commission et aussi pour le bénéfice de la population ce à quoi servirait ce fonds substantiel et spécial.

M. Larouche: II y a présentement certaines personnes qui sont en situation de faillite, certaines personnes pour qui une recherche d'emploi ou de logement à l'extérieur sont une nécessité urgente. Nous avons à définir d'abord quels sont exactement les cas d'urgence au sein du comité dont nous avons demandé la formation. Présentement, je ne peux pas vous donner plus de détails sur l'utilisation future du fonds d'urgence en question. Le fonctionnaire qui serait sur place pourrait répondre à cela avec précision.

M. Perron: D'ailleurs le point no 2 a beaucoup d'importance avec le point no 1, si je comprends bien et, de toute façon, ils sont interreliés. Alors, à ce sujet, j'ai déjà commencé, comme je vous l'avais déjà mentionné, des interventions auprès du ministre concerné. Je continuerai à travailler dans ce sens et j'espère que le gouvernement lui-même par le biais de ce ministère prendra la décision qui s'impose pour faire en sorte que dans les plus courts délais -cela ne veut pas dire dans un mois, cela veut dire dans les jours qui viennent - il y ait quelqu'un qui soit mandaté pour venir ici sur place et travailler de concert avec vous. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, je

vous remercie. Merci, M. Larouche, ainsi que les autres personnes qui vous ont accompagné dans la préparation de votre mémoire.

La commission suspendra donc ses travaux pour prendre un lunch pour revenir pour 20 heures 30. Cela donne 2 heures; alors la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures 30.

(Suspension de la séance à 18 h 25)

(Reprise de la séance à 20 h 39)

Le Président (M. Bordeleau): Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît. La commission parlementaire de la présidence du conseil de la constitution se réunit de nouveau pour continuer l'étude des mémoires. À la suspension, nous avions terminé le troisième mémoire. Nous en sommes donc au quatrième, soit à l'exécutif du Parti québécois de Duplessis.

Je demanderais donc au représentant, M. Valmont Vallée, je crois, de se présenter et de nous présenter les personnes qui seront avec lui et de procéder. Je vous souligne à tous, à toutes, que pour passer à travers l'horaire de la soirée, il faudra être très avare de temps. Je demanderais à tout le monde de collaborer et de toujours résumer leur pensée autant que passible, que ce soit dans les questions ou les réponses.

M. Fortier: M. le Président... est-ce qu'on peut demander au président d'être plus sévère envers nous-mêmes...

Le Président (M. Bordeleau): Envers vous-mêmes?

M. Fortier: ...pour qu'on puisse procéder d'une façon plus diligente?

Le Président (M. Bordeleau): Je veux bien tenter d'être plus vigilant sur le temps. Alors, si nous commencions dès maintenant, M. Vallée, c'est à vous.

Parti québécois de Duplessis

M. Vallée (Valmont): M. le Président, messieurs les membres de l'Assemblée nationale, mesdames et messieurs, ce mémoire est présenté par l'exécutif du Parti québécois de Duplessis en collaboration avec les membres du comité local du Parti québécois de Schefferville.

Je voudrais vous présenter, à ma gauche, M. Serge Monfette, M. Rodrigue Ross et, à ma droite, MM. Robert Crousset et Clermont Lavoie.

Présentation: À la suite de l'annonce faite par le gouvernement québécois qu'une commission parlementaire portant sur l'avenir de Schefferville soit convoquée, l'exécutif du

Parti québécois de Duplessis et son comité local de Schefferville ont décidé de présenter un mémoire sur le sujet.

Nous croyons qu'il est aussi de notre responsabilité de prendre officiellement position sur la question et de faire les recommandations qui s'imposent sur la présente situation et sur l'avenir, à la suite de l'annonce de la minière IOC de fermer ses exploitations, décision que nous déplorons vivement puisqu'elle touche la population de toute une ville et même d'une région.

Ce mémoire que nous vous présentons est à la mesure de nos moyens techniques et financiers. Il se veut, de plus, une prise de position de notre parti sur toute la question des fermetures d'usines et des mises à pied massives. Il est de notre devoir de s'assurer que les citoyens de Schefferville seront protégés face à ce qui leur arrive. Il nous faut veiller à ce que la minière IOC et les gouvernements provincial et fédéral prennent leurs responsabilités dans cette affaire. C'est pourquoi les gouvernements provincial et fédéral, la minière IOC, le conseil de ville de Schefferville et leurs citoyens devront s'asseoir à une même table pour discuter concrètement des intentions de chacun, quant à la survie de Schefferville. Par exemple, qui devra payer pour les services qu'il faudra conserver? Peut-on créer et maintenir suffisamment d'emplois pour assurer la survie de Schefferville? Voilà le genre de questions que la commission parlementaire devra débattre.

Nous voulons féliciter et remercier le gouvernement québécois et l'Opposition pour la sage décision de tenir cette commission parlementaire sur les lieux même de la ville de Schefferville. Nous espérons que ce précédent se propagera à tout le Québec. Il est à souhaiter que cette démarche sera hautement appréciée par la population de Schefferville et qu'elle sera suivie de décisions concrètes et rapides de la part des parties impliquées. Nous tenons à souligner que ce mémoire a été rendu possible grâce à l'aide financière que nous a fournie le Parti québécois de la région de la Côte-Nord.

Historique.

La ville de Schefferville, ainsi nommée en l'honneur de Mgr Scheffer, fut incorporée en 1955 en vertu de la Loi sur l'organisation municipale des villages miniers. Cette ville, sise à 54° degrés de latitude nord et 66 degrés de latitude ouest, entre le lac Knob et le lac Pearce, dans la province de Québec, est située au centre de la région minière en exploitation. La construction de cette ville fut commencée tard en 1953, mais c'est seulement au printemps de 1954 que les travaux furent entrepris sur une grande échelle. Le plan d'aménagement fut conçu par le service technique de la minière IOC, avec l'aide du ministère des Mines du Québec. En 1975, un programme fut lancé

pour l'agrandissement de la ville.

Au centre de la ville se dressent trois écoles et trois églises modernes; un hôpital de 33 lits a été ajouté à l'acquis de la ville. On a centralisé sous un même toit toutes les installations récréatives et sportives, soit l'aréna, le centre récréatif, le centre culturel et le gymnase. L'aréna possède une glace artificielle utilisable huit mois par année.

Schefferville a été reliée à Sept-Îles en 1954 par la voie ferrée. Le dernier crampon, symbole de la fin des travaux de la voie ferrée, a été enfoncé par M. J. R. Timmins, le 13 février 1954. Le premier convoi de minerai de fer a quitté la cour de triage de Silver Yard pour Sept-Îles le 31 juillet 1954. Dans les bonnes années, on pouvait compter 4500 personnes à Schefferville.

Responsabilité de la minière IOC. Depuis 1953, la minière IOC a amené sur place un grand nombre de travailleurs en vue d'exploiter les mines de fer qui s'y trouvent. De là l'obligation pour celle-ci de mettre sur pied les services communautaires nécessaires à la population et de les maintenir tant et aussi longtemps que toutes les solutions ne seront pas étudiées et les décisions rendues.

Ces travailleurs ont quitté leur village, leur ville et leur milieu de vie. Ils se sont donc déracinés pour s'établir dans ce pays nordique. Ce déracinement a été très douloureux pour beaucoup d'entre eux puisqu'il leur a fallu quitter père, mère, frères, soeurs et, souvent même, leur femme et leurs enfants. Ils ont aussi quitté beaucoup de leurs amis d'enfance pour venir s'installer dans une ville très peu organisée où ils ont dû s'intégrer dans un milieu austère et exigeant. Cet effort physique et moral a été un prix énorme à payer. Il ne faut surtout pas oublier que des familles complètes sont nées à Schefferville et que ces dernières ont un sentiment d'appartenance à cette région isolée qu'elles considèrent comme la leur, en plus de la connaître de fond en comble.

Si les travailleurs de Schefferville ont reçu beaucoup de la minière IOC, ils ont également donné énormément à cette même entreprise. Quand nous disons qu'ils ont donné beaucoup à cette entreprise, nous voulons dire qu'ils n'ont pas seulement travaillé durement sous des conditions climatiques sibériennes, doublées d'un isolement géographique et culturel.

Comparativement aux villes du sud ayant des populations équivalentes, Schefferville ne possède pas, et de loin, les mêmes avantages culturels comme des troupes de théâtre, des films récents, des réseaux de télévision, des journaux qu'il est possible de lire la même journée au lieu de deux à trois jours plus tard, des postes de radio, etc.

Que l'on pense seulement au fait que cette ville est située au 55e parallèle dans la taïga, qu'il faut faire dix heures de train pour se rendre à Sept-Îles pour rejoindre le réseau routier de la province, qu'il en coûte presque aussi cher pour aller à Sept-Îles en avion que pour se rendre de Montréal à Miami. De plus, comme Schefferville ne peut se permettre des cégeps et des universités, les étudiants et étudiantes doivent se séparer de leur famille pour de longues périodes et les coûts sociaux à payer sont énormes, dû au manque d'intimité familiale causé par de trop longues séparations, sans oublier les coûts financiers de transport et d'hébergement imposés par l'éloignement des grands centres. Depuis l'annonce de la fermeture de l'exploitation minière par la compagnie IOC, les citoyens vivent dans un climat d'incertitude et de désarroi. Cette incertitude, autant financière que professionnelle, joue un grand rôle déstabilisateur dans le cercle familial. La famille devient irritée et nerveuse, ce qui occasionne des disputes et des désaccords qui n'arriveraient pas normalement. Cette situation malheureuse doit être corrigée par la compagnie et par les gouvernements en assurant l'avenir de ces familles, autant de celles qui restent que de celles qui partent.

En développant des centres miniers au Nouveau-Québec et dans le Labrador, la minière IOC s'est donné une responsabilité morale très grande à l'endroit de ces populations. Maintenant qu'elle annonce son retrait de Schefferville, il est de sa responsabilité de s'assurer que les citoyens de cette ville soient traités le plus humainement possible. Ce faisant, elle se doit de prendre ses responsabilités pour corriger une situation qu'elle a elle-même créée.

Certaines familles voudront quitter Schefferville. Ces dernières ont accumulé des biens depuis plusieurs années. Il est normal qu'elles veuillent les apporter avec elles, car ils font partie de leur patrimoine. Même si elles veulent vendre leurs biens à Schefferville, à un prix raisonnable, pourront-elles le faire? On a le droit d'en douter si l'on tient compte du grand nombre de personnes qui sont déjà sans emploi et qui n'ont pas encore décidé, si oui ou non elles demeureront ou quitteront Schefferville.

Combien en coûte-t-il pour transporter un ménage de Schefferville à Québec ou à Montréal? Un transporteur de Sept-Îles, spécialisé dans le domaine, nous donne les chiffres suivants: Pour un ménage de 6000 livres, soit un ménage moyen pour une famille de deux adultes et de deux enfants, le coût du transport de Schefferville à Québec est de 4524 $. Pour le même ménage à Montréal, il est de 4719 $. Comme vous pouvez le constater, il n'est pas facile de sortir de Schefferville. Il en va de même pour les autres villes nordiques de Gagnon et de Fermont.

II nous semble que ces familles doivent être aidées par ceux qui ont bénéficié le plus de leur labeur depuis nombre d'années. La minière IOC se doit d'aider financièrement ceux qui désirent quitter Schefferville et se doit de mettre gratuitement à leur disposition les moyens de transport qu'elle possède pour qu'ils puissent déménager leur famille et leurs biens dans des régions économiquement mieux nanties.

D'autre part, la fermeture des installations minières de Schefferville porte des préjudices graves à d'autres travailleurs, si on analyse les impacts négatifs sur l'ensemble des opérations de la minière IOC, autant au Labrador qu'à Sept-Îles, et sur le chemin de fer, car cette décision comporte des réductions d'activités dans le domaine ferroviaire, dans le transbordement et aussi dans les services directs et indirects.

Les conséquences indirectes sont tragiques: mises à pied dans tous les secteurs connexes, incertitude des travailleurs face à leur réengagement, possibilité de perte d'avantages pécuniaires. C'est pourquoi la minière IOC et sa filiale Q N S & L R devraient intégrer ces travailleurs sur les listes déjà déposées devant le comité de reclassement, ce qui leur permettrait de bénéficier des primes de séparation et de tous les autres avantages possibles, incluant les primes de déménagement.

Gouvernement du Québec. Nous décelons une volonté sérieuse, dans l'attitude du gouvernement du Québec, de nous venir en aide et de contribuer à régler les problèmes des citoyens et citoyennes de Schefferville, problèmes causés par la décision de la minière IOC. Cette volonté politique est ressentie par la présence des membres de la commission parlementaire. Vous êtes ici en tant que représentants de l'Assemblée nationale du Québec pour écouter et poser des questions, ce qui vous permettra sûrement de mieux comprendre la situation et les besoins du milieu. Nul doute que vos recommandations au gouvernement et aux autres parties impliquées auront beaucoup d'importance et contribueront à aider nos concitoyens et concitoyennes de Schefferville. À ce moment-ci, nous voulons demander à la commission de recommander au gouvernement le maintien de tous les services gouvernementaux actuels, selon les besoins de la population, puisque c'est maintenant que se font sentir les besoins réels. Le gouvernement doit aller aussi loin que de fournir des services additionnels pour soutenir les familles qui veulent toujours demeurer à Schefferville en aménageant un bureau provisoire regroupant différents ministères pour aider ceux et celles qui désirent se prévaloir des services gouvernementaux. Le gouvernement doit aussi maintenir son aide financière à la ville de Schefferville pour qu'elle puisse maintenir ses services à la population, incluant les services de loisirs.

À la suite de ces énoncés qui sont des exemples - on devrait lire "généraux" - nous demandons à la commission de tenir compte, dans son rapport au gouvernement du Québec, des sujets décrits dans les pages suivantes: A) Fonds minier; B) Fosse du Labrador et planification du développement minier en milieu nordique; C) Action des ministères; D) Table de concertation.

Fonds minier. Nous regrettons que le gouvernement n'ait pas légiféré sur la création d'un fonds minier, ce qui aurait été un outil fort utile pour réintégrer les travailleurs miniers de Schefferville dans un milieu compatible avec leur mode de vie.

Nous osons croire que nous vivons la première et dernière fermeture d'une ville minière au Québec. Nous pressons le gouvernement de préparer et de faire adopter à court terme une loi-cadre sur le fonds minier. Nous espérons que la malheureuse situation vécue par les citoyens de Schefferville sera un exemple qui motivera le gouvernement à réagir sans plus de délai. En l'absence d'une telle loi protectrice pour les citoyens des villes minières, nous exigeons que le gouvernement du Québec applique toutes les mesures de pression possibles sur les compagnies impliquées afin qu'elles respectent les obligations morales envers les employés et citoyens de Schefferville. Ces mesures de pression pourraient aller aussi loin que l'abolition des droits miniers de toutes les compagnies qui ne respectent pas la réglementation de l'État.

De plus, nous pressons le gouvernement du Québec de légiférer le plus rapidement possible en votant une loi visant à civiliser les entreprises qui pratiquent des mises à pied massives et, donc, des fermetures d'usines. Cette loi devrait les obliger à verser des compensations aux travailleurs touchés par de telles décisions.

Nous demandons que le gouvernement du Québec en fasse une de ses priorités, comme l'avait promis le premier ministre, René Lévesque, lors de la dernière campagne électorale.

Fosse du Labrador et planification du développement minier en milieu nordique. Nous demandons au gouvernement du Québec d'établir, une fois pour toutes, une planification à court terme et à moyen terme de l'exploitation minière, en particulier dans la fosse du Labrador qui, selon des experts en la matière, demeure le potentiel le plus intéressant de l'ensemble du Québec. En passant, qu'il nous soit permis de déplorer que le seul minerai exploité jusqu'à maintenant soit dans le domaine du fer, et nul doute que la baisse de la demande ferreuse permettra d'accélérer l'exploration, mais il sera nécessaire de pousser au

maximum les interventions afin de permettre cette accélération.

Il est temps que le gouvernement du Québec s'implique, si nécessaire, en faisant l'exploration conjointement avec les compagnies minières car plus de fonds investis donneront naissance à plus de recherches et permettront d'effectuer un inventaire exhaustif ayant pour résultat la connaissance de gisements exploitables sur une base rentable.

En somme l'action du gouvernement est essentielle dans cette étude. Il ne faudrait pas que le développement de nos richesses se fasse uniquement dans l'intérêt des compagnies. En plus d'y trouver leur dieu, ces dernières développeront un sens civique qui profitera au maximum aux citoyens du pays où elles prélèvent des richesses qui génèrent des profits.

Si un tel plan se réalise, il ne faudrait plus parler alors de fermeture de villes minières mais bien d'ouvertures en plus de rentabiliser les villes existantes. L'avenir du Québec est dans le nord, et même si la conjoncture économique masque cette réalité, il faut intensifier l'inventaire de nos richesses minières.

Si vous le permettez, revenons maintenant à Schefferville qui pour nous est la plaque tournante, le carrefour, le lieu de rencontre et la voie d'accès aux richesses naturelles de toutes sortes que recèle la côte du Labrador. Si Schefferville n'existait pas il faudrait l'inventer. Schefferville est nécessaire pour une exploration plus poussée des richesses minières de cette grande région québécoise. Depuis les années 40, des équipes d'explorateurs miniers ont établi leur quartier général à Schefferville. Elles ont trouvé plus facile et plus économique de faire de la recherche minière à partir de Schefferville, que d'utilier des bases de ravitaillement sises ailleurs, malgré que ces dernières soient souvent nécessaires, dépendant du projet d'exploration.

Nous croyons que le gouvernement du Québec doit se doter d'un programme de recherche spécifique pour la Côte-Nord, et spécialement pour le nord de Schefferville, quitte à investir conjointement avec l'entreprise privée. Par ces temps de crise, le gouvernement du Québec, même si l'argent est rare, ne peut manquer l'occasion de faire sentir sa présence à Schefferville par des projets de création d'emplois dans le domaine de la recherche minière.

Vous comprendrez que par le passé, on avait l'habitude de voir arriver au printemps de nombreuses équipes de spécialistes à la recherche de nouvelles ressources. Ces équipes quittaient Sept-Îles par le train pour se rendre à Schefferville. De là, elles continuaient leur route par avion vers des lieux plus au nord.

Dans les cas d'implantation de nouvelles exploitations minières dans les milieux nordiques, le gouvernement devrait obliger les entreprises impliquées dans ces dits projets, à se rencontrer autour d'une table ronde avec les représentants des syndicats intéressés et le ministère responsable du dossier minier, afin de déterminer les conditions de travail, les conditions de fermeture, l'établissement de nouvelles villes, et l'agrandissement ou encore le maintien d'une ville existante. Ceci dans le but d'éviter les erreurs du passé dues à des projets de villes champignons et où on entrevoit maintenant la possibilité que ces dernières deviennent des villes fantômes découlant d'un manque de planification et d'exploration.

Enfin, une telle concertation pourrait favoriser les compagnies, le gouvernement et les travailleurs en évitant d'être pris pour amener un soutien financier à ces dites localités qui se créent naturellement autour de tel projet sans suffisamment de planification.

Action des ministères. Nous demandons au gouvernement du Québec de mandater différents ministères pour faire des études de faisabilité et de rentabilité de projets qui pourraient s'implanter dans la région de Schefferville, ce qui serait possible et non pas de créer mais d'assurer sa survie. En plus de maintenir les quelques emplois qui sont actuellement assurés par les différentes instances et à titre d'exemple nous citons les suivants: (21 heures)

Connaissant les atouts de la région pour la chasse et la pêche, différents ministères concernés pourraient aider à développer l'industrie touristique, et au maximum, en coordination avec le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Connaissant la capacité des infrastructures, il serait intéressant d'établir un projet pilote pouvant créer des emplois pour la jeunesse de l'endroit; le ministère de l'Environnement pourrait établir un projet d'étude sur les effets causés à la nature par le "débalancement" de l'écologie, sur la flore, la faune et les cours d'eau.

Table de concertation. Nous demandons au gouvernement du Québec de créer une table de concertation qui serait formée des représentants des citoyens de Schefferville, de l'hôtel de ville, du mouvement syndical, des représentants de la minière IOC, des représentants des gouvernements, et que cette table de concertation ait comme but d'évaluer les besoins immédiats de la population de Schefferville et de veiller à ce que la population soit assurée de pouvoir satisfaire ses besoins quotidiens en nourriture, en logement, en services socio-récréatifs et de transports, etc; de préparer, d'évaluer et de concrétiser tout projet créateur d'emplois; de reclasser et de

recycler des travailleurs afin de les intégrer à la population active de Schefferville ou encore ailleurs en province.

Les fonds nécessaires au fonctionnement de ce comité ainsi que ceux destinés aux projets mis sur pied devraient être assumés par la minière IOC et par tous les gouvernements, qui doivent assurer le bien-être de tous les citoyens, et ce par respect pour ces travailleurs et ces ex-travailleurs envers lesquels les parties ont des obligations morales.

Nous croyons sincèrement que, face à la dure réalité de la fermeture des installations minières et à la situation de la ville de Schefferville, seuls les citoyens et les citoyennes de cette ville peuvent décider de leur avenir et de celui de leur ville. Les parties doivent fournir toutes les techniques nécessaires.

Le gouvernement fédéral. Dans ce dossier, le gouvernement fédéral doit assumer ses responsabilités financières et morales à l'endroit de la population de cette ville. Est-ce que le gouvernement fédéral a l'intention de donner les mêmes services que ceux qu'il fournit présentement à la suite de la fermeture de la mine? Nous pensons à des services tels que les postes, l'aéroport et les affaires indiennes. Nous savons que la minière IOC a réduit son service ferroviaire entre la jonction Ross Bay et Schefferville et tente présentement d'obtenir du gouvernement fédéral le droit de rendre permanent l'abandon d'un train par semaine, alors qu'il y avait auparavant deux trains par semaine. La population est en droit de savoir si la minière IOC a l'intention de garder ouverte la ligne de chemin de fer entre la jonction Ross Bay et Schefferville. Il est du devoir du gouvernement fédéral de s'assurer que la population de Schefferville soit desservie le plus adéquatement possible par le chemin de fer de la minière IOC. En conséquence, le gouvernement fédéral doit refuser à celle-ci de réduire son service de train entre la jonction Ross Bay et Schefferville.

Conclusion. En conclusion de ce mémoire, nous voulons formuler les commentaires suivants: La fermeture des installations minières de Schefferville nous fournit l'occasion de rappeler au gouvernement du Québec qu'il est urgent de se donner une législation d'avant-garde qui protégera les populations aux prises avec des fermetures de villes minières. Tout aussi importante sera la création d'un fonds minier dont le besoin se fait sentir par les temps qui courent, principalement sur la Côte-Nord. Nous pressons le gouvernement québécois de faire plus en ce qui concerne la planification à long terme, l'exploration et le développement de la fosse du Labrador et de la Côte-Nord.

Nous voulons féliciter tous les intervenants présents à cette commission parlementaire et nous osons croire que des actions positives et ponctuelles en faveur de la population de Schefferville découleront des discussions en cours. La population veut savoir ce qu'il adviendra de sa ville. Il est du devoir de la commission de l'éclairer.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: M. le Président, je voudrais remercier l'exécutif du Parti québécois du comté de Duplessis et particulièrement le comité local du Parti québécois de Schefferville, parce que, à la lecture du mémoire, au moins on se rend compte qu'en associant le comité local du Parti québécois de Schefferville... Ayant eu l'occasion, avant de venir ici à Schefferville de rencontrer la population et d'entendre les mémoires, d'en prendre connaissance, pour ceux qu'on avait reçus, je reconnais que vous êtes sûrement très près de la réalité vécue ici à Schefferville, puisque, à plusieurs égards, vous avez des suggestions similaires à celles qu'on retrouve dans la plupart des mémoires. Dans ce sens-là, je pense que c'est la preuve que l'exécutif du Parti québécois et, particulièrement sa faction du comité local, sont sûrement actifs dans le milieu et sûrement en contact régulier avec la communauté scheffervilioise. Et dans ce sens-là, il est intéressant de constater que vous aussi vous endossez certaines recommandations qui nous ont été faites par la plupart des intervenants et qui, possiblement, tout au cours de la journée, continueront de nous être répétées, soit la question du maintien des services les plus fondamentaux, soit la question d'essayer de se retourner rapidement comme gouvernement et de prendre des décisions par rapport à la nécessité d'offrir, dans les meilleurs délais, les perspectives d'avenir les plus palpables.

Il n'y a pas, quant à moi, d'éléments très discutables puisque le mémoire comme tel évoque des choses qui ont déjà été évoquées. Mais j'aimerais peut-être approfondir quelques orientations que vous voulez donner à des sujets qui m'apparaissent d'importance et qui apparaissent au gouvernement également de très grande importance.

Pour ce qui est d'une suggestion majeure, celle de créer une table de concertation, je tiens à vous signaler qu'on retrouve à peu près la même formule, quant à la composition à savoir un représentant de chacun des deux paliers de gouvernement, les citoyens bien sûr, votre communauté, la Compagnie minière IOC, les syndicats; je pense qu'il y a un consensus assez clair sur la composition de cette table de

concertation. Je voudrais peut-être juste avoir des précisions de votre part puisque, si vous le suggérez et que vous en faites une mention importante, cela signifie que vous vous êtes arrêtés au rôle de cette table de concertation. J'aimerais savoir de votre part, dans quel délai vous pensez que cette table de concertation devrait se mettre au travail et quel devrait être - et c'est surtout cela qui m'apparaît le plus important parce que, bien sûr, le gouvernement devra faire ses devoirs et préciser quel type de mandat il devrait confier à une telle table de concertation - si c'était vous, l'exécutif du Parti québécois, qui aviez à donner un mandat précis avec un échéancier à cette table de concertation, quel serait à peu près le mandat que vous lui confieriez?

M. Vallée: Je pense qu'il est important d'écouter la population et d'inventorier les besoins de la population, les besoins immédiats.. D'accord? S'assurer, par exemple, essayer de faire en sorte de connaître les coûts de ces besoins, et comment on pourrait justement défrayer ces coûts et qui devrait le faire. Est-ce le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral, la Compagnie minière IOC? Je pense que les deux paliers de gouvernement, de même que la minière IOC ont des responsabilités dans ce dossier. Et je pense qu'il est important de s'assurer, au départ... Et quand vous me dites: quand cette table devrait-elle être créée? Je pense que ce doit être dans les meilleurs délais, c'est-à-dire à la suite de cette ronde de rencontres. Et pourquoi dans les meilleurs délais? Parce que la population a besoin de savoir et ce n'est pas au mois de juin, ce n'est pas au mois de juillet, c'est au mois de février, au mois de mars, au mois de février au plus tard qu'on a besoin de savoir.

M. Gendron: D'accord. Dans votre mémoire, vous avez insisté passablement sur la nécessité d'avoir ce que j'appelle un plan d'intervention plus particulier pour ce qui est de l'exploration minière dans la fosse du Labrador. Et, dans ce sens, je pense que la préoccupation du gouvernement du Québec est réelle. Le ministre de l'Énergie et des Ressources aura l'occasion, je pense, au cours de la commission, de préciser un peu plus quel type d'intervention. Mais si j'avais à vous demander le rôle éventuel de certaines sociétés d'État, dans un tel plan d'exploration minière, comment voyez-vous, entre autres, un mandat particulier à SOQUEM?

M. Vallée: Nous pensons...

M. Gendron: Est-ce que vous croyez que les sociétés d'État ont un rôle particulier dans l'exploration plus poussée, plus accélérée de la fosse du Labrador?

M. Vallée: Nous pensons que le gouvernement, en collaboration avec les compagnies minières, devrait justement intensifier la recherche minière dans la fosse du Labrador. Si le gouvernement investit 5 000 000 $ et que les compagnies minières investissent 5 000 000 $, cela fait 10 000 000 $. Par conséquent, cela fait plus de recherche, on va mieux connaître ce que recèle la fosse du Labrador, en ce qui concerne les richesses naturelles. Le gouvernement pourra établir un meilleur plan de développement cohérent de cette richesse, de façon qu'on puisse connaître un peu mieux l'avenir.

Si cette exploration se fait uniquement par les compagnies minières, il y a un risque que ce qu'elles découvriront comme richesse naturelle, elles le garderont pour elles, c'est-à-dire s'il y a du minerai, quelle en est la quantité et la qualité. Il se peut très bien que le minerai soit là et soit exploitable dans des délais raisonnables. Si la compagnie minière qui fait la recherche garde pour elle ses secrets, il se peut très bien que cette compagnie l'exploite seulement dans vingt ou vingt-cinq ans parce qu'il ne serait pas dans son intérêt de le faire maintenant. C'est pourquoi il est important que le gouvernement s'associe avec les compagnies minières.

M. Gendron: Vous évoquez également la nécessité pour le gouvernement du Québec de se doter, le plus rapidement possible -j'emploie votre propre expression - d'une législation d'avant-garde qui protégera les populations aux prises avec des fermetures de villes minières. J'aimerais que vous nous donniez des précisions ou votre propre conception d'une loi ou d'une mesure législative d'avant-garde pour contrer et pour être mieux préparés à faire face éventuellement à tous les inconvénients que pose l'absence d'une loi dans une telle perspective. En particulier, eu égard à certains délais, j'aimerais que vous vous expliquiez. Vous vivez ici dans la communauté locale. Vous avez des amis, vous avez des contacts fréquents. J'aimerais que vous portiez un certain jugement sur les délais de fermeture de la minière IOC. Cela a été évoqué par M. Marois, ce matin. Il est arrivé, ailleurs au Canada ou dans la société nord-américaine, que des compagnies minières aient dû fermer leurs portes. C'est toujours le même problème, un gisement minier cela s'épuise. J'aimerais savoir si, selon vous, le délai que la minière IOC a décidé d'appliquer dans le cas que nous connaissons vous apparaît convenable ou si vous endossez également l'espèce d'ouverture qui a été manifestée par M. Marois et - à ma connaissance - confirmée par M. Brian Mulroney de voir à prolonger ce délai pour permettre à vos citoyens une plus grande

capacité réelle de faire un choix en toute connaissance de cause, eu égard à des questions de logement, de primes de séparation de quelque nature que ce soit. Quel est votre point de vue?

M. Vallée: La minière IOC a déposé, ce matin, son mémoire. Nous n'avons pas eu le temps de l'étudier mais nous en avons pris connaissance à sa lecture. Je pense qu'il appartient aux citoyens de Schefferville, aux travailleurs de Schefferville - je ne pense pas uniquement aux travailleurs de la minière IOC, je pense également à tous les travailleurs de Schefferville - d'étudier en profondeur ce que leur offre la minière IOC pour essayer de déterminer si cela est suffisant, si cela est correct. Je pense qu'il est difficile, ce soir, de décider si cela est suffisant ou non parce que cela implique énormément de questions techniques auxquelles, personnellement, je ne connais pas la réponse.

En ce qui concerne les fermetures d'usine, quand on pense à une société quelconque qui ne peut plus faire honneur à ses obligations financières, elle dépose devant la cour ses biens et le juge décide si elle sera déclarée en faillite ou non. Si c'est le cas, toute une procédure s'établit, s'amorce. Cette procédure a pour but de protéger les créanciers externes, de protéger les propriétaires, de protéger la société, de protéger les clients. Dans le cas d'une société minière, s'il y avait un cadre de référence, s'il y avait une loi lorsqu'une société minière décide de fermer ses portes, les travailleurs seraient mieux protégés puisqu'on saurait un peu à quoi s'en tenir. Actuellement - je ne dis pas qu'on est pris au dépourvu mais c'est au mois de février qu'on est ici à Schefferville - il n'existe pas de loi, une vraie loi. Il n'y a pas de cadre de référence, par conséquent, je pense que les populations seraient mieux protégées. On connaîtrait à l'avance les fermetures de villes minières et comment ces fermetures doivent s'articuler. Je pense, par exemple, au fonds minier. Quand nous parlons du fonds minier, nous disons, nous, que c'est une assurance, c'est un fonds qui est créé, c'est une réserve financière et ce fonds aurait pour but - sans que je sois un spécialiste de la question, d'autres viendront après moi pour en discuter - le recyclage de la main-d'oeuvre. Il pourrait avoir pour but le dédommagement des mineurs, faciliter l'établissement de protocoles d'entente, le transfert des fonds de retraite, ce qui serait très important. Ce fonds pourrait être alimenté par les sociétés minières et aussi par les travailleurs. Je pense qu'il est important et, profitant de l'occasion, je demande à l'Opposition d'aider le gouvernement afin que les travailleurs puissent avoir un fonds minier dans les meilleurs délais.

M. Gendron: Une dernière question. Sur le fonds minier, M. Vallée, c'est à dessein que je n'en ai pas parlé parce que, demain, je sais que d'autres porte-parole, dont particulièrement le groupe des métallos, voudront sûrement en parler et on aura l'occasion peut-être d'expliciter davantage. Mon collègue, M. Marois, donnera des précisions concernant le dossier toujours, à mon avis, très important, particulièrement dans les régions minières, du fonds minier.

Ma dernière question, je voudrais simplement la poser comme ceci: Advenant le cas - et là ce n'est pas un voeu et ce n'est pas un souhait, j'espère qu'il en sera tout autrement mais, je l'ai mentionné lors de l'ouverture, je pense qu'il appartient aux citoyens en toute connaissance de cause de décider de leur choix: demeurer ou partir, en souhaitant que les perspectives d'avenir qu'on va leur offrir leur permettront de faire le choix le plus réaliste possible - où les choses n'arriveraient pas comme je viens de l'évoquer, c'est-à-dire qu'il y aurait une saignée très importante de la population, est-ce que votre conviction est que, de toute façon, les deux services de transport qui existent à Schefferville, à savoir le service aérien et le service ferroviaire, devraient être maintenus? Quel est votre point de vue?

M. Vallée: Les services doivent être maintenus, les coûts doivent être partagés par le gouvernement du Québec, même si c'est une responsabilité du gouvernement fédéral - je pense au service aérien, je pense à l'aéroport, je pense au service par train -et également par la minière IOC. Mais les services doivent être maintenus et la population ne doit pas être inquiétée par une diminution des services.

M. Gendron: Je vous remercie, M. Vallée, ainsi que toute votre équipe.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je voudrais, premièrement, remercier M. Valmont Vallée pour la présentation de son mémoire. Vous allez comprendre, M. Vallée, que mardi nous avons eu l'occasion de rencontrer l'association libérale ainsi que son président, qui est avec nous ce soir, M. Marcel Dupuis, et nous avons visité, entre autres, SIDBEC-Normines, Rayonier et maintenant nous sommes ici à Schefferville. C'est un problème qui affecte sûrement Schefferville, mais qui tient compte de l'ensemble de la Côte-Nord qui est actuellement en difficulté.

À la page 10, entre autres, vous traitez du gouvernement du Québec. Vous

mentionnez: "Nous décelons une volonté sérieuse dans l'attitude du gouvernement du Québec". Je diffère quelque peu d'opinion avec la présentation de votre mémoire à cet article. Nous avons, justement, accepté de nous déplacer à Schefferville dans le but de déceler, en fait, cette volonté du gouvernement parce que nous ne l'avons pas encore décelée, nous, du côté de l'Opposition. Au contraire, nous constatons que le gouvernement - il est au pouvoir depuis sept ans - a en main des études importantes qui ont été déposées dans les années 1978, 1979 et 198D par un organisme du gouvernement du Québec, c'est-à-dire l'Office de planification et de développement du Québec. Dans certains de ces rapports, on retrouve des orientations intéressantes qui étaient proposées par l'OPDQ que le gouvernement aurait pu appliquer immédiatement en 1979. Malheureusement, nous sommes en 1983 et aucune de ces recommandations n'a été appliquée. Nous assistons actuellement à la fermeture d'une ville qui est sûrement très importante et qui est encore beaucoup plus importante pour les citoyens qui y résident.

Nous comprenons qu'une partie importante de votre population a déjà quitté la ville mais il y a une partie de cette population qui veut demeurer à Schefferville et qui veut voir cette relance économique au sein de la Côte-Nord.

M. le Président, là où nous partageons l'opinion du Parti québécois du comté de Duplessis, c'est à la page 14 quand vous mentionnez: "Nous demandons au gouvernement du Québec d'établir une fois pour toutes une planification à court terme et à moyen terme..." Je pense qu'il est très important que le gouvernement établisse une planification en tenant compte non seulement des problèmes dans la conjoncture économique dans laquelle nous vivons, mais une planification à court terme et à moyen terme dans le but de sécuriser une population importante de la Côte-Nord.

J'ose souhaiter, M. le Président, que ce gouvernement tiendra compte des aspirations des citoyens, et tenant compte du fait que vous êtes sûrement beaucoup plus près de ce gouvernement que nous ne le sommes, étant donné que nous sommes là pour le remplacer le jour où les Québécois et Québécoises auront compris la défaillance totale de ce gouvernement dans la gestion québécoise actuelle... je tiens cependant à vous souligner qu'avant d'y arriver, nous souhaitons que ce gouvernement pose des gestes importants et dans un avenir rapproché.

Comme dernier élément, au sujet des conclusions de la page 22, nous voulons féliciter tous les intervenants présents à cette commission parlementaire. Nous osons croire que des actions positives et ponctuelles en faveur de la population de

Schefferville découleront des discussions en cours. La population veut savoir ce qu'il adviendra de sa ville et il est du devoir de la commission de l'éclairer. Nous sommes très conscients que la commission a un travail important à faire ici à Schefferville et nous souhaitons, M. le Président, que le gouvernement sera en mesure, dans les prochains mois, d'annoncer des politiques tenant compte du court terme, et de convoquer aussi, à la suite de la proposition que mon collègue le député d'Outremont faisait ce matin, une commission parlementaire dans les plus brefs délais dans le but d'étudier à moyen terme et à long terme les problèmes de l'ensemble de la Côte-Nord. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie. Je vous remercie également, M. Vallée, ainsi que les personnes qui étaient avec vous, de vous êtes présentés devant notre commission.

J'appelle immédiatement le groupe suivant, soit la nation des Naskapis de Schefferville. Je demanderais au chef de la bande, M. Guanish, de s'approcher.

Veuillez également identifier les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît!

Les Naskapis de Schefferville

M. Einish (Sampson): M. le Président, avant de commencer, j'aimerais présenter la délégation des Naskapis. À mes côtés, le chef des Naskapis, M. Joseph Guanish; un conseiller spécial, M. Joney Mameamskum; un conseiller auprès des Naskapis, M. Paul Wilkinson; un membre du conseil de bande et président par intérim de la Société de relogement des Naskapis, M. Elijah Einish; un conseiller spécial, Mme Denise Geoffroy; un membre du conseil de bande des Naskapis, M. Joseph Peastitute; un membre du conseil d'administration de la Société de développement des Naskapis, Mme Louise Uniam. Je suis Sampson Einish, président de la Société de développement des Naskapis.

Le chef des Naskapis présentera un prologue en naskapi, sans traduction, ni en anglais ni en français. C'est un dialogue relié à la présentation du sommaire de notre peuple de demain. C'est le chef, M. Joseph Guanish, qui va le présenter en naskapi. C'est la première page du prologue. (21 h 30)

Le Président (M. Bordeleau): D'accord.

M. Guanish (Joseph): S'exprime en naskapi.

M. Einish (Sampson): Puisque le prologue a été présenté par le chef, une autre présentation sera faite par M. Joney

Mameamskum, notre conseiller spécial, qui vous la lira en anglais. Cette fois-là, ce sera en anglais, le langage mondial. Il y a un mémoire supplémentaire que nous avons préparé. Vous pouvez le lire. On a distribué le texte qui est devant vous.

M. Mameamskum (Joney): Thank you for the introduction, Sam Mr. Chairman, honorable members of this commission, Chief Joe Guanish has asked me to present a supplementary brief on his behalf and on behalf of the Naskaspi... Band Council, and especially the Naskapi people of Schefferville. When we prepared our briefing title, Our People Tomorrow, my people and I believed that we would start moving into our new village, Kawawachikamach, on the 7th of February 1983. We were aware of the fact that the village would not be totally finished until early 1984, but we felt confident that it already offered safe and comfortable shelter.

Our colleagues of the Naskapi Relocation Corporation had informed us of certain problems with the road from Schefferville to Kawawachikamach. Basing myself on this information, I had already written to the Government of Québec, on the 11th of January 1983, refusing to accept the access road. I append a copy of my letter to this brief.

As late as the 11th of January 1983, I was optimistic that our problem relating to the road would be rapidly solved. Since then, however, there have been two major developments. First, I have learned that the Ministry of Energy and Resources of Québec has refused definitely to accept any responsibility for maintaining the road that it has built. Secondly, I have been informed that the Ministry of Transport of Québec refuses to accept ownership of that part of the road situated on the land of Québec, that it refuses to pay its full share of clearing the road in winter 1982 and 1983 and that it will make no commitment whatsoever to provide money for clearing and maintaining the road after mid-1983.

As far as I can determine, no one in the Government of Québec is prepared to correct the error of design in the road that I described in my letter of the 11th of January 1983. Let me note that I have received satisfactory assurances from the Government of Canada that it will assume responsibility for full cost of clearing and maintaining that part of the access road that falls under its jurisdiction.

Without a firm guarantee from the Government of Québec to correct the error of design in the access road in summer 1983 and to maintain its part of the road indefinitely thereafter, my councillors and I cannot take the responsibility of instructing our people to begin moving to

Kawawachikamach. Consequently, I inform you today that the Naskapi People refuse to move to Kawawachikamach until the Government of Québec assumes its full responsibility for the access road.

I inform you also that we hold the Government of Québec entirely responsible for all costs associated with our inability to move to Kawawachikamach which I value at approximately 10 000 $ a month. The ludicrousness, inconsistency and injustice of the position of the Government of Québec in this matter is illustrated by the following. On one hand, the Government of Québec refuses to pay its share of the cost of the Naskapi school, thereby forcing our children to travel daily between Kawawachikamach and Schefferville. On the other hand, that same Government refuses to clear the snow from the very road along which those children must travel.

I thank you for your time, commission members. Thank you.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

Peut-on procéder maintenant avec le mémoire comme tel?

M. Einish: Oui. Je pense que vous avez tous lu le mémoire qu'on présente. Il y a même une table des matières où les solutions sont incluses, etc. Présentation... Tout est supposé être à votre disposition. Je vais lire la table des matières. Le prologue a déjà été lu par le chef en naskapi, de même que l'introduction et les objectifs. En quoi les Naskapis sont-ils concernés? Il y a même la position du peuple naskapi. On a étudié une solution, soit d'avoir un centre de formation, un usage accru du chemin de fer pour les touristes, la mine de Schefferville, un musée industriel, un casino, un pénitencier, l'exploitation de la tourbe, les pourvoiries, la chasse commerciale du caribou, le lichen, un jardin zoologique nordique, un centre d'écologie nordique, une école des arts et du spectacle, une ferme d'élevage d'animaux à fourrure, un programme d'échange pour les étudiants, des bureaux gouvernementaux à Schefferville et l'exploitation d'hydroélectricité.

Ce sont les solutions qu'on a bien étudiées en comité pour pouvoir les présenter. Aussi, il y a une autre suggestion qui a été faite par le chef Guanish, hier; c'était l'exploitation des ressources forestières, qui n'était pas incluse dans ce rapport. Dans ce domaine, c'est presque dans le sens d'une participation économique.

Je n'insisterai sur aucune des solutions, car elles sont bien expliquées dans les documents que constitue notre présentation. Peut-être avez-vous bien étudié cette documentation.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. On

peut donc procéder aux questions. Je donne la parole au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, je voudrais remercier votre chef de ce message de solidarité envers les autres groupes du milieu. Cela m'apparaît un modèle - en tout cas en ce qui me concerne - de solidarité, de soutien mutuel entre les groupes d'un même coin de pays. Je trouve cela passablement exemplaire et je tiens à l'en féliciter.

Je voudrais également vous dire que vous avez une série de points très intéressants sur lesquels on a déjà certaines réflexions, et sur d'autres qui méritent sans doute d'être étudiés.

Cet après-midi, j'ai eu la chance de disserter un peu sur la commercialisation du caribou. Vous y faites allusion comme étant un sujet à l'étude chez vous et je trouve cela très intéressant. Si on en vient à conclure une entente, cela assurera sans doute une retombée économique fort intéressante pour l'ensemble des gens du milieu.

Également, vous...

Mme Geoffroy (Denise): ... M. Chevrette: Excusez.

Mme Geoffroy: ...une fois de temps à autre, je m'excuse.

M. Chevrette: Je vais m'arrêter, madame. Si j'avais su, je vous aurais rendu la tâche plus facile.

Le Président (M. Bordeleau): Je comprends que vous voulez traduire.

Mme Geoffroy: C'est que, ici, dans le groupe, il y a seulement M. Einish qui comprend le français. M. Guanish et le reste des autres intervenants parlent l'anglais et le naskapi. C'est pour cela qu'il faut traduire du français à l'anglais et de l'anglais au naskapi.

M. Einish: M. le Président, pourriez-vous permettre que d'autres fassent leur présentation en anglais, parce que c'est notre droit de parler en anglais comme en français? Il y aurait d'autres personnes qui pourraient répondre aux questions si vous aviez la politesse de les poser en anglais.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre. (21 h 45)

M. Chevrette: On a beau être poli, il faut avoir les capacités! Je demanderai donc à mes collègues, tantôt, de poser quelques questions en anglais. D'accord?

Je voudrais parler de la route, sujet que vous avez apporté en supplément ce soir. Mon collègue de l'Énergie et des Ressources vous fournira une réponse dès ce soir.

Maintenant...

M. Ciaccia: Je voudrais faire une suggestion, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Si je peux faire une suggestion au ministre, peut-être pourriez-vous faire vos interventions une à la fois afin qu'on puisse traduire en naskapi, ainsi ils pourraient comprendre; autrement, si vous parlez trop longtemps, il sera difficile pour eux de le traduire. Si vous parlez clairement, cela aidera aussi.

M. Chevrette: II ne faudrait surtout pas que vous commenciez à parler dans ce cas.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, quant aux pourvoiries, est-ce que les gens voient la possibilité d'un travail conjoint entre votre communauté et les non-Indiens du territoire?

M. Fortier: Très bien.

M. Wilkinson (Paul): M. le ministre, je pense que les Naskapis ont indiqué dans leur mémoire qu'ils s'intéressent à la pourvoirie. Ils ont décrit les façons d'élargir l'étendue des activités qui se déroulent dans les pourvoiries. Do you want to translate, Sir?

M. Fortier: You coordinate with the Whites.

M. Wilkinson: II y a toujours danger, lors d'une commission parlementaire, d'en profiter pour faire référence à tout un paquet de problèmes qui ne relèvent pas nécessairement de cette commission parlementaire. Je pense toutefois qu'il vaut la peine de mentionner qu'il existe depuis quelque temps un problème entre les autochtones, signataires des conventions et le gouvernement du Québec en ce qui concerne l'interprétation du droit de premier refus accordé aux Cris, aux Inuits et aux Naskapis. Tout ce qu'on peut dire là-dessus aujourd'hui, c'est qu'on espère vivement que ce problème sera réglé prochainement. On espère que le gouvernement du Québec retirera son appel contre le jugement qui a déjà été prononcé par la cour du Québec en faveur des autochtones. Une fois cet obstacle enlevé, je pense qu'on peut dire que les Naskapis sont bien prêts à collaborer avec toutes les autres parties impliquées pour améliorer la situation

des pourvoiries dans le Nord québécois, tant au profit des non-autochtones que des autochtones.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, je prends note de la remarque de M. Wilkinson et nous verrons à clarifier ces choses dans les meilleurs délais puisque, au niveau du jugement comme tel et de son inscription en Cour d'appel, nous n'avons pas les réponses précises à vous donner.

De toutes façons, je crois que le comité conjoint doit se réunir les 15 et 16 février et j'ai bon espoir qu'on pourra clarifier plusieurs points.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous pouvez continuer.

M. Chevrette: Je vais passer la parole à mon collègue de l'Énergie et des Ressources pour qu'il puisse répondre à votre question concernant l'aspect routier.

Je vous remercie, en ce qui me concerne, d'avoir présenté un message aussi clair. Je vous réitère mes félicitations quant à votre esprit de solidarité envers l'ensemble des communautés de Schefferville. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Une voix: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Wilkinson.

M. Wilkinson: La traduction est finie maintenant.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je vais répondre d'une façon très précise au nom du gouvernement sur la question de la route de Schefferville - vous excuserez ma prononciation là-dessus - qui donne accès au territoire et au lieu-dit Kawawachikamach. Pour ce qui est des autres points du mémoire et, en particulier, la dernière question soulevée au sujet de l'appel devant les tribunaux, je voudrais vous dire que nous allons, bien sûr, revoir vos propositions et en faire une analyse plus détaillée. Nous y donnerons suite rapidement, mais je pourrais tout de suite répondre sur la question de la route.

M. Einish: ...de la gentillesse à nous répondre puisque cela a pas mal évolué à la Société de relogement des Naskapis. Ils sont plus au courant de cette affaire concernant la voie d'accès à Kawawachikamach. Je crois que ce n'est pas la meilleure réponse, sur la voie d'accès.

M. Wilkinson: Je pense qu'on pourrait peut-être attendre la pleine explication de M. Duhaime.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je dois vous dire que le problème est très récent. J'ai ici la dernière correspondance de M. Gourdeau, du SAGMAI, qui date du 7 février 1983, c'est à quelques jours de nous. Je voudrais rappeler que la construction de cette route a été faite à même les budgets du ministère de l'Énergie et des Ressources et que, traditionnellement, les routes minières sont payées à même des budgets du ministère de l'Énergie et des Ressources et ensuite, pour des fins minières, administrées par le ministère de l'Énergie et des Ressources.

Dans ce cas-ci, puisqu'il ne s'agit pas d'une route minière comme telle, ou encore forestière, nous devions, suivant nos règles budgétaires, transférer la responsabilité de cette route au ministère des Transports qui vous a fait une proposition de prendre l'engagement de l'entretenir pour une année, c'est-à-dire en 1982-1983. Je peux dire, ce soir, au nom du gouvernement, de façon très claire, ceci: Que ce soit le ministère des Transports ou le ministère de l'Énergie et des Ressources, le gouvernement du Québec va prendre à sa charge l'entretien de cette route.

Une voix: C'est bien.

M. Wilkinson: Je pense que la première chose qu'on devrait peut-être clarifier c'est que, de l'avis des Naskapis, le problème n'est pas nouveau. Les Naskapis ont signé la convention du Nord-Est québécois en janvier 1978. Entre 1978 et 1980, il y a eu des études sur les possibilités de relogement. Lors de ces études, nous avons - pas nous mais les experts-conseils embauchés conjointement par le gouvernement et les Naskapis - étudié le site au bord du lac Matemace. Même en ce moment - si je me rappelle bien, c'était vers la fin de 1978 -M. Guanish les a avertis de la possibilité d'un problème avec le déneigement en haut de ce qu'on appelle ici Dolley Ridge. C'est basé sur les expériences acquises, entre autres, par la Compagnie minière IOC. À ce moment, le chef a suggéré aux ingénieurs un autre tracé pour ce qu'on appelle la voie d'accès. Les deux tracés ont été publiés dans le rapport de nos ingénieurs-conseils.

M. Perron: Est-ce que vous parlez de la

route...

M. Wilkinson: Je pourrais peut-être finir.

M. Perron: Allez-y, oui.

M. Wilkinson: La deuxième étape a été une visite à Schefferville faite par les ingénieurs du ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec. Lors de cette première visite, le chef leur a expliqué à nouveau ses craintes et ses inquiétudes. On leur a même donné le nom de trois personnes qui étaient toujours à l'emploi de la Compagnie minière IOC. On leur a conseillé d'aller les voir, de vérifier les rapports du chef. À notre connaissance, les ingénieurs responsables n'ont jamais rencontré les responsables de l'IOC. Cela fait déjà deux ans que la voie d'accès est ouverte. On a eu des problèmes l'hiver passé. Au cours de l'été passé, nous avons organisé une série de réunions avec les représentants du gouvernement du Québec, avec les représentants du gouvernement fédéral. Il a été question d'études, il a été question de toutes sortes de choses. Finalement, on est en plein hiver, cela fait déjà quatre mois que les Naskapis, par le biais de leur Société de relogement des Naskapis, paient les coûts du déneigement, ce qui représente 30 000 $ environ.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: II y a deux problèmes, M. le Président. Il ne faudrait pas qu'on se transforme ici en ingénieurs-conseils, spécialistes dans les questions de voirie. Il y a deux problèmes au dossier. Il y a une question de tracé et il y a une question d'entretien de la route durant l'hiver. Le ministère des Transports a fait une proposition que vous avez refusée pour l'instant, offrant 25 000 $ pour l'année en cours. Vous l'avez refusée parce qu'il n'y avait pas de problématique à long terme, d'une part, quant à l'entretien.

Deuxièmement, vous voulez des corrections quant au tracé. Ce que je vous disais tout à l'heure, sans pour autant vous dessiner ce soir où serait un tracé qui pourrait vous satisfaire, je vous dis tout de suite que pour ce qui est de l'entretien de la route et de son déneigement à long terme le gouvernement du Québec va en assumer la responsabilité.

Pour ce qui est du tracé, nous allons demander à nos ingénieurs, tant au ministère de l'Énergie et des Ressources qu'à vos ingénieurs-conseils, de se rencontrer dans les meilleurs délais et voir comment, ensemble, ils pourraient nous faire une suggestion. Pour autant que les coûts pourraient être raisonnables, il y aurait peut-être moyen de régler le problème.

Le Président (M. Bordeleau): On pourrait peut-être laisser du temps pour la traduction. Cela va, M. Wilkinson. (22 heures)

M. Wilkinson: Je pense que les Naskapis se sentent obligés de refuser, pour deux raisons: premièrement, on sait, à 100%, que le montant de 25 000 $ sera insuffisant. Les Naskapis ne voulaient pas signer un contrat qu'ils ne se savaient pas capables de respecter. Deuxièmement, ils ne voulaient pas demander à leur population, à la moitié de leurs membres, de déménager sans pouvoir assurer leur sécurité, surtout en ce qui concerne les écoliers qui devront voyager deux fois par jour, cinq jours par semaine entre le nouveau village et Schefferville. Ce n'est pas qu'ils ont voulu refuser. Les Naskapis veulent déménager. Ils ont de belles maisons qui sont bien plus confortables, bien plus faciles à entretenir que les maisons ici. Ils veulent déménager, mais ils n'ont pas pu.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, premièrement, je voudrais remercier M. Joseph Guanish et les Indiens naskapis pour le mémoire qu'ils nous ont présenté. Les recommandations qui sont contenues dans le mémoire vont au-delà des stricts besoins des Naskapis. Surtout, je voudrais m'excuser auprès du chef Joseph Guanish, parce que je veux faire des remarques en français. Je voudrais faire certaines représentations, non seulement poser des questions aux Naskapis, et je souhaite que cette commission parlementaire les prenne en considération.

Alors, si vous me permettez de parler français, je pourrais arrêter de temps à autre pour que vous puissiez faire la traduction au chef Joseph Guanish.

M. Einish: M. le Président, comme Paul Wilkinson l'a souligné, dans le domaine de l'éducation, c'est très important que l'éducation soit un élément essentiel pour les communautés et pour les jeunes. Tandis qu'avant, on avait toujours eu de la difficulté à appliquer la section de la convention s.ur l'éducation, soit dans les délais par un secrétaire-trésorier...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais rappeler à cette commission parlementaire l'attitude très raisonnable que les Naskapis ont prise durant les négociations de la convention de la Baie James. Durant ces négociations qui ont duré deux ans et auxquelles,

malheureusement, les Naskapis n'ont pu assister, sauf durant les dernières étapes, le gouvernement du Québec a été obligé, à cette époque, d'annuler tous les droits des Naskapis dans le territoire concerné sans que les Naskapis soient des signataires de l'entente. Alors, les Naskapis se sont vus obligés de renoncer à leurs droits. Cependant, il y avait un engagement du gouvernement du Québec de négocier avec eux. Mais placez-vous dans la position d'un des premiers peuples du Québec, lequel se voit enlever tous les droits qu'il avait depuis des temps immémoriaux. Il a accepté cela à la suite de la bonne foi du gouvernement de négocier avec eux. C'était une attitude très responsable et très raisonnable de la part des Naskapis. Je pourrais vous avouer, M. le Président, qu'à cette époque, moi-même, je me sentais un peu nerveux d'avoir été dans l'obligation de recommander cette procédure au gouvernement, mais on avait d'autres intérêts pour les Cris et pour les Inuits, qui voulaient signer absolument l'entente. On avait les contraintes de temps. Alors, je voudrais premièrement souligner l'attitude très responsable des Naskapis qui m'amène à faire des commentaires sur la position actuelle des Naskapis, sur l'entente qu'ils ont subséquemment signée avec le gouvernement du Québec.

Vous savez, si on veut le respect de nos coutumes, de notre langue, de nos traditions, de notre culture, ce respect commence par le respect que nous pouvons accorder, que nous devons reconnaître aux premiers peuples du Québec: les peuples autochtones. Je crois que les représentations que les Naskapis font ce soir, quant au respect de l'entente, devraient être prises très au sérieux par le gouvernement. Je suis surpris moi-même de voir qu'il y a des difficultés avec l'entente, des difficultés qu'on vient de souligner ce soir, qu'on vient d'apprendre, quant à la route d'accès au nouveau village des Naskapis qui a été bâti, à Kawawachikamach, et qui est près d'être occupée maintenant. Dans l'entente de la Baie-James, il y avait une obligation, il y avait une option qui avait été accordée aux Naskapis de se relocaliser. Le gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada, la Société de la Baie James, Hydro-Québec et tous les intervenants, tous les signataires de l'entente ont accepté cette option. Il ne faudrait pas que, aujourd'hui, par des moyens, même de bonne foi, on mette des bâtons dans les roues des Naskapis en disant: On a construit ce village, mais on va avoir des difficultés à s'y rendre. C'est comme dire à un locataire: Je vous loue votre logement, mais il faudra que vous me payiez un prix additionnel pour la clef du logement. Je ne pense pas que ce soit l'intention, ce n'est certainement pas l'esprit de l'entente. Je suis heureux de voir que le ministre s'est engagé ce soir en disant: Nous allons, le gouvernement du Québec, respecter l'engagement de payer le coût d'entretien.

Savez-vous que c'est par hasard que nous avons une commission parlementaire ici ce soir? Que serait-il arrivé si on n'avait pas eu cette commission parlementaire? Je voudrais souligner au gouvernement que vous avez des problèmes très sérieux avec SAGMAI, avec la mise en application de cette entente. Je ne pense pas qu'on puisse permettre que les autochtones soient obligés de faire des représentations comme ils le font devant une commission parlementaire qui a été mandatée, non pas pour voir aux problèmes des autochtones, mais pour regarder les problèmes des citoyens de Schefferville. Par hasard, ils viennent nous faire ces représentations et le ministre s'engage. Mais le mois prochain, l'année prochaine, s'il y a d'autres problèmes avec l'entente de la Baie-James et le Nord québécois, qu'allez-vous faire? Parce que si on ne peut pas respecter le droit des autochtones, cela sera aussi difficile de respecter les droits des citoyens de Schefferville. Je ne pense pas qu'on puisse se permettre deux poids et deux mesures.

Je voudrais vous remercier, encore une fois, en disant que les recommandations qui ont été faites par la bande des autochtones naskapis ne touchent pas seulement les problèmes des Naskapis, mais que cela va au-delà de leurs problèmes. Cela reconnaît une réalité du territoire nordique et des peuples qui habitent ces territoires, qu'ils soient Naskapis ou non.

Je voudrais poser quelques questions au chef Joseph Guanish. Quant à la relocalisation, au nouveau village qui a été construit, quel est le coût approximatif des installations dans ce nouveau village?

M. Wilkinson: Je pourrais peut-être vous renvoyer à l'annexe 8 de notre mémoire. On calcule de façon provisoire que le nouveau village va coûter autour de 13 000 000 $.

M. Ciaccia: Ce nouveau village a été construit d'après l'entente de la Convention de la Baie-Jame et du Nord-Est québécois. C'était une option, si je comprends bien, que les Naskapis avaient de se relocaliser. Le 1er décembre 1978, il y a eu une lettre de M. Norman Hawkins, de Peat Marwick et Associés, conseillers en administration, adressée à M. Paul Wilkinson, secrétaire du groupe d'études socio-économiques. Cette lettre faisait part de certaines informations que M. Hawkins avait obtenues de la compagnie Iron Ore. Apparemment, il y avait eu un article dans le Soleil disant que peut-être Iron Ore devrait terminer ses activités à Schefferville. M. Hawkins a confirmé qu'il avait parlé à un des représentants, un

assistant du président de Iron Ore à cette époque, M. Halsey, qui lui avait confirmé que c'était vrai, qu'il y avait un fondement à la rumeur voulant qu'Iron Ore étudie la possibilité de cesser ses activités à Schefferville. Il avait même donné une date pour la fin des activités, c'est-à-dire avant 1985.

Le groupe d'étude pour la relocalisation du village des Naskapis comprenait un membre du gouvernement du Canada, un membre du gouvernement du Québec et un membre de la bande des autochtones naskapis. Ce que je ne peux pas comprendre, c'est qu'il semble que tout le monde était au courant que la IOC devait quitter Schefferville, excepté le gouvernement du Québec. Puisqu'on n'a pas pu le confirmer, on a laissé continuer les études et on a laissé, avec la participation du gouvernement du Québec, construire ce nouveau village des Naskapis à 10 ou 15 milles de Schefferville.

Je pourrais demander ceci: Si, à cette époque, vous aviez eu la confirmation que la compagnie Iron Ore devait quitter définitivement, cesser ses activités à Schefferville, est-ce qu'il y aurait eu des possibilités à ce moment-là de prendre d'autres décisions quant à la relocalisation du village des Naskapis?

M. Wilkinson: C'est une question très intéressante, mais il est assez difficile d'y répondre. Je pense que la première chose qu'il faut comprendre, c'est que toutes les parties - je parle maintenant des deux gouvernements et des Naskapis - étaient liées par la convention. Le chapitre 20 de la convention du Nord-Est québécois ne donnait, grosso modo, que deux possibilités aux Naskapis, soit de se reloger, soit de rester sur la réserve Matimekosh. La convention, au chapitre 20, allait même plus loin que ça. Elle prévoyait que si les Naskapis ne votaient pas avant le 31 janvier 1980, c'est-à-dire deux ans après la signature de la convention, ils perdaient toute possibilité de se reloger. Donc, je pense que le groupe d'étude socio-économique ainsi que le comité de relogement ont fait de leur mieux pour évaluer la situation. Bref, si l'annonce qui était supposée être faite au printemps 1979, soit l'annonce de la date de la fermeture. Si elle avait été faite, je pense que les Naskapis seraient allés voir les deux gouvernements afin de leur demander s'il serait possible de modifier la convention. Cela aurait été très très difficile. Il ne se serait pas agi de modifier tout simplement le chapitre 20 et, probablement le chapitre 5 qui traite des terres, ainsi que le chapitre 15 qui traite de la chasse et de la pêche. (22 h 15)

Donc, je n'ai pas vraiment répondu à votre question, mais j'espère que j'ai expliqué pourquoi les parties impliquées ont dû agir de la manière dont ils ont agi. Si on avait pu agir autrement j'espère que oui, avec la bonne volonté des deux gouvernements et des Naskapis, on aurait, j'en suis certain, réussi à faire modifier la convention. Mais on ne l'a pas fait. On n'a pas essayé.

M. Ciaccia: Je ne voulais pas blâmer les Naskapis. Évidemment, vous étiez liés par l'entente. Vous ne pouviez pas faire des modifications unilatéralement. Mais si le gouvernement, qui faisait partie de votre groupe d'étude, avait pris les mêmes informations que celles que vos représentants ont prises, ils auraient pu retarder la prise de décision et, peut-être, éviter des dépenses assez considérables pour la construction du village et qui vont être encore plus considérables dans le maintien de la route qui sera nécessairement à la charge du gouvernement. Je pense que si le gouvernement avait fait ses devoirs... Les mêmes informations que les représentants des Naskapis ont eues étaient aussi disponibles au gouvernement.

Je voulais vous poser une autre question. Si Schefferville ferme, si on espère qu'on va trouver les moyens nécessaires et les solutions pour assurer la survie de Schefferville et, quant à nous, non seulement la survie de Schefferville telle qu'elle existe aujourd'hui, mais s'il y avait des investissements additionnels, on pourrait même espérer que Schefferville pourrait avoir le même développement qu'elle a connu dans le passé. C'est notre espoir que le gouvernement va pouvoir faire cela, par l'entremise des représentations qui sont faites aujourd'hui, par l'entremise des études et des recommandations qui ont été faites. Mais, si cela ne se produit pas, est-ce que la fermeture de Schefferville causerait des problèmes sérieux aux Naskapis? Est-ce que cela irait à l'encontre de l'entente de la Baie-James? Autrement dit, est-ce que le gouvernement peut permettre la fermeture de Schefferville sans être en défaut envers la bande des Naskapis par suite de l'entente sur la Baie-James et sur le Nord-Est québécois?

M. Mameamskum: Mr. Ciaccia, as we said before, as a Naskapi...

M. Ciaccia: May be, so that you can understand, I will ask this question in English. If the Government allows Scheffer-ville's closure, will it be in default under the agreement? In other words, is the Government obliged to maintain the survival of Schefferville? If it is not, will it be in default under the terms of the agreement it signed with you?

M. Mameamskum: As we said before, we are going to move with or without

Schefferville's closure. The thing is, as we said, the Government of Canada and the Government of Québec signed an agreement with the Naskapis, the agreement is recognized by both governments and was signed by all three parts and we will seriously consider a legal recourse if our agreement is breached to the extent that we think it is breached.

M. Ciaccia: Breached if Schefferville closes down.

M. Mameamskum: But the thing is, as we say, we have to respect the agreement. It says that we have to relocate it after the vote. As for your question as such, I would refer it to my legal adviser.

M. Ciaccia: Pour les services de santé, comment le gouvernement... Est-ce que vous pouvez avoir les services de santé, les services d'éducation, si Schefferville ferme?

M. Perron: On a dit que cela ne fermait pas.

M. Ciaccia: Ah! Vous vous êtes engagés? Eh bien! c'est cela que je veux entendre! C'est cela que je veux entendre. Le député de Duplessis...

M. Einish: M. le Président, notre secrétaire, Mme Denise Geoffroy va traduire la réponse, d'accord?

Mme Geoffroy: Pour le bénéfice des membres de la commission qui ne parlent pas l'anglais, je vais vous traduire la réponse de M. Mameamskum.

M. Mameamskum a dit: Que Schefferville ferme ou que Schefferville reste, les Naskapis vont se reloger dans leur nouveau village. L'entente a été signée par les deux gouvernements et par les Naskapis. Cette entente comporte beaucoup de chapitres dans bien des domaines et les Naskapis veulent que toute l'entente soit respectée, avec ou sans Schefferville.

M. Ciaccia: Les services de santé, comment allez-vous avoir les services de santé si Schefferville n'existe pas?

M. Wilkinson: Peut-être que je pourrais apporter deux clarifications. Premièrement, même si je connais Joney, si on travaille ensemble depuis huit ans, je ne suis pas son conseiller juridique, mais juste son conseiller simple. Pour nous, il ne s'agit pas nécessairement de discuter ou d'évaluer si la fermeture de Schefferville sera une brèche ou une contravention à la convention du Nord-Est québécois. Je pense que la nature de l'engagement pris par le gouvernement du Québec était de fournir certains services aux

Naskapis. Pour nous, la façon la plus logique, la plus juste, la moins dispendieuse, la plus efficace de les fournir, c'est en assurant la survie de Schefferville. Si, dans sa sagesse, le gouvernement juge autrement et, à la condition que les services soient fournis au nouveau village, je pense que le gouvernement aura respecté l'esprit de la convention.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va?

M. Ciaccia: Je vous remercie. Mon temps est écoulé. Nous avons d'autres mémoires à entendre. Je veux vous remercier pour votre présentation et j'espère que le gouvernement va prendre en considération non seulement les obligations auxquelles il s'est engagé dans l'entente du Nord-Est québécois, mais aussi les recommandations très valables qui ont été portées à l'attention du gouvernement dans le mémoire des Naskapis, des recommandations qui ne touchent pas seulement les Naskapis, mais qui sont vraiment pour le bénéfice de toute la population de Schefferville, incluant les Naskapis.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de... Je pense que vous voulez... Non, cela va?

M. Einish: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Einish: II faudrait savoir que les Naskapis ont résidé ici depuis 1955, d'accord? Puisque les Naskapis ont des liens économiques avec la ville de Schefferville, ils nous fournissent soit les services légaux, soit le déblayage de la neige, par exemple, à la réserve de Matimekosh. De même, aussi, nous savons qu'on aura encore des services fournis par la ville de Schefferville. Nous savons aussi qu'on reçoit des services et, même sur la base économique, on sait qu'il y a des commerçants de la ville de Schefferville, comme nous, qui bénéficient des services essentiels de Schefferville. Cela ne veut pas dire qu'on marche unilatéralement, on marche ensemble et cela, c'est un aspect positif.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci. J'avais déjà reconnu M. le député d'Ungava.

M. Chevrette: J'avais une réponse. Je l'appporterai tantôt.

M. Lafrenière: Je peux laisser la parole au ministre.

Le Président (M. Bordeleau): Non, cela va. M. le député d'LJngava.

M. Lafrenière: J'aimerais revenir au contenu du mémoire des Naskapis. J'aurais une question à poser sur la chasse commerciale du caribou. Je vais essayer de la poser en anglais pour que vous puissiez comprendre le sens de ma question: If we admit that there is a surplus of caribous in the Northern Québec, how do the Naskapis feel about this probability or this chance of doing commercial hunting? As we know, the SDBJ made a study on that and it figured that there should be, at least, 200 jobs created by that. The second question would be: Have you had any talks with the Inuits farther North, concerning this caribou commercial hunting?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Wilkinson.

M. Wilkinson: Les Naskapis exposent leur position en ce qui concerne la chasse commerciale au caribou à la page 13 de la version française de leur mémoire. Grosso modo, on peut dire que, sous réserve de certaines conditions, ils appuient l'idée. Bien sûr, la première chose qui serait nécessaire serait de faire modifier la Loi sur la conservation de la faune. Il en a déjà été question juste avant Noël quand on a rencontré, entre autres, M. Chevrette, lors de la commission parlementaire qui était en train, précisément, d'évaluer les modifications qui pourraient être apportées à cette loi.

L'autre condition qui est peut-être plus importante, c'est que la chasse commerciale au caribou respecte les avantages accordés aux autochtones par les deux conventions. On parle particulièrement de ce qu'on appelle la priorité d'exploitation accordée aux autochtones. Bien sûr, cela n'est pas une exclusivité. Je pense qu'on ne veut pas que les non-autochtones soient exclus des emplois à créer. L'exploitation commerciale du caribou demande peut-être une certaine expérience qui n'existe encore que chez les autochtones. Les autochtones devraient y jouer un rôle prépondérant.

Pour répondre au deuxième volet de votre question, oui, nous avons rencontré les Inuits à plusieurs reprises afin de discuter de la chasse commerciale au caribou. Ces discussions ont eu lieu, entre autres, au sein du comité conjoint chasse, pêche et trappage dans lequel sont représentés les trois groupes autochtones, les deux gouvernements et même la Société de développement de la Baie James en tant qu'observateur. Il y a aussi eu des réunions privées entre les Cris, les Inuits et les Naskapis. Bien sûr, si on parle de la chasse commerciale du troupeau de la rivière George, cela impliquerait, en ce qui concerne les autochtones, les Inuits et les Naskapis et probablement les Cris.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: II y a eu quelques questions soulevées auxquelles je voudrais apporter des éléments de réponse. La première est une affirmation. Tous les engagements pris par le gouvernement du Québec vis-à-vis de votre communauté seront respectés intégralement.

Je peux même affirmer, premièrement, que l'appel du jugement dont on a parlé -puisque j'ai eu l'information - sera retiré à la suite des négociations qui auront lieu ces jours-ci. Ceci est en espérant, bien sûr, qu'on pourra conclure une entente.

Deuxièmement, je voudrais également vous dire que dans la déclaration d'ouverture du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, il a été clairement indiqué que les services d'éducation, les services de santé et les services de loisirs seront maintenus proportionnellement à la population restante.

M. Ciaccia: C'est une question d'information.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il est exact que dans l'entente, il y avait une obligation de construire une école à laquelle le gouvernement fédéral participerait à 75% et le gouvernement du Québec à 25%? Est-ce que le gouvernement du Québec a rempli cette obligation?

There is an obligation in the agreement to build a school for the Naskapis where 75% would be paid by the federal Government and 25% by the provincial Government. Has the provincial Government fulfilled its obligation? (22 h 30)

M. Einish: M. le Président, c'est Joe, un autre membre, qui va répondre à la question.

M. Peastitute (Joseph): That is what the agreement says.

M. Ciaccia: The provincial Government paid its share?

M. Peastitute: No problem.

M. Ciaccia: Is there any problems with the provincial Government? Has it undertaken to pay its share?

M. Peastitute: Yes. We sure do have a lot of problems.

M. Ciaccia: You are having problems?

Well, since they are in a very receptive mood, maybe they can clear up these problems right now?

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Chevrette: D'ailleurs, si on m'avait adressé la question, j'aurais pu répondre où en était le dossier. C'est exactement l'explication que j'allais donner. Pour l'école, il y a un engagement du gouvernement du Québec à 25%, c'est vrai. Le dossier est rendu au Conseil du trésor, c'est vrai. Le Conseil du trésor, je pense en agissant sagement, attendait purement et simplement les résultats de la commission avant de décréter. Point.

M. Ciaccia: Je ne ferai pas de débat là-dessus, mais l'entente de la Baie-James n'a rien à voir avec la commission.

M. Chevrette: Non, mais il aurait pu...

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, on va donner quelques minutes pour la traduction. Un à la fois.

M. Chevrette: Qui a la parole?

Le Président (M. Bordeleau): Là, c'est moi qui l'ai. Je vais la donner à quelqu'un. Non, ce n'est pas fini. Alors, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, il aurait fort bien pu arriver, avec la situation actuelle et selon l'orientation, qu'on arrive ici avec une décision très ferme de laisser la ville ouverte et même de surenchérir concernant la poudre aux yeux en lançant n'importe quel projet et les gens auraient pu tout aussi bien venir nous dire ici, d'une façon catégorique: On ferme carrément la ville. Cela aurait pu avoir des incidences. On aurait pu être appelés à se rasseoir avec les Naskapis pour discuter d'une formule qui tienne compte des circonstances. Je pense que c'est ce qu'on appelle assumer ses responsabilités.

J'ajouterai également qu'il est vrai que le conseiller a dit tantôt: Des modifications seront apportées à la Loi sur la conservation de la faune. Le projet de loi devrait être déposé à la fin de mars et, bien sûr, si on réussi la conclusion d'ententes, les 15 et 16 février, on en tiendra compte dans la loi, naturellement.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Guanish: We have already asked M. Peastitute to answer. Canada has largely authorized 75% of the costs at school and Québec has not. The agreement does not specify that we have to wait for a Royal commission to get that school set up first. It does not specify that we have to wait for a Royal commission. It specifies that Québec has to pay 25%.

M. Chevrette: Je le reconnais, M. le Président. Je reconnais que l'entente est spécifique, claire et précise; que le gouvernement du Québec a pris un engagement de 25%; que le gouvernement va respecter son engagement, mais que, sagement je pense, compte tenu qu'on ne connaissait pas d'avance les résultats éventuels de cette commission, cela aurait pu avoir une incidence quelconque et on aurait pu être appelés à repenser le dossier avec votre conseil.

Dernier point. Je suis heureux également que vous considériez maintenant qu'il serait valable pour l'ensemble des groupes de la région de négocier une formule, quelle que soit la formule, et on fera preuve d'imagination, pour que vous conserviez les avantages qui vous sont dévolus de par l'entente, de par la convention de la Baie-James, et qui permettra aussi, je l'espère, à l'ensemble des communautés du territoire de bénéficier de la ressource qui est renouvelable. Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

Un complément de réponse que me demande le député de Duplessis. Une clarification sur une question qui a été posée antérieurement.

M. Perron: Oui, si vous permettez, M. le Président, je m'adresserai en anglais aux Naskapis, pour leur compréhension, puisque l'offre qui a été soulevée tout à l'heure par le ministre de l'Énergie et des Ressources n'a pas été comprise par les Naskapis.

If the members of the commission would permit, I would like to clarify a situation in two points. The first one was raised by the Minister of Energy and Resources concerning the maintenance of the road during this winter. The Minister said -and he asked if it would be to your convenience - that the Government will maintain the opening of the road during this winter with its own funds, with its own money. Secondly, he said that some engineers from the Department of Energy and Resources and the Department of Transport will be coming over to see you shortly to see about the way to correct the road you have right now in making... It is about the hill where you have a problem and where the snow packs all over when there is a lot of wind. So, the correction should be made in that section. Would that be satisfactory to

you?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Wilkinson.

M. Wilkinson: M. le Président, je tiens à remercier M. Perron. En tant que bon Irlandais, je fais de mon mieux pour me débrouiller en français, mais même après huit ans au Québec, il m'arrive de faire des erreurs et je m'en excuse. Je pense que l'engagement qu'a pris M. Duhaime serait tout à fait satisfaisant pour les Naskapis.

M. Perron: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Einish: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, un petit mot en conclusion?

M. Einish: Avant de finir notre discours j'aimerais faire la présentation d'une autre personne qui est pas mal concernée par nos affaires. J'aimerais dire aussi que les Naskapis ont déployé beaucoup d'efforts depuis quatre ans pour assurer leur développement économique, social et politique.

La signature de la convention du Nord-Est du Québec ne prenait pas en considération quelque changement que ce soit dans le climat économique ou social. La convention nous a assuré certains droits et nous exigerons qu'ils soient respectés, puisque tout le monde a bien compris nos représentations.

J'aimerais donc présenter Mme Alison Cowan. Si vous le permettez, M. le Président, la révérende Alison Barnett Cowan présentera son discours à votre commission.

Le Président (M. Rocheleau): Je m'excuse. On a posé des questions sur le mémoire que vous avez présenté. Je veux bien donner la parole à Mme Cowan pour quelques minutes, mais je ne voudrais pas qu'on reprenne le débat sur l'ensemble du mémoire tel qu'il a été présenté à la commission.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Rocheleau): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: ...ayant lu le mémoire de madame, je sais que c'est un court mémoire d'une page et demie qui se veut un appui au mémoire des Naskapis. En ce qui me concerne, je suis prêt à donner mon consentement pour qu'on règle le bloc.

Le Président (M. Rocheleau): D'accord. Une voix: Nous aussi.

Le Président (M. Rocheleau): Vous pouvez y aller, Mme Cowan.

Mme Cowan (Alison): M. le Président, mon mari et moi sommes des prêtres anglicans des Naskapis et c'est à ce titre que je vous parle.

L'Église anglicane n'avait pas préparé d'intervention parce que nous savions que nos intérêts étaient bien représentés par les interventions du comité des citoyens et le conseil de bande des Naskapis. L'Église anglicane de Schefferville comprend peut-être 100 Naskapis et à peu près 30 familles de la ville dont quelques-unes désirent rester ici sans aucun doute. L'Église restera ici parmi le peuple naskapis car tous les Naskapis, sauf une dizaine qui sont mariés à des catholiques romaines, sont anglicans. Un presbytère et une nouvelle église seront bâtis à Kawawachikamach au printemps prochain, je l'espère.

Nous désirons seulement appuyer la demande des Naskapis, à savoir que le gouvernement respecte la convention du Nord-Est québécois dans l'esprit et dans la lettre, que le gouvernement assure la continuité des services essentiels pour la nouvelle réserve et pour les résidents de Schefferville qui désirent rester ici. Cela veut dire l'avion, le train, l'énergie, l'électricité et l'huile à chauffage, les services sociaux et médicaux ainsi que les autres services mentionnés dans le mémoire présenté par les Naskapis.

De plus, nous demandons que le gouvernement assure aux Naskapis l'apprentissage de métiers essentiels, tels la plomberie, le chauffage, l'électricité, l'administration, et qu'ils puissent avoir les services de travailleurs et de professionnels dans ces domaines jusqu'à ce qu'ils soient autonomes.

Nous recommandons que le gouvernement du Québec étudie les suggestions des Naskapis pour ce qui a trait au développement économique de cette région et aide à leur réalisation, sauf peut-être un casino.

Finalement, nous vous donnerons le texte des propositions envoyées aux deux gouvernements par le Comité exécutif du diocèse de Québec et le synode de la province ecclésiastique du Canada. De plus, nous désirons souligner que le Bureau national de l'Église anglicane s'intéresse beaucoup à la situation de Schefferville et désire que tous ceux qui sont affectés par la décision de la minière IOC soient traités avec justice et équité.

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de lire....

Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, Mme Cowan. Je remercie les gens de la nation naskapie de s'être présentés devant la commission.

M. Einish: M. le Président, le chef de bande voudrait vous remercier en naskapi et je vais ensuite traduire.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. En conclusion.

M. Guanish: S'exprime en naskapi.

M. Einish: Le chef de bande vous remercie d'avoir eu la politesse d'entendre nos délibérations et nos présentations afin d'en arriver à une sorte de solution fructueuse.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. La commission vous remercie également.

J'appelle immédiatement la Société de développement de la Baie James. Il ne s'agit peut-être pas de la société elle-même, mais des cadres de la Société de développement de la Baie James, dont le porte-parole est M. Jacques Gauthier. (22 h 45)

M. Gauthier, avant de vous donner la parole, j'ai regardé votre mémoire et il pourrait être lu. Par contre, à ce moment-ci de la soirée, si vous pensez que cela peut être même plus fructueux, de résumer au maximum le mémoire pour permettre un échange plus élaboré... Je vois que vous avez des cartons aussi, alors je vous demande de faire un choix dans votre présentation pour vous en tenir autant que possible aux 20 minutes qu'on accorde en général aux intervenants dans la présentation.

Cadres de la Société de développement de la Baie James

M. Gauthier (Jacques): M. le Président, je préférerais lire le mémoire, si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Si vous voulez me présenter les personnes qui sont avec vous et procéder à la lecture du mémoire.

M. Gauthier (Jacques): M. le Président, MM. les ministres, MM. les députés, je vous présente les collègues qui m'accompagnent. À ma droite, M. Gilles Dionne, directeur de l'exploration minérale à la Société de développement de la Baie James. À l'extrême droite, M. René Gingras, directeur des opérations dans le territoire. À ma gauche, M. Gérald Comeau, adjoint au président; M. Louis Gilbert, qui est responsable des relations avec les autochtones; Mme Françoise Gilbert, qui est rédactrice en chef de notre journal Le Jamésien et qui a participé à la rédaction du mémoire. C'est une équipe pluridisciplinaire que nous vous présentons aujourd'hui, une équipe forte des connaissances, de l'expérience et de la documentation accumulées au cours de onze années de travail en milieu nordique. Avec ce bagage acquis dans le Moyen-Nord, les cadres et les employés de la Société de développement de la Baie James et de ses filiales ont pensé apporter une contribution à l'effort commun destiné à donner un nouvel essor à Scheffer-ville.

Il serait inconcevable de permettre la disparition de Schefferville. Cela constituerait un recul considérable dans l'histoire du Québec, dans son expansion démographique et sa dynamique générale de développement économique. Ce serait réduire à néant les années de labeur acharné des pionniers du Nord qui ont consacré leurs énergies à faire sortir le Québec septentrional de son oubli de froidure. Au beau milieu d'une précédente crise économique qui secouait fortement la Côte-Nord, Mgr Scheffer, premier évêque de la région et dont la ville a pris le nom, disait avec sagesse: En face de ce marasme économique qui n'a que trop duré, ne maudis pas la noirceur, allume ta propre chandelle. Les gens de Schefferville ont montré leur volonté de se battre pour ne pas laisser s'éteindre la flamme. Nous sommes prêts à la ranimer avec eux en mettant notre expérience et nos compétences au service de la population régionale et du gouvernement du Québec afin de trouver des solutions à court et à long terme à la crise que vit présentement Schefferville.

Nous nous proposons d'apporter la contribution de notre expérience et de notre compétence dans un groupe de travail qui entreprendrait l'analyse et la réalisation des projets et suggestions qui seront ou qui ont été mis de l'avant par nous-mêmes ou par d'autres. Ce groupe de travail serait composé de résidents de Schefferville et de représentants d'organismes susceptibles de contribuer au renouveau de la ville. De notre côté, nous y apporterions le concours de nos spécialistes dans des domaines aussi différents que l'ingénierie, l'écologie, les mines, le tourisme, les télécommunications et autres. Ce groupe de travail aurait le mandat de mettre en oeuvre tous les moyens d'action destinés à maintenir à court terme l'activité de la ville car Schefferville a perdu, avec la fermeture des établissements de l'Iron Ore, le moteur principal de son économie.

Il est donc vital de mettre en place dès maintenant de nouveaux moteurs. Nous croyons que les éléments de survie sont là. Il s'agit de les sortir de l'ombre. Nous sommes prêts à nous mettre au travail

immédiatement si le gouvernement du Québec veut bien nous en donner le mandat. Le rôle de développeur multisectoriel de la SDBJ dans le territoire de la baie James nous a amenés à considérer le potentiel économique des régions limitrophes. Nous nous sommes donc penchés sur les ressources de Schefferville et nous avons déjà envisagé quelques éléments de solution aux problèmes que connaît actuellement la ville.

Parmi les possibilités à court terme, il a été proposé une entreprise commerciale de gestion du troupeau de caribous de la rivière George. L'idée n'est pas exactement nouvelle, mais il y a énormément à faire avant de pouvoir la mettre en pratique. Depuis maintenant plus de deux ans, certains d'entre nous travaillent à analyser les implications d'un tel projet. C'est dire que nous avons déjà une bonne idée. Nos études de préfaisabilité sont en bonne voie et le dossier est assez avancé pour être mené à terme dans un laps de temps relativement court, s'il nous est demandé de poursuivre nos travaux dans ce sens.

Il ressort des études préliminaires que l'organisation intensive de la chasse sportive et de la chasse commerciale des caribous est rendue nécessaire par le fort taux de croissance du troupeau. En accord avec les experts, nous croyons que ce troupeau est en train de surexploiter le milieu végétal dont il dépend et que sa surpopulation augmente le risque qu'il soit décimé par des causes épidémiologiques ou par les prédateurs. En conséquence, il perdrait toute valeur commerciale. On a déjà vu ce phénomène se produire en Alaska et au Yukon avec le troupeau Porcupine. Il serait donc avantageux, à la fois pour l'économie et pour l'écologie, de stabiliser le troupeau de la rivière George en prélevant annuellement, de façon sélective, un pourcentage important de bêtes, déterminé d'après le taux d'augmentation annuelle établi par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Nous avons, de plus, amorcé une réflexion sur les problèmes légaux et logistiques reliés à l'abattage, la manutention, la conservation et la commercialisation du caribou. À notre avis, l'organisation de la chasse commerciale, de l'abattage, du traitement et de l'expédition de la viande, le traitement de sous-produits comme les bois et la peau, ainsi que leur commercialisation, permettraient la création de plusieurs entreprises créant quelque 200 emplois directs, sans compter les contrats de services avec des entreprises locales.

Dans un deuxième temps, nous souhaitons envisager avec le groupe de travail de Schefferville une série de mesures destinées à renforcer les activités de tourisme, de chasse et de pêche. Le secteur du tourisme est une part importante de l'économie du Québec, mais il faut bien dire que les attraits pour le tourisme nordique se développent avec lenteur dans l'ensemble de la clientèle touristique. La Société de tourisme de la Baie-James, Sotour, a travaillé avec acharnement à la promotion des produits nordiques. Nous en avons fait la promotion dans certaines foires touristiques à Montréal, Cleveland, Dallas ainsi qu'en Europe. Aucune entreprise locale ne peut assumer les coûts très élevés d'un marketing de cette envergure, mais un organisme à l'échelle de tous les territoires nordiques pourrait le faire.

Cette année, des pages élogieuses ont été consacrées au camp de chasse à l'oie de Grande-Île, exploité par Sotour, dans des journaux aussi connus que le Devoir, les revues Nord et Sentier ainsi que dans des périodiques internationaux, car nous avons attiré non seulement un grand nombre de Québécois, mais aussi des Américains, des Français, des Italiens, des Allemands, des Autrichiens et autres. Il faut tabler dès maintenant sur cette renommée naissante et profiter du climat positif pour élargir l'éventail des produits offerts. Nous assurons déjà la promotion de la pourvoirie locale Tuktu, par l'intermédiaire de Nortour, firme associée à Sotour. Il faut accenter encore cette campagne de promotion et l'étendre à toutes les pourvoiries et autres organismes à vocation touristique. L'intérêt pour le Nord commence à percer, ce n'est pas le moment de relâcher nos efforts.

Nous nous proposons d'apporter au groupe de travail de Schefferville un projet préparé par l'équipe de Sotour, il y a quelques années, et qui combinerait la pêche au saumon, la chasse au caribou et la descente de rivières en canot dans le secteur de la rivière George. Appuyées solidement sur notre assistance technique et des mécanismes adéquats de mise en marché, des entreprises locales pourraient mettre le projet en branle dès cette année.

Les projets que nous venons d'exposer sont destinés, dans l'immédiat, à redonner vigueur à la région et à lui permettre, dans le futur, de diversifier son économie. Il apparaît cependant que ces projets ne peuvent, à long terme, soutenir seuls une évolution dynamique. Schefferville, située dans la zone précambrienne du bouclier canadien, est en bonne position pour poursuivre et accentuer sa vocation initiale de ville minière. En effet, le nord de la région, et particulièrement la fosse du Labrador, sont reconnus comme étant des secteurs potentiels de première importance en ce qui concerne les ressources minérales du Québec. Nous citerons, à l'appui de cette affirmation, un extrait du document intitulé Le virage technologique. Bâtir le Québec, phase II, qui a été présenté dans tout le Québec, au printemps dernier, par M.

Bernard Landry, ministre du Commerce extérieur, alors ministre d'État au Développement économique.

Ce document officiel reflète donc la philosophie du gouvernement en fait d'évolution économique au Québec. Il y est dit: "La partie septentrionale de la fosse du Labrador et son extension nord en direction de la zone Cap Smith-Maricourt présente un intérêt certain, puisqu'elle constitue un bassin riche en métaux variés tels l'uranium, le plomb, le zinc, l'or, le cuivre, le nickel, etc. Malgré les efforts de quelques intervenants privés et publics, l'absence de connaissances géoscientifiques du potentiel de ce territoire en retarde considérablement le développement. D'autre part, l'inexistence d'infrastructures d'accès représente une grave contrainte pour la viabilité des exploitations. Le développement de la fosse du Labrador requiert donc une approche spécifique regroupant les interventions des secteurs privé et public."

Nous souscrivons entièrement à cet énoncé de la problématique de la fosse du Labrador, que nous avons d'ailleurs commencé à analyser au cours des dernières années. En conséquence, nous proposons au gouvernement du Québec de mettre à contribution notre équipe d'exploration minérale et sa longue expérience de travail sur les terres du Nord. Depuis sa création, la SDBJ s'est intensivement attachée à l'exploration minérale. Au cours des dix dernières années, chaque fois qu'elle a mis 1 $ dans des projets en participation avec des entreprises privées, la SDBJ a obtenu que ces dernières investissent à leur tour plus de 2 $, soit un ratio de plus de deux pour un.

Récemment, le ministre de l'Énergie et des Ressources du Québec, M. Duhaime, annonçait que 50 000 000 $ devaient être consacrés au développement des ressources de la fosse du Labrador. En s'appuyant sur les résultats obtenus à la baie James, l'équipe d'exploration minérale de la SDBJ se fait fort de mettre, à côté des 50 000 000 $ gouvernementaux, 100 000 000 $ en provenance de ses associations actuelles et futures avec le secteur privé. Car il est rationnel de penser que, si l'entreprise privée s'est intéressée aux ressources hypothétiques de la zone nord de la baie James, elle sera encore davantage attirée par les richesses soupçonnées dans la fosse du Labrador et dont une partie a déjà été mise à jour. De plus, plusieurs de nos associations sont encore en vigueur avec d'importantes firmes étrangères dont Uranerz, d'Allemagne, Séru nucléaire et Serem, de France, ainsi qu'avec des compagnies de l'intérieur du pays.

Cette action conjointe des secteurs public et privé, souhaitée par nos dirigeants, injecterait quelque 150 000 000 $ dans le développement minier de la région, avec les retombées économiques que l'on peut imaginer pour Schefferville. (23 heures)

Depuis 1976, la SDBJ a installé des bureaux miniers à Radisson, Matagami et Chibougamau où évoluait un personnel permanent d'une vingtaine de géologues. Ces équipes de la SDBJ, ainsi que celles de ses associés du secteur privé, se sont adjoint, dans leurs travaux de terrain près de 700 étudiants géologues, pour la plupart originaires du Québec. Dans le secteur de Chibougamau, l'accroissement des investissements du groupe SDBJ et de ses partenaires a été phénoménal depuis l'ouverture du bureau. En effet, les sommes consacrées à l'exploration minérale dans ce secteur géographique, qui se situaient entre 1 000 000 $ et 2 000 000 $ en 1976 et 1977, sont passées à 4 500 000 $ en 1980, pour atteindre une dizaine de millions en 1981 et en 1982.

Chargé de l'exploration de la fosse du Labrador, notre groupe implanterait un bureau minier à Schefferville, avec une dizaine de géologues permanents et tout le personnel de support nécessaire aux opérations de prospection. Cette équipe aurait un double mandat: d'une part, celui d'effectuer, à forfait ou autrement, et en partie, le programme de reconnaissance et de cartographie que le ministère de l'Énergie et des Ressources pourrait mettre de l'avant dès 1983; d'autre part, celui d'effectuer un ensemble de travaux de prospection plus immédiatement orientés vers la découverte de dépôts économiques polymétalliques ou de caractères diversifiés, tels le cuivre, le plomb, le nickel, l'or, l'argent, l'uranium, et autres, s'il y a lieu. Avec la collaboration du milieu et des ministères impliqués et l'apport de nos associés, nous ne doutons pas que notre équipe d'exploration minérale, déjà bien rodée, puisse répéter dans la région de Schefferville le même scénario que dans le secteur de Chapais-Chibougamau.

Déjà, en 1982, nous avons été fortement sollicités par une nouvelle entreprise d'exploration désireuse de s'implanter au Québec. Le projet, concernant la région de Schefferville, prévoyait des investissements de 2 000 000 $ à 4 000 000 $ par année à partir de 1982. Avec l'accord des autorités gouvernementales, nous pourrions poursuivre ces négociations.

Si notre exposé s'attarde aussi longuement sur l'exploration minérale, c'est parce que nous considérons qu'il s'agit là d'un point capital, non seulement pour le développement futur de Schefferville, mais pour l'économie du Québec dans son entier. L'inventaire des ressources de la fosse du Labrador est loin d'être établi et nous pouvons être l'outil du gouvernement du

Québec aux fins de le réaliser, comme nous l'avons été à la baie James. Avant d'exploiter nos richesses, il est indispensable d'en tracer l'inventaire.

Étant donné la situation d'urgence, ici, il nous apparaît souhaitable et à l'avantage de Schefferville de confier ce rôle à une équipe toute prête, familiarisée depuis longtemps avec les caractéristiques et les conditions du milieu nordique et dont la philosophie est orientée vers des travaux exploratoires. Une société comme SOQUEM, par exemple, serait obligée de modifier ses structures et ses objectifs de rentabilité de façon à répondre à la nécessité de répertorier les ressources méconnues de la région. SOQUEM et nous sommes, en quelque sorte, des instruments complémentaires au service de l'essor minier du Québec. Le développement intégré des ressources du Nord québécois constitue une entreprise considérable et à long terme. Or, le contenu du virage technologique, que ce soit au niveau des infrastructures de base, des développements miniers, hydroélectriques, touristiques ou au niveau d'actions plus spécifiques comme l'exploitation du gibier, traduit un intérêt constant pour les régions éloignées dont le Nouveau-Québec et les autres régions nordiques.

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse de vous interrompre. Je veux vous souligner qu'on en est à 22 minutes et vous en avez encore un bon bout à lire. Est-ce que je pourrais vous suggérer d'accélérer le débit, d'en couper des bouts ou de résumer des choses?

M. Gauthier (Jacques): M. le Président, je ne peux pas accélérer davantage. Si vous préférez qu'on abandonne, on abandonnera, mais si on a permis aux autres de présenter leur mémoire avec tout le temps dont ils avaient besoin, il me semble que la commission devrait nous accorder ce même privilège.

Le Président (M. Bordeleau): J'essaie d'être équitable pour tout le monde, sauf qu'il y a d'autres personnes encore après votre groupe et tout le monde, finalement, devient pénalisé à un moment donné. Ecoutez, je ne veux pas être restrictif à la minute et à la seconde près, mais je vous souligne que cela fait 23 minutes et j'aimerais que vous puissiez terminer le plus rapidement possible l'exposé sur votre mémoire.

M. Gauthier (Jacques): Je peux continuer? Oui? Merci. Il nous apparaît qu'une suite logique et conséquente à ce document - je parle du document Le virage technologique - en regard de ces régions, serait la conception d'une série de mesures concernant l'aménagement et le développement du Nord du Québec qui pourrait être divisé en trois parties principales.

Tout d'abord, il s'agirait d'établir les paramètres de l'aménagement et du développement du Nord du Québec. Dans un deuxième temps, il serait justifié de prévoir la création d'organismes locaux de développement administrés par des citoyens des régions. Un premier geste dans ce sens pourrait être la mise en place d'une société de développement de Schefferville rayonnant sur la contrée environnante et qui, par la compétence d'administrateurs locaux, sensibilisés aux caractéristiques et aux besoins du milieu, saurait assurer efficacement la réalisation des projets mis de l'avant pour la région.

Ce concept de société autonome de développement, à rayonnement variable selon les régions, est également applicable ailleurs dans les territoires nordiques et les régions limitrophes, comme dans l'Abitibi-

Témiscamingue ou le secteur de Chapais-Chibougamau. Le concept de société autonome de développement régional est tout aussi applicable aux populations autochtones avec l'implantation de sociétés consacrées au développement économique des Montagnais et des Naskapis ainsi que des Inuits.

Relativement à ce dernier point, nous citerons l'exemple de la Société de développement autochtone de la Baie-James: SODAB. Cette filiale de la SDBJ, par ailleurs autonome au plan décisionnel, a été créée en 1978. Après un début modeste, la SODAB envisage, pour 1983, un chiffre d'affaires de 4 300 000 $ et espère atteindre 7 000 000 $ en 1984.

Si la courbe ascendante se poursuit, il est permis de penser que le chiffre d'affaires de la SODAB atteindra des sommes considérables d'ici 20 ans. Les sociétés autochtones de type correspondant à la SODAB devraient, logiquement, suivre la même courbe d'évolution positive. Nous croyons que l'expérience de l'équipe de la SDBJ peut être de grande utilité pour la mise en place de ces organismes.

Enfin, les employés et les cadres de la SDBJ et de ses filiales proposent, dans un troisième temps, que le noyau actuel du groupe SDBJ serve de base à la formation d'un organisme d'assistance au développement du Nord du Québec au service des ministres et ministères responsables de l'aménagement et du développement du Nord et des sociétés autonomes de développement régional.

Avec cet organisme que, pour simplifier l'exposé, nous dénommerons DEVNORD, le gouvernement se doterait d'un solide instrument qui saurait se pencher, à la fois sur la nécessité de survie de Schefferville et sur les défis constants que représente la mise en valeur des ressources de nos

territoires nordiques lesquels constituent, rappelons-le, les deux tiers de la superficie du Québec. DEVNÛRD, organisme d'assistance au développement à vocation québécoise, situé entre la planification gouvernementale et l'exécution locale, servirait de pilier de soutènement à toutes les sociétés de développement à rayonnement régional ou local pour le Nord du Québec.

Les mesures que nous préconisons présenteraient, pour la région de Schefferville et pour l'ensemble du Québec nordique, les avantages suivants: Premièrement, elles accorderaient aux résidents des régions le rôle qui leur revient dans le processus d'évolution de leur économie. Deuxièmement, elles assureraient aux organismes régionaux les indispensables structures de soutien à l'entreprise qui ont, de tout temps, fait défaut en régions éloignées, entravant souvent la réussite des initiatives locales. Troisièmement, elles conserveraient, en les transférant à DEVNORD, certains engagements majeurs actuellement assumés par la SDBJ. Quatrièmement, elles élimineraient dans une proportion appréciable les frais inutiles, en supprimant principalement les dédoublements d'équipements et de services. Cinquièmement, DEVNORD serait un lien entre les sociétés régionales, l'entreprise privée, les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux et les forces économiques concentrées dans le Sud, susceptibles de s'associer au développement nordique, comme elles l'ont déjà fait auparavant.

Pourquoi notre équipe serait-elle un outil adéquat pour appuyer l'aménagement et le développement du Nord du Québec? Tout d'abord, parce que, depuis près de douze ans, les spécialistes et les consultants de la SDBJ, en association avec des ministères et autres entités gouvernementales, ont accumulé un dossier d'études nordiques sans précédent, couvrant une vingtaine de secteurs. Le centre de documentation de notre société compte des centaines de documents appuyés par quelque 504 thématiques. On peut donc dire, en premier lieu, que DEVNORD bénéficierait de l'armature de connaissances indispensables à tout développement du Québec nordique et serait en mesure d'effectuer des études d'ordre général, écologiques, minières, économiques ou des recherches plus spécifiques, comme celle concernant la gestion du troupeau de caribous.

Durant son mandat, la SDBJ a oeuvré en milieu nordique. C'est elle qui a mis en place à la baie James la plupart des infrastructures permanentes telles les routes, aéroports, villages permanents. À cette époque, rappelons-le, il existait peu de choses concernant de telles constructions en milieu subarctique. Bien des techniques spécifiques ont dû être mises au point en cours de route par la SDBJ et ses sous-traitants de l'entreprise privée. Ensemble, ils ont développé une compétence peu commune dans la mise en place de ponts de glace, ponceaux de type spécial, ponts à forte capacité portante, chaussée en terrain meuble ou sur pergélisol. Aucune école ne peut remplacer cette expérience acquise sur le terrain. S'il devient nécessaire de construire des chemins d'accès aux différents types d'exploitation, nous sommes en mesure de le faire. Encore récemment, d'ailleurs, le gouvernement du Québec nous a accordé sa confiance en nous chargeant de la gérance de la construction du nouvel aéroport régional de Chapais-Chibougamau, réalisé par sous-contrat avec l'entreprise privée.

Enfin, nous sommes une équipe en place, appuyée sur des structures fonctionnelles, des services de soutien et un équipement dont une grande partie à usage nordique. Un organisme entièrement nouveau devrait se structurer et s'équiper à neuf. La mise sur pied de DEVNORD permettrait un gain appréciable de temps et d'argent.

Nous sommes prêts à poursuivre nos efforts pour servir d'instrument de développement du Nord du Québec qui constitue, pensons-y, une énorme partie du patrimoine québécois. Quand nous nous déclarons prêts, nous parlons au présent. Si le gouvernement du Québec entérinait nos propositions, nous n'aurions besoin d'aucun délai pour nous mettre à la tâche. Étant donné la situation d'urgence à Schefferville, il est indéniable qu'il s'agit là, croyons-nous, d'un avantage de poids. Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Gauthier.

M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier cette équipe pluridisciplinaire, comme vous vous êtes décrits vous-mêmes. Je sais que vous vous êtes intéressés au dossier depuis plusieurs années. Je sais également que vous êtes à l'origine de certaines demandes de pourvoirie. Il y a des langues qui nous ont rapporté ces choses.

Il est assez intéressant de comparer nos études, puisqu'il y a environ six mois les membres de mon ministère sont entrés en communication avec vos représentants. Cet après-midi, vous avez assisté sans doute à la présentation du mémoire du comité des citoyens de la région. Je vous citais, d'une certaine façon, puisque nos études arrivent à peu près aux mêmes conclusions que les vôtres, à savoir la création éventuelle de 200 emplois. Je pense qu'on vibre au même diapason en ce qui regarde la perception de l'éventuelle commercialisation du caribou, qui est une ressource renouvelable.

(23 h 15)

Cet après-midi, j'ai parlé de 35 000 à 50 000 caribous peut-être comme ressource annuelle. J'ai oublié d'ajouter le mot "annuelle", mais cela pourrait être annuellement. Je pense que cela a peut-être semé une certaine confusion chez certaines personnes puisqu'on me disait: 50 000 caribous, on n'en aura pas pour longtemps. Mais quand on sait qu'on a un cheptel de tout près de 400 000, eh bien, on peut imaginer que la reproduction actuelle est d'environ 13% et que les prises sont d'environ 2% annuellement. De sorte qu'il y a un danger à moyen et à long terme pour le cheptel lui-même.

Je vous remercie de la présentation. Je n'ai pas de commentaires comme tels à ajouter, sauf celui de vous dire que nous étions sans doute nous aussi sur la bonne voie puisque c'est confirmé. Si c'est confirmé par une équipe pluridisciplinaire, c'est donc dire que c'est valorisant pour l'équipe pluridisciplinaire de mon propre ministère.

M. le Président, je voudrais cependant finir par une seule petite question. Croyez-vous qu'il est essentiel de créer une structure au niveau de la commercialisation du caribou en particulier et aussi, pour ajouter à la dimension touristique de la région, ne pourrait-on pas plutôt envisager -je vous pose la question et j'aimerais vous entendre là-dessus - la prise en main par les gens du milieu de la création d'une coopérative dans le milieu sous la surveillance de nos biologistes qui connaissent fort bien, je crois, au niveau de mon ministère, la gestion de la faune et, aussi, en collaboration avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, créer cette structure - puisqu'on a de plus en plus, vous le savez, des maisons du Québec ici et là à travers le continent -assumer une certaine promotion et faire en sorte que la région de Schefferville connaisse les retombées économiques escomptées? J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Gauthier ou quelqu'un d'autre.

M. Gauthier (Jacques): Dans notre mémoire, nous avons suggéré que les autochtones se prennent en main, que des groupes de travail et même des sociétés régionales de développement soient mis sur pied. Donc je réponds oui à ce que vous proposez, M. le ministre. Oui. Ce sont des groupes locaux qui devraient prendre en main ce travail. Nous, quand nous avons proposé notre groupe, c'était pour venir assister ces groupes locaux et pour fournir des moyens qui ne sont pas toujours disponibles. Mais c'est toujours dans le sens d'une assistance au développement.

Nous avons voulu reconnaître dans notre mémoire que la planification du développement appartient aux autorités gouvernementales. Ce n'est pas une société qui devrait la faire. Mais pour réaliser ce développement, il faut des outils et tous les gouvernements ont des ministères, des sociétés d'État et des organismes paragouvernemen-taux.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, ce qui se dégage déjà de quelques mémoires, les gens qui veulent une diversification au niveau industriel reconnaissent maintenant que la faune, une ressource renouvelable, représente un élément important dans tout ce rouage. Je crois que si on concluait, tout le monde ensemble, que Schefferville doit vivre, doit survivre et doit se développer, je pense que c'est là une des voies extrêmement importantes et mon ministère entend assumer tout son leadership au niveau de ces secteurs d'activité économique très importants.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais, bien sûr, remercier M. Gauthier pour la présentation qui a été faite. Pour les fins des travaux de cette commission parlementaire, je voudrais bien indiquer, pour que personne ne s'en offense, que ce mémoire est présenté par les cadres de la Société de développement de la Baie James, suivant son titre, et non pas par la Société de développement de la Baie James comme telle qui, comme tout le monde le sait, relève du ministère de l'Énergie et des Ressources. C'est donc une contribution que vous faites aux travaux de notre commission à titre personnel, cela va sans dire, et je vous en remercie. Je n'aurai pas de question spécifique à poser, je ferai seulement quelques commentaires et, l'heure avançant, je tenterai d'être bref. Il est bien certain que nous allons privilégier la voie qui est indiquée dans votre présentation de nous appuyer sur des organismes locaux de développement.

La grande région du Nord-Ouest, pendant plusieurs années, s'est plainte de l'éloignement de la Société de développement de la Baie James et de son siège social par rapport à son lieu d'activité. Nous en sommes tous conscients. Je pense que j'ai au moins deux collègues à ma gauche, M. le Président de cette commission et mon collègue, M. le ministre à l'Aménagement, qui endosseraient ce que je viens de dire assez facilement. Cela, c'est certain.

La deuxième chose: nous n'avons pas de solution à l'exclusivité d'autres pour l'instant,

c'est certain. Une nouvelle société qui serait mise sur pied, qui recevrait un vaste mandat de fonctionnement dans tout le territoire, au-delà de cette ligne qu'on pourrait tracer entre Schefferville et la baie James, c'est presque un pays à administrer.

Je dirai, cependant, que dans les mois qui viennent, nous aurons bien sûr l'occasion d'annoncer de façon très claire ce que nous entendons faire sur le plan des organismes que nous souhaiterions mettre en place. Je pense pouvoir dire tout de suite que nous allons très certainement privilégier la voie d'une association avec l'entreprise privée. Nous allons nous joindre à ses efforts et à ses initiatives. C'est dans ce sens que j'ai eu l'occasion de m'adresser moi-même à l'Institut canadien des mines et de la métallurgie, le 14 septembre dernier à Sept-Îles. C'est peut-être là qu'il y a eu un coefficient multiplicateur qui s'est introduit quelque part dans votre mémoire, puisque vous parlez d'un montant de 50 000 000 $ que j'aurais annoncé, alors que j'ai le texte devant moi et que j'ai parlé d'un montant de 10 000 000 $ à 20 000 000 $. Il était entendu que ce montant étant la contribution du gouvernement, avec l'effet multiplicateur que l'industrie privée pouvait y apporter, on arriverait à peu près à ce montant. Il est bien certain que si les budgets nous le permettaient, que, si on pouvait y aller avec 50 000 000 $ de fonds publics, avec l'effet d'entraînement du secteur privé pour arriver à ce chiffre que vous souhaiteriez de 150 000 000 $ pour la fosse du Labrador, en particulier, toute la région nordique, je pense que tout le monde sera d'accord ici pour dire qu'on avancerait beaucoup plus rapidement. Il faut cependant tenir compte que 10 000 000 $, c'est beaucoup d'argent. Quand on considère - vous l'aviez tantôt sur une carte géographique - la distance qu'il y a de Schefferville vers le nord, le long du fossé du Labrador, avec l'absence d'infrastructure sur ce territoire, on a des chances de ne pas aller tellement loin. C'est dans ce sens que j'ai invité l'entreprise privée à nous faire connaître ses intentions dès l'automne dernier. Notre problématique s'appuie sur deux voies: les financements à frais partagés sur des programmes d'exploration, et il est loin d'être exclu que nous puissions envisager une entente avec le gouvernement fédéral, de la même manière que nous avons signé des ententes sur les infrastructures industrielles, par exemple, sur les axes routiers prioritaires, etc. En second lieu, une approche qui consisterait à aider l'entreprise privée, à financer ses dépenses d'infrastructures en milieu nordique. Quant aux modalités, quant aux mécanismes comme tels, je crois que nous souhaiterions qu'ils soient le plus souples possible, qu'ils soient le moins coûteux possible, de façon que le maximum d'efforts et d'argent soit affecté non pas dans des structures, mais vraiment dans des dépenses sur le terrain.

Je reçois, bien sûr avec plaisir, plusieurs des suggestions qui sont faites. Vous avez raison de dire que la société d'État SOQUEM est astreinte, comme toutes nos sociétés d'État, à des contraintes axées sur un effort de rentabilité, et qu'un travail ou un mandat de répertorier essentiellement des richesses de notre sous-sol serait difficilement conciliable avec des objectifs de rentabilité. Je pense que tout le monde s'entend là-dessus, mais les deux choses ne sont pas en opposition. Je dois vous dire, M. Gauthier, à vous et à votre équipe qui avez travaillé ensemble, que sur certains points on se rejoint. Il restera à voir quel est l'effort financier que nous pourrons dégager. Déjà, dans la fosse du Labrador, des montants d'argent ont été réaffectés pour l'année en cours. Il restera à trouver de meilleurs véhicules. Peut-être que c'est le ministère de l'Énergie et des Ressources qui est le mieux placé pour administrer un pareil programme.

Enfin, on est réceptif à des suggestions et c'est dans ce sens-là que je reçois votre mémoire. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. Gauthier, j'ai écouté avec plaisir votre présentation. Si j'en ai bien compris le sens, il y avait trois points principaux, je crois. D'une part, vous dites que: pour un territoire aussi grand - et là je rejoins le ministre, mais peut-être à l'envers, car il dit que c'est tellement grand qu'on doit y aller à la pièce - tellement grand, cela prend une structure particulière.

Votre deuxième point, c'est que les ministères planifient, que les sociétés d'État, surtout SOQUEM tentent de rentabiliser leurs opérations, et vous dites: Nous avons l'expérience non seulement de nous appuyer sur une planification et d'exécuter, mais de faire la promotion de ce genre de choses-là.

Moi, ce que j'ai retenu dans votre présentation, c'est le mot "promotion" parce que le ministre vient de dire qu'il attend des soumissions qui viendraient de l'entreprise privée. Ce que j'ai retenu de votre présentation c'est que vous, vous seriez plus actifs pour promouvoir, aller chercher cette aide-là, comme vous l'avez fait à la baie James.

Votre troisième point, c'est qu'il y a des ressources humaines à la Société de développement de la Baie James qui pourraient être mises en oeuvre. Il y a des gens chez vous qui ont acquis, au cours des ans, au cours des dix dernières années, je pense bien, une expérience très valable sur un territoire qui est immense, qui est tout le Grand-Nord québécois.

J'aimerais que vous me disiez, selon

l'expérience que vous avez, quels efforts financiers seraient nécessaires pour accomplir le genre de mission que vous venez de définir ce soir. Je lisais dans le rapport annuel de la SDBJ, l'an dernier, que vous aviez fait, peut-être avec une structure différente, une recommandation semblable et différente - du moins peut-être en ce qui concerne les structures, mais c'était toujours la même équipe qui était en place - pour que la Société de développement de la Baie James devienne une société de développement du Nord québécois. Oublions les structures, je crois que l'intention, l'objectif que vous poursuivez est le même. Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure il y a eu une certaine évolution depuis l'an dernier par rapport à cette recommandation-là? (23 h 30)

Pour réellement réaliser des choses, pas seulement à Schefferville mais dans tout le Nord québécois, assurer une présence de l'État québécois sur un territoire qui est le nôtre, pour ne pas laisser cette présence à d'autres gens, qu'ils soient du fédéral ou d'ailleurs, quels seraient les moyens nécessaires pour assurer une présence, faire du développement à Schefferville, faire du développement sur l'ensemble du territoire dans le Grand-Nord québécois, du moins, en ce qui concerne les domaines que vous avez mentionnés, c'est-à-dire tout le domaine minier, l'exploration et la promotion minières, le caribou, enfin toutes les autres activités que vous avez mentionnées?

Est-ce que vous pourriez nous donner un ordre de grandeur pour que, réellement, s'il y avait une volonté politique de réaliser une présence et de faire du développement, compte tenu du fait que quelqu'un me signalait que, pour trouver un filon, une mine, il faut dépenser en moyenne quelque 36 000 000 $ à 40 000 000 $, si on va dans la fosse du Labrador à coups de 10 000 000 $ ou 15 000 000 $, cela va nous prendre quelques années, selon les statistiques, avant de trouver une mine qui puisse être développée?

M. Gauthier (Jacques): D'abord, notre mémoire est différent en quelques points de ce que la société de développement déclarait dans son rapport annuel, parce qu'il s'agit bien - nous n'avons pas essayé de le cacher - d'un mémoire des cadres, ce soir. C'est d'ailleurs le titre sur la couverture de notre document. Il est différent en ce sens que la société de développement, dans son rapport annuel, proposait qu'elle soit transformée en une société de développement du nord. La société de développement a toujours eu comme handicap le fait que sa loi en faisait un genre d'État dans l'État. Quand on a une société de développement, cela comporte un pouvoir décisionnel en matière de développement. Dans notre mémoire, ici, nous avons voulu nous détacher de cette position. Nous reconnaissons que ce n'est pas une société qui peut avoir ce pouvoir décisionnel. Ce sont les autorités gouvernementales. Alors, c'est une première différence.

La deuxième différence est que, s'il n'y a pas une société qui a le pouvoir décisionnel, il faut donc avoir des sociétés régionales qui puissent prendre en main leur propre développement. C'est ce que nous suggérons. Ces deux points sont très importants. Ils constituent une nouvelle approche au développement.

Pour ce qui est d'un ordre de grandeur, remarquez que, dans ce mémoire, nous avons lancé des concepts. Nous ne sommes pas arrivés avec une solution toute faite. Nous suggérons des voies d'accès. On n'est certainement pas allé au-delà de cela. D'ailleurs, pour pouvoir présenter des coûts, il faudrait présenter un mémoire au nom de la société, parce qu'il nous faudrait aller piger dans les chiffres, dans les budgets passés et dans les livres de la société. On n'avait pas le temps de le faire, premièrement. Si on avait voulu le faire, bien sûr qu'il aurait fallu que ce mémoire fût officiellement présenté par la société.

Mais, pour vous donner quand même un certain ordre de grandeur, comme on a parlé de l'établissement d'un bureau à Schefferville, je vais demander à M. Gilles Dionne, qui est directeur de l'exploration minérale, de nous dire ce que cela comporterait.

M. Dionne (Gilles): Supposons qu'en 1983, nous voulons établir un bureau minier à Schefferville, je pense que nous aurions besoin de six géologues, de deux techniciens, d'une secrétaire, d'un acheteur-répartiteur et d'un autre bonhomme, peut-être, pour faire une équipe de dix ou onze personnes. Ces gens seraient en permanence et demanderaient un budget de l'ordre de 500 000 $ à 650 000 $. Si nous voulons avoir des géologues, ce n'est pas nécessairement pour travailler dans les bureaux, mais à cause du climat d'ici, j'imagine très bien que ces géologues vont être dans les bureaux pour une période de six mois. Ils vont travailler sur le terrain pour une période de trois mois l'été, probablement, et de deux mois l'hiver. Donc, une période de cinq mois.

Pour faire des travaux d'exploration et de prospection, pour une équipe semblable, en plus des étudiants pendant l'été - il faut en profiter parce que la saison est très courte - nous croyons que nous aurions besoin en plus d'environ 1 350 000 $, pour tenir les six géologues occupés sur le terrain en plus d'un autre groupe de six diplômés d'université, ainsi qu'un certain nombre d'étudiants. Donc, pour l'ordre de grandeur

de 2 000 000 $ en 1983, nous voulions avoir au moins six équipes qui travailleraient en permanence au bureau de Schefferville et sur le terrain pendant une période de cinq mois.

Bien entendu, c'est la première année d'exploration sur le terrain. Il n'y a pas de forage de prévu. Le forage est en deuxième lieu. En 1984, on pourra avoir des accroissements de l'ordre de 500 000 $ ou 1 000 000 $, selon les résultats, et bâtir un budget qui pourrait, pour une période de cinq ou six ans, passer de 2 000 000 $ à quelque chose comme 3 000 000 $ ou 4 000 000 $. Ce sont des travaux que notre personnel pourrait faire. Si vous voulez maintenant qu'on fasse la promotion pour aller chercher du capital des compagnies, à ce moment-là, la plupart des compagnies, selon notre expérience, veulent aussi gérer leur travail, être opérateurs. Voulant être opérateurs, elles veulent aussi qu'on paie 50%. Si on veut garder une équipe et participer à 50% dans un autre projet, il va falloir un autre montant à côté pour les participations. Cela dépend de la volonté du gouvernement, de la possibilité des fonds pour nous donner des budgets pour avoir des participations.

M. Fortier: Merci pour l'information, mais ma question était celle-ci: Certains observateurs croient qu'on a des retards à rattraper et que si on veut, comme le mentionnait mon collègue de Mont-Royal, arriver avec des projets dans les meilleurs délais, pour trouver de nouvelles mines et pour éventuellement les développer et si on veut qu'éventuellement le rattrapage se fasse sur un nombre d'années, pas d'ici 50 ans mais d'ici une dizaine d'années, quel serait l'ordre de grandeur? Je comprends bien ce que vous me dites; vous me dites ceci: Si vous me donnez 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ par année, voici comment on va les dépenser. Ce que je vous demande, c'est ceci: Si on veut arriver à des résultats plutôt rapidement, afin de faire en sorte que d'ici quelques années il y ait des résultats dans la région de Schefferville, quel genre de budget serait requis pour arriver à un résultat dans les meilleurs délais?

M. Dionne: Je crois qu'il y a une certaine vitesse de croisière qu'une compagnie d'exploration peut avoir pour optimiser ses découvertes et l'argent qu'elle reçoit de l'ordre de grandeur de 6 000 000 $ à 7 000 000 $. Je pense que lorsqu'on dépasse 6 000 000 $ de budget d'exploration pour soi-même on est à la limite du contrôle de la perfection, de la qualité de l'ouvrage. C'est à peu près cela qu'un groupe peut faire.

M. Fortier: Vous dites qu'il pourrait y avoir plusieurs équipes, s'il y avait d'autres promoteurs.

M. Dionne: S'il y avait d'autres organisations, d'autres compagnies, d'autres groupes, mais pour une entité corporative, une entité quelconque, je pense que sa limite est, pour optimiser, aux environs de 6 000 000 $ ou 7 000 000 $. Au-delà de 7 000 000 $, je pense qu'on perd le contrôle, on perd la qualité.

M. Fortier: Maintenant, une question m'intéresse beaucoup. Indépendamment des structures, indépendamment de la façon dont le gouvernement va juger bon de donner priorité à ce développement minier ou de donner priorité à d'autre chose, selon son bon désir, il reste qu'au Québec vous avez formé des ressources humaines qui sont à l'intérieur de la SDBJ et, sans vouloir vous entraîner dans un débat politique que nous aurons, j'en suis sûr, très bientôt sur le sujet, je lis les journaux et je vois qu'il paraîtrait que le gouvernement a décidé de démanteler la SDBJ. Je lis dans les journaux que des individus qui ont des formations particulières à la SDBJ ont quitté la SDBJ. J'aimerais que vous me disiez finalement combien il vous reste de gens qui ont cette expérience-là à la SDBJ? Quelles que soient les décisions que prendra le gouvernement, est-ce agir dans le meilleur intérêt du Québec que de laisser se dissiper ces expertises à gauche et à droite, au lieu de prendre les décisions qui seraient dans le meilleur intérêt du Québec et d'expliquer clairement aux cadres et aux employés de la SDBJ ce que sont les véritables intentions du gouvernement et où ils se retrouveront éventuellement? Je sais que le gouvernement a dit qu'éventuellement ces gens-là se retrouveraient à SOQUEM ou ailleurs, mais je lis dans les journaux que le conseil de la SDBJ ne peut se réunir à cause d'un problème légal - c'est complètement farfelu, mais en tout cas - et, pendant ce temps-là, les employés de la SDBJ se demandent où ils s'en vont et plusieurs quittent l'emploi de la compagnie.

M. Gauthier (Jacques): D'abord, M. le député, nous aussi nous lisons les journaux et c'est comme cela que nous sommes quelquefois au courant de certains détails. C'est vrai que nous avons une équipe et qu'on aimerait bien qu'elle serve. Nous avons, ce soir, lancé des idées que le gouvernement peut prendre ou laisser tomber, mais je pense qu'il y a quand même quelque chose de bon dans ces idées. Nous aimerions qu'après avoir acquis cette expérience... Le gouvernement a quand même investi beaucoup d'argent dans notre société au cours des 12 dernières années. On ne voudrait pas que ce capital soit perdu; on aimerait que, quelle que soit la formule qu'on adopte, notre groupe puisse continuer de servir les intérêts du Québec. Pour

répondre plus spécifiquement à votre question, c'est vrai que nous avons dû faire des mises à pied il y a quelque temps. Il y a des membres de nos équipes qui présentement retirent de l'assurance chômage ou sont en attente, qu'on pourrait récupérer si on avait des travaux immédiats à faire. Je demanderai à M. Gérald Comeau de vous donner des chiffres tout à fait récents de nos effectifs.

M. Gilbert (Louis): À la SDBJ, il y a plusieurs entités affiliées. Globalement, les effectifs permanents et réguliers, pour l'année qui s'en vient, 1983, se totalisent à 295. Maintenant, si on les répartit selon les différentes fonctions, on peut dire qu'à la Direction générale et administration il y a un total de 44; à la Direction du développement des infrastructures, il y en a 42; au développement minéral, il y en a 8; à la municipalité de la Baie-James, incluant les services de sécurité publique, il y en a 16; au service de sécurité publique, 132; à la filiale Sotel, 35; à la filiale Sotour, 8; à la filiale Sodab, environ 10; pour un grand total de 295. C'est quand même un groupe assez diversifié que nous avons. Maintenant, il y a aussi des employés temporaires et on peut dire que, pour l'année 1983, nous anticipons avoir 636 personnes-mois. Donc, c'est une autre cinquantaine d'employés pour une année complète.

M. Fortier: En terminant, tout ce qui...

M. Gilbert: J'aimerais ajouter que la grande majorité de ces employés sont sur le territoire de la baie James. En fin de compte, 80% sont affectés sur le territoire même, dans les trois pôles de croissance: Matagami, Chapais-Chibougamau et Radisson.

M. Fortier: Écoutez, M. Gauthier, en terminant, pour ma part, je crois que vous avez apporté des idées intéressantes et j'ose espérer que, très prochainement, le gouvernement vous fera connaître ses décisions. Je crois qu'on doit vous remercier de cet apport aux travaux de notre commission parlementaire, en espérant que les inquiétudes des cadres et des employés puissent être levées éventuellement pour que, finalement, vous sachiez exactement quel est l'avenir de la société et quel est l'avenir des employés qui la composent.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Un petit mot de la fin, M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional?

M. Gendron: Je voudrais quand même, au nom du gouvernement, vous remercier et dire simplement une phrase ou deux. Effectivement, dans le contenu de votre mémoire, vous avez répété à trois ou quatre reprises qu'il y avait là des choses intéressantes. Suivant les responsabilités qui sont miennes comme ministre d'État à l'Aménagement, et particulièrement au Développement régional, je dirai que oui, vous avez des suggestions qui peuvent être très intéressantes dans la perspective d'une réflexion qu'on est en train de mener chez nous dans le sens d'avoir le plus rapidement possible des structures plus décentralisées où le et les milieux, dans l'ensemble du Québec, sont davantage impliqués. Je pense que c'est dans ce sens que vous avez plusieurs bonnes suggestions que je voudrais regarder au cours de la réflexion que je poursuis. Dans ce sens, je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Gauthier, ainsi que les personnes qui étaient avec vous. Je demanderais donc maintenant au représentant du Conseil régional de développement de la Côte-Nord de se présenter. (23 h 45)

Question d'heure. Je suis à la disposition des membres de la commission. On a jusqu'à maintenant par le consentement des membres tenté de respecter notre ordre du jour et, actuellement, il nous reste trois mémoires à entendre pour boucler notre horaire. Et, tant que j'aurai le consentement des membres, je continuerai. Alors, c'est M. Yvon Sirois, je présume. M. Sirois, vous pouvez y aller.

CRD de la Côte-Nord

M. Sirois (Yvon): Le président de la commission étant extrêmement conscient, en vertu d'un proverbe, d'un dicton appris sur les bancs de l'église, que l'esprit peut difficilement absorber plus que la partie foncière peut endurer, je vais essayer de résumer. Je vous remercie.

D'abord, je saute les premières citations qui pourraient être lues mais qui peuvent indiquer un peu le ton du rapport. Je passe immédiatement au fondement de développement des régions. Le conseil ici est peut-être le seul organisme qui va plutôt chercher à cerner un peu la dynamique régionale plutôt que de se borner uniquement à Schefferville, c'est-à-dire Gagnon, Fermont, Sept-Îles, Port-Cartier.

Pour démarrer uniquement, quatre principes tirés d'un texte préparé sous la responsabilité du ministre à l'Aménagement et au Développement régional, des principes de base qui n'ont pas encore été officiellement discutés et qui ont été exposés, soit: Le développement régional - premier principe - est global en ce sens qu'il est d'ordre économique, social, culturel, éducatif et politique. Donc, on ne peut pas uniquement le regarder avec une facette.

Deuxième principe: Dans le développement des régions, le gouvernement est responsable des grandes orientations d'ensemble visant à assurer l'équilibre des régions. Donc là, également, en vertu de ce principe, les régions doivent attendre du gouvernement certaines balises générales.

Troisième principe: Le développement des régions doit se fonder sur les dynamismes locaux et régionaux. C'est un peu ce que la commission est venue chercher à Schefferville: un dynamisme local et identifier également le dynamisme de la sous-région.

Le quatrième principe: Que le développement des régions relève à la fois de l'État et des régions.

Partant de là, en introduction, on insistait sur le fait que le but de la commission ce n'était pas de chercher certains boucs émissaires pour expliquer la détérioration économique. On souscrit à ce principe. On sait pertinemment - et cela, je le lis - "Nulle question également de chercher à présenter une étude exhaustive de la situation, alors que des dizaines de fonctionnaires provinciaux se sont déjà penchés sur le problème." Alors, c'est évident que tous les fonctionnaires provinciaux en région et des fonctionnaires provinciaux à Québec ont eu comme mandat de fournir à l'équipe ministérielle un paquet de données. On ne s'est pas arrêté à cet aspect.

De fait, le Conseil régional de développement de la Côte-Nord se contente de traduire, dans son intervention, des préoccupations concernant l'économie régionale de la Côte-Nord entièrement, davantage à la fois à la MRC de Sept-Îles et de Caniapiscau.

En quelques caractéristiques régionales, ce qu'on voudrait mentionner, ce qu'on pourrait oublier, à l'heure actuelle: la région administrative 09, qui part de Tadoussac à Blanc-Sablon et qui comprend les villes nordiques, compte sur la présence au gouvernement d'un seul député; parce qu'il n'y en a que deux pour la région, alors c'est M. Perron qui doit assumer à la fois cet immense territoire pour traduire auprès du gouvernement toutes les préoccupations. Cela, il faut accepter que c'est spécial. Et cela demande largement à un bonhomme.

Il faut vous dire qu'au fédéral ce n'est pas beaucoup mieux parce qu'on a un député et demi. Cette fois-là, on part pratiquement de Québec. Cela aussi, au point de vue force politique, représente des bonshommes et cela prend des surhommes pour faire la tâche. Il faut quand même le reconnaître. Dans une région, pour le député fédéral, qui a 1000 milles de long, quand on dit au député: Peut-être que c'est un peu différent dans notre région, peut-être qu'on a un peu raison.

Chez nous, messieurs les membres de la commission, il faudra retenir également que la répétition de réunions exige des efforts surhumains de la part des leaders locaux. C'est-à-dire qu'à ce moment il y a des déplacements absolument fantastiques pour se rendre à Québec pour SIDBEC-Normines, siéger ici, le cas par exemple d'ITT, etc., le cas de la Basse-Côte-Nord. Il faut être conscient que c'est une autre dimension qui exige des solutions particulières.

Dans une région, en quelque sorte hors critère, il est devenu indispensable que l'autorité gouvernementale, que la compagnie et que la population puissent conjointement et solidairement dégager un plan d'action qui permettra, d'abord, de sauver les meubles et, après, d'assurer la relance économique.

Dans le deuxième cas, on parlait des cas d'espèce. Je pourrais citer une dizaine de mémoires, ou une grande commission comme la commission Payne, le mémoire de la commission sur SIDBEC-Normines, ITT également, le paquet d'études; Roche et Associés qui ont fait une étude d'ensemble, pas une, une étude en trois, quatre volets sur les pêches sur tout le territoire, qui ont erré un peu parce qu'ils avaient oublié de venir sur le territoire; le rapport Berthiaume sur les pêches, qui n'est pas disponible, mais qui orienterait l'industrie des pêches. Le rapport Boucher dont on a parlé; mais je ne retiens qu'un autre rapport, celui-là et je lis: Parce qu'il donnait déjà, en 1979, une certaine indication au gouvernement dans quelle voie s'orienter. Une autre étude, cette fois-là portant sur la stabilité de la main-d'oeuvre - et quand on parle de la stabilité de la main-d'oeuvre, on soulève les préoccupations économiques de la région -dans le Moyen-Nord québécois, réalisée par la firme P.S. Ross et Associés, a été déposée au gouvernement en mai 1979.

Qu'est-il advenu de l'application de la soixantaine de recommandations que formulait ledit rapport? Citons entre autres, et je n'en ai cité que quatre, cinq, mais elles traduisent les préoccupations que le rapport recommandait et c'était déjà là - la commission pourrait très bien tirer une série de recommandations à peu près identiques à la suite de ses travaux: "Que soit préparée une politique de développement économique de chaque localité." Quatre ans après, on peut demander: Est-ce commencé? Quatre localités comprenaient également dans le secteur de Chapais toutes les villes... "Que soit explicitée une politique de mise en place des infrastructures et des services essentiels dont l'échéancier d'implantation soit cohérent avec l'échéancier de développement des investissements privés." Alors, à ce moment-là, cela obligeait à la fois le gouvernement à identifier ses développements ou l'établissement de ses infrastructures futures et cela aurait également obligé les compagnies minières du secteur à identifier

exactement leur développement futur. Peut-être qu'on aurait su où on s'en allait. "Que soit définie une politique de peuplement de territoire - encore là, c'est très spécifique - aboutissant à la réduction de l'éparpillement de la population et l'accroissement de la taille des villes." Des recommandations du genre, il y en avait 60 faites par une firme spécialisée en consultation. C'est clair que le CRD ne pouvait pas reprendre ces études. Je ne continue pas, mais les citations - et je suis rendu à la page 5... Je ne prendrai pas plus que quinze minutes, M. le Président. Le Conseil régional de développement de la Côte-Nord fait remarquer aux membres de la commission que nous traitons à nouveau d'un cas d'espèce. Alors qu'aucune politique globale gouvernementale n'est susceptible de fournir, tant aux autorités municipales qu'aux travailleurs, aux compagnies et à la population en général, des guides éprouvés leur permettant de préparer des solutions de rechange. On est pris à créer de toutes pièces. Il est évident que les chefs de file, tant de Schefferville que de Fermont, de Gagnon, de Port-Cartier et de Sept-Îles, manqueront de souffle s'ils doivent constamment innover dans la recherche de solutions aux problèmes socio-économiques de cette vaste sous-région de la Côte-Nord, sans pouvoir faire appel à des règles de jeu généralement tragiquement absentes à l'heure actuelle au sein de nos gouvernements, on pourrait dire au fédéral ou au provincial.

Les coûts socio-économiques. Je me contente de souligner que dans ce rapport, dans la question du chapitre des coûts socio-économiques, qu'il est important de trouver quels sont, en vertu d'une étude, les effets négatifs de fermeture, de semi-fermeture, d'annonces de suspension d'activités, comme, par exemple, celles qui ont été véhiculées sur la SIDBEC-Normines. Qu'arrive-t-il en fin de compte sinon un désengagement global des gens mis en cause? On dit: Où s'en va-t-on? Je rappellerai également aux membres de la commission que, lorsque sont arrivés les problèmes de Sept-Îles et de Port-Cartier, le fédéral a voté 120 000 000 $. On a dit: C'est la grande offensive. Évidemment, on ne reclasse pas dans des villes monoindustrielles, 1500 employés du jour au lendemain et on ne relance pas des entreprises dans deux ans. Le comité des 120 000 000 $ qui devait faire des suggestions avait deux ans. Dans deux ans, on avait seulement commencé à planifier. Mais c'était impossible. Il n'en demeure pas moins que l'échéance est arrivée. Dans d'autres endroits, on aura dépensé 20 000 000 $, 22 000 000 $, 24 000 000 $, comme dans la région de Windsor. Dans la région de la Côte-Nord, sur les 120 000 000 $, pas beaucoup. Pourquoi? Parce que cela n'était pas possible, dans le mandat confié, d'atteindre, à l'intérieur des échéances, les objectifs fixés. Cela ne l'était pas, humainement.

Philosophie de la compagnie IOC, au chapitre de la page 9. Je voudrais seulement mentionner, je le disais dans le paragraphe, je connais bien le président de la minière: Parfait, un excellent plan. Je pense que le président de la compagnie, M. Mulroney, s'est chargé, par le biais des médias d'information, tant électroniques qu'écrits, de vanter à bon droit ses primes, sa générosité. Mais on peut mentionner, par exemple, quelque chose qui avait chatouillé le Conseil régional de développement de la Côte-Nord, quand la minière intervenait à Sept-Îles à pleine page d'annonces pour dire: La ville devrait peut-être baisser ses taxes. La ville avait assumé des coûts en vertu même de certaines exigences de la minière. Cela, c'était de la publicité tapageuse à mauvais escient. Je suis prêt à lui donner une bonne tape sur l'épaule et à dire: La IOC, vous êtes généreuse. Mais, dans certains cas, on se demande si la publicité n'est pas à la fois trompeuse et fautive. C'est tout ce que je résume. Le texte est très clair.

Je conclus ce chapitre en disant: Le Conseil régional de développement de la Côte-Nord invite donc la minière IOC à arrêter, de concert avec les autorités gouvernementales et la population concernée, les modalités d'un programme d'action qui renfermera des mesures à concrétiser pour réduire au minimum les impacts négatifs occasionnés par le licenciement massif de travailleurs; des mesures qui devront à la fois satisfaire ces ex-employés et les populations locales. La ville de Sept-Îles a assumé des emprunts, par exemple, pour son usine de traitement des eaux et avant qu'elle ne soit inaugurée, la minière a dit: On n'a plus besoin d'eau. L'usine est construite. Tu ne peux pas la rouler et la mettre dans des boules à mites, cela n'est pas possible. Ces mesures devront à la fois satisfaire ces ex-employés et les populations locales qui ont sérieusement misé sur le sérieux et la présence à très long terme de la compagnie IOC dans des municipalités telles que Schefferville et Sept-Îles. En vertu de ce qui a été dit avant, en vertu des annonces dans les journaux, etc., il ne m'apparaît pas si clair que cela, aux yeux de la population et des gens qui oeuvrent à l'extérieur de la compagnie, que la compagnie allait fermer. Ce n'était pas si clair que cela. Cela pouvait se lire en filigrane: On ferme, on ne ferme pas, on réduit, on ne réduit pas. Mais ce n'était pas deux et deux font quatre.

Les règles de croissance et de relance économique. Vous pourrez les lire. J'ai arrêté là. Chose certaine: C'est impossible de relancer l'économie de toute la sous-région concernée, Sept-Îles, Port-Cartier, Schefferville, Fermont, Gagnon, tant qu'on n'a pas arrêté la décroissance. Si on veut partir en

avant, il faut d'abord arrêter de reculer. C'est la même chose pour une automobile, tant que tu n'as pas arrêté de reculer, tu ne pars pas de l'avant. Il n'y a pas de miracle là-dedans.

Là aussi, il y a un paragraphe qui résume tout, je le saute. Je pense que je rends service à la commission.

Avenue de solutions et recommandations. Le Conseil régional de développement de la Côte-Nord ne juge pas nécessaire de dissocier ces deux volets, avenue de solutions et recommandations, qui se rattachent au principal objectif endossé par notre organisme - je mentionne, pour le bénéfice des membres de la commission, que notre conseil d'administration comprend 22 membres. Il n'y a personne à côté de moi, parce qu'il y a le maire Bégin qui a déjà parlé, qui siège à notre conseil d'administration, il ne veut pas être en conflit d'intérêts. Il y en a un autre qui représente la ville de Fermont, lui aussi, il ne veut pas être en conflit d'intérêts. Il y en a un autre qui représente... Ils sont membres de notre conseil d'administration. Il y a 22 membres répartis de Tadoussac à Blanc-Sablon, il nous en coûte cher pour voyager, on a moins d'employés, parce qu'on ne peut pas engager les employés, c'est pour cela que je suis tout seul ce soir - soit celui du maintien du maximum d'activités socio-écomiques à Schefferville. Cela, c'est endossé globalement par le Conseil régional de développement de la Côte-Nord. Un tel objectif présuppose à priori qu'il y aura de la part du gouvernement une volonté ferme de procéder à l'identification des voies possibles de diversification de l'économie de la localité. Que le gouvernement s'assoie et on dit vraiment qu'est-ce qu'on peut faire? En cela, on peut procéder assez vite; premièrement. (Minuit)

Deuxièmement, de la part des autorités municipales une volonté non moins ferme de se battre pour la survie de la localité, c'est-à-dire que si toutes les autorités de la ville de Schefferville commençaient à hésiter, eh bien! là à ce moment-là, ça ne va pas bien. Si je rappelle une anecdote qui s'est passée à Duparquet. Duparquet c'est quand même une ville minière de l'Abitibi. Un bon jour, au mois de janvier, j'arrive en automobile à une chambre de commerce à Duparquet et la minière est fermée. En plein centre du village, juste en face d'un garage, le feu dans ledevant de mon véhicule. Vite ouvre le capot, ferme l'alimentation électrique, les fils sont brûlés, l'éventail a touché à tout cela. Je fais touer mon véhicule jusqu'en face du garage. J'y entre. Il y a un petit bonhomme de 12 ans. Je lui dis: penses-tu que ton père peut me réparer cela? Moi, dit-il, je ne connais pas cela la mécanique. Écoutez monsieur, si mon père ne pouvait pas réparer cela, cela ferait longtemps que l'on aurait fermé le garage.

Je pense que si le gouvernement ne pouvait pas, puis la minière non plus, réparer la situation à Schefferville, cela ferait longtemps que le tout serait fermé.

Donc une volonté non moins ferme de s'abattre méthodiquement pour la survie de la localité. De la part des citoyens en place, un désir évident de prendre en main leur destinée, et ça ce n'est pas facile. Le type qui a toujours vu son compte d'électricité, etc., payé par la compagnie, puis demain matin il se dit qu'est-ce que ça fait là, ce bon Dieu de compte-là. Bien, évidemment qu'il est déplacé un peu dans sa façon de penser, dans sa mentalité. Cela c'est important pour les gens de se battre.

De la part de la minière, il faudrait aussi une décision non ambiguë de rendre public son programme d'activité. Que cela ne soit pas un patinage de fantaisie. Que ce soit: c'est là qu'on s'en va, c'est là qu'on s'en va, c'est là qu'on s'en va. Cela c'est nécessaire. Exemple, dans le milieu, en même temps que son désir véritable de maintenir son service ferroviaire, on le maintient selon un horaire qui favorise les déplacements de la population. Alors voilà, et que l'on pense des solutions applicables à court, moyen et long terme. Il me reste deux pages.

Étant de notoriété publique, que les fonctionnaires provinciaux ont dressé un bilan le plus complet possible de l'ensemble du portrait, c'est clair que le gouvernement l'a. Il y a des pages d'accumulées là-dessus. Que ces mêmes fonctionnaires ont certainement fourni aux autorités gouvernementales des avenues possibles de solutions. C'est évident, parce que ce sont des bons fonctionnaires qu'on a dans la région, ça il n'y a pas d'erreur. Que des directives fortement incitatives ont pu être données. Là, j'ai dit: "auront été données", mais je vais amoindrir mon affirmation: "auront pu être données" pour ne pas trop élargir la fourchette de solutions parce que cela coûte de l'argent. C'est évident que les ministres ont pu dire, bien allez-y pas trop large parce que notre budget est limité. J'ai tenu cela pour acquis, parce que c'est normal en période d'austérité. Moi, je dis cela à mes employés, je n'en ai pas beaucoup, mais je leur dis pareil: Que le président de la minière IOC a déjà rendu publics des indices confirmant les intentions de la compagnie de continuer quelque chose, l'exploration, etc. Qu'un editorial de la Presse paru le 27 janvier 1983, là il résume les projets, je ne les ai pas en écrits, parce que j'ai tenu pour acquis qu'il avait pris cela dans un texte, que des groupes de citoyens ont traité de projets portant sur la pêche et la chasse. Que les autorités municipales envisageaient certaines améliorations.

Le conseil arrive avec ses

recommandations: 1° , que le gouvernement provincial rende disponible, à la fois si possible, évidemment les textes ça va bien ils sont là; 2° , les minutes cela va aller assez vite, et 3°, certaines balises si c'était possible de les rendre à la pièce, sans être à attendre et de dire, eh bienl on a le chapitre final, il y a 1012 pages on est prêt à vous revoir de nouveau. Il peut y avoir des orientations, mais je pense qu'on en a déjà donné. Alors, qu'on donne cela le plus tôt possible surtout dans les projets à court terme.

Que les gouvernements provincial et fédéral, je dis bien les deux, commandent ou commanditent une étude axée sur les impacts sociaux-économiques négatifs qui sont engendrés par des fermetures ou des semi-fermetures. Sept-Îles est passée de 38 000 de population à 26 000. Sept-Îles ce n'est pas fermé, mais il y a des impacts négatifs. Port-Cartier de 13 000 à à peu près 8000 ou 7500, ce n'est pas fermé, mais il y a des impacts négatifs.

Que les gouvernements provincial et fédéral implantent un comité spécial à mandat prolongé pour guider les municipalités, les travailleurs, les groupes organisés du territoire concerné dans la préparation de projets, de documents, d'études qui permettent d'accéder à des programmes spéciaux.

Encore dernièrement, je suis allé à Gagnonville. Il y a un comité sur pied, mais ils ne savent même pas ce qu'est une zone désignée. Il est évident qu'ils ont besoin d'aide. On dit au gouvernement qu'il pourrait peut-être financer un comité itinérant, lequel va aider spécialement les gens à dire: dites donc à notre gouvernement que ce n'est pas comme cela qu'on marche. Il faudrait marcher plutôt comme cela. Même si ce comité faisait cela, il ferait sa tâche. Mais il faut aider ces gens-là, parce qu'il n'y en a pas beaucoup en région qui peuvent le faire. Donc, ce serait un comité permanent, itinérant, composé de cinq ou six personnes. Il couvrirait les villes concernées et favoriserait la compréhension et la préparation des projets pour avoir accès aux subventions spéciales.

Que le gouvernement fédéral fasse connaître son intention d'étudier en priorité toute demande de soutien financier aux entreprises de transport aérien et ferroviaire. Si le gouvernement fédéral peut dépenser 16 000 000 000 $ pour se rendre à Vancouver par un deuxième chemin, il peut peut-être aider les gens, ici, quant au transport. Je dis "peut-être". Surtout, quand on a une compagnie de transport aérien dont on ne connaît pas les grandes balises de l'avenir, mais on sait qu'elle est encore là et qu'elle fait des voyages de temps en temps.

Que le gouvernement provincial mandate sa société d'État, Hydro-Québec, de tracer un plan d'intervention dans le secteur, lequel plan devrait faire état des possibilités de transférer les tâches administratives ou de préparation ou d'entretien à Schefferville, ou encore, quand elle entreprendra les dernières phases de LG 4, etc. Est-ce qu'il y aura possibilité d'y avoir accès, de commencer une route pour aller vers la baie James? En tout cas, c'est à étudier.

Que les gouvernements se penchent avec célérité sur l'étude des projets qui vont être instaurés ici. C'est-à-dire qu'il y ait une forme de priorité au gouvernement et que cela ne suive pas un canal qui dise: Vous êtes arrivés les 73e, vous allez finir par monter sur la pile.

Que le gouvernement provincial reprenne son intention - et tout le monde en a parlé - de créer un fonds minier.

Que les gouvernements, les compagnies minières et les autorités municipales adoptent une attitude commune concernant l'avenir desdites localités afin de rompre la psychose de l'incertitude. Ce qui embête les gens, que ce soit noir ou blanc, cela n'est pas compliqué à comprendre, mais quand c'est gris, on ne sait pas si c'est gris-blanc ou gris-noir. C'est cela qui embête tout le monde.

En dernier ressort - c'est une demande au ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional - que le ministre responsable du développement accélère son processus mis en branle pour établir une politique du développement des régions. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Sirois. Vous avez effectivement réussi à faire cela dans les vingt minutes. Alors, M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: M. Sirois, je voudrais tout simplement commencer avec votre pensée d'introduction, lorsque vous mentionniez que l'esprit ne peut en prendre plus que le siège qui le supporte. J'aurais aimé observer à quel endroit vous étiez assis, parce que, si je considère tout le dynamisme avec lequel vous avez rendu votre mémoire, vous deviez sûrement avoir un très bon siège. Je vous remercie également d'avoir réveillé quelques-uns de mes collègues - je vais jusque-là - et, sûrement, aussi mes collègues de l'Opposition, avec toute la fermeté, la fierté également et le dynamisme dont vous avez fait preuve en rendant votre mémoire.

Par contre, j'ai un petit problème avec vous, parce que je vais probablement être obligé de vous ajouter à la liste des personnes suspectes, à mon cabinet, qui sont ces spécialités des fuites, parce que, dans votre document, pour les quatre ou cinq premières pages, j'ai reconnu pas mal de choses que je prétends avoir lues et, pour

certaines, même avoir rédigées. Quand vous parlez, entre autres, des fondements mêmes de la politique du développement régional...

M. Sirois: C'est quasiment ce qui a paru dans le Devoir.

M. Gendron: Ah bon! Pour être plus sérieux, je pense, effectivement, lorsque vous touchiez ces points, qu'on va s'entendre très rapidement, puisque j'ai travaillé, comme président du comité ministériel sur la décentralisation, à une réflexion qui, je l'espère, nous conduira effectivement, dans les meilleurs délais, à l'ébauche ou, au moins, aux grandes balises - parce que j'ai toujours parlé en ces termes - de l'élaboration d'une politique de développement régional. Cependant, on est toujours conscient qu'on ne peut pas à la fois prétendre à la nécessité d'une politique de développement régional et acheter la conviction qu'il appartient à l'État québécois de la définir parce que, là, il y aurait une contradiction fondamentale. Si on est tous convaincus que, de plus en plus, quel que soit le gouvernement, le nôtre ou les autres qui succéderont au Québec, l'avenir est dans les régions fortes, à condition qu'on fasse davantage confiance aux régionaux, qu'on les implique davantage dans les décisions et là, on pourra peut-être parler un peu mieux de véritable concertation.

Il y a un préalable à la concertation: c'est l'implication et la participation. Les régionaux ont été sollicités pendant de nombreuses années pour s'impliquer, être consultés dans une multitude de dossiers, dans de nombreuses études et il me semble que cette étape doit absolument être franchie. C'est dans ce sens que j'essaie de réfléchir le mieux possible avec mes équipes supports, avec mes collaborateurs immédiats pour arriver à ce que vous souhaitez dans votre dernière recommandation - j'y reviendrai peut-être un peu plus précisément tantôt - quand vous dites que le ministre délégué à l'Aménagement et au

Développement régional accélère le processus mis en branle pour établir une politique de développement des régions. Je suis content que vous l'ayez rappelé parce que deux collègues ministériels sont ici présents et j'espère qu'ils m'aideront à franchir les étapes nécessaires à l'adoption des grandes lignes puisque je m'y suis engagé dans une consultation. Je veux mettre les citoyens de tout le Québec dans le coup de l'élaboration de cette politique de développement régional.

Alors, pour tous ces aspects auxquels vous faisiez des références quant au développement des régions, l'implication des régionaux, avoir de meilleures structures de concertation, je pense que je serai très court puisque vous aviez un discours peut-être plus énergique que le mien, mais au moins sur le fond, on a exactement les mêmes points de vue.

Le CRD de la Côte-Nord, comme dans les autres régions du Québec, est un organisme qui a tenté d'être présent aux différents dossiers qui ont été ouverts par le milieu. Cela a été sa première responsabilité. Dans ce sens, vous avez, comme structure, pas nécessairement de concertation unique, mais comme organisme d'intervention, fait des suggestions qui sont intéressantes, qui reprennent également, pour le problème que nous regardons depuis ce matin et que nous continuerons d'approfondir demain, des suggestions qui, tout compte fait... Encore là, c'est tout a fait normal que des gens d'un même milieu, devant un même problème, aient souvent les mêmes approches et les mêmes suggestions. Je pourrais reprendre vos six ou sept propositions et vous indiquer des éléments de réponse et je ne suis pas sûr qu'à ce moment, vous seriez particulièrement satisfaits parce qu'on est obligé quand même de tenir compte d'une plus grande appréciation de certaines implications. Quant à moi, si vous voulez avoir le compte rendu des délibérations le plus vite possible, je vous répondrai: Bien sûr qu'on est d'accord et on va tout faire pour que le comité favorisant l'accès aux programmes fédéraux-provinciaux soit aussi accessible par rapport aux gens des régions éloignées. Je pense qu'il est important de tout mettre en oeuvre pour que vous ayez droit à cette information. Le plan d'intervention d'Hydro-Québec que vous proposez, la demande sera transmise à Hydro-Québec. Je pense que c'est une demande importante que vous avez faite.

Célérité des gouvernements à appuyer les solutions et les projets. Habituellement, quand le milieu nous présente, avec certains projets, des solutions pour les réaliser, on peut être un peu plus rapides dans nos décisions. Le problème, c'est que souvent les milieux - c'est normal - selon leur dynamisme, leur volonté, identifient plusieurs projets et il n'est pas toujours facile de cadrer cela par rapport à des problématiques d'ensemble, par rapport à des politiques de développement.

Le fonds minier, j'ai eu l'occasion de le dire à deux reprises, demain, il en sera sûrement question, puisqu'on a un mémoire des métallos sur le sujet, et mon collègue, M. Marois, aura l'occasion d'expliquer davantage où nous en sommes rendus.

Je voudrais, avant de passer la parole à quelques collègues, peut-être commenter deux questions de façon plus précise. À un endroit, dans votre mémoire, vous dites que le CRD préconise une nouvelle façon de penser qui permettra d'assurer la concertation de tous les agents de développement économique. J'aimerais cela que vous précisiez davantage quelle serait

cette nouvelle approche, mais surtout, puisque vous êtes un porte-parole du CRD, quel serait exactement le râle d'un CRD à l'intérieur d'une telle approche de concertation plus large que celle qu'on a toujours connue.

M. Sirois: Sur la question de la concertation, le problème dans la région, c'est d'avoir une concertation régionale et de réunir les gens parce que c'est un coût énorme. On peut vous dire que c'est le problème rencontré par n'importe qui. Si on tient un conseil d'administration, c'est 5000 $ à 6000 $. Alors, ce problème se posait. D'ailleurs, la concertation a été prévue dans certains documents. Évidemment, cela comprendrait strictement des gens de l'entreprise privée d'une part; par exemple, des commerçants, des industriels. Quant aux structures municipales, comme les nouvelles MRC par exemple, à l'intérieur d'une région, elles pourraient y avoir un ou deux mandataires à un conseil d'administration régional, cela est possible. Également, il y a les organismes qui sont strictement régionaux, comme le conseil régional des loisirs, le CRSSS; il y en a quatre dans la région, alors, un représentant. À ce moment-là, on peut avoir un conseil qui serait représentatif à l'intérieur de la région, mais qui nécessite, dans le cadre de la Côte-Nord, un budget spécial. Ce pourrait être un CRD renouvelé, comme il en a été question souvent dans les journaux, ou une conférence d'orientation au développement, mais qui, à ce moment-là, regroupe quand même des représentants de municipalités, qui représentent les messages véhiculés là, les industriels, les commissaires industriels, les chambres de commerce et les organismes régionaux, en termes de structures régionales. (0 h 15)

Le problème dans une région comme la nôtre, c'est que le phénomène d'appartenance n'existe pas, c'est-à-dire que les gens de Toudassac ne sont pas préoccupés tellement par la commission parlementaire d'aujourd'hui. Parce que ce n'est pas le même style qu'en Gaspésie. Cela amène les permanents à se déplacer plutôt que ce soit les populations qui se réunissent régulièrement en comité. C'est quand même, à l'intérieur d'une région comme la nôtre, une particularité, mais vraiment exceptionnelle. Vous allez dans la Basse-Côte-Nord, mais vous ne demandez pas les gens de Blanc-Sablon. Nous, on les fait venir trois fois par année. Alors, cela c'est toute une particularité. C'est pour cela qu'était amenée la dernière recommandation au ministre, à savoir que le ministre accélère sa consultation, parce qu'à ce moment les organismes régionaux de la Côte-Nord, en vertu de ces quelques balises, pourraient dire: Voici, pour la région de la

Côte-Nord, un organisme qui se veut régional pourrait répondre à telle ou telle balise. Sur ce point, il y a un document en préparation. Je vous dirai, M. le ministre, que, dans un premier temps, à l'heure actuelle, notre organisme s'est regroupé avec le CERL à l'intérieur de locaux où les trois salles principales sont occupées en commun pour faciliter la consultation. On prévoit que les autres organismes régionaux pourraient se regrouper et, à ce moment-là, les salles de conférence, la reprographie, les comités et certains services seraient conjoints.

Mais l'important pour la Côte-Nord, c'est que l'organisme puisse siéger et cela posera un problème de budget, d'une part, à cause des distances et, d'autre part, un problème de personnel: il faudrait être un peu fou pour travailler dans un territoire qui va de Tadoussac jusqu'à Blanc-Sablon, qu'il faut desservir en totalité. C'est un peu ce que fait un de vos députés à l'heure actuelle; alors, il peut en parler.

M. Gendron: Rapidement, cela va être une tout autre question. Est-ce que vous croyez que c'est rêver en couleur d'envisager une seule structure de concertation, une structure unique de concertation pour tout le territoire de la Côte-Nord? Est-ce que quelqu'un qui préconise une telle structure fait fausse route, d'après vous?

M. Sirois: D'après moi, non, pour la raison suivante. Si vous ne faites que deux structures, à ce moment-là, vous allez vous réveiller avec une des structures qui ne comportera probablement qu'un demi-député fédéral. Là, cela va être difficile de le consulter. On ne saura jamais dans quelle partie. Ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a pas de densité de population et que, deuxièmement, la Côte-Nord est un développement linéaire. Il n'y a pas d'arrière-pays. Dans n'importe quelle région au Québec, il y a de l'arrière-pays. Ici, on n'en a pas. Alors, la consultation est linéaire. Il y a trois choses en commun: le fleuve Saint-Laurent, les lignes d'Hydro-Québec et un bout de la 138 qui ne finit pas!

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Gendron: Merci, M. Sirois. Juste une seconde. À propos de l'une des recommandations que vous faisiez concernant le comité d'action-chômage, M. Marois voudrait dire juste un mot là-dessus, avant de passer la parole à un autre.

M. Marois: Oui, M. le Président, très rapidement. M. Sirois, vous évoquez dans votre mémoire, à la page 8, le soutien que vous apportez au Comité action Côte-Nord qui a été mis sur pied, qui est présidé par

M. le maire de Fermont, M. Ménard, et qui regroupe des représentants, effectivement, des villes de Schefferville, Gagnon, Fermont, bien sûr, Port-Cartier, Sept-Îles. Vous dites qu'ils auront besoin de fonds pour mener à bonne fin certaines études dont l'une devrait cerner les coûts socio-économiques de la fermeture et puis élaborer des stratégies ou, à tout le moins, une stratégie de relance pour la Côte-Nord. Vous posez la question: Est-ce que le gouvernement du Québec est prêt à épauler l'action du Comité action Côte-Nord?

Effectivement, vous êtes au courant, bien sûr, puisque je comprends que c'est par ce biais que vous l'introduisez, que le Comité action Côte-Nord a fait parvenir au premier ministre, M. Lévesque, un télégramme le 4 février dernier - et m'a fait parvenir une copie de ce télégramme -faisant état de cette étude dans laquelle les municipalités concernées sont impliquées financièrement pour un montant de 25 000 $, et demandant au gouvernement du Québec de les épauler pour un montant de 40 000 $ pour leur permettre de terminer cette étude extrêmement importante.

Comme vous le savez, nous sommes passés à Port-Cartier. Nous avons eu l'occasion de rencontrer les gens du Comité action Côte-Nord. M. le maire Bégin, je ne sais pas s'il est encore parmi nous, en fait partie. Il nous avait été dit: Nous comptons en reparler lors de la commission parlementaire par le biais de votre intervention. M. le maire de Fermont nous avait demandé de réserver pour ici ce que je vais maintenant vous dire: Le gouvernement répond favorablement à cette demande. Je peux vous annoncer officiellement, à tous les membres du Comité action Côte-Nord, que le gouvernement du Québec versera le montant demandé de 40 000 $ pour permettre de terminer cette étude.

M. Sirois: M. le ministre, disons, d'abord, que je n'étais pas informé. L'inspiration, on l'a formulée. Disons que, par l'intermédiaire de commissaires industriels, le FRIC, qui est le fonds régional d'initiative à la concertation, en collaboration avec les municipalités également dans les autres projets qui seraient émis - le FRIC administré par le CRD - était prêt à investir dans le Comité action Côte-Nord la somme de 10 000 $, enjambant sur cette année et l'an prochain, dans des projets de concertation autres que l'étude.

M. Marois: Parfait.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Alors, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais remercier M. Sirois pour son mémoire. En plus des recommandations très positives, je pense que votre présentation a redonné un peu de vie à nos délibérations, spécialement si tôt le matin.

Vous parlez de coûts socio-économiques. Je crois que c'est un élément très important. À la commission parlementaire sur SIDBEC-Normines à laquelle vous avez référé, on avait parlé des coûts socio-économiques parce qu'en évaluant les décisions qu'un gouvernement doit prendre, que ce soit à Schefferville ou à Gagnon, un gouvernement doit prendre en considération les coûts socio-économiques, les coûts pour le gouvernement, pour les citoyens concernés. À cette commission parlementaire où le député de Duplessis était présent, on avait fait la suggestion - non, je ne référerai pas au fait que vous vous êtes partis à deux heures et demie du matin pour ne pas répondre à notre motion qu'on avait faite en bonne et due forme - au gouvernement d'effectuer une étude sur les coûts socio-économiques avant de prendre une décision. Je pense qu'on n'a pas besoin d'avoir la tête à Papineau pour faire une telle suggestion. Je pense que c'est élémentaire. Mais on avait quand même demandé au gouvernement de prendre l'engagement de faire cette étude. Je voudrais vous poser deux questions: Puisque vous faites partie du Comité action Côte-Nord et que vous faites partie de toutes les activités quant au développement potentiel pour essayer de trouver des solutions pour la Côte-Nord, êtes-vous au courant si une telle étude a été commencée par le gouvernement?

M. Sirois: Non, absolument pas. D'abord, d'une part, je ne siège pas comme membre au sein du comité qui regroupe cinq localités parce que, en fait, j'agis sur l'ensemble du territoire et, d'autre part, je ne sais absolument pas si le... Mais, comme le ministre vient de l'annoncer, en fin de compte, il y aurait un montant prévu pour entreprendre, de concert avec le Comité action Côte-Nord, une telle étude.

M. Ciaccia: Je trouve que ce serait important que le gouvernement fasse une telle étude avant de prendre une décision, soit sur SIDBEC-Normines ou, même, avant de prendre certaines décisions ici à Schefferville. Je parle d'une étude socio-économique pour chaque endroit concerné.

M. Sirois: Je répondrais de la façon suivante: Évidemment, quand le feu est à la bâtisse, tu éteins l'incendie et tu regardes après. Tu te dis: Là, on rebâtit, on agrandit, on raccourcit, on n'a pas le choix. C'est clair que, dans les cas qui représentent toute la sous-région qui regroupe deux MRC, c'est-à-dire Port-Cartier, Sept-Îles et les villes nordiques, il y a quand même des solutions

d'urgence qui ne peuvent pas attendre une étude exhaustive sur l'ensemble des problèmes ou sur les impacts négatifs. L'étude est urgente, elle est nécessaire, mais elle ne devrait pas justifier le gouvernement de dire: Là, on attend une étude; on retarde telle solution. On est pris dans ce dilemme. Ce qui est important, c'est que les deux choses se fassent parallèlement. On aborde tout un "kit" - en bon canadien - de dépannage et en même temps qu'on fait le dépannage, on dit: Maintenant, on va essayer de s'y prendre pour qu'à l'avenir cela ne se reproduise pas. C'est comme cela que je verrais la solution. Est-ce l'oeuf ou la poule qui est avant? Je ne le sais pas.

M. Ciaccia: Je comprends ce que vous dites. C'est entièrement raisonnable s'il y a des décisions d'urgence à prendre pour arriver à aider les gens d'une certaine localité. Mais, par exemple, avant de prendre une décision sur une fermeture, je pense que vous serez d'accord qu'il faudra au moins avoir cette étude socio-économique.

M. Sirois: C'est certain que le gouvernement, aussi bien au sujet de Schef-ferville, de Gagnon et, on ne sait jamais, de Fermont ou - une autre mine qui n'est pas ici ce soir - de Fer et Titane à Havre-Saint-Pierre, une autre localité où il y a des minières, devrait procéder à des études sur l'impact négatif, l'impact en coût, l'impact social, assurance-chômage, déplacement, j'irais aussi loin que le suicide ou n'importe quoi, afin d'avoir un certain pattern qui permettrait au gouvernement de dire: À cause des impacts négatifs, on prend telle solution plutôt que telle autre. Dans le cas d'une fermeture comme celle de SIDBEC-Normines, par exemple, qui a une implication absolument astronomique, cela serait bon que le gouvernement procède au moins à une partie préliminaire de cette étude.

M. Ciaccia: Peut-être que le gouvernement pourrait nous informer s'il a commencé une telle étude ou s'il en possède une. Vous avez référé aussi à certains rapports qui étaient disponibles au gouvernement. Est-ce que vous avez l'impression qu'on procède un peu par improvisation? Par exemple, on annonce, une journée, que SIDBEC-Normines perdra 150 000 000 $. On convoque tous les gens. On fait une commission parlementaire sur SIDBEC-Normines. À un autre moment, Iron Ore envoie un avis disant qu'elle cesse ses opérations à Schefferville. On convoque une autre commission parlementaire. Trouvez-vous que c'est de cette façon que nous devrions procéder? Remarquez bien que je ne suis pas contre; je pense que, dans les circonstances, c'est important d'avoir l'avis des citoyens. Mais est-ce que vous trouvez que c'est suffisant? Est-ce que vous trouvez que c'est un peu improviser les choses que d'arriver à la dernière minute avec une commission parlementaire sans avoir vraiment apporté d'autres solutions de planification, spécialement quand les études, les rapports -vous avez fait référence au rapport Boucher - étaient disponibles?

M. Sirois: Évidemment, c'est très difficile de le dire. D'abord, je n'ai pas de jugement à porter sur la façon dont le gouvernement procède. Je sais que l'Opposition est beaucoup mieux informée que moi de toutes les tractations gouvernementales et de la façon dont cela fonctionne. Ce n'est certainement pas mon rôle de dire si le gouvernement procède correctement ou pas. Cela, je ne le sais pas. Mais je sais que notre mémoire préconise certaines recommandations au ministre qui, elles, tiennent compte de nos connaissances et du mandat qu'on reçoit, nous, de recommander des choses et non pas de juger l'action gouvernemetale. Quelquefois, on dit: Tel rapport aurait pu être appliqué ou bien peut-être que le gouvernement aurait pu débloquer un petit peu plus de fonds. À ce sujet, on a des présomptions parce qu'il y a des projets. Quant à l'action globale du gouvernement, je ne pense pas que ce serait mon rôle ce soir de l'évaluer.

M. Ciaccia: C'est parce que j'avais vu dans votre mémoire "cas d'espèce versus politiques globales". Vous avez dit, à la page 3: "Dans le cas de SIDBEC-Normines, une commission parlementaire a siégé après que furent étalés dans les journaux les problèmes rencontrés dans la société d'État. À première vue, il est apparu que le gouvernement n'a procédé à aucune politique précise pour traiter ce cas d'espèce."

M. Sirois: Ce cas d'espèce, je dis bien.

M. Ciaccia: Je me demande si c'est la même...

M. Sirois: Alors, c'est pour cela que le chapitre dit au gouvernement: On aurait besoin d'un programme d'ensemble, parce qu'assez souvent - on a des rapports ou autre chose - cela ne semble pas s'inscrire dans un programme d'ensemble. Mais cela ne présuppose pas un jugement global sur l'action gouvernementale. (0 h 30)

M. Ciaccia: Quand vous demandez, dans vos recommandations, que le gouvernement provincial rende disponible le plus tôt possible le compte rendu de l'ensemble des délibérations de la présente commission, qu'avez-vous vraiment à l'esprit?

M. Sirois: Nous avons à l'esprit - je l'ai, d'ailleurs, exprimé tantôt, j'en ai donné

une clarification - premièrement, d'avoir les minutes de l'assemblée, etc. Cela va bien. Les rapports, c'est une chose. D'autre part, quand l'équipe ministérielle va en discuter, il y a des alignements. On va s'aligner de telle ou telle façon. C'est probablement possible, pour l'équipe ministérielle, de dire, comme l'ont laissé soupçonner certains ministres aujourd'hui, tel le ministre du Loisir, de la Chasse et la Pêche: Nous autres, on s'en va là et voici, il y a déjà un volet là-dedans, sans que ce soit le plan d'ensemble global. Mais on pourrait, dans une grande tête de chapitre, par exemple, chasse et pêche, ou main-d'oeuvre, ou développement régional, dire qu'on a une orientation. C'est ce dont on aurait besoin le plus tôt possible.

M. Ciaccia: Finalement, à la page 15, vous faites une autre recommandation ou vous vous fixez un objectif, "celui du maintien du maximum d'activités socio-économiques à Schefferville." Je comprends que cela présuppose de votre part une confiance dans l'avenir de Schefferville. Je présume que vous voudriez bien - nous le souhaitons bien, nous aussi, de ce côté-ci -que le gouvernement démontre aussi la même confiance que vous avez démontrée par cette affirmation.

M. Sirois: Oui, parce que pour nous, c'est une plaque tournante au point de vue économique, au point de vue du développement et de la mise en valeur. Puis, on dit qu'on a confiance. Nous souhaitons que Schefferville demeure et puisse, à un moment donné, une fois qu'on a arrêté le recul, repartir en avant.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous auriez une conclusion ou une question? M. le député de Gaspé.

M. LeMay: Merci, M. le Président. Il y a quelque chose qui m'inquiète un peu dans votre mémoire, M. Sirois. C'est que vous parlez d'un certain comité pour guider les municipalités. On a parlé, ce matin, de concertation, c'est-à-dire au plan fédéral, provincial, municipal, ainsi qu'avec la compagnie minière. On parle aussi de subventionner substantiellement le Comité action Côte-Nord. Par contre, tout à l'heure, vous étiez favorable à n'avoir qu'une seule structure. Ne trouvez-vous pas que cela commence à faire pas mal de monde et pas mal de cas?

M. Sirois: II faut bien comprendre une chose. Si vous prenez le Comité action Côte-Nord, qui couvre cinq municipalités et qui s'oriente vers des travaux d'importance, je pense, tels que superviser et suivre une étude d'impact socio-économique, c'est une tâche. Je parle d'une structure de concertation pour le Comité action Côte-Nord, qui part de Blanc-Sablon jusqu'à Tadoussac et qui se demande: Est-ce qu'il y aura un programme pour la continuation de la route 138, qu'est-ce qu'on fera, par exemple, dans le domaine des pêches où il y a eu un plan quinquennal de fait et où le conseil a proposé plusieurs recommandations parce que la Côte-Nord commençait seulement à s'éveiller à la pêche industrielle et commerciale et, en tenant compte de cela, était largement en retard et déficiente face à la Gaspésie et à la rive sud? Eh bien, à ce moment-là, on faisait des recommandations territoriales globales. Tandis que vous pouvez avoir un comité de citoyens qui siège ici et un représentant qui va siéger au Comité action Côte-Nord. Le Comité action Côte-Nord, qui s'occupe de cinq localités quand il y en a 40 sur la Côte-Nord, va demander au gouvernement, quant au transport aérien, qu'il y ait une table de concertation; quant à la mise en valeur de la forêt sur la Côte-Nord, où dans un coin du territoire elle est surexploitée, en danger de rupture de stock, tandis qu'à l'Est, elle est sous-exploitée parce qu'une compagnie est fermée, eh bien, il y a une politique régionale pour y faire face. Il y en a d'autres qui sont territoriales et sous-régionales. Si vous divisez une région de 800 milles de long en comités sous-régionaux, vous allez être obligés de procéder ainsi sur la Côte-Nord et d'avoir soit des fédérations, conférences d'orientation ou autres, mais ce sera nécessaire sur la Côte-Nord. C'est un des défis de la Côte-Nord, que les gens de Baie-Comeau, qui semblent bien s'orienter au point de vue économique, se préoccupent également de l'avenir des villes minières, selon le bon vieux principe canadien, "quand il pleut sur le curé, cela dégoutte sur le bedeau".

M. LeMay: M. Sirois...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Gaspé.

M. LeMay: ...tout à l'heure, vous parliez de structures plus élaborées, mais vous parliez d'études faites par le gouvernement pour le développement de la Côte-Nord. Vous sembliez dire que ce seraient des fonctionnaires qui viendraient de Québec faire une étude ou le gouvernement. Est-ce que vous ne verriez pas plus des gens de la Côte-Nord, quitte à les subventionner, plutôt que de prendre des gens qui viennent de l'extérieur?

M. Sirois: Je souscris pleinement à la suggestion. Cela posera le défi que les gens de la Côte-Nord s'impliquent davantage. Cela

pose le phénomène des défis quand vous demandez à quelqu'un qui siège bénévolement de partir de Havre-Saint-Pierre et de s'en venir à Baie-Comeau; il va faire 300 milles et il retourne le lendemain, mais il est encore à 400 milles de Blanc-Sablon. C'est nécessaire, aussi bien pour les gens des villes nordiques et les gens de Sept-Îles, de se créer ce genre d'habitude qui créera une cohésion entre les décideurs régionaux et, à l'heure actuelle, cela n'existe pas sur la Côte-Nord. Baie-Comeau ne se préoccupe pas d'ici et pas tellement Havre-Saint-Pierre parce que c'est le problème de Sept-Îles.

Juste pour vous montrer que cela n'existe pas, quand la compagnie Iron Ore a annoncé qu'elle fermait ses portes ou le concentrateur à Sept-Îles, il y a quand même un maire qui a dit: Ce sera une bonne chose pour nous. Lui, il était dans la misère et il s'est dit: S'il y en a un deuxième qui a de la misère, on va être deux. Cela s'est dit dans les journaux. Il n'y a peut-être pas un phénomène de cohésion; c'est en train de se créer et c'est absolument essentiel sur la Côte-Nord. C'est peut-être la seule région au Québec - on va parler de la Gaspésie, on parle du miracle de la Beauce - la Côte-Nord, où, quand il y a un problème à Sept-Îles, ils coupent les marges de crédit à Baie-Comeau parce que le gérant de banque ou le vice-président n'a jamais compris les distances. Cela est déjà arrivé et c'est cela, la Côte-Nord. C'est nécessaire qu'il y ait une cohésion régionale et cela demande un effort particulier pour que les gens disent, à un moment donné: Sur le plan régional, on se bat pour cela. Il faut vous dire qu'avec deux députés cela fait du pain sur la planche.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Sirois. M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, le Président. M. Sirois, votre mémoire est le troisième qui déplore les modes de transport sur la Côte-Nord. Je pense que le ministre vous a ouvert la porte en disant: Lorsque les gens sont dynamiques et font des propositions concrètes... Est-ce que, par hasard, vous auriez formulé des recommandations dans le domaine du transport, soit à court ou long terme? Ce serait peut-être le temps de les présenter ce soir.

M. Sirois: Disons qu'au mois de mars à peu près on a fait une table de concertation sur le transport aérien sur la Côte-Nord -c'est une brochure, quand même, d'une centaine de pages - qui regroupait des intervenants à partir de Blanc-Sablon jusqu'à Tadoussac. Il y avait quand même 80 intervenants à Sept-Îles et on en fait une autre sur un autre sujet au mois de mars prochain. Là, il y a une série de recommandations qui ont été formulées tant à l'égard des compagnies qu'à l'égard des gouvernements fédéral et provincial. Le mémoire a été envoyé au ministère des Transports.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie beaucoup, M. Sirois, de vous être présenté. Le prochain intervenant, il s'agit du représentant des départements d'urbanisme et de géographie de l'Université McGill, M. Marc Bouffard. Vous pouvez procéder. Je vous fais la même recommandation qu'aux autres, d'être aussi concis que possible et, s'il est possible, de tourner les coins ronds à l'occasion.

Départements d'urbanisme et de géographie de l'Université McGill

M. Bouffard (Marc): Depuis trois ans maintenant, l'École d'urbanisme et le département de géographie de l'Université McGill s'intéressent aux conditions de vie dans les communautés minières du Moyen-Nord québécois et du Labrador. Durant les périodes estivales, notre groupe de recherche a ainsi eu la possibilité de séjourner à Gagnon, Fermont, Labrador City, Wabush et Schefferville. Dans chaque communauté, nous avons rencontré plus d'une centaine de ménages avec lesquels nous avons discuté de leur mode de vie et de leurs aspirations face à l'existence particulière qui se présente à eux. Nous avons également rencontré les différentes autorités locales dont les administrations municipales, les compagnies minières, les syndicats, les groupes communautaires, les travailleurs sociaux et j'en passe. C'est ainsi que nous avons pu constituer une banque de données considérable et des dossiers qui sont disponibles aux chercheurs et à toute personne intéressée. Jusqu'à maintenant, plusieurs ouvrages ont été publiés sous différents thèmes. Ce projet était supervisé par les professeurs John Bradbury et Jeanne Wolfe, respectivement du département de géographie et de l'École d'urbanisme de l'Université McGill.

Mon nom est Marc Bouffard et je suis étudiant en urbanisme. C'est au nom du groupe entier que je présente ce mémoire.

L'annonce de la fermeture de Schefferville a soulevé d'importantes questions concernant les politiques nationales et provinciales en matière de mines et de planification régionale à long terme. Malgré un fort degré d'optimisme au cours des 30 dernières années, la compagnie minière et ses employés ont graduellement fait face à une diminution des opérations pour aboutir finalement à la fermeture de la ville. Personne, incluant la compagnie minière, la municipalité, le gouvernement provincial et la communauté entière, n'était vraiment préparé à cette situation. Il y avait bien eu

quelques rumeurs et signes précurseurs, mais ceci n'avait jamais été sérieusement considéré comme les signaux d'une véritable fermeture.

L'annonce de la fermeture, en novembre dernier, a révélé l'absence de vision à long terme au niveau des politiques minières. Des études plus poussées sur les stratégies d'établissement, sur les politiques minières et sur la nature des relations entre la compagnie minière et le gouvernement provincial ont encore besoin d'être approfondies.

Formuler des réponses aux problèmes du déclin et de la fermeture des mines est très complexe. Certains problèmes pourront être réglés par le biais de politiques à court terme ou à long terme pour d'autres. La fluctuation des prix sur le marché du minerai de fer, la main basse de certaines compagnies sur l'industrie de l'exploitation du minerai fer et la présente crise tombent sous la juridiction et le contrôle du gouvernement provincial. Mais qu'existe-t-il en termes de politiques relatives aux modes de propriété dans l'habitation, aux fermetures des villes, au recyclage des travailleurs et à leur transfert, à l'information préalable et au dévoilement des projets futurs de la compagnie en ce qui touche la communauté, des fonds de secours et j'en passe?

Deux types de politiques peuvent être développées. Premièrement, il y a les politiques à court terme qui veulent minimiser les effets de la crise actuelle sur la communauté et surtout éviter tout mouvement de panique. Ce sont des solutions qui cherchent plutôt à réparer et non à préparer le futur: support financier, assurance-chômage, bien-être social. À long terme, ces politiques se doivent de reconnaître la nature instable inhérente au secteur des mines, les cycles économiques des industries et l'instabilité de la structure sociale dans les communautés minières.

Pour une politique du logement et des services à la communauté. La plupart des villes-ressources du Québec et du Canada peuvent être qualifiées de villes nouvelles en ce sens que celles-ci ont été planifiées et construites globalement avant de voir une population s'y établir dans un seul mouvement. Dans ces villes construites par des corporations privées désirant exploiter nos ressources naturelles, viendra s'installer une population de plusieurs milliers d'individus qui désirent y retrouver les avantages de la vie urbaine à la mode sudiste. Pour attirer cette main-d'oeuvre et également la maintenir en place, la compagnie se doit de bâtir une ville de très haute qualité afin de compenser particulièrement pour les conditions géoclimatiques que l'on y retrouve.

Ces avantages, on les retrouve notamment dans une politique d'habitation qui se doit de tenir compte du caractère particulier de ces communautés. Il en va de même pour certains services qui doivent être fournis par la compagnie elle-même. En fait, la présence de la compagnie à l'intérieur de la communauté est telle qu'en langue anglaise on utilise le terme "company town" pour décrire ce type de relation.

En conséquence, lorsque la compagnie décide de cesser ses opérations, c'est la communauté entière qui s'en retrouve affectée comme en fait foi la nécessité de tenir une commission parlementaire sur l'avenir de Schefferville.

Généralement, à l'intérieur d'une ville mono-industrielle, il existe différents types d'habitations qui varient entre la maison unifamiliale et la garçonnière, en passant par les maisons en rangées, jumelées, etc. C'est un marché qui est contrôlé par la compagnie et ceci se répercute sur l'attribution des unités de logement et ce, en fonction du statut au travail. Il en va de même pour les non-employés de la compagnie qui, dans l'impossibilité d'obtenir un logement à partir du stock de la compagnie, doivent recourir à un marché parallèle qui offre généralement des logements de moins bonne qualité, exemple, la maison mobile. Cette situation se répercute également au niveau des services offerts dans la ville alors que, par exemple, les commerçants ne sont pas incités à venir s'y établir. Pour les employés du secteur public, cette situation oblige l'État à s'impliquer financièrement par des subventions afin que ses travailleurs puissent disposer de logements adéquats.

Les villes mono-industrielles se caractérisent donc par l'absence d'un marché libre pour l'habitation. En conséquence, nous croyons que les organismes publics reliés à l'habitation, tels la SCHL, la SHQ, devraient s'impliquer davantage et mettre en branle un marché secondaire destiné aux ménages, non employés par la compagnie et qui ont droit aux mêmes avantages au niveau du logement. (0 h 45)

II existe également différents modes d'attribution des logements qui varient généralement entre le marché locatif et celui de la vente avec ou sans clause de rachat. Comme chacun possède ses avantages et ses désavantages, il ne nous est pas permis de recommander un type particulier, en ce sens que ce choix doit se faire en fonction de la communauté à implanter: durée d'existence, revenus de la population, préférences des ménages, etc. Néammoins, il nous est apparu que la compagnie IOC avait quelque peu modifié sa politique et ce, en fonction de ses intérêts particuliers. En fait, c'est une situation qui est caractéristique à plusieurs villes mono-industrielles.

En conséquence, nous demandons que cesse dorénavant une telle pratique et que les compagnies s'engagent formellement

envers le gouvernement et la communauté à ne modifier leurs politiques d'habitation que si les conditions sont avantageuses pour chaque partie.

Il existe un type de marché pour l'habitation qui, jusqu'à maintenant, a été peu considéré à l'intérieur des villes mono-industrielles. Il s'agit du marché coopératif dans lequel s'impliqueraient les gouvernements par le biais de la SCHL et de la SHQ. Nous recommandons donc que ce type de marché soit examiné de plus près et ce, d'autant plus qu'il peut représenter un type de logements avantageux pour les non-employés des compagnies.

Deuxièmement, nous croyons également que les villes du Moyen-Nord devraient offrir un stock de logements diversifié tant en type d'habitation qu'en mode d'attribution, location ou vente. En fait, chaque ménage devrait pouvoir passer par un logement locatif, le temps de se faire une idée juste des types d'existences qui l'attendent.

Troisièmement, les maisons mobiles, de même que les "bunkhouses" devraient être découragées dans les villes-ressources, car ceux qui les habitent ont tendance à vivre en marge de la communauté. De plus, la maison préfabriquée semble tout indiquée pour plusieurs raisons. Elle peut être déménagée, car démontable, et ce, en fonction des besoins de la compagnie. Elle peut offrir une meilleure qualité et des coûts réduits de construction.

Les subventions et la clause de rachat. Construire dans les régions sub arctiques coûte cher et cette situation se traduit par la nécessité que la compagnie subventionne le prix ou le loyer des habitations.

En conséquence, nous estimons qu'il est normal que la compagnie s'adjoigne une clause de rachat afin de maintenir un stock convenable. Cependant, si la compagnie opte pour ce type de marché, la clause doit être maintenue durant toute l'existence de la communauté.

Cela a plusieurs raisons. Parmi les plus importantes, il faut éviter de créer un marché qui serait inévitablement déséquilibré. Ainsi, les premières maisons qui seront disponibles à travers le marché libre atteindront des prix exorbitants.

En conséquence, nous estimons que la clause de rachat est valable pour autant que celle-ci protège le propriétaire et ce, particulièrement à partir du moment où l'existence de la communauté tire à sa fin, d'où l'absence d'un marché immobilier. Nous estimons également qu'il est du devoir de la compagnie de racheter les maisons des propriétaires qui désirent quitter Scheffervil-le.

Nous croyons que la présence des banques sur le marché immobilier - prêts hypothécaires - est à déconseiller, et ce, en prévision de la disparition du marché, et que les banques exigeront un remboursement intégral du prêt. Habituellement, ces banques se retireront d'elles-mêmes au moindre signe d'incertitude, ce qui en fait une source de financement peu fiable.

Malgré la clause de rachat, nous croyons que chaque propriétaire devrait recevoir une plus-value intéressante sur ses versements et sur les améliorations apportées à la maison. Sinon, afin d'éviter une dégradation et certains conflits à travers la communauté, un marché locatif devrait être instauré.

Troisièmement, finalement, nous croyons que le service d'habitation devrait fonctionner le plus possible en marge de la compagnie. En particulier, ce service aura la qualité de séparer questions de travail et habitation.

Services à la communauté. En réponse à la cessation des activités minières et à un exode massif de la population, il sera nécessaire de restructurer la plupart des services, tant privés que publics, offerts à la communauté. La plupart subiront une baisse de leur clientèle et, dans beaucoup de cas, il faudra abandonner tout simplement les affaires. Nous recommandons donc que soit entreprise au plus tôt une étude devant conduire à l'élaboration d'une liste des services minimums, de leur réorganisation et de l'aide à leur apporter, et ce, en fonction, premièrement, d'un miminum d'activités dans la communauté ou d'une disparition totale des activités, quoiqu'une disparition totale soit peu probable.

En effet, à moins que tous ces services ne soient relocalisés à l'intérieur de la réserve indienne, il faut présager que cette population autochtone ne cessera pas d'utiliser les services offerts par la communauté de Schefferville. Déjà, une question de taille se pose: Qui prendra en charge le service ferroviaire jusqu'alors assuré par la compagnie minière? Ce service, qui doit notamment assurer le transport des passagers à bon compte, est vital pour ravitailler l'agglomération de Schefferville et de la réserve indienne.

En conséquence, nous croyons que divers programmes devront être mis en branle, particulièrement afin de maintenir une qualité et un niveau adéquat de services dans la municipalité, d'assurer un lien de communication adéquat avec les régions du sud, de venir en aide aux commerçants acculés à la faillite.

La communauté et la municipalité. Les communautés minières sont particulières en ce sens qu'elles sont des créatures des compagnies et que ces dernières vont financer la construction de la ville tout entière ou presque. Même si le gouvernement provincial a voulu éviter un contrôle direct de la compagnie sur les affaires municipales et communautaires par le biais de la Loi sur

les villes minières, il n'en demeure pas moins que celle-ci en sa qualité de principal payeur de taxes est directement responsable de la santé financière de la municipalité et, le cas échéant, de sa survie.

La législation actuelle, principalement la Loi sur les villes minières qui se rapporte à l'administration municipale, est peu explicite quant au rôle et aux obligations des divers intervenants et ce, à travers les diverses phases que sont l'établissement, le fonctionnement et le déclin des communautés minières du Québec. Comme il ne fait nul doute que la compagnie a besoin de la communauté pour fonctionner et vice versa, la compagnie mère devrait, selon toute logique, être responsable de la santé financière de la municipalité. En fait, la mise en tutelle de Schefferville en 1978 doit être considérée comme un acte isolé et une telle situation ne devrait pas se répéter.

Comme si la compagnie Iron Ore avait voulu assurer sa prospérité au début, et sa survie à la fin, certains faits montrent que l'implication financière de celle-ci s'est faite de moins en moins importante, exception faite des quelques années qui ont suivi la mise en tutelle.

En conséquence, nous estimons que la Loi sur les villes minières devrait être révisée et rendue plus explicite, notamment sur les obligations des diverses parties en présence et sur ce qui concerne le financement municipal, la mise en place des services publics et leur financement, la fermeture de la ville, s'il y a lieu, et les responsabilités des diverses parties. Il nous apparaît également raisonnable que toute compagnie mère soit responsable de la santé financière de sa communauté et qu'en conséquence celle-ci compense pour le manque à gagner de la municipalité et ce, après que cette dernière a fixé un taux de taxe acceptable autant pour la compagnie que pour les propriétaires.

La cessation des activités minières. En termes de revenus pour la municipalité, la compagnie IOC contribue pour près de 80%, ce qui correspond à sa valeur inscrite sur le rôle de l'évaluation foncière. On comprendra que plusieurs s'inquiètent de l'avenir de la municipalité advenant que la compagnie cesse ses activités et qu'elle ne soit plus tenue de payer ces taxes. En réponse aux services rendus, nous croyons légitime de demander à la compagnie Iron Ore de s'engager envers la municipalité à verser une certaine portion de ses taxes et ce, durant quelque temps encore. Une étude plus détaillée permettra de mieux évaluer l'importance de cette aide qui pourrait également prendre l'aspect de subvention.

Il est également nécessaire que la municipalité de Schefferville voie à réduire au maximum ses coûts d'opération. Entre autres options, nous croyons qu'il serait possible de fermer certains quartiers et de relocaliser la communauté restante dans certains secteurs. Cette restructuration aurait pour effet de réduire les dépenses d'opération et d'entretien, de déneigement, d'aqueduc, de police et de favoriser la création de nouveaux noyaux qui faciliteront l'émergence d'une nouvelle communauté. Nous espérons donc que l'offre de vente des maisons à 1 $ s'appliquera aux ménages qui seront localisés à l'intérieur de ce programme.

Le troisième point: une économie à diversifier. La situation actuelle, dans laquelle sont plongées les communautés du Moyen-Nord québécois, ne fait que confirmer l'importance qu'il y aura à l'avenir de favoriser l'éclosion de véritables communautés régionales qui desserviront plusieurs industries. Ce type de communauté est donc l'antithèse de ce qu'est une ville mono-industrielle. Le principe même qui régit ce type de communauté est celui de la diversité économique et ce, tant à l'intérieur de celle-ci qu'au niveau de son hinterland. Chaque centre régional dessert donc plusieurs mines, chantiers, etc. Cette diversification économique assure une certaine stabilité en ce sens que les secteurs qui composent la communauté économique sont non seulement différents, mais souvent complémentaires. Au point de vue communautaire, ces centres régionaux offrent un cadre de vie plus intéressant parce que plus diversifié et cela, en termes de centre de distribution de biens et services. Au point de vue financier, ces communautés sont particulièrement intéressantes pour les compagnies et les corporations municipales: investissements partagés, économies d'échelle, stabilité de la main-d'oeuvre.

On est malheureusement forcé de reconnaître aujourd'hui que l'absence de politiques ou de stratégies à l'échelle du Moyen-Nord n'a pas favorisé l'implantation de telles communautés régionales, de même que le développement ou la survie des communautés en place. Ce développement, laissé aux mains des compagnies seules, n'a favorisé l'expansion que d'une seule richesse, le fer.

Il serait grand temps d'élaborer enfin une politique globale pour le développement à l'échelle régionale. C'est au travers des MRC récemment constituées que ce développement pourrait se faire. Considérant que ces entités régionales seront éventuellement amenées à jouer un rôle de plus en plus important quant à leur développement, on peut se demander s'il ne serait pas préférable de fusionner en une seule MRC celles de Caniapiscau et des Sept-Rivières. Après tout, quelques-uns des principes fondamentaux régissant le découpage des MRC ne sont-ils pas justement ceux de la région d'appartenance et de

l'entité économique?

Considérant le fait que ces MRC partagent non seulement la même base économique, le fer, mais également les mêmes compagnies maîtresses et que le minerai de l'une est exporté vers l'autre et qu'en conséquence le développement de l'une ne peut se faire sans celui de l'autre, il nous semble approprié de recommander que les élus locaux envisagent sérieusement la possibilité d'un fusionnement entre les deux MRC, car une véritable politique à l'échelle régionale ne peut se faire si on sépare le Moyen-Nord québécois (MRC de Caniapiscau) du reste de la Côte-Nord (MRC des Sept-Rivières).

Quant à la formulation de certaines solutions de rechange pour venir en aide à la communauté de Schefferville, il faut prendre conscience que celle-ci est géographiquement isolée et qu'il sera difficile d'y ramener le plein emploi à moins qu'une industrie majeure ne vienne s'y implanter à nouveau. Il faut également ajouter que tout programme élaboré en période de crise ne peut avoir autant de chances de réussite que ceux planifiés avec soin et mis en application longtemps avant l'annonce de la fermeture. Pressés par les événements, plusieurs seront amenés à élaborer des programmes qui n'auront, en fait, que peu d'impacts quant aux chances de survie de la communauté. Malgré les diverses pressions qui font en sorte que ces programmes de diversification doivent être opérationnels le plus tôt possible, il n'en demeure pas moins que ceux-ci devront être soigneusement préparés et examinés, notamment en ce qui touche aux programmes à long terme.

Quant à ces programmes à long terme, nous recommandons que soient examinées soigneusement certaines expériences étrangères dans lesquelles les villes mono-industrielles ont déjà vécu ce genre de situation et qui ont su ramener la prospérité à l'intérieur de leur communauté, particulièrement en Suède, en URSS et en Australie. Ce besoin de connaissances est d'autant plus important que la situation actuelle qui prévaut à Schefferville risque de s'étendre dans un certain avenir à plusieurs villes mono-industrielles du Québec.

Pour ce qui est des programmes à court terme, ces programmes n'ont d'intérêt que dans la mesure où ils assurent un certain niveau d'activités dans la communauté, et ce en attendant une reprise normale des activités économiques. L'avantage de la plupart de ces programmes est qu'ils peuvent être mis en branle dans un laps de temps relativement court après l'annonce de la fermeture définitive de la mine.

Le Président (M. Bordeleau): Vous m'excuserez, mais cela fait déjà 20 minutes. Je vais donc vous demander de conclure.

M. Bouffard: Il me reste environ cinq pages, cinq minutes.

Le Président (M. Bordeleau): C'est beaucoup. On vous demanderait d'abréger, s'il vous plaît!

M. Bouffard: Parmi les programmes à court terme, on n'a pas élaboré trop, trop.

Le Président (M. Bordeleau): Ce n'est pas parce que ce n'est pas intéressant...

M. Bouffard: Non, j'espère.

Le Président (M. Bordeleau): ...c'est parce que les règles de la commission le veulent ainsi.

M. Bouffard: Les règles sont ce qu'elles sont. On a un point qu'on voudrait quand même souligner, c'est l'information à la communauté. Je veux simplement lire ce passage-là. À la fin de janvier 1983, la compagnie Iron Ore annonce la création d'un plan d'indemnité et de relance de plusieurs millions pour la communauté de Schefferville. La volonté de la compagnie de venir en aide à ses employés est très louable. Cependant, il faut considérer que l'annonce de cette aide survient près de trois mois après celle de la fermeture. Durant plusieurs semaines, des dizaines de familles ont vécu dans l'incertitude et surtout des moments pénibles. C'est alors qu'on annonce à ces gens que leur communauté, "que l'on croyait condamnée à disparaître, pourra renaître grâce à une nouvelle vocation que l'Iron Ore et d'autres institutions tentent actuellement de définir."

En conséquence, nous croyons qu'il est nécessaire que soit développée une politique qui fera en sorte que la compagnie soit tenue de rendre public tout projet qui concerne l'existence de la communauté. Lorsqu'il est question d'une fermeture permanente ou temporaire, une telle décision se doit d'être accompagnée d'une période de préavis. Actuellement, il existe quand même certaines périodes de préavis au niveau de la loi du travail pour certaines compagnies, mais ces périodes nous apparaissent inadéquates compte tenu du caractère particulier des communautés minières du Moyen-Nord dans lesquelles les possibilités d'emploi sont rares. Nous recommandons donc que cette période de préavis soit révisée en conséquence.

On a aussi parlé des programmes d'aide aux communautés en détresse. Il existe actuellement de nombreux programmes gouvernementaux, fédéraux et provinciaux, pour venir en aide aux communautés en difficulté. Certains s'adressent spécifiquement aux communautés minières et nordiques alors que d'autres, ayant une portée beaucoup plus

générale, ne les concernent qu'indirectement. Notre groupe de recherche sur les villes minières du Moyen-Nord du Québec et du Labrador, de même que le groupe de travail fédéral-provincial sur les communautés minières ont déjà répertorié plusieurs de ces programmes. Certains ont déjà fait leurs preuves dans certaines provinces. (1 heure)

En conséquence, nous croyons qu'un groupe de recherche devrait être constitué afin d'étudier la validité de certains programmes étrangers ici, dans le contexte du Moyen-Nord québécois et, ensuite, de regrouper les plus pertinents à l'intérieur de ce qui pourrait devenir une véritable politique québécoise en matière de communautés minières. Par la suite, ce groupe verrait à coordonner la mise en application. Ensuite, un peu comme tout le monde, on encourage la création d'un fonds de mine, mais qui devrait regrouper quand même plusieurs types de mines et non pas seulement les mines de fer.

Le Président (M. LeMay): C'est bien, M. Bouffard. Je donne la parole immédiatement au ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais d'abord dire à M. Bouffard que, pour ma part, j'ai lu avec beaucoup d'attention ce mémoire. Je dois dire que je retiens ce mémoire comme en étant un d'une grande qualité qui a été présenté devant cette commission. Si ce n'était l'heure tardive - nous passons maintenant 1 heure du matin - ce mémoire aurait mérité une bonne heure de discussion.

Je voudrais simplement évoquer quelques points. Le premier, c'est que ce mémoire nous est présenté modestement, mais par des spécialistes, sur un problème que doit vivre aujourd'hui la communauté de Schefferville. Au tout début de votre mémoire et en l'ouvrant, vous nous dites, en nous avisant presque de ne pas nous illusionner, nous tous, sur les solutions et les remèdes: "Des études plus poussées sur les stratégies d'établissement, sur les politiques minières et sur la nature des relations entre la compagnie minière et le gouvernement provincial ont encore besoin d'être approfondies. Formuler des réponses aux problèmes du déclin et de la fermeture des mines est très complexe." C'est vrai que nous ne sommes pas en face d'une situation à laquelle nous pourrions répondre par un oui ou par un non. Je voudrais simplement vous demander si c'est conciliable une vocation mono-industrielle que reçoit une communauté, une ville, au moment du démarrage d'une entreprise minière et une problématique de vie à long terme dans un contexte socio-économique normal. Vous formulez, dans votre mémoire, une proposition et je la reçois très favorablement. Vous nous indiquez que vous êtes prêts à mettre sur pied un groupe de recherche sur les communautés en détresse. Je sais l'accueil que pareille proposition a reçu, pour l'instant en tout cas - souhaitons que la décision sera corrigée -au gouvernement fédéral. Pour notre part, nous accueillerions très favorablement cette proposition; nous serions même prêts à la soutenir et à voir comment nous pourrions recevoir une expertise et des propositions concrètes.

Je voudrais aussi souligner le fait que vous, comme beaucoup d'autres, avez été frappés - vous le soulignez avec éloquence à la page 18 de votre mémoire - par la nécessité d'informer la communauté. Vous avez en quelque sorte, dans vos propres mots, résumé ce que j'évoquais moi-même aujourd'hui devant cette commission. À la page 18, vous dites: "Même si tous s'y attendaient à un moment donné, l'annonce brutale de la fermeture a pris tout le monde par surprise." Je pense, comme vous, que nous aurons à établir ce que j'appellerais un cadre de fonctionnement, principalement lorsqu'il s'agit d'activités minières mono-industrielles. Tout le monde conviendra que la cessation des activités d'une telle entreprise a un impact brutal, direct et subit sur une communauté. En ce sens, je partage entièrement votre point de vue.

Je pourrais peut-être, M. le Président, m'arrêter ici, puis voir si, dans la première question - le reste étant des commentaires que je formulais - comment vous pourriez réagir à cette espèce d'harmonisation que vous souhaiteriez entre une problématique de développement minier à long terme et des évocations mono-industrielles. Est-ce conciliable?

M. Bouffard: Notre groupe en était arrivé à la conclusion qu'il faut éviter autant que possible la mise en place de communautés mono-industrielles. On prône le développement de communautés régionales.

M. Duhaime: Je vais vous demander bien simplement: Est-ce que votre groupe est prêt à aller aussi loin qu'à recommander de ne pas entreprendre un développement qui déboucherait sur une activité mono-industrielle?

M. Bouffard: Autant que possible, oui. M. Duhaime: Pardon?

M. Bouffard: Autant que possible, oui. Comme tout le monde le fait remarquer aujourd'hui, toute ville mono-industrielle est vouée inévitablement à une fin. Il n'y a pas d'autre choix.

M. Duhaime: Êtes-vous prêt à prendre le risque de faire une recommandation comme cela?

M. Bouffard: Non. Excusez-moi, je suis un peu nerveux. On a vraiment recommandé, à l'intérieur de toutes les études qu'on a faites, de tous les rapports qu'on a publiés, la création de villes desservant plusieurs compagnies, autant que possible elles-mêmes diversifiées, différentes mines, différentes économies et on a découragé les villes uniquement mono-industrielles.

M. Duhaime: Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Cela va? M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je tiens, premièrement, à vous remercier pour le dépôt du mémoire à cette commission. J'aurais sûrement plusieurs questions à poser. Par contre, étant donné l'heure tardive, je vais tenter de me limiter à quelques questions.

À la page 14, vous mentionnez, entre autres: "II nous semble approprié de recommander que les élus locaux envisagent sérieusement la possibilité d'un fusionnement entre les deux MRC, soit celle de Caniapiscau et celle des Sept-Rivières." Étant donné que, ce matin, on en a discuté très peu et qu'on a considéré le fait que Caniapiscau, actuellement, qui retient les municipalités de Fermont, Gagnon et Schef-ferville à l'intérieur de l'aménagement du territoire et d'un schéma d'aménagement préparé, est-ce que vous pourriez expliciter votre pensée sur le fait que ces deux municipalités régionales de comté viennent à peine d'être créées et déjà des interventions se font sentir à savoir qu'il devrait y avoir des fusions au niveau de certaines MRC?

M. Bouffard: Depuis le début, on a essayé de comprendre pour quelles raisons les villes nordiques avaient choisi de se regrouper sur elles-mêmes. Il ne semble pas y avoir d'autre choix comme on le dit dans le mémoire, puisque l'ensemble de la Côte-Nord, si on parle des villes nordiques, de Sept-Îles et de Port-Cartier, partage la même industrie, les mêmes compagnies, les mêmes installations. C'est inconcevable, en fin de compte, que les décisions de l'une n'aillent pas dans le même sens que celles de l'autre quand on parle de développement régional et d'identité où les MRC sont vouées à jouer un rôle éventuellement. Toute décision prise, comme la fermeture de Schefferville, va automatiquement se répercuter sur ce qui se passe à Sept-Îles. On aborde la recommandation dans ce sens qu'en partant il nous semble inconcevable qu'il y ait eu deux MRC constituées; même si cela ne fait pas longtemps qu'elles ont été constituées, on demande que soit examinée sérieusement la possibilité d'un fusionnement entre les deux. Ce n'est pas parce qu'on trouve que les deux fonctionnent mal, mais c'est plutôt à cause du besoin d'une politique régionale, comme plusieurs en ont parlé aujourd'hui, si cela doit se faire au niveau des MRC.

M. Rocheleau: M. le Président, tenant compte du fait que ce sont des urbanistes qui ont préparé ce mémoire, tenant compte du fait que l'ensemble du territoire que représente la Côte-Nord comporte des problèmes très particuliers à une industrie en particulier, l'industrie minière, tenant compte que des études ont été faites antérieurement, les études de l'OPDQ en 1978-1979 et de P.S. Ross et Associés en 1978, qui comportaient, d'une part, des recommandations très importantes, est-ce qu'on n'aurait pas dû appliquer à ce moment-là certaines recommandations plutôt que de tenter de refaire aujourd'hui un ensemble de nouvelles études pour démontrer qu'il y a des problèmes effectivement très présents, tellement présents qu'on est sur le point de vider une municipalité de toute sa population?

M. Bouffard: Vous savez, quand on parle de MRC, on parle de villes monoindustrielles, pas mono-industrielles, mais monoéconomiques, ayant une seule économie, le fer. Trois villes à l'intérieur d'une MRC telle que Caniapiscau. Comme on voit que Schefferville est en voie de disparition, si une MRC a deux municipalités, cela va à l'encontre du sens même d'une MRC. On ne peut pas parler de MRC alors qu'il y a deux municipalités à l'intérieur et une municipalité au nord qui est beaucoup plus faible que les autres.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre de la Main-d'Oeuvre.

M. Marois: Très rapidement, compte tenu de l'heure, je voudrais formuler un commentaire et poser une question. Le commentaire que je veux formuler est le suivant: Je partage entièrement l'opinion de mon collègue, le ministre de l'Énergie et des Ressources, et je sais que mes collègues ministériels la partagent aussi. Je crois qu'il est malheureux qu'il soit 1 h 15 du matin. Je crois que c'est un des mémoires remarquables que nous avons eus, particulièrement sur le plan de l'analyse. Je regrette que les médias ne soient plus là à cette heure-ci.

Sur le plan de l'analyse, particulièrement, je pourrais relever un seul point pour l'instant. À la page 18 de votre mémoire, je crois que vous mettez le doigt sur une des

questions clés que mon collègue de l'Énergie et des Ressources a posées ce matin au président de la minière IOC, sur laquelle je suis revenu immédiatement après et à laquelle mon collègue et moi maintenons que nous n'avons pas obtenu une réponse satisfaisante et valable, c'est-à-dire: Qu'est-ce qui explique qu'après trois années de bonne performance économique de rendement, avec un niveau de production à la baisse de tonnes, subitement, on ferme? Tellement subitement que vous dites: "II faut considérer que l'annonce de cette aide - vous parlez du plan d'indemnité de plusieurs millions annoncé par la compagnie en janvier survient près de trois mois après celle de la fermeture." Pourquoi? Pourquoi trois mois après la fermeture, l'annonce d'un plan d'indemnité? Sans compter les conséquences que vous évoquez pour la population. C'est pour cela que j'ai insisté pour obtenir du président de la minière IOC une prolongation du délai. Il y a eu une ouverture de faite. Cela ne restera pas là. On va y revenir. Sur cette question aussi, cela ne restera pas là. Les travaux de cette commission ne sont pas terminés. On va y revenir parce que la question demeure entière: Pourquoi trois mois après l'annonce de la fermeture, uniquement trois mois après, annonce-t-on un plan d'indemnité? On y reviendra. Mais je pense que vous touchez le coeur d'un problème fondamental en ce qui concerne ce qui s'est passé, ce qui se passe ici et aussi la leçon à retenir pour l'avenir. (1 h 15)

Ma question sera très courte. Je ne veux pas ouvrir, ce soir, un débat sur le fonds minier. Vous l'évoquez à la page 22 où vous faites allusion au projet de loi no 3 qui avait été déposé par le gouvernement à l'Assemblée nationale. Vous nous dites que ce "projet de loi no 3 sur le fonds minier révisé, doit être adopté le plus rapidement possible et, surtout, il devra s'appliquer également aux mines de fer." Vous dites "révisé". Voici ma question: Est-ce que je comprends bien que vous dites "révisé" parce que - vous dites plus haut: "Cependant, cette loi peut amener certains problèmes" - vous craignez certains problèmes? Pourriez-vous, le plus concrètement possible, me dire quel type de problèmes et en quoi vous craignez ces problèmes?

M. Bouffard: Justement, le mot "révisé" fait allusion au fait que, dans le projet de loi, les mines de fer étaient exclues, c'est le premier terme. Parmi les autres problèmes, on n'a pas étudié le projet de loi comme le fera le syndicat demain, mais on peut a priori, au niveau de l'ancienneté en tout cas, du transfert, de la sauvegarde de l'ancienneté à l'intérieur d'une autre communauté, envisager que la communauté réceptrice ne verra pas la venue de travailleurs de Schefferville, par exemple, d'une façon favorable si ses travailleurs doivent perdre leur ancienneté à cause de ces travailleurs-là. On ne voulait pas développer ce type de problème; on voulait tout juste le soulever.

M. Marois: En d'autres termes, que ce ne soit pas des déplacements qui, au moment où ils se font, ont pour effet d'enlever des emplois à d'autres qui les ont déjà.

M. Bouffard: Ne pas enlever leurs emplois, mais surtout ne pas enlever les avantages qu'ils ont accumulés à cette époque.

M. Marois: D'accord.

M. Bouffard: Que cela soit assez clair dans cette loi.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Bouffard, d'être venu présenter un mémoire devant notre commission. J'appellerais le dernier mémoire à être présenté ce soir -l'autre mémoire sera déposé seulement - il s'agit de la Station de recherche subarctique de McGill, avec M. Paul Wilkinson que la commission connaît déjà. Vous pouvez y aller dès maintenant, M. Wilkinson.

Station de recherche subarctique de McGill

M. Wilkinson (Paul): Merci, M. le Président. Je voudrais seulement expliquer que je porte un deuxième chapeau maintenant. Je vous parle en tant que directeur adjoint du Centre d'étude et de recherche nordique de McGill. Je veux vous présenter très brièvement un mémoire qui a été préparé, pas par moi, mais par le professeur Tim Moore, du département de géographie à McGill, qui est directeur de recherche de notre station ici, en collaboration avec M. Douglas Barr, qui est le gérant de la station. Je veux seulement vous donner le résumé de ce mémoire.

Brièvement, la Station de recherche subarctique de McGill est ici à Schefferville depuis 1954, presque depuis le début. Les projets de recherche que la station a soit entrepris, soit parrainés, impliquent toutes la gamme des possibilités à partir des sciences naturelles jusqu'aux sciences sociales, à des projets de nature très appliquée et à des projets de recherche de nature très théorique. La station a toujours bien collaboré avec les autorités municipales de Schefferville, avec les citoyens et avec la Compagnie minière IOC. En bref, le but de notre mémoire est d'appuyer la plupart des mémoires qui ont déjà été soumis.

On peut peut-être lire une couple de paragraphes à la page 2: En dépit de

l'annonce de la fermeture de la compagnie Iron Ore du Canada, la Station de recherche subarctique de McGill a pleinement l'intention de demeurer à Schefferville. Pour le centre et l'ensemble des résidents qui choisiront de demeurer dans la ville, il est essentiel que certains services minimaux soient maintenus. On en a fait la liste: des services adéquats pour les passagers et les marchandises entre Sept-Îles et Schefferville; le maintien d'un service aérien régulier; le maintien des services municipaux; le maintien des services de santé et d'éducation, récréatifs et autres.

Je veux juste ajouter un commentaire, quelque chose qui n'est pas compris dans ce mémoire. Quelque chose qui m'a impressionné au cours de la journée, c'est que presque tout le monde est d'accord qu'il y a un besoin de certaines études portant sur le Nord québécois. Mon commentaire est que, jusqu'à l'année dernière, le Québec connaissait un certain leadership sur le plan mondial en ce qui concerne les recherches nordiques. Ici, au Québec, on avait quatre centres de recherche nordique. Je parle du Centre d'études nordiques à Laval, du Centre d'ingénierie nordique de l'École polytechnique de Montréal, du Centre de recherche sur le Moyen-Nord à Chicoutimi et, bien sûr, de notre Centre d'étude et de recherche nordique à McGill. Tout d'un coup, malheureusement, cela a changé juste à un moment où le besoin de telles sortes d'études devient très très clair, très très urgent. Pour des raisons que je ne veux pas expliquer parce qu'il est trop tard, le conseil de l'université, l'année dernière a tout à fait changé de politique en coupant les subventions de base à trois de nos quatre centres. La subvention de notre centre à McGill a été réduite à zéro, la subvention au Centre d'études nordiques à Lavai réduite à zéro. La même chose pour le Centre de recherche sur le Moyen-Nord à l'Université du Québec à Chicoutimi. Le Centre d'ingénierie nordique de l'École polytechnique a reçu la troisième tranche d'une subvention de trois années. Je ne suis aucunement mandaté par les autres centres de recherche nordique au Québec, mais les responsables des quatre centres se réunissent régulièrement. Donc, certainement au nom de McGill et, en toute probabilité, des autres centres de recherche nordique, on vous demande de regarder de nouveau ce dossier, de voir si le moment n'est pas venu d'augmenter les subventions qui sont accordées aux recherches nordiques ici au Québec, parce que ceci serait conforme à la recommandation qui a été faite au gouvernement par le comité qui a été créé, il y a deux ans, pour étudier la recherche nordique au Québec. Les recommandations de ce comité sont contenues dans un rapport soumis au gouvernement qui s'intitule Les défis de la recherche nordique au Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: Oui, toujours pour les mêmes raisons, je ne voudrais pas être trop long. Première question rapidement parce que votre commentaire est très clair. L'esprit est là, vous formulez certaines demandes. Je pense que vous avez un perception qui est sûrement exacte. Depuis l'annonce de la fermeture, je pense qu'immanquablement le nombre de services a été réduit, il y a sûrement une réduction de services. Il y a des gens qui sont inquiets. Surtout quand on met trois mois entre le moment où l'on dit qu'on arrête les activités et le moment où on annonce les compensations, cela crée une période difficile.

Première question. Puisque vous parlez d'augmenter l'aide financière à la recherche subarctique, les subventions, etc., cela signifie probablement que vous en avez, actuellement, mais que vous ne les trouvez pas suffisantes?

M Wilkinson: On en a très peu. Ce qu'on a perdu, ce sont les subventions de base pour les centres de recherche nordique. Les départements continuent à recevoir des subventions pour des projets précis, mais les subventions de base pour les centres ont été abolies dans trois cas sur quatre.

M. Gendron: Un commentaire et une question à la fois. On ne voit pas cela dans votre mémoire, mais c'est l'espèce de conclusion rapide que vous faites en disant: Si demain matin le gouvernement du Québec avait l'occasion d'augmenter et d'accroître la recherche - là, vous ne dites pas cela de même - moi, je perçois comme cela - les effets seraient presque automatiques sur un impact socio-économique beaucoup plus appréciable. Le texte intégral dit: Cela pourrait avoir, mais dans le mémoire, ce n'est pas tellement "pourrait"; c'est presque une conclusion, presque une certitude, selon ce que vous exprimez, d'impact socio-économique appréciable pour la région. J'aimerais que vous creusiez cela un peu plus compte tenu, justement, que c'est un domaine où on a un certain niveau de recherche d'atteint. Mais - je pense que c'est un collègue de l'Opposition qui invoquait cela - surtout si on va uniquement au volet de l'exploration, on peut dépenser beaucoup d'argent avant d'être en mesure d'avoir quelque chose de véritablement concret et palpable. Cela a été un peu le problème de la Société de développement de la Baie-James. On n'a pas eu l'occasion d'interviewer la société, mais elle a mis

beaucoup d'argent sur l'exploration. Sauf que si on lui avait demandé combien de développement de mines cela a donné concrètement, on aurait eu des surprises. C'est un peu normal. C'est un peu dans le même sens pour vous. J'aimerais savoir rapidement sur quoi vous vous basez pour conclure que, à très court terme, l'impact socio-économique serait mesurable, observable.

M. Wilkinson: Quand les universitaires parlent de beaucoup d'argent, pour eux, cela implique peut-être 50 0D0 $, 60 000 $, 75 000 $ ou 100 000 $. On ne parle pas de 2 000 000 $, 3 000 000 $ ou 6 000 000 $ par année. Il y a des projets qui donneraient des résultats très rapides et très intéressants. Je pense, entre autres, à la possibilité d'étudier le rôle que pourraient jouer les tourbières de la région de Schefferville, soit pour la production d'énergie, soit pour l'exportation à des fins d'horticulture. Je pense que, d'ici 18 mois, on verrait quelque chose dans la région de Schefferville. Le projet de recherche coûterait peut-être 100 000 $, 120 000 $, mais pas plus que cela. Ici, sous peu, on verrait des résultats.

M. Gendron: Est-ce que la station de recherche de Schefferville est très fréquentée par des chercheurs étrangers?

M. Wilkinson: En été, on reçoit normalement entre 25 et 40 chercheurs, surtout des chercheurs québécois, non seulement de l'Université McGill mais aussi des autres universités québécoises. De temps à autre, on a des groupes d'étrangers. Il y a deux ans, je pense, on a reçu peut-être 15 chercheurs de la Finlande. Mais c'est surtout une station de recherche qui s'intéresse au Nord québécois.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Laurier.

M. Sirros: II y a quelque chose que je n'ai pas compris. C'est peut-être à cause de l'heure tardive. Vous dites, d'une part, que la station de recherche va demeurer à Schefferville. D'autre part, vous dites que la subvention de base à la station de recherche a été réduite à zéro. Comment allez-vous faire pour rester?

M. Wilkinson: D'accord. Il faut toujours faire la distinction entre le Centre d'étude et de recherche nordique, qui est localisé à l'Université McGill, à Montréal, et la station de recherche subarctique qui est ici à Schefferville. Le centre, à Montréal, jusqu'ici, a obtenu surtout des subventions provenant du programme FCAC du gouvernement du

Québec. La station de recherche subarctique, ici à Schefferville, est subventionnée à même le budget, le "base budget" de l'Université McGill. Donc, il n'y a aucun lien entre les deux.

M. Sirros: Le "base budget" continue de s'appliquer?

M. Wilkinson: Cela va en diminuant, mais je pense, il y a deux ans, que l'Université McGill a été en mesure de nous donner environ 65 000 $ par année. Cette année, on recevra peut-être 52 000 $. Avec le taux d'inflation que l'on connaît, la vie commence à être pénible, mais on est presque certain de pouvoir rester.

M. Sirros: Je ne sais pas si c'est une question que je peux vous poser, mais êtes-vous au courant des budgets dont disposent les trois autres centres? Les autres centres n'ont pas de station sur place? Est-ce la seule station sur place?

M. Wilkinson: Non. Le Centre d'études nordiques de l'Université Laval a un laboratoire à Poste-de-la-Baleine et également, si je me rappelle bien, à Kuujjuaq, anciennement Fort-Chimo. Mais notre station est la plus grande.

M. Sirros: Et tous et chacun se maintiennent dans l'ordre de grandeur des universités en termes d'argent? Finalement, on ne parle pas de millions?

M. Wilkinson: Je pense que non. M. Sirros: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci, M. Wilkinson. Il reste un autre mémoire, le numéro 18M, soit l'Association des pourvoyeurs du nord de Schefferville, mais ils ont indiqué qu'ils voulaient seulement le déposer. Il sera disponible au secrétariat des commissions.

M. Chevrette: C'est un excellent mémoire auquel je répondrai personnellement, par écrit, aux intéressés. Cela m'intéresserait, oui.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, la commission ajourne ses travaux à ce matin, dix heures.

(Fin de la séance à 1 h 30)

Document(s) associé(s) à la séance